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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mardi 17 septembre 2002 - Vol. 37 N° 83

Consultation générale sur le document intitulé Responsabilité sociale des entreprises et investissement responsable


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures deux minutes)

Le Président (M. Paré): Bonjour, tout le monde. À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des finances publiques est réunie afin de procéder aux audiences publiques dans le cadre de la consultation générale sur la responsabilité sociale des entreprises et l'investissement responsable.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) remplace M. Duguay (Duplessis) pour la durée de l'examen de cette affaire.

Le Président (M. Paré): Merci, madame. Maintenant, je vais vous faire lecture de l'ordre du jour. Donc, il y aura des remarques préliminaires du groupe parlementaire formant le gouvernement, en premier lieu; par la suite, Mme la porte-parole officielle de l'opposition officielle. Le premier groupe que nous allons recevoir, c'est le Social Investment Organization; à 15 h 30, nous allons recevoir la Chambre de commerce du Québec; et, 16 h 30, M. Pierre Desrochers, à titre individuel; et l'ajournement se fera à 17 heures. Nous aurons trois jours de consultation et d'audition pour ce faire.

Remarques préliminaires

Donc, sans plus tarder, M. le député de La Prairie, pour vos remarques préliminaires. Il faut savoir que nous avions un comité de travail formé, à l'intérieur du comité des finances publiques, qui était formé, oui, du député de La Prairie, aussi de la députée de La Pinière, donc qui feront les remarques préliminaires. À vous, M. le député de La Prairie.

M. Serge Geoffrion

M. Geoffrion: Merci, M. le Président. Alors, brièvement, quelques remarques avant de commencer nos travaux. Comme parlementaires d'un État moderne et responsable, nous sommes heureux d'initier cette discussion, cette consultation sur la responsabilité sociale des entreprises et l'investissement responsable, un champ d'intérêt qui n'est pas nouveau mais qui a pris son envol, disons, dans les médias, notamment dans les médias, lors du Sommet de la Terre en 1992 où l'idée d'une réconciliation de la croissance économique et de la protection de l'environnement a dominé ce Sommet de Rio. Déjà, bien auparavant, des accidents environnementaux majeurs ? on pense aux tragédies de Bhopâl et de l'Exxon Valdez ? et les grandes problématiques écologiques ont également fourni une impulsion à la progression des fonds d'investissement responsables, notamment aux États-Unis.

Plus près de nous, au sein de cette commission des finances publiques, nous avons entrepris des discussions sur ce sujet à la fin de l'année 2000. Un premier et un deuxième documents d'information ont été préparés pour aboutir à la création d'un comité de travail au sein même de cette commission. Nous avons également assisté, la députée de La Pinière et moi-même, en juin 2001, à un intéressant colloque sur le sujet, à Montréal.

D'emblée, l'idée de tenir des auditions publiques sur la base du deuxième document intitulé Responsabilité sociale des entreprises et investissement responsable nous est donc apparue essentielle. Bien que de plus en plus documenté, ce thème demeure à certains égards mal défini ou mal compris. Donc, un premier objectif, celui de contribuer à une meilleure connaissance de ce phénomène, de cette nouvelle réalité, je dirais même de ces nouvelles préoccupations. Le deuxième objectif: définir quels rôles peuvent jouer les pouvoirs publics et, bien sûr, nous ici, les parlementaires, pour nous assurer que les investisseurs publics se soucient de plus en plus du comportement des entreprises dans lesquelles ils placent leur argent.

Le gouvernement doit-il intervenir et comment? Quel rôle le gouvernement est-il appelé à jouer dans ses interventions auprès du secteur privé et dans ses propres activités? Bref, comment peut-on donner l'exemple? Dans quel secteur? Autant de questions auxquelles cette consultation apportera des réponses, des pistes de solution. On peut également se demander: Est-ce que nous devons aller aussi loin qu'en Angleterre où le gouvernement britannique a créé un ministère de la Responsabilité sociale des entreprises dont la mission est de coordonner les actions publiques dans ce domaine? Doit-on intervenir sur le plan législatif? Bref, toutes ces questions interpellent de plus en plus les gouvernements mais préoccupent aussi les citoyens et les citoyennes, les consommateurs, eux aussi de plus en plus informés et qui recherchent ou devraient rechercher des produits socialement responsables, si on peut employer l'expression.

Donc, sur ce, M. le Président, les membres de la commission des finances publiques, nous tous, avons bien hâte d'entendre la quinzaine de groupes et d'individus qui ont généreusement répondu à l'invitation de cette commission. Alors, nous nous souhaitons de bons travaux. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de La Prairie. Mme la députée de La Pinière.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je voudrais d'abord vous souhaiter à tous les collègues et à vous, M. le Président, un bon début de travaux. Nous sommes réunis aujourd'hui pour entreprendre un mandat d'initiative sur l'investissement socialement responsable et la responsabilité sociale des entreprises. C'est une première dans les annales de l'Assemblée nationale, considérant la nouveauté du sujet que nous abordons dans cette consultation de la commission des finances publiques.

Rappelons qu'il s'agit d'un mandat d'initiative, donc d'une volonté commune des députés membres de cette commission d'étudier et de réfléchir sur un phénomène relativement nouveau pour les parlementaires. Et, pour ma part, mes collègues de l'aile parlementaire libérale ont manifesté un intérêt tout particulier pour ce sujet-là et cela est démontré par notre participation active que ce soit aux comités de travaux que nous avons eus et également en commission parlementaire.

Un mandat d'initiative représente l'avantage de procéder à un examen serein de cette question au-delà des lignes de nos partis respectifs. D'ailleurs, on constate l'absence de l'Exécutif dans cette commission et c'est formidable parce qu'on veut donner un peu plus de rôles aux députés et on veut permettre aux députés de jouer un rôle plus actif. Et c'est une commission qui est très sereine, M. le Président, grâce à votre sagesse.

Je tiens à remercier tous les collègues membres de cette commission qui ont compris, donc, l'importance des enjeux de l'investissement socialement responsable et qui, à travers nos séances de travail, ont donné leur accord unanime pour que notre commission en fasse un mandat d'initiative. J'en profite d'ailleurs pour saluer un nouveau venu parmi nous, qui participe pour la première fois à nos travaux à titre de député du Lac-Saint-Jean.

Pour ma part, j'ai toujours eu une sensibilité particulière pour les questions de l'environnement, de l'équité en matière d'emploi, du respect des droits humains et de la démocratie. Dès lors, l'intérêt pour l'investissement socialement responsable s'est imposé tout naturellement. Mais, de façon plus concrète, c'est suite à un colloque sur ce sujet, organisé à Montréal par le Social Investment Organization, auquel j'ai participé en juin 2001 avec mon collègue le député de La Prairie, que j'ai décidé de poursuivre la réflexion sur ce sujet et d'amener cette préoccupation à l'intérieur de la commission des finances publiques pour l'analyser plus à fond.

n (14 h 10) n

Une autre motivation d'ordre plus professionnel m'a amenée à m'intéresser davantage à l'investissement socialement responsable, comme levier de développement économique local. En effet, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'habitation, je suis très préoccupée par la crise du logement et son impact sur la qualité de vie des citoyens. Aussi, j'ai pensé que l'investissement responsable pourrait être une avenue à explorer pour mettre sur le marché de nouvelles unités de logement pour les familles démunies. Une telle approche impliquerait de façon structurée et efficace un partenariat entre le public, le privé, le milieu du travail et le milieu communautaire.

Par ailleurs, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'autoroute de l'information, je crois comprendre que les technologies de l'information ont été identifiées, du moins au plan de l'environnement, comme une solution attrayante pour l'investissement socialement responsable, un autre sujet à explorer. J'aurai l'occasion durant cette consultation publique d'approfondir ces sujets avec les experts et les groupes qui se présenteront devant nous.

Oui, c'est une première pour les parlementaires de l'Assemblée nationale, de se pencher sur la question de l'investissement socialement responsable, mais nous ne sommes pas la première Législature ni les seuls pouvoirs publics à regarder ce dossier de près. Au contraire, les États-Unis d'Amérique, le Royaume-Uni, la France et la Belgique ont une longueur d'avance.

Le Royaume-Uni, par exemple, dispose déjà d'une législation encadrant l'investissement socialement responsable. En effet, l'amendement apporté en juillet 2000 au Pensions Act de 1995 fait l'obligation aux caisses de retraite d'agir dans la transparence et de tenir compte dans leurs politiques de placement non seulement du facteur de rentabilité, mais aussi des dimensions sociales et éthiques de ces investissements.

La France a fait de même en février 2001 en adoptant la Loi sur l'épargne salariale, qui introduit un mécanisme de contrôle et de réduction des comptes en ce qui a trait aux fonds éthiques.

La Belgique pour sa part a introduit le 5 juillet 2001 un projet de loi relatif aux pensions complémentaires, qui contient une disposition qui oblige les caisses complémentaires à rendre publiques les orientations de leurs placements en matière sociale et environnementale.

Aux États-Unis, l'expérience menée par la Californie depuis 1999, sans être exclusive, mérite d'être soulignée. Il s'agit d'une initiative de l'État de Californie qui a utilisé l'investissement socialement responsable comme levier de développement des zones sensibles où vivent des communautés défavorisées. On a appelé cette approche «Smart Investments». Cette politique a conduit à la réalisation d'un vaste projet de prise en main par les communautés locales de leur propre développement. En effet, en mai 2000, le gouvernement de Californie a lancé l'opération «The Double Bottom Line, investing in California's emerging markets», qui devait permettre aux communautés locales dont le potentiel économique était sous-utilisé de se prendre en main et de participer à la croissance de la richesse collective tout en respectant l'impératif de la rentabilité des investissements requis.

Au Canada, nous sommes encore aux premiers balbutiements dans le domaine de l'encadrement législatif de l'investissement responsable. En effet, la loi canadienne sur les sociétés par actions n'a été modifiée qu'en juin 2001 afin de permettre aux actionnaires, au-delà du simple impératif de la rentabilité, de questionner les politiques des entreprises en matière d'éthique et de responsabilité sociale.

Mais, au-delà des lois et des règlements qui relèvent de la responsabilité des parlementaires et des gouvernements, c'est toute la culture institutionnelle des entreprises publiques et privées qu'il faut changer, car, de plus en plus, les citoyens exigent d'avoir un environnement sain et expriment des inquiétudes et des préoccupations quant au respect des normes de travail, de la démocratie, de la transparence et des droits humains.

Ces questions ont émergé avec beaucoup d'intensité depuis le débat sur la mondialisation et le libre-échange. Nous avons ici même, dans cette assemblée, entrepris il y a un an un débat sur la ZLEA, la Zone de libre-échange des Amériques, en commission parlementaire des institutions. Plusieurs groupes et organismes représentant la société civile sont venus nous dire que la mondialisation de l'économie, que l'impératif du profit ne doivent pas se faire au détriment des acquis démocratiques et sociaux et des valeurs d'équité, d'égalité, de démocratie et de respect des droits humains. C'est cette prise de conscience collective, portée par des citoyens de plus en plus avisés et concernés, citoyens qui sont également des consommateurs et des épargnants, qui exerce des pressions sur les entreprises publiques et privées et qui les incite à revoir leurs pratiques d'investissement.

Nous avons vu cette stratégie à l'oeuvre dans la lutte internationale contre l'apartheid, lorsque les produits et services sud-africains ont été boycottés de par le monde. C'est un des exemples les plus marquants de l'impact de l'opinion publique internationale sur l'investissement des entreprises. Aujourd'hui, les exemples ne manquent pas. C'est ainsi que, en 1998, sous la pression de communautés religieuses américaines qui ont profité de leur pouvoir d'actionnaires pour forcer la compagnie, Nike a cessé ses pratiques d'exploitation du travail des enfants; ainsi, par voie de propositions des actionnaires, les méthodistes ont amené Nike à adopter un code de conduite. D'autres exemples nous sont donnés par des entreprises qui n'ont pas attendu qu'on leur pousse dans le dos mais qui ont pris des initiatives et des mesures proactives.

Maintenant, qu'en est-il pour le rôle de l'État? Car, lorsqu'on parle des entreprises qui doivent se conformer à des pratiques plus sociales et plus environnementales, l'État a un rôle à jouer et même, je dirais, un leadership à prendre. Alors, nous avons, dans la littérature, répertorié un certain nombre de propositions qui incitent par exemple le gouvernement à favoriser l'acquisition de produits certifiés ISO, à privilégier les compagnies forestières qui ont de bonnes pratiques environnementales en matière d'achat de papier, par exemple ? on sait que le gouvernement consomme beaucoup de papier ? donc, avoir des politiques préférentielles pour justement faire valoir les valeurs de l'environnement et de la responsabilité sociale.

Un des sujets aussi qui est soulevé lorsqu'on discute de l'investissement responsable, c'est la définition même du concept. Lorsque nous avons été à ce fameux colloque, mon collègue et moi, en juin 2001, j'ai écouté les conférenciers puis après je me suis dit: Mais ils parlent de choses complètement différentes! Alors, je suis allée au micro puis je leur ai dit: Pourriez-vous nous aider à comprendre c'est quoi, l'investissement responsable? Et, finalement, ça dépend de quel point de vue?

Naturellement, c'est un phénomène nouveau, mais c'est aussi un phénomène complexe et vaste et ça dépend de quel aspect on veut aborder. Mais disons que la tradition de l'investissement socialement responsable remonte à l'origine à des considérations morales et religieuses. Le premier fonds éthique a été créé en 1928 par les quakers aux États-Unis qui, bien entendu, refusaient d'investir dans des secteurs qui sont contraires à leurs croyances religieuses et à leurs valeurs morales, notamment dans le secteur de l'environnement et de l'esclavage, et on peut se rappeler ce que représentait l'industrie du coton à cette époque, et je trouve qu'ils étaient très avant-gardistes. Donc, le fonds éthique tire son origine des communautés religieuses qui exerçaient une sorte de sélection avant d'investir leur argent dans des entreprises dont les activités sont contraires à leurs convictions.

L'investissement responsable a commencé à se structurer il y a trois décennies avec la création en 1970 du Pax World Fund par l'Église méthodiste en réaction à la guerre du Viêt-nam. Les fonds éthiques n'ont jamais cessé de croître depuis. On estime à 3 000 milliards de dollars américains les fonds de placement éthiques dans le monde dont les deux tiers sont d'origine américaine, un quart d'origine anglaise et 5 % d'origine française. Au Canada, les fonds éthiques représentent 50 milliards de dollars, et on estime le nombre de Canadiens qui détiennent des investissements socialement responsables à 300 000 Canadiens.

Alors, qu'en est-il des attentes, puisque nous avons reçu dans cette commission 22 mémoires et que nous allons entendre 15 groupes durant les trois journées de consultation? Il en résulte, en ce qui a trait aux attentes que nous avons pu colliger par l'aide de notre service de recherche, qu'il y a un certain nombre de préoccupations et de propositions, surtout, de solution qui sont amenées par les différents groupes. Notamment, on propose qu'il y ait un soutien fiscal à l'investissement à vocation communautaire: c'est une préoccupation que je partage, notamment dans le domaine de l'habitation et du logement social plus particulièrement; obligation des caisses de retraite à consacrer 1 % de leur portefeuille à des projets d'investissement à vocation communautaire ? ça se discute, nous allons avoir avec nous des groupes pour essayer de valider cette proposition; implication de la Caisse de dépôt et placement du Québec dans le domaine de l'investissement responsable ? on sait que la Caisse de dépôt et de placement est un joueur majeur au niveau des investissements, et nous avons lu dernièrement que la Caisse de dépôt et de placement était dans le flou en ce qui a trait à la responsabilité de l'entreprise; on suggère également l'adoption d'une politique d'achat gouvernementale qui favoriserait la responsabilité sociale des entreprises; l'obligation pour les entreprises de produire un bilan social et environnemental; l'exigence pour les caisses de retraite de divulguer dans quelle mesure elles tiennent compte des critères sociaux, environnementaux et éthiques dans leurs décisions, et également des mesures de soutien aux entreprises pour l'application du concept de responsabilité sociale.

Voilà quelques-unes des suggestions qui nous sont faites et que nous allons regarder plus à fond en écoutant les groupes qui vont se présenter devant nous. Je vous remercie, M. le Président. Moi, j'ai l'intention de me consacrer avec grand intérêt à ce débat.

n (14 h 20) n

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, Mme la députée de La Pinière. Y a-t-il d'autres remarques préliminaires? M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Chers collègues, ce n'est pas sans émotion que je prends la parole aujourd'hui, puisque c'est la première fois que je participe à une commission parlementaire, d'autant plus que le sujet que nous abordons aujourd'hui m'est très cher, puisque, depuis plusieurs années, je milite pour que nous débattions des impacts de la mondialisation.

On le sait, ce concept parfois galvaudé n'est pas sans conséquence sur les pouvoirs publics et sur les citoyens en particulier. Notamment, on sait que la mondialisation avec ses bienfaits mais également ses inquiétudes, notamment sur le plan de l'accroissement de la compétitivité, engendre des conséquences parfois négatives et pousse parfois les entreprises à l'effort un peu quant à leur façon de faire. C'est pourquoi, moi, je considère que, dans ce contexte, cette mondialisation oblige parfois les États à adopter des agendas néolibéraux, faisant en sorte de laisser sur le pavé certains citoyens. Et c'est pourquoi je crois et je considère important que l'État soit là pour surveiller et établisse des règlements, des lois qui puissent faire en sorte de devenir une espèce de garde-fou à cette mondialisation néolibérale. Or, je vois, à travers l'investissement socialement responsable, une piste de solution pour humaniser cette mondialisation.

Quand on sait que le moteur de l'économie, de cette économie mondiale, l'essence de cette économie, c'est les capitaux, capitaux qui, à travers le monde, à travers les marchés financiers, sont à la recherche toujours de meilleurs rendements, il est intéressant de réaliser que 1 $ sur deux, sur les marchés financiers, proviennent des caisses de retraite, donc qui appartiennent aux travailleurs, c'est pourquoi il est absolument urgent qu'une prise de conscience de la part de ces propriétaires de capitaux puisse émerger et qu'on puisse se poser la question: À quoi sert mon argent? Est-ce que mon argent est utilisé dans des entreprises à travers le monde et où les normes environnementales ne sont pas respectées, où les normes du travail ne sont pas respectées? Donc, il est urgent que nous prenions conscience de ces éléments-là.

Certains militants avancent qu'acheter, c'est voter. Eh bien moi, je dis qu'investir aussi, c'est voter. Donc, c'est pourquoi plusieurs propositions nous sont amenées aujourd'hui sur la table, notamment une à laquelle je milite depuis déjà quelques années au parlement fédéral, lorsque j'étais député à Ottawa, c'est-à-dire d'obliger les administrateurs de caisses de retraite à rédiger annuellement un rapport dans lequel ils décrivent les considérations d'ordre social, éthique et environnemental dont ils tiennent compte dans leur choix de placements et aussi les droits de vote qui viennent avec, parce que je pense qu'il ne faut peut-être pas forcer personne à faire de l'investissement socialement responsable, mais ce qu'on peut faire, c'est se donner des instruments pour qu'il y ait davantage de transparence et que, à partir de ces instruments et de cette transparence, eh bien, les travailleurs puissent avoir les outils, les propriétaires de capitaux, en fait, puissent savoir où est investi leur argent et si ces investissements sont conformes, en fait, à leurs valeurs. Et je pense qu'actuellement ce n'est pas toujours le cas.

Donc, l'investissement socialement responsable, c'est d'abord de savoir où est investi notre argent et de quelle façon. Et, une fois qu'on a investi dans certaines entreprises, on devient propriétaire de cette entreprise, et de ce fait, incombent certaines responsabilités, à savoir, par exemple, la possibilité d'aller à l'assemblée annuelle des actionnaires, sur le parquet des entreprises, et pouvoir faire des propositions, et, encore une fois, des propositions à caractère social, environnemental. D'ailleurs, la législation canadienne a fort heureusement été changée dans le cadre du projet de loi S-11 enlevant le droit aux P.D.G. de grandes compagnies de retirer, du revers de la main, des propositions qui seraient à caractère social.

Donc, c'est toute une révolution que nous devons faire. Cette révolution, nous devons d'abord la commencer par nos institutions, en nous dotant d'instruments cohérents et qui puissent engendrer une plus grande transparence. Et, par la suite, je pense que là il y aura un grand devoir, un grand travail qui devra être fait auprès des travailleurs et propriétaires de capitaux, à savoir de quelle façon est investi leur argent. Et, moi, je dois vous dire sincèrement que j'y vois, à travers... dans ce thème, une lueur d'espoir pour humaniser cette mondialisation et que chaque citoyen qui investit puisse prendre leurs responsabilités afin que leur façon de placer leur argent soit en conformité avec leurs valeurs. Et je considère justement que le Québec, qui a toujours été un peu avant-gardiste et, notamment, avec le gouvernement en place, sur le plan de la sociale-démocratie, doit continuer dans ce sens. Et c'est pourquoi c'est un grand plaisir pour moi de participer à cette commission parlementaire. Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean et bienvenue à cette commission. Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires de part et d'autre? Non.

Auditions

Donc, nous allons débuter en recevant le premier groupe, le Social Investment Organization. Je vous invite à prendre place. Vous avez déjà pris place. Si vous voulez vous présenter s'il vous plaît. Vous aurez 20 minutes pour faire votre présentation et 40 minutes d'échange avec les parlementaires. Bienvenue, mesdames; bienvenue, monsieur.

Social Investment Organization (SIO)

Mme Hayles (Lisa): Merci. Je m'appelle Lisa Hayles. Je suis la directrice adjointe de la Social Investment Organization. Avec moi, aujourd'hui, c'est François Meloche, qui vient du Groupe investissement responsable. Mais il est aussi sur notre conseil d'administration. Et aussi Diane Boudreau, du Regroupement pour la responsabilité sociale des entreprises. Son organisme est membre du SIO.

On est ravis d'être là pour présenter nos vues sur la responsabilité sociale des entreprises et l'investissement responsable. Je vais dire au début que je suis de Toronto, une anglophone, donc, j'espère que vous allez me donner... vous allez excuser mon français. Nous félicitons le comité de son initiative de tenir ces audiences sur une question de politique aussi importante.

Qui sommes-nous? Le Social Investment Organization est un organisme national, sans but lucratif, qui s'applique à promouvoir l'investissement responsable au Canada. Le SIO a plus de 400 membres à travers le Canada, incluant les gérants des fonds d'investissement responsable, les institutions financières et les conseillers en investissement, les ONG et les individus; au Québec, la Fiducie Desjardins, Fondaction et Bâti-rente, GIR et RRSE sont tous membres de la SIO.

On fait des recherches sur l'industrie d'investissement responsable. On fait de l'éducation, surtout pour les conseillers financiers, mais aussi pour des comptes publics, sur l'investissement responsable. On organise des colloques et des ateliers, et on fait des représentations comme aujourd'hui, ici.

Le Québec a une longue histoire de soutien pour les institutions financières locales. À notre avis, c'est la juridiction la plus progressive en Amérique du Nord. Il a soutenu les institutions financières contrôlées localement, soutenant les valeurs sociales du peuple québécois. Vous avez le Mouvement Desjardins, le Fonds de solidarité et Fondaction, la Société locale d'investissement dans le développement de l'emploi, le SOLIDE. Et il y a les autres outils financiers qui contribuent au développement local, et aussi, bien sûr, la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui est maintenant un des plus grands investisseurs boursiers au monde.

n (14 h 30) n

Nous croyons que le gouvernement du Québec peut jouer un rôle de leadership dans le développement des politiques pour encourager les capitaux responsables. Pour nous, la définition d'investissement responsable, c'est le processus de sélectionner ou de gérer les investissements selon des critères sociaux ou environnementaux. Normalement, ça comprend trois volets: défense des actionnaires et engagements corporatifs; l'investissement communautaire ou solidaire; et les filtrages qui impliquent la sélection des compagnies dans un portefeuille basée sur des critères sociaux et environnementaux. Cette année, on a commencé, avec nos membres, une consultation sur les standards et les principes pour les acteurs institutionnels dans l'investissement responsable. On a formé un comité de notre conseil d'administration. On a fait circuler un document de travail pour obtenir des commentaires et, le mois prochain, en octobre, on va mettre le rapport sur notre site Web pour obtenir différents points de vue.

La crise courante de confiance dans les marchés boursiers. Récemment les scandales financiers en Amérique ont porté l'attention sur un dilemme apparent pour les marchés de capitaux. Comment les entreprises peuvent-elles développer des stratégies de croissance à long terme si elles sont constamment sous pression pour maintenir un prix élevé des actions dans le court terme? Comme investisseurs responsables, nous croyons que l'investissement responsable fournit une partie de la réponse de ce dilemme. L'investissement responsable offre un modèle d'investissement basé sur l'idée de développement durable. Notre vue de la gouvernance corporative est que le risque social et environnemental est significatif, mais largement non reconnu pour déterminer la valeur des actions. On pense que les standards d'audit et de comptabilité doivent être renforcés, mais ceci est insuffisant; on doit tenir compte des risques sociaux et environnementaux auxquels les investisseurs font face. Il y a des politiques publiques qui peuvent être adoptées par des gouvernements, des commissions des valeurs mobilières et des bourses qui aideront à apporter une culture de transparence sociale et environnementale. Le gouvernement peut améliorer la performance de la responsabilité sociale des entreprises en augmentant la transparence sur les problèmes sociaux et environnementaux. Actuellement, les rapports financiers ne donnent pas une image exacte d'une entreprise.

Nous croyons que l'établissement obligatoire des rapports sociaux et environnementaux est nécessaire. Il y a quelques entreprises qui fournissent des rapports sur la durabilité, la «sustainability» maintenant, mais ce n'est pas le cas pour un grand nombre d'entreprises. L'adoption obligatoire des rapports sur la durabilité produira un marché boursier plus équitable.

Sur le rôle des caisses de retraite. Comme vous le savez très bien, je crois que, pour chaque dollar, chaque 2 $ échangés sur le marché financier, un dollar provient des caisses de retraite. Les règlements sur la divulgation des pensions sont déjà en place au Royaume-Uni, en Australie, en France et en Allemagne. On s'attend à ce que cette politique devienne bientôt la norme parmi les pays de l'OCDE. Le Canada risque d'être en retard sur ses partenaires de l'OCDE sur cette importante initiative de politique. Une action décisive par le gouvernement du Québec pourrait aider à établir les règles de divulgation pour les caisses de retraite majeures à charte au Québec et aussi établir un précédent pour la pratique des autres juridictions au Canada.

Donc, la SIO fait les recommandations suivantes au comité des finances publiques: Que les règlements sur les valeurs mobilières du Québec soient changées pour requérir que les compagnies publiques de la province adoptent des codes de conduite sur la responsabilité sociale des entreprises et incorporent les principes sociaux et environnementaux dans ces codes corporatifs; 2° que les règlements des valeurs mobilières du Québec soient changés pour écrire que les questions de nature sociale et environnementale soient divulguées comme risque matériel dans leur dossier de discussion et analyse de la gestion; 3° que les règlements de valeurs mobilières du Québec soient changés pour requérir que le comité d'audit des compagnies publiques revoient l'établissement de leurs rapports sociaux et environnementaux, s'assurant que des stratégies de gestion de risque sont en place pour traiter les risques de nature matérielle; 4° que la Loi sur les caisses de retraite du Québec et la Loi sur les régimes complémentaires de retraite soient amendées pour exiger que les administrateurs de régimes de pension préparent un rapport annuel soulignant les facteurs sociaux, éthiques et environnementaux qui ont été considérés dans la sélection et la gestion des investissements des fonds de caisses de retraite; 5° que le ministère des Finances change les règles des REER pour permettre l'admissibilité d'investissements dans des fonds de prêt communautaire ? ça c'est une responsabilité fédérale; 6° recommander que les règlements des valeurs mobilières soit modifiés pour permettre aux organismes à but non lucratif d'émettre des actions d'investissement communautaire au public.

En conclusion. Une analyse financière traditionnelle considère les compagnies sans tenir compte des impacts sociaux et environnementaux. De notre avis, le résultat de cette perspective est limité. Les membres de la Social Investment Organization croient que cette relation traditionnelle entre le capital et l'économie arrive à sa fin. Le gouvernement et les faiseurs de politique publique peuvent aider à changer cette situation en mettant en place des politiques simples pour encourager les compagnies et les marchés boursiers à répondre aux réalités sociales et environnementales.

Et je crois que, aussi, Diane et François ont des commentaires.

Le Président (M. Paré): M. Meloche.

M. Meloche (François): En fait, je laisserais peut-être la parole à Diane. Moi, je n'ai pas vraiment de commentaire, à part que j'appuie les propositions. Et puis, brièvement, le groupe Investissement responsable est une firme de recherche et de conseils en investissement responsable au Québec. Donc, c'est tout, je vais laisser la parole à Diane.

Le Président (M. Paré): Mme Boudreau.

Mme Boudreau (Diane): Merci, M. le Président. Je suis coordonnatrice du Regroupement pour la responsabilité sociale des entreprises, qu'on appelle plus souvent sous le sigle RRSE. Je crois que notre Regroupement est une association qui n'est pas très connue au Québec ? nous avons eu vent de ce qui se passait par des intervenants de l'Ontario ? mais je veux vous dire que j'étais très contente que les membres du RRSE étaient très satisfaits de voir l'intérêt que le gouvernement portait à ce sujet qui, pour nous, est vraiment primordial.

Au fond, nous travaillons beaucoup, nous, dans l'axe de dire, de faire un actionnariat de responsables, ce qui veut dire que nous intervenons auprès des entreprises. Je me souviens avoir rencontré M. le député du Saguenay, lorsqu'il était à Ottawa, et avoir parlé avec lui de l'entreprise Alcan qui est une entreprise québécoise et qui est au voisin, et qui a de petits problèmes sur les épaules. Nous avons commencé certaines interventions avec l'entreprise, ayant conscience que les entreprises québécoises sont le gros levier de notre économie et qu'il ne s'agit pas d'aller les caler, je dirais, mais au fond, essayer d'entretenir un dialogue avec ces entreprises pour questionner.

Tantôt, j'étais très contente aussi d'entendre Mme la députée de La Pinière qui rappelait quelques suggestions, quelques recommandations qui ont été faites et qui entrent vraiment dans le contexte de ce que nous pensons. Je suis entièrement d'accord avec les propositions qui sont faites par le SIO et je voudrais peut-être mettre un appui sur l'importance pour les entreprises d'avoir un code de conduite, un code de conduite respecté et dont le processus de mise en place est vérifié vraiment par quelqu'un de l'extérieur. Lorsqu'on a des codes de conduite et que des rapports nous viennent de l'intérieur, sans vouloir être malhonnête, parfois on a la couleur des lunettes que l'on porte et ce n'est pas toujours facile d'être objectif. Pour moi, c'est un des éléments sur lesquels j'aimerais appuyer, un des éléments sur lequel, dans nos interventions, nous appuyons OSI.

n (14 h 40) n

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Boudreau. Est-ce qu'il y a d'autres interventions de la part des présentateurs. Ça va. Alors, nous allons débuter les échanges avec les parlementaires. M. le député de La Prairie.

M. Geoffrion: Oui. Merci, M. le Président. Bienvenue à cette commission, mesdames, monsieur.

Dans votre mémoire, vous avez fait allusion à quelques reprises au règlement des valeurs mobilières, la Commission des valeurs mobilières, tout ça. Deux questions, vous souhaitez qu'on puisse permettre à des organisations, à des organismes à but non lucratif là d'émettre des actions d'investissement communautaire. Est-ce que ça existe ailleurs et, si oui, comment ça fonctionne? J'aurai peut-être une autre question par la suite, Mme Hayles.

Le Président (M. Paré): Mme Hayles, la parole est à vous.

Mme Hayles (Lisa): D'accord. Pas exactement, mais il y a des exemples qui existent dans le Royaume-Uni et aussi il y a des exemples aux États-Unis qui sont plutôt sur le plan des crédits d'impôt pour donner les avantages des investissements au communautaire. Je ne sais pas les... Je n'ai pas d'exemples clairs, spécifiques pour vous donner mais j'ai...

M. Geoffrion: Oui. Si je comprends bien, c'est que ce que vous souhaitez ici pour le Québec, ça n'existe pas encore vraiment là sous la forme d'actions, là, d'investissement communautaire. Il y a des exemples peut-être qui se rapprochent ailleurs. C'est ce que je comprends mais que, ici, précisément, cette formule-là n'existe pas comme telle, là. Je ne sais pas, là. Est-ce que c'est ce que vous me dites?

Mme Hayles (Lisa): Oui. Sauf qu'il y a en Nouvelle-Écosse un système pour le Community Development Corporation qui est un peu pareil, qui donne la possibilité pour les Community Development Corporations d'aller sur le marché boursier pour lever les fonds, et c'est un système spécifique en Nouvelle-Écosse. Ça donne le processus pour obtenir des fonds pour les projets dans les communautés beaucoup plus facile, oui, un peu plus facile. Je crois que c'est un système qui peut être facilement adopté pour le système ici au Québec. Il y a déjà au Québec... C'est vrai qu'au Québec il y a déjà un système aussi développé, tant pour les autres provinces, au niveau des investissements communautaires. C'est un système qui est vraiment bien encadré, je crois. Il y a des choses comme les SOLIDE qu'on n'a pas vraiment en Ontario, par exemple.

Mais cette suggestion, c'est vraiment ciblé sur le fait que, si les Community Development Corporations ont des problèmes pour trouver des fonds... Il y a en plus des investisseurs sociaux qui font partie de notre organisation, qui cherchent des opportunités pour faire des investissements comme ça mais il n'y a pas vraiment... il n'y a pas, à notre avis, assez de véhicules pour eux. Donc, on cherche pour donner plus d'opportunités pour les investisseurs sociaux pour qu'ils puissent faire des investissements.

On a, par exemple, un de nos membres, Meritas, les Fonds mutuels Meritas, qui voulait faire du placement de leur... Ils veulent faire des investissements communautaires avec du placement de leur... Je veux dire tout l'argent qu'ils ont en main.

Une voix: ...

Mme Hayles (Lisa): Leurs actifs, merci. Donc... Mais, actuellement, c'est difficile de trouver des opportunités où ils peuvent mettre des fonds, investir des fonds pour obtenir un rendement. Même si c'est un rendement petit, ils cherchent pour une opportunité d'investir dans quelque chose. Et puis, des fonds communautaires, c'est un exemple qu'ils voulaient investir là-dedans mais ils n'ont pas... En fait, ils n'ont pas beaucoup d'exemplaires à travers le Canada où ils peuvent faire ça.

M. Geoffrion: Vous faites également, je pense, plusieurs sondages, là, auprès de vos membres, je pense que c'est une fois ou deux par année. Là, il y a un sondage qui s'en vient, là, nous dit-on. Est-ce que c'est des sondages que vous faites exclusivement auprès de vos membres, comme association canadienne, pancanadienne ou c'est également des sondages que vous faites auprès du public en général? Et quels sont, à partir de ces sondages-là, là, la perception que vous dégagez du public en général sur toute cette vaste question-là? Est-ce que vous avez déjà un certain nombre d'éléments, là, de perception sur comment les Canadiens, les Québécois perçoivent ou comprennent... Je disais, dans mon petit mot au début, qu'il y avait tout... Un des objectifs de cette consultation, c'est de mieux faire connaître, hein? cette nouvelle dynamique là. Est-ce que, vous, déjà, à partir des sondages, des études que vous réalisez deux fois l'an, vous avez déjà une bonne idée de ce que nos concitoyens et concitoyennes, là, décodent de l'investissement responsable et de la nécessité d'aller plus loin dans ce domaine-là?

Le Président (M. Paré): Mme Hayles.

Mme Hayles (Lisa): Ce n'était pas un sondage que, nous, on a fait, mais l'année dernière, il y avait la commission sur la responsabilité sociale des entreprises qui était convoquée par Ed Broadbent et puis d'autres gens. Eux, ils ont fait un sondage sur l'idée, sur... avec le public en demandant qu'est-ce que c'est, les responsabilités des entreprises vers la communauté, vers les «stakeholders» ? je ne sais pas ce mot en français. Et le sondage a trouvé que plus que 50 % ont pensé que les entreprises ont une responsabilité vers... plus que les gens qui ont leurs actifs, même si ça coûte ? les entreprises ? même si ça va ajouter un prix, ajouter un coût pour les opérations des entreprises.

Et je crois qu'il y a... Même ils ont fait un sondage pour les gens qui avaient des actifs, les gens qui étaient assez riches, c'est-à-dire qu'ils avaient un portefeuille des actifs, ils avaient un portefeuille de 100 millions de dollars... oui, 100 000 $ ou plus. Il y avait plus de gens avec plus d'argent, c'est-à-dire qu'il y avait des gens qui étaient des investisseurs qui gagnent peut-être plus que leur argent vers leurs investissements qui sont d'accord pour des codes de conduite pour l'«expectation» qu'on peut avoir des explications sur les comportements des entreprises, en plus, pas juste ceux... légal, mais on demande... ? c'est ça ? on demande beaucoup plus que ça maintenant.

M. Geoffrion: Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de La Prairie. Mme la... Vous aviez une réponse additionnelle, Mme Boudreau.

Mme Boudreau (Diane): Bien... Oui, c'est que...

Le Président (M. Paré): Allez-y.

Mme Boudreau (Diane): Au fond, je crois que notre population québécoise est de plus en plus sensible à ces enjeux. Et si ça se manifeste souvent par une recherche de fonds éthiques, parce qu'on pense que, dans un fonds éthique, je ne dirais pas qu'on va se laver les mains, mais on a la conscience un peu plus tranquille, alors que le fonds éthique, dit éthique, ce n'est pas toujours très évident, parce que les entreprises, quand on les suit dans tous leurs dédales, il y a peut-être des petits détours que nous trouverions plus ou moins droits. Mais je pense que cette responsabilité sociale qui va jusqu'à l'actionnariat très actif prend de plus en plus sa place.

Et les gens qui nous consultent, nous, puis qui voudraient avoir de l'information sur des fonds éthiques ? et nous ne sommes pas là pour ça ? alors que nous tâchons de les sensibiliser pour l'autre volet, ils disent: Mais c'est bien vrai. Et le fait que les gestionnaires des fonds de retraite s'impliquent également dans ce sens-là, bien, je pense que c'est une sensibilisation qui devient de plus en plus forte. Et du côté des États-Unis, l'engagement des gestionnaires de ma caisse commune a grandement aidé, parce que ce n'est pas tout de dire: On va retirer nos actifs de telle compagnie. Ce qui est arrivé le printemps dernier pour Talisman, lorsque le gouvernement fédéral a demandé aux caisses de retraite de retirer, ce qui est arrivé, c'est qu'on n'avait plus de procuration pour pouvoir intervenir, pour pouvoir continuer de questionner la compagnie, l'entreprise. Alors, je pense que c'est bien des points à considérer, mais je pense que la population québécoise devient de plus en plus sensible à cet élément-là.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Boudreau. Est-ce qu'il y a d'autres... Il reste 10 minutes aux groupes parlementaires. D'autres questions? M. le député de Lac-Saint-Jean.

n (14 h 50) n

M. Tremblay: C'est intéressant ce que vous venez de dire, Mme Boudreau. Parce que, dans l investissement socialement responsable, il y a le filtre, on choisit dans quelle entreprise on va investir et, une fois qu'on a investi à l'intérieur de cette entreprise, étant donné le fait qu'on est un peu propriétaire, on peut militer pour que cette entreprise change ses façons de faire. Donc, est-ce que vous croyez qu'il est mieux, qu'il est préférable parfois de garder ses actions complètement même si on est parfaitement conscient que l'entreprise agit mal, mais c'est de cette façon justement qu'on peut militer? Et l'autre question, c'est surtout celle-là: Qui doit le faire? Est-ce que vous attendez que ce soient les syndicats qui aient une vigilance à cet égard ou que ce soient les groupes communautaires ou quels qu'ils soient, ou bien donc des groupes de citoyens qui s'élèvent contre des agissements de compagnies qui sont absolument irrespectueux?

Le Président (M. Paré): Mme Boudreau.

Mme Boudreau (Diane): Oui. Alors, pour votre première question là, vous me disiez que... Est-ce que vous me la répéteriez, juste deux mots là, parce que j'étais en train de prendre des notes?

M. Tremblay: Oui. En fait, tout simplement, je disais: L'activisme actionnarial n'est pas plus performant pour changer les choses que juste le filtre?

Mme Boudreau (Diane): D'accord. Alors, c'est ça, c'est qu'il est très important de pouvoir garder des actions dans une entreprise pour pouvoir intervenir. Il y a un minimum qui est requis et, selon la loi, présentement, c'est 2 000 $. Moi, je suis membre aussi du conseil d'administration du fonds Esther-Blondin qui est une corporation des Soeurs de Sainte-Anne et je fais partie du comité d'investissements. Nous avons changé notre structure de gestion en juillet dernier et, dans une des firmes de gestionnaires, il y a un compte privé puis un compte avec des unités de fonds. Alors, on m'a téléphonée pour me dire: Mme Boudreau, dans la caisse commune, vous avez des actions de Seagram ? pas Seagram parce qu'il n'existe plus ? Molson, puis nous l'avons dans la caisse commune, de même que du Talisman.

Alors, il est évident que, dans une caisse commune, on n'a pas droit de parole. Alors, elle a dit: Ces deux titres que nous achèterions pour l'autre portefeuille, est-ce que vous les voulez? Alors, ce que j'ai répondu, c'est que: Bien, j'aimerais que vous gardiez 2 000 $ chez Talisman pour qu'on garde notre droit de parole et, Molson, on le laisse tomber. Alors, pour moi, il est très important d'avoir cette participation qui nous permet d'intervenir. Vous allez dire: Avec 2 000 $, ça n'a pas beaucoup d'impact quand vous intervenez, mais il n'en reste pas moins que je pense que ça pousse les gens à réfléchir. Parce que c'est 2 000 $ ici, mais on sait que ça peut être beaucoup ailleurs aussi, ou aux États-Unis, entre autres, Talisman.

Le Président (M. Paré): Madame, est-ce que vous voulez compléter?

Mme Boudreau (Diane): Oui. Alors, pour votre deuxième question: Qui doit faire ça? Bien, moi, je pense que, pour les caisses communes, il est évident pour les caisses de retraite, ça nous aide drôlement. Moi, je travaille beaucoup en collaboration avec Bâti-rente qui est une partie de Fondaction où, lorsqu'on a une documentation, une expertise sérieuse qui fait pencher de notre côté, c'est évident qu'ils vont voter dans le sens que nous allons suggérer. C'est très important parce que les fonds de retraite ont des actifs énormes, à comparer les autres, donc c'est très important.

Mais je pense qu'il est important que des associations comme la nôtre, qui regroupent des communautés religieuses, des associations, des individus, ça ait aussi une présence sur cette façon d'intervenir qui est très importante. Et, comme association, nous n'intervenons jamais, comme association, nous intervenons au nom des membres qui sont actionnaires. Alors, je pense que des associations comme ça peuvent aider. Et, pour moi, il y a place, si on regarde, pour la proposition d'actionnaires de La Baie au printemps dernier qui a recueilli plus de 36 % des voix, je pense que c'est parce qu'il y avait eu un bon mouvement et une bonne publicité. Il y a la publicité qu'il va peut-être falloir développer.

Le Président (M. Paré): ...

M. Meloche (François): Juste un mot à propos du débat entre les deux stratégies: les filtres ou le militantisme. Je dirais que la stratégie habituelle qui est utilisée par les actionnaires militants puis beaucoup aux États-Unis parce que c'est beaucoup plus aux États-Unis qu'il y a une historique puis de l'expérience à ce niveau-là. Il y a ? juste entre parenthèses ? il y a environ 200 propositions par année qui sont proposées par des actionnaires aux États-Unis par année. Donc, la stratégie, c'est d'engager la compagnie, avoir un dialogue avec pour l'entraîner à avoir un meilleur comportement social et environnemental. Mais, quand il n'y a pas de progrès, éventuellement il y a des actionnaires qui vont décider de la vendre et puis de protester, si on veut, avec leurs sous, en enlevant les sous.

Alors, c'est un peu ça, le cadre. C'est sûr qu'il y a aussi les filtres sectoriels qui disent: Bien, là, on évite carrément certains secteurs par... moralement, on n'est pas capable d'investir dans le militaire, le tabac ou l'alcool, des choses comme ça. Mais, en termes de stratégie, pour faire avancer certaines compagnies, c'est plus cette approche-là qui est utilisée là.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Meloche. D'autres questions du côté des membres du gouvernement? Ça va. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme Hayles, Mme Boudreau et M. Meloche de Social Investment Organization, merci pour le mémoire que vous nous avez présenté. On voit que vous êtes des professionnels; vous faites un excellent travail dans ce domaine, que ce soit au niveau de l'information qu'on reçoit ou du travail que vous faites avec les entreprises.

Je voudrais vous provoquer un peu. Dans votre série de recommandations, vous insistez beaucoup, sinon presque exclusivement, sur les mesures coercitives, sur la législation et la réglementation et vous nous interpellez comme parlementaires pour qu'on pousse sur le gouvernement pour qu'il modifie la réglementation, qu'il adopte des législations, alors qu'il y a une autre approche qui est beaucoup plus, je dirais, proactive et qui dit que les entreprises, connaissant leur intérêt, sachant que les pressions vont venir des consommateurs, des épargnants, etc., elles vont s'autodiscipliner. Alors, je veux savoir où est-ce que, qu'est-ce que, quelle sorte de crédibilité vous donnez à cet argument, de la proactivité? Et, si à vos yeux, il y a moyen, si on ne peut pas faire et l'un ou l'autre, est-ce qu'on peut faire l'un et l'autre?

Le Président (M. Paré): Mme Hayles.

n (15 heures) n

Mme Hayles (Lisa): Comme j'ai déjà dit, on croit que la législation est obligatoire. Il y a des entreprises qui répondent aux pressions de leurs consommateurs, leurs clients, qui produisent des rapports sur la «sustainability», la durabilité, qui commencent à être plus ouvertes, plus transparentes. Mais ce n'est pas toutes les entreprises, ce n'est pas tous les secteurs. C'est très difficile du point de vue de l'investisseur qui voulait comparer plusieurs entreprises dans un secteur, qui doit avoir des critères systématiques qui indiquent qu'est-ce qu'ils font dans tel et tel et tel endroits, leurs relations avec les communautés où ils se trouvent, leurs usines, avec leurs employés, avec tous les «stakeholders» avec qui ils ont des rapports. Pour nous, les rapports qui sont produits par les entreprises sont une façon, mais ça ne suffit pas. On doit avoir des rapports qui sont systématiques, qui peuvent être comparés entre plusieurs compagnies, des entreprises, et pour ça on doit que... la législation et la réglementation est nécessaire. Je ne sais pas si vous avez des...

Mme Houda-Pepin: D'accord. J'ai d'autres questions. Alors donc, vous aurez probablement l'occasion de revenir pour me donner des réponses. Quand vous dites, dans votre recommandation 1, qu'on doit, en fait, suggérer au gouvernement d'imposer un code de conduite corporatif à l'ensemble des entreprises publiques ? c'est ça, vous avez ciblé les entreprises publiques particulièrement ? à votre connaissance, est-ce qu'il y a un gouvernement au Canada ou ailleurs qui fait ça, c'est-à-dire, par autorité législative, on impose à toutes les entreprises publiques un code de conduite corporatif?

Le Président (M. Paré): M. Meloche.

M. Meloche (François): À ma connaissance, non. Non.

Mme Houda-Pepin: Bon, très bien. Donc, vous voulez que, nous, on prenne un leadership dans ce domaine. Très bien, j'ai bien compris. Je voulais quand même... J'étais sûre, mais, quand même, je voulais vérifier que... Je n'ai pas vu dans la littérature que j'ai lue qu'il y a un gouvernement quelque part... On a adopté des législations pour répondre à des choses bien spécifiques, mais avoir une autorité comme ça pour imposer un code de conduite à toutes les entreprises publiques, c'est pas mal gros. Puisque ça n'existe pas, je vais quand même pousser la réflexion avec vous.

Vous savez que le gouvernement, c'est gros, c'est beaucoup de ministères, c'est beaucoup d'organismes, c'est très tentaculaire. S'il fallait qu'on fasse ça, dans la pratique, par où on doit commencer, quelles sont les entreprises publiques qui vous chicotent, celles que vous voulez que tout de suite, là, si on a une recommandation à faire, on dise: C'est celles-là, un, deux, trois? Lesquelles?

Le Président (M. Paré): M. Meloche.

M. Meloche (François): «Chicotent», c'est...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Meloche (François): Chicoter, c'est qui dérange, qui «bothers».

Mme Hayles (Lisa): Ah! O.K.

M. Meloche (François): Mais vous allez peut-être... C'est un mot important pour la question. Mais, moi, ayant compris le mot «chicotent», je dirais: Il y a plusieurs secteurs à risque, comme on dit, au Québec, qui sont un petit peu plus exposés que d'autres. Si on regarde au point de vue environnemental, on a les secteurs comme les mines, les forêts, le pétrole. Bon. Au Québec, ce n'est pas tellement présent, le secteur du pétrole. Aussi, on peut le prendre de l'angle, disons, du travail aussi, donc toutes les questions reliées au travail en manufacture pour fabriquer les produits. Mais, disons, d'un point de vue d'un code, je ne sais pas si... On parle de demander aux entreprises d'adopter un code. Les codes, la façon dont on perçoit les codes, habituellement, c'est des codes volontaires. Parce que l'idée, c'est que les entreprises se joignent volontairement à ça parce qu'elles voient un avantage d'un point de vue de relations publiques mais aussi d'un point de vue de mieux gérer leur entreprise pour respecter les normes internationales en environnement ou sociales.

Donc, le gouvernement peut faire comme... Il y a des exemples où est-ce que des gouvernements ont fait des tables rondes sur des questions puis ont développé des codes avec d'autres intervenants. Et puis ça fait en sorte que ça émane du gouvernement, l'initiative, mais, en fait, tout le monde participe, puis ensuite ça développe un consensus autour de qu'est-ce qui est un bon agissement exemplaire pour les entreprises, puis là, ensuite de ça, il y a un code.

J'ai dit les mines tout à l'heure. C'est parce que les mines, bon, c'est un des gros secteurs des ressources naturelles du Québec, et les forêts aussi.

Mme Houda-Pepin: Est-ce que le secteur agricole est à risque, selon vous, du point de vue environnemental?

M. Meloche (François): Oui, mais c'est juste que, d'un point de vue, disons, d'entreprise publique, il n'y a pas beaucoup de présence publique, c'est plutôt des entreprises privées. Et puis ça, c'est quelque chose... Bon. En tant qu'investisseurs, on touche beaucoup moins aux entreprises privées, on touche indirectement...

Mme Houda-Pepin: Mais l'État, quand même, accorde des subventions au milieu agricole, beaucoup.

M. Meloche (François): C'est vrai. C'est vrai, puis, en effet, il y aurait là aussi peut-être un rôle à jouer en développant des recommandations de gestion environnementale, par exemple, au niveau agricole, au niveau de l'utilisation des pesticides et au niveau de l'utilisation, la gestion des déchets agricoles, etc.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Vous avez dit que la meilleure façon d'élaborer un code, c'est en ayant tout le monde autour de la table et que, ensemble, par une concertation, on réussit à dégager des consensus. Mais, à votre connaissance, dans les codes existants, je parle des entreprises publiques actuellement, là où il y en aurait, est-ce qu'il y a un modèle, est-ce qu'il y a un code qui vous semble être une référence et duquel on peut s'inspirer?

M. Meloche (François): Ouais. Disons qu'il y a un code international, bon, qui est dans les recommandations, c'est celui du Global Reporting Initiative. Ça, c'est un code, c'est plutôt un genre de guide sur la transparence, comment les entreprises devraient rapporter l'information au niveau environnemental et social. Et puis on revient un peu au rôle principal, ou, en tout cas, un des rôles très importants qui est, en fait, résumé dans les deux points, les deux recommandations. C'est l'information, puis le gouvernement peut avoir un rôle dans faire en sorte que les entreprises soient plus transparentes et rapportent plus d'informations au niveau social et environnemental.

Donc, le Global Reporting Initiative, c'est une initiative qui est, entre autres, organisée par les Nations unies, par le Programme des Nations unies pour l'environnement, puis d'autres organisations et puis qui veut vraiment devenir le genre de norme à laquelle les entreprises vont être appelées à répondre, en termes de transparence.

Maintenant, d'autres modèles, bien, il y a une initiative, en fait, qui a été initiée par la Maison-Blanche, il y a quelques années, qui traitait des questions de travail dans les manufactures, chez les sous-traitants, et puis là encore il y a eu plusieurs groupes qui ont été appelés. Alors ça, ce serait peut-être un modèle à regarder également.

Mme Houda-Pepin: Également, à la page 14 de votre mémoire, vous vous questionnez sur les organismes à but non lucratif qui émettraient des actions d'investissement communautaire au public, et, quelque part dans votre mémoire, vous avez parlé aussi du capital de risque dans le domaine communautaire. Je sais pour ma part, dans la lecture qu'on fait, que le Québec est La Mecque du capital de risque, c'est-à-dire ce n'est pas ce qui nous manque, mais, si je comprends bien, c'est que ce capital de risque ne se dirige pas vers le secteur communautaire, d'une part, parce que le risque est grand et, deuxièmement, parce que les dividendes, si on peut dire, ne sont pas toujours au rendez-vous.

Pourriez-vous élaborer davantage sur votre recommandation n° 5, qui est à la page 14, s'il vous plaît, en rapport avec les... la recommandation que les règlements des valeurs mobilières soient modifiés pour permettre aux organisations à but non lucratif d'émettre des actions d'investissement communautaire au public? Comment ça peut... Quelle forme ça peut prendre? Est-ce qu'il y a un secteur qui vous semble prioritaire dans le domaine du développement communautaire? Est-ce qu'il y a des expériences qui ont été faites ailleurs desquelles on peut s'inspirer?

Le Président (M. Paré): Mme Hayles.

Mme Hayles (Lisa): Moi, je suis au courant de quelques fonds communautaires dans la province de Québec, surtout ACEM, l'Association communautaire d'emprunt de Montréal, qui est membre de la SIO et qui prête des petits montants d'argent dans une communauté relativement défavorisée à Montréal. Aussi, au Québec, il y a un réseau des fonds communautaires, mais ce réseau-là, dans ma compréhension, ça n'a pas la possibilité de... on ne peut pas investir directement dans la plupart de ces outils-là. Ce n'est pas pour les investisseurs. Donc, ils dépendent des subventions du gouvernement ou des fondations ou... je ne sais pas, où ils peuvent trouver de l'argent.

n (15 h 10) n

Donc, l'idée, c'est de libérer un peu plus d'argent du marché d'investisseurs sociaux qui ont cet intérêt, qui cherchent des opportunités pour investir l'argent localement. Et surtout que, pour les gens au Canada qui peuvent épargner pour leur retraite, on a la possibilité d'investir dans toutes sortes d'outils à haut risque en fait. Moi, je ne suis pas un expert en finances, mais on peut investir dans des trucs à haut risque pour notre retraite. Par contre, on n'a pas la possibilité d'investir dans une communauté locale, dans un outil qui veut servir notre communauté, pour faire un outil qui peut faire des prêts localement, dans un endroit local, je veux dire.

Donc, c'est un peu... Il y a quelque chose de contradictoire dans cette politique-là qui cherche à protéger les investisseurs des risques mais qui encourage des investisseurs à prendre des risques beaucoup plus élevés à l'extérieur de leur communauté locale. Mais ils ne peuvent pas, par exemple, investir dans quelque chose, un outil, local, qu'ils, c'est possible qu'ils le savent bien, ne peuvent pas obtenir des crédits d'impôt pour ça. Mais il y a les autres outils pour obtenir des crédits d'impôt.

Mme Houda-Pepin: Une dernière question, parce que j'ai mon collègue...

Le Président (M. Paré): Oui, Mme la députée de La Pinière, parce que M. le député de Nelligan m'a demandé la parole.

Mme Houda-Pepin: Voilà. Exactement. Vous suggérez également que le ministère des Finances change les règles du REER pour permettre l'admissibilité au REER des investissements dans les fonds de prêts communautaires. Pourriez-vous nous dire qu'est-ce que ça implique une telle mesure? Ça va aider qui? Est-ce qu'il y a des secteurs d'activité communautaires qui vont en bénéficier? Comment ça va s'appliquer? Si on le recommandait demain matin au ministère des Finances, ça implique quoi, ça?

Le Président (M. Paré): Mme Hayles.

Mme Hayles (Lisa): Je crois qu'il y a plusieurs facteurs qui peuvent, peut-être pas immédiatement mais bientôt, bénéficier de ce changement de politique, surtout encore les fonds communautaires mais aussi, c'est possible, le logement social, des «corporatives».

On a des organismes à but non lucratif qui sont implantés à travers le Canada, qui cherchent des financements, et puis il y a des investisseurs institutionnels, les organismes religieux. Peut-être que la plupart des caisses de retraite ne sont pas là encore, mais elles commencent à s'intéresser à ce secteur, à cette partie du marché. Mais il y a des blocages qui existent pour qu'elles puissent considérer ces investissements. Donc, pour les individus surtout, au niveau des REER, il y a... Dans ma communauté, à Toronto, par exemple... J'habite à Riverdale, à Toronto, où se trouve le Riverdale Community Loan Fund, qui donne des prêts pour les petites entreprises locales. Et, si j'investis un morceau de ma retraite là, je ne peux pas obtenir un crédit d'impôt, même si je vois exactement où ce fonds travaille et comment ce travail contribue à soutenir une économie locale.

M. Meloche (François): Juste, peut-être, rajouter un petit point, juste un exemple. Aux États-Unis, où est-ce qu'il n'y a pas de genre de REER dans le même genre, il y a des fonds qui existent... Bien, il y a des fonds éthiques qui ont une politique d'investir 1 % de leur actif dans des investissements communautaires ou dans le logement social, et puis ils ont des bons rendements. Alors, c'est juste pour dire que ça peut se faire.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Meloche. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Merci beaucoup, Mme Hayles, M. Thorpe et Mme Meloche pour votre présentation. Thank you very much for your presentation. Je pense que c'est une excellente façon de commencer.

Je suis un ancien agent de développement communautaire et je trouve le débat que nous sommes en train de commencer assez intéressant, parce qu'il y a une mission économique qu'on discute et une mission sociale, une valeur sociale qui, de temps en temps, je ne veux pas dire qu'elles sont contradictoires, mais il y a certainement une tension créative entre les deux. Et je voudrais juste profiter de votre présence ici pour mieux comprendre comment on peut vivre... comment les deux visions peuvent vivre ensemble.

Je fais des débats avec mon épouse. Je ne dis pas de quel côté chacun est dans le débat, mais on fait des débats souvent où on met notre argent. Il faut que je dise que, financièrement, je suis content qu'elle gagne plus de 100 % des batailles, mais j'ai une autre approche. Mais j'arrive à ma question, parce que vous avez utilisé souvent les mots critères sociaux et environnementaux. Moi, je trouve que les valeurs sont subjectives, sont même jugementales, que peut-être je partage vos opinions. Peut-être, quand on discute c'est quoi, les bonnes valeurs environnementales, il n'y a aucun débat entre vous et moi sur ça, mais il me semble que nous sommes... J'arrive à la question: Qui juge ça? Parce que vous avez, dans presque toutes vos recommandations, parlé des facteurs sociaux, éthiques, environnementaux.

M. Meloche, vous avez parlé de quelques exemples: Nations unies pour l'environnement et même de Washington sur le travail, mais sur les valeurs sociales, qui décide ça? Comment on peut décider ça et un peu... Where does it stop? Parce que j'ai peur que, quand on parle de valeurs sociales maintenant, il y a un mouvement à droite incroyable, à droite sur les valeurs. Je n'entre pas dans le débat sur ça aujourd'hui, mais... Et je vois qu'est-ce qui se passe dans quelques autres pays, et les valeurs familiales, je les trouve vraiment à droite. Est-ce que cette pente... J'ai peur que c'est une piste glissante, malgré que peut-être je commence le débat avec vous 100 %. Je voudrais vous entendre sur ça. Comment un gouvernement... Avec beaucoup de vos recommandations, vous avez parlé de Commission des valeurs mobilières du Québec, vous dites qu'on doit avoir un encadrement sur les critères sociaux et environnementaux. Comment on peut établir ça? C'est quoi, imputabilité? Et aussi, une fois que ça commence, où ça arrête?

Et dernière question ? parce que le temps passe vite ? vous avez parlé de l'exemple de la Nouvelle-Écosse, Nova Scotia, the Community Development Fund. If you could give us, later on, some examples... like send us information on that, mais aussi les Nations unies. Je ne veux pas que vous fassiez tout le travail pour la commission, mais, si c'est facile, vous avez quelques documents, au moins les sites Web, les envoyer à la commission, ça m'intéresse beaucoup et, je présume, les autres membres de la commission.

Avec ça, peut-être c'est une question très générale, mais peut-être, pour commencer nos trois jours, comment on peut décider ce mélange des deux cultures, deux systèmes de valeurs et où ça arrête?

Le Président (M. Paré): M. Meloche.

M. Meloche (François): Bien, je peux peut-être commencer. Bien, il y a différentes façons de prendre le problème, là. Le gouvernement a divers rôles, comme je l'ai dit tantôt, au niveau de favoriser la transparence des entreprises. Bon. Ça, c'est une chose. Parce que c'est vrai qu'une fois qu'on sait qu'est-ce que les entreprises font, bien, il faut quand même avoir décidé des valeurs qu'on va promouvoir, mais, ça, c'est une première étape.

Maintenant, quand on parle des... Quand je dis... Bien, on dit souvent, là: Les questions sociales et environnementales ça englobe finalement toutes les valeurs qu'on... Bon. Qu'est-ce qu'on veut dire par ça? Bien, je pense, dans certains cas, il y a des normes internationales puis, par normes internationales, c'est des normes qui ont été négociées pendant de nombreuses années dans des processus internationaux des Nations unies, par exemple, ou bien, dans le cas des normes de travail, bien, il y a l'Organisation internationale du travail qui a des conventions très précises sur qu'est-ce qui est souhaitable en termes de droits des travailleurs. Alors, ça, dans ce cadre-là, la plupart des demandes qui sont faites auprès des entreprises se reposent sur ça tout le temps. C'est comme la base.

n (15 h 20) n

Quand on parle d'environnement, c'est peut-être un peu plus complexe, parce que, là, il y a différentes législations, différentes normes. Et puis les questions environnementales, c'est souvent relatif à l'environnement dans lequel on est. Souvent, ça... Bon. Mais, encore là, il y a des cas... Disons que l'action qui est faite par les actionnaires militants et puis, disons, la pression qui est faite sur les entreprises, c'est clair qu'il y a un problème environnemental pour... que les agissements de la compagnie entraînent des problèmes graves à l'environnement. Et puis on mentionne... En ce moment, il y a beaucoup de pression qui est faite sur le géant du pétrole ExxonMobil par rapport au fait qu'ils n'investissent pas dans les énergies renouvelables, par exemple, et puis qu'ils s'opposent au Protocole de Kyoto. Il y a des situations où est-ce qu'il y a des compagnies qui ont des projets spécifiques qui vont entraîner des dommages sur l'environnement local. Alors là on est dans des situations où est-ce que, oui, c'est des valeurs, parce qu'on dit: L'environnement est important, mais c'est assez clair, selon la plupart des observateurs, qu'il y a un problème là.

Quand on arrive à décider vraiment entre deux entreprises, dans le cas des filtres, par exemple, au niveau de l'environnement, même au niveau social, là, ça peut devenir plus complexe, il faut... et puis c'est là qu'il y a des organisations qui se spécialisent là-dedans, dans la recherche, pour évaluer les entreprises et puis comparer les entreprises. Puis là il y a différents indicateurs. Mais ça, c'est, disons, une science en développement, ce n'est pas arrêté. Alors, c'est vrai qu'il y a des débats, mais le rôle du gouvernement, c'est de permettre à ces débats d'avoir lieu et puis de mettre en application ces valeurs-là. Alors... En tout cas... Voulez-vous compléter?

Mme Hayles (Lisa): Je n'ai pas grand-chose à ajouter. Je crois que, quand on parle des valeurs sociales et environnementales au Canada, on peut, même s'il y a des débats qui continuent... il y a 100 ans, il y avait un débat sur les droits des femmes, qui n'existe plus maintenant, on est d'accord sur cette loi-là. C'est sûr que ça va développer... Dans 100 ans, peut-être on va avoir une autre idée sur les animaux, peut-être on va arrêter de manger des animaux, je n'en sais rien, mais je veux dire que maintenant on a des grandes lignes, des grandes lignes directrices qui peuvent nous guider au niveau de nos attitudes vers des idées sociales et environnementales.

Et puis, comme François a expliqué, il y a des processus internationaux qui sont en jeu, nous, qu'on fait partie. Quand on fait des manifestations vers les actionnariats, avec nos actions, c'est basé sur les critères, les règles internationales qui s'étaient développées pendant des années. Donc, il y a un guide pour des entreprises, pour qu'elles puissent suivre quelque chose qui est établi.

Et je vais vous raconter une histoire. Il y a un an, j'ai rencontré un homme dans une... c'était comme un colloque sur l'éthique dans le domaine des entreprises, et ce monsieur était sur le conseil d'administration de Nike, pour le Canada. Et il m'a expliqué qu'en fait Nike, entre eux, pas publiquement, ils ne vont jamais le dire en public... Moi, je suis en train de le faire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Hayles (Lisa): Il m'a dit que Nike était d'accord pour l'établissement des codes de conduite, parce que c'est rien... Comme on fait en Indonésie, par exemple. Ils ont des pressions des ONG, ils en ont du gouvernement. Vraiment, ils cherchent des lignes directrices pour leur comportement. Mais ils ne vont jamais dire ça publiquement, c'est à vous, en tant que gouvernement, c'est à nous, en tant que ONG, des organismes d'intérêt et de pression, pour encourager l'adoption de ces codes de conduite.

Le Président (M. Paré): Merci, madame. Peut-être le mot de la fin, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Mais juste un petit... Peut-être après votre présentation, on peut discuter. Votre projet de Riverdale Community Loan Fund m'intéresse beaucoup et je voudrais juste mieux comprendre, vite, là. Si j'ai un autre petit 1 000 $ après mon séjour comme député... Parce que nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord. Ça ne reste pas beaucoup avec le gouvernement PQ, là, mais... Il faut que je passe mes messages, quand même. Qu'est-ce que le Fonds fait avec les argents? Est-ce que le Fonds réinvestit ça dans les compagnies qu'on dit «responsables» ou est-ce que c'est l'inverse, il utilise les profits pour faire fonctionner les mouvements communautaires ou est-ce que ça utilise directement l'argent pour faire fonctionner les projets communautaires?

Mme Hayles (Lisa): C'est un fonds de garantie qui est placé dans une caisse populaire. La caisse populaire, c'est un partenaire dans le projet. Puis les gens avec les projets, les petites entreprises, viennent et, eux aussi, ils sont obligés de mettre un peu d'argent sur un compte dans la caisse populaire. Puis, moi, en tant qu'investisseur, je reçois 2 % par an de mon petit investissement. Puis les gens qui ont les petites entreprises paient une plus... Il y a une échelle entre, moi, ce que je reçois et le coût d'intérêt qu'elles doivent payer. Et comme ça, ça tourne, c'est... Et depuis qu'il a commencé ? ça fait quatre ans, quatre ans et demi ? il a perdu aucun... Il a... Comment on dit «they'd not lost a penny»?

Une voix: Ils n'ont rien perdu.

Mme Hayles (Lisa): Ils n'ont rien perdu puis ils ont tous payé leurs investisseurs.

M. Williams: Pas comme quelques autres fonds qu'on a aujourd'hui.

Le Président (M. Paré): Merci, mesdames, merci, monsieur, pour votre contribution à cette commission. J'inviterais la Chambre de commerce du Québec à prendre place, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Bonjour, M. Audet, bonjour, Me Marchand ? je présume. À cette commission, vous aurez 20 minutes pour... Vous avez l'habitude, M. Audet, de cette commission. Donc, vous avez 20 minutes de présentation et 40 minutes d'échange avec les parlementaires de part et d'autre. Donc, nous y allons. À vous la parole.

Chambre de commerce du Québec (CCQ)

M. Audet (Michel): Alors, merci, M. le Président. Écoutez, on a déposé il y a déjà quelques semaines un mémoire que, j'espère, je pense que vous avez pris connaissance. Donc, je ne le lirai pas au complet, puisqu'il est un petit peu long, et je voudrais justement éviter de prendre beaucoup de temps. Je vais essayer d'y aller à l'essentiel.

Donc, juste en guise d'introduction, je vais dire que nous avons été à la fois heureux et un peu surpris qu'on fasse une commission parlementaire sur le sujet de la responsabilité sociale et qu'on retrouve d'ailleurs dans le document qui a été déposé par la commission, finalement, des phrases à l'effet que c'est un concept assez nouveau, que ça a pris naissance surtout après 1992, etc.

Je suis président d'un mouvement qui n'est pourtant habituellement pas nécessairement un précurseur, et je vous fais état, dans nos politiques d'action qu'on a depuis 20 ans, de tout un document, qu'on a mis en annexe de notre document, qui porte la responsabilité sociale des entreprises. Donc, ça a été fait bien avant donc que je sois à la Chambre, entre 1980 et 1982. Et depuis 20 ans, ça figure dans toutes les chartes des chambres de commerce à travers le Québec et nos membres reçoivent ça régulièrement à chaque année. Donc, ça constitue justement une vingtaine de composantes que vous avez en annexe à notre mémoire.

Tout ça pour vous dire qu'on était contents de pouvoir venir mais, en même temps, on a vu, dans le mémoire, qu'on a fait un peu le tour du monde pour voir un peu ce qui s'était passé. On aurait peut-être dû venir à la Chambre de commerce du Québec, ça aurait peut-être été instructif et peut-être moins coûteux. On vous aurait dit ce qui avait été fait depuis 20 ans sur ce sujet-là à la Chambre. C'est juste une entrée en matière évidemment, prenez-le pas personnel. Je ne sais pas qui a écrit le document, mais j'ai été étonné de voir qu'on n'avait pas du tout, qu'on n'avait pas tellement fait de recherches sur ce qui s'était fait au Québec.

n (15 h 30) n

Au cours des dernières années donc, le sujet de la responsabilité sociale, on l'indique, a suscité plus d'intérêt, beaucoup plus d'intérêt effectivement, que par le passé. Particulièrement, on en a parlé en Europe, on en a parlé de ce côté-ci de l'Atlantique également. Il y a eu des colloques, des commissions parlementaires.

Ceci dit, pour la Chambre de commerce du Québec ? je viens de le dire ? c'est une préoccupation qui n'est pas nouvelle, puisque en 1981 un comité de la Chambre était formé, bon, pour s'y attarder. Et, dans le rapport qui a été déposé l'année suivante, on suggérait un cadre général à l'intérieur duquel l'entreprise québécoise pourrait évaluer son implication sociale et, le cas échéant, y apporter des correctifs.

Donc, cette position, comme je viens de mentionner, figure maintenant dans nos politiques d'action, un document qu'on publie chaque année, qu'on remet à l'occasion de chacun des congrès ? c'est celui de l'an dernier; donc, cette année, il figure encore en bonne place ? où on donne aux Chambres de commerce locales et aux membres de la Chambre, justement, le cadre, en quelque sorte, d'action de leur responsabilité sociale. En 2002 donc, la démarche de la Chambre demeure donc toujours pertinente et éclairante ? je parle de la démarche qui a été entreprise en 1982 ? notamment au titre de la définition extensive de la responsabilité sociale d'une entreprise, surtout dans la confusion qui semble avoir pris naissance en marge de l'engouement dont cette notion est l'objet.

Le document de consultation de la commission des finances publiques souligne que l'objet de la responsabilité sociale demeure, et je cite: «à certains égards mal défini et mal compris», et il est en effet difficile d'en circonscrire l'essence avec précision. C'est pourquoi la définition extensive de la Chambre qui dresse une liste des besoins que l'entreprise québécoise devrait tenter de satisfaire au mieux et dans son propre intérêt, pour pouvoir être qualifiée de bon citoyen corporatif, pour remplir adéquatement ses responsabilités sociales ? c'est comme ça qu'on l'a présenté ? demeure d'actualité et a été intégrée dans nos politiques d'action.

Le document retient 18 composantes, qu'on trouve en annexe, qui définissent la responsabilité. Deux d'entre elles cependant ? et c'est là-dessus que je veux insister dans ma présentation ? étaient et demeurent essentielles quant à nous soit le respect des lois et la rentabilité financière. Il va de soi, comme le souligne d'ailleurs le document de consultation de la commission, qu'il ne suffit pas nécessairement de respecter les lois pour être nécessairement un bon citoyen corporatif. Mais, pour les entreprises, il s'agit de vertus cardinales, et leur observance constitue le point de départ du rôle social des entreprises, particulièrement dans le contexte québécois où l'encadrement législatif est réglementaire et particulièrement serré.

Donc, le premier cadre qu'il faut respecter c'est justement notre corpus législatif, nos lois. Nous soumettons qu'il n'est pas exact cependant de l'exprimer, comme l'a exprimé le document, que les préoccupations de responsabilité sociale des entreprises ne sont pas couvertes par les lois et les règlements. Lorsque le législateur édicte des lois, il le fait pour cristalliser sa volonté politique, pour consacrer un principe de fond, généralement afin d'atteindre un objectif de société émanant de la majorité des citoyens qui ont élu les gouvernants place. En d'autres termes, qu'il s'agisse d'imposer une obligation, de baliser les rapports entre les parties, de les réguler ou même de réprimer un comportement social, la loi et les règlements qui en découlent correspondent à des choix d'État. C'est ainsi qu'il manifeste sa volonté. C'est de cette façon qu'il véhicule les orientations que les citoyens veulent donner à leur environnement social soit parce qu'il croit répondre à un besoin impérieux ou qu'il estime, à tort ou à raison, qu'il s'agit de la volonté populaire majoritaire. C'est l'essence d'un système démocratique.

Au Québec, le législateur encadre les actions et le fonctionnement des entreprises dans leurs rapports avec leurs employés par de multiples législations ? Jean en a fait une petite liste pour vous illustrer l'importance: Bien sûr, il y a la Charte des droits et libertés de la personne, la Charte de la langue française, le Code du travail, la Loi des normes du travail, la Loi sur la santé et sécurité du travail, la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, la Loi sur l'équité salariale, la Loi sur l'équité en matière d'emploi, la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre, dite la loi de 1 %, la Loi sur les décrets de conventions collectives, la Loi sur le régime complémentaire de retraite, le Code civil du Québec.

Le législateur balise les relations qu'elles entretiennent avec les consommateurs de leurs produits et des services également. C'est ainsi qu'il y a la Loi de la protection du consommateur, la Loi sur les assurances, le Code civil du Québec, etc.

Il détermine de quelle manière elles doivent se comporter avec la société de façon générale. Et pour ça, il y a, encore une fois, la Charte des droits et libertés de la personne, la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur la protection des renseignements personnels, les lois fiscales particulièrement nombreuses dont maintenant une taxe, même, sur la pauvreté et le Fonds Jeunesse, etc.

Donc, à cette nomenclature des lois provinciales, dont la liste n'est pas exhaustive, en fait, et à laquelle il faut ajouter de nombreux règlements qui en découlent, on peut additionner de nombreuses lois fédérales et de nombreux règlements de même que toute la réglementation municipale qui encadrent la vie quotidienne des entreprises.

On peut déduire de ces nombreuses interventions législatives que l'État touche presque tous les domaines d'activité des entreprises. Le seul respect des lois n'épuise certes pas les obligations qui découlent de la responsabilité sociale, mais, dans la mesure où les interventions de l'État se manifestent dans autant de sphères d'activité, toujours plus et mieux ciblées, la couverture des obligations sociales est de mieux en mieux assurée.

Alors que dans certaines sociétés de grands pans d'activités sont laissés à l'initiative et au bon vouloir des entreprises qui doivent alors, de leur propre initiative, imposer les obligations qu'elles identifient à titre de citoyen responsable, ces seuls exemples démontrent que le Québec se démarque depuis longtemps en imposant des comportements, des responsabilités, des devoirs et autres exigences dans presque tous les secteurs d'intervention. Il n'est donc pas étonnant que plusieurs entreprises ? et, je le dis, particulièrement pour la moyenne et la petite entreprise ? témoignent de leur profonde conviction d'avoir rempli les obligations qui découlent de la responsabilité sociale une fois qu'elles se sont acquittées, donc, du respect des lois et que le respect des lois ait été retenu comme première composante de la définition de la Chambre.

La deuxième composante qui, également, est fondamentale, c'est la rentabilité financière. Il est regrettable qu'une certaine pensée dominante perpétue l'adhésion manichéenne qui oppose encore la notion de profits et d'implication sociale. On cite, par exemple, que «pour plusieurs observateurs, la recherche du profit occulte trop souvent la responsabilité sociale des entreprises ou des investisseurs». C'est dans le document même de la commission. Nous croyons que c'est une erreur et peut-être davantage une manifestation d'une incompréhension de la nature même d'une entreprise et d'une vision pour le moins passéiste de la réalité. Ces deux notions ne doivent pas être mises en opposition parce qu'elles ne sont pas mutuellement exclusives. La rentabilité financière est la première vocation d'une entreprise. À terme, son existence en dépend. C'est ce qui compense le risque, c'est ce qui permet le maintien et la création d'emplois, c'est ce qui détermine les investissements. C'est cette notion fondamentale d'une grande simplicité qui est trop souvent occultée.

J'ai l'habitude de dire que la pire chose qui peut arriver à une communauté ? puis on le vit souvent ? c'est qu'une entreprise soit obligée de fermer ses portes. Donc, la pérennité d'emploi et la continuité d'une entreprise, c'est fondamental pour le développement de la communauté et le développement de ses citoyens. Donc, je pense que c'est... L'entreprise va fermer ses portes quand elle n'est plus rentable. On le vit actuellement, malheureusement, et de façon tragique dans certaines régions du Québec.

Ce qu'on oublie également, c'est le lien étroit qu'une entreprise entretient avec sa communauté. Lorsqu'une entreprise est essentiellement tributaire des exigences de la société... et ce sont les demandes du marché qui déterminent sa capacité de se développer et, dans certains cas, de survivre. Ce rapport très étroit est particulièrement significatif au Québec dont le tissu socioéconomique est composé d'une majorité de PME qui émanent directement de leur milieu et en demeurent généralement très proches. Les données compilées par le ministère de l'Industrie et du Commerce démontrent que 95 % des entreprises réparties dans toutes les régions du Québec emploient moins de 50 employés et 97 % en emploient moins de 100. Ces entreprises génèrent une activité économique importante dans toutes les régions du Québec.

Mais on comprendra que la première responsabilité de ces PME, c'est d'assurer, justement, leur pérennité, leur continuité, leur survie. Ici encore les statistiques sont révélatrices: pour les entreprises comptant de 20 à 99 employés, le taux de survie après cinq ans n'est que de 57 %. C'est dire que près de la moitié, donc, disparaissent dans les cinq premières années de leur vie. Après 10 ans, c'est un peu plus du tiers, 37 % d'entre elles, qui sont encore en affaires. Le taux de survie est encore plus faible pour les entreprises plus petites. En fait, plus elles sont petites, plus le taux de survie est faible. Donc, on assiste également à une mouvance dans ce domaine-là, qui est très importante, qui fait que, si on ne peut pas, donc, traiter l'entreprise comme un univers qui est absolument comparable dans toutes les régions et dans toutes les tailles, la PME ? et c'est l'essentiel du tissu industriel du Québec ? ne peut pas supporter les mêmes obligations que la très grande entreprise. Et ça, je pense que c'est connu, mais, malheureusement, les documents qui sont publiés font, à notre avis, trop peu cette différence.

Les grandes entreprises composent évidemment une autre réalité. Leur taux de résistance est plus élevé mais leur rentabilité financière n'en demeure pas moins leur première mission, et pour des raisons évidentes. Pour les uns comme pour les autres, la capacité de créer et de maintenir des emplois est d'ailleurs directement liée à cette rentabilité. C'est là l'autre volet de la responsabilité sociale des entreprises. La rationalisation des effectifs ne s'effectue jamais facilement, particulièrement dans le cas des PME.

n (15 h 40) n

Pour les autres composantes ? et là je vais passer un petit peu plus vite, évidemment ? je voudrais noter un phénomène qui actuellement est particulièrement dramatique dans les entreprises, c'est la transparence des entreprises, donc la véracité des résultats financiers. Pour la Chambre, le manque de transparence dans les états financiers et les bilans et la fraude de certains dirigeants manquant carrément de scrupule ont éclaboussé les milieux financiers, et c'est toute la confiance des consommateurs et des épargnants qui en aura été ébranlée. Donc, nous n'avons aucune pitié pour les gens qui ont fraudé, et je crois que la loi sera appliquée avec toute la rigueur. Je pense que les acheteurs d'actions comme les consommateurs ont droit à toute la vérité là-dessus. Alors, nous, on ne défendra pas une minorité qui n'est pas défendable. Puis je pense que, là-dessus, on veut... On le voit maintenant parce que c'est un dossier qu'on voit encore tous les jours, mais, quand on regarde les résultats de ce qui se passe avec le dépôt actuellement des états financiers devant la SEC américaine, finalement, il y a eu, ma foi, moins de 10 entreprises sur 1 000 qui ont été touchées, donc moins de 1 %. Donc, ce n'est pas la généralité et on en a fait... C'est tout à fait trop quand il y en a une ou quelques-unes, mais ce qu'on veut dire là-dessus, c'est que ces gens-là, on ne veut pas prendre fait et cause pour leur défense. Je pense que c'est plus... Là, il y a un manque de responsabilité à l'égard de leurs actionnaires quand on fraude, et de l'information.... Et, là-dessus, on veut être très clairs: nous, on pense que, là-dessus, il faut être absolument intransigeants quant à la véracité et à la transparence des données que doivent fournir ces entreprises-là.

Un autre point qu'on veut signaler, c'est que, dans beaucoup de milieux, les entreprises ? et on l'a vu beaucoup, nous, dans notre réseau ? les entreprises, beaucoup d'entreprises ont une sorte de contrat social avec leur milieu. Celles qui s'en occupent avec plus de diligence voient leurs efforts soulignés par un système de reconnaissance important, divers. Pour un, la Chambre de commerce du Québec décerne depuis déjà plus de 20 ans, 23 ans maintenant, des Mercure d'excellence auxquels des centaines d'entreprises ont aspiré depuis des années et souligne les efforts des entreprises dans différents domaines, on le sait: contribution au développement économique régional, efficacité énergétique, développement de la main-d'oeuvre, etc., beaucoup d'autres domaines.

Ce qu'il est intéressant de noter ? et je profite pour le mentionner, puisque je suis dans cette fonction depuis plus de neuf ans, donc, je viens de fêter mes dixièmes mercuriades ? c'est que les critères de base pour les choisir, les entreprises, intègrent des facteurs de responsabilité sociale. Mais la première chose dont on s'assure, c'est que l'entreprise, justement, va avoir, a la capacité de survivre et de, justement, résister au temps et aux vagues. Et on est très fiers de dire que, dans nos entreprises lauréates, plus de 99 % ? et on en a donné à peu près 400 depuis maintenant plus de 20 ans ? plus de 99 % sont encore en affaires. Donc, je pense qu'elles ont témoigné comme ça de leur solidité financière, ont contribué au développement de leur milieu, parce que, justement, elles avaient quand même une bonne gestion et elles avaient la capacité, les capacités financières de continuer. Et, encore une fois, c'est un facteur qu'on veut noter et qu'on récompense à l'occasion des mercuriades.

On le sait, il y a beaucoup de concours, il y en a 75 exactement dans toutes les régions. M. le député, vous êtes régulièrement appelé, d'ailleurs, à participer à ces remises de prix. Je vois des gens autour de la table, on s'est retrouvés, d'ailleurs, souvent à des galas semblables, et, dans toutes les communautés, c'est un fierté que de reconnaître justement la contribution des entreprises au développement de leur milieu. Donc, ça fait partie ? je suis très fier de le dire ? ça fait partie de notre mission, et on le fait avec beaucoup d'enthousiasme parce que, ça, c'est important, que les gens s'identifient et contribuent donc au développement social du milieu.

J'ajoute que le mouvement des jeunes chambres, particulièrement la Jeune Chambre de Montréal qui décerne chaque année maintenant son prix Arista pour reconnaître une personnalité d'affaires socialement responsable et qui, cette jeune Chambre, a adopté elle-même une charte de la responsabilité sociale de l'entreprise en 1997. Je ne sais pas si elle viendra devant vous, mais il y a dans le mouvement, donc, déjà une sensibilité qui transparaît au niveau également non seulement de la Chambre de commerce de Québec mais de ses composantes et du regroupement des jeunes chambres.

Qu'en est-il maintenant compte tenu de cette ampleur? Je vais dire quelques mots... Est-ce que c'est nécessaire dans ce contexte que le gouvernement... qu'il y ait une intervention gouvernementale additionnelle? Vous comprendrez que toute cette intervention que je viens de faire vise quant à nous à dire que, effectivement, l'encadrement réglementaire législatif actuel est suffisant pour les entreprises, qu'il faut procéder par promotion, par incitation et non pas ajouter, évidemment, d'autres dispositions réglementaires qui auraient pour effet, je dois dire, de tuer le bénévolat.

À titre d'illustration ? je ne nommerai pas la personne ? hier soir, j'étais avec un coprésident. La semaine dernière, il y avait un très gros événement à Montréal. C'est un événement pour le financement de l'Institut de cardiologie. Il a ramassé près de 1 million de dollars. Un des coprésidents me disaient: S'ils mettent un règlement, moi, je ne suis plus là parce que je fais ça comme bénévole et non pas parce que j'y suis obligé. Tu sais, c'est un peu fondamental. Alors... Et l'année dernière il était président d'un autre comité, cette fois-là le Bal de la jonquille, pour, justement, ramasser plus de 1,2 million contre la recherche sur le cancer. Donc, il y a beaucoup de gens d'affaires qui sont effectivement... qui s'impliquent dans ces causes-là, qui le font sur une base personnelle, et ça, c'est très important. Quand on parle de l'entreprise, nous, ce qu'on fait à la Chambre, chaque année on remet, depuis cinq ans maintenant, le Mérite philanthropique à une personnalité d'affaires, un homme et une femme d'affaires qui se sont distingués pour leur engagement social, pour leur mérite philanthropique. Bien sûr qu'ils sont présidents ou qu'ils sont dans une entreprise, mais ce qu'on reconnaît, ce sont les individus parce que, évidemment, il y a des présidents d'entreprise qui sont plus sensibles à ça ? ça aussi, ça fait partie des valeurs ? que d'autres, soit parce qu'ils ont plus de temps soit parce qu'ils ont plus de ressources, ils sont dans un univers également qui se prête plus à ça. Alors donc, ça aussi, c'est... Il faut distinguer entre l'entreprise et le chef d'entreprise, et je pense que beaucoup de chefs d'entreprise s'impliquent. Ils le font puis ils le font bénévolement, ils le font généreusement. Mais si on leur dit maintenant: Voici un nouvel encadrement que vous devrez accomplir, alors, je pense qu'ils vont déléguer ces responsabilités-là, et je pense que toute la société va y perdre. Alors, personnellement, je pense qu'on n'évoque pas comme tel de mesures législatives, mais à quelques endroits on semble flirter à se poser des questions là-dessus. Moi, je pense que ce serait une erreur pour, justement, l'engagement que les sociétés privées prennent déjà à l'égard de la responsabilité sociale et qu'elles vont continuer de prendre à l'avenir. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Audet. Maintenant, on passe à la période des questions. M. le député de La Prairie?

M. Geoffrion: Non, monsieur...

Le Président (M. Paré): Non. Le député de Lac-Saint-Jean, et vous serez suivi par le député d'Abitibi-Est.

M. Tremblay: Oui. M. Audet, merci de votre présence. Je pense qu'on a un malentendu aujourd'hui, dans le sens que je suis d'accord à 95 % de ce que vous avez dit dans votre mémoire, que la PME contribue socialement par la création d'emplois, qu'il faut lui laisser libre champ et tout ça. La commission aujourd'hui, je pense que ce n'est pas ça qu'elle est en train d'étudier. Ce qu'elle est davantage en train d'étudier, c'est plus au niveau de la grande entreprise. Quand on parle de responsabilité financière puis d'investissement socialement responsable, notamment, je ne pense pas que la Chambre de commerce du Québec serait contre l'idée que nous demandions aux gestionnaires de caisses de retraite qu'elles aient davantage de transparence ? et je crois que la transparence, dans le monde des affaires, est quelque chose que vous recherchez énormément ? donc, que les administrateurs de caisses de retraite émettent annuellement, par exemple, un rapport dans lequel ils décrivent les considérations d'ordre social, éthique et environnemental dont ils ont tenu compte dans leurs choix de placement. Et, encore là, quand on parle de placements, on parle de grandes entreprises, vous comprendrez.

Donc, c'est pour ça que ? tout à l'heure, dans votre début de mémoire, vous sembliez dire qu'on est en train de réinventer la roue par les travaux qu'on fait aujourd'hui ? je m'excuse, mais je pense que les travaux qu'on fait, c'est des travaux exploratoires qui sont extrêmement sérieux et qui, en tout cas personnellement, me touchent. Et c'est pour ça que je veux vous dire que ce que nous étudions aujourd'hui va davantage par rapport à la responsabilité des grandes entreprises. Je donne un exemple que tout le monde connaît: General Motors qui part avec ses pénates, alors que je crois que 300 millions de prêts garantis ont été consentis à ces entreprises qui semblent dire: Non, nous, on est là juste pour faire du profit.

Donc, c'est juste pour vous rappeler que l'investissement socialement responsable et la responsabilité des entreprises, c'est de s'assurer que des multinationales ou des très grandes entreprises qui, parfois, sous la pression de leurs actionnaires qui n'ont que pour seul objectif le rendement... c'est de les inviter à voir aussi le rendement social et environnemental.

Donc, je ne vous poserai pas de questions, je vous ferai seulement que ce commentaire auquel aujourd'hui je vous dis: Je suis d'accord avec 95 % de ce que vous avez dit. Mais quand on parle de responsabilisation des entreprises, je suis d'accord avec vous que la PME joue un rôle majeur, et il faut continuer à travailler dans ce sens-là, mais les travaux que nous faisons aujourd'hui sont davantage à travers les multinationales. Comme, par exemple, si une multinationale de chez nous exagérait quant à l'utilisation des ressources naturelles, je pense que ce serait certainement pertinent de la remettre à l'ordre non pas par un cadre réglementaire mais par ? aujourd'hui, ce que nous étudions ? par le fait que les actionnaires qui sont propriétaires de cette entreprise puissent avoir un mot à dire. Donc, en tout cas, je tenais à faire cette rectification.

M. Audet (Michel): Vous ne me posez pas de questions, mais je vais quand même répondre.

Le Président (M. Paré): M. Audet. Puis vous connaissez bien, je pense bien, General Motors...

M. Audet (Michel): Oui, oui!

Le Président (M. Paré): ...vous étiez sous-ministre à l'époque où l'Industrie et du Commerce a signé ce contrat-là.

M. Audet (Michel): Oui, oui, oui, tout à fait, vous avez raison. Et lorsque, effectivement, les emplois ont pu être prolongés d'un certain nombre d'années, et ça a toujours été une décision difficile chaque fois. Ça revient régulièrement. Je pense que.. Je ne parlerai pas du dossier de General Motors parce que c'est un cas d'espèce et, d'autre part, je pense qu'il faut respecter le fait que, si ce n'est pas rentable pour l'entreprise, un jour ou l'autre ils doivent prendre leur décision. Donc, ce n'est pas à moi à commenter cette décision-là.

n (15 h 50) n

Ce que je voulais noter là-dedans, c'est que les PME, donc, ont des dynamiques, comme on le mentionnait tantôt, qui déjà sont assez lourdes. Vous parliez tantôt de notions de ressources naturelles, etc. Effectivement il y a... Ce qu'on dit, c'est que, là-dedans, il y a déjà une encadrement de lois et de règlements. J'en sais quelque chose, là, j'ai déjà été aussi sous-ministre aux richesses naturelles. Il y a déjà un paquet de lois et des règlements qui encadrent l'exploitation des ressources naturelles, qui encadrent un... Alors donc, il faut...

Ce que l'on a en tête, là, ce que vous avez en tête, ce que vous mentionnez, c'est, au fond, l'utilisation ou l'investissement que font les caisses de retraite particulièrement dans des investissements dits, disons, plus sociaux ou qui sont à rentabilité sociale, etc.

Moi, je mets en garde les gens contre ça, pas parce que ce n'est pas souhaitable, je pense que c'est bon que les caisses de retraite évoquent ça, mentionnent ça, mais il faut se rendre compte que les gens qui ont investi dans les caisses de retraite... Je pense à la Caisse de dépôt qui est notre patrimoine national. Est-ce que... Si la Caisse de dépôt met une note de pied, à la fin de l'année, pour dire: On en a fait, des investissements, dans le domaine social, mais, en fait, notre portefeuille en a souffert de 1 milliard, je ne suis pas sûr que les investisseurs québécois vont être contents. Si c'est à coûts constants ou comparables, j'achète 100 %, mais s'il y a un prix à payer, en quelque sorte, pourquoi eux paient ça? Ce n'est pas son argent, c'est l'argent des gens qui ont investi là-bas.

Et ça, ça m'amène un peu à faire un commentaire, que, toute cette disposition-là, au siècle dernier, les propriétaires d'entreprise, les chefs d'entreprise étaient les propriétaires. Ils avaient créé des entreprises, ils ont créé des fondations. Ils donnaient leur argent. Quand vous avez affaire à des entreprises qui ont un actionnariat très large, les propriétaires de l'entreprise, ce sont les actionnaires ? je regrette de le dire ? et c'est eux qui sanctionnent ? puis on voit qu'ils sanctionnent brutalement ? quand les attentes ne sont pas... Et ça, ce n'est pas juste des gros, là. Il y a des caisses de retraite mais il y a des petits. Ils ont les mêmes réactions, hein. Tout le monde est pénalisé actuellement. Donc, il ne faut pas...

Je pense que ce serait facile de dire, trop facile de dire: Bien là, il faudrait qu'il y ait un pourcentage du portefeuille consacré à ces investissements-là. Tant mieux s'il y en a, tant mieux qu'on l'évoque. Moi, je n'ai pas d'objection que ça se fasse sur une base que les... D'ailleurs, il y en a qui le font, soit dit en passant, puis j'étais récemment à un tournoi avec une firme que je ne nommerai pas mais qui est un importateur important de café puis qui s'est associé justement avec un groupe, une ONG du Honduras pour, justement, mettre sur le marché un café éthique, ni plus ni moins, équitable, donc, effectivement, et qui permet à 200, 300 communautés du Honduras de vivre mieux. Bravo. C'est parfait. Puis ils vont... Ça, c'est même très bon. C'est son intérêt, bien compris. Donc, je ne peux que... Je suis 100 % d'accord. Je participe à cet événement-là.

Mais de là à dire: Est-ce que, par exemple, on doit mettre des critères ou des règles dans les fonds de pension pour, en quelque sorte, forcer ou modifier la façon dont est composé le portefeuille? Moi personnellement, je pense qu'il faut y penser à deux fois parce que, encore une fois, c'est les consommateurs et c'est eux qui paient. Ce sont... Les bénéficiaires, ce sont ceux qui ont mis leur argent là, et il faudrait leur poser la question avant de le faire, puis je suis convaincu que... Je sais à peu près quelle réponse ils vont donner. Ils vont dire: Écoute, moi là, c'est mon argent. Si elle rapporte moins là, je vais la mettre ailleurs. C'est ça, finalement, que les individus attendent d'un régime de retraite.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Audet. M. le député de Lac-Saint-Jean, c'est terminé?

M. Tremblay: Bien, en fait, c'est... On a l'air à ne pas être d'accord mais on l'est très, en fin de compte. Actuellement, là, lorsque vous parlez de rendement, je pense que, lorsqu'on regarde les rendements des caisses de retraite qui investissent, socialement responsables, on a parfois des rendements supérieurs parce que, justement, les entreprises qui adoptent des comportements socialement responsables bien souvent sont des entreprises responsables et qui ont une vision à long terme, et ça, je pense que tout le monde se rejoint là-dessus, donc.

Mais quand on parle d'inciter les administrateurs de caisses de retraite à plus de transparence, on n'obligera personne... En tout cas moi... Parce que personnellement, en étant à Ottawa, j'avais travaillé sur un projet de loi qui n'obligeait absolument pas l'investissement socialement responsable mais qui, par plus de transparence, suggérait aux propriétaires de ces argents-là de dire: Bon, bien moi, je veux, j'ai le droit de savoir où est investi mon argent et si cet argent correspond à mes valeurs. Donc, la nuance, elle est là, et il est absolument hors de question de forcer qui que ce soit à faire de l'investissement socialement responsable. Fin du commentaire.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député. M. Audet, voulez-vous ajouter ou madame? Madame.

Mme Marchand (Louise): Bien, en fait, vous avez très certainement lu dans le mémoire que les propos que la Chambre a tenus s'appliquent autant aux grandes qu'aux petites, et, bon, je pense que, quand on a regardé le document qui a été livré en consultation, on a une approche globale de ce qu'est la responsabilité sociale des entreprises, et on y greffe la variable de l'investissement socialement responsable, qui sont interreliées, comme le document le dit très bien, d'ailleurs. Or, c'est dans cette perspective-là.

Mais les commentaires qu'on vous a faits valent autant pour la grande que pour la petite, et souvent, d'ailleurs, les gestes, les actions sont pris davantage par les plus grandes entreprises. Alors... Et tout ce qu'on essaie de vous dire, c'est qu'il faut faire attention: le tissu socioéconomique du Québec est particulier, et si le gouvernement songe éventuellement, à la suite d'un rapport que ferait cette commission, à intervenir, il faut moduler, à la limite, selon la capacité des entreprises à supporter un certain nombre de choses, et au Québec... C'est pour ça qu'on vous a cité des chiffres, que, de toute façon, vous êtes à même d'avoir autant que nous, là.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Marchand. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Pelletier (Abitibi-Est): Merci, M. le Président. Mme Marchand, M. le président. On vit dans un monde de promotion, promotion, entre autres, des idées, et c'est tout à fait correct. Je pense que c'est le fondement de la démocratie, que chacun fasse la promotion des idées: c'est ce qu'on fait aujourd'hui en commission parlementaire, c'est ce qu'on fait à l'Assemblée nationale, la promotion des idées de toutes sortes, de toutes formes.

Mais, c'est comme dans tout ce qu'on fait, on recherche toujours un équilibre. Lorsqu'on fait la promotion d'une bonne idée, bien là, c'est une question de génie, puis lorsqu'on se rend compte que l'idée est moins bonne, ça a souvent des conséquences difficiles. Je pense, entre autres, à la dernière année où, spécialement aux États-Unis, on a fait... je ne dirais pas la dernière année, mais on a vécu un vent de promotion d'idées, je dirais, de droite, d'idées de moins de gouvernement, moins de réglementation, et, au cours des derniers cinq ans, cette idée de ? puis elle est encore très vivante aujourd'hui ? moins de gouvernement, moins de réglementation, ça a eu des effets.

Vous avez dit tantôt que les grands désastres financiers aux États-Unis, que ce soit WorldCom, Enron, au niveau des épargnes ici ? Nortel est dans ce groupe-là aussi ? vous avez mentionné que ce n'était pas beaucoup important en nombre. En nombre, c'est vrai, vous avez raison, mais en masse monétaire et en argent perdu, c'est de l'argent en tiguidou. Maintenant, les États-Unis qui véhiculent ? le président actuel des États-Unis le fait puis le fait toujours ? véhiculent moins de gouvernement sont aujourd'hui même après faire de la réglementation pour réglementer un peu plus les grandes entreprises capitalistes. Donc, le promoteur de moins de gouvernement, il est aujourd'hui à écrire de la réglementation qui va dans le sens contraire de ce qu'il a créé au cours des dernières années.

Donc, ne pensez-vous pas qu'on a peut-être été un peu trop loin dans rien faire ou moins faire, en tant que gouvernement, ce qui a créé des désastres financiers qu'on a seulement qu'effleurés le dessus, là? Parce qu'on parle des grosses affaires, WorldCom, Enron; ici, au Canada, on ne parle que, peut-être, de Nortel, mais il y en a beaucoup d'autres qu'on parle moins. Moi, je sais qu'on ne parle pas de Safeguard, aux États-Unis, mais ça a dégringolé, au niveau de l'action, la même chose que WorldCom, la même affaire. Donc, est-ce que vous ne pensez pas qu'on a peut-être été trop loin, vu qu'on est obligés aujourd'hui de les réglementer pour éviter que ça se reproduise?

Le Président (M. Paré): M. Audet.

M. Audet (Michel): Si vous me permettez, je pense qu'il y a eu deux mouvements qu'il faut quand même distinguer: il y a eu le mouvement de la bulle spéculative, qui s'est emparé des consommateurs en général et des investisseurs, hein, puis tout le monde y a été un peu partie à ça. Et bien sûr que les entreprises ne criaient pas en disant: Écoute, n'investissez pas, ce n'est pas bon. Il y avait évidemment une complicité de bien du monde pour dire que les données sont bonnes. Et on avait des gens qui allaient jusqu'à raconter, puis on se le faisait tous dire: ce n'est pas important, même, qu'une entreprise, même, commence à produire; ce qui est important, c'est qu'elle ait un plan puis qu'éventuellement elle veuille faire des choses dans cinq ans ou dans 10 ans. Puis on achetait des «futures», hein? C'est un peu ça qui s'est passé. Donc, beaucoup de monde s'est laissé emporter dans cette bulle-là.

n (16 heures) n

Ça, c'est le propre, évidemment, de l'appât du gain. Et je pense que, là-dessus, le président de la fédérale américaine, le Federal System, M. Greenspan, a été très dur. Il l'a dit effectivement: Finalement, les gens qui ont été trop gourmands, qui ont été trop avaricieux se sont faits, eux-mêmes, prendre à leur propre jeu, parce qu'effectivement c'est bien beau de vouloir escompter des revenus, mais la base de l'entreprise n'était pas là. C'est une entreprise qui ne produit pas, qui n'a pas des résultats... qui n'a pas une base solide, bien, évidemment, un jour ou l'autre, ça éclate et ça a éclaté. La bulle a éclaté.

Donc, ça, ça fait... Il faut distinguer cet aspect-là d'entreprises qui ? peut-être lié à ça ? ont maintenu des pratiques elles-mêmes non transparentes qui ont faussé des données pour justement peut-être tirer avantage. Là, c'est un autre facteur et, ça, je pense que, quand on parle tantôt de... et c'est ça qui est en train d'être réglementé, avec raison, aux États-Unis. Et qu'est-ce qui touche, en passant, les compagnies canadiennes, hein, soit dit en passant? Toutes les compagnies canadiennes qui transigent sur la Bourse sont touchées de la même façon, doivent remettre les mêmes rapports, parce que ça touche toutes les entreprises. Donc, essentiellement toutes les grandes entreprises canadiennes, les 100 plus grandes, sont sur le Dow Jones. Elles doivent aussi faire les mêmes rapports, donc, par ce biais, là, et je pense que c'est très heureux qu'il en soit ainsi. Ils doivent soumettre des rapports, attester des rapports, renforcer justement les sanctions pour les gens qui faussent les rapports, parce que c'est de la fraude et il faut le dire et, là, je pense qui là-dessus ça a été très clair.

Alors, moi, sur ce plan-là, je trouve que, la réaction, elle est tout à fait correcte. Elle est correcte aux États-Unis. Au Canada, la question se pose: Est-ce qu'on doit le faire ou pas? Je pense que déjà on a un bon cadre de règlement. Je ne suis pas sûr, moi, personnellement, que ça ajouterait beaucoup, beaucoup de choses, mais, s'il le faut, faisons-le, parce que, là-dessus, moi, je suis sans pardon pour les gens qui fraudent. Je vais être très clair là-dessus.

Par contre, le marché, lui, c'est autre chose. La situation de marché, les gens, ils se sont tous fait prendre. On s'est tous fait prendre un jour ou l'autre en pensant faire un bon coup puis finalement, ça s'est avéré être l'inverse. Parfois, on en fait des bons, parfois on en fait des moins bons. Ça fait partie du marché puis le marché punit sévèrement dans ce temps-là, parce que, quand il y a seulement des vendeurs, bien, évidemment, les actions, elles chutent puis elles chutent rapidement.

Alors, moi, je pense qu'il faut distinguer les deux. Je suis d'accord avec vous, mais, en même temps, il faut distinguer les deux phénomènes. Il y a un phénomène d'une bulle spéculative qui s'est dégonflée qui, elle, est liée carrément à un phénomène... Et puis il y en a un autre qui était des cas où des gens ont posé des gestes délibérés pour fausser les données pour manquer à la transparence. Ceux-là méritent évidemment d'être condamnés. Alors, il ne faut pas mettre nécessairement tout le monde dans le même panier, là. Je ne voudrais pas que tout le monde qui a connu toutes les actions des entreprises, qui ont connu des baisses, soient considérés comme ayant été l'objet de fraude, là. En tout cas, dans mon esprit... dans mon livre, à moi, ce n'est pas ça qui s'est passé.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Audet. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Pelletier (Abitibi-Est): Oui. M. Audet, j'aurais une petite question. Moi, je fais une différence entre deux sortes d'investissement. L'investissement institutionnel, entre autres, des caisses de retraite, en d'autres mots, des masses monétaires très considérables dont l'actionnaire n'a pas ou peu de contrôle, là, le petit épargnant ? en bout de ligne, il n'a pas grand chose à dire ? et aussi, l'autre masse très importante d'épargne ou d'investissement que tu décides toi-même. Tu décides d'acheter des actions en Bourse. Tu décides de prendre des fonds mutuels. C'est des décisions que tu prends toi-même. Ça, c'est un secteur d'activité. En d'autres mots, si tu veux prendre des risques pour faire des gros gains, bien, c'est toi-même qui le risque.

Mais, quand on tombe dans des gros fonds de retraite, comme on connaît, il me semble que, là, il y a prudence à prendre pour... puis je n'ai pas peur de surréglementer quand c'est l'argent des autres. Quand tu joues avec l'argent des autres, est-ce que vous n'êtes pas d'accord qu'on doit avoir une réglementation plus serrée? Puis, pour le reste du monde qui veulent faire ce qu'ils veulent avec leurs argents, on est dans un pays libre. Mais, quand ce n'est pas ton argent, tu dois avoir des limites, des «guidelines» pour éviter ce qui est arrivé encore toute l'année. La Caisse de dépôt, elle a placé elle aussi dans des «blue chip» et puis son rendement n'est pas fort. Puis, plein de gens bien intentionnés ont placé... ceux qui ont placé individuellement, bien, ils ont pris leur décision. Mais ceux qui se retrouvent dans des fonds de pension de toutes sortes, là, que tu sois municipalité, commission scolaire, Caisse de dépôt ou etc., cette partie-là ne trouvez-vous pas qu'elle doit être réglementée puis, au besoin, la réglementer encore?

Le Président (M. Paré): M. Audet.

M. Audet (Michel): Écoutez, d'abord évidemment, on a tous des fonds de pension à gérer. On a en a un, nous, même dans notre propre organisation et les chiffres sur cinq ans sont bons. Sur un an ou deux ans, ils sont mauvais. Est-ce que c'était normal pendant une année qu'ils augmentent de 20 %? La réponse, c'est non. Ce n'est pas... Est-ce qu'on peut soutenir 20 % de croissance, 18 ou 20 % de croissance de rendement indéfiniment? La réponse, c'est non. La croissance économique, en général, est de 4, 5 %, donc... Les taux d'intérêt étaient de 3, 4, 5 %, est-ce que c'était tenable à long terme? Ça ne l'était pas.

Alors, quand c'était à 20 %, on était tous très heureux, mais quand les fonds, en général, ces fonds-là sont des fonds équilibrés, et à long terme, bien ils font des rendements qui s'approchent plus de 6, 7 % que de 20 %. Il y a eu des années où ils ont fait 20, mais là ils ont fait moins 5 ou moins 10, ça va se rétablir. C'est pourquoi actuellement les régimes vous donnent des chiffres qui sont sur cinq ans en disant que, sur cinq ans, ils sont encore finalement dans des... ils ont encore des rendements positifs et très satisfaisants.

Je pense qu'il faut aussi voir le phénomène un peu dans une perspective un peu plus longue, donc sur ce plan-là, et il y a déjà des règles très strictes, comme vous le savez. Les régimes de retraite en tout cas sont assujettis à des règles très strictes de la part de la Régie des rentes précisément. On doit se conformer à un paquet de règles déjà, et je pense que les gens qui gèrent ces régimes-là sont très conscients de ces enjeux-là. Je ne pense pas qu'il y ait... Mais il y a des catégories de risque, on peut choisir d'y aller ? plus risquées ? pour penser de gagner plus, mais c'est le choix aussi du groupe en question qui décide chaque année, dans sa réunion, dans quels types de fonds il veut... s'il veut un fonds équilibré ou s'il veut un fonds un peu plus à capital un peu risqué ou s'il veut un fonds d'obligations. Bien, il va avoir évidemment... il a à choisir, et ça aussi ça fait partie du choix, même si c'est des choix collectifs mais, ça aussi, c'est des choix qui sont faits.

Alors, moi, avant de proposer des réglementations additionnelles, je pense qu'il faudrait avoir une bonne lecture de la situation à long terme quand on aura un choix et non pas juste sur une année ou deux.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Audet. Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Alors, bonjour, M. Audet, Mme Lamarche. J'ai bien aimé la lecture de votre mémoire. Moi-même venant d'une région très entrepreneuriale, je comprends que, chez nous, comme ce doit être le cas ailleurs, les entreprises sont déjà socialement responsables en s'investissant dans leur communauté de toutes sortes de manières: en prêtant, en donnant, en fournissant des matériaux, en prêtant de l'équipement, même de la main-d'oeuvre, en donnant, en faisant des dons, et je sais que généralement, la plupart du temps, ces entreprises-là donnent avec beaucoup de générosité.

Je comprends aussi que... J'ai peut-être une petite anecdote pour vous dire que c'est probablement chose qui... ? vous dites: depuis 20 ans, 23 ans que vos mercures existent ? donc ce n'est pas d'hier là que les entreprises s'investissent dans leur communauté, donc sont socialement responsables. Et je peux vous dire que, moi, il y a 20 ans, en 1980-1981, j'avais justement proposé la candidature de l'entreprise pour laquelle je travaillais au niveau des Mercuriades et que ça portait justement sur l'implication communautaire et sociale de l'entreprise pour laquelle je travaillais. Juste une petite anecdote en passant.

Vous avez parlé que deux prémisses étaient importantes au niveau de la responsabilité sociale des entreprises au niveau de la Chambre de commerce, c'était le respect des lois. Et là-dessus je suis obligée d'être d'accord avec vous, il y a déjà 250 lois juste au Québec, 4 500 règlements, ça fait beaucoup de choses à respecter. Et c'est d'ailleurs très coûteux pour les entreprises, on parle d'un peu plus de 1 milliard par année comme coûts aux entreprises du Québec. Alors, c'est énorme. Alors, chaque fois qu'on parle d'ajouter une réglementation, moi, ça me fait pour le moins sourciller. En tout cas, je me permets d'examiner la question avec beaucoup de sérieux.

Vous parlez également de la rentabilité financière des entreprises, eh bien vous avez aussi raison parce que la seule façon de partager la richesse, c'est d'abord de la créer. Si on ne la crée pas, on ne peut pas la partager avec les autres, et une façon d'être socialement responsable, c'est de partager justement une partie de la richesse des entreprises.

Vous avez parlé beaucoup des PME, mais il y a une réalité au Québec, c'est qu'il y a deux types d'entreprises: d'abord, les entreprises qui sont complètement privées, qui sont généralement des PME, et vous avez des sociétés qui sont publiques, cotées à la Bourse. Je comprends que c'est peut-être plus compliqué pour une entreprise, une petite PME, d'avoir à s'ajouter des codes d'éthique et toutes sortes de choses, surtout quand elle a très peu d'employés. Mais ne seriez-vous pas d'accord à ce que les employés qui sont cotés en Bourse, qui sont régis par la CVMQ par exemple, aient à produire, comme c'est le cas aux États-Unis, un code de conduite qui les obligerait à divulguer s'ils font l'objet d'une amende, d'une poursuite judiciaire, si des lois environnementales pourraient affecter leur profitabilité? Est-ce que vous seriez d'accord à aller dans ce sens-là?

n (16 h 10) n

Le Président (M. Paré): M. Audet.

M. Audet (Michel): Écoutez, sans... Je pense que je vais laisser Me Marchand peut-être parler plus de l'aspect juridique. Mais, je crois que déjà... Vous savez que, lorsqu'une entreprise a des poursuites, le vérificateur externe de l'entreprise l'indique clairement dans une note que l'entreprise est poursuivie, qu'elle est susceptible d'un montant de tant ? même, il l'indique. Alors, donc il y a ? pour bien faire comprendre ? un passif éventuel et l'obligation est là, par le rapport des vérificateurs...

Mme Leblanc: L'obligation, moi, je ne pense pas qu'il y ait d'obligation.

M. Audet (Michel): De la part des vérificateurs externes. Je crois que pour... Les grandes entreprise, en tout cas, ont fait état des poursuites. On ne fait pas état nécessairement de tout ce qui se passe mais, s'il y a des poursuites officielles, je pense que... Et, en tout cas, j'ai vu des cas où les entreprises l'indiquent clairement.

Ceci dit, on avait travaillé, nous, dans ce contexte-là ? et je pense que ça rejoint un petit peu vos préoccupations ? avec justement Claude Béland et son fils et les jeunes chambres de Montréal et un groupe sur... On avait publié un livre justement sur la mission sociale de l'entreprise et... le bilan social de l'entreprise plutôt... de façon plus clairement: le bilan social de l'entreprise. Et, on a diffusé ce document-là aux entreprises pour, en plus de diffuser son bilan, qu'elles y annexent effectivement son information sur son bilan social. C'est, je pense, dans son intérêt. c'est bien compris, de faire mieux connaître. Et, je pense que ça, moi, je n'ai aucun problème à ce que les entreprises ajoutent de l'information additionnelle que vous mentionnez. Bon.

Est-ce qu'il faut en faire, encore une fois, de nouveaux règlements, de nouvelles obligations? Personnellement, je pense que là on va se trouver encore à faire... Évidemment, si vous mettez une obligation, ça veut dire des pénalités. Et il y a beaucoup de ces facteurs-là qui veulent dire qu'ils sont du domaine de l'éthique. C'est du domaine de l'éthique essentiellement. Et comment écrire dans une loi... décrire des comportements qui touchent à l'éthique? Je veux dire: Habituellement, les lois on dit ce qui est bien, on dit ce qu'on peut faire puis on dit ce qu'on ne peut pas faire. Mais, l'éthique comme telle, là, ce n'est pas évident de le décrire, hein, et surtout d'y mettre des sanctions parce qu'il y a beaucoup de choses à la marge.

Alors, ce qu'on préfère, nous, c'est plutôt de fournir aux entreprises... Et, ça, ça serait quelque chose qui pourrait être très bien fait , et je pense que nos organisations seraient prêtes à collaborer là-dessus pour travailler, pour fournir, par exemple, aux entreprises, un cadre sur un bilan social qu'elles pourraient présenter justement en annexe ou accompagnant leurs états financiers. Ça, moi, je pense que c'est quelque chose... Et on y a travaillé. On a un livre qui a été publié par Philippe Béland précisément et puis d'autres gens de la Jeune Chambre de Montréal. C'est un document que j'avais contribué même à financer à la Chambre donc justement sur le bilan social de l'entreprise. Alors, moi, je pense que c'est quelque chose qui pourrait être développé dans cette perspective-là, mais, encore une fois, sur une approche évidemment d'incitatifs ou sur une approche d'un intérêt bien compris des entreprises de fournir plus d'information.

Le Président (M. Paré): Merci. Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: M. Audet, vous dites que ça fait 23 ans déjà que la Chambre de commerce du Québec a un code, son propre code d'éthique en 18 points. Alors, si ça fonctionne bien et que vous en faites la diffusion, comme vous le dites auprès de toutes les chambres de commerce et de tous vos membres, quels résultats concrets... est-ce que c'est appliqué? Est-ce que vous avez un feedback? Est-ce que vous avez sondé à savoir si effectivement les entreprises qui sont membres des chambres de commerce respectent ce code-là?

M. Audet (Michel): Écoutez, clairement, on n'a pas fait d'enquête là-dessus, vous avez raison. Je pense que la réaction qu'ont beaucoup d'entreprises quand ils regardent ça, ils vont dire: Moi, je fais ça. Ça fait partie de ma vie normale, disons, peut-être sans trop s'en soucier. Mais, il y aurait, je pense ? et, ça, c'est quelque chose qui nous a frappés particulièrement quand on a vu le document ? intérêt effectivement à remettre... On a un congrès prochainement. J'ai l'intention de remettre à tous les participants et aux chambres participantes le document nouveau et le diffuser davantage. Parce que, sans être... je n'y ai pas participé moi-même quand il a été écrit, donc je peux dire très modestement: il est assez bien fait. Il couvre pas mal tous les aspects effectivement de la vie de l'entreprise et de son implication dans la communauté. Alors, c'est une suggestion qu'on va faire cette année précisément. Je pense que c'est une excellente suggestion. On a un congrès à Sherbrooke dans deux semaines. Donc, on va le diffuser à nos chambres et à nos membres effectivement et on va essayer d'avoir, par la suite... de faire un sondage pour voir comment ils réagissent. Je pense que c'est une suggestion que j'accueille avec beaucoup d'intérêt.

Mme Leblanc: Ce serait intéressant, M. Audet, d'autant plus que, si vous souhaitez que le gouvernement aille dans le sens de la promotion plutôt que par mesures coercitives obligatoires, alors ça serait intéressant de savoir si ce qui existe chez vous depuis 23 ans a eu des résultats ou si ça n'en a pas eu.

On va y aller avec justement ces codes d'éthique... la Chambre de commerce ou les entreprises, les PME ou la grande entreprise se dotent. On parle souvent que, dans les rapports financier, social et environnemental que font les entreprises ? d'une façon volontaire, on le rappelle ? et où encore les codes de conduite sont devenus à certains égards des déclarations qui sont rassurantes pour les actionnaires, que c'est souvent récupéré par des agences de marketing, et ça sert justement souvent de stratégie de mise en marché.

Alors, dans ce sens-là, si c'est exact, ce que je viens de vous dire là, comment on peut rassurer l'investisseur que, même avec un code volontaire ou encore un rapport financier, social et environnemental qui est fait de façon volontaire, ces informations-là sont exactes et sont appliquées au sein de l'entreprise?

M. Audet (Michel): Bien, je pense que, à partir du moment où l'entreprise prend l'engagement de signer ou de faire un bilan semblable, moi, je fais confiance aux médias pour vérifier si les affirmations sont exactes. Habituellement, ça fait partie... c'est le début de la sagesse, on a une société très médiatisée, on a des médias très alertes. Si une entreprise a des prétentions qui ne se vérifient pas dans la réalité, je suis sûr que ça va rebondir. Alors, là-dessus, je pense que je ferais confiance à la dynamique normale, disons, de l'information pour corriger les choses.

D'ailleurs, vous remarquerez que la plupart des dossiers qui sont sortis aux États-Unis et qui sortent encore, c'est vraiment suite à des... Finalement, il faut leur donner ça: les médias sont très fort là-dessus et parfois même font surréagir le marché dans un certain sens. Donc, sur ce plan-là, moi, je pense qu'il n'y a pas... enfin, je pense personnellement que l'information et une information correcte permet aux gens de porter un bon jugement. Et si le président s'est commis dans une information qui n'était pas correcte, il aura à payer le prix, hein. Il faut se rendre compte que le marché sanctionne fortement les gens qui mentent, hein, c'est très clairement... Il y a des gens qui paient un prix très élevé. Il y en a, on va dire, qui sont partis dans des bonnes conditions, malgré tout, là. Ça, je veux bien dire ça, mais il reste que le marché lui-même sanctionne fortement les entreprises qui ne fournissent pas de l'information exacte et parfois surréagissent justement parce qu'on punit littéralement les gens qui donnent de la fausse information.

Alors, moi, je pense que, à partir du moment... ce qui est important, et c'est pourquoi ? d'ailleurs c'est toute la crédibilité du système qui est en cause ? c'est pourquoi, moi, j'attache tant d'importance au fait qu'on sanctionne les gens qui donnent de la mauvaise information, qui ne sont pas transparents. Parce que toute la force du système, la capacité de notre système, notre capitalisme en fait nord-américain tient à ça, tient à la transparence de l'information et à la crédibilité de l'information financière qui est fournie. Donc, quand elle est fausse, les gens prennent des décisions sur de fausses représentations et en conséquence de quoi il y a quelqu'un qui doit être sanctionné.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Audet.

Mme Leblanc: M. Audet, vous ne croyez pas que les investisseurs seraient mieux protégés si des activités de surveillance justement des entreprises seraient réglementées, mieux structurées finalement?

M. Audet (Michel): Bien, elles le sont déjà beaucoup, hein. Vous savez qu'il y a déjà beaucoup d'organismes, à part les Bourses, les commissions de valeurs mobilières, il y a déjà... Au Québec, on est en train de réformer et d'intégrer justement tous les organismes de réglementation dans ce domaine-là. Donc, il y a déjà beaucoup de cette réglementation-là. Et, encore une fois, tous ceux qui sont sur le marché américain font partie en quelque sorte du bassin et sont visés directement par les mesures prises par le gouvernement américain. Moi, je pense que, avant de renforcer ou de développer de nouveau, il faut d'abord... on est en train justement de repenser notre système de réglementation, d'intégrer au Québec, là, les organismes qui réglementent, peut-être voir là-dedans si ça couvre tous les aspects. Ça, je veux bien, mais je ne vois pas pourquoi est-ce qu'il faudrait en ajouter à ce qui est déjà sur la table, il y en a déjà beaucoup, hein.

Mme Leblanc: C'est suffisant?

M. Audet (Michel): Oui.

n (16 h 20) n

Mme Leblanc: Maintenant... Voilà pour les entreprises. Mais abordons maintenant le sujet des organismes gouvernementaux tels que la Caisse de dépôt et de placement qui gère quand même 150 milliards de fonds, et ces fonds-là appartiennent aux Québécois et aux Québécoises qui n'ont à peu près pas leur mot à dire sur la façon dont la Caisse investit ces fonds, puisqu'il n'y a pas de mécanisme de prévu pour ça. Est-ce que vous ne croyez pas qu'un gouvernement devrait intervenir pour obliger la Caisse de dépôt et de placement à se doter d'un code d'éthique et d'une façon... pour les actionnaires qui sont les travailleurs québécois, pour être capables de s'ingérer ou d'avoir leur mot à dire dans les placements qu'effectue la CDP?

Le Président (M. Paré): M. Audet.

M. Audet (Michel): C'est une question très lourde qui ferait l'objet d'une commission parlementaire en soi. Il faudrait écouter les gens de la Caisse. Écoutez, je pense que la Caisse, comme les autres fonds de retraite, ont connu des revers ces dernières années, ont fait des mauvais placements. Il s'agit de savoir si c'est leur décision ou si la décision a été prise plus pour des fins politiques. Ça, c'est ça qu'il faudrait vérifier. Ceci dit, moi, je pense que, là, encore une fois, il y a un cadre de prévu à la Caisse, il y a un conseil d'administration. Personnellement, moi, en tout cas, j'ai salué l'arrivée du nouveau président et souhaité qu'il se donne un conseil d'administration formé de gens plus près de la gestion des... Je vais vous le dire comme je le pense, puisque ce n'est pas sujet d'actualité, mais je l'ai dit, donc je vais le répéter, ce n'est pas un sujet, c'est-à-dire de la conviction: On a mis à la Caisse de dépôt des gens qui sont là pour représenter un certain corporatisme. Pour être bien clair, on en est membre d'un corporatisme, mais ce n'est pas vrai que quelqu'un doit être à la Caisse de dépôt parce qu'il est président d'une centrale syndicale, pour être bien clair. Ce n'est pas vrai que les gens sont nécessairement mieux représentés. Moi, je pense qu'il faut revoir la composition de la Caisse pour y mettre des gens justement qui ont une indépendance d'esprit là-dessus, qui ne prendront pas des décisions en fonction des intérêts des membres qui déposent nécessairement là, mais en fonction des intérêts de l'ensemble des déposants pour s'assurer que ce soit le meilleur rendement possible pour tous les déposants.

Alors, je ne dis pas que c'est à cause de ça que des décisions ont été mal prises, mais je pense que si j'avais un voeu à exprimer, je pense qu'il faut revoir effectivement... et je pense que Jean-Claude Scraire a fait de bonnes propositions en partant, sur les faits d'abord d'avoir une double... un président du conseil et un P.D.G.; deuxièmement, de reforme et restructurer le conseil d'administration, Personnellement, je souhaite que le prochain président donne suite parce que c'est... Puis, troisièmement ? et ça, je pense que ça a été évoqué ? qu'il y ait peut-être plus de transparence dans l'information donnée au public qui sont finalement les déposants là-bas, quoique la Caisse donne déjà, dans ses rapports... si vous lisez les rapports, il y a déjà pas mal d'information. Il y en a déjà quand même beaucoup, mais si les gens ne sont pas assez informés, je sais qu'il y a le Vérificateur général qui veut y aller. Ça, ça fait des années. C'est un dossier, vous savez, qui ne date pas d'hier, enfin depuis 1965 que la Caisse existe, depuis 1965 que le Vérificateur général demande de faire la vérification des comptes. Alors, je pense que c'est quelque chose qui mérite d'être étudié, regardé. Il y a du pour et du contre. Alors, là-dessus, je ne peux pas me prononcer ayant été déjà des deux côtés de la barrière, j'aime mieux laisser les gens porter une décision en toute objectivité.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Audet.

Mme Leblanc: On sait tout simplement que des filtres d'investissements, c'est déjà utilisé par d'autres organismes qui font la même chose que la Caisse de dépôt et placement. On peut penser à CALPERS aux États-Unis qui gère quand même le fonds le plus important. On peut parler de Teachers' en Ontario. Alors, pourquoi, au Québec, nous, on ne pourrait pas se doter de la même chose qu'eux, à savoir qu'on aurait un code d'éthique par lequel les investisseurs qui n'ont pas un mot à dire présentement dans l'utilisation des fonds, comment ils sont investis, alors, pourquoi on ne pourrait pas au moins avoir ce code d'éthique là qui nous dirait: c'est dans ce sens-là que la Caisse de dépôt va utiliser les fonds et pas autrement?

M. Audet (Michel): Moi, je trouve que c'est une excellente suggestion. Personnellement, je ne vois aucune objection à ce que la Caisse adopte ça d'elle-même en fait. Je ne verrais pas pourquoi elle n'en fait pas elle-même la proposition, c'est à son avantage même que les gens aient davantage confiance à son comportement et à son éthique. Je suis convaincu que, à la Caisse, il y a des gens qui doivent y penser.

Mme Leblanc: Merci.

Le Président (M. Paré): Alors, ça conclut notre discussion. Merci de votre contribution. Parfait.

M. Tremblay: Bien, ça va un peu dans le même sens que la question de ma collègue. On n'en a pas beaucoup parlé mais, quand on parle d'investissement socialement responsable, on parle aussi d'activisme actionnarial. Et je suppose que la Chambre de commerce n'est certainement pas contre le fait que, par le fait que, comme par la Caisse de dépôt ou des véhicules de placement, des caisses de retraite, nous devenons... il est impossible de s'ingérer dans des entreprises à l'extérieur du pays, à l'extérieur du Québec, et ainsi, critiquer des actions d'entreprises dans d'autres pays. Et éventuellement, si une multinationale européenne ou américaine venait faire des choses qui n'ont pas de bon sens ici et que le Québec ne serait pas capable de réglementer, bien, on aura un autre levier, par l'activisme actionnarial, par nos actions dans cette multinationale, par exemple, d'aller sur le parquet de l'assemblée des actionnaires, et ainsi, critiquer ou éveiller l'attention médiatique sur des exagérations de multinationales.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Merci, M. Audet, merci, Mme Marchand, de votre contribution à cette commission.

J'inviterais M. Pierre Desrochers à s'avancer, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Paré): Bonjour, M. Desrochers. Bienvenue à la commission. Merci. Maintenant, vous aurez 10 minutes pour présenter votre mémoire et 20 minutes d'échange avec les parlementaires. Ça fait que: bienvenue. Allez-y.

M. Pierre Desrochers

M. Desrochers (Pierre): Bon. Alors, mon nom est Pierre Desrochers. Je suis directeur de la recherche à l'Institut économique de Montréal mais je présente aujourd'hui mon mémoire à titre personnel. L'Institut économique de Montréal, comme vous le savez peut-être, est un «think tank» qui s'intéresse aux questions de politique publique. On est surtout connus pour notre bulletin des écoles secondaires qu'on présente dans L'actualité, mais enfin.

Merci de m'avoir invité à présenter le mémoire aujourd'hui. Mon mémoire est essentiellement philosophique dans la mesure où je voulais défendre un point de vue que je ne m'attendais à voir défendu ici, c'est-à-dire qu'il n'y a pas vraiment d'opposition entre la recherche du profit et la protection de l'environnement. Je traite d'autres thèmes mais, vu que j'ai 10 minutes, je vais traiter de ça surtout. En fait, ce que je dis donc, c'est que ce qui est bon financièrement est bon pour l'environnement, et je crois que ce qui sous-tend le mémoire un peu ne comprend pas vraiment cette logique-là. Alors, c'est ce que je voudrais essayer d'expliquer dans les prochaines minutes.

D'abord, votre document de consultation est bien fait, mais je crois qu'il présente une vision qui a deux problèmes. La première, c'est que vous parlez strictement de profits, alors que, d'un point de vue plus philosophique, notre système d'économie de marché est caractérisé par un système de profits et de pertes. Bon, évidemment, c'est de l'évidence, mais je vais y revenir plus loin.

Vous parlez aussi beaucoup de lois et de cadres réglementaires des entreprises mais vous ne parlez pas vraiment de la notion de droit de propriété privée qui implique que les entreprises bénéficient des retombées positives de ce qu'elles font, mais elles sont à la fois responsables de leurs actions nocives. Donc, en gros, ce que je vais soutenir, c'est que la recherche du profit est toujours la meilleure forme d'investissement responsable, pour l'environnement, pour les individus, etc.

Mon mémoire a quatre sections, bon. D'abord, je parle de la recherche du profit puis du bilan social; ensuite, de la recherche du profit et du bilan environnemental; des risques de la responsabilité sociale; ainsi que les grandes lignes de ce que devrait faire le gouvernement. Je vais me concentrer surtout sur la deuxième portion, c'est-à-dire la recherche du profit puis le bilan environnemental.

Si vous voulez, à la page 2, je ressors la citation que vous connaissez sûrement, la célèbre d'Adam Smith: La main invisible du marché. Ce que dit Adam Smith, dans le fond, au XVIIIe siècle, c'est qu'il est contre l'idée un peu qui est représentée dans votre mémoire qui existe depuis des milliers d'années, c'est-à-dire qu'on ne peut pas promouvoir l'intérêt individuel puis faire le bien pour l'ensemble de la société.

n (16 h 30) n

Alors, l'économie apparaît; Adam Smith vient puis dit: Non, c'est le contraire; en fait, la recherche du profit, c'est une bonne chose, parce qu'on s'assure que l'égoïsme des individus est utilisé à bon escient. L'exemple qu'il utilise historiquement, c'est de dire: Dans le fond, si j'ai du pain puis de la viande sur ma table, ce n'est pas parce que le boucher et le boulanger m'aiment, mais simplement parce que la recherche du profit les amène à me servir. Et ce que dit Adam Smith ? et, dans le fond, il répond déjà à certains des arguments qui sont soulevés dans votre document, c'est le deuxième paragraphe ? c'est que, tout en ne cherchant que son intérêt personnel, l'entrepreneur, donc, travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société que s'il avait réellement pour but d'y travailler. Il ajoute ? et ça, c'est écrit en 1776: «Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient dans leurs entreprises de commerce à travailler pour le bien général aient fait beaucoup de bonnes choses.»

Ça, si vous voulez, dans le fond, c'est un peu le point de vue des économistes; et une chose qu'on ne comprend pas souvent, c'est que c'est vrai aussi pour l'environnement. Si vous allez à la page 7, en fait, j'explique comment, historiquement, la recherche du profit puis le mécanisme des profits et des pertes ont eu des conséquences environnementales positives. Qu'est-ce que c'est, dans le fond, le profit puis les pertes? C'est de s'assurer que, dans un monde où les gens veulent toujours plus, où les besoins sont toujours illimités, mais peu importe le niveau de développement, où on a des ressources limitées, le système de profit puis des pertes nous assure que nos ressources limitées sont utilisées au meilleur escient. Donc, si une entreprise fait des profits, elle répond à la demande des consommateurs; si une entreprise fait des pertes, dans le fond, elle gaspille des ressources rares, et ce que le marché dit à cette entreprise-là, c'est: Non, arrête de gaspiller, revois tes opérations ou sinon ferme tes portes puis libère tes ressources pour des activités qui vont vraiment répondre aux besoins des gens, aux besoins des consommateurs. Dans le fond, le système des profits nous assure que, dans une économie, ce n'est pas les entreprises qui mènent, ce sont les consommateurs.

Alors, comment est-ce que ça se traduit au niveau de l'environnement? Je vous ai donné trois exemples, un peu, qui résument la dynamique. Encore une fois, c'est une perspective plus large, mais je croyais que ce serait utile dans le contexte de la commission.

Le premier, c'est la sauvegarde des baleines. Quand on parle des baleines et du fait qu'on en a encore aujourd'hui, on pense surtout à Greenpeace puis aux actions des 30 dernières années. Mais, en fait, ça n'a rien à voir. Il faut remonter à il y a plus de 150 ans. Pour les amateurs de hockey ici, vous vous souvenez sans doute qu'il y avait une équipe de hockey au Connecticut, à Hartford, qui, avant de déménager en Caroline, s'appelait les Whalers. Pourquoi est-ce qu'ils s'appelaient les Whalers? Parce que, à l'époque, au XIXe siècle, les États-Unis avaient la plus grande flotte baleinière au monde. Ils étaient tellement efficaces qu'ils ont presque complètement détruit les baleines au XIXe siècle. En fait, lorsque la chasse des baleines a arrêté, vers 1850, il en restait pour à peu près l'équivalent de quatre saisons de chasse. Il y aurait eu quatre autres saisons à l'époque, puis on n'aurait plus de baleines aujourd'hui ou, en tout cas, plus des espèces qu'on aime, qu'on voit ici, les baleines bleues, les autres, etc.

Mais qu'est-ce qui a arrêté ça, la chasse des baleines à l'époque? C'est le système des profits. Pourquoi? Parce que l'huile de baleine était le meilleur combustible que les gens avaient à l'époque, mais il restait tellement peu de baleines puis la demande était tellement forte que le prix du baril, en dollars d'aujourd'hui, était de 137 $US, soit environ six fois plus que le prix du baril de pétrole à l'heure actuelle. Donc, voyant qu'il y avait des possibilités de profits énormes à faire là-dedans, plusieurs entrepreneurs, notamment Rockefeller, Edison, dans le domaine de l'électricité, puis d'autres ont décidé d'investir beaucoup pour trouver des substituts à l'huile de baleine. Et le résultat, c'est qu'aujourd'hui on a toutes sortes de substituts en termes d'énergie, on a l'hydroélectricité, on a toutes sortes de choses qui ont remplacé ça. Et pourquoi est-ce que ça a eu lieu, pourquoi est-ce que cette transition-là a eu lieu? Parce qu'il y avait Greenpeace en 1850? Non, parce que le système des profits disait qu'il y avait beaucoup d'argent à faire si on développait des substituts à l'huile de baleine. Donc, enfin, c'est un exemple parmi d'autres, mais c'est souvent le cas dans l'économie des ressources naturelles. Pourquoi est-ce qu'aujourd'hui on a tellement plus de ressources naturelles que dans le passé puis que les réserves de pétrole augmentent au lieu de diminuer? Parce que c'est rentable de penser à long terme puis de planifier puis de trouver des substituts.

Un deuxième exemple qui devrait toucher un peu notre fibre québécoise, c'est la question des forêts. On entend souvent des manchettes au Québec comme quoi la forêt est en train de disparaître. Or, c'est faux. Il y a quelques mois, Le Devoir, par exemple, faisait sa première page en disant que 2 % des boisés de la Rive-Sud de Montréal étaient en train de disparaître, nos entreprises ne pensent pas à l'avenir, la gestion est mauvaise. Or, en fait, en Amérique du Nord, on a plus d'arbres maintenant qu'on n'en avait en 1920, et puis le couvert forestier de l'Amérique a augmenté de 10 % depuis 10 ans. Puis si vous traversez la frontière ? et c'est ce que j'indique à la page 9 ? au Vermont, en 1850, vous aviez 37 % de la superficie de l'État qui était couverte de forêts; aujourd'hui, c'est 77 %. Donc, vous avez deux fois plus de forêts au Vermont qu'il y a 150 ans. Le New Hampshire, c'est à peu près la même chose: c'est passé de 50 % à 87 %. Pourquoi? Est-ce que c'était rentable de détruire les forêts? La même chose: le prix du bois devenait plus dispendieux, les gens avaient de la misère à se chauffer, on consommait beaucoup de bois. On a développé des substituts: on a développé le charbon, on a développé le pétrole, on a développé les poutres d'acier, on a développé les plastiques, etc.

Une autre invention qui a eu des retombées bénéfiques aussi, encore une fois qui a été faite pour la recherche du profit, c'est l'invention de l'automobile. Ce qu'on oublie ? à l'époque ? c'est qu'en 1910 il y avait environ 25 % de la surface agricole aux États-Unis qui servait à nourrir les chevaux de trait, les chevaux puis les autres animaux de trait. Ça coûtait cher, ce n'était pas un usage efficace des terres. Mais le développement du pétrole a permis de développer l'automobile. Du jour au lendemain, en quelques années, 25 % de la surface agricole des États-Unis est redevenue des forêts.

La même chose depuis 40, 50 ans, le développement des rendements agricoles a augmenté de façon considérable: on produit aujourd'hui beaucoup plus sur une petite superficie ou sur une même superficie qu'on ne produisait à l'époque. Par exemple, au cours des 200 dernières années, on en est arrivés à produire environ huit fois plus de blé sur la même quantité de terrain. Pourquoi? Parce que c'est toujours plus rentable d'agir de la sorte. Donc, la recherche du profit fait qu'on fait toujours plus avec moins, on développe des ressources avec des sous-produits, et ça permet, au bout du compte, d'avoir des retombées environnementales bénéfiques.

Page 6, la question de la pollution qui est un peu plus controversée. Même chose, la pollution aujourd'hui est beaucoup moins importante dans nos sociétés que par le passé, peu importe les indicateurs que vous regardez: l'air, l'eau, les particules en suspension, peu importe, la tendance est à la baisse depuis très longtemps. Pourquoi? Bien, comme je l'explique un peu plus en détail dans mon papier, c'est parce que, dans le fond, la pollution, les entreprises ont toujours compris que c'était du gaspillage et que le gaspillage n'était pas payant.

Donc, je mets une citation d'un ingénieur français en 1905 qui a écrit une petite brique d'environ 450 pages sur l'art de faire du recyclage avec les produits industriels. Puis, qu'est-ce qu'il dit? À la page 11, ici, dernier paragraphe: «...dans bien des circonstances, il est possible d'employer les déchets et les résidus soit comme combustible, soit comme engrais, soit dans l'alimentation des animaux, soit aussi pour en retirer, par un traitement approprié, des matières ayant une valeur appréciable.» Il n'est donc pas nécessaire ? ce que je soutiens à la page 12 ? de promouvoir une forme particulière d'investissement responsable en matière d'environnement car il n'y a jamais eu de conflit entre la rentabilité des entreprises et une meilleure conduite environnementale. Les entreprises les plus rentables ont toujours été les plus respectueuses de l'environnement.

Je vais sauter la question des conséquences néfastes, la responsabilité sociale, sinon pour dire qu'aujourd'hui on a souvent des notions de politiques environnementales qui ne résistent pas à l'analyse, comme par exemple les politiques de recyclage à la ville de Montréal qui sont déficitaires. Il serait beaucoup plus écologique d'avoir des incinérateurs qui convertiraient ces produits-là en sources d'énergie plutôt que de faire qu'est-ce qu'on fait puis de continuer de faire des déficits. Mais on le fait parce qu'il y a une perception, qui est bien répandue, que le recyclage est bon pour l'environnement, ce qui n'est pas toujours le cas.

Donc, en conclusion. Que doit faire le gouvernement? La première recommandation, c'est de ne plus fausser le mécanisme des prix, les profits et les pertes. Donc, qu'il analyse l'intérêt particulier vers l'intérêt général. Arrêtons de donner des subventions, des mesures de soutien ou de mettre des barrières aux échanges entre les entreprises.

Deuxièmement, définissons mieux les droits de propriété privée. C'est une question juridique que je laisse un peu en plan, mais évitons de faire les erreurs qu'ils font aux États-Unis où, en voulant bien faire, souvent on crée toutes sortes de coûts puis toutes sortes de barrières au recyclage et aux activités novatrices.

Et troisièmement, lorsqu'on décide de faire des politiques environnementales, intervenons sur la base d'analyses scientifiques solides plutôt que sur des perceptions répandues mais fausses.

Donc, en dernière analyse, la logique économique et l'examen des données objectives nous amènent à conclure que la recherche du profit dans le contexte de droit de propriété privée bien défini est la garantie la plus sûre que les corporations agiront dans l'intérêt général, tant au niveau social que de l'environnement. Il n'est donc pas nécessaire de créer un nouveau cadre réglementaire ou de demander aux entreprises d'assumer de nouvelles responsabilités à l'égard de la société et de l'environnement, car la recherche du profit, encore une fois, comme je l'explique, dans le respect des droits de propriété, demeure la meilleure approche pour favoriser le développement social et environnemental.

Enfin, comme je vous le dis, j'ai beaucoup plus de détails, j'ai des notes de bas de page, mais je pense que je vous ai donné assez de matière pour me poser des questions.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desrochers. M. le député de Bertrand.

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Je vais être... Vous m'avez ébranlé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cousineau: Nous tous.

M. Desrochers (Pierre): C'était le but. C'était le but. Je vous écoute.

M. Cousineau: Bien, c'est parce que j'ai une formation en biologie, là, et vous nous avez mentionné que plus on avance dans le temps plus la pollution diminue, tant atmosphérique que... Alors, ça m'ébranle un petit peu là. Je ne sais pas à quelle place vous avez pris vos sources.

M. Desrochers (Pierre): Bien, je vous invite à regarder les rapports des Nations unies, de l'Agence d'environnement et de protection des États-Unis, d'Environnement Canada, et c'est indéniable.

M. Cousineau: D'accord, mais il me semble que... en tout cas.

M. Desrochers (Pierre): Bien, écoutez, je vous les donnerai si vous voulez. Je vous enverrai ça. Oui.

M. Cousineau: Mais écoutez, vous avez aussi passé très rapidement... bien, vous avez dit que vous laissiez tomber les conséquences néfastes de la responsabilité environnementale. J'aimerais ça quand même vous entendre, quelques mots là-dessus, parce que...

M. Desrochers (Pierre): Bien, c'étaient des exemples que je donnais. En fait, je ne sais pas... Vous êtes en biologie, vous connaissez l'analyse des cycles de vie. Ce qui se fait de plus en plus dans les écoles d'ingénierie, c'est-à-dire que, au lieu de regarder juste la question de la destruction ou de la façon dont on gère les déchets, on regarde l'ensemble du cycle de vie dans les produits, c'est-à-dire, à partir de l'extraction, la transformation et ce qu'on en fait après coup.

Or, ce qu'on se rend compte, c'est que la plupart des politiques environnementales, règle générale, ne regardent que la question de la gestion des déchets. Or, si on fait intervenir les questions d'extraction, de fabrication puis des sous-produits qui sont impliqués, souvent, on obtient des résultats contre-intuitifs, c'est-à-dire que, par exemple, les sacs de plastique vont souvent être plus écologiques que les sacs de papier. Pourquoi? Parce qu'un sac de plastique... En partant, le plastique, c'est fait avec un sous-produit de l'industrie pétrolière puis, comme vous le savez, une fois qu'on le met dans le sol et que vous avez des conditions d'anaérobie ? c'est-à-dire, donc, qu'il n'y a pas d'oxygène, les bactéries n'interviennent pas ? le sac est comme une pierre; dans le fond, il n'a pas d'impact comme tel lorsque, donc, on regarde l'ensemble, tandis que, lorsqu'on décide de recycler du papier, souvent, il faut faire intervenir des produits chimiques et on produit des sous-produits.

n(16 h 40)n

Enfin, je vous renvoie aux experts là-dessus; il y a, notamment, un groupe à l'Université de Montréal qui travaille sur ces questions-là. Mais, lorsqu'on regarde l'ensemble du cycle de vie d'un produit plutôt que juste la question de la gestion des déchets, souvent on obtient des résultats qui sont contre-intuitifs et qui tendent à prouver que certaines politiques gouvernementales ne sont pas les plus justes, ne sont pas les meilleures, même si elles ont été adoptées de bonne foi.

M. Cousineau: Nous sommes présentement à préparer un code de gestion des pesticides pour l'ensemble du territoire québécois et puis on s'apprête à demander aux entreprises de réduire la quantité de ces substances non biodégradables et puis les produits chimiques de synthèse. Est-ce qu'on devrait arrêter tout ça?

M. Desrochers (Pierre): Moi, ce que je vous dirai là-dessus ? je ne suis pas un spécialiste de la question des pesticides ? ça fait des années déjà que les agriculteurs le font. Pourquoi? Parce que c'est payant. Moins on utilise de pesticides, plus on les utilise de façon intelligente, plus on diminue nos coûts de production. Et si vous regardez la quantité de pesticides qui est utilisée en Amérique du Nord ? je n'ai pas les chiffres avec moi puis, encore une fois, je n'ai pas la prétention d'être un spécialiste là-dessus ? la tendance est à la baisse depuis des années. Même chose aux États-Unis, si vous regardez un facteur aussi simple que l'eau, mettons l'eau utilisée par l'industrie américaine ? pas la consommation domestique mais la consommation industrielle ? elle diminue depuis 1980. Pourquoi? Parce que les entreprises se rendent compte que c'est payant d'utiliser moins d'eau puis d'être plus efficaces tout simplement.

Ce que je vous dis, moi, dans le fond: Oui, c'est bien, d'avoir une réglementation, mais il faudrait éviter de faire ce qu'on a fait aux États-Unis dans bien des cas, c'est-à-dire d'obliger une certaine approche, d'imposer une certaine technologie puis, dans le fond, de bloquer toutes les alternatives possibles. Et enfin, moi, comme je vous dis, je ne suis pas spécialiste de la question des pesticides, je n'ai pas regardé ce que vous avez fait au Québec, mais ce que je vous conseillerais personnellement, c'est de laisser l'alternative aux gens pour être créatifs, plutôt que d'imposer une approche coulée dans le béton.

M. Cousineau: Mais nous, on dit que les entreprises chimiques ont une responsabilité environnementale immense, très importante, concernant l'utilisation des pesticides de synthèse. Et puis, parallèlement à ça, on s'aperçoit que le taux de cancer de toutes formes, au niveau humain, ça augmente d'une façon...

M. Desrochers (Pierre): Pourquoi? Parce qu'on vit beaucoup plus longtemps aujourd'hui qu'il y a un siècle. Vous regardez l'espérance de vie; quand mon grand-père est venu au monde, l'espérance de vie à l'époque était de 47 ans. Aujourd'hui, mon frère, il va avoir une petite fille dans quelques jours, elle va vivre sans doute 77 ans. On a éliminé presque toutes les autres maladies, mais on vit plus vieux. Donc, on ne meurt plus de ce qu'on mourrait avant, c'est-à-dire des choses aussi simples que la diarrhée, le choléra, ce genre de choses-là; mais, en vivant plus vieux, on tend à développer des cancers, c'est vrai. Mais il n'y a pas d'épidémie de cancers aussi répandue qu'on le prétend. Puis, en même temps, pourquoi on meurt du cancer? Mais parce qu'on vit plus longtemps puis on ne meurt plus d'autre chose comme on mourrait avant. Donc, l'industrie chimique aussi, même si ça peut sembler contre-intuitif, a fait des bons coups, puis il faudrait les reconnaître aussi.

M. Cousineau: Mais je terminerais en disant que nombreuses sont les études à travers le monde, que ce soit aux États-Unis, ou en Europe, ou au Canada et puis au Québec, qui démontrent clairement le lien direct entre l'utilisation des pesticides, au niveau agricole puis au niveau domestique, et puis l'augmentation des cancers, des lymphomes et puis... En tout cas.

M. Desrochers (Pierre): Bien écoutez, moi, je vous référerais aux travaux de Bruce Hayne, de Berkeley, qui a prouvé que 99 % des pesticides qu'on consomme, en fait, sont d'origine naturelle, c'est-à-dire qu'ils se trouvent dans les plantes, les plantes ne bougent pas, ont leur mécanisme de défense, et que les pesticides chimiques, règle générale, c'est environ 1 ou 2 % de ce qu'on consomme. Mais, bon, enfin, c'est un autre débat.

M. Cousineau: Ça va.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de Bertrand. Madame la députée... Pardon, il reste cinq minutes du côté ministériel. Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Tremblay: On peut y revenir tantôt.

Le Président (M. Paré): Pour cinq minutes, ça va? O.K. Allez-y, Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Desrochers. Je suis d'accord avec mon collègue de Bertrand pour dire que, oui, votre mémoire est surprenant; en tout cas il est écrit dans un style assez direct et puis il ne laisse pas beaucoup de place à la nuance.

Moi, je veux revenir... Je veux d'abord vous dire que la conclusion de votre mémoire, je suis tout à fait d'accord avec ça. Mais il y a quand même des aspects que j'aimerais éclaircir avec vous. On dit qu'il y a de plus en plus de données empiriques qui semblent montrer qu'il existe une relation directe entre la responsabilité sociale et le succès commercial, finalement, la profitabilité des entreprises. Bon. Parallèlement à ça, on sait qu'aux États-Unis et au Royaume-Uni... Par exemple, au Royaume-Uni, les administrateurs d'une société incorporée en vertu de la Companies Act doivent prendre leurs décisions en fonction des employés et non seulement en fonction des actionnaires. Bon. Aux États-Unis, il y a 30 États américains qui prévoient que les administrateurs ont le droit de peser l'impact de leurs décisions sur de nombreux intervenants qui sont non détenteurs d'actions. Ça, on appelle ça les fournisseurs, les clients, les employés, les créanciers et tout ça, bon. Mais ces lois-là ont un caractère facultatif, c'est-à-dire que les administrateurs peuvent en tenir compte ou non, ils ne sont pas obligés. Or, il semble que l'impact de ces lois-là, vu qu'elles ont un caractère facultatif, le résultat est décevant. Mais, puisqu'il y a des donnés empiriques qui viennent dire que, oui, il y a une relation directe entre la responsabilité sociale des entreprises et la profitabilité, pourquoi dans ce cas-là est-ce qu'on n'irait pas faire en sorte de mettre en place des mesures qui vont obliger ou encore faciliter le fait que les entreprises aient recours à un processus, à un code d'éthique ou quelque chose de semblable qui ferait en sorte, là, d'avoir une meilleure responsabilité sociale?

M. Desrochers (Pierre): Bon, O.K., je réponds à cette question-là dans la section 3, puis je n'en ai pas parlé. En fait, le problème que je vois avec ça, c'est que, un, on n'apprécie pas suffisamment le côté social des profits et des pertes, puis, deuxièmement, lorsqu'on introduit un code comme ça, dans le fond, on peut lui faire dire n'importe quoi, puis souvent on pense seulement à l'action à court terme et pas à l'action à long terme. On parlait de General Motors il y a quelques minutes. Bon, on peut blâmer General Motors de se sauver avec notre argent; d'un autre côté, qu'est-ce qu'on lui a donné. Je veux dire: Qui est à blâmer? Si on décide d'adopter des mesures qu'on dit de responsabilité sociale où on pense aux entreprises ? si vous me permettez de philosopher un peu ? dans le fond, pour prendre un exemple bébête: pensez à un agriculteur qui décide d'être généreux cette année puis qui décide de donner toutes ses semences pour l'an prochain aux pauvres de son village, là, pour employer une parabole un peu biblique. On peut croire que, oui, c'est un geste généreux, il va aider ces gens-là à court terme. L'an prochain, par contre, il n'a plus rien à semer. Et, bon, est-ce que les gens sont mieux, au bout du compte? Et, moi, ce que je déplore ou enfin ce que je crois constater, c'est que souvent, sous le prétexte d'invoquer la responsabilité sociale des entreprises, on invoque des politiques qui peuvent sembler bonnes à court terme, mais si on réfléchit un peu à leurs conséquences à long terme, ce n'est pas clair que ça va être nécessairement mieux pour l'ensemble des gens puis pour l'ensemble des gens dans une communauté.

Pour en revenir au fait qu'il n'y a pas d'opposition entre la responsabilité sociale des entreprises ou enfin que ces entreprises-là sont plus profitables, oui, puis je dis que ça a toujours été le cas. Je suis peut-être naïf, mais je crois que c'est payant d'être honnête en affaires avec ses fournisseurs, de bien traiter ses employés, d'avoir une conduite novatrice, d'essayer de faire plus avec moins, d'utiliser moins d'intrants, d'émettre moins de pesticides. Et souvent, le bien n'est pas l'ennemi du bon, au contraire. Mais est-ce qu'on a besoin pour ça d'introduire un code d'éthique ou des mesures qui, dans le fond, sous prétexte de faire mieux que le système des profits et pertes, vont peut-être amener une gestion à courte vue mais qui va être désastreuse à long terme? Je ne suis pas convaincu personnellement que les mesures, que l'on va affubler du parapluie de la responsabilité sociale, vont nécessairement être meilleures pour l'ensemble des acteurs que le système qu'on a connu dans le passé. C'est l'essentiel de mon mémoire, en fait.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desrochers. M. le député de...

Mme Leblanc: J'ai juste une petite... avant de passer à l'autre, il va nous rester du temps.

Le Président (M. Paré): Oui, bien sûr.

Mme Leblanc: Alors, moi, je suis d'accord avec vous pour dire que, d'abord, il faut créer la richesse si on veut être capables de la partager. Alors, ça, c'est une prémisse de départ, là; on va s'entendre là-dessus. Mais il ne faut pas non plus verser dans l'option extrémiste qui dit que ça doit être la notion de profit qui doit être absolument le leitmotiv et qu'il ne doit pas y avoir autre chose, puisque ? on l'a dit ? il y a une relation directe entre la responsabilité sociale et la profitabilité parce que probablement que les actionnaires, les consommateurs jouent un rôle normal là-dedans et vont plutôt privilégier des compagnies qui répondent à leurs valeurs.

M. Desrochers (Pierre): Ou vont répondre aux perceptions qu'ils ont et qui souvent ne sont pas fondées sur l'analyse scientifique.

Mme Leblanc: Peut-être, peut-être. Mais de là à aller, je veux dire, à un laisser-aller complet au niveau de ces entreprises et pas seulement des entreprises ? parce qu'on n'a pas abordé encore la question de la Caisse de dépôt et de placement qui gère 150 milliards, finalement, de l'argent des contribuables québécois, hein, des travailleurs québécois et qui n'ont pas un mot à dire ? alors, entre le laisser-aller total et un net interventionnisme de l'État qui ferait en sorte de, au moins, tout au moins, faciliter ou promouvoir des codes d'éthique, qu'est-ce que vous choisissez?

M. Desrochers (Pierre): Bon, écoutez, ce que je vous dirai là-dessus, là: D'abord, le laisser-aller total, comme j'explique dans mon mémoire de façon un peu plus détaillée, ça n'a jamais vraiment existé dans la mesure où, dans le passé, même avant l'adoption des lois environnementales, quelqu'un qui polluait, mettons, le terrain de son voisin était responsable, il pouvait se faire traîner en cour et souvent l'était. Bon, je l'explique un petit peu là-dedans. Donc, ça, c'est une chose, c'est-à-dire qu'il y a un laisser-aller, que les entreprises ne sont pas responsables; non, on peut toujours se faire traîner en justice si on nuit à la propriété d'autrui, première chose. Ensuite, la Caisse de dépôt: oui, c'est vrai que les gens n'ont pas un mot à dire, oui, c'est vrai que, en tant qu'investisseur, j'aimerais peut-être qu'on me donne un peu plus de liberté pour savoir où je mets mon argent. Je vivais aux États-Unis jusqu'à il y a quelques mois; j'ai fait mes études là-bas puis, enfin, j'ai marié quelqu'un là-bas qui ne connaissait pas le Québec et qui est choqué du fait que, au Québec, on n'a pas le choix que d'investir, mettre notre épargne à la Caisse de dépôt. Et elle me dit toujours: Mais, dans le fond, pourquoi? C'est leur donner une licence de faire ce qu'ils veulent, de ne pas les rendre responsables face à la société? Pourquoi n'avons-nous pas le choix d'investir l'argent de notre retraite ou enfin notre futur fonds de pension dans le conduit que l'on choisirait? Alors, à ce moment-là, pourquoi ne pas donner plus de liberté aux petits investisseurs? Est-ce que, dans le fond, scinder la Caisse de dépôt en deux, est-ce que leur donner plus de choix d'investir où ils veulent ne serait pas une meilleure façon de les aider que d'investir encore un règle réglementaire autour de la Caisse de dépôt? C'est une question, je crois, qui vaut la peine d'être débattue.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Paré): Merci, M. Desrochers. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Bien, moi, je suis un petit peu déstabilisé par vos propos d'aujourd'hui. J'irais même jusqu'à dire que vous êtes un danger public. Je veux dire...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Desrochers (Pierre): Je ne pensais pas que ma présentation vous ferait cet effet-là, mais j'espère que vous ne vous sauverez pas avec votre chaise là. Je vous écoute.

M. Tremblay: Non, mais sérieusement. Bien, tout à l'heure vous avez commencé votre prémisse en parlant de la main invisible d'Adam Smith mais, en tout cas je vous rappellerai qu'Adam Smith était un croyant. Et moi, je ne sais pas, mais j'ai l'impression que sa main invisible était peut-être un petit peu dictée par Dieu. Mais bref ? parce que vous avez fait de la philosophie, je veux en faire un peu ? mais là, vous avez semblé dire aussi que les conditions environnementales de notre territoire et même de la planète vont bien, alors que...

M. Desrochers (Pierre): Va mieux, va mieux.

M. Tremblay: Va mieux, alors que, je m'excuse mais, si on regarde les rapports de l'ONU en matière environnementale, pourquoi a-t-on fait des sommets internationaux, pourquoi faisons-nous un sommet de Kyoto, alors que tout va bien, il n'y a pas de problème dans le meilleur des mondes? Je voudrais bien être dans votre monde mais, je m'excuse, je ne le suis pas. D'autant plus que, si on dit qu'il ne faut absolument pas réguler le marché, c'est un peu... Moi, ce que je vois dans le marché parfois, c'est la compétition. Et la compétition à outrance, bien on voit un petit peu ce que ça fait parfois, c'est qu'il faut mettre... À la compétition, il faut absolument établir des règles du jeu. Je vois ça un peu comme le hockey: si vous n'avez pas d'arbitre, si vous n'avez pas d'instrument de protection, bien vous vous faites rentrer dedans, puis c'est les plus faibles qui vont crever puis les plus forts vont survivre. D'où l'essentiel que nous nous dotions de systèmes publics, de programmes sociaux qui vont faire en sorte que les plus pauvres puissent tirer un peu leur épingle du jeu. Je ne sais pas si vous êtes pour ou contre les programmes sociaux, mais, d'après moi, vous devez être contre. J'ai bien hâte de vous entendre là-dessus. D'autres éléments, parce que peut-être que, en fait, ce qu'il ne faudrait peut-être pas faire, ce serait partir et aller discuter une heure de temps et ce serait peut-être un minimum.

M. Desrochers (Pierre): Si vous voulez, pas de problème.

M. Tremblay: Mais êtes-vous en train de dire également que ce qui a été fait par exemple dans le très conservateur Royaume-Uni en matière de transparence au niveau des placements n'est pas une bonne chose? Que la France, l'Australie, ils sont tous engagés dans l'idée d'avoir davantage de transparence pour l'investissement, c'est une mauvaise chose? Bref, j'aurais une tonne de questions. Et, malheureusement, je suis un peu sonné d'entendre vos propos que tout s'améliore.

M. Desrochers (Pierre): Est-ce qu'on peut se limiter à la question de l'environnement vu que c'était l'essentiel de...

Le Président (M. Paré): Il nous reste deux minutes, cher monsieur, pour le faire.

M. Desrochers (Pierre): Bon, bien, écoutez, ce que je vous dirai: Malgré tout ce que vous pouvez reprocher au marché, oui, effectivement, voyagez un peu...

M. Tremblay: J'ai fait le tour du monde plusieurs fois.

M. Desrochers (Pierre): ...vous allez voir que l'environnement dans les économies de marché est en bien meilleur état qu'en Europe de l'Est, qu'en ancienne Union soviétique, que dans les pays du Tiers-Monde. Pourquoi? Parce que les sociétés développées sont devenues riches non pas en exploitant ces économies-là, mais en étant toujours plus efficaces, en faisant toujours plus avec moins puis en trouvant des nouveaux usages pour leurs déchets. Il n'y a pas d'objectif, il n'y a pas de conflit irrémédiable entre faire plus et mieux avec moins de ressources, qui est la meilleure façon de faire des profits et d'améliorer la qualité de l'environnement.

Vous regardez... Écoutez, on parlera de l'ONU si vous voulez. Moi, les statistiques sur les forêts, ça vient de la FAO, de la Food and Agriculture Organization des Nations unies. Je veux dire, c'est eux qui le disent, ce n'est pas moi. Vous regardez les chiffres de l'APA aux États-Unis, c'est eux qui disent que la qualité de l'air dans les villes est meilleure aujourd'hui qu'elle l'a été il y a 150 ans. L'air à Londres aujourd'hui est beaucoup plus respirable qu'il était au Moyen Âge. Pourquoi? Parce qu'on ne brûle plus de la bouse de vache, parce qu'on ne brûle plus du charbon de mauvaise qualité, parce qu'on a développé du gaz naturel, parce qu'on a développé de l'hydroélectricité. Le smog à Londres, qui tuait des milliers de personnes encore il y a quelques décennies, aujourd'hui, c'est un mauvais souvenir. Aux États-Unis, Los Angeles, les journées de smog sont disparues. C'était encore un problème il y a 20, 25 ans. Personne ne peut nier que la qualité de l'environnement s'est améliorée.

Maintenant, beaucoup de gens se sont développé une niche à dire que les choses vont mal et continuent d'empirer depuis 30 ou 40 ans et se font payer de beaux sommets à Johannesburg et ailleurs, c'est vrai. D'un autre côté, regardez ce que disent les experts puis regardez ce que disent les activistes, et souvent vous allez voir que l'un contredit l'autre. Enfin. Mais je suis prêt à aller prendre une bière avec vous, si vous voulez, il n'y a pas de problème.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Desrochers. Je suis bien content d'entendre qu'à Los Angeles... Mon dernier séjour, sur les six jours que j'ai été là, il y a eu cinq jours de smog, donc...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Desrochers (Pierre): Ils sont plus sévères que dans le passé. Une journée...

Le Président (M. Paré): Je suis content qu'en un an il y ait eu de tels changements là puis pour les gens de Los Angeles et de la région. Merci de votre contribution.

Et, ici, on va ajourner à demain, la commission, pour 9 h 30, sauf erreur. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 56)


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