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Commission permanente de la Famille et du Bien-Etre
Social
Bill 26 - Loi de l'aide sociale
Séance du jeudi 6 novembre 1969
(Dix heures dix minutes)
M. PLAMONDON (président de la commission permanente de la Famille
et du Bien-Etre social): A l'ordre, messieurs! Il me fait plaisir de vous
souhaiter la bienvenue à la commission permanente du ministère de
la Famille et du Bien-Etre social chargée de l'étude du bill
26.
Nous allons continuer à recevoir les mémoires et les
représentations des divers groupes qui ont manifesté le
désir de se faire entendre.
Nous allons recevoir les mémoires ou entendre les
représentations de ceux qui ont à en faire, suivant l'ordre du
jour. Nous appelons un groupe d'assistés-sociaux du Québec
métropolitain, le comité Centre-Ville, dont M. Paul Deboies est
le porte-parole, semble-t-il, ou d'autres personnes qui désirent se
faire entendre. M. Deboies.
M. DEBOIES: M. le Président, M. le ministre, messieurs les
membres de la commission.
Au nom des assistés sociaux du Québec
métropolitain, permettez que mes premiers mots soient pour vous adresser
nos plus sincères remerciements. De plus, nous disons que toutes les
classes de la société doivent féliciter la commission
parlementaire du bill 26, qui donne un exemple tangible de démocratie.
La commission parlementaire du bill 26 trouve que la démocratie n'est
pas un vain mot.
Nous, les assistés-sociaux du centre-ville métropolitain,
nous considérons que les mouvements de rue seuls sont
éphémères, à court terme et facilement
écrasés. C'est donc pour cette raison que les
assistés-sociaux du Québec métropolitain se sont
groupés dans un comité afin de défendre leurs droits et de
mettre le syndicat dans la rue et la rue dans le syndicat.
Qu'est-ce que la rue? C'est l'endroit où nous vivons, où
nous sommes nous-mêmes ensemble. Ce sont nos quartiers ouvriers et
défavorisés, nos villages pas très riches, nos
réserves emmurées. Ce sont nos coins, nos logements, nos taudis,
nos petits restaurants, nos bancs dans les parcs; ce sont nos voisins, notre
parenté. C'est le bas de la falaise, Saint-Roeh, Saint-Sauveur,
Stadacona, Ville de Vanier, Bélair, Duberger, Lorette, Lauzon, Montmagny
et toutes les Notre-Dame du bas de Québec. Ce sont toutes les rues sales
et poussiéreuses.
Cela, tout ensemble, fait des milliers de personnes qui vivent dans
l'injustice sociale et l'inégalité. Chacun vit une situation ou
plutôt il la subit, parce qu'il n'a aucun espoir d'en sortir.
Ce sont et le chômeur, et l'assisté social, et la
mère nécessiteuse, et la veuve qui vont quêter ces
allocations, renvoyés de l'un à l'autre des agences de
bien-être aux quatre coins de la ville, qui ne comprennent rien à
ce système, qui s'usent de longues journées à attendre sur
un banc, qui remplissent des formules et qui reçoivent, au bout du mois,
une pitance. Et cela, sans droit au travail, sans droit à
l'épargne. Et ce sont des pères de famille, sans droit à
une vie familiale privée et sans droit à une éducation
normale et entière de leurs enfants.
Des centaines de milliers de personnes sont comme cela,
dépendantes, sans sécurité, ni avenir, privées des
libertés essentielles. Au mois de septembre, le comité des
assistés sociaux Centre-Ville faisait une enquête parmi les
assistés sociaux. Sur les 400 que nous avons interviewés, 90 p.c.
avaient au-delà de 40 ans, 98 p.c. étaient unilingues, 94 p.c.
avaient fait des études simplement jusqu'à la 5e
année.
La conclusion de cette enquête fut que les gens de plus de 40 ans
n'avaient plus aucun débouché sur le marché du travail. De
plus, une des conclusions fut que, par exemple, simplement pour être
balayeur dans une usine, il fallait avoir une 1 le année, et pour un
Canadien français, être bilingue. Je vous demande, M. le
Président, messieurs les membres de la commission, si on balaie mieux en
anglais que l'on ne balaie en français. Une autre conclusion fut que 23
p.c. des interviewés avaient travaillé avec des
contremaîtres anglais unilingues, qu'ils avaient perdu leur poste et
reçu l'ultime affront de se faire dire: "You, goddamn, pea soup, speak
white! "
La dernière conclusion des assistés sociaux que nous avons
interviewés fut que, dans la belle province de Québec, on
chôme en français "and we work in English".
Dans l'immédiat, nous demandons à la commission, que les
allocations sociales des gens de moins de 30 ans, qui reçoivent $55 par
mois, soient augmentées à $80 et que toutes les autres soient
augmentées à un minimum de $100.
Nous demandons à la commission que l'on fasse enquête chez
les propriétaires qui exigent des loyers trop élevés et
extorquent de l'argent des locataires sous toutes sortes de
prétextes.
Nous protestons, d'une façon énergique, contre certains
propriétaires, qui reçoivent les chèques des
assistés sociaux, au nom de l'assisté social alors que le type en
question ne voit pas même son chèque et ne sait même pas
quel montant il retire.
De plus, il a été prouvé, durant notre
enquête, que 100 p.c. des assistés sociaux n'avaient aucun loisir.
Nous demandons à la commission, dans un avenir immédiat, de
fonder un comité de loisirs spécialement pour les assistés
sociaux.
De plus, nous demandons à la commission un centre
d'hébergement pour les 300 à 400 personnes qui, ici, dans la
ville de Québec, doivent actuellement coucher dehors faute d'abri.
Dans le centre-ville de Québec, c'est là que les gens ont
les plus bas revenus, habitent les maisons les plus vieilles et les plus
délabrées. Ils sont les moins instruits, leurs enfants
réussissent moins bien, s'instruisent moins. Ils sont les plus
frappés par le chômage, car le plus haut pourcentage de la ville
est dans le centre-ville. Et ceux qui trouvent le plus difficilement du travail
ont dépassé l'âge de 40 ans.
Alors, quels sont les problèmes fondamentaux?
Premièrement, la sécurité matérielle, afin
de ne pas être continuellement pris par des problèmes
d'argent.
Cela veut dire être capable de se procurer les biens et les
services qui sont disponibles dans la société.
Deuxièmement, la liberté, c'est être en mesure de
vivre sa propre vie sans être au crochet des autres. En fait, être
libre, en démocratie, cela veut dire avoir le pouvoir de choisir sa
propre destinée et d'influencer également l'orientation de la
société.
Troisièmement, la culture, c'est le domaine du savoir, c'est
posséder des connaissances de base - savoir écrire, compter, etc.
- des connaissances techniques pour exercer un métier, avoir toutes les
informations nécessaires pour savoir comment fonctionne une
société, comment fonctionne un gouvernement; une connaissance des
lois et de ses droits; c'est à ce moment-là que quelqu'un est en
mesure de se débrouiller et de se prononcer en connaissance de
cause.
Comment remédier à l'état actuel?
Premièrement: égalité. Quand on parle
d'égalité, on veut d'abord affirmer la dignité de chaque
homme, qu'il soit assisté social, alcoolique, faible, estropié,
qu'il ait 40 ans ou 70 ans, qu'il soit célibataire ou marié,
qu'il soit ouvrier spécialisé ou manoeuvre. Egalité ne
veut pas dire uniformité, mais bien égalité des chances,
justice pour tous les hommes.
Egalité des chances, cela veut dire que n'importe qui pourrait
avoir les moyens suffisants pour s'âpa-nouir à son maximum,
s'instruire et prendre des loisirs.
Justice signifie donner à chacun la possibilité de vivre
honorablement et s'épanouir. Chaque homme est un homme, et on doit lui
reconnaître cette dignité humaine.
L'égalité implique un droit fondamental au travail qui ne
devrait pas être conçu comme un privilège accordé
par les possédants. Chaque homme a le droit de se sentir utile dans la
mesure de ses moyens. Le travail devrait donc être plus qu'un moyen de
s'assurer un revenu, mais devrait être un moyen d'accomplissement
personnel afin que l'assisté social ne soit pas toujours
dépendant de la société.
Ici, M. le Président, messieurs les membres de la commission,
pour réadapter l'assisté social au travail, et plus
spécialement celui, qui, depuis un an, deux ans ou trois ans,
reçoit des allocations sociales, je considère que le gouvernement
devrait établir dans le centre-ville de Québec une commission de
retour au travail. Et si cette commission est établie, je demanderais
qu'un assisté social en fasse partie, mais à une condition, sans
salaire.
En terminant, si on ne peut procurer du travail à tous les
assistés sociaux - il est assez difficile de le faire - la commission
parlementaire du bill 26 devrait soumettre à l'Assemblée
nationale que chaque individu reçoive un revenu minimal garanti. Nous
entendons, par un revenu minimal garanti, que l'individu ne reçoive pas,
comme actuellement, une pitance, mais reçoive suffisamment, afin de
satisfaire aux besoins essentiels de la vie.
Je termine, M. le Président, messieurs les membres, avec l'espoir
que, dans un avenir rapproché, le sort des assistés sociaux soit
amélioré.
Maintenant, permettez-moi de vous présenter M. Jean-Paul
Rousseau, directeur du comité Centre-Ville des assistés
sociaux.
M. ROUSSEAU: M. le Président, M. le Ministre, M. le
Sous-Ministre, au mois d'août, nous avons formé le comité
Centre-Ville des chômeurs et des assistés sociaux, afin de
résoudre nos problèmes avec les autorités
compétentes.
Notre troisième syndicat, nous l'avons formé afin
d'être les porte-parole des déshérités et des
rejetés de la société, qui ne pouvaient pas se faire
entendre par les syndicats reconnus, parce que nous ne payions aucune
cotisation. Ce que votre troisième syndicat demande, ce n'est pas la
charité, mais du travail, afin de pouvoir vivre décemment dans un
pays, dans une province démocratique. Le travail est un droit
fondamental de l'homme, qui remonte à l'ère de la civilisation.
Il se perd énormément de capital humain dans la province de
Québec, dans tous les corps de métiers; manque d'information dans
les centres de main-d'oeuvre. Je dois vous dire que le postulant ne vend
peut-être pas son savoir-faire, mais, par contre, le fonctionnaire du
centre de la main-d'oeuvre n'est pas préparé à acheter le
savoir-faire du postulant s'il ne lui pose pas de questions sur son
savoir-faire.
Et l'on dit dans la province de Québec que nous manquons de gens
compétents pour remplir les postes que nous avons à offrir. C'est
archifaux. Vos centres de main-d'oeuvre... Au lieu de construire des
écoles polyvalentes - ce gaspillage d'argent que les gouvernements font
- employez les gens compétents que vous avez, et vous n'avez pas besoin
d'écoles polyvalentes.
M. DEBOIES: M. le Président, permettez-moi de vous
présenter M. Auguste Parent, un représentant de notre
comité en formation, le comité des assistés sociaux de la
rive sud.
M. PARENT: M. le Président, Honorables ministres et
députés, membres de cette commission, je voudrais tout d'abord
vous remercier d'avoir bien voulu nous recevoir pour nous permettre de
démontrer à la face de la province que le Québec n'est pas
l'Etat policier que certains prétendent ou veulent nous faire croire,
notamment le FLQ.
En ce moment, nous constatons qu'au Québec la démocratie
n'est pas lettre morte, même si parfois il se produit quelques
anicroches. Mais qui peut se vanter d'être exempt de tout embarras si
petit qu'il soit. D'ailleurs, notre présence en est la preuve la plus
éclatante. C'est pourquoi je vous félicite, messieurs les membres
de cette commission, de permettre ce dialogue qui laisse entrevoir la
réalisation prochaine d'une démocratie économique qui
deviendrait en même temps l'application vécue de notre
démocratie politique.
Attendu que la démocratie politique doit inspirer et nourrir
l'esprit de notre société, cela sous-entend, sans aucun doute,
que la démocratie économique doit aussi protéger tous les
citoyens composant ladite société, de sorte que dans une
démocratie militante, les citoyens libres et heureux sont toujours en
mesure de se développer pour le plus grand bien de tous et de chacun en
particulier.
Partant du fait que la société a été
créée, inventée, ou fabriquée par des hommes, cette
dite société devrait donc nécessairement être au
service total de
l'homme et pour tous les hommes. Et qui donc, aujourd'hui, oserait
prétendre que cette société se serait créée
elle-même, qu'elle serait venue comme cela, comme un cheveu sur la soupe,
dans l'histoire de l'humanité? N'est-il pas aberrant de constater que
l'outil social, de fabrication humaine, pour servir l'homme, accomplisse si mal
sa mission de libérer l'homme lui-même?
C'est pourquoi, à titre de porte-parole des assistés
sociaux de la rive sud, je dois porter à votre généreuse
attention la gravité du mal qui étrangle présentement
plusieurs milliers de familles des villes de Lauzon, Lévis et
Saint-Romuald, affectant de cette façon au moins cinq, six ou sept
comtés couvrant ce territoire. Cette industrie occupe ordinairement
2,500 à 2,700 ouvriers par année, mais, faute d'une marine
marchande qui brille par son absence, en ce moment, nos ouvriers ainsi que leur
famille sont devenus de ce fait des citoyens de deuxième zone sinon
plus.
Messieurs, si, pendant la période la plus critique de la guerre
1939-45, nous avons trouvé les moyens de mettre en application les
politiques visant à préparer sur mer la victoire finale de nos
alliés, pourquoi, aujourd'hui, dans un moment presque aussi critique, ne
fournirions-nous pas le même effort pour construire par milliers, par
centaines de milliers, des maisons qui permettraient à la population de
nos cités et de nos villes de s'épanouir dans la paix et la
liberté, à l'ombre de cette petite propriété
familiale qui a toujours été le gage de la stabilité
économique et politique de tout Etat fort tant sur le plan moral que
social?
Si, en 1969, nous savons ce que nous disons, ce dont nous parlons, en
cette société d'abondance où l'énergie
nucléaire est devenue une réalité industrielle, et
où, nous savons, l'énergie solaire sera un fait accompli et
où l'énergie cosmique deviendra le lot de l'humanité avec
tout ce que l'esprit de l'homme mettra à la disposition des habitants de
cette planète, ne croyez-vous pas, messieurs, que le moment est
arrivé où nous devons faire un point d'arrêt pour regarder
le chemin parcouru, évaluer les progrès accomplis, tout en
scrutant vraiment si, avec tout cela, l'homme est vraiment plus heureux?
Voilà pourquoi, aujourd'hui, avec mes amis, représentants
d'assistés sociaux de diverses régions de la province, je vous
pose la question: Attendrons-nous que la société fabriquée
par l'homme le dévore lui-même? Combien de temps encore
allons-nous rester attachés à des idées surannées?
Combien de temps encore allons-nous respecter et conserver des principes
économiques qui pouvaient être bons dans une époque de
disette, alors que la société industrielle faisait à peine
ses premiers pas? Quand donc reconnaf-trons-nous à l'homme qui pense,
à l'homme qui peine et à l'homme qui souffre, le droit
fondamental à ses besoins vitaux, qui sont le vivre, l'habit et
l'abri?
Quand donc l'Etat, pour une fois, reconnaîtra-t-il le droit de
l'homme à ses besoins immédiats, non pas en vertu d'une charte
des droits de l'homme, mais par la plus grande des chartes, l'unique charte,
celle que la naissance confère à tout homme qui naît sur
cette planète?
Messieurs, honorables membres de cette commission, puis-je en terminant,
déclarer que le gouverne- ment le plus honnête et le mieux
intentionné se trouve toujours devant des difficultés internes
insurmontables? En s'appuyant sur les assemblées représentatives,
il est paralysé. S'il impose ses buts, on l'appelle dictature. C'est
donc dire qu'une révolution complète s'impose, beaucoup plus
révolutionnaire et beaucoup plus étendue que toutes les
révolutions du passé. Révolution économique et
politique, qui ne peut aboutir qu'en étant d'abord une révolution
spirituelle, la prise en considération de l'autre pour nous-mêmes,
en raison des valeurs actuelles ou potentielles qui sont dans chaque homme.
Un dernier mot. Sortons donc, pour une fois, d'un certain climat de
bienfaisance, sous forme de bons de soupe, et de la charité sous
l'aspect de l'aumône, par la reconnaissance de la primauté de
l'homme sur toutes les richesses terrestres. C'est pourquoi l'homme qui souffre
le plus doit être le premier servi, dans une société
hautement organisée pour servir et non asservir. Restituons à
l'homme secouru de réelles raisons de vivre et de reconquérir sa
dignité, car rien d'autre, vraiment, ne peut relever un homme
déchu. De cette façon, avec votre aide, de l'homme qui
était une épave, nous en ferons un sauveur, parce qu'il sentira
que nous avons besoin de lui, qu'il est nécessaire.
C'est pourquoi je suis convaincu que la loi-cadre, bill 26, sous la
direction distinguée de l'honorable ministre et des membres de cette
commission, sera une grande amélioration pour les assistés
sociaux de cette province, pour qu'ils redeviennent des actifs dont notre
société a tellement besoin aujourd'hui. Merci, messieurs.
M. CLOUTIER: Alors, MM. Deboies, Rousseau et Parent, nous vous
remercions de vos interventions et je vais en dire un mot seulement. Je
comprends que le programme est chargé. Devant cette commission, je
voudrais remercier MM. Deboies, Rousseau et Parent, au nom des membres de cette
commmission, les remercier de leur participation aux travaux de cette
commission, d'être venus, librement, nous donner leur opinion, et de
l'avoir fait d'une façon aussi franche et aussi positive.
Je voudrais seulement faire une petite remarque. M. Deboies, dans son
intervention, a parlé des centres d'hébergement. Je voudrais lui
dire qu'il y a actuellement à Québec quelques centres
d'hébergement en construction, que je donne de mémoire, il y en a
au moins trois ou quatre que je connais. Il y a d'autres projets qui vont se
matérialiser sous peu et je crois que, d'ici quelques mois, nous aurons
résolu le problème de l'hébergement des personnes
âgées, ici dans la ville de Québec et dans le Québec
métropolitain.
En ce qui concerne la commission de retour au travail, c'est un point
extrêmement important que vous avez touché là; il y a dans
plusieurs régions de la province, actuellement, des comités de
reclassement des personnes aptes au travail, des comités qui
fonctionnent et dont les résultats sont très éloquents. De
temps à autre, vous voyez, dans les journaux, des résultats de
ces expériences.
Du côté de Québec, plus particulièrement le
secteur qui intéresse M. Deboies, je dois lui dire qu'à
partir de l'atelier protégé, qui existe, je crois qu'il
nous sera possible, en complétant les cadres de cette organisation, de
donner suite à ce voeu de la création d' un comité assez
bien structuré de retour au travail. Je reviens aux personnes
âgées pour dire que je crois... Est-ce que M. Deboies a voulu
parler aussi des voyageurs qui sont de passage à Québec et qui
n'ont pas de...
M. DEBOIES: Oui, M. le ministre, non seulement les voyageurs de passage,
mais même des résidents qui ne peuvent obtenir leurs allocations
sociales, faute de chambre.
Il y a bien le refuge de nuit qui existe, mais, à cause de
certaines raisons, ces gens ne peuvent coucher là.
A une réunion de notre comité, nous avions quinze jeunes,
d'environ 25 ou 26 ans, qui couchaient dans des voitures. De plus, M. le
ministre, je crois que le refuge de nuit, qui est financé par votre
ministère, ne remplit pas le devoir qu'il devrait remplir. Je
considère que le refuge devrait être ouvert toute la
journée, et plus spécialement lorsque le temps est froid, ou
lorsqu'il pleut, ou lorsqu'il neige.
Ici, M. le Ministre, permettez-moi, en terminant, de dire que le
comité des assistés sociaux Centre-Ville, le comité des
assistés sociaux de Duberger, le comité des assistés de la
Rive Sud désapprouvent la position que les comités de citoyens de
Montréal ont prise, en ne voulant pas venir présenter leurs
griefs à la commission.
M. CLOUTIER: Je vous remercie, M. Deboies, de ces précisions
additionnelles. Quant à la position des comités de
Montréal, à la fin de la séance, nous ferons
personnellement, et peut-être que le député de D'Arcy-McGee
aussi, voudra apporter des rectifications au nom des deux équipes qui
forment cette commission parlementaire.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Saint-Germain.
M. SAINT-GERMAIN: Vous avez mentionné, M. Deboies, que certains
chèques étaient reçus par les propriétaires, que
les chèques n'étaient pas envoyés directement à
l'assisté social, je suppose que, dans ces cas-là, il y a une
raison?
M. DEBOIES: Mon Dieu, le ministre et les hauts fonctionnaires ne sont
pas responsables de cette chose-là. Il existe une sorte de patronage, je
dirais. Je pourrai donner au ministère certaines adresses où un
employé du ministère envoyait les gens à cette maison de
chambre, et que les chèques étaient faits au nom du
concierge.
M. LE PRESIDENT: M. Gardner, est-ce que vous aviez...
M. GARDNER: Je pourrais peut-être, M. le Prési-deat, faire
quelques commentaires sur une note que M. Deboies a faite tout à
l'heure. J'aurai peut-être ensuite une question à lui poser. Vous
mentionné que les assistés sociaux ne pouvaient se permettre
d'avoir des loisirs, ne pouvaient participer aux centres de loisirs.
Réellement, je trouve regrettable qu'une telle chose puisse exister.
Pourquoi nos centres de loisirs ne pourraient-ils pas donner gratuitement leurs
services aux assistés sociaux? Je crois que c'est là un point
extrêmement important, parce que les assistés sociaux ont besoin
de loisirs, au même titre que n'importe quel autre individu, et je
verrais bien que tous les centres de loisirs et tous les organismes qui
s'occupent de loisirss quels qu'ils soient, donnent gratuitement à ceux
qui possèdent une carte médicale ou un chèque d'assistance
sociale, des loisirs dans leur centre. Je considère que cela est
obligatoire à une époque où les gens n'ont pas de travail,
pour qu'ils puissent quand même se procurer certains loisirs qui sont
absolument nécessaires à leur développement moral autant
que physique. Maintenant, vous avez mentionné tout à l'heure
qu'il y avait 23 p.c. de personnes qui avaient été mises à
pied parce que des contremaîtres unilingues anglais leur auraient dit:
Vous ne faites pas l'affaire. C'est ici même, à Québec?
M. DEBOIES: Ici, à Québec, et aussi en dehors de
Québec sur certains chantiers et dans certaines industries, comme
à Montréal Nous avons, parmi nos membres...
M. GARDNER: Vous parlez des gens de Québec seulement?
M. DEBOIES: Oui. Mais nous avons comme membres des gens qui ont
travaillé à Montréal et qui sont revenus ici à
Québec. J'en ai eu moi-même l'expérience, lorsque j'ai
travaillé pour Perigny où tous les contremaîtres
étaient anglais, et où on a congédié une couple de
journaliers, parce qu'ils ne comprenaient pas l'anglais.
M. GARDNER: Cela ne devait pas être la raison.
M. DEBOIES: Ecoutez, M. le député, je vous affirme que la
chose est vraie et je crois que ceux que nous avons interviewés nous ont
dit la vérité.
M. GARDNER: C'est bien malheureux, si tel est le cas.
M. DEBOIES: Oui, parce que je crois, et maintenant je suis dans une
mauvaise position, M. le député, à cause... Mon Dieu
même si le bill 63 n'avait pas été en Chambre, j'aurais
parlé de la même façon. Je dis aux membres de cette
commission que je ne prenais pas position sur le bill 63, quand j'ai
mentionné les contremaîtres unilingues ou quand j'ai dit qu'il
fallait chômer en français.
Devant la commission parlementaire du bill 26, je n'approuve ni ne
désapprouve le bill 63.
M. LE PRESIDENT: M. le député de D'Arcy-McGee.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je voudrais faire de brefs
commentaires sur les interventions très intéressantes que nous
avons entendues tout à l'heure. Pour ma part aussi, je trouve
très heureux que M. Deboies et ses collègues soient venus
échanger avec
nous, très ouvertement, des points de vue. Il est clair que nous
ne sommes pas en mesure, du jour au lendemain, de remédier à tous
les problèmes qu'ils ont déposés sur notre table, mais
nous sommes tous extrêmement touchés par la situation des
assistés sociaux et nous voudrions apporter les améliorations qui
s'imposent.
L'on parle depuis assez longtemps du revenu minimal garanti. Nous avons
en main, et surtout depuis le début de cette série de
séances de la commission parlementaire, une certaine documentation, une
compilation d'opinions qui nous permettront d'étudier, de façon
plus efficace, ce qu'est un revenu minimal garanti. Nous avons, et je pense que
nous étions tous impressionnés par ses chiffres, le document
soumis par le Montreal Diet Dispensary avec des calculs de budget familial.
Donc, il y a beaucoup de travail que nous devrons faire là-dessus, en
comparant ce que nous faisons avec ce que nous pourrions faire et avec ce qui
est calculé comme vrais besoins par des gens responsables et
objectifs.
Donc, jusqu'à un certain point - et je sais que ce n'est pas
érigé en système à travers le pays ou à
travers la province - nous travaillons dans cette idée de revenu minimal
garanti et les chiffres, qui nous ont été fournis par le Montreal
Diet Dispensary, constituent en quelque sorte l'ébauche d'un tel
système, qui n'est pas tellement loin du système que nous avons
actuellement. Il s'agit d'apporter des améliorations.
Je suis frappé par les commentaires de M. Deboies au sujet des
loisirs et au sujet d'un certain paternalisme qui veut que le chèque ne
soit pas adressé à l'assisté social, comme si
l'assisté social n'était pas capable de gérer
lui-même son budget personnel ou familial. Des études ont
été faites, qui ont démontré clairement que cette
idée paternaliste est généralement fausse et que l'on
devrait permettre à l'assisté social de le faire avec des
conseils peut-être dans certains cas; ce n'est pas tout le monde qui est
expert dans la question de son budget familial, il y a des professionnels qui
peuvent donner des conseils, qui peuvent surveiller au départ pour
mettre la personne ou la famille sur la bonne voie. Mais l'idée que
l'assisté social n'est pas en mesure de gérer son propre budget
est fausse à la base et, sauf exception, l'on devrait dire à
l'assisté social: Voici ce que nous croyons nécessaire,
gérez-le comme vous le jugez bon et nous sommes là pour vous
aider si c'est nécessaire.
Je suis frappé aussi par une remarque de M. Deboies, qui est
très juste. C'est que la réadaptation pour le retour sur le
marché du travail devient plus difficile après
l'écoulement d'une certaine période de temps de dépendance
sociale. Nous le savons très bien - des études ont
été faites qui l'ont démontré -qu'une
période de six mois suffit pour mettre la personne en difficulté
quant à sa propre réadaptation et qu'il nous faudra des mesures
spéciales et des conseillers spéciaux pour aider dans ce
domaine-là.
Je suis frappé aussi par la forte proportion des assistés
sociaux qui n'ont qu'une cinquième année. J'ai dit souvent, et je
le répète aujourd'hui, que notre politique de bien-être
social doit être axée surtout et avant tout sur les
intérêts des enfants des familles défavorisées, pour
empêcher ces enfants de retomber dans le cercle vicieux de la
dépendance sociale que nous connaissons. Finalement - et comme M.
Deboies, je l'aurais dit même si le bill 63 n'avait pas été
devant la Chambre présentement - je suis profondément ému
par le commentaire qu'a fait M. Deboies quand il a dit: On chôme en
français, on travaille en anglais. Je pense que nous tous, dans ce
Parlement, même si nous préconisons de part et d'autre des
modalités différentes, des moyens différents pour arriver
à cette fin, nous cherchons la même fin, celle de faire du
français la langue du travail et non pas du chômage dans la
province de Québec.
M. LE PRESIDENT: Merci, alors nous allons procéder, Messieurs,
nous vous remercions de votre présence. Oui, M. le député
de Sainte-Anne, voulez-vous vous approcher, s'il vous plaît?
M. HANLEY: Est-ce que ce monsieur est capable de nommer les compagnies
de Montréal et les contremaîtres qui ont renvoyé les
Canadiens français parce qu'ils ne parlent pas anglais?
M. DEBOIES: Oui, je pourrais vous les donner, M. Hanley.
M. HANLEY: C'est très sérieux. M. le Président, le
problème de Montréal, aujourd'hui, c'est que les grandes
compagnies anglaises, les grands magasins anglais n'engagent pas les Anglais
parce qu'ils ne sont pas capables de parler français. C'est contraire
aux accusations de M. Deboies. J'ai passé 30 ans de ma vie sur les
problèmes de la pauvreté et du chômage; 95 p.c. sont des
Canadiens français, et je n'ai jamais eu une plainte d'un seul Canadien
français de Montréal, renvoyé par un contremaître
anglais. Je n'ai jamais su cela, je veux les noms des compagnies ou de leurs
représentants de Montréal, car je veux faire une enquête
auprès des compagnies et des contremaîtres si c'est vrai. Vous
n'avez pas la même expérience que moi de Montréal. J'ai un
autre problème, je vais le répéter, c'est de placer les
vendeurs et les filles dans les grands magasins anglais. Nous ne sommes pas
capables parce qu'ils ne parlent pas français. Et parfois, je m'en
prends aux directions des magasins anglais parce qu'ils refusent d'engager
quelqu'un de langue anglaise dans les magasins. Ce fut mon problème
à Montréal.
En même temps, je veux féliciter le ministre du Bien-Etre
social de Québec, parce que je n'ai pas vu une famille... Et dans mes
livres, j'ai 5,000 problèmes par année, 95 p.c. des Canadiens
français, sans un sou, et le représentant de Montréal ne
réglait pas tous ces cas de pauvreté. J'ai eu des
problèmes avec les petits commis de la ville de Montréal qui
représentent le ministre du Bien-Etre social de Montréal. J'ai
appelé le représentant du ministre à Montréal, il a
fait des enquêtes immédiatement et réglé l'affaire.
Je parle de celui qui paye le gaz naturel, celui qui paye
l'Hydro-Québec. Je vais un petit peu plus loin. J'ai plus d'un cas ici
dans mon livre, par exemple, un homme qui gagne $50 par semaine avec une
famille de six enfants. J'ai des preuves dans mon livre, j'ai fait une plainte
au ministre du Bien-Etre social, et son ministère envoie une allocation
chaque mois à cette famille-là. Et le
père de famille travaille 50 heures par semaine. Il ne gagne pas
assez d'argent pour sa famille. Le représentant du ministre lui donne
une allocation.
C'est la première expérience dans ma vie. J'ai fait des
démarches auprès du ministre du Bien-Etre social pour un homme
qui travaille à temps plein...
Je prends votre parole, mais voulez-vous me donner les noms des
compagnies? Je suis un ami des Canadiens français et si je trouvais un
seul contremaf-tre qui veut faire quelque chose contre le Canadien
français de Montréal, je vais agir immédiatement.
M. DEBOIES: M. Hanley, je vous donnerai les noms. Cet après-midi,
au local, je prendrai les feuilles d'interview et je vous donnerai les noms des
individus avec leurs adresses et je l'enverrai à tous les membres de la
commission...
M. GARDNER: C'est très important, je crois...
M. DEBOIES: ... avec le nom de la compagnie et, alors, messieurs les
députés qui voudront faire une enquête auprès de ces
gens pourront le faire en ayant leur adresse et leur numéro de
téléphone.
M. LE PRESIDENT: Alors, nous vous remercions, M. Deboies. Je pense que
c'est à la satisfaction des membres de la commission. Nous appelons le
comité des citoyens de Val-d'Or, qui est représenté, je
crois, par Mme Gauthier.
MME GAUTHIER: Bonjour, M. le Président, M. le ministre et M. le
sous-ministre. Premièrement, je tiens à vous remercier de m'avoir
invitée pour venir exprimer l'opinion des citoyens de la région
de Val d'Or, comté d'Abitibi-Est, je précise parce que je crois
que souvent, à Québec, on ne nous trouve pas sur la carte
géographique, dans différents ministères. Mais, j'ai une
remarque à vous faire sur ce point, peut-être que cela va
être bien vu, peut-être que cela va être mal vu; mais, de
toute façon, je suis ici pour exprimer l'opinion des citoyens de ma
région, et, en même temps, la mienne, personnellement. J'y tiens
à l'extrême.
La remarque que j'ai à vous faire, c'est sur le point suivant:
l'invitation, c'est très bien; mais je trouve que, lorsque l'on
s'adresse à des personnes de ma catégorie, celle des petits
salariés... Nous donnons notre temps bénévolement pour
travailler pour le bien de la population, pour faire l'ouvrage souvent des
fonctionnaires qui sont en place. Même s'il faut blesser quelqu'un, il
faut que cela sorte de quelqu'un, alors je le sors.
Maintenant, on m'invite, on dit: Madame, M. Grenier voudra bien vous
faire profiter de son automobile comme moyen de transport. C'est très
bien. Mais, je tiens à dire que l'automobile de M. Grenier, quelque
confortable qu'elle puisse être, c'est un camion. De Val-d'Or à
Québec, ce n'est pas la porte voisine, cela serait à remarquer.
On paie les repas, c'est encore très bien. Mais on dit: Madame, il n'est
pas question d'avoir un gîte pour coucher. Je peux coucher à la
belle étoile, comme la température était belle hier,
c'était préférable de coucher sur un banc dans un parc ou
de demander à la police de me donner une cellule pour la nuit.
Je perds même un salaire de $24 pour me présenter ici. Il
n'est pas question de me rembourser, c'est très généreux.
Mais, on sait qu'il y a, dans les ministères, certains fonctionnaires
qui sont largement remboursés de leurs dépenses de voyage, ils
ont le choix de transport qu'ils veulent. Quelqu'un a déjà
même dit qu'ils "tipaient" à $5 par jour, je crois que c'est fort
un peu.
On garoche l'argent par les fenêtres; mais, quand il s'agit de
personnes de mon genre... Cela ne veut pas dire que l'on est les moindres dans
la société. Monsieur parlait de budget tout à l'heure; il
disait que ce n'étaient pas tous les assistés sociaux ou les
personnes qui avaient la chance de savoir administrer un budget. Monsieur,
administrer un budget, quand on a un gros salaire, c'est très facile.
Administrer le budget du peuple, quand on taxe au besoin, c'est encore facile.
Mais administrer la petite pension, la pitance qu'on donne aux assistés
sociaux, et le salaire du petit salarié à $3,500, à $4,000
et à $5,000; à $5,000 je vais fort, parce que le type dans la
région qui fait cela, ou qui fait $6,000 et plus, il travaille
au-dessous de la terre, où il laisse sa santé et il n'a aucune
protection des compagnies américaines comme les mines qui sont
subventionnées par le gouvernement. Cela, vous le savez, messieurs. Vous
n'êtes pas sans le savoir, du moins vous seriez supposés le savoir
si vous ne le savez pas. Voilà à quoi je veux en venir.
C'est facile d'administrer un gros budget, mais vous ne vous êtes
jamais arrêtés à penser, que celui qui administre un petit
budget doit être bougrement intelligent pour venir à bout d'avoir
un toit sur la tête, un toit et un morceau de terre qui lui
appartiennent, puis faire vivre sa famille avec le strict nécessaire.
Cela prend un gars intelligent dans la vie d'aujourd'hui.
Premièrement, la paie est coupée par les deux bouts, et il
nous reste le milieu pour vivre. Même si nous arrivions le matin et que
nous disions: Messieurs, je n'ai pas assez pour accrocher mon budget à
la fin de l'année, cela ne veut rien dire. On n'augmentera pas cela. La
loi est faite de cette façon: Prenez cela, monsieur, ou prenez votre
billet bleu et dehors. C'est comme cela qu'on est "runné".
Et, même dans la région, c'est déplorable à
l'heure actuelle. On n'a pas de foyer pour les vieux. Cela fait plusieurs
années que c'est demandé. Alors, quand on décide de
construire un foyer pour les vieux, pourquoi est-ce que cela ne serait pas
construit sur un pied d'égalité et non pas pour le vieux qui
possède un peu d'argent, à qui l'on donne la chance de prendre
l'appartement le plus beau, le plus cher, qui paie un peu plus pour s'en faire
donner un peu plus?
Et celui qui a travaillé toute sa vie à petit salaire, on
lui donne encore la pitance pour finir ses jours?
Il y a une chose que je tiens à vous faire remarquer. Quand ces
gens sortiront du foyer de l'âge d'or, ils iront tous à la
même place, ils iront tous pourrir à la même place: sous six
pieds de terre. Cela, je tiens à vous le faire remarquer. Il y a une
différence sur la terre pour les êtres humains. Mais après
la mort, je crois que nous allons tous à la même place. C'est mon
opinion, messieurs.
On devrait, premièrement, loger les vieux qui ne sont pas assez
malades pour rester dans les hôpitaux. Cela devrait être
mentionné et devrait être corrigé: loger les vieux dans ces
foyers, ceux qui ne sont pas assez malades pour aller dans les hôpitaux,
mais trop malades pour rester dans des maisons privées. Cela veut dire
un vieux qui est paralysé, un vieux qui n'est pas capable de manger
seul, un vieux - je vous le dirai carrément - qui pisse dans ses
culottes. Cela ne s'est peut-être jamais dit dans un salle comme
celle-ci, mais moi, je le dirai: Qui pisse dans ses culottes! Cela ne se garde
pas dans une maison privée. Ces vieux sont encore dans la rue et dans le
fossé.
On fait des foyers d'âge d'or, c'est beau; mais on loge des
personnes qui pourraient se garder facilement dans des maisons privées.
On pourrait penser à ces vieux-là.
Moi, j'ai vu un cas typique à Val-d'Or, d'une femme de 70 ans
à qui on avait été porter un vieux de ce genre chez elle
en disant: Gardez-le, madame, s'il vous plaît, c'est un étranger,
on vous donnera $80 par mois pour le garder, en attendant d'avoir une place
pour le loger. Pour quinze jours, madame, faites-nous la charité pour
quinze jours, madame.
Eh bien, j'ai été obligée de m'en occuper -
étant donné que je suis présidente du comité des
citoyens, on a recours à moi dans différents domaines - pour
qu'on sorte ce type de là. Cela faisait trois mois et demi; la femme
n'en pouvait plus, elle était malade, elle a dit: On va m'entrer
à l'hôpital. C'était placé par le service social de
Val-d'Or. Quand j'ai appelé, on m'a dit: Madame, écoutez, il ne
faut pas faire ceci, il ne faut pas faire cela. J'ai dit: Ecoutez, messieurs,
avant que la femme ne parte pour l'hôpital, elle est martre chez elle, du
moins, c'est à elle la maison, et puis on va le faire sortir.
Occupez-vous-en, placez-le. J'ai dit: Mes bons messieurs, vous en avez des
femmes, vous avez un foyer, prenez celui-là, amenez-le chez vous et
ayez-en soin. Alors, vous vous rendrez compte du travail que cela peut donner,
et pensez-vous qu'une personne de 70 ans a la capacité de faire cela?
Nous sommes venus à bout de faire sortir le vieux comme cela.
Alors, vous me direz que c'est juste. Non, c'est une injustice d'un bout
à l'autre de la province!
Maintenant, je n'ai pas seulement mon opinion à donner, il faut
que je donne l'opinion de mon comité. Ecoutez, moi, je crois qu'il y a
plusieurs assistés sociaux ici. Premièrement, le "bobo", le
premier, c'est qu'il n'y a aucune politique de développement
économique.
Et maintenant, il y a les étudiants qui sont, à
l'été, sans travail pendant les vacances. Et vous en avez au
moins 80 p.c. qui ne sont pas des fils à papa, des fils de docteur,
d'avocat, de ministre et de député, de toutes sortes. Eux, ils se
trament les pieds, parce qu'ils savent qu'ils sont protégés, et
qu'ils auront du travail; Mais les petits salariés, vous en avez 80 p.c.
qui ne demandent qu'à travailler, messieurs. Je le sais, j'ai
travaillé l'an dernier pour avoir de l'ouvrage pour les
étudiants. Lorsque j'ai demandé aux étudiants de venir me
donner leur nom, cela s'est présenté comme les doigts de la main,
je ne fournissais pas. Il a fallu que je demande de l'aide pour prendre les
noms.
Ils voulaient travailler et ils avaient à coeur de gagner quelque
chose pendant les vacances pour continuer leurs études. Alors, est-ce
que vous habituerez ces gens à leur donner un chèque d'assistance
sociale tout à l'heure? Vous allez faire d'eux des assistés
sociaux. Quand on leur donnera leur chèque, ils ne voudront plus
travailler. Vous en avez de nombreux qui ne veulent pas travailler parce qu'ils
sont trop paresseux. Vous en avez qui sont tellement dans la misère.
Mais vous en avez qui sont trop paresseux. Là, je suis d'accord.
Ensuite, il y a un manque de travail. Là, je suis encore d'accord. Mais
vous allez faire avec cela, encore de nouveaux assistés sociaux, si le
gouvernement ne prend pas l'affaire en main et n'offre pas de travail. Et il y
en a du travail à faire dans la province. Vous pouvez être
sûrs de cela.
Dans la région de l'Abitibi, on pourrait vous en montrer comme
les doigts de la main. On pourrait vous en sortir des suggestions pour faire
travailler nos étudiants. Et cela ne serait pas de l'ouvrage mal fait,
et cela ne serait pas de l'ouvrage perdu.
J'ai encore rencontré M. Michel Guay, ce matin, avant de m'en
venir ici, parce que j'avais affaire à avoir des formules pour nos
étudiants. Elles ne sont pas prêtes, et il paraîtrait que
les budgets seront coupés. Cela va en faire du beau!
Maintenant, les réformes dans les lois-cadres, c'est ceci, dans
la région de l'Abitibi, pourquoi les barèmes dans l'Abitibi ne
seraient-ils pas les mêmes que dans les grands centres?
Parce qu'en Abitibi, vous savez que c'est assez froid, les loyers sont
au même taux que dans les grandes villes, et parfois plus chers, parce
que le chauffage est plus long. Nous chauffons onze mois par année,
nous, dans notre région. Et pour cela, si nous ne voulons pas chauffer
dans le mois de juillet; il faut que ce soit un bel été. Parce
que souvent, nous sommes obligés de faire une petite "attisée",
un petit chauffage, le matin, pour tempérer la maison.
Maintenant, nous n'avons pas de manufactures de chaussures, ni de
vêtements. Alors, nos vêtements coûtent plus chers, parce
qu'il y a le transport.
Maintenant, pour la nourriture, nous n'avons aucune manufacture. Vous
allez dire: Vous avez des cultivateurs. Les cultivateurs crèvent de faim
sur leurs terres! Comment voulez-vous qu'ils fassent manger les autres? Ils
crèvent de faim! Alors, nous payons encore plus cher la nourriture, et
les barèmes sont "un bout" plus bas pour les assistés sociaux. De
plus, je suis dans le comité des citoyens. Nous avons essayé
d'aider certains assistés sociaux. C'est déplorable de voir leur
situation. Même M. le ministre est au courant que j'ai demandé de
m'envoyer quelqu'un pour visiter des familles en particulier. On m'a dit: Ne
touchez pas aux cas particuliers, madame. Eh bien, si nous ne touchons pas aux
cas particuliers, nous ne sortirons pas de notre marasme. Il faut sortir des
cas particuliers, toucher à un cas particulier, pour aider à
vingt, qui sont semblables à ce cas particulier. Alors, on finit par
avoir un gros nombre sur la "mappe". Cela se ramasse, les gens.
C'est très bien, j'ai insisté, il a fallu que j'insiste,
il a fallu que j'envoie des télégrammes. On dirait qu'eux, de
Québec à Val-d'Or, ce n'est pas faisable. Mais moi, en camion, de
Val-d'Or à Québec, c'est faisable. En camion. Mais eux, ce n'est
pas faisable en avion.
Finalement, on a décidé de m'envoyer un
représentant. Alors, on a envoyé un type, on en a envoyé
quatre, j'en avais besoin d'un. C'est très bien, j'ai connu les autres,
cela me fait plaisir. Alors, nous avons été visiter certaines
familles, mais j'aimerais dire à M. le ministre que, pour ces familles,
cela n'a absolument rien changé. Rien. Je crois qu'elles sont encore
pires qu'elles étaient. Il y en a même une, si on ne l'aide pas
bien vite, on va lui payer son cercueil!
Deuxièmement, à propos de la loi des assistés
sociaux, on dit: Madame, on vous donne la carte médicale. Qu'est-ce que
la carte médicale paie, messieurs? Les médecins, ceux qui font
encore des $50,000 et $60,000 par année, et $70,000 par année.
Mais la femme sort de chez le médecin avec sa prescription, et elle n'a
pas d'argent pour aller chercher ses remèdes. C'est clair, cela. Je
connais des femmes qui, pendant trois mois, vont chez le médecin. Avec
les cartes à tous les mois. Le docteur donne la prescription, elles
mettent la prescription dans leur poche. Que vais-je faire? Je vais couper le
pain à mes enfants ou je vais aller chercher ma prescription. Elle
s'assoit là, et elle se laisse crever, tranquillement.
Tout à coup, le voisin s'aperçoit que cette femme va
mourir. Bon, on appelle. N'y aurait-il pas moyen de faire quelque chose pour
elle? Oui, Ah! ... On l'envoie chez le docteur, le docteur décide qu'il
faut qu'elle aille à l'hôpital de Montréal. Est-ce une
économie cela? Si on lui avait donné sa carte spéciale
pour payer ses médicaments, on éviterait des voyages à
Montréal qu'on est obligé de lui payer, l'argent des
dépenses en plus. Ensuite, pendant combien de temps peut-elle être
hospitalisée? Si elle a des enfants, on est obligé de prendre
quelqu'un et de faire garder les enfants. C'est encore une dépense
supplémentaire. Ce n'est pas économique.
Deuxièmement, dans les bureaux, on nous dit toujours: On est
surchargé d'ouvrage! On est surchargé d'ouvrage, mais ils ne
laissent jamais leur place, par exemple, pour la donner à un autre. Ils
sont surchargés, ils n'aiment pas cela, mais ils sont là. Ils
sont là, tout le temps. On est surchargé d'ouvrage, pourquoi? Je
vais vous le dire, moi. Cela ne fait pas longtemps que je travaille
là-dedans, cela ne fait pas longtemps que j'essaie de sortir ces lois
qui sont cachées en-dessous de la table, que les gens n'ont pas le droit
de voir. Et ce sont des lois populaires, ce sont des lois que le public devrait
voir. Ce ne sont pas des lois. Des lois, ce sont des lois. Des lois du
gouvernement, elles devraient être publiques, elles ne devraient pas
être cachées. C'est mon opinion personnelle. Cela fait partie de
la population. Quand vous venez chercher nos taxes, cela fait partie de la
population! Vous y voyez à nos payes, sur ce sens-là. Alors
pourquoi ne serait-on pas capable de voir les lois? Non, nous n'avons pas le
droit de dire cela. M. le ministre nous dit de ne pas faire cela. M. le
ministre nous dit de ne pas faire cela. Les barèmes sont comme ceci,
sont comme cela. On vient à bout de chercher des lois, de faire sortir
les lois, tranquillement, pour essayer de sortir nos assistés
sociaux.
Et écoutez bien les gens. Il y en a qui diront: Vous avez les
assistés sociaux qui ont vécu là-dessus, cela fait des
années; ils ne travailleront jamais de leur vie. C'est vrai. Je suis
d'accord. Je ne me bats pas pour ceux-là. Je me battrai pour leurs
enfants, si on leur donne de la misère. C'est très bien. Mais je
ne me bats pas pour les paresseux. Je me bats pour un type qui est malade, et
qui a gagné sa vie honorablement. A un moment donné, il est
malade, tuberculeux, souvent par la faute des mines où il n'y a pas de
protection. Ils vous retombent sur le dos, ces assistés
sociaux-là. Maintenant vous avez des personnes qui vont tomber... Un
matin, cela peut bien être vous qui serez paralysé, cela peut bien
être moi, n'est-ce pas? Nous sommes en pleine santé, mais demain
matin, je ne serai peut-être pas capable de bouger de mon lit. Personne
ne le sait.
Ce type-là - c'est un règlement à apporter encore,
et j'aimerais qu'on s'en rende compte le type a travaillé, il
s'est mis un toit sur la tête, il a des paiements à faire sur sa
maison. Il tombe malade, il n'est plus capable de travailler.
Il va au bureau d'assistance sociale; on le ridiculise, on le pousse au
pied du mur en lui disant: Monsieur, c'était à vous de prendre
vos précautions. Moi, j'ai pris connaissance de cela, à part
cela. Ce que je prouve là, c'est vrai. Monsieur, c'était à
vous de prendre vos précautions; vous travailliez et vous n'avez jamais
pensé que vous tomberiez malade; vous avez des paiements sur le dos et
ta ta ta ta ta... Si on pensait à cela, monsieur, personne ne
s'endetterait! Il n'y aurait pas de crédit nulle part. Hein, si on
pensait, premièrement, tomber malade aujourd'hui ou demain, et qu'on ne
serait pas capables de faire nos paiements?
Ce type-là -je parle d'un type, mais c'est en
général - il a $70 à donner sur sa maison. Vous avez une
propriété, monsieur; alors, vous n'avez pas le droit à
votre logement. S'il n'avait pas de maison, si on le logeait, sur sa formule,
le logement serait rentré. Certains fonctionnaires assez bien
placés, qui travaillent là-dedans, m'ont dit: Madame, on peut pas
faire cela; c'est un capital. Une drôle de réflexion pour des gens
intelligents qui sont supposés avoir des qualifications! Parce que le
type en question, il a mis son avoir là, il a travaillé
là, puis il a mis ce qu'il avait là; alors, il ne peut pas avoir
de protection. Il ne peut pas avoir d'argent en banque. Le gars qui travaille
à ce salaire-là, qui a de l'argent en banque, ça prend un
gars, aie... Ecoutez!
M. GARDNER: Ce n'est pas vrai ce que vous dites là, madame, ce
n'est pas vrai.
MME GAUTHIER: Attendez un peu là! Ce que je viens de dire ici...
J'ai toujours dit la vérité dans une assemblée; je ne
viendrai pas mentir ici à Québec.
Premièrement, ce type-là, on ne tient pas compte de son
loyer. Puis le cas, si vous voulez, je l'ai justement, particulièrement.
Je veux voir M. le Ministre, tout à l'heure. Le type, là, on ne
tient pas compte de son loyer. On dit: vous avez une propriété;
on lui a donné, pendant deux ans, $90 par mois pour vivre avec sa femme,
sous prétexte qu'il avait un garçon à la maison qui
travaillait et qui devait lui fournir tant pour cent de son salaire. Le
garçon payait sa pension; c'est très bien. Mais vous, si je vous
demandais combien il y en a parmi vous qui ont donné tant pour cent de
leur salaire à leurs parents dans le temps qu'ils
étaient jeunes, dans le temps qu'ils ont travaillé avant
de se marier, est-ce qu'il y en a beaucoup qui ont donné tant pour cent
du salaire aux parents? Je serais curieuse de leur faire lever la main
s'il y a quelqu'un qui serait franc et qui dirait la vérité.
Alors, la jeunesse d'aujourd'hui est encore la même. Un
pensionnaire, ce n'est pas un revenu. C'est une dépense. Est-ce
vrai?
On lui a payé pendant deux ans $90 par mois. On lui a
remonté son salaire à $110, sa pitance. J'appelle cela une
pitance, moi, ce n'est pas un salaire. A $110 par mois, avec sa femme; cela
fait quatre ans que sa femme ne s'est pas acheté un morceau de linge.
C'est un cas que votre représentant est venu visiter avec moi. Cela n'a
absolument rien changé.
Le type a du coeur dans le corps. Il a de la misère à
marcher, puis il a demandé de faire la surveillance des enfants à
la sortie de la classe pour tâcher de s'en sortir un peu. Hein! cela lui
donne $60 par mois; cela fait $170. Bien, on dit: Monsieur, on va vous couper,
vous en avez trop. Est-ce aider du monde à vivre, cela? Est-ce aider du
monde à s'aider? Ce ne sont pas des parents, ni des amis. Ce sont des
gens que j'ai rencontrés, parce que je suis dans le comité des
citoyens.
Cela devrait être une réforme à la loi. Que le type
qui a sa propriété, qui a des paiements à faire, ce
devrait être considéré comme un loyer pour lui donner
l'argent pour son paiement, quitte après que la maison sera finie de
payer, de lui laisser seulement une vingtaine de piastres par mois comme
allocation, pour réparations de sa maison; parce que vous savez des
maisons, avec les années, cela prend des réparations.
Bâtissez-la comme vous voudrez; il y a toujours des réparations
à faire. Quelqu'un m'a dit: Bien oui, si le type vend sa maison, on va
avoir l'air drôle!
Mais vous savez fort bien que vos lois sont faites de telle façon
que si le type vend sa maison, il va falloir qu'il la mange avant que vous lui
envoyiez un autre chèque. Est-ce vrai ou pas? C'est cela. C'est la loi.
Alors vous ne pouvez pas vous faire arranger d'une manière ou d'une
autre. Vous allez toujours avoir le dessus parce que c'est vous qui avez le
haut du pavé. Mais pourquoi ne serait-ce pas considéré? On
déplore cela, nous, dans la région.
Maintenant, quand on demande à quelqu'un, à un
ministère quelconque de venir constater des faits réels, des
injustices aveuglantes qui sont faites réellement sur le territoire...
Nous ne sommes pas des enfants d'écoles. Nous sommes des gens avec les
deux pieds à terre. Même si nous n'avons pas beaucoup
d'instruction, nous avons assez de plomb dans la tête pour marcher tout
seuls. Ce n'est pas les autres qui nous conduisent par la main. Quand on dit:
Je suis une telle, veuillez envoyer quelqu'un, pourquoi avertit-on les bureaux?
Tout de suite, on renvoie le télégramme, on renvoie la lettre, on
renvoie les patentes au bureau.
Qu'est-ce qu'on fait au bureau dans ce temps-là? Quand vous
attendez de la visite chez vous, et que les cendriers sont sales, qu'est-ce que
vous faites? Vous les videz? Ben! c'est ça qu'on fait dans les bureaux,
on les vide, les cendriers. On court les familles, on cherche les noms, quel
nom a-t-elle cette femme-là?
Cela fait trois mois qu'on travaille au bureau, pour faire avoir un
"bien-être" à telle ou telle famille, mais on ne sait pas encore
le nom, on téléphone pour savoir le nom. C'est logique! On
écarte les formules, c'est logique! Notre chèque n'est pas
rentré, pourquoi? Ah! Madame, votre formule a été
écartée. Est-ce logique, dans une fonction publique, de perdre
des formules? Est-ce logique, ça? Quand on s'arrête, et qu'on
réfléchit avec notre tête, même si elle n'est pas
bien bien qualifiée, notre tête, il y a quelque chose dedans!
Maintenant, on nous dit: Vous savez, madame, dans nos bureaux, on engage
des types qualifiés. Ils ont leur douzième année, ils ont
trois ans d'études spécialement pour cela, et ils sont
qualifiés. Mais un type qualifié là, qui ne sait pas ce
qu'est un budget, qui ne sait pas ce qu'est une vie de famille, qui ne sait pas
ce qu'est une personne malade, qui tombe malade aujourd'hui pour demain, je ne
voudrais pas tomber sur l'assistance sociale, moi! Moi, je les trouve bien
bonnes ces petites femmes-là qui sont délaissées par leur
mari, puis d'autres qui sont malades, de ne pas être rendues à
l'asile. Parce que moi, je ne resterais pas longtemps, moi. Six mois et on me
renfermerait, certainement je ne pourrais pas vivre dans des conditions comme
celles-là! Je ne sais pas pourquoi on ne fait pas une loi qu'on respecte
et dont l'effet serait de protéger les personnes humaines. Est-ce vrai
ou faux! Et voir si des personnes qui sont assistées sociales n'ont pas
le droit de vivre! De vivre, de manger, toujours, plein leur ventre. De ne pas
dire: Demain matin, je n'ai pas de pain à donner à mes
enfants.
Ensuite, il y aurait une loi à ajouter pour le père de
famille qui abandonne sa femme et ses enfants, que ce soit parce qu'il la
trouve trop haïssable, qu'il ne la trouve pas aussi belle que l'autre avec
laquelle il ira rester... cinquante raisons, n'est-ce pas? Il va s'en trouver
des raisons. Quand on veut mal faire, on s'en trouve. C'est logique. Bon!
Pourquoi n'y a-t-il pas une loi pour ce type-là? S'il ne veut pas vivre
avec sa famille, c'est très bien. S'il ne peut pas la supporter, c'est
encore très bien, mais qu'il fasse vivre sa famille. Qu'il la fasse
vrvre sa famille. Je connais des maris qui vivent séparés de leur
femme, qui vivent avec une autre femme, qui ont des enfants avec une autre
femme. Et cela va retomber encore sur l'assistance sociale. Celle-là
retombera encore sur l'assistance-sociale. J'en connais. Puis, la petite femme,
bien, on lui donne de la misère, toute la misère possible. II
faudrait qu'elle se fasse soigner, on retarde sa prescription. On lui donne
tout juste pour vivre, il faut la tenir à vivoter. Je n'appelle pas cela
vivre, moi, j'appelle cela vivoter. Et puis le monsieur, il s'en va les mains
blanches, lui, et on ne court pas après. On dit: Oui, on a
rapporté cela à la police. Mais la police... C'est dans tous les
domaines, je crois que des personnes ne font pas leur travail. Si la police ne
le trouve pas, c'est parce qu'elle ne fait pas son travail. Alors, c'est rendu
que c'est dans tous les domaines que des personnes ne font pas leur travail.
Puis vous mettez du monde qualifié. Vous mettez du monde avec des
qualifications dans tous les domaines mais ils n'ont rien dans la tête.
La majorité, n'en déplaise à certains messieurs, des
qualifications et pas de "jugeotte". Ce n'est bon à rien. On n'a pas
besoin
d'être qualifié pour être capable d'entrer dans une
maison, et aider des assistés sociaux. Les aider moralement,
premièrement, pour savoir exactement, tranquillement, d'où vient
le "bobo".
Deuxièmement: comprendre sa situation. Si elle n'est pas capable
d'administrer un petit budget - ce n'est pas facile à administrer, un
petit budget - tiens, je voudrais vous voir, messieurs. Je voudrais vous voir
avec $2,500 ou $1,800 par année, vous nourrir, vous loger, vous
vêtir, vous chauffer. Hein! ce n'est pas un cadeau! Moi, j'en sais
quelque chose, et je n'ai pas été malchanceuse moi, dans la vie.
Mon mari a gagné tout le temps. Il n'a jamais été sur
l'assurance-chômage. Puis, j'ai travaillé quand il a fallu
travailler; là je perds encore un salaire pour venir ici. Quand il
fallait retrousser les manches, je les ai retroussées. Je n'étais
pas instruite, mais j'étais capable de me débrouiller. Voyez-vous
là? Pourquoi la société ne réfléchit-elle
pas mieux que cela? Vous avez la population, vous avez la masse qui crie
après vous, pour avoir de la justice dans tous les domaines.
Réveillez-vous, il est temps. Moi je croirais qu'il est temps de vous
réveiller. Puis, apportez des modifications aux lois, des modifications
valables. Puis, lorsqu'on vous dit qu'une telle chose se fait, n'attendez pas
qu'on écrive ou qu'on téléphone, on n'a pas les moyens de
faire cela, nous. Nos téléphones ne sont pas payés. Quand
les montants arrivent, on ouvre les yeux. Puis, envoyez donc quelqu'un nous
rencontrer. N'avertissez pas les bureaux. Puis, vous allez voir qu'on ne les
fera pas marcher, les gars. On va leur montrer des preuves. On va leur en
montrer.
Je regardais, M. Deboies, tout à l'heure, qui disait: Ces
messieurs ne sont pas responsables. Mais, quand même, ça finit
toujours que vous êtes responsables. S'il y a une erreur qui se glisse,
vous êtes responsables. Ensuite, il parlait de la langue anglaise.
Même à Val-d'Or, mon bon monsieur, on se présente pour
avoir du travail, on vous dit: Etes-vous bilingue, madame, mademoiselle ou
monsieur? Non? Ah, bon! c'est dommage, il faudrait que vous soyiez bilingue.
L'Anglaise se présente: Etes-vous bilingue? Non, elle ne parle pas un
mot de français. Ah, c'est très bien!
Même à Val-d'or, dans nos petits magasins et dans nos
pharmacies, on a ça à Val-d'Or. M. Deboies a parfaitement raison
de dire que ça existe à Montréal, je ne vois pas pourquoi
ça n'existerait pas à Montréal si ça existe
à Val-d'Or. Il faut parler les deux langues; à certains endroits
ils vont être un peu plus indulgents. Moi, je ne suis pas opposée
à ce que les personnes apprennent l'anglais. Cela ne veut pas dire que
je parle du bill, moi non plus, ce n'est pas là, je ne veux pas toucher
à ça. Je ne suis pas contre, j'essaie d'apprendre l'anglais et
puis, si je le parlais, je serais fière de le parler. Mais les Anglais
ne se cassent pas la tête pour l'apprendre, eux. Il y a ça
à remarquer. Il y en a quelques-uns qui vont se la casser et puis ce
sont des cours privés payés par le gouvernement, souvent, qu'ils
ont pour apprendre l'anglais, ce n'est pas long.
Là, ça se passe ici, sous nos yeux, ces choses là.
L'affaire du budget, j'y reviens encore. J'aimerais poser une question au type
qui a parlé de ça: Comment pourrait-il vivre, lui avec une
pension de $215 par mois, huit enfants, une femme, payer le loyer,
l'électricité, le chauffage, tout ce dont nous avons besoin pour
vivre dans une vie normale? Est-ce que l'on pourrait me répondre?
M. HANLEY: Oui, je suis capable de donner la réponse. Faites une
demande à la fonction publique et faites-moi la demande à
Montréal et je ferai une demande au ministre pour un subside ou un plus
gros montant pour acheter des médicaments, du linge et toutes sortes de
choses pour la famille. Je n'ai aucun cas où le ministre ou son
représentant m'aurait refusé. Vous parlez de Val-d'or en abitibi.
Est-ce que vous avez un député là? Pourquoi ne pas porter
vos plaintes à votre député?
MME GAUTHIER: Je les ai, les plaintes. On en a comme les doigts de la
main, des plaintes. Dans tous les ministères, nous sommes oubliés
complètement. Il y a l'hôpital que nous demandons depuis des
années et l'agrandissement, nous ne l'avons pas. Le foyer des vieux, on
se demande si ça sortira bien vite, eh?
M. CLOUTIER: Je pourrais répondre tout de suite à Mme
Gauthier au sujet de l'hôpital qu'on est en train de discuter avec le
ministère de la Santé; du plan, du réaménagement de
l'hôpital. Nous espérons qu'au début de 1970,
c'est-à-dire au printemps de 1970, le projet puisse se réaliser.
En ce qui concerne le foyer des personnes âgées, c'est la
même chose. Alors, je pense que, dès l'an prochain, en 1970,
à Val-d'Or, la question de l'hôpital et du foyer pour personnes
âgées sera une question réglée.
MME GAUTHIER: Bon, c'est très bien. Merci, M. le Ministre. Je
suis contente d'apprendre cela, il y en a beaucoup dans le comité qui
seront contents d'apprendre cela, de voir que nous allons avoir quelque chose.
Cela prend du temps, mais nous allons finir par l'avoir, c'est une affaire.
Maintenant, une chose qu'on m'a demandé d'apporter: Pourquoi
gardons-nous secrète la liste des assistés sociaux? On m'a dit
que ça devrait être public.
UNE VOIX: Oh!
MME GAUTHIER: II n'y a pas de "oh" madame, arrêtez-vous, monsieur.
Laissez-moi parler et ensuite vous jugerez.
La liste des assistés sociaux devrait être affichée
dans les bureaux, je vais vous en donner la raison. Etre assisté social,
parce que nous sommes dans le besoin, ce n'est pas un déshonneur. C'est
un bien qui nous revient. Cela empêcherait beaucoup d'injustices,
voilà où je veux en venir.
Vous avez des assistés, des personnes qui retirent des pensions,
qui ont un gros char, qui sont mieux meublés que ceux qui travaillent.
Quand nous faisons le rapport de cela, on nous dit: On ne donne pas de l'argent
pour payer les chars, c'est la finance qui s'arrange avec. Je suis assez
vieille pour savoir que, lorsque les paiements d'un char ne sont pas faits, la
finance ne le laisse pas dans les mains d'un gars, ça, je
sais ça. Pourquoi ne serait-ce pas affiché? Le type qui
chauffe la Cadillac et qui vient chercher son chèque, il aurait honte
que son nom soit là!
Je vous passe un papier moi. Ensuite on pourrait l'emporter plus
facilement. Ce n'est pas un déshonneur; ceux qui en ont
réellement besoin, je les ai consultés et ils m'ont dit, eux, que
ça ne leur faisait ni chaud ni froid que ce soit affiché dans les
bureaux d'assistés sociaux, dans les bureaux du Bien-Etre et de la
Famille. Moi, j'aimerais que cette question soit considérée. Le
point de vue est d'empêcher des injustices. C'est pour empêcher que
les gens qui auraient le moyen de vivre par eux-mêmes prennent l'argent
du pauvre pour vivre. Il me semble que c'est une chose à laquelle on
devrait penser deux fois. Pourquoi ont-ils ça? Je ne le sais pas.
Souvent on sort de la parenté, on sort de différentes
petites affaires, c'est le cousin de très loin mais ça finit par
être cousin! Alors je demande encore au ministre et j'insiste: M. le
Ministre, quoi que vous pensiez, c'est ça. Ils disent toujours: Mme
Gauthier donne des ordres. Je ne donne pas d'ordre, mais je demande qu'on
prenne note que, quand on téléphone à vos bureaux,
veuillez, s'il vous plaît, - on ne vous "achalera" pas pour rien
veuillez nous accepter, ou nous rappeler vous-mêmes parce que moi, ma
manière de procéder et de travailler, ce n'est pas d'atteindre
les membres, c'est d'atteindre la tête quand les membres ne grouillent
pas. C'est ma manière de travailler. Vous en avez des membres tout
autour de vous! Mais qui vous rapporte s'ils font leur travail ou s'ils ne le
font pas, hein? C'est la population qui est supposée vous le rapporter
et la population, nous, les petites gens, elle s'est fermée assez
longtemps. Il faut que ça débouche, que ça déborde.
On a critiqué entre nos murs, on a vu des injustices et on disait: Mon
Dieu, "est-ce" possible? Mais c'est tout ce qu'on disait. Mais aujourd'hui, il
faut que ça ait de l'écho, il faut que ça sorte et la
population est décidée de sortir.
Je ne suis pas une personne pour casser les vitres, soyez assurés
de ça, puis quand on viendra à casser des vitres et à
faire sauter des bombes, moi, je ne serai pas là, vous êtes
sûrs de ça! Je ne veux pas détruire ce qu'on a, mais je
veux améliorer le sort des gens et avoir ce dont on a besoin dans une
province comme la nôtre.
Maintenant je termine, je calcule que j'ai été assez
longue. Peut-être ai-je été un peu ennuyante? De toute
façon, c'est mon idée que je voulais dire et je l'ai dite, j'ai
dit celle du comité. Il se peut que vous ne teniez pas compte du tout de
ce que j'ai dit, parce qu'on n'a pas l'habitude d'écouter des gens de ma
classe - on dit les petites gens - malgré qu'on dise souvent que ce ne
sont pas les moindres, les petites gens, ça aide les autres à
vivre, les autres vivent grâce aux petites gens...
M. LEVESQUE (Laurier): Pour les élections, ça compte
beaucoup.
MME GAUTHIER: Oui.
Je voudrais qu'il y ait un point de mis, et puis un gros point, sur les
injustices aveuglantes qui se commettent dans les ministères de la
Famille, du Bien-Etre et de la Santé, par des fonctionnaires ou des
membres qu'ils représentent. Je voudrais qu'on sache exactement qu'il y
a des formules perdues, que les gens se présentent au bureau et qu'ils
se font très mal recevoir. C'est facile de recevoir des gens avec un
sourire. Des gens qui sont dans la misère qui arrivent et qui disent:
Mon Dieu, ce matin mon mari est malade. Je ne peux pas, qu'est-ce que je vais
faire là-dedans? Il me semble que si on disait: Assoyez-vous, madame, et
prenez le temps d'expliquer votre cas. J'ai deux heures à vous donner,
j'ai trois heures s'il le faut. S'asseoir là et l'écouter, puis
la comprendre et lui parler. Mais ne pas lui dire: Madame, ta, ta, ta, ta,
ta..., l'abîmer de bêtises! La femme est là, Ah, ah, ah! ...
Elle est toute saisie, elle ne sait plus quoi dire, elle bafouille et part de
là avec rien.
Je voudrais qu'il y ait quelqu'un, dans les bureaux, capable de recevoir
les gens et de leur répondre au téléphone poliment.
J'insisterais là-dessus, M. le Ministre, j'insisterais pour que ce soit
rentré cela. Etudiez ça et vous allez voir que ça va avoir
du bon sens quand ce sera étudié.
Maintenant, je vous remercie de m'avoir écoutée et
j'espère que vous ne m'en voudrez pas trop! Si j'ai blessé
quelqu'un, ce n'était pas mon intention. De toute façon, il faut
sortir ce qu'on a à dire pour ne pas rester avec.
M. LE PRESIDENT: Merci, Mme Gauthier.
M. CLOLTIER: Mme Gauthier, évidemment il y aurait bien des choses
à dire, non pas en réplique, si vous voulez, mais dans un
échange d'observations. D'abord je voudrais vous dire que je constate
que le voyage, même s'il a été long, même s'il a
été fait dans des conditions pas faciles, en camion, ne vous a
tout de même pas trop bouleversée, vous arrivez devant la
commission en excellente forme.
MME GAUTHIER: Vous avez la chance, monsieur, que j'aie une très
bonne santé!
M. CLOUTIER: Je prends ça comme un compliment à l'adresse
du ministre de la Santé, qui veille sur la santé des gens aussi
éloignés que Val-d'Or.
M. LEVESQUE (Laurier): C'est-à-dire que vous éprouvez leur
santé.
M. CLOUTIER: J'éprouve leur santé. Evidemment, vous avez
dit beaucoup de choses, Mme Gauthier, vous les avez dites telles que vous les
voyez, le plus sincèrement possible. Je tiens pour acquis que votre
seule motivation est d'améliorer le système, de venir en aide
à ceux qui autour de vous, vous le constatez, sont aux prises avec
certains problèmes, certaines difficultés et, pour cela,
évidemment, il n'y a aucun membre de cette commission qui ne vous fera
de reproches.
Que vous ayez souligné certaines déficiences du
système, c'est évident qu'il y en a. C'est pourquoi nous
apportons devant l'Assemblée nationale un nouveau projet de loi, c'est
pourquoi nous apportons également un nouveau projet de
règlements. La raison d'être de
cette commission est d'étudier et de proposer à la Chambre
une nouvelle réglementation qui, nous l'espérons - et nous en
sommes convaincus, surtout avec les opinions qui nous sont données
devant cette commission, les suggestions d'amélioration qui nous sont
faites - répondront aux besoins de 1969.
Du point de vue administratif, dans nos bureaux, que la dispensation des
allocations engendre des lacunes, que le personnel de nos bureaux, à
certains moments, n'ait pas été à la hauteur de la
tâche -évidemment, je ne voudrais pas porter de jugement global -
il a pu et il peut encore se glisser des exceptions que nous n'acceptons pas.
Quand vous dites, Mme Gauthier, que le ministre devrait insister auprès
de tous ses fonctionnaires, de tous ceux qui sont en contact direct avec les
assistés sociaux, avec ceux qui se présentent au bureau, pour
qu'ils soient reçus comme des personnes avec toute la dignité et
la considération nécessaire, je dois vous dire que c'est
déjà fait. Nous avons déjà insisté et nous
en faisons une priorité au ministère, de voir à former
notre personnel, à lui inculquer l'importance de cet aspect humain de
contact avec la clientèle.
Quand vous nous dites, aussi franchement que vous l'avez fait, que ces
réponses données, cet accueil qui doit être fait dans nos
bureaux, ces réponses au téléphone doivent toujours
être empreintes de courtoisie, d'humanité, en cela vous avez
parfaitement raison. Si des cas nous sont signalés où des
fonctionnaires de nos bureaux, qui ont des contacts avec le public, ne
remplissent pas ces conditions de base, quelles que soient les qualifications
qu'ils aient, j'interviendrai personnellement, je vous en donne ma parole, pour
qu'on les déplace et que l'on évite qu'ils soient en contact avec
la population.
MME GAUTHIER: Je suis heureuse d'entendre dire cela et je vous donnerai
un nom tout à l'heure. Est-ce assez franc ce que je vous dis
là?
M. CLOUTIER: J'apprécie que vous nous apportiez votre
collaboration là-dessus, et la remarque que j'ai faite pour vous et pour
la région de Val-d'Or, évidemment, nous la faisons pour toutes
les régions de la province. Il ne servirait à rien de moderniser
un appareil administratif, d'obtenir des informations de première main
quant aux statistiques dont nous avons besoin pour administrer, de recruter
beaucoup de monde pour administrer une loi sociale, d'avoir une bonne loi
sociale, si ceux qui, à la base, sont en contact avec la population, ne
remplissent pas ces exigences et n'ont pas ces qualités dont vous avez
parlé et dont nous avons parlé maintes fois et que nous mettons
en toute première place dans le recrutement du personnel.
Mais vous comprendrez, Mme Gauthier et tous ceux qui
s'intéressent à ce projet de loi, qu'évidemment il y avait
beaucoup de choses à faire. On sait quelles sont toutes les lacunes,
toutes les difficultés, on sait que le projet de loi, lui-même, ne
réglera pas tous les problèmes. Il est relié à
d'autres aspects que vous avez mentionnés, surtout l'aspect
économique, et l'importance que des emplois soient trouvés, que
l'économie soit renforcée, afin qu'il y ait de moins en moins de
gens qui soient obligés de faire appel à cette loi, à ce
bill no 26. Ce projet de loi est un complément. Il n'est pas en
lui-même je l'ai déjà dit et j'y reviens - une
solution à tous les problèmes.
Les problèmes de santé devront trouver une réponse
du côté de la santé. Les problèmes de
l'éducation devront trouver une réponse là et les
problèmes de chômage, là où l'économique doit
entrer en jeu. Alors ce sont des considérations que je voudrais vous
faire.
Je voudrais vous dire aussi que, quand vous nous dites que les lois sont
cachées et que, évidemment, les gens ne peuvent pas avoir toute
l'information qu'ils désirent, je crois bien qu'il est exact que, du
côté de l'information, il y a eu des déficiences. C'est
difficile -et je l'ai dit déjà - d'établir une
communication étroite, une communication directe entre les
assistés sociaux, d'une part, et le gouvernement, et l'application de
ces lois sociales. Mais j'ai dit aussi que, dans le cadre de cette loi, il sera
important que nous donnions de l'information et nous allons en donner sur cette
nouvelle loi, sur ses règlements, sur son application, sur les droits
des citoyens.
Je ne crois pas que, s'il y a eu dans le passé, appelons cela, si
vous voulez, de la réticence quant à fournir des informations, je
crois que c'est un aspect qui doit être corrigé et que les
assistés sociaux doivent savoir évidemment, s'il y a des lois,
s'il y a une réglementation, ce à quoi ils ont droit. Alors ce
sont les principaux points.
Quant à la question des listes d'assistés, vous avez
mentionné qu'il devrait y avoir une publication des listes
d'assistés, évidemment nos lois actuelles ne permettent pas de
divulguer des renseignements de nature aussi confidentielle. Vous avez
mentionné certains avantages à ce qu'il y ait publication des
listes, telle une certaine gêne pour certains qui abusent des lois de
l'assistance sociale. Par contre, il y en a d'autres pour lesquels cela est
relié de très près à l'intimité ou cela a
tellement un caractère personnel qu'évidemment je crois bien
qu'avant d'accorder, avant d'accepter une telle suggestion, il devrait y avoir
beaucoup plus d'études des implications d'une telle mesure.
Ce sont les considérations rapides que je voulais vous faire, et
vous dire aussi que, dans votre région -et l'on a parlé tout
à l'heure de comité de reclassement pour le retour au travail des
assistés sociaux - votre région va faire l'objet, avec le
coor-donnateur régional, M. Grenier, qui est dans le territoire, d'une
attention particulière, de sorte que nous pourrons aider, là
encore, le ministère de la Famille en prenant l'initiative avec tous les
autres ministères et les gens du milieu, les gens des agences, les gens
de l'entreprise privée, tous ceux qui peuvent aider dans ce secteur, au
retour au travail, au retour à la vie normale des assistés
sociaux.
M. LE PRESIDENT: Le député de D'Arcy-McGee.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je voudrais pour ma part,
féliciter Mme Gauthier de la contribution impressionnante qu'elle a
faite à nos discussions.
Je voudrais apporter une petite précision à des remarques
que j'ai faites dans la conversation avec M. Deboies auparavant. Je n'ai pas
dit, madame, qu'il est
facile d'administrer un budget très restreint. J'ai dit qu'il est
faux de prétendre que, si l'on met de l'argent entre les mains d'une
assistée sociale, elle est incapable de savoir quoi en faire. C'est ce
que j'ai voulu dire. Je comprends que les barèmes laissent à
désirer aux yeux des assistés sociaux. Nous avons la parole du
ministre que les nouveaux barèmes seront plus généreux.
Nous en sommes très contents. Mais je ne voudrais pas que
l'assisté social passe pour une personne incompétente. Elle est
très compétente, extrêmement compétente, justement
à cause de ce que vous avez souligné, car c'est tellement
difficile d'administrer un budget familial tellement limité.
Il y a plusieurs autres sujets que vous avez soulevés, je
voudrais les commenter très brièvement ou en commenter
quelques-uns.
Les étudiants qui ne trouvent pas de travail l'été:
c'est un problème que j'ai souligné à plusieurs reprises,
qui intéresse peut-être davantage pour l'instant, le
ministère de l'Education dans ce sens que l'étudiant est
réputé avoir gagné un certain montant d'argent pendant
l'été, même s'il n'a pas eu de travail. C'est un
problème assez sérieux, et je pense que l'on devrait
apprécier le problème de chaque individu qui demande un
prêt ou une bourse d'étude par la suite, et que le
ministère de la Famille et du Bien-Etre devrait donner un coup de main
ou demander au ministère du Travail de donner un coup de main à
ceux qui ne trouvent pas facilement du travail d'été.
Le problème des vieilles personnes est extrêmement
difficile. Il y a des efforts qui se font présentement pour leurtrouver
assez, non seulement de places, mais de services aussi. Nous avons de vieilles
personnes qui sont dans des foyers - et vous l'avez souligné, madame -
qui seraient chez elles, s'il y avait des services à domicile, pour leur
permettre de rester chez elles. Il y en a qui sont chez elles parce qu'il n'y a
pas de lits dans les foyers ou dans les hôpitaux, et qui restent beaucoup
trop longtemps chez elles, parce que l'on n'est pas en mesure de les accueillir
là où elles devraient être soignées. Il y en a qui
restent à l'hôpital beaucoup trop longtemps, parce qu'il n'y a pas
d'autre place pour une convalescence, ou même de services à
domicile, pour leur permettre de quitter l'hôpital. Et c'est
particulièrement le cas dans certains de nos grands hôpitaux
psychiatriques, de nos asiles pour aliénés. Il y a des gens qui
restent là simplement parce qu'ils sont vieux, et il n'y a pas d'autres
moyens de les faire soigner; donc, ils demeurent dans un tel asile. Et, il y en
a qui sont, malgré tout cela, mais à la porte des hôpitaux
de convalescence, ou pour le traitement des maladies chroniques, parce qu'il y
a des limites imposées sur la durée du séjour. Et, il n'y
a quand même pas de place où ils peuvent aller, et si l'on est
obligé de trouver des moyens de fortune, des pis-aller, pour en avoir
soin, parce que l'hôpital dit: II n'y a plus moyen pour nous de vous
garder.
Donc, en ce qui concerne le problème des personnes
âgées, on semble, pour l'instant, tourner en rond sur une
espèce de carrousel. J'espère fortement que les efforts qui se
font présentement au ministère aboutiront à des solutions
valables pour cet ensemble de problèmes.
Finalement, je reprends vos paroles sur le problème des
médicaments à l'intérieur du régime d'assistance
médicale. Nous savons que ce régime a été
créé en avril 1966, qu'avant sa création il y a eu un
grand débat où nos amis d'en face ont insisté sur le
défaut, la lacune, qui se trouvait dans ce régime, parce que l'on
n'incluait pas les médicaments. De notre côté, nous avions
répondu que c'était notre intention, après une courte
période d'expérience du régime, d'y ajouter les
médicaments. Aujourd'hui, après toute cette période de
temps, nous demandons toujours que les médicaments soient inclus. Il me
semble -je ne fais pas plus de partisanerie que cela - que nous sommes
arrivés à un point où il faut que quelque chose se fasse,
et j'espère que le gouvernement est en mesure de nous dire que,
très bientôt, quelque chose se fera dans ce domaine.
Et pour terminer, j'appuie tout ce que vous avez dit, madame, sur la
question de la politesse dans les bureaux du ministère. Le ministre se
rappellera sûrement qu'au tout début de nos débats sur les
crédits de son ministère, c'est un des problèmes les plus
importants que je me suis permis de souligner. Nous avons tous à coeur
la qualité de l'accueil qui est fait et qui sera fait aux
assistés sociaux dans les bureaux du gouvernement.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laurier.
M. LEVESQUE (Laurier): Sans recouper nécessairement - sauf dans
certains cas où il n'est peut-être pas mauvais d'insister à
plusieurs - je voudrais tout simplement reprendre certaines des remarques qu'a
faites le député de D'Arcy-McGee et ajouter peut-être deux
ou trois points qui me viennent à l'esprit, et qui sont
différents.
Je dois féliciter les représentants du Comité des
citoyens de Québec, et très particulièrement Mme Gauthier.
Je ne peux pas juger du détail de chacun des points qu'elle nous a
donnés pour nous éclairer, à partir de l'expérience
qui se vit en dehors des ministères et en dehors de la Chambre. Mais
chose certaine, c'est que je suis profondément impressionné. Ce
qu'a dit Mme Gauthier, en particulier, qui parlait de cas et de choses qui se
vivent, rejoint des impressions, mais trop rapides, parce que nous ne vivons
pas assez proche de chaque cas. Nous ne pouvons pas. Il y a des impressions
qu'un député accumule, et aussi ce que six mois à peu
près, un peu plus, un peu moins, dans le ministère du Bien-Etre
et de la Famille m'ont fait constater. Il y a une chose qui me frappe
particulièrement, c'est qu'en écoutant les gens qui
représentent des citoyens - et qui s'en occupent parce qu'ils se sont
donné ce rôle-là - et en comparant avec le climat du
ministère, et je dois le dire avec les remarques mêmes du
ministre, il y a un décalage qui m'inquiète et qui, à un
moment donné - je ne sais pas comment Mme Gauthier disait cela -en tout
cas, cela voulait dire: II y a quelque chose qui va nous sauter dans la face.
Et ce sont ceux qui sont en place qui vont l'avoir les premiers.
C'est que le décalage est entre, je crois, une insatisfaction de
plus en plus justifiée vis-à-vis de ce qui se passe, ou
plutôt de ce qui ne se passe pas, et le manque incroyable du sens de
l'urgence dans l'admi-
nistration publique, surtout celle qui touche aux hommes, aux gens et
à leur famille. On manque du sens du fait que ça presse et qu'on
doit agir.
Le rapport Boucher est paru en 1963, le gouvernement qui a fini en 1966
a sa responsabilité évidente. Nous sommes en 1969. Je me souviens
qu'il y eut des commissions qui ont siégé sur cette damnée
loi générale, qui avaient déjà été
mis en marche au moment où on a quitté le ministère. Nous
sommes trois ans et demi plus tard, et nous sommes encore en train de la
discuter. Nous attendons encore, soit dit en passant, les tables du
ministère, comme si c'était un profond mystère de discuter
de chiffres.
La loi qui a été déposée il y a des mois et,
en outre, les règlements sur lesquels on travaille depuis quelque temps,
on a nettement l'impression que, pendant que tout ça se fait, on
continue pour toutes sortes de raisons, dont les unes peuvent être
justifiables, d'autres peut-être moins, à discuter sur les
chiffres, même au niveau du cabinet, et que le ministre n'est pas capable
d'apporter le morceau. Je donne mes impressions telles que je les ressens.
Pour passer tout de suite à un sujet qui, pour moi, est une
obsession et où je voudrais recouper ce qu'a dit le député
de D'Arcy-McGee, je trouve également scandaleux, honteux,
invraisemblable, qu'on soit encore - il y a des mois qu'on l'a demandé
de nouveau -trois ans et demi après la mise en marche de l'assistance
médicale, dans une société où il n'y a pas un
damné médecin qui soigne autrement qu'avec des prescriptions neuf
fois sur dix, qu'on soit encore en train d'attendre le résultat de je ne
sais pas quel comité, qui a succédé à d'autres
comités, qui eux aussi étaient en marche en 1966 et que pour les
médicaments, ce n'est pas réglé.
Je crois que cela recoupe l'expérience des gens qui nous ont
parlé aujourd'hui. Comme député je trouve ça
honteux. Sans arrêt, on se heurte à des cas de ce genre-là.
Dans le cas des vieillards, c'est un fouillis, à mon humble avis. En
plus il y a le danger de devenir tellement obsédé par une
politique, qui est partiellement justifiable en soi, celle des foyers. Ces
foyers qu'on parachute littéralement et automatiquement à des
corporations dans tous les coins, et dont la Société
d'hypothèques et de logement, je crois, a la clef.
On oublie une chose évidente, c'est que, pour beaucoup de gens,
c'est un déracinement. Ce n'est peut-être pas vrai dans un petit
village ou dans une toute petite ville, où tout le monde, s'il y a un
foyer, n'est pas loin de son milieu habituel.
Mais dans des grandes villes ou dans des villes moyennes, c'est un
déracinement possible de gens qui pourraient très bien, et je
suis convaincu, à moindre coût, tout compris, vivre dans leur
milieu habituel, pourvu qu'on leur donne la chance de vivre et qu'un logement
modeste soit disponible.
Je serais même prêt, au point où en sont certaines
choses en tout cas le ministre a dit qu'on ne pouvait pas écarter
cela du revers de la main, et ça pourrait peut-être s'appliquer
dans d'autres domaines, je pense aux bourses par exemple - à discuter de
l'utilité de publier les noms. Moi aussi, j'ai l'impression que la
plupart des gens qui bénéficient du bien-être social et qui
en ont vraiment besoin, ça ne leur créerait pas tant de
problèmes que ça.
Mais, par ailleurs, on dirait qu'il est impossible de faire
disparaître vraiment les injustices, les passe-droits, le petit
"taponnage" de patronnage de coin. Peut-être dans un sens, en tout cas.
La loi ne le permet évidemment pas, je crois, aujourd'hui, mais chose
certaine, c'est qu'on devrait peut-être y penser.
Maintenant, le climat qu'a évoqué Mme Gauthier, c'est
celui qu'à l'occasion, sur certains cas, nous constatons nous aussi. On
doit prendre garde de traiter les gens comme des numéros, de les
balloter d'une place à l'autre ou, à l'occasion, de les faire
paralyser sur place par des gens dont il est trop généreux de
dire qu'ils sont qualifiés. Il y a toute une bonification du personnel,
dont on discute aussi. Elle est mise en marche tranquillement. Des
études à ce sujet se poursuivent continuellement.
Je suppose qu'on est en train d'établir une pédagogie de
ce que doit être quelqu'un qui sait recevoir ses concitoyens quand ils
sont mal pris. Mais une chose est certaine, c'est que même si, à
l'occasion, il fallait des coups de pied quelque part... Une idée
m'était déjà venue au ministère - que Mme Gauthier
reprend à sa façon c'est celle de ne pas avertir toujours
les bureaux. Ou, en tout cas, avoir un "spot check" si vous voulez ou une
espèce de chien de garde ambulant, qui irait voir ce qui se passe en
réalité dans les régions en dehors de la communication
officielle entre le ministère et les gens qui sont supposés le
représenter dans les régions.
Parce qu'il y a un paquet de choses qui disparaissent dans ces
communications officielles ou alors qu'on retrouve au moment où le mal
est fait. De toute façon les gens ont oublié, parce qu'il y a
d'autres maux qui se font pendant ce temps-là.
Evidemment, une autre chose a été dite par le
représentant des citoyens et revient au mot "justice". C'est qu'une
foule de sujets se recoupent. Le ministre a raison de dire: Evidemment, ce
n'est pas le ministère du Bien-Etre social et de la Famille qui peut
s'occuper des problèmes de l'éducation et de la santé,
quoique le ministère de la Santé soit au moins personnellement
relié. Mais il y a une chose certaine, c'est que, là encore, cela
nous fait toucher du doigt un peu - en quelle année ou quel
siècle cela se réalisera, on ne le sait pas - le fait que la
coordination entre ces petits empires ou ces espèces de royaumes avec
des murailles autour que sont devenus les ministères, et très
souvent même les divisions à l'intérieur d'un
ministère, il faudra, au lieu d'en parler, qu'on trouve le moyen de
briser ces compartiments, de faire travailler ensemble, non seulement les
ministres, mais les hauts-fonctionnaires et les gens à
l'intérieur d'un ministère, et surtout entre les
ministères qui sont complémentaires au point de vue de la
population, c'est-à-dire là où cela touche les gens dans
leur vie de tous les jours.
C'est peut-être une des façons - et là encore les
choses trament - une des façons serait de relier... Cela fait des
années qu'on a créé sur le papier - et Dieu sait si cela
prend du temps de passer du papier à la réalité - les
régions administratives du Québec, dix ou douze, enfin, avec des
chicanes entre les capitales ou les métropoles éventuelles, etc.
J'ai l'impression que cela tourne en rond.
Mais si le gouvernement voulait être présent à ses
administrés d'une façon convenable, une des choses
qui crèvent les yeux, c'est qu'il faudrait que les
ministères que l'on appelle les ministères des ressources
humaines - celui du ministre, tout particulièrement, mais aussi celui de
la Santé, celui de l'Education, du Travail et de la Main-d'oeuvre
que ces ministères, au moins le plus vite possible, s'établissent
dans des régions de façon coordonnée, qu'on ne soit pas
obligé de courir à 25 adresses pour trouver des gens qui
devraient être complémentaires et qui devraient travailler sous
une seule direction générale. Parce que c'est de cette seule
façon que le gouvernement, l'administration publique pourra être
disponible, d'une manière convenable, pour les gens qui vivent
là, quelque part dans le Québec, et non pas seulement à
Québec, avec des téléphones qui rejoignent le travail,
mais à partir de tel empire. Cela coordonne très mal ou cela ne
coordonne pas du tout ceux qui rejoignent le Bien-Etre, mais à partir de
l'autre royaume, il faudrait que cela soit coordonné dans les
régions, pour que les gens sachent ce qui leur arrive et sachent aussi
au besoin à qui s'adresser lorsque cela va mal.
Et je terminerai en disant ceci, c'est que tout compris - peu importe
qu'il y ait des morceaux... Je pense que Mme Gauthier a pris sa
responsabilité et, c'est la première fois que j'entends un
témoignage de ce genre, aussi concret et aussi précis. Nous avons
un service d'enregistrement ici. Je proposerais à tout le moins que
l'essentiel - et tel quel à part cela, qu'on ne commence pas à le
mettre en jargon - du discours et de l'intervention de Mme Gauthier
mériterait d'être transcrit au complet ou à peu
près, recopié pour le Cabinet, chacun des collègues de
l'honorable ministre - peut-être pas tous les députés, je
regrette, mais nous n'avons pas tous été ici, ce matin, chacun a
son travail - et certainement pour tous les fonctionnaires le moindrement
appelés à signer quoi que ce soit dans le ministère de la
Famille et du Bien-Etre social.
Et encore une fois, je félicite ceux qui se sont
dérangés ce matin.
M. CLOUTIER: M. le Président, un mot seulement au sujet de la
dernière observation du député. Je pense bien que le
journal des Débats étant édité, il est facile de
faire une distribution...
M. LEVESQUE (Laurier): Faites-en une belle petite plaquette avec la
photo de Mme Gauthier, et qu'on ait une chance au moins de savoir que cela a
été dit.
M. CLOUTIER: Une photo en couleur, M. le député de
Laurier.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie. Nous entendrons maintenant le
mémoire du Conseil des Oeuvres de Montréal, qui, je pense, est un
mémoire conjoint avec The Montreal Council of Social Agencies.
M. PRETTY: Louis Pretty, président du Conseil des Oeuvres de
Montréal.
M. le Président, M. le Ministre, M. le sous-ministre, messieurs
les députés. Tout d'abord nous aimerions vous remercier pour
l'occasion que nous avons eue de vous présenter le mémoire que
nous avons préparé.
Le Conseil des Oeuvres de Montréal et le Montreal
Council of Social Agencies, de par leurs objectifs, se sentent
responsables de promouvoir le bien-être de la population et d'apporter
une contribution à l'élaboration des politiques et mesures aptes
à cette promotion.
Ainsi, l'étude du bill 26, projet de loi de l'aide sociale et du
projet de règlements s'y rapportant, s'inscrit dans les
préoccupations régulières des deux conseils. Nous
tenterons donc de critiquer ce bill à la lumière de nos
expériences particulières et selon nos prises de position et
déclarations de principe antérieures.
La politique sociale préconisée par les deux conseils a
fait l'objet d'un mémoire présenté à la Commission
royale d'enquête sur la santé et le bien-être social. Ce
mémoire, "Une politique sociale pour le Québec", tente de
définir des objectifs souhaitables dans divers aspects de
l'activité humaine; la sécurité financière y est
décrite comme un bien nécessaire au développement social
des familles et des personnes seules. L'objectif proposé par le
mémoire en matière de sécurité financière
est "d'assurer à chaque famille et chaque personne hors famille un
revenu minimal qui leur permette de satisfaire leurs besoins fondamentaux".
Pour réaliser cet objectif primordial que constitue la
sécurité financière, le mémoire fait plusieurs
recommandations dont nous rapportons maintenant les principales.
"Premièrement, que soit réalisée, le plus tôt
possible, l'intégration de tous les régimes visant à
assurer la sécurité financière des citoyens
québécois, comme première étape vers
l'établissement d'un revenu minimal garanti. "Deuxièmement, que
soit banni du régime unique de revenu minimal garanti le "means test"
dans sa forme actuelle. "Troisièmement, que ce revenu minimal soit
fixé à un taux adéquat, c'est-à-dire correspondant
aux besoins réels des familles et des individus. "Quatrièmement,
que ce revenu minimal garanti soit un revenu familial, sauf dans le cas des
personnes seules. "Cinquièmement, que ce revenu minimal soit
indexé annuellement à l'évolution du coût de la vie
et des besoins, à la grandeur de la famille et à l'âge des
enfants. "Sixièmement, que ce revenu minimal soit accessible à
tous les citoyens, sans exception et quelles que soient les circonstances, dont
le revenu annuel est inférieur à la norme fixée.
"Septièmement, qu'une caisse d'assistance financière d'urgence
soit maintenue pour permettre de faire face aux situations
imprévues".
C'est à la lumière de ces recommandations
antérieures que nous ferons une critique du bill 26, projet de loi
d'aide sociale, présenté à la quatrième session de
la vingt-huitième Législature, et suggérerons des
modifications au projet de loi et au projet de règlements s'y
rapportant. Nous sommes reconnaissants au ministre de la Famille et du
Bien-Etre social et à l'Assemblée nationale d'avoir
créé cette commission parlementaire pour permettre aux
différents corps intermédiaires du Québec de faire
entendre leur point de vue.
A ce moment-ci, je demanderai à M. Yvon Belley, le directeur
général du Conseil des oeuvres, de prendre la parole.
M. BELLEY: Peut-être qu'on pourrait maintenant essayer de donner
les remarques générales. Les membres de cette assemblée
ont en main je pense, le texte du mémoire. Je vais essayer de le lire
rapidement. Quant aux remarques particulières, par la suite, M. Leahey,
qui a été le coordonnateur du mémoire ou du projet pourra
donner plus d'explications détaillées, si vous le
préférez.
Nous nous demandons si le bill ou le projet de loi numéro 26 est
vraiment un pas vers le revenu minimal garanti. Il faut noter que le projet
réalise cette intégration des divers régimes que nous
souhaitions et considérions justement comme une première
étape en vue de l'établissement du revenu minimal. Nous
considérons aussi que le bill 26, en accordant l'aide sociale sur la
base de la différence entre les revenus et les besoins des familles et
personnes hors familles, représente une amélioration par rapport
aux lois d'aide sociale actuellement en vigueur.
Toutefois parce qu'il y a un "toutefois" - nous pensons que le
bill ne garantit pas absolument que les besoins réels seront
considérés car rien n'assure que les normes de départ
seront adéquates, d'une part, et qu'elles seront ensuite ajustées
selon le coût de la vie, d'autre part. Il est regrettable, à notre
avis, que le projet de règlements ne nous ait pas permis de faire des
comparaisons entre les barèmes d'assistance actuels et les allocations
que permettra la nouvelle loi.
Le bill 26 améliore incontestablement le régime actuel
d'aide sociale. Il n'assure toutefois pas un revenu à tous les citoyens,
sans exception, quelles que soient les circonstances et sans ce fameux "means
test", comme le ferait une mesure comme le revenu minimal garanti. Donc,
à ce point de vue, le bill 26 ne répond pas à l'objectif
plus général que la société doit poursuivre,
objectif que vous a signalé le président du Conseil des oeuvres
tantôt.
Une critique assez générale que nous faisons concernant le
bill, c'est la possibilité d'arbitraire. En considérant le projet
dans sa perspective réelle, c'est-à-dire comme une mesure
d'assistance - parce qu'en fait, c'est une mesure d'assistance, et non un
revenu minimal nous devons formuler une autre critique
générale: cette possibilité, justement d'arbitraire, qui
est présente dans beaucoup d'articles du bill, et qui en diminue
singulièrement la portée bénéfique.
En effet, les conditions, auxquelles sont soumises l'obtention et la
continuation de l'aide, sont sujettes à des décisions qui
pourraient être tout à fait arbitraires selon les dispositions du
projet de loi et de règlements. On peut dire que l'exercice du droit
d'appel reconnu aux citoyens, et qui devrait les garantir contre ces
décisions arbitraires, n'est pas, en soi, assorti de toutes les
garanties d'impartialité. Nous pensons qu'il s'agit de la faiblesse
majeure, ou d'une des faiblesses majeures du projet, et nous suggérons,
comme vous le verrez tantôt dans le détail, quelques moyens d'y
remédier.
La complémentarité des politiques a été
signalée tantôt par quelques membres de la commission. Nous
pensons que cette mesure, tout en contribuant à la
sécurité financière des citoyens, n'est pas plus qu'une
mesure d'assistance, et qu'une des mesures qui peuvent contribuer au
développement social; plus précisément, il faudrait que
l'Etat poursuive en même temps les politiques cohérentes de plein
emploi, de main-d'oeuvre, de santé, de protection du consommateur,
politique d'habitation, politique de la famille, etc., pour que la loi d'aide
sociale réalise vraiment son objectif.
Les exemples qui suivent ne servent qu'à démontrer que,
justement, il y a une relation très étroite entre les
différentes dimensions de la politique sociale, entre autres dans le
domaine de la santé. On sait très bien que si les services ou les
soins sont inadéquats, inacessibles, financièrement et
culturellement, il peut y avoir comme conséquences une augmentation des
déboursés de l'assistance publique, et la diminution de la
rentabilité des entreprises. On n'a pas à insister
là-dessus. Plusieurs études, comme on l'a souligné
tantôt, le rapport Boucher, entre autres, et le premier rapport ou le
deuxième, je crois, de la Commission d'enquête sur la santé
et le bien-être social, la commission Castonguay, démontrent que
la maladie constitue l'une des principales causes de la pauvreté. C'est
la même chose entre le chômage, évidemment, et
l'assistance.
Il est illusoire de penser diminuer le nombre d'assistés sociaux,
aptes au travail, en leur imposant une série de contraintes, alors que
le développement économique d'une province ou d'une
région, ne permet pas d'employer plus de 95 p.c. de sa main-d'oeuvre.
Or, les politiques de main-d'oeuvre pour l'immigrant, le jeune travailleur, le
travailleur handicapé ou le travailleur âgé, peuvent
apporter certains correctifs, mais à condition d'être dynamiques
et coordonnés.
L'interdépendance des différentes dimensions de la
politique sociale est tellement réelle que la loi d'aide sociale
pourrait avoir pour résultat indirect de subventionner les entreprises
marginales, non productives, les taudis, les compagnies prêteuses et les
exploiteurs professionnels, si on ne poursuit pas en même temps des
politiques positives et dynamiques de développement économique et
de développement social.
Maintenant, avant de passer aux détails, je ne sais pas, il
serait peut-être à propos que le président du Montreal
Council, M. Legged - puisque c'est un mémoire conjoint
présente aussi des remarques générales qui sont
peut-être plus particulières au Montreal Council... Est-ce que
vous aimez les faire tout de suite, monsieur...
M. LEGGED: Merci, M. le Ministre, de nous offrir cette occasion de faire
quelques remarques sur cette nouvelle loi; si vous le permettez, je vais parler
dans ma langue maternelle. C'est possible, cela? Merci.
We wish to commend the Government for this very excellent integration of
much existing legislation into Bill 26. We think this is a move in the right
direction. We recognize that the bill, also, is an attempt to provide in the
long term, for a guaranteed annuel income, for the needy and the low income
people. This is also a very good and excellent move.
On a few detail points, we believe that provision, as
set out in the law for all individuals to work in order to get
assistance under this Act, is a good thing but we do feel that more provisions
should be made in the Act for persons who are unable to work such as the aged,
medically unfit, psychologically unfit persons.
A little more details on the Act or some regulations with respect to
these people to protect their rights, we believe should be in. On the
subjective investigation of the individual, the means test, we are against a
100 p.c. investigation in this instance. We believe that some form of sampling
technique should be developed on a regional basis. We think that this would be
more politically acceptable, less costly and will reduce the friction between
the client and the professional worker. We recognize that there are great many
difficulties in this connection but we think that something could be worked out
in this area.
As experience is gained with this bill, we would hope that the
provisions of the bill and the law would be broadened to provide for a much
more comprehensive social service which would be integrated more deeply into
the plans for the economy of the Province. In other words, this should be
ultimately integrated into the economy of the Province to affect all persons in
the population.
Also along this line, as the Act is developed, and you have more
experience with it, we would hope that the Government and the various agencies
involved would developed what we would call "norms" or "terms of reference", so
that various cases in the Province could be treated on a fairly consistent
basis. There is a fair amount of flexibility given to the Minister to
arbitrate, in many instances, in this bill, and we feel the flexibility is a
good thing but we think that you should think, as you go along, of developing
"les normes", "les termes de référence" so that various cases can
be treated on a consistent basis.
In future, I think both councils would welcome more dialogue and
discussion with departments of the Government and the Government prior to the
law coming into effect. We feel that this will have a beneficiary effect and
will - how can I put it give us a better chance to express ourselves
and, as a result of this, we would hope for you to get a better understanding
of how the lay person feels about this type of legislation.
As a closing remark, I would like to say that we feel that, because a
person is poor economically, this should not be a degrading thing. He is a
citizen of this Province and, as a citizen of the Province, the fact that he
has not as much money as somebody else should not be held against him. And the
law should not, in any respect, have the effect of degrading this particular
person because he is being given aid.
There are my remarks.
M. PRETTY: Maintenant M. Leahey, le responsable du mémoire du
Conseil des Oeuvres de Montréal, va nous présenter des remarques
particulières.
M. LEAHEY: La première remarque particulière que nous
voulons faire porte sur les besoins. Nous remarquons que le projet de loi
établi par l'article 5 fait une distinction très nette entre les
besoins ordinaires et les besoins spéciaux. Par ailleurs, l'article 5
encore et le règlement 3.06 donnent une certaine définition de
ces besoins.
Nous trouvons que cette définition est trop restreinte et
qu'à notre avis, il faudrait y ajouter, au moins, les articles suivants:
Service de gardiennes à domicile; frais de transport pour visiter un
membre de la famille hospitalisé; frais de transport pour se faire
soigner en clinique externe. Ce ne sont que des exemples.
Pour d'autres besoins spéciaux, nous pensons que la loi devrait
laisser un peu de latitude aux bureaux régionaux, étant
donné la difficulté même de prévoir ces besoins
spéciaux. Par ailleurs, la notion même de besoin évolue et
nous pensons que la loi devrait le reconnaître expressément.
Enfin, une deuxième remarque sur les besoins porte sur les
critères établis dans la loi et les règlements qui
permettent le paiement de ces besoins-là aux assistés sociaux.
Nous remarquons d'abord que des critères différents sont
employés pour payer les besoins spéciaux et les besoins
ordinaires. Les besoins spéciaux sont payés selon les tarifs
minimaux en vigueur dans la région dont il est question alors que les
besoins ordinaires sont soumis à un montant, c'est-à-dire que les
besoins ordinaires sont payés selon un montant ou soumis à un
maximum fixé ou déterminé de temps à autre par le
gouvernement. Alors, on peut s'interroger sur le pourquoi de cette distinction.
S'il est vrai que, pour recevoir les soins spéciaux, les soins
médicaux, tel que décrit dans les règlements, il faut
payer un certain minimum, il en est de même pour les besoins
ordinaires.
Il me semble qu'il pourrait s'ensuivre que l'allocation sociale
versée pour les frais de médecins, dentistes, pharmaciens, etc.,
soit payée selon les tarifs en vigueur, alors que l'allocation sociale
payée directement aux familles ou personnes seules, pour leurs besoins
ordinaires, soit soumise à des décisions dont la
périodicité est soumise à l'arbitraire.
Par ailleurs, s'il nous semble possible d'observer dans le bill et dans
les règlements s'y rapportant, la volonté du gouvernement
d'adapter l'allocation sociale aux changements du coût de la vie, nous
nous demandons pourquoi ne pas indexer directement et obligatoirement
l'allocation sociale au coût de la vie.
Nous croyons essentiel que l'allocation sociale soit accordée aux
individus et familles selon les coûts réels nécessaires
pour satisfaire à leurs besoins ordinaires et spéciaux. Et
à cette fin, nous insistons pour que, établis au départ
à un niveau réaliste, les montants accordés soient
revisés tous les six mois, pour tenir compte de l'augmentation du
coût de la vie et des changements de besoins.
Par ailleurs, nous aimerions que le bill prévoie que l'aide
puisse être accordée immédiatement en cas d'urgence. La
deuxième série de remarques particulières, que nous
voulons faire sur le bill et les règlements, porte sur l'initiative et
la participation d'une part et la liberté des citoyens d'autre part.
Nous nous réjouissons de l'intention de prévention et de
réadaptation qui apparaît aux articles 8, 9 et 10 du bill.
Cependant, nous notons que le règlement 5.06, portant sur les plans de
relèvement, laisse assez peu de
place à l'initiative et à la participation des citoyens.
Or, il nous semble que, pour que ces plans de relèvement aient le
maximum de chances de réussite, l'initiative et la participation des
citoyens soient absolument essentielles.
Suggérons donc que le projet de loi et les règlements
soient amendés dans ce sens, afin de permettre cette participation et
afin de laisser une certaine initiative aux citoyens. Enfin, nous
suggérons que l'étude et le choix des plans de relèvement
soient faits par une équipe de gens compétents en la
matière et reconnus pour leur compréhension des problèmes
sociaux, plutôt que par une seule personne. Cette équipe devrait
comprendre aussi des non-fonctionnaires.
L'article 12 prévoit que toute personne qui, sans raisons
suffisantes, refuse ou abandonne un emploi qu'elle pourrait remplir ou
continuer à remplir, peut se voir refuser l'allocation sociale. A cause
de la possibilité de décision arbitraire sur cet article, nous
croyons que la loi risque de devenir, injustement, coercitive et punitive.
Nous avons deux questions à poser se rapportant à cet
article. Nous demandons que soit définie exactement l'autorité
qui aura à prendre position sur cette disposition de la loi. Nous
demandons aussi sur quels critères les fonctionnaires se baseront, pour
décider des raisons suffisantes qu'aurait un citoyen de laisser un
emploi, ou comment on arrivera à définir, comment un citoyen
pourrait remplir ou continuer à remplir un emploi.
Nous suggérons que l'on étudie la possibilité de
constituer des comités régionaux composés de personnes
compétentes, et de disciplines variées, pour prendre les
décisions sur les cas visés par l'article 12.
La troisième section des remarques particulières porte sur
la famille et les personnes seules.
Nous reconnaissons comme une amélioration le calcul des besoins
sur une base familiale. Cependant, cette particularité exige une
définition précise des termes "famille" et "personne seule" de
façon à prévoir tous les cas possibles. Or, certaines
imprécisions dans le texte du projet de loi nous font redouter des
difficultés dans son application.
La quatrième section de nos remarques particulières porte
sur la détermination de l'admissibilité.
Nous reconnaissons la nécessité d'une certaine
vérification des demandes d'aide sociale, afin que l'aide
accordée réponde à des besoins réels. Cependant,
nous croyons que la procédure de détermination de
l'éligibilité, telle que prévue au règlement 5.05,
risque d'entraîner la violation de la vie privée, et le manque de
respect de la dignité humaine des citoyens.
Des expériences ont été, et sont actuellement
faites, dans divers états américains sur de nouvelles
méthodes de détermination d'admissibilité. Nous rapportons
ici un résumé très rapide d'une publication que nous
possédons, et qui donne les résultats de ces
expériences-là.
Ces procédures de détermination, qui sont actuellement
expérimentées, sont basées sur une déclaration
personnelle du candidat, et cette méthode est appuyée sur
l'hypothèse que les individus sont responsables et capables de fournir
l'information nécessaire à la détermination de
l'éligibilité, sans qu'une entrevue personnelle et des efforts
souvent inutiles et humiliants de vérification de l'information soient
nécessaires.
L'expérience américaine comporterait les avantages
suivants: respect de la dignité des candidats; meilleure utilisation du
personnel professionnel; participation maximale des candidats; diminution des
erreurs dues aux fonctionnaires; grande rapidité dans l'attribution de
l'aide; et, de façon globale, plus grande efficacité
administrative.
Nous recommandons donc que la procédure de détermination
de l'éligibilité des candidats à l'aide sociale soit
réétudiée à la lumière des
expériences étrangères et que tous les efforts soient
faits pour expérimenter ici ce qui semble constituer une grande
amélioration administrative et sociale.
Il est évident que nous ne pouvons pas faire ceci du jour au
lendemain. Entre-temps, s'il est nécessaire d'effectuer les
opérations prévues à l'article 5.05 du projet de
règlements, nous suggérons que l'on fasse tous les efforts pour
susciter une participation du requérant à toutes les phases
prévues à l'article 5.05, c'est-à-dire, en particulier,
sur l'appréciation de la durée de l'aide et de la forme la mieux
appropriée. Nous demandons aussi cette participation sur l'analyse des
circonstances et des besoins qui amènent les personnes en cause à
recourir à l'aide sociale.
Par ailleurs, nous croyons que ces analyses devraient être faites
par des spécialistes, ou ne pas être faites du tout. Nous
suggérons également que toutes les précautions soient
prises pour respecter la vie privée et la dignité humaine des
requérants. Une de ces façons serait de veiller à ce que
les administrateurs de la loi reçoivent une formation
appropriée.
La remarque suivante porte sur les taux d'intérêt.
Nous croyons que le gouvernement ne devrait jamais garantir ou
permettre, selon cette loi, des emprunts à des taux supérieurs
à ceux qu'il doit payer lui-même pour ses emprunts, pour les
mêmes termes.
Dans un autre article, nous demandons que, de même que l'article
29 prévoit que le requérant doit être informé de son
droit d'appel, lorsqu'il reçoit la réponse à sa demande de
révision, nous suggérons qu'il soit également
informé de son droit de révision. Ce que le bill ne
prévoit pas actuellement.
Nous suggérons que le ministre, avant de procéder à
la nomination des commissaires, procède à des consultations
auprès des corps intermédiaires intéressés, comme
cela se fait pour la nomination des membres de certains conseils
supérieurs.
Enfin, sur les pouvoirs de la commission d'appel, nous croyons que ces
pouvoirs devraient inclure la possibilité de prendre une décision
sur une cause type et d'y référer ensuite les cas similaires.
Egalement, la commission devrait pouvoir proposer des modifications
à la loi ou aux règlements lorsqu'à son avis des articles
sont inapplicables ou susceptibles de causer des préjudices graves.
Enfin nous suggérons l'insertion, dans les dispositions diverses,
d'un article portant sur l'information relative à la loi. Chaque bureau
régional chargé d'appliquer l'aide devrait être
suffisamment équipé pour répondre à toute demande
d'information de la
part de la population. Peut-être faudrait-il prévoir aussi
la publication d'une ou de plusieurs borchures d'information vulgarisée
sur la loi d'aide sociale.
Enfin, pour terminer, une remarque sur les services de bien-être
social. Le terme "plan de relèvement", dont il est question dans le
projet de loi, n'a pas été défini et suppose toute une
gamme de services qui ne sont pas mentionnés dans le bill ou les projets
de règlements, ce qui est indispensable quand on les conçoit
comme services ayant pour but d'atténuer, de supprimer ou de
prévenir les causes et les effets de la pauvreté, de la
dépendance, de l'assistance; ainsi les services sociaux personnels, les
services d'orientation et les services de développement
communautaire
Comme ils ne sont pas mentionnés, on peut se poser la question,
à savoir quelle relation existera entre les services qui appliqueront la
loi et les autres services, d'une part, et qui dispensera les services qui
doivent accompagner l'assistance financière, d'autre part. Nous ne
prenons pas position, mais nous suggérons qu'avant d'arrêter une
politique à cet égard il y aurait avantage à obtenir des
consultations dans le Québec avec les agences sociales et les conseils
de bien-être ou de développement social qui ont été
traditionnellement reliés étroitement aux organismes
gouvernementaux de bien-être.
M. PRETTY: Alors, pour terminer, je remercierai de nouveau la commission
qui a permis d'exposer nos points de vue. Excusez-moi un instant. Mme Howlett
du Montreal Council of Social Aid.
MME HOWLETT: On m'a tout a fait oubliée. M. le Ministre, si vous
permettez, je voulais ajouter quelques remarques pour compléter celles
de Mme Gauthier, qui m'ont beaucoup frappée. Je ne peux pas partir sans
remarquer la différence de présentation entre une personne qui
vit la situation et nous qui travaillons. Nous avons notre rôle à
jouer, n'est-ce pas, mais puisqu'il faut faire une présentation assez
étudiée, en profondeur, il faut la faire par écrit et on
ne peut pas le dire spontanément.
Mais pour appuyer Mme Gauthier et pour compléter ses remarques,
j'ai eu une expérience que je veux vous raconter pour vous encourager,
M. le Ministre, parce que je me suis faite assistée sociale, un jour.
J'ai fait la queue pour recevoir une assistance sociale. Je voulais savoir de
première main ce qu'était l'expérience d'une
assistée sociale et j'ai été bien, bien
impressionnée par la réception qu'elles ont eue à
Montréal. C'était au marché Atwater.
Nous avons fait la queue pendant une heure et demie et il n'y avait pas
de siège. Une personne s'est évanouie. Quand même, une fois
rendus dans le bureau, ce n'était pas la faute des officiers du bureau,
n'est-ce pas, si nous attendions depuis une heure et demie, parce qu'il faut
être là. Tout le monde se rend là de bonne heure.
Alors voici que, après cette expérience, j'ai
appelé le bureau du Bien-Etre à Montréal et j'ai
expliqué qu'il n'y avait pas de banc. On m'a dit qu'on allait en
installer tout de suite. Je ne suis pas retournée pour voir s'ils
avaient vraiment installer les bancs, mais tout de suite on a compris la
situation. Il paraît que les meubles venaient d'être repeints et
qu'on avait peur de les égratigner.
Alors, on n'a pas replacé les bancs. Je voulais aussi vous donner
l'autre côté de la médaille parce qu'il y a de bonnes
choses qui se font dans le bien-être, à Montréal en tout
cas. Je vous remercie beaucoup de nous avoir reçus aujourd'hui. Je
trouve que le bill ne répond pas à tous les besoins, mais au
moins c'est un commencement. Je vous en félicite. Merci.
M. CLOUTIER: Un mot seulement pour remercier ceux qui sont venus au nom
du Conseil des oeuvres et du Montreal Council of Social Agencies devant la
commission nous apporter un mémoire qui a dû demander beaucoup de
travail et de réflexion. Nous le considérons comme une
contribution extrêmement importante à nos
délibérations. Nos officiers, les membres de la commission
d'abord, le prendront en sérieuse considération, et au
ministère, tous les mémoires qui nous ont été remis
feront l'objet d'études additionnelles par nos comités qui
travaillent sur ce projet de loi et le projet de réglementation.
Pour ajouter à ce que Mme Howlett disait il y a un instant, nous
avions bien compris que Mme Gauthier, dans son exposé, a fait ressortir
évidemment les lacunes qu'elle a rencontrées. Elle n'est pas
venue devant la commission - et ce n'est pas le rôle non plus de ceux qui
viennent devant la commission - souligner précisément ce qui
fonctionne bien. C'est surtout pour mentionner les lacunes, les
déficiences, et c'est de cela surtout que nous avons besoin et c'est
là où nous voulons apporter des corrections.
Comme vous l'avez mentionné, Mme Howlett et nous vous
remercions qu'il y ait des bonnes choses dans le fonctionnement du
système, c'est évident; parce que s'il n'y avait pas eu tout de
même une certaine consistance dans la distribution de l'assistance
sociale, s'il n'y avait pas eu une expérience extrêmement riche de
ce côté-là qui s'est accumulée avec les
années, s'il n'y avait par eu de la bonne volonté de la part du
personnel au service du bien-être de la ville de Montréal et
partout en province, il y a longtemps que tout ce système de lois
qui n'ont pas assez de coordination entre elles - se serait
écroulé. De toute façon, nous considérons aussi que
c'est là un point de départ, le projet de loi qui nous est
présenté, le projet de réglementation.
Il vous apparaît qu'il y a des normes qui sont peut-être
imprécises. D y a le caractère de souplesse on l'a
mentionné à introduire dans une loi, dans une
réglementation. Mais, s'il y a des choses qui sont imprécises, il
n'y a pas de doute qu'avec l'expérience, après avoir
corrigé les lacunes, les déficiences qui existent actuellement,
après avoir aussi fait prendre conscience à une certaine partie
des gens qui sollicitent de l'assistance sociale, non seulement des droits
qu'ils ont mais aussi des devoirs et des responsabilités qu'ils ont de
travailler eux-mêmes à leur propre réhabilitation, une fois
que ce contexte sera bien installé, je pense que la coordination, de la
participation des citoyens... Je crois que la participation des citoyens, il
est évident par leur présence ici devant les commissions, qu'ils
la désirent cette participation.
Alors, en collaboration, avec la participation des
citoyens, les agences et le gouvernement qui travaillent dans ce
secteur, après avoir posé ce premier jalon important qu'est le
bill 26 et sa réglementation, je crois que dans les années
à venir, nous serons en mesure, une fois que le système sera
mieux rodé, de préciser davantage, d'ajouter à cela des
expériences que nous devrons ajouter, une meilleure participation de la
part des autres ministères et cela est déjà
assuré.
Je reprends une remarque qu'a faite tantôt le député
de Laurier en parlant du cloisonnement entre les ministères. Je crois
que l'on peut dire maintenant que ce décloisonnement est presque
assuré parce qu'il y a de nombreux comités
interministériels qui travaillent très étroitement. Je
voudrais en mentionner un en particulier, c'est celui qui réunit, pour
le reclassement des assistés sociaux, le ministère du Travail
avec le ministère de la Famille, le ministère de la Santé,
le ministère de l'Industrie et du Commerce et le ministère des
Terres et Forêts; c'est un comité qui a déjà -
après quelques mois d'existence - fait des réalisations dignes de
mention.
Evidemment, il y a aussi d'autres comités qui fonctionnent dans
le secteur de la santé et du bien-être. Je ne voudrais pas
reprendre toutes les discussions, les remarques qui ont été
faites tantôt par le député de D'Arcy-McGee et le
député de Laurier.
Je dois dire que beaucoup de ces questions, évidemment, ont
été discutées lors de l'étude en commission, le
printemps dernier, et je ne voudrais pas reprendre ici, pour ne pas trop
allonger la discussion, toutes ces questions qui nous préoccupent: les
médicaments, les plans d'assurance maladie ou la réhabilitation.
Alors je remercie donc en terminant ceux qui sont venus devant la commission
nous apporter cette contribution extrêmement positive.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je ne voudrais pas que Mme Howlett
et ces messieurs partent offusqués si nous ne posons pas beaucoup de
questions. Vous nous avez, de façon très courtoise, envoyé
votre mémoire par le courrier. Nous avons eu l'occasion de
l'étudier à tête reposée. Nous sommes, comme il se
doit, impressionnés par les commentaires que vous faites; je ne voudrais
en reprendre que deux. Vous insistez sur l'information qui doit être
à la disposition de l'assisté social et de tous ceux qui
travaillent dans le domaine du service social. Cette information n'a pas,
à mon avis, été suffisante par le passé. Nous
encourageons depuis quelques temps le gouvernement à améliorer
ses services d'information.
Dans votre dernier paragraphe, vous dites qu'il y aurait avantage
à tenir des consultations dans le Québec avec les agences
sociales et les conseils de bien-être ou de développement social.
Je dirai aussi avec les assistés sociaux et je crois que nous sommes,
ici, limités dans nos contacts par le fait que vous êtes
obligés de vous déplacer pour venir nous rencontrer. Depuis
quelque temps nous commençons à envisager -je ne sais pas dans
quelle mesure cela sera possible -le déplacement des commissions
parlementaires pour rencontrer les gens sur place. Dans le cas des
assistés sociaux, je pense qu'il est hautement désirable que nous
le fassions. J'espère que ce sera une politique du Parlement à
l'avenir.
M. LE PRESIDENT: Merci. Monsieur, voulez-vous vous approcher s'il vous
plaît?
M. HANLEY: A propos de la situation des pauvres au bureau du
bien-être social au marché Atwater, je veux apporter une remarque
à l'intention de la dame. Ce n'est pas la faute du ministre de la
Santé du Québec si les pauvres de la ville de Montréal
sont classés comme des animaux dans la salle du bien-être social.
Quand j'ai reçu une plainte, pas une douzaine, une plainte sur les
conditions de ce local, j'ai fait une inspection. Sur le même plancher,
M. le Ministre, le maire Drapeau a des bureaux pour la loterie, luxueux, bien
illuminés, bien peinturés, beaucoup de chaises, beaucoup de
pupitres et beaucoup de fonctionnaires. Ah! non, vraiment! De l'autre
côté, sur le même plancher, les pauvres, comme le dit
madame, comme des animaux, n'ont pas de sièges, n'ont pas de
lumière, dans des conditions comme cela. J'ai expliqué à
la direction, au directeur du bien-être social de Montréal, les
conditions d'un service qui reçoit un million de dollars par
année et d'un autre, le bureau du bien-être social qui
dépense beaucoup, beaucoup de millions de dollars par année,
beaucoup de dollars des contribuables de Montréal, de l'argent du
bien-être social de Québec.
Comme le dit, Mme Howlett, aujourd'hui, ce ne sont pas les mêmes
conditions aujourd'hui, parce que le directeur du bien-être social a agi.
Aujourd'hui, nous avons des bureaux avec des chaises, avec des bancs et
beaucoup de lumière, pour les pauvres dans le local du bien-être
social de Montréal. Est-ce vrai ou non, madame, aujourd'hui? Est-ce
qu'il y a une amélioration dans les locaux du bien-être social au
marché Atwater aujourd'hui?
MME HOWLETT: Je ne sais pas, parce que je n'y suis pas retournée.
Je sais que j'ai été très bien accueillie lorsque j'ai
appelé pour leur dire qu'on avait besoin de bancs.
M. HANLEY: Voulez-vous y faire un tour, madame? Aujourd'hui, il y a
grand changement là.
M. CLOUTIER: Je suis sûr que le maire Drapeau recevra avec
beaucoup de bienveillance les remarques du député de Sainte-Anne
sur l'aménagement des bureaux de la ville de Montréal.
M. GOLDBLOOM: Sachant d'où elles viennent.
M. LE PRESIDENT: Nous inviterons l'organisme suivant qui est The Family
Association of Montreal.
Est-ce qu'il y a des représentants de cette association? Est-ce
que M. Thompson est là? M. C.E.R. Thompson? Il est absent.
Mr. GOLDBLOOM: Or, perhaps, could we ask the members of The Montreal
Council of Social Agencies if we are to consider that the brief of The Family
Association of Montreal as a joint brief with Le Conseil des Oeuvres de
Montréal and the Montreal Council?
MRS. HOWLETT: No.
MR. GOLDBLOOM: Thank you.
M. LE PRESIDENT: Nous passerons à l'organisme suivant qui est la
Corporation des travailleurs sociaux du Québec.
Madame? Vous êtes madame?
MME MONTPETIT: Je suis madame Montpetit.
M. LE PRESIDENT: Madame Montpetit. Nous vous écoutons,
Madame.
MME MONTPETIT: M. le Président, M. le Ministre, MM. les membres
de cette commission, la Corporation des travailleurs sociaux professionnels de
la province de Québec désire vous présenter quelques
idées sur le problème d'accessibilité aux
médicaments. Ce problème a déjà été
mentionné à quelques reprises depuis ce matin. Je pense que cela
indique justement jusqu'à quel point c'est un problème crucial,
et je pense que nous avons à vous apporter une expérience assez
concrète quand même, parce que nous vivons près de ces
gens.
Etant donné que le programme d'assurance-maladie, dont
l'application est prévue pour l'année 1970 dans la province,
n'inclut pas le coût des médicaments, les travailleurs sociaux qui
oeuvrent soit dans les milieux de santé, soit dans les agences
polyvalentes, sont extrêmement inquiets de la difficulté
croissante qu'ont les indigents à se procurer les médicaments
jugés essentiels à leur guérison, et parfois à leur
survie.
Jusqu'à ces dernières années, bien que
l'assurance-hospitalisation n'ait jamais compris le coût des
médicaments en dehors de la durée d'hospitalisation, plusieurs
cliniques d'hôpitaux avaient accepté comme leur
responsabilité d'accorder des médicaments soit gratuitement, soit
pour une somme symbolique, aux indigents.
Depuis plus d'un an, il devient de plus en plus difficile d'obtenir des
médicaments par l'intermédiaire des cliniques externes des
hôpitaux; de semaine en semaine, les restrictions se font de plus en plus
sévères pour des raisons de budget, nous dit-on.
Une enquête auprès des services sociaux des hôpitaux
de la province a révélé une situation confuse, des
politiques différentes, arbitraires et instables, mais partout, des
difficultés que les travailleurs sociaux jugent préjudiciables au
rétablissement de la santé des malades.
Les assistés sociaux peuvent être dirigés vers les
services de bien-être pour l'obtention de suppléments, qu'ils
obtiennent ou n'obtiennent pas, selon les régions.
Les économiquement faibles ont trois possibilités: le
recours à l'endettement, le recours à la charité
privée, ou mettre la prescription au rancart.
A l'occasion de la présentation de la loi d'assistance sociale,
nous croyons extrêmement urgent d'attirer l'attention de cette commission
parlementaire sur l'inefficacité, et les carences du système
actuel d'assistance supplémentaire accordée aux indigents, pour
inclure le coût des médicaments.
Le système actuel qui permet d'accorder des suppléments en
argent, pour frais de médicaments, sur présentation d'un rapport
médical détaillé indiquant la nature du médicament,
la posologie et la durée prévue, est insatisfaisant pour les
raisons suivantes: 1. Le processus de référence à
l'organisme de bien-être implique des démarches
répétées, onéreuses pour des malades (cardiaques,
patients psychiatriques, patients épileptiques entre autres) et des
délais préjudiciables à la santé; ces délais
durent des semaines et parfois des mois. 2. Le processus ne semble pas
tenir compte de la possibilité de changements dans la médication
en cours de traitement. Ces changements désorganisent le budget et
nécessitent de nouvelles démarches. 3. Le processus ne
tient pas compte du fait que les assistés sociaux, aux prises avec des
besoins aigus non satisfaits, peuvent utiliser les sommes obtenues pour frais
de médicaments, à d'autres besoins, qui leur paraissent
momentanément plus urgents. 4. Enfin, les médicaments sont
achetés au prix de détail sans aucun contrôle. Nous
trouvons également inadmissible et incompréhensible que les
médicaments soient donnés gratuitement dans les hôpitaux
psychiatriques, alors qu'ils ne sont pas accordés dans les
hôpitaux généraux où doit se faire la
prévention.
Les conséquences à long terme de l'inaccessibilité
aux médicaments pour les indigents sont les suivantes:
Hospitalisations répétées ou prolongées.
Absentéisme prolongé au travail et recours à l'assistance
sociale. Incapacité allant en s'amplifiant et provoquant l'abandon
du travail. Perturbations familiales avec toutes les conséquences
sur le plan social et économique. Dans l'immédiat, le personnel
des cliniques externes des hôpitaux gaspille ses énergies à
poser des diagnostics et à prescrire des traitements qui ne sont pas mis
en application.
Les travailleurs sociaux sont à même de constater les
répercussions sur l'état des malades des prescriptions non
remplies. Quand les prescriptions sont remplies, les indigents s'adressent
à la Société Saint-Vincent de Paul, aux agences familiales
ou aux services sociaux des hôpitaux pour obtenir de l'aide lorsqu'ils
sont dans une impasse. Les patients discutent avec nous de leur désarroi
et de leur anxiété face à ce problème.
Devant les problèmes cruciaux couramment vécus par les
indigents avec lesquels ils viennent en contact, les travailleurs sociaux
considèrent qu'il est de première importance pour la
réhabilitation, tant physique que psychologique des malades, que ceux-ci
n'aient pas à s'inquiéter, à se débattre et
à s'humilier pour se procurer les médicaments nécessaires
à leur guérison.
Nous voulons signaler, comme prioritaires, les besoins de
médicaments gratuits pour les personnes suivantes: 1. Les patients
psychiatriques.
2. Les malades qui ont des conditions chroniques: diabétiques,
cardiaques, épileptiques, arthritiques, asthmatiques, etc. 3. Les
personnes âgées qui prennent des médicaments de
façon continue et n'ont que la pension de vieillesse pour tout revenu.
4. Les personnes souffrant de conditions aiguës temporaires mais où
la médication peut être extrêmement coûteuse. 5. Les
jeunes mères enceintes qui ont besoin de vitamines et autres
médicaments pour mener une grossesse à terme.
Nous recommandons incessamment au ministère de la Famille et du
Bien-Etre social que le bill 26 prévoie les mesures nécessaires
pour que les indigents, c'est-à-dire les assistés sociaux et les
économiquement faibles puissent obtenir les médicaments
gratuitement: que les médicaments soient donnés en nature
et non en argent; - que les malades munis d'une carte d'assistance
médicale puissent obtenir leurs médicaments, soit de
l'hôpital ou d'une pharmacie indépendante selon des ententes
établies avec le ministère de la Famille et du Bien-Etre social;
que les malades reconnus par l'hôpital comme indigents mais non
encore bénéficiaires de l'assistance sociale obtiennent au moins
la première prescription ou la prescription de départ, dans le
cas d'une hospitalisation, de la clinique de l'hôpital; les autres
prescriptions pourraient être obtenues quand l'éligibilité
à une assistance sociale aura été établie; - que
les économiquement faibles obtiennent également la
première prescription de la clinique de l'hôpital, si les
personnes préposées à l'évaluation
financière au sein de la clinique le jugent à propos; une
évaluation contrôlée par l'organisme de bien-être
devra établir l'éligibilité à une aide
prolongée, complète ou partielle, selon les modalités
établies pour les assistés sociaux.
Nous ne croyons pas qu'il soit de notre ressort de recommander que les
médicaments soient fournis par l'hôpital ou par des pharmaciens
indépendants. Nous voulons, cependant, suggérer que, si
l'hôpital doit faire des déboursés pour les
médicaments accordés aux indigents, il puisse être
remboursé par le ministère de la Famille et du Bien-Etre
social.
Nous soumettons ces recommandations, croyant que l'application
apporterait une solution à un problème aigu qui affecte
particulièrement la classe défavorisée à travers la
province. Nous croyons également que ces recommandations s'inspirent
à la fois de principes d'une administration saine et efficace et de
préoccupations humanitaires. C'est signé: Maurice Miron,
président, Corporation des travailleurs sociaux professionnels de la
province de Québec. Les personnes dont vous avez le nom sur la page
suivante, ont été consultées quant à la
préparation du mémoire, pour connaître la situation, et ont
aussi approuvé les idées que nous exprimons. Merci, M. le
Ministre.
M. LE PRESIDENT: Merci, madame.
M. CLOUTIER: Un bref commentaire pour remercier Mme Montpetit de ce
mémoire extrêmement intéressant.
M. GOLDBLOOM: C'est un problème que nous avons discuté.
Vous avez entendu, madame Montpetit, la discussion sur certains aspects de ce
problème. Vous en soulignez d'autres ici, et je suis convaincu que le
ministre apportera une attention très particulière à ce
problème, parce que, à nos hôpitaux, il y a des malades
touchés. Indépendamment de la question de la carte
d'assistance-médicale le problème des médicaments pour
ceux qui s'adressent aux cliniques externes est un problème très
difficile, et il faut que nous nous penchions là-dessus. Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, madame. Pour ce qui est de "The Family
Association of Montreal", nous avons en main le mémoire. Or, nous allons
demander au service de transcription du journal des Débats d'inclure ce
mémoire ou la traduction française de ce mémoire au
journal des Débats. (Voir le texte publié en annexe)
La Corporation des conseillers sociaux de Sherbrooke devait
présenter un mémoire ce matin. Nous avons reçu un
télégramme de son président, M. Hamel, qui nous informe de
son impossibilité de se rendre à la séance de la
commission de ce matin. Il nous fait part également qu'il enverra copie
du mémoire qu'il entendait présenter à la commission, au
cours de la semaine qui va venir.
Nous avions également à l'ordre du jour l'Association du
Québec pour les déficients mentaux qui devait être
représentée par M. Pierre Paradis. Je ne crois pas que M. Paradis
soit présent. Non. Il n'est pas présent.
Alors, ceci clôt la liste des groupes qui désiraient se
faire entendre ce matin. Le ministre avait manifesté le désir de
dire quelques mots avant l'ajournement de la séance.
M. CLOUTIER: Oui, M. le Président, j'ai dit au début de la
séance, en réponse à une remarque de M. Deboies, qui avait
mentionné qu'il n'approuvait pas la position, l'attitude des
comités de citoyens de la région de Montréal, à
l'effet de ne pas se présenter devant la Commission parlementaire,
j'aimerais, à ce sujet, M. le Président - et surtout après
avoir pris connaissance des déclarations que nous rapportent les
journaux de ce matin, déclarations qui auraient été
faites, hier, au sujet de ce refus de participation des assistés sociaux
faire un bref commentaire. Afin que les mots ne dépassent pas ma
pensée, M. le Président, j'ai rédigé un texte
très court que je voudrais donner ici pour les membres de la
commission.
D'abord, en nous remémorant les circonstances et les discussions
qui ont entouré cette invitation, vous vous souviendrez, M. le
Président, que le 11 septembre dernier, à l'occasion de la
première réunion de la commission parlementaire que vous
présidez, j'avais indiqué que, face à l'importance du bill
26, des groupes avaient manifesté le désir de se faire entendre
devant cette commission. C'est d'ailleurs l'une des
principales raisons qui avaient amené l'Assemblée
nationale à renvoyer ce projet de loi extrêmement important
à un examen minutieux en commission, dès après la
première lecture et ce, en vue d'entendre les opinions de tous les
intéressés en la matière.
Plusieurs mémoires, rédigés par des groupements
professionnels, ont été déjà déposés
sur la table de cette commission et ont ainsi permis de fructueuses
discussions. Tout au cours de ces présentations de mémoires, il
est apparu utile et nécessaire d'entendre les points de vue que sont en
mesure de formuler par eux-mêmes les assistés sociaux de
Montréal et des autres régions de la province. Aussi, en accord
avec mon collègue, le député de D'Arcy- McGee, vous avez
consenti, M. le Président, à titre exceptionnel, à mettre
à leur disposition un autobus qui les amènerait de
Montréal à Québec et, retour à Montréal.
Cette rencontre de la commission parlementaire de l'aide sociale avec
les assistés sociaux de Montréal devait avoir lieu aujourd'hui
même, à la satisfaction de tout le monde. En effet, pour permettre
aux assistés sociaux de se mieux préparer, et à la
requête de certains d'entre eux, je vous ai moi-même demandé
de différer jusqu'à aujourd'hui la date de la troisième
réunion du comité parlementaire, ce que vous avez fait fort
obligeamment, en accord avec notre collègue, le député de
D'Arcy-McGee. Nous avions donc, pour la commodité de tous, cru utile de
fixer la date de la prochaine réunion à aujourd'hui, le 6
novembre.
Je comprends que certains assistés sociaux de la région de
Montréal, peut-être sous des influences extérieures
à leur groupe, influences, d'ailleurs, que je m'explique mal, se
refusent momentanément de venir simplement exposer eux-mêmes leur
propre point de vue devant notre commission. Je le regrette d'autant plus que
je sais combien vous vous êtes efforcé, M. le Président, de
trouver des moyens concrets susceptibles de favoriser la venue à
Québec des intéressés. M. le Président, en liaison
avec mon chef de cabinet au bureau de Montréal, M. Johnson, vous aviez
entrepris d'organiser ce voyage en autobus. Et deux des porte-parole de chacun
des comités de citoyens ont été pressentis pour venir nous
rencontrer.
Il y en a, je crois, une bonne quinzaine de comités. Ce voyage ne
pouvait toutefois pas consister en un pique-nique pour quiconque. Nous le
considérons, en ce qui nous concerne personnellement, comme un
événement aussi important pour eux que pour nous. Sans
empêcher personne de venir ici, il fallait se limiter en priorité
à ceux que désigneraient les assistés sociaux
eux-mêmes comme leur porte-parole pour venir à Québec,
quitte à combler ensuite les places vacantes dans l'autobus.
C'étaient les arrangements matériels.
Mes officiers ont à cet égard rencontré bien des
difficultés, ne serait-ce que pour identifier les véritables
responsables de groupes d'assistés sociaux. Mes officiers ont, à
bon droit, évité de faire le choix des personnes conscients
qu'ils sont, comme moi d'ailleurs, que c'est aux assistés sociaux
eux-mêmes qu'il appartient de faire le choix des personnes et de
suggérer des noms de participants.
Au moment même où le député de Portneuf, qui
agit ici comme président, s'apprêtait à adresser
individuellement à chacun des intéressés des invitations
confirmant ces ententes, j'apprends que les assistés sociaux de
Montréal ne seront pas avec nous aujourd'hui pour nous faire part de
leurs problèmes. Ils ont, comme je l'ai dit tantôt, fait part
à la presse de déclarations à cet effet. J'ai lieu de
croire, à certains indices, que plusieurs des assistés sociaux de
Montréal, qui ont, de façon bienveillante, été
invités à se faire entendre ici, ont été l'objet de
manipulations qui ont eu pour effet d'empêcher la poursuite du dialogue
que je désire serein et fécond entre le gouvernement et les
assistés sociaux du Québec.
Il est aussi possible que les assistés sociaux aient perdu espoir
et jugé inutile de faire à la commission parlementaire des
représentations qui seraient comprises. Il est possible qu'ils n'aient
pas saisi et apprécié l'effort qui est fait ici pour comprendre
leur problème en toute objectivité. Si c'était bien le
cas, nous toucherions du doigt ce phénomène bien
d'actualité, qui montre la difficulté qu'il y a d'établir
des communications, que ce soit sur le plan de la famille, que ce soit sur le
plan de la vie communautaire, que ce soit sur le plan des différentes
couches de la population, que ce soit entre le gouvernement et les
citoyens.
C'est pourquoi j'ai déjà exprimé l'avis que le
projet de loi d'aide sociale ne peut pas être une réponse à
tous les problèmes. C'est l'ensemble des politiques sociales qu'il faut
réorganiser et, là-dessus, je crois que nous avons, depuis le
début de nos travaux, suffisamment élaboré.
Dans cette entreprise, nous nous efforçons de rechercher toutes
les formes de participation pour assurer le concours de tous les citoyens
à cette oeuvre.
En terminant, M. le Président, je voudrais dire que nous avons
entendu avec grand plaisir, ce matin, les groupes d'assistés sociaux qui
sont venus du Québec, du Québec métropolitain, de la rive
sud et de la région de Val-d'Or. Leur participation aux travaux de cette
commission a été remarquée et appréciée par
tous les membres de la commission parlementaire, et, je n'en doute pas, par
tous ceux qui ont assisté à ce débat. Ils ont, je crois,
eu une réception très attentive de la part des membres de la
commission.
Nul doute que, de leur passage ici résultera une meilleure
compréhension d'un côté comme de l'autre. De leur
côté, la compréhension de la complexité des
problèmes que nous avons à résoudre, et de notre
côté, peut-être le fait, d'ajouter cette dimension humaine
à la compréhension de leurs problèmes.
De toute façon, j'ai déjà échangé
avec le député de d'Arcy-McGee, antérieurement, des
opinions sur la possibilité que la commission puisse peut-être se
déplacer. Il en a dit un mot tout à l'heure. Je ne sais pas si de
façon pratique cela est possible. Ce serait là un
précédent qui va beaucoup plus loin que ce que nous avons fait,
c'est-à-dire offrir aux assistés sociaux de venir devant cette
commission parlementaire, et leur défrayer leurs dépenses.
C'est-à-dire que c'était l'Assemblée nationale,
elle-même, par le président de cette commission, qui faisait
l'invitation, qui offrait de payer les dépenses des assistés
sociaux. Maintenant, il serait peut-être possible, et cela à la
condition que l'Assemblée nationale elle-même examine les
possibilités de ce précédent, que la commission,
étant donné la matière qui nous préoccupe,
étant donné la délicatesse du sujet, que cette commission,
donc, se déplace.
De toute façon, je ne veux pas prendre position ce
matin, référant, par votre voix, M. le Président,
ce problème à la commission parlementaire. Je crois que, ce que
l'on doit retenir de tous ces événements, c'est que la commission
parlementaire, par l'intermédiaire du président et des deux
porte-parole des deux côtés de cette table, ont fait
jusqu'à maintenant tout ce qu'il était humainement possible de
faire, pour mettre à la disposition de tous les groupes de citoyens de
la province la possibilité de venir s'exprimer devant la commission.
Nous sommes prêts à aller jusqu'au bout de notre mandat et de
toujours n'avoir pour seul objectif, que le bien et l'amélioration des
conditions de ce secteur important de population, pour lequel nous
travaillons.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, ayant eu au cours des
récentes semaines de nombreux contacts avec des assistés sociaux,
j'ai été en mesure de constater le grand intérêt
qu'ont ces citoyens pour les discussions qui se déroulent ici depuis
quelque temps.
Nous nous sommes réunis ici le 18 septembre. A cette occasion,
deux groupes d'assistés sociaux étaient présents et
étaient écoutés avec beaucoup d'intérêt de la
part de tous les membres de la commission. Je peux vous dire, M. le
Président, que je suis, en partie et indirectement responsable de la
présence de ces deux groupes. Les organisateurs, qui sont des
travailleurs sociaux, ont pris contact avec moi pour avoir des renseignements
sur le déroulement des travaux de la commission parlementaire, sur la
façon de préparer leurs mémoires, sur les facilités
qui pouvaient être à leur disposition ici à Québec.
J'étais donc très heureux qu'à la suite de cette
séance, le ministre exprime le désir de rencontrer d'autres
groupements de citoyens.
Le ministre, comme il vient de le dire, m'a fait l'honneur de me
consulter au sujet des dispositions. Je suis convaincu que ce qui est
arrivé au cours des derniers jours n'est qu'un malentendu, parce qu'il
est clair que les intentions du ministre, et ce que l'on appelle les conditions
imposées par le ministre, étaient tout à fait normales et
raisonnables. Peut-être que, dans les explications données et
reçues, il y a eu un malentendu quelconque.
J'espère que ceux qui ont décidé de ne pas venir
aujourd'hui accepteront de venir nous rencontrer une autre fois. Si la
commission peut se déplacer, tant mieux, mais nous serons sûrement
appelés à siéger ici à un autre moment qui ne sera
pas très lointain. S'il y a moyen de renouveler l'invitation - je suis
certain que le ministre est disposé à le faire - j'espère
qu'elle sera mieux comprise et acceptée dans l'esprit dans lequel elle a
été lancée et aura été lancée.
Puisque cela a pris la voie des journaux, je regretterai beaucoup que
les assistés sociaux et tous les intéressés mettent en
doute l'utilité de ces séances de la commission parlementaire et
la sincérité de ceux qui y siègent.
M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas devoir ajouter aux commentaires qui ont
été faits. Je pense qu'on a donné l'éclairage
nécessaire pour démontrer et faire la lumière sur cette
situation.
M. CLOUTIER: M. le Président, un seul mot, faisant suite à
ce que le député de D'Arcy-McGee vient de dire. L'invitation que
nous avions faite à tous les assistés sociaux de venir devant la
commission, particulièrement à ceux de la région de
Montréal, tient toujours. Et je serais très heureux, au nom de la
commission, si nous pouvions en venir à une entente et qu'ils viennent
devant la commission, à une séance ultérieure, reprendre
cette présence ici qu'ils n'ont pas acceptée pour ce matin.
Alors, nous allons continuer d'explorer cette possibilité qu'ils
reviennent sur leur décision.
M. GOLDBLOOM: Très bien, M. le Président, parce que nous
avons tous été enrichis par la contribution de la lettre que nous
avions adressée aux intéressés. "Il nous fait plaisir de
vous confirmer par la présente qu'en accord avec le ministre et son
collègue le député Victor Goldbloom, je vous invite
à venir exposer les points de vue des citoyens de votre région
devant la commission parlementaire de l'aide sociale, bill 26, qui
siégera le 6 novembre prochain à compter de 10 heures." Et je
pense que c'est là l'essentiel. "Afin de faciliter votre venue à
Québec et, parce qu'il est vraisemblablement impossible en
période de session aux députés et membres de
l'Assemblée nationale de se déplacer à Montréal
pour entendre les opinants sur le bill 26, le président de
l'Assemblée nationale a consenti, à titre exceptionnel, de mettre
à leur disposition un autobus qui quittera Montréal pour
Québec, le 6 novembre 1969 à 8 heures a.m. Vous pourrez prendre
place dans cet autobus, munis de la présente que vous voudrez bien
présenter à M. Roberge ou à son adjoint, qui ont tous deux
été désignés pour vous accompagner à
l'occasion de ce voyage. Le point de départ, pour la commodité de
chacun, sera le terminus d'autobus, coin Berri-Demon-tigny, à 8 heures
précises. "J'ajoute que cette même lettre d'invitation vous donne
droit au dîher du midi qui, pour éviter toute perte de temps, sera
pris à proximité du parlement, c'est-à-dire au chalet des
employés civils. Le retour en autobus de Québec à
Montréal est prévu pour 3 heures précises de
l'après-midi, et l'embarquement pourra avoir lieu à ce moment
devant la bibliothèque de la Législature."
Les autres choses sont peut-être secondaires, c'est la conclusion
de la lettre, etc. Alors c'était l'essence de la proposition qui avait
été faite.
Alors, je tiens à remercier tous les participants à la
séance de la commission et à souligner tout
particulièrement le caractère positif de tous les mémoires
et les interventions qui ont été faites au cours de cette
commission. La séance est levée.
(Fin de la séance: 13 h 3)
ANNEXE
Mémoire présenté par la FAMILY SERVICE
ASSOCIATION OF MONTREAL sur le bill 26 et ses projets de règlements,
Loi sur l'Assistance Sociale 9 Octobre 1969
Nous avons étudié le "Mémoire sur le bill 26 et ses
projets de règlements" présenté par la
Fédération des Services Sociaux à la Famille du
Québec ainsi que l'"Opinion du Conseil des Oeuvres de Montréal et
du Montreal Council of Social Agencies sur le Bill 26 et les règlements
s'y rapportant".
Nous approuvons pleinement le principe exprimé et les
méthodes d'application recommandées dans les deux documents
soumis qui résultent d'une analyse fouillée et perspicace du bill
26 et de ses règlements. Nous sommes d'accord avec ces deux organismes
et approuvons le principe philosophique qui a présidé à
l'élaboration du bill 26. Etant un organisme directement
intéressé aux problèmes des individus qui seront soumis au
bill 26 dans sa forme finale, nous aimerions souligner quelques questions et
particulièrement les points suivants: 1) II est absolument
nécessaire de définir les critères qui serviront à
déterminer les montants jugés suffisants pour subvenir aux
besoins d'une famille ou d'un individu, en tenant compte de l'âge des
personnes concernées et des autres conditions (Section 3 des
Règlements). Nous sommes d'avis que la seule manière
d'établir un budget individualisé suffisant est de faire appel
à une équipe de spécialistes en statistique et en
économie domestique qui exprimeront les besoins en termes du coût
actuel de la vie. 2) Nous croyons que le calcul du coût fondamental
ou normal - des besoins doit inclure: a) les besoins
éducationnels (coût des aides à l'éducation non
fournis par le système scolaire; le vêtement, conforme aux
exigences des écoles publiques des communautés
métropolitaines; un certain montant qui permettra aux membres plus
âgés de la famille de s'inscrire à des programmes
d'éducation permanente); b) les besoins médicaux (coût du
transport; remèdes qui ne sont pas fournis gratuitement par les
cliniques; services, dentures, prothèses; diètes spéciales
ou aliments complémentaires prescrits par des médecins
spécialistes); c) les besoins récréatifs (cotisations aux
bibliothèques, aux centres sociaux; coût des journaux, etc.) 3) Le
calcul du loyer mensuel (Section 3 des Règlements) devrait
prévoir que le logement doit satisfaire aux normes d'hygiène et
de convenance quant à l'espace alloué, au système de
chauffage et aux autres services de sécurité (installation
électrique et système d'égouts en bonne condition). Nous
croyons qu'on devrait inclure le téléphone qui est devenu une
nécessité pour une famille urbaine. 4) Nous appuyons fortement la
méthode d'établir l'admissibilité à l'assistance
sociale décrite et proposé dans l'"Opinion" soumise par le
Conseil des Oeuvres de Montréal et le Montreal Council of Social
Agencies (pp. 8 and 9), c à - d. "Declarations or a simplified
method of eligibility determination". Cette méthode a déjà
été mise en pratique et s'est avéré efficace parce
qu'elle permet a) au candidat à l'assistance d'assumer la pleine
et entière responsabilité de sa déclaration et de se
soumettre aux conséquences si sa déclaration est fausse; b) de
réaliser une économie importante dans les frais d'administration.
En pratique, cette méthode est fondée sur nos principes
fondamentaux concernant une participation démocratique dans
l'activité gouvernementale, cette activité même qui
décide du sort du candidat à l'assistance. Cette participation
est infiniment précieuse en termes de potentiel humain.
5) Nous désirons aussi souligner un point exposé dans
l'introduction du "Mémoire" de la Fédération des Services
Sociaux à la Famille du Québec concernant la
nécessité d'employer un personnel compétent, capable non
seulement de s'occuper des requêtes d'une manière efficace et
compréhensive, mais capable aussi d'établir une ligne de conduite
interinstitutionnelle et interdisciplinaire. Un tel réseau de
communications résoudrait les problèmes de réorientation
des candidats, de l'utilisation des ressources du milieu concerné,
créant au besoin de nouvelles ressources et communiquant efficacement
avec des personnes de classes diverses. 6) Nous sommes heureux de constater que
le bill 26 insiste sur la réadaptation et le recyclage des
assistés sociaux aussi bien que des citoyens incapables de subvenir
pleinement à leurs besoins. Cependant, nous craignons que les programmes
de réadaptation ne deviennent inefficaces, coûteux et inutiles
s'ils ne sont pas intégrés dans l'ensemble de l'économie
provinciale. 7) Nous nous inquiétons de l'insistance sur le programme
d'austérité démontrée récemment par le
gouvernement quant à sa répercussion sur l'assistance sociale.
Nous espérons ardemment que la teneur du bill 26 est une preuve que le
Gouvernement est pleinement conscient de la nécessité d'humaniser
et de rénover les conditions existantes relatives à l'assistance
sociale et plus importante que le régime d'austérité et
que la portée des dispositions du bill 26 ne sera pas compromise par les
problèmes d'appropriation des crédits nécessaires.
C.E.R. Thompson, p.s.w. Executive Director Family Service Association of
Montreal 4515 St.Catherine Street West Montreal 215, Quebec
Telephone: 931-1721