Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mercredi 27 mars 2024
-
Vol. 47 N° 48
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 44, Loi modifiant principalement la Loi sur le ministère de l’Économie et de l’Innovation en matière de recherche
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15 h (version non révisée)
(Quinze heures deux minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous souhaite la bienvenue
et je demande à toutes les personnes qui sont dans la salle de bien vouloir
éteindre leur sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet
de loi n° 44, Loi modifiant principalement la Loi sur
le ministère de l'Économie et de l'Innovation en matière de recherche. Mme la
secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Boivin Roy (Anjou—Louis-Riel) est remplacée par M. Chassin
(Saint-Jérôme), Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Beauchemin
(Marguerite-Bourgeoys) et M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve) est remplacé
par M. Bouazzi (Maurice-Richard).
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Nous entendrons ce matin les témoins suivants, soit la Fédération des cégeps,
le Réseau des CCTT-Synchronex et Pr Vincent Larivière.
Je souhaite maintenant la bienvenue à nos
invités, à nos premiers invités qui sont de la Fédération des cégeps. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé puis nous
procéderons à la période d'échange par la suite. Je vous invite donc à vous
présenter et à commencer votre exposé, s'il vous plaît.
M. Tremblay (Bernard) : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, Mmes, MM. les députés. Mon nom est Bernard Tremblay.
Je suis le président-directeur général de la Fédération des cégeps. Je suis
accompagné, cet après-midi, de Mme Marie-Claude Deschênes, directrice
générale du cégep de La Pocatière, et de M. Sylvain Poirier, directeur
adjoint de la recherche à la Fédération.
Nous sommes bien heureux, évidemment, d'être
ici pour représenter les 48 cégeps du Québec qui comptent, je vous le
rappelle, 55 centres collégiaux de transfert de technologie connus sous
leur acronyme CCTT. Nous vous remercions évidemment de nous donner l'occasion
de présenter nos remarques sur le projet de loi n° 44,
dont certaines modifications présentent évidemment un intérêt pour nos membres.
D'entrée de jeu, je tiens à indiquer que nous sommes d'accord avec le processus
de simplification administrative, résultat de la réunification ou de la fusion
des trois fonds de recherche actuels en un seul. Nous sommes heureux de
constater que le projet de loi mentionne la recherche collégiale. Nous
suggérons toutefois quatre mesures pour favoriser la pleine reconnaissance de
la recherche...
M. Tremblay (Bernard) : ...recherche
collégiale, assurer une représentation des cégeps aux Fonds de recherche du
Québec et augmenter le financement de la recherche dans les collèges.
Nous soulignons également la pertinence de
reconnaître la place du réseau collégial dans la structure, les instances, le
financement et les actions qui découleront du projet de loi. C'est dans cette
optique que nous partageons donc, avec la Commission de l'économie et du
travail, les réserves et les propositions de la fédération à propos de certains
éléments du projet de loi.
Tout d'abord, il n'est pas inutile de
rappeler que la recherche est présente dans les cégeps depuis leur création il
y a plus de 50 ans. On compte actuellement environ
5 000 personnes qui pratiquent la recherche active au sein des
établissements collégiaux et de leurs centres collégiaux de transfert de
technologie.
Pour illustrer la forme que prend
concrètement cette recherche collégiale, je prends un instant pour vous
présenter le portrait d'un chercheur, Martin Bourbonnais, lauréat du prix de
l'ACFAS Denise Barbeau 2023. M. Bourbonnais dirige le Centre TERRE au
Cégep de Jonquière, il se spécialise dans l'énergie renouvelable pour les sites
isolés, il compte plus de 25 ans d'enseignement et de recherche, il a
développé des outils innovants pour.... pour l'énergie, pardon, solaire et
géothermique. M. Bourbonnais a aidé de nombreux partenaires à intégrer des
énergies vertes, tant au Québec qu'à l'international, et son travail
visionnaire a conduit à la création d'infrastructures et d'organisations
tournées vers l'avenir et a permis, hein, d'alimenter en énergie des sites dans
le Grand Nord du Québec, par exemple.
Ce sont des chercheurs et des chercheuses
comme lui, impliqués dans le milieu de l'enseignement collégial que nous
souhaitons valoriser, outiller et stimuler, et, par ricochet, des milliers
d'étudiantes et d'étudiants qui prennent part à des projets de recherche menés
dans les cégeps et dans les CCTT.
Comme nous souhaitons que les personnes
investies dans la recherche soient reconnues et soutenues, nous sommes
préoccupés par la composition du conseil d'administration du Fonds de recherche
du Québec, qui élimine de facto les trois conseils d'administration des fonds
actuels. Or, des membres représentant le réseau collégial siégeaient à ses
fonds. La fédération juge essentiel de garantir une représentation du milieu
collégial au conseil d'administration du Fonds de recherche du Québec en
réservant un minimum de sièges aux gestionnaires des établissements collégiaux.
Comme première recommandation, donc, de
notre mémoire, nous proposons donc la reformulation du premier paragraphe du
premier alinéa de l'article 22.21 du projet de loi afin d'y prévoir trois
personnes qui occupent une fonction de gestionnaire dans le réseau collégial.
La fédération est consciente que, pour réaliser l'objectif d'une juste
reconnaissance de la recherche collégiale dans le nouveau fonds, la composition
de comités internes du nouveau fonds sera déterminante. Alors, un peu comme
d'autres intervenants, nous profitons donc de l'occasion pour indiquer qu'il
sera primordial que des personnes expertes liées à la recherche collégiale, des
chercheurs, des chercheuses issues de collèges, de CCTT, de gestionnaires de
recherche dans les cégeps soient appelés à siéger au sein des comités des
programmes pour les trois directions scientifiques.
La fédération constate aussi que les
montants attribués à la recherche collégiale par le gouvernement du Québec ne
représentent pas une juste indication de la capacité du réseau, ils sont... ils
sont insuffisants pour assurer le développement de la recherche collégiale. De
2019 à 2023, l'ensemble des budgets alloués à la recherche collégiale par les
trois fonds ne représentait que 1,6 % du financement octroyé. Vous
admettrez avec moi qu'on peut faire mieux et qu'on a besoin de plus pour
alimenter la recherche collégiale.
Les objectifs, donc, de la stratégie
SQI... SQRI qui
visent des retombées de la recherche d'innovations commercialisables par les
entreprises du Québec ne peuvent se réaliser sans l'apport de la recherche
appliquée. Elle se réalise dans les cégeps et dans les CCTT répartis sur
l'ensemble du territoire du Québec dans une... dans un large éventail de
domaines de recherche. La SQRI2022-2027
mentionne que le gouvernement souhaite maximiser la performance des centres et
des plates-formes de recherche. L'objectif est de favoriser la cohérence, la
cohésion et la mutualisation de leurs interventions. La fédération, donc,
profite donc du dépôt du projet de loi n° 44 pour demander un rehaussement
substantiel des fonds disponibles pour la recherche collégiale.
Comme deuxième recommandation, donc, la
fédération suggère à la commission de s'assurer que les programmes du nouveau
FRQ permettront de rééquilibrer la répartition des financements afin que la
part dédiée au collégial atteigne progressivement un minimum de 10 % des
financements annuels octroyés, et ce, sans pénaliser évidemment les autres...
les autres activités de financement du fonds.
À ce stade, je vais laisser ma collègue
poursuivre.
Mme Deschênes (Marie-Claude) : Merci,
mesdames, messieurs. La fédération tient à souligner l'importance du savoir et
de l'innovation dans la croissance économique. Elle met en lumière le rôle clé
du financement gouvernemental dans la recherche, rôle...
Mme Deschênes (Marie-Claude) : ...pour
les établissements d'enseignement supérieur, y compris les cégeps. Le développement
économique doit se réaliser de pair avec l'avancement de la connaissance.
• (15 h 10) •
La centralisation du développement et de
la promotion de la recherche au seul ministère de l'Économie pose le risque, à
moyen terme, d'un recul de développement des connaissances au Québec. C'est
pourquoi, dans la troisième recommandation de notre mémoire, nous demandons
l'implication étroite de la ministre de l'Enseignement supérieur dans
l'exécution de la mission du FRQ.
Nous suggérons la réécriture du libellé du
deuxième alinéa de l'article 22.8 du projet de loi pour mettre en lumière
l'équilibre requis entre la recherche non dirigée et la recherche dirigée. Nous
proposons donc un nouveau libellé pour le fonds.
De plus, la Fédération propose une
modification au libellé de l'article 22.9 afin de prévoir une consultation
de la ministre de l'Enseignement supérieur lorsqu'il est question de promouvoir
et d'aider financièrement la recherche dans les établissements d'enseignement
supérieur et lorsque le Fonds attribue des bourses aux personnes étudiantes.
De même, nous sommes d'avis que le Fonds
devrait, en plus de transmettre pour approbation un plan présentant les actions
prévues pour l'année, transmettre également une copie de son plan pour
consultation à la ministre de l'Enseignement supérieur. Ainsi, la Fédération
propose la modification au libellé du premier alinéa de l'article 22.11.
Finalement, le projet de loi n° 44
propose de reprendre les articles actuels qui touchent à la commission de
l'éthique en science et en technologie et de les intégrer sans modification
dans la loi sur le ministère de l'Économie, de l'innovation et de l'Énergie.
Tels qu'ils sont écrits, les articles font siéger à la Commission des personnes
issues de la recherche universitaire et industrielle. La Fédération souligne
que cette formulation va à l'encontre du chapitre deux, section deux du projet
de loi, qui inclut la recherche collégiale comme partie intégrante de la
recherche en enseignement supérieur. La Fédération demande donc d'ajuster la
formulation des articles pour que la recherche collégiale soit représentée à sa
juste valeur au sein de la Commission de l'éthique en recherche et en
technologie.
En conclusion, la Fédération réitère
qu'elle appuie l'objectif de simplification administrative proposé par le
projet de loi. Elle insiste cependant sur l'importance d'une gestion ouverte et
transparente qui permettra de soutenir toutes les chercheurs... toutes les
chercheuses et tous les chercheurs québécois, y compris ceux et celles du
collégial. Par ailleurs, elle souligne l'urgence d'un soutien financier accru
pour la recherche collégiale, essentielle à son développement. Le
sous-financement chronique de la recherche collégiale, et tout particulièrement
du réseau des CCTT, exige une action immédiate. Les propositions soumises par
la Fédération sont formulées dans un souci de renforcer la collaboration entre
enseignement et recherche via une implication formelle de la ministre de
l'Enseignement supérieur.
Nous vous remercions pour votre écoute et
espérons que vous prendrez en considération nos recommandations.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour une durée de
16 minutes 30 secondes.
M. Skeete : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Salutations aux collègues de l'opposition. Salutations aussi
à vous. Merci de venir en présentiel. Je le dis souvent parce que la pandémie a
fait en sorte qu'on voit moins de gens maintenant. Alors, bienvenue. Je me
permets aussi de saluer les directrices scientifiques qui sont ici avec nous.
Bienvenue, mesdames.
J'aimerais rapidement rebondir sur une
question puis aussi un état de fait. Vous revenez sur le fait que le
financement au niveau collégial n'est pas au même niveau universitaire, même
beaucoup en dessous de cela. C'est quoi, la... pour vous, l'explication?
Pourquoi, historiquement, on finance moins les cégeps que les universités?
C'est quoi, cette... d'après vous, la raison derrière ça?
M. Tremblay (Bernard) : Oui.
Bien, effectivement, c'est une bonne question. Et je pense que c'est
intéressant qu'on prenne un instant pour s'en parler. Vous savez, le modèle
universitaire, il génère, d'une certaine façon, un partage entre l'enseignement
et la recherche. On sait qu'un professeur d'université doit faire de la
recherche pour son avancement de carrière et ça fait partie du cheminement de
l'enseignement, donc, à l'université.
Quand on a créé les cégeps, on a axé
l'organisation du travail sur l'enseignement pur. Le constat, après
50 ans, c'est qu'on... ces gens-là ont une expertise, on a des gens de
très haut niveau, on a des milliers d'enseignants qui ont des formations de
maîtrise, de doctorat, de postdoctorat...
M. Tremblay (Bernard) : ...et
donc ces gens-là avaient de l'aspiration à faire de la recherche, ils en ont
fait depuis la création des cégeps. Et c'est bien documenté, et ça s'est
développé, et on a développé, donc, le modèle des CCTT. Mais il reste que
l'organisation du travail, j'oserais dire, favorise l'enseignement et il ne
comporte pas la même dynamique, qui fait que, lorsqu'on embauche un prof à
l'université, automatiquement on vient soutenir la recherche universitaire.
Alors, au niveau collégial, il faut des mesures pour venir soutenir un
dégagement, d'une certaine façon, des enseignants pour qu'ils effectuent de la
recherche, à défaut de quoi, le modèle ne génère pas, le financement ne génère
pas d'élément associé à la recherche. C'est un premier élément. Et,
deuxièmement, bien, évidemment, le modèle aussi de nos CCTT, où le financement
de base est... est... est très faible par rapport au niveau d'activité des
CCTT, bien, il ne permet pas de soutenir les infrastructures et le fonctionnement
des centres de recherche. Alors, c'est ce... Le financement, dit autrement, n'a
pas suivi la progression extraordinaire qui est... de nos CCTT, qui sont
devenus, évidemment, des fleurons. Et, lorsqu'on parle d'un financement de base
de quelques centaines de milliers de dollars pour des centres qui ont des...
des chiffres d'affaires maintenant de plusieurs... plusieurs millions, pour ne
pas dire dizaines de millions, bien, vous comprendrez qu'on est dans...
toujours dans une recherche de financement pour assurer le simple
fonctionnement du centre. Alors, c'est contreproductif par rapport à la volonté
que le gouvernement a lui-même de miser aussi sur la recherche appliquée.
Donc, je pense que c'est une partie de
l'explication. Peut-être que mes collègues veulent rajouter, mais je... je...
je... À ce stade-ci, je pense que ça... ça résume simplement, effectivement, un
élément clé qui nous distingue des universités et qui devrait donc être
considéré au niveau du financement. Donc, il n'y a pas de financement pour
dégager des enseignants et on embauche donc des professionnels sur la base du
financement qu'on obtient, essentiellement parce qu'on a des contrats avec des
organisations pour développer des projets de recherche qu'ils nous soumettent.
M. Skeete : Vous avez
l'unanimité de vos collègues, donc, j'imagine, ils pensent la même chose. Vous
savez, on a... On a entendu beaucoup de groupes passer par... par ici. Puis une
chose que je veux rappeler, c'est qu'on parle ici des fonds de recherche du
Québec, alors c'est... Bien sûr, la recherche appartient et va continuer
d'appartenir à l'enseignement supérieur. Dans votre réponse, ce que j'entends,
c'est... c'est peut-être une opportunité de revoir le financement en général ou
la manière qu'on fait de la recherche dans les cégeps. Je me demande :
Est-ce que c'est vraiment la place du projet de loi n° 44 de faire tout ce
que vous évoquez dans votre réponse? Puis, si la réponse, c'est oui,
précisément, j'aimerais mieux comprendre qu'est-ce qu'on pourrait faire à
l'intérieur du cadre du 44 pour justement arriver là. Parce que je suis
d'accord avec vous que les CCTT font un travail extraordinaire. Puis d'ailleurs
j'en parlais aussi avec les jeunes qui sont venus, il y avait deux
regroupements d'étudiants qui sont venus la semaine passée, puis ils ont fait
un travail... puis moi, je regrette de ne pas avoir été introduit à cette
notion de recherche au cégep. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus aussi.
M. Tremblay (Bernard) : ...je
pense que mes collègues pourront compléter. Vous avez raison de dire que tous
les problèmes ne transitent pas ou ne se règlent pas, là, par le projet de loi,
mais il reste quand même que tous les éléments sont importants pour faire
progresser la recherche collégiale. Et, lorsqu'on vous expose le niveau de
financement que les fonds, actuellement, accordent à la recherche collégiale,
bien, force est de constater qu'il y a certainement une clé là aussi. On
parle... On parle beaucoup de relève en recherche. Bien, évidemment, la relève,
elle... elle... elle ne débute pas à la fin du parcours universitaire, elle
débute au niveau collégial. Et j'ajouterais le fait que, pour nous, c'est très
important, puis vous avez... vous avez souligné en préambule à votre question,
qu'il y a... il reste une place pour l'enseignement supérieur, j'en suis, mais
il faut garder justement cette synergie entre l'enseignement et la recherche.
Et c'est un effort, dans le modèle collégial, que de s'assurer que non
seulement on fait de la recherche pour ce que ça procure pour l'économie du
Québec, mais on fait de la recherche pour ce que ça procure à nos étudiants,
nos étudiantes et à notre dynamisme académique dans nos établissements. Si on
veut développer le sens de l'innovation, ça se passe aussi par des retombées de
la recherche dans nos... dans nos cégeps. Je sais qu'au cégep de ma collègue il
y a des programmes qui visent justement à maximiser cette relève et l'effet sur
la... sur l'enseignement. Peut-être, tu peux... oui.
Mme Deschênes (Marie-Claude) : Oui?
Juste, j'attendais de voir si... si je pouvais m'exprimer sur cette
question-là. En fait, l'élément clé, puis Bernard en a parlé tout à l'heure, la
recherche au collégial, c'est sur une base volontaire. Et, quand... Le
volontariat fait en sorte que, par exemple, quand vient le temps de faire des
dépôts de projets...
Mme Deschênes (Marie-Claude) : ...pour
différents programmes, dont le FRQ. Les ressources sont plutôt limitées,
puisqu'on ne réussit pas à dégager les sommes nécessaires pour être capables de
faire ce projet-là.
• (15 h 20) •
Ceci dit, on parle de la relève au
collégial. Chez nous, on a un programme d'étudiants chercheurs qui fait en
sorte que la recherche, elle est partie prenante de son parcours académique. Et
je vous rappelle que c'est... on n'en voit pas au collégial. On voit ça à
l'université, mais très peu au collégial. On a réussi, avec les centres de
recherche, avec différents partenaires, à faire vivre une expérience au
collégial. Et la relève, moi, je l'ai vue dans les yeux de ces étudiants-là,
qui côtoient des enseignants qui sont vraiment passionnés par la recherche,
mais qui le font, je le rappelle, sur une base volontaire, dans le cadre d'un
dégagement de leur enseignement. Alors, oui, c'est important que la relève, au
niveau des étudiants chercheurs, au niveau de nos chercheurs, aussi, de cégep,
se fasse dès le collégial.
M. Skeete : Puis j'ai bien
entendu votre recommandation par rapport à avoir une présence sur le conseil
d'administration. Je suis curieux, parce que, je dois vous dire, là, moi, et
l'équipe, puis le ministre Fitzgibbon, on s'est beaucoup questionnés sur cette
question-là, parce que, d'un côté, on avait l'obligation de se conformer à la
nouvelle Loi sur les sociétés d'État puis, de l'autre côté, on savait très bien
qu'on devait avoir une diversité de voix, scientifique, sur le conseil
d'administration. Ça fait que, je vous le dis, là, ça a causé beaucoup de
discussions. Là, vous nous demandez une place réservée sur les conseils
d'administration, puis ce serait encore une autre place réservée sur une place
qui est déjà assez grande, où est-ce qu'il manque déjà de place. Je serais
curieux de vous entendre, parce qu'il n'y a rien qui dit, en ce moment, que,
dans le conseil d'administration, les gens du réseau collégial ne sont... sont
exclus. Alors, il n'y a rien qui fait que vous n'avez pas le droit d'y être.
Vous, vous demandez une place réservée.
Est-ce que vous êtes confiants que vous allez trouver votre place dans ces
conseils d'administration là si on ne l'inscrit pas? Est-ce que vous êtes
inquiets qu'on va vous oublier? C'est quoi, votre niveau de confiance que vous
allez pouvoir tirer votre épingle du jeu dans cette... dans ça? Parce qu'il n'y
a rien qui dit que vous n'allez pas l'être, là.
M. Tremblay (Bernard) : Bien,
moi, je suis obligé de vous dire que notre niveau de confiance, il est faible,
parce que, regardez, sur la place publique, à tous les jours, je parle de CCTT
avec des gens très, comment dire, au fait de l'actualité, et, neuf fois sur 10,
les gens disent : Ah! je ne connaissais pas ça, tu me fais découvrir
quelque chose. On oublie qu'il y a des milliers de chercheurs dans le réseau
collégial. Alors, vous le dites, en réduisant le nombre de places, par l'effet
du projet de loi, et le fait qu'on va fusionner trois conseils
d'administration, les places vont être, comment dire, assez limitées. Alors,
s'il n'y a pas un geste fort pour indiquer que la recherche collégiale doit
être présente, bien, les chances sont que, malheureusement, dans ce partage-là
des sièges, bien, qu'on ne retrouve pas, effectivement, cette présence
collégiale là, alors. Et je ne pense pas que c'est de la mauvaise foi, ou quoi
que ce soit, mais c'est parce qu'il y a énormément de... il y aura énormément
de gens intéressés et peu de places disponibles, et là ça devient, donc, le
geste du législateur que de dire : Pour nous, la recherche collégiale est
importante, c'est une clé pour la relève, c'est une clé pour le type de
recherche qui se fait dans les collèges, et on souhaite que ça fasse partie,
dans le fond, du... de la gouvernance, là, du Fonds de recherche du Québec.
M. Skeete : On a entendu le
Scientifique en chef et d'autres gens qui sont venus nous voir, puis le
Scientifique en chef nous parlait de... parce que, justement, on parlait de
l'obligation de se conformer à cette loi-là. Les conseils d'administration les
plus optimaux, généralement, ils n'ont pas plus que 15 personnes. On laisse la
possibilité d'aller jusqu'à 19, parce qu'on est soucieux des enjeux que vous
évoquez. Je me demande... Si on parlait surtout des sous-comités? Mettons, on
va avoir un sous-comité, je ne sais pas, science et... médical ou, peu importe
les... le nom qu'ils pourraient, ultimement, avoir, ces sous-comités là, j'imagine
qu'ils garderaient les mêmes. Est-ce que... Si on vous donnait une place
réservée là, est-ce que ce serait quelque chose qui irait vous rassurer, de
dire : On a une place dans la prise de décision, dans ces sous-comités là,
où est-ce qu'il y a plus de scientifiques, pour faire valoir votre point, ou
vous tenez absolument à être dans le conseil d'administration, bien, le vrai,
là, le normal, là?
M. Tremblay (Bernard) : Écoutez,
je pense que, pour nous, ce qui est important, c'est que la recherche collégiale
soit représentée à sa juste valeur. Évidemment, il reste qu'il y a des gestes,
je dirais, qui sont inscrits dans une loi, qui témoignent d'une reconnaissance
de l'État. Alors, c'est pour ça qu'on insiste sur...
M. Tremblay (Bernard) : ...cet
espace-là au conseil d'administration, en étant conscients, et je pense
qu'effectivement le Scientifique en chef a ce souci-là, et les directions
scientifiques, de faire en sorte que dans les travaux qui seront faits par le
fonds de recherche dans le cadre de comités, il y ait une présence collégiale.
C'est pour ça qu'on parle d'une gestion ouverte et transparente qui tiendra
compte effectivement de la réalité collégiale.
Maintenant, il reste que cet élément-là,
une fois le projet de loi adopté, sera... ne sera plus du ressort, je dirais,
là, du législateur, sera du ressort de l'organisation du nouveau fonds de
recherche. Alors, moi, je réitère quand même qu'il y a un... je pense qu'il y a
un geste, il y a un geste fort à réaliser dans le projet de loi pour s'assurer
que cette place-là soit vue. Et, encore une fois, compte tenu d'un long
historique où au Québec on a laissé vraiment... On ne voit que la recherche
universitaire. En toute franchise, on ne voit que ça, on ne parle que de ça.
Même, en tout respect, le Scientifique en chef, dans son mémoire, parle de la
relève en parlant beaucoup, hein, de maîtrise, doctorat, postdoctorat, alors
c'est... Et je sais qu'il est très soucieux aussi de la recherche collégiale,
mais, même dans l'écriture du mémoire, on sent moins cette réalité-là. Alors,
je pense quand même qu'il y a un message, on se fie aux parlementaires pour
choisir quel est le bon message, mais il y a un message à passer sur
l'importance, donc, de la recherche au collégial.
M. Skeete : Puis cet appel-là
a été bien entendu. Puis je comprends par votre intervention... Parce que le
conseil d'administration a un rôle de vigie, mais vraiment, les comités, ça va
être les experts qui vont être là. Puis j'entends que c'est bien le fun, les
comités, là, mais, tu sais, qu'est-ce qui nous dit qu'on va être là? Ça fait
que, vous, vous souhaitez quelque chose de plus fort, peut-être une présence,
peut-être même nommer les sous-comités dans la loi, pour être sûrs que vous
avez une place là, pour être sûrs que vous êtes représentés, parce que
j'entends... puis...
M. Tremblay (Bernard) : Certainement
une option, oui.
M. Skeete : Puis je veux
juste vous dire : j'ai bien entendu cet appel-là des gens du milieu
collégial. Alors, si je peux vous rassurer, j'ai bien entendu ça.
C'est tout pour moi, Mme la Présidente. Je
pense que mon collègue avait une question.
La Présidente (Mme D'Amours) : Oui.
Je vais céder la parole au député de Saint-Jérôme pour une durée de
2 min 42 s
M. Chassin :Ah oui! C'est rapide, quand même.
La Présidente (Mme D'Amours) : Allons-y.
M. Chassin :Bien, merci, Mme la Présidente, merci beaucoup. Justement,
on parlait un peu, hors d'ondes, là, avant le début, de votre présentation fort
intéressante, où vous avez parlé du fait que le financement ne suit pas
nécessairement, là, notamment pour dégager la possibilité, en fait le temps,
puis, ne serait-ce que pour faire des demandes de subvention, là, c'est du
temps, c'est... Il faut y consacrer en fait non seulement des heures, mais du
jus de cerveau, comme on dit. Et puis on a travaillé justement ensemble sur ce
rajout, là, dans le financement collégial d'un «R» pour l'aspect rayonnement
régional et recherche. Je ne sais pas si je me trompe. Est-ce que ce n'est pas
particulièrement, au collégial, notamment avec les CCTT, beaucoup, une
recherche qui est dite plus appliquée, dans le sens où... C'est sûr que ce
n'est pas si dichotomique, là, recherche fondamentale, recherche appliquée,
tout le temps, mais je ne sais pas à quel point vous avez cette cette
perception-là. Ça pourrait être une explication, sachant qu'il y aurait à peu
près 80 % de recherche fondamentale dans le financement des fonds de recherche
actuels.
M. Tremblay (Bernard) : Je vais
laisser mon collègue répondre.
M. Poirier (Sylvain) : Oui.
Effectivement, la recherche collégiale est plus généralement appliquée, et
qui... mais n'exclut pas le fondamental, comme la recherche universitaire est
plus majoritairement fondamentale, sans exclure l'appliquée. Dans les normes
internationales, la recherche appliquée n'est pas une sous-recherche, c'est une
autre façon de faire de la recherche.
Maintenant, si on parle dans le cadre du
projet de loi d'envoyer la recherche à l'Économie, bien, évidemment, les
caractéristiques apportées par la recherche appliquée à trouver des solutions
concrètes au bénéfice d'entreprises et d'organismes, que ce soit dans des
secteurs technologiques, sociaux ou de santé, fait en sorte qu'on se doit un
peu d'insister non pas pour réduire le fondamental, on veut protéger ce qui est
là, mais on veut malgré tout dire que, dans une logique et dans l'esprit de la
SQRI2, si on veut que la recherche fondamentale mène à des innovations
commercialisables dans les entreprises, il faut, à quelque part, que ça passe
par la recherche qui se fait dans les collèges.
• (15 h 30) •
M. Chassin :Valoriser la recherche fondamentale, en quelque sorte...
La Présidente (Mme D'Amours) :
10 secondes, M. le député...
15 h 30 (version non révisée)
M. Chassin :...mais merci beaucoup, c'était bien, bien clair comme
explication, j'apprécie.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Merci. Maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys pour une
durée de 12 minutes 23 secondes pour vos échanges.
M. Beauchemin : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à toutes les équipes qui sont ici. Merci à
vous d'être avec nous aujourd'hui. Tantôt, vous avez mentionné comme quoi que,
bien, le financement n'a pas suivi la croissance, là, des CCTT, comme ça semble
assez évident. Est-ce que... bon, on parlait d'un objectif de 10 %, moi,
je trouve que ça a de l'allure. Mais j'aimerais ça comprendre, de votre
perspective à vous, quelles sont les conséquences du fait que le financement n'a
suivi la croissance. Ça se... ça se représente comment dans votre quotidien,
ça?
M. Tremblay (Bernard) : Concrètement,
et je vous dirais, il y a différentes situations... puis, tout à l'heure, vous
allez entendre nos collègues de Synchronex qui vont vous parler plus
spécifiquement des CCTT, mais du côté des CCTT, ce que ça implique, c'est donc
une recherche perpétuelle de financement pour soutenir des installations, des
équipements qui doivent être renouvelés et qui doivent être entretenus. Et donc
un effort énorme pour rechercher un financement qui, normalement, là aussi
selon des normes internationales, devrait en bonne partie être assuré pour se
permettre de développer de nouveaux projets de recherche. Donc, c'est un
aspect.
L'autre aspect, c'est le fait qu'on le
disait, dans nos cégeps, des enseignants, ils doivent être volontaires dans le
modèle de notre organisation du travail, et on n'a pas de ressources pour les
inciter à être, je dirais, dégagés de leur... de leur enseignement pour faire
de la recherche. Ce qui amène, je dirais, oui, des passionnés à continuer à
faire de la recherche, mais non pas une culture vraiment intégrée de recherche
dans les CCTT de façon généralisée. Alors, il s'en fait beaucoup, mais imaginez
le potentiel quand on regarde le nombre de cégeps qu'on a au Québec, le nombre
d'enseignants avec leur capacité. Si on avait un modèle... qui, en passant, est
un modèle aussi qui ressource les enseignants, qui retournent après de l'enseignement...
Alors, à cette espèce de mélange, je dirais, qui ferait en sorte qu'il y aurait
des retombées beaucoup plus fortes sur l'enseignement, sur les... sur les
étudiants. Mais c'est un... c'est un peu ça, concrètement, que je vous dirais,
là, qu'on peut constater, donc une difficulté à faire progresser nos CCTT,
parce qu'on est freiné constamment par un financement de base qui n'est pas là
et qui devrait être là, et qui est là, ailleurs dans le monde, dans les centres
de recherche, qui sont nos modèles, quand on regarde l'Allemagne ou ailleurs,
et le fait que, dans nos collèges, bien, évidemment, nos enseignants, il y a
quelques... il y a quelques passionnés, mais on a de la difficulté à leur
donner la capacité de développer leurs activités de recherche. Et... oui?
M. Poirier (Sylvain) : Oui,
si... si je peux ajouter avec un exemple concret. Quand on parle d'effet, le
modèle, quand Bernard disait plutôt qu'au niveau universitaire, un professeur
doit faire de la recherche dans sa tâche et qu'au niveau du collège, on doit
trouver un financement pour dégager d'enseignement l'enseignant ou le
chercheur. Si on prend l'exemple d'une subvention, là, je prends un chiffre de
50 000 $ qui va à un professeur universitaire, le professeur universitaire
a 50 000 $ pour faire sa recherche, c'est-à-dire pour payer des
auxiliaires, pour payer du monde, parce que son salaire, lui, n'est pas
couvert, dans ce 50 000 $ là, il est déjà payé par... pour faire de la
recherche. Et en plus, l'université reçoit des frais indirects de la recherche
pour toute l'infrastructure qui l'entoure. Au collégial, on reçoit 50 000 $, on en prend 40 000 $, on paie le salaire
du professeur pour dégager ou pour le remplacer, et il reste 10 000 $ pour
faire de la recherche. Donc, évidemment, quand, en plus, on voit qu'on est très
peu financés et que chaque financement nous permet de faire peu de recherche,
bien, tout ça s'additionne.
M. Beauchemin : Merci. J'imagine
que, comme toutes les autres entités sur Terre, là, le ralentissement
économique a dû quand même affecter votre capacité d'aller chercher ou pas,
peut-être nous le confirmer, des... des projets, du financement externe pour
faire des projets. Est-ce que ça a été quelque chose que vous avez remarqué
dans votre quotidien, ça, un peu, le fait que, bon, justement, l'économie est
au ralenti? Ça a-tu eu un effet négatif sur votre entrée de fonds?
M. Tremblay (Bernard) : Ça,
en toute franchise, je n'oserais pas répondre. Je pense que nos collègues de
Synchronex, tout à l'heure, auront une réponse plus... plus claire là-dessus,
peut-être Marie-Claude, si tu as...
Mme Deschênes (Marie-Claude) : Bien,
peut-être, il y a eu... il y a eu des avantages et des inconvénients au
ralentissement économique. Je m'explique...
Mme Deschênes (Marie-Claude) : ...dans
certains cas, c'est plus difficile d'aller chercher le partenaire industriel
qui est nécessaire pour compléter le projet de recherche. Parce que dans un
contexte économique difficile, la première chose qu'ils vont couper, c'est bien
sûr la recherche et le développement. En contrepartie, par contre, il y a eu,
bon, toute la période de la pandémie qui a aussi amené des opportunités pour
les centres de recherche. Donc, je dirais que je ne suis pas capable, moi non
plus, de le mesurer avec exactitude, mais je ferais attention d'aller vers
quelque chose qui serait nécessairement négatif ou nécessairement positif. Moi,
j'ai vu les deux dans mes centres de recherche, des opportunités et des freins.
Mais c'est sûr que pour attacher un projet de recherche, comme le mentionnait M. Poirier
tout à l'heure, il faut aller chercher à la fois, dans les fonds de recherche
qui sont disponibles, les programmes des organismes subventionnaires, mais il
faut aussi aller chercher un partenaire industriel dans le cas de la recherche
appliquée. Ça, c'est un parcours du combattant, là. Ce n'est pas facile à
faire, là, puis il faut le faire à partir de nos frais. Donc, c'est un peu pour
ça qu'on expliquait que c'est le sous-financement.
M. Beauchemin : Ma dernière
question, c'est sur le financement, après ça, j'ai deux autres sujets, ça fait
que... puis il me reste six minutes. Alors, le 10 % que vous suggérez...
Moi, je travaille souvent avec des indices de référence, je travaille avec des
comparatifs, etc., un genre de benchmarking. Est-ce que vous avez été voir à
l'extérieur du Canada ou du Québec pour vous donner une idée de comment
d'autres institutions similaires... La structure du cégep, je ne sais pas si
elle représentative ailleurs dans le monde, là, mais est-ce que vous en voyez des
exemples dans d'autres juridictions où est ce que ce 10 % est approprié?
Donc, pour comprendre un peu d'où vient le 10 %, là.
M. Poirier (Sylvain) : Oui.
Il est toujours difficile de faire des comparaisons avec le réseau des cégeps
parce qu'il est unique. Alors, ce que je peux dire, c'est qu'on a quand même un
référentiel canadien, notamment avec le financement des trois fonds à Ottawa.
Et du côté du financement de la recherche collégial à Ottawa, on est dans les
6 % à 8 %, plus 6 % au niveau social, plus 8 % au niveau
techno, là, mais on est dans ces eaux-là. Et on a le même dossier de dire au
fédéral : Le financement de la recherche, dans le cas des financements
fédéraux, c'est la recherche qu'on fait à perte. Donc, le 6 % à 8 % ne
peut pas être suffisant parce que c'est ce qu'on a du côté fédéral, puis ça ne
fonctionne pas. Alors, c'est dans ces... je dirais, dans ces chiffres-là qu'on
navigue.
M. Beauchemin : O.K. Comme
dans l'Ancien Monde dans lequel j'habitais, on disait : Faire du bootstrapping
pour arriver à la solution. C'est un peu ça que vous avez fait, si je comprends
bien. C'est bien.
La présence... Attends, je vais lire
exactement comment vous l'écrivez, là, pour être sûr que je rapporte bien
vos... L'implication étroite de la ministre de l'Enseignement supérieur dans
l'exécution de la mission du fonds de recherche du Québec. C'est votre
troisième recommandation. Comment vous voyez ça? Comment ça fonctionnerait,
selon vous, là?
M. Tremblay (Bernard) : Bien,
on croit qu'effectivement il y a une dynamique à conserver entre les deux
ministères. Le rattachement, donc, formel au ministère de l'Économie ne nous
pose pas de problème, mais on croit qu'il doit quand même y avoir, donc, cette
capacité là d'influence du ministère de l'Enseignement supérieur, puisque la
recherche se fait dans des établissements bien souvent d'enseignement
supérieur. D'où le fait qu'on a proposé que, pour des gestes clés, plan
stratégique, plan d'action annuel, qu'il y ait une consultation de la ministre
de l'Enseignement supérieur préalable, dans le fond, à l'adoption, pour qu'il y
ait cette espèce de mécanisme, comme on voit dans d'autres lois, cette espèce
de mécanisme, je dirais, là, de concertation. Vous savez, on a un exemple
récent avec le projet de loi qui a modifié la Charte de la langue française,
qui fait en sorte que le ministre de la Langue est consulté sur des actions que
pose la ministre de l'Enseignement supérieur. Donc, c'est un peu dans cet
esprit-là qu'on a souhaité, sans alourdir la structure, créer cette espèce
de... maintenir cette espèce de synergie qui nous semble importante entre les
deux ministères.
M. Beauchemin : O.K., je
comprends. En fait, ça m'amène à mon autre question. Il y a un groupe qu'on a
vu... je ne me souviens plus si c'était la semaine passée ou la semaine
d'avant, là. Là, je vais... Acfas, L'Acfas...
Mme Deschênes (Marie-Claude) : L'Acfas.
M. Beauchemin : ...merci, qui
parle de faire... d'intégrer la recherche en français. Trouvez-vous que, dans
votre univers à vous, dans le quotidien, c'est quelque chose qui se ferait
facilement, se fait facilement? A de la place à s'améliorer? Comment vous voyez
ça?
M. Tremblay (Bernard) : Le
français dans la recherche? Bien, moi, je vous répondrais d'abord, justement
avec les nouvelles dispositions de la Charte de la langue française, il y a
des... on a des contraintes à respecter...
M. Tremblay (Bernard) : ...alors,
et il reste que 43 des 48 établissements collégiaux sont des
établissements francophones. Alors, on baigne dans un milieu francophone, et
donc je ne vois pas d'enjeux à ce niveau-là pour nous. En étant conscients que,
quand on a des partenaires internationaux, parce que la recherche collégiale,
ce n'est pas une recherche locale, hein, c'est une recherche qui se fait aussi
à l'international, bien, il y a évidemment des... comment dire, des partenaires
qui peuvent être d'une autre langue. Et pour nous, je pense que toutes les
initiatives, entre autres, de publication en français, de soutien aux publications
en français, d'accès à la littérature scientifique en français, sont des
actions qui sont porteuses, là, pour soutenir la recherche en français.
• (15 h 40) •
M. Beauchemin : Je me trompe
peut-être en disant ça, mais est-ce que le fait que c'est majoritairement plus
appliqué, il y a peut-être moins cet enjeu-là, versus le fondamental qui est au
universitaire, où est-ce que les gens ont plus tendance à vouloir publier plus
souvent, j'imagine? C'est-tu... Puis publier en anglais. Ça semble...
M. Poirier (Sylvain) : Oui,
effectivement, les publications en recherche se font majoritairement en
anglais, mais au niveau collégial, il y a effectivement moins de publications.
On travaille actuellement pour augmenter le nombre de publications collégiales,
mais c'est un fait que, comme on publie moins, tout court, on publie moins en
anglais également, là. Donc...
M. Beauchemin : Puis votre
ratio... bien, je dis ça de même, il y en a-tu un, ratio français-anglais dans
les publications que vous faites à votre niveau?
M. Poirier (Sylvain) : Je
n'ai pas de chiffre exact, mais je ne serais pas surpris d'un 50-50. Donc...
M. Beauchemin : O.K., c'est
bon. C'est... C'est damnant, parce que moi, je suis un gars de chiffres, ça
fait que je vais toujours vous poser ces questions-là, là. Un dernier chiffre
que j'aimerais avoir votre opinion là-dessus. On a rencontré des groupes qui
nous parlaient d'avoir des objectifs de société pour investir dans la recherche
complète, là, dans l'ensemble de... la tarte complète de la recherche au
complet, là, 3 % du produit intérieur brut. C'est quoi, votre opinion
là-dessus? Qu'est-ce que vous en pensez?
La Présidente (Mme D'Amours) : En
20 secondes.
M. Tremblay (Bernard) : Ah!
bien, écoutez, ce sera très bref. On n'a pas fait d'analyse qui nous
permettrait de se positionner sur un chiffre comme ça. Je serais... je serais
mal à l'aise de vous dire si 3 % est suffisant ou trop.
M. Beauchemin : O.K. Bien,
merci. C'est pour comprendre un peu la compétitivité du Canada, à long terme,
du Québec, à long terme, là.
M. Tremblay (Bernard) : Mais
3 %, quand on parle de benchmarking puis de regarder ce qui se fait
ailleurs, je dirais que c'est ce qui permettrait au Québec de juste rejoindre
ou accoter ce qui se fait de mieux dans les pays du G-20.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Merci. C'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au
député de Maurice-Richard pour une durée de quatre minutes huit secondes pour
votre période d'échange.
M. Bouazzi : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Très, très heureux que vous ayiez accepté cette invitation.
C'est drôle que vous ayiez commencé par parler de M. Bourbonnais, que j'ai
rencontré il n'y a vraiment pas longtemps dans le cadre d'une tournée sur les
questions énergétiques, effectivement, au Cégep de Jonquière, au Centre TERRE,
il y a un travail exceptionnel qui se fait par M. Bourbonnaus, entre autres,
parce que c'est une équipe formidable qui travaille sur des choses qu'on ferait
bien d'installer le plus possible partout au Québec.
Vous, donc, je comprends évidemment
l'essence de ce dont vous parlez, c'est beaucoup de valoriser la recherche qui
se trouve dans vos établissements, qui sont effectivement moins évidemment
connus que ce qui se fait ailleurs dans les universités. Puis, encore une fois,
pour en avoir visité, il se passe des choses extraordinaires. Une... une des...
unes des critiques, si on veut, qu'on a reçues de plusieurs groupes avant vous
ici, c'était vraiment l'idée de dire : Bien, on ne veut pas qu'il y ait un
seul fonds. On voudrait en garder trois, garantir un certain financement pour
des espaces de recherche qui n'ont littéralement rien à voir, là, des questions
de sciences sociales d'un côté ou des questions très, très technologiques de
l'autre. Ça, tout le monde est d'accord pour dire qu'il fallait des espaces de
collaboration parfois plus faciles, mais... mais il y avait quand même un gros
accord pour dire il y a plein d'espaces où il n'y a juste pas de collaboration
et il y a des espaces qu'on veut être sûrs de financer. Vous, si vous vous
retrouvez à garantir la reconnaissance de la recherche que vous a faite dans un
système où il y a aussi une garantie pour les trois fonds en tant que tels,
est-ce que ça vous dérange? Est-ce que... Donc, est ce que... est-ce que ça
vous dérangerait, en gros? Parce que vous êtes... vous êtes d'accord avec la
transition qui est devant nous. Est-ce que, si on a quelque chose où les trois
fonds sont garantis d'une manière ou d'une autre à travers une gouvernance, on
ne sait pas encore laquelle, mais que, par ailleurs, il y a une reconnaissance
de ce que vous apportez à la recherche et puis évidemment un accès, il n'y a
pas de problème?
M. Tremblay (Bernard) : Tout à
fait...
M. Tremblay (Bernard) : ...oui,
parce qu'en fait l'idée d'un seul fonds et l'appui qu'on... qu'on y accorde,
c'est par rapport au volet administratif, qui pouvait générer une certaine
lourdeur avec trois fonds. Mais, quant au... quant à la pertinence d'avoir
trois secteurs, d'avoir une garantie de financement et de s'assurer qu'il y ait
un équilibre, je pense que c'est un... un souci, pardon, un souci légitime de
la communauté scientifique que de... que de dire : Il ne faut pas que la
fusion amène cette disparition-là ou le... la supplantation d'un aspect de...
d'un secteur de recherche au détriment des autres.
Alors, je... moi, je siège actuellement au
FRQ Société, Culture. Bien, c'est sûr que je... tu sais, moi, je suis très
sensible au fait qu'il faut qu'il demeure un équilibre dans le financement
futur entre les secteurs des fonds actuels, même s'il y a fusion administrative
pour des fins de commodité de fonctionnement, en fait.
M. Bouazzi : Donc, vous
partagez une partie du souci, là.
M. Poirier (Sylvain) : Oui,
puis, dans tous les cas, ce qui est important, c'est que les trois fonds ne
soient pas étanches au niveau de leur financement. C'est-à-dire qu'un projet
technologique qui veut inclure un sociologue ou un psychologue pour déterminer
les impacts du changement technologique ne devrait pas ne pas être recevable
parce que c'est un chercheur de sciences humaines dans un projet technologique.
M. Bouazzi : Il me reste
quelques secondes. Un des problèmes des personnes sur le C.A, c'est la question
d'indépendance, donc possiblement quelqu'un qui aurait accès à des fonds de
recherche ou qui voudrait... ou qui a déjà eu accès, etc., ne serait pas
indépendant. Est-ce que vous pensez que c'est une bonne idée d'exclure ces
personnes-là des différents C.A.?
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Tremblay (Bernard) : Bonne
question. A priori, écoutez...
La Présidente (Mme D'Amours) : C'est
tout temps que nous avions.
M. Tremblay (Bernard) : ...non.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission suspend les travaux quelques
minutes afin que notre prochain groupe prenne place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 47)
(Reprise à 15 h 50)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue au groupe des
CCTT‑Synchronex. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre
exposé, s'il vous plaît.
M. Lesage (Michel) : Merci
beaucoup. Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre. MM. Mmes les députées,
bonjour. Merci de nous recevoir. Je m'appelle Michel Lesage, je suis
président-directeur général du Réseau des CCTT-Synchronex. Je suis accompagné
du président du conseil d'administration, M. François Drouin, qui est en
ligne, qui est également directeur général de TransBiotech, un CCTT en
biotechnologie, rattaché au cégep de Lévis. Je suis aussi accompagné de
Mme Nancy Déziel, qui est administratrice sur notre conseil et directrice
générale aussi du Centre national en électrochimie et en technologies
environnementales, le CNETE, rattaché pour sa part au cégep de Shawinigan. Et
enfin, je suis accompagné d'Aurélie Licois, ma collègue, qui est directrice qualité
et performance au réseau. Je présenterai le mémoire, mais évidemment, chaque
personne qui m'accompagne est susceptible de prendre la parole puis de
renchérir et bonifier mes réponses à vos questions au moment de la période de
discussion.
D'abord, précisons ce qu'est le Réseau des
CCTT. Vous êtes peut-être ou non familiers avec... avec ce que nous sommes et
qui nous représentons. Et ensuite on va s'exprimer sur l'importance de la
recherche appliquée dans le continuum de l'innovation et dans la planification
budgétaire de FRQ. Et enfin, on va commenter certains points spécifiques du
projet de loi. Si vous vous demandez ce qu'est le Réseau des CCTT‑Synchronex,
nous sommes le regroupement de 59 centres collégiaux de transfert de
technologie, d'où l'acronyme CCTT, et de pratiques sociales novatrices. Chacun
de nos centres se spécialise dans un domaine d'expertise qui lui est propre.
Essentiellement, nous sommes... Nos membres sont des centres d'innovation et de
recherche appliquée qui servent de laboratoire de recherche et développement
pour plus de 6 000 entreprises annuellement dans le cadre de
11 000 projets. 70 % de notre clientèle sont constitués de PME,
et on contribue à l'amélioration de leurs procédés, de leurs produits, de leurs
pratiques, de leurs technologies. On compte plus de 2 400 experts à
notre emploi qui réalisent 11 000 projets par année.
Les projets sur lesquels on travaille ont
pour conséquence directe l'augmentation de la productivité des organisations
qui nous embauchent. Je n'irai pas ici, faute de temps, dans la présentation de
statistiques, mais je pense qu'il est de compréhension commune que le Québec
n'affiche pas une avance importante en matière de productivité, et même a connu
des reculs, le Canada aussi. Donc, on est dans une situation où le Canada comme
le Québec sont en défi d'améliorer la productivité des organisations, là, qui
constituent, qui composent notre économie. Il faut souligner à grands traits le
fait que l'innovation, qui découle de la recherche, est notamment une façon de
hausser la productivité du Québec. En matière de recherche, il est important de
différencier la recherche fondamentale de la recherche appliquée. Vous en avez
parlé avec nos prédécesseurs. Les deux sont très importants, mais aussi très
différents. La recherche fondamentale est celle dont l'objectif est d'acquérir
ou de faire avancer le champ des connaissances, faire progresser la science.
L'utilisation de cette avancée n'est pas nécessairement envisagée ou prévue au
moment de la débuter. Évidemment, elle est souhaitée, mais elle n'est pas
nécessairement intégrée au projet. La recherche appliquée pour sa part, conduit
vers un but pratique déterminé en amont du début des travaux. Elle répond à un
besoin, à un problème clairement défini par un client, un milieu preneur, un
partenaire qui peut être une entreprise, un OBNL, une administration publique,
enfin à peu près n'importe qui. Notre clientèle est très diversifiée.
Donc, voilà pour qui nous sommes. Passons
au projet de loi no 44. Je débute en exprimant clairement qu'on se
présente aujourd'hui auprès de vous avec un sentiment d'appui puis on accueille
très favorablement le projet de loi. On salue la volonté du gouvernement de
simplifier, de consolider, d'optimiser l'organisation gouvernementale en matière
de recherche et d'innovation. On voit la fusion des fonds comme une opportunité
de créer des synergies et des collaborations qui transcendent les disciplines
et d'aborder les grands enjeux de société selon une approche multidisciplinaire
et concertée. On croit que l'adoption du projet de loi fera en sorte d'assurer
une cohérence et une continuité entre les deux piliers que sont la recherche et
l'innovation. On croit aussi que cela va permettre au gouvernement d'être en
mesure de soutenir des priorités de recherche choisies en fonction des grands
enjeux sociétaux auxquels nous faisons face, sans sacrifier, et là, on le
souligne, l'excellence et l'indépendance de la recherche qui est réalisée.
Enfin, on espère que le nouveau FRQ...
M. Lesage (Michel) : ...va
contribuer à la mise en œuvre de conditions qui contribueront à la valorisation
tant des technologies que des pratiques sociales, et ça, notamment par
l'entremise des collèges et des CCTT qui jouent un rôle vital dans la
traduction des connaissances en applications concrètes et leur maturation vers
des marchés ou des milieux preneurs.
Le réseau tient à renchérir sur le fait
qu'il est essentiel de ne pas subordonner toute activité de recherche aux
seules visions et intérêts politiques, économiques. La diversité des
disciplines, des secteurs et les perspectives de recherche doivent être
préservées pour permettre une approche équilibrée et structurante. L'objectif
de favoriser un écosystème de recherche dynamique et agile, excellent, capable
de relever les défis actuels tout en contribuant au bien-être et à la
prospérité de la société québécoise doit demeurer.
Avant de traiter de points précis du
projet de loi, je dois d'abord mettre l'emphase sur le fait que les
financements propres du FRQ devraient, selon nous, être mieux répartis entre la
recherche fondamentale et appliquée. On a pris la peine de présenter
sommairement la différence entre les deux. Au Canada, 140 collèges et
instituts se partagent 2 % du budget des trois conseils subventionnaires,
alors qu'environ 110 universités disposent de 98 % des budgets. Au
Québec, on n'a pas la donnée granulaire pour... pour arriver à un chiffre
comparable, mais on sait qu'on est dans le même ordre de grandeur. Le même
constat s'applique ici, donc la recherche collégiale presque très, très peu
représentée, insuffisamment représenté, là, dans les fonds et les
investissements du FRQ. Le réseau, donc, souhaite que le Fonds de recherche du
Québec profite de la réorganisation qui... qu'il engage pour accroître son soutien
à la recherche réalisée dans les collèges. J'ai cru comprendre qu'on n'était
pas les premiers à vous en parler.
En ce qui a trait aux programmes existants
des FRQéfectueux, le réseau déplore l'arrêt d'un des deux seuls programmes
exclusivement dédiés à des projets de recherche pour les chercheurs et
chercheuses de collèges, soit le Programme de recherche au collégial, et
s'attend à le voir réapparaître ou voir apparaître un programme de même type
bonifié pour toutes les disciplines sous la nouvelle entité. Le réseau estime
qu'il faut mieux soutenir les collaborations interordres par des programmes
appropriés et le soutien à la mise en place de chaires interordres, et pas
nécessairement uniquement dans les zones d'innovation que le gouvernement crée.
Dans cet esprit, le réseau tient à
féliciter le FRQ pour la création du programme Catalyseur d'innovation dont la
structure de type réseau implique un leadership exercé par des CCTT avec une
collaboration d'au moins une université. C'est un programme qui est en forte
demande, pour lequel il y a un engouement. Le problème, c'est qu'il manque
cruellement de financement. Donc, on souhaiterait que ce programme-à soit
beaucoup mieux financé à l'avenir parce qu'il est porteur de collaborations
interordres.
Le réseau souhaite voir financer plus de
stages aussi dans les CCTT et les collèges. On propose de collaborer avec la
nouvelle entité pour adapter les programmes de stages existants et mieux
diffuser ces opportunités auprès de nos membres. Le réseau demande aussi une
uniformisation au sein du fonds de certains critères d'éligibilité, notamment
le statut de chercheur et de chercheuse collégial, et on est prêt à collaborer
en tout temps avec le fonds afin de mieux définir ce statut, ainsi que tout
enjeu relatif à la rémunération des chercheurs et chercheuses de collèges pour
mieux prendre en considération la réalité des collèges et notamment celle des
gens qu'on représente, c'est-à-dire les CCTT.
Le réseau encourage la nouvelle entité à
ouvrir l'ensemble de ses programmes aux chercheurs et chercheuses de collèges,
de CCTT, cependant, avec le bémol ou le souci particulier suivant qu'il devrait
y avoir un souci mis sur l'établissement de critères d'évaluation adaptés ou
appropriés à la réalité des chercheurs de collèges qui n'est pas la même que
pour des chercheurs d'universités. Alors, quand on a accès aux mêmes programmes
et qu'on fait face aux mêmes critères, bien, on n'est pas toujours choisi. On
n'a pas toujours des chances parce que nos chercheurs vivent dans un univers
totalement différent de celui des chercheurs universitaires.
Enfin, nous avons quelques commentaires
sur certains points spécifiques du projet de loi. D'abord, on applaudit à
l'ajout du rôle de diplomate scientifique qui est accordé au Scientifique en
chef sur les plans local, régional, national et international. On pense que ça
va conforter ou officialiser le leadership qu'il existe... qu'il exerce déjà
dans le positionnement puis le rayonnement du Québec et ailleurs au Canada,
aussi à l'étranger, en matière de recherche. On est prêt, nous, à collaborer
avec le Scientifique en chef dans cette... dans l'exécution de cette partie-là
de sa mission de diplomatie scientifique. On a d'ailleurs nous-mêmes des
projets à l'international.
• (16 heures) •
On approuve que le Scientifique en chef
devienne le président-directeur général des affaires courantes. Comme la
présidence du conseil d'administration soit une fonction distincte et
indépendante, cela va permettre d'éviter tout conflit d'intérêts, d'assurer une
gouvernance transparente. Pour que la composition du CA garantisse une
représentation équilibrée des différentes perspectives et besoins en matière de
recherche et d'innovation selon les secteurs de recherche, mais également du
point de vue universitaire et collégial, on pense ce qu'il est opportun — et
là on va vous faire la même demande que nos prédécesseurs — de
réserver un siège au CA au Réseau des CCTT pour représenter non pas les CCTT,
mais les particularités et besoins de la recherche collégiale, ainsi que la
recherche appliquée réalisée à...
16 h (version non révisée)
M. Drouin (François) : ...avec
et pour des entreprises et organisations clientes au Québec. On applaudit la
décision en faveur du maintien des postes de direction scientifique au sein du
fonds. Ces directions continueront de superviser des activités de recherche,
selon le secteur, et de veiller à ce qu'elles soient alignées sur les priorités
stratégiques définies par le FRQ et de faciliter des ponts entre les
disciplines.
Et enfin nous espérons que la mise en
place des comités aviseurs, et ce, pour chacun des secteurs, permettra de
rapporter les réalités terrain, tant du côté universitaire que du collégial, et
de fournir des conseils d'experts et des suggestions sur les orientations
stratégiques liées spécifiquement au secteur et d'orienter les programmes de
financement et les politiques de recherche. On pense que ces comités aviseurs
là devraient accueillir des chercheurs, donc des gens qui sont familiers avec
la recherche et pas nécessairement des chercheurs qui ont un statut académique.
La très grande majorité de nos chercheurs ne sont pas des académiques, ne sont
pas des professeurs, ils font de la recherche à temps plein.
Sur ça, bien, même si on préconise le
maintien des trois disciplines, des trois secteurs et la qualité, l'excellence
puis l'indépendance de la recherche qui est reliée là, on applaudit grandement
la possibilité que la nouvelle structure va permettre de supporter des projets
de recherche interdisciplinaire, qui vont faire appel à la concertation et à la
collaboration. On pense que la majorité des grands enjeux auxquels le Québec
fait face actuellement ne relève pas de disciplines particulières, mais plutôt
font appel à des compétences ou des savoirs interdisciplinaires.
Sur ce, je ne sais pas où on en était dans
notre 10 minutes, mais on est prêts à prendre vos questions.
La Présidente (Mme D'Amours) : Vous
avez dépassé votre 10 minutes, mais M. le ministre m'avait avertie qu'il
laissait du temps... de son temps pour que vous puissiez terminer votre...
votre exposé.
Maintenant, M. le ministre, la parole est
à vous pour une période d'échange de 15 minutes 51 secondes.
M. Skeete : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Encore une fois, bienvenue parmi nous, M. Drouin. Merci à
vous aussi de vous joindre à nous. J'ai quelques questions à vous poser. Vous
avez sans doute entendu les échanges qu'on a eus tantôt avec la Fédération des
cégeps. Vous avez évoqué, comme eux, que vous souhaitez avoir une place. J'aimerais
vous entendre sur le sous-comité. Je ne sais pas si vous avez eu la chance d'entendre
nos échanges, mais est-ce que vous accueillez favorablement une place à cette
instance-là pour être entendus lors des dépôts de projet?
M. Drouin (François) : Bien,
c'est sûr qu'on apporte une réponse semblable à celle de la Fédé des cégeps.
Notre confiance est limitée. L'expérience qu'on a quand on parle de recherche
au Québec, c'est qu'on parle largement de recherche universitaire. Quand on
voit les programmes, ils sont conçus pour des universités. La pensée que la
vraie recherche se fait dans les universités est assez prédominante. On le voit
dans à peu près... dans toutes les... dans toutes les... toutes les occasions
ou toutes les situations. Ça fait que nous, on verrait d'un très bon œil que la
recherche collégiale dispose d'un siège qui... qui... qui prend part à la
gouvernance du fonds de recherche, donc au conseil d'administration. Et on voit
aussi... Là, pour l'instant, ce n'est pas spécifié dans le projet de loi, là,
mais la composition des comités... On pense, les comités qui devraient graviter
autour des trois secteurs, là, devraient aussi accueillir des chercheurs des
deux ordres, là, collégial et universitaire, et quitte à l'inscrire dans la
loi. Parce que là encore, la preuve nous en est faite souvent que... soit la
place qui nous est réservée, elle est mince ou il faut se battre à chaque fois
pour... pour l'obtenir, ça fait que...
M. Skeete : Puis c'est quoi
la source, selon vous, de... de... de cet état des faits là? Pourquoi il faut
se battre pour avoir une place, si les cégeps font de la bonne recherche?
M. Drouin (François) : Bien...
Puis je vais... je vais y aller pour une première réponse, mais j'inviterai mes
collègues... Si vous voulez renchérir, n'hésitez pas. Évidemment, il y a... il
y a une perspective historique. La recherche collégiale date de moins
longtemps. Elle est en émergence. Elle fait sa place, donc elle est en
croissance. Elle est rendue à un niveau de développement qui fait en sorte que
là, on commence à avoir des besoins puis à signifier ce qu'on a besoin pour
grandir. L'habit qui nous a été fait est trop petit, là. Ça fait que je pense
qu'une des premières raisons, c'est... c'est la perspective historique, c'est
le fait qu'on est là depuis moins longtemps. On en fait depuis moins longtemps,
puis... puis voilà.
Je pense que c'est la principale chose,
puis je pense que... Je m'engage sur un terrain glissant, mais je pense que les
universités ont aussi tendance à penser que la vraie recherche se fait dans les
universités par des gens qui ont complété des doctorats, des postdocs donc...
et qu'il n'est pas possible de faire des projets de recherche. Évidemment, il y
a... il y a différents types de recherche. Il y a différents types de projets
de recherche. Je peux... Si vous alliez demander aux clients de nos centres, s'ils
estiment que la recherche, qui est faite et qui répond à leurs besoins, est une
recherche de qualité pertinente, utile et excellente. J'aimerais leur laisser
répondre à la question, mais vous auriez comme réponse que c'est une recherche
qui répond très bien à leurs besoins. Ça fait que moi, je pense qu'on a une
perspective historique. On a aussi un regard de nos... de nos collaborateurs
universitaires qui apprennent à travailler avec... avec les collèges. Mais là
dessus peut-être que vous voulez...
Mme Déziel (Nancy) : Je peux
peut-être ajouter qu'on sait que le continuum innovation n'est pas complet. On
transfère très peu de ce qui est développé dans les universités...
Mme Déziel (Nancy) : ...actuellement.
Alors, les CCTT, c'est leur travail. Le professeur universitaire, ça ne
l'intéresse pas ou peu d'aller jusqu'au transfert à l'industrie. Ce qui
l'intéresse, c'est de pousser sa curiosité et de former les étudiants, et puis
il fait un excellent travail. Nous, quand on travaille avec ces enseignants-là,
on peut adapter et puis transférer au marché pour pouvoir justement gagner en
productivité au niveau du Québec. Et effectivement j'appuie ce que Michel a
dit, c'est vraiment une perspective historique quand on recule, parce qu'avant
les cégeps n'avaient pas accès aux Fonds de recherche du Québec, et ça fait à
peine une douzaine, quinzaine d'années qu'on peut appliquer sur ces fonds-là.
Alors, c'est tout simplement une perspective historique.
M. Lesage (Michel) : Puis on l'entend
dans nos vis-à-vis fédéraux comme provinciaux, pour ne pas nommer le FRQ ou
pour ne pas nommer CRSNG ou les conseils, on entend l'écoute puis l'intérêt
pour la recherche collégiale, mais il faut faire de la place, il faut créer des
pratiques, il faut créer de l'histoire, il faut créer des succès. Il y a de
l'ouverture, mais il n'y a pas une place suffisante.
M. Skeete : Mais là vous
m'amenez à quelque part, où est-ce qu'on a entendu beaucoup de voix. Une des
voix qu'on a entendue dans ce projet de loi là, c'était, au contraire, de nous
dire : Il ne faut absolument pas faire de la recherche dirigée. Là, vous
venez ici militer pour qu'on en fasse plus. Pouvez-vous me dire comment vous...
Parce que là, je dois vous dire, le nombre de personnes qui sont plus inquiètes
du contraire est prédominant. J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Lesage (Michel) : Moi, je
pense qu'il ne faut pas choisir, il faut qu'on fasse les deux, c'est-à-dire
qu'il y a une vertu à faire de la recherche qui développe, qui fait avancer le
champ de connaissance, parce que les inventions, les innovations de demain, on
les prépare aujourd'hui. Donc, la recherche fondamentale, la recherche non
dirigée, la recherche libre, académique, elle est essentielle et primordiale.
Alors, vous ne trouverez pas en nous des gens qui vont dire : Il ne
faudrait pas en faire. Le problème, c'est qu'il y a trop peu de son... de sa
contrepartie de transfert ou d'amener la recherche ou l'innovation dans la
société, dans les entreprises, dans les organisations. Cette recherche
appliquée là ne se fait pas assez. Si on regarde, tant au fédéral qu'au
provincial, les rapports qu'on lit récemment, le Canada est en tête de file
parmi... la tête en peloton pour la recherche fondamentale ou l'avancement de
la science. Il fait partie du peloton de fin quand vient le temps de regarder
comment les entreprises ou les organisations innovent. Comment on fait pour
combler ce manque-là? C'est la recherche appliquée.
Alors, pour nous, il ne faut pas choisir,
il faut faire les deux. Mais on a eu plutôt tendance à faire beaucoup de
recherche fondamentale et à soutenir timidement la recherche appliquée. C'est
la raison de notre présence à quatre aujourd'hui ici, là, on voulait être sûrs
que ce message-là soit bien véhiculé.
M. Skeete : Je ne sais pas si
vous avez eu la chance d'écouter nos échanges la semaine passée, le chiffre qui
avait été évoqué, c'était, en ce moment, un ratio de 80-20. Je vais vous faire
une confidence, je ne pense pas qu'on va élargir davantage, mais votre message
est entendu par rapport à la place du collégial, ça, je veux vous le dire,
comme j'ai dit aux autres groupes qui représentaient votre secteur. Moi, j'ai
découvert un réseau beaucoup plus que je le pensais, qui a une place à occuper.
Donc je vais garder ça en tête lors des autres... lors des délibérations qu'on
va avoir avec les collègues. Je pense que le collège peut et doit occuper une
plus grande place à l'intérieur de la recherche. Alors, c'est un message qui est
bien entendu sur le reste.
J'aimerais vous entendre sur le rôle que
vous jouez, parce que vous parlez notamment des manques d'opportunités qu'on
offre, justement, parce qu'on ne pense pas spontanément à la recherche
collégiale comme une avenue de recherche typique. Y a-tu des demandes,
actuellement, de recherche qui sont non comblées, des stages ou des jeunes qui
voudraient faire de la recherche dans le réseau collégial, qui ne réussissent
pas à en faire, ou des gens qui sont... qui seraient peut-être aptes à en faire
de la recherche, mais qui ne trouvent pas toujours des issues? Ça arrive-tu,
actuellement, ça?
Mme Déziel (Nancy) : Actuellement,
les jeunes vont vraiment vers le privé pour leurs stages, parce que les
salaires sont très grands et nous, dans les CCTT, on peine à leur offrir des
bourses qui sont décentes. Alors, effectivement, quand on porte à notre
attention des programmes de bourses, on les utilise à 100 %, il ne reste
pas d'argent sur la table. Également, quand on parle de projets de recherche
appliquée, je pense à des compagnies comme, par exemple, les masques au
lithium, avec lequel votre gouvernement travaille beaucoup, des entreprises
avec lesquelles on voudrait faire des projets de recherche. On applique au
fédéral, parce que les principaux programmes industriels sont au fédéral, et on
se fait refuser, notre centre, au CNETE, cette année, s'est fait refuser 11
projets au fédéral. Ce sont toutes des entreprises québécoises qui ne seront
pas répondues.
• (16 h 10) •
Alors, oui, on a un grand besoin, c'est
demandé par l'industrie, et les étudiants ont des besoins également au niveau
de financement. Et nous sommes limités dans le financement qu'on peut mettre de
l'avant pour les bourses, parce qu'on n'est pas payés, nous, les CCTT, pour accueillir
des étudiants. Ça fait partie de notre mandat, mais on ne reçoit pas d'argent
pour ça...
M. Lesage (Michel) : ...si je
peux me permettre...
M. Skeete : Oui, allez-y,
s'il vous plaît.
M. Lesage (Michel) : ...dans
les opportunités, Nancy l'a présenté, le continuum...
Des voix : ...
M. Lesage (Michel) : ...le
continuum d'innovation. On développe beaucoup de choses dans les universités.
Ce n'est pas le travail des chercheurs, sauf exception, d'amener ces
innovations ou ces inventions-là au marché. Donc, il y a beaucoup de résultats
de recherche qui dorment dans les... dans les universités, qu'on... qui ne
trouvent pas leur chemin vers la société. Pour nous, ça, c'est une opportunité
manquée, tant au Canada qu'au Québec, comment on fait pour amener une plus
grande partie des résultats de recherche générés dans les universités dans les
organisations, dans les entreprises. Ça, pour moi, là, la maturation, le
continuum de l'innovation, là, c'est... c'est un rendez-vous manqué jusqu'à maintenant
au Canada puis au Québec. Et ça, on n'est pas les seuls à pouvoir faire ça.
Mais ça, c'est vraiment notre cœur de métier de faire ça, de prototyper, de
mettre à l'échelle, une chose qui se fait à petite échelle dans une université,
comment on peut la faire à grande échelle dans une usine? Ça, c'est notre
travail de faire ça, de... d'imaginer les procédés, de les développer, de les
valider, réduire le risque pour les entreprises. Alors, nous, on est vraiment
dans notre cœur de métier. Ça, c'est une opportunité qui est manquée
globalement au Québec et au Canada actuellement.
M. Skeete : Mais pas au
détriment... la recherche fondamentale, on s'entend.
M. Lesage (Michel) : Non, on
veut amener la recherche fondamentale au marché.
M. Skeete : Je comprends. Je
comprends. O.K. Ça fait que, pour nous, le projet de loi n° 44, c'était
l'occasion d'aborder la recherche au collégial, comme vous le savez. Comment on
fait pour initier les étudiants au collégial? Parce que moi, j'ai souvent évoqué
que je n'ai jamais entendu parler de ça quand j'étais au cégep, moi, cette
recherche collégiale. Qu'est-ce qui manque pour démontrer le... l'utilité... de
montrer que ça existe à nos étudiants? C'est comment... Le lien se fait
comment, typiquement, dans un parcours? Puis comment qu'on fait pour en faire
davantage, selon vous?
M. Lesage (Michel) : Je vais
y aller pour une première réponse, puis j'ai ma collègue à droite qui
dit : Je veux dire quelque chose là-dessus. 17 000 étudiants, c'est
le nombre d'étudiants qui sont rejoints par les activités de nos membres. Les
étudiants viennent visiter nos laboratoires, viennent faire des laboratoires
dans nos équipements, assistent à des séminaires, des colloques. Donc, ils sont
exposés à l'activité de recherche de nos CCTT. Il y a plusieurs collèges qui
ont même des parcours études-recherche qui impliquent les CCTT. Ça, c'est une
façon de le faire. Il y en a aussi un plus petit nombre qui viennent faire des
stages ou qui sont des collaborateurs rémunérés dans nos projets de recherche,
plus petit nombre, à peu près autour de 900, 1 000 — 900 ou
1000, là, pas 900 000 — par année. Donc, c'est une façon qu'on a
de rejoindre nos étudiants. C'est une mission. Mais le financement dont on
dispose pour faire ça, il est microscopique et... pas l'enjeu de... Bien, vous
avez parlé de financement tout à l'heure, je ne sais pas si on aura l'occasion
d'en parler, mais c'est un enjeu pour nous, pour nos centres, d'avoir de la...
du temps de disponibilité pour faire de l'encadrement, accueillir puis en faire
davantage. Mais, quand même, 17 000 étudiants rejoints. Mais,
là-dessus, je...
Mme Déziel (Nancy) : Nous
avons calculé les coûts d'accueillir un stagiaire dans notre centre, et puis,
en plus de la bourse, qui est environ 5 000 $ pour un stage d'assez
longue durée puis qui donne un peu... de meilleure employabilité de cet
étudiant-là, ça nous coûte 12 000 $ par étudiant, dans un centre,
pour l'accueillir, l'encadrer, le former sur les équipements, lui faire rencontrer
l'entreprise, travailler sur des projets de l'entreprise. L'étudiant ne peut
pas être laissé à lui-même, il ne peut pas faire les analyses sans être
supervisé. Alors, il y a des coûts à ça.
Il y a cinq ou six ans, on avait eu un
programme qui s'appelait le programme Trial, dans lequel chaque centre recevait
100 000 $ pour faire des projets, justement, de diffusion de science,
d'accompagnement des étudiants. Et là je vais parler pour mon centre à moi, on
accueillait, à ce moment-là, 3 000 étudiants sous différentes formes,
là, c'était un concept qui s'appelait Hashtag Station Science, qui a été très
populaire. On est allés dans les écoles primaires, les écoles secondaires. On
accueillait des gens dans nos laboratoires. On avait des stages. On
accompagnait dans des concours. Aujourd'hui, c'est moins de 500, pas parce
qu'on ne veut pas, parce qu'on n'a plus ce financement-là, qui a duré trois
ans, et on n'a plus accès à ça, et on voudrait le faire. Il y a de la demande.
Les enseignants nous appellent pour recevoir. On est... On est dans le...
l'obligation de décliner.
Alors, dans les fonds de recherche du
Québec, s'il y avait un genre de programme comme ça ou si le gouvernement du
Québec avait une ouverture à ça, je pense que ça serait très, très bien
accueilli, là, puis ça a des retombées importantes.
M. Drouin (François) : Puis
j'aimerais ajouter un point.
M. Skeete : Oui, M. Drouin,
parfait. Allez-y.
M. Drouin (François) : Un
autre élément qui, je crois, est manquant présentement, c'est la culture de la
recherche dans les... dans les cégeps, dans les collèges. C'est... Il y a
peu... C'est assez récent, le fait de faire de la recherche. Comme on disait
tantôt, ça... les programmes collégiaux ne... ça ne fait pas si longtemps que
ça qu'ils existent. Donc, il y a peu de culture de recherche encore. Donc,
tout... Puis un des éléments qui vient blesser cette culture de... ce manque de
culture de recherche là, c'est justement le fait que, bien, il y a un faible
pourcentage des budgets de recherche actuellement qui est accordé à la
recherche dans les collèges. Si... On peut dire que c'est important, mais la
vraie façon de le démontrer, c'est en finançant puis en disant : C'est
vrai que ça a de l'importance, voici comment on vous encourage, voici
comment...
M. Drouin (François) : ...au
soutien dans ce... dans le développement de cette culture-là.
M. Skeete : Merci beaucoup.
Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
vais céder maintenant la parole au député d'Abitibi-Est.
M. Dufour : Donc, bonjour,
merci beaucoup de votre présence. Écoutez, moi, j'ai eu le plaisir, lorsque
j'étais ministre des Forêts, de faire affaire avec les CCT, et puis je pense
que c'est... c'était même pour moi aussi une découverte à ce moment-là. Vous
parlez, entre autres, le rétablissement... Puis, vite fait, si on regarde sur
le projet de loi, vous semblez très en lien avec ce que le ministre essaie de
présenter présentement, de préparer. Vous parlez de rétablissement du programme
de recherche collégial du FRNQ et puis... du FRQNT, plutôt, et la situation de
votre budget. Pouvez-vous nous en parler un petit peu davantage pour, je pense,
nous instruire un peu sur toute la problématique que vous avez présentement?
M. Lesage (Michel) : Bien,
tout d'abord, votre première question sur le programme Recherche au collégial.
Il a été mis en pause, en moratoire parce que, vous n'êtes pas sans savoir, ou
peut-être vous ne le savez pas, il y a un grand chantier sur la recherche au
collégial présentement en cours, donc, jusqu'aux termes de ce chantier-là, le
FRQNT a mis son programme Recherche collégial en pause, en arrêt. Nous, on
aurait préféré qu'il attende les résultats du chantier avant de prendre une
décision, mais... Donc, ce qu'on aimerait, c'est que ce programme-là soit
rétabli. Évidemment, il était... il est... De façon générale, les programmes
destinés à la recherche collégiale au FRQ sont... sont de petites envergures.
Les sommes étaient... Le nombre de projets financés était petit. La somme
accordée par projet était petite. Ça fait que, s'il était rétabli, on
militerait en faveur d'une bonification des enveloppes pour être capable de
soutenir un plus grand nombre de plus grands projets. Donc, ça, c'est le
premier point.
Le financement des CCTT. On sort d'un exercice
budgétaire qui a été difficile pour tout le monde, y compris pour nos membres.
La situation de nos membres, actuellement, avec le développement de nos
centres, là, nos centres ont... disposent maintenant de laboratoires,
d'équipements, d'infrastructures, de bâtiments, donc de coûts de maintien de
ces équipements-là et de ces infrastructures-là, puis ont du personnel de plus
en plus qualifié, de hauts niveaux. Moi, j'ai vu, là, ce réseau-là se
développer au cours des 20 dernières années. Alors, on a à faire
maintenant des expertises de haut niveau. Ces deux phénomènes là, là, d'être
capable d'attirer et de conserver des expertises de haut niveau puis des
équipements qui sont parfois comparables ou même avantageusement comparables à
ceux de laboratoires universitaires comparables font en sorte que nos
centres... le financement de base de nos centres est... est... est lacunaire,
est... il ne fait plus l'affaire. Donc, nos centres, actuellement, une portion
importante de notre réseau est en difficulté financière. Dans la dernière
année, on pense que le tiers de nos membres a terminé en déficit. Notre réseau
s'autofinance à 85 %, donc... il peut compter sur 15 % de financement
de base de l'État. Il n'y a pas de réseau de recherche au Canada puis au
Québec, c'est fini, donc...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
M. Lesage (Michel) : ...financement
public insuffisant.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Beauchemin : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. L'impact de ne pas avoir un rehaussement du
financement, pour vous, ça se traduirait comment?
M. Lesage (Michel) : Des
déficits, des mises à pied, le choix de projets plus payants, moins payants,
des projets auxquels on ne donne pas suite, des clients auxquels on s'intéresse
moins parce que c'est moins payant, une course effrénée — nos prédécesseurs en
ont parlé — de projet en projet pour dégager des faméliques marges de profit
pour payer ce qui n'est pas financé dans le financement de base, donc
difficultés plus grandes de s'impliquer dans le développement de grands projets
structurants, de parler à des partenaires économiques, de bâtir des filières.
Vous savez, nos CCTT sont partout sur le territoire. Alors, dans bien des cas,
dans les régions, ils sont au cœur des stratégies de redéploiement puis de
diversification économique. Alors, ça, pour faire bâtir des grands projets
économiques dans des régions dévitalisées, c'est du temps, c'est de la
concertation, c'est du montage de projets, c'est des partenariats, c'est des
alliances. Tout ça est... ne rapporte rien. Ça fait que, donc, on est plus
parcimonieux sur ces choses-là. On s'investit moins, on fait un projet après
l'autre pour essayer de dégager des marges. Ça fait que c'est une course
effrénée pour des projets, pour des marges. C'est déjà commencé, les mises à
pied. Alors, on a déjà des chercheurs qui ont quitté des CCTT, des postes qui
ont été non comblés, du personnel parfois administratif, parfois scientifique.
Quand on perd un chercheur qu'on a développé pendant 10, 15 ans, là, il ne
s'en va pas au chômage, il s'en va travailler ailleurs, on ne le reverra
jamais. Ça fait qu'on a commencé, là, actuellement, cette année, à
déconstruire... à débâtir le réseau.
M. Beauchemin : Puis est-ce
que vous pouviez spéculer sur la raison du pourquoi, cette année, ça a
commencé? Est-ce que c'est corrélé au ralentissement économique qu'on... qu'on
ressent dans tout le Québec un petit peu ou...
• (16 h 20) •
M. Lesage (Michel) : C'est
sûr que le ralentissement économique occasionne des... Des entreprises clientes
retardent des décisions, on retarde des projets, prennent moins de risques.
Donc, plusieurs de nos centres nous disent, effectivement, la décision de
s'engager dans un projet d'un client tarde et est remise à l'année d'après. Ça
fait que, oui, c'est sûr que le ralentissement économique affecte, affecte nos
membres. Puis, l'autre raison pourquoi ça arrive maintenant, bien...
M. Lesage (Michel) : ...en
fait, si vous regardez juste une partie de nos chiffres, vous allez voir un
réseau qui est en développement. Vous allez voir un réseau dont le chiffre
d'affaires, là... tu sais, nous, on reçoit à peu près 25 millions de
financement public par année, de base, là, puis on génère à peu près
175 millions de chiffre d'affaires, d'où mon 85 % tout à l'heure, là.
Bien, si vous regardez ce 175 millions là, là, au fil des années, il a...
il n'était pas... il n'était pas à cette hauteur-là. Donc, on a un réseau qui
se développe. Le problème, c'est qu'il se développe à perte. C'est que les
marges sont nulles, les financements ne fonctionnent pas, les... on est payés
coût tant pour faire les projets, on a le droit à des petits frais indirects
qui ne correspondent pas à nos besoins. Puis là, bien, nos centres ont atteint
un niveau de développement tel, que, là, les parcs d'équipements, le parc
d'infrastructures puis le personnel de haut niveau, bien, commencent à affecter
ceux qui sont les plus développés.
Mme Déziel (Nancy) : J'ajouterais
qu'historiquement, quand j'étais... je présidais le réseau, il y a quelques
années, on avait signifié une problématique importante de financement des
centres qui ont des grandes infrastructures, et il y avait eu une injection de
fonds de 278 000 $ par année par centre pour trois ans. Et ces fonds-là se
sont terminés il y a un an et demi. Alors, c'est la disparition de ce fonds-là,
ainsi que le fonds TRIAL, qui était 100 000 $ par année pour soutenir le
transfert vers l'enseignement et les jeunes, qui nous a mis en problème. Donc,
ça, ce financement-là est disparu et crée un manque vraiment important chez les
centres. Cet argent-là était nécessaire. Alors là, on pige dans nos soldes de
fonds, mais j'ai discuté avec mes collègues et nous... nous arrivons dans le
fond de nos soldes de fonds, donc d'où les mises à pied qui ont débuté, là. Ce
n'est pas facile.
M. Beauchemin : Je comprends,
je vous entends. Donc... aucune compensation additionnelle qui a été faite par
le gouvernement, là, si je... si je vous entends bien?
M. Lesage (Michel) : Bien,
aucune annonce...
M. Beauchemin : Le «peek»
financier de l'aide gouvernementale a été atteint, et là on redescend un peu.
M. Lesage (Michel) : Bien,
aucune nouvelle au budget. On attend l'exercice des crédits, voir le détail des
crédits accordés au financement des collèges. Puis le tiers de nos membres sont
des CCTT qui ne sont intégrés dans le collège. Ce sont donc des employés de
collèges. Eux vont vivre avec la hausse du... des salaires, là, du... négociés
dans la fonction publique, là, mais on n'a aucune garantie que le financement
va suivre. Les collèges vont bénéficier d'un financement additionnel pour
compenser ces coûts de main-d'œuvre là, mais nos employés à nous dans les collèges
ne sont pas partie prenante de cette formule de financement là. Alors, on a une
vingtaine de collèges, là, qui vont se trouver peut-être avec une masse
salariale rétroactivement augmentée pour une année qui est terminée.
M. Beauchemin : Le groupe qui
vous a précédé avait un objectif quantifié, là, de 10 % au niveau du fonds
de recherche, qui devrait être envoyé au collégial. Si vous aviez spéculé sur
un... un acquis potentiel à obtenir de votre part, ce serait quoi à peu près au
niveau du pourcentage, selon vous?
M. Lesage (Michel) : Je dois
avouer qu'on n'a pas fait cette réflexion entre nous, ça fait que je
m'aventurai sur un... sur un chiffre, là, mais on pense qu'actuellement,
dépendant de ce qu'on regarde et ce qu'on considère, on est entre 1% et
3 %. Alors, toute augmentation serait la bienvenue. On sait que les temps
sont difficiles pour tout le monde, là, y compris pour ceux qui gèrent des
fonds de recherche.
M. Beauchemin : O.K., bien,
je vous entends. On a eu effectivement... juste une dernière, puis je vais...
je vais prononcer l'acronyme comme il faut, ACFAS, qui est venu nous parler de
la recherche, là, en français. Je voulais vous entendre sur ce sujet-là, à
savoir : De votre perspective à vous, de l'ensemble des établissements sur
lesquels vous êtes associés, directement ou indirectement avec, là, la
publication en français, selon vous, est ce que ça représente 50-50, comme on a
entendu l'autre groupe nous mentionner?
M. Lesage (Michel) : Je ne
sais pas... je ne sais pas où ce chiffre-là a été utilisé. Moi, je n'ai pas de
chiffres, là, je n'ai pas de dénombrement de publications. Pour nous, l'enjeu
se présente un peu différemment. C'est la possibilité de faire affaire avec des
clients ou des organisations clientes, parfois au Québec, mais souvent hors
Québec, là, et donc la possibilité de le faire dans la langue de nos clients,
qui... Donc, il faut trouver des aménagements, là, il y a des... il y a des
voies de passage qui sont prévues, là, mais qui ne sont pas toujours simples
pour être capables de faire de la recherche avec des clients aussi, dans des
contextes où le français n'est pas nécessairement la langue première.
Mme Déziel (Nancy) : J'ajouterais
que ça dépend des disciplines. En sciences naturelles et en génie, c'est très
difficile de publier en français. Alors, les publications sont en anglais. Nos
chercheurs publient, je dirais, au... j'ai un peu honte de le dire, mais
100 % en anglais.
M. Beauchemin : Puis
j'essayais de comprendre, parce que j'essayais de me faire un ratio dans la
tête de... pour voir, dans un univers, là, où est-ce que, bon, je ne sais pas
combien de cégeps anglophones il existe, mais bon, on aurait pu extrapoler que
ça devrait représenter, théoriquement, pour être équitable... le nombre de
cégeps anglophones sur le nombre de cégeps francophones devrait être le
pourcentage d'écrits en anglais, mais...
M. Beauchemin : ...c'est... Je
ne suis pas un scientifique moi-même, ça fait que j'ai juste garroché ça comme
ça, là, pour me faire un benchmark. Mais qu'est-ce que vous penseriez qui
pourrait être représentatif si... même si ce n'est pas quelque chose qui est
dans le domaine appliqué, là, là?
M. Lesage (Michel) : Bien,
les chercheurs, ils publient dans des revues qui offrent de la visibilité puis
qui sont des revues qui font avancer le champ de connaissance puis leur
carrière scientifique. Ça fait que le choix de la revue puis... et donc de la
langue, c'est souvent plus dicté par le domaine d'activité puis la revue ou la
publication qui a un retentissement, là. C'est plus comme ça que ça se fait.
Mais j'ajouterais la même chose que nos prédécesseurs : le phénomène de
publication, dans les collèges, est beaucoup moins important que dans les
universités. Nos... La majorité des projets qu'on fait se font avec des
clients, industriels ou non, et c'est... donc, les projets ne requièrent pas
toujours, en fait, pas nécessairement souvent, non plus, une publication. Même,
souvent, elle n'est pas souhaitée, cette publication-là, par nos clients.
Ça fait que c'est un enjeu, publier
davantage, de valoriser davantage, là, mais le phénomène de publication
scientifique, dans le réseau des CCTT, ce n'est pas... ça n'a pas le même poids
puis la même importance que dans le réseau universitaire, puis c'est une des
différences entre les deux domaines de recherche, là. On n'a pas le même
univers.
M. Beauchemin : Puis vous
avez mentionné, tantôt, une certaine... vous vouliez avoir une représentation
sur le conseil d'administration du fonds de recherche. Comment que... Comment
cette personne-là de votre organisme serait sélectionnée pour en arriver à être
la représentante ou le représentant sur le C.A.?
M. Lesage (Michel) : Bien,
comme, la plupart du temps, quand on a des représentations, il y a un appel
d'intérêt, il y a une discussion entre nos membres. La question se poserait,
de : Est-ce que c'est un CCTT membre qui va porter la vision de la
recherche appliquée collégiale? Est-ce que c'est quelqu'un de la permanence du réseau
lui-même? Ça, ce serait une discussion à faire dans nos instances. Mais,
généralement, pour un cas comme celui-là, là, qui va susciter de l'intérêt puis
qui est important stratégiquement, il y aura une discussion dans nos instances,
là.
M. Beauchemin : O.K. On a eu
un groupe, qui est venu nous parler la semaine dernière, qui parlait de...
d'établir un ratio du produit intérieur brut qu'on aurait dépensé, comme
économie, là, sur la recherche, appliquée ou fondamentale, ce n'était pas
spécifique, je pense que c'était l'ensemble. Alors, bon, c'est sûr que je
comprends l'aspect que la recherche fondamentale a une très longue piste
d'atterrissage pour en arriver à avoir, peut-être, une application,
éventuellement, un jour, là, mais, d'un côté ou de l'autre, en bout de piste,
l'objectif est d'améliorer notre productivité, dans son ensemble. Selon vous,
quel serait un genre d'indice de référence, comme... Parce qu'on a mentionné
3 % comme étant peut-être le chiffre qui serait un objectif noble, pour le
Québec, là, d'avoir. Qu'est-ce que vous en pensez, vous?
M. Lesage (Michel) : On n'a
pas fait de réflexion dans nos instances là-dessus. Avez-vous une idée, une
opinion?
Mme Déziel (Nancy) : En fait,
le 3 %, c'est le chiffre qu'on entend de la part des chercheurs du
domaine, mais on n'a pas été plus loin que ça.
Mme Licois (Aurélie) : Bien,
je pense qu'on peut renchérir là-dessus. Effectivement, 3 %, c'est la
valeur du PIB dans les pays qui sont, comme ce qui a été dit la semaine
dernière, les top guns, là, donc, vraiment les pays numéro un qui sont dans...
qui sont nommés pour la recherche. Donc, si vous cherchiez un benchmark l'autre
jour, bien là, on l'a, c'est 3 %. Donc, c'est, minimalement, 3 %.
Présentement, je pense qu'on est peut-être à 2 % au niveau du Québec, donc
on accuse un retard de ce côté là.
M. Beauchemin : Puis une des
choses qu'on a tendance à faire, là, nous autres, ici, là, c'est d'essayer de
se comparer, d'avoir des indices de référence, d'essayer de comprendre comment
qu'on définit le succès, là. Puis, dans votre cas à vous, plus spécifiquement,
ici, on parle d'aider la... dans l'appliqué, là, à réaliser des gains de
productivité. Puis je ne sais pas... Je vous comprends, là, je vous entends
puis je suis certain que c'est la réalité. J'essaie juste de me dire... Comment
peut-on mesurer le succès? Est-ce que vous êtes capables de le quantifier,
d'une certaine façon, dire : Par rapport à la façon que ça s'est fait
avant, notre client, si on peut l'appeler ainsi, a été capable d'augmenter sa
productivité de 8 %, puis là vous faites un sondage, vous êtes un nouveau
client puis vous arrivez à un chiffre point? Est-ce que vous avez ce genre
d'exercice là, pour qu'on puisse, nous, être capables de voir qu'est-ce que ça
donne?
• (16 h 30) •
Mme Déziel (Nancy) : Actuellement,
on a fait faire une étude, puis 1 $ investi dans un CCTT en génère 12 vers
l'industrie, donc c'est quand même des retombées extrêmement importantes. Si je
parle de mon centre, parce que je connais ces chiffres-là en particulier, chez
nous, 85 % de ce qu'on a fait depuis 15 ans, on l'a rendu au marché, donc
c'est très concret. Et puis on...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Déziel (Nancy) : ...chaque
année avec une quinzaine d'universités, dont à peu près toutes les universités
québécoises. On regarde ce qu'elles font, on adapte, on rend au marché. C'est
ça, notre fonction. Comment on pourrait calculer ça? C'est le défi. Vous l'avez
dit, le sondage, c'est quand elles y répondent, à nos entreprises. Puis, des
fois, elles ne font pas toujours le lien.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je vais céder la parole au
député de Maurice-Richard.
M. Bouazzi : Merci beaucoup.
Très heureux de vous rencontrer ou de vous rerencontrer, n'est-ce pas?
Peut-être une première question pour continuer sur la question que j'ai posée
juste avant et malheureusement n'a pas eu de réponse, mais je vais vous poser
la même question. On sait qu'une des questions qui se pose sur le CA, le groupe
avant vous voulait qu'il y ait des personnes sur les C.A. Je comprends qu'aussi,
de votre côté, il y a une volonté de participer à la gouvernance de ces fonds.
Le fait de pouvoir avoir accès à ces fonds-là en tant que chercheur, est-ce que
ça devrait être quelque chose qui définirait le fait d'être indépendant, si on
veut?
M. Lesage (Michel) : Bien, en
fait, si c'était un gestionnaire ou une direction de centre qui étaient là, ils
ne font pas de recherche, ne porte pas de projet. Si c'était quelqu'un du
réseau, de la permanence du réseau, même constat, même indépendance. C'est sûr
que c'est difficile, surtout dans une situation comme celle du Québec, de s'intéresser
à la recherche, d'en connaître un bout, d'avoir une contribution à apporter et
de n'être lié d'aucune manière à la recherche qui est réalisée au Québec. Bonne
chance si on arrive à y arriver. Ça fait que l'idée, c'est d'avoir des gens qui
sont capables d'apporter une perspective. Dans celle que nous proposons, nous,
c'est la perspective de la recherche appliquée et réalisée avec des milieux
preneurs dans les collèges et non pas nos membres. Mais je comprends que...
M. Bouazzi : J'entends
évidemment qu'il y a des gens qui n'ont pas quelque chose... qui ne vont pas
demander eux-mêmes et encore, là, parce qu'ils auraient un intérêt à recevoir,
évidemment, des fonds du FRQ, même s'ils ne sont pas chercheurs, mais qu'on
exclut des gens parce qu'ils pourraient avoir bénéficié ou être en train de
bénéficier d'un fonds, ne serait pas quelque chose qui toucherait à leur
indépendance. Parce que je vous avouerais que moi, j'ai été très étonné que ce
soit un critère d'indépendance. Je travaillais dans une institution où la
question de la gouvernance était très importante et il arrivait parfois que
quelqu'un doive se lever et sortir parce qu'il y avait une prise de décision où
il était en conflit d'intérêts. Ça arrive, là. Mais de là à exclure les gens de
la possibilité même d'être sur un C.A., j'ai trouvé ça quand même beaucoup, là,
honnêtement. Je ne sais pas...
Mme Déziel (Nancy) : Si je
peux me permettre, je peux compléter la réponse. J'ai été vice-présidente du
Conseil d'administration des fonds de recherche du Québec Nature et technologies
puis je suis au conseil d'administration du Conseil national de recherche en
sciences et en génie du Canada. Dans ces fonds-là, on n'approuve pas les
projets un par un. Donc, ce sont des comités d'évaluation qui notent les
projets. Il y a un comité multipartenaires qui «rank» les projets, qui, bien
entendu, n'a pas de projet dans ce concours-là. Et le conseil d'administration
approuve en blocs. Donc, les gens ne savent pas ce qu'ils approuvent, ils ne
savent pas s'ils sont dedans ou s'ils ne sont pas dedans. Donc, il n'y a pas de
conflit d'intérêts possibles. Maintenant, si la réglementation propose ça pour
la saine gouvernance, bien, je pense qu'il y a toujours possibilité de s'ajuster,
là.
M. Bouazzi : O.K. Il me reste
peu de temps. Un des gros sujets qui nous est venu des différents groupes, c'est
de dire : Mais comment est-ce qu'on est capable de garantir qu'il n'y ait
pas un des trois fonds ou même deux sur trois des trois fonds qui se retrouvent
à être pénalisés? Est-ce que vous... Je comprends que vous êtes d'accord avec
le fait de faire de la collaboration, etc., mais qu'on garantisse un certain
pourcentage pour ces fonds-là dans la gouvernance, est-ce que vous seriez
contre, par exemple?
M. Lesage (Michel) : On a
même écrit dans notre mémoire... Nous, on veut des garanties sur le maintien
des financements dans les trois secteurs. Évidemment, celui qui nous préoccupe
le plus, c'est société culture, c'est lui qui est le plus susceptible d'écoper,
là, s'il y avait des choix. Puis ça, c'est important, c'est crucial pour nous.
11 de nos membres sont en pratique sociale novatrice, là, on est... On a parlé
de productivité tout à l'heure, mais ce n'est pas le seul résultat à attendre
de la recherche appliquée. Ce ne sont pas que des gains de productivité qu'on
vise, là. Donc, la mesure du succès, là, c'est... elle est complexe et elle ne
peut pas se mesurer uniquement qu'en productivité.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vous remercie infiniment pour votre contribution à nos travaux. Je suspends
les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de
prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 35)
(Reprise à 16 h 41
)
La Présidente (Mme Tremblay) : Alors,
nous allons maintenant reprendre les travaux. Donc, je souhaite la bienvenue au
Pr Vincent Larivière. Je vous rappelle, M. Larivière, que vous disposez de
10... 10 minutes pour votre exposé, puis après nous allons procéder à une
période d'échange avec les membres de la commission. Alors, si vous êtes prêt,
je vous invite à débuter votre présentation. Merci.
M. Larivière (Vincent) : Super.
Bien, écoutez, merci beaucoup, Mme la Présidente. Mmes et MM. les députés,
merci de me donner l'opportunité de dire quelques mots sur le projet de loi
n° 44. Donc, moi, je suis professeur de sciences de l'information à
l'Université de Montréal. J'ai été une chaire UNESCO sur la science ouverte. Je
suis également directeur scientifique du Consortium Érudit, qui est une
plateforme de diffusion de revues, puis directeur scientifique adjoint de
l'Observatoire des sciences et des technologies. Donc, moi, j'étudie la
communauté scientifique depuis une vingtaine d'années, les différentes politiques
scientifiques, de la façon dont la recherche s'est réorganisée. Puis j'ai été
membre du conseil d'administration du FRQSC, de 2016 à 2023.
Donc, passer dernier dans une commission
comme celle-ci permet de... bon, d'avoir vu quand même certaines tendances qui
se sont dégagées dans les interventions. Je vais essayer de pas trop répéter ce
qui a déjà été dit, mais je vais quand même faire écho à certains.... à
certains éléments. Je vais essayer aussi d'amener et d'autres points.
Donc, moi, dans l'ensemble, là, je dirais
en tant qu'expert, j'ai quand même des réserves sur le projet de loi
n° 44, et ce n'est pas clair pour moi, en quoi vraiment il améliore les
structures de soutien à la recherche dans la province, puis même que, dans
certains cas, j'ai certaines craintes que ça pourrait en fait mettre en péril
des facettes qui vont plutôt bien. Donc, j'ai un certain nombre de
recommandations, quatre, qui visent à assurer en fait trois points. D'une part,
le développement de programmes de financement qui reconnaissent la spécificité
des pratiques de recherche et de diffusion des connaissances de chacun des
trois grands domaines. Deuxièmement, d'assurer l'indépendance du champ
scientifique dans la gestion de ces programmes de financement, et enfin de reconnaître
le secteur d'enseignement supérieur comme étant le lieu où, en gros, la
recherche scientifique se fait et la formation à la recherche se fait.
Donc, ma première recommandation, c'est de
maintenir trois fonds et trois conseils d'administration qui sont distincts.
Les trois fonds actuels ont été créés il y a une vingtaine d'années dans la
refonte des Fonds FCAR, CQARS, et caresser et FRQSC. Ils ont été cristallisés
dans la refonte de 2011 avec la création du poste de Scientifique en chef.
Cette structure de financement là, qui a d'ailleurs, hein, je le répète,
l'appui de la communauté de recherche québécoise, ça répond au besoin de
prendre en compte les spécificités disciplinaires, en gros, des sciences
naturelles, des sciences sociales et des sciences de la santé. En fait, les
trois domaines qui sont couverts par les trois fonds ont des pratiques de
collaboration différentes, des... une division du travail qui est différente,
des pratiques d'interdisciplinarité qui sont différentes, des pratiques d'évaluation
de la recherche et de modes de diffusion qui sont très, très, très différents.
Mais, dans tous ces domaines-là, il y en a
quand même un qui est un peu plus fragile que les autres, et c'est celui des
sciences sociales et humaines. Souvent, la recherche est publiée dans des
revues nationales et elle s'intéresse à des objets qui sont propres au Québec,
et souvent c'est en langue française. Et quand je dis que c'est le domaine le
plus fragile, il faut voir que les domaines des sciences sociales et humaines
regroupent plus de la moitié des étudiants aux cycles supérieurs au Québec,
mais reçoivent 25 % du financement de la recherche qui est donné par les
fonds, et groupent aussi près de la moitié des professeurs, 48 %. Donc, la
fusion des fonds sous un seul conseil d'administration, qui aurait par ailleurs
une très faible représentation du nombre académique, est en fait susceptible
d'affaiblir encore davantage les domaines des sciences sociales et humaines et
de réduire d'une certaine façon la place de diffusion en français puis de la
recherche sur le Québec, des domaines encore là qui semblent être très chers à
ce gouvernement. Donc, je... je recommanderais de maintenir...
M. Larivière (Vincent) : ...la
structure des fonds de recherche actuels.
Ma deuxième recommandation a rapport à la
participation des membres du champ scientifique au conseil d'administration.
Donc, l'histoire des sciences a clairement montré que les scientifiques sont à
même de contribuer davantage à l'économie, à la société et à, bon, différentes
sphères pour lesquelles on décide d'avoir des scientifiques dans notre société,
lorsqu'ils sont essentiellement indépendants. Puis cette autonomie-là, elle a
été reconnue par le gouvernement du Québec par la Loi sur la liberté académique.
Donc, bien que je reconnaisse la nécessité d'un gouvernement de se soumettre
aux lois qu'il a lui-même créées, puis par là j'entends la Loi sur la
gouvernance des sociétés d'État, il me semble que les fonds de recherche sont
d'une nature qui est intrinsèquement différente à celle de Loto-Québec,
Hydro-Québec ou de la Société des alcools, où le conflit d'intérêts, on
pourrait dire, prend une tout autre forme.
D'une certaine façon, on peut dire que les
fonds de recherche du Québec sont un peu victimes de leur succès ici, dans le
sens où à peu près tous les scientifiques actifs dans la province vont avoir un
certain rattachement aux Fonds, que ce soit via les regroupements stratégiques,
les équipes ou les faits qu'ils ont... le fait qu'ils ont été financés, à un...
à un moment donné. Donc, la nécessité ici de se conformer aux exigences de la
Loi sur la gouvernance des sociétés d'État aura pour effet de priver la
communauté scientifique de sa capacité à contribuer, de par son expertise, aux
décisions relatives à l'organisation de la recherche dans les trois domaines.
Et là, je suis allé faire une petite
analyse pour voir, bien, ils font quoi, les organismes subventionnaires
comparables à l'échelle internationale. Est-ce qu'ils ont effectivement des C.A
qui sont composés de membres du champ scientifique ou des... principalement des
C.A. composés d'externes? Donc, j'ai... je suis allé voir ce qui se fait dans
le reste du Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Australie, et il n'y a
aucun des C.A. qui respecterait une loi analogue à celle de la gouvernance des
sociétés d'État.
Aux États-Unis, à la National Science
Foundation, qui a un budget de 10 milliards de dollars, c'est plus de
70 % des membres du C.A. qui sont des académiques affiliés à des universités.
Au CRSH, aux trois conseils fédéraux, c'est une très grande majorité, là, on
parle de 78 %... plus... en fait, plus de 80 %, au CRSH et au CRSNG
et 63 % aux IRSC. Et c'est ce qui est intéressant, aux IRSC, c'est qu'il y
a un seul membre qui ne fait pas partie, si vous voulez... ou disons qui fait
partie d'une sphère qui est un peu plus privée, et c'est un consultant
indépendant. Parce qu'on est bien conscient qu'ici le conflit d'intérêts
fonctionne davantage de l'autre côté, où les compagnies pharmaceutiques
pourraient influencer la recherche qui se fait dans les universités.
Donc, compte tenu des conséquences, on
pourrait dire, de l'autonomie scientifique de la conformité à la loi sur la
gouvernance des sociétés d'État et de la définition quand même assez
restrictive qui a été adoptée, là, quant à c'est quoi un membre indépendant, je
recommande d'assurer en fait une représentation majoritaire de membres de la
communauté au sein des C.A. et de sérieusement reconsidérer la place des fonds
de recherche du Québec sur la liste des sociétés d'État.
Ma troisième recommandation touche le
rattachement des fonds de recherche au ministère de l'Enseignement supérieur.
Et là, il faut se rappeler c'est quoi la mission des fonds de recherche du
Québec. C'est essentiellement de soutenir le développement stratégique et
cohérent de la recherche scientifique au Québec. Elle se fait où, la recherche
scientifique? Bien, elle se fait essentiellement dans les universités. C'est le
cas dans à peu près tous les pays du monde où, en gros, 90 % de la
recherche, elle est faite dans le monde universitaire. C'est la même chose au
Québec et c'est vrai dans à peu près tous les domaines. Donc, quand on prend
les domaines des sciences de la santé, des sciences sociales et humaines, et même
dans les domaines un peu plus appliqués que sont la chimie et la physique, on
est à plus de 80 %, en fait, de ce qui se fait au sein des universités.
C'est un peu plus bas en biologie. Et la recherche qui se fait là, ce n'est pas
dans le secteur privé, elle se fait dans le secteur gouvernemental. Donc,
puisque la recherche, elle est au cœur des activités des universités, et que
les universités sont responsables de la quasi-totalité de ce qui se fait dans
la province, il me semble beaucoup plus approprié et encore là cohérent que les
activités de financement de ces... de la recherche soient au sein du ministère
de l'Enseignement supérieur. Et je rappelle encore là les craintes relatives
aux pressions des milieux économiques sur la recherche et, encore là, de
l'importance qui a été accordée par ce gouvernement au concept de liberté
académique. Il me semble que ce rattachement-là serait beaucoup plus logique.
Et enfin, mon dernier point, et je vois
que je suis dans les temps, en tout cas, je pense, ça a rapport avec le statut
de scientifique en chef ou le poste de scientifique en chef. Donc, il y a quand
même des débats assez récents qui auraient besoin d'une contribution de la
science, qu'on pense au projet Northvolt, et d'autres, et ça nous montre en fait
qu'on a besoin d'avoir des structures indépendantes qui permettent d'aviser les
différents paliers de gouvernement sur différents projets. Donc, dans ce
contexte-là, je suis extrêmement heureux de voir que le poste de scientifique
en chef ne sera plus seulement que de gérer des activités de recherche, mais
aussi de donner du conseil scientifique aux différents...
M. Larivière (Vincent) : ...un
palier de gouvernement. Mais dans ce contexte-là, il faut aussi revoir un peu
le processus de nomination du scientifique en chef. Et je pense que ce
comité-là devrait avoir une dominance de scientifiques. Donc, si on veut avoir
le scientifique qui est, on pourrait dire, le plus représentatif, qui ait le
soutien de la communauté scientifique, bien, il devrait y avoir, au sein de
ce... de ce comité-là, un certain nombre de scientifiques.
• (16 h 50) •
Il faudrait aussi probablement spécifier
dans le projet de loi qu'effectivement il n'y a pas un scientifique en chef qui
peut connaître tous les domaines. Donc, son rôle ne sera pas de donner
nécessairement de l'expertise lui-même tout le temps, mais d'être capable
d'aller coordonner l'expertise scientifique au sein de la province. Donc,
voilà! Je m'arrête ici. Merci beaucoup pour votre temps et au plaisir de discuter.
La Présidente
(Mme Tremblay) : Merci pour votre présentation. Alors, nous
allons maintenant commencer la période d'échange. Alors, je cède la parole à M.
le ministre.
M. Skeete : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Content de vous revoir et aussi à ce siège, Mme la
Présidente. Donc, M. Larivière, merci de prendre le temps d'être avec
nous, aujourd'hui. J'ai quelques questions en lien avec votre intervention puis
votre mémoire. Puis d'ailleurs, merci de prendre le temps de venir vous joindre
à nous aujourd'hui. Je veux vous rassurer sur quelques notions. Vous savez, on
a entendu différents groupes venir nous dire, en lien avec l'indépendance du
scientifique en chef : Bien, on devrait peut-être le faire nommer par les
deux tiers de l'Assemblée nationale. Or, on se... On se replie sur votre point
de vue, que l'Assemblée nationale, bien qu'elle est remplie de gens compétents
et qualifiés, ce ne sont pas tous des scientifiques. Et je pense que,
justement, une des réponses qu'on avait données à cette question-là,
c'est-à-dire oui, mais comment on fait pour s'assurer que cette bonne personne
là va être vraiment quelqu'un qui va être respecté par ses pairs? C'est
justement d'avoir une nomination par ses pairs, avec un comité sélectionné
parmi ses pairs. Donc, je veux vous rassurer, c'est l'intention, que les futurs
scientifiques en chef soient nommés par une équipe de gens crédibles du domaine
scientifique, qui sont, en bout de ligne, qui vont aboutir à une nomination
d'une personne qui est respectée par ses pairs. Je pense qu'on ne s'en sort
pas, là, tu sais. Puis je vous... j'oserais dire, même, si on ne voudrait pas
le faire, je pense que ça ne marcherait pas. Je pense que les scientifiques
n'accepteraient pas ça. Et cette personne... cette personne-là ne serait pas
crédible. Alors, c'est même une démarche que je... Je ne vois pas comment on
pourrait faire autrement. Donc, je veux vous rassurer là-dessus, c'est
l'intention du gouvernement.
Je veux vous amener sur votre suggestion
par rapport au C.A. Vous savez, la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État
vient mettre certaines balises pour les C.A. Mais à mon sens, ce que vous
exprimez comme inquiétude, ce n'est pas vraiment le lieu du C.A. d'avoir ces
inquiétudes-là. Pour moi, un C.A. assure une gouvernance d'une institution,
mais qui n'est pas dans le jour à jour. L'exemple que je vous donnerais, ça
serait quand on parle des... des conseils d'administration de l'école des
pompiers ou l'école de la police. Ce n'est pas nécessairement parce que ça touche
la police qu'il faut que le C.A. soit rempli de personnes de police. Au
contraire, en fait. Si on veut avoir une police qui représente la société, on
veut avoir un conseil qui, oui, est rempli de gens qui connaissent le domaine
policier, qui connaissent les enjeux, mais qui ne sont pas nécessairement liés.
Puis de l'autre côté, d'avoir des gens qui sont strictement liés, bien, dans le
projet de loi, même si le conseil d'administration est rempli d'indépendants,
dans la notion de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, ça ne veut pas
dire que ces personnes-là ne sont pas qualifiées. La notion d'indépendant veut
juste dire que la personne n'est pas liée par un financement direct. Il n'y a
rien qui empêche un recteur ou quelqu'un qui... ça fait quelques années qu'il
n'a pas reçu de financement, à siéger là. Donc, il ne faut pas confondre
indépendant par... par, manque d'un autre mot, incompétent, là. Ça va être des
gens qui comprennent ça qui vont y siéger. Donc, je veux juste vous dire un
peu, moi, quand je parle de conseil d'administration où je loge. J'aimerais
vous entendre sur la manière que je vois le monde, puis peut-être avoir une
réaction de votre part.
M. Larivière (Vincent) : Merci
beaucoup, M. le ministre, pour votre commentaire. Bon, par rapport à votre
premier point, bon, donc, je prends pour acquis que ça va être écrit un peu
plus en détail dans la... l'autre mouture du projet de loi sur la composition
de ce comité-là de pairs parce que, bon, effectivement, ce n'était pas très
présent dans cette version-là. Donc, c'est une bonne nouvelle. Bon. Par rapport
au C.A. des trois fonds, bon, on est... on est retourné voir la liste des
sociétés d'État puis, effectivement, les fonds n'étaient pas là avant 2022,
donc n'avaient pas à se soumettre à cette règle, à cette règle-là. Donc...
Donc, de mon point de vue, je ne sais pas encore tout à fait ce qu'ils font là
puis je n'ai pas de solution en ce sens ou je ne sais pas dans quelle autre
catégorie ils pourraient être, mais ils ont déjà été dans une autre catégorie.
Maintenant, en termes...
M. Larivière (Vincent) : ...de
membres, de membres indépendants, et tout ça. Écoutez, pour avoir siégé sur ces
C.A. là, ce sont des C.A. qui donnent quand même du contenu aux fonds. Ce sont
des C.A. qui sont, d'une certaine façon, composés de gens qui sont actifs dans
le système et qui sont capables d'informer le Scientifique en chef et les
directions scientifiques sur quels programmes devraient être créés et, bon,
comment on devrait diviser la tarte, on pourrait dire, du financement. De
penser que ces gens-là sont en conflit d'intérêts s'ils reçoivent du
financement, je pense que c'est mal connaître la façon dont le financement est
octroyé, qui est octroyé par des comités de pairs qui sont complètement indépendants
du conseil d'administration, et... ne voit même pas les décisions de
financement qui sont... qui sont prises. Donc, je vous entends bien quant au
fait que vous voulez qu'il y ait des académiques quand même sur ce comité-là.
Maintenant, j'ai une crainte, moi, que ce
soit un C.A. qui soit composé, en grande partie, de gens qui sont plus actifs
en recherche et qui sont plutôt loin du terrain, et que ça va influencer la
capacité, en fait, à bien financer la recherche et à créer des programmes qui
répondent aux besoins de la communauté.
M. Skeete : Puis... Merci
pour cette réponse-là, ça me permet de mieux cerner l'inquiétude. Ça fait que,
oui, ça me fait beaucoup réfléchir. Merci. Je vous dirais, moi, où est-ce que
j'insiste, puis je pense que c'est une bonne idée, c'est pour dire : En
fait, c'est la norme en termes de gouvernance. Tous les chercheurs, tous les
scientifiques en gouvernance nous disent que c'est la façon de procéder. Puis,
en fait, de faire le contraire, ça serait d'aller contre les données qui nous
démontrent que l'indépendance, c'est vraiment la clé pour des conseils
d'administration. Donc, je ne sais pas si on va être d'accord, mais, en fait,
c'est les données empiriques qui nous allument pour dire : C'est comme ça
dans toutes les sociétés puis toutes les bonnes pratiques de gestion nous
amènent vers ça. Par contre, je tiens absolument à vous rassurer, on veut quand
même avoir des gens compétents. Ce n'est pas parce qu'on est indépendant que ce
n'est pas des gens qui comprennent le domaine. Mais j'aimerais vous entendre
sur la suggestion qui a été faite par plusieurs personnes sur les sous-comités.
Est-ce que vous voyez un signal, au moins,
d'espoir, à l'intérieur de ce désir-là, dans les sous-comités, de dire: Bien
là, si on comprend que la gestion du fonds au complet va être gérée par un
conseil d'administration, bien sûr, pour les questions qui touchent vraiment
précisément la science puis le contenu, mais, bien sûr, on veut avoir des gens
qui connaissent ça. Donc, les sous-comités, vous voyez ça comment?
M. Larivière (Vincent) : Bien,
je veux quand même répondre à votre première intervention sur la norme
internationale. Comme je l'ai écrit dans mon mémoire, ce n'est pas la norme
internationale, la norme internationale, quant au C.A. d'organisation, de
financement de la recherche, c'est des membres académiques. Donc, vos experts,
malheureusement, amalgament, je pense, des C.A. d'entreprises publiques, comme
Hydro-Québec, avec des C.A. d'organismes de financement comme les fonds de
recherche. Puis ce qui est vrai pour Hydro-Québec n'est pas nécessairement vrai
pour les fonds. Ce n'est pas parce qu'on a rattaché ça à un concept de société
d'État que ça... Donc, malheureusement, je m'inscris en faux et j'aimerais
beaucoup qu'on me montre une donnée empirique qui me contredit là-dessus. Donc,
je ferme cette parenthèse-là, mais...
M. Skeete : Mais, en fait,
avant que vous fermez la parenthèse, j'aimerais rebondir. Si je comprends bien,
puis c'est important que je vous comprenne bien, là., ce n'est pas parce que...
Ça fait que, si je comprends bien, dans le fond, ce que vous dites, ultimement,
c'est : Bien, je comprends que la Loi sur la gouvernance des sociétés
d'État existe, puis elle est peut-être bonne pour d'autres, mais en ce qui a
trait à la recherche, puis moi, puis nous, bien, ça ne devrait pas nous
concerner, ces pratiques de gouvernance là, parce que les scientifiques, dans
les conseils d'administration, sont différents des autres. Puis la gouvernance,
quand on parle de gouvernance pour les autres, mais, pour vous, c'est
différent. Je dois conclure qu'en matière de recherche c'est différent.
M. Larivière (Vincent) : Je
vous dirais que la norme internationale dans la gouvernance des organisations
qui financent la recherche, elle est composée majoritairement de scientifiques.
M. Skeete : Mais on dit la
même chose, là, parce que, moi, ce que je sous-entends... Je veux juste être
clair parce que...
M. Larivière (Vincent) : ...actif.
Si on prend la...
M. Skeete :
O.K. Actif. Je comprends.
M. Larivière (Vincent) : ...à
la... ce sont des gens qui sont financés, hein, on parle de présidents
d'université, on parle de chercheurs qui sont directeurs ou directrices de
centres de recherche. Donc, ce sont des individus qui sont... dont les
organisations auxquelles ils sont affiliés, reçoivent du financement, et ça,
c'est la norme internationale. Mais c'est différent, j'en conviens, pour une
organisation comme la SAQ, qui a des fournisseurs, qui génèrent des revenus
pour l'État, ce n'est pas ça avec les fonds. Donc, on a amalgamé ça alors que
ce sont des missions qui sont complètement différentes, et je pense que la
gouvernance doit être différente.
• (17 heures) •
M. Skeete : Je comprends. Ça fait
que, dans le fond, moi, ce que je conclus... ce que ce que je comprends de
notre échange, c'est que la notion d'indépendant pour vous, elle diffère de
nous, qu'est-ce qu'on considère indépendant, parce que, pour vous,
indépendant...
17 h (version non révisée)
M. Skeete : ...ce n'est pas
actif. Dans le fond, moi, je dis on peut-être un scientifique compétent, qui a
de l'expérience, qui a une contribution, mais vous, vous dites : Oui, mais
si on l'exclut parce qu'il n'est pas actif, pour moi, c'est trop... c'est une
trop grande restriction. Puis moi, je dis le contraire. Dans le fond, elle est
là, la différence, entre ce qu'on voit dans ce conseil d'administration là.
M. Larivière (Vincent) : Je
ne suis pas sûr que je saisis, mais, bref, je pense, une définition de...
M. Skeete : Oui. Je vais le
redire. Je comprends que je n'étais pas... je n'étais pas clair. Bon, dans le
fond, la seule différence entre vous et moi, c'est que pour moi, le conseil d'administration
va être représenté de gens compétents qui ont de l'expérience, qui sont des
scientifiques. La seule différence, c'est que, dans mon cas, étant indépendants,
ils ne risquent pas d'être actifs. Vous, vous dites : Voilà le problème
que j'ai avec cette notion-là.
M. Larivière (Vincent) : Je
dis essentiellement que vous ne trouverez pas des gens qui n'ont pas... qui
sont actifs en recherche ou qui auront... qui sont encore dans le système puis
qui n'auront pas un lien à quelque part avec les fonds parce que les fonds ont
trop bien fait leur travail au cours des 20 dernières années.
M. Skeete : Je comprends.
Merci pour cette clarification-là.
M. Larivière (Vincent) : Puis
par rapport à votre rôle des sous-comités...
M. Skeete : La sous-question.
Oui.
M. Larivière (Vincent) : Oui,
oui, exactement, qui est intéressant. Effectivement, c'est un moindre mal, mais
il faut que ces comités-là aient des dents. Et puis, dans une version
antérieure d'un projet de loi analogue qui date de 2011, les comités sectoriels
avaient des pouvoirs qui étaient clairs. Puis moi, je vous inviterai à aller
voir ce qui avait été écrit à l'époque où, essentiellement, les comités
sectoriels étaient responsables des orientations disciplinaires des fonds. Mais
là, ultimement, ces comités sectoriels là ont un pouvoir qui est analogue à
celui d'un C.A. Et donc pourquoi ne pas avoir trois C.A.? C'est un peu ça, mon
interrogation.
M. Skeete : Je comprends.
O.K. Parfait. Mais vous voyez ça d'un bon oeil. Puis pour vous, il faut que ça
aille du mordant.
M. Larivière (Vincent) : Bien,
il faut... il faut que ce soit un peu plus que «il y aura des comités
sectoriels», il faut dire qu'est ce qu'ils vont en faire et quels seront leurs
pouvoirs.
M. Skeete : J'aimerais vous
entendre parce que vous avez été une personne qui s'est beaucoup exprimée sur
la recherche en français, vous êtes, en fait, très connu pour ça, et j'aimerais
vous entendre là-dessus puis surtout, là, le... bien, l'importance de la
recherche en français, les défis de la recherche en français, j'aimerais vous
entendre là-dessus.
M. Larivière (Vincent) : Mais,
écoutez, la recherche en français, c'est un défi constant, bien, disons que c'est
un défi depuis une quarantaine d'années, c'est à peu près disparu dans les
domaines des sciences naturelles et des sciences médicales, dans les sciences
sociales et humaines, c'est encore une part importante de ce qu'on publie au
Québec, mais c'est en déclin depuis une vingtaine d'années. Pourquoi? Bien,
parce qu'on ne lui a pas donné de valeur. Hein, la... il n'y a pas de langue
qui est vraiment meilleure qu'une autre pour diffuser des connaissances. Mais
au Québec, si on parle français, c'est on pourrait dire la langue naturelle
avec laquelle on pourrait diffuser nos connaissances et c'est celle qui va
donner le plus accès aux connaissances à la population de la province. Donc, on
n'a pas donné d'importance à ça. Donc, il y a un bon travail à faire pour s'assurer,
on pourrait dire, d'une reconnaissance au moins égale de la publication en
français à celle de la publication en anglais.
Il n'y a pas grand-chose là-dessus dans le
projet de loi, là, je comprends que ce n'est pas le but de ce projet de loi là,
mais ma crainte, c'est qu'en fusionnant les trois conseils le... la discipline
qui est la plus susceptible d'être affectée, bien, c'est celle qui est un peu
différente des autres, puis c'est les sciences sociales et humaines qui, par
ailleurs, publient en français. Donc, une crainte que les spécificités de cette
discipline-là soient affectées par un fonds qui va être, avouons-le, dominé par
des disciplines des sciences naturelles et médicales.
M. Skeete : Puis c'est
intéressant ce que vous dites, parce que comment vous... comment vous faites
pour arriver à cette conclusion là, quand on sait que les enjeux contemporains
nécessitent cette interdisciplinarité là qui fait en sorte que les sciences
sociales, un, n'ont jamais été aussi financées et, deux, sont... ont été aussi
importantes dans le discours public, politique, et même en recherche.
M. Larivière (Vincent) : Bien,
l'interdisciplinarité, je suis content que vous m'ameniez sur ce terrain-là
parce que faut voir ce qu'on entend par ça. Il y en a beaucoup d'interdisciplinarité
qui se produit entre la sociologie puis l'économie, entre la... l'histoire puis
la philosophie, mais ça, ça se passe à l'intérieur des sciences sociales.
L'interdisciplinarité qu'on appelle ici
intersectorialité, là, entre la physique puis la philo, ou la physique puis la
socio, il n'y en a pas des tonnes. Donc, les structures actuelles, à mon avis,
permettent l'interdisciplinarité qui existe et qui fonctionne entre des
disciplines qui sont au sein de secteurs... on pourrait dire au sein du même
secteur. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'interdisciplinarité un peu plus
lointaine entre la médecine et la physique, ça, j'en conviens, il y en a, mais
ça me semble un argument plutôt faible par rapport aux désavantages que la
fusion pourrait apporter.
M. Skeete : Je vous dirais,
un des enjeux qu'on voit dans la société contemporaine, c'est surtout de plus
on avance, plus les différents secteurs se chevauchent, que ça soit l'éthique
et l'intelligence artificielle, que ça soit la santé et le... la socioéconomie.
Alors, pour moi, c'est important de regrouper et de ramener ces gens-là. Si on
était tous dans un fonds, nous, on pense que ça va favoriser ces échanges-là...
M. Larivière (Vincent) : ...écoutez,
c'est une hypothèse. À mon avis, les structures actuelles le permettent déjà.
Puis, pour avoir de l'interdisciplinarité, ça prend des disciplines. Donc, il
faut s'assurer qu'il y ait des bonnes formations disciplinaires. Puis je pense
que les trois fonds permettent... permettent de faire ça, mais... mais pour
être honnête, bon, ayant un peu étudié l'interdisciplinarité, il y a encore des
débats au sein de la communauté des experts, si effectivement c'est la façon
qui nous permet de résoudre les grands problèmes. Dans la littérature sur
l'interdisciplinarité, on voit que c'est beaucoup... c'est souvent très
programmatique, hein, on propose ça comme une orientation de politique
publique, mais il n'y a pas tant d'études qui montrent si ça marche en réalité.
M. Skeete : Puis j'ai... il
me reste quelques minutes, là, puis j'aimerais vous entendre là-dessus, votre
crainte venant du fait que... parce qu'on fusionnerait les trois fonds, en
quelque part, les sciences humaines, les sciences sociales seraient perdantes.
En ce moment, est-ce que vous êtes... est-ce que vous connaissez un mécanisme
qui empêche arbitrairement de couper dans les sciences sociales ou c'est même
possible aujourd'hui de couper les sciences sociales, malgré le fait qu'ils ont
leur propre fonds?
M. Larivière (Vincent) : Bien,
écoutez, c'est une bonne question. Ce n'est pas moi qui... qui prend ces
décisions-là, mais oui, je pense qu'un gouvernement peut pas mal faire... pas
mal faire ce qu'il veut, mais dans la mesure où le but d'un gouvernement puis
d'un fonds, c'est de soutenir la recherche dans un domaine donné, mais je ne
pense pas que c'est quelque chose qui va se produire, puis je pense qu'en ayant
un fonds ça sécurise un peu plus les choses.
M. Skeete : Intéressant.
Bien, merci beaucoup, hein? C'est tout pour moi, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Tremblay) : C'est
tout alors...
M. Larivière (Vincent) : Merci.
La Présidente (Mme Tremblay) : Merci,
M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Beauchemin : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, merci d'être avec nous. J'ai quelques questions pour vous.
Puis je voulais... bien, là, on l'a entendu à plusieurs reprises. J'ai un peu
l'impression avec... on va faire face, là, à un fait accompli, là, dans le sens
que, bon, le projet de loi, parce que c'est dans la gouvernance des sociétés
d'État, doit donc aller se rapporter, là, au ministère de l'Économie,
Innovation. Dans ce contexte-là, vous, vous demandez de rattacher le fonds, là,
au ministère de l'Enseignement supérieur. Comment voyez-vous faire ce rattachement-là
dans le contexte actuel?
M. Larivière (Vincent) : Écoutez,
je ne vous vois pas, là, je peux... je vous entends, mais je ne vous vois pas.
Donc, comment je vois ça? Bien, écoutez... Ah! Bonjour. Bon, je ne suis pas
spécialiste des organisations et des ministères, mais ça me semble quelque
chose qui est tout à fait possible, dans la mesure où c'est un ajout. Quand je
regardais l'organigramme, il y a quelques jours, on a tout l'organigramme du
ministère, qui est un mégaministère, avouons-le, de l'Économie, de l'Innovation
et de l'Énergie. Puis c'est dans une petite boîte à côté, avec cinq autres...
autres organisations, qui relèvent du ministère, mais bon, qui sont un peu
flottantes. Donc, moi, je le prends puis je le ramène à l'Enseignement supérieur,
avec les budgets qui sont... qui sont cohérents à tout ça. C'est beaucoup plus
cohérent avec la mission des universités, parce qu'écoutez un prof
d'université, ça... ça fait... ça... il y a deux piliers aux universités
l'enseignement, la recherche, puis on ajoute à ça le service à la collectivité,
mais ces deux missions-là, essentielles, de l'université, il y en a une qui est
financée par le ministère de l'Enseignement supérieur et l'autre va être
financée par le ministère de l'Économie et de l'Innovation. Donc, ça me semble
contreproductif d'avoir deux entités distinctes qui financent une même... une
même organisation.
M. Beauchemin : Je vais
m'avancer pour dire une observation, là, que... en fait, la structure actuelle,
là, dans la situation où est-ce qu'on est, là, pas dans le projet de loi, mais
le Scientifique en chef, en fait, est dans une de ces cases-là, à l'extérieur
des fonds. Ça fait que ce que vous dites, c'est finalement de... de mettre le
ministère de l'Enseignement supérieur dans une espèce de structure similaire à
la structure que le Scientifique en chef a actuellement dans... avant le projet
de loi. C'est un peu ça, là, que vous suggérez?
M. Larivière (Vincent) : Ça
pourrait être quelque chose d'analogue. Ce n'est pas quelque chose précisément
auquel j'ai réfléchi dans la... dans la mécanique, mais je suggère aussi que le
Scientifique en chef a une case à lui, comme vous le dites, qui est plutôt
indépendante et qui ne relèverait pas juste d'un ministère et qui pourrait
choisir aussi des... un peu plus de mandats, un peu plus de latitude là-dessus,
là.
M. Beauchemin : ...en
organisation, je pense qu'on appelle ça staff, un peu, là, le nom, là, qu'on
donne à ce genre de structure là. Donc, juste pour peut-être résumer, là, votre
propos. Accorder un statut indépendant au Scientifique en... pour que la
nomination soit faite par un comité de pairs, je pense que c'est un peu ça qui
est entendu.
• (17 h 10) •
M. Larivière (Vincent) : Ce
qui est une bonne nouvelle.
M. Beauchemin : Oui, je pense
que ça, ça peut quand même générer plusieurs candidatures, ça peut suggérer
plusieurs personnes à...
M. Beauchemin : ...aux... aux
personnes au ministère qui décidera par la suite. Mais moi, je voulais vous
entendre sur la proposition qu'on a entendue par plusieurs groupes, puis
contrairement à ce que le ministre nous mentionnait tantôt, le voté aux deux
tiers de l'Assemblée nationale et existe déjà pour plusieurs personnes qui
travaillent pour le gouvernement, comme le Commissaire à l'éthique, le
Commissaire à la langue française, le Commissaire au lobbyisme, le dit le
directeur général... le Directeur... Directrice générale des élections,
Protecteur, Protectrice du citoyen et le Vérificateur général, donc des
personnes qui sont indépendantes, finalement, puis ça, c'était peut être un peu
l'argumentaire. Puis, par la suite, j'aimerais vous entendre sur... sur le côté
de la démocratie, un petit peu, là. Mais c'est un petit peu l'argumentaire qui
fait en sorte que ça... ça donnerait encore plus d'indépendance au Scientifique
en chef si la nomination se faisait approuver aux deux tiers de l'Assemblée
nationale. Pour un des arguments qu'on a entendus de la part de je ne me
souviens plus quel groupe, la semaine dernière, c'est que ça prend le deux
tiers, ais une fois qu'il est nommé, il est comme nommé, et l'enlever de là
deviendrait comme un peu difficile. Donc, le Scientifique en chef serait encore
plus indépendant d'une certaine façon, là. Je veux vous entendre là-dessus. Qu'est-ce
que vous, vous en pensez de... d'insérer ça dans un processus plus
représentatif de la démocratie? La nomination va passer par le comité, ça sera
des... des pairs qui pourraient faire les nominations, mais que la démocratie
puisse s'exprimer.
M. Larivière (Vincent) : Ce
n'est pas... Écoutez... c'est une bonne question. Je vous avoue que ma
préférence ici irait un comité de pairs. Maintenant, je... je conçois très bien
l'élément... l'élément démocratique, donc avoir une structure où ce sont des
pairs qui nominent et ultimement... et cette nomination-là qui a été faite par
le comité de pairs doit être entérinée par l'Assemblée nationale aux deux
tiers. Ce serait une combinaison qui me semblerait appropriée.
Mais vous avez mentionné un autre point, bon,
que... ah! bien, que j'ai oublié. Donc... donc j'ai... j'ai des notes. Mais
donc... donc, oui, ça semble a priori une mécanique qui pourrait combiner les
deux, dans la mesure où le comité de pairs fait une sélection et non pas
fournit 22 nominations, donc fait une sélection. Donc, vous avez une
personne qui est approuvée et ultimement, elle est entérinée aux deux tiers.
Maintenant, l'autre... l'autre élément,
comme je l'ai mentionné, ça me revient, c'est qu'en combinant le rôle de
conseil scientifique et le rôle de... de... on pourrait dire... Ici, je...
conseil scientifique... de... de Scientifique en chef, là. Le conseil
scientifique, c'est une personne que vous allez voir en tant qu'élu pour avoir
de l'expertise pour... Pour vous aider dans des décisions liées à la science.
En combinant ça avec la direction des fonds, ça devient un peu compliqué au
Scientifique en chef d'avoir cette indépendance-là qui est nécessaire à vous
donner des avis qui sont indépendants en ce sens où il est aussi dépositaire des...
du budget des fonds et tout ça. Donc, il y a un mélange ici qui me semble quand
même un peu difficile à combiner, donc à la fois d'être un administrateur en
tant que président du CA des fonds et aussi un conseiller indépendant. Donc, le
Commissaire à la langue française a son budget à lui pour faire des analyses
sur les sujets qui l'intéressent, mais il n'est pas aussi gestionnaire d'un
fonds qui financerait de la recherche, par exemple, sur la langue française, ou
qui financerait des initiatives de façon à pousser la langue française. Donc,
la combinaison des deux rôles du Scientifique en chef, elle n'est pas si simple
que ça, à mon avis, à articuler d'une... Ce n'est pas une idée contre laquelle
je suis, mais c'est une idée qui demande qu'on y réfléchisse un peu.
M. Beauchemin : C'est un
très, très, très bon point en fait que vous amenez. Et je veux vous amener...
puis là, je vais le prononcer comme il faut, là, parce que je viens de me faire
corriger sur ma prononciation d'un acronyme, ACFAS, avec le s.
M. Larivière (Vincent) : ACFAS,
oui.
M. Beauchemin : Juste pour
qu'on soit clair, vous, est-ce que vous seriez donc prédisposé à suggérer une
obligation de fixer un plancher minimum pour le financement de la recherche en
français?
M. Larivière (Vincent) : Tout
dépend ce qu'on entend par recherche en français. Au Québec, la grande majorité
de la recherche se fait en français, en ce sens où les cours se donnent en
français. Les labos fonctionnent en grande partie en français. Maintenant, elle
se diffuse en anglais et il faut donc... il faut donc distinguer les deux.
Donc, ce n'est pas clair ce que... ce que l'on veut dire par «recherche en
français». Si on parle de... d'échanges qui se fassent en français, je pense
qu'on a des politiques linguistiques dans les universités qui répondent très
bien à cette... a cette demande-là. De mettre des quotas de publication en
français, ça...
M. Larivière (Vincent) : ...va
être beaucoup plus problématique, compte tenu des, bon, différents aspects, on
pourrait dire, de la... de la liberté académique.
M. Beauchemin : Puis dans...
Puis, bien, expliquez-moi, parce que moi, je ne comprends pas ce que vous venez
de me dire là.
M. Larivière (Vincent) : Non.
Bien, écoutez, donc vous avez compris le premier élément sur les aspects. Donc,
pour le deuxième élément, un scientifique, essentiellement, ça peut disposer de
son résultat de recherche comme... comme ça... comme ça lui tente. Si j'ai le
goût d'écrire un article en espagnol ou en portugais, c'est parce que j'ai
décidé que c'est la meilleure communauté pour les résultats de recherche que
j'ai. Donc, de mettre des quotas de diffusion de recherche en français
amènerait, je pense, des réactions plutôt négatives de la part de la communauté.
Ce qu'il faut faire, ce n'est pas des
quotas, mais créer des incitatifs structurels dans nos mécanismes d'évaluation.
Parce que là, il faut bien comprendre que la façon dont les comités
fonctionnent à beaucoup d'égards, c'est qu'on va considérer un article en
anglais dans une revue américaine comme étant intrinsèquement meilleur qu'un
article en français dans nos revues québécoises. Et c'est là.
M. Beauchemin : C'est
exactement le même contenu?
M. Larivière (Vincent) : Puis
ce serait exactement le même contenu. Oui, oui. Totalement, totalement. Donc,
on est dans une... on pourrait dire, c'est une guerre d'image, une guerre de
réputation où l'anglais a une meilleure réputation que le français dans le
champ scientifique. Donc, il faut, puisque c'est un construit social, puisque
c'est quelque chose à laquelle vous, en tant qu'élu, pouvez donner de la
valeur, bien, il faut créer structurellement ces incitatifs-là pour que la
science en français, elle soit reconnue. Donc, il faut fonctionner...
M. Beauchemin : Est-ce qu'un
empêche l'autre? Je veux dire, on peut publier dans les deux langues aussi.
Non?
M. Larivière (Vincent) : Bien,
pas la même chose. Donc, en général, quand vous publiez votre article en
français, bien, la maison d'édition à qui vous l'avez envoyé, bien, possède le
contenu, donc, il faut demander la permission pour faire des traductions, ou il
y a des nouvelles... des nouveaux types de licences qui permettent une
réutilisation, c'est un débat un peu technique, mais a priori, non. Maintenant,
un scientifique peut décider d'envoyer un article sur une thématique a en
français et un autre sur une thématique B, une thématique B en anglais. Mais ce
qu'on voit dans bon nombre de domaines, c'est que des articles en français, il
n'en reste à peu près plus.
M. Beauchemin : C'était la
question que j'avais, là. Je viens vraiment de le comprendre, l'enjeu. O.K.,
c'est intéressant. Merci pour ça. Tout à l'heure, vous parliez... Il me reste
une minute, je pense, Mme la...
La Présidente (Mme Tremblay) : 1
min 30 s.
M. Beauchemin : O.K. Tout à
l'heure, vous parliez de la science humaine, qui est un peu l'enfant mal aimé,
si j'ai bien compris, là, le sens de vos propos. En parlant de plancher, il y
aurait-tu un plancher de financement minimum pour la science humaine, selon
vous?
M. Larivière (Vincent) : Bien,
écoutez, dans un monde idéal, les sciences humaines seraient financées à la
hauteur de leur représentation dans le champ universitaire. Donc, c'est généralement
accepté que les sciences humaines sont moins financées pour des raisons qui
m'échappent, hein? Comme prof dans ces domaines-là, il faut que je donne des
bourses à mes étudiants, il faut que je présente à des conférences. Mes coûts
pour la recherche sont analogues à ceux de mes collègues dans d'autres
domaines. Or, collectivement, on est financés à un pourcentage qui est beaucoup
moindre.
Puis en toute honnêteté, ça affecte
beaucoup les étudiants. Des étudiants de doctorat qui n'ont aucun financement
en sciences humaines et sociales, c'est assez fréquent. Des étudiants qui font
un doctorat dans le domaine des sciences naturelles ou dans le domaine des
sciences médicales qui ne sont pas financés, ça n'existe à peu près pas. Donc,
on accepte ça, mais à mon avis, c'est inacceptable.
M. Beauchemin : Mais est-ce
que vous avez eu le temps ou déjà pensé ou même peut-être rêvé à qu'est-ce qui
pourrait être un financement idéal, peut-être en absolu ou en relatif, mais en
tout cas un financement plancher pour cette science-là?
M. Larivière (Vincent) : Non,
je n'ai pas... je n'ai pas réfléchi à un montant, mais je pense que les...
la... Évidemment, ce que l'on veut, c'est davantage de financement pour tout le
monde, donc de ramener des montants qui sont analogues à ce qui existe dans les
autres fonds au prorata du nombre de profs, bien, ça serait au moins, au moins
un début.
M. Beauchemin : C'est une
façon de le mesurer. C'est un petit peu ça, là, que je cherchais comme réponse.
Bien, je vous remercie pour votre temps. Merci pour les réponses.
La Présidente (Mme Tremblay) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Maurice-Richard.
M. Bouazzi : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci, M. Larivière, pour vos... pour vos propos fort, fort
éclairants, précis.
Et peut-être une première question. Si
rien ne change dans ce projet de loi, quels sont les risques à la liberté
académique que vous pouvez entrevoir?
M. Larivière (Vincent) : Bien,
le premier, il est directement sur la composition des C.A., donc qui va
déterminer des types de programmes. Bien, si c'est principalement des gens de
l'extérieur du champ scientifique, on pourrait vouloir privilégier des
programmes université-entreprise. Et je ne dis pas que c'est une mauvaise chose
d'en avoir, mais il ne faut pas oublier que ces organismes-là sont des
organismes de recherche fondamentale et donc leur mission, c'est de financer
des travaux de recherche fondamentale. Puis d'une certaine façon, dans ce
projet de loi là, il y a un peu la combinaison de deux choses : il y a un
rattachement d'à peu près tout au ministère de l'Économie et la fusion dans un
C.A. Si c'était seulement une de ces deux choses là, la communauté serait
peut-être un peu moins craintive quant au futur, mais le fait de ramener ça
sous... dans un seul C.A. sous un ministère qui est quand même assez
interventionniste, bien, ça amène un certain nombre de...
M. Larivière (Vincent) : ...de
craintes, là, par rapport à la liberté académique, oui.
• (17 h 20) •
M. Bouazzi : Bien, vous...
vous faites le lien direct avec ma prochaine question. Comment la communauté de
chercheuses et de chercheurs autour de vous accueille ce projet de loi à date?
M. Larivière (Vincent) : La
première réaction, c'est... quand on a vu le projet de loi sortir, c'est :
Est-ce qu'il y a quelqu'un qui était au courant que ça s'en venait? Donc, il
n'y a eu à peu près aucune consultation, et ce... ce n'est pas un projet que la
communauté cherchait, hein? On n'était pas, en ce moment, en train de se
dire : Ah! il y a plein de choses qui ne marchent pas. Non, en ce moment,
la division avec les trois fonds, les investissements... Ah! ça va bien dans le
système de la recherche au Québec. Donc, de voir ça arriver, c'est pour le
moins surprenant, et la réaction est globalement... pas particulièrement
positive.
M. Bouazzi : Quand... Vous,
ce que vous dites, c'est : Abandonnez l'idée de fusionner. Gardons
trois... trois fonds indépendants. De toute façon, la... il y a de la
collaboration qui est possible. Ce n'est pas non plus... un quotidien de
200 % du temps d'avoir de la collaboration. C'est plus important de
protéger les fonds tels qu'ils sont. Et la réponse du ministre, à plus d'une
reprise d'ailleurs à date, ça a été accueilli favorablement. Une des idées qui
nous a été proposée, qui était d'avoir des comités par... donc il y en aurait
trois qui dépendraient du... du... Si l'objectif du projet de loi, c'est de
simplifier le travail administratif et de passer de 3 C.A. à 1 seul, et
que, de l'autre côté, pour réussir à répondre à vos besoins, on garde le C.A.,
mais on en rajoute trois, est-ce que... Si vraiment ces comités ont le poids
qu'ils devraient avoir, est-ce que vous pensez qu'on aurait simplifié le
travail administratif?
M. Larivière (Vincent) : En
toute honnêteté, je me posais la même question. Donc, on crée de nouvelles
structures pour remplacer des anciennes qu'on vient d'abandonner et qui, par
ailleurs, fonctionnaient très bien. Donc... Donc, oui, il n'y a pas de... il
n'y a pas de gain, mais il y a une perte en termes de... de latitude que vont
avoir ces comités sectoriels, surtout s'ils n'ont pas de dents.
M. Bouazzi : Et puis il me
reste un peu moins d'une minute pour revenir... et puis c'est un point sur
lequel j'ai... j'ai... j'ai fait intervenir tous les groupes avant vous,
évidemment. Vous, votre point, c'est qu'un chercheur... Écarter un chercheur
qui a accès ou qui voudrait avoir accès au fonds du FRQ, de la possibilité de
siéger au conseil d'administration serait une faute, carrément, là, sur....
sur... sur la question, et ça serait ne pas comprendre ce que c'est que
l'indépendance dans le cas du FRQ.
M. Larivière (Vincent) : Bien,
ça serait ne pas reconnaître la... la spécificité du champ scientifique d'une
part, la norme dans les organisations internationales, qui sont analogues, et
le processus d'octroi de financement, qui est complètement indépendant de ce
qui se fait au conseil d'administration, qui ne voit aucun résultat et ne prend
aucune décision sur les demandes de financement individuelles.
M. Bouazzi : Ça me semble
limpide. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Tremblay) : Merci.
Alors, je vous remercie, M. Larivière, pour la contribution à nos travaux.
Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes
et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des présentes auditions
publiques.
Alors, la commission ayant accompli son
mandat, j'ajourne maintenant ses travaux jusqu'au jeudi 28 mars,
8 heures, où la commission se réunira en séance de travail. Alors, merci,
tout le monde. Bonne fin de journée.
(Suspension de la séance à 17 h 24)