Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mercredi 13 mars 2024
-
Vol. 47 N° 43
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 51, Loi modernisant l’industrie de la construction
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11 h (version non révisée)
(Onze heures dix-huit minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous souhaite la bienvenue
et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet
de loi n° 51, Loi modernisant l'industrie de la construction.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par Mme Mallette (Huntingdon).
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Nous entendrons ce matin les témoins suivants, soit la CE... pardon, la CSD Construction
et le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction
(international). Donc, je vous souhaite, chers invités, la bienvenue. Vous
représentez CSD-Construction. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous allons procéder à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à nous faire
votre exposé, s'il vous plaît.
M. Vachon (Luc) :Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre, mesdames,
messieurs des oppositions ainsi qu'à vos équipes respectives. Alors, nos
sincères salutations, et merci de nous recevoir pour entendre le point de vue
de la CSD et de la CSD Construction sur le projet de loi n° 51.
Alors, je suis Luc Vachon, président de la
Centrale des syndicats démocratiques. Je suis accompagné de M. Carl Dufour,
Président de la CSD Construction, ainsi que de Francis Fortier, qui est
conseiller syndical...
M. Vachon (Luc) :...à la recherche pour la CSD.
Alors, tout d'abord, je tiens à préciser
que c'est avec ouverture que nous sommes ici, malgré les grandes réserves que
nous avons sur certains aspects du projet de loi et que, si parfois mes propos
pourront sembler non complaisants, ils ne doivent en rien être interprétés
comme une attaque à la volonté du ministre de provoquer des changements dans
l'industrie ni un plaidoyer pour un statu quo. Nous savons très bien que les choses
doivent changer et nous sommes en accord avec certains changements proposés.
Nous en proposons d'autres, d'ailleurs, dans notre mémoire. Et, pour plusieurs
de nos désaccords sur certains points du projet de loi, ils reposent sur notre
conviction profonde que les moyens choisis ne répondront pas aux objectifs
souhaités et seront néfastes pour la main-d'œuvre, voire même pour l'industrie
elle-même. Nous avons une certaine critique sur les moyens et arguments qui ont
conduit à certaines propositions de ce projet de loi. Nos propos ne sont pas
non plus des attaques envers les entrepreneurs de l'industrie, qui,
rappelons-le, sont à plus de 80 % des entreprises de cinq employés et
moins, qui travaillent dur et qui ne sont pas réellement ceux à qui bénéficieraient
ces modifications, ce serait même souvent le contraire.
• (11 h 20) •
Un autre élément qui heurte dans
l'aboutissement de ce projet de loi provient non pas de ce qu'il contient, mais
de ce qui a été véhiculé dans l'espace public depuis le début des débats
entourant ce projet de loi. Le sentiment de déception qu'ont la CSD, la CSD
Construction est qu'encore une fois les travailleuses et travailleurs de
l'industrie de la construction font les frais à tort des changements de
l'industrie. Nous déplorons que, par les exemples utilisés, on laisse ainsi
comprendre que, si les chiffres ne donnent pas les résultats souhaités, c'est
la faute des syndicats et des travailleurs et travailleuses, ce serait de leur
faute si les travaux sont plus longs, que, si on enlève des règles, on va alors
les rendre plus efficaces. C'est croustillant, ce genre de discours. Ça fait
beaucoup de bruit dans l'espace public, ça marque l'imaginaire collectif, mais
ça évite surtout qu'un regard se porte sur les vraies choses qui seraient
importantes pour cette industrie. Parce que parfois c'est payant ainsi, ça va
augmenter les profits. C'est d'ailleurs plutôt inquiétant que, dans
l'argumentaire, les propos de certaines associations patronales ait été repris
en argument, et, au final, de retrouver dans le projet de loi des dispositions
correspondant aux demandes portées par ces associations. Nous sommes déçus
qu'encore, parce que ce n'est pas vraiment la première fois, les travailleurs
et travailleuses font seuls les frais avec aucun gain tangible en retour.
Les propos tenus, les exemples utilisés
qui sont souvent grandement exagérés, parfois plus près de la déformation que
de la réalité, les exemples à l'emporte-pièce, les fameuses portes, les
fantastiques gains d'efficacité. Des sondages, des sondages dont les résultats
sont érigés en étude puis portés en vérité dans l'argumentaire politique.
Soyons francs un petit peu, un sondage soumis à ses propres membres, dont on
peut facilement douter au départ de la neutralité des réponses, où seules
308 personnes ont été sondées et dont seulement 112 de ces
308 personnes ont répondu, ça démontre le peu d'intérêt qu'eux-mêmes ont
eu pour le sondage et, du même souffle, ça démontre que, pour eux-mêmes pour
eux, l'enjeu n'est pas là.
Revenons sur ces fameuses portes qui ont
pris 45 jours pour être changées. On comprend tous qu'il n'y a pas eu de
travail sans arrêt, en continu pendant 45 jours, mais personne ne soulève
la question de savoir qui a bien pu aussi mal planifier ses travaux pour que, selon
les prétentions, ce qui prendrait 26 jours en prendra au final 45. Dans le
fond, ce qu'on nous dit, c'est : On planifie mal, alors il faudrait qu'on
puisse compenser nos erreurs avec une réduction des règles.
J'aborde maintenant le fond du projet de
loi et de ce qu'il apporte comme changements. Bien entendu, on ne pourra pas
toucher tous les éléments, mais vous trouverez plusieurs commentaires et
suggestions additionnels dans notre mémoire. Dans les faits, ce projet de loi
n'aura pas les effets attendus. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui, je
précise, dans le contexte actuel ou celui des prochaines années, causera de
grandes catastrophes visibles, du moins, avant quelques années. Mais il n'y a
rien non plus dans ce projet de loi qui apportera des changements significatifs
sur le terrain. Pourquoi? Parce qu'on tourne le dos aux véritables enjeux. On
tourne le dos à une meilleure planification des travaux, aux réels problèmes
d'attraction et de rétention de la main-d'oeuvre. On ne parle pas de l'importance
d'une main-d'oeuvre mieux et plus formée. On ne parle pas non plus de la
nécessité du changement de culture nécessaire dans cette industrie ni de
l'importance qu'il y ait un...
M. Vachon (Luc) :...véritable travail conjoint des acteurs pour une
amélioration des conditions de travail, d'une amélioration de l'organisation du
travail et l'introduction de nouvelles technologies. Tout cela pourrait
produire de réels gains de productivité.
Comme bons coups du projet de loi, on peut
parler du fonds de rétroactivité, enfin éliminer cette anomalie
incompréhensible qui dure depuis tant d'années favorisant incontestablement les
associations patronales au détriment des syndicats et les travailleuses et
travailleurs qu'ils représentent. Il reste encore quelques angles morts sur ce
point, mais déjà, ça constitue une correction significative. Les modifications
apportées au processus de conciliation qui peuvent passer sous le radar seront,
nous le souhaitons, un élément important pour permettre un meilleur déroulement
des négociations en vue du renouvellement des conventions collectives et
permettront, nous le souhaitons aussi, aux parties de travailler ensemble à
trouver des solutions porteuses pour l'industrie.
Maintenant, en ce qui concerne le volet de
la polyvalence, nous faisons un constat moins positif. Nous ne croyons pas que,
d'une part, ce qui est proposé donne des résultats très grands, et, d'autre
part, ce sera totalement ingérable, impossible concrètement à baliser, une
porte grande ouverte à des utilisations abusives de toutes sortes. Il sera
impossible pour la CCQ et son inspectorat de véritablement faire appliquer ce
genre de règles.
Quant à la mobilité de la main-d'œuvre
interrégionale, ce qui est proposé est fortement préoccupant. Y a-t-il des
choses qui doivent être actualisées dans la mobilité? Assurément. Mais les
dispositions qui prévalent actuellement ont été déterminées par les parties
lors de négociations. Les travailleuses et travailleurs ont probablement
concédé, en contrepartie, des conditions de travail. Et aujourd'hui, on va
sortir ça du champ de négociation, on va retirer ces protections, et ce, sans
qu'ils puissent, à la limite, obtenir des gains en contrepartie. De plus... la
réduction de 1 500 heures de travail requises auprès des
employeurs... d'un employeur dans les deux années précédentes à
750 heures, ce qui revient à dire qu'une personne qui fera 375 heures
de travail par année pour un employeur sera considérée comme faisant partie du
noyau de travailleurs qualifiés de cet employeur. 375 heures par année, à
peine 10 semaines, ça ne correspond en rien à une personne faisant partie
du noyau qualifié. Au contraire, ça correspond exactement à la main-d'œuvre qui
vient s'ajouter pendant les phases de pointe, puis c'est souvent des personnes
qui sont différentes d'une année à l'autre, voire d'un contrat à l'autre. Nous
sommes d'avis que des améliorations peuvent être apportées, mais elles
devraient être déterminées par les acteurs de l'industrie, entre autres par la
négociation, comme ce l'est actuellement.
On ne semble pas non plus tenir compte
dans ces propositions de la composition des entreprises, dont plus de 80 %
ont cinq employés et moins, alors qu'une poignée seulement d'entreprises se
partagent les plus grands travaux partout dans la province, dont en région, ni
de la concentration des heures de travail dans deux régions, soit la région
métropolitaine de Montréal et de la Capitale-Nationale, alors que près des deux
tiers des heures de travail se concentrent dans ces deux régions. La résultante
sera indéniablement que les travailleuses et travailleurs des régions auront
donc encore moins accès aux grands travaux qui se feront dans leur propre
région, ils vont devoir encore plus qu'actuellement sortir de leur région pour
gagner leur vie et maintenir leurs qualifications.
En somme, nos constats face au projet de
loi n° 51 sont qu'il ne s'agit pas, malgré ce que nous croyons être une réelle
intention d'améliorer la productivité du secteur construction, de pistes
porteuses, et qui sont plus de l'ordre des réponses aux attentes des
associations patronales, qui visent on ne peut plus clairement une
déréglementation. Il y a eu allègement de la réglementation visant
l'installation des machines de production antérieurement, il y a de ça
plusieurs années, et là on commence à se rendre compte aujourd'hui que, bien
que ça avait l'air intéressant à l'époque pour certains, ce n'est peut-être pas
une si bonne idée. L'argument de la trop grande réglementation, ou de sa trop
grande rigidité, ou de sa complexité, c'est un argument facile, simple, trop
souvent utilisé afin de détourner le débat. Nous croyons fermement que la
préoccupation de hausser la productivité peut se défendre, que l'intention de
départ était en ce sens, mais... les propositions du projet de loi ne vont
malheureusement pas dans cette direction et qu'à certains égards... risquent
même d'avoir l'effet contraire. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions. Vous avez fini à temps.
M. Vachon (Luc) :C'est tout le temps dont j'avais besoin.
La Présidente (Mme D'Amours) : Parfait.
Donc, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la
période d'échange, et je vais céder la parole au ministre pour un temps de
16...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...min 30 s,
période d'échange questions-réponses.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Merci, M. Vachon, ainsi qu'à toute votre équipe. C'est un mémoire
qui est étoffé, qui contient beaucoup de commentaires et des recommandations
intéressantes, puis je vous connais assez pour savoir que vous le faites dans
un état d'esprit d'aider à bonifier le projet de loi. Je l'ai constamment
répété, c'est un projet de loi qui se veut à la quête d'un équilibre modéré,
mais aussi, perfectible.
• (11 h 30) •
Avant de vous poser quelques questions,
parce que vous avez abordé plusieurs sujets, je veux juste prendre un peu de
temps pour vous mentionner qu'il n'a jamais été de notre intention... puis là
je vous renvoie la balle, vous me connaissez assez bien... on ne veut pas, par
un projet de loi, faire des gains sur le dos des travailleurs. Parce que,
constamment, que ce soit la polyvalence ou la mobilité, on a à coeur la qualité
des travaux, la sécurité des travailleurs ainsi que leur santé, puis le projet
de loi n° 42 est une autre démonstration de la volonté du gouvernement de
faire tout en son possible pour que tout le monde, notamment dans le secteur de
la construction, puisse évoluer dans un environnement qui est sain et
sécuritaire.
Vous prenez aussi quelques minutes pour
faire le procès d'AppEco. Bon, simplement rappeler, il y a eu des
consultations, appelons ça une étude, un rapport ou un sondage. Il y a quand
même un nombre impressionnant d'entrepreneurs qui ont dit, selon différents
scénarios de polyvalence, dont celui qui est dans notre projet de loi : On
pourrait économiser 10 % des heures travaillées. Il y a eu 210 millions
d'heures travaillées en 2022. Si on en récupère 10 %, c'est 21 millions,
et la conclusion de personnes, quand même, reconnues et réputées en économie
est que ce serait l'équivalent de pouvoir construire 25 ou 26 écoles primaires,
et donc une réduction des délais et des coûts. Et est-ce que, dans certains
chantiers, il y a une certaine polyvalence? Probablement. Mais la loi et le
règlement sont clairs, les métiers comprennent des tâches qui sont comprises
dans une annexe, et dans un article, donc, spécifique, on dit qu'on doit
respecter les définitions de métiers. D'où l'importance de faire de la
polyvalence. Mais ce n'est pas un bar ouvert. C'est une polyvalence qui est
contrôlée. C'est des tâches complémentaires. Les exemples qui ont été utilisés,
c'est des cas vécus, c'est des cas qui nous ont été rapportés. Ce n'est
certainement pas pour faire du sensationnalisme.
Là où on se rejoint beaucoup, c'est
l'importance de la planification des travaux. Parce que le projet de loi, ce
n'est pas une finalité. Quand on parle de modernisation, souvenez-vous, le Plan
construction, avec ses interventions, en collaboration avec le Conseil du
trésor, le ministère des Infrastructures et d'autres ministères, et les huit
allègements réglementaires. Il y a aussi de la formation accélérée. Mais la
planification des travaux, je pense qu'elle s'impose, qu'on soit un petit, un
moyen ou un grand entrepreneur. Mieux on planifie, plus on sauve des délais et
plus on réduit, ultimement, nos coûts. Et moi, je pense que les effets attendus
vont dépendre, essentiellement, de la collaboration des parties.
La mobilité, juste rappeler qu'en génie
civil, voirie, il y a 13 métiers qui bénéficient de la pleine mobilité, puis il
n'y a pas eu les effets pervers qui sont annoncés par certains groupes. Il y a,
en institutionnel, commercial et industriel, 20 %, on peut aller jusqu'à
20 % de mobilité. Il y a à peu près 11 %, 12 %, 13 % des
personnes qui en bénéficient. Vous savez qu'il y a des impacts financiers à la
mobilité. La mobilité, c'est un outil additionnel pour, notamment, permettre à
des régions de réaliser des projets industriels dans les filières stratégiques
de l'économie du Québec. J'aurais aimé... puis je sais que vous en traitez,
mais, quand on parle du projet de loi, n'oubliez pas l'accès. On veut un
secteur qui, comme tous les secteurs d'activités...
11 h 30 (version non révisée)
M. Boulet : ...plus inclusif,
un peu plus diversifié, les femmes, les Premières Nations, les minorités
visibles, les personnes immigrantes, les personnes en situation de handicap. Qu'est-ce
que vous dites aux personnes immigrantes qui arrivent au Québec puis qui disent :
Il n'y a aucune norme de reconnaissance des acquis de mes heures de formation,
de mon expérience de travail? Le projet de loi répond aussi beaucoup à l'accès
qui va permettre à notre industrie de se distinguer.
J'aimerais juste vous entendre, peut-être
un peu brièvement, là, votre mémoire dit que, bon, pour les assouplissements
qui ont été faits pour les femmes... Bon, vous souvenez-vous, Luc, vous
connaissez bien le programme d'accès à l'égalité pour les femmes, qui est entré
en vigueur en 2015, qui a donné d'excellents résultats, on est passés de 9...
de 0,9 % à 3,8 % de représentativité féminine. Ça va en augmentant.
Ce que j'ai compris, c'est que vous... Est-ce que vous êtes d'accord à ce que
ces mesures-là s'appliquent aux groupes issus de la diversité que je viens de
mentionner? Parce que j'ai compris, une de vos recommandations, c'est que vous
souhaitiez que ces mesures-là, qui ont été mises en place pour les femmes, ne s'appliquent
pas pour les autres groupes issus de la diversité, c'est comme ça que je l'ai
compris, alors que ça a été tellement bénéfique pour les femmes. Bien, si... je
vous donne l'occasion de rectifier le tir, allez-y.
M. Dufour (Carl) : M. Boulet,
ce qu'on a peur, dans le fond, c'est que, si vous prenez tous les autres
travailleurs puis vous les collez sur les mesures des femmes... c'est que le
3,8 % des femmes fonde comme neige au soleil puis que les femmes aient
moins d'accès à l'industrie. On a une grosse crainte là-dessus. Mais, pour le
premier point que vous avez donné, la RAC pour les immigrants, on était d'accord
pour la reconnaissance. Mais on a peur que, si vous collez tous les autres
travailleurs avec les mesures des femmes... que le 3,8 % descende très
rapidement.
M. Boulet : Bien, comme vous
savez, M. Dufour, le programme d'accès à l'égalité pour les femmes expire cette
année, et il y en aura une nouvelle version, et ça va tenir compte, et ce n'est
pas prévu qu'il y ait d'incidence, au contraire, le taux est en augmentation.
Quand on regarde les cohortes, tant au diplôme d'études professionnelles que
les attestations d'études professionnelles, il y a de plus en plus de femmes.
La croissance, elle est amorcée, elle se poursuit. Et ce n'est pas parce qu'on
fait bénéficier des mesures qui ont donné des résultats positifs pour les
femmes que ça va avoir un impact négatif qu'on puisse en faire bénéficier d'autres
groupes. Ça, c'est l'opinion que nous avions.
Autre point, M. Vachon, il y a le
mécanisme, dans le projet de loi, de consultation des donneurs d'ouvrage, qui,
si je me souviens bien, est en place depuis 2011, puis vous recommandez l'abrogation
de ce mécanisme de consultation, alors que je vous connais comme un homme d'ouverture,
un homme ouvert à la collaboration, prêt à obtenir les opinions des donneurs d'ouvrage.
Est-ce que je vous ai mal compris? Mais j'ai vu qu'une recommandation
concernait votre volonté d'abroger ce mécanisme-là et j'aimerais, en deux mots,
savoir pourquoi.
M. Vachon (Luc) :Je vais être tout à fait transparent et honnête là-dessus.
Vous vous attendez ça, hein?
M. Boulet : Je vous connais
comme ça.
M. Vachon (Luc) :Ça a fait partie des discussions, mais je dirais que cet
élément-là n'aurait probablement pas dû se retrouver parce qu'il existe déjà
dans la loi, ça, il y a juste eu un déplacement dans le projet, là, juste un
déplacement. Ce n'est pas un enjeu crucial, ça, là-dessus, je vous le dis, même
si mon opinion est que ça n'aurait peut-être pas dû être là à l'époque, mais,
bon, ça y est. Ce n'est pas... Ce n'était pas pour enlever quelque chose qui y
était.
Ceci dit, si vous me permettez d'intervenir
sur le programme d'accès pour les femmes, ça a donné certains résultats. Je ne
partage pas exactement votre opinion à l'effet que ça a donné d'excellents
résultats parce qu'on est à 3,8 %, ça avance, ça avance tranquillement,
mais c'est quand même à pas de tortue, là, je veux dire, c'est... on n'a pas
passé de 0,9 % en 2015 à 3,8 % en... aujourd'hui, tu sais, on a... on
a... c'est très progressif. Puis, l'autre bout, c'est... ce qu'il faut
regarder, c'est la plupart... il y a 50 % des femmes qui entrent qui
quittent. Alors, on a un phénomène à réfléchir sur notre...
M. Vachon (Luc) :...capacité de retenir les femmes parce que si... ça n'arrivera
pas dans la vie, mais, si toutes les femmes qui était entrées dans l'industrie
étaient demeurées, on serait au-dessus de 10 %, actuellement. Alors, on a
un exercice à faire là-dessus, puis ensuite, ce qu'on dit dans le mémoire, ce
n'est pas qu'on est contre qu'il y ait des mesures pour les minorités visibles,
les personnes immigrantes, il y a des distinctions à faire parce que c'est
peut-être une définition qui est un peu trop... où tout est dedans, et il y a
des distinctions à faire en fonction des différentes... pas catégories, ce
n'est pas correct, là, mais, tu sais, différentes particularités des groupes
qui sont visés.
• (11 h 40) •
M. Boulet : Puis je sais que
vous connaissez l'existence de ces travaux-là. L'amélioration du taux de rétention
des femmes est une priorité. Le sondage qui avait été révélé par la CCQ il y
a... je pense, en 2021, démontrait qu'à peu près 55 % des femmes
abandonnaient dans les cinq premières années de leur arrivée dans l'industrie
de la construction. C'est inadmissible. Puis ça il faut s'intéresser à la
formation, la sensibilisation, puis notamment le projet de loi n° 42 qui
s'applique dans l'industrie de la construction vise à répondre à l'importance
aussi d'intégrer une culture de signalement puis de dénonciation. Parfois...
Vous l'avez vu dans le sondage Léger, on révélait aussi que 79 % des
personnes, qui observaient subissaient soit des menaces, de l'intimidation ou
du harcèlement, ne le disaient pas par crainte de représailles. Elles seront
protégées dorénavant avec le projet de loi n° 42... ou par crainte de
perdre leur emploi. Elles seront dorénavant protégées avec le projet de loi
n° 42 et certaines dispositions actuelles de la Loi sur les normes du
travail et celles en matière de santé-sécurité du travail, où j'ose croire
qu'on a fait quand même des pas en avant.
Peut-être, autre élément, M. Vachon.
Vous savez que dans le projet de loi, pour permettre une meilleure intégration
des personnes issues des communautés autochtones, on va permettre l'octroi de...
de permis de référencement, puis ça, c'est revendiqué, c'est souhaité. Puis
dans les régions éloignées, j'ai même rencontré un syndicaliste dont on... on
réfère, on parle de son nom sur la place publique, puis il me disait que
c'était super important dans sa région que les groupes, comme l'administration
régionale Kativik, comme... et autres qui ont des ententes
intergouvernementales, puissent participer au processus de référencement,
malheureusement, donc aussi peu représenté par les associations représentatives
reconnues dans la loi R-20. Pourquoi vous vous opposez à l'octroi de
permis de services de référence de main-d'oeuvre à ces entités? Encore une
fois, peut-être que j'ai mal lu et parce qu'on reçoit les mémoires un peu à la
dernière minute, mais vous semblez vous opposer, et, si ce n'est pas le cas, je
vous donne l'occasion de rectifier le tir.
M. Vachon (Luc) :Bien, en fait, dans les discussions qu'on a eues, nous,
avec tous les conseillers et conseillères de la CSD-Construction, c'était... Ces
gens là, quand ils sont membres chez nous, ils sont référés avec le même... le
même intérêt. Le même exercice est fait, et ils sont membres chez nous. Alors,
ils sont représentés comme tous les membres chez nous. Alors... La question
c'était : Bien, pourquoi? Qu'est-ce que ça va apporter de plus, sinon de
venir mettre une espèce de troisième joueur dans l'équation? Parce que la CCQ
le fait déjà. Nous, on le fait déjà. Je suis sûr que chacune des associations
représentatives qui fait la référence, quand ils ont des... du travail dans ces
régions-là, vont le faire. Il y en a autour de la région de Montréal aussi, où
est-ce que les gens m'ont dit : On ne comprend pas parce que nous on le
fait déjà, tout ça, on fait déjà ça. Quand ils sont membres chez nous, ils sont
membres chez nous.
M. Boulet : C'est une mesure
additionnelle, je pense, qui va permettre une intégration beaucoup plus
harmonieuse des personnes issues des communautés autochtones, particulièrement
dans les régions éloignées. C'était une revendication qui m'apparaissait
totalement légitime.
Et, Luc, avant qu'on termine, c'est sûr
qu'on va s'assurer que les programmes d'accès à l'égalité...
M. Boulet : ...provenant de la
CCQ, qui sont... travaillé en collaboration avec les parties, les partenaires
de l'industrie de la construction puissent prévoir des mesures en tenant compte
de chacun des groupes, notamment et particulièrement aussi, bien sûr, les
femmes.
Peut-être, dernier commentaire. Vous le
savez, M. Vachon, depuis le début de l'année 2023, on en a mis en place,
des ateliers de consultation avec les partenaires parce que je suis un grand
partisan de faire des changements après consultations. Je disais tout le temps,
au début des consultations, là où il n'y a pas de consensus, le législateur
doit faire un certain arbitrage. Et souvenez-vous, sur la polyvalence, on avait
eu des discussions. Évidemment, les associations d'employeurs sont plus
favorables, les centrales... les associations syndicales, moins, mais on avait
travaillé sur une liste potentielle d'activités qui pouvaient être partagées
d'un métier à l'autre. Il n'y a pas eu d'entente. On a... on a parlé, puis vous
me confirmez, pendant des mois, des mois, des mois. Il n'y a pas eu d'entente
sur une activité. Les employeurs en veulent plus, les syndicats en veulent
moins.
La Présidente (Mme D'Amours) : En
terminant.
M. Boulet : Je pense que
notre article, avec les conditions, est le fruit d'un bon équilibre. Alors,
merci beaucoup encore une fois de votre présence et de votre mémoire.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, M. le ministre. Maintenant, je vais céder la parole à la députée de
Bourassa-Sauvé pour une période d'échange de 12 minutes 23 secondes.
Mme Cadet : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci, messieurs Vachon, Dufour et Fortier, pour votre
présentation ainsi que pour votre mémoire, effectivement, très étoffé.
Je commencerais, un peu comme vous l'avez
fait, avec la notion de productivité. Parce que vous... bien, vous l'avez
mentionnée dans votre présentation, mais également, donc, dans votre mémoire,
donc, vous nous nous présentez, donc, les différentes, donc, fluctuations de
productivité à travers le temps, les époques. Et notamment vous nous présentez
donc une régression linéaire multivariée avec la relation entre l'indice de
productivité et les nouvelles entrées dans l'industrie de la construction.
J'aimerais peut-être commencer en vous entendant sur cette question-là, comment
vous définissez les différents... les différents éléments relatifs à la
productivité dans l'industrie de la construction au Québec, puis on ira par la
suite sur les différentes causes.
M. Vachon (Luc) :L'aspect plus technique... Avant de passer ça à mon
collègue à la recherche, peut-être, sur des éléments plus techniques, je pense
que ce qui est énoncé, ce n'est pas différent dans l'industrie de la
construction que dans n'importe quel autre secteur d'activité. Chaque fois
qu'il y a l'entrée d'une nouvelle main-d'œuvre qui n'a pas d'expérience, qui a
des qualifications plus faibles, qu'ils vont les acquérir en chemin, dans tout
le processus de la phase d'apprentissage, il y a toujours une chute de la
productivité, tout le temps, partout. Puis après, quand l'apprentissage se
fait, l'acquisition des compétences, on assiste à une augmentation de la
productivité, puis à la suite, une stabilisation.
Dans l'industrie de la construction, il y
a tellement d'abandons, il y a tellement de renouvellement constant de
main-d'œuvre qui arrive toujours, cette croissance, cette augmentation de la
qualification, qui devrait normalement se faire, elle se neutralise par les
départs puis les entrées nouvelles, constamment. C'est ça qui se produit. C'est
ça qui se produit. Après, c'est des éléments plus techniques. Ça, si je... si
je les explique, vous ne les comprendrez pas, moi, ça fait que je vais laisser
à Francis ce bout-là.
M. Fortier (Francis) : Oui.
Merci. Bien, je ne vais pas nécessairement aller dans le détail du calcul. Je
pense qu'il faut peut-être faire un petit pas de recul quand on va parler de
productivité du travail, dans la mesure où ce n'est pas... contrairement à ce
qu'on pense, ce n'est pas un indice qui mesure pour de vrai la productivité du
travail. Grosso modo, c'est le PIB divisé par les heures, le nombre d'heures
travaillées. Ça fait que l'idée qui est derrière, quand on prend cet outil-là,
c'est de voir qu'est-ce qui compose le PIB. Et c'est là que ça permet de voir,
si on augmente le PIB, on va automatiquement augmenter la productivité. Grosso
modo, techniquement, c'est ça que le calcul dit.
Qu'est-ce qui augmente le PIB? Plusieurs
éléments. Il y a, d'un côté, le niveau, en fait, de salaire, et de l'autre
côté, qu'est-ce qui est produit en valeur ou en plus-value, donc c'est-à-dire les
profits et qu'est-ce qui est généré de ventes. Comment on augmente tout ça? De
manière non statique, de manière beaucoup plus simple, bien, on va parler, oui,
de l'intensité du travail plus que de sa dimension... On va parler de la
formation des personnes, de l'expérience sur le terrain. Ça, on va parler un
petit peu plus de la productivité en termes de producteur du travail au sens où
on l'entend, mais il y a plein d'autres éléments. On va parler de
l'organisation, de l'intensité, en fait, du capital, de comment qu'on utilise
les machines, comment qu'on utilise les outils. On va aussi parler de comment
qu'on organise...
M. Fortier (Francis) : ...des
chantiers, mais n'importe... comment on organise le travail, tous ces
éléments-là sont inclus dans qu'est-ce qu'on parle comme étant la productivité
du travail. Et c'est sur ces éléments-là qu'on a pris le temps de partir la
réflexion de l'ensemble du mémoire. Est-ce qu'on peut améliorer certains de ces
éléments-là sans avoir une pression ou d'une déréglementation indue sur
l'industrie de la construction et aussi sur les travailleurs et travailleuses?
Puis ce qu'on dit aussi, c'est qu'en pensant que le 10 %... par exemple,
si on veut vraiment monter le 10 % comme que c'est dit, il faudrait que,
pour de vrai, l'indice de productivité serait juste du travail. Et là on
pourrait être d'accord avec l'étude, mais ce n'est pas le cas. Malheureusement,
on a une étude qui fait de la statistique avec des experts d'économie, non pas
de statistique, ça fait qu'on se retrouve avec quelque chose qui est en dehors
de leur domaine. Ça fait qu'à la base ils ont des mauvais chiffres puis ils ne
sont pas capables de reproduire par la suite dans leur expertise d'économie
sans avoir eu l'expertise initiale.
• (11 h 50) •
Mme Cadet : Merci. Donc, je
vous entends. Donc, pour vous, le... donc, la notion de productivité, elle est
multifactorielle. M. Vachon, donc, je reviendrais, donc, sur l'aspect,
donc, des nouveaux travailleurs. Donc, je pense qu'il y a deux éléments ici,
donc notamment... donc on a vu, donc, un grand besoin de travailleurs, donc,
dans le secteur, donc, en raison de la pénurie de main-d'œuvre, mais d'autre
part, vous avez beaucoup, donc, parlé, donc, de l'aspect manque de rétention.
Le projet de loi, je pense que, donc, ça, c'est l'une de ses failles. Donc, il
mentionne très peu, donc, le... nous amène très peu sur la voie des solutions
en matière de rétention. Donc, je vous laisserais élaborer. Donc, sur cette
question-là, vous avez effleuré la question de la formation, notamment.
M. Vachon (Luc) :Bien, il faut qu'on se penche sur toute la question de la
formation, la question de l'organisation du travail, puis ça, notamment, on
parlait des femmes tout à l'heure, mais les femmes, on peut bien faire des programmes,
puis toutes sortes d'affaires, mais un des... oui, il y a la question du
climat, il y a la question de la culture qui se travaille, mais la question de
l'organisation du travail, c'est un facteur déterminant pour pouvoir permettre
que des femmes prennent leur place pleinement dans l'industrie. On a parlé
juste avant des taux d'abandon. C'est vrai, des femmes, c'est plus élevé, mais
c'est quand même très élevé chez les hommes aussi, il y a un roulement, et ça,
ça fait partie des préoccupations.
Donc, quand on retient les gens, on réduit
le taux de désertion, ce qui fait en sorte que les gens demeurent. Un, ils vont
acquérir plus de connaissances, de qualifications, de compétences ensuite. La
formation, plus les personnes sont formées... Puis ça, je pense qu'il n'y aura
pas de débat là-dessus, sur le fait que des personnes mieux formées vont
augmenter le niveau de productivité. Il y a des choses, il y a la question
technologique. Il n'y a pas qu'au niveau de la main-d'œuvre, c'est vraiment...
Toute la planification des travaux, il y a quelque chose, là qui est phénoménal
comme gain, mais qu'on commence tout juste à adresser, qu'on commence tout
juste à voir poindre. Et on a vu quelque chose là-dessus, hier, dans le budget,
alors, on va voir comment ça va s'orchestrer, mais on commence tout juste à
vouloir mettre ce sujet-là. Puis l'organisation du travail, c'est important
parce qu'il fut un temps où l'industrie de la construction procurait des
conditions de travail qui étaient vraiment supérieures.
Aujourd'hui, les secteurs autour se sont
vraiment rattrapés, ils sont compétitifs de manière très importante par rapport
aux secteurs, alors... Puis ensuite, on a beau avoir un taux horaire, ce qui
est important, c'est de regarder combien d'heures dans l'année tu gagnes. Ça,
quand tu travailles dans la construction puis que tu as un salaire moyen à
40 000 $ par année, il n'y a rien à faire des pirouettes avec ça, là.
Alors, il faut regarder comment on est capable d'augmenter le nombre d'heures,
ça va générer au niveau de la rétention. L'organisation du travail, la
planification et la formation, c'est des éléments sur lesquels on doit se
pencher pour trouver une solution.
Mme Cadet : Bien, justement
pour... parce que je regarde, donc, le temps qui file. Donc, pour augmenter le
nombre d'heures, bien, notamment, donc, au niveau, donc, de la polyvalence, je
suis d'accord avec vous dans le mémoire, donc, que la notion, donc, est
insuffisamment définie, mais vous y allez avec les différentes recommandations,
par exemple, donc de mises en commun des familles de métiers et du cumul
métier-occupation. Donc, j'aimerais vous entendre, donc, sur ces
recommandations-ci. Donc, comment est-ce que, dans le projet de loi...
M. Dufour (Carl) : C'est moi
qui va y aller là-dessus.
Mme Cadet : Oui, allez-y.
M. Dufour (Carl) : Les
occupations, plus ou moins 35 000 travailleurs dans l'industrie de la
construction ne sont pas reconnus comme métier. Pourquoi? On a des
scaphandriers qui sont polyvalents. Quand ils sont dans l'eau, ils peuvent
toucher à tout. Pourquoi ne pas les reconnaître comme métier? On veut de la
polyvalence puis on n'en a pas. Ce qu'on nous, à CSD Construction, c'est que
les occupations deviennent métier dans leurs tâches résiduaires, qu'ils peuvent
aller chercher une carte d'apprentissage. S'ils vont chercher une carte
d'apprentissage, ils font plus d'heures. S'ils font plus d'heures, c'est prouvé
avec tous les sondages qu'on a, on va faire de la rétention. Famille de
métiers, même chose...
M. Dufour (Carl) : ...si on
prend un compagnon, tantôt on a parlé avec M. Boulet de faire reconnaître les
acquis de l'extérieur, bien, dans nos familles de métier, si on est capables de
faire reconnaître nos familles de métier par les sous-comités, dans le fond,
pour bonifier leurs heures, un compagnon qui tombe apprenti première année, on
va donner les chiffres, grosso modo, à 600 $ semaine, puis le chômage lui
donne 575 $, il va peut-être rester chez eux pour gagner 25 $ par
semaine de plus, mais, si on bonifie ses qualificatifs en famille de métier,
travaillés par les sous-comités puis les professionnels de l'industrie, puis on
le fait monter un petit peu plus haut, s'il gagne plus cher, il va peut-être
aller travailler dans un autre métier. Ça fait que, s'il travaille plus, à la
fin de l'année, il a fait plus d'heures, plus de fonds de pension, plus de
MÉDIC, ça fait que ça fait de la rétention automatiquement.
Je n'ai pas besoin de vous dire, dans
l'industrie, tous métiers confondus, c'est de 1 000 à
1 200 heures, tous métiers. Ça fait que, si on est capables de faire
de la rétention avec ça, ça va juste être bon pour notre industrie avec des
travailleurs formés qui sont déjà sur le terrain. Ils sont capables d'en faire
plus, on a des très beaux exemples là-dessus. Comme je vous ai dit, le
scaphandrier peut faire de la polyvalence, il peut tout faire dans l'eau, mais
il n'est même pas reconnu comme métier, l'arpenteur, même chose. C'est des...
C'est des occupations qui ont des formations puis qui ne sont pas reconnues. Je
pense qu'on a une belle porte d'entrée pour faire de la rétention.
Mme Cadet : Puis, pour les
manoeuvres parmi les occupations, donc...
M. Dufour (Carl) : C'est la
même chose, dans le fond, eux autres aussi. Si on les reconnaît comme métier,
dans le fond, ils peuvent aller chercher une carte d'apprentissage. Ça fait que
je prends un homme de vis sur l'asphalte, qui est plus saisonnier, quand il
arrive à la fin de saison, à la place d'aller faire du chômage, il va chercher
une carte d'apprentissage de métier. Il peut travailler tout l'hiver dans
d'autre chose. Ça fait que son fonds de pension monte, il fait plus d'argent.
Il travaille au chantier, il a de l'expérience, il connaît déjà le terrain. Ça
fait qu'on fait de la rétention maintenant.
Mme Cadet : Il serait reconnu
dans ce cadre-là puis il n'aurait pas besoin, donc, de perdre sa carte
d'occupation pour être capable d'accéder à...
M. Dufour (Carl) : C'est ça.
C'est en plein ça. Parce que vous comprendrez que, dans l'industrie de la
construction, des fois, là, juste la bureaucratie de quatre, cinq jours, oui...
certains règlements qui fait qu'il pourrait retourner chercher sa carte, mais,
pour quatre, cinq jours, il sort de l'industrie puis il rentre dans une usine.
Ça fait que, dans le fond, si on peut garder notre monde qui sont déjà formés,
qui sont déjà sur le terrain... Tu sais, les chiffres parlent d'eux autres
mêmes. Après cinq ans, c'est... 56 % des femmes qui sortent puis 36 %
des hommes qui sortent compagnons. Ça fait que je pense qu'on a un travail à
faire de rétention, puis ça passe aussi par la planification des travaux. Si
nos travailleurs, travailleuses font plus d'heures, ils vont rester là-dedans.
Mme Cadet : Puis justement,
sur la planification des travaux, tu sais, dans votre mémoire, donc, vous
présentez une espèce de comité, là, de comité de travail à votre recommandation
25. Est-ce que vous pensez... Bien, en fait, qu'est-ce que vous pensez qui va
émerger de ce comité-là?
M. Dufour (Carl) : Faire
travailler plus notre monde. Je vais prendre juste l'asphalte l'été, juste à
cause du dégel, on en met moins dans les camions. Ça fait qu'on commence plus
tard. Si on pourrait commencer avant, le monde fait plus d'heures. Si les
travailleurs, travailleuses font plus d'heures, ils vont rester plus dans
l'industrie. C'est prouvé, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Tous les sondages
le fait, ceux qui font plus d'heures restent plus longtemps dans l'industrie.
Mme Cadet : O.K. Ça fait que
vous pensez que la planification des travaux, donc, avec la table de travail
que vous recommandez, donc, ça, ça va aider, donc, les travailleurs à faire
plus...
M. Dufour (Carl) : Oui, parce
qu'on donne tout... on donne des pics tous en même temps. Dans le fond,
80 % de l'ouvrage, c'est le gouvernement qui le donne, puis il le donne
tout en même temps. Ça fait qu'on crée un pic dans l'été, ça fait que tous les
travailleurs sont demandés à la même place. Ça fait que, si on est capables de
l'étirer, nos travailleurs vont travailler plus, puis on va faire de la
rétention.
Mme Cadet : Deux dernières
questions avec mon temps. Donc, la première, donc, sur... bien, justement, on
va sur la diversité. Je vous ai entendus, donc, les réponses que vous avez données
au ministre. C'est quoi, les changements de comportement en chantier qui
devraient avoir lieu pour être capable d'améliorer la rétention des femmes sur
les chantiers?
M. Vachon (Luc) :Bon, au niveau... au niveau de la culture, ça commence beaucoup
à changer. Honnêtement, il y a beaucoup de sensibilisations qui sont faites.
Bon, c'est dans le discours, c'est dans l'air, je pense que chacune des
associations syndicales, même les associations patronales, fait des travaux de
sensibilisation, fait des démarches de sensibilisation auprès du milieu. Ça...
Il y a une évolution, et ça va... et ça va, je suis convaincu, avant longtemps,
avoir des bénéfices. L'organisation du travail, elle, elle est très statique,
elle est très traditionnelle, et ça, ça correspond mal...
Mme Cadet : Juste parce qu'il
ne reste plus...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...10 secondes.
Mme Cadet : Je vous entends.
Sur le fonds de rétroactivité, je vous ai entendus, donc, sur le... la
rétroaction en tant que telle, mais, sur le fonds, quelle est votre opinion
là-dessus? Ce n'est pas dans le mémoire.
M. Dufour (Carl) : ...la
journée 1, on veut la rétro. La convention est signée, c'est la journée 1...
Mme Cadet : Donc, pas de
fonds.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps...
M. Dufour (Carl) : Bien oui,
le fonds, on en veut un, mais, en tout cas...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions. Je suis désolée. Je suis la gardienne du
temps.
Mme Cadet : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
allons maintenant passer avec la période d'échange avec le député
d'Hochelaga-Maisonneuve. M. le député, vous avez quatre minutes huit secondes.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous trois. Bravo pour votre solide mémoire! 37
recommandations, si je ne me trompe pas. Il y a de la bonne matière.
Je vais faire un suivi sur la question que
ma collègue vient de poser sur la rétro. C'était un des thèmes que je voulais
aborder avec vous. Donc, hier, les gens de la FTQ disaient : Nous, on
préférerait juste retirer l'interdiction, dans le fond, puis qu'on laisse les
parties négocier. Est-ce que vous êtes à peu près à la même place par rapport à
ça ou... Comment vous vous situez là-dedans?
M. Vachon (Luc) :En fait, notre réflexion... au début, on a... on a réfléchi
à cet aspect-là parce que, l'interdiction de négocier, je n'ai jamais vraiment
compris pourquoi il y avait ça, là... seul secteur d'activité qui n'avait pas
ça...
M. Vachon (Luc) :...ceci dit, on s'est mis à réfléchir, à dire : Bon,
O.K., le fonds, qu'est-ce que ça a provoqué? Et là on regarde comment la
composition de l'industrie est faite. Puis l'idée, c'est : il faut
toujours se pencher pour que ce soit le plus favorable aux travailleurs,
travailleuses là-dedans. Alors, on dit : Bon, bien, admettons qu'on
négocie, puis qu'on ne réussit pas un renouvellement avant échéance, bon, puis
que, là, il s'écoule du temps, oui, là, admettons qu'on peut négocier une
rétroactivité... Mais là les personnes, là, travaillent... un, deux, trois
employeurs différents. L'employeur, il disparaît de la carte. Parce qu'il y en
a, là, aussi, au niveau des employeurs... qui ferment, qui font faillite, tout
ça. Puis là on dit : Bon, bien, si une personne a travaillé... deux, trois
employeurs, on négocie une rétroactivité, O.K., ça va, mais ça va être qui, la
responsabilité de faire appliquer ça?
• (12 heures) •
Ça fait que, théoriquement, c'est chacun
des employeurs qui devrait faire les ajustements salariaux, mais là il faut que
les travailleurs, les travailleuses s'occupent de savoir : O.K., est-ce
que j'ai eu le bon nombre d'heures, j'ai eu le bon ajustement, et tout ça. On
s'est dit : Là, on retransfère ça dans la cour des travailleurs,
travailleuses. Est-ce que c'est une bonne solution? On n'est pas convaincus de
ça.
Alors, on a dit : Bon, O.K., ça n'a
rien de parfait, le fonds. Puis ce n'est pas grave, je veux dire, les choses
parfaites, c'est rare. Mais on dit : Bon, à partir du moment où ce
fonds-là serait vraiment... Puis là, comme Carl l'a soulevé, on ne doit pas
recommencer à jouer dans un film où, là, tout à coup, on va renégocier. Oui, tu
as le droit à une rétroactivité, il va y avoir un fonds, mais là tu vas
recommencer à négocier ça. Pourquoi on n'établit pas la règle qu'à partir de la
journée d'échéance, oui, les parties vont négocier... L'augmentation de salaire
qui s'applique pour la première année, c'est elle qui s'applique à l'échéance,
point, puis, à partir du fonds, il y aura versement à toutes les heures qui ont
été déclarées, qui ont été envoyées par les employeurs, parce que c'est eux
autres qui versent la contribution. Bien, la CCQ est capable de gérer tout ça, fera
les redistributions en fonction de ça.
M. Leduc : ...pas
d'opposition à ce qu'on accumule un certain fonds, mais c'est sur
l'application, par la suite, que vous différez de vision.
M. Dufour (Carl) : Puis ce
qu'on veut avoir de plus, c'est les avantages sociaux aussi sur la rétro, parce
que ce n'est pas dans le projet de loi, puis c'est important, la retraite... il
faut que ça soit mis en même temps que la rétro. Si le travail, ils l'ont, il
faut que ça soit mis dedans.
M. Leduc : Parfait. Autre
aspect, c'est les droits de grief, notamment sur les enjeux salariaux. Hier, le
ministre disait : Oui, mais là vous n'avez pas peur que ça va être une
abondance de griefs, que ça va être un déluge de griefs? Vous, vous syndiquez
des gens dans d'autres secteurs, à la CSD, que la construction. Est-ce qu'il y
a des secteurs économiques où il y a une avalanche de griefs puis que les gens
ont plaidé pour qu'on retire du code du travail la permission de faire des
griefs parce qu'il y en avait trop? Est-ce qu'il y a d'autres secteurs
économiques qui... à votre connaissance, qui font ce genre de plaidoyer?
M. Vachon (Luc) :
Non, non, non. Bien, en fait, ça serait comme retirer... vouloir retirer aux
gens le droit de... la capacité de faire appliquer leur droit. Alors, ça,
j'ai... j'ai travaillé, moi, pendant une vingtaine d'années dans tous les
autres secteurs possibles. Le droit de grief, c'est reconnu, ça, le droit de
grief, c'est reconnu.
Est-ce qu'il va y avoir affluence tout à
coup de grief? Bon, d'abord, il y a des choses qui sont déjà claires, il y a
des choses... Il pourrait y avoir des griefs uniquement sur... une affluence
sur des choses qui ne sont pas déjà connues, convenues, qui ne sont pas déjà
claires. Il n'y aura pas tout à coup le dépôt des griefs sur chacune des
dispositions de la convention collective qui sont appliquées dont
l'interprétation a été faite puis qui... elle se fait depuis plusieurs années,
hein? Donc, il va y avoir certains éléments, c'est vrai, où il pourrait y avoir
une augmentation, ça se peut.
La Présidente (Mme D'Amours) :
C'est tout le temps que nous avions. Je suis désolée. Je vous remercie, M.
Vachon, M. Dufour et M. Fortier, pour votre contribution aux travaux de notre
commission.
Je suspends un court laps de temps les
travaux quelques instants pour... afin de permettre aux prochains invités de
prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 03)
12 h (version non révisée)
(Reprise à 12 h 06)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue au Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la
période d'échange. Je vous invite donc à nous... à vous présenter et à nous
dire votre exposé, s'il vous plaît.
M. Trépanier (Michel) : Chers
députés, membres de la commission de l'économie et du travail, Mme la Présidente,
je me présente, Michel Trépanier, président du Conseil provincial international
et chaudronnier de métier. Avec moi, je vous présente notre directeur général,
Patrick Bérubé, qui est monteur assembleur, M. Éric Nantel, qui est responsable
en santé et sécurité et conseiller en relations de travail, puis Maître André
Dumais, qui est le procureur du Conseil provincial.
En effet, en lisant le préambule de ce
projet de loi, j'ai remarqué que l'objectif est de moderniser l'industrie de la
construction. Ce que tente de faire le ministre est un objectif noble,
nécessaire et partagé par tous les acteurs de l'industrie, car une industrie en
santé est bonne pour l'économie du Québec. Maintenant, la question c'est on
modernise pour qui et pourquoi?
Avant de parler des travailleurs et des
travailleuses, j'ai envie de vous parler de nos priorités en lien avec ce
projet de loi. En effet, nos priorités sont : un, la bonification de la
formation initiale pour augmenter la diplomation, la formation et l'accès à l'industrie,
deux, le perfectionnement dans l'industrie de la construction et le rôle que
les associations syndicales peuvent y jouer, trois, la mobilité, quatre, le
rapatriement des conventions collectives.
Finalement, on pense que la modernisation
devrait être faite pour le bien-être, puis je répète, pour le bien-être des
travailleuses et des travailleurs de l'industrie. En tant que syndicat, nous
sommes l'addition de ces femmes et de ces hommes qui se lèvent tous les matins
pour aller construire nos logements, nos écoles, nos hôpitaux, nos routes, et j'en
passe. C'est donc en leur nom et dans leur intérêt que nous sommes ici devant
vous aujourd'hui.
Je vais commencer par les éléments de ce
projet de loi qui viennent régler des iniquités. Nous croyons que le processus
de négociation, dont l'inclusion de la rétroactivité, viendra améliorer des
négociations qui ont été difficiles dans la dernière décennie.
Maintenant, permettez-moi de revenir sur
la modernisation. Pour que cette modernisation réponde à l'intérêt des
travailleuses et des travailleurs, celle-ci doit répondre à : un,
augmenter leur employabilité, deux, favoriser une formation initiale et leur
perfectionnement, trois, améliorer leur environnement de travail.
Commençons par parler d'employabilité.
Comme vous le savez, la rétention est l'un des enjeux les plus importants de
notre industrie. En effet, les chiffres officiels de la CCQ parlent d'eux-mêmes.
Nous allons malheureusement perdre, à la première année, 8 %...
M. Trépanier (Michel) : ...de
nos diplômés et 18 % de nos non-diplômés. Après cinq ans, ce chiffre passe
de 24 % pour les diplômés et de 40 % pour les non-diplômés. Il faut
comprendre la réalité de nos travailleuses et de nos travailleurs.
• (12 h 10) •
Permettez-moi de maintenant vous donner
quelques enlignements et quelques éléments complémentaires.
1 062 heures de façon annuelle pour une travailleuse ou un
travailleur; de façon annuelle, des horaires instables qui changent d'une
semaine à l'autre; beaucoup de mobilité entre les équipes de travail, entre les
chantiers et entre les secteurs. En gros, une grande proportion de nos membres
ne connaisse pas où ils travailleront la semaine prochaine, ni celle d'après ni
avec qui et pour qui. Notre industrie est constituée de postes nomades avec des
chantiers éphémères et des employeurs tem-po-raires dans la très grande
majorité des cas. Dans cette réalité d'instabilité, l'employabilité passe
d'abord par la compétence et donc par la formation et le perfectionnement.
J'ai envie de vous parler de formation
professionnelle. Étrangement, dans ce projet de loi là, on n'en... parle pas.
La formation initiale doit être la pri-o-ri-té absolue de notre industrie. Une
statistique qui veut tout dire : en 2014... Je vais prendre mon temps. En
2014, 67 % des personnes qui entraient dans notre industrie détenaient une
diplomation; aujourd'hui, 22 %. 67 % en 2014; 22 % aujourd'hui.
Qu'est-ce que ça veut dire? Des écoles de métier à travers le Québec qui se
vident, des gens en chantier qui entrent sans la moindre préparation, une
santé... sécurité à risque, une employabilité future limitée et une
productivité affectée par la force des choses. La formation professionnelle
étant la porte d'accès, la porte d'entrée de notre industrie, elle assure une
compétence acquise avant la première journée en chantier, un sentiment
d'appartenance plus grand envers une industrie pour laquelle on s'est
longuement préparé et une plus grande valorisation directe issue de la
productivité accrue de chaque diplômé. Aujourd'hui, il est urgent d'adresser
ces enjeux. Pourquoi notre organisation recommande aux élus de s'assurer que ce
projet de loi favorise la compétence? Notamment en s'assurant du respect des
obligations de formation continue, en s'assurant que chaque travailleuse et
travailleur maîtrise son métier avant qu'il ne pratique d'autres tâches...
autre que leur métier, que l'on permette aux travailleurs et aux travailleuses
d'avoir accès à du perfectionnement de la part de leur syndicat lorsqu'ils ne
sont pas à l'emploi, comme il se fait partout ailleurs au Canada. En tant que
représentants des travailleurs, nous voulons aussi nous assurer que le
perfectionnement puisse être assuré par les associations syndicales comme dans
le reste du pays. Cette formation est actuellement financée par des cotisations
négociées entre les parties et peut être donnée par les employeurs, les
associations patronales, les institutions d'éducation, tous... de la CCQ.
Ainsi, les syndicats que nous sommes pourront favoriser l'employabilité de nos
membres en répondant aussi aux besoins en développement de la compétence et en
favorisant la rétention. Actuellement, certaines de nos sections locales
offrent déjà la formation à leurs membres sans avoir accès au bénéfice de tous
les travailleurs qui passent par l'employeur. Pourtant, les travailleuses et
les travailleurs membres de l'Inter cotisent à ces fonds et désirent être en
mesure d'en bénéficier. Cependant, elles désirent aussi de bénéficier de leur
plan de carrière et pas selon les besoins de leur employeur. M. Boulet,
permettez-moi d'élever notre jeu et de contribuer à l'effort de la formation et
de la rétention de notre industrie. Nous espérons que ce projet de loi
permettra de corriger des anomalies et aussi d'améliorer considérablement l'accessibilité
à la formation et l'offre de services sans aucun frais additionnel pour le
gouvernement. Après avoir entendu le budget d'hier, j'ai une quasi-certitude
que cet effort sera apprécié par le gouvernement.
Un autre sujet... lequel ce projet de loi nous
inquiète est celui de la mobilité. En 2017, nous avons eu d'importants
mouvements de grève de travailleuses et de travailleurs sous le thème La
famille d'abord. Ces derniers étaient préoccupés des conditions de travail par
rapport à leur désir d'être présents...
M. Trépanier (Michel) : ...et
actifs dans l'éducation de leurs enfants. Fini le temps où les travailleurs
demandaient à partir de la maison pour vivre une expérience payante. La
priorité : la famille d'abord. Et je crois qu'il importe à l'industrie de
s'y ajuster. En effet, nous avons été surpris de voir l'abolition des clauses
des conventions collectives sur la mobilité sur ce projet de loi. Que le
développement économique des régions est mis de l'avant par le gouvernement
actuel depuis son élection en 2018, voici ce même gouvernement... veut que les
entreprises... qu'ils puissent construire en région sans travailleuses ou
travailleurs locaux. Cette décision nous apparaît comme étant catastrophique
pour la santé économique des régions pour les salariés de l'industrie. La
priorité régionale des conventions collectives a pour objectif d'assurer et de
maintenir l'expertise de pointe dans toutes les régions du Québec. Nous vous
demandons donc de revoir ce projet pour protéger l'économie des régions, mais
aussi de respecter le désir des travailleuses et des travailleurs de
l'industrie, qui nous disent haut et fort que leurs priorités ont changé.
M. le ministre, Mme la Présidente de la
commission, députés du gouvernement, chers députés de l'opposition, sachez que
je pourrais passer des heures à vous parler des conditions des travailleurs et
des travailleuses, leurs défis, leurs craintes puis des efforts de nos équipes
pour les accompagner. Cependant, le temps nous étant limité, je veux conclure
en vous demandant de penser à ces femmes et ces hommes pour qui vos décisions
auront un impact sur leurs vies. Lorsque vous analyserez ce projet de loi,
pensez à leurs besoins, à leurs familles et leur employabilité. Comme l'a dit
notre premier ministre sur le dossier de l'immigration : On va en prendre
moins, mais on va en prendre soin.
D'ailleurs, à ce sujet, j'aimerais vous
parler de ma rencontre vendredi dernier avec Alyson, une jeune tuyauteuse de
métier à qui je parlais de ce projet de loi, cette même jeune fille que vous
avez rencontrée vendredi dernier, M. le ministre. Après m'avoir entendu parler
du projet de loi n° 51 pour essayer de comprendre ce qu'elle pensait, elle m'a
passé ce commentaire d'une vérité frappante : En tout respect, M. Trépanier,
ce projet de loi ne changera rien à votre travail...
La Présidente (Mme D'Amours) : En
terminant.
M. Trépanier (Michel) : ...ou
celui des gens qui sont assis ou en... vous écoutant à l'Assemblée nationale,
mais, moi, ça va changer ma vie en chantier et mon avenir dans mon métier. Je
vous remercie.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vous remercie, M. Trépanier, pour votre exposé. Je dois demander le
consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure précise. Est-ce que
j'ai le consentement? Merci. Donc, nous allons maintenant commencer la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Oui, merci, Mme
la Présidente. Merci, M. Trépanier. Merci à toute l'équipe, Patrick, pour le
travail de préparation. C'est un mémoire qui est bien fait, qui comprend
l'importance de l'exercice que nous amorçons.
Puis je vais commencer, M. Trépanier, par
Alyson. Effectivement, je suis allé à... dans un chantier vendredi dernier, une
clinique de fertilité au centre-ville de Montréal, pour rencontrer le conseil
des Elles de la construction et j'ai eu des échos extrêmement favorables sur le
projet de loi, qui était attendu, puis Alyson, qui est une tuyauteuse, qui est
d'ailleurs la seule travailleuse sur les 20 personnes de ce chantier-là,
elle est aussi préoccupée puis intéressée par tout ce que nous faisons pour
favoriser l'intégration des femmes dans l'industrie de la construction.
Évidemment, vous abordez un certain nombre
de concepts. Je vais simplement revenir, là, parce qu'hier vous avez fait grand
état des statistiques de moyenne d'heures. Et, si on exclut les personnes qui
font moins de 500 heures, la moyenne d'heures est de 1 404, parce
qu'il y a beaucoup de personnes qui font moins que 500 heures. Ils le font pour
un besoin ou pour une tâche ponctuelle. Il y a des personnes qui vont
travailler une semaine, deux semaines. Toutes ces personnes-là sont considérées
dans la statistique qui a été révélée hier. Alors que la réalité, pour les
personnes qui font plus de 500 heures, c'est une moyenne qui est beaucoup
plus respectable. Puis ce qu'on a réalisé aussi, c'est que 62 % des
salariés âgés de 55 ans et plus déclaraient moins de
1 000 heures annuellement. Donc, il y a aussi cette réalité-là.
Il y a une effervescence dans l'industrie
de la construction. Il y a des besoins qui vont se poursuivre pendant de
multiples années. On a besoin de main-d'œuvre, on a besoin d'accroître notre
productivité. Il y a des écarts qui nous séparent, le Québec...
M. Boulet : ...l'Ontario puis
le reste du Canada, puis on a besoin d'être plus inclusifs. Je le répète :
Moi, j'ai rencontré aussi... parce que vous me parlez de rencontre, des
personnes ukrainiennes, des personnes de Tunisie, des personnes d'un peu
partout sur la planète puis impossible de se faire reconnaître leurs heures de
formation ou leurs expériences de travail. Il ne faut pas négliger l'avancée
considérable que ça va procurer aux personnes issues de la diversité. Et je suis
d'accord sur la compétence des travailleurs. C'est pour ça que la flexibilité,
elle est conditionnelle. Il faut respecter la compétence du travailleur puis il
faut surtout s'assurer qu'il n'y ait pas d'impact sur des lésions
professionnelles potentielles, donc sa santé, sa sécurité, son intégrité
physique et psychique. Puis on a fait énormément de travaux, vous le savez,
avec les représentants en santé-sécurité dans la loi modernisant le régime de
santé-sécurité, dans la loi que nous adopterons éventuellement pour lutter
contre le harcèlement et les violences qui surviennent dans les milieux de
travail. La rétention, ça passe beaucoup par ça, puis le taux d'abandon des
hommes y est aussi trop élevé. Puis la compétence, c'est certainement un atout
dans la rétention.
• (12 h 20) •
Ceci dit, la formation... ce n'est pas un
projet de loi qui adresse spécifiquement à la formation. C'est des nouvelles
façons de faire. C'est des nouvelles organisations de travail. C'est une
possibilité d'avoir une certaine mobilité. J'entendais tout à l'heure :
C'est à peu près le seul secteur où il n'y a pas possibilité de faire un grief
d'interprétation ou d'application d'une convention, mais c'est probablement le
seul secteur où il y a des obstacles autant à la mobilité alors que, vous le
savez, M. Trépanier, il y a 13 métiers en génie civil-voirie qui
bénéficient de la pleine mobilité. Il n'y a pas d'effets négatifs qui nous ont
été rapportés. En institutionnel, commercial, industriel, il y a un seuil à
20 %. Il n'y a pas d'effets négatifs qui nous ont été rapportés. La
diplomation par le DEP, le diplôme d'études professionnelles, ce sera toujours
la voie à privilégier, toujours. L'attestation d'études professionnelles a été
mise en place pour répondre à un besoin pressant de main-d'œuvre additionnelle.
Et vous le savez, dans les cinq métiers où il y a une attestation d'études
professionnelles qui vient couronner des heures de formation, il y a eu une
entrée d'à peu près de 55 à 85 % des personnes qui y accèdent à l'industrie
de la construction par la voie des bassins, donc sans formation. Et le taux de
rétention...
M. Trépanier (Michel) : ...j'ai
juste un point d'information. C'est juste pour notre contribution. On est
ici... puis je vous respecte, là, le plus haut point. Nous, on va amener une
certaine contribution. On veut être capables de répondre à votre question, puis
j'ai peur de ne pas être capable de contribuer, puis sans... avec la plus
grande marque de respect. Là, je vous entends depuis tantôt. J'aimerais à ce
qu'on puisse être capables de contribuer pour partager... les réflexions de nos
travailleuses puis de nos travailleurs avec le plus grand des respects, M. le
ministre.
M. Boulet : Tout à fait.
M. Trépanier (Michel) : Mme
la Présidente, désolé.
M. Boulet : Bien, soyez...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...interventions?
M. Boulet : ...soyez
rassurés.
La Présidente (Mme D'Amours) : M.
le ministre.
M. Boulet : On a toute une
équipe qui prend connaissance de votre mémoire, qui est étudié avec attention,
avec considération. Je fais des observations sur vos propos, et c'est important
pour moi de dire qu'il y a 300 millions de dollars qui ont été
investis dans la formation accélérée et il y a des montants qui ont été confirmés
hier dans le budget de mon collègue aux Finances. Le travail se poursuit. Vous
en faites partie avec la Commission de la construction du Québec, le ministère
de l'Éducation, le ministère de l'Emploi pour mettre en place des programmes de
formation en alternance travail-études. Il y a un comité de formation
professionnelle qui relève de la Commission de la construction du Québec. Donc,
la loi ne vise pas à déplacer le paritarisme qui s'exerce aussi au sein de la
Commission de la construction du Québec. Et l'aspect formation évolue depuis
des années, et ça va se poursuivre. Et je sais que vous avez eu des discussions
encore au comité de formation professionnelle, ce que vous appelez la CFPIQ, et
ça va...
M. Boulet : ...se poursuivre.
J'aimerais vous entendre, M. Trépanier.
Vous dites qu'il y aurait une pratique où un donneur d'ouvrage ou un
entrepreneur donnerait à un employeur des consignes visant l'entrave à des
activités syndicales sous peine de sanctions économiques. J'aimerais juste savoir
spécifiquement ce à quoi vous référez, parce que ça m'apparaît un phénomène qui
requiert notre attention particulière. Je ne sais pas, Patrick ou Michel.
M. Bérubé (Patrick) : Bonjour,
M. le ministre. Bonjour, Mme, M. les députés. Rapidement, l'entrave, c'est la
suivante. C'est un cas réel, soit dit en passant, là. C'est-à-dire qu'on a des
représentants en chantier qui font leur job de représentants, comme c'est prévu
en vertu de la loi. Donc, quand ils se présentent en chantier, évidemment, il
peut arriver des fois qu'il arrive des situations quelconques, là, peu importe,
là, ce n'est pas des situations qui sont de gravité... mais il y a des fois
aussi des donneurs d'ouvrage, qui sont en somme les généraux, qui vont faire de
l'intervention. À proprement dit, je vous coupe ça court, là : Aïe! Lui,
ce représentant-là, je ne veux pas le voir sur mon chantier, tu vas lui
demander de quitter aujourd'hui, ça ne me tente pas de le voir, ou peu importe
la notion ou la raison pour laquelle il demanderait. À partir de là, il faut
comprendre que c'est une matière qui est grieffable, hein, les activités
syndicales. Donc, la seule personne qu'on peut rejoindre, c'est l'employeur sur
lequel l'employeur s'est fait commander de sortir en occurrence le
représentant. Puis, je réitère, c'est un cas réel, ce que je suis après de
relater. Et là, à ce moment-là, on doit grieffer l'employeur, qui, dans les
faits, va faire quoi? Va appeler en garantie le donneur d'ouvrage qui a passé
l'exécution de dire : Je ne veux plus le voir sur mon chantier. Nous, ce
qu'on dit, c'est que quelqu'un qui contrevient à la loi en matière d'activités
syndicales, si c'est un... c'est un entrepreneur, c'est une chose, mais, quand
on l'envoie en matière pénale, bien, que quelqu'un qui intervient dans... en
cette matière soit aussi visé autant que les autres s'il contrevient aux
entraves des activités syndicales.
M. Boulet : Donc, c'est un
cas vécu. Donc, le donneur d'ouvrage a transmis une instruction à
l'entrepreneur de nuire à l'exercice d'activités syndicales par ailleurs
prévues soit dans le Code du travail ou dans une loi ou la loi R-20.
M. Bérubé (Patrick) : Exactement.
Et, quand on veut, nous autres, à ce moment-là, faire une intervention, bien,
visiblement c'est l'employeur qui a reçu la commande qu'on doit viser.
M. Boulet : O.K. Et, M.
Bérubé, j'aimerais savoir est-ce que c'est un cas ou c'est un phénomène qui
devient...
M. Bérubé (Patrick) : Non,
c'est arrivé quelques fois, là, pour être honnête, là. Je vous nomme un cas
parce qu'il est ponctuel, mais c'est arrivé à plusieurs reprises, M. le... M.
le ministre.
M. Boulet : O.K. Évidemment,
je suis totalement en désaccord avec ce... puis ça requiert une procédure puis
ça requiert une sanction, éventuellement.
J'aimerais ça... Il y a deux autres sujets
sur lesquels j'aimerais ça vous entendre, M. Trépanier. Le comité paritaire de
relations de travail, je sais que c'est un enjeu parce que la volonté, c'était
de mettre en place, comme il y a dans beaucoup d'organisations privées,
publiques, parapubliques, un comité qui discute de tout ce qui concerne
l'interprétation ou l'application des conventions, parce que vous référez aux
griefs. Évidemment, ce n'est pas le mandat de ce comité-là de s'intéresser à la
formation professionnelle parce que ça, ça relève du CFP. Ce n'est pas son
mandat de s'intéresser aux avantages sociaux parce que ça, ça relève du comité
des avantages sociaux, ce que vous appelez le CASIC, ni de ce qui relève de la
juridiction du conseil d'administration. Mais justement pour prévenir des
griefs ou embarquer dans un processus de recherche de solutions, ça nous
apparaissait être un véhicule opportun et pertinent. Qu'est-ce que, brièvement,
vous en pensez, d'une structure comme celle-là?
M. Trépanier (Michel) : Merci
pour la question, M. le ministre. Premièrement, cette idée-là, elle vient du
conseil provincial, le comité des relations de travail. L'intention à l'arrière
du «relations de travail», là... On ne parle pas de conditions, je vais
demander à M. Bérubé d'en parler. «Relations de travail», c'est d'avoir des
discussions d'industrie, parce que, malheureusement, les gens d'industrie n'ont
pas de discussion d'industrie. Ça fait que l'esprit, là, à la base du comité de
relations de travail, c'est que, de façon paritaire, tous les organismes qui
sont liés à la construction, associations patronales, syndicales, discutent des
grands enjeux, dont la planification, dont des enjeux d'industrie, et aussi un
élément supplémentaire pour venir alimenter le conseil d'administration. Je
suis membre du conseil d'administration. La perception : ce n'est pas un
comité...
M. Trépanier (Michel) : ...paritaire.
Avec le plus grand respect que j'ai pour les indépendants, quand on prend une
décision au sein du conseil d'administration, il faut faire ça de surface, puis
l'idée venait qu'un comité paritaire puisse alimenter le conseil
d'administration pour la réflexion lors d'une prise de position. La condition
de travail, ça n'a jamais été notre intention. Je vais laisser Patrick pour
répondre à votre question, M. le ministre. Mais l'intention, c'est d'avoir des
discussions. Puis pourquoi qu'on se priverait d'avoir des discussions, les
grandes organisations patronales, syndicales, sur les enjeux de l'industrie?
• (12 h 30) •
M. Boulet : Je comprends très
bien. C'est un excellent commentaire, M. Trépanier.
M. Bérubé (Patrick) : En
fait, effectivement, la notion des relations de travail, on pense que c'est
important. D'ailleurs, dans votre projet de loi, vous faites mention que les
consultations envers la commission sont importantes. Effectivement, la
commission possède beaucoup de données, possède aussi un «picture» de
l'industrie en temps réel. Donc, qu'elles soient évidemment consultées... On
pense que, comme Michel vient de dire, c'est que, via un comité paritaire où il
y a une expertise qui s'en va vers l'administration, parce qu'on sait que la
commission a la plume, minimalement, au moins sur la réglementation, donc on ne
se prive pas de cette expertise-là.
Ceci étant, même si ça sonne pareil, les
relations et les conditions, ce sont quand même deux choses complètement
distinctes, M. le ministre. D'abord, l'une... Vous savez qu'on a une
recommandation qui veut... qui se veut... qu'on aimerait rapatrier les
conventions collectives chez le syndicat. C'est l'ADN même d'un syndicat, c'est
sa matière première. Le syndicat, lui, négocie les conventions collectives et,
qui plus est, les applique aussi... comme ça dans chacune des sphères
d'activité. Il n'y a que dans la construction où on se retrouve avec un tiers.
En toute honnêteté, M. le ministre, je pense que la commission a amplement de
travail à faire en matière de lois et en matière de règlements que de s'occuper
des conventions collectives relèverait des syndicats, à mon avis. Ceci étant
dit, donc, conditions versus relations, donc, les conditions, laissons ça aux
parties, à proprement dit, et les enjeux d'industrie, réglementations ou toutes
sortes de lois ou d'enlignements, même gouvernementaux soient-ils, devraient
être au comité des relations de travail.
M. Boulet : Très bien
compris. M. Trépanier, j'aimerais... Parce que c'est vrai que le temps est
limité. On nous parle beaucoup d'assujettissement de la machinerie de
production, j'aimerais ça que vous expliquiez en quoi ça consisterait. Et
quelle est la position du conseil provincial sur ce sujet-là?
M. Trépanier (Michel) : La
question, c'est de savoir si...
M. Boulet : On doit
assujettir la machinerie de production, les équipements, qui sont...
M. Trépanier (Michel) : Patrick,
tu veux-tu en parler?
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
écoutez, M. le ministre, la machinerie de production est définie dans le
règlement R-1, dans le...
M. Boulet : Tout à fait.
M. Bérubé (Patrick) : ...champ
d'application, elle est au sens très large. Je pense que, même si on voudrait,
dans l'ensemble... Parce qu'on qualifie les travaux comme étant assujettis, on
en conviendra, en vertu de 1, f. Donc, si vous nous dites qu'aujourd'hui vous
êtes favorable à assujettir de la machinerie de production, je dirais :
C'est sûr que le Conseil provincial ne s'opposera jamais. Ceci étant, même si
on le voudrait, là... puis là, je ne sais pas, visiblement, de quoi on fait
référence avec exactitude, mais, si on voudrait l'ensemble des travaux en
périphérie de l'industrie, je pense qu'on y arriverait difficilement. Donc...
M. Boulet : Je suis d'accord.
M. Bérubé (Patrick) : ...je
vais essayer de vous suivre là-dessus. Mais, je vous dis, on va toujours être
d'accord avec l'assujettissement, mais je pense qu'il va toujours y avoir des
travaux qui ne le seront pas.
M. Boulet : Ce n'est pas dans
le...
La Présidente (Mme D'Amours) : 30
secondes, M. le ministre.
M. Boulet : Merci beaucoup,
Michel, Patrick, merci à votre équipe, puis c'est un mémoire de très grande
qualité. J'apprécie votre présence ainsi que votre contribution, et au plaisir
de vous revoir bientôt. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Avant de continuer, j'aimerais vous dire, M. Trépanier, que mon rôle comme
présidente n'est pas de demander au ministre de poser des questions, mon rôle -
et, probablement, c'est son choix qu'il ait des grands commentaires et quelques
questions, ça lui appartient - mon rôle, c'est seulement de surveiller s'il est
sur le sujet et qu'on comble le temps. Et je voulais vous dire aussi que le
mémoire n'est pas lu nécessairement que sur le côté gouvernemental, vous avez
aussi les partis d'opposition qui font un excellent travail de démocratie et
que votre mémoire va être lu, reconnu et à... étudié avec attention. Je voulais
simplement mettre une mise au point là-dessus.
Maintenant, nous allons continuer avec Mme
la députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Merci, M. Trépanier, merci à toute l'équipe pour votre plaidoyer.
Ma première question, donc, porte sur un élément que vous avez mentionné en
introduction : que 67 %...
12 h 30 (version non révisée)
Mme Cadet : ...de la main-d'œuvre
dans le secteur de la construction en 2014, donc, arrivaient diplômés. Aujourd'hui,
10 ans plus tard, c'est 22 %. C'est un énorme enjeu. Je pense que,
là-dessus, on partage des opinions similaires, donc, d'avoir, donc, une main-d'œuvre,
donc, qui se soit autant, donc, déqualifiée, donc, à l'intérieur d'une décennie
et qui... manifestement, donc, le concept de bassin qui a été créé, donc, qui
est légitime et qui... pour combler des enjeux ponctuels de main-d'œuvre règle
maintenant, donc, des enjeux systémiques de manque de main-d'œuvre.
Bien, question... la première question,
toute simple, donc, qu'est-ce qui s'est passé en 10 ans? Pourquoi on a un tel
taux de personnes qui arrivent dans le secteur d'activité avec peu de
diplomation?
M. Trépanier (Michel) : Merci
pour la question. En 2014, le réseau scolaire, de l'éducation, en formation
professionnelle, son premier objectif, c'était de répondre aux besoins de l'industrie.
Maintenant, le premier objectif, malheureusement, des centres de services
scolaires, c'est pour rencontrer des balises de rentabilité. Il faut arrêter de
voir l'éducation comme une dépense, il faut voir l'éducation comme un
investissement. Ça fait que, je crois, directement, c'est des orientations
gouvernementales d'intention. C'est pour ça, on sensibilise le monde qu'on doit
réorienter nos priorités. La priorité du gouvernement actuel, c'est supposé d'être
l'éducation. L'éducation, ça ne passe pas par des AEP, des formations
accélérées qui visent juste cinq métiers, on est 25 métiers, dans l'industrie
de la construction, 31 occupations, dont certaines occupations spécialisées. Il
faut adresser, à la base, un message fort, un message clair pour rectifier la
situation. On ne peut pas parler de productivité si on ne parle pas de
formation à la base. Ça fait que, pour répondre à votre question, Mme la
députée, je crois vraiment que c'est la distinction entre la rentabilité,
maintenant, qui est le premier objectif des centres scolaires, contrairement à
avant, à répondre à des besoins de l'industrie.
Mme Cadet : Vous venez de le
mentionner, donc, une partie de la rétention... Parce qu'un des aspects qui est
bien important, donc, c'est d'avoir, donc, une main-d'œuvre qui demeure dans l'industrie.
Donc, ça passe par la formation, la qualification. Vous l'avez dit puis vous m'avez
entendue, donc, émettre, donc, mes commentaires, mes réserves, donc, sur les
AEP de courte durée. Alors, si ça ne passe pas par les AEP, donc, en fait...
Comment, bien, en fait... parce que ce ne sera pas dans le... ce n'est pas dans
le projet loi, donc, actuel, donc, les questions de formation, qu'est-ce qu'il
faudrait que nous, on mette en œuvre, comme législateurs, pour nous assurer
de... en fait, donc, de mieux qualifier la main-d'œuvre qui arrive, en fait?
M. Trépanier (Michel) : Je
vais essayer de le simplifier. Deux voies d'accès, dans l'industrie : par
diplomation ou ouverture de bassin. On est parti de 77 % de diplomation,
là, on est rendus à 22 %. Ici, il faut reprioriser la diplomation par l'entremise
des ATE, c'est une alternative, des DEP, il faut diversifier l'offre pour s'assurer
qu'elle atteigne la demande des nouvelles générations. Ça, c'est un.
L'autre chose qu'on doit faire, c'est
rajouter des joueurs supplémentaires en formation. C'est une de nos
recommandations, qu'on puisse contribuer à l'essor, de favoriser la compétence
de nos travailleurs. Deux, c'est d'envoyer un signal puis de financer les
systèmes scolaires. On est capable de doubler le nombre de DEP, présentement,
je suis convaincu que, notre réseau, on serait capable de répondre à 8000
travailleurs annuellement sur nos besoins de 12 000 à 15000. Il y a un chemin
qu'on est obligé d'adresser, c'est les ouvertures de bassin. Qu'on le veuille
ou pas, c'est une mesure alternative. Présentement, c'est la mesure primaire.
Comment qu'on peut résorber la situation? Augmenter leur formation pour
augmenter leur employabilité. Présentement, je vous invite, demain matin, vous
voulez rentrer dans la construction, vous avez la possibilité, chacun d'entre
vous, la seule chose vous avez de besoin, c'est une garantie de 150 heures.
Vous allez commencer une carrière. La job de l'industrie, pour atteindre notre
objectif de compétence puis de formation, c'est de mieux accompagner ces
travailleurs-là puis ces travailleuses-là pour augmenter leur employabilité par
la formation. Ça fait qu'élever... ça fait partie de nos recommandations élever
le standard pour l'article 7, pour mieux accompagner, pour s'assurer que, quand
un travailleur ou une travailleuse entre dans notre industrie, on en prend
soin, on augmente son employabilité. Puis, directement, si nos travailleurs,
travailleuses travaillent plus, ça va avoir un lien direct sur la rétention, ça
fait qu'on va avoir de quoi de structurant.
Ça fait qu'il y a plusieurs éléments, mais
on va en faire part, puis soyez rassurée, du côté des articles par article,
malgré ce que le ministre dit, que ce n'était pas cette loi-là qui a un
impact...
M. Trépanier (Michel) : ...à
un moment donné, il faut que quelqu'un en prenne charge, puis là, c'est notre
industrie. Parce qu'à chaque fois que j'ai demandé au ministère de l'Éducation
une rencontre, le ministre Drainville, je n'ai jamais eu de rencontre. Ça fait
que moi, j'ai besoin de savoir, du côté de l'éducation, l'AFP, la formation
professionnelle, à qui que je parle, à ce gouvernement-là. Puis je sers de
l'opportunité ici, qu'on va contribuer dans l'objectif, quoi? D'augmenter la
formation professionnelle puis la compétence de nos travailleurs.
• (12 h 40) •
Mme Cadet : Vous dites, dans
l'étude que vous avez publié hier : «Il faut effectivement plus de
main-d'œuvre au Québec pour produire le même niveau de PIB en construction, ce
qui témoigne d'un sous investissement chronique en capital, en technologie de
manière générale, en recherche et développement.» Donc, au-delà de la
formation, je comprends que la formation, donc, pour vous, donc, c'est un
vecteur de productivité, mais pour atteindre, donc, cette productivité là,
donc, il y a d'autres aspects. J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Trépanier (Michel) : Bien,
je vous en donne plusieurs. Première chose, politisation des dossiers. Quand un
gouvernement... je ne vise pas un gouvernement précis, là, on s'immisce dans un
projet puis qu'on dit que ça va se faire en trois ans, puis que tout le monde
dans l'industrie sait que ça va se faire dans cinq ans, avec le double des
montants, ça fait une pression. L'autre chose, la planification des travaux.
Une meilleure planification, un étalement des projets, ça a un impact direct.
La gestion des projets, la gestion des projets est extrêmement importante.
L'octroi des contrats, le principe du plus bas soumissionnaire a un impact sur
la productivité, qu'il y ait un roulement des entreprises. La capacité des
entreprises, puis je ne veux pas faire de la démagogie, là, je veux être clair,
85 % des entrepreneurs, c'est cinq salariés et moins. La grande majorité
de ces entreprises-là, ça vient des travailleurs qui ont décidé d'avoir une
fibre d'entrepreneur puis de commencer une carrière. On a besoin de mieux les
outiller pour mieux les former, pour les rendre plus productifs dans leur
capacité de gestion. L'innovation, les nouvelles technologies, l'intégration,
dans notre rapport, on a émis un rapport hier, on a un retard de productivité
sur l'innovation par rapport aux autres provinces. Puis, quand on parle de
main-d'œuvre, Mme la députée, le premier indicateur qu'on se base, c'est la
formation ou la non-formation dans une entreprise. Ce n'est pas de savoir si le
monde sont plus polyvalents puis font des tâches autres, le premier indicateur
qui vient servir pour évaluer la productivité sur l'élément de la main-d'œuvre,
c'est la formation.
Mme Cadet : Mais... mais dans
votre mémoire, vous parlez aussi... puis dans votre étude, vous parlez de la
sous-utilisation des travailleurs, puis vous l'avez dit un peu plus tôt, donc
les faire travailler plus. Comment... bien, en fait, quel... au-delà, donc, de
former, comment est-ce qu'on les fait travailler plus, travailler plus
d'heures, là? On a eu, donc, le débat sur le nombre d'heures travaillées en
moyenne. Donc, quand on exclut ceux qui travaillent moins de 500 heures,
comment est-ce qu'on les fait travailler plus...
M. Trépanier (Michel) : Bien,
à la base, c'est de... à la place de rentrer tout le temps du monde dans notre
industrie aussitôt qu'on a un petit besoin, là, ponctuel dans le temps, notre
première habitude, c'est de ne pas regarder ce qu'il y a présentement de disponible.
Puis le principe des ouvertures de... je vais demander à Patrick de
l'expliquer, mais on ouvre les valves à la place de prendre soin des compagnons
puis des compagnonnes qui sont déjà présents en chantier.
Mme Cadet : Mais, si on les
fait travailler plus, avec... parce que je lisais votre étude, hier, puis je me
disais, bon... vous suggérez, donc, certaines, donc, augmentations qui nous
permettraient, donc, peut-être, donc, d'éliminer, donc, 2000, donc,
travailleurs dans les besoins de main-d'oeuvre, mais, selon les derniers
chiffres, on a quand même, donc, un déficit de 12 000 travailleurs. Donc, quand
on les fait travailler plus, en moyenne, selon vous, est-ce qu'on vient combler
le déficit de main-d'oeuvre qui existe dans le secteur?
M. Trépanier (Michel) : Bien,
le 12 000, il n'est pas nouveau. Le 12 000, il n'est pas nouveau. Normalement,
annuellement, là, du côté de la commission, nos besoins, c'était environ
10 000. Ici, là, ce qu'on dit, la première chose qu'on devrait viser, c'est de
mieux utiliser ceux qui sont déjà présents avant d'ouvrir les vannes pour les
nouveaux.
L'autre chose, l'étalement puis la
planification des travaux, ça a été souvent mentionné puis je pense que c'est
un des mandats qui pourraient être attribués au comité des relations de travail
pour s'assurer une meilleure prévisibilité pour une meilleure répartition des
travaux, pour s'assurer que la main-d'œuvre actuelle, elle soit optimisée à
l'année longue. Ça, je pense que c'est une alternative.
Mme Cadet : Puis pourquoi
la... selon vous, la polyvalence, ça ne leur permettrait pas de travailler plus
puis que la main-d'oeuvre, donc, soit plus utilisée, là, moins sous-utilisée?
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
écoutez, je pense qu'à un moment donné ça prend une certaine ligne aussi pour
garder la compétence puis la diriger. Moi, j'entends, depuis hier, la notion de
polyvalence, puis, pour être transparent avec vous, Mme la députée, j'essaie de
la comprendre. Quand je la lis, ici, on dit : «Cet ajout porte grandement
à confusion», ça c'est dans notre mémoire, je m'excuse à la page 16, on dit
«prévoit tantôt des tâches comprises dans un métier, tantôt des tâches du
métier, des tâches en lien direct avec l'exercice du métier». Je tiens juste à
vous préciser que c'est dur à suivre. Moi, quand on me dit : Écoutez, on
va dans un principe de polyvalence, puis ça, on pense que ça va augmenter
l'employabilité. J'ai de la misère à le cerner, c'est quoi que ça veut dire, en
ce moment, la polyvalence. Si on me dit que la polyvalence, c'est une zone
grise entre deux métiers, puis qu'on n'est pas tout à fait sûr encore, bien,
qu'on identifie la tâche puis qu'on le mette en annexe au niveau d'une
réglementation, je n'ai aucun problème avec ça. Alors là, je serais capable de vous
dire : Je suis d'accord avec...
M. Bérubé (Patrick) : ...une
polyvalence parce qu'à la base il y aura une qualification ou une compétence
qui accompagnera le tout. Maintenant, là où je suis craintif, c'est que, de
façon arbitraire puis de façon ponctuelle, en chantier, c'est un... c'est un
employeur qui va dire : Écoute, voici la séquence, là, puis je pense
qu'entre les deux, là, ce que tu vas être capable de faire, fais-le, puis on
verra après ce que ça donne. On ne sera pas plus avancé si on commence à faire
des travaux puis qu'on n'est pas sûr de la qualification, puis qu'on revient,
puis qu'on soit obligé de les reprendre. Puis là on ne parlera pas de
productivité ici, on est d'accord.
Donc, moi, je fais juste vous dire que
j'ai de la misère à la qualifier, j'ai de la misère à la quantifier, j'ai de la
misère à voir avec... de façon concise, quand on me parle d'une polyvalence.
Est-ce que les travailleurs sont à ce point rigides? Ce n'est pas ça. Ils sont
compétents. Mais je vous fais référence à un menuisier qui a trois pages recto
verso au niveau de sa compétence de métier, et il est compétent dans son
métier, je voudrais juste vous dire que c'est déjà toute une commande, pour
cette personne-là ou ce travailleur ou cette travailleuse-là, de remplir la
norme de son propre métier. Alors, je suis un peu perplexe, pour être honnête.
Mme Cadet : ...définiriez
le... donc, selon vous, aussi, là, comme le groupe précédent, donc, la notion
est insuffisamment définie, donc il faut... Donc, vous, donc, avoir, donc, une
liste de tâches en annexe, donc, la mise en commun des familles de métiers,
vous en pensez quoi?
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
moi, pour la notion des familles de métiers, honnêtement, je ne me suis pas
penché sur cette notion-là, je sais que ça avait déjà été amené. Mais je peux
juste vous dire quelque chose par rapport à tout ce que vous me dites, Mme la
députée. On nous a demandés... Parce qu'on nous a dit : Ah! on vous a
consultés, ça n'a rien donné au bout. J'entendais le ministre tout à l'heure
nous dire ça. On a eu 3 heures de consultation pour régler ce qui ne s'est
pas réglé en 20 ans, puis on nous dit : Bien, écoutez, il
commencerait à être temps que vous vous modernisiez. Je pense que la...
Mme Cadet : ...parce que je
sais que je n'ai plus beaucoup de temps, là, rapidement vous entendre, donc,
sur la question du fonds. Vous avez entendu la FTQ hier, donc, dire oui, la
rétroactivité, mais le fond, que c'était trop complexe puis ingérable. Donc,
vous en pensez quoi?
M. Trépanier (Michel) : Bien,
à la base, le fond, nous autres, ce qu'on...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...désolée,
cinq secondes.
M. Trépanier (Michel) : Ah!
O.K. Bien, nous, c'est le principe, c'est la permission de pouvoir signer la...
de s'entendre sur la rétroactivité.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
M. Trépanier (Michel) : Tout
le mécanisme, c'est entre les parties que ça devrait rester.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je suis désolée. Je cède maintenant la parole au député
d'Hochelaga-Maisonneuve pour une durée de quatre minutes huit secondes.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous quatre. Merci pour votre belle contribution aussi.
Restons sur le dossier du régime du travail. Pourquoi, selon vous, dans le
projet de loi, on ne vous permet toujours pas, la partie syndicale, de négocier
des griefs sur le salaire, on ne vous permet toujours pas d'être couverts par
une loi... et on ne vous permet toujours pas d'avoir une rétroactivité
salariale, comme à peu près tous les autres syndicats du Québec?
M. Bérubé (Patrick) : Merci,
M. le député. Écoutez, honnêtement, je vais y aller par spéculation. Je crois
qu'il y a des associations d'entrepreneurs qui ne le souhaitent vraiment pas.
Soyons honnêtes. Et c'est toujours la notion démagogique ou la notion du mythe
et de la réalité quand on dit : Ah non, là, vous allez voir, on va
contingenter le système d'arbitrage puis on n'y arrivera pas, il va y avoir un
paquet de plaintes. Je ne vois pas en quoi, si on respecte les conventions, il
y a un grief qui se dépose. Soit dit en passant, ça, c'est la première chose en
amont que je vais... que j'aimerais amener.
M. Leduc : S'il y a un paquet
de plaintes, c'est peut-être parce qu'il y a un paquet de problèmes.
M. Bérubé (Patrick) : Et
voilà. On s'entend là-dessus. Donc, il y a minimalement au moins cette
observation-là, vous en serez d'accord avec moi. Deuxièmement, s'il y a des
plaintes, c'est qu'ils militent en faveur d'être déposées, mais on est au civil
en ce moment. Moi, j'ai des histoires d'horreur qu'il y a des gens qui
attendent un dédommagement ou une indemnité, de quelque nature que ce soit, en
fonction de ce qui a été négocié par les parties, soit la partie syndicale, patronale,
et ça a pris cinq ans avant de recouvrer les sommes. Alors, est-ce qu'on va me
dire que, de ce côté-là, on est efficaces? Je pense qu'en matière civile, M. le
député, en matière... En matière civile, je pense qu'ils en ont déjà plein
leurs bras. On est d'accord avec le nouveau Code civil, les protocoles, tout ce
qui vient avec. Et la commission aussi en a plein ses bras. Je pense que, en
tout respect, elle devrait se concentrer sur le travail au noir, sur
l'inspection, la qualification. Elle a une multitude de mandats. Le
rapatriement des griefs, c'est pour ça qu'on demande de pouvoir le faire.
D'ailleurs, ça se fait partout ailleurs. On n'est pas pire qu'ailleurs. Puis je
ne veux surtout pas, M. le député, me rendre demain à aller rencontrer les travailleurs
puis les travailleuses de l'industrie puis de leur dire : Vous savez, dans
l'industrie de la construction, je suis obligé de vous dire que vous avez moins
de droits que dans les autres.
M. Leduc : Ce qui est le cas
actuellement, malheureusement.
M. Bérubé (Patrick) : Tout à
fait.
M. Leduc : Le ministre plaide
beaucoup que son projet de loi va faire en sorte qu'on va être capable de
construire plus de logements, de maisons et d'autres chantiers. Pouvez-vous
pointer, selon vous, l'article du projet de loi ou les articles du projet de
loi qui vont faire en sorte que, l'année prochaine, il aura plus de maisons
construites que...
M. Leduc : ...dans l'état
actuel des choses?
M. Trépanier (Michel) : Je
n'en vois pas, mais je peux vous pointer les articles de nos recommandations
qui pourraient aider dans ce sens-là.
M. Leduc : Allez-y donc.
• (12 h 50) •
M. Trépanier (Michel) : Bien,
la formation professionnelle, je reviens. Qui qui va pouvoir me répondre qu'il
s'occupe de la formation professionnelle dans notre industrie? Un jour, c'est
la loi R-20. L'autre jour, c'est le ministère de l'Éducation. L'autre jour,
c'est le ministère de l'Emploi. Je pense qu'on doit saisir l'opportunité qu'on
a aujourd'hui de moderniser notre industrie, de faire mieux. Ça fait que
j'espère que je vais avoir cette réponse-là. Mais par la formation, la
formation syndicale aussi, de mieux accompagner nos travailleurs pour les
rendre plus polyvalents dans leur métier. On a certaines sections locales qui
le donnent déjà, de la formation d'appoint, en amont. Puis, je pense, M. le
ministre, vous avez visité un de nos centres, le local 144, à la fine pointe de
la technologie. Présentement, c'est à même leurs cotisations qu'ils donnent de
la formation. On ne peut pas utiliser le fonds de formation. Ça fait que des
alternatives comme ça, des propositions de mieux planifier les travaux, si vous
vérifiez nos recommandations, ça va avoir un impact direct, direct sur notre
capacité de mieux construire.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Leduc : Vous parlez de
l'alternance travail-études. Peut-être quelques secondes là-dessus.
M. Trépanier (Michel) : Oui,
bien, rapidement, il faut trouver des moyens pour être plus attractifs avec la
nouvelle clientèle. La nouvelle clientèle, elle veut être moins longtemps à
l'école, mais il faut trouver tous les moyens possibles pour l'amener à
l'école. L'ATE, on est favorables avec ça. C'est une alternative au D.E.P.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup.
M. Leduc : Merci.
M. Trépanier (Michel) : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : M.
Nantel, M. Trépanier, M. Bérubé et Me Dumais, merci pour votre contribution à
nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
15 h. Merci, tout le monde.
(Suspension de la séance à 12 h 51)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 00)
La Présidente (Mme D'Amours) : Bonjour,
tout le monde. Nous reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la
bienvenue à la Confédération des syndicats nationaux et à la CSN-Construction.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis
nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite donc à vous présenter et à nous donner votre exposé, s'il vous
plaît.
M. Enault (François) : Merci,
Mme la Présidente. Donc, François Énault, premier vice-président de la CSN. Je
suis accompagné à ma droite de Pierre Brassard, président de la
CSN-Construction. À sa droite, Étienne Poitras, qui est un des deux
coordonnateurs de la CSN-Construction et à ma gauche, Maxime Cauchy-Charest,
qui est de notre service juridique à la CSN. Donc, écoutez, dans un premier
temps, bien, je tiens à vous remercier, là, l'ensemble des parlementaires, pour
votre invitation à participer aux travaux de la commission. Écoutez, la CSN, on
représente 330 000 membres dans tous les secteurs d'activité au
Québec, la CSN-Construction, on parle d'environ 15 000 travailleuses
et travailleurs partout au Québec et on est une des cinq organisations
représentatives, là, de la construction. Donc, nous sommes heureux de
participer à cet événement et de contribuer à dépoussiérer la loi des relations
de travail, la formation professionnelle, la gestion de la main-d'œuvre et de
la construction et ce avec... et ses règlements afférents. C'est la dernière
fois que je le prononce durant mon exposé, donc, R-20.
Donc, ceci n'ayant pas fait l'objet d'une
réforme depuis 30 ans, nous saluons la volonté du gouvernement de
moderniser l'encadrement législatif dans l'industrie de la construction, le
tout en conformité avec l'évolution du droit du travail. Les recommandations
faites à notre mémoire s'inscrivent dans les trois principes qui guident le
projet de loi, à savoir la productivité, l'accès et l'inclusion et la
collaboration. À ce titre, nous souhaitons débuter en soulignant les bons coups
du projet de loi. La CSN accueille favorablement les mesures favorisant l'inclusion
et la rétention des femmes et des personnes représentatives de la diversité de
la société québécoise. De plus, également, la possibilité de négocier la
rétroactivité salariale, dont je comprends qu'il y a quand même certains
éléments à regarder, là, mais on salue, là, l'idée de rendre ça disponible.
Donc, également de la bonification au carnet de référence qui permet de mettre
en contact les employeurs et les associations titulaires de permis s'avère un
outil favorisant la transparence et la capacité d'embauche. La création d'un
comité de relations de travail dans l'industrie nous apparaît une bonne idée
pour aider à améliorer les relations de travail dans le secteur de la
construction. Du moins, ça ne peut pas être pire. Mais il ne faut pas penser
que c'est une solution magique qui va tout régler. La CSN appuie toutes les
démarches qui auront pour effet de mieux encadrer le processus de négociation
afin de permettre une meilleure communication et une plus grande efficacité
entre les acteurs impliqués. Le législateur devrait s'inspirer du Code du
travail et ramener le régime de négociation de la construction sur les
paramètres du code.
Portés par ces principes, voici
quelques-uns de nos... quelques-unes de nos recommandations. Nous sommes d'accord
d'ajouter un recours visant l'obligation de négocier avec diligence et bonne
foi. La modification proposée visant l'obligation des parties de transmettre
par écrit aux autres parties leurs demandes, offres et propositions sur l'ensemble
des matières devrait se réaliser en deux étapes afin de leur permettre de
prendre connaissance des demandes respectives pour ensuite être en mesure de
communiquer des offres et des propositions appropriées.
Il faut s'inspirer de ce qui existe déjà
dans le Code du travail et profiter de la réforme pour rapprocher le régime de
négociation de la construction à ce qui se fait en vertu du code. L'obtention
du droit de grève ne devrait pas être assujettie à une médiation, quelle qu'en
soit la durée. On croit à la médiation, d'ailleurs, M. le ministre, vous savez
que je suis peux-être un des plus grands utilisateurs dans cette salle de la
médiation, mais elle ne doit pas être un frein à l'exercice, à l'utilisation du
rapport de force.
Toujours dans la même logique, en rouvrant
R-20, l'occasion devrait être saisie pour intégrer des dispositions
antibriseurs de grève. En 1977, le Québec a joué un rôle de précurseur en
adoptant des dispositions limitant l'utilisation de travailleurs de
remplacement en temps de grève légale. Dans le cadre de la modernisation du
code canadien, le gouvernement du Canada souhaite adopter des dispositions à
cet effet. Et même M. Poilievre pense que c'est le gros bon sens. Donc,
permettre et cautionner l'utilisation des travailleurs de remplacement en temps
de grève légale ont un effet dévastateur sur la bonne conduite des
négociations, sur la paix industrielle et sur le respect des principes...
15 h (version non révisée)
M. Enault (François) : ...principes
directeurs de votre projet de loi.
Sur la mobilité des salariés de la
construction, ce sujet de négociation implique un nombre important de
considérations complexes, incluant la croissance de l'économie régionale, les
besoins d'une plus grande productivité, ainsi que le respect de la qualité de
vie, des conditions des travailleuses et des travailleurs de l'industrie de la
construction au Québec, et dans ce contexte particulier, l'intervention du
législateur visant à invalider les clauses de conventions collectives portant
sur la mobilité de la main-d'œuvre est une mesure disproportionnée qui a pour
effet concret de déséquilibrer le rapport de force entre les parties de
négocier librement leurs conditions de travail. Une approche moins intrusive et
plus ciblée du législateur pourrait viser à créer un comité paritaire afin que
ce dernier procède à l'analyse du recoupage plus ciblé des 12 régions
contenues dans le règlement. Le projet... le projet de loi tente de trouver des
solutions faciles qui régleraient l'ensemble des problématiques des secteurs de
la construction ayant des enjeux et des réalités bien différentes. On ne peut
pas imposer les mêmes remèdes aux secteurs du génie civil, de l'industriel, de
l'institutionnel et commercial et finalement du résidentiel. Le «one size fits
all» ne fonctionnera pas. La CSN vous demande à ne pas limiter les matières
négociables entre les associations respectives et les associations représentant
les employeurs afin que celles-ci puissent bénéficier de toute la latitude et
la flexibilité pour négocier leurs conditions de travail. Je vais passer la
parole au président de la CSN-Construction.
M. Brassard (Pierre) : Merci...
François. Merci, députés, M. le ministre. Bien, vous savez, on a eu plusieurs,
plusieurs journées de consultation avec vous dans l'année dernière, et puis on
a regardé aussi... tu sais, le projet de loi était supposé de s'attaquer sur l'attraction,
la polyvalence, la rétention, mais on a omis quelque chose en passant, c'est la
reconnaissance. Il y a des travailleurs qui sont déjà à pied d'oeuvre sur les
chantiers de construction, des travailleuses, et on constate qu'il y a... nous,
on a une inquiétude au sujet de la rétention de la main-d'œuvre et de la
productivité à cause de la reconnaissance, puis je vais m'expliquer un peu plus
loin. Puis on constate aussi qu'il y a des problèmes au niveau du rappel, et on
rappelle que les gens sans DEP, ils restent moins de cinq ans dans l'industrie
de la construction. Donc, on déplore que des solutions visant la productivité,
la rétention ne règlent pas les problèmes de fond.
Les mots qui ne sont pas attaqués par le
projet de loi : les conditions de travail qui sont problématiques. Tu
sais, on a entendu, là... j'ai entendu d'autres camarades, là, les horaires de
travail qui sont exécrables, l'absence de règles favorisant la conciliation
famille-travail, l'absence d'un règlement d'antibriseurs de grève, le manque de
planification des entreprises, un grand nombre de sous-traitants. L'exemple, de
la porte pas installée, là, tu sais, est-ce que c'est la personne qui n'avait
pas le bon titre ou est-ce que ce n'est pas la bonne compagnie qui était à pied
d'œuvre en train pour pouvoir installer la porte ou finaliser l'installation de
la porte?
Et puis un exemple où on manque notre
cible au niveau de la reconnaissance puis de favoriser la productivité puis l'attractivité
de l'industrie, on a envoyé... on vous a fait parvenir des documents aussi
là-dessus, là, c'est les arpenteurs en construction. Les arpenteurs en
construction, là, c'est des experts dans la mesure sur un chantier de
construction, puis s'ils n'étaient pas là, bien, il n'y aurait aucun travail
qui pourrait avancer. Donc, il n'y a pas une mesure, il n'y a rien. Donc l'absence...
l'absence de reconnaissance depuis des années dans ce métier amène ces derniers
à partir vers des employeurs tels que les villes, les mines, les géomètres puis
les firmes d'ingénieurs.
L'attractivité. Comment attirer les
travailleurs étrangers et revoir les permis de travail? L'industrie est en
surchauffe, hein, puis on passe à côté de gens qualifiés parce qu'en plus, on a
de la misère à faire reconnaître le travail qu'ils font dans leur pays. Ça fait
que ça prend des mesures facilitantes pour reconnaître leurs acquis. Et ces
gens-là, ils veulent travailler.
Autre réforme qui manque les trois cibles
visées par le ministre, celle du désassujettissement des offices municipales d'habitation.
C'est une perte sèche pour l'industrie. Ça n'ajoute à rien à la main-d'œuvre
dans l'industrie puisque ces gens-là vont quitter l'industrie, ils iront œuvrer
ailleurs, à l'extérieur de l'industrie de la construction. Puis on le voit, là,
il y a des prestations au niveau de la machinerie de production, et ils veulent
revenir assujettis.
La polyvalence, ce n'est pas un problème
de l'industrie, c'est un problème de secteur, et c'est un secteur, puis on l'a
dit en commission... en rencontre...
M. Brassard (Pierre) : ...le
génie civil, ils vont fonctionner de toute façon avec des sous-traitants, puis
ça... il n'y aura pas de problème au niveau de la polyvalence pour eux, ils
embauchent des sous-traitants. Le problème, c'est vécu dans le secteur
résidentiel, et on vous a adressé le problème en rencontre, puis on dit :
Il faudrait... On ne peut pas avoir un remède d'industrie, il faut avoir un
remède ciblé, et on est prêts à s'asseoir avec les parties pour être capables
de réussir à trouver un remède pour ce secteur-là.
La mobilité, c'est la même chose. Tu sais,
les parties sont coupables de... sont capables de s'entendre au niveau des
conventions collectives, puis ça nous donne une...
• (15 h 10) •
La Présidente (Mme D'Amours) : M.
Brassard, est-ce qu'il vous reste encore beaucoup de choses à dire? Parce que
votre temps est écoulé. Si...
M. Brassard (Pierre) : Il me
reste deux choses : la mobilité, le scrutin électronique, tant qu'à
moderniser R-20.
La Présidente (Mme D'Amours) : Parfait.
M. le ministre, est-ce que vous consentez, M. le ministre, à ce que M. Brassard
prenne du temps de votre temps de parole? Allez-y, vous pouvez continuer.
M. Brassard (Pierre) : Une
minute. Merci, M. ministre. La mobilité, on l'a dit, hein, les gros joueurs
vont amener leurs employés avec les sous-traitants, puis ça va faire que, sur
les... dans les régions éloignées, en dehors des grands centres, il risque d'y
avoir de la grogne, de la bisbille et des gens en perte d'emploi, en
assurance-emploi plus longtemps. Et je l'ai vécu parce qu'en même temps je suis
un gars du Saguenay-Lac-Saint-Jean, donc je l'ai vécu, les grosses entreprises
qui arrivent avec leurs sous-traitants, parce que c'est la nouvelle mode, là,
c'est de la sous-traitance à outrance.
Et le scrutin électronique, où on
dit : On veut moderniser la loi R-20, on veut dépoussiérer ça, ça fait des
années qu'on n'a pas bougé là-dessus. On est à l'ère électronique et on n'a
aucune notion, au niveau du scrutin, tout se fait encore à la mitaine. C'est
une lourdeur pour les travailleuses puis les travailleurs de vouloir s'exprimer
et même de contester. Donc, on est rendu à l'ère électronique, il y a des... je
l'ai dit au ministre du Travail, qu'il y a des municipalités qui s'en vont
là-dessus, au niveau du vote électronique, pour les prochaines élections. Ça
fait que je pense qu'on doit ne pas passer sous silence puis on doit améliorer,
au niveau du système de la période de changement d'allégeance syndicale.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. M. le ministre, nous sommes rendus à votre période d'échange. Donc,
vous avez environ 15 min 20 secondes.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. M. Enault, M. Brassard, votre équipe, bravo!, c'est un excellent
mémoire, et je trouve que votre présentation, elle est raisonnée et constructive.
C'est un projet de loi, puis, je le répète, il est perfectible, on est toujours
à la recherche d'un équilibre quand on rédige. On consulte, ce n'est jamais
parfait, mais vous êtes venus ici pour nous faire des propositions. Puis,
d'emblée, M. Enault, vous faites référence aux bons coups du projet de loi, et
ça, il faut que ce soit dit. Vous parlez d'inclusion. C'est un défi constant
d'être dans un secteur inclusif et diversifié. Ça, ça va répondre aux
objectifs, non seulement d'avoir une main-d'œuvre accrue, mais aussi une
meilleure productivité. La rétroactivité, évidemment, il y a les aspects
pratiques, mais il y avait un article dans la loi qui prohibait, qui
interdisait aux parties de négocier une rétroactivité. Cet article-là est
abrogé. Au moins, on revient à la liberté des parties de négocier. Moi, c'est
ce qui est le plus important. Les aspects, les modalités de mise en
application, moi, je suis toujours ouvert aux idées.
Le comité de relations de travail, c'est
aussi de quoi que vous comprenez très bien. L'objectif, c'est d'améliorer et
aussi de prévenir, parce qu'on parle d'amélioration des relations de travail,
mais aussi de prévenir des enjeux ou des litiges qui, à un moment donné,
prennent des disproportions un peu déraisonnables. Le recours, effectivement,
on était fiers, parce qu'on ne l'a pas dans le Code du travail, la possibilité
de faire un recours en cas de défaut de négocier avec diligence et bonne foi.
Je pense que c'est intéressant que vous le mentionniez.
La grève sans médiation, je veux vous
entendre, François, puis on se connaît bien, là, parce qu'effectivement vous
êtes un partisan des alternatives de résolution de litiges en relations de
travail. Vous dites une grève sans médiation, parce que la médiation, ça altère
le rapport de force. Comment ça altère le rapport de force, en deux mots,
François?
M. Enault (François) : Quatre?
M. Boulet : C'est bon, je
t'écoute.
M. Enault (François) : Non,
mais, écoutez, M. le ministre...
M. Enault (François) : ...j'ai
trop vu, exemple... puis je ne veux pas mêler le secteur public avec la
construction, mais dans le secteur public, il y en a des passages, des
médiations obligatoires, où il ne se passe pas grand-chose. Lorsque les parties
décident d'y aller en médiation....
M. Boulet : Comme ça s'est
fait là, oui.
M. Enault (François) : C'est
ça. Mais quand on a décidé d'y aller, ça s'est fait, parce que les parties
avaient une nécessité. Ce qu'on ne veut pas, c'est que des gens viennent faire
du temps, exemple 30 jours en médiation, puis compter les carrés, puis en
disant : Bon, il en reste 10, huit, neuf, sept, six... puis après ça, on
peut. Nous, ce qu'on veut, c'est qu'il y ait des médiations vraiment
constructives, où les gens, quand qu'ils y vont, il y a une personne qui est
là, qui les accompagne puis qu'on était capables de trouver des solutions, et
non pas seulement faire perdre du temps à des gens et faire du temps. C'est ça
derrière ce qu'on dit, là. Et puis vous le savez, M. le ministre, je veux dire,
en 50 ans, il y a une fois qu'il y a eu une conciliation qui a été
demandée à la table centrale dans le secteur public, c'est cette année avec les
quatre dirigeants du Front commun. Donc, on est pour, mais lorsque c'est le bon
moment.
M. Boulet : Parfait. On se
rejoint. Il faut que la médiation soit obligatoire et effective, que les deux
parties, les parties dans le cas présent de la construction, y participent de
bonne foi, et ça, ça peut donner des résultats, ça, ça n'a pas d'impact négatif
sur le rapport de force, ça permet d'atténuer les tensions puis d'éviter un
conflit, généralement.
M. Enault (François) : Ce
qu'on dit, sur l'obligation, c'est qu'on aimerait bien que ce soit volontaire.
M. Boulet : O.K. Je
comprends.
M. Enault (François) : Mais
j'entends ce que vous dites. Et ce qu'on dit, c'est de mettre un nombre de
jours, ça peut juste des fois rendre le monde à ne rien faire. Il faut vraiment
que ce soit une volonté. Lorsque c'est une volonté, ça fonctionne, on le sait,
M. le ministre.
M. Boulet : Puis c'est dur
d'obliger la volonté. Puis je rejoins François là-dessus, tu ne peux pas forcer
les parties à négocier, tu ne peux pas forcer les parties, tu peux les forcer à
négocier de bonne foi et avec diligence, mais la médiation, ça prend une
volonté conjointe. Je comprends ce point-là. O.K.
La mobilité. Quand on fait un projet de
loi de cette nature-là, il faut aussi viser à simplifier. En matière de
mobilité, M. Enault, c'est compliqué, c'est extrêmement asymétrique, pour
des métiers en génie civil, voirie, oui, pour d'autres non, pour des métiers
dans l'institutionnel commercial, industriel, c'est oui, dans d'autres... Je
pense que le projet de loi, au-delà d'avoir un impact sur les conventions
collectives, ce n'est pas les conventions collectives qui sont en vigueur
actuellement, c'est à leur expiration, il y a un enjeu, il n'y a pas eu
d'entente, il y a des recours, il y a eu des recours au tribunal administratif
du travail, après ça, à la Cour supérieure, là, on attend d'être entendus
devant la Cour d'appel, je parle des parties qui... Or, ce n'est pas si simple
que ça de dire : Laissons les partis négocier, c'est beaucoup plus simple
de même. Ce n'est pas le cas. Alors que ce qui dans le projet de loi, c'est
simple.
Et je rappellerai que le règlement sur
l'embauche et la mobilité contient un article 35 qui réfère à la priorité
d'embauche régionale, ça fait quand tu as besoin d'embaucher, c'est d'abord et
avant tout les travailleurs, travailleuses de la région. Et, par la suite, la
mobilité, elle peut s'exercer, mais elle va permettre, particulièrement en
contexte de pénurie de main-d'œuvre, à des régions d'être compétitives et
d'attirer la réalisation de projets industriels. Donc, la mobilité, il faut la
voir comme étant favorable au développement social et économique des régions.
Le... l'autre... l'autre élément sur
lequel j'aimerais vous entendre, vous dites : un recoupage plus ciblé des
régions en fonction... J'aimerais ça peut-être que vous me donniez juste un peu
plus de précisions parce que je n'ai pas eu le temps de lire en détail la
mémoire. Qu'est-ce que vous auriez à me dire là-dessus sur le redécoupage des
régions?
M. Enault (François) : Je ne
répondrai pas sans mon avocat, M. le ministre, donc je vais laisser Maxime
répondre
M. Boulet : Maxime d'abord.
M. Cauchy-Charest (Maxime) : Quant...
M. le ministre, quant au redécoupage, je vais laisser la parole au spécialiste,
mais pour ce qui est de la portion de la mobilité, lorsqu'on parle de la
contestation judiciaire, là, sur les dispositions, parce qu'on a grand fait
état de l'article 35 du règlement comme étant l'espèce de balise
d'encadrement de cette mobilité-là, la finalité recherchée par le recours qui
est actuellement devant la Cour d'appel, c'est de déclarer inopérant ces
articles-là. Donc, si on juxtapose une limitation pour les parties, de négocier
une clause de convention collective qui vient moduler, disons, les conditions
de travail des travailleurs quant à la mobilité...
M. Cauchy-Charest (Maxime) : ...et
que, par la suite, on est en l'absence d'une disposition ou d'une protection
réglementaire, comme prévu à 3538 du règlement. On se trouve finalement entre
deux chaises. Donc, c'est quand même relativement... C'est périlleux et c'est
pour ça que je voulais le préciser, parce que ce n'est pas juste un recours,
c'est devant les tribunaux. Il y a quand même une incidence pratique à la
finalité de ce... de ce recours-là, juxtaposé avec la proposition d'empêcher
des parties, finalement, de venir reprendre le contrôle nécessairement un peu
de leurs conditions de travail.
• (15 h 20) •
M. Boulet : ...un résultat
pratique qui va résoudre les conflits qui va permettre de clarifier la
situation, autant pour les travailleurs préférentiels que pour ceux qui auront
15000 heures pour avoir une pleine mobilité. Pour nous, ça a vraiment
l'impact d'éclaircir la situation relative à la mobilité. Puis souvent on me
dit : Pour les griefs, on est le seul secteur qui ne peut pas. On est
aussi le seul secteur où il y a tant d'obstacles asymétriques à la mobilité de
la main-d'œuvre. Ça fait qu'il faut tenir compte aussi de cette réalité-là. Et
on est convaincus qu'en termes de développement régional, avec tous les projets
industriels annoncés un peu partout au Québec découlant de la filière batteries
puis Hydro-Québec, ça va aider certaines régions. Le redécoupage, on peut...
C'est parce qu'il reste combien de temps?
La Présidente (Mme D'Amours) : 6
min 20 s.
M. Boulet : Six minutes.
Alors, peut-être, François, j'aimerais ça... Pierre? Pierre. Ça va bien,
Pierre?
M. Brassard (Pierre) : Pour
avoir de la mobilité, M. le ministre?
M. Boulet : Non, pas de la
mobilité.
M. Brassard (Pierre) : Ah!
O.K.
M. Boulet : La reconnaissance
des acquis. C'est parce qu'on a des articles de reconnaissance des heures de
formation et puis des expériences de travail aussi dans notre projet de loi.
Mais je suis d'accord avec vous, M. Brassard, que la reconnaissance des acquis,
ça va nous permettre d'intégrer plus de personnes. Parce qu'il y en a plein,
puis on ne réfère pour qu'aux groupes issus de la diversité, là, mais bien sûr,
les Premières Nations, les personnes immigrantes, les minorités visibles, les
personnes en situation de handicap, les femmes, mais aussi des personnes qui
ont de l'expérience pertinente à l'extérieur. Puis avec la règle de 35 %,
ça devrait être bénéfique. Mais vous avez parlé horaires de travail, M.
Brassard, puis conciliation travail-famille. Ça, pour moi, c'est des matières
aussi à négocier lors des renouvellements de conventions collectives. Est-ce
que ça l'est?
M. Brassard (Pierre) : Bien,
c'est un peu pour ça que, d'entrée de jeu, je disais au niveau de l'attraction,
on est... l'industrie n'est pas sexy, maintenant. Excusez l'expression, là,
mais on ne l'a pas. Au fil des ans, là, on l'a démontré. Et quand on parle
de... Puis je vais vous un peu ramener à la mobilité, là, la mobilité, de la
façon dont elle est libellée sur une base volontaire, le volontarisme, dans
l'industrie de la construction, ça n'existe pas ou très peu. La précarité de
l'emploi, il n'y a pas d'ancienneté, la sécurité d'emploi n'y étant pas, les
travailleurs vont se le faire imposer, d'aller travailler. Les gros joueurs de
l'industrie qui embauchent des paquets de sous-traitants, eux, quand ils vont
arriver, poigner un contrat d'école ou d'hôpitaux... d'hôpital au
Saguenay-Lac-Saint-Jean, parce que je prends l'exemple du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, qu'ils vont venir avec l'ensemble de leurs
sous-traitants parce que vous avez dit que c'est de nouveaux besoins de
main-d'oeuvre quand on va mettre 3536 en application. Donc, moi, je suis au
Saguenay. Je vois arriver, je ne nommerai pas de nom, qui vient faire un CHSLD
public avec 18 sous-traitants qui ont des heures d'enregistrées pour les
sous-traitants, puis moi, je ne travaillerai pas.
Donc, ça va créer... Donc, on veut...
L'État est supposé d'être un facilitateur, ne devrait pas arriver avec des
choses où on va être en grogne contre l'État, on va être en grande contre les
entreprises parce que, nous, on va se ramasser à l'assurance-emploi parce que
la mobilité est ouverte «at large». Vous avez dit, ce matin, je l'ai pris dans
ma mémoire, là, 100 % de mobilité pour 13 métiers dans le génie
civil? Aucun problème. 20 % dans l'ICI? Aucun problème. Là, on arrive, on
veut faire un remède pour l'ensemble de l'industrie en mettant «at large» la
mobilité. Pourtant, vous avez dit ce matin qu'il n'y avait pas de problème au
niveau du ICI. Donc, le problème, il est ciblé, il est dans les entreprises.
Les sous-traitants s'en vont dans l'institutionnel commercial, industriel parce
qu'il y a une cadence de travail.
M. Boulet : ...à ce que je
disais, dans l'ICI, c'est limité à 20 % et...
M. Brassard (Pierre) : Puis
vous n'avez pas de problème?
M. Boulet : Non. Mais il n'y
a pas eu d'effet négatif. Mais ça a empêché des régions de réaliser des projets
industriels, des projets de construction, faute de main-d'oeuvre, parce que la
mobilité ne leur permettait pas parce qu'ils avaient atteint le plafond du
20 %. C'est ça, les règles du marché, puis c'est ça que devrait
permettre...
M. Boulet : ...devrait
permettre notre organisation de travail, ce n'est pas d'aller tasser du monde
qui est dans les régions. Puis vous savez que les entrepreneurs, quand ils
veulent soumissionner, ils veulent être les plus concurrentiels possibles, et
il y a toujours les frais de séjour puis les frais de déplacement, puis ça
représente quoi, 25 %, 26 %. Ça fait que l'intérêt... Et en plus, il
y a la priorité d'embauche régionale. Mais l'intérêt, au-delà de ça, c'est...
financièrement, c'est de faire affaire avec des gens de métier qui sont dans
les régions. Mais il n'y en a pas assez, on a un phénomène de pénurie de
main-d'œuvre.
Le problème, c'est qu'on se replace
toujours à une époque où il y avait du chômage, où il y avait des besoins. Les
bassins de main-d'œuvre, pourquoi ça rouvre tant? Pourquoi, dans certains
métiers, M. Brassard, il y a jusqu'à 85 % des travailleurs qui rentrent
par les bassins? Ça, en termes de rétention... Parce que vous parliez de
l'importance de la reconnaissance pour améliorer le taux de rétention. La
formation... l'absence de formation a un impact aussi, et même plus négatif,
là, pour la possibilité de retenir le monde.
Scrutin électronique, Pierre, c'était le
dernier point. C'était quoi, le point, Pierre? C'était qu'on a réussi à faire
un maraudage sanitaire en 2021. Là, on a été capables de sortir des sentiers
battus. Là, vous dites : On devrait faire un scrutin...
M. Brassard (Pierre) : Électronique.
On a fait un sanitaire. Maintenant, on est rendu à l'ère électronique, puis, tu
sais, tout fonctionne comme ça, là. La facilité... Nous, on est élus au
suffrage universel de nos membres par vote électronique : ils reçoivent un
code-barre, ils peuvent voter pour le président, ils peuvent voter pour
l'ensemble de leurs leaders d'organisation. Puis, quand vous avez dit de former
un comité pour savoir... pour s'assurer le découpage des régions, ce
découpage-là date du début du siècle, à la blague. Donc, s'il y a un
redécoupage à faire... Parce que ce que j'entends, moi, des prestations des
organisations patronales, c'est que la personne de Saint-Hyacinthe ne peut pas
travailler à Drummond, là.
M. Boulet : Oui, je
comprends.
M. Brassard (Pierre) : Donc,
s'il y a un problème de redécoupage, prenons-le par... prenons le taureau par
les cornes puis travaillons à ce qu'on ne mette pas à feu et à sang les
régions. Parce que les régions, là, on a du bon monde, puis, si notre monde se
ramasse en chômage, on va avoir après ça à reprendre le...
M. Boulet : Oui, c'est vrai.
M. Brassard, je veux conclure. Ils ont fait état des points forts du projet de
loi, c'était vraiment intéressant, puis j'ai apprécié beaucoup votre
présentation. Puis au plaisir de se reparler bientôt. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, M. le ministre. Maintenant, je vais céder la parole à la députée de
Bourassa-Sauvé pour 10 min 24 s
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, messieurs, merci pour votre présentation. Je commence
justement avec ce... le point dans votre mémoire où est-ce que vous dites,
donc, que vous accueillez favorablement les mesures sur l'inclusion et la
rétention des femmes et des personnes représentatives de la diversité de la
société québécoise. Évidemment, donc, je pense qu'on a parlé abondamment, là,
de la sous-représentation des femmes dans l'industrie, notamment, bon, oui, la
question de la formation, mais également la question du climat de travail.
La première question que j'ai pour vous,
c'est : Pour vous, donc, en termes de lutte contre le harcèlement,
qu'est-ce qui a changé dans l'industrie dans les dernières années qui
permettrait donc d'être prêt à accueillir plus de femmes?
M. Brassard (Pierre) : Bien,
vous savez, on a travaillé beaucoup avec la Commission de la construction,
beaucoup au niveau du PAEF au niveau de l'industrie de la construction. Une
chose qu'il faut qu'on améliore, c'est avec... il faudrait que le gouvernement,
à un moment donné... je ne sais pas comment le dire poliment, là, mais il faut
que le gouvernement, à un moment donné, ait un courage politique de dire :
Ça prend des obligations d'embauche des femmes, des immigrants, des
autochtones, des diversités. Si on ne fait pas ça, les entreprises, là, qu'on
appelle pour référer des femmes, c'est elles qui nous disent : Ah non! je
n'en veux pas, de femmes. Ça fait que, si on ne réussit pas à peser sur la
bedaine de ceux qui embauchent... Bien, nous, on les défend, mais c'est les
employeurs qui les embauchent. C'est eux-mêmes qui ne veulent pas les
embaucher.
Mme Cadet : Mais il y a quand
même un enjeu d'attractivité, quand même. Je vous entends, là, sur la question
des donneurs... des obligations potentielles aux donneurs d'ouvrage puis des
employeurs. Je pense que tout ça, donc, ça peut être vrai. Mais, au niveau,
donc, du climat de travail, il y a quand même du travail à faire de ce côté-là
pour s'assurer du maintien aussi, là, parce que c'est une chose, l'embauche,
mais c'est surtout la rétention par la suite.
M. Brassard (Pierre) : Exact.
Mme Cadet : Donc, quand bien
même il y a ces obligations-là, il faut du travail du côté de la rétention
aussi.
M. Brassard (Pierre) : Rétention,
reconnaissance, ça égale productivité. On le dit, on le...
M. Brassard (Pierre) : ...depuis
le début, ça fait que, si on n'est pas capable de les maintenir à l'emploi,
hein... il y a plein de choses, là, ils partent en congé maternité, quand ils
reviennent, le chantier est terminé, bien, son lien d'emploi est terminé. Donc,
il n'y a pas de reconnaissance pour qu'ils aient le goût de rester plus
longtemps dans l'industrie de la construction. Ça fait qu'il faut amener... il
faut élever notre jeu, tu sais. On parle depuis le début, là, qu'il faut
moderniser cette loi-là, il faut moderniser cette loi-là, mais il faut aussi qu'on
ait le courage politique de le faire, parce que c'est bien beau de le dire,
mais si, après, on s'en retourne dans nos chaumières en disant : Bien, en
tout cas, on l'a dit puis on va aller se cacher en arrière de nos TV, ça ne
marchera pas.
• (15 h 30) •
Mme Cadet : Je suis curieuse,
vous, comme organisation, comment est-ce que vous avez élevé votre jeu sur
cette question-là?
M. Enault (François) : Peut
être en complément, justement, là, CSN-Construction... il y a quatre membres au
comité exécutif de la CSN-Construction, dont un poste réservé à une femme.
Donc, je pense que charité bien ordonnée commence par soi-même, ça fait qu'on
l'a fait, nous. Puis, justement, pour s'assurer que lorsque des femmes viennent
travailler, hein, dans le secteur de la construction, qu'il y ait des personnes
aussi qui peuvent se référer. Puis, chez nous, on a des femmes justement pour
ça, puis montrer, justement, qu'on est inclusifs. Donc, ça commence comme ça,
mais je pense qu'il va falloir aller un peu plus loin, justement, pour
s'assurer... Puis je pense que le compagnonnage est important aussi pour bien
former ces gens-là, leur donner un travail qui soit pérenne, là, c'est ça
aussi, là, je veux dire, sinon, bien, c'est clair que ça va être dur d'attirer
des femmes dans le milieu de la construction.
Mme Cadet : Merci. Je veux,
moi aussi, donc, aller sur le chantier, là, du redécoupage. Donc, vous dites,
donc, vous souhaiteriez, donc, créer un comité paritaire pour procéder à
l'analyse du... de limiter les 12 régions contenues dans le règlement. Au-delà,
donc, des questions du ministre auxquelles vous avez répondu, je suis curieuse
de voir, donc, pour vous... est-ce que ce que vous avez un exemple de... bon,
Sainte-Hyacinthe, Drummondville, mais, si on redécoupe, on n'a pas encore,
donc, la même problématique, tu sais, peu importe à quoi ressemble la carte?
M. Brassard (Pierre) : Quand
on parle de découpage, il faut que ce comité-là fonctionne. Ça fait qu'en même
temps on voit la prévision des travaux dans le futur, ça fait qu'on est capable
de voir, est-ce qu'on va avoir des problèmes reliés... au niveau de la mobilité
si les chantiers... Comme, là, voyez-vous, il y a des filières de batteries à
Trois-Rivières, ce n'est pas pour un clin d'œil pour vous, M. le Ministre, mais
il y a une filière de batteries à Trois-Rivières. Est-ce qu'on va être
confrontés, dans le futur, à un manque de travailleurs? L'ouverture de bassins
comble sporadiquement un manque de travail ou... un manque de travailleurs.
Mme Cadet : ...dans le
fond... je sais que dans... quand vous parlez du redécoupage, donc, on est
vraiment, donc, dans la question des régions limitrophes, là, donc cet
enjeu-là, mais il va toujours y avoir une région limitrophe, donc, peu importe
à quoi ressemble le redécoupage. Donc, c'est pour ça que j'essaie de saisir
le... ce que ça viendrait régler, ce comité paritaire là.
M. Brassard (Pierre) : Bien,
ce qu'on dit... si on n'a pas de forum pour pouvoir en discuter, on va mettre
un remède général qui va occasionner plus de problèmes administratifs que
d'autres choses. Donc, si on n'a pas... si on a un forum pour être capable d'en
discuter, il y a des travaux de prévus, le gouvernement a une enveloppe
budgétaire, ils veulent faire tel projet, ce comité-là va pouvoir regarder et
dire : Est-ce qu'on va avoir un problème de main-d'œuvre, est-ce qu'on va
avoir un problème de mobilité? C'est à ça que ça sert, des relations de
travail, c'est à ça, c'est l'ADN des syndicats, ça fait qu'il faut qu'on soit
capable de le faire. On l'a dit, le camarade vice-président l'a dit, il n'y a
pas de remède «one fits all», là-dessus, il y a un... L'industrie, là, c'est
vaste, ça englobe beaucoup de régions, puis on ne peut pas mettre à mal les
régions, les travailleuses puis les travailleurs des régions parce qu'on a un
problème de recrutement de la main-d'œuvre, puis...
Mme Cadet : Oui, mais,
là-dessus, sur le recrutement de la main-d'œuvre, parce que, dans le mémoire,
aussi, tu sais, vous parlez, donc, de la conjoncture qui découle du plein
emploi puis... En fait, donc, quand on regarde les différentes analyses
économiques, donc, on... il y a très peu d'experts qui nous ramènent, donc, aux
différents taux de chômage historiques, là, qu'on a connus à l'époque, donc, de
la création du cadre réglementaire qu'on a aujourd'hui. Donc, étant donné,
donc, qu'il y a peu d'anticipation de revenir à ce taux de chômage là, donc,
pour vous, donc, comment est-ce qu'on s'adapte? Oui, pour aujourd'hui, c'est
qu'il y a une conjoncture actuelle, donc, de pénurie de main-d'œuvre très
vaste, mais, pour l'avenir, on va quand même avoir, donc, différents défis au
niveau de la planification de la main-d'œuvre. Donc, comment est-ce que vous...
comment est-ce que ça s'imbrique dans tout ça?
M. Brassard (Pierre) : Bien,
tu sais, si on regarde l'année dernière, là, quand on avait une crainte au
niveau des taux d'intérêt élevés, puis l'IPC, puis tout ça, je n'aurais pas
prédit que, dans les cinq prochaines années, on aurait pété des scores de fou
au niveau des heures de l'industrie, là. Ça fait que, moi, je pense qu'il peut
y arriver...
15 h 30 (version non révisée)
M. Brassard (Pierre) : ...des
choses dans le futur qu'on n'avait pas prévues. Puis on ne peut pas toujours se
défendre : Bien, on n'avait pas de boule de cristal. Nous, là, ça c'est
des... c'est de la main-d'oeuvre, c'est des humains qu'on fait travailler, qu'on
fait gagner leur vie, puis qui amènent du pain puis du beurre sur la table, ça
fait que moi, je ne peux pas juste me dire... me cacher derrière : je n'avais
pas de boule de cristal. C'est des êtres humains qu'on gère, nous, là, au
niveau des... au niveau syndical, ça fait qu'on ne peut pas... on ne peut pas
jouer avec ça.
M. Enault (François) : Peut-être
juste un complément?
Mme Cadet : Oui.
M. Enault (François) : Bien,
on le place dans notre mémoire, là, on laisse beaucoup de place à la
négociation, on fait... on fait confiance aux parties de trouver des solutions.
Puis on le répète, là, dépendamment du secteur d'activité de la construction,
dépendamment aussi du temps, je veux dire, la photo d'aujourd'hui ne sera pas
la même photo dans quatre ans, c'est seulement ça, notre crainte, d'appliquer
une loi présentement qu'on ne pourra plus défaire dans trois, quatre ans, là.
Et c'est ça qu'on dit : il faut laisser aux parties le loisir d'être
capables de négocier les éléments de mobilité de main-d'oeuvre dans les
régions, avec les problématiques x, y, z, dépendamment du contexte.
Mme Cadet : Mon autre
question est au niveau de la productivité... vous le mettez aussi. Donc, le...
l'un des principes directeurs ici, donc, c'est de... d'assurer une meilleure
productivité. Comment vous pensez que le projet de loi, il peut permettre de
bâtir mieux, plus vite et à moindre coût ou comment il faudrait l'améliorer
pour qu'on atteigne véritablement cet objectif-là?
M. Brassard (Pierre) : Bien,
on l'adresse un peu au niveau de l'amélioration de la productivité, hein? Le
compagnonnage, c'est la majeure, la planification des travaux aussi. Donc, une
meilleure planification des travaux, une possibilité de compagnonnage. Parce
que, du moment où est-ce que c'est ma force, ma capacité de travail, là, qui
fait que je rentre le premier sur un chantier puis je sors le dernier parce que
j'ai plein de trucs puis je ne les donne pas en compagnonnage aux nouveaux puis
aux nouvelles, bien, il n'y en aura pas, de productivité, il n'y en aura pas, d'amélioration
de productivité. Parce que c'est ma... c'est ma sécurité d'emploi, là, à l'heure
actuelle, c'est ma capacité d'effectuer des travaux puis mes trucs.
Ça fait que si je ne suis pas capable de
faire le compagnonnage de ça ou si je n'ai pas l'intention parce que c'est ma
sécurité d'emploi... Il n'y a pas de sécurité d'emploi, il n'y a pas d'ancienneté
sur les chantiers de construction, donc c'est moi qui fais ma sécurité d'emploi
puis mon ancienneté, par ma capacité de travail, ça fait que je ne donne pas
mes trucs, il n'y a pas de compagnonnage puis il n'y a pas d'étalonnement des
travaux puis de préparation des travaux. Donc, la productivité, elle ne peut
pas être au rendez-vous. Il y a une difficulté là.
Mme Cadet : Merci. En
terminant, de mon côté, vous aviez... bien, vous indiquiez, donc, que vous
accueillez positivement l'opportunité de négocier les clauses de rétroactivité
salariale. Vous avez parlé donc souvent donc dans vos réponses, donc de
négociation directe, vous avez entendu la FTQ hier donc, vous, au niveau du
fonds, comment est-ce que vous accueillez, là, ce mécanisme-là?
La Présidente (Mme D'Amours) : En
10 secondes.
M. Brassard (Pierre) : Si c'est
compliqué, je suis content qu'on soit capable de la négocier, mais qu'elle s'applique,
on n'a pas besoin de fonds spécial, de patente spéciale qu'après ça, qui a une
complexité à administrer. Puis on salue l'intention de vouloir nous donner un
petit bonbon au niveau du projet... pl 51.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve. M. le
député, vous avez trois minutes 28 secondes.
M. Leduc : Merci. Le ministre
dit que c'est un gros bonbon, je ne suis pas sûr que je suis d'accord.
M. Boulet : ...le terme n'est
pas juste.
M. Leduc : Le terme n'est pas
juste. Bonjour à vous quatre. Content de vous voir ici. Peut-être une question
qui répond, mais moi, je suis surpris, là, on parle de la mobilité de main-d'oeuvre,
puis on va jouer dans les conventions collectives, on va unilatéralement
modifier des conventions collectives. Est-ce que vous avez vu ça souvent,
peut-être plus, M. Enault, dans d'autres secteurs économiques qu'un
gouvernement, à travers une loi, peut-être à part des lois spéciales, bien sûr,
mais vient identifier des clauses puis il vient les modifier?
M. Enault (François) : Écoutez,
je l'ai dit à plusieurs tribunes, là, ça fait 30 ans que je négocie, non, je n'ai
pas vu ça beaucoup, là, tu sais, je n'ai jamais vu ça. Donc, c'est ce bout-là
qu'il faut travailler à part. Bon, je ne parle pas des décrets dans le secteur
public là, à toutes les négociations, à part celle-ci, la dernière... l'avant-dernière.
Écoutez, puis c'est ça qu'on dit, on est capable de travailler les choses. Et
ce que Maxime disait tantôt, mais, à un moment donné, de toute façon, l'employeur
a déjà pris certains recours pour essayer d'invalider ça. Et c'est ce qu'on se
dit : Laissons négocier. Puis on regarde le courant jurisprudentiel
présentement, on l'a vu ce qui s'est passé en Ontario avec le gouvernement
Ford, que leur loi a été... excusez...
M. Leduc : Ça arrive même au
salon bleu, ça.
M. Enault (François) : ...ait
été invalidée. Bon, c'est tout ça qu'on dit, l'arrêt Saskatchewan...
M. Enault (François) : ...on
place tous les éléments puis on dit : Pourquoi qu'on ne fait pas de ce
projet de loi là... On a l'opportunité, hein? On a code du travail qui
fonctionne assez bien quand même. Pourquoi on n'essaie pas d'imbriquer plus
d'éléments du Code du travail actuel au lieu de rester sur la fameuse R-20 tout
le temps, tout le temps puis que personne ne connaît, à peu près, là.
• (15 h 40) •
M. Leduc : Sur la question de
la présence des femmes. Plus tôt, hier, en fait, on a reçu le CIAFT qui
proposait qu'on pousse le gouvernement à aller plus loin dans les programmes
obligatoires de contractuels pour avoir des quotas, j'imagine, d'embauche de
femmes. Est-ce que c'est quelque chose avec lequel vous seriez à l'aise?
M. Enault (François) : Je
pense que, tantôt, là, je veux dire, de faire de la pression auprès des
gouvernements pour obliger les employeurs à avoir un certain quota, pas
seulement des femmes, mais de toutes les minorités qui représentent le Québec,
là, donc, oui, il faut regarder vers ça, mais, en même temps, il faut quand
même que ça soit... il faut que ce soit attractif, également, je veux dire, on
ne peut pas... parce que c'est bien beau, si on met des obligations d'embaucher
du monde mais qu'on n'est pas attractif, qu'il n'y a pas la formation, qu'il
n'y a pas les conditions, tu sais, les conditions mises en place pour garder
ces gens-là, bien, ils vont rentrer d'une porte puis ils vont sortir de l'autre
porte.
M. Leduc : Exact. On n'aura
rien réglé.
M. Enault (François) : Non.
M. Leduc : Sur un même
esprit, donc, de ne rien régler, les formations très courtes, là, qui sont
proposées, ça vous inquiète un peu aussi, là? Je sais qu'il y a beaucoup
d'organisations qui disent : Bien là, est-ce que les D.E.P. vont survivre
à long terme, en plus des embauches par bassins? On parle des fois d'alternance
études-travail. Où est-ce que vous vous situez, dans tout ça, par rapport à la
formation?
La Présidente (Mme D'Amours) : En
30 secondes.
M. Brassard (Pierre) : C'est
dur, en 30 secondes, mais, écoutez, tant que ça va être financé, c'est sûr
qu'il va y avoir une attraction. On a toujours dit, si c'est pour avoir une
rétention, c'est louable pour le gouvernement, mais nous, on était contre ça.
M. Leduc : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je vais maintenant céder la parole au député de Jean-Talon pour une
durée de 2min 38 s.
M. Paradis : Merci beaucoup
pour votre présence et pour votre mémoire. Une des choses que j'essaie de faire
ou qu'on essaie de faire, c'est de... je pense que c'est de comprendre quelles
sont vos recommandations les plus fortes puis qu'est ce qu'aussi vous nous
incitez vraiment à ne pas faire, ce qu'il faut éviter. Et là je pense que, dans
la page 10 de votre mémoire, il y a une partie importante, qui dit : Bien,
il y a des conventions collectives, il y a un règlement sur l'embauche puis la
mobilité des salariés de l'industrie de la construction... il y a des
conventions collectives, puis là les employeurs cherchent à déclarer les
dispositions sur la mobilité inopérantes. Donc là, le règlement, c'est notre
dernier rempart, puis là le projet de loi viendrait faire tomber ce rempart-là,
briser un certain équilibre. Vous dites : Si ça, ça se passe, ça va avoir
un impact sur le respect des considérations complexes que sont la croissance de
l'économie régionale, les besoins d'une plus grande productivité, le respect de
la qualité de vie, des conditions des travailleurs. Est-ce que vous pourriez
nous dire concrètement ça serait quoi, l'effet, selon vous, si on adoptait le projet
de loi tel quel, sur ces éléments-là que vous avez identifiés dans votre
mémoire?
M. Enault (François) : On le
répète, premièrement, de se faire couper le droit de négocier, on est contre.
Ça, c'est... oui, c'est le coeur de notre mémoire de dire : Il faut
laisser les parties se... négocier.
Par rapport à la mobilité de main-d'œuvre,
c'est qu'on ne veut pas avoir les... plein de... on ne voudrait pas qu'un
entrepreneur x qui est le monopole, un gros employeur dans la région de
Montréal, déplace toujours toute sa gang dans une région donnée puis qu'il va
faire du fly-in, fly-out, hein, que ces gens-là vont prendre de l'argent, vont
faire de l'argent là, ils vont venir le redépenser dans leur région où est-ce
qu'ils demeurent, puis nos gens dans la région vont se retrouver souvent sans
travail. C'est ça, c'est une des craintes qu'on a. On veut s'assurer que, dans
les régions, nos gens de la région puissent travailler, qu'on motive ces
gens-là, qu'on embauche, qu'on soit imaginatif, qu'on fasse de la place aux
femmes, aux autochtones. Donc, c'est ça qu'on veut, également.
Puis peut-être aussi, il va falloir faire
des pressions auprès du gouvernement par rapport aux permis ouverts, hein?
Parce que, si les permis étaient ouverts, bien, quand il y a des fermetures,
comme dans Oymel, on pourrait prendre ces gens-là puis arriver, puis les placer
peut-être dans la construction ou dans d'autres métiers. Ça, c'est des éléments
qu'il faut faire. Puis j'en profite parce que vous dites : C'est quoi qui
est fort aussi? Ce qui est fort, dans notre mémoire, ce qu'on dit... il y a un
code du travail qui fonctionne assez bien, au Québec, collons-nous là-dessus au
lieu d'essayer de réinventer la roue.
Et, en passant, parce que je suis un peu
déçu, je n'ai pas eu encore la question, mais un des éléments phares de notre
mémoire, ce qu'on dit... il faut ramener la loi antiscab, dans la construction.
On a trop parlé souvent de violence, de n'importe quoi dans la construction,
que c'est ci puis que c'est ça, mais, si on veut régler tous ces éléments-là,
la loi antiscab va venir régler beaucoup de choses que votre parti avait
réglées en 1977.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, Messieurs Poitras, Brassard, Enault et Maître... Merci infiniment de
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques minutes
afin que le prochain... que nos prochains invités prennent place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 45)
(Reprise à 15 h 49)
La Présidente (Mme D'Amours) :
Nous reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue au Syndicat
québécois de la construction. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer
votre exposé, s'il vous plaît.
M. Gendron (Sylvain) : Merci.
Sylvain Gendron, président du Syndicat québécois de la construction. Mme la
Présidente, M. le ministre, mesdames, messieurs, les commissaires, bonjour.
Merci de nous permettre de nous exprimer sur le projet de loi n° 51.
• (15 h 50) •
Alors, le Syndicat québécois de la
construction est une organisation, est une association représentative en vertu
de l'article 28 de la loi R-20. Notre organisation est exclusivement consacrée
au travail...
M. Gendron (Sylvain) : ...aux
travailleurs de l'industrie de la construction de tout corps de métiers et
occupations, et ça, partout dans la province. Alors, vous comprendrez que notre
analyse du projet de loi n° 51 porte sur plusieurs points présentés
évidemment au projet, mais aussi sur quelques grands absents. Nous espérons que
ce mémoire saura apporter un éclairage pertinent et constructif sur les
modifications légales et réglementaires à venir.
Je suis accompagné aujourd'hui,
immédiatement à ma droite, d'Isabelle Pelletier, qui est directrice à la
formation et aux avantages sociaux, aux syndicats du Directeur général
Charles-Olivier Picard, et ainsi complètement au bout, Mme Julie Brissette, qui
est coordonnatrice aux Relations du travail et lésions professionnelles. C'est
M. Picard qui va faire la présentation du mémoire.
M. Picard (Charles-Olivier) : À
mon tour de vous saluer tous distingués parlementaires, personnel politique,
personnel de la fonction publique. Mme la Présidente, je tiens d'abord à
préciser que nous sommes le premier groupe qui présente devant vous qui affiche
une parité. Donc, je tiens à le souligner.
Donc, nos recommandations s'expriment dans
un projet de loi qui a été qualifié de perfectible par M. le ministre. Donc, on
se présente devant vous avec cet objectif-là. On a regroupé notre mémoire par
thème. Donc, le premier thème qu'on aborde avec vous, c'est celui de la
mobilité. Celui de la mobilité, quand on regarde le projet de loi, on se rend
compte assez rapidement que le projet de loi propose une ingérence directe dans
les conventions collectives qui appartiennent aux parties et non au
gouvernement. Nous ne sommes plus dans une ère où ce qu'on vit avec des décrets
gouvernementaux, il faut le rappeler. Donc, dans ce sens-là, il faut rétablir
la possibilité aux parties de convenir elles-mêmes de leurs règles de mobilité
dans les conventions collectives. Elles ont été déterminées par les parties et
les partis elles-mêmes.
Donc, en lien avec ça aussi, bien, ce qui
est au Règlement sur la mobilité, sur la modification de statut préférentiel,
on propose de rejeter en bloc, là, ce qui a été ajouté à ça. Et même on va plus
loin, on propose d'ajouter une disposition voulant que les articles 35 à
39.1 du Règlement sur l'embauche et la mobilité des salariés soient partie
intégrante de toute convention collective pour rattacher le pouvoir d'embauche
régional prioritaire à l'ensemble des travailleurs.
En lien avec la négociation, deuxième
thème, on propose de revoir la mécanique permettant la rétroactivité salariale
pour qu'elle donne véritablement un pouvoir de force équitable entre les
parties qui négocient. Un fonds dédié, tel qu'il est créé, n'amènera pas un
rapport de force sur l'emploi pour régler la convention collective dans les
moments ou dans les délais auxquels il se doit.
Et rattaché à ça, il est plus que
nécessaire de moderniser nos moyens de pression. Nous sommes rendus à l'étape
où on a besoin de moyens de pression alternatifs telles les grèves tournantes
et des dispositions antibriseurs de grève. Nous sommes en 2024, on modernise,
on a droit à un... on a droit aux moyens de pression auxquels le Code du
travail a droit.
Polyvalence des métiers, on l'aborde tout
comme un projet de loi, nous proposons de retirer l'article 72 du projet
de loi, car, selon nous, le mécanisme en place pour donner l'opportunité de
réviser un métier existe déjà à la loi, à l'article 123.1, 14e paragraphe.
Cette mécanique-là a été testée deux fois seulement depuis 2013, il est dur
pour moi de conclure que cette mécanique-là est désuète, elle n'a pas fait ses
preuves encore.
En termes de formation professionnelle, on
propose des états généraux visant à valoriser la formation professionnelle dans
l'industrie. Nous proposons, en lien avec ça, de retirer les formations
écourtées de type AEP. Nous avions jusqu'à tout récemment la fierté d'une
formation professionnelle la plus estimée au Canada, et on est en train de
niveler vers le bas. Ce n'est pas ça que nous, on souhaite. D'ailleurs, nous
avions demandé un forum dédié sur la formation professionnelle dans les
consultations préalables. Celui-ci était prévu le 1er septembre 2023,
a été retiré de l'agenda et n'a jamais été remis au jeu. On se questionne
pourquoi.
Un autre grand absent dans ce projet de
loi là sont des mesures de rétention structurantes. Nous avons beaucoup
d'abandons au cours des cinq premières années de carrière de toutes les
travailleuses et travailleurs. Il faut vraiment aller travailler sur ces
angles-là. En lien avec ça, bien, il faut travailler sur le climat de travail.
On propose d'introduire une responsabilité solidaire entre les employeurs en
matière de harcèlement afin que l'employeur du harceleur soit également
responsable que l'employeur de la victime. Avec le phénomène de coentreprises
que nous avons en ce moment, il est grand temps de moderniser... nous...
M. Picard (Charles-Olivier) : ...nous
avons fait un mémoire à l'occasion du pl 42. Nous vous le réitérons
aujourd'hui, maintenant, car le chantier de construction est un milieu de
travail à part entière. On propose également que l'ensemble des causes... des
clauses normatives administratives puissent faire partie des sujets pouvant être
portés en arbitrage.
À ce titre, il n'est pas normal que je ne
peux pas greffer l'ensemble de ma convention collective. Nous proposons
également de travailler un peu plus fort sur la lutte au travail au noir. Les
actions gouvernementales, en matière de financement, pour aider ces
activités-là, démontrent leur efficacité. Et avec un volume d'heures qui ne
cesse de monter, il est clair qu'il y a des stratagèmes d'évasion fiscale aussi
qui montent. C'est tout simplement un lien de constatation. En matière de
gouvernance, j'aimerais mettre d'avant-plan que le Comité des relations de
travail est une bonne idée, mais ne doit pas couvrir des sujets de convention
collective. Les sujets de conventions collectives appartiennent aux parties
uniquement, n'appartiennent pas au gouvernement. Par contre, il serait beaucoup
plus intéressant que ce comité de relations de travail là se penche sur la loi
R-20 et les règlements qui soient afférents en matière de gestion de
main-d'œuvre.
Également, en matière de gouvernance, on
souhaite que le conseil d'administration revoie un peu la possibilité de vote
au niveau des administrateurs. Nous croyons qu'il n'est pas normal, à ce jour,
que des administrateurs qui ne proviennent pas de l'industrie puissent voter
sur d'autres régimes de retraite, puissent voter sur nos régimes d'assurance
collective et puissent également se pencher sur le fonds de formation des
salariés qui appartient à tous les salariés quelconques et qui reste aux
salariés. Donc, il n'est pas normal, à ce titre-là, qu'on puisse voir ça. Les
mesures de la diversité au projet de loi ne sont pas assez robustes, notre
dernier thème que je souhaite aborder avec vous. Il est clair que les mesures
de diversité devraient être un petit peu plus renforcées pour, d'une part, mettre
en place des programmes d'obligation contractuelle. N'oublions pas que le
gouvernement est le principal donneur d'ouvrage dans l'industrie de la
construction pour certains secteurs.
Donc, c'est notre économie à nous. On peut
bien décider de mettre les mesures qu'on veut sur nos propres projets. Et il
advient assez important de renforcer aussi la conciliation travail-famille, non
seulement sur l'industrie de la construction, mais par les voies d'accès, que
ce soit par la formation initiale ou que ce soit par d'autres façons.
N'oublions pas que les personnes, les femmes qui attaquent notre industrie sont
souvent des personnes en réorientation de carrière et ont des obligations
familiales importantes. Il ne faut pas les oublier quand on pense à la formation
de ces personnes-là. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter
notre période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Oui, merci, Mme la
Présidente. Merci au Syndicat québécois de la construction, vraiment, un, votre
participation, votre contribution aux échanges, la qualité de votre mémoire,
vos recommandations. Puis c'est important, M. Gendron le soulignait au départ,
mais c'est important pour moi de le repréciser. Le projet de loi n'est pas une
finalité, c'est une étape dans un vaste processus de modernisation qui s'est
amorcé, il y a un certain nombre d'années, avec, notamment, les huit
allègements réglementaires et les programmes de formation qu'on est en train de
développer, de repenser à la Commission de la construction du Québec,
notamment, en alternance travail-études. Puis il y a la Loi sur
l'administration des contrats publics. On est plusieurs ministères à être
impliqués dans la planification, l'octroi des contrats publics, notamment, la
transparence, la planification. Et donc c'est vraiment dans cette
perspective-là qu'il faut envisager le projet de loi, là. On s'intéresse
notamment aux relations de travail puis à la gestion de la main-d'œuvre.
• (16 heures) •
Je comprends Charles-Olivier, là,
l'intégration de 35 à 39, même si ce n'est pas tout le monde qui est partisan
de ça, intégrer des articles réglementaires ou des articles de loi dans des
conventions collectives. Mais ce que vous visez surtout, c'est de s'assurer que
la priorité d'embauche régionale soit respectée puis 35 demeure tel quel. Puis,
moi, la mobilité, je le vois beaucoup plus comme une façon... Bien, vous m'avez
entendu tout à l'heure, peut-être, je vais me répéter un peu, mais de
simplifier puis d'éclaircir de quoi qui est extrêmement complexe et appliqué de
façon très variable, parce que les règles ne sont pas les mêmes d'un secteur à
l'autre. Il y a des articles dans la loi, il y a des articles dans les règlements,
il y a des articles dans les conventions collectives de travail sectorielles.
Ça fait que c'est beaucoup plus dans cette perspective-là, d'aider à ce que des
projets de construction se réalisent partout au Québec...
16 h (version non révisée)
M. Boulet : ...puis moi, j'ai
rencontré des personnes dans des chantiers, un à Sherbrooke récemment, puis il
y a des travailleurs qui me disaient : Moi, la mobilité, je la souhaite.
Moi, j'aimerais ça aller travailler dans telle ville pendant un certain temps
pour contribuer à la réalisation d'un projet qui s'inscrit dans la transition
énergétique, là. Tu sais, ce n'est pas... il n'y a rien de symétrique dans l'industrie
de la construction. Je pense que c'est... c'est un trait commun, et la polyvalence,
c'est la même dynamique. Mais, la mobilité, je comprends vos recommandations
puis vos commentaires, mais il faut véritablement la voir comme un outil
additionnel qui va nous permettre de construire plus et de façon équitable le
plus possible un peu partout au Québec.
La rétro, M. Picard, vous dites :
Bon, c'est une avancée, mais vous n'êtes pas pour le fonds. Comment vous voyez
ça, la rétro? Évidemment, vous allez me dire que les parties la négocient, mais
après, parce qu'il y a beaucoup d'instabilité puis de déplacements d'un
chantier à l'autre, d'un employeur à l'autre, comment vous verriez ça sur le
plan pratique?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
effectivement, la rétroactivité, c'est un vœu pieux qu'on veut depuis
longtemps, puis l'avancée que vous faites aujourd'hui, de dire que, bien, on a
la possibilité de la négocier, c'est sûr que nous, on vous rejoint à ce
moment-là, mais la manière que c'est libellé, ça... ça ressemble beaucoup plus
à un fonds d'indemnisation qu'à un fonds de rétroactivité tel qu'il se soit.
Parce que n'oublions pas que le principe d'une négociation, c'est un jeu d'équilibre
et de rapport de force. Dans le jeu d'équilibre et de rapport de force, le
montant de rétroactivité salariale à négocier devient important aussi pour
inciter l'employeur à régler sa convention collective.
Maintenant, pour répondre précisément à
votre question, chacune des heures de travail sont enregistrées à la Commission
de la construction du Québec, et ces heures-là peuvent être retracées.
Maintenant, il faut travailler avec les outils qu'on a pour retracer chacune de
ces heures-là. Et, lorsque l'employeur aura à faire des chèques rétroactifs à
ses travailleurs, ça, c'est un rapport de force qu'on peut aller chercher.
M. Boulet : O.K. Je
comprends. O.K. Moi, je ne suis pas fermé à rien là-dessus. À partir du moment
où on décide d'abroger l'article qui prohibe, après ça, dans l'application
pratique, le fonds de rétroactivité, je trouvais que c'était une excellente
idée pour la mettre en œuvre étant donné qu'on voulait s'assurer que tout le
monde puisse la recevoir, puis des déplacements, puis de la mobilité d'un
employeur à l'autre, mais je trouve que c'est une contribution qui est
intéressante.
M. Picard, la consultation formation, c'est
parce que ça a été contemporain à la mise en place des AEP, les attestations d'études
professionnelles. C'est ça qui a fait en sorte que la consultation... mais elle
se poursuit par ailleurs avec la commission de la construction, le ministère de
l'Éducation, le ministère de l'Emploi, et elle est large, et elle concerne tous
les programmes de formation en alternance travail-études et, bien sûr, le
comité de formation professionnelle, que vous connaissez bien, le CFP.
Le travail... Non, je vais... Le CRT,
Charles-Olivier, j'aimerais ça plus vous entendre parce que vous dites que...
Parce que le CRT, c'est cinq représentants patronaux, cinq représentants
syndicaux, on ne discute pas d'affaires du CFP, du CASIC puis du C.A., bon,
formation professionnelle, avantages sociaux puis C.A. Moi, j'ai toujours pensé
que c'était là le bon forum pour discuter, comme dans toutes les entreprises,
de relations de travail puis d'application des conventions collectives puis de
trouver des solutions pour prévenir des enjeux, puis là vous me dites : Ça
ne devrait pas être ça, mais ça devrait être la loi et le... les règlements?
Est-ce que ce n'est pas un peu empiéter sur le C.A.?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
en fait, l'apport intéressant que le comité de relations de travail peut faire,
c'est de donner... de débattre et d'échanger les questions pour que le C.A.
ensuite les entérine, mais ça doit se faire sur le règlement et la loi R-20, en
aucun cas les conventions collectives, car elles appartiennent aux parties qui
les ont négociées, puis les parties qui les ont négociées, ce n'est pas l'ensemble
des membres du C.A.
M. Boulet : Non, mais il y
aurait cinq représentants patronaux, cinq représentants syndicaux. Mais prenons
l'exemple de Sylvain Gendron. S'il était sur ce comité-là et sur le C.A., il
discuterait au CRT et il aurait entériné les...
M. Boulet : ...c'est un peu
comme ça, Charles-Olivier?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
ça peut être un peu comme ça, mais le CRT, on peut désigner aussi quelqu'un
d'autre aussi pour débattre de la question, pour qu'ensuite nos administrateurs
du CA...
M. Boulet : Il me fait un
demi-sourire, là, il aimerait ça être là.
M. Gendron (Sylvain) : Alors,
M. le ministre, lorsqu'on siège au conseil d'administration, en temps normal,
on ne va pas siéger ni au CRP ni au CAC...
M. Boulet : Normalement, oui.
M. Gendron (Sylvain) : Bien,
on s'assure d'une certaine neutralité, on s'entend, là, pas neutralité, mais
une indépendance.
M. Boulet : Qu'il n'y ait pas
de conflit d'intérêts.
M. Gendron (Sylvain) : C'est
ça, pour qu'il n'y ait surtout pas de conflit d'intérêts.
M. Boulet : Mais je veux
juste pousser un peu plus loin. Donc. Charles-Olivier, est-ce que vous ne
craindriez pas qu'il y ait de la duplication entre le travail fait au CRT et
celui fait par le CA ?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
absolument pas, parce que le CA ne sont pas des gens qui sont experts dans
toutes les matières. Un autre groupe syndical le disait ce matin, ce comité-là
peut donner de l'air au CA en débattant les questions auxquelles le CA devra
entériner par la suite.
M. Boulet : O.K. Et
l'interprétation puis l'application des conventions, vous dites que le CRT ne
joue pas là-dedans?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
exactement, parce que nos conventions collectives, au moins trois sur quatre,
ont déjà ce comité-là à l'intérieur de celles-ci. Puis si on ne s'entend pas,
bien, on va en grief d'interprétation tout simplement. C'est déjà prévu. Et à
l'intérieur de votre projet de loi, vous avez enlevé l'étape préalable de
l'autorisation par la commission.
M. Boulet : C'est un bon
point. O.K. Je comprends.
Travail au noir, c'est parce que ça
revient dans un certain nombre de mémoires. Est-ce que vous connaissez le
groupe ACCES Construction? Oui, bon, pour ceux qui sont moins familiers avec
ça, c'est important pour moi de le rappeler, c'est un comité qui... ACCES, ça
veut dire Action Concertée pour Contrer les Économies Souterraines, et c'est un
comité qui regroupe la CNESST, la Régie du bâtiment puis la Commission de la
construction du Québec et ils réalisent des projets, les trois organismes
concernés pour lutter contre l'évasion fiscale. Et à chaque année, il y a des
budgets qui sont présentés, il y a des montants d'argent considérables, et ça
donne d'excellents résultats. Ça fait que simplement pour rappeler qu'il y a
des subventions considérables. Là, je pense, pour les trois, là, c'est en 2023‑2024,
c'est 10,7 millions de dollars consacrés à la lutte à l'évasion fiscale
spécifiquement dans l'industrie de la construction, donc avec évidemment des
bénéfices avantageux pour la population québécoise.
L'autre affaire, bon, l'obligation
contractuelle, ça, ça revient aussi. M. Picard, puis là, c'est sûr que ce qui
est souvent soulevé, c'est que c'est incompatible avec les ententes
internationales, les ententes de commerce qui nous lient avec d'autres pays, de
ne pas obliger d'avoir une obligation contractuelle, ce qui ne nous empêche pas
cependant d'avoir toutes les mesures incitatives, notamment pour les bassins,
pour l'accès, pour l'émission des cartes de... tu sais, en faveur des femmes,
ce qu'on a dans le programme d'accès à l'égalité, puis à l'égard desquels on fait
bénéficier les groupes issus de la diversité. Est-ce que s'il y avait... bon,
l'obligation contractuelle, vous l'avez mentionnée, est-ce qu'il y a autre
chose qui pourrait nous aider à accroître l'arrivée des personnes issues de la
diversité dans l'industrie de la construction? Puis là, je réfère aux personnes
immigrantes, aux Premières Nations, aux minorités visibles, puis les personnes
en situation de handicap. Est-ce que vous avez fait une réflexion pour nous
proposer de quoi pour être encore plus musclés à cet égard-là?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
c'est là que notre réflexion rentre peut-être un peu en contradiction avec la
vôtre. Étant donné que nous, on travaille des mesures de rétention au lieu de
miser sur un accès élargi et l'attraction.
M. Boulet : L'attraction.
M. Picard (Charles-Olivier) : Effectivement.
Mais pour nous, les obligations contractuelles, quand on regarde ce qui se fait
dans certaines communautés autochtones où est-ce qu'ils sont responsables à
100 % des contrats qui se passent sur leur territoire, il y a des
négociations qui sont en faites, des retombées qui sont faites. Donc, comme le
gouvernement est un principal donneur d'ouvrage dans plusieurs ministères,
organismes, ou trésor, bien, on se dit que pour les contrats qui appartiennent
aux Québécois, il faut que les retombées appartiennent aux Québécoises aussi.
• (16 h 10) •
M. Boulet : Tout à fait. Et
ils ont le même souci, la même réalité dans l'octroi, bien sûr, des contrats
publics. On s'intéresse, M. Picard, ceci dit, à la rétention dans le programme
d'accès à l'égalité, puis vous étiez là pour le projet de loi n° 42...
M. Boulet : ...il y avait...
tu sais, le sondage Léger, et je m'excuse de le rappeler, là, qui démontrait
que 79 % dans notre secteur étaient soit témoins ou subissaient, mais ne
disaient pas, parce que par crainte de représailles ou de perdre leur emploi.
Puis, quand on a des articles dans la loi 42 qui protègent les personnes
qui collaborent à des signalements ou qui signalent contre des mesures de
représailles ou contre des ruptures de lien d'emploi, je pense que c'est quand
même un pas en avant, parce que c'est une des causes qui est souvent invoquée,
notamment par les femmes, pour abandonner l'industrie de la construction, là,
dans les premières années. Est-ce que... Donc, bien là, je vais vous poser
donc, en rapport avec la rétention : Il y a-tu une idée additionnelle que
vous pourriez partager avec nous pour améliorer la rétention?
M. Picard (Charles-Olivier) : Je
vais laisser mes consoeurs répondre.
Mme Brissette (Julie) : Oui,
bien, en fait, en lien avec le harcèlement, là, vous l'avez... vous l'avez bien
mentionné, là, c'est quand même quelque chose qui, bon, a tendance à
s'améliorer, mais dont on est un peu trop présent... un peu trop présent
encore. Dans le fond, dans la mémoire, ce qu'on propose, c'est une forme...
dans notre jargon, là, on appelle ça une responsabilité solidaire. Donc, ce
qu'on constate avec le recours en lien avec la loi sur les normes du travail,
c'est que lorsqu'on veut dénoncer ou mettre le recours en place, la seule
personne sur qui on peut le faire, c'est l'employeur de la victime elle-même.
Par contre, la dynamique d'un chantier de construction fait en sorte que, très
souvent, la victime et l'harceleur vont être embauchés par deux entreprises
totalement différentes. Et là, avec le recours comme il est présentement, on a
un employeur de la victime qui est très, très limité dans les moyens qu'il peut
faire pour faire cesser la conduite. Et un employeur qui embauche l'harceleur
qui lui a les possibilités de le faire, mais parce qu'il est non imputable, a
tendance à se mettre la tête dans le sable et dire : Bien, moi, je n'ai
pas de conséquence, donc pourquoi j'agirais là-dessus? Donc, en mettant cette
forme de responsabilité là, ça fait en sorte que le harcèlement devient un peu
l'affaire de tous et permet en fait, là, une meilleure... une meilleure façon
d'agir, là, autant pour l'employeur du harceleur.
M. Boulet : O.K., bien, il
faudrait, Mme Brissette, qu'on revoie le PL 42. Mais, quand on dit :
Provenant de toute personne, ça peut être un fournisseur ou un client, mais,
dans le contexte que vous soulevez, à mon avis, puis là il faudrait que je
relise le libellé, mais une plainte pourrait être soumise à l'employeur du
harceleur. Parce que, quand tu parles de prévention, puis de la possibilité de
faire un recours pour que les torts soient réparés ou pour avoir un remède tel
que prévu à la loi, il faut que tu aies une possibilité, sans passer
nécessairement par la responsabilité solidaire. Parce que la responsabilité
solidaire, c'est un autre mécanisme, tu sais, la responsabilité conjointe et
solidaire. Mais la personne, à mon sens, peut utiliser le mécanisme de plainte
et de prise en charge et faire un recours à l'égard de l'employeur du
harceleur, puis que le harceleur ait à rendre des comptes, selon moi. On ne
peut pas laisser une personne qui côtoie une autre sur un même... dans un même
environnement de travail, parce qu'il y a deux employeurs distincts, ne pas
bénéficier d'aucune protection. Je ne suis pas d'accord avec ça. Ça fait que je
vous rejoins totalement là-dessus. Et c'est beaucoup par le canal du projet de
loi n° 42 qu'on aura... qu'on a la réponse. Mais, si j'ai à vous donner
l'intention que j'avais, c'est certainement de protéger cette personne-là de la
manière que je viens de l'expliquer, mais c'est un excellent point.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Boulet : Merci beaucoup.
Non, mais sincèrement, merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
M. le ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonjour, messieurs, Mesdames. Donc, pour une fois que je ne
vais pas dire : Bonjour, Messieurs, c'est effectivement très encourageant.
Je vais aller dans l'ordre de votre mémoire que vous nous avez présenté. Donc,
d'abord, donc, sur la question de la mobilité de la main-d'œuvre, je pense que
vos propos, donc, sont... votre prise de position, donc, elle est très claire.
Vous... vous ne vous prononcez pas donc, sur la question des régions
limitrophes, là, donc vos prédécesseurs qui sont donc venus nous présenter leur
mémoire, un peu plus tôt, donc, nous ont parlé, donc, soit, donc, de prises de
position ou de certaines pistes de solutions, là, sur la question du... donc,
qui a fortement été évoquée, là, dans l'espace public, là, des travailleurs qui
voudraient donc pouvoir travailler...
Mme Cadet : ...passer dans une
région à l'autre, donc, qui est très, très proche, dans les régions CCQ. Donc,
je vous vois hocher de la tête, là, Charles-Olivier, donc je vous laisserais
élaborer là-dessus.
M. Picard (Charles-Olivier) : Oui,
bien, d'ailleurs, c'est une réalité qu'on vit beaucoup avec nos travailleurs.
Ayant notre siège social à Saint-Hyacinthe, bien, l'exemple de tantôt, entre
Saint-Hyacinthe et Drummondville, c'est quelque chose qu'on a vu souvent.
Dans le passé, la Commission de la
construction du Québec administrait, c'était une règle administrative, une zone
tampon d'environ 50 et 60 kilomètres. J'ai été étonné que ce ne soit pas
dans le projet de loi, qu'on rende cette règle administrative là dans
l'intention du législateur, parce que c'est ça qui était appliqué au niveau de
la Commission de la construction du Québec jusqu'à il y a quelques années. Je
pense que ça a cessé dû à certains recours qui ont été entrepris par le passé.
Mais, si ça aurait pu être une solution, j'ai été étonné de ne pas le voir dans
le projet de loi.
Par contre, comme nous, notre intention
est d'abord de protéger les emplois en région, à titre d'exemple, je ne
comprendrais pas pourquoi un travailleur du Bas-Saint-Laurent serait en
compétition pour un emploi à Rimouski avec quelqu'un qui viendrait de la région
de Québec ou Montréal. Nous, notre intention, c'est de protéger ces emplois-là
d'abord.
Mme Cadet : D'accord. Merci.
Puis, à défaut... Puis on a aussi vu, dans d'autres mémoires, là, la question,
donc, des... du statut préférentiel... le 15 000 heures ou, bon, le
750 heures de travail sur 24 mois pour un même employeur. À défaut,
vous, est-ce qu'il y aurait un certain... un certain seuil que vous dites,
donc, ça, ce serait plus acceptable pour vous?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
le règlement actuel prévoit 1 500 heures sur 24 mois. Si on le
reporte sur une base annuelle, c'est très peu. Si on le reporte sur une base,
que quelqu'un a une stabilité d'emploi au sein de cette entreprise-là, c'est
très peu encore. Donc, nous, on pense que le seuil actuel est nettement
suffisant.
Mme Cadet : Merci.
Maintenant, sur le processus de négociation, donc... poser des questions, donc,
sur la notion du fonds, là. C'est bien clair, dans votre mémoire, puis vous
avez répondu aussi à cette question-là au ministre. Donc, vous semblez, donc,
dubitatifs, donc, quant à ce mécanisme-là. C'est vraiment, donc, au niveau de
la faisabilité pour vous que ça accroche?
M. Picard (Charles-Olivier) : Oui,
bien, c'est vraiment au niveau de la faisabilité. Puis c'est aussi sur c'est
quoi l'impact que... que ça va avoir sur l'employeur qui retarde indûment les
négociations. Est-ce que l'employeur du travailleur... Là, c'est le travailleur
qui le vit, là, directement. Est-ce que l'employeur du travailleur va avoir un
rapport de force à exercer contre lui dans un contexte comme celui-là? Avec le
projet de loi qu'on a là, ça ressemble beaucoup plus à un fonds d'indemnisation
qu'à un fonds de rétroactivité.
Mme Cadet : Donc, pour vous,
ça ne change rien, là, comme mécanisme ou...
La polyvalence des métiers. Donc, au
niveau de l'article 72 du projet de loi, donc, vous n'êtes pas les
premiers, donc, à nous dire que la notion de polyvalence n'est pas très claire
ou ne... la... n'est pas assez définie. Comment... Et puis là, vous ajoutez
dans votre mémoire, donc, la question, donc, de baliser le travail des
inspecteurs, donc, afin de respecter, donc, le principe de polyvalence. Je
comprends que votre recommandation, c'est le retrait de l'article 72... en
tout cas, donc, à défaut, donc, comment vous, vous redéfiniriez, donc, par
exemple, les notions de tâches? Puis on a entendu, donc, d'autres groupes avant
vous, donc, nous dire qu'il faudrait, donc, revoir, donc, l'annexe au niveau des
tâches ou vous parlez aussi, donc, de définir, donc, la notion, donc, de courte
durée aussi. Donc, comment... Quelles seraient donc vos recommandations à cet
égard?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
libellé comme suit, c'est sûr, comme vous le constatez, nous, on propose de
retirer complètement. Mais n'oublions pas que si on avait voulu réellement
utiliser les processus prévus à la loi sur la redéfinition du métier ou de
certains métiers, de certaines tâches, les deux sujets qui auraient été soumis
à l'ordre du jour n'auraient pas été les engins polyvalents pour soulever des
charges et n'auraient pas été l'industrie ferroviaire, auraient été beaucoup
plus larges pour couvrir d'autres tâches.
Il y a un processus prévu à la loi, et le
processus prévu à la loi en ce moment n'a pas été utilisé pour ces
questions-là. Donc, c'est pour ça qu'on se questionne, à savoir, bien, on
répond à qui? On ne répond certainement pas aux travailleurs. Puis si les
employeurs nous disent, bien, qu'on n'est pas assez efficaces, la chaîne
logistique, la chaîne d'approvisionnement, l'ordonnancement du travail en
chantier, ça n'appartient pas aux travailleurs, ça appartient à l'employeur.
Mme Cadet : Puis, en fait,
vous... commencé à répondre à ma prochaine question, qui était, bien,
justement, donc, comment est-ce qu'on améliore la productivité des
travailleurs? Donc, si c'est... si, pour vous, ce n'est pas à travers, donc, le
mécanisme de polyvalence qui est inscrit au projet de loi, donc, je vous
entends, donc, sur la planification des travaux, donc, est-ce qu'il y a
d'autres éléments, donc, qui nous permettraient d'améliorer la productivité de
l'industrie pour, donc, encore une fois, donc, construire, donc, plus vite, à
moindre coût, plus rapidement?
• (16 h 20) •
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
plus vite, à moindre coût, plus rapidement est un vœu pieux pour plusieurs...
M. Picard (Charles-Olivier) : ...mais
il ne faut pas oublier la qualification puis la reconnaissance de ces
travailleurs-là. Ces travailleurs-là deviennent plus efficaces avec la
formation adéquate initiale, pas avec des formations de courte durée. Et s'ils
sont rentrés par des processus alternatifs, exemple les bassins, bien, il faut
s'assurer que ces travailleurs-là soient rattachés à un parcours de formation
professionnelle par le perfectionnement, le perfectionnement qui appartient à
tous les travailleurs de façon indépendante.
Mme Cadet : Merci. Vous
m'avez entendu dans l'espace public, dans les derniers mois, depuis le
lendemain de l'annonce en octobre dernier, donc, par, donc, des différentes
failles des attestations d'études professionnelles, donc, de courte durée,
mais... c'est assez clair, donc vous remplaceriez, donc, ce... ce programme-là,
donc, qui vient boucher un trou, là, de façon à très court terme, donc par...
par la ATE, de l'alternance travail études, la formation... la formation
professionnelle.
Vous avez... vous êtes mitigés, là, sur la
question de la reconnaissance de l'expérience de travail des travailleurs issus
de l'immigration, pour vous, donc, je comprends, donc, que la RAC, donc, ça
doit demeurer aussi au niveau du système de l'éducation. Puis, au delà, donc,
de ça, je sais que vous avez, donc, de la diversité, là, pour ce qui est de...
de l'immigration, donc, comment est-ce qu'on s'assure, donc, que le ratio des
personnes immigrantes soit donc comparable à leur poids démographique dans la
société, dans l'industrie de la construction?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
c'est sûr que si on parle de RAC au niveau de la reconnaissance des acquis
scolaires, ça doit appartenir au système scolaire, c'est clair. Si on parle de
reconnaissance d'heures de travail faites hors Canada, et que ça devient un
mandat de la Commission de la construction du Québec, il va falloir que la
Commission de la construction du Québec travaille avec les partis pour établir
c'est quoi, les reconnaissances de chacun des métiers. Puis nous, bien, on a le
comité sur la formation professionnelle de l'industrie de la construction et on
a également l'ensemble des sous-comités professionnels de métiers où siègent
les représentants syndicaux de métiers et certains employeurs. Donc, avec ça,
on va être capables, industrie, de se prendre en charge et de dire qu'est ce
qui est une... qu'est ce qui est une expérience de travail équivalente au
Québec.
Mme Cadet : Merci.
L'assujettissement... donc, vous nous parlez de la question de la machinerie de
production, donc vous recommandez l'assujettissement de l'installation,
réparation et de l'entretien de la machine production, pourquoi?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
en fait, c'est un voeu pieux, je pense, de l'industrie en ce moment de ravoir
ces travaux-là dans le champ d'application. Pourquoi? Parce que c'est les mêmes
employeurs qui travaillent hors assujettissement ou en assujettissement. Il
devient un peu illogique de voir que, jour un, je suis Code du travail, jour
deux, je suis R-20. Donc, c'est d'avoir une certaine suite logique. Et comme
beaucoup de ces travaux-là sont connexes à de la machinerie de bâtiment, c'est
un peu technique ce que je vous dis là, mais ça fait partie de la coquille
intégrante de certains bâtiments, du moins ça se rattache à ces systèmes-là.
Nous, c'est une simple question logique puis c'est des heures qui appartiennent
à l'industrie de la construction, selon nous.
Mme Cadet : Merci. Puis
enfin, donc, en matière de diversité, je suis assez d'accord avec vous, donc,
les mesures ne sont assez robustes. Je pense que c'est un bon terme.
Rapidement, donc, vous parlez donc de
mettre des mesures d'accès aux programmes de formation initiale, je vous ai
entendu sur le programme d'obligation contractuelle, là, c'est très clair, les
incitatifs supplémentaires. Donc, peut-être élaborer sur ces questions-là.
Mme Pelletier (Isabelle C.) : Certainement.
Étant donné qu'il y a plusieurs femmes qui quittent l'industrie peu de temps
après leur entrée, on parle d'un an, cinq ans, on en a parlé, tous les
intervenants ont parlé du sujet depuis hier, il faut passer par la formation
professionnelle. Il y a une meilleure rétention lorsque les gens passent par la
formation initiale, le D.E.P. Les femmes qui intègrent l'industrie, rarement ce
sont des jeunes qui sortent du secondaire. Souvent, c'est de la réorientation
de carrière. Les appels qu'on a, c'est des femmes qui ont des enfants, qui ont
des obligations financières, et lorsqu'on leur explique de quelle manière elles
peuvent intégrer l'industrie, elles se découragent ou elles passent directement
par le bassin, parce que c'est la méthode la plus rapide et facile d'obtenir un
revenu pour leur famille. Donc, même si on pousse sur la formation, de partir
un an et demi en formation, c'est impensable pour elles. Donc, on le sait qu'il
y a déjà des programmes qui existent au niveau des instances gouvernementales
pour favoriser la formation. Nous, on croit qu'au lieu d'investir l'argent ou
de dépenser l'argent qu'on pourrait dire pour les A.E.P., on pourrait
l'investir dans la formation initiale, les D.E.P., pour favoriser l'accès et
améliorer le financement aussi de ces gens-là, ce serait un bon incitatif pour
les inciter à aller passer un an et demi sur les bancs d'école. Cette
formation-là ensuite nous aide...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je suis désolée, c'est tout le temps que nous avions. Merci beaucoup.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole aux députés d'Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à
vous, M. le député
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous quatre. Je vous laisserais terminer, si vous voulez.
Mme Pelletier (Isabelle C.) : Bien,
je vous remercie...
Mme Pelletier (Isabelle C.) : ...Donc,
en ayant une formation initiale complète, les femmes intègrent mieux les
chantiers, elles sont déjà préparées. Elles ont acquis des compétences en
formation et elles sont plus confiantes, aussi, lorsqu'elles rentrent sur les
chantiers, de faire leur métier. Elles savent de quoi elles parlent. Et il y a
une meilleure rétention, elles quittent moins les chantiers lorsqu'elles
passent par la formation initiale.
M. Leduc : J'ai bien retenu
la phrase que vous aviez tantôt, comme échange avec le ministre, où est-ce que
lui se concentre beaucoup sur l'attraction, mais il laisse un peu tomber la
rétention, et c'est là où vous intervenez. Donc, je comprends que
l'attestation, ce n'est pas la piste intéressante à long terme. Vous parlez du
D.E.P. D'autres groupes parlent de l'alternance études-travail. Est-ce que ça
fait partie de vos propositions, ça aussi?
M. Picard (Charles-Olivier) : Absolument.
Il faut trouver une façon de s'adapter aux travailleurs du futur. Puis les gens
qui passent par la formation professionnelle, comme l'a souligné ma consoeur, ce
sont des gens, des fois, qui ont des obligations familiales qui sont
différentes, et on doit s'adapter à la réalité de ces gens-là. Mais,
effectivement, en plus, l'ATE permet de tester les apprentissages qu'on vient
d'avoir, et de caler, et de valider : Suis-je dans la bonne carrière? Et,
quand la réponse est oui, c'est vecteur de succès.
M. Leduc : Quand on apprenait
dans le budget, donc, hier, qu'il y avait prolongation de cohortes A.E.P., ce
n'est pas une bonne nouvelle, là?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
pour nous, ce n'est pas une bonne nouvelle, parce que la vraie diplomation qui
doit être reconnue, c'est le diplôme d'études professionnelles. Au sein de nos
équipes, j'ai, à titre de représentant syndical, un ancien enseignant de ce métier-là,
il connaît bien cette réalité-là, et la première chose qu'il m'a dit :
Écoute, Charles-Olivier, ce n'est pas vecteur de succès pour l'avenir.
M. Leduc : Je comprends. Vous
parliez du fonds d'indemnisation, vous êtes assez critique de la proposition
sur la rétro. Qu'est-ce qu'on fait comme alternative? On laisse ça tel quel...
c'est-à-dire, on modifie la loi pour dire qu'on peut faire de la rétro, dans
les conventions, puis on laisse les parties négocier?
M. Picard (Charles-Olivier) : Exactement,
puis c'est à peu près représentatif de ce que vous aviez déposé, il y a
quelques années, comme projet de loi.
M. Leduc : Ah! O.K. Des gens
qui ont fait leur devoir. C'est bien. Un beau projet de loi.
M. Picard (Charles-Olivier) : On
était là.
M. Leduc : Merci. Le ministre
parle beaucoup du fait que son projet de loi vise à construire plus de maisons,
notamment, plus d'infrastructures. Vous, est-ce que vous êtes capable de me
pointer un article, dans le projet de loi, qui fait en sorte qu'il va y avoir
plus de maisons construites l'année prochaine?
M. Picard (Charles-Olivier) : Ma
réponse va être simple : Non.
M. Leduc : O.K. Donc, ce
n'est pas ça, le but du projet de loi, selon vous, en tout cas, ce ne sera pas l'effet.
Je reviens peut-être sur le régime du travail. Là, on a parlé de fonds
d'indemnisation, la loi anti-scam. Pourquoi c'est important de vous intégrer
dans la loi anti-scam?
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
c'est absolument important, parce que c'est de respecter les travailleurs,
aussi, qui font le choix d'aller revendiquer leurs conditions de travail en
laissant de côté, un peu, leur salaire. Nous, on est là pour eux, on a un fonds
de grève puis on les accompagne. Mais, tu sais, c'est un rapport de force
équitable à aller rechercher, puis c'est respecter la réalité des gens qui se
battent pour leurs conditions de travail. Il n'est pas normal qu'on soit le
seul secteur d'activité, pratiquement, au Canada, à avoir ça, parce que, même
au fédéral, ça semble se régler en ce moment.
M. Leduc : Bien oui, c'est
ça, ça va se régler au fédéral. On va être la seule juridiction... En
construction, ce sera le seul domaine qu'il n'y aura pas cette application-là,
là, au Québec.
M. Picard (Charles-Olivier) : Exact.
M. Leduc : Bon, c'est un peu
spécial. Puis sur les griefs, pouvoir faire des griefs sur le salariat, vous
êtes là-dedans aussi?
M. Picard (Charles-Olivier) : Sur
le salariat, on est là-dedans aussi, mais il ne faut pas oublier l'ensemble des
mesures administratives et l'ensemble des mesures normatives de la convention.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, c'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je cède la parole au
député de Jean-Talon.
M. Paradis : Merci beaucoup
pour votre présence et votre mémoire. On a 2 min 38 s, j'en ai
déjà pris 15. Je vais vous poser deux questions, pour essayer de faire en sorte
qu'on maximise notre temps. La première chose, c'est que vous dites
qu'actuellement le projet de loi aurait comme effet de venir régler une
question qui est judiciarisée actuellement, dont on n'a pas encore vidé les
tenants et aboutissants devant les tribunaux, celle de la mobilité. Et non
seulement ça, vous dites : Bien, nous, on veut maintenir les clauses
actuelles, mais on veut, en plus, faire en sorte qu'on va enchâsser les
dispositions du règlement qui encadrent la mobilité. Qu'est-ce que vous
répondez à ceux qui disent que, bien, c'est, justement, un des principaux
écueils à la flexibilité, puis à la productivité, puis à l'efficacité dans le
domaine de la construction? Un.
Deuxièmement, j'ai beaucoup aimé la phrase
où vous dites que le sujet de la formation professionnelle est le grand oublié
du projet de loi, vous dites ça, et là vous dites : Ça prend des états
généraux sur cette question-là, puis il faut mettre fin aux formations de
courte durée qui mènent à une A.E.P. Est ce que ces états généraux doivent
avoir lieu avant qu'on continue à discuter de ce projet de loi? Est-ce que c'est
absolument essentiel? Est-ce que ce n'est pas ça, pour vous, le coeur, là, de
la question? Vous dites que c'est une grande fierté dans notre domaine de la
construction.
• (16 h 30) •
M. Picard (Charles-Olivier) : Bien,
c'est une grande fierté parce qu'on est... le seul secteur d'emploi,
construction, au Canada... c'est-à-dire, au Québec, on est l'exemple à suivre,
par la qualité de la formation indépendante. Donc, ça, c'est bien important.
Puis les états...
16 h 30 (version non révisée)
M. Picard (Charles-Olivier) : ...généraux
sont à tenir le plus rapidement possible. C'est pour ça que la partie syndicale
avait demandé un atelier dédié à la formation professionnelle dans les
conditions préalables.
Maintenant, à votre autre question sur la
mobilité, bien, l'ingérence dans nos conventions collectives, ça n'a juste pas
sa place. Puis, si les parties patronales souhaitaient le régler de bonne foi,
bien, on l'aurait réglé à travers une négociation collective. Si on se reporte
à la négociation de 2017, c'est un peu plate de mettre la négociation sur la
place publique en ce moment, mais je suis forcé de le faire, d'un côté, les
patrons voulaient le négocier, et, d'un autre côté, on fait un recours au
tribunal. La bonne foi n'est pas là, puis malheureusement on retrouve ça dans
le projet de loi aujourd'hui.
M. Paradis : Est-ce que... Il
me reste combien de temps?
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Paradis : Mais est-ce
que... Parce que là on pourrait vous dire là-dessus : Oui, mais là on
essaie de faire des ouvertures, puis vous, vous dites : Non, non, je ne
suis pas prêt à aller vers là, je suis prêt... je veux encore revenir vers là
en bétonnant les clauses actuelles, en enchâssant les dispositions du
règlement.
M. Picard (Charles-Olivier) : Exactement.
On veut les enchâsser parce que la convention collective, c'est le principal
contrat de travail du travailleur et de la travailleuse, puis le faire
respecter, c'est important pour nous.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Donc, Mme Brissette, M. Picard, Mme Pelletier et M. Gendron, merci
pour votre contribution à nos travaux.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre à nos prochains invités de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 31)
(Reprise à 16 h 38)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue à la Corporation
des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec et à la Corporation des maîtres
électriciens. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à une période d'échange avec les élus.
Donc, je vous invite à vous présenter et à
commencer votre exposé, s'il vous plaît.
M. Kingsbury (Erik) : Bonjour,
Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. Les députés. Nous tenons, tout
d'abord, à vous remercier de nous donner l'opportunité de vous adresser nos
observations concernant le projet de loi modernisant l'industrie de la
construction. Je suis Erik Kingsbury, président de la Corporation des maîtres
électriciens du Québec, la CMEQ. Je suis accompagné de Me Julie Senécal,
directrice générale et vice-présidente exécutive de la CMEQ. Également, avec
nous, M. Beauchamp, président de la CMMTQ, et Me Steve Boulanger, directeur
général de la CMMTQ.
• (16 h 40) •
La CMEQ et la CMMTQ sont ensemble, devant
vous, aujourd'hui, puisque... ayant été fondées par des lois d'ordre public
similaires en 1949...
M. Kingsbury (Erik) : ...1950,
leurs préoccupations et observations à l'égard du projet de loi sont communes.
M. Beauchamp (Denis) : ...transformations
ont pour but d'augmenter la compétence et l'habileté de leurs membres en vue
d'assurer au public une plus grande sécurité. Elles ont également, depuis 2001,
un mandat gouvernemental quant à la qualification professionnelle de leurs
membres. Il leur appartient de délivrer, suspendre ou annuler la licence
d'entrepreneur de ceux-ci. Depuis 2022, les... Les deux corporations
administrent également le règlement sur la formation continue de leurs mains.
Aujourd'hui, la CMMTQ regroupe plus de 2 900 entrepreneurs en
construction, de partout au Québec, spécialisés en mécanique de bâtiment,
particulièrement en plomberie et chauffage, et des entrepreneurs en
réfrigération et en protection incendie peuvent aussi en faire partie.
M. Kingsbury (Erik) : La
CMEQ regroupe l'ensemble des entrepreneurs électriciens répartis à travers le
Québec, actuellement au nombre de plus de 3 800.
M. Boulanger (Steve) : Donc,
en plus d'avoir été créées par des lois particulières, les corporations sont
reconnues à titre d'associations d'entrepreneurs dans la loi R-20. Il est
important toutefois de vous spécifier qu'on n'est pas directement impliqués
dans les relations de travail. C'est un mandat qui incombe davantage,
précisément dans la loi, à l'association d'employeurs ou aux associations
sectorielles d'employeurs que cette commission va d'ailleurs entendre. Donc,
nos commentaires qu'on va formuler, ça va moins toucher à proprement parler au
régime de relations de travail, hormis une grande réserve qu'on se doit de souligner,
une sérieuse réserve sur la rétroactivité salariale, qui est inconciliable, à
notre avis, avec le régime actuel des relations de travail. Les associations
qui ont un mandat spécifique pourront vous entretenir à ce sujet davantage. Nos
commentaires, nous, ont été formulés dans une perspective en lien avec nos lois
constitutives, avec un objectif, celui de l'amélioration de la productivité.
Et en ce sens-là, on salue le projet de
loi qui présente de belles avancées pour moderniser notre industrie, au premier
chef la polyvalence des métiers. Alors, on salue l'assouplissement qui est
inclus dans le projet de loi. On vient tenter d'accroître la polyvalence parce
qu'un cloisonnement qui serait trop étanche entre les tâches des métiers, à
notre avis, est un frein à l'efficience puis à la productivité. On est d'accord
avec la voie qui a été choisie également pour introduire le concept qui est
balisé, donc, de façon générale, au lieu d'y aller avec une liste de tâches qui
aurait dû être très spécifique à l'intérieur de la réglementation. Donc, on
pense que c'est une bonne voie. Toutefois, la polyvalence, elle doit répondre
en tout temps à un impératif de santé, un impératif de sécurité pour les
travailleurs, mais aussi pour les utilisateurs des installations, notamment
mécaniques électriques, qui doivent être sécuritaires, conformes aux différents
codes et normes, efficaces, bien fonctionnelles. Et on pense que le législateur
nous a entendus, ont fait un bon choix en excluant l'application du principe de
polyvalence à des métiers davantage dangereux, à risque pour le public, comme
celui d'électricien, de tuyauteur, de mécanicien de protection incendie et de
frigoriste.
On attire l'attention des parlementaires
sur l'arrimage qui est toutefois souhaité entre le... certes, la polyvalence
dans la loi R-20 et également les licences d'entrepreneur. Donc, les...
C'est un peu l'équivalent, l'entrepreneur embauche des travailleurs, et chacun
a un champ d'action circonscrit dans sa spécialité. Or, il existe pour les licences
la notion de travaux connexes, donc qui permet des travaux hors la
sous-catégorie de licence, un peu comme on le fera avec la polyvalence. Ce
qu'il faut s'assurer, c'est de mieux encadrer. Les critères sont différents. Je
pense que l'objectif est le même, flexibilité et productivité. Les critères
sont différents dans les deux lois. Alors, il faudra s'assurer de bien encadrer
la notion de travaux connexes et s'assurer de l'arrimage avec la polyvalence
des métiers. C'est une recommandation que nous formulons.
Mme Senécal (Julie) : Un
autre aspect du projet de loi qui nous interpelle, c'est l'exclusion de la R-20
des travaux exécutés par les salariés permanents des offices d'habitation.
Donc, ces travaux-là deviennent des travaux hors construction, comme on dit
dans notre jargon. Or, une croyance populaire tenace est à l'effet que hors
construction équivaudrait à absence de réglementation, ce qui est tout à fait
faux. En fait, pour les métiers plus à risque, comme l'électricité, la
plomberie, le chauffage ou la réfrigération, le salarié doit toujours être
qualifié. Il doit détenir un certificat de qualification délivré par
Emploi-Québec. Donc, les travaux ne peuvent pas être faits par des concierges,
par exemple, ou des personnes à tout faire. Donc, c'est une très grande
méconnaissance à cet égard, et c'est d'autant plus important de rectifier le
tir qu'une mauvaise exécution par des personnes non qualifiées peut causer des
dommages importants au bâtiment et compromettre évidemment la vie et la
sécurité...
Mme Senécal (Julie) : ...des
travailleurs et des habitants. Donc, il est primordial, et on en fait une des
recommandations de... au moment où on vient élargir les travaux hors
construction, de s'assurer de mettre en place les moyens de communication,
d'information, pour diffuser, justement, la réglementation applicable aux
travaux hors construction.
Au niveau de l'accès à l'industrie, bien,
soulignons que, particulièrement en électricité, plomberie, chauffage, les
besoins sont particulièrement criants. Une bonne nouvelle, en ce qui nous
concerne : il y a de l'intérêt, il y a de l'intérêt des jeunes envers nos
métiers. Il y a des listes d'attente pour accéder aux D.E.P. dans nos métiers.
Donc, il y a plus de demandes que de places disponibles et il y a plus de
besoins dans l'industrie qu'il y a de places disponibles aux D.E.P. Donc, la
solution est simple, augmentons les places au niveau du D.E.P. C'est déjà un
pas franchi par le gouvernement, qui a annoncé, dès janvier 2024,
l'augmentation de la capacité d'accueil dans nos D.E.P. C'est ce que nous
saluons, mais il faut poursuivre en ce sens-là, il faut aussi s'assurer de la
disponibilité, c'est très important de ces formations en région, parce qu'avec
la pénurie de logements, ce qui se passe, c'est que l'étudiant qui est
intéressé par un métier de l'industrie de la construction, mais qui n'est pas
offert dans sa région, bien, il va... il n'ira pas dans une autre région parce
qu'il n'aura pas de logement dans l'autre région. Donc, ça creuse le déficit de
main-d'œuvre qualifiée en plomberie et en électricité dans les régions. Donc,
ça, c'est... on demande vraiment de s'assurer de la disponibilité en région, et
d'accélérer, également, le processus d'actualisation des D.E.P., qui est
beaucoup trop long. Il faut être plus agile à ce niveau-là parce qu'on a besoin
des D.E.P. qui sont à jour. Le processus est trop long pour... On peut en
profiter également pour introduire de l'alternance travail-études, qui fait
consensus dans l'industrie, donc, c'est une belle... une belle voix prometteuse
pour revitaliser le D.E.P.
Et, s'il est important de pouvoir compter
sur une formation initiale de qualité, bien, ce n'est pas suffisant. Pour
obtenir une industrie plus productive et performante, il faut aussi que les
compagnons et les apprentis maintiennent leurs compétences, leurs connaissances
à jour tout au long de l'exercice de leur métier. Depuis le 1ᵉʳ avril 2022, les
membres des corporations sont pris en main et sont assujettis à des obligations
de formation continue obligatoire. On vous soumet qu'il est tout aussi
nécessaire que leurs travailleurs, ceux qui exécutent les travaux sur les
chantiers, aient aussi... soient eux aussi assujettis au même type
d'obligation.
En terminant, nous espérons maintenant que
la modernisation se poursuivra avec la révision de l'autre loi-cadre de
l'industrie, soit la Loi sur le bâtiment, notamment pour permettre la mise en
place d'un nouveau modèle d'inspection. Les travaux vont bon sens en ce... vont
bon train en ce sens. Il faut aussi voir à moderniser et harmoniser les lois
des corporations.
M. Boulanger (Steve) : Et
moi, je terminerai, si vous le permettez, avec un clé en main que j'offre au
gouvernement, en lien avec les objectifs du projet de loi de moderniser
l'industrie et d'accroître la productivité. Ça fait 10 ans qu'on en parle,
réglons la problématique des retards de paiement dans la construction. Si ma
mémoire est bonne, c'est la quatrième fois que je me présente en commission
parlementaire pour en parler. Il s'agit d'une occasion unique. On a prévu, par
le projet de loi no 22, adopté au printemps 2022, qu'il y aurait une
réglementation sur les délais de paiement. On a beaucoup travaillé avec le
Conseil du trésor sur une future réglementation. C'est très prometteur, ça a
été constructif. Tout est prêt, on est en projet pilote depuis 2018. On a
encore entendu hier des enjeux d'attractivité des entreprises sur les contrats
gouvernementaux. C'est une solution en or. L'Ontario a sa loi depuis plusieurs
années. À nous de passer à l'action. On demande au gouvernement d'adopter
rapidement la réglementation en ce sens. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
infiniment. Merci pour votre exposé. Nous passons maintenant à la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. M. Kingsbury, Me Sénécal, M. Beauchamp, M. Boulanger, merci
beaucoup pour la qualité de votre mémoire, la qualité de votre présentation. Je
vais me permettre un certain nombre de commentaires, puis une couple de
questions. Un, j'apprécie énormément la façon dont vous exprimez votre appui,
notamment à la polyvalence, parce que, parfois, il y a des doutes de certaines
personnes, mais la polyvalence, il faut qu'elle soit bien balisée. Et c'est
certain qu'il y en a qui souhaiteraient plus de polyvalence puis d'autres qui
ne veulent pas de polyvalence, mais les trois principes qui nous ont guidés, M.
Boulanger, puis vous l'exprimez bien, c'est notamment la santé et sécurité du
travail, la sécurité des bâtiments puis la qualité des travaux.
• (16 h 50) •
Puis, toujours, donc, si on pense à la
santé et sécurité du travail, il faut le faire dans le respect des compétences
des travailleurs. Et je suis...
M. Boulet : ...totalement
d'accord avec vous. Au delà de ce qui a été fait par un groupe, le groupe... le
cloisonnement est un frein dans beaucoup de cas, où, par exemple, un
charpentier menuisier ne peut pas réparer un carré fait par le carreleur parce
qu'il est pour un sous-traitant ou le... Bon, je ne veux pas banaliser aucun
métier, mais c'est évident que ça va réduire les délais et conséquemment les
coûts, puis qu'on ait exclu les métiers les plus à risque comme les
électriciens puis les tuyauteurs, moi, je pense que ça s'inscrit dans cette
philosophie-là de ce qui nous a guidés, notamment la santé-sécurité, les
risques et la sécurité des bâtiments. Ça fait que merci de vos commentaires à
cet égard là. Et soyez conscients que tout ce qui doit être fait par les employeurs
en collaboration avec les syndicats pour identifier, contrôler et éliminer les
risques à la santé, sécurité, intégrité physique puis psychique des
travailleurs, on va continuer d'être présents constamment. Ce n'est pas la loi
qui va tout faire, ça va prendre un engagement d'ailleurs que vous avez de
votre côté à la CMEQ puis la CMMTQ.
Deuxième commentaire, licence
d'entrepreneur, c'est un excellent commentaire. Dans les licences
d'entrepreneur, il y a une description des champs d'application avec travaux
connexes. Et j'ai déjà demandé. On a déjà demandé à la RBQ d'assurer un
arrimage, c'est le terme que vous utilisez, là, Steve, et on va s'assurer qu'il
y ait un arrimage pour ne pas qu'il y ait de confusion et que ce soit clair
pour les entrepreneurs. Bon, avant d'aller à d'autres points, je vais... la
rétroactivité, vous dites : C'est inconciliable avec le régime de relation
de travail. En quoi?
M. Boulanger (Steve) : Ça va
me permettre un commentaire général. Comme vous savez, on n'a pas de mandat de
relations de travail, alors, nos collègues, les associations d'employeurs. Ce
qu'il faut comprendre, dans notre industrie, puis j'irai à haut niveau, mais on
a un régime particulier de relations de travail qui n'est pas celui qui est
prévu dans le Code du travail. Alors, il faut être... il y a un équilibre
présentement, il faut être très prudent de choisir certains éléments qui
sont... qui... qui apparaissent, là, dans le corpus législatif du Code du
travail pour les intégrer dans l'industrie de la construction. Et la
rétroactivité nous apparaît être un de ces principes-là qui est difficilement
applicable. Quand on est en atelier fermé, c'est facile d'identifier les
travailleurs, le nombre d'heures fait, etc. L'industrie de la construction,
c'est 200 000 travailleurs, c'est 25 000 employeurs. Alors, si on
veut faire de la rétroactivité, il faudrait identifier qui a fait quoi, quand,
dans quel secteur d'activité et pour combien d'heures. Ça devient à peu près
irréalisable à notre avis. Et créer un fonds pour ça alourdirait, on pense
qu'on s'éloigne de l'allègement réglementaire, de l'efficacité que souhaite le
gouvernement dans les institutions.
M. Boulet : Oui, je le
comprends très bien, le commentaire, c'est ce qui a motivé probablement le législateur
à adopter l'article de la loi R-20 qui interdisait aux partis de négocier
une rétroactivité. Je pense que c'est bien expliqué. Puis j'ai posé la question
pour que nous partagions ce que vous venez de mentionner.
Les offices d'habitation, ce qu'on a
réalisé, c'est qu'évidemment, c'est des logements sociaux abordables, qui...
bon, parce que les travaux d'entretien, réparations, rénovations devaient être
faits sous l'empire des conventions puis de la loi R-20, bien, ça
requérait des appels d'offres, il y avait des soumissions puis ça retardait la
disponibilité des logements sociaux pour les personnes qui en ont
fondamentalement besoin. Et ça, c'est une demande qui est quand même... qui
date d'un certain temps. Et je vous rassure, hein, ce n'est pas des travaux...
c'est vraiment des travaux d'entretien comme la peinture ou le revêtement de
sol, là, mais pour rendre le logement social disponible le plus rapidement
possible, pour que le Québécois ou la Québécoise qui est dans le besoin d'être
logé puisse l'être le plus rapidement possible. Mais soyez rassurés, il n'y a
pas... C'est vraiment, comme on le mentionne dans la loi... le projet de loi,
plutôt, l'entretien, réparations, rénovations. Puis c'est des salariés
permanents, là, ce n'est pas... puis je ne veux pas banaliser ce que vous
appelez les... tu sais, les préposés à l'entretien ou les concierges, là, mais
c'est vraiment pour s'assurer que le logement soit...
M. Boulet : ...en état
d'entretien pour permettre à la nouvelle personne d'y accéder.
Les D.E.P. en électricité, c'est
intéressant parce que, de façon concomitante à l'instauration des attestations
d'études professionnelles, on a accru la capacité d'accueil en électricité puis
en plomberie, puis ça a donné des résultats. Moi, les centres de formation
professionnelle où je suis allé, ça a donné d'excellents résultats. Puis il y a
des cohortes d'ailleurs qui sont complètement paritaires. Il y a une cohorte
que j'ai visitée en électricité, 11 gars puis 11 filles, puis ça s'adonne que c'était
chez nous, à Trois-Rivières, puis j'étais particulièrement fier de ça. Et vous
référiez à des cohortes en région. Avez-vous des exemples où il y a eu des
enjeux, des cohortes qui n'ont pas démarré parce qu'on était en région, il n'y
avait pas assez... j'imagine, parce qu'il n'y avait pas assez de monde, hein?
Mme Senécal (Julie) : En
fait, le problème, c'est qu'il n'y a pas de cohortes en région. C'est-à-dire,
si le D.E.P. en électricité n'est pas offert en Gaspésie, mais seulement qu'à
Rimouski, bien, le jeune en Gaspésie, il n'ira pas déménager à Rimouski, parce
qu'il n'y en a pas, de logement à Rimouski. Donc, ce qu'il va faire, c'est
qu'il va choisir une autre formation offerte dans sa région, mais... ce qui
fait en sorte que l'expertise ou les métiers en électricité ou en plomberie qui
ne sont pas offerts dans une région donnée, bien, on devient en déficit de
main-d'œuvre qualifiée pour cette région-là. Donc, c'est important de s'assurer
de l'accessibilité aux D.E.P. les plus en demande partout au Québec.
M. Boulet : Puis je sais que
notre collègue à l'Éducation travaille très fort là-dessus parce que c'est
constamment une demande qui est faite, là, par les centres régionaux. Je sais
qu'il y a eu des avancées qui ont été faites, mais il y a du progrès à faire,
particulièrement en électricité, là, et les métiers couverts par vos deux
corporations.
Vous référiez aussi à... Bon, vous avez de
la formation continue obligatoire. Comment ça s'exprime, là? C'est imposé par
vos deux corporations à tous vos membres?
Mme Senécal (Julie) : Effectivement,
ce sont des règlements adoptés en vertu de nos lois constitutives, donc
règlements en vertu de la Loi sur les maîtres électriciens et de la Loi sur les
maîtres mécaniciens en tuyauterie. Donc, les membres, par leur... le biais de
leur répondant en exécution de travaux, doivent suivre un certain nombre
d'heures de formation, 16 ou 24, ou même 32 si on combine plusieurs licences,
par période de référence de deux ans pour maintenir leurs connaissances à jour.
C'est juste normal. Quand il y a un changement de code, par exemple, le code
d'électricité change, bien, c'est normal que ceux qui exécutent les travaux,
bien, se mettent à jour. Donc, c'est cette obligation-là qu'on trouverait
normale. Un plombier ou un électricien qui ne connaît pas son code, ce n'est
pas rassurant pour la sécurité du public et ce n'est pas productif non plus
parce que l'employeur est obligé vraiment, là, de suivre ses gens. Et ce qu'on
constate, c'est que, même si on a un fonds de formation, même s'il y a des
incitatifs, même si les formations sont gratuites, il y a très peu de
compagnons et d'apprentis qui vont se former volontairement. Donc, la moyenne,
c'est 11 %, puis même pour les compagnons, c'est 3 % qui se forment
volontairement. Donc, aussi, ça prend une certaine... ce n'est pas
nécessairement la même... le même mécanisme, ça peut être un mécanisme
différent, mais ça prend un mécanisme qui forme... qui oblige les travailleurs
à maintenir leurs compétences à jour. Ça, c'est très important pour nous.
M. Boulanger (Steve) : Puis
j'ajouterai, si vous permettez, cette idée-là, c'est à même notre mission, de
développer la compétence et l'habileté de nos membres, mais cette idée-là, de
formation continue obligatoire, elle a germé dans la tête des entrepreneurs
d'abord et avant tout, qui ont dit : On va se prendre en main, parce
qu'ils parlaient déjà de formation de travailleurs, et on s'est dit :
Prêchons par l'exemple, donnons-nous des obligations à titre de répondants de
licence nous-mêmes pour pouvoir superviser les travailleurs. Alors, on a déjà
fait le premier pas au niveau des deux corporations pour les entrepreneurs en
plomberie et en chauffage et en électricité. Et donc on se projette dans le
futur puis on se dit : Bien, ce sera au tour des travailleurs aussi de
faire leur part. Ils en font déjà, de la formation. Il s'agit d'augmenter la
fréquence puis de mieux l'encadrer.
Mme Senécal (Julie) : Et
aussi on travaille en collaboration avec la Régie du bâtiment du Québec,
évidemment, dans ce dossier-là, qui, elle aussi, impose de la formation
continue à certaines sous-catégories de licence d'entrepreneur général.
• (17 heures) •
M. Boulet : O.K. Super. Puis
ne sous-estimez pas l'exemplarité que ça impose dans tout le secteur de la
construction. Puis vous référez notamment à l'alternance travail-études, et il
y a des travaux importants qui se font actuellement, la Commission de la
construction du Québec, le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Emploi,
le ministère du Travail, et c'est une formule qui est intéressante parce qu'on
référait souvent aux jeunes de 18 à 29 ans qui ne sont ni en emploi, ni aux
études, ni en formation, c'est une industrie...
17 h (version non révisée)
M. Boulet : ...et qui a besoin
d'améliorer son image, d'être mieux perçu. Et, si on veut être attractifs puis
retenir, ça passe notamment par des formules alternatives comme ça. Puis quelqu'un
qui a... qui n'a pas d'avenir et qui veut avoir l'ambition d'être un
électricien ou un tuyauteur, bien... puis qui sait qu'il peut bénéficier de l'alternance
travail-études avec un incitatif financier, bien, c'est des bénéfices pour
toute la société québécoise.
M. Boulanger (Steve) : Oui.
Puis j'ajouterai, si vous le permettez, j'ajouterai un point. Vous allez
entendre beaucoup de positions opposées dans le cadre de cette commission, mais
s'il y a un point de convergence patronal-syndical, c'est l'importance de la
formation professionnelle. D'y aller de façon innovante avec, entre autres, de
l'alternance travail-études, donc de nouvelles façons pour permettre aux gens
de se former puis d'intégrer notre industrie. C'est un point de convergence qu'on
devrait travailler tous ensemble.
M. Boulet : Tout à fait. Et c'est
la raison pour laquelle tous les partenaires impliqués dans la formation
professionnelle sont à pied d'œuvre et travaillent intensément à ce que... à ce
qu'on redéfinisse aussi les programmes qui mènent à des diplômes d'études
professionnelles, là, au D.E.P. Puis, bon, je pense qu'on est tous conscients
que l'avenir de l'industrie réside beaucoup là-dedans, puis améliorer notre
bilan lésionnel, là. Parce qu'en termes d'accidents de travail, maladies
professionnelles, on est... on a des records, puis en termes de décès,
malheureusement, on a des records.
Donc, moi, c'est à peu près complet. Les
retards de paiement, est-ce qu'il y avait, au-delà de me... de m'utiliser comme
messager, Steve? Je comprends l'importance que les paiements soient faits dans
des délais raisonnables puis que les travaux soient planifiés. Puis je redis qu'on
s'intéresse, dans cette loi-là, aussi à l'accès. Vous avez vu les mesures qui
vont permettre une meilleure diversité, ça, ça va nous permettre d'accroître la
main-d'oeuvre dont on a besoin dans tous les métiers. Et, bon, la polyvalence,
on en a parlé, la mobilité, la gouvernance de la Commission de la construction
du Québec, la confirmation de sa mission et le régime de négociation, parce que
vous êtes aussi partenaire important au conseil d'administration. Alors, merci
beaucoup. Je ne sais pas si vous aviez un autre commentaire à faire, Steve?
M. Boulanger (Steve) : Bien,
sur les délais de paiement, on profite de l'occasion, effectivement. Mais le
gouvernement a mis en place une volonté gouvernementale, par le projet de loi 12
au printemps 2022, on a introduit des pouvoirs réglementaires dans la
LCOP, la Loi sur les contrats des organismes publics, pour mettre en place
cette réglementation-là. Alors, nous, ce qu'on dit : c'est votre collègue
du secrétariat du Conseil du trésor, la présidente du Conseil... du secrétariat
du Conseil du trésor qui a ça entre les mains, on espère que ça aboutisse. Mais
je veux vous dire que les travaux se sont très bien déroulés. On a fait ça de
la bonne façon. Ça a été plus long, mais je pense qu'on l'a fait de la bonne
façon. On a fait un projet pilote, on a testé la marchandise, on a proposé des
éléments d'amélioration, et puis ça fonctionne.
Et c'est... Je veux... je veux rappeler
aux parlementaires, ce n'est pas de payer pour des travaux qui sont mal faits.
C'est de payer pour des travaux qui ont été faits en temps raisonnable, ce qui
est prévu contractuellement, ce qui n'est pas le cas présentement. Alors, si on
veut attirer de nouveaux entrepreneurs qui ont le savoir-faire mais qui n'ont
pas nécessairement tous les leviers financiers, bien, il faut s'attaquer à
cette problématique-là.
M. Boulet : Oui, tout à fait,
puis j'en suis conscient. Puis notre collègue au Trésor travaille fort. Puis la
LCOP fait constamment l'objet de révision. Ne négligeons pas non plus l'intégration
des nouvelles technologies, au-delà de la formation, le BIM, la planification
des travaux. Notre projet de loi, c'est un élément du casse-tête global de la
modernisation qui va faire de notre industrie une qui est performante, qui est
distinctive et attractive. Merci beaucoup de votre présence et de votre
présentation.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de
Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci, Messieurs, Mme, donc, de votre... de votre présentation.
Je commencerais avec, donc, le premier
élément que vous abordez, donc, dans votre mémoire, donc, soit la question de
la rétroactivité. Donc, vous énoncez donc très clairement qu'évidemment vous n'êtes
pas impliqués, donc, directement, donc, dans la question des relations de
travail, mais pour vous, c'est important de vous prononcer sur l'introduction
de la possibilité de négocier le versement d'un ajustement salarial rétroactif
et la création du fonds de rétroactivité.
D'abord, donc, sur le versement de l'ajustement
salarial rétroactif, donc, pour vous, donc, quel est... quel... quel est, donc,
le premier motif, là, qui vous pousse à vous dire que c'est... ça... ce serait
une mauvaise idée pour pour l'industrie?...
M. Boulanger (Steve) : ...je
pense qu'il y a un équilibre dans l'industrie. On n'est pas partie à la table
de négociations, mais les parties se sont toujours entendues, du moins, dans
les dernières années, relativement calmement, puis des ententes qui ont été
signées de bonne foi par tout le monde. Alors, je ne verrais pas pourquoi on
devrait s'attaquer à un problème qui ne semble pas exister. Et il ne faut pas
oublier que l'industrie de la construction, c'est une industrie particulière,
c'est une des seules industries où il y a une syndicalisation obligatoire. Il
ne faut pas perdre de vue, il y a un cadre de régime de relations de travail
qui est différent du reste des industries, comme je le disais tantôt.
Donc, la rétroactivité, il faut quand même
que... c'est très difficilement applicable dans notre secteur où les
travailleurs sont mobiles. Ils passent de chantier en chantier, d'employeur en
employeur et de secteur en secteur. C'est ce qui complexifie l'affaire. C'est
pour ça qu'on pense que c'est inconciliable avec le régime actuel des relations
de travail.
Mme Cadet : Puis vous dites
que, si elle devait être conservée comme mesure, elle devrait être clairement
balisée en R-20. Donc, pour vous, à quoi ressemblerait, donc, le type de balise
nécessaire?
M. Boulanger (Steve) : Bien,
en fait, c'est... les associations pourront préciser des choses, mais nous, ce
qu'on ne voulait pas, c'est que ce soit balisé dans la réglementation
uniquement. On pense qu'il doit y avoir des guides qui sont dans la loi pour
permettre, si jamais on va vers une réglementation, un encadrement. Par exemple,
ça pourrait être une durée de temps qui pourrait être intégrée dans la loi pour
permettre aux partis d'avoir une bonne négociation, mais de dire : Bien,
on n'étirera pas ça pendant huit mois pour avoir une rétroactivité qu'on sera
incapable d'appliquer. C'est ce genre de balises là auxquelles on pense, mais
on pense que ça devrait être fait à l'intérieur même de la loi pour donner un
cadre bien précis.
Mme Cadet : ...je comprends
que c'est vraiment, donc, sur la création du fonds de rétroactivité. Donc, on a
entendu plusieurs intervenants avant vous, nous dire qu'il s'agissait donc d'un
mode plutôt complexe d'introduire la notion de rétroactivité dans le projet de
loi.
M. Boulanger (Steve) : Tout à
fait.
Mme Cadet : Puis j'imagine
aussi, donc, quand je vous lis sur, bon, la complexité, l'alourdissement, donc
tout ce que vous dites, donc ça fait un peu contrepoids à l'objectif initial
qui est vraiment de rendre l'industrie plus productive. C'est l'objectif
d'introduire le projet de loi. Donc, c'est un peu un frein à cet objectif ici
aussi de parler de rétroactivité du fonds.
M. Boulanger (Steve) : On y
va à ce moment-là. On ne toucherait pas à la productivité des travailleurs et
des entrepreneurs. C'est plus un alourdissement administratif de la machine qui
devra être géré par la Commission de la construction du Québec. Et ultimement,
il y a une augmentation des coûts qui est associée à ça, et c'est nous tous,
comme citoyens, qui, en bout de piste, devons les assumer.
Mme Cadet : Puis sur la
question, justement, donc, de la productivité, encore une fois, donc, je fais
ce pas en arrière, parce qu'on nous présente, donc, ce projet de loi en nous
disant qu'on a, donc, des avancées qui devraient donc aller dans ce sens. Donc,
pour vous, comment le projet permet de bâtir mieux, plus vite et à moindre
coût?
M. Boulanger (Steve) : Bien,
d'abord, c'est un pas en avant. Les métiers sont extrêmement cloisonnés. Il y a
une exclusion pour nos métiers. Alors, c'est difficile pour nous de se
prononcer, parce qu'au quotidien, puis en questionnant nos entrepreneurs, ça ne
changera pas grand-chose pour les métiers mécaniques et électriques. Mais on
est conscients que c'est un pas en avant. Il pourrait y avoir des applications
très ponctuelles qui pourraient nous aider. Alors, oui, ça pourrait, dans
certains cas.
Mme Cadet : ...comment
l'améliorer pour que ça aille en ce sens, comment améliorer le projet de loi.
Donc, nous, comme législateurs, donc, comment est-ce qu'on pourrait, donc,
présenter différents amendements, donc, pour nous assurer qu'on continue
d'aller... en fait, qu'on aille, donc, dans le sens, donc, de l'amélioration de
la productivité dans l'étude du projet de loi.
M. Boulanger (Steve) : Aussi,
la polyvalence, ça nous semble correct, ce qui est dans le projet de loi, là.
Mais, comme je vous dis, comme ça ne s'applique pas à nos métiers, on n'est
peut-être pas les mieux placés pour commenter cet aspect-là précis de la
polyvalence.
Mme Cadet : Je comprends. Un
autre aspect qui fait débat, donc, c'est aussi, donc, la question de l'impact
du projet de loi sur le secteur résidentiel, sur la crise de l'habitation.
Selon vous, avec le pas de recul que vous avez, est-ce que vous pensez que le
projet de loi qui est présenté ici, donc, devrait avoir, donc, une contribution
substantielle à cet égard?
• (17 h 10) •
M. Boulanger (Steve) : Au
niveau de nos métiers, je vous dirais non, encore une fois, en raison de
l'exclusion, pour d'autres métiers, possiblement, qui pourra... Si on met de la
flexibilité, bien, on accroît la productivité. Maintenant, j'ai entendu les
questions qui ont été soulevées devant cette commission sur l'augmentation des
mises en chantier, comment résorber la crise du logement. On est ici, quand
même, dans une loi de relations de travail. Alors, c'est un ensemble, c'est une
problématique qui est très vaste. Il y a la façon de construire...
M. Boulanger (Steve) : ...il
y a l'environnement social, les municipalités ont un rôle à jouer, etc., donc
c'est un... c'est un... on ne peut pas régler le problème de la crise du
logement à l'intérieur de la loi R-20.
Mme Cadet : Pas uniquement,
ça, c'est clair.
M. Boulanger (Steve) : Certainement
pas.
Mme Cadet : Sur le... et pas
dans le budget non plus. Sur la question de la polyvalence, donc pour vous,
donc, le mode... le... les définitions, donc, qui sont inclus, donc vous
êtes... vous êtes... bon, vous êtes en accord avec la manière dont c'est
libellé. Ceci dit, pour vous, est-ce que c'est suffisamment défini? Puis je
pose ma question, donc, puisque vous vous prononcez, donc, sur
l'article 72, donc sur les risques de judiciarisation qui pourraient venir
avec cette définition. Donc, est-ce qu'on a assez d'éléments? Je comprends, là,
qu'on... on risquerait d'être sclérosé, donc, avec une définition de tâche donc
très précise, parce que ça nous amènerait... ça ne donnerait pas la flexibilité
nécessaire, donc pour permettre, donc, cette polyvalence, justement. Est-ce qu'on
a assez d'éléments pour éviter un recul, justement, en matière, donc, de
productivité? Parce que bon, les parties risqueraient donc de se poser des
questions sur, bon, est-ce que ça, c'est de courte durée, ça, ce ne l'est pas.
Qu'est-ce qu'on fait avec ça?
M. Boulanger (Steve) : C'est
un équilibre qui est très difficile à atteindre, j'en conviens. Cependant, il a
été... L'exercice de prévoir des tâches partagées avec chacun des métiers a été
tenté et il s'est soldé par un échec. Nommons les choses, les syndicats étant
constitués... Les syndicats de métier, bien, chacun tient à l'exercice de ses
tâches et je peux le comprendre. Donc, cet exercice-là n'a pas fonctionné.
Alors, il restait une autre alternative qui est d'avoir un concept. Maintenant,
on a fait un concept, on a mis des balises. Effectivement, il pourrait y avoir
une judiciarisation, mais ce qu'il faut comprendre, c'est que ça existe dans
plusieurs lois, là, de définir un principe, de le baliser, puis les parties
fonctionnent à l'intérieur. Donc, je pense qu'il va y avoir une adaptation,
mais on a mis quand même trois critères relativement, moi, je pense, qui
guident... qui nous guident relativement bien pour savoir en quoi consiste, là,
la polyvalence. Tu sais, c'est quand même assez restrictif quand on lit les
trois conditions qui sont cumulatives, bien, ça ne permettra pas n'importe
quoi, ça ne permettra pas à l'entrepreneur ou tuyauteur d'aller effectuer des
travaux de peinture. On n'est pas là du tout, ce n'est pas lié au métier, ce
n'est pas nécessaire à l'avancement. Alors, il y a quand même des balises qui
sont... qui nous apparaissent assez claires, et c'est un pas, hein, de voir
comment l'industrie va réagir. Pour une première fois, on essaie d'y mettre un
peu plus de flexibilité. C'est ça qu'on reconnaît, nous, le principe
d'atteindre une meilleure productivité par une flexibilité, mais en ayant quand
même des balises. Puis, on l'a dit, la santé-sécurité des travailleurs et des
utilisateurs des bâtiments doit être impérativement respectée.
Mme Cadet : Oui, puis ça nous
permettrait... vous souhaitez en fait, qu'on... que le projet de loi puisse
aussi encadrer la notion des travaux connexes.
M. Boulanger (Steve) : Oui,
les travaux connexes, c'est prévu dans la Loi sur le bâtiment, dans son
Règlement sur la qualification professionnelle, les entrepreneurs ont des
licences, et c'est découpé en sous-catégories. Par exemple, un entrepreneur en
plomberie a une licence 15.5 et on détermine les travaux de plomberie
qu'il peut faire et on dit les travaux... il peut faire également les travaux
connexes. Or, le règlement nous dit les travaux connexes, ça doit être compris,
ça doit être exécuté lors de travaux compris dans la sous-catégorie, et les
travaux connexes ne peuvent pas être faits non plus dans le domaine électrique
ou en plomberie, ça c'est clair aussi. C'est pour ça que le corpus législatif
est... est cohérent là-dessus. Cependant, il y a d'autres conditions qui ont
été... qui sont en règlement, dont une interprétation de la Régie du bâtiment.
Donc, les travaux connexes doivent être nécessaires à la réalisation de l'objet
du contrat. Et il y a des troisièmes critères qui étaient émis par la
jurisprudence où on est venus dire : Ça doit présenter un lien étroit avec
les travaux. Donc, c'est un peu difficile pour l'entrepreneur de s'y retrouver,
donc c'est pour ça qu'on propose... notre recommandation est double finalement,
d'abord encadrer les travaux connexes au niveau des licences d'entrepreneurs
d'une part, et d'autre part, s'assurer de son arrimage avec le principe de
polyvalence qu'on intègre... qu'on veut intégrer dans la loi R-20.
Mme Cadet : Mais, merci. En
terminant, donc sur la question, donc, de la formation, vous avez bien raison,
je pense que tout le monde s'entend là-dessus, sur cette importance-là, pour
améliorer la productivité des travailleurs. Les régions... pas de DEP, donc en
Gaspésie, donc, souvent les gens s'en vont au Nouveau-Brunswick pour se...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...que
nous avions, je suis désolée.
Mme Cadet : C'était trop
long.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à
vous, M. le député.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous quatre. Contents de vous avoir ici. Je veux parler
un peu de la rétro, c'est intéressant votre perspective, et je suis d'accord
avec vous sur une partie puis... mais je n'atterris pas nécessairement à la
même place que vous. Là où je vous rejoins, c'est que c'est compliqué ce qui...
M. Leduc : ...et dans le
projet de loi qui nous est présenté par le ministre. Moi, je la qualifie, la
proposition du ministre, d'une fausse bonne idée, dans le sens où il part d'une
bonne intention, mais ce qu'il nous soumet, ouf!, ça va être difficile à gérer.
Par contre, je ne suis pas sûr que
j'atterris à la même place que vous, dans le sens où... est-ce que, vous, vous
concluez qu'il faut juste ne rien faire sur la rétroactivité ou vous dites: Il
faut faire autre chose que le ministre propose?
M. Boulanger (Steve) : Nous,
on pense que c'est un principe qui ne pas être introduit. On va être clair, là,
on ne pense pas que la rétroactivité est applicable dans le domaine de la
construction. Les entrepreneurs, là, doivent soumissionner pour des années à
l'avance, des fois, au niveau des contrats. Comment, de quelle façon on va
prévoir s'il va y avoir une rétroactivité ou pas au niveau des coûts? Alors, on
pense que c'est un principe qui n'est pas conciliable avec le régime actuel des
relations de travail, et je suis persuadé que les associations d'employeurs qui
négocient les conventions vont être mieux à même d'éclairer les parlementaires
à ce sujet.
M. Leduc : Je suis convaincu
qu'ils vont être contre, quand ils vont venir nous parler, ça, il n'y a pas de
grosse surprise là, mais il faut comprendre, la mécanique, c'est
qu'actuellement, si vous avez la loi telle qu'elle, il y a un avantage pécunier
objectif pour les patrons de «staler», en bon français, la négociation le plus
longtemps possible au-delà de l'échéance de la convention collective. Ils
économisent, objectivement, des milliers, des millions de dollars à chaque jour
gagné. Et de l'autre côté, il y a un objectif clair du syndicat, qui, à chaque jour
perdu du salaire, bien, il est aussi bien de déclencher la grève le plus vite
possible pour que ça... pour ne pas que ça s'étale pendant des jours et des
mois. Ça fait que, cette mécanique-là, elle est malsaine et elle génère du
conflit, alors il faut qu'on trouve une solution à ça.
Est-ce que c'est compliqué? C'est une
évidence, que c'est compliqué, mais il y a bien des affaires, dans la vie, que
c'est compliqué. La Loi sur l'impôt, c'est très compliqué, pourtant, on fait
tous nos impôts à chaque année. C'est le temps, d'ailleurs, si vous n'avez pas
commencé, moi, c'est fait. Mais c'est compliqué, mais je ne peux pas croire
que, si on laisse les parties avec une possibilité ouverte de le faire,
qu'elles ne peuvent pas trouver des solutions.
M. Boulanger (Steve) : Mais,
à l'inverse, quel est l'incitatif pour les syndicats de régler rapidement,
sachant qu'il y a rétroactivité? Alors, tu sais, ça va des deux côtés.
Présentement, c'est absent, puis, si on le met bien, bien, ce n'est pas plus un
incitatif à régler. Et, dans le passé, puis comme je vous dis, je n'étais pas
aux tables de négociation, d'habitude, ce n'est pas les employeurs qui veulent
économiser, parce qu'ils n'économisent pas, dans le sens où ils ont
soumissionné les contrats avant la négociation, ceux qui se poursuivent, alors
ce n'est pas... ils cherchent pas plus cher aux clients, ils n'engrangent pas
plus de dollars. Ils paient le salarié au salaire puis ils chargent ce qu'il
faut aux clients, alors il n'y a pas d'économie sur le dos des travailleurs.
M. Leduc : Vous n'êtes pas en
train de me dire qu'il n'y a jamais des dépassements de coûts dans les contrats
non plus, là?
M. Boulanger (Steve) : On n'a
pas dit ça.
M. Leduc : Bon. Il peut y
avoir des dépassements de coûts, s'il y a de la rétro à payer, éventuellement,
ce n'est pas impossible.
M. Boulanger (Steve) : Sur
les dépassements de coûts, une des façons, puis ça, nos partenaires syndicaux
l'ont dit... il faut s'attaquer, si on veut avoir une meilleure productivité
dans l'industrie et une meilleure planification des travaux...
M. Leduc : On est d'accord.
M. Boulanger (Steve) : On est
d'accord avec eux, une meilleure gestion des chantiers de construction, une
meilleure préparation des plans, des devis, identifier des besoins...
identification des besoins, etc. C'est une foule de facteurs.
M. Leduc : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au député de
Jean-Talon. La parole est à vous, M. le député.
M. Paradis : Bonjour. Merci
beaucoup. Merci pour le mémoire. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Vous...
C'est intéressant parce que vous dites : Nous, les métiers qu'on
représente, le projet de loi ne viendra pas changer grand-chose sur la question
de la polyvalence, mais on est conscients que le décloisonnement, c'est un
besoin parce que ça va vraiment contribuer à plus d'efficience dans les
travaux. Puis, ensuite, vous dites : Il y a un point de convergence
patronal-syndical, c'est l'importance de la formation professionnelle, mais là
vous dites : «Il est primordial de poursuivre dans la voie des formations
de courte durée menant à une attestation d'études professionnelles», si j'ai
bien suivi votre mémoire. Non?
Mme Senécal (Julie) : Ce
n'est pas... non, en fait, nous... pour nous, la voie d'entrée à l'industrie,
c'est vraiment le D.E.P. L'attestation d'études professionnelles, c'est autre
chose. Je pense que ce fut une mesure temporaire pour régler la problématique
de ceux qui rentrent par bassins, qui n'ont aucune formation.
M. Paradis : Très bien.
Mme Senécal (Julie) : Donc,
ce n'est pas la voie de l'avenir, pour nous, là, c'est clair.
M. Paradis : Donc, je vais
revenir juste sur le décloisonnement, parce que, justement, une de vos... une
de vos... la mission, en fait, c'est d'augmenter la compétence et l'habileté de
vos membres. Là, on a reçu beaucoup de mémoires qui nous disent : Bien, le
décloisonnement, en réalité, c'est un danger pour la qualité de la formation
puis la qualité des travaux. C'est pour ça que j'aurais particulièrement aimé
vous entendre, vous, sur cette question-là, compte tenu, justement, de votre
position privilégiée, que vous n'êtes pas directement concernés par la
question.
• (17 h 20) •
M. Boulanger (Steve) : On a
étudié la question pour savoir... Évidemment, les métiers qui sont prévus ne
pourront pas exécuter des tâches qui sont réservées aux électriciens puis aux
plombiers. Cependant, un tuyauteur pourra, lui, remplir les critères...
M. Boulanger (Steve) : ...polyvalence
pour faire certains autres travaux, ça ne s'applique à peu près pas. Peut-être
un peu de calorifugeage, donc l'isolation tuyauterie sur des... pour permettre
d'avancer les travaux parce que l'entrepreneur en calorifugeage a quitté le
chantier, puis il y a un petit bout qui a été oublié. Mais pour nous, là, ça ne
changera pas l'essence du métier de tuyauteur qui est bien encadré sur
lequel... Il n'y a pas un enjeu de qualité de travaux dans notre... dans
notre... dans notre métier. Et, pour les autres métiers, je ne me prononcerai
pas, mais il faut quand même se le dire, il y a des métiers qui sont quand même
moins à risque que d'autres au niveau de la sécurité des occupants.
M. Paradis : O.K. Donc,
ce que ce que vous dites, c'est qu'il n'y a pas... Vous ne voyez pas de risque
de diminution de la qualité des travaux par des... en conséquence du
décloisonnement.
M. Boulanger (Steve) : Pas
dans nos métiers.
M. Paradis : Pas dans
vos métiers.
M. Boulanger (Steve) : Non.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...c'est
tout le temps que nous avions. M. Beauchamp, Me Boulanger,
Me Sénécal et M. Kingsbury, merci infiniment pour votre contribution
à nos travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre aux prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 21)
(Reprise à 17 h 27)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux, et je souhaite maintenant la bienvenue à l'Association
des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis nous commencerons
la période d'échange. Je vous invite donc à vous présenter et à nous présenter
votre exposé, s'il vous plaît.
M. Joncas (Marc) : Merci. Je
me présente, Marc Joncas, président du conseil d'administration de
l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. Je suis
accompagné ici, à ma droite, de M.... Maître Christian Tétreault, directeur des
relations de travail juridique au sein de l'association. Bon, je tiens
premièrement à vous remercier, Mme la Présidente, M. le... M. le ministre, de
nous donner l'opportunité de nous exprimer, exprimer notre point de vue de
l'Association, les constructeurs de grandes routes et travaux du Québec, sur le
projet de la loi 51. Elle. Nous représentons aujourd'hui
2600 employeurs actifs au sein de l'industrie du secteur génie civil et
voirie, qui emploient plus de 44 000 salariés ayant accumulé plus de
30 millions... 39 millions d'heures en 2022. Je vais quand même
laisser le soin à maître Christian Tétreault de vous résumer l'ensemble de
notre mémoire. Je reste évidemment disponible pour les questions et je tiens
quand même à saluer le courage du ministre de faire des modifications au
projet... au projet... avec le projet de loi n° 51.
M. Tétreault (Christian) : Merci,
M. le Président. D'abord, d'entrée de jeu, j'ai envie de vous dire que
probablement que la présentation qu'on va faire devant vous va avoir pas mal de
dissonance par rapport à ce que vous avez entendu, jusqu'à présent, de la part
de mes partenaires, des partenaires syndicaux l'industrie de la construction.
Alors donc, d'entrée de jeu, puisque la... j'ai une courte période de temps qui
m'est allouée pour présenter notre mémoire, nous allons limiter les
commentaires aux trois principaux thèmes du projet de loi, à savoir la
polyvalence, la mobilité et la rétroactivité. Évidemment, on aborde d'autres
thèmes dans notre mémoire, mais compte tenu du temps restreint qu'on avait, on
voulait surtout concentrer nos commentaires sur ces trois éléments-là, qui sont
les trois éléments principaux.
• (17 h 30) •
Mais, avant d'aborder ces thèmes, vous
avez probablement observé que notre mémoire contient plusieurs recommandations
qui visent les occupations. Vous vous posez probablement la question :
Pourquoi l'ACRGTQ fait-elle autant de recommandations en rapport avec cette
catégorie de main-d'œuvre? Il y a deux raisons principales. D'abord, cette
main-d'œuvre est omniprésente sur nos chantiers de construction. Elle
représente 42 % des heures réalisées dans le secteur. Et deuxièmement,
c'est une main-d'œuvre qui réalise des travaux qui sont particulièrement
névralgiques et stratégiques dans le secteur. Ce sont... ce sont ces
travailleurs-là qui...
17 h 30 (version non révisée)
M. Tétreault (Christian) : ...nos
routes, ce sont ces travailleurs-là qui réalisent des travaux d'infrastructures,
c'est-à-dire quand on parle... souterraines. Quand on parle d'infrastructures
souterraines, on va parler du réseau d'égouts, d'aqueduc. Ce sont eux qui
construisent le réseau de transport, d'énergie électrique ou de distribution d'énergie
électrique, ce sont... puis là, je ne peux pas vous lister tout ce qu'ils font,
mais qui font le dynamitage, le forage, etc. Alors, c'est une main-d'œuvre particulièrement
sensible dans notre secteur d'activité.
Ce qui m'amène maintenant à vous parler de
la polyvalence, à aborder le thème de polyvalence. Nous sommes globalement d'accord
avec les orientations privilégiées dans le projet de loi.
D'une part, le législateur a pris la sage
décision de ne pas dénaturer les métiers tels qu'ils existent depuis des
dizaines d'années. D'ailleurs, la structure des entreprises est également
orientée en fonction de l'existence de ces métiers.
D'autre part, le législateur identifie
trois conditions permettant le déploiement de la polyvalence. Le cumul de ces
conditions d'application font en sorte que ça ne serait pas un bar ouvert, pour
employer l'expression qui a été utilisée par le ministre à quelques reprises
depuis le début de la commission parlementaire, où tout un chacun va pouvoir
réaliser à sa guise du travail qui ne relève pas expressément du certificat de
compétence dont il est titulaire. La polyvalence, ça va demeurer exceptionnel.
La règle, c'est quand vous allez avoir des travaux à réaliser qui relèvent d'un
certificat de compétence d'un métier, ça va demeurer le métier qui va avoir la
responsabilité d'exécuter les travaux.
Nous sommes cependant en désaccord avec le
fait que le projet de loi exclut, et là, vous l'aurez compris, pourquoi j'ai
fait un préambule sur l'importance des titres occupationnels dans le secteur
génie civil et voirie, alors le projet de loi exclut de l'application du
principe de polyvalence les titres occupationnels. Si le gouvernement veut
atteindre la cible visant à améliorer la productivité sur les chantiers de
génie civil, il est nécessaire que cette catégorie de main-d'œuvre soit
assujettie à la règle de la polyvalence. Et, à cet égard, on a produit un
texte, un libellé de texte qu'on vous propose, qui est reproduit à la page huit
du mémoire de l'ACRGTQ.
Toujours en ce qui concerne le thème de
polyvalence, nous avons présenté deux autres recommandations. D'abord, nous
souhaitons apporter une précision en lien avec l'exception relative aux travaux
de structure. Cette expression est large et ambiguë et elle pourrait même
entraîner l'inapplicabilité de la polyvalence dans le secteur génie civil et
voirie, puisqu'en définitive l'essence de ce secteur-là, c'est effectivement d'exécuter
des travaux de structure. Une route est une structure, un pont est une
structure, un chemin de fer est une structure, etc. Ce qu'on souhaite, c'est
de... que cette expression soit définie de manière à ce qu'elle vise les
travaux relatifs à la stabilité et à la capacité portante des ouvrages ou des
bâtiments. Ce qui me semble d'ailleurs être en ligne droite avec le fait qu'on
vise à protéger les... la sécurité du public puis qu'on vise aussi à s'assurer
que les... ce soient les travailleurs compétents qui vont réaliser ces
travaux-là, qui concernent la stabilité des bâtiments et qui concernent la
capacité portante des ouvrages de génie civil.
Autre recommandation pour accroître la
polyvalence dans le secteur génie civil et voirie, on demande de modifier l'article 23
du règlement sur la délivrance des certificats de compétence afin de permettre
qu'un titulaire de certificat de compétence occupation puisse débuter l'apprentissage
d'un métier sans devoir renoncer à son certificat de compétence Occupation.
Alors, au moment où on se parle, dès le moment où un salarié veut se lancer
dans une... dans l'apprentissage d'un métier, l'article 23 l'oblige à
remettre à la Commission son certificat de compétence, ce qui fait en sorte
que, quand il se présente sur le chantier, il ne peut plus réaliser les tâches
pour lesquelles il a développé pourtant une expertise pendant une longue
période de temps. Alors, ça crée un... une situation un peu insensée.
Ce qui m'amène maintenant à vous parler de
la mobilité. Je vais passer rapidement sur le thème de la mobilité, parce que
nous avons, dans la convention collective du secteur génie civil et voirie, une
règle qui offre beaucoup plus d'agilité et de flexibilité pour la mobilité que
ce qui est prévu au règlement. En fait, pour plusieurs métiers et la quasi-totalité
des occupations, c'est la pleine mobilité sans restriction quant au lieu de
résidence du travailleur depuis près de 25 ans, là. Ce n'est pas nouveau.
On n'a pas négocié ça hier. Ça fait longtemps que ça existe dans nos conventions
collectives. Cette clause de mobilité...
M. Tétreault (Christian) : ...Bon,
bien que ça concerne, le ministre l'a mentionné, là, 13 métiers et les
occupations, bien, en fait, ça représente quand même et ça couvre quand même
80 % des travaux qui sont réalisés dans le secteur génie civil et voirie.
L'introduction de cette clause de mobilité sans restriction a permis aux
employeurs du secteur de récupérer la pleine faculté de sélection de la
main-d'œuvre. Cette clause a aussi pour effet de respecter l'enseignement de la
Cour suprême dans l'affaire Godbout contre Ville de Longueuil, où la Cour
suprême indique qu'une restriction empêchant un travailleur d'avoir accès à un
emploi en raison de son lieu de résidence porte atteinte à la vie privée et à
la liberté. Mais il y a encore... Il y a encore quand même 20 %, plus ou
moins 20 % des travaux qui sont assujettis à la convention collective où
c'est la... c'est le règlement sur la mobilité qui s'applique.
Pour les raisons plus amplement discutées
dans le mémoire, l'ACRGTQ considère qu'il faut dépoussiérer ce vieux règlement
adopté dans les années 70 dans un contexte social, économique,
démographique et juridique qui n'a aucun écho avec le Québec d'aujourd'hui.
Pour l'ACRGTQ, nous devons privilégier la libre circulation des ressources
humaines et abolir les restrictions relatives à la mobilité, à un respect des
droits garantis par les chartes. Dans l'hypothèse où le législateur allait de
l'avant avec les règles telles qui sont proposées, encore une fois, on fait une
recommandation concernant les titres occupationnels, on veut que les titres
occupationnels soient également assujettis à la règle qui permette de
bénéficier de la pleine mobilité dès lors qu'il a accumulé
15 000 heures au rapport mensuel de la CCQ, alors que cette règle-là,
actuellement, en fonction de ce qui est écrit dans le projet de loi, est
réservée exclusivement aux compagnons.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...il
vous reste 10 secondes.
M. Tétreault (Christian) : Bon.
Alors, il reste 10 secondes, vous dites?
La Présidente (Mme D'Amours) : Oui.
M. Tétreault (Christian) : Bon,
je vais sauter. Mon Dieu! J'avais fait l'exercice chez moi, ça avait pris neuf
minutes.
La Présidente (Mme D'Amours) : Donc,
je cède... Nous allons...
Une voix : ...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...passer
à la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : C'est
souvent le cas quand on prépare des plaidoiries, hein, Christian? Merci, Mme la
Présidente. Merci, M. Joncas. Merci, Me Tétreault. C'est un excellent
mémoire qui... qui est écrit de manière articulée, bien structurée et qui
démontre l'importance de l'équilibre, hein, parce qu'effectivement, sur les
trois sujets principaux qui vous concernent, la polyvalence, la mobilité et la
rétroactivité, vous poussez le cursus un peu plus pour la polyvalence. Pour la
mobilité, vous êtes pour la pleine circulation des ressources humaines. Et pour
la rétroactivité, on pourra en reparler, là. Mais la polyvalence,
effectivement, ce n'est pas un bar ouvert. Elle doit être contrôlée. Puis la
santé-sécurité, vous m'avez souvent entendu en parler, elle est fondamentale.
Ce que vous aimeriez, puis j'aimerais ça vous entendre sur la polyvalence, vous
aimeriez que ce même principe là de polyvalence s'applique pour les détenteurs
de certificat compétence occupation. Est-ce que c'est bien ça?
M. Tétreault (Christian) : Vous
avez tout à fait compris. En fait, là, on parle... On fait abstraction du fait
qu'on vous demande de... de mettre en place... en fait, de retirer les
dispositions qui sont dans le règlement sur l'embauche et la mobilité de la
main-d'œuvre qui restreint la mobilité. Mais si on devait maintenir les règles
telles qu'elles sont proposées actuellement dans le projet de loi, ce qu'on
vous demande, c'est que la règle selon laquelle quelqu'un qui atteint
15 000 heures enregistrées à la CTQ puisse bénéficier de la mobilité
provinciale s'applique également au site occupationnel.
M. Boulet : Aussi.
Donc... O.K. On va revenir à la mobilité puis la polyvalence. Donc, aussi pour
les occupations, vous jugez que ça engendrerait une réduction des délais et des
coûts, ultimement.
M. Tétreault (Christian) : Tout
à fait.
M. Joncas (Marc) : Tout
à fait. On a un exemple, justement, je pense qu'il est dans le mémoire.
M. Boulet : Oui. Bien,
j'allais vous demander ça, l'installation d'un coffrage rudimentaire. Est-ce
que c'est ça?
M. Joncas (Marc) : Oui,
ça existe beaucoup maintenant, surtout dans les projets d'assainissement dans
les... bien, surtout dans les grandes villes. C'est des gros conduits qu'il n'y
a pas nécessairement des pièces déjà fabriquées d'avance. Donc, on nous demande
de faire un, ce qu'ils appellent un... un jargon, un bloc joint. C'est un
coffrage en béton, on vient couler le béton, on met de l'acier d'armature.
C'est d'une durée de moins d'une journée. Et comme Christian disait, c'est un
journalier, souvent, qui est affairé à... aux travaux d'égouts. Et souvent on
est obligé d'arrêter. Le chantier doit arrêter...
M. Joncas (Marc) : ...rentrer
une personne qui pose l'armature, rentrer un charpentier-menuisier pour faire
le coffrage...
• (17 h 40) •
M. Boulet : Incroyable.
M. Joncas (Marc) : ...et
ça, ça affecte la productivité et les coûts. Et ça, on est habitués à ça, ça
fait qu'on le met dans les coûts. Mais c'est sûr que, si on veut trouver les
moyens d'être plus productifs, ça en fait partie.
M. Boulet : Donc, ce qui
serait souhaitable, c'est que le détenteur du certificat compétence occupation,
le journalier, en l'occurrence, ou manoeuvre, là... vous appelez ça occupation
journalier... il pourrait faire le travail. Si c'était planifié en début de
journée, il pourrait faire le travail que quelqu'un qui fait l'armature et
quelqu'un qui fait la menuiserie doivent faire.
M. Joncas (Marc) : Oui,
parce que c'est des travaux peu compliqués. Et la première chose - on est
d'accord avec tout le monde, là-dessus, qui est passé ici - la priorité, c'est
la santé et sécurité des travailleurs. Il ne faut pas que ça mette le
travailleur en danger. Puis ça, ça en est, un cas, qu'il n'y a aucun problème
là-dessus, là. C'est des gens manuels, ce n'est pas des travaux compliqués, ça
se fait très bien.
M. Boulet : Super. Je
comprends très bien. O.K., ça fait que ça me rassure. Puis je trouve que c'est
une idée intéressante. Évidemment, on va travailler en étude détaillée, après
les consultations particulières, mais je trouve ça intéressant. Puis,
Christian, vous connaissez aussi, cependant... les détenteurs de certificat
compétence occupation peuvent faire des tâches résiduelles des 25 métiers,
mais ça n'a pas la même portée.
M. Tétreault (Christian) : Exact,
tout à fait. En fait, la catégorie des titres occupationnels, ça comprend
toutes les tâches qui n'appartiennent pas nécessairement à un métier.
M. Boulet : Exact.
M. Tétreault (Christian) : Il
faut avoir à l'esprit que, dans le secteur génie civil et voirie, les titres
occupationnels, ça côtoie principalement des opérateurs de machinerie lourde et
des opérateurs de pelle, et ça côtoie... Parce que les opérateurs de machinerie
lourde et les opérateurs de pelle, ça représente 30 % des heures déclarées
dans notre secteur, et ça travaille aussi de concert avec des
charpentiers-menuisiers et des ferrailleurs, essentiellement. Alors, les titres
occupationnels qui sont présents sur le chantier côtoient... bien,
quotidiennement, peut-être pas, mais régulièrement les charpentiers-menuisiers
et les ferrailleurs... Alors, ils ont une connaissance de ce qui se fait, ils
apprennent un peu, en côtoyant ces gens-là, sur les mécanismes qui peuvent être
mis en place.
M. Boulet : Oui, oui, je
comprends.
M. Joncas (Marc) : Je
peux peut-être vous donner un exemple concret sur ça, sur des métiers qu'un
charpentier-menuisier fait du... pourrait faire de la finition de béton dans
les trottoirs, vous voyez, partout où on construit des trottoirs en béton,
partout au Québec. Et la pratique est qu'on coffre le matin, c'est des... ça
prend des charpentiers-menuisiers qui font le coffrage, et l'après-midi on
coule les trottoirs. Ça prend des finisseurs. Donc, aujourd'hui, souvent, on
est obligé de grossir l'équipe parce qu'on... on ne peut pas attitrer tout le
temps un charpentier-menuisier. L'après-midi, il ne peut pas travailler ou il
faut qu'il fasse d'autres choses, il ne peut pas agir comme finisseur. Puis
d'ailleurs, c'est une demande que ça... ça fait très longtemps, c'est un vieux
métier, et ça vient plutôt des travailleurs qu'on doit... qu'on a pris par
habitude de coffrer le matin et de couler l'après-midi parce que c'est un
métier très difficile, très pénible. Et les travailleurs, c'est un peu, un
peu... C'est moins dur pour eux de couler l'après-midi parce que la partie
coffrage est quand même très pénible pour le travailleur. Ça fait que c'est une
pratique qu'on... qu'on a toujours fait, mais ça... on est obligé d'ajouter des
gens dans l'équipe à cause de ce... inflexibilité-là. Ça, c'est au courant de
la journée, là, ce n'est pas...
M. Boulet : Les délais,
les coûts. Oui, dans le respect des balises, des trois balises qui apparaissent
au projet de loi no 51, à l'article 72. O.K. Ça me va. C'est un autre
bel exemple, M. Joncas. Puis il y en a des exemples à répétition, des
avantages de la polyvalence sur les délais et les coûts. Je voyais, maintenant,
en ce qui concerne la mobilité, puis Me Tétreault, vous y faisiez
référence, beaucoup de métiers, moi, je répète tout le temps 13 métiers en
génie civil et voirie qui bénéficiaient de la pleine mobilité. Parfois bon,
vous avez entendu d'autres groupes venir faire des représentations devant nous,
la mobilité, ça a des effets négatifs. Puis j'aimerais ça qu'avec ce que vous
vivez pour les 13 métiers vous nous parliez des conséquences que ça peut
avoir sur, notamment, l'employabilité des travailleurs, travailleuses et leur
conciliation travail-famille. Ça fait que c'est une question assez large, mais
j'aimerais ça vous écouter.
M. Tétreault (Christian) : Bien,
en fait, j'entends depuis un certain temps mes partenaires syndicaux dire...
M. Tétreault (Christian) : ...qu'il
faille trouver une façon d'améliorer la rétention de la main-d'œuvre. Alors
moi, je pense que le fait que quelqu'un puisse effectivement être assigné sur
tous les chantiers que l'employeur obtient, indépendamment de la région
administrative où ces chantiers-là sont réalisés, bien, ça favorise le maintien
à l'emploi de cet individu-là, parce qu'il va pouvoir suivre, effectivement,
les contrats que son employeur va obtenir.
M. Boulet : Bien oui.
M. Tétreault (Christian) : Et
ce faisant, bien, ça améliore ses revenus, ça améliore... Puis en même temps,
si on permet aussi à quelqu'un de développer des compétences parallèles, en lui
permettant notamment d'exécuter des tâches dans certaines circonstances qui
correspondent à la polyvalence, bien, je pense que ça va stimuler l'intérêt des
gens de demeurer dans l'industrie. Il n'y a rien de pire chez les jeunes
aujourd'hui de les consigner à des tâches routinières et sans possibilité de
pouvoir développer des compétences parallèles, ou autres. Alors moi... c'est...
ça fait... Si on veut améliorer la... la rétention dans l'industrie de la
construction, je ne vous dis pas que c'est les seuls éléments qui doivent être
mis en place, mais ça participe certainement à l'atteinte de cet objectif-là,
effectivement.
M. Boulet : C'est très, très
clair. O.K. Et évidemment c'est important de redire que la mobilité, ce n'est
pas une obligation. C'est un droit.
M. Tétreault (Christian) : Tout
à fait.
M. Boulet : C'est une faculté.
M. Tétreault (Christian) : Voilà.
M. Boulet : Et que la
priorité d'embauche régionale demeure quand qu'il y a des besoins d'embauche
pour l'exécution d'un contrat dans une région.
Autre question que je trouve intéressante,
travaux de structure. Bon, comme vous avez vu, on fait exception à la
polyvalence d'un certain nombre de métiers qui sont plus à risque, comme les
électriciens, tuyauteurs, mécaniciens d'ascenseur, les frigoristes, puis on
fait référence aux travaux de structure puis les opérations de grues. J'aurai
évidemment le temps de le préciser, mais c'est véritablement en ce qui concerne
l'intégrité structurante des bâtisses, puis j'ai écrit ce que vous avez
mentionné, la capacité portante ou la stabilité des bâtiments. C'est ce qui est
visé, parce que ça aussi, ça a une incidence sur la sécurité de la structure
prise dans son ensemble, et c'est comme ça que ça doit être compris. Puis si
besoin en est, on aura une définition plus précise, mais l'intention que le
législateur a, c'est vraiment compatible avec le propos que vous avez tenu.
M. Tétreault (Christian) : Sans
vouloir vous interrompre, M. le ministre, on a proposé effectivement une définition
de «travaux... En fait, on a employé l'expression «travaux structurels» plutôt
que «travaux de structure». Le «travaux structurels» m'apparaît mieux adapté à
la réalité ou aux objectifs que vous venez d'identifier, là.
M. Boulet : O.K. Moi, j'aime
bien dire les vrais mots. Puis l'intégrité structurale ou la capacité portante,
là, on verra à ce que ce soit clair, que ça soit le moins ambigu possible. Puis
j'aime bien quand vous dites que les trois conditions sont... puis votre
prédécesseur l'avait mentionné sont simples, faciles à comprendre. Quand on
veut compliquer, on peut, mais quand on veut simplifier, on peut aussi.
M. Tétreault (Christian) : J'ajouterais,
si vous me permettez, ce n'est pas nouveau ces trois paramètres-là, hein?
M. Boulet : Bien non. Bien
non.
M. Tétreault (Christian) : On
voit que le législateur s'est largement inspiré de ce qui résulte de la
jurisprudence, là, concernant l'application de l'article 24 de la
loi R-20, notamment en ce qui concerne... Parce qu'on... on avait confié
la responsabilité au Tribunal administratif du travail de régler tous les
conflits de... les litiges relatifs aux conflits de juridiction de métier en
lui donnant la responsabilité de tenir compte dans ses décisions de l'efficience
sur l'organisation du travail. Et, dans le cadre de l'interprétation de cette
notion-là, c'est précisément les trois paramètres qui ont été utilisés par le
Tribunal administratif du travail pour permettre, effectivement, dans certaines
circonstances de... que quelqu'un puisse exercer une tâche qui ne relève pas
nécessairement de son certificat de compétence.
M. Boulet : Non, c'est ça
pour déterminer si la tâche x faisait partie du métier a ou du métier b.
C'était la juridiction qui était conférée au Tribunal administratif du travail
en vertu de l'article 24. Tout à fait d'accord. Je ne sais pas combien de
temps il reste.
La Présidente (Mme D'Amours) : Il
vous reste quatre minutes?
M. Boulet : Quatre minutes.
J'aimerais vous entendre aussi, pour finir, sur la mobilité, puis peut-être
qu'on parlera de rétroactivité, là. Mais Mobilité, ce que vous dites aussi pour
les détenteurs de certificats... compétence occupation, après avoir complété
15 000 heures, ils pourraient être mobiles pour... peu importe
l'identité de l'employeur.
M. Tétreault (Christian) : Exact.
M. Boulet : O.K. Parfait.
M. Tétreault (Christian) : En
fait, actuellement, en vertu de la convention collective, la quasi-totalité des
titres occupationnelle bénéficie de la pleine mobilité. Il y a quelques titres
occupationnels...
M. Tétreault (Christian) : ...qui
sont assujettis à la règle de la mobilité qui est prévue au règlement, et c'est
ces tâches-là qu'on souhaite.
• (17 h 50) •
M. Boulet : Bien oui, bien
oui. Puis ça serait la même règle applicable à tout le monde.
M. Tétreault (Christian) : Tout
le monde.
M. Boulet : C'est ça qui est
notamment visé, plutôt que l'asymétrie à laquelle je réfère souvent. J'aimerais
vous entendre sur la rétroactivité.
M. Tétreault (Christian) : Oui,
bien, en fait...
M. Boulet : Qu'est-ce que
vous en pensez?
M. Tétreault (Christian) : ...j'ai
envie de poursuivre ce que j'avais... ce que j'avais commencé à vous lire.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Tétreault (Christian) : Il
me reste combien de temps, vous dites?
La Présidente (Mme D'Amours) : Trois
minutes.
M. Tétreault (Christian) : Trois
minutes. Je vais avoir le temps.
M. Boulet : Je vous laisse
mes dernières minutes, Me Tétreault.
M. Tétreault (Christian) : Alors
écoutez, j'allais vous lire que, d'entrée de jeu, l'ACRGTQ endosse l'analyse du
juge... dans sa décision du 6 décembre 2022. C'est une décision qu'on a
produite en annexe de notre mémoire. Dans le cadre de cette décision, portant
notamment sur la validité de l'article 48 interdisant la rétroactivité, la Cour
supérieure fait deux constats importants, puis je veux les reprendre parce que,
quant à moi, c'est des mises en garde qui... que vous devriez avoir à votre
esprit quand vous allez analyser l'introduction du mécanisme de rétroactivité.
Alors, d'abord, la cour, après avoir souligné les caractéristiques de l'emploi
dans l'industrie de la construction, conclut que «l'absence de rétroactivité
n'est pas un oubli du législateur, c'est le fruit d'une mûre réflexion pour la
mise en place d'un équilibre au niveau du rapport de force». C'est important de
retenir ça, là, c'est un juge de la Cour supérieure qui a entendu une preuve,
une longue preuve, qui vient dire : L'absence, le fait qu'il n'y a pas de
rétroactivité, ça s'inscrit dans un contexte où on cherche à équilibrer le
rapport de force entre les parties. «De plus, la cour a reconnu que le régime
actuel n'empêchait pas les partenaires de l'industrie de faire preuve de
créativité et de négocier une forme de compensation qui tient compte du délai
écoulé entre l'échéance de la convention collective et la signature de
l'entente de principe, sans nécessairement parler formellement d'un concept de
rétroactivité.» Alors les partenaires de l'industrie de la construction peuvent
négocier quelque chose qui vise à compenser sans imposer le concept de
rétroactivité, sans générer la lourde charge qui va résulter de l'application
de la rétroactivité, puis ça enlève tous les effets pervers aussi par rapport à
l'introduction de la rétroactivité. Parce que, nous, on anticipe qu'en
mettant de la rétroactivité, ça risque d'avoir un impact sur la célérité du
processus. On pense que les choses risquent de traîner et qu'en matière de
relations de travail tout ce qui traîne finit par avoir des conséquences sur le
climat de travail. Alors, si on veut mettre en place une mécanique qui vise à
favoriser le plus rapidement possible les ententes entre les partenaires de
l'industrie, ce n'est assurément pas une bonne idée que d'introduire la
rétroactivité.
M. Boulet : Donc, ça peut...
vous référez à une compensation ou ça pourrait être un montant forfaitaire?
M. Tétreault (Christian) : Le
juge a fait référence à la question...
M. Boulet : La compensation.
M. Tétreault (Christian) : ...d'un
montant forfaitaire, mais ça pourrait... ça peut être autre chose aussi.
Écoutez, moi, j'ai fait les neuf rondes de négociation dans l'industrie de la
construction, puis on a toujours consenti des augmentations de salaire qui
étaient au-delà de l'inflation, sauf la dernière ronde de négociation, parce
qu'on a été pris un peu au dépourvu, hein, on a négocié en 2021, puis, après
ça, l'inflation s'est mise à monter en flèche. Mais faisons abstraction de la
dernière période d'application de la convention collective, toutes les autres,
on a toujours consenti des augmentations de salaire qui visaient justement à
enrichir le pouvoir d'achat des travailleurs de la construction, et, justement,
en ayant à l'esprit que ça a pu prendre un mois ou deux mois pour négocier.
M. Boulet : Je comprends très
bien.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Boulet : Eh! Merci
beaucoup, M. Joncas, Me Tétreault. C'était une excellente présentation. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Maintenant, je cède la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonjour, messieurs, merci d'être avec nous cet après-midi.
Encore une fois, j'irais dans l'ordre de votre mémoire puis je commencerais
donc avec la question, donc, évidemment, donc, du certificat de compétences,
occupation, qui, selon vous, devrait également être visé par le mécanisme de la
polyvalence. Je pense que j'ai bien entendu votre argumentaire puisque...
M. Tétreault (Christian) : Excusez-moi,
je ne vous entends pas très bien, je suis...
Mme Cadet : Ah oui, c'est
très loin du micro. Est-ce que c'est mieux?
M. Tétreault (Christian) : Oui.
Là, c'est mieux.
Mme Cadet : Parfait. Donc, je
poursuis. Donc, je vais y aller, donc, avec votre première recommandation, à
l'effet, là, que les certificats... que les titulaires de certificats de
compétences, occupation devraient être visés par le mécanisme de la
polyvalence. Je pense que vous avez expliqué, donc, le poids de ces salariés-là
dans votre secteur. Question rapide, ici, donc, on parle, donc, de combien de
salariés par année, donc, en termes effectifs...
Mme Cadet : ...les titulaires
d'un certificat de...
M. Tétreault (Christian) : Eh
mon Dieu! Je ne sais pas précisément cette statistique-là.
M. Joncas (Marc) : Total de
l'OCR?
M. Tétreault (Christian) : Oui.
En fait, dans le mémoire, je peux vous dire que, par exemple en 2023, il y a eu
39 633 000 heures qui ont été... — j'ai ça au tableau,
là, à la page 7 du mémoire...
Mme Cadet : Oui, oui, oui, je
le vois, oui.
M. Tétreault (Christian) : ... — qui
ont été exécutées, globalement, dans le secteur génie civil et voirie, et il y
a eu...
M. Joncas (Marc) : 44 000
salariés.
M. Tétreault (Christian) : Oui,
il y a 44 000 salariés.
Mme Cadet : 44 000
salariés. Donc, c'est...
M. Tétreault (Christian) : Mais,
dans le secteur génie civil et voirie, ça comprend les opérateurs, les titres
occupationnels et l'ensemble des autres métiers.
Mme Cadet : Voilà. Donc,
c'est ça. Donc, on parle quand même, donc, d'un nombre substantiel ici, donc,
et... Donc, là, votre recommandation, donc, aura un impact, là, assez direct,
là, sur la productivité du secteur, donc, de permettre que ces titulaires-là,
donc, aient un accès au mécanisme de polyvalence qui est prévu au projet de
loi.
M. Tétreault (Christian) : Tout
à fait.
Mme Cadet : Puis je me posais
cette question en termes de nombre de salariés puis aussi en termes de... bon,
où on a les heures totales, mais du nombre d'heures par année par salarié,
parce qu'un peu plus tôt, donc, on a parlé, donc, de la sous-utilisation, donc,
de certains salariés. Est-ce que c'est quelque chose que vous voyez dans votre
secteur aussi?
M. Tétreault (Christian) : Bien,
écoutez, moi, je le... je ne comprends pas vraiment le... ce à quoi on fait
référence quand on parle de sous-utilisation des travailleurs de la
construction. Moi, c'est plus... mon vécu, là, c'est plutôt l'inverse...
Mme Cadet : C'est ça, dans
votre secteur, c'est autre...
M. Tétreault (Christian) : ...qui
se passe actuellement, c'est-à-dire que les employeurs sont même prêts à se
tourner vers les programmes de travailleurs étrangers pour aller chercher
des... pour essayer de trouver de la main-d'œuvre pour réaliser leurs travaux.
J'imagine que, s'il y avait des travailleurs qui étaient sous-utilisés au
Québec, on aurait d'abord pensé à embaucher ces travailleurs-là pour réaliser
nos travaux. Maintenant, c'est sûr que, nous, on a... on est saisonniers,
essentiellement, là, O.K., on commence à travailler au mois d'avril puis on
cesse nos activités à toutes fins pratiques au mois de décembre.
M. Joncas (Marc) : Oui, ça,
c'est... Effectivement, c'est le gros problème de notre secteur, génie civil et
voirie. Contrairement au bâtiment, on travaille pratiquement en urgence environ
six mois par année, donc tout se passe en même temps. C'est de là que vous
voyez l'explosion de cônes apparaître en période estivale. Et, malheureusement,
on demande depuis longtemps au gouvernement d'étaler ces travaux, on est très
d'accord avec les syndicats de ce côté-là, être plus...
Mme Cadet : Sur la
qualification.
M. Joncas (Marc) : ...avoir
plus de prévision, d'étaler les travaux au maximum. On sait que, déjà, on
voit... La température, les dernières années, est beaucoup plus clémente, déjà
en avril, qui nous permettrait de travailler. Mais, si on n'a pas les appels
d'offres... Au Québec, 60... en tout cas, en génie civil-voirie, 75 % des
appels d'offres se font en mars, avril, mai. Donc, si on n'a pas déposé nos
prix, et les chantiers ne décollent jamais avant juin, juillet, on perd
énormément de temps.
Mme Cadet : Oui. Donc, il y a
quand même une réalité saisonnière, donc, dans votre secteur, d'où le... aussi,
donc, votre recommandation 3, au niveau du cumul, là, des certificats de
compétence, occupation. Donc, il pourrait débuter l'apprentissage d'un métier
sans renoncer à son certificat, puis je comprends ici, donc, qu'on est quand
même dans une perspective de... Vous disiez, donc, «apprentissage»... Vous dites
«apprentissage d'un métier», là. Donc, la personne pourrait poursuivre sa
formation, puis elle ne serait pas... elle n'aurait pas besoin de renoncer à
son certificat de compétence-occupation, là.
M. Tétreault (Christian) : Voilà.
Exact.
Mme Cadet : Puis...
M. Tétreault (Christian) : Évidemment,
ça favorise la polyvalence, là. Tu sais, c'est une règle simple qui n'est pas
compliquée à appliquer. Si vous avez quelqu'un qui peut à la fois exécuter des
tâches qui relèvent de son certificat de compétence, occupation et à la fois
des tâches qui relèvent d'un certificat de compétence apprenti, bien, ça
correspond à ce qu'on peut considérer être de la polyvalence.
Mme Cadet : Voilà, comme on
le voit dans... du côté des métiers, là, qu'un compagnon, donc, peut débuter
l'apprentissage d'un autre métier puis d'avoir un certificat d'apprenti.
M. Joncas (Marc) : D'ailleurs,
c'est un non-sens. En plus, il baisse de salaire pour...
Mme Cadet : C'est ça. Donc,
ses compétences seraient reconnues dans ce contexte-là.
M. Joncas (Marc) : Oui, pour
une période.
Mme Cadet : Au niveau de...
bien, de la rétroactivité, donc, on vous a bien entendus. Pour vous... Donc,
vous parlez donc de l'équilibre, là, puis vous avez parlé, donc, de la décision
du juge Pérodeau là-dessus. Pour vous, quelles seraient les conséquences d'un
tel réaménagement des composantes de la structure des négociations?
M. Tétreault (Christian) : Vous
voulez dire par l'introduction du mécanisme de rétroactivité?
Mme Cadet : Oui.
• (18 heures) •
M. Tétreault (Christian) : Bien,
écoutez, c'est sûr que ça peut avoir plusieurs impacts. D'abord, le juge
Pérodeau a précisé que ça aurait un impact sur le rapport de force, l'équilibre.
Ensuite, s'il y avait un mécanisme de rétroactivité... D'ailleurs, mes
collègues qui nous ont précédés des corporations vous l'ont bien expliqué, là,
les caractéristiques de l'emploi dans l'industrie de la construction puis de la
lourdeur administrative que ça pourrait générer si on devait appliquer le
mécanisme de rétroactivité. Donc, ça crée ce phénomène de lourdeur...
18 h (version non révisée)
M. Tétreault (Christian) : ...je
vous l'ai mentionné d'entrée de jeu que ça pouvait avoir un impact sur la
célérité de la négociation. J'ai envie de vous dire que, dans le cadre des
dernières rondes de négociations, particulièrement 2017‑2021, moi, j'ai assisté
à une nouvelle stratégie syndicale de solidarité intersectorielle, c'est-à-dire
qu'à la table du secteur génie civil et voirie, on avait l'impression que
nos... nos... l'avancement de nos discutons... de nos discussions était retardé
parce qu'il y avait des difficultés à d'autres tables de négociations, et ça,
ce n'est pas juste une impression. Moi, j'ai déjà été, dans le cadre d'un
contexte de négociation, à attendre, passer des nuits à attendre avec les
syndicats pour voir qu'est-ce... est-ce qu'il y avait du développement aux
autres tables. Puis là, s'il y avait eu du développement, bien, on avait signé.
Mais vu qu'il n'y a pas de développement, on ne signe pas. Alors, si on met de
la rétroactivité, bien, vous allez renforcer cette... cette stratégie de
solidarité intersyndicale au détriment du principe de la négociation
sectorielle.
Mme Cadet : Donc, c'est un
impact. Vous parliez donc de la célérité, mais j'imagine qu'aussi... il y a
aussi une question de coût aussi.
M. Tétreault (Christian) : Tout
à fait.
Mme Cadet : Là, ce que vous
disiez tantôt, là, que vous avez... que vous avez fait neuf rondes de
négociations, puis à chaque fois, donc, le pouvoir d'achat des travailleurs,
là, n'a jamais été... ça ne s'est jamais fait au détriment du pouvoir d'achat
des travailleurs. Donc ça a toujours été maintenu, donc, au-delà de l'inflation.
M. Tétreault (Christian) : Absolument.
Mme Cadet : Mais le cas...
dans le contexte, donc, d'un fond de rétroactivité, est-ce que vous pensez que
ça aurait un impact sur le coût? Bien, en fait, le coût de la construction, là,
est-ce que ce serait incorporé à...
M. Tétreault (Christian) : Tout
à fait. Oui. Que ce soit de la rétroactivité pure, c'est-à-dire comme on
reconnaît dans les autres secteurs d'activité, où que ce soit par l'intermédiaire
d'un fonds, c'est sûr que ça va avoir un impact sur les coûts des soumissions.
Mme Cadet : Le coût des
soumissions.
M. Tétreault (Christian) : Puis
ça va générer aussi... puis ça, c'est un élément qu'on n'a pas vraiment
discuté, mais ça va générer de l'incertitude par rapport à la prévisibilité des
coûts de main-d'œuvre quand les employeurs font leurs soumissions.
Mme Cadet : Merci. Vous avez
une section sur l'accès à l'industrie de la construction, mais on vous entend
peut-être un peu moins sur la question de la rétention. On a beaucoup parlé de
formation aujourd'hui de la part de toutes les parties. Donc, au niveau donc de
la rétention et de son impact sur la productivité du secteur de la
construction, puis, encore une fois, de la possibilité de construire à moindre
coût, plus rapidement, peut-être vous entendre si vous avez des... un avis sur
cet aspect.
M. Tétreault (Christian) : En
fait, j'ai envie de dire que c'est l'ensemble des propositions qu'on a
formulées qui vont nous permettre effectivement de... de faire une meilleure
utilisation de nos ressources humaines qui sont disponibles. Ça va aussi
améliorer définitivement les délais de... de livraison des travaux. Tu sais,
si... Puis, en même temps, si j'avais la solution pour... pour... magique pour
dire : Bien, on va mettre en place des mécanismes puis on va accélérer
les... les chantiers de construction, là, je ne serais pas ici devant vous
pour... en train de convaincre les employeurs de mettre ça en place.
Alors, c'est une question qui est
difficile à répondre. Mais c'est sûr qu'à partir du moment où on introduit de
la polyvalence, de la mobilité, qu'on essaie de... d'améliorer le sentiment d'appartenance
à l'employeur puis qu'on... c'est sûr qu'il va falloir aussi qu'on s'attaque à
la formation. Ça, on est là-dessus, on rejoint les propos qui ont été tenus par
tout le monde, là. C'est clair que si on veut améliorer le bilan de la
rétention, il faut qu'on réussisse à trouver une façon d'avoir une adéquation
entre l'offre de formation qui mène à un DEP et les besoins quantitatifs de
main-d'œuvre de l'industrie de la construction.
Mme Cadet : Partout sur le
territoire.
M. Tétreault (Christian) : Actuellement,
là, si les gens entrent par voie de bassin, c'est parce que les centres de
formation professionnelle ne répondent pas aux besoins quantitatifs des
employeurs. Si on réussissait à répondre par l'intermédiaire des gens qui sont
diplômés, les employeurs embaucheraient en priorité les gens qui sortent des
écoles. C'est bien mieux de faire...
Mme Cadet : Puis en
terminant.
M. Tétreault (Christian) : C'est
bien...
Mme Cadet : En terminant,
parce que je n'ai pas beaucoup de temps. Sur la question de la machinerie de
production.
M. Tétreault (Christian) : Oui.
Mme Cadet : Donc, je
comprends que vous souhaitez que les travaux de machinerie de production soient
assujettis comme on l'a entendu un peu plus tôt?
M. Tétreault (Christian) : Bien,
en fait, je ne dirais pas jusqu'à dire qu'on souhaite que ce soit toute la
machinerie de production qui soit assujettie à l'industrie de la construction.
En fait, cette démarche là a été initiée quelque temps avant qu'on se présente
devant les commissions parlementaires par une association qui s'appelle l'Association
des entrepreneurs mécaniques industriels du Québec, l'AEMIQ, que j'ai rencontré
à deux reprises. Et on a d'ailleurs discuté avec des... les donneurs d'ouvrage.
On a eu... Tu sais, on est... il y a quand même... ça a quand même fait l'objet
d'un consensus. C'est 11....
La Présidente (Mme D'Amours) : C'est
tout le temps que nous avions. Je suis désolée, je dois passer la parole...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...député
d'Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à vous, M. le député.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous deux. Content de vous entendre aujourd'hui.
Je dois vous avouer que je suis quand même
un peu surpris des propos que vous tenez, là, sur la rétroactivité. C'est parce
que, des fois, quand j'entends les réticences que vous nous soumettez, c'est
comme si j'avais l'impression qu'on arrivait à quelque chose de nouveau dans le
domaine du droit du travail, la rétroactivité, puis qu'on vous demandait d'être
les cobayes d'un nouveau concept. Bien, la rétroactivité, là, ça existe dans
beaucoup de conventions collectives dans à peu près tous les secteurs
économiques du Québec. Mais j'entends comme si la construction, c'était
tellement spécial et unique que ça méritait une exception par rapport à
l'entièreté du reste des travailleurs et travailleuses du Québec. Parce que
maintenant, vous le savez sûrement, les juridictions fédérales vont être
assujetties, là, j'imagine, d'un mois à l'autre, à cette... à cette
obligation-là. Donc, pourquoi on... Pourquoi la construction est si spéciale
que ça par rapport aux autres? Pourquoi il n'y a pas d'innovation? Parce que ce
qu'on comprend, c'est que c'est peut-être un peu compliqué. Puis là-dessus, on
est d'accord, ce que le ministre dépose, c'est un peu compliqué. Moi aussi je
trouve que c'est un peu compliqué. Mais pourquoi on ne peut pas juste faire
confiance aux parties, comme dans tous les autres secteurs, pour dire :
trouvez une façon pour que ça fonctionne? Vous voulez maintenir l'interdiction.
C'est ça que je comprends?
M. Tétreault (Christian) : Exact.
Oui.
M. Leduc : Vous n'êtes pas
capables d'innover avec vos partenaires syndicaux pour trouver une manière dont
on pourrait...
M. Tétreault (Christian) : On
est capables de faire preuve de créativité, je vous l'ai dit d'entrée de jeu,
quand j'ai présenté le mémoire. En fait, il faut... il faut justement laisser
place à la créativité des partenaires de l'industrie pour trouver des façons de
compenser les délais qui sont mis en place.
Maintenant, il faut avoir à l'esprit quand
vous me dites : ce n'est pas nouveau, ce n'est pas nouveau dans les autres
secteurs d'activité, mais c'est nouveau dans le secteur de la construction, par
ailleurs, hein?
M. Leduc : Oui. Bien, je
comprends une réticence, mais vous... on n'invente pas le bouton à quatre
trous, là, aujourd'hui.
M. Tétreault (Christian) : Mais...
mais... mais on est tellement particuliers qu'il y a une loi qui vise à régir
toutes les relations de travail dans l'industrie de la construction. Si on
était semblables aux autres secteurs d'activités, on n'aurait pas besoin de
cette loi-là, on serait assujettis au Code du travail puis ce serait réglé.
Mais on a un système, un régime particulier qui a été échafaudé pendant
plusieurs années pour arriver à une situation où les partenaires qui se
présentent aux tables de négociation ont un rapport de force qui est équilibré.
Alors, avant d'introduire des concepts qui
risquent de déstabiliser ce rapport de force là, bien moi, je... je pense, ce
n'est pas utile pour les raisons que je vous ai expliquées. Mais de surcroît,
je dois vous dire, comme je vous l'ai mentionné, ça fait neuf rondes de
négociation qu'on fait, là. Le bilan au chapitre de la table de négociation ou
du résultat des négociations est excellent, là. Vous n'avez pas entendu
beaucoup parler de conflits dans l'Institut de la construction depuis 1995. Il
y a eu six conventions... il y a eu... En fait, on a eu neuf conventions
collectives, six ont été signés sans aucun conflit de travail, sans
intervention du gouvernement, deux ont été signés avant que... l'échéance de la
convention collective. Il y a eu trois conventions collectives qui ont... qui
ont généré... en fait, trois périodes de négociation qui ont généré en conflit
de travail. Et il y a... il y a... le conflit travail n'a pas été long, là...
M. Leduc : Oui, oui...
M. Tétreault (Christian) : Une
semaine, puis au bout d'une semaine, les partenaires s'étaient...
M. Leduc : ...je connais...
M. Tétreault (Christian) : s'étaient
entendus.
M. Leduc : ...je connais les
chiffres, en effet.
M. Tétreault (Christian) : La
seule...
M. Leduc : Est-ce que...
...une autre question.
La Présidente (Mme D'Amours) : Il
vous reste... secondes.
M. Leduc : Oui, c'est ça.
Est-ce que l'exceptionnalisme de la construction, ça fait en sorte qu'il n'y
aurait pas de handicap non plus dans la construction?
M. Tétreault (Christian) : Bien,
dans notre secteur, moi, je dois vous dire que, quand les...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...je
suis désolée. Je vais maintenant céder la parole au député de Jean-Talon. La
parole est à vous, M. le député.
M. Paradis : Merci beaucoup.
J'aimerais parler de... Merci pour votre mémoire. Merci pour votre présence
avec nous aujourd'hui. J'aimerais parler de... des pages 10 et 11 de votre
mémoire au sujet de la mobilité. Vous abordez... C'est intéressant parce que
vous, vous dites : Bien, on veut abolir les articles, là, 35, 35.1, etc,
qui encadrent la question de la mobilité. Et vous dites : Bien, nous, dans
notre secteur, on a déjà ça en génie puis en voirie, puis... beaucoup de
flexibilité, de polyvalence, puis ça n'a pas eu d'impact significatif sur le
développement régional. Et là vous parlez d'un certain nombre de critères qui fait
en sorte que ça a protégé quand même l'intérêt des régions. Est-ce que vous
pourriez développer sur cette... sur cette partie-là, mais en réfléchissant de
la perspective... Parce qu'une des choses qu'on entend souvent dans d'autres
mémoires, c'est : Oui, mais ça, c'est les plus grands entrepreneurs des
villes qui nous disent ça, puis, quand on est un petit entrepreneur en région,
c'est différent, pour nous, ce n'est pas... ce n'est pas pareil. Est-ce que
vous pourriez élaborer, là, sur cette partie-là de votre mémoire, mais sous
cette perspective-là?
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Tétreault (Christian) : En
fait, je ne suis pas certain d'avoir compris... question. Je suis désolé.
• (18 h 10) •
M. Paradis : La question de
la capacité...
M. Paradis : ...des plus
petits entrepreneurs, et donc des travailleurs qui appartiennent à des plus
petites unités, à faire face à d'éventuels plus grands entrepreneurs qui
viennent des villes puis qui vont... qui profiteraient de la plus grande flexibilité,
et qui ferait en sorte que donc ça serait à l'avantage de certains, mais
désavantage d'autres.
La Présidente (Mme D'Amours) : En
une minute.
M. Tétreault (Christian) : Bon,
écoutez, d'abord, il faut avoir à l'esprit qu'il y a un frein économique ou...
à la mobilité de la main-d'oeuvre. Dans nos conventions collectives, on a
d'importants frais de déplacement, 159 $ par jour travaillé. Alors, ça, ça
a pour effet d'augmenter considérément les coûts de main-d'oeuvre. Et, si
l'employeur veut obtenir... qu'on soit gros ou petit, veut obtenir le contrat
en vertu de la règle du plus bas soumissionnaire, il n'a pas le choix de
s'assurer qu'il va faire un juste équilibre entre ses besoins de main-d'oeuvre
qui vont... qui sont ses travailleurs, son noyau de travailleurs, son ADN, et
les travailleurs locaux.
Dans le fond, ce que je suis en train de
vous dire, c'est que le marché a fait en sorte que, sur les chantiers de génie
civil et voirie, il y a un juste équilibre qui s'est imposé entre l'embauche
des travailleurs régionaux, de par les frais de déplacement notamment, et les
travailleurs qui sont... qui... le noyau des travailleurs de l'entreprise.
La Présidente (Mme D'Amours) : C'est
tout le temps que nous avions. Donc, Maître Tétreault et M. Joncas, je vous
remercie pour votre contribution à nos travaux de la commission.
La commission ajourne travaux jusqu'à
demain 14 h, où elle poursuivra son mandat. Merci beaucoup, tout le monde.
(Fin de la séance à 18 h 12)