Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mardi 12 mars 2024
-
Vol. 47 N° 42
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 51, Loi modernisant l’industrie de la construction
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures quarante-cinq minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) : Bonjour,
tout le monde! La Commission de l'économie et du travail. Bienvenue dans notre
commission. Avant de commencer officiellement... Non, s'il vous plaît, à l'ordre!
Il fallait que je dise le petit mot : À l'ordre! Désolée. Ayant constaté
le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail
ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leur appareil électronique, s'il vous
plaît.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n°
51, Loi modernisant l'industrie de la construction. Mme la secrétaire, y a-t-il
des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Martel (Nicolet-Bécancour) est remplacé par Mme Mallette
(Huntingdon) et Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey) est remplacée par MmeRotiroti (Jeanne-Mance―Viger).
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Nous débuterons par les remarques préliminaires, puis nous entendrons par la suite
les témoins suivants, soit la Commission de développement des ressources
humaines des Premières Nations du Québec, le Conseil d'intervention pour l'accès
des femmes au travail et la FTQ-Construction. J'invite maintenant le ministre
du Travail à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez
de six minutes. La parole est à vous.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, tout le monde, collègues des partis d'opposition,
collègues gouvernementaux. Évidemment, on est tous heureux de commencer les
consultations particulières sur le projet de loi n° 51, qui est fondamental
pour la société, pour répondre aux besoins de la population québécoise. À
chaque fois que j'ai présenté un projet de loi, les consultations particulières
ont permis d'enrichir les textes, et j'ai exactement la même attente pour ce
projet de loi là. Donc, mon état d'esprit en est un d'écoute, d'échange. J'ai
souvent mentionné que c'était un projet de loi que nous voulions équilibré,
modéré, mais aussi perfectible. Il y a eu des consultations en amont, et
maintenant c'est le temps de dire comment les textes vont pouvoir s'appliquer
sur le terrain. Au cours des prochains jours, on va entendre une vingtaine d'organisations.
Quand on connaît l'importance de l'industrie de la construction pour l'économie
et la société québécoise, ça m'apparaît un incontournable. Évidemment, il y a
une quantité impressionnante de travail qui nous attend dans l'industrie de la
construction au cours des prochaines années. Il faut penser aux écoles, aux
hôpitaux, aux logements, aux routes, aux projets liés à la transition
énergétique, notamment. Et ce contexte doit constamment guider les travaux...
M. Boulet : ...ou du comité et
de l'Assemblée pendant l'étude qui va nous permettre d'accroître nos efforts de
modernisation de l'industrie de la construction. Évidemment, on veut aider
l'industrie à réaliser des chantiers plus efficacement, plus rapidement, en
favorisant un climat de travail puis un contexte productif et harmonieux.
De façon plus précise, les objectifs du
projet de loi se résument comme suit : un, accroître la productivité, en
particulier grâce à des mesures visant la polyvalence et la mobilité, deux,
élargir l'accès à l'industrie et encourager la diversité et l'inclusion, trois,
favoriser la transparence et la collaboration en améliorant le régime de
négociation et en renforçant et en précisant le rôle de la Commission de la
construction du Québec.
Il y a aussi des mesures complémentaires
comme l'amélioration du carnet référence construction, possibilité pour un
office d'habitation de réaliser davantage de travaux grâce à ses propres
salariés permanents. Et en ce qui concerne la polyvalence et la mobilité,
évidemment, le projet de loi propose des mesures qui visent à les favoriser,
mais sans jamais faire abstraction des compétences spécifiques des travailleurs
qui sont essentielles pour la productivité, la qualité des travaux et, bien
sûr, la santé-sécurité des travailleurs. Mais certainement que la polyvalence accrue
va permettre à un travailleur qualifié à titre de compagnon d'effectuer des
tâches qui relèvent d'un autre corps de métier dans certaines conditions. Et
donc en autorisant des travaux connexes ou complémentaires, on évite d'avoir
recours à un autre corps de métier et ça va réduire les délais et conséquemment
les coûts.
• (9 h 50) •
Puis c'est dans ce même état d'esprit là
qu'on a abordé la mobilité. Et la préférence d'embauche locale va toujours
demeurer, puis les employeurs devront continuer de faire appel d'abord et avant
tout aux travailleurs locaux, toutefois, pour faciliter l'organisation du
travail, on veut permettre à plus de personnes de bénéficier d'une mobilité
provinciale, soit avec leur employeur ou avec des employeurs différents. On le
sait, dans plusieurs régions, la main-d'œuvre locale ne suffit pas,
dépendamment des périodes de l'année, dépendamment des secteurs, dépendamment
des métiers, donc on veut combler les manques et faciliter la réalisation de
projets dans les régions.
En ce qui concerne l'accès, on veut aider
notamment des personnes issues de la diversité, les minorités visibles, les
personnes immigrantes et les personnes issues des Premières Nations à intégrer
un secteur qui est souvent opaque.
La négociation, la gouvernance, on y
reviendra, mais on veut certainement faciliter le renouvellement des
conventions collectives de travail par secteurs de façon périodique et que ça
soit fait de la manière la plus harmonieuse.
Donc, une approche équilibrée qui vise à
répondre aux besoins des Québécois et des Québécoises. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
M. le ministre. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle
et députée de Jeanne-Mance-Viger à faire ses remarques préliminaires. Vous
disposez de quatre minutes 30 secondes. La parole est à vous.
Mme Rotiroti : Merci, Mme la
Présidente. Alors, à mon tour de saluer mes collègues et le ministre du
gouvernement, mes collègues de l'opposition officielle.
Alors, si nous sommes ici pour...
aujourd'hui pour parler du projet de loi n° 51, projet de loi qui est très
important puisqu'il aurait pu permettre des très grandes avancées dans
l'industrie de la construction au Québec. Force est de constater que le projet
de loi manque toutefois d'audace. Nous... On nous parle de quatre secteurs
fondamentaux dans le projet de loi : la productivité, la polyvalence, la
rétroactivité et le logement. Il est évident qu'on ne va pas assez loin.
J'espère sincèrement que les consultations vont amener à la bonification du
projet de loi. Et je salue aussi l'ouverture du ministre pour être à l'écoute
et de cette agilité et flexibilité pour améliorer le projet de loi. Je pense
que ça... c'est un pas nécessaire pour le domaine de la construction.
Le ministre nous parle d'une industrie
névralgique. En effet, nous sommes d'accord avec ça. Il est primordial de
donner les moyens et les possibilités à cette industrie de croître et de se
développer pleinement. La construction représente une locomotive dans
l'économie du Québec, et il faut lui donner les outils pour qu'elle puisse
continuer d'avancer et d'innover. Une organisation qui n'innove pas, c'est une
organisation qui est condamnée à perdre. Il est primordial qu'on trouve des
alternatives et des solutions pour améliorer la productivité dans l'industrie
de la construction. Le statu quo n'est plus une option.
Quand le ministre nous parle des écarts de
productivité entre le Québec, l'Ontario et le Canada, on remarque que ce sont
des données hautement préoccupantes...
Mme Rotiroti : ...en effet,
qui provient hors de tout doute raisonnable qu'un coup de barre s'impose.
Malheureusement, en termes de changement, d'innovation et de transformation, je
ne vois aucune mesure structurante dans le projet de loi. Le ministre propose
des ajustements esthétiques à la loi R-20, mais aucune mesure structurante
pour l'industrie de la construction au Québec et d'améliorer la productivité.
Le projet de loi, on ne vient pas adapter
ou moderniser le contenu des formations liées aux métiers de construction. Il
n'y a rien concernant la planification des travaux. Et il n'y a aucune mention
de l'intégration d'innovations dans l'industrie. Le cadre légal laisse peu de
place à la créativité et à l'innovation. Et le projet de loi ne fait rien pour
corriger la situation.
Pourquoi... au niveau de la polyvalence,
pourquoi on ne permet pas aux travailleurs de la construction de détenir plus
d'une carte, d'occuper plus de métiers, ou encore d'avoir à la fois un métier
et une occupation? Considérant qu'il y a plusieurs métiers qui sont
saisonniers, pourquoi un travailleur qui exerce l'un de ces métiers ne
pourrait-il avoir une carte pour l'été et une carte tout l'hiver? Une telle
solution permettrait d'améliorer la polyvalence et de lutter en partie contre
la rareté de la main-d'œuvre.
Rétroactivité. Plusieurs questions à ce
sujet là aussi, M.... Mme la Présidente. Dans le projet de loi, le ministre
propose de permettre la négociation d'une rétroactivité sur le taux de salariés
et créer un nouveau fonds à la CCQ. J'ai hâte d'entendre les groupes nous
parler de la faisabilité d'un tel mécanisme et un tel fonds. On peut
sérieusement se questionner sur la rétroactivité et les fonds de rétroactivité
tels que présentés dans le projet de loi, ce sont des mesures qui vont... si ce
sont des mesures qui vont réellement permettre d'améliorer le pouvoir d'achat
des travailleurs.
Au niveau du logement, Mme la ministre, la
CAQ a nié depuis des années la crise de logements, et j'avoue qu'on pensait que
le ministre serait un petit peu plus audacieux dans le projet de loi et chose
de constater que ce n'est pas le cas.
Alors, j'espère sincèrement que ces... les
consultations puis les groupes qu'on va avoir pendant les prochains jours vont
nous éclairer et nous donner des recommandations qui vont nous permettre
sincèrement de faire une vraie réforme dans l'industrie de la construction qui
va plaire à tous les gens, non seulement les travailleurs, mais les employeurs,
la... le côté patronal et syndical qui va faire en sorte que notre industrie va
être un des plus productifs à travers, je dirais, je suis habituée de dire «à
travers le monde», mais c'est, je pense, c'est ça qu'on vise aujourd'hui.
Alors, merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
Mme la députée. Nous... je... passons maintenant à la... au porte-parole du
deuxième groupe d'opposition, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour une
durée de 1 min 30 s. La parole est à vous, M. le député.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Salutations à tout le monde. Il y a beaucoup de gens qui vont nous
écouter aussi cette semaine, je pense, ces audiences seront très populaires.
Moi, je vous avoue d'emblée, Mme la
Présidente, que j'ai quand même quelques déceptions alentour de la mouture
initiale du projet de loi du ministre. On nous avait présenté ça comme une
manière de... de construire davantage, de construire plus, notamment, de
maison. J'ai lu et relu le projet de loi et je ne trouve pas le ou les articles
qui vont faire en sorte qu'on va construire plus de maisons au Québec. J'ai
même posé la question, je rencontrais l'APCHQ la semaine dernière, c'est les
patrons, là, du secteur résidentiel, je leur ai demandé quel article, là, va
faire en sorte qu'on va construire plus de maisons l'année prochaine, aucun
article n'était identifié. Donc, j'ai bien hâte de voir qu'est ce que le
ministre va nous faire comme présentation à ce niveau-là.
Sinon, il y a des déceptions, je pensais
qu'on ferait en sorte de... de mettre le régime de travail de la construction à
jour, il n'y a rien sur les griefs, il n'y a rien sur la Loi anti-scab, le
projet de rétro est un peu mal attaché, à mon avis. Je suis bien ouvert à
discuter sur la polyvalence, mais il faut toujours qu'il y ait la ligne rouge
qui est la santé-sécurité au travail, ça, le ministre l'a dit, je l'entends,
alors on va travailler là-dessus.
Mais, sur la mobilité, Mme la Présidente,
je suis quand même très inquiet. On se rappelle des épisodes de Rambo Gauthier
sur la Côte-Nord. Moi, ce n'est pas mon syndicaliste préféré, vous l'aurez
compris, mais il faut comprendre le contexte qui était derrière ça. Moi, j'ai
la crainte qu'avec la façon dont on touche à la mobilité de la main-d'œuvre,
avec le projet de loi n° 51, on génère un contexte favorable à l'émergence
d'un nouveau Rambo Gauthier, et j'aimerais ça qu'on évite ça le plus possible.
Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
M. le député. Maintenant, nous passons au troisième groupe d'opposition avec le
député de Jean-Talon pour une durée d'une minute.
M. Paradis : Merci, Mme la
Présidente. À mon tour de saluer tout le monde qui est avec nous aujourd'hui,
M. le ministre, et toute l'équipe qui a contribué à la préparation du projet de
loi.
C'est une initiative intéressante avec des
objectifs sous-jacents importants, celui de moderniser notre secteur de la
construction, de favoriser la polyvalence, mais on va être intéressés de savoir
sur quelles données probantes le ministre s'est basé pour nous proposer les
solutions qu'il y a dans le projet de loi. Est-ce que d'autres données,
d'autres analyses vont venir nous éclairer autrement? Est-ce qu'il y a d'autres
solutions à considérer pour moderniser notre secteur? Est-ce qu'on parle assez
de la qualité des travaux et de l'importance de la formation de nos
travailleurs et travailleuses du secteur de la construction?
M. Paradis : ...construction,
la question de la sécurité au travail, de l'efficacité dans la gestion de la
main-d'œuvre dans le domaine du travail, qu'en est-il de la question du travail
au noir? Est-ce qu'on aurait dû l'aborder de front en même temps? Et sur cette
question de la mobilité, nous allons être particulièrement attentifs, quant à
nous, à la question des intérêts des régions. Alors, c'est perfectible. On est
à l'écoute.
La Présidente (Mme D'Amours) : ...M.
le député. C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, nous allons débuter
les auditions, et je souhaite maintenant la bienvenue à la Commission de
développement des ressources humaines et des Premières Nations du Québec. Je
vous rappelle, chers invités, que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé. Puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite donc à vous présenter et à nous lire votre exposé,
s'il vous plaît.
(Visioconférence)
M. Jalbert (Richard) : Oui,
bonjour. Richard Jalbert, je suis directeur général de la Commission de développement
des ressources humaines des Premières Nations du Québec. Je suis avec Wanda
Lafontaine qui est coordonnatrice au soutien aux communautés avec nous, et M.
Réal Martin qui est coordonnateur du Comité consultatif des Premières Nations
et Inuits au marché du travail. Merci, ministre Boulet. Salutations à vous et
merci de cette invitation. Salutations à aussi tous les parlementaires qui sont
présents.
• (10 heures) •
La CDRHPNQ, la Commission de développement
des ressources humaines des Premières Nations, est une des commissions sous le
chapeau, sous la tutelle de l'APNQL, l'Assemblée des Premières Nations du
Québec et Labrador, qui nous ont gracieusement fait place à leur invitation
ici, aujourd'hui. La Commission de développement des ressources humaines est
détentrice des ententes fédérales, des ententes du programme de formation et
compétences à l'emploi et destinées aux Autochtones, et aussi à l'Entente pour
les Premières Nations dans le milieu urbain. Donc, on répond aux besoins aux
autochtones dans la formation et l'employabilité à travers le Québec, d'une
région à l'autre. On couvre l'entièreté du Québec. Par ce fait, pour réussir
ça, on représente 27 communautés et on a 31 centres, des centres
pour... des CSEF, des centres de soutien aux...
(Visioconférence)
Mme Lafontaine (Wanda) : ...
M. Jalbert (Richard) : ...des
centres en services en emploi et en formation, 31 centres à travers du
Québec. Aussi notre parcours, on travaille très étroitement avec la CCQ dans un
programme, le PACPNI, pour faciliter l'accès aux autochtones à l'industrie de
la construction. Nous assumons aussi la présidence du Comité consultatif des
Premières Nations et Inuits du marché du travail. On assume aussi la présidence
du Conseil scolaire en éducation aux adultes. Donc, dans certaines communautés,
on a des centres régionaux en éducation aux adultes aussi qui détiennent des
autorisations du ministère de l'Éducation pour la formation et la
reconnaissance des acquis en matière de construction. Donc, nous, à la CDRH, nous
croyons que nous sommes la référence en employabilité et en formation et la
Commission la plus... la meilleure placée pour faciliter l'intégration des
autochtones dans l'industrie de la construction.
Je dois aussi mentionner que selon les
chiffres de la CCQ, 85 % des travailleurs autochtones du Québec détiennent
un certificat de compétence, 52 % des travailleurs autochtones sont des
compagnons, dont 376 personnes, dont 105 comme chantiers... comme
charpentiers-menuisiers, 1 372 autochtones ont travaillé dans la
construction, seulement 901 contracteurs ont embauché des travailleurs
autochtones et près de la moitié d'entre eux sont des... ont 10 employés
et moins. Donc, sur cette base de ces chiffres-là, nous avons fait un mémoire
que nous allons vous fournir sur nos pensées puis nos solutions pour intégrer
les autochtones dans cette industrie que nous croyons aussi est... les
autochtones sont une réponse de la... pour la main-d'œuvre qualifiée puis une
réponse pour la problématique de la pénurie de main-d'œuvre puis la pénurie de
logements. Comme vous le savez, selon le traité 1064, les autochtones sont
des citoyens de l'Amérique du Nord. Donc, on voit beaucoup, à cause de...
10 h (version non révisée)
M. Jalbert (Richard) : ...les
difficultés de l'intégration du Québec, on voit beaucoup les autochtones
traverser... nos voisins du Sud, amener leur expertise aux États-Unis ou en
Ontario avec la formation de... qui est... donc il y a moins de restrictions au
niveau d'accès à cette profession. Nous croyons que demeurer au Québec et
faciliter l'intégration des autochtones à cette industrie-là est la réponse.
Pour cette raison-là, nous croyons aussi que la CDRHPNQ, qui est placée... qui
répond à tous ces besoins-là, devrait être... en somme être une agence de
placement des autochtones en matière de construction. On a l'expertise pour les
qualifier, l'expertise pour les former, l'expertise pour les placer. On reçoit
de nombreux, nombreux appels de contracteurs qui cherchent une main-d'oeuvre
autochtone, surtout au niveau fédéral, avec l'obligation des contracteurs qui
veulent soumissionner sur... sur des contrats fédéraux, ont des exigences, un
minimum de main-d'œuvre autochtone à devoir garantir dans leur formation. On
reçoit de nombreux appels et nous pensons que nous sommes la solution. Et nous
voyons le changement de la loi comme une bonne chose, un bon augure pour régler
cette situation là et rapidement devenir... devenir la porte d'entrée des autochtones
aux métiers de la construction. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Maintenant,
nous allons commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à
vous pour une durée de 16 minutes 30 secondes, période d'échange
question-réponse.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Je vous avoue que je vais attendre avec intérêt de recevoir votre
mémoire et le lire avec attention et considération. Et M. Jalbert... parce que
vous vous êtes exprimé très bien à l'égard de l'incontournabilité de l'intégration
des personnes issues des Premières Nations, communautés autochtones dans l'industrie
de la construction. Et vous savez qu'il y a des dispositions importantes dans
le projet de loi n° 51 qui concernent l'accès. Évidemment, je le répète, on
était à la quête d'un équilibre. Puis, s'il y a des idées pour bonifier le
projet de loi, moi, je suis ici pour les écouter. Mais, notamment, je veux
saluer votre implication avec la commission de la construction du travail pour
le… puis votre implication au comité consultatif, qui relève de la commission
des partenaires du marché du travail. Je sais à quel point vous êtes engagés et
que vous souhaitez des résultats.
Et j'ai hâte aussi... puis M. Jalbert, j'aimerais
ça que vous me mettiez l'eau à la bouche sur des recommandations spécifiques
qui sont dans votre mémoire. Parce que, par exemple, vous avez vu, dans le
projet de loi, qu'on va permettre à l'association ou aux groupes qui ont des
ententes intergouvernementales de bénéficier d'un permis de référence de la
main-d'œuvre. Et là, je vous entends, le Conseil de développement des
ressources humaines des Premières Nations, et je trouve que c'est intéressant,
parce que je trouve que ce que vous soumettez, notamment que vous puissiez agir
comme accompagnateur pour placer, pour former, moi, je n'exclue rien, là. Mais
est-ce que vous diriez, si vous aviez une recommandation phare qui va
apparaître dans votre mémoire... qu'est-ce que vous me présenteriez? Qu'est-ce
que vous allez me présenter dans votre mémoire? Puis m'expliquer peut-être les
deux, trois recommandations fondamentales.
M. Martin (Réal) : Il y en
12, M. le ministre.
M. Boulet : Il y en a 12.
Tant mieux, et si...
M. Martin (Réal) : ...juste
quatre.
M. Boulet : Pardon?
M. Martin (Réal) : On va vous
en donner juste quelques-unes.
M. Boulet : Allez-y. Je vous
écoute.
M. Martin (Réal) : Au niveau
des critères de qualification de la main-d'œuvre, là, on demanderait une
période de deux ans avant qu'un certificat de compétence apprenti ne soit plus
valide. Parce que vous comprendrez qu'il n'y a pas de la construction dans
toutes les communautés à chaque année. Alors, si vos travailleurs sont
12 mois sans travailler, ils perdent leur certificat. Alors, on demande
une période de deux ans et même de quatre ans pour les personnes judiciarisées,
parce que vous comprendrez que, si on a des travailleurs...
M. Martin (Réal) : ...dans la
construction. Puis, Dieu seul sait, on est en train de faire un avis sur les personnes
judiciarisées Premières Nations et Inuit au Québec. Puis vous comprendrez
qu'avec 20 % de la population carcérale autochtone au Québec, on a
plusieurs travailleurs qui passent du temps sous les barreaux. Alors, tous ces
gens-là, on demanderait une période de quatre ans pour les personnes
judiciarisée avant qu'un certificat de compétence ne soit plus valide.
Aussi, une modification des ratios
compagnon-apprenti, que vous allez trouver en annexe deux dans le mémoire, soit
d'augmenter le ratio compagnon-apprenti à un pour le trois pour les apprentis
des Premières Nations du Québec. On va vous dire pourquoi. Vous aviez autorisé
un ratio de un pour deux pour les femmes il y a deux ans, et puis là, deux ans,
il y avait juste 300 femmes environ qui étaient dans le domaine de la
construction, deux ans après, on est rendu à 1 300. Alors, le ratio de un
pour deux pour les femmes qui avaient été autorisé a très bien fonctionné. Ici,
pour nous autres, on pouvait avoir un ratio de 1 pour 3 dans les communautés surtout...
Souvent, les contracteurs ou les entrepreneurs en construction sont des petites
entreprises de moins de 10 employés. Alors, ça devient très difficile de
faire du un pour un dans les communautés si on a besoin de personnel de la
construction.
• (10 h 10) •
Une autre affaire qui serait nécessaire,
c'est une... au fonds de formation spécialement dédié aux travailleurs de
l'industrie de la construction. On n'a pas eu accès vraiment, là, à ces... au
fonds de formation dans le passé. Une modification des... des formations
obligatoires pour l'obtention d'un certificat de compétence apprenti. On l'a
vu, là, vous avez... vous avez autorisé, là, le... l'offensive en formation de
la construction, là, en autorisant des programmes spéciaux dans cinq métiers de
la construction, puis on voudrait voir ça élargie, là, dans d'autres métiers
qui ne nécessitent pas toujours un D.E.P., mais plutôt un A.E.P. Puis, étant
donné que notre clientèle est très éloignée du marché du travail, vous savez
qu'on a un taux de décrochage scolaire d'environ 70 % à comparer à
30 % pour les personnes québécoises. Et c'est ce qui fait que nos... notre
clientèle est... est bien souvent, là, de... au secondaire 3, des fois
quatre ou... on est très loin, là, des mathématiques secondaire quatre ou le
français secondaire IV. Alors, tout ce qui peut nous aider, là, à diminuer
les critères éducatifs pour l'accès...
M. Jalbert (Richard) : Par
ailleurs, M. le ministre, en ce qui concerne l'intégration des Premières
Nations, aussi vous avez déjà accordé des ententes avec les Mohawks de
Kahnawake. Nous croyons que tous les travailleurs des Premières Nations
devraient tous bénéficier des engagements similaires avec la nation mohawk de
Kahnawake, que vous allez trouver à notre annexe I dans notre mémoire. Aussi,
votre collègue mentionnait la sécurité sur les chantiers de construction. C'est
aussi une de nos priorités.
Donc, pour ce faire, nous représentons des
communautés de la langue anglophone aussi. On a décelé des difficultés, pour
ces travailleurs-là, d'avoir la formation de 30 heures donnée à l'ASP
Construction dans leur langue, des délais d'attente, qui est inacceptable,
voire plus d'un an par manque de formateurs anglophones. Donc, il faudrait
offrir puis faciliter l'accès... et à des documents en anglais pour les
travailleurs et entrepreneurs des Premières Nations à la CCQ, ce qui est une
question de nécessité. Nous, de par notre réseau de formation, d'éducation aux
adultes, on facilite... tu sais, aussi les autochtones qui sont de première
langue autochtone et seulement une seconde langue, soit l'anglais ou soit le
français. Il s'agit de faciliter, selon notre... dans notre réseau, la
graduation et...
M. Jalbert (Richard) : ...la
diplomation en éducation professionnelle dans les métiers de construction, dans
les autres aussi d'ailleurs. Mais il s'agit de faciliter l'intégration avec les
exigences de la langue. Réal.
M. Martin (Réal) : Bien, une
modification des prérequis de formation obligatoire pour l'obtention d'un
certificat de compétence apprenti, ça nous aiderait puis une passation d'examen
de qualifications, mais pratique, ça aiderait beaucoup de candidats à passer
des cartes de compétence. Premièrement, à cause de la question de la langue,
vous comprendrez qu'il y a toute la population algonquine dans l'Outaouais qui
est anglophone, les Mohawks sont anglophones, on a deux communautés anglophones
en Gaspésie, les Inuits qui sont anglophones, les Cris sont anglophones, puis
le problème avec ASP construction, c'est qu'on ne peut pas obtenir les
formations en anglais assez rapidement pour toute cette clientèle-là. Puis au
niveau de la passation des examens, une qualification avec un examen pratique
plutôt qu'un examen théorique pourrait vraiment aider notre clientèle à passer
plus d'examens de compétence.
M. Boulet : Bon, je veux
juste les reprendre, parce que je suis assez sensible aux recommandations que
vous venez d'expliquer. La première, bon, juste redire que dans l'état actuel
des choses, quelqu'un qui ne travaille pas pendant une année, il perd son
certificat compétence apprenti. Et vous vous dites... Tenant compte du volume
de travail qui est variable, puis on le sait, dépendamment des métiers,
dépendamment des secteurs, dépendamment des régions, il y a des périodes de
l'année qui sont beaucoup plus tranquilles, donc il y a beaucoup moins d'heures
de travail. C'est ce qui explique que la moyenne des heures varie beaucoup
dépendamment des régions. Mais ce que vous vous dites, dans votre cas, il
faudrait allonger ça à une période de deux ans avant que le certificat de
compétence apprenti ne soit plus valide et pour les personnes judiciarisées.
Puis quand vous référez aux personnes judiciarisées, est-ce que c'est la
population judiciarisée indépendamment de son origine ou vous référez
particulièrement aux personnes issues des Premières Nations? Les pourcentages
peuvent varier, mais il y a quand même un intérêt pour la protection des
personnes judiciarisées. Puis vous le savez, avec le conseil consultatif puis
la Commission des partenaires du marché du travail, on s'intéresse beaucoup à
leur réintégration. Donc, j'aimerais ça juste que vous me confirmiez le deux
ans puis le quatre ans pour les personnes judiciarisées. Est-ce que c'est bien
ça, Richard puis Réal?
M. Martin (Réal) : Absolument.
C'est exactement ça. Parce que les personnes judiciarisées, si elles sont
incarcérées pendant un an ou deux, ils perdent leur certificat de compétence.
Puis comme on vous disait... Mais ça vaut... vous savez, M. le ministre, ça
vaut pour tous les Québécois, hein?
M. Boulet : Absolument.
M. Martin (Réal) : C'est une
bonne idée pour tous les Québécois. Mais dans notre cas particulier, c'est
parce qu'on a une grosse population qui est judiciarisée.
M. Boulet : Est-ce que,
monsieur... O.K. Puis est-ce que, M. Martin, vous avez quand même eu
connaissance de cas assez fréquent de personnes issues des communautés
autochtones qui ont perdu leur certificat de compétence apprenti au bout d'un
an?
M. Martin (Réal) : Bien, je
pense que oui. Au niveau du Nunavik, entre autres, on sait qu'on a perdu au
moins 30 %, par exemple, à cause...
M. Boulet : Quand même.
M. Martin (Réal) : Chez les
Inuits, vous comprendrez qu'il y a peut-être moins de construction que dans les
autres communautés qu'ailleurs, là...
M. Boulet : Bien oui, bien
oui.
M. Martin (Réal) : ...puis,
souvent, bien, c'est ça. Tu sais qu'on a des chiffres de 30 % de perte,
là, chez les Inuits. On n'a pas eu d'études puis on n'a pas fait d'études, là,
au niveau des autres communautés, mais...
M. Boulet : Non, mais déjà si
vous pensez à un chiffre de 30 % de personnes dans certains secteurs qui
auraient perdu leur certificat compétence apprenti, là, au bout d'un an, c'est
quand même préoccupant parce que c'est une main-d'œuvre qui est essentielle.
O.K., ça répond bien. Le ratio, on se comprend, pour les hommes, il y a un
ratio, pour les femmes et les groupes issus de la diversité, dans le p.l. n° 51, on réfère à un compagnon par deux apprentis. Et ça,
c'est votre deuxième recommandation. Vous souhaiteriez que ce soit un compagnon
pour trois apprentis? Puis, en pensant, M. Martin, j'apprécie...
M. Boulet : ...beaucoup que
vous souligniez, pour le bénéfice de toutes les personnes présentes ici, que le
ratio bonifié pour les femmes a eu pour effet d'accroître considérablement le
nombre de femmes qui ont intégré l'industrie de la construction. Dans les
entrées en 2022, c'est 9,5 % de femmes, donc c'est un... quand même un résultat
qui est intéressant. Et vous, ce que vous dites, c'est : on consent, dans
le PL 51, le un pour deux, mais vous souhaiteriez qu'on soit encore un peu plus
audacieux, puis là, je prends le concept de notre... de notre collègue du Parti
libéral, et donc que ce soit un compagnon par trois apprentis. Est-ce que c'est
bien ça?
M. Martin (Réal) : C'est bien
ça. Peut-être que ça ne peut pas se faire dans tous les métiers, par exemple,
peut-être l'électricité puis plomberie, mais dans charpenterie-menuiserie, il y
a dans... il y a bien d'autres métiers où ça pourrait être applicable. Puis la
problématique avec ça, c'est que des communautés, souvent, les entrepreneurs,
ils ont 10 employés et moins, ça ne représente pas plusieurs corps de
métier, alors il n'y a pas beaucoup d'embauche pour nous autres avec du un pour
un.
M. Boulet : O.K. Puis vous le
savez, hein, puis là, je vous... je vous parle aux trois, là, que le pacte PNI,
vous travaillez avec la CCQ, mais il y a... il va y avoir des mesures qui vont
répondre aux préoccupations qui apparaissent et qui sont dans votre mémoire.
Puis notamment le certificat Compétences apprenti, ça va faire partie du cadre
normatif, qu'il puisse être valide pendant une période de deux ans. Ça fait que
moi, je suis ouvert totalement à votre première recommandation.
• (10 h 20) •
Quant à la deuxième, on va voir l'impact.
Mais, tu sais, ça a été notre état d'esprit, avec le PL 51, de faire bénéficier
les groupes issus de la diversité des mêmes avantages qu'on a consentis aux
femmes depuis le programme d'accès à l'égalité qui a été mis en vigueur depuis
2015, où on est passés de 0.9 à 3.8 % de représentativité. Mais on va
regarder la faisabilité du ratio, donc, puis là, l'accès, le pacte PNI va
répondre aussi à certaines de vos préoccupations.
Vous avez mentionné l'attestation d'études
professionnelles. Juste que vous élaboriez un petit peu plus : vous
souhaiteriez que ce soit élargi à d'autres métiers?
Puis, avant de conclure, parce que là je
réalise qu'il me reste une minute, on est...
La Présidente (Mme D'Amours) : 30 secondes.
M. Boulet : ...on est en
train de faire la traduction de tous les outils de formation pour répondre à
votre préoccupation pour l'anglais et les langues qui sont parlées, là, par les
communautés autochtones et avec l'association sectorielle paritaire du secteur
de la construction. Ça fait que les AEP, si j'ai bien compris, c'est que vous
souhaiteriez que ce soit aussi possible pour d'autres métiers.
La Présidente (Mme D'Amours) : En
10 secondes.
M. Martin (Réal) : Absolument.
M. Jalbert (Richard) : Exactement.
On a un réseau établi... un réseau établi via l'éducation qui donne des AEP,
des DEP, et nous sommes... Nous sommes très, très, très friands à graduer des
gens et les rendre professionnels.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
M. Boulet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole à la députée de Jeanne-Mance-Viger pour une période
de 10 minutes 24 secondes, s'il vous plaît.
Mme Rotiroti : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Jalbert, Mme Lafontaine et M. Martin. Merci d'être
parmi nous aujourd'hui.
Alors, nous aussi, on a très hâte de lire
votre mémoire. C'est très intéressant, qu'est-ce que vous avez sorti comme
recommandations, là. Les plus importantes, on comprend bien que c'est le un
pour trois au niveau de l'apprenti pour les compagnons, une formation qui est
adaptée plus à votre réalité, alors c'est noté.
Et je réitère, je remarque l'ouverture du
ministre, même sans avoir lu votre mémoire, qu'il est ouvert à faire des
changements pour s'assurer que vous êtes compétitifs dans l'industrie. Je sais
que le ministre a quand même consulté beaucoup d'acteurs avant de déposer le projet
de loi, et je me demandais si vous étiez consultés en amont?
M. Jalbert (Richard) : En
fait, oui, on travaille... on est consultés directement par nos... notre
implication avec la CCQ. Notre... nous assumons la présidence du CCPNIMT, donc
notre voix est entendue à plusieurs niveaux, plusieurs...
M. Jalbert (Richard) : ...sauf
que ce qui est nouveau aujourd'hui, avec l'annonce du projet de loi, on est
impliqué dans le...mais on voit un laps de temps pour la mise en œuvre de ça
jusqu'à 10 ans, pour certaines mesures, dans le... On voit dans le
changement de la loi une façon très rapide d'arriver à nos résultats. Ce qui
est nouveau dans notre mémoire, qu'on va vous préciser, c'est que ça nous a
fait réfléchir sur l'importance que la CDRH devrait être une agence de
placement, l'agence de... la porte d'entrée pour les entrepreneurs et pour les
autochtones, devenir un centre de main-d'œuvre d'auparavant pour pouvoir
répondre ponctuellement et rapidement à cette... à cette demande de l'industrie
et aux deux pénuries. Nous croyons que nous sommes la solution pour ça. C'est
ce qui est devenu un peu plus novateur dans notre mémoire, mais en guise de
réponse à ça. Et aussi nous... nous sommes responsables des formations. On a un
réseau d'écoles, on a un réseau de centres d'éducation aux adultes et des
préalables aussi au niveau de... le conseil scolaire en éducation des adultes,
au niveau des centres de vocation professionnels dans différentes communautés
anglophones et francophones. Nous croyons que nous sommes la porte d'entrée
pour les métiers de la construction, pour être plus ponctuels, pour répondre à
ce besoin.
M. Martin (Réal) : Bien, pour
répondre à votre question, Mme, oui, on a été consultés en amont, au mois de
juillet, le Comité consultatif des Premières nations et des Inuits a déposé une
demande au changement de la loi via l'ACPNT avec notre président Jean Lortie,
et puis ce qu'on a su, c'est que très peu de temps après, il y avait... il y
avait un projet de loi pour le... Oui, on a été consultés.
Mme Rotiroti : Parfait. Merci
beaucoup. Bien contente d'entendre que vous étiez consultés en amont. Si je
comprends bien, M. Jalbert, dans votre commentaire, c'est que vous, vous êtes
prêts au niveau d'offrir la formation dans même la langue anglaise, vous êtes
capables d'adapter les formations que vous offrez, que ça soit au niveau de
vocation professionnelle, et autres, pour votre clientèle. Dans le fond, vous
n'avez pas la permission présentement de le faire. Ça prend un changement dans
la loi pour que vous... vous pouvez être cette porte d'entrée là, que vous
dites.
M. Jalbert (Richard) : En
fait, les centres de vocation anglais et français donnent actuellement des
formations sans problème. Ce que... ce que nous voyons l'opportunité dans le
changement de la loi, qui est déjà fait avec les Cris au... avec Kativik, où
nous sommes... nous devenons la porte d'entrée. l'appel pour les autochtones.
Ils ont une porte à frapper et on peut les diriger vers les centres de
vocation, mais aussi répondre aux contracteurs qui... ils en perdent leur latin
à trouver une main-d'œuvre autochtone pour remplir les exigences des contrats
fédéraux et aussi des contrats sur... communautés. Donc, on le fait déjà. Il
s'agit d'officialiser que nous sommes l'agence de placement en matière de...
autochtone.
Mme
Rotiroti
: Je
comprends. Parfait. Merci pour la précision. Quand vous parlez de la place de
la... parlez-nous un petit peu de la place de la constitution dans votre
communauté. Ça représente quoi, en termes de retombées économiques pour...
économiques et sociales chez vous? Ça peut représenter quoi?
M. Jalbert (Richard) : Bien,
c'est très différent. On représente 27 communautés puis on représente
aussi des gens en milieu urbain. Donc, c'est... puis sur communauté, comme...
comme vous le mentionnez, ce n'est pas selon le décret de la construction, ils
n'ont pas besoin d'être qualifiés pour construire et travailler dans le monde
de la construction sur communauté. Donc, c'est le nerf de la guerre la construction,
mais nous, ce qu'on... ce que qu'on pense, c'est qu'on est capables de faire
une différence dans la société québécoise au lieu de pousser notre
main-d'oeuvre soit à l'Ontario ou aux États-Unis. On a, comme à Kahnawake, une
expertise incroyable en monteurs et en ferblantiers, mais ça s'en va tous
travailler aux États-Unis, parce qu'ils ont le droit. Il s'agit que nous, on
puisse les qualifier puis les recommander de travailler ici.
Mme Rotiroti : Oui, puis
nous, on a tout l'intérêt avec... de les garder ici, au Québec, aussi, parce
qu'on a besoin de ces travailleurs-là, en effet. Dites-moi, est-ce qu'il y a
des mesures dans le projet de loi qui sont suffisantes, selon vous, pour
permettre davantage des autochtones... de s'intégrer davantage à l'industrie?
Voyez-vous... il y a-tu une mesure qui, pour vous, ferait en sorte que ça
serait avantageux et vous pouvez vous intégrer davantage? Qu'est-ce que vous
voulez absolument que le ministre...
Mme Rotiroti : ...dans vos
recommandations, qu'il garde ou qu'il... S'il y a une recommandation à lui
faire, ça serait laquelle? Là, vous avez mentionné quelques-uns, là, mais celui
qui était incontournable.
M. Jalbert (Richard) : Vas-y,
Réal.
M. Martin (Réal) : Le
changement de ratio, déjà, qui est rendu à un pour deux, c'est déjà bon, mais
si on pouvait avoir un pour trois. Le changement de ratio, là, il va venir
changer toute la... il va venir tout changer la configuration de la formation
parce qu'on va avoir plus d'accès à de l'accompagnement, à des compagnons.
Actuellement, là, c'est la meilleure clé.
Puis l'autre clé, c'est... c'est comme on
disait, là, actuellement, comme agence de placement... Les Inuits ont obtenu
l'autorisation d'être agence de placement, les Cris ont obtenu leur autorisation
d'être agence de placement, puis la CDRHPNQ représente toutes les autres
communautés autochtones, toutes les autres nations qui ne sont pas
conventionnées, à part les Inuits, les Cris. C'est la CDRHPNQ qui représente
les Algonquins, les Innus, les Micmacs, enfin qui représente toutes les autres
communautés dans la province de Québec.
Mme Rotiroti : Parfait. J'ai
pu comprendre que vous avez quand même une bonne relation avec la CCQ. Et, dans
le projet de loi que le ministre a sur la table, on parle d'un fonds de
rétroactivité qui serait géré, dans le fond, avec la... c'est géré par la CCQ.
Est-ce que vous avez des commentaires ou des suggestions à faire dans cette
partie-là? Parce qu'il y a quand même des groupes qui sont un peu inquiets de
la façon que ce fonds-là va être géré, toute la question d'où vont venir les
fonds, est-ce que c'est uniquement par des cotisations ou autres. Alors,
j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
• (10 h 30) •
M. Martin (Réal) : Il y a
déjà un fonds de formation qui est prévu à la CCQ, puis on n'a jamais eu accès
à ces fonds-là. On a... Puis il y a eu des demandes répétées par... faites par
les Cris, les Inuits dans le... dans les années passées, puis leurs projets
n'ont jamais... ont toujours passé sous la table. Alors, c'est un... c'est dans
notre... c'est dans nos demandes, qu'on ait accès au fonds de formation de la
CCQ. Comment est financé le fonds de formation à la CCQ? Je ne suis pas
certain, mais il y en a un puis il est supposé d'être pour toute la province.
Mme Rotiroti : Merci. On
parle aussi, dans le projet de loi, concernant la productivité. On parle
beaucoup de la possibilité qu'on peut avoir une carte... deux cartes de
compétence, c'est-à-dire entre autres pour les travailleurs saisonniers, ceux
qui travaillent l'été, d'avoir une carte et pour ceux qui pourraient faire
d'autres choses l'hiver et avoir une formation puis avoir une autre carte.
Aujourd'hui, ce n'est pas possible. Est-ce que pour vous ça serait quelque
chose qui pourrait faciliter et augmenter la productivité dans... chez vous ou
est-ce que c'est quelque chose que vous ne considérez pas? Pour vous, c'est
vraiment le un compagnon pour trois apprentis qui pourrait faire en sorte...
qui pourrait améliorer la productivité?
M. Jalbert (Richard) : En
toute honnêteté, le ratio est primordial et augmenterait l'accès à la
profession. Par contre, ce que vous... l'idée d'avoir une compétence d'été et
une compétence d'hiver est loin, à mon esprit, une solution. Si vous êtes
opérateur de machinerie lourde chargé de la neige ou chargé du gravier, c'est
la même chose. La compétence est dans la formation. Si on est opérateur, on est
opérateur. Charpentier-menuisier dans l'été et charpentier-menuisier dans
l'hiver, c'est la même chose. Nous, on promouvoit la formation totale.
M. Martin (Réal) : Bien,
avoir accès à plusieurs cartes de... (panne de son) ...besoin aussi parce
qu'ayant... Vous savez, là, qu'il y a des milliards qui ont été mis de côté
pour la construction de logements sur les communautés par le gouvernement
fédéral, et puis actuellement ils attendent, il y a des appels à projets pour
des projets de construction pour le manque de logements et d'hébergement. Mais
là...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
c'est tout le temps que nous avions pour ce bloc d'échange. Je cède maintenant
la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve pour trois minutes 28 secondes.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, messieurs. Bonjour, Mme. Vous avez fait référence, là, à
des choses qui pourraient faciliter l'attraction des personnes autochtones dans
l'industrie de la construction, mais j'aimerais vous poser une question connexe
par rapport à la rétention, parce qu'on sait que, dans d'autres domaines... en
fait, dans le domaine général de la construction, dans le domaine des... pour
retenir des femmes, notamment, dans la construction, c'est quasiment une porte
ouverte, là, on... il y en a qui...
10 h 30 (version non révisée)
M. Leduc : ...30, mais qui
ressortent presque aussitôt après quelques années. Est-ce qu'on a le même
problème de rétention de la main-d'œuvre pour les personnes autochtones dans la
construction?
M. Jalbert (Richard) : Bien,
en fait, c'est la diversité, c'est... la rétention, les problèmes de rétention
que nous avons dans la construction est plutôt la territorialité avec les
bassins et l'attraction des autres provinces et de nos voisins du Sud, entre
autres les États-Unis. La rétention au Québec se répond par les difficultés
administratives, la mobilité parce qu'on représente les autochtones à travers
le Québec, là, que ce soit de Pakuashipi à la Basse-Côte-Nord jusqu'à Kitigan
Zibi, pas loin d'Ottawa. Les réalités sont différentes. On travaille avec 27 réalités
différentes. Donc, la mobilité et la rétention... Un autochtone charpentier à
Pakuashipi, bien, il n'y a pas d'horaire, il n'y a pas du travail à l'année,
mais il se fait appeler plus facilement ailleurs du Québec que de venir
travailler peut-être possiblement dans le coin d'Ottawa, dans d'autres
communautés. Donc, la rétention, nous, elle est un sujet très, très actuel,
mais plus vers les autres provinces.
M. Leduc : Vous parliez à l'instant
de mobilité. On a reçu un mémoire du Grand Conseil des Cris qui propose une
espèce de nouvelle région, une sous région par rapport aux régions de la CCQ,
en lien avec la mobilité régionale. Est-ce que... Je sais que vous, vous
représentez donc une perspective plus large d'autochtones du Québec, mais est-ce
que c'est quelque chose que vous soutenez également? Est-ce qu'il y a d'autres
endroits avec d'autres nations qui pourraient être intéressés d'avoir des
espèces de sous-régions qui leur permettraient d'avoir potentiellement une
meilleure représentativité dans le marché du travail?
M. Jalbert (Richard) : On n'est
pas fermé à explorer d'autres possibilités qui vont améliorer la mobilité avec
la main-d'œuvre autochtone. Par contre, pour le mémoire actuel, ça n'a pas été
une... ça n'a pas été mis en avant, là, en avant-plan.
M. Leduc : Puis le fait d'avoir
la mobilité, telle que le propose le ministre, où est ce qu'on baisse le
plafond, ce qui faciliterait, quelque part, beaucoup les gens de Montréal, du
corridor Montréal-Québec, de se déplacer en régions éloignées, vous n'avez pas
la crainte que ça pourrait potentiellement priver des personnes autochtones de
régions justement d'avoir accès à des chantiers?
M. Martin (Réal) : C'est déjà
comme ça. Tous les entrepreneurs viennent de l'extérieur. C'est déjà... Ça
existe déjà.
M. Leduc : Oui, je comprends
que les entrepreneurs sont de l'extérieur, mais là, dans les conventions
actuelles, il y avait des quotas à respecter en lien avec l'embauche locale qui
vont être pas mal plus lousses dans le futur si le projet de loi est adopté. Ce
n'est pas une crainte que vous avez qu'il y ait moins de personnes, dont des
personnes autochtones dans les régions, qui puissent être embauchées?
M. Jalbert (Richard) : C'est
pour ça que dans le mémoire on a mis qu'il faut quand même que... on a une
crainte de la disparition de l'article 36 qui fait... Donc, on devrait
maintenir l'article 36 dans la loi qui garantisse l'embauche d'une main-d'œuvre
autochtone, là.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions.
M. Leduc : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole au député de Jean-Talon pour une durée de 2 min 38 s.
M. Paradis : Merci beaucoup.
Je vous inviterais peut-être à poursuivre dans cette même lignée. Vous venez de
dire : Nous, ce qu'on ne voudrait pas voir, c'est une abolition de l'article 36.
Vous nous avez fait part de quelques-unes des recommandations qu'on verra dans
votre mémoire, qu'on a hâte de lire. Est-ce qu'il y a d'autres éléments que
vous nous inviteriez à ne pas faire, des choses que vous nous invitez à ne pas
faire? Je veux dire, nous, actuellement il y a ça, ne touchons pas à ça, n'allons
pas là. Donc, vous avez des recommandations sur ce que vous aimeriez voir. Est-ce
qu'il y a des éléments que vous aimeriez... où vous dites : Ça, pour nous,
ça pourrait ne pas nous aider? Parce qu'évidemment on veut favoriser une
intégration et notre premier devoir, c'est de ne pas nuire, c'est de ne pas
reculer, c'est d'avancer. Est-ce que vous avez des recommandations là-dessus?
M. Martin (Réal) : Non, on
a... Nous, on va de l'avant puis on appuie le projet de loi absolument. Puis
tout changement qui peut... Tu sais, la plupart des changements qui sont
proposés dans ce projet de loi là favorisent l'intégration des autochtones.
Maintenant, des choses qu'on ne voudrait
pas voir, c'est plutôt des choses qu'on a besoin pour... on a besoin d'outils
comme la question des agences de placement pour les autochtones sur le
territoire, mais on n'a rien vu dans le projet de loi qui vient... qui ne nous
aide pas dans notre démarche d'intégrer le marché de l'emploi dans le secteur
de la construction.
M. Jalbert (Richard) : Que ce
soit au PAC, PNI, que ce soit le... tous nos travaux, on travaille dans le sens
qu'il y ait...
M. Jalbert (Richard) : ...il y
a... que ça ne répond pas aux besoins des autochtones comme main-d'œuvre. Donc,
le changement de loi est nécessaire et nous amène à faire des coupes plus vite
et plus grandes. Donc, autre que l'article 36, qui garantisse une certaine
embauche à la... à la main-d'oeuvre autochtone, on voit d'un bon oeil la loi
avec les recommandations qui est dans notre mémoire.
M. Paradis : Je n'ai pas
le...
La Présidente (Mme D'Amours) : 30 secondes.
M. Paradis : 30 secondes.
Je vous aurais posé la question sur la... les enjeux de mobilité, parce qu'on
va beaucoup en parler, j'aurais vous aimé... j'aurais aimé vous entendre continuer
sur la perspective autochtone de cette mobilité interrégionale. Parce que vous
avez dit : Nous, c'est l'Amérique, notre territoire, et on le comprend
bien. J'espère qu'on va pouvoir vous lire dans votre mémoire sur cette
question-là.
M. Martin (Réal) : Bien, une
chose à retenir, il faut comprendre qu'actuellement il y a un exode des jeunes
de... qui partent des communautés puis qui viennent vivre en milieu urbain. On
a au-delà de 50 % de la population autochtone qui habite maintenant les
régions urbaines. Alors, ce qui est bon dans un sens est bon de l'autre aussi,
alors... parce que ça va permettre à ces gens-là, s'ils ont des cartes de
qualification, de travailler en dehors de leur territoire.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
infiniment, M. Javert, Mme Lafontaine et M. Martin, pour votre contribution aux
travaux de notre commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre à nos prochains invités de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 40)
(Reprise à 10 h 49)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue au Conseil
d'intervention pour l'accès des femmes au travail. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à nous faire part de votre exposé, s'il vous plaît.
Mme Cummings (Colette) : Alors,
bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre, messieurs, mesdames députés. Mon
nom est Colette Cummings, je suis la directrice générale et je vous présente ma
collègue Marianne Lapointe qui fera la présentation.
Mme Lapointe (Marianne) : Bonjour.
Alors, le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail est un
organisme de défense collective des droits ayant une portée nationale au
Québec. Depuis de nombreuses années, le CIAFT et ses groupes membres se
penchent sur les inégalités et des interventions sur le terrain ont construit
notre expertise collective. Notre engagement auprès de la main-d'œuvre féminine
nous permet de transmettre les enjeux qu'elles rencontrent dans l'accès à
l'industrie de la construction.
• (10 h 50) •
Nous exprimons tout d'abord notre
reconnaissance pour certaines initiatives du législateur. Premièrement, nous
applaudissons le courage dont fait preuve le législateur pour l'ouverture d'une
loi complexe comme la loi R-20. Deuxièmement, nous appuyons l'intention
nommée par le législateur d'augmenter les amendes infligées aux contrevenants à
la Loi sur les normes du travail. Un pas dans la bonne direction.
Troisièmement, nous tenons à souligner l'effort de l'industrie et la constance
de la Commission de la construction du Québec dans ses travaux pour développer
le programme d'accès à l'égalité des femmes dans l'industrie de la construction
et intégrer les groupes intervenant auprès de la main-d'œuvre féminine dans les
travaux de consultation.
Cependant, au moment où l'industrie tente
de devenir plus attrayante pour les femmes, nous notons que certains éléments
sont en rupture avec ce qui devrait être fait pour rendre l'industrie plus
inclusive. Nous sommes ravis d'avoir l'occasion de vous présenter notre point
de vue et nous allons nous concentrer sur les enjeux qui touchent
particulièrement les femmes.
Nos deux premières recommandations sont
donc générales. Comme première recommandation, nous recommandons de poursuivre
le soutien aux organisations concernées par le PAEF pour assurer sa pérennité,
sa mise à jour et son application afin de cheminer vers une industrie
attrayante pour les femmes, mais aussi de favoriser leur maintien à long terme.
Nous recommandons en numéro deux que le
législateur prévoie dans toute mesure en lien avec ce projet de loi un
processus d'analyse différenciée selon les sexes, comme stipulé dans le cadre
de référence ADS+ déposé en 2023 par le Secrétariat à la condition féminine du
gouvernement du Québec.
Au sujet des impacts du projet de loi sur
la conciliation famille-travail-études et le rôle de proches aidants, nous
constatons tout d'abord que le p.l. n° 51 est loin de s'intéresser aux
difficultés autour de la maternité et de la parentalité, non seulement nous
constatons qu'il n'y a aucun ajout de mesures significatives, mais le projet
semble augmenter le risque de problématique et créer des pressions
supplémentaires. Nous tenons à appuyer fortement sur l'importance de ce point
pour les femmes, c'est un facteur clé qui influence leur choix de quitter le
secteur après quelques années seulement. Un sondage récent mené par le
CIAFT : 80,7 % des répondantes mentionnent que les heures de service
de garde ne concordent pas avec leur horaire de travail et 20 % disent
qu'elles ont profité du retour du congé de maternité pour changer de type
d'emploi ou quitter l'industrie.
Donc, le p.l. n° 51 introduit des
dispositions sur la flexibilité entre régions, nous craignons que cette
nouvelle façon d'opérer induise des pressions supplémentaires sur la
main-d'œuvre en conciliation travail-famille-études et proche aidance.
Nos recommandations sont donc,
premièrement, d'introduire des mesures formelles de CFTIPA dans l'industrie.
En...
Mme Lapointe (Marianne) : ...concertation
avec les centrales syndicales et les organismes communautaires ayant développé
de l'expertise sur ce point. Ces mesures devront être mises en place pour
répondre aux besoins de la main-d'œuvre en tenant compte de la disponibilité
des services publics comme les garderies.
Notre quatrième recommandation est de
porter une attention particulière au mode de dispensation des programmes
d'études de formation continue et de formation rapide mis en place récemment
afin que leur logistique tienne compte de la... En cinquième point, nous
recommandons que l'octroi du droit pour une entreprise de déplacer une
travailleuse ou un travailleur de région s'accompagne d'une obligation de
fournir des mesures pour faciliter la...
Au sujet du harcèlement et de
l'assainissement du climat de travail. Ceci est un autre point de rupture pour
les femmes qui influence leur décision de quitter l'industrie. Le climat
toxique qu'elles y rencontrent, le harcèlement, les violences, la
discrimination et les comportements inappropriés sont encore trop souvent
présents sur les chantiers. Les conditions spécifiques de l'industrie de la
construction nécessitent une attention particulière selon nous. Cette question
demeure un enjeu qui repousse la main-d'œuvre féminine, qui a un taux d'abandon
de 52 % après cinq ans. Notre recommandation numéro six est donc de rendre
l'obligation obligatoire une formation concernant le savoir être, la prévention
du harcèlement, des violences, de la discrimination et des comportements
inappropriés pour toute personne possédant une carte de compétence dans
l'industrie. Ces formations devraient se retrouver financées et intégrées
directement dans l'offre du Fonds de formation de l'industrie.
Aussi, en septième recommandation, nous
suggérons pour tout employeur et leur équipe de gestion la mise en place de
formations et la mise en place d'un accompagnement en gestion de la diversité
afin de les aider à préparer leur entreprise à l'arrivée d'une nouvelle
main-d'œuvre. Cette mesure devrait s'accompagner d'une forme d'obligation,
puisque les incitatifs n'ont pas donné les résultats escomptés lors des
dernières années.
Nous avons un point de vigilance
concernant l'application des mesures développées pour les femmes à l'ensemble
des communautés de la diversité. Nous questionnons les impacts possibles des
modifications du règlement sur le service de référence de la main-d'œuvre de
l'industrie de la construction, entre autres à l'article neuf, au regard du
maintien des acquis pour les femmes. Avec les modifications proposées au
PL 51, les candidatures féminines seront-elles noyées parmi les autres
diversités? Il est légitime de poser la question. Notre recommandation huit est
donc de revendiquer que les femmes conservent leur priorité au sein du système
de référencement, comme stipulé dans le PAEF. Selon nous, une continuité dans
cette mesure est un bon moyen de contribuer à l'atteinte de cibles et de
favoriser l'entrée des femmes dans l'industrie.
Au sujet de l'introduction de changements
au processus de reconnaissance des compétences, un élément bien documenté est
la difficulté qu'ont les femmes à faire reconnaître leurs compétences sur les
chantiers. Sujettes aux doubles standards, elles se voient trop souvent dans
l'obligation de prouver leur capacité à répétition, obtenir une certification
reconnue tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'industrie est une méthode
éprouvée de contrôler cette problématique. Nous exprimons donc une forte
réserve sur la proposition de créer un nouveau processus de reconnaissance des
compétences. Le risque est réel de créer une industrie à plusieurs vitesses.
Les femmes qui se retrouveraient dans cette nouvelle catégorie de main-d'œuvre
pourraient se retrouver dans un futur proche à vivre une double discrimination,
c'est-à-dire être une femme et être une femme immigrante avec une
reconnaissance d'acquis de l'étranger. Notre neuvième recommandation est donc
que soit appliqué un complet processus d'analyse différenciée selon le sexe,
avec intersectionnalité, dans toute démarche de création de nouveaux programmes
de reconnaissance de diplômes et de compétences.
En supplément et en dernier point, nous
avons une revendication concernant un élément manquant, selon nous, dans ce
projet de loi, le programme d'obligations contractuelles. Depuis 2014, la
recommandation de l'implantation d'un programme d'obligations contractuelles
fait partie de la liste des recommandations des groupes de femmes et de
plusieurs partenaires de l'industrie. Cette recommandation nous semble toujours
pertinente et opportune et le présent projet de loi serait l'occasion de
s'engager dans cette voie audacieuse et nécessaire. Notre recommandation
numéro 10 est donc d'instaurer des cibles pour l'octroi de contrats
publics, cibles s'appliquant aux entrepreneurs généraux, maîtres d'œuvre et
donneurs d'ouvrage, mais aussi à leurs sous-traitants. Ceci pour faire une...
pour faire en sorte que cela devienne une responsabilité partagée par tous. Les
cibles devraient s'appliquer à l'ensemble des corps de métiers, et ce, peu
importe la taille de l'entreprise. Nos recommandations... nous recommandons aussi
en numéro 11 de...
Mme Lapointe (Marianne) : ...de
créer des outils d'accompagnement des entreprises ainsi que la mise en place de
processus de surveillance pour de réelles embauches avec un maintien en emploi
tout au long du projet.
Et, pour être certain que ce soit
respecté, nous suggérons un système de sanction s'il n'y a non-respect, et ceci
pour faire en sorte que l'entreprise, là, fasse ce qu'il est nécessaire pour
conserver le niveau des cibles pendant toute la durée du contrat. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Oui, merci, Mme
la Présidente. D'abord, merci sincère, je l'ai fait tout à l'heure, là, pour le
Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail. On vous a reçus,
d'ailleurs, lors des consultations particulières du projet de loi n° 42.
Votre mémoire est bien fait, vos recommandations sont claires. Et on partage l'objectif
qui est transcendant, c'est-à-dire de faire de l'industrie de la construction
une qui est inclusive et diversifiée. Et jamais elle n'aurait été, notre
intention, de diluer le taux ou le pourcentage de représentativité des femmes
dans l'industrie de la construction.
Puis vous y avez fait référence, le
Programme d'accès à l'égalité, puis ça a été mentionné par le groupe précédent,
ça a connu des résultats superintéressants. En 2015, on était à 0,9 %, on
est à 3,8. Et 9,5 %, je le mentionnais, mais c'est important pour moi de
le répéter, des nouvelles entrées, en 2022, c'est des femmes. Puis je suis allé
dans des cohortes en électricité, dans différents métiers où il y a autant de
femmes. On atteint la parité presque complète. Donc, les femmes, c'est un
potentiel immense pour l'industrie de la construction. Et tout ce qu'on pourra
faire... Et, je vous le confirme, le Programme d'accès à l'égalité pour les
femmes, bon, je pense qu'il est en vigueur jusqu'en 2024. On travaille
beaucoup, vous en êtes conscientes, à la CCQ pour une nouvelle version du
Programme d'accès à l'égalité. Puis il n'est pas question de ne pas soutenir
les organismes et au contraire de soutenir les organismes qui s'intéressent à
l'intégration et à la rétention.
• (11 heures) •
Conciliation travail-famille, j'en suis
conscient. Évidemment, ça relève beaucoup du ministère de l'Éducation puis
beaucoup des entrepreneurs, qui doivent s'assurer aussi de respecter
l'importance de la famille. C'est une valeur qui est fondamentale au Québec.
Puis ce qui me préoccupe beaucoup,
c'est... Souvenez-vous du sondage qui a été commandé par la Commission de la
construction qui démontrait qu'un pourcentage important de travailleurs et
travailleuses étaient témoins ou subissaient du harcèlement, de la
discrimination, des menaces. Ça, le projet de loi n° 42, je le répète, il
s'applique aussi à l'industrie de la construction. Ça fait que la formation
pour mieux prévenir, pour s'assurer qu'on intègre aussi une culture de
signalement dans l'industrie de la construction, j'anticipe que ça donne des
résultats intéressants, parce que ce même sondage-là révélait que les 79 %
ne signalaient pas par crainte de représailles ou par crainte de perdre leur
emploi. Donc, si cette commission parlementaire là nous permet de redire le
plus souvent possible que ça passe par une dénonciation... Et c'est ça qui va
nous permettre d'améliorer, notamment, le taux de rétention des femmes.
Puis vous avez noté aussi dans le projet
de loi n° 51 qu'on permet quand même le maintien de la carte de
compétence, là, dans des situations précises, vous me faites un sourire, là,
mais, en cas de retrait préventif, adoption, congé de maternité, congé
parental. Je pense qu'on a essayé de s'assurer que ça n'a pas d'impact négatif
pour les femmes qui exercent des droits, d'ailleurs, qui font du Québec l'envie
de plusieurs autres pays, qui font que le Québec a un taux d'emploi des femmes
qui est particulièrement élevé. Donc... Puis la priorité, là, le service de
référence, là, qui apparaît dans le Programme d'accès à l'égalité. Moi, je
pense qu'il faut tenir à cette priorisation-là, il faut... Puis je vais
m'assurer que les recommandations que vous faites, dans la mesure où elles sont
bénéfiques pour l'intégration puis la rétention des femmes, on puisse y assurer
un suivi qui est pragmatique. Et je ne veux pas, je le répète, parce que je
vais laisser du...
11 h (version non révisée)
M. Boulet : ...temps de parole
à mes collègues de Huntingdon et de Hull, il faut que d'aucune manière le
projet de loi ne soit perçu comme étant une dilution à l'égard des femmes, au
contraire. Toutes les mesures qu'on a mis en place, que ce soient les ratios,
que ce soient les pourcentages pour l'ouverture des bassins de main-d'œuvre,
tout ce qui a été fait à l'avantage des femmes, il faut que ce soit maintenu et
il faut que ce soit raffermi. Alors, merci beaucoup, Colette et Marianne. Belle
présentation, beau mémoire et je vais laisser mes deux collègues échanger un
peu plus avec vous.
La Présidente (Mme D'Amours) : merci,
M. le ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Hull.
Mme Tremblay : Merci. Alors,
bonjour. Très heureuse de vous recevoir également aujourd'hui, comme le
ministre l'a mentionné. Alors, au niveau de... Bon, la conciliation travail
famille, effectivement, dans le milieu de la construction, elle est importante.
Vous en parlez beaucoup puis à différents niveaux. Donc, au niveau... Comment,
sur les chantiers, favoriser l'intégration... des femmes? Bon, vous avez parlé
d'horaire, mais est-ce qu'il y a autre chose que les horaires? Comment
concrètement, là, ça peut se vivre sur un chantier, cette conciliation-là?
Mme Lapointe (Marianne) : Bien,
en fait... Merci de la question et merci pour les bonnes intentions, en fait,
du législateur de mettre le focus sur la diversité. Vous comprendrez que, pour
nous, notre focus à nous est vraiment de s'assurer que nous parlons des
éléments qui peuvent influer sur le maintien en emploi des femmes dans l'industrie,
puisqu'à 52 % elles quittent après seulement cinq ans. Donc,
effectivement, beaucoup de mesures très positives ont été mises en place pour
favoriser leur entrée, , maintenant, occupons-nous du maintien.
La conciliation famille travail dans l'industrie
de la construction est quand même assez complexe. Et, oui, on parle d'horaires
de travail, on parle aussi d'arrimer ces horaires de travail là avec la disponibilité
des heures de services de garde. On parle aussi de toute la mécanique de départ
en retrait préventif et les congés parentaux par la suite, et de s'intéresser
aussi à ce qui se passe lorsqu'on revient. Donc, il y a, vous le savez, dans l'industrie
de la construction, une non-permanence des emplois, puisqu'on passe d'un
chantier à l'autre, parfois même dans la même année et parfois même dans le
même mois. Donc, un retour en emploi par la suite... On salue la disposition d'intégrer
une mesure, là, de favoriser le maintien de la carte de compétence au retour d'un
congé parental, c'est une très bonne disposition de ce projet de loi, mais il
faut aussi s'occuper de la mécanique qui vient après, donc peut être de l'aide
à retrouver de l'emploi et s'intéresser aussi à comment fonctionne, là, la
multiplicité des employeurs dans la même année pour les femmes.
Mme Tremblay : Parfait. Puis
vous avez parlé aussi, là, au niveau... Parce que je... bon, je suis avec le
ministère aussi de l'Éducation, puis on a effectivement créé des programmes
rapides, puis là aussi, vous parliez de conciliation parce que c'est difficile,
au niveau, là... j'imagine, d'accéder à ces formations-là dû à des horaires qui
sont souvent chargés quand on a des formations qui sont rapides. Est-ce que ça
vient encore avec ce que vous venez de dire, là, au niveau des services de
garde? Donc, est-ce que vous avez d'autres choses à ajouter plus
particulièrement que les programmes de formation rapide?
Mme Lapointe (Marianne) : Bien,
en fait, dans les programmes de formation, c'est tout programme de formation.
Donc, les centres de formation professionnelle présentement ont beaucoup l'habitude
de mimer les horaires de l'industrie de la construction, ce qui n'est
probablement pas nécessaire. On pourrait, par exemple, favoriser des horaires
qui sont plus en lien avec les services de garde ou s'assurer que les services
de garde offrent des services qui s'arrimeraient aux horaires de l'industrie de
la construction.
Par la suite, si on offre des programmes
de formation continue ou de formation rapide et que ces programmes là se font
en surplus, des heures de travail de la travailleuse ou du travailleur, bien,
ça ne favorise pas la disponibilité de cette personne pour sa famille, ses proches
qui ont besoin d'un soutien. Parce que n'oublions pas, la conciliation famille
travail études et proches aidance, dans notre vision à nous, on s'intéresse
aussi aux soins aux personnes en perte d'autonomie. Donc, pour nous, c'est
toute personne qui travaille dans l'industrie...
Mme Lapointe (Marianne) : ...industrie
de la construction, hommes et femmes confondus devraient avoir accès aux
mesures de conciliation travail-famille. Pas seulement les femmes.
Mme Tremblay : Parfait.
Donc... Et vous parlez, dans une de vos recommandations, de la création
d'outils d'accompagnement des entreprises pour l'embauche et l'accueil de la
diversité. Est-ce que c'est parce que ces outils-là sont inexistants ou parce
qu'ils doivent être bonifiés? Donc, j'aimerais ça que vous entendre, là, sur
cette recommandation-là.
Mme Lapointe (Marianne) : Suite
à l'arrivée du programme d'accès à l'égalité dans l'industrie de la
construction, il y a eu effectivement une formation de créée et elle était
offerte en concomitance avec une aide financière lors de l'embauche d'une femme
dans l'industrie, dans l'entreprise. Cette formation-là, bien que super
performance... performante, a été moins utilisée que ce qu'on aurait pu croire.
Cette formation-là a été d'ailleurs construite avec l'aide d'un de nos groupes
membres. Donc, on la trouve bien, mais il y aurait lieu, parce que ça fait déjà
quand même plusieurs années qu'elle a été créée, de la rafraîchir et d'en faire
une certaine forme de promotion et d'obligation, en fait, pas juste un
incitatif financier, mais plus une forme d'obligation pour que l'ensemble des
employeurs soient formés pour l'accueil de la diversité.
Mme Tremblay : Parfait.
Merci. Donc, j'ai ma collègue aussi qui a des questions.
La Présidente (Mme D'Amours) : Oui,
je vais céder la parole maintenant à la députée de Huntingdon, s'il vous plaît.
Mme Mallette : Combien de
temps qu'il nous reste?
La Présidente (Mme D'Amours) : Cinq
minutes 30 secondes.
Mme Mallette : Super. Merci.
J'ai lu votre mémoire avec attention. Effectivement, je rejoins les propos de
M. le ministre, c'était très bien fait et surtout très bien documenté.
Mme Lapointe (Marianne) : Merci.
• (11 h 10) •
Mme Mallette : D'ailleurs,
j'ai moi-même lu, là, certaines des études, là, qui... dont celle de l'ATF, qui
date de 2023, donc qui est tout récent. Puis j'ai rencontré d'ailleurs les
personnes qui ont fait... qui ont... qui ont produit ce document-là, puis ils
parlaient beaucoup, entre autres, de harcèlement, puis tout ça. Les autres
documents, ils datent quand même d'environ 10 ans pour la majorité des
autres documents. Dans les cinq dernières années, il y a beaucoup de choses qui
ont été faites au ministère du Travail, à la CCQ, puis tout ça, dont une loi,
là, qui vient juste d'être votée pour le harcèlement, qui rejoint d'ailleurs
le... les propos, là, de l'ATF. Est-ce que vous pourriez me dire, dans les cinq
dernières années, les éléments qui ont vraiment amélioré les choses, puis celles
dans lesquelles il faudrait renforcer, puis celles selon lesquelles pour vous
on n'a peut-être pas eu l'effet escompté?
Mme Lapointe (Marianne) : Merci
de la question. Effectivement, c'est un des éléments sur lequel on met beaucoup
le focus dans notre mémoire, parce que pour nous, le harcèlement et toute
situation, ce qui se décline, dans cette thématique-là, a un grand impact sur,
en fait, la pérennité des femmes dans l'industrie et dans leur emploi.
Donc, ce que je pourrais indiquer, là,
pour la réponse à votre question, c'est qu'en fait beaucoup d'éléments ont été
faits pour, entre autres, aider les centrales syndicales à se former au niveau
des processus de plainte et quel est le harcèlement, c'est quoi les
conséquences pour les femmes, etc. Donc, nous saluons cet état de fait. Et
cette formation-là a été faite, entre autres, avec ATF dans les dernières
années, un organisme partenaire du CIAFT, que nous apprécions énormément.
Cette question-là, pour nous, demeure
quand même importante parce qu'il faut maintenant que ça descende dans les
milieux de travail. Donc, oui, il y a beaucoup d'éléments qui ont été proposés,
dans les différents projets de loi récents, qui proposent des aménagements pour
l'employeur, faire en sorte que l'employeur se conforme plus à sa
responsabilité de mettre en place une mesure, une politique de prévention du
harcèlement. Par contre, il y a toutes les autres déclinaisons de violence et
de discrimination et les comportements inappropriés. Et souvent, ça se passe
dans les milieux de travail. Donc, nous, notre recommandation, c'est que tous
les travailleurs, toute personne qui met un pied sur le chantier ait, reçoive
une forme de formation par rapport à ça, ce n'est pas obligé d'être superlong,
mais d'avoir un outil de sensibilisation. Et on a un outil pour intégrer ça
dans l'industrie de la construction, qui est le fonds de formation...
Mme Mallette : Effectivement.
Puis, entre autres, c'est un des éléments d'ailleurs que l'ATF relevait, comme
quoi que c'est ce qui fait que les femmes quittent. Donc, on s'entend que c'est
un antirétention.
Mme Lapointe (Marianne) : Sur
ce, nous sommes totalement d'accord.
Mme Mallette : Donc... Mais,
à part cet élément-là, qui est quand même majeur, qu'est-ce qu'on peut faire
pour augmenter la rétention des femmes? Parce qu'il y avait d'autres éléments
aussi qui étaient très pertinents pour augmenter la rétention des femmes, donc
pas juste les attirer, pas juste les intégrer, mais aussi de les retenir à long
terme.
Mme Lapointe (Marianne) : Bien,
je pense que c'est une combinaison. Il n'y a pas une seule mesure qui va faire
la job, comme on dit, c'est vraiment une combinaison, selon nous, et puis les
mesures de conciliation famille-travail-études et proche aidance en sont une,
les mesures pour l'assainissement du climat de travail en sont une autre, et je
mentionnerais aussi de s'intéresser à tout ce qui concerne, là, le fameux
service de référencement de la main-d'oeuvre, puisque les femmes sont obligées
de passer... Il n'y a pas de permanence d'emploi dans l'industrie de la
construction. Donc, le fait d'avoir à, tu sais, recommencer le processus à
plusieurs reprises dans la même année et, par la suite, à avoir à prouver ses
compétences, ce sont aussi des démarches lourdes, donc on devrait en tenir
compte et mettre des mesures d'assouplissement de ces difficultés.
Mme Mallette : Parfait. Eh!
je vous remercie beaucoup. M. le ministre aurait...
La Présidente (Mme D'Amours) : Oui.
Il reste 40 secondes, M. le ministre.
M. Boulet : Oui. Simplement,
la conciliation travail-famille-études-proche-aidance, n'oublions jamais que
c'est aussi matière à négociation lors des renouvellements des conventions
collectives de travail. Ça fait que j'invite les parties à porter une attention
particulière à cette préoccupation-là. Puis la formation sur la diversité, je
sais que c'est discuté à l'association sectorielle paritaire construction. Il
faut faire des pas en avant, puis je suis aussi d'accord avec cette proposition-là
de faire plus de formation. Puis, enfin, je vous réitère : le p.l. n° 42
fait... permet des avancées importantes pour améliorer le taux de rétention des
femmes. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
M. le ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de
Jeanne-Mance-Viger.
Mme Rotiroti : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, merci, Mme Cummings et Mme Lapointe, d'être
parmi nous aujourd'hui, très intéressant de vous entendre et de lire votre
mémoire. Vous faites plusieurs recommandations qu'on va regarder attentivement.
Mais j'aurais... j'irais au vif du sujet, parce qu'on n'a pas beaucoup de
temps. J'ai senti une inquiétude par rapport... quand vous avez fait votre
présentation sur l'inclusion et la diversité, que... la partie inclusion,
diversité, que la représentation des femmes serait diluée, vous avez cette
crainte-là. Qu'est-ce qui fait en sorte que vous êtes préoccupées à cet
effet-là? Est-ce que vous voyez quelque chose dans le projet de loi qui
pourrait, comment je peux vous dire, qui pourrait vous donner raison? Je dirais
ça comme ça.
Mme Lapointe (Marianne) : Bien,
en fait, ce sont les modifications à l'article 9, là, au regard du maintien...
bien, de la modification du règlement sur les services de référence de la
main-d'œuvre qui nous préoccupent. On salue l'intégration des autres membres de
la diversité culturelle du Québec, on croit que c'est quand même une avancée
intéressante pour le Québec d'inclure de la diversité. Par contre, on voudrait
que les acquis des femmes par rapport aux règles... par rapport aux services de
référencement soient conservés, donc qu'il y ait toujours les candidatures
femmes présentées en premier, ensuite les autres membres de la diversité et
ensuite les autres travailleurs de l'industrie.
Mme Rotiroti : Parfait. Merci
de le clarifier, parce que j'ai pu comprendre dans votre présentation puis les
recommandations faites que c'est quasiment le statut particulier que vous
voulez, vous voulez passer en premier.
Mme Lapointe (Marianne) : C'est
déjà le cas avec le Programme d'accès à l'égalité dans l'industrie de la
construction. Depuis son avènement, les femmes... les candidatures féminines
sont présentées en haut de liste dans le service de référencement aux
employeurs, donc l'employeur voit ces candidatures-là en premier. C'est déjà un
statut établi. Donc, c'est un acquis pour les femmes qu'on veut qu'elles ne
perdent pas.
Mme
Rotiroti
:
Ah! je comprends. Parfait, excellent. Merci pour la clarification. Vous dites
dans votre mémoire, à la page 5, qu'en qu'est-ce qui concerne l'industrie de la
construction, vous étiez, et plusieurs de vos membres, vous avez participé à
l'ensemble des consultations qui mènent...
Mme Rotiroti : ...l'élaboration
du programme Accès à l'égalité des femmes dans l'industrie de la construction,
dans la version 2015.
Mme Lapointe (Marianne) : Oui.
Mme Rotiroti : Vous faites
aussi... Vous dites que vous avez pris le temps de participer et vous avez fait
des recommandations, vous connaissez... parce que vous connaissez évidemment
mieux que n'importe qui le... les enjeux qui appartiennent aux femmes. Ça fait
que vous avez mené... On sait que le ministre a mené des consultations en amont
avant de déposer ce projet de loi là. La question que je pose à tous les
groupes : Avez-vous été consultées avant?
Mme Lapointe (Marianne) : Malheureusement
non. Par contre, nous avons tout de même participé à de nombreuses
consultations tout au long du parcours du Programme d'accès à l'égalité pour
les femmes dans l'industrie de la construction. Ce n'est pas la première fois
qu'il est sous la loupe, là, pour des modifications, des renouveaux, mais,
cette année, non.
Mme Rotiroti : O.K. Alors...
Mme Lapointe (Marianne) : On
est disponibles pour le faire, par contre.
Mme Rotiroti : Oui. Parfait.
Alors, votre disponibilité est notée. Merci. Dans la page six de votre mémoire,
vous dites que «depuis 2012, notre organisation ainsi que plusieurs groupes
communautaires alliés font état de problématiques pour l'accueil, l'intégration
et le maintien des femmes en emploi dans l'industrie de la construction et
présentement... et présentent des solutions.» Alors, selon vous, qu'est-ce qui
ne fonctionne pas dans l'accueil, l'intégration et qu'est-ce qu'on pourrait
faire de mieux? Qu'est-ce que vous... Avez-vous des recommandations à nous
faire?
• (11 h 20) •
Mme Lapointe (Marianne) : Bien,
en fait, depuis l'avènement du Programme d'accès à l'égalité en 2015, comme
c'est mentionné dans notre mémoire, nous avons participé à tout le travail
préparatoire. À cette époque, on avait vraiment établi que, pour les femmes, il
est important de s'intéresser à tout le processus pour que ça se passe bien.
Donc, quand je dis «tout le processus», c'est vraiment de l'étape... jusqu'à
s'intéresser à l'étape du choix de carrière jusqu'à l'étape du maintien en
emploi. Donc, pour nous, c'est la recette gagnante. Donc, quand on parle de
s'intéresser aux étapes préliminaires avant l'arrivée de la travailleuse sur un
chantier, il y a tout un parcours pour cette travailleuse-là. Donc, lorsqu'elle
se bute à des difficultés en entrée d'emploi, eh bien, ça fait déjà x nombre
d'années, là, qu'elle a un parcours du combattant. Donc, c'est un des éléments
pour lesquels très souvent les femmes vont abdiquer après très peu d'années de
travail parce qu'elles sont déjà essoufflées avant même d'avoir leur premier
emploi. Donc, il faut s'intéresser à toutes les étapes.
Le Programme d'accès à l'égalité pour les
femmes dans l'industrie de la construction proposait plusieurs solutions. Il y
en a qui ont très bien fonctionné, comme par exemple de mettre les femmes en
haut de la liste dans le service de référencement. C'est une mesure qui a très
bien fonctionné. D'autres ont moins bien fonctionné. Donc, on suggère une mise
à jour pour pouvoir mettre de l'avant de nouvelles solutions et pouvoir avoir
un PAEF renouvelé pour les prochaines années.
Mme Rotiroti : Parfait. Pour
vous, est-ce que vous considérez que le gouvernement fait assez concernant
l'embauche de la main-d'œuvre féminine? Est-ce qu'il y a quelque chose qu'on
pourrait faire de plus, que vous aimerez voir dans le projet de loi, qui ferait
en sorte qui... non seulement ça peut attirer les femmes dans l'industrie, mais
surtout les garder?
Mme Lapointe (Marianne) : Oui,
bien sûr, il y a quelque chose qu'on peut faire de plus, et ça ne s'adresse pas
nécessairement au p.l. 51, ça s'adresse à, dans le fond, quelque chose de plus
au niveau gouvernemental. Donc, le Programme d'obligation contractuelle est une
action qui pourrait être faite pour augmenter le nombre de femmes dans
l'industrie de la construction, établir des cibles pour l'octroi des contrats
publics, c'est dans les mains du gouvernement, et récemment, en 2022, il y a eu
le dépôt et l'adoption du projet de loi n° 12, 2022, qui met déjà la table, en
fait, pour cet élément-là. Donc, c'est un outil législatif qui est déjà
disponible pour le gouvernement. Donc, c'est la loi visant...
Mme Lapointe (Marianne) : ...principalement
à promouvoir, là, l'achat québécois et responsable par les organismes publics
et à renforcer le régime d'intégrité des entreprises et... accroître les
pouvoirs de l'Autorité des marchés publics». Ça a été adopté en 2022. Il y a
déjà des outils à l'intérieur de ce projet de loi là qui pourraient... que le
gouvernement pourrait utiliser pour imposer des contraintes en lien avec
l'intégration de la diversité sur les chantiers en lien avec les contrats
publics. Donc, c'est de l'argent public qui est dépensé dans ces contrats. Il
devrait y avoir attaché à ces contrats une responsabilité.
Mme Rotiroti : La
responsabilité liée à la responsabilité.
Mme Lapointe (Marianne) : Tout
à fait.
Mme Rotiroti : C'est très
intéressant. Merci.
Mme Lapointe (Marianne) : Mais
c'est en dehors du cadre du PL 51.
Mme Rotiroti : Le cadre du
p.l. n° 51, oui, c'est...
Mme Lapointe (Marianne) : Mais
on a tout de même mis dans notre mémoire.
Mme Rotiroti : Parfait.
Merci. Dernière question. Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme D'Amours) : Une
minute 50 secondes.
Mme Rotiroti : O.K. Dans
votre recommandation numéro six sur le harcèlement, vous dites : «Nous
recommandons de rendre obligatoire une formation concernant le savoir-être (la
prévention du harcèlement, des violences... et... comportements...», etc. «Ces
formations devraient se retrouver financées et intégrées directement dans
l'offre du fonds de formation de l'industrie.» Alors, vous, vous voulez
retrouver ce volet-là dans la formation même que vous recevez, c'est ça?
Mme Lapointe (Marianne) : Bien,
en fait, que ce soit intégré dans le fonds de formation de l'industrie, c'est
la méthode la plus simple, en fait, pour financer et attacher une forme
d'obligation pour cette formation-là. Notre objectif est que toute personne
possédant une carte de compétence et mettant les pieds sur un chantier ait reçu
de la sensibilisation. On a observé d'autres avenues possibles, donc, d'autres
suggestions. Il y a aussi les formations qui sont données par l'ASP
Construction, qui s'intéressent à la santé et sécurité sur les chantiers, mais
on trouvait que, dans cette formation-là, il y a déjà beaucoup de sujets à
couvrir, donc ça aurait été peut-être un peu lourd d'être intégré à cet
endroit-là. Pour ce qui est des employeurs, on avait aussi... on avait aussi
une suggestion d'intégrer ça au niveau des obligations au niveau de la Régie du
bâtiment du Québec pour l'obtention des licences pour les employeurs, mais,
encore là, les contenus de ces formations-là sont aussi lourdes. Par contre, au
niveau d'établir une obligation, ça serait un bon chemin aussi, puisque pour
avoir ta... bien, tu sais, ta carte à licence, tu es obligé de passer par là.
Donc, ce serait un chemin approprié.
Mme Rotiroti : Merci
beaucoup, merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vais maintenant céder la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve, s'il vous
plaît.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous deux, très heureux de vous voir en commission. Moi,
le chiffre, là, c'est 52 %, vous dites, hein, qui ne restent pas cinq ans,
des femmes dans la construction, je le trouve hallucinant, là. C'est énorme.
C'est un robinet qui coule, mais qu'on n'est pas capable de fermer. J'aimerais
vous entendre sur la question de la formation obligatoire, là, je pense que
c'est comme votre recommandation n° 6, parce que, dans le fond, ce que
vous souhaitez, j'imagine, c'est un changement de culture dans le milieu de la
construction. Puis un changement de culture, ça ne se fait pas avec un projet
de loi ou, en tout cas, ce n'est pas instantané. Ça fait que c'est à travers
cette formation-là que vous le souhaitez, ce changement de culture là?
Mme Lapointe (Marianne) : Oui,
effectivement, c'est en fait notre préoccupation numéro un. On croit vraiment
qu'il y a plein de mesures qui ont été mises en place grâce au programme
d'accès à l'égalité pour les femmes. Il y a eu beaucoup de travaux qui ont été
faits. L'industrie a énormément collaboré et changé ses pratiques. Donc,
beaucoup d'associations patronales ont mis en place des outils pour les
employeurs, beaucoup... la plupart des organisations syndicales ont aussi fait
beaucoup d'efforts à ce niveau-là, au niveau du harcèlement. Donc, on salue
tous ces efforts-là. On salue aussi le fait qu'il y a de plus en plus de femmes
qui entrent dans l'industrie de la construction. Donc, c'est quand même
9 %, là, des entrées qui étaient féminines, là, récemment. Donc, c'est
quand même des avancées incroyables, mais 52 % des femmes quittent après
cinq ans. Donc, c'est vraiment beaucoup. Donc, notre focus est vraiment sur les
mesures qui peuvent amener un maintien des femmes dans l'industrie. Et on croit
vraiment que toute la question du climat de travail et des comportements
inappropriés, le harcèlement, la violence sont une clé pour le maintien des
femmes dans l'industrie et on croit...
Mme Lapointe (Marianne) : ...que
toute personne qui met un pied sur les chantiers devrait être sensibilisée à
ça. Il ne faut jamais oublier que tous les employés qui entrent sur un
chantier, même un apprenti, première année, va finir par évoluer, va devenir
compagnon, compagnon formateur, chef d'équipe, donc éventuellement employeur
peut-être aussi. Donc déjà, en partant, si tout le monde avait une formation de
sensibilisation au savoir-être, bien, ça impliquerait, en fait, une industrie
complètement renouvelée par rapport à ça.
M. Leduc : Combien de temps, Mme
la Présidente?
La Présidente (Mme D'Amours) : 45
secondes.
M. Leduc : Sur les programmes
d'obligation contractuelle, là, recommandations 10 et 11, c'est
intéressant. J'imagine que ce n'est pas aujourd'hui que vous nous sortez ça de
votre chapeau?
Mme Lapointe (Marianne) : Non.
M. Leduc : C'est quelque
chose que vous commandez depuis quelques années?
Mme Lapointe (Marianne) : Depuis
2014.
M. Leduc : Qu'est-ce qui
explique que ça n'a jamais été fait?
Mme Lapointe (Marianne) : Volonté
politique. On avait très peu de temps, donc j'ai répondu très rapidement, mais
c'est ça. C'est... Ça n'a pas été mis dans les priorités. Il y avait même une
petite phrase dans le programme d'accès à l'égalité en 2015 pour amener vers
là, mais c'est une des mesures qui a été le moins regardée dans les dernières
années puis qui n'a pas été mise en place.
M. Leduc : Parfait. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole au député de Jean-Talon. La parole est à vous.
M. Paradis : Bonjour, Mme
Cummings et Mme Lapointe.
Et il y a quelque chose que j'aime
particulièrement de votre mémoire, c'est que vous nous dites d'abord que si on
veut des mesures pour favoriser l'intégration des femmes au secteur, ayons un
portrait de la situation et des données probantes. Vous nous proposez une
analyse différenciée selon les sexes, ensuite, vous nous proposez des mesures,
et enfin, vous dites voyons si on est capables ensuite de calculer si on est
arrivés à nos... à nos fins, en mesurant justement les résultats. Très
intéressant.
• (11 h 30) •
J'aimerais vous amener sur le point un et
deux. Je vais vous poser mes questions tout de suite. Vous savez, qu'on a... il
nous reste deux minutes. Sur l'analyse différenciée selon les sexes, vous avez
dit que vous n'avez pas été consultés jusqu'à maintenant. Qu'est-ce qu'on... de
quoi on dispose actuellement qui pourrait nous aider sur les données probantes?
Est-ce que vous êtes capables de nous donner des pistes? Est-ce qu'on pourrait
faire quelque chose pour s'assurer qu'on adopte les bonnes solutions dans ce
projet de loi? Donc, ça, c'est sur la première partie.
Sur la troisième partie, est-ce que vous
avez déjà réfléchi à des cibles? Quelles seraient ces cibles qu'on devrait
inscrire? Est-ce que ça seraient des pourcentages? Est-ce que ça serait en
nombres? Est-ce que vous pouvez nous alimenter, de telle sorte que nous, on
puisse travailler sur cette base-là et éventuellement voir si on est capables
d'intégrer ça au projet de loi?
Mme Lapointe (Marianne) : Oui.
Je vais commencer par les cibles. C'est la réponse la plus rapide. Donc, oui,
on a pensé à des chiffres. Donc, comme l'industrie de la construction comporte
un peu plus de 3 % de femmes présentement, on pense qu'une cible de
4 % serait réaliste. Et si on rêve, 5 %.
Pour ce qui est de la première partie de
votre réponse, il est certain que le CIAFT ainsi que d'autres organisations
communautaires travaillent sur la question des femmes dans l'industrie de la
construction depuis plusieurs années. Je vais noter, entre autres, Action
travail femmes de Montréal, qui est un organisme qui a une grande expertise sur
plusieurs points qui concernent le PL 51, entre autres, les processus de
plainte en harcèlement et toute la question de la reconnaissance des acquis et
des diplômes étrangers, elles ont une belle expérience là-dessus, donc allez
lire leur mémoire qu'elles vont déposer, ça vaudra certainement la peine, et
elles auront mis plein d'informations sur ces points-là.
Par rapport à la recommandation de mettre
en place un processus d'analyse différenciée selon les sexes, il y a évidemment
le Secrétariat à la condition féminine du Québec, le Conseil du statut de la
femme et le CIAFT, qui sont disponibles pour être consultés à cet égard. Dans
nos organismes membres, nous avons des organismes qui sont experts et expertes,
là, pour faire... pour faire ce type d'analyse. Et on a même sorti un petit
document récemment, au CIAFT, qui concerne l'analyse différenciée selon le
sexe, qui s'adresse au Comité sectoriel de main-d'oeuvre.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
infiniment. Le temps étant écoulé, Mme Lapointe, Mme Cummings, merci beaucoup
pour votre contribution à notre commission.
J'ajourne... je suspends les travaux
quelques minutes afin que nos prochains invités prennent place.
(Suspension de la séance à 11 h 33)
11 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 11 h 40)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue à la
FTQ-Construction. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé. Et puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres
de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et à commencer votre
exposé, s'il vous plaît.
M. Guérin (Arnold) : Bonjour,
Arnold Guérin, président de la FTQ-Construction. Je suis accompagné d'Éric
Boisjoly, qui est notre directeur général, qui, lui, va présenter notre
mémoire. Puis il y a Maître Claude Tardif qui est le procureur de la
FTQ-Construction. Merci de nous donner l'opportunité de se faire entendre. M.
le ministre, M. et Mme les députés, merci beaucoup de nous recevoir. Vu qu'on n'a
pas grand temps, je vais passer tout de suite la parole à Éric qui présente
notre mémoire.
M. Boisjoly (Éric) : Merci.
Bien, la modernisation de la loi 20, la loi 20, c'est la loi qui
régit l'industrie de la construction, ce n'est pas la loi qui va faire... ce n'est
pas ça la modernisation de la loi qui va faire qu'il va y avoir plus de
chantiers, plus de main-d'œuvre, plus de polyvalence, plus de compétences puis
plus de productivité. À la FTQ-Construction, on avait participé à toutes les
consultations préliminaires du projet de loi. On avait amené dans le fond une
solution potable, c'était la tenue d'un forum sur l'industrie de la
construction, où est-ce qu'on pouvait asseoir tous les acteurs de l'industrie,
que ce soit autant patronaux, syndicaux. On avait aussi mentionné au ministre
que le Travail devrait être présent, le Trésor devrait être présent, l'Éducation
devrait être présente et les infrastructures aussi devraient être présentes à
ce forum-là.
On n'est pas contre la vertu d'avoir une
modernisation de la loi. Je pense qu'on est rendus en 2024. À chaque fois qu'on
a modernisé la loi R-20, on a toujours sabré dans les droits des travailleurs.
C'est ce que la FTQ-Construction prend conscience, a pris conscience lors du
dépôt de ce projet de loi. Je vais aborder le volet de la mobilité provinciale.
La mobilité provinciale, ça a été mis en place dans les années 70,
justement pour s'assurer d'une paix industrielle, s'assurer que les gens des
régions pouvaient travailler puis établir leur famille, avoir une vie sociale
dans leur région. Ce qu'on vient de faire aujourd'hui, c'est qu'on vient de
sabrer tous ces droits là des travailleurs et des travailleuses des régions du
Québec. Pour nous, c'est un non-sens. Je pense que les entrepreneurs ont le
droit d'emmener leurs gens, mais à compétences égales, on devrait prioriser l'embauche
régionale. La loi R-20 régit déjà l'employabilité régionale avec l'article 35,
l'article 38. Les conventions collectives prévoient des clauses justement
sur la mobilité. Là, ce projet de loi là va nous empêcher de négocier des
clauses de mobilité. C'est inacceptable. On vient d'enfreindre un droit d'association.
Pour nous, à la FTQ-Construction, je pense que le gouvernement ne nous a pas
entendus lors des consultations préliminaires. C'est des situations qu'on avait
amenées.
La protection des métiers, c'est un autre
volet. On parle encore de productivité, de qualité des travaux. Comment on peut
être productif quand on n'a pas les compétences de notre métier? Présentement,
on parle toujours de cloisonnement de métiers, on a aussi amené que les
entrepreneurs étaient plus cloisonnés que les métiers de l'industrie de la
construction. Les entrepreneurs, bien, écoutez, ils sont... ils sont...
M. Boisjoly (Éric) : ...structurés
par métier. Il y a des entrepreneurs peintres, il y a des entrepreneurs en
carrelage, il y a des entrepreneurs en systèmes intérieurs. Ces gens-là, c'est
des gens de métier, puis on ne peut pas leur demander de faire autre chose que
leur métier, ils soumissionnent dans les travaux qui leur sont demandés. On
demande aujourd'hui aux travailleurs et travailleuses de faire autre chose que
leurs entrepreneurs. Une autre chose qui est inacceptable dans le projet de
loi, on n'est pas... on n'est pas censé dénuder de sens en comprenant qu'il
faut être plus productif, plus polyvalent, mais la polyvalence s'acquiert avec
les compétences, ça s'acquiert avec la formation professionnelle, ça s'acquiert
avec... Dans le fond, l'apprentissage des métiers, ça s'apparente aussi avec,
dans le fond, les... l'éducation. On est dans cette sphère-là. C'est toutes des
choses que la FTQ-Construction avait proposées dans les... dans les... dans le
fond, dans les études préliminaires du projet de loi. On n'a pas été entendus.
Après ça, du côté des relations de
travail, du côté des relations de travail, mais je l'ai dit tantôt, le droit
d'association, on a demandé le pouvoir... on a le droit de négocier nos
conventions collectives, mais présentement on n'a pas le droit, dans le fond,
de la faire respecter. C'est la procédure de grief, on ne l'a pas pour tous les
enjeux, dans le fond, de la convention collective. C'est une autre
problématique qu'on avait demandé au ministère du Travail de nous donner l'opportunité
de pouvoir faire valoir nos droits avec les clauses négociées dans les
conventions collectives. Encore une fois, on n'a pas été entendus. C'est
inacceptable pour nos travailleurs et travailleuses.
Les gens quittent l'industrie de la
construction, on le sait, on a un problème de rétention. Où, dans notre projet
de loi, là, le ministre a adressé une situation sur la rétention de la
main-d'œuvre? Il n'y a rien dans ce projet de loi là pour s'assurer de la
rétention de la main-d'œuvre.
L'employabilité des femmes, hein, elle est
où? Elle est où? Elles sont où, les mesures pour l'employabilité des femmes? La
seule chose qu'on fait, c'est qu'on rouvre les bassins aux travailleurs et
travailleuses pour les rentrer plus rapidement dans l'industrie. Sans compétence,
sans formation initiale, c'est prouvé, les statistiques de la Commission de la
construction du Québec le prouvent, les gens qui rentrent dans l'industrie sans
formation quittent l'industrie dans les cinq ans à venir. Ça fait que, dans le
fond, on a créé un panier plein de trous, on rentre des gens, mais on ne les
retient pas dans notre industrie.
La modernisation de la loi, nous, ce qu'on
pense, c'est que ça passait aussi par la planification des travaux, mais où
est, dans le projet de loi, quelque chose qui est censé ou qui va parler de
planification des travaux? On va garrocher des... des projets à coup de
milliards dans l'industrie dans les prochaines années, à qui mieux mieux, qui
va les construire? On a un problème d'attraction, on a un problème de
rétention, on a un problème de qualification, puis c'est toutes des choses qui
ne sont pas adressées dans le projet de loi. Ça fait que, pour nous, c'est
inacceptable.
On va déposer aujourd'hui un, dans le
fond, un mémoire qui va amener un paquet de solutions qui ne sont peut-être pas
tous compatibles avec tous les gens, mais sauf que, pour nous, à la
FTQ-Construction, avec les consultations qu'on a faites avec nos travailleurs,
travailleuses, c'est des choses qui, pour nous, sont sensées, qui pourraient
améliorer l'industrie de la construction. On est toujours ouverts aux
discussions.
Je pense qu'il va y avoir des... des mois,
des semaines et des journées qui vont passer d'ici à l'adoption de ce projet de
loi là, on ne lâchera pas le morceau, on veut se faire entendre, on veut
travailler avec l'industrie, on veut construire le Québec de demain. Les
travailleurs et travailleuses de l'industrie ont construit le Québec d'hier,
c'est nous autres qui ont fait les grands travaux, c'est nous autres qui ont
fait les... les travaux d'ingénierie, les premiers barrages hydroélectriques,
on a fait les routes, on a construit les écoles, on a construit les hôpitaux,
on a construit le REM, puis aujourd'hui on vient nous dire que ces
travailleurs-là ne sont pas assez productifs, ne sont pas compétents puis ils
ne sont pas assez qualifiés, c'est dur à prendre, ça, pour nos travailleurs et
travailleuses de l'industrie de la construction à la FTQ-Construction.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter notre... nos échanges.
M. le ministre, la parole est à vous.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. D'abord, merci pour la préparation, je dirais, extrêmement
minutieuse du mémoire de la FTQ-Construction. On sait tous à quel point vous
êtes un acteur important dans cette industrie-là qui représente 7,9 % du
PIB québécois. Puis c'est un projet de loi qui vise à... à permettre l'arrivée
de nouvelles personnes et améliorer la productivité. Puis moi, je veux
remercier la FTQ-Construction parce que, malgré des désaccords, depuis le début
de l'année 2023, on maintient le dialogue. Il y a eu des consultations,
Éric, vous vous souvenez, avec les sous-comités professionnels qui sont
paritaires...
M. Boulet : ...sur des
activités partagées à identifier. Puis la FTQ-Construction, bon, il y a eu des
soubresauts à l'automne, mais on a maintenu quand même un dialogue. Et moi,
j'ai toujours répété que le projet de loi, il se voulait modéré, à la quête
d'un équilibre et aussi perfectible. Ça fait que les recommandations que vous
faites, on va les étudier avec considération puis tout le respect qui vous est
dû.
Je me souviens du forum, l'idée d'un
forum. Je pense qu'on est dans un contexte qui est cependant différent des
années 70, là, une époque où il y avait du chômage endémique un peu
partout dans les régions du Québec, alors que là, il y a des besoins. On est en
déficit de main-d'oeuvre dans des secteurs, dans des régions, dans des métiers
en particulier, et évidemment, ça varie, mais il y a des besoins partout.
Puis je veux juste vous entendre sur
quelques points, là. D'abord, la mobilité. On sait qu'en génie civil et voirie,
pour un certain nombre de métiers, il y a une mobilité complète, puis dans institutionnel,
commercial et industriel, il y a une mobilité jusqu'à 20 % qui était
convenue, qui apparaît soit dans des règlements ou des conventions collectives.
Est-ce que ça a eu des effets que vous avez notés comme étant négatifs dans des
régions?
M. Boisjoly (Éric) : Bien,
écoutez, M. Boulet, on n'est pas sans savoir le début du chantier de La
Romaine, hein?
M. Boulet : Oui.
• (11 h 50) •
M. Boisjoly (Éric) : Je pense
que le Québec ne veut pas revivre ça. Hydro-Québec a créé, dans le fond, avec
le gouvernement de l'époque, un comité, dans le fond, à côté, pour s'assurer
d'avoir une employabilité régionale. Les travaux de la... de La Romaine ont
continué avec une priorité d'embauche régionale. Je pense que ça a atténué,
dans le fond, les conflits de travail, ça a aidé à maintenir une paix
industrielle. Puis je pense que La Romaine s'est faite... s'est effectuée dans
un temps quand même assez décent, hein? Puis il y a eu des milliers d'heures
qui ont été travaillées là, puis je pense que la majorité des gens de la
Côte-Nord y ont travaillé. Mais ce projet-là avait mal commencé. Hydro-Québec a
écouté la partie syndicale, dans le fond, ils ont mis dans leur contrat une
possibilité d'employabilité régionale, puis c'est ce que le gouvernement devrait
faire aussi présentement. Il n'y a rien dans le projet de loi qui fait, qui va
obliger, dans le fond, dans les contrats du gouvernement, d'embaucher une
main-d'œuvre locale.
M. Boulet : Bien, il y a
quand même, vous le mentionniez à juste titre, l'article 35 du règlement
qui maintient et qui demeure en vigueur et qui prévoit un ordonnancement dans
l'embauche. Et pour moi, l'embauche régionale, elle est fondamentale. La
mobilité, c'est pour répondre à des besoins spécifiques de certaines régions où
il y a des travailleurs, travailleuses qui ont quitté. Et, si on veut être
attractifs puis intéresser des projets pour qu'ils puissent se réaliser dans
certaines régions, la mobilité est certainement un atout. Donc, ce n'est pas
que négatif. La mobilité, à bien des égards, elle peut favoriser le
développement et la croissance des régions et permettre à des travailleurs de
faire plus d'heures de travail. Puis la mobilité, je le répète souvent, ce
n'est pas une obligation, c'est une faculté, c'est un droit. Donc, c'est
bénéfique pour plusieurs travailleurs et travailleuses que j'ai rencontrés
aussi dans les chantiers de construction.
Mais c'est sûr qu'au-delà de
l'article 35, ce qu'on anticipe, c'est que, d'abord et avant tout, quand
la main-d'œuvre est disponible localement... Parce qu'il y a beaucoup de
travailleurs et travailleuses, pour différentes raisons, qui ne sont pas
disponibles, c'est la raison pour laquelle il y a des ouvertures de bassins
dans beaucoup de régions, là. Il y a des déficits de main-d'oeuvre pour
réaliser des projets qui ont été retardés en raison de manque de main-d'oeuvre.
Je veux vous entendre aussi, Éric, sur,
bon, la protection des métiers. Évidemment, c'est une polyvalence qu'on a voulu
la plus contrôlée possible pour ne pas affecter les compétences, la qualité des
travaux, la santé-sécurité des travailleurs. Éric, tu me connais assez bien
pour savoir à quel point, quand on réfère à la santé-sécurité du monde, on est
là puis on est présents avec la CNESST, notamment. Mais ici, on parle de
pouvoir exercer les tâches d'un autre métier quand c'est complémentaire, pour
finir un travail. Est-ce que... Qu'est-ce que... C'est quoi votre opinion
là-dessus? Parce que, quand je lis le mémoire, là, puis je l'ai lu un peu en
diagonale, là, ce n'était pas clair. C'était sur la...
M. Boulet : ...Éric, quel est
le point central?
M. Boisjoly (Éric) : Bien, le
point central, c'est que c'est clair qu'on est... la FTQ-Construction, c'est
une structure qui est structurée par métiers, hein, on a des syndicats
affiliés. C'est sûr qu'on veut protéger nos métiers, c'est clair. Quand on
parle toujours de production et de qualité de travaux, on n'est pas sans savoir
que la main-d'œuvre, au cours des... environ des 10 dernières années, a majoritairement
entré par ouverture de bassins. Ça veut dire qu'ils ont rentré sans formation
initiale. Avec toutes les mesures que vous avez mises en place, parce qu'on a
mis aussi des mesures... le gouvernement actuel a mis des mesures en place
pour, dans le fond, pallier à la rareté de la main-d'œuvre, mais on est
éligibles plus rapidement à aller à nos examens de compagnon, l'apprentissage
est allégé. Ça fait que comment on fait pour être compétent et polyvalent quand
on n'a même pas acquéri toutes les compétences données dans notre métier? C'est
ça, la question qu'il faut se poser puis c'est la question qu'on se pose. On
demande la polyvalence, mais de la polyvalence, ça passe par de la compétence.
Quand 70 % des gens, voilà 10 ans, rentraient dans l'industrie par
diplomation, aujourd'hui, c'est complètement le contraire. C'est 30 % des
gens qui rentrent par diplomation, 70 % rentrent sans formation. Comment
on peut avoir de la compétence et de la qualité?
M. Boulet : Et ça, là-dessus,
c'est important pour moi, Éric, ce point-là, parce que la polyvalence, ce n'est
pas un bar ouvert, il faut que ce soit dans le respect des capacités de chaque
personne. Puis, tu sais, quand je réfère au couvreur d'un centre d'achat qui
voit qu'une feuille de contreplaqué... Bon, tu m'as souvent entendu le répéter,
là, mais sans attendre des heures pour avoir un charpentier-menuisier ou
quelqu'un qui est manœuvre ou... il fait ce qui est connexe, il fait ce qui est
complémentaire. Puis bon, on l'exprime dans un certain nombre de conditions.
Ça, on peut en discuter.
Mais la compétence, c'est au cœur de ce
qui fait la force de l'industrie de la construction. Puis moi, je suis d'accord
avec vous autres quand vous dites : On a actuellement les outils pour être
productifs puis efficaces. Mais l'ouverture des bassins, il y en a beaucoup,
puis les bassins, vous le dites bien, ils rentrent par les bassins puis ils
lâchent. Pourquoi? Parce qu'ils ne sont pas formés, et on fait une attestation
d'études professionnelles dans des métiers où il y a des déficits de
main-d'œuvre. Puis on donne, on transfère des compétences essentielles pour
pouvoir être plus habiles ou plus connaissants que les personnes qui intègrent
par les bassins. Donc, c'est un atout, c'est un pas en avant. Parce que moi,
j'ai toujours dit et répété que le DEP, le diplôme d'études professionnelles,
c'est la voie privilégiée, mais certainement que l'attestation d'études
professionnelles, c'est supérieur à la personne qui rentre par les bassins de
main-d'œuvre. Moi, c'est mon opinion, Éric, puis je pense que ça risque de
donner des résultats intéressants, en termes de nouvelles personnes qui
intègrent et le taux de rétention. D'ailleurs, les cohortes qui se donnent dans
les centres de formation professionnelle, partout au Québec, ça donne des bons
résultats. Puis il y a eu un engouement assez phénoménal, si on regarde le
nombre de personnes qui sont admises.
Éric, les griefs, on en a déjà discuté. Un
grief, c'est tout ce qui concerne l'interprétation ou l'application d'une
convention collective. Comment vous... votre thèse à vous serait
qu'indépendamment de la matière, comme dans les autres secteurs d'activités...
puis en passant dans les autres secteurs d'activités, il y en a, de la
mobilité, il n'y a pas d'obstacle à la mobilité. Mais je reviens aux griefs.
Est-ce que, tenant compte des délais... Puis, on le sait, Me Tardif, vous le
savez, ça s'est tellement judiciarisé que ça prend du temps avant d'être
entendu devant un arbitre. Les audiences durent longtemps. Est-ce que vous
anticiperiez que ça surcharge encore plus le régime d'arbitrage de griefs au
Québec, si tout ce qui est problème d'interprétation ou d'application de la
convention collective des différents secteurs peut faire l'objet d'un grief?
Juste, avez-vous une opinion là-dessus?
M. Tardif (Claude) : Certain
que j'en ai une, opinion. Moi, pour moi... je pratique là-dedans depuis
40 ans, M. le ministre, vous le savez, on a pratiqué l'une contre l'autre
une couple de fois. Ceci étant, ceci étant...
M. Boulet : Je n'aurais pas
dit ça, Claude.
M. Tardif (Claude) : Ah!
O.K., excusez, je le savais... je m'excuse si j'ai porté ombrage à... pratiqué
l'un contre l'autre.
M. Boulet : Non, non, non,
pas du tout.
M. Tardif (Claude) : Ceci étant,
ça va être enlevé...
M. Tardif (Claude) : ...minutes,
j'espère, ceci étant, pour moi...
Une voix : ...
M. Tardif (Claude) : ...pour
moi, il y a... c'est plutôt l'inverse, puis on sait très, très bien. Après ça,
le grief d'arbitrage, lorsqu'elle est bien administrée, lorsqu'on l'applique,
elle a été mise là juste avant pour se vouloir quelque chose, un processus
rapide, peu coûteux et efficace. C'est ça, l'objectif de la... Qu'on puisse
dire aujourd'hui que c'est un peu plus long, mais c'est normal, il y a des
matières qui ont fait que c'est un peu plus long, les droits fondamentaux,
etc., puis il ne faut pas passer outre. Mais ce qui fait l'objet que ce n'est
pas possible de faire des griefs, c'est sur des matières qui ne sont pas des
droits fondamentaux, mais ils sont des matières, le salaire, les primes... une
allocation. Pourquoi que ce serait long, aller faire un grief que tu ne paie
pas de mon taux de salaire? C'est plutôt le contraire. Ça prendrait
10 minutes. On s'en va devant un arbitre, on fait une preuve, bingo, c'est
réglé. Et ça ferait en sorte que les travailleurs, ils n'attendraient pas après
leur 20 $, 100 $ ou 50 $ pendant trois ans quand c'est la CCQ
puis plus que ça quand ça s'en va en Cour supérieure.
Donc, je vous rassure, pour moi, ce qui
est clair dans ma tête, c'est que, si on met une procédure de grief
d'arbitrage, enfin, les travailleurs vont pouvoir avoir accès à une procédure
rapide, peu efficace et peu coûteux pour des matières qui nécessitent justement
qu'on aille rapidement.
M. Boulet : O.K. Puis, Me
Tardif, je profite de l'occasion pour dire l'estime que j'ai pour vous, pour
votre expertise. Puis, effectivement, on s'est côtoyés dans des dossiers. Puis
j'aime ça quand vous référez à une preuve bingo. Une preuve bingo, ça veut dire
qui est rapidement soumise devant l'arbitre.
M. Tardif (Claude) : Oui,
mais...
• (12 heures) •
M. Boulet : Malheureusement,
c'était l'intention de ce régime-là, que ce soit le plus expéditif possible. On
constate qu'en réalité ce n'est pas nécessairement le cas. J'aimerais ça vous
entendre sur le comité paritaire de relations de travail. Parce que, pour moi,
c'est important qu'on fasse un bout de chemin pour donner un forum aux parties,
c'est-à-dire les patrons et les syndicats, cinq représentants des patrons, cinq
représentants des syndicats, pour discuter des relations de travail. Puis ça
m'amène à l'interprétation puis à l'application des conventions collectives.
Évidemment, ce qu'on dit dans le projet de loi, c'est que ce n'est pas des
matières qui relèvent du comité de formation professionnelle ou des matières
qui relèvent du comité d'avantages sociaux, les... et non plus des matières qui
relèvent du C.A. de la Commission de la construction du Québec, mais qu'on s'y
intéresse, comme dans tous les milieux de travail où c'est syndiqué, puis chez
nous, c'est syndiqué de façon extrêmement intense, mais qu'on puisse avoir un
comité de relations de travail pour discuter, trouver des solutions, dialoguer
puis régler ça. Du moins, moi, Éric, puis Me Tardif, puis Arnold, je
considérais que c'était quand même un pas en avant. Puis il faut quand même
être clair, il y a des matières qui peuvent faire l'objet d'un grief, comme
l'ancienneté, des mouvements de main-d'oeuvre et autres, mais, vous avez
raison, Me Tardif, sur des aspects salariaux, ça ne peut pas. Mais j'aimerais
ça vous entendre sur ce comité-là. Je ne sais pas si j'ai encore...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...
M. Boulet : J'aimerais ça
vous entendre d'abord aussi sur le fonds de rétroactivité salariale, comment
vous le voyez, donc, le comité paritaire de relations de travail, Éric, je
parle beaucoup... puis le fonds de rétroactivité salariale, votre opinion.
M. Boisjoly (Éric) : Je vais
être court. Dans les négociations, quand on ne règle pas quelque chose, on crée
un comité. Ça fait que vous n'avez rien réglé sur les relations de travail en
créant un comité sur les relations de travail. Aujourd'hui, ce que le
gouvernement fait en créant ce comité-là... j'ai des mots creux, mais je pense
qu'il se fout du 20 $, du 40 $ puis du 50 $ par semaine que le
travailleur, travailleuse manque sur sa paie parce que l'employeur ne lui a pas
volé... ne lui a pas donné. Ça, c'est du vol, c'est du vol parce qu'on ne paie
pas son salaire. Puis ça, c'est pour ça que les gens quittent l'industrie.
Parce que le sondage de la commission parle aussi. Les gens quittent
l'industrie à cause de quoi? À cause des conditions de travail, santé, sécurité
et surtout application des conventions collectives. Vous n'avez pas écouté
là-dessus. Pour nous, c'est inacceptable.
M. Boulet : Mais, juste
là-dessus, Éric, ce n'est pas pour régler un problème. Les comités de relations
de travail, dans à peu près toutes les conventions collectives de travail au
Québec, c'est négocié et convenu entre les parties, justement pour discuter...
M. Boisjoly (Éric) : Mais ce
n'est pas appliqué.
M. Boulet : C'est appliqué de
façon asymétrique. Ça dépend des parties. Puis ce n'est pas toujours de la
faute des employeurs, ça peut être de la faute de la partie syndicale. Mais des
comités de relations de travail qui fonctionnent bien, ça permet de prévenir et
de régler des enjeux d'interprétation ou d'application de convention. Ça fait
que ce n'est pas pour régler, c'est pour prévenir et trouver des solutions. Sur
le fond, la rétroactivité salariale, Éric.
M. Boisjoly (Éric) : Une
rétroactivité salariale, là, c'est... Puis on a eu des lois spéciales. On se
fait toujours traîner, puis ça perdure, puis ça, c'est élonge, les négociations
du secteur de la construction...
12 h (version non révisée)
M. Boisjoly (Éric) : ...une
vraie rétroactivité, c'est qu'on s'entend avec le patronat sur un pourcentage
applicable à la signature de la convention collective, il y a un délai de deux,
trois mois, quatre mois. Mais, si on s'entend sur un 2 %, bien, c'est
rétroactif à la signature de la convention collective. Ça, ce n'est pas
compliqué, c'est applicable, ça se fait dans toutes les sphères d'activité.
On veut créer un fonds géré par la
Commission de la construction qui est payé par les salariés, encore, avec le
prélèvement, c'est encore les salariés qui vont payer pour gérer ce fonds-là.
Puis l'enveloppe budgétaire de négociation va être impactée justement parce qu'on
va négocier ce fonds-là avant même la ronde de négociation. Inacceptable.
M. Boulet : C'est quel
article?
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions pour la première période d'échange.
M. Boulet : Merci, Éric.
La Présidente (Mme D'Amours) : Maintenant,
je vais céder la parole à la députée de Jeanne-Mance-Viger. La parole est à
vous.
Mme Rotiroti : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. Boisjoly, M. Guérin, M. Tardif, merci d'être là.
Écoutez, je vous entends parler et
discuter avec le ministre. Vous faites référence, dans votre projet de loi,
de... le projet loi ne règle rien pour la rétention, la qualification, la
compétence, l'attraction, polyvalence. Dans le fond, vous êtes contre l'ensemble
du projet de loi, de qu'est-ce que je comprends?
M. Boisjoly (Éric) : On n'est
pas contre la modernisation, mais on est contre le projet de loi, oui, c'est
clair, dans son...
Mme Rotiroti : Au complet?
M. Boisjoly (Éric) : Bien, de
la manière qu'il est aligné, c'est qu'on... on l'a dit tantôt, bien, on vient
brimer de plus en plus le droit des travailleurs, le droit d'association. Me
Tardif, si vous voulez aller un petit peu plus là-dessus.
M. Tardif (Claude) : Écoutez,
on parle de créer un comité sur les relations de travail. La même... La
définition dit : on fait un comité pour régler des problèmes qui
pourraient amener un grief. On n'est pas... on ne peut pas en déposer, des
griefs, sur certaines matières. C'est assez circulaire comme discussion. On dit :
on va moderniser. La Cour suprême, je ne sais pas en combien de jugements, a
dit : Il faut faire en sorte la liberté d'association, on est rendu là. C'est-à-dire
ceux qui négocient des conventions collectives doivent avoir, d'un point de vue
collectif, le pouvoir de déposer des griefs. On n'est même pas là. Ce n'est
pas... Ça ne coûte pas cher, ça, puis ça ne fait pas rien à la pénurie de la
main-d'œuvre, là. Il me semble, si on veut se moderniser, que ça, ce n'est pas
trop fatigant. Ça, ça devrait se faire naturellement. On ne devrait même pas en
débattre ici, là. Ça devrait être reconnu d'emblée. Passons à autre chose,
discutons, mais pourquoi qu'on ne veut pas donner ça? Comment voulez-vous que
la FTQ-Construction soit en harmonie avec un projet de loi qui n'est même pas
capable de reconnaître à la base la liberté d'association qui est reconnue par
les tribunaux, tribunaux à travers le Canada, le monde... En fait, c'est bien
dur d'être en harmonie avec une position qui ne tient pas compte, de base, des
droits fondamentaux. C'est... Ça, c'est... Ça... On ne nous rejoindra pas si
on... à partir de là.
Mme Rotiroti : C'est parfait.
Je vois que vous étiez dans la liste des gens, des groupes que le ministre
voulait consulter en amont avant le projet de loi. Vous vous êtes retirés de
cette consultation-là?
M. Boisjoly (Éric) : Non, on
ne s'est pas retirés. On a participé à toutes les tables. On s'est retirés
quand qu'on a mis justement les AEP que le ministre parlait tantôt. On avait
demandé, toutes les assos syndicales, j'ai des confrères ici, en arrière, là,
on avait demandé, parce qu'on a été, toutes les assos syndicales, à ces
consultations-là, on a demandé une table sur la formation professionnelle. On s'est
retirés des consultations parce qu'on attendait toujours une table sur la... Et
on l'attend encore. On ne l'a pas eue. Malheureusement, il y a... il y a une
résolution du conseil d'administration qui... qui a... qui a sorti pour
justement contrer les AEP. On voulait aller vers l'alternance travail-études,
pousser sur l'alternance travail-études au... au lieu d'aller vers les
attestations d'études professionnelles qui dénaturent complètement le diplôme d'études
professionnelles. On n'a même pas pris en compte la résolution du conseil d'administration
de la Commission de la construction du Québec. C'est inacceptable, ça non plus.
Mme Rotiroti : Parfait.
Merci. Je vois que vous avez une... quand on parle de la mobilité, la
polyvalence dans le projet de loi, mais surtout la mobilité, vous, votre
crainte, c'est la rétention de vos employés. Vous dites que, quand ça a été
fondé, et tout ça, la FTQ, l'objectif, c'était que les gens s'installaient dans
la région, restaient dans la région. Alors, comment expliquez-vous qu'il y a
des travailleurs, exemple, je vous donne un exemple, un travailleur de Trois-Rivières
ou Mauricie qui se plaint ne pas avoir le pouvoir d'aller travailler, mettons,
à côté, à Bécancour ou dans la région de Québec, ou vice versa. Pour vous, ça,
ça pourrait compromettre le fait que la personne va quitter la région où est-ce
qu'il est installé depuis 20... les 20 dernières années pour partir, parce qu'il
ne peut pas... Parce qu'il va aller travailler sur un chantier particulier,
ponctuellement, puis revenir. Pour vous, ce n'est pas possible, ça. C'est ça
que je comprends?
M. Boisjoly (Éric) : Je pense
qu'il y avait des propositions de zones limitrophes. Il y avait des choses qui
étaient proposées. Il y a des choses qui étaient possibles de négocier dans les
conventions collectives présentement, mais ça ne sera plus possible parce qu'on
vient de légiférer autre chose. Mais sur la mobilité, il y a quand même eu des
contestations légales là-dessus, puis il y a encore des contestations légales
qui sont en procédure judiciaire.
M. Tardif (Claude) : Et je
vais renchérir là-dessus. Cette position-là, que vous... que vous...
M. Tardif (Claude) : ...présentez,
là, je vous invite à aller lire la mémoire du procureur général devant la
contestation qui est devant la Cour d'appel et où le procureur général
disait : C'est tout à fait normal qu'il y ait ces situations-là lorsqu'il
y a des zones limitrophes. Ce n'est pas... ce n'est pas anormal cette situation
là, c'est tout à fait normal, ça peut désavantager certaines personnes, mais
dans l'ensemble la règle est bien articulée et c'est pour ça qu'elle est. Et je
vous invite, le PG a présenté une preuve abondante relativement à l'objectif
constant des articles 35 et la priorité, 38 qui est l'exception, du
règlement, soit d'offrir quoi? Une sécurité d'emploi aux travailleurs de la
construction et de préserver la paix sociale au sein de cette industrie. Ça,
c'est la position du gouvernement du Québec devant la Cour d'appel du Québec en
2024, mais pourquoi qu'on change ça? Puis on va privilégier maintenant plus la
priorité à la région, on va faire une priorité provinciale, ça ne tient pas la
route si on va... Elle est où, la sécurité d'emploi? Puis elle est où, la paix
sociale?
Mme Rotiroti : Parfait.
J'ai... c'était très clair. Merci beaucoup. Vous... je pense que vous attendez
comme on entend tous que... les entrepreneurs, entre autres, demandent que les
chantiers aillent plus vite, que c'est trop long. Je sais qu'il y a eu
plusieurs articles, on a vu même des exemples où est-ce que ça prenait presque
13 jours pour changer des cadres de porte dans les écoles. Il me semble,
c'est un peu ridicule, hein? Alors, vous, votre solution pour que les chantiers
aillent plus vite, ce serait... si vous avez des suggestions à nous faire, là,
pour qu'on soit plus productifs, ce serait quoi? Parce que, dans le fond, vous,
vous êtes en désaccord avec tout qu'est-ce qu'on... qui est proposé dans la
loi, vous dites que ça ne donne rien, le projet de loi ne fait rien au niveau
de la productivité. Par contre, on fait face à des enjeux comme ça où est-ce
que... je ne sais pas pourquoi que le Québec est toujours différent des
autres... des autres provinces, ici, c'est toujours plus long, hein, toujours
plus long pour construire une école, toujours plus long pour construire une
autoroute, toujours long. Pourquoi? Puis qu'est ce qu'on peut faire pour,
justement, qu'on soit dans les... les palmarès, là, que le Québec est dans les
meilleurs.
• (12 h 10) •
M. Boisjoly (Éric) : Mais
toujours plus long. Écoutez, on avait une présentation ne voilà pas longtemps
au conseil d'administration de la CCQ sur le REM. Le REM s'est bâti en cinq
ans. Ailleurs dans le monde, le même REM avec les... à peu près les mêmes
structures, les mêmes kilométrages, s'est bâti en 10 ans. Ça fait que je
ne le sais pas où le Québec n'est pas productif et rapide d'exécution. C'est
sûr qu'il a peut-être certains chantiers qu'il y a des problématiques, mais ça,
ça passe par la planification. La planification, ce n'est pas le rôle du
syndicat, c'est le rôle des donneurs d'ouvrages. Et heureusement le gouvernement
du Québec est donneur d'ouvrage environ à 80 % des travaux
d'infrastructure. C'est à lui à planifier les travaux, pas à nous. Nous, on
exécute les travaux. À quelque part, on va... il faut arrêter de garrocher la
balle toujours dans la cour des salariés puis des travailleurs, des
travailleuses de l'industrie de la construction, je pense que tout le monde
doit se responsabiliser. Le gouvernement du Québec doit aussi se
responsabiliser dans la planification des travaux.
Mme Rotiroti : Bien, je
contente, M. Boisjoly, que vous parlez de planification parce que... à
moins que j'ai... je ne l'ai pas vu dans le projet de loi, il n'y a rien sur la
planification dans projet de loi, ou qui propose des choses pour mieux
planifier les chantiers. Ça fait que je suis contente que vous... vous portez
ce point-là. C'est... c'est noté.
J'irai moi aussi sur le fonds de
rétroactivité. On sait très bien que, dans le projet de loi, ce serait la CCQ
qui... qui aurait la gestion de ce fonds-là. Puis on s'entend qu'on commence
à... la CCQ commence à en avoir beaucoup à gérer. Il y a même le
questionnement : Est-ce qu'ils vont être capables de le gérer? C'est quoi
le mécanisme? C'est quoi la façon que ça va être déployé? Même au niveau de la
cotisation, qui qui va cotiser dans ce fonds-là puis comment ça va être
distribué? Pouvez-vous me parler un petit peu de vos craintes si vous en avez,
ou si vous trouvez que c'est une bonne idée? J'aimerais ça vous entendre
là-dessus.
M. Boisjoly (Éric) : Bien, je
l'ai dit tantôt. Rapidement, pour nous créer un fonds pour, dans le fond, la
rétroactivité, c'est un non-sens. Une rétroactivité, c'est quelque chose qu'on
négocie en ronde de négociations. Puis s'il y a un délai à la signature de la
convention collective, mais le pourcentage ou le montant qui aurait été négocié
sera applicable à l'échéance de la convention collective. Puis s'il y a un
délai d'un mois, de deux semaines, de trois semaines, de deux mois, de trois
mois, bien, ce sera applicable à la signature de la convention collective,
c'est simple, ça se fait dans toutes les autres sphères syndiquées où est ce
qu'il y a des rondes de négociation. Ce n'est pas compliqué. Pourquoi créer un
fonds, une barrière que nous, encore là, le salarié n'aura pas un mot à dire c'est
qui qui va décider du volet qui va être financé, qui va être ramené dans les
poches des travailleurs, des travailleuses? Non, la CCQ n'a pas d'affaires
là-dedans. Premièrement, ça appartient au syndicat et au patronat de négocier,
ça n'appartient pas à la Commission de la construction du Québec.
Mme Rotiroti : ...
La Présidente (Mme D'Amours) : Une
minute, Mme la députée.
Mme Rotiroti : C'est
vraiment...
Mme Rotiroti : ...une question
très simple : Est-ce que le placement syndical existe encore dans
l'industrie de la construction?
M. Boisjoly (Éric) : Oui.
Mme Rotiroti : Oui, dans
toutes les sphères, dans tous les secteurs?
M. Boisjoly (Éric) : Pas dans
toutes les sphères. C'est contrôlé. Sauf que ça ne fonctionne pas, on s'entend.
Le meilleur exemple, c'est les femmes dans l'industrie. C'est les premières
référées au haut de la liste, elles ne sont jamais appelées. Ça fait que ce
n'est pas compliqué, ça ne fonctionne juste pas.
Mme Rotiroti : Bien, je suis
contente que vous apportiez les femmes, parce que je vous ai attendus, pas plus
tard que la semaine passée à LCN, à dire à quel point que les femmes sont
compétentes sur les chantiers, puis sont méticuleuses et très précises dans
leur travail. Quand vous dites que ça ne marche pas, le placement syndical,
entre autres pour les femmes, donnez-nous un... Pouvez-vous me donner un
exemple concret?
M. Boisjoly (Éric) : Bien,
écoutez, je l'ai dit, elles sont les premières sur les listes... les listes de
référence de la commission de la construction. Les employeurs ne veulent
seulement pas les embaucher. Ce n'est pas compliqué, parce qu'il y a encore
beaucoup de discrimination. Il y a encore beaucoup de harcèlement. Il y a
encore beaucoup d'intimidation. Puis ça, malheureusement, que c'est les femmes.
Il y a aussi les apprentis qui le vivent. Malheureusement, c'est encore une
industrie... Je pense qu'on... elle s'est améliorée de beaucoup, je pense
qu'elle a encore à s'améliorer, mais on a encore un grand pas à faire en avant.
Mme Rotiroti : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
c'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je vais céder la parole au
député de Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à vous, M. le député.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous trois. D'abord, souligner la qualité de votre
mémoire, 83 pages, quand même, il y a des mémoires de maîtrise à
l'université qui sont plus courts que ça, des fois, mais ça s'est lu avec
beaucoup de plaisir.
M. Boisjoly (Éric) : Oui,
mais ce n'est pas moi qui l'ai écrit, là.
M. Leduc : Non? Pas grave, on
le salue quand même. J'aimerais vous entendre sur le régime du travail. Mais
d'abord, un mot, là, le ministre tantôt disait, tu sais, sur la mobilité, que
ça va permettre aussi aux gens des régions de pouvoir venir travailler à
Montréal. Moi, ça m'a un peu fait titiller, là, je n'ai pas l'impression que
c'est ça qui vole, le monde... de vos membres des régions, venir travailler à
Montréal, ils veulent travailler sur les chantiers dans leur région respective.
M. Boisjoly (Éric) : Bien,
première des choses, ils veulent d'abord et avant tout dans leur région, ça,
c'est clair. Mais, s'il n'y a pas de travaux, mais s'il y a des travaux
ailleurs, mais, oui, ils vont y aller. Je pense que les travailleurs,
travailleuses de l'industrie, ils l'ont toujours démontré, c'est... ils sont
nomades, ils se promènent, ils ont construit la Baie-James, ils ont construit
les alumineries dans des régions comme la Côte-Nord, le Saguenay
Lac-Saint-Jean, mais toujours en partenariat avec les travailleurs locaux. Puis
ça, ça a toujours été. On a toujours priorisé les travailleurs locaux avant
d'aller à l'extérieur.
M. Leduc : Moi, je
m'attendais, dans ce projet de loi là, à une mise à jour du régime du travail
importante, parce que j'ai moi-même déposé un projet de loi il y a quelques
années, sur la question de la rétroactivité, sur la question de la loi
anti-scabs. On a entendu, évidemment, vos griefs sur l'impossibilité de faire
des griefs sur certains dossiers. Pas de loi anti-scabs dans le projet de loi,
une drôle de patente sur la rétro. C'est un peu frustrant, non?
M. Boisjoly (Éric) : C'est
très frustrant. Oui.
M. Tardif (Claude) : C'est
sûr. Puis, encore une fois, vous le savez très bien, les travailleurs de
remplacement ou anti-scabs, peu importe, hein, au fédéral, ils l'ont fait. Ce
n'est pas quelque chose... ils se sont ajustés. On se serait entendus si on
disait : On veut moderniser, on... Je comprends qu'on est au Québec, on ne
veut pas parler nécessairement du fédéral, là, mais ils l'ont fait dans un
régime qui est pan... à travers la province. Donc, c'est très, très possible et
souhaitable qu'il y ait des dispositions au niveau des travailleurs de
remplacement. Il n'y a rien, il n'y en a pas. On le demandait, on l'a demandé
dans... lors d'une contestation d'une loi. Ils nous ont dit : Écoutez,
c'est au législateur à le faire. Bon, on trouvait que c'était le bon moment. On
l'a redemandé, puis ils n'ont pas répondu.
Au niveau de la mobilité, je veux juste
intervenir. Lorsqu'on dit que la priorité régionale est encore là à 35, puis
qu'on a juste fait... augmenté la possibilité d'avoir des travailleurs qui
viennent d'autres régions, il y a aussi un impact important, c'est les clauses
des conventions collectives qui sont négociées, qui existaient, qui
restreignaient cette... les parties avaient négocié, parce qu'on pouvait. Là,
c'est fini. Ils sont annulés à compter du 1ᵉʳ mai 2025. Avec quoi, comme
compensation pour les travailleurs? Zéro, on a donné... à ce que l'employeur
demandait, on a répondu : Parfait, on vous enlève les... J'ai rarement vu
ça, moi, dans ma pratique depuis 40 ans, qu'on va annuler...
M. Leduc : Un projet de loi
qui vient jouer dans une convention collective.
M. Tardif (Claude) : ...vient
annuler des dispositions de conventions collectives. C'est quelque chose quand
même.
M. Leduc : Moi non plus, je
n'ai pas vu ça souvent, je vous le confirme.
M. Tardif (Claude) : C'est
peut-être moderne, mais dans le mauvais bord.
M. Leduc : Qu'est-ce que
serait l'alternative à la... ce que j'ose appelé la patente du ministre sur la
rétroactivité, là? Vous, vous n'aimez pas bien, bien ça. Moi aussi, je trouve
ça compliqué, son affaire. C'est quoi, l'alternative?
M. Tardif (Claude) : Bien,
écoutez, c'est simple, laissez les partis négocier. C'est ça, c'est d'en faire
une matière négociable. On enlève la partie de la loi qui interdit la
rétroactivité.
M. Leduc : Qui l'interdit.
M. Tardif (Claude) : Laissez
les parties négocier.
M. Leduc : C'est tout.
M. Tardif (Claude) : Ils
s'entendront, puis c'est ce que M. Boisjoly dit.
M. Leduc : Comme dans tous
les autres secteurs économiques.
M. Tardif (Claude) : Bien,
écoutez, c'est quoi qui serait différent?
M. Leduc : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je vais céder la parole au
député de Jean-Talon. La parole est à vous.
M. Paradis : Pour deux
minutes 38. Merci beaucoup pour un mémoire vraiment détaillé et instructif
puis... et merci pour votre franchise aujourd'hui...
M. Paradis : ...vous commencez
en disant dans le mémoire : «L'industrie de la construction est mal en
point.» Ensuite, vous contestez plusieurs des mesures proposées dans le projet
de loi n° 51 puis vous proposez plein de mesures très intéressantes qui ne
sont pas dans le projet de loi n° 51. Vous terminez en disant que le
projet de loi n° 51, ce n'est pas une avancée positive, «il est encore
temps de rectifier le tir». Dans les deux minutes qui nous restent, qu'est-ce
que vous pensez qu'on devrait faire actuellement, là? Vous savez, là, le
ministre, lui, bien, il va bien sûr pousser, c'est normal, il a déposé un
projet de loi, il va pousser pour qu'il soit adopté. Est-ce qu'on a une base de
travail quand même pour avancer? Qu'est-ce que vous nous recommandez de faire
quand il est dit : «Il est encore temps de rectifier le tir», là? On est
là, vous représentez 80 000 travailleurs, mais on est là, tous ensemble, pour
l'intérêt du Québec. Qu'est-ce qu'il faut faire?
M. Boisjoly (Éric) : Moi, je
pense qu'il n'est jamais trop tard pour asseoir, puis je l'ai dit tantôt en
entrée de jeu, tous les acteurs autour d'une même table puis de dire :
O.K., ce projet de loi là, il est là... Tantôt, il y a d'autres... il y a
d'autres associations syndicales qui vont venir prendre parole, je pense qu'ils
vont adresser leurs commentaires, il y a aussi des associations patronales qui
vont venir parler. Je pense que tout le monde a un bémol sur ce projet de loi là,
dans son sens à lui, autant patronal que syndical. Je pense que d'asseoir,
encore là, tous les acteurs autour d'une table pour s'assurer de la paix
sociale... Je le dis, là. Là, c'est facile, on va mettre en place un projet de
loi, mais, en octobre, on dénonce nos conventions collectives, et de là
commence la ronde de négociation, là, on va pouvoir se faire entendre
légalement, avec nos travailleurs et nos travailleuses. Aujourd'hui, il y avait
du monde, aujourd'hui, en avant de l'Assemblée nationale, qui sont venus dire
qu'ils ne sont pas d'accord avec le projet de loi, justement, pour leur région,
pour la négociation, pour leur droit d'association. Ça fait que qu'est-ce qu'on
veut créer? On veut-tu créer un climat harmonieux dans l'industrie de la construction
ou on veut recréer un climat où est-ce qu'il va avoir, dans le fond, des
conflits de travail puis des relations de travail houleuses? C'est la question
que je pose. Mais il est encore temps, je pense, d'asseoir tout le monde autour
d'une table puis de dire : Regardez, je pense qu'on est... on est... on
est à côté de la track, recommençons.
• (12 h 20) •
M. Paradis : Donc, au-delà de
ces consultations particulières, ce que vous nous dites, c'est : On a
besoin encore beaucoup plus de concertation avant d'avancer puis de changer les
normes.
M. Boisjoly (Éric) : Mais
qu'on nous écoute. Parce qu'on dit tout le temps : On vous entend, mais il
faut écouter.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions. Donc, je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de notre commission.
J'ajourne ces travaux jusqu'à demain le
mercredi 13 mars, après les avis touchant des travaux des commissions, où
elle poursuivra son mandat. Merci tout le monde.
(Fin de la séance à 12 h 21)