Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
jeudi 8 février 2024
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Vol. 47 N° 38
Étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-six minutes)
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Après
avoir constaté le quorum, alors nous déclarons la séance de la Commission de l'économie
du travail ouverte.
La commission est réunie aujourd'hui afin
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 42,
Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la
violence à caractère sexuel en milieu de travail.
Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a
des remplacements aujourd'hui?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme D'Amours (Mirabel) est remplacée par Mme Mallette
(Huntingdon), M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par Mme Poulet
(Laporte), Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Morin
(Acadie) et Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey) est remplacée par Mme Caron
(La Pinière).
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. Alors, avant de débuter les remarques préliminaires, je dépose le
mémoire reçu depuis la fin des auditions, soit celui du Syndicat québécois de
la construction, dont vous avez reçu l'avis de greffier à cet effet là tout à l'heure.
Donc, nous débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre du
Travail, vous disposez de 20 minutes.
M. Boulet : 20 minutes.
Merci, Mme la Présidente. D'abord, vous remercier, puis saluer l'ensemble des
collègues gouvernementaux, les collègues des partis d'opposition. Je pense qu'on
amorce l'étude détaillée d'un projet de loi qui est vraiment fondamental pour
le Québec, parce que ça concerne un fléau qui est devenu endémique dans
plusieurs milieux de travail, c'est-à-dire le harcèlement psychologique et les
violences à caractère sexuel.
Le climat de travail d'une commission
parlementaire, pour moi, il est vraiment important. Je pense qu'on est tous ici
avec une volonté ferme d'entreprendre un dialogue qui est constructif. On a un
objectif commun, c'est-à-dire d'aider les travailleuses et les travailleurs à
œuvrer dans un environnement qui est sain, qui est sécuritaire, qui est exempt
de harcèlement, quel qu'il soit. Et on a évidemment entendu les groupes qui
sont venus en consultations particulières. C'est extrêmement crucial pour ces
groupes-là d'être convaincus, d'être entendus. Moi, chaque fois, je leur dis qu'on
va le faire avec attention et considération. Et au-delà des groupes qui ont été
entendus ici, devant nous, tous les mémoires sont et seront analysés. Là, je
comprends qu'il y en a un nouveau du Syndicat québécois de la construction. On
va faire l'analyse qui s'impose, on va étudier, on va s'assurer que ces
recommandations soumises par le Syndicat québécois de la construction soient
bien véhiculées.
• (11 h 40) •
Puis ça me tient à cœur de aussi réitérer
qu'à chaque fois qu'on a eu des études détaillées, bon, j'en ai eu quand même
un certain nombre avec notre collègue de Hochelaga-Maisonneuve, à chaque fois,
on prend le temps de s'assurer que tout le monde comprend bien. S'il y a des
amendements, on les analyse. S'ils sont pertinents puis qu'ils s'imposent, on s'assure
aussi de les faire. Parce qu'un projet de loi, dans le cas qui nous concerne,
il est généralement précédé de beaucoup de consultations. Puis je rappelle ici
que les trois expertes sont...
M. Boulet : ...on bénéficie
d'une réputation extrêmement enviable, non seulement au Québec, mais à
l'échelle internationale. Anne-Marie Laflamme... elle est doyenne de la Faculté
de droit de l'Université Laval... Dalia Gesualdi-Fecteau, qui était en
relations industrielles à l'UQAM, et, maintenant, à l'Université de Montréal,
et Rachel Cox, qui est en relations industrielles à l'UQAM, c'est des personnes
qui ont écrit beaucoup, qui sont reconnues comme étant des personnes
objectives, et elles ont fait un rapport qui a été honoré, qui a été louangé,
qui contenait 82 recommandations, et il y en a un certain nombre à saveur
administrative, puis, c'est important, au cours de l'étude détaillée, je
rappellerai les recommandations administratives, qui, pour la vaste majorité,
ont été mises en application par la CNESST ou le Tribunal administratif du
travail. Et il faut être en action, parce que chaque cas en est un de trop. Il
faut tendre vers l'objectif, qui est le moins possible de cas. On sait tous à
quel point il y a des effets corrosifs non seulement dans l'environnement de
travail, mais au sein des familles et parmi les proches des personnes qui sont
victimes, particulièrement de violence à caractère sexuel.
Donc, on est tous ouverts à bonifier le
projet de loi, et moi, pour la cohérence de nos discussions puis de nos
travaux, étant donné qu'on a eu très peu de temps... puis je suis un petit peu
désolé que vous ayez reçu la séquence hier, en fin d'après-midi... j'en ai
parlé avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve... ce que je propose, c'est que
nous y allions loi par loi, les lois qui sont amendées par le projet de loi, et
on finit par la Loi sur les accidents de travail, maladies professionnelles, où
il y aura peut-être le plus de discussions et d'amendements potentiels. Et j'ai
divisé... Donc, on commencerait par la loi santé et sécurité, le Code du
travail, la Loi sur les normes du travail, la loi concernant la protection des
stagiaires et les articles de concordance, la Loi santé et sécurité du travail,
la loi sur les relations de travail, formation professionnelle et gestion de la
main-d'œuvre dans le secteur de la construction — c'est la loi R-20 — ensuite,
la LATMP, la loi sur les accidents de travail, maladies professionnelles, et,
enfin, les mesures transitoires et finales.
Il y a un certain nombre d'amendements — j'ai
toujours travaillé de cette manière-là — qui sont consécutifs aux
consultations particulières. Il y a certaines recommandations qu'on a
transformées en amendements, mais il y a un certain nombre d'amendements, vous
vous en doutez bien, que je dois présenter au Conseil des ministres, puis je
n'ai pas eu le temps de le faire cette semaine. Ce sera fait la semaine
prochaine. Mais il y a deux amendements que j'aimerais vous soumettre ce matin,
après que les allocutions soient terminées. Si on consent tous pour y aller de
cette manière-là, nos cahiers en colonnes, qui sont partagés, je pense, par
voie électronique, avec vous autres, je veux qu'on y aille rondement, qu'on
soit le plus efficaces possible, et moi, je vais, après nos allocutions, vous
présenter les deux amendements, je vais les présenter sommairement, on arrêtera
quelques minutes, puis, après ça, ça nous permettra d'amorcer nos discussions
de la manière la plus diligente possible.
Alors, Mme la Présidente, on est disposés
à débuter. Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, j'invite maintenant le porte-parole de l'opposition
officielle, le député de l'Acadie, à faire ses remarques préliminaires, pour
une durée maximale de 20 minutes.
M.
Morin :Merci, Mme la Présidente, j'apprécie. M. le ministre,
collègues parlementaires, je... en fait, c'est un... je me sens privilégié
d'être ici avec vous ce matin pour traiter d'un projet de loi qui est très
important. On pourra... Évidemment, on aura des commentaires constructifs à faire
à M. le ministre au fur et à mesure qu'on étudiera le projet de loi article par
article. Mais j'aimerais, dans mes remarques préliminaires, souligner que ce
projet de loi vise à réglementer, aider à la dénonciation, éventuellement,
enrayer toute la question de la violence, du harcèlement et des violences à
caractère sexuel...
M.
Morin :...le domaine du travail, et c'est très important. Puis
c'est très important aussi, comme parlementaires, qu'on puisse traiter de ces
questions-là, parce que, dans notre quotidien, la majorité des Québécois et des
Québécoises vont consacrer des heures, et des heures, et des heures de leur vie
à travailler, et, je pense, une des choses qu'on doit leur garantir, c'est
d'être capables de travailler dans un milieu qui est sain, dans un milieu qui
est accueillant, dans un milieu qui est sûr, dans un milieu où la personne
n'aura pas à vivre des situations de harcèlement.
Il y a toute la question de la santé et de
la sécurité au travail. C'est fondamental. On veut que les travailleurs et
travailleuses du Québec aient accès à un milieu qui est sécuritaire. Mais, en
plus, il y a toute la question de la lutte contre le harcèlement et de la lutte
contre les violences sexuelles, et, c'est malheureux, mais je pense qu'il faut en
faire le constat, cette situation, elle existe, elle existe dans notre milieu
de travail, et c'est ce que M. le ministre tente de corriger avec son projet de
loi. C'est important de traiter de ces questions-là et de prendre le temps de
le faire, parce que...
Je me rappelle très bien quand le document
Rebâtir la confiance a été déposé, divulgué et publié, avec toutes les
recommandations. Il y avait plusieurs recommandations qui traitaient,
justement, de toute la question du harcèlement sexuel et des agressions
sexuelles en milieu de travail. Et c'est fondamental de rebâtir la confiance de
notre système de justice, et ça, je peux vous en parler, parce que j'y ai passé
une grande partie de ma vie, notamment à plaider des dossiers, et à plaider des
dossiers, et à déposer des accusations en matière d'agression sexuelle, pas
toujours dans un contexte de milieu de travail, mais, quand même, des
agressions... des accusations d'agression sexuelle à l'égard, évidemment,
d'agresseurs, mais tout en tenant compte et tout en essayant de travailler, et
d'encourager, et, évidemment, d'accompagner, le plus possible, la victime. Et
ça, c'est hyperimportant, à mon avis, parce que c'est déjà difficile de
dénoncer, alors, une fois qu'on a dénoncé, et qu'il y a un volet qui devient
public, et donc il y a des procédures. Il faut être capables d'accompagner les
victimes pour faire en sorte que le processus puisse se rende jusqu'au bout. Et
ça arrive, ça arrive assez souvent que, malheureusement, des victimes vont se
décourager. Il faut éviter ça, il faut être capables de leur donner un milieu
de travail où elles vont être capables, ces victimes, de dénoncer, et faire en
sorte que le processus puisse aller de l'avant.
Le harcèlement sexuel, c'est une
problématique importante dans les milieux de travail, puis, quand on regarde
les statistiques, le nombre est quand même important. On parle souvent, là,
d'une personne sur deux, presque une personne sur deux, 49 % des gens qui
ont subi un comportement sexualisé, inapproprié ou discriminatoire. Il y a un
fort pourcentage de femmes, mais il y a aussi des hommes qui sont victimes de
ces comportements-là, et c'est totalement inacceptable. Puis il faut savoir
aussi, pour avoir accompagné, traité de ces dossiers-là, accompagné des
victimes... voir ce que ça fait chez les gens, et, croyez-moi, c'est loin
d'être banal. À un point où des victimes vont arrêter de travailler. Elles ne
seront plus capables d'aller dans leur milieu de travail, elles ne seront plus
capables de dormir, vont être obligées d'avoir recours à des ressources
externes, médicales, ou autres, parce qu'elles ne fonctionnent plus. Et
imaginez une personne qui doit retourner dans son milieu de travail, mais qui
sait ou qui anticipe qu'elle va devoir vivre ce genre de situation là. C'est
totalement inacceptable. Donc, il est important de s'adresser, de s'attaquer au
problème. C'est ce que tente de faire M. le ministre.
• (11 h 50) •
Et donc il y a plusieurs lois, et on va le
voir, éventuellement, qui... où il y a des modifications pour essayer d'avoir
un milieu de travail sécuritaire et sûr. Et il faudra aussi s'assurer... puis
ça, bien, ça va être notre rôle, dans l'opposition officielle, à ma collègue
députée de La Pinière et à moi... de faire en sorte que ce projet de loi, finalement,
pourra être la meilleure possible pour garantir un milieu...
M.
Morin :...non seulement qui est sain, sécuritaire, mais de
s'assurer également que des victimes qui déposent plainte ne seront pas l'objet
de représailles, c'est aussi fondamental, et de s'assurer qu'il y aura des
mécanismes en place qui vont faire en sorte que ce sont des gens totalement
indépendants qui traiteront de ces dossiers-là pour s'assurer qu'il n'y ait
aucune apparence de partialité.
Alors, pour mes remarques préliminaires,
Mme la Présidente, je vais m'arrêter ici, mais je tenais quand même à brosser
un tableau un peu global de la problématique, de la difficulté et puis, après
ça, on va voir, article après article, comment on peut améliorer la situation.
Je vous remercie.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député. Alors, j'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe
d'opposition et député d'Hochelaga-Maisonneuve à faire ses remarques
préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, tout le monde. Très content de vous retrouver en étude
détaillée. Je faisais le décompte avec mon collègue de la recherche... de
combien de projets de loi, là, j'ai eu à échanger avec le ministre du Travail.
On a compté huit. Je ne sais pas si vous voulez compter, vous aussi, M. le
ministre, ce serait le huitième, je pensais neuf, mais c'est peut-être le
huitième. Vous ferez votre calcul, puis on s'en reparlera, puis il y aura la
construction qui viendra assez tôt aussi, on aura certainement un neuvième
cette année. Sinon, Mme la Présidente, bien, moi aussi, je veux saluer tous les
gens qui sont venus en commission nous parler dans la section des auditions.
C'est toujours important, c'est une partie essentielle de la démocratie, là, de
pouvoir entendre les gens à l'extérieur de notre enceinte, mais venir nous dire
ce qu'ils pensent de ce qu'on s'apprête à faire avec des lois qui les
concernent directement.
Sur le fond du projet de loi, je ne
reprendrai pas l'essentiel de la présentation de mon collègue, là, qui était
fort fort pertinente. Je pense, en effet, que c'est une loi qui était attendue,
une loi qui, grosso modo, se base, en effet, sur les recommandations des trois
expertes citées par M. le ministre aussi. Tu sais, vous allez voir, on a
peut-être quelques amendements qu'on va déposer de notre côté, mais, grosso
modo, ça va, je pense, bien aller. Il y aura des questions qu'on va poser au
ministre sur comment il pense appliquer tel ou tel article. Est-ce qu'il a
entendu les arguments des groupes? Est-ce qu'il penche plus vers telle lecture
que l'autre, comment il a éventuellement évolué sur sa pensée? Donc, des fois,
ce sera des amendements, des fois, ce sera des échanges, qui nous permettra de
voir où est-ce qu'il loge, qui laissera aussi des traces, hein, on l'oublie
trop souvent, mais, des fois, quand une loi est contestée devant les tribunaux,
pour en déterminer l'interprétation, quand il y a un conflit d'interprétation,
bien, les échanges ici, en cette Chambre, dans cette commission, peuvent être
utilisés pour dégager l'intention du législateur, comme on l'appelle.
Alors, moi, je prends ce rôle-là
d'opposition à cœur, de dégager le plus possible, de clarifier l'intention du
législateur dans plusieurs sections des différentes lois que j'ai travaillé
avec le ministre. Alors, je vais m'en tenir à ça pour l'instant. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres membres qui souhaiteraient faire
des remarques préliminaires? M. le député de Jean-Talon.
M. Paradis : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. J'aimerais me joindre d'abord à mes collègues pour remercier
toutes les personnes qui ont travaillé à la préparation de ce projet de loi qui
est vraiment très important. J'aimerais remercier toutes les personnes qui ont
transmis des mémoires très informatifs, très utiles pour nous et toutes les
personnes également qui sont venues témoigner. Je remercie particulièrement le
ministre de sa perspective ouverte.
Je n'ai pas huit projets de loi, moi, de
faits, avec le ministre, ça va être mon... ma première expérience avec le
ministre. Mais j'aime beaucoup le fait qu'il se montre ouvert, et je pense que
c'est ce qui nous doit nous guider comme groupe aujourd'hui. Je l'ai mentionné
hier au salon bleu, il y a... les enjeux qu'on va devoir... qu'on va avoir à
traiter, c'est des enjeux de hauteur politique. On est là pour faire la
meilleure chose possible, Mme la Présidente. Il faut qu'on ait... Il faut qu'on
ait le courage d'aller le plus loin possible pour que le Québec soit un endroit
innovant, un endroit à la fine pointe des meilleures pratiques pour lutter
contre le harcèlement psychologique qui... de violence sexuelle en milieu de travail,
pour qu'on assainisse les pratiques en milieu de travail, pour qu'on on
prévienne ces formes de violence, ces formes de harcèlement, qu'on crée un
milieu de travail qui est propice, en fait, à éviter les situations et qu'on
les traite bien quand il y en a, quand il y a des plaintes, quand il y a des
enjeux réels qui se posent.
Je l'ai mentionné au début des
audiences... la perspective de quelqu'un qui, pendant 20 ans, a travaillé dans
une organisation qui cherchait à faciliter la représentation juridique des
personnes qui sont victimes de ce genre de violence...
M. Paradis : ...pas toujours
en milieu de travail, mais parfois en milieu de travail. Donc, j'arrive avec ce
cœur d'avocat, de droits humains. Mais de l'autre côté aussi, j'ai été
gestionnaire d'une organisation, donc je suis conscient aussi de ce que ça veut
dire pour les employeurs de... de travailler dans ce domaine-là et je suis
conscient qu'il va y avoir des questions délicates à traiter sur lesquelles
nous arrivons pour certaines sans a priori d'idées et qu'on fasse la meilleure
chose. On en a nommé plusieurs hier, au salon bleu, et ces enjeux-là. Donc, il
va falloir s'assurer aussi qu'on tienne compte de l'état existant du droit. On
a eu des discussions, notamment lors des audiences, et par bonheur, je l'ai
mentionné, je le réitère encore aujourd'hui, par bonheur... quel bonheur de
nous appuyer sur le travail des trois expertes. Vous l'avez mentionné, M. le
ministre, c'est vraiment éclairant. Elles sont venues aussi nous nous rappeler
leurs recommandations et ce qu'on peut faire de mieux aussi pour améliorer le
projet de loi en fonction de ces recommandations-là. Mais d'autres aussi nous
ont incités à la prudence à bien considérer l'état du droit. Et là-dessus, M.
le ministre. Je... on en a parlé brièvement, mais le Barreau s'est montré
disponible pour continuer à nous éclairer sur l'état du droit, sur certaines
dispositions, notamment sur les fameuses clauses d'amnistie dont on va parler.
Elles arrivent assez rapidement dans le plan de travail, M. le ministre, et je
vois la logique d'aborder les modifications loi par loi. Peut-être aussi qu'il
y a certains enjeux qui arrivent tôt. On a tous collaboré, je pense, pour
traiter ce projet de loi-là avec lui donner la priorité qu'il mérite. Mais
est-ce qu'il y a des questions qui mériteront qu'on prenne le temps, peut-être,
de recevoir de l'information additionnelle? Je me le demande notamment donc
pour qu'on soit vraiment éclairé sur l'état actuel de la situation et les
tenants et aboutissants des décisions qu'on pourrait prendre. Alors, moi, très
disposé donc à collaborer avec tous les collègues et toutes les collègues ici
présents, et hâte d'aborder donc les discussions sur ces enjeux-là. Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) :
Merci, M. le député. Alors, Mme la députée de La Pinière, pour vos
remarques préliminaires.
• (12 heures) •
Mme Caron : Merci, Mme la
Présidente. Alors, comme les collègues, et je partage le... le souci de bien
faire le travail, non pas de perdre le temps, mais, comme le ministre l'a dit,
de... bien, en fait, je dis, de prendre le temps pour, comme le ministre l'a
dit, de s'assurer que tout le monde comprend bien ce qu'on est en train de
faire. L'objectif du projet de loi de protéger les victimes, puis, évidemment,
on veut idéalement prévenir ce genre de comportement dans tous les milieux de
travail pour pouvoir protéger toutes les victimes, et on espère réduire aussi
le nombre de victimes. Alors je pense que ça va être important qu'on s'assure
que c'est le plus... malgré, c'est très délicat toutes ces questions-là, que la
mise en application de la loi sera le plus simple possible à faire. Donc, que
ce soit clair, par exemple, qu'on n'est pas une victime dans... dans... qui,
dans un milieu comme l'enseignement supérieur et une victime qui est dans un
milieu comme le secteur de la construction, et qu'on ait des définitions
différentes qui fassent en sorte que dans un tel milieu, la victime va recevoir
le traitement, comme... que le... que la loi prévoit et que l'autre victime,
bien, aura aussi le traitement de son dossier, mais avec un résultat peut-être
différent, parce que la définition... il y a des éléments de la définition qui
ne sont pas dans une loi et qui sont dans l'autre. Alors, je pense qu'il va
falloir s'assurer que tous les angles sont couverts dans tous les milieux de
travail pour que ce soit équitable pour tous et pour toutes. Je suis donc à cet
égard là, heureuse d'avoir constaté, durant les consultations, l'ouverture dont
le... le ministre faisait preuve par rapport aux propositions qui étaient
faites ou aux préoccupations qui étaient soulevées. Alors, mon souhait,
évidemment, c'est que cette ouverture-là continue pendant l'étude détaillée
pour qu'on s'assure d'avoir le projet de loi et, au bout... en bout de piste,
la loi qui sera la plus utile possible et dont la mise en application ne fera
pas problème. Et quand je parle de la mise en application, c'est qu'on veut
protéger toutes les personnes dans tous les milieux de travail...
12 h (version non révisée)
Mme Caron : ...mais on
comprend que les milieux de travail ne sont pas tous égaux... ce sens que
certains milieux... dans certains milieux de travail, il y a des conventions
collectives, où il y a possibilité de faire des griefs. Dans d'autres milieux
de travail qui ne sont pas syndiqués, il peut y avoir de très grandes
entreprises, où on a des directions de ressources humaines qui sont bien
dotées, avec des personnes qui peuvent faire... qui ont les compétences et les
connaissances nécessaires pour mener à bien les enquêtes et bien traiter les
dossiers, alors qu'il y a de très petites entreprises où les ressources sont
moindres, les ressources ne sont pas présentes à l'interne. On peut dire que
ces entreprises-là paieront pour des ressources externes. C'est certain que c'est
faisable, mais en même temps, on ne veut pas que ça devienne un fardeau
épouvantable sur les petites entreprises, d'où l'importance de s'assurer que la
mouture finale du projet de loi fera en sorte que les processus qu'il faudra
respecter seront clairs et le plus... le plus simple, et je le mets entre
guillemets, parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, ce sont des questions
délicates. Il faut que ce soit bien fait puis il faut que ce soit fait par des
personnes qui ont... qui ont les compétences. On a appris durant les
consultations que les membres du Barreau avaient droit à une formation, ils
pouvaient suivre une formation de 60 heures pour traiter ce genre de cas,
parce que c'est très délicat. Il faut savoir, surtout si on... Bien,
évidemment, le Barreau offre des formations aux membres du Barreau, mais d'autres
personnes qui ne sont pas avocats ou avocates spécialisés dans ce domaine ont
besoin aussi de formation. Donc, comment... comment ça va... ça va s'articuler
tout ça? C'est important de bien... de bien faire le travail parce qu'on veut
encore une fois que toutes les victimes aient un traitement qui est équitable.
Et je reviens sur un point, j'y reviendrai
sûrement durant l'étude détaillée, un point qui me... qui me préoccupe à propos
des utilisateurs, des personnes qui utilisent le programme chèque
emploi-services pour recevoir des services de soutien à domicile, par exemple.
Alors, on parle de personnes aînées qui ont peut-être des troubles cognitifs ou
qui ont des... des... qui sont en perte d'autonomie. On parle de personnes en
situation de handicap, qui ont besoin d'aide à domicile et qui utilisent le
programme emploi-services dans le cadre duquel... ce chèque emploi-services,
donc dans le cadre duquel la personne qui reçoit les services est considérée
comme employeur. Alors, cette personne-là, quant à moi, ne peut pas mettre en
place tout ce qui est prévu dans la loi. Par contre, on veut quand même que la
personne qui vient rendre le service, l'employé qui vient rendre le service,
préposée par exemple, soit protégée elle aussi, ou lui aussi, par ce qui est
prévu dans la loi en cas de harcèlement ou de violence à caractère sexuel dans
le cadre du travail. Parce que la personne qui reçoit le service, même si ce n'est
fort probablement pas elle qui va faire... qui pourrait commettre des violences
à l'égard de l'employé, bien, il peut y avoir d'autres personnes dans l'entourage,
dans la famille ou dans les voisins qui... qui sont sur le milieu de travail de
la préposée, par exemple. Alors ça, comment... comment ça va s'articuler? C'est
une... c'est une préoccupation parce qu'il ne faudrait pas que les gens
décident de ne plus avoir recours au programme chèque emploi-services, parce
que la... le fardeau, qui leur serait amené par... par cette loi, serait...
serait impossible à mettre... à mettre en place, à respecter.
Alors ça, c'est un de mes grands... de mes
grandes préoccupations. Et aussi préoccupation qui... dont on pourra parler,
celle de s'assurer que les milieux de travail, qui sont aussi des milieux de
vie pour personnes vulnérables, soient protégés dans le sens où on ne soit
pas... que les... les employeurs sachent si un candidat potentiel à travailler
dans leur milieu a déjà été reconnu fautif de violences à caractère sexuel ou
de harcèlement psychologique ou harcèlement sexuel, parce qu'on ne voudrait pas
que... qu'on continue. Parce que ça s'est... ça s'est produit, on l'a vu dans
certains mémoires qui nous ont apportés des cas. Donc, on ne voudrait pas qu'une
telle personne vienne travailler dans un milieu où il y a des résidants qui
sont...
Mme Caron : ...sont très
vulnérables et où il y a aussi des employés, donc les collègues de cette
personne-là, qui sont des populations très vulnérables, parce qu'on le sait,
les femmes sont le plus souvent les victimes de ces actes-là, et, dans des
milieux de vie comme CHSLD, comme maison des aînés, comme ressource
intermédiaire, comme RPA, bien, il y a beaucoup de femmes, beaucoup de femmes
immigrantes et qui sont aussi des victimes. Je ne sais pas si j'oserais...
j'ose utiliser le mot des victimes peut-être faciles ou qui n'oseront pas
nécessairement porter plainte. Et on veut que toutes ces femmes, que tous les
employés, hommes ou femmes, soient protégés par cette loi. C'est l'objectif, je
le pense, du projet de loi. Alors, ce sont des questions fort importantes dont
on aura à discuter. Et, comme mon collègue député de l'Acadie, c'est un honneur
pour moi de pouvoir faire partie des discussions des travaux sur ce projet-là.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup, Mme la députée. Alors, nous en sommes maintenant au bloc des motions
préliminaires. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous nous avez déjà
annoncé avoir une motion que vous avez dûment déposée et transmise à la
commission en vertu de l'article 190. Maintenant, est-ce qu'il y aurait
d'autres motions préliminaires? Très bien. Alors, M. le député
d'Hochelaga-Maisonneuve, on va vous demander de lire votre motion.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Ça va comme suit :
«Qu'en vertu de l'article 244 de nos
règles de procédure la Commission de l'économie du travail, avant
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi visant à
prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère
sexuel en milieu de travail, tienne des consultations particulières et qu'à
cette fin elle l'entende les groupes suivants : Fédération autonome de
l'enseignement, Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, Alliance
du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux,
Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, Centrale des
syndicats démocratiques ainsi que tout autre groupe jugé pertinent par la
Commission.»
Est-ce que j'explique tout de suite, Mme
la Présidente? Est-ce que j'explique tout de suite la motion?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Juste
un instant, on attend de voir la projection de la motion.
On va suspendre une petite minute.
(Suspension de la séance à 12 h 07)
(Reprise à 12 h 08)
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Voilà.
Merci beaucoup. Donc, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous avez
30 minutes pour discuter de votre motion et les représentants des chefs
des groupes parlementaires auront également la même durée, 10 minutes pour
les autres intervenants. Alors, la parole est à vous.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. J'ai fait une longue intervention hier au salon bleu sur l'adoption
du principe et j'y ai fait un segment sur ma déception quant au nombre de
groupes qui ont été invités pendant la semaine dernière où on a fait les
audiences. Je souligne au passage que ce n'est pas toujours facile de négocier
avec le bureau du leader de mon estimé collègue, le leader du gouvernement. Ce
n'est pas simple. Il faut toujours, comme, étirer, étirer, étirer. Mais bon,
c'est la vie, c'est la négociation et ce n'est pas nous qui sommes
majoritaires.
• (12 h 10) •
Or, moi, j'ai un principe de base.
Lorsqu'on va aller toucher au droit du travail, le code, la loi des normes, la
loi de la santé et sécurité, la LATMP, c'est toutes des lois qu'on modifie à
travers ce projet de loi là, et bien d'autres lois, d'ailleurs, loi de la
protection du stagiaire, loi du statut professionnel des arts visuels, j'en
ai-tu oublié, loi des relations de travail, la formation professionnelle dans
l'industrie de la construction... lorsqu'on touche au droit du travail, à mon
avis, on ne peut pas faire l'économie d'entendre tous les groupes qui
représentent les travailleurs et travailleuses. Je serais ouvert aussi à ce
qu'on inclut, évidemment, les groupes qui représentent les patrons aussi pour
les mêmes raisons. Pourquoi? Parce que ce sont eux et elles qui vont avoir à
appliquer ce droit du travail que nous sommes en train de modifier. Ce n'est
pas moi, ce n'est pas M. le ministre, c'est les groupes sur le terrain, à plus
forte raison, des groupes représentant les travailleurs et travailleuses.
Est-ce que tel ou tel universitaire, on aurait pu l'inviter ou pas? Il y a de
la place pour en débattre, ils ont... je veux dire, ils peuvent émettre leur
opinion, tout ça. Mais les gens qui auront à gérer les conventions collectives,
l'application de normes du travail, l'application de principe de santé et
sécurité... On ne peut pas dire...
M. Leduc : ...ah bien, il y a
eu deux, trois centrales syndicales, ils ont représenté le mouvement. En plus
que, dans le cas qui nous intéresse, le projet de loi no 42, si on fait
l'examen des différents mémoires qui ont été déposés par les centrales
syndicales, c'est très éclaté. Souvent, les centrales syndicales... bien,
souvent, sur certains projets de loi, il y a le camp des travailleurs, le camp
des patrons, bon, grosso modo, avec quelques nuances, ça reprend grosso modo
les mêmes choses, mais, dans ce cas-ci, les centrales syndicales avaient quand
même beaucoup d'approches distinctes, notamment sur les fameuses clauses
d'amnistie. Je pense qu'il n'y avait aucune centrale qui avait exactement la
même position sur les clauses d'amnistie, il y avait des nuances, là, des
virgules, mais on avait un portrait très éclaté, ce qui n'est pas une mauvaise
chose. Les centrales syndicales, c'est démocratique, c'est des gens qui
réfléchissent puis ils ont tous des façons de voir différentes... le droit du
travail, et ils auraient dû être entendus, chacune d'entre elles. Là, je ne
suis pas en train de dire qu'on invite tous les syndicats locaux de toutes les
shops du Québec, hein, je ne suis pas là du tout, mais, honnêtement, des
regroupements syndicaux de la taille de la Fédération autonome de
l'enseignement, de la FIQ, de l'APTS... des gros syndicats, ça, là, ce n'est
pas petit, là, c'est des milliers de personnes, c'est des conseillers
syndicaux. Ils ont des départements de recherche. Ils en ont produit, des
mémoires, ils nous les ont envoyés, ils sont dans le Greffier, là. Moi, j'en ai
rencontré quelques-uns, de ces groupes-là, en parallèle. N'ayant pas été
entendus, j'imagine qu'ils ont sollicité aussi mes collègues des autres
oppositions, mais moi, je les ai rencontrés aussi parce que je voulais les
entendre. J'aurais pu juste dire : Bah! Je vais juste lire votre mémoire,
puis merci de votre contribution. Mais je voulais les entendre puis avoir un
échange avec eux, hein? On a un ancien premier ministre qui disait... hein,
d'entendre l'autre partie, mais on ne l'a pas fait complètement, on ne l'a pas
fait suffisamment lors de cette commission.
Et, encore une fois, moi je ne suis pas
quelqu'un qui abuse de la procédure des motions préliminaires, là, on a une
négociation, on s'entend sur une liste puis on procède, mais je réitère que,
pour moi, le principe de base devrait être le suivant, et je... peut-être que
je m'en sers aussi pour les audiences qui viendront sur le projet de loi sur la
construction, quand on touche au droit du travail, on devrait inviter ou, en
tout cas, accepter la requête de se faire entendre de chacune des organisations
syndicales qui le désire, parce qu'on touche à leur droit de travail. Ce n'est pas
juste à nous, le droit du travail, c'est aux gens qui l'appliquent, c'est aux
gens qui le traitent, qui se mettent les mains dans le pétrin, comme on dit,
pour moudre la pâte.
Alors, c'était ma déception, en plus qu'on
avait un après-midi de libre, jeudi dernier, qu'on aurait pu consacrer à ça, à
rajouter quelques groupes. Je comprends, avec le recul que, finalement, c'était
la date qui avait été choisie pour présenter le projet de loi de la
construction du ministre. Je pense que ça aurait pu être retardé un peu pour
respecter ce principe du fait que tous les groupes qui représentent des
travailleurs et des travailleuses dûment accrédités par le Code du travail
devraient être entendus quand on touche au droit du travail. Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur la motion? M.
le député de l'Acadie.
M.
Morin :Oui, Mme la Présidente. Merci. En fait, je trouve
intéressante la motion de mon collègue. C'est vrai que ma compréhension de nos
travaux parlementaires, c'est que c'est le... enfin, l'expérience que j'ai eue
dans des dossiers en justice, c'est que c'était le bureau du leader, qui est
aussi le ministre de la Justice, qui... bon, finalement, après nos recommandations,
envoyait des invitations.
Maintenant, je constate que c'est un
projet de loi qui... bien, je l'ai dit d'emblée, qui est important puis qui est
essentiel, je pense, pour toute la question du marché du travail au Québec, des
travailleurs, des travailleuses, mais aussi des patrons. Et compte tenu de
l'impact de ces dispositions-là, c'est toujours, je pense, important de pouvoir
écouter le plus grand nombre de groupes possible, particulièrement quand on est
dans l'opposition, parce que, non seulement ça nous permet de lire les mémoires
mais ça nous permet aussi d'entrer dans un dialogue constructif avec plusieurs
groupes.
Et je constate, entre autres, que, parmi
certains groupes qu'on avait demandés... et moi, je n'ai pas eu le privilège
d'entendre les groupes précédemment, mais j'ai regardé, j'ai lu les mémoires,
on voulait entendre la commission...
M. Morin : ...les droits de la
personne. Je comprends qu'ils ont déposé un mémoire et on a un peu le sens de
ce qu'ils voulaient dire, mais lire un mémoire puis entrer dans un dialogue,
poser des questions à un groupe, ça permet parfois de nous faire réaliser qu'il
y a des éléments qu'on n'avait pas vus. Et je vais vous donner... je vais vous
donner un exemple de ça.
Dans la session dernière, j'ai passé un
grand nombre d'heures dans le fameux projet de loi qui a modifié la Loi sur
l'expropriation au Québec. Et je me souviens, entre autres, d'une experte, Me
Burel, qui a déposé un mémoire, mais quand elle est venue nous parler, elle a
été capable évidemment de... non seulement de bonifier, mais de nous donner des
explications particulières, puis de nous expliquer concrètement sur le terrain
ce qui allait donner... ce qui allait arriver de ces modifications. Donc, tout
ça pour vous dire que, pour moi, c'est très important. Et je constate que, bon,
la Commission des droits de la personne, on ne l'a pas entendue. On m'informe
également que nous, on avait demandé d'entendre le regroupement des jeunes
chambres de commerce, ça n'a pas été accepté, ça n'a pas été retenu, puis,
également Force jeunesse. Ce sont des groupes importants qui, quant à moi,
représentent aussi éventuellement l'avenir du Québec. C'est ces gens-là qui,
éventuellement, auront un rôle à jouer dans le milieu du travail, que ce soit
comme propriétaires d'entreprise ou comme représentants syndicaux, travailleurs
ou travailleuses, etc.
Et donc d'où l'importance, d'où
l'importance d'entendre le plus de groupes possibles, non pas pour retarder
indument des travaux, là, ce n'est pas... ce n'est pas l'objectif, mais quand
on touche à des éléments qui sont tout aussi importants, je pense que nous, en
tout cas, comme législateurs, plus on a de groupes, plus on a d'opinions, plus
on a de recommandations et de conseils, plus ça permet éventuellement d'adopter
des projets de loi qui vont être très pertinents pour... pour la population
québécoise. Donc, c'est des remarques que je voulais partager avec les membres
de la commission en ce qui a trait ou en lien avec la motion que mon, en fait,
collègue parlementaire, député d'Hochelaga a présentée. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député de l'Acadie. Alors, est-ce qu'il y a d'autres remarques
préliminaires? Parfait. Du côté de la banquette du ministre.
M. Boulet : On a entendu
16 groupes, Mme la Présidente, des groupes qui sont extrêmement
représentatifs de la société québécoise, qui ont été discutés entre les partis
politiques, incluant le parti gouvernemental, et moi, j'ai énormément de
respect pour l'APTS et la FIQ, qui n'étaient pas d'ailleurs proposées, ni par
mon collègue du Parti libéral ou mon collègue du Parti québécois. J'ai beaucoup
de respect pour la Commission des droits de la personne. Pas Force Jeunesse,
mais, en même temps, je vous rappellerai qu'on a entendu la CSN, la FTQ, la
CSQ, on a entendu les trois expertes, on a entendu Juripop, puis on a entendu
la Fédération des chambres de commerce, le Conseil du patronat. Je pense qu'on
a un échantillon qui est extrêmement représentatif, encore une fois. Mais moi,
je sais que les groupes auxquels vous avez fait référence, on a analysé les
mémoires, on a tenu compte des recommandations. Et, comme je mentionnais lors
de mes propos préliminaires, on l'a fait avec attention, considération, puis on
les remercie pour... Je profite de l'occasion pour les remercier de leur
intérêt et d'avoir préparé des mémoires à notre attention. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, on comprend que M. le député de Jean-Talon, vous auriez
des remarques à effectuer. Donc, vous avez 10 minutes.
• (12 h 20) •
M. Paradis : Oui, merci. Puis
j'ai bien... j'ai bien entendu le ministre. J'aurais... moi, je suis très
intéressé aussi par la motion de mon collègue le député
d'Hochelaga-Maisonneuve. Dans sa présentation, il a beaucoup insisté sur les
syndicats et les gens qui représentent les employés en matière d'emploi. Je
pense que c'est sage, en effet, de chercher à consulter le plus largement
possible lorsqu'on vient toucher des dispositions fondamentales du droit du
travail. Et là, il y a une ouverture aussi. Il a dit : On pourrait en
profiter aussi pour entendre d'autres personnes. Je pense qu'il y a... du côté
patronal, du côté des employeurs, on n'a peut-être pas non plus fait le tour de
la question, M. le ministre. Et...
M. Paradis : ...je
reviens là-dessus. Sur le plan juridique, je pense que des avis objectifs aussi
pourraient nous aider. Je pense qu'on n'a pas entendu, par exemple, la
conférence des arbitres de griefs, qui sont parmi les principaux concernés, sur
la mécanique, sur la façon dont on prend des décisions, sur ces
dispositions-là. Et je comprends que la motion n'est pas présentée, là, du
tout, là, dans une optique, là, de... de ralentir les travaux ou de faire de la
procédure, mais bien dans une perspective d'un éclairage le plus complet
possible de nos travaux. Et moi, en tout cas, je l'ai mentionné hier, je serais
très intéressé à prendre juste un petit peu plus de temps pour entendre des
personnes très compétentes qui vont nous donner des recommandations, des avis
éclairés sur l'état de la situation actuellement pour qu'on puisse vraiment
mieux avancer. Et je pense que ce n'est pas une question, là, de retarder
indûment, mais vraiment de prendre un petit peu plus de temps pour, oui,
nous... nous alimenter avant de plonger dans des questions très techniques.
Puis je le réitère. M. le ministre, on commence notamment avec la définition de
violences sexuelles, puis je pense qu'un des premiers éléments, ensuite, qu'on
va voir, c'est la fameuse question des clauses d'amnistie. Je pense qu'il faut
faire la bonne chose et qu'on pourrait se donner un petit peu plus de temps et
un petit peu plus de matériel pour bien décider. Moi, je suis... je suis intéressé
à ce qu'on... à ce qu'on puisse réouvrir aux personnes mentionnées et peut être
à d'autres, M. le ministre. J'y pense encore, je les mentionne, je ne veux pas
les... leur mettre trop de pression sur les épaules, mais le Barreau du Québec,
notamment, s'est montré ouvert à nous alimenter sur d'autres questions. Et ça,
ça pourrait être très intéressant pour tout le monde.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Merci, M. le député de Jean-Talon. Alors, M. le député de
Hochelaga-Maisonneuve, j'ai vu votre petit doigt. Cependant, en vertu de
l'article 209 et 217 de notre règlement, vous n'avez droit qu'à une seule
intervention et aucune réplique. Alors, le débat maintenant étant clos, nous
allons mettre aux voix cette motion. Donc, les membres de la commission qui
sont pour la motion.
Des voix : ...
M. Leduc : ...demanderais
un vote par appel nominal.
Une voix : ...un dernier
commentaire.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Malheureusement. M. le ministre.
M. Boulet : O.K. Parfait.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Alors, du côté de la banquette gouvernementale...
La Secrétaire : Je vais aller
le faire moi-même.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Très bien. Alors, la secrétaire va procéder à la mise aux voix.
La Secrétaire : Pour, contre,
abstention.
M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc : Pour.
La Secrétaire
: M. Boulet
(Trois-Rivières)?
M. Boulet : Contre.
La Secrétaire
: Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Contre.
La Secrétaire
: Mme Mallette
(Huntingdon)?
Mme Mallette : Contre.
La Secrétaire
: M. Dufour
(Mille-Îles)?
M. Dufour : Contre. Pas
Mille-Îles, Abitibi-Est.
La Secrétaire : Excusez-moi
de l'erreur. Oui, M. Dufour (Abitibi-Est)?
M. Dufour : Contre.
La Secrétaire
: Mme Poulet
(Laporte)?
Mme Poulet : Contre.
La Secrétaire
: M. Morin
(Acadie)?
M. Morin : Pour.
La Secrétaire
: Mme Caron
(La Pinière)?
Mme Caron : Pour.
La Secrétaire
: Mme Boivin
Roy (Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Abstention.
La Secrétaire
: Alors,
la motion est rejetée.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Donc, puisque nous avons
terminé le bloc des motions préliminaires, selon les discussions entre les
groupes parlementaires, il y a un plan de travail qui nous a été proposé par le
ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour étudier le projet de loi selon le
plan de travail et la feuille de route qui y est incluse?
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Consentement. Merci beaucoup. Alors, M. le ministre, la parole
est à vous.
M. Boulet : Bien, je
demanderais une suspension, Mme la Présidente, de quelques minutes. Je vais
présenter deux amendements puis...
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Très bien.
M. Boulet : ...juste
pour me préparer puis m'assurer qu'ils sont bien déposés. Ils sont bien
déposés, les deux amendements? O.K. Quelques minutes.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Merci beaucoup. Alors, suspension des travaux...
(Suspension de la séance à 12 h 24)
12 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 12 h 31)
La Présidente (Mme Boivin Roy) :
Merci beaucoup. Alors, M. le ministre, on comprend que vous avez deux
amendements en vertu des articles 196 et 197. Est-ce qu'il y a
consentement pour que le ministre puisse lire les amendements?
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Boivin Roy) :
Consentement. Merci. M. le ministre.
M. Boulet : Oui, merci, Mme
la Présidente. Donc, le premier amendement, c'est l'article 18 :
Insérer dans le paragraphe 4° du troisième alinéa de l'article 81.19 de la
Loi sur les normes du travail, proposé par le paragraphe 2° de l'article 18
du projet de loi, et après «un document», «incluant la personne désignée pour
en prendre charge».
Donc, commentaire. On a entendu plusieurs
groupes. Donc, cet amendement-là vise à préciser que l'employeur doit indiquer
la personne désignée pour prendre en charge une plainte ou un signalement dans
la politique de prévention et de prise en charge des situations de harcèlement
psychologique. Je pense que ça ne requiert pas d'explication additionnelle. Et
le deuxième amendement... Oui, vas-y.
M. Leduc : Pour bien
comprendre, là...
M. Boulet : Bien, il y
en a... Il y a quelques groupes qui suggéraient que pour bonifier le contenu
minimal de la politique de prévention et de prise en charge, qu'on indique
aussi la personne qui est désignée pour en prendre charge, la personne qui s'en
occupe de l'application et de l'effectivité de la politique, là.
M. Leduc : Donc, on crée
l'obligation d'avoir une politique à travers le projet de loi.
M. Boulet : Oui. Puis il
y a le contenu qui est déterminé par plusieurs alinéas. Et, dans le contenu, ce
que des groupes nous ont dit, il faudrait aussi que vous mentionniez qui...
M. Leduc : Qui va s'en
occuper pour que... savoir à qui on...
M. Boulet : ...va s'en
occuper de, tu sais, la personne qui veut le signaler ou la personne qui veut
faire une plainte, qui est responsable de l'application de la politique.
M. Leduc : Que ça soit
signalé dans la politique.
M. Boulet : Exact.
M. Leduc : Pas
nécessairement, mettons, sur un babillard ou...
M. Boulet : Que ce soit
écrit dans la politique qui est la personne désignée pour en prendre charge.
M. Leduc : Ça fait que
si moi je suis victime d'une agression, je réfléchis à potentiellement faire
une plainte, je sais qu'il y a une politique. Il faut que je la trouve d'abord.
M. Boulet : Bien, la politique.
M. Leduc : Mais bon.
M. Boulet : Oui, mais en
même temps, il y a de la formation...
M. Leduc : Oui, oui,
oui.
M. Boulet : ...de l'information,
de la sensibilisation.
M. Leduc : Mais, en tout
cas, il y a...
M. Boulet : Mais tu vas
voir, dans la politique, c'est à qui. Qui est la personne, qui est responsable
de recevoir ton signalement.
M. Leduc : La politique
de chaque employeur.
M. Boulet : Exact.
La Présidente (Mme Boivin Roy) :
M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour une prochaine fois, vous m'indiquerez
que vous souhaitez prendre la parole, s'il vous plaît, plutôt que d'interpeler
le ministre directement? M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci. Merci,
Mme la Présidente. Merci pour le rappel. En fait, là, je comprends, M. le
ministre, que vous nous avez proposé un plan de travail, mais que, dans votre
plan de travail, finalement, on passe directement à la Loi sur les normes du
travail et que vous vous intéressez à l'article 18 du projet de loi. Je...
Non? Ce n'est pas ça?
M. Boulet : Non, non. En
fait, c'est conformément à une habitude de travail que j'ai développée avec le
collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, avant d'entreprendre des discussions, je dépose
en amont les amendements et je fais un commentaire explicatif. Et après ça, ça
nous permet d'aller beaucoup plus rondement. Puis ça permet à vos conseillers,
si jamais ils ont des remarques à faire ou une modification de l'amendement, à
bien se préparer. C'est juste pour des raisons de planification. C'est une
habitude de travail. Je pense qu'elle est saine et elle est louée constamment
par mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Morin : Alors donc...
M. Morin : ...je... Je
comprends que, dans le cadre de la planification des travaux, nous pouvons
faire des remarques, finalement, préliminaires avant qu'on se consacre, selon
votre plan de travail, à l'étude comme telle. Je n'y vois pas d'inconvénient,
M. le ministre, là.
M. Boulet : Puis
vraiment des remarques... Puis vraiment des remarques préliminaires, comme
vient de le faire le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Et moi, c'est mon
habitude aussi. À chaque fois, j'essaie le plus rapidement possible, quand mes
amendements sont disponibles, de les transmettre à la greffière pour que ça
puisse être disponible à vous autres.
M. Morin : D'accord.
Bien, en fait, je peux vous dire que dans un premier temps je reçois bien cette
proposition-là, M. le ministre, parce que, dans la préparation, avec ma
collègue, la députée de La Pinière a, en vue de l'étude article par article, un
questionnement que l'on avait en regardant l'article 18 du projet de loi,
et plus particulièrement le paragraphe 4°, c'est de dire : Bien, à qui?
M. Boulet : Bien,
exactement.
M. Morin : Parce que...
Parce que... Bon. Puis on pourra reparler éventuellement de toute la question
de la politique, mais un des éléments qui m'apparaît hyper important. On a beau
avoir une politique, si elle n'est pas connue, si elle n'est pas diffusée, si
elle n'est pas expliquée, puis si les employés ne savent pas à qui s'adresser,
bien là, on vient de diminuer d'une façon importante, à mon avis, l'efficacité
de la politique. Donc, je comprends qu'avec cette proposition-là, l'employeur
ou la personne qui devra développer la politique devra clairement identifier
une personne pour en prendre charge.
M. Boulet : Tout à fait.
M. Morin : Bien.
M. Boulet : Tout à fait.
M. Morin : Parfait. Maintenant...
Puis on pourra aussi en reparler, mais est ce que vous voulez... Je vois que ce
n'est pas le cas. On l'identifie. Est-ce que vous voulez qualifier le statut de
cette personne-là au sein de l'organisation pour évidemment s'assurer que les
gens qui auront à porter plainte pourront s'adresser à quelqu'un, par exemple,
qui... qui est assez indépendant, qui a les coudées franches pour agir, compte
tenu de la nature même de la plainte?
M. Boulet : Oui, ça ne
veut pas dire que c'est nécessairement la personne qui va faire enquête, mais
on ne nomme pas la personne généralement parce que ça peut être par exemple le
coordonnateur, ou le directeur en ressources humaines, ou la directrice en
ressources humaines qui peut être une personne différente. Mais il faut dire
qui est la personne désignée, qui va recevoir les signalements, les plaintes.
Et oui, tout à fait, il faut que ce soit clair, clairement énoncé. Et c'était
le but des représentations des groupes qui sont venus en consultations particulières.
Vous avez la même compréhension que j'ai.
M. Morin : Merci.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Mme la députée de La Pinière.
Mme Caron : Merci, Mme
la Présidente. Alors, est-ce que je... Est-ce que je comprends que, dans votre méthode
de travail que vous avez développée avec le collègue, vous déposez les
amendements parce que vous en avez uniquement... Bon, j'ai entendu parler de
deux amendements. Donc, vous avez seulement deux amendements à déposer sur
l'ensemble du projet de loi, ou simplement deux aujourd'hui, ou deux qui sont
prêts maintenant, puis il y en aura d'autres, et vous fonctionnerez de la même
façon.
M. Boulet : C'est une
bonne question. Je pense qu'on va être prêts à passer au vote, là, tellement on
en discute. Là-dessus, Alexandre, collègue, me fait aller un peu plus loin dans
nos discussions. En fait, c'est les deux amendements que je pouvais préparer et
déposer ce matin, qui ne requéraient pas une approbation par le Conseil des
ministres. Oui, collègue de La Pinière, j'ai d'autres amendements que je devrai
présenter au Conseil des ministres mercredi, la semaine prochaine. Donc, à la
poursuite de nos travaux, j'aurai d'autres amendements, mais pour ce matin,
c'est les deux amendements que j'étais en mesure de déposer. Mais les autres
amendements qui requièrent une approbation, ils concernent plus la Loi sur les
accidents de travail maladie professionnelles. Donc, c'est un de nos derniers
blocs et c'est une autre des raisons qui me motivaient à y aller de cette
manière-là.
Mme Caron : Merci.
M. Boulet : C'était une
excellente question.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : M. le ministre. On va vous inviter à lire rapidement votre
deuxième amendement sur l'article 19.
• (12 h 40) •
M. Boulet : Merci, Mme
la Présidente. Article 19. Remplacer le sous-paragraphe a) du paragraphe
1° de l'article 19 du projet de loi par le suivant :
«a) par le remplacement de «123.7, 123.15
et 123.16» par «123.15, 123.16 et 123 point...
M. Boulet : ...explication.
Bon, en fait, c'est pour ajouter le nouvel article 123.17 qui concerne, là, la
possibilité pour les partis de convenir de la confidentialité, là, dans une
entente de confidentialité, et de convenir de la levée de cette
confidentialité-là. Donc, énumérer cette disposition-là aussi comme devant
faire partie intégrante d'une convention collective. Donc, ça avait été omis
dans le projet de loi initial, donc c'est une précision additionnelle. Ça devra
aussi faire partie de la convention collective de travail convenue entre les
parties, et ça, ça avait été... est-ce que ça avait été souligné? Mais ça avait
été souligné dans l'analyse qui a été faite suite à la réception de mémoire.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, juste en guise de rappel pour la gouverne de nos
travaux, les deux amendements ont été lus. Pour l'instant, simplement,
l'objectif du ministre était d'annoncer et de présenter ceux qui s'en venaient,
évidemment, question de courtoisie, question de bonne collaboration entre les
collègues. Mais évidemment les amendements seront présentés en bonne et due
forme selon le plan de travail. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Je veux juste
réitérer à quel point c'est apprécié du côté des oppositions, en tout cas, de
chez nous à Québec solidaire, parce que, bien que ce n'est pas des amendements,
justement, fondamentalement structurants ou déstructurants du projet de loi.
Nous... de voir un peu où est-ce que le ministre s'en va, aussi, où est-ce que
le ministre ne va pas, s'il ne dépose pas d'autre amendement, en tout cas, là
on sait qu'il y en aura d'autres sur d'autres aspects d'une autre loi. Mais, en
ce sens-là, nous, après ça, on se retourne puis on dit : O.K. Bien, dans
ce cas-là, il bouge là-dessus ou il ne bouge pas là-dessus, on peut commencer
déjà à se faire une tête puis à écrire des choses. Donc, c'est une pratique que
j'apprécie, je voulais le souligner.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
pour vos commentaires. Je pense que c'est ce qui fait que nous avons tous
gaiement fait entorse à la procédure. Alors, M. le ministre, votre plan de
travail. Vous débutez avec l'article 33.
M. Boulet : Oui. Merci.
Article 33. L'article 1 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail,
modifié par l'article 122 du chapitre 27 des lois de 2021, est de nouveau
modifié par l'ajout, à la fin, de la définition suivante :
«Violence à caractère sexuel : toute
forme de violence visant la sexualité ou toute autre conduite se manifestant
notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des
attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu'elles se produisent à une
seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la
diversité sexuelle et de genre.»
L'article 1 tel que modifié se lit comme
suit : «Dans la présente loi et les règlements, à moins que le contexte
n'indique un sens différent, on entend par "Tribunal administratif du
travail", le Tribunal administratif du travail institué par la Loi
instituant le Tribunal administratif du travail.
«Violence à caractère sexuel : Toute
forme de violence visant la sexualité ou toute autre conduite... inconduite se
manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements
ou des attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu'elles se produisent à
une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à
la diversité sexuelle et de genre.»
Commentaire. Donc, ça introduit une
définition, la définition qui est nécessaire à l'application des dispositions
de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : M.
le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, merci, Mme
la Présidente. Alors, M. le ministre, quand j'ai lu l'article 33 et la
définition... en fait, la première question qui m'est venue à l'esprit,
c'est : Est-ce qu'on retrouve des définitions semblables ou qui veulent
définir le même type de comportement indésirable dans d'autres lois? Parce que
le collègue député d'Hochelaga le mentionnait dans nos travaux, évidemment,
éventuellement, les tribunaux pourront s'en servir pour interpréter l'esprit du
législateur, il y aura évidemment un produit fini. Mais il y a une chose qui
est sûre, c'est que, plus on a des définitions qui sont cohérentes, se
ressemblent, comportent les mêmes éléments, plus évidemment ça va faciliter un
travail d'interprétation. Et d'ailleurs...
M. Morin : ...pour éviter
évidemment éventuellement des décisions qui pourraient être contradictoires. Et
le Barreau du Québec, dans son mémoire, soulevait cet enjeu, et permettez-moi
de citer le mémoire du Barreau à la page 3. Le Barreau disait : «Nous
saluons la volonté du législateur de mieux reconnaître et de faciliter
l'indemnisation de ce type de légions... de lésions. Cependant, nous souhaitons
attirer l'attention sur l'enjeu que soulève l'ajout de cette fonction — pardon.
Rappelons d'abord que la notion de violence à caractère sexuel a été introduite
en 2018 à la Loi sur les normes du travail. La Loi sur la santé et la sécurité
du travail a également été modifiée par l'ajout d'obligations pour l'employeur.
Dans la Loi sur les normes du travail, on a une définition de harcèlement
psychologique.»
Et le Barreau disait : Nous sommes
d'avis que la coexistence de deux notions distinctes de harcèlement
psychologique et de violence à caractère sexuel pourrait donner lieu à des
interprétations et à des décisions différentes basées sur les mêmes faits. Plus
précisément, nous souhaitons porter à l'attention du législateur que la
coexistence de ces deux définitions distinctes peut poser une difficulté dans
le contexte où deux divisions du Tribunal administratif du travail sont en
cause. D'autant que quand on regarde aussi dans l'ensemble du corpus législatif
québécois, il y a quelques années, le législateur québécois dans la Loi sur
l'enseignement supérieur a aussi adopté une définition pour lutter plus
particulièrement sur les campus d'établissements d'enseignement supérieur. Donc
une définition visant à lutter contre les violences, évidemment à caractère
sexuel.»
Donc, est-ce que, dans votre travail, M.
le ministre, vous avez tenu compte de ces autres lois? Est-ce qu'il n'y aurait
pas lieu de mettre en application les recommandations proposées par le Barreau
du Québec et s'assurer que, finalement, autant pour les tribunaux que pour les
gens qui veulent porter plainte ou les employeurs qui vont devoir adopter des
politiques pour éviter ce genre de comportement, là, on ait une définition qui
va... qui va éviter des incohérences ou enfin qui vont complexifier le travail
de l'ensemble des intervenants dans ce... dans ce domaine? C'est... c'est ma
première question.
M. Boulet : Mme la
Présidente, c'est pour des raisons de stabilité et d'harmonie qu'on a retenu
cette définition-là, puis là, je veux tenter d'être le plus clair possible.
C'est une loi qui vise à combattre, à lutter contre les violences à caractère
sexuel, et c'est une définition qui est celle de l'Organisation internationale
du travail, et c'est une définition qui est exactement la même de celle qu'on
retrouve dans la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère
sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur.
Dans cette loi-là, c'est cette
définition-là qui s'impose pour éviter de l'instabilité jurisprudentielle. Puis
là, mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve œuvre était là pour le projet de loi
n° 59 qui modernisait le Régime de santé-sécurité du travail où on a
ajouté la santé psychologique. Bon. On a référé constamment à l'intégrité
psychique au-delà de l'intégrité physique et on obligeait, dans un programme de
prévention ou un plan d'action, à identifier pour mieux contrôler et éliminer
les risques psychosociaux, dont notamment on référait à la violence physique et
à la violence psychologique. Puis, souvenez-vous, collègue, la violence
physique, psychologique, ça incluait la violence conjugale, familiale et
sexuelle. Donc, il y a déjà une obligation d'identifier dans le programme de
prévention ou le plan d'action. Ici, c'est une définition qui vise à ajouter
des dispositions, mais pas à être une définition qui est redondante...
M. Boulet : ...et dans la Loi
sur les normes du travail, c'est différent.
• (12 h 50) •
Et vous faites référence, collègue de
l'Acadie... En 2018, la notion de harcèlement psychologique... puis c'est entré
en vigueur, je pense, le 12 juin 2018... elle a été modifiée pour
dire que le harcèlement psychologique incluait... en fait, on le disait en mentionnant :
le harcèlement psychologique comprend une telle conduite lorsqu'elle se
manifeste, bon, pour des raisons à caractère... des paroles, tels actes ou de
tels gestes à caractère sexuel. Parce que dans le harcèlement psychologique,
c'est difficile, quand la plainte est présentée, de savoir s'il va y avoir une
connotation sexuelle ou non. Et le corpus... bien, la jurisprudence est bien
établie, là, sur les cinq critères qui s'appliquent, là, la répétitivité ou
l'événement isolé, l'atteinte à l'intégrité physique ou psychologique... bon,
et c'est bien établi. Ça fait que... Et cette loi-là n'a pas la même portée, et
il y aurait un risque d'avoir un impact sur les décisions de jurisprudence
développées, parce que notre définition est plus large que celle de la LNT, de
la Loi sur les normes du travail. Ça fait qu'on ne voulait pas la limiter.
Parce que, dans la loi santé et sécurité, moi, ce qui est important pour moi,
c'est «sans égard à la gravité», puis avant qu'une atteinte survienne. Ça fait
que je trouve que c'est avantageux pour les victimes, et c'est beaucoup plus
clair, parce que la violence à caractère sexuel, elle est définie de la façon
la plus libérale, entre guillemets, possible.
Puis, enfin, la LATMP, il faut faire
attention, parce que la LATMP, aussi, elle, c'est une loi qui a une portée
d'indemnisation, puis là il ne faut pas avoir une définition qui réduit la
portée de l'indemnisation en vertu de la Loi sur les accidents de travail et
maladies professionnelles. On sait que, quand c'est un événement qui survient
sur les lieux de travail, par le fait ou à l'occasion du travail, tu peux faire
une réclamation à la CNESST puis recevoir une indemnité de remplacement de
revenu. Ça fait qu'on ne peut pas avoir non plus une définition qui pourrait être
interprétée comme réduisant la portée de la définition de ce qu'est un accident
de travail en vertu de la Loi sur les accidents de travail et maladies
professionnelles.
Donc, oui, j'ai entendu les groupes, mais
j'ai analysé, réanalysé, puis je trouve que ça n'a pas... je veux dire, ça ne
tiendrait pas la route, et on créerait... au lieu d'être en quête d'une
meilleure harmonie, on créerait comme un chaos dans l'interprétation. Puis je
finirais en disant : L'OIT est là. On a une loi qui le définit clairement
et qui a exactement la même portée dans le domaine de l'enseignement supérieur,
et donc cette définition-là, elle est tout à fait compatible, elle est large,
mais elle vise à lutter puis à combattre contre les violences à caractère
sexuel, et c'est cette définition-là qui est nouvelle et qui est amenée grâce à
ce projet de loi là. Alors, voilà. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, Mme la députée de La Pinière.
Mme Caron : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. le ministre, j'ai compris que vous disiez que cette
définition-là était celle de la Loi visant à prévenir et combattre les
violences dans les établissements d'enseignement supérieur, mais dans celle sur
les établissements supérieurs, il y a la notion de moyens technologiques. On
dit... Alors que la notion de moyens technologiques, on ne la retrouve pas ici.
Et je dirais qu'aussi la notion de moyens technologiques répondrait à une
préoccupation qui a été faite, durant les consultations, à propos du
télétravail, parce qu'il y a des employés qui sont en télétravail. Alors,
puisque la notion de moyens technologiques existe déjà dans la loi pour les
établissements supérieurs, je pense qu'on ne viendrait pas réduire la portée de
la définition ou de la loi si on incluait cet aspect-là ici.
Et une autre... un autre aspect, une
phrase qui est incluse dans la Loi sur les normes du travail, à l'article
81.18, c'est le fait qu'une seule conduite grave peut aussi constituer du
harcèlement psychologique si elle porte...
Mme Caron : ...une telle
atteinte et produit un effet nocif continu pour la personne salariée. Et
certains mémoires nous ont... et certaines personnes qui sont venues en
consultation nous ont dit aussi être inquiètes du fait qu'on n'avait pas cette
notion de quand... d'un seul événement grave qui constitue aussi du
harcèlement. Alors, si on... Je ne pense pas qu'on viendrait réduire la portée
de... encore là, de la définition ou de l'actuel projet de loi, si on s'assurait
d'ajouter ce point-là qui existe déjà dans la Loi sur les normes du travail et
qui, à mon sens, viendrait assurer une cohérence avec la Loi sur les normes du
travail.
M. Boulet : C'est un bon
point. Je vais m'assurer qu'on soit... C'est parce que c'est important cette
discussion-là sur la définition, parce qu'elle va se retrouver aussi dans
d'autres articles.
Une voix : ...
M. Boulet : Non, mais
j'attendais... Est-ce que... O.K. Je l'ai entendu de certains groupes qui
disait : Un seul événement avec un effet nocif. Mais dans notre
définition, on en «à une seule occasion», mais on n'a pas l'effet nocif, d'où
l'élargissement du concept. Ce n'est pas le rétrécissement du concept, c'est
une condition de moins. Donc, la violence à caractère sexuel, telle que définie
dans la loi santé-sécurité, qui vise à prévenir, elle est plus large que dans
la Loi sur les normes du travail. Puis je comprends votre commentaire, mais
c'est l'effet inverse. On l'a «à une seule occasion» puis on n'a pas à prévenir,
même s'il n'y a pas d'effet nocif ou de dommage important qui se perpétue dans
le temps, comme c'est prévu par la jurisprudence qui interprète la définition
dans la Loi sur les normes du travail. C'est quand?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : M.
le député de l'Acadie.
M. Morin : Oui. Merci...
M. Boulet : ...juste pour
compléter, le télétravail est couvert aussi. On l'avait couvert dans la
modernisation du régime de santé-sécurité. Vous allez voir, je pense, c'est 5.1
de la loi santé-sécurité, le concept de télétravail est couvert. On avait déjà
demandé un avis au Comité consultatif du travail et de la main-d'œuvre qui nous
confirmait, et c'était notre interprétation, que les lois du travail
s'appliquent au télétravailleur ou à la télétravailleuse. Puis il y a même des
dispositions, là, en matière d'inspection, mais je vais juste vous référer à
5.1 de la loi.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, le député de l'Acadie, juste vous indiquer qu'il reste
deux minutes avant de devoir ajourner les travaux.
M. Morin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Alors, merci, M. le ministre. Vous avez répondu d'emblée à une
des questions que j'allais vous poser en ce qui a trait au télétravail.
Maintenant... maintenant, indépendamment du télétravail, moi, je veux
simplement m'assurer que votre définition couvre aussi toute l'utilisation de
moyens technologiques qui peuvent entraîner évidemment des conduites, des
messages avec une violence à caractère sexuel et... et je ne vois pas que c'est
inclus dans votre définition.
Par contre, quand je vous faisais
référence à la loi qui traite de l'enseignement supérieur et des violences, on
a pris la peine de mentionner ou de faire référence à des moyens
technologiques. Donc, je veux juste m'assurer... Je comprends votre idée de
vouloir élargir la définition, mais je veux juste m'assurer que, même dans une
situation où on n'est pas en télétravail, un travailleur pourrait très bien
utiliser un moyen technologique pour commettre des actes de violence à
caractère sexuel auprès de d'autres travailleurs.
M. Boulet : La réponse :
Oui, totalement. Et contrairement à l'autre loi que vous mentionnez, on ne fait
pas référence au télétravail alors que nous c'est couvert. Donc, toute forme,
indépendamment du moyen, de violence à caractère sexuel, c'est inclus dans la
définition que vous avez à l'article 33.
M. Morin : Donc,
l'utilisation de moyens technologiques serait incluse dans des pratiques?
M. Boulet : Oui. Oui, tout à
fait. En fait, toute forme de violence visant la sexualité, indépendamment du
moyen utilisé, et on le dit assez clairement, où toute autre inconduite qui
se...
13 h (version non révisée)
M. Boulet : ...par des gestes,
des pratiques, des paroles, des comportements, des attitudes à connotation
sexuelle non désirée, oui, c'est couvert. C'est une définition que je considère
large, ambitieuse, mais tout à fait respectueuse de l'objet de notre projet de
loi. Puis on va le retrouver dans les clauses... on va le retrouver dans
plusieurs articles qui vont suivre l'étude du projet de loi.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, M. le député de l'Acadie, sans inquiétude, vous pourrez
poursuivre vos réflexions au retour de l'heure du lunch. Merci à tous pour
votre collaboration. Nous devons suspendre et on se retrouve à 14 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 01)
14 h (version non révisée)
(Reprise à 14 h 05)
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. Alors, rebonjour à tous, j'espère que vous êtes bien rassasiés suite
à l'heure du lunch. La Commission de l'économie et du travail reprend ses
travaux. Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 42, Loi
visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à
caractère sexuel en milieu de travail. Alors, nous étions dans votre plan de
travail d'étude détaillée, M. le ministre, sur l'article 33...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : ...vous
aviez terminé votre échange. Notre député de l'Acadie avait peut-être des
réflexions, je pense, lorsque nous avons conclu pour le lunch.
M. Morin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Effectivement, vous avez tout à fait raison. Puis je voudrais
revenir, je voudrais revenir avec la définition qui est proposée et qui vise,
évidemment, dans ce cas-ci la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Mais,
dans la définition qui est proposée à l'article 33, on dirait... on dit, en
fait, «des attitudes à connotation sexuelle non désirées, qu'elles se
produisent à une seule occasion ou de manière répétée», et il n'y a pas de
qualification quand il s'agit d'une seule occasion. Donc, on ne dit pas, par
exemple... on ne qualifie pas la gravité du geste qui aurait pu se produire à
une seule occasion. Cette définition-là, on veut l'inclure dans la Loi sur la
santé et la sécurité du travail.
Maintenant, je comprends que, dans la Loi
sur les normes du travail, à l'article 81.18, le harcèlement psychologique est
défini et on fait aussi référence à des paroles, des gestes, des actes à
caractère sexuel, mais là on dit «une seule conduite grave peut aussi
constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et
produit un effet nocif contenu pour la personne salariée». Donc, je reviens à
ce que je disais précédemment, avant la pause pour le repas du midi, donc, on
va se ramasser avec deux définitions qui, pour moi, sont un peu différentes.
Donc, quelqu'un qui porterait une plainte
en vertu de la Loi sur les normes du travail, ce qui est possible en vertu de
la loi, notamment aux articles 123 et suivants, si la personne a été victime
d'un seul geste, il va falloir que ça soit une seule conduite grave, alors que
si la personne porte plainte en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du
travail, il n'y a pas... la personne n'aura pas à démontrer la gravité. Donc,
c'est comme si on avait deux standards, tout dépendant en vertu de quelle loi
on se situe et on se plaint et comment la personne victime, elle... bien,
n'aura peut-être pas nécessairement toujours consulté un avocat avant
d'intenter un recours. Comment va-t-elle savoir? Il y a une loi qui semble être
privilégiée ou plus facile à prouver que l'autre, à moins qu'il y ait quelque
chose que je ne comprenne pas, mais, quand je regarde les définitions puis les
deux lois, c'est ce qu'il m'apparaît.
M. Boulet : Bon. Est-ce que
ça va, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Tout
à fait.
M. Boulet : Bon. Comme j'ai
mentionné ce matin, notre définition s'inspire de celle provenant de
l'Organisation internationale du travail et de celle apparaissant dans la loi
luttant et combattant les violences à caractère sexuel dans le secteur de
l'enseignement public. Et vous avez raison, c'est deux définitions différentes.
Il faut que ce soit deux définitions différentes, pour ne pas créer
d'instabilité et pour ne pas réduire la portée de ce qu'est une violence à caractère
sexuel.
Dans la Loi sur les normes du travail, qui
est une loi qui comporte des recours et qui vise à corriger des situations, le
harcèlement est défini, vous avez raison, ça peut être une seule conduite
grave, et il faut que ça génère des effets nocifs. Dans la loi sur la santé et
sécurité, qui a une portée purement et strictement préventive, on veut avoir
une définition la plus large possible, donc on n'a pas à démontrer ni la
gravité ni l'effet nocif qui est la conséquence d'une seule atteinte, pour,
bien sûr, faire de la prévention et s'assurer que le concept de violence soit
bien saisi dans les milieux de travail. On ne peut pas réduire le concept de
violence, là, on viendrait diluer la portée de notre projet de loi no 42.
• (14 h 10) •
Je ne sais pas si vous me... Puis je veux
le répéter, là, c'est une loi purement préventive, puis ce n'est pas le mot
«harcèlement», c'est le mot «violence». Une violence, en soi, c'est grave, mais
ça peut être, plus subtilement, moins grave, mais c'est important de rappeler
que la définition est plus large dans la loi santé et sécurité, et il n'y a pas
d'obligation. On ne fait pas une plainte en disant...
M. Boulet : ...une violence à
caractère sexuel au sens de la Loi santé-sécurité, si on veut avoir une
indemnité... puis là je m'en vais à une autre loi, la Loi sur les accidents de
travail maladie professionnelle, qui est une loi d'indemnité, tu n'as pas à
démontrer ce qui est dans la LNT. Puis je l'ai travaillée avec mon collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve, on a ajouté la santé psychologique, le «risques
psychosociaux», la violence physique, psychologique. Ça incluait la violence
conjugale, familiale ou à caractère sexuel. C'est beaucoup plus large. Puis ça
fait partie d'un programme de prévention, pour les plus petites entreprises à
moins de 20 salariés, c'est un plan d'action. Mais ce n'est pas pour être
indemnisé... pour être indemnisé en vertu de LATMP, tu n'as rien qu'à démontrer
que c'est relié à ton travail ou par le fait ou à l'occasion du travail. C'est
pour ça que notre définition vise à assurer l'harmonie, je dirais dans la
portée respective de chacune de ces lois là, et puis, pour ne pas rétrécir
indûment ce qu'est une violence à caractère sexuel. C'est ce qui nous... qui
rend ça impératif, là, puis ça va être un des éléments conducteurs, là, de
d'autres articles aussi de la loi, du projet de loi, plutôt.
M. Morin : Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Mme
la députée de La Pinière.
Mme Caron : Merci, Mme la Présidente.
Alors, j'essaie de vous suivre, M. le ministre. Dans une autre vie, j'ai déjà
eu à siéger à un comité d'éthique où on étudiait des plaintes, comité... je ne
suis pas avocate. Le comité, qui était présidé par une avocate spécialisée dans
les dossiers de harcèlement psychologique, harcèlement sexuel, et tout ça. Et,
quand venait le temps de statuer pour savoir si on recevait la plainte ou si on
ne la recevait pas, il y avait toujours la notion de gravité, dont il
fallait... il fallait... qu'il fallait considérer. Par exemple, est-ce que le
harcèlement sexuel... c'est-à-dire que pour que ce soit considéré du
harcèlement sexuel, bon, outre la crédibilité des témoignages, et tout ça, il
fallait que ce soit répétitif ou que ce soit passé une seule fois, mais que ce
soit suffisamment grave que la personne... que la victime, admettons, ait eu
peur, tu sais, qu'elle ait été traumatisée par ça ou... Puis là ce n'était pas
dans un... ce n'était pas dans un régime d'indemnisation ou quoi que ce soit.
Alors donc, je comprends bien que, tu
sais, pour que ce soit reconnu comme du harcèlement sexuel ou psychologique, il
y a deux choses, ou bien c'est répétitif sur une certaine période, ou bien
c'est une... c'est arrivé une seule fois, mais c'est très grave. Alors, là où
j'essaie de vous suivre dans cette définition-là, je me dis : Bon, alors,
«toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre inconduite se
manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des
comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirée, qu'elles se
produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la
violence relative à la diversité sexuelle et de genre», et je comprends très
bien que ça vient de l'Organisation internationale du travail. Je suis allée
lire la définition. Mais moi, quand je le lis, je comprends qu'une personne qui
aurait... mise en cause, qui aurait commis une parole, un geste, une seule fois
ou bien 50 fois, ça va être considéré de la violence à caractère sexuel.
Peu importe, même si c'est le même geste ou la même parole qui a été fait une
seule fois puis qui n'est peut-être pas, entre guillemets, grave, là, mais ça a
été fait une seule fois bien, bien, la plainte va être reçue de la même manière
que quelqu'un qui a fait ce même geste-là pendant des semaines. C'est comme ça
que je le comprends. Peut-être que je le comprends mal, mais c'est comme ça que
je le comprends et je me dis que d'autres vont peut-être interpréter comme moi.
Alors, c'est pour ça que j'essaie de vraiment préciser votre pensée là-dessus.
M. Boulet : Oui, puis c'est
une bonne question. Puis la définition n'est pas pour emprunter le corridor
d'une plainte, ça l'est dans la loi sur les normes. Et ce n'est pas pour
emprunter le corridor de l'indemnisation comme ça l'est dans la loi sur les
accidents de travail, maladie professionnelle. Ce n'est que le corridor, en
fait, c'est le grand corridor de la prévention. Donc, quand on dit : La
violence à caractère sexuel, puis l'OIT fait ce raisonnement là, il faut que ce
soit une définition suffisamment libérale pour sensibiliser, parce que, là, on
met ça dans un programme de... dans une politique de...
M. Boulet : ...prévention qui
va être intégrée, on va le voir plus tard, dans le programme de prévention, et
c'est pour être attentif aux symptômes où il y a des pratiques, des paroles,
puis ça peut être une seule occasion, et c'est à connotation sexuelle, ça vise
la sexualité. Puis, oui, tout à fait, la sexualité, c'est plus pointu, c'est
plus aigu, puis c'est ce que les expertes nous disent, et c'est plus pernicieux
dans les milieux de travail. C'est pour ça que ça requiert une définition qui
est suffisamment englobante.
Puis, je le répète, comme je l'ai dit à
votre collègue de l'Acadie, moi, là, si vous me disiez : Bien, on va
voter, là, de toute façon, ultimement, là... Mais je ne voudrais pas
dire : Il faut que ce soit grave puis il faut qu'il y ait un effet nocif.
Non. Les violences à caractère sexuel, là, ce n'est pas nécessairement de quoi
de grave puis ce n'est pas nécessairement de quoi qui génère un effet nocif. Ça
fait qu'on viendrait diluer, selon moi, je dis le «scope», mais c'est plus la
portée de notre projet de loi si on incluait ou on essayait de l'harmoniser,
alors qu'au contraire on l'harmonise en la définissant dans le respect de ce
que vise la Loi santé, sécurité du travail. Son objectif, c'est d'éliminer à la
source, à la source les dangers pour la santé, sécurité, intégrité physique et
psychique. On l'a répété... J'ai dû le dire quelques fois, hein, collègues.
Mais, sérieusement, c'est comme ça qu'on l'a réfléchi et pensé.
Mme Caron : D'accord.
Maintenant, est-ce qu'une personne qui est victime, qui lit la nouvelle loi
puis qui lit la définition dans la nouvelle loi - ça va être au début - de la
«violence à caractère sexuel», elle va... la personne va lire ça puis elle va
dire : Bien, c'est arrivé juste une fois, mais, selon la loi, c'est de la
violence à caractère sexuel?
M. Boulet : C'est une forme
de violence. Il faut définir le terme «violence» aussi, là. Tout n'est pas
violence, tout n'est pas violent, puis je n'utiliserai pas des exemples, de
peur de faire des erreurs, là...
Mme Caron : Exactement.
M. Boulet : ...mais tout
n'est pas violent. On dit «toute forme de violence visant la sexualité». Donc,
c'est manifestement de quoi de... puis violent, si... En soi, dans la
définition, c'est inhérent au concept de «violence» qu'il y a de quoi de
brusque, il y a de quoi d'inacceptable, là.
Mme Caron : Alors, je
comprends ça. Mais, là où je voulais en venir, c'est que la personne qui lit
cette définition peut juger qu'elle a été... qu'elle a subi une violence à
caractère sexuel et peut se dire : Bien, moi, je suis... admettons, je suis...
C'est une personne salariée qui est visée par le régime de la LNT puis qui
dirait : Bien, je vais... tu sais. Puis là, elle va se rendre compte que,
woups! dans le régime de la Loi sur les normes du travail, ce n'est pas tout à
fait la même chose. Ça fait que peut-être qu'elle se... elle pensait qu'elle
était... bien, tu sais, qu'elle avait effectivement vécu de la violence à
caractère sexuel, elle l'a senti comme ça, elle l'a vécu comme ça, et puis elle
va aller de l'avant avec des recours, peut-être, si elle est évidemment visée
par le régime de la Loi sur les normes du travail, puis là elle va se rendre
compte que, non, elle ne l'est pas.
Ça fait que j'essaie juste de me mettre
dans la peau d'un citoyen ou d'une citoyenne qui doit comprendre ça. Puis la
cohérence, donc, des lois et des définitions, c'est important pour cette
personne-là, alors j'essaie de me mettre dans la peau de cette personne-là.
Mais je comprends ce que vous voulez faire, ne pas restreindre, que ce soit le
plus large possible. Mais comment le citoyen ou la citoyenne va s'y retrouver
dans ça?
• (14 h 20) •
M. Boulet : Ah mon Dieu! Vous
allez voir d'ailleurs les présomptions. Je disais qu'il va y avoir des
adaptations dans des articles plus loin, puis ça, c'est la Loi sur les
accidents de travail, pour les fins d'application de présomptions qui ne
plaisent pas nécessairement aux employeurs. Comme vous savez, à chaque fois
qu'on rajoute une présomption, les employeurs sont moins confortables. Mais on
retient cette définition-là de «violence à caractère sexuel». Ça fait que tout
est fait de manière à ce que ce soit cohérent et harmonieux. Puis chaque loi,
en droit du travail, a sa spécificité puis a son objectif. Puis ce n'est pas du
harcèlement sexuel, c'est de la violence sexuelle. Ce n'est pas la même
affaire. Dans la Loi sur les normes du travail, que vous avez amendée puis...
M. Boulet : ...je trouvais que
c'était une belle loi, là, qui a été adoptée par ma prédécesseure en 2018. On a
modernisé ou actualisé la notion de harcèlement psychologique, parce que,
harcèlement psychologique, je me souviens que votre réflexion, c'était que...
Il y a beaucoup de groupes qui disaient : il faut qu'il y ait un bloc
uniquement pour le harcèlement sexuel. Puis, tu sais, le raisonnement que vous
teniez, c'était de dire le harcèlement psychologique, il comporte souvent une
connotation à caractère sexuel qu'on ne peut pas tout le temps détecter en
amont, qu'on détecte souvent lors de l'enquête. C'est la raison pour laquelle,
quand vous avez amendé la définition à 81.18, vous avez dit que le harcèlement
psychologique, là, les termes, là, c'est... ça inclut aussi le harcèlement
sexuel. Puis là, on en revient à la seule... la seule conduite grave, si elle
engendre des effets nocifs, mais ça, c'est la même définition pour le
harcèlement psychologique, qui est le grand concept qui contient aussi le
harcèlement sexuel.
Ici, ce à quoi les expertes se sont
attardées, c'est la notion de violence à caractère sexuel en milieu de travail.
Et c'est ça qu'on constate, où il y a une forte prévalence dans les milieux de
travail. Puis là, je ne reviendrai pas avec les statistiques. Et c'est pour ça,
là, c'est une définition qui est suffisamment large pour permettre de bien
comprendre que, quand ça vise la sexualité et que c'est de la violence, c'est
visé par une loi qui vise à prévenir. Puis, dans les présomptions ou dans la
loi sur les accidents de travail, qu'on va voir plus tard, on ne fait pas des
présomptions «at large», mais on fait des présomptions pour s'appuyer aussi sur
une définition comme celle-là.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors,
merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur
l'article 33? M. le député de Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Je veux faire parler le ministre sur la notion de non désiré. Quand
on dit, dans la définition, là, «des attitudes à connotation sexuelle non
désirées», je pense que ça n'inclut pas ce que je vais donner comme exemple,
mais je veux clarifier : si je me fais inviter par quelqu'un au travail,
une collègue de travail, à aller prendre un verre après le travail. Parce que
là, dans le fond, c'est comme à la frontière du consentement aussi. Est-ce que
de se faire inviter à aller prendre un verre, que ce soit à la maison de la
personne ou dans un bar, pour vous, ce n'est pas une attitude à connotation
sexuelle?
M. Boulet : Non. Si ça se
résume à ce que vous venez de me dire, non.
M. Leduc : C'est le «non
désiré», dans ce cas-là, qui est ici en question.
M. Boulet : Effectivement.
Mais «non désiré», ça veut dire un comportement qui n'est pas souhaité, qui
n'est pas désiré par la personne. Ce n'est pas une invitation, mais ça peut
être un toucher, ça peut être un acte, ça peut être une parole aussi, sur un
attribut.
M. Leduc : Bien, c'est ça,
les paroles, c'est là que je veux aller.
M. Boulet : Bien oui, ça, ça
peut être... ça pourrait. Il faut prévenir ça. Il y a des milieux de travail,
puis là je ne veux pas donner d'exemples, là, pour ne pas banaliser ou cibler
des milieux de travail, mais où c'est à forte prépondérance masculine, il y a
des risques. Puis vous le savez, puis il y a un passé. Puis il y a peut-être eu
des événements, il y a peut-être eu des données empiriques qui démontrent qu'il
y a des risques, dépendamment des types d'environnement de travail, puis ça,
oui, il faut... Ça peut être un toucher, ça peut être une parole, ça peut...
Puis on l'a vu. Puis il y a des paroles qu'échangées entre nous deux dans une
commission parlementaire peuvent être considérées comme plus acceptables, mais
dans un milieu de travail, puis en tenant compte de la personnalité des deux
personnes, ça peut être de la violence à connotation ou à caractère sexuel, là,
tu sais.
M. Leduc : Bien sûr, bien sûr.
Parfait. Bien,c'est ça que je voulais vérifier. C'est que, dans le fond, la
question du consentement, elle vient un peu... parfois, les... ce n'est pas
des... ce n'est pas des catégories étanches, hein?
M. Boulet : Non.
M. Leduc : Les situations
peuvent se recouper et avoir plus qu'une connotation. Mais, de fait, de
demander à quelqu'un d'aller prendre un verre, toujours dans mon exemple, pour
vous, ça ne constitue pas un truc non désiré. Parce que, nécessairement, si on
invite quelqu'un, on ne peut pas présumer que c'était désiré, il y a toujours
des indices, bien sûr, mais...
M. Boulet : Mais, tu sais...
tu sais, comme... collègue, ici, c'est un supérieur immédiat...
M. Leduc : Oui, ça, c'est
différent.
M. Boulet : ...qui invite une
dame, une collègue, à répétition, ou même s'il l'invite une fois...
M. Boulet : ...dépendamment du
contexte, ça peut être... la lumière jaune doit s'allumer.
M. Leduc : Oui, le ton
utilisé, les mots utilisés, on s'entend.
M. Boulet : Oui.
M. Leduc : O.K., ça clarifie
pour moi. J'avais une autre question aussi. J'ai eu des discussions avec des
groupes qui se demandaient pourquoi vous n'avez pas retenu le mot «sexiste»
dans votre définition. Parce que de dire quelque chose à connotation sexuelle,
c'est une chose, des pratiques, des gestes, des paroles, des attitudes à
connotation sexuelle. On pourrait considérer ça un peu limitatif par rapport
aux rajouts. «Sexuel», on peut le laisser là, mais on pourrait rajouter
«sexiste» aussi.
M. Boulet : Moi, je pense que
ça l'inclut. Moi, à ma compréhension, c'est que c'est plus large. Puis je sais
que vous me le fait dire parce que vous avez de saines raisons. Tu sais, on
dit : «toute forme de violence visant la sexualité, d'une part, ou toute
inconduite...», bon, là, il y a des mots «...ou des attitudes à
connotation...», donc connotation sexuelle. Selon moi, c'est extrêmement large.
Puis c'est sûr que dans l'application, ça requiert un certain jugement, puis un
examen de la valeur probante des personnes qui s'expriment, puis le contexte de
travail. Mais moi, je pense que c'est... en fait, je dis, ça inclus.
M. Leduc : Parce qu'on m'a
fait état... je n'ai pas lu les jurisprudences, mais on m'a fait état de
parfois certaines jurisprudences où on peut avoir des confusions sur... Parfois
s'il y a eu un touché, bien sûr, sur la personne, là, c'est clairement du
harcèlement sexuel, mais si c'est, par exemple, un patron qui dit à son employé
femme de davantage mettre en valeur sa poitrine pour satisfaire plus de clients
ou attirer plus de clients, là, on est plus dans le harcèlement psychologique.
Il y a des fois une espèce de frontière qui n'est pas tout le temps claire
entre les deux.
M. Boulet : Moi, je pense que
notre définition est la plus large et l'exemple que vous venez de donner, ça
fait partie de cette définition-là, clairement, dans mon esprit. De demander à
quelqu'un de mettre en valeur des attributs physiques pour des raisons
d'affaires, c'est inacceptable, intolérable, puis c'est inclus là-dedans, puis
ça peut être une, puis ça ne serait pas nécessairement... là, vous allez me
suivre, c'est le fun que vous vous référiez à des exemples, ça ne serait pas
nécessairement une seule conduite grave qui produit un effet nocif. Je pense
que vous m'avez bien compris.
M. Leduc : Est ce que
Mme Cox et ses collègues avaient référé à ça dans leur rapport, sur la
notion sexiste versus sexuelle?
M. Boulet : Non. Bien, pas à
ma connaissance, non.
M. Leduc : O.K. Ça va être
tout.
M. Boulet : O.K., merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député. Alors, M. le député de Jean-Talon, pour vos commentaires.
M. Paradis : Oui, merci. M.
le ministre, vous avez indiqué à quelques reprises que la définition suggérée à
l'article 33, qui modifie l'article 1 de la Loi sur la santé et la
sécurité du travail, est inspirée du droit international. Je suis plutôt
content d'entendre ça. Donc, pour les fins de l'établissement de l'intention du
législateur...
M. Boulet : ...
M. Paradis : Bien oui, bien
oui, l'avocat de droit international est réjoui par cette mention.
M. Boulet : Pour qui j'ai
beaucoup de respect d'ailleurs.
M. Paradis : Je vous en
remercie, c'était réciproque, M. le ministre. Mais est-ce que j'ai raison de
penser que vous faites référence à la Convention 190 de l'Organisation
internationale du travail?
M. Boulet : Oui, totalement.
C'est la Convention 190 sur la violence et harcèlement. Puis ce n'est pas
très vieux, collègue, hein? Ça date de 2019 puis ça s'inspire de ça. Oui, tout
à fait.
M. Paradis : Oui, et qui est
une avancée, je le confirme, intéressante en droit international. Mais est-ce
que j'ai raison de penser, en fait, que le libellé que vous avez adopté n'est
pas tout à fait celui de la convention elle-même?
M. Boulet : Tout à fait. Ce
que j'ai mentionné, ça s'inspire, ce n'est pas le libellé exact, mais on a
travaillé en équipe, on a consulté beaucoup et on a fait unanimité autour d'une
définition de cette nature-là pour qu'elle soit la plus large et la plus
libérale et qu'elle se détache notamment, collègue, de celle apparaissant
notamment dans la loi sur les normes, parce qu'on parle plus de harcèlement, on
parle de violence. Puis on l'a adaptée aussi à nos... avec notre équipe de
légistes, là, aux définitions qu'on a dans nos lois aussi.
• (14 h 30) •
M. Paradis : Qui est un
processus que je comprends...
14 h 30 (version non révisée)
M. Paradis : ...que je
comprends très bien, mais il me semble y avoir quand même des différences
assez... assez importantes entre la définition qui a été choisie aux fins du
projet de loi et celle de la Convention 190 de l'Organisation internationale
du travail. Et je pose la question pas parce que, nécessairement, je suis en
désaccord avec les termes qui ont été choisis aux fins du projet de loi, mais
parce que l'intérêt de s'inspirer du droit international, et là on arrive à l'intention
du législateur, c'est de permettre, en quelque sorte, à nos tribunaux, aux
arbitres de griefs, à toute personne qui interprète cette définition de pouvoir
aussi s'inspirer de la jurisprudence ou de décisions qui ont été rendues
ailleurs en vertu des mêmes dispositions du droit international, sans bien sûr
être liés. Je ne dis pas qu'on serait liés par ces définitions, mais l'intérêt,
c'est d'aller chercher, donc, les mêmes inspirations dans le droit
international. Donc, est-ce que vous seriez en mesure de nous parler un petit
peu de ces choix que vous avez faits dans l'adaptation de la définition
québécoise qui, comme vous le dites, s'inspire de cette source du droit
international?
M. Boulet : Évidemment, lors
des consultations, on veut s'assurer que la définition soit la plus compatible
possible avec l'objet de la loi. Et, quand on travaille avec la direction des
affaires juridiques de mon ministère notamment, on veut s'inspirer des
meilleures définitions, notamment à l'échelle internationale, mais pas en
disant : Ça va impliquer nécessairement que la décision de jurisprudence
rendue ailleurs s'applique chez nous, comme vous le dites superbien, puis vous
connaissez ça mieux que moi, mais pour s'assurer que notre définition soit la
plus moderne et d'actualité. Et, après ça, les avocats travaillent avec d'autres
équipes d'autres ministères, notamment en justice, pour s'assurer qu'il y ait
une cohésion dans notre corpus législatif et une définition qui soit compatible
aussi avec les concepts qui sont généralement étudiés par nos tribunaux en
matière de travail. Ça fait que c'est un peu ça, mon raisonnement. Alors, ce n'est
pas si sophistiqué que ça, là, mais c'est une définition qui est non seulement
inspirante, mais qui nous rapprochait de celle qu'on a dans la Loi visant à
prévenir et combattre les violences à caractère sexuel, là, dans les
établissements d'enseignement supérieur, qui n'est pas la même non plus...
M. Paradis : Non.
M. Boulet : ...pas le même
libellé, mais compatible avec les mots qu'on utilise en droit du travail
québécois. Puis, tu sais, les mots comme les gestes, les paroles, les... on
retrouve ça aussi, par ailleurs.
M. Paradis : Je réitère, moi,
une nouvelle fois que je suis... je me réjouis du fait qu'il y ait eu cette
inspiration en droit international parce que la Convention 190, elle a
vraiment été saluée comme une grande avancée en droit international. Cependant,
je le redis, il me semble que la définition s'écarte quand même beaucoup. Et là
je vais vous dire pourquoi je vous pose la question, c'est parce qu'il y a
probablement des choix, comme vous le dites, qui ont été indiqués pour la
rendre plus... à même de cadrer avec le corpus...
M. Boulet : Plus compatible
avec le droit québécois.
M. Paradis : ...exactement,
le corpus québécois. Mais là, donc, on se retrouve avec une définition qui n'est
pas la même que celle d'autres lois, donc celle qu'on vient de nommer, là, la
loi pour prévenir... la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à
caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur, les autres
définitions en droit du travail. Et là j'en arrive en fait au risque qui est
quand même souligné, mon collègue l'a mentionné tout à l'heure, le risque qu'il
y ait tellement de définitions et tellement de sources que ce soit un enjeu d'interprétation
et qu'on commence à permettre, notamment au gré des dossiers, et du tribunal
qui entend les dossiers, et des avocats qui plaident, qu'on aille chercher des
éléments, des définitions qui nous plaisent le plus dans une loi par rapport à
l'autre. Et, encore une fois, j'ai bien entendu vos explications sur la
justesse des termes qui ont été choisis ici. J'aimerais ça vous entendre sur
ces risques-là d'interprétations contradictoires et surtout ces risques-là par
rapport à ce que plusieurs intervenants en audience nous ont mentionné, c'est-à-dire
que ce qu'on veut aussi, c'est simplifier l'exercice des droits et recours dans
ce domaine-là, où les gens nous disent : Aïe! là, il y a tellement de
lois, puis il y a tellement de recours, puis il y a tellement de définitions,
puis tellement de mécanismes que ça devient complexe.
M. Boulet : Oui, puis je suis
assez d'accord avec vous. Ce qui me guide aussi, là, dans la rédaction finale,
c'est de m'assurer que les définitions soient les plus simples possibles pour
éviter les trop grandes périodes de transition ou d'instabilité...
M. Boulet : ...instabilité
jurisprudentielle, que ce soit plus facile à interpréter et donc plus facile à
appliquer. Et je pense que cette définition-là, bien, il y a beaucoup quand
même de décisions jurisprudence, surtout les arbitres de grief, puis en
application de 81.18, parce que les griefs de harcèlement psychologique, il y
en a beaucoup. La jurisprudence est bien établie, là, sur les cinq critères qui
vont inspirer, mais encore une fois, c'est deux mondes différents, et c'est
nouveau dans le corpus législatif québécois qu'on réfère, dans les milieux de
travail, il l'avait en enseignement supérieur, mais là, c'est l'ensemble des
milieux de travail, à la violence à caractère sexuel. Puis j'oserais croire,
mais nos juristes nous le confirment, on va être à la... tu sais, on va être
les premiers au Canada. C'est une loi qui va inspirer le reste du Canada. Moi,
je suis bien fier de ça. Puis que vous référiez à à votre confort qu'on utilise
des règles de droit international, notamment la convention 190, moi, je
suis tellement sur cette longueur d'onde là. Je comprends ce que vous me dites cependant.
Mais le plus vite ça va être adopté, le plus vite ça va être mis en
application, et y a aussi le temps de former les juges, les conciliateurs
formés sur les mythes et stéréotypes et avec cette définition-là, le cas
échéant. Et à la CNESST qui va voir à l'application formation, sensibilisation
et information, moi, je pense qu'on va déployer ça comme on a réussi, comme on
réussit actuellement à faire avec la vaste modernisation du Régime de santé et
sécurité. Il y a des collègues qui avaient des appréhensions, mais il y a des
leaders syndicaux qui aujourd'hui nous remercient pour ce que nous avons fait.
Puis bon, moi, je suis dans le camp des confiants.
M. Paradis : Et puis je
partage certainement en partie votre confiance, M. le ministre. Et justement
parce que vous dites qu'on est en train de montrer la voie, peut être pour
préciser peut être, le mémoire du Barreau du Québec ne le dit pas comme ça,
mais... mais vous savez, il y a ce bon vieil adage qui dit : Le
législateur ne parle pas pour rien dire, et s'il y a des différences entre les
définitions, c'est parce qu'on a voulu qu'il y ait de telles différences. Et
là, quand je vous entends, M. le ministre, j'ai l'impression qu'il y a quand
même une volonté de... d'unifier, mais de permettre à chaque loi d'atteindre
des objectifs qui peuvent être différents. Mais est ce qu'il n'y a pas un
risque? Est-ce que les gens au ministère qui ont travaillé avec vous ne voient
pas ce risque, qu'en maintenant des différences alors que nous sommes en train
de créer le droit, on lance un message clair qu'on a voulu ces différences-là?
Donc là, quand on va voir une décision d'une division du Tribunal administratif
du travail, on va avoir un type de décision X sur la définition de la violence
sexuelle, puis là, quand on va être devant l'autre division, on va avoir un
autre type de décision. Ce n'est peut-être pas ça qu'on voulait faire
aujourd'hui.
M. Boulet : Je suis
extrêmement sensible à ce que vous venez de dire, mais je le répète, les lois
ont des portées différentes. Ici, c'est une loi préventive. Il faut s'assurer
que tous les milieux de travail se prennent en main et comprennent bien ce
qu'est une violence à caractère sexuel. Ça va passer par beaucoup de pédagogie,
puis les tribunaux vont avoir à le faire aussi, là. Il va y avoir une période
évidemment d'adaptation, comme je mentionnais un peu plus tôt, mais on s'est
assuré qu'il y ait la meilleure harmonisation possible. Ce n'est jamais
parfait, mais avec cette définition-là, ça rentre bien dans les... les
compartiments qui appartiennent à chacune des lois. Puis plus tard dans la
LATMP, on va le voir pour l'application des nouvelles lois, les deux nouvelles
présomptions. Et les exemples que... auxquels référait le collègue, il y a des
situations qui ne seraient pas du harcèlement parce que le harcèlement, c'est
répétitif en vertu de la LNT. Quand c'est un événement, il faut que ce soit
grave. Un, puis deux, il faut qu'il y ait un effet nocif, et là, on est plus
là-dedans et on peut être devant un événement. Évidemment, c'est de la
violence, il y a forcément de la brusquerie aussi. Mais tu n'as pas à démontrer
un effet nocif, là. Il faut que tu préviennes puis il faut mettre la barre la
plus haute possible, et ça, il y a beaucoup de groupes qui nous l'ont
mentionné. Puis les expertes souhaitaient d'ailleurs qu'on développe au Québec,
dans les milieux de travail, une sensibilité particulière à tout ce qui est à
connotation sexuelle.
• (14 h 40) •
M. Paradis : Donc... donc je
comprends que c'est cette... c'est cette volonté de ratisser le plus largement
possible, d'avoir la définition la plus généreuse possible pour couvrir le plus
de situations possibles qui vous a guidé.
M. Boulet : Exact.
M. Paradis : De même que les
membres de votre équipe, et que donc...
M. Paradis : ...les risques
qu'on vient de mentionner, d'interprétations divergentes, ils ont été
considérés et ils sont assumés, si je peux parler de cette façon-là.
M. Boulet : Totalement
d'accord. Puis je ne suis pas naïf, on connaît le droit puis on sait c'est
quoi, les relations de travail. Les risques sont considérés d'une part, et ils
sont très faibles selon notre compréhension. Puis juste vous rappeler que... ce
que j'ai mentionné aussi, dans la loi sur les accidents de travail et maladies
professionnelles, qui est une autre loi, qui vise à indemniser des travailleurs
qui ont des lésions, la définition est tellement différente, là, c'est un
événement imprévu et soudain, survenu par... C'est très, très différent. Mais,
pour répondre à votre question plus précisément, les risques, oui, ont été
considérés, et on s'est assurés de les éliminer.
M. Paradis : Je termine
là-dessus, Mme la Présidente. Est-ce que l'idée d'utiliser cette nouvelle
définition, que vous proposez aux fins de ce projet de loi, qui peut-être
pourrait être qualifiée de plus généreuse de l'ensemble des définitions qu'on a
devant nous, là, dans les différents projets de loi... que ce soit elle qui
soit utilisée pour peut-être modifier les autres lois et donc avoir une
définition unifiée en bout de ligne?
M. Boulet : Non. Il y aurait
toute une levée de boucliers si on utilisait une définition de cette... Non. La
réponse, c'est non.
M. Paradis : C'est non, O.K.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Pendant que j'écoutais les autres échanges, je relisais un peu des
trucs sur le... l'échange précédent que nous avions, moi et le ministre, là,
par rapport à «sexuel» versus «sexiste». D'abord, je suis allé revérifier un
peu le rapport Cox, là. À la page six, elles font un tableau où elles font
référence à harcèlement sexuel incluant le harcèlement sexiste, qui recoupe
agressions à caractère sexuel, qui ensemble forment des violences à caractère
sexuel. Ça fait que là je comprends que c'est en ligne droite avec ce que vous
disiez précédemment.
M. Boulet : Totalement.
M. Leduc : Et j'ai trouvé
aussi la décision que, je pense, dans le jargon, on appelle la décision Lippé
du tribunal du droit de la personne de 1998. Je veux juste en lire quelques
phrases pour encore être vraiment certain qu'on est à la même place.
Le paragraphe 167 de la décision
Lippé de 1998 : «Le harcèlement sexuel résultant d'un milieu hostile est
donc une manifestation plus subtile, plus insidieuse que le harcèlement à
connotation sexuelle. Ce type de situation ne comporte habituellement pas
d'élément qui pourrait laisser croire à une démarche de séduction. Au
contraire, les paroles, les gestes ou les... les actes, pardon, convergent vers
la démonstration de l'inadéquation de la personne face à son milieu de travail,
généralement à prédominance masculine, mais pas exclusivement non plus, et ce
simplement parce qu'elle est caractérisée par l'un des motifs énumérés à
l'article 10 de la charte, en l'occurrence parce qu'elle est une femme.
C'est pourquoi il est possible de qualifier ce type de harcèlement sexuel de
harcèlement sexiste. Le genre plutôt que la sexualité est l'objet du
harcèlement.»
Paragraphe 168 : «Le harcèlement
sexiste est susceptible de revêtir diverses formes allant de l'usage de langage
cru, blagues grivoises, remarques désobligeantes, rebuffades, brimades,
injures, insultes et/ou menaces, voies de fait ou autres agressions, en passant
par des caricatures, graffitis, dommages causés à la propriété de la victime ou
aux lieux et objets mis à sa disposition, le tout en mettant particulièrement
en cause les caractéristiques proprement féminines. Essentiellement, ce type de
harcèlement cherche à isoler les femmes en leur rappelant soit qu'elles ne sont
pas à leur place dans ce milieu, soit qu'elles sont fragiles et que c'est à
leurs risques et périls qu'elles intègrent le milieu. Le milieu comporte ses
codes et ses règles qui tendent à conforter les préjugés et les stéréotypes en
vertu desquels les abus de pouvoir s'exercent.»
Là, il y a d'autres trucs, là, je m'arrête
ici. Bon, je répète, c'est la décision Lippé, c'était le tribunal... droit de
la personne en 1998. Est-ce que... Je comprends qu'il y a la jurisprudence qui
est une chose, ça, c'est là, ça reste, mais est-ce que, dans sa lecture, dans
sa proposition de définition, le ministre se rattache à ça?
M. Boulet : Je me rattache
aux propos que vous venez de citer. Évidemment, je n'ai pas la décision devant
moi, je ne connais pas l'ensemble des éléments factuels qui ont été mis en
preuve, mais oui, sur le fond de ce que vous venez de citer, c'est tout à fait
compatible avec ce qu'on vient de discuter.
M. Leduc : Est-ce que dans ce
sens, alors, ça ne pourrait pas être intéressant de rajouter la référence à
sexiste dans votre définition?
M. Boulet : Elle est incluse,
la connotation, tout ce qui vise la sexualité. Donc, c'est large et... attends
minute, et plus tard on répète «tout ce qui est à connotation sexuelle». Non,
c'est... Dans le corpus...
M. Boulet : ...en tout cas,
moi... pour moi, c'est inclus dedans, collègue. Si c'est la réponse que vous
souhaitez, là.
M. Leduc : Ça fait que,
mettons, de dire violences à caractère sexuel incluant un caractère sexiste ou
si on faisait référence à quelque chose, pour vous, ce n'est pas nécessaire?
M. Boulet : Non.
M. Leduc : Parce que c'est
clairement, clairement, clairement implicite que c'est là et que ça l'inclut.
M. Boulet : Oui, tout à fait.
M. Leduc : Je chercherais
juste à... Parce qu'il y a des gens qui nous écoutent qui vont pouvoir
peut-être aller plaider, pourront se référer, bien sûr, à nos échanges, puis,
si jamais il y a un juge à quelque part...
M. Boulet : Mais comment vous
définissez «sexiste»? Sexiste, c'est une attitude de discrimination fondée sur
le sexe. C'est exactement le libellé de la Charte des droits et libertés de la
personne, et ici, c'est encore plus large, c'est visant la sexualité. Donc, ce
qui est sexiste, tel que défini dans nos dictionnaires, oui, c'est compris dans
cette définition-là.
M. Leduc : O.K. Je termine en
vous resignifiant ma crainte, M. le ministre. Ça fait que, là, on a un échange,
puis c'est clair pour vous, c'est clair pour moi, c'est clair pour ceux qui
nous auront écoutés puis qui auront l'occasion peut-être d'aller référer à
notre échange, si jamais un juge à quelque part...
M. Boulet : Tellement.
Tellement.
M. Leduc : ...n'es pas
d'accord ou n'a pas nécessairement pensé à ça, mais qu'arrivera-t-il pour les
personnes qui n'auront pas eu connaissance de cet échange-là? On espère que le
juge ou la juge, peut-être, dans sa formation, éventuellement, aura compris que
«sexuelle», ça inclut sexiste aussi.
M. Boulet : Oui. Bien oui.
Puis, tout ça, là, ça réfère à ce que notre collègue de Jean-Talon
disait : Après ça, c'est de faire le pont entre ce qui est dans la loi
après son adoption et sa mise en application. Et pour que ce soit une mise en
application compatible avec ce qui est écrit dans la loi, ça va requérir
formation, information, sensibilisation, retaper sur le clou, ce qu'on a fait
dans d'autres lois en matière du travail. Moi je pense que c'est
l'incontournable : persistant, former, former, former.
M. Leduc : Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. Alors, M. le député de Jean-Talon.
M. Paradis : On a tellement
de plaisir à parler de droit international, permettez-moi d'y revenir juste une
minute. La définition de la convention 190, dont on dit qu'elle est
l'inspiration, c'est... je vais me permettre de la lire, là, pour les fins du
débat : «L'expression violence et harcèlement, dans le monde du travail,
s'entend d'un ensemble de comportements et de pratiques inacceptables ou de
menaces de tels comportements et pratiques, qu'ils se produisent à une seule
occasion ou de manière répétée, qui ont pour but de causer, causent ou sont
susceptibles de causer un dommage d'ordre physique, psychologique, sexuel ou
économique, et comprend la violence et le harcèlement fondés sur le genre», qui
est définie tout de suite après.
Ce qui m'intéresse particulièrement, M. le
ministre, là, je vais le dire très clairement, c'est qu'ici il y a... alors
que, dans la définition qui est proposée dans le projet de loi, c'est le
caractère non désiré, là, qui est la clé, donc, on se place du côté subjectif
de la personne qui en est l'objet puis on dit : Ce n'est pas désiré,
l'intérêt de la convention 190, c'est qu'on dit que c'est fait dans le but de
causer, ça cause ou c'est susceptible de causer un dommage d'ordre physique. Et
ça, cet élément de causalité qui est inclus dans la définition, ne se retrouve
pas dans le projet de loi, et je voulais savoir si c'était voulu pour... encore
une fois, pour les fins d'interprétation ou si on avait voulu atteindre cet
objectif-là autrement. Parce qu'ici c'est intéressant, hein, ça peut couvrir...
Je reprends l'exemple qui était donné par mon collègue de la circonscription
d'Hochelaga-Maisonneuve, il a dit une invitation à souper, mais une invitation
à souper qui revient le mardi, le jeudi, le mercredi suivant, l'autre jeudi, le
samedi suivant puis plusieurs fois, bien là, on peut dire, bien, ça, il y a
comme un but de causer, ça à cause ou c'est susceptible de causer une forme de
violence ou un dommage.
• (14 h 50) •
M. Boulet : C'est parce que
la définition de la convention 190, c'est une définition globale, qui concerne
la violence, le harcèlement, les formes d'abus, puis là il y a un lien de
causalité pour démontrer, donc, le dommage, peu importe sa nature. Et ça
revient à la discussion qu'on avait, nous, dans notre cas, on a une définition
qui vise à permettre au milieu de travail de faire de la prévention. Cette
définition-là, elle s'apparente un peu plus à celle qu'on a dans la Loi sur les
normes du travail, qui est plus restrictive, mais qui donne ouverture à des
recours. Et cette définition-là est différente aussi de celle de la Loi sur les
accidents de travail et maladies professionnelles, mais c'est comme si, nous,
il y avait plusieurs...
M. Boulet : ...morceaux qui
forment un casse-tête, parce qu'on a plusieurs lois, alors que la
convention 190, bien, vous le savez, c'est une définition qui sert de
guide, qui nous a servi d'inspiration pour l'objet spécifique de la loi
santé-sécurité qui vise à faire de la prévention.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. Alors, M. le député de l'Acadie.
M.
Morin :Oui. Merci, Mme la Présidente. Donc, juste brièvement,
M. le ministre, pour que ce soit bien... bien clair. Dans la définition que
vous proposez de «violence à caractère sexuel» : Toute forme de
violence... et qui se manifeste par des gestes, des pratiques, des paroles, des
comportements, des attitudes... Je reviens à ce que je disais précédemment. Si
une personne utilise un moyen technologique pour utiliser une forme de
violence, ce serait inclus dans quel élément de votre définition?
M. Boulet : Toute forme de
violence, indépendamment du moyen utilisé. Est-ce que c'est en présentiel?
Est-ce que c'est virtuel? Est-ce que c'est électronique? Est-ce que c'est par
une autre technologie? Toute forme, indépendamment de l'utilisation ou
indépendamment de... du moyen qui est utilisé.
M.
Morin :Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 33?
Ça va. Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la
mise aux voix. Est-ce que vous souhaitez un vote nominal? Ça va. Très bien.
Alors, est-ce que l'article 33 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Adopté.
Parfait. Merci beaucoup. ...ça vous va, Mme la secrétaire? Très bien.
M. Leduc : ...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui?
M. Leduc : Bien, si je
comprends bien, on entrerait dans la section du Code du travail?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Exactement.
Et on comprend que vous souhaitez déposer un amendement qui rajouterait un
article.
M. Leduc : Exact. On peut le
faire à ce moment-ci?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui.
Juste vérifier avec la secrétaire si le document a bien été déposé sur
Greffier. Alors donc, le document a été déposé. Nous allons l'afficher à
l'écran. Alors, l'article est affiché sur l'écran. Il n'y aura pas de... de
format papier qui va circuler, là. Donc, M. le député d'Hochelaga...
M. Boulet : ...déposer tout
de suite pour qu'on l'étudie au rang... Vous voudriez qu'on le... qu'on
l'étudie immédiatement?
M. Leduc : Pourquoi? Oui.
M. Boulet : On va vous
écouter.
M. Leduc : J'y vais?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : ...oui.
M. Leduc : Parfait.
Amendement : Insérer, avant l'article 1 du projet de loi, le
suivant :
«0.1 Le Code du... le Code du travail,
pardon, (chapitre C-27) est modifié par l'insertion, dans son article
47.3, des mots «pour un motif autre que celui d'être l'auteur d'une violence à
caractère sexuel au sens de la Loi sur la santé et la sécurité du travail
(chapitre S-2.1) après le mot «disciplinaire».
Et ça se... ça se lirait comme suit, donc,
l'article 47.3 : «Si un salarié qui a subi un renvoi ou une mesure
disciplinaire pour un motif autre que celui d'être l'auteur d'une violence à
caractère sexuel au sens de la Loi sur la santé et sécurité du travail ou qui
croit avoir été victime de harcèlement psychologique, selon les
articles 81.18, 81.20 de la Loi sur les normes du travail, croit que
l'association accréditée contrevient à cette occasion à l'article 47.2, il
doit, s'il désire se prévaloir de cet article, porter plainte et demander par
écrit au tribunal d'ordonner que sa réclamation soit déférée à l'arbitrage.»
Sur le fond, maintenant, Mme la
Présidente. Quand ce débat-là a commencé sur la façon de mieux protéger les
potentielles victimes et les... donc les réelles victimes sur les milieux de
travail, les associations étudiantes ont commencé à faire circuler la question
des clauses d'amnistie, dont nous discuterons un peu plus tard, selon le plan
déposé par le ministre, moi, je trouvais ça intéressant. J'avais des
questionnements. On a échangé beaucoup, les associations étudiantes et moi, et
aujourd'hui je suis assez ouvert à ça... puis on aura des questions tantôt.
Mais ça devrait bien aller pour le... ce volet-là, sur les clauses d'amnistie,
qui viendront dans... peut-être cet après-midi ou, au plus tard, dans notre
prochaine séance. Moi, je me suis dit : Qu'est-ce que je... qu'est-ce
qu'on peut faire aussi de supplémentaire, pas nécessairement en remplacement,
mais de supplémentaire à cette approche-là sur les clauses d'amnistie? Et ayant
moi-même pratiqué longtemps le droit du travail — j'ai été un
conseiller syndical avant mon élection en 2008 — je me rappelle de
cette injonction...
M. Leduc : ...et de cette
crainte qu'ont développée les syndicats à l'égard de l'article 47.2. Tous
les conseillers syndicaux, je dirais, la plupart des militants syndicaux
connaissent l'article 47.2. Parce que c'est un fléau, c'est l'obligation
de représentation, et je dis «un fléau» pas parce que c'est une obligation de
représentation, mais parce qu'on l'utilise trop souvent pour des raisons un peu
farfelues. D'ailleurs, il y a des articles qui circulent, là, c'est à 95 %
ou... en tout cas, entre 9... en haut de 90 % de cas de 47.2 qui sont
finalement refusés. C'est le moment où un salarié considère qu'il a été mal
représenté par son syndicat qui dépose une plainte qui se rend au tribunal et
donc il dit : J'ai été mal représenté, je poursuis mon syndicat. Dans tous
les cas où on a entendu des histoires, là, telle personne s'est retrouvée à
avoir une petite tape sur les doigts, il est resté en place... Chaque fois
qu'une chronique écrite sur ce dossier-là ou sur d'autres types de dossiers,
d'ailleurs, mais concentrons-nous sur les dossiers de violence à caractère
sexuel, systématiquement, vient la question : Pourquoi le syndicat défend
les pourris? Systématique. C'est une grande question qui est soulevée de
manière systématique dans ces textes-là, dans ces opinions-là. Et je le comprends
pourquoi, parce que, lorsqu'historiquement le mouvement syndical a demandé et
obtenu la cotisation obligatoire, ce qu'on appelle dans le jargon la formule
Rand, qui fait en sorte que, si on négocie une hausse de salaire dans une
entreprise donnée, elle ne s'appliquera pas juste à ceux qui ont signé leur
carte de membre du syndicat, elle va s'appliquer à tout le monde, forcément...
Alors, en contrepartie, logiquement, tout le monde de cette entreprise-là,
qu'ils aient signé leur carte de membre ou pas cotise au syndicat.
Éventuellement, s'il n'y a presque personne qui n'a signé sa carte de membre,
le syndicat peut être révoqué, bon, ça, c'est une autre partie du code.
En toute logique aussi, on a mis la
formule Rand, donc vient cette... ce monopole de représentation, qu'on appelle,
cette obligation de représentation et qui fait en sorte qu'en effet, si
quelqu'un commet une violence à caractère sexuel dans son milieu de travail, le
syndicat est, à toutes fins pratiques, tenu de le représenter. Il y a toute une
jurisprudence qui s'est développée sur quelle est la limite de cette obligation
de représentation. Elle n'est pas totale et absolue, hein? Une des limites très
claires que la jurisprudence a tracée, c'est le fait d'obliger de référer à un
grief à l'arbitrage. On n'est pas obligé de référer un grief à l'arbitrage,
comme syndicat, si on fait l'examen conscient et rigoureux que ce grief-là n'a
à peu près aucune chance d'être gagné. Et là la jurisprudence a dégagé qu'une
bonne utilisation des ressources, et des tribunaux, d'ailleurs, et des arbitres
permettait au syndicat de faire ce genre d'exercice là et de ne pas référer à
un grief à l'arbitrage, même si c'était le désir du salarié.
Par contre, il s'est développé beaucoup
cette culture où, pour se protéger contre un éventuel 47.2, on dit :
Dépose un grief, fais une enquête, dépose un grief, plaide au moins une fois
dans un comité de relations de travail, un CRT, fais un genre de service de
base et, après ça, bien, on verra ce que ça donne. Mais il s'est développé,
donc, cette culture-là d'avoir peur, en quelque sorte, et de... d'avoir peur de
cette surenchère alentour du 47.2.
• (15 heures) •
J'ai écrit une lettre au ministre, en
octobre, où je lui soumettais cette idée-là : Pourquoi, dans le dossier
spécifique des violences à caractère sexuel... je ne suis pas en train de
remettre en question l'économie générale du projet de loi ni l'économie
générale du droit du travail, mais, dans les cas de 47.2... dans les cas de
violences à caractère sexuel, pardon, pourquoi on ne lèverait pas partiellement
cette obligation de représentation en disant : Bien sûr, il y a mille et
une situations, mille et une nuances, le syndicat est à même d'apprécier ce qui
est devant lui, le cas qui est devant lui, il pourrait décider, en effet, de
vouloir défendre l'agresseur quand même? Mais, si on veut envoyer un signal
très clair dans les... dans le milieu de travail, il faut casser à la source,
je dirais, l'intention ou les gestes de harcèlement, d'agression sexuelle.
Pourquoi ne pas envoyer le signal très clair que ce n'est pas vrai que, peu
importe ce que tu fais, ton syndicat va te défendre? Si tu fais une connerie à
caractère sexuel, puis qu'à sa face même tu es dans le tort, puis, après une
enquête sommaire, tu es dans le trouble...
15 h (version non révisée)
M. Leduc : ...pourquoi le
syndicat serait obligé de défendre cette personne? Alors, c'est un peu l'esprit
de l'amendement que je soumets aujourd'hui pour la considération du ministre.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? M. le ministre, est-ce
que vous souhaitez suspendre?
M. Boulet : Non, je pense, je
pourrais faire des commentaires généraux. Évidemment, ça nous amène... ce n'est
pas dans l'esprit du projet de loi, là, je sais que c'est un sujet qui vous
intéresse, on en a déjà discuté. 47.2, c'est pour prévenir ou protéger les
syndiqués contre la mauvaise foi, l'abus, la négligence grave des syndicats.
Parce qu'il n'y a pas, par ailleurs, une obligation des syndicats, tu sais, il
faut toujours qu'ils trouvent un équilibre entre les droits des individus, puis
il faut qu'ils s'assurent qu'il y ait un droit qui soit légitime en vertu de la
convention collective qui les gouverne. Puis les statistiques que j'ai en tête,
c'est qu'il y a seulement 30 % des plaintes qui vont au Tribunal
administratif du travail puis 97 % des plaintes sont rejetées. Mais je
sais que ça peut ennuyer certains syndicats, mais il y en a... Puis l'étape
qui suit le Tribunal administratif, c'est l'arbitre de griefs, ça fait qu'il
n'y en a à peu près pas qui vont là, s'il n'y va pas. C'est sûr que c'était un
ennui considérable pour les employeurs, parce que les employeurs, ils sont mis
en cause au Tribunal administratif du travail. Ils ne savent pas s'ils doivent
y aller ou faire des représentations. Puis le syndicat, bien, il est comme...
bien, le syndiqué est souvent représenté par un avocat ou un conseiller
externe. Puis le syndicat est contraint de démontrer qu'il n'a pas agi avec
négligence grave. Je sais que ça peut être un ennui pour les syndicats.
Ceci dit, au-delà de s'éloigner du
principe du projet de loi, ça créerait... Puis là là, je vous dis, de façon
très, très télégraphique, collègue, une disparité importante entre les
syndiqués puis les non-syndiqués, il y a 40 % des travailleurs qui sont
syndiqués au Québec, il y en a 60, donc, qui ne le sont pas, qui peuvent faire
une plainte à la CNESST, qui bénéficient d'une enquête, une décision de la
CNESST. Ils peuvent être accompagnés, il peut y avoir de la médiation. Puis,
après ça, ils peuvent même demander la révision administrative. Puis ils
peuvent même aller au Tribunal administratif du travail. Puis, s'ils ne sont
pas accompagnés par le service juridique de la CNESST, parce que la décision a
été rejetée, ils peuvent y aller avec leur propre avocat. Ça fait que, moi, je
pense que ça serait une disparité de traitement profonde entre les syndiqués
puis les non-syndiqués, puis ça risquerait de viser de facto toutes les
plaintes, là, parce que les formulaires sont faits. Il faudrait, comme, adapter
des formulaires qui n'enverraient pas nécessairement le bon message. Quand c'est
du harcèlement, tu ne peux pas avancer. Puis, quand ce n'est pas du
harcèlement, à la limite, 47.2 puis 47.3. Puis 47.3, il faut quand même s'assurer
que le syndicat a contrevenu à 47.2, qui réfère la négligence ou à l'abus ou
aux mauvais traitements. Puis ça serait un peu en contradiction avec la
position, vous vous souvenez, là, dans le cadre des modifications au Code du
travail en 2019, les principes de justice naturelle, le droit d'être entendu,
le droit de s'assurer d'être représenté de façon juste, sincère et adéquate, ça
pourrait empêcher un syndiqué qui, de façon sommaire, est considéré comme l'auteur
de violence ou de harcèlement, parce que là vous référez au harcèlement.
Et puis quand on réfère à au droit d'être
entendu, bien là, il y a la liberté d'association, à mon avis, il y aurait,
potentiellement, au-delà de l'enjeu d'équité procédurale, un enjeu
constitutionnel. Puis, si je peux vous rassurer, dans la loi, dans la LITAT, la
Loi sur le tribunal administratif du travail, il y a un article qui permet au
TAT de rejeter sommairement, parce que je sais qu'un groupe, notamment la CSN,
référait à la possibilité de rejeter sur dossier. Il y en a d'autres qui ont
différentes formules, là, si l'employeur a sanctionné, il ne pourrait pas, sauf
que l'employeur, des fois, il peut avoir sanctionné de façon abusive ou
inéquitable. Ça fait que le TAT...
M. Boulet : ...quand même
le pouvoir de rejeter sommairement une plainte de cette nature-là. Ça fait que
c'est sûr qu'on pourrait en débattre pendant des heures, mais moi, j'ai
beaucoup de motivation. Puis on va sûrement en rediscuter, peut-être dans le
cadre d'un autre projet de loi, mais... Puis je comprends très bien la
légitimité de ce que vous avancez comme amendement, mais à ce stade-ci, pour
les raisons que je viens de mentionner, je ne suis pas confortable.
M. Leduc : Je peux y
aller?
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Oui. Allez-y, M. le député.
M. Leduc : D'accord.
Vous m'avez dit tantôt d'attendre que vous me donniez la parole.
La Présidente (Mme Boivin
Roy) : Vous êtes un bon élève. Merci beaucoup.
M. Leduc : J'essaie de...
J'essaie. M. le ministre, vous faites référence à la question du droit naturel.
Puis c'est drôle parce que je l'ai vu venir, cet argument-là, parce que pas
plus tard qu'hier, dans mon intervention au salon bleu, j'ai parlé de ça
précisément. Puis j'ai émis la réflexion suivante à deux volets. D'abord, plus
tard, là, quand on va commencer à... non seulement faire sauter, mais interdire
les clauses d'amnistie, vous allez jouer un peu dans le droit naturel, là.
Hein, vous allez décider que... Ce n'est pas étanche à 100 %, là, votre
définition du droit naturel en faisant sauter les clauses amnistie. Je ne suis
pas en train de dire je compte. Je viens de dire tantôt que j'étais assez
ouvert à ça. Ça fait que, moi, je trouve ça un peu particulier de me faire servir
cet argument-là quand dans quelques instants on va parler aux clauses
d'amnistie puis vous faites précisément la même chose, c'est-à-dire que vous
allez jouer dans... de droit naturel.
M. Boulet : Non. Ceci
dit, avec respect, on n'interdit pas les clauses d'amnistie. On empêche...
c'est-à-dire on permet à l'employeur de ne pas en tenir compte. C'est tout à
fait différent. Puis les spécialistes en droit constitutionnel... Tu sais,
parce que je sais qu'il y a un risque, là. Il peut y avoir des recours. Les
risques sont faibles. On les a analysés. Puis, tu sais, l'employeur, là, tu
sais, quand on parlait... Bien, on va... Puis ça, c'est un autre débat, là,
mais tu sais, quand une personne est réhabilitée, ça fait partie des
circonstances atténuantes, là. Si le travailleur est capable de démontrer qu'il
s'est réhabilité, l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de décision, si
c'est disciplinaire ou administratif, il va considérer la réhabilitation comme
un élément atténuant. Mais dans la vaste majorité des cas, le potentiel
récidivant est extrêmement élevé. Puis il y a des experts scientifiques et
médicaux qui le confirment, là. En matière de violence et de harcèlement
sexuel, le risque est... Mais c'est différent. C'est pour ça que j'ai retenu une
approche différente pour les clauses d'amnistie. Que mon collègue, dans une
autre loi pour les fins de protéger les élèves, a utilisé un libellé aussi
similaire.
M. Leduc : Oui, au
final, vous avez bien pu prendre un chemin différent... Ça revient au même. Si
on dit un patron n'est pas obligé d'en prendre compte, vous auriez tout aussi
pu les abolir, puis ça aurait été la même affaire, là.
M. Boulet : Ah bien, les
parties peuvent les négocier, les clauses d'amnistie.
M. Leduc : Oui, mais si
elles sont inopérantes?
M. Boulet : Sauf que
pour ces fins là, l'employeur dans l'exercice, dans l'examen, dans l'analyse de
la situation d'un employé, ça ne pourra pas l'empêcher de tenir compte d'un
événement qui est survenu quatre ans ou huit ans avant.
M. Leduc : Elles
n'existeront que sur papier. Parce que, dans le réel, le patron aura toujours
le choix de ne pas...
M. Boulet : Pour ces cas
spécifiques là.
M. Leduc : Bien, il
n'aura plus bien, bien d'intérêt de les négocier. Dans tous les cas, je suis
d'accord avec vous sur le fond. Je dis juste que, sur la forme, vous êtes en
train de jouer dans le droit naturel avec ça.
M. Boulet : ...
M. Leduc : Ce n'est pas
vrai que c'est étanche. Puis là, moi, je dis : D'accord. Faisons un peu la
même logique puis allons jouer un peu dans le droit naturel pour l'obligation
de représentation. Vous avez dit dans un article du Devoir la semaine dernière,
là, lorsque vous avez présenté votre projet de loi sur la construction au
journaliste. C'était-tu Le Devoir? Je ne me rappelle plus quel journal. Je
pense c'était Le Devoir. On vous interrogeait là-dessus en lien avec un élément
que j'avais mis au jeu dans un point de presse, ici même, là à l'Assemblée.
Vous étiez ouvert à la situation. Vous avez même dit : Oui, oui, je
regarde ça, je trouve ça intéressant. Je comprends que c'était une ouverture
intellectuelle, mais qu'après examen, la porte s'est refermée.
• (15 h 10) •
M. Boulet : ...serai
ouvert intellectuellement, dans six mois, dans un an, tout le temps. Moi,
j'aime ces discussions-là qu'on fait en étude détaillée, puis c'est fait dans
le plus grand des respects, puis j'aime ça faire ces discussions-là. Mais je me
vois mal en plus nier à un salarié injustement accusé, lui nier le droit de
faire une plainte dans un cas comme celui-là. Parce que, là, on vient d'ouvrir
la porte pour permettre au syndicat de dire : Non, malheureusement...
Alors qu'il y a quand même... Le syndicat quand même une protection
particulière...
M. Boulet : ...particulièrement
efficace. On va relire 47.2 — là, excusez-moi — juste pour
me remettre dedans.
«47.2. Le syndicat... l'association
accréditée ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire
ni faire preuve de négligence grave.» Puis là, après ça, faut quand même que le
salarié ait fait l'objet d'un renvoi ou d'une mesure disciplinaire, là. Je te
dis` : Aïe! et c'est 30 %, collègue, des plaintes qui se rendent au
Tribunal administratif du travail, puis 97 % sont rejetées.
M. Leduc : Non, mais tout ce
temps-là, là...
M. Boulet : Je sais qu'il y a
une appréhension puis, je sais, j'en ai côtoyé des représentants syndicaux que
ça les ennuie, mais souvent, ce n'est pas analysé nécessairement de manière
compatible avec ce qui est écrit à 47.2 et suivants. Mais je comprends votre
point.
M. Leduc : Moi, j'ai... je
vais donner un exemple d'une situation que j'avais connue quand j'étais
conseiller syndical. Un employé s'était mis à envoyer des photos à des
collègues de travail, des photos... vous devinez, mettons, de quelle nature.
Une voix : Explicites.
M. Leduc : Photos explicites,
on va dire ça de même. Ça s'était su, bon. Le syndicat se sentait obligé, de
crainte du 47.2, de défendre cette personne, de déposer un grief, d'aller...
alors que les plaintes... pas les plaintes, mais la preuve, elle était
flagrante, là. Il n'y avait pas de... il n'y avait absolument aucune forme de
doute sur le fait que lesdites photos avaient été envoyées par ladite personne,
et que ça méritait une sanction qui était, dans ce cas-là, un renvoi. Vous,
vous voulez continuer à obliger le syndicat à procéder à la défense de cette
personne-là?
M. Boulet : Non. Ce n'est pas
ce que la loi dit. Ce n'est pas ce que le code dit. Il pourrait, dans un cas
manifeste comme ça, mettre en application son devoir de juste représentation,
de représentation sans mauvaise foi, sans discrimination, sans négligence. Je
vais vous donner le meilleur truc.
M. Leduc : Oui, mais...
M. Boulet : Moi, je
recommanderais aux syndicats d'avoir des politiques en la matière et
l'appliquer avec équité, et ça leur permettrait de dire, par exemple, on ne va
pas de l'avant parce qu'on a respecté nos critères d'équité. Mais on ne peut
pas nier à cette personne-là le droit d'être entendu si le syndicat... Dans un
cas comme ça, là, selon moi, là, juste à vol d'oiseau, là, parce que c'est
très, très sommaire, il n'y aurait pas de mauvaise foi. Il y a des syndicats
qui interprètent 47.2 comme un devoir, indépendamment des circonstances. Non,
les syndicats modernes auront ou doivent avoir des politiques pour décrire
clairement comment ces syndicats-là doivent se comporter devant des auteurs de
violences à caractère sexuel ou du harcèlement psychologique. Et pour les fins
de la discussion, peu importe la nature de l'offense, si... Tu ne peux pas...
Il faut quand même que tu assures un équilibre entre les intérêts des
travailleurs. Puis à la limite, si tu n'es pas certain, puis que ta politique
te dit : Tu dois le représenter, puis qu'il est en conflit avec la
victime, bien tu fais une muraille de Chine, ce que la plupart des syndicats
font, mais ils n'ont pas systématiquement, ceci dit avec respect pour les
syndicats qui nous écoutent, à faire des 47.2.
M. Leduc : Mais ça, cette
pratique-là, elle existe déjà. S'il y a deux salariés, un agresseur et un
agressé, c'est déjà souvent deux conseillers syndicaux différents ou des élus
différents d'un exécutif qui s'occupent de ces dossiers-là, puis c'est bien
correct, puis c'est bien normal. La question n'est pas là. Puis on... quand on
a des échanges dans nos... dans nos différents projets de loi, M. le ministre,
on a toujours eu cette différence-là où vous vous collez à une interprétation
très, très stricte de la loi, puis moi, je vous parle de la réalité du terrain,
puis des fois, on n'arrive pas à se comprendre. Bien sûr qu'en théorie le
syndicat pourrait se construire un argumentaire qui dit : Je ne le
déposerai pas grief. Mais qu'est-ce qui va arriver? Le salarié, là,
l'agresseur, là, il le sait, là, le 47.2, ça existe. Il s'est peut-être poigné
un avocat privé. Qu'est-ce qu'il lui a dit, l'avocat privé? Il a dit : Tu
menaces ton syndicat d'un 47.2, puis tu vas voir, ton syndicat va plier parce
que ça coûte tellement cher, c'est tellement long, c'est tellement pénible que,
parfois, il fait le choix de t'écouter puis de le déposer ton grief ou ta
référence à l'arbitrage, même s'il sait que tu es un tout croche...
M. Leduc : ...parce que c'est
moins pénible que de se taper un 47.2, et c'est ce côté-là qu'il faut aller
régler, M. le ministre, en retirant l'obligation.
M. Boulet : Je le comprends,
puis c'est intéressant. Puis, tu sais, 47.2 vise à protéger un syndiqué contre
les abus d'un syndicat, puis là vous me dites : Il faudrait protéger les
syndicats contre les abus des salariés. Or, les tribunaux sont là pour ça,
ultimement. C'est la raison pour laquelle le tribunal administratif rejette le
quasi 97 % des dossiers, et, en plus, il a le pouvoir... puis vous me le
faites dire en étude détaillée... il a ce pouvoir là spécifique de rejeter
sommairement une plainte, puis c'est prévu dans la loi, puis ça devrait être fait
plus régulièrement dans des cas d'abus de syndicats par des salariés syndiqués.
Mais on ne peut pas juste, en regardant
puis en disant : Il a autant de harcèlement ou de violence, puis il n'a
pas droit à rien, là... Il a quand même droit d'aller dans un canal lui
permettant de s'exprimer. Le droit d'être entendu, c'est ça. Puis tout
non-syndiqué, ce régime à deux vitesses là, il serait fantastique, et du
non-vu, en droit du travail. Le non-syndiqué, là, il aurait tout, la
représentation, l'enquête, la décision initiale, la révision administrative, la
représentation, le cas échéant, par un avocat de la CNESST ou un autre avocat,
puis une audience au TAT. Tu sais, c'est comme... Puis là on vient dire
ici : Toi, si tu es victime de négligence... en fait, si tu es renvoyé ou
tu es l'objet d'une mesure disciplinaire, puis que, dans ce contexte-là, le
syndicat a agi de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire,
donc fait preuve de négligence, tu te retrouves le bec à l'eau. En tout cas.
Mais je comprends ce que vous me dites. Je
sais... Puis j'espère que notre échange va contribuer à une meilleure
compréhension de ce que c'est. Parce que vous étiez conseiller syndical. Moi,
je ne faisais pas le même travail, mais il y en a beaucoup, de syndicats, dans le
cadre de mon travail, qui me disaient : Nous, on a cette contrainte-là, on
doit systématiquement les représenter. Puis moi, je n'argumentais pas, à ce
moment-là. Mais là je suis dans une position où je peux le dire.
M. Leduc : Cet article là, là,
M. le ministre, 47.2, 47.3, de mémoire d'historien de formation que je suis,
là, ça avait été introduit pour éviter les effets de gang, hein, qu'il y a...
Parce que les syndicats, c'est des petites bibittes politiques aussi, hein, il
y a un exécutif, puis il peut y avoir des élections, puis, si tu as une gang
qui se présente à l'exécutif contre une autre gang, puis quelqu'un, dans
l'autre gang, qui subit un renvoi ou une mesure disciplinaire, bien, il peut y
avoir une espèce de côté revanchard, de dire : Bien, je ne te défendrai
pas, parce que tu as voté contre moi à l'élection de l'année passée. Tu sais,
l'humain étant l'humain, il y a de tout partout, et ça peut se retrouver,
évidemment, dans le milieu syndical comme ailleurs. Donc, ce genre d'article là
était prévu pour ça, c'était prévu pour éviter que tu gagnes ton élection avec
ta gang puis que tu décides que ton appareil syndical ne sert plus à défendre
tout le monde, mais ne sert qu'à défendre ceux qui ont voté du bon bord. Ça
fait que c'est une bonne idée qu'on ait introduit ça, à l'origine.
Mais quand vous dites vous-même... Puis la
statistique, elle est pire que je pensais, là, 97 % des plaintes rejetées.
Ça ne vous envoie pas un signal qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans le
système, qu'il y a quelque chose de brisé si 97 % de vos plaintes sont
rejetées?
M. Boulet : Non, mais
c'est...
M. Leduc : Ça ne veut pas
dire que ça fonctionne bien, là.
M. Boulet : Non, mais il n'y
en a que 30 %. Il n'y en a pas beaucoup. Il n'y en a que 30 % qui se
rendent au Tribunal administratif du travail, là, donc c'est peu. Je ne sais
pas combien il y a de plaintes en vertu de 47.2, au Québec, par année. Je vous
donnerai le chiffre... 465. C'est peu. 465 plaintes par année, ce n'est pas le
désastre qui nous est annoncé ou auquel on fait référence. C'est... Sur combien
d'unités d'accréditation syndicale au Québec? Il y en a combien? Des milliers.
M. Leduc : Bien, 465, ce
n'est pas banal.
M. Boulet : Mais il y en a
combien, d'accréditations syndicales?
M. Leduc : Il n'y a pas 150
personnes dans les services juridiques des centrales syndicales, là.
M. Boulet : 465, collègue.
M. Leduc : Oui, mais il faut
les préparer, ça, il faut monter le dossier, il faut y aller...
• (15 h 20) •
M. Boulet : Il y en a
30 %, de ces plaintes-là, qui vont au Tribunal administratif du travail,
puis 97 % sont rejetées. Et là on ferait un amendement qui comporte des
enjeux constitutionnels, qui crée un régime à deux vitesses, qui nuit à... au
pouvoir, notamment, de rejeter...
M. Boulet : ...du Tribunal
administratif du travail avec les conséquences en matière d'équité procédurale.
Moi, je pense que, quand on fait la balance des avantages et des inconvénients,
ça nous fait réaliser que ce que ça nous impose comme parlementaires, c'est de
mieux expliquer. Puis je sais que vous profitez de cette discussion-là pour
passer des messages, puis ça me fait plaisir d'y contribuer, parce qu'il ne
faut pas que 47.2 soit interprété comme donnant un droit à n'importe qui,
n'importe quand, indépendamment de ce qu'il a pu faire ou de ce qu'elle a pu
faire aussi.
M. Leduc : Bien, ce n'est
pour ça que je dis du tout, ce que je dis, c'est que, moi, je pense que 467 plaintes,
464, ce n'est pas banal non plus, ça nécessite du gros travail, qu'il y a des
gens qui passent quasiment du temps plein dans certaines centrales à gérer ce
fardeau que sont les plaintes... la... à 97 % du temps frivoles ou, en
tout cas, pas basées. Puis qu'au-delà de ça, au-delà de ça, il faut envoyer un
signal clair et il faut permettre aux syndicats... Puis là on... je reviens à
la base, là, pas en train de dire que le syndicat devient incommunicado dès
qu'il y a un moindre soupçon, là. Le... dit : A subi un renvoi ou une
mesure disciplinaire. Puis, d'habitude, si le patron fait bien sa job, s'il y a
un renvoi ou une mesure disciplinaire, c'est qu'il y a une enquête sommaire
ou... une enquête en bonne et due forme. Ça fait que, le syndicat, on assume
qu'il aura pris connaissance du dossier, qu'il aura fait sa... son enquête
aussi. Et c'est suite à ça que là, moi, je dis : Pourquoi il serait obligé
de procéder?
M. Boulet : C'est intéressant
qu'on me dise que le syndicat assume que l'employeur a bien fait son enquête et
donc que la mesure est bien fondée. Tu sais, je ne suis pas sûr que ça, c'est
la réalité, mais vraiment pas.
Puis là j'ai les chiffres plus précis, là,
c'est 489, mais il y en a 226 de ces 489 qui ont été réglés ou il y a eu un
désistement. Donc, ce n'est vraiment pas un phénomène important au Québec,
c'est vraiment très, très marginal, ce n'est vraiment pas un enjeu. Quand on le
comprend bien, c'est beaucoup plus une protection, une équité procédurale au
bénéfice des salariés, puis indépendamment de ce qui s'est passé, là, mais pour
les protéger contre les abus syndicaux, contre les négligences dont ces
personnes-là peuvent faire l'objet.
M. Leduc : Incluant l'auteur
d'une violence à caractère sexuel.
M. Boulet : Oui. Là, vous
parlez...
M. Leduc : C'est important de
protéger les droits de l'auteur d'une violence à caractère sexuel.
M. Boulet : C'est important
de donner une plateforme où la personne a le droit d'être entendue. Le non...
le...
M. Leduc : Bien, personne ne
dit qu'il n'a pas le droit d'être entendu ici, là.
M. Boulet : Oui, mais «si un
salarié qui a subi un renvoi pour un motif autre».
M. Leduc : Il n'est plus
obligé d'être entendu en lien avec un grief ou un arbitrage.
M. Boulet : Tu sais, 47.3, il
faut quand même qu'il croie, à cette occasion-là, avoir été victime d'abus,
discrimination ou négligence grave. Puis, je le répète, le régime à deux
vitesses, on ne peut pas faire un amendement à un article du Code du travail
qui crée...
M. Leduc : M. le ministre,
vous le faites sur les...
M. Boulet : Oui, c'est un
régime à deux vitesses.
M. Leduc : ...vous le faites
sur les clauses d'amnistie où c'est précisément ça que vous allez faire.
M. Boulet : Non, parce qu'en
milieu non syndiqué, là, l'employeur, il n'en a pas, de clauses d'amnistie,
c'est négocié par les syndicats et les employeurs. La convention, c'est la loi
des partis. En milieux non syndiqués, il n'y a pas de clause de pardon ou
d'amnistie, ça n'existe pas. Ça fait que...
M. Leduc : Mais vous décidez
que, sur certains sujets, il n'y en aura plus, des clauses d'amnistie, ou elles
ne seront pas considérées par l'employeur.
M. Boulet : Oui. Tout à fait.
M. Leduc : Mais c'est un peu
la même chose que je fais ici.
M. Boulet : Non. Mais là,
quand on parle du droit d'être entendu, ça serait créer vraiment un régime
distinct pour les non-syndiqués, parce que le non syndiqué, là, auquel vous
pensez, là, qui ne devrait pas avoir accès à tout le processus de 47.2 et
suivant, lui, là, il pourrait aller à la CNESST en révision administrative puis
au tribunal. Ça, pour moi, c'est un enjeu profond, puis je suis sûr qu'on se
ferait casser ça.
M. Leduc : Moi, ce que je
retiens, c'est que vous trouvez ça important de maintenir cette possibilité-là,
pour l'auteur d'une violence à caractère sexuelle. Je suis un peu déçu, parce
que je trouvais que c'était une façon supplémentaire de serrer la vis envers
les agresseurs sur les milieux de travail, d'envoyer le message que ce n'est
pas vrai que tu vas te faire défendre n'importe quand, n'importe où, de donner
davantage de liberté de jugement des dossiers à la partie syndicale, d'envoyer
le message que ce n'est pas vrai que c'est le bar ouvert pour les agresseurs.
Je sentais un appétit de ce côté-là dans l'espace public, donc je suis...
M. Leduc : ...un peu déçu de
voir que cette porte-là se referme aujourd'hui. Puis j'insiste encore une fois,
hein, quand je disais tantôt : Vous faites la même chose dans les clauses
d'amnistie, je vais être d'accord, tantôt, on va avoir des échanges, on va
avoir des questions, mais, au final, je vais être d'accord d'avoir un petit
régime à deux vitesses sur les clauses d'amnistie pour serrer la vis. Ça fait
que je ne vois pas pourquoi on se permet de le faire là-bas puis on ne se
permet pas de le faire ici.
M. Boulet : Mais, en fait,
j'apprécie votre amendement. Je sais le sentiment qui vous habite, puis on en a
parlé, je pense que d'avoir une politique de représentation avec des critères
d'équité, des critères objectifs de la part des syndicats, vous permettrait
exactement d'atteindre le même objectif sans nier un droit fondamental. Je suis
profondément convaincu que, si le syndicat avait une politique de
représentation pour baliser l'application de 47.2, il atteindrait le même
objectif. Puis moi, j'apprécie toutes les discussions puis je trouve d'ailleurs
que, depuis le début de l'étude détaillée, c'est superintéressant, puis je
comprends très bien votre amendement, puis je le respecte, puis je respecte
encore plus les motivations que vous avez, collègue.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, le député de Jean-Talon, la parole est à vous.
M. Paradis : J'ai écouté avec
attention cet échange. Je pense que mon collègue le député
d'Hochelaga-Maisonneuve apporte, arrive avec un enjeu qui est vraiment
important en droit du travail, là, celui des articles 47.2 et 47.3 du Code du
travail. Je suis heureux d'entendre que le ministre en prend bonne note, parce
que c'est peut-être un débat qui devrait avoir lieu de nouveau. Notamment, on a
parlé tout à l'heure de l'importance d'entendre les acteurs concernés. Ces
changements-là, proposés par mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve sont des
changements importants. Je pense que ça serait bien d'entendre les syndicats
eux-mêmes, les représentants des travailleurs et les représentants patronaux.
Et là un angle que je n'ai pas entendu
dans cette discussion, là, mais que... je pense, auquel il faut faire
attention, c'est que la création d'une exception, par exemple, à 47.3, peut
être interprétée, en quelque sorte, comme une confirmation du régime général,
et peut-être qu'on veut faire attention à ça aussi, là. Si on veut jouer dans
ces articles-là, 47.2, 47.3, il faut faire attention aux effets qu'une
modification précise, ici, pourrait avoir sur l'interprétation du régime général.
Donc, en quelque sorte, peut-être que cet échange entre le ministre et le
député d'Hochelaga-Maisonneuve devrait mener à une initiative plus large de
révision de ces deux articles-là du Code du travail, sur lesquels on pourrait
entendre les parties concernées, parce que c'est un véritable enjeu qui est
discuté aujourd'hui.
M. Boulet : Moi, je suis
totalement d'accord avec ça, puis on va avoir d'autres opportunités. Il y a
d'autres projets de loi, éventuellement, sur lesquels nous travaillons. Puis,
moi, je suis prêt à avoir de nouveau une discussion. Puis le Comité consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre, où sont les leaders patronaux et les
centrales syndicales, pourraient aussi nous donner un éclairage, puis il y aura
des... Mais la porte n'est pas fermée à jamais, là, à discuter puis à trouver
des solutions différentes de l'état actuel du droit. Tout à fait d'accord.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Il y avait M. le député de l'Acadie.
• (15 h 30) •
M.
Morin :Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je comprends et j'ai
suivi avec attention les explications du collègue député
d'Hochelaga-Maisonneuve, mais mon intervention ira sensiblement dans le même
sens que le collègue, du député de Jean-Talon, c'est-à-dire qu'on a... j'ai dit
précédemment, aujourd'hui, quand on a commencé l'étude article par article,
qu'il était important de consulter, d'entendre différents groupes. Et là je
comprends ce qu'a à l'esprit le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, mais c'est
quand même... on va se démarquer du régime général qui existe présentement en
droit du travail, et là on n'a pas entendu personne, pas entendu de patron, pas
entendu de syndicat. J'ai ce malaise, et c'est la raison pour laquelle... et là
le gouvernement, M. le ministre, décidera, mais, si jamais il y a une
poursuite, je pense qu'il faudrait que ce soit fait dans un forum où on aura eu
l'opportunité d'entendre plusieurs groupes, pour ne pas prendre une décision
précipitée qui va avoir un impact sur le droit du travail sans qu'on ait tous
les...
15 h 30 (version non révisée)
M.
Morin :...Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour votre information, il vous
reste 5 min 15 s.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Je prends la balle au bond que le ministre vient de lancer au jeu,
à savoir obtenir l'opinion de la CCTM, le Comité consultatif du travail et de
la main-d'œuvre, qui est une instance intéressante, là, qui nous avait guidés
notamment sur les travaux de la santé-sécurité puis sur plusieurs autres. Je
veux juste l'entendre un peu plus clair, là. Est-ce que j'ai bien compris que
le ministre était intéressé à donner un mandat au CCTM d'étudier cette question
là du 47.2?
M. Boulet : J'en discuterai
avec le CCTM. Est-ce qu'ils ont déjà fait des travaux sur 47.2 et suivants? Je
pense que oui. On pourra faire l'inventaire des travaux. Et s'il y a des
opinions complémentaires ou des avis complémentaires, plutôt, à obtenir, moi,
je suis ouvert à les obtenir. Et il y aura une discussion franche entre les
syndicats puis les patrons, puis on obtiendra l'avis, puis ça pourra nous
guider dans un autre projet de loi qui sera plus centré sur la simplification
des procédures. Puis, oui, le CCTM est le forum approprié pour faire la
réflexion qui s'impose et la finaliser, cette réflexion.
M. Leduc : Parce qu'on sait
comment ça marche dans la CCTM... fait des travaux. Mais vous, vous pouvez
donner des mandats au CCTM.
M. Boulet : Tout à fait.
Alors, j'en discute, je vais obtenir l'inventaire des travaux qui ont été
effectués et, si besoin en est, on obtiendra un avis complémentaire.
M. Leduc : Ça serait quoi un
délai raisonnable pour que je vous relance là-dessus?
M. Boulet : Ah, mon Dieu!
Moi, je pense que je leur mets tellement de pression, au CCTM. Ils savent que j'ai
peu de patience, mais certainement quatre, cinq mois, six mois, là. Sûrement au
début de l'automne, collègue.
M. Leduc : Pour voir s'ils
ont déjà fait des travaux là-dessus?
M. Boulet : Non, non, pour...
Ah! non, non, non, l'inventaire des travaux, ça, ça peut prendre quelques
semaines, là, ça ne sera pas long, là.
M. Leduc : O.K. Au retour du
congé de la relâche, vous aurez pu avoir cette information-là.
M. Boulet : Ah! Bien oui, au
retour du congé de la relâche, oui, oui, je serai en mesure de dire : Il y
a eu des réflexions, il y a eu des échanges, il y a eu des rapports, il y a eu
des consultations...
M. Leduc : Oui s'il n'y en a
pas eu.
M. Boulet : Oui, exactement.
Tout à fait. À ce moment-là, moi, je pourrais leur donner leur mandat de nous
faire un avis.
M. Leduc : Intéressant. Je
vous tiens au mot. On se reparle rapidement sur ce sujet-là.
M. Boulet : Et ce sera fait.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup. Alors, si n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la
mise aux voix.
M. Leduc : Un vote par appel
nominal, s'il vous plaît, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Très
bien. Alors, est-ce que la question... est-ce que l'amendement introduisant le
nouvel article 0.1 du Code du travail est adopté? Mme la secrétaire, nous
avons une demande de vote nominal.
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?
M. Leduc : Pour.
La Secrétaire : M. Boulet
(Trois-Rivières)?
M. Boulet : Contre.
La Secrétaire : Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Contre.
La Secrétaire : Mme Mallette
(Huntingdon)?
Mme Mallette : Contre.
La Secrétaire : M. Dufour
(Abitibi-Est)?
M. Dufour : Contre.
La Secrétaire : Mme Poulet
(Laporte)?
Mme Poulet : Contre.
La Secrétaire : M. Morin
(Acadie)?
M.
Morin :Contre.
La Secrétaire : Mme Caron
(La Pinière)?
Mme Caron : Contre.
La Secrétaire : Mme Boivin
Roy (Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Abstention.
Alors, le nouvel article est rejeté.
Donc, nous allons poursuivre l'étude
détaillée. M. le ministre, nous serions rendus donc au Code du travail, les
articles 1 et 2. Je rappelle à tous les membres de la commission que vous
avez 20 minutes par intervention pour chacun des articles, évidemment, en
une seule intervention ou morcelée en plusieurs interventions en vertu de l'article 245.
Alors, je ne le rementionnais pas, à défaut d'avoir un temps supplémentaire
pour un article donné. M. le ministre.
M. Boulet : ...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Oui,
effectivement.
M. Boulet : Ça fait que j'allais
demander une pause, là, mais. O.K. Alors :
1° Le Code du travail est modifié par l'insertion,
après l'article 100, du suivant :
L'arbitre qui procède... En fait,
100.0.0.1 : L'arbitre qui procède à l'arbitrage d'un grief relatif à une
conduite de harcèlement psychologique au sens de la Loi sur les normes du
travail doit avoir subi... suivi, excusez-moi, une formation sur la violence à
caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par le ministre.
Commentaire. Donc, c'est un nouvel article
qui répond à une recommandation. C'est la recommandation 39, là, du comité
d'expertes. Donc, l'obligation pour un arbitre... puis là c'est large, dès que
c'est un grief de harcèlement psychologique. Pourquoi? Parce qu'il peut y avoir,
sans que ce soit mentionné, une connotation sexuelle...
M. Boulet : ...de suivre, puis
là, ça fait référence, collègue de Jean-Talon, là, à l'harmonisation, là, tu
sais, c'est plus que pas assez, donc de suivre une formation portant sur la violence
à caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par le ministre. Donc,
le ministre va prévoir, dans ces conditions, le contenu, la durée, les
personnes, les organismes autorisés à donner cette formation. Alors, ça
complète.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le ministre. Alors, M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, j'ai... en fait, j'ai quelques observations et une ou deux
questions pour M. le ministre, dans un premier temps.
Quand on regarde l'article 18 du
projet de loi, qui va modifier la loi sur les normes du travail, et qu'on fait
référence à l'ajout d'une politique, vous prenez la peine, M. le ministre,
d'indiquer dans la loi plusieurs éléments pertinents qui vont devoir être
inclus dans la politique. Par ailleurs, ici, on parle de formation. Mais plutôt
que d'inclure dans la loi certains éléments essentiels qui pourraient être
inclus dans la formation et donc qui, d'une certaine façon, pourraient suivre
la logique de l'article 18, vous vous réservez le droit de les déterminer
vous-même. J'imagine que ce sera éventuellement par règlement ou un décret du
gouvernement. Et puisqu'il s'agit d'un élément important, je comprends que...
je comprends qu'ici c'est un peu plus restreint, on parle de formation pour les
arbitres, mais il n'en demeure pas moins que, s'il y a des éléments qui sont
éminemment importants, je pense que ce serait intéressant de les mettre dans le
projet de loi, ce qui permettrait aux parlementaires d'en débattre ou de vous
faire des suggestions là-dessus. C'est mon... c'est ma première remarque, ma
première... ma première observation, puis qui est aussi une question, donc M.
le ministre pourra évidemment m'expliquer davantage pourquoi il a choisi de
décider... en fait, d'agir et de prendre cette décision-là, ici.
L'autre élément que j'aimerais soulever,
parce qu'on en a parlé beaucoup depuis le début de l'étude article par article,
et je fais référence au document, au mémoire du comité d'expertes, maîtres Cox,
Gesualdi-Fecteau et Lalamme, qui font une recommandation de modification
spécifiquement pour cet article, et je vous réfère, M. le ministre, à la page
16 de leur mémoire, et qui disent qu'en fait on devrait faire une référence aux
enjeux de violence à caractère sexuel, qui sont plus larges, et non pas en
vertu de la Loi sur les normes du travail, mais plutôt en vertu de la Loi sur
la santé et la sécurité du travail. Et ça, pour qu'il y ait une cohérence et
pour que votre modification proposée soit vraiment efficace. Et ça revient,
finalement, à toute la discussion qu'on a eue, là, depuis le début de la
journée, sur les différentes définitions. Et je me demandais pourquoi vous
n'avez pas ici suivi la recommandation du comité d'experts.
Donc, ce sont mes deux premières
questions, M. le ministre.
M. Boulet : O.K. J'en ai
discuté avec les expertes, puis c'est... la formation, c'est bien sûr la
violence à caractère sexuel, donc telle que définie dans la loi santé et
sécurité du travail, mais c'est imposé à tous les arbitres qui entendent des
griefs en matière de harcèlement psychologique. Pour les raisons que j'ai
précisées un peu plus tôt, souvent, ces griefs-là finissent par se transformer
en plaintes pour faire suite à des violences à caractère sexuel. Donc, je pense
que le but visé par les expertes était rencontré, puis c'est comme ça qu'on l'a
libellé.
• (15 h 40) •
Puis pour la formation, bien, la
formation, ce qui est souhaité, c'est que ce soit un article, une... des
activités de formation, conformément à la politique du CCTM. Donc, ça va être
déterminé par le CCTM, mais le ministre va consulter avant de déterminer le
contenu de la formation. Mais déjà, la formation est amorcée. La conférence des
arbitres et le CCTM, qui nomme... en fait, moi... le ministre du Travail, en
fait, nomme les arbitres sur recommandation du CCTM. Et le CCTM s'est engagé...
M. Boulet : ...à modifier sa
politique générale pour la confection puis la liste des membres en y ajoutant
l'obligation de formation. Donc, tout est attaché. C'est sûr que tout n'est pas
dans la loi, mais il y a... Puis c'est pour ça que je répétais souvent, dans
mes notes préliminaires : Il y a tellement de recommandations à saveur
administratives. On aurait eu 250 articles de loi. Puis, ce qui est
administratif, c'est CNESST... c'est CCTM, c'est la conférence des arbitres.
Mais ce qui était... ce qui est au cœur de la recommandation, c'est d'obliger
les arbitres à être formés sur les mythes et stéréotypes en matière... Est-ce
que je comprends que le collègue avait demandé... le collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : En
fait, ce n'était pas clair parce que... tout de suite, c'est ça, nous, on a
15 h 50, je pense qu'il est simplement allé à la chambre de bain,
peut-être.
M. Boulet : Ah! O.K. Parfait.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : M.
le député de l'Acadie.
M. Morin : Oui, parce que...
Parce que, compte tenu de votre réponse, M. le ministre, et je vous en
remercie, en ce qui a trait à la consultation, j'aurais... j'aurais un
amendement à proposer à cet article-là du projet de loi que nous pouvons
envoyer sur Greffier, puis je pourrai expliquer pourquoi par la suite.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Parfait.
Merci, M. le député. Alors, est-ce qu'il y a d'autres commentaires?
M. Leduc : En attendant que
ça soit envoyé? Oui, bien, je peux y aller.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : ...allez-y,
M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : J'ai dit quelque
chose de drôle?
M. Boulet : Non, non...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Non,
on se demandait...
M. Boulet : ...l'opportunité
d'être entendu.
M. Leduc : Bien oui, on y va
dans ce cas là!
M. Boulet : Vous... je savais
que vous alliez la saisir.
M. Leduc : Vous connaissez
mon tempérament, M. le ministre. J'ai des questions. Donc, 100.0.0.1, ça fait
beaucoup de points, mais bon, quand vous parlez de l'arbitre de griefs, en
fait, l'arbitrage de griefs, donc un arbitre de griefs, c'est bien. Est-ce que
les juges... Est-ce que les médiateurs vont être formés aussi?
M. Boulet : Oui, je vais
répondre à ça tout de suite. La lettre du TAT, s'il vous plait. Je l'ai lu, à
quelque part, mais c'est important que je la lise, parce que ça, ça fait partie
de ce qui est administratif. Je vais lire de quoi, là, ça va prendre deux
minutes.
Des voix : ...
M. Boulet : Ça ne sera pas
long, Mme la Présidente. Bon, ça va rassurer aussi ceux qui nous écoutent. Je
l'ai demandé. Et j'ai obtenu la confirmation, puis je pourrai vous transmettre
la copie, là, mais ça vient de la secrétaire générale du Tribunal administratif
du travail. C'est pour donner suite à la recommandation pour former et créer
une division spécialisée. Et c'est...
Des voix : ...
M. Boulet : Bon, le
tribunal... Le 15 novembre dernier, Mme Catherine Gareau-Blanchard, du
ministère de la Justice, a dispensé une formation intitulée Mythes et
stéréotypes avec lesquels composent les personnes victimes de harcèlement
sexuel et d'agression à caractère sexuel, à tous les juges administratifs, les
conciliateurs, ainsi que les assesseurs. Puis cette formation a été adaptée aux
besoins du tribunal. Puis elle, Mme Gareau-Blanchard, du ministère de la
Justice, elle dispense une formation aussi à tous ceux qui vont intervenir avec
le tribunal spécialisé... puis l'équipe spécialisée est en fonction. Donc, la
formation est déjà donnée. Puis c'est des juges administratifs qui détiennent
déjà l'expertise. Ils sont dans la division santé-sécurité. Ils sont dans la
division relations de travail puis les dossiers vont être traités par des
conciliateurs dument formés aussi. Puis cette équipe spécialisée là, bien, elle
va atteindre les objectifs recherchés par nos trois expertes pour la création
d'une division spécialisée. Puis il y a des pouvoirs prévus, là, dans la loi
constitutive du tribunal. Il va y avoir une conférence préparatoire. Il va y
avoir des mesures d'aide aux témoignages, des paravents...
M. Boulet : ...des témoignages
à distance, l'obtention d'une ordonnance pour remettre le nom de personnes
impliquées, s'il y a des préjudices, des ordonnances de non-divulgation,
non-publication non-diffusion, de l'accompagnement, puis, en tout cas, il y a
une série de mesures, mais pour répondre plus spécifiquement à votre question,
oui, c'est déjà fait.
M. Leduc : Donc, mais
pourquoi, dans la loi, on fait juste référence aux arbitres de grief?
M. Boulet : Bien, parce que
le code du... Il y a la loi, c'est une autre loi. C'était une recommandation
qui pouvait se mettre... devenir effective par la voie administrative. Dans le
Code du travail, ça concerne les arbitres, pas les juges. Il y a une autre loi,
qui s'appelle la Loi sur le tribunal administratif du travail, et on pouvait le
mettre en œuvre, comme j'avais expliqué à Me Laflamme... Fecteau puis... oui,
effectivement.
M. Leduc : Bien, donc, autre
question, pourquoi avoir choisi seulement cette loi-là et pas les autres?
M. Boulet : Bien, parce que
le Code du travail, c'était la recommandation, que les arbitres qui étaient
saisis de griefs en matière de harcèlement psychologique aient une formation
obligatoire, alors moi...
M. Leduc : D'accord, donc,
découlant de la recommandation du rapport Cox, vous avez dit : Je vais le
faire, mais, à défaut d'ouvrir les autres lois... ce qui n'aurait pas
nécessairement été plus long, j'imagine?
M. Boulet : Non, mais ça
pouvait se faire administrativement, puis ce qui pouvait se faire
administrativement... beaucoup de recommandations pouvaient se faire via la
CNESST et 90 % des recommandations administratives qui concernent la
CNSESST sont déjà en application, ça fait que...
M. Leduc : Mais ce qui est
administratif, ça peut aussi être arrêté n'importe quand.
M. Boulet : Ah! tout à fait.
Ça peut...
M. Leduc : ...tandis que,
dans la loi, tu ne peux pas faire ça.
M. Boulet : Ce n'est pas la
même procédure. Ce qui est administratif peut être évolutif, donc s'adapter, tu
sais. Par exemple, on se parle, nous deux, à l'occasion, puis s'il y a des
façons différentes de faire, on les change, on les adapte, vous l'avez vu pour
les travailleurs étrangers temporaires, pour l'escouade de prévention, pour les
services d'aide personnalisée, pour les entreprises. Ça, ça évolue, mais pour
ce qui est des recommandations du rapport Cox, je pense qu'on va l'appeler
comme ça, c'est les arbitres qui étaient visés.
M. Leduc : Qui étaient,
uniquement, identifiés.
M. Boulet : Dans le Code du
travail, oui.
M. Leduc : Et non les autres.
M. Boulet : Exact.
M. Leduc : Bon. Quand vous
dites «suivi une formation sur la violence à caractère sexuel dont les
conditions sont déterminées par...», de quelles conditions on parle?
M. Boulet : Les conditions,
bien, c'est ce que devra obligatoirement être...
M. Leduc : Le contenu?
M. Boulet : Le contenu de la
formation. Mais c'est déjà amorcé, puis, comme je mentionnais un peu plus tôt,
le CCTM s'est déjà engagé à modifier sa politique générale pour la confection
puis la gestion de la liste des membres arbitres. Comme vous savez, ils me font
des recommandations, que j'entérine, on nomme des arbitres, puis ça va être
autant les arbitres nommés par le ministre que les arbitres convenus entre les
parties, là. Souvent, dans les conventions collectives, il y a des arbitres
déjà identifiés. Quand ils ne sont pas identifiés... C'est les arbitres qui
décident, hein, c'est la particularité de la justice arbitrale, mais ils vont
ajouter une... quand la loi va être adoptée, ils vont ajouter une obligation de
formation, et c'est l'organisme qui va déterminer ce que constituent les
conditions, là, de formation.
M. Leduc : O.K., c'est ça, ça
fait que... ce n'est pas vous.
M. Boulet : Puis la
conférence des arbitres, on a eu des discussions avec eux autres, parce qu'ils
font partie des organismes qu'on a consultés, et eux aussi, ils en font déjà,
de la formation obligatoire, puis ils vont s'engager à l'adapter en fonction
des besoins du système.
M. Leduc : Ça fait que chacun
des groupes qu'on a parlé tantôt, là, les arbitres, les médiateurs, les juges,
ils vont s'autoréguler, ou c'est en lien avec votre ministère? Parce que
c'est...
• (15 h 50) •
M. Boulet : Bien, bon, le
TAT, c'est l'équipe spécialisée, des juges relations de travail puis santé et
sécurité, les conciliateurs, les assesseurs, les intervenants formés. Les
arbitres, c'est prévu dans le Code du travail, puis la CNESST, collègue, on a
annoncé, en septembre, à Montréal, un partenariat avec Maître Sophie Gagnon
puis l'équipe de Juripop, puis la CNESST a déjà formé, bien, a engagé 18
conseillers en santé psychologique pour l'identification des risques
psychosociaux, donc la violence physique, psychologique, incluant la conjugale,
familiale et sexuelle. Il y a déjà beaucoup d'ateliers de formation qui ont été
faits. Puis les intervenants, là, les conseillers en réadaptation, vous
connaissez ça, les agents d'indemnisation, ceux qui auront à gérer des dossiers
de violence...
M. Boulet : ...à caractère
sexuel seront formés. Les dossiers vont être traités prioritaires. Il y a
tout... je n'aime pas utiliser ce mot-là, là, mais un écosystème qui va
graviter autour de notre tronc commun, qui est notre projet de loi, pour
s'assurer que ça soit... ça nous permette d'atteindre nos objectifs qu'il y en
ait le moins possible, évidemment.
M. Leduc : Pourquoi vous
n'aimez pas ça dire «écosystème»?
M. Boulet : Bien, je trouve
que...
M. Leduc : Je suis curieux.
M. Boulet : Je trouve, c'est
surutilisé.
M. Leduc : Ah! c'est
surutilisé. O.K.
M. Boulet : Oui.
M. Leduc : Dernière question,
Mme la Présidente, on parle de quel délai pour que cette formation-là soit
construite, coordonnée et livrée, surtout?
M. Boulet : Bien, elle est
déjà donnée dans plusieurs cas. Évidemment, quand l'obligation va être
effective, quand ça va entrer en vigueur, ça va devoir se faire, il va y
avoir... je pense, c'est un... c'est-tu un délai de six mois?
Des voix : ...
M. Boulet : On va en discuter...
M. Leduc : Dans les délais
d'application.
M. Boulet : ...dans les
dispositions d'entrée en vigueur, oui.
M. Leduc : Mais j'ai entendu
un an à peu près, pour avoir complété l'ensemble des formations pour tout le
monde.
M. Boulet : Exact. Mais il y
a une bonne partie, sinon la majorité des formations qui sont déjà complétées.
M. Leduc : Est-ce que ça va
être une formation d'une seule fois ou il y aura des mises à niveau?
M. Boulet : Ah mon Dieu! Vous
me le faites dire. Il y aura des suivis puis il y aura des formations mises à
jour, là, parce que ça évolue tellement.
J'ai rencontré une dame qui a écrit un
livre, je ne sais pas si vous la connaissez, une dame qui est originaire de
l'Abitibi-Témiscamingue, elle vit dans la région de Montréal, elle a écrit un
livre sur les relations toxiques au travail puis en affaires, puis j'ai trouvé
ça tellement intéressant parce que... bien, elle, elle s'intéresse beaucoup à
ce qu'elle appelle les pervers narcissiques, là, mais elle a beaucoup
d'exemples de symptômes, de comportements pour permettre aux employeurs de
détecter des signes. Puis, tu sais, je le disais souvent, les risques
psychosociaux, là, tu peux avoir une dame qui travaille différemment, qui a des
ecchymoses, qui va souvent à la salle de bain, qui va souvent au téléphone, qui
sort souvent dehors, dont la qualité ou la quantité de travail se modifie. Il y
a beaucoup d'indices comportementaux ou de symptômes qui permettent de
détecter, hein? Puis, quand on parle de violence, ça va requérir ça, là, ce
réflexe-là, là, d'être attentif puis d'aider la personne.
Mais ça va faire partie de la formation...
là, je dévie un peu du sujet, là, de la formation des milieux de travail.
M. Leduc : Peut-être encore
une petite dernière, Mme la Présidente. Tantôt, quand on a parlé des médiateurs
ou des conciliateurs, je veux juste... certain qu'on a couvert tout le monde,
parce que, si je ne me trompe pas, conciliateur, c'est au tribunal, puis
médiateur, c'est à la CNESST.
M. Boulet : Exact.
M. Leduc : Tout ce beau monde
là va avoir cette formation-là?
M. Boulet : Absolument.
M. Leduc : O.K. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
beaucoup, M. le député. Alors, nous allons suspendre les travaux. M. le député,
je pense que vous êtes attendu au salon bleu bientôt. Sous entente des leaders,
évidemment, nous allons pouvoir suspendre. Et, au retour, il y aura
intervention de Mme la députée de La Pinière. Également, M. l'Acadie, vous
aurez un amendement pour nous.
Alors, les travaux sont suspendus. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 54)
16 h (version non révisée)
(Reprise à 16 h 03)
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
à tous. Alors...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci
à tous. Nous reprenons les travaux sur le projet de loi n° 42. Donc, nous
étions sur l'article 1 du Code du travail. Nous avions des interventions à
venir. Donc, on commence avec la députée de l'Acadie...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : La
Pinière, excusez-moi, oui. C'est vrai, tout à fait.
Mme Caron : Merci, Mme la Présidente.
Alors, je voudrais... j'aurais, en fait, deux questions pour le ministre. Tout
à l'heure, mon collègue de l'Acadie s'interrogeait sur les conditions qui
seront déterminées par le ministre pour la formation sur la violence à
caractère sexuel, s'interrogeait pourquoi on ne mettait pas... on n'avait pas
mis les conditions essentielles de cette formation-là dans cet article-là,
alors que, pour la politique, on met... on met les conditions qu'on souhaite
voir. J'ai cru comprendre, puis vous me corrigez si j'ai mal compris, que la
formation était déjà existante et qu'elle était... qu'elle avait été conçue par
le CCTM. Est-ce que c'est bien ça?
M. Boulet : Oui, en fait, on
n'a pas les compétences, nous, pour déterminer ce que sera la formation. Quand
on réfère aux conditions déterminées par le ministre, c'est, un, le contenu,
deux, la durée, trois, les personnes ou organismes qui vont être autorisés à
donner de la formation. Et, pour ça, ça prend des consultations. Et les
consultations, c'est le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre,
qui s'est déjà engagé, puis j'ai déjà une lettre que je peux vous lire aussi,
qui s'est déjà engagé à rendre la formation obligatoire dans la confection de
la liste des membres qui sont des arbitres. Puis, évidemment, il y a la
conférence des arbitres de griefs, qui regroupe tous les arbitres membres, qui
a déjà de la formation pour les arbitres en matière de harcèlement
psychologique, là, qui est plus large que la violence, parce que, comme je
mentionnais tout à l'heure, souvent le harcèlement a une connotation... pas
souvent, là, mais, dans des cas, là, une connotation sexuelle. Ça fait que c'est
essentiellement ça, la formation. Il faut une consultation additionnelle puis
il faut s'assurer que ceux qui sont membres soient bien formés, puis ça, c'est
déjà fait.
Mme Caron : Et c'est pour...
Là, on parle uniquement des arbitres pour les griefs.
M. Boulet : Des arbitres.
Oui. Oui.
Mme Caron : Est-ce qu'on a
quelque chose pour les autres...
M. Boulet : ...oui, autant, il
y a une équipe spécialisée qui est formée. C'est des juges, des conciliateurs,
des assesseurs puis des intervenants. Ils ont déjà eu la formation sur les...
stéréotypes, qui a été dispensée par une avocate du ministère de la Justice. Et
ça va être une équipe spécialisée qui va mettre en place les paravents, l'aide
au témoignage, la conférence préparatoire individuelle, la possibilité de
mettre fin, on va le voir plus loin, à la médiation, quand elle ne donne pas de
résultats. Puis l'autre bout, en amont, avec la CNESST, il y a 90 % des
recommandations administratives qui ont déjà été mises en application. Donc, la
formation est déjà dispensée aux agents d'indemnisation, aux conseillers en
réadaptation, ceux qui ont à décider en révision administrative. En fait, tous
les... puis, je pense, je vais te répondre, en partie, aussi au collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve, tous ceux qui sont saisis de dossiers de harcèlement
sont formés... Et ça va être une formation continue, parce qu'on me
disait : Est-ce que ça va être mis à jour? On appelle ça, de la formation
continue, donc, adaptée aux besoins. Mais oui, tout est déployé, collègue, je
vous rassure, la formation, si on veut que notre projet de loi donne des résultats,
ça passe, un, par la prévention puis, deux, c'est la formation.
Mme Caron : Et, pour faire de
la prévention, il faut être formé aussi...
M. Boulet : Totalement...
Mme Caron : ...c'est-à-dire
que l'un...
M. Boulet : ...totalement.
Puis l'autre affaire, collègue, la politique qu'on a, là, avec le contenu
minimal dans la loi, ça, c'est les milieux de travail, parce que ce n'est pas
le législateur qui va tout faire, puis ce n'est pas les juges, puis les
conciliateurs, puis les intervenants, en santé, sécurité, c'est... le principe
de base, c'est que c'est les milieux de travail qui se prennent en charge. Qui
est le mieux placé pour identifier un risque psychosocial? L'employeur, les
travailleurs, les travailleuses puis les syndicats, quand il y a des syndicats.
Ça fait que c'est pour ça que le contenu minimal a été raffermi
considérablement dans notre projet de loi pour s'assurer que les milieux de
travail se prennent bien en charge.
Mme Caron : D'accord. Puis,
quand vous avez fait allusion à 90 % des recommandations qui avaient été
mises en place, est-ce que...
M. Boulet : Oui, les
recommandations qui interpellaient la CNESST, on a annoncé, à Montréal, que
90 % avait été mis en place et on est allé au-delà de ça, parce que je
n'irai pas... puis je ne sais pas si, moi, je trouve, en fait, s'ils nous
écoutent, moi, je trouve qu'ils font un travail remarquable d'accompagnement,
notamment des personnes victimes qui sont marginalisées, des personnes qui
n'ont pas eu les moyens, puis je dis les moyens financiers, d'autres moyens de
se représenter, de se défendre. Donc, ça augmente considérablement les risques
de victimisation secondaire chez ces personnes-là qui sont seules, qui sont
souvent exclues, exclues du marché. Ça fait que Juripop va les accompagner,
puis ils ont des personnes, des avocats, des avocates, surtout des avocates,
mais ils vont accompagner, aider, à travers tout le processus, là, parce qu'il
y a des dédales, mais, pour leur permettre que leurs torts subis soient réparés
de la façon la plus humaine possible. Puis moi je suis fier de ce
partenariat-là puis je vais continuer de le répéter. Puis vous avez vu que le
deuxième groupe qui est venu devant nous, c'était Juripop, dans ce projet de
loi là, il joue un rôle qui est vraiment fondamental... pas que dans ce projet
de loi là, mais tout ce qui concerne la santé, sécurité, intégrité physique et
psychique des travailleurs, travailleuses d'un organisme qui, selon moi, est
vraiment distinctif au Québec.
Mme Caron : Puis, finalement,
dans ses recommandations qui ont été retenues, mises en œuvre, est-ce qu'il y
avait celle sur la durée, comme, que la formation soit d'au moins
4 heures, que ce soit offert en présentiel, comme... comme le recommandait
le rapport...
M. Boulet : Non, c'est plus
de consulter puis de s'assurer que les intervenants... Moi, je ne dirais
pas : Le conseiller en réadaptation X, il devrait suivre... tu sais, on va
le déterminer pour les arbitres de grief, parce que ça, c'est dans notre
périmètre d'action, mais ce n'est pas moi qui vais dire... d'ailleurs, puis les
mythes et stéréotypes, là, la formation donnée aux juges, conciliateurs et
assesseurs du Tribunal administratif du travail, le législateur ne pourra pas s'immiscer
dans tous les processus administratifs. Ce qui est important pour moi, c'est
que partout où il y a des personnes qui ont à côtoyer ou à gérer des dossiers
de harcèlement, violence à caractère sexuel... soient dument formés pour ne pas
que...
M. Boulet : ...tu sais, il y
a tellement de préjugés en cette matière et puis il y a tellement de mythes,
puis il y a tellement de... de pensées qui ne sont pas compatibles avec la
réalité vécue par la personne victime. ÇA fait que oui.
• (16 h 10) •
Mme Caron : Et ça va... ça va
comprendre aussi les tout petits employeurs?
M. Boulet : Ah! tout à fait.
Mme Caron : Tout le monde va
avoir accès?
M. Boulet : Mais les tout
petits employeurs, c'est intéressant puis, dans la... la Loi modernisant le
régime de santé-sécurité, quand ils ont moins de 20 employés, au lieu
d'avoir un gros programme de prévention, ils ont ce qu'on appelle un plan
d'action qui est simplifié. Mais ils doivent, dans ces milieux de travail là,
identifier les risques pour mieux les contrôler et les éliminer. Mais ça
s'applique à tout le monde, oui, tout à fait. Puis il y a des violences à
caractère sexuel dans tous les secteurs d'activité économique. Il y en a plus
dans certains secteurs, puis je ne vais pas les identifier. Puis parfois il y a
huit personnes, puis c'est... Il y a des risques et il faut faire de la
prévention, puis il faut former, puis ça... ça fait que... Mais il faut que ça
soit adapté à la réalité du milieu de travail. Si on va dans une entreprise
manufacturière où il y a 600 travailleurs, puis il y a plusieurs
départements, la réalité n'est pas la même qu'un petit atelier où les huit
travailleurs sont ensemble. Donc, il faut que ce soit adapté.
Mme Caron : Oui, tout à fait.
Puis il peut y avoir... il peut avoir un... un très petit milieu de travail,
une microentreprise où il y a le patron et il y a deux employés aussi qui... et
là et là ils sont... ils sont... ils doivent être formés également.
M. Boulet : Aie! mon Dieu.
Mme Caron : Et ça m'amène
à... au point que j'ai soulevé dans les remarques préliminaires : Qu'en est-il
des responsabilités des personnes qui reçoivent... qui profitent du programme
chèque emploi-service qui sont considérés légalement comme l'employeur?
Qu'est-ce que...
M. Boulet : On peut... on
pourra en parler, collègue. J'ai demandé à mon équipe de fouiller ce point-là.
Mme Caron : D'accord.
M. Boulet : Mais je vais
revenir à l'employeur avec deux... ça peut-être un homme qui a deux employés
qui travaillent... deux femmes qui travaillent pour lui. C'est important de — et
on va le voir plus loin, puis c'est le fun, les premiers articles d'un projet
de loi, parce que souvent on... on finit par traiter de tous les articles qui
suivent, puis ça va beaucoup plus vite après — mais de développer, au
Québec, une culture de signalement, parce que les gens... Vous avez vu le
sondage Léger qui a été commandé par la Commission de la construction du
Québec, 79 % des personnes qui sont témoins ou qui... ou qui subissent
menaces, intimidation, discrimination ne signalent pas. Pourquoi? Parce qu'ils
ont peur à des représailles ou ils ont peur de perdre leur emploi. Il y a un
article dans notre projet de loi, j'espère qu'on va tous y adhérer rapidement,
mais qui protège les personnes qui signalent ou les personnes qui collaborent à
un signalement, parce que ma voisine peut signaler, puis moi je collabore pour
témoigner ou... Mais il faut protéger les travailleurs et travailleuses puis il
faut que les personnes signalent parce que, quand on ne signale pas, c'est là
que les risques de victimisation secondaire s'accroissent, et que les dommages
et les effets corrosifs sont les plus importants. Ça fait que donc ça, c'est
important pour moi de le signaler, là. Puis le chèque emploi-service, je suis
assez sensible à ces... Je comprends que c'est prioritaire puis je vous ai
entendue au salon bleu, je vais faire fouiller ça, puis je ne vous dis pas
que... mais je veux voir, comprendre, là, comment on pourrait appliquer ça, là,
pour protéger le mieux possible.
Mme Caron : Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors,
M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, écoutez, à ce stade-ci, pour, je vous dirais, encadrer un
peu la... la discrétion du ministre, et puis pour reconnaître aussi
l'importance de ce type de formation-là, je comprends ici qu'on parle
particulièrement des arbitres, j'aurais un amendement à soumettre. Donc, je
pense que vous l'avez reçu, Mme, sur Greffier. Alors, si on peut l'afficher, je
pourrais le lire.
Donc, dans le cadre du projet de loi
n° 42, l'article 100.0.0.1, tel que proposé par l'article 1 du
projet de loi, est modifié :
1° par l'insertion, à la fin de la phrase
suivante «le ministre doit consulter des organismes ou....
M. Morin : ...professionnels
compétents et dûment reconnus dans l'élaboration des conditions de la
formation; et
2° par l'insertion, à la fin, de l'alinéa
suivant :
«Cette formation est délivrée par des
organismes aux professionnels compétents et dûment reconnus.»
L'article modifié se lirait comme
suit : 100.0.0.1. L'arbitre qui procède à l'arbitrage d'un grief relatif à
une conduite de harcèlement psychologique au sens de la Loi sur les normes du
travail (chapitre N-1.1) doit avoir suivi une formation sur la violence à
caractère sexuel dont les conditions sont déterminées par le ministre. Le
ministre doit consulter des organismes ou professionnels compétents et dûment
reconnus dans l'élaboration des conditions de la formation. Cette formation est
délivrée par des organismes ou professionnels compétents et dûment reconnus.
Et cette modification-là est proposée,
compte tenu de l'importance de la formation, mais effectivement parce que
l'arbitre devra être formé, parce qu'il aura à décider et trancher des litiges
qui impliquent évidemment du harcèlement psychologique ou même sur la violence
à caractère sexuel, donc de s'assurer que ce sont effectivement des
professionnels dûment reconnus qui pourront aider, finalement, le ministre dans
l'élaboration de la formation, puisque la formation ou les conditions de
formation seront déterminées par le ministre, qui ne sont pas dans la loi, ils
sont donc probablement inclus par règlement ou par décret, et qu'effectivement
cette formation sera donnée par des organismes ou des professionnels compétents
et reconnus, compte tenu de l'importance du sujet, s'assurer que ce sont des
personnes dûment compétentes qui vont être capables de donner cette
formation-là. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Merci,
M. le député. Alors, est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement?
M. Boulet : Est-ce qu'on peut
suspendre quelques minutes, s'il vous plaît, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Tout
à fait, M. le ministre. Oui. Alors, nous suspendons.
(Suspension de la séance à 16 h 17)
(Reprise à 16 h 19)
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Vous
pouvez y aller.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. En fait, je reçois bien l'objet de l'amendement et je suis d'accord
avec l'objectif. En même temps, je ne veux pas limiter le pouvoir du ministre,
qui est moi ou quelqu'un d'autre, de déterminer la durée, le contenu, les
personnes ou organismes autorisés à donner cette formation. Mais je ne veux pas
être le seul. Je veux... La consultation implique aussi que ce n'est pas que le
ministre, là. Le CCTM, la conférence des arbitres ont un rôle à jouer. Le CCTM
s'occupe de la réinscription, mais d'abord et avant tout de l'admission des
arbitres, et de me les recommander, puis la conférence des arbitres s'assure de
dispenser des services de formation aux arbitres. Ça fait que je ne veux pas
comme me limiter ou dire «doit consulter des organismes ou professionnels
compétents et dûment reconnus». Dans le fond, le CCTM va en identifier, des
organismes ou des personnes compétentes. Et la conférence des arbitres, il y a
beaucoup d'arbitres qui ont des spécialisations, qui ont fait des études au
Québec et à l'étranger et qui font des ateliers de formation pour le bénéfice
des arbitres. Ça fait que je veux simplement vous rassurer qu'il n'y a rien qui
ne se...
M. Boulet : ...ne se fera sans
consultation, mais, d'abord et avant tout, avec la collaboration du comité
consultatif travail et main-d'oeuvre. Puis bon, les leaders, vous savez que le
CPQ, la FCEI, les MEQ et la FCCQ sont là, la CSN, la CSQ, la FTQ puis la CSD
sont là et d'autres des acteurs patronaux et syndicaux. C'est le forum où
s'exerce le dialogue social au Québec. Et je veux que ça évolue, puis je veux
que, l'obligation de consultation, bien, dans ses fonctions inhérentes, le
ministre consulte. Ce n'est pas... c'est... Selon moi, la chose parle par elle-même.
Mais je vais m'asseoir beaucoup sur ces organismes-là, qui vont déterminer la
compétence, puis le jeu, puis la capacité, puis les habiletés des personnes qui
vont dispenser la formation. Mais je comprends très bien. Puis, si vous voulez
me le faire dire, bien, je l'ai dit, c'est certain qu'il y aura de la
consultation et c'est certain que la formation va être dispensée par les bonnes
personnes.
M. Morin : Alors, en fait, si
vous... en fait, si vous permettez, c'est ça, c'est... je reprends un peu la
balle au bond, et l'amendement a été quand même rédigé dans un esprit assez
large qui vous donne ou qui donne au ministre une... en fait, une marge de
manœuvre, mais qui rappelle l'importance de cette formation-là. Donc, au fond,
si vous nous dites, M. le ministre, que vous consultez, que ça fait partie de
votre travail, et je le conçois très bien, donc, qu'on puisse l'ajouter dans la
loi ne fait au fond que venir exprimer l'intention du législateur, de
l'importance et démontrer l'importance de la consultation, ce qui ne devrait
pas, normalement, vous limiter dans vos actions en tant que ministre.
M. Boulet : Est-ce qu'on peut
ajourner une minute? Moi, j'aimerais parler avec les collègues.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : On
va suspendre, M. le ministre. On va ajourner dans huit minutes, mais, pour
l'instant, on va suspendre.
(Suspension de la séance à 16 h 22)
(Reprise à 16 h 29)
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Alors,
nous reprenons nos travaux. M. le député de l'Acadie, donc, on vous cède la
parole rapidement.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, pendant la pause, j'ai eu la possibilité de discuter avec
mes collègues parlementaires et, suite aux discussions, et il reste très peu de
temps pour nos travaux aujourd'hui, donc, je vais retirer mon amendement et
j'en présenterai un autre lors de notre prochaine séance de travail.
La Présidente (Mme Boivin Roy) : Très
bien. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour le retrait de l'amendement
proposé par le collègue de l'Acadie? Il y a consentement? Très bien. Donc,
l'amendement est retiré. On attendra la prochaine fois votre prochain
amendement. Mais pour l'instant...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Boivin Roy) : C'est
ça. Il est 16 h 30, chers collègues. Alors, nous devons ajourner les
travaux de la commission sine die. Merci.
(Fin de la séance à 16 h 30)