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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 31 janvier 2024 - Vol. 47 N° 36

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail


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Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures vingt-sept minutes)

La Présidente (Mme D'Amours) : Alors, bonjour, tout le monde. Bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Avant de commencer officiellement la captation, je vous demanderais de vous nommer à tour de rôle de... pour valider le bon fonctionnement et... Bon, on l'a fait, ce travail-là. Je suis désolée. Je suis ma feuille de route.

Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous souhaite donc la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Martel (Nicolet-Bécancour) est remplacé par Mme Mallette (Huntingdon); M. Tremblay (Dubuc) est remplacé par Mme Poulet (Laporte); et Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey) est remplacée par Mme Caron (La Pinière).

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Nous entendrons ce matin les témoins suivants, soit l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail et la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité au travail.

Je souhaite maintenant la bienvenue à l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail. Je vous... Je vous rappelle, chers invités, que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange...

La Présidente (Mme D'Amours) : ...avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Sauvageau (Lyne) : Je vous remercie, Mme la Présidente. Je suis Lyne Sauvageau, présidente-directrice générale de l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail. Je suis accompagnée par M. Alain Marchand, qui est directeur scientifique à l'institut et qui est également professeur titulaire à l'Université de Montréal et directeur de l'Observatoire sur la santé et le mieux-être au travail, qu'on appelle communément l'OSMET. Je suis également accompagnée de Mme Iuliana Nastasia, qui est ergonome, ingénieure, chercheuse senior ici, à l'Institut de recherche en santé et sécurité du travail, et qui s'intéresse aux questions de réadaptation et de retour au travail. Comme le temps est compté, je vais donc initier tout de suite la présentation de notre mémoire.

En fait, qu'est-ce qui est l'institut? Rapidement, c'est un organisme scientifique à but non lucratif, on est... on existe depuis maintenant plus de 40 ans. C'est un organisme paritaire qui exerce sa mission de recherche appliquée dans le domaine du travail à travers quatre grands leviers scientifiques : donc, on a des chercheurs, on est un centre de recherche; on attribue aussi des subventions et des bourses à travers un fonds de recherche, un fonds subventionnaire pour les chercheurs internes, externes et également, là, qui vise à soutenir la relève scientifique à travers des programmes de bourses de maîtrise, de doctorat et des bourses postdoctorales; on a un service de laboratoire, donc on fait des analyses, on développe des méthodes en lien avec les contaminants en milieu de travail; et bien sûr on a une fonction de centre de liaison et de transfert. Donc, l'objectif de l'ensemble de nos travaux, c'est de bien sûr s'assurer que les milieux de travail québécois reçoivent les connaissances scientifiques appropriées à leurs enjeux et à leurs besoins. Donc, c'est la seule organisation qui est entièrement consacrée à la recherche en santé et en sécurité du travail au Québec.

• (11 h 30) •

Aujourd'hui, en fait, on vous... on a souhaité attirer l'attention de la commission sur l'importance des changements qui sont proposés à l'intérieur du projet de loi pour la réadaptation et le retour et le maintien au travail des personnes victimes de harcèlement et de violence à caractère sexuel. Donc, on a abordé la... notre mémoire en fonction... parce qu'on a été interpellés par la recommandation n° 8 du comité qui était présidé par Mme Cox et qui, en fait, souhaite ou nous interpelle pour procéder à l'élaboration d'une échelle de limitation fonctionnelle pour les personnes qui sont victimes de violences à caractère sexuel, parce que... et je vais laisser M. Marchand vous présenter en fait les deux grands enjeux qui nous... en fait, qu'on a vus à travers cette demande-là qui est formulée, là, indirectement à l'IRSST et qui en fait a des... a une importance, je dirais, quand on s'intéresse à la réadaptation et au retour durable au travail, là, des personnes qui ont été indemnisées et/ou victimes d'une lésion professionnelle de cette nature. Alain.

M. Marchand (Alain) : Oui, bien sûr. Donc, reconnaissance de la violence à caractère sexuel comme lésion professionnelle va impliquer la mise en place de processus de réadaptation et de retour durable au travail pour la victime. Évidemment, compte tenu de ce type de lésion, les conséquences peuvent être multiples et diverses, conséquences au plan physique, psychologique, somatique, sexuel et social. Évidemment, tout ça peut varier d'une personne à l'autre. Dans certaines situations, ça peut réellement provoquer un événement traumatique, et il y a une importance aussi de la dimension psychosociale pour le retour au travail. Les gens doivent retourner dans leur milieu, là où possiblement les... ou là où les agressions se sont produites, donc il y a une dimension importante qu'il faut prendre en considération.

Donc, deux grands enjeux, là, qu'on a soulevés. Il y a un premier enjeu qu'on a identifié, c'est qu'il y a très peu de connaissances sur les effets pour les victimes de violence à caractère sexuel en milieu de travail. Pour les besoins de ce mémoire, on a fait ici, à l'IRSST, une revue rapide de la littérature et on a pu voir qu'aucun outil n'existait, là, actuellement qui est spécifique à ce type d'évaluation. On a trouvé une seule revue systématique qui aborde ces...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Marchand (Alain) : ...des conséquences, mais ce n'était pas spécifique à la situation en milieu de travail, alors donc il y a vraiment des limites à cet égard-là. Et il existe cette fameuse... cette fameuse échelle de limitations fonctionnelles sur laquelle l'IRSST a travaillé, a publiée en 1991, mais on reconnaît, là, qu'il y a des limites à cette... à l'utilisation de cette échelle.

Donc, deux grands enjeux, ce qui fait que les approches pour nous aider à aborder cette question du retour et de la réadaptation... on a trois approches, là, qui ont été... qui ont été proposées, une approche basée sur les atteintes ou les déficiences, une autre qui est basée sur les limitations fonctionnelles et une autre qui porte surtout sur l'évaluation directe de l'incapacité. Donc, c'est... on va tenir en compte... on va faire une évaluation qui va tenir en compte l'interaction entre la personne et son environnement, on va prendre en considération l'état de santé et les déficiences de la personne ainsi que sa capacité à faire face aux exigences du milieu de travail. Et on peut dire que c'est une approche, là, qui est préconisée par l'Organisation mondiale de la santé.

Alors, pour être en mesure d'avancer, on pense, dans cette direction-là, de se donner une démarche d'évaluation pour les travailleurs et les travailleuses. Il nous semble, là, nécessaire, là, de procéder à la formation d'un groupe élargi qui va regrouper des experts en provenance de diverses spécialités et disciplines, avec évidemment une connaissance, là, de la problématique et des différents contextes de travail. Ce qui... Il faut arriver à développer de nouvelles connaissances sur les conséquences des violences à caractère sexuel sur les... pour les travailleurs et les travailleuses, là, on a vu, là, qu'il y a vraiment un manque de connaissance à cet égard, ce qui va nous amener aussi à tenter d'établir un consensus sur quels outils on doit retenir, quels tests on doit intégrer dans cette évaluation-là, qu'on peut faire, des capacités de la personne et évidemment en venir à une clarification des rôles et responsabilités des professionnels qui accompagnent les victimes de violences à caractère sexuel, en lien évidemment avec cette démarche.

Alors, étant donné notre mission à l'IRSST, là, de favoriser la recherche appliquée en matière de santé et sécurité, donc on se met à la disponibilité, là, des partenaires du monde du travail pour initier une démarche, démarche qui va mener au développement d'une procédure qui va nous permettre d'évaluer, de procéder à de bonnes évaluations pour la réadaptation et les retours au travail pour les personnes qui sont victimes d'une lésion causée par une violence à caractère sexuel.

Mme Sauvageau (Lyne) : Donc, avant de vous remercier, donc l'intention ou ce sur quoi on souhaite porter l'attention des membres de la commission, c'est qu'en fait la mise en œuvre du projet de loi nous interpelle dans le sens où on a un travail pour aider le retour au travail et le maintien durable au travail des personnes victimes de ce type de lésion. Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je suis maintenant prête à entendre le ministre pour sa période d'échange.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Sauvageau, M. Marchand, Mme Nastasia. C'est intéressant parce que vous abordez le projet de loi sous un angle différent. Évidemment, c'est à connotation réglementaire, parce que le projet de loi vise à établir une substance pour permettre plus de prévention, un meilleur accompagnement, un meilleur soutien, mais il y a aussi des mesures administratives. Mais souvenez-vous, quand on a fait le projet de loi modernisant le régime de santé et sécurité, constamment, quand on faisait des comparaisons, on réalisait que les durées d'absence suite à un accident ou une maladie professionnelle étaient beaucoup trop élevées au Québec, ce qui faisait que les coûts étaient beaucoup plus importants pour les employeurs qui paient les cotisations permettant d'indemniser les travailleurs, et on s'est assurés que les travailleurs, travailleuses blessés ou malades puissent accéder à des mécanismes de réadaptation, que ce soit social ou professionnel, le plus rapidement possible.

Donc, vous, ce qui vous interpelle, c'est particulièrement les conséquences, qu'est-ce que les violences à caractère sexuel peuvent engendrer chez la personne victime. Et je pense qu'il y a beaucoup de matière à considérer pour un éventuel règlement dans la mise en application des mesures administratives et pour le bénéfice des médecins qui font le suivi, là, que ce soient les médecins qui sont désignés par les employeurs ou les médecins traitants parce que...

M. Boulet : ...quand ils remplissent les formulaires sur les cinq éléments médicaux, il y a notamment les limitations fonctionnelles. Ça fait qu'il faut identifier les limitations fonctionnelles pour déterminer ce que la personne serait en mesure de faire. Parce que M. Marchand référait à un retour au travail durable, mais, pour permettre un retour au travail durable, ça prend un minimum de précision quant à l'identité des limitations fonctionnelles, qu'elles soient temporaires ou permanentes. Ça fait que je pense que la contribution de l'IRSST peut être extrêmement intéressante pour déterminer les tenants et aboutissants de ces limitations-là puis faire avancer la science médicale. Moi, je trouve que c'est un... une approche... puis on va certainement, Mme Sauvageau, s'en reparler, puis là je ne veux pas prendre tout le temps, là, mais je vais vous faire discuter.

Donc, vous savez qu'on propose, dans le projet de loi, que les programmes de prévention et de prise en charge soient intégrés... ou les politiques soient intégrées dans les programmes de prévention ou les plans d'action, là, dépendamment de la grosseur de l'entreprise. Est-ce que vous pensez que le contenu minimal que nous avons dans notre projet de loi sur la politique de prévention devrait inciter, dans la mesure où il est intégré au programme de prévention en santé et sécurité, qu'il y ait une recherche plus poussée sur ce que vous considérez comme étant les conséquences ou les limitations fonctionnelles découlant d'une violence à caractère sexuel? Je ne sais pas, Mme Sauvageau, M. Marchand ou Mme Nastasia, là, lequel ou laquelle veut répondre.

• (11 h 40) •

Mme Sauvageau (Lyne) : En fait, le propos ou ce qu'on souhaite... Effectivement, il y a une question, je pense, qui le... Là où on voit notre apport, là, où on voit la plus-value de ce que peut amener l'IRSST, c'est vraiment de... c'est la contribution dans la... je dirais, dans la façon d'évaluer la capacité de la personne à revenir au travail. Compte tenu de la complexité, je dirais, la nature de la lésion, les outils actuels sont limités dans notre... En fait, il y a deux choses, là, on l'a dit. Il y a la limite même de... je dirais, de l'outil qui est utilisé en ce moment puis il y a la volonté de mieux comprendre les conséquences pour ces victimes-là.

Est-ce que, quand on... Je pense, c'est ça, ce qu'on dit, c'est que la mise en œuvre du projet de loi va probablement nous amener à avoir, en définitive, beaucoup plus de personnes qu'on devra accompagner dans un processus de retour de... tel que vous le proposez. Est-ce que ça devrait être intégré d'emblée dans un... dans une approche de prévention? Je vous dirais peut-être que j'enverrais la réponse... le questionnement à M. Marchand, mais a priori, c'est peut-être confondre les genres, selon nous. On est vraiment... Nous, je pense qu'on a une... vraiment un apport spécifique à faire pour aider, je dirais, un retour réussi dans les milieux de travail puis une compréhension des conséquences pour les professionnels qui cheminent avec ces personnes-là.

Alain, je ne sais pas si...

M. Marchand (Alain) : Bien, on peut peut-être ajouter que l'ensemble des investissements qu'on peut faire en termes de prévention, de pratiques, de programmes, de formations, interventions politiques, et tout ça, va évidemment nous aider à faire une meilleure prévention en milieu de travail, et donc, évidemment, on salue les efforts qu'on peut mettre dans cette direction-là pour arriver à prévenir les cas de violence à caractère sexuel. Alors, que répondre... que oui? Je pense que plus on va en faire, mieux ça va être.

M. Boulet : ...Marchand, moi, j'élargirais le mandat, entre guillemets, en faisant une analyse un peu plus poussée de ce que peut être l'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, parce que ça, ça a un impact sur l'indemnité pour dommages corporels versée aux travailleurs, travailleuses. Et souvent on a l'impression, bon, ces violences-là à caractère sexuel peuvent engendrer des... non seulement des limitations fonctionnelles qui retardent le retour au travail, mais des atteintes permanentes qui empêchent de revenir dans ton travail prélésionnel, pré violence à caractère sexuel. Ça fait que moi, je pense...

M. Boulet : ...qu'au-delà des limitations fonctionnelles, il faut s'attarder aussi aux atteintes permanentes à l'intégrité physique et psychique. Et évidemment il va y avoir du travail de collaboration à faire avec les médecins qui pratiquent particulièrement en santé-sécurité. Puis impliquer la CNESST qui est ici présente, qui nous écoute aussi en même temps.

Moi, ça va compléter mes remarques, Mme la Présidente, mais je veux vous dire merci. Bravo pour votre volonté de contribuer. Puis évidemment, même si ce n'est pas dans le projet de loi qu'on va identifier les limitations fonctionnelles et/ou l'atteinte permanente, je pense que votre mémoire nous invite à avoir une vision de l'avenir. Et, dans la mesure où ces violences-là sont bien reconnues et bien indemnisées, il va falloir s'assurer par la suite qu'on détermine bien comment ça engendre des déficiences ou des limitations. Et ça, ça va être pour le bénéfice des travailleurs et travailleuses ainsi que des employeurs.

Une voix : ...

M. Boulet : Oui, ma collègue, ma collègue de Hull aurait une question.

La Présidente (Mme D'Amours) : Oui. Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?

M. Boulet : Oui, c'était terminé.

La Présidente (Mme D'Amours) : Ah, parfait. Donc, je vais céder la parole à la députée de Hull.

Mme Tremblay : Oui. Oui, bonjour. Lors de votre exposé, vous avez parlé, là, que, bon, il y avait très peu de choses qui se faisaient, qu'on allait être probablement innovateurs au Québec, là, en mettant en place cette échelle-là, mais, parmi, là, ce que vous avez recensé dans la littérature, là, j'aimerais ça... bien, s'il y a un petit quelque chose qui se fait ailleurs, c'est quoi? Puis de voir, tu sais, la perspective que ça ça va amener ici au Québec, puis comment ça va... Vous l'avez un peu expliqué, là, l'implantation, comment vous voulez implanter cela, mais est-ce que vous avez déjà aussi créé des liens avec des différents partenaires également? Donc, voir un peu ce que vous avez recensé puis les liens que vous créez ou que vous souhaitez créer avec les différents partenaires.

Mme Sauvageau (Lyne) : Alain, je crois que la question est tout indiquée pour toi.

M. Marchand (Alain) : Bon, alors, c'est ça, comme on est trois, on les prend à la balle. Voilà. Alors, bien, écoutez, oui, là, c'est une démarche évidemment qu'on va entreprendre, on a... Par exemple, l'IRSST est en lien avec un réseau en réadaptation, ce qu'on appelle le REPAR. Il y a plusieurs acteurs qui sont impliqués sur les questions de retour et de réadaptation en milieu de travail. Donc, on est assez bien outillés ici à l'IRSST avec des partenaires pour être en mesure de faire avancer, là, un programme pour nous aider à mieux faire nos évaluations, pour s'assurer que les personnes qui retournent, retournent au travail dans les conditions optimales.

Et la question, le point qui a été soulevé par M. le ministre sur essayer de comprendre davantage les incapacités permanentes que ces situations-là ont provoquées, là, il y a vraiment quelque chose, là, qu'on pourrait aussi développer avec des partenaires autour de nous, nos équipes de chercheurs, les collaborations qu'on a dans les... avec les universités, etc.

Une voix : Peut-être, pour ajouter... 

Mme Tremblay : Moi, j'aurais peut-être une dernière question, là. Au niveau des risques psychosociaux, est-ce que vous en avez identifiés qui sont plus... pour éviter, là, les séquelles, est-ce qu'il y en a que vous avez plus ciblés que d'autres qui peuvent éviter des séquelles dans les travaux que vous avez faits jusqu'à maintenant?

M. Marchand (Alain) : Bien, écoutez, moi, j'ai... comme chercheur, j'ai travaillé beaucoup sur ce qui amène les gens à développer des symptômes de détresse, de dépression, d'anxiété, d'épuisement professionnel. Pour avancer sur la question de savoir... pour les personnes qui ont vécu une violence à caractère sexuel et en particulier les conséquences par la suite, ça, il y a un peu plus... il y a davantage de besoins en matière de recherche, mais assurément que des observations qu'on va faire sur la nécessité du soutien social au travail, la nécessité de pas que ces personnes-là se retrouvent en situation d'isolation, ça va être des facteurs extrêmement importants, mais surtout de montrer dans quelle mesure que la direction ou l'entreprise accueille favorablement ce retour et met en place des conditions favorables qui vont permettre à la personne de bien retourner au travail.

Alors donc, évidemment, il y a... on a toute une connaissance sur les risques psychosociaux, là, je pourrais vous en sortir une liste d'une vingtaine, là, mais spécifiquement pour la question des personnes qui ont vécu une violence à caractère sexuel, je pense qu'on a besoin d'avancer encore un peu plus pour mieux comprendre le rôle des risques psychosociaux en lien avec le développement de conséquences particulières pour ce type de lésions.

Mme Tremblay : Donc, votre échelle, vous allez... Bon, vous avez parlé d'une certaine échelle, donc de bien justement établir...

Mme Tremblay : ...comment la personne, tu sais, elle est touchée, puis où est-ce qu'elle en est, ça permettrait à l'employeur justement de mieux adapter, selon ce que je comprends, là, le retour au travail aussi de la personne puis de favoriser finalement la réussite, là, de ce retour-là.

M. Marchand (Alain) : Assurément, avec les bons outils, on devrait arriver à faire un excellent retour au travail de la personne. Mais on a besoin de travailler dans cette direction-là par contre.

Mme Tremblay : Parfait. Bien, je vous remercie.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup à vous trois et donc aux personnes qui vous accompagnent en filigrane, d'être virtuellement, donc, présents, donc, pour ces consultations particulières, merci d'avoir accepté l'invitation. Je pense qu'à la fin de votre exposé, juste avant, donc, la période d'échange avec le ministre, vous avez bien embouteillé l'essence de votre démarche et du rôle, là, que vous entrevoyez jouer. Je l'ai noté, là, vous disiez, donc, aider au retour au travail et au maintien durable des personnes victimes de ce type de lésion. Donc, on comprend vraiment que c'est dans ce cadre-là que vous voyez votre champ d'intervention. Donc, à ce titre, la première question que j'ai pour vous, c'est de voir, donc... et généralement, tu sais, vous, quand vous avez pris connaissance, donc, du projet de loi n° 42 tel que rédigé, est-ce qu'il y a des articles qui limiteraient, qui... ou qui empêcheraient, là... mais je n'irais même peut-être pas jusqu'à dire ça, mais qui... qui, pour vous, là, seraient peut-être un frein, donc, à cette... à cette mission-là? Donc, s'il y a des articles qui pourraient être mieux formulés, ou des amendements qui devraient être déposés pour permettre, là, que le cadre, donc, qui vise à... comme l'indique le libellé du... du titre du projet de loi, donc prévenir et combattre, donc, le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail. Est-ce qu'il y a des articles qui limitent le rôle, là, d'aider au retour au travail et au maintien durable?

• (11 h 50) •

Mme Sauvageau (Lyne) : Je n'avais pas... pas dans la lecture que nous, on en a faite. Puis vraiment on a voulu... surtout, on a voulu attirer l'attention sur des éléments qu'il fallait mettre en place au moment où le projet de loi, par exemple, serait adopté ou mis en œuvre, les éléments qui... sur lesquels il nous semblait en fait que la lumière n'était pas mise, mais c'est... ça ne... et qui interpellait notre rôle à nous comme institut de recherche. Donc, je ne sais pas si c'est... c'est clair. C'est qu'en fait la lecture qu'on fait du projet de loi, il n'y a rien qui limite, là, au contraire, toutes les dispositions sont là pour favoriser la réadaptation et le retour durable. Je veux dire, toutes les... toutes les... je veux dire, on a des lois, il y a des mécanismes qui sont en place, on pense, nous, qu'on a un rôle à jouer pour spécifiquement venir mieux appuyer les professionnels qui sont investis du côté de la réadaptation et du retour durable au travail à travers un travail qu'on a, je dirais, déjà... qu'on a amorcé en 1991. Et on voit que cette échelle-là qu'on a développée, elle est très bien acceptée, mais il y a moyen de l'améliorer, et il y a moyen de la spécifier, ou, en tout cas, il y a eu du travail à faire pour tenir compte des risques psychosociaux notamment, et encore davantage, là, je dirais, le travail est encore peut être plus grand quand on veut à déterminer les capacités de la personne à revenir en milieu de travail lorsqu'elle a été victime de lésions de type violences à caractère sexuel.

Alors, nous, on voit qu'il y a... il y a peu de choses dans la littérature, on... vous le verrez, là, peut-être à la lecture approfondie du mémoire, il y a peu de choses sur cette dimension là des violences à caractère sexuel en milieu de travail lorsqu'on veut effectivement favoriser un retour durable. Donc, là, nous, on voit qu'il y a une contribution de connaissances originales à faire pour permettre de mieux soutenir les professionnels qui seront appelés peut-être de plus en plus, ou en tout cas qui seront appelés à faire ce travail de retour, avec, je dirais, des guides, des tests qui sont standardisés, bien reconnus.

Mme Cadet : Puis... puis, oui, j'ai vu ça dans votre mémoire. Effectivement, donc toute la question du déficit de littérature, puis c'est certain, puis j'imagine que c'est votre approche aussi. Donc, vous accueillez... bon, vous accueillez, quand même, donc, favorablement, le dépôt du projet loi dans une perspective de recherche et de bonification de la littérature. Parce que, bon, avec...

Mme Cadet : ...le... je vous... donc, je vous vois hocher de la tête, donc, en précisant, donc, les différents mécanismes en matière de prévention des VACS, bien, ça vous permet, donc, d'avoir, donc, plus de cas et de bonifier, donc, l'échelle dont vous parliez précédemment. C'est bien ça? Parfait.

Ensuite, bien, l'autre aspect, donc, ça, je pense que c'était plus dans vos... d'échange avec le ministre dont vous parliez, donc, du rôle de prévention, donc j'avais peut-être un peu, donc, la même... la même question. Donc, en mettant mon chapeau de législateur, donc, en pensant, donc, à la prochaine étape pour nous, là, qui va venir, là, qui va être de l'étude détaillée du projet de loi, donc, c'est aussi sous cette loupe-là que je vous pose... je vous pose ces questions-là, donc, sur l'aspect prévention aussi, est-ce que... s'il y a... est-ce qu'il y a des moyens de... des avenues de bonification, là, que vous voyez, que vous dites : Ah bien... de bonification, tu sais, d'une part, puis... puis... puis en vous parlant puis en échangeant aussi sur votre rôle, des éléments qui vous... que vous dites : Ah, bien ça, ça nous permettrait, là, de mieux avoir accès aux données ou mieux pouvoir... Bien, je pense, c'est vraiment l'accès aux données, là, vraiment, donc, être capables, donc, de colliger le tout, là, pour bonifier la littérature. Donc, le volet prévention mais aussi donc le volet sur lequel on vient d'échanger, sur la bonification de la littérature, est-ce qu'il y a des éléments qui vous faciliteraient la tâche à cet égard-là?

Mme Sauvageau (Lyne) : Alain, je pense que je... toute la question peut-être d'accès aux données, c'est peut-être un petit peu dans... c'est davantage dans tes... en lien spécifiquement peut-être avec cette préoccupation-là, je dirais, de... Je te laisse... je te laisse la parole, Alain, sur ces éléments-là.

M. Marchand (Alain) : Oui. Bien évidemment, là, il y a un besoin de connaissances nouvelles, ça, c'est clair, mais il y a un besoin aussi, peut-être, de... d'une meilleure surveillance de comment va évoluer la situation en matière de... en matière de réclamation de lésion. Ici, à l'IRSST, on a pour mission, entre autres, de surveiller comment se profilent au fil du temps les lésions professionnelles et donc d'avoir accès à des informations qui vont nous permettre de voir où sont les principaux problèmes, où sont les foyers de lésions professionnelles à caractère... à caractère sexuel, les différences hommes/femmes selon l'âge, selon les secteurs, selon la profession. Donc, nous, on peut évidemment arriver à mieux documenter cette évolution-là de ce profil-là, lésionnel, à partir des informations de surveillance qu'on a à l'IRSST à partir des données de la commission, entre autres, où on fait ces évaluations, mais aussi d'autres données qui pourraient être disponibles, des données plus larges auprès de la population, on pense aux données de l'Institut de la statistique du Québec, des données de Statistique Canada. Alors donc, il y a vraiment là un intérêt marqué pour être en mesure de mieux suivre puis de voir aussi, en fonction des interventions qu'on fait, comment la législation, par exemple, a des effets pour nous aider à réduire ces lésions-là au fil... au fil du temps.

Une voix : Là-dessus... Ah...

Mme Sauvageau (Lyne) : Peut-être j'ajouterais qu'en fait... puis là j'élargis peut-être à toute la notion de risque, prévention, santé mentale, risques psychosociaux, ce qu'on voit, c'est que, oui, il y a beaucoup de littérature sur la connaissance de ces risques-là, ce qu'on a moins, en fait, en termes de prévention, c'est quelles sont les interventions efficaces en milieu de travail pour, je dirais, prévenir l'apparition de lésions pour soutenir les travailleurs. Donc, la connaissance des risques, elle est là, hein... (panne de son)... la connaissance des interventions qui sont... (panne de son) ...efficaces à mettre en œuvre en milieu de travail. Là, il y a effectivement, je dirais, des... il y a encore des... je pense, de la recherche à faire, des connaissances à avoir, et c'est peut-être dans le champ de la... je dirais, de la mise en œuvre aussi, même en prévention, des interventions qu'on sait efficaces en milieu de travail, il reste du travail à faire... il reste de la recherche à mener.

Mme Cadet : J'ai une question aussi sur le délai de présomption... donc, à l'article 28.0.2, dans le libellé du projet de loi, d'une maladie d'un travailleur qui survient dans les trois mois après que ce dernier ait subi de la violence à caractère sexuel sur les lieux du travail est présumé être une lésion professionnelle. Est-ce que le... en regard, là, de ce que vous mentionnez dans votre mémoire pour élaborer un plan de réadaptation individualisé adéquat puis d'évaluer, donc, les conséquences multiples que peuvent entraîner les VACS, est-ce que ce délai-là, est-ce qu'il est trop court, selon vous, il est trop long? Comment est-ce que vous l'évaluez...

Mme Sauvageau (Lyne) : ...je ne sais pas si nous, spécifiquement, on a... cette question-là, en fait, elle est... elle est très, très pointue, là. Est-ce qu'on a, nous, des données probantes en lien avec ça? Je ne peux pas vous... je ne pense pas que...

Mme Cadet : Pas encore.

Mme Sauvageau (Lyne) : C'est ça, et voilà. En revanche, sur les liens, peut-être, Alain, je sais que toi, tes travaux... mené potentiellement, là, sur la question des liens entre les... les lésions, par ailleurs, et de ce type de violence là, de lésions...

La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes, M..

M. Marchand (Alain) : Oui, bien, rapidement, écoutez, on a... on sait que... d'abord vécu une lésion a des conséquences sur le plan physique, mental. Et quel est le délai? Ça, je ne serais assurément pas en mesure de vous répondre là-dessus, là, on aurait possiblement besoin de connaissances là-dessus aussi.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci infiniment. Nous sommes maintenant rendus au député d'Hochelaga-Maisonneuve pour sa période d'échange.

M. Leduc : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour à vous trois. Merci d'être là. J'aimerais d'abord... question plus générale, comprendre un peu comment ça fonctionne votre récolte de données. Tout le monde dit qu'il manque des données. Quelles sont les données des fois qui nous... qui nous manquent? Qu'est-ce qu'il faudrait faire pour mettre la main dessus? C'est-tu plus le traitement des données qui est difficile ou qu'il manque de temps? J'aimerais ça vous entendre un peu là-dessus.

• (12 heures) •

M. Marchand (Alain) : C'est une question qui est fort intéressante. Écoutez, on a actuellement, nous, à l'IRSST, nous, accès aux données de la commission, on a certaines informations que collige la commission qui nous permettent de comprendre, de faire des profils en matière de... en matière de lésions. C'est sûr que ce qui manque au Québec, ce sont des enquêtes plus spécifiquement orientées santé, sécurité du travail, là, des enquêtes à grand déploiement, avec un nombre appréciable de personnes sur le marché du travail qui répondent, avec des volets qu'on pourrait explorer spécifiquement sur des questions de l'exposition à des violences à caractère sexuel, par exemple, là, ou autres risques psychosociaux.

Sur ce plan-là, je pense qu'on pourrait faire un effort supplémentaire, là, en termes de société pour mieux documenter les réalités vécues par les personnes en milieu de travail. On a évidemment l'enquête sur la santé de la population, mais c'est un tout petit volet qui est dédié... qui est dédié au monde du travail. On avait vraiment besoin d'avoir des enquêtes beaucoup plus importantes en matière de santé et sécurité, avec des... vraiment des problématiques spécifiques au monde du travail. Alors là, comme vous pouvez le voir, là, il y a vraiment un besoin, là, en matière de données pour être en mesure d'encore mieux documenter, là, les différentes expositions auxquelles sont soumis les travailleurs, travailleuses.

M. Leduc : Si je comprends bien, vous me corrigerez, mais ce n'est pas tellement l'accès aux données brutes, l'enjeu, que le temps et les ressources pour les traiter puis en faire une recherche x.

M. Marchand (Alain) : Bien, je dirais : Pas tant les traiter que les avoir sous la main, donc avoir des données disponibles, avoir des données d'enquêtes récentes sur des populations larges d'employés sur le marché du travail. Ces informations-là sont très peu disponibles, mais une fois qu'elles sont disponibles, c'est facile de les analyser.

M. Leduc : Donc, c'est l'inverse, c'est la collecte de données qui est un problème, qui est difficile. Qu'est-ce qu'il faudrait faire alors pour améliorer cette collecte-là? C'est-tu des plus de ressources, c'est-tu un meilleur maillage avec la CNESST?

Mme Sauvageau (Lyne) : Je vous dirais que ce dont... ce à quoi M. Marchand fait référence en ce moment, c'est davantage... c'est-à-dire qu'on a plusieurs types de données qui sont accessibles, mais qui sont parcellaires, qui couvrent des aspects parfois restreints pour des sous populations. Ce qu'on n'a pas, c'est vraiment comment est-ce qu'on peut relier ça peut-être à des portraits d'ensemble, c'est-à-dire qu'on a des réalités qui sont toujours particulières. Ce qu'on n'a pas, c'est... c'est un petit peu l'idée, comme le recensement, hein? On...pourriez faire une... l'idée, c'est d'avoir des données qui nous permettent de voir l'ensemble des populations de travailleurs. Quand on... et les données, les enquêtes populationnelles, faites par exemple par l'Institut de la statistique du Québec, n'ont pas vraiment jusqu'à présent été dirigées vers cette population de travailleurs, vers l'ensemble des travailleurs. Ce qui fait qu'on a des données populationnelles, dont une partie qui concerne le travail, ou alors les données de la CNESST qui regardent une autre réalité. C'est comment on arrive à faire un portrait d'ensemble de tout ça qui est parfois difficile. Donc, une enquête, je dirais, de nature populationnelle, qui vient parler du monde du travail...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Sauvageau (Lyne) : ...ou qui vient interroger les gens sur le monde du travail nous permettrait d'avoir cette espèce de...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.

Mme Sauvageau (Lyne) : Ça nous permet de passer de l'un à l'autre. Merci...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup.

M. Leduc : Merci beaucoup. Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vais céder maintenant la parole au député de Jean-Talon, s'il vous plaît.

M. Paradis : Bonjour. Je vous remercie de votre mémoire. Je dois dire que j'ai beaucoup appris en le lisant. Si je comprends bien, ce que vous dites, c'est que, même pour une personne qui n'a pas été victime de violence à caractère sexuel, la procédure d'évaluation des limitations fonctionnelles ne fait pas l'unanimité, puis là vous dites : Il y a beaucoup de travail à faire, notamment maintenant quand on se penche sur le cas spécifique des violences basées sur le genre.

Je vais m'inscrire dans la foulée des questions de ma collègue la députée de Bourassa-Sauvé en vous demandant : Est-ce que vous avez des recommandations à nous faire, nous, à titre de législateurs? Est-ce qu'on devrait, dans le projet de loi qu'on est en train d'analyser, donner... se donner des devoirs, donner des devoirs au gouvernement ou à une institution particulière pour mieux équiper, notamment je pense ici aux employeurs du Québec, pour prévenir d'abord en matière de prévention, mais aussi pour être capable de mieux accompagner les victimes pour un retour le plus serein possible, le plus digne possible en milieu de travail? Est-ce qu'il y a des choses qu'on peut faire? Parce que vous parlez d'études par des experts, mais, nous, comme législateurs, à quoi on devrait penser, en retenant aussi qu'il y a des employeurs qui sont des toutes petites organisations, des toutes petites PME et qui ont souvent... qui sont démunies face à ça?

Mme Sauvageau (Lyne) : Écoutez, spécifiquement pour... dans le projet de loi, à titre de... je dirais, de représentants de la population ou de parlementaires, c'est sûr que notre point de vue à nous, c'est, ce qui est important, de fonder les actions et les interventions sur des données probantes. Il arrive parfois que le législateur est devant les données. Là, je dirais, on a besoin, pour mieux vous accompagner dans le processus, de déployer des recherches dans le domaine. Et j'attirerais votre attention sur l'importance peut-être d'investir dans le domaine ou dans... pour tout ce qui s'appelle développement de nouvelles connaissances, recherche, pour nous permettre de mieux vous accompagner dans des choix de société. Ça serait le... Ça serait ma réponse. Est-ce que c'est... on doit l'inscrire dans ce projet de loi? C'est plutôt une attention générale à laquelle peut-être, là, comme... comme représentants... sur l'importance de la recherche et de... sur le... et l'importance du développement de connaissances. En santé et en sécurité du travail, je dois dire qu'au Québec, moi, je suis très fière, là, qu'on ait un institut, des gens qui se consacrent à cette recherche-là. Au Canada, c'est unique. On devrait capitaliser sur cette force-là au Québec. Et puis voilà. Donc, je vous remercie.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Merci infiniment, chers invités. Maintenant... Merci pour votre contribution à nos travaux.

Maintenant, je souhaite la bienvenue à la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et puis nous commencerons la période d'échange. Je vous invite donc à vous présenter et à nous lire votre exposé.

Mme Oudar (Manuelle) : Merci, Mme la Présidente. Alors, d'abord, permettez-moi de vous remercier ainsi que les parlementaires, là, pour l'invitation ce matin. Je me présente, Mme Manuelle Oudar. Je suis présidente-directrice générale de la CNESST, la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail. Je suis accompagnée aujourd'hui de Me Mélanie Vincent, vice-présidente aux normes du travail, M. Claude Beauchamp, vice-président à l'indemnisation et à la réintégration au travail, et de M. Pierre Cyr, directeur général de la performance et de l'innovation, alors ici avec moi pour informer les parlementaires et répondre à vos questions.

Par sa mission, vous le savez, la commission s'inscrit dans la réflexion et dans la recherche de solutions afin de prévenir le harcèlement sexuel et les agressions à caractère sexuel dans un contexte de travail, bien sûr, dans la mission de la commission, notre mission étant aussi d'accompagner les victimes et... qui font appel à nos services.

Selon le rapport des trois chercheuses, d'ailleurs que je remercie chaleureusement, Mme Cox, Mme Laflamme, Mme Gesualdi-Fecteau, au sujet du harcèlement sexuel dans le milieu de travail, rapport qui a été rendu public au printemps, elles constatent que les comportements sexualisés, inappropriés ou discriminatoires sont encore monnaie courante. Selon le rapport, au Québec, presque une personne sur deux, puis je pense que vous l'avez cité plusieurs fois ici depuis...

Mme Oudar (Manuelle) : ...hier, 49 % ont observé ou subi un comportement sexualisé, inapproprié ou discriminatoire en milieu de travail au cours des 12 mois précédant le sondage effectué par Statistique Canada. Quant aux personnes visées personnellement par un comportement sexualisé ou inapproprié, j'ajoute que les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes à indiquer avoir subi un comportement sexualisé, inapproprié ou discriminatoire au cours de la dernière année. Selon nous, c'est inacceptable. Selon elles aussi, les chercheuses, il faut que les milieux de travail améliorent la prise en charge des enjeux de harcèlement sexuel et d'agressions à caractère sexuel, et ce, par la formation, la prévention, mais aussi en ce qui concerne le processus de traitement des plaintes. Et c'est là que la CNESST souhaite rappeler l'importance de prendre soin des victimes et de toujours améliorer nos pratiques. C'est pourquoi nous, on a collaboré de façon très étroite avec les chercheuses, à la fois pour examiner en profondeur nos façons de faire, mais aussi pour changer certaines pratiques. Et on a conclu également une entente de partenariat avec Juripop en décembre dernier.

Dans la foulée de la mise en œuvre des recommandations, on a effectué des travaux sur notre offre de services aux victimes de harcèlement sexuel ou d'agressions à caractère sexuel. Comme vous le savez, l'offre de services à la commission, elle s'étend du début de l'appel des victimes auprès de la commission jusqu'à leur représentation devant les tribunaux, où on assure sans frais la représentation des victimes devant les tribunaux.

• (12 h 10) •

Il est important de bien les accompagner, les victimes, et, sur un total de 82 recommandations qui se trouvent dans le rapport, 23 concernaient des améliorations administratives, des améliorations qu'on a déployées au cours de l'automne dernier. Donc, à ce jour, 90 % de ces recommandations sont mises en place. Elles ont d'ailleurs été présentées au conseil d'administration, parce que la question a été posée hier par quelqu'un en audition, elles ont bien été présentées au conseil d'administration en septembre 2023, et même je remercie les chercheuses parce qu'elles sont venues faire la présentation de leur rapport aussi également.

Alors, ces recommandations et celles qu'on a mises en œuvre concernent plus particulièrement la formation continue pour l'ensemble des intervenants, l'amélioration du processus de traitement des réclamations, le développement aussi des liens institutionnels avec les autres organismes. On a aussi optimisé la prise en charge pour offrir un service personnalisé aux victimes de violences à caractère sexuel. On a consolidé aussi une ligne de traitement. On a une équipe de six agents aussi dédiés uniquement aux réclamations. Alors, c'est des exemples de changements qu'on a procédé aussi au cours des... de l'automne.

Je voudrais vous parler des risques psychosociaux, parce que vous avez certainement vu qu'on a lancé une grande campagne publicitaire à l'automne dernier. Pour nous, protéger la santé, assurer l'intégrité physique et psychique des travailleuses, des travailleurs, c'est au cœur des lois du travail. Une attention particulière a donc été apportée aux risques psychosociaux, particulièrement sur les violences physiques et psychologiques, qui incluent la violence conjugale, familiale ou à caractère sexuel. À titre d'organisme gouvernemental de la mise en application des lois du travail, on a priorisé nos interventions qui permettent de soutenir le développement d'une culture de prévention. On a fait en sorte que les... la prise en charge soit aussi adéquatement assurée par les milieux de travail.

Hier après-midi aussi, vous avez eu le dépôt de la planification stratégique de la CNESST à l'Assemblée nationale, planification qui a été adoptée par le C.A. en décembre dernier. Donc, vous allez voir qu'il y a un indicateur très pertinent, le 1.2.2, qui est effectivement l'obligation des employeurs de se doter d'une politique de prévention de harcèlement psychologique et sexuel. Alors, les choses tombent à point.

Je... Le temps m'est compté, Mme la Présidente, alors je vais aller rapidement sur les points qu'il me reste à traiter. Comme je vous le disais tout à l'heure, donc, on a annoncé une grande initiative et nos... le lancement de nos travaux au niveau de la promotion de la santé psychologique. On a ajouté aussi 18 conseillers et conseillères en santé psychologique à temps plein qui oeuvrent exclusivement à la promotion de la santé psychologique au travail. Puis, en parallèle, le travail en synergie est fait avec les spécialistes des normes du travail pour se concerter dans les actions à fournir, les renseignements aussi à donner puis les recours plus spécifiques en matière de harcèlement. À ce jour, c'est 300 activités qui ont été réalisées auprès de 800 employeurs, presque...

Mme Oudar (Manuelle) : ...travailleuses et travailleurs qui ont été rencontrés en 2024. On va hausser nos activités à 900. Donc, avec la campagne publicitaire, l'ajout des conseillers en santé psychologique, le rayonnement de ces actions est au rendez-vous.

Si l'Assemblée nationale adopte le projet de loi n° 42, la commission veut assurer les parlementaires qu'elle répondra présente pour informer, accompagner les milieux de travail, diffuser aussi les nouvelles mesures. On veillera à faire connaître les nouvelles obligations aussi auprès des employeurs, des travailleurs, des partenaires, des travailleuses également dans le cadre de toutes nos actions, là, de communication, de prévention, de surveillance, toutes nos initiatives en matière de promotion, de partenariat et d'accompagnement des milieux de travail.

Ça complète ma présentation. On va être disponible pour répondre aux questions. Comme vous avez pu le constater, on a à coeur d'informer les milieux de travail, de les accompagner dans la compréhension et l'application conforme des lois.

Moi, je profite des quelques secondes qui me restent pour rendre hommage aux victimes qui osent porter plainte. Je trouve qu'on est là pour ça aussi. Et aussi remercier les membres du personnel de la commission, mais aussi tous ceux qui oeuvrent auprès des victimes, je pense aux CAVAC, je pense aux organismes communautaires, mais aussi aux corps policiers, on n'en a pas beaucoup parlé aussi aujourd'hui, il y a des gestes qui nécessitent aussi qu'une plainte à la police soit portée. Alors, je remercie l'ensemble des acteurs et actrices de la société québécoise qui oeuvrent auprès des victimes. C'est un grand pas pour la réhabilitation. J'en profite pour remercier aussi les membres du personnel de mon organisation, des membres que j'apprécie énormément, pour lesquels j'ai énormément d'admiration, ils font un travail formidable, là, dans tous ces dossiers pour soutenir et aider les milieux de travail en prévention, pour lutter contre ce fléau, Mme la Présidente. Alors, on est disponibles pour répondre aux questions. Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Merci infiniment pour votre exposé. Maintenant, la période d'échange avec le ministre. La parole est à vous.

M. Boulet : Merci, Mme Oudar. Merci pour la qualité du mémoire ainsi que de votre présentation de ce matin. C'est important. J'ai quatre questions précises à vous poser. Mais d'abord mentionner que la CNESST, en matière de normes d'équité, de santé-sécurité, joue un rôle vraiment primordial au Québec. Puis ici on parle de violences à caractère sexuel puis de harcèlement. On se souvient tous, puis vous les avez rencontrés, donner un mandat à un comité d'expertes, et elles nous ont présenté un rapport qui contient 82 recommandations. Et je voyais ce matin un représentant syndical via les médias qui disait : Il n'y a rien dans le projet de loi, en fait, peu pour accompagner, former et soutenir. Mais il faut constamment redire qu'il y a des recommandations d'application administrative et des recommandations d'application législative. Et la CNESST, puis j'aime que vous le mentionniez, a confirmé un partenariat avec Juripop qui accompagne des personnes victimes marginalisées souvent, des personnes qui sont en dehors de la société. Et ça, moi, je trouve que c'est une avancée considérable. Puis, en matière de sensibilisation, de formation, la CNESST est constamment là pour répondre aux besoins, s'assurer que ce qui est identifié comme étant une priorité pour les employeurs, les syndicats et les travailleurs, on soit en mesure d'avoir un plan d'action. Puis votre plan stratégique, on l'a déposé effectivement hier au salon bleu et il fait état de l'ensemble de ce que vous réalisez pour atteindre nos objectifs. Mais je le dis, hein, puis la CNESST, c'est un organisme qui est purement paritaire, tu sais, il faut trouver un équilibre, là, ce n'est pas tout le temps blanc, ce n'est pas tout le temps noir. Il faut trouver une voie de passage qui s'appuie sur un consensus qui est raisonnable. C'est pour ça que je le mentionnais au comité d'expertes, elles sont tout à fait conscientes de ce qui a valeur administrative, qui est mis en application par la CNESST ou le Tribunal administratif du travail, parce qu'on n'en parle pas beaucoup, là, mais il y a une équipe dédiée qui a déjà été formée de juges au Tribunal administratif du travail et de conciliateurs. Il va y avoir des... de la confidentialité, des paravents, de l'accompagnement, des conférences préparatoires individuelles. Il y a un ensemble de recommandations, ça fait qu'il ne faut pas isoler ou fragmenter parce...

M. Boulet : ...Ça nous fait perdre de vue la globalité de la mission que nous avons, comme parlementaires, de lutter, de combattre et de prévenir le harcèlement et particulièrement les violences à caractère sexuel. Ceci dit, le projet de loi est toujours perfectible, puis c'est la raison pour laquelle on fait des consultations particulières, puis, bon, j'ai fait des commissions parlementaires avec mes collègues qui sont dans les partis d'opposition, il y a le collègue de Jean-Talon, que je vais apprendre à découvrir et à connaître, et donc je veux vous donner l'opportunité de répondre à quatre questions bien, bien précises.

Qu'est-ce que vous mettez en place de façon concrète pour accompagner les employeurs dans l'application de ce qui serait... bien, ce qui serait dans la loi, là, mais dans ce qui est dans le projet de loi, donc accompagnement des employeurs? Mme Oudar.

Mme Oudar (Manuelle) : Merci, M. le ministre, pour la question. Puis, effectivement, il faut rappeler que c'est un maillage, là, toutes les mesures, les 83 recommandations du rapport des expertes, à qui aussi nos propres... nos propres plans d'action administratifs ont été présentés. Donc, on continue aussi ce maillage-là et ce travail ensemble.

• (12 h 20) •

Donc, ces mesures, pour répondre à votre question, pour accompagner les... plus précisément les employeurs. D'abord, les employeurs, ils peuvent contacter, bon, l'agent de relation client pour obtenir toute l'information. Ils ont aussi tout le soutien qui est effectué du côté des inspecteurs et inspectrices. Il y a des mesures d'accompagnement qui sont déployées par les inspecteurs et inspectrices, qui ont été formés, en passant, sur les risques psychosociaux, parce que ça aussi, j'entendais qu'ils n'étaient pas formés, eux aussi. J'ai beaucoup d'admiration pour ces personnes qui, dans le fond, soutiennent. Convaincre, contraindre, hein? C'est toujours le slogan de la commission, soutenir, convaincre, contraindre. On est là dans le soutien, l'accompagnement, et s'il y a des choses qui nécessitent effectivement qu'il y ait des interventions pénales, elles seront faites. Mais il faut retenir aussi qu'on est dans un rôle d'accompagnement. Pourquoi? Pour la prise en charge de la prévention durable et de la santé et sécurité. Les milieux de travail doivent aussi devenir des ambassadeurs de la prise en charge de la prévention. Les employeurs aussi peuvent faire appel aux 18 conseillers, là, dont j'ai parlé tout à l'heure, là. C'est des conseillers en santé psychologique au travail. Ils peuvent organiser une activité de sensibilisation sans frais, donc, dans leur milieu de travail, c'est offert, donc, de la façon dont ils le souhaiteront, virtuelle, présentielle, dans tous les milieux de travail du Québec. Aussi, dès le processus de traitement d'une plainte, l'employeur est toujours contacté. Donc, on va lui expliquer la situation, le processus de traitement de la plainte, ses droits et obligations aussi.

Puis notre service de médiation est assez performant aussi, avec des très bons taux de satisfaction, là, dans nos sondages clientèle, un bon taux aussi de règlement, à la... au choix des parties. Il y a... Toute cette démarche-là est volontaire, bien entendu, là, dans le processus de médiation.

Ensuite, bien, quand il y a des décisions qui sont rendues, bien entendu, là, les gens sont contactés pour les informer.

Là, j'ai parlé spécifiquement des services directs à l'employeur, mais, si j'y vais à plus haut niveau, au niveau du site web, des outils qui sont développés, tout notre site internet est adapté, là, depuis l'automne passé au niveau des risques psychosociaux, il le sera... Je m'excuse, je prends trop de temps de votre... de parole de vous.

M. Boulet : ...mais allez-y. Non, non, moi, je vous laisse aller.

Mme Oudar (Manuelle) : Je termine en vous disant, parce que c'est utile aussi, hein, vous parlez souvent des PME, vous avez raison, on se rappelle souvent que la plupart n'ont pas de direction de ressources humaines, donc c'est important de déployer des outils qui peuvent être utiles. Donc nous, on a déployé un modèle de politique de prévention des... de la prise en charge, un modèle, un guide aussi, une politique qui peut être adaptée à la situation de la PME en question. Puis moi, je vous invite à visiter le site web de la commission sur les risques psychosociaux. Ça explique très clairement et de façon très vulgarisée, c'est quoi, les risques psychosociaux, puis des exemples de facteurs de risques psychosociaux, de façon à avoir des exemples puis des choses très concrètes. Alors voilà, M. le ministre, je termine là-dessus.

M. Boulet : Merci, Mme Oudar. Les 18 conseillers en santé psychologique, là, il faut constamment en faire la promotion, ce n'est pas toujours connu. Mais il y a un déficit de connaissance de ce que nous faisons, particulièrement à la CNESST, puis ça s'applique à bien des égards. Puis la culture de prévention, elle est aussi extrêmement importante, là...

M. Boulet : ...on veut lutter contre un phénomène, il faut d'abord identifier les risques pour mieux les contrôler, mieux les éliminer. Et les risques psychosociaux, ça, ça émane de notre autre projet de loi modernisant le régime de santé-sécurité du travail, puis le harcèlement... tu sais, ça en fait partie de ces risques-là. Donc, les employeurs, avec les syndicats puis les travailleurs, doivent se prendre en charge, identifier ces risques-là pour les éliminer, mais utiliser les outils que la CNESST met à leur disposition.

Donc, ma deuxième question, là, ça réfère à la culture de formation, et la culture de signalement aussi, qu'il faut améliorer, le signalement, de façon à ne pas craindre des représailles ou une mesure, quelle qu'elle soit, parce qu'on l'a vu dans un autre sondage commandé par la Commission de la construction du Québec, 79 %, là, de ceux qui observaient ou subissaient, ne signalent pas par crainte de représailles ou de perte d'emploi. Donc, quelles sont les formations et les campagnes de sensibilisation, ciblées par la CNESST, que vous mettez en application pour prévenir, lutter et combattre?

Mme Oudar (Manuelle) : Alors, tout à l'heure, effectivement, j'ai parlé de notre campagne sociétale. J'espère que tout le monde l'a vue, elle a été rediffusée le 31 décembre avec les trois dragons. Je vais expliquer...

M. Boulet : Une campagne sociétale...

Mme Oudar (Manuelle) : La campagne sociétale qui va être rediffusée au printemps. Alors, je l'explique sur... bon, tout le monde l'a compris, je pense, parce que les Québécois sont très intelligents, mais sur trois planches. Donc, la première, le harcèlement sexuel, la deuxième, le harcèlement psychologique, où on voit des gobelins, là, qui parlent contre un employé avec un casque de la construction, d'ailleurs. Le but de viser des personnages fantastiques, c'est de ne pas stéréotyper une personne, par exemple. Vous voyez la troisième planche dans la publicité, c'est une personne qui crie après une réceptionniste à travers un plexiglass, alors c'est personnalisé par un énorme dragon. Alors, je suis certaine que tout le monde voit un peu à quoi je fais référence, effectivement. Ça, c'est sur les risques psychosociaux. Donc, les trois situations, le harcèlement sexuel, le harcèlement psychologique et l'exposition à des chocs traumatiques fait en sorte qu'on... ça devient un risque des risques psychosociaux qui affectent la santé psychique et psychologique du travailleur ou de la travailleuse. Ça émane, vous l'avez mentionné aussi, d'un projet de loi qui a été adopté ici, le projet de loi n° 59, dans le fond, qui a intégré toute la santé psychique et psychologique à l'intérieur de la législation du travail. On vous remercie d'ailleurs infiniment, M. le ministre, là-dessus, et les membres de la commission.

Parmi aussi les autres aspects promotionnels et de publicité à grand déploiement qui ont été faits, outre la campagne sociétale, bien, c'est de changer le site web, de l'adapter, de bonifier aussi toutes les pages qui sont existantes, de développer des outils, comme je mentionnais tantôt aussi, qui sont adaptés, qui peuvent être utilisés par les milieux de travail. Puis merci de mentionner aussi qu'on est un organisme paritaire, donc sur notre conseil d'administration, tout ça est déployé aussi en partenariat avec les membres du conseil d'administration patronal et syndical, ce qui permet d'avoir des outils qui sont pertinents et utilisables dans les milieux de travail. On a développé aussi toute notre stratégie, là, de communication. On l'a... on va fêter... et souligner, pardon, cette année, en 2024, les 20 ans d'introduction des dispositions sur le harcèlement psychologique dans la loi sur les normes du travail. Donc, on profite aussi de cet événement-là pour rappeler les dispositions et faire en sorte, puisque ça faisait partie aussi de votre question, M. le ministre... de faire en sorte que... de sécuriser aussi les victimes dans cette crainte de représailles qui a été exprimée à travers les divers sondages qu'on a vus.

M. Boulet : ...aussi que 90 % des 23 recommandations qui interpellaient la CNESST sont mises en application. Je vais aussi reparler de la campagne sociétale. Et moi, j'offrirais à mes collègues de Bourassa-Sauvé, Hochelaga-Maisonneuve, Jean-Talon, mon acolyte de mon cabinet vous transmettrait... ça dure à peu près deux minutes, là, le... puis ça a passé à peu près partout, là, Manuelle...

Mme Oudar (Manuelle) : Effectivement, puis, à l'automne, on était dans le top cinq des... même avant la...

Mme Oudar (Manuelle) : ...je pense, du lait, et autres... sur les campagnes publicitaires les plus fortes.

M. Boulet : C'est une campagne fine, subtile, intelligente, qui a retenu l'adhésion des syndicats puis des employeurs, puis j'aimerais ça vous la partager puis Linda aussi. Bien, excusez-moi, collègue de La Pinière. Et donc j'aimerais ça quand même... Ah! vous l'avez vu? O.K. Parfait. Donc, O.K.. Excellent. Puis j'apprécie énormément... parce que je veux laisser à mes collègues du temps, mais votre collaboration que vous exprimez dans l'application d'un projet de loi qui, souhaitons-le tous, deviendra une loi au bénéfice du Québec et des Québécois et des Québécoises particulièrement légitime d'un phénomène qui est désastreux dans les milieux de travail. Merci beaucoup à vous quatre.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. O.K., c'est la députée de Laporte en premier. Il vous reste deux minutes.

Mme Poulet : Bien, merci, Mme la Présidente. Bonjour, merci beaucoup de votre implication, à vous quatre. Vous avez mentionné tantôt que la CNESST voulait changer certaines pratiques. Vous publiez déjà des informations sur le harcèlement psychologique ou sexuel au travail. Vous publiez d'ailleurs un portrait sur la violence, le stress, le harcèlement au travail, incluant le harcèlement sexuel... de 2018... Il y a un rapport en 2018, 2019, 2022. Le précédent groupe a mentionné qu'il manque une enquête à grand déploiement avec volet sur la violence à caractère sexuel, que la société pourrait faire un effort supplémentaire. Selon vous, comment pourrait-on colliger le nombre de signalements auprès des employeurs?

• (12 h 30) •

Mme Oudar (Manuelle) : ...bonne question. Puis on travaille énormément avec l'IRSST puisque, bien, vous le savez, c'est le... nos cousins ou notre cousine, comme je dis souvent donc, même conseil d'administration aussi les mêmes membres, un organisme paritaire aussi. Je pense que ce à quoi il faisait référence aussi, c'est d'avoir une vue peut-être sociétale aussi de l'ensemble de la problématique. Parce que nous, à la commission, bien, nos statistiques couvrent les personnes qui ont porté plainte, qui ont fait appel à nos services. Du côté des normes, on ne couvre que les non-syndiqués parce que quand on est syndiqué, le recours, c'est vers le grief. Donc, au Québec, il faut savoir que 60 % des personnes sont non syndiquées. On a un haut taux de syndicalisation par rapport aux autres provinces canadiennes, mais il reste quand même qu'une partie de la population... Donc, la plainte et le recours et la défense des droits, c'est l'association syndicale qui fait le même travail que dans le fond, Mélanie Vincent, ici, au niveau des normes. Il faut...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions...

Mme Oudar (Manuelle) : Ah! pardon!

La Présidente (Mme D'Amours) : ...pour la partie gouvernementale. Je cède maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Oudar. Bonjour. Ma première question toute simple, donc je cite le ministre : Tout projet de loi est perfectible, donc comment, nous, comme législateurs, on peut réfléchir au projet de loi et trouver des moyens pour que celui-ci facilite votre travail en matière de prévention des violences à caractère sexuel...

Mme Oudar (Manuelle) : Bien...

Mme Cadet : ...ou de traitement, oui?

Mme Oudar (Manuelle) : ...déjà, en tout cas, je pense que c'est un grand pas en avant. Je pense que le projet de loi va aider, en tout cas, au niveau du travail de la commission. On s'attend aussi, vous avez certainement vu dans l'étude d'impacts, qu'on a des demandes au niveau des ressources. Donc, on souhaite aussi avoir une solidarité entière pour s'assurer que la vingtaine de personnes qu'on demande au niveau de l'application, ce qui est nécessaire, soit au rendez-vous. C'est ce qu'on vous mentionne quand on vous dit aussi qu'on assure l'entière application. Ça ne fait pas partie du projet de loi, mais ça fait partie d'une application sensée et judicieuse des articles qui sont prévus. Je salue, moi, le contenu du projet de loi. J'ai suivi les débats aussi d'hier avec les chercheuses. Il y a des recommandations qui vous sont faites au niveau de l'examen de certaines problématiques. J'ai bien aimé aussi certaines questions sur le... les choix qu'elles... qu'elles suggèrent... qu'elles vous suggèrent, là, sur le travail qu'il y a à faire dans leur top trois ou quatre. Il y a des idées qui sont intéressantes aussi là -dedans, alors je pense que ça fera partie de votre travail au niveau de l'étude article par article. Mais pour nous, comme le projet de loi est là actuellement, c'est satisfaisant dans à la fois la protection, la prévention aussi et l'accompagnement des victimes.

Mme Cadet : Bien, vous venez de le dire, là, que vous avez suivi un peu, donc, les débats d'hier. Puis je... je me demande... En fait, une des autres questions que je me demande plus particulièrement, donc...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Cadet : ...Il y a des groupes, bien, d'un côté comme de l'autre, si on voulait dire ça comme ça, parce que la... toutes les parties, donc, sont pour le principe du projet de loi, là, ils ont évidemment, donc, certaines revendications précises, qui nous... qui nous... qui nous soumettaient que l'article, donc, 33 du projet de loi, qui définit les violences à caractère sexuel, pouvait peut-être semer, donc, une certaine confusion avec la notion de harcèlement sexuel. Évidemment, vous, au niveau de vos ressources, vous les formez, il n'y a pas nécessairement d'enjeux. Mais est-ce que vous pensez que ça risque de... au départ, donc, de créer une certaine confusion au sein des différentes parties prenantes, et que... qu'au départ, donc, vos ressources risquent d'être, je ne veux pas dire «engorgées», là, mais disons «sollicitées» par rapport à cet élément-là?

Mme Oudar (Manuelle) : La définition qui se trouve à l'article 33, si je ne m'abuse, c'est une définition qui est aussi basée à la fois sur des expertises, pas juste ici au Québec, mais ailleurs, sur, même, je pense bien, au niveau de l'OIT aussi, également, l'Organisation internationale du travail. De notre côté, ce n'est pas une problématique qui a été soulevée à l'interne dans la préparation qui sera faite, là, au niveau des formations. Je pense que c'est... Ça ne pose pas d'enjeu, là, dans la définition qui est... qui est proposée, on est donc dans 33, dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

Mme Cadet : D'accord, y compris sur la question du contexte de gravité, là, je sais que... bien, vous l'avez entendu hier, donc, une des... donc, la... a soumis à notre attention, donc, l'absence du critère de gravité que l'on retrouve dans le harcèlement sexuel. Et je... Il y a d'autres intervenants aussi, là, qui l'ont indiqué dans leur mémoire. Donc, pour vous, donc, ici, donc, vous voyez vraiment, donc, ces éléments-là de façon complémentaire?

Mme Oudar (Manuelle) : Oui. Puis au niveau de la formation, on va tenir compte effectivement de ce qui a guidé la conception de la définition comme telle. Il n'y a pas de... il n'y a pas d'enjeu, là, de notre côté, au niveau de la formation. Je ne sais pas si, du côté des collègues, il y a des choses qu'ils souhaitent ajouter ou soulever.

Mme Vincent (Mélanie) : Je tiendrais peut-être juste à préciser qu'en matière de normes du travail, il faut se rappeler qu'une seule conduite peut mener... peut correspondre au critère de harcèlement, là, dans la loi sur les normes du travail. Donc, quand qu'on parle de gravité, je comprends que c'est un concept qui existe particulièrement en matière de santé et sécurité du travail, là, on est... on est, disons, familiers avec ce critère-là en matière de SST, du côté des normes du travail, bien, bien évidemment, un seul événement... Donc, on ne parle pas... ce n'est pas tout à fait le contexte de gravité, mais on pourrait l'assimiler, en quelque sorte.

Mme Cadet : Merci. Vous voyez aussi, donc, que le délai de réclamation pour lésion professionnelle, donc, passe, donc, de six mois à deux ans. Je voulais peut-être vous entendre là-dessus, sur ce délai-là.

Mme Oudar (Manuelle) : Oui. C'est une bonne chose aussi, effectivement, là, de laisser ce délai-là, cette latitude-là aussi également. C'est conforme aussi aux dernières modifications qui ont été faites dans la Loi sur les normes du travail, où il y a une certaine cohérence aussi avec le délai de deux ans. Donc, pour nous, ça ne causait pas d'enjeu. Deux ans, bien, c'est un petit peu ce qu'on retrouve, comme je disais, dans les lois du travail puis c'est ce qui permet peut-être aussi à quelqu'un qui sera assigné à faire une enquête, d'aller retrouver les témoins, d'aller documenter, d'aller rechercher la preuve. Donc, il n'y avait pas d'enjeu de notre côté à être à deux ans.

Mme Cadet : Et dans votre étude d'impact, j'imagine qu'en termes, donc, de ressources, vous avez tenu compte aussi, là, de... de ce... de ce délai, donc, élargi, donc, qui... donc, qui est une bonne chose, mais pour vous assurer, donc, d'avoir assez de ressources pour être capables, donc, de conjuguer avec l'augmentation des réclamations?

Mme Oudar (Manuelle) : Oui, tout à fait. Parce qu'en fait tous les changements, celui-ci comme d'autres, vont amener, et c'est tant mieux, une augmentation, c'est ce qu'on veut, hein, des plaintes, puis de pouvoir aussi davantage accompagner des gens qui vont venir faire appel à nos services, donc il faut aussi qu'on puisse répondre présents.

Mme Cadet : Merci. Je passe la parole à ma collègue.

La Présidente (Mme D'Amours) : Oui. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour à vous tous et merci pour votre mémoire et votre présence.

Alors, j'ai remarqué que, dans votre mémoire, il n'y avait pas de recommandations pour bonifier le projet de loi alors je ne peux qu'en déduire que le projet de loi, tel quel, même, vous convient. Et la...

Mme Caron : ...je me posais : Est-ce que vous avez tout ce qu'il faut pour pouvoir mettre en application ce qui vous revient?

Mme Oudar (Manuelle) : En fait, bien, comme je disais tout à l'heure, on a les objectifs poursuivis, on va les accomplir, mais on a... on est actuellement, vous l'avez vu dans l'étude d'impact, en demande d'effectifs, donc une vingtaine d'effectifs récurrents, des ETC, comme on l'appelle dans notre jargon. Vous savez qu'on est assujettis à la loi sur la fonction publique. Donc on est... on a des obligations de ce côté-là. Le... La décision ne m'appartient pas.

Mme Caron : Je comprends. Alors, vous avez actuellement combien d'enquêteurs pour les dossiers de nature psychologique?

Mme Oudar (Manuelle) : Tous les enquêteurs, je le mentionnais tantôt, ont été formés sur les risques psychosociaux. Alors, peu importe si un enquêteur se retrouve... Au niveau santé et sécurité, on parle de plus de 300 enquêteurs et, au niveau des normes, plus d'une centaine, là, de... d'enquêteurs. Alors, les 300 dont je parle au niveau de santé et sécurité, ils ont tous été formés pour justement être sensibles à une situation qui pourrait arriver, même s'ils sont dépêchés sur une autre situation, bien, qu'ils puissent être sensibilisés à une situation de risques psychosociaux inattendue. Donc, ces 300 là sont prêts à intervenir. Et même on va redonner de la formation au printemps aussi, on l'a mentionné tantôt, dans le cadre de la... du partenariat avec Juripop, on a aussi des... un partenariat justement pour la formation de nos... de nos intervenants.

• (12 h 40) •

Mme Caron : Donc, selon vous, les personnes sont formées pour de multiples types d'enquêtes, finalement, réalisées.

Mme Oudar (Manuelle) : Oui.

Mme Caron : Alors, vous avez écouté hier aussi ce qui... les groupes qui sont venus nous rencontrer. Alors, on avait... et c'est pour ça que je vous pose la question, il y avait le mémoire de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, et dont une personne siège au C.A. de la CNESST, qui nous disait, et là, pour ne pas me tromper, je vais citer ce qui est dans le mémoire, que «le service de l'inspectorat, donc, de la CNESST doit veiller à ce que les employeurs respectent les normes établies pour garantir des conditions de travail sûres et saines, ce qui inclut les violences à caractère sexuel. Malheureusement, la capacité de la commission à remplir ses obligations est variable.» Alors, est-ce que... est-ce que vous êtes d'accord avec ce constat ou est-ce que vous avez peut-être quelque chose à nous dire pour nuancer ce constat?

Mme Oudar (Manuelle) : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Votre réponse en 30 secondes.

Mme Oudar (Manuelle) : D'abord, mentionner que cette personne ne fait pas partie du conseil d'administration. Donc, juste pour éclairer les parlementaires.

Mme Caron : Merci pour la précision. Merci pour la précision.

Mme Oudar (Manuelle) : Quand j'ai entendu ça, j'ai appelé d'ailleurs moi-même hier soir la présidente de la FTQ, Mme Magali Picard. Au niveau des chiffres... Qui siège au C.A. et pour laquelle j'ai énormément d'admiration et très... je suis très satisfaite du travail de Mme Picard. Au niveau des chiffres, alors, je vais vous dire qu'au niveau 2023, il y a eu 32 994 visites...

La Présidente (Mme D'Amours) : ...que nous avions. Je suis vraiment désolée.

Mme Oudar (Manuelle) : D'accord.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je dois céder la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous quatre. On doit adopter un règlement qui découlera du projet de loi que nous adopterons dans les prochaines semaines et on le sait à quel point c'est un parcours du combattant, adopter un règlement en droit du travail, parce que ça prend plusieurs étapes, c'est long, ça prend des vérifications, ça prend des débats, ça prend des consensus patronaux-syndicaux, et la cour est pleine, il y en a plusieurs, là, qui sont en rédaction en ce moment. Pour faciliter la discussion, mettre un peu de pression sur les deux parties, patronale, syndicale, a été évoquée hier l'idée qu'on reprendrait, en fait, du modèle qu'on avait utilisé sur le p.l. 59, en santé et sécurité du travail, d'imposer une date limite de deux ans après laquelle, s'il n'y a pas de règlement adopté, ça serait le ministre qui serait obligé de trancher et de procéder pour ne pas qu'on tombe dans une espèce de limbes où, bien, les parties ne s'entendent pas et ça tombe sur... entre deux... entre deux craques, là... dans une craque, pardon, puis là on n'en entend plus parler. D'ailleurs, je pense que le règlement qui nous a inspirés en... au p.l. 59 est déposé, là, depuis janvier, il est... Il est public, donc les gens peuvent aller le voir, le commenter, c'est bien. Mais est-ce que ça serait une bonne idée, donc? Est-ce que vous tirez une expérience positive de ce délai-là qu'on avait utilisé par rapport à l'autre règlement?

Mme Oudar (Manuelle) : Alors, merci. Écoutez, moi, je répondrais peut-être en plusieurs morceaux. D'abord, j'ai énormément confiance en notre présidente du conseil d'administration, Louise Otis. J'ai énormément confiance aussi en nos institutions publiques, en la CNESST et au C.A...

Mme Oudar (Manuelle) : ...de la CNESST. J'étais étonnée d'entendre ça parce qu'il y a déjà un article dans la loi. On est dans la Loi sur la santé-sécurité du travail, on fait référence ici à l'article 223 de la loi n° 38 du projet de loi, il se trouve dans un corpus législatif avec des articles qui suivent où on dit que si la commission n'adopte pas le règlement à l'article 225, le gouvernement peut le faire, pouvoir qu'il n'a pas utilisé, en tout cas dans les huit dernières années que je suis là. Ce qui me permet de vous dire que, dans notre planification stratégique précédente, nous, on s'était fixé des cibles, hein, pour atteindre justement une adoption de règlement. Donc, toujours étonnée d'entendre ça, je vais arriver avec des chiffres, encore une fois, si le temps me le permet. Mme la Présidente, 19 dépôts sur 21 règlements en 2023, c'est 90 % d'atteinte, notre cible, on l'a dépassé, 14 en 2022, 16 en 2021, 20... 22 en 2020. Alors, écoutez, moi, depuis que je suis en poste, je n'ai pas vu de retard. Même au niveau de la LMRSST, j'ai donné une demande... une commande parce que j'avais entendu ça aussi, qu'on était toujours en retard, donc j'ai demandé à mes équipes même d'arriver trois mois avant l'échéance fixée par l'Assemblée nationale. Il y a des gens qui ont travaillé très fort, du temps supplémentaire. Et hier j'ai entendu le cri du coeur aussi de certains membres du C.A. parce que tout le monde travaille fort aussi dans les comités paritaires. Donc, moi, je réitère ma confiance énorme envers la présidente du C.A., là, Mme Louise Otis, envers les membres du conseil d'administration qui font très bien leur travail. Puis toutes nos cibles et nos résultats sont publiés dans nos rapports annuels qui sont déposés chaque année ici, et on est à plus de 90 % d'adoption de nos règlements.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je cède la parole au député de Jean-Talon.

M. Paradis : Merci. Bonjour. Merci pour votre contribution à nos travaux. J'ai été particulièrement interpellé par ce que vous avez fait en matière de constitution d'une boîte à outils pour tout le monde, pour les travailleurs, pour les employeurs, afin de favoriser un milieu de travail le plus sain possible puis aussi une capacité de prévenir.

Alors, vous dites que vous avez un guide pour l'élaboration d'une politique de prévention puis un modèle aussi de politique en matière de harcèlement. Vous êtes un peu plus loin que vous allez travailler sur des nouveaux modèles. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus? Parce que... Et sur le... sur les contacts que vous avez ou l'arrimage que vous avez avec les groupes d'employeurs puis les groupes de travailleurs pour qu'il y ait aussi un mariage... un développement, là, des meilleures pratiques aussi issues de ce qui se passe sur le terrain, ça m'apparaît essentiel, en tout cas pour vraiment travailler sur le plan de la prévention. Par exemple, en matière de formation, quel type de formation? Qu'est-ce que devrait être le contenu? Comment aménager les lieux physiquement pour mieux prévenir, pour aussi assurer une réinsertion des victimes, etc. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?

Mme Oudar (Manuelle) : Merci, Mme la Présidente. Pour la question, je vais donner la parole à Me Mélanie Vincent. C'est une question très pertinente et qui fait appel aussi à notre ADN, la façon dont on travaille avec les partenaires pour être pertinent dans le développement de nos outils. Me Vincent.

Mme Vincent (Mélanie) : Pour répondre à la question, je peux peut-être reprendre un peu l'exemple qu'on a fait en 2018 lors de l'introduction, la première introduction de l'obligation pour les employeurs de détenir une politique en matière de prévention du harcèlement et de traitement des plaintes. Donc, on a élaboré un modèle de politique, on a élaboré un guide et, évidemment, lorsqu'on fait ces exercices-là, on s'associe nos partenaires, je dirais naturels, à la CNESST, donc, évidemment, les associations d'employeurs, les associations syndicales. On a aussi, vous le savez, un comité consultatif en matière de normes du travail, qu'on peut évidemment consulter lorsqu'on met en place, c'est son rôle, c'est son mandat de venir nous guider sur les meilleures pratiques à mettre en place. Donc, c'est ce qui a été fait lorsqu'est entrée en vigueur la première obligation en 2019. Depuis, le modèle de politique est disponible sur le site web de la CNESST. Je dirais, bon an mal an, il y a un téléchargement d'environ 9 000... il y a 9 000 téléchargements annuellement du modèle de politique. Donc, évidemment, on est déjà en train de revisiter à la lumière des propositions qui sont faites puis on va être au rendez-vous. On va être au rendez-vous.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je suis désolée, je suis la gardienne du temps, et c'est terminé pour le bloc d'échange. Je vous remercie infiniment pour votre contribution à nos travaux à la commission.

Et la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures. Merci, tout le monde.

(Suspension de la séance à 12 h 48)


 
 

14 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 h 01)

La Présidente (Mme D'Amours) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur appareil électronique.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail. Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants, soit l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec, le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail et l'Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades.

Je souhaite maintenant la bienvenue à nos invités, qui sont de l'Ordre des conseils... des conseillers, pardon, en ressources humaines agréés. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé et puis ensuite nous procéderons à la période d'échange. Maintenant, je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Poirier (Manon) :Merci. Bonjour à toutes, bonjour à tous. Mon nom est Manon Poirier. Je suis la directrice générale de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés du Québec et je suis accompagnée de ma précieuse collègue Noémie Ferland-Dorval, directrice des Communications et affaires publiques. L'Ordre regroupe plus de 12 000 professionnels de la gestion des ressources humaines et des relations industrielles. Nous assurons bien sûr, à l'instar des autres ordres au Québec, la protection du public, notamment par l'encadrement de la profession. Et on a aussi un souci constant d'outiller l'ensemble de l'écosystème en matière de pratiques de gestion de ressources humaines. Les interventions de l'ordre se font toujours dans un souci d'équilibre entre la réussite des organisations et le bien-être des travailleurs.

Avant de se lancer sur les éléments du mémoire, je vais faire un petit peu un pas de recul, puis prendre un petit peu l'état de la situation. Malgré une prise de conscience grandissante et certaines avancées législatives ces dernières années, le harcèlement continue de faire des impacts négatifs dans nos organisations. Tant ils sont nombreux, il est un peu difficile de faire le décompte de l'ensemble des cas qui, en plus, ont défrayé l'actuelle... l'actualité ces dernières années. Je pense qu'ils rappellent l'omniprésence de ce fléau et qu'aucun milieu de travail n'est à l'abri, que ce soit dans le domaine de la culture, dans le milieu des affaires ou même celui de la politique. Malheureusement, puis je pense que c'est un des enjeux, le Québec ne dispose que d'un portrait statistique bien incomplet de la situation. Les près de 5000 plaintes qui sont déposées à la CNESST ne représentent que la pointe de l'iceberg. Et ça, on le sait depuis longtemps. Et on a voulu, par des sondages et des études, donner un petit peu un aperçu de l'ampleur du phénomène au Québec. Donc, on a sondé récemment, et 11 % des travailleurs et travailleuses affirment avoir été personnellement victimes de harcèlement au cours...


 
 

15 h (version non révisée)

Mme Poirier (Manon) :...cours de la dernière année seulement.

Bien sûr, il y a une mécompréhension parfois de ce que constitue le harcèlement. Alors, selon nos experts, qui nous disent qu'un cas sur cinq représente véritablement du harcèlement, c'est quand même 100 000 Québécois ou Québécoises qui ont été victimes de harcèlement l'année dernière. C'est un chiffre qui est vraiment énorme. Considérant les conséquences physiques et psychologiques chez les victimes et leur entourage, autant personnel que professionnel, les conséquences financières, les conséquences sur la productivité et réputationnelles sur les organisations et la pression que tout ça amène sur les instances publiques, que ce soit au niveau de la CNESST, bien sûr, le système de justice, le système de santé, le harcèlement en milieu de travail ne représente rien de moins, selon nous, qu'un enjeu de santé publique auquel nous avons collectivement l'obligation de remédier.

L'intention du projet de loi n° 42 est bien sûr très noble, et nous saluons la volonté du ministre de faire avancer les choses en la matière. Parmi les bons coups du projet de loi, on aimerait souligner entre autres la sagesse du législateur à considérer tant le harcèlement sexuel que le harcèlement psychologique, évitant ainsi de créer des mécanismes à deux vitesses, la prescription d'un contenu minimal, bien sûr, à la politique organisationnelle - c'était l'invitation qu'on vous avait faite, M. le ministre, en 2018, et là on retrouve certains éléments au projet de loi - le retrait des clauses d'amnistie dans les cas de violence et l'allongement à deux ans du délai de réclamation pour une lésion professionnelle, qui nous semble être cohérent avec les autres durées et délais en matière de harcèlement.

Il y a quelques articles dans le projet qui nécessitent peut-être des ajustements, selon notre avis. Bien sûr, on vous en a fait état dans notre mémoire, mais... souligner peut-être trois éléments. Premièrement, la définition proposée de «violence à caractère sexuel» nous apparaît trop large et devrait être un peu resserrée par souci de cohérence avec les critères qui sont déjà établis au niveau du harcèlement à la Loi sur les normes du travail; la notion d'«attitude» nous semble extrêmement subjective; et la notion de «gravité pour une seule inconduite» devrait être intégrée dans la définition.

Au niveau d'imputation des coûts en matière de santé-sécurité, je pense que le défi ici, c'est de trouver le juste équilibre entre la responsabilisation des employeurs et la considération des victimes, bien sûr pour limiter le nombre de fois qu'elles doivent répéter... ils et elles doivent répéter leur histoire. Donc, une façon, pour nous, serait de donner une définition plus restrictive de la notion de «représentant de l'employeur» pour ne pas que ça soit... ça n'inclue pas trop de personnes.

Finalement, un des éléments à améliorer aussi : au niveau de la confidentialité du dossier médical, il serait selon nous approprié d'élargir l'accès à d'autres professionnels qui aussi ont un code de déontologie et sont soumis au secret professionnel afin de donner plus de flexibilité aux employeurs de toutes tailles au Québec pour... et pour soutenir bien sûr leur droit de se défendre, pour ne pas imposer un fardeau trop grand aux médecins désignés, et tout en, bien sûr, assurant la confidentialité.

Néanmoins, ce qui nous préoccupe le plus n'est pas tant ce que le projet de loi contient, mais plutôt ce qu'il omet. Pour réaliser son intention d'améliorer la prévention et l'intervention en matière de harcèlement au travail, ce qui manque, selon nous, c'est un meilleur encadrement de la prise en charge à la source, là où les problèmes sont vécus et relevés, soit au sein même des organisations. Actuellement, le topo qu'on a, c'est que la gestion des plaintes par les organisations est excessivement inégale, ce qui engendre bien sûr des préjudices importants pour bien des gens.

C'est sûr qu'il y a les recours légaux, que ce soit à la CNESST ou à la Commission des droits de la personne, mais ces recours-là, ils sont souvent complexes puis comportent un peu certaines limites, parce qu'ils sont plutôt basés sur une philosophie d'indemnisation plutôt que de réelle résolution de la problématique. Puis je vous rappelle une donnée qui, nous, nous interpelle beaucoup : c'est que, sur les 5000 plaintes annuellement qui sont déposées en matière de harcèlement à la CNESST, la très grande majorité des gens qui déposent une plainte ne sont plus à l'emploi ou encore sont en congé de maladie et n'envisagent peut-être pas le retour au sein de l'organisation qui les employait.

Donc, une amélioration de la prise en charge en organisation permettrait notamment d'éviter que les situations toxiques se détériorent, parce qu'on serait en mesure de les attraper plus rapidement. Donc, restreindre l'impact humain, psychologique de détresse, ça éviterait que ça embourbe les instances publiques puis, bien sûr, ça éviterait la répétition de ces situations-là. Puis, pour parvenir à ça, la bonne nouvelle, c'est qu'il y a des véhicules qui existent qui sont éprouvés et qui bénéficient aussi, selon nos données, d'un appui fort e la population. Donc, le... pour nous, vraiment, la...

Mme Poirier (Manon) :...prise en charge. Ce qu'il faut regarder, c'est, un, le comment, et, deux, le qui.

Donc, tout d'abord, le comment. Le projet de loi vient dicter des thèmes de contenu qui doivent se retrouver dans les politiques, ce qui est vraiment un excellent début, mais la prise en charge d'une plainte de harcèlement, c'est un geste qui est extrêmement complexe, puis elle doit être réalisée selon des règles de l'art. Donc, l'ordre recommande que le processus de traitement des plaintes soit clarifié et standardisé selon les bonnes pratiques éprouvées, un peu de la même manière que le législateur, il a fait au niveau de l'équité salariale. Donc, non seulement les organisations ont l'obligation de réaliser l'équité salariale, mais aussi elles doivent le faire selon une méthode définie. C'est un peu la même logique que nous proposons ici afin d'avoir des résultats concrets.

Outre le comment, il faut s'interroger sur le qui. Lorsqu'un employeur confie à une personne une enquête, par exemple, en matière de harcèlement, je vous dirais qu'il met un peu dans les mains de cette personne-là le sort de la victime et de la personne mise en cause. Parce que la... c'est la personne qui fait enquête qui a accès à la preuve, aux témoignages, et qui fait sens de ça et qui regarde si ça constitue du harcèlement ou pas, donc c'est absolument essentiel que l'employeur s'assure de la compétence de l'enquêteur, sa compréhension de ce que constitue le harcèlement, que la personne ait une rigueur dans la méthodologie, un protocole afin de préserver la confidentialité et un processus qui génère de la confiance et qui amène les témoins à s'exprimer.

• (15 h 10) •

Je pense qu'il est inconcevable aujourd'hui, malgré tout ce qu'on sait, que n'importe qui peut faire une enquête en matière de harcèlement, n'importe qui peut traiter les plaintes en matière harcèlement aujourd'hui. Je pense qu'il est crucial de s'assurer de la compétence et de l'encadrement des personnes responsables de la prise en charge des plaintes. Sondés sur le sujet, 80 % des travailleurs québécois sont en accord avec le fait que cette personne devrait être un professionnel spécifiquement formé en la matière.

Vous savez, maintenant, on forme les juges, les arbitres, les corps policiers, les intervenants de la CNESST par rapport à... donc qui nous... par rapport au harcèlement, aux violences sexuelles. Il nous apparaît clair que le législateur reconnaît que ces situations demandent des compétences spécifiques, donc qu'est-ce qu'on attend pour exiger les mêmes compétences chez ceux qui traitent, sur le terrain, en amont, en entreprise, la très grande majorité des cas?

Donc, deux avenues ont fait leurs preuves au Québec... Pardon.

(Interruption) Donc, deux avenues ont fait leurs preuves au Québec. Un, Le système professionnel québécois. La voie du système professionnel est la preuve que les ordres permettent d'assurer la compétence et l'encadrement des professionnels. Dans le cas des enquêtes, ça pourrait être les membres du Barreau, bien sûr les membres de notre Ordre, et il pourrait y en avoir d'autres. L'autre véhicule auquel on peut penser, c'est la voie de l'accréditation. On le fait déjà en matière de médiation, en matière familiale, donc on pourrait aussi répliquer cette même approche pour le harcèlement. Je vous remercie.

La Présidente (Mme D'Amours) : ...merci pour votre exposé. Maintenant, nous allons commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

Des voix : ...

M. Boulet : Oui. Merci, Mme la Présidente. Merci pour la présentation. J'anticipais, et ça s'est confirmé, que vous alliez bien faire ça. C'est un excellent mémoire et, évidemment, l'Ordre des CRHA a une réputation que nous reconnaissons tous.

C'est certain que votre sondage Léger, il y avait même un 47 %, là, des personnes qui avaient subi ou vécu du harcèlement au cours de leur vie. Je pense que la raison d'être de l'intervention, elle est incontournable, elle est incontestable. En même temps, on va faire des pas en avant, puis je vous remercie d'avoir soutenu le principe du projet de loi qui vise à combattre, à lutter puis à prévenir des situations qui sont totalement inacceptables puis ont des retombées, vous le mentionnez bien dans votre rapport, non seulement pour les travailleurs, travailleuses, mais leurs familles, leurs proches et pour la société québécoise dans son ensemble.

En même temps, évidemment, il faut... il faut toujours trouver une espèce d'équilibre, hein? Puis je vous le mentionnais au début, puis Noémie n'était pas présente ce matin, mais je tiens quand même à préciser que les expertes avaient recommandé une division spécialisée au Tribunal administratif du travail, puis on a formé déjà une équipe spécialisée au Tribunal administratif du travail. La formation a déjà été donnée par Catherine Gareau-Blanchard, du ministère de la Justice, puis le titre de la formation, c'est Mythes, stéréotypes avec lesquels composent les personnes victimes...

M. Boulet : ...de harcèlement sexuel et d'agressions à caractère sexuel. Ça a été dispensé aux juges administratifs, aux conciliateurs, aux assesseurs. Il y a une équipe spécialisée dédiée à la conciliation, puis, évidemment, vous le savez, avec la CNESST, il y a une priorisation des plaintes, des réclamations en cette matière. Et il y aura aussi là... Puis des fois, ça a l'air de détails, là, mais il va y avoir des conférences préparatoires, il va y avoir de l'accompagnement individuel. Le médiateur, ça, c'est dans le projet de loi, va pouvoir mettre fin au processus de médiation. Il y a l'utilisation des mesures d'aide aux témoignages comme les paravents, les témoignages à distance, les ordonnances pour omettre le nom des personnes impliquées, si la situation, évidemment, pouvait être préjudiciable, notamment à la victime. Comment faire des ordonnances de non-divulgation, non-publication, non-diffusion? Mais je trouve tout le temps, moi, qu'il y a un déficit, puis je le mentionnais ce matin, de connaissances. Puis là je mets beaucoup l'accent sur la victime, mais vous mentionniez que...  Bien, l'harmonisation des définitions, c'est une belle réflexion, là, qui nous a été partagée par d'autres groupes, là, puis je ne ferai pas de discussion profonde là-dessus, mais simplement pour se rappeler que la loi santé-sécurité, c'est une loi de prévention; la loi accidents de travail, maladies professionnelles, c'est une loi d'indemnisation puis celle des normes, c'est une loi, comme le titre le dit, de normes et de recours, ça fait que les définitions peuvent varier en fonction des objectifs des lois concernées. Mais je suis assez d'accord que ça crée de la confusion alors qu'on veut quand même simplifier. Ça fait que ça, c'est certain que mon équipe et moi, on va s'attarder à cette situation-là. Puis au-delà des pourcentages, je mentionne souvent que Léger a aussi fait un sondage dans le secteur de la construction puis qu'il n'est pas aussi écarté de bien d'autres secteurs d'activités. Mais les signalements qui ne sont pas faits... Puis, tu sais, Manon, vous en faisiez référence, 5 000 plaintes, ce n'est pas le reflet de la réalité, là. Juste votre sondage, ça démontre qu'il y en a déjà beaucoup plus. Ça fait que les gens subissent, sont victimes ou sont témoins et ils ne le disent pas. Ça fait qu'au-delà de la culture de prévention puis de formation, il faut développer une culture de signalement, puis j'espère que notre loi, le jour venu de son adoption, on déploiera toutes les mesures qui s'impose pour sensibiliser, informer. Puis la CNESST... Vous le savez, en septembre, on a annoncé la mise en application de 90 % des 23 recommandations des expertes, qui concernaient la commission, et il y en aura d'autres à venir. Puis vous avez sûrement vu la campagne sociétale qui a tourné beaucoup. Moi, j'ai trouvé cette campagne-là, fine, intelligente, assez subtile, mais qui a... qui a fait l'objet d'énormément de discussions. Puis je me suis assuré que mes collègues en face puissent en prendre connaissance.

Manon, je veux vous entendre maintenant. Je me sers aussi de ce temps-là pour parler de ce qui se fait, là. Mais quand vous dites : Encadrement de la prise en charge, puis là, c'est une question de contre-interrogatoire, est-ce qu'il n'y a pas une contradiction entre l'encadrement puis la prise en charge? Souvenez-vous quand on a modernisé le régime de santé-sécurité, le père de Noémie a été très actif dans ce dossier-là, mais ce qui était véhiculé, ce qui était anticipé des parties, c'est qu'elles se prennent en charge. Puis il y a des groupes qui me disent : Le contenu minimal, il ne faut pas que ça soit trop instructif. Il ne faut pas que vous nous dictiez quoi faire. Vous nous dites : Prenez-vous en charge. Bien, que les parties identifient notamment les risques, décident des techniques puis des méthodes utilisées, puis du contenu des programmes de formation puis d'informations, j'y vois quand même un petit peu une... pas une contradiction, là, mais une divergence d'opinions. Est-ce qu'on dicte trop ou on laisse la marge de manœuvre aux parties pour déterminer beaucoup de ce qu'il y a à faire? Puis ça fait référence notamment au processus, là. Vous disiez, Manon, comment et qui, je vais y revenir, mais le processus, on y réfère spécifiquement au paragraphe 6 du contenu minimal. On dit : Le processus de prise en charge d'une situation de harcèlement, incluant le processus applicable lors de la tenue d'une... On verra, là, l'identité de... mais j'aimerais ça vous entendre sur ce que moi, je vois comme un petit...

M. Boulet : ...à l'opposé, est-ce qu'on encadre plus ou on permet plus aux parties de se prendre en charge?

Mme Poirier (Manon) :Bien, ça fait quand même... La notion de harcèlement psychologique a été intégrée à la loi il y a 20 ans.

M. Boulet : Oui.

Mme Poirier (Manon) :C'est sûr qu'on a fait du progrès. Est-ce qu'avec les chiffres qu'on a partagés, est-ce qu'on est satisfaits d'où on en est par rapport à tout ce qui a été fait en prévention, en sensibilisation, en formation? Tu sais, dans la mesure... C'est sûr qu'il y a plein d'employeurs qui font une excellente prise en charge. Tu sais, on ne peut pas parler de tous les employeurs du Québec dans le même souffle, hein? Ils sont tous très différents. Mais il reste encore, puis on le voit trop souvent, les employeurs qui, peut-être par mécompréhension, parce que, bien sûr, ils ont d'autres... d'autres responsabilités, ne comprennent pas ou ne prennent pas au sérieux toute la... cette détresse humaine là ou ces plaintes-là. Je ne pense pas que de... C'est la façon de traiter une plainte, alors, tu sais, c'est le mécanisme. Nous, on le connaît, on l'a établi, c'est nos exigences de normes de pratiques pour nos professionnels, le Barreau fait la même chose. Ça fait qu'au fil du temps puis au fil de notre expertise, on a établi que pour vraiment prendre en charge de façon adéquate une plainte, il y a un certain protocole à suivre. Sinon, bien, on risque les dérapages, on risque les préjudices. Donc, c'est comme ça qu'on fait ça.

• (15 h 20) •

Vous parliez de la construction. S'il y a bien une industrie qui est très normée... Mais, tu sais, à un moment donné, on a établi une façon de faire. Tu sais, je ne veux pas comparer l'humain avec la construction, mais vous comprenez, on a des normes pour dire : Quand on fait ça, il faut qu'il y ait telle qualité, mais pourquoi on est réticents à venir dire : Voici comment on traite une plainte pour éviter les dérapages? Ça fait que je ne pense pas que c'est... Et ça s'adapte bien sûr à tous les environnements, ce qu'on vous propose, donc ça n'a pas besoin d'être exactement la même façon de l'exécuter pour la très grande entreprise ou la petite entreprise. Mais je pense qu'il faut... je pense qu'il faut comme société savoir prendre les moyens, surtout quand c'est l'humain. Vous savez, présentement, là, il y a bien des organisations au Québec qui travaillent très fort pour la loi 25, pour la protection des données. J'ai... Je n'ai jamais entendu : Mon Dieu, c'est épouvantable, les PME vont devoir... on leur dicte quoi faire, on leur fait dépenser de l'argent. Ça fait que, tu sais... Parce que... il faut protéger les données bien sûr, c'est important, mais là on parle de l'humain. Ça fait que je pense que comme société, il va falloir s'assurer que l'humain est important. Et quand il y a des gens qui vivent de la détresse, des situations très exigeantes émotivement, qu'il y a un impact sur la productivité, il va falloir venir dicter : Bien, c'est la façon qu'on le fait. C'est... c'est... c'est la norme qu'on fait et c'est comme ça qu'on doit le faire, sinon on ne règle pas la problématique.

M. Boulet : D'accord. Donc, c'est entre les deux. Il ne faut pas trop dire comment. Il faut laisser quand même aux parties le soin de déterminer les tenants et aboutissants du processus. Moi, je le comprends bien comme ça dans le libellé, là, de l'alinéa 6, là, dans le contenu minimal obligatoire de la politique. Puis, tu sais, il faut tenir compte tellement de la réalité des PME, puis, indépendamment des secteurs, il y a une majorité d'entreprises où il y a moins de 10 travailleurs ou moins de cinq travailleurs, puis les situations de harcèlement sont aussi possibles dans des environnements où il y a peu de personnes.

L'identité de l'enquêteur. Qu'est-ce que... Bon, je connais une des revendications légitimes de certains groupes comme le vôtre. Il y a des avocats qui en font, il y a des internes qui en font aussi des fois. Les plus petites organisations, elles disent : C'est toi qui vas être responsable de l'application de la politique. Je vais juste en profiter pour rappeler que la politique va être incluse dans le programme de prévention ou le plan d'action, là, dépendamment... Et ça, quand vous référiez aux risques psychosociaux, bien, la santé psychologique, c'est nouvellement intégré dans notre loi, ça fait que l'identification des risques, à mon avis, ça va simplifier. Mais l'identité de la personne, Manon, eu égard à une PME, est ce que ça ne peut pas être une personne de... Ça aussi, là, ça peut être des intérêts extrêmement variés, là. Les grandes compagnies plus multinationales ou les grandes entreprises qui ont des établissements un peu partout, tu sais, qui sont dans 15 villes du Québec, c'est variable, beaucoup, là. Vous, qu'est ce que vous pensez? Ça devrait être un enquêteur externe? Est-ce que ça peut, dans certaines circonstances, être un enquêteur interne? Est-ce qu'il devrait y avoir un code d'éthique? Est-ce qu'il devrait y avoir...

M. Boulet : ...La formation, j'en conviens, ça, je pense que... Ceux qui font des enquêtes devraient minimalement savoir que... comment convoquer, comment s'assurer du respect de la confidentialité, comment rédiger un rapport, bien connaître les cinq critères d'application de la notion de harcèlement, qui est à la Loi sur les normes du travail. Mais j'aimerais vous entendre là-dessus, là, tenant compte de la diversité corporative québécoise.

Mme Ferland-Dorval (Noémie) : Oui. Bien, tout d'abord, tu sais, je tiens à mentionner qu'on comprend votre préoccupation au niveau de la diversité des réalités d'organisations, puis on est conscients, puis on n'est pas insensibles à l'ampleur du fardeau administratif de manière générale que beaucoup d'organisations ont, dont les PME. Manon le mentionnait tout à l'heure, tu sais, il s'agit des fois de... c'est une question de choix et de priorités. Par rapport au p.l. 25, on n'a pas hésité à leur rajouter une couche... une couche de restrictions puis d'obligations. On pense qu'on pourrait le faire aussi dans ce cas-là.

Par rapport à si c'est quelqu'un d'interne ou externe, il n'est pas exclu que ça soit quelqu'un... interne. En fait, nous, ce qu'on veut, c'est que cette personne-là, peu importe, c'est qui, qu'elle soit à l'interne ou à l'externe, c'est qu'elle soit compétente puis qu'elle soit encadrée. Les deux voies qu'on vous propose, que ce soit celle du... professionnel ou celle de l'accréditation, permettent de faire ça. On veut s'assurer qu'elle... qu'elle a un devoir d'impartialité, qu'elle a un secret professionnel, qu'elle soit... qu'elle soit... qu'elle soit compétente. Donc, pour nous, interne, externe, ça, ce n'est pas... ce n'est pas un enjeu à ce niveau-là.

Mme Poirier (Manon) :...il y a un modèle qui existe dans les petites organisations, qu'on voit de plus en plus. On invite un... Je vais parler des... on invite un professionnel en ressources humaines pour valider la politique. Est-ce que ma politique est adéquate, là? Tu sais, je suis entrepreneur, j'ai plein de chats à fouetter. Je ne connais pas ça les RH puis je veux bien faire. J'invite cette personne-là à m'aider à écrire la politique. C'est cette personne-là qui fait de la formation auprès de mes employés. C'est déjà le visage. Et, s'il y a une plainte, c'est cette personne-là à qui on l'interpelle. Oui, c'est un investissement de quelques heures d'un professionnel, mais c'est un modèle tout à fait accessible à ces petites organisations là, donc d'aller chercher quelqu'un à l'externe. Dans un exemple où on a une entreprise, par exemple de plomberie, puis il n'y a pas de personne qui peut prendre ça à l'interne, donc c'est un modèle qui est tout à fait... Je pense que les moyens puis les modèles, si on y tient puis on croit qu'il faut faire cesser, je pense qu'après ça, c'est simple. On va se mettre ensemble puis on va trouver des moyens de rendre accessible l'expertise aux PME. Mais je pense que ce qui bloque là, sur les moyens, parce qu'on est très créatifs quand on veut y arriver, c'est parce qu'on... Pour une raison qui nous échappe, on n'est pas absolument convaincu qu'on doive aller là, puis après ça, les moyens, ils vont se placer. Ça fait qu'encore une fois on se dit : Bien, ce n'est pas grave, c'est... c'est des enjeux humains. Puis les enjeux humains dans notre société, bien, on a l'impression que ça va... ça va se régler tout seul. Puis on peut peut-être moins les mettre sur un fichier Excel puis les cumuler, puis, tu sais, on ne voit pas les chiffres au bout du compte, mais les coûts humains, les coûts organisationnels, les coûts de santé sont importants. Ça fait que je pense que c'est un faux débat les moyens puis la pression ou la crainte qu'on a par rapport aux PME. C'est tout à fait accessible, même aux plus petites d'entre elles.

M. Boulet : Super. Je suis assez d'accord avec ça. Puis la CNESST, je pense qu'ils nous le réitéraient ce matin, ils vont faire un guide pour l'élaboration d'une politique, là, ça fait que... donc, c'est une forme d'accompagnement. Puis les entreprises qui vont lever la main pourront obtenir de l'accompagnement sur comment faire ta politique, puis on le fait aussi en matière de santé-sécurité du travail. Mais il faut que je mentionne que l'Ordre des CRHA est extrêmement présente aussi, là, dans la formation. Je sais que beaucoup de vos membres font des ateliers de formation dans vos congrès annuels puis dans vos rencontres. Vous faites beaucoup de formation. Et je connais beaucoup de membres de l'Ordre des CRHA qui sont hyper habiles puis qui font des enquêtes. Il y a des personnes d'ailleurs qui sont devenues des spécialistes, là, qui ne font qu'à peu près que ça, puis ils le font pour des PME et des grandes organisations. Moi, je trouve ça fantastique. Moi, j'ai beaucoup d'estime pour ce que vous faites. Ça fait qu'essentiellement, moi... ça terminerait mes... C'est terminé?

La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes pour leur dire merci.

M. Boulet : Manon. Noémie, merci beaucoup. Vous avez été à la hauteur des attentes que nous avions en vous, et on va anticiper votre collaboration continuelle après l'adoption de la loi, souhaitons-le. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je me tourne vers la députée de La Pinière pour son temps de parole. La parole est à vous.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci beaucoup pour votre présence et votre mémoire. J'aimerais vous poser une question. Dans votre deuxième recommandation, vous faites référence à lever l'obligation de confidentialité...

Mme Caron : ... Mais, si je continue sur le thème de la confidentialité, une question qui me turlupine depuis hier que j'ai posée à d'autres personnes : Dans un contexte où, par exemple, un mis en cause est sanctionné parce qu'effectivement il a posé des gestes de violence à caractère sexuel ou de harcèlement psychologique et qu'il change d'emploi pour aller par exemple dans un milieu comme une résidence privée pour aînés, où là c'est un milieu de vie composé de personnes vulnérables et aussi un milieu de travail souvent composé de personnes vulnérables qui sont sont souvent des femmes, des femmes immigrantes, est-ce que vous voyez un inconvénient à ce que le dossier, par exemple, du mis en cause qui a été sanctionné, qui va travailler dans un tel milieu, que ce dossier-là... que l'information à l'effet qu'il a été sanctionné puisse être donnée par son ex-employeur au nouvel employeur qui va prendre des références? Est-ce que... De votre point de vue professionnel, comme CRHA, est-ce que vous... qu'est-ce que vous en pensez?

• (15 h 30) •

Mme Poirier (Manon) :Oui. Bien, d'abord, c'est sûr que la prise de références est soumise au consentement. Donc, si moi, il est arrivé quelque chose chez mon ancien employeur, ce serait étrange que je donne cette référence-là, et l'employeur, le nouvel... le futur employeur ne peut pas passer outre s'il n'a pas le consentement. Donc, du moment où la personne, pour une raison de manque de jugement, disons-le, par rapport à ses intérêts, donne consentement, est-ce qu'on devrait divulguer? Là, je pense que je reviens à tout le processus, c'est-à-dire que.... Est-ce que c'est une bonne chose de le faire, si notre enquête, elle n'était pas nécessairement solide? Est-ce que... Tu sais, si notre processus n'était pas béton, est-ce qu'on a le droit de nuire à la réputation de quelqu'un d'autre, tu sais? Ça fait que, oui, on aimerait pouvoir identifier à un futur employeur : Faites attention, cette personne-là a un historique, mais je pense que... je vous dirais que ça serait très dangereux d'ouvrir ça, parce que ça ouvrirait à des cas où, bien, ce n'était pas tout à fait légitime, ça n'a pas été bien enquêté, la conclusion était inexacte. Ça fait que, donc, si jamais la personne fait l'erreur de donner consentement, je ne pense pas qu'on devrait aller sur ce véhicule-là si c'est suite à un processus interne que personne n'est... dont personne n'est venu valider la légitimité.

Mme Caron : Et dans le cas d'une entreprise plus grande, peut-être, où le processus a été validé, il se fait dans les règles de l'art, est-ce que ça changerait?

Mme Poirier (Manon) :Bien là, ça va être difficile de venir... Qui va venir établir que cette organisation-là peut donner l'information, et pas l'autre? Ça fait que je pense que, de façon pratico-pratique, ça serait peut-être difficile à se mettre en action. Puis, encore une fois, les cas sont limités, parce qu'il faut ce fameux consentement-là. Donc, je pense que la situation risque de ne pas trop se produire. Encore une fois, il faudrait vraiment qu'il y ait une entité neutre qui viendrait dire : Bien oui, les processus chez un tel, un tel employeur sont adéquats, ça fait qu'on peut partager l'information, et pas dans l'autre. Je ne pense pas que ça soit réalisable, là, de façon si facile.

Mme Caron : O.K. Donc, cet... le nouvel employeur ne peut pas avoir, je dirais, l'oeil pour savoir s'il y a un risque plus grand en embauchant telle autre personne ou telle autre pour...

Mme Poirier (Manon) :Malheureusement, les limites avec certains... au niveau de la vie privée et des renseignements confidentiels, sauf toujours bien sûr s'il y a le consentement. Mais, vous savez, il y a un instrument aujourd'hui si jamais le cas a fait... a eu plus de ramifications, mais bien sûr on peut peut-être avoir quelques données, mais, encore une fois avec parcimonie, utiliser ce qui réside sur l'Internet, donc. Mais souvent, maintenant, les employeurs font aussi à la fois la vérification des références, sous consentement, et des recherches, là, sur différentes plateformes. Encore une fois, il faut faire attention à ce genre d'usage là.

Mme Caron : Oui, c'est ça, puis surtout que la confidentialité peut faire en sorte que ça ne se retrouve pas non plus sur...

Mme Poirier (Manon) :Bien sûr.

Mme Caron : ...sur une plateforme. Dans l'étude... une étude que vous avez mentionnée, il est question de télétravail, où on disait que c'est... ça peut être beaucoup plus difficile de mettre en application une politique de prévention de harcèlement ou de violences à caractère sexuel ou d'intervenir par la suite. Pourquoi ça devient plus compliqué dans le cadre du télétravail?

Mme Poirier (Manon) :Je ne pense pas que c'est plus compliqué, je pense que toute la prévention, la formation, la sensibilisation se font bien à distance. Donc, nous, nos deux préoccupations avec le harcèlement, c'est que, quand est arrivé le fameux télétravail lors de la pandémie, on a eu l'impression que ça faisait réduire le harcèlement, alors qu'en fait, l'aisance derrière l'ordinateur, et on le voit tristement sur les médias sociaux, ça crée des comportements inadéquats qui vont... puis... et donc les travailleurs nous avaient dit, alors qu'ils sont en télétravail : Tu sais, je serais peut-être moins volontaire à venir déposer une plainte, parce qu'il y a comme cette distance-là qui s'était créée. Ça, c'était notre première préoccupation. La...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

Mme Poirier (Manon) :...seconde préoccupation, c'est il faut juste s'assurer que l'employeur n'a pas la responsabilité d'assurer un environnement complètement exempt de harcèlement si la personne est toujours en télétravail. Donc, est-ce que l'environnement de la personne est adéquat à la maison? Est-ce que les voisins... Bref, il faut juste bien limiter que c'est en lien avec le travail. Donc, je vais prendre l'exemple peut-être inusité d'un voisin, bien, ce n'est pas ma responsabilité comme employeur, parce que le voisin n'a pas de lien d'emploi avec moi. Ça fait qu'il faut que ce soit des gens qui soient en lien avec l'organisation ou le travail.

Mme Caron : D'accord. Maintenant, au sujet de votre recommandation numéro 6, où vous disiez que «l'article 4 ajoute à la loi sur... à la LATMP des présomptions qui ont pour objectif de faciliter la preuve permettant la reconnaissance d'une lésion professionnelle découlant d'une...  Alors, le libellé pourrait imposer, après trois mois, à la victime le fardeau de la preuve.»

Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus, s'il vous plaît?

Mme Poirier (Manon) :Oui, en fait, dans préparation avec certains de nos aviseurs légaux qui disaient : Bien, l'intention, elle est claire, mais le libellé peut-être doit être revu. Ce que prévoit le texte, là je ne l'ai pas devant moi, c'est que... doit démontrer que la lésion résulte de la violence à caractère sexuel. Donc, le fait de devoir démontrer que ça résulte de ça, elle nous disait que ça remettait le fardeau à la victime. Donc, ce n'est pas... Donc, on avait comme l'impression que l'intention ne s'avérait pas avec le libellé du texte, donc une invitation sans pouvoir faire de recommandation prisée sur le nouveau texte, mais de s'assurer que l'intention se matérialise bel et bien par la proposition de texte.

Mme Caron : D'accord, merci. Et puis votre septième recommandation à propos de la notion de représentant, vous trouvez que ça laissait place beaucoup à l'interprétation, est-ce que vous pouvez nous en parler davantage?

Mme Poirier (Manon) :Oui, la notion de représentant de l'employeur, ça veut dire quoi, donc jusqu'où. Donc, on comprend, on se dit : Bon, bien, les organisations ne seront pas imputées à moins que ce soit directement leur comportement, donc un dirigeant, une dirigeante. Mais le représentant de l'employeur, c'est qui, tu sais, sur la petite PME de 10 personnes, on peut comprendre que le représentant de l'employeur, c'est, premièrement, une personne, mais dans une plus grande organisation jusqu'où ça va.

Ça fait que l'idée, c'est de trouver cet équilibre-là entre... Quand on enlève l'imputation à l'employeur et c'est toutes les unités qui absorbent bien, il pourrait avoir une certaine déresponsabilisation en disant : Bien, de toute façon, s'il y a des lésions professionnelles associées à ça, ça ne va pas m'impacter dans mon expérience. Mais, par ailleurs, plusieurs groupes d'accompagnement de victimes vont vous dire que, tu sais, plus il y a de risques de contestation par l'employeur, bien, plus ça expose la victime à répéter son histoire, elle revit son histoire, donc limiter les cas de contestation.     Donc, si on donne une définition plus restrictive de c'est qui un représentant de l'employeur, ça va... donc, plus restrictive que large, bien ça va permettre à la victime de ne pas, dans plusieurs cas, devoir répéter son histoire, mais continuer quand même à imputer certains coups à l'employeur quand c'est de son... du comportement de ses dirigeants.

Mme Caron : Merci. Ensuite, vous aviez aussi la question de la confidentialité du dossier médical en lien avec l'article 5, alors, là encore, j'aimerais vous entendre nous expliquer davantage.

Mme Poirier (Manon) :Oui, bien, en fait, c'est sûr que, déjà, dans les organisations, beaucoup...  Donc, c'est le médecin qui est désigné qui peut avoir un accès au dossier médical, l'employeur peut avoir un accès au dossier plus administratif. Mais, tu sais, l'employeur a le droit de se défendre, donc de contester un cas et d'avoir accès à l'information. Là, notre compréhension du projet de loi, c'est... donc, ce n'est strictement que le médecin désigné qui a accès à cette information-là, et c'est lui ou c'est elle qui va décider quelles informations il ou elle partage à l'employeur. Donc, il y a une préoccupation de droit de l'employeur, il y a une préoccupation de charge ou d'impact chez les médecins, le médecin traitant, est-ce qu'il veut prendre cette responsabilité de dire : Quelles informations je donne?

Et, tu sais, concrètement, pratico-pratique, bien, certaines organisations, désigner un médecin, c'est très loin de leur réalité au quotidien. Des fois, ils ont un cas, ils n'ont pas cette compétence-là assez. Donc, notre suggestion, c'est d'ouvrir à un petit peu plus de gens que strictement le médecin désigné pour pouvoir avoir accès à ce dossier médical. Mais des gens qui ont les mêmes obligations que les médecins, c'est-à-dire de secret professionnel, de confidentialité, donc la voie des ordres professionnels, là, pourrait être une façon d'offrir plus de flexibilité, mais maintenir la confidentialité.

Mme Caron : O.K. Et d'ailleurs il y a une amende qui est liée avec ce que le médecin... de son respect de la confidentialité. Alors, est-ce que... Donc, ce serait aussi une obligation que d'autres professionnels...

Mme Poirier (Manon) :Oui...

Mme Poirier (Manon) :Exactement, donc. Donc, s'il y avait un manquement dans un dossier, par exemple pour un CRHS-CRIA, donc, cette personne-là s'exposerait, suite à une enquête du syndic, soit à une... à une amende qui est versée ou une radiation temporaire. Donc, on a les mêmes mécanismes que le Collège des médecins pour s'assurer de la confidentialité de nos professionnels.

Mme Caron : O.K. Mais est-ce que vous... Parce que... Je pose la question parce que quelqu'un nous l'a soulevé hier. Est-ce que vous ne pensez pas que le fait qu'il y ait cette... ce risque de subir une amende puisse réduire le nombre de personnes qui seraient prêtes à effectuer ces tâches-là?

Mme Poirier (Manon) :Non, je ne pense pas. En fait, nos professionnels font le choix, donc je vais parler pour les professionnels, CRHS-CRIA, elles font le choix d'être membre de leur Ordre, mais elles ne sont pas obligées d'être membres de leur ordre pour pratiquer en ressources humaines. Donc, sciemment, ils décident... Moi je vais respecter mon code de déontologie. Ça fait que je ne pense pas que ça va être un frein, mais une reconnaissance de leur expertise. Ils sont déjà très impliqués dans ce genre de dossier là et ils sont souvent plus proches des organisations, peut-être, que médecins, bien sûr quand on parle des petites organisations, là.

• (15 h 40) •

Mme Caron : Et puis... Je ne sais pas s'il reste...

La Présidente (Mme D'Amours) : Une minute.

Mme Caron : Moins d'une minute. Vous avez mentionné que l'intervention en milieu de travail était peut-être le... le point faible, disons, de... Quelle serait votre plus grande... votre recommandation qui pourrait venir pallier à cette... à cette...

Mme Poirier (Manon) :Oui. Bien, on en... On en a quelques-unes, là, mais si vous... Donc, bien sûr, c'est d'appliquer la façon de faire. Mais s'il y a une chose, je pense, qu'on doit faire, et je serais heureuse d'entendre, à l'instant, M. le ministre dire que, pour la formation des gens qui font des enquêtes, il est tout à fait en faveur de ça. Donc... Donc, pour moi, c'est de s'assurer que les gens qui sont enquêteurs aient la formation et soient encadrés. Ça, c'est l'essentiel. Si on doit faire un choix dans nos recommandations pour la protection du public, il faut que ces gens-là soient formés, soient encadrés.

On a le souci de le faire pour tous les autres qui sont déjà plus... Tu sais, les arbitres sont déjà plus formés. Donc, c'est tous ces gens-là qui sont au TAT et qui, là, ont déjà une longueur d'avance sur plein de gens qui présentement font des enquêtes en matière de harcèlement. On voit trop souvent l'organisation demander à quelqu'un, à l'interne, aux contrôleurs, j'aime beaucoup les contrôleurs, beaucoup de respect pour leur expertise, mais ce n'est quand même pas ça qu'ils font dans la vie, ce n'est pas pour ça qu'ils sont formés.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.

Mme Poirier (Manon) :Alors, l'essentiel, c'est ça.

Mme Caron : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Toujours un plaisir de vous entendre en commission. Moi aussi je trouve que votre mémoire est très bon. La constance est impressionnante d'un projet de loi à l'autre, comme le ministre l'a si bien dit tantôt. Blague à part, j'ai posé la question à quelques groupes qui sont passés avant vous. Si vous avez écouté puis si vous me voyez venir, vous faites plusieurs propositions. Lesquelles sont les incontournables que vous pensez, là, qui sont essentielles qu'on... qu'on traite puis qu'on intègre au projet de loi pour que vous disiez à la fin de l'exercice : C'est bon. Ils ont ramassé l'essentiel. S'il y en avait deux ou trois, peut-être quatre.

Mme Ferland-Dorval (Noémie) : Oui. Bien, la première, on a parlé de la définition tout à l'heure au niveau de la violence. Clairement, c'est quelque chose qui a été relevé par plusieurs groupes qui ont eu un peu la même lecture que nous. C'est qu'on pense que c'est une... une grande priorité. Puis, au risque de nous répéter, la deuxième priorité, c'est... À notre sens le nerf de la guerre, c'est d'élargir le «scope» un petit peu du projet de loi pour assurer une meilleure prise en charge. On a mentionné les deux... les deux volets qui, selon nous, permettraient d'assurer cette meilleure prise en charge là. Puis, tout à l'heure, M. le ministre a parlé de... de l'espoir que le projet de loi, une fois adopté, puisse redonner confiance aux victimes. Puis au sein des organisations, tant que les victimes ne sont pas assurées que les plaintes seront bien traitées puis qu'elles sont accueillies par les bonnes personnes, malheureusement, la confiance ne sera pas... ne sera pas au rendez-vous. On pense que c'est vraiment ça le nerf de la guerre. Donc, ce serait nos deux... nos deux volets principaux.

M. Leduc : Quand vous parlez de la définition, là, est-ce que c'est celle-là 28.0.1 ou c'est une autre?

Mme Poirier (Manon) :Celle de la violence.

Mme Ferland-Dorval (Noémie) : La violence à caractère sexuel.

M. Leduc : C'est la... privé, là, qui posait problème?

Mme Poirier (Manon) :Oui. Bien, en fait, il y a... il y a... En fait, ce qui cause problème dans la notion de violence à caractère sexuel, c'est... On... On énonce des paroles, des gestes et des attitudes. Ça fait que, tu sais, il y a quelque chose de très subjectif dans la notion d'attitude. Ça fait qu'on n'est pas sûrs... Je pense que c'est la première fois qu'on la voit là, sauf erreur, cette notion-là. Donc, il y a beaucoup d'interprétation. Qu'est-ce que c'est, une attitude? Puis aussi, on dit que ça peut être répété, une seule fois ou répété. Mais quand on dit une seule fois, on ne fait pas de référence à la notion de gravité, alors qu'on est habitué au niveau du harcèlement psychologique, sexuel, de... Tu sais, s'il y a un seul geste, il faut qu'il soit grave. Mais donc si on lit la... tel quel aujourd'hui la définition qui est proposée, donc, une parole non désirée, une fois, pourrait être catégorisée comme de la violence...

Mme Poirier (Manon) :...violences à caractère sexuel, on n'est pas sûrs que ça soit souhaitable, oui.

M. Leduc : Donc, mais la référence, à la fin de 28.01, là, «sauf si cette violence survient dans un contexte strictement privé», beaucoup de gens ont trouvé que c'était dangereux, que ça...

Mme Poirier (Manon) :Oui.

M. Leduc : Qu'est-ce que vous pensez de ça? Parce que je n'ai pas nécessairement lu quelque chose de spécifique là-dessus, dans votre mémoire, sauf erreur.

Mme Poirier (Manon) :Non, on n'a pas trop poussé sur cette notion-là, mais je pense que... je pense que les gens l'ont bien représenté, c'est difficile, des fois, de distinguer qu'est-ce qui est vraiment du privé ou pas, est-ce que les événements sociaux ou... est-ce que le fait de... on fait un voyage d'affaires ensemble, tu sais, comme, qu'est-ce que... ou jusqu'où va la notion de privé puis la notion de travail fait. Ça fait que je pense qu'on serait peut-être en accord avec les gens qui vous ont invités à être prudents avec cette notion de... privé.

M. Leduc : Qu'il y avait peut-être un danger, là, d'ouvrir cette porte-là.

Mme Poirier (Manon) :Oui.

M. Leduc : Parfait. Il y a Juripop qui est passé, hier, qui disait qu'il pourrait être intéressant d'ouvrir la porte à des recours civils quand on a affaire à deux personnes, deux employés, là, qui... un employé harceleur, un employé harcelé, qu'on devrait pouvoir ouvrir la porte à un recours civil, donc à des poursuites extra santé et sécurité, si on peut dire. Est-ce que c'est une porte qu'il faut ouvrir, ça aussi?

La Présidente (Mme D'Amours) : Réponse en 20 secondes.

Mme Poirier (Manon) :Je pense que, si nos mécanismes actuels et ceux de l'interne sont efficaces puis... les autres recours, ce n'est peut-être pas nécessaire, mais, tu sais, on ne... je ne les ai pas entendus, on ne s'est pas penché là-dessus. Ça fait que, si vous voulez qu'on vous réponde, on pourrait peut-être y songer davantage pour avoir une réponse complète et rigoureuse.

M. Leduc : ...

Mme Poirier (Manon) :Oui.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Merci beaucoup, tout le monde. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques minutes afin de permettre aux prochains invités de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 45)

(Reprise à 15 h 48)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous revenons à la commission. Donc, je souhaite maintenant la bienvenue à l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec. Je vous rappelle, chers invités, que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Je vous demande donc de vous présenter et de commencer votre exposé. Ah! là, je n'ai plus de son, Mme. Les micros sans fermés?

Mme Demers (Isabelle) : On reprend. Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Oui. M. le ministre du travail, Mme la Présidente de la commission, mesdames et messieurs membres de la commission, je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui dans le cadre des consultations sur le projet de loi no 42.

Je m'appelle Isabelle Demers, je suis vice-présidente développement stratégique, affaires publiques et innovation à l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec, l'APCHQ. Je suis aujourd'hui en compagnie de mes collègues, Mylène Turcotte-Bureau, qui est directrice principale des affaires juridiques, et de M. Dominic Veillette, directeur santé et sécurité...

Mme Demers (Isabelle) : ...relations de travail à l'APCHQ. Brièvement, là, nous sommes fondés... nous existons depuis 1961. Nous représentons plus de 20 000 membres. Nous agissons comme un moteur de développement social et économique par la promotion de la durabilité de la qualité en habitation. Nous sommes spécialistes de l'habitation et de la rénovation. Nos hôtes, c'est aussi le représentant patronal du secteur résidentiel lors du renouvellement des conventions collectives de l'industrie. Nous sommes aussi le plus important gestionnaire de mutuelles de prévention du domaine de la construction. En 2003, nos mutuelles de prévention comptaient environ 2500 entreprises dans le domaine de la construction et 1500 autres entreprises dans d'autres secteurs connexes. Depuis sa création, l'APCHQ fait structure la prévention sur les chantiers de construction, et comme toujours, le gouvernement du Québec peut compter sur notre appui pour identifier les activités de gestion de la santé et de la sécurité du travail qui permettront d'améliorer le bilan de la santé et de la sécurité dans l'industrie pour le bénéfice des travailleurs.

• (15 h 50) •

C'est d'ailleurs avec grand intérêt que nous avons participé, au printemps 2022, aux travaux du comité chargé d'analyser les recours en matière de harcèlement sexuel et d'agressions à caractère sexuel. Aujourd'hui, nous saluons la présente pièce législative, et ce, particulièrement pour les dispositions touchant le droit du travail et la prévention. Toutefois, certaines dispositions en matière d'indemnisation, sur ces éléments, l'APCHQ soulève quelques préoccupations en ce qui a droit... En ce qui a trait aux droits de gestion de l'employeur. Dans les prochaines minutes, nous allons concentrer notre propos sur certaines modifications qui ont trait notamment à la définition même de violence à caractère sexuel telle que proposée dans le projet de loi. De plus, nous formulerons aussi des recommandations pour les présomptions en matière de lésions professionnelles et pour l'accès au dossier médical d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle. Je vous remercie. Je cède maintenant la parole à ma collègue Turcotte-Bureau qui vous exposera avec plus de détails les recommandations que nous vous mettons dans le but de contribuer à ce que les objectifs souhaités par la loi 42 puissent être rencontrés. Merci beaucoup.

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Merci, isabelle. Bonjour, Mme la Présidente. Tout d'abord, en ce qui a trait à la définition de violences à caractère sexuel telle que proposée par la loi à l'article 33 du projet de loi, nous considérons que le libellé est large et ambigu. L'application d'une telle définition pourrait faire l'objet d'abus, d'interprétations libérales engendrant une augmentation importante des réclamations non fondées et des conséquences pour l'employeur qui devra se défendre. Pour l'association, la définition contenue à la Loi sur les normes du travail concernant le harcèlement psychologique est suffisamment complète, y incluant d'ailleurs déjà les paroles, les actes ou les gestes à caractère sexuel. C'est pourquoi l'APCHQ recommande le retrait de l'article 33 du projet de loi.

Pour ce qui a trait aux présomptions en matière de lésion professionnelle, l'article 4 de la présente pièce législative prévoit l'ajout de deux présomptions en faveur des travailleurs afin de faciliter la reconnaissance d'une lésion professionnelle lorsque celle-ci résulte d'une violence à caractère sexuel. Rappelons que l'article 28 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles impose l'appréciation de trois critères seulement soit la présence d'un diagnostic de blessure qui arrive sur les lieux de travail et le fait que le travailleur était à son travail. La connexité avec le travail en ce que cette blessure survient par le fait ou à l'occasion du travail est importante. Pour l'APCHQ, l'ajout dans le projet de loi de critères additionnels afin de faciliter la reconnaissance d'une lésion professionnelle est superflu et vient alourdir le texte de loi considérant que l'article 28 actuel de la LATMP est suffisant pour permettre la reconnaissance de lésions professionnelles. Une maladie ou une blessure serait automatiquement considérée comme résultant du travail dès lors que la violence sexuelle en est la cause. Le seul moyen pour l'employeur de renverser cette présomption sera de prouver le caractère strictement privé de l'acte. De plus, une reconnaissance automatique de ce type de lésions s'effectuera en l'absence d'enquêtes par des personnes habilitées en matière de violences à caractère sexuel. L'APCHQ considère que les nouvelles dispositions auront pour effet d'augmenter le fardeau de l'employeur en empêchant l'appréciation réelle des faits lors de l'admissibilité,  de la décision d'admissibilité et, conséquemment, de générer davantage de litiges devant les tribunaux.

En ce qui a trait à la maladie, au sens de la loi, elle doit évidemment être énumérée soit dans le règlement à l'annexe I en raison de sa caractéristique en lien avec le travail déterminé, ou encore faire la preuve d'une caractéristique du travail exercée ou directement reliée au risque particulier. Ainsi, instaurer une présomption de maladie dans le cas de violences à caractère sexuel serait dénuée de sens du fait qu'une maladie découlant d'une violence ne peut être caractéristique d'un emploi, même d'un emploi en particulier. À ce titre, une maladie résultant de la violence sexuelle ne peut pas avoir la même reconnaissance qu'une amiantose, par exemple, qui, en lien avec un travail qui a impliqué une exposition à la fibre d'amiante ou encore une atteinte auditive...

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : ...en lien avec un travail ayant impliqué une exposition à un bruit excessif. Ceci dit, rappelons qu'à titre de maladie d'ordre psychologique, certaines modifications ont déjà été proposées par la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, qui prévoit déjà une présomption de maladie professionnelle pour les troubles de stress post-traumatique faisant suite à une violence sexuelle. C'est pourquoi l'APCHQ recommande de maintenir le statu quo au niveau de l'article 28 de la LATMP et de retirer les ajouts qui sont prévus à l'article 4 du présent projet de loi.

Enfin, pour l'accès au dossier médical d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle, les articles 6, 7, 8 du projet de loi prévoient une restriction importante au droit de gérance de l'employeur pour les réclamations auprès de la CNESST, tout en imposant en plus des sanctions en cas de non-respect. Au niveau de la CNESST, il faut comprendre que la relation tripartite qui existe dans le cadre d'une réclamation est vraiment particulière à notre système québécois. L'employeur qui est l'unique contributeur au régime d'indemnisation se voit imposer des décisions à l'égard de réclamations soumises pour ses travailleurs, lesquelles décisions ont un impact direct sur ses droits, sur ses recours et l'ensemble de son dossier financier. Puisque le régime d'indemnisation de la CNESST est uniquement et entièrement financé par les employeurs cotisants, la procédure menant à une décision individuelle doit être conduite dans le respect des devoirs d'agir équitablement à l'égard des personnes impliquées.

L'APCHQ a basé son raisonnement, notamment sur la Loi sur la justice administrative, laquelle prévoit qu'une autorité administrative est tenue de s'assurer que le dossier... et que les documents pertinents s'y retrouvent avant la prise de décision. Un tel droit à l'égard de l'administré doit également exister à l'égard de la partie qui va en subir des conséquences financières par l'augmentation de ses cotisations. L'APCHQ est d'avis qu'un équilibre doit prévaloir dans la gestion d'un dossier de réclamation et ainsi l'employeur doit conserver son droit de commenter au vu et au su de la documentation médicale, la situation rencontrée. En empêchant l'employeur d'effectuer un suivi diligent dans l'évolution de la lésion professionnelle de son travailleur, l'assignation temporaire et un prompt retour au travail peuvent également être nettement compromis. De plus, en raison de la proposition avancée, il serait à prévoir une sollicitation exponentielle des médecins désignés afin d'assurer un suivi régulier imposé par la loi.

Quant à la question de la sanction en cas d'accès au dossier médical, il importe de préciser que les articles de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé en parlent déjà, la détention, la communication et la conservation de renseignements de nature personnelle. Elle encadre également le non-respect de ces dispositions prévues à la loi et c'est la Commission d'accès à l'information qui est l'entité gouvernementale qui veille à son application. L'ajout de sanctions proposées dans le projet de loi pourrait engendrer une confusion quant au recours à exercer. Ainsi, avec la formulation telle que proposée dans le projet de loi, l'accès au dossier complet du travailleur ne sera possible qu'en contestant administrativement ou médicalement les aspects du dossier. Il s'agit exactement de la situation que l'APCHQ veut éviter. Empêcher l'employeur d'exercer son droit de gérance dans le cadre d'une réclamation pour lésion professionnelle et lui refuser tout l'accès aux informations pertinentes pour une saine gestion de ces réclamations engendrera inévitablement l'augmentation de contestations et la judiciarisation des dossiers devant la CNESST devant le Tribunal administratif du travail et, évidemment, le Bureau d'évaluation médicale. C'est pourquoi l'APCHQ recommande le retrait des nouvelles dispositions qui sont prévues aux articles 38, 38.1, 39 et 458.1. Ceci met fin à notre présentation. Je vous remercie pour votre attention. Nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. D'abord, vous remercier sincèrement, Mme Demers, Me Turcotte-Bureau, M. Veillette, un, pour la présentation, puis, deux, la qualité de votre mémoire. Puis on sait tellement à quel point votre secteur est important, hein, non seulement pour le Québec, mais le domaine résidentiel. Il y a énormément d'entreprises avec un nombre limité de travailleurs. Il faut simplifier si on veut lutter, si on veut développer une culture de prévention, de formation et de signalement, il faut que ce soit adapté à la réalité spécifique de chacun des entrepreneurs de la construction. Puis vous savez tous les trois, là, les résultats du sondage Léger qui a été communiqué par la voix de la Commission de la construction du Québec sur le 79 % de travailleurs qui ne signalent pas par crainte de représailles ou de perdre leur emploi. Et ça existe là où il y a trois, huit, 15...

M. Boulet : ...personnes. Je vais m'intéresser à trois éléments qui sont soulevés, là, plus spécifiquement par Me Turcotte-Bureau. La définition. On va réanalyser la situation, mais je veux que vous compreniez que cette définition-là, elle s'inspire de l'Organisation internationale du travail, qui a la même définition, puis dans la Loi sur la lutte aux violences à caractère sexuel dans le domaine de l'enseignement supérieur. Puis, c'est sûr qu'on le met dans une loi qui vise à prévenir et lutter, alors que dans la Loi santé-sécurité... Bien, en fait, il y a trois lois différentes, là, je la répète souvent, là, santé-sécurité, c'est une loi préventive, accidents de travail, maladies professionnelles, c'est une loi d'indemnisation, et la Loi sur les normes identifie des recours et spécifie des obligations minimales qui doivent être respectées, notamment par les employeurs. Le but, ce n'est pas d'interférer avec le droit de gérance de l'employeur, mais c'est de s'assurer qu'il y ait une compréhension la plus commune et la plus respectueuse des objectifs de ces trois lois différentes là.

• (16 heures) •

Puis je ne veux pas l'oublier, là, parce que ma collègue de Huntingdon m'en parle à l'occasion, là, quand on réfère à la formation, Isabelle, vous l'avez mentionné au départ, ne négligeons pas les mutuelles de prévention, ne négligeons pas non plus les associations sectorielles paritaires. Il y en a une dans le secteur de la construction, elles sont impliquées dans les comités, les sous-comités de la CNESST. Ça, c'est hyper bénéfique, et on n'en parle pas assez souvent. Donc, pour la définition, c'est certain que je veux m'assurer que les définitions soient les plus conciliables possibles, mais ce que vous demandez, ce que je comprends, Me Turcotte-Bureau, c'est qu'on l'enlève tout simplement, alors qu'il y en a d'autres qui nous ont dit : Il faut l'élargir. Vous avez oublié d'indiquer le geste ou l'acte isolé qui génère des retombées quand même ou des dommages importants. Donc, il y en a qui nous demandent de l'élargir puis vous, vous nous demandez de l'éliminer. Est-ce que j'ai bien compris, Me Turcotte-Bureau? Êtes-vous sérieuse?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Oui, en fait, j'ai eu la chance d'écouter, là, les commissions depuis hier, effectivement. Oui, c'est effectivement une information qui a été omise, là, dans la définition parce que, si on se base sur celle qu'on retrouve sur la Loi sur les normes, l'acte isolé et seul est d'une gravité suffisante peut engendrer du harcèlement. Notre analyse, en fait, c'est basé sur le fait que la définition qu'on retrouve au niveau de la Loi sur les normes inclut déjà une série importante de situations et ça inclut également le caractère... les gestes à caractère sexuel. Donc, on se retrouverait avec deux définitions qui s'appliqueraient dans deux situations différentes, j'en suis consciente. Ce que je craignais, mais ce que nous craignons, en fait, au niveau de la définition qui était proposée dans le projet de loi, c'est vraiment le fait qu'elle est extrêmement large, on y inclut toute forme de violence ainsi que toutes autres inconduites, et ce spectre-là d'inconduites qui peuvent se manifester par différents comportements, gestes ou caractères, peut être extrêmement large. Et ce qu'on veut éviter, en fait, c'est que ça génère, en fait, soit de l'abus ou des interprétations beaucoup trop libérales, ce qui engendrerait un nombre important de réclamations auprès de la CNESST; les employeurs devront sur défendre, et tout. Donc, c'est vraiment à ce niveau-là, au niveau des définitions, on voulait une harmonisation ou encore on s'inspirait de la Loi sur les normes du travail pour parler de ces crimes à violence... à caractère sexuel.

M. Boulet : Donc, ce que vous me dites, c'est que vous demandez dans votre mémoire le retrait de la définition, mais s'il y avait une définition il faudrait qu'elle soit harmonisée avec celle contenue dans la Loi sur les normes du travail. Je vois trois hochements de tête pour le bénéfice... ah, bien, tout le monde vous voit. Alors, ça me va pour la définition.

Les présomptions. Je comprends que les employeurs n'aiment pas l'ajout de présomption. On en a ajouté dans notre Loi modernisant le régime de santé-sécurité du travail, il y a de mes collègues qui le demandaient qu'on ajoute des présomptions. Ici, c'est important de redire qu'une présomption, c'est simplement un moyen de faciliter la preuve puis d'éviter la victimisation secondaire des personnes qui sont victimes, là, qui veulent faire des plaintes. Le fardeau de la preuve n'est pas le même. Mais, en même temps, il y a des moyens de renverser cette présomption-là qui n'est que relative, hein, vous connaissez...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Boulet : ...bien ça, Me Turcotte-Bureau, puis ce n'est pas qu'en démontrant que c'est survenu dans un contexte strictement privé. Tous les éléments déclencheurs de l'application de la présomption peuvent faire l'objet d'une preuve contraire, tu sais, s'il n'y a pas eu violence à caractère sexuel ou s'il n'y a pas eu blessure ou maladie, mais je comprends votre point. Vous voulez enlever toutes les présomptions, puis il y a d'autres groupes, je vais vous faire sourire, qui nous disent qu'il faut allonger les délais d'application des présomptions, hein? Ça fait que c'est pour ça qu'en relations de travail, je dis tout le temps, il faut essayer de trouver le meilleur consensus possible.

Ça fait que je comprends, pour la présomption plus générale. Pour la maladie, ce n'est pas blessure, maladie, là, c'est la maladie dans les trois mois. Et ça, ça fait un consensus dans la communauté scientifique et médicale, que c'est probant à l'intérieur de ce délai-là. Mais il y en a qui souhaiteraient que ce soit beaucoup plus long que trois mois. Là-dessus, Me Turcotte-Bureau, est-ce que vous aviez un élément à ajouter? Vous demandez le retrait pur et simple, hein?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Bien, en fait, au niveau des présomptions, effectivement, M. le ministre, ce qu'on mentionnait, c'est que l'article 28, tel que rédigé actuellement, et l'application qui en est faite par les tribunaux est suffisante. Une brève recherche de mon côté avec les mots clés «violence», «caractère sexuel» et «admissibilité» m'a permis de répertorier que neuf décisions sur 10 sont admissibles et sont acceptées par les tribunaux. Donc, c'est faux de demander... en fait, ça serait erroné de demander des présomptions additionnelles pour le bénéfice que malheureusement les victimes ne sont pas reconnues. Ça fonctionne actuellement avec l'article 28 et... Excusez-moi, vous voulez peut-être intervenir, M. le ministre, je vais vous laisser...

M. Boulet : Non, non, non. Finissez votre point. J'ajouterai un commentaire.

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Le point également qui a été soulevé au niveau... quand on sort de la sphère professionnelle. Donc, on parlait hier de caractère strictement privé, par exemple, là, du milieu qui est strictement privé. Il y a, encore une fois, l'article 2 de la LATMP qui permet cet élargissement de cette sphère professionnelle là même à l'extérieur des lieux du travail. Donc, la reconnaissance, lorsqu'on prend le recours, là, devant les tribunaux, évidemment, ça fonctionne. Les tribunaux sont très conscients de l'application et de l'appréciation des faits qui sont soumis par les victimes lors de telles réclamations.

M. Boulet : Je comprends et je suis assez d'accord avec votre deuxième partie, mais la première partie, même s'il y en a un pourcentage important où les plaintes slash réclamations sont acceptées, il y en a très, très, très peu, là, comme vous avez vu, là, c'est un peu moins que 5 000, alors que les victimes ne signalent pas, ne dénoncent pas. Et les présomptions, c'est certainement un élément, quand c'est bien communiqué, qui favoriserait la dénonciation, le signalement ou une demande d'accompagnement pour soumettre une réclamation. Parce que le 4 000 quelques cents, là, plaintes ou réclamations, ce n'est certainement pas le reflet de la réalité. Quand on voit les 49 %, les 11 %, les 79 %, la prévalence est tellement massive. C'est pour ça qu'au-delà de la formation puis de la prévention il faut s'assurer que les personnes signalent.

Puis, avant de laisser la parole à ma collègue de Laporte, juste sur l'accès, on ne vient pas limiter l'accès, le paradigme demeure exactement le même. On disait accès, mais par la voie du professionnel de la santé désigné par l'employeur. Et c'est la même réalité, là, le... l'employeur qui va faire une contestation sur un des éléments de 212 ou qui va faire une contestation, il va pouvoir obtenir un résumé ou l'information pertinente à l'exercice de ses droits de contestation, puis ultimement au Tribunal administratif du travail. Ça fait que nous, on l'avait libellé pour clarifier, puis j'aimerais ça que vous le révisiez, bon, révisiez le texte... puis le texte qu'on a dans notre projet de loi, puis vous allez voir que c'est plus une question de clarification de la situation. Puis on sait en réalité, Me Turcotte-Bureau, que les employeurs, par la voix des professionnels de la santé désignés par eux ou par elles, ils obtiennent de l'information, là, qui est pertinente à l'exercice de leurs droits.

Il reste combien de temps?

La Présidente (Mme D'Amours) : ...minutes 30 secondes.

M. Boulet : O.K. Est-ce qu'à cet égard-là vous aviez un commentaire à partager avec moi...

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : ...oui, en fait, il s'agit de... ce qui est prévu, c'est que le professionnel de la santé va pouvoir ne transmettre que les informations qui sont nécessaires. Le libellé, là, je le cherchais, donc, ce qui est nécessaire. Ce qui arrive, c'est que, souvent, lors de l'analyse du dossier, c'est des informations que l'on découvre. Puis il ne faut pas oublier que le médecin, quand il regarde un dossier, lui, il les regarde avec ses yeux de médecin, avec les informations qu'il peut, lui, juger nécessaires pour permettre à l'employeur d'exercer ses droits, mais les gestionnaires ou les personnes qui ont accès aux dossiers vont les regarder d'un autre aspect, plus administratif. Si on parle, par exemple, de crédibilité ou d'informations qui ont été transmises par le travailleur à son médecin traitant dans le cadre de l'ouverture de son dossier. Donc, le médecin désigné n'aura peut-être pas cette vue d'ensemble pour bien gérer le dossier, pour transmettre les informations qui sont réellement nécessaires. Et, actuellement, pour avoir sondé les différentes cliniques, le mot d'ordre, c'est : Bien, continuez à contester et provoquez des contestations. Puis c'est ce qu'on veut éviter, M. le juge, on ne veut pas non plus surcharger... M. le juge, excusez-moi, déformation... M. le ministre.

• (16 h 10) •

M. Boulet : Vous venez de me nommer, là. Est-ce que c'est une promotion ou une démotion?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : M. le ministre. Excusez-moi. Déformation professionnelle. Mais on veut surtout éviter de créer des contestations inutiles et de surcharger le régime, la CNESST, le TAT et le BEM, par cette entremise-là, donc, c'est ça.

M. Boulet : D'accord. Oui, mais, en même temps, il faut protéger la confidentialité, puis ce que le projet de loi dit, quand même, c'est que le professionnel de la santé peut transmettre un résumé des informations qui sont pertinentes, là. Puis il faut faire la distinction entre les notes évolutives, là, qui sont dans le dossier administratif, puis les rapports médicaux, puis les rapports d'expertise. Mais je comprends votre point. Eh! merci beaucoup, je vais céder mon temps de parole à ma collègue de Laporte, mais, merci beaucoup, et on va certainement se reparler ou s'écouter bientôt.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Laporte pour un temps de 3min 10 s.

Mme Poulet : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous trois. Merci beaucoup de votre participation. Selon les groupes précédents... il a été soulevé un manque d'enquête à grand déploiement avec un volet sur la violence à caractère sexuel, que notre société pourrait faire un effort supplémentaire avec la problématique spécifique au monde du travail. J'ai posé la question tantôt à un groupe qui n'a pas pu, malheureusement, manque de temps, poser la... répondre à cette question-là. Il a été aussi soulevé qu'il y a un coût humain et un coût organisationnel à ces actes-là, on le sait. À titre... je voulais savoir aussi, à titre d'employeur, alors qu'un changement de culture s'impose et pour montrer l'exemple, comment qu'on pourrait colliger les signalements auprès de vos membres, au-delà de la prévention, au-delà des formations? Comment qu'on pourrait colliger les signalements auprès de vos membres pour bien favoriser la divulgation, pour avoir vraiment un portrait de la situation?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Je peux me lancer, écoutez... bien, Isabelle, tu veux-tu y allez?

Mme Demers (Isabelle) : Non, vas-y, Mylène, c'est parfait.

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Donc... Excusez-moi. Donc, en fait, pour colliger l'information au niveau de nos membres à nous, à l'APCHQ, c'est certain qu'on pourrait mettre sur place des données et un mécanisme d'information qui nous... transmise. Évidemment, il faudrait qu'il y ait un agencement, en fait, avec toutes les autres associations pour que ça puisse fonctionner et garder, là, vraiment, les données quant à la dénonciation.

Au niveau des mécanismes, évidemment, bien, il peut y avoir des politiques, des directives qui seront transmises à nos membres de cette manière-là, avec une nouvelle marche à suivre pour les divulgations. À ce niveau-là, il y a peut-être Isabelle ou Dominic, là, peut-être, avec l'aide de la CCQ, et tout... Je pense qu'il faut se questionner s'il n'y aurait pas matière à avoir une collection de ces données-là.

Mme Demers (Isabelle) : Merci, Mylène. C'est sûr que ça nous interpelle beaucoup. Merci, d'abord, de votre question. Ça nous interpelle beaucoup parce que nous sommes aussi préoccupés de contribuer à faire en sorte que cette culture-là s'amenuise, qu'on soit un milieu qui soit plus, plus ouvert, plus accueillant, qui soit aussi sécuritaire, où... Et donc, évidemment, vous l'avez nommé, il faut avoir de la formation, il faut être en mesure de faire de la prévention. On a d'ailleurs, depuis 2019, là, des politiques, des politiques pro forma, on assiste les entrepreneurs, on a des formations qui sont offertes, où on les accompagne dans la mise en place d'actions très, très...

Mme Demers (Isabelle) : ...pour les sensibiliser aux différents types de formes de harcèlement ou de violence qui pourraient se passer dans le milieu de travail. C'est un milieu où, on le sait, il y a peu de femmes, il y a peu de personnes qui proviennent des minorités, c'est-à-dire qu'il y en a quand même, mais... mais, toutes proportions gardées, c'est un milieu qui est... qui est perçu parfois comme étant moins ouvert. Et il y a un effort qui doit se faire auprès de chacun des entrepreneurs de notre milieu pour être ouvert et pour offrir un environnement de travail sécuritaire. Maintenant, est-ce que c'est à nous à colliger l'information?

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Je suis désolée.

Mme Demers (Isabelle) : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Je suis désolée. Le temps étant écoulé pour la partie gouvernementale, je me tourne maintenant pour la période d'échange avec la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois pour votre participation et votre mémoire. J'aimerais vous poser une question à propos des obligations de l'employeur pour ce qui est de... En fait, c'est à la page sept de votre mémoire où vous dites que l'article 34 du projet de loi fait référence à un règlement à venir qui est pour l'instant inexistant. Ce règlement viendrait déterminer toute autre mesure visant à prévenir ou faire cesser une situation de violence à caractère sexuel. Et vous dites que vous considérez cette disposition importante, mais difficile à commenter compte tenu de l'absence d'un encadrement réglementaire. Et c'est pourquoi il serait important que le ministère du Travail entame une consultation des parties prenantes lors de l'élaboration du règlement. Est-ce que vous pourriez nous dire comment vous... vous envisagez cette... une telle consultation? Pourquoi c'est... c'est important que des parties prenantes prennent part finalement à l'élaboration du règlement?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : En fait, l'élimination, que ce soit du harcèlement ou de la violence à caractère sexuel, c'est un... C'est une... C'est un problème de société, en fait, c'est un problème qui doit toucher toute partie, tout corps, partie prenante, en fait, dans l'administration. Donc, d'avoir des comités paritaires par l'entremise de la CNESST, par exemple, c'est une... ça serait une option afin de collaborer avec les syndicats et les employeurs pour déterminer cet... cet encadrement, pardon, réglementaire qui serait nécessaire. Il y a plusieurs... qui existent déjà. On le sait que ça fonctionne très bien avec la CNESST, les syndicats, les acteurs du côté patronal. Donc, de s'inspirer de ce qui se fait face à d'autres situations en termes de prévention, ça serait une optique très envisageable.

Mme Caron : O.K., merci. J'ai l'impression que vous faites beaucoup le ménage dans les définitions, parce que plusieurs de vos recommandations ont porté là-dessus. Alors donc, vous voyez une nécessité de cohérence entre les lois qui existent déjà, j'imagine, et puis... Mais est-ce que vraiment les violences à caractère sexuel sont vraiment bien incluses dans les définitions des autres lois?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Bien, en fait, bien, on s'est basé surtout sur celles sur la loi sur les normes du travail, que l'on retrouve. Cette inclusion-là est non seulement textuellement dans le texte, mais également c'est de la manière que les tribunaux l'interprètent. Donc, oui, à mon avis, elles sont... elles sont bien encadrées, elles sont présentes et elles ne sont pas laissées pour compte. Donc, d'avoir une définition additionnelle n'est pas, à mon avis, à notre avis, nécessaire.

Mme Caron : Merci. La question du délai de deux ans que vous trouvez trop... trop long, est-ce que... Est-ce que vous pourriez peut-être élaborer davantage sur ça? Parce qu'en matière de ce qu'on a entendu hier aussi, c'est qu'en matière de violences à caractère sexuel, le trois mois n'est peut-être pas si facile que ça à respecter pour la victime, par exemple, qui peut avoir besoin de décanter, qui peut... avant d'avoir le courage de dénoncer, de porter plainte, qu'il y ait une enquête.

M. Veillette (Dominic) : Si vous me permettez, Mme la députée, on considère actuellement que le délai de déclaration à la CNESST est suffisamment long, du fait qu'une réclamation à la CNESST va donner ouverture à partir du moment qu'il y a un préjudice, c'est-à-dire une lésion professionnelle et la nécessité de...

M. Veillette (Dominic) : ...de recevoir compensation ou indemnisation. Donc, si les actes à caractère sexuel sont suffisamment graves et qui donnent ouverture à une consultation médicale et... l'attestation médicale d'une lésion professionnelle à caractère... découlant d'un acte sexuel, il y a une obligation du travailleur de remettre l'attestation médicale pour que l'employeur puisse prendre en charge non seulement d'une façon contemporaine le cas, au niveau de l'enquête, au niveau de la prévention, mais aussi la gestion du cas. Donc, à partir du moment que l'employeur a une attestation médicale, il y a un arrêt de travail qui est émis par le médecin, l'employeur a l'obligation de répondre à son obligation du paiement des indemnités pendant les 14 premiers jours et d'ouvrir le dossier à la CNESST.  Donc, à partir de ce moment-là, le délai de deux ans devient relativement caduc, parce que, dans les faits, le dossier va quand même être ouvert à la CNESST sans nécessairement que le travailleur ait complété sa réclamation officiellement à la CNESST. 

• (16 h 20) •

Mme Caron : D'accord, et... Merci pour cette précision-là. Et, pour ce qui est de l'accès au médecin, qui peut être parfois problématique, comme on sait, dans l'état actuel des choses, est-ce que ça ne vient pas ajouter un élément, disons, dans cette position-là?

M. Veillette (Dominic) : Bien, c'est sûr que ça peut venir compliquer les choses, puis on est aussi conscient qu'il peut avoir une une certaine période de latence entre, justement, les actes reprochés, les faits reprochés et le préjudice au niveau lésion... au niveau psychique, que ce soit en lien avec le lien que la personne fait entre les faits reprochés et les conséquences qu'elle a subies au niveau psychologique et au niveau de l'accès du médecin.

Donc, actuellement, il y a l'article 352 qui permet justement aux travailleurs de se faire relever du délai de réclamation, s'il y a un motif juste et suffisant. Et, par ailleurs, le délai de six mois qui est prévu à la loi au niveau de la réclamation, qu'on le reporte à deux ans, il reste que le délai de réclamation possible à la CNESST peut partir... peut partir du moment que la victime subit une lésion professionnelle et subit un préjudice. Donc, ce n'est pas nécessairement à partir du jour 2 suivant l'acte, l'acte reproché, que le délai part, mais à partir du moment que la personne subit le préjudice ou qu'elle établit un lien entre son préjudice psychologique et les actes reprochés. Donc, on l'amène à six mois ou à 12 mois. Les délais sont quand même suffisants à notre opinion.

Mme Caron : Merci. Tout à l'heure, dans votre présentation, j'ai cru comprendre, et puis corrigez-moi... corrigez ma compréhension ou clarifiez, s'il vous plaît, que vous faisiez une différence, par exemple, entre une lésion professionnelle comme l'amiantose, pour utiliser cet exemple-là, ou une lésion qui se produirait, par exemple, en milieu de travail en raison d'actes de violence à caractère sexuel. Alors, est ce que... Est-ce que vous pouvez nous élaborer davantage, je vous dirais, est-ce que l'un est plus méritoire que l'autre, ce n'est peut-être pas le bon mot, pour compensation?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Non, en fait, les deux sont sur le même pied d'égalité. En fait, les maladies professionnelles qui sont énumérées dans la loi, la LATMP, sont des maladies qui sont reconnues en... et qui ont un lien, une connexité avec un emploi x. Donc, l'amiantose, c'est un lien avec la fibre d'amiante et c'est reconnu par les connaissances médicales, et par les tribunaux, et par la loi elle-même. D'ailleurs, dans la LMRSST, le projet de loi n° 59, qu'on parlait, là, un peu plus tôt, bien, c'est la même chose. Les maladies d'ordre psychique, psychologique, un stress, un... excusez-moi, un stress post-traumatique qui découle d'une violence sexuelle est une maladie maintenant reconnue d'emblée dans la loi avec le pl 59.

L'accident de travail qui est tout aussi important, quand je dis «accident de travail», donc c'est le fait isolé ou multitude de faits qui engendrent une violence à caractère sexuel est tout aussi important que les maladies. La seule chose, c'est qu'elle ne découlera pas nécessairement d'un lien direct avec l'emploi même, mais avec des faits qu'on devra, là, pointer et cibler pour les expliquer. Mais tous les deux méritent compensation.

Mme Caron : Merci bien. Tout à l'heure, il a été question des médecins et de l'information, et le lien que vous faisiez aussi avec le droit de gestion de l'employeur, et le droit de se défendre, et tout ça, est-ce que les médecins... bien, évidemment, ont leur expertise médicale, est-ce qu'ils auraient besoin, ceux qui interviennent dans ce genre de dossier, d'une formation spécifique concernant les cas de harcèlement psychologique ou de violence à caractère sexuel, étant donné qu'on comprend...

Mme Caron : ...d'après tous les... d'après la plupart des personnes qui sont venues déposer un mémoire depuis hier, qu'il y a une formation à y avoir. On ne peut pas... malgré toute une... toute la bonne volonté qu'on peut avoir, une personne ne peut pas s'improviser enquêteur dans un cas comme ça. Elle doit connaître les définitions qui sont utilisées dans la loi, ne serait-ce que l'exemple, par exemple, d'un seul acte grave qui est tellement grave qu'il peut consulter... constituer du harcèlement. Ça n'a pas besoin d'être quelque chose de répétitif dans le temps. Donc, est-ce que vous, vous trouvez que les médecins devraient avoir aussi une telle formation?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Définitivement, Mme la députée. En fait, tout le monde bénéficierait de comprendre qu'est ce que constitue du harcèlement ou de la violence à caractère sexuel, et c'est un peu ce qu'on présente dans notre projet également au niveau de la prévention. On est d'accord avec ce qui avait été proposé dans le projet et on en... on l'a peu effleuré dans notre mémoire. Cependant, cette sensibilisation-là et cette éducation-là ne se limitent... ne devraient pas se limiter au médecin désigné ou à simplement l'employeur ou aux travailleurs. C'est vraiment un problème de société, et on doit aller toucher le plus de personnes possible pour les sensibiliser à qu'est-ce que constitue une violence ou même une inconduite à caractère sexuel. Ça va même au-delà de ça. Mais pour répondre spécifiquement à votre question, oui, effectivement, les médecins en bénéficieraient.

Mme Caron : Merci. Dans... dans votre association, vous avez des professionnels qui sont... qui sont entrepreneurs aussi, j'imagine, des petits comme des moyens ou des gros. Est-ce que, selon vous, ils vont être en mesure de mettre en application ce qui est exigé d'eux dans le projet de loi n° 42?

Mme Demers (Isabelle) : Et si je peux me permettre, c'est sûr que c'est un défi pour un entrepreneur de mettre en application tous les éléments qui constituent l'environnement de travail, l'environnement réglementaire, l'environnement législatif du milieu du travail, qui est un environnement qui est complexe. Est-ce qu'ils vont être en mesure? Bien, il va falloir faire, Mme la députée, parce qu'on se doit de prendre ça en charge et on doit... et on se doit d'agir pour diminuer les risques qui touchent l'environnement de travail qui ne serait pas adéquat pour un travailleur. Et donc, bien, il va falloir redoubler d'efforts pour communiquer, informer, former.

Comme ma collègue Mylène le disait, on se doit tous d'être plus sensibles et de comprendre quels sont les tenants, les aboutissants, les implications du harcèlement en milieu de travail et de mettre en place un environnement qui est sain et qui est adéquat. On va les aider, c'est notre rôle. On n'a pas un rôle de syndic, mais on a un rôle d'accompagnement pour faire en sorte qu'on puisse l les aider à devenir de meilleurs entrepreneurs aussi et de devenir aussi des entrepreneurs attrayants, et parce que ça fait partie de l'attraction d'un entrepreneur s'il propose un environnement de travail qui est sain et adéquat. Donc, on va devoir le travailler en ce sens là, définitivement...

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avions. Maintenant, je cède la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve pour son temps de période d'échange.

M. Leduc : Merci beaucoup. La Présidente Bonjour à vous trois. J'imagine qu'on se reverra bientôt pour parler d'un nouveau projet de loi en construction. Il sera peut-être déposé demain. On verra bien ce que l'avenir nous réserve. Sur le fond de votre mémoire.

J'avoue, j'étais un petit peu surpris de son contenu parce que j'ai recensé vite, vite, là, vous savez, un, deux, trois, quatre, cinq recommandations qui proposent soit le retrait d'articles ou finalement le statu quo, donc pas de modification, là : l'article 33, l'article 4, 5, 6, 7 et 16, 270 de la... 327 de la LATPM. Ça fait beaucoup de retraits ou de statu quo. Puis, si on vous écoutait, je me demande qu'est-ce qui resterait de substantiel dans cette loi-là, dans ce projet de loi là du ministre?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : En fait. Oui, effectivement, ça peut sembler costaud ces demandes de retrait là. En fait, la position qu'on a prise, c'est pourquoi changer quelque chose qui fonctionne bien. Et je reprends... Je sais que le ministre Boulet a mentionné, un peu plus tôt que malheureusement c'était un problème de dénonciation et ce n'est pas un problème d'indemnisation. Et les retraits que l'on demande, c'est vraiment par rapport à la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles parce qu'une fois qu'une partie, la victime en fait, fait une demande de réclamation auprès de la CNESST, le système fonctionne. La loi telle que constituée présentement fonctionne bien, et il y a des réparations...

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : ...la ration qui est octroyée à la partie réclamante. Cependant, on a un problème de dénonciation, et, ça, j'en suis très consciente. Il n'y a pas de mécanisme, il n'y a pas de support qui est apporté autant à la personne victime qu'à la personne qui pourrait être témoin de telles situations. Et je pense que c'est plutôt là qu'on doit mettre nos efforts pour sensibiliser les employeurs, créer des mécanismes et les mettre en place et que ça fonctionne bien. Et quant aux indemnisations, comme je vous dis, lorsqu'on se rend là, tout va relativement bien et ça fonctionne bien, la jurisprudence ou, du moins, là, les décisions qu'on a découvert en sont la preuve. Donc, c'est vraiment au niveau de la prévention. Et dans notre mémoire, on n'en a pas parlé non plus parce qu'on abondait dans le même sens que ce qui était déjà proposé.

• (16 h 30) •

M. Leduc : Je comprends. Sauf erreur de ma part, vous ne faites pas référence aux clauses d'amnistie. Est-ce que vous le faites dans votre mémoire?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Non, effectivement.

M. Leduc : Est ce que c'est parce que ça ne s'applique pas tel quel votre milieu puis ça va être plus quelque chose qu'on va retrouver dans la réforme de demain, dans la Loi R-20?

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : En fait les clauses amnistie, on ne s'est pas penché sur ces clauses-là. On est conscient qu'il y en a dans toutes les conventions collectives, en fait. La clause amnistie, il y a plusieurs droits qui s'opposent à cette clause-là et on a le droit de la victime d'avoir fait la plainte et que le tout soit indiqué au dossier de la personne qui a commis l'acte. Cependant, on a le droit à la réhabilitation, un droit à laquelle on doit penser et le droit de l'emploi aussi de cette personne-là. Et ce que j'entendais comme commentaire hier, c'est que, dans les cas de violence à caractère sexuel, qu'importe l'acte ou de la gravité de l'acte, il ne devrait pas avoir de clause amnistie et on devrait tout simplement laisser le tout au dossier du commettant. Donc, je pense qu'il faut se requestionner. Est-ce que ces clauses-là devraient être maintenues ou être tout simplement retirées dans les cas de violences à caractère sexuel, en prenant en considération vraiment le droit des deux parties, mais surtout du commettant qui peut se réhabiliter dans la période qui suit la commission...

M. Leduc : Donc, vous n'avez pas nécessairement...

La Présidente (Mme D'Amours) : ...

M. Leduc : 10 secondes? Bon, ça va être tout. En 10 secondes, on peut juste vous remercier puis vous dire dans deux, trois semaines, peut être, pour la prochaine audience. À suivre. Merci.

Mme Turcotte-Bureau (Mylène) : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vous remercie, chers invités, pour votre contribution à nos travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants afin que nos prochains invités prennent place. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 31)


 
 

16 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 16 h 40)

La Présidente (Mme D'Amours) : ...chers invités, que vous avez 10 minutes pour votre exposé. Je vous demande de vous présenter et de commencer votre exposé, s'il vous plaît.

Mme Cummings (Colette) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, messieurs et mesdames les députés, merci de nous recevoir à la Commission de l'économie et du travail, pour l'invitation à témoigner aujourd'hui devant vous. Mon nom est Colette Cummings, je suis la directrice générale du Conseil d'intervention de l'accès des femmes au travail et je suis accompagnée par Mme Martine Bégin, trésorière et membre du conseil d'administration du CIAFT. Alors, le CIAFT est fondé en 1982. C'est un organisme de défense collective des droits ayant une portée nationale au Québec. Il est constitué de groupes et de personnes qui oeuvrent dans le domaine de l'accès, du maintien des femmes au travail. Notre philosophie d'intervention repose principalement sur les principes de l'autonomie financière des femmes, qui est largement tributaire de leur accès au travail, une juste rémunération et que leurs droits soient respectés. La mission du CIAFT est d'oeuvrer à la défense, à la promotion et au développement de services, de politiques et de mesures favorisant la réponse aux besoins spécifiques des femmes en matière de travail. En raison de notre mandat, le CIAFT profite de cette consultation pour commenter le projet de loi no 42.

Commençons par souligner certaines avancées proposées dans ce projet de loi. Alors, le CIAFT salue l'ajout de la présomption qui allège le fardeau de la preuve lorsque le harcèlement sexuel a mené à une lésion professionnelle et que les victimes déposent une réclamation en vertu de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles. Nous parlerons plus tard d'une amélioration souhaitée afin que les présomptions permettent d'éviter à certaines travailleuses... soient victimes de mythes et stéréotypes entourant la violence sexuelle.

Nous saluons aussi la proposition d'allonger de trois mois à deux ans la période pendant laquelle la victime d'une lésion professionnelle qui résulte d'une violence à caractère sexuel peut porter plainte. Cet ajout constitue une amélioration, bien que cette période de deux ans pourrait ne pas être suffisante pour certaines victimes de violence sexuelle au travail.

Nous soulignons dans ce mémoire quatre grands principes que nous trouvons importants et qui guident cette analyse du projet de loi. Donc : l'accès à la justice, le meilleur accompagnement, la cohérence entre les instances, le soutien à l'application de la loi. Nos recommandations portent surtout sur les situations de travailleuses non syndiquées. Cette liste n'est pas exhaustive et nous vous invitons donc à consulter.

Mme Cummings (Colette) : ...consulter les mémoires des autres groupes de femmes qui vous ont été déposées.

Le recours découlant du droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique en vertu de la loi des normes du travail s'applique difficilement dans certains milieux de travail.

Prenons l'exemple de travailleuses rémunérées dans le cadre du programme Chèque emploi-service du ministère de la Santé et des Services sociaux. Plus de 30 000 femmes sont rémunérées via le programme. Elles sont embauchées par des personnes usagères âgées ou en situation de handicap, reconnues comme employeur. Ces personnes ont besoin de services à domicile qui, à titre d'employeur, ont l'obligation de mettre en place des moyens raisonnables pour offrir un milieu de travail exempt de ce harcèlement psychologique.

Cette situation comporte des difficultés morales pour les travailleuses. Prenons l'exemple d'une travailleuse victime de harcèlement de la part d'un fils de la personne usagère. La travailleuse employée via le Chèque emploi-service qui subit ce harcèlement devrait porter plainte à la CNESST contre la personne usagère qui fera l'objet de la plainte à titre d'employeur, même lorsque le harcèlement est commis par son entourage.

Les modifications contenues dans le projet de loi n° 42 ne changent pas les difficultés d'application pour les travailleuses précaires employées par le Chèque emploi-service, dont la plus grande majorité sont des femmes. Cela est vrai pour ce secteur, mais il constitue malheureusement un exemple parmi tant d'autres.

Prenons d'autres cas de figure comme les situations où le harcèlement sexuel se produit au moment de la préembauche, lors des entrevues ou dans le cas où il est indiqué de poursuivre directement la personne qui harcèle. Le CIAFT souhaite donc que ce soit traité à la CD...

Une voix : ...PDJ.

Mme Cummings (Colette) : ...c'est ça, les plaintes déposées pour des personnes victimes du harcèlement au milieu de travail lorsque c'est indiqué.

Le meilleur accompagnement aux travailleuses. D'abord, le CIAFT salue la proposition de permettre à une personne médiatrice de mettre fin au processus de médiation lorsque celui-ci n'est pas utile ou impliqué. Cependant, il faut rappeler que la médiation demeure une approche empreinte de neutralité qui ne corrige pas le déséquilibre entre les parties en cas de harcèlement sexuel. Le CIAFT souhaite donc que soit offert un accompagnement juridique aux travailleuses victimes de harcèlement à caractère sexuel par le CNESST dès l'étape de la médiation.

Nous avons salué, d'entrée de jeu, l'ajout de présomption des cas de lésions professionnelles dues à la violence sexuelle. Cependant, le CIAFT s'interroge quant au libellé proposé à l'article 28.0.1 un de la LATMP. Ici, on réfère au libellé, sauf si cette violence survient dans un contexte strictement privé. Cette précision pourrait permettre la réintroduction dans le processus décisionnel de mythes et stéréotypes liés à ce type de violence et serait contreproductif et affaiblirait le bénéfice de présomption proposée par le projet de loi. Nous recommandons donc de revoir le libellé de l'article 28.0.1 de la LATMP afin de s'assurer qu'il hésite... qu'il évite de réintroduire les mythes et les stéréotypes liés au harcèlement sexuel.

Enfin, nous proposons de développer des liens ainsi qu'un protocole de référencement entre la CNESST et les ressources d'aide en matière de violence sexuelle pour que la travailleuse puisse bénéficier d'une ressource existante dans leur région : le CALACS, CAVAC, GAIHST, l'ATF, les lignes REBATIR, et Juripop, etc.

Une meilleure cohérence entre les instances. Nous tenons à souligner deux mesures de cohérence intéressantes déjà mise en place. D'une part, le développement des liens institutionnels entre les directions et les vice-présidences de la CNESST facilitant le traitement des plaintes et harcèlement sexuel. En... Et, d'autre part, l'entente entre le CNESST...

Mme Cummings (Colette) : ...le CDPDJ sur la référence du dossier de plainte de harcèlement discriminatoire. Malgré leurs limites, ce type d'entente repose... propose des avancées. Le CIAFT veut aussi soulever un enjeu touchant la cohérence entre les instances qui requièrent des améliorations. On réfère à la loi, à l'article 123.16 de la LNT qui, en raison de l'interprétation habituelle et qui est faite, entraîne souvent des sous-indemnisations des plaignantes. La complexité de l'interprétation repose sur les difficultés d'évaluer a priori la probabilité que le harcèlement entraîne une lésion professionnelle et sur l'équivoque entourant la période où il y a lésion professionnelle. Cette complexité entraîne confusion et incertitude, privant très souvent des plaignantes d'indemnités de remplacement de salaire perdues. Le CIAFT recommande de revoir le libellé de l'article 123.16 de la loi.

• (16 h 50) •

Des mesures de soutien en application de la loi... l'application de la loi est une responsabilité partagée entre les nombreux acteurs. Certaines mesures mobilisent, responsabilisent et encadrent des acteurs importants face à leur contribution à la protection des travailleuses et travailleurs. Des mesures qui soutiendraient l'application de la loi ont d'ailleurs été proposées par les expertes. Nous saluons ici l'ajout de l'article 32 du projet de loi de la notion d'agression à caractère sexuel à la liste des infractions criminelles pouvant mener à la disqualification d'une personne à un poste d'autorité dans le secteur de la construction.

La Présidente (Mme D'Amours) : ...est-ce que vous êtes... vous reste encore beaucoup de temps? Parce qu'on aurait terminé.

Mme Cummings (Colette) : Pardon? Conclusion...

La Présidente (Mme D'Amours) : C'est correct?

Mme Cummings (Colette) : Alors, bon, on peut passer aux questions.

La Présidente (Mme D'Amours) : Parfait, je suis désolée, là, mais si vous aviez eu quelques phrases, je vous aurais laissé aller, mais sinon on peut débuter notre... notre échange. Donc, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Oui. Merci. Bien, j'ai eu l'occasion de vous rencontrer au préalable et de souligner la qualité de votre contribution et de votre mémoire. Et Mme Cummings, je vous laisserais compléter votre commentaire, je vous laisserais du temps pour le faire.

Mme Cummings (Colette) : Merci beaucoup. Alors, des mesures... je reprends. Des mesures qui soutiendraient l'application de la loi ont d'ailleurs été proposées par les expertes. Nous saluons l'ajout de l'article 32 au projet de loi de la notion d'agression à caractère sexuel à la liste des infractions criminelles pouvant mener à la disqualification d'une personne à un poste d'autorité dans le secteur de la construction. La CIAFT croit à la nécessité d'introduire d'autres mesures de soutien à l'application de la loi. Ces mesures pourraient toucher l'adhésion à une mutuelle de prévention, le financement public pour des projets dans le secteur culturel, l'obtention et le renouvellement des licences de la Régie du bâtiment au Québec, assujettissement des employeurs de tout type présents et... sur un chantier de construction à l'obligation de protection des travailleuses et travailleurs en matière de violence à caractère sexuel. Alors, ces mesures mettraient à contribution plusieurs parties prenantes face à leurs responsabilités. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme D'Amours) : M. le ministre.

M. Boulet : Merci beaucoup, Mme Cummings. J'apprécie aussi que vous mettiez l'accent sur les avancées du projet de loi. Et que vous considériez que l'ajout des présomptions va contribuer à diminuer aussi les risques de victimisation. Je comprends vos remarques par ailleurs sur les délais, la possibilité pour le médiateur d'y mettre fin, là, quand il considère que ce n'est vraiment pas utile. Je vais essayer de me limiter à quatre éléments, là, accès, accompagnement, cohérence puis soutien.

Accès. Je veux juste vous rappeler que dans les 82 recommandations du comité d'expertes, il y en a beaucoup qui sont à connotation administrative, qui sont déjà, vous le savez, depuis septembre dernier, mises en application par la CNESST. Il y a énormément de sensibilisation et d'information, formation. Vous avez vu aussi la campagne sociétale qui était sur...

M. Boulet : ...selon nous, assez fine et intelligente, qui génère des belles retombées. Mais je vous invite... parce qu'il y a un déficit de connaissance de ce qui est mis en application par la CNESST, et je le dis tant aux associations d'employeurs que les syndicats, que les travailleurs, que les conseils d'intervention comme le vôtre, n'hésitez pas à en faire la promotion. Il y a beaucoup d'accompagnement, il y a des ateliers de formation. Puis les violences à caractère sexuel, au-delà de la culture de prévention puis de formation qu'il faut constamment développer et intégrer dans les milieux de travail, il ne faut pas négliger aussi la culture de signalement. Tu sais, on réalise tellement que le nombre de plaintes à la CNESST n'est pas le reflet de la réalité, qui est beaucoup plus endémique que la perception qu'on peut avoir si on ne regarde que les statistiques de chiffres. Il y a des pourcentages tellement effarants dans les sondages, dans les statistiques, qui démontrent qu'on a peur des représailles, on a peur des terminaisons d'emploi, et c'est un des articles qui m'apparaît être la pierre angulaire de notre projet de loi.

Le chèque emploi... Bon, l'accompagnement, bien, il y en aura beaucoup, d'accompagnement, puis aussi au Tribunal administratif du travail. On a formé une équipe dédiée. Ils ont déjà eu une formation d'une experte sur les mythes et les stéréotypes dans les cas de violences à caractère sexuel. Il y a des juges administratifs, des conciliateurs puis des personnes qui vont les accompagner. Il faut qu'il y ait aussi des conférences préparatoires, qu'il y ait des paravents, qu'il y ait des informations sur la divulgation, la confidentialité puis la diffusion. On veut véritablement aller le plus loin possible, mais 90 %, mise en application par la CNESST, puis, au TAT, l'équipe dédiée répond à la recommandation qui nous suggérerait d'avoir un tribunal spécialisé. Mais, comme on a une division des relations de travail puis une division santé et sécurité, ils vont travailler en collaboration puis ils vont s'assurer d'échanger l'information qui s'impose. Puis la cohérence entre les instances, c'est un élément aussi qu'il faut... Tu sais, vous faisiez référence notamment aux CALACS. Il faut s'assurer que l'écosystème qui nous préoccupe, qui permet non seulement de réparer des torts, mais de réduire l'acuité des préjugés, là, bon, on réfère souvent à de la victimisation secondaire... qu'on s'assure que tous les intervenants puissent avoir l'information qui s'impose. Le soutien, la même affaire.

Deux éléments, là... parce que je vais après ça céder la parole à mes collègues, mais, pour les chèques emploi-service, là, il faudrait voir, c'est vraiment du cas par cas, mais souvenez-vous que, dans le régime... dans la modernisation qu'on a faite du régime de santé et sécurité, on a inclus pour la première fois les travailleurs, travailleuses domestiques, qui sont souvent des personnes qui viennent de l'étranger, puis on était fiers. Évidemment, il y a des conditions, mais il faudrait voir au cas par cas, là, à celui que vous soulevez, si la personne peut quand même être... peut avoir accès au régime d'indemnisation puis au régime d'accompagnement.

Puis, l'autre, là, en contexte préembauche, n'oubliez pas que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse demeure toujours un intervenant, puis quelqu'un qui est victime de discrimination ou de situation d'inconduite ou de violence à caractère sexuel dans un contexte préembauche, tu n'es pas... tu ne bénéficies pas d'une immunité. Je le dis parce que je veux en parler, de ça. Il y a une commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qui peut recevoir des plaintes, il y a des processus d'enquête, de médiation, puis il faut s'assurer que les personnes le sachent aussi dans les milieux de travail, les personnes qui font des entrevues, qui font de la sélection. On ne peut pas faire de la discrimination ou des distinctions qui nous permettent de ne pas embaucher la personne.

Ça fait que je veux simplement, encore une fois, vous dire merci. Puis je céderais la parole à... Est-ce que ma collègue de Hull est disposée à intervenir à ce stade-ci? Ma collègue de Laporte, excusez-moi.

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vais laisser la parole à Mme la députée de Laporte... un temps de neuf minutes.

Mme Poulet : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci à vous deux de votre présence et du dépôt de votre mémoire. Le groupe précédent a mentionné que le système actuel fonctionne bien. Pourtant, le TAT s'est... le Tribunal administratif du travail s'est engagé à offrir des formations aux juges...

Mme Poulet : ...au conciliateur, notamment. Et il y a une partie, dans votre mémoire, vous mentionnez «dans un contexte d'entrecroisement des motifs de harcèlement discriminatoire, il est évident que ni la CNESST et le TAT n'ont de compétence». Moi, ma question est : Trouvez-vous que les femmes sont bien outillées?

Mme Bégin (Martine) : Je ne sais pas, je ne crois pas que c'est dans notre mémoire.

Mme Poulet : Ah non? Je me suis trompée? Ah! je m'excuse. Bien, ma question demeure la même : Trouvez-vous que les femmes sont bien outillées pour se représenter au TAT?

• (17 heures) •

Mme Bégin (Martine) : Bien, en fait, je vous dirais que, de façon générale, il y a des choses à améliorer, mais pour... en tout cas, je ne veux pas que je mettre l'accent sur les acteurs précédents qui ont été présents à la commission, mais, pour avoir lu le rapport des expertes, je pense qu'il y a un rapport très précis de qu'est-ce qui va bien et qu'est-ce qui va moins bien. Et, dans ce contexte-là, on trouve que l'approche que M. le ministre du Travail a pris de solliciter des expertes externes pour faire un bilan de qu'est-ce qui va bien... en tout cas, de qu'est-ce que... c'est quoi, quels sont les problèmes et sur quoi on peut compter, ça sert de socle au projet de loi no 42 qui est présentement en étude.

Donc, comme on le disait, on fait confiance... comme on le disait dans notre mémoire, on fait confiance au ministre et à la CNESST pour mettre en œuvre les différentes recommandations qui ont été faites, des recommandations d'ordre administratives qui ne sont pas dans le projet de loi. Donc, on pense que le projet de loi, c'est une avancée importante pour améliorer l'accompagnement et les possibilités d'avoir justice de la part des femmes. On pense que c'est une avancée intéressante. Et on a fait part de quelques recommandations ou quelques suggestions d'améliorations qu'on pourrait... sur lesquelles on pourrait revenir, là, mais je pense que le bilan, le rapport que les expertes ont fait dresse un portrait très précis et très rigoureux de la situation des femmes en situation de harcèlement sur le marché du travail et qui donne une bonne idée de ce qu'il y a à faire. Et le projet de loi no 42 répond en grande partie aux demandes des expertes.

Mme Poulet : Est-ce que vous pensez que la prévention, la formation va inciter les femmes à divulguer plus les actes commis, les actes sexuels?

Mme Bégin (Martine) : Bien, moi, je pense que c'est une question de confiance, là. Je pense qu'il y a un mouvement. Au-delà du marché du travail, il y a un mouvement, actuellement, au Québec, depuis metoo, bon, etc., où les femmes sont en... en tout cas, les institutions travaillent beaucoup pour que les femmes reprennent confiance ou prennent... aient confiance au système, aux tribunaux, aux instances décisionnelles, et je pense que, dans ce sens-là, toutes les contributions vont être positives pour les informer davantage et développer leur confiance. C'est sûr qu'il va toujours rester des exceptions. Il va toujours rester des situations qui vont être difficiles, mais les victimes d'actes à caractère... de violences à caractère sexuel ou de harcèlement sexuel, on n'a pas besoin de faire de grandes démonstrations, ont des traumatismes psychiques qui... dont il faut tenir compte, puis je pense qu'on voit qu'on en tient compte. Et, moi, je pense que c'est développer, donc, l'accompagnement, mais aussi la confiance que les femmes vont avoir envers les instances qui vont pouvoir leur rendre justice.

Mme Poulet : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. D'autres interventions de ce côté-là? Députée de Hull, la parole est à vous.

Mme Tremblay : Oui. Alors, bon, j'ai... question, je vais aller sur mon ordinateur, mais j'aimerais ça bien... parce que, là, je le vois, que vous êtes...

Mme Bégin (Martine) : Oui. Ça dépend du mémoire, là.

Mme Tremblay : Oui. Non, j'ai le bon, c'est bien votre groupe, donc, justement, Conseil d'intervention... aux femmes. Donc, est-ce que... Juste me reparler un petit peu... Je comprends que... dans votre mission, vous accompagnez des femmes, justement, qui ont vécu des difficultés, notamment, là, de la violence à caractère physique, psychologique, sexuelle, puis vous les accompagnez dans leur cheminement de réinsertion?

Mme Bégin (Martine) : O.K. En fait, le CIAFT est un regroupement qui travaille dans l'ensemble des dossiers qui touchent les femmes et le marché du travail. Notre... Le CIAFT regroupe des organismes qui viennent en aide aux femmes qui entrent sur le marché du travail. On n'a pas une... on n'est pas... notre... les interventions des groupes ou des membres ne sont pas spécifiquement axées sur le harcèlement sexuel au travail, c'est vraiment l'ensemble des dossiers : la formation professionnelle, l'équité salariale, etc., donc c'est vraiment l'ensemble des dossiers qui sont à l'interface de la situation des femmes et du marché du travail. Donc, on n'intervient pas directement ou spécifiquement en matière de harcèlement, mais il y a des d'autres mémoires qui ont été déposés qui... les organismes n'ont pas été invités, là, ici, mais les mémoires ont été déposés, et les groupes qui interviennent directement auprès des femmes qui sont en situation de harcèlement en milieu de travail ont déposé des mémoires.

Mme Tremblay : Parfait. Bien, ma collègue l'a un peu abordé, mais je vais quand même...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme Tremblay : ...revenir sur... parce que là, vous avez dit «une question de confiance».

Mme Bégin (Martine) : Oui.

Mme Tremblay : Bon, parce que vous l'avez nommée, avec les mouvements qu'il y a eu dans les dernières années. Puis on parle beaucoup, dans ce projet de loi là... puis et vous l'avez probablement vu par l'article... notamment l'article 18, là, on va travailler en prévention, plan d'action. Donc, les employeurs, donc, doivent avoir des... intégrer la politique à ce plan d'action là, puis là, il nomme, ici, là, dans le projet de loi, tout ce qui doit être ajouté, notamment à la politique.

Mme Bégin (Martine) : Oui.

Mme Tremblay : Est-ce que, pour vous, c'est suffisant? Est-ce que ça, c'est déjà des bons pas justement pour la confiance?

Mme Bégin (Martine) : Oui, oui.

Mme Tremblay : Quand les femmes arrivent dans un dans un milieu de travail, est-ce... est-ce que ce sont des bons moyens ou est-ce que vous en... il y a des choses qui ont été oubliées?

Mme Bégin (Martine) : Bien, moi, je pense qu'il y avait déjà un modèle de politique et un guide de rédaction d'une politique pour les entreprises qui existait. Moi, je pense que les ajouts qui sont... qui sont proposés dans le projet de loi sont des ajouts tout à fait pertinents pour les dossiers plus d'agressions à caractère sexuel parce qu'on parle plutôt de harcèlement psychologique, incluant le harcèlement sexuel. Mais là, je pense qu'il y a quand même des ajouts qui vont être pertinents dans les différentes politiques.

Et pour avoir travaillé moi-même avec des entreprises, des petites entreprises qui devaient avoir ces politiques-là, c'est sûr qu'il y a un... les politiques ont un aspect très d'information et de prévention auprès des entreprises, et comme elles doivent être rendues à la connaissance des travailleurs et des travailleuses, bien... et qui doivent être affichées, bien, il y a vraiment une... une occasion, là, de sensibiliser et d'informer beaucoup de gens sur les responsabilités des employeurs et les responsabilités aussi des travailleurs et des travailleuses qui peuvent être témoins de harcèlement psychologique ou sexuel. Donc, la révision ou l'amélioration de ces politiques-là va être un autre tour de roue, je pense, pour sensibiliser de façon assez large les entreprises de toutes tailles et les employeurs... Les travailleurs et travailleuses qui sont au courant de l'existence de ces politiques-là.

Mme Tremblay : Parfait. Puis là, je comprends. Parce qu'il y a un autre groupe qui est passé avant vous puis ils auraient maintenu un petit peu plus le statu quo. Donc, je... vous les avez sûrement entendus. Donc, moi, je comprends que vous, pour la confiance des femmes, l'accès à leur... au marché du travail, des gestes comme le gouvernement pose aujourd'hui, c'est des gestes qui sont importants et dans la bonne direction. Est-ce que... En terminant, est-ce qu'il y a quelque chose qu'on pourrait améliorer encore puis qui n'a pas été nécessairement nommé dans le projet de loi?

Mme Bégin (Martine) : Bien en fait, peut-être juste attirer l'attention sur des éléments qui sont dans le projet de loi et qui nous préoccupent.

Mme Tremblay : Oui.

Mme Bégin (Martine) : Notamment le libellé de l'article... je pense que c'est 2801, c'est ça, qui qui fait état du... des strictes... la notion de strictement confidentiel... strictement privé.

Mme Tremblay : Privé.

Mme Bégin (Martine) : Ça, effectivement, on a... nous, on a de la difficulté avec cette notion-là puisqu'on craint que ça réintroduise, limite les stéréotypes dans le processus décisionnel des... lorsqu'il y a des plaintes en matière de harcèlement psychologique et sexuel. Ça fait que s'il y avait une chose sur laquelle je voulais attirer mon... votre attention sur quelque chose qui devrait être la seule chose qui devrait être retirée de la loi, parce que je sais qu'il y a eu d'autres d'autres intervenants qui voulaient retirer plein de choses, la seule chose qu'on suggère, mais en tout cas la seule, la plus importante qu'on suggère de retirer, c'est vraiment, là, le strictement privé de l'article 2801, je crois, de la LNT.

Mme Tremblay : LNT.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.

Mme Tremblay : Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour à vous deux.

Une voix : Bonjour.

Mme Caron : Merci pour votre présence et votre mémoire. Alors, dans... En fait, dans la suite de la question de la collègue, je vais aller en page 5 où vous faisez référence à l'absence, dans le projet de loi, de mesures visant à renforcer le recours contre le harcèlement discriminatoire en vertu de la Charte des droits et libertés, et vous rappelez que les expertes, dans le rapport, celles qui sont venues nous voir hier, avaient souligné qu'elles souhaitent vivement que les victimes qui choisissent de porter plainte pour harcèlement psychologique devant la CNESST ne soient plus dans une situation où elles perdent des droits reconnus si elles avaient porté plainte en vertu de la Charte québécoise. Est-ce que vous pouvez élaborer un petit peu là-dessus et nous dire peut-être ce que vous auriez recommandé?

Mme Bégin (Martine) : Bien, en fait, la recommandation qu'on porte, c'est... c'est... on en a parlé un petit peu rapidement, là. Si je prends l'exemple... Mais en fait, il y a des situations où l'application... l'utilisation de la Loi sur les normes du travail est difficile, là. Je vais reprendre l'exemple du chèque emploi-service, là. Je vais faire ça rapidement. C'est des personnes... Bon, c'est un programme qui a été mis en place pour que des personnes en situation de handicap puissent choisir, gérer, mettre à pied les employés qui venaient leur donner des services à domicile. Malgré... malgré l'objectif de ce programme-à, avec le temps, le réseau de la santé l'a...

Mme Bégin (Martine) : ...à des personnes âgées en situation de précarité. Là, maintenant, c'est vraiment des personnes qui sont en problème cognitif qui ont même... qui ont accès à ce programme-là, ce qui fait que la personne qui est embauchée est payée par le programme chèque emploi-service, son employeur, c'est la personne qui a des problèmes, mettons, d'Alzheimer. Quand elle subit du harcèlement sexuel de la part d'un proche, elle ne voudra pas porter plainte contre l'employeur qui est la Mme Alzheimer, donc elle se retire du dossier. Tu sais, il y a... Bon. Donc, on trouve ça important que ces cas-là, parce qu'il y a quand même 30 000 employés... 30 000 salariés, 30 000 personnes qui sont payées par le chèque emploi-service, que ces personnes-là soient réaiguillées vers la Commission des droits de la personne parce que, M. le ministre le disait tout à l'heure, il y a la Commission des droits des personnes reste là, mais c'est important que ces femmes-là, quand ça arrive et qu'elles font plainte à la CNESST et que la CNESST dit : Bien là, si vous voulez faire une plainte, ça va être la Mme Alzheimer qui va être l'employeur. Les personnes se retirent... Bien, de leur dire qu'elles peuvent aller à la Commission des droits de la personne et travailler bien sûr avec la Commission des droits de la personne pour que ces cas-là soient bien compris. Ça fait que ça, c'est un exemple.

• (17 h 10) •

On parlait du préemploi, c'est un peu la même chose. Quand une personne vient, par exemple, donner à la CNESST... à la CNESST, faire une plainte en disant : Mais moi, j'ai été victime de harcèlement sexuel lors d'une entrevue d'embauche. Au lieu... Mais je ne dis pas qu'ils disent ça, là, il faut juste prévoir que les gens disent : Bien, ce n'est pas ici qu'il faudrait que vous fassiez pour plaire, mais vous pouvez faire une plainte à la Commission des droits de la personne. Et on sait qu'il y a des ententes... il y a une entente qui existe déjà entre la Commission des droits de la personne et la CNESST. Donc, peut-être prévoir des aménagements ou, en tout cas, de... pour que les employés sachent bien reconnaître ces dossiers-là et référer les personnes au bon endroit.

Mme Caron : Autrement dit, c'est une question vraiment d'information, de s'assurer... Parce que dans... pour ce qui est du chèque emploi-service, ce programme-là est utilisé par les personnes... en tout cas, moi... Des personnes aînées ou des proches aidants de personnes aînées ou de personnes en situation de handicap se servent du programme parce qu'elles ont besoin de cette aide financière là, mais elles n'aiment pas être employeur parce que ça vient... des proches aidants disaient : Ça vient ajouter à notre fardeau, là, de... Il faut trouver les personnes, il faut remplir...

Mme Bégin (Martine) : C'est ça. Ça, pour moi, c'est clair, ce n'est pas ici puis ce n'est pas au ministère du Travail, puis ce n'est pas la CNESST qu'il faut régler ça, c'est avec le ministère de la Santé, là, mais...

Mme Caron : Oui, tout à fait. Mais simplement pour décrire le contexte, donc, mais c'est bien que vous souleviez cet exemple-là parce que je dirais que oui, il faut absolument que les travailleurs ou travailleuses soient informés mais sachent qu'elles n'ont pas à porter plainte contre l'employeur qui est la personne déjà très vulnérable, donc il faut que cette personne-là le sache, mais ça amène un regard, une réflexion importante aussi sur les responsabilités, le rôle d'employeur, de la personne qui est usager du chèque emploi-service. Même si, comme vous le dites si bien, ce n'est pas dans le cadre de ce projet de loi là que ça se régler, mais c'est un regard fort important que vous amenez ici.

Il nous reste combien de temps? Parfait.

Bon, vous vous êtes déjà exprimé sur le contexte strictement privé, c'était... je l'avais souligné dans votre mémoire parce que ça nous été apporté beaucoup aussi hie, et puis on peut comprendre que ça peut être flou et compliquer les choses.

Mme Bégin (Martine) : Oui, c'est ça. En fait, c'est qu'on ne souhaite pas que le... en fait, on craint que le... ce libellé-là reproduise la... des... comment je dirais, pas la tendance, là, mais reproduise la recherche de la victime parfaite dans des cas de harcèlement sexuel. Puis dans les cas de violence à caractère sexuel, il ne faut surtout pas rembarquer sur cette tendance-là de chercher la victime parfaite, et on croit que cette... ce bout de libellé-là pourrait nuire.

Mme Caron : Est-ce que vous pourriez donner un exemple de victime parfaite, par exemple?

Mme Bégin (Martine) : Et c'est tellement rare, des victimes parfaites.

Mme Caron : On se comprend. Mais ce qui est.

Mme Bégin (Martine) : Des éléments de victime imparfaite. Bien, en fait, c'est... on a vu des situations où il y avait du harcèlement ou des... même des agressions à caractère sexuel où la victime s'est... a voulu réétablir un contact avec la personne qui l'avait harcelée ou agressée pour comprendre ou pour vérifier des choses puis... Bon, c'est clair qu'à partir du moment où il y a un retour, un contact de nouveau avec cette personne-là, la victime vient de perdre énormément de crédibilité, là, ça fait que...

Mme Bégin (Martine) : ...ça, c'est une chose, mais c'est des actes, des actes qui sont documentés, reconnus maintenant dans le comportement prévisible d'une victime d'acte... d'acte à caractère sexuel. Et donc toutes ces actions-là viennent décrédibiliser, je ne sais pas si c'est un mot, décrédibiliser la victime. Donc, la recherche de la victime parfaite, ça prendrait quelqu'un qui se comporte parfaitement, comme si elle avait un avocat ou une avocate à côté d'elle qui lui dit : Tu fais ça, tu fais ça. Tu ne dis pas ça, tu ne réponds pas là, bon, ce qui n'existe pas ou très peu, à mon avis.

Mme Caron : Alors, comme je suis en train de...

Mme Bégin (Martine) : ...vous étouffer.  

Mme Caron : ...de m'étouffer, je vais vous demander aussi s'il y a un autre point que vous n'avez pas eu le temps de couvrir dans votre présentation ou par les questions qui vous ont été posées sur lequel vous aimeriez attirer notre attention.

Mme Bégin (Martine) : Bien, un point qui n'a pas... Parce qu'on a quand même écouté les représentations des autres organismes, un élément qui n'a pas été soulevé, on croit qui n'a pas été soulevé ici, en commission, c'est la dernière partie du mémoire, là, où on parlait des mesures de soutien à l'application de la loi. Puis on disait... Dans le fond, quand le projet de loi propose d'ajouter à la liste des actes criminels, qui interdit... qui disqualifierait quelqu'un pour avoir des responsabilités dans le secteur de la construction, on a ajouté «l'agression à caractère sexuel». On trouve que c'est une mesure qui soutient l'application de la loi dans le sens qu'il y a une responsabilité des partenaires, les partenaires étant les... le secteur de la construction. Les gens savent que si telle personne a fait une violence à caractère sexuel, elle ne pourra pas... elle ne pourra pas occuper ces responsabilités-là.

Il y a d'autres... Dans le rapport des expertes, il y a d'autres mesures de ce genre-là qui avaient été proposées, qui n'ont pas été retenues selon notre compréhension. Et on a parlé tout à l'heure des des mutuelles de prévention, de réserver l'accès aux mutuelles de prévention, aux entreprises qui se conforment, qui ont une politique, qui ont suivi de la formation, etc., les différentes obligations qui leur sont faites. Il y avait aussi le renouvellement et... pas l'accès, mais l'obtention et le renouvellement des permis à la régie... à la RBQ, on est habitué d'appeler la RBQ, la RBQ, s'ils n'ont pas suivi de formation en matière de harcèlement sexuel. Donc, il y a une série de mesures comme ça qui avaient été... qui avaient été recommandées par les expertes, qui n'ont pas été retenues. On les trouve intéressantes et on trouve que ça va dans le sens de de partager la responsabilité de faire, de faire reposer les responsabilités sur différents partenaires et non pas seulement sur les tribunaux, sur le TAT, sur la CNESST, sur...

Donc, on trouvait qu'il y avait... Bon, il y avait un autre exemple, c'était de ne financer que des projets, dans le secteur culturel, ne financer que les projets qui se conforment aussi à leurs obligations, parce qu'il y a eu des problèmes aussi dans le secteur culturel. Donc, on trouvait que ces mesures-là étaient intéressantes.

Une voix : ...

Mme Caron : ...quelque temps, je ne peux plus continuer.  

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vais céder la parole maintenant au député d'Hochelaga-Maisonneuve. La parole est à vous.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Content de vous voir ici. Merci pour le mémoire très riche. Beaucoup de choses ont été dites, là, dans les interventions précédentes, je vais donc être un petit peu plus périphérique, peut-être. Votre dernière recommandation confie un mandat d'analyse sur les effets de sa mise en œuvre dans cinq ans. Je suis allé voir le texte puis je me disais pourquoi cinq ans? C'est parce que le projet de loi parle déjà d'un an, ça aurait pu être trois. Est-ce que cinq, c'est en vous basant sur une expérience précédente?

Mme Bégin (Martine) : Bien, en fait, un an, on trouve que... Bon, un an, c'est comme si c'est un état de mise en œuvre. Le cinq ans, c'est plus un état, un état... un rapport sur les effets de la mise en œuvre dans le sens que... Pour le dire autrement, dans un an, c'est possible de faire un rapport en disant : Voici ce qui a été mis en œuvre. Dans cinq ans, comme comme le ministre du Travail l'a fait, de confier le mandat à des expertes, de faire un rapport dans cinq ans, c'est plus sur l'effet des recommandations. Mais là je ne suis pas sûre de ma compréhension, parce que je pense que c'est dans le projet de loi. C'est ça. Donc, c'est prévu dans le projet de loi, hein? C'est ça. Ça fait que nous, on veut juste être sûr que ça va être là.

M. Leduc : C'est-à-dire que c'est le un an qui est prévu ou le un an et cinq ans, les deux?

Mme Bégin (Martine) : Le cinq ans, le cinq ans. 

M. Leduc : D'accord. Parfait. Donc, vous mettez ceinture et bretelles...

Mme Bégin (Martine) : Si on veut.

M. Leduc : Parfait. Je ne pense pas que vous faites référence aux clauses d'amnistie dans votre texte.

Mme Bégin (Martine) : Non, parce que nous, on travaille surtout...

M. Leduc : ...non-syndiqué.

Mme Bégin (Martine) : Exactement. Ça fait qu'on n'a pas... on n'a pas examiné la situation, on n'a pas examiné...

Mme Bégin (Martine) : ...la problématique.

M. Leduc : Puis de ce que vous avez entendu précédemment... pas nécessairement quelque chose qui vous fait pencher d'un bord ou de l'autre.

Mme Bégin (Martine) : Bien, on se... on serait... on serait... En tout cas, le bord sur lequel on penche, c'est l'analyse des expertes.

M. Leduc : O.K. Parfait. Intéressant. Comme le temps file rapidement, qu'est-ce qui serait la... la ou les deux ou trois priorités qu'il faut... retenir de... dans votre mémoire?

Mme Bégin (Martine) : Oui. On a... on a fait... on a fait un grand effort de synthèse puisqu'on a seulement 10 recommandations, dont juste cinq touchent la loi, alors qu'il y en a une série qui touche vraiment...

M. Leduc : Puis dans ces cinq-là, là, s'il faut en identifier une ou deux.

• (17 h 20) •

Mme Bégin (Martine) : Oui, oui, dans ces cinq-là, bien, j'ai parlé tantôt du strictement privé.

M. Leduc : Oui, ça je me rappelle. J'ai noté.

Mme Bégin (Martine) : Il y a le libellé du 123.16 sur... qu'on considère que c'est dangereux... bien, pas c'est dangereux, il y a risque de sous- indemnisation à cause du libellé actuel.

M. Leduc : 23.16 vous avez dit?

Mme Bégin (Martine) : 123.16 qui a été abondamment discuté par les expertes et par... je pense que c'est Juripop.

M. Leduc : Oui, je... oui.

Mme Bégin (Martine) : L'autre, c'est... Bien, on a parlé de l'accompagnement, l'accompagnement notamment en médiation pour éviter que des... des femmes, des plaignantes qui ne sont pas habituées au processus légal lors d'une médiation puissent révéler des informations sensibles qui pourraient... Parce que les expertes parlaient de médiation où il y avait... des employeurs venaient à la pêche pour avoir des informations. Ça, ça nous préoccupe, et aussi d'arriver à la fin de la médiation avec des... des... des compensations qui sont nettement inférieures à ce qu'elles auraient pu recevoir, là. Ce que je comprends, c'est qu'il y a beaucoup de... il va y avoir de l'accompagnement au niveau du Tribunal administratif. Nous, ce qu'on demandait, c'est qu'il y ait un accompagnement au niveau de la médiation dès le... dès les plaintes qui sont faites à la CNESST.

M. Leduc : Bien ça, c'est des changements législatifs ou des changements administratifs?

Mme Bégin (Martine) : Je ne le sais pas puisque je ne suis pas membre du Barreau et... Je ne le sais pas, mais... Oui, c'est ça.

M. Leduc : Ah! bien là, ça, ça ne vous prive pas d'avoir une opinion sur le sujet.

Mme Bégin (Martine) : Non, j'ai une opinion, mais c'est...

M. Leduc : Moi, je ne suis pas membre du Barreau puis je vote sur des lois, ça fait que ça va bien.

Mme Bégin (Martine) : O.K. C'est ça. Sinon... sinon, je pense qu'on a fait le tour des... des grandes préoccupations qu'on avait...

M. Leduc : Merci beaucoup.

Mme Bégin (Martine) : ...qu'on a.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci infiniment de votre contribution à nos travaux. J'ajourne les travaux quelques minutes. Je suspends, pardon, les travaux quelques minutes le temps que nos prochains invités s'installent. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 21)

(Reprise à 17 h 26)

La Présidente (Mme D'Amours) : Nous reprenons nos travaux. Et je souhaite la bienvenue à l'Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades. Je vous rappelle, chers invités, que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé et puis nous procéderons à la période d'échange après. Donc, je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Robert (Virginie) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Oui, donc, moi, c'est Virginie Robert. Je suis conseillère à l'Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades, et je suis accompagnée de mon camarade Félix Lapan, qui est secrétaire général de l'UTTAM.

Donc, l'UTTAM est un groupe populaire qui soutient et représente les travailleuses et travailleurs victimes de lésions professionnelles depuis bientôt 50 ans. Nos membres, dont j'aimerais d'ailleurs souligner la présence aujourd'hui dans la salle, et les personnes que nous soutenons sont majoritairement des travailleuses et travailleurs non syndiqués qui connaissent très bien les difficultés du régime de réparation de lésions professionnelles. Aujourd'hui, c'est armé de cette expertise-là que nous venons vous présenter notre mémoire.

Vous comprendrez bien que l'UTTAM est familière avec les obstacles du régime. Les lésions professionnelles liées aux violences à caractère sexuel sont une minorité de cas pour lesquels nous sommes amenés à donner du soutien. Cela m'amène par ailleurs à souligner une grande absence de cette consultation où les représentantes des groupes de femmes et de groupes de défense de droits des travailleuses qui auraient pu partager avec la Commission leur expertise spécifique avec les travailleuses victimes de violences à caractère sexuel au travail. Je pense notamment non exclusivement à Action travail des femmes et au Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail, dont il est difficile d'ignorer l'absence.

Nonobstant cela, nous aimerions souligner que le projet de loi n° 42 a le potentiel d'améliorer l'accès au régime pour les victimes de lésions professionnelles liées aux violences à caractère sexuel. Cependant, on constate que, malgré le travail colossal qu'a produit le comité d'experts, avec des recommandations prenant en considération l'analyse globale de la situation actuelle, les législateurs semblent réticents à mettre en œuvre certains changements qui y sont proposés. Nous croyons que le législateur risque de rater sa cible s'il ne porte pas des modifications à son projet de loi.

Le mémoire que nous présentons aujourd'hui porte uniquement sur notre domaine d'expertise, soit la réparation des lésions professionnelles. Nous n'aborderons donc que les changements qui touchent à la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles, sans aborder la question de l'imputation. Afin de faciliter la présentation, mon camarade et moi vous présenterons nos recommandations dans l'ordre du mémoire. Donc, j'amènerais, là, à votre attention la première recommandation qui concerne la définition des violences à caractère sexuel que le projet de loi apporte dans la Loi à la santé et la sécurité du travail, auquel référant l'ATMP. Bien que nous croyons souhaitable qu'une définition apparaisse dans la loi qui permettrait d'assurer une constance dans les décisions rendues par les décideurs, la définition proposée nous semble incomplète. En effet, la définition telle qu'écrite dans...

Mme Robert (Virginie) : ...le projet de loi ne semble pas inclure explicitement la notion de sexisme, alors que ce type de violence fait pourtant bel et bien partie de la définition des violences à caractère sexuel, comme l'a d'ailleurs présenté le comité d'experts dans son rapport. L'inclusion explicite du sexisme dans la définition permettrait par ailleurs d'éviter une interprétation trop restrictive de la notion de violence à caractère sexuel, en invisibilisant la violence systémique que vivent particulièrement les femmes en milieu de travail et qui ne se manifeste pas nécessairement par des... par des comportements à connotation sexuelle au sens strict. Je passe maintenant la parole à mon camarade Félix pour la suite des recommandations.

M. Lapan (Félix) : Merci, Virginie. Alors, je vais vous parler, moi, des deux présomptions nouvelles, parce que le projet de loi prévoit deux présomptions légales pour faciliter la reconnaissance des lésions causées par la violence à caractère sexuel. C'est une bonne chose, et on invite d'ailleurs le ministre à résister aux pressions des groupes patronaux qui demandent de diluer ou de retirer les présomptions. C'est une avancée importante, les présomptions, puis elles doivent demeurer pour que tout ça ait un sens pour les victimes.

• (17 h 30) •

La première présomption va permettre de présumer qu'une violence à caractère sexuel commise par un supérieur ou un collègue du même établissement est reliée au travail. C'est une bonne chose, mais on veut attirer l'attention sur le fait que ça va laisser sans protection la victime si l'auteur de la violence est un bénéficiaire, un client ou tout autre tiers lié au travail. Le comité d'expertes a montré que, dans 33 % des cas, la personne qui commet la violence est un tiers relié au travail. Et la présomption de connexité avec le travail ne s'appliquerait pas dans ce cas. Nous, on vous invite à bonifier la définition... la première présomption pour qu'elle s'applique à tout tiers relié au travail. On demande aussi de retirer le «au sein d'un même établissement» pour qu'elle s'applique aussi à un collègue de travail travaillant au sein d'un autre établissement du même employeur.

La seconde présomption va permettre de présumer qu'une maladie qui survient après un acte de violence à caractère sexuel sur les lieux du travail est une lésion professionnelle. C'est aussi une belle avancée. Concrètement, la victime n'aura pas à prouver la relation entre la maladie et un... et la violence. Et elle n'aura pas à prouver la survenance d'un événement imprévu et soudain. C'est une avancée. Nous, cependant, on réagit à la condition que cette maladie apparaisse dans les trois mois qui suivent la violence. Pour nous, cette condition n'a pas vraiment de fondement scientifique ou juridique. Elle devrait disparaître, la condition du trois mois. Là-dessus, on demande au législateur de plutôt retenir la recommandation des expertes qui ne prévoyaient aucun délai de cette nature.

On veut vous parler de l'accès au dossier. Le projet de loi propose des modifications qui concernent l'accès au dossier de l'employeur. Nous, on compare l'article 38 tel qu'il est écrit actuellement et tel qu'il va être modifié, puis on ne voit pas de véritable changement autre que cosmétique, là. C'est comme une précision, mais il était déjà prévu, là, que l'employeur n'avait pas accès au dossier médical de la victime et de réadaptation physique. Mais le problème, c'est que cette restriction d'accès ne s'applique qu'en première instance. Dès qu'il y a des litiges au dossier, l'employeur obtient un dossier médical complet en révision ou au Tribunal administratif du travail. Alors, pour nous, pour protéger vraiment la confidentialité des données médicales des victimes, parce que c'est un vrai problème, l'interdiction devrait être élargie au dossier de la révision administrative et au dossier du Tribunal administratif du travail.

Pour nous, il manque aussi une chose que les expertes ont recommandée. Les expertes proposaient un article 38.2 dans lequel il y avait notamment une interdiction que la personne qui accède au dossier au nom de l'employeur, qui agit au nom de l'employeur, qui représente l'employeur, soit une personne impliquée dans la violence à caractère sexuel. Là-dessus, les expertes racontent des histoires d'horreur, le genre d'histoires qui brisent le lien de confiance envers la justice ou des victimes. C'est la personne qui les a agressées qui... qui agit comme représentant de l'employeur, qui consulte les notes de psychologue détaillées et qui contre-interroge la victime au tribunal. On peut imaginer le cauchemar que c'est de raconter son histoire devant son agresseur qui... qui nous contre-interroge au tribunal.

On veut parler de l'indemnisation des mineurs aussi. Dans notre projet de loi, il y a une injustice, une discrimination qui existe dans la loi actuelle, puis on salue le fait que le projet de loi agisse sur l'article 80 parce que, nous, on dénonce depuis longtemps l'injustice de l'article 80. La sous-indemnisation actuelle, c'est une honte, à 126 $ par semaine en 2024. Malheureusement, le projet de loi perpétue l'injustice parce qu'on a décidé d'indemniser toutes les personnes de moins de 18 ans sur une base de 17 heures par semaine. On comprend que ça vient, le 17, de la Loi sur l'encadrement du travail des enfants adoptée l'année dernière, mais on a l'impression que le ministre a oublié que cette limite de 17 ne s'applique que... qu'aux...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Lapan (Félix) : ...aux mineurs qui sont assujettis à l'obligation de fréquentation scolaire pendant le calendrier scolaire. Nous, on ramène notre proposition qu'on avait faite en avril dernier, dans le projet de loi no 19, qui était d'indemniser en calculant les heures de travail que la loi autorise les personnes de moins de 18 ans à faire sur l'année complète, en tenant compte du calendrier scolaire et de si on est assujetti ou non à l'obligation de fréquentation scolaire.

En ce qui concerne les délais, on a une proposition, dans le projet de loi, d'allonger le délai de réclamation pour les victimes de violences à caractère sexuel, pour le faire passer de six mois, qu'il est, à deux ans. C'est positif, mais c'est insuffisant. Le hors délai, c'est la cause numéro un des refus de réclamation des lésions causées par les violences à caractère sexuel, c'est ce que révèlent les expertes, notamment parce que ces lésions sont parfois diagnostiquées des années après les violences qui les ont causées. Pour nous, la meilleure solution, c'est celle des expertes, c'est de réputer... c'est de considérer que toutes les victimes sont réputées avoir un motif valable d'avoir réclamé hors délai s'il y a lieu, et de cette manière-là, personne, aucune victime de violences à caractère sexuel ne perdrait ses doigts... ses droits. On fait la modification à l'article 352 de la loi, comme les expertes le recommandaient.

Il y a d'autres éléments dont les expertes traitent et qui... que le projet de loi a ignorés, notamment les expertes interviennent au niveau de l'article 27 de la loi. Nous, on vous recommande carrément l'abolition de l'article 27, comme la CSN le disait hier, on a des arguments là-dessus, on pourra peut-être en parler, parce que le temps file. On recommande aussi une modification à l'article 129 pour éviter que des victimes de maladies soient plongées dans la misère pendant des mois, en attente d'une décision à cause d'effets de système. Ça aussi, là, on invite les députés, s'ils veulent plus de détails, à lire notre mémoire ou à nous poser des questions.

Finalement, on demande la création d'une division spécialisée sur la violence à caractère sexuel au tribunal, comme les expertes le demandaient, comme les expertes disaient que c'était la pièce centrale de la réforme dont nous avons besoin.

Je vais aller vers mes remarques finales. L'UTTAM est bien placée pour connaître les difficultés que vivent chaque année des milliers de victimes d'accidents et de maladies du travail qui sont confrontées au régime de réparation. Que ce soit quand elles décrivent un événement survenu au travail, quand elles parlent de leurs douleurs, de leurs incapacités, on ne croit pas les victimes, trop souvent. On se méfie d'elles, à la CNESST, on remet en question tout ce qu'elles rapportent. Chaque fois qu'un employeur donne une version différente de la victime, c'est l'employeur que la CNESST croit. Ça, c'est le vécu, c'est ce qu'on voit dans les dossiers. Les victimes du travail ont souvent l'impression de vivre un retournement absurde de situation dans lequel elles se retrouvent en position d'accusé. On les accuse de négligence, on les accuse de se plaindre pour rien, on les accuse d'inventer des problèmes, on les accuse de ne pas guérir assez vite. C'est comme ça que beaucoup de victimes vivent le fait d'avoir une lésion professionnelle. Dans les cas de victimes de violences à caractère sexuel, beaucoup de ces problèmes-là sont décuplés. Je comprends que mon temps se termine.

La Présidente (Mme D'Amours) : Il est terminé, votre temps, cher M..

M. Lapan (Félix) : D'accord. Merci de nous avoir écoutés. On est prêt et prête à répondre à vos questions.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci. Période d'échange, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Boulet : Comme je l'ai mentionné... Merci, Mme la Présidente. Mme Robert, Mme Lapan, puis vos collègues, évidemment, on apprécie votre présence. Je comprends que votre mémoire, qui est particulièrement étoffé, là, il a 50 pages, ne porte que sur le volet indemnisation, donc la Loi sur les accidents de travail, maladies professionnelles. Et, souvenez-vous, les conversations qu'on avait eues avec le p.l. no 59, on a fait quand même des grands pas en avant. La santé psychologique, ce n'était pas reconnu, on a ajouté l'intégrité psychique partout, on a ajouté l'obligation d'identifier pour mieux contrôler et éliminer les risques psychosociaux. Etm grande avancée aussi, on a ajouté à la liste des maladies professionnelles présumées les troubles de stress post-traumatique, ce qui est vécu par plusieurs victimes de violences à caractère conjugal. Et ce n'est pas toujours simple, hein, tu sais, Félix, tu le mentionnais, ou Virginie, tu sais, il y a des groupes qui disent : Pas de présomption, d'autres qui disent oui. Les délais, ils ne devraient pas passer de six mois à deux ans, alors que d'autres nous disent : Il ne devrait pas y avoir de délai à deux ans. Bon. Évidemment, il y a des nuances. Puis vous le savez, en relations de travail, c'est important d'essayer de trouver un équilibre.

Puis ça m'interpelle, quand vous dites, à la CNESST, les personnes victimes de violences à caractère sexuel... Elles sont accueillies, elles sont, maintenant, là... les intervenants, 90 % des...

M. Boulet : ...23 recommandations à connotation administrative ont été mises en application, puis le partenariat avec Juripop, on ne peut pas nier que ça va avoir plein d'effets bénéfiques. Puis les personnes à la CNESST... Il ne faut pas non plus rendre la CNESST, comme institution, responsable. C'est des êtres humains qui sont là, les intervenants. Puis, Virginie et Félix, je vous rappellerai qu'avant la... le projet de loi n° 59 on n'avait accès à la réhabilitation que lors de la détermination d'une atteinte... tu sais, quand la personne était consolidée avec une atteinte. Là, dès la survenance de la lésion professionnelle, elle peut être accompagnée par un conseiller ou conseillère en réadaptation.

Je sais qu'on ne fera pas tout, mais il faut aller le plus loin possible, puis je sais qu'on ne sera pas parfaits puis que le projet de loi nécessite des améliorations, puis j'aime beaucoup discuter avec vous autres, un, parce que vous vous préparez puis, deux, parce que vous représentez des personnes qui ont besoin de l'être, majoritairement des travailleurs non syndiqués, qui sont souvent marginalisés, dont on ne considère pas la valeur complète au marché de l'emploi du Québec. Ça fait que, Virginie puis Félix, je l'ai déjà dit, là, puis tu vas me dire : Oui, mais vous n'êtes pas allé assez loin, mais, bon, je pense que vous comprenez mon travail.

Mais, Virginie, vous faisiez référence à l'absence, à nos consultations particulières, de groupes comme Action travail des femmes. Je veux vous le redire, on va étudier avec attention et considération tous les mémoires. On ne peut pas entendre tout le monde. Tu sais, il y a des projets de loi qu'on a déposés, en matière de travail, où il y avait 30, 40 puis 50 groupes qui voulaient être entendus, mais on ne peut pas tous. Et je pense que votre présence témoigne de l'intérêt que j'ai envers ce que vous dites puis des recommandations que vous nous soumettez. Mais il faut passer le mot. Quand il y a des mémoires qui nous seront transmis, on va les analyser, on a toute une équipe et on va travailler en collaboration avec les personnes de la CNESST.

Puis les recommandations administratives, je n'y reviendrai pas, de la CNESST, mais le TAT, on a formé une équipe dédiée aux violences à caractère sexuel. Puis je vais reprendre le nom de la personne qui a donné la formation, une personne du ministère de la Justice, sur les mythes et stéréotypes en matière de violences à caractère conjugal, c'est Catherine Gareau-Blanchard, et on a formé une équipe non seulement de juges administratifs, mais aussi des conciliateurs puis des intervenants accompagnateurs. Et cette équipe spécialisée va aussi jouer un rôle dans la... Vous savez, puis, je pense, c'est Félix qui l'a mentionné, qu'on peut mettre fin à la médiation quand ce n'est pas utile, mais il va y avoir des conférences préparatoires individualisées, des mesures d'aide au témoignage, les témoignages à distance, les paravents, les ordonnances, la formation pour la divulgation, la confidentialité puis la diffusion. Le Tribunal administratif du travail répond de façon efficace et pratique à la recommandation du comité d'expertes, et je leur en avais parlé, puis on est allés en amont puis on a fait ce qu'administrativement les expertes nous recommandaient.

Définitions incomplètes, je suis d'accord, mais vous m'avez entendu, je pense, je ne répéterai pas, là, la... tu sais, les lois ont différents objectifs, santé et sécurité en matière de prévention, accidents de travail, maladies professionnelles, indemnisation, puis les normes, c'est pour des recours.

• (17 h 40) •

Les deux présomptions légales, Félix, j'ai entendu, il faut résister aux demandes des patrons. Je vais travailler avec mes collègues, notamment d'Hochelaga-Maisonneuve, Bourassa-Sauvé, La Pinière. Si on les a mises dans le projet de loi, c'est qu'on considérait qu'elles jouaient un rôle utile. C'est fascinant puis effarant de constater à quel point il y a peu de signalements. Et les présomptions, à mon avis, vont contribuer à intégrer des cultures qui vont permettre aux personnes de dénoncer, de dire. Parce que le nombre de plaintes, à 4 400, là, ce n'est pas nécessairement le reflet de la réalité.

Deux, trois autres points. Les étudiants mineurs, on perpétue... en fait, on élimine une injustice, selon moi...

M. Boulet : ...c'est un régime d'indemnisation qui vise à remplacer une capacité de gain. Même au-delà de 16 ans, où le 17 ans ne s'applique plus puis tu n'as plus d'obligation de fréquentation scolaire, il y a la possibilité, vous allez le voir dans le libellé, de faire une preuve de gain anticipé, parce qu'on veut véritablement remplacer, comme tous les autres travailleurs, la capacité de gain. Mais, Félix, tu me dis non. Avant de finir, bien, j'aimerais vous écouter, Félix ou Virginie, là-dessus.

M. Lapan (Félix) : ...

Mme Robert (Virginie) : Oui, c'est moi. Oui, en fait, vous avez raison, le principe de l'indemnisation, c'est effectivement d'indemniser la capacité de travail. Et, en fait, votre modification législative, si elle modifie... elle ajoute le 17 h pour le salaire minimum, ce qui est parfait, mon collègue Félix, il l'a ajouté, il manque une portion à ce 17 heures-là. C'est la portion qui travaille durant l'été, hein? On ne... Il ne faut pas oublier que, dans votre propre loi, hein, dans la Loi sur les normes du travail, il est indiqué que le 17 heures ne s'applique pas dans les périodes de congés, dont l'été, où est-ce que les étudiants vont travailler, là, des 40 heures semaine, là. Donc...

M. Boulet : ...à 16 ans, oui.

Mme Robert (Virginie) : Oui, exactement. Lorsqu'on parle des 17... des 16 ans qui ont fini leur obligation scolaire, là, à 16 ans, on peut... La dernière année de notre 16 ᵉ anniversaire, on n'est plus assujetti, là, à l'obligation fréquentation scolaire. Et les jeunes de...

M. Boulet : 17 ans, en fait...

Mme Robert (Virginie) : Non, à partir de la dernière année du septième anniversaire, on n'est plus assujetti à l'obligation de fréquentation scolaire.

M. Boulet : Oui. Oui. Oui.

Mme Robert (Virginie) : Donc, il y a une partie des 16 ans et les 17 ans qui ne sont plus assujettis. Eux ont une capacité de travail complète.

M. Boulet : Et ils peuvent la démontrer parce que l'article prévoit...

Mme Robert (Virginie) : Non. Non, votre changement prévoit qu'ils peuvent démontrer des gains des 12 derniers mois qui étaient supérieurs.

M. Boulet : Non, les gains anticipés dans les 12 mois qui vont suivre, à moins d'une preuve que les gains anticipés, dans l'année qui va suivre, puissent être supérieurs.

Mme Robert (Virginie) : Ne reste que leur capacité de travailler, à ce moment-là, devrait être immédiatement reconnue comme étant complète.

M. Boulet : Et ça peut se démontrer puis ça peut... Moi, ce qui est important pour moi...

Mme Robert (Virginie) : Elle devrait être automatique. C'est leur capacité de travail. À partir de ce moment-là...

M. Boulet : Tu sais, Virginie...

Mme Robert (Virginie) : ...la capacité de travail est complète.

La Présidente (Mme D'Amours) : ...

Mme Robert (Virginie) : Oui, pardon.

La Présidente (Mme D'Amours) : ...attendre que les personnes aient fini de parler.

Mme Robert (Virginie) : Désolée.

La Présidente (Mme D'Amours) : Et une discussion très animée. Alors, prenons notre temps, être calme et écoutons la personne qui termine sa phrase, et ensuite on pourra répondre ou poser la question. M. le ministre.

M. Boulet : Le délai de deux ans, bien, je reviens à ce que j'ai dit, il y en a qui trouvent que c'est beaucoup trop puis d'autres trouvent que ce n'est pas suffisant. Il y en a qui nous demandent de rester à six mois, là où c'était avant. J'ai bien compris vos représentations. La réhabilitation favorisant le retour au travail, je suis tellement d'accord avec ça. Le plus rapidement on va prendre la personne en charge, qu'elle sera accompagnée, pour éventuellement revenir au travail, puis on réfère à un retour au travail durable, ce sera le mieux. La négligence grossière est volontaire à l'article 27. Vous connaissez l'interprétation hyperrestrictive qu'en fait le Tribunal administratif du travail, puis ça prend quasiment une... tu sais, je me réfère souvent à l'exemple, il faut être sur le bord d'une falaise, puis décider de se tirer en bas, puis avoir des blessures importantes pour que la CNESST, puis ultimement le TAL, dise que 27 s'applique et que ce n'est pas une lésion professionnelle. Mais je vous ai entendu là-dessus. Moi, je veux compléter, parce qu'il y a de mes collègues... Non?

La Présidente (Mme D'Amours) : ...

M. Boulet : O.K. Alors, moi, ça complétera mes commentaires, Mme la Présidente. Merci.

La Présidente (Mme D'Amours) : Parfait. Merci. Je vais céder maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Cadet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous pour votre présentation. Je consultais rapidement votre mémoire... attendez, j'avais identifié ma toute première question. Voilà. Je... Concernant l'absence de connexité au travail, donc, vous avez... bon, vous en avez parlé un peu, là, pendant votre présentation, j'ai été un peu surprise de voir, donc, une de vos recommandations sur le fait de maintenir de façon... de façon impérative le terme «strictement» dans le contexte, donc, de strictement privé. Donc, vous voyez, est-ce que j'en suis à l'article 28.0.1. Vous avez... J'imagine, vous avez suivi les échanges hier et un peu plus tôt aujourd'hui, où la très grande majorité des intervenants, en fait, là, nous demandaient d'enlever complètement, donc, cet élément-là du projet de loi, d'un côté comme de l'autre côté, là. Du patronal, donc, on nous disait que, bon, la preuve à faire est extrêmement...

Mme Cadet : ...difficile, donc j'ai questionné Me Perreault, là, du Conseil du patronat du Québec sur cette question-là, puis je me disais, donc, ce n'est pas tout à fait évident, parce qu'en fait il semble très souvent y avoir une connexité. Evidemment donc, de l'autre côté aussi, Juripop nous le disait, et ainsi que les expertes, là, que ça pouvait contribuer à une certaine stéréotypisation, que c'était plus difficile, et alors que vous, vous souhaitez absolument qu'on maintienne le contexte strictement... Allez-y.

M. Lapan (Félix) : En fait, je n'irais pas jusqu'à dire on souhaite absolument que, mais on ne demande pas le retrait, et vous avez raison, parce que nous, après analyse et réflexion, on pense que le «sauf si c'est strictement privé» pourrait avoir un effet protecteur sur la présomption. Et parce que notre expérience des dossiers de la CNESST, c'est que la commission souvent n'applique pas les présomptions ou en tout cas quand... quand on rencontre des conditions de base d'une présomption, la présomption de l'article 28 ou 29, la CNESST va toujours, toujours faire l'exercice de se poser la question : Est-ce qu'elle est renversée? Hein, on a une présomption de maladie professionnelle à l'article 29, la CNESST va se demander : Mais est ce que la présomption est renversée?

Nous, on lit le «sauf si c'est strictement privé» comme étant un énoncé très clair de la condition du renversement de la présomption. Et si on n'a plus le «sauf si c'est en privé», c'est  la CNESST qui va évaluer est ce que c'est renversé ou non, et nous, on a... on a une crainte qu'en première instance la commission se mette à le renverser. Si c'est... si c'est partiellement privé, parce que «strictement» en français, c'est synonyme «d'uniquement, totalement, entièrement,» ça nous semble effectivement, comme certains représentants du patronat ont dit, ça nous semble effectivement être une condition difficile à rencontrer, et c'est une bonne chose parce que là, on vient mettre une présomption qui va permettre à des victimes de faire reconnaître leurs lésions, puis, tu sais, on a donné des exemples dans notre mémoire.       C'est vraiment une avancée cette présomption-là, on espère qu'elle va être maintenue puis on vous demande pas de retirer le «sauf si strictement privé». On comprend qu'il y a des organisations syndicales qui ont demandé de l'enlever. Écoutez, le législateur décidera s'il l'enlève ou pas. Mais si vous gardez la fin du terme, le «strictement», il est essentiel, parce que s'il disparaissait, là, ça donnerait... o. On aurait toutes les interprétations, puis ça aurait plus de bon sens. Le «strictement», il est une condition élevée pour... pour renverser la présomptionc,Et ça, c'est une bonne chose parce qu'on veut que la présomption s'applique dès qu'il y a un lien avec le travail, parce que toutes les zone grises, là, pour nous, ça ne sera pas strictement privé, justement, ça va être partiellement privé, parce qu'il y a toute une zone... en tout cas...

Mme Cadet : Ça fait que vous, votre crainte, c'est vraiment au niveau du renversement du fardeau de la preuve.

M. Lapan (Félix) : Ah oui! parce que la CNESST regarde tout le temps ça, même si on n'avait pas «sauf si c'est strictement privé». Le ministre l'a dit de toute façon, il a fait de bonnes remarques là-dessus, c'est que ce débat-là, il va se faire . Automatiquement, la CNESST, même si on rencontre les conditions de la présomption, la CNESST, ils évaluent mais est-ce qu'elle est renversée, tu sais, est ce que c'est suffisamment dans la sphère personnelle pour dire que... Puis là, pour nous, si on a les termes «sauf si c'est strictement privé», parce que les mots veulent dire quelque chose, et «strictement», c'est un mot fort. En tout cas, si on doit garder... Puis je comprends qu'il y a eu des représentations de tous les côtés, tu sais, je veux dire, peut-être que le ministre choisira de l'enlever, puis on aura quand même la nouvelle présomption, là, puis bon. Mais si on garde la fin, c'est sûr qu'il faut garder le «strictement». En tout cas, il ne faudrait pas que ça soit «sauf si c'est dans le contexte privé», ça, ça serait... la présomption ne servirait plus à rien. Mais si on garde... si on fait encore référence à «sauf si c'est dans un contexte privé», il faut que ça soit «strictement privé» pour que la présomption serve à quelque chose.

Mme Cadet : Puis justement, donc, sur les... sur l'argumentaire de... du fait, donc, que ça pouvait, bon, se stéréotyper, donc, certaines situations, que ça pouvait être au désavantage de la plaignante, là, en tant que telle. Tu sais, là-dessus, j'aimerais vous entendre.

• (17 h 50) •

M. Lapan (Félix) : C'est parce que le problème, c'est que la CNESST le fait tout le temps, l'exercice. Ça fait que, même si on n'écrit pas «sauf si c'est dans un contexte strictement privé», la CNESST, c'est une présomption de connexité avec le travail. Ça fait qu'automatiquement, la CNESST va se poser la question : Est-ce que c'est vraiment dans la sphère du travail? Puis c'est inévitable, là, ils le font pour toutes les présomptions... bien, en tout cas, malheureusement, là, notre pratique, puis je comprends, là, comme le ministre, intervenait tout à l'heure, à la CNESST, c'est des humains, là, puis ils peuvent avoir une empathie, mais il y a une logique d'organisation où on regarde quand même pour ne pas indemniser du monde si on n'est pas sûr qu'ils peuvent l'avoir.

Et ils vont regarder : Est-ce qu'on peut considérer la présomption renversée? C'est inévitable. Ça fait que, comme ils le font avec les présomptions de 28, 29, puis de laisser ça dans le flou à la CNESST qui décide quand c'est renversé, on a des craintes. Puis le patronat a raison de dire : Ça va être dur de prouver que c'est un contexte strictement privé, mais tant mieux...

M. Lapan (Félix) : ...parce que, si on ne réussit pas à le prouver, ça veut dire qu'il y a un lien avec le travail, et oui, la violence à caractère sexuel est en lien avec le travail, elle doit être indemnisée. Rappelons que le régime indemnise les lésions qui surviennent par le fait ou à l'occasion du travail. J'ai entendu des choses hier qui remettaient en question cette idée-là, là, qu'on indemniserait des lésions qui surviennent à l'occasion du travail. Ça n'a aucun sens, là, ça fait des années, mais... Donc, voilà.

Mme Cadet : Merci. Sur la notion de tiers, en fait, dans la définition même, là, vous souhaitez d'avoir du... je pense, bien, en fait, que ce... qu'il puisse y avoir une inclusion, là, donc, d'une part, du conseil d'un autre établissement - je pense que probablement que ça, cet élément-là, donc, il est clair - mais aussi, là, qu'on puisse aller, donc, au-delà, donc, du collègue, mais de tout tiers. Donc... peut-être vous entendre là-dessus. Ce que vous dites essentiellement, donc, dans les cas que vous, vous voyez, il y a donc des violences à caractère sexuel, là, qui sont régulièrement effectuées par des personnes qui ne sont pas des collègues de travail?

M. Lapan (Félix) : Bien, ce n'est pas nous qui le disons, c'est les expertes, page 69 du rapport d'expertes. On reproduit l'espèce de tarte, là, qu'on retrouve à la page 69 du rapport d'expertes à la page 15 de notre mémoire. On voit que 33 % des violences sont commises par... là, on met «patients», «résidents», «clients», «tiers», «étudiants», «autres», «prisonniers dans un milieu carcéral», par exemple. Bien, ça, c'est toutes des personnes pouvant commettre des violences à caractère sexuel qui ont un lien avec le travail. Nous, on donne un exemple, là. La présomption, si on ne l'applique pas aux tiers, on pourrait imaginer une vendeuse dans un commerce de détail qui se fait harceler par un client pendant son shift de travail et qui, après son shift de travail, quitte pour rentrer chez elle et serait victime d'une agression sexuelle par ce client-là, qui la suivrait, O.K. Elle ne serait pas couverte par la présomption dans l'état actuel, parce qu'elle n'est pas un travailleur ou une travailleuse, elle n'est pas... Mais pourtant, c'est évident que cette lésion-là survient à l'occasion du travail, là, il y a un lien direct avec le travail. Le but de cette présomption-là, ce serait de couvrir des situations comme celle-là si c'est un collègue ou un supérieur. Nous, on veut l'élargir à tout tiers relié au travail, si on veut couvrir... parce que sinon, on laisse sans protection une victime sur trois, là.

Mme Cadet : Oui. L'article 27... Vous demandez donc la suppression de l'article 27 de la TMP. Donc, les groupes que moi, j'ai vus, donc, c'est... vous êtes donc le deuxième, là, qui demandez donc l'inclusion, donc, de cette recommandation-là, donc, du comité d'expertes dans le projet de loi. Donc, pour vous, donc, ce...

M. Lapan (Félix) : Oui. Les expertes ne recommandaient pas d'enlever complètement 27, elles recommandaient, tu sais, pour être juste, là, elles recommandaient juste de ne pas l'appliquer dans les cas de violences à caractère sexuel, puis pour nous c'est un minimum. Mais, comme la CSN l'a dit hier, nous, on est pour éliminer complètement l'article 27, qui est un reliquat de la loi de 1909, qui est la loi... Elle a un beau nom, la loi de 1909, hein, pour ceux qui le savent, là, ceux et celles qui le savent : c'est la Loi concernant les responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes à leur travail et la réparation des dommages qui en résultent. En 1909, il y avait dans cette loi-là le concept de la «faute inexcusable», c'est ça, faute inexcusable de l'employeur qui permettait d'augmenter l'indemnisation ou faute inexcusable du travailleur, de la victime, qui diminuait l'indemnisation. Ça fait qu'il y avait comme une notion, là, dans des fautes graves d'un côté et de l'autre.

En 1931, ce régime-là a été changé par la première loi sur les accidents du travail, qui est le premier régime sans égard à la faute. On a enlevé la faute inexcusable de l'employeur, mais on a laissé la faute inexcusable du travailleur sous forme de négligence grossière et volontaire. Ça, c'est parce qu'en... dans les années 30, le patronat a réussi à faire des pressions pour dire : On ne devrait pas considérer la faute de l'employeur dans un régime sans égard à la faute, mais on continue de considérer la faute du travailleur. Pour nous, l'article 27 n'a pas sa place dans un régime sans égard à la faute, il aurait dû être enlevé il y a longtemps. On a une occasion de le faire, les expertes nous disent l'effet néfaste. Puis, le ministre a raison, les victimes de violences à caractère sexuel ne sont pas refusées à cause de l'article 27, c'est vrai que la jurisprudence est restrictive pour l'article 27. Mais les expertes montrent l'effet néfaste d'avoir cet article-là, ça justifie des questions où on questionne le comportement de la victime, puis ça le justifie... Ça a des effets épouvantables dans les cas de violences à caractère sexuel, mais ça a des effets très néfastes dans d'autres cas aussi de lésions professionnelles. Pour nous, même s'il n'est pas appliqué souvent puis même s'il est restrictif, il est appliqué parfois dans des cas où ça produit des situations totalement injustes.

Mme Cadet : ...dire, en fait, c'est qu'il est utilisé parce que l'outil existe, mais dans les faits, donc, il n'aura pas, donc, préséance. Donc, l'argumentaire, donc, qui sera fait, donc, en fonction de l'article 27 ne sera pas... n'aura pas prépondérance...

M. Lapan (Félix) : Il est souvent...

Mme Cadet : ...mais ça aura quand même un effet néfaste, là, sur la personne qui doit être questionnée pendant ce temps là.

M. Lapan (Félix) : Il n'est souvent pas retenu, mais il l'a été dans des cas, là, qui, nous, on trouve qu'il laisse à désirer, là, mais... Parce que ça arrive. Il y a des gens...

M. Lapan (Félix) : ...qui perdent leurs indemnités en article 27. Nous, on en a vu dans des dossiers qu'on a défendus. C'est vrai que c'est rare, mais un travailleur accidenté ou une travailleuse accidentée qui a des limitations fonctionnelles, qui est mal réadapté par la CNESST, n'est pas capable de se trouver un nouveau travail. Elle n'a plus d'indemnités, accepte un emploi parce qu'elle n'a pas le choix, parce qu'elle ne trouve pas d'autre emploi, accepte un emploi sachant qu'il ne respecte pas une de ses limitations fonctionnelles, se blesse dans son nouveau travail. Il y a des refus qui ont été confirmés malheureusement par le tribunal dans des situations comme ça où les gens n'ont plus le droit à aucune réparation parce qu'on dit : C'est une négligence grossière d'avoir accepté un emploi qui ne respecte pas tes limitations. Moi, je pourrais... je vous assure qu'on a vu des gens pas du tout de mauvaise foi, pas du tout mal intentionnés, parce qu'ils se retrouvent dans une situation où ils n'ont plus d'autres choix. Ils retournent faire un travail qui sont... sur papier, ce n'est pas supposé être capable de faire, parce qu'ils n'ont rien d'autre. Ils se reblessent puis ils perdent tout droit à la réparation. Ça, je trouve que ce n'est pas acceptable en 2024 dans un régime sans égard à la faute. Puis une façon de solutionner ce genre de choses là, c'est de faire disparaître l'article.

Mme Cadet : Il ne reste plus beaucoup de temps, je vais laisser ma collègue...

La Présidente (Mme D'Amours) : Dix secondes.

Mme Cadet : Ah! c'est tout.

La Présidente (Mme D'Amours) : C'est tout.

Mme Cadet : Ah! d'accord O.K., notre chronomètre n'était pas...

La Présidente (Mme D'Amours) : Donc, merci. Je cède la parole maintenant au député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Leduc : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Toujours un plaisir de vous entendre. Riche mémoire, costaud, presque 50 pages. Un des plus toffu, je pense, touffu, pardon, j'aime beaucoup le tofu, peut-être que j'ai faim, c'est pour ça, il est 6 heures. Blague à part, j'ai posé la même question à plusieurs de vos prédécesseurs. En particulier, vous, qui avez beaucoup de substance, ça serait quoi, là, les deux, trois ou quatre trucs essentiels qu'il ne faut pas échapper dans l'étude détaillée?

M. Lapan (Félix) : Bien, toutes nos recommandations sont importantes.

M. Leduc : Oui, je le sais, mais...

M. Lapan (Félix) : Mais il y a une chose qu'on s'est dite, puis... parce qu'on attendait un peu ce genre de question, après avoir suivi les travaux, mais il y en a... bien, en fait, il y en aurait peut-être... il y en a trois qu'on se disait qu'on voulait parler, là, mais il y en a une en particulier parce qu'on a parlé des deux autres dans les derniers échanges, que peu de gens ont parlé, c'est la nécessité pour nous de modifier l'article 129.

De quoi on parle? O.K. L'article 129 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles, c'est une disposition que peu de gens connaissent parce qu'elle n'est jamais utilisée. C'est une disposition inopérante qui permet à la CNESST, dans des situations où des victimes sont en attente d'une décision sur leur réclamation, de recevoir des indemnités anticipées. Les expertes, ils ont recommandé de faire une intervention à l'article 129 pour les travailleurs et les travailleuses non syndiqués, puis ça, c'est quelque chose qui n'affecte que les non-syndiqués, O.K., c'est les gens qui vont faire une réclamation pour une lésion psychologique et une plainte en vertu de la Loi sur les normes du travail en harcèlement psychologique. Ce que ça produit, c'est que, comme la CNESST, en indemnisation, doit attendre le résultat de l'enquête, ça augmente de plus de 50 % le délai d'attente pour la décision de première instance. Pendant ce temps là, la personne n'a ni traitement ni indemnités. Les expertes, ils démontrent dans le rapport que ça fait passer de 82 à 128 jours d'attente le temps d'attente pour la décision de première instance. Ce n'est que les non-syndiqués qui vivent ça, plus... vivent plus de quatre mois sans revenus quand tu es non syndiqué, que tu n'as souvent pas d'assurance salaire, c'est plongé dans la misère des gens qui sont malades, qui sont incapables de travailler et qui attendent simplement la décision initiale. On propose, nous, une disposition pour faire un amendement à l'article 129 qui ferait que la CNESST paierait des indemnités anticipées dans ces situations-là. Et on met aussi une autre situation où des gens sont malades, c'est des maladies pulmonaires professionnelles, qui doivent attendre après l'avis d'un comité des maladies pulmonaires professionnelles, c'est un autre effet de système qui est prévu dans la loi. Et ces gens-là, on pense, devraient avoir des indemnités anticipées. C'est des gens qui sont victimes d'une maladie, qui attendent après leur traitement et leurs indemnités. On dit : On a un article qui permettrait à la CNESST de leur payer des indemnités anticipées. C'est une disposition inopérante. Elle a été là... elle est écrite là, dans la loi en 1985. On propose un amendement pour qu'elle serve à quelque chose, inspiré des expertes.

M. Leduc : C'est quelque chose que les expertes recommandaient.

M. Lapan (Félix) : Oui.

M. Leduc : Parfait. Combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme D'Amours) : ...minutes.

M. Leduc : Est-ce qu'il y a d'autres éléments qui vous semblent incontournables? Peut-être des éléments qu'on n'a pas eu le temps d'aborder aujourd'hui, que vous aimeriez prendre quelques instants pour nous présenter.

• (18 heures) •

M. Lapan (Félix) : On a déjà parlé de la nécessité d'abolir 27, de modifier l'article 80. Ma camarade Virginie en a parlé. Peut-être un élément que la FTQ... dont la FTQ a parlé, c'est de certaines situations où les gens devraient avoir accès à des services de représentation. La FTQ proposait une ressource publique qui pourrait financer des services de présentation pour les mineurs, dans des litiges. Parce qu'en... dans des litiges, puis ça, ça fait longtemps qu'on le demande, l'UTTAM, là, dans les litiges, en vertu de la Loi sur les accidents du travail, les maladies professionnelles, il n'y a aucune représentation. Les gens peuvent en avoir une aux normes du travail, mais pas en réparation.

M. Leduc : Ça serait assuré par la CNESST ou ça serait...

M. Lapan (Félix) : Oui, ça serait financé par la... pas assuré...


 
 

18 h (version non révisée)

M. Lapan (Félix) : ...nécessairement, mais ce serait financé par la CNESST.

Une voix : ...financé.

M. Lapan (Félix) : Nous, de toute façon, on est pour. Vous... Vous le savez, c'est une proposition qu'on faisait dans le cadre du projet de loi n° 57, une ressource publique de services d'information et de représentation financée par la CNESST, mais avec une direction indépendante.

La Présidente (Mme D'Amours) : Merci beaucoup.

M. Lapan (Félix) : ...

La Présidente (Mme D'Amours) : Je vous remercie, chers invités, pour votre contribution à nos travaux à la commission. La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, le 1er février, après les avis touchant les travaux des commissions, où elle poursuivra son mandat. Merci, tout le monde.

(Fin de la séance à 18 h 04)


 
 

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