(Onze
heures vingt-six minutes)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, bonjour. Bonjour, tout le monde.
Attention, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'économie et du travail ouverte.
La
commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité
du travail.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
Oui, Mme la Présidente. Mme Chassé (Châteauguay) est remplacée par M. Caron
(Portneuf) et Mme Richard (Duplessis) est remplacée par M. Gaudreault
(Jonquière).
Étude détaillée (suite)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Hier, lors de l'étude détaillée, on a
fait allusion aux articles suspendus.
J'aimerais les nommer, lesquels sont suspendus jusqu'à présent. Alors, nous
avons l'article... je vais y aller par ordre, là, l'article 22,
l'article 85, l'article 117, l'article 126, ainsi que le 234, et
une section portant sur la surdité de l'article 238. Est-ce que ça vous
va?
M. Leduc :
...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : 234, c'est hier, oui.
M. Leduc :
Au complet, celui-là?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui, il est au complet. Est-ce que ça vous va?
Vous voulez que le répète, député d'Hochelaga-Maisonneuve?
M. Leduc :
C'est beau. Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : C'est beau? Alors, ce sont les articles qui sont
suspendus. Donc, c'était une excellente question hier.
Nous
poursuivons, alors, ce matin, avec le sujet 4, Fonctionnement, deuxième
partie, 4.2, l'optimisation des recours, 4.2.2, le Bureau d'évaluation
médicale, BEM. Et, lors de notre ajournement d'hier, le député
d'Hochelaga-Maisonneuve avait déposé un amendement introduisant un
nouvel article 61.1. Alors, oui, M. le ministre.
M. Boulet :
Oui. Avec votre permission, Mme la Présidente, je demanderais une suspension de
quelques minutes, s'il vous plaît.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Immédiatement? Mais je pense que...
Attendez, député... Vous vouliez, Nelligan?
M. Derraji :
Oui, oui. Le député de Nelligan. Juste une... si ma mémoire, elle est bonne,
parce que je viens d'entendre les articles suspendus, mais je pense aussi
l'article 29 et 30.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : On va les étudier. On va regarder. Vous, vous
dites : 29, 30?
M. Derraji :
S'il vous plaît. Juste vérifier.
M. Boulet :
Qui auraient été suspendus?
M. Derraji :
Oui, oui. Bien, juste vérifier si...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : O.K. On va regarder, puis je vous reviens avec
ça.
M. Derraji :
...si ce qu'on a est conforme avec ce que vous avez.
M. Boulet :
Absolument. Il va falloir...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
On va regarder. On avait... On va regarder puis on va revenir.
Une voix :
...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Ah! Oui, oui. Oui, oui, ceux du projet de loi. O.K.? Député de Nelligan, ça
vous va comme réponse?
M. Derraji : Je vais juste
revérifier.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait.
M. Derraji : Mais ce n'est pas
grave. On peut suspendre pour avancer, oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Mais on va suspendre puis on pourra vérifier également. Ça vous va?
M. Derraji : Oui.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, M. le ministre a demandé une suspension.
Nous allons suspendre quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 28)
(Reprise à 11 h 39)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, lorsque nous avons terminé hier, comme je le disais, nous étions rendus
à l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve qui introduisait un nouvel
article à 61.1. Alors, est-ce qu'il y avait d'autres interventions sur
l'amendement? Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Je peux continuer,
si vous voulez.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Oui. Moi, c'est...
M. Leduc : Il y a ma collègue...
Mme Jeannotte : ...intervention,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Ah! je m'excuse. Je ne vous avais pas vue, Chantale, mais pas du tout.
Excusez-moi, députée de...
• (11 h 40) •
Mme Jeannotte : C'est
Mme la députée de Labelle, en passant.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...de Labelle, oui. Excusez-moi. Je ne vous avais pas vue du tout. Oui.
Question de règlement sur la recevabilité d'un amendement
Mme Jeannotte : Oui, Mme la
Présidente, j'aimerais soulever une question de réglementation, dans le fond,
en vertu de l'article... je ne suis pas habituée, Mme la Présidente, hein,
l'article 197 du règlement, sur la recevabilité de l'amendement portant le
numéro 61.1.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
D'accord. Donc, vous voulez avoir un avis sur cet amendement qui a été reçu...
Mme Jeannotte : La
recevabilité, oui, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...après celui d'avoir voté, si je comprends bien, l'article 61.
Mme Jeannotte : C'est ça.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord. Donc, vous êtes conscients que nous allons suspendre pour
recevoir... Et c'est sur quel argument? Oui, merci.
Mme Jeannotte : Bien, c'est sur
l'argument de... il y a quelque chose dans l'amendement qu'on ne pouvait pas
faire, là. Le ministre m'aidera peut-être, mais...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est-à-dire qu'on a voté l'article 61.
M.
Boulet : ...on a voté, hier, l'article 61, qui réfère
spécifiquement au professionnel de la santé qui agit comme membre du Bureau
d'évaluation médicale. Donc, le BEM, il est là, il existe en vertu d'un article
qui a été adopté hier. Et l'essence de l'amendement soumis par notre collègue d'Hochelaga-Maisonneuve
vise à abolir le BEM. Donc, ça aurait une incidence sur l'article 61 qui a
été adopté hier.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Tout à fait.
M. Boulet :
Donc, c'est expliqué simplement. Puis je le fais vraiment, Mme la Présidente...
puis je tiens à le souligner, là, par
respect aussi pour l'intégrité de l'institution puis pour le respect des règles
de procédure. Ce n'est nullement pour avoir un impact négatif quel qu'il
soit, puis je l'ai fait en discutant avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui. Est-ce qu'on peut permettre un peu les
échanges avant? Oui? Alors, peut-être, député d'Hochelaga-Maisonneuve, si vous
voulez intervenir?
M. Leduc :
Oui. Première question de forme. Je comprends que vous allez nous rendre une
décision écrite.
Une voix :
...
M. Leduc :
Parfait. Question sur le fond, donc, j'ai compris, un peu, les motifs, là, de
mes collègues d'en face. Moi, j'avais l'intention de commencer cette
section-là, le fameux regroupement que le ministre nous a proposé en début de
séance, là, la section 4, dans sa volonté de regrouper des thèmes.
J'imaginais donc qu'en arrivant dans la section 4, Fonctionnement, sur le
BEM, 4.2.2., bien, j'allais vouloir rapidement parler de l'abolition du BEM. Ma
compréhension — puis,
si c'est une erreur, j'en suis désolé, c'est certainement une erreur de... de
bonne foi, pardon — c'était
qu'il fallait commencer la section pour soulever l'abolition du BEM. Puis là le
premier amendement, c'était l'amendement 61, que j'ai voulu laisser
commencer puis débattre. Il s'est terminé. Puis, après ça, j'ai tout de suite
intervenu.
Est-ce qu'il aurait
fallu que j'arrive en début de section, mais avant qu'on nomme le premier
article? Là, j'avoue que j'aurai peut-être une leçon au regard de ce que vous
me proposerez tantôt. Mais, moi, à mon sens, laisser passer l'article 61 pour commencer cette section-là, la
section 4.2.2, ne fermait pas la porte à toute autre considération,
notamment celle d'abolir l'organisme ou, du moins, la fonction qui est en
question dans 4.2.2, à savoir le BEM, justement, parce que le... puis, ça, on
l'a vu dans d'autres aspects de ce projet de loi là ou d'autres projets de loi,
des fois, il y a des évolutions qui arrivent
dans les débats, il y a des discussions à micros fermés, on échange avec la
partie gouvernementale, puis parfois ça arrive qu'ils changent d'avis puis
qu'on les convainque sur le fond de l'idée de changer quand même de manière assez importante l'ordre des choses et ce
qui était la position initiale du gouvernement. Alors, ce n'est pas rare
que, quand ça arrive puis qu'on réussit à les convaincre sur le fond, peu
importe où est-ce qu'on est rendu dans l'ordre du projet de loi, il puisse
peut-être falloir revenir en arrière, modifier quelque chose.
Il est bien entendu
que, nous, de notre côté, Mme la Présidente, nous avions préparé quelques
amendements de concordance, si d'aventure on
allait convaincre M. le ministre d'adopter celui qu'on est en train de
discuter, le 61.1. On ne peut pas
résumer dans un seul amendement, un seul article l'entièreté des conséquences
de la portée d'un article, et d'autant plus, donc... c'est le cas dans
l'actualité, là, de notre discussion du BEM.
Alors, moi, j'en
avais déjà quelques-uns d'écrits, si d'aventure le ministre allait concourir à
mes arguments puis ma présentation. Aurait-il fallu le déposer avant de traiter
le 61? Je ne le sais pas. Moi, je pensais fonctionner dans les règles de l'art.
Voilà mon argument. Puis, vous le savez, le 61 n'a pas nécessairement rajouté
un paragraphe qui n'était pas déjà prévu dans le BEM, n'a pas institué le BEM.
L'article 61 qu'on a adopté plus tôt, il venait modifier des choses.
Donc, à mon sens, on ne va pas à l'encontre de la volonté de l'article 61
qui a été adopté par la commission. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il d'autres interventions?
Sinon, nous allons... Oui, député de Jonquière.
M. Gaudreault :
Oui. Merci, Mme la Présidente. L'appel au règlement fait par la députée de
Labelle et soutenu par le ministre est
extrêmement important. Et je comprends les arguments du député
d'Hochelaga-Maisonneuve, et je suis d'accord avec lui sur un élément sur
le fond, c'est l'abolition du BEM, c'est l'abolition du BEM.
Cependant, et c'est
là-dessus que, dans la décision écrite, je pense qu'il va falloir entendre
votre jugement, Mme la Présidente, je ne suis pas sûr que le député d'Hochelaga-Maisonneuve
se prend de la bonne manière.
Alors, c'est pour ça
que moi, j'écoute bien l'appel au règlement des députés du gouvernement, parce
que le député d'Hochelaga-Maisonneuve a voté pour l'article 61, et vous
remarquerez, Mme la Présidente, dans les échanges sur le vote, moi, je me
suis abstenu, parce qu'on ne peut pas voter pour un article puis, après ça,
proposer de l'abolir, première chose.
Et, deuxième chose,
puis en tout respect pour le député d'Hochelaga-Maisonneuve...
Et,
encore une fois, c'est là que j'ai comme un malaise, parce que je
suis d'accord sur le fond, mais il faut qu'on procède de
la bonne manière.
Le deuxième élément, moi,
je vous demande de regarder, dans votre décision, parce que le ministre a fait allusion à la protection de l'institution, c'est tout à fait important, de regarder, dans votre décision, si, par un amendement, on peut abolir toute une
section qui n'est pas touchée de cette manière par le projet de loi.
C'est hyperingrat, le rôle qu'on a comme députés
de l'opposition, mais les règles du jeu font en sorte qu'on doit faire des amendements à partir des
articles de loi existants. On ne peut pas faire indirectement par un amendement ce que le ministre n'a pas fait
dans son projet de loi. La règle du jeu fait en sorte que je suis obligé de
faire du judo sur l'article qui est proposé dans le projet de loi et ne pas,
par un amendement, venir abroger toute une section.
Alors, c'est les questions que moi, je vous
soulève, sur lesquelles j'aimerais vous entendre là-dessus. Je suis convaincu
que, depuis 1792, il doit y avoir une liasse de jurisprudences, dans le droit
parlementaire, sur ce sujet-là. Et je vous
répète, puis je ne sais pas combien de fois que je pourrais le répéter, que je
suis favorable sur le fond, d'abolir le BEM, mais il faut qu'on le fasse
en respectant les règles parlementaires.
Alors, moi, ce que je... je termine en vous
disant : On va attendre votre décision, on a hâte de l'avoir. En attendant, pour ne pas ralentir le processus du projet de loi, puis là, peut-être, là, on peut suspendre pour bien s'entendre,
là, mais on peut continuer avec les articles
d'une prochaine section, là, pour ne pas perdre de temps. Quand vous arriverez
avec votre décision sur le BEM, bien là on procédera.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, on a une suggestion sur la table. Est-ce qu'on a un consentement pour ça, de continuer? On peut
essayer de trouver une présidence. De ce que je comprends, il y a une
suggestion.
Une voix : ...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Mais ça ne se fait pas? Je n'aurais pas le consentement, c'est ça? J'attends ce
qu'on me dit. On peut... Mais vous avez compris la suggestion du député?
M. Boulet : Je trouve que c'est
une suggestion totalement constructive. On est dans une commission parlementaire. On fait une étude détaillée d'un
projet de loi qui est fondamental pour les Québécois et les Québécoises.
Et c'est pour ces personnes-là, c'est pour les Québécois qu'on fait une
commission parlementaire. Et ils seraient fiers de constater que nous utilisons de manière efficace le temps de
commission parlementaire qui nous est alloué, Mme la Présidente. C'est
mon commentaire.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
D'accord. Oui. Est-ce qu'on aurait... D'abord... Bien, on va y aller avec la
suggestion qui est là puis, après ça, on aura d'autres consentements
nécessaires, là. Oui?
M. Derraji : Bien, je pense que
ce qui a été soulevé par la députée de Labelle par rapport à la demande...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
La recevabilité de l'amendement, oui, au 61.1.
M. Derraji : ...de la
recevabilité de l'amendement, je pense que, si... Et je comprends le ministre,
que nous sommes là pour faire un travail qui est très important par rapport à
la modernisation. Ça, je ne pense pas que personne
autour de la table, surtout qu'ils sont... je pense à mon collègue d'Hochelaga,
que depuis novembre qu'on est dans ce projet de loi avec beaucoup, beaucoup,
beaucoup d'heures extracommission pendant la commission. C'est un engagement,
qu'on le fait d'une manière honorable.
Mais je pense
que nous sommes devant un fait. Je vois mal comment on va continuer l'échange
sachant qu'il y a un élément
important, un doute qui s'est installé par rapport à quelque chose. Tant mieux,
le collègue s'est abstenu. Je ne pense pas que tout le monde s'est
abstenu lors du vote, en tout cas, je parle de moi-même, mais je pense que la
décision est importante pour la suite de nos travaux.
Ça n'empêche pas qu'on a toujours des
discussions mode «off», à l'extérieur du micro avec le ministre, qu'on va continuer cette bonne collaboration, mais
je pense... la collègue députée de Labelle vient de mettre sur la table
est extrêmement important pour la suite des choses. Il faut le clarifier, on
ferme la porte, on continue d'avoir nos travaux en toute collégialité. Ça,
c'est ce que je pense, Mme la Présidente.
• (11 h 50) •
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci. Donc, je comprends que, déjà, on n'a pas le consentement. Vous voulez quand même intervenir? Non? Parfait.
Alors, écoutez, on sera obligés de suspendre... Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M. le ministre, non?
M. Boulet : Non, merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
Rapide intervention pour faire le suivi sur les commentaires de mon collègue de
Jonquière sur le fond, là, pas sur la forme, à savoir si on peut soulever un
élément qui n'est pas nécessairement abordé directement par le ministre.
Peut-être que l'abolition du BEM, bien sûr, n'est pas dans le plan du ministre,
mais le BEM, lui, il est là, puis il est là au
complet, il y a une section qui est intitulée le Bureau d'évaluation médicale.
Alors, le thème du BEM est
certainement mis au jeu.
Dans
un projet de loi précédent, je m'étais un peu essayé. J'étais un nouveau
député, je testais des choses. Je voulais qu'on règle d'autres sujets sur les
normes du travail, sur... Bref, je m'étais un peu amusé puis, bref, je ne m'étais pas amusé très longtemps parce qu'après
ça, ça avait été soulevé, puis la décision rendue avait clairement indiqué
qu'on ne pouvait ouvrir une autre loi qui
n'était pas déjà ouverte dans le projet de loi. Ça fait que
j'ai compris ma leçon.
Mais là,
certainement, le BEM est ouvert, le sujet est là. Est-ce que la position exacte
de l'abolition du BEM, c'est celle qui est défendue par le ministre? Non, mais
le thème du BEM est certainement là. Il y a plusieurs articles qui sont
traités. Alors, moi, je soutiens... puis en tout respect de ce que vous allez
décider tantôt, mais je soutiens qu'on peut certainement amener d'autres idées
complémentaires, notamment celle de l'abolition du BEM.
Puis, Mme la
Présidente, pas plus tard que la semaine dernière, dans le projet de loi n° 78, on a amené un thème complètement différent, on était
sur la transparence des entreprises, et complètement champ gauche. Et, entendons-nous, sur le fond, j'étais ravi, hein?
C'était la question du RQAP, pour régler une demande que je soutenais
personnellement depuis des mois, mais champ gauche complètement, aucun
rapport avec la transparence des entreprises. C'était quoi, la clé? C'était la collaboration
puis c'était la volonté des partis d'entendre et d'accorder cette permission-là
de déroger.
Maintenant, est-ce
qu'on fait ça aujourd'hui parce que la partie gouvernementale n'a pas envie
qu'on parle d'abolition du BEM? Là, je... ça leur appartient, sur les motifs
véritables derrière cette contestation, mais je soutiens, Mme la Présidente,
qu'on peut certainement traiter d'abolition du BEM dans ce projet de loi.
Merci.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. J'ai bien entendu vos arguments. Donc, s'il
n'y a pas d'autre intervention, nous allons suspendre et nous pourrons...
Comment communiquer, là, le retour, là? On ne pourra pas être... Bon, non, c'est sûr, on ne pourra pas être là
avant 13 heures. D'abord, on ne revenait qu'à 15 heures, hein? Vous
vous rappelez qu'on devait
suspendre... je pense, c'était à 1 heure. Donc, je ne pense pas qu'on va être de retour avant 13 heures, effectivement.
Donc, on peut déjà se dire, d'ores et déjà, qu'on se revoit vers
15 heures. Ça vous va?
Une voix :
...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : On va suspendre jusqu'à
15 heures, effectivement. Ça vous va? C'est bien. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 53)
(Reprise à 15 heures)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, bonjour. Attention, s'il vous plaît! La Commission
de l'économie et du travail reprend ses travaux. Nous poursuivons l'étude
détaillée du projet de loi n° 59, Loi
modernisant le régime de santé et de sécurité du travail.
Décision de la présidence sur
la question de règlement
sur la recevabilité d'un amendement
Lors de notre
suspension de nos travaux cet avant-midi, nous avions suspendu pour que je
puisse rendre ma décision sur la question de règlement soulevée par la députée
de Labelle concernant l'amendement proposé par le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
alors, je commence.
L'amendement proposé
introduit un nouvel article, 61.1, qui vise à supprimer les articles 204 à
233 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Mme
la députée de Labelle soulève la recevabilité de l'amendement qui vise à
abroger des articles de la loi existante, dont un modifié par l'article 61
du projet de loi précédemment adopté. Le ministre
soutient que l'amendement aurait une incidence sur l'article 61
précédemment adopté, qu'il, que lui, l'article, devrait donc être
considéré irrecevable.
M. le député de Jonquière
se questionne quant à lui à savoir si un amendement visant à introduire un
nouvel article peut abroger une portion de la loi existante qui n'est que
partiellement touchée par un projet de loi.
M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve soutient que, malgré que son amendement
propose d'abroger un article de la loi existante, précédemment modifié par
l'article 61 du projet de loi, des amendements de concordance pourraient ensuite être
proposés pour s'assurer de la cohérence du projet de loi.
Afin
de statuer sur la recevabilité d'un amendement, la présidence doit tenir compte de l'ensemble
des critères prévus par le règlement
de l'Assemblée nationale et de la jurisprudence. Ces règles de base sont notamment
codifiées aux articles 197 et 244 du règlement, qui prévoit que les
amendements doivent se rapporter à l'objet du projet de loi et être conformes à son esprit et à la fin qu'ils visent. De plus, un amendement
ne doit pas introduire un nouveau principe. Notre jurisprudence stipule
qu'un amendement doit se rattacher au principe et ne peut ni le contredire ou
l'écarter ni l'élargir d'une manière telle qu'il va au-delà de l'objet du
projet de loi. Elle précise également qu'un amendement qui vise à modifier un
article d'une loi existante dont l'article en question n'est pas modifié par le
projet de loi est recevable s'il vise le même objet que d'autres articles du
projet de loi.
À cette fin ou à cet
égard, je vous renvoie à la décision 197/8 du Recueil de décisions en
commissions parlementaires. En l'espèce, l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve
touche plusieurs articles, dont les articles 204
à... 223, pardon, de la Loi sur les accidents du travail et la maladie
professionnelle, dont plusieurs ne sont pas visés par le projet de loi.
La question que la
présidence doit se poser dans cette situation est la suivante : Est-ce que
l'objet visé par l'amendement est conforme à l'esprit et aux fins visés du projet
de loi? Celui-ci propose, aux articles étudiés au sujet 4.2.2, de revoir
les pouvoirs du Bureau d'évaluation médicale en ce qui concerne la
consolidation d'une lésion professionnelle. L'amendement, quant à lui, vise l'abolition de ce bureau. Il semble, donc, que
l'abrogation des articles de la loi
visés par l'amendement a un effet contraire à l'esprit visé par le projet de loi, soit d'en revoir certaines modalités.
Ainsi, puisque le principe de l'amendement va à
l'encontre de celui du projet de loi, cet amendement est irrecevable. Étant donné que cet amendement
est irrecevable en vertu de cette règle de base, soit que les amendements
ne peuvent aller à l'encontre du principe du projet de loi, il n'est pas, donc,
nécessaire pour la présidence d'évaluer si cet amendement contrevient à la
règle voulant qu'un amendement ne peut contredire un article du projet de loi
déjà adopté, même si certains membres de la commission ont soulevé cet aspect.
Cela étant
dit, dans le cas où cet amendement avait été recevable, il aurait été effectivement souhaitable qu'il soit proposé avant les articles du projet de
loi qui touchent le Bureau d'évaluation médicale. Voilà la décision. Ça va?
Alors, oui, je peux accepter, là, quelques
commentaires, mais on ne pourra pas prendre beaucoup de temps. Je vous laisse
la parole, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Bien, merci, Mme la
Présidente, pour votre décision bien expliquée. C'est apprécié. J'essaie de
retenir des leçons de tout ça. Vous dites... surtout pour la fin, là, vous
dites : S'il avait été recevable, il aurait... mieux de le déposer avant. Ça, je le comprends, puis
c'était mon intention initiale, mais... en tout cas, je pensais que c'était
mieux d'ouvrir une section que de
s'introduire comme ça, avant même qu'on ait abordé des sujets. Mais là vous
dites que, de toute façon, même si j'avais fait ça, il n'était pas
recevable en raison, puis c'était ce bout-là que j'ai manqué, parce qu'il va à
l'encontre de l'objet de la loi?
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Parce qu'il va effectivement à
l'encontre. Il y a plusieurs petits points, là, hein? Parce que les
amendements doivent se rapporter à l'objet du projet de loi et être conformes à
son esprit et à la fin qu'il vise. Et, de plus, un amendement ne doit pas
introduire un nouveau principe, et vous, ce que vous faites, c'est... Il semble, donc, que l'abrogation des articles de
la loi visée par l'amendement a un effet contraire à l'esprit visé par le projet de loi, soit d'en revoir
certaines modalités, alors que, vous, vous voulez complètement...
M. Leduc : Je comprends. Puis
je vous pose des questions parce qu'évidemment on avait d'autres types d'amendement qu'on avait déjà prévus avant même ce
débat-là, et là j'essaie de voir comment ça peut s'insérer dans cette
décision que vous nous rendez. Ça fait que je ne sais pas s'il y a d'autres
commentaires, mais, évidemment, vous comprendrez qu'on aura besoin d'une
suspension, là, pour évaluer tout ça.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : D'accord. On pourra aussi voir...
Oui, est-ce qu'il y a d'autres commentaires ou d'autres... Non? C'était
assez clair pour les autres? Oui? Parfait.
Alors,
écoutez, donc, nous allons poursuivre, ou vous voulez votre suspension tout de
suite, tout de suite, ou on peut...
M. Leduc : ...d'autres
amendements sur la question du BEM. Puis là, à la lumière de votre décision...
Bien, si vous m'aviez dit : Non, non,
c'est bon, on traite votre amendement, on aurait continué, mais là... Là, il
est suspendu. Vous le...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Il est irrecevable.
M. Leduc : Il est irrecevable.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est ça. C'est ça.
M. Leduc : Ça fait que les
autres que j'avais préparés, je dois les réviser en fonction de votre décision,
là.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
D'accord. Oui, député de Nelligan.
M. Derraji : La décision sera...
elle sera déposée dans... sur le Greffier ou non?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Non.
M. Derraji : C'est juste une
décision verbale? O.K.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : C'est verbal. C'est ce qu'on m'a...
j'ai demandé. On demande tout le temps une décision écrite, mais elle
est écrite pour moi, finalement...
M. Derraji : Ah! c'est bon.
O.K.
La Présidente (Mme IsaBelle) : ...pour
que je puisse la lire. Enfin, c'est ça.
M. Derraji :
C'est bon. Merci, Mme la Présidente.
M. Leduc : ...versée dans une
jurisprudence? Comment ça fonctionne?
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, dans une jurisprudence, mais
elle ne sera pas publique, hein? C'est ce que j'ai compris.
M. Leduc : D'accord.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est bien ça? Elle ne sera pas déposée, si vous voulez, au Greffier, là.
M. Leduc : Je comprends.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : C'est enregistré. De toute façon,
vous avez l'enregistrement, vous avez ce que je viens de lire. Mais
l'écrit en soi n'est pas déposé, là, ce que je viens de lire n'est pas déposé
officiellement.
M. Derraji :
Donc, si on veut se référer à votre jugement ou aux jugements de la présidence,
ça veut dire on doit aller chercher la transcription pour pouvoir...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Au Journal des débats.
M. Derraji : ...au Journal
des débats...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est ça.
M. Derraji : ...pour pouvoir
garder l'esprit derrière l'analyse et le refus de l'amendement du collègue pour
éventuellement les autres articles. C'est ce que je peux comprendre?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Tout à fait, tout à fait. Et c'est pour ça qu'on a pris aussi le temps d'aller chercher une réponse, parce qu'il nous l'a
demandé, hein, où on doit introduire dans ce cas-là. Donc, on a pris le temps
pour ça. Oui.
M. Leduc :
Oui, et je l'apprécie, d'ailleurs. Merci. J'essaie bien de comprendre, encore
une fois, là, l'essence de votre décision. Donc, si j'avais voulu
convaincre le ministre d'abolir le BEM, je ne peux pas le faire en venant ici à
micro ouvert, parce que ce n'est pas l'objet de la loi. Il aurait fallu que j'y
aille à micro fermé, que je le convainque et qu'il nous annonce lui-même qu'il
pouvait modifier sa loi en conséquence. C'est ça que je retiens, dans le fond,
là.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Là, je ne sais pas si c'est comme ça.
Parce que je sais que ça a été une question aussi un peu soulevée par le
député de Jonquière, là...
M. Leduc : C'est un peu
étrange, non?
La Présidente (Mme IsaBelle) : ...mais
je ne sais pas comment, là, je peux vous répondre à ça, là. Là, on va un peu
trop loin, effectivement. Comment vous auriez pu vous y prendre? Peut-être que,
ça, ça pourrait être discuté éventuellement, là, éventuellement, parce que ce
n'est pas l'objectif, là, du projet de loi actuel.
M. Leduc : Bien, c'est parce
qu'on a eu, depuis le début de cette commission, plein de débats sur toutes sortes d'aspects qui n'étaient pas nécessairement
directement liés, à la virgule près, à l'intention ou... parce ça reste de
l'interprétation, ce qui est le mandat de cette législation-là. Puis on
s'entend que cette loi-là, elle est particulièrement épaisse et, j'oserais
dire, généreuse en termes d'options, justement, là, en termes de terrain de
jeu.
Alors,
j'essaie de comprendre comment aurais-je dû m'y prendre, au-delà de la
technicalité d'un article adopté ou pas, ou en premier ou en deuxième, mais
pour... si mon ambition est de convaincre le ministre de changer quelque
chose. Et ça a été le cas sur d'autres
sujets et ça a été le cas, la semaine dernière, sur le 78. C'est comme drôle,
parce que vous... pas vous nécessairement, mais, en tout cas, la
jurisprudence, vous nous invitez à ne pas faire ça à micro ouvert, vous nous invitez à le faire en dehors de la séance.
Et, si d'aventure je réussis à le convaincre, bien là on pourrait, dans le
fond... le ministre pourrait abolir ses propres amendements. Puis il l'a
fait lui-même à plusieurs reprises, là. Il dépose des amendements pour retirer
ses lois, ce que nous, on n'a pas le droit de faire, puis ça, je le comprends.
Ça fait qu'en tout cas, c'est un peu... Je la
reçois, votre décision, puis c'est correct.
M. Boulet : Je pense qu'il ne
faut pas...
M. Leduc :
Je ne comprends juste pas où est-ce qu'on s'insère, nous, pour amener des
débats qui sont certainement sur le terme de la santé-sécurité, mais qui
n'ont pas été nécessairement mis au jeu de cet angle-là par le ministre.
• (15 h 10) •
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui, M. le ministre.
M. Boulet :
Mais j'aimerais ça qu'on simplifie la discussion, là. Moi, je pense qu'il faut
lire... Je pense que votre décision est claire. Je pense qu'il faut la
lire pour bien comprendre son essence.
Ceci dit,
vous me connaissez, ma porte est toujours ouverte. Moi, je n'ai jamais fait de
requête en irrecevabilité. Je ne joue pas la carte de la procédure. Ici,
ça apparaissait être un cas plus évident, disons, parce qu'on venait d'adopter
l'article 61, et après il y avait comme un amendement qui annulait, qui
abrogeait...
M. Leduc :
Mais ce n'est pas ça qu'elle dit. Elle vient de dire que ce n'était pas à cause
de ça, là, qu'elle le rejetait.
M. Boulet : Non, mais c'était
un des...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'était, pour vous, peut-être, un élément, mais ce n'est pas cette raison-là.
M. Boulet : Mais ma porte, moi,
est toujours ouverte, là, à ce qu'on puisse discuter, là. Tu sais, ici, pour
les motifs exprimés par la présidente, c'est irrecevable, mais on n'a pas... Tu
sais, là où vous allez présenter d'autres amendements, comme vous m'aviez
proposé de le faire, et, tu sais, on va en discuter, là, de ces amendements.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Donc, est-ce que ça vous va?
Donc, c'est beau? Oui, député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, bien,
c'est une décision importante que vous avez rendue, Mme la Présidente, puis je
veux vous féliciter. Puis le ministre a raison de dire qu'on ne veut pas faire
de procédure pour faire de la procédure, mais
il reste que ce type de décision là puis d'intervention sur, par exemple, la
recevabilité ou pas, ce sont des interventions qui sont importantes.
Parce qu'on n'est pas juste nous dans une bulle. Tu sais, il y a eu des
interventions, puis de la jurisprudence, puis on travaille pour le futur aussi,
puis c'est important qu'on s'entende comme il faut.
Mais moi, ce
que je comprends, c'est parce que ça devient un peu absurde. Le député
d'Hochelaga-Maisonneuve, puis moi aussi, puis, je pense, le député de Nelligan
aussi, on veut discuter de la pertinence ou pas du BEM, bon. Puis ce que
j'entends de la part du ministre, il dit : On... Je suis ouvert à ce qu'on
discute de la pertinence du BEM. Il dit : J'ai toujours manifesté de l'ouverture. En tout cas,
c'est ce que je viens d'entendre de sa part. Puis l'article qui dit qu'il y a
un BEM qui est créé, bien, il est adopté, c'est l'article... l'article
précédent, là, l'article 61 qui venait modifier l'article 216. Parce
que le premier alinéa de l'article 216 dit : «Est institué le Bureau
d'évaluation médicale.» Ça fait que c'est... Je veux dire...
Puis là ça a été vite à l'article... à
l'article 61, parce qu'il y avait l'amendement du... en fait, l'article
proposé par le ministre, là, qui venait modifier l'article 216. Ça fait
que c'est peut-être là qu'il aurait fallu faire l'amendement tout de suite,
dire qu'on ajoute un alinéa au début pour dire qu'on biffe le premier alinéa,
qui dit : «Est institué le Bureau d'évaluation médicale.»
Ça fait que... Mais... Ça fait qu'on est dans
une drôle de situation, où on ne peut pas discuter de la pertinence du BEM ou
pas pour des raisons de procédure. Alors, moi, je pense que la vraie discussion
de fond qu'on doit avoir, c'est là-dessus, c'est sur le BEM. Alors, pour ce
faire, selon les procédures, est-ce qu'il faut revenir un pas en arrière puis
rouvrir le 61? Peut-être. Ça peut être une alternative.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parce qu'effectivement c'est à 61 qu'il aurait fallu en discuter. C'est
effectivement ça. Parce que c'est clairement indiqué, là : «Est
institué...»
M. Leduc : Vous venez de dire
qu'on ne peut pas en discuter.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Mais non. C'est là qu'il aurait fallu en discuter, mais on... Là, vous avez...
Là, ce n'est pas recevable, là, parce que... Vous auriez pu en discuter,
peut-être, à 61 sans déposer un amendement. Mais, écoutez, moi, ma
décision, elle est finale.
M. Boulet : En même temps...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Oui, ministre.
M. Boulet : Bien oui, puis
c'est ça, la décision est rendue, l'article est adopté. Comme le collègue le
souligne, moi, j'ai accepté d'emblée, même, de discuter de la pertinence du
BEM. J'ai expliqué comment le BEM fonctionnait,
comment les membres du BEM étaient nommés, comment le CCTM, où les syndicats et
patrons siègent, s'occupe de la nomination puis des recommandations des
membres du Bureau d'évaluation médicale, que c'est des aspects médicaux
spécialisés qui requièrent l'intervention d'un arbitre médical pour accélérer
le processus.
Il n'est pas question d'abroger le BEM, c'est
une institution qui est en place depuis des années. Est-ce qu'on peut discuter
de comment on peut l'améliorer puis de sa pertinence? Moi, j'ai déjà exprimé
mon opinion là-dessus. C'est pour ça que je vous dis : Les discussions, on
en a depuis le début du projet de loi n° 59. Puis je n'ai jamais joué la carte de la procédure. Au contraire, j'ai joué la carte du mérite puis
de la nature des discussions. Vous avez soumis des amendements que nous
avons acceptés, vous avez soumis des amendements que nous avons modifiés après
des discussions, puis je pense qu'il faut continuer dans
cette même orientation-là. Moi, ça va être l'état d'esprit qui va constamment
m'animer. Je ne fais pas ça pour moi, on fait ça pour les travailleurs, puis
les travailleuses, puis les employeurs, pour
améliorer leur qualité de vie au travail, diminuer la fréquence puis la gravité
des accidents de travail. Il faut continuer dans cette direction-là.
C'est un travail de conviction. On échange.
Je pense qu'il faut, en même temps, s'assurer
que nos travaux soient efficaces. Tu sais, travailler dans l'harmonie, ça ne veut pas dire arrêter, puis
arrêter, puis... ça veut dire avancer puis progresser. Puis j'aime... la
plupart du temps, c'est ce que nous
faisons. On le fait dans la discussion, puis ça permet au projet de loi d'évoluer et de répondre à la santé et sécurité des travailleurs
puis des travailleuses. Merci.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Donc, on comprend qu'on peut poursuivre... Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Là, il
y a plein de choses qui se sont
dites, puis je trouve qu'il y a des propos qui se contredisent, là, à
savoir : C'est quoi, les motifs que vous avez mis sur la table pour
refuser l'amendement? Puis là, après ça, il y a des...
Moi, ce que je retiens, là, puis dites-moi si je
me trompe, là, c'est qu'il y a quand même une très grande liberté ou une très
grande flexibilité sur la parole, sur les mots qu'on utilise quand on est sur
un article x, qu'on peut aller quand même louvoyer sur toutes sortes de sujets.
Là-dessus, il y a quand même beaucoup d'élastique. Là où il n'y en a pas du
tout, où il y a même une certaine rigidité, puis votre décision en témoigne un
peu, c'est sur l'écrit, c'est sur l'amendement comme tel. Parce que là, tantôt,
on disait : On peut-tu parler de l'abolition du BEM? Il dit oui au début,
puis là, après ça, il dit : Non, on en a déjà discuté, ce n'est pas mon
intention. Là, je suis confus.
Ça fait que, là, est-ce que je fais bien de
retenir que, vu qu'il n'y a pas l'abolition du BEM dans l'intention du législateur, dans l'intention du gouvernement,
vous trouvez ça irrecevable que j'en discute à travers un amendement, mais qu'à l'intérieur d'une discussion x ou y il
n'y a vraiment pas d'interdiction à échanger dans le cadre d'une discussion
sur le BEM, sur la pertinence de l'existence du BEM? Je vous pose une bonne
question.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Bien, je veux voir, elle vient de m'écrire quelque chose. Bon, un amendement
irrecevable, c'est ce qu'elle m'écrit, là, mais c'est un peu spécial, pourrait
être... L'article 61 a été adopté, ça, c'est trop tard, O.K., c'est ce
qu'elle me dit, mais un amendement irrecevable pourrait être discuté si sa
recevabilité n'est pas soulevée.
Enfin, on
peut... Moi, si... je vous suggère, là, on va suspendre puis on va clarifier le
tout, là. En étant suspendu, ça va être plus... Puis, après ça, je
reviendrai avec ce qui a été dit.
Alors, nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 18)
(Reprise à 16 h 06)
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous avons... Nous reprenons les travaux. Nous avons reçu un
nouvel amendement de la part du député d'Hochelaga-Maisonneuve. Alors,
je vous invite à le lire et à l'expliquer.
M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Alors, ça va comme
suit : Introduire, après l'article 60 du projet de loi, le suivant : 60.1... pardon. Non, un instant.
Des voix : ...
M. Leduc : Juste une petite
seconde, Mme la Présidente. Une petite erreur de numérotation. Voilà.
Insérer, après l'article 61 du projet de
loi, le suivant :
61.1. Les articles 209 à 212.1 de cette loi
sont abrogés.
Alors,
explications. Comme on l'évoquait précédemment, là, avant la suspension, mon
intention était d'abolir le Bureau d'évaluation médicale, le BEM. Ça n'a
pas été possible de recevoir mon amendement à cet effet.
On avait un plan b, mais, au regard de votre
décision, on a considéré, là, que, pour ne pas étirer inutilement la sauce, on
sautait directement au plan c, qui est celui qui est devant vous en ce moment,
qui n'abolit pas le BEM, qui maintient le
BEM, malheureusement, à mon avis, là, en quelque sorte, mais on essaie de
jouer, donc, dans le carré de sable que vous nous déterminez en fonction
de la jurisprudence.
L'idée, ici, c'est de vraiment avoir un outil
efficace de déjudiciarisation. Puis on a eu des longs débats hier puis la
semaine dernière sur le TAT, puis ses délais, puis, bon, ça, c'est une chose.
C'est sûr que c'est long au TAT puis à la judiciarisation, mais il ne faut pas
oublier qu'à la base, si c'est long au TAT, oui, c'est qu'il y a des... il y a
des enjeux et des défis, mais c'est aussi parce qu'il y a beaucoup de
contestations, et il y a beaucoup de contestations des employeurs, notamment.
Beaucoup de ces contestations-là sont à l'effet de critiquer et de remettre en
question la décision, et la recommandation, et le diagnostic du médecin qui est
à charge, le fameux médecin traitant.
La façon dont ça fonctionne avec le BEM, c'est
que le médecin traitant vous donne un diagnostic. La commission, la CNESST,
peut ne pas être d'accord avec le diagnostic, et elle-même, la commission,
demander une contre-expertise médicale à un
médecin de son choix, mais ça peut aussi être le patron qui vient et dit :
Non, non, même si la commission est d'accord, moi,
j'exerce mon droit... en tout cas, son option, en tout cas, de faire une...
d'exiger une contre-expertise médicale, et nécessairement avec, en tout cas, la
plupart du temps, un médecin de son choix, un médecin d'entreprise.
Et c'est là que s'ouvre le chaos des
contestations médicolégales, parce que, là, quand on décide d'avoir deux
expertises, il faut aller les produire, ça coûte de l'argent, ce n'est pas
gratuit. Et c'est là que, quand il y a deux expertises... Puis on imagine
qu'une contre-expertise patronale a des bonnes chances de ne pas être d'accord
avec l'expertise du médecin qui a charge. Quand il y a désaccord, donc, sur le
diagnostic, c'est là que le BEM arrive puis qu'il essaie de trancher entre les
deux, entre les deux présentations, les deux diagnostics. Mais cette
décision-là du BEM, elle est contestable aussi. On peut aller jusqu'au
tribunal, on peut aller au TAT pour contester. Et toutes ces étapes-là sont
longues, sont dispendieuses, en particulier pour le travailleur, sont
anxiogènes, ça, j'en ai parlé abondamment, de l'anxiété des ces procédures-là
pour les gens qui vivent déjà une lésion qui est en soi anxiogène.
Alors, si d'aventure on était intéressés, on
était prêts à explorer cette idée-là, qu'à l'étape précédente, donc, avant même
d'aller au BEM, bien, qu'on restreigne la possibilité de contestation du
médecin traitant, qu'on lui fasse davantage
confiance en permettant qu'à la commission de contester le diagnostic du
médecin traitant et non à l'employeur...
• (16 h 10) •
Parce que c'est beaucoup là que se joue la
partie. C'est l'employeur qui, parce que le système est ainsi fait, va avoir
une imputation à sa cotisation s'il y a reconnaissance d'une maladie
professionnelle ou d'une lésion, bien, se bat, là, comme un diable dans l'eau
bénite, utilise tous les moyens... parce que ça vaut la peine d'investir en
contestation médicale pour espérer s'épargner une facture plus salée en matière
de cotisation de la CNESST. C'est très mal fait comme système. Malheureusement,
on ne réévalue pas fondamentalement cette logique-là avec ce projet de loi, soit. Cela étant dit, ce n'est pas écrit
dans la Constitution, ça, que l'employeur a le droit de contester l'expertise
médicale d'un médecin qui a charge. C'est même plutôt, à la limite, détonnant
comme principe.
Vous, là, Mme la Présidente, si vous avez une
maladie, vous allez voir votre médecin, qui vous prescrit une pilule qui est
reconnue par la RAMQ, bien, la RAMQ ne va pas vous envoyer voir un autre
médecin de la RAMQ parce qu'il considère que
vous n'avez pas accès à ces pilules-là. Ça va être votre médecin traitant,
point barre. Il n'y aura pas de contre-expertise médicale ou de toute sorte
de labyrinthe médicolégal.
C'est assez particulier, à la santé et sécurité,
ce genre de système là où on s'installe dans une espèce de débat, puis les
preuves qui se multiplient et qui se... à grand coup de 1 000 $,
2 000 $ l'expertise, des fois plus. Puis là on n'a même pas payé le
médecin qui vient s'asseoir aussi devant le TAT pour vous parler de son
expertise. C'est des coûts qui sont complètement grotesques, en particulier
pour un salarié, qu'il soit syndiqué ou pas, d'ailleurs, et qui peuvent parfois,
même, mettre du monde dans la faillite, là, hein? Ce n'est pas rare, là,
d'entendre des cas de faillite de gens qui se pitchent là-dedans puis qui se
sont ramassés dans ce trouble-là. Et parfois, bien, ils vont prendre le choix
de se retirer. Ils vont prendre le choix de retirer... de complètement abaisser
les bras. Mais ceux qui décident de se battre, bien, il faut qu'ils
investissent beaucoup d'argent. Il y en a qui se mettent dans des situations de
faillite.
Alors moi, c'est ce scénario-là que je veux
éviter. C'est ce scénario-là d'un employeur qui, parce qu'il veut
principalement... le motif principal, c'est de ne pas avoir l'imputation sur sa
cotisation mais mène cette bataille, cette guerre
de tranchées juridico-médicale. Moi, je pense que ça serait probablement la
façon la plus efficace de contribuer à la déjudiciarisation de la santé
et sécurité au travail au Québec, dans notre système actuel, considérant les
efforts qui sont faits et qui seront faits
par le TAT et sa présidente, en laquelle nous avons tous et toutes confiance.
Mais, au-delà de ça, là, si, à la source, il y a moins de... si le
fleuve n'est pas aussi intense en matière de demandes de contestation parce qu'on en a réduit un peu la portée, parce
qu'on a restreint la portée, la possibilité à la CNESST de faire ça, bien,
on s'évite quand même beaucoup, beaucoup,
beaucoup de problèmes dans le reste de cette machine qui se met en branle
quand le patron décide que c'est plus
rentable de contester que d'avoir de l'imputation des coûts sur sa cotisation.
Voilà.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait. Merci. M. le ministre.
M. Boulet : Merci. Tout d'abord, moi, je reconnais que ça
peut être anxiogène. J'ai préparé des témoins, j'ai assisté des personnes qui devaient aller devant un
tribunal administratif ou autre, ce n'est jamais simple. C'est toujours
stressant, c'est difficile, alors il faut démontrer de l'empathie à
l'égard des travailleurs et travailleuses, surtout qu'ils ont subi un accident
de travail ou ils ont une maladie professionnelle. Je comprends que ce n'est
vraiment pas facile.
En même temps, il y a un système puis qui n'est
pas parfait. Moi, j'aime mieux référer au concept d'arbitrage médical, qui a
été remplacé par le BEM, mais la mécanique est la même. On dit, quand il y a
des sujets médicaux puis que les médecins ne
sont pas d'accord, il y a un arbitre qui tranche. Évidemment, c'est toujours
le médecin traitant qui est prépondérant. D'ailleurs, l'article 224 de la
loi le dit, la commission est liée par l'opinion du médecin traitant sur
le diagnostic, les soins, les traitements, la date de consolidation, l'atteinte
puis les limitations.
L'amendement
que propose le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, il vient dire : Les employeurs, dorénavant,
vous n'avez plus accès au système d'arbitre médical, c'est seulement le médecin
du travailleur. Puis, si la CNESST, à qui on demanderait de se transformer en
défenseur des intérêts des employeurs, décide d'obtenir un rapport d'un médecin
qui est en désaccord avec le médecin traitant... alors qu'on sait qu'à peu près
10 % des cas sont l'objet d'un examen de la part d'un médecin désigné par
la CNESST...
Ici, on est dans un contexte où il y a un
employeur qui cotise puis un travailleur qui a un accident de travail. Oui, peut-être
qu'il y a des employeurs qui abusent, peut-être qu'il y a aussi des
travailleurs qui abusent. Mais là ce n'est plus les travailleurs puis les
employeurs, c'est les médecins. Puis le médecin, je pense que c'est un droit
qui est reconnu dans toutes les juridictions qu'un employeur puisse dire à un
travailleur : Peux-tu aller de faire examiner par mon
médecin? Puis, si le médecin est en désaccord sur les soins et les traitements,
des fois, c'est totalement utile, il dit : Moi, je vais demander à un
arbitre de trancher ce différend-là.
Donc, on ne
peut pas, parce qu'on est à la quête d'un équilibre, provoquer un déséquilibre
entre les employeurs puis les
travailleurs et dire : Dorénavant, ce n'est que l'opinion du médecin
traitant, puis les employeurs ne peuvent plus.
Puis j'entends mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve :
Mais la commission? Mais la commission, son rôle, ce n'est pas de dire :
Dans ce dossier-là, l'employeur, s'il avait pu, il aurait dû, puis je vais le
faire, parce qu'il ne peut plus en raison des amendements qui ont été défendus,
qui ont été proposés par le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. Donc, pour moi,
d'abolir le droit de contestation de l'employeur sur des aspects médicaux, ça
m'apparaît être un déséquilibre qui ne peut pas être accepté.
Je répète, j'ai souvent répété qu'on parle d'un
régime d'indemnisation sans égard à la faute, mais il faut maintenir un certain
équilibre puis il faut permettre à l'employeur d'exercer un droit fondamental
d'avoir accès, par son médecin désigné, au dossier médical du travailleur et de
pouvoir s'exprimer. Mais ce n'est pas lui qui s'exprime, c'est le Bureau d'évaluation
médicale.
Puis, quand
on parle de judiciarisation, moi, je suis assez d'accord.
D'ailleurs, on n'enlèvera jamais complètement les contentieux. D'ailleurs, on dit : Pour les aspects médicaux, la personne
pourra décider de passer outre à la Direction de la révision administrative
puis aller directement au Tribunal administratif du travail. Et cette
option-là, qui a déjà été adoptée, va
contribuer, dans une certaine mesure, à accroître les... à diminuer les délais
puis à diminuer la judiciarisation.
Donc, essentiellement, c'est les motifs qui font
que, même si je comprends bien l'amendement soumis par le collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve, même si je comprends même pour un petit employeur,
là... parce qu'il n'y a pas que les travailleurs qui vivent de l'anxiété. Le
petit employeur qui a quatre travailleurs puis qui a deux accidents de travail, bien, il veut bien... il est stressé, lui
aussi, parce qu'il faut qu'il fasse rouler ses opérations, puis il
ne sait pas quoi faire. Puis il aimerait ça pouvoir faire examiner un travailleur
pour qu'il se prononce, ce médecin-là, sur la date de consolidation puis les
limitations fonctionnelles, puis peut-être décider de faire une assignation
temporaire, puis s'il y a une possibilité de faire une demande de partage de coûts. Je sais
que c'est souvent critiqué par certaines personnes, mais, quand c'est
légitime puis qu'on peut le faire, bien, que les employeurs fassent... exercent
leurs droits.
• (16 h 20) •
Encore une fois, je serai toujours contre
l'exercice abusif et déraisonnable de droits de contestation. Puis j'ose croire
que c'est fait de manière correcte et consciencieuse. D'ailleurs, tous les
médecins qui interviennent au BEM, c'est des personnes qui sont soumises à des
codes de déontologie. Puis je rappellerai, pour le bénéfice de tout le monde,
que tous les arbitres médicaux, donc tous les membres du BEM, sont nommés par
le ministre du Travail sur la recommandation du Comité consultatif du travail
et de la main-d'oeuvre. Donc, c'est des personnes neutres, c'est des personnes
objectives. Puis j'expliquais, un peu plus tôt, au collègue de Jonquière,
notamment, tu sais, ces personnes-là, là, ils bénéficient de celui qui a
examiné le travailleur de façon contemporaine à l'événement, donc le médecin
traitant du travailleur, qui a fait le suivi, qui a fait les rapports médicaux
d'évolution, qui a accumulé des notes évolutives dans son dossier. Donc,
au-delà de la prépondérance qui s'affirme via 224 lors de la décision de la CNESST, qui, elle, est liée par l'opinion du
médecin traitant, l'arbitre médical, il constate dans la plupart des cas que la
valeur probante de l'opinion du médecin traitant est supérieure à la valeur
probante du médecin désigné par l'employeur.
Puis, enfin, peut-être la dernière statistique,
là, qui m'apparaissait intéressante, 41,9 % des décisions BEM sont
confirmées au Tribunal administratif, 40,4 %, il y a une modification,
mais seulement 17,7 % sont infirmées. Puis, encore une fois, les décisions
que le TAT infirme, ce n'est pas nécessairement en faveur des employeurs tout
le temps, ça peut aussi être en faveur des
travailleurs. Ça fait que c'est quand même une statistique qui est révélatrice
d'une réalité. Puis, moi, pour moi, ce système-là, il est comme un entonnoir
puisqu'il permet, pour des questions spécialisées...
Je le répète, les cinq items mentionnés à
l'article 212, c'est clair. Il n'y a pas personne ici, à moins qu'il y ait
des personnes qui aient une formation
médicale, qui va examiner quelqu'un puis qui va se prononcer sur un diagnostic,
la nature, la suffisance, la durée des soins et traitement, la date de
consolidation, l'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique puis
les limitations fonctionnelles permanentes ou temporaires du travailleur. On a
besoin du Bureau d'évaluation médicale. Pour
moi, il est pertinent et incontournable. Mais je suis tout à fait conscient
qu'il y a une volonté de faire une discussion de cette nature-là, et ça
me fait plaisir d'y participer. Merci.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres
interventions? Alors, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme
la Présidente. Moi, je suis sidéré
par la statistique que vous nous présentez, M. le ministre. Si j'ai bien noté, là, 49% des décisions du BEM sont
maintenues, là, on parle rendu au TAT, là, 49 % maintenues, 40,4 % modifiées, 17 % infirmées. Puis
que ce soit en faveur ou en défaveur du travailleur ou de l'employeur,
ce n'est vraiment pas terrible, comme statistique, parce que le BEM, là,
il est supposé d'être l'arbitre entre deux visions, là, la vision du médecin traitant puis la vision du
médecin de l'employeur ou de la CNESST. Il est supposé de trancher ça. Puis,
quand c'est contesté, seulement
une fois sur deux, on lui donne entièrement raison. Mon Dieu! Si un arbitre de hockey,
là, qu'on contesterait toutes ses décisions
puis si la moitié seulement se révélaient être des bonnes décisions, pas sûr
qu'il garderait sa job plus qu'une couple de matchs. Moi, je trouve ça
terrible, comme statistique. Puis, complètement renversées, là, 17 %,
presque une fois sur cinq. Une fois sur cinq, elles sont complètement
renversées.
M. Boulet : ...vous savez, vous avez pratiqué. Les dossiers
médicaux, là, sont constamment en évolution. Il y a des nouvelles expertises. Quand tu arrives au Tribunal administratif du travail, les parties se préparent, ont des compléments
d'expertise. Et que dans 17 % des cas il y a une décision où on infirme le
rapport de l'arbitre médical, moi...
Là, je vais revenir sur la
neutralité, l'objectivité, puis vous connaissez le processus de nomination des
juges au Tribunal administratif du travail,
encore une fois, il y a des recommandations, puis c'est un processus qui est
extrêmement strict et rigoureux. Et n'est pas juge au TAT qui veut, et
n'est pas arbitre médical qui veut. C'est des personnes qui ont des... je veux
dire, qui font leur travail de manière rigoureuse. Puis je ne peux pas... À
moins qu'il y ait des plaintes qui soient faites à l'égard de certains juges,
mais, je le répète, je n'ai jamais vu un dossier de lésion professionnelle — puis
quand je dis «lésion professionnelle», c'est le terme légal, c'est soit un
accident de travail ou une maladie professionnelle — qui n'était pas
évolutif. Puis je n'ai pas vu de dossier aller au Tribunal administratif du
travail sans qu'il y ait des compléments d'expertise ou des nouvelles
expertises. C'est normal, c'est comme ça. Puis c'est souvent à l'avantage des travailleurs
et c'est souvent à l'avantage des employeurs qu'ils aient l'opportunité de se préparer, d'avoir une défense complète, qui,
je pense... qui sont entendus par des personnes qui rendent des décisions.
Puis ces décisions-là, collègue, peuvent, à la
limite, faire l'objet de requêtes en révision ou même un contrôle judiciaire
devant les tribunaux supérieurs, devant la Cour supérieure. Et vous irez voir
les statistiques, puis je ne les connais pas par coeur, mais il y a peu de
décisions du TAT, en pourcentage, qui font l'objet de requêtes en révision
judiciaire. Merci.
M. Leduc : Oui, mais il ne faut
pas oublier de penser qu'il y a aussi les moyens financiers, puis la volonté,
puis les reins solides de monter ça jusqu'en haut, là. C'est souvent, peut-être,
le bout de l'équation qu'on évacue de la discussion. Ce n'est pas simplement
l'État de droit. Puis on voit... Il faut comprendre le reste du système. Puis
c'est le mot-clé, là, moi, que je veux vous mettre aussi comme argument, c'est
le système. Parce que vous me référez encore
le fait que c'est des nominations au TAT qui sont des nominations consensuelles
suggérées par le CCTM, mais c'est
comme une variation sur le même thème du débat de la semaine dernière, sur les délais au TAT. L'enjeu, ce n'est pas la personnalité de
Mme Nadeau. Le problème, c'est l'analyse du système qu'on a devant nous.
C'est la même chose avec le TAT. Je ne suis pas... Du BEM. Je ne suis pas en train
d'attaquer individuellement chacun des médecins qui siègent au bureau du
BEM. C'est sûrement des gens compétents, sûrement des personnes qui ont été
nommées là par un processus rigoureux. Je suis en train de faire une analyse
factuelle d'un système.
Il faut arrêter de circonscrire nos affaires aux
individus. Il faut regarder le système qui est devant nous. Puis, visiblement, ce système-là, à mon avis, il ne
fonctionne pas très bien. Il n'est pas particulièrement performant. Il stagne.
Il produit des drôles de statistiques en matière de décisions infirmées. Il
complexifie la chose. Il coûte extrêmement cher pour les employés. Il coûte
cher pour les employeurs aussi, mais, visiblement, c'est rentable pour eux d'y
aller pareil à cause du système d'imputation.
M. Boulet : Je vous dirais...
Bien, je suis assez d'accord sur le fond. Les délais sont trop longs, puis
c'est comme ça pour tout ce qui se judiciarise. Puis moi, je suis un partisan
des alternatives de résolution de litiges. C'est la raison pour laquelle
l'avenue de l'option entre la révision administrative et le Tribunal
administratif du travail va nous
permettre... avec le temps, parce que ce n'est pas une loi qui va être coulée
dans le béton, je le souhaite, pendant 40 ans.
Dans quatre ans, dans six ans, j'espère qu'après les rapports puis les études
de mise en application on fera des amendements pour bonifier ce projet
de loi là.
Mais je suis assez d'accord que ce n'est ni
simple... Ça pourrait être encore plus simple, mais ça pourrait être beaucoup plus complexe, parce que ce système-là,
il est quand même éprouvé. Puis je ne dis pas que c'est Mme Nadeau
uniquement, mais ça fait partie de son plan de diminuer les délais. Puis il y a
du travail à faire. Puis elle le sait puis elle
est active là-dedans. Je dis juste que ça ne donne pas toujours les résultats
anticipés. Puis je le dirais de la Cour d'appel, la Cour supérieure, puis tous les tribunaux judiciaires, puis tous les
tribunaux administratifs, les délais sont trop longs. Puis je suis un de
ceux qui est inconfortable.
En même temps, dans les dossiers CNESST, dans
les dossiers d'accidents maladie, je vous dirais, il y a quand même plus de
bénéfices que pour bien d'autres tribunaux administratifs parce que les
informations médicales nouvelles, elles sont
fréquentes dans à peu près tous les dossiers. Puis les rapports d'expertise,
malheureusement, il y a une pénurie d'otorhinos, il y a une pénurie de
spécialistes en ci puis en ça. Allez voir un cardiologue, ou allez voir un
pneumologue, ou allez voir un psychiatre, ce n'est pas simple, c'est long, mais
les délais, parfois, engendrent des effets un peu bénéfiques, puis ce n'est pas
souhaitable, mais ça permet quand même aux personnes de se présenter
adéquatement.
Puis, ceci
dit, enfin, puis le collègue de Jonquière le sait, il y a un moyen paquet de
remises. Et il y a beaucoup trop de remises. Puis les juges, puis vous
parlerez à Mme Nadeau, ils font tout pour les refuser le plus possible.
Mais il manque de l'information, je n'ai pas eu mon expertise, il y a encore
une évolution dans tel dossier. C'est sûr que, si on prend les 103 000 lésions professionnelles au Québec en
2018, il y a des cas de tout, il y a une variété. Puis je sais que les
groupes avec lesquels vous êtes en contact, ils vont vous dire : Mais lui,
il est arrivé telle... Oui, il y en a, des cas malheureux, mais je pense qu'en général ça donne des résultats qui sont
humains, imparfaits, mais humains et qui sont rendus dans toute la
rigueur que le système impose.
Puis il ne faut pas faire ça à bric-à-brac quand
c'est des affaires médicales. Puis, quand c'est des dossiers d'accidents de
travail, il faut les traiter avec sérieux puis humanité. Puis je pense que
toutes les personnes qui sont impliquées à la CNESST sont soucieuses de cette
réalité-là.
M. Leduc : Puis ce n'est pas ça
qu'on remet en question aujourd'hui.
• (16 h 30) •
M. Boulet : Non, mais les
délais.
M. Leduc :
Encore une fois, on n'est pas en train d'évaluer individuellement chacune des
personnes, si elles sont bien intentionnées ou pas. On remet en question un
état général des choses et quelle est la conséquence de cet état général des
choses sur le travailleur, parce que c'est principalement pour lui qu'on a fait
ce régime-là. Bien sûr, il est aussi au bénéfice des employeurs, vous le
soulignez abondamment.
M. Boulet :
Bon.
M. Leduc :
Mais ce n'est pas l'employeur qui est lésionné, là, ce n'est pas lui,
l'employeur, qui a la lésion, c'est le travailleur. Ça fait que le régime, on
le construit, au final, quand même, pour la personne qui a la lésion. J'espère
qu'on s'entend là-dessus.
M. Boulet : Mais, collègue, vous êtes en train de demander
qu'on amende la loi. Puis les employeurs, le petit, le moyen, le grand,
tu lui dis : Quand c'est du médical, l'arbitre médical, ce n'est pas pour
toi.
M. Leduc : Pourquoi ça serait pour lui? C'est quoi, la
philosophie derrière l'idée de dire qu'il a le droit d'envoyer ça
chez son médecin d'employeur?
M. Boulet :
Bien, poser la question, c'est y répondre.
M. Leduc :
Bien, j'aimerais ça, entendre votre réponse à vous.
M. Boulet : C'est un accident de travail. Bon, vous savez
c'est quoi, une blessure survenue sur les lieux de travail alors qu'il
est à son travail. Ces trois éléments-là créent une présomption d'accident de
travail. Est-ce que... Quand il y a des
présomptions au bénéfice des travailleurs, est-ce qu'il n'y a pas un droit de
l'employeur de dire : Ce n'est pas une blessure, ce n'est pas une condition objective au plan médical, ce n'est
pas survenu pendant les heures de travail, c'est survenu ailleurs ou ce
n'est pas survenu pendant les heures de travail? Puis la date de consolidation,
il me semble qu'il y a un impact sur le
retour potentiel du travail. Faire une assignation temporaire, il faut que tu
fasses examiner le travailleur.
M. Leduc :
Mais il est déjà examiné.
M. Boulet :
Non, mais, si tu as une idée par ton médecin désigné puis que ton médecin
désigné dit : Ce n'est pas le bon
diagnostic ou ce n'est pas les bons soins, ce n'est pas les bons traitements,
il me semble qu'il devrait y avoir un canal qui permet...
Écoutez,
moi, ça m'apparaît évident. C'est un équilibre entre l'employeur puis le
travailleur. Tu ne peux pas faire... remplir un formulaire de
réclamation : Le 18 janvier 2018, j'ai eu tel événement au travail,
tu décris l'événement, puis tu vas obtenir une attestation médicale initiale de
ton médecin, puis, après ça, c'est fini.
M. Leduc :
Mais pourquoi...
M. Boulet :
C'est un système qui est en place depuis longtemps, qui donne de bons résultats
et qui a comme prémisse de base que, quand
c'est une matière médicale — puis
212 est clair, puis ça se fait toujours dans le contexte de prépondérance de l'opinion du médecin traitant,
224 est clair — c'est
normal qu'il y ait un arbitre qui... Puis le Comité consultatif du travail
et de la main-d'oeuvre les
recommande, ces arbitres-là. Ils décident qui a tort puis qui a raison. Mais...
M. Leduc :
Je ne vous parle pas de l'arbitre, là, je vous parle du médecin de l'employeur.
M. Boulet :
Non, mais vous le dites quand même : C'est quoi, l'intérêt de l'employeur
de contester?
M. Leduc :
Ah! l'intérêt, je le comprends très bien, M. le ministre. La question,
c'est : C'est quoi, le droit?
M. Boulet :
Mais oui, mais le travailleur aussi, il exprime son droit. Puis il est...
L'arbitre médical bénéficie du dossier, les notes évolutives, l'examen initial.
Tu sais, il a... Sa prépondérance s'exerce, puis l'arbitre médical...
Et,
je le répète, je suis convaincu que tel groupe va nous dire : Ce
travailleur-là a été lésé. Oui, mais il a été lésé, à chaque fois que tu vas devant un décideur, peu importe son habit, il y a quelqu'un qui est un
peu lésé ou quelqu'un
qui est totalement lésé, ou il y a quelqu'un qui a raison puis il y a quelqu'un
qui a tort.
Quand je vous disais,
tout à l'heure, qu'il faut mettre l'accent sur la conciliation
prédécisionnelle, à ce tribunal-là, il y a
un système avec des conciliateurs qui sont des personnes
extrêmement qualifiées, et il y a un pourcentage important
de dossiers qui se règlent en conciliation. Mais c'est souvent sur
l'admissibilité, sur le lien de causalité. Puis les aspects médicaux, quand un
arbitre a eu l'opportunité de s'exprimer puis qu'il a vu les dossiers médicaux
confectionner par les deux médecins...
Puis,
des fois, ce n'est pas l'employeur. Des fois, c'est la CNESST. Le
but de votre amendement, ça serait de dire à l'employeur :
Dorénavant, tu es évacué de...
M. Leduc : Oui.
M. Boulet :
Tu n'as plus le droit de... Bien, écoutez...
M. Leduc :
Mais parce que sa principale motivation, c'est la désimputation.
M. Boulet :
J'entends, j'entends, mais je ne peux pas adhérer à un système qui crée un
déséquilibre de cette nature-là.
M. Leduc : Mais ce n'est pas tellement un déséquilibre, c'est qu'à la base qu'est-ce que c'est qu'il fait là, lui, le médecin de l'employeur? Qu'est-ce
que c'est qu'il fait là, l'employeur, de commencer à aller décider...
M. Boulet :
O.K. Je pense que j'ai tout dit.
M. Leduc :
...d'aller décider ce que le salarié a le droit d'avoir comme diagnostic ou
pas? On va se dire les choses franchement quand même, M. le ministre : si
un salarié arrive avec un diagnostic de son médecin traitant, que l'employeur
ne trouve pas ça agréable de lire ça parce que ça va imputer une hausse de
cotisation personnalisée, qu'il se retourne de bord puis qu'il mandate un
médecin à son emploi de faire un nouveau diagnostic, de quel côté de la clôture
on peut penser que la pomme, elle va tomber? Bien, ça ne prend pas la tête à
Papineau pour comprendre qu'elle va tomber probablement un peu plus souvent du
côté de la clôture de l'employeur, n'est-ce pas?
M. Boulet :
Mais l'employeur, il ne calle pas la décision de son médecin. Le médecin est
soumis...
M. Leduc :
Non, mais il signe le chèque, par exemple.
M. Boulet :
Pardon?
M. Leduc :
Il signe le chèque, par exemple.
M. Boulet :
Ah! Ah! mais là... Là, vous ne voulez pas qu'on fasse de la personnalité, là,
mais, si vous voulez remettre en question la conscience professionnelle des
médecins, il y a un syndic au Collège des médecins, puis les travailleurs
peuvent faire des plaintes. Ça, je l'ai entendu. Puis il y a des employeurs qui
pourraient faire des plaintes au syndic du Collège des médecins pour de la
médecine de complaisance, selon leur opinion.
Arrêtez. N'embarquons
pas dans ce débat-là, parce que vous ne voulez pas qu'on personnalise et vous
m'amenez dans cette personnalisation-là. Ça, là, je l'ai entendu, puis, pour
moi, c'est de la stigmatisation des employeurs : Ils callent la shot, ils
paient le médecin, le médecin se fait acheter, ça fait qu'il rend l'opinion que
le médecin lui demande de rendre, après ça,
il va devant un arbitre. Il ne peut pas acheter l'arbitre médical, quand même.
M. Leduc :
Mais ce n'est pas ça que j'ai dit.
M. Boulet : Il ne peut pas acheter le TAT, quand même.
Et, juste de penser qu'il peut acheter, entre guillemets, un médecin
désigné, bon, moi, je n'ai pas d'autre commentaire à faire, Mme la Présidente.
M. Leduc :
Vous pensez que ça n'existe pas, que c'est complètement farfelu, comme hypothèse?
M. Boulet :
Je n'ai pas... Je pense qu'il y a de l'abus partout, dans tous les systèmes.
Puis je réfère... la santé et sécurité n'en
fait pas... n'est pas excluse. Il y a des travailleurs qui peuvent abuser, qui peuvent... puis il y a
des employeurs qui peuvent abuser. Si
une commission comme la nôtre peut contribuer à diminuer ce type
d'abus là, tant mieux, mais ce n'est pas en éliminant des droits qu'on
va le faire. Merci.
M. Leduc :
Vous n'avez pas besoin de dire : Il y a peut-être des travailleurs qui
abusent; il y a certainement des travailleurs qui abusent. C'est même... je
veux dire, c'est sûr que ça existe. On n'est pas en train d'imaginer que tout
est blanc d'un bord puis que tout est noir de l'autre.
Encore une fois, M.
le ministre, je vous ramène sur l'analyse d'un système. Je vous demande de
faire un pas de recul puis je vous demande
de vous demander, en fait, si la façon dont on a construit, historiquement, ce système-là...
avec le droit qu'on a donné à un employeur
de prendre l'option de contester dans le principal but de se faire désimputer
le diagnostic d'un médecin du salarié, bien, ce n'est pas surprenant que
la pomme, elle tombe plus d'un bord que de l'autre quand c'est lui qui fait la
contre-expertise. Voyons! C'est fait pour ça. Lui, il ne va pas aller se
chercher une contre-expertise qui va comme valider le médecin traitant à la
base. C'est comme ça qu'on a construit le système. On ne peut pas faire à semblant que tout est beau, puis tout est fin, puis
que le droit est magnifique, puis que tout
le monde est dans des bonnes intentions, là. À un moment donné, il faut
regarder aussi concrètement ce qu'il se passe, là.
M. Boulet :
Je vais m'attarder à des... quand vous dites qu'il fait ça dans le but de
désimputer. C'est comme ça que vous vous
exprimez. Les employeurs, par
ailleurs, puis c'est un autre sujet,
peuvent faire des demandes de partage de
coûts dans des cas spécifiques, vous les connaissez, notamment
quand il y a un handicap préexistant, conformément à la définition de la Charte
des droits et libertés de la... Que les employeurs puissent demander un partage
de coûts, c'est légitime aussi, là. Ce n'est pas... bon.
Mais
que vous disiez : Certainement, il y en a qui abusent, oui, puis il y en a
certainement qui abusent des deux côtés, mais... Merci, Mme la Présidente.
M. Leduc : Tu sais, dans sa vie, là, un salarié, combien de
fois il va prendre le même expert? Très,
très peu, là. Il va avoir un
cas, s'il est malchanceux, deux cas de SST dans sa vie. Il n'aura pas une
relation à long terme avec ce médecin-là, d'un point de vue, donc... au regard
de la CNESST.
Dans
le cas d'un employeur qui va revenir avec le même médecin une fois à une autre,
ce n'est pas innocent, là. On ne fera pas à semblant que c'est innocent.
Moi, je ne suis pas en train de déterminer que tout ce beau monde là sont des
serviteurs du grand capital, je ne suis pas là du tout. Je suis en train de
vous dire qu'il y a quand même un système
qui, si on le regarde de manière globale, fait en sorte qu'il y a une pomme qui
tombe plus souvent d'un bord que de l'autre parce qu'il y a un intérêt
de désimputer à la cotisation. C'est...
Puis je ne suis pas
tout seul à le dire. Il y a eu combien de rapports qui ont été écrits depuis
des années qui font le même diagnostic puis que, quand on regarde la question
de la surjudiciarisation, là, il faut commencer par là? Il faut commencer par
là parce que, si on ne commence pas par là, si on regarde juste, mettons, la
question du TAT, c'est au bout de la chaîne. Mais, au début de la chaîne, c'est
là, c'est l'employeur qui peut contester la prépondérance du médecin traitant.
Puis moi, je ne vous
dis pas de faire en sorte qu'il n'y ait plus rien, là. La commission, elle
existe encore, puis la commission, s'il y a
de l'abus, elle peut utiliser son pouvoir et demander une révision médicale.
Ça, je ne le conteste pas dans mon amendement.
• (16 h 40) •
M. Boulet : Mais là vous demandez à la commission... en
annulant le droit de l'employeur de contester, d'avoir un médecin désigné,
vous transformez la CNESST en défenseur des intérêts des employeurs.
M. Leduc :
Bien, pourquoi je ferais ça? Elle a déjà le pouvoir de le faire, ça.
M. Boulet :
L'autre élément sur lequel c'est important de revenir, dans le cas des travailleurs,
ce que j'ai souvent vu, moi, c'est le médecin de famille. Tu sais, il y a bien
plus de stabilité médicale, je pense, là — puis je n'ai pas de
statistique, puis peut-être que je me trompe — que chez les employeurs. Les
employeurs, souvent, ils ont des médecins désignés aussi qui peuvent être les
mêmes pendant un certain nombre d'années.
Mais vous présumez
qu'ils peuvent les acheter. Tu sais, s'ils les achètent... je ne pense pas que
tous les médecins vont contribuer à ce que vous pensez que les employeurs font.
Moi, j'ai confiance aux médecins, j'ai confiance que ces personnes-là
respectent leur code de déontologie et j'ai confiance que les contribuables
ainsi que les employeurs, travailleurs, dans
le cas de la santé-sécurité, soient bien informés qu'ils peuvent faire des
plaintes au syndic.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, est-ce
qu'on peut laisser la parole au député... Oui.
M. Leduc :
Je terminerais mon échange. J'achevais, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait.
M. Leduc :
Moi, je pense qu'on met les médecins dans une situation trop délicate, trop
difficile, particulièrement les médecins qui vont être contactés par des
employeurs ou pour des mutuelles de prévention pour faire des contre-expertises. C'est une situation qui est beaucoup trop
tendue, où est-ce qu'on a, évidemment, une expertise de base du médecin traitant puis quelqu'un qui
nous embauche pour réviser cette expertise-là. Eh là là! C'est dans une
situation un peu délicate.
Je ne veux pas
commencer à rentrer dans l'histoire de syndic ou quoi que ce soit, ça ne
m'intéresse pas. Ce n'est pas là la question. La question, c'est qu'on a
construit un système qui met ces gens-là dans une situation délicate. Et moi,
je veux, d'une part, les retirer de cette situation délicate là, mais je veux
surtout m'assurer que ce système-là soit plus efficace. Puis je pense que c'est
dans l'intérêt des employeurs, parce que ça coûte cher, ça coûte cher. Des
centaines, des milliers de dollars qu'on engloutit dans des contre-expertises,
etc., soi-disant pour se sauver de l'argent dans l'imputation, ça coûte bien
cher pour le...
Puis, si vous voulez vraiment
être efficace dans votre surjudiciarisation, à la source, régler ce problème-là,
ça me semble être la meilleure solution. Je pense que c'est un bon compromis par
rapport à ce que j'avais proposé originalement, dont on n'a pas pu discuter,
qui était l'abolition pure et simple du BEM. La commission, elle est amplement
en mesure de faire cette évaluation-là, et elle le fait déjà, de la validité du
diagnostic du médecin traitant et de le
contester, si elle trouve qu'il y a de l'abus ou s'il y a de la médecine de
complaisance. Elle a ce pouvoir-là, elle l'exerce déjà, on lui
demanderait simplement de continuer à l'exercer. Ça ne la transforme pas en
mandataire des employeurs.
Les employeurs
peuvent bien, après ça, essayer de lever un drapeau pour dire : Aïe! Bien
là, moi, je n'ai peut-être plus le droit de le contester directement, mais je
considère que, tel ou tel cas, il y a peut-être de l'abus. Bien, écoutez, ils
le feront, puis la commission regardera si c'est nécessaire de réviser un
dossier ou pas. Mais on va certainement, certainement s'économiser du temps, de
l'argent et une bonne dose d'anxiété pour tout le monde, pour les employeurs
comme pour les salariés.
M. Boulet :
Je pense qu'il y a une méprise de votre part sur le rôle et la mission de la
commission. Puis, deuxièmement, c'est sûr
qu'on va diminuer les contestations si on enlève, purement et simplement, le
droit aux employeurs de contester et de faire examiner les travailleurs.
Ça fait que c'est sûr que ça va baisser. Vous n'avez plus le droit de
contester. C'est seulement la commission qui a le droit, en votre nom ou au nom
du système.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Oui?
M. Boulet : Merci. Non, c'est
complet.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, je donne la parole, cette fois-ci, au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui. Alors, on
a assisté à un échange très, très intéressant, en tout cas, pour moi qui arrive
dans cette commission-là, là... permet de
bien comprendre la dynamique. Je regrette d'être obligé de demander au ministre,
s'il vous plaît, juste de me répéter les
trois chiffres, là, de la statistique, 40, 49, 17, là. Peut-être juste... s'il
vous plaît, parce que je n'ai pas eu le temps de tous les prendre en
note, là.
M. Boulet : Le nombre de
décisions du Tribunal administratif du travail qui confirment le BEM :
41,9 %.
M. Gaudreault : 41,9 % qui
confirment.
M. Boulet : Oui. Puis le nombre
de décisions qui modifient le BEM : 40,4 %.
M. Gaudreault : Ah! c'est lui
qu'il me manquait.
M. Boulet :
Mais je ne sais pas de quelle nature puis en faveur de qui. Puis le nombre de
décisions qui infirment le BEM, c'est 17,7 %.
M. Gaudreault : O.K.
M. Boulet : Donc, on peut le
présenter de différentes façons, mais, si tu mets le 41,9 % avec le
40,4 %, c'est à peu près... près de
83 % des décisions où le BEM est confirmé ou en partie confirmé. Là, je ne sais pas, en partie, là, ça
peut représenter...
M. Gaudreault : 41,9 % — c'est
ça? — qui
confirment.
M. Boulet : Oui. Exact.
M. Gaudreault : 40,4 % qui modifient et 17,7 % qui
infirment les décisions. Maintenant, est-ce
que le ministre est capable de nous
fournir des chiffres sur... les chiffres bruts, là, sur les contestations
médicales logées devant le BEM? Est-ce qu'on a ça à quelque part?
M. Boulet : Oui. C'est juste que ça peut prendre un petit peu de temps, là, parce qu'on n'était pas préparés pour le Tribunal administratif,
là. Mais je vais...
M. Gaudreault : Admettons dans
les, je ne sais pas, trois, quatre dernières années, là.
Des voix :
...
M. Gaudreault : On peut
suspendre un peu, s'il veut, là.
M. Boulet :
...c'est à peu près... Bon an, mal an, là, il y a à peu près 11 000...
Comme là, collègue, du 31 mars 2020...
Des voix :
...
M. Boulet : Donc, c'est à peu
près 10 000, 11 000, bon an, mal an, des demandes reçues au BEM, au
Bureau d'évaluation médicale.
M. Gaudreault : Si on remonte
il y a cinq, six ans, on est-tu capable d'avoir des chiffres?
M. Boulet : En 2016‑2017,
demandes reçues, 12 921. Des avis BEM, on est encore dedans, 10 705.
M. Gaudreault : Ça,
10 705, c'est?
M. Boulet : Des avis produits
par le BEM.
M. Gaudreault :
O.K., la même année, 2017.
M. Boulet : Oui. Puis il y a
eu... Bien, j'ai les... Bien, c'est ça. 10 705 en 2016‑2017.
M. Gaudreault : 10 705.
M. Boulet : Oui. Puis, je vous
dirais, là, c'est pas mal autour de ça, là. 2017‑2018, c'est 11 043; 2018‑2019,
11 225; 2019‑2020, 10 667. Puis là, comme l'année n'est pas
complétée, c'est 6 541. Mais c'est pas mal tout le temps ça, là, entre 10 000, 11 000... entre 10 000 et
12 000. Ce n'est pas si impressionnant que ça. Moi, ça... je pensais que
c'était beaucoup plus que ça.
M. Gaudreault : Par rapport à?
M. Boulet :
Bien, par rapport au nombre de lésions. Tu sais, en 2018, il y a eu
103 000 lésions... des accidents et des maladies, là. Ça fait que, là
où il y a un désaccord entre le médecin de l'employeur puis le médecin du
travailleur, et où ça se rend à
l'arbitre médical, ce n'est pas un si fort pourcentage, là. Peut-être 10 %
des cas, là. Puis on me dit oui, Sylvain... collègue.
M. Gaudreault :
Oui, pas de problème. Est-ce que... Moi, j'entends bien le député
d'Hochelaga-Maisonneuve, là. Est-ce qu'il n'y a pas... Comment je
pourrais dire? Est-ce que ce n'est pas devenu une façon... Quand on voit, là, qu'il y en a quand même 40,4 % qui modifie,
17,7 % qui infirme les décisions, 41,9 %... 41,9 % qui confirme,
donc c'est quand même... la majorité
est là, qui confirme les décisions. Est-ce que le ministre reconnaît que ce
n'est pas devenu, le BEM, avec le
temps, un certain levier pour des employeurs — moi, je ne veux pas généraliser — pour des employeurs d'aller chercher
une désimputation, là?
• (16 h 50) •
M. Boulet : C'est une
excellente question, puis ça a été soulevé en partie, là, par le collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y a des employeurs qui utilisent le BEM
pour, éventuellement, faire une demande de partage
de coûts? C'est une hypothèse qui peut se confirmer dans certains cas. Je suis,
cependant, profondément convaincu que
la vaste majorité des employeurs le font pour des motifs légitimes. Puis c'est...
Une demande de partage de coûts, ce n'est pas... ce n'est pas de quoi de sacré
non plus, là. C'est un droit qui est prévu. Puis, quand tu obtiens un partage
de coûts, bien, c'est juste que les indemnités sont assurées par le fonds
commun, par l'ensemble des employeurs.
Je rappellerai au collègue que 100 % des
cotisations à la CNESST sont assumées par les employeurs. Ça fait que c'est sûr que l'employeur qui fait ça, bien,
il réussit à se faire désimputer, puis c'est l'ensemble des employeurs qui
assument. Ça fait que ça ne sort pas du... de...
M. Gaudreault : O.K. Moi, je
suis très sensible à l'argument de la... déjudiciarisation, je vais finir par
le dire, de la déjudiciarisation. On a un
système judiciaire très lourd, de plus en plus lourd. On en a parlé, hier, à
l'occasion d'un autre article, là, sur le fait que c'était... il y avait
beaucoup de causes au Tribunal administratif du travail qui avaient un
«backlog», qu'ils n'étaient pas capables d'arriver avec l'atteinte de leur
cible de traitement, là, des causes. Donc, la déjudiciarisation, elle existe.
Elle n'existe pas juste en cette matière, elle existe dans plein de domaines.
J'entends le ministre qui nous dit qu'il est un partisan de modes alternatifs
de règlement de conflit. Je suis heureux de l'entendre dire ça, parce que je
pense que c'est un système qu'on doit développer davantage au Québec, les modes
alternatifs de règlement de conflit, notamment la conciliation, etc.
Maintenant, est-ce que le BEM n'est pas devenu
une porte d'entrée pour judiciariser davantage? Sans enlever rien à qui que ce soit, sans dire : Ah! c'est
de la faute d'un plus que l'autre, mais, globalement, là, quand on dit, par exemple, en 2017, 10 705, 2020, plus ou moins 10 000, également, contestations qui se
retrouvent devant le BEM, des contestations médicales qui sont logées,
est-ce que, dans le fond, d'ajouter cette structure ou d'avoir cette structure,
plutôt, cet intermédiaire n'est pas une
façon d'alourdir, de judiciariser, de gagner du temps, même, dans certains cas,
peut-être de vouloir, comme on dit, l'avoir à l'usure, là, tu sais, des
travailleurs, par exemple, qui sont lésés puis qui sont fragiles?
Moi, j'en ai vu dans mon bureau de
circonscription puis je suis sûr aussi que les collègues députés, là... Parce
que moi, je constate, comme ça m'arrive souvent depuis trois ans, que je suis
souvent le doyen autour d'une table de commission
parlementaire, là. Puis, si... puis je l'ai déjà dit en entrevue, Mme la
Présidente, année par année, là, bon an, mal an, comme disait le ministre tantôt, là, moi, le dossier qui revient
le plus sur mon bureau de député, avec mes attachés politiques dans la
circonscription, c'est des dossiers de CSST... bien, de CNESST, c'est... après
ça, la SAAQ. Il faudrait qu'à un moment
donné je fasse un relevé, là, les dossiers de citoyens, là, qui viennent nous
voir comme député, désemparés. Pas le député qui est désemparé, là, le
citoyen qui est désemparé. Le député est souvent désemparé aussi, mais c'est
souvent pour...
Une voix : Par voie de
conséquence.
M. Gaudreault :
...par voie de conséquence, mais aussi par d'autres raisons. Moi, à chaque
période de questions, je sors de là assez désemparé, mais c'est un
autre...
M. Boulet : Les questions ou
les réponses?
M. Gaudreault :
C'est une période de questions, ce n'est pas une période de réponses. C'est
pour ça que sors désemparé souvent. Mais, bon, la question n'est pas là.
Les citoyens arrivent au bureau de député
désemparés, avec des enjeux de CNESST. Je me souviens encore d'un monsieur, M. Caron, je veux dire,
c'était, en tout respect pour lui, puis il est décédé de... Puis je ne dis pas
qu'il est décédé de ça, mais, en tout
cas, c'est un ensemble de situations. Il est venu à mon bureau pendant
plusieurs années, puis c'était un personnage de Kafka, il était devenu un
personnage du Procès de Kafka, perdu à travers les dédales puis...
Donc, est-ce qu'il n'y a pas, par l'institution
du BEM, un moment donné, une façon indirecte de dire : On va l'avoir à
l'usure, tu sais, le travailleur ou la travailleuse qui est lésé? Puis je me
demande si la judiciarisation n'est pas là,
dans le fond, d'une certaine manière, la lourdeur de la judiciarisation. N'y
aurait-il pas lieu de sortir de notre silo, là, puis de notre boîte et de se dire : Bien, on va travailler les
choses autrement? Je veux dire, cette loi n'a pas été révisée depuis 40 ans? Depuis 40 ans. Puis je
trouve, puis ce n'est pas un reproche que je fais à personne, qu'on est
beaucoup dans nos paramètres par
défaut. Donc, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de revoir un certain nombre de
choses, notamment au BEM, pour dire : Bien, on va sauter une étape,
on va travailler autrement? On reconnaît... Si on reconnaît, entre autres, à
l'article 224, que c'est le médecin traitant qui a prépondérance, ce n'est
pas un principe banal, ça. Il faudrait que ça apparaisse partout dans le
processus de la loi. C'est un principe fondateur de la loi. Puis j'entends le
ministre, qui est entièrement d'accord avec ça.
Puis moi, je ne veux pas embarquer dans les
scénarios de médecine de complaisance. Il y en a peut-être, mais, je veux dire, de façon générale, les
médecins, moi, je présume de leur bonne foi, qu'ils travaillent avec une
pratique professionnelle. Ils ont prêté serment.
Puis est-ce qu'il y a des abus dans certains
cas? Oui, dans tous les domaines, il y en a, malheureusement. Il faut tout
faire pour les empêcher. Mais comment ça se fait qu'à un moment donné le
système fait en sorte que cette quantité de
10 000 à 12 000 par année devant le BEM puis que... Là, tant qu'à
rouvrir la loi, là, on ne sait pas combien de temps qu'on va être ici, nous
autres, comme députés, là. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de faire une vraie
réforme pour sortir de la boîte et faire en sorte qu'à travers
l'ensemble du processus le médecin prépondérant, le médecin traitant avec sa prépondérance apparaisse
davantage, tout en respectant les droits de tous et chacun, là? Alors, je lance
un peu ça comme ça, mais...
Regardez, là, on est le 9 juin, on termine
vendredi, dans deux jours. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de regarder comment on
pourrait sortir de cette boîte-là pour faire autre chose?
La Présidente (Mme IsaBelle) : Député...
Une voix : ...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Député de Jonquière, on a le
député de Nelligan
qui voudrait aussi intervenir.
M. Gaudreault : Ah! O.K.
M. Derraji : Parce que... Je
peux?
M. Gaudreault : Oui, oui.
M. Derraji : Je trouve très intéressante
la fin... en fait, tout ce que vous avez dit... J'ai tendance à être sélectif dans mes réponses, mais je veux juste
préciser, ce n'est pas uniquement la fin, mais j'aime beaucoup
le débat, comment ça a été ramené par mon collègue, même si je ne le
partage pas à 100 %, surtout la partie de l'employeur, il y a des méchants un peu partout. Mais vous m'avez piqué à
pas mal de reprises, mais je me suis retenu pour ne pas répondre. Mais vous avez droit à votre opinion comme j'ai le
droit le mien, mais je pense que c'est un bon débat autour de la table.
Et la façon avec laquelle vous avez terminé,
cher collègue député de Jonquière, m'interpelle beaucoup, et je voulais
intervenir avant que le ministre réponde, et j'ai deux paragraphes à partager
avec vous. C'est des rapports que nous avons reçus dans le cadre de cette
commission. Et, je trouve, ils mettent la table vraiment, d'une manière très claire, sur l'enjeu, à mon avis. Je vais les
lire et j'espère que ça va clarifier un peu la complexité de la chose et que
probablement, devant ce fait que nous avons le droit, en tant que
parlementaires, d'ouvrir ce débat sur la modernisation, de prendre vraiment le temps de voir où ça bloque,
pourquoi ça bloque et pourquoi on a, la question que vous avez posée,
les trois pourcentages.
Je vais commencer avec la Direction des enquêtes
du collège : «La Direction des enquêtes du collège reçoit, chaque année,
des plaintes concernant la médecine d'expertise en regard de l'évaluation
médicale indépendante des travailleurs. La
qualité de l'évaluation et de l'expertise, dans le domaine de la santé des
travailleurs, ne doit pas être fondée sur
les attentes ni l'atteinte des objectifs d'une organisation, mais bien répondre
à un ordre professionnel et scientifique établi en matière de médecine
du travail. L'appréciation de ses qualités doit être faite par les pairs
médecins.
«Interpelé
par les défis que soulève l'encadrement de cette pratique, le collège a mené
une importante réflexion et s'apprête à publier un guide d'exercice sur
la médecine d'expertise. Il entend aussi publier un guide d'exercice traitant
du contexte propre à l'exercice de la médecine auprès des travailleurs.
«Nous ne saurions passer sous silence — nous
ne saurions passer sous silence — l'intérêt que nous avons à échanger
périodiquement avec la CNESST, de même que l'importance de retrouver, de
prévoir une présentation médicale dans la structure de gouvernance de cet
organisme.»
Maintenant, l'autre enjeu... Désolé,
je vais agrandir, parce que c'est très petit. Bon. Quelles étaient les
évaluations médicales? Désolé, c'est un peu long, mais...
• (17 heures) •
M. Gaudreault : Non, mais peut-être juste, si vous
permettez, une petite question de procédure... pas de procédure, mais de
précision. Je n'ai pas compris, précisément...
M. Derraji :
Ah! ça, c'est...
M. Gaudreault :
C'est quel collège?
M. Derraji :
Désolé. Ah! vraiment, je suis désolé.
M. Gaudreault :
Ah! le Collège des médecins.
M. Derraji :
Oui, oui, Collège des médecins.
M. Gaudreault :
Ah! je pensais que c'était le collège de Jonquière ou...
M. Derraji :
Non, non, non... Oui, oui...
Une voix :
...
M. Gaudreault :
Bien oui, c'est les meilleurs.
M. Derraji :
Je sais que vous aimez très bien votre région, mais c'est le Collège des
médecins...
M. Gaudreault :
...Collège des médecins, il manquait ce bout-là. C'est quelle année, excusez?
M. Derraji :
C'est dans le cadre de...
M. Gaudreault :
C'est maintenant, O.K., O.K., c'est beau.
M. Derraji :
Oui, oui, c'est dans le cadre de notre commission parlementaire, on les a...
ils sont venus...
M. Gaudreault :
O.K., O.K., O.K., c'est beau, je suis replacé, là.
M. Derraji :
Oui, oui, exact. Et, sérieux, ils placent vraiment la problématique de ce... au
fait, des questions des collègues, là, maintenant, au niveau de la qualité des
évaluations médicales, fragilité du réseau et délais, ce que nous sommes en
train de discuter : «Si les objectifs poursuivis par le projet de loi sont
louables, l'expérience et l'observation de la situation actuelle laissent
croire que ni les délais prescrits ni la disponibilité des médecins en
entreprise et des médecins évaluateurs et experts sont réalistes dans un avenir
prévisible — on
ne règle pas le problème, hein — notamment parce que le secteur de la
santé et sécurité au travail est en concurrence avec les besoins de l'ensemble
du réseau de la santé.» Ce n'est pas moi, c'est... «La pandémie de
COVID-19 a exacerbé cette situation. Dans la
dernière année, le collège a été informé que les délais pour obtenir des
opinions médicales s'allongent, en raison des pressions de mobilisation
effectuées par le système de santé sur les médecins. Cette situation ne permet
donc pas de respecter les délais prescrits par la loi. Lors de la première
vague de la pandémie, le BEM comptait plus de 4 000 dossiers en
retard. Cela a obligé les gestionnaires à recourir à des alternatives, soit des
études sur dossier permettant de traiter les
demandes d'évaluation en atténuant ou en contournant l'évaluation individuelle
avec entrevue et examen, qui est
généralement préconisée. À titre d'exemple, des médecins ont sollicité
l'opinion du collège en raison de leur inconfort dans un contexte où ils
se sentaient divisés entre le respect de leurs obligations — notamment
la nécessité de procéder à une expertise
rigoureuse avec examen du travailleur — et la nécessité de répondre à une règle
administrative — étude
sur dossier en téléexpertise — imposée par certains organismes. Il
semble que dans certaines circonstances, les
décisions d'indemnisation seraient prises par des fonctionnaires, faute d'une
opinion médicale obtenue dans un délai utile.»
Je pense que c'est du
très bon français, très bien expliqué et, en plus, bien livré. Je vous donne
une petite... Non, mais blague à part, les faits sont là, le collège le dit
clairement : Il y a un problème quelque part, et, si on veut vraiment
moderniser, je pense qu'il y autre chose qu'on doit voir. Parce qu'au bout de
la ligne on veut la... j'ai le même problème
que vous, j'ai le même problème, la déjudiciarisation, hein? Vous aussi, hein,
je pense, on est nombreux autour de la table à prononcer le mot, parce
qu'on ne veut pas arriver... Mais le problème, il est là.
Donc, moi, c'est pour
cela que je voulais ajouter ce constat avant que le ministre réponde. Vous avez
le portrait global en fonction des interventions des collègues... et que je
trouve quand même que la Direction des enquêtes
du Collège des médecins est une très
bonne intervention. Moi, le dernier paragraphe, sérieux, écoute, j'espère
que ce n'est pas la réalité parce que lire
qu'«il semble que dans certaines circonstances, les décisions d'indemnisation
seraient prises par des fonctionnaires faute d'une
opinion médicale obtenue dans un délai utile», c'est très alarmant pour moi.
Voilà.
J'espère que le ministre, maintenant, va avoir
le luxe de nous répondre en fonction de...
M. Boulet : Il y a plusieurs
points qui ont été touchés. Mais, la CNESST, je rappelle qu'elle accepte 81,9 %
des réclamations présentées par les travailleurs. Et, en vertu de 224, elle se
fie, bien sûr, sur la prépondérance, en fait elle n'a que l'opinion du médecin
traitant. Donc, il n'y a pas de problématique à cet égard-là.
Ce que
soulève le collègue de Nelligan, avec le rapport du Collège des médecins, moi,
je le partage. Et les délais, c'est... les délais, ce n'est toujours pas
favorable à la reconnaissance ou à l'exercice de droit. En même temps... puis
c'est comme ça, puis je ne veux pas me comparer, là, mais, tu sais, c'est comme
ça devant tous les tribunaux, devant tous
les décideurs. Et le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre m'a
soumis, récemment, 11 candidatures de personnes pour agir au BEM, puis il y a une pénurie de main-d'oeuvre
qui accentue, bien sûr, le recrutement de membres du Bureau d'évaluation
médicale. Ça, vous l'avez enregistré, j'espère?
M. Derraji : J'ai le ministre
de l'Emploi, Mme la Présidente, à 17 h 05, qui avoue qu'il y a
une pénurie de main-d'oeuvre. Je vais le noter pour mes futures interventions
au salon bleu.
M. Boulet : Je le dis puis je
le répète : Il y a une pénurie de médecins pour siéger au Bureau
d'évaluation médicale. Mais je ne suis pas
dans la sémantique, rareté ou pénurie, là, la nuance est très, très mince. Mais
ça, ça sera... on aura toujours à
lutter contre ça. Mais, en même temps, en santé et sécurité, comme les dossiers
sont évolutifs, c'est généralement
favorable que les délais soient un petit peu plus longs. Mais 11 nouveaux membres
du Bureau d'évaluation médicale, mais il y aura toujours un travail à
faire.
Les arbitres
de grief, c'est la même dynamique. Puis ça, je fais écho aux commentaires du
collègue de Jonquière. À l'époque, souvenez-vous ce que la Cour suprême
disait : C'est que c'était de la justice administrative qui se voulait
expéditive et simple. Aujourd'hui, tu ne vas pas devant un arbitre. C'est... Ça
s'est judiciarisé puis... Pardon?
M. Leduc : Au moins deux ans?
M. Boulet : Ah! puis... bon, puis les arbitres, on le sait,
hein, ils sont nommés par le Comité consultatif travail et de la
main-d'oeuvre. Puis il n'y en a pas assez, ce qui fait que les délais sont beaucoup
trop longs.
En même temps, puis je fais référence aux ADL,
là, les alternatives de résolutions de litiges, je suis assez fier de le dire : 64,2 % des dossiers, avant d'arriver au TAT, là,
en conciliation prédécisionnelle, sont réglés à ce stade-là. Donc, 64,2 %. Je n'ai pas de comparatif, mais je
pense qu'on peut presque se targuer d'avoir un pourcentage de conciliations
réussies qui est inégalé, selon moi, au Québec.
Puis la judiciarisation, oui, on l'a interpelée
beaucoup, là, parce que c'est un des objectifs, de déjudiciariser, puis on le
fait énormément. Parce que je rappellerai aux collègues qu'il y avait trois
paliers : il y a la CNESST, il y a la révision administrative puis il y a
le TAT. Puis, bon, on pensait abolir complètement la révision administrative,
puis je l'ai dit, moi, aux collègues, j'étais de cet avis-là. Puis ça faisait
partie des recommandations du CCTM. Mais, à
la justice puis par... non seulement par cohésion avec le corpus législatif
québécois, mais, par principe et par simplicité pour le justiciable
québécois, il faut qu'il y ait encore un accès à une révision administrative
qui se fait sur dossier, puis c'est moins long. Ça fait que l'option d'aller
soit en révision administrative ou au TAT, dans les dossiers de financement et dans les dossiers médicaux, je
pense que ça a fait l'objet d'un... moi, ce que j'appelle un beau compromis,
là. On a adopté ces articles-là, et ça va contribuer à simplifier et éliminer,
dans un certain nombre de cas... Puis on va le faire progressivement.
Si, dans quatre ans, cinq ans, on se rend compte que ça ne donne pas les
résultats anticipés en termes de déjudiciarisation, bien, on corrigera le tir.
C'est important, on... oui, on se sert d'une
modernisation ou d'une réforme. Moi, je suis un partisan de ça, la réforme, collègue, mais pas d'une révolution. Tu
sais, on ne jettera pas toutes les structures du jour au lendemain. On fait
une réforme. La révolution, ce n'est pas,
généralement, porteur de changements bénéfiques, surtout en
matière de santé et sécurité.
Je pense que la réforme est assez globale. Puis, après ça, sous réserve d'évaluation,
il y aura des amendements nouveaux.
Je voulais aussi vous informer qu'il y avait
maintenant un processus de révision par les pairs. Les membres du BEM, ils
se... ils vérifient leurs avis avec leurs pairs au Bureau d'évaluation médicale,
ça fait qu'ils s'assurent de limiter les
possibilités de contestation puis d'adhérer le plus possible à ce qui est dans
le dossier médical du travailleur.
Autre élément... bien, deux autres éléments, là,
pour faire suite au commentaire, moi, j'appelle ça de la saine judiciarisation,
collègue. Quand c'est du médical, il faut que ça aille devant une instance
spécialisée, puis c'est des médecins. Puis je ne sais pas s'il y a beaucoup
d'autres tribunaux ou décideurs de cette nature-là. Ça n'a pas besoin d'être
toujours des avocats ou des... Ici, c'est des médecins parce que c'est une
matière spécialisée qui va au-delà des qualifications de ceux qui sont... ceux
et celles qui sont ici avec nous.
Enfin, dernier point, vous allez pouvoir
constater, lors de votre rencontre, collègue de Jonquière, avec mon équipe,
qu'il y a une section gouvernance où on a revu complètement la façon dont la
CNESST est gouvernée. Puis il y avait une
trentaine d'articles, là, dans ce bloc-là, de gouvernance, puis je pense que, ça
aussi, ça va être porteur de changements intéressants.
Tout ça pour dire,
moi, j'entends les commentaires puis je le sais, que les praticiens, c'est...
En fait, tous les systèmes qui mènent à des décisions sont compliqués, sont
longs. Puis, au TAT, il y a des plans d'action pour réduire les délais. Au Bureau d'évaluation médicale, le
CCTM, le Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, travaille
beaucoup en collaboration avec mon ministère, avec moi, pour nommer des
nouveaux membres du BEM. Puis, à la CNESST,
il y a beaucoup d'efforts qui sont faits, on l'a vu, pour les dossiers entendus
de façon urgente ou prioritaire, mais
il y a toujours une pression pour rendre les décisions les plus rapidement
possible puis en respectant 224. Parce que, quand on réalise que 82 % des décisions acceptent les réclamations,
c'est quand même une statistique impressionnante.
• (17 h 10) •
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Député de Nelligan.
M. Derraji :
Oui. Merci pour les réponses, mais, au fur et à mesure que je lis le rapport...
Malheureusement, ils ne sont pas venus en
consultation. On n'a pas eu le temps de les voir, mais ils nous ont envoyé un
excellent rapport. Et, s'il y a un rapport vraiment à voir dans le cadre
de ce que nous sommes en train d'échanger, c'est vraiment ce rapport. Et ce qui
me fait vraiment peur un peu, ils le mentionnent, c'est la concurrence pour les
effectifs médicaux. Et, quand je dis «la
concurrence pour les effectifs médicaux», le texte, il est très, très clair,
c'est que le projet de loi, tel qu'il est rédigé, tient pour acquise la
disponibilité des médecins pour répondre aux exigences de la loi. Et ces
disponibilités, chers collègues et M. le ministre... Il y a un réseau de santé
aussi, il y a un réseau de la santé où il y a d'énormes problèmes.
Je veux juste vous
lire un paragraphe que je trouve pertinent : «La majorité des demandes
d'indemnisation acheminées à la CNESST concernent deux domaines : la santé
mentale et les problèmes musculosquelettiques. Or, les délais de consultation
médicale en santé mentale sont d'environ deux ans.» Et on a un débat, à
l'intérieur du salon bleu, sur la fameuse
liste d'attente au niveau de la santé mentale. «Pour les problèmes de nature
musculosquelettique, les délais d'attente sont également longs et aussi
en croissance.» Ça, c'est le collège, encore une fois, le même rapport. Là, on
parle de la problématique des médecins de famille qui ont abandonné la
pratique.
Mais ce qui est un
peu... qui dérange dans la situation actuelle, à part le fait que les médecins
de famille n'effectuent pas de médecine auprès des travailleurs en entreprise,
c'est qu'il disait : «Si les responsables de la CNESST souhaitent
opérationnaliser le projet de loi — donc, là on parle de
l'opérationnalisation — ils
devront coordonner leurs activités avec le réseau de la santé pour mobiliser,
de part et d'autre, les ressources médicales nécessaires afin d'atteindre leurs
objectifs respectifs.»
Donc, la question du
délai revient encore une fois. Donc, comment l'arrimage va avoir lieu entre la
CNESST et le réseau de la santé sachant que, même dans le réseau de la santé,
il y a un délai, et des délais d'attente qui sont énormes? Je les ai évoqués
dans deux thèmes, à savoir la santé mentale et les problèmes
musculosquelettiques.
Je continue. Donc
coordonner, ça, c'est un aspect qui a été soulevé. «À notre connaissance, cela
ne s'est jamais fait. Une absence de
coordination», ça, c'est très clair dans leur constat, M. le ministre, une
absence de coordination «se
traduirait inévitablement par un délestage, de la part des médecins, des
activités de santé au travail au profit d'autres secteurs du réseau de
la santé.» Donc, je ne pense pas que c'est le but qu'on cherche.
Donc,
comment le ministre peut dire... ou
bien il entrevoit l'opérationnalisation de cette réforme par la CNESST?
M. Boulet :
Ça me fera plaisir de discuter avec vous amplement de ce sujet-là. On en a déjà
parlé puis, vous le savez, on peut en discuter à mon bureau, mais je voudrais
me limiter, là, à ce stade-ci, là, puis je le dis de façon hyperrespectueuse, à
l'amendement présenté par le collègue de Québec solidaire, qui vise à amender,
à annuler ou à abroger le droit des
employeurs de contester au Bureau
d'évaluation médicale. Ça fait que je
limiterais, à ce stade-ci, mes commentaires.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Député de Nelligan et ensuite député de Jonquière.
M. Derraji :
Bien, je ne veux pas le perdre... le prendre personnel, parce que je sais que
le ministre, il est généreux. Mais, quand on arrive à un débat de fond, j'ai
l'impression qu'il vient de me fermer une porte, sachant que la porte du ministre,
elle était toujours ouverte quand je pose une question.
Mais ce n'est pas
grave, je le respecte. Il peut arrêter le débat au moment opportun, mais le
débat de fond reste, M. le ministre, le... au-delà de l'amendement du collègue.
Parce que moi, je pense qu'on a toujours l'habitude d'avancer en toute collégialité à l'intérieur de cette commission. Les
faits seront là, tout ce que je viens de dire, le collègue de Jonquière,
tout ce qu'on vient de dire est important par rapport à l'opérationnalisation.
M. Boulet :
Ah! tout à fait. Puis...
M. Derraji :
Et j'en suis sûr, que votre volonté est la même, je vous connais quand même
assez, c'est la même chose, mais on peut ne
pas continuer le débat sur ce qui a été ramené sur la table par les collègues
et finir l'amendement, mais, sur le fond, il y a un réel problème. On
ne peut pas juste dire : On vote l'amendement et on passe à autre chose. C'est un réel
problème...
M. Boulet :
Ah! puis...
M. Derraji :
Et je ne pense pas que c'est votre volonté, parce que vous allez vivre avec une
modernisation incomplète, et je ne suis pas sûr que c'est ce que vous voulez.
M. Boulet : Ah! tout à fait. Bien, je vais m'attarder, là,
parce que je sais que ça vous préoccupe, puis vous avez le souci que les choses soient bien
opérationnalisées. Parce que le succès des mesures, des programmes ou des
réformes, peu importe leur nature, réside dans la capacité des ressources
humaines de bien les mettre en application.
Et vous avez raison, mais il y a deux volets.
Les effectifs médicaux, c'est vrai qu'il y a une pénurie, puis dans toutes les spécialités, puis dans toutes...
puis on a parfois des problèmes d'adéquation entre les formations qui sont
données dans les universités puis les besoins concrets. Puis, dans
le marché de la santé et sécurité du travail, il en manque, des
médecins. Puis il y en a, des groupes, qui sont venus en consultations particulières.
Sur le BEM, je sais que tant les syndicats que
les patrons sont constamment préoccupés par le recrutement de ressources
spécialisées, et ça, ça va demeurer un défi constant. Pour les ressources qui
seront requises par la mise en application du projet de loi n° 59, bien
sûr qu'il y a des évaluations qui sont faites à la CNESST, et il y aura l'ajout
de ressources, le cas échéant, là, parce qu'on parle de déjudiciarisation à
certains égards, on parle de ressources en réadaptation. Mais, comme je l'ai
déjà signalé, oui, puis vous allez travailler avec moi, collègue de Nelligan, à
ce qu'ensemble on puisse s'assurer qu'il y ait les ressources nécessaires à la
CNESST pour que la CNESST s'améliore à tous égards.
Puis collègue de Nelligan a été un acteur très
actif dans tout le volet, notamment de la gouvernance, et je sais qu'il va
continuer à être préoccupé par la façon dont les choses sont mises en
application.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Nous avions aussi le député de Jonquière.
• (17 h 20) •
M. Gaudreault : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Je suis en train de relire le rapport de la Commission de l'économie et du travail de 2006 sur le BEM, entre autres. Bien, c'était
sur l'ensemble du système, là, c'était l'examen... la Commission de
l'économie et du travail, puis là je n'ai pas le détail, mais ça devait être un
mandat d'initiative, donc notre commission, en décembre 2006, qui avait fait un
rapport à la suite de l'examen du rapport d'évaluation du Bureau d'évaluation
médicale et du document d'actualisation de ce rapport. 2006. Quand même, c'est quand
même très intéressant, là.
Et, à la page 9 de ce rapport, quand même,
il y avait déjà des critiques importantes qui étaient faites sur le Bureau d'évaluation médicale, où on dit : «Un deuxième enjeu retient
l'attention de la Commission de
l'économie et du travail», donc notre
commission. «Il s'agit du double rôle du BEM : à la fois centre
d'expertise médicale et organisme partie d'un processus judiciaire ou
quasi judiciaire, le BEM navigue entre les eaux de la science et de la
justice.» C'est 2006, Mme la Présidente.
Ensuite, on dit, un peu plus loin, à la page...
à la page... je m'excuse parce que, là, je suis en train de fouiller, le Bureau d'évaluation médicale à la
page 15 : «La Commission
s'interroge sur le mandat et la compétence qui devraient être confiés au BEM. À cet égard, la sauvegarde
des droits du travailleur accidenté ainsi que les délais entre les étapes
du BEM et de la CLP — évidemment, à l'époque, en 2006 — occupent
une place importante dans la réflexion qui doit être effectuée.»
La commission nous dit : «L'avis du BEM, en
soi, n'ajoute à peu près rien de plus au dossier du travailleur accidenté, sur
le plan médical et scientifique, en regard des expertises produites pour la
CSST. Et pourtant le BEM joue en quelque sorte le rôle d'un organisme décisionnel à l'égard de l'état de santé
du travailleur accidenté, du moins temporairement, c'est-à-dire jusqu'à
ce que la Commission des lésions professionnelles rende sa décision. Sans avoir
à respecter l'esprit de la loi ni les
principes qui gouvernent un tribunal, la décision du BEM permet d'écarter
l'indemnité versée au travailleur accidenté jusqu'à la décision du CLP.
Cette situation, quelquefois injuste, puisque
la décision est par la suite infirmée ou modifiée par la CLP, peut causer un préjudice fort sérieux
à certains travailleurs.»
2006, Mme la Présidente. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de réforme depuis ce temps-là. On le sait,
la CNESST a été créée. Mais, en 2006, les parlementaires qui nous
précédaient à cette commission avaient analysé en profondeur le BEM puis ils
faisaient des constats quand même extrêmement sévères.
Ça fait que, là, je saute des bouts puis je fais
une parenthèse, en passant : c'est là qu'on voit comment c'est intéressant
d'avoir des mandats d'initiative en commission parlementaire, mais les
gouvernements abusent souvent de leur majorité pour empêcher des commissions...
des mandats d'initiative dans les commissions parlementaires. Là, on voit que... C'est, quoi, 2006? On est en
2021. 16 ans... 15, 16 après, on l'utilise encore. En tout cas, moi, je
l'utilise.
Donc, si on revient aux recommandations de cette
commission, il y a des recommandations, clairement, qui touchent le BEM. Une de recommandations — écoutez bien ça, Mme la Présidente :
«Que le rôle du Bureau d'évaluation médicale soit revu de manière à
éliminer la confusion entre son rôle scientifique et son rôle juridique.»
Une autre recommandation : «Que seule la Commission
de la santé et sécurité du travail puisse demander au BEM d'émettre un avis.»
Bon, puis il y a plein d'autres...
Ah! il y a une autre recommandation ici :
«Que les efforts d'amélioration du fonctionnement du BEM et de la qualité de
ses avis se poursuivent», puis ainsi de suite, là, il y a d'autres
recommandations qui sont peut-être moins pertinentes en vertu du débat que nous
avons à l'heure actuelle.
Alors, moi, ce que je dis, Mme la Présidente,
c'est que le débat qu'on a présentement sur le BEM, il n'est pas sorti de nulle part. Ce n'est pas nous, là, qui venons dire, là : On va discuter du
BEM. Déjà, en 2006, nos prédécesseurs avaient fait
un rapport là-dessus. On se fait souvent dire, en politique : Les rapports
demeurent sur des tablettes, dorment sur des tablettes. Alors là, c'est pour
ça, moi, je tends la main au ministre, à la suite du débat que nous avons, pour
sortir de notre coquille, sortir de la boîte puis voir comment on peut
améliorer la situation.
Et, d'ailleurs, moi, j'aime bien cette
recommandation et j'aimerais savoir l'opinion du ministre. Puis je pense que
les amendements proposés par le député d'Hochelaga-Maisonneuve... Parce qu'on
parle d'un amendement, là. C'est pour ça que je reviens
là-dessus, là. Je suis hyper sur le bon picot. Quand le rapport de 2006
disait, le rapport de notre commission
disait : «Que le rôle du Bureau d'évaluation médicale soit revu de manière
à éliminer la confusion entre son rôle scientifique et son rôle
juridique», j'aimerais savoir, de la part du ministre, il penche de quel bord,
lui. Il est-tu d'accord? Est-ce que c'est un
rôle scientifique, ou un rôle juridique, ou un peu des deux? Tu sais, c'est
quoi, là? Le BEM as-tu un côté givré ou un côté sucré, là, tu sais, le
rôle scientifique puis le rôle juridique? Alors...
M. Boulet : C'est purement
scientifique. C'est un avis. Le BEM rend un avis. Donc, c'est un arbitre qui
dit : J'entends, j'écoute, je vois le travailleur puis je rends un avis.
Et c'est après ça que la CNESST rend une décision qui confirme l'avis rendu par...
Ça fait que c'est sûr que ça évite la confusion que... à laquelle vous faites
référence, là, entre le scientifique puis le juridique, là, parce que jamais le
BEM ne rend de décisions.
M. Gaudreault : Non, ça, j'en suis
conscient. Mais il faudrait retourner dans le texte plus à fond, là, dans le
texte du rapport de la commission. Mais, si c'est un avis scientifique, on
dirait qu'avec le nombre de contestations et surtout la répartition des... les
proportions que le ministre nous disait tout à l'heure, là, 41,9 %
confirment, 40,4 % modifient, 17,7 % infirment, est-ce que ce n'est
pas devenu... si c'est un rôle scientifique, est-ce que ce n'est pas devenu,
pour les employeurs, une instance juridique?
M. Boulet : Un instant, je vais
juste vérifier...
La Présidente (Mme IsaBelle) : ...une
suspension, M. le ministre?
Des voix :
...
M. Boulet : Oui, c'est parce
que je suis en train de vérifier, collègue de Jonquière. Puis c'est intéressant
parce que c'est un rapport qui date de 2006, et il y a beaucoup de mesures qui
ont été prises suite à ce rapport-là. Puis c'est quand même assez étoffé. Mais,
je pourrai m'assurer de les partager avec vous puis avec les collègues, là,
bien sûr, mais toutes les mesures qui ont été prises suite à la production de
ce rapport-là de la Commission économie et travail pour améliorer la qualité.
Il y avait une autre donnée que je voulais
partager avec vous, puis ça va peut-être contribuer à démythifier un peu, là,
moi, ce que j'appelle une fausse réalité, qu'on a l'impression que tout va au
BEM. Quand je dis : 82 % des réclamations initiales sont acceptées à
la CNESST, il y a à peu près 90 000...
Une voix :
...
M. Boulet : ...réclamations,
dont 82 % sont acceptées. Puis vous êtes meilleur en mathématique que moi,
parce qu'on a la même formation académique, ça fait que j'imagine que ça va
nous prendre cinq minutes chacun.
M. Gaudreault : Non, mais j'ai
fait... moi, j'ai fait sciences humaines sans maths au cégep.
M. Boulet : Moi de même.
M. Gaudreault : Pour vrai? Ah
oui? Aïe! C'était vraiment...
M. Boulet : Ça fait que je ne
sais pas s'il y en a qui sont meilleurs que nous autres dans le calcul, là.
M. Gaudreault : Non, non, mais
c'était péjoratif, sciences humaines sans maths, imaginez.
M. Boulet : Ah oui! On était en
bas de la pyramide, hein? On s'est rattrapés quand même.
M. Gaudreault : Oui, oui, quand
même! Oui. En tout cas.
M. Boulet : Mais, 107 000 réclamations, 82 %
acceptées, puis à peu près 10 000, 11 000 avis BEM par année. Ce n'est quand même pas un... Il n'y a pas tant de...
Tu sais, quand on parle de judiciarisation, il faut peut-être un peu combattre cette perception-là que nous avons. Ça
ne m'apparaît pas tout à fait compatible avec la réalité. Et j'aimerais
ça partager, là, pour revenir à votre rapport, là... faire l'inventaire de
toutes les mesures qui ont été mises en action... en application suite à ce
rapport-là de la Commission économie, travail. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Y a-t-il d'autres interventions?
• (17 h 30) •
M. Gaudreault : Bien, pour faire un peu de pouce sur ce que le
ministre me dit par rapport au rapport de 2006, moi, je trouve ça intéressant. On n'est pas obligés de l'avoir tout de
suite, parce que le temps file, là, puis je comprends qu'on sort ça
comme un lapin d'un chapeau, mais, si le ministère ou les gens qui travaillent
avec le ministre pouvaient nous produire
comme un tableau, là, tu sais, avec des picots, là, pour dire : Telles
recommandations du rapport en 2006,
est-ce que ça a été suivi? Comment on fait? On le fait souvent pour les suivis
de recommandations. Je m'excuse de revenir avec
l'exemple de la Commission de l'administration publique, là, mais pour savoir
si la recommandation a été suivie, et, sinon, pourquoi. Autrement dit, est-ce qu'il
y a un tableau de suivi des recommandations de cette commission de parlementaires
en 2006? Et ça nous permettrait de faire un meilleur travail pour le BEM, là,
si on pouvait nous déposer ça, et de voir, pour s'assurer que le rapport de la commission
en 2006 n'a pas été tabletté.
Puis je veux juste dire quand même quelque chose
au ministre, puis il va me permettre de le faire... bien, il n'a pas à me
permettre ou pas, là, mais, je veux dire, c'est en tout respect, mais je
comprends, là, son calcul mathématique, on parle de 10 000, 12 000
sur 106 000... 107 000, je suis bien d'accord, mais chacun, chacune
des 10 000, 12 000, c'est des M. Caron comme moi j'ai connu à
mon bureau de comté, là, puis des gens qui vivent des drames et qui... Moi, je
pense que personne ne souhaite se retrouver dans les dédales de l'ensemble de
la filière de la santé et sécurité au travail au Québec. Donc, oui, c'est
peut-être peu, par rapport au 107 000, mais chaque personne n'est pas
qu'un chiffre, chaque personne vit des situations puis des drames, et tout, et
tout.
Donc, moi, je veux juste dire, à toutes fins
utiles, effectivement, c'est gros ou c'est petit, tout dépendant du point de
vue qu'on se place, mais on est ici pour faire un travail, pour nous assurer du
respect de la dignité des personnes, des travailleurs, des travailleuses qui
sont lésés ou accidentés et éviter les dérapages. Puis moi, je dirais,
peut-être, pour terminer sur ce point-là, que... Le ministre dit : Ce
n'est peut-être pas nécessairement là qu'il y a les plus gros efforts de
déjudiciarisation à faire. Bien, moi, je pense que chaque effort compte, chaque
effort compte. Si on peut s'assurer qu'il n'y a pas une dérive du BEM, puis le
ministre a été très clair, là, d'un statut scientifique à un statut juridique,
bien, on aura toujours bien gagné ça, parce que, si c'est scientifique, il faut
que ce soit purement scientifique. Et, présentement, avec le projet de loi que
nous avons, le chapitre ou les articles qui touchent le BEM, je ne suis pas
convaincu qu'on règle ce problème-là.
Alors, tout
ça pour dire — la chute
finale — moi, je
vais appuyer les amendements du député... l'amendement du député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour les
raisons qu'il faut brasser la carcasse du BEM pour le bien des travailleurs
puis des travailleuses, et pour le bien de notre système, et aussi pour
déjudiciariser. Voilà. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci.
M. Boulet : Rapidement, puis de façon un peu télégraphique, brasser une
carcasse au détriment des employeurs, je ne peux pas adhérer à ça. Mettre de la
pression additionnelle avec la collaboration
du Comité consultatif travail et de la main-d'oeuvre, ça, je vais
poursuivre dans cette direction-là. Puis, vous le dites bien, c'est la multiplicité
des efforts qui font qu'on atteint des objectifs, notamment, en matière de
judiciarisation. La dérive, je pense qu'on a évité ça. Le tableau de suivi des
recommandations, bien sûr, je vais demander à mon équipe de s'assurer de vous
le faire parvenir puis d'en transmettre copie, bien sûr, aux collègues
d'Hochelaga-Maisonneuve et Nelligan.
Enfin, dernier commentaire, pour chaque
M. Caron, il y a une petite entreprise membre de Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante. Il y en a énormément, de petits qui vivent un
stress, différent, mais qui sont contraints
de vivre dans la bureaucratie, dans les cotisations sur les masses salariales
et autres, puis qui doivent compléter des
formulaires. Ce n'est pas simple. Puis, en plus, l'employeur, vous le savez, il
a un devoir, en vertu de la loi, d'assister le travailleur, il a un
devoir d'assistance pour lui permettre de compléter les formulaires de
réclamation puis, bon, de signer tous les
avis puis réclamations. Puis ce n'est pas simple pour les membres, mais je
dis : Il faut penser à M. Caron puis il faut penser aux
petites entreprises aussi. Merci, hein, de votre...
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres
interventions sur l'amendement? Député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Puis je salue d'avance le député de Jonquière, qui annonçait qu'il
allait appuyer mon amendement. C'est apprécié.
Puis moi aussi, je veux rebondir rapidement sur
ce qu'il a évoqué, également, le rapport de la Commission de l'économie et du
travail. On en a parlé rapidement hier, là, c'est vrai qu'une recommandation
qui est importante, sur laquelle, en fait, j'ai basé cet amendement, qui est
la... un, deux, trois, quatre... cinquième, que seule la Commission de la santé et de la sécurité du travail puisse
demander au Bureau d'évaluation médicale d'émettre un avis, c'est précisément
l'effet recherché de l'amendement dont on est en train de discuter. Puis, si on
va à la fin de ce rapport-là, là, de décembre 2006, on voit la collègue du
député de Jonquière, Mme Lorraine Richard, députée de Duplessis, qui
était là à l'époque, on voit aussi, puis je l'ai souligné également,
M. Karl Blackburn, qui était député de Roberval, qui est aujourd'hui rendu
à la tête du Conseil du patronat. Je ne sais pas si le Conseil du
patronat appuie cette recommandation-là, il faudra leur demander, ils nous
donneront leur avis en temps et lieu.
Cela étant dit, je ne sors pas ça
d'un chapeau, là. C'est quelque chose sur lequel on est allé plonger dans le passé, parce que c'est quand même un vieux débat,
l'existence du BEM. Tellement vieux — puis ça sera probablement ma dernière intervention, Mme la Présidente — qu'il y a un rapport qui date du 6 mai 1994. J'étais-tu
rendu au secondaire, moi, en 1994? Je
n'étais pas loin, je n'étais pas loin, j'y arrivais. L'année après la dernière
coupe Stanley du Canadien, aussi,
faut-il le mentionner? Peut-être que c'est cette année qu'on
repart le bal, un nouveau marqueur. Bref, la déjudiciarisation du régime
québécois de santé et sécurité du travail, je vous lis un extrait d'une page,
là, qui est assez fascinant au regard du
débat qu'on a ici aujourd'hui : «L'analyse du processus décisionnel en matière médicale. Le comité s'est longtemps penché sur la question
de l'évaluation médicale, d'abord en raison du nombre des contestations qui en découlent, mais aussi parce que les
personnes rencontrées ont critiqué cette mesure. Il paraît clair que la
structure de fonctionnement qu'impose la loi s'appuie sur le souci
d'obtenir, à l'égard d'une question médicale, une décision guidée par un professionnel de la santé impartial
et indépendant de la commission. Sa structure comporte toutefois certains
éléments déclencheurs d'affrontement.
«Le médecin désigné
par la CSST, conformément à l'article 204 de la LATMP, est le plus souvent
perçu comme un adversaire du médecin qui a
charge du travailleur. Ainsi, dès le début du processus, tend à s'installer un
climat de méfiance et de confrontation plutôt que de concertation. Le
ton est donné à la suite du dossier, toutes les décisions ultérieures seront
perçues comme hostiles et systématiquement contestées.
«Donc, du simple fait
du processus en place et sans que personne ne soit à blâmer, le système actuel
oriente les parties vers une attitude de
confrontation. Il a également lieu de mentionner qu'un régime fondé sur la
confrontation d'avis médicaux modifie la finalité de l'expertise
médicale, alors que la véritable fonction de l'expertise médicale est de servir le diagnostic et de soutenir le
traitement adéquat. Elle devient, dans le processus actuel, un instrument
servant à l'arbitrage des différends.»
Je
termine, Mme la Présidente, avec un autre extrait, parce que, là, après ça, ils
font des recommandations, notamment...
La Présidente
(Mme IsaBelle) : ...minute.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. «Le système actuel favorise la surenchère des
expertises médicales, dont les parties
doivent assumer les frais et les inconvénients. Ce chassé-croisé d'expertises
cristallise les divergences d'opinions entre médecins. De plus, le nombre des
expertises médicales demandées dans le contexte du processus actuel
constitue un frein à l'obtention rapide d'une décision finale en cette matière,
ce qui ne favorise personne et entraîne un coût social exagéré.»
1994, Mme la
Présidente, un rapport qui a été administré par la... commandé par la CNESST.
On pourrait redire mot pour mot ce qui a été
écrit là en 1994. J'aurais aimé ça qu'on ait... On a eu un bon débat
aujourd'hui, je le salue. On l'a finalement fait en après-midi plutôt
qu'en matinée, ce n'est pas grave, on l'a fait, c'était l'essentiel. Et voilà, moi, je voulais me battre pour qu'on avance, pour
qu'on avance dans la défense des travailleurs, travailleuses. J'aurais
souhaité qu'on ait une solution avec le BEM, mais voilà, ça aura été ma
contribution. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il d'autres
interventions? Alors, je comprends que, s'il n'y a pas d'autre
intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement déposé
par le député d'Hochelaga-Maisonneuve concernant l'article... ou le nouvel
article proposé à 61.1.
La Secrétaire :
Oui. Pour, contre, abstention. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve?
M. Leduc :
Pour.
La Secrétaire :
M. Boulet (Trois-Rivières)?
M. Boulet :
Contre.
La
Secrétaire : Pour les
membres du groupe parlementaire
formant le gouvernement,
Mme Jeannotte (Labelle)?
Mme Jeannotte :
Contre.
La Secrétaire :
Pour les membres de l'opposition officielle, M. Derraji (Nelligan)?
M. Derraji :
Abstention.
La Secrétaire :
M. Gaudreault (Jonquière)?
M. Gaudreault :
Pour.
La Secrétaire :
Et Mme IsaBelle (Huntingdon)?
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté, nous... Oui, député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc :
On va vous envoyer un nouveau 61.1, Mme la Présidente. On peut suspendre
très rapidement, deux petites minutes.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui. Est-ce qu'il est déjà rédigé? Non?
M. Leduc :
Oui.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Oui? Alors, nous allons suspendre quelques
instants.
(Suspension de la séance à 17 h 40)
(Reprise
à 17 h 55)
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, nous avons reçu un nouvel amendement de
la part du député d'Hochelaga-Maisonneuve. Je vous invite à le lire et à
l'expliquer s'il y a lieu.
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. L'amendement va comme suit : L'article suivant
est ajouté au projet de loi :
61.1. Cette loi est
modifiée par l'insertion, après l'article 216, du suivant :
«216.1. Ne peut agir
comme membre du Bureau d'évaluation médicale un professionnel de la santé ayant
déjà été radié par son ordre professionnel
en raison d'un geste posé alors qu'il agissait comme membre de ce bureau.»
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Merci. Y a-t-il des explications?
M. Leduc :
Oui. Là, je comprends, par contre, qu'il y a des vérifications du côté de la
partie gouvernementale, mais, en gros, c'est pas mal ce qui est écrit là, en ce
sens où on veut s'assurer, pas nécessairement que ça soit quelque chose qui est
arrivé très fréquemment, mais que, si un membre du BEM, surtout si on... bon,
là, on ne l'a pas aboli, là, on n'a pas permis d'aller réduire la portée de
l'outil du BEM d'un point de vue de groupe du patron... de patronaux... voyons,
de groupes patronaux, pardon, et, bon, alors, s'il est pour exister encore, le
BEM, il faudrait vraiment s'assurer qu'il y ait une confiance absolue envers
son impartialité.
Et, techniquement
parlant... Puis, au pire, peut-être qu'avec les vérifications qui seront
faites, là, dans la soirée, peut-être que, demain, le ministre nous corrigera
ou nous informera de ce qu'il peut exister déjà, comme procédure pour s'assurer
de ça, mais nous, on voulait, en tout cas, au moins, en le mettant au jeu comme
ça, s'assurer que, si une personne est radiée dans le cadre de quelque chose
qu'il a fait dans le cadre de son travail au BEM, bien, qu'il ne pourra pas
continuer à y siéger par la suite.
M. Boulet :
Écoutez, Mme la Présidente, moi, je vais saluer le mérite de cet amendement-là,
qui vise, bien sûr, à rassurer les travailleurs et les employeurs de la
parfaite probité et intégrité professionnelles des membres du BEM. Puis,
effectivement, comme le dit le collègue, dans la mesure où le BEM va continuer
à exercer des fonctions, soyons certains que c'est des personnes qui ont toutes
les habilités puis toutes les qualifications.
Et je vérifie, parce
qu'il y a une entente entre le Comité consultatif travail et main-d'oeuvre...
qui me recommande... il y a une entente entre le CCTM et le Collège des
médecins, et je veux voir, au niveau de la vérification diligente qui est faite
par le CCTM, avant de me faire recommander, ce qu'ils font à cet égard-là. Puis
on va le codifier. Moi, je souhaite qu'on puisse le codifier, là, à moins qu'il
y ait un obstacle technique que j'ignore, mais j'aimerais ça qu'on puisse
codifier le contenu de cette entente-là, parce que, sur le mérite, je l'ai dit
aux collègues, hors micro, je suis d'accord avec le contenu de l'amendement.
Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Y a-t-il d'autres interventions? Écoutez, il reste deux
minutes. Deux minutes. Oui, député de Jonquière.
M. Gaudreault :
Question un peu bête, là, est-ce que, pour être membre du BEM, il faut
nécessairement être membre d'un ordre professionnel? Est-ce qu'il y a des gens
qui agissent en matière de santé qui ne sont pas membres d'un ordre
professionnel?
M. Boulet :
Non, non, mais... quand j'aurai le contenu de l'entente, là, entre le CCTM puis
le Collège des médecins, je pourrai vous confirmer, mais il faut que tu sois
membre du Collège des médecins.
M. Gaudreault : Oui, mais il y a d'autres professionnels qui
agissent? Est-ce qu'il y a d'autres professionnels qui peuvent agir?
M. Boulet :
Est-ce qu'il y en a d'autres?
M. Gaudreault :
Des physiothérapeutes, des...
M. Boulet : Seulement des médecins. Pour l'évaluation
médicale, là, pour les cinq volets de l'article 212, ce ne sont que
des médecins.
M. Gaudreault :
O.K. Il n'y a pas de travailleurs sociaux, de...
M. Boulet :
Non. Non, mais ça, on a élargi, là, suite à la loi... c'était-tu la loi n° 6,
là, pour la désignation du professionnel de
la santé, là? Le médecin qui s'occupe du travailleur, ça peut être autre chose
qu'un médecin, là, puis dans certaines
circonstances, mais, pour être un membre du Bureau d'évaluation médicale,
il faut absolument être un médecin.
M. Gaudreault :
O.K.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Parfait. Il n'y a pas d'autres interventions?
Bien, écoutez, compte tenu de l'heure... Je vous remercie, d'abord, pour la
belle collaboration que nous avons eue aujourd'hui. Je vous remercie.
Et, compte tenu de l'heure, bien, la commission
ajourne ses travaux sine die. Je vous invite à bien faire... à bien dormir
cette nuit, parce que, demain, nous aurons une longue journée.
(Fin de la séance à 17 h 59)