(Onze
heures quatorze minutes)
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, bonjour à tous et à toutes. À l'ordre, s'il
vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je
demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 53, Loi
actualisant la Loi sur les décrets de convention collective en vue
principalement d'en faciliter l'application et de favoriser la
transparence et l'imputabilité des comités paritaires.
M. le secrétaire,
est-ce qu'il y a des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lamontagne (Johnson) est remplacé par M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière).
Remarques préliminaires
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, nous débuterons cet avant-midi par des remarques
préliminaires puis nous entendrons les
organismes suivants : la Fédération des travailleurs et travailleuses du
Québec, et la Confédération
des syndicats nationaux conjointement avec la Centrale des syndicats
démocratiques.
Alors, pour les
remarques préliminaires, la répartition du temps, c'est un total de 12 minutes.
Pour Mme la ministre, ça sera six minutes;
pour l'opposition officielle, 3 min 30 s et le deuxième groupe d'opposition, 2
min 30 s. Donc, nous débutons avec les remarques préliminaires de
Mme la ministre.
Mme Dominique Vien
Mme
Vien : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Bon matin à chacun et à chacune. On étudiera, au
cours des prochains jours, le projet de loi n° 53, qui améliore la
Loi sur les décrets de convention collective.
Actuellement, au Québec, la Loi sur les décrets de convention collective
touche 75 000 salariés,
2 300 artisans et 8 700 employeurs. On compte 15 décrets en
vigueur, notamment dans l'entretien d'édifices publics, dans les services
automobiles et chez les agents de sécurité. Ces décrets sont administrés par
des comités paritaires, qui sont formés de représentants syndicaux et
patronaux.
Cette
loi est plus âgée que n'importe qui d'entre nous ici aujourd'hui. En effet,
elle est née en 1934, dans le sillage de la grande dépression. Le
ministère du Travail a été créé, quant à lui, en 1931. La Loi sur les décrets
de convention collective, c'est la première législation
générale en matière de travail au Québec. Elle était là bien avant la Loi sur les
normes du travail, qui ont vu le jour en
1979, et même bien avant le Code du travail, qui, lui, date de 1964. La loi n'a
pas été révisée depuis 20 ans et le moment est venu de la revisiter.
Ce
que nous proposons dans le projet de
loi n° 53 est le fruit d'un
large consensus à la suite de négociations... pardon, de consultations. Les ajustements proposés
permettent notamment de simplifier le processus de modification d'un décret, d'améliorer la transparence,
la gouvernance et la reddition de comptes des comités paritaires et de confier
au Tribunal administratif du travail, communément appelé le TAT, le soin
d'entendre les litiges portant sur les champs d'application
d'un décret. De façon plus détaillée, un recours pourrait désormais être intenté
au Tribunal administratif du travail
à l'encontre d'un comité paritaire si celui-ci, dans l'exercice de ses
fonctions, a agi de mauvaise foi, ou encore d'une manière arbitraire, ou
discriminatoire ou s'il a fait preuve de négligence grave à l'endroit d'un
salarié ou encore d'un employeur. Et je
précise aussi que le projet de loi propose de confier au TAT plutôt qu'aux
tribunaux civils les litiges portant sur
l'application d'un décret. Nous voulons, de cette façon, que les procédures
soient plus rapides et moins coûteuses.
Nous
avons également prévu accroître la transparence des comités paritaires. Le
projet de loi détermine quels sont les
renseignements qui devraient être versés ou encore publiés dans le site
Internet Web, donc, d'un comité. Il prévoit la publication de divers documents administratifs, tels que le rapport
annuel, les états financiers vérifiés et les prévisions budgétaires, ce
qui n'existerait pas à l'heure actuelle.
La
ministre serait autorisée à définir des directives visant
la saine gouvernance des comités, notamment de se doter
de codes d'éthique et à nommer des observateurs chargés d'assister à leurs
séances.
Le
projet de loi propose aussi de confier à la ministre
la responsabilité d'approuver, par arrêté ministériel — c'est nouveau — les modifications à un décret de convention
collective. Ces changements visent à réduire les délais et les coûts de traitement des requêtes. C'est simplement...
et, disons-le, de la simplification réglementaire. Je tiens à préciser
que des modifications mineures doivent actuellement être approuvées par le
Conseil des ministres, ce qui, à sa face même, passez-moi l'expression
anglaise, vient alourdir beaucoup le processus.
De plus, le projet de loi propose aussi d'actualiser les amendes imposées en cas d'infraction à
la Loi sur les décrets de convention collective. Certaines n'ont pas été
augmentées depuis 30 ans.
Nous n'avons pas oublié le volet formation
et de la main-d'oeuvre... de la main-d'oeuvre, pardon. Dans le projet de loi, il est
prévu qu'un décret puisse contenir toute disposition pour rendre obligatoire
l'obtention d'un certificat de qualification
pour exercer un métier ou encore une profession. On fait référence ici à un
programme établi en vertu de la Loi
sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre. Des dispositions sont aussi prévues pour permettre aux comités paritaires de
poursuivre leurs activités de formation continue.
Voilà,
M. le Président, ça résume, de façon succincte, bien entendu, les
objectifs, l'objet du projet de loi
n° 53, qui est connu, comme projet de loi, puisque tous les partenaires du
milieu, évidemment, y ont été associés, d'une façon ou d'une autre, dans l'élaboration de ce projet de
loi, soit par des consultations ou autres, notamment au comité consultatif sur la main-d'oeuvre.
Alors, je suis prête maintenant, après les remarques de mes collègues, à
entendre les commentaires de nos invités.
• (11 h 20) •
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la ministre
du Travail, députée de
Bellechasse. Je vais maintenant passer la parole à M.
le député de Richelieu pour 3 min 30 s pour... de l'opposition
officielle pour vos remarques préliminaires.
M. Sylvain Rochon
M. Rochon :
Merci, M. le Président. Mme la ministre, collègues de la deuxième opposition,
députés du parti ministériel, collaborateurs. Mes remarques seront brèves, M.
le Président.
Nous sommes ici en
mode écoute. Il y a en effet près de 20 ans — la ministre le
rappelait — que
le dernier exercice de révision de la Loi
sur les décrets de convention collective se déroulait. Cette loi, elle est
importante puisqu'elle détermine les
conditions de travail et de la main-d'oeuvre de plusieurs secteurs d'activité
généralement soumis à une forte concurrence.
Je sais qu'il y a des apôtres de l'abolition de cette loi, mais, comme le
faisait remarquer Michel Grant, qui est professeur à l'UQAM, elle pourrait signifier, cette abolition, une
baisse des conditions de travail et de la main-d'oeuvre.
Le ministère a
amorcé, en 2009, un processus de réflexion, hein, sur le rôle et la place de
cette législation à l'intérieur du système de relations industrielles
québécois, puis, en 2012, des travaux de révision de la loi. Un avis, d'ailleurs, a été demandé au comité consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre, lequel a été remis au ministre en
décembre 2014. Ils ont permis, ces travaux,
de dégager plusieurs consensus entre les représentants patronaux et syndicaux
du comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, dont notamment
celui de la nécessité de moderniser la loi actuelle et de renforcer la gouvernance et la transparence des
comités paritaires. Le 26 mai 2015, le ministre du Travail de
l'époque a présenté ce projet de loi pour
actualiser la Loi sur les décrets de convention collective, qui s'appuie sur le
consensus du Comité consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre... qui s'appuie généralement, je dois nuancer,
parce que, des groupes nous feront remarquer, au cours de nos
consultations, d'autres articles dérogent un peu de ce consensus ou encore n'en
sont pas nés.
Alors,
c'est pour ça que je dis que nous serons en posture, là, vraiment d'écoute
pour, de façon très constructive, voir comment il pourrait être possible
d'améliorer le projet de loi que nous avons à examiner. Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de
Richelieu, porte-parole de
l'opposition officielle en matière de
travail. Alors, je passerais maintenant la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière pour
2 min 30 s... du deuxième groupe d'opposition.
M. Marc Picard
M. Picard :
Merci, M. le Président. Bon matin à tous. Tout comme mon collègue, j'ai analysé
le projet de loi. On a eu un briefing technique aussi, Mme la ministre.
Merci pour le briefing technique, mais... en tout cas, nous avons été informés
qu'il y a eu un travail de fait en sous-comité du... c'est le CCTM, là, le
Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.
Et puis moi, j'avais vraiment l'impression qu'il y avait un consensus puis hier
j'ai commencé à lire les mémoires et
je vois que le gouvernement a fait d'autres choix. Puis ça, c'est son rôle, le
gouvernement, là. Et je comprends que,
lors des auditions, il y a des gens qui vont nous dire que ça ne respecte pas
le consensus, et aussi différents groupes vont argumenter pour avoir qu'est-ce qu'ils auraient aimé avoir dans le
consensus qu'ils n'ont pas eu. Donc, en tout cas... mais ça me fait penser un peu, lorsqu'on a eu le même
exercice avec le député de Louis-Hébert sur un projet de loi, là, il y a
quelques mois.
Mais,
comme d'habitude, moi, je suis là pour être constructif, essayer de trouver le
meilleur système possible pour ces
comités paritaires là. C'est vrai que ça fait 20 ans qu'on n'a pas touché à
cette loi, mais je vais avoir aussi certaines questions sur les pouvoirs
qui sont attribués à la ministre, là, puis...
Parce
qu'hier on ne m'a pas convaincu. Tantôt, la ministre a repris le même argument
sur le fait que ça soit plus rapide, le fait que ça ne passe pas au
Conseil des ministres, là. La seule explication qu'on a eue hier, c'était
durant la période estivale, là, parce qu'il
va y avoir quand... même si ça ne passe pas au Conseil des ministres, il y a
quand même, je dirais, une ronde de
consultations qui sera faite de façon sélective par la ministre, là. Mais ça ne
m'a pas convaincu. Mais, en tout cas,
on verra, là. Dans le cours des choses, on évolue toujours. Donc, vous allez
peut-être réussir à me convaincre.
Donc, M. le
Président, je termine mes remarques préliminaires là-dessus. Merci.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
Auditions
Alors, nous allons maintenant commencer les
auditions. Pour votre information, la durée de l'exposé est de 10 minutes, et puis la période d'échange avec les
parlementaires est de 32 minutes,
puis trois minutes pour la présidence. Alors, étant donné qu'il n'y a
pas de député indépendant, le gouvernement aura 16 minutes, l'opposition
officielle 9 min 30 s et le deuxième groupe d'opposition
6 min 30 s.
Alors, bonjour. Donc, présentez-vous, avec
l'organisme, et puis vous avez 10 minutes de présentation.
Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
M. Cadieux (Serge) : Merci, M. le
Président. Je suis Serge Cadieux, secrétaire général de la FTQ. Je suis
accompagné de Me Jean-François Beaudry, qui représentait la FTQ sur le
sous-comité du CCTM, qui a produit un avis
sur les modifications à être apportées à la Loi sur les décrets de convention collective en décembre 2014. Bien, dans un premier
temps, j'aimerais souligner... Bien, j'aimerais aussi remercier les membres de
la commission de nous inviter pour faire valoir le point de vue de la FTQ.
Vous savez, parce que
vous nous voyez souvent, la FTQ est une centrale syndicale importante au Québec.
Nous représentons 600 000 travailleurs et travailleuses dans
l'ensemble des secteurs d'activité économique et dans toutes les régions québécoises. La FTQ représente un très
grand nombre de personnes syndiquées qui sont assujetties au régime d'extension juridique des conventions collectives,
aussi connu sous le nom de régime des décrets de convention collective. Pensons notamment aux secteurs suivants : les services automobiles, l'entretien d'édifices
publics, les agents de sécurité, le
camionnage, l'enlèvement des déchets solides, l'installation d'équipements
pétroliers, les matériaux de construction, la menuiserie métallique, le verre. Ce régime revêt donc une importance
particulière pour les membres que nous représentons, mais également pour le maintien de conditions de travail décentes pour l'ensemble des travailleurs et travailleuses concernés.
Le projet de loi n° 53, présenté en mai 2015, découle de plusieurs
démarches, dont... Vous l'avez mentionné en introduction. Dans un premier
temps, le ministère du Travail a mené en 2012 des consultations pour mettre à jour la Loi sur les décrets de convention collective. Le
rapport qui en a résulté a constitué la base des discussions pour les
travaux d'un sous-comité du CCTM, et, je
dois le mentionner, le CCTM a examiné les 46 recommandations qui émanaient
du ministère du Travail. Donc, il
n'y a rien qui a été escamoté, les
travaux ont vraiment porté à partir des 46 recommandations qui ont été faites. Et le
CCTM arrivait avec un avis unanime qu'il présentait au ministre
en date du 14 décembre 2014. Donc, ce
n'est pas rien. Les gens qui sont couverts par la loi, c'est... sur le régime
des décrets de convention
collective, c'est-à-dire les employeurs et les associations de travailleurs, les syndicats, tout le monde s'est entendu,
donc il y a eu un consensus
complet là-dessus. Bon.
D'une façon générale, évidemment, on salue le projet
de loi n° 53 là où le gouvernement a transcrit, dans un projet de loi, le consensus des parties. Ça, c'est évident. C'est un petit peu comme si les parties négocient une convention collective,
c'est la loi des parties, et que le gouvernement le transposait dans une loi. C'est juste normal,
c'est les parties qui sont impliquées là-dedans.
• (11 h 30) •
Toutefois,
nous estimons que des modifications sont nécessaires avant l'adoption
de ce projet de loi. Plusieurs de ses dispositions vont clairement à l'encontre de la philosophie qui sous-tend le
régime des décrets de convention
collective. Dans certains cas, le ministère fait fi des consensus dégagés par
les travaux du CCTM pour s'arroger de nouveaux pouvoirs qui visent entre autres à modifier le contenu des décrets et à
s'immiscer dans la gestion des comités paritaires. Dans un contexte où les parties du CCTM ont
travaillé ensemble pour établir des consensus, nous nous expliquons mal
ces décisions, qui, selon nous, n'améliorent pas le fonctionnement du régime
des décrets de convention collective.
Et ici, là,
j'apporterais une clarification. On peut comprendre, quand le ministre
demande un avis aux partenaires, aux
gens qui sont visés par une loi en
particulier — ça ne vise pas l'ensemble des citoyens,
ça vise des salariés particuliers, des
groupes particuliers — et
qu'un consensus sur les modifications à être apportées... et que ce consensus-là
n'intervient pas, exemple, dans les finances publiques, moi, je peux comprendre
que, s'il y a un consensus qui demande au gouvernement
d'injecter de l'argent pour créer un nouveau service à la population ou un
nouveau service à la clientèle qui
est couverte par la Loi sur les décrets de convention collective, là le
ministre doit faire des arbitrages et qu'il y a une décision qu'il doit prendre. Mais, à partir du
moment où les parties arrivent à un consensus, la FTQ s'explique mal que
le ministre prenne plutôt l'avis du
ministère du Travail, qui avait fait un travail de déblayage en premier, là, en
2012, mais que ce travail de
déblayage là n'a pas abouti à un consensus entre les parties, surtout quand ça
n'implique pas de l'argent de l'État,
que ça vise uniquement les employés et les employeurs touchés par la Loi sur
les décrets de convention collective.
Vous savez,
au cours des dernières années et depuis 2008, j'ai siégé sur plusieurs
sous-comités du CCTM à la demande
d'avis des différents ministres du Travail qui se sont succédé. Et on constate
de plus en plus que le ministère du Travail
a pris la fâcheuse habitude de centraliser plus les décisions auprès du
ministère plutôt que d'accueillir favorablement les compromis qui ont été trouvés entre les parties. Et, je le répète,
là, je comprends que le pouvoir du ministre peut et doit être exercé
dans le cas où les parties ne s'entendent pas. C'est sûr qu'il y a un arbitrage
à faire et que le ministre doit trancher sur
un bord, ou sur l'autre, ou dans le milieu, en fait au meilleur de sa
connaissance, c'est normal, mais, à partir du moment où il y a un consensus qui n'amène pas des déboursés de la part
des finances publiques, qui concerne vraiment... parce que les comités paritaires sont financés par les parties, là, on
s'entend là-dessus, là, ce n'est pas le gouvernement qui met de l'argent
là-dedans, alors donc, honnêtement, on trouve ça malheureux.
Et,
je vous le dis, là, ça peut décourager les gens qui siègent, des partenaires,
là, autant patronal, syndical... Ce discours-là,
vous n'allez pas l'entendre uniquement de la partie syndicale, vous allez
l'entendre aussi de la partie patronale, là, ça peut décourager les parties qui siègent.
Ils ne sont payés pour siéger là-dessus, là, les parties, pour essayer de
trouver des solutions, puis qu'on met ça de
côté. Moi, je demande que le gouvernement... et je demande à la ministre
d'examiner ça avec une grande attention, là,
c'est l'occasion qu'on a aujourd'hui de le lui rappeler. Puis, vous allez le
voir, dans notre lettre mémoire, il
n'y a pas juste deux, trois endroits où il y a eu des consensus et où ça a été
écarté; vous l'avez, dans le bas de la page 2, là, l'ensemble des
articles de notre mémoire, l'ensemble des articles qui ont été écartés.
Donc,
avec le projet de loi n° 53, le ministre du Travail s'arroge de nouveaux
pouvoirs, ce qui est en opposition complète
avec l'esprit de la Loi sur les décrets de convention collective. D'abord, le
ministre obtient le pouvoir de réviser la
pertinence du champ d'application de toute disposition d'un décret à la demande
des parties. Cette situation n'est pas acceptable,
selon nous. Pourquoi le gouvernement souhaite-t-il mettre en place une telle
mesure alors que le CCTM... qui est arrivé
à un consensus voulant que le contenu des ententes susceptibles de faire
l'objet d'une extension juridique ne soit pas révisé? Nous estimons que de tels pouvoirs viendraient mettre en
péril la stabilité des rapports autant au sein des comités paritaires qu'entre ces derniers et les
assujettis. De plus, nous craignons que cela ne compromette le maintien des
décrets puisque l'opposition d'un seul
intervenant pourrait mener à la révision de leur contenu. La FTQ demande donc
que les contenus des décrets de convention collective ne puissent être
révisés par la ministre.
Ensuite,
le projet de loi permet au gouvernement d'adopter un règlement afin de définir
les termes et expressions qui y sont
utilisés ou préciser les définitions prévues au présent article. Une telle
disposition, nous le craignons, pourrait permettre de réduire le nombre de personnes salariées et d'employeurs
assujettis aux décrets de convention collective. Aussi, cela donne la
possibilité de rouvrir le débat concernant l'inclusion des artisans à la loi
alors que les parties ont clairement indiqué
ne pas vouloir aller dans cette direction. Bien que les définitions actuelles
ne soient pas parfaites, elles permettent
néanmoins de garantir un certain équilibre. Donc, conformément à l'avis du CCTM,
la FTQ demande qu'il soit permis au ministre de revoir ou d'actualiser
les définitions.
Finalement,
le projet de loi accorde des pouvoirs additionnels au ministre en ce qui a
trait aux règlements élaborés par les comités paritaires pour leur
fonctionnement. Le ministre peut établir des directives pour favoriser une
saine gouvernance des comités paritaires. Il est également en mesure d'abroger
ou de modifier tout règlement d'un comité paritaire
et il devient responsable de leur approbation alors qu'il s'agissait
précédemment d'une prérogative du gouvernement. Pourtant, l'octroi de
tels pouvoirs au ministre n'a jamais fait l'objet d'un consensus au CCTM. Les parties s'étaient toutefois entendues pour qu'un
règlement général soit adopté afin de fixer des balises pour les
règlements des comités paritaires.
La
FTQ estime que le futur règlement devrait être élaboré selon les
recommandations du sous-comité du CCTM et en collaboration avec les
parties prenantes.
Donc, c'est tout le
temps que j'ai. On aura l'occasion d'échanger...
Le
Président (M. Cousineau) : Avec les questions des
parlementaires, vous pourrez poursuivre. Donc, je passe maintenant la
parole à Mme la ministre pour les 16 prochaines minutes. Merci, M. Cadieux.
Mme
Vien : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, M.
Cadieux, maître, merci d'être là ce matin. J'aimerais savoir exactement,
M. Cadieux, pour quelle raison vous craignez tant que la ministre puisse
apporter des modifications. Puis je tiens à
préciser au passage également que ce n'est pas tous les changements, là, qui
emprunteraient la voix de l'arrêté
ministériel, je tiens à le rappeler, là, il y a certains domaines, il y a
certains éléments qui pourraient être touchés,
par exemple, qui continueraient à passer par la voie réglementaire, notamment
toute la question de la révision, par exemple, des définitions.
Qu'est-ce que qui vous chicote tant, M. Cadieux, à la FTQ, là-dessus?
M. Cadieux (Serge) : Ce n'est pas uniquement la FTQ, je vous dirais, parce que c'est la
position commune, tant des
associations d'employeurs que des associations syndicales. Je suis d'accord
avec vous, ce n'est pas tous les consensus qui ont été écartés qui
visent le pouvoir ministériel, là, il y a différents éléments, mais... Parce
que, vous savez, cette loi-là, c'est une loi qui vise les parties et il est
normal, comme le processus existait actuellement, que, s'il y avait des modifications à être apportées... et c'est la preuve
vivante, aujourd'hui, on est ici aujourd'hui pour voir des modifications
à la loi sur les régimes des décrets de
conventions collectives, qui n'a pas été revisitée depuis 20 ans. On ne
s'oppose pas à ça. Mais on dit :
Quand il y a une révision qui vient affecter les droits des parties, ça ne doit
pas être pris par une seule personne.
Ça doit suivre le processus normal d'un amendement législatif et ça doit être
soumis au jeu et les parties doivent avoir l'opportunité de faire valoir
leur point de vue là-dessus.
Mme Vien :
M. Cadieux, sauf erreur, vous me corrigerez, que ce soit dans un sens ou dans
l'autre, un arrêté ou évidemment un
règlement, il y a toujours les consultations de 45 jours à la Gazette
officielle, donc, une prépublication.
M. Cadieux
(Serge) : Sur un règlement.
Mme Vien :
Et un arrêté ministériel aussi. C'est ce qu'on me confirme ici.
M. Cadieux
(Serge) : Oui, oui, oui.
Le Président (M.
Poëti) : ... pour les fins de l'enregistrement, donc, M. Beaudry.
M. Beaudry
(Jean-François) : Oui,
bonjour. Je mentionnais qu'effectivement il y a une publication de 45
jours pour un arrêté.
Mme Vien :
Donc, une possibilité pour les groupes, les gens intéressés à s'opposer, ou à
apporter des commentaires, ou à nous
faire part de leurs observations sur un enlignement ou un changement que
voudrait apporter le ou la ministre.
• (11 h 40) •
M. Cadieux (Serge) : Oui, mais c'est
très différent. Le processus est très différent, hein? Puis, quand il y a une
modification au règlement, qu'on le met dans la Gazette officielle, on
fait valoir notre point de vue par écrit, il n'y
a pas de commission parlementaire, c'est un processus qui est différent d'un
amendement législatif. On va en convenir, là, on va en convenir tous les
deux.
Donc, nous,
on pense que, de toute façon, ça a bien servi par le passé, il n'y a pas eu de
dérapage à ce niveau-là. On n'aime pas l'attitude ou le chemin que le gouvernement
semble de plus en plus prendre de donner le pouvoir à un ministre, puis je peux prendre l'exemple du projet de loi n° 10. Évidemment, on l'a décrié, on pense que ça ne
devrait pas être le chemin qui doit être pris, alors, autant pour cette loi-là
que pour plein d'autres lois.
Le Président (M. Poëti) : Mme
la ministre.
Mme Vien :
Vous avez soulevé qu'on a pris en considération davantage le point de vue du
ministère du Travail sur certains éléments plutôt que l'avis ou le
consensus qui est né des délibérations qui ont eu lieu dans le sous-comité du CCTM. Qu'est-ce qui vous fait penser ça? Et
qu'est-ce qui vous dérange dans le fait qu'on puisse considérer l'avis
du ministère du Travail? Je vais vous donner
mon opinion très claire là-dessus : on semble mettre en opposition l'avis
du ministère, les gens du ministère et les
gens qui siègent au CCTM. Je voudrais juste bien comprendre votre pensée là-dessus.
M. Cadieux (Serge) : Ma pensée
n'est pas compliquée, ma pensée n'est vraiment pas compliquée, Mme la ministre. Il y a des travaux qui ont été faits par
le ministère, des travaux qui ont été faits entre 2009, 2012. Il y a eu
des recommandations qui ont émané du ministère. Le gouvernement n'a pas cru
bon, à cette époque, de reprendre ces recommandations-là et de les mettre au
jeu pour un projet de loi, et je dirais que le gouvernement a eu la sagesse de demander aux partenaires ce qu'ils en pensaient,
et parce que ça les touche eux, ça les touche eux, ça ne touche pas les
autres citoyens du Québec. Ça touche les employeurs puis les travailleurs qui
sont visés par la Loi sur les décrets de convention collective, donc le monde
sur le terrain, le monde qui finance les comités paritaires, et ils ont
dit : Parfait, regardez, on... Et ces
gens-là ont fait un travail très sérieux, et ils ont examiné les
46 recommandations, et ils ont dit : Bien, là-dessus, on est d'accord. Il y en a qu'on est
allés de l'avant, que les parties sont allées de l'avant avec la
recommandation, mais il y en a d'autres qui ont dit : Bien, ce n'est
pas vraiment adapté à notre situation, donc on recommande de quoi de différent.
Et, moi, ce
qui me dérange, c'est qu'à partir du moment... et pas moi personnellement, ce
qui dérange la FTQ, c'est qu'à partir
du moment où on interpelle les joueurs de première ligne, les gens qui sont
visés par les modifications, quand on
sait que le ministère a fait un travail avant, mais que ça ne semble pas que le
gouvernement est préoccupé... Est-ce que ça, c'est vraiment ce que les
parties souhaitent? Et je salue cette décision-là, que vous avez demandé au
CCTM d'examiner ça. Et le CCTM vous arrive,
puis il dit : Bien, il y a un paquet d'éléments qui ont fait consensus.
Celle-là, moi, j'aurais tendance, Mme
la ministre, bien humblement, et en tout respect pour l'opinion contraire, à
partir du moment où il n'y a pas de
l'argent qui sort des coffres publics, les parties veulent ça, c'est eux qui
travaillent. Mais pourquoi chercher la
chicane quand les deux veulent ça? C'est un peu comme quand les deux parties
négocient une convention collective puis qu'ils s'entendent, je vois mal
quelqu'un de l'extérieur venir dire : Non, non, ça ne sera pas ça.
C'est la loi
des parties. À partir du moment où, là, on demande... que les parties ne
s'entendent pas, c'est votre rôle de
trancher, je le respecte, et on vous demande souvent, dans plusieurs dossiers :
Écoutez, on ne s'entendra pas, vous devez mettre de quoi au jeu, vous
devez trancher. C'est votre rôle comme élus, je ne mets pas ça en doute. Mais,
à partir du moment où on s'entend que ça ne
coûte rien au gouvernement, pourquoi ne pas aller de l'avant? Je veux dire, on
a de la difficulté à comprendre, ça ne fonctionne pas, ça, on ne peut
pas fonctionner comme ça avec les partenaires.
Le Président (M. Poëti) : Mme la
ministre.
Mme Vien :
Alors, M. le Président, moi, je vais passer la parole aux collègues. Il doit
certainement me rester un petit peu de temps si je voulais revenir à...
Le Président (M. Poëti) : Bien
sûr, il reste 8 min 50 s. Donc, M. le député de Richelieu, la
parole est à vous.
M. Rochon : Oui. Merci, M. le Président.
Merci, M. Cadieux, d'avoir produit ce mémoire et d'être là pour le défendre et nous aider à faire une bonne réflexion
utile à l'examen minutieux qui suivra, article par article, du projet de loi.
Alors, j'ai
bien compris que la FTQ souhaite que l'adoption de ce projet de loi mène à la
revalorisation du régime des décrets
de conventions collectives. Vous écrivez : «Plusieurs secteurs d'activité
économique pourraient bénéficier de ce
formidable outil de protection sociale, en particulier dans le secteur des
services où oeuvrent une proportion importante de femmes — vous
faites bien de le signaler — et où la syndicalisation est souvent plus
difficile. Dans un contexte où la hausse
des inégalités sociales freine la croissance économique, menace la stabilité de
l'économie, érode le tissu social, nous
sommes persuadés — écrivez-vous — que le régime des décrets de convention collective peut jouer un rôle
crucial dans une redistribution plus équitable de la richesse au Québec.»
Cette conclusion me rejoint, rejoint ce que
défend ma formation politique, sensible au sort des travailleuses et des
travailleurs.
Autre
chose qui me rejoint dans votre mémoire, c'est cette observation que vous
faites qu'au cours des dernières années
il y a une inquiétante tendance à la centralisation de la part du gouvernement, tendance à privilégier les décisions qui viennent d'en haut, hein, et tous secteurs confondus. J'observe ça
aussi. «Or — vous
dites — cette
approche ne peut s'appliquer au régime des décrets de convention
collective, qui repose sur le paritarisme — c'est un beau mot — et la
concertation.»
Vous avez des inquiétudes à l'égard des nouveaux
pouvoirs dont s'arroge le ministre, notamment celui de «modifier le contenu des décrets et à s'immiscer — là je reprends, là, votre texte à vous,
là — dans la
gestion des comités paritaires». Puis
vous dites : Ça n'a pas d'incidence financière sur le gouvernement. Il ne
devrait pas s'en mêler. D'accord. Mais
est-ce que cela n'a pas d'incidence, par ailleurs, sur les consommateurs, les
citoyennes et les citoyens du Québec, ce que ces décrets établissent?
J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Cadieux
(Serge) : Bien, vous savez,
comme on l'explique un peu dans... premièrement, ça vient aussi réguler
un peu la concurrence, hein, ça empêche la concurrence déloyale dans certains
secteurs d'activité. D'ailleurs, c'est la raison
pour laquelle, à l'origine, ça a été mis en place. Vous savez, on a un régime
qui est entre la Loi sur les normes du travail
et le Code du travail. Bon, c'est ce
régime-là qui existe depuis les années 30 et qui vient réguler. Et, à partir
du moment où on pense que, dans un secteur
d'activité économique... parce qu'il peut y en avoir d'autres, décrets, aussi,
ce n'est pas limité à ceux qui existent
actuellement... et à partir du moment où une ou des parties demandent
d'extensionner ça à d'autres secteurs, bien,
on va devoir faire la démonstration que, socialement et économiquement, c'est
correct, là, c'est rentable, qu'il y
a un équilibre qui est respecté. Et c'est la même chose la journée où on veut
en abolir un, on doit aussi faire cette
démonstration-là. Ça ne doit pas être pris uniquement... ça ne doit pas être
une décision ministérielle. C'est un régime, là, qu'on va mettre de
côté.
Je prends
l'exemple, dans l'Outaouais, là, pour le décret des coiffeurs de l'Outaouais,
ces gens-là, écoutez, sont déçus,
puis là, évidemment, vous parlez de femmes, il y a beaucoup de femmes, on
s'entend-u, dans ce secteur-là. C'est catastrophique pour ces gens-là
qu'il n'y ait plus de décret dans leur région, pour les travailleuses, les
travailleurs qui travaillent dans des salons
de coiffure dans l'Outaouais. Et évidemment, là, évidemment, c'est mis au jeu
dans le projet de loi. Évidemment, on n'est pas d'accord avec ça, mais
ça ne doit pas être une décision ministérielle.
M.
Rochon : Puisque vous faites
allusion au Décret sur les coiffeurs de la région de l'Outaouais, le motif
pour lequel le projet de loi propose
l'abrogation de ce décret, c'est celui qu'il est le seul qui doive son
existence à une exception prévue dans la loi. On nous dit, au ministère,
que, contrairement aux autres décrets — mon collègue de la deuxième opposition faisait référence tantôt à notre
briefing technique d'hier, là — il ne repose pas, celui-là, sur une
convention collective existante. Qu'est-ce
que vous avez à répondre à l'égard de ce motif pour lequel l'abrogation dudit
décret est proposée par le projet de loi?
M. Cadieux (Serge) : Je vais
demander à Me Beaudry de vous répondre parce qu'il a siégé sur les travaux.
• (11 h 50) •
M. Beaudry
(Jean-François) : En fait,
sur cette question-là, il n'y a
jamais eu de discussions en
sous-comité sur l'abrogation du
décret dans la coiffure. Mais ce que je peux vous dire, c'est que, de toute
façon, il existait d'autres formes de
conditions de travail qui s'appliquaient à un ensemble de personnes, et, cette
réalité-là, on la retrouvait dans le domaine de l'automobile. Et les conditions de travail qui étaient discutées
n'originaient pas d'une convention collective négociée
employeur-employés, mais bien d'une entente sur les conditions de travail qui
était issue des discussions en comité paritaire.
Et donc, à mon point de vue, cette exception-là dont vous faites mention ne
s'applique pas parce que, de
toute façon, il y avait déjà des pratiques dans le domaine qui permettaient, dans le fond, à un décret d'exister malgré le fait qu'il n'y avait pas de négociation
directe entre employeur et employés dans le sens d'une convention collective
initiale.
M. Rochon : Alors, je vous entends contester le fait qu'il
s'agisse, dans les faits, d'une exception, là, ou qu'il s'agisse d'une exception dans les faits. Mais, même si
c'était le cas, et que, cette exception, elle ait été prévue dans la
loi, y aurait-il quelque chose de neuf sous le soleil pour, aujourd'hui, la
faire disparaître?
M. Cadieux
(Serge) : Pas à notre connaissance, il n'y a pas de quoi qui vient faire en sorte qu'aujourd'hui on va l'abolir, là.
M. Rochon : «[La] ministre
obtient le pouvoir — nous
en parlions, là — de
réviser la pertinence du champ d'application
et de toute disposition d'un décret à la demande des parties.» Vous écrivez,
plus loin, après avoir fait cette remarque, votre crainte que «cela ne
compromette le maintien des décrets puisque l'opposition d'un seul intervenant pourrait mener à la révision de leur contenu».
Est-ce que je dois comprendre que, s'il s'agissait d'une opposition conjointe,
d'une demande conjointe, vos vues seraient différentes?
M. Cadieux (Serge) : Les
discussions au CCTM, Me Beaudry va répondre.
M. Beaudry (Jean-François) : Alors, sur cette question-là, effectivement,
lorsqu'on a discuté, en sous-comité, de cette question-là, tous les
intervenants ne souhaitaient pas qu'il y ait de révision des décrets par le
ministre. Mais les discussions portaient
strictement sur le fait qu'on ne souhaitait pas qu'il y ait de révision par le
ministre en cours de décret. L'objectif
fondamental était de s'assurer qu'il y ait stabilité dans les rapports et qu'on
s'assure que cette stabilité demeure. Maintenant, lorsqu'est arrivé le projet de loi, on
a intégré cette nouvelle disposition là, et nous, on l'a contestée, maintenant,
parce qu'elle est formulée de façon de
permettre à ce qu'une seule partie puisse intervenir et faire en sorte qu'un
décret pourrait éventuellement être modifié.
Le Président (M. Poëti) : Merci, M. Aubry. Le temps étant terminé, je
vais demander à la ministre si elle veut terminer son temps de parole
immédiatement ou, par alternance, laisser le député de la CAQ s'exprimer.
Mme Vien :
...
M. Picard :
Vous pouvez le dire fort, je suis gentil, là.
Mme Vien :
Non, non. Par gentillesse, je vais vous laisser la parole.
M. Picard :
Merci, Mme la ministre. Merci, M. Cadieux, et maître.
Dans
le mémoire... bien, je comprends, comme je disais tout à l'heure, mais je
comprends que, ce que vous nous dites, il y a eu un travail de fait au
sous-comité, et là, dans le projet de loi, vous retrouvez certaines choses,
mais le ministère, là, a amené d'autres
sujets ou d'autres angles sur un document qui existait depuis déjà quelques
années, qui avait été travaillé.
Dans votre mémoire, à
la page 2, je voudrais avoir une précision, là, au deuxième alinéa,
deuxième phrase, vous dites : «Dans certains cas, le ministère fait fi des
consensus dégagés par les travaux du CCTM pour s'arroger de nouveaux pouvoirs qui visent, entre autres, à modifier
le contenu des décrets et à s'immiscer dans la gestion des comités paritaires.» Qu'entendez-vous par «s'immiscer dans
la gestion»? Là, ce n'est pas... Donc, j'aimerais avoir des précisions
là-dessus.
Une voix :
Me Beaudry.
M. Beaudry (Jean-François) : Oui.
Mais, en fait... C'est ça, c'est que, d'une part, la façon dont...
Les gens se sont posé la question.
On était d'accord et tout
le monde était d'accord
pour qu'il y ait un règlement général qui s'applique aux comités paritaires et qui soit décrété par le gouvernement. Mais, lorsqu'on a revu le projet de loi, d'abord,
c'était un pouvoir qui était donné au
ministre, le ministre pouvait même modifier ou abroger un règlement
des comités paritaires et il peut même
aller plus loin que ça, il peut même émettre des directives aux comités
paritaires de la façon de se comporter, et là ça va très loin. Alors, c'est non seulement le pouvoir réglementaire qui est donné au ministre,
non seulement le pouvoir de modifier ces règlements ou de les abroger, mais en plus de pouvoir
émettre des directives qui vont lier les comités paritaires, et, en ce
sens-là, on considère que le ministère s'ingère dans les affaires, ou pourrait
s'ingérer dans les affaires d'un comité paritaire.
M.
Picard : À votre connaissance, est-ce qu'il y avait eu des discussions avec le ministère,
disant... à un moment donné,
disons qu'il y avait un problème dans les travaux d'un comité
paritaire, puis dire : Bien là, si vous ne le réglez pas, on va
diriger, on va vous donner des instructions?
M. Beaudry (Jean-François) : ...discussions en sous-comité et on a proposé au ministre
et au ministère de faire en sorte qu'il y ait un observateur du ministère qui se présente aux assemblées et aux réunions du
comité. Et lorsqu'il y a... avec des pouvoirs même assez
grands, l'article 26 de la loi prévoit qu'une personne pourrait avoir des
pouvoirs d'un commissaire d'enquête, en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête. Et donc cette personne-là, c'est un
peu, dans le fond, une espèce de... sans être un tuteur, c'est quelqu'un
du ministère qui vient surveiller ce qui se passe. Et
nous, on considérait que c'était suffisant, il y avait consensus à cet égard-là
de la part de toutes les parties autour de la table.
M.
Picard : Au niveau... je vais attaquer l'angle de la
transparence, parce que, dans le projet de loi, on parle de la transparence et de l'imputabilité. C'est quoi vos
commentaires là-dessus, sur la transparence des comités paritaires, de
la gestion, des fonds, tout ça, là?
M. Beaudry (Jean-François) : Bien, en fait, il a été constaté effectivement
que, du côté des comités paritaires, on se retrouvait dans une situation
d'une loi quand même qui date de plusieurs années, qui n'avait pas été révisée
depuis 1996. Et, depuis ce temps-là, il y a
eu toute une mouvance au niveau gouvernemental pour permettre justement une
plus grande imputabilité, une plus grande
transparence, des règles de gouvernance plus structurées, et, en ce sens-là, on
était d'accord. Il y a des recommandations
qui visent la transparence sur, par exemple, les états financiers, les budgets,
qui sont les membres du comité
paritaire, qui siège sur un comité paritaire, etc. Et donc il y a une
ouverture, mais tout ça dans un contexte
encadré d'une réglementation encadrée et pour permettre aux gens de savoir...
et d'être mieux protégés et surtout de connaître comment fonctionne le
comité paritaire et, s'il y a lieu, de pouvoir réagir.
M. Picard :
Merci. Il reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Cousineau) : 2 min 9 s.
M. Picard : Deux
minutes? Merci. Au niveau de la nomination des gens du comité paritaire
actuellement, pouvez-vous expliquer comment ça se passe? Qui détermine
que telle personne représente la partie patronale, telle personne représente le
syndicat?
M. Beaudry (Jean-François) : Ce sont les parties qui désignent des représentants
en nombre égal, et donc siègent sur les comités paritaires des individus
qui sont identifiés par les parties.
M. Picard :
Ici, dans ma question, est-ce que c'est les travailleurs qui déterminent les
représentants, partie syndicale, que je vais mettre entre guillemets, et est-ce
que c'est les employeurs... parce que...
M. Beaudry (Jean-François) : Très souvent, ce sont les associations de
salariés qui désignent des représentants, et la même chose du côté des
employeurs. Ce sont leurs associations qui déterminent leurs représentants.
M.
Picard : O.K., c'est bon. Je vais revenir sur le comité
paritaire de l'Outaouais, là. Hier, j'ai posé la question au briefing technique puis je n'ai pas eu de... C'est
quoi votre feeling là-dessus, là, pourquoi on veut abolir le comité
paritaire dans l'Outaouais? Là, on nous
dit : Ça fait 20 ans, c'était une exception. Mais pourquoi qu'on ne l'a
pas fait avant? Je ne suis pas capable de comprendre pourquoi.
• (12 heures) •
M. Cadieux
(Serge) : M. Beaudry l'a dit, ça n'a pas été discuté dans les travaux
du comité. Moi, je pense qu'il y a une
partie qui l'a demandé, qui est la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante. Ça n'a pas été
discuté lors des travaux, et il y a
le dépôt du projet de loi, et on se rend compte que c'est là-dedans, et ça
n'a jamais été discuté. Bon. Pourquoi aujourd'hui? Je pense que c'est
une demande d'une partie puis qu'on y fait droit.
Le Président (M.
Cousineau) : 15 secondes.
M. Picard :
15 secondes. Je vais vous remercier pour votre participation. Merci.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. Mme
la ministre, il vous reste 8 min 50 s.
Mme
Vien : Oui, merci, M. le Président. Ma question s'adresse à vous, M. Cadieux. Est-ce
que vous jugez que les comités paritaires doivent faire preuve de plus
de transparence et améliorer leur gouvernance?
M. Cadieux
(Serge) : Oui, comme Me Beaudry l'a dit, et c'est dans ce sens-là
qu'on était d'accord pour les modifications qui sont apportées.
Mme
Vien : À ce qu'on me
laisse entendre, c'est que, par
exemple, sur toute la question de la transparence, tout ce qui est prévisions
budgétaires, rapports annuels, etc., ne figurerait pas, au moment où on se
parle, dans la grande majorité des cas, dans les sites Internet, ce qui
est maintenant rendu l'outil principal de transmission d'informations des
comités paritaires.
Là
où je veux en venir, c'est que qui devrait avoir l'autorité de leur dire ce qui
devrait se retrouver normalement sur
leurs outils de communication? Si ce n'est pas la ministre,
ça devrait être qui, puisque, jusqu'à aujourd'hui, sauf erreur, ils ne se sont pas autorégulés? Je ne porte pas de jugement, M. Cadieux,
j'essaie de comprendre. Qu'est-ce que vous avez à me répondre là-dessus?
M. Cadieux (Serge) : Bien, moi, ce que j'ai compris, c'est que les parties ont assaini, ont
apporté des mesures pour assainir des
bonnes règles de gouvernance et recommandent même que le ministère
puisse envoyer un observateur. Il me
semble qu'un observateur qui a un mandat de la ministre du Travail d'aller
voir ce qu'il se passe, si ça ne marche pas, la première qui va le savoir, c'est la ministre du Travail, et elle pourra prendre les décisions en conséquence. Il me semble que ça, ça doit satisfaire un ministre, en disant : Bien, s'il y a
des affaires qui retroussent, on a quelqu'un qui est là, qui est un observateur, qui... puis, évidemment,
ça donne le message aussi aux membres du comité paritaire, bien, qu'ils
doivent se comporter correctement.
Mme Vien :
Ça va être ma dernière question, M. le Président. M. Cadieux, comment on peut
augmenter l'imputabilité de ceux et celles
qui siègent au comité paritaire? Parce
qu'on parle beaucoup de gouvernance, on parle de transparence, on parle aussi d'imputabilité. Est-ce que c'est un concept
qui devrait faire partie des changements apportés puis, si oui, comment
on l'organise? Comment on fait atterrir ça?
M. Cadieux (Serge) : Ce n'est pas compliqué, Mme la ministre : par la réglementation,
par de la réglementation, pas par des
pouvoirs d'une seule partie. On encadre ça par des règlements, on le fait dans
plusieurs autres organismes, on le fait à la CNESST, on le fait... On le
fait pratiquement partout, là. On n'est pas en train de vous dire qu'on ne doit
pas encadrer les bonnes pratiques, la bonne
gouvernance. Mais ça, ça se fait par la loi ou par les règlements. C'est notre
position.
Mme
Vien : Bien, alors, si je comprends... puis je vous suis très
bien dans tout ce que vous m'avez dit aujourd'hui. Là, je pense, où le
bât blesse, c'est que vous n'êtes pas d'accord, peut-être pas sur le contenu,
mais sur le véhicule qui
est emprunté, c'est-à-dire que ce que vous souhaitez, c'est qu'on continue par
la voie gouvernementale, donc Conseil des ministres, etc., et qu'on
n'aille pas dans la voie de l'arrêté ministériel.
M. Cadieux
(Serge) : Vous m'avez bien compris, Mme la ministre.
Mme
Vien : Même si je vous assure que, dans les deux cas, il y a prépublication,
il y a donc consultation, vous maintenez que vous n'êtes pas en accord.
Parfait, merci.
M. Cadieux
(Serge) : Même à ça, le chemin actuellement suivi est le bon chemin.
Mme Vien :
Merci beaucoup, M. Cadieux. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la
ministre, merci, M. Cadieux, merci,
M. Beaudry pour votre participation à notre commission parlementaire.
Je
suspends pour quelques instants et je demande aux gens du groupe suivant de
bien vouloir s'approcher à la table, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à
12 h 5)
(Reprise à 12 h 7)
Le Président (M. Cousineau) : Alors, bonjour à tous et à toutes. Nous reprenons nos travaux. Alors,
nous recevons maintenant les gens
de la Confédération des syndicats nationaux et Centrale des syndicats
démocratiques. Donc, celui ou celle
qui va faire la présentation, vous vous présentez, et puis vous présentez les
gens qui vous accompagnent, et, comme le groupe précédent, vous avez
10 minutes de présentation. Par la suite, nous passerons aux périodes
d'échange. Alors, allez-y.
Centrale des syndicats démocratiques (CSD) et
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Mme Lévesque (Francine) : Merci, M. le Président. Alors, c'est moi qui vais
ouvrir la séance. Je suis Francine Lévesque,
vice-présidente de la CSN. Je suis accompagnée, à ma droite, de François
Vaudreuil, qui est président de la CSD, M. Guy Harvey, M. Normand Pépin
et, à ma gauche, François Enault et Claude Bernier.
Donc, bien, merci de
nous recevoir aujourd'hui pour faire le point avec vous sur nos réactions à
votre projet de loi n° 53. Alors, évidemment, nos deux organisations ont décidé de joindre leurs voix ce matin parce qu'étant parties prenantes toutes les deux de décrets dans le
secteur de l'industrie des services automobiles, or, on a donc
conséquemment... et au CCTM et également sur
le terrain, on partage une expérience commune qui nous permet aujourd'hui,
d'une même voix, de vouloir souligner l'importance à nos yeux de maintenir
la Loi sur les décrets de convention collective, mais également l'importance, évidemment, dans le contexte actuel, de
l'actualiser pour la rendre plus apte à répondre aux besoins des
travailleuses et des travailleurs sur le terrain, qu'ils soient syndiqués ou
qu'ils ne le soient pas.
On
pense que c'est important, cette loi-là, parce qu'elle permet très certainement
de rehausser de façon importante les
conditions salariales, mais les conditions de travail également des gens de ces
milieux-là, et, bien, c'est quand même quelque
chose qui est intéressant. Ça fait partie de nos missions sociales également de
nous préoccuper non seulement du sort des membres que nous représentons,
mais également des gens qui sont peut-être parmi les moins capables de se représenter,
là, parce qu'ils ne sont pas membres d'une organisation syndicale.
• (12 h 10) •
Donc,
pour nous, l'importance également d'actualiser cette loi-là repose sur
l'importance de maintenir, je dirais, ce
qui a caractérisé cette loi-là depuis 1934, date à laquelle elle a été adoptée,
suite à la grande dépression. C'était, dans le fond, pour permettre que, dans le milieu, sur le terrain, les
secteurs industriels qui sont concernés puissent continuer de se développer, mais pas simplement sur la base
qu'on va niveler par le bas les conditions de travail des gens qui
oeuvrent dans ces milieux-là, mais ça va se
baser, tout ça, sur, je dirais, une concertation qui va permettre de rehausser,
pour tout le monde, les meilleures conditions de travail, les meilleurs...
dans le fond, ce qui aurait été capable d'être conclu aux meilleurs qui puisse s'appliquer partout, de telle
sorte que la concurrence se fasse sur des bases, je dirais, peut-être
plus saines pour tout le monde dans l'industrie, pas simplement les patrons,
mais également l'ensemble des travailleurs.
Donc,
c'est ce qu'on pense qu'il est important de préserver dans la loi et c'est ce
qui nous a animés dans l'ensemble des
travaux auxquels on a participé au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre
et auxquels, dans le fond, on a continué de travailler dans la
réalisation et dans la rédaction de notre mémoire ici ce matin.
Or,
on va y aller très rapidement évidemment sur les éléments sur lesquels on pense
qu'il y a encore matière à bonifier des choses dans le projet de loi parce
qu'il y a beaucoup des choses qu'on a faites dans nos travaux qui ont été
retenues par la ministre. Mais on
pense qu'il y a peut-être des points sur lesquels on veut insister auprès de
vous pour continuer encore, ce matin, de vous convaincre qu'il faut travailler
encore plus à assurer le maintien de ce qui a caractérisé le milieu de travail visé par les décrets de convention collective, c'est-à-dire le
partenariat, la concertation, et évidemment un processus qui est
basé sur les meilleures pratiques en termes de relations de travail plutôt que
sur une judiciarisation des choses, des travaux.
Or,
c'est l'esprit qui nous a animés et, dès à présent, je vais céder la parole à
François, qui va y aller peut-être, lui, de façon plus précise sur les
éléments des recommandations qu'on vous a présentées.
M. Vaudreuil
(François) : Merci, Francine. M. le Président, Mme la ministre...
Le Président (M. Cousineau) :
...c'est?
M. Vaudreuil (François) :
Pardon? Vaudreuil, président de la CSD.
Le Président (M. Cousineau) :
Vaudreuil.
M. Vaudreuil
(François) : Alors, M. le
Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de l'invitation qui nous a été faite. Notre
présence ici, à la commission parlementaire, ce matin, est fort importante
pour nous parce qu'on considère que la Loi des décrets de convention collective
joue un rôle très important dans tout le
droit de l'emploi, le droit du travail. On veut saluer, féliciter évidemment
les consensus que vous avez
reconduits dans le projet de loi, les consensus qui ont été établis au CCTM. Il
y a certains éléments, certains irritants
qui, selon nous, ne devraient pas apparaître au projet de loi, et c'est ces
éléments-là dont je voudrais vous faire part immédiatement.
Le premier
élément, on vous demande que soit retiré du projet de loi le pouvoir du
gouvernement de définir les termes et
les expressions ou de préciser les définitions, qu'il respecte la
recommandation des parties au CCTM afin de ne pas revoir les définitions comme stipulé au CCTM; que soit retiré aussi
du projet de loi ou du moins, plutôt, là, que soit clarifié le texte qui permet aux parties
d'apporter des modifications au décret en tout temps. En fait, ce qu'on
voudrait essentiellement, dans ce texte-là,
c'est qu'il soit clarifié pour qu'on comprenne qu'il n'y ait pas
d'interprétation, mais qu'on comprenne que ce soit fait de façon
conjointe entre les employeurs et les représentants syndicaux.
Or, on vous
demande aussi que vous renonciez à donner au ministre la possibilité de réviser
toute disposition à un décret; que
soit retiré du projet de loi l'article obligeant le ministre à consulter tout
autre ministre qui lui paraît concerné ou
du moins qu'il précise que ladite consultation ne doit pas faire obstacle à la
volonté des parties de modifier le décret; que soit réécrit l'article 19 afin que ce soient les parties au
CCTM qui élaborent les directives visant une saine gouvernance, et ce, sous la gouvernance du CCTM, qui est le
lieu de concertation approprié; et enfin, le dernier élément, que soit
revu et réécrit l'article 24 du projet
de loi afin que des indications plus claires balisent la portée de l'arrêté
ministériel autorisant le ministre à
déterminer un processus de révision et que vous teniez compte du consensus des
parties au CCTM à l'effet de nommer
une personne représentant le ministère dont les fonctions et devoirs seraient
de recevoir, d'enquêter, de traiter et de faire rapport au ministre
relativement à toute plainte plutôt que de judiciariser par l'exercice d'un
recours devant le TAT. Or, voilà.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Il reste trois
minutes. Sinon, on va passer à la période de questions. Alors donc, Mme
la ministre, pour une période de 16 minutes.
Mme Vien : Merci
beaucoup. Bienvenue à vous tous,
merci de vous être déplacés ce matin. Je pose tout de suite ma question d'entrée de jeu : Qu'est-ce
qui vous inquiète dans le fait qu'on puisse vouloir revoir certaines
définitions, redéfinir certains termes? Au
ministère, par exemple, on me laissait entendre que certaines définitions,
d'une région à une autre, pouvaient
poser problème; notamment, si ma mémoire est bonne, c'est la définition d'«artisan». Qu'est-ce qui vous dérange?
Est-ce que ce soit, donc, la ministre qui procède ou qu'on touche aux définitions? Qu'est-ce qui vous chicote là-dedans?
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Lévesque.
Mme
Lévesque (Francine) :
Écoutez, ce n'est pas le fait de revoir certaines définitions qui nous
turlupine, c'est plutôt la manière
dont on va s'assurer qu'on prend en compte les opinions et qu'on fait
ensemble... on chemine ensemble, qu'on
fasse des travaux de façon conjointe. Vous savez, l'idée du paritarisme qui
est à la base même de cette loi-là, c'est ça qui nous interpelle le
plus. On veut absolument s'assurer que... Puis on sait que, des fois, le
diable est dans les détails, hein? On
veut absolument s'assurer que, si on a à actualiser des
définitions, bien, on fasse ensemble ces travaux-là au niveau des
comités paritaires, que les différentes composantes, les deux parties, tant
patronale que syndicale, on fasse ce
travail-là et qu'on convienne ensemble... C'est la meilleure manière, c'est
celle qu'on connaît qui nous amène aux
résultats les plus probants, à l'effet
que ce sera clair à ce moment-là de quelle manière on doit interpréter les
définitions en question. Or, dans le fond, c'est de s'assurer d'un processus, et c'est pour ça qu'on trouve qu'à
partir du moment où on fait ces travaux-là ensemble dans les lieux
appropriés paritaires, bien, on se questionne évidemment sur le fait que la ministre
ou le ministre puisse arriver d'autorité puis décréter, d'une
certaine façon, des définitions et des interprétations.
Mme Vien : En fait, ce qui
vous inquiète, c'est qu'on se lève un bon matin, on décide qu'on apporte un changement ou on ajoute une définition, on apporte
un changement — je ne sais pas quel cas de figure il peut
exister, là — et qu'on ne prenne pas la peine de vous
consulter, qu'on ne prenne pas la peine de s'asseoir avec vous et
qu'unilatéralement on procède. C'est ça qui vous inquiète?
Mme Lévesque (Francine) :
Absolument.
Mme Vien :
Qu'est-ce qui vous inquiète aussi dans le fait, François... M. Vaudreuil,
pardon, qu'on puisse vouloir aller
consulter d'autres... Moi, quand j'ai lu votre mémoire, ça m'a un peu surprise,
ça. Vous savez, quand on adopte des... on va au Conseil des ministres, on est obligés de
faire certaines vérifications auprès des jeunes, auprès de certains
groupes, à savoir : Est-ce que notre
règlement, le changement que l'on veut apporter dans quelque domaine que ce
soit... quels sont les impacts qui
pourraient exister pour, donc, des groupes ou etc., et on va avoir la prudence,
je dirais même des fois la sagesse
aussi, d'aller vérifier auprès d'autres collègues ministres : Est-ce que
ce que moi, je m'apprête à faire va créer un préjudice pour des clientèles dans un autre ministère? Peut-être que
j'ai mal compris ce que vous souleviez dans votre mémoire. Si vous
pouviez davantage m'éclairer puis préciser votre pensée là-dessus,
j'apprécierais.
• (12 h 20) •
M. Vaudreuil (François) : Belle
question. Je vais essayer d'y répondre le plus succinctement possible. Cette question-là s'adresse à ce que j'appellerais
l'économie des rapports collectifs au Québec, le modèle qu'on a
développé. Alors, le modèle qu'on a
développé au cours des dernières décennies au niveau des rapports collectifs de
travail repose sur, entre autres, un
des piliers, c'est sur la négociation des parties, c'est-à-dire les
représentants patronaux et les représentants
syndicaux, et ce cadre-là se fait d'une façon libre et en favorisant le plus
grand processus démocratique. Donc,
ça, c'est le fonctionnement de nos rapports collectifs au Québec et une
tendance actuellement, et on va prendre l'exemple qu'on vient de vivre,
là, ou pas qu'on vient de vivre, mais qu'on vit actuellement au niveau du
secteur des municipalités où on sort complètement de l'expertise de la
dynamique ou on sort complètement de l'économie des rapports collectifs des relations du travail qu'on a faites au Québec,
et on transpose ça, on donne au ministère, au ministre des Affaires municipales des pouvoirs qui ne sont
pas de sa compétence. Quand je dis qu'ils ne sont pas de sa compétence,
ils n'ont pas la compétence. C'est au ministère du Travail que cette
compétence-là a lieu. Alors, donc, ça, c'est des glissements. Et, quand les
parties contractantes à un décret de convention collective décident du contenu,
c'est la négociation des parties. Ça leur appartient à eux. Et le
gouvernement...
Une voix : ...
M.
Vaudreuil (François) :
... — non, excusez — et le gouvernement n'a pas, donc, à
s'immiscer, le gouvernement ne l'a
jamais fait. Le seul endroit où il le faisait, c'était dans l'industrie de la
construction. Et, avec la réforme qu'il y a eu au milieu des années 90
quand on a créé le nouveau régime de négociation où on a mis fin aux décrets,
on a dit, à ce moment-là : Ça va être la libre négociation comme partout
ailleurs.
Les autres
ministères n'ont pas à intervenir dans le volet des relations du travail, ça,
ça appartient au ministère du Travail,
c'est comme ça depuis plus d'une cinquantaine d'années et puis c'est un modèle
qui fonctionne bien. Alors, de changer
cette dynamique, de changer cette économie, d'avoir des glissements qui nous
permettent de déroger au modèle qu'on a construit, c'est une erreur dans
laquelle il ne faut pas tomber.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la ministre.
Mme Vien : Je vous ai bien
compris. Transparence, gouvernance, ça vous dit quoi par rapport à la situation
actuelle, puis comment on pourrait se propulser plus loin dans un tel cas?
M. Vaudreuil (François) : Bon, c'est
excessivement important, puis je pense que les travaux au niveau du CCTM à cet égard-là sont concluants, les gens ont
dit : Oui, il faut y travailler, puis on le fera au niveau du CCTM,
ce qu'on vous propose. On le fait dans tous
les organismes, que ce soit... Dans tous les organismes, on le fait actuellement,
alors je ne verrais pas pourquoi que les
comités paritaires seraient soustraits. D'ailleurs, les comités paritaires ne
s'objectent pas à ça. On pense que, dans un
souci d'harmonisation, en raison de l'expertise qu'on a de l'existence des
comités paritaires qui ont administré des décrets de conventions
collectives... on pense qu'au CCTM on pourrait faire un travail fort
intéressant là-dessus.
Mme Vien : Merci. M.
Vaudreuil, merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Ça va, Mme la ministre? Alors, je
passerais maintenant la parole à M. le député de Richelieu, de
l'opposition officielle.
M. Rochon : Merci, M. le Président.
Alors, MM. Vaudreuil, Enault, Pépin, Harvey, Bernier, Mme Lévesque, merci
d'être là.
Une voix : ...
M. Rochon : Ça va? Pardon? J'ai eu
une distraction, là. C'est un collègue qui semblait indiquer qu'il y avait probablement
un vote actuellement. Mais ce n'est pas le cas, M. le Président? Nous
continuons? D'accord. Alors, nos excuses.
M. Vaudreuil, d'abord, un clin d'oeil à vos
derniers propos... Ah! il y a un vote.
Le Président (M. Cousineau) :
Il semble que oui. Nous allons aller voter.
Donc, je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 23)
(Reprise
à 12 h 42)
Le Président
(M. Cousineau) : Nous en étions à la période d'échange, et
puis il vous reste 8 min 59 s, M. le député de Richelieu.
Des voix :
...
Le Président
(M. Cousineau) : Oui, c'est vrai. M. le député de
Richelieu, il vous reste 8 min 59 s.
M. Rochon : Alors, merci, M. le Président. Alors, j'allais faire un clin d'oeil,
M. Vaudreuil, aux quelques mots que vous avez dits au sujet du projet
de loi n° 110. Je voulais vous dire que je me reconnais dans votre
discours désapprobateur sur ce projet de loi
qui chasse le domaine des relations de travail dans les municipalités, de la
supervision, de l'accompagnement du ministère du Travail pour plutôt les mettre
sous la supervision du ministère des Affaires municipales,
puis c'est une bonne idée de refaire cette observation devant la gardienne du
Code du travail, la ministre du Travail.
Mais
revenons à ce qui nous occupe, le projet de loi n° 53. Non seulement
avez-vous cosigné, CSD et CSN, un mémoire
commun, mais nous avons entendu avant vous la FTQ nous communiquer des
positions assez similaires aux vôtres.
Alors, la Loi sur les décrets de convention collective a permis et permet
toujours aux travailleuses et aux travailleurs québécois, à des milliers
d'entre eux, syndiqués ou non, de profiter de meilleures conditions de travail.
Depuis son adoption, la concurrence entre les employeurs ne se fait plus au
détriment des salariés visés par les décrets.
Vous concluez, comme
la FTQ avant vous, que force est de constater que l'actualisation par ailleurs
de cette loi-là devenait nécessaire,
nécessaire aux yeux de l'ensemble des participants à la consultation menée par
le ministère auprès du Comité
consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, et ce, malgré le souhait
d'abolir les décrets formulés par certaines organisations patronales.
Nous en recevrons une plus tard qui, écrivez-vous, a tout de même participé de
façon positive à l'exercice. Bon, plusieurs consensus repris dans
le projet de loi... cependant, tous les consensus ne s'y retrouvent pas, et j'entends bien que c'est là le problème.
Et l'autre problème, c'est que plusieurs des modifications introduites
n'ont jamais été abordées dans des consultations ou vont tout simplement à
l'encontre des parties consultées.
Je
souhaite parcourir certaines de vos recommandations. L'article 2 du projet
de loi prévoit l'ajout d'un
nouvel article qui stipule que les parties à la convention peuvent demander en tout
temps que soient apportées des modifications au décret. La Fédération des
travailleurs du Québec nous a fait
remarquer ça aussi. Mais vous, de
façon très, très bien précise, noir
sur blanc, vous exprimez qu'il faudrait à tout le moins, pour éviter
tout imbroglio, préciser que ce sont les parties qui peuvent demander conjointement
des modifications au décret. Alors, faute de retirer cet article, si au moins il
y avait la notion de conjoint...
M. Vaudreuil
(François) : Ce serait parfait. Ce serait parfait.
M. Rochon :
Ce serait parfait?
M. Vaudreuil (François) : Oui, oui. L'idée, c'est que c'est la loi des
parties, et puis ce qu'on veut s'assurer, dans la loi, c'est que ce
soient «les parties» et non «une des parties peut demander».
M. Rochon :
Vous allez voir que je ne voudrai pas prolonger indûment l'échange avec vous parce
que votre mémoire a le mérite d'être très clair, et je vous félicite pour cette
clarté.
L'article
4 introduit une pratique qui n'a jamais été discutée au Comité consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre :
l'obligation pour le ministre du Travail de
«consulter tout autre ministre qui lui paraît concerné si une modification
au champ d'application du décret a pour effet d'en étendre la nature des
travaux assujettis ou le territoire d'application». Cela, cette mesure, paraît sage, hein? À première vue, difficile de
s'élever contre ça, hein? Ça paraît même responsable, sauf que ce que
vous nous faites remarquer, et c'est une remarque qu'il nous faut considérer,
c'est que ça pourrait constituer un frein à
une modification souhaitée conjointement par les parties. Ralentir cette
modification ou même la compromettre, j'aimerais vous entendre plus
avant là-dessus.
M. Vaudreuil (François) : Merci. Écoutez, c'est comme je vous ai dit
tantôt, c'est la loi des parties. Moi, ça va faire 20 ans que je suis à la présidence de la CSD, j'en ai vu
quelques-unes. Puis, tu sais, je me rappelle très bien d'être venu ici,
à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, puis on nous disait, par
exemple, que, dans l'industrie du vêtement,
il y avait, à l'époque, quatre décrets de convention collective et qu'avec la
disparition des décrets de convention collective
on créerait 8 000 nouveaux emplois. Alors, voyez-vous, des balivernes
comme ça, j'en ai entendu qui provenaient de d'autres ministères, des études,
des analyses qui avaient été faites au niveau économique.
Et
ce que j'ai répondu tantôt à Mme la ministre, c'est que l'univers des rapports
collectifs au Québec, de la façon dont on a construit ça, ça appartient
aux parties, et les parties ne se font pas harakiri, au contraire, au
contraire. Et on développe un écosystème où
on assure... où, en tout cas, on favorise le plus le développement de travail
décent puis où la compétition ne se
fait pas entre les employeurs au détriment des salariés — ce n'est pas rien, cette
disposition-là — et que,
si les parties décident de modifier le champ d'application ou décident de
modifier le décret, ça leur appartient à eux, ça n'appartient pas au ministre, ça n'appartient pas au ministre. Alors,
c'est dans toute la conception, c'est toute la dynamique de la libre négociation et du décret qui devient
la loi des parties. Alors, c'est ça, le raisonnement de base, c'est ça, la
logique dans laquelle on oeuvre et c'est de
cette façon-là qu'on parvient à améliorer les conditions de vie des gens qu'on
représente.
L'autre
commentaire général, je devrais vous faire tantôt, quand vous parliez d'une
association patronale qui visait l'abolition des décrets, la seule chose
que je vous dirais là-dessus, c'est que les entreprises ne vivent pas sur une île
déserte. Ils vivent en société,
il y a des règles, il y a des lois et puis il faut travailler dans ce
cadre-là, parce qu'il y a une organisation
patronale, entre autres, qui favorise à tout prix l'abolition des décrets,
puis, à les entendre parler, c'est comme
s'ils vivaient sur une île déserte. Or, la vie puis la société,
ce n'est pas ça, là. C'est juste un commentaire
général que je voulais faire là-dessus. Francine, as-tu...
• (12 h 50) •
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. Mme Lévesque.
Mme
Lévesque (Francine) : Si je
peux me permettre, peut-être un petit ajout. Je dirais, on a une maxime,
des fois, qu'on se dit entre nous, à savoir
que le mieux, c'est l'ennemi du bien. Et ce qu'on craint, particulièrement, avec cette idée que ce soit
inscrit dans la loi, que la ministre doit consulter tous les ministres qui peuvent se
sentir concernés, c'est qu'à toutes fins pratiques on se retrouve complètement
paralysés qu'on ne puisse pas apporter quelque changement parce qu'on se
retrouve dans une situation où on doit faire plaisir à tout le monde et à sa
mère en même temps.
Or, nous, on
se dit : Faisons confiance aux parties, la ministre du Travail est là pour
s'assurer... de toute façon, elle fait
partie de son Conseil des ministres, donc elle a des occasions de pouvoir échanger
avec les gens du gouvernement qui peuvent
avoir des intérêts à lui faire valoir. Ce n'est pas nécessaire d'inscrire dans
la loi expressément une disposition de cet ordre-là. Faisons confiance aux parties sur ce volet-là et donnons-nous
une chance d'être capables d'assurer qu'on puisse vraiment actualiser
les choses.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, Mme Lévesque. Alors, ça
termine ce bloc. Je vais passer maintenant au député de
Chutes-de-la-Chaudière pour les 6 min 30 s suivantes.
M. Picard :
Merci, M. le Président. Question bien simple : Est-ce qu'on peut connaître
l'identité des gens qui siègent sur un comité paritaire?
Des voix : Bien oui. Oui.
M. Picard :
Parce que je vous pose la question, parce que, lors de notre briefing
technique, j'ai posé la question : J'aimerais avoir la composition des différents comités paritaires. Le
ministère du Travail n'a pas cette information-là. Je trouve ça bizarre
comme transparence.
M.
Vaudreuil (François) : Je ne
peux pas vous répondre au nom du ministère, là, mais il n'y a pas de
problème.
M. Picard : Mais, chez vous,
on peut l'avoir pour les différents comités.
M.
Vaudreuil (François) : On va
vous donner le nom des gens qui siègent sur les comités paritaires. Ce
n'est pas un trouble, ça. Oui, oui.
Une voix : Bien, c'est plus
que ça, là...
Le Président (M. Cousineau) :
Attention pour... Ne parlez pas en même temps. Poursuivez, M. le député.
M.
Picard : O.K., merci. Donc,
je comprends que votre ligne générale, je dirais, sur le projet de loi, c'est
que la ministre s'attribue peut-être
trop de pouvoirs, trop de pouvoirs, puis là elle va aller consulter les autres
ministres. Sauf que je comprends que... on nous a expliqué que,
actuellement, c'est par le Conseil des ministres. Donc, ils sont consultés actuellement, quand même, lorsque ça passe au
Conseil des ministres. Mais, concernant la transparence, l'imputabilité,
est-ce que vous seriez en faveur d'une genre de loi-cadre qui vient donner les
balises, là, puis que... Ce n'est pas la ministre
qui va dire : Telle chose, je veux l'avoir, là... une loi-cadre qui
dit : Regardez, nous, on a besoin de telle information entre a et
d, là. Je vous lance l'idée, là.
J'essayais de voir, parce que je comprends le
but recherché par la ministre, je comprends que les gens du sous-comité n'avaient pas fait ces
recommandations-là, donc, j'aimerais vous entendre là-dessus. C'est une
suggestion, là, pour essayer de dénouer l'impasse, si je peux dire.
Le Président (M. Cousineau) :
M. Vaudreuil.
M.
Vaudreuil (François) :
Écoutez, l'idée là-dessus est toute simple, là. Ce qui est arrivé, c'est qu'il
y a quelques années, je pense que c'est autour de 2012, le ministère du
Travail, les fonctionnaires du ministère du Travail avaient préparé un document de réflexion sur l'avenir de
la Loi des décrets de convention collective. Alors, il y a passé
différents ministres, et Sam Hamad,
lorsqu'il a occupé pour la dernière fois le ministère du Travail, comme
ministre du Travail, nous a demandé, au CCTM... et là il faut bien
savoir, là, qu'au CCTM vous avez les présidences des quatre centrales syndicales, vous avez les présidences du Conseil
du patronat, de la Fédération des chambres de commerce, de la FCEI, des manufacturiers exportateurs du Québec... il
nous a demandé de faire une analyse sur la Loi des décrets de convention
collective. On s'y est appliqués et on s'y
est appliqués de façon très sérieuse. Il y a eu des travaux. Et il y a un
consensus qui a été
défini par les associations patronales et par les centrales syndicales pour
dire : Voici ce qu'on devrait changer dans la loi pour
l'actualiser, la moderniser.
Or,
il y a des éléments additionnels qui ont été ajoutés, qui accordent des
pouvoirs et qui ne sont pas de la volonté des associations patronales et des associations syndicales, parce qu'on
a tous étudié ces éléments-là, mais qui étaient des éléments qui émanaient du document de 2012 qui
avait été préparé par la fonction publique. Mais, ce que je peux vous dire,
le consensus au CCTM, il est clair. Et ce qu'on demande, c'est de reproduire ce
consensus des partenaires sociaux. Concernant l'éthique, la transparence,
l'équité, la meilleure gouvernance, en somme, nous y sommes. Il n'y a aucun problème là-dessus. Le seul truc qu'on dit, c'est : Passons par
le CCTM pour avoir un certain niveau d'harmonisation pour s'assurer
qu'on est capables de le faire.
Le Président
(M. Cousineau) : M. le député.
M. Picard : ...suggestion d'une loi-cadre justement
pour uniformiser, là, parce qu'il y a plusieurs comités paritaires, vous parlez des membres du comité, du sous-comité.
C'est quoi votre feeling actuellement? Vous parlez des membres, là, vous avez vu le projet de loi, il y avait un
consensus, puis là il n'est pas respecté... certains sujets... donc, j'aimerais
avoir le feeling, là, des membres du sous-comité.
Le Président
(M. Cousineau) : M. Enault.
Une voix :
C'est M. Enault.
Le Président
(M. Cousineau) : M. Enault.
M. Enault
(François) : ...avoir siégé au sous-comité avec mon collègue Normand,
et, bon, vous avez vu M. Beaudry tantôt
qui représentait aussi la partie syndicale. Le feeling, c'est parce que j'ai un
certain malaise, c'est parce qu'il ne
faudrait pas non plus jouer le CCTM contre le ministère, là. Je pense que le
CCTM est un outil que le ministère utilise pour consulter des parties,
hein? Je pense qu'il y a eu un consensus et c'est clair que ce consensus-là...
Puis, comme je vous dis, là, il y avait la
chambre de commerce en face de nous, la FCEI et le Conseil du patronat, là,
donc... et les trois grandes centrales du privé. Donc, je pense qu'on faisait
le tour là-dessus. Donc...
M. Picard :
Attendez un peu... demander de préciser... C'est parce que je l'ai fait. J'ai
participé à l'analyse d'un projet de loi avec le député de Louis-Hébert. Ils
n'avaient pas tous pris les recommandations, mais on ne sentait pas ce qu'on
sent dans vos mémoires actuellement, là. C'est que, oui, les gens, ils
n'avaient pas tout pris, mais les gens venaient puis ils essayaient d'avoir un
peu plus. Mais là il se dégage quelque chose, je dirais, de malsain, entre
guillemets, là.
M. Enault
(François) : Notre crainte,
c'est que certains éléments, compte tenu du rapport que François disait
tantôt de 2012, le consensus était quand même... a mis beaucoup
d'éléments du rapport qu'on a mis de côté qui étaient issus du ministère. Et le consensus a donné un autre
document qui se retrouve beaucoup dans le projet de loi, mais il y a
certains éléments qui ne se retrouvent pas qui nous rendent un peu nerveux, là.
Mais,
sur la gouvernance, on en est, là. On en est. On a fait venir plein de gens
puis on en est qu'il faut s'assurer d'avoir une gouvernance semblable
pour l'ensemble des comités paritaires.
Puis je sais que ça
finit, mais l'autre élément qui nous questionne beaucoup, c'est toute la
judiciarisation qui pourrait arriver par
l'utilisation des 47.2. Donc, je pense qu'on a déjà assez de trouble
présentement avec les 47.2, d'en rajouter...
parce que le dernier consensus qui a eu lieu, c'est quand même la personne
nommée par le ministère pour faire enquête. Et moi, je pense qu'on doit
y aller et, si ça ne fonctionne pas, on se reverra par la suite.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. Enault. Alors,
pour les deux minutes restantes, là, parce qu'on termine à
13 heures, je vais laisser la parole à Mme la ministre.
Mme Vien :
Bien, moi, je suis un peu étonnée d'entendre ce que j'entends un peu ce matin,
parce que les conversations qu'on a pu avoir
depuis que moi, je suis arrivée au ministère à bâtons rompus dans les
rencontres qu'on a, des fois
informelles, des fois formelles... Les parties à qui on a parlé, et la partie
syndicale en est également, tout le monde avait tellement hâte qu'on procède puis qu'on appelle le projet de loi puis...
on était assez contents de ce qu'il y avait là-dedans, puis là, ce
matin, ça semble quasiment qu'il faut déchirer ça, là. Et moi...
M. Vaudreuil
(François) : Non, non, ce n'est pas ça qu'on dit.
Mme Vien :
Non, mais je vais finir, si ça ne vous dérange pas. Ce n'est pas le message
que, nous, on nous envoyait, là, ce n'est
vraiment pas le message qu'on nous envoyait. Il reste deux minutes. Je ne sais
pas si vous voulez me répondre à ça, là, mais...
Le Président
(M. Cousineau) : Il reste 1 min 15 s.
Mme Vien :
Parce que c'est le député de Chutes-de-la-Chaudière... Si c'est la lecture que
vous en faites, moi, je trouve ça triste. Si ce n'est pas ça, dites-le,
parce que, moi, ce n'est pas le message que j'ai reçu depuis que je suis
arrivée au ministère.
Une voix : ...
M. Vaudreuil
(François) : Rapidement,
rapidement, les consensus qui ont été développés, Mme la ministre, au CCTM, qu'on les retrouve. On applaudit. On
applaudit ces différents changements-là. Mais ce qu'on vous dit, c'est
qu'il y a des irritants dans le projet de
loi qu'il faut modifier. C'est de ceux-là qu'on a discuté. La balance, c'est
parfait, là. On ne vous dit pas que
tout ce que vous avez reproduit qui fait partie du consensus au CCTM, ce n'est
pas bon. Ce n'est pas ça qu'on vous
dit, là. On dit : Il y a des éléments là-dedans qui ne devraient pas
apparaître au projet de loi et ils sont au nombre d'un, deux, trois,
quatre, cinq, six... Il y en a sept, huit, à peu près, sur l'ensemble du projet
de loi.
Mme Vien : Merci,
M. Vaudreuil. Combien de temps? 30 secondes.
Le Président (M. Cousineau) :
Vous avez 28 secondes.
Mme Vien :
28 secondes. Vite, vite, vite. En termes d'imputabilité, M. Vaudreuil,
est-ce qu'il serait pensable qu'on organise,
une fois par année, une assemblée générale annuelle, par exemple, où on
pourrait s'adresser aux employés qui sont impactés par le décret, où le
comité paritaire rencontrerait ces employés-là, une espèce de reddition de
comptes avec les assujettis? C'est-u quelque chose de pensable, ça?
Une voix : ...
Le
Président (M. Cousineau) : Alors, écoutez... Bon. Alors, à ce moment-ci, je dois
suspendre jusqu'à 15 heures, en
rappelant aux parlementaires que vous ne pouvez pas laisser de choses sur les
tables puisqu'il y a un caucus ce midi ici.
Donc, je suspends jusqu'à 15 heures dans la même
salle. Merci.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 4)
Le
Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! Votre attention. Donc, nous étions en suspension
depuis 13 heures. Alors, nous allons reprendre nos travaux.
Nous recevons, cet après-midi, donc, à
15 heures, pour une période quand même de 2 h 15 min, nous recevons l'association patronale des coiffeurs de
l'Outaouais, le Comité paritaire des coiffeurs de l'Outaouais, le
syndicat des employé-e-s coiffeurs de l'Outaouais. D'accord?
Alors, avant de vous donner la parole puis que
vous puissiez vous présenter chacun d'entre vous pour les fins
d'enregistrement, je vais vous donner le temps sur... pour 2 h 15 min,
là, on va permettre un exposé de 30 minutes aux gens qui sont en arrière plutôt
que 10 minutes comme on l'a fait avec les groupes précédents. Donc, un exposé
de 30 minutes. Et puis, après ça, il y aura une période d'échange avec les
parlementaires de 1 h 40 min. Puis la présidence, bien, on se conserve un cinq minutes pour le travail que
nous avons à faire. Et puis j'aimerais qu'on fasse une distribution de
cette façon-là, Mme la ministre. Puis, voyez-vous, le gouvernement a 50
minutes, mais on va faire trois blocs, 15, 15, 20. D'accord, Mme la...
Mme Vien : Oui, oui. Je suis
d'accord.
Le
Président (M. Cousineau) : D'accord, 15, 15, 20. Pour l'opposition
officielle, vous avez 30 minutes, on
fera trois blocs, 10, 10, 10, d'accord,
donc, par rotation. Et le deuxième
groupe d'opposition, vous avez 20
minutes, ce sera six, sept, sept. Ça vous va comme ça?
M. Picard : C'est bien.
Merci.
Le Président (M. Cousineau) :
Parfait. Donc, on vous laisse aller, messieurs, en arrière, et puis pour votre 30 minutes. Et puis le premier qui va parler,
présentez les gens qui vous accompagnent pour les fins d'enregistrement.
Puis on vous laisse aller pour vos présentations, 30 minutes.
Association patronale
des coiffeuses et coiffeurs de l'Outaouais (APCO),
Comité paritaire des coiffeurs de l'Outaouais, Syndicat des
employé-e-s coiffeuses et coiffeurs de l'Outaouais (SECO)
M.
Parisien (Hugo) : Alors,
mesdames, messieurs, bonjour. Premièrement, merci de nous accueillir enfin pour l'écoute
sur l'avis de notre décret à l'intérieur du territoire de l'Outaouais.
Je vais présenter l'ensemble
de l'équipe. On favorise une approche raisonnée, c'est donc pour ça qu'on est
en équipe avec l'association patronale des
coiffeurs de l'Outaouais, de même qu'avec le syndicat. Et, parmi nous,
nous avons le vice-président de l'association patronale des coiffeurs de
l'Outaouais, M. Yves Briand. Nous avons également le président du syndicat des employés-e-s coiffeurs de l'Outaouais, M. Stéphane Drouin. Vous avez, à notre droite, il est évidemment
enseignant en droit à l'Université du
Québec en Outaouais, enseignant à la Faculté de droit, bref, la partie
civile à l'Université d'Ottawa, enseignant
au Barreau pour la formation professionnelle et évidemment membre du
Barreau, mais, surtout depuis 36 ans,
procureur du Comité paritaire des coiffeurs de l'Outaouais, M. Denis Brochu.
Et, de mon côté, mon nom est Hugo
Parisien. Je suis nouvellement directeur général du Comité paritaire des
coiffeurs de l'Outaouais. Par contre, je tiens à ce que vous sachiez que
j'y suis depuis maintenant 15 ans. C'est cette année qu'on m'a nommé directeur général. J'étais responsable de
l'application du décret de convention collective. Alors, voilà pour les
présentations.
Écoutez, pour
ce qui est des articles 1 à 37 du projet de modification de la loi, donc le
projet de loi n° 53, pour les trois
parties qui sont devant vous aujourd'hui, nous, on se colle, si vous me
permettez l'expression, aux recommandations qui seront formulées par tant l'association des directeurs généraux que
l'Association des comités paritaires du Québec, ça, ça va pouvoir clore cette partie-là. Pourquoi on
se colle? Parce que ça a été fait d'une façon tout à fait démocratique,
on a consulté les membres. On a été appelés
et on a participé à l'ensemble de ces éléments-là au courant de la dernière
année avec eux, et ça s'est bien fait. Donc, vous comprendrez que, nous, ce qui
nous touche énormément, c'est les articles 38 à 40, particulièrement l'article
n° 39, et nous vous en parlerons aujourd'hui.
Premièrement,
je vais quand même dresser le portrait de la coiffure en Outaouais. La masse
salariale, 7,2 millions; le
chiffre d'affaires, 37,8 millions; visites et inspection du Comité
paritaire des coiffeurs de l'Outaouais, 708; le nombre de poursuites, 44; nombre — très important — réglé hors cour, 34. Donc, pour la dernière
année, c'est 76 % de règlements hors
cour. Les infractions totales, au courant de l'année, c'est 210. Avec ces
chiffres-là, on comprend que, souvent, ça se règle en arrière-scène ou avec les derniers avis qui sont acheminés dans
le respect du décret sur les coiffeurs de l'Outaouais. Le nombre d'employeurs en Outaouais est fixé à 29.
Le nombre d'employeurs artisans est fixé à 112. Le nombre d'artisans est fixé à 389. Le nombre de salons au total, 415.
Pourquoi je vous dis ça? C'est parce qu'il y a une notion qui est bien
importante à comprendre, c'est que les entrepreneurs seuls en salon, donc qui
sont seuls au salon ou qui travaillent seuls à la maison, représentent
66 % des coiffeurs... des salons de coiffure en Outaouais, désolé, donc
des salons.
Et j'aimerais
faire un point sur la transparence et la diligence du comité. Je n'ai pas
besoin de vous mentionner que je
crois qu'on est nommés, avec nos confrères ici, à l'association des directeurs
généraux, je les remercie de leur présence également... On est cités en
exemple au point de vue de la transparence, de notre imputabilité, et je vous
invite à aller visiter le site Web à cet effet-là.
Le décret sur
les coiffeurs de l'Outaouais, pour sa part, contient des heures d'admission de
clients en salon, clientèle et heures
d'ouverture, des prix minimaux, salaires et commissions, des jours fériés. Je
veux que vous sachiez que ça se fait
avec l'aide de nos coiffeurs qui siègent. C'est eux qui prennent partie
prenante et qui vivent leur décret. Pourquoi est-ce qu'il y a des heures d'admission de client en
salon? S'il y a 66 % des salons puis c'est des gens seuls qui y
travaillent, on n'a pas les outils pour en
arriver à faire des compétitions avec des superchaînes américaines qui offrent
des coupes à 3 $ et qui offrent
d'autres éléments à ces niveaux-là, donc des heures d'ouverture assez
fulgurantes. On avait créé une exception à l'époque sur ces conditions-là.
• (15 h 10) •
Le décret est
actualisé. Quand on voit des choses dans les journaux qui mentionnent que, bon,
bien, il est là depuis 1934...
Écoutez, depuis 1934, à nombreuses reprises, on a procédé à la modification du
décret, sans contredit, je peux vous le mentionner d'emblée.
Les parties
contractantes, c'est une approche raisonnée. On a parlé de prix minimaux tout à
l'heure. Vous allez comprendre
pourquoi est-ce qu'il y a des prix minimaux. On n'est pas juste obligés d'en
mettre sur la bière au Québec. Les
prix minimaux, c'est bien important de constater que, quand on augmente un prix
minimal sur une profession qui est majoritairement
payée à commission, on augmente le revenu de part et d'autre. Peut-être des
bons outils éventuellement pour essayer
de traiter, peut-être, d'une façon convenable les coiffeurs sur l'ensemble du
territoire québécois... La notion d'artisan est prépondérante dans
l'analyse de la situation. On a l'impression que les coiffeurs sont un
nombre... incontestablement dans les
superchaînes, ce qui n'est pas le cas, on va le voir tout à l'heure. Les
parties contractantes vont feront
état des choses. Mais je veux que je vous sachiez qu'avec les données que vous
avez sûrement consultées dans le mémoire les salaires sont plus élevés
en Outaouais, plus élevés que la moyenne provinciale, et je peux vous indiquer également qu'on aide à faire élever la moyenne
provinciale, qui se veut un salaire sous le seuil de la pauvreté. En
Outaouais, on est fiers d'être au-dessus du seuil de la pauvreté.
L'Association
des comités paritaires du Québec, évidemment, je suis persuadé, ils vous le
diront, y siégeant... je veux
simplement vous dire qu'ils sont contre l'abrogation. C'est la première fois en
l'histoire qu'on passe via un projet de loi qui modifie la transparence, l'imputabilité pour abroger un décret.
C'est la première fois. Pour eux, c'est un préjudice important puis ce
n'est pas basé sur les besoins des assujettis. À ce sujet-là, je vais leur
laisser parler parce que c'est important de
savoir que c'est aux coiffeurs de l'Outaouais à décider s'ils maintiennent ou
non leur décret, et l'ensemble des pourparlers
qu'on aura aujourd'hui avec vous vont revenir à ça, mais est-ce qu'on peut
laisser aux coiffeurs de l'Outaouais la décision de, oui ou non, vivre
un décret?
Sur cette
note, je vous présente à l'instant même le président du syndicat des
employé-e-s coiffeurs de l'Outaouais, M. Stéphane Drouin, pour faire
l'état des choses.
M. Drouin (Stéphane) : Bonjour, tout le monde. Un premier mot pour vous
remercier de prendre le temps de nous
écouter. En étant président du syndicat depuis maintenant 16 ans, j'ai aussi,
et je tiens à le dire, siégé pendant 12 ans au CSMO, au Comité sectoriel de la main-d'oeuvre
et des soins personnels du Québec. Alors, j'ai siégé à toutes les tables, à tous les projets de loi de normes de
travail au niveau de la coiffure, alors ça me fait plaisir d'être ici pour
venir débattre mes membres. Je représente
quand même 33 % des employés de l'Outaouais, mais, en même temps, je
représente les 800 aussi. On est ici pour se débattre.
C'est
une loi qui nous tient à coeur, qui fonctionne. On a décidé, en l'espace de
quatre minutes, de nous l'enlever sous notre nez, pour se faire appeler
par un journaliste, qui était le seul demeuré ici, à la Chambre, pour nous
appeler 15 minutes après la conférence de
presse pour nous aviser que notre décret était pour être abrogé. Je ne suis pas
d'accord avec ça parce que, dans la première
loi qui a été écrite, on venait consulter les membres, demander... Il n'y a
personne du syndicat, il n'y a personne du
côté patronal qui a souhaité abroger ce décret-là. Oui, je sais que souvent ça
dérange parce qu'on est la seule région qui l'a conservé depuis
l'abolition en 1985. Mais c'est très important, parce que, nous, ça réglemente nos heures de travail, ça réglemente le
salaire des employés, nos congés fériés, où les normes du travail ne
répondent pas à nos besoins.
En
ayant siégé aussi ailleurs partout au Québec, je me rends compte, et c'est flagrant...
la différence de la masse salariale,
les conditions de travail ne sont pas les mêmes. Là, on tombe à du sept
jours-semaine, 12 heures par jour. On a quand même un manque de main-d'oeuvre qualifiée. On est en train de
régler ça avec le mandat de la norme professionnelle.
Mais,
Dieu merci, conservez, s'il vous plaît, le décret en Outaouais, ça fonctionne
bien. Les membres répondent, on aide
les poursuites, il y a des règlements rapides. Hugo fait un travail
extraordinaire. Moi, je suis ici pour défendre ces droits-là parce que j'y crois. Regarde, ça fait 16
ans que je suis là puis je veux le conserver. C'est essentiel à la
survie, déjà qu'on est le seul métier qui
est en D.E.P., qui est, en moyenne, à travers le Québec, sous le seuil de
pauvreté. Quand l'électricien ou le plombier peut faire 60 $ de
l'heure, puis là, nous, on va nous enlever le décret, puis on va faire des compétitions à 5 $, 10 $ la coupe de
cheveux, puis on va rechambarder ces 400
salons là, puis que, là, à un moment
donné, le salaire, il sera plus sans
contrôle, puis là les employeurs ne pourront même plus répondre, de un, non
plus... Parce qu'on travaille souvent ensemble. Nous, on est tous
conjoints, on est un secteur qui fonctionne bien. On n'est pas en
mésentente ni patronale et syndicale. Quand tous les choix se font ou qu'il y a
ces changements au niveau du décret pour les prix minimaux, les heures d'ouverture, les jours fériés... qu'on a d'ailleurs
déposés en 2012, qu'on n'a jamais eu de réponse, puis après ça on a
décidé de nous abroger...
Alors,
ça nous amène ici pour venir défendre nos droits. C'est essentiel, je crois,
tout ça. On a quand même 96 % des
coiffeurs au Québec qui veulent plus de réglementation parce qu'il y a eu le...
depuis 1985, en ayant siégé sur toutes ces
tables-là à travers le Québec dans la profession. Nous, on a la chance d'avoir
des règlements, et ça fonctionne, ça fait qu'un milieu sain, la compétition est saine, les gens ont un mode de vie
beaucoup plus équilibré, beaucoup moins stressant. Et on remarque qu'ailleurs, dans le sondage CSMO,
en 2009, quand on a fait une consultation pour établir la norme de travail en coiffure, on avait 96 % des gens
qui voulaient plus de règlements et un autre 96 % qui voulait le retour
des comités paritaires. Parce que les
gens... quand moi, je me permettais d'aller siéger ailleurs, c'est sûr qu'au
début on ne m'aimait pas tout le
temps, mais, une fois que j'expliquais c'était quoi, vraiment, le mandat d'un
comité paritaire, quand c'était bien
fait, puis que tout le monde était en pertinence ensemble, ils se sont rendu
compte qu'est-ce qu'il leur manquait depuis les derniers 30 ans.
Alors,
c'est pour ça qu'on est ici, pour pouvoir le conserver dans l'espérance de
garder notre qualité de travail puis d'avoir une qualité de vie. Merci.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. Drouin. Alors, on passe la
parole à qui, maintenant? Il vous reste quand même 19 minutes.
M.
Parisien (Hugo) : Oui, sans problème. Écoutez, je vais simplement
faire quelques points. Je veux mentionner, au point de vue de l'historique de la situation... c'est-à-dire qu'en
2012 l'ensemble des parties contractantes ont fait une consultation à valider quels seront les nouveaux
éléments à aborder dans le prochain décret. Parce que, comme je vous le disais tout à l'heure d'emblée et d'entrée de jeu,
le décret est modifié et est actualisé. Le fameux 96 % qu'on a pris,
là, c'est des coiffeurs qui ne veulent pas
travailler le dimanche. C'est le résultat qu'on a au point de vue du mémoire
qui vous a été déposé. Donc, on
dépose ce mémoire-là. Initialement, le mémoire servait à modifier le décret
pour répondre aux besoins que les
parties contractantes avaient dûment négociés dans le respect de votre Loi sur
les décrets de convention collective.
Donc, on a procédé à la négociation du décret, on a déposé des demandes pour
actualiser le décret et on a tout fait ce
qu'il fallait, et la réponse à ça, plutôt que de regarder la situation, c'est
qu'on a reçu une lettre qui dit : On vous abroge.
C'est
un peu particulier. L'annonce s'est faite en collaboration avec la FCEI, et,
pour en avoir parlé longuement avec
M. Drouin, la question demeure : Mais où était la partie syndicale pour
une loi dont l'essence même est le paritarisme? On annonce, avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante,
on y reviendra tout à l'heure, M. le procureur aura des éléments à
soulever à ça... mais, vu qu'on annonce tout ça, bien, dans le respect de la
Loi sur les décrets de convention
collective, ça aurait été plaisant d'avoir un syndicat. Vous n'en avez pas
trouvé, parce qu'il n'y a pas de syndicat qui va être pour l'abrogation d'une convention collective. Et vous le
savez très bien. Et 15 h 53, ici, l'annonce qu'on fait la conférence de presse, 15 h 57, on
annonce l'abrogation du décret. Ça, c'est au mois de mai 2015. Et ensuite le
journaliste qui nous a appelé nous dit
d'emblée : Écoutez, on vous laisse le temps de vous préparer, j'étais le
seul à l'intérieur de la pièce, et tous les autres journalistes avaient
quitté la journée. J'ai cru comprendre que les journées finissent tôt parce qu'à 3 heures le café ferme. Je le sais, on
l'a vécu ici. Donc, la situation actuellement, c'est : On l'a annoncé un
peu en catimini, sans partie syndicale alors qu'on parle de paritarisme.
C'est quand même intéressant.
Mais,
sur cette note, je vous présente maintenant une autre personne qui est aussi
importante, qui constitue la moitié du
décret, c'est-à-dire l'association patronale des coiffeurs de l'Outaouais, qui
est délégué par l'assemblée générale annuelle. Voici le vice-président,
M. Yves Briand.
Le Président (M.
Cousineau) : M. Briand.
• (15 h 20) •
M. Briand
(Yves) : Alors, bonjour,
messieurs, dames. Je suis très honoré et très fier d'être ici,
premièrement. Ça me tient bien à coeur parce
que la profession que j'exerce depuis 42 ans maintenant m'a permis de voyager à
travers le monde puis de devenir une personne très influente au niveau de la
coiffure. Je suis très heureux aussi de remercier le gouvernement d'avoir créé
un D.E.P. pour les coiffeurs parce que c'est important qu'on nous reconnaisse à
travers le monde. Malheureusement, dû, en
1985, à la déréglementation, nos cartes de compétence ont été ignorées et ce
qu'il y a eu après, tous les jeunes nouveaux coiffeurs, coiffeuses
n'avaient aucune idée de ce qui se passait, là. C'est grâce à l'information que le comité paritaire, le comité au niveau, là, des professionnels
et employeurs... et des employés leur donnaient comme information qu'on
a pu les amener à aller chercher leur Sceau rouge et compagnie.
Pourquoi je
dis aussi tout ça, c'est que malheureusement, à travers les années, je trouve
que notre profession a été dénigrée, en 1985 surtout, quand on a perdu... Mme
Marois disait qu'on brimait l'accès sur le marché du travail à
toutes les personnes qui pouvaient exercer
le métier de coiffeur mais qui n'avaient pas été bons à l'école. Ça nous a
donné une claque puis on a dit :
Bien, on veut autre chose. Là c'est là que les D.E.P. ont commencé à entrer,
puis je remercie beaucoup.
En 31 ans comme employeur, la différence entre
avoir un comité paritaire ou un syndicat d'employés et d'employeurs a fait que moi, j'ai maintenu et je maintiens encore des
employés chez moi depuis 28, 29... 10 ans, 15 ans. Il n'y a pas de
turnover, comme on dit, en bon français, par chez nous, comme ça se fait
partout. Nos salariés sont entre 3 000 $ et 7 000 $ de plus par
année, dû à notre décret. C'est sûr que ce n'est pas tous les employeurs qui
sont contents parce qu'on doit suivre
des normes. On est en haut des normes du travail. On doit appliquer tous les
salaires, tout ce qu'ils font, mais ça garde une unité et une conformité
dans tout ça.
Moi, pourquoi
je suis ici, c'est pour répondre à vos questions, bien entendu, et vous dire
que j'y tiens profondément. Et je
représente quand même 30 % de tous les employeurs de la région, mais
40 % de la masse salariale, parce que, chez moi, j'ai un salon de
coiffure qui a 12 coiffeurs, mais 23 employés au total, incluant l'esthétique,
massothérapie.
Je suis ici à
votre disposition pour répondre à vos questions. Je suis vraiment désolé que ça
se soit produit comme ça. Par contre,
on est là pour régler les choses puis aller de l'avant. C'est avec une bonne
foi qu'on va régler ça ensemble. Merci beaucoup.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. Briand. M. Parisien.
M.
Parisien (Hugo) : Simplement, avant de vous introduire Me Brochu, je
veux simplement mentionner que, bref, quand l'annonce s'est faite sur le
FCEI — c'est
important de faire le point sur le FCEI — avant même qu'on parle
d'abrogation, avant même qu'on parle de modifications de notre décret, quand on
a fait la consultation, nous avions acheminé une lettre au gouvernement du
Québec où, lors d'une rencontre des 14 coiffeurs qui siégeaient... on avait rencontré des gens de la FCEI qui, dans leur
salon... c'est-à-dire qui dit «on» s'exclut... ces gens-là avaient rencontré
des gens de la FCEI, l'ensemble des
administrateurs de nos deux parties contractantes ont eu la visite de la FCEI
dans le salon pour recueillir du membership, et c'est la lettre qui en
fait état.
Pourquoi je
vous dis ça? C'est parce que, dans cette lettre-là, on stipule et on mentionne,
après que ces 14 coiffeurs là ont eu
la visite de ce représentant de la FCEI là, on mentionne que celui-ci mentionne
que, si on paie la cotisation, on n'aura pas de poursuite au comité paritaire, et, si on ne la paie pas, on aura
des poursuites au comité paritaire. Aujourd'hui, il ne travaille plus
pour la FCEI, très bonne décision de leur part, mais nous, on en a fait
mention.
Après ça, on
a envoyé... aucune réponse à la demande de modification du décret. La seule
chose qu'on a vue, c'est la FCEI qui
annonce, avec M. Hamad, l'abrogation du décret. On s'est posé quelques
questions. Vous conviendrez que c'est
un peu difficile à comprendre parce que, pour eux, la question majeure qui se
pose, là, c'est que la coiffure, là, c'est une profession féminine, on ne se le cachera pas, et eux, quand on voit
des électriciens qui ont des ordres qualifiés par le gouvernement, qui ont des... vous allez chez le
mécanicien, vous avez des listes de tarifs qu'on ne peut pas excéder
parce que... C'est le même niveau d'études.
Pourquoi eux doivent gagner sous le seuil de la pauvreté? Parce que la FCEI,
qui représente souvent les grandes
chaînes... Parce que ce n'est pas sous le seuil de la pauvreté qu'on se paie
une cotisation à 400 $, on va se l'indiquer, là. Mais la FCEI, qui
représente souvent les grandes chaînes, c'est 7,9 % des coiffeurs en Outaouais. Et je peux vous garantir que le
téléphone ne dérougit pas, parce que ceux et celles qui sont à l'intérieur
des salons de coiffure en Outaouais se
posent la question : Mais qu'advient-il de notre situation? Donc, je veux
que vous le sachiez.
Moi, je vous
invite... si on prend et on accorde une si grande attention aux membres de la
FCEI... En coiffure — je
ne sais pas si c'est comme ça pour le reste
du Québec — il y a
beaucoup plus de nos membres. Vous comprendrez que j'ai des personnes
autour de moi qui, oui, gagnent plus que le seuil de la pauvreté peut-être puis
qui croient en leur profession, mais, dans
ce cadre-là, même eux ne paient pas la FCEI.
Ils n'y croient pas. Donc, je vous inviterais à peut-être
mettre un grain de sel quand vous allez assister aux éléments de la FCEI. La
dernière étude qu'ils nous ont acheminée, ils avaient consulté deux
salons en Outaouais. Notre consultation fait état de près de 230, 240 salons.
Vous l'avez vu.
Sur cette note, la partie légale avec notre
procureur, Me Denis Brochu.
Le Président (M. Cousineau) :
Me Brochu.
M. Brochu
(Denis) : Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, j'avoue ne pas être trop,
trop familier avec la raison d'être
et le fonctionnement de la commission. Je suis plus familier avec les salles de
cour, dites palais de justice, et salles
de classe. Néanmoins, à partir de l'information que j'ai pu recueillir, j'ai
comme réalisé que vous êtes essentiellement réunis pour vous permettre de mieux exercer pleinement votre rôle de
législateur, d'une part, mais j'ajoute, et ça me paraît extrêmement important, parce que ce sera surtout le but de
mon propos, également un rôle de contrôleur de l'action gouvernementale. Alors, mes propos vont surtout porter sur l'action
gouvernementale, sur la démarche du gouvernement. Puis je vais, dans un premier temps au moins, vous
sensibiliser à la réalité suivante vécue par les personnes que je représente.
Depuis à peu près 2012, ces gens-là piétinent,
cherchent par tous les moyens à faire avancer leur décret, cherchent à
améliorer leur décret. La dernière demande de modification était dans cette perspective-là,
parce qu'ils constatent sur le terrain que ce sont des choses qui peuvent
bonifier la situation des coiffeurs et des coiffeuses, et, franchement parlant, l'action gouvernementale qui
a été menée depuis 2012 en est une où on est beaucoup sur notre appétit parce qu'il ne se passe rien. Alors, ça a pris à
peu près trois ans, parce qu'on est aujourd'hui le 5 octobre, pour se
faire dire, et on le sait depuis le mois de mai 2015, qu'on a finalement à
l'esprit cette idée-là d'abroger le décret.
Avouez que ce
n'est pas très, très efficace quand le ministre de l'époque était saisi d'une
demande de modification depuis fort longtemps et qu'il n'a jamais
vraiment donné suite à la demande de modification.
Maintenant,
je vais vous indiquer certaines anomalies, à mon avis, dans la démarche
gouvernementale qui font que l'esprit
de la Loi sur les décrets de convention collective, à mon avis, n'est
manifestement pas respecté. Parce qu'il y a tout un esprit derrière
cette loi-là, qui est de nature un peu particulière.
Mais, dans un premier temps, vous allez me
permettre de vous ramener en 1996, époque à laquelle le comité paritaire et moi-même — je suis un témoin privilégié — nous nous adressions à la commission
parlementaire qui était chargée
d'étudier le projet de loi n° 75, qui concernait justement la Loi sur les
décrets de convention collective. Et le projet de loi comportait, entre
autres, ce qui était grandement souhaité par les parties que je représentais,
une dérogation au paragraphe 4° de
l'article 9.9 — je ne
vous cache pas qu'on parle des prix minimaux — et une au deuxième alinéa de
l'article 10 de la loi qui concerne, bien entendu, l'exigence des
associations accréditées.
Ces dérogations-là ont été acceptées et elles
ont été traduites dans la loi de 1996 à l'article 39 de la loi. Donc, il y
avait une dérogation particulière pour la réalité de l'Outaouais, concernant
bien entendu son statut de comité paritaire et de responsable de l'application
d'un décret, et cette loi-là a été acceptée par l'Assemblée nationale.
Depuis, comme M. Parisien vous l'a mentionné, et
d'autres vous l'ont également souligné, les parties ont fait évoluer leur décret. Ce n'est pas resté lettre
morte : tout ce qui a été demandé au gouvernement de l'époque, tout ce
que le gouvernement de l'époque avait
accepté, je le répète, avait pour but de faire avancer les conditions de
travail, le bien-être des coiffeurs
et des coiffeuses puis avoir un salaire relativement décent. Or, cet
objectif-là a toujours été maintenu. Et il est révélé, si vous prenez connaissance de la demande de modification, la
dernière, il est révélé par des demandes qui ont été formulées, qui correspondent exactement à ce genre
de réalité là qu'on veut voir installée dans la province... pas dans la
province, pardon, mais dans la région de l'Outaouais.
Or,
conséquence oblige, parce qu'il faut être conséquent parfois, je vous invite à
constater que le projet de loi n° 53 propose justement d'abroger
l'article de la loi qui a été adoptée en 1996. Donc, si on abroge ceci... et je
me suis mis à réfléchir puis à penser à haute voix, je me suis dit : Je ne
sais pas pourquoi on abroge le décret quand ce décret-là a absolument besoin de ces dérogations-là. Parce
que, soyons honnêtes, en soi, ceci suffit à signer l'arrêt de mort du
décret. Là, je ne comprends pas pourquoi on
a un autre article où on sent le besoin de dire : En passant, j'abroge le
décret des coiffeurs de la région de
l'Outaouais... vraiment incompréhensible comme façon de voir les choses. Je
vous le souligne, par ailleurs, et
ça, c'est le projet de loi qui le révèle, présumant, bien entendu, comme je le
souhaite et comme je le pense, que vous l'avez consulté et parcouru.
On est
aujourd'hui le 5 octobre. On est devant vous. On vous remercie de nous fournir
l'occasion — je me
joins aux autres — de nous entendre, surtout de nous écouter.
Mais je vous invite à réfléchir puis à réfléchir sérieusement. On est
donc aujourd'hui le 5 octobre. Le processus dans lequel les parties
contractantes sont engagées depuis un certain temps
déjà et dont vous faites maintenant partie, au fond, tire son origine d'une
demande de modification qui a été adressée au ministre par les parties
contractantes.
• (15 h 30) •
Le Président (M. Cousineau) :
...
M. Brochu (Denis) : Pardon?
Le Président (M. Cousineau) :
...
M. Brochu (Denis) : Merci, M. le
Président. Malgré l'absence d'opposition à ce sujet-là, on ne peut pas dire que
le ministre s'est prononcé sur cette demande de modification, puis il n'a
fourni aucun motif à cet effet-là. La seule
réponse qui a été communiquée, abstraction faite de ce qui nous préoccupe
concernant la modification, c'est de dire : Nous vous proposons d'abroger le décret et nous souhaitons vous entendre
à ce sujet-là, avoir vos réactions. Pas un iota de motif concernant la
demande de modification que les parties contractantes avaient choisi, bien
entendu, de présenter au ministère.
Alors, plutôt
que de donner suite à la demande de modification, le ministre a demandé aux
parties contractantes de réagir, ce que les parties contractantes ont
fait. Par la suite, sans fournir de motif — parce qu'il n'y a jamais de
motif comme tel — le ministre, sous le couvert d'un projet de
loi... Je ne sais pas si vous avez consulté le titre de ce projet de loi
là, franchement, pour le moins très élaboré,
mais on comprend que l'idée, c'est de favoriser la transparence,
l'imputabilité des comités paritaires puis, finalement, faciliter
l'application.
Je vous ferai remarquer, par ailleurs, qu'il y a
l'article 40 qui dit : Bien, nous cherchons, bien entendu, à faire accepter par l'Assemblée nationale — donc obtenir l'aval de l'Assemblée
nationale — l'abrogation
du Décret des coiffeurs de la région
de l'Outaouais. Et, dans le fond, aucune demande formelle n'a jamais été
présentée dans ce sens-là par les parties contractantes, ni l'une d'entre elles, ni
le comité paritaire, ni même des personnes qui sont assujetties au
décret. Alors, depuis quand est-ce qu'on en
arrive à un résultat semblable quand il n'y a aucune demande à cet effet-là? À
moins qu'il y ait eu d'autres considérations...
À l'occasion
de la conférence de presse, je vous ai entendu... M. le Président, le temps
court... À l'occasion de la conférence
de presse tenue le 26 mai 2015, le ministre a fait grand état de la nécessité
de moderniser la loi, et là il avait d'amples
motifs. Mais, quand il s'est agi de parler de l'abrogation du décret des
coiffeurs de l'Outaouais, il n'y en avait pas, de motif. Il y avait simplement une déclaration qui nous fait constater
pourquoi on en arrive à ce résultat-là, et c'est tiré essentiellement de
la conférence de presse, où il nous dit : «Il reste un élément, ce
que... [...]le dernier décret pour les coiffeurs
dans la région de l'Outaouais — je souligne «le dernier décret», comme si
c'était monstrueux — [...]nous
allons mettre fin à ce décret-là pour les coiffeurs dans la région de
l'Outaouais. Donc, il n'y a plus des prix fixés, ou des conventions, ou d'un décret, c'est éliminé.» Et là il nous le donne, le
motif : «Ça va être le libre marché dans la région de l'Outaouais.» Bien, si le critère, c'est le libre
marché dans la région de l'Outaouais, pourquoi est-ce que ça ne serait
pas le libre marché dans toutes les régions du Québec?
Il était accompagné de Mme Hébert, de la FCEI,
qui a abondé dans le sens présenté par le ministre Hassad de l'époque à la conférence de presse. Si vous lisez
attentivement la conférence de presse et si vous retenez surtout ce que Mme Hébert y dit... Poussons le raisonnement
jusqu'au bout. Ça veut dire fondamentalement que, si on suit le
raisonnement de Mme Hébert et de la FCEI
jusqu'au bout, tout ce qu'on a à faire, c'est abolir tous les décrets.
J'aimerais ça qu'on puisse dire aux
gens du Saguenay—Lac-Saint-Jean,
le royaume où les gens... des concessionnaires d'automobiles, qu'ils
devraient être comme la région de l'Outaouais,
où il n'y en a pas, de décret, pour cette activité-là. Moi, je pense qu'ils y
tiennent, à leur décret. Nous, on y tient exactement de la même façon.
Ceci étant,
je termine, M. le Président. Merci de votre bonté. Je vous souligne, assez
paradoxalement — et
c'est notre interprétation de la loi — l'article 8 confie au ministre, bien
entendu, le pouvoir de recommander au gouvernement d'abroger un décret. Et je comprends que c'est
sans même s'adresser à l'Assemblée nationale, là. Ça pourrait se faire à
travers le gouvernement. On ne voit pas,
dans ce texte-là, cette idée-là qu'il va donner des motifs. On voit dans le
texte qu'il doit consulter. C'est assez
paradoxal que l'article 8, dans le projet de loi, on propose de le modifier où,
justement — ce n'est pas
par enchantement — il y a
des exigences très strictes où on dit au ministre : Tu vas fournir les
motifs. Non seulement tu vas donner l'occasion aux parties de se faire
entendre, mais tu vas fournir les motifs.
Alors, je trouverais ça bizarre qu'on puisse
dire aux gens du comité paritaire et les parties contractantes : Vous n'étiez pas à la bonne époque, vous étiez
juste un peu avant. Si vous aviez
attendu l'adoption du projet
de loi, on vous aurait donné les motifs, mais là on ne vous les
donne pas. À mon avis, implicitement, l'article 8 oblige le ministre à donner des motifs, et il n'en a pas donné, autre que de
nous parler du libre marché, et ça, à mon humble avis, ça ne tient pas
la route. Je vous remercie, M. le Président, mesdames, messieurs.
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, merci, Me Brochu. Donc, nous allons passer à la période d'échange avec
les parlementaires. Évidemment, nous allons débuter avec Mme la ministre pour
un premier bloc de 15 minutes. Mme la ministre.
Mme Vien : Alors, Me Brochu, M. Drouin, M. Parisien, M.
Briand, merci de vous être déplacés aujourd'hui. Merci surtout
de cette passion qui vous anime, c'est franchement intéressant, c'est même rafraîchissant, merci de nous partager ça
cet après-midi.
Moi, je vais
mettre les choses bien au clair tout
de suite, là, je suis une ministre
qui reprend ce projet de loi, donc je suis
en relais, depuis huit mois maintenant
que je suis au ministère du Travail. Je peux vous assurer que je vous ai
écoutés bien, bien, bien attentivement et
j'ai aussi lu votre mémoire, puis que je ne suis vraiment pas insensible à
votre situation. Cependant, on va poser des questions puis on va essayer
d'y voir un petit peu plus clair.
Rappelez-moi
donc, en 1996, à votre souvenir, qu'est-ce qui a fait en sorte... parce que
vous n'êtes pas... votre entente — je vais le dire dans mes mots, hein, je ne
suis pas des spécialistes comme les gens du ministère, je vais parler
dans mes mots — votre entente, là, qui régit le travail de
vos coiffeurs ne repose pas sur une convention collective, comme les
décrets actuellement que nous avons au Québec, les 14 autres décrets
actuellement. Donc, voilà une exception. Dans d'autres
décrets, on ne vient pas fixer les prix minimums, comme d'ailleurs le stipule
l'article 9.1 de la Loi sur les décrets de convention collective. Ça,
c'est la mécanique, c'est ce qui vous caractérise.
À votre
souvenir, quelle a été la raison ou les raisons qui ont fait en sorte que vous
bénéficiez d'une exception pour avoir
survécu dans le temps, compte tenu du fait que vous n'êtes pas notamment
calqués sur une convention collective et que vous n'avez pas non plus d'association accréditée syndicale à
l'intérieur de votre comité paritaire? Je ne sais pas... Est-ce que je
suis claire? Oui?
M. Brochu
(Denis) : Vous avez raison, Mme la ministre. Il n'y a pas
d'association accréditée... ce qui est justifié à l'époque, et même encore aujourd'hui, on va
élaborer là-dessus, cette idée-là de pouvoir bénéficier d'une dérogation
tend sur le phénomène d'être une association
accréditée. On les appelait, à l'époque, des associations de bonne foi, on va
se rappeler un peu le contexte de l'époque. Et l'autre...
Mme Vien : Pouvez-vous vous
approcher de votre micro, on va mieux vous entendre. Merci.
M.
Brochu (Denis) : Ce serait préférable. Et l'autre dérogation, les prix
minimums, ce qui va, bien entendu, en principe,
à l'encontre de l'article 9.1 de la loi actuelle, on comprend ça. Mais il faut
comprendre que, si ça a évolué dans ce sens-là — puis je laisserai M. Parisien compléter,
s'il le faut — c'est
parce qu'il y avait des particularités qui faisaient en sorte que, pour
l'Outaouais, c'était la chose qui paraissait à faire pour assurer des
conditions de travail qui soient acceptables et qu'on puisse les faire
progresser, les conditions de travail.
Mme Vien :
On va avoir une discussion, vous puis moi, les gens vont nous suivre, ils sont
habitués. Est-ce que la pression ontarienne, par exemple, le fait que vous
soyez près de l'Ontario...
M. Brochu
(Denis) : C'est un facteur.
Mme Vien :
O.K. C'est un facteur, donc ça exerçait une pression.
M. Brochu
(Denis) : Ça exerce une pression.
M. Parisien
(Hugo) : C'est plus normé aussi en Ontario.
M.
Brochu (Denis) : Beaucoup plus normé en Ontario, ce qui fait que la
proximité de la frontière, on sait, sans en faire une grande histoire, que les gens de l'Outaouais peuvent
facilement magasiner en Ontario, se procurer des biens de consommation en Ontario et autres, puis des
services. On est habitués à cette réalité-là. Mais il faut se replacer dans
le contexte non seulement de l'époque, mais ce contexte-là n'a pas changé, on
est encore aux prises avec les mêmes difficultés.
Ça fait que, si on a obtenu la dérogation, c'est parce qu'on a senti le besoin
de reconnaître que, pour les fins de ce qu'on voulait accomplir dans ce secteur d'activité là... qui est
relativement fragile, entendons-nous, là, il faut quand même s'assurer qu'on puisse contrôler un certain nombre
de choses puis que les gens puissent vivre décemment, dans le fond, pas de leur métier, parce que je pense que c'est
beaucoup plus la nature d'une personne qui est artisane... C'est ça que
c'est, un coiffeur puis une coiffeuse, ce
n'est pas un mécanicien, il ne change pas des pneus, hein, il traite avec des
personnes, parfois même agit comme
psychologue. Vous en savez peut-être quelque chose, Mme la ministre. On va chez
la coiffeuse...
• (15 h 40) •
Mme Vien :
...
M.
Brochu (Denis) : Non, mais, à une certaine époque, seul son coiffeur
le sait, ça fonctionnait, puis ça se dit encore. Ça fait que cette
réalité-là est encore présente puis elle justifiait cette démarche-là que nous
avions faite à l'époque en commission parlementaire. Ça ne s'est pas
fait en catimini. C'est en commission parlementaire, nous avons dit :
Voici la réalité de l'Outaouais.
Et
puis je pense que vous n'avez pas le choix parce que
ça fait partie des critères que la loi sur les décrets identifie... quand vous consultez l'article
6... et moi, je suis d'avis que le ministre, avant de proposer l'abrogation, devait
s'inspirer des critères de l'article
6... ma prétention étant la suivante : si les critères de l'article
6 doivent être utilisés pour extensionner une convention, puis je vous fais abstraction de la convention dans
notre cas, bien, de la même façon, à l'inverse, ce qui est le gros bon sens, je pense,
il va devoir s'inspirer des mêmes critères pour proposer l'abrogation. Ce
serait invraisemblable de penser
autrement. Il y a des éléments de justice naturelle qui font que...
Moi, je veux bien donner les pouvoirs au ministre, mais il va falloir qu'il les exerce judicieusement. Il ne peut pas les exercer
n'importe comment, ce n'est pas vrai, ce n'est pas le système du Québec
et ce n'est pas ce que les tribunaux reconnaissent. Mais il y avait un contexte
particulier qui existe encore.
M. Parisien, si vous
voulez compléter.
M.
Parisien (Hugo) : Oui, si je peux juste ajouter, c'est parce que la
notion artisanale, quand qu'on disait que 66 % des gens travaillent seuls, une femme enceinte ou une femme
qui a choisi d'être à la maison, donc, peu importe, pour exercer son métier de coiffeuse ou pour sa
durée enceinte, va se retrouver à la maison, peu importe la situation
dans laquelle... On se retrouve avec 66 % des salons qui sont dans cette
situation-là. Bref, on ne peut pas former une unité d'accréditation, ce serait nouveau au Québec, vous en conviendrez, avec
une seule personne qui est tant l'employeur que l'employé. Ce qui est important pour eux, c'est les prix minimaux. Je
vais être honnête avec vous, de voir une grande chaîne dire : Vous achetez 50 $ à l'intérieur
du marché et vous vous retrouvez avec une coupe gratuite, c'est bien rare qu'on
gagne à l'épicerie une dent arrachée gratuitement. Donc, la notion de
professionnalisme, eux autres, est basée là-dessus.
D'un
autre côté, la commission... C'est parce que la notion artisanale... Le prix
minimal devrait être partout au Québec,
selon moi, parce qu'on est là puis on forme des gens au niveau d'un diplôme
d'études professionnelles. C'est des artisans
qui travaillent seuls, et on se retrouve dans une situation où est-ce que, bon,
O.K., on a choisi d'aller dans une grande chaîne et on met les coupes à
3 $, mais une coupe à 3 $ avec une commission dessus, on sentait
qu'on n'ira pas loin.
Donc,
pour le décret sur les coiffeurs de l'Outaouais, oui, les normes de salaire
sont importantes, les commissions sont importantes, mais les prix et les
heures, c'est essentiel, c'est ce qui permet aux gens qui ont choisi cette profession-là, pour soit travailler à la maison,
soit travailler dans un salon seul, soit louer une chaise seul et entrer
aux heures qu'ils le désirent, d'avoir les
moyens de ne pas avoir à compétitionner avec les autres organisations
gigantesques.
Mme
Vien : M. Parisien, en Ontario, Me Brochu disait : Ah!
c'est pas mal réglementé aussi, c'est très normé. Est-ce qu'ils ont,
eux, des normes sur les prix et sur les heures d'ouverture?
M. Parisien (Hugo) : C'est
différent. C'est qu'en Ontario on est plus en mode d'un ordre des coiffeurs,
c'est-à-dire qu'on pense, la qualification est nécessaire en Ontario,
c'est-à-dire qu'on reconnaît qu'un coiffeur est une personne professionnelle, et, à ce sujet-là, tous les
moeurs changent en Ontario, c'est-à-dire qu'on n'a pas nos cartes, on ne
peut pas exercer la profession. Ici, oui, le gouvernement du Québec va
reconnaître la profession en offrant, comme le disait Yves tout à l'heure, un D.E.P., mais il n'y a pas personne qui valide,
c'est-à-dire qu'on ne peut pas refuser quelqu'un qui n'a pas de D.E.P. à faire de la coiffure au
Québec. Il y a beaucoup plus de problématiques au point de vue des soins
de la peau puis de la tête au Québec qu'ailleurs en Ontario.
Mais,
si on revient au décret, c'est plus au point de vue de... on a l'obligation
d'avoir une carte de compétence, et je
le sais très bien parce qu'à l'intérieur du bureau, la frontière étant très
courte, vous en conviendrez, bien, souvent, je dois remettre les cartes
de compétence. On dépoussière nos ateliers de 1984, là, avant, et on sort les
radiographies de poumons puis tout ce qui en
était pour aller chercher sa compétence et on remet la carte au coiffeur, parce
qu'en Ontario ils ont l'obligation
d'avoir cette carte-là, et non seulement ils ont l'obligation d'avoir cette
carte-là, c'est qu'à partir de 1984 tout coiffeur qui veut transférer en
Ontario doit, logiquement, soit trouver un mécanisme d'accompagnement ou avoir
cette carte-là. Mais, si tu es venu au monde après 1984, tu ne l'as pas.
Mme Vien :
Mais ils n'agissent pas sur les heures d'ouverture ou des prix minima, là, en
Ontario.
M. Parisien
(Hugo) : Non, ils n'agissent pas à ce sujet-là.
Mme Vien : O.K.
C'est beau. Est-ce que les grandes chaînes, les Wal-Mart de ce monde,
Escompte-Coiffe — je
ne sais pas si c'est... il y en a par chez vous puis que si vous considérez ça
comme des grandes chaînes ou, en tout cas, des chaînes — ces
gens-là, je présume, ces organismes-là sont sous décret chez vous.
M. Parisien
(Hugo) : Effectivement, oui.
Mme Vien :
O.K.
M. Briand
(Yves) : ...pas ça. Si vous me permettez d'en parler...
Mme Vien :
Non, c'est ça.
M. Briand
(Yves) : Quand j'ai commencé à travailler, en 1977, j'ai été employé
par la chaîne Glemby International. J'ai été
assistant-gérant chez Sears, dans le salon de coiffure. C'est sûr qu'eux ont dû
s'adapter au Québec, parce qu'ils
arrivaient des États-Unis et du reste du Canada et on avait le comité
paritaire, et, dans le temps, on avait aussi, comme on disait,
l'accréditation avec nos cartes de compétence. Chaque coiffeur, avec sa carte
de classe A, pouvait travailler avec un
apprenti, alors que, s'il n'y avait pas de classe A dans le salon de coiffure,
aucun apprenti ne pouvait entrer. Ils
ont dû s'adapter et ils ont trouvé l'idée quand même géniale, parce que ça leur
permettait d'offrir une qualité que... ailleurs, les coiffeurs et les
coiffeuses partaient, entraient, partaient, entraient.
Je
sais que, de ce monde, les grandes chaînes comme Wal-Mart, Magicuts, et tout
ça, eux, ce qu'ils veulent, c'est qu'ils
ne veulent pas de clientèle régulière. Ils veulent des coiffeurs et des
coiffeuses qui vont être là pour six mois, on change, on recommence. Le but, c'est d'offrir un service et non une
qualité de service. Parce que je recueille des coiffeurs qui ont
travaillé là et qui s'en viennent chez nous faire application et, une fois
qu'ils sont rendus là, ils s'aperçoivent qu'ils
ont été lésés dans leurs salaires et tout ça. Moi, ils sont tous inscrits au
comité paritaire à titre d'employés, ils vont voir Stéphane, et tout ça, et le comité paritaire se
charge de leur faire la chasse aux sorcières, si on peut dire, à ces
grandes chaînes-là pour leur remettre les sous qu'on leur doit.
Moi
qui ai engagé pendant 31 ans et qui continue d'engager 92 % de femmes dans
les salons de coiffure, je trouve ça atroce qu'on paie les gens avec si
peu de salaire. C'est sûr que ça m'a pris plus d'années à faire mes sous, parce
que le comité paritaire régit. J'ai des
employés qui sont rendus à cinq et six semaines de vacances payées, ce qu'on
ne voit jamais nulle part ailleurs dans la
coiffure. Alors, moi, c'est pourquoi ça, j'y tiens beaucoup. Ça m'a permis, à
travers les années, de m'éduquer et d'éduquer; parce que je suis aussi
entraîneur professionnel pour les coiffeurs, je donne de la formation partout
et j'y tiens énormément.
Je ne sais pas quoi
dire pour vous convaincre de le garder, mais je sais qu'en ayant siégé autant
sur le comité employés que le comité employeurs on a eu que des bonnes choses
qui en sont sorties puis je veux le maintenir à ce niveau-là.
Le Président (M.
Cousineau) : Trois minutes, Mme la ministre.
Mme Vien :
Vous êtes un employeur?
M. Briand
(Yves) : Oui.
Mme Vien :
Si j'ai bien lu, c'est 10 000 $ de plus dans les poches des coiffeurs
de l'Outaouais par rapport au reste du Québec.
M. Briand (Yves) : Entre
3 000 $ et 7 000 $, oui.
Mme Vien :
Entre 3 000 $ et 7 000 $?
M. Briand (Yves) : Oui, de plus.
Mme Vien : Vous leur payez du
quatre, du cinq, six, sept semaines de vacances.
M. Briand (Yves) : Oui.
Mme Vien : De votre point de
vue, qu'est-ce qui est si bon pour vous dans ce décret?
M. Briand
(Yves) : Bien, voyez-vous,
moi, quand j'emploie des gens, je les forme à travers les années et ça
coûte quand même beaucoup d'argent pour les former. Mais j'ai le rendement qui
revient par la suite, c'est-à-dire que, si je fais venir un formateur ou si
c'est moi qui le donne, ça coûte 3 000 $ pour la journée. Mes
employés, s'ils quittent deux mois après...
Mme Vien : Mais est-ce que
c'est le décret qui vous permet de faire ça?
M. Briand (Yves) : Le décret me...
Mme Vien : Qu'est-ce que le
décret vous apporte?
M. Briand
(Yves) : Le décret me permet
de leur offrir cette possibilité-là, d'avoir deux semaines, trois
semaines, quatre semaines, cinq semaines de
payées et d'avoir une commission de 50 % sur le travail qu'ils font, alors
que le reste du Québec, maximum, 40 %.
M. Parisien (Hugo) : Si je peux
apporter une correction, les semaines de vacances, c'est à sa discrétion. La commission, évidemment, fait partie du décret et
est calculée de part et d'autre, une partie pour l'employeur, une partie
pour l'artisan qui a travaillé à créer la coiffure chez la personne qui a
demandé le service.
Mme Vien :
Donc, de toute évidence, si je comprends bien, M. Briand, c'est qu'il y a
autant de bénéfices pour vous, l'employeur, que pour l'employé, hein?
M. Drouin (Stéphane) : Totalement
d'accord. Si je peux me permettre...
M. Briand (Yves) : Effectivement.
M. Drouin
(Stéphane) : Des employés
bien payés puis des employés heureux, ça reste des employés fidèles. Des
gens sous-payés, maltraités, dans des
conditions malsaines créent qu'il y a toujours une rotation. En ayant travaillé
dans le milieu, quand même, 18 ans, puis en
ayant rencontré des gens de partout dans la province, c'est toujours la
problématique. Des employés sous-payés puis
des gens pas heureux, là, ça fait juste sacrer leur camp. Alors, quand tu as
des gens bien payés puis que les gens
gagnent bien leur vie, qui ont des vacances, qui ont un mode de vie sain, ça
reste des employés fidèles et ça ne
reste pas des employés de six mois. Ça fait du six, 15, 20, 25 ans, comme on va
voir dans d'autres métiers, qu'on va demeurer dans le même travail
pendant une grosse partie de notre vie.
• (15 h 50) •
Mme Vien : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Cousineau) : Mme la ministre, si vous permettez, on va passer à l'autre bloc
puis on reviendra à vous un petit peu plus tard.
Mme Vien : Non, mais ça va.
Merci.
Le Président (M. Cousineau) :
Oui? Ça va? Alors, M. le député de Richelieu de l'opposition officielle pour 10
minutes.
M.
Rochon : D'accord.
Merci, M. le Président. MM. Drouin, Briand, Parisien et Brochu,
bienvenue en commission. Je ne m'attendais pas à ce que vous vous
présentiez ici avec un large sourire aux lèvres, je m'attendais à vous
retrouver à peu près dans les dispositions que vous présentez, dans la disposition d'esprit, là, avec laquelle nous vous accueillons.
Écoutez,
ce n'est pas rien, ce projet de loi
là heurte de plein fouet votre profession, le décret qui vous gouverne, parce qu'en effet, à l'article 39, on
y lit : «Le Décret sur les coiffeurs de la région de l'Outaouais ainsi que
tous les règlements qui en découlent sont abrogés.» Alors, pas étonnant que
vous soyez aujourd'hui devant nous portant cette frustration, si ce n'est pas
cette colère, parce que votre frustration a été amplifiée, si j'ai bien compris — et
j'espère avoir mal compris — parce que vous avez initialement appris par un média ce que le gouvernement projetait de faire.
Le 5 janvier
2015, vous écriviez au prédécesseur de la ministre actuelle ceci :
«Les parties contractantes au décret sur les coiffeurs de l'Outaouais
tiennent à souligner leur étonnement de la dernière lettre du ministère du
Travail concernant la
survie de notre décret. Comme la Loi sur les décrets de convention collective
le mentionne : une abrogation d'un
décret est possible lorsque l'une des
deux parties contractantes au décret ou le comité paritaire responsable de
son application désire y mettre un terme. À ce sujet, ni l'association
patronale, ni le syndicat des employés, ni le comité paritaire ne vous a déjà
fait part d'un tel désir», écrivez-vous au ministre d'alors.
«Le ministère
du Travail n'a pas fait la démonstration qu'il existe une volonté claire
d'abrogation du décret et il n'a pas
soumis aux parties les motifs sur lesquels repose [cette] décision. De leur
côté, les parties ont soumis, avec leur requête en modification, une
consultation qui exprime clairement la volonté de conserver ce décret.»
À la lumière
de ces dires, votre volonté d'abrogation repose uniquement sur des opposants
qui se sont exprimés en utilisant des
mécanismes autres que ceux prévus par la loi. Vous observez qu'ils ont donc, à
votre point de vue — et
là je ne me fais pas juge de ce qui s'est
produit — contourné
finalement les règles et, par le biais d'autres avenues, ont réussi à
convaincre le ministre qu'il faille cesser de voir apparaître au projet de loi
modifiant la loi initiale l'exception de ce décret pour les coiffeurs de
l'Outaouais. C'est bien votre lecture des faits. C'est ça? Je ne me trompe pas?
On a expliqué
plus tôt, c'est mon collègue de la deuxième opposition qui l'a fait, que nous
avons pu jouir d'un briefing technique sur le projet de loi, et ma
compréhension — et
je pense que la partageait mon collègue — était à l'effet que le projet de loi proposait l'abrogation
du décret particulièrement parce qu'il devait son existence à cette
exception prévue dans la loi, parce que son
existence était un peu anachronique, finalement. Il ne reposait pas, comme les
autres décrets, sur une convention
collective existante et rendait obligatoire des prix minimaux pour les services
rendus au public. Alors, on nous a
expliqué qu'il ne restait, au Québec, que votre seul décret dans le secteur de la
coiffure, celui de la région de l'Outaouais, que tous les autres avaient
été abolis dans les années 1980.
Pourquoi,
donc, avec ce portrait qu'on nous a tracé... et je vous pose la question non
pour m'objecter à l'existence de
l'exception, là, qu'on se comprenne bien, je ne veux pas augmenter votre
indisposition... je vous pose cette question pour vous permettre de faire valoir encore pourquoi il faudrait
maintenir cette exception pour la région de l'Outaouais. Vous en avez
parlé un peu tantôt, là. Vous nous avez dit que l'Outaouais était en soi une
région distincte, comme le Québec est, pour paraphraser un ancien premier
ministre, une société distincte. Mais, au-delà de ça, j'aimerais vous entendre
plus avant, là.
M. Drouin
(Stéphane) : ...de répondre
à cette question. En étant dans le milieu, je le vis à tous les jours.
Oui, on est à part. Oui, on a décidé de
conserver quelque chose. Et je vais vous faire l'inverse : Pourquoi nous
l'enlever quand nous, on gère nos
choses? On ne dérange personne ailleurs au Québec. Les gens rentrent faire
leurs rapports annuels, ça leur prend
15 minutes, ils connaissent Hugo, tout est clean, toutes les parties sont
en bonne entente. Pourquoi, demain matin, on nous l'enlève? On ne dérange personne, on gagne mieux notre vie, on a
une meilleure qualité de vie, on est le secteur qui est le seul qui gagne ce salaire-là minimum. Et, quand on dit «minimum»,
c'est parce qu'on peut faire bien plus, parce qu'on est un domaine qui est à commission. Alors, plus tu coiffes, plus
t'en fais, plus tu en as dans ta poche. Ce qui est important à
maintenir, c'est quand même le salaire minimum... à la base, demeure beaucoup
plus élevé qu'ailleurs.
Alors, je
vous rends la retour : Pourquoi qu'une telle journée dans l'année, à
13 h 57, on prend une décision de nous l'enlever sous le nez quand aucune partie contractante n'a souhaité
l'abrogation du décret? Il n'y a jamais eu de pétition, il n'y a jamais eu de mouvement, on n'a jamais
dérangé personne, on remplit nos rapports depuis l'existence. Alors,
c'est à vous de peut-être être conscient qu'on a un mécanisme qui fonctionne,
on a quelque chose qu'on apprécie, qu'on ne veut pas perdre.
M. Rochon : D'accord.
M.
Parisien (Hugo) : Et, si je peux renchérir, c'est évident que la
réalité de l'Ontario... je n'ai pas besoin de vous le mentionner, vous
le vivez au Québec, c'est-à-dire que les professionnels qui sont sous ordre...
je n'ai pas les études, vous comprendrez
qu'on est un comité paritaire qui a un budget annuel d'environ
100 000 $, là... Si on pouvait porter les études ou apporter des lobbyistes, on le ferait;
la situation n'est pas là. Mais, au point de vue des ordres, quand on
fixe les gens avec des professions, des
ordres... et, si vous regardez les salaires moyens des électriciens, c'est
beaucoup plus élevé... Je reviens aux
électriciens, aux mécaniciens. Pourquoi je dis ça? C'est parce que, si on
traverse la rivière, ils sont placés en ordres, c'est structuré. On se rend compte : Non, il n'y a pas de
prix, mais on fixe les prix ensemble, comme les électriciens, comme les médecins au Québec. Il y a des normes
qui sont soit gouvernementales, soit décidées en équipe, soit... qui
sont là. Et nous, on fait face à cette rivière-là. C'est important de le
savoir, parce que c'est pour ça qu'en 1996, entre autres, on avait maintenu
le décret.
Et la notion artisanale est très importante.
C'est-à-dire que, oui, on aimerait peut-être bien ça, étendre une convention
collective existante, mais, dans la situation actuelle, bien, on n'en a pas de
besoin. Ce sont eux la portée de la voix, ce
sont eux qui décident. En augmentant les prix minimaux, bien, ils touchent
directement au salaire de monsieur, donc...
désolé, au revenu annuel de monsieur et au salaire de monsieur. Donc, c'est le
plus beau des mondes, c'est une réalité qui est particulière.
Le Président (M. Cousineau) :
1 min 30 s.
M.
Rochon : Oh! que c'est peu.
En passant, ne croyez pas avoir à me convaincre des bienfaits sur les
conditions des travailleuses, on va dire ça,
travailleuses, majoritairement, et travailleurs du secteur. D'ailleurs, c'est
très, c'est très sympathique, presque
émouvant d'entendre un employeur nous dire qu'il est content de pouvoir offrir
de telles conditions de travail à ses
salariés, hein? Bon, ce qu'il ne pourrait peut-être pas faire s'il n'y avait
pas ce décret, qui produirait une concurrence bien différente. Mais il y a eu jadis
d'autres comités paritaires dans le domaine précis de la coiffure
ailleurs au Québec, n'est-ce pas?
Une voix : Oui.
• (16 heures) •
M.
Rochon : Je me souviens que,
chez moi, dans Richelieu, ça existait, il y a sans doute bien longtemps.
Mais pourquoi ceux-là ont-ils été abolis, au nom de quels motifs? Ce serait
intéressant de vous entendre là-dessus si vous connaissez la réponse, si vous
avez examiné cette question-là.
M.
Parisien (Hugo) : Peut-être que vous pouvez constater la passion des
coiffeurs qui sont avec nous. La
passion était la même quand que c'est arrivé
en 1984. Je n'y étais pas, je ne vous le cacherai pas. J'avais, quoi, trois, quatre
ans à l'époque. Je n'avais pas la tête pour me faire une tête. Par contre, avec
l'historique de l'ancien directeur général, qui travaille encore pour nous, qui
est consultant, et qui est là depuis 36 ans, lui, il avait une réalité qui
était réellement importante à figurer à l'intérieur de tout ça. Je veux...
Le
Président (M. Cousineau) : ...vous pourrez continuer un
petit peu plus tard sur cette lancée
avec le député de Richelieu, mais moi, je me dois... Je gère le temps
aussi.
Une voix : ...
Le Président (M. Cousineau) :
Je me dois de passer la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière pour
six minutes.
M. Picard :
Vous allez pouvoir poursuivre, parce que j'allais sur ce sujet-là.
Expliquez-moi pourquoi, dans les autres
régions du Québec, ça a été aboli... puis je ne connais pas le niveau des prix,
là, tantôt, on va revenir sur les prix... mais expliquez-moi pourquoi, dans les autres régions, il n'y en a plus,
de décret. Puis je dis ça, là, ce n'est pas parce que je suis contre vous, là. Je veux juste bien
comprendre. Parce que le but ici, nous, là... le gouvernement a déposé un
projet de loi. Il y a une commission
parlementaire pour qu'on saisisse bien le but recherché. Donc, on veut vous
entendre puis on se fait une idée par après.
M. Parisien
(Hugo) : C'est fort apprécié. Tout ce que je veux mentionner face à
ça, c'est que Me Brochu y était à ce moment-là. Vous y étiez, si je ne
m'abuse, en 1984?
M. Brochu
(Denis) : J'y étais, mais ça demeure vague. Je pourrais vous répondre,
par ailleurs, pour l'avoir vécu à l'égard de d'autres réalités. À
l'origine, il faut qu'il y ait une volonté des personnes. S'il n'y a pas de
volonté des personnes, ce n'est pas un truc qui va fonctionner. Les coiffeurs
et les coiffeuses, sauf les quelques opposants dont on nous parle — sans avoir vraiment les chiffres, parce qu'on ne les a jamais
eus — on
n'entend pas ces gens-là nous dire qu'elles sont très insatisfaites de
ne pas avoir à travailler le dimanche. On ne les entend pas dire ça. On les
entend au contraire dire : On aimerait bien que ceci évolue dans ce
sens-là parce que ça va bonifier notre situation.
Je vous donne un autre exemple. Si la volonté
n'existe pas dans les autres régions du Québec, avouez qu'on n'y peut pas grand-chose. Ça n'empêche pas les
gens du Québec — vous en
parlerez à M. Parisien — les gens d'ailleurs au Québec d'appeler M. Parisien, dire :
Bien, comment est-ce que vous avez fait pour? Et demandez-lui, il va vous le
dire. Et ça, c'est d'actualité.
Maintenant,
entre leur dire «voici ce que vous devriez faire» et poser des gestes dans ce
sens-là, bien, c'est à eux de se
prendre en main. C'est peut-être ça, la réponse. C'est un peu comme vous
dire : Comment se fait-il que, dans la région de l'Outaouais, les concessionnaires automobiles, il n'y en a
pas, de décret? Bien, parce qu'il n'y a pas, à l'origine, une volonté. Je pense que c'est aussi simple que ça.
Mais cette volonté-là, il faut la cultiver. Il faut avoir les moyens de la
cultiver.
M. Parisien
(Hugo) : ...la réalité qu'on
a soulevée tout à l'heure à l'égard de l'Ontario, c'est un des
principes majeurs à cette modification-là. Je voulais vous le... au maintien,
donc, du décret sur les coiffeurs de l'Outaouais à l'époque. Ça, je peux vous
le dire.
M. Picard : O.K. Mais...
Vous voulez parler? Non?
M. Briand (Yves) : Après que
vous aurez fini.
M. Picard : O.K., c'est beau. Au
niveau des décrets pour les coiffeurs, il y en avait sur tout le territoire du Québec?
Oui?
M. Brochu (Denis) : Je vais
présumer que oui. Il y en avait un bon nombre.
Une voix : Oui, il y en avait
partout.
M. Picard : Mais... Oui,
allez-y.
M. Briand
(Yves) : Pour avoir été dans
le domaine de la coiffure depuis 1977, je me souviens très bien, en
1984, quand Montréal et Québec
ont décidé d'abolir le comité paritaire, le remue-ménage que ça a fait, et tout
ça. C'était une clique, si on peut
dire, de gros employeurs du centre-ville de Montréal et du centre-ville de
Québec qui étaient tannés de se
faire diriger par les employés, parce qu'il y avait effectivement le comité des employés et des employeurs. Puis eux, ils
voulaient gérer ça à leur façon, mais ils n'ont pas donné l'information qu'il
fallait. Ils disaient juste simplement à ce moment-là :
Nous allons créer quelque chose de nouveau qui va vous amener dans un statut
meilleur. Mais il y a une loi qui dit que, lorsqu'on annule un comité
paritaire, on ne peut pas le réinstaurer.
Moi, depuis
1985, ce que j'entends de Montréal et Québec quand je donne de la
formation : Nous aimerions que vous
étendiez vos tentacules jusque chez nous. Nous voulons réavoir un comité
paritaire et un syndicat d'employés et d'employeurs.
C'est ce que j'entends tout le temps, tout le temps. Je le sais que nous, on a
travaillé fort à travers les années pour essayer d'étendre notre
territoire, mais on n'a pas les sous et les moyens nécessaires pour faire des
campagnes publicitaires pour aller chercher le reste du Québec. Il y aura
toujours une partie qui ne voudra pas, mais, quand il y a 75 % de la population des femmes qui
disent : Oui, je veux des conditions de travail meilleures, je veux être
en haut des normes du travail, mais ils ne peuvent pas l'obtenir, ils ne
savent pas où aller, ils ne savent pas quoi faire, moi, ça me saigne beaucoup
en dedans.
Le Président (M. Cousineau) :
1 min 40 s, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard :
Merci. Si j'ai bien saisi tout à l'heure, si, dans le projet de loi, on propose
d'abolir le comité, c'est parce qu'il
y a un problème au niveau de la reconnaissance des travailleurs comme
association accréditée. C'est-u ça ou je suis dans le champ?
M. Parisien
(Hugo) : Bien, effectivement, c'est parce qu'il n'y a pas d'unité
syndicale en Outaouais. Logiquement...
Mais c'est une belle façon novatrice, selon moi, de faire en sorte de vivre un
décret. C'est-à-dire que toute personne
peut assister à l'assemblée générale de l'une ou de l'autre des parties. Toute
personne peut... Bien, toute personne, en
autant que ce soit un coiffeur, sur le territoire de l'Outaouais, assujetti,
vous comprendrez. Toutes ces personnes-là peuvent... Et c'est par les
coiffeurs, pour les coiffeurs. Et c'est eux qui décident de leur prix, de leurs
conditions, de leur situation.
Et ce n'est
pas pour rien que, quand la dernière étude de votre... bien, pas de votre, là,
mais du comité sectoriel de la
main-d'oeuvre, qui pose la question à l'ensemble du Québec : Qu'est-ce
qu'on peut faire pour améliorer l'industrie de la coiffure?, réponse numéro un : remettre les
comités paritaires. Je n'ai pas besoin de vous dire que ce n'est pas en
Outaouais qu'on a fait augmenter la moyenne
de cette réponse-là. La réponse numéro trois... Excusez, j'ai fait deux.
Trois : réglementer la
tarification. C'est ce qu'on fait. Réponse numéro cinq : contrôler le
travail au noir. On ne fait que ça, enregistrer les salons. C'est un soutien au... On répond à des
éléments qui sont clairs pour l'ensemble du Québec. Et, malgré le fait
qu'on l'a déjà en Outaouais et que les gens
ne répondront pas ça, c'est malgré tout la première réponse qui sort d'un
diagnostic de la coiffure sur le territoire québécois. On l'a chez nous.
On aimerait ça le maintenir.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. Alors, ça termine le temps que vous aviez pour ce... Je reviens avec Mme
la ministre pour les 15 prochaines minutes.
Mme Vien :
M. Parisien, nous avons reçu, dans le cadre du dépôt du projet de loi, je
pense, c'est bien ça, des... C'était par voie électronique, les contre,
les pour, là? Oui?
Une voix : Les commentaires,
oui, tout à fait.
Mme Vien :
Il y a quand même des gens qui se sont dit en désaccord avec le maintien du
décret de la coiffure, des coiffeurs
chez vous. Tantôt, vous nous disiez : Tout le monde est d'accord, et
tout ça, puis on a quand même des copies de journaux de chez vous où, entre autres, il y a une dame, là, qui fait
des sorties publiques sur cette question-là. D'ailleurs, je ne sais pas si c'est la même dame à laquelle vous
faites allusion dans votre mémoire. Il y a quand même des gens qui,
donc, s'opposent, qui souhaiteraient l'abolition du décret.
M.
Parisien (Hugo) : Effectivement, vous avez tout à fait raison. Je veux
que vous sachiez une chose. Un comité paritaire,
là, on n'est pas là pour se faire aimer. Les associations, tant mieux, peuvent
avoir des partis pris politiques. Nous, nous appliquons un décret de
convention collective. C'est bien rare — puis je suis persuadé que
vous le comprenez, Mme la ministre — que j'envoie une montre en or. C'est plutôt
un huissier qui se présente avec un constat d'infraction pour ne pas avoir payé, pour ne pas avoir respecté les
prix minimaux, pour ne pas avoir respecté les heures d'admission des clients en salon. Et surtout, je tiens à vous
mentionner que ces gens-là peuvent participer aux mécanismes. Les
parties contractantes peuvent les écouter
lors des assemblées générales annuelles. Il n'y a pas de problème. Lors du
renouvellement, on peut vous envoyer
des lettres disant : Bien, on aimerait ça s'opposer à la... Il y a des
mécanismes. Ça, c'est le premier élément.
Deuxième élément.
Nous, on vous donne un exemple, le ministère du Travail nous a demandé
d'analyser une pétition qui avait été faite
en ligne. Vous conviendrez qu'il y avait des noms assez spéciaux sur la
pétition. C'est-à-dire que je ne
pensais pas que c'était pour causer autant d'émoi, mais George W. Bush avait
signé la pétition. C'est simplement, pourquoi
je vous le dis, c'est parce qu'on se posait des questions sur la nature et la
valeur de cette pétition-là. Quand on a vu ça, on s'est posé des questions, mais, quand on
a vu arriver Michael Jackson, alors qu'il était décédé, bien on s'est
posé encore plus de questions. On savait que M. Bush ne l'avait pas signée.
Ce
que je veux vous dire face à ça, c'est que n'importe qui peut signer ces
pétitions-là. Et, une fois qu'on a fait le ménage de ces documents-là, il faut vérifier si les gens qui répondent à
ces envois-là... Est-ce que c'est des coiffeurs? Est-ce que c'est des assujettis au décret sur les
coiffeurs de l'Outaouais? Ou est-ce que c'est la maman de la découpe de
journal que vous avez entre les mains? C'est
différent. Donc, il faut vraiment que ce soit un coiffeur qui est assujetti au
décret. Et, une fois qu'on avait fait,
exemple, le ménage de cette pétition-là, qu'on avait retiré la famille de la
dame qui se retrouve probablement dans le journal, qu'on avait retiré
certains éléments, bien, on constatait qu'il y avait 24 personnes qui avaient signé cette pétition-là sur 800 coiffeurs.
Et on avait remis le tout, à la demande du bureau du ministère du
Travail, à M. Audet pour lui faire état de qui était coiffeur, qui était
assujetti, et tous ces éléments-là.
Donc,
évidemment, si j'envoie un constat
d'infraction qui est autorisé par le contentieux du comité paritaire,
qu'il est approuvé et qu'on est contre le fait de fermer le dimanche, exemple,
et qu'on fait partie du 4 % qui veut ouvrir le dimanche, qu'on ouvre le dimanche, bien, je pense qu'on est en état de
vouloir aller se plaindre soit au ministère du Travail soit à d'autres entités, mais ça ne représente pas
la majorité, devoir que les deux parties contractantes gardent toujours
sur les épaules.
• (16 h 10) •
Le Président (M.
Cousineau) : Mme la ministre.
Mme
Vien : Est-ce que je vous ai bien compris, tantôt, dans votre
exposé, vous disiez : Lors de nos assemblées générales annuelles?
M. Parisien
(Hugo) : Bien, c'est lors de leurs assemblées générales annuelles. Ça,
il faut comprendre, il faut s'entendre.
Mme Vien :
O.K. Alors donc, le comité paritaire, ce n'est pas chez vous, là.
M.
Parisien (Hugo) : Attention. Le comité paritaire est formé de
personnes en toute parité. Eux sont constitués en assemblée générale annuelle. Eux aussi, donc, élus
démocratiquement, et c'est les gens qui sont là qui, d'une façon égale,
vont nommer des personnes qui siègent au comité paritaire. Donc, ça demeure des
coiffeurs dûment élus par leurs assemblées
générales annuelles qui constituent le comité paritaire, mais le comité
paritaire n'a pas d'assemblée générale annuelle.
Mme Vien : Bien. C'est ce que je redoutais, parce que c'est comme ça
partout, dans tous les comités paritaires puis...
M. Parisien
(Hugo) : Oui, oui, effectivement. Non, non, on ne fait pas différent.
Mme
Vien : ...moi, je cherche une façon d'augmenter l'imputabilité,
parce que c'est ce dont aussi, par le titre et... Et j'ai de la difficulté, très sincèrement, à
voir, dans le projet de loi, à quoi s'accroche cette imputabilité-là. Puis moi,
je suis imputable, le député de Richelieu
est imputable, le député de Chutes-Chaudière est imputable, vous aussi, vous
devez être imputable, M. le sous-ministre. L'imputabilité, c'est important.
Et
je posais la question ce matin : Est-ce qu'effectivement il y aurait une formule
à développer pour faire en sorte qu'on
puisse informer les assujettis, chez vous, les coiffeurs, aussi les employeurs
de ce qui se passe dans votre comité paritaire,
quelles sont les prévisions budgétaires pour la prochaine année, etc.? Déjà, de
les mettre sur un site Internet, c'est ce
que nous, on voudrait, mais, en plus d'être avec les gens puis de
l'expliquer... On me disait ce matin : Ça va être un peu compliqué, parce que c'est des syndicats aussi qui
inviteraient leurs syndiqués, puis, des fois, ça se compte en plusieurs centaines de personnes. On n'en est pas là. Mais
il faudrait trouver une formule pour parler d'imputabilité pour arriver
justement à développer quelque chose. En tout cas, vous avez parlé, lors de
l'assemblée générale annuelle, je dirais : Bien, voilà un décret où ils en
tiennent, une assemblée générale. Mais ce n'est pas ça, là.
En tout cas, si vous
avez des idées sur cette question-là, vous nous les acheminerez.
M.
Parisien (Hugo) : Si je peux vous mentionner, par contre, quelques
éléments... On a été les premiers à mettre en ligne le budget annuel, ça fait des années qu'il est en ligne, si vous
allez visiter le www.cpcoiffure.ca. Évidemment, il y a des éléments qu'on s'unit à l'association des
directeurs généraux pour faire faire les recommandations. Vous
comprendrez pourquoi. Si je vous donne un exemple, c'est que les personnes qui
sont en poursuite et que... n'ont pas été nommées coupables devraient être nommées à l'intérieur de la loi, on a des
questions. Mais, tant qu'ils ne sont pas plaidés coupables ou qu'ils
n'ont pas été nommés coupables via le système juridique, on ne peut pas...
Il y a quelques
éléments comme ça. Ce qu'il faut savoir, c'est que là on parle de...
actuellement, assister aux rencontres, on
parle de code de déontologie, de code d'éthique, d'éléments... Nous, on a un
document qui permet de déposer des
plaintes en ligne de façon confidentielle ou de façon nommée. Tous les éléments
sont déjà en place, c'est-à-dire que souvent il faut se poser la
question : Quelle est la meilleure façon? Et je ne sais pas si c'est au
gouvernement à traiter de ça, mais c'est
peut-être de mandater les comités paritaires à trouver la meilleure façon pour
rejoindre leurs assujettis. Il y a
des façons... Vous comprendrez qu'il y a des niveaux d'étude qui font en sorte
qu'on est tout le temps en mode lecture, on lit les journaux. Et il y a des diplômes d'études professionnelles
que peut-être, des fois, comme eux, sont passionnés, travaillent jour, nuit, soir, fin de semaine. En
coiffure, c'est probablement la réalité si on veut réussir. Donc, ces
gens-là, il faut trouver une façon de les rejoindre.
Et ce qualificatif-là, quand vous avez
parlé du site Internet, on ne réinventionne pas ces... Bref, on... J'avais
rien que le bouton à quatre trous... mais
c'est correct, on ne touche pas à la situation. Le seul but, c'est de faire en
sorte que les gens aient
l'information. La question : Est-ce qu'ils l'ont en Outaouais? Ça, je peux
vous confirmer que oui. Est-ce que c'est un audit comptable, donc vérifié par un comptable? C'est la première
dépense qui est affectée au budget. Est-ce qu'ils ont le nombre d'inspections? La réponse est oui. Est-ce
qu'on a un code de déontologie? La réponse est oui. Est-ce que je remets
via Internet les plaintes qui entrent? Elles
entrent automatiquement dans le bureau des présidents. Donc, si jamais il y
a une plainte à mon égard aux inspecteurs,
aux procureurs, ça entre directement chez eux. Donc, il y a des mécanismes
à mettre en place parce qu'on n'est pas la vérité absolue.
Par contre, ce qu'il
faut savoir, c'est que, d'un point de vue juridique, le comité paritaire dépose
souvent des poursuites au pénal tout simplement, et, rendus là, dans cette
partie-là, la partie légale et du contentieux, ce qu'il faut savoir, c'est que
c'est au juge à traiter de cette question-là. Souvent, on va avoir beaucoup de
malaise à avoir reçu un huissier ou à avoir
reçu un constat d'infraction. Je peux comprendre le malaise et le côté choqué.
Mais, quand on fait en sorte que l'ensemble
de la majorité suit ce décret-là, on a une obligation de l'appliquer, et, après
ça, bien, malheureusement... ou
heureusement, tant mieux, ces gens-là peuvent dénoncer des éléments. Mais je
vais être honnête puis je n'irai pas plus loin que ça, parce que je ne suis pas ici pour nommer des noms, mais,
quand on a poursuivi quelqu'un qui n'a même pas donné le salaire minimum imposé par la Loi sur les normes et le salaire
du décret, bien, je vous dirais que je dors quand même la nuit de voir qu'on figure à la première
page du journal pour nous chicaner un peu. Je dors quand même la nuit.
Mme Vien :
Bien, moi, ça fait le tour, M. le Président.
Le Président
(M. Poëti) : Bien, écoutez, c'est très bien.
Mme Vien :
Je vous remercie, parce que je n'aurai peut-être pas le temps de parole pour,
mais je tiens à vous remercier. Très
franchement, j'ai beaucoup apprécié vous rencontrer, j'ai beaucoup apprécié
vous entendre, j'en ai appris plus, puis c'est l'idée, c'est l'objectif
d'une rencontre comme celle-ci. On dépose un projet de loi. C'est une pièce législative qui a été déposée par un prédécesseur.
On peut lire des choses, mais avoir les gens en face de nous, avoir ce
pouls-là, c'est intéressant de pouvoir compter dessus. Merci beaucoup de vous
être déplacés aujourd'hui.
Des voix :
Merci à vous.
Mme Vien :
Et, encore une fois, je vous réitère toute ma sensibilité. Alors, on va
entendre les autres groupes, on va prendre le temps de bien réfléchir à
tout ça pour faire atterrir une pièce législative la plus intelligente
possible.
Une voix :
Merci.
Le Président (M. Poëti) : Peut-être juste à titre d'information pour le
suivi du temps parce qu'on est réglementés dans le temps, mais vous
pensez qu'à l'occasion tout se finit à 3 heures à Québec, c'est faux.
Je
veux vous dire que, Mme la ministre, vous avez quand même, après le temps de
l'opposition, donc la première opposition,
encore un 10 minutes, la deuxième opposition, un sept minutes. Si vous en
aviez besoin, Mme la ministre, vous auriez une autre période de temps
qui pourrait vous être allouée si vous le décidiez. Alors, sans plus tarder, je
vais permettre au député de Richelieu, pour une période de 10 minutes, de
pouvoir soit s'exprimer ou poser des questions.
• (16 h 20) •
M. Rochon : Merci, M. le Président. J'ai jeté un coup d'oeil au site Internet de la
Commission de l'économie et du travail
où les citoyennes et les citoyens peuvent laisser des commentaires, n'est-ce
pas, sur les projets de loi en examen. C'est
la ministre, là, qui m'a donné cette envie en référant à des commentaires qui
ne sont pas tous favorables au maintien du décret. Je suis allé voir
pour que nous laissions quand même une juste idée, là, à propos, là, du
pourcentage de commentaires favorables et
défavorables. Je n'ai pas fait une étude, là, statistique, là, poussée, mais,
je crois qu'elle en conviendra, on y
retrouve davantage de commentaires positifs que négatifs. Vous en convenez,
hein? Je voulais le signaler, là.
Mais effectivement, effectivement, il y a des coiffeuses et coiffeurs qui
commentent en se plaignant de devoir être régis par des règles en ce qui
a trait aux heures d'ouverture. Alors, certes, on en voit, on en voit, de ça.
Dans
votre mémoire, on cite des propos du Syndicat des employés coiffeurs de
l'Outaouais qui apparaissent sur le portail des associations, et ça a
été transmis en 2010, dans le journal des parties contractantes, à tous les
salons de l'Outaouais. Alors, je reprends la citation : «Souvent,
nous devons voir ce qui se passe ailleurs au Québec pour comprendre ce que vaut notre décret.
C'est en se promenant à Montréal vers 21 heures le dimanche de la fête des
Mères, tout en observant une coiffeuse en train de travailler qu'on se rappelle
à quel point notre décret est important.
«C'est
en voyant, à Québec, une promotion d'une compagnie américaine
nouvellement implantée qui fixe la coupe de cheveux à un prix dérisoire pour le prochain mois qu'on comprend la
valeur de notre décret. Devons-nous accepter qu'un artisan qui travaille à deux pas de cette compagnie depuis plus de
20 ans annonce faillite à la fin de ce mois?» Et ce sont des cas qui se
sont vus. Je me souviens, là, de quelque chose de cette nature dans l'actualité.
«Les gens qui ont choisi de travailler légalement à la maison pour prendre soin
de leur famille ont droit, eux aussi, à une vie décente.»
Je
cite ça parce que je trouve que c'est un excellent résumé du
plaidoyer que vous nous faites, avec beaucoup
de passion, c'est le mot de la ministre
et je le constate moi aussi, la passion qui vous anime et cette certitude que
le décret sert bien les intérêts des
coiffeurs et coiffeuses de l'Outaouais. Tout à
l'heure, vous exprimiez que le comité
paritaire n'a, par ailleurs, pas... ou a, par ailleurs, souvent une
tâche ingrate, hein, celle de rappeler à l'ordre, et que nous ne devons
pas nous surprendre de son degré relatif de popularité. J'ai bien compris?
Une voix :
C'est ça.
M.
Rochon : Qui fait appliquer
une loi, des lois — notre président a été policier — ne se construit pas nécessairement un
taux de popularité enviable. Il devient beaucoup plus populaire lorsqu'il est
député ou président de commission.
Mais je
blague, mais je comprends le sérieux de ce que vous disiez tout à l'heure et je
conclus que, pour ce motif, nous
devons être prudents quand viennent à nos oreilles des commentaires peu
élogieux sur les comités paritaires. Bon, tâche ingrate, ce qui ne veut pas dire que parfois ils ne peuvent pas
commettre d'impairs, d'erreurs, et ainsi de suite. Je sais que le projet de loi, là, dont on veut exclure
votre décret souhaite justement qu'un suivi attentif de leurs opérations
soit assuré, là, hein, et qu'ils exécutent leurs activités avec plus de
transparence, et il y a toutes sortes de modalités, là, prévues au projet de
loi.
Écoutez, moi,
je n'allongerai pas davantage, là, la période pour laquelle on me permet de
m'exprimer, mais je vais vous laisser
les derniers instants qui sont consacrés à mon intervention pour une dernière
chose que vous auriez à dire pour nous
convaincre qu'il faut que l'exception qui existe à la loi que ce projet de loi
veut amender subsiste dans la nouvelle loi. Je vais à 53.
M. Parisien (Hugo) : C'est important
de mentionner... On est actuellement ici aujourd'hui, ça fait un an et cinq
mois qu'on a fait l'annonce de la nouvelle. On aurait pu se retrouver dans une
situation catastrophique, plus de paiement
de cotisations. On est payés à même les coiffeurs, là, ce n'est pas le
gouvernement qui nous paie. Il n'y a aucun changement d'employés, les ressources sont là, les budgets sont là, donc
les cotisations sont payées par les coiffeurs, et, dans ce cadre-là,
c'est une volonté assez exceptionnelle quand on sait le salaire moyen d'un
coiffeur.
Deuxième
chose que je tiens à vous mettre à l'esprit, et je ne serai pas là juste pour
prêcher pour notre paroisse, c'est bien important de le noter, vous avez
environ 24 000 coiffeurs au Québec, on l'a mentionné tantôt, ce sont vos psychologues, les gens qui vous accueillent. Bref,
prenez-en soin, de vos coiffeurs. Ce n'est pas sous le seuil de la
pauvreté qu'ils sont bien traités, c'est
au-delà de ça. Et je peux vous dire que des politiciens qui prennent soin de
leurs coiffeurs, bien, 24 000
coiffeurs, ça parle au Québec, comme ça ne se peut pas. Vous le savez, donc
c'est simplement l'esprit politique de la chose.
Moi, je vous
dirais... je vous lance la balle, sachant qu'ils sont au même niveau d'étude
que tous les professionnels qu'on a
parlé aujourd'hui. Bien, je vous dirais, donnez-leur un petit élan, ils vont
vous remettre ça en double, en triple, en quadruple parce que c'est en double, en triple et en quadruple que ça
parle dans les salons. Voilà. Y aurait-u d'autres...
M. Briand
(Yves) : Bien, moi, si je
peux rajouter, je ne sais pas combien de temps, je vais faire ça très
concis...
Le Président (M. Poëti) : ...
M. Briand
(Yves) : Ah! parfait. En
1996, j'ai été audité par le gouvernement, pas parce que je ne payais pas
mes impôts, parce que je donnais trop des
gros montants de salaire. Il y a quelqu'un qui est venu chez nous du
gouvernement du Québec, il m'a dit :
Pendant 52 semaines, tu vas me remettre tes rapports de paie et tes rapports
d'entrée d'argent parce que tu paies
trop tes employés. J'ai dit : Sur quoi vous vous basez? Ils m'ont
dit : Le reste du Québec n'a pas des salaires comme chez vous. Là, ils ont demandé mes prix de
base, ils ont tout fait ça. Puis, pendant un an, à tous les jeudis
matins, je recevais un téléphone pour
donner : Ce coiffeur-là a entré 1 000 $, lui a entré
2 000 $, lui a entré 3 000 $, lui a entré
4 000 $, voici son salaire. Ça a duré pendant un an.
Alors, moi,
je me dis que, si on s'inquiétait du haut salaire que je donnais puis j'étais
réglementé, je me demande ce que le Québec perd pour les endroits où ça
ne l'est pas. Merci.
Le Président (M. Poëti) : Merci,
monsieur. Alors, M. le député de la deuxième opposition...
M. Picard : Merci.
Le Président (M. Poëti) : ...sept
minutes.
M. Picard :
C'est beau. Merci, M. le Président. Je vais être bref moi aussi. Peut-être une
petite question. Tantôt, vous avez parlé de coupe à 3 $, là, ça
existe, ça, des coupes à 3 $? Et, si oui, je voudrais savoir où — pas
parce que je veux y aller...
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Picard :
Non, mais, plus sérieusement, est-ce que vous avez le comparatif des prix que
les gens paient chez vous par rapport
à, je vais dire, la région de Québec, la région de Montréal, juste pour que je
saisisse bien, là, s'il y a un impact? Parce
qu'il n'y a pas peut-être même pas d'impact du tout, parce que j'ai compris
tantôt que le système de commission, vous, vous en donnez plus, les
autres donnent 10 % de moins. En tout cas, j'aimerais vous entendre
là-dessus.
M.
Parisien (Hugo) : Deux éléments, ce qu'il faut savoir, c'est qu'au
point de vue du prix minimum, souvent,
lors d'ouverture... je n'ai pas les données exactes à travers le Québec, mais
on sait qu'on peut recevoir des appels d'ailleurs, puis ça entre souvent parce que, pour
eux, s'ils ont un problème de prix, les anciennes moeurs font en sorte
que les appels sont retournés chez nous. Ils
cherchent le comité paritaire de la coiffure. Et, quand on retrouve des
promotions d'ouverture, je parlais tout à l'heure des grandes chaînes, donc il
y a différents éléments qui font en sorte qu'on se retrouve avec... ça ne durera pas six ans, on s'entend, mais, pour une
période de deux semaines, une période d'ouverture : Achetez tel
produit, obtenez une coupe à 5 $. Bref, ce n'est pas des outils pour faire
en sorte qu'on se retrouve dans une belle situation.
Il
y a plusieurs derniers avis, à même le Comité paritaire des coiffeurs de
l'Outaouais, qui sont acheminés pour mettre
un frein à des promotions. Et, dans ce cadre-là, oui, ça se peut qu'on se
retrouve avec des coupes à 3 $ parce que ça va être marqué : À l'achat d'un traitement capillaire, obtenez une
coupe à 3 $. Oui, il y a autre chose, il y a un autre paiement en
arrière, mais la coupe à 3 $, elle existe.
Par contre, puisque
ce sont des professionnels, c'est bien rare qu'on va entendre — je
reviens aux autres professions
professionnelles — un
mécanicien mentionner qu'on va changer vos pneus à double, triple et quadruple
rabais ou un électricien qui dit : Je
vais vous installer huit branchements. Et la preuve que c'est une profession
qui mérite d'avoir la notion de professionnalisme,
je vous inviterais, ce soir, petit devoir : Coupez les cheveux de votre
conjoint, votre conjointe. Vous allez
les appeler demain matin, vous allez les chercher, ils peuvent vous donner leur
numéro de téléphone, vous allez voir que ce sont des professionnels.
M. Picard :
Merci.
M. Parisien
(Hugo) : Ça me fait plaisir.
Le Président (M.
Poëti) : Elle va être déçue, c'est elle qui me les faits.
Des voix :
Ha, ha, ha!
Le Président (M.
Poëti) : Alors, merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Brochu, M. Drouin
et M. Parisien... Mme la ministre, les gens de la première et deuxième
opposition, on vous remercie de cette présence. Nous allons suspendre la séance
pour permettre à la prochaine intervenante de pouvoir s'approcher de la table.
On suspend quelques
instants. Merci à tous.
(Suspension de la séance à
16 h 30)
(Reprise à 16 h 36)
Le Président
(M. Cousineau) : Donc, nous allons reprendre nos travaux.
Nous recevons Mme Hébert de la Fédération
canadienne de l'entreprise indépendante. Vous allez voir qu'on va vous libérer
avant, parce qu'on est quand même en avant de... on a de l'avance sur notre
horaire, Mme Hébert. Alors, on vous laisse pour votre exposé, si je
me souviens bien, c'est 10 minutes, exposé de 10 minutes. Par la
suite, nous allons passer à une période d'échanges.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)
Mme Hébert (Martine) : Merci beaucoup, M. le Président. Moi, je peux
passer la soirée avec vous, ça ne me dérangera pas, surtout qu'on est
avec un excellent projet de loi.
Alors,
M. le Président, distingués membres de la commission, Mme la ministre, comme
vous le savez, la FCEI, on regroupe 109 000 chefs de PME à
l'échelle canadienne. Nos membres sont dans toutes les provinces, dans tous les
secteurs d'activité, et je vous dirais qu'on
en compte plusieurs centaines, voire quelques milliers qui sont assujettis à
l'un des 15 décrets de convention collective toujours existants et
chapeautés par la LDCC au Québec.
On
a pris connaissance avec, donc, beaucoup d'intérêt du projet de loi n° 53.
Je vous dirais que, depuis 10 ans, on a mené plusieurs sondages, on a fait des représentations à n'en plus
finir, des recherches, des études de cas, on a reçu des centaines et des
centaines d'appels de nos membres qui sont assujettis à un décret, on a
transmis 1 500 lettres signées individuellement
par des entrepreneurs récemment encore demandant aux ministres du Travail qui
se sont succédé d'abolir cette loi-là
ou à tout le moins de la dépoussiérer. Alors, vous comprendrez qu'on salue
chaleureusement le dépôt de ce projet de
loi, dont plusieurs dispositions se veulent le reflet, d'ailleurs, d'un
consensus patronal-syndical qui a été atteint au terme de travaux menés,
là, par le Comité consultatif sur le travail et la main-d'oeuvre.
Alors,
c'est un excellent projet de loi, comme je l'ai dit. Bien qu'on souscrive aux
éléments de consensus qui sont reflétés dans ce projet de loi là, je
pense qu'on souhaite, M. le Président, présenter, dans notre mémoire, là,
quelques éléments de réflexion additionnels pour le législateur pour rendre le
projet de loi encore plus excellent qu'il ne l'est.
Alors,
je vous dirais que, la LDCC, on considère que c'est une loi qui est périmée,
c'est une loi qui est inéquitable et
c'est une loi qui est très lourde de conséquences dans le paysage des affaires
au Québec. Il faut rappeler que c'est une loi qui a été adoptée en 1934 dans un contexte
socioéconomique complètement différent de celui qui prévaut aujourd'hui.
Cette loi fut conçue à l'origine pour
corriger certains déséquilibres qui existaient dans la gestion des relations du
travail au Québec, on s'en
souviendra. Or, depuis ce temps-là, M. le Président, le filet de protection
social des travailleurs québécois et le régime de négociation collective se sont grandement déployés, et ce, de telle
sorte que les conditions qui avaient mené à l'adoption de la LDCC
aujourd'hui sont complètement disparues.
À
l'heure où le Québec est le plus ouvert que jamais sur le commerce extérieur et
où notre économie a besoin de tous les
leviers possible pour continuer à croître, la LDCC, loi unique en Amérique du
Nord, représente une incongruité notoire
dans le paysage législatif québécois. En plus de ne pas répondre aux nouvelles
réalités du monde du travail, elle défavorise les petites et moyennes
entreprises dans les régions et dans les secteurs où il y a des décrets.
• (16 h 40) •
Aussi
ironique que cela puisse paraître, M. le Président, je vous dirais que,
80 ans plus tard, ce sont les propriétaires de petites entreprises qui nous affirment être victimes de compétition
déloyale due à la Loi sur les décrets de convention collective, chose que cette loi-là, à l'origine,
visait à corriger. Ils estiment que le marché est brisé à cause de cette loi
parce qu'elle favorise les plus gros joueurs
dans les localités où les décrets sont présents au détriment des plus petits
joueurs. Il faut rappeler que, dans
plusieurs comités paritaires, ce sont souvent les plus gros joueurs qui
participent aux négociations et qui se retrouvent à imposer des
conditions aux plus petits joueurs sans que ces derniers n'aient un mot à dire
ou que leurs réalités ne soient prises en compte.
En
revenant à l'essence même de ce que sont les comités paritaires, on peut
aussi facilement comprendre que cette loi crée un terrain fertile à des distorsions dans
les marchés, à des traitements inéquitables et à des conflits d'intérêts,
ne fût-ce qu'en apparence. En effet, les
comités paritaires, faut le rappeler, là, sont composés de représentants patronaux et syndicaux qui négocient les décrets auxquels ils
sont aussi partie prenante. Ces entreprises-là qui siègent sur les comités
paritaires négocient, donc, des conditions
qui vont être imposées à d'autres entreprises qui ne siègent pas aux
comités paritaires, mais avec lesquelles
elles sont en concurrence directe dans leurs marchés. Qui plus est, ces mêmes
comités paritaires sont aussi ceux qui sont
chargés de surveiller l'application des décrets. Autrement dit, ils sont à la
fois juge et partie.
Alors,
M. le Président, chaque mois, comme je vous l'ai dit tantôt, on reçoit de
nombreux appels de membres qui décrient
les décrets de convention collective, qui ne comprennent pas comment ça se fait
que le gouvernement maintient ce régime-là
qui les assujettit à des conditions sans qu'ils n'aient un seul mot à dire,
sans qu'ils ne soient jamais consultés, sans qu'on ne leur ait jamais
demandé : Est-ce que vous tenez au maintien du décret dans votre industrie
et dans votre région? Personne n'a jamais
sollicité... il n'y a pas d'assemblée générale des comités paritaires, les
assujettis aux décrets de convention
collective ne sont jamais consultés par personne et ils se font imposer des
conditions d'affaires, des conditions qui
sont décrétées, qui sont décidées par des joueurs qui siègent sur des comités
paritaires et qui ne sont pas représentatifs de l'ensemble des
employeurs qui sont couverts par le décret.
Alors,
nous, ce qu'on pense... Il y a beaucoup de choses dans le projet de loi, M. le
Président, qui viennent apporter, là,
plus d'imputabilité, plus de transparence, puis assainir la gouvernance des
comités paritaires, puis on salue ça. Mais je pense que, ce qu'il faudrait faire, d'une part, c'est qu'il faudrait que
l'application de la loi, incluant les vérifications, les enquêtes, soit sous l'égide d'un organisme
impartial et indépendant comme la Commission des normes, de l'équité
salariale et de la santé et sécurité du
travail, la CNESST. C'est d'ailleurs une des recommandations fondamentales
qu'on émet dans le projet de loi.
Un
mot maintenant sur la pertinence du maintien des décrets. Nous étions très
heureux de voir que le projet de loi prévoit
l'abolition de celui sur les coiffeurs de l'Outaouais, ça en fera un de moins.
On recommande aussi qu'une révision... puis
je vous dirais que je ne peux pas concevoir qu'au Québec, en 2016, on ait
encore besoin d'un décret pour régir les conditions de travail des
coiffeurs dans l'Outaouais. Il n'y en a pas nulle part ailleurs au Québec. Des
décrets sur les coiffeurs, il y en avait dans
d'autres régions du Québec, et ils ont été abolis. Je ne vois pas pourquoi
est-ce qu'on maintiendrait celui de l'Outaouais.
On recommande donc,
M. le Président, aussi, qu'une révision de la pertinence de l'ensemble des
décrets soit effectuée. Je pense que ce
serait le temps. Et on recommande que cette révision-là soit faite de façon
démocratique et non par ceux qui sont juge et partie, c'est-à-dire les
comités paritaires.
Donc, d'ailleurs, on
recommande qu'un alinéa soit ajouté à l'article 6 du projet de loi pour y
inscrire qu'aux cinq ans le ministère du
Travail administre un scrutin secret par la poste auprès de tous les assujettis
aux décrets sur la pertinence, leur
volonté de maintenir ou non le décret. Là, on pourrait vraiment dire que la
partie, au décret, patronale, si elle est effectivement en faveur, hein,
du maintien du décret ou si elle est en défaveur du maintien du décret.
Alors, M. le
Président, je pense qu'il est aussi utile de rappeler que cette loi est
incohérente avec les objectifs gouvernementaux en matière d'allégement
réglementaire et administratif. En tant que coprésidente du comité sur l'allégement réglementaire avec la vice-première
ministre, Mme Thériault, je vous dirais que c'est clair que la LDCC
vient ajouter une complexité réglementaire
et administrative qui pèse lourd sur les entreprises assujetties, qui, pour la
plupart, ne disposent pas d'un service de
ressources humaines ou de comptabilité pour gérer toutes les exigences qui sont
imposées par les comités paritaires.
Quant au fardeau
fiscal, il faut se rappeler aussi que la LDCC impose une taxe de plus sur la
masse salariale sur nos PME. Or, on était déjà les champions de ces taxes-là au
Québec, il me semble qu'on aurait pu se passer de celle-ci et qu'on devrait
s'en passer, mais bon, on va vivre avec au moins un dépoussiérage de cette
loi-là.
C'est
pourquoi, M. le Président, on souhaiterait aussi rappeler l'un des principes de
réglementation intelligente qui prône
une modulation des obligations en fonction de la taille des entreprises. Et on
souhaiterait soumettre à la considération de la commission de dire que, à tout le moins, on pourrait appliquer ce
principe-là dans la LDCC comme on l'applique dans d'autres lois, par
exemple la Loi sur l'équité salariale, qui dit que les entreprises de
10 employés et moins ne sont pas assujetties,
la Loi sur les RVER, qui dit que les entreprises de cinq employés et moins ne
sont pas assujetties. Donc, on pourrait
appliquer le même principe dans cette loi-là et on soumet à la considération
des membres de la commission de bien vouloir
adopter un amendement au projet de loi qui prévoirait que les petites
entreprises, là, de moins de 20 employés sont exclues de l'application
des décrets.
Alors, je vous dirais que... on vous a soumis
aussi, dans notre mémoire, une piste pour faciliter la vie des entreprises, à
savoir que... vous savez que les entreprises doivent payer les cotisations
qu'elles prélèvent sur la masse salariale aux comités
paritaires et elles doivent faire en même temps, aussi, mensuellement, des
rapports de DAS, de déductions à la source,
à Revenu Québec. Nous, ce qu'on suggère, c'est que le projet de loi prévoie que
les cotisations qui sont prélevées
dans le cadre des décrets soient versées à même les DAS comme toutes les autres
cotisations, incluant celles sur la CSST depuis quelques années. Alors,
je pense que ça serait, à tout le moins, au moins, une amélioration, là, au
chapitre de la paperasserie qu'engendre ce projet de loi là.
Au niveau de
la gouvernance, transparence et imputabilité des comités paritaires, M. le
Président, je pense que l'amélioration
de la gouvernance est au coeur de ce projet de loi là. On en est fort
satisfaits. Cette question a d'ailleurs été largement abordée lors des
travaux du CCTM et plusieurs ont fait l'objet d'un consensus. On salue les
articles qui donnent de nouvelles
obligations au comité paritaire en matière de transparence et de reddition de
comptes. On salue aussi ceux qui
obligent les comités paritaires à informer les employeurs et les travailleurs,
via leur site Internet, notamment, et on propose d'ailleurs de renforcer cette obligation-là en obligeant les
comités paritaires à informer les assujettis directement en cas de
changements au décret ou de propositions de modification.
Je voudrais
vous parler aussi de l'article 22 du projet de loi, qui ajoute le nouvel
article 22.3, qui va obliger les comités
paritaires à diffuser plusieurs informations, ce qui fera grand bien parce que
les comités paritaires ne sont pas réputés
nécessairement, là, pour la plus grande transparence qui soit. Alors, on est
très contents de ces articles-là. Et on vous suggère aussi d'ailleurs d'obliger les comités paritaires à non
seulement afficher les ordres du jour des rencontres qu'ils tiennent, parce que, l'ordre du jour, vous savez,
c'est très succinct, mais aussi à afficher les procès-verbaux, pourquoi
pas, sur le site Internet, des réunions, là, qui sont tenues.
On suggère aussi, afin de toujours améliorer la
gouvernance des comités paritaires, qu'ils soient soumis à la surveillance, qu'ils soient ajoutés dans les
mandats du Protecteur du citoyen ainsi que dans celui du Vérificateur
général du Québec. Ce sont des organismes
qui prélèvent, qui prennent de l'argent sur le salaire de travailleurs, qui
prennent de l'argent de la part
d'employeurs sur leur masse salariale et qui administrent ça, qui sont des organismes
aussi qui sont chargés d'administrer
une loi, donc on devrait les assujettir à la surveillance du Vérificateur
général du Québec et du Protecteur du citoyen.
Je vous
dirais qu'on a remarqué aussi que le projet de loi n° 53, dans l'article
4, prévoit que les modifications au décret ne passeront plus par un
décret gouvernemental, mais par arrêté ministériel...
Le Président (M. Cousineau) :
...en conclusion.
Mme Hébert
(Martine) : Bon. Oui. Alors,
pour une fois qu'on est d'accord avec la FTQ, s'il vous plaît, amendez cet article-là, là, pour ne pas qu'il y ait, je
vous dirais, là, de dérogation à la loi sur les règlements et que les
modifications doivent continuer d'être apportées par décret.
Bref, M. le
Président, un excellent projet de loi, un projet de loi qui est perfectible,
évidemment, et on souhaite vivement
que les membres de la commission souscriront à l'ensemble des recommandations
que nous avons soumises dans le mémoire déposé à cet effet.
Le
Président (M. Cousineau) : Bien. Merci, Mme Hébert. Alors, je
vais maintenant passer la parole à Mme la ministre pour les 16
prochaines minutes.
Mme Vien :
Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Hébert. Merci d'être là cet
après-midi. C'est très apprécié.
Enfin, ce projet de loi a été appelé, hein, pour étude avec, donc, des
consultations; par la suite, s'en suivront les processus reliés à tout
l'environnement législatif.
Je commence tout de suite. L'organisme
indépendant chargé, donc, de vérifier les comités paritaires, etc., vous le voyez... Vous nous parliez de CNESST, et
peut-être que j'ai mal compris. Comment vous le voyez? Qu'est-ce qu'il
fait exactement? Qu'est-ce qu'il surveille?
• (16 h 50) •
Mme Hébert
(Martine) : Ce qu'on dit,
c'est que les comités paritaires, là, sont juge et partie, c'est-à-dire,
ils sont chargés de négocier les
dispositions, mais, en même temps, ils sont chargés d'appliquer, de faire
appliquer les décrets. Puis c'est eux
autres qui reçoivent l'argent, hein, qui est perçu. Donc, ce sont des comités.
Ils ne sont pas impartiaux, là. Ils sont juge et partie dans
l'application des décrets.
Ce qu'on dit,
c'est que l'application de la loi et l'application des décrets, donc
l'inspection, les vérifications... tu sais, on a entendu beaucoup de choses, là, sur les inspecteurs, justement, et,
justement, des agissements qui ne sont pas toujours des pratiques, je vous dirais, très convenables.
Donc, tout ça est fait par des organisations qui sont les comités
paritaires qui sont juge et partie. Nous, ce
qu'on dit, c'est : Tout ce qui a trait à l'inspection, la vérification,
amenez ça à la CNESST plutôt, où il y a des inspecteurs qui sont
habitués de faire des vérifications dans les entreprises qui ont des codes de déontologie et des codes d'éthique à suivre, qui sont imputables aussi au sein de ces
organismes-là, et amenons plutôt tout qu'est-ce
qui est vérification et inspection à la CNESST plutôt que de laisser ça sur les
comités paritaires qui sont juge et partie, donc ils ne peuvent pas être
impartiaux lorsqu'ils font l'inspection et la vérification, ils sont juge et
partie.
Mme Vien : Mme Hébert, c'est que la CNESST est aussi elle-même paritaire.
Est-ce que ça va causer un problème?
Mme Hébert
(Martine) : La CNESST est
paritaire, mais je vous dirais qu'elle est chargée d'administrer beaucoup
de lois du travail, non seulement en matière de santé et sécurité, en matière d'équité salariale, en
matière de normes du travail. Et la parité qui existe au sein de la
CNESST, c'est une parité qui englobe l'ensemble des représentants des... en fait, la vaste
majorité des représentants des employeurs québécois et de même pour les
travailleurs. Ce n'est pas un petit
groupe d'employeurs dans une région puis dans un secteur donné qui contrôle
toute l'affaire, là. On se comprend.
Mme Vien :
Mme Hébert, vous nous parliez tout à l'heure que, si je vous ai bien
compris... Est-ce que vous souhaiteriez
qu'une partie des entreprises soit comme retranchée de l'application du décret?
Est-ce que je vous ai bien suivie? Donc, de petites entreprises?
Mme Hébert
(Martine) : Oui, tout à fait. Je vous le soumettrais à votre considération, Mme la ministre, de même qu'à celle des membres
de la commission qu'il y a plusieurs lois au Québec en matière de loi du travail. Je vous soumets celle sur l'équité salariale. Je pense à celle sur les RVER aussi. Donc,
il y a plusieurs lois au Québec qui modulent les obligations des entreprises en fonction de la taille. On appelle ça d'ailleurs...
C'est un des principes de réglementation intelligente. Et c'est un des
principes, d'ailleurs, Mme la ministre, que votre gouvernement vient d'adopter
dans son nouveau plan d'allègement
réglementaire, où il s'engage à appliquer ce principe-là dans les
réglementations qu'il vote.
Alors, je
vous dirais, je soumettrais, donc, c'est pour ça qu'on dit : Pourquoi
est-ce qu'on n'appliquerait pas ce même principe là?, surtout que
l'administration du décret ou toute la paperasse qui va avec le comité
paritaire, les obligations qui sont imposées par le comité paritaire, comme le
reste, pèse beaucoup plus lourd sur les plus petites entreprises. Alors, si on dit : Bien moi, je vous dis :
Allons-y avec les principes de réglementation intelligente, si vous voulez maintenir l'ensemble des décrets tels
quels, bien, à ce moment-là, au moins, excluez les plus petites
entreprises de l'application des décrets.
Mme Vien :
Mais les décrets existent justement pour ces petites entreprises là qui n'ont
peut-être pas les reins assez solides,
qui n'ont pas assez de personnel, qui jamais ne se syndiqueront. C'était pour
leur donner justement une espèce de régime de conditions de travail,
parce qu'elles sont petites.
Mme Hébert
(Martine) : Non. Bien, je
vais vous dire, Mme la ministre, là, que moi, je n'ai pas entendu un
seul de mes membres demander le maintien du
décret. J'ai encore... en m'en venant, là, j'étais dans ma voiture, j'ai encore
parlé avec trois de mes membres, qui sont
dans différents secteurs qui sont couverts par un décret puis qui m'ont
dit : Ça n'a pas de bon sens, c'est un groupe d'individus qui
décide pour moi, pour mon entreprise puis pour l'ensemble des autres entreprises dans mon secteur d'activité, ce que je
dois faire, comment je dois payer. Ils n'en veulent pas, de cette loi-là.
Ils n'en veulent pas. Les PME du Québec n'en
veulent plus, de cette loi-là. Ils n'en veulent pas parce que, je vous l'ai
dit tantôt, malheureusement, c'est une loi où vous avez les plus gros joueurs
qui sont assis au comité paritaire et qui fixent les conditions, qu'ils vont
imposer à ceux avec qui ils sont en compétition directe sur le terrain.
Mme Vien :
Mme Hébert... Juste une petite seconde. Je prends une note.
Mme Hébert
(Martine) : Vous savez, il y
a beaucoup, Mme la ministre, d'entreprises au Québec qui ne sont pas assujetties à un décret et qui n'ont aucun
problème à fixer les conditions de travail de leurs employés, là. Je veux
dire, ce n'est pas parce qu'on a un décret
que tout d'un coup c'est merveilleux. Au contraire, moi, ce que je vous dis, ce
qu'on me rapporte et nous à la FCEI... On
n'est pas juge et partie, là. Je veux dire, les comités paritaires, on ne siège
pas là-dessus. On ne reçoit pas une
cent de ça. Je veux dire, moi, je ne travaille pas pour un comité paritaire,
puis ce que nos membres nous disent, c'est : On n'en veut pas.
Mme Vien :
Quand vous dites qu'il y a des entreprises qui devraient être retranchées de
l'application de la LDCC, c'est les entreprises de combien d'employés et
moins?
Mme Hébert (Martine) : Bien,
écoutez, nous, ce qu'on vous a suggéré, c'est 20 employés et moins.
Mme Vien : Et moins?
Mme Hébert (Martine) : Oui.
Tout à fait.
Mme Vien : Bien là,
c'est parce que c'est 95 %... 92 %, est-ce que c'est ça, M. le
sous-ministre, là, vous me donnez... 95 %, ici, des entreprises, donc, qui
seraient visées. Autrement dit, aussi bien dire qu'il y a plus de décret.
Mme Hébert
(Martine) : Sinon, Mme la
ministre, là, moi, je vous le dis, moi, je demande à ce qu'on demande
aux entreprises qui sont assujetties à un décret, là, qu'on vérifie de façon
démocratique est-ce qu'elles souhaitent avoir un décret, oui ou non. Et vous allez voir que vous allez avoir probablement
95 % qui vont vous dire justement : on n'en veut pas, du décret. Alors, que les entreprises qui en
veulent, du décret, bien, se l'appliquent entre elles puis qu'elles
excluent, dans le fond... ou qu'on permette
à celles qui ne veulent pas être assujetties
au décret justement de pouvoir exercer leurs affaires de façon
libre et concurrentielle.
Mme Vien :
Mme Hébert, je pose la question depuis ce matin parce que je me questionne
beaucoup. Bon, je comprends que la
transparence, la gouvernance, vous êtes sûrement d'accord avec ça si j'ai bien
compris votre propos puis dans les
lectures que j'ai faites. Sur l'imputabilité, il n'y a rien actuellement de ce
qu'on peut imaginer qui existe dans les décrets, c'est-à-dire que, tu sais, une
assemblée générale annuelle comme on voit chez nos organismes
communautaires ou même... institutions
financières tiennent des assemblées annuelles. Qu'est-ce qu'on pourrait mettre
en place pour assurer l'imputabilité
des personnes et/ou des membres du comité paritaire ou du comité paritaire
lui-même? Qu'est-ce qu'on pourrait mettre en place? Est-ce que vous avez
songé à ça à la FCEI?
Mme Hébert
(Martine) : Oui, tout à
fait. S'il y a un des membres à qui j'ai parlé en m'en venant, justement
tantôt dans mon auto, qui nous écoute en ce moment, il va être bien content de
votre suggestion parce que c'était une des suggestions qu'il me faisait, de
dire : Moi, là, je ne suis jamais consulté. Il dit : Ils m'arrivent
avec un décret, là, puis supposément, là, qu'ils nous représentent, puis tout
ça. Puis il dit : On n'est jamais consultés. On ne s'est jamais fait demander : Êtes-vous d'accord ou non? Est-ce
que vous le voulez, le décret? Est-ce que vous ne le voulez pas? Est-ce
que ces conditions-là... Alors, il
dit : Je n'ai jamais été invité dans une assemblée générale. Je n'ai
jamais eu de mot à dire. Je n'ai jamais parlé avec ces gens-là à part
de : Il faut que vous donniez vos cotisations puis il faut que vous
payiez. Alors, je pense, Mme la ministre, que l'assemblée générale que vous
proposez serait une grande avancée par rapport à la situation actuelle.
Cependant, il
faut bien se rappeler que, si c'est une assemblée générale où le vote est à
main levée puis que tu as des taupins en arrière qui te checkent puis
que le comité paritaire va t'écoeurer parce que tu as voté contre ou tu as voté
contre une proposition, pendant les années
qui vont suivre, bien, on n'est pas dans un exercice, je vous dirais, où
c'est parfait. O.K.? C'est mieux que la
situation actuelle. Moi, ce que je vous dis, c'est : Ce qui est
préférable, c'est encore un scrutin,
un scrutin secret administré par la poste, par le ministère du Travail, à
l'ensemble des assujettis au décret. Je pense que c'est le meilleur mécanisme pour assurer l'exercice le plus
démocratique possible. Mais je vous dis qu'à défaut de ça, au moins,
l'assemblée générale, ça serait mieux que rien.
Mme Vien : Je vais vous
parler des coiffeurs de l'Outaouais. Avez-vous des membres dans ce coin-là?
Mme Hébert (Martine) : J'en ai,
j'en ai plusieurs. J'ai parlé avec deux de mes membres, d'ailleurs, en m'en
venant, qui sont des coiffeurs de l'Outaouais.
Mme Vien :
Selon les représentants du comité paritaire qui étaient là juste avant vous, je
ne sais pas si vous avez pu leur
glisser un mot, de leur lecture à eux, il n'y a pas grand monde en Outaouais
qui souhaite l'abrogation du décret des coiffeurs en Outaouais.
Mme Hébert
(Martine) : Moi, j'ai une
lecture complètement différente, Mme la ministre, puis moi, je ne suis pas comité paritaire, là. Moi, je ne suis pas juge
et partie de ça, là, puis les représentants qu'on a sur le terrain, les
membres que nous avons dans l'Outaouais qui
sont assujettis au décret, là, il n'y a personne qui en veut. Et j'ai demandé
tantôt, là, parce qu'ils se connaissent
entre eux autres, puis je vous le dis, là, j'ai demandé : Est-ce que vous,
de ce que vous connaissez de vos compétiteurs,
là, ils en veulent-tu, du décret? Ils m'ont dit tous les deux : Martine,
je ne connais pas personne qui en veut de ce décret-là à part ceux que
ça sert qui sont au comité paritaire.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme la ministre.
Mme Vien :
Une dernière question. Sur l'arrêté ministériel, ça chicotait des centrales
syndicales ce matin. De toute évidence,
de ce que j'ai compris de mes lectures et de ce que vous ai entendu dire
tantôt, vous n'êtes pas d'accord avec ça. Vous dites : C'est encore le gouvernement qui devrait décider. À
partir du moment où je vous dis : Un arrêté ministériel ou un règlement qui est présenté par la ministre au
Conseil des ministres, ce qui vient alourdir beaucoup, pour changer un
tiret comme on a déjà dû faire... Il faut
donc toute la procédure qui nous amène jusqu'au Conseil des ministres. Là, tu
sais, c'est par chance que le ridicule ne
tue pas, là, à un moment donné, parce que ce n'est pas drôle. On sait ce que ça
prend comme temps, comme énergie,
comme étapes, comme processus pour amener un mémoire au Conseil des ministres,
parce que tout règlement est
accompagné d'un mémoire. Et donc ça passe à travers toute la filière
administrative, chez les sous-ministériels, tous les gens posent un oeil là-dessus puis émettent des commentaires.
Si je vous dis : À partir du moment où il y a, donc, ce processus-là de... de consultation, pardon,
avec — les
journées sont longues, là, on commence à chercher nos mots à cette heure-ci — de consultation à la Gazette officielle,
voilà, que ce soit par décret... par arrêté ministériel ou règlement, ça
ne vous rassure pas un peu?
• (17 heures) •
Mme Hébert
(Martine) : Écoutez, je ne
suis pas juriste, là, puis je ne connais pas les dédales. Moi, ce que je
vous dis, c'est qu'au CCTM, il y a eu
consensus pour dire qu'on ne voulait pas de dérogation à la Loi sur les
règlements, et je vous dirais que, ce qui est important, c'est d'avoir
la possibilité de consulter. Ce qui est intéressant dans le processus actuel, c'est qu'il y a... bien, en tout cas, à
moins que je ne me trompe, là, mais il y a
tout un processus où on peut aussi émettre des commentaires, etc. C'est transparent. Donc, c'est ce qu'on
préférait, on préférait que ce soit maintenu tel que c'est à
l'heure actuelle, surtout qu'on
connaît la propension des comités paritaires à vouloir toujours
en rajouter, puis en rajouter, puis à
justifier, hein? Je vous signalerai qu'il
y a beaucoup... la tendance est
souvent à vouloir rajouter des choses.
Prenez
l'exemple, par exemple, du comité d'entretien ménager dans Montréal,
qui avait introduit une espèce de certificat de conformité supposément
pour faciliter l'application du décret; on sait très bien que c'était pour
limiter l'entrée de nouveaux joueurs dans le
marché, hein, de mettre des barrières à l'entrée. Heureusement, ils ont été déboutés en cour, parce que la loi prévoyait justement,
là, des mécanismes assez serrés d'encadrement de ce genre de pouvoir.
Alors,
je vous dirais que, moi, comme je vous dis, le consensus du CCTM, il était très
clair à l'effet qu'on ne souhaitait pas que ce soit par arrêté ministériel.
Mme Vien :
Merci beaucoup, Mme Hébert.
Mme Hébert
(Martine) : C'est moi qui vous remercie.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la ministre. Alors, je passerais maintenant
la parole au représentant de l'opposition officielle, le député de
Richelieu, pour 9 min 30 s.
M. Rochon :
Oui, merci, M. le Président. Merci, Mme Hébert, de votre présentation, qui a le
mérite d'être claire, c'est le moins
qu'on puisse dire, claire, et là n'y voyez pas, là, un reproche que je vous
adresse, j'allais ajouter : claire et sans beaucoup de nuances. En tout cas, votre discours
est campé et ne laisse pas de place au gris, c'est noir ou c'est blanc.
Le gouvernement, s'il
voulait vous satisfaire entièrement, il n'amenderait pas la Loi sur les décrets
de convention collective, il la ferait complètement disparaître. Il n'y aurait plus, au Québec, de décret de convention collective. Vous haïssez ça. Vous haïssez ça.
Et,
quand je dis «vous», j'aimerais... puis ce n'est pas un «vous» personnel, là,
c'est vous, votre association, et j'aimerais mieux comprendre qui vous
représentez. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, elle a des membres sur l'entièreté du territoire
canadien. Combien de membres? Des entreprises
de toutes dimensions ou à dimensions variables? Pouvez-vous m'instruire là-dessus
un peu?
Mme Hébert (Martine) : Ça fait 45 ans qu'on existe, à la FCEI, hein? On
est l'organisme qui représente les PME à l'échelle canadienne, y compris au Québec. On a 109 000 membres au Canada. On en a à peu près
24 000 au Québec, et, de ce
nombre-là, au Québec, nous en avons plusieurs centaines qui sont assujettis,
voire, je l'ai dit tantôt, même quelques... on est dans le plus que le millier de membres qui sont assujettis à un
décret de convention collective à l'heure actuelle, et ça fait... Et, quand vous dites, là : J'haïs les
décrets, un instant, là, moi, je suis porte-parole. Moi, ce que je vous dis,
c'est ce que mes membres, ce que les chefs
de petites entreprises du Québec me disent, que je représente, me disent, c'est
que c'est une loi qui mine leur
compétitivité, c'est une loi qui prête à la compétition déloyale, c'est une loi
qui prête aussi flanc à toutes sortes
de pratiques qu'on peut juger parfois pas nécessairement souhaitables par les
comités paritaires et c'est une loi qui leur empêche de faire des
affaires.
Puis
je vais vous donner juste un exemple. On parlait des coiffeurs de l'Outaouais
tantôt. Je parlais justement avec une
de mes membres, là, qui est en Outaouais, puis elle, cette membre-là, elle a un
salon de coiffure en Outaouais puis elle a aussi d'autres services qu'elle offre, comme spa, etc. Bien, à cause du
décret, là, l'expansion de son entreprise puis les services qu'elle peut
offrir à sa clientèle au spa sont limités parce que, là, elle ne peut pas faire
ci puis elle ne peut pas faire ça, etc.
Donc, c'est une loi... et ce n'est pas une question de haïr, mais c'est une loi
qui, oui, de par ses dispositions, empêche nos petites entreprises de
pouvoir prendre de l'expansion et de pouvoir continuer de croître et de créer
des emplois, effectivement.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui, j'ai compris, et cette nuance, je l'avais faite, Mme Hébert. Quand j'ai
dit «vous», tantôt, j'ai caricaturé,
évidemment, là, quand j'ai dit : Vous haïssez ça, les décrets, «vous»
étant la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante, qui représentez ceux que vous venez de nous dire
représentés.
Qu'est-ce qui rend les entreprises, qui doivent se gouverner en vertu
d'un décret, moins compétitives? Est-ce que ce sont les conditions que ces entreprises doivent offrir à leurs
travailleuses et travailleurs qui seraient, ces conditions, si les
entreprises le pouvaient, bien moindres que ce qu'elles sont en raison de ce
décret?
Le Président (M.
Cousineau) : Mme Hébert.
Mme Hébert
(Martine) : Écoutez, il y a plusieurs choses, parce que les décrets
peuvent imposer plusieurs conditions aux
entreprises. Il y a, évidemment, tout ce qui est la paperasserie, qu'on appelle,
hein, l'espèce de rapport mensuel.
Et, quand, dans une entreprise, vous avez des travailleurs qui sont assujettis
au décret, vous en avez qui ne sont pas assujettis, il faut que vous teniez des registres, il faut que vous
montriez ça aussi à l'inspecteur quand il vient, etc. Et il y a toute une série aussi de choses qui dictent, par exemple, les heures d'ouverture, par
exemple, la formation, les
normes, en termes de compagnonnage, etc.,
donc qui enlèvent de la flexibilité à l'entreprise pour pouvoir opérer comme elle souhaite opérer. Et, rappelez-vous, il y en a eu des cas
qui ont été médiatisés, là, d'entreprises même qui ont fermé des
services, parce que le comité paritaire disait : Bien, si tu
fais de la signalisation de chantier routier, tu vas être obligé d'être
assujetti au décret aussi, avec ton service de ça, etc.
Donc,
oui, ça enlève de la flexibilité aux petites entreprises et ça alourdit le
fardeau réglementaire qui pèse
sur elles, parce qu'elles n'ont pas de
département de ressources humaines pour administrer tout ce que les décrets
leur imposent.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Rimouski... de Richelieu.
M. Rochon : Il se trompe toujours,
il me dit toujours Rimouski, mais je trouve ça flatteur, parce que j'aime
beaucoup mon collègue de Rimouski.
Une voix :
...
M. Rochon : La région est très belle
aussi, celle de Richelieu également.
Vous êtes consciente, Mme Hébert, que ces
décrets, ils procurent aussi, aux travailleuses et travailleurs des entreprises qui doivent se gouverner en fonction
d'eux, des conditions de travail dont sont heureux de pouvoir jouir ces travailleuses et travailleurs. Parce que, si je
vais au bout de votre logique, je pourrais conclure que, de la même façon
que vos membres voient d'un bien mauvais
oeil ces décrets, je présume qu'ils ne doivent pas voir d'un oeil plus
favorable les syndicats, les conventions collectives qu'ils sont obligés de
signer. Ça aussi, hein, ça les force à négocier, avec leurs employés, des
conditions salariales plus favorables.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine) : Je vous
dirais...
M.
Rochon : Parce que, tout à
l'heure, je vous ai entendu dire, et ça m'a frappé, votre surprise d'être, pour
une fois, d'accord avec la Fédération des
travailleurs du Québec, la FTQ, puis, quand vous avez nommé FTQ, ce n'est pas
clair que vous aviez un autocollant de la FTQ sur le pare-brise de votre
automobile.
Mme Hébert
(Martine) : Probablement
qu'ils n'ont pas une étiquette de la FCEI eux autres non plus sur la
leur.
M. Rochon : Non, et je pourrais sans
doute comprendre pourquoi, là.
Mme Hébert (Martine) : Mais bon, je
les aime bien. Soit dit en passant, justement, on travaille ensemble au CCTM et
ça se passe très bien.
Alors, je
vous dirais qu'au niveau des conditions de travail les études qu'on a faites,
justement, démontrent que nos membres
vont souvent rémunérer leurs employés même au-dessus du décret. Le problème
n'est pas là, le problème est dans le
la flexibilité. Le problème est que, si le décret t'impose une augmentation
salariale de tes employés de 4 %, bien peut-être que toi, tu aurais peut-être décidé... ces
employés-là, x, y, z, de les augmenter de 5 %, puis d'autres, de 2 %.
Mais là tu ne peux plus, parce que
ton décret vient de t'imposer des choses qui t'enlèvent ta flexibilité comme
employeur de pouvoir gérer tes employés et tes salaires dans ton
entreprise de la façon que tu voudrais et de façon plus équitable.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député, 1 min 40 s.
M.
Rochon : Mme Hébert, est-ce
que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a fait, à
l'époque où le prédécesseur de la ministre
actuelle avait les fonctions de ministre du Travail, des représentations auprès
de lui alors qu'il travaillait à
l'ébauche de son projet de loi, pour qu'en effet ce projet de loi renferme un
article prévoyant la disparition, l'abrogation du décret des coiffeurs
de l'Outaouais?
Mme Hébert
(Martine) : On a fait de
représentations pour l'abrogation de tous les décrets. Alors, c'est sûr
que, je vous dirais, dans ce sens-là, ma réponse est oui. C'est comme...
M. Rochon : Oui, mais pas
spécifiquement celui-là, vous n'avez pas de souvenir, mais enfin...
• (17 h 10) •
Mme Hébert
(Martine) : Bien, je vous
dirais que c'est quand même une incongruité. Pourquoi est-ce qu'on a
enlevé tous les décrets de tous les coiffeurs partout ailleurs au Québec puis
qu'on a maintenu celui-là? Pouvez-vous m'expliquer ça? Il y a longtemps, là. Et
que, pourtant, le milieu de la coiffure, au Québec, là, se porte quand même relativement bien, hein? Il y a des coiffeurs.
Puis j'ai entendu tantôt parler de coupes de cheveux à 3 $. J'aimerais ça
avoir l'adresse, là, parce que je n'en ai jamais vu, là, personnellement.
M. Rochon : Cet argument sur
l'existence — anachronique,
selon vous, là — du
décret pour les coiffeurs de l'Outaouais, vous l'avez tenu auprès du député de
Louis-Hébert?
Mme Hébert
(Martine) : M. le député, on
l'a tenu pour l'ensemble des décrets. Alors, c'est évident que nous
avons demandé l'abolition de l'ensemble des décrets, et ça inclut... Il y en a
15, là, tu sais. Il était inclus dans les 15, dans la liste.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Ça termine le temps que nous
avions pour ce bloc. Je vais passer maintenant à la deuxième opposition.
M. le député de Drummond—Bois-Francs,
pour 6 min 30 s.
M.
Schneeberger :
Merci, M. le Président. Peut-être qu'en Outaouais, proche d'Ottawa, on
s'arrache les cheveux, on n'a pas
besoin de coiffeur. J'aimerais ça peut-être que vous nous citez des exemples
pour mieux comprendre. Vous nommez, justement,
au niveau de votre mémoire, «un sérieux dépoussiérage de cette loi périmée, qui
ouvre la porte à [une] concurrence déloyale [...] inéquitable et qui
mine la compétitivité [de] la croissance des PME y étant assujetties».
Pouvez-vous me donner un genre d'exemple qui est en lien avec ça? Je veux dire,
un fait, là, qui peut être très courant?
Mme
Hébert (Martine) : Bien,
écoutez, allons-y par logique, là. Les comités paritaires, c'est des
entreprises qui sont là puis qui
négocient les conditions de travail, les conditions qui vont être imposées à
leurs compétiteurs directs dans le marché.
En tout cas, il me semble que déjà, en partant, on devrait voir quelque chose
là. Je ne dis pas que ça se fait, mais je dis que ça ouvre la porte, en tout cas, à des conflits d'intérêts, à
tout le moins, M. le député, en apparence. Je pense qu'on peut convenir, là, le gros bon sens nous amène
vers ça. Et d'ailleurs nos membres se plaignent, de dire : Bien,
écoutez, souvent, ce sont les plus gros
joueurs qui sont couverts par les décrets qui vont être aux comités paritaires
et qui vont décider des conditions
qui vont être imposées aux plus petits joueurs. Et ça, oui, ça crée une
distorsion dans notre système, et c'est pour ça qu'on dit qu'on ne
devrait pas en avoir, des décrets.
Maintenant,
je veux revenir sur le fait que ce projet de loi là, il y a d'excellentes
mesures là-dedans, puis il faut l'adopter.
À défaut d'abolir les décrets, là, il est impératif qu'on adopte ce projet de
loi là avec les modifications, évidemment, là, préférablement, qu'on
propose. Mais c'est un excellent projet de loi, là.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Schneeberger :
Oui, M. le Président. Vous aimeriez que les décrets des conventions
collectives soient éliminés. Ça veut dire
que, vous, ce serait l'élimination complète. Et puis, d'après vous, quels
seraient les impacts positifs et aussi négatifs?
Mme Hébert (Martine) : Bien,
écoutez, nous, ce qu'on voit, ce que nos membres nous disent, c'est que les
impacts seraient davantage positifs. D'ailleurs, je vous invite... On a réalisé
des études — on
pourra les envoyer à la commission, ça nous
fera plaisir — des
études de cas ou encore des sondages auprès de nos membres qui sont
assujettis à des décrets. Et vous allez voir
qu'en vaste majorité ce qu'ils disent, c'est que ça mine leur capacité, ça mine
la flexibilité de l'entreprise, ça
mine leur capacité à faire croître leur entreprise, à créer davantage d'emplois
et à prendre de l'essor. Donc, c'est clair.
Alors, oui,
c'est sûr qu'on préférerait l'abolition des décrets. Ce qu'on comprend, c'est
que ce n'est pas là le chemin qu'a
voulu emprunter le gouvernement. Le gouvernement a préféré présenter un projet
de loi qui permettait de dépoussiérer cette loi-là, puis on est très
contents parce qu'on est déjà beaucoup mieux qu'on ne l'était avant le projet
de loi n° 53.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Schneeberger : Vous
souhaitez une meilleure gouvernance au niveau de la transparence, imputabilité
des comités paritaires. Et puis là-dedans
vous proposez justement... L'article 22, vous aimeriez que la loi exige que les
comités affichent leurs procès-verbaux sur les sites Internet. Je veux dire,
c'est-u demandé par plusieurs, ça, ces...
Mme Hébert
(Martine) : Bien, en tout
cas, nous, on vous le demande. Puis, comme je le dis, nous, on
représente des centaines d'entreprises qui
sont assujetties à un décret. Puis on fait cette demande-là, on vous la soumet.
Parce qu'un ordre du jour, comme le
projet de loi le prévoit... Vous conviendrez comme moi qu'un ordre du jour ça
ne dit pas grand-chose, hein? Je veux
dire, c'est très laconique, là. C'est une petite phrase avec... Ça dit :
Bon, bien, voici, on va traiter de ça, de
ça, de ça. Mais ça ne dit pas ce qui a été décidé, ça ne dit pas quelle est la
décision qui a été prise. Est-ce qu'il y a des résolutions qui ont été
adoptées, etc.? Donc, oui, on voudrait que les procès-verbaux soient affichés.
Vous savez,
il faut bien rappeler, hein, les comités
paritaires, ce sont ces comités qui perçoivent des cotisations sur les salaires des travailleurs et sur les masses salariales des employeurs, 1 %, donc c'est de l'argent. Moi, je dis : À l'heure où nous sommes, au Québec, avec tout ce que nous avons connu dans les
années passées, je pense qu'on est tous d'accord pour dire que les
principes de saine gouvernance doivent s'appliquer le plus possible et d'autant
plus à des organismes qui perçoivent de l'argent sur le chèque de paie des
travailleurs.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M. Schneeberger :
Oui. Vous marquez plus loin que vous recevez, chaque mois, de nombreux appels
de monde qui se disent victimes
d'intimidation, de menaces, excès de zèle, comportements jugés abusifs de la
part d'inspecteurs des comités paritaires. Ce n'est pas le fun
d'entendre ça.
Mme Hébert (Martine) : Non.
M. Schneeberger :
Pour quelles raisons? C'est quoi? C'est quoi? Avez-vous des exemples typiques à
nous soumettre ou...
Mme Hébert (Martine) : J'ai
496 exemples concrets ici que je ne peux pas vous remettre parce que c'est
confidentiel. Mais j'en ai 496 avec moi, là,
c'est tous des exemples d'appels de membres qu'on a reçus sur le comité
paritaire.
Je vais vous donner juste un exemple, là. Un de
nos membres dit : Bon, confirmation d'une inspection chez l'employeur. Alors là, vous allez m'envoyer, d'ici
deux semaines, les registres de paie des années ta, ta, ta, à ta, ta,
ta, les feuilles de temps des années, etc.,
le calcul de la banque de maladie des salariés, le journal de caisse,
déboursés, l'état de banque, les chèques encaissés, le journal des
achats des trois derniers mois, le bulletin de paie ou copie de la semaine précédente, les copies de relevés d'emploi, etc.,
la liste de tout... le nom et les coordonnées de tous vos clients, tous
vos clients. Et là le
comité paritaire, ce qu'il fait après, là, c'est qu'il écrit à tous les clients
de cette entreprise-là pour demander aux
clients : Donnez-moi tous les contrats que vous avez signés avec cette
entreprise-là, copie des chèques, etc. Là, le client appelle
l'entreprise, puis il dit : As-tu des problèmes avec le gouvernement?
Coudon, qu'est-ce qu'il se passe? Ils me demandent
d'envoyer copie de tous les chèques que je t'ai faits, etc. Donc, c'est ça,
c'est ça, la réalité sur le terrain, là. C'est ça qu'il se passe. Et ça, on fait ça, bien, évidemment, pourquoi?
On fait ça, bien, pour supposément sous le volet de l'application du
décret.
Mais c'est sûr que nos membres considèrent que
c'est l'excès de zèle puis que ça n'a pas lieu d'être, là. Aïe! Aller chez les clients pour semer le doute en plus
que l'entreprise... avez-vous fait quelque chose de mal? Je vous dirais,
ça n'a pas de sens.
Le Président (M. Cousineau) :
Mme Hébert, je vous remercie pour votre participation. C'est tout le temps
que nous avions.
Alors, la commission ajourne ses travaux à
demain, le 6 octobre, après les affaires courantes, vers à peu près
11 h 30. Bonne journée à tous et à toutes. Merci, Mme Hébert.
(Fin de la séance à 17 h 18)