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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mardi 23 août 2016 - Vol. 44 N° 101

Étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu’à favoriser l’intégration en emploi


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Question de règlement sur la recevabilité d'un amendement

Décision de la présidence

Amendements déposés

Intervenants

M. Claude Cousineau, président

M. Guy Hardy, président suppléant

M. François Blais

M. Dave Turcotte

Mme Françoise David

M. Sylvain Rochon

M. Sébastien Schneeberger

M. Harold LeBel

Mme Monique Sauvé

M. André Drolet

M. Raymond Bernier

M. Saul Polo

M. Paul Busque

*          Mme Chantal Maltais, ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale

*          Mme Johanne Bourassa, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-neuf minutes)

Le Président (M. Cousineau) : À l'ordre, s'il vous plaît! Prenez place. La porte en arrière, s'il vous plaît. À l'ordre! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

• (9 h 40) •

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par M. Bernier (Montmorency); M. St-Denis (Argenteuil), par M. Busque (Beauce-Sud); M. Leclair (Beauharnois), par M. Turcotte (Saint-Jean); et M. Therrien (Sanguinet), par M. LeBel (Rimouski).

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la secrétaire. Avant de débuter, j'espère que vous avez passé un bel été et puis je vous souhaite une belle rentrée. Nous allons travailler encore sur notre projet de loi n° 70, et puis donc je vous souhaite une très belle session, qui est à nos portes.

Étude détaillée (suite)

Lors de notre dernière séance, le 9 juin dernier, nous avions débuté l'étude de l'amendement de M. le député de Richelieu à l'article 83.1, proposé par l'article 28 du projet de loi.

Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet amendement? Alors, M. le député de Richelieu... Un instant, je vais essayer de voir le temps qu'il nous restait. Est-ce que vous avez le temps, Mme la secrétaire? Alors, oui, temps restant sur les amendements. Concernant l'amendement du député de Richelieu... Ce ne sera pas long, je vais me retrouver dans mes notes. D'accord. Pour l'amendement, donc, M. le député de Saint-Jean, il vous resterait 55 secondes; M. le député de Rimouski, il vous reste 13 min 50 s; M. le député de Richelieu, 11 min 45 s; M. le député de Drummond—Bois-Francs, vous n'aviez pas pris de temps, donc vous avez 20 minutes; et, Mme la députée de Gouin, vous avez deux minutes, deux minutes juste sur l'amendement de M. le député de Richelieu.

M. le député de Richelieu, est-ce que vous vouliez prendre la parole? M. le député de Saint-Jean, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Bon, tout d'abord, bonjour à vous toutes et à vous tous.

Tout d'abord, le ministre, lors de la dernière session parlementaire, avait ouvert sur certains éléments, mentionnant, bon, qu'il avait une ouverture sur la question des obligations, entre autres, là, la forme que les obligations pourraient prendre. À ce moment-là, bon, il avait dit : Je dois me modérer parce que ça prend un certain temps à réfléchir, à trouver, bon, les tenants et aboutissants de ça. J'aimerais savoir si, bon, durant l'été, le ministre et son équipe ont eu le temps de réfléchir à cette question et de nous arriver finalement avec une proposition pour qu'on puisse trouver effectivement une voie de passage pour faire en sorte qu'on puisse améliorer, là, le sort des gens, parce que c'est ça qui est l'objectif en bout de ligne. Donc, je ne sais pas, le ministre, s'il a des choses à nous dire à ce sujet-là, parce que je crois que, s'il arrive avec une nouvelle vision des choses, on est aussi bien de travailler là-dessus, là.

Le Président (M. Cousineau) : ...d'accord, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre, est-ce que vous voulez...

M. Blais : Peut-être, oui. Bien, tout d'abord, saluer tous les collègues, tout d'abord, là, puis nous souhaiter, bien sûr, une bonne session parlementaire.

Il y avait deux éléments, là, sur lesquels on discutait, je crois, là. Le premier élément, c'est toute la question et l'importance de la rencontre, là, d'évaluation, et ça, on a regardé encore les bonnes pratiques dans le monde, et je dois vous dire que ma conviction, là, elle est renforcée par rapport à l'importance de rencontres d'évaluation et qu'elles se fassent, donc, l'autre élément... pour différentes raisons. Puis on a examiné avec les fonctionnaires ce que l'on fait déjà sur une base volontaire en évaluation, c'est très intéressant. D'autres juridictions font les choses différemment, parfois vont dans d'autres secteurs, mais c'est fondamental que cette évaluation-là soit faite. Nos agents sont aussi formés pour, disons, détecter des problèmes de santé mentale. Ils ne peuvent pas faire de diagnostic, heureusement, là, mais ils peuvent référer par la suite. Et ça, pour moi, c'était aussi important. Donc, ma conviction est renforcée par rapport à ça mais, vous comprenez, aussi à l'exigence que ça se passe, hein?

Et, deuxièmement, je pense qu'on a eu une discussion, formelle ou informelle, je ne me souviens plus trop, là, avec le temps, là, mais sur : Est-ce qu'on pourrait, au lieu de... est-ce qu'on pourrait aller vers des mécanismes davantage de retenue de chèque, hein? Et ça, on a regardé cette possibilité-là. Elle est problématique. Elle est portée par des bonnes intentions, j'en suis certain, mais elle est problématique si elle est systématisée tout au long de la période où la personne est à l'aide sociale, parce que, là, il peut s'agir, dans certains cas, d'un appauvrissement important, pour différentes raisons, et on n'ira pas dans cette direction-là. Je pense que tout le monde ici avait des bonnes intentions par rapport à ça, mais c'est pire qu'une coupure de 52 $ pendant un mois, là, parce qu'il peut arriver différents événements.

Donc, je pense, c'étaient les deux éléments sur lesquels j'avais dit : Oui, je vais regarder ça. Et je l'ai regardé avec intérêt, avec les fonctionnaires, et ça donne un peu la trajectoire pour la discussion qui s'en vient.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je suis prêt, donc, à continuer les discussions concernant l'amendement. Je vous rappelle l'amendement qui avait été déposé par M. le député de Richelieu : Insérer, après le deuxième alinéa, l'alinéa suivant :

«Le programme Objectif emploi sera mis en vigueur qu'après le dépôt du prochain plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale.»

Donc, Mme la députée de Gouin, vous...

Mme David (Gouin) : Non, bien, M. le Président, c'est parce que j'aurais souhaité poser une question au ministre sur ce qu'il venait de dire, mais, bon...

Le Président (M. Cousineau) : Bien, vous pouvez toujours, c'est sur votre temps, Mme la députée, vous avez quand même du temps, là, deux minutes.

Mme David (Gouin) : Oui, mais justement j'ai deux minutes. Bon, bien, je vais le faire.

M. le ministre nous dit que sa conviction est renforcée quant à la question d'une rencontre d'évaluation. Puis j'ai relu dernièrement l'article qu'il avait envoyé aux journaux en juin, je pense, où il dit : Pour le moment, il n'est même pas possible d'obliger quelqu'un à rencontrer un fonctionnaire, ne serait-ce qu'une fois. Mais, si ça devenait possible qu'un nouveau demandeur ait l'obligation de rencontrer un ou une fonctionnaire pour faire cette évaluation, est-ce que ce ne serait pas suffisant pour atteindre les fins recherchées par le ministre? C'est ma première question.

Et, la deuxième, j'aimerais que le ministre me rappelle les discussions — parce qu'honnêtement je ne m'en rappelle pas, c'est l'effet pervers des vacances — sur la retenue de chèque. Ça ne me rappelle rien du tout.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.

M. Blais : Écoutez, il y a eu des discussions peut-être plus informelles que formelles, là, donc je ne veux pas aller plus loin là-dessus, je ne veux pas nommer personne, mais effectivement des discussions... Donc, je n'irai pas plus loin là-dessus. Je pense que ça méritait d'être regardé, voilà.

Et, l'autre point, bien là, je veux savoir. Est-ce que vous voyez ça comme une proposition, de votre côté, en disant : Nous, on n'aime pas les sanctions, mais on reconnaît que, oui, pour une évaluation, au moins, là, ça devrait être fait, elle devrait être obligatoire? Est-ce que c'est une évolution un petit peu de votre position? C'est à moi de vous retourner, maintenant, la question, là. C'est important, là, de savoir parce que, bon, on essaie de trouver des façons de se rapprocher, je pense, on est de bonne foi, là, dans cet effort-là.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Écoutez, M. le Président, c'est ça, je pense qu'il me reste une minute, donc c'est un peu court pour entamer un débat sur cette question, mais il n'y a rien de nouveau dans ce que je viens de dire, c'est une avenue que j'ai déjà suggérée au ministre. Et donc je pense qu'à partir de maintenant c'est à lui de nous dire si ça lui apparaît être une avenue, je ne sais pas, moi, concevable, quitte à ce que, plus tard, avec plus de temps et peut-être de d'autres manières on puisse en débattre.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. Mais je vous rappelle qu'après l'amendement il vous reste quand même 19 min 5 s sur l'article comme tel. Alors, M. le ministre, est-ce que vous avez... Non?

M. Blais : Non. Sauf qu'on aura l'occasion d'en parler, là, oui.

Le Président (M. Cousineau) : D'accord, oui. Alors, M. le député de Richelieu, pour 11 min 45 s.

• (9 h 50) •

M. Rochon : Merci, M. le Président. Bien, je vais d'abord vous dire le plaisir que j'ai de vous retrouver et puis de retrouver l'ensemble des collègues, de retrouver le ministre, dont je souhaitais très sincèrement que l'opinion ait évolué pendant le congé d'été, dont je souhaitais que la réflexion, là, ait pris un clair tournant, nous permettant d'avoir la certitude que le programme Objectif emploi ne poussera pas les prestataires vers une situation de pauvreté plus difficile encore que celle qu'ils ont actuellement à affronter. Je ne suis pas certain de percevoir dans ce qu'il vient de nous confier sur sa démarche intellectuelle que ce soit le cas, qu'il soit en effet, là, en train de réfléchir à des sanctions qui ne rendraient pas la vie encore plus dure pour ces gens-là.

Je l'entends nous dire l'importance qu'il porte à la rencontre dite d'évaluation. Je souhaite lui faire part d'un contexte assez troublant. Pour que ces rencontres d'évaluation là aient lieu, en tout cas dans ma circonscription, celle de Richelieu, le ministre sait-il combien il y a, à Sorel-Tracy, de fonctionnaires dédiés à la rencontre des prestataires d'aide sociale? Sait-il combien il y a, à Sorel-Tracy, d'agents et d'agentes d'aide sociale?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Non, si vous me le demandez comme ça, je ne répondrai pas à la question, bien sûr, il y a pas mal de centres locaux d'emploi au Québec. Ce qui compte surtout pour mesurer l'impact, là, de la proposition, c'est le nombre de primodemandeurs.

Mais je pourrais vous revenir avec le nombre de primodemandeurs par année en moyenne à Sorel-Tracy. Je serais prudent, là, sur le chiffre, mais on pourrait vous donner une idée de ça.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Alors, moi, je vais revenir immédiatement avec le nombre d'agents et d'agentes d'aide sociale au bureau de Sorel-Tracy : le nombre, c'est zéro, c'est zéro. Alors, c'est zéro parce qu'ils ont été délocalisés vers un autre bureau. Et ce qu'on me dit, c'est qu'actuellement les prestataires d'aide sociale sont condamnés à parler avec leur agente ou leur agent par téléphone, alors il n'y a plus de rencontre physique. Alors, on est bien parti pour l'application du programme Objectif emploi.

M. le Président, ce que j'aurais souhaité notamment, c'est qu'au cours de l'été le ministre relise les pages de l'ouvrage qu'il a signé sur le revenu minimum garanti. Il estimait, en 2001, que les politiques de type «workfare» — je sais, il va nous dire que ce n'est pas ça, là, ce n'est pas ça qui est prévu dans le programme Objectif emploi, c'est en partie ça — ne faisaient rien pour aider les personnes pauvres. Au contraire, écrivait-il, «elles les forcent à occuper un travail qu'elles ne désirent pas et dans des conditions d'employabilité inférieures à celles des autres travailleurs, ce qui les enferme définitivement dans des statuts de citoyens de second rang».

Dans son livre Un revenu garanti pour tous, paru en 2001 aux éditions Boréal — j'imagine, c'est encore disponible dans certaines bonnes librairies — il n'avait pas de mots assez durs pour dénoncer les mesures de type «workfare», M. le Président. Il les estimait «coûteuses et inefficaces du point de vue de la réinsertion au travail». Elles créeraient même, et je cite, «des injustices graves en mettant à la disposition d'employeurs une main-d'oeuvre soumise, bon marché et dépourvue des droits minimaux que l'on accorde normalement aux autres travailleurs».

Au XIXe siècle, en Angleterre, on créa des «workhouses», qui devinrent — et je cite toujours le ministre — rapi­dement des «lieux de recrutement et d'exploitation des pauvres». «Ne sommes-nous pas en train de commettre les mêmes erreurs et les mêmes injustices près de deux siècles plus tard?», s'interrogeait-il alors.

Et puis, en 2016, après sa carrière d'auteur de 2001, carrière de danseur, il essaie le tango, M. le Président. «Il n'existe aucune incompatibilité entre l'instauration d'un revenu minimum garanti et l'amputation d'un chèque d'aide sociale», estime le maître du tango. «Québec n'exclut pas de mettre de côté cette pénalité. "Il y a une ouverture à ce sujet", a même déclaré M. Blais[...]. Il n'y aura "pas nécessairement" de pénalités finalement. "Ce qui est important pour moi, c'est de maintenir un incitant. Comme incitant, ça peut être un incitant financier positif..."» Alors là, ça allait bien, là, sauf que, dans la même journée, il rappelle La Presse, qui le citait, là, qui faisait part de ce que je viens d'indiquer, pour dire que, pour le moment, il maintient le cap au sujet des pénalités : «On ne va pas obliger les gens à faire ceci ou [ça]. On va définir avec eux un projet, mais il faut qu'il y en ait un, projet, [entendons-nous] bien.»

Pourquoi j'arrive avec cet amendement à l'effet que le programme Objectif emploi ne soit mis en vigueur qu'après le dépôt du prochain plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, c'est parce que je pense que c'est là-dedans qu'il faut se diriger, la lutte à la pauvreté. Et, citant cette fois Richard Gravel, du Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, «il est évident que le premier pas à faire pour combattre la pauvreté consiste à améliorer le revenu des personnes et des familles en situation de pauvreté. Ceci constitue un passage obligé afin de, comme le dit la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, permettre aux personnes de jouir des ressources, des moyens, des choix et du pouvoir nécessaires pour acquérir et maintenir leur autonomie économique et pour favoriser leur intégration et leur participation à la société. En vue d'assurer un revenu adéquat à l'ensemble des personnes, écrit M. Gravel, il est impératif comme société de s'en donner les moyens, notamment en revoyant de fond en comble la fiscalité afin qu'elle puisse mieux jouer son rôle de redistribution de la richesse collective.

«Par ailleurs, l'accès à des services publics de qualité est un incontournable dans la prévention de la pauvreté, d'abord par un meilleur soutien offert aux enfants de milieux défavorisés, tels des services de garde éducatifs de qualité et une priorité donnée aux interventions auprès des jeunes écoliers de ces milieux pour prévenir le décrochage scolaire et éviter la perpétuation de la pauvreté d'une génération à l'autre. Des services de santé et des services sociaux gratuits et accessibles sont également primordiaux dans la perspective où les personnes à plus faible revenu ont souvent davantage de problèmes de santé et pas suffisamment d'argent pour avoir accès à d'autres solutions.

«Cela a été maintes fois dit, un obstacle important à la poursuite des efforts pour réduire et, à terme, éradiquer la pauvreté est sans contredit le lot de préjugés véhiculés sur les personnes en situation de pauvreté, plus particulièrement sur les prestataires d'aide [sociale] — on en a parlé largement ici, de ces préjugés, et nous avons même entendu ici des préjugés être énoncés, et je ne vise pas le ministre, là. Les médias se font régulièrement les porte-parole de telles idées préconçues, souvent reprises par de larges pans de la population, sans prendre en considération les raisons pour lesquelles ces femmes et ces hommes ont dû avoir recours à [de] l'aide financière, le niveau de la prestation qui leur est accordée, les conditions dans lesquelles vivent ces personnes, les efforts qu'elles font pour s'en sortir ainsi que les nombreux obstacles auxquels elles [font] face.

«Après l'adoption à l'unanimité par l'Assemblée nationale d'une loi avant-gardiste et la mise en oeuvre de deux plans d'action, il est essentiel de donner un nouveau souffle à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale au Québec. L'élaboration du troisième plan d'action nous en donne l'occasion.» Ensemble, termine M. Gravel... «Espérons que l'ensemble de la société québécoise saura la saisir — cette occasion du troisième plan d'action — afin de manifester de nouveau sa solidarité envers ceux, plus souvent celles, qui sont laissés de côté sous prétexte que lutter contre la pauvreté coûte cher. Dans les faits, il en coûte bien plus [cher] de laisser la situation se détériorer, tant en termes monétaires qu'en termes de cohésion sociale. Il en va du maintien d'une société réellement démocratique où il fait bon vivre et où l'ensemble des citoyennes et citoyens ont une place et la possibilité d'y jouer un rôle.»

M. le Président, il faut réfléchir largement, sérieusement au problème de pauvreté auquel font face trop de nos concitoyennes et concitoyens, et ce n'est pas en leur imposant des sanctions parce qu'ils ne suivent pas l'un des trois parcours que leur suggère le programme Objectif emploi que nous allons améliorer leur sort. Et, pour évaluer leur contexte de vie, faudrait-il encore que des gens les rencontrent, et, encore une fois, vous pouvez vérifier, au bureau de Sorel-Tracy il n'y a plus physiquement sur les lieux d'agent et d'agente d'aide sociale.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Il vous restera deux minutes. M. le ministre.

• (10 heures) •

M. Blais : Peut-être une précision importante, là. Sur le «workfare», là, bon, bien sûr, j'y tiens parce que c'est une définition standard, là, il s'agit d'emplois non rémunérés, non, mais qui... et qui est conditionnel, bien sûr, pour l'obtention de l'aide sociale. La raison pour laquelle j'étais aussi ferme, à l'époque, c'est qu'effectivement ça donne un statut inférieur à ces personnes-là, hein, donc, au niveau des conditions de travail, donc ce n'est pas acceptable.

Ce qui est intéressant, au Québec, c'est que les emplois disponibles sont tellement présents — et ils vont encore être plus présents dans les prochaines années quand on regarde tout simplement l'évolution du chômage — qu'on n'a, bon, absolument pas besoin de cet outil-là.

Ce qui m'a le plus surpris, quand je me suis remis à travailler sur le projet de loi n° 70, quand je regardais un petit peu les pratiques internationales, c'est tout d'abord que la norme, maintenant, c'est qu'il y ait des exigences, des contreparties, de la réciprocité, là, et que des pays aussi sociodémocrates que le Danemark et aussi égalitaires que le Danemark utilisaient parfois aussi le «workfare». Et j'ai essayé de comprendre pourquoi, là. Je n'ai peut-être pas toute l'explication, mais une des explications possibles, c'est qu'au Danemark l'emploi est probablement plus immobile et plus difficile d'accès, là, que la situation ici.

Donc, on n'a pas besoin du tout d'aller dans ces traces-là, il y a des emplois disponibles. Et, bien sûr, quand les gens retournent à l'emploi, ils sont considérés comme, hein... on doit respecter les normes minimales de travail pour tout le monde. Donc, on n'a pas besoin d'aller dans cette direction-là, même si à ma grande surprise... En 2001, quand j'écrivais l'ouvrage, je pense que je considérais que c'était uniquement une politique pour, bon, disons-le, les États-Unis, où ça avait été fait notamment dans les années 70. Et j'ai découvert avec surprise plus récemment que, même dans les pays sociodémocrates, le «workfare» a été utilisé, probablement pour des fins un peu différentes et dans un contexte économique qui est bien différent de celui des États-Unis.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu, il vous reste deux minutes. On peut revenir aussi, M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Bien, écoutez, une réflexion, là, bien, bien brève : Je voudrais donc voir le ministre s'imposer au Conseil des ministres et expliquer, pour les en convaincre, à ses collègues combien déjà les prestataires d'aide sociale ont une situation intenable, intenable. Je sais que ce sera difficile, je sais qu'il lui faudra beaucoup, beaucoup, beaucoup de pouvoir de conviction. Je le pense d'autant plus après avoir entendu son collègue aux Finances dire que le salaire minimum à 10,75 $ de l'heure, c'était bien, bien, bien raisonnable.

Alors, il a sans doute près de lui des gens — comment l'exprimer tout en demeurant politiquement correct? — légèrement déconnectés de la réalité, M. le Président, mais je lui envoie toutes les ondes positives que je peux et l'appelle à une position ferme et courageuse auprès de ses collègues du Conseil des ministres, encore une fois, pour qu'il sache leur dresser la réelle situation des prestataires d'aide sociale, qui n'est pas rose et qui ne mérite surtout pas d'être à nouveau détériorée par des sanctions qui ne peuvent avoir leur place quand on vit d'aussi maigre pitance, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Ça met un terme au temps que vous aviez. Par alternance, est-ce que M. le député de... Oui. Alors, M. le député de Drummond—Bois-Francs.

M. Schneeberger : Oui, merci, M. le Président. Alors, premièrement, je voudrais souhaiter la bienvenue, un bon retour de vacances à tout le monde.

Je n'ai pas vraiment de question sur l'amendement. Par contre, selon les allégations du député de Richelieu, ce qui me préoccupe, c'est vraiment le... Il faisait allusion au nombre de personnes qui travaillaient au bureau, il mentionnait zéro. Alors, moi, je trouve ça très préoccupant, parce que moi, j'ai toujours dit que, dans l'ensemble, j'étais assez à l'aise avec l'approche, par contre ça prenait vraiment des résultats avec le monde sur le terrain. C'est sûr que ce n'est pas des gens au bout du fil qui vont améliorer la situation. Et, si une région comme Sorel-Tracy n'a pas de bureau, je me demande bien où est-ce que les bureaux vont l'être. Parce que, là, on parle quand même d'un centre... d'un pôle régional, là. Alors, si un pôle régional comme Sorel-Tracy n'a pas de personne, c'est très préoccupant.

Maintenant, j'aimerais savoir... Je ne veux peut-être pas la réponse immédiatement, parce que je suppose que le ministre ne l'a pas, mais je voudrais savoir qu'est-ce qu'il advient dans des cas de même. C'est quoi, la vision? Qu'est-ce qui va être fait? Est-ce que ces employés-là vont être transférés dans un centre de services ou autres? Moi, je veux vraiment la réponse, parce que moi, je veux bien me faire miroiter que le nouveau projet de loi est une Cadillac, mais une Cadillac pas de moteur, là, ça vaut zéro. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. M. le ministre.

M. Blais : M. le Président, on est allés chercher des informations, là, sur Sorel-Tracy. Si vous voulez, je demanderais à la sous-ministre adjointe d'expliquer un peu le fonctionnement, là, aux collègues. On n'a pas encore le nombre de primodemandeurs, on devrait pouvoir l'avoir prochainement.

Le Président (M. Cousineau) : Est-ce que je peux avoir un consentement pour permettre à la sous-ministre de s'adresser aux parlementaires? Mme la sous-ministre, votre nom, votre titre et puis...

Mme Maltais (Chantal) : Oui. Bonjour. Chantal Maltais, sous-ministre adjointe à la Solidarité sociale.

Alors, il existe un CLE à Sorel, il est toujours ouvert. Oui, vous avez la bonne information dans le sens que, oui, il y a des employés qui sont transférés au centre administratif. Toutefois, selon l'information — on essaie d'avoir des données plus précises, là, pour bien répondre aux gens de la commission — il y a 11 agents d'aide socioéconomique. Tous les agents qui donnent... tous les agents d'aide à l'emploi demeurent au CLE.

Et vous avez raison que les gens qui donnent de l'aide financière vont être au centre administratif. Toutefois, ils vont se déplacer pour rencontrer les gens sur rendez-vous. Alors, oui, ils vont communiquer, mais ils vont se déplacer à tous les moments nécessaires pour bien répondre aux besoins et aller au CLE. Alors, ils peuvent être soit à Châteauguay... et l'autre centre administratif, c'est Saint-Hyacinthe.

C'est l'information que j'ai. Comme on disait tout à l'heure, on essaie d'avoir des précisions pour savoir le nombre exact et savoir aussi combien sont-ils pour... combien de primodemandeurs aussi, pour s'assurer d'un bon service. Le temps d'aller chercher les données dans les systèmes informatiques, on va pouvoir vous les donner.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la sous-ministre, pour les fins d'enregistrement, voulez-vous donner votre nom au complet?

Mme Maltais (Chantal) : Oui. Chantal Maltais.

Le Président (M. Cousineau) : Chantal Maltais. Merci. M. le député de Drummond—Bois-Francs, est-ce que ça...

M. Schneeberger : Je veux savoir : Quand vous dites qu'ils vont se déplacer, ils vont se déplacer où?

Mme Maltais (Chantal) : Au CLE lui-même.

M. Schneeberger : Au CLE lui-même. O.K.

Mme Maltais (Chantal) : Au CLE, oui. Alors, oui, ils vont prendre un rendez-vous avec la personne qui est à l'aide sociale pour le rencontrer. Et ils se déplacent au CLE pour les rencontrer.

M. Schneeberger : Et, s'il n'y a pas... Là, vous dites... bon, il y a un CLE à Sorel-Tracy, j'imagine. Mais, mettons, dans des endroits plus ruraux, plus éloignés, à ce moment-là, comment ça marche?

Le Président (M. Cousineau) : Mme la sous-ministre.

M. Schneeberger : Est-ce que ces mêmes employés là vont aller s'installer dans des... ils appellent ça des centres de services, comme on avait mentionné, là? Parce que je ne pense pas qu'une personne sur l'aide sociale, qui n'a pas de voiture puisse faire... Surtout en milieu rural, là, il n'y a pas de transport en commun, elle ne fera pas 100 kilomètres de vélo pour aller voir la personne.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la sous-ministre.

Mme Maltais (Chantal) : Oui. Je passerais la parole à Mme Johanne Bourassa, la sous-ministre associée à Emploi-Québec, qui s'occupe de l'organisation des services, qui va pouvoir répondre précisément à votre question.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, effectivement, c'est moi qui vais lui passer la parole.

Mme Maltais (Chantal) : Oh! excusez! Je ne voudrais pas prendre votre rôle.

Le Président (M. Cousineau) : Ça me fait plaisir. Alors, est-ce que je peux avoir le consentement pour que Mme Bourassa, la sous-ministre associée, puisse s'adresser à vous? Oui, ça va? Consentement. Mme la sous-ministre associée.

Mme Bourassa (Johanne) : O.K. Bon. Alors, Johanne Bourassa, sous-ministre associée à Emploi-Québec.

L'organisation des services est adaptée, là, dans chacune des régions. Comme Mme Maltais vous l'a précisé, il y a des agents d'aide à l'emploi, là, dans tous les bureaux. Pour ce qui est des agents d'aide sociale, il y a des régions où ils ont fait des regroupements pour le traitement, mais les personnes peuvent toujours recevoir de l'information de base à l'intérieur de leur centre local d'emploi, et les agents peuvent se déplacer dans les centres locaux d'emploi pour rencontrer la clientèle sur rendez-vous. Les personnes n'ont jamais à aller à un autre lieu que leur centre local d'emploi, ils reçoivent leurs services de proximité toujours dans leur centre local d'emploi.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la sous-ministre associée. M. le député de Drummond—Bois-Francs.

M. Schneeberger : Oui. Dans les régions, je dirais, moins urbaines ou, en tout cas, éloignées ou autres, est-ce qu'il y a un minimum de distance entre un centre de services ou un CLE pour le service aux citoyens? Y a-tu des règles là-dedans, au niveau de la distance?

Le Président (M. Cousineau) : Mme Bourassa.

Mme Bourassa (Johanne) : Techniquement, on regarde les services de proximité, là, dans un rayon de 50 kilomètres, pour les services à la clientèle, mais c'est sûr qu'il y a des territoires, là, qui sont plus étendus, quand on pense principalement au Nord du Québec, où on doit trouver d'autres façons pour donner des services, compte tenu de l'étendue du territoire puis du fait que la population est dispersée sur ce territoire-là, et c'est pour ça que dans certains cas il est prévu, là, de pouvoir faire des entrevues dans des salles, dans nos bureaux mais par visio, pour être capable d'intervenir, là, avec un agent d'aide à l'emploi ou agent d'aide sociale.

M. Schneeberger : Quand vous parlez du Nord du Québec, vous parlez, genre, comme le comté d'Ungava, de ces coins-là?

Mme Bourassa (Johanne) : Oui, au nord du 49e.

• (10 h 10) •

M. Schneeberger : Parce que, je veux dire, mettons la Côte-Nord, tu sais, il y en a qui vont appeler ça le Nord, là, mais, moi, ce n'est pas le Nord du Québec, là, sur la Côte-Nord, là, tu sais, on s'entend que c'est... Les villages sont quand même assez rapprochés, là, même si les distances sont plus élevées que dans la région de Montréal, bien entendu. C'est pour ça que c'est bien entendu, quand... c'est bien important, pardon, de comprendre c'est quoi, le Nord du Québec, pour vous, là, c'est quoi, les critères, parce que... Vous savez, les Innus à Kuujjuaq, ils appellent ça le Sud, chez nous, là. Le Sud, nous autres, c'est la Floride.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la sous-ministre associée.

Mme Bourassa (Johanne) : Oui. Quand je parle du Nord du Québec, là, je parle au nord du 49e parallèle, là, ce qui est appelé la région administrative Nord-du-Québec, là, pour nous.

M. Schneeberger : Parfait. C'est bon, merci.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. Ça va, M. le député de Drummond—Bois-Francs?

M. Schneeberger : Ça va comme ça, oui.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la sous-ministre associée. Alors, M. le député de Rimouski, vous avez demandé la parole. En vous rappelant qu'il vous reste 13 min 50 s sur l'amendement de M. le député de Richelieu.

M. LeBel : Merci, M. le Président. Bien, à mon tour de saluer tout le monde, après quelques... un bel été, j'espère que tout le monde en a profité. Mais en même temps, pour nous autres, les étés, on se repose, mais c'est une façon aussi d'aller connecter avec notre monde, de parler avec les gens un peu partout, discuter avec des gens, des groupes, comme on se promène, des festivals, on parle avec des personnes, les gens nous racontent un peu leur vécu puis comment ils voient la situation. Ça fait que j'espère que tout le monde ont pu faire le plein de discussions avec nos citoyens et citoyennes puis que ça a peut-être aussi pu influencer leur opinion sur ce qu'on est en train de faire ici aujourd'hui, de travailler sur un programme qui veut lutter contre la pauvreté. Parce que, moi, je suis convaincu, ici, tout le monde qui est autour de la table, là, la lutte à la pauvreté, comme pour tous les Québécois, c'est un élément important. Ça fait consensus. On l'a soit vécu personnellement ou dans notre famille on a vu des gens qui vivent la pauvreté et on est très touchés par ce débat-là.

L'amendement nous propose... L'amendement de mon collègue de Richelieu, si je le relis, dit : «Le programme Objectif emploi sera mis en vigueur qu'après le dépôt du prochain plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale.» Dans le fond, ce que l'amendement propose, c'est une meilleure ordonnation de ce qu'on est en train de faire. On a une loi, une loi-cadre. À partir de la loi, on veut se donner un plan, et à partir du plan on devrait se donner un programme. Actuellement, on se donne un programme sans plan et à partir d'une loi où on n'a pas vraiment pris le temps d'évaluer les 10 dernières années de cette loi.

La loi, pourtant, actuellement donne certaines obligations, c'est à ça que ça sert, la loi, des obligations, entre autres... Puis moi, j'en retiens deux, pour y avoir travaillé beaucoup, là, comme à l'époque j'étais directeur de cabinet de la ministre qui avait déposé ce projet de loi, je retiens deux obligations pour le gouvernement, c'est, premièrement, une clause d'impact, qui demande... la loi exige que le gouvernement, dans toutes ses activités, étudie l'impact sur la pauvreté de ses actions, et ce qu'on peut appeler un barème plancher, c'est-à-dire qu'on a convenu que plus bas qu'un certain revenu c'est comme impossible de vivre et on a convenu qu'il y avait comme un plancher qui devait être respecté.

Ensuite, à partir de cette loi-là, les gouvernements se sont donné des plans, je pense qu'on est rendus au deuxième ou au troisième plan depuis la... troisième, troisième plan depuis la loi. Le plan, ce qu'il sert, lui, c'est de définir les rôles des partenaires qui travaillent avec le gouvernement partout dans les régions du Québec, de soutenir des initiatives de lutte à la pauvreté, de soutenir l'action communautaire, qui vient aussi aider à lutter contre la pauvreté. Ce plan-là, actuellement, il n'est pas, comme, terminé, et il y a pourtant des enjeux, là. Puis on l'a vu dans les régions. Avec la fin de plusieurs... l'abolition par le gouvernement de plusieurs structures, organismes en région, bien, souvent, c'est plusieurs initiatives de lutte à la pauvreté qui ont été abandonnées. Et ça, aujourd'hui, on voit des impacts, là, vous l'avez peut-être vu cet été quand vous avez rencontré votre monde. Et ça, bien, le prochain plan qu'on est en train d'adopter, il y a des enjeux, il y a beaucoup de questions qu'on aurait pu poser.

Ensuite, après ce plan, on pourrait convenir... on pourrait voir ensemble du programme comment on va travailler avec les personnes, les primodemandeurs, comme vous appelez, parce que ça se fait dans un contexte plus large. Un primodemandeur qui vient nous rencontrer, qu'on veut lui offrir un programme, si on sait que le plan peut proposer... qu'il y a des activités dans telle organisation communautaire, qu'il y a telle formation qui est donnée par les partenaires du marché du travail... Il y a plusieurs facettes d'un plan, qui fait en sorte que, la personne qui arrive à l'aide sociale, avant de lui proposer certains programmes ou certaines sanctions, bien, on a à travers le plan, qui est une vision... on peut soutenir cette personne-là et on peut lutter comme il faut contre la pauvreté. Le gouvernement propose d'y aller tout de suite, un peu à l'envers, de ne pas attendre le plan et de proposer un programme tout de suite, un programme qui est décrié par beaucoup de chercheurs, par beaucoup d'organismes.

Puis là je l'ai lu quelques fois, mais je veux le rappeler, le comité consultatif du gouvernement, reconnu par le gouvernement, dans son mémoire sur le projet de loi n° 70... Je vais le lire parce que c'est important. Ce qu'il propose dans son mémoire, ce qu'il dit, concernant le projet de loi n° 70, c'est que «le comité ne peut qu'appuyer l'intensification du soutien et de l'accompagnement des nouveaux prestataires d'aide sociale, car, on le sait, plus une personne demeure longtemps à l'aide, plus il lui devient difficile de s'en sortir. Par contre, le comité s'oppose à toute mesure coercitive assortie de pénalités qui viendraient réduire une aide financière déjà trop faible pour assurer la couverture des besoins de base des personnes, compromettant ainsi leur santé et leurs chances de s'en sortir. Cette façon de faire contrevient à la législation en vigueur, notamment la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, la Charte des droits et libertés de la personne et le pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels.» Un mémoire signé par le comité reconnu par le gouvernement pour le conseiller sur la lutte à la pauvreté. C'est assez majeur comme déclaration.

J'ai déposé ici, moi, un budget mensuel d'une personne vivant seule à l'aide sociale qui avait été préparé par un groupe de Rimouski, où on voit qu'avec un montant de 703 $ par mois... on voyait toutes les dépenses de la personne, et on arrive à la fin et on voit bien qu'il n'y a pas de place à des coupures là-dedans. Pour moi, c'est important de revenir là-dessus. C'est qu'on est... Les sanctions, tout le monde le dit, même le Conseil du patronat, je pense, disait que c'était dangereux d'y aller avec des sanctions dans un budget mensuel, pour ces personnes qui sont déjà au minimum, là. Puis je pense qu'il faudrait améliorer ces revenus-là. Au contraire, on propose de couper si on ne participe pas à différentes affaires.

Le ministre sait bien qu'on est contre ces sanctions. En contrepartie, il parle de rencontres obligatoires d'évaluation. J'ai posé une question à un moment donné ici, je ne me souviens plus à quel moment, là, mais j'essayais de voir comment ça fonctionne. Quelqu'un arrive, un primodemandeur, là, il veut rencontrer quelqu'un. Comment il fait? Comment il est accueilli? On m'avait dit qu'on avait des statistiques pour le nombre de primodemandeurs, mais les statistiques sur la façon qu'ils sont accueillis, ce n'était pas clair. On m'avait dit, bon : La personne qui arrive à l'aide sociale, dans les cinq jours elle pourra être rencontrée, mais ce n'est pas nécessairement... Ça pourrait. Ils sont invités dans les cinq jours à une rencontre, mais ce n'est pas nécessaire. Elle pourrait être rencontrée dans le mois, mais, si elle n'est pas vue... mais, encore là, on ne le sait pas trop, s'ils sont vraiment, tout le monde, rencontrés dans le mois. Mais ce qu'on nous dit, c'est que, s'ils ne sont pas vus dans les cinq premiers jours et ni dans le mois, là il y a une relance par écrit ou par téléphone, là, je n'ai pas trop su comment, mais il y avait une relance aux primodemandeurs. Ce qui m'aurait intéressé, c'est de savoir combien il y en a qui ont été vus en cinq jours, combien il y en a qui ont été vus dans le mois puis combien ça a pris pour faire des relances, avoir des statistiques là-dessus. Mais on n'en a pas, on ne les a pas sur... À ce qu'on m'a dit, on ne les avait pas. On avait le nombre de primodemandeurs, mais, comment on les a accueillis, comment ça a été fait, on n'a pas ces statistiques-là.

• (10 h 20) •

Ça fait que, bref, c'est difficile à évaluer aujourd'hui, comment les rencontres d'évaluation sont faites puis quel impact ça a. On peut dire : Oui, mais elles ne sont pas obligatoires, donc ce n'est pas obligatoire... Ça ne va pas bien, mais on n'est pas capables de savoir comment que ça fonctionne aujourd'hui. Est-ce qu'il y en a beaucoup qui ont été vus dans les cinq jours ou... Est-ce qu'il a fallu faire beaucoup de relance? Est-ce qu'il y en a qui ont été vus dans le mois? On n'en a aucune idée. Puis on n'en a aucune idée, mais on arrive à des conclusions quand même. Il me semble qu'on devrait, avant d'arriver à des conclusions, avoir une bonne évaluation de ce qui se fait actuellement.

Mon collègue de Richelieu parle qu'à Sorel-Tracy personne ne peut... c'est zéro qui peut accueillir. Bien là, s'il y a zéro, ça me surprendrait que les primodemandeurs à Sorel-Tracy sont vus en cinq jours, ça me surprendrait beaucoup. Il y aurait peut-être un téléphone de fait à Saint-Hyacinthe pour venir les voir dans le mois, peut-être, on ne le sait pas, mais, encore là, on n'a pas les statistiques.

Et, mon collègue de Drummondville, c'est un peu la même chose. Quand il parle de milieu rural, je connais aussi... il a raison, il y a un impact, c'est clair. Quelqu'un qui vit en milieu rural, qu'il n'y a pas de transport en commun, rien de tout ça, est-ce qu'elle est vue dans cinq jours, cette personne-là, ou plus tard? Comment...

Ça fait qu'il me semble... Quand le ministre dit : Oui, des rencontres d'évaluation obligatoires, je pense, c'est ça qu'il faut, je pense qu'on pourrait regarder, mais ce serait bon... Puis, le ministre étant... Le ministre, c'est un intellectuel, c'est quelqu'un qui veut des études, qui travaille... Il me semble que... Je suis certain qu'en lui-même il aimerait bien avoir les statistiques dans son ministère, savoir combien qui sont vus actuellement, les primodemandeurs, en cinq jours, je suis certain qu'il aimerait ça savoir tout ça, et ça lui permettrait de prendre les meilleures décisions.

C'est clair aussi que, comme mon collègue de Richelieu le dit, l'a bien dit, le nombre d'agents, c'est primordial. Si on veut vraiment faire des rencontres d'évaluation qui ont de l'allure, bien, il faut le nombre d'agents... qu'ils soient capables de voir les personnes de visu, pas par téléphone.

Tu sais, j'essaie de... Tu sais, ici, souvent, là, on est autour de la table puis on discute des cas, on discute, bon, la pauvreté, le primodemandeur, le primodemandeur, mais, à force de dire «le primodemandeur», à un moment donné, ça devient juste un nom, mais il faut voir qu'en arrière du nom «primodemandeur» il y a une personne, il y a une personne qui est affectée par sa situation, qui... Ce n'est pas évident, pour cette personne-là, de prendre le téléphone ou de savoir comment se débrouiller à travers les dédales, là, des programmes du ministère. Puis il y a des situations personnelles, là, tu sais, vie maritale, maladie, plein de choses qu'on ne sait pas trop, là, puis... Deux minutes? Bref, je veux juste qu'on se rappelle que derrière le mot «primodemandeur» il y a des personnes qui vivent des situations. Ça fait que ce n'est pas comme automatique : primodemandeur, agent, rencontre obligatoire. Il y a des façons d'accueillir les gens, et il me semble qu'il faudrait travailler là-dessus. Si on parle de rencontres, ce n'est pas une question mathématique, il faut que les rencontres... Obligatoire, moi, je ne suis vraiment pas fermé à ça, mais il faut que ce soient vraiment des rencontres d'évaluation avec des gens en personne qui accueillent d'autres personnes qui vivent des situations. Bref, ceux qui accueillent doivent avoir une formation adéquate pour accueillir ces personnes-là.

Le ministre... Nous, on est contre les sanctions. Ce que j'avais senti, c'est que lui dit : Les sanctions, je suis prêt à regarder ça si on parle de rencontres obligatoires. Moi, je pense qu'il y a une piste, mais encore faut-il qu'on ait plus de précisions sur ces rencontres-là. Oui, mais est-ce qu'il y a du monde qui vont être là? Est-ce qu'il y aura une formation? Est-ce qu'il y aura des services adéquats donnés à des gens qui sont vulnérables déjà et qui ont besoin d'être bien accueillis?

Et ça devrait s'intégrer dans un plan, dans le plan de lutte. Si le ministère n'est pas capable d'accueillir ces personnes-là, il y a des partenaires aussi sur le terrain, des groupes communautaires, des intervenants qui peuvent y travailler, qui peuvent participer. Le ministère le sait, vous travaillez avec eux autres. Ça fait que, ça, dans un plan bien établi, où on voit le rôle de chacun, avec des moyens, en finançant les groupes communautaires, en finançant les groupes de défense de droits, bien, je pense que, là, on peut être capable d'accompagner ces primodemandeurs, ces personnes qui vivent des situations difficiles, on peut les accueillir comme du monde. Merci.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre. Je vous demande toujours de vous ramener, toujours, à l'amendement. La discussion est assez générale, là, mais il faut se ramener toujours aux amendements qui sont déposés. Mais c'est bien. Poursuivez, M. le ministre.

M. Blais : M. le Président, donc, pour répondre à une question de tout à l'heure, là, Sorel, dans cette région administrative là, il y a 113 primodemandeurs par année, donc c'est entre neuf et 10 nouveaux primodemandeurs par mois. Le taux de chômage dans la région est de 6,4 %, donc inférieur un peu au taux de chômage de la moyenne québécoise.

Ce qu'il est intéressant de noter, à Sorel, c'est que le ratio emplois disponibles ou emplois affichés et primodemandeurs, qui nous donne un indice, bon, ces gens-là, ils ont-u une chance de se trouver un emploi un jour ou l'autre, il est de 49,29, donc 49 emplois pour un primodemandeur. Je ne dis pas que chaque emploi correspond aux capacités d'un primodemandeur, mais c'est très élevé, c'est plus élevé que la moyenne québécoise. Ça signifie que, hein, dans votre coin, là, si on appliquait Objectif emploi, on pourrait en sauver plusieurs, parce que plusieurs, hein, auraient une chance, bien sûr, si on les prend en main, si on les prend en charge, pas simplement, là, d'être à l'aide sociale longtemps, bien, de se trouver éventuellement un emploi. Pour donner un petit peu, là, le pourtour.

Maintenant, sur la question de l'obligation, moi, comme j'ai dit, là, sur la rencontre d'évaluation, moi aussi, je me suis promené au Québec, hein, cet été, on parle aux gens, on parle d'Objectif emploi, vous en avez parlé, j'en suis sûr, dans votre... En tout cas, moi, là, les gens n'en reviennent pas qu'on ne rencontre pas systématiquement un premier demandeur pour faire une évaluation. Je pense qu'on a tous cette sensibilité-là ici, au moins savoir à qui on fait affaire puis qu'est-ce qu'on pourrait éventuellement faire pour aider. Ensuite, le processus, des démarches, etc., on pourra avoir une discussion, mais je suis revenu avec cette conviction qu'il faut aller de l'avant pour rendre ces évaluations-là systématiques. On pourra parler de la qualité des évaluations, le temps que ça prend pour les faire, etc., si vous voulez, on pourrait s'engager là-dessus, mais, si on peut se rendre à 83.10, si c'est bien ça, je ne veux pas faire d'erreur, je vais apporter une proposition pour modifier le projet de loi et rendre obligatoire, hein, l'évaluation.

Évidemment, obligatoire, le problème que l'on a ici, autour de la table, c'est que, si on ne le fait pas, qu'est-ce qui arrive, hein? Parce que, si c'est obligatoire, il faut que ça ait un sens. Depuis le début de nos conversations, c'est toujours, bien sûr, la portée d'«obligatoire». Alors, ça aussi, j'ai des éléments, là, pour proposer, là, que, pour le cas de la première évaluation, qui est fondamentale, on puisse avoir retenue de chèque, hein, jusqu'au moment où la personne... Si, un jour, la personne, on lui demande de venir se présenter à une évaluation, si elle ne vient pas à cette évaluation-là, on retiendra le chèque jusqu'au moment où elle viendra, puis, bien sûr, on pourra le lui remettre à ce moment-là. C'est une pratique qui existe déjà partiellement, la retenue du chèque, pour avoir des informations administratives, donc, mais on la mettrait aussi dans le projet de loi.

Donc, moi, j'ai la conviction que là-dessus, là, on peut s'entendre, parce que je pense qu'on a tous une sensibilité que ces personnes-là soient rencontrées. Ça n'a aucun sens. Puis je vous le dis, j'ai examiné l'ensemble des pratiques internationales : la base, là, c'est avant tout qu'il y ait une évaluation de ces personnes-là. Mais encore faut-il se rendre à 83.10, bien sûr, pour qu'on puisse en discuter.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski, il vous reste une minute sur l'amendement.

M. LeBel : Bien là, on vient de rajouter, là... Le ministre parlait de retenue. Au début, il avait évalué... L'histoire de retenue de chèque, moi, je suis un peu comme ma collègue de Gouin, on n'a jamais discuté de ça ici, là. Et là on vient de rajouter : Rencontre obligatoire, sinon retenue de chèque.

Là, on parle d'un chèque de dernier recours, là. Retenir un chèque, là, il peut y avoir des conséquences assez majeures, là, pour la personne. Et là le ministre... Nous, je viens de dire qu'on était contre les sanctions, et là il vient d'en rajouter. La sanction majeure, c'est de retenir le chèque.

Il me semble que, là, on ne s'est pas vraiment bien entendus. Il y a un malaise dans le problème, là, je pense.

M. Blais : ...un intérêt pour l'évaluation.

Le Président (M. Cousineau) : Ça termine le temps qui vous était alloué, M. le député de Rimouski. Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement de M. le député de Richelieu?

S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement proposé par M. le député de Richelieu est adopté? M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : M. le Président, est-ce que vous pouvez procéder au vote par appel nominal?

Le Président (M. Cousineau) : Bien sûr, M. le député de Saint-Jean. Mme la secrétaire, vote par appel nominal.

La Secrétaire : M. Rochon (Richelieu)?

M. Rochon : Pour.

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

M. Hardy : Contre.

La Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

La Secrétaire : M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier : Contre.

La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?

M. Polo : Contre.

Le Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens.

La Secrétaire : L'amendement est rejeté.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, l'amendement déposé par M. le député de Richelieu est rejeté. Nous revenons à l'article principal, 83.1, et je vous donne le temps restant... Oui, M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Oui. J'aurais un amendement à vous soumettre, M. le Président, à cet article.

Le Président (M. Cousineau) : Absolument.

• (10 h 30) •

M. Rochon : Il s'agirait d'ajouter, après le premier alinéa, l'alinéa suivant :

«Aucune disposition du présent chapitre ne peut aller à l'encontre de l'action 28 du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2011‑2015, soit de soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes.»

Je vous le dépose.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Nous allons suspendre pour quelques instants, le temps d'en faire des copies et puis de regarder l'acceptabilité de...

Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 31)

(Reprise à 10 h 34)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Donc, nous avons un amendement à l'article 83.1 déposé par M. le député de Richelieu qui se lit comme suit, je vais reprendre la lecture : Ajouter, après le premier alinéa, l'alinéa suivant :

«Aucune disposition du présent chapitre ne peut aller à l'encontre de [l'article] 28 du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les [hommes] et les [femmes] 2011‑2015, soit de soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes.»

Alors, M. le député de Richelieu, à vous de plaider.

M. Rochon : Oui. Alors, vous avez bien compris, M. le Président, notre souci à l'égard des femmes aux revenus inférieurs. Les femmes non diplômées qui occupent un emploi à temps plein ont un salaire nettement moins élevé que les hommes dans la même situation. C'est ce que révélait une étude du Conseil du statut de la femme, qui juge la situation très préoccupante. Selon la présidente de ce conseil, Mme Miville-Dechêne, cet écart est dû au fait que les emplois peu qualifiés traditionnellement occupés par des femmes sont beaucoup moins rémunérés.

Puis je vous ramène à l'article 28, là, que cite mon amendement, en disant qu'aucune disposition du présent chapitre ne peut aller à l'encontre de cette action 28 du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2011‑2015. Alors, que dit l'action 28, Soutenir un ensemble d'activités offert par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes? «Pour certaines femmes, les démarches vers l'autonomie économique impliquent un accompagnement accru — ça va mal, encore une fois, avec zéro agent d'aide sociale au bureau de Sorel-Tracy présent physiquement, on n'a pas contredit mon affirmation — et la prise en considération de toutes les dimensions de leur vie. En tablant sur l'expertise et l'intervention des organismes spécialisés en développement de la main-d'oeuvre féminine, qui sont actifs sur le territoire du Québec, le gouvernement — je suis toujours en train de citer l'action 28 du plan d'action gouvernemental — entend soutenir les femmes aux prises avec des difficultés importantes qui nuisent à l'amélioration de leur condition de vie, notamment en favorisant leur accès à des métiers non traditionnels et leur maintien en emploi. Groupe cible : les femmes dont la situation économique est précaire.» S'il y en a dont la situation économique est précaire, ce sont bien les femmes prestataires d'aide sociale.

Je souhaite, M. le Président, revenir sur une statistique que nous a livrée tout à l'heure le ministre. Je veux le réentendre me dire quel est le taux de chômage à Sorel-Tracy, il a cité un chiffre tantôt. Ou étais-je distrait? Ce n'est pas de ça dont il était question?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Je m'excuse, M. le Président...

M. Rochon : Oui, vous avez parlé tout à l'heure, M. le ministre... Vous permettez, M. le Président, que je lui répète la question?

Le Président (M. Cousineau) : Oui, allez-y, M. le député de Rimouski... de Richelieu.

M. Rochon : Merci. Encore une fois, la confusion avec Rimouski ne me blesse pas du tout, j'adore mon collègue de Rimouski.

Alors, M. le Président, le ministre, tout à l'heure, a cité des statistiques relatives à Sorel-Tracy, aux emplois disponibles, si je ne m'abuse. J'ai même perçu un taux de chômage qu'il aurait...

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Oui. Alors, je vais reprendre, j'ai peut-être fait ça un peu trop rapidement. Donc, le taux de chômage en juillet 2016, là, j'y vais pour la Montérégie, d'accord, j'ai ça par région, alors on va voir si on peut, si vous voulez, cibler davantage, mais c'est 6,4 %, donc c'est en baisse de 0,1 % depuis juin 2016. Et je pense que c'est à partir de ce chiffre-là — donc on va corriger le tir, si nécessaire — que j'obtiens toujours les 111... C'est bien 111 qu'on avait tout à l'heure? Je pense que j'avais 113, hein?

Une voix : 113.

M. Blais : 113 primodemandeurs dans la région, donc, et avec 114 000 postes signalés, donc ce qui vous fait un ratio très élevé de postes, potentiellement, hein, je suis toujours prudent là-dessus, mais très élevé, accessibles pour des primodemandeurs qui étaient accompagnés davantage, un peu plus élevé que la moyenne québécoise.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu.

• (10 h 40) •

M. Rochon : M. le Président, je dois absolument ici parfaire les connaissances du ministre et de son entourage. Là, on me cite des statistiques relatives à la Montérégie. Eh bien, dans ce beau pays du Québec, il y a des régions administratives puis il y a des sous-régions. Il y a même, vais-je vous l'apprendre, M. le Président, des localités, tantôt urbaines, tantôt rurales, chacune présentant des caractéristiques qui leur sont propres. Voilà pourquoi c'est une très grave erreur de faire du mur-à-mur régional. On ne fait pas du mur-à-mur régional, ça ne tient pas la route. Ça en fait faire, de la route, aux fonctionnaires, mais ça produit des politiques qui ne tiennent pas la route.

Sorel-Tracy, là, ce n'est pas la Montérégie. Il n'y a pas 6 % de taux de chômage à Sorel-Tracy, réveillez-vous! Je m'excuse, je dois le dire brutalement. Il y a un grave problème d'emploi à Sorel-Tracy. Encore récemment, une entreprise nommée General Electric, qui vient d'acheter Alstom, division Hydro, annonçait la probable délocalisation de 350 travailleurs vers une autre municipalité de la Rive-Sud de Montréal, alors que le portrait n'est déjà pas rose. Puis le ministre, s'appuyant sur les connaissances de son entourage, vient dire qu'il y a de l'emploi disponible à Sorel-Tracy? C'est insultant pour l'intelligence, M. le Président, ça ne tient pas la route.

Est-ce qu'enfin ce gouvernement va s'apercevoir qu'il n'y a pas que des régions administratives, au Québec, qu'il y a des sous-régions puis qu'il y a des localités? Sorel-Tracy, là, c'est l'endroit où il se trouve le moins de citoyens au travail dans toute la Montérégie, dans toute la Montérégie.

Quand j'ai affirmé, tantôt, qu'il n'y avait aucun agent d'aide sociale physiquement présent au CLE de Sorel-Tracy, je n'ai pas fait ça pour mettre le ministre dans l'embarras, c'est que je trouve que c'est un non-sens, c'est un non-sens. Il n'y a personne pour accompagner physiquement, au CLE de Sorel, les prestataires d'aide sociale. Savez-vous ce qu'ils font, les prestataires d'aide sociale? Ils se présentent là, là, puis là il y a des îlots, là, avec des téléphones. Là, ils prennent le téléphone, là, puis ils appellent leur agent d'aide sociale, qui a été délocalisé inconsidérément à Saint-Hyacinthe pour sauver du fric. Mauvaise décision, très mauvaise décision.

Alors là, moi, je trouve ça très intéressant que nous jasions ensemble du projet de loi n° 70 et des vertus du formidable programme — et là j'ironise puis je le dis pour vrai, les personnes qui transcriront ce que je dis et liront la transcription — du formidable projet de loi n° 70, mais là il faudrait discuter à partir des faits réels, du contexte véritable, pas lancer n'importe quoi, là : 6 % de chômage à Sorel-Tracy; des emplois, il en pleut, puis ils n'auront pas de problème à se trouver de la... Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas ça. Alors, voilà. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de...

M. Rochon : Est-ce que ces gens, là, peuvent, quand ils réfèrent à Sorel-Tracy, aller voir ce qui se passe vraiment, là, pas nous parler de la Montérégie, là? Ce n'est pas la même chose partout, là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Vous voulez rajouter quelque chose, M. le ministre?

M. Blais : Non, non. C'est un endroit très respectable, la Montérégie, par ailleurs.

Le Président (M. Cousineau) : D'accord. Madame...

M. Rochon : M. le Président, je m'excuse...

Le Président (M. Cousineau) : Oui, M. le député de Richelieu.

M. Rochon : C'est quoi, cette réponse-là : C'est un endroit très respectable, la Montérégie? Je n'ai jamais dit...

Une voix : Par ailleurs.

M. Rochon : Par ailleurs. Oui, bien oui, je ne nie pas que la Montérégie... Ça n'a aucun rapport, la réflexion du ministre, ce n'est pas ça que je dis. Je dis qu'il faut tenir compte des particularités sous-régionales et locales.

Puis je m'excuse de le faire sur ce ton-là, je n'ai pas... Moi, je ne souhaite jamais employer ce genre de ton, je souhaite toujours demeurer courtois. Je ne veux pas faire de procès sur la bonne foi des gens, je crois en leur bonne foi. Je veux juste signaler quelque chose dans l'intérêt de l'avancement de nos travaux et surtout dans l'intérêt des prestataires d'aide sociale, là, dont on est en train, là, censément, de se préoccuper du sort. Mais là, si on le fait à partir de fausses prémisses, en inventant des contextes, on est mal partis, là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Mme la députée de Gouin, sur l'amendement.

Mme David (Gouin) : Oui, sur l'amendement, M. le Président. Alors, j'aimerais signaler que je suis très heureuse de cet amendement déposé par mes collègues puis je voudrais expliquer pourquoi.

D'abord, j'ai le sentiment que, lorsqu'on discute des primodemandeurs, on est probablement très, très nombreux à avoir dans notre imaginaire, hein, ce portrait, et je suis certaine que c'est le cas du public aussi, là, ce portrait du jeune homme, 18 ans, qui le jour de son anniversaire va chercher un chèque d'aide sociale parce que... enfin, parce qu'on a l'impression, nous, là, de loin, qu'il ne rêve que d'aide sociale, alors que, je pense, normalement, il a bien d'autres rêves, ce jeune, mais on a souvent en tête une image de jeune homme, qu'elle soit vraie ou fausse, là. Que ce soient les jeunes hommes qui soient majoritaires ou non parmi les primodemandeurs, j'ai le sentiment, à tort ou à raison, que c'est à eux qu'on pense. Et pourtant, parmi les primodemandeurs, il y a certainement des jeunes femmes, et il y a aussi des femmes d'un certain âge.

Et je voudrais apporter un exemple très concret et très récent, parce que ma visite date de la semaine dernière, d'un organisme qui s'occupe de jeunes mères enceintes et par la suite qui accouchent et qui ont des très jeunes enfants, un organisme de mon comté qui s'appelle les maisons Augustine-Gonzalez, organisme tout à fait extraordinaire, comme tous ces organismes-là, dans le fond, avec qui j'ai discuté de cette fameuse question des sanctions, et qui m'exprimait tout son désaccord avec cette approche-là. Les jeunes femmes — elles sont très jeunes — qui arrivent dans une résidence, donc dans l'une des résidences Augustine-Gonzalez, sont des jeunes femmes enceintes. Elles sont généralement bien seules, parfois rejetées par leur famille, le théorique papa n'est pas tellement dans le paysage. Donc, elles se débrouillent. Et, plutôt que de, moi, je dirais, s'adonner à des activités peut-être moins intéressantes, elles décident... elles sont souvent référées, mais elles acceptent de venir vivre dans une maison où des intervenantes vont les aider.

C'est un processus long. Cette jeune femme est enceinte. La grossesse, bien, ça dure neuf mois. Elle va accoucher. Lorsque le bébé est très jeune, je sais que l'aide sociale va la laisser tranquille, mais il vient un moment où c'est sûr qu'elle veut aussi se reprendre en main, elle veut faire quelque chose de sa vie, et là elle est entourée, soutenue, encadrée par des intervenantes, qui va l'amener, la plupart du temps, à retourner aux études. Et, lorsque je suis allée visiter, là, j'avais devant moi des jeunes femmes en train de terminer leurs études secondaires, j'en avais une autre qui était au cégep, et on me racontait qu'il y en avait une autre qui était maintenant à l'université.

Autrement dit, on peut travailler avec des jeunes femmes qui ont eu toutes sortes de malchances, qui viennent souvent de familles très dysfonctionnelles, de familles pauvres. On peut et on doit les aider. Il faudrait multiplier ce genre d'initiative parce que, quand on leur en donne la possibilité, elles veulent sortir de l'aide sociale, parce qu'elles vont souvent dire : Ce n'est pas ça que je veux offrir à mon tout-petit qui vient de naître, je veux lui offrir une meilleure vie. Il y en a une qui m'a dit : Bien, quand il ira à l'école, moi, j'aimerais ça être capable de l'aider à faire ses devoirs, puis, pour ça, il faut que je finisse mon secondaire.

Autrement dit, on ne soupçonne pas à quel point la motivation des jeunes femmes peut être présente, pour peu qu'elles se sentent entourées. Alors, évidemment, je serais portée à dire que le premier geste qu'il faut poser, avant de penser de pénaliser qui que ce soit, c'est de donner plus de possibilité financière, plus de ressources humaines à ces organismes qui soutiennent des femmes, des organismes qui existent partout au Québec, pour qu'ils puissent vraiment remplir leur rôle, et là on aura des femmes qui sortiront de l'aide sociale, parce que ce n'est pas tellement une vie.

Mais je rappelle... C'est intéressant, lire l'action 28 du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Dans ce point du plan d'action...

M. le Président, je m'excuse, mais là je manque un petit peu de concentration.

Le Président (M. Cousineau) : Poursuivez, Mme la députée.

• (10 h 50) •

Mme David (Gouin) : Merci. Dans ce paragraphe, on dit : «Pour certaines femmes, les démarches vers l'autonomie économique impliquent un accompagnement accru et la prise en considération de toutes les dimensions de leur vie — et ça, en ce qui a trait aux femmes, c'est extrêmement important. En tablant sur l'expertise et l'intervention des organismes spécialisés en développement de la main-d'oeuvre féminine, qui sont actifs sur le territoire du Québec, le gouvernement entend soutenir les femmes...», etc.

C'est bien d'avoir un texte comme ça dans un plan d'action gouvernemental 2011‑2015. Le seul problème, c'est qu'en 2015 le gouvernement libéral a coupé de façon importante les subventions dans les organismes d'employabilité pour femmes, organismes liés au Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail. Alors là, il va falloir savoir qu'est-ce qu'on veut, là. Est-ce qu'on veut vraiment aider les femmes? Là, pour quelques minutes, je vais parler seulement des femmes, non pas que les hommes n'aient pas de problème lorsqu'ils sont à l'aide sociale, je pense qu'on en a parlé abondamment, mais je vais me concentrer, pour l'instant, sur les femmes. Est-ce qu'on veut vraiment les aider à sortir de l'aide sociale avec des parcours individualisés, des parcours qui tiennent compte de l'ensemble de leur vie, de leur situation familiale, d'une situation conjugale qui a souvent mal tourné et où elles ont été victimes de violence? Est-ce qu'on va vraiment mettre de l'argent dans tout ça ou bien est-ce qu'on va se contenter de dire : Bien, si vous ne voulez pas suivre le programme, vous êtes coupée, ce qui est tellement réducteur quand on pense à toute l'importance, effectivement, pour de nombreuses femmes, de sortir de l'aide sociale? La plupart d'entre elles ont des enfants et veulent donc offrir un avenir meilleur à leurs enfants.

Est-ce qu'on va aussi donner aux femmes des emplois décents, payés comme du monde, avec des horaires qui tiennent compte de leurs responsabilités familiales? Est-ce que le gouvernement du Québec va se décider à, par exemple, hausser de façon importante le salaire minimum? Il y a un grand débat social en cours là-dessus en ce moment. C'est très important, premièrement, parce que, si on travaille et qu'on a un salaire minimum qui nous maintient sous le seuil de faibles revenus, vous avouerez avec moi que ce n'est pas un très grand incitatif au travail. C'est un meilleur incitatif au travail que d'être capable, à la fin de la semaine, de se dire : J'ai travaillé 35, 40 heures et je peux vivre de mon salaire.

En ce qui a trait aux femmes, c'est particulièrement important. Savez-vous que la majorité des personnes au salaire minimum sont des femmes, 60 %, qu'elles sont concentrées dans trois secteurs, restauration, hébergement, commerce de détail, et qu'on parle donc très souvent de femmes peu scolarisées, occupant des métiers peu qualifiés, au salaire minimum, et, qui plus est, se faisant offrir des emplois qui sont rarement entre 35 et 40 heures-semaine, rarement? Il faut juste que vous parliez à la caissière de votre caisse populaire ou de votre banque pour comprendre qu'on n'offre plus aux femmes des emplois à temps plein et que souvent elles sont au salaire minimum. Parlez avec les vendeuses qui sont dans des commerces dans votre centre d'achats, parlez à la serveuse de votre restaurant du coin, parlez à la caissière du supermarché. Si elle est syndiquée, son sort est un peu meilleur. Si elle ne l'est pas, c'est la même chose que pour les autres : des salaires minables, des horaires de travail, parce qu'il n'y a pas assez d'heures, qui ne permettent pas de vivre décemment et, qui plus est, très souvent des horaires coupés, qui n'ont aucun rapport avec la vie familiale, des serveuses de restaurant, par exemple, à qui on va dire : Tu viens travailler de 11 heures à 14 heures et de 17 heures à 20 heures. En ville, c'est peut-être un peu plus facile, il y a le métro, à Montréal. Ailleurs, on fait ça comment quand on est une mère monoparentale, puis qu'on a de la difficulté à se déplacer, puis qu'il n'existe pas de transport en commun, puis en plus de ça, bien, à l'heure du souper il y a les enfants?

Je fais exprès d'apporter toutes ces situations pour dire que, si on veut être sérieux dans notre désir d'aider les femmes, d'ailleurs qu'elles soient primodemandeurs ou autres, hein, de sortir de l'aide sociale, non seulement, bien sûr, il faut continuer dans le bon sens ce qui avait été entrepris avec le budget Séguin à l'époque, donc les allocations familiales qui avaient été rehaussées... Je sais très bien qu'il y a beaucoup moins de femmes monoparentales à l'aide sociale qu'avant, je suis bien au courant de ça, mais il y en a. Et il y en a chez les primodemandeurs, il y a des jeunes femmes vraiment en difficulté qu'il faut aider. Mais, pour ça, il faut une panoplie de services et il faut aussi aborder... Le ministre d'Emploi et Solidarité sociale, si je ne m'abuse, est aussi ministre du Travail. Non? Il n'est pas ministre du Travail? Désolée. Enfin, je ne me rappelle pas qui est ministre du Travail, c'est un peu bête.

Une voix : ...

Mme David (Gouin) : Pardon?

Une voix : ...

Mme David (Gouin) : Dominique Vien.

Le Président (M. Cousineau) : Un instant. On n'a pas à sortir le nom de... Il faut donner le titre du ministre ou de la ministre, non pas le nom de famille.

Mme David (Gouin) : D'accord, bon, petite erreur. Écoutez, il faut, je pense, que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale transmette un message, donc, à la ministre du Travail, et ce message est le suivant : On veut sortir des personnes de l'aide sociale? Bien, entre autres, il va falloir regarder les lois du travail, il va falloir regarder l'obligation de donner à l'avance les horaires de travail — ça, pour les femmes, c'est extrêmement important — et il va falloir hausser le salaire minimum.

Retour à l'aide sociale. Je voudrais rappeler aussi que des coupes à l'aide sociale peuvent aussi... je ne dis pas que c'est la totalité des cas, mais peuvent aussi amener des jeunes femmes en particulier à être tentées par des activités que plusieurs jugeront problématiques, et je parle ici de la prostitution, du travail du sexe. Si, pour certaines, ce travail peut être un choix, pour d'autres ce n'est pas ça du tout, et je serais vraiment désolée qu'une loi imposant des pénalités ait comme effet, chez certaines jeunes femmes, de les amener à se dire : Bon, bien, moi, si on ne m'aide pas convenablement, si en plus on coupe mon chèque d'aide sociale, je vais m'adonner à des activités qui ne me plaisent pas forcément mais qui sont rentables, il faut quand même se le dire. Et je rappellerai, même si on a des fois un peu de misère à regarder cette situation en face, que, dans certaines régions minières, par exemple, la prostitution, c'est la deuxième industrie qui vient après l'ouverture de la mine. Ça, j'espère que tout le monde est conscient de ça ici, là, parce que c'est un problème qui ne concerne pas que les femmes concernées, c'est un problème qui devrait toucher tout le monde, hommes et femmes. C'est un vrai problème.

Donc, il n'y a aucun avantage pour les femmes, primodemandeurs ou non, de faire face à des pénalités dans les chèques d'aide sociale, mais par contre il y a tous les avantages au monde à pouvoir avoir des services, du soutien, de l'accompagnement. Lorsqu'on est une jeune femme, qu'on vit toutes sortes de difficultés, familiales, personnelles, c'est de l'aide dont on a besoin, c'est de l'accompagnement qui tient compte de la situation, très souvent, familiale. Et c'est pourquoi j'appuierai l'amendement de mon collègue. Et j'en profiterai pour dire qu'il faudra en même temps réactualiser ce plan d'action, qui est terminé depuis 2015, et offrir vraiment aux femmes des services adaptés, avec une approche féministe, qui tient compte de l'ensemble de leur situation, ce qui existe de moins en moins au Québec; pas de plus en plus, de moins en moins. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre, voulez-vous réagir aux propos de... Non?

M. Blais : Non. Finalement, ça va, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Ça va aller?

M. Blais : Oui.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, je passerais maintenant la parole à Mme la députée de Fabre.

• (11 heures) •

Mme Sauvé : Alors, M. le Président, j'aimerais revenir sur l'amendement qui est proposé et peut-être revenir sur le portrait, l'état de situation tel que je le vois et je le connais et rassurer les collègues par rapport à l'ensemble des activités offertes par les organismes qui accompagnent, dans le fond, les femmes vers l'employabilité, parce qu'il y a un état de situation qui est quand même important à noter comme étant réjouissant avec l'ensemble des expertises sur le terrain.

Il y a des organismes... On a parlé beaucoup des partenaires que sont les ressources externes, qui sont en lien direct, qui sont des organismes communautaires mais avec une expertise spécifique en employabilité, c'est d'eux dont il est question dans l'amendement. Alors donc, il existe, à travers le Québec et dans les régions du Québec, des organismes communautaires, principalement je pense qu'ils sont dans le regroupement du RQUODE, qui sont dédiés, qui ont une approche, donc, spécifique pour l'accompagnement spécifique des femmes dans leur réalité qui leur est propre. Et ils existent, ils existent depuis longtemps, ils offrent un accompagnement individualisé. Je pense, entre autres, à Laval, on a l'organisme Dimension Travail qui fait un excellent boulot d'accompagnement, très personnalisé, auprès des femmes. Alors, ce sont des expertises terrain, expertes qui existent et qui ont vu un rehaussement de leur financement en lien avec leurs activités d'accompagnement offertes, donc un rehaussement de 3,5 % dans la dernière année, alors ce n'est pas rien. Et non seulement on parle d'expertise en employabilité... Puis j'insiste sur ce principe-là parce qu'on parle beaucoup des organismes communautaires, qui font un travail remarquable sur le terrain, mais parmi eux il y a les organismes communautaires dits ressources externes qui ont l'expertise spécifique d'employabilité, c'est eux qui sont en premier lien direct avec cette expertise-là pour accompagner les personnes, dont les femmes, vers un succès en emploi. Alors donc, je voulais revenir, dans un premier temps, sur cet état de situation, le rehaussement de leur financement et l'expertise qu'ils détiennent depuis des années.

L'autre aspect dont je voulais parler, c'était le comportement des femmes qui vont chercher de l'aide, parce que je sais... entre autres, j'ai entendu la députée de Gouin nommer cette réalité-là, et je peux vous dire que, de façon assez généralisée, la majorité des statistiques de fin d'année des organismes communautaires ressources externes, qu'ils soient spécifiquement... adressant la clientèle femmes ou les autres organismes qui accueillent hommes et femmes... Évidemment, je pense, entre autres, à Perspective Carrière, qui accompagne particulièrement les personnes immigrantes à Laval. Je pense à des organismes aussi comme Midi-Quarante chez nous, à Laval. Ce sont des organismes qui accueillent hommes et femmes. Et, quand on regarde ces organismes-là qui ne sont pas spécifiques femmes, leurs proportions, leurs statistiques démontrent que la clientèle est... peut-être pas en grande majorité, mais il y a une clientèle féminine qui est plus importante que la clientèle des hommes. Pourquoi? Parce que souvent les femmes, entre elles, vont nommer le besoin d'aide, vont nommer qu'elles ont reçu des ressources, qu'elles ont reçu un accompagnement, elles s'en parlent et elles vont de façon plus naturelle aller vers une aide lorsque c'est nécessaire. Je vous dirais qu'avec les hommes c'est parfois plus difficile, ils s'en parlent moins entre eux, et on a... Pour avoir un caractère attractif, de dire : Voilà, il y a de l'aide disponible, c'est un plus grand travail, bien souvent. Alors donc, en termes d'accès aux activités qui existent, encore une fois, qui sont expertes, je vous dirais que les femmes ont recours aux services existants de façon peut-être plus, habituellement, naturelle même que les hommes, ce qui fait en sorte que, oui, il y a un accompagnement présent pour les femmes et, oui, elles fréquentent les différentes organisations qui peuvent les aider vers l'employabilité.

Alors, tout ça pour dire que, face à l'amendement, je pense qu'il y a un soutien aux activités qui sont offertes, il y a une expertise en place, il y a eu un rehaussement du financement, et les femmes fréquentent, bien sûr, ces ressources, et ces aides, et ces expertises. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Fabre. Je dois fonctionner par alternance, Mme la députée de Gouin, si vous permettez. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci...

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre, est-ce que vous aviez quelque chose à ajouter? D'accord. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Justement, moi, j'appuie beaucoup ce que notre collègue la députée de Fabre mentionne. C'est effectivement pour ça que nous avons déposé cet amendement, parce qu'effectivement, là, il y a des ressources externes, là. Entre autres, là, on peut référer, là... Il y a 16 organismes, là, qui sont spécialisés pour les femmes. Et mon collègue a déposé cet amendement-là. Je ne le sais pas, bon, je ne peux pas parler pour lui, mais moi, je crois que la raison pourquoi qu'il l'a déposé, cet amendement, c'était dans tout le contexte que nous avons vécu lors de la dernière session parlementaire, où nous avons, lors de l'étude de crédits, à la période de questions, à différents moments, revenu sur cette question-là du financement de ces 16 organismes d'employabilité féminine, d'employabilité pour les femmes.

Moi, à moins que j'en aie échappé une cet été, ce qui est possible, ce qui est possible, l'enjeu n'est toujours pas réglé entre le ministre que nous avons devant nous et la ministre de la Condition féminine pour assurer le financement de ces organismes. Pourtant, moi, je... bien, ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, qui est notre porte-parole à la condition féminine, avait posé des questions, j'ai posé aussi des questions comme porte-parole pour l'emploi.

À l'époque, on avait émis un communiqué, M. le Président, je pourrais reprendre quelques éléments du communiqué de presse. Et là je parle du mois de mars, là, puis, bon, ça ne semble toujours pas réglé. Bon, à l'époque, je constatais un peu à chaque jour de quelle façon la ministre responsable de la Condition féminine incarnait son féminisme à sa manière, hein, la ministre avait dit : Moi, j'incarne le féminisme à ma manière. Et on avait constaté que, bon, la semaine dernière, elle avait refusé de s'engager — puis là, la semaine dernière... là, je pourrais dire «il y a quelques mois», parce que c'était au mois de mars — de rétablir le financement des 16 organismes québécois spécialisés en développement de la main-d'oeuvre féminine, ce qui fragilise, on le dit, ainsi davantage encore le soutien à l'employabilité des femmes. Lors du dernier budget, le gouvernement a amputé de 60 % l'enveloppe dédiée à la mission de ces organismes, faisant passer l'enveloppe globale leur étant dédiée de 1,2 million de dollars à 500 000 $. À l'époque, la ministre de la Justice avait promis de créer un comité qui travaillerait rapidement pour soutenir la mission globale de ces groupes. Un an plus tard, le verdict de ce comité est surprenant : le financement n'est plus disponible. Et là, à cette époque-là, j'avais déclaré, M. le Président : «Il est primordial de rétablir le 1,2 million lors du prochain budget.»

Là, on nous avait un peu joué... on avait fait une partie de ping-pong, hein, ça arrive des fois, à l'Assemblée nationale, qu'on a ça. Là, le ministre de l'Emploi nous dit : Non, c'est la ministre de la Condition féminine, avec le Secrétariat de la condition féminine, qui va financer. Le Secrétariat de la condition féminine dit : Non, c'est le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale qui va... Là, à un moment donné, tu sais, à quelque part, il faut s'entendre, là.

Est-ce qu'il y a des situations? Oui, il y a une situation. Il y a une situation, M. le Président, on le voit. Trois quarts des femmes rencontrées par ces organismes ont réglé des problèmes qui freinaient la recherche d'un emploi, leur maintien en emploi. Les deux tiers occupent un emploi durable ou sont toujours aux études plus de deux ans après la fin de leur participation, la moitié de ces femmes ont vu leurs revenus augmenter. Ça, M. le Président, quand on parle de retour en emploi ou de maintien en emploi durable, c'est de ça que nous parlons. Nous parlons aussi d'une meilleure scolarité, hein, scolarisation pour ces femmes. Déjà que 16 organismes, ce n'est pas beaucoup... Malgré tout, ces 16 organismes-là oeuvrent dans 11 régions du Québec, M. le Président, ce n'est quand même pas rien.

On le sait, on le voit, on doit avoir davantage de préoccupation pour les femmes, parce qu'elles vivent, là, des réalités différentes, là. Là, j'essaie de me retrouver dans mes piles, là, j'avais des articles, là, que j'avais ici, là, à quelque part, là, qui pouvaient démontrer... mais je vais pouvoir y aller de mémoire, là, le temps que je retrouve mes articles, là. Mais on l'a vu, on l'a cité, on en a parlé, il y a une précarité en emploi pour les femmes. Je crois, là, que c'est 50 % qui...

• (11 h 10) •

Une voix : ...

M. Turcotte : C'est Sylvain qui l'a? Bon, c'est mon collègue, là, qui est parti avec mon article, là. C'est 50 %, je crois, ou 30 %... 30 %. Emplois non qualifiés : les femmes gagnent 30 % de moins que les hommes, un article, là, du Journal de Québec, 5 mai 2016. Mon collègue en a parlé, de ça. Il a cité cet article-là, d'ailleurs, là, c'est pour ça, bon, qu'il l'avait, là, c'est parfait.

Portrait statistique Égalité femmes-hommes : ensemble du Québec, ça, c'est le rapport qui a été produit par le Conseil du statut de la femme, qui juge la situation très préoccupante. Quand on a des chiffres comme ça, M. le Président, on doit se questionner.

Quand on a aussi, on en a parlé... Puis là, à l'époque, les gens n'avaient pas trop apprécié, là, qu'on parle de ça ici, là. C'est quand même important. Diane Matte, organisatrice communautaire et fondatrice de la Concertation des luttes contre l'exploitation sexuelle, bon, dans le texte qu'elle a publié dans Le Devoir en février dernier, S'attaquer à la demande, on le voit, elle mentionne qu'il y a un risque, qu'il y a un risque d'une augmentation du nombre de femmes qui pourraient être contraintes de se rendre jusqu'à un travail qui est, bon, disons, peu honorable, bon, sur la prostitution, etc. Ce n'est pas l'objectif de personne ici, M. le Président, j'en suis certain, mais, quand on voit qu'il y a des réalités plus difficiles chez les femmes... Bon, puis la science n'a pas encore changé ça, c'est encore les femmes qui ont les enfants, au Québec. Donc, inévitablement, pendant le temps de la grossesse, après ça une partie... Même si de plus en plus de pères prennent la responsabilité des enfants, là, pour le congé parental ou autres, les statistiques démontrent que c'est encore beaucoup les femmes qui le font. Pendant ce nombre de mois, pendant cette année-là, pendant ce temps-là, en termes d'expérience, en termes d'ancienneté, bien, c'est les femmes qui sont pénalisées.

On le voit, il y a davantage de femmes sur les bancs d'école, mais on le voit aussi, qu'en termes de... pour le secondaire, etc., c'est toujours plus difficile pour les femmes de poursuivre, parce que les emplois sont souvent, bon, stigmatisés, on le sait. Ma collègue tantôt en a parlé ce matin au point de presse que nous avons tenu. Sur la question des préposées aux bénéficiaires, elle l'a mentionné, que c'était davantage, souvent, les femmes qui étaient incitées à faire ce métier-là parce que naturellement on dit, bon : Les femmes sont meilleures pour s'occuper des personnes, puis tout ça. Quand on le sait, quand on le sait, que, préposé aux bénéficiaires, il y a quand même un travail... c'est quand même physique comme travail, bon, des fois il faut, bon, déplacer des personnes, puis tout ça... Je le sais, j'ai vécu ça récemment, bon, j'ai sorti de l'hôpital la semaine passée, j'ai été hospitalisé quelque temps, j'ai vécu ça. Bon, la dernière fois, c'était durant la crise du verglas, je ne m'en souvenais plus beaucoup, mais j'ai vécu... j'ai vu tout le travail qui se fait dans nos hôpitaux. D'ailleurs, ce serait tout un autre enjeu, là, qu'on pourrait parler. Disons que j'ai pris quelques notes, que je pourrai transmettre au ministre de la Santé, bon, parce qu'il y avait quelques commentaires que j'ai entendus là de la part de l'équipe médicale, et autres.

Mais, M. le Président, je crois que c'est bien, c'est bien de dire : On veut remettre les gens au travail, on veut que les gens se trouvent un emploi, on veut que les gens soient plus scolarisés, on veut aider les femmes, etc., je suis tout d'accord avec ça, tout d'accord avec les propos de notre collègue la députée de Fabre. Mais, quand on arrive au-delà, là, des paroles, là, que, là, c'est l'action qui parle, là, que c'est l'aide, là, concrète du gouvernement qui est apportée, là, bien, on passe de 1,2 million à 500 000 $ pour les 16 organismes d'employabilité féminine, ce qui fait, je pense... de mémoire, là, c'était à peu près une coupure de 75 000 $, de mémoire, par organisme. Qu'est-ce qu'on fait? J'ai rencontré, moi, quelques fois ces organismes, celui dans ma circonscription. Je suis chanceux, je suis chanceux. Sur 125 députés, j'ai la chance d'avoir un organisme qui oeuvre auprès des femmes dans ma circonscription, COFFRE, hein, qui est un organisme réputé, ça fait une trentaine d'années qu'il existe, etc. Mais c'est un problème quand on voit que ces organismes-là, bon, doivent vivre une coupure.

Donc, M. le Président, je crois que l'amendement de notre collègue est très pertinent. Dans un contexte où l'austérité est moins présente, dans un contexte où les coupures sont moins présentes puis, bon, le gouvernement a des marges de manoeuvre plus importantes, je crois que, bon, c'est une autre réalité. On n'a pas autant besoin de réaffirmer dans la loi toute l'importance de maintenir l'aide... Bon, on l'a fait pour les personnes handicapées, on l'a fait pour les jeunes, on l'a fait pour les femmes, etc. Mais c'est parce qu'on ne dit pas ça pour rien et on ne dépose pas cet amendement-là pour rien, c'est parce qu'il y a des cas, puis on le voit. Ces organismes-là ont été coupés.

La Stratégie d'intervention d'Emploi-Québec à l'égard de la main-d'oeuvre féminine, qui date de 2009, n'a pas été renouvelée encore, M. le Président. La responsabilité du ministre qui est devant nous actuellement.

Donc, je crois que l'amendement de notre collègue est très pertinent pour s'assurer qu'on puisse aider les gens à se sortir de la pauvreté, à se trouver un emploi, à retourner aux études, etc., mais plus particulièrement les femmes, parce que, oui, malheureusement c'est encore plus difficile pour les femmes, au Québec et ailleurs, mais nous parlons au Québec, que pour les hommes. Et on le voit. Le portrait statistique que je parlais tantôt, M. le Président, indique que le taux d'emploi des femmes non diplômées est de 38,3 %, comparativement à 52,3 % pour les hommes sans qualification particulière. Les chiffres que je parlais tantôt, là, quand je disais que c'est plus difficile pour une femme, là, bon, qui n'a pas terminé son secondaire, etc., là, bien, on le voit, là. Pour une femme qui n'a pas son diplôme d'études secondaires ou un autre diplôme, 38,3 % se trouvent un emploi, mais, quand on est un homme, 52,3 %. Ce n'est pas normal, M. le Président.

Puis, dans les chiffres du ministre, quand il parle des primodemandeurs, là, je crois qu'il nous les avait déjà donnés, là, par rapport... hommes-femmes, etc., là, mais ce serait peut-être une bonne idée de ventiler davantage, là, ces chiffres par rapport peut-être au sexe, aux âges, etc. Les âges, ça, on le sait, il nous en a parlé beaucoup, là, c'étaient beaucoup les jeunes, beaucoup les jeunes. D'ailleurs, je ne sais pas trop comment les jeunes libéraux doivent interpréter le projet de loi n° 70, parce que ça pourrait s'apparenter à une clause orpheline, hein, dans les faits, parce qu'on vise vraiment les jeunes, ça a été stigmatisé pour les jeunes : C'est pour les jeunes, les jeunes, et quand on sait que ce n'est pas que les jeunes, mais, dans les faits, la promotion, là, le marketing du projet de loi n° 70, pour réussir à essayer de trouver quelques appuis, là, est basé sur : On va aider les jeunes. On pourrait revenir, là, avec les témoignages des Auberges du coeur, entre autres, là. Mais c'est pour ça que nous, on voulait aussi rappeler, M. le Président, que, dans le projet de loi n° 70, il y aura des conséquences pour l'ensemble des primodemandeurs à l'aide sociale et, dans ce cas-ci, par rapport aux femmes.

Je pourrais mentionner aussi, M. le Président, un autre bout, là. Lorsque les femmes détiennent un diplôme collégial ou universitaire, les femmes sont beaucoup plus susceptibles d'occuper un emploi. À titre d'exemple, le taux d'emploi des femmes ayant une formation universitaire est de 81,5 %, comparativement à 83,4 % pour les hommes. Donc, il y a plus de femmes à l'université que les hommes, mais les hommes se trouvent quand même plus d'emplois, malgré leurs diplômes universitaires, puis on le sait.

Pourquoi que je dis cette statistique-là? C'est qu'on a entendu que les gens à l'aide sociale, c'étaient, bon, plus des gens sans diplôme ou des gens... secondaire, peut-être collégial, mais là c'était... puis il n'y avait pas beaucoup d'universitaires. Le ministre nous a sorti les chiffres, là, je ne me souviens plus exactement, là, mais c'était quand même un chiffre assez important, là. Je pense que c'était 30 %, à peu près, de mémoire, de gens qui avaient un diplôme universitaire. Dans la...

M. Blais : 14 %.

M. Turcotte : 14 %?

M. Blais : 14,3 %.

• (11 h 20) •

M. Turcotte : Je m'excuse. Il y avait un trois à quelque part, c'est juste que je n'avais pas mis le zéro à la bonne place, je m'excuse. 14,3 %, 14,3 %.

Lors du débat sur les carrefours jeunesse-emploi, on avait entendu aussi que, pour les jeunes, c'était une préoccupation, une problématique, le nombre de jeunes qui avaient un diplôme universitaire qui ne se trouvaient pas un emploi. Pour les femmes, c'est la même chose.

Donc, on n'est pas contre, on n'est pas opposés, loin de là, à ce qu'il y ait une rencontre, quand le ministre parle d'une rencontre pour une évaluation, si on peut dire, avec un primodemandeur. Pourquoi? Parce que justement ce serait une belle occasion, lors de cette rencontre-là, que, une personne qui a un diplôme d'études universitaires, quelqu'un qui n'a pas de diplôme, quelqu'un qui a un diplôme du secondaire, peu importe, on puisse l'orienter vers la bonne ressource.

Dans le cas d'un diplôme universitaire, peut-être que c'est parce que la personne a vécu des mauvaises expériences dans son emploi précédent qu'elle a obtenu suite à son diplôme universitaire et qu'elle n'a... et ce n'était pas son élément, finalement, parce que, oui, ça se peut, hein, on le voit, on change, hein, de profession, etc., avec le... Ce n'est pas comme l'époque de mes grands-parents, bon, on fait un métier, puis on rentre à la shop, puis c'est notre parent qui nous... notre père, souvent, à l'époque, qui nous faisait rentrer à la shop, puis après ça il sortait à la retraite, là. Ce n'est plus comme ça, maintenant, on fait plusieurs métiers, plusieurs emplois. Donc, c'est peut-être parce que ça ne fonctionnait pas. Peut-être qu'il a eu des mauvaises expériences, peut-être que la relation avec le patron n'était pas correcte, avec les collègues de travail, peu importe. Donc, peut-être l'amener vers un organisme d'employabilité comme les organismes pour les femmes, si c'est une femme. Si c'est un jeune, un carrefour jeunesse-emploi, peu importe. Ça peut être aussi, si la personne n'a pas de diplôme secondaire terminé, bon, bien, de l'inciter à finir son diplôme d'études secondaires, donc de l'envoyer dans un centre d'éducation des adultes... ou d'avoir une rencontre d'orientation, parce que, on se le dit, dans nos écoles il n'y a plus beaucoup d'orienteurs, et le peu d'orienteurs qu'il reste sont débordés. Donc, ce travail-là d'orientation est important pour que les gens qui ne savent pas trop ce qu'ils veulent... Quelqu'un qui ne sait pas trop quel métier qu'il veut faire ou qui a besoin d'aide, de conseils ou du moins de se faire poser des fois les bonnes questions, d'avoir cette rencontre-là avec un agent, dans ce cas-là, d'aide socioéconomique, mais ça pourrait aussi être avec un agent d'Emploi-Québec, ça peut aider, ça peut aider cette personne-là parce que, si la personne se trouve un objectif... Moi, là, je veux faire tel métier. Bien, qu'est-ce que j'ai besoin pour me rendre à ce métier-là? Avoir une formation, avoir... bon, etc., développer telle compétence, telle habilité, ça permet de... Puis peut-être avoir recours à un organisme communautaire parce qu'elle a différentes problématiques personnelles. Ce qui fait en sorte que cette rencontre-là est une bonne chose.

Mais là le ministre ajoute une nouvelle sanction à tout ça, là. Déjà qu'on trouve qu'il y en a trop puis on trouve qu'il ne devrait pas y avoir de sanction, là le ministre dit : On pourrait retenir le chèque pour la première rencontre, si elle ne vient pas, puis tout ça. Il va falloir qu'il nous explique davantage ce qu'il veut dire, parce que, là, c'est questionnable. Là, s'il ne vient pas à la première rencontre, ils vont retenir le chèque. Pour combien de temps? Ça, on ne sait pas. Après ça, là, si la personne... Parce qu'il y avait déjà des sanctions prévues pour une première rencontre, là, dans le tableau que le ministre nous a déposé. Ça fait que, là, il ajoute une nouvelle sanction, mais là, en plus, il y a toutes les autres sanctions qui viennent en ligne de compte.

Donc, moi, ce que je crois, M. le Président, c'est que visiblement l'été n'a pas été assez long, pour le ministre, pour recharger ses batteries et réfléchir un peu. Donc, moi, je crois que le ministre gagnerait beaucoup à poursuivre la réflexion ou à clarifier sa position avant la rentrée parlementaire, parce que, sinon, on ne pourra pas continuer comme ça, là, on perd notre temps.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. C'est tout le temps qui vous était alloué sur l'amendement.

M. Turcotte : ...je perds mon temps, je n'en ai même plus.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, je suis prêt à... M. le ministre, est-ce que vous voulez réagir, avant que je passe la parole à quelqu'un?

M. Blais : Non, là, je suis assez d'accord qu'on perd notre temps de plus en plus, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Il faut faire attention à ce qu'on dit, là.

Une voix : Enfin, on a un consensus.

Le Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! On ne fera pas un débat là-dessus, là. Mme la députée de Gouin, à vous la parole.

Mme David (Gouin) : Il me reste combien de temps, M. le Président, s'il vous plaît?

Le Président (M. Cousineau) : On va vous... On me dit qu'il vous reste cinq minutes.

Mme David (Gouin) : Merci. Bon, toujours sur l'amendement, d'abord j'aimerais apporter une précision, parce que j'écoutais attentivement les débats, y compris l'intervention de la collègue de Fabre. Oui, les organismes d'employabilité liés au Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail ont reçu cette année une augmentation de leurs budgets de 3,5 %, mais ce qu'il ne faudrait pas oublier de dire, c'est que ces 16 organismes, répartis dans 11 régions, ont subi en 2015 une coupure de 60 % d'un budget qui leur était alloué pour toutes sortes d'activités de soutien aux participantes et de la concertation dans le milieu, ils sont passés de 1,2 million à 500 000 $. Alors, je comprends que cette année on a fait une petite augmentation de 3,5 %, mais on est très, très, très loin de récupérer les sommes qui avaient été coupées l'année précédente, alors qu'on était en pleine réalisation du plan d'action en condition féminine, qui n'était pas terminé puisqu'il se terminait en 2015. Alors, visiblement, l'austérité était plus importante que le plan d'action en condition féminine.

Deuxièmement, je voudrais dire aussi que c'est très important d'avoir des organismes soit non mixtes ou mixtes qui ont une approche féministe, on ne le dira jamais assez, parce qu'avoir une approche féministe, ça veut dire, entre autres, proposer aux femmes des avenues de retour à l'emploi qui ne soient pas centrées uniquement sur les métiers traditionnellement féminins mais qui puissent ouvrir la porte à tous les métiers, parce que tous les métiers doivent absolument, maintenant, non seulement en théorie, mais dans les faits être accessibles aux femmes, et tout le monde sait bien que ce n'est pas le cas. J'ai souligné plus tôt, dans un point de presse précédant cette commission, que de très nombreuses femmes se faisaient offrir non pas de terminer leurs études secondaires, mais une formation très courte pour devenir préposées aux bénéficiaires, poste très fréquent dans les résidences privées de personnes âgées, poste très mal rémunéré, généralement au salaire minimum, requérant peu de formation, et qui font en sorte, entre autres choses, que le roulement de personnel dans ces résidences est assez dément, que les gens s'en plaignent, les personnes âgées s'en plaignent, et que les femmes elles-mêmes, à un moment donné, considèrent que ce n'est pas possible d'occuper un emploi si mal rémunéré. Mais ça, c'est un des problèmes, mais l'autre problème, c'est : Mais pourquoi diable offrons-nous systématiquement à des femmes d'occuper ce genre d'emploi? Qu'on leur offre si c'est ce qui leur convient, il n'y a aucun problème, mais les femmes peuvent aussi être monteuses de lignes à Hydro-Québec, là. Il est temps qu'on allume un peu sur les capacités des femmes à remplir, à occuper des emplois extrêmement diversifiés. Mais malheureusement, très souvent, lorsque des femmes sont à l'aide sociale, ce n'est pas ça qui se passe.

Un autre point que je voudrais apporter, ça a aussi été souligné ce matin par l'une des intervenantes au point de presse, c'est toute la situation des femmes victimes de violence conjugale. Il n'est pas exact de penser que ces femmes, avec la loi telle qu'elle serait adoptée, là, auraient bien du temps devant elles pour se reprendre en main, essayer de se refaire un peu une santé physique et mentale avant qu'on les oblige à participer à un programme. En tout cas, moi, je n'ai pas vu ça écrit nulle part. Et, en ce moment, ce que je sais fort bien, c'est que nombreuses sont ces femmes qui ne peuvent pas très rapidement être à plein temps dans un programme. C'est toute leur vie qui est en morceaux et qu'elles essaient de recoller petit à petit.

Comme il me reste très peu de temps, je voudrais aussi poser une question, et c'est toujours suite à l'intervention de notre collègue la députée de Fabre, mais, si, finalement, dans les groupes où sont référées les personnes à l'aide sociale, il y a déjà beaucoup de femmes — c'est ce qu'elle nous dit — et que les femmes sont particulièrement réceptives à recevoir de l'aide et à essayer de sortir de l'aide sociale, si je comprends bien, dans le fond, pour les femmes québécoises mal prises et à l'aide sociale, on n'a pas besoin de pénalité, ce qui fait quand même déjà pas mal de monde.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin, c'était tout le temps que vous aviez sur l'amendement. M. le ministre, voulez-vous réagir? Sinon, je passe la parole à quelqu'un d'autre.

• (11 h 30) •

M. Blais : Peut-être une remarque générale. Une des présentations peut-être les plus saisissantes qu'on a eues en commission parlementaire, c'était celle du Conseil du statut de la femme, et je pense que tout le monde s'en rappelle, qui montrait qu'il y avait de plus en plus un problème d'abandon scolaire chez les jeunes femmes. Et la présidente de l'époque disait très clairement : Il faut faire quelque chose, il faut, hein, et c'est ses mots, obliger, il faut trouver des façons, là, pour que cette situation-là soit prise très au sérieux par ces jeunes femmes. Bien sûr, en même temps, elle ne voulait pas qu'on aille vers une obligation qui pourrait amener des sanctions, je le reconnais d'emblée.

On est exactement dans cette orientation-là. Il faut s'assurer que ces personnes-là, femmes et hommes, mais là on parle des femmes, en ce moment, là, aient toutes les chances de se reconstruire, de terminer leurs études. Pour ça, encore une fois, on a besoin de les rencontrer, d'évaluer leur situation puis éventuellement, là, de leur proposer, avec des bonifications importantes, je rappelle que les montants qu'on propose sont importants, ici je pense que tout le monde en a convenu, hein... leur donner les moyens, là, si possible, de terminer leurs études ou encore d'entreprendre un travail. On est exactement, là, dans cette voie-là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je suis prêt à entendre un prochain intervenant sur l'amendement de M. le député de Richelieu. Oui, M. le député de Rimouski. Sur l'amendement.

M. LeBel : Oui. Je pense qu'on ne perd pas notre temps à parler de la pauvreté des femmes. Je pense qu'il y a quelque chose... il y a un élément important, il y a une différenciation à y avoir, il y a une analyse différente à faire pour ce qui est de la pauvreté des femmes.

D'ailleurs, là, je regardais, il y a plusieurs avis ou des rapports sur la pauvreté des femmes au Québec dans plusieurs régions. Entre autres, la Capitale-Nationale, la région du ministre, tu sais, il y a des statistiques assez claires, là : «13,8 % des femmes de la région vivent sous le seuil de faibles revenus comparativement à 10,8 % pour les hommes. Dans l'agglomération de Québec, c'est le cas de presque 16 % des femmes comparativement à 12,5 % pour les hommes. [...]On peut mieux constater l'ampleur de la problématique lorsqu'on regarde la situation des femmes âgées de 55 ans et plus. Dans cette catégorie d'âge, 16,6 % des femmes de la région vivent sous le seuil de faibles revenus comparativement à 9 % pour les hommes.» Je pense qu'il faut s'intéresser à ce phénomène de la pauvreté chez les femmes au Québec, une pauvreté qui peut être différente si tu es en milieu urbain puis en milieu plus rural, mais il faut prendre le temps de regarder tout ça.

Tantôt, j'expliquais que, depuis la loi pour lutter contre la pauvreté, un des gains importants du milieu populaire, à l'époque, avait été de forcer le gouvernement, puis ça avait été... le gouvernement avait accepté, puis on avait travaillé avec les groupes, avec les partis d'opposition, d'intégrer ce qu'on appelle une clause d'impact à la loi pour lutter contre la pauvreté. Cette clause d'impact oblige les gouvernements, depuis ce temps-là... malgré que je ne suis pas sûr que c'est toujours très bien fait, mais oblige le gouvernement, à chaque projet de loi, d'analyser l'impact de leur projet de loi sur la pauvreté, puis ça peut être dans plein de domaines.

Il y a une autre clause d'impact, là, on pourrait appeler comme ça, une autre... qui s'appelle l'analyse différenciée selon les sexes, dans plusieurs interventions, plusieurs plans d'action du gouvernement cette analyse-là a été mise en place. J'aimerais savoir du ministre : Sur ce projet de loi n° 70, est-ce que cette analyse différenciée selon les sexes a été faite? Et, si oui, comment ça se passe? Comment ça se fait?

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre.

M. Blais : Oui. Écoutez, on revient au travail, là, puis parfois il faut se rafraîchir un peu la mémoire sur certains dossiers, là. Donc, si je me souviens bien, là, il n'y a pas d'obligation formelle, hein, de faire cette analyse-là. Cependant, nous, on doit faire une analyse en vertu de la loi-cadre, là. On va la déposer, bien sûr, en même temps qu'on va déposer au Conseil des ministres, là, les règlements, là, pour le projet de loi.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Je vois qu'il y a des précisions à rajouter. Allez-y. Je m'excuse, M. le Président.

M. Blais : ...un petit arrêt, M. le Président, juste pour ne pas faire d'erreur. Je mêle les analyses d'impact et...

Le Président (M. Cousineau) : Absolument. Alors, on peut suspendre quelques minutes.

Donc, je suspends.

(Suspension de la séance à 11 h 35)

(Reprise à 11 h 39)

Le Président (M. Cousineau) : Votre attention. Nous reprenons nos travaux. Alors, M. le ministre, est-ce que vous avez des précisions à apporter?

• (11 h 40) •

M. Blais : Oui. Donc, M. le Président, pour le bénéfice de tout le monde puis pour mon propre bénéfice, là, il va être important de distinguer, là. Les études d'impact, on en a déjà parlé, je pense, ici abondamment. Donc, les études d'impact auront à être déposées, comme j'ai mentionné tout à l'heure, au Conseil des ministres lorsque, bien sûr, on déposera les règlements, parce que la loi demeure encore une loi habilitante. Cependant, l'analyse différenciée, là, elle est importante en amont parce qu'elle nous aide à orienter, bien sûr, le projet de loi et elle nous aide aussi à orienter, par exemple, des règlements.

Donc, je l'ai déjà mentionné, ça fait déjà un bon bout de temps donc je vais le rappeler quand même, dans le cas des femmes, là, il faut tenir compte de situations particulières et qui nous amènent à ne pas les intégrer dans Objectif emploi, certains cas particuliers. Par exemple, je pense qu'on l'a fait ici, mais je le vais le refaire pour le bénéfice de tout le monde, là, une femme enceinte d'au moins 20 semaines, hein, donc, est exclue d'Objectif emploi. Une personne, donc une femme aussi, bien sûr, hébergée, là, dans un... qui est victime de violence et qui se réfugie dans une maison d'hébergement — c'est souvent les femmes — donc, est aussi exclue d'Objectif emploi. Pour des raisons de santé, bien, c'est hommes et femmes, mais ça peut aussi arriver aux femmes, bien entendu. Dans le cas, et c'est peut-être plus important, là, des personnes qui ont à charge un enfant d'âge préscolaire, ça, on l'avait mentionné, donc, c'est aussi exclu. Et, dans le cas de personnes — c'est souvent des femmes, ça a été dit ici aussi tout à l'heure — qui ont à charge un enfant handicapé, donc, elles sont exclues, pour cette période-là, du moins, ça peut être plus long, là, de la participation obligatoire, bien sûr, à Objectif emploi, même si toutes nos mesures demeurent offertes, là, à ces personnes.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre, pour les précisions. M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Oui. Je comprends, là, qu'il y a certaines exclusions, là, qui peuvent toucher des situations particulières aux femmes ou... mais la question était... L'ADS, l'analyse différenciée selon les sexes, ce n'est pas nouveau, là, dans l'État québécois, là, c'est un gain du mouvement féministe, on a réussi à intégrer ce concept d'analyse différenciée selon les sexes, qu'on appelle l'ADS. On sait que, dans certains plans d'action du gouvernement, l'analyse a été faite, mais je comprends que, là, en amont au projet de loi, ce sur quoi on travaille aujourd'hui, sur le projet de loi n° 70 comme il est là, aujourd'hui, présenté, il n'y a pas eu d'analyse différenciée selon les sexes à proprement dit. Vous allez voir pour la suite des choses, mais, à proprement dit, quand on propose des choses, dans ce projet de loi là, on n'a pas vu ça par... on n'a pas pris le temps de regarder ça par la lorgnette de l'ADS, c'est ce que je comprends.

M. Blais : Oui. Écoutez, donc, on n'a pas d'obligation à déposer une analyse de ce type-là. L'important, pour nous, c'est de tenir compte de la situation particulière des femmes, notamment en pauvreté.

Puis là-dessus, là, je suis très ouvert. Si les collègues d'en face ont des préoccupations, ils pourraient faire des propositions pour dire : Écoutez, est-ce que vous tenez compte de telle situation ou telle autre?, on est prêts, bien sûr, à écouter leur avis.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Bien, là-dessus, puis je suis certain que ma collègue de Gouin doit écouter comme il faut, l'ADS, là, d'avoir réussi à intégrer ce principe-là, c'est de s'assurer qu'on ne fasse plus les choses sur le coin d'une table, qu'on ne se dise plus : Oui, bien, si tu as des préoccupations... C'est d'avoir un cadre bien précis puis de lui donner un nom, qu'on appelle l'ADS, puis on dit : À travers ce cadre-là, on regarde les choses point par point. Y a-tu un impact différent sur les femmes que sur les hommes? C'est ça, l'ADS. Puis je pense que, si c'est sérieux, on doit la mettre en place, on doit faire l'analyse selon la formule qui a été expérimentée, qui est faite, ce n'est pas la première fois que le gouvernement travaille avec ça.

Moi, je vois, concernant le projet de loi, que l'ADS, l'analyse, selon la façon de faire, n'a pas été faite. Et, bon, je comprends que le ministre est ouvert à ce qu'on regarde des choses, mais il me semble que, ça, quand on travaille là-dessus, on ne fait pas ça sur un coin de table.

Là, ce que je... C'est parce qu'il y a une différence. Puis je reviens un peu à ce qu'on disait tantôt sur l'accueil des primodemandeurs, tu sais, je rappelle, là, on se disait que le ministre veut rendre obligatoire l'accueil des primodemandeurs. Le ministre convient que chaque CLE n'est pas, aujourd'hui, là, dans l'état actuel des choses, puis mon collègue de Richelieu l'a bien démontré pour Sorel-Tracy... qu'il n'y a pas dans chaque CLE ce qu'il faut pour accueillir tous les primodemandeurs. Et là juste par la mathématique on se pose la question : Est-ce que... Là, le ministre dit : Il y a tant de primodemandeurs, bon, là, ça pourrait prendre trois ou quatre agents pour les accueillir, je ne sais pas, moi, on pourrait voir, on pourra essayer, mais, je vous dis, il y a une différence entre quelqu'un qui arrive pour rencontrer un agent, quelqu'un... Si je prends l'exemple de ma collègue de Gouin, d'un jeune de 18 ans, il y a une différence entre ce jeune homme de 18 ans là et une femme de 45, 50, 52 ans, qui a un vécu, qui a eu des problématiques particulières. J'ai l'impression que l'agent, le jeune qu'il va accueillir... je n'ai pas juste l'impression, je suis convaincu que cet agent-là va avoir une façon de faire autrement entre le cas du jeune de 18 ans et la dame de 45, 50 ans, je suis convaincu, il faut que l'accueil soit fait autrement. Et ça, c'est un peu ça, quand on parle de prendre en considération les problématiques différentes, puis c'est ça, l'analyse différenciée selon les sexes.

Dans mon bureau de comté, les cas de pauvreté, souvent, qui viennent nous rencontrer, plus que la moitié c'est des femmes. C'est des problèmes de logement, nutrition, les enfants à charge, violence, violence conjugale mais souvent, des fois, des enfants aussi. Moi, j'ai le dossier des aînés, et, comme porte-parole, je vous dis, les femmes plus âgées... Quand je regardais tantôt les 55 ans, là, c'est là qu'il y a le plus de femmes qui vivent de la pauvreté. Ça fait qu'il y a des façons de travailler avec ces gens-là qui sont différentes, je suis convaincu.

Et ça me fait juste... Parce qu'on a ouvert quelque chose tantôt, et, à mon avis, ça se rajoute à la réflexion. Si on veut accueillir les primodemandeurs puis rendre ça obligatoire, il faut être certain que l'accueil va bien se faire puis qu'on... parce qu'on parle de gens vulnérables. Ça fait que ces primodemandeurs-là, ils ne sont pas tous pareils, ils vivent des situations différentes, et, concernant les femmes et les femmes plus âgées, il y a vraiment un enjeu à prendre en considération. Et, avant d'aller sur ce que le ministre disait tantôt, de dire : Les primodemandeurs, s'ils ne participent pas à la première rencontre, on pourrait retenir le chèque, bien, je peux vous dire que, si on parle de femmes vivant des situations difficiles comme je mentionnais tantôt, là, de logement, de nutrition, de... problèmes conjugaux, problèmes de violence ou problèmes avec les enfants, retenir un chèque, ça a un impact majeur, majeur, qui peut amener des conséquences graves, à mon avis, sur la santé de la personne.

Je reviens là-dessus. Pour moi, tout le débat qu'on vient de faire, ce n'est vraiment pas une perte de temps. On vient juste de s'apercevoir qu'avancer sur l'idée de l'accueil obligatoire... O.K., je pense qu'on peut faire quelque chose dans ce sens-là, mais il faut vraiment prendre ça comme il faut puis l'analyser comme il faut pour s'assurer que cet accueil-là soit bien fait puis qu'on ait les capacités de bien le faire, sinon on joue avec la santé de certaines personnes. Puis je reviens, moi... Pour les cas que j'ai vus, là, arriver à des sanctions auprès de ces femmes-là, avec les montants d'argent qu'on leur verse, pour essayer de se... pour la survie, arriver avec des sanctions, moi, je vous le dis, là, on joue avec le feu. Ça fait que ce n'est vraiment pas une perte de temps, là, ce qu'on vient de faire, de discuter de cette problématique-là, et ça devrait influencer la suite de nos discussions, si on veut avancer sur l'accueil, puis les primodemandeurs, puis... La nécessité pour le ministre d'offrir à ces primodemandeurs-là, dépendamment de la situation qu'ils vivent, que ce soit une femme, une femme plus âgée, ou un jeune homme, ou... il faut qu'ils soient accueillis comme il faut puis qu'on puisse les intégrer comme il faut.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre.

• (11 h 50) •

M. Blais : Je pense, M. le Président, que l'expression «perdre le temps», là, que j'ai utilisée tout à l'heure n'était pas parlementaire. En tous cas, là... Je crois que je l'ai reprise, même, parce que mon collègue d'en face l'a utilisée, bon, je l'ai reprise peut-être à un autre escient. Mais je veux quand même bien cadrer la discussion, qu'on se comprenne bien.

Le député nous dit : Écoutez, moi, j'ai des préoccupations, est-ce que les ressources vont être là pour les accueillir, tout ça. Je trouve que c'est une préoccupation légitime et je suis prêt à répondre à ces questions-là. Le député de Drummond—Bois-Francs a la même préoccupation depuis le départ : C'est bien beau, mais est-ce qu'on va pouvoir répondre à la demande correctement? J'ai essayé de répondre à ses préoccupations puis je peux continuer.

Bien sûr, la députée de Gouin ne s'en cache pas, hein, elle l'a dit dans un journal cette semaine : Moi, je m'en vais en commission parlementaire pour faire de l'obstruction, hein, elle l'a dit explicitement : Je m'en vais là pour faire de l'obstruction. Quand je regarde mes collègues de l'opposition officielle, j'ai l'impression qu'on fait le même type de travail, c'est un constat que je fais, qu'on ne parle plus... Si on veut répondre à des questions du type... aussi légitimes que : Est-ce que les ressources vont être là?, on va travailler là-dessus, mais, comme je sais que, de toute façon, j'ai beau répondre à ces questions-là, on n'avancera pas plus, c'est pour ça que j'ai utilisé l'expression, hein : J'ai l'impression qu'on perd notre temps.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski, vous êtes toujours sur votre temps de parole. Est-ce que ça va pour l'instant? Il vous restera quand même un peu de temps. M. le député de Richelieu, à vous la parole.

M. Rochon : Moi, M. le Président, je trouve ça plutôt noble de faire obstruction à un projet de loi qui aurait pour effet de détériorer le sort de personnes qui vivent déjà d'une extrême maigre pitance, je trouve ça plutôt noble. Cela dit, ce n'est pas l'exercice auquel nous nous livrons, pas au sens parlementaire du mot «obstruction». Nous tentons de trouver avec le ministre des amendements à ce projet de loi pour qu'il n'ait pas, justement, l'effet de détériorer encore davantage le sort de personnes vivant dans des conditions déplorables, à la situation financière tout à fait, là, impensable.

J'entendais tout à l'heure ma collègue de Fabre vanter les mérites des organismes communautaires travaillant auprès des femmes. J'imagine alors qu'elle n'aura aucun mal, et que c'est dicté par la cohérence, à appuyer l'amendement que j'ai soumis à cette commission à l'effet qu'aucune disposition du présent chapitre ne puisse aller à l'encontre de l'article 28 du plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les hommes et les femmes, soit de soutenir un ensemble d'activités offertes, ces activités, par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes. Si elle veut être cohérente avec le discours qu'elle a tenu ici, avec les hommages vibrants qu'elle a rendus aux organismes voués à améliorer l'employabilité des femmes, elle ne peut, il me semble, que souscrire à mon amendement. Si elle ne le fait pas, je lui souhaite d'avoir de bonnes explications.

Je veux revenir sur ma circonscription, M. le Président. Cela m'a trop étonné d'entendre tout à l'heure le ministre, inspiré par les statistiques que son entourage lui a tendues, parler presque de plein emploi à Sorel-Tracy.

La population de la circonscription de Richelieu, elle est composée de celle de la MRC Pierre-De Saurel, elle-même concentrée dans la ville de Sorel-Tracy, et la situation y apparaît plus difficile que dans le reste de la Montérégie — j'espère qu'on prend des notes, de l'autre côté. La population est plus âgée, s'accroît plus lentement qu'ailleurs en Montérégie. Le profil socioéconomique est aussi moins avantageux, il est moins avantageux. Avec un taux d'emploi moins élevé, le nombre de prestataires de l'assurance-emploi et de l'aide sociale y est important.

Et, je me raccroche à mon amendement, les femmes n'échappent pas à cette réalité, et sur le plan économique elles sont moins avantagées. Or, on sait à quel point la situation économique peut avoir une influence sur les autres aspects de la vie. Elles sont plus nombreuses, les femmes, chez moi, à être sans emploi, et celles qui travaillent, bien, elles le font majoritairement dans les secteurs moins bien rémunérés : certains services, hébergement, restauration, commerce de détail. Elles sont moins nombreuses à travailler à leur compte. Elles sont, chez moi, par ailleurs, plus instruites que les hommes, surtout chez les jeunes.

Mais là où l'écart est le plus marqué, c'est dans les salaires, M. le Président. Elles font en moyenne 70 % du salaire des hommes, et même celles qui occupent des emplois bien rémunérés voient leur rémunération demeurer largement inférieure. Si on avait une analyse différenciée selon les sexes, là, on apprendrait... on en tiendrait compte, je l'espère, en établissant des programmes comme Objectif emploi puis en réfléchissant à améliorer le sort des personnes.

Alors, la situation économique, évidemment, a une incidence sur les autres conditions de vie, c'est ce que me confirment à chaque jour les femmes que je rencontre. Et puis, savez-vous, j'ai organisé, il y a quelques mois, un forum sur la condition de vie des femmes dans Richelieu, auquel forum ont pris part plusieurs femmes engagées dans des organismes communautaires, et en tête de liste des difficultés qu'elles rencontrent il y a l'isolement, un isolement, une exclusion, qui viennent de plusieurs sources et prennent plusieurs formes, qui sont souvent interreliées.

Puis un des aspects de cet isolement, c'est l'accès à des places en CPE, qui est rendu plus difficile pour les femmes démunies avec la récente centralisation des listes. Saviez-vous ça, M. le Président? Avant, quand les femmes appelaient au CPE, le contact direct avec la personne qui répondait permettait d'identifier celles qui étaient plus démunies, sans ressources, en détresse et puis de s'assurer de leur trouver non seulement une place dans le CPE, mais souvent de référer cette personne-là à d'autres ressources. Alors, avec les listes centralisées — c'est ça qui arrive quand on centralise, quand on régionalise — on ne tient plus compte des particularités locales. Avec les listes centralisées, les femmes remplissent des formulaires, n'indiquent pas nécessairement leurs difficultés, ne serait-ce que parce qu'elles ne savent pas les nommer, et peut-être aussi parce qu'elles ont honte de les exprimer. Résultat : des CPE se retrouvent avec des places réservées aux enfants vivant dans des familles démunies qui sont vacantes, alors que les intervenantes savent que ces familles existent dans leur voisinage immédiat.

Une autre forme d'isolement se situe sur le plan de l'accès au logement. Les femmes pauvres, surtout si elles sont monoparentales, ont difficilement accès à un logement convenable à un prix raisonnable, ce qui mène certaines femmes à opter pour une forme d'itinérance. Elles ne vivent pas en permanence dans la rue, mais elles vont coucher occasionnellement dans un parc, une maison abandonnée, le divan d'un ami, une chaise à l'urgence, dans une voiture...

Il faut se soucier de la pénible situation de plusieurs femmes au Québec. Encore une fois, M. le Président, je veux exprimer l'espoir réel que ma collègue de Fabre, qui a complimenté l'action des organismes communautaires dédiés à la situation des femmes, appuie mon amendement, ce serait l'élémentaire cohérence, amendement que je cite à nouveau pour conclure : «Aucune disposition du présent chapitre ne peut aller à l'encontre de l'action 28 du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes[...], soit de soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes.» Voilà, M. le Président.

• (12 heures) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Il vous restera encore quelques minutes.

Alors, je suis prêt à entendre un autre intervenant ou une autre intervenante. Oui, M. le député de Drummond—Bois-Francs.

M. Schneeberger : J'aurais une question plutôt sur le plan juridique, là, peut-être avec les juristes en arrière du ministre, au niveau de la recevabilité de l'amendement, étant donné que l'amendement fait le lien avec un plan d'action, qui n'est pas une loi, et aussi au niveau d'un plan qui est temporel, c'est-à-dire qui se finissait en 2015. Est-ce qu'au niveau légal on peut déposer un amendement qui fait un lien comme ça? Juste pour savoir si, admettons qu'on vote pour, ça va passer, là, légalement, sur le point de vue juridique.

Le Président (M. Cousineau) : Dans le cas de... À la question que vous soulevez, M. le député de Drummond—Bois-Francs, c'est nous ici qui décidons si c'est recevable ou pas, un. Et, deux, c'est au début qu'on doit signifier, là, qu'on est d'accord ou pas avec un amendement, qu'on soulève la recevabilité ou pas. Là, on est très, très, très engagés dans la discussion...

M. Schneeberger : Oui, mais je n'ai pas pris la parole encore, là.

Le Président (M. Cousineau) : Pardon?

M. Schneeberger : Je n'avais pas pris la parole encore.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, je sais, mais, sur l'amendement, on en discute depuis maintenant plus d'une heure, là.

M. Schneeberger : O.K., c'est bon.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, c'est juste un petit rappel que c'est nous qui décidons de la recevabilité d'un amendement ou pas. Et puis, deuxième chose, vous devez soulever ça au début. D'accord?

M. Schneeberger : O.K., parfait.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, ça n'empêche pas les... Si jamais il y a une question qui touche les juristes en arrière, bien, ils vont peut-être, dans les coulisses en arrière, vous dire que vous avez raison, M. le député, ou pas raison, mais là, pour l'instant, on s'en tient à ça.

M. le ministre.

M. Blais : Je ne suis pas juriste, Dieu m'en garde, je suis un humaniste, alors... Mais deux points.

Donc, on n'est pas allés très loin là-dessus simplement parce que l'amendement, il est, disons, doublement superfétatoire, la première parce qu'il s'adresse à une politique passée, hein, donc qui est terminée, et, deuxièmement, il y a une règle juridique, c'est ce qu'on me dit, là, derrière, une règle juridique qui veut qu'on ne dit jamais qu'on va obéir à une politique du gouvernement simplement parce qu'on est en train de rédiger une loi. Et, si à chaque fois qu'on rédige une loi on dit qu'on va respecter les politiques du gouvernement, des fois on ne l'écrit pas, est-ce que ça veut dire qu'on pourrait ne pas respecter les politiques du gouvernement?

Donc, dans la hiérarchie des droits, on n'introduit pas des amendements de ce type-là. Mais je ne pense pas que c'est suffisant, là, compte tenu qu'on a eu beaucoup d'amendements de cette nature-là, qui du point de vue juridique avaient une teneur, là, assez faible.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Ça va, M. le député de Drummond—Bois-Francs?

M. Schneeberger : Oui, oui, c'est beau, c'est parfait.

Le Président (M. Cousineau) : Ce n'est pas un reproche, là, c'est une question de procédure et puis...

M. le député de Richelieu. Il reste combien de temps pour M. le député de Richelieu? Trois minutes quelques secondes, M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Je ne les utiliserai pas pleinement, j'y vais juste pour un clin d'oeil au ministre, là, qui vient de nous parler d'un plan gouvernemental maintenant échu. J'aime qu'il le souligne, ça me permet de réclamer de sa part, de la part du gouvernement qu'il aille faire ses devoirs. C'est plutôt triste qu'il n'y ait pas eu renouvellement du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes, hein, plan 2011‑2015. Le suivant, on va l'attendre pendant combien d'années encore? À moins que la question ne préoccupe plus le gouvernement. Ce serait, si c'était le cas, au grand désespoir, j'en suis persuadé, de la députée de Fabre.

Alors, peut-être le ministre saurait-il nous dire à quel moment, s'il a cette information, sera présenté le nouveau plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes, parce que, dans ce cas comme dans celui du plan de lutte contre la pauvreté, nous sommes en attente et impatients.

Par ailleurs, si ce qui l'ennuie est la référence au plan, on peut peut-être y aller d'un amendement pour se concentrer sur le soutien aux activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes, sans nommer le Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes, malheureusement échu parce que ce gouvernement n'en a pas présenté d'autres depuis.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement déposé par M. le député de Richelieu? M. le député de Rimouski. Il vous reste 10 minutes.

M. LeBel : Moi, je pense qu'on aurait pu éviter tout ça si on avait fait ce qu'il fallait, là, c'est-à-dire intégrer le programme qu'on est en train de travailler à un plan d'action adopté. Je rappelle ce que je disais au début : Il y a une loi-cadre, il y a un plan d'action, puis les programmes doivent s'attacher au plan d'action. On est en train de faire un programme sans qu'il y ait de plan d'action, ça fait qu'on travaille à l'envers, comme si on trouve moins important le plan d'action. Si on avait fait ça, on se serait attachés à l'ensemble de l'action gouvernementale, mais on a décidé de le faire autrement.

Là, on a parlé de la pauvreté des femmes. Il y a un groupe qui s'appelle le réseau québécois d'action pour les femmes, on parle d'impact de la pauvreté des femmes, un «risque élevé de dépendance physique et/ou psychologique à certains médicaments et maintien des femmes dans les conditions de vie qui entretiennent la détresse psychologique et les problèmes de santé. Occasion pour l'industrie pharmaceutique de faire fortune [souvent]. Augmentation du sentiment de culpabilité, de faible estime de soi et d'impuissance chez les femmes», qu'est-ce qui amène souvent... «Mesure menant le plus souvent à des emplois qui maintiennent les personnes dans la pauvreté — on parle des femmes.

«Coupures dans les programmes d'aide — sécurité du revenu, assurance-emploi; coupures dans les soins de santé et diminution des services au détriment des femmes — usagères, travailleuses du réseau public, aidantes, bénévoles; manque chronique de logement social — des listes attente à ne plus finir; [et] implantation [d'un] régime d'assurance médicaments [au] Québec qui n'exempte toutes les personnes pauvres du paiement d'une franchise mensuelle lors de l'achat de médicaments.» C'est un extrait d'un avis du réseau québécois d'action pour les femmes.

Je rappellerai que, dans le milieu communautaire, là, c'est une observation, mais, tu sais, on a beaucoup... depuis deux ans, là, avec l'austérité, on a comme frappé pas mal l'action communautaire, et, dans le milieu communautaire, c'est beaucoup les femmes qui y travaillent. Ça fait que, quand on a... Comme cet été beaucoup de groupes communautaires ont fermé leurs portes parce qu'ils n'arrivaient pas au financement. J'ai des groupes communautaires qui travaillent auprès des handicapés qui auront des coupures importantes dans la région du Bas-Saint-Laurent. Souvent, quand on fait ces coupures-là, les personnes qui perdent leur emploi, c'est très, très souvent des femmes.

Si on parle, après, d'intégration, si je prends la logique du ministre, là, il y a une rencontre d'évaluation, puis on essaie de les intégrer au marché du travail existant, pour les femmes il y a des problématiques assez particulières. Souvent, les femmes qui sont à l'aide sociale, qui ont besoin d'aide sociale, c'est des femmes monoparentales, ça fait qu'on a besoin de prendre en considération des mesures travail-famille pour permettre à ces femmes-là d'intégrer le marché du travail, bref, des façons de faire différentes, qui doit être capable à être livré par le ministère puis par les gens qui vont accueillir ces personnes-là.

Dans ce sens-là, je rappelle que la meilleure façon, puis je voyais ça dans d'autres analyses, là, sur l'impact de la loi pour lutter contre la pauvreté, qui a déjà 12, 13 ans, ça va assez rapidement... L'élément majeur qui avait fait le succès de la loi puis des plans d'action qui ont découlé, c'est la régionalisation de l'action avec des partenaires en région, avec des fonds. Et ça, notamment pour les femmes, je pense que ça a eu des impacts majeurs.

Et on ne peut pas comme travailler sur un programme emploi puis accueillir ces gens-là, les primodemandeurs, les gens qui ont des problématiques d'emploi ou qui doivent vivre avec la pauvreté... J'ai de la misère, je ne vois pas la vision large du ministre, là-dedans, puis du gouvernement. On travaille sur un programme pointu, on parle de primodemandeurs, de personnes qui viennent accueillir, puis là qu'ils vont essayer d'intégrer ce... mais on ne voit pas l'action plus large qui doit être faite pour lutter contre la pauvreté. Et c'était ça, la force des plans d'action. Et, je rappelle, là on est en train de faire un programme sans prendre en compte le plan d'action.

• (12 h 10) •

Ce qu'on est en train de faire là, là, puis on va le faire par d'autres amendements, c'est le noeud de l'affaire, c'est qu'on pense que des sanctions, des sanctions qui pourraient être faites sur des personnes qui vivent avec 704 $ par mois, ça n'a pas de maudit bon sens, on ne peut pas aller couper dans ces... Puis, en contrepartie, si on se disait : Oui, regarde, il n'y aura pas de coupure parce qu'on va les intégrer, c'est sûr qu'on va leur trouver un emploi, c'est sûr qu'on va les intégrer dans la formation, c'est sûr qu'on... Mais, cette assurance-là, on ne l'a pas, on ne l'a pas pour plusieurs raisons. On ne l'a pas parce qu'on n'est pas sûrs que le ministère, actuellement, est organisé pour bien accueillir chacune des personnes. Là, on peut parler de jeunes hommes, d'une vingtaine d'années, puis de femmes plus âgées, de 45, 50, 55 ans, qui ont des problématiques différentes. On pense que le ministère, actuellement, n'est pas équipé pour recevoir ces personnes-là dans les régions du Québec puis prenant en compte, entre autres, des régions plus rurales. Ça fait que, bref, on propose des sanctions sans, en contrepartie, avoir l'obligation, pour le gouvernement, de livrer la marchandise, de ne pas laisser personne tomber, on n'est pas capables d'avoir l'assurance du ministre que personne ne va être laissé tomber.

Je rappellerai, là, que j'avais posé la question, on me disait qu'actuellement... Parce que la première fois que j'avais posé la question au ministre, c'est le ministre qui avait dit : Vous comprenez, M. le député, on n'est pas capables... on n'a pas l'obligation de rencontrer les personnes à l'aide sociale puis actuellement on ne les rencontre pas. Après quelques questions, on s'est aperçus que, oui, il n'y avait pas d'obligation, mais il y avait un processus, un processus un peu compliqué, là, que j'expliquais tantôt, cinq jours, sinon un mois, sinon un rappel par lettre ou par téléphone, mais on ne sait pas exactement comment, on n'a pas de statistiques, là, combien il y en a eu en cinq jours, combien il y en a eu dans le mois, on ne sait pas, on ne peut pas évaluer exactement le processus d'accueil actuel. Tout ce qu'on a, c'est la liste de primodemandeurs. Ça fait qu'on n'est pas capables, actuellement, d'analyser. On sait qu'il y a eu des coupures de postes dans le ministère assez... ça a été assez important comme coupures, et on s'avance sur l'idée qu'il faut maintenant, pour les personnes à l'aide sociale, les obliger à participer, sinon il y a des sanctions. Puis là on vient de rajouter... On va les obliger à venir participer à un accueil d'évaluation puis on lance l'idée que, s'ils ne participent pas à cette rencontre-là, on pourrait couper le chèque au complet, retenir le chèque au complet. Vous comprenez que, là, on nage un peu dans plusieurs hypothèses. Et je rappellerai toujours qu'on parle de personnes qui vivent des situations difficiles puis on parle de gens qui vivent avec 704 $ par mois.

Si on veut avancer, il faudrait aller sur le noeud de l'affaire aussi, là, tu sais, c'est de dire : Est-ce que le ministre est toujours convaincu que les sanctions sont nécessaires? Puis est-ce qu'il était sérieux tantôt en disant que, si la personne ne participe pas à un accueil, qui va devenir obligatoire, on pourrait retenir le chèque au complet? Si on est là-dedans, je vais vous dire, là, on vient de... c'est majeur, là, comme façon de faire. Puis tout ça à partir d'un programme qui se fait indépendamment de la loi-cadre pour lutter contre la pauvreté puis indépendamment d'un plan d'action, qui nous sort du champ gauche — du champ droit, je vais plutôt dire — qui n'a pas de logique puis, en plus, qui n'est pas porté par ce qui a fait le succès de la loi puis de la lutte à la pauvreté au Québec, qui n'est pas porté par une concertation régionale des partenaires, de gens du monde municipal, de groupes communautaires, d'intervenants en économie sociale qui soutiennent, qui travaillent pour soutenir, pour lutter contre la pauvreté. Tout ça est fait indépendamment, indépendamment, qui nous est amené comme, si on parle de sanctions, si tu ne participes pas... en sachant que dans chaque région du Québec il y a des situations bien, bien différentes, on parle de retenir le chèque si tu ne participes pas à une première rencontre. En tout cas, j'ai l'impression qu'on est loin d'avoir une vision globale de la lutte à la pauvreté.

Écoutez, là, on a coupé dans le logement social, c'est difficile pour les gens d'avoir des logements. On a coupé dans les groupes de ressources techniques pour aider les coops d'habitation. On a coupé dans les... on a saccagé nos centres de la petite enfance, qui étaient un outil pour aider à sortir de la pauvreté. On a coupé, on a aboli les structures régionales de concertation, qui notamment travaillaient pour l'égalité entre les hommes et les femmes puis notamment travaillaient pour lutter contre la pauvreté. On a coupé dans l'action de développement rural pour aider, entre autres, les initiatives en milieu rural pour créer de l'emploi, garder nos jeunes en milieu rural. On fait tout ça et on nous arrive aujourd'hui en disant : Bien, on réforme l'aide sociale. Si tu ne participes pas, tu as des sanctions, si tu ne participes pas à une réunion, on coupe ton chèque. Vraiment, on est vraiment loin du grand consensus qui a fait en sorte qu'on avait adopté la loi pour lutter contre la pauvreté avec tous les partis qui étaient présents à l'Assemblée nationale à cette époque-là. Il me semble qu'il faudrait revenir un peu puis discuter du fond des choses. On est en train d'avoir un très grand... un grand recul, au Québec, sur notre façon d'aborder la lutte à la pauvreté.

Puis je le répète, là, la lutte à la pauvreté, tout le monde, tous les collègues ici, autour de la table, des deux bords, je suis convaincu que tout le monde, ils veulent trouver des solutions pour lutter contre la pauvreté. Mais actuellement on est en train de... on prend le problème à l'envers, on commence par un programme, un programme qui en train de se bâtir indépendamment de la vision qu'on devrait avoir sur la lutte à la pauvreté, qui se bâtit tout seul pendant qu'on est en train de travailler sur un plan d'action. Pourtant, dans le plan d'action, il y aurait des éléments, là, qui pourraient nous convaincre d'avancer sur certaines choses, mais on ne le sait pas.

Puis le ministre, souvent, dans les points plus pointus, nous parle des règlements, ce sera aux règlements, ce sera aux règlements. C'est quand on va déposer les règlements qu'on fera l'analyse différenciée selon les sexes, c'est quand on va déposer les règlements qu'on verra les ressources qu'on va donner à chaque CLE dans nos régions, c'est quand on va déposer les règlements qu'on verra, qu'on verra, qu'on verra. Il me semble qu'on joue avec... On est en train de travailler sur un dossier important. Moi... On va continuer à déposer des amendements, on va continuer à poser les questions qu'il faut.

Le Président (M. Cousineau) : C'est tout le temps que vous aviez, M. le député de Rimouski. Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres intervenants concernant la motion déposée par M. le député de Richelieu? M. le ministre, vous voulez réagir?

M. Blais : Peut-être des petits éléments de réflexion, là. Ce qu'il est quand même important de noter, dans Objectif emploi... Donc, je comprends la crainte des collègues qui disent : Est-ce que les ressources sont là? Si les ressources ne sont pas là, ça ne marche pas. Donc, c'est légitime, on va continuer de répondre aux questions là-dessus, mais en autant, bien sûr, qu'on ait l'impression que ça nous permet d'avancer. Mais il faut aussi comprendre qu'Objectif emploi se différencie d'autres programmes qui ont été mis en place dans le monde parce qu'il n'y a pas d'objectif de résultat ferme, vous ne devez pas... vous rentrez à Objectif emploi, vous avez six mois pour trouver un travail, sans ça c'est fini. Si vous ne pouvez pas rencontrer un agent parce qu'il n'est pas là, bien, hein, vous n'aurez pas de coupure, mais vous allez avoir les bonifications, parce que vous êtes dans Objectif emploi. Si ça prend du temps pour vous inscrire, il y a une question de places, qui sait, en formation des adultes, bien, vous ne serez pas coupé par ça, au contraire. On souhaite tous que les ressources soient là, mais ce ne sera jamais à la personne, qui est déjà dans une situation plus fragile, hein, à le subir, si jamais, nous, les ressources ne sont pas au rendez-vous. Mais on souhaite que les ressources soient là.

Donc, c'est important, dans l'approche, parce que très souvent il y a des objectifs de résultat. D'ailleurs, Objectif emploi peut être critiqué parce qu'il n'est pas assez ferme et dur là-dessus, mais moi, je préfère cette approche-là, je pense qu'elle est compatible un peu avec les valeurs québécoises.

Sur la question de ma réflexion cet été, j'ai réfléchi, mais surtout j'ai fait un tour de roue pour regarder quelles sont les autres pratiques dans le monde. Écoutez, il n'y a pas 56 pratiques, puis, s'il y en avait, je vous demanderais, là... pour augmenter la participation. On n'enlève pas la citoyenneté aux gens, on ne les envoie pas en prison. Tout ce que l'on voit dans le monde, c'est qu'il y a une possibilité ou bien de coupure complètement de l'aide sociale jusqu'au moment où la personne se réinsère dans une démarche ou bien des coupures qui sont plus légères comme celles que je recommande. Je ne peux pas faire le tour du monde pour dire exactement, là, toujours quels sont les montants ailleurs, tout ça, mais assez clairement, au niveau des sanctions, on se situerait probablement dans le quintile inférieur, là, en comparaison internationale, en tout cas certainement en bas de la moyenne, tout ce que j'ai vu. Et là, ces pays de sociodémocrates ou pays de, hein, ce que vous voulez, là, il n'y a pas vraiment de différence entre les pays, sociodémocrates ou non, sur cette question-là de l'application de sanctions. Mais ce qui était important, pour moi, c'était d'avoir des sanctions que l'on connaît déjà, qui sont déjà pratiquées au Québec pour les cas de fraude, les mêmes montants, mais que l'on met possiblement si quelqu'un...

Ce que j'ai aussi appris... bien, appris... je le savais, parce que ce que j'ai vu comme chiffres cet été, puis là les chiffres étaient plus probants, c'est que, les sanctions, leur rôle, c'est la dissuasion, c'est de pousser les gens à collaborer puis à participer. Elles sont appliquées assez rarement, quand on regarde, dans la réalité, là, elles sont appliquées assez rarement, mais l'effet, cependant, de dire : Écoutez, oui, il va y avoir quelque chose si jamais vous abandonnez, ça a un effet dissuasif, et donc ça favorise la participation. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement déposé par M. le député de Richelieu?

Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement déposé par M. le député de Richelieu est adopté?

Oui, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : M. le Président, est-ce que vous pouvez procéder au vote par appel nominal?

Le Président (M. Cousineau) : Absolument, M. le député de Saint-Jean. Donc, vote par appel nominal. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Oui. M. Rochon (Richelieu)?

• (12 h 20) •

M. Rochon : Pour.

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

M. Hardy : Contre.

La Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

La Secrétaire : M. Bernier (Montmorency)?

M. Bernier : Contre.

La Secrétaire : M. Polo (Laval-des-Rapides)?

M. Polo : Contre.

Le Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens.

La Secrétaire : L'amendement est rejeté.

Le Président (M. Cousineau) : Donc, l'amendement déposé par M. le député de Richelieu est rejeté.

Donc, nous revenons à l'article principal. Oui, M. le député de Richelieu, vous avez...

M. Rochon : Oui, pour lequel j'aurais un amendement, M. le Président. Il s'agirait d'ajouter, après le premier alinéa, l'alinéa suivant :

«Les dispositions du présent chapitre doivent soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes.»

Le Président (M. Cousineau) : Merci. Donc, nous allons suspendre pour en faire des copies et puis pour voir à la recevabilité de cet amendement.

(Suspension de la séance à 12 h 21)

(Reprise à 12 h 26)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, votre attention, s'il vous plaît, nous reprenons nos travaux. Donc, il y a un amendement qui est déposé par M. le député de Richelieu, qui se lit comme suit : Ajouter, après le premier alinéa, l'alinéa suivant :

«Les dispositions du présent chapitre doivent soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes.»

Alors, M. le député de Richelieu, vous pouvez plaider.

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Oui, M. le ministre.

Question de règlement sur la recevabilité d'un amendement

M. Blais : ...m'éclaircir, M. le Président, sur... Moi, ma lecture, j'aurais une question, là, de recevabilité de cet amendement-là. Il me semble qu'on vient de rejeter un amendement, là, qui est similaire. On a enlevé la première partie, mais l'essentiel est resté. Est-ce qu'il faut... Il faut travailler là-dessus?

Le Président (M. Cousineau) : Oui, alors, puisque vous soulevez la question de recevabilité, M. le ministre, d'accord, nous allons suspendre pour qu'on puisse, nous... Oui?

M. Rochon : Est-ce que je ne peux pas plaider, moi aussi, à ce moment-ci?

Le Président (M. Cousineau) : Non, non. Non, bien, pas immédiatement. Vous pourrez plaider quand je vais revenir avec ma décision. D'accord?

Alors donc, nous allons suspendre. Puis, compte tenu qu'il nous reste trois minutes avant l'heure du dîner, bien, nous allons réfléchir là-dessus durant l'heure du dîner puis nous allons vous revenir à...

Donc, je suspends jusqu'à 14 heures, je crois, c'est ça, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

(Reprise à 14 h 3)

Le Président (M. Cousineau) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration à l'emploi.

Alors, avant la suspension, nous en étions sur une discussion concernant l'amendement déposé par M. le député de Richelieu, à savoir M. le ministre a soulevé une question de recevabilité ou irrecevabilité, là, alors c'est M. le ministre qui a soulevé la question. Évidemment, durant l'heure du dîner, j'avais pensé de vous laisser plaider sur ce point, mais à la commission vous savez qu'on a des juristes, on a des gens qui se penchent là-dessus, et puis on a demandé... j'ai demandé aux gens, à nos juristes de regarder l'amendement précédent qui a été défait au niveau des membres de la commission et l'amendement déposé et puis je suis prêt à rendre une décision. Donc, il n'y a pas de plaidoyer à y avoir. Alors, je vous lis la décision qui a été produite par nos juristes et puis j'en suis tout à fait à l'aise.

Décision de la présidence

La jurisprudence parlementaire a déjà établi que, pour qu'un amendement soit recevable, il ne doit pas avoir le même effet qu'une motion présentée précédemment. Elle a également précisé que l'objet d'un amendement doit être suffisamment différent d'un amendement précédemment rejeté.

Or, en l'espèce, l'objet de l'amendement précédemment rejeté par la commission visait à ce que les dispositions du présent chapitre ne pouvaient aller à l'encontre de l'article 28 du Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2011‑2015, soit de soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes. Bien que le nouvel amendement reprenne une portion complète de l'amendement précédent rejeté, notamment sur l'employabilité des femmes, son objet est suffisamment différent.

Dans ces circonstances, j'en viens à la conclusion que l'amendement est recevable, puisqu'il est suffisamment différent de celui qui a été précédemment rejeté par la commission. Il y a eu de la jurisprudence en 1984, en 1986 et en 2006.

Voilà, donc, c'est la décision du président. C'est recevable. Et puis on ouvre la discussion sur l'amendement déposé par M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Alors donc, vous avez tous et toutes un beau 20 minutes.

M. Rochon : Oui, bon, je ne l'utiliserai pas au complet, en tout cas pas dans l'immédiat, parce que je veux entendre le ministre. Je ne détesterais pas non plus entendre la députée de Fabre.

Je suis content que vous jugiez recevable l'amendement, d'autant plus content que cet amendement, il a été rédigé en tenant compte de la principale objection formulée par le ministre relativement à l'amendement qui l'a précédé. Vous vous souvenez de l'amendement qui l'a précédé? Celui-là, il référait au Plan d'action gouvernemental pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2011‑2015, disant qu'aucune disposition du présent chapitre, celui que nous étudions, ne pouvait aller à l'encontre de ce plan, ce plan visant à soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes. Le ministre a eu le réflexe, sans doute parce qu'il n'est pas encore tout à fait, tout à fait, tout à fait un politicien classique, de nous dire : Hé! ça ne marche pas, ça, puisque le plan d'action auquel vous référez, le plan d'action gouvernemental auquel vous référez — il est de ce gouvernement, il est ministre, il est au Conseil des ministres — il est échu depuis 2015. Plat aveu, M. le Président, plat aveu. Le ministre met ainsi en lumière le fait que ce gouvernement n'a pas pensé à renouveler le plan d'action pour l'égalité entre les femmes et les hommes, pas davantage qu'il n'a renouvelé, jusqu'ici, le plan de lutte contre la pauvreté. Bon, c'est bien, le ministre le souligne, le souligne.

Cela dit, puisque, ai-je compris, il ne s'agissait que de sa seule objection, j'imagine que lui et sa collègue de Fabre, que nous avons entendue ce matin louanger le travail des... Puis elle a eu raison de le faire, là, je n'ironise pas, moi, je salue ça puis j'abonde dans son sens, il y a des organismes communautaires qui font du travail fabuleux sur la question de l'égalité entre les femmes et des hommes. Alors, j'imagine qu'elle et le ministre ne pourront que souscrire à cet amendement. S'ils ne le font pas, devant le constat que nous semblons tous, autour de cette table, tant du parti ministériel que des oppositions, partager à l'effet qu'il y a du chemin à faire pour les femmes, notamment au plan du traitement salarial, bien là on va se poser des questions. On va se dire : Comme ça, le projet de loi n° 70, il ne doit pas veiller à... contrecarrer tout le travail qui se fait pour que les femmes rattrapent les hommes sur le plan salarial. Mais j'imagine que, là, je fabule et que le ministre vous dira — je passe par vous, M. le Président — vous dira, dans 30 secondes, que nous pouvons déjà passer au vote et puis qu'ils appuient cet amendement. Terminé, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. M. le ministre.

M. Blais : Non, je n'ai pas de commentaire pour le moment.

Le Président (M. Cousineau) : Pas de commentaire, M. le ministre? D'accord. Je suis prêt à entendre un autre intervenant. M. le député de Saint-Jean, sur l'amendement déposé par M. le député de Richelieu.

• (14 h 10) •

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Au fond, essentiellement, cet amendement-là fait juste rappeler qu'on doit porter une attention particulière aux femmes, quand on parle des questions d'employabilité, et qu'il y a un certain nombre de services, d'activités qui sont offerts par des organismes, et nous, au fond, on veut que, l'article, là, 28, que mon collègue de Richelieu, à la session passée, avait qualifié d'article fondateur du programme Objectif emploi, bien, au fond, le programme Objectif emploi tienne compte de cette particularité. Donc, c'est le but, essentiellement, de... c'était le but du dernier amendement de mon collègue, au fond. Et, suite aux commentaires du ministre, mon collègue a cru bon, finalement, d'y aller droit au but et de dire l'objectif que nous visons.

Je vois mal comment le gouvernement peut être contre cet élément. Peut-être que ce n'est pas la bonne formulation, peut-être qu'il y a des mots qu'il faudrait changer, peut-être qu'il faut... Ça, vous savez, M. le Président, nous avons une équipe réduite, quand même, à l'opposition officielle, nous avons notre recherchiste, Karine, mais le ministre a une équipe, là, de légistes, de gens autour. Donc, si ce n'est seulement que là-dessus, je crois qu'on est capables de travailler tout le monde ensemble puis d'arriver à un terrain d'entente. Mais nous, on considère que c'est important, dans ce projet de loi ci, de rappeler l'importance d'avoir une attention particulière pour les femmes, sachant que, même s'il y a beaucoup d'efforts ici et là de par le temps, bien, c'est encore malheureusement les femmes qui, en nombre, sont les plus démunies de notre société.

Donc, si le gouvernement est sérieux dans sa volonté d'aider les gens à s'en sortir, je crois que c'est une bonne mesure. Il y a des organismes qui existent déjà, on les connaît, on en a fait la nomenclature plus tôt ce matin. Donc, c'est le but, essentiellement, de l'amendement.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce que... M. le ministre.

M. Blais : M. le Président, j'écoutais attentivement parce que j'essaie de comprendre la portée, là, de la proposition ici, là. Il semble qu'il y a deux interprétations possibles. Il y a en peut-être d'autres, mais il y en a deux que je comprends.

Il y a une interprétation qui dit : Écoutez, on doit faire attention, dans l'évaluation de la situation, à la situation des femmes puis d'avoir une lecture plus fine. Bon, alors, si c'est ça, je veux dire, c'est déjà dans le projet de loi, parce qu'on parle vraiment d'un plan d'intervention personnalisé, donc qui tient compte des situations des femmes, des hommes, des immigrants aussi, donc, de la complexité de leur situation. Si c'est ça, donc, je ne peux pas être en accord, parce que je trouve qu'on a déjà ce qu'il faut, là, au niveau des principes pour dire : Il faut vraiment tenir compte et avoir un service qui soit le plus personnalisé possible.

L'autre interprétation possible, qui est tout à fait différente, c'est : Il faut, je pense, maintenir le niveau de financement ou même l'améliorer ou... des organismes en employabilité, parce qu'il y a eu ces discussions-là, je pense, un peu plus tôt. Là, je ne mettrais pas ça dans un projet de loi. Si c'est ce qu'on me demande, dire : Dans un projet de loi, il faut dire qu'on va maintenir le niveau de financement de quiconque... Il est préférable toujours de regarder la performance à la fois de nos propres services, la performance aussi des organismes en employabilité. Je rappelle quand même qu'Emploi-Québec, là, subventionne 399 organismes partenaires en employabilité. On a fait des efforts intéressants cette année, on augmenté de 3,5 %, je crois, 3,5 %, oui, les budgets de tous ces organismes-là, pour montrer l'importance que l'on accorde à Objectif emploi puis l'encadrement. Mais je ne suis pas prêt, si c'est bien la bonne interprétation, à dire : Bien, voilà, ça, c'est pour toujours, ça va être financé de cette façon-là, ou encore plus. Je ne pense pas que c'est la place d'un projet de loi, là, pour prendre ce type d'engagement là. Ce ne serait pas une bonne gestion des fonds publics, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Je crois que les mots ont un sens. Il est écrit dans l'amendement : «Les dispositions du présent chapitre doivent soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes — on ne les nomme pas — qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes.» Je crois que c'est assez large pour justement ne pas aller dans le pointu comme le ministre semble avoir des craintes. Et effectivement je crois qu'il a tout à fait raison que ce n'est pas dans un projet de loi qu'on doit nommer tel ou tel organisme qui doit être financé à telle hauteur puis... Premièrement, un projet de loi, une loi vit sur plusieurs années. Ce serait même, je m'excuse de l'expression, mais se tirer dans le pied, de dire : On va donner tant d'argent à tel organisme, quand on sait qu'une loi peut n'être seulement réouverte que dans... on ne sait pas, là, il y a des lois qui sont réouvertes plus fréquemment, mais ça peut être dans 10 ans, 20 ans, donc, finalement, pour l'organisme, ça représenterait moins d'argent, avec l'évolution de l'inflation, etc. Donc, ce n'est pas de ça qu'il est question.

Ce qu'il est question, c'est un ensemble d'activités, un ensemble d'activités, c'est-à-dire d'avoir, on pourrait dire, une offre d'activités... Quand on parle d'activités, là, ce n'est pas... je ne parle pas, là, des activités, là, comme... un sens qu'il peut y avoir du mot mais, c'est-à-dire, des services, services-conseils, d'accompagnement, etc., donc d'avoir une attention particulière, oui, comme le ministre a mentionné dans sa première interprétation qu'il nous soumettait, c'est-à-dire avoir une attention particulière à la réalité que les femmes peuvent avoir, etc.

Comme le ministre l'a dit, il y a un accompagnement personnalisé. Donc, qui dit accompagnement personnalisé dit : Nous allons tenir compte des particularités des gens. Je peux comprendre ça, effectivement. Mais comment ça va se faire, par quel organisme, etc.?

Donc, nous, ce qu'on dit, c'est : Est-ce que le projet de loi peut prévoir que, dans le cas des femmes... On dit «les femmes» parce que, dans le cas des jeunes, qui est, disons... même si on peut avoir des jeunes femmes, mais, dans le cas des jeunes, le ministre a annoncé en conférence de presse et a répété ici à plusieurs égards que, pour les jeunes, c'était d'emblée dans les carrefours jeunesse-emploi que les jeunes pourraient avoir des services. Donc, nous, ce qui nous questionne, c'est que... Dans le cas des jeunes, c'est clair, les carrefours jeunesse-emploi, même si un certain nombre de carrefours jeunesse-emploi, bon, ne se sont pas encore — à moins que ça s'est fait cet été, mais ça m'étonnerait — entendus tout à fait avec le gouvernement ou avec le ministre. Dans le cas des femmes, qu'est-ce qui arrive?

On a eu ce débat-là sur les personnes immigrantes, le ministre nous a dit certaines choses, certains éléments, on pourra y revenir éventuellement, mais là on essaie d'avancer le plus qu'on peut dans le projet de loi puis dire, bon : On peut-u régler des questions une après l'autre, donc la question, là, nous, qu'on voulait traiter par l'amendement précédent? Et là on s'est dit : On va enlever toute référence au plan d'action, etc., pour ne pas faire diversion, si on peut dire, dans l'amendement, parce qu'effectivement, le ministre l'a dit, le plan d'action peut changer, l'action peut changer de numéro, puis tout ça, donc, dans la loi, ce n'était peut-être pas habile, peu importe. Donc, on enlève ça, on va droit à l'essentiel. Nous, ce qu'on dit, puis l'amendement est clair : Soutenir une offre de services, au fond — «soutenir un ensemble d'activités», c'est de ça qu'on parle — par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes, donc, on suppose, des organismes qui ont cette expertise-là.

Est-ce que ce n'est que les 16 organismes? Non. C'est ces 16 organismes là, ça peut être d'autres organismes qui vont développer un créneau spécialisé pour les femmes. Ça peut être aussi... Si, les 16 organismes, il y en a d'autres qui se créent ou certains de ces 16 là disparaissent, peu importe... On n'est pas là-dedans, là. On a donné cet exemple-là, on en a parlé parce que... c'est pour montrer justement l'importance que le ministre doit porter à cette question-là, puis que ça nous démontre qu'on voulait avoir davantage de certitude de la volonté du gouvernement et du ministre pour agir dans ce sens-là, voyant, dans les faits, qu'il y a ce problème-là pour les organismes, là, sur la table. Ça fait qu'on s'est dit : S'il y a déjà ce problème-là, qui qui nous dit que, dans un an, deux ans, cinq ans, 10 ans, on pourrait décider... ce n'est plus important, de s'occuper des femmes, avoir des services dédiés pour les femmes en employabilité, et ce sera...

Donc, le ministre ne peut pas être contre ça, je crois, là. Donc, c'est... Et là je le redis, M. le Président : Si c'est les mots, si c'est l'ordre, si ce n'est pas au bon endroit, on peut tous travailler là-dessus. Mais je crois que l'important, et c'est le message qui est lancé, c'est avoir une offre de services vraiment spécialisés pour répondre aux besoins des femmes, offerts dans des organismes qui ont une expertise dans le domaine ou qui ont un service, là, particulier pour les femmes.

• (14 h 20) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre. Ça va, M. le ministre?

M. Blais : Ça va. Je pense que ma collègue, peut-être...

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme la... par alternance, si vous permettez, M. le député de Richelieu. Mme la députée de Fabre.

Mme Sauvé : M. le Président, je veux revenir évidemment sur l'amendement et sur mon propos précédent ce matin. Je veux bien réitérer que, l'intervention que j'ai faite, l'intention, c'était de démontrer que le soutien en termes d'accompagnement aux femmes était déjà présent, donc implicite, et donc il n'y avait pas la nécessité d'ajouter un amendement.

Ceci étant dit, je réitère qu'il y a les ressources, l'expertise qui existent déjà, qui sont soutenues et reconnues, et c'est le but de mon propos, mais je veux aussi revenir sur... Parce que la loi, qui est sur l'adéquation entre le marché du travail, bien sûr... fait en sorte qu'on doit travailler à l'accompagnement des personnes vers un succès auprès du marché du travail, il y a une priorité qui est donnée, et qui inclut l'accompagnement aux femmes, et ce sont les clientèles sous-représentées présentement sur le marché du travail. Et je veux parler des jeunes, des primodemandeurs et des personnes immigrantes, qui vont représenter, à peu de chose près, en 2021, pour les jeunes, plus de 50 %, autour de 57 % et, les personnes immigrantes, 17 %. D'ailleurs, ce sont des priorités, en termes de priorités de clientèle basées sur la sous-représentation, qui étaient très présentes dans la stratégie Tous pour l'emploi de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale du gouvernement précédent.

Alors, tout ça pour mentionner que la préoccupation accompagnement des femmes, elle est présente. Le propos que je veux ramener, c'est que l'expertise, elle est là, les femmes y ont accès, c'est implicite, il n'y a pas la nécessité d'y aller vers l'amendement, bien que ça demeurera une préoccupation, mais il y a une préoccupation à donner aussi aux clientèles qui sont sous-représentées sur le marché du travail. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Fabre. M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Vous savez, M. le Président, un gouvernement, avant de prendre une décision, avant de soumettre à l'ensemble des parlementaires un projet de loi puis de se soumettre, avant ça, à des consultations, il a le devoir, il me semble, puis ça doit être l'avis de bien du monde, de faire une analyse fine de la situation, fine, pas une analyse grossière, pas une analyse générale. L'analyse différenciée selon les sexes, ça, c'est une analyse fine. Les groupes de femmes demandent ça depuis des années, des années et des années, puis il y a de la résistance à l'égard de ça.

Et ça me permet, ce propos, de revenir sur quelque chose que je n'oublierai pas de sitôt, c'est-à-dire, au moment où je faisais remarquer, ce matin, au ministre l'absence physique d'agents et d'agentes d'aide sociale au bureau de Sorel-Tracy, la réplique qu'il m'a faite que l'emploi, à Sorel-Tracy, ce n'était, en quelque sorte, pas un problème. Et là il m'a sorti des statistiques, bon, il y avait de l'emploi, il y avait de l'emploi, il y avait de l'emploi, M. le ministre, c'est ça que vous avez dit, parce que le ministre référait non à des statistiques pour Sorel-Tracy, mais à des statistiques pour l'ensemble du territoire de la Montérégie, autre analyse non fine, grossière au sens de ne tenant pas compte, là, de particularités importantes. Et ça, ça peut mener à des décisions très préjudiciables aux gens.

Les agents et agentes d'aide sociale qui travaillaient au bureau de Sorel, ils et elles sont rendus majoritairement où, toutes et tous? À Saint-Hyacinthe. Bien, savez-vous quoi? Le marché de l'emploi est bien plus favorable à Saint-Hyacinthe qu'à Sorel-Tracy. Puis on les a envoyés là-bas, avec pour résultat que les prestataires, quand ils arrivent au bureau de Sorel, ils ont une petite table, un téléphone, ils composent un numéro puis ils parlent à l'agent ou l'agente qui est à Saint-Hyacinthe.

Ça, là, ce sont des décisions qu'on prend quand on analyse grossièrement des situations. On s'est dit, austérité oblige : Sauvons du fric, faisons travailler tout le monde aux mêmes endroits, parce qu'il n'y a peut-être pas que Saint-Hyacinthe où les gens ont été relocalisés. Mais est-ce que le gouvernement en sauve réellement, vous pensez, vous? Ces fonctionnaires, ils doivent se déplacer, je me demande si on ne leur verse pas une allocation de transport. Je me pose la question, ça ne m'étonnerait pas que ce soit le cas. Et, d'autre part, combien, faisant cela, de prestataires d'aide sociale qui auraient pu en effet sortir du régime d'aide sociale et aller vers des études, aller vers l'emploi, aller acquérir des connaissances... combien d'entre eux ne le feront pas parce qu'ils n'auront pas eu cette conversation vivifiante, là, avec un agent ou une agente qui aura su les motiver?

C'est dans le même esprit qu'on amène, qu'on apporte cet amendement-là à l'effet que le chapitre que nous étudions doive «soutenir un ensemble d'activités offertes par des organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes», parce que l'on sait, là aussi, en termes d'emploi et de marché du travail, que c'est plus difficile pour les femmes que pour les hommes. N'en pas tenir compte, bien, il me semble que c'est manquer à notre devoir de femmes et d'hommes politiques. On est là pour ça, là, tenir compte de particularités fines, importantes.

Alors, c'est essentiellement ce que j'avais à ajouter. Et je sais, malheureusement, que ça ne convaincra ni le ministre ni ses collègues du parti ministériel, c'est le signal qu'ils ont donné il y a un instant, mais je ne crois pas qu'ils aillent dans la bonne direction. Je maintiens que les politiques, là, mur à mur, là, c'est dommageable pour le Québec, ses régions et son monde.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. D'autres interventions concernant l'amendement déposé par M. le député de Richelieu? M. le député de Rimouski.

• (14 h 30) •

M. LeBel : Le problème qu'on fait face, là, puis, avec les amendements, les questions qu'on pose démontrent cette problématique-là, c'est exactement ce que je disais ce matin, c'est qu'on n'a pas bien ordonné notre réflexion sur la lutte à la pauvreté. Le gouvernement arrive avec un programme avant même qu'un plan d'action ait été comme développé et où on a consulté les gens, où on a adopté... un plan d'action qui est relié à une loi-cadre qu'on a comme... qui devrait être renouvelée. Des cibles devraient être redonnées, on devrait se redonner des cibles, cette loi-là. C'est ce qui était prévu à l'intérieur même de la loi, il y avait un article de la loi qui disait qu'après 10 ans on devrait l'évaluer et se redonner des cibles, ce qu'on n'a pas fait. Ça fait qu'il y a une loi-cadre où les cibles sont obsolètes, mais là on devrait changer... on devrait être ailleurs. Il y a un plan d'action qui n'est pas terminé, qui est en consultation, qui n'est pas terminé, qui n'est pas adopté, et le gouvernement s'entête à arriver avec un programme qui intervient directement, d'une façon pointue, auprès des gens qui vivent la pauvreté.

Ça fait que c'est pour ça qu'on pose des questions, parce que c'est la vision derrière tout ça qu'on ne peut pas trouver, qu'on ne trouve pas. On se fait répondre : Bien, on verra dans les règlements, on verra ailleurs, on verra plus tard si on peut avancer, mais, si au début de l'aventure on aurait pris le temps de discuter de la loi-cadre puis on se serait entendus sur un plan d'action, on aurait parlé de l'aide auprès des femmes, on aurait parlé de d'autres éléments et aujourd'hui on serait peut-être plus prêts à identifier exactement qu'est-ce qu'il faut faire comme programme pour aider les gens à l'aide sociale ou qui vivent la pauvreté à intégrer le monde de l'emploi. Mais on n'a pas fait ces démarches-là, on est allé plus rapidement. Et on s'entête, on apprend des choses, on s'entête à des... on se dit, là, que c'est comme ça que ça fonctionne, que, pour que ça fonctionne, on va mettre sur le dos des gens à l'aide sociale des sanctions. Si tu ne participes pas à un programme, tu as une sanction. On a ajouté que, si tu ne participais pas à une rencontre d'évaluation, on pourrait retenir ton chèque.

Ça fait que, bref, c'est ce manque de vision là qui fait qu'on peut poser des questions sur comment on va travailler auprès des femmes, entre autres des femmes plus âgées, qui vivent des situations différentes des plus jeunes. Parce qu'on revient toujours un peu à ça, c'est comment on accueille les gens. Comment qu'on les prend en charge? Comment qu'on travaille avec eux autres?

Puis on revient avec le concept du primodemandeur. Je répète parce que, pour moi, c'est comme assez majeur, on parle du primodemandeur comme s'il était pareil, là... tout le monde est pareil, mais on sait que, les primodemandeurs, ça peut être bien différent, la situation que chacun peut vivre, entre autres les femmes plus âgées, parce qu'on sait qu'il y a de la pauvreté de ce côté-là. Ces gens-là, on doit bien les accueillir. Et là, actuellement, la façon qu'on fait ça, aujourd'hui, depuis plusieurs années, il y a une démarche où on est très ouverts à les rencontrer dans les premières journées, on se donne du temps, sinon on les rappelle, là, c'est les cinq jours, un mois au plus tard, mais on n'a jamais évalué cette formule-là, on ne sait pas comment ça fonctionne, on ne sait pas combien il y en a rencontrés en cinq jours, combien dans un mois. Ceux qui sont rencontrés en cinq jours, est-ce que c'est plus les jeunes que les femmes? Est-ce que c'est plus des personnes âgées? Est-ce que... Ça, on ne le sait pas, on n'a pas les statistiques. Qui, actuellement, là, dans les cinq premiers jours qu'ils font une demande à l'aide sociale vient plus rapidement? On ne le sait pas, ces chiffres-là. Ce serait bien de le savoir parce qu'on pourrait évaluer avant de commencer une démarche d'accueil. C'est ça, le manque de vision qu'on fait face.

Puis, quand mon collègue, ce matin, s'est emporté un petit peu, je trouvais, sur la question de Sorel...

Une voix : ...un reproche ou...

M. LeBel : Non, ce n'est pas un reproche. Sur Sorel-Tracy, c'est quand même particulier, parce que, là, il nous dit : Zéro agent à Sorel-Tracy. Le ministre dit : Bien, il y a tant de primodemandeurs, il y a tant de chômage. Là, le ministre confond la sous-région de Sorel-Tracy... bien, il ne faut jamais dire «sous-région», la région de Sorel-Tracy et la Montérégie, puis, bon, O.K., il arrive à dire : Bien, il y a zéro, mais il y a des gens à Saint-Hyacinthe qui peuvent se déplacer, au besoin. Ça aussi, là, quelqu'un... Puis parlons des faits. Quelqu'un, une dame, 52, 53 ans, en difficulté, elle est obligée de demander l'aide sociale, elle se déplace à Sorel-Tracy...

Une voix : Ce n'est pas vieux, 52, 53.

M. LeBel : Non, ce n'est pas vieux. Ce n'est pas vieux, non. Mais elle se déplace pour aller à Sorel-Tracy. Ce que je comprends de ce que vous me disiez, cher collègue, c'est qu'il y a un genre de cubicule puis un téléphone. Je vous dis, ce n'est pas évident pour cette dame-là, et là il faut... Il y a de l'angoisse, là. Quand est-ce que la personne va venir la rencontrer? Chaque jour, c'est angoissant. Chaque jour, c'est pesant. Puis là on ne sait pas qu'est-ce qu'elle vit, elle est rendue où dans la problématique de pauvreté, puis on sait que ça peut amener des problèmes au niveau de la santé,  tout ça. Là, elle a un téléphone dans un cubicule, elle parle à quelqu'un qu'elle ne voit pas, qui va peut-être venir la rencontrer plus tard. C'est sûr que, si c'est un plus jeune, c'est un plus jeune de 20 ans qui arrive, il pogne le téléphone, il dit... il va attendre. Vous voyez la différence entre les gens qui ont accès au service. Ça fait qu'il faut prendre ça en cause.

Puis, quand le ministre, ce matin, il dit : Bon, moi, si la personne ne participe pas à la première entrevue, on va analyser la possibilité de retenir le chèque, si la personne ne participe pas aux mesures, on va avoir des sanctions, mais le ministre est correct, là, lui, il se dit : Moi, si c'est de ma faute, par exemple, si je ne suis pas là dans les premières journées pour accueillir la personne, c'est sûr que je ne retiendrai pas le chèque, si c'est de ma faute. Il dit : Si je ne réussis pas à trouver des emplois à la personne ou à l'intégrer dans un marché, une formation, c'est sûr que je ne donnerai pas de sanction, c'est ça que vous avez dit ce matin. Bref, vous allez agir en bon père de famille. Si ça fonctionne, si je suis capable de donner le service, puis la personne ne le prend pas, là je vais taper sur les doigts, mais, si c'est moi qui n'est pas capable de donner le service, je vais comprendre, je ne couperai pas, je ne retiendrai pas le chèque. Mais ça, c'est bien de le dire, mais la personne qui le vit, la personne qui va chercher le service, elle, là, la personne, elle voit le règlement. Tout ce qu'elle sait, c'est que, si elle ne se présente pas à l'accueil, son chèque, il peut être retenu. Puis elle va attendre l'accueil, là, puis, elle, elle va sentir l'épée au-dessus de sa tête, là, c'est sûr qu'elle va sentir ça, la personne qui veut intégrer le marché de l'emploi, qui dit : Moi, si je ne participe pas à rien, là, selon le programme du gouvernement, là — c'est ce qui sort partout dans les journaux — si je ne participe pas à une formation de quelque chose, c'est sûr, mon chèque est coupé. Elle ne sait pas qui va prendre la décision de dire : Non, ton chèque ne sera pas coupé parce qu'on ne réussit pas à te donner... Vous comprenez, il y a... on crée un genre de climat où la responsabilité est mise sur le dos de la personne, la personne pauvre, la personne à l'aide sociale, on lui met toute la responsabilité sur le dos, mais le gouvernement, nous, on se dit : Bien, nous, si on ne réussit pas à donner le service, ce n'est pas grave, on attendra une semaine ou deux de plus; on ne la coupera pas, mais on attendra. C'est un genre de contrat social qui est fait à moitié.

Si on veut vraiment lutter contre la pauvreté, on doit prendre des engagements clairs. Si on ne veut pas échapper personne dans la trappe de la pauvreté, il faut prendre des engagements clairs. Si on veut que la personne réponde clairement, là, puis participe aux activités, nous autres, il faut être capables de servir, donner le service. Puis ce n'est pas vrai que nous autres, on peut se détacher, comme gouvernement, en disant : Bien, nous, si on ne réussit pas à livrer, ce n'est pas grave, on ne la coupera pas, ce n'est pas bien, bien grave. C'est ce bout-là, c'est ça que moi, j'ai de la misère à comprendre.

C'est pour ça qu'on aurait dû travailler sur un plan d'action, parce que, la députée de Fabre a raison, il y a plein de groupes communautaires, d'intervenants qui peuvent venir combler ce que l'État ne peut pas donner, elle a raison. La seule chose, par exemple, c'est que tous les groupes communautaires qu'elle nomme sont tous contre le projet de loi, mais ça, c'est un autre problème. Mais, ces groupes communautaires là, cette participation des groupes puis des intervenants, là, pas juste des groupes communautaires, le milieu scolaire, elle est importante, dans tout ça, mais on le retrouve pas dans le projet de loi, ces interventions-là. On pourrait retrouver ça dans un plan d'action, mais on n'en parle pas, du plan d'action. On parle du projet de loi, où on tape sur le clou de la personne assistée sociale, on lui tape sur la tête.

La responsabilité est là. Le gouvernement, c'est quoi, la responsabilité du gouvernement? Est-ce qu'on doit... Si on se fie aux dernières années, où le gouvernement a déstabilisé ses ministères, où il y a moins de ressources, surtout en région... Ce n'est pas pour rien qu'ils ont coupé les ressources dans Sorel-Tracy, c'est dans ces régions-là qu'on coupe le plus, puis on relocalise dans les centres en se disant : Ces sous-régions-là — puis là je vais dire «sous-régions-là» — on va se déplacer. Puis on le vit dans le Bas-du-Fleuve, comme en Gaspésie. Puis là, dans ces régions-là, enlève le transport en commun, enlève... Ça a créé encore plus de problèmes.

Vous rendez-vous compte, M. le Président? À un moment donné, tu sais, je trouvais ça drôle, ce matin, là, mais, de l'autre côté, on disait : Les gens vont se déplacer de Saint-Hyacinthe, ils iront à Sorel. Bien, il y a déjà eu une note du président du Conseil du trésor chez nous où on empêchait les fonctionnaires de se déplacer, pendant plusieurs mois, il y avait une note : Refusé. On a essayé de rencontre le directeur du CLE à Rimouski. Il ne pouvait pas, il fallait aller dans son bureau, M. le président du Conseil du trésor avait dit : Toi, tu ne sors pas de ton bureau. Puis là, là, vous nous dites : Ah! les gens vont se déplacer, ils vont se déplacer. À un moment donné, ça se peut qu'on soit sceptiques.

Pour moi, c'est important, si on veut s'occuper de tout le monde puis ne pas laisser tomber personne... Puis on sait qu'au niveau des femmes il y a une problématique qui est différente, les femmes qui vivent la pauvreté. Bien, si on veut s'occuper de tout ça puis comme il faut, pour ne pas perdre personne, il faut que le gouvernement s'engage, puis s'engage comme il faut à donner les services, qu'il s'engage à financer les groupes communautaires, à ne pas les laisser tomber, qu'il s'engage par rapport aux femmes, entre autres, à soutenir nos centres de la petite enfance. Le ministre, ce matin, il parlait de certains pays sociodémocrates puis avec les sanctions, tu sais, il y a des pays sociodémocrates qui donneraient certaines sanctions comme les autres, mais, d'un autre côté, il ne dit pas que, certains de ces pays sociodémocrates, on investit dans le logement communautaire, dans le logement social, on ne laisse pas tomber personne, c'est mur à mur, on donne du logement social, qu'on investit dans les centres de la petite enfance, dans les garderies. Si on fait tout ça, si le gouvernement, d'un côté, n'échappe pas personne, il travaille au niveau de l'enfance, au niveau de la jeunesse pour ne pas que le monde décroche dans les écoles, si on travaille tout ça, si, au bout de la ligne, on a fait notre travail comme il faut, qu'on resserre un peu la vis, peut-être, mais on ne le fait pas, ici, on laisse tomber : saccage dans les CPE, plus de monde pour soutenir les jeunes en décrochage scolaire. Ça fait qu'en bout de ligne on échappe notre monde.

• (14 h 40) •

Ça fait que moi, je me dis : Si on veut donner le service aux gens, le gouvernement doit s'engager davantage. Le ministre ne peut pas s'en sortir en disant : Bien, si je ne suis pas capable d'accueillir la personne dans le cinq jours, bien, je ne retirerai pas son affaire, tu sais, je ne retirerai pas son chèque; si je ne suis pas capable de lui donner une formation, bien, je ne le couperai pas. Ça ne peut pas fonctionner comme ça. Le ministre peut bien vivre avec ça, mais la personne qui vit la situation, à l'autre bout, que lui, il décide que, dans le programme, s'il ne s'implique pas, il est coupé, il n'attend pas de savoir... bien là, il ne se dit pas, en dedans : Ah! bien, le ministre, il ne me coupera pas parce que... Ce n'est pas ça, ce n'est pas comme ça que ça marche. Quand tu vis la pauvreté, tu vis de l'angoisse, tu vis de l'anxiété, et c'est jour après jour.

Le Président (M. Hardy) : M. le ministre.

M. Blais : Je viens de comprendre un petit peu, là... Je ne sais pas s'il y a une zone de rapprochement, là. Donc, on a parlé souvent ouvertement ici d'opposition de principe à la question qu'il puisse y avoir des obligations et, bien sûr, des conséquences quand ces obligations-là ne sont pas respectées. Je viens d'entendre que cette opposition de principe là, elle pourrait peut-être être relâchée selon... si le gouvernement changeait certaines politiques, que ce soit le logement social ou autre chose. Parce que c'est assez important, pour moi, de comprendre l'opposition que vous avez. Si c'est une opposition, hein... Parce que vous avez dit : Les pays sociodémocrates, eux autres, ils investissent, etc., dans leur main-d'oeuvre ou dans le logement social, ça rend acceptable peut-être pour... mais quelqu'un qui a une opposition de principe, en général, c'est inacceptable, quelles que soient les conditions ou la conjoncture. Donc, peut-être important, pour moi, de clarifier, là, parce que, dans le fond, c'est assez différent, et puis là on pourrait peut-être ouvrir un échange là-dessus.

Quand on regarde un peu l'histoire de ces débats-là au Québec, bon, 1998 — il ne faut pas que je fasse d'erreur, on revient des vacances — 1998, le Parti québécois instaure un système d'obligation pour l'ensemble des prestataires aptes à l'aide sociale avec des conséquences financières, des coupures financières qui sont près du double de ce que nous proposons. Ça a été abandonné par la suite, difficultés de gestion, et on pourrait en reparler, mais ça s'adressait à l'ensemble des personnes aptes. Quand on regarde un petit peu le... Et la personne qui avait fait ça, à l'époque, c'est Mme Harel, hein, qui était quelqu'un... extrêmement engagée dans sa communauté, là, comme vous, puis extrêmement engagée dans les groupes communautaires, mais aussi qui pensait que c'était nécessaire de bouger. Elle l'a fait à sa façon, très bien, on n'est plus là maintenant.

Regardons l'avenir, maintenant. Alors, on a un candidat, hein, au Parti québécois qui en... j'ai ici 2000, là, il ne faut pas que je me trompe, je ne veux pas vous induire en erreur... en 2008 nous dit ceci... «Le choc des générations se constate aussi dans la députation du PQ : le jeune député — à l'époque — Alexandre Cloutier — je pense que vous appuyez tous ici...

Une voix : ...

M. Blais : Oui. Donc, député de Saint-Jean, pas... oui.

M. Turcotte : ...on peut nommer un député par son nom, maintenant?

M. Blais : Oui, mais je lis l'article. Mais bon.

M. Turcotte : C'est un nouveau règlement? Ça s'est changé cet été, ça?

M. Blais : Bon. Alors, l'actuel candidat, là, à la chefferie du Parti québécois...

M. Turcotte : C'est le député de Lac-Saint-Jean.

M. Blais : ...et probablement prochain chef du Parti québécois dit ceci, il est élu député de Lac-Saint-Jean, âgé de 31 ans à l'époque, il est «d'accord avec l'idée d'adopter des mesures plus strictes pour assurer le retour sur le marché du travail des assistés sociaux aptes au travail». On le cite : «Dans la mesure où ils sont aptes au travail, je n'ai pas de problème avec ça.»

Bon, c'est assez important de savoir quelle est la nature de l'opposition, hein, au... Est-ce que c'est une opposition de principe ou ça peut changer, là, selon, là, les chefs ou encore les ministres au Parti québécois? C'est assez important parce qu'il me semble que, là, il y aurait une zone de rapprochement. Le Parti québécois l'a déjà fait dans le passé et visiblement pourrait aussi le refaire dans un futur pas si lointain que ça.

Le Président (M. Hardy) : M. le député de Rimouski, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Je crois que le ministre ne s'aide vraiment pas en ce moment, là. C'est le fun de faire de l'humour quand c'est drôle, premièrement, mais il faut avoir aussi... être capable de livrer les punchs quand c'est le temps. Et là ce qu'on lui demande de livrer, c'est sa vision. Il peut essayer de poursuivre le Festival Juste pour Rire, mais là, en ce moment, c'est sa vision.

Le ministre a déposé... a publié un...

M. Blais : M. le Président...

Le Président (M. Hardy) : Oui, M. le ministre.

M. Blais : Je ne pense pas qu'on est au Festival Juste pour Rire ici, je ne pense pas...

Le Président (M. Hardy) : Je vous demanderais de faire attention et de poursuivre, s'il vous plaît.

M. Turcotte : Moi, M. le Président, ce que je lis et ce que j'ai sous mes yeux, c'est un communiqué du ministre, qu'il a publié aujourd'hui. Et entre ce qu'il est écrit dans le communiqué du ministre et ce que le ministre dit et fait ici, en commission parlementaire, et là je ne parle pas de l'avenir, je parle de ce que nous avons vu et ce que nous vivons aujourd'hui : contradictoire.

Moi, j'aimerais, M. le Président, parce que c'est à vous que je dois demander ça, si c'est possible, obtenir une copie de l'ensemble des intentions réglementaires du projet de loi n° 70. Parce que le ministre, dans le communiqué, mentionne qu'il a déposé ses intentions réglementaires. Donc, M. le Président, est-ce que je peux obtenir une copie des intentions réglementaires du ministre pour l'ensemble du projet de loi n° 70? Dans son communiqué, il dit qu'il les a déposées. Donc, je n'ai peut-être pas obtenu cette copie-là. J'aimerais pouvoir poursuivre mon travail de parlementaire en obtenant la copie de l'ensemble des intentions réglementaires du projet de loi n° 70 comme il est écrit dans le communiqué du ministre. Il les aurait déposées ici, en commission parlementaire. Je ne les vois pas, je ne les ai pas. Peut-être que, M. le Président, vous pouvez m'en remettre une copie.

Le Président (M. Hardy) : M. le ministre.

M. Blais : Écoutez, M. le Président, dès le départ, on a rappelé que ce projet de loi là, c'est une loi habilitante. Donc, il y a des éléments sensibles, compte tenu notamment de la clientèle, là, des éléments sensibles qui étaient contenus dans les règlements du projet de loi, et j'ai indiqué que j'allais déposer ou faire connaître, c'est dans ce sens-là, faire connaître mes intentions réglementaires. Elles font partie de nos débats, nos débats ont été enregistrés. J'ai parlé des éléments les plus importants, notamment des parcours. Il y a des documents qui ont été déposés, c'est vraiment les documents plus importants. Et, si on continue, à la lecture du projet de loi, article par article, quand il y aura lieu de faire connaître les intentions réglementaires... Mais, pour le moment, tout a été, hein, déposé au sens où tout a été présenté comme étant mes intentions réglementaires, elles sont connues. Je ne suis pas revenu sur aucun élément, là, à ma connaissance, là, de ces intentions réglementaires là.

Il faut bien comprendre qu'il reste encore des choses à dire et à présenter. Progressons et avançons. Je l'ai dit, à chaque moment je pourrais les présenter pour que les collègues comprennent bien, là, la direction, là, qui est prise dans ce projet de loi là.

Le Président (M. Hardy) : M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : M. le Président, je cite le communiqué de presse : «Jusqu'à maintenant, le ministre [...] a consacré plus de 85 heures à ce projet de loi en commission parlementaire. Il a apporté de nombreux assouplissements en plus de déposer ses intentions réglementaires.»

M. le Président, est-ce que nous pouvons obtenir l'ensemble des intentions réglementaires du ministre sur le projet de loi? Nous en avons obtenu deux, intentions réglementaires, et le ministre nous a dit : Si on travaille bien, si vous êtes gentils, je vais vous dévoiler mes autres intentions réglementaires pour les articles suivants. Nous ne les avons toujours pas eues.

Donc, M. le Président, le ministre dit, écrit dans un communiqué de presse pour l'ensemble des médias qu'il a déposé ses intentions réglementaires, et ce n'est pas le cas. Est-ce qu'il peut les déposer maintenant?

Le Président (M. Hardy) : M. le ministre.

M. Blais : Bon, je vais le redire une fois, là, j'ai présenté mes intentions réglementaires, hein, pour plusieurs articles, même pour des articles à venir. S'il y en a d'autres à présenter, je vais les présenter. Alors, pour moi, c'est assez important pour qu'on comprenne bien, là, la nature même du projet de loi.

M. Turcotte : Donc, M. le Président, je constate que le ministre confirme qu'il n'a pas déposé ses intentions réglementaires, qu'il en a présenté — il dit le terme «présenté» — un certain nombre pour des articles que nous avons étudiés. Puis je vais passer... grâce de la première partie du projet de loi, où on l'a demandé, et nous n'avons eu aucune intention réglementaire de sa part, il a dit que ce serait au Conseil des ministres que ça allait se faire, mais on va passer ce bout-là, mais, sur les articles à venir, nous ne les connaissons toujours pas, les intentions réglementaires. Donc, le communiqué de presse, j'invite l'attaché de presse du ministre à faire un erratum pour ce communiqué.

L'autre question, «nombreux assouplissements», j'aimerais, M. le Président, que vous me déposiez les amendements qui ont été adoptés ici, en commission parlementaire, sur la partie II du projet de loi sur l'aide sociale qui viennent... qui ont été présentés par le ministre.

Le Président (M. Hardy) : Je vais suspendre quelques instants, puis on va revenir avec ça.

Je suspends.

(Suspension de la séance à 14 h 50)

(Reprise à 14 h 53)

Le Président (M. Hardy) : Donc, nous reprenons nos travaux.

Amendements déposés

Suite à la question de M. le député de Saint-Jean, nous allons réunir les amendements et nous allons les déposer pour qu'ils soient rendus publics. Voilà à la question.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. On comprend que les amendements qui nous tiennent... que je fais référence, c'est surtout sur la deuxième partie, là, du projet de loi, celle que nous étudions actuellement, sur la partie Objectif emploi, parce que c'est essentiellement là-dessus que, bon, la tension porte. Et puis le ministre dit qu'il a présenté, qu'il a fait un certain nombre d'assouplissements... de nombreux, le terme, a apporté de nombreux assouplissements. Donc, moi, la seule chose que j'ai entendue, là... la dernière version, là, quand on dit : 2.0 ou point... bon, la dernière version que nous avons, bien, c'est que le ministre, s'il n'y a pas une rencontre, la première rencontre, bien là il va retenir le chèque, maintenant. Ça fait que ça, c'est le dernier assouplissement en liste. Méchant assouplissement, M. le Président! J'ai hâte de voir l'amendement.

Donc, moi, ce que je crois, M. le Président, là, c'est que le ministre, en ce moment, là, joue ça un peu à l'aveugle, là, et va en fonction de ce qu'on dit, essaie de détecter ce qu'on veut dire, ce que l'amendement veut dire, etc. Je crois, là, M. le Président, qu'on est rendus à un stade où notre position est très claire. Nous sommes contre les sanctions qui sont présentées, que le ministre nous a parlé et que l'ancien ministre nous avait parlé avant, et le ministre le sait, le ministre le sait.

Donc, moi, je l'invite, s'il veut vraiment que son projet de loi soit adopté et qu'il tient vraiment à appliquer cette réforme-là, qu'il trouve un réel terrain d'entente. Nous avons proposé à plusieurs reprises des terrains d'entente. Nous avons même proposé la scission du projet de loi pour s'assurer que la première partie... Elle pourrait déjà être mise en vigueur, en application, la première partie du projet de loi, parce qu'elle a été adoptée par la majorité ministérielle, là. Nous nous sommes opposés, mais la majorité ministérielle a adopté la première partie du projet de loi. Donc, on aurait déjà réglé ça.

Donc, on a fait plusieurs autres propositions, on a déposé plusieurs amendements, plusieurs amendements. Si c'est ça que le ministre veut dire, quand il parle de nombreux assouplissements... C'est qu'il nous a dit à quelques reprises, des amendements que nous avons déposés : C'est une bonne idée, je suis d'accord avec ça, et, quand on est arrivés au vote, bien, il a voté contre, parce qu'il disait que ce n'était pas au bon endroit. Moi, j'ai proposé et mes collègues ont proposé à plusieurs reprises : On va suspendre cet article-ci, on va aller l'adopter au bon endroit, on va pouvoir gagner du temps et être plus efficaces dans notre travail, comme on l'a fait dans la première partie du projet de loi. On n'était pas d'accord avec la première partie du projet de loi. Il y a des... Emploi-Québec, là, hein, l'abolition d'Emploi-Québec, on avait des gros problèmes avec ça. On en a encore, des questionnements, etc. Mais on a bien fait le travail parce que, le ministre, à ce moment-là, peut-être que c'était, bon, le fait qu'il arrivait dans le projet de loi, je trouvais que ça collaborait bien, là, on a accepté de... on allait suspendre un article, on adoptait un amendement à tel endroit, on revenait, etc. Je ne sais pas si c'est parce que le ministre a tellement peur qu'on soit contre les sanctions. Parce qu'il aime parler du passé, mais lui aussi, il a écrit beaucoup, hein, bon, il a écrit plus qu'un autre, et il avait une vision. Il a encore cette vision-là, je pense qu'il est un peu déchiré dans tout ça, et là je crois qu'il... Je ne sais pas. Pourtant, il n'y a pas de game, rien. C'est clair, notre position, là, on est contre les sanctions. Mais, un coup qu'on se dit ça, il y a des éléments, là, qu'on peut avancer dans le projet de loi. Si un amendement qu'on dépose est bon, pourquoi qu'on ne l'adopte pas, surtout quand le ministre nous dit : Je suis d'accord avec votre amendement?

Je crois que, M. le Président, on pourrait gagner à améliorer notre travail, à gagner du temps, à être plus efficaces, à rendre un meilleur service à la population, mais je ne sais pas pourquoi, mais le ministre s'entête à ne pas vouloir adopter aucun amendement qu'on dépose, même s'il est d'accord avec ces amendements-là.

Donc, moi, je souhaite que le ministre ou son attaché de presse, là, puisse émettre un erratum, à tout le moins, là, pour son communiqué, entre autres sur les intentions réglementaires et sur les assouplissements, parce qu'on ne les a pas vus. Et là vous, M. le Président, vous revenez dans le débat, là, puis vous avez manqué ça, je ne répéterai pas tout ça, là, mais vous pourrez aller lire les transcripts...

Le Président (M. Cousineau) : ...pas souligner l'absence d'un parlementaire.

M. Turcotte : Je souligne votre arrivée, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Ah bon! D'accord.

M. Turcotte : Il y a une nuance.

Le Président (M. Cousineau) : ...vous a aidé beaucoup. Poursuivez.

M. Turcotte : Donc, M. le Président, moi, je crois que c'est véritablement le statu quo de la part du ministre. Il ne bouge pas. Avant la fin de l'été, il nous avait dit : J'ai des idées, je pourrais trouver des voies de passage, des solutions, tout ça. Nous, on était enthousiastes de revenir aujourd'hui pour entendre ces propositions-là puis... Aucune proposition, M. le Président, depuis ce matin, aucune tentative de la part du ministre de trouver une voie de passage, une solution pour qu'on soit d'accord, à tout le moins un de nos amendements qu'il reprend, dire : Regardez, là, ça, si on adopte ça comme ça... Non, rien.

La seule chose qu'il nous a dite, c'est : C'est une bonne idée, ça, de faire une rencontre obligatoire, on va la faire. Nous, c'est parce qu'on considère que c'est la meilleure chose pour la personne, d'avoir une rencontre. Le ministre nous dit : Oui, c'est une bonne chose, puis on va y ajouter le fait qu'on va retenir le chèque si la personne n'y va pas. Ça fait que, là, est-ce que c'est pour la personne ou c'est pour économiser de l'argent qu'on fait ça, là? Parce qu'il faut se rappeler que l'ancien ministre, lui, son objectif d'Objectif emploi, ce n'était pas Objectif emploi, c'était objectif : On économise 50 millions avec le projet de loi. C'était ça, l'ancien ministre. Donc, je sais que le ministre actuel nous a dit : Non, on n'économisera pas 50 millions, bon...

Une voix : Peut-être qu'il va économiser plus.

• (15 heures) •

M. Turcotte : Peut-être qu'il va économiser plus. Mais, moi, ce que je crois que... c'est dommage, actuellement, M. le Président.

Mais nous sommes des gens démocrates, nous sommes ouverts, nous sommes prêts à passer par-dessus tout ça, ce qu'on a vécu, ce qu'on voit, ce qu'on a entendu ici, M. le Président, mais je crois que le ministre peut, peut, encore aujourd'hui, nous dire : Voici quelle est ma vision, clairement, et de préférence ne pas changer d'opinion ou de vision quelques minutes par la suite.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. En vous rappelant qu'il vous reste une minute. M. le ministre.

M. Blais : Peut-être rappeler à mon collègue d'en face d'être prudent, là, quand il dit : Nous, notre position est claire, on est contre les sanctions, on est contre l'obligation. Je lui rappelle, il le sait très bien, là, qu'il y a une course à la chefferie au Parti québécois en ce moment, que le candidat qu'il appuie est un candidat qui a déjà donné son accord à ce principe-là. Je le cite, là : «Dans la mesure où ils sont aptes au travail, je n'ai pas de problème avec ça.» Ce que je veux lui dire, hein, puis je le dis à mes trois collègues d'en face, quand même, parce que je pense qu'ils supportent le même candidat : Soyez prudents, il peut y avoir une évolution de la pensée, là, à ce sujet-là.

Sur la question, maintenant, des amendements puis de l'écoute dont on a fait preuve, je crois, là, sincèrement, là, pour améliorer le programme, je lui rappelle que j'ai déposé un document qui était un document significatif, pour lequel on s'est entretenus très longtemps ici, on pourrait même parler en termes d'heures, qui était un napperon qui donnait une image assez claire des parcours, des conséquences, des conséquences financières positives, des conséquences négatives. Ça fait partie des éléments que j'ai déposés, M. le Président. Puis on a parlé tout à l'heure que les amendements pourraient être déposés, mais je vais demander aussi qu'on rappelle, hein, le dépôt de ce document-là, parce qu'essentiellement... il donnait beaucoup d'information. On n'est pas obligés de donner toutes ces informations-là, mais c'est par transparence que je le fais.

Quelles sont les mesures, un peu pour, hein, tenir compte des critiques, là, que l'on a mises en place?

Première chose, on a exclu un certain nombre de personnes, hein, d'Objectif emploi, on en a parlé un peu plus tôt ce matin, donc des personnes qui, pour toutes sortes de raisons, sont dans une situation temporaire où ils ne peuvent pas participer au programme.

Deuxième élément très important, on a introduit un parcours de préemployabilité pour tenir compte... Et ça, c'est la pratique, hein, qui nous indique que, des personnes qui ne sont pas prêtes, pour différentes raisons, à entrer sur le marché du travail, faire une recherche ou même retourner aux études, ce n'est pas une raison pour les laisser dans leur sous-sol ou dans la rue, il faut quand même les aider. Mais il faut les prendre là où ils sont, dans une situation beaucoup plus éloignée du marché du travail, puis faire en sorte de cheminer avec eux. Ça n'existait pas auparavant, là, dans Objectif emploi.

J'ai mentionné à plusieurs reprises, et c'est maintenant dans le programme, que le retour aux études, hein, le fait de finir un diplôme ou encore de chercher une qualification devait être considéré, hein, comme un des cheminements prioritaires. Rappelez-vous que les discussions autour d'Objectif emploi, au tout début, c'étaient des discussions où il fallait à court terme occuper un emploi, en tout cas c'était parti dans cette direction-là. J'ai demandé à ce qu'on mette le cap sur l'éducation. On a beaucoup de décrochage scolaire, au Québec, et l'éducation, c'est la meilleure façon de sortir de la pauvreté.

Pour ce qui est des montants, hein, des coupures possibles, moi, je... on fera un inventaire aujourd'hui un petit peu de ce qui se fait ailleurs, ici même, au Canada, et dans le monde, au niveau des coupures. J'ai demandé à ce que ce soient à peu près les mêmes coupures que ce que l'on pratique déjà, ce que l'on connaît déjà à l'aide sociale dans le cas de fraudes, mais qu'on les applique aussi progressivement... des montants qui sont limités et qui sont révocables dès que la personne se remet en marche. Ça, ça a été des clarifications extrêmement importantes; en général, qui ont été bien accueillies.

J'ai précisé à plusieurs reprises qu'Objectif emploi, contrairement à d'autres programmes du genre ailleurs, ne fixait pas à l'avance des objectifs en termes de temps, il n'y a pas une obligation en termes de temps, à l'intérieur de six mois... On trouve ça à plusieurs endroits et dans des sociétés, encore, tout à fait respectables, vous avez six mois pour vous trouver quelque chose, sans ça, ensuite, vous n'avez plus l'aide sociale. J'ai dit : On n'est pas du tout dans ce type de discours là, au contraire. L'important, c'est que la personne soit en marche et qu'elle aille dans une direction, qu'elle aura choisie, bien sûr, avec la personne.

Donc, je pense, hein, vraiment qu'on a clarifié beaucoup de choses, qu'on a donné ici toutes les informations, à vrai dire à peu près toutes les informations que l'on peut attendre. Elles ont été déposées sous la forme de documents, parfois, comme je l'ai mentionné. Parfois, ça peut être simplement par des modifications qui ont été apportées. Donc, l'essentiel...

Puis je reviens au coeur du problème : en face, on privilégie le statu quo. Et je leur rappelle amicalement que les choses peuvent changer, au Parti québécois, il pourrait y avoir un nouveau chef éventuellement qui voit les choses différemment de vous, et je vous demande d'être prudents, je vous demande d'être prudents dans la position que vous prenez parce que ça pourrait changer dans les prochains mois.

Des voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! J'y vais par alternance, et Mme la députée de Gouin a levé la main pour avoir la parole.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. En tout cas, il y a au moins une chose que le ministre ne pourra pas dire de toutes les oppositions de l'autre côté de la table : moi, je n'ai jamais changé d'avis, depuis 25 ans, sur la nécessité d'offrir aux personnes assistées sociales une prestation de base qui soit convenable. Et j'ai fait des batailles innombrables, que j'ai souvent perdues, avouons-le, pour hausser de façon importante les prestations à la sécurité du revenu.

Je comprends qu'il y a des gens ici qui font de la politique, là, puis qui, bon, s'en prennent amicalement les uns aux autres. Moi, je vais... Tant qu'à y être, entrons dans le jeu. Je peux citer le ministre aussi, parce que, comme l'ont dit certains de mes collègues, le ministre a écrit, c'est une très belle chose que d'écrire, et dans son livre, que tout le monde connaît, le ministre nous dit : «Il importe aussi de rechercher un consensus qui ne table pas exclusivement sur les appuis intéressés que notre position peut récolter, mais aussi sur la façon dont nous réussissons à intégrer les positions des autres au sein d'une doctrine plus cohérente. Cette recherche de la critique constante et de l'intégration du point de vue de l'adversaire est le seul moyen dont nous disposons pour faire progresser nos idées, quelles qu'elles soient.» Je trouve ça très, très intéressant, cette citation, à laquelle je souscris complètement. Je pense que le travail démocratique que nous essayons de faire ici, quel que soit notre passé, notre présent, quelles que soient nos allégeances, c'est de se demander : Quelle est la meilleure façon d'aider les personnes assistées sociales, hein? Je pense que le fond de la question, c'est ça.

Alors, je vais y aller très concrètement, puisque l'amendement porte quand même sur la question des femmes, et j'ai une question pour le ministre. Celui-ci a lu ce matin... effectivement a relu, là, la liste des personnes exclues de l'obligation de parcours sous peine de pénalité. Moi, je n'ai pas vu dans cette exclusion, à moins que je me trompe, je veux être sûre, que, par exemple, une femme victime de violence conjugale à qui... je vais essayer de le dire le plus clairement possible, là, qui aurait rencontré une intervenante sociale dans une maison d'hébergement pour femmes et/ou une travailleuse sociale, par exemple, dans son CLSC, et avec qui il serait convenu de façon claire que, pour un certain nombre de semaines ou de mois, madame n'est pas en mesure de suivre quelque programme que ce soit... je voudrais savoir si ce diagnostic social... Parce qu'il n'y a pas que le médical, dans la vie, là, il y a la détresse psychologique, il y a les problèmes que les gens vivent. Est-ce que, dans ce cas-là, dans ces cas-là, il peut être concevable pour le ministre qu'une femme victime de violence qui n'est pas hébergée ou qui n'est plus hébergée ait un moment de répit, là, avant qu'on veuille l'obliger, si c'est ce qui se fait finalement, de suivre un parcours?

Le Président (M. Cousineau) : Merci, madame. M. le ministre.

M. Blais : Oui. Donc, j'essaie de répondre à la question, parce que c'est un cas un petit peu précis. Donc, c'est quelqu'un qui n'est pas hébergé?

Mme David (Gouin) : Oui.

M. Blais : Donc, dans le cas de quelqu'un qui n'est pas hébergé, tout simplement, la prestation de base est augmentée d'une allocation pour contrainte temporaire...

(Consultation)

M. Blais : Je peux vérifier ça, parce que, là, il y a des points de vue un peu divergents.

Le Président (M. Cousineau) : ...suspendre quelques instants pour regarder?

M. Blais : On va suspendre. Juste pour ne pas se tromper, là.

Le Président (M. Cousineau) : Nous allons suspendre quelques instants pour avoir une bonne réponse à la question de la députée de Gouin.

(Suspension de la séance à 15 h 10)

(Reprise à 15 h 11)

M. Blais : ...recherche d'emploi active ni la recherche... Cependant, selon l'évaluation de sa situation, hein, puis, bon, est-ce qu'elle est prête déjà à aller peut-être faire un suivi psychologique ou un suivi au CLSC, là — ce que j'ai compris dans cet exemple-là, la personne était déjà suivie au CLSC — donc, si l'évaluation, c'est qu'elle devrait continuer à avoir un suivi dans un CLSC... Il y a des gens, au contraire, qui peuvent avoir le suivi, mais aussi qui veut commencer à reconstruire sa vie, là, qui est prête à commencer à reconstruire sa vie mais progressivement, là. Donc, c'est une option qui fait partie, là, de la situation des personnes qui sont en préemployabilité.

C'est toujours un peu délicat, ces cas-là, parce que... Encore l'été dernier, je rencontrais un groupe, donc, dans ce cas-ci, c'était une maison d'hébergement pour femmes victimes de violence, puis, bon, qui est bien connue, là, mais eux me disaient que c'est très important que la personne soit en démarche, c'est-à-dire que... Ils me disaient : Nous, on n'est pas un hôtel. Éventuellement... Bien sûr, au début, on héberge la personne, parce que... et parfois les enfants, mais éventuellement il faut que la personne soit en démarche, en reconstruction, là, prenne une décision, tout ça.

Mais c'est des cas tellement, tellement uniques, là, chacun. Mais, pour le situer, au moins, on peut le situer à l'intérieur de la préemployabilité, donc dans cette catégorie de soutien psychosocial.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : C'est intéressant, la réponse du ministre, M. le Président. Puis j'aimerais lui souligner que, c'est sûr, je connais bien toute cette question de la problématique de la violence conjugale, donc c'est plus facile pour moi d'en parler que, par exemple, de parler des jeunes qui ont des problèmes de dépendance, parce que c'est une population avec laquelle j'ai moins travaillé, donc je me fie sur les intervenants qui travaillent avec ces gens-là, mais au fond c'est assez intéressant, ce qu'on dit, parce que le ministre nous dit : Même les maisons d'hébergement souhaitent que les femmes soient en démarche. Bien, bien sûr. C'est d'ailleurs le travail même des intervenantes en maison d'hébergement, non pas seulement de loger et nourrir une femme et ses enfants, mais tout le travail qui est fait, effectivement, avec cette femme pour l'aider à reconstruire sa vie. Mais je veux quand même souligner que l'approche féministe, telle que je la connais, en tout cas, et telle qu'elle est pratiquée dans de nombreuses maisons d'hébergement, consiste à ne rien imposer, ce qui fait que, dans plusieurs cas, il y a des femmes qui vont retourner avec un conjoint prétendument repentant, et il se peut que, six mois ou un an plus tard, des gros problèmes se posent, madame va revenir et cette fois-là va être davantage prête, parce que c'est gros, là, souvent, quand on est une mère de famille avec des enfants, donc va être prête à quitter un conjoint violent, refaire sa vie, etc.

Autrement dit, la notion de coercition est inexistante et elle ne peut pas exister, ça ne fonctionnerait pas, parce qu'on a affaire ici à des femmes, ça peut arriver à des hommes, mais principalement à des femmes qui sont des victimes et qui ont toutes un problème de reconstruction de l'estime d'elles-mêmes, qui est souvent la chose la plus atteinte.

Le parallèle serait assez facile à faire avec les jeunes, au fond, hein? Vous sortez de la DPJ, vous avez 18 ans, sentiment d'échec, très peu d'estime de soi. Ça se peut que vous ne soyez pas prêt tout de suite à obligatoirement... tu sais, vous sentir obligé, encadré, encarcané dans une mesure, mais ça se peut très bien que quelques mois après vous soyez prêt.

C'est ça, toute la différence entre l'approche du ministre et la nôtre, c'est que nous croyons... je crois — je vais assumer — je crois profondément dans la capacité des êtres humains à se transformer, je l'ai trop vu pour ne pas y croire, mais je crois tout aussi profondément, basé sur les faits, pas seulement sur une réflexion philosophique éthérée, là, basé sur les faits, je crois aussi que les êtres humains ont parfois besoin de temps, ont surtout besoin d'aide, d'accompagnement, et que, pour certains et certaines, ça peut être plus long que pour d'autres.

Ce que je crois aussi, c'est qu'il n'appartient pas à un ou une fonctionnaire de l'aide sociale de déterminer quel doit être le parcours d'une personne quand cette personne-là, c'est une personne à part entière. On ne parle pas seulement ici de retour au travail, on parle de la construction d'une personne qui est souvent en petits morceaux, pour toutes sortes de raisons. Donc, il y a toutes les dimensions psychosociales qui entrent là-dedans. Et, parce qu'elle est à l'aide sociale, cette personne-là, elle va devoir subir cette espèce d'encadrement ou d'encarcanement de la fonction publique. Une autre personne qui n'est pas à l'aide sociale, une femme, par exemple, qui est à la maison, c'est le mari qui gagne le revenu, elle, on va penser normal qu'elle fasse une démarche à sa façon, en prenant le temps nécessaire. Et tout ça pourquoi? Parce qu'à la personne qui est à l'aide sociale on donne des sous, 623 $ par mois. Est-ce que, franchement, ça justifie toute cette mécanique, que je trouve, moi, plutôt infantilisante, à l'égard de personnes majeures, avec des tas de problèmes mais majeures et qu'on devrait aider, donc on devrait dire oui à l'amendement qui est sur la table, là, aider davantage les organismes qui s'en occupent?

Cela me permet de dire aussi que ce que le ministre a qualifié d'obstruction ce matin, et c'est vrai que c'est un mot que j'ai prononcé la semaine dernière, c'est effectivement une résistance profonde et documentée à cet aspect coercitif du projet de loi et non pas à l'ensemble. Ça fait des lunes qu'on le dit, il y a plein de bons objectifs à ce projet de loi. Il y a un programme qui pourrait être très intéressant; évidemment, il faudra y mettre les sous. Ce n'est pas ça, le problème. Le problème, c'est cette espèce de notion que, pour que ça marche, il va falloir obliger les gens. Tout nous démontre le contraire. Quand les programmes sont là, quand on prend le temps avec les gens, quand on accompagne, quand on soutient, en général, ça marche, mais il faut être très persévérant.

Le ministre a apporté souvent l'exemple des jeunes qui s'en vont... en retour aux études chez les adultes et qui ne terminent pas. C'est vrai, mais ce que le ministre est incapable de nous dire, peut-être parce que les recherches n'ont pas été faites, c'est pourquoi et qu'est-ce qu'on peut faire pour s'assurer que les jeunes terminent.

D'ailleurs, je suis à la veille de l'inviter à venir rencontrer, puisque le ministre fait plusieurs rencontres, c'est intéressant... Je suis à la veille de l'inviter à venir rencontrer un organisme de mon comté qui s'occupe précisément de ces jeunes-là qui, sans cet organisme, ne termineraient pas leurs études à l'éducation aux adultes, et, grâce à cet organisme, ils les terminent.

Donc, quand on parle de résistance ou statu quo, franchement... en tout cas, je laisse le ministre débattre avec l'opposition officielle là-dessus, là, mais, le statu quo, sincèrement, qui veut le statu quo à l'aide sociale? Je ne pense pas que c'est ce que l'opposition officielle veut, mais moi, je vais parler pour moi : Tout sauf le statu quo, parce que le statu quo est intolérable. Avec les prestations qu'on donne aux gens, franchement, puis avec le manque d'activités, de programmes diversifiés, avec la fermeture de nombreux points de service, des centres locaux d'emploi, les 20 % de fonctionnaires, pensez-vous vraiment, M. le Président, que c'est ce que je veux, ce genre de statu quo? Certainement pas.

Mais là on est devant ce qui, moi, m'apparaît être un peu incohérent, c'est-à-dire, d'un côté, on veut obliger des gens à faire des démarches, mais, de l'autre côté, je ne sais même pas comment, en région, les gens vont faire pour se rendre à leur centre local d'emploi rencontrer leurs fonctionnaires. D'abord, il faudrait qu'il y ait un fonctionnaire, puis, deuxièmement, il faudrait qu'il y ait des moyens de transport. Alors, je ne sais pas comment on va faire, mais ça a l'air que c'est ça, l'idée. Bien oui, mais il faut être clair, là, il faut d'abord mettre les ressources, il faut insister là-dessus. On pourra toujours discuter du reste.

• (15 h 20) •

Je voudrais, en terminant, donner un exemple concret qui, celui-là, va toucher directement les femmes. Puis je pense qu'on va comprendre ce que je veux dire — je l'ai dit ce matin — quand j'explique que les situations des hommes et des femmes sont assez différentes mais aussi que...

C'est bien beau, la Scandinavie, là. Moi, je ne connais pas entièrement... je ne sais pas entièrement ce qui se passe dans les pays scandinaves dans la moindre région, mais je sais une chose, c'est qu'au Québec, en ce moment, il y a des régions en perte d'emploi. Je pense entre autres à la Côte-Nord, où j'ai passé 15 jours cet été en vacances, mais une députée en vacances, quand elle arrive quelque part, les gens lui parlent, alors j'ai eu abondamment de témoignages. Et qu'est-ce qui m'a frappée? C'est le genre de région où, quand on parle d'emploi, là, c'est tout le temps l'emploi masculin, dit masculin ou masculin dans les faits, parce que, dans ma tête à moi, il n'y a pas d'emploi masculin et féminin, mais, dans les faits, mines, construction, réparation de routes, il y en a abondamment sur la Côte-Nord, je n'ai pas vu de femmes dans ces métiers-là. Mines, ça ne va pas tellement bien, d'ailleurs, mais construction, routes, ça, routes, je peux vous dire que ça y allait pas mal. Mais il n'y a pas de femmes. Les femmes, elles, pendant ce temps-là, dans cette région-là et probablement dans d'autres, sûrement dans d'autres, ont perdu des emplois. Pourquoi? Austérité. On coupe en culture, on coupe en tourisme, on coupe dans les services publics. Et non seulement on n'augmente que très peu le financement des organismes communautaires, mais il y a maintenant des coupures faites par les Centraide dans différentes régions. Pourquoi? Parce qu'il y a trop de demandes puis que les Centraide n'y arrivent plus.

Alors, qui perd les emplois? Les femmes. Évidemment, quand une mine ferme, les hommes, d'accord. Si elle rouvre, les hommes iront à la mine. Autrement dit... Je sais bien que la question de l'ADS a été abordée longuement ce matin, mais, si on en faisait, des ADS sérieuses, on découvrirait que beaucoup de gestes posés par le gouvernement actuel concourent à des pertes d'emploi féminin, ces mêmes femmes qu'on va peut-être... j'espère que non, mais qu'on pourrait peut-être retrouver à l'aide sociale puis à qui on va dire : Bien là, maintenant... je ne sais pas qu'est-ce qu'on va leur proposer exactement, mais on va essayer de vous trouver des emplois. Ce ne sera pas si simple, M. le Président, ce ne sera pas si simple.

Devant toute cette culture-là, qui est vraiment, là, de centrer le développement économique du Québec sur des mégaprojets, mine, cimenterie, Hydro-Québec, barrage, construction, emplois masculins à 90 % ou 95 %, puis je suis probablement en bas de la réalité, on laisse tomber les femmes, puis après on se revire de bord puis on dit : Mais on va faire de la coercition à l'aide sociale. C'est ça, le problème, M. le Président. Et c'est pour ça que, oui, je m'obstine à résister à la coercition. On n'est vraiment pas dans un développement économique et social qui est favorable à l'emploi pour tous et pour toutes, et surtout pas pour toutes. Le jour où ce sera fait, le jour, effectivement, où il y aura des logements à prix convenable pour tout le monde, le jour où la culture sera accessible à tout le monde, le jour où il y aura des centres à la petite enfance les plus gratuits possible pour tout le monde, est-ce que d'autres discussions seront possibles? Je n'en sais rien, mais on en est tellement, tellement loin que c'est un débat un peu futile que de se demander qu'est-ce qu'on ferait un jour peut-être si l'ensemble de la situation changeait pour le mieux. Quand on sera rendus là — je sens que ce n'est pas d'ici deux ans — on pourra réfléchir autrement.

Mais, pour le moment, c'est sûr qu'on va avancer dans le projet de loi, mais on va avancer bien mieux si le ministre renonce aux pénalités, qu'on puisse discuter de cette fameuse première rencontre, qu'on puisse regarder les conditions dans lesquelles elles pourraient s'exercer. Ce n'est pas tout, ça, de parler de rencontres obligatoires; comme l'a dit mon collègue député de Saint-Jean, il faut regarder les conditions dans lesquelles ça se passe. Là, on pourrait possiblement avancer. Mais, pour le moment, le ministre tient à tout prix à maintenir les sanctions; oui, avec quelques assouplissements, mais, fondamentalement et pour une raison qui m'échappe encore, bien, il y croit, il y croit. Et que faire contre la foi? Ça, c'est difficile, M. le Président. Alors, il y croit, je n'y crois pas, et en plus je pense que c'est une atteinte à la dignité des personnes. Donc, oui, là-dessus, pas sur le reste, là-dessus, oui, je vais faire preuve d'un peu d'obstination.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.

M. Blais : Peut-être essayer de situer un peu le problème auquel on essaie de s'attaquer, là, du côté gouvernemental.

J'ai écrit un petit texte cet été, je ne sais pas si vous avez eu le temps de le lire, M. le Président, là, sur les limites du volontariat. Je commence par une anecdote, là, bon, une direction régionale qui me dit : Bien, écoutez, on a convoqué, entre guillemets, là, des prestataires d'aide sociale qui ont un indice d'employabilité élevé, c'est-à-dire que c'est des personnes qui ont déjà occupé un emploi, qui ont une formation, en tout cas qui sont aptes à l'emploi, donc parmi les plus élevés, ils en ont convoqué une soixantaine dans un coin du Québec où il y a, disons, une diminution de chômage, les choses vont assez bien; il y en a une trentaine qui ont appelé au CLE pour vérifier si c'était obligatoire. On ne peut pas... on n'a pas le droit de convoquer et d'obliger quelqu'un à une rencontre. La rencontre, c'était pour présenter un peu les différents programmes qui existent de retour aux études, réinsertion sur le marché du travail, stages, subventions pour ces personnes-là. Donc, ces gens-là ont prétexté qu'ils étaient trop occupés, bon, il y en a cinq qui sont venus à la rencontre, puis il y en a deux qui se sont inscrits. Sont-ils encore là? Je ne le sais pas.

C'est sûr qu'on a un problème de participation aux mesures, hein, ça, c'est clair, puis on a un problème, au Québec, de surreprésentation des assistés sociaux. Il y a une baisse du nombre d'assistés sociaux qui est corollaire à la diminution du chômage, mais, quand on regarde avec les autres provinces, avec des exceptions, on a un problème de surreprésentation. Donc, c'est difficile de ne pas imaginer qu'il n'y a pas un lien entre les deux.

Le printemps dernier, j'ai beaucoup insisté sur ce qui se faisait en Europe du Nord, dans les pays scandinaves, simplement pour bien sensibiliser les collègues qui sont attachés au modèle social-démocrate et qui se considèrent comme des sociodémocrates, qui veulent être considérés parmi leur clientèle comme des sociodémocrates, que, sur ces questions-là, là, d'aide sociale, d'obliger les gens à être un peu plus actifs, de l'activation à l'aide sociale, on ne peut pas trancher au couteau les pays de droite et de gauche, c'est beaucoup plus complexe que ça. Moi, je connais assez bien certains de ces pays-là. En même temps qu'ils sont généreux, ils sont aussi extrêmement exigeants, rigoureux au niveau, par exemple, des équilibres budgétaires, donc c'est des mondes qui sont un peu... beaucoup plus, disons, différents de ce qu'on peut imaginer, là, parfois ici. Et je voulais convaincre les collègues que l'idée, ce n'est pas être de droite ou de gauche, être social-démocrate ou pas, ça se fait partout, partout dans le monde, d'avoir des contreparties.

Maintenant, si on revient dans notre pays, au Canada, bien, ça se fait dans toutes les provinces, sauf à Terre-Neuve-et-Labrador. Puis c'est intéressant de voir un peu... Là, j'ai colligé ça un peu cet été pour aller un peu plus loin là-dessus, ça m'a donné quelques idées, mais c'est important de comprendre, là, que c'est une norme internationale, d'avoir cette cible de contrepartie là pour activer, d'une certaine façon.

Les gens le font de différentes façons. Prenez le cas de la Colombie-Britannique. C'est clair, il faut convenir tôt d'une entente, il faut signer une entente avec les prestataires pour l'intégration au marché du travail. Eux, c'est très intégration au marché du travail, leur affaire. Si la personne omet volontairement de satisfaire aux engagements qui ont été convenus, il peut y avoir annulation de l'aide complètement ou il peut y avoir diminution de l'aide. Les barèmes d'aide financière, en Colombie-Britannique, c'est 610 $ par mois. À mon avis, il n'existe pas quelque chose comme le crédit d'impôt de solidarité, mais ce serait quelque chose qu'il faudrait fouiller, ça pourrait être intéressant.

• (15 h 30) •

L'Alberta, les barèmes pour une personne seule à l'aide sociale, c'est 627 $. Encore une fois, toujours, hein, tous les prestataires... Nous, on est seulement avec les primodemandeurs, hein, c'est un peu plus de 4 %, hein, de l'ensemble des assistés sociaux, c'est un petit nombre de personnes avec qui on a beaucoup de chances d'avoir du succès. En Alberta, un peu comme le Parti québécois dans les années 90, toutes les personnes aptes au travail conviennent d'une entente, conviennent des moyens aussi que l'on va utiliser, donc... Et il n'y a pas de distinction entre premier et autres manquements. Et, encore une fois, si un prestataire ne respecte pas les engagements convenus dans le plan d'intervention vers l'emploi, l'aide financière, elle est annulée.

Je continue simplement pour montrer les solutions, là, que les différentes provinces ont trouvées. Saskatchewan, hein, ici, c'est, encore une fois, tous les prestataires aptes au travail, donc plus près du modèle du Parti québécois, tous les prestataires aptes au travail conviennent, dans le cadre d'une entente — on voit toujours ce principe d'entente, hein, pour s'assurer, là, qu'il y a une forme d'engagement, là, qui est prise, une entente — des moyens qui devront être déployés afin d'intégrer le marché du travail. Encore une fois, c'est très travaillé, ça aussi. On a une approche, au Québec, je pense, qui est différente, qui est plus près, là, de notre culture. Encore, ici, sanction, annulation de la prestation.

L'Île-du-Prince-Édouard, dans le cadre du programme d'assistance sociale, tous les prestataires qui ont été évalués comme étant prêts à occuper un emploi et qui ont un potentiel pour l'emploi doivent participer à des mesures, établies, encore une fois, dans leur plan d'intervention. Refus ou abandon d'un emploi : annulation de l'aide financière. Vous vous rendez compte, on est à des années-lumière, là, hein, de ce que l'on peut faire dans les provinces voisines.

Nouvelle-Écosse, dans le cadre de son Programme de soutien à l'emploi et d'aide au revenu, les prestataires ont l'obligation de participer à une évaluation d'employabilité. Vous voyez, ça revient toujours, cette question d'évaluation, connaître la personne, connaître pour ensuite trouver la meilleure façon de l'aider. Premier manquement : annulation de la prestation pour une période de six semaines. Deuxième récidive : annulation de la prestation pour une période supplémentaire de six semaines.

Le Manitoba, dans le cadre du Programme d'aide à l'emploi et au revenu, la plupart des prestataires doivent chercher activement du travail. Ces prestataires sont donc soumis à des ententes relatives au travail. Toujours le même principe. Évaluation. Ensuite, on fait une entente sur laquelle on pourrait construire quelque chose pour une éventuelle réinsertion. Refus de l'emploi ou de recherche d'emploi, première fois : diminution de la prestation de 50 $ par mois, donc ça se rapproche beaucoup plus de nous. Si les obligations ne sont toujours pas respectées après six mois : réduction supplémentaire de 50 $ par mois, et ainsi de suite.

Je passe les États-Unis, vous connaissez un peu le système américain. L'Ontario est assez intéressante parce que, l'Ontario, très exigeante aussi, notamment au niveau de l'évaluation linguistique pour repérer des problèmes d'analphabétisme. Donc, là-dessus, eux, ils travaillent beaucoup, ils font des évaluations, des tests linguistiques pour voir, évidemment... surtout automatiquement pour toutes les personnes qui n'ont pas terminé leur deuxième année, pour voir, bien... Parce que, si vous voulez aider quelqu'un puis vous vous rendez compte que, finalement, il est analphabète fonctionnel, ça change, bien sûr, votre approche et l'aspiration que vous pouvez avoir à court et moyen terme pour ces personnes-là. Et, bien sûr, évaluation systématique, tout le monde, pas uniquement les... hein, tout le monde. Et ensuite un plan d'intervention. Si je me souviens bien, là, je n'ai pas mes notes, si je me souviens bien, ils doivent signer ce plan d'intervention là. Si les gens ne le suivent pas : un mois comme pénalité. Récidive : trois mois.

C'est notre pays, c'est le même pays, pourtant c'est des approches différentes. Mais il y a toujours cette idée d'encadrement serré, d'évaluation, des pénalités aussi, simplement... pas parce que... Et souvent ce qu'on remarque, dans les notes... On n'a pas toujours les informations, mais ce qu'on nous dit, c'est que souvent, en général, les pénalités ne sont pas exercées. Leur effet, il est important, mais c'est un effet dissuasif. Et tant mieux, parce que ça veut dire que les gens, une fois que, hein, ils ont compris que c'est sérieux, hein, ils ne raccrochent pas au téléphone en disant : Écoutez, je suis trop occupé, je ne viendrai pas à la rencontre, maintenant que je sais que ce n'est pas obligatoire, hein? Donc, c'est une boucle sur le problème que j'ai présenté un peu plus haut.

Donc, on n'est pas en train de faire quelque chose de bizarre, d'anormal, c'est plutôt une norme internationale. Je vous passe tous les pays. On a parlé de plusieurs pays européens à d'autres fins, là, le printemps dernier, mais je passe ça pour aujourd'hui.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Un petit rappel... c'est-à-dire une petite mise au point concernant le temps restant sur l'amendement de M. le député de Richelieu. Alors, M. le député de Saint-Jean, il vous reste une minute; M. le député de Rimouski, 7 min 40 s; M. le député de Richelieu, 10 min 45 s; M. le député de Drummond—Bois-Francs, 20 minutes; et puis, Mme la députée de Gouin, quatre minutes. Je vous passe la parole, madame.

Mme David (Gouin) : J'aimerais simplement dire au ministre, en réponse aux informations qu'il vient de nous donner, que moi, je suis très fière que le Québec soit différent du reste du Canada. De toute façon, sincèrement, ce n'est pas le seul point, ce n'est pas le seul secteur d'activité dans lequel le Québec a décidé d'agir différemment. Je vous rappellerai que le Québec est la seule province canadienne à avoir un réseau de centres à la petite enfance, en tout cas on l'a encore pour le moment. À ma connaissance, c'est la seule province canadienne qui a un régime d'aide juridique. C'est la province canadienne où il s'est fait, par le passé, le plus de logement social. C'est la province canadienne où la réhabilitation des délinquants mineurs est conçue comme l'aspect le plus important de toute la manière d'orienter notre système de justice. C'est la seule province canadienne dans laquelle nous avons des cégeps. Bref, le Québec est et sera, maintenant et toujours, une société distincte — ça, c'est une parole libérale. Moi, j'en suis fière et je ne tiens surtout pas à ce qu'on imite des modèles qui, à mon avis, nous font reculer.

Je suis très heureuse que le ministre n'ait pas abordé le système d'aide sociale américain établi sous M. Clinton. Je ne sais pas ce que sa femme en pense. J'ai été horrifiée quand ce nouveau système d'aide sociale a été mis en place, si je me souviens bien, dans les années 90, faisant en sorte qu'une personne ne puisse sous aucun prétexte être à l'aide sociale plus que cinq ans dans toute sa vie. Voilà une manière de couper les ailes aux gens, et de ne pas les aider, de toute façon, et de ne faire que renforcer les préjugés à l'égard des gens.

Je termine en disant que le ministre a effectivement raconté cette anecdote, bon, d'un centre local d'emploi qui faisait des démarches et tout, dans une région qu'il ne nomme pas... Et c'est correct, les anecdotes, dans le sens que ça donne une image concrète, hein, de ce dont on parle. Le seul problème, c'est que l'anecdote dit très peu de choses. Qui étaient ces gens? Des hommes? Des femmes? Des jeunes? Des moins jeunes? Depuis combien de temps ils étaient à l'aide sociale? Pourquoi est-ce qu'ils ont finalement décidé de ne pas embarquer dans un programme? Est-ce qu'ils sont sortis de l'aide sociale de toute façon ou ils y sont encore? C'est quand on a l'ensemble du portrait concret qu'on est capables de porter un jugement. Et ce qui me frappe terriblement ici, c'est que ceux qui ont l'expérience concrète de la vie à l'aide sociale et de comment on peut aider les gens, ce sont tous les organismes qui sont venus nous voir et qui, eux, font ça au quotidien; on ne les écoute pas, on préfère nous apporter des exemples de gens à qui on a téléphoné et qui ne sont pas venus. Oui, mais une véritable recherche, là, une véritable enquête nous dirait de qui on parle, de quoi on parle, pourquoi les refus, qu'est-ce qui s'est passé. Là, on serait capables d'avoir une discussion beaucoup plus concrète, discussion que nous avons pu avoir avec un certain nombre d'organismes, là, qui sont venus nous voir en commission parlementaire. Mais, depuis ce temps-là, je trouve que c'est comme si on avait complètement oublié tout ce que les gens nous ont dit. Je trouve ça extrêmement malheureux, personnellement.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre, vous voulez réagir? Non, ça va? M. le député de Richelieu, à vous la parole.

M. Rochon : M. le Président, quelqu'un dans l'entourage politique du ministre lui a visiblement fait des lignes, dont il paraît bien fier. Je disais un peu plus tôt qu'il n'avait pas encore... la conversion ne s'était pas encore opérée entre le prof et l'homme politique, dit politicien, le politicien. Alors, il s'est dit : Je vais me faire aider, puis la conversion va s'opérer. Alors là, il nous sort, fier de lui, en 2000 je ne sais plus quoi...

Une voix : 2008.

• (15 h 40) •

M. Rochon : ...2008, ça fait à peine huit ans, ça fait que c'est quand même d'actualité, en 2008, le député de Lac-Saint-Jean, qu'il nomme par son nom, pour être sûr que tout le monde va bien comprendre, puis aussi par le titre qu'il souhaite voir être le sien au mois d'octobre. Alors, le député de Lac-Saint-Jean, écoutez ça, mesdames messieurs, le député de Lac-Saint-Jean serait favorable à ce que les prestataires d'aide sociale aptes au travail retournent au travail. Méchante affaire! Mais savez-vous quoi, M. le ministre? Ces prestataires-là, eux autres mêmes sont favorables à retourner au travail. C'est quoi, la... Qu'est-ce que vous pensiez détenir là comme citation assassine? Bien oui, moi aussi. Moi aussi, je suis favorable au retour au travail des prestataires d'aide sociale aptes au travail. J'espère qu'ils vont se trouver un emploi, comme eux-mêmes l'espèrent, pour ne plus avoir à vivre de ces maigres prestations puis avoir un salaire qui leur permet d'avoir une existence décente, d'avoir des loisirs comme tout le monde, d'avoir une belle qualité de vie...

Le Président (M. Cousineau) : Un instant, M. le député de Richelieu. Oui. Une question de règlement, M. le député... M. le ministre?

M. Blais : On m'impute peut-être des propos, là. Ce que j'ai dit, là... Je veux bien qu'on discute et qu'on débatte, mais, sur ce que j'ai dit et sur ce que le député, surtout, de Lac-Saint-Jean, c'est ce qui nous intéresse pour le moment, a dit en 2008, il se dit d'accord avec l'idée d'adopter des mesures plus strictes pour assurer le retour sur le marché du travail des assistés sociaux aptes au travail, donc des mesures plus strictes. «Dans la mesure où ils sont aptes au travail, je n'ai pas de problème avec ça», dit-il. Voilà.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, la précision a été apportée. M. le député de Richelieu, poursuivez.

M. Rochon : Bien, continuons là-dessus, M. le Président. Il pense que, là, c'est bien meilleur, là, il vient de fesser dans le dash, comme on dit.

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Ne parlez pas en même temps, là.

M. Rochon : Bien non, ça ne fesse pas pantoute dans le dash. Moi aussi, je suis en faveur, hein, de mettre en oeuvre des politiques, de prendre des mesures pour faciliter la recherche d'emploi, pour les prestataires d'aide sociale, pour les accompagner dans cette recherche d'emploi. C'est ce qu'il prétend faire avec le programme Objectif emploi. On est d'accord avec ça, on lui dit depuis le début, on est d'accord. C'est avec les sanctions qu'on n'est pas d'accord, les sanctions.

Mais là il y a un mosus de problème, il y a un mosus de problème, M. le Président. Là, on va accompagner les prestataires d'aide sociale vers diverses avenues pour améliorer leur sort, alors acquisition de compétences, formation, marché du travail, avec, à Sorel-Tracy, zéro agent d'aide sociale. Tantôt, je l'entendais et aussi je suppose qu'il croyait détenir une formidable anecdote, qui allait révolutionner la réflexion actuelle menée au Québec sur ce sujet, il nous a dit : Je ne nommerai pas le centre local d'emploi — puis là il devait regarder en arrière de sa feuille, puis il y avait le nom du centre — mais il y a une place où on a convoqué cinq prestataires en entrevue, et il y en a juste deux qui se sont présentés. Oui. Je vais lui en servir une meilleure, au ministre, moi, O.K.? Une journée, là, à Sorel-Tracy, il y a cinq prestataires d'aide sociale qui se sont présentés pour rencontrer un agent, aucun agent ne s'est présenté. Savez-vous pourquoi? Il n'y en a plus.

M. le Président, ce n'est pas sérieux. Ce n'est pas sérieux, M. le Président. Ce n'est pas davantage sérieux que le communiqué, là, qui a été émis par le ministère de M. le député et qui veut... je voulais dire «faire croire à la population», non, qui informe la population de nombreux assouplissements qui ont été apportés au projet de loi n° 70. Les assouplissements, là, apportés au projet de loi n° 70 suite à des propositions d'amendement venant du parti ministériel, j'ai hâte de les voir. D'après moi, on les compte sur les doigts d'une seule main, puis on n'a probablement pas besoin de la main au complet. Les amendements proposés à ce projet de loi n° 70 sur l'aide sociale, ils sont venus des oppositions, de l'opposition officielle particulièrement, puis, oui, il y en a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup, de propositions d'amendement. C'est venu dans une boîte, une grosse boîte de Fleecy, là, il y en a une pile, là. Nous, on en a proposé, des assouplissements. Lui, pas beaucoup.

Mais j'ai hâte de voir, puisque la commission a dit qu'elle produirait un tout petit cahier, là, qui allait les réunir. Je pense qu'une chemise comme celle-ci suffira, M. le Président, vous n'aurez même pas besoin d'utiliser votre brocheuse, très, très facile.

Le communiqué, encore une fois, ça, c'est intéressant, mon collègue de Saint-Jean l'a soulevé, le communiqué dit que, donc, le ministre «a apporté de nombreux assouplissements en plus de déposer ses intentions réglementaires». Aïe! là, là, c'est fort, là! Je me souviens très bien, pour avoir souventefois participé aux travaux de cette commission, que nous n'avons eu de cesse de lui demander de produire ici les intentions réglementaires. On en a vu une couple, mais, l'essentiel, il n'a jamais voulu le produire parce que, le ministre, ce qu'il fait avec nous, c'est : Si vous êtes gentils — peut-être ne le dit-il pas en ces termes précis, mais en substance c'est ce que ça veut dire — si vous êtes gentils, je vous en présenterai d'autres de temps en temps. Mais là, le communiqué, ce n'est pas ça qu'il laisse entendre. Le communiqué laisse entendre qu'il a déposé ses intentions réglementaires, qu'il a apporté de nombreux assouplissements, que nous, on veut le statu quo. Nous qui en avons proposé, on veut le statu quo.

Moi, là, j'ai l'impression, là, que l'attaché de presse du ministre... peut-être même pas un attaché de presse, peut-être le ministère, la direction des coms du ministère, là, a présenté ça au ministre, là, et il a fait comme pour le projet de loi, il n'est pas allé voir les détails, il a dit : Dans l'ensemble, là, c'est correct. Il a fallu que nous, nous lui fassions remarquer que, dans le détail, ça ne marche pas pantoute, pantoute, pantoute, là. Ce n'est pas représentatif du tout de la réalité, ce communiqué-là, comme ne l'étaient pas les chiffres qu'on m'a servis ce matin. Je sais, j'ai l'air de radoter, mais c'est important. Les chiffres qu'on m'a servis, là, sur le marché de l'emploi à Sorel-Tracy, là, il y avait de l'emploi, pas de problème. Bien oui, on a oublié un détail : c'étaient les chiffres pour la Montérégie. On l'a signalé mais prenant pour acquis que Sorel, ça devait être pareil, tu sais. Bien non, ce n'est pas la même chose.

Alors, on oublie trop de détails, M. le Président. Alors qu'on devrait avoir ici des discussions extrêmement sérieuses...

Le Président (M. Cousineau) : Un instant. Est-ce que c'est une question de règlement, M. le ministre?

M. Blais : ...il faut... Bon, je comprends, là, que, tu sais, il y a un petit peu de relâchement, là, mais je pense qu'il faut faire attention pour ne pas imputer des propos qui n'ont pas été tenus du tout, du tout, du tout.

Le Président (M. Cousineau) : Soyez prudent, M. le...

M. Rochon : ...terminer. Et puis c'est drôle, je vais justement aborder le thème du relâchement, d'ailleurs, c'est celui que j'abordais.

Oui, il y a du relâchement, M. le Président, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de relâchement — je n'ai pas dit «beaucoup» cinq fois pour faire du temps, c'est pour appuyer — et, ce relâchement-là, on le voit de la part du gouvernement. Ce n'est pas sérieux, ce projet de loi là. C'est fait à la va comme je te pousse, ça ne tient pas compte de particularités régionales et locales extrêmement importantes, ça ne veut pas tenir compte de la situation des femmes sur le marché du travail, qui n'est pas du tout la même que celle des hommes, et ça refuse aussi de tenir compte du personnel disponible dans les centres locaux d'emploi.

D'ailleurs, tiens, tiens, tiens, on va parler des vraies... je vais finir avec les vraies affaires. C'est un slogan que vous aimez, ça, les vraies affaires, vous vous souvenez, les vraies affaires. Je vais vous poser une question, puis, vous allez voir, ça va être la vraie affaire.

Vous voulez accompagner, c'est le défi du programme Objectif emploi, les prestataires, particulièrement les primodemandeurs, vers des avenues, hein, d'acquisition de compétences, d'arrivée sur le marché du travail, de retour aux études. Zéro agent et agente d'aide sociale à Sorel. M. le ministre, une question qui aborde une vraie affaire : J'aimerais vous entendre séance tenante ou d'ici la fin de l'après-midi, je peux vous donner le temps de réfléchir un peu, vous entendre me dire que ces agents et agentes d'aide sociale qui ont été délocalisés, là, de Sorel-Tracy vers une autre municipalité sur le territoire de la Montérégie vont réintégrer leur lieu de travail à Sorel-Tracy puis vont accompagner physiquement les prestataires d'aide sociale pour qu'ils puissent améliorer leur sort.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

• (15 h 50) •

M. Blais : M. le Président, je vais demander peut-être à la sous-ministre de répondre, là, sur le fonctionnement exactement d'un CLE comme celui de Sorel-Tracy. Donc, on est allés chercher quelques informations. Il y a des confusions parfois, agent d'aide à l'emploi, agent d'aide sociale, qui nourrissent le débat, donc elle va nous aider là-dessus.

Une petite précision, je suis allé chercher des informations supplémentaires. Donc, les chiffres du chômage au Canada sont par région. Donc, on a parlé de la Montérégie tout à l'heure. On a peu de choses pour les sous-régions, si vous voulez, mais on a parfois des mesures qui sont faites. La dernière mesure, bon, remonte à un certain nombre d'années, mais à ce moment-là, c'est intéressant de savoir, Sorel et Montérégie avaient le même taux de chômage, c'est 2011. Alors, aujourd'hui, il faudrait voir, ce serait intéressant de voir si on a une évaluation, si Sorel est plus bas que Montérégie, mais je n'ai pas les chiffres pour l'appuyer.

Alors, sur la question peut-être, hein, du fonctionnement, là, de...

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme la sous-ministre associée, Mme Bourassa. Allez-y, madame.

Mme Bourassa (Johanne) : Oui. Alors, comme vous le dit M. Blais, dans les services, il y a des agents d'aide à l'emploi qui s'occupent de toutes les questions d'emploi, donc ce sont eux qui font l'entrevue d'évaluation et d'aide à l'emploi, qui élaborent le plan d'intervention, qui font le suivi avec le client, qui font le lien avec les organismes en développement de l'employabilité, les établissements scolaires sur le territoire, et il y a les agents d'aide socioéconomique, d'aide financière, qui, eux, ont la responsabilité de recevoir les demandes d'aide financière, d'établir l'admissibilité et ensuite de faire la gestion du dossier.

Ce qu'on nous dit, c'est que, dans le CLE de Sorel-Tracy, effectivement, les agents d'aide financière ont été regroupés à Saint-Hyacinthe pour le traitement des dossiers actifs. Par ailleurs, quelqu'un qui a besoin de rencontrer son agent d'aide financière, on lui donne un rendez-vous à son CLE, et l'agent se déplace ces journées-là au centre local de Sorel.

Par ailleurs, les agents d'aide à l'emploi, il y en a sept, et ils sont toujours au CLE de Sorel, et ce sont eux qui vont, dans le cadre du programme Objectif emploi, comme maintenant, recevoir la clientèle en entrevue d'évaluation d'aide à l'emploi et pour établir, là, le plan d'intégration des personnes.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la sous-ministre associée. M. le... Il vous reste une minute.

M. Rochon : Oui. Ce sera sous forme de question. Puisque le ministre a fait intervenir madame, je me permettrai de lui poser une question complémentaire : Quel but poursuivait-on en délocalisant les travailleuses et travailleurs qu'on a délocalisés? Était-ce un objectif financier? Cela s'est-il fait dans le cadre de compressions financières? Est-ce une mesure d'austérité, M. le Président?

Je ne veux pas lui faire faire de la politique, je reprends ma question autrement. J'aimerais qu'elle me dise pour quel motif ces personnes ont été délocalisées.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme la sous-ministre.

Mme Bourassa (Johanne) : Oui. Je vous dirais que c'est pour des raisons d'optimisation, parce que les volumes de prestataires ont été en décroissance, ce qui fait que le volume de dossiers par centre local d'emploi a varié dans le temps. En regroupant le traitement des demandes, ça permettait de maintenir un niveau de dossiers par agent plus équitable à l'intérieur de l'organisation du travail.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la sous-ministre associée. C'est tout le temps que vous aviez, M. le député de... Oui, M. le ministre.

M. Blais : Un ajout à ce vient d'être dit mais peut-être à un niveau un peu plus national. Il faut comprendre puis il faut aller dans les CLE, là, sur le territoire du Québec pour le voir, que... Il faut comprendre qu'il y a une diminution du chômage, donc, et une diminution quand même de l'aide sociale, depuis un certain nombre d'années, donc il y a une diminution de la pression, hein, dans plusieurs, plusieurs, plusieurs CLE au Québec. Ces éléments-là ajoutent, bien sûr, hein, à la pertinence de faire un programme comme Objectif emploi, parce que, disons, nos centres sont là, on a encore des employés, on a annoncé aussi qu'on voulait augmenter... qu'on va augmenter de 90 ETC, donc, nos équipes, là, pour répondre à des nouvelles demandes, donc il y a une opportunité en termes de prise d'emploi, en termes aussi, disons-le, de disponibilité de temps, là, des employés pour rencontrer de façon un peu plus assidue ces personnes-là et les suivre. Je pense que c'est vraiment le bon moment pour le Québec, là, d'avancer, là, dans cette direction.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors donc, je suis prêt à entendre un autre intervenant. Oui, M. le député de Rimouski. Il vous reste 7 min 40 s sur l'amendement du député.

M. LeBel : Oui. Je vais essayer d'y aller en trois étapes. Les primodemandeurs, déjà, peut-être continuer là-dessus les questions, un primodemandeur, il arrive, il demande une entrevue, là. Là, actuellement, celui qui a l'entrevue en cinq jours — c'était avec vous que j'avais discuté de ça, là, à l'époque — celui qui a l'entrevue en cinq jours, il rencontre qui? Il rencontre le socioéconomique, aide financière?

Le Président (M. Cousineau) : Mme la sous-ministre associée.

Mme Bourassa (Johanne) : Il va rencontrer son agent d'aide à l'emploi. L'agent d'aide financière va faire une évaluation de sa demande et des pièces qu'il a déposées, va communiquer avec la personne s'il y a des pièces manquantes à son dossier ou pour discuter avec elle de ses droits et obligations en vertu des règles de l'aide financière, mais la personne qu'il va rencontrer, c'est son agent d'aide à l'emploi, pour faire une évaluation de sa situation d'emploi, faire l'entrevue et élaborer un plan d'action.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Ça fait que la personne qui arrive à l'aide sociale, qui a différentes difficultés, là, de... Si je reviens avec les... On parlait des femmes tantôt. Quelqu'un qui a 52 ans, qui a, tu sais, vécu différentes difficultés arrive comme primodemandeur. Est-ce qu'elle rencontre... La première personne qu'elle rencontre, ce n'est pas son agent socioéconomique, pour l'aide financière, c'est la personne de l'aide à l'emploi?

Le Président (M. Cousineau) : Mme la sous-ministre.

Mme Bourassa (Johanne) : Oui. Je vous dirais que ça va dépendre des situations. Si le formulaire... Si l'information est complète et que les documents qu'elle doit déposer pour justifier sa demande sont complets, elle n'aura pas de relation avec un agent d'aide financière. S'il y a des informations qui sont manquantes au dossier ou des informations à la demande qui laissent entendre qu'elle aurait droit à d'autre chose qu'une prestation de base, là, effectivement, l'agent d'aide financière va entrer en relation avec elle, mais toujours pour traiter la question financière de son dossier. La question d'emploi sera traitée par l'agent d'aide à l'emploi.

M. LeBel : Selon vous, la première personne qu'on doit rencontrer, c'est tout de suite l'intégration en emploi.

Mme Bourassa (Johanne) : Ce qui est recherché, c'est effectivement de les faire rencontrer rapidement une personne qui va évaluer leur situation face à l'emploi et qui va les mobiliser ou les mettre en mouvement vers l'emploi.

M. LeBel : O.K. Bien, je trouve ça un peu particulier. Si on dit qu'on veut intégrer tout le monde, puis accueillir tout le monde, puis bien évaluer la situation de la personne...

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski, si vous permettez, à ce moment-ci, pour permettre aux gens d'aller se rafraîchir un petit peu, je vais suspendre pendant cinq minutes, parce que c'est long, en fin de compte. On a commencé à 14 heures, puis ça va jusqu'à 18 heures.

Si vous permettez, on va suspendre cinq minutes pour permettre aux gens d'aller se rafraîchir et puis se délier les jambes un petit peu. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 58)

(Reprise à 16 h 7)

Le Président (M. Cousineau) : Nous allons reprendre nos travaux. Vous voyez qu'une pause, ça fait toujours un peu de bien.

Donc, nous en étions avec M. le député de... excusez, de Rimouski. Remarquez que c'est sur la même rive, hein?

M. LeBel : Et il me reste combien de temps?

Le Président (M. Cousineau) : Quand vous avez commencé, vous aviez un 7 min 40 s, il va vous rester à peu près sept minutes, oui.

M. LeBel : Merci. O.K., bon, avec cette pause-là, on va repartir ça autrement, puis je reviendrai sur ma question plus tard.

Je veux juste rappeler... Et ça m'a fait rire un peu quand le ministre a cherché des déclarations dans le passé de collègues. Tu sais, lui, ce livre-là, c'est une mine de déclarations, là, qu'on peut aller chercher à chaque page. Mais le ministre, il m'a fait rire parce que c'était... Dans une de ses citations là-dedans, je vais vous le lire, il dit : «Malheureusement...» Parce qu'on propose un débat de fond, on propose un débat de fond sur la lutte à la pauvreté puis on dit depuis tantôt qu'il manque un peu de vision, qu'on est au cas par cas, puis on est déjà sur un programme où on aurait pu, avant d'aller sur le programme... d'avoir un plan d'action plus large. Le ministre avait écrit : «Malheureusement, il apparaît difficile de compter uniquement sur la classe politique pour mener de tels débats de fond puisqu'elle demeure soumise à la logique électoraliste qui n'accepte généralement d'elle que la formulation de slogans.» Je pense que le ministre a appris assez rapidement cette logique de la classe politique en nous sortant des déclarations hors contexte.

Dans son même livre, ce qu'il nous dit, concernant l'aide aux plus démunis, où on parle de réciprocité : «Dans cette perspective, il est attendu de chacun qu'il fournisse une "contribution" à la société, si modeste soit-elle. Ceux qui ne le feraient pas ne devraient rien attendre des fonds publics — c'est un peu ce que propose le ministre. Pourquoi existerait-il une quelconque obligation de solidarité sociale envers les "paresseux", les "profiteurs" et ceux qui se placent "volontairement" dans une situation de dépendance?

«Cette conception de la justice — c'est toujours le ministre qui écrit — correspond grossièrement, sans s'y réduire complètement, à l'idée très ancienne de "justice commutative", selon laquelle on devrait toujours recevoir en proportion de ce que l'on donne. Aristote fut l'un des premiers défenseurs de cette idée, finalement encore assez répandue de nos jours. Nos voisins américains lui ont fait une grande place dans leur dernière réforme de la sécurité sociale et il est évident qu'elle joue un rôle central dans la justification éthique du "workfare". Malgré tout, je la considère — et c'est le ministre qui parle — inapplicable, incohérente et surtout profondément injuste.»

C'est un peu dans ce sens-là qu'on pose des questions depuis le début. On pense que les sanctions puis la façon que le ministre aborde tout ça, les sanctions, retenir les chèques, et tout ça, on est loin du fond de la question de lutte à la pauvreté. Et c'est souvent porté par beaucoup de préjugés, et c'est assez injuste.

• (16 h 10) •

Le ministre souvent aussi va nous ouvrir... nous dire qu'il a de l'ouverture sur certains aspects. Je lui ai dit tantôt, on sort certaines... bon, on parle de certains pays où on est assez... on travaille avec les demandeurs d'aide sociale, on travaille de façon très costaude, mais en amont ces pays-là ont investi beaucoup dans la lutte à la pauvreté par des garderies, par le logement social, par des initiatives populaires, c'est des pays où on ne se gêne pas d'intervenir avec les groupes communautaires, où on intervient. Ce que je dis, c'est qu'au Québec non seulement on est déjà intervenu, mais, depuis deux ans, on a coupé systématiquement dans ces mesures, dans ces mesures puis dans ces actions, entre autres je parle des garderies, des CPE, qui venaient aider à lutter contre la pauvreté. Ça fait qu'on ne peut pas couper là-dedans puis, d'un autre côté, dire : On va restreindre notre aide aux gens à l'aide sociale. Si on veut avoir une vraie stratégie de lutte à la pauvreté, il faut travailler aussi en amont, et c'est ce qu'on ne fait pas au Québec.

Le ministre est drôle, il nous disait : Bon, il y a peut-être de l'ouverture. Un peu plus et il me disait : Bon, si on augmentait le nombre de places en CPE, si j'augmentais le logement social, seriez-vous d'accord avec... Je ne sais pas s'il a des velléités de devenir premier ministre, mais, pour l'instant, j'ai bien beau lui demander d'augmenter les centres de la petite enfance ou le logement social, ce n'est pas lui qui va me donner une réponse. Et, si je me fie sur ce qui s'est passé les deux dernières années, pas certain que je vais croire à tout ça.

À un autre moment, j'avais posé des questions sur les... Le ministre avait ouvert, il avait dit : Vous rendez-vous compte, M. le député, je ne suis pas capable, obliger les personnes, je ne suis pas capable de les inviter à participer à des rencontres. Et là, en questionnant, on a appris qu'il y avait quand même une procédure pour demander des rencontres aux gens à l'aide sociale et on a eu beaucoup de... je pense que ça a été formateur ou éducatif pour plein de monde autour de la table, là, où on a appris comment tout ça fonctionnait. Je répète, là : Quelqu'un en demande l'aide sociale, en dedans de cinq jours il peut être rencontré. S'il ne l'est pas, il y a un mois, et, si ce n'est pas fait, il y aura une relance par écrit ou par téléphone pour rencontrer la personne. Ce que je n'ai pas, toujours, puis ce que je dénote... Puis je trouve ça dommage, parce qu'on pourrait être plus alimentés si on savait exactement combien de personnes sont rencontrées en cinq jours, en un mois. Je pense qu'on ne serait pas dans le débat d'obligation, on pourrait voir un peu plus comment ça fonctionne.

Et là, tantôt, en posant des questions, là, on ne sait plus qui rencontre qui. Quand, dans les cinq jours, quelqu'un arrive à l'aide sociale, on apprend que c'est peut-être l'agent d'aide à l'emploi qui va la rencontrer, la personne qui demande l'aide sociale, ou peut-être la personne d'aide socioéconomique, ça dépend comment le formulaire a été rempli par la personne. Ça veut dire que, quelqu'un qui est à l'aide sociale, qui est un peu... qui a de la difficulté, qui ne sait pas trop, qui est nerveux, qui vit de l'angoisse, puis tout ça, qui dit : Moi, je remplis mon formulaire, s'il l'a bien fait, bien, c'est la personne d'aide à l'emploi qui va la rencontrer; s'il a mal fait son formulaire, c'est la personne socioéconomique. Mais là il n'y a pas le même nombre de... Il y a des CLE, je comprends, qui ont, dans le CLE, des agents d'aide à l'emploi, mais il n'y en a pas d'aide socioéconomique. Ça fait qu'il y a beaucoup de «ça dépend de». Ça dépend comment ça a été fait, ça dépend comment ça a été proposé, ça dépend de la région, ça dépend de...

Ce que j'aimerais, c'est... Est-ce que ce serait possible que le ministre nous dépose par CLE le nombre d'agents d'aide à l'emploi puis le nombre d'agents socioéconomiques, puis avoir un peu la définition de tâches de chacun de ces postes-là, et savoir, actuellement, là, dans le cadre des primodemandeurs, est-ce que c'est plus les agents de développement de l'emploi qui rencontrent les primodemandeurs ou c'est plus les agents socioéconomiques? En tout cas, ce serait assez intéressant d'avoir le dépôt de tout ça. Ça nous donnerait un peu... on pourrait savoir un peu mieux comment on veut accompagner nos gens.

Puis je rappellerais aussi qu'il faut toujours revenir à l'idée que, la personne qui demande de l'aide sociale, cette personne-là vit des réalités qui ne sont pas les mêmes, chacune des ces personnes-là. Je rappelle qu'un jeune de 20 ans qui arrive à son CLE, qui est en démarche, là, qui est apte au travail, qui est en démarche...

Le Président (M. Cousineau) : En conclusion, M. le député, parce que votre temps s'écoule. Il reste quelques secondes.

M. LeBel : Moi, ce que je dis, c'est qu'il y a la réciprocité. Si on veut dire aux gens : On veut vous accompagner, il faut leur donner les services qu'il faut pour les accompagner.

Et le ministre me disait que, si je ne suis pas capable de donner les services qu'il faut, il n'y aura pas de sanction; si je ne suis pas capable de le rencontrer, je ne retiendrai pas son chèque. Mais ce n'est pas une façon de procéder. Pour quelqu'un qui arrive à l'aide sociale, il faut que les règles soient claires. Et là on ne sait même pas qui les accueille, puis on ne sait même pas s'ils vont être capables de les accueillir, puis on ne sait même pas sur quelle base ils vont les accueillir. Ça fait que je trouve qu'on a un problème.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. M. le ministre.

M. Blais : Peut-être on va essayer de voir quel genre de formation on peut donner. Bon, c'est une question simple, mais c'est une réponse complexe, parce qu'il y a beaucoup, beaucoup de centres locaux d'emploi, il y a beaucoup de personnes qui y travaillent. On va essayer de voir, là, qu'est-ce qu'on peut donner à court ou moyen terme comme information là-dessus.

Sur la justice commutative, ça, c'est assez extraordinaire parce que, dans le fond, c'est une conception de la justice qui est très populaire, mais que j'ai toujours trouvée, effectivement, erronée. Elle est populaire parce qu'on l'utilise beaucoup, par exemple, dans le sport. On accepte, dans le sport, que, bon, une fois que les équipes sont calibrées, une fois que les équipes... je ne sais pas, moi, les boxeurs ont des poids similaires ou des choses comme ça, bon, bien là on peut avoir une joute, et puis que le meilleur gagne, puis on accepte qu'il y en ait un qui gagne, qu'il y en ait un autre qui perd. Mais, dans la vie en société, ça ne fonctionne pas comme ça. La partie dont on parle, c'est la partie de l'existence, le type de vie que l'on peut espérer avoir dans une société qui espère à traiter justement ses membres. Et le problème avec la justice commutative, hein, puis peut-être c'est ça que j'essayais d'expliquer, là, hein, je n'ai pas le livre, mais le problème, c'est que, dans le fond, le principe : À chacun son talent ou à chacun ses efforts, c'est valable si tout le monde a le même talent ou tout le monde a la capacité de fournir les mêmes efforts. On sait bien que la vie, de la naissance jusqu'à la fin de son existence, c'est traversé par de nombreuses inégalités, et c'est ça qui nuit, je pense, le plus au principe de justice commutative.

Cependant, là où il y a une possibilité d'avoir une conception de la justice comme réciprocité, hein, ce n'est pas dans l'idée : À chacun son effort ou à chacun selon son talent ou son mérite, mais que chacun doit contribuer selon ses capacités. On pourra avoir un débat philosophique sur cette conception-là de la justice, mais je peux vous dire que celle-là, elle est beaucoup plus robuste, puis elle est défendue autant par des penseurs de gauche que de droite. Chacun devrait pouvoir contribuer, dans la société, selon ses capacités.

Et c'est la raison pour laquelle, bon, il y a l'adhésion à l'idée qu'on pourrait exiger de gens qui reçoivent, hein, une aide sociale, qui sont aptes, bien sûr, un effort supplémentaire, bon, ça vient de ce principe de justice comme réciprocité. Si vous êtes capable de fournir un effort, bien, très bien, on va vous le demander, de le faire. Ça, ça rejoint une grande partie de la population, puis je reconnais qu'il peut y avoir un débat philosophique sur la conception de la justice comme réciprocité.

Il reste un autre argument, qui est complémentaire mais qui est autonome aussi, hein, c'est l'idée que, si on peut aider une personne, surtout une jeune personne, qui commence dans la vie, de la même façon, parfois, qu'on a des législations pour rendre l'école obligatoire, on peut avoir des législations pour rendre, par exemple, la diplomation obligatoire jusqu'à un certain point, notamment quand on rencontre des personnes à l'aide sociale qui n'ont pas terminé leur secondaire V, mais là on le fait au nom de la promotion des capacités à venir de cette personne-là. Bon, puis ça peut peut-être vous choquer, mais, du point de vue moral, on voit ça assez souvent, ce type de justification. On dit : Ça nécessite une intervention un peu plus musclée, mais le but, c'est de libérer le potentiel à venir des personnes.

Pierre Fortin disait dans une étude, je pense, et c'est paru cet été, si je me souviens bien, que, si vous terminez votre secondaire V, au Québec, on peut évaluer que vous aurez accès à un revenu de près d'un demi-million de dollars de plus que si vous ne terminez pas votre secondaire V. Vous vous rendez compte de l'enjeu pour une personne? Alors, ça vaut la peine de dire, quand tu arrives à 18 ans, tu as eu une vie difficile : Écoute, on va t'aider, nous, on va t'aider à te donner les ressources pour que tu puisses aller chercher ton diplôme, parce que, hein, on augmente, à ce moment-là, bien sûr, les capacités de ces personnes-là tout au long de leur vie.

Alors, c'est un peu le type d'argument qu'on peut utiliser. On est loin de la justice commutative, hein, mais on est à l'intérieur ou bien de la justice comme réciprocité ou bien la justice comme déploiement, là, du potentiel. Chacun devrait avoir le droit de pouvoir développer son potentiel, dans la vie, et, si on peut les aider, parfois, avec une certaine contrainte, bien, il faut le faire.

• (16 h 20) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, est-ce qu'il y a encore d'autres intervenants? Il reste une minute au député de Saint-Jean. M. le député de Saint-Jean, est-ce que vous prenez votre minute? Oui?

M. Turcotte : M. le Président, je vais profiter de cette minute pour demander de nouveau au ministre de déposer l'ensemble de ses intentions réglementaires comme il l'a mentionné dans son communiqué de presse, parce que, sinon, il devra effectivement émettre un erratum. Donc, je ne voudrais pas le mettre dans cette situation délicate, donc j'aimerais qu'il dépose l'ensemble des intentions réglementaires pour l'ensemble du projet de loi, pas juste si on est gentils, puis si on est fins, puis si on dit comme lui.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre, est-ce que...

M. Blais : M. le Président, je n'ai pas dit qu'il faut être gentil, fin, penser comme moi. J'ai simplement dit que, si on avançait, ça, c'était normal que, lorsqu'on avance, point par point, on aura l'occasion de voir les intentions réglementaires, s'il y en a d'autres qui restent. Mais, pour l'essentiel, les intentions réglementaires les plus importantes, elles ont été déposées et largement discutées, en tout cas, là, ici. Donc, je n'ai pas besoin d'aller plus loin.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, est-ce qu'il y a d'autres... M. le député de Drummond—Bois-Francs? Non?

Alors donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, avant de mettre aux voix cet amendement, je vous rappelle qu'il faut... Parce que je suis bien placé pour entendre tout ce qui se dit, puis c'est une très belle conversation, mais je vous rappelle qu'il faut toujours se ramener à l'amendement. Parce que l'amendement précisait, là, les «organismes qui travaillent à améliorer l'employabilité des femmes», puis souvent, bien... on a philosophé sur beaucoup de choses, là, mais il faut toujours se ramener à l'amendement, s'il vous plaît. Je suis très, très généreux, vous le savez, j'ai un grand coeur, mais c'est un rappel que je dois vous faire.

Donc, est-ce que l'amendement déposé par M. le député de Richelieu est adopté? Oui, M. le député de Saint-Jean?

M. Turcotte : M. le Président, est-ce que vous pouvez procéder au vote par appel nominal, s'il vous plaît?

Le Président (M. Cousineau) : Mme la secrétaire, vote par appel nominal.

La Secrétaire : M. Rochon (Richelieu)?

M. Rochon : Pour.

La Secrétaire : M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

La Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

La Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

La Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

La Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

M. Hardy : Contre.

La Secrétaire : M. Busque (Beauce-Sud)?

M. Busque : Contre.

La Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

Le Président (M. Cousineau) : Je m'abstiens.

La Secrétaire : L'amendement est rejeté.

Le Président (M. Cousineau) : Donc, l'amendement déposé par M. le député de Richelieu est rejeté. Nous... Oui, Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je voudrais déposer un amendement.

Le Président (M. Cousineau) : D'accord, Mme la députée de Gouin. Alors, vous pouvez en faire la lecture, puis par la suite nous allons suspendre pour en faire des copies.

Mme David (Gouin) : Oui. Alors, l'amendement se lirait comme suit : Le premier alinéa de l'article 28 du projet de loi, tel qu'amendé, est modifié par le remplacement du mot «personnes» par les mots «bénéficiaires du Programme d'aide sociale ou du Programme de solidarité sociale» et par l'ajout, après le mot «participent», de «une prestation supplémentaire».

Le Président (M. Cousineau) : Merci, madame. Donc, je suspends quelques instants pour permettre les photocopies.

Alors, suspendu pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 23)

(Reprise à 16 h 26)

Le Président (M. Cousineau) : Nous reprenons nos travaux. Donc, Mme la députée de Gouin, votre amendement, vous pouvez en discuter, on vous laisse la parole.

Mme David (Gouin) : Oui, merci, M. le Président. Donc, si l'amendement était adopté, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, le premier alinéa se lirait donc comme suit : «Le programme Objectif emploi vise à offrir aux bénéficiaires du Programme d'aide sociale ou du Programme de solidarité sociale qui y participent une prestation supplémentaire et un accompagnement personnalisé, notamment par une formation, en vue d'une intégration en emploi.»

Le sens de mon amendement est assez simple et clair, je pense, c'est que, dans le fond, si le programme Objectif emploi est un bon programme, oublions un instant la question des sanctions, mais, pour le reste, hein, si c'est un bon programme, un programme où vraiment, là, on dit qu'on va aider les gens, on va les soutenir, on va les accompagner, on va les aider à développer leur plein potentiel, pourquoi est-ce qu'on ne l'offre pas à toutes les personnes à l'aide sociale?

Je sais bien, on me dira : Les primodemandeurs, c'est plus important parce que justement ce sont des gens qui n'ont pas été à l'aide sociale, qui arrivent à l'aide sociale. Remarquez, il peut y avoir des gens qui l'ont peut-être été il y a 10 ans et qui, là, reviennent, là, ce n'est pas très clair, ça, si on les considère primodemandeurs ou non, mais, disons, la majorité, là, des primodemandeurs seraient des gens qui demandent de l'aide sociale pour la première fois de leur vie. Je comprends qu'on dise : On va aider de façon particulière ces personnes-là pour qu'elles ne restent pas à l'aide sociale, sachant cependant que le ministre nous a dit en juin, selon les chiffres du ministère, que de toute façon la moyenne des personnes reste neuf mois à l'aide sociale. Bon, il y a des gens qui sont déjà à l'aide sociale. Parmi ces personnes-là, il y a des gens qui sont au Programme d'aide sociale ou au Programme de solidarité sociale. Autrement dit, il y a des gens, dans le langage que tout le monde connaît un peu, là, soit jugés aptes au travail ou soit jugés inaptes à occuper un emploi de façon régulière... ou, on va dire, ils ont des contraintes sévères à l'emploi. Concrètement, parmi les personnes qui sont catégorisées, entre guillemets, ayant des contraintes sévères à l'emploi, on retrouve des personnes handicapées, qui parfois ont des handicaps même assez lourds, mais qui seraient tellement désireuses, justement, de contribuer, là. J'ai noté les mots du ministre tout à l'heure : Chacun contribue selon ses capacités. C'est une bonne idée. Alors, pourquoi pas les personnes qui vivent avec un handicap? Pourquoi ne pas leur donner la chance de contribuer, même, par un travail? D'ailleurs, ça existe déjà, là, des ateliers adaptés, par exemple, où des personnes ayant un handicap physique ou intellectuel contribuent, avec les capacités qu'ont ces personnes, à fabriquer des objets, par exemple, qui tiennent compte évidemment, bon, de la capacité des gens. Ça, c'est une contribution, et il y a d'autres personnes qui contribuent d'autres manières. Il y a bien des façons de contribuer à la société.

• (16 h 30) •

Alors, si le programme Objectif emploi n'est pas uniquement un programme axé sur le retour classique à l'emploi, 40 heures-semaine, à durée indéterminée... Puis le ministre nous l'a dit souvent, ça, il peut y avoir des programmes de préemployabilité, il peut y avoir même de l'alphabétisation, il peut y voir plein d'aspects dans son programme qui s'appelle Objectif emploi. Mais pourquoi ce ne serait pas accessible aux gens qui sont, au moment où on se parle, là, à l'aide sociale, dans l'un ou l'autre des programmes? Pourquoi le primodemandeur aurait-il ou aurait-elle, en fait, une allocation supplémentaire plus importante que la personne en ce moment à l'aide sociale qui participe à un programme et qui a 130 $ de plus par mois? On est en train de créer des drôles d'inégalités, là, c'est assez ahurissant. Si on pense que le primodemandeur va être plus motivé, ça va être plus important, il va mieux vivre en lui donnant 150 $ par mois, mais pourquoi ce ne serait pas vrai de n'importe quelle personne qui est à l'aide sociale et qui vit dans la pauvreté?

Donc, je ne comprends pas très bien pourquoi ce programme est offert uniquement aux primodemandeurs. Est-ce que c'est une question d'argent? Est-ce que le gouvernement trouve qu'il manque d'argent pour appuyer davantage toutes les personnes à l'aide sociale désireuses de participer à un programme? Et, si ce n'est pas une question d'argent, quelle est la raison?

Alors, je vais arrêter ici pour le moment parce que j'aimerais que le ministre réponde à cette question : Pourquoi le programme Objectif emploi n'est-il pas offert à toutes les personnes en ce moment à l'aide de dernier recours, désireuses d'y participer?

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.

M. Blais : Bien, disons, on ne veut pas mettre des personnes qui ont des contraintes sévères à l'emploi dans une obligation, hein, nécessairement, là, de... en tout cas, ça n'a jamais été dans notre intention, même toutes les personnes aptes.

Mais il faut faire attention, cependant. Au Québec, puis on me corrigera, là, toutes les personnes qui participent à des mesures, hein, reçoivent une bonification, hein? Bien sûr, participer à une mesure, ils le font sur une base volontaire. La différence avec Objectif emploi, ça peut être les montants, on pourrait toujours même regarder les montants, là, pour quelqu'un... parce que ça semble vous préoccuper, là, les montants que peut recevoir quelqu'un dans Objectif emploi par rapport à quelqu'un qui est volontaire et qui participe à des mesures semblables, pour essayer de faire des comparables, mais, sur le fond, là, vous avez raison, là, c'est-à-dire...

Et le continuum apte-inapte est un continuum... Moi, j'ai toujours été très, très, très prudent là-dessus, hein, pour éviter de le renforcer. D'ailleurs, dans les consultations, là, sur le prochain plan de lutte contre la pauvreté, il y a des choses assez intéressantes, hein, qui nous ont été proposées, là, pour continuer le travail qui a été fait, notamment pour les personnes handicapées, pour l'intégration... retour aux études, l'intégration sur le marché du travail. On aura peut-être l'occasion, là, d'en reparler quand on reparlera du plan de lutte, mais des bonifications existent déjà, hein, pour tout le monde.

Ici, la différence, est-ce qu'elles sont... elles sont un peu différentes, dans le cas d'Objectif emploi, parce qu'on veut vraiment donner une chance supplémentaire aux personnes, en disant : Écoutez, oui, c'est vrai, vous êtes obligés, mais on vous donne des moyens supplémentaires, parce qu'il y a un coût à se mettre en marche, nécessairement, puis, bien sûr, vous avez une obligation. Pour le moment, pour nous, il n'est pas... on a une vision différente, disons, qu'avait le Parti québécois là-dessus, là, on ne veut pas toucher l'ensemble des aptes par l'obligation, et encore moins les inaptes. On n'est pas du tout dans ce discours-là. On pense qu'il faut commencer plus petit et avec un encadrement plus serré, donc aller davantage vers les premiers demandeurs.

Mais un n'exclut pas l'autre, là, c'est-à-dire qu'on peut aussi, sur une base volontaire, aller vers des mesures. On pourrait en présenter un certain nombre. On pourrait vous présenter aussi les bonifications auxquelles ces personnes-là ont droit quand elles participent.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Restons sur le programme Objectif emploi. Est-ce que la réponse du ministre — là, je ne veux pas interpréter — c'est : Non, le programme Objectif emploi ne sera pas offert à l'ensemble des prestataires? Et laissons de côté pour un instant la situation particulière des personnes qui vivent avec un handicap physique ou intellectuel. Donc, je prends... Moi non plus, je ne suis pas très friande des catégories, mais elles existent pour l'instant. Donc, prenons l'ensemble des personnes dites aptes au travail qui sont en ce moment à l'aide sociale. Est-ce que la raison pour laquelle le ministre n'offre pas le programme Objectif emploi à toutes ces personnes-là, c'est uniquement parce qu'il veut faire une distinction entre le caractère obligatoire du programme pour les primodemandeurs et non obligatoire pour les personnes déjà à l'aide sociale? C'est la seule raison? Est-ce que j'ai bien compris?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Non, pas tout à fait. Donc, l'ensemble des mesures, hein, dont on parle... Objectif emploi est un programme qui rend obligatoire la participation à des parcours. Dans ces parcours-là, il y a une série de mesures qu'on connaît déjà, qui sont déjà utilisées. L'ensemble des mesures sont disponibles, hein, pour tous les prestataires d'aide sociale, même personnes inaptes et aptes, elles sont disponibles pour toutes ces personnes-là et, bien sûr, elles viennent avec des bonifications. Le problème que l'on a, vous le savez, c'est qu'on a un taux très faible de participation à ces mesures-là et qu'il faut changer ça en se concentrant davantage sur les premiers demandeurs, parce qu'on sait que c'est très difficile de mobiliser une personne après un certain nombre d'années à l'aide sociale.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Je repose ma question. Je ne me souviens plus des chiffres exacts, parce qu'on les a pas mal regardés, le printemps dernier, mais il me semble que la bonification de l'allocation de participation, là, pour le primodemandeur variait entre 150 $ et 200 $ de plus par mois — est-ce que je me trompe? — dépendant des programmes, là, dépendant des mesures auxquelles participeraient les primodemandeurs.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Oui. Donc, effectivement, là, bon, il ne faut pas que je me trompe, là, si vous êtes dans des mesures de développement de compétences, formation, hein, sur une base volontaire, apte ou inapte, pour moi ça ne fait pas de différence ici, mais on pourra me corriger, c'est 165 $ par mois — c'est bien ça? — de plus. Donc, recherche active d'emploi, 165 $ par mois, c'est le cas en ce moment, là, c'est...

Une voix : Non, ça, c'est l'objectif.

M. Blais : C'est l'objectif, d'accord. Et 165 $ par mois aussi pour développement des habiletés sociales. Et les allocations de développement des compétences, c'est 260 $ par mois, oui, parce que c'est plus exigeant, bien sûr, parce que, là, vous êtes en formation, donc c'est plus exigeant en termes de temps.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée.

Mme David (Gouin) : Excusez-moi, j'ai mal entendu. 260 $ de plus par mois pour?

M. Blais : Si vous êtes en développement de compétences. C'est bien ça?

Mme David (Gouin) : Qu'est-ce que ça veut dire, ça, développement de compétences?

M. Blais : En formation, pardon.

Mme David (Gouin) : En formation. 260 $ de plus par mois. O.K.

En ce moment, un prestataire d'aide sociale apte, disons un jeune, là, qui retourne à l'éducation aux adultes, reçoit combien de plus par mois, en ce moment, s'il vous plaît?

M. Blais : Donc, il reçoit de plus par mois 195 $. Ça lui fait à peu près 922 $ par mois, 11 000 $ par année si on compte — il ne faut pas que je me trompe, oui — le crédit d'impôt de solidarité, je crois, oui.

Mme David (Gouin) : Alors, à ce moment-là, j'aimerais que le ministre m'explique pourquoi on continuerait de trouver convenable qu'un jeune — je dis «jeune», mais ça peut être moins jeune aussi, hein? — retourne à l'école et reçoive 195 $ par mois de plus que sa prestation de base, alors que le primodemandeur, lui, qui va suivre la même formation puis, sait-on jamais, dans la même classe va recevoir 260 $ par mois. J'essaie juste de comprendre ça.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : La différence est importante. Je ne sais pas... La différence est assez importante parce que, dans le cas du primodemandeur dans la même classe, s'il quitte sa classe, lui, il a des conséquences et des pénalités financières que l'autre n'a pas, tout simplement. Il est dans un autre programme.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée.

• (16 h 40) •

Mme David (Gouin) : Donc, finalement, on revient toujours et éternellement à cette fameuse question de l'obligation, assortie de sanctions, de pénalités. C'est vraiment une approche punitive, M. le Président. Dans ma tête à moi, si une personne participe à un programme, que ce soit retour aux études, que ce soit participer à une entreprise d'insertion ou que ce soit pour des personnes plus éloignées du marché du travail, de participer à des programmes d'alphabétisation... Mais comment justifier que, pour l'une de ces personnes, tout cet investissement de temps, d'énergie, tu sais, tout ce qu'elle se demande à elle-même, là, va valoir tant puis, pour l'autre, bien, parce que, si l'autre personne quitte, bien, là il y a une sanction, alors, on va lui donner plus? Je ne sais pas. Là, on est devant une conception du monde qui, moi, m'échappe un peu, en tout cas. Je ne comprends pas très bien.

Ce que, par contre, moi, je pense, c'est qu'il faudrait offrir le programme Objectif emploi, avec les allocations qui sont prévues, et en oubliant les sanctions, mais laissons ça de côté. La question, c'est de savoir si on offre le programme à tout le monde ou juste aux primodemandeurs. C'est ça, le point que je veux soulever par l'amendement. Mais pourquoi pas? Pourquoi pas? Justement, s'il y a des gens qui sont déjà à l'aide sociale et qui, devant une panoplie d'activités offertes, devant la possibilité de rencontrer un fonctionnaire ou une fonctionnaire, tu sais, devant la possibilité qu'on lui offre des allocations plus importantes... Si cette personne-là a envie de participer, je trouve que le message qu'on lui envoie, c'est : Tu peux bien participer, si tu veux, mais ça vaut moins que pour l'autre qui est primodemandeur, qui, lui, va recevoir plus. Disons que ça fait perdre un petit peu la motivation. Je ne trouve pas ça très rentable, entre guillemets, là, ni sur le plan social ni sur le plan économique, dans le fond.

Et je fais un lien. Le ministre, tout à l'heure, a parlé de diplomation obligatoire. Je sais que c'est un débat qui commence à avoir cours au Québec, des gens très, très respectables commencent à dire : Il faudrait que l'école soit obligatoire, au Québec, jusqu'à l'obtention d'un diplôme d'études secondaires ou jusqu'à 18 ans. Je ne sais pas, c'est comme si on était... Je vois poindre à l'horizon une société d'obligations, mais sans qu'on réfléchisse à : Oui, mais qu'est-ce qu'il y a en dessous de tout ça? Comment ça se fait que tant de jeunes quittent l'école secondaire avant de l'avoir complétée? Ça, c'est la vraie question, parce que c'est vrai, il y en a beaucoup trop, mais la vraie question, c'est : Comment ça se fait? C'est incroyable, là. Il y a beaucoup trop de garçons... Il y a aussi des filles, mais vraiment, du côté des garçons, c'est l'hécatombe. Ça ne me fait absolument pas plaisir, il faut changer cette situation. Mais, d'un côté, on réfléchit à de la diplomation obligatoire, et, si un jeune n'a pas terminé son secondaire et qu'il entre à l'aide sociale, on va lui dire : Bien là, c'est ça qu'il faut que tu fasses, puis on va te donner une allocation, intéressante, j'en conviens, mais, si jamais tu quittes, on va te l'enlever, mais, d'un autre côté, on coupe à l'instruction publique, on coupe dans les écoles — là, on a remis un petit peu d'argent mais pas des masses — on coupe dans le personnel qui vient en aide aux enseignants, et après ça, bien, on fait reposer toute la responsabilité de se diplômer sur les épaules des jeunes eux-mêmes, de leurs valeureux enseignantes et enseignants, de leurs familles, quand elles sont capables d'accoter le jeune. Et puis, s'il n'y a rien qui marche, bien là, à 18 ans, on va l'obliger d'aller à l'école, sous peine de sanctions quand même assez importantes.

Je ne sais pas comment ça se fait, de la part de gens que je respecte, qui sont des chercheurs ou ex-chercheurs, de gens qui ont des idées, qui ont de l'imagination, comment ça se fait qu'on ne commence pas par le début, le début qui serait : Donnons des logements convenables à tout le monde, des parents avec des emplois qui ont un peu de bon sens puis payés décemment, des enfants qui vont à l'école et où on peut détecter rapidement les problèmes, et où ils peuvent avoir de l'aide. J'en ai encore autour de moi, là, cet été, qui sont obligés d'aller dans le privé chercher de l'aide pour leurs enfants parce que le public ne la donne pas... ou alors ça prend un an, pour un enfant de cinq ans, alors qu'il faudrait intervenir tout de suite. Bien, on va dans le privé.

Donc, si on commençait par là pour développer le plein potentiel de tous nos enfants, parce que je l'écoute, le ministre, là, puis je prends des notes, il me semble qu'on ne serait pas obligé d'arriver après ça à l'âge adulte en disant : Bien là, on va vous obliger. Pourquoi ce n'est pas la société, pourquoi ce n'est pas la classe politique qui s'oblige dès le début, dès la naissance des enfants, de s'en occuper, jusqu'à ce qu'effectivement, autour de 16 ans, ils aient terminé leurs études secondaires?

Alors, bon, ça, c'est comme corollaire à l'amendement, mais, si je reviens à l'amendement, tel que nous a invités le président à le faire, je souhaite vraiment que le programme Objectif emploi, auquel... Puis, dans mon amendement, il n'est pas question de sanctions, pas de sanction, il n'est pas question de ça. Il est question d'un programme d'activités, d'actions d'employabilité, etc., ou de préemployabilité et que ce programme soit offert à tout le monde, ce qui veut dire avec les mêmes allocations pour tout le monde. C'est ça, le sens de mon amendement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. M. le ministre.

M. Blais : Peut-être une information, parce que je pense que ça a été dit aussi ce matin. Il faut faire attention, la durée moyenne à l'aide sociale pour les adultes sans contraintes, hein, je ne parle pas de ceux avec contraintes, on comprend que c'est beaucoup plus long pour eux, la durée moyenne est de neuf ans et demi, au Québec. Ça, c'est les chiffres les plus récents, c'est mars 2016. La durée consécutive moyenne, c'est-à-dire quand on regarde... Parfois, les gens sortent et reviennent. Donc, la durée consécutive moyenne, c'est 4,7 ans pour les personnes aptes. C'est gigantesque, hein, parce que c'est sûr qu'après deux ans vous avez, là, une inflexion, là, en termes de sortie de l'aide sociale, hein?

Donc, j'ai compris neuf mois, mais il n'y a pas de neuf mois, là, du tout dans la durée moyenne des séjours à l'aide sociale, consécutive, là, ou non.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : M. le Président, je ne veux pas faire de guerre de chiffres, là, mais je veux juste souligner que le chiffre de neuf mois, c'est le chiffre que le ministre nous a donné en juin lorsqu'il parlait de la durée... Attendez, là, je veux le dire bien. Il parlait de... Premièrement, il était question des primodemandeurs et non pas de l'ensemble des personnes à l'aide sociale, donc uniquement les primodemandeurs. Et la compréhension que j'avais, en tout cas, du chiffre du ministre, c'est qu'un primodemandeur, en moyenne, en moyenne, donc il y en a que c'est plus, il y en a que c'est moins, sortait de l'aide sociale au bout de neuf mois. C'est la compréhension, honnêtement, que j'ai eue des propos du ministre tenus en juin, je pense.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Non, c'est beaucoup plus long que ça. Comme je vous le dis, bien, le primodemandeur, c'est aussi une personne à l'aide sociale. Donc, encore une fois, là, en ce moment, c'est 4,7 ans.

Ce qui a été dit, qui a été mentionné, je me souviens très bien, là, il y avait une petite confusion dans les chiffres parce que, ça, c'est purement statistique, si vous prenez une photo sur un an... Parce qu'un primodemandeur, à un moment donné, il ne l'est plus. Donc, si vous prenez une photo sur un an, c'est bien ça, vous arrivez à quoi? 9,7, 9,7 mois. Ça ne veut rien dire, une photo sur un an, parce que ce qui intéresse les gens, c'est de savoir, bon, quand vous rentrez à l'aide sociale, au Québec, en ce moment, vous y restez pendant combien de temps, hein? Ne prenez pas la photo juste sur un an, prenez la photo sur la durée moyenne, parce que cet indicateur-là, il est fondamental pour connaître les risques que vous avez d'y rester plus longtemps. Et à ce moment-là, bien sûr, vous arrivez à des chiffres aussi importants, là, que ce que j'ai mentionné, là.

Bon, le problème, encore une fois, ce n'est pas qu'on verse de l'aide sociale. Encore une fois, le problème, c'est qu'il y a un risque de piège, hein, qui est bien documenté, à l'aide sociale, et c'est à ce moment-là que, bien sûr, c'est plus difficile de mobiliser les gens.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Gouin, ça va? Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre qui veut intervenir? M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Oui, un petit peu, je pourrai continuer un peu plus tard, mais ça m'a fait sourire, tantôt... J'ai aimé ça, par exemple, la discussion sur la justice commutative, puis j'ai eu l'impression que... Souvent, le printemps passé, vous avez dit que certains chercheurs manquaient de rigueur. J'ai l'impression que vous avez mis Aristote dans ceux qui manquaient de rigueur, ça fait que je trouvais que c'était fort un peu.

M. Blais : L'égalité est une idée qui remonte au XVIIIe siècle à peine, hein?

M. LeBel : Un autre dans la liste de ceux qui manquent de rigueur. Mais, dans la... C'est gros pareil.

M. Blais : ...le principe d'égalité.

Le Président (M. Cousineau) : Sur l'amendement.

• (16 h 50) •

M. LeBel : Puis un autre... Tantôt, on disait aussi, quelqu'un qui n'a pas fait le secondaire V ou... tu sais, il ne faut pas le... il faut trouver une façon de lui donner de l'aide, il faut que cette personne-là... il ne faut pas l'échapper. Bien, moi, je pense qu'il ne faut pas... cette personne-là ne devrait pas arriver à l'aide sociale, là. C'est à l'école qu'il ne faut pas l'échapper, il faut investir à l'école pour ne pas qu'il y ait de décrocheurs, tu sais, là-dessus je suis d'accord avec ma collègue de Gouin, là, il faut investir dans nos écoles, puis ce n'est pas ce qu'on est en train de faire actuellement. Ça fait partie de la logique, là. Si on abandonne nos interventions avec les orthopédagogues, avec tout le monde dans les écoles, si on coupe dans nos écoles puis on coupe dans les petites écoles en milieu rural, bien, c'est sûr qu'à un moment donné on échappe du monde, il y a des décrocheurs. Ça fait qu'il faut continuer à... il faut investir dans nos écoles.

L'amendement nous propose d'élargir, là, ceux qui peuvent avoir accès à différents... aux programmes puis avoir accès à des montants d'argent qui pourraient leur être octroyés s'ils participent à des projets. Je comprends que ça, ça amène des sommes supplémentaires.

Le ministre à l'origine du projet de loi n° 70, le député de Louis-Hébert, avait dit à l'époque, je cite : «Avec le projet de loi n° 70, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale[...] — le député de Louis-Hébert — veut économiser jusqu'à 50 millions par année à l'aide de programmes de diminution des prestations à ceux et celles qui reçoivent de l'aide sociale.» Je demanderais au ministre : Est-ce qu'on est toujours... Est-ce que c'est la même idée du ministre d'économiser? Est-ce qu'on parle toujours de 50 millions de dollars par année qu'on pourrait économiser par le projet de loi n° 70?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Non, il n'y a aucune économie, dans Objectif emploi, de ce type-là. Puis la raison pour laquelle il n'y en a pas, c'est que, bien, vous l'avez vu, quand même, on donne des montants assez importants, c'est quand même 17 000 personnes. On évalue, s'il y avait une pleine participation, hein, à Objectif emploi, que le coût pourrait s'approcher de 50 millions de dollars. Je ne veux pas faire d'erreur, mais il me semble que c'est un chiffre que j'ai entendu s'il y avait une pleine participation.

Regardez bien. Tout ce qu'il y a dans Objectif emploi, c'est des coûts, hein, en termes de bonification, en termes de services. On a augmenté quand même de façon importante les budgets des services... des organismes en employabilité, je ne calcule même pas ça dans le 50 millions, et on s'est aussi engagés à ajouter 90 ETC dans le réseau d'Emploi-Québec pour Objectif emploi. Donc, on l'a obtenu, ça, du Conseil du trésor.

Donc, les coûts sont importants, mais l'intérêt est là, parce que, bien sûr, vous comprenez que, si on réussit à intégrer davantage de gens, c'est des vies sauvées, hein, c'est des vies carrément sauvées, là, hein?

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski.

M. LeBel : M. le Président, je comprends qu'il faut intervenir puis je comprends que c'est des vies sauvées. Puis, pour avoir travaillé près de ces gens-là, je... Là-dessus, on partage ça.

Mais j'aimerais savoir. Le député de Louis-Hébert, qui est à l'origine du projet de loi n° 70... Puis on parle du même projet de loi qui est déposé là, là, il n'a pas changé, là. On a changé le ministre, mais on n'a pas changé le projet de loi. Ça fait que le député, à l'origine, qui était ministre à l'époque, de Louis-Hébert, disait que, par ce projet de loi là, il voulait «économiser jusqu'à 50 millions de dollars par année à l'aide de programmes de diminution des prestations à ceux et celles qui reçoivent de l'aide sociale». Ce que je voudrais savoir : Est-ce que vous êtes d'accord avec ça? L'objectif du député de l'époque, le député de Louis-Hébert qui était à l'époque ministre, qui était d'économiser jusqu'à 50 millions par année, est-ce que vous pensez qu'on est encore dans la même bracket?

M. Blais : Ce n'est pas du tout mon objectif, hein, donc, ce n'est pas du tout mon objectif. Et regardez les crédits du ministère, il n'y a rien comme ça, de la même façon qu'il n'y a rien, j'insiste là-dessus, dans des sommes que l'on pourrait économiser, entre guillemets, par des sanctions, il n'y a aucune évaluation qu'il y aura des économies à ce niveau-là.

M. LeBel : Bref, le député de Louis-Hébert est un peu comme Aristote. Lui aussi a manqué un peu de rigueur, probablement, à l'époque.

M. Blais : Je vous laisse ce commentaire-là. Surtout Aristote, que j'aime beaucoup.

Le Président (M. Cousineau) : Poursuivez, M. le député.

M. LeBel : Bon, c'en est un autre dans le paquet de ceux qui ont manqué de rigueur.

Ma question là-dessus, sur l'économie : Tantôt, j'ai demandé qu'on nous dépose le nombre d'agents socioéconomiques puis les agents de développement de l'emploi par CLE. Comment on les appelle, les troisièmes, là, les agents de recouvrement, de... Comment qu'on les appelle, là, ceux qui vont chercher des montants d'argent qui auraient été donnés en trop? On les appelle comment, eux autres?

Une voix : ...

M. LeBel : On les a déjà appelés comme ça, là, mais ce n'est plus, maintenant, de même.

M. Blais : M. le Président, une question que peut-être la sous-ministre pourrait... à laquelle la sous-ministre pourrait répondre.

Le Président (M. Cousineau) : Bien, absolument. Sous-ministre en titre ou sous-ministre associée?

M. Blais : Les deux sont associées, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Les deux sont associées? Bon, bien...

M. Blais : En tout cas, c'était comme ça hier, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Le sous-ministre en titre, là, je crois. Je m'excuse, M. le sous-ministre en titre, en arrière.

Alors, sous-ministre associée 1 ou sous-ministre associée 2?

Mme Bourassa (Johanne) : C'est bon, je vais y aller.

Le Président (M. Cousineau) : Allez-y, Mme Bourassa.

Mme Bourassa (Johanne) : C'est bon. Oui, il y a des agents d'aide à l'emploi, il y a des agents d'aide financière et il y a des agents de conformité, qui, eux, ont comme objectif de réviser les dossiers des agents d'aide financière en fonction des risques de non-conformité qu'il pourrait y avoir au dossier.

M. LeBel : Ça fait que, si je comprends bien, les agents socioéconomiques, d'aide financière, eux autres, ils vont s'assurer que la personne qui a déposé son formulaire a tout bien fait ça. S'il a bien fait ça, ça va aller à l'agent d'aide à l'emploi, pour l'envoyer dans un processus, mais, s'il n'a pas bien fait ça ou s'il manque des choses, c'est l'autre, de conformité, qui va débarquer, là. Non?

Mme Bourassa (Johanne) : Non. Je peux...

Le Président (M. Cousineau) : Allez-y, Mme Bourassa.

Mme Bourassa (Johanne) : Merci. L'agent d'aide financière, il a la responsabilité de la gestion du dossier d'aide financière de la personne, donc, au moment du dépôt de la demande, donc, de déterminer son admissibilité au programme en fonction de la loi et du règlement qui sont en vigueur. Une fois que son admissibilité est faite et qu'il a droit à des prestations, il a la responsabilité de gérer son dossier d'aide financière le temps qu'il est admissible au programme. Donc, si sa situation familiale change en cours de mois, s'il a des revenus au cours du mois, s'il a droit à des prestations spéciales, toutes ces dimensions-là, elles sont adressées à l'agent d'aide financière, alors que toutes les questions reliées à son retour en emploi et l'évaluation de sa capacité d'entreprendre des démarches d'emploi sont faites par l'agent d'aide à l'emploi.

Et c'est pour ça qu'on disait que le dossier d'aide financière peut se traiter sur la base des documents reçus puis de l'information reçue de la clientèle et des documents qu'ils ont déposés au centre local. Quelqu'un qui a besoin de lunettes va peut-être venir déposer sa prescription pour recevoir les montants, il n'aura pas nécessairement à rencontrer son agent d'aide financière pour ce faire.

Par contre, pour ce qui est du côté de l'emploi, pour évaluer sa situation, bien, il faut qu'il réalise une entrevue avec la personne, d'où la convocation par les agents d'aide à l'emploi pour rencontrer la clientèle.

Le Président (M. Cousineau) : Merci.

M. LeBel : O.K. Est-ce que je pourrais rajouter à ma demande de tantôt? Je demandais le nombre d'agents de développement... d'aide à l'emploi, les demandes... socioéconomiques. Je rajouterais l'autre, là, celui-là qui fait du recouvrement, de conformité. Ça fait que... Parce que, je pense, il y a trois agents, là.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme la sous-ministre en titre.

Mme Maltais (Chantal) : Non.

Le Président (M. Cousineau) : Ah! La sous-ministre associée. Je suis tout mélangé avec ça, moi. À 17 heures, là...

Mme Maltais (Chantal) : Oui. Chantal Maltais.

Il y a des agents de conformité. Il y a aussi, comme vous le disiez tout à l'heure, des agents de recouvrement, il y a un centre de recouvrement.

Donc, lorsqu'il y a des sommes qui sont dues au ministère, il y a des agents de recouvrement aussi. Donc, c'est une tâche qui est vraiment autre chose aussi. Et il y a des agents de conformité, qui travaillent beaucoup plus, maintenant, par rapport à ce qu'on appelle les incohérences, c'est-à-dire s'il y a des incohérences entre, par exemple, le rapport d'impôt ou ce qui a été dit dans un autre ministère. Ce n'est plus, maintenant, sur la façon de faire qui a déjà existé il y a plusieurs années. Alors, ce n'est pas des gens qui vont fouiller un petit peu partout, c'est de l'information qu'on reçoit par transfert de fichiers, et à ce moment-là des dossiers sont montés. Alors, ça, c'est des agents de conformité.

Les agents de recouvrement sont au centre de recouvrement, ils font comme dans les autres centres de recouvrement, c'est-à-dire qu'ils ont une dette, ils communiquent avec les gens, ils les appellent pour voir avec eux comment le remboursement va se faire. Alors, ils font une entente avec eux. Si les gens sont déjà à l'aide, il y a des montants qui sont déjà écrits au règlement qui viennent...

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski.

• (17 heures) •

M. LeBel : Merci. Non, c'est intéressant comme... Ça veut dire qu'il y en a quatre, on est rendus à quatre. Ça fait qu'il y a l'agent de développement de l'emploi, que je pense que, pour le ministre, c'est cette personne-là qu'il voudrait qu'elle soit plus active, dans le ministère, avec les prestataires. Quand les prestataires demandent... Le primodemandeur, ce que vous vouliez plus, c'est qu'il travaille avec cette personne-là pour l'intégrer en emploi. Vous avez une autre personne qui est plus le socioéconomique. Cette personne-là, c'est plus pour aider la personne prestataire à monter son formulaire si elle est mêlée. Après ça, vous avez celui de conformité qui vient revoir après tout ça pour s'assurer si, dans le formulaire, la personne n'a pas oublié de dire des affaires ou aurait comme oublié certaines affaires, entre autres si elle vit maritalement ou des affaires du genre. Et, s'il y a quelque chose là, cette personne-là alerte la quatrième personne, qui est, lui, à quelque part d'autre, qui va s'assurer d'aller recouvrer l'argent si ça ne respecte pas les règles. Ça ressemble à ça, O.K.

Ça fait que ce que j'aimerais, dans l'ensemble, dans ma demande que j'avais tantôt, c'est que, dans... Les agents de conformité, si je comprends, ces agents-là sont dans les CLE. Ça fait que ça veut dire que, dans un CLE, normalement, sauf à Sorel-Tracy, il y aurait trois agents, agent de développement de l'emploi, agent socioéconomique puis agent de conformité, normalement, mais des fois ils sont relocalisés, j'ai compris, là, mais normalement. Puis les agents de recouvrement sont dans un centre particulier. Ça fait que ce que j'aimerais savoir, c'est combien il y en a de chacun, puis parce qu'effectivement, moi, ça m'a intrigué, là, la déclaration de... Puis je suis content que le ministre ressorte un peu la déclaration du ministre fondateur, qui voulait un projet de loi qui vienne sauver... économiser des sous. C'est pour ça que je posais ces questions-là. Merci.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Rimouski. M. le ministre, voulez-vous réagir? Non? Ça va comme ça? Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'amendement? Oui, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Notre collègue la députée de Gouin, par son amendement, au fond, nous permet de ramener un sujet, un débat que nous avions eu précédemment, à la session parlementaire précédente, sur le fait que... Et elle a bien fait, là, de nous le réactualiser, là, parce que des fois les chiffres changent, là, mais, si j'ai bien compris, à l'heure actuelle, un prestataire d'aide sociale qui désire retourner aux études ou terminer ses études peut bénéficier d'une prestation supplémentaire, d'une allocation supplémentaire de 195 $ par mois. Est-ce que c'est le cas?

Le Président (M. Cousineau) : Oui, Mme Maltais... M. le ministre.

M. Blais : Je vais répondre, oui.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, allez-y, M. le ministre.

M. Turcotte : Donc, un prestataire actuel de l'aide sociale qui désire faire une recherche intensive d'un emploi, est-ce qu'il bénéficie, lui, d'une allocation supplémentaire?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Là-dessus, je ne veux pas faire d'erreur, je vais laisser la sous-ministre associée répondre, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Absolument. Mme Maltais.

Mme Maltais (Chantal) : Oui. Les gens qui font de la recherche active d'emploi, présentement à l'aide sociale, ne reçoivent pas de montant additionnel que leur prestation de base. Ceux qui sont dans des mesures actives reçoivent un montant mensuel de 195 $.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Quand on parle de mesures actives, ce n'est que pour de la formation ou c'est pour autre chose aussi? Qu'est-ce qu'on entend par «mesures actives»?

Le Président (M. Cousineau) : Mme Bourassa.

Mme Bourassa (Johanne) : Oui. Les mesures actives, qui sont plus intensives en termes d'heures-semaine, donnent droit à l'allocation d'aide à l'emploi de 195 $. C'est la mesure de formation et les projets de préparation à l'emploi qui se réalisent, là, dans des organismes en développement de l'employabilité.

La mesure Services d'aide à l'emploi, qui est aussi offerte par les organismes en développement de l'employabilité mais est de plus courte durée, par des recherches d'emploi — c'est là qu'on retrouve les clubs de recherche d'emploi, par exemple, les stratégies de recherche d'emploi sur trois jours, préparation de C.V., etc. — dans ce cas-là, on utilise la notion de journée plutôt que de semaine, et c'est donc 9 $ par jour qui est autorisé, dans ces cas-là, plutôt que 45 $ par semaine, puisque les personnes ne se présentent pas cinq jours-semaine au sein des services, habituellement.

Le Président (M. Cousineau) : Merci. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : O.K. Donc, pour une mesure active : 195 $. Qu'elle soit pour la recherche d'emploi, ou la préparation à l'emploi, ou de la formation, actuellement, c'est 195 $, le maximum qu'il est possible d'avoir, supplémentaire, sur notre prestation.

Mme Bourassa (Johanne) : ...une exception pour la recherche d'emploi. Comme Mme Maltais vous l'a dit, si la recherche d'emploi est autonome, la personne la fait d'elle-même, elle ne reçoit rien. Elle reçoit 9 $ par jour si elle est dans un club de recherche d'emploi ou si elle est dans une stratégie de recherche d'emploi, mais à ce moment-là c'est trois jours-semaine, pour la stratégie de recherche d'emploi, donc elle recevrait 27 $ pour sa participation.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député.

M. Turcotte : Et, quand on parle de formation, acquisition de compétences ou développement de compétences, comme le ministre a mentionné précédemment, à l'heure actuelle, qu'est-ce qu'on entend... Est-ce qu'il y a certains programmes... Est-ce qu'il y a une certaine limite? Est-ce qu'en termes de... Je ne parle pas nécessairement, là, dans la profession en tant que telle, mais, dans le niveau de diplomation, disons ça comme ça, est-ce qu'une personne peut terminer son diplôme d'études secondaires? Est-ce que... Je ne pense pas qu'elle peut faire son université, là, ce n'est pas... il y a un autre programme, l'aide financière, mais est-ce qu'elle peut faire une formation professionnelle ou...

Mme Bourassa (Johanne) : Je peux répondre? Oui? C'est pour toute formation secondaire, que ce soit de la formation générale, que ce soit de l'alphabétisation, de la francisation ou de la formation professionnelle.

Et, pour la formation collégiale, on est surtout, là, dans les attestations d'études collégiales, donc des formations de courte durée, là, au niveau collégial. On va de façon exceptionnelle en formation universitaire, vous avez raison. C'est les prêts et bourses qui s'appliquent dans ce cas-là.

M. Turcotte : Actuellement, un prestataire d'aide sociale ou une... qui ne sait pas trop qu'est-ce qu'elle veut faire, mais elle a comme objectif de terminer son secondaire parce que, pour elle, c'est un handicap de ne pas avoir son D.E.S., est-ce qu'elle peut terminer son diplôme d'études secondaires? Est-ce qu'elle peut avoir son diplôme d'études secondaires en étant à l'aide sociale?

Le Président (M. Cousineau) : Mme Bourassa.

Mme Bourassa (Johanne) : Actuellement, on cherche à déterminer avec les personnes un objectif professionnel avant de les inscrire en formation générale, pour la raison que le taux d'abandon est plus élevé en formation générale et qu'il est plus mobilisant de faire une formation générale avec un objectif professionnel, là. Donc, on fait d'abord un exercice, là, d'orientation pour identifier, dans un premier temps, les préalables requis pour la formation professionnelle ou technique, et c'est ces formations-là que la personne est invitée à suivre en formation générale. Donc, c'est des préalables à la formation professionnelle et technique.

Mais il existe des personnes qui font des formations aussi dans un objectif d'un D.E.S., dépendamment du territoire dans lequel elles se situent puis des exigences d'embauche qu'il y a dans le territoire.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député.

M. Turcotte : Dans le programme Objectif emploi, il me semble... J'avais pris des notes, mais ça date un peu, là. Donc, j'avais pris en note que le programme Objectif emploi pouvait permettre, en termes de formation, acquisition de compétences, soit un D.E.P., donc, en formation professionnelle, formation technique — je comprends, là, la nuance que vous amenez, là, que c'est plus une attestation — alpha, francisation, semi ou peu spécialisé en termes de formation, puis la formation générale aux adultes. C'est bien ça?

Dans le cas du programme Objectif emploi — puis ça peut peut-être être le ministre qui peut me répondre, parce que c'est peut-être plus une orientation ministérielle — est-ce que le ministre considère que, dans le programme Objectif emploi... Parce qu'on a eu un peu ce débat-là même sur l'appellation du programme. Est-ce qu'on sera dans le même axe, dans le sens de prioriser, pour la personne, de trouver un cheminement professionnel, et par la suite de l'amener dans le cheminement scolaire qui va la mener à son objectif professionnel? Au fond, si la personne veut... son objectif, elle n'est pas prête à retourner en emploi, elle n'est pas prête nécessairement à se trouver une profession, mais au moins de se mettre en action par un retour aux études, en terminant son diplôme d'études secondaires, est-ce que, dans le programme Objectif emploi, ce sera davantage favorisé que ça l'est actuellement? Je comprends qu'il y a certaines nuances en fonction des territoires puis, bon, des besoins, là, peut-être de formation dans certaines régions, là, mais est-ce que, dans le programme Objectif emploi, il y aura davantage de latitude, pour les agents dans les centres locaux d'emploi, de permettre un retour aux études et la fin... l'obtention du diplôme d'études secondaires, plutôt que de se trouver une profession à tout prix avant d'aller... Je pense que le ministre comprend ma question, là, je le vois qui semble vouloir répondre.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

• (17 h 10) •

M. Blais : Alors, la réponse, c'est oui, il y aura davantage de latitude.

Il faut cependant comprendre... Puis on me rappelle souvent qu'il y a un principe de réalité. Plusieurs de ces personnes-là ont quitté l'école. Le scolaire, ça a été un échec pour eux. Et, par le passé, du moins, quand on a essayé de les ramener, disons, en classe pour terminer leur D.E.S., ça ne s'est pas toujours avéré fructueux. Ça, on le sait par l'expérience.

Cependant, la possibilité doit être là. Ça doit être valorisé, qu'on termine son D.E.S., ou encore, comme ça a été mentionné, qu'on aille vers une formation professionnelle. Et là, à ce moment-là, on va chercher les prérequis qui sont nécessaires pour ça.

C'est plus un principe de réalité qu'il faut avoir à l'esprit qu'une volonté, disons, du ministre de dire : Écoutez, nous, c'est ça qu'on valorise, parce que ça peut avoir un effet, disons, plus négatif que positif.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Actuellement, quelqu'un qui est à l'aide sociale ou, après l'adoption du projet de loi et la création du programme Objectif emploi, quelqu'un qui aura déjà fait sa demande d'aide sociale, donc il sera à l'aide sociale à ce moment-là, est-ce qu'une personne peut recevoir une allocation supplémentaire, dans le tableau qui nous avait été présenté par le ministre, pour le développement des habiletés sociales?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Voulez-vous... Reprenez votre question.

M. Turcotte : ...prestataire d'aide sociale actuel ou, on peut dire, un prestataire d'aide sociale après l'adoption du projet de loi, là... Ma question, c'est : Si on exclut les nouveaux demandeurs, après l'adoption du projet de loi... Parce que, ça, je comprends qu'ils vont l'avoir, c'est écrit dans le tableau pour Objectif emploi. Mais un prestataire d'aide sociale peut actuellement avoir une allocation supplémentaire pour le développement des habiletés sociales?

Mme Bourassa (Johanne) : Non.

M. Turcotte : O.K. Donc...

M. Blais : Peut-être un petit point là-dessus, si je peux ajouter, pour comprendre un petit peu le... Dans le fond, moi, j'ai beaucoup insisté sur ce point-là, et c'est une innovation, au Québec, de nommer... Dans le fond, il y a des activités de préemployabilité qui existent, il y a des personnes qui sont référées en préemployabilité, ça existe déjà, mais, de nommer ce parcours-là, dire «il existe», il y a des gens qui ne sont pas prêts ni à un ou ni à l'autre, mais ces gens-là ne doivent pas nécessairement rester dans la rue pour autant ou à la maison, il y a moyen de valoriser pour eux des activités puis de les faire grandir éventuellement vers une autre étape, puis on doit le reconnaître, le nommer puis aussi trouver une forme de financement.

Alors, on a eu des petits débats tout à l'heure sur la question des changements que j'ai voulu apporter, là, au programme pour vraiment, là, faire en sorte peut-être d'adoucir des sections. Ça, je pense que ça a été un changement important. Je pense que ça a été reconnu de part et d'autre aussi, qu'il fallait nommer cette situation-là puis permettre à ces gens-là de grandir à leur façon.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Puis là mes questions s'adressaient, là, puis je pense que c'était clair pour tous, là, pour les gens qui sont sans contraintes à l'emploi. Mais, pour les gens qui sont avec contraintes sévères, il n'y a pas d'allocation spéciale pour eux, pour la formation ou...

Mme Bourassa (Johanne) : C'est les mêmes règles.

M. Turcotte : C'est les mêmes règles. Donc, ils peuvent avoir aussi...

Mme Bourassa (Johanne) : C'est les mêmes règles parce que la contrainte sévère peut être un handicap qui n'empêche pas de faire un retour aux études, ou de bénéficier d'une subvention salariale, ou de bénéficier d'un projet de préparation à l'emploi. L'allocation n'est pas attachée à l'aide sociale mais au programme d'aide financière de dernier recours.

M. Turcotte : Donc, M. le Président, toutes ces questions pour mieux exprimer notre pensée, ma pensée sur l'amendement de notre collègue. Parce que l'amendement de notre collègue, au fond, de ce que je comprends, c'est d'offrir... s'assurer que l'ensemble des bénéficiaires du programme d'aide sociale puissent recevoir les allocations que le ministre prévoit dans le programme Objectif emploi. Moi, c'est ce que je comprends de l'amendement qui est présenté par notre collègue la députée de Gouin. Dans l'optique où le ministre a réitéré que, pour la catégorie du... bien, le programme ou l'axe du programme, développement des habiletés sociales, c'est une innovation, donc ce n'était pas présent actuellement, moi, je crois que la question qui sous-tend... qui est présente par l'amendement de notre collègue est très importante. Je comprends que le ministre nous a déjà dit qu'il était plus facile d'agir rapidement pour un retour en emploi ou pour une activation plus rapide des personnes lorsqu'ils sont des primodemandeurs, parce que, bon, c'est plus rapide avant qu'ils sortent de l'aide sociale ou ils demeurent moins longtemps à l'aide sociale qu'un prestataire actuel, mais je crois que la question demeure. Si on a une personne qui a fait sa demande d'aide sociale hier, aujourd'hui, lors de l'adoption du projet de loi, elle sera considérée comme un prestataire actuel, donc pas comme un primodemandeur, mais peut-être que cette personne-là a plus de motivation à s'en sortir qu'un primodemandeur qui fera se demande six mois après la mise en oeuvre du programme. Puis je pourrais dire la même chose pour quelqu'un que ça fait un certain nombre de temps qu'il est à l'aide sociale, parce qu'il avait des difficultés ou autres, mais, s'il y avait une offre, une possibilité pour lui d'avoir justement une allocation pour le développement des habiletés sociales puis avoir accès à ces ressources-là, peut-être que cette personne-là serait davantage prête, motivée et pourrait faire un retour plus rapide sur le marché du travail ou du moins s'activer.

Donc, je crois que la question qui est présente et... la proposition que notre collègue la députée de Gouin amène est très intéressante, d'autant plus que, lors des consultations particulières... Je ne crois pas qu'à ces consultations-là c'était le ministre actuel, je crois que c'était le précédent ministre, le député de Louis-Hébert, mais il y a plusieurs groupes qui ont demandé de pouvoir participer au programme Objectif emploi, entre autres les groupes pour les personnes handicapées, disant que, même s'ils avaient des contraintes sévères à l'emploi, ils pourraient, eux aussi, contribuer à la société, s'ils avaient un tel programme, mais avec une nuance assez importante — et le ministre comprendra qu'on va la réitérer pour être certains qu'on se comprenne — sans l'obligation d'y participer, donc l'objectif n'étant pas de rajouter des personnes avec des contraintes dans un programme obligatoire, qui ne peuvent pas, eux, parce qu'ayant des contraintes, bon, certaines limites... leur imposer contre leur gré, bien entendu. Donc, moi, je crois que l'amendement de notre collègue est très pertinent. Et je crois que le ministre pourrait y réfléchir, voir comment ça pourrait s'impliquer... s'implanter, plutôt, ou être mis en fonction, mais nous, on considère qu'effectivement... Parce qu'il y a en quelque sorte... pas une injustice, mais on est quand même dans une zone sensible, là. Quelqu'un qui vient de faire sa demande d'aide sociale, qui la demande, va pouvoir bénéficier de 260 $ pour retourner aux études, puis, sur la chaise à côté, au centre d'éducation des adultes, ou dans le groupe d'alphabétisation, ou sur le plan de... dans la salle de classe, là, qui... pour un garage, pour un D.E.P., bien, la personne juste à côté, elle, qui est prestataire d'aide sociale depuis six mois, bien, elle, elle va recevoir 195 $ plutôt que 260 $. Donc, il y a quand même... Puis c'est sûr que la motivation, c'est sûr, c'est difficile à évaluer, à comparer, parce que ça dépend aussi des périodes, des moments de la vie de la personne. La motivation, ça fluctue aussi, hein? Il y a des moments où... La personne reçoit un échec, c'est plus difficile, un problème personnel ou autres. Mais je crois que le ministre devrait étudier cette question-là d'une façon plus approfondie pour s'assurer que l'ensemble des personnes qui ont une motivation de s'en sortir puissent avoir les ressources à sa disposition pour s'en sortir.

• (17 h 20) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre.

M. Blais : Ça va.

Le Président (M. Cousineau) : Ça va? Ça va aller? Et est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. J'aimerais simplement savoir combien de temps il me reste.

Le Président (M. Cousineau) : Est-ce qu'on peut avoir une indication? Cinq minutes, qu'on me dit.

Mme David (Gouin) : O.K. J'aimerais revenir sur un point parce qu'il me paraît un peu obscur. La question de la formation générale, j'écoutais avec attention les propos de la sous-ministre adjointe... associée, sous-ministre, bon, enfin, bref, excusez-moi, mais ça vient mêlant un petit peu, à un moment donné, sur la formation générale, disant qu'en ce moment, si j'ai bien compris, on va d'abord définir avec une personne son parcours professionnel pour ensuite voir si, oui ou non, elle ira en formation générale. En fait, ça confirme complètement ce que je vis comme députée sur le terrain, à savoir qu'il n'est pas facile pour une personne à l'aide sociale d'accéder à la formation générale et qu'on lui propose bien plus souvent des formations courtes la menant directement à l'emploi. Et ce que je comprends, c'est que la sous-ministre nous dit : Vous comprenez — ou c'est peut-être le ministre qui l'a dit, là — le taux d'abandon est très élevé, ce que nous savons, ce que nous ne contestons pas. Là, ce que je ne comprends pas, c'est que le ministre, tout à l'heure, dans une intervention importante, je crois, nous a dit : Avec Objectif emploi, il va y avoir des changements, des assouplissements, j'ai fait des annonces réglementaires, je n'ai pas déposé tout le temps des documents, mais j'ai quand même annoncé que la formation générale, ça serait important. Mais même le ministre dit : Oui, mais, vous comprenez, il y a un principe de réalité. Bien, moi, je voudrais savoir finalement, là, est-ce que, oui ou non, on va favoriser... Particulièrement chez des jeunes qui n'ont pas quitté l'école depuis si longtemps que ça et qui, là, ont 18 ans, 19 ans, arrivent à l'aide sociale, est-ce que, oui ou non, on va d'abord et avant tout leur proposer de terminer au moins un D.E.S. ou un D.E.P., là? Parce que, de nos jours — on est en 2016 — en bas de ça, qu'est-ce que vous voulez faire au juste, là, dans la vie? Vous le savez, on a ici, autour de cette table, des gens très éduqués. Ça nous a servi, l'éducation. Bien, c'est pareil pour tout le monde. Donc, moi, j'aimerais savoir où on en est au juste.

Et j'aimerais ajouter que je ne conteste pas le taux d'abandon. Ce que je conteste, c'est qu'on abandonne les abandonnés. C'est-à-dire qu'il y a des manières de prévenir l'abandon. Il y a des organismes qui travaillent exactement dans ce sens-là et qui réussissent avec des jeunes qui ont des difficultés d'apprentissage importantes, mais qui malheureusement n'ont pas été suffisamment soutenus au primaire et au secondaire. Il y a des organismes qui les prennent à 16, 18 ans, surtout 18 ans, puis qui, oui, les soutiennent dans un exercice de formation générale et, oui, arrivent avec eux à terminer cette formation générale. Pourquoi est-ce que ce n'est pas la voie qu'on privilégie, plutôt que de dire : Ah! bien, le principe de réalité, c'est qu'il y a bien des abandons en formation générale, ça fait qu'on va offrir des petites formations courtes, là, menant directement à des emplois, je m'excuse, mais... non, je n'utiliserai pas le mot que j'avais envie d'utiliser, je vais simplement dire des emplois mal rémunérés avec des conditions de travail très souvent assez indécentes? Pourquoi est-ce que la voie qu'on ne privilégie pas, c'est celle du soutien à ces jeunes-là en formation générale? Ça existe. On pourrait le faire partout au Québec.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. Réaction, M. le ministre?

M. Blais : Des fois, j'écoute ma collègue, et elle est plus forte sur les contraintes que moi. Il faut aussi respecter les gens dans leur cheminement puis leurs choix. Ce que j'entends, de ce côté-ci de la table, peut-être pas ce qu'elle entend, de son côté, puis j'ai autant de raisons de le croire, là, que de ce côté-ci, c'est qu'en général, là, ce qu'on nous demande, c'est bien ça, c'est plutôt des formations plus courtes, professionnelles, parce qu'il y a eu une expérience, un cheminement scolaire difficile.

Mais, sur le reste de son argumentation, là, j'en conviens très bien, là. Et, si elle me dit : Non, non, moi, mon expérience, puis quand je parle aux gens, c'est qu'ils ne se font que proposer des formations courtes ou professionnelles, je le dis, là, publiquement, je pense qu'il y a un problème, puis il faut le corriger. Ce n'est certainement pas ma vision des choses.

Donc, on va essayer d'avoir plus d'informations là-dessus, là, s'il y a un biais, comme elle le constate, là, dans sa pratique de députée, là, pour voir comment on peut corriger ce biais-là.

Je pense que ma collègue...

Une voix : ...

Le Président (M. Cousineau) : Oui. On est sur votre bloc. Est-ce que vous avez terminé? Il reste une minute.

Mme David (Gouin) : J'aimerais simplement dire au ministre que je ne pense pas que systématiquement tous les agents proposent uniquement des formations courtes, là, je n'irai pas dans la caricature, quand même. Et je conçois très bien qu'il y ait des personnes qui désirent une formation courte et retourner rapidement sur le marché du travail. Je dis simplement qu'il a été porté à mon attention quelques situations.

Mais toutes les situations n'arrivent pas au bureau de la députée, donc j'ai bien peur qu'il y en ait d'autres. Et, les groupes aussi qui sont venus nous voir en commission parlementaire, il y en a quelques-uns qui nous ont dit : Vous savez, pas facile d'obtenir de l'aide sociale qu'une personne désireuse de parfaire son éducation secondaire puisse le faire.

Alors, merci au ministre de s'informer de la situation. Et ce que je souhaite, c'est que, dans un programme Objectif emploi le meilleur possible et souhaitable, oui, on offre des formations générales au plus grand nombre de jeunes possible, là.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Gouin. Je passerais maintenant la parole à Mme la députée de Fabre.

Mme Sauvé : Merci, M. le Président. Alors, je voulais un peu revenir sur l'intervention de la députée de Gouin par rapport à sa préoccupation sur le taux d'abandon, comment on travaille, comment on essaie de prévenir.

J'en ai déjà parlé précédemment, mais, il y a environ trois ans, il y a eu des grands travaux qui ont été faits par Emploi-Québec avec l'ensemble des ressources externes, donc les organismes communautaires en employabilité, parce qu'il y avait cette préoccupation-là du taux d'abandon et de façon très documentée, je dirais, avec, évidemment, là, le pourcentage de taux d'abandon par mesure et par type de clientèle, donc c'était très, très documenté. Donc, la cible était effectivement de pouvoir travailler à prévenir, à diminuer le taux d'abandon, et ça s'est fait de façon très concertée, je dirais.

Il y a un lieu qu'on n'a pas beaucoup nommé, mais qui s'appelle le forum des ressources externes, qui est lié à Emploi-Québec, qui est au niveau national, donc, mais aussi dans toutes les régions du Québec, et ça a été un lieu où les représentants d'Emploi-Québec des régions ont travaillé, ont discuté avec l'ensemble des ressources externes pour voir — il y a même eu des rencontres individuelles avec chaque ressource externe — comment on travaille, comment on diminue le taux d'abandon, et comment on s'y prend, et comment on suit ça ensemble. Et je vous dirais que ça s'est fait de façon assez probante, parce qu'il y a eu des petits gestes et des grandes stratégies de part et d'autre, mais ce qui a été assez intéressant, c'est qu'il y a eu des stratégies très concrètes, comme par exemple la souplesse du plan d'intervention individualisé, qui permettait donc vraiment de dire, et c'est le but d'Objectif emploi... d'avoir à chaque étape une révision du plan d'intervention, si c'est nécessaire, et de prévoir avec le chercheur d'emploi... Le primodemandeur ou le chercheur d'emploi, c'est de regarder avec lui des étapes plus à court terme, donc quels sont les obstacles immédiats à l'emploi, comment on y travaille à court terme et comment on se donne un plan d'action d'intervention individualisé en lien avec ta réalité, en lien avec tes obstacles et à court terme.

Alors, cet ajustement-là et cet assouplissement des plans d'intervention individualisés, ça s'est fait dans beaucoup, beaucoup de régions, avec beaucoup de ressources externes, et ça a eu comme effet vraiment de diminuer le taux d'abandon. Alors, ce n'est pas la panacée, mais en même temps il y a eu des gestes concrets et il y a eu vraiment un exercice assez intéressant, là, à l'ensemble du Québec qui s'est fait à ce niveau-là, je voulais le nommer. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Fabre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Richelieu.

• (17 h 30) •

M. Rochon : Oui. Merci, M. le Président. Moi, je souscris tout à fait à l'esprit de l'amendement de la députée de Gouin à l'effet d'étendre à l'ensemble des prestataires d'aide sociale, qu'ils soient des primodemandeurs, des gens qui veulent appliquer sur le programme ou des prestataires existants, alors, qu'on rende disponible à l'ensemble des prestataires le programme Objectif emploi et ses incitatifs.

Ça, c'est une question, d'ailleurs, qui avait déjà été abordée, il me semble, dans le cadre de nos travaux. Nous avions été quelques-uns, de ce côté-ci, à nous étonner que les mêmes incitatifs ne soient pas offerts aux primodemandeurs et aux prestataires actuels, surtout qu'il y avait, du point de vue de certains d'entre nous, quelque chose comme... qui sonnait un peu incohérent entre le constat entendu du ministre à l'effet qu'il était plus difficile de ramener sur le marché du travail ou de convaincre d'adhérer à une autre voie, formation, acquisition de compétences, un prestataire de longue date qu'un nouveau demandeur... Alors, si tel est le cas, pourquoi inciter financièrement davantage celui pour lequel il y a davantage de facilité à convaincre d'adhérer à un parcours d'acquisition de compétences, d'acquisition de formation académique ou d'adhésion au marché du travail? Pourquoi mettre davantage d'incitatifs pour celui-là que pour celui qu'il est plus difficile de convaincre?

Et ça, j'aimerais d'ailleurs que le ministre intervienne sur cette question-là, que je reformule, je vous ai dit que je l'avais déjà abordée : Où est la cohérence là-dedans, plus d'incitatifs à quelqu'un qu'il est plus facile de convaincre, moins à quelqu'un qu'il est plus difficile de convaincre?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Disons qu'il n'y a certainement pas d'opposition de principe à dire : Tout le monde dans la classe, par exemple, devrait avoir le même montant. Dans les faits, dans une classe où il y a des jeunes en formation des adultes, vous allez avoir des gens qui ont des montants assez différents selon les programmes dont ils arrivent, parfois du fédéral, parfois de l'aide sociale. À l'intérieur de l'aide sociale, qui sait, là, il peut y avoir des différences. Donc, ce n'est pas une opposition de principe forte, c'est ça que je veux vous dire.

Dans le cas d'Objectif emploi, on a vraiment voulu faire un effort financier pour dire : Vraiment, on donne un coup, parce que les bonnes pratiques nous enseignent qu'il faut à la fois avoir des bonifications financières mais aussi avoir un pouvoir de contrainte pour avoir des résultats. Ça, c'est l'OCDE qui nous dit : Il faut faire les deux en même temps pour augmenter vos chances. On a eu un apport financier au dernier budget, hein, je vous le rappelle, pour Objectif emploi, notamment, là, pour payer ces bonifications-là. Est-ce qu'on devrait aller dans d'autres voies, penser à améliorer aussi d'autres secteurs, penser plus aux personnes inaptes en disant qu'il faudrait peut-être aller plus vers des bonifications pour ce groupe-là que les personnes aptes volontaires? Il peut y avoir des débats là-dessus, mais la priorité, compte tenu... dans les sommes qui sont à notre disposition, c'est quand même de faire un effort important, puis ça peut donner des sommes intéressantes, là, pour les participants à Objectif emploi.

Je vous rappelle par ailleurs qu'ils sont aussi dans la classe, ceux qui doivent... qui ont des obligations fortes, hein, de participer, sous contrainte ou possibilité, là, de coupure, alors que les autres ne l'ont pas. Donc, dans quel monde vous préférez vivre, exactement? Celui qui est volontaire, qui a peut-être un peu moins de sous mais qui n'a pas ce risque-là ou cette contrainte-là, alors que l'autre, lui, l'a?

Donc, moi, j'ai de la difficulté à le départager, mais je veux vous dire qu'il n'y a pas d'opposition de principe. Il y a un enjeu, toujours, financier. On a vraiment voulu faire un effort puis on pense que ça va donner des résultats.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu.

M. Rochon : La question que je soulève à la faveur de l'amendement proposé par ma collègue de Gouin — alors, je lui donne tout le mérite que la question soit soulevée — c'est l'apparente contradiction, il me semble, de ces incitatifs supérieurs pour ceux qui n'ont pas le choix, inférieurs pour ceux qui l'ont. Vous me suivez, M. le ministre, hein? Ça suscite chez moi une réflexion, des questions importantes.

Alors, on versera, selon le portrait actuel, des incitatifs financiers supérieurs aux gens qui n'auront d'autre choix qu'adhérer à l'une des voies de formation offertes par le programme Objectif emploi, et, pour ceux qui ont le choix d'y adhérer ou de n'y pas adhérer, les incitatifs financiers seront moindres. Ce n'était pas formulé avec un point d'interrogation très apparent à la fin, là, mais il y en avait un.

Le Président (M. Cousineau) : C'était style réflexion.

M. Rochon : Oui.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : M. le Président, j'ai donné mon explication là-dessus. Je pense que c'est une explication de financement, hein, donc de priorisation.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Richelieu.

M. Rochon : La collègue de Gouin n'a pas eu le temps, tout à l'heure, de dire qu'il y avait une... il pouvait y avoir une impression d'abandon, hein, d'abandon des prestataires d'aide sociale qui reçoivent ces prestations depuis un bout de temps, d'une concentration de l'action que sur les nouveaux demandeurs, primodemandeurs dans le jargon ministériel. Ce n'est pas une agréable impression que celle de cet abandon par le ministère des gens qui reçoivent depuis un bout de temps — et c'est variable, ce bout de temps, ça peut être quelques jours, quelques mois, plusieurs années — des prestations. Ça ne chicote pas le ministre, ça ne l'embête pas? Point d'interrogation.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Tant que la réalité ne conforte pas l'impression, donc, il n'y a aucun problème, là. Essentiellement, là, on peut regarder encore une fois les budgets, là, du ministère, on maintient nos différents programmes d'insertion. Encore une fois, on a même augmenté les budgets en employabilité. Donc, on n'est pas du tout en train d'abandonner, certainement pas, là, qui que ce soit. On est en train de se donner une priorité, assez forte, je le reconnais, assez forte, là, pour les premiers demandeurs, là, puis je pense que c'est légitime. Je pense que la population, là-dessus, nous suit beaucoup, beaucoup, parce qu'il y a une sensibilité dans la population au fait de faire un effort davantage, pas exclusivement, bien sûr, mais davantage auprès des premiers demandeurs. Beaucoup sont des jeunes. D'autres sont des immigrants qui connaissent peu nos façons de faire, qui peuvent parfois avoir de la difficulté à intégrer le marché du travail. Donc, quand on explique ça à la population, en général, les gens nous suivent très bien.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Rimouski.

M. Rochon : Oui. Je reviens à ma question initiale : Où le ministre trouve-t-il sa motivation à donner davantage de soutien financier, d'incitatifs financiers à quelqu'un plus facile à motiver et moins d'incitatifs financiers à quelqu'un plus difficile à motiver? J'ai du mal un peu à le suivre.

Puis là il ajoute que, la population, c'est ce qu'elle souhaite. Je ne sais pas où il a trouvé ça, j'ai manqué un sondage en quelque part, probablement. Point d'interrogation. Je m'excuse, j'ai souvent l'air de faire des réflexions et de ne pas lui adresser des questions...

Le Président (M. Cousineau) : Non, non, ça va.

M. Rochon : ...mais on est dans la formule pas mal du «on jase», puis peut-être que cette jasette pourrait produire des résultats, sait-on jamais.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Encore une fois, c'est une question de priorités, hein? À budget donné... Si la proposition du collègue, c'est de dire : Écoutez, vous avez un peu plus d'argent, donc partagez ça parmi tous les bénéficiaires d'aide sociale qui participent à des programmes, je lui dis : Bon, on va aller... on va donner une priorité à ce groupe-là. Encore une fois, je pense que ça vaut la peine, surtout quand on est plus jeune, immigrant, on arrive pour la première fois, d'avoir les meilleures conditions possible, là, pour... Et qui sait? Éventuellement, si on a des ressources financières additionnelles, si on pense que ça vaut la peine, on pourra aussi, également, augmenter les autres montants pour les autres groupes, ce n'est pas du tout exclu, hein?

• (17 h 40) •

M. Rochon : Alors, je retiens, parce que je veux être sûr d'avoir bien compris : Priorité, en termes d'incitatifs financiers, pour une voie autre que les prestations d'aide sociale classiques, c'est-à-dire une voie acquisition de compétences, une voie formation, une voie marché du travail, incitatifs supérieurs, financièrement parlant, aux jeunes et aux néo-Québécois. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Blais : Ce que vous venez de présenter, là, c'est les catégories habituelles, là. Donc, essentiellement, j'y vais de mémoire, là, un primodemandeur, moins de 30 ans, ça doit représenter à peu près 60 %, 62 % de la clientèle à l'aide sociale, et les immigrants, donc, ça doit représenter autour de 31 %. Est-ce que je... 36%. Donc, ça, c'est vraiment, là, le groupe qui est constitué, là... qui constitue, pardon, les primodemandeurs à l'aide sociale au Québec.

M. Rochon : M. le Président, je veux juste éviter que le ministre tourne les coins un peu ronds. Il n'y a pas, je présume, dans ce groupe qui pourrait profiter du programme Objectif emploi, et particulièrement de ses incitatifs financiers, que des jeunes de moins de 30 ans, parce qu'il doit y avoir des primodemandeurs plus âgés que ça, et des néo-Québécois et Québécoises.

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : Bien, c'est-à-dire qu'encore une fois, là, ce que j'ai devant moi, là, pour les moins de 30 ans, effectivement, là, c'est, quoi, 55 %, 56 %. Alors, ce qui vous intéresse, ce serait de connaître les personnes qui ont plus de 30 ans? Parce que j'ai les chiffres, si ça vous intéresse. Entre 30 et 40 ans, qui sont primodemandeurs, c'est ça qui vous intéresse? Parce que je les... Non?

M. Rochon : Je veux vous entendre préciser qui pourra toucher ces incitatifs financiers et qui ne pourra pas. Là, j'ai compris que qui ne pourra pas, ce sont ceux qui sont déjà prestataires d'aide sociale. Qui le pourront, toucher ces incitatifs financiers, ce sont les primodemandeurs, parmi lesquels, me dites-vous, les néo-Québécois et Québécoises nouvellement arrivés au Québec, qui n'ont pas de travail, et essentiellement des jeunes. Les jeunes représenteraient, dans ces primodemandeurs, quoi, vous m'avez dit, 55 % d'entre eux? Est-ce que c'est ça?

M. Blais : Oui. Alors donc, on va faire un peu de mathématiques, là. Donc, ici, j'ai les chiffres pour 2014‑2015, ça doit nous donner à peu près une fenêtre, là, comparative. Donc, le groupe 29 ans et moins — c'est ça qui est un peu compliqué — 29 ans et moins, donc, on a 55,9 %. Si vous prenez le groupe 35 ans et moins, là vous atteignez 73,1 %. Donc, voilà. Et puis, chez les 30-35 ans, 17,2 %; chez les 36 ans à 54 ans, 24,8 %.

M. Rochon : Toutes ces remarques que nous faisons au ministre, ces réflexions que nous lui partageons, ces amendements proposés tantôt par l'opposition officielle, tantôt par la collègue de Gouin, bien plus rarement par la deuxième opposition, qui souscrit entièrement au projet de loi, puis c'est bien son droit, là, devraient lui permettre réaliser que nous ne nous opposons pas à un programme tel Objectif emploi qui aurait le mérite, mais vraiment le mérite d'améliorer les compétences des gens, les connaissances des gens, la formation des gens, qui aurait le mérite de les conduire sur le marché du travail. Comme nous l'avons souventefois répété, notre opposition c'est une opposition aux sanctions prévues au programme. Les incitatifs financiers, bien, nous ne pouvons qu'y applaudir, hein? Et nous voudrions, le ministre l'a bien entendu, puis c'est ce que poursuit comme objectif l'amendement de la collègue de Gouin... Les incitatifs financiers, nous voudrions les voir étendus à l'ensemble des prestataires, pas seulement aux primodemandeurs.

Et nous voulons tellement que des mesures permettent d'améliorer le sort des prestataires d'aide sociale qu'obstinément nous tentons de conduire le ministre et son équipe à nous donner des assurances quant au personnel qualifié qui opérationnalisera ce programme, quant au personnel qualifié qui rencontrera les primodemandeurs, et je continue d'avoir beaucoup d'inquiétudes à cet égard. Rien ne m'a rassuré à ce propos, puis je ne le fais pas exprès, là. C'est difficile d'avoir une idée juste de qui se trouve aujourd'hui, en termes de personnel, là, dans les centres locaux d'emploi dans les localités, là, pas dans les bureaux régionaux, là, dans les localités. C'est difficile parce que, là, on nous présente des professionnels exerçant des fonctions diverses, portant des titres divers. On a paru en répertorier quatre tantôt, là. J'écoutais l'échange que mon collègue de Rimouski a eu avec une des sous-ministres, je ne risquerai pas si c'est adjointe ou associée, mais une des sous-ministres, et de cet échange je n'ai pas trop bien compris ce qu'il advenait en termes de personnel qualifié dans les centres locaux d'emploi. Moi, je sais, pour le vivre à Sorel-Tracy, qu'il y a eu du déplacement de personnel, qu'il y a eu de la délocalisation.

Et à ce propos, et toujours, toujours dans l'esprit de m'assurer que le programme que souhaitent développer le ministre et le ministère fonctionne, j'aimerais, si c'est possible, M. le Président, demander par votre entremise au ministre et au ministère, à son ministère, de nous produire des chiffres, des chiffres sur l'évolution des effectifs dans les centres locaux d'emploi au cours des cinq dernières années. Je pense que ça peut se faire, ce travail-là. Et le ministre conviendra, là, je pense, là, conviendra que c'est extrêmement utile aux réflexions que nous avons ici, aux travaux de la commission sur ce projet de loi.

Moi, je veux savoir combien il y a de travailleurs et travailleuses dans ces centres locaux d'emploi pour opérationnaliser ce programme, que le ministre présente à certains égards comme révolutionnaire, en tout cas audacieux, je ne me souviens pas du qualificatif, là, mais il en est fier puis il dit que c'est quelque chose, hein, de quand même nouveau en termes d'employabilité...

Une voix : ...

M. Rochon : ...O.K., préemployabilité, me souffle-t-il, dans ce domaine-là. Enfin, il en semble bien fier. Bon. Alors, il faut s'assurer qu'il puisse être vraiment opérationnalisé.

Alors, j'ai fait une demande de chiffres, M. le Président. Est-il possible que le ministère les produise? Encore une fois, ce que je souhaiterais, c'est un document qui puisse m'indiquer le mouvement d'effectif au cours des cinq dernières années dans les centres locaux d'emploi.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. M. le ministre.

• (17 h 50) •

M. Blais : M. le Président, pour peut-être réitérer un peu ce que j'ai dit plus tôt, là, si un exposé de ce type-là nous permettait de voir qu'est-ce qu'il y a, puis peut-être même des manques, et puis qu'est-ce qu'on pourrait faire pour satisfaire les collègues d'en face, là, oui, très bien, on y va, dans Objectif emploi, mais je sais bien, ils l'ont dit à plusieurs reprises aujourd'hui, que de toute façon ils s'objectent au principe même d'Objectif emploi de créer des obligations. Donc, je ne ferai pas travailler les fonctionnaires là-dessus pour répondre à des questions qui ne nous permettront pas d'avancer, sur un blocage que je constate, là, de plus en plus. Alors, je réutilise l'expression, là, je pense qu'on perd notre temps, là, avec ce type de demande là.

Le Président (M. Cousineau) : M. le député de Richelieu.

M. Rochon : M. le Président, quel article du règlement est-ce qu'on invoque quand un collègue, là, le ministre déforme complètement nos propos? Le Québec au complet, les gens qui nous regardent viennent de m'entendre dire exactement le contraire de ce que le ministre prétend avoir été mon discours. Je viens de dire que nous souscrivons, nous, à l'idée d'améliorer le sort des prestataires d'aide sociale, on souscrit à l'idée d'ouvrir pour eux des voies de formation, d'acquisition de compétences, des voies facilitant leur arrivée sur le marché du travail, puis qu'à cet égard le programme Objectif emploi n'est pas vilain, nous sommes à l'aise avec les incitatifs qu'il prévoit. Là où l'on ne suit pas le ministre, c'est quand il parle de sanctions. Nous, nous voulons que tout soit mis en branle pour améliorer le sort des gens dans des situations pas faciles, qui vivent dans des contextes de pauvreté avec de maigres prestations, alors, on veut tout faire pour améliorer leur sort, mais on n'adhère pas à des sanctions qui vont détériorer ce sort.

Est-ce que vous m'avez entendu, là, dire que j'étais contre le projet de loi au complet, contre le programme... Non. Je suis contre les sanctions qu'il prévoit, mais, quant au reste, je trouve qu'on peut avoir des discussions intéressantes autour de l'amélioration du sort des prestataires d'aide sociale.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Blais : C'est très clair, là, on ne peut pas jouer sur les mots, on voit bien, là, où est le noeud, hein? Et on perd de plus en plus notre temps. Les gens qui nous écoutent, je pense, en sont conscients, là, qu'on est allés au maximum, je pense, de part et d'autre, hein, de la possibilité puis de la souplesse, là. Moi, je pense que j'ai apporté beaucoup de choses, depuis mon arrivée au ministère, sur ce programme-là, on est allés très loin. On a été à l'écoute des commentaires, des propositions.

On revient toujours à cette question-là : Peut-il y avoir vraiment des obligations ou pas? Nous, on y est favorables. On pense qu'on a un problème sérieux, M. le Président, de participation à des mesures qui, si jamais elles étaient obligatoires, ces mesures-là, donneraient des meilleurs résultats.

Donc, on a un point de vue qui est diamétralement opposé, là. Je ne veux pas caractériser la position de mes collègues, j'espère qu'elle va évoluer. Encore une fois, là, je rappelle qu'un des candidats à la chefferie a déjà une position beaucoup plus proche de la nôtre, peut-être que ça peut évoluer dans le bon sens. Mais, pour le moment, je constate de plus en plus, là, qu'on est devant une impasse, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Richelieu, il vous reste 3 min 20 s.

M. Rochon : C'est assez. C'est assez, trois minutes, pour dire que, moi, mon constat, puis je vais vous le dire, mon constat, c'est que ce qui excite le ministre, c'est les sanctions. Lui, là, il veut, là, sanctionner les prestataires d'aide sociale, là, c'est ça, son objectif, là. Et il se désole qu'on ne le partage pas. Bon, bien, c'est correct. Si c'est ça, le noeud, effectivement, il y a un maudit problème, puis on ne passera pas au travers. Lui, il veut absolument sanctionner les prestataires d'aide sociale, et nous, on veut améliorer leur sort. Moi, je croyais que c'était aussi ce qu'il voulait, mais je constate qu'il s'obstine tellement avec l'histoire des sanctions qu'elles prennent le dessus sur les mesures incitatives. Alors, il a raison de dire qu'on a un méchant problème, un méchant problème, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Oui, puis vous avez raison : dans un couple, là, quelqu'un qui veut puis quelqu'un qui ne veut pas, ça va mal. M. le ministre.

M. Blais : Non, non, M. le Président, moi, je n'ai pas de fascination pour les sanctions. On n'en parle presque jamais.

Dans le fond, là, ce qui est important, puis on le voit bien, même on le voit bien dans la pratique... Ce qui va arriver, là, c'est qu'une fois, là, que vous dites aux gens : Écoutez, oui, quand vous nous dites : Ah! je n'ai pas le temps, ce soir, je ne peux pas venir à la rencontre, bien, vous êtes obligé de venir, il y a des conséquences si vous ne venez pas, bien, qu'est-ce... ils viennent, ils arrivent, c'est tant mieux. Et, quand on regarde, là, les pratiques ailleurs, on se rend compte que, finalement, les sanctions sont rarement appliquées, mais qu'elles ont un effet dissuasif puis qu'elles favorisent la participation.

C'est pour ça que je n'ai aucune fascination pour ça. Encore une fois, on ne considère même pas des économies, hein, dans ces sanctions-là, ce qui veut bien dire qu'on n'a aucune fascination pour ça. Mais elles envoient un message, je pense, que les gens doivent se prendre en main; qu'on est là pour les aider, mais qu'ils ont un bout de chemin à faire. Donc, c'est ça qui est important.

Le Président (M. Cousineau) : Deux minutes, M. le député de Richelieu.

M. Rochon : M. le Président, bon, là, là, on vient d'apprendre un autre détail : Maintenant, il va y avoir des rencontres le soir, des rencontres le soir. D'accord. Parfait.

Je repense à la demande que j'ai faite, là, M. le Président. J'ai demandé que le ministère de monsieur produise un document qui nous donnerait le portrait de l'évolution des effectifs dans les centres locaux d'emploi depuis les cinq dernières années. La réponse, c'est ça, là, c'est ce que le ministre vient de me faire.

Qu'est-ce que le ministre ne veut pas que nous voyions, là? C'est quoi? Quel est le... Ce n'est pas montrable, l'évolution des effectifs dans les centres locaux d'emploi? Qu'est-ce que ma demande a de si grave pour lui déplaire à ce point et recevoir une... j'allais dire recevoir une fin de non-recevoir?

Le Président (M. Cousineau) : M. le ministre.

M. Blais : La demande a un sens, hein, mais de toute façon on sait que ça ne nous conduit nulle part. Encore une fois, c'est ça. À un moment donné, là, il faut bien reconnaître qu'on est devant des gens qui disent : Nous, c'est le statu quo, on ne veut pas de grand changement à l'aide sociale, on veut que ça continue comme ça fonctionne. Dans un contexte où partout au Québec, partout au Québec il y a des demandes pour des employés, les gens cherchent des employés, dans un contexte où on a beaucoup trop de décrochage scolaire, au Québec, puis qu'il faut essayer de travailler aussi sur ce front-là, on nous dit grosso modo : Le statu quo. Donnez ce que vous avez toujours donné, donc des bonifications, etc. On ne veut pas prendre le problème directement.

Moi, je peux bien présenter, M. le Président, tous les documents qu'on me demande, mais je n'ai aucunement l'impression que ça va nous faire avancer. On est devant, hein, une situation de blocage.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député. Une minute.

M. Rochon : Quelques secondes. Le ministre dit : Je sais que la demande a un sens. Bien, j'espère, que la demande a un sens! Puis le sens, il n'est pas pire, là. Le sens, c'est de s'assurer qu'il y a, dans les centres locaux d'emploi, les effectifs suffisants pour opérationnaliser le programme du ministre. C'est juste ça, moi, l'assurance que je veux avoir.

Mais j'ai l'impression que son refus tient au fait que le document nous mettrait dans un... nous présenterait un portrait totalement contraire, c'est-à-dire qu'il nous confirmerait qu'il n'y a plus les effectifs dans les centres locaux d'emploi pour opérationnaliser ce programme. Et, si ce n'est pas vrai, qu'il produise les chiffres, c'est tout.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Richelieu. Oui, M. le ministre.

M. Blais : ...une chose. Là-dessus, là, essentiellement, je pense que les gens qui nous ont écoutés aujourd'hui ou qui nous écouteront plus tard, qui sait, là, ont compris le sens, là, de mon intervention.

Le Président (M. Cousineau) : D'accord. Oui, M. le...

M. Turcotte : ...maintenant, ce ne sera plus le programme Objectif emploi, ça va être le programme objectif sanction.

Le Président (M. Cousineau) : Bon, alors, compte tenu de l'heure, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au mercredi 24 août 2016, à 15 heures.

(Fin de la séance à 17 h 59)

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