(Onze heures trente minutes)
Le Président
(M. Cousineau) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission
de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 70,
Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et
l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Ouellet (René-Lévesque)
remplace M. Bergeron (Verchères); M. Turcotte (Saint-Jean) remplace M.
Leclair (Beauharnois); et M. LeBel (Rimouski) remplace M. Therrien (Sanguinet).
Étude détaillée (suite)
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. Alors, lors de la dernière séance, nous étions à travailler le bloc
n° 1, Loi favorisant le développement
et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, qui comprend les
articles 2 à 7. Nous sommes toujours sur l'article 2. Le député de
René-Lévesque, oui, avait posé une question au ministre, mais là, le député n'étant pas là, M. le ministre, est-ce que
vous pouvez nous donner une réponse ou vous préférez qu'on attende le député de René-Lévesque? On va lui demander de
reformuler sa question, puis vous pourrez répondre à ce moment-là.
(Interruption)
Excusez-moi. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 2? Oui,
M. le député de Saint-Jean. Puis il vous reste quand même assez de
temps.
M.
Turcotte : 15. M.
le Président, on a abordé, bon, précédemment la question de la main-d'oeuvre
future. J'aimerais savoir de la part du ministre s'il y a une estimation de
combien de... on parle de combien de personnes, là, qu'on pourrait aider par
main-d'oeuvre future?
M.
Blais : C'est un bassin très important. Il s'agira de voir maintenant
si les employeurs tendent la perche, hein, qui est offerte, parce que c'est un bassin très, très important de...
finalement, ça couvre toute la formation professionnelle, technique,
potentiellement, ça couvre aussi les immigrants, ça peut aussi couvrir — on en
a parlé hier, je crois, un peu — les personnes qui sont un peu plus éloignées
de l'employabilité. Donc, on a peut-être des nombres là-dessus. Je pense
qu'hier on avait quelque chose. Je vais attendre pour voir un peu en termes de
proportion, mais la proportion la plus importante, c'est les étudiants en
formation professionnelle et technique, ça, c'est sûr.
M.
Turcotte : Ça fait
qu'on peut facilement parler de plusieurs milliers de personnes par année.
M.
Blais : Oui, et j'ai les chiffres plus exacts maintenant. Donc, en
termes de proportion, c'est effectivement les jeunes, 53 %, là, potentiellement, qui pourraient être touchés par
la mesure. Donc, c'est plus de 370 000 personnes au Québec. La
future population immigrante, donc, l'évaluation, c'est plus de 115 000
personnes. La hausse d'activité de 15 à 64 ans, oui?
Une voix : Oui, ça peut
être...
M.
Blais : Oui, c'est peut-être moins significatif, là. Les personnes en
chômage, là, qui pourraient être inscrites dans les mesures, plus près de 60 000 personnes; et les personnes
de 65 ans et plus, il faut le mentionner parce que ça peut aussi toucher
des personnes... on voit ça de plus en plus et on risque de le voir de plus en
plus, des gens qui débutent une deuxième, une troisième carrière, donc, ça peut
être autour de 50 000 personnes.
Une voix : M. le député de
Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Donc, je comprends, dans la vision du ministre, quand on parle de main-d'oeuvre
future, ce n'est pas nécessairement quelqu'un qui n'a jamais travaillé,
mais c'est quelqu'un qui n'a pas travaillé dans un domaine en particulier, parce que, quand on parle des 65 ans
et plus, quand le ministre nous parle d'une deuxième, troisième
carrière, c'est des gens qui ont déjà été
sur le marché du travail. Donc, dans ce cas-là, ça serait des gens qui
n'étaient pas dans ce domaine-là mais qui, après avoir passé une partie
de leur vie active, voudraient être dans une nouvelle carrière pour avoir un horaire de travail peut-être plus adapté
à leur réalité, faire des choix différents que... c'est moins un emploi
dit alimentaire, mais plutôt un emploi par plaisir de le faire et peut-être
pour servir sa communauté.
Donc,
je comprends que c'est une définition quand même large de «main-d'oeuvre
future», parce qu'on peut avoir en
tête, à première vue, qu'on parle des jeunes ou des gens qui sont sur les bancs
d'école, ou qui devraient être sur les bancs
d'école, ou ont terminé les bancs d'école puis qui voudraient se trouver un
emploi, mais je comprends que c'est une définition plus large, en
fonction de certains types de métier, là.
M. Blais : L'expression «future» ne
doit pas être prise en termes de cohorte d'âge, hein, ça doit être compris au sens où, les entreprises, parce que
finalement, encore
une fois, c'est les entreprises
qui font la dépense de formation, c'est elles qui demandent à ce qu'une partie de ces dépenses-là soit
admissible, c'est elles-mêmes qui, finalement, font appel à une main-d'oeuvre potentielle. Donc, on pourrait dire : Main-d'oeuvre potentielle future. Bien sûr, dans ce potentiel-là, on retrouve un segment
un peu plus étroit, là, puis qui est une réalité : des personnes qui ont
plus de 65 ans.
M.
Turcotte : Donc,
c'est vraiment une main-d'oeuvre future pour l'entreprise.
M. Blais : Oui, c'est comme ça qu'il
faut le comprendre.
M.
Turcotte : D'accord.
M. Blais : Je pense que la bonne
expression... «qui a un potentiel futur».
M.
Turcotte : D'accord.
Est-ce que vous pouvez... Parce qu'une de nos inquiétudes concernant cet
article-là du projet de loi, c'est... puis
je l'ai un peu mentionné à la séance d'hier, c'est concernant justement
le fait qu'on a plus de gens qui
pourront être rejoints par des initiatives de formation soit par l'entreprise
ou via la Commission des
partenaires du marché du travail. Je comprends que de la diminution... bien, du
changement entre 1 million et 2 millions, cette perte d'argent, si on peut dire ça ainsi, elle est
compensée par un réinvestissement du gouvernement. Le 12 millions de
dollars qui est différent, le gouvernement le réinvestit à 2 millions par
année pour les bourses et 10 millions pour l'adéquation formation-emploi. Donc, ce 12 millions là est
compensé par le gouvernement plutôt que ça soit les entreprises qui le
cotisent soit par elles-mêmes leurs
formations ou le cotisent au fonds. Cependant, ce n'est pas nécessairement pour
des activités de formation proprement
dites en termes d'adéquation formation, ça peut être vu un peu plus large. On y
arrivera plus tard. Le ministre va me dire que j'ai hâte d'arriver aux
autres articles.
Mais moi, je
suis inquiet, nous sommes inquiets sur qu'est-ce qui arrivera avec la
main-d'oeuvre actuelle parce que c'est
quand même un enjeu. On voit de plus en plus, dans nos circonscriptions, des
entreprises soit qui se délocalisent, ferment leurs portes, peu importe,
et qu'on a une main-d'oeuvre qui est là, qui a pris un certain âge et ils n'ont
pas toujours eu de la formation durant le temps qu'ils étaient à l'emploi, avec
le faible taux d'alphabétisation que nous avons — le ministre a été
ministre de l'Éducation, il le sait. Donc, d'avoir des initiatives de formation
en entreprise actuellement pour pouvoir aider ces gens-là, qui sont
actuellement sur le marché du travail, pour s'assurer soit qu'ils obtiennent un
meilleur emploi, donc qu'ils libèrent des emplois inférieurs qui pourraient
être pris par des gens plus jeunes ou avec moins d'expérience, donc, et faire
la chaîne de l'employabilité, ou faire en sorte que ces gens-là, s'ils perdent,
malheureusement, leurs emplois, bien, puissent être plus rapidement aptes à se
trouver un autre emploi.
Donc, est-ce
que le ministre a une assurance que la main-d'oeuvre actuelle ne sera pas
délaissée par les activités de formation soit en entreprise ou soit par
la Commission des partenaires du marché du travail? Parce que c'est bien
d'encourager la main-d'oeuvre future, mais il ne faut pas que ça soit au
détriment de la main-d'oeuvre actuelle.
• (11 h 40) •
M.
Blais : Oui, ce serait malheureux si c'était le cas, hein? Donc, il
faut bien comprendre qu'encore une fois c'est les employeurs qui décident de la stratégie de formation. À vrai dire,
ce n'est pas tout à fait le cas, parce que bien souvent il y a une
discussion... c'est même à l'intérieur des conventions collectives par voie,
là... qu'on décide, disons, d'un commun
accord, des stratégies, là, de formation pour les employeurs... non, les
employés, pardon. Il faut bien comprendre, il faut bien voir que... D'abord, on sait bien que, s'il y a fermeture
d'une entreprise ou une délocalisation, il y a déjà des programmes qui
sont à l'oeuvre, là, dans les centres locaux d'emploi auxquels les personnes
qui sont en chômage sont les tout premiers
bénéficiaires ayant priorité, il faut le dire, compte tenu, là, notamment de
l'origine du financement de ces programmes-là.
Mais il faut aussi comprendre que les personnes
qui ont perdu un emploi et qui ont besoin de retourner sur le marché du travail sont aussi des bénéficiaires de l'ouverture que nous faisons, hein, parce que
cette ouverture-là, ça permet aussi à une entreprise... Alors, c'est toujours,
hein, les futurs employés. Donc, si votre entreprise, malheureusement, ferme,
pour différentes raisons, et qu'une autre entreprise est intéressée,
éventuellement, à votre capital humain, à ce moment-là, bien, elle va pouvoir
développer un programme pour vous accueillir.
Donc, on
offre plus de souplesse dans la possibilité à la fois d'investir chez ces
travailleurs mais, quand ça va bien, aussi d'investir dans le futur
potentiel... les employés, pardon, qui ont perdu, là, leur travail. Donc, il me
semble que c'est complémentaire.
M.
Turcotte : Quelle
garantie pouvez-vous nous donner que la main-d'oeuvre actuelle ne sera pas pénalisée
par l'ajout de la main-d'oeuvre future?
Parce que je comprends que vous-même, vous croyez que ça serait dommage
que la main-d'oeuvre actuelle soit pénalisée. Donc, comme ministre, vous avez
des pouvoirs en vos moyens. Est-ce qu'il faudrait
ajouter dans l'article... que ça soit mentionné que ça ne se fasse pas au
détriment de la main-d'oeuvre actuelle, pour que ça soit plus clair, je
ne sais pas, quel...
M.
Blais : Ce serait vraiment, vraiment une erreur, parce que, d'une
certaine façon, c'est qu'on ne sait pas exactement comment qualifier «au
détriment de la main-d'oeuvre actuelle».
Imaginons
aujourd'hui, et c'est le cas, qu'il y a, disons, des formations qui sont peu
qualifiantes, disons-le comme ça, que les
entreprises, pour différentes raisons, là, réussissent plus ou moins bien, là,
à faire leurs dépenses, mais, le jour où on leur dit : Bien,
écoutez, vous pouvez aussi attirer des jeunes chez vous, leur verser une bourse
ou encore aller vers un programme de formation, là, en complémentarité avec une
école, il faut qu'elles puissent le faire, hein? Et, là-dessus, je peux vous dire, les syndicats, là, du Québec ont
montré une grande maturité, parce qu'au tout début, quand on a commencé à discuter du sujet, il était normal
qu'ils s'inquiètent un peu de leurs travailleurs, ceux qu'ils
représentent. Ils ont une obligation de respecter, tout d'abord, les
travailleurs en fonction, et pas ceux à venir, et je pense qu'ils ont compris
qu'il y a une culture de la formation qui mérite d'être développée au Québec.
En
général, les entreprises québécoises, il faut le noter, malgré notre loi
actuelle, font moins de formation — c'est bien le cas, hein? — font moins de formation que les entreprises
comparables canadiennes. Donc, il y a une culture de la formation à
développer. On pense que d'aller dans cette direction-là, là, améliore
grandement, là, cet esprit, cette culture de formation.
M.
Turcotte :
...contradictoire, ce que j'entends. En
même temps, lorsqu'on
voit que le gouvernement, au fond... Puis ce n'est pas moi qui le
dis, là, c'est dans la présentation du dernier budget. Quand on parle
d'adéquation entre la formation et l'emploi, le gouvernement présente comme une
mesure pour favoriser l'adéquation entre la formation et l'emploi un allégement réglementaire pour
8 000 entreprises par la hausse du seuil d'assujettissement à la Loi
favorisant le développement et la
reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre, donc, la loi du 1 %,
de 1 million à 2 millions.
Je
comprends ce que le ministre dit, nous en sommes. Nous trouvons ça aussi
dommage et nous considérons que les entreprises, effectivement, gagnent
à avoir davantage de formation dans leurs murs ou à l'extérieur de leurs murs, mais, du moins, pour leurs personnels parce qu'ils
gagnent en productivité, en compétitivité pour faire face à d'autres entreprises, mais, quand on lance comme message à
8 000 entreprises : Mais vous n'êtes plus obligées de faire de
la formation maintenant parce que vous n'êtes plus assujetties à la loi
du 1 %, je comprends qu'un certain nombre vont peut-être continuer à le
faire parce qu'ils considèrent que c'est important, mais, en même temps, c'est
un geste qui va à l'encontre de favoriser la culture de formation en
entreprise.
Une voix :
M. le ministre.
M.
Blais : ...un portrait d'ensemble un peu plus large. Tout d'abord, il
s'agissait de donner un coup de main aux PME québécoises. Dans le fond, celles qui ont le plus de difficultés à
atteindre la contrainte du 1 %, en général, c'est des petites et moyennes entreprises, pour des raisons
qu'on peut comprendre : ils n'ont pas le temps de penser à ça,
réfléchir à ça. Souvent, ils doivent faire
affaire avec des agences, là, qui s'occupent de réfléchir à ce que pourrait
être la formation pour leurs
entreprises, et donc, finalement, ils préfèrent payer à Revenu Québec plutôt
que... et donc à mettre ça dans le fonds plutôt que le faire.
Donc,
la décision, c'était de donner un coup de main à ces PME là, qui sont plus
fragiles. Il ne faut pas sous-estimer le
fait que cette obligation-là, c'est une taxe sur la rémunération, donc, et
c'est à peu près une taxe qui est quand même la plus difficile à justifier du point de vue économique, parce que vous
pouvez ne faire aucun profit, vous pouvez même être à perte pendant un
certain temps, mais vous devez quand même débourser. Donc, c'était dans une
stratégie d'aider ces entreprises-là. Mais, le message, je ne pense pas que
c'est de ne pas faire de formation, c'est qu'on vous enlève cette taxe-là, qui est un peu plus pénible, nous, on va
compenser. Donc, c'est vraiment un coup de main pour les entreprises, mais ces PME là quand même sont admissibles encore
aux crédits d'impôt qui existent déjà, au crédit d'impôt pour stage en milieu de travail, aux programmes de subventions qui
existent, du fonds actuel. Donc, toutes ces petites PME là, même si
elles ne contribuent pas aujourd'hui, elles ont quand même accès — et
c'est important de le dire, parce qu'elles le font — accès au fonds, aux mesures et aux services d'Emploi-Québec et, bien
sûr, aux déductions fiscales en
formation.
Donc, je pense qu'on
a trouvé un bon équilibre. On voulait donner un coup de main à ces petites et
moyennes entreprises là et, en
même temps, on ne voulait pas
diminuer, là, la portée puis l'importance du fonds. Donc, je pense qu'on a trouvé,
comme gouvernement, un bon équilibre.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Je
comprends ce que vous mentionnez... ce que le ministre mentionne — pardon,
M. le Président. Cependant, peut-être
qu'à l'usage les PME que le ministre fait référence... bien, que le budget
aussi fait référence, les 8 000, peut-être que leurs choix auraient été
différents s'ils avaient pu justement, avec la main-d'oeuvre future...
quand vous parlez, bon, de stages en
entreprise, etc., ce qui fait en... Parce que le ministre a mentionné que, pour
des entreprises, c'est... qui
considèrent que la formation de leur main-d'oeuvre est pas mal faite, donc envoient l'argent
au fonds. Là, de pouvoir justement bonifier leurs entreprises par de la
formation de future main-d'oeuvre, puis tout ça, peut-être que ça aurait été bien de donner une période où on peut
expérimenter cet article-là, là, de la main-d'oeuvre actuelle et
future avant de passer de 1 à 2 millions pour les entreprises.
M.
Blais : Non, on le faisait
déjà pour les petites PME, les toutes petites, puis on l'a simplement élargi,
là, puis on n'a pas vu vraiment, là... L'impact — c'était
pour leur donner un coup de main dans une période qui était peut-être plus difficile, là, pour les PME — je
pense que c'est vraiment les libérer d'une taxe sur la masse salariale qui
est une taxe qui était assez lourde.
Il
faut bien le comprendre, là, que toute cette histoire-là a commencé dans un
débat où les représentants du milieu patronal nous disaient :
Écoutez, là, on n'a plus besoin de ça, on a bien compris, les entreprises qui
ne feront pas de formation ne survivront pas. Donc, il y avait une certaine
idée du laisser-faire : celles qui ne feront pas de formation, elles ne vont pas survivre, donc on n'a pas besoin
d'être obligé de le faire. Et finalement on s'est ralliés, tous, je pense, au Québec, à la fois
les représentants du milieu patronal et du milieu syndical, pour un petit peu diminuer le fardeau, là,
sur les toutes petites entreprises, mais
aussi, hein, renforcer, comme on l'a mentionné hier, renforcer les conditions,
là, d'éligibilité, là, pour ce
remboursement et aussi ouvrir sur le personnel futur. Mais, il ne faut jamais
oublier une chose, c'est qu'en ce moment,
compte tenu de la rareté de la main-d'oeuvre que les entreprises rencontrent,
leur première priorité, avant de se retourner vers l'avenir, c'est aussi
de conserver leurs propres employés puis s'assurer qu'ils soient formés de
façon convenable.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean.
Alors, écoutez, je passerais maintenant la parole au député de
René-Lévesque, parce que, lors de la dernière séance, vous aviez une question
que vous aviez posée au ministre, mais vous
n'avez pas eu de réponse. Alors, si vous voulez reformuler votre question, on
devrait avoir la réponse du ministre.
M. Ouellet : Donc, ma question était
la suivante : Je voulais savoir... Parce que M. le ministre avait posé l'hypothèse que, dans cette modification de loi
là, on pouvait anticiper de nouveaux besoins et un des besoins qui
pouvaient être anticipés, c'était la
formation à distance. Donc, j'aimerais entendre le ministre sur cette
prétention-là future, qu'il serait peut-être intéressant à regarder dans
ce projet de loi là.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
• (11 h 50) •
M. Blais : Alors, ça, c'est
intéressant. Je vais le prendre un petit peu en contrefactuel, là.
Prenons
aujourd'hui un des débats qu'il y a, là, sur l'admissibilité des dépenses.
Est-ce que, les frais de déplacement, les frais de logement, on devrait les
reconnaître ou pas? On sait que, pour quelques heures de formation, parfois, de véritables formations
qualifiantes, hein, les coûts, on en a parlé un peu hier, les coûts peuvent
être extrêmement importants en
termes de frais de déplacement, en
frais de séjour. Bon, on va en parler tout
à l'heure à l'article
5, un peu comment on voit les choses.
On pourrait
imaginer très bien que, compte
tenu de l'évolution à la fois des technologies, à la fois des coûts et des dépenses, de plus en plus de formations puissent
se faire et mériteraient de se faire à distance — d'ailleurs, ça se fait déjà dans le monde universitaire à tous les niveaux d'enseignement — et,
à ce moment-là, compte
tenu de la facilité, compte tenu de
l'efficacité de la mesure, compte
tenu de l'impact positif que ça a sur
la réduction des coûts de déplacement et de logement, on pourrait avoir une discussion gouvernementale pour penser qu'il faut changer un peu ce que l'on reconnaît comme
admissible, qui est favoriser, dans certains cas, par exemple, que les choses
se fassent à distance avec des technologies appropriées. Donc, aujourd'hui, on ne le voit pas encore comme ça, mais peut-être demain ou peut-être même après-demain ce serait le cas.
Donc, l'effet
de la technologie pourrait nous apporter d'autres possibilités, qui sait,
réduire certains coûts et nous permettre de financer davantage d'heures
qualifiantes.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de René-Lévesque.
M.
Ouellet : On pourrait penser
à... de salles multimédias, on pourrait penser à toute la technologie de fibre
optique qui serait nécessaire pour permettre effectivement, dans les
entreprises, d'obtenir la formation à haut niveau. Et pourquoi je vous dis ça? Et dans votre ancienne vie de ministre de
l'Éducation... Vous devez vous souvenir que, pour ce qui est de la Côte-Nord, on n'a pas d'université,
on a une corporation qui fait du courtage de formation. Alors, c'est
pour ça que j'aimerais savoir si ce genre de contexte là serait applicable ou
pourrait être envisageable.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : Tout à fait — je
suis prudent — tout
à fait, oui.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Je n'ai plus d'autre...
Le
Président (M. Cousineau) : Avant, je pourrais peut-être aller voir, par alternance... Est-ce qu'il y a d'autres interventions, toujours sur l'article 2? D'accord. Donc, je reviens à M. le député de Saint-Jean. Il vous reste
5 min 25 s, je crois.
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. Suite à la discussion que j'ai eue avec le ministre,
j'aimerais déposer un amendement.
Le Président (M. Cousineau) :
Absolument.
M.
Turcotte :
Donc, à l'article 2, ajouter la phrase suivante après le premier
paragraphe : «La formation de la main-d'oeuvre future ne se fera
pas au détriment de la main-d'oeuvre actuelle.»
Le Président (M.
Cousineau) : On va suspendre quelques instants pour voir la
validité de l'amendement.
(Suspension de la séance à
11 h 53)
(Reprise à 11 h 59)
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, votre attention! Nous allons reprendre nos
travaux. Donc, il y a un amendement sur la table déposé par M. le député
de Saint-Jean. M. le député de Saint-Jean, vous pouvez plaider en relisant votre amendement. Vous avez tous et
toutes l'amendement entre les mains? Allez-y, M. le député de Saint-Jean.
• (12 heures) •
M.
Turcotte : Bien, M. le Président, merci. Tout d'abord, bon, l'amendement, là, d'ajouter après le paragraphe qui est à l'étude... le premier paragraphe
qui est à l'étude actuellement la phrase suivante : «La formation de la main-d'oeuvre future ne se fera pas au
détriment de la main-d'oeuvre actuelle.»
Pourquoi qu'on désire ajouter cette mention, M. le Président? Bien, c'est parce que, on l'a
mentionné précédemment, nous avons des craintes que la main-d'oeuvre...
Nous sommes d'accord avec le principe qu'il faut effectivement aider la main-d'oeuvre
future, d'autant plus, dans la présentation du ministre, dans ses réponses à
ces questions, qu'on ne doit pas nécessairement
la voir en termes de cohorte d'âge, mais plutôt de main-d'oeuvre future pour une entreprise ou pour les entreprises, donc ça peut
être assez large, pour faire en sorte que les entreprises puissent obtenir la main-d'oeuvre nécessaire
et qualifiée dans leurs besoins de main-d'oeuvre quand, on le sait effectivement, qu'il y a beaucoup
d'entreprises qui ont besoin de gens, mais, bon, des fois, ce
n'est pas toujours évident de faire l'adéquation. Donc, d'ajouter «la main-d'oeuvre future», c'est
une bonne chose, mais notre crainte, c'est que la main-d'oeuvre actuelle soit pénalisée. On
l'a expliqué un peu tantôt, précédemment, avec le ministre.
C'est
un peu à la lumière de sa réponse qu'on a finalement fait le choix de
déposer l'amendement, M. le
Président, parce que le ministre a trouvé aussi qu'effectivement ce serait
regrettable que la main-d'oeuvre actuelle soit pénalisée. Mais, dans notre lecture, c'est qu'il y a quand même
un risque que les initiatives de formation en entreprise qui actuellement sont offertes à la main-d'oeuvre actuelle de l'entreprise pourraient être mises de côté pour favoriser l'implantation de
stages, ou autres, en entreprise
avec les bourses, on en a parlé hier, mais aussi qu'il pourrait y avoir, du
moins, une partie de l'argent qui serait investie justement pour des...
on a dit «les stages». Mais on sait qu'il y a une volonté du gouvernement
d'implanter le modèle dual, donc, le modèle allemand, en formation
professionnelle et on a vu, avec le nombre de personnes...
c'est quand même énorme, le nombre de personnes : 370 000 jeunes, 115 000 immigrants,
60 000 chômeurs, 50 000 personnes de 65 ans et plus. Donc,
tout ça, là, c'est quand même beaucoup de gens, et, on a vu hier, même s'il y a une compensation, du gouvernement, du
12 millions, il y a quand même moins d'entreprises qui auront à
cotiser ou à offrir des initiatives de formation.
Donc, nous considérons
que l'ajout de cette phrase-là n'empêche pas, justement, des initiatives pour
la main-d'oeuvre future mais permet de garder quand même une proportion
appréciable, là, importante des initiatives de formation ou de l'accompagnement en formation pour la main-d'oeuvre
actuelle. Donc, c'est notre lecture que nous faisons. Peut-être le
ministre pourrait expliquer un peu qu'est-ce qu'il en pense. Par la suite, on
pourra faire un échange, là.
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, M. le ministre.
M.
Blais : Oui. Écoutez, on a réfléchi à l'amendement, donc, il pose pas
mal de problèmes, pas mal de difficultés. Peut-être que la première est une question de fond, c'est qu'on ne peut
pas imaginer... on a essayé de le faire, on ne peut pas imaginer une entreprise,
en particulier aujourd'hui, hein, qui formerait la main-d'oeuvre future au
détriment de sa propre main-d'oeuvre. Vous
vous rendez compte, hein? Il a déjà des employés en entreprise, il les a
trouvés, ils sont là. Dans un
contexte de rareté de main-d'oeuvre déjà, la pire des choses, c'est de
s'adonner à faire de la formation pour des personnes qui ne sont pas
là — dont
il ne sait même pas, soit dit en passant, si ces personnes-là vont entrer à son
emploi — parce que vous comprenez bien que, dans un cycle
de formation, vous acceptez d'être partenaire de la formation, vous n'avez pas un contrat à vie avec la personne
que vous formez, nécessairement. Donc, on ne peut pas imaginer sur le fond des choses une entreprise, pour le moment,
qui s'adonnerait à faire davantage de formation pour de la main-d'oeuvre
future que pour sa propre main-d'oeuvre.
Ce que la loi veut
faire, c'est d'ouvrir des possibilités, mais pas de changer... Il y a un
déséquilibre qui est inimaginable, là,
pour... N'oubliez pas, là, ces sommes-là, elles ne viennent pas du
gouvernement, elles viennent, pour l'essentiel,
là... Le 1,3 milliard, c'est des dépenses que fait l'entreprise dans son
intérêt, hein, et son premier intérêt, c'est de maintenir les gens
qu'elle a à l'emploi.
Mais
continuons l'exercice pour voir si on pourrait imaginer qu'il y a
une entreprise qui aurait fait cette erreur malheureuse. La question, c'est : Comment
on va mesurer ça? Comment on mesure le détriment? Comment on fait?
Alors, est-ce qu'on regarde les sommes qui sont allouées? Est-ce qu'on va commencer à vérifier ça? Qui va vérifier ça? Et ensuite, si
jamais on a une métrique pour faire cette évaluation... et vraiment, là,
réfléchissons au type de métrique qui va être nécessaire, et ça ne sera pas nécessairement
une métrique financière, mais, si jamais on réussit à s'entendre sur une métrique, ensuite on a encore la question de
savoir : Mais pourquoi une entreprise devrait se soumettre à ça, alors
que c'est son premier intérêt, hein, de protéger sa main-d'oeuvre actuelle?
Donc, on voit là, là, des
possibilités de complication de la loi qui sont très, très, très importantes,
je n'ose pas l'imaginer. Je n'ose pas imaginer aussi quelle serait la réaction
des entreprises si on leur refilait ça dans les pattes, c'est-à-dire constamment, à chaque année, faire la preuve qu'ils n'ont
pas agi au détriment de leurs employés actuels avant de pouvoir faire reconnaître une dépense. Déjà,
les entreprises nous disent que la reconnaissance d'une dépense, c'est
assez lourd, hein, ils nous reprochent
souvent, là, que la loi est déjà assez lourde, mais là on est en train
peut-être d'atteindre des sommets. Alors, voilà. Je ne suis pas très en
faveur.
Le
Président (M. Cousineau) : Je vais demander... bon, toujours,
évidemment, sur l'amendement, si vous voulez réagir, M. le député, mais
il y a des confrères qui veulent réagir aussi. Vous préférez que...
M.
Turcotte : ...
Le Président (M. Cousineau) :
Oui?
M.
Turcotte : ...bien,
pour donner...
Le Président
(M. Cousineau) : D'accord. Bien, je passerais la parole à la
députée de Gouin puis, par la suite, au député de Drummond—Bois-Francs.
Mme la députée de Gouin, sur l'amendement.
Mme David (Gouin) : Oui, bien sûr,
M. le Président. De toute façon, je vais être assez brève, laisser la place aux
collègues.
Il me semble
qu'il y a une petite confusion ici. Bien, d'abord, je voudrais indiquer que,
bon, je ne voterai pas mais que je me
prononce pour l'amendement. Et je ne comprends pas très bien l'argumentation du
ministre, donc j'aimerais peut-être
qu'il l'explique davantage. Ma compréhension... peut-être que le collègue de
Saint-Jean pourra le préciser aussi, ma compréhension de l'amendement, ça n'est pas de fonctionner entreprise
par entreprise en se demandant : Est-ce que, dans telle entreprise, on va favoriser davantage la
main-d'oeuvre qui est, en ce moment, en emploi ou est-ce qu'on va mettre
davantage l'accent sur, par exemple, bon,
des stages? Moi, je pense que, si on lit bien l'amendement et si on lit bien
dans notre cahier l'article tel que modifié,
on parle de «l'action concertée des partenaires patronaux, syndicaux et
communautaires et des milieux de l'enseignement». C'est de ça qu'on
parle.
On parle donc
d'un mandat donné à la Commission des partenaires du marché du travail en lien
avec les milieux de l'enseignement,
puis ce qu'on est en train de dire... ce que je pense que le ministre veut
faire avec sa loi, c'est élargir le mandat
de la commission, bon, pour qu'on ne s'occupe pas seulement de la main-d'oeuvre
actuelle et future. Donc, les arbitrages,
les grandes décisions financières, à mon avis, là, à moins que vraiment je ne
comprenne pas bien ni la situation actuelle
ni le sens de la loi, c'est que globalement, à l'échelle du Québec, sur une
année, par exemple, ou deux ans, ou trois ans, on va s'assurer que les
montants investis pour la formation, disons, de la main-d'oeuvre future ne se
fassent pas au détriment de la main-d'oeuvre actuelle.
Moi, c'est ma
compréhension. Et ça n'est donc pas, non, à moins que je me trompe, une sorte
de diktat, là, imposé aux
entreprises, une par une, dans lesquelles on va aller fouiller de façon un peu
intrusive. Je ne l'ai vraiment pas compris comme ça, cet amendement. Et c'est pour ça que je l'appuie. Alors,
peut-être que, là, il faudrait... c'est pour ça que je suis brève, là,
j'aimerais qu'on continue à clarifier, dans le fond, les termes de
l'amendement.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, Mme la députée de Gouin. Bien, une réaction, M. le ministre, sur
l'intervention de la députée de Gouin?
• (12 h 10) •
M.
Blais : Encore une fois, je ne sais pas comment on fait pour vérifier ça, et je n'ose pas
imaginer la lourdeur que ça peut
impliquer — c'est une forme, je trouve, de paternalisme qui est exagérée — de
demander aux entreprises de répondre à ce type de critère là.
Nous, ce que
l'on veut ici, ce n'est pas de défavoriser l'un par rapport à l'autre, c'est
d'ouvrir, hein, c'est d'ouvrir cette
loi-là, c'est d'ouvrir la culture de la formation à d'autres possibilités qu'aujourd'hui, notamment la main-d'oeuvre
future, mais en aucune façon on ne veut
réduire un pour l'autre, d'autant plus qu'encore une fois, j'insiste là-dessus,
on veut aussi resserrer la nature des
dépenses. Alors, je pense que c'est Pascal qui disait : Ce qui ne se
mesure pas ne se contrôle pas.
Le
Président (M. Cousineau) : Merci. Est-ce que vous voulez réagir encore, Mme la députée de Gouin, sur...
Mme David (Gouin) : Non, M. le
Président, pas pour l'instant.
Le Président (M. Cousineau) :
Non. M. le député de Drummond—Bois-Francs.
M.
Schneeberger : Merci,
M. le Président. Je regarde l'amendement.
Je ne suis pas contre le principe, parce que j'avais aussi, quand même, posé des questions un peu qui allaient en ce
sens-là, je veux dire : Avec la main-d'oeuvre,
est-ce qu'on pourrait tout miser sur la formation des jeunes et non sur la formation
actuelle?
Par contre,
quand on a fait un amendement comme ça, moi, je me questionne toujours
sur l'application de la loi. Et actuellement, au Québec, on a déjà énormément de paperasse — d'ailleurs, si vous faites un peu des visites
d'usine, toutes les entreprises vont vous le dire, là — on
est étouffés par la paperasse. Alors, moi, je m'inquiète. Comment cet article serait appliqué? C'est-à-dire est-ce qu'une... Je
prends un exemple, une usine, demain matin, qui agrandit et qu'ils embauchent,
je ne sais pas, une trentaine de nouvelles personnes, alors, c'est la nouvelle
forme... tu sais, je veux dire, c'est des nouveaux, là, ce n'est pas des gens
qui sont actuellement en usine. Est-ce que, selon la loi, selon l'application,
cette usine-là serait en défaut si on impose un certain pourcentage ou autre?
Et il est là, mon hic. Si maintenant l'amendement ferait en sorte que, mettons,
on regarderait sur une période de cinq ans si la compagnie a juste fait de la
formation au niveau des nouveaux, futurs... et non des employés actuellement,
là peut-être que ça se poserait, la question.
Mais, encore là, moi, je me dis qu'une usine... des directeurs, ou ceux qui
s'occupent des ressources humaines, ou... le propriétaire, c'est le premier à se
tirer dans le pied s'il ne forme pas ses employés. Alors, je comprends l'approche. En même temps, moi, je m'inquiète, c'est : Quelle application et quelle lourdeur administrative on va avoir?
Ça
fait que, si on peut avoir de quoi qui est très léger, oui, mais, si ça
l'implique une lourdeur administrative, c'est sûr que moi, je ne veux
pas qu'on aille dans ce sens-là. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Cousineau) : ...M. le député de Drummond—Bois-Francs. Une réaction
sur les propos du député, M. le ministre, avant de passer la parole au député
de Saint-Jean?
M.
Blais : Non, je suis assez
d'accord avec lui, hein, on voit bien que c'est difficile à gérer. Laissons les
entreprises regarder leurs priorités, puis
on peut imaginer qu'une année, exceptionnellement — j'ai visité, quoi, hier, une entreprise,
là, qui est en croissance très rapide, là — qu'une année, là, il puisse y
avoir un peu plus d'argent, qui sait, pour la main-d'oeuvre future, mais
l'entreprise que j'ai visitée hier, elle est constamment en formation de sa main-d'oeuvre,
là, qu'elle là et elle essaie de la
conserver, parce que, disons, c'est extrêmement compétitif, le secteur où elle... Donc, encore
une fois, je trouve que c'est généreux, là, mais je trouve que ça ne rajoute absolument
rien et surtout je n'ose pas imaginer comment on pourrait gérer un
principe comme celui-là.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci. Alors, nous revenons... Oui, M. le député
de René-Lévesque.
M. Ouellet : M. le ministre, j'aurais peut-être
un exemple que j'aimerais vous soumettre, du bien-fondé d'accepter cet amendement-là
et d'une solution justement pour gérer ce genre de cas.
Je vais prendre un
exemple d'une entreprise qui vient d'acquérir... ou qui va acquérir, pardon,
une nouvelle technologie, qui va changer son procédé. Et, dans mon exemple
aussi, je tiens à préciser que l'entreprise n'est pas syndiquée, parce que vous avez fait mention tout à l'heure que les syndicats ont été très pointilleux sur cet article-là.
Alors, on va le faire dans un autre contexte, donc pas de présence de syndicat,
donc pas de protection pour le travailleur en question.
Et donc j'ai un travailleur d'expérience qui n'a pas les qualifications sur la
nouvelle technologie à venir et qui, disons,
a un comportement peu enviable aux yeux de l'entreprise. Alors, ce qui pourrait
se passer : l'entreprise pourrait décider
de choisir de qualifier un jeune finissant, donc une jeune formation, en
spécifiant tout simplement à son travailleur d'expérience qu'il n'a pas les qualifications ou la compétence pour
opérer la nouvelle machinerie, donc qu'il devra procéder à une mise à
pied, puisqu'il ouvre un nouveau poste avec des nouvelles qualifications et
qu'il aura eu la bénédiction de la loi sur le 1 % pour former la personne
sur ce nouveau poste de travail.
Vous
allez me dire que, bien, la personne pourrait effectivement faire valoir son
droit au sein des normes du travail pour congédiement déguisé. Effectivement,
il aurait à prouver qu'il y a eu un congédiement déguisé, mais la façon dont on
pourrait déterminer si effectivement l'entreprise a essayé d'utiliser la loi du
1 % pour qualifier un salarié futur versus un salarié expérimenté, c'est tout
simplement de lui demander de déclarer, lorsqu'il aura à reconnaître sa formation, s'il a procédé à des mises pied sur ce
cadre de travail là ou s'il a procédé à des mises à pied sur l'établissement
en question par rapport à la nouvelle technologie qui a été implantée.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le député. M. le ministre.
M.
Blais : Disons, on peut même
simplifier l'exemple, hein, parce qu'on n'a même pas besoin que dans
l'exemple il y ait une nouvelle technologie. Il y a
des entreprises qui ont des difficultés avec certains
employés, que ce soit fondé ou pas, il y a
des entreprises qui ont certaines difficultés et qui préfèrent
parfois intégrer des nouveaux employés. Ça se fait aujourd'hui, ça s'est toujours fait. Je pense même que moi-même, j'ai eu ce type
de préoccupation là à une autre époque.
Alors, on n'est pas
ici en train de repenser les normes minimales du travail, des droits des uns et
des autres, là — parce que, dans votre exemple, il y a quand même
des droits, là, qui peuvent être invoqués en temps venu — la seule question qu'on se pose : Est-ce qu'on peut faciliter la
possibilité, là, pour les entreprises, hein, de collaborer à la
formation de la main-d'oeuvre future? Et je
ne vois pas dans l'exemple, là, en quoi, par exemple, si on disait : La
formation de la main-d'oeuvre future
ne se fera pas au détriment de la main-d'oeuvre actuelle, en quoi le problème
serait réglé. Parce que, même si on ajoutait la clause que vous
proposez, dans un exemple aussi pointu que celui-là, on ne peut pas imaginer
comment ça, ça protège... C'est votre souhait, je pense, c'est de protéger
l'employé, là, qui est jugé moins productif, là. Donc, moi, je ne vois pas
aucunement de protection. Si l'employeur veut s'en défaire, il a une façon de
le faire et il doit aussi reconnaître que l'employé a des droits par rapport à
sa contribution passée.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de René-Lévesque.
M. Ouellet :
Vous êtes d'accord qu'avec ce nouvel outil là il pourrait utiliser, dans le
fond, le fait... parce qu'il y a un coût à
se débarrasser de quelqu'un d'expérience et le remplacer par quelqu'un
d'inexpérimenté. Donc, la loi en question vient amoindrir ce coût-là en
compensant justement l'accueil de cette main-d'oeuvre future.
Est-ce
qu'une entreprise pourrait effectivement avoir l'occasion d'y songer suite à
l'introduction de sa loi? Peut-être. Je ne présume pas que tous les employeurs
ont cette idée-là, mais d'avoir quand même une pensée pour les employés actuels, donc de ne pas permettre
exclusivement aux employés futurs de bénéficier de cette formation-là,
je pense que ce serait important de le
soumettre. Ce qu'on veut comprendre aussi dans cette loi-là, c'est que
quelqu'un qui voudrait... donc, une entreprise qui voudrait
bénéficier... ou faire reconnaître ses besoins de main-d'oeuvre future pourrait
tout simplement indiquer à la commission ou, du moins, à l'organisation qui
accréditerait sa formation en question si effectivement elle a procédé là à des
mises à pied avant la formation. Et je pense que ça, c'est une bonne indication qu'on est en train un peu de contourner
la loi ou de s'éloigner de l'essence même de la loi. Et c'est un peu la crainte qu'on a, en voulant rajouter qu'effectivement
dans cette disposition-là, bien, il n'y a aucun détriment qui va se
faire sur la main-d'oeuvre actuelle.
M.
Blais : Mais, encore une fois, moi, disons, je n'ai pas d'objection de
principe quand je lance : On devrait... Je conseille à toutes les entreprises de ne pas mettre en cause leur
main-d'oeuvre actuelle pour la main-d'oeuvre future. Puis ce serait très mal avisé. Puis je ne connais pas un
chef d'entreprise qui voit les choses de cette façon-là, hein? Si des
entreprises ou des organisations ont de la
difficulté avec certains employés, c'est une chose, il y a des façons, parfois,
de résoudre ces difficultés-là, mais je ne vois pas en quoi l'ajout de
ce principe-là — parce
que, là, vraiment, je pense qu'on s'est entendus sur le fait que ce serait à
peu près ingérable comme ajout, là — va protéger un groupe par
rapport à l'autre.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député.
M. Ouellet : C'est l'«ingérable» que j'ai un peu de misère. Comme je vous le
soumettais tout à l'heure, M. le ministre,
ce serait possible, par simple déclaration de l'entreprise, d'indiquer si,
suite à l'accréditement de cette nouvelle main-d'oeuvre future, il a
procédé à des mises à pied.
Alors,
si la réponse est non, il utilise la disposition en accord avec la loi, mais,
si la réponse est : Oui, j'ai procédé à des mises à pied,
effectivement, sous enquête, on serait capable de voir s'il y a eu dénaturation
de la loi.
• (12 h 20) •
M.
Blais : Je comprends votre sensibilité puis je la partage, mais
vraiment, là, on s'enfonce, en ce moment, dans une bureaucratie, là, qui
est inimaginable.
Le Président (M.
Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski,
vous voulez réagir.
M. LeBel :
Oui. Bien, bonjour, M. le Président. On parlait de l'article 1. J'ai déjà
dit ça dans une autre commission : C'est important, l'article 1, on
sait ce que c'est, c'est fondamental, ça fonde le reste, ça vaut la peine de s'y attarder. Et je pense que dans ça, dans votre
projet, vous amenez un élément nouveau. On parle de main-d'oeuvre
future. Ce n'est quand même pas rien, c'est
quelque chose de gros que vous amenez, là, et je pense que, dans
l'article 1, amener cet amendement-là, ça vient...
Le Président (M.
Cousineau) : ...ai-je besoin de vous rappeler que nous sommes
sur l'article 2?
M. LeBel :
Oui, oui, mais c'est l'article 1 tel que modifié, c'est ça?
Une voix :
Mais c'est l'article 2 du projet de loi.
M. LeBel :
Bien, ça se tient, c'est aussi important.
Le
Président (M. Cousineau) : Allez-y. C'est parce que je ne veux
pas mélanger les gens qui nous suivent, hein?
Une voix :
Ah! il l'aime, son article 1.
M. LeBel :
Bien moi, je le tiens, c'est pour ça que je tiens à ça. Mais, ce que je veux
dire, c'est fondamental pareil, on parle
d'une clientèle future. L'amendement ne vient pas régler la problématique. Ce
n'est pas là, mais ça vient dire que, dans les autres articles plus
tard, on va trouver ce qu'il faut pour respecter cet engagement-là, que la
clientèle future, la main-d'oeuvre future ne viendra pas s'intégrer, au
détriment de ceux qui sont là actuellement.
Le
ministre dit : Ça ne vient pas régler la question. On comprend. Mais ça
vient juste dire que le législateur s'attend à ce que, dans les autres projets, on aura les amendements qu'il faut et
on s'assurera qu'on respectera la main-d'oeuvre actuelle. Puis l'exemple du collègue de René-Lévesque, c'était... Puis
vous avez amené l'autre exemple aussi. On voit qu'il y a peut-être un
problème. Ça fait que pourquoi ne pas tout de suite annoncer nos intentions et
faire en sorte dans le reste du travail
qu'on fera dans les autres articles — 1, 2, 3, 4 — qu'on protégera la main-d'oeuvre actuelle?
C'est un peu ça, l'objectif. Puis,
vous l'avez dit, je pense que vous avez la même préoccupation que nous autres,
vous ne voulez pas qu'un
compétitionne l'autre. Ça fait que pourquoi ne pas l'annoncer tout de suite
puis s'assurer qu'on fasse bien le travail?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais : Bien, écoutez, moi aussi,
bon, ma première réaction, j'ai dit : Bon, si on ajoute ça, c'est
peut-être un message important. Je pense
qu'il y a un petit peu la symbolique comme peut-être l'article 1 d'autres lois,
qui sait, mais,
bon, en en parlant un peu avec nos légistes, là, il faut bien mesurer aussi le
poids des mots et la répercussion que ça a et ensuite, bien sûr, savoir comment on va le gérer, parce que, si on le
met, c'est parce qu'on pense que c'est sérieux, on peut le faire et que l'on doit le faire et comment on
va le gérer. Puis le droit, c'est un peu comme la science, il y a un
principe d'économie, hein : si on peut dire une chose clairement,
atteindre nos résultats... et, si en en ajoutant, on perd de nos résultats, on
perd de l'efficacité, notamment dans la gestion de cette loi.
Je vous
rappelle que déjà, sous la forme actuelle, bon, les entreprises se plaignent,
trouvent ça assez lourd. On va leur
donner de nouvelles obligations, aux entreprises. Déjà, vous allez voir, quand
on va avoir des nouvelles contraintes, il va falloir qu'ils justifient un peu mieux la nature des dépenses, ils
vont aller sur un autre terrain, notamment faire affaire avec des maisons d'enseignement, former leur
main-d'oeuvre pour que certaines parties de leur main-d'oeuvre
deviennent des compagnons, etc. Donc, déjà,
on les amène dans plusieurs changements. Je pense qu'on a convaincu, au Québec,
le monde patronal qu'il fallait aller dans
cette direction-là, qu'ils devaient s'occuper davantage de formation, et je
pense que ça, c'est acquis, mais je pense
qu'il ne faut pas aller aussi loin que ce que vous souhaitez, parce que ça
serait difficilement gérable.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. M. le député de Rimouski.
M. LeBel : Oui. C'est parce que, tu
sais, il y a des endroits où il y a une pénurie de main-d'oeuvre, mais ce n'est pas... puis le ministre rappelle ça souvent,
il y a des pénuries de main-d'oeuvre, mais ce n'est pas partout la même
façon, la même chose. Ça fait que c'est pour ça que la protection de la
main-d'oeuvre actuelle est importante. Et je comprends
la... et c'est pour ça qu'on amène l'amendement en sachant bien que
l'amendement ne règle rien mais que, plus tard dans les autres... On
parle souvent du 5, là, de l'article 5, on parle d'autres articles où on pourra
être fidèles à l'amendement qu'on vient
d'amener là. C'était un peu ça, l'objectif. Mais je pense qu'il y a un danger,
là, il faut protéger la main-d'oeuvre actuelle.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M.
Blais : Je peux ajouter un élément d'information, je pense, qui est
important, là : le projet de loi, quand même, ses orientations ont été validées, et on a eu des discussions
notamment avec les partenaires du marché du travail, qui se sont tous
entendus sur les bienfaits, là, d'élargir à la main-d'oeuvre future. Je pense
qu'il y a un consensus là-dessus et qu'ils ne jugeaient pas approprié d'avoir
le cran de sécurité, là, que vous proposez.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Saint-Jean, à vous la parole
maintenant, on est toujours sur l'amendement.
M.
Turcotte : On est
toujours sur l'amendement, M. le Président. Je viens d'entendre que, bon, le
ministre a dit qu'il y a eu un consensus
concernant les partenaires du marché du travail. Bien, dans les faits, cette
décision-là aussi, hein, de hausser le seuil, bien, s'est faite dans le
dernier budget sans nécessairement qu'il y ait de consensus de la Commission
des partenaires du marché du travail, on s'entend, M. le Président, et puis,
bon, les syndicats nous le rappellent dans
leurs mémoires, ils l'ont dit aussi en commission parlementaire. Et les
syndicats aussi nous ont mentionné des
craintes par rapport à l'ajout de la main-d'oeuvre future dans la possibilité
d'avoir recours, là, pour la loi du 1 %. Donc, je comprends ce que le ministre nous dit, mais en
même temps le consensus n'est pas si généralisé que ça, là, hein? On
s'entend que c'est beaucoup plus les organismes qui oeuvrent auprès des
entreprises privées, donc, qui effectivement demandaient ça, mais eux
demandaient aussi même l'abolition de cette loi-là.
Nous avons
d'autres exemples. On peut parler en termes de francisation. Actuellement, en
raison de la hausse de l'assujettissement
de 1 à 2 millions de dollars, il y a une décision du gouvernement, au
fond, de passer de 8 millions de dollars
à 4 millions de dollars la francisation en entreprise. Ça, c'est un autre
exemple qu'il dit, mais des gens qui sont actuellement en entreprise qui n'ont pas la chance ou l'occasion de
pouvoir bien s'exprimer en français, bien ils se voient coupés de leurs cours de francisation en
entreprise, et là, nous, notre crainte, c'est que, là, si on ajoute en plus...
puis ça, ça se fait déjà actuellement, donc, si on ajoute la
main-d'oeuvre future... Puis je comprends puis j'ai eu l'occasion puis, je pourrais dire, dans ce cas-ci, le privilège de
visiter le CIMIC en Beauce aussi, là, que le ministre faisait référence
hier pour, entre autres, le programme de soudage, qui est un des projets
pilotes en termes de formation professionnelle pour le modèle dual. Donc, j'ai
visité avec le chef de l'opposition officielle, donc, on a vu le succès de ce
centre-là, on n'est pas contre le principe.
Cependant,
cependant, l'implantation du modèle dual au Québec ou, du moins, une forme du
modèle dual fait en sorte que, oui,
il devra y avoir des stages en entreprise, puis ces stages-là seront rémunérés,
et ça prend des gens pour payer ces
stages-là. Et notre crainte, c'est que, si l'argent qui est actuellement dans
le fonds ou qui pourrait aller dans le fonds ou l'argent que les entreprises, plutôt que d'investir dans la formation de
leur main-d'oeuvre actuelle... servirait à payer ces stages-là en
entreprise, bien, ça fait en sorte qu'inévitablement, inévitablement des gens
qui sont déjà en entreprise actuellement
pourraient être pénalisés et faire en sorte que leur formation actuellement...
et je ne parle pas des formations comme
la collègue de Gouin a mentionné un peu hier, là, des... je pense, le terme
qu'elle avait utilisé, c'est «rigolotes», là, mais je ne veux pas lui mettre des mots, là, qu'elle n'a pas dits, mais,
du moins, des formations questionnables, disons ça comme ça, frivoles, je ne parle pas de ces
formations-là, mais je parle de formation... on parle de francisation, on
parle de cours d'alphabétisation, on parle
de cours pour pouvoir manipuler, oeuvrer sur des nouvelles technologies, des
nouveaux équipements, faire en sorte que nos entreprises soient plus
productives, plus compétitives, faire en sorte qu'il y ait un esprit d'entreprise, un esprit d'équipe, un sentiment
d'appartenance, faire en sorte qu'il y ait une rétention de la main-d'oeuvre dans nos entreprises puis que nos
entreprises soient davantage enracinées dans leurs communautés, qu'il y ait davantage de partenariats avec nos cégeps,
qui sont quand même, il faut le rappeler, importants, les commissions
scolaires avec la formation professionnelle.
• (12 h 30) •
Donc, tout
ça, M. le Président, nous en sommes, nous sommes d'accord avec ce principe-là,
mais, selon nous, d'ajouter, comme il est écrit actuellement dans l'article...
Peut-être que le ministre n'aime pas le... ou les gens, là, du gouvernement
n'aiment pas la façon que nous avons écrit exactement, là, les mots utilisés
dans notre amendement, mais, bon, on peut
modifier des mots, on peut préciser certains éléments, mais c'est le principe,
puis le ministre semble être d'accord avec le principe que la
main-d'oeuvre actuelle ne soit pas pénalisée par rapport à la main-d'oeuvre
future. Effectivement, on peut questionner
sur comment on évalue ça, et autres, mais il y a un principe de base qui dit
que la loi du 1 %, à la base,
visait les employés, les gens en entreprise. Bravo si ça peut servir à la
main-d'oeuvre future, mais il ne faut pas
que la cotisation des entreprises ou l'argent que les entreprises investissent
dans les initiatives de formation, finalement, serve, d'une façon indirecte, à subventionner ou à combler l'initiative
gouvernementale, qu'on pourra débattre dans une autre commission parlementaire, d'implanter le modèle dual et faire en
sorte que finalement ça soit... plutôt que ça soit le gouvernement lui-même par les fonds qui lui sont
attribués par les impôts et les taxes, mais que ça soit des entreprises
qui paient pour ça ou que ça soit d'autres entreprises qui initient la
formation pour cette main-d'oeuvre future là.
Donc, nous,
c'est notre crainte. Bon, le ministre semble dire : Non, ce n'est pas possible, ce
n'est pas applicable, je n'ose même
pas croire... je n'ose même pas imaginer comment on pourrait appliquer ça.
Mais, au-delà de ça, il y a un
principe qui est là, et je crois que le ministre lui-même aurait tout à gagner
de trouver une formulation adéquate pour justement baliser ce risque de
dérapage, qui aurait des impacts, il faut le dire. Moi, je peux vous parler de
différentes entreprises dans ma circonscription. Prysmian ont fait des manifestations ici à
l'époque parce que, bon, Hydro-Québec
a envoyé la production des fils électriques en Ontario puis aux États-Unis,
mais les travailleurs qui ont perdu leurs jobs à Prysmian à Saint-Jean — à
Pirelli avant — bien
ces gens-là, bien, ils ont essayé de se trouver un emploi, ça a été
difficile, ont été obligés de suivre des cours avec des organismes
d'employabilité, etc. Ça n'a pas été facile. La plupart de ces gens-là n'ont pas eu le choix de se rendre à l'aide sociale. Le projet de loi n° 70 vise à réduire le nombre de nouveaux demandeurs à l'aide sociale pour les amener
sur justement un parcours d'employabilité. Donc, si on enlève,
justement, cette formation-là en entreprise ou ce maintien-là, bien, peut-être
qu'on aurait moins de gens à risque justement de perdre leurs emplois, qui
ferait en sorte que ces gens-là, bien, ils vont être... plus difficile à
trouver un emploi par la suite.
Donc, nous,
c'est notre position, c'est ce qu'on croit. C'est qu'on a entendu aussi de la
part de différents groupes, notamment les trois centrales syndicales que
nous avons entendues, qui l'ont dit ici, là, et on peut le lire dans leurs mémoires.
Donc, c'est pour ça que nous avons amené cet amendement-là, M. le Président.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. Une réaction, M. le ministre?
M. Blais : Bien, l'enfer est pavé de
bonnes intentions, hein? Il faut bien, bien comprendre ici que, dans les jugements que l'on porte, il y a
une asymétrie, là, entre employeurs et employés. Le Québec
est la seule juridiction au Canada — et
probablement une des rares au monde, on
pourrait faire une vérification — qui a ce type de loi là. Et on a eu
beaucoup de représentations pour mettre fin à ça compte tenu de la lourdeur,
compte tenu que ça n'avait pas donné nécessairement
des résultats probants au point de vue des investissements des entreprises et
là on est en train de discuter de...
Et moi, je pense qu'on a bien fait de sauver la loi en lui donnant un peu de
coffre et aussi en élargissant sa portée. Moi, je pense qu'on est vraiment dans la bonne direction.
Et on a réussi à avoir un consensus. Je peux vous dire que, quand nous
sommes arrivés au pouvoir, le consensus était loin d'être là, surtout du côté
de la partie patronale.
Donc, on a
quelque chose... on essaie de voyager, si possible, légèrement et ouvrir des
possibilités, et, si on va dans la direction, là, qui nous est proposée,
là, je peux vous dire, ça va être à la fois, ingérable, ça va être un nid, là,
de contestations, on vient nuire à nos entreprises. Il ne faut pas oublier
qu'encore une fois ce n'est pas l'argent du gouvernement, c'est l'argent des
entreprises. On oblige les entreprises à faire une dépense. Ce n'est pas
l'argent des syndicats, ce n'est pas
l'argent des employés, c'est les entreprises. Donc, il me semble qu'on ne peut
pas se substituer ici aux entreprises et à leur capacité de choisir les
investissements qu'elles veulent faire ou bien dans leurs équipements ou bien
dans le capital humain.
Donc, c'est
pour ça, encore une fois, à la
fois au niveau du principe, de la possibilité que ça soit fonctionnel, là, que je ne peux pas donner mon appui
à la proposition des collègues.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions concernant l'amendement?
M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Merci,
M. le Président. J'entends le ministre
nous dire : Effectivement, bon, le Québec est une des seules législations où il y
a... une des seules nations qui a ce type de législation. Le ministre a aussi,
précédemment, mentionné que le Québec est un
des endroits où il y a justement la plus faible culture de formation en entreprise.
Donc, je crois que, parce que nous devons
oeuvrer davantage sur la culture de formation en entreprise, effectivement,
nous devons aussi, aussi mettre en place des législations qui stimulent
cette culture de formation là en entreprise et la promouvoir davantage. Si nous avions une forte culture
entrepreneuriale... bien, ça aussi, là, mais, si nous avions une forte
culture de formation en entreprise,
peut-être qu'effectivement nous n'aurions pas besoin de cette loi-là, peut-être
que nous n'aurions même pas besoin de ce projet de loi là au complet.
Mais il faut aussi vivre dans notre réalité.
Donc,
je comprends que, bon, le ministre s'oppose à notre amendement, mais je voulais
quand même mentionner cet aspect-là, M. le Président. Mais je crois que
mon collègue de René-Lévesque va intervenir.
Le Président (M. Cousineau) :
Alors, M. le député de René-Lévesque, toujours sur l'amendement.
M.
Ouellet : Oui.
Effectivement, je peux entendre les préoccupations du ministre sur notre
amendement comme étant des mots qui
sont peut-être forts sur le... ou même, dans ce cas-là, péjoratifs sur la
portée qu'on veut apporter. Ce qu'on essaie de voir aussi... puis on
pourrait peut-être proposer de changer «ne [sera] pas au détriment» par plutôt «complémentaire». Donc, ce qu'on veut bien
comprendre dans l'essence, c'est qu'il y a un état de fait, il y a un état.
Il existe des employés dans une
organisation, et la formation d'employés futurs doit être complémentaire à
l'offre qu'il y a déjà. Donc, lorsque les entreprises vont demander un
remboursement des frais par rapport à la formation, ils pourraient, assurément et aisément, dans le même formulaire,
pour justifier leurs dépenses, tout simplement indiquer que la main-d'oeuvre actuelle était suffisante et que la
main-d'oeuvre future, elle était complémentaire à ce qui existait déjà. Et
ça, je pense, de façon très bureaucratique, c'est très facilitant et surtout
c'est complémentaire à ce qui existe déjà.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de René-Lévesque, est-ce que je comprends que vous faites un
sous-amendement?
M.
Turcotte : On va
voir la réponse du ministre.
Le Président (M. Cousineau) :
Parce que, là, je vais voir avec le ministre. M. le ministre, allez-y.
M.
Blais : Non. Je pense qu'on participe de la même logique, là, de la
difficulté de gérer ce type de proposition là. Encore une fois, c'est plein de bons sentiments, là, je comprends bien,
mais il faut éviter, là, ce type d'erreur là quand on rédige une loi.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci. M. le député de René-Lévesque? M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Merci, M. le Président. J'aimerais comprendre comment ça vont se faire,
l'application, actuellement, là, de
la formation entre la main-d'oeuvre actuelle et future et les liens avec les
institutions scolaires proprement dites, donc, les cégeps avec les commissions scolaires. C'est les institutions
scolaires qui vont organiser la formation ou c'est dans le cas où on a actuellement... les entreprises organisent
des formations, font accréditer leur formation par la Commission des
partenaires du marché du travail si elles sont accréditées ou du moins elles
répondent aux règles de la commission? Elles
devront par la suite être... elles seront remboursées par la Commission des
partenaires du marché du travail. Donc, je comprends qu'il y a un
aspect... l'entreprise peut elle-même faire sa propre formation et...
M.
Blais : On a les deux versions, hein : dans la première version,
celle que vous évoquez, là, où l'entreprise peut organiser une
formation, bien sûr, avec des formateurs reconnus — et, en général, c'est
des formations courtes, on comprend
pourquoi — ça peut
être reconnu par les partenaires du marché du travail puis ça peut donner
droit, là, à une subvention; ou
encore — c'est ce
que rend possible aussi la loi — que ça se fasse par des établissements qui
sont reconnus, donc, et aussi par des
ententes reconnues, avec une périodicité dans la formation puis un cadre dans
lequel, par moments, la personne est, en entreprise ou dans
l'organisation, en formation et, par moments, elle est en établissement. Donc,
les deux sont possibles.
• (12 h 40) •
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : ...M. le
Président. Et les mutuelles de formation, elles arrivent où dans le portrait?
Bon, je comprends que même un certain nombre
ont été même menacées, sinon ont mis fin à leurs activités, là, dans certains
cas, mais les mutuelles de formation, elles arrivent où là-dedans?
Le Président (M. Cousineau) :
M. le ministre.
M. Blais : Peut-être demander au
sous-ministre, si c'est possible.
Le
Président (M. Cousineau) : Oui, mais ça va me... C'est une
nouvelle séance, ça me prend un consentement pour permettre au
sous-ministre de répondre.
Une voix : ...
Le Président (M. Cousineau) :
Consentement. Merci. M. Matte, M. le sous-ministre.
Une voix : ...
Le Président (M. Cousineau) :
Oui. Présentez-vous quand même, monsieur, pour l'enregistrement.
M.
Matte (Bernard J.) : Merci, M. le Président. Bernard Matte,
sous-ministre du Travail et d'Emploi et Solidarité sociale.
Les
mutuelles continuent d'exister, là, comme processus de regroupement, un peu
comme les comités sectoriels peuvent
être une forme de regroupement. D'ailleurs, un peu plus loin dans le projet de
loi, il y a des éléments qui portent sur,
justement, cet élément de reconnaissance là. Donc, on va continuer,
c'est-à-dire qu'ils peuvent se faire reconnaître des activités de formation et, une fois ces
activités-là reconnues, bien ils vont pouvoir les dispenser auprès des
entreprises.
Donc, plus loin, on
va voir qu'on vient baliser davantage cette façon-là de faire pour s'assurer
que, plutôt que chacune des entreprises
demande une accréditation à cette formation-là, l'organisateur pourra le faire
pour l'ensemble. Donc, ça sera vrai aussi pour une commission scolaire,
ou pour un cégep, ou pour une institution d'enseignement de dire :
J'organise une formation pour plus d'une entreprise, je vais la faire
reconnaître une fois, puis, après ça, chaque entreprise
pourra bénéficier de cette reconnaissance-là. Donc, les mutuelles continuent,
mais le processus de mutuelle va être encadré aussi un petit peu mieux,
compte tenu des expériences qu'on a eues dans le passé, là.
Le Président (M.
Cousineau) : ...M. le sous-ministre. M. le député de
Saint-Jean.
M.
Turcotte :
On parle des mutuelles sectorielles et des mutuelles régionales?
M. Matte (Bernard
J.) : Présentement, je reconnais surtout les mutuelles sectorielles,
mais ça inclurait les mutuelles régionales si elles font la démonstration de
leur solidité aussi, parce qu'on s'est aperçus aussi qu'il y a des mutuelles régionales qui avaient une prétention
mais qui n'ont pas été capables de l'appliquer, leur prétention, sur le
terrain.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : J'aimerais ça comprendre... parce que, bon, c'est
en posant des questions qu'on apprend, bon, un peu plus l'intention du législateur par l'article, et,
des fois, ça peut déboulonner certains mythes, là, j'aimerais comprendre
davantage comment le ministre voit
l'application de... ou l'implantation — parce qu'il a été aussi ministre de
l'Éducation, donc, il a tout en tête ces
éléments-là — le modèle dual comme modèle, bon, de
formation professionnelle. Il a lui-même mentionné que des étudiants de formation professionnelle... Je comprends
que, peut-être, dans le 370 000 jeunes,
ce n'est pas que des étudiants en
formation professionnelle, parce qu'au Québec on serait bien heureux d'avoir
370 000 jeunes en formation
professionnelle, mais ce n'est pas le cas. Donc, il y a quand même un certain
nombre d'étudiants en formation professionnelle
et en formation technique aussi, mais, bon, comment l'application du modèle
dual va se faire là-dedans et quel aspect du projet de loi actuellement
pourrait être... qui pourrait contribuer à l'implantation de ce modèle-là?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
Bien, à vrai dire, hein, dans le modèle dual, ce n'est pas les entreprises,
mais c'est le ministère de l'Éducation qui
va continuer à reconnaître les formations. Le type de formation, bien sûr,
change, hein, puis on augmente la quantité
de la formation qui se fait dans les organisations et on augmente aussi les
moments, les périodes où ça peut se faire, donc, pourvu que ça se fasse,
comme on a mentionné hier, en fin de cycle de formation. Ça peut se faire dès
le départ puis ça peut s'insérer dans toute la formation.
Donc, on peut à la
fois implanter... logiquement, du moins, on peut implanter le modèle dual au
Québec ou le favoriser sans la loi n° 70, hein, tout simplement, et on
pense que la loi n° 70 aide beaucoup parce qu'elle peut créer une culture de formation en entreprise — ce qui est important, il y a un message
ici — mais
aussi reconnaît les dépenses. Et, pour les dépenses admissibles, bien,
vous le savez — on
en a parlé hier, on en parle très bientôt, là, à l'article 5, là — vous allez voir un peu le type de dépenses
qui peuvent être reconnues désormais, là, pour la main-d'oeuvre future.
Le Président (M.
Hardy) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Un retour!
Le Président (M.
Hardy) : Bonjour.
M.
Turcotte :
Ah! ça nous fait plaisir de vous accueillir aujourd'hui ici. Donc, je comprends
de la réponse du ministre qu'il y a
effectivement une possibilité... et je ne porte pas de jugement sur ça, là, mais il y a
une possibilité pour une entreprise
qui accepterait, hein... Donc, on pourrait parler d'une entreprise, là, qui accepte d'accueillir des élèves de formation professionnelle
en soudage du CIMIC, en Beauce. Bon, bien, cette entreprise-là, le stage
rémunéré ou, du moins, les formateurs en
entreprise, etc., ces dépenses-là pourraient être considérées applicables en vertu de la loi du 1 %, ce qui fait en sorte que, quand on parle de
main-d'oeuvre future, on parle aussi des étudiants participant à des stages
découlant du modèle dual.
Le Président (M.
Hardy) : M. le ministre.
M. Blais :
Oui, tout à fait.
Le Président (M. Hardy) : M. le
député de Saint-Jean.
M.
Blais : Je n'aurais pas pu mieux le dire.
Le Président (M.
Hardy) : Mieux le dire.
M.
Turcotte :
D'accord, M. le Président.
Le Président (M.
Hardy) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je vais laisser ma
place au président.
Le Président (M.
Cousineau) : Alors, si j'ai bien compris... Est-ce qu'il y a
d'autres interventions sur l'amendement?
M.
Turcotte : ...que
le ministre n'est pas d'accord avec notre amendement. Donc, dans ce
cas-ci, s'il n'y a pas d'autre
intervenant, je demanderais le vote par appel nominal.
Le
Président (M. Cousineau) : Bien sûr. C'est tout
à fait votre droit. Donc, nous allons
voter l'amendement, alors, sur appel nominal. Mme la
secrétaire.
La Secrétaire :
M. Turcotte (Saint-Jean)?
M.
Turcotte :
Pour.
La Secrétaire :
M. Ouellet (René-Lévesque)?
M. Ouellet :
Pour.
La Secrétaire :
M. LeBel (Rimouski)?
M. LeBel :
Pour.
La Secrétaire :
M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?
M.
Schneeberger :
Contre.
La Secrétaire :
M. Blais (Charlesbourg)?
M. Blais :
Contre.
La Secrétaire :
Mme Sauvé (Fabre)?
Mme Sauvé :
Contre.
La Secrétaire :
M. Hardy (Saint-François)?
M. Hardy :
Contre.
La Secrétaire :
M. Polo (Laval-des-Rapides)?
M. Polo :
Contre.
La Secrétaire :
M. Drolet (Jean-Lesage)?
M. Drolet :
Contre.
La Secrétaire :
M. St-Denis (Argenteuil)?
M. St-Denis :
Contre.
La Secrétaire :
M. Cousineau (Bertrand)?
Le Président (M.
Cousineau) : Je m'abstiens.
La Secrétaire :
C'est rejeté.
Le Président (M.
Cousineau) : Oui. Alors, l'amendement est rejeté. Nous revenons
sur la discussion sur l'article 2. Alors, d'autres interventions concernant l'article 2?
M.
Turcotte : ...M. le Président.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte :
Donc, j'aimerais revenir sur une intervention que j'ai faite précédemment
sur...on a parlé des formations des entreprises, que l'entreprise peut offrir une formation. Les mutuelles qui
ont organisé une formation qui
serait reconnue pourraient l'offrir à
différentes entreprises, donc ça devient facilitant pour des entreprises
du même type ou qui ont les mêmes
besoins, bon, c'est une chose.
Si je me souviens
bien, la Fédération des cégeps et aussi la Fédération des commissions
scolaires, dans leurs mémoires, entre autres... les fédérations des commissions
scolaires l'ont mentionné plus
spécifiquement, la question
des... puis je comprends que ce n'est pas
vous le ministre de l'Éducation, là, mais la question de la reconnaissance des A.E.P., entre autres, ou, au cégep, qu'on pourrait aussi... je crois
que c'est des A.E.C., donc, des formations plus courtes, plus spécifiques pour certains besoins mais qui
attribuent un diplôme, une attestation qualifiante, là, donc, aux
participants de la formation, à l'élève, à l'étudiant. Est-ce que ça aussi, ça
peut être reconnu, donc, quelqu'un... Est-ce que c'est juste une formation
qui est vraiment, là, en entreprise mais où quelqu'un
qui... La Fédération des commissions
scolaires, je crois, parlait de... bon, ils ont un D.E.P. sur la
conduite de camion et, bon, il y a des besoins pour des chauffeurs d'autobus
et que l'A.E.P. pour conduite d'autobus
n'existe pas encore, même si elle est demandée depuis longtemps,
et là ça pourrait faire en sorte qu'on pourrait répondre à une pénurie de main-d'oeuvre dans le métier, là, de conduite d'autobus. Dans leur mémoire,
là, sur le projet de loi n° 70, la Fédération des commissions scolaires
parle de ça, là.
Donc,
est-ce qu'avoir cette formation-là d'A.E.P., si elle existait, dans ce cas-ci...
ou on pourrait reparler, hier, de l'exemple de la production en
acériculture, ou etc., est-ce que ce type de formation là aussi pourrait être
applicable? Donc, une entreprise
qui dit : Moi, j'aimerais que mon employé... ou un employé futur, mais
mon employé, dans ce cas-ci, suive une A.E.P. ou quelque chose comme ça,
est-ce qu'il pourrait... les dépenses de ça pourraient être applicables?
• (12 h 50) •
M. Blais :
Oui, bien sûr, mais il y a asymétrie dans les exemples que vous avez arrêtés,
là. Dans le cas d'un employeur qui décide
qu'un employé mériterait... et ce serait bien qu'il aille vers une formation
courte, à ce moment-là tous
les coûts de la formation, hein, peuvent être reconnus. C'est déjà le cas actuellement,
donc, pour les employés. Dans le cas d'un futur employé, là, qui serait en formation,
donc, et l'employeur serait participant, là, il ne peut être participant que
pour le stage, la partie, là, qui est au sein de l'organisation, mais pas pour
le reste.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Donc,
les coûts de sa formation, d'une A.E.P. seraient à sa charge pour une main-d'oeuvre future, donc seraient à sa
charge, sauf durant la période de stages. Là, il pourrait avoir un certain remboursement,
du moins l'entreprise pourrait prendre à sa charge la question du stage et se
faire rembourser via les initiatives de formation.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M.
Blais : Il faut
faire attention à est-ce qu'il y a remboursement ou pas. Ce qui est important, c'est qu'on
part à l'intérieur d'une loi où c'est des dépenses qui sont admissibles. Donc, bien
sûr, s'il y a remboursement, là, ce qui est admissible, c'est cette portion-là,
qui se fait à l'intérieur de l'entreprise, la portion de formation, bien sûr.
M.
Turcotte :
Dans les dépenses admissibles, est-ce qu'on tient compte des besoins régionaux en
termes de formation ou c'est vraiment les besoins de l'entreprise proprement
dits?
Une voix :
M. le ministre.
M.
Blais : Il faut
comprendre qu'il y a des règles, finalement, il y a
deux types de dépenses, là : il
y a les dépenses qui ont à voir avec, disons, la loi générale dont
on parle ici, hein, c'est ça qui permet à une entreprise, où qu'elle soit
sur son territoire, de faire reconnaître un certain nombre de dépenses — on va
en parler bientôt, j'en suis sûr — et ensuite il y a des dépenses ou des... au niveau régional, des dépenses ou encore
des formations que l'on voudrait développer à l'aide du fonds qui est disponible, là, dont on a parlé
hier, et là, bien sûr, ça tient compte... là, il y a un arbitrage qui se fait
région par région et qui reconnaît à la fois
les besoins de la région mais aussi qui connaît ces entreprises et qui peut
être en mesure d'évaluer si la demande qui est faite, dans ce cas-ci,
c'est une aide financière, cette demande-là, elle est opportune du point de vue
de la logique de l'entreprise et de son positionnement dans la région.
Le Président (M.
Cousineau) : M. le député de Saint-Jean.
M.
Turcotte : Donc, pour la main-d'oeuvre future, la règle
s'applique aussi, donc, mais est-ce que, là, on tient compte davantage
des besoins régionaux ou c'est vraiment les besoins de l'entreprise?
Le Président (M.
Cousineau) : M. le ministre.
M. Blais :
Encore une fois, la question que vous posez est générale, j'essaie de la situer
dans un ou l'autre cadre. Alors, pour la main-d'oeuvre future, là, s'il s'agit
d'une dépense qu'une entreprise veut faire reconnaître, c'est vraiment l'entreprise qui
est à même de décider ce qui est bon pour elle, encore pour le moment, du
moins, là, donc, et ensuite il s'agit
de voir si c'est admissible ou pas selon les critères de la loi. Si vous faites
une demande, comme entreprise, au
fonds, là, bien sûr, ça se fait en tenant compte à la fois des priorités
régionales, de votre situation comme entreprise, mais des priorités
régionales, hein? C'est la force du fonds d'avoir, partout au Québec, là, sur
le territoire, là, des comités régionaux.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député.
M.
Turcotte :
Dans le cas où, vous l'avez mentionné, qu'effectivement pour... lorsque
l'implantation du modèle dual serait
faite, je suppose que, dans ce cas-là, il y aurait un plus grand... ça ne
serait pas en fonction de besoins d'une entreprise, ça serait plus en
fonction des besoins de main-d'oeuvre dans une région ou, du moins, dans
l'ensemble du Québec, donc, des métiers en
émergence où qu'on a des pénuries et que, là, il y aurait davantage
d'initiatives pour implanter des stages pour, bon, assurer par la suite
une rétention de ces personnes-là en entreprise.
Donc, dans ce
cas-là, ça serait davantage sous une base des besoins régionaux ou nationaux
que des besoins en entreprise
proprement dits, parce que, l'entreprise qui accueillera des stages, ce n'est
pas elle qui va dire : Moi, je veux avoir des stagiaires dans telle
formation. Elle va dire : Moi, j'accepte, là, d'accueillir ces...
M.
Blais : Bien, encore une fois — c'est toujours la même chose — si on parle de dépenses admissibles,
hein, puis l'entreprise juge qu'elle devrait, oui, effectivement collaborer
comme certaines le font dans la Beauce, là, avec le milieu puis avec la formation, bon, à ce moment-là, bien sûr, c'est à
l'entreprise de juger, là, ses besoins. Le principe ici, c'est de le
permettre, ce n'est pas de... ce n'est jamais de l'obliger, mais c'est de le
permettre.
Le Président (M. Cousineau) :
M. le député de Rimouski.
M. LeBel : Oui. Le temps avance, il
n'y aura pas beaucoup de temps, mais, avant qu'on avance sur l'article... Le ministre parlait beaucoup de
consensus tantôt. Puis, quand on a amené l'amendement... parce qu'on est
très... je pense que, tout le long de
l'étude, on va revenir souvent là-dessus, sur l'importance de voir comment on
va traiter la clientèle future puis l'actuelle pour ne pas qu'on en
vienne que ce soit... que les deux soient supportées d'une façon correcte.
Le ministre
parlait de consensus, mais je vais me permettre de lire, dans le mémoire des
différents syndicats, un passage, je
pense, qui donne bien l'importance de nos questions. On dit : «La
formation des jeunes ainsi que celle des personnes éloignées du marché
du travail sont très importantes. Mais d'autres instances en ont la
responsabilité, dont le ministère de
l'Éducation et celui de l'Emploi et de la Solidarité sociale. La loi actuelle a
été revue en 2008 afin de mieux répondre aux besoins des entreprises
ainsi que de la main-d'oeuvre en emploi. Bien que nous soyons d'accord pour améliorer et valoriser une concertation [entre]
les autres organismes et ministères, ce qui est d'ailleurs prévu dans
d'autres articles du projet de loi, nous
considérons qu'il faut absolument conserver aux besoins de la main-d'oeuvre en
emploi un terrain qui lui est propre.»
Je pense que ça démontre bien la sensibilité...
et c'est ça qui nous avait amenés à proposer l'amendement, bon, qui a été battu. Mais, avec le porte-parole,
je suis certain qu'on va revenir régulièrement pour s'assurer de
l'équité entre les deux volets. Puis je
pense que c'est ça que le mémoire des syndicats propose et c'est vers ça...
quand le ministre parlait d'un consensus, ça, ça fait partie du
consensus.
M.
Blais : Oui, mais le consensus, finalement, est un petit peu plus
large que ça, hein, parce que... C'est tout à fait normal. Moi, je
respecte tout à fait cette préoccupation-là. Je n'ai pas mentionné tout à
l'heure que je ne la respectais pas. Je pensais qu'on n'était pas capable de
l'opérationnaliser. C'est autre chose, là.
Et c'est
normal aussi que les syndicats, quand ils font une représentation aussi
officielle qu'à l'Assemblée nationale, bien, ils souhaitent, à
l'intérieur de leur premier mandat... et leur premier mandat, c'est de protéger
leurs membres et favoriser bien sûr leur
développement. Donc, c'est leur tâche. Et je pense qu'il y a eu des discussions
importantes, à la Commission des
partenaires du marché du travail, sur ce projet de loi pour en arriver, malgré
tout, à un consensus. On continue à
dire : C'est tout à fait normal — d'autant plus que ce n'est pas eux qui
paient, c'est les employeurs — que leur première préoccupation, c'est leurs membres, pas leurs futurs membres.
Mais je pense qu'il y a eu quand même un travail qui a été fait, au Québec, sur cette question-là, puis, je le dis, il
faut saluer le milieu syndical d'avoir fait cette réflexion-là. Je ne crois pas qu'ils soient venus en commission
parlementaire... en tout cas, je ne me souviens pas qu'ils soient venus
en commission parlementaire pour déchirer
leurs chemises et crier au loup. Ils ont fait part de leurs préoccupations
comme vous le faites aujourd'hui.
Le Président (M. Cousineau) :
...M. le ministre. D'autres interventions? M. le député de René-Lévesque.
M.
Ouellet : Oui. J'aimerais qu'à travers l'étude du projet de loi le
ministre puisse garder en tête pas juste notre prétention, mais notre désir, effectivement, de protéger la
main-d'oeuvre actuelle versus la main-d'oeuvre future, puis, quand je veux dire «protéger»... Puis j'ai entendu
la réponse sur le fait que ce serait compliqué ou bureaucratique de
gérer une application de la loi avec une
contrainte, de dire... de ne pas être obligé de prendre des employés existants,
puis y aller vers les employés futurs.
Je pense que
ce qu'il est important de bien comprendre puis ce qu'on veut faire là-dedans,
c'est qu'effectivement, quand ce n'est pas inscrit dans la loi — je
sais, j'ai été en affaires avec des entreprises — quand ce n'est pas
inscrit, c'est parce
qu'on peut effectivement, dans certains cas, le faire. Alors, j'invite le
ministre à garder en tête que ce qu'on veut essayer de faire dans ce
projet de loi là, puis notre contribution, c'est de s'assurer qu'on n'est pas
en train de dénaturer l'utilisation d'une main-d'oeuvre future au détriment,
assurément, d'une main-d'oeuvre actuelle qui est compétente, dans certains cas, mais par les nouvelles technologies, ou
par de nouveaux procédés, ou par de nouvelles façons de faire, ils seraient, malheureusement, mis de
côté pour une main-d'oeuvre future et, dans certains cas, à moindre
coût, et je pense que c'est là qu'il est, l'enjeu, pour les mains-d'oeuvre
futures.
Le Président (M. Cousineau) :
Merci, M. le député de René-Lévesque.
Mais, compte
tenu de l'heure, je dois ajourner sine die nos travaux. Alors, on se reverra à
la prochaine séance, toujours sur l'article 2. Merci.
(Fin de la séance à 13 heures)