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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le vendredi 7 novembre 2014 - Vol. 44 N° 11

Interpellation du député de Saint-Jean au ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale sur le sujet suivant : Fermeture des carrefours jeunesse-emploi : l'abandon des jeunes par un gouvernement libéral sans vision


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Table des matières

Exposé du sujet

M. Dave Turcotte

Réponse du ministre

M. François Blais

Argumentation

Conclusions

M. François Blais

M. Dave Turcotte

Autres intervenants

M. Claude Cousineau, président

Mme Caroline Simard

M. Yves St-Denis

M. Claude Surprenant

Journal des débats

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci. Bonjour à tous et à toutes. M. le ministre, les parlementaires. Alors, étant donné qu'il est 10 h 3, ça va me prendre un consentement. Parce que l'ordre de la Chambre, c'est de 10 heures à midi, donc, ça va me prendre un consentement pour se rendre à 12 h 3. Alors, est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Parfait. À l'ordre du jour, s'il vous plaît, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à l'interpellation du député de Saint-Jean au ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale sur le sujet suivant : Fermeture des carrefours jeunesse-emploi : l'abandon des jeunes par le gouvernement libéral sans vision.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Auger (Champlain) est remplacé par Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré); M. Therrien (Sanguinet) est remplacé par M. Turcotte (Saint-Jean); et M. Lamontagne (Johnson), par M. Surprenant (Groulx).

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la secrétaire. Je vous rappelle brièvement le déroulement de l'interpellation.

Dans un premier temps, le député de Saint-Jean aura un temps de parole de 10 minutes, suivi du ministre pour 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante : d'abord, un député de l'opposition officielle, ensuite M. le ministre, puis un député du groupe formant le gouvernement, et ainsi de suite. Je comprends qu'il y a une entente à l'effet que la deuxième opposition interviendra lors de la troisième et de la sixième intervention. Ça va? 20 minutes avant midi, ou 12 h 3 dans notre cas ici, j'accorderai 10 minutes de conclusion au ministre et un temps de réplique égal au député de Saint-Jean. Enfin, je vous rappelle que le débat ne peut, à moins de consentement, dépasser midi, mais on a eu un consentement pour 12 h 15.

Alors, M. le député de Saint-Jean, vous avez la parole pour les 10 premières minutes.

Exposé du sujet

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci beaucoup, M. le Président. Suite à l'annonce, à la confirmation, par le ministre, de la modification de la mission des carrefours jeunesse-emploi au Québec, je tenais à tenir cette interpellation pour avoir plus d'éclaircissements, avoir aussi l'occasion de présenter au ministre l'apport des carrefours jeunesse-emploi au Québec.

Avant d'aller plus loin, M. le Président, j'aimerais saluer la vingtaine de jeunes qui sont de partout de la Capitale-Nationale, qui sont avec nous aujourd'hui, des jeunes qui ont eu et qui ont des services des carrefours jeunesse-emploi et qui, avec la réforme proposée, n'auraient plus droit à ces services de leurs carrefours jeunesse-emploi. Des jeunes qui se cherchent un emploi parce qu'ils ont en ce moment un emploi précaire et qu'ils veulent avoir un meilleur emploi ne pourraient plus avoir accès aux carrefours jeunesse-emploi. Des jeunes qui leurs parents gagnent un peu trop d'argent n'ont pas droit à l'aide sociale, ces jeunes-là n'auraient plus droit d'avoir d'aide des carrefours jeunesse-emploi. Des jeunes de 16, 17 ans qui n'auraient plus droit non plus parce qu'ils ne sont pas dans la bracket qu'on leur dit, les 18-35 ans, donc, ils n'auraient plus droit, eux non plus, à l'aide des carrefours jeunesse-emploi.

Donc, à 40 000 jeunes au Québec on leur dit : À partir du 1er avril 2015, vous n'aurez plus droit aux services du carrefour jeunesse-emploi. D'où vient ce 40 000 là, ce 40 000 jeunes là, M. le Président? Bien, c'est mathématique. Il y a 60 000 jeunes qui sont aidés, à l'heure actuelle, par année par nos carrefours jeunesse-emploi au Québec. Sur le 60 000, 40 000 sont des moins de 18 ans, tous les jeunes que je vous ai parlé tantôt, là, qui ne sont pas à l'aide sociale, qui ne sont pas à l'assurance-emploi ou qui ont un emploi mais qui veulent avoir un meilleur emploi, ou des jeunes qui ont besoin de services d'orientation, de l'accompagnement pour l'employabilité ou l'entrepreneuriat. Donc, 40 000 jeunes sur 60 000 jeunes qui seront mis de côté. Moi, je comprends la volonté du ministre et du gouvernement de réduire le nombre de jeunes à l'aide sociale au Québec. Je crois que c'est un combat que tout le monde au Québec partage, est d'accord. Les carrefours jeunesse-emploi au Québec font déjà ce travail-là et ils sont prêts à le faire encore plus. Ce que je demande au ministre, au fond, aujourd'hui, c'est de s'asseoir de nouveau avec les carrefours jeunesse-emploi et d'échanger avec eux sur comment on peut faire pour aider davantage de jeunes au Québec, pas comment aider certains jeunes.

Moi, je crois qu'il faut donner une chance à tous nos jeunes, tous les jeunes du Québec sont importants. J'ai d'ailleurs quelques témoignages, quelques jeunes qui ont tenu à s'exprimer. Je vais citer un témoignage :

«Je m'appelle David Bourgelas, j'ai 22 ans et je fréquente le CJE depuis près de trois ans, trois ans de support constant, d'aide apportée dans toutes mes démarches personnelles et professionnelles. C'est la chance d'avoir une équipe énergique et rassurante qui nous apporte aide, confiance, sécurité et bien sûr une oreille toujours prête à écouter et conseiller celui ou celle qui en ressentent le besoin. La première année a été une période très difficile pour moi, soit l'enfer de la drogue et du crime. J'étais perdu et, sans la moindre lueur d'espoir, j'ai commencé à me confier à Patrick, le responsable des Jeunes en action. Sans que je m'en doute, j'ai bâti une relation de confiance et de respect avec Patrick. Il est devenu pour moi un exemple à suivre, un repère et un soutien dans la noirceur qu'était ma vie. La deuxième année a été très mouvementée pour moi. Ma vie n'avait plus de sens, j'avais le goût de mourir et de tout abandonner.

• (10 h 10) •

«Avant de commettre l'irréparable, je suis venu voir Patrick en lançant un cri de détresse et de désespoir. C'est à cet instant que j'ai connu toute l'équipe. Un après l'autre, ils sont venus me parler, m'encourager, m'apporter le soutien pour avoir le courage de m'inscrire en thérapie. Sans aucun doute, ils ont été avec moi tout au long de ma thérapie. Après, j'ai été incarcéré pour des crimes commis dans le passé, et, une fois de plus, ils étaient derrière moi. J'ai été libéré au mois de mai 2014. Et, depuis ce temps, nous travaillons tous ensemble pour ma réussite.

«Aujourd'hui, je travaille, je n'ai plus de problèmes avec la justice, je vis dans la légalité. Je suis heureux et j'ai confiance en moi. Quand je regarde tout le cheminement que j'ai fait, les changements que j'ai apportés à ma vie, les épreuves que j'ai surmontées, je vois toute l'équipe du carrefour jeunesse-emploi, qui m'a aidé sans me laisser tomber et qui n'a jamais cessé de croire en moi. Sans leur travail acharné et leurs efforts tout au long de ces trois années, je ne serais plus de ce monde, ou j'y serais encore, mais je ne serais pas l'homme que je suis devenu. J'aurais pu encore, sur plusieurs pages, vous témoigner de tout ce que m'ont apporté... aux jeunes de Montmagny et à moi-même. Moi, je crois que je n'ai pas besoin d'en dire davantage, puisque les faits parlent d'eux-mêmes, et je vous rappelle que le carrefour jeunesse-emploi est bien plus qu'un organisme, il m'a sauvé.»

M. le Président, c'est un témoignage d'un jeune. C'est pour ce David-là qu'on doit se battre. C'est pour ce David-là et l'Anthony que la collègue du ministre de l'Emploi et Solidarité, la ministre de la Justice, a témoigné il y a de ça quelques années ici même, à l'Assemblée nationale. C'est pour tous ces Anthony, c'est pour tous ces David, c'est pour tous ces jeunes-là qui sont ici aujourd'hui dans les tribunes, ici, à l'Assemblée nationale, mais aussi tous les jeunes qu'on peut aider partout au Québec, c'est pour ces jeunes-là que les carrefours jeunesse-emploi existent, avec leur originalité, leurs particularités, leurs couleurs locales. C'est plus de 100 000 carrefours... pas 100 000, 100 carrefours jeunesse-emploi partout au Québec qui aident des milliers de jeunes au quotidien en fonction de leurs problématiques et non pas en fonction de «est-ce qu'ils ont un chèque ou pas».

C'est pour ces jeunes-là qu'on doit se battre. C'est pour ces jeunes-là que l'ancien premier ministre du Québec, le premier ministre Jean Charest, se disait fan numéro un des carrefours jeunesse-emploi. Il aurait aimé que ça soit le Parti libéral du Québec qui ait l'idée de mettre en place les carrefours jeunesse-emploi. Ironie du sort, c'est le Parti libéral du Québec qui décide... qui propose, du moins, de changer la mission de ces carrefours jeunesse-emploi là qui démontre la réussite des carrefours, parce que des milliers de jeunes se trouvent un emploi, reprennent le goût à la vie, s'intègrent dans notre société. J'invite d'ailleurs le ministre à visiter des carrefours jeunesse-emploi, à aller voir les jeunes qui sont dans ces carrefours, d'aller rencontrer les intervenantes, les intervenants, les gens des équipes terrain, les équipes terrain des carrefours jeunesse-emploi, qui font un travail extraordinaire au quotidien. J'ai eu l'occasion de visiter, la chance de visiter le Carrefour jeunesse-emploi de Charlesbourg-Chauveau, qui est le carrefour jeunesse-emploi du comté, de la circonscription du ministre. J'ai vu des jeunes là avec des brillants dans les yeux, des étincelles, des jeunes qui, grâce à leur carrefour jeunesse-emploi, ont pu avoir le courage et la volonté de se lever chaque matin pour participer, pour construire avec nous dans la société du Québec. C'est pour ces jeunes-là qu'il faut se battre.

M. le Président, le ministre est le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Il est le ministre responsable de faire en sorte qu'il y ait moins de pauvreté, qu'il y ait moins d'exclusion au Québec. Ce n'est pas n'importe quel ministre, c'est le ministre, selon moi, le plus important du gouvernement. C'est le ministre qui s'occupe de la dignité de nos jeunes, la dignité de nos Québécoises et de nos Québécois. M. le Président, j'invite sérieusement, sérieusement le ministre à prendre le temps de visiter des carrefours jeunesse-emploi, de rencontrer les jeunes qui ont été aidés et qui sont aidés par leur carrefour jeunesse-emploi, pour comprendre le changement catastrophique qu'il est en train de faire pour ces jeunes-là. Ce n'est pas ses fonctionnaires, ce n'est pas les gens du ministère qui ont la décision à prendre, c'est lui. Il est le ministre, il est le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, le ministre responsable des carrefours jeunesse-emploi. C'est sur ses épaules que cette décision-là est, à l'heure actuelle.

M. le Président, j'invite le ministre à bien écouter les témoignages, les commentaires qui seront faits durant cette interpellation-là et je l'invite par la suite à prendre un temps de réflexion pour aider nos jeunes et à prendre la bonne décision pour l'ensemble de nos jeunes du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le député de Saint-Jean. Alors, M. le ministre, à vous pour les 10 prochaines minutes.

Réponse du ministre

M. François Blais

M. Blais : Alors, merci beaucoup, M. le Président. C'est une première expérience pour moi, alors je vais essayer d'être à la hauteur à la fois de ma fonction et du sujet que l'on aborde aujourd'hui.

D'abord, je veux remercier le député de Saint-Jean pour cette interpellation, parce que, il a raison, c'est un sujet quand même assez important. On parle des carrefours jeunesse-emploi, mais, à travers les carrefours jeunesse-emploi, on parle aussi de la jeunesse. Je le remercie aussi, parce que, disons, dans la chaleur de la période des questions, on n'a pas toujours l'occasion, la possibilité d'élaborer sur des sujets un peu plus complexes, alors qu'en interpellation, bien sûr, on a du temps, avec mes collègues — je remercie d'ailleurs mes collègues d'être présents ici, et les collègues de l'opposition, d'être présents, là, pour cette interpellation — donc, d'aller plus loin, d'aller vers une meilleure compréhension des enjeux. Et finalement je le remercie parce que ça m'a obligé, moi aussi, de mon côté, à faire une partie de ce qu'il me demande, c'est-à-dire de réfléchir, d'aller plus loin dans ma réflexion, et, dans ce cas-ci, ça m'a amené à renforcer, disons, ma conviction, là, par rapport à la proposition que nous faisons, là, en ce moment, là, aux carrefours jeunesse-emploi.

Donc, je trouve que déjà, dans la discussion, on a fait un bout de chemin assez important, hein, parce que le titre de cette interpellation, c'est bien : Fermeture des carrefours jeunesse-emploi. Excusez-moi si j'utilise parfois «centre jeunesse». C'est parce que j'ai été huit ans sur un conseil d'administration d'un centre jeunesse. Alors, je vais peut-être, parfois, trébucher, mais on parlera aujourd'hui, bien sûr, des carrefours jeunesse-emploi.

Donc, le titre de l'interpellation, c'est : Fermeture, et, je pense, et j'ai bien écouté mon collègue le député de Saint-Jean, là, qu'on s'entend là-dessus, il n'est pas question ici de fermer quelques carrefours jeunesse-emploi, il est question, et je pense qu'il a bien formulé le problème, et c'est à nous d'y répondre maintenant, il est question de savoir si on peut, si on doit, s'ils méritent d'avoir une priorisation au niveau de leurs actions. Alors, l'expression «priorisation», ce n'est pas un synonyme de l'expression «exclusion». Donc, si le gouvernement décide de faire en sorte que les carrefours jeunesse-emploi se tournent davantage, en priorité, vers des jeunes qui sont plus éloignés du marché du travail, et là-dessus je pense aussi qu'on s'entend, c'est-à-dire qu'on voit bien qu'il y a aussi une urgence d'agir chez ces jeunes, ça ne signifie pas aucunement que les carrefours jeunesse-emploi doivent fermer leurs portes à d'autres jeunes.

À vrai dire, il faut rappeler que les carrefours jeunesse-emploi ne sont pas des entités du gouvernement du Québec, ce sont des partenaires. Nous travaillons avec eux sur une base de subventions et/ou sur une base d'ententes de service. Donc, les carrefours jeunesse-emploi vont pouvoir continuer à rencontrer les jeunes, hein, qu'ils veulent bien rencontrer, à développer avec eux les projets qu'ils voudront bien développer. Cependant, et je pense que toute la question aujourd'hui, hein, elle est bien, bien située par le député de Saint-Jean, c'est de savoir est-ce que l'on peut aussi prioriser davantage leurs actions vers des jeunes qui en ont encore plus besoin, qui sont particulièrement éloignés du marché du travail, les jeunes éligibles à l'assurance-emploi ou les jeunes assistés sociaux.

Il faut donner le contexte un peu, maintenant, de cette décision. Je rappelle que les carrefours jeunesse-emploi ont été créés en 1997. Il y avait autour de 14,5 % de chômage chez les jeunes à cette époque. Aujourd'hui, il y a 9,6 %, ou quelque chose du genre, de chômage chez les jeunes. Donc, il y a eu une diminution importante de chômage chez les jeunes. On pourrait dire : Bien, bravo, on n'a plus besoin des carrefours, finalement, le problème est en train de se dissoudre par lui-même, on a d'autres organisations, on a les centres locaux d'emploi, qui peuvent les rencontrer.

• (10 h 20) •

Donc, il y aurait un argumentaire pour dire : Le problème du chômage chez les jeunes est en diminution, et allons, hein, vers une mesure plus radicale : fermons les carrefours jeunesse-emploi... ou, plutôt, cessons de les subventionner — ils ont d'autres revenus, par ailleurs — et confions ça à d'autres services, notamment aux centres locaux d'emploi.

Notre approche, c'est, au contraire, de dire : Les carrefours ont prouvé leurs compétences, ont prouvé leur valeur ajoutée dans la relance de l'emploi. On a eu des beaux exemples, là, qui ont été proposés par le député de Saint-Jean. Donc, notre approche est de rappeler qu'il y a une expertise qui est reconnue par les carrefours jeunesse-emploi. La question maintenant : Est-ce qu'on peut davantage recentrer, comme on le fait d'ailleurs avec tous nos organismes, hein? Il faut comprendre qu'Emploi-Québec subventionne aujourd'hui plus de 300 organismes, et je ne parle pas des carrefours jeunesse-emploi, mais qui aident à l'employabilité, qui aident au retour vers l'emploi de différentes clientèles, dont les clientèles jeunes, en passant, hein, les femmes, d'ex-détenus, etc.

Donc, on a 300 organismes. On fonctionne, avec ces organismes, toujours de la même façon : par une entente de service, un contrat dans lequel on négocie. Et j'insiste sur le mot «négocie». On n'impose pas les contrats de services. On négocie avec eux, à partir de leur réalité, quels sont les objectifs qu'on leur demande d'atteindre. Eux nous font part de leurs clientèles naturelles. Et, suite à cette négociation, on définit un contrat de services. Ce que l'on veut faire avec les carrefours jeunesse, de ce point de vue, c'est de normaliser leur situation, de dire : Écoutez, vous êtes des partenaires à part entière, comme nos 300 autres organismes qui appuient l'employabilité au Québec, vous êtes des partenaires, mais maintenant nous désirons davantage avoir des ententes de service avec vous sur une base contractuelle, avec des attentes plus précises. Et le député de Saint-Jean a raison d'insister sur le fait que nous voulons qu'il y ait davantage de travail avec des personnes qui sont plus éloignées du marché du travail, et c'est tout à fait normal, hein? Quand on regarde un peu l'évolution de la clientèle des carrefours, on voit qu'ils rencontrent aujourd'hui, à peu près, 10 000 jeunes de moins qu'il y a 10 ans, mais on leur accorde un revenu de 10 millions de dollars de plus, hein, ce qui fait qu'il y a eu une augmentation, hein, des frais de gestion qui est assez importante dans les carrefours jeunesse-emploi. Et ce que nous désirons, encore une fois, pas directement, mais indirectement, simplement en travaillant sur une base d'entente de service, c'est aussi de diminuer leurs frais de gestion.

Maintenant, pour ce qui est, disons, du contact plus direct, parce que le député me sollicite pour que j'aie un contact plus direct avec les carrefours jeunesse-emploi avant de rendre ma décision, je dois dire que ma décision a été alimentée, entre autres... mais je fais toujours attention, disons, aux anecdotes, mais, dans ce cas-ci, l'anecdote, disons, prend symbole.

Lorsque j'ai rencontré pour la première fois le carrefour jeunesse-emploi à Charlesbourg, je me rappelle d'une excellente rencontre que j'avais eue avec des jeunes qui se préparaient pour un voyage en Afrique, avec des représentants, là, du carrefour jeunesse-emploi. Et j'avais trouvé ça extrêmement intéressant, c'est-à-dire, tout le niveau de préparation de cette rencontre-là, mais ensuite... pardon, de ce voyage-là en Afrique, le niveau de préparation, l'intérêt que les jeunes avaient pour ce séjour en Afrique. Bon. Cependant, malgré le respect que je dois aux personnes, je suis sorti dubitatif — je ne savais pas encore à ce moment-là que j'allais devenir ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale — parce que je me suis dit, hein : Si on veut rapprocher les jeunes du marché du travail, est-ce qu'un séjour en Afrique est vraiment la bonne approche, hein, pour le faire? Donc, je suis resté assez dubitatif. Moi-même qui n'y suis jamais allé, en Afrique, je crois que j'étais un peu jaloux d'eux. Et la question, c'est bien ça. Et maintenant, bon, ce que j'ai su par la suite, c'est que ce type de voyage est régulièrement organisé par les carrefours jeunesse-emploi.

Moi qui viens du milieu universitaire, moi qui ai toujours encouragé les jeunes à aller à l'étranger et prendre des expériences, notamment en formation, je ne peux pas, disons, critiquer de manière totale ces choix des carrefours jeunesse-emploi, mais il faut comprendre qu'il y a des priorités, et l'une de nos priorités, c'est que les carrefours se penchent un peu plus, donc, se penchent davantage vers les jeunes qui sont plus éloignés du marché du travail, pour leur donner une chance.

Donc, je pense qu'on poursuit des objectifs semblables, mais il faut aller maintenant au niveau des moyens. Nous avons une bonne expérience dans les ententes de service avec plus de 300 organismes subventionnaires, donc on ne crée rien de nouveau, on normalise une situation et on s'assure, dans un contexte où il y a eu une diminution très importante, hein, non négligeable, du chômage chez les jeunes... Je vous rappelle qu'on s'attend à, d'ici 2017... Ce n'est pas les politiques qui le disent, c'est plutôt les fonctionnaires du ministère de l'Emploi, les statisticiens qui s'attendent à une création de 725 000 emplois dans les trois prochaines années... non, pardon, 725 000 emplois seront disponibles, plutôt, dans les prochaines années.

La moitié de ces emplois-là devrait aller vers les jeunes, donc il faut vraiment s'assurer de la meilleure adéquation.

Argumentation

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, nous allons maintenant procéder à la période d'échange. Là, c'est par blocs, évidemment. La première série d'interventions : cinq minutes pour le député d'opposition, cinq minutes pour le ministre et cinq minutes pour un député ou une députée ministériels.

Alors, M. le député de Saint-Jean, à vous la parole.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. J'ai écouté les mots d'introduction du ministre. Juste pour remettre en contexte : lors de la création des carrefours jeunesse-emploi au Québec, sous un gouvernement du Parti québécois, mais tous les partis politiques à l'époque ont été impliqués dans la création de ces carrefours... D'ailleurs, c'est pour ça que la plupart des carrefours ont le nom de leur circonscription, parce que c'étaient des députés à l'époque qui devaient parrainer la création de leur carrefour jeunesse-emploi dans leur circonscription. Les députés de tous les partis politiques ont été impliqués à ce moment-là.

Et qu'est-ce qui a été dit, à ce moment-là, lors de la fondation, à la base, des carrefours? Le taux de chômage chez les jeunes était élevé. Le ministre nous a dit à la période de questions qu'il considérait que le taux de chômage maintenant était rendu assez bas chez les jeunes, là, pour justifier un changement. Il nous a parlé de 9 %. Je n'expliquerai pas, M. le Président, au ministre qu'un taux de chômage, c'est calculé sur le nombre de personnes qui sont à la recherche d'emploi. Donc, les jeunes qui sont éloignés du marché du travail, qui ne sont plus à la recherche d'emploi parce qu'ils sont désabusés, découragés ou en dehors du système ne comptent pas dans le taux de chômage. Donc, on peut supposer que le taux de chômage chez les jeunes est plus élevé que 9 %. Mais, à l'origine, ce qu'on s'est dit : Dans chacune des circonscriptions, dans chacune des communautés, on va regarder les problématiques de nos jeunes de ces communautés, puis on va se donner des outils pour les accompagner. Donc, c'est ce qui fait en sorte que chaque carrefour jeunesse-emploi au Québec a sa particularité, son originalité, sa couleur.

Je peux comprendre que, pour le ministre... Je dis ça parce que c'est compliqué pour moi, comme porte-parole de l'opposition officielle, ça fait que ça doit être compliqué pour le ministre aussi de connaître tous les programmes et tous les services des carrefours jeunesse-emploi partout au Québec, parce que c'est original et particulier dans chacun. C'est sûr que ça peut faire peur. Le mur-à-mur, ça, c'est bien rassurant, il n'y a pas bien, bien de stress avec ça. Il y a deux, trois programmes partout au Québec qui sont gérés pareil, c'est des critères, c'est uniforme, ça n'a pas de couleur, ça n'a pas de saveur puis ça n'a pas trop de problèmes. Ce qui a fait la force et la richesse des carrefours jeunesse-emploi, M. le Président, c'est justement ça : c'est leur saveur, c'est leur couleur, leur originalité.

Le ministre nous dit qu'il veut recentrer la mission des carrefours jeunesse-emploi. Moi, si le ministre, en mot de conclusion, nous dit : M. le Président, je vais m'assurer que les carrefours jeunesse-emploi demeurent, gardent leur originalité, leur couleur, leur saveur et qu'ils fassent un travail pour aider nos jeunes à avoir moins de jeunes à l'aide sociale et à l'assurance-emploi mais que pour autant on ne mettra pas de côté les autres jeunes, moi, je vais l'applaudir. Malheureusement, ce n'est pas ça que j'ai entendu jusqu'à maintenant. Moi, je suis d'accord pour qu'on aide les jeunes à l'aide sociale à ne plus être sur l'aide sociale, mais il faut aider tous les jeunes. Un jeune qui a un problème d'orientation doit être aidé aussi. Moi, ce que j'aimerais comprendre, c'est comment ça va fonctionner maintenant, M. le Président. On a des jeunes qui vont arriver dans un carrefour jeunesse-emploi, on va leur dire : Non, on ne peut pas vous aider, vous devez passer par votre centre local d'emploi. On a appris en commission parlementaire, cette semaine, sur le projet de loi n° 15 qu'à peu près une soixantaine de centres locaux d'emploi vont être fermés au Québec. En tout cas, en Montérégie, j'ai Saint-Rémi, Contrecoeur qui est fermé. Il y en a un dans le comté de Pointe-aux-Trembles.

Donc, on va avoir moins de ressources à Emploi-Québec pour aider ces jeunes-là, mais on leur dit : Vous devez passer par là. Et là il va y avoir des rencontres, des discussions. Je ne sais pas comment on va faire, parce qu'en ce moment quelqu'un qui fait une demande d'aide sociale ne peut même pas rencontrer son agent au début. Donc, je ne sais pas comment on va rencontrer tous ces jeunes-là.

Et là on va déterminer un indice d'employabilité. Ça, c'est un beau mot, ça, M. le Président, un «indice» d'employabilité. Est-ce qu'il faut que le jeune performe à l'indice d'employabilité ou ne performe pas pour avoir l'aide du carrefour jeunesse-emploi? On ne le sait pas. Donc, avec son indice d'employabilité, il va savoir s'il va pouvoir avoir les services du carrefour jeunesse-emploi, mais, pour ça, il faut qu'il y ait un chèque, il faut qu'il soit à l'aide sociale ou à l'assurance-emploi, il faut qu'il ait plus de 18 ans et il ne faut pas que ses parents gagnent trop, parce que sinon il ne pourra pas avoir l'aide sociale. Puis, s'il a un emploi déjà, bien il faut qu'il lâche son emploi, tomber à l'aide sociale ou à l'assurance-emploi. Comment, M. le Président, le ministre peut... Comment le ministre peut nous expliquer cette augmentation-là de bureaucratie avec les centres locaux d'emploi, qu'on va leur donner, qui n'ont déjà pas assez des ressources pour aider notre monde déjà?

• (10 h 30) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Alors, M. le ministre, pour les cinq prochaines minutes.

M. Blais : Alors, beaucoup de choses. Et j'ai vraiment l'impression que, sur certains points, on se rapproche de plus en plus.

Donc, sur l'expression «indice d'employabilité», je dois reconnaître que c'est une expression qui a une consonance bureaucratique, hein, et qui peut être un peu abrasive. Et pourtant c'est fondamental, hein, c'est fondamental dans la mission, hein, qu'ils ont à accueillir. Les indices d'employabilité sont reconnus par toutes les organisations internationales comme un outil pour gérer bien sûr des clientèles. Et ce que l'on peut reprocher aux carrefours jeunesse-emploi, mais c'est un reproche, disons, qui n'est pas sévère, qui est lié au fait qu'on a laissé les choses aller, disons, progressivement, ce qu'on peut reprocher aux carrefours jeunesse-emploi, c'est de s'être dispersés.

Et j'écoutais mon collègue le député de Saint-Jean au début dire : Bon, ils font toutes sortes de choses, c'est extrêmement varié d'un endroit à l'autre. Alors, il y a une connotation positive à ça, bien sûr, parce qu'il faut être adapté à la situation des régions, mais il y a une connotation aussi négative : la dispersion, hein, et ça, bien sûr, nous, comme nous les finançons... Et, bien sûr, nous ne finançons que partiellement les carrefours jeunesse-emploi. Les carrefours jeunesse-emploi reçoivent d'autres financements, parfois d'une municipalité, parfois d'organisations publiques ou parapubliques, donc, et nous n'intervenons pas sur ces financements-là et sur ces autres éléments, hein, de développement.

Mais, sur le financement, disons, qui nous appartient, ce que nous recherchons, hein, c'est de diminuer la dispersion et qu'ils aillent effectivement en prenant en considération, oui, des indices d'employabilité. Quelqu'un qui revient de l'étranger avec un baccalauréat, je peux comprendre, hein, qu'il y a une recherche d'emploi qui doit se faire et qu'il y a une certaine difficulté, mais, quelqu'un qui a quitté assez jeune l'école, qui est assisté social depuis trois ans et qui veut revenir sur le marché du travail, on comprend aussi que l'indice n'est pas le même et que l'effort n'est pas le même, hein, et que ce qu'on va demander aux carrefours jeunesse-emploi sera plus exigeant. Mais ils seront rémunérés aussi, parce que c'est extrêmement important pour nous. Sur la question de reconnaître les particularismes régionaux, ça tombe bien parce que, justement, dans nos méthodes de financement, les ententes seront prises avec les directions régionales d'Emploi-Québec. Donc, il ne s'agit pas de mur-à-mur du tout. Le seul mur-à-mur, si je peux parler ainsi, c'est qu'il faut convaincre nos amis des carrefours jeunesse qu'il est préférable de faire comme tous nos autres organismes dans le domaine de l'employabilité, de fonctionner sur une base d'ententes de service. Mais par la suite, une fois que ce principe-là est reconnu, ils vont discuter dans chaque région pour bien prendre en considération la situation de l'emploi qui est possible chez les jeunes et les possibilités, disons, de développement, là, personnel.

Donc, du point de vue de la régionalisation, j'en suis, avec mon collègue de Saint-Jean. Du point de vue de la dispersion, je n'en suis pas. Je crois qu'il y a un enjeu de dispersion. Nous ne voulons pas financer l'ensemble des activités des carrefours jeunesse mais celles qui sont centrées sur leur mission et notamment, maintenant, un peu plus sur la mission des jeunes qui sont un peu plus éloignés du marché du travail. Ils pourront continuer à rencontrer les jeunes qui sont moins éloignés, dont l'indice d'employabilité, pour reprendre l'expression qui a été lancée tout à l'heure, est différent.

Mais donc nous avons une perspective régionale. Mon collègue a commencé en disant que ça a été créé dans les régions avec un investissement personnel des députés. Nous en sommes toujours. Et nous n'allons pas appliquer du mur-à-mur au niveau des règles de financement, nous allons tenir compte des situations de chacun. Et ce qui est intéressant, ce qui mérite aussi d'être souligné, c'est que le financement va être autour de ces clientèles. Donc, c'est clair que, si vous êtes dans une région où il y a plus de jeunes éloignés du marché du travail et que vous décidez de travailler avec Emploi et Solidarité, hein, pour aider ces jeunes-là, vos chances, hein, d'augmenter le financement que vous avez aujourd'hui vont être bien différentes.

Le mur-à-mur, c'est la situation actuelle, parce que, depuis à peu près, quoi, là, 12 ans maintenant ou 14 ans, les revenus des carrefours jeunesse-emploi, ce qui leur permet d'exister, en tout cas, à partir de notre ministère, sont reportés année après année. C'est du mur-à-mur, et on quitte le mur-à-mur pour aller davantage s'asseoir sur les besoins de chaque région.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le ministre. Alors, je passerais maintenant à la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré pour les cinq prochaines minutes.

Mme Simard : Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais en profiter pour saluer mes collègues ici présents, ainsi que le personnel politique, et également les jeunes, les représentants du CJE que nous n'avons pas, malheureusement, l'opportunité de voir mais qui sont avec nous ici présents aujourd'hui.

Comme l'a souligné tout à l'heure le ministre, c'est ma toute première expérience d'interpellation également aujourd'hui, et je suis particulièrement heureuse de le faire pour discuter des services à la jeunesse québécoise et plus particulièrement des services en employabilité et au retour sur le marché du travail, d'autant que j'ai eu le privilège et que j'ai toujours ce privilège d'ailleurs d'être l'adjointe parlementaire du premier ministre à la jeunesse, un dossier sur lequel je travaille en collaboration à l'occasion, et, espérons-le, dans une continuité, avec notre collègue le député de Saint-Jean. Alors, vous savez comme moi — vous allez être sans doute plusieurs à être en accord — que rares parmi nous sont ceux qui ont eu un parcours sans embûche, donc un parcours en ligne droite. Et, très souvent, nos décisions nous font faire des détours dans la vie, des détours qu'on aimerait souvent ne pas faire. Les jeunes aidés par les organismes en employabilité ont parfois, eux aussi, à prendre de nombreux détours, et l'expertise de ces groupes et des organismes auprès des différentes clientèles, dont les jeunes, est reconnue par le gouvernement.

Puisque l'interpellation d'aujourd'hui porte sur les carrefours jeunesse-emploi, il est important de rappeler ce qu'est un CJE. Mon collègue et ministre a rappelé l'historique de la création des CJE. Alors, ce réseau, en 2014, compte 110 CJE, qu'on nomme carrefours jeunesse-emploi, bien sûr, dont trois sont situés dans ma circonscription, soit à Beaupré, à Baie-Saint-Paul et à La Malbaie. Ils sont regroupés en deux réseaux : le regroupement des carrefours jeunesse-emploi et du Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi.

Sur le site Web du regroupement, la mission d'un CJE est décrite comme suit : «Les carrefours jeunesse-emploi ont comme mandat d'accompagner et de guider les jeunes adultes de 16 à 35 ans dans leurs démarches d'insertion sociale et économique, en aidant à leur cheminement vers l'emploi, vers un retour aux études ou dans le démarrage d'une petite entreprise. Les services et activités visent à l'amélioration des conditions de vie générales des jeunes.» Et c'est en référence sur le site www.rcjeq.org.

Dans le cadre du dialogue social, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale a rencontré, le 22 septembre dernier, les représentants du regroupement des carrefours jeunesse-emploi. Le ministre leur a alors confirmé que la formation et l'intégration des jeunes au marché du travail étaient l'une de nos priorités, et je le réitère aujourd'hui dans cette occasion. Nous croyons que, pour répondre à cette clientèle, l'expertise des CJE peut toujours être utile et encore mieux utilisée qu'elle l'est actuellement. À la demande du ministre, des discussions se sont amorcées entre le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et les regroupements d'organismes en employabilité pour adapter l'offre des services aux jeunes dans chacune des régions selon les besoins des jeunes dans ces régions. Donc, dorénavant, par souci de cohérence et d'efficience, le ministère veut conclure des ententes d'achat de services sur les mêmes bases qu'avec les autres partenaires et appliquera les mêmes exigences quant à l'évaluation de l'atteinte des objectifs.

Je tiens à rappeler que, malgré le contexte budgétaire difficile, le gouvernement a protégé l'enveloppe budgétaire attribuée aux carrefours jeunesse-emploi pour cette année et que, pour l'an prochain, nous souhaitons maintenir ce niveau d'investissement en services directs aux jeunes. Je ne crois pas que ce qui leur a été demandé est de changer leur mission, et ça, c'est ce que le ministre a rappelé tout à l'heure et a rappelé précédemment, également, dans d'autres discussions, M. le Président.

Donc, les CJE peuvent, s'ils le souhaitent, poursuivre leurs activités et initiatives locales avec l'aide financière d'autres partenaires également. Que ce soient des projets d'entrepreneuriat pour contrer le décrochage scolaire, des voyages à l'étranger ou des démarches d'entreprises, ils pourront continuer de le faire avec d'autres partenaires financiers également que le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. La mission du ministère est de participer à la prospérité économique du Québec et au développement social en contribuant à l'équilibre du marché du travail, en soutenant le développement et la pleine utilisation du capital humain, en favorisant la solidarité et l'inclusion sociales, en soutenant la concertation en matière d'action communautaire et bénévole.

Certains CJE sont très actifs dans la recherche de partenaires financiers dans leurs communautés afin de mener à bien leurs initiatives locales. Ce qui est demandé aux CJE et qui fait l'objet de l'interpellation est demandé à tous les partenaires du gouvernement : une meilleure utilisation des fonds publics, une meilleure reddition de comptes. Merci, M. le Président.

• (10 h 40) •

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré. Alors, nous allons passer au deuxième bloc selon la même séquence : député de l'opposition; ministre; et député ministériel. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Je suis heureux d'entendre de la bouche du ministre précédemment qu'il nous confirme qu'il n'y aura aucune fermeture de carrefour jeunesse-emploi au Québec. Donc, c'est ce que j'ai entendu de la part du ministre. Donc, moi, je trouve que c'est déjà une excellente nouvelle. Donc, on va pouvoir s'assurer d'avoir une présence partout au Québec, dans toutes nos régions, dans toutes nos circonscriptions. Ça, c'est une première chose.

J'ai entendu tantôt le ministre parler de normalisation des carrefours jeunesse-emploi. Ça, moi, j'entends ça : «normalisation». Je comprends que le ministre va aussi peut-être dire que c'est un terme qui est peut-être un peu bureaucratique. Je vais lui concéder, effectivement. Mais en même temps ça dit ce que ça dit, là, ça veut dire qu'on va rendre les carrefours jeunesse-emploi normaux, ils vont tous être pareils. Donc, comment on fait pour s'assurer que tous nos jeunes avec différentes problématiques soient aidés?

J'ai entendu le ministre tantôt, quand il nous parlait d'indice d'employabilité. Au fond, il faut savoir que les jeunes qui vont dans les carrefours jeunesse-emploi ont des problématiques différentes, ils ne rentrent pas dans une case ou dans une autre puis ils vont avoir un service au carrefour pour juste un service d'employabilité. Il y a une complexité des cas. Les jeunes apprennent bien des choses, mais ils sont en début de leur processus de vie dans la société et ils ont des problématiques familiales, personnelles, amoureuses, dépendances de drogue, alcool, ou autres, puis tout ça, et d'avoir une personne-contact qui les aide dans tout ça, moi, je pense, c'est ce qui fait la richesse des carrefours, et par la suite ces carrefours-là peuvent aider ces jeunes-là à retourner aux études, terminer leur secondaire V, poursuivre des études, faire de nouvelles études, se trouver un emploi. Quand on entend que le ministère, le ministre ne veut plus qu'on s'occupe des 16-17 ans... Olivier, ici, 16 ans, qui se cherchait un premier emploi d'été, il est venu au carrefour jeunesse-emploi de sa circonscription pour avoir de l'aide dans ses démarches de prospection pour un emploi et finalement il a eu recours aux services du CJE pour comment faire un C.V., une lettre de présentation, une préparation d'entrevue, avec le projet IDEO 16-17. Suite à ses démarches, bien Olivier a pu finalement rejoindre la coopérative jeunesse de travail d'Hochelaga-Maisonneuve pour apprendre à travailler en équipe sur des tâches manuelles, de confection de marionnettes géantes pour le défilé de la Saint-Jean. Suite à ça, ses recherches ont finalement abouti à une proposition d'embauche, pour une période estivale, dans une entreprise de production d'emballages. Et Olivier nous dit que «le CJE est un organisme qui m'a mené à devenir plus confiant et à m'initier au nouveau monde qu'est le travail». Ça, M. le Président, Olivier, c'est un jeune qui n'aurait plus accès au carrefour jeunesse-emploi, dans la grande normalisation, là, des carrefours jeunesse-emploi.

Donc, M. le Président, j'aimerais comprendre de la part du ministre : Qui va s'occuper de ces jeunes-là, les 16-17 ans, les jeunes qui ont besoin d'orientation, les jeunes qui ont recours aux services d'entrepreneuriat, les jeunes qui n'ont pas droit à l'aide sociale parce que leurs parents gagnent trop d'argent? Moi, dans mon comté, dans ma circonscription, j'ai rencontré un jeune qui n'avait pas droit à l'aide sociale parce que ses parents gagnaient trop. Je lui ai demandé : Ils font quoi, dans la vie, tes parents? Il me dit : Ma mère est infirmière auxiliaire puis mon père a une petite entreprise. Donc, parce qu'il a le malheur que ses parents gagnent un peu trop d'argent, il ne peut pas être à l'aide sociale. C'est correct qu'il ne soit pas à l'aide sociale, mais là il va être pénalisé encore plus parce qu'il ne pourra pas aller à son carrefour jeunesse-emploi, qui, eux, ont l'expertise d'aider les jeunes à se trouver un emploi.

Les jeunes itinérants qui sont sans adresse. Est-ce que le ministre sait combien de jeunes au Québec n'ont pas de pièce d'identité? Est-ce qu'il le sait? Il y en a un nombre incroyable, de jeunes et de gens, au Québec, qui n'ont pas de pièce d'identité, n'ont pas de carte d'assurance maladie, n'ont pas de permis de conduire. Comment ces jeunes-là vont pouvoir s'inscrire pour une recherche d'emploi dans un centre local d'emploi?

Donc, c'est pour tous ces jeunes-là, avec le carrefour jeunesse-emploi, leur carrefour jeunesse-emploi, qu'on veut les aider. Donc, j'aimerais savoir de la part du ministre qui va aider tous ces jeunes-là, qui ne pourront plus être aidés par leur carrefour jeunesse-emploi. Et, si leur situation change durant le processus, est-ce qu'il va y avoir une réévaluation de leur indice d'employabilité? Est-ce que le ministre peut répondre à ces questions?

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre, pour les cinq prochaines minutes.

M. Blais : Alors, tout d'abord, encore une fois, merci pour les questions.

Sur le concept de normalisation, je comprends que c'est une expression qui est un peu sous-déterminée. Donc, il faut comprendre, l'expression, je l'ai utilisée dans un sens très précis, c'est que ce que nous voulons faire, ce que nous allons faire, ce n'est pas une aventure, c'est quelque chose que nous connaissons très bien, à vrai dire, c'est une normalisation au sens où c'est des choses que nous connaissons très bien et qui fonctionnent très bien avec l'ensemble de nos partenaires en employabilité. C'est dans ce sens, hein, qu'il fallait comprendre «normalisation». Nous n'allons pas vers une aventure.

D'ici 2017, il y aura plus de 725 000 postes au Québec à pourvoir, dont plus de la moitié seront disponibles pour des jeunes. Il faut s'assurer maintenant que les jeunes puissent bénéficier des services d'emploi et des services d'emploi efficaces. Comme ministre, ma grande préoccupation est qu'un maximum de travailleurs soient sur le marché du travail. Commencer sa vie à l'aide financière de dernier recours accroît fortement le risque d'y rester à long terme. Parmi les jeunes de moins de 21 ans qui bénéficiaient de l'aide financière de dernier recours en mars 2003, 2 606 en bénéficiaient toujours en mars 2014. Parmi les jeunes âgés entre 21 et 24 ans qui bénéficiaient de l'aide financière de dernier recours en mars 2003, 4 984 en bénéficiaient en mars 2014. En mars 2014, parmi les prestataires de moins de 25 ans, 75 % des jeunes qui bénéficiaient de l'aide sociale provenaient d'une famille ayant déjà bénéficié d'un programme d'assistance sociale dans le passé. Cette proportion était de 83 % chez les moins de 20 ans. C'est ça, hein, demander aux carrefours jeunesse de nous donner un coup de main et d'aller davantage vers ces jeunes, qui sont les plus démunis de la société. Pour les jeunes de moins de 25 ans, le taux d'abandon aux mesures et services d'emploi est largement plus élevé, on le sait, que pour les personnes de plus de 25 ans. En juillet 2014, encore quelques chiffres, 50 000 jeunes de moins de 35 ans à l'aide financière de dernier recours n'avaient pas de contraintes à l'emploi qui les empêchait de retourner sur le marché de l'emploi. 13 700 jeunes avaient un indice d'employabilité — je sais que mon collègue aime l'expression — 13 700 jeunes avaient un indice d'employabilité supérieur à 60, c'est-à-dire qu'il y a vraiment une possibilité pour eux d'intégrer rapidement le marché du travail si on s'occupe d'eux, si on les encadre bien. Les autres 36 900 avaient des obstacles plus importants, indices d'employabilité différents qui demandent un effort beaucoup plus important, bien sûr, de la part de nos partenaires et de la part des carrefours jeunesse-emploi, mais je sais qu'ils n'ont pas peur, hein, de faire des efforts. Donc, nous devons apporter une aide à ces jeunes, c'est urgent, afin de les soutenir vers leurs démarches d'emploi.

Comme gouvernement, nous avons agi. Depuis septembre 2014, tous les nouveaux demandeurs d'aide sociale de moins de 25 ans au Québec bénéficient d'une approche d'accueil personnalisée, d'une intensification des actions auprès d'eux et d'une mobilisation au regard de leur intégration vers le marché du travail. Tous ces jeunes pourraient bénéficier de l'expertise des carrefours jeunesse-emploi. Rappelons que c'est fondamental dans notre démarche, que les statistiques, les études montrent que plus un jeune demeure sur l'aide sociale... demeure longtemps, pardon, sur l'aide sociale, moins les chances qu'il retourne sur le marché du travail sont importantes.

Donc, je pense qu'on s'entend tous ici pour dire que, hein, ça mérite un effort supplémentaire de la part du gouvernement d'aller vers ces jeunes, et il y a une possibilité des carrefours jeunesse-emploi, compte tenu de leur expertise, de leur donner un coup de main. Il me semble qu'on s'entend de plus en plus sur un certain nombre de choses. La crainte que j'entends de la part de mon collègue et de la part aussi des carrefours jeunesse-emploi, et j'aimerais essayer de clarifier un petit peu l'enjeu de cette crainte, c'est que... Nous ne demandons pas, nous n'imposerons pas, d'aucune façon, l'exclusivité, hein, des clientèles. Il y aura encore de la place dans les négociations, dans les discussions, si vous préférez, avec les centres régionaux pour examiner quelles sont les clientèles qu'ils veulent regarder, compte tenu de leur expertise, compte tenu des besoins, mais, c'est clair, on va leur demander un effort supplémentaire sur les jeunes qui sont un peu plus éloignés du marché du travail.

Donc, ça m'étonnerait que les carrefours jeunesse ferment et ça m'étonnerait encore davantage qu'ils ferment leurs portes à des jeunes qui sont dans le besoin. Il y aura de la place dans les négociations. On le fait avec nos autres organismes pour des jeunes qui sont sans chèque et avec chèque.

• (10 h 50) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. M. le député d'Argenteuil.

M. St-Denis : Oui. Bonjour, M. le Président. D'abord, permettez-moi de saluer M. le ministre, les collègues, ma collègue ici, au gouvernement, ainsi que mes collègues de l'opposition et de la deuxième opposition, ainsi que les employés de l'aile parlementaire.

Donc, M. le ministre, dans le contexte, je crois important de rappeler la mission et le rôle d'Emploi-Québec avant de parler des relations avec ses partenaires. Emploi-Québec assure les services directs à la population et aux entreprises en matière d'emploi ainsi que les services de solidarité sociale. Sa mission est de contribuer à développer l'emploi et la main-d'oeuvre ainsi qu'à lutter contre le chômage, l'exclusion et la pauvreté dans une perspective de développement économique et social. Un principe de base guide les orientations du ministère : le travail est le meilleur moyen de réduire la pauvreté et d'assurer l'autonomie financière, l'insertion sociale des individus aptes au travail. Son mode de gestion est décentralisé, partenarial et axé sur les résultats.

C'est sur ces fondements et sur ces principes qu'Emploi-Québec, depuis sa création en 1997, agit avec succès et atteint ses objectifs, visant à répondre aux besoins du marché du travail et de ses clientèles. De plus, Emploi-Québec a su ajuster de façon continue son offre de services en réponse aux changements importants de son environnement. Les résultats de ses interventions depuis plus de 15 ans sont là pour en témoigner. Emploi-Québec est décentralisée pour offrir des services de proximité sur l'ensemble du territoire du Québec par les bureaux des centres locaux d'emploi, par exemple. Emploi-Québec compte sur un réseau étendu de partenaires complémentaires dans l'offre de ses services, entre autres les carrefours jeunesse-emploi, ressources externes en développement de l'employabilité, organismes communautaires et établissements d'enseignement. Les partenaires en ressources externes, dont font partie les CJE, jouent un rôle important pour offrir des services de proximité et de qualité à nos clientèles, notamment auprès des jeunes. Pour plusieurs jeunes, la transition entre l'école et le marché du travail est un véritable défi, particulièrement lorsqu'ils ont abandonné leurs études. Trouver un emploi peut devenir une tâche hasardeuse pour un jeune qui n'est pas bien outillé pour intégrer le marché du travail, et les échecs accumulés peuvent décourager ceux qui s'y prennent mal ou ne bénéficient pas d'un soutien adéquat.

Le Québec a besoin de tous les travailleurs, notamment de tous les jeunes, incluant les prestataires de l'aide sociale ou qui risquent de le devenir. Le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale est préoccupé par l'insertion et le maintien en emploi des jeunes qui ne sont ni en école, ni aux études et ni en emploi. L'insertion en emploi de ces personnes constitue un gain, puisque l'emploi est la meilleure façon de lutter contre la pauvreté et l'exclusion, auxquelles elles font face, ainsi que pour l'État, par le biais d'une réduction des dépenses du programme d'aide sociale et une hausse des rentrées fiscales.

Par le placement en ligne, Emploi-Québec contribue notamment à ce que les entreprises dotent les postes vacants qu'elles affichent. Pour un citoyen à la recherche d'un emploi, c'est un processus assez simple. Il n'a qu'à se rendre sur le site placement.emploiquebec.gouv.qc.ca et à sélectionner par différents critères — région, mot clé et programme spécifique — pour voir la liste d'emplois disponibles. On peut dénombrer, en date du 1er octobre 2014, plus de 38 000 postes vacants inscrits sur le site de placement en ligne d'Emploi-Québec dont la plupart des postes affichés demandaient un an, et moins, d'expérience. Et une très grande majorité de ces postes étaient à temps plein.

Il existe un autre site Internet très intéressant pour les jeunes, le site de l'information sur le marché du travail, le IMT. Le site Internet IMT en ligne, appuyé par le site Placement en ligne, permet la diffusion de l'information sur le marché du travail. IMT en ligne donne accès à un ensemble cohérent d'informations faciles à interpréter et permet aux personnes qui cherchent un emploi, qui doivent faire un choix de carrière ou qui désirent améliorer leur situation d'emploi de prendre des décisions éclairées. C'est un service universel, c'est-à-dire un service offert à toute la population et à toutes les entreprises. Concrètement, ce site permet d'obtenir l'information sur plusieurs questions, par exemple quelles sont les perspectives d'emploi par profession ou par secteur d'activité pour les cinq prochaines années? Quel est le salaire généralement payé pour chacune des professions? Quelles formations mènent aux différentes professions, etc.?

Parce que les jeunes répondront à une part importante des besoins du marché du travail québécois de demain et qu'ils traversent une diversité d'expériences déterminantes, en vue de leur bonne intégration au marché du travail, il devient, donc, important que leurs offres de services permettent de répondre aux besoins des jeunes. Merci.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député d'Argenteuil. Alors, nous allons passer au troisième bloc de la séquence : deuxième groupe d'opposition; ministre; et puis député ministériel. M. le député de Groulx, la parole est à vous.

M. Surprenant : M. le Président, je vous remercie. Alors, comme j'ai peu de temps et que je n'aurai pas beaucoup, donc, d'interventions, je salue rapidement mes collègues des deux côtés de la Chambre et également, bien, je salue les gens en haut et qui ont pris un peu de leur temps ce matin pour venir participer à cette occasion. Alors, voilà.

Donc, pour commencer, M. Blais... pardon, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité tantôt a fait état de dispersion, que ça le préoccupait, alors donc, il entend plutôt établir des ententes de service à l'avenir avec des objectifs précis. Alors, ça me rappelle beaucoup des propos, là, du Parti libéral qui vont dans le sens d'une centralisation paramétrique, et je suis inquiet de ça. À la Coalition avenir Québec, on parle plutôt d'amener les sous et les ressources près du milieu et, donc, pour qu'il y ait un processus décisionnel qui soit vraiment local et adapté aux réalités du milieu. Alors, je pense que l'orientation qui est prise actuellement s'éloigne des particularités non pas uniquement régionales, mais bien du milieu spécifique. Et effectivement, donc, la façon que vous allez fonctionner viendra modifier la mission des CJE et privera environ 40 000 jeunes, par année, des services actuels, donc, des CJE.

Donc, au niveau des services qui sont offerts, on parle d'accueil, d'informations, de références, d'incitation au raccrochage scolaire, de l'aide à l'employabilité et à l'intégration en emploi et de développement de l'entrepreneuriat. C'est un élément très important chez nous, à la Coalition avenir Québec. Or, au niveau de quelques statistiques, les NEET, qui sont les ni en emploi ni en formation, en 1997, il y avait un taux de 20 %; on est rendu aujourd'hui à un taux de 14 %. Alors, ça, ça ne s'est pas produit par des miracles, c'est parce qu'il y a eu de l'accompagnement, et les CJE ont joué un rôle déterminant, à mon avis, au cours de cette période-là pour s'assurer que les jeunes finalement reviennent dans la ligne souhaitée. Et donc il y a eu un... accompagnement, dis-je, très bénéfique.

Au niveau des jeunes entrepreneurs, on a un taux, au Québec, de 2 % comparativement à un taux de 1,6 % au Canada et nous en sommes très fiers. Et donc la valorisation de l'entrepreneuriat, c'est très important, il faut le faire le plus tôt possible. Alors, on a une position qui est intéressante au Québec, mais il ne faut pas reculer. On a un problème au niveau de la qualité des emplois, et ça prend des entrepreneurs qui vont créer les entreprises de demain, qui vont assurer des emplois rémunérés plus élevés parce qu'on a perdu au niveau de la qualité des emplois.

Le décrochage scolaire : en 1999, on parlait de 22 %; on parle aujourd'hui de 16 %. Mais c'est très, très, très important, cette donnée-là, parce qu'effectivement l'éducation, c'est prouvé, amène des emplois de qualité, et on en a besoin, de cette offre d'individus, pour des entreprises de l'extérieur, qu'elles soient intéressées à venir investir au Québec, parce qu'il va y avoir de la main-d'oeuvre qualifiée.

Alors, maintenant, au niveau du taux d'assistance sociale, en 1998 on parlait d'un taux de 11,3 %. On parle aujourd'hui de 6,7 %. Bien, ça s'est produit, ça, parce qu'il y a eu intervention à la source. On a amené les gens à ne pas se rendre à l'assistance sociale, mais on est intervenu tout de suite pour aider les gens à se prendre en main puis s'assurer d'un succès futur. Donc, l'idée de modifier le rôle des CJE, là, est vraiment, à mon avis, à reconsidérer. Alors, maintenant, au niveau des retombées financières, il y a une étude d'effectuée par Raymond Chabot Grant Thornton et qui parle qu'il y a des retombées économiques d'entre 72 millions et 288 millions de dollars. Alors donc, c'est important. Il y a un élément donc très positif non seulement au niveau sociologique, mais au niveau économique par les CJE.

Alors donc, j'ai quelques petites questions rapides. Je m'interroge sur le fonctionnement que vous avez pris pour en arriver à décider de couper dans les CJE. Alors, est-ce qu'il y a eu effectivement des consultations avant l'annonce des changements au financement des CJE? J'ai l'impression que c'est fait paramétrique puis après ça on va essayer de consulter un peu, mais c'est avant qu'il faut aller voir les gens puis leur demander quelles sont les réalités du milieu, puis après ça peut-être, s'il y a lieu... des programmes. Mais là on a l'impression que c'est une approche qui est plus... comme on dirait en affaires, qui est «top-down» et non pas «bottom-up». Alors, il faut aller voir les gens sur place puis voir comment, si vous pensez changer des choses... allez voir qu'est-ce qu'ils font, quel est leur impact sur les résultats puis de voir, s'il y a lieu, par après, à faire des changements, et non pas le faire de façon paramétrique, en regardant d'en haut tout ça, là. Alors, il faut aller voir les gens, M. le ministre.

Alors donc, les CJE ont fait des propositions également pour contribuer à l'effort fiscal. Est-ce que vous les avez écoutés? Est-ce que vous...

• (11 heures) •

Le Président (M. Cousineau) : Merci.

M. Surprenant : Bon. Excusez-moi. Pardon.

Le Président (M. Cousineau) : Il faut respecter le temps. Alors, M. le ministre, les cinq prochaines minutes.

M. Blais : Très bien. Je pense qu'au moment où on est rendus, là, dans l'échange je vais essayer d'expliquer un peu comment fonctionnent les contrats, hein, les ententes que l'on va prendre avec les carrefours jeunesse. Ça va vous permettre de voir que la décentralisation demandée est là, mais la reddition de comptes y est aussi. Parce que je connais mon collègue député de Groulx, hein? Je me souviens qu'à l'étude des crédits, lorsqu'il est question de reddition de comptes de mon ministère, il ne me donne aucune chance, il est très exigeant. Et je pense qu'à la fois il faut permettre la décentralisation, donc une gestion décentralisée, mais aussi il faut pouvoir exiger une reddition de comptes des organismes avec qui on fait affaire.

Donc, on l'a mentionné, les carrefours jeunesse ont été créés il y a 20 ans dans un contexte où la clientèle jeune, 16 à 25 ans, était beaucoup plus nombreuse qu'aujourd'hui et le taux de chômage à leur endroit était plus important. En 2003‑2004, et je vais vous demander de retenir ces chiffres, ils sont très importants, là, je pense, notamment pour le député de Groulx, pour sa préoccupation sur la reddition de comptes, donc, en 2003‑2004, le nombre de jeunes desservis par les carrefours jeunesse, pour la subvention, pour la mission de base que nous leur accordons, était de 56 000 jeunes; en 2013‑2014, donc tout récemment, 45 400. Donc, il s'agit d'une baisse, hein, de 19 % des jeunes rencontrés en 10 ans. Il y a un enjeu, vous allez me suivre, de reddition de comptes, savoir est-ce que les priorités sont au bon endroit. La situation de nos jeunes a évolué. Nous constatons une diminution du poids des jeunes dans l'ensemble de la population québécoise, une amélioration de la situation des jeunes sur le marché du travail — le député de Groulx l'a mentionné — la diminution de la présence des jeunes parmi les prestataires de dernier recours — il l'a aussi mentionné — la diminution des jeunes participant aux mesures d'Emploi-Québec en général, compte tenu de la situation de l'emploi.

Le mode de financement, maintenant, par subventions. Emploi-Québec finance les 110 carrefours jeunesse-emploi par le biais d'une subvention dans le cadre de la mesure Services d'aide à l'emploi, autour de 45 millions de dollars en 2014‑2015. Le protocole d'entente de subvention permet aux carrefours jeunesse de fixer leurs cibles et de choisir les jeunes qu'ils desservent. Donc, il y a une forte décentralisation, au point où ils peuvent eux-mêmes décider de leurs cibles et des jeunes qu'ils desservent. Moi, je suis certain, là, que le député de Groulx, lors de la prochaine étude de crédits, me posera des questions sur cette forme particulière de décentralisation, où on laisse les organismes décider de leurs cibles et décider aussi des jeunes que l'on veut rencontrer, sans qu'il n'y ait aucune reddition de comptes, sans que le donneur d'ouvrage ou celui qui subventionne n'ait aucune attente particulière.

Le protocole d'entente de subvention ne correspond plus aux besoins d'Emploi-Québec. Sa reddition de comptes ne permet pas d'évaluer les résultats des carrefours jeunesse ni par participant ni en fonction des clientèles prioritaires d'Emploi-Québec. Encore une fois, avec plus de 300 organismes, nous avons un mécanisme de reddition de comptes qui permet notamment au député de Groulx, à l'étude des crédits, de me poser des questions : Ces organismes-là sont-ils efficaces? Combien de personnes ils ont rencontrées? Combien de personnes ils ont permis d'avoir... de donner un accès au travail, etc.? Dans le cas des carrefours jeunesse, c'est beaucoup plus difficile. La conversion du mode actuel, subvention à la mission, en mode entente de service fera en sorte que les centres locaux d'emploi — les centres locaux d'emploi, non pas le ministère, les centres locaux d'emploi — détermineront, avec les carrefours jeunesse-emploi, dans les régions, les mesures et les services qui devront être offerts aux jeunes pour favoriser leur intégration et leur maintien en emploi. Cette négociation en région permettra de prendre davantage en compte les besoins en emploi des jeunes et des caractéristiques du marché du travail régionales.

Le ministère est présentement en discussion avec les deux grands regroupements de carrefours jeunesse-emploi. Il y a eu une rencontre déjà cette semaine. Les orientations prises concernant le mode de financement des carrefours jeunesse devraient être appliquées au 1er avril 2015 prochain. Les interventions des carrefours jeunesse seront recentrées — j'utilise le mot «recentrées», je vais même le répéter — recentrées. Nous ne demandons pas l'exclusion, hein, mais d'aller davantage vers ces clientèles. Le mode subvention, il est vrai, sera remplacé par le mode entente de service. Encore une fois, parce que je crains les questions de mon collègue le député de Groulx, lors des prochains crédits budgétaires, lorsqu'il me posera des questions sur le rendement des organismes avec qui nous travaillons... la clientèle desservie sera davantage les 18-35 ans.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, nous allons passer maintenant à un député ministériel. Oui, on est toujours sur...

Mme Simard : Merci.

Le Président (M. Cousineau) : Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Mme Simard : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, pour notre gouvernement, l'emploi est la priorité numéro un. Et, vous le savez, on l'a répété et on le répétera dans le futur également, pour créer de nouveaux emplois et pour répondre aux besoins du marché du travail, il est important d'assurer une bonne adéquation entre la formation offerte et les emplois disponibles. Nous ne prévoyons pas de pénurie généralisée de main-d'oeuvre d'ici les 10 prochaines années. Toutefois, la rareté de main-d'oeuvre se fera sentir dans certaines professions, dans certains secteurs et dans certaines régions, et la mienne ne fera pas exception. Ce sera notamment le cas des professions de la santé et des régions où le taux de chômage est faible.

J'aimerais d'ailleurs partager quelques statistiques avec vous, puisque j'apprécie particulièrement les statistiques. Alors, selon les prévisions d'Emploi-Québec, près de 725 000 emplois seront disponibles au Québec d'ici 2017. D'ici 2021, le Québec devrait se rapprocher du plein-emploi, avec un taux de chômage de 5,3 %, taux le plus bas enregistré depuis 1967 et qui s'approche de ce que les économistes appellent taux de chômage de plein-emploi. Les secteurs qui connaîtront la croissance la plus importante sont les secteurs professionnels et les services de santé et de l'assistance sociale. La croissance se concentrera d'ailleurs du côté du secteur des services, qui accaparera 95 % des 264 000 emplois qui seront créés. Près de 40 % des emplois qui seront créés d'ici les prochaines années sont des emplois de niveau technique qui requièrent, pour la plupart, une formation professionnelle au secondaire ou une formation technique au collégial. Les emplois demandant une formation universitaire compteront, pour leur part, eux aussi, près de 40 % des nouveaux emplois créés.

Les perspectives d'emploi seront très favorables pour les jeunes finissants, les personnes au chômage, les travailleurs et travailleuses plus âgés désirant demeurer actifs et les personnes immigrantes d'ici les cinq prochaines années. Sur cet horizon de cinq ans, l'emploi s'accroîtra en moyenne de 0,9 % par année. Il devrait être en hausse dans la grande majorité des 33 industries. La croissance se concentrera du côté des services, un domaine qui apportera 163 400 nouveaux emplois au cours de la même période. Ce domaine générera 93 % des emplois qui seront créés. Dans le secteur des services, les industries où les plus fortes créations d'emplois sont prévues sont les soins de santé et assistance sociale, les services professionnels, scientifiques et techniques et le commerce de détail. L'évolution de l'emploi connaîtra tout de même un sort variable d'une industrie à l'autre, tant dans le secteur des services que dans celui de la production de biens. Dans ce dernier secteur, où est prévue la création de 11 400 emplois, celle-ci profitera surtout à la construction, à l'industrie minière et à la fabrication de biens durables.

• (11 h 10) •

Plus de la moitié des emplois à pourvoir au cours de la période reviendront à des jeunes de moins de 25 ans qui ne sont pas encore sur le marché du travail. Les personnes nouvellement immigrantes en occuperont 16 %, et les actuels chômeurs et chômeuses, 10 %. La hausse du taux d'activité des différents groupes d'âge contribuera à hauteur de 19 %, dont 7 % pour les personnes de 65 ans et plus.

Selon les estimations des économistes des directions générales d'Emploi-Québec, l'emploi sera en croissance dans toutes les régions du Québec. Grâce à la hausse prévue de l'emploi, le taux de chômage diminuera dans toutes les régions. Dans un contexte de rareté grandissante de main-d'oeuvre découlant du ralentissement démographique, Emploi-Québec inscrit davantage ses interventions dans une stratégie cohérente en matière d'adéquation, formation, compétences, emploi. Bien que la responsabilité première revienne aux entreprises et aux travailleurs, Emploi-Québec est constamment à pied d'oeuvre pour faciliter le fonctionnement du marché du travail et favoriser l'adéquation entre les aspirations de la main-d'oeuvre, incluant les jeunes, et les besoins des employeurs.

L'information sur le marché du travail de qualité, à jour et diffusée dans un langage accessible, est un levier majeur qui permet à Emploi-Québec de faire connaître les besoins actuels et futurs en main-d'oeuvre qualifiée et les postes à pourvoir tant au plan local, régional que national. Cela aide notamment les différents acteurs du marché du travail à ajuster leurs démarches, à les adapter selon leurs besoins actuels et futurs du marché du travail. Par exemple, les perspectives d'emploi par profession pour un horizon de cinq ans produites par... Emploi-Québec, pardon, fournissent, pour l'ensemble du Québec et ses 17 régions administratives, des données sur 400 emplois. Elles incluent un diagnostic sur la probabilité — restreinte, acceptable ou favorable — de trouver un emploi dans ces domaines. Elle forme un intrant important à plusieurs initiatives gouvernementales.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré. Je cède maintenant la parole, pour le bloc n° 4, à M. le député de Saint-Jean. M. le député.

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Sur le bloc, principalement, sur la question de la reddition de comptes et le financement à la mission, de ce que j'ai entendu jusqu'à maintenant, M. le Président, de la part du ministre, c'est que le financement à la mission des carrefours jeunesse-emploi sera... il n'y aura plus de financement à la mission, ça sera en fonction d'ententes. Donc, en fonction des jeunes, du nombre de jeunes et de la particularité de ces jeunes-là, chaque carrefour jeunesse-emploi recevra un montant d'argent pour aider ces jeunes-là, en particulier. De ce que j'ai compris du ministre, c'est ça, donc il n'y a plus de financement à la mission.

En même temps, le ministre nous a dit tantôt qu'il ne croit pas... et qu'il espère qu'aucun carrefour jeunesse-emploi ne fermera ses portes, ça, c'est une chose, mais qu'aucun carrefour jeunesse-emploi ne fermera la porte à des jeunes qui ne s'inscrivent pas dans les critères mentionnés, là, à l'heure actuelle. Donc, que des jeunes de moins de 18 ans, que des jeunes qui ne sont pas à l'aide sociale, des jeunes qui ne sont pas à l'assurance-emploi, ces jeunes-là pourraient continuer à avoir des services de leurs carrefours jeunesse-emploi. Donc, comment le ministre peut en même temps dire : Il n'y a plus de financement à la mission, il y a un financement, si on peut dire, personnalisé en fonction du jeune, mais en même temps nous dire que les carrefours jeunesse-emploi vont pouvoir continuer à aider d'autres jeunes? Ils vont prendre l'argent où? Ils vont prendre l'argent où? Ça, c'est la première chose.

Pour la question de la reddition de comptes, moi, j'aimerais ça que le ministre m'explique le fait que son ministère ainsi que les carrefours jeunesse-emploi ont investi pratiquement 500 000 $ pour la mise en place d'un logiciel, d'un outil de reddition de comptes et de gestion des dossiers, à l'intérieur de leur organisation, 500 000 $ de l'argent des contribuables, et qu'on dit que maintenant, avec la réforme proposée, ça, on met ça de côté et là on va prendre l'outil qui est utilisé déjà dans les centres locaux d'emploi. Pourtant, c'était la première année que c'était mis en place, et, sur 96 carrefours jeunesse-emploi, 90 ont soumis avec une... 88 % de conformité des dossiers. Donc, c'est la première fois que ça se fait. Donc, il y a déjà un effort pour améliorer la reddition de comptes. C'est la première année que c'était fait avec les gens du ministère, de concertation, et 88 % de conformité pour la première année, c'est quand même très bien. Donc, il y a un effort qui est fait pour la reddition de comptes aussi. Le ministre a comme laissé sous-entendre qu'il fallait avoir plus de reddition de comptes. Moi, je suis certain que les gens des carrefours jeunesse-emploi, si c'est juste ça que ça prend pour que le ministre dise : Bon, finalement, ce n'est peut-être pas si pire, on va peut-être les garder, la mission des carrefours jeunesse-emploi... ils sont prêts à en faire plus, de paperasse, puis remplir plus de rapports si c'est ça que le ministre veut. Mais en même temps j'entends, dans le projet de loi n° 15, en commission parlementaire, de la part de son collègue président du Conseil du trésor : Il faut avoir un gel d'embauche, il faut s'assurer qu'il y ait moins de paperasse, il faut réduire la bureaucratie. Mais en même temps le ministre nous dit : Il faut en faire plus, plus de reddition de comptes. Bon, si c'est ça que ça prend, moi, je pense que les gens des carrefours jeunesse-emploi sont prêts à le faire.

Au fond, M. le Président, ce que je comprends, avec ce que je viens de dire, la reddition de comptes, le fait qu'il n'y ait plus de financement à la mission mais que ça va être un financement... appelons ça personnalisé, en fonction du jeune, mais on ne sait pas encore... Si, le jeune, son parcours change durant son aide avec le carrefour jeunesse-emploi, est-ce que son indice d'employabilité va changer aussi? Ça, on ne le sait pas encore. Ce jeune-là va arriver, puis on va lui donner un CP-12 puis on va lui donner un indice d'employabilité. C'est ce que j'ai compris de tout ça. Là, c'est le bout le plus technique, là, de l'interpellation, là.

Mais, au fond, si je résume ça, là, chaque jeune va avoir une cote puis un chiffre, puis ça, ça va décrire ce jeune-là. Puis ce jeune-là, là, il va se sentir valorisé, tellement valorisé après ça, là, pour retourner sur le marché du travail ou retourner en processus, là, de cheminement scolaire, là. Moi, M. le Président, là, pour être sérieux, là, je ne pense pas que c'est comme ça qu'on va valoriser nos jeunes puis je ne pense pas que c'est comme ça qu'on va pouvoir aider nos jeunes, en leur donnant une cote puis un chiffre. Ça, là, c'est : Untel, là, David, là, bien, c'est : Toi, c'est ça, ta cote, puis tu as un indice d'employabilité de tant, puis on t'aide ou on ne t'aide pas. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre, cinq prochaines minutes.

M. Blais : Oui. Je suis d'accord avec le député de Groulx, hein, représenter un jeune comme un indice d'employabilité, ce serait bien triste, hein? D'une certaine façon, ce que l'on parlait tout à l'heure en termes d'indice d'employabilité, c'est de rappeler la profondeur de l'intervention qu'on recherche, alors, et on ne dit pas aux jeunes : Vous, vous avez un indice de ceci ou de cela, mais la profondeur de l'intervention. Et quiconque ici sait très bien qu'il y a des jeunes qui sont beaucoup plus éloignés du marché du travail, et les carrefours jeunesse le savent très bien, d'ailleurs, encore mieux que vous et moi, M. le député, savent très bien qu'il y a des jeunes qui sont plus éloignés du marché du travail, l'intervention sera plus longue, plus difficile, et ils savent comment intervenir, etc. Donc, on ne présente jamais aux jeunes, hein, les indices d'employabilité, ce n'est d'aucune utilité. Et, pour nous, quand on transige avec des organismes d'employabilité, vous comprenez que c'est assez important de savoir quelle est la nature de l'intervention et la profondeur de l'intervention qu'ils doivent faire, pour bien les financer.

Maintenant, sur la question du financement, il faut bien comprendre que les carrefours jeunesse-emploi ne sont pas des créatures directes ou une extension du gouvernement du Québec, ils ont une autonomie relative. Ils ont été créés suite à une impulsion puis une volonté gouvernementales, mais ils bénéficient d'une grande, disons, autonomie. Alors, grossièrement, pour comprendre le montage financier des carrefours jeunesse, en moyenne, à peu près 70 %, dans ce qu'ils reçoivent, vient d'Emploi-Québec. C'est beaucoup d'argent. C'est pour ça, M. le député, qu'ils sont un peu nerveux en ce moment, hein, et qu'ils s'inquiètent de leur avenir. Donc, 70 % à peu près, ça vient d'Emploi-Québec, en moyenne, mais ils reçoivent aussi des sommes du Secrétariat à la jeunesse et d'autres sommes parfois des municipalités, parfois d'organismes publics, parapublics, même privés, pour des missions relatives à la jeunesse. Moi, ce qui m'intéresse, bien sûr à titre de ministre de l'Emploi et de la Solidarité, et encore une fois parce que je crains toujours les questions difficiles du député de Groulx, là, lors de l'étude des crédits budgétaires, ce qui m'intéresse, bien sûr, c'est la gestion des 70 %, là, et, disons, la direction que doit prendre ce financement. Donc, si nous allons vers un financement qui priorise, et je pense que le mot «se recentrer» n'est pas le bon, priorise les clientèles que nous désirons davantage, qui sont plus éloignées du marché du travail, on sait très bien, et dans toutes les négociations que nous faisons avec nos organismes d'aide à l'employabilité, qu'il y a toujours une ouverture pour des rencontres avec d'autres jeunes. Et nous les finançons aujourd'hui, sauf que nous allons inverser un peu, hein, les priorités en faveur de ces clientèles.

• (11 h 20) •

Mais les carrefours n'auront pas à fermer leurs portes à quiconque. En tout cas, s'ils le font, ce ne sera pas parce que je leur demande, aucunement. Donc, ce sera leur choix, à la limite, une façon de répondre, disons, ou de contester, mais certainement pas une demande qui vient du ministre.

Donc, un financement diversifié, nous en contrôlons une partie, et il y a un enjeu de reddition de comptes. C'était le deuxième élément, hein, de votre présentation, hein : Est-ce que vous voulez augmenter la reddition de comptes? À vrai dire, c'est plutôt la modifier que de l'augmenter, hein? Vous avez raison, il y a des outils budgétaires qui ont été... des outils, pardon, informatiques qui ont été développés avec l'appui des carrefours jeunesse-emploi. Une partie, hein, du contenu de ces outils-là pourra être encore utilisée notamment pour l'administration, disons, budgétaire des organismes. L'enjeu de la reddition que nous recherchons davantage, et, encore une fois, nous voulons les normaliser par rapport aux autres organismes que nous finançons déjà, c'est davantage de connaître quelles sont leurs clientèles, qu'est-ce qu'ils font avec ces clientèles-là, quel est le chemin que suivent ces clientèles-là vers l'emploi ou non, les difficultés qu'ils rencontrent. Là-dessus, il nous manque beaucoup d'informations précises pour mieux les financer et davantage pour mieux financer notamment des régions qui sont prises avec des plus grandes clientèles éloignées du marché du travail.

Donc, c'est ça, l'essentiel : pas nécessairement plus de reddition, mais une meilleure reddition pour les financer davantage selon leurs activités réelles. Et, encore une fois, j'insiste là-dessus, il y a eu une certaine dispersion que je comprends très bien, une certaine dispersion dans l'activité des carrefours jeunesse-emploi. Ce sera leur choix de maintenir l'éventail de leurs activités, mais nous, nous voulons les recentrer sur les travailleurs un peu plus éloignés du marché du travail.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je passerais la parole maintenant au député d'Argenteuil pour les cinq prochaines minutes. M. le député.

M. St-Denis : Alors, merci, M. le Président. Merci de me donner l'opportunité de m'adresser à vous une deuxième fois, là, dans cet exercice d'interpellation, car cette fois-ci je vais vous faire part de mes préoccupations au niveau des finances publiques.

L'objectif de notre gouvernement est d'atteindre l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Le budget déposé au printemps dernier par le ministre des Finances est un budget sérieux. C'est budget sérieux parce qu'il adresse une situation sérieuse, celle de l'état des finances publiques dont nous avons hérité. C'est budget sérieux parce qu'il pose dès maintenant des gestes structurants pour la relance de l'économie et le redressement des finances publiques. C'est un budget sérieux parce qu'il est accompagné de budgets des dépenses, démontrant ainsi notre rigueur et notre transparence dans la saine gestion des finances publiques.

Notre budget s'appuie sur deux grands piliers : la relance de l'économie et le redressement des finances publiques. La relance de l'économie s'appuie sur cinq grands axes : la relance de l'investissement privé et le soutien aux PME, la stratégie maritime, la relance du Plan Nord, l'exploitation responsable de nos richesses naturelles et le maintien et le développement de nos infrastructures. Le redressement des finances publiques, lui, s'appuie sur la réduction des dépenses de l'État par des efforts demandés aux ministères et aux organismes publics : par un gel global des effectifs des organismes publics et parapublics, par des efforts au Revenu, par un effort demandé aux sociétés d'État, la lutte contre l'évasion fiscale, la diminution de certaines dépenses fiscales.

Nous voulons que le Québec crée plus de richesse et soutienne davantage d'emplois. Nous devons mettre fin au déséquilibre structurel des finances publiques, qui alourdit notre dette et limite notre liberté d'action. Nous devons nous donner une marge de manoeuvre pour développer les services en santé, en éducation, aider les plus vulnérables, réduire la dette et diminuer le fardeau fiscal. Ce budget est un premier pas pour bâtir une société qui conjugue le développement économique, la justice sociale et l'équité intergénérationnelle.

L'état des finances publiques oblige l'État à se réinventer et à remettre en question certaines façons de faire pas uniquement dans une perspective à court terme, mais également avec une vision porteuse pour les générations futures. Ainsi, la Commission de révision permanente des programmes permettra un repositionnement et la mise en place de processus d'évaluation continue visant à recentrer l'action de l'État dans des programmes prioritaires et là où les besoins sont les plus pressants. Certains programmes seront jugés pertinents mais insuffisamment pourvus en ressources. D'autres, au contraire, seront revus en profondeur. Tous les programmes seront sujets à être évalués. Le gouvernement souhaite que tous les ministères et organismes de même que les employés de l'État participent à cet effort national, qui est essentiel à la prospérité du Québec. Le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale est appelé, comme tous les autres ministères, à faire sa part dans le retour de l'équilibre budgétaire.

Une enveloppe budgétaire de 4,5 milliards pour l'année 2014‑2015 démontre l'importance accordée par le gouvernement à l'emploi et à la solidarité sociale. La majorité des efforts du ministère ont été faits au niveau administratif, question de protéger les personnes les plus vulnérables.

La protection des prestations d'aide financière de dernier recours et des services pour les personnes les plus vulnérables de notre société faisait partie des principales préoccupations lors de la présentation du dernier budget. C'est pour cette raison que nous nous sommes assurés de ne pas couper les prestations à l'aide financière de dernier recours. Il est essentiel pour le gouvernement de maintenir un filet de sécurité sociale adéquat toujours en s'assurant de tout mettre en oeuvre pour favoriser le retour ou l'accès au marché du travail à celles et ceux qui ne sont pas en emploi, la gestion rigoureuse des programmes d'aide financière administrés par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, afin de s'assurer que les bons montants soient versés aux bonnes personnes, faisant également partie des préoccupations de notre gouvernement.

Lorsque l'on parle de retourner toutes les pierres, ce n'est pas seulement pour regarder s'il y a des économies, mais aussi pour évaluer l'efficacité des investissements et l'évolution des besoins. On demande donc à tous les organismes... des ententes de service avec le gouvernement d'expliquer avec précision comment est dépensé l'argent qui leur est versé, aux CJE. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Merci beaucoup, M. le Président. On a vu, ce matin, les chiffres de l'emploi sont sortis. Depuis l'arrivée au gouvernement par le Parti libéral, 82 000 emplois à temps plein ont été perdus. C'est catastrophique, c'est énorme. C'est vraiment l'effet libéral dans toute sa beauté de voir autant de gens perdre leurs emplois à temps plein.

La vision du gouvernement actuel, le député l'a mentionné, c'est le Plan Nord et la stratégie maritime. Le problème, c'est que le prix des métaux est en train de baisser, est en chute libre, et, avec ces deux projets-là, puis si on ajoute l'accord de commerce avec l'Union européenne, il n'y aura pas vraiment d'emplois qui seront créés rapidement, du moins dans les prochains mois, les prochaines années, liés à ces stratégies-là.

Donc, qui de mieux que les carrefours jeunesse-emploi pour aider nos jeunes à se trouver un emploi dans des moments où l'économie, où la création d'emplois va mal? On ne demandera pas : À qui la faute, là? Ça, ça sera un autre débat. On fera une autre interpellation, s'il le faut, sur cette question-là. Mais qui de mieux pour aider nos jeunes à se trouver un emploi que les carrefours jeunesse-emploi, d'autant plus que les retombées fiscales des carrefours jeunesse-emploi, c'est 25 millions de dollars de bénéfices? Donc, ça coûte moins cher à l'État d'avoir les carrefours jeunesse-emploi que de ne pas les avoir. Le gouvernement, là, gagne 25 millions de dollars en retombées fiscales parce qu'il y a les carrefours jeunesse-emploi qui aident nos jeunes, qui aident nos jeunes qui ont un emploi précaire à avoir un emploi de meilleure qualité, d'aider nos jeunes qui n'ont peut-être pas des diplômes à avoir des meilleurs diplômes.

Je vais vous donner un exemple, M. le Président. Une autre jeune de ma circonscription que j'ai rencontrée, une jeune qui avait une profession, là, ce qu'on appelle, dans le jargon populaire, un emploi alimentaire, là, donc une job juste pour survivre financièrement, elle ne se sentait pas valorisée là-dedans. Elle est allée au carrefour jeunesse-emploi. Ils l'ont aidée avec le service d'orientation. Elle s'est développé des aptitudes et un intérêt pour travailler dans une boutique de fleuriste. Elle a commencé à travailler là. Elle se sentait valorisée, tellement que, là, elle a retourné au carrefour jeunesse-emploi pour suivre des études pour aller plus loin dans la botanique et pouvoir davantage être spécialiste dans son domaine. Donc, c'est des revenus supplémentaires à l'État, parce qu'elle va payer plus d'impôt parce qu'elle va avoir un plus gros salaire. Ça, c'est des retombées économiques pour le gouvernement.

• (11 h 30) •

Moi, je me souviens d'un ancien premier ministre qui avait dit, à la blague peut-être, mais l'image était restée forte, à tous ces étudiants qui manifestaient dans les rues : Qu'ils aillent se trouver une job dans le Nord. Il ne faudrait pas que ces jeunes-là, qui ont de la difficulté à se trouver un emploi, quand on voit 82 000 emplois à temps plein perdus au Québec depuis avril, donc depuis l'arrivée au gouvernement du Parti libéral... que c'est encore le message qu'on lance à nos jeunes, que le seul avenir du Québec passe par aller se trouver une job dans le Nord. Parce que les carrefours jeunesse-emploi ont aussi une mission de garder nos jeunes en région, d'attirer des jeunes dans nos régions, de dynamiser nos régions, de faire en sorte qu'il y ait des milieux de vie stimulants qui soient créés partout au Québec, puis ça, c'est grâce à la mission, à la couleur et à la saveur des carrefours jeunesse-emploi.

M. le Président, on parlait d'entrepreneuriat tantôt. Qui va aider Kevin Genest... de 17 ans, qui fréquente le CJE depuis qu'il a 16 ans, le CJE de Montmorency, qui l'a aidé à se trouver un premier emploi grâce au programme pour les adolescents, puis qui a réussi à conserver son emploi. Puis maintenant il veut se lancer sa propre compagnie d'audiovisuel, avec ses services en entrepreneuriat qu'il a eus du carrefour jeunesse-emploi. Ça, c'est un futur entrepreneur, c'est un futur créateur de richesse pour le Québec, c'est un futur payeur de taxes et d'impôt, puis il a déjà commencé s'il travaille, hein, du moins s'il a un assez gros revenu, mais qui va contribuer, qui va contribuer à s'assurer qu'au Québec on puisse répartir notre richesse par nos impôts. Puis bientôt, je lui souhaite, il va pouvoir créer des emplois. Bien, c'est des Kevin comme ça qu'on a besoin d'aider au Québec. Puis, malheureusement, avec la réforme que le ministre est en train de mettre en place, il met ça de côté.

Donc, j'aimerais savoir de la part du ministre, et je reviens, comment il peut s'assurer que les carrefours jeunesse-emploi vont pouvoir aider tous les jeunes, sans exception, mais avec un financement uniquement basé sur les jeunes qui sont à l'aide sociale et à l'assurance-emploi.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Jean. M. le ministre, pour les cinq prochaines minutes.

M. Blais : Pour répondre peut-être un peu brutalement : un peu moins de voyages en Afrique et peut-être un peu plus, hein, de travail avec les jeunes, comme vous le demandez vous-même.

Donc, selon nos chiffres, donc, en 2003-2004, les carrefours jeunesse-emploi ont rencontré 56 000 jeunes par année. C'est beaucoup. Aujourd'hui, ils en rencontrent 45 000, donc 10 000 de moins. Les frais administratifs déclarés par les carrefours jeunesse-emploi... je sais que ça va intéresser le député de Groulx, donc, les frais administratifs des carrefours jeunesse-emploi seraient de 26 % aujourd'hui, hein, sur la base du financement que nous leur accordons, et ces frais excluent les salaires. Alors, si bien sûr on intègre les salaires, c'est des frais administratifs qui sont autour de 40 %, donc c'est important. Ça s'explique très bien. Si vous diminuez, hein, le nombre de jeunes que vous rencontrez, automatiquement vos frais administratifs, relativement du moins, augmentent. Donc, c'est un enjeu pour nous aussi de les recentrer vers la mission pour diminuer leurs frais administratifs et pour qu'ils rencontrent plus de jeunes — là-dessus, je suis tout à fait d'accord avec mon collègue — rencontrer plus de jeunes, revenir à des chiffres qui ressemblent à ceux qui existaient il y a à peine 10 ans.

Sur la question maintenant de la création d'emplois, on a eu une mauvaise nouvelle ce matin au niveau de la création d'emplois. Et, depuis que je suis en fonction, je découvre un paradoxe qui est assez difficile à comprendre : partout où je vais, quand je rencontre des entreprises, on me dit : Je n'ai pas de main-d'oeuvre, je ne réussis pas à recruter. Si je ne recrute pas, je ne réussirai pas à me développer comme je le veux. En ce moment, aujourd'hui même, il y a 38 000 emplois affichés sur le seul site d'Emploi-Québec, et c'est une partie des emplois disponibles au Québec. Donc, l'enjeu de la création d'emplois, que je partage entièrement, là, avec mon collègue, c'est de savoir aussi est-ce que l'adéquation entre la formation et l'emploi aujourd'hui au Québec est celle dont nous avons besoin.

Et je vais lui donner un exemple extrêmement patent. J'étais à Shawinigan en début de semaine. Tout le monde ici reconnaît que la région de Shawinigan vit une situation difficile au niveau de l'emploi. Des petits employeurs, des toutes petites PME, se sont regroupés, neuf, hein, pour créer une formation... c'est-à-dire, pour participer à une formation de machiniste. Alors, tous ces employeurs-là étaient en mesure de se développer davantage, la demande pour leurs produits était là, mais ils ne pouvaient pas créer d'emplois tout simplement parce que la main-d'oeuvre de machinistes n'y était pas. Ils ont créé 32 emplois. Comment? Par la formation. Ils ont créé des emplois non pas en allant chercher des nouveaux contrats — les contrats étaient là — ils ne pouvaient pas les créer parce que les travailleurs n'y étaient pas. Donc, par la formation, par l'accompagnement de 32 jeunes, nous avons créé des emplois à Shawinigan.

Donc, il y a un enjeu très important, dans les prochaines années, pour le développement du Québec, de l'adéquation formation-emploi, et c'est une de nos priorités. Et, justement parce que c'est une de nos priorités, nous demandons aux carrefours jeunesse, hein, de se concentrer davantage vers des jeunes qui sont à la recherche d'emploi. Il y a des emplois disponibles. Ce matin, 38 000 emplois disponibles sur le site d'Emploi-Québec, c'est une partie des emplois disponibles pour le Québec. Il y a des emplois disponibles, mais ces jeunes-là ne sont pas préparés, etc., suffisamment pour y accéder. Donc, il y a une raison supplémentaire pour dire : Concentrons-nous sur ces jeunes-là, un peu moins de séjours en Afrique. Mais, encore une fois, hein, si les carrefours jeunesse obtiennent du financement pour financer ces activités-là, je n'ai absolument aucun problème. Mais, du point de vue de notre mission à Emploi-Québec, nous ne voulons plus financer ce type d'activité parce que nous pensons que les carrefours jeunesse peuvent faire plus. Ils l'ont fait par le passé et ils ont une expertise pour le faire.

Un mot sur la question de la création de la richesse par les carrefours jeunesse-emploi, hein? J'ai vu aussi cette étude, si je me souviens bien, de Grant Thornton. Je me méfie des comptables comme je me méfie des économistes, mais parfois j'ai plus confiance aux économistes qu'aux comptables, hein? Donc, ici les chiffres ressemblent un peu à la multiplication des pains, tout simplement, parce que, quand on fait ce type de recherche, et la recherche l'indique très bien, on n'a contrôlé aucune variable. C'est-à-dire que tout ce que l'on fait, c'est qu'on suit le parcours de jeunes, on dit : Tiens, ils occupent un emploi maintenant, ils ont un salaire, donc c'est lié à l'intervention des carrefours jeunesse-emploi. Parfois, c'est lié à l'intervention, parfois non. C'est difficile parce qu'il y avait un enjeu d'endogénéité, les variables n'étaient pas contrôlées dans cette étude.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre. Alors, je passerais la parole maintenant à la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré pour les cinq prochaines minutes.

Mme Simard : Merci beaucoup. Alors, toutes les mesures d'Emploi-Québec visent à aplanir les déséquilibres du marché du travail et permettre notamment de doter les clients d'Emploi-Québec d'outils pour faciliter soit leur insertion, leur retour ou leur maintien en emploi.

Par le biais de la Mesure de formation de la main-d'oeuvre, je souhaite rappeler qu'Emploi-Québec soutient les personnes dans l'acquisition de formations répondant aux besoins des entreprises, notamment lorsque leur manque de compétence constitue la raison pour laquelle elles sont au chômage. Emploi-Québec encourage particulièrement les formations professionnelles et techniques comportant des stages de formation en entreprise, car cela est propice à l'acquisition de compétences pratiques adaptées à l'emploi. Par ces services aux entreprises, Emploi-Québec offre une aide en matière de soutien à la gestion des ressources humaines en particulier aux petites entreprises. Emploi-Québec exerce une veille régulière et publie des perspectives d'emploi en se basant sur un certain nombre de paramètres, dont le scénario de prévision de croissance économique du Québec produit par la Conference Board du Canada.

Au cours des prochaines années, il y aura d'importantes possibilités d'emploi au Québec pour les personnes qui veulent intégrer le marché de l'emploi. Pour accélérer la croissance économique et la création d'emplois, le gouvernement agit sur plusieurs fronts, comme l'a souligné mon collègue député d'Argenteuil précédemment. Ils constituent... c'est-à-dire, ils consistent à relancer le Plan Nord et l'industrie forestière, à développer, au Québec, un réseau de fournisseurs et d'équipementiers de calibre mondial, à déployer la première stratégie maritime de l'histoire du Québec, une stratégie qui m'interpelle particulièrement et qui interpelle également les citoyens de ma circonscription. Ils consistent aussi à relancer les exportations notamment auprès des PME, à relancer l'innovation et la création de nouvelles entreprises, à procurer aux jeunes et aux travailleurs les qualifications requises pour le marché du travail.

Le ministère travaille à améliorer l'employabilité des personnes en les soutenant dans leurs démarches d'intégration en emploi. L'emploi demeure le moyen privilégié pour assurer la sécurité économique et l'inclusion sociale de tous. Notre première préoccupation, c'est qu'un maximum de Québécois soient sur le marché du travail, et, pour y arriver, la notion d'adéquation formation-emploi est centrale pour que les individus aient les compétences et que les employeurs puissent avoir la main-d'oeuvre qualifiée dont ils ont besoin.

• (11 h 40) •

Le gouvernement s'est engagé à analyser comment le Québec peut s'inspirer du modèle allemand des écoles de métiers appelé système dual afin d'intégrer davantage de stages en entreprise dans les programmes de formation professionnelle et technique. Pour notre gouvernement, la formation est importante dans un contexte où il pourrait y avoir des situations de rareté de main-d'oeuvre.

D'ici 2017, ce seront près de 725 000 postes qui seront à pourvoir. Le défi des prochaines années ne sera donc pas les possibilités d'emploi, mais de s'assurer que les gens qui se cherchent un emploi aient la formation nécessaire pour les emplois disponibles. Nous nous assurerons que la formation réponde aux besoins du marché du travail, c'est pourquoi nous travaillerons à l'adéquation formation et emploi. Nous travaillons à bien comprendre les besoins du marché, à créer un lien fort entre les entreprises et la formation professionnelle et technique, à permettre aux jeunes et aux adultes en formation d'avoir accès à la technologie de pointe et qu'ils puissent acquérir des expériences en emploi.

Le Québec enregistre un retard en matière de productivité et de formation liée à l'emploi, ce qui constitue un frein à la prospérité de son économie. À cet égard, en 2012, la Commission des partenaires du marché du travail, en concertation avec Emploi-Québec, a mis de l'avant Investissement-compétences. Cette initiative vise à accentuer la mobilisation de tous les acteurs du marché du travail pour établir une stratégie cohérente d'investissement et établir une véritable culture de la formation continue et du développement des compétences dans les entreprises. Pour soutenir, par des moyens concrets, l'engagement des entreprises québécoises dans le développement des compétences de leur main-d'oeuvre, Investissement-compétences offre un dispositif d'engagement pour les entreprises, une gamme intégrée de services-conseils et de soutiens financiers regroupant les programmes de subvention du Fonds de développement et de reconnaissance des compétences. Les entreprises sont aussi invitées à prendre un engagement envers la formation et à signer le certificat Investissement-compétences. La commission vise 20 000 entreprises engagées pour 2018. Au début de l'automne 2014, près de 9 020 certificats avaient déjà été émis aux entreprises québécoises.

La priorité, c'est l'emploi et l'économie pour notre gouvernement, et des actions concrètes sont prises afin que tous puissent participer au marché du travail.

Le Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré. M. le député de Groulx, une minute.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, les CJE jouent un rôle crucial, à mon avis, au niveau socioéconomique, alors il ne faut vraiment pas penser abandonner les jeunes. C'est notre richesse de demain, ils ont besoin de support, d'une part.

Au niveau de la reddition des comptes, M. le Président, alors, je crois que le ministère n'a pas toutes les données qui sont pourtant colligées et disponibles par les CJE. Alors, si vous les demandez, vous allez vite les obtenir. D'ailleurs, le système s'appelle Espresso. Or, maintenant, notre position à nous, c'est que — et je vais vous la lire — «nous souhaitons le maintien des services actuels des CJE. Même si l'enveloppe budgétaire des CJE reste la même, le changement des conditions y étant rattachées conduira à une réduction de cette mission. Les retombées fiscales positives résultant de l'action des CJE sont amputées de plus de 68 % par ce changement. La CAQ souhaite travailler en partenariat avec le milieu plutôt que via l'annonce de décisions détachées des réalités du terrain. Aussi, la CAQ souhaite que soit revue la reddition de comptes afin d'y inclure la population cible et le portrait des bénéficiaires propres à chaque CJE.»

Alors, l'équilibre budgétaire, on sait qu'il est important pour vous. Avez-vous un rapport qui dit que ce n'est pas rentable d'opérer les CJE tel que ça fonctionne ou avez-vous un rapport qui dit que vous pouvez faire mieux?

Conclusions

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le député de Groulx. Nous en sommes à la dernière étape, donc la conclusion : 10 minutes pour le ministre et 10 minutes pour le député de Saint-Jean. Alors, vous pouvez, M. le ministre, disposer de vos 10 minutes.

M. François Blais

M. Blais : Bien, je remercie tous les collègues ici, mes collègues, disons, du gouvernement, les collègues aussi de l'opposition et en particulier, bien sûr, mon collègue de Saint-Jean, qui a amené cette discussion-là ici, à la fois ici même, en Chambre, mais devant la population puis devant les CJE, hein? Je trouve que qu'est-ce qui est, disons, vraiment appréciable dans l'exercice, c'est de pouvoir nous expliquer entre nous mais aussi de parler directement aux CJE, à ceux qui aiment les CJE, qui sont inquiets, qui ont été inquiétés, etc., par les annonces récentes, et j'espère que ce qu'ils ont entendu aujourd'hui permet de les rassurer. Alors, les rassurer comment?

Tout d'abord, nous savons qu'il n'y aura pas de fermeture des carrefours jeunesse-emploi. Il n'y en aura pas. Nous savons maintenant que nous allons maintenir le même niveau de financement, c'est-à-dire, du moins pour Emploi et Solidarité sociale, de 45 millions de dollars. Donc, le financement sera au rendez-vous parce que nous avons besoin d'eux, nous avons besoin de leur expertise. Il y a un changement important, ce ne sera plus sous la forme d'une subvention directe mais par un contrat de services, du moins pour ces 45 millions. Et je comprends que c'est en partie une nouveauté, parce qu'il faut savoir que les CJE reçoivent aussi déjà des contrats de services d'Emploi-Québec pour des choses un peu plus précises. Donc, ce n'est pas une nouveauté complète, mais, c'est vrai, hein, je l'ai dit souvent, c'est un recentrage, une priorisation de leur mission vers les jeunes qui sont plus éloignés du marché du travail dans un contexte où il y a une diminution quand même non négligeable du chômage chez les jeunes depuis la création des CJE, dans le contexte où je constate, et je réponds en partie, là, à mon collègue député de Groulx, je constate une dispersion, hein, de leurs activités et le fait que l'on veut les recentrer davantage sur la mission de la relance de l'emploi, puis ça, je pense qu'on est tous d'accord ensemble là-dessus.

Nous ne fermerons pas aucun carrefour jeunesse-emploi, nous continuerons de travailler avec eux dans les prochaines années. Ils sont des partenaires importants pour le gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec n'abandonne pas ces jeunes. En tout cas, je n'ai rien entendu aujourd'hui qui me fait croire le contraire. Les changements administratifs et de mission discutés aujourd'hui entre nous permettent de recentrer notre action vers ceux, les jeunes, qui ont besoin le plus de l'expertise des carrefours jeunesse-emploi. Dans 76 % des cas, ce sont des jeunes prestataires qui proviennent d'une famille ayant bénéficié d'un programme d'assistance sociale, pour qui cette situation peut représenter un blocage pour leur avenir.

Ce sont plus de 50 000 prestataires d'aide financière de dernier recours de moins de 35 ans qui ont les capacités de participer au marché du travail. Le gouvernement du Québec doit modifier son approche afin d'intégrer le plus de jeunes possible au marché du travail, et ça, je pense, c'est un objectif que nous partageons tous ici. C'est ce que nous avons fait avec l'accueil personnalisé et l'accompagnement soutenu pour les jeunes prestataires de moins de 25 ans à l'aide sociale, mais nous avons besoin maintenant de faire un pas de plus. Nous avons besoin des carrefours jeunesse-emploi pour aider ces jeunes à réintégrer le marché du travail.

Nous devons prendre des décisions en nous basant sur l'aide devant réellement être offerte aux personnes qui en ont le plus besoin, je répète, aux personnes qui en ont le plus besoin — une troisième fois — aux personnes qui en ont le plus besoin. Nous devons actualiser nos interventions et celles de nos partenaires afin qu'elles répondent aux besoins du marché du travail d'aujourd'hui, un marché du travail qui, comme je le mentionnais plus tôt, a grandement évolué depuis la mise en place des carrefours jeunesse-emploi. Les occasions d'emploi seront plus que favorables pour les jeunes Québécoises et les jeunes Québécois. Encore faut-il être là, auprès d'eux, pour les appuyer.

Je rappelle que, selon Emploi-Québec, 375 000 emplois seront à pourvoir par des jeunes d'ici 2017, hein — c'est l'effet, bien sûr, de la bascule, notamment de la bascule démographique — sans compter la création d'emplois générés par des projets d'investissement qui ont été annoncés récemment. Près de 15 % de la clientèle des programmes d'aide financière de dernier recours sont des jeunes de moins de 35 ans sans aucune contrainte à l'emploi. Le taux de chômage chez les jeunes adultes de 15 à 34 ans est passé de 14,3 % en 1997 à 9,6 % en 2013. Il devient alors, à notre avis, conséquent, cohérent, raisonnable, justifié, nécessaire de recentrer l'action des carrefours jeunesse-emploi. Ce n'est quand même pas contre la religion. Est-ce que cette situation signifie que les carrefours jeunesse-emploi ne faisaient pas un bon travail? Je ne pense pas avoir parlé de ça aujourd'hui, loin de là.

• (11 h 50) •

Ces changements signifient que nous pouvons tous ensemble faire mieux pour nos jeunes, encore une fois, parce que bien sûr je crains les questions, hein, du député de Groulx, aux crédits budgétaires, sur ce que nous faisons et comment nous finançons les organismes d'aide à l'employabilité. C'est pourquoi, à compter du 1er avril 2015, le ministère signera des ententes de service avec les carrefours jeunesse-emploi, donc, des ententes de service avec les carrefours jeunesse-emploi selon les mêmes modalités que celles des autres organismes oeuvrant en employabilité financés dans le cadre de la mesure Services d'aide à l'emploi. Il n'y a aucune honte à ça. Ces ententes fonctionnent bien, on les adapte bien aux organismes, on les adapte bien aux régions aussi, M. le député.

Les services financés par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale offerts par les carrefours jeunesse-emploi seront recentrés vers la clientèle qui doit être aidée par les services publics d'emploi, soit prioritairement les jeunes prestataires de l'aide financière de dernier recours et les jeunes admissibles à l'assurance-emploi. L'enveloppe disponible pour les jeunes sera maintenue. Des travaux ont débuté cette semaine en collaboration avec le réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec et le Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi afin de s'assurer que la transition s'effectue efficacement. Ils vont d'ailleurs nous revenir dans deux semaines avec une proposition par rapport à ce que l'on a déjà proposé. Donc, nous sommes en discussion avec eux. C'est difficile pour eux. Le changement est toujours difficile. Le changement est toujours difficile, mais il est parfois nécessaire.

Le ministère verra à ce que les services offerts soient complets et efficaces. Oui, des objectifs seront fixés en début d'entente, et une reddition de comptes sera effectuée par les carrefours jeunesse-emploi afin de vérifier l'atteinte des résultats attendus, pas uniquement les budgets, mais l'atteinte des résultats attendus, parce que nous finançons nos organismes de cette façon. Le gouvernement du Québec est conscient que cette approche modifie les façons de faire des carrefours jeunesse-emploi. Nous allons continuer à les soutenir dans ce chemin. Nous sommes convaincus que les changements proposés permettront d'atteindre l'objectif fixé, à savoir mieux soutenir les jeunes pour favoriser leur participation au marché du travail.

Pour conclure, M. le Président, je remercie tous ceux qui ont contribué à l'échange de qualité, un échange démocratique, auquel nous avons participé aujourd'hui. J'espère d'ailleurs obtenir la collaboration des collègues de l'opposition pour la suite des choses. Il me semble que ce que nous faisons appartient à la raison, appartient au sens commun. Les temps changent, et il faut s'adapter. Soyez assurés que le gouvernement du Québec a une vision et que nous jeunes en sont partie intégrante. Plusieurs chantiers sont en cours au ministère afin d'optimiser l'offre de services offerte aux jeunes et de voir comment nous allons les soutenir davantage dans les prochaines années. Plusieurs travaux sont également en cours au niveau gouvernemental afin de donner aux générations futures des projets majeurs créateurs de richesse. Nous n'avons qu'à penser au Plan Nord, qui permettra de créer des emplois et de stimuler l'économie dans l'ensemble des régions du Québec, tant au Sud qu'au Nord. Il s'agit de projets porteurs pour le Québec et pour nos jeunes. Je souligne d'ailleurs l'importance d'avoir une jeunesse compétente, prête à relever les défis du marché du travail. Je pense que j'ai donné un exemple éclatant de cela avec ce que nous avons vu à Shawinigan cette semaine, des entreprises qui se sont coordonnées pour favoriser la formation en emploi, pour créer des emplois.

En terminant, je réitère également l'importance qu'accorde le gouvernement du Québec aux carrefours jeunesse-emploi et à l'ensemble des organismes, et je les salue aujourd'hui, l'ensemble des organismes, ils sont plus de 300, qui oeuvrent au développement de l'employabilité au Québec. Je vous remercie, M. le Président, et je remercie tous les collègues.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Saint-Jean, pour votre conclusion de 10 minutes.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, après pratiquement deux heures de discussion et d'échange, le ministre peut dire qu'on se rapproche. Moi, je pense qu'on s'éloigne.

Effectivement, le ministre nous dit que, selon lui, il n'y aura pas de fermeture de carrefour jeunesse-emploi. Ça, c'est une chose. Mais en même temps il nous confirme que le financement à la mission des carrefours jeunesse-emploi ne sera pas maintenu. Et il nous annonce, même si on le savait déjà, qu'il y aura un financement en fonction de chaque jeune. Donc, le financement va aller en fonction de l'aide de ces jeunes-là, mais de certains jeunes. Et c'est là le point, là. Le ministre nous dit : Aucun carrefour jeunesse-emploi ne va mettre de côté les autres jeunes. Mais on n'a pas l'assurance de ça de sa part, là. Il a une responsabilité, comme ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, de s'assurer que tous les jeunes puissent avoir un emploi décent, de qualité et pouvoir obtenir ce qu'ils désirent comme emploi, mais en privilégiant... Et c'est correct d'aider les gens qui sont à l'aide sociale et à l'assurance-emploi, mais ce n'est pas les seuls jeunes du Québec. Sur 60 000 jeunes par année que les carrefours jeunesse-emploi aident, avec la réforme que le ministre propose aujourd'hui c'est 40 000 jeunes qui seront mis de côté.

Il nous parle de dispersion, il nous parle de recentrage. Par la suite, on a entendu un nouveau mot qui est arrivé, c'est «prioriser». Donc, quand on dit «prioriser», ça veut dire que les autres jeunes ne seront pas mis de côté. S'ils ne sont pas mis de côté, je reviens avec ma question : Comment on va faire pour financer ces services-là? N'ayant plus de financement de base, M. le Président, les carrefours jeunesse-emploi ne pourront plus mettre en place des programmes en fonction de la couleur, l'originalité et la saveur de chacune des régions du Québec pour attirer des jeunes. On le voit, il y a une diminution du nombre de jeunes qui viennent d'Emploi-Québec dans les carrefours jeunesse-emploi. Pourquoi? Parce que les jeunes ne veulent pas être juste un CP-12 ou un indice d'employabilité. Les jeunes ont besoin de se sentir comme une personne, pas juste comme un code et comme un numéro. Et c'est pour ça que les jeunes sont intéressés par le modèle des carrefours jeunesse-emploi.

Moins de centres locaux d'emploi au Québec avec le projet de loi n° 15, moins d'agents à Emploi-Québec, dans les centres locaux d'emploi. Quelqu'un qui fait une demande pour l'aide sociale ne peut pas rencontrer son agent dès sa demande pour l'aide sociale. Et là on lui dit et on leur dit, à ces gens-là qui travaillent dans les CLE : En plus de tout ça, là, vous en avez déjà assez, là, mais ce n'est pas grave, on va vous en ajouter, on va vous ajouter tout le triage, là, comme dans une urgence, des jeunes pour qu'ils puissent savoir est-ce qu'ils performent assez bien en termes d'indice d'employabilité pour aller, oui ou non, dans un carrefour jeunesse-emploi par la suite. C'est une augmentation de la bureaucratie, c'est une augmentation de la paperasse, c'est une diminution de la qualité du service pour nos jeunes du Québec, M. le Président, les jeunes qui sont pénalisés. Le ministre, il nous dit qu'il ne voit pas encore, là, dans tout ce que j'ai dit ou dans tout ce que les autres ont dit, des jeunes qui seront pénalisés. Oui, il y en aura. Les 16-17 ans, ils ne pourront plus être aidés par les carrefours jeunesse-emploi. Les jeunes qui ne sont pas à l'aide sociale, avec le financement que vous proposez, ne pourront pas être aidés par les carrefours jeunesse-emploi. Vous me parlez, M. le ministre... Pardonnez-moi, M. le Président.

Le ministre nous parle de sa surprise, partout où il va, de voir des gens qui se cherchent des employés qualifiés. D'accord. Je suis porte-parole en formation professionnelle, éducation des adultes, alphabétisation. Je suis très conscient de ça : les carrefours jeunesse-emploi aident nos jeunes à avoir une orientation pour savoir dans quel domaine poursuivre leurs études ou améliorer leur formation pour avoir des emplois de qualité. Qui va orienter nos jeunes du Québec? Il va falloir attendre que nos jeunes qui ont un emploi actuellement lâchent leur emploi pour tomber à l'assurance-emploi ou, encore pire, être obligés de se rendre à l'aide sociale pour pouvoir être aidés par les carrefours jeunesse-emploi? Ça n'a pas de bon sens, M. le Président. En plus, son collègue ministre de l'Éducation coupe dans l'orientation dans nos écoles. Il m'a déjà dit aux crédits : Est-ce que vous êtes en train de me dire, M. le député, que la main gauche fait quelque chose puis elle ne parle pas à la main droite? Mais on le voit encore, un autre exemple de la part du gouvernement, on coupe l'orientation dans nos écoles, on coupe l'orientation dans les carrefours jeunesse-emploi. Nos jeunes qui ont des emplois à statut précaire vont devoir rester à leur statut précaire parce que, pour les gens du ministère, le ministre, ils ont déjà un emploi, ils n'ont pas besoin d'avoir plus, pas besoin de contribuer plus au gouvernement.

Le ministre nous dit : Moins de voyages en Afrique. Bon. Est-ce que le ministre sait que...

Une voix : ...

• (12 heures) •

M. Turcotte : Le ministre rit. En tout cas, la mobilisation des jeunes puis l'implication des jeunes dans une collectivité pour aller aider d'autres jeunes qui ont besoin en Afrique, entre autres, ça fait rire le ministre. Bon. On peut repasser. 80 % du maintien en emploi suite aux stages à l'international. C'est des jeunes qui ramassent de l'argent avec des campagnes de levée de fonds, avec du financement, qui se mobilisent. En même temps, le ministre, est-ce qu'il est en train de dire que, toute l'aide du gouvernement pour les jeunes à l'étranger, on va couper ça? Bon. On peut fermer cette parenthèse-là.

25 millions de retombées fiscales suite au travail des carrefours jeunesse-emploi. Il se méfie des comptables, il se méfie des économistes. Aux crédits, il m'a dit qu'il se méfiait des avocats. Il se méfie de beaucoup de gens, il se méfie de beaucoup de gens. Moi, à sa place, moi, à sa place, je me méfierais de son collègue le président du Conseil du trésor, qui, d'une façon idéologique, a décidé de faire des choix politiques et idéologiques dans un contexte d'austérité pour saborder un des fleurons québécois qui sont les carrefours jeunesse-emploi. Ce n'était pas assez, les CPE, ce n'était pas assez, les centres de santé et de services sociaux, ce n'était pas assez, les conseils locaux de développement, il faut qu'il s'attaque en plus, à la demande de son collègue président du Conseil du trésor... Parce que je connais le ministre. Je suis certain qu'au fond de lui, là, son combat qu'il a toujours fait pour aider les plus démunis de notre société a toujours été apprécié et louangé par plusieurs. Je sais qu'au fond de lui il n'est pas à l'aise de faire ça, ce qu'il fait en ce moment, mais il répond au mandat de son collègue président du Conseil du trésor. S'il a quelqu'un à se méfier, c'est au président du Conseil du trésor. Je dis ça en toute amitié, bien entendu, parce que, sur le plan personnel, on peut apprécier ou pas la personne, mais, sur le plan idéologique, c'est assez clair.

Son ancien... bien, lui, il ne l'a pas connu comme chef, mais il l'a quand même sûrement connu un peu partout, l'ancien premier ministre du Québec, M. Jean Charest, premier ministre Jean Charest, a dit qu'il était le fan numéro un des CJE. Pour lui, là, c'était la plus grande invention. Il aurait aimé ça que ça soit le Parti libéral du Québec qui crée les CJE. C'est aujourd'hui le Parti libéral du Québec qui met fin à la mission des carrefours jeunesse-emploi qui ont amené, selon les dires lui-même du ministre, les grands résultats, qui ont fait baisser le taux de chômage au Québec chez nos jeunes. Les carrefours jeunesse-emploi, c'est une originalité, c'est une couleur locale. J'aime beaucoup les propos de mon collègue de la Coalition avenir Québec quand il parle du pouvoir de décider de nos localités. C'est ce que les carrefours jeunesse-emploi ont fait, c'est ce qu'on veut qu'ils fassent.

Est-ce que le ministre, maintenant qu'on a fait tout ce débat-là, est-ce que le ministre peut nous assurer, après la fin de cette interpellation, de prendre quelques minutes pour rencontrer les jeunes qui sont présents ici et les gens des carrefours jeunesse-emploi? Parce qu'il a laissé sous-entendre que, selon lui, ces gens-là étaient rassurés de ses propos. Est-ce qu'il pourrait les rencontrer pour entendre leurs premières impressions, à ces jeunes-là, qui sont les premiers visés par la réforme du ministre, pour les entendre? Parce qu'on sait que les carrefours jeunesse-emploi ne sont pas comme les autres. C'est un organisme à part, une organisation à part, et c'est ce qui a fait ces résultats.

Quand j'ai rencontré des jeunes au Carrefour jeunesse-emploi Charlesbourg-Chauveau, le carrefour jeunesse-emploi de la circonscription du ministre, une jeune fille qui est ici, d'ailleurs, a utilisé les termes : C'est une trousse d'espoir pour moi, le carrefour jeunesse-emploi. Un autre a parlé de boussole, un autre a parlé de spécialiste des trous de services. Quelqu'un a dit que c'était unique au Québec, que... petits moyens, grands coups de main. Ça, c'est des jeunes, c'est des jeunes qui ont eu ou qui ont des services de nos carrefours jeunesse-emploi. C'est des Anthony, comme la ministre de la Justice était si fière qu'il se sorte de sa solitude et de son isolement chez lui. C'est des David, c'est des Marc, c'est des Laurence qui sont aidés partout au Québec, peu importe leur âge, peu importe la grosseur de leur portefeuille, peu importent leurs problématiques.

Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le député de Saint-Jean, merci, M. le ministre, merci, M. le député de Groulx, merci, M. le député d'Argenteuil, et merci, Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, pour cette séance de travail très intéressante, très intéressante.

Alors, compte tenu de l'heure, je lève la séance, et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Bonne fin de semaine.

(Fin de la séance à 12 h 4)

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