L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'économie et du travail

Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mercredi 29 octobre 2008 - Vol. 40 N° 41

Consultations particulières sur le document intitulé L'occupation du territoire forestier québécois et la constitution des sociétés d'aménagement des forêts


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Quinze heures quatorze minutes)

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et auditions publiques à l'égard du document de travail intitulé L'occupation du territoire forestier québécois et la constitution des sociétés d'aménagement des forêts. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Arcand (Mont-Royal) est remplacé par M. Riedl (Iberville) et M. Deslières (Beauharnois) est remplacé par M. Gaudreault (Jonquière).

La Présidente (Mme Gonthier): O.K. Alors, à l'ordre du jour, aujourd'hui, nous entendrons l'Office des producteurs de plants forestiers du Québec, l'Association des fabricants de panneaux de composites, la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean et finalement Greenpeace.

Auditions (suite)

Alors, j'accueille maintenant l'Office des producteurs de plants forestiers du Québec. Bon après-midi. Alors, M. Gohier, vous êtes le président de l'office. Alors, je vous inviterais à présenter peut-être les gens qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour présenter les grandes lignes de votre mémoire, et par la suite nous procéderons à un échange avec les parlementaires. Alors, la parole est à vous.

Office des producteurs de
plants forestiers du Québec

M. Gohier (Richard): Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi de présenter les personnes avec qui je suis accompagné. Alors, à ma gauche, Mme Claire Simard, qui est la directrice générale de l'Office des producteurs de plants forestiers, et, à ma droite, M. Dany Paquet, qui est vice-président de l'Office des producteurs de plants forestiers.

Alors, l'office remercie la Commission de l'économie et du travail de lui permettre de déposer un mémoire dans le cadre de ses consultations particulières sur le document de travail intitulé L'occupation du territoire forestier québécois et la constitution des sociétés d'aménagement des forêts. Notre participation aux travaux de la commission se veut un témoignage de notre volonté à contribuer à la dynamisation et à l'essor du secteur forestier québécois, tout en s'assurant que la mise en marché collective des producteurs de plants forestiers du Québec soit respectée.

Alors, tout à l'heure, Mme Simard va prendre la parole pour vous expliquer plus dans le détail le rôle de notre plan conjoint, là, dans le cadre de la loi des marchés agricoles et le rôle qu'on joue dans tout l'approvisionnement des plants forestiers au Québec orchestré dans la politique de reboisement du ministère des Ressources naturelles.

Alors, depuis de nombreuses années, les producteurs de plants forestiers, bon, maintenant regroupés, là, depuis l'an 2000, à l'intérieur d'un office ? mais je vous dirai qu'on est actifs quand même depuis le début des années quatre-vingt ? on participe à l'effort de reboisement de nos forêts en produisant des plants de diverses essences s'intégrant à nos écosystèmes avec succès grâce à leur qualité. Dans ce cadre-là, je me permettrais, là, d'ajouter qu'on rejoint, là, d'une façon assez importante les préoccupations de la commission concernant le développement durable, où le reboisement joue un rôle assez important. Qui dit reboisement dit production de plants forestiers, et notre réseau de distribution, orchestré dans le cadre de la politique de reboisement du ministère des Ressources naturelles, a fait grandement ses preuves en distribuant des plants de qualité en volume et respectant des normes, là, hautement élevées de la part du gouvernement.

On est aussi un acteur provincial qui travaille efficacement avec toutes les régions du Québec. On a des pépinières, on a 18 pépinières dans le réseau. Mme Simard va vous expliquer dans le détail, là, un petit peu plus tout à l'heure, mais on est situés dans toutes les régions du Québec et on joue un rôle, nous, comme acteur provincial pour s'entendre, là, sur le normatif et la distribution des volumes comme tels et la négociation des contrats. Mais on est présents dans toutes les régions, et ça fait longtemps qu'on travaille en régionalisation.

Alors, notre mémoire vous présentera un historique de la création des pépinières de plants forestiers, l'importance de la mise en marché collective pour les producteurs de plants forestiers du Québec ainsi que nos recommandations afin d'optimiser cette production au Québec. Alors, je cède la parole à Mme Simard, et par la suite ce sera la période de questions.

Mme Simard (Claire): Merci. Alors, on va vous présenter l'historique de la création des pépinières de plants forestiers au Québec pour bien vous faire comprendre l'importance qu'a l'organisation collective au niveau des plants forestiers des producteurs de plants forestiers, bien sûr.

Alors, la production de plants de reboisement d'espèces résineuses a commencé au Québec au début du siècle avec la mise en place d'une première pépinière gouvernementale au début des années 1900. À cette époque, les plants produits sont à racines nues, c'est-à-dire produits directement en sol et utilisés pour reboiser les terrains forestiers dévastés par les feux.

Jusqu'en 1960, on produit entre 1 et 2 millions de plants par année pour tenter de combler les besoins de reboisement. Puis, au cours des années soixante et soixante-dix, l'ouverture de plusieurs pépinières gouvernementales hausse la production annuelle de plants résineux à racines nues à près de 50 millions de plants.

Au tout début des années quatre-vingt, le gouvernement du Québec décide de favoriser l'expansion d'un programme de reboisement. L'objectif, à ce moment-là, était d'une production d'environ de 300 millions de plants en semis par année. L'introduction de la culture de plants en récipients a favorisé la création et l'établissement d'une trentaine de pépinières dans le secteur privé suite à un appel d'offres du ministère des Ressources naturelles et de sa Direction de la production de semences et plants. Cette arrivée de nouvelles pépinières, bien sûr, a permis d'augmenter très rapidement la capacité de production provinciale. Alors, même si l'objectif de 300 millions de plants n'a jamais été atteint, il se reboisait tout de même environ 250 millions de plants annuellement, ce qui permettait, de 1988 à 1991, le reboisement de 1 milliard de plants par les pépinières publiques et privées.

n (15 h 20) n

Le début des années quatre-vingt-dix est marqué par l'introduction de nouvelles pratiques sylvicoles et une rapide décroissance des programmes de reboisement. La demande totale en plants pour le reboisement a chuté de façon drastique à 150 millions de plants annuellement. Les pépinières privées sont appelées à produire environ 100 millions de ces plants dans un contexte de décroissance et de libre concurrence où la règle du plus bas soumissionnaire s'appliquait. Résultat: une diminution irrationnelle des prix sous le coût de production, qui a atteint près de 60 % sur 10 ans. Alors, l'effet d'une telle concurrence ne laisse aucune marge de manoeuvre aux producteurs. Ça a pour conséquences directes des faillites et des fermetures d'entreprises. Le groupe de producteurs voit ainsi son nombre diminuer autour de 20 entreprises.

En 1995, devant la précarité des entreprises, un plan de soutien temporaire est mis en place par le ministère. Des contrats minimaux sont accordés sans appel d'offres afin de maintenir les producteurs en activité. Ce geste du ministère démontre la volonté du gouvernement de conserver le réseau des pépinières privées en activité.

Alors, en 1998, ce programme prend fin, et les appels d'offres reprennent. Cette situation compromet non seulement la structure même des entreprises, mais aussi la qualité des plants livrés, sans compter le risque de ne pas rendre à terme une production. Il faut comprendre que, quand les producteurs mettent leurs semis en terre, ça prend environ deux ans, là, avant que la production soit mise dans les forêts.

Alors, la mise en marché des producteurs de plants forestiers. Devant une telle situation de précarité et de vulnérabilité, les producteurs réagissent de manière responsable en empruntant la voie de la solidarité plutôt que de mener une guerre commerciale qui, à terme, ne ferait que des perdants. En 2000, le groupe de pépinières privées s'engage donc dans un processus de création d'un plan conjoint en vertu de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche. Cette loi québécoise, plutôt que d'intervenir directement sur le marché, opère une forme de délégation des pouvoirs aux acteurs du monde agricole. Elle a pour fins de favoriser l'organisation ordonnée de la production et de la mise en marché. Elle encadre les relations commerciales entre les producteurs et les acheteurs, tout en protégeant l'intérêt public.

Alors, les objectifs des producteurs, là, de la création de leur plan conjoint en production de plants forestiers étaient d'obtenir le pouvoir de négocier les conditions de mise en marché de tous les producteurs, d'assurer un partage juste et équitable de la production en respectant les spécialités des producteurs et les besoins du ministère et d'obtenir un prix juste et stable pour assurer la pérennité des entreprises. Alors, le plan conjoint des producteurs de plants forestiers représente donc la volonté des producteurs de négocier leurs contrats et de répartir équitablement la production entre eux.

Un produit agricole est, en vertu de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche, «tout produit de l'agriculture, de l'horticulture, de l'aviculture, de l'élevage ou de la forêt». Les plants forestiers sont donc considérés comme étant un produit agricole au sens de la loi.

L'introduction d'un nouveau régime forestier, incluant les stratégies d'aménagement à mettre en place et la création des sociétés d'aménagement des forêts, devra considérer ce fait et, conséquemment, que des règles bien définies encadrent et caractérisent la mise en marché de ce produit au Québec. Ainsi, les conditions de mise en marché dans les plants forestiers sont et devront rester identiques pour l'ensemble des producteurs, et ce, indépendamment du lieu de production.

De plus, cette loi offre un cadre bien adapté et adaptable en fonction des acteurs d'une activité agricole particulière afin d'établir des relations d'affaires où tout le monde est gagnant, et ainsi contribuer à l'essor d'une industrie viable. Pour nous, ceci cadre tout à fait avec les objectifs actuels et futurs en matière de reboisement au Québec.

À ce jour, le principal mandat confié à l'Office des producteurs de plants forestiers est celui stipulé dans la Loi sur la mise en marché, soit d'être l'agent de vente et de négociation des producteurs visés par le plan. L'office est également chargé d'administrer et d'appliquer le plan conjoint. L'office peut en outre, avec l'approbation de la régie, exercer des fonctions relatives à la production et à la mise en marché du produit visé pour promouvoir, défendre et développer les intérêts des producteurs visés par le plan.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme Simard, il vous resterait une minute pour conclure.

Mme Simard (Claire): Merci. Encore une fois, nous considérons important de rappeler que les éventuels changements apportés au régime forestier doivent considérer le fait qu'un plan conjoint provincial encadre la mise en marché des plants forestiers au Québec et que l'office est en ce sens interlocuteur unique et officiel des producteurs.

Dans ce cas, s'il me reste très peu de temps, je vous inviterais à aller tout de suite à nos recommandations, à la page 14. Alors, je vous ai expliqué qu'on est encadrés par la Loi sur la mise en marché. Alors, on demande bien sûr d'être considérés comme tel avec le réaménagement du régime forestier et de bien sûr être considérés comme l'interlocuteur unique de tous les producteurs privés en ce qui a trait à la mise en marché des plants forestiers.

Dans le respect de sa mission première, l'office doit également s'assurer, en vertu de la loi, que le partage des volumes entre les producteurs se fait de façon ordonnée et équitable. Ceci représente un aspect majeur pour les producteurs de plants forestiers qui doit être bien compris et considéré dans le réaménagement possible du régime forestier.

Alors, les mandats. Vous savez qu'il y a deux réseaux au niveau de la production de plants forestiers au Québec: un réseau privé et un réseau public. Alors, on demande que les mandats actuellement partagés par les réseaux public et privé soient bien définis. À cette fin, à la page 16, nous invitons la Commission de l'économie et du travail à recommander au gouvernement du Québec la mise en oeuvre des mesures suivantes: de revoir le partage des rôles et responsabilités qui incombent actuellement à chacun des réseaux de pépinières privées et publiques afin d'optimiser les ressources et atteindre les résultats recherchés par le gouvernement du Québec; de concentrer l'activité du réseau de pépinières gouvernementales au niveau de la recherche et du développement et de la production de semences de première qualité; et de confier l'ensemble de la production de plants forestiers dédiés au reboisement des terres publiques aux producteurs faisant partie du réseau de l'office, qui dispose d'une capacité suffisante pour répondre à l'ensemble des besoins relatifs à la production de plants forestiers au Québec.

Ainsi, ces mesures permettront de consolider le réseau de producteurs de plants forestiers, qui doit faire face à des variations de production importantes d'une année à l'autre, ce qui le fragilise. Par cette consolidation, le gouvernement du Québec s'assurera de maintenir une stabilité au niveau de la production de plants dans le réseau privé, également toute la main-d'oeuvre, limitant la perte d'expertise acquise, et cela, à un bien meilleur coût pour l'État.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci beaucoup, Mme Simard. Alors, la parole serait maintenant à Mme la ministre.

Mme Boulet: Aviez-vous terminé, Mme Simard, ou vous aviez encore des choses à nous dire?

Mme Simard (Claire): Oui.

Mme Boulet: Alors, Mme Simard, merci d'être avec nous, les gens qui sont avec vous également, là ? j'avais ma feuille ici, là, attendez un petit peu ? alors, M. Gauthier, M. Paquet et Mme Simard. Alors...

Une voix: ...

Mme Boulet: Gohier. O.K. Excusez-moi. Alors, M. Paquet et Mme Simard. Alors, écoutez, je trouve ça fort intéressant de vous entendre, d'autant plus qu'on parle de sylviculture intensive, là. Alors, j'imagine qu'on ne peut pas parler de sylviculture intensive sans penser qu'on aura besoin de davantage de plants. Alors, assurément, vous serez au coeur des actions qui seront posées dans le cadre de... Et je trouve ça intéressant... Je pense que tout le monde était d'accord ici pour dire qu'on n'attendra pas en 2013. Si on parle de sylviculture intensive, il pourrait très bien y avoir des projets pilotes dans des régions données. Alors, je pense que ça pourrait déjà, à très court terme, mettre en valeur la sylviculture intensive dans le cadre d'un projet pilote. Je vais y aller tout de suite, d'entrée de jeu, avec le recrutement puis la main-d'oeuvre, là, parce qu'on nous dit souvent que les secteurs comme les vôtres, c'est difficile de recruter, les conditions de travail ne sont peut-être pas nécessairement idéales ou... J'aimerais juste savoir comment ça se passe chez vous, dans vos entreprises. Est-ce que c'est facile de recruter les gens? Si oui.. ou sinon, c'est quoi, les problématiques particulières qui sont le plus fréquemment soulevées de la part des gens qui vont travailler chez vous?

M. Gohier (Richard): Bien, écoutez, d'emblée de jeu, je vous dirais que, bon, la caractéristique de nos pépinières, ce sont des entreprises agricoles au départ, donc une activité assez importante, là, durant la période du mois d'avril à l'automne. C'est sûr que ça amène certaines contraintes de recrutement de personnel. Je vous dirais qu'une pépinière qui veut réussir, là, à produire des plants de qualité se doit d'avoir un bon noyau de personnes très compétentes et efficaces, d'où la recherche d'un temps d'emploi qui est le plus long possible. La consolidation du réseau privé, dans un contexte, là, de demande de la part de la politique de reboisement d'atteindre 100 % de l'occupation de notre capacité de production, serait grandement utile, c'est sûr. Actuellement, dans le contexte de partage, là, de la production de plants entre le réseau public et privé, ça nous amène actuellement à diviser la capacité de production autour de 70 % d'utilisation, ce qui n'est pas souhaitable actuellement, c'est sûr. Alors ça, ça amène une difficulté.

n (15 h 30) n

Par contre, au niveau du recrutement comme tel, bien c'est variable. Je vous dirais qu'il y a des régions où le niveau de recrutement est plus facile ou d'autres régions, qui se rapprochent plus près des centres, où les taux de chômage sont très bas, 4 %, 5 %, 6 %, c'est sûr qu'à ce moment-là la compétition est très forte. Donc, on se doit d'offrir des conditions de travail qui sont concurrentielles, qui sont bonifiantes, là, pour le personnel puis on doit miser sur de l'excellence là-dedans pour offrir un contexte de travail qui est bonifiant puis qui est valorisant aussi. Puis je pense que c'est possible parce qu'on est des entreprises agricoles assez dynamiques. Aussi, on a un mandat de produire des plants qui vont éventuellement servir à maintenir le capital forestier et aussi la création de biomasse dans un contexte environnemental. Ça aussi, ça peut devenir une stimulation, là, pour une nouvelle clientèle de jeunes, là, qui ont des préoccupations environnementales de plus en plus présentes. Mais c'est des gros défis à relever, ça, définitivement, c'est des très, très gros défis à relever.

Mme Boulet: Mme Simard ? je peux y aller, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Gonthier): ...

Mme Boulet: ...oui; alors, Mme Simard ? dans votre présentation, vous avez référé au programme de mise en terre de 300 millions de plants. Est-ce que vous pensez que ce genre de programme là pourrait être une bonne idée? Assurément, là, j'imagine, mais j'aimerais vous entendre, est-ce que vous pensez qu'en 2008 ce serait une bonne idée? Et est-ce que vos entreprises, vos partenaires seraient capables de fournir à la demande si jamais le gouvernement décidait de mettre en terre de façon beaucoup plus importante le nombre de plants au Québec?

Mme Simard (Claire): Assurément. Assurément, parce qu'on vous l'a un petit peu expliqué... C'est sûr qu'on l'a bien résumé, là, il faut comprendre qu'il y a deux réseaux, hein, au niveau de la production de plants: un réseau privé et un réseau public. Si je vous fais un parallèle avec ce qui s'est fait au niveau agricole, le gouvernement du Québec, à l'époque, il y avait des fermes aussi qui étaient en production, ils ont été... Dans le fond, le rôle des fermes qui appartenaient à l'État a été revu et a été spécifié. Au niveau agricole, les domaines sont bien sûr la recherche, le développement technologique, etc. Alors, nous, c'est sûr que ce qu'on propose, c'est de laisser au réseau privé la production de plants, étant donné que les producteurs du réseau ont toute l'expertise. Et en plus, comme M. Gohier vient de vous le mentionner, ça permettrait de conserver la main-d'oeuvre beaucoup plus facilement parce qu'il y aurait beaucoup plus, là, de production qui serait garantie, là, au niveau de l'État.

Mme Boulet: Êtes-vous capable de me dire, les entreprises qui font partie de votre association, combien de travailleurs on parle?

Mme Simard (Claire): ...au-dessus de 1 200 personnes.

Mme Boulet: 1 200 personnes?

Mme Simard (Claire): Oui. 1 200, ça, on parle bien sûr du personnel qui est employé à temps plein et bien sûr aussi à temps partiel parce que c'est... la grosse période est bien sûr dans la production qui se passe, je dirais, entre le mois de mars et le mois d'octobre, là.

Mme Boulet: Et ce que vous nous suggérez, c'est que les pépinières privées s'occupent de production de plants, c'est bien ça, et que la pépinière publique, elle, fasse davantage de recherche?

Mme Simard (Claire): Oui, comme ça se fait actuellement. Et la production des semences, toute l'expertise de toute façon est déjà dans le réseau public.

Mme Boulet: Les pépinières publiques produisent, là, on me dit, là, aussi des peupliers hybrides, des plants à racines nues, des plants issus de boutures, des mélèzes hybrides, et autres. Est-ce que les pépinières privées sont en mesure de produire ce type de plants?

Mme Simard (Claire): Je dirais qu'à l'introduction du plan... Le produit visé actuellement est le plant résineux produit en récipient, les plants à racines nues avaient été exclus. Il faut comprendre qu'on est un jeune plan conjoint, qu'on a visé un produit particulier, mais, à l'époque de la création du plan conjoint, il y avait déjà des pépinières qui produisaient des plants à racines nues. Il y en a encore qui en font. Je vous dirais qu'il y aussi d'autres productions qui se font en parallèle dans les entreprises, là. Souvent, les entreprises ne font pas que de la production de plants forestiers. Il y a tout le volet ornemental qui peut être fait, il y a certains de nos membres également qui ont un volet, par exemple, de production de sapins de Noël. Donc, c'est sûr que les producteurs ont amplement l'expertise pour produire ces plants-là.

Mme Boulet: Je vais avoir une dernière question assez brève, là. On parle du 300 millions de plants. Selon vous, c'est quoi, les besoins du territoire québécois? C'est 300 millions de plants sur combien d'années pour répondre, selon vous, là, à une sylviculture qui serait adéquate puis qui nous aiderait peut-être?

M. Paquet (Dany): Un aménagement intensif, pour moi, en tout cas, ça veut dire un aménagement supérieur des forêts du Québec et ça passe en bonne partie par le reboisement. Si on fait des comparaisons avec les pays scandinaves, où est-ce que le reboisement est fortement utilisé, de chiffrer immédiatement un volume, tout dépendant des plants, mais je pense qu'on peut facilement remplir les pépinières du Québec sans créer trop de problème, là, pour l'instant. On serait capables de relever le défi de produire le 150 millions de plants qui se produit présentement au Québec et on pourrait aussi agrandir ces pépinières-là.

Mme Boulet: Ça serait quoi, votre capacité d'en produire plus? Parce qu'on dit qu'aujourd'hui on en prend entre 130 et 150 millions, là, vous seriez capables d'aller à 300, vous seriez capables de doubler finalement, à peu près, votre production?

M. Gohier (Richard): Oui. Bien, écoutez, c'est sûr, il faut le remettre dans un contexte de type de plants, puis au mètre carré, et ainsi de suite, mais je vous dirais effectivement qu'on pourrait, là, se rendre, si on occupait 100 % de notre capacité... on pourrait accoter des chiffres comme vous mentionnez, là. C'est sûr qu'il y aurait beaucoup plus de travail à faire, là, d'études plus précises comme telles, mais c'est sûr que le réseau a une expertise, le réseau a de l'expérience, et le réseau peut prendre de l'expansion aussi, définitivement.

Mme Simard (Claire): Juste peut-être en complémentaire là-dessus, il faut bien comprendre que les producteurs vont faire les investissements nécessaires s'il y a bien sûr un approvisionnement ou une demande qui va être sur une période justifiant l'investissement. On ne peut pas demander aux producteurs de faire des investissements de milliers de dollars pour seulement un an, là.

Mme Boulet: Vous avez raison, Mme Simard.

M. Gohier (Richard): Oui. Puis, en réponse aussi à ça, le fait de maintenir le réseau en place comme il est là, en maintenant, bon, la régionalisation puis le rôle que l'office, là, doit jouer, là, d'interlocuteur privilégié, fait qu'on a des vases communicants aussi, qui fait que, sur les types de plants demandés dans certaines régions qui peuvent être fournis par des pépinières de d'autres régions, ça, c'est un élément très, très important à garder aussi dans un contexte où c'est quand même des produits qui sont périssables, là.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci, Mme la ministre. Alors, je passerais maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, Mme la Présidente. Mme Simard, M. Paquet, M. Gohier, bonjour et bienvenue. Merci beaucoup. J'aimerais ça... Vous avez parlé justement des besoins réels. Il y a une question qu'on se pose toujours en forêt: Quand on reboise ou on ne reboise pas? On disait qu'une partie boisée, une partie non reboisée, cinq ans, ça ne paraît pas, mais, quand on commence à... sept ans, etc., on commence à voir les grandes différences. Est-ce que c'est toujours le cas? Parce qu'il y a des terres où on a fait de la sylviculture, où, en réalité, on n'a pas fait de reboisement, on a dit: Ah! la nature va reprendre le dessus. Et on dit, certains ingénieurs forestiers ou peu importent les discussions sur le sujet, une partie qu'on reboise puis une partie qu'on ne reboise pas, cinq ans, on ne voit rien, mais sept ans, on commence à voir la différence. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette affirmation-là?

M. Paquet (Dany): Bien, je pense qu'il faut dire que, dans l'ancien régime, ce qu'on parlait, on parlait d'un rendement soutenu. Autrement dit, si, à un endroit, qu'on coupait 100 m³, on voulait remettre en valeur 100 m³ de boisé. Et, si la régénération naturelle était suffisante, on ne reboisait pas. Par contre, ça ne veut pas dire que ce sol-là, ce terrain-là n'avait pas une possibilité de produire 200 m³ et 250 m³ avec un reboisement. Quand on parle d'aménagement intensif, c'est de ça qu'on parle. Si on va chercher le vrai potentiel d'une forêt en enlevant les perturbations qu'il y a eu depuis des années et en remettant un reboisement ou un plein boisement... Quand même, ce n'est pas tous du reboisement, ça peut être un plein boisement, ça peut être une régénération naturelle avec un repiquage de plants d'épinette, par exemple, et pour aller chercher un volume accru et un rendement, à ce moment-là, de 200 m³ à l'hectare, 250 m³ à l'hectare.

La Présidente (Mme Ménard): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, Mme la Présidente. J'ai fait un saut tout d'un coup, je... Vous me permettrez, vous venez juste d'apporter un point concernant les types de sol. J'ai parlé avec le ministère sur la possibilité de... Il y a une nouvelle technologie qui sont les bioréacteurs au niveau des fermes porcines, où on va récupérer du phosphore en poudre et de voir si les sols québécois et tous les sols forestiers étaient aptes justement à avoir... il y avait suffisamment de minéraux dans le sol pour ne pas être obligé de mettre un engrais additionnel ou, en mettant un engrais additionnel qui est celui-là, qui nous permettrait une élimination naturelle du produit, on augmenterait la capacité forestière, on augmenterait le bois... c'est-à-dire on augmenterait la vigueur du bois. Est-ce que, d'après vous, ça se peut ou si c'est utopique de le penser?

M. Gohier (Richard): Je n'ai pas saisi.

M. Roy: Bien, c'est-à-dire qu'on se sert du phosphore, d'une quantité plus grande de phosphore dans les terres qui seraient pauvres avant de faire du reboisement ou, avec le reboisement, on pourrait mettre le phosphore.

M. Gohier (Richard): Disons, sans rentrer dans le détail, c'est sûr qu'un plant forestier qui va devenir à maturité, si on prend une épinette, par exemple, a des besoins spécifiques en différentes concentrations d'éléments nutritifs, là, de phosphore, d'azote et de potassium. L'idéal, pour un arbre, c'est d'être optimisé, là, d'avoir toujours une ressource optimisée de ces éléments nutritifs là dans le sol. Alors, c'est sûr que, si on avait les moyens et les techniques pour être capables d'évaluer les sols qui vont être reboisés et de dire, par exemple: Bien, ce sol-là est pauvre comme tel, puis il y a un amendement naturel en provenance de récupération de déchets de ferme pour amender ce sol-là, bien c'est sûr que ce serait bénéfique. Ce serait le meilleur des mondes, ça, je vous dirais.

n (15 h 40) n

Sauf que disons, comme on dit, de la coupe aux lèvres, là, il y a beaucoup de travail à faire au niveau de la mécanisation de l'épandage de ces produits-là comme tel, le suivi agronomique comme tel. Puis c'est sur des superficies énormes. Quand on parle qu'actuellement, là, 150 millions de plants qui est reboisé par année, c'est des milliers, des milliers et des milliers d'hectares, là, dans des zones aussi qui doivent être accessibles. Mais c'est sûr que ce serait un monde idéal, là, ce que vous parlez, possible peut-être à moyen terme.

M. Roy: ...c'est juste parce que le phosphore est disponible à l'heure actuelle, les bioréacteurs sont en place, le gouvernement en autorise un peu partout, et on se ramasse avec une quantité impressionnante de phosphore disponible pour aider... Bien sûr, on fait toujours... on parle des cours d'eau, on fait toujours attention, abstraction des endroits où il y a des cours d'eau, mais ça, c'est une ressource qui existe présentement, qui est là, qui est facilement épandable parce que c'est une poudre, donc ça peut être facilement épandable.

M. Gohier (Richard): Oui. C'est sûr qu'éventuellement ça pourrait bonifier la croissance des arbres, avoir des rotations beaucoup plus rapides et, à ce moment-là, avoir une intensification par mètre carré, là, du nombre de mètres cubes qui pourrait être récolté.

M. Roy: J'aimerais que vous me parliez... Parce qu'il y a un dossier qui est très important depuis le début, on parle de biomasse. Si on se réfère simplement à des images que vous avez, qu'on a tous vues ici, où nos anciens bûcherons sortaient leur bois un à la fois ou deux à la fois avec leurs chevaux, ou leurs boeufs, ou leurs orignaux, dans certains cas, et qu'on laissait les fameuses traînées où le sol était gratté par la sortie de ces billots-là, donc on avait des endroits qui étaient supposément très fertiles au reboisement. Aujourd'hui, dans certains endroits où les coupes forestières ont été mal faites, bien on a bien sûr des andains monstrueux, des endroits où c'est difficile d'aller reboiser, puis je plains justement les planteurs dans ces situations-là. Mais j'aimerais ça que vous me parliez de biomasse. Vous, vous avez besoin de richesse au niveau des sols pour que vos sols soient bons. Vous savez qu'il y a une filière biomasse qui s'en vient, qui est là, qui est actuelle et qui va enrichir le domaine forestier et enrichir les régions avec la biomasse. On peut le faire si on le fait de façon très professionnelle. Vous, comment vous voyez ça avec les plants qu'on doit planter et la biomasse qu'on doit ressortir des forêts?

M. Paquet (Dany): Moi, en tout cas, j'ai eu l'occasion d'aller en Suède dernièrement, je pense qu'il ne faut pas réinventer la roue. Je ne veux pas dire que tout est bon de ce qui se fait dans les pays scandinaves, mais, au niveau du Québec, on a quand même des essences... des pays qui se ressemblent, avec des bons potentiels, ils font de la biomasse dans ces pays-là depuis déjà plusieurs années, et il y a des endroits que ça peut se faire, et il y a d'autres endroits que c'est peut-être des sols plus fragiles, il faut faire attention. Allons chercher l'information qui existe, puis je pense que, si on peut augmenter le potentiel énergétique du Québec en utilisant la biomasse, bien chapeau! et ça va possiblement donner un peu plus de travail dans nos régions aussi parce que c'est un produit qui, présentement, est resté sur le parterre de coupe.

M. Roy: D'ailleurs, c'était le but du phosphore de tout à l'heure et même de l'épandage. Parce que, là, on me parle du phosphore d'un côté, mais, dans le même produit, on va avoir d'autres minéraux qui vont être importants et qui pourraient servir, dans nos forêts, à aller chercher justement les terres qu'on appauvrirait un peu en enlevant l'excédent de biomasse qui nous servirait à faire d'autre chose. Donc, on peut avoir un complément, on peut avoir un travail qui est là. Et, je l'ai dit en commission, on a tendance, au Québec, à toujours vouloir avoir un modèle québécois. Et la roue, les gens l'ont déjà inventée ailleurs, c'est tellement facile de prendre le modèle et de s'en aller avec.

Maintenant, il y a un dernier point qui m'interpelle, c'est que ces forêts-là des autres pays sont, bien des fois, des monocultures, et on reproche toujours de reboiser toujours la même chose. Comme, par exemple, dans la réserve de Matane, on a parlé de l'épinette noire, où on implantait tout simplement de l'épinette noire, puis on dit: Ce n'est pas ce que ça prend pour l'orignal. Donc, vous, qu'est-ce qu'on fait avec justement les reboisements, mais tout de la même espèce ou.... Vraiment, est-ce qu'on est rendu diversifié ou si on s'en va vers de la monoculture?

M. Paquet (Dany): Moi, je trouve qu'on diversifie la forêt. Parce que, moi, je suis originaire du Bas-Saint-Laurent, c'est une sapinière à bouleau blanc, sapinière, et on reboise depuis... depuis 20 ans, on reboise d'épinette, on reboise d'épinette blanche, d'épinette rouge, d'épinette de Norvège et de l'épinette noire, mais on fait... Puis le reboisement, finalement ce n'est pas l'ensemble du territoire qu'on reboise, là. On ne reboise pas 10 % de notre territoire, ça fait qu'on ne fait pas de monoculture. Il faut faire... Il y a des secteurs, on fait des petits secteurs de monoculture, mais, par rapport à la grande forêt, là, c'est très peu.

M. Roy: L'épinette de Norvège, c'est une épinette qui pousse beaucoup plus vite que les autres, mais est-ce que la capacité du bois... bien, en tout cas, c'est ce qu'on me disait, est-ce que la fibre de bois est aussi bonne que les autres épinettes ou bien si on dit: Ça, c'est juste pour avoir du bois debout le plus rapidement possible?

M. Gohier (Richard): On n'est pas des spécialistes, là, de la fibre comme telle, mais je vous dirais, en gros, que l'épinette de Norvège et l'épinette blanche ont quand même des similitudes. Et l'épinette de Norvège a une croissance très rapide, assez intéressante, on a plus un problème avec un insecte actuellement, là, qu'il faut contrôler. C'est pour ça que ça limite actuellement le reboisement de l'épinette de Norvège.

M. Roy: O.K. Une question courte, deux volets. Les pépinières sont situées où en région, s'il vous plaît? Et est-ce qu'on a acheté, dans les dernières années, des arbres qui venaient de l'extérieur? Est-ce qu'on a de la compétition qui vient des autres provinces ou si on insiste pour que ce soit tout au Québec? Puis dans quelles régions ils sont?

M. Gohier (Richard): La politique du reboisement du ministère est très, très bien encadrée. On utilise des plants qui sont produits dans les pépinières du Québec à 100 %. Et reboiser dans les zones écologiques, ça, il y a un travail immense qui est fait du côté du ministère, puis on est très avant-gardiste de ce côté-là en augmentant aussi les rendements. Bon, les pépinières sont... il y a 18 pépinières privées actuellement. Si on parle de l'ouest, il y en a dans l'Outaouais, il y en a en Abitibi. Il y en a au Saguenay?Lac-Saint-Jean, il y en a sur la Côte-Nord, il y en a en Gaspésie, il y en a dans le Bas-Saint-Laurent, il y en a dans la Mauricie...

Une voix: ...

M. Gohier (Richard): ...la Beauce, oui.

M. Roy: Merci.

M. Gohier (Richard): Bienvenue.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci beaucoup. Alors, je passerai maintenant la parole au député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, madame, messieurs, bienvenue à cette commission parlementaire. Merci de la contribution que vous y apportez, c'est une connaissance de plus qu'on a, tu sais. Vous marquez dans votre document, en page 7, que l'Office des producteurs fait partie intégrante de la Loi de mise de marché des produits agricoles et vous mettez, à la fin du paragraphe, le deuxième paragraphe: «L'introduction d'un nouveau régime forestier, incluant les stratégies d'aménagement à mettre en place et la création [soi-disant des nouvelles] sociétés d'aménagement des forêts ? ça peut être même un autre créneau que la société d'aménagement, mais vous le mettez en porte-à-faux ? devra considérer ce fait et, conséquemment, que des règles bien définies caractérisent la mise en marché de ce produit au Québec.» Vous voulez dire quoi?

M. Paquet (Dany): Bien, on veut dire simplement que, présentement, il y a un office des producteurs de plants forestiers, qui défend les producteurs parce qu'il y a eu un problème, on est régis par la Régie de marchés agricoles. Ce qu'on veut dire, c'est que, peu importe quel organisme qui fera l'achat des plants, à ce moment-là qu'il tienne compte de l'Office des producteurs de plants comme l'intervenant à privilégier lors d'achats, de prise de possession de plants forestiers au Québec.

M. Dufour: Vous avertissez de ne pas vous oublier.

M. Paquet (Dany): Exactement.

M. Gohier (Richard): C'est ça, parce qu'il y a un cadre légal. Il ne faut pas oublier qu'il y a un cadre légal, là, qui nous régit puis qui va régir aussi, dans la politique de reboisement, l'achat des plants comme tel puis...

M. Dufour: Vous disiez, Mme Simard, tout à l'heure qu'il y avait 1 200 travailleurs, on parle de travailleurs réguliers et de travailleurs à temps partiel. C'est quoi, le ratio, là, le quantum au niveau du régulier et du partiel? Puis combien de temps ils travaillent dans l'année, là, grosso modo?

Mme Simard (Claire): Je dirais qu'au niveau... c'est principalement des emplois à temps partiel, je dirais. La période où est-ce qu'il y a plantation des semis se fait environ, pour les premières pépinières, autour du mois de mars. Et la période intensive, c'est sûr que c'est la période d'été, où est-ce qu'il y a la livraison des plants, le travail du sol, etc., pour fermer les pépinières pour la période hivernale vers la fin octobre, environ.

M. Paquet (Dany): Juste pour rajouter que, si possible, on essaie de rendre éligibles nos gens à l'assurance chômage, c'est bien important. Et une grosse majorité de nos employés, c'est des employés féminins, qui est quand même à considérer. Ce n'est peut-être pas des extraordinaires salaires, mais ça donne souvent un deuxième salaire et ça maintient aussi des régions, là, qui ont de la difficulté économiquement, là.

M. Dufour: Alors, vous avez sensiblement les mêmes travailleuses et travailleurs à toutes les années parce que, bon, c'est du travail saisonnier, des fois c'est un deuxième emploi, mais ils proviennent de la région, puis vous avez une assurance. Donc, vous avez un équilibre par rapport aux employés que vous avez.

M. Gohier (Richard): Oui. C'est des gens très fidèles.

M. Dufour: Parfait. J'ai une papetière chez nous, à Forestville, dont je connais le directeur, qui est M. Brochu. Le collègue, tout à l'heure, posait une question, bien vous dites que vous avez aujourd'hui 18 pépinières privées. Vous avez mentionné où c'est qu'ils se situaient, j'en ai une à Forestville. Il y en a eu à Luceville ou dans le coin de Saint-Anaclet, je ne sais pas si... C'en est une qui est publique?

Une voix: À Luceville.

M. Dufour: À Luceville, hein? Quand je vais voir ma fille qui demeure à Luceville, je la vois, la pépinière où la track de chemin de fer. Combien ils en ont au niveau du réseau public? Est-ce que c'est à peu près la même grandeur...

Mme Simard (Claire): Il y en a six.

n (15 h 50) n

M. Dufour: Il y en a six. Et vous dites, à la page 16 du document, de revoir le partage des rôles et responsabilités. Vous avez parlé de recherche tout à l'heure et le fait que vous revienne la mise en marché. Est-ce qu'ils font de la mise en marché, eux, au niveau des plants? Est-ce qu'il y a juste vous? Comment ça fonctionne au moment où on se parle, là? Est-ce qu'on remet des pendules à l'heure par rapport aux recommandations que vous avez ou, au moment où on se parle, ils font de la production, eux autres aussi?

M. Gohier (Richard): C'est ça, bien, actuellement, c'est sûr qu'il y a un double rôle de la part du ministère, là, c'est lui qui fixe les normes, c'est lui qui négocie les contrats avec le secteur privé, auquel il confie actuellement, là, environ 65 % à 70 % du besoin en plants résineux, là, bon, en récipients comme tels. Ils produisent 100 % du feuillu, 100 %, bon, de toutes les autres productions comme telles. Bon. Enfin, le ministère, lui, il reçoit les demandes des reboiseurs, il établit le volume de plants qu'il a à produire, il rencontre l'Office des producteurs de plants forestiers et il met sur la table un pourcentage de plants, puis là on rentre en négociation pour établir le partage de ces volumes-là dans le réseau, le normatif et les prix. Il y des rencontres à chaque année.

Au niveau du public comme tel, les règles du jeu sont complètement différentes. C'est à l'intérieur de son réseau, il fait produire tant de millions de plants à ses pépinières gouvernementales, et ça rentre dans le réseau d'approvisionnement des industriels forestiers pour répondre à soit la stratégie de rendement soutenu, aux obligations légales d'un CAAF. C'est comme ça que ça fonctionne. C'est sûr que ça crée des tensions, c'est bien sûr, parce que, là, on a l'État qui a un double et triple rôle à certains moments. Bon, c'est historique, hein, il y a des éléments là-dedans, là, qui remontent à avant les années quatre-vingt, où le ministère était unique producteur, et, à partir des années quatre-vingt, bien il y a un partage, là, dans le réseau privé, dans le réseau public comme tel. Puis, dans toutes sortes de commissions où est-ce qu'il y a eu des échanges comme tels, bien on se rend compte que le secteur privé est à même de répondre à toutes les exigences du ministère, que ce soit au niveau du normatif, au niveau du volume comme tel à produire, et on serait capables de répondre à toute la commande à 100 %. Bien, c'est sûr que ça amène un débat politique, hein, c'est bien sûr.

M. Dufour: Merci. Je vais passer la parole à ma collègue.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, Mme la députée de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, vous avez quelques minutes, mais pas beaucoup.

Mme Morasse: Bonjour. J'entendais des producteurs de plants en serre privés qui voulaient démontrer l'importance que la provenance des plants, là, qu'on produit... à ce que les serres soient à proximité de la mise en terre. Vous nous avez parlé de votre réseau, là, comment faites-vous ce partage équitable là de la production parce qu'on vient qu'on grince des dents quand on sait que plus que la moitié de notre mise en terre provient d'une autre région...

M. Gohier (Richard): En fait, il y a deux éléments là-dedans. Au niveau physiologique, c'est qu'il n'y a pas de problème à faire produire des plants plus au sud, mettons, qui s'en iraient en Abitibi-Témiscamingue parce que les semences et les récipients, dans nos contrats, sont fournis par le ministère des Ressources naturelles, et la provenance des semences... pour une pépinière qui serait plus au sud, qui livrerait des plants en Abitibi-Témiscamingue, utilise des semences qui sont en provenance du réseau de vergers à graines du ministère d'Abitibi-Témiscamingue, par exemple. Ça fait que ça, il n'y a pas de danger de ce côté-là, les plants peuvent voyager, là, sans problème.

Au niveau du partage, bien, avec le ministère, il y a des balises quand même qui sont mises en place, des fois concilier ou... On est même allés en arbitrage dans les discussions qu'on a eues avec le ministère pour le partage justement des volumes, pour respecter certains critères de régionalisation dans un partage équitable. Mais le grand principe qui nous guide là-dedans, c'est qu'il y a un historique de production, il y a des pépinières qui sont en place depuis 25 ans comme telles, puis on veut éviter qu'on en déshabille une pour habiller l'autre. Ça, là, ça n'a aucun sens. Ça n'a aucun sens, puis il faut faire très attention à ça.

La Présidente (Mme Gonthier): 1 min 30 s, à peu près, Mme la députée.

Mme Morasse: J'aimerais vous entendre sur votre capacité à réagir soit à des demandes nouvelles comme la populiculture, qui prend son envol, là, des arbres à forte croissance, et également à de grands sinistres. On sait qu'à Senneterre, l'année dernière, plus de 10 ans de récolte ont passé sous les flammes, qu'il faudrait reboiser, mais on n'a pas immédiatement probablement la quantité pour pouvoir mettre en terre. Comment vous vous êtes organisés pour pouvoir répondre à de grands changements comme ça, de grands besoins?

M. Gohier (Richard): Dans le plant résineux ? très rapidement ? on a quand même des producteurs... Bon, justement, vous connaissez une pépinière qui est à Guyenne, qui est capable de produire du matériel en l'espace de neuf mois. Alors, c'est sûr qu'on a des producteurs qui sont capables de répondre assez rapidement à une demande, là, spécifique qui peut arriver suite à un incendie de feu de forêt ou une politique gouvernementale qui nécessiterait rapidement du reboisement.

Dans les autres essences, où on est absents actuellement, c'est sûr que c'est un rapport de force, de discussion avec le ministère comme tel. On est confinés actuellement à la production de résineux en récipients. On ne fait pas de peuplier, on ne fait pas de feuillu, on ne fait pas de résineux racines nues comme tels. Bon, Dany, je pense qu'il veut répondre à ça.

M. Paquet (Dany): ...juste vous donner un ordre de grandeur de ce qui est utilisé présentement. À l'ensemencement 2008 ? puis c'est les chiffres du ministère, là; l'ensemencement 2008 ? dans les productions de résineux, il y avait 151,3 millions d'arbres qui étaient ensemencés, l'ensemencement de 2008. Et, dans les autres essences, peuplier hybride, érable à sucre, bouleau jaune, chêne, etc., c'est 2,5 millions d'arbres. Ce n'est pas le gros volume. Puis il y a une pépinière présentement au Québec, qui est une pépinière publique, qui est spécialisée dans le feuillu, qui fait principalement cette production-là.

Nous autres, présentement, l'occupation des pépinières privées, on est aux alentours de 70 %. Ça fait que, si on a ensemencé 150... Je vous laisse faire le calcul, 151 millions d'arbres qu'il s'est ensemencé en 2008, incluant les pépinières publiques, puis on est à 70 %, on est capables de répondre assez rapidement à un grand besoin d'arbres. Et, tout dépendant du produit, on peut travailler aussi... Ça, c'est selon un historique, là. La capacité à installer des pépinières est plus grande que ça, parce qu'on a fait d'autres choses dans le temps aussi. On serait capables de répondre rapidement.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, M. Gohier, M. Paquet, Mme Simard, nous vous remercions de votre participation à cette commission.

Alors, je vais suspendre les travaux pour quelques instants et j'inviterais immédiatement l'Association des fabricants de panneaux de composites à prendre place à la table.

(Suspension de la séance à 15 h 57)

 

(Reprise à 15 h 59)

La Présidente (Mme Gonthier): ...s'il vous plaît!

Une voix: ...

La Présidente (Mme Gonthier): Bien, on reprend. Nous reprenons maintenant nos travaux. Alors, nous accueillons maintenant l'Association des fabricants de panneaux de composites. Alors, M. Bisson, vice-président des relations avec les gouvernements de l'association, si vous voulez bien nous présenter les gens qui vous accompagnent. Vous allez avoir par la suite 10 minutes pour faire votre présentation et vous pourrez échanger avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous.

Association des fabricants
de panneaux de composites

M. Bisson (Donald): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour. Premièrement, j'aimerais remercier les membres de la commission de bien avoir voulu nous accueillir ici, aujourd'hui, c'est très apprécié.

Alors, pour introduire les membres qui me joignent aujourd'hui: à ma droite immédiate, Louis Brassard, P.D.G. de Tafisa, M. Sylvain Martel, directeur des approvisionnements de Tafisa; à ma gauche immédiate, M. James Hogg, qui est président et chef de direction de Uniboard, et M. Donel Galipeau, vice-président ressources forestières de Uniboard.

n (16 heures) n

Trois éléments seront au coeur de notre présentation et sont vitaux pour assurer la survie de notre industrie: le premier, la sécurité de nos approvisionnements en fibre; le deuxième, la réduction du coût de la fibre; et le troisième, au-delà des questions spécifiques du livre vert, les impacts sur l'industrie des panneaux de composites des subventions accordées par le gouvernement à la production d'énergie produite à partir de biomasse forestière.

L'Association des fabricants de panneaux de composites est une organisation nord-américaine fondée en 1960. Nous représentons au-delà de 90 % de l'industrie au Canada, aux États-Unis et au Mexique. Alors, on est une association nord-américaine. Au Québec, nous représentons tous les joueurs de l'industrie: Uniboard, Tafisa et Sacopan. Ces entreprises sont présentes dans six régions du Québec, à Sayabec, Val-d'Or, Mont-Laurier, Laval, Lac-Mégantic et Sacré-Coeur.

Le Québec est le deuxième plus important producteur de panneaux en Amérique du Nord, avec 14 % de la capacité de production, et nos installations sont des plus modernes de l'industrie. Au Canada, le Québec représente au-delà de 60 % de la capacité de l'industrie. Puis j'aimerais spécifier, à ce moment-ci, là... Ça fait que, tout le monde, on se comprend, nos produits, c'est le panneau de particules, le MDF et le «hardboard», que vous connaissez tous, vos armoires de cuisine, des moulures, des planchers, etc., juste pour se mettre dans le contexte, là, que tout le monde comprenne qui on est.

Les retombées économiques de nos usines sont importantes pour les régions du Québec: 1 700 emplois directs, plus de 60 millions de dollars en masse salariale et plusieurs millions de taxes provinciales et municipales.

Notre industrie a été fondée sur les principes du développement durable. Nos usines valorisent annuellement des milliers de tonnes de matières ligneuses résiduelles qui étaient autrefois brûlées ou enfouies dans le sol. En février 2008, face aux pressions macroéconomiques, à la baisse de disponibilité des matières ligneuses et à la hausse des prix de la fibre, Uniboard a été contraint de fermer son usine de La Baie, au Saguenay, pour la relocaliser aux États-Unis.

Malgré nos installations modernes et notre importante capacité de production, l'industrie québécoise du panneau est en sérieuse difficulté. Notre industrie est fortement dépendante des scieries qui nous fournissent les planures et les sciures qui entrent dans la fabrication des panneaux. Or, les conditions du marché ont changé depuis que le modèle forestier québécois a été mis en place. Les possibilités de coupe ont été réduites de 35 %, la filière québécoise n'est plus parmi les producteurs à bas coûts, et le marché du bois d'oeuvre est en forte baisse aux États-Unis. Sous le régime actuel, le sort de notre industrie est lié à la santé économique de l'industrie du sciage, qui est en rationalisation.

Maintenant, je vais laisser la parole à M. James Hogg, président de Uniboard.

M. Hogg (James N.): L'offre de fibre. Les difficultés dans le sciage ont eu des conséquences désastreuses pour notre industrie. Entre 2005 et 2007, la production de sciures et rabotures a diminué de 24 %, et, selon les derniers chiffres, la baisse sur la période de 2005 à 2008 est de 57 %.

Hausse des coûts de production. Depuis 2002, les coûts de production des usines de panneaux de l'Est du Canada ont augmenté de 46 %. Cette hausse est attribuable au prix de la résine, qui a augmenté de 76 %, et au prix de la fibre, qui a augmenté de 44 %. Et c'est seulement dans l'Est du Canada. Vous comprendrez qu'avec l'augmentation des coûts de la fibre la rentabilité de l'industrie est frappée de plein fouet.

Nos marchés. Les États-Unis sont le principal marché de panneaux de composites québécois. Au cours des dernières années, la compétitivité de nos usines a été doublement minée sur ces marchés. Le prix de la fibre a augmenté de 44 % au Canada, la hausse n'a été que 10 % dans le Sud-Est des États-Unis. D'autre part, avant la chute récente du dollar canadien, l'augmentation de prix de nos produits aux États-Unis a été complètement annulée par la force de notre devise.

Les subventions à l'industrie de l'énergie à partir de biomasse. La rationalisation dans l'industrie du sciage n'est pas la seule responsable de cette forte augmentation du prix de la fibre. L'émergence d'une industrie de l'énergie produite à partir de la biomasse forestière subventionnée par Québec et Ottawa a créé des pressions additionnelles sur la demande de fibre et de sévères distorsions au niveau du prix. Grâce à ces subventions, les producteurs d'énergie à partir de biomasse forestière sont en mesure d'acheter les produits conjoints issus de la transformation du bois à un prix plus élevé que le joueur non subventionné comme nous.

Les subventions à l'industrie de la biomasse, granules et bûches. Déjà, nous ressentons les effets du marché européen du carbone. Depuis 2003, la demande de sciures et rabotures pour la production de granules et de bûches a crû de 17 % par année, soutenue principalement par l'Europe. Maintenant, la consommation de sciures et de planures à des fins énergétiques représente 26 % de la fibre disponible. Or, dans un contexte de rationalisation des scieries et une offre de fibre qui ne cesse de diminuer, cette proportion pourrait augmenter dans un avenir proche, les granules à base de bois comprimé créant peu de valeur ajoutée.

Mesures mises en oeuvre par Québec et l'industrie. En 2005, le gouvernement a reconnu les difficultés d'approvisionnement des industries de panneaux et du carton et publié le document intitulé Pistes ayant pour but d'atténuer la diminution des volumes de sciures et de rabotures. Or, trois ans après la publication de ce document, la production de fibre a chuté de plus du double, soit de près de 600 000 tonnes anhydres, et les solutions proposées n'ont pas permis de dégager le volume escompté.

Notre industrie a aussi mis en place des mesures visant à limiter la perte de rentabilité causée par l'augmentation du prix de la fibre et à diminuer le lien de dépendance envers ses fournisseurs. Mais, malgré les efforts déployés par Québec et l'industrie, la situation demeure très, très critique, et le gouvernement doit agir. Avec ça, je laisse la parole à Louis Brassard.

M. Brassard (Louis): Merci, James. Donc, j'ai quatre minutes de recommandations. Je ne sais pas s'il me reste quatre minutes?

La Présidente (Mme Gonthier): Pas tout à fait, non.

M. Brassard (Louis): Sinon, ça me fera plaisir à répondre à des questions touchant les recommandations.

La Présidente (Mme Gonthier): Oui.

M. Brassard (Louis): Donc, comme il a été dit, l'enjeu primordial pour l'industrie des panneaux est un approvisionnement en fibre sécurisé et un prix compétitif. Les mesures que nous proposons au gouvernement sont de trois ordres.

D'abord, la gestion des forêts québécoises et le livre vert. Alors qu'il a bien servi le Québec par le passé, le modèle forestier s'avère aujourd'hui coûteux et inefficace du point de vue économique. Sous ce régime, qui a pour fondement le lien CAAF-usine, les considérations locales ont éclipsé la recherche d'économies d'échelle. Cette façon de faire a nui au développement économique de nos régions. Nous sommes inquiets que la réforme proposée entraîne les mêmes conséquences, que... des préoccupations d'une MRC ou d'une région pourraient-elles reléguer au second plan les besoins d'une usine voisine qui est située à l'extérieur de cette région?

Pour notre industrie, il est donc essentiel que le gouvernement précise la gouvernance des sociétés d'aménagement et des forêts de proximité. Notamment, nous devons avoir notre voix au sein des conseils d'administration des sociétés d'aménagement. Il est essentiel que le gouvernement assure un accès suffisant à la fibre tout en préservant la pérennité de nos forêts. Particulièrement, les contrats entre les membres du CPA et les détenteurs actuels des CAAF doivent être automatiquement reconduits sous les nouvelles garanties d'approvisionnement, et ce, jusqu'à l'échéance desdits contrats.

Si un bureau de mise en marché du bois est créé, il est essentiel que celui-ci prenne la forme d'un réel libre marché et qu'aucune industrie ne soit favorisée au détriment d'une autre.

n (16 h 10) n

Mais, à elles seules, ces propositions ne règlent pas nos problèmes d'approvisionnement en fibre. Pour être complète, la solution doit sortir du cadre du livre vert et adresser la question des subventions à la production d'énergie produite à partir de la biomasse forestière.

Donc, notre deuxième recommandation demande au gouvernement de mettre fin aux distorsions qu'il a introduites dans les marchés de fibre. Trois options sont envisageables. Premièrement, le gouvernement pourrait éliminer immédiatement les subventions accordées à la production d'énergie à base de biomasse forestière. Deuxièmement, le gouvernement pourrait offrir les mêmes avantages à tous les utilisateurs de fibre en subventionnant non pas le capital, mais plutôt la production de fibre comme telle. Donc, l'ensemble des utilisateurs de fibre, de cette façon, s'en trouverait gagnant.

Toutefois, nous considérons que, pour soit des raisons politiques ou de commerce international, ces deux premières options pourraient être difficilement réalisables. C'est pourquoi notre troisième recommandation de ce point-là est que le gouvernement devrait plutôt favoriser l'utilisation de produits conjoints issus de la transformation du bois, soit les copeaux, les sciures et les planures à des fins de création de valeur ajoutée et en interdire la vente aux producteurs d'énergie produite à partir de biomasse et de granules. Cette option garantirait une meilleure rentabilité sociale de la fibre. En effet, l'industrie des panneaux crée plus d'emplois et de valeur ajoutée par tonne métrique anhydre de fibre que l'industrie énergétique et, en plus, notre industrie séquestre les gaz à effet de serre durant la vie utile de nos produits. Il faut dire aussi... il faut souligner que notre industrie est en soutien à toute une chaîne de fabrication de nos clients, donc plusieurs entreprises québécoises, fabricants de meubles, de stores, Industries de la Rive Sud, Lacasse, Teknion, et j'en passe. À peu près 1 000 cuisinistes au Québec ont besoin de nos panneaux pour s'approvisionner et eux-mêmes, à leur tour, fabriquer des meubles.

Il est aussi essentiel qu'un contrôle gouvernemental approprié soit effectué, c'est-à-dire des inspections et des amendes en cas de faute. Actuellement, rien ne garantit que la sciure et la raboture ne soient pas utilisées pour produire de l'énergie. Une fois l'équipement acheté et la subvention reçue, l'utilisateur peut soit brûler de la biomasse forestière soit brûler de la sciure, et, dans une cour à bois, les deux piles peuvent être côte à côte.

Finalement, notre dernière recommandation vise à augmenter la disponibilité de fibre. Ensemble, notre industrie, au Québec, nous consommons environ 1,6 million de ce qu'on appelait anciennement des résidus forestiers... 1,6 million de tonnes de résidus forestiers. Par contre, il y a environ un demi-million de tonnes de bois qui est enfoui par année au Québec, du bois de démolition et du bois de construction... de nettoyage. Alors, nous recommandons au gouvernement de favoriser la valorisation du bois recyclé. Dans nos usines, nous pouvons utiliser ces bois-là pour fabriquer des panneaux.

Le Québec gagnerait à regarder un peu qu'est-ce qui se passe ailleurs. Entre autres, aux États-Unis, dans les États du Massachusetts et le New Hampshire, il est interdit d'enfouir les déchets de bois, et ça a créé toute une nouvelle industrie de revalorisation de ces produits-là. Il en coûte, en Nouvelle-Angleterre, environ 100 $ la tonne pour enfouir, alors qu'ici ça coûte à peu près 30 $ la tonne. Donc, ça a généré, de cette façon-là, une nouvelle industrie. Et notre usine à nous, on est situés à 10 km, à vol d'oiseau, de la frontière du Maine, donc on s'approvisionne davantage des États-Unis pour ce type de bois.

Donc, les recommandations que nous formulons vont bien au-delà des considérations du livre vert et la gestion des forêts québécoises. Le gouvernement doit agir rapidement afin d'assurer un accès à la fibre sécurisé et à un prix compétitif. Toutefois, tant que l'industrie de l'énergie produite à partir de biomasse forestière continuera d'être subventionnée au détriment des producteurs de panneaux, la survie de notre industrie sera menacée. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, merci, messieurs. Je vais céder immédiatement la parole à Mme la ministre.

Mme Boulet: Alors, merci beaucoup, messieurs de l'Association des fabricants de panneaux de composites. Alors, merci pour votre présence, merci pour votre présentation. Je vais y aller tout de suite avec ma première question. Vous demandez que les changements qui seront apportés au régime forestier n'entraînent pas de distorsion du marché de la fibre et que les contrats conclus entre les bénéficiaires de CAAF et vos membres concernant l'achat de planures et de sciures soient reconduits sous les nouvelles garanties d'approvisionnement. J'aimerais juste que vous nous précisiez votre demande, tout simplement. Et, plus généralement, êtes-vous en faveur de l'instauration d'un marché concurrentiel de bois? Est-ce que vous êtes pour le bureau de mise en marché de bois public, là? Est-ce que vous êtes en faveur de ce principe-là, oui ou non?

M. Bisson (Donald): Donel, tu peux-tu prendre ça?

M. Galipeau (Donel): Bien, concernant votre première question, nous avons des contrats à long terme de signés avec des détenteurs de CAAF présentement. Ça a toujours été le cas, et ces contrats-là sont déposés au gouvernement du Québec comme protection, comme garantie de suppléance. Et, s'il y a des changements aux attributions, qu'on passe de CAAF à garantie d'approvisionnement, ce qu'on souhaite, c'est que ces mêmes protections là soient reconduites dans la nouvelle forme de garantie d'approvisionnement.

Concernant la question du libre marché de la fibre, on a bien mentionné dans notre document détaillé que c'est une option, pour nous autres, qui est correcte en soi en autant qu'il y ait un véritable marché libre de la fibre, qu'il n'y ait pas de prix plancher puis que les quantités soient suffisamment grandes d'offertes sur le marché pour ne pas qu'il y ait de distorsion reliée à l'offre et la demande. Puis ça, évidemment, bien, nous, on dit ça parce que ce sera au bénéfice de nos fournisseurs. Parce que, nous, présentement, on n'est pas tellement impactés par ça, puisqu'on achète les résidus des producteurs de bois d'oeuvre. Mais on pense que le libre marché, pour eux, serait une solution viable en autant que c'est un réel libre marché.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard: Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Vous nous dites que vous souhaitez réduire votre dépendance des scieries. Pour ça, vous demandez de pouvoir obtenir des garanties d'approvisionnement. Pouvez-vous nous préciser votre demande?

M. Martel (Sylvain): En fait, au niveau... Ce qu'on veut, essentiellement c'est garder ce qui était couvert par l'ancien régime au niveau des garanties de suppléance, si un de nos fournisseurs n'est pas capable, pour toutes sortes de raisons, de nous livrer le matériel, tel qu'entendu au contrat et tel qu'entendu dans ses garanties d'approvisionnement, qu'on ait l'option d'aller chercher le bois et de le mettre en marché nous autres mêmes pour nous approvisionner des sous-produits.

La Présidente (Mme Gonthier): Oui, alors le député d'Iberville, s'il vous plaît.

M. Riedl: Alors, bienvenue chez nous. Merci pour votre présentation. Vous vous dites en désaccord avec l'idée d'instaurer un prix plancher pour la tenue d'enchères sur le bois des forêts publiques. Pouvez-vous nous expliquer les motifs de votre position?

M. Martel (Sylvain): De notre côté, on est habitués à transiger avec des scieries qui sont du niveau frontalier qui, eux, sont habitués à transiger avec les Américains, où la vraie notion de libre marché est en opération. Donc, si on impose un prix plancher, on comprend mal comment le marché va fonctionner, étant donné qu'il faut que la tendance suive. Si ça baisse, ça baisse; si ça monte, ça monte. Puis il faut que les acteurs principaux puissent trouver leur bois, sinon arrêter d'opérer ou augmenter leur capacité de production dépendamment des marchés.

La Présidente (Mme Gonthier): Oui, Mme la députée de Laporte.

Mme Ménard: Merci. Le projet de réforme du régime veut laisser plus de place aux régions dans la gestion forestière. Vous mentionnez craindre un contrôle régional accru. Pouvez-vous nous expliquer davantage vos craintes et nous indiquer quelles mesures devraient être envisagées?

M. Martel (Sylvain): C'est que, dans le contexte mondial actuel, pour survivre dans une industrie comme la nôtre, il faut être de contexte international, donc produire 24 heures par jour, sept jours par semaine avec le maximum de valeur ajoutée dans nos produits. Donc, on transige avec énormément de régions au Québec. Tafisa seulement couvre à peu près le deux tiers du Québec. On se voit mal interagir avec chacune des MRC, avec tous les régionalismes que ça peut comporter. Il faut qu'il y ait une libre circulation de tous les résidus qui peuvent se générer au niveau des produits conjoints de l'industrie de transformation, c'est une question de survie autant pour nous que pour les papetières du Québec.

La Présidente (Mme Gonthier): Ça va? Alors, je céderais maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet.

n (16 h 20) n

M. Roy: Merci beaucoup, Mme la présidente. Messieurs, bonjour et bienvenue. Vous me voyez quand même sous un certain choc, et je vais m'expliquer. C'est sûr qu'on veut tous sauver nos emplois, on veut tous sauver vos usines, on veut tous sauver l'industrie forestière, mais en même temps on veut faire baisser le prix de la fibre. Donc, dans le fond, tout le monde la voudrait pour rien. Puis on l'a eue pour rien, on l'a eue pour pas cher depuis des années, des années, des années, on en a pris une bonne quantité, on voit l'état de nos forêts à l'heure actuelle. Tant mieux, ils se refont, mais la génération après moi... je vais avoir le temps de crever avant que je recommence à voir mes arbres neufs dans tous les systèmes. Là, vous nous demandez un autre point. Depuis le début qu'on parle de biomasse, et là vous voudriez qu'on élimine cette pierre-là, qui est mondiale, pour vous laisser ce bois-là? J'aimerais ça juste que vous m'expliquiez ça.

M. Bisson (Donald): Il y a une chose qu'il faut comprendre, je pense que c'est le devoir de l'État de s'assurer que la bonne fibre va au bon endroit. Puis, quand on regarde, aujourd'hui, qu'est-ce les usines de panneaux de composites génèrent comme richesse pour le Québec comparativement à brûler ces résiduels de bois, il faut regarder qu'est-ce qu'on crée au point de vue d'emplois, au point de vue de développement régional. Puis il faut mettre en contexte aussi que l'industrie de meubles au Québec, qui est une industrie très importante pour le Québec, se fie sur notre industrie pour les alimenter de panneaux. Puis qu'est-ce que notre industrie demande, c'est de grandir le panier de fibre disponible à tout le monde. Puis, où on a le plus de difficultés, c'est qu'on se voit aujourd'hui en compétition avec des industries qui sont hautement subventionnées par les gouvernements, que ce soit le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux, des octrois directs, des avantages fiscaux, etc., pour le produit qui est énergétique. Alors, on subventionne le produit, mais on ne subventionne pas la matière première. Ça fait que notre industrie, on va tous à la même pile de bois, mais la nouvelle industrie à base de biomasse, l'industrie énergétique à base de biomasse, elle est favorisée. Elle a déjà de l'argent dans ses poches qui parvient des gouvernements et, tout à l'heure, va parvenir des crédits carbone. Alors, nous autres, on est désavantagés, on ne peut pas être en compétition égale. Alors, le plancher n'est pas égal pour tout le monde.

M. Roy: ...

M. Brassard (Louis): En complément, on est en faveur de la production d'énergie à base de matières renouvelables où... Et, dans le document détaillé, ce qu'on a voulu détailler justement, c'est au niveau de la définition de ce que c'est, la biomasse forestière. Et la biomasse forestière, ce n'est pas de la sciure, ce n'est pas de la planure, ce n'est pas des copeaux parce que ces produits-là peuvent être mis en valeur. Par contre, dans une papetière où il y a une usine de cogénération et une usine de fabrication de pâte ou de papier, comme je disais tout à l'heure, dans la cour à bois ces piles de matériaux là sont une à côté de l'autre, et de quelle façon on va réglementer que la vraie biomasse va à la production d'énergie et que les autres produits vont à la production de produits à valeur ajoutée? C'est là qu'est notre question.

M. Roy: Pour avoir survolé le Québec longuement, et même cette année encore, pour vérifier pour la tordeuse des bourgeons, on se rend compte que, contrairement à ce que les gens peuvent penser, on a encore beaucoup de bois. Mais ce même bois là est de plus en plus loin, de plus en plus difficile à aller chercher et il va être de plus en plus coûteux. Et on ne peut pas se battre contre les industries de bois. Chez nous, là, les industries de meubles ont toutes fermé, Meubles Morigeau et dernièrement... Teknion est dans ma cour, est chez moi à Montmagny, donc je connais très bien l'importance que le bois peut représenter. On a une région, chez nous, qui est touchée de plein fouet par la crise forestière, comme plusieurs de mes confrères et consoeurs ici. Donc, on est tous conscients de ça, on cherche, depuis le début, des solutions pour que tout le monde trouve leur compte. Les régions, parce qu'on parle de fonds d'autonomie régionale, on parle de développements régionaux, on parle de forêt de proximité, on parle d'essayer de laisser en région... On disait, cette semaine: Malheureusement, il va falloir qu'on en ferme, des usines, parce qu'on en a trop créé, on a trop créé un marché artificiel, puis, aujourd'hui, il faut faire une saine rationalisation, puis malheureusement elle va se faire toute seule.

Moi, je veux juste qu'on regarde ensemble ou que vous nous apportiez des solutions en disant qu'est-ce qu'on fait, à qui on attribue du bois parce que, là, on coupe du bois puis on fait des chips pour faire du papier avec du bois rond. À la limite c'était même défendu par le gouvernement, Puis, pour alimenter l'industrie papetière, on est rendu qu'on le fait. C'est parce que, là, on s'embarque dans une plateforme où, en réalité, on va essayer de trouver pour vous votre besoin. Parce que les industries, chez nous, ils sont rendus qu'ils vendent leur sciure, parce qu'on parle de troisième et quatrième transformation, ils sont rendus qu'ils vendent leur sciure directement en emballage sur le marché de New York, pilée à la main dans leurs camions, parce que c'est le seul moyen de rentabiliser un camion. Mais là, théoriquement, cette sciure-là, vous en auriez besoin, vous, pour vos panneaux. Est-ce que quelqu'un vous a fait l'étude ou vous êtes-vous approchés de la filière du saule osier?

Une voix: ...

M. Roy: Du saule osier. Non?

M. Galipeau (Donel): Bien, saule, oui. Osier, je ne suis pas certain, là.

M. Roy: ...saule osier va devenir, pour les gens qui veulent travailler au niveau de la biomasse, l'avenir du Québec. Il y a six producteurs de saule osier, et, dans les terres qui sont malheureusement en friche, on va pouvoir replanter ça. Et c'est un grand développement, et ça va devenir une richesse pour le Québec tantôt, une richesse régionale, ce qui va vous laisser de la place, à vous autres, pour la biomasse forestière. Au lieu d'aller chercher la biomasse pour créer les palettes puis créer les bûches, on va pouvoir créer les bûches et les palettes là, là. On ne parle pas de 25 ans, on parle dans les prochaines années, les prochains mois même. On est déjà rendus là dans notre région, donc on va pouvoir vous laisser la biomasse forestière. Mais il y en a à l'heure actuelle, il y en a énormément à aller chercher. Est-ce que votre industrie demande à ce que quelqu'un aille les chercher ou si vous êtes prêts à aller chercher ce qu'il y a dans le bois qui pourrait vous servir présentement?

M. Galipeau (Donel): ...et même on l'a fait à plusieurs occasions. Chaque fois que ça peut être économiquement... on le fait. Pour notre usine de Sayabec, on va en forêt régulièrement et pour les exploitations normales et pour les exploitations de biomasse, c'est-à-dire qu'on prend le bois avec l'écorce et on a réussi à trouver des méthodes pour fabriquer nos panneaux avec ça. En Abitibi, on fait la même chose et on a des projets pour le faire. Concernant la production de saules, on a un lien avec les gens de Champneuf présentement, il y a des plantations de saules qui sont faites dans lesquelles on participe, également dans la région de Mont-Laurier. Alors, certainement qu'on ne fait pas juste regarder les sciures, planures et crier après parce qu'elles s'en vont, on cherche des solutions. Mais la base comme telle de notre approvisionnement, on fabrique les panneaux depuis 1976, ça a toujours été fait avec des sciures, planures à cause d'une disponibilité assez grande et économique.

Il ne faut pas oublier que nos compétiteurs, nos clients sont aux États-Unis, et on compétitionne avec les producteurs américains qui... Ce que vous avez dit tantôt, c'est bien vrai, là, les coûts, les coûts, il ne faut pas juste parler de ça, mais les coûts des Américains, c'est la moitié des nôtres. C'est ça, même, tu sais, que ce soit dans les sciures ou dans les copeaux, c'est la moitié. Puis, avant ça, on avait au moins l'avantage de pouvoir se rendre facilement chez nos clients à cause de notre disponibilité de fibre, notre qualité de fibre et son prix. Ça, c'est en train de disparaître, puis c'est certain qu'on cherche, on passe notre temps à chercher des solutions parce que c'est notre plus gros problème.

M. Roy: Je tiens tout de même, en terminant, non pas à être critique, mais à vous féliciter sur ce que vous faites. Bien des fois, ce n'est pas tout le monde qui aime ça travailler avec ces panneaux-là, hein, c'est très particulier. Mais, pour le développement du MDF, ça a été quand même une partie importante de récupération de bois qui aide énormément à l'industrie à l'heure actuelle. Donc, juste pour la création de ce produit-là, la recherche et développement que vous avez faite, je tiens à vous féliciter là-dessus. Donc, vous ne faites pas... Je comprends très, très bien ce que vous recherchez, puis, nous autres, de notre côté, en même temps, on cherche à sauver pour la génération... La génération qui me suit, je cherche à sauver un peu ce que malheureusement on a pris abondamment. Donc, si on est capables de trouver un équilibre pour sauver votre industrie, puis sauver les régions, puis sauver les petits moulins... Tout le monde veut travailler dans le même sens. Donc, je vous demande simplement de continuer à nous apporter et chercher de bonnes idées, chercher de nouvelles technologies, et on sera derrière vous pour appuyer votre industrie grandement. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Je passerais maintenant la parole au député de René-Lévesque, s'il vous plaît.

n(16 h 30)n

M. Dufour: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, messieurs, merci pour les documents que vous nous avez remis, les graphiques. Merci de l'intervention et de l'implication que vous avez à cette consultation particulière.

Alors, je vois, dans le document qui nous a été remis aujourd'hui, le graphique concernant les six ? mais vous en aviez sept, maintenant six ? usines, là, qui sont présentes en région, dont Sacré-Coeur, Boisaco, qui est dans mon comté, le comté de René-Lévesque, et Sacopan, effectivement qui fait des produits à valeur ajoutée et qui s'en sort assez bien au moment où on se parle parce que, justement, ils font des produits à valeur ajoutée au niveau de leur industrie, dont je connais très bien M. Guy Deschênes.

Mes collègues vont avoir une question ou deux à vous poser. J'en ai une à vous poser, et vous l'avez... Vous émettez, dans les documents que vous nous avez donnés, des questionnements et vous émettez certains commentaires. Je voudrais éclaircir certains commentaires. On est en commission parlementaire, ça va faire trois semaines, on parle de régionalisation, est-ce qu'on parle de gestion de pouvoirs? Plusieurs nous disent que ça prend une ligne directrice du gouvernement, un peu ce que vous avez dit tout à l'heure, monsieur, mais il y a une forte tendance à ce qu'on régionalise. Les régions veulent s'accaparer certains aspects de la foresterie chez eux, que ce soit aménagement forestier, et on parle que ça pourrait être les conférences régionales des élus, les commissions des ressources naturelles. Il y en a qui parlent, comme vous avez dit tantôt, qu'effectivement, dans les MRC, c'est eux qui gèrent les schémas d'aménagement. Il y en a qui nous disent que ça prend un ensemble de partenaires autour de ce CA d'administration là. Il y en a qui nous disent qu'il ne faut pas que l'industrie soit là. Dans le document, à la page 25, vous dites qu'en plus d'être là vous voulez que l'industrie qui sont en région aient une place au CA, mais vous rajoutez que... mais également des entreprises clientes. Alors, j'aimerais ça que vous élaboriez davantage sur cet aspect-là parce que, là, c'est la première fois qu'on l'entend, là, depuis qu'on a commencé la commission parlementaire.

M. Brassard (Louis): Oui. On se doutait bien que ce serait un concept qui générerait une question. C'est sûr que nous sommes une industrie à capital très intensif. Une règle du pouce, là, pour créer un emploi, il faut investir à peu près 1 million de dollars. O.K.? Chez nous, là, à Lac-Mégantic, on a 300 employés. Bon, vous savez déjà à peu près, là, l'investissement total depuis 12 ans. Donc, de régionaliser, c'est bien, sauf que ça nous mettrait à la merci de décisions régionales à l'extérieur... dans des endroits où on s'approvisionne, mais dans l'extérieur de notre région où on aurait peu de contacts, peu d'accès avec le milieu politique, et ça mettrait en cause réellement l'investissement qu'on a fait. Nous, dans notre cas, on vient de réinvestir, et c'est un risque important pour... Je ne pense pas que nos investisseurs, que ce soient les nôtres ou que ce soit Uniboard, seraient intéressés à continuer à investir alors que réellement tu ne contrôles pas ton destin parce que c'est dans la main de gens qui sont à 100 km. Quand même, tu sais, ça dépend de la dimension des régions. Donc, on aurait un sentiment de vulnérabilité, compte tenu de la valeur de nos investissements.

Vous avez parlé tout à l'heure de Boisaco au niveau de valeur ajoutée, il faut mentionner aussi que, les gens qui sont représentés à la table, on est vraiment des leaders en Amérique du Nord au niveau de la valeur ajoutée. Presque dans toutes les usines au Québec, il n'y a pas seulement les panneaux bruts qui sont fabriqués, mais des panneaux de mélamine ou des planchers. Donc, réellement, c'est la tangente européenne, la façon européenne de faire des panneaux, de faire de la valeur ajoutée qui a été implantée ici, au Québec. Et le Québec est devenu un chef de file en Amérique du Nord avec des usines modernes aussi mais, comme je disais, des investissements très, très importants.

La Présidente (Mme Gonthier): M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault: Oui. Merci, Mme la Présidente. Dans les résumés de vos recommandations, le point 1, troisième volet, je dirais, là, sur la question du bureau de mise en marché du bois, vous dites que vous voulez que celui-ci prenne la forme d'un réel libre marché et qu'aucune industrie ne soit favorisée au détriment d'une autre. Alors, j'aimerais vous entendre un petit peu plus sur les craintes que vous avez parce qu'en même temps, dans votre autre document, là, à la page 55, quand vous allez un petit plus dans le détail de votre recommandation 1.3, là, vous dites, bon, qu'aucun prix plancher du bois ne soit fixé. C'est la demande que vous faites pour le libre marché. Alors là, j'essaie de voir... Il y a, dans certaines régions, quasiment des monopoles, là. Je pense au Saguenay?Lac-Saint-Jean où AbitibiBowater détient 80 %, voire même plus, là, des droits. Alors, est-ce que le libre marché, tel que vous le voyez, ne pourrait pas créer un déséquilibre entre les gros et les petits comme les petites scieries indépendantes, par exemple? Et pourtant vous avez l'air assez préoccupés dans votre mémoire ? et je le salue ? par la rentabilité sociale. Donc, rentabilité sociale, il me semble que c'est aussi de tenir compte d'une diversité et d'éviter un trop grand monopole dans un certain nombre de régions.

M. Galipeau (Donel): Vous savez, quand la situation va se présenter qu'on s'en va vraiment dans le libre marché, je ne pense pas, en tout cas avec notre historique, qu'on va être des joueurs très importants là-dedans et je n'ai pas la prétention d'avoir... nous n'avons pas la prétention d'avoir réfléchi aussi profondément à la question du libre marché que les entreprises que vous mentionniez tantôt, comme les grandes papetières ou n'importe quelle entreprise qui s'approvisionne directement de la forêt. En tout cas, nous, on a juste 10 % de notre approvisionnement total qui vient de la forêt. Nos réflexions font suite à des discussions qu'on a eues avec plusieurs de nos fournisseurs au cours des deux dernières années à ce sujet-là, les réflexions qu'on a partagées entre nous et les expériences qu'on a ailleurs aux États-Unis dans les libres marchés, et ce qu'on avait perçu dans le livre vert, c'était que le libre marché qui était proposé n'était pas un réel libre marché. Alors, ce qu'on a pris comme position ici, c'est que, s'il y en a un, on est loin d'être contre, mais il faut que ce soit un réel libre marché.

Je pense, pour répondre à votre question des grandes superficies occupées par très peu de joueurs, je pense que vous avez tout à fait raison que, ça, ça peut faire des distorsions. Et puis, sans relire notre texte, je pense que qu'est-ce qu'on dit, il faut, si on va dans ce sens-là, protéger les actions qui vont être prises contre les distorsions qui ne seront pas naturelles et qui vont pouvoir être dommageables aux parties qui sont là depuis longtemps historiquement.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, Mme la députée de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, il reste très peu de temps, deux minutes, question et réponse incluses.

Mme Morasse: O.K. Merci. Je vais essayer d'inclure les deux ensemble. Bonjour, messieurs. Ce document...

M. Dufour: ...

Mme Morasse: J'avais deux questions. Mais le document ici contient des mesures pour stimuler la transformation de fibre résiduelle n'ayant peu ou pas de preneurs comme les aires d'ébranchage, là, il y a un paquet de branches à... Aux dernières nouvelles, l'industrie du panneau, à moins qu'il y ait eu beaucoup de développements, là, je ne pense pas que ça se bouscule aux portes pour faire du panneau de branche ou du panneau d'écorce. Alors, je m'explique mal votre réticence à voir le Québec vouloir stimuler le monde du granule ou d'une transformation à valeur ajoutée pour les fibres qui, présentement, n'ont pas d'utilisateur.

M. Hogg (James N.): On peut utiliser presque tout, c'est la première réponse à ces questions-là. On travaille avec les fournisseurs de la biomasse à partir de la forêt, compagnies comme Cyclofor. On ramasse tout, tout et nous avons des systèmes de nettoyage pour utiliser presque tout. Comme mon collègue de Tafisa a dit, on peut utiliser le bois qui est déjà utilisé dans le bâtiment avec le nettoyage qu'on fait dans les usines. Ça veut dire presque tout qui ressemble à une fibre, on peut l'utiliser. C'est seulement une question de la mobilisation et du traitement.

n(16 h 40)n

M. Martel (Sylvain): Je pense qu'il faut mettre en nuance la différence entre la biomasse forestière et les produits conjoints qui viennent des différentes usines de transformation primaire. C'est sûr qu'il y a une catégorie de biomasse forestière qui peut être dirigée vers le brûlage, et puis ça, vous allez voir dans notre document, on est assez exhaustifs dans la définition et l'identification de ces différents types de produits là. Mais ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a des technologies européennes, on est... les deux compagnies ont des sièges sociaux importants en Europe et des implantations d'usines en Europe, les technologies existent. Pour vous donner un exemple, au niveau du bois recyclé, on a investi massivement à Lac-Mégantic pour prendre du bois de démolition, le nettoyer et le réincorporer dans notre panneau. Puis, nous, on pense que c'est la voie de l'avenir dans un certain domaine, en plus d'une partie de la biomasse forestière qui peut être réutilisée.

La Présidente (Mme Gonthier): Je vous remercie beaucoup. Alors, malheureusement, le temps est écoulé. Alors, messieurs de l'Association des fabricants de panneaux de composites, nous vous remercions de votre participation.

O.K. Nous allons suspendre nos travaux quelques instants, et j'inviterais immédiatement les gens de la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean à prendre place à la table.

(Suspension de la séance à 16 h 41)

 

(Reprise à 16 h 46)

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, nous allons reprendre nos travaux. Nous accueillons maintenant les gens de la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Alors, M. Simard, bonjour. Bonne fin d'après-midi. Alors, je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation et par la suite vous allez échanger avec les membres de la commission.

Conférence régionale des élus
du Saguenay
?Lac-Saint-Jean
(CRE du Saguenay
?Lac-Saint-Jean)

M. Simard (Georges): Donc, j'ai M. Bernard Généreux, qui est préfet de la MRC Domaine-du-Roy, à ma droite; j'ai M. Léonard Côté, qui est préfet de la MRC Lac-Saint-Jean-Est; j'ai M. Serges Chiasson, qui est chef d'équipe de la commission régionale sur les ressources naturelles et le territoire, le CRRNT; j'ai M. Gilbert Goulet, qui est préfet de la MRC Maria-Chapdelaine; et j'ai M. Bertrand Couture, qui est représentant de la MRC du Fjord-du-Saguenay; et j'ai avec moi M. Daniel Giguère, qui est directeur général de la conférence régionale des élus.

La Présidente (Mme Gonthier): La table n'est pas assez grande pour tous vous accueillir.

M. Simard (Georges): Au Saguenay?Lac-Saint-Jean, bien, une grappe, c'est plusieurs bleuets, hein?

La Présidente (Mme Gonthier): ...

M. Simard (Georges): Donc, j'y vais?

La Présidente (Mme Gonthier): Oui, allez-y.

M. Simard (Georges): Donc, Mme la Présidente, Mme la ministre, députés de l'Assemblée nationale, la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean remercie le gouvernement du Québec, et plus particulièrement son ministre des Ressources naturelles, M. Béchard, pour le courage et la détermination qu'il a eus de modifier le régime forestier actuel.

Nous remercions aussi les membres de la commission pour leur invitation à participer aux consultations particulières et auditions publiques sur le document de travail dans le cadre de la Commission de l'économie et du travail, et plus particulièrement de nous avoir permis de reporter notre présentation. Donc, merci beaucoup.

D'abord, un constat se dégage à partir d'un consensus régional qui remonte à plus de 30 ans: l'influence des régionaux n'a pas eu un grand impact sur la gestion forestière, qui est encore l'apanage de deux grands groupes, le gouvernement et son appareil, et l'industrie, détenteur des droits. Ce système a assez duré. Le régime actuel a atteint ses limites. Les régionaux profitent de l'opportunité créée par le livre vert pour amener à court terme un modèle de gouvernance axé sur la décentralisation et établissant les bases d'un véritable partenariat milieu, donc, travailleurs, décideurs municipaux, producteurs privés, industrie et gouvernement.

La région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est 106 000 km². C'est 277 000 habitants, quatre MRC, Domaine-du-Roy, Fjord-du-Saguenay, Lac-Saint-Jean-Est, Maria-Chapdelaine, regroupant 48 municipalités, plus une grande ville, Saguenay, ainsi qu'une communauté autochtone, Mashteuiatsh. C'est l'un des plus grands territoires forestiers du Québec, couvrant 85 688 km², ce qui représente 17 % de l'ensemble des forêts du Québec. C'est 200 fois l'île de Montréal.

À noter, 93 % de ce vaste territoire forestier est de tenure publique. 23 des 49 municipalités dépendent de l'économie forestière et sont qualifiées de mono-industrielles. Plus du tiers des emplois du secteur manufacturier sont reliés au domaine forestier. L'industrie regroupe six usines de pâtes, papiers et cartons, 21 scieries qui transforment 7,6 millions de mètres cubes de bois, une usine de panneaux, ainsi que trois usines de cogénération, et plusieurs usines de deuxième et troisième transformation réparties sur tout le territoire. De plus, le potentiel de la biomasse forestière de notre région, établi à plus de 838 000 tonnes métriques anhydres, est le plus important au Québec.

n(16 h 50)n

Quelques statistiques sur la région forestière du Saguenay?Lac-Saint-Jean: c'est la première région en contribution de redevances; c'est la première région pour sa possibilité forestière; c'est la deuxième superficie forestière, 8 414 000 hectares; 22,5 % des bois coupés de tout le Québec; 23 % des bois transformés de tout le Québec; un emploi sur trois est relié au secteur forestier; 25 000 emplois directs, indirects et induits; 11 500 emplois directs; 1,9 milliard en valeur de production.

Devant cette démonstration, nous pouvons, sans conteste, qualifier la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean comme étant la première région forestière du Québec. Et, compte tenu de l'importance de la forêt dans notre économie, nous voulons en obtenir la gestion. La décentralisation est une revendication maintes fois exprimée. Ce n'est pas un feu de paille, c'est un consensus revendiqué depuis des années par la région.

Nous avons énuméré, dans les pages qui suivent, là, une liste exhaustive d'événements qui le prouvent. Je vais en citer, entre autres, un. Le 6 novembre 2005, lors d'une consultation populaire faite en même temps que les élections municipales régionales, un mandat clair de la population régionale a été donné. En effet, 95 180 citoyens et citoyennes, donc 92,5 % de ceux et celles qui se sont exprimés, répartis dans 44 villes et municipalités de la région, ont donné le mandat aux élus municipaux de négocier une entente avec le gouvernement du Québec visant la décentralisation de la gestion des ressources naturelles.

Cette longue liste d'actions est la démonstration éloquente de la volonté régionale d'obtenir la gestion décentralisée, ce qui ultimement permettra le plein développement dans notre filière forestière régionale.

Le présent gouvernement a ouvert des portes, qui nous amène à croire à la décentralisation et à la revendiquer. Je vous fais grâce de la liste des événements et déclarations politiques que vous retrouvez dans les pages 9 et 10. Devant autant de déclarations et de faits ? parce que j'ai 10 minutes ? la région se dit tout à fait légitimée de proposer un modèle de gouvernance basé sur la décentralisation.

Nous demandons la mise en place d'un projet pilote de décentralisation de la gestion forestière dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. La réforme que propose le livre vert permet de revoir en profondeur le régime forestier. Les objectifs de cette refonte majeure sont: de se donner comme mission de construire le Québec de demain avec la forêt, et tout particulièrement innover dans les façons de gérer la forêt pour intégrer pleinement les valeurs de développement durable, assurer la pérennité des ressources forestières et en protéger la diversité; permettre une mainmise plus directe des régions et des collectivités à l'égard de leur avenir forestier; répondre aux enjeux de l'évolution et de la rentabilité de l'industrie des produits forestiers; intégrer les valeurs et le savoir des communautés autochtones; fournir des emplois stimulants dans des communautés et des régions qui renouent avec la prospérité.

À cet effet, le gouvernement propose la mise en place d'une entité régionale ayant la responsabilité d'aménager de manière opérationnelle les forêts du domaine de l'État. Le document de travail précise que cette entité sera une société d'aménagement. De l'avis des régionaux, cette approche n'est pas acceptable, puisqu'elle est le prolongement de la façon de faire actuelle et fait en sorte que les instances décisionnelles imputables sont encore reléguées à un rôle d'organisations que l'on consulte par obligation. De ce fait, le gouvernement du Québec doit se concentrer sur ses fonctions stratégiques de gestion de l'État et ramener auprès d'instances régionales imputables les responsabilités de gestion et d'opération.

Quant à revoir fondamentalement le régime forestier, la région affirme que l'on doit adopter un nouveau mode de gouvernance faisant appel aux instances imputables présentes sur le territoire que sont les MRC. La gestion forestière par ces instances est le véhicule tout indiqué qui permettra au Québec et à la région d'atteindre leurs objectifs sociaux, économiques et environnementaux. Cette approche vise la simplification de la gestion forestière et la simplification des structures, ce qui aura pour effet une diminution des coûts de la fibre et des gains de productivité essentiels à la relance de ce moteur économique qu'est la forêt. Ce mode de gouvernance devrait aussi permettre l'optimisation de l'utilisation des ressources de la forêt et maximiser la création de richesse au profit des régionaux. La région entend prendre exemple sur le mode de gestion des terres publiques intramunicipales délégué aux MRC pour définir son projet de gouvernance annoncé.

L'approche partenariale entre le milieu régional, l'industrie, la communauté autochtone et le gouvernement est la base de notre projet de décentralisation. Des mécanismes d'ajustement et d'arbitrage seront nécessaires, ce qui permettra de transcender les frontières administratives et forestières des territoires impliqués.

Pourquoi nous réclamons la gestion de la forêt vers des instances régionales imputables que sont les MRC? Parce que les régionaux sont les mieux placés pour répondre aux enjeux de la forêt, par exemple l'acceptabilité sociale, le développement régional et la création de richesse, le maintien de la productivité et de la biodiversité de la forêt boréale, le développement de la connaissance forestière;

Parce que la forêt est la principale base économique de notre région et que plusieurs collectivités en dépendent;

Parce que les intervenants régionaux ont la capacité d'établir des partenariats avec la communauté autochtone de Mashteuiatsh;

Parce que les intervenants régionaux ont la capacité d'établir des partenariats avec l'industrie;

Parce que nous pouvons faire mieux et plus avec cette ressource;

Parce que nous n'avons pas grand pouvoir d'influence sur la gestion de cette ressource dont l'exploitation est entre les mains de deux groupes, comme je le disais tout à l'heure, le ministère et les détenteurs de CAAF;

Parce que la région a une expertise en qualité et en quantité: plus de 150 ingénieurs forestiers; plus de 10 000 travailleurs spécialisés dans toutes les phases de l'industrie forestière; un consortium de recherche sur la forêt boréale à l'Université du Québec à Chicoutimi; le seul fonds de recherche accrédité en région dédié à la forêt boréale; une offre régionale de formations de niveaux secondaire, collégial et universitaire liées à l'aménagement de la forêt, aux opérations forestières et à la première, deuxième et troisième transformation du bois; une stratégie régionale de développement de la filière du bois; un créneau ACCORD en émergence ? produits structuraux et produits à valeur ajoutée à base de bois modifié thermiquement; une structure industrielle diversifiée de l'aménagement à la troisième transformation.

Et surtout parce que nous cumulons suffisamment d'expériences novatrices en gestion concertée du milieu forestier pour prétendre être en mesure de gérer efficacement la forêt qui nous entoure, dont: plusieurs ententes spécifiques de régionalisation axées sur les ressources, entre autres celles sur la gestion décentralisée et la mise en valeur du territoire public intramunicipal; une expérience pilote de premier plan de protection et de mise en valeur de la forêt privée; plusieurs expériences de gestion intégrée des ressources; plusieurs ententes de partenariat d'aménagement forestier du territoire intramunicipal sous CAAF entre l'industrie et les corporations locales et municipales...

La Présidente (Mme Gonthier): M. Simard, il faudrait conclure, s'il vous plaît.

Mme Boulet: ...M. Simard, je vais vous donner un peu de mon temps. Ça vous va-tu?

La Présidente (Mme Gonthier): O.K.

M. Simard (Georges): ... ? ah! je vous aime ? plusieurs conventions d'aménagement forestier; des projets régionaux de dispersion des coupes mettant à profit une approche écosystémique prenant en considération les feux, la dynamique de la pessière noire et le caribou forestier; la forêt modèle du Lac-Saint-Jean.

En réalité, la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean a la maturité, l'expertise, l'expérience, la créativité, la vision, le dynamisme et les principaux outils pour relever le défi de la gestion décentralisée de la forêt québécoise qui nous entoure.

Maintenant, la CRE et les MRC de la région proposent l'élaboration d'un modèle de gestion décentralisée de la forêt sur l'ensemble du territoire régional, qui sera présenté dans les prochaines semaines, selon les valeurs et la vision de décentralisation qui suivent. Notre modèle de gestion décentralisée abordera non seulement la structure de l'organisation, mais aussi les éléments énoncés dans le document de travail: forêt de proximité, stratégie d'aménagement, délimitation territoriale, fonds d'investissement, mise en marché des bois, bureau de mise en marché.

Notre souhait: la refonte du régime forestier, oui, mais prenons le temps de bien faire les choses. En conséquence, nous demandons à Mme la ministre et au gouvernement de retarder de deux ans le prochain calcul de la possibilité forestière, un délai raisonnable qui devrait permettre aux différents intervenants de livrer leurs plans et leurs travaux qui nourriront le nouveau régime forestier et qui auront une incidence sur les calculs du Forestier en chef. Sans ce délai, tous nos efforts de planification, d'orientation et de décision n'influenceront que l'horizon de 2018-2023, ce qui nous apparaît inacceptable.

En conclusion, la refonte du régime forestier est un projet majeur et structurant, un véritable projet de société régional, considérant l'importance de l'économie forestière pour notre région. L'objectif de notre projet est rassembleur et permettra d'établir une cohésion entre tous les intervenants forestiers régionaux. Nous sommes convaincus que seule la décentralisation nous permettra de répondre aux défis de demain, qu'ils soient économiques, sociaux ou environnementaux. Nous sommes un peuple forestier et nous le serons encore demain. Nous voulons préparer la forêt de demain pour nos générations futures. Notre projet de décentralisation, en terminant, est la meilleure avenue pour que la citation suivante du premier ministre du Québec se réalise: «Le défi que nous avons maintenant est de faire en sorte que cette forêt, si puissamment associée à notre passé, puisse être tout autant associée à notre avenir.» Merci.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci beaucoup, M. Simard. Alors, Mme la ministre.

n(17 heures)n

Mme Boulet: Alors, merci beaucoup, M. Simard. Alors, je voudrais saluer les gens qui sont avec vous, M. Côté, M. Généreux, M. Chiasson, M. Goulet, M. Couture. Alors, il y a eu beaucoup de papiers écrits sur votre visite, sur votre présence parmi nous. Alors, on est très heureux que vous soyez là. On aurait trouvé le moyen de vous entendre, soyez assurés. J'avais même demandé, si on n'est pas capable de les insérer parce qu'il n'y a pas de groupe qui se désiste... On aurait prolongé ? en tout cas, à tout le moins, je l'aurais proposé aux collègues de prolonger ? pour vous entendre. Vous avez dit que c'était une région forestière, on en est fort conscients, et c'est d'autant plus important de vous entendre.

M. Simard (Georges): Je voudrais profiter de l'occasion pour vous remercier. Et je n'en ai jamais douté, donc j'ai pris la chance, avec les gens de la conférence régionale des élus, de prendre le temps que ce document-là soit vraiment la région, la parole de la région, d'une seule et même voix. Donc, je vous dis, aujourd'hui, que ce l'est.

Mme Boulet: O.K. On est très heureux de vous avoir. Je vais y aller, d'entrée de jeu, avec ce que vous avez... Vous avez terminé sur cette note-là, et ça a fait sursauter le député de René-Lévesque. Il ne vient pas du Saguenay?Lac-Saint-Jean, là. Non, mais c'est parce que vous dites qu'il faut prendre notre temps et qu'il faudrait reporter le prochain calcul de la possibilité forestière. Alors, un, j'aimerais vous entendre là-dessus. Mais, deux, j'imagine que ça ne remet pas en question... Parce que la possibilité forestière, c'est une chose, mais que, les autres éléments du livre vert, j'imagine que, pour vous, ils sont importants. Le projet pilote, je vais revenir sur le projet pilote, là, dans ma deuxième question, mais vous souhaiteriez qu'on retarde le calcul de la possibilité forestière. Mais en même temps les autres éléments du livre vert, pour vous, est-ce qu'il y a comme urgence de les mettre en place?

M. Simard (Georges): Vous allez comprendre que, quand on va parler de décentralisation, donc nous serons à cette table-là justement pour discuter de toutes ces décisions-là. Donc, c'est pour nous tous des points qui vont s'attacher à cette gestion de la forêt. Donc, on pense que l'élément majeur, c'est de dire au gouvernement: Regardez, là, c'est chez nous. Je vais vous dire, même dans l'industrie, moi, à Dolbeau-Mistassini, j'ai une usine de papier, et on ne s'occupait pas de ce qui se passait là. À un moment donné, ils ont vendu l'usine de cogénération à Boralex, et c'est ce qui met en péril, en ce moment, notre papetière. Donc, vous comprendrez qu'à partir de maintenant les gens du milieu disent: On veut se mêler de cette forêt-là, et elle ne doit pas être gérée, on dit souvent, par chez nous, sur l'asphalte.

Mme Boulet: Alors, je vais vous demander de me parler un peu de votre projet pilote, là, parce qu'on a ouvert la porte pour des projets pilotes ? on l'a dit d'ailleurs à la région de l'Abitibi ? notamment sur la mise en marché des bois publics. Eux autres, ça, ça les intéresse. Chez vous, c'est peut-être plus la gestion régionale. Mais il y a une ouverture, là, pour... 2013, c'est loin. Puis, avant de dire: On va tout changer ça en 2013, peut-on se préparer à voir ce que ça va avoir l'air, est-ce que ça va être fonctionnel, opérationnel, est-ce que ça va être efficace? Et les projets pilotes nous permettraient de tester des éléments clés du livre vert, en tout cas dans ma lecture à moi, là.

Maintenant, vous référez.... Et M. Généreux l'avait dit quand il est venu, qu'il nous a parlé pour la FQM, de déléguer à la MRC, et vous êtes à peu près les seuls qui nous demandez ça. Et il y avait la FQM, on lui a dit, à M. Généreux: Tout le monde qui est passé ici... ou la grande majorité des gens nous ont dit: Ça devrait relever soit de la CRE soit de la CRRNT. Bon, la société d'aménagement telle quelle, on dit: Bien, c'est peut-être une structure dédoublée. Donc, on n'a peut-être pas besoin de ça parce qu'on a ce qu'il faut en région. Alors, j'aimerais juste vous entendre, là. Ça va fonctionner comment? Comment vous voyez ça très concrètement? Puis quel sera le lien avec les industriels? Parce que, chez vous, vous en avez un gros, un gros joueur majeur qui est en grande partie chez vous, qui détient à peu près 50 % des CAAF du Québec, comment ça va se jouer concrètement, les MRC par rapport à l'industrie, par rapport aux autochtones? J'aimerais juste vous entendre, là, par rapport à la CRE et par rapport à la CRRNT, comment vous voyez ça, là, sur le terrain.

M. Généreux (Bernard): Quand on dit dans le document qu'on a quelques décennies de réflexion sur la question, on a aussi une pratique forestière chez nous qui est un peu particulière. Puis, dans le modèle de la gestion des TPI, on a eu l'occasion aussi de mettre en place un modèle où effectivement la CRE, avec les MRC, a convenu d'un modus vivendi quant à la gestion de cette responsabilité-là, puis ça marche, puis ça marche très bien, et on voudrait pousser plus loin cette façon de faire dans le modèle du nouveau régime forestier qui est proposé et s'appuyer sur la connaissance qu'on a puis les ressources dont a fait état M. Simard tantôt. On a une région qui est très bien organisée, là, au plan de ses réseaux, de son expertise, de ses secteurs de recherche, des institutions de formation, puis on veut mettre tout ça à contribution pour que le principe qui est derrière tout ça, qui est celui de la réappropriation de la forêt... De recréer cette confiance-là entre la forêt puis le milieu, comme le disait M. Simard à juste titre, bien je pense que ça passe par l'implication des élus sur le terrain. Puis que le modèle chez nous soit celui que l'on propose, on ne le souhaite pas qu'il soit le modèle qu'on impose pour l'ensemble du Québec, là. Je pense qu'on reconnaît, là-dedans, qu'il y a de la place pour de la modulation, de la géométrie variable, appelons ça comme on voudra, mais, chez nous, on est prêts à aller beaucoup plus loin dans cet arrimage CRE-MRC en intégrant les instances qui sont déjà là. Puis je pense qu'on rejoint là-dessus les points de vue de plusieurs qui se sont exprimés ici quant à la futilité de mettre en place une autre structure de planification et de gestion autour des sociétés, là, d'aménagement qu'on rejette comme bien d'autres, là.

M. Simard (Georges): Je dois vous dire qu'en région... Quand je suis arrivé à la conférence régionale des élus, j'ai demandé à notre directeur général de convoquer les présidents, les directeurs généraux des MRC parce que je disais: La CRE, c'est un endroit de concertation régionale, mais les vrais décideurs dans chaque coin de la région, ce sont vraiment les MRC. Donc, nous sommes au-dessus, mais nous devons avoir l'opinion de ces gens-là, et chacun gère son territoire. Donc, ici, si on parle des MRC, c'est qu'on vient de le souligner, les MRC gèrent les TPI depuis longtemps... bien, depuis qu'on nous l'a donné, et je pense que... je vais vous dire, quand quelqu'un a une bleuetière, que le coupe-vent, il a décidé de le couper, je vais vous dire qu'on suit ça de très près parce que c'est chez nous, et on tient à ce que la forêt soit régénérée, soit... produise. Je vais laisser la parole...

D'ailleurs, juste un petit détail, la CRRNT, ce ne sont pas des élus, ce ne sont pas des gens imputables, alors que, dans les MRC, ce sont des gens imputables, et c'est pour ça qu'on dit: On a une responsabilité. Puis, je vais vous dire, j'ai entendu dernièrement que, dans nos régions, là, le côté des villes, les municipalités, on a le derrière le plus près du pied du citoyen, hein? Ça fait que je vais vous dire, les gens nous surveillent de très près, et on doit s'occuper de tous les départements, même la forêt. M. Goulet, de Maria-Chapdelaine.

M. Goulet (Gilbert): Mme la ministre, je pense, je suis un ardent défenseur des MRC. Au Saguenay? Lac-Saint-Jean, il y a un contexte un peu peut-être à part, c'est que vous avez Maria-Chapdelaine avec le plus grand territoire forestier, vous avez le Fjord, qui est un autre grand territoire forestier. Entre les deux, vous avez les villes de Chicoutimi, Alma, ainsi de suite. Alors, de la manière que la CRE est faite, vous avez plus de représentants du coin de Chicoutimi que vous en avez du nord du lac. Alors, on n'est pas contre la CRE, on veut travailler avec la CRE. Mais par contre, pour les décisions dans nos territoires forestiers, on veut avoir notre mot à dire, puis ça, on y tient. Puis ça, je me bats depuis avec... M. Béchard l'avait compris les années passées, puis je pense qu'il nous donnait raison. Mais nécessairement qu'on veut travailler en collégialité, là. On ne veut pas dire à la CRE: On ne s'en occupe pas pantoute puis on veut faire nos affaires. On veut travailler, comme on veut travailler avec la CRRNT. C'est notre chef, ça, la CRRNT. Mais, des fois, il ne fait pas toujours comme on veut, alors on veut avoir notre mot à dire. Je pense que c'est pour ça qu'on est peut-être la seule région où est-ce qu'on insiste pour les MRC, mais soyez assurés qu'on va insister longtemps.

Une voix: Oui, M. Chiasson.

M. Chiasson (Serges): Je compléterais à votre question, Mme la ministre... Parce que vous disiez: Comment vous allez intégrer les industriels, là, il y a un grand groupe d'industriels chez vous, AbitibiBowater? Je vous dirais que, dans le cadre de Coulombe, effectivement on avait travaillé beaucoup un modèle de décentralisation et que les gens de l'industrie, Abitibi, dans le temps, et Bowater, étaient derrière notre projet de décentralisation. Donc, ils étaient en accord avec une approche où la région prenait les cordeaux de la gestion des ressources naturelles sur le territoire.

Maintenant, ce projet-là dans le cadre de Coulombe, il est moins adapté, compte tenu du contexte où on veut maintenant avoir un nouveau régime forestier, qu'on a des nouveaux paramètres tels qu'une garantie de bois, du bois aux enchères, etc., mais ce que, nous, on prend comme engagement, c'est qu'au cours des prochaines semaines on va ramener ce monde-là à l'entour des tables et on va vous définir un modèle vraiment, là, concerté de la gestion décentralisée de la forêt au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Et il y a déjà des «commitments» importants avec l'industrie là-dessus.

n(17 h 10)n

Mme Boulet: Je n'aurai pas le temps, il ne me reste plus beaucoup de temps. Je voudrais juste que vous m'expliquiez, là, votre modèle. Vous me dites que ça aura pour effet de diminuer les coûts de la fibre et apporter des gains de productivité. Ce qui est clair, là, c'est l'objectif qu'on cherche ici. Il ne faudrait pas que tout ce qu'on va faire va faire en sorte qu'au bout de la ligne la fibre va coûter plus cher puis qu'on va nuire encore davantage à notre industrie. Ça, pour nous, c'est très, très important. Alors, je vais attendre votre modèle, là, parce que je sais que, là, vous allez me remettre un document, là, mais soyez assurés que ça, c'est l'objectif ultime. Alors, on veut être plus efficaces, mais en même temps on veut protéger notre forêt pour les générations futures puis on veut s'assurer qu'il y ait de la place pour l'ensemble des utilisateurs. Je pense que ça, ça résume un petit peu ce qu'on cherche. J'espère que le modèle que vous allez nous proposer va atteindre cet objectif-là.

M. Simard (Georges): Nous voulons faire de l'agriculture avec cette forêt-là, donc qu'elle soit le plus productive possible, un beau grand jardin.

Mme Boulet: ...l'ensemble des utilisateurs. Merci.

M. Simard (Georges): Et, chez nous, tout le monde a une petite propriété en forêt, un camp de chasse. Donc, je vais vous dire, on vit dans cette forêt-là et on a des rapports continuels à chaque fois qu'il se fait quelque chose d'inacceptable.

La Présidente (Mme Gonthier): Vous allez me permettre, M. Simard, je vais passer maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci beaucoup, Mme la présidente. Messieurs, merci beaucoup d'être là. Félicitations, premièrement, pour votre solidarité. C'est rafraîchissant de voir que des MRC sont capables de s'entendre, même si on se dispute, on reste capable de s'entendre. C'est très rare dans des... Je ne ferai pas de parallèle avec chez nous, je vais simplement vous dire que je trouve ça très rafraîchissant de voir que les gens sont capables de s'entendre. D'un autre côté, vous comprendrez aussi que, même si le préambule est long et ça ne vous... En tout cas, vous allez avoir de la place à répondre, mais je veux quand même juste situer... Mes confrères du Saguenay? Lac-Saint-Jean sont des gens qui sont fiers, et les gens du Saguenay?Lac-Saint-Jean sont des gens très fiers. Quand on parle de la fierté beauceronne, bien ils sont fiers dans un créneau; vous, vous êtes très, très fiers dans l'autre créneau.

J'ai bien compris le message de régionalisation et les gens qui ont une vision de ce que c'est que le Saguenay?Lac-Saint-Jean puis qui disaient: Demain matin, on veut en faire un château fort comme à l'entour de la ville de Québec. Les points d'entrée sont tellement faciles à fermer qu'on pourrait fermer un vase puis dire: Nous, là, on est vraiment chez nous, puis théoriquement vous n'avez pas d'affaire à être là, on est chez nous. Vous avez toutes les routes d'accès. Contrairement à d'autres places où il y a peut-être plein de portes d'entrée, chez vous les portes d'entrée sont vraiment faites pour qu'on comprenne la façon géographique de centrer votre territoire à l'intérieur.

Et, quand on regarde ça, vous nous dites que vous voulez avoir presque l'exclusivité du développement de vos ressources naturelles, et ça, c'est extraordinaire de vouloir le faire. Puis, de l'autre côté, on essaie, comme dans le projet de loi n° 92 sur l'eau, de voir que la forêt est un bien commun qui appartient à l'ensemble des Québécois. Je suis persuadé que je ne comprends pas, dans votre message, que le bois du Saguenay?Lac-Saint-Jean appartient uniquement aux gens du Saguenay?Lac-Saint-Jean mais que le développement qui doit se faire au Saguenay?Lac-Saint-Jean doit se faire par les gens du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Donc, on dit toujours: Si on partage, dans le cas des éoliennes, si on partage le paysage, si on partage le vent, il faut en partager les profits. Puis, si, nous, on veut continuer à aller dans votre belle région, bien on veut s'assurer que vous allez en faire un développement très protectionniste de votre territoire. Donc, de là, un projet pilote, moi, je trouverais ça extraordinaire dans une région comme la vôtre. Parce que tout le monde a demandé pour un projet pilote, même M. Généreux en a... On en parlait même hier, tout le monde veut avoir... hier...

Une voix: ...

M. Roy: ...avant-hier, lundi. Donc, tout le monde veut avoir son projet pilote, mais vous nous proposez un grand et un gros projet pilote. Donc, c'est pour ça que votre vision de l'avenir est... Moi, je disais, au niveau du bois commun, comment vous allez nous proposer ça pour que l'acceptabilité provinciale se fasse en harmonie avec votre vision très décentralisée de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean?

M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, moi, je pense que le principe même de la décentralisation, c'est qu'on dit à l'État: Occupe-toi de... La responsabilité de l'État, c'est de s'assurer justement de l'équité, hein, de l'équité dans le partage des ressources, et que la gestion de cette ressource-là, ça n'a rien à voir avec cette responsabilité, c'est autre chose. Donc, on dit: Une fois qu'on s'est entendus sur les principes du partage... Parce que c'est bien sûr qu'on ne prétend pas garder l'exclusivité des bois qui sont aux volumes que vous avez là, puis je pense qu'on va continuer d'exporter. D'ailleurs, on est en train de faire un quatre-voies divisé, là, pour faciliter ça, là. Donc, il faut que ça circule, les biens, hein? Mais, la planification puis la gestion de cette forêt-là, on prétend qu'elle sera, dans ce modèle-là, encore plus efficace puis plus proche des populations. Parce qu'on le voit, là, ce qui nous conduit à ça, là, c'est le constat de Coulombe, hein, où on a comme eu l'impression que c'était en train de nous échapper, la forêt, là. Donc, pour se réapproprier ça puis de faire encore mieux puis plus avec la forêt, avec l'ensemble d'expertise qu'il y a sur le territoire on pense qu'on est les mieux placés.

Puis la décentralisation, rappelons-le, c'est accompagné de transferts puis de moyens, là. Il y a des gens qui sont actuellement au ministère qui vont s'en venir travailler avec nous autres, là, là-dedans, là, puis on ne fera pas ça tout seuls avec Serges Chiasson, là, puis avec nos deux, trois, là, D.G. Il y a là une responsabilité qu'on va définir, cadrer puis opérationnaliser dans... Mais ça, je pense que ce n'est pas dans l'idée de tout garder le développement de la forêt au Saguenay?Lac-Saint-Jean, il y a des transferts. Tantôt, on voyait les gens, là, des composantes, bien il est bien sûr qu'ils vont venir chez nous chercher du volume puis de la ressource pour être capables de faire leurs produits, là. Ça va continuer puis ça doit continuer, là.

M. Simard (Georges): On a fait une guérite, chez nous, six heures de temps juste pour voir le nombre de camions qui sortaient de la région, et, je vais vous dire, on en a eu 69 en l'espace de six heures et on n'a pas surveillé tous les coins. Donc, on contribue certainement au développement de d'autres régions et de d'autres milieux. Je dis souvent: Les régions ressources n'ont pas ? je vais parler, à Montréal, par exemple; n'ont pas ? l'impact qu'ils devraient avoir. Moi, je dis souvent: Si toutes les régions ressources pouvaient arrêter l'eau de couler, pouvaient arrêter le bois de sortir, pouvaient arrêter les mines pendant peut-être un mois ou deux, on verrait quelles sont les régions qui seraient en misère parce que, je vais vous dire, il n'y aurait plus grand courant ici, là.

Ça fait que je pense qu'on est des régions ressources importantes, et on pense qu'on doit justement cultiver cette forêt-là pour avoir chez nous le plus grand nombre d'emplois. Aujourd'hui, c'est peut-être plus facile d'aller en forêt, mais revenez à nos grands-parents, là ? parce que, moi, j'ai 60 ans, mon grand-père, je ne sais pas quel âge qu'il aurait aujourd'hui; mais ? je vais vous dire, aller dans le bois, dans ce temps-là, avec ses chevaux, etc., là, ce n'était pas évident, Il y a des films aujourd'hui. Ça fait que, par respect pour ces gens-là qui nous amenés dans ces régions-là pour développer justement cette forêt, bien on pense qu'on doit s'en occuper.

M. Roy: Je veux laisser plus de temps à mes confrères. J'aimerais ça donner le temps à mes confrères du Saguenay?Lac-Saint-Jean pour poser des questions...

Une voix: ...

M. Roy: Non, non, simplement pour donner plus de temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Roy: Je terminerai simplement en vous disant que, les quatre-voies que l'ensemble de la province de Québec est en train de faire là-bas, on va essayer de les sauver en faisant plus de cabotage sur le Saguenay pour éviter d'avoir trop de camions sur ces routes-là. Ce serait une belle idée, ça aussi, pour sauver l'environnement. Donc, on va protéger l'asphalte qu'on est en train de vous faire. S'il vous plaît, pensez-y!

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, avant de céder la parole à vos collègues de l'autre table, je pense que votre collègue à côté de vous, le député de Chambly, a quelque chose à demander. Allez-y.

M. Merlini: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Messieurs, merci beaucoup de votre contribution. M. Simard, je vous félicite comme président de la conférence régionale des élus. Et je félicite aussi les préfets de la MRC parce qu'on voit une belle collaboration. Et c'est un travail extraordinaire que vous avez fait, qui amène beaucoup à l'étude qu'a faite la commission de la refonte du régime forestier, et c'est quelque chose qui est important. Vous dites que vous avez une région avec 93 % de forêt publique, et on voit que c'est un enjeu majeur pour vous, et c'est quelque chose qui doit être travaillé maintenant. Et vous apportez une belle collaboration et un bel exemple, pour ce Parlement, à suivre aussi, que, oui, des fois, comme mon collègue disait ? et je renchéris sur qu'est-ce qu'il a dit ? des fois, on peut ne pas s'entendre, mais on finit toujours par aboutir à quelque chose, on finit toujours par travailler sur quelque chose qui va être gagnant pour la région.

Vous avez parlé tantôt des usines de cogénération et que vous aviez 838 000 tonnes métriques de biomasse. Ces usines de cogénération là, voyez-vous une autre possibilité de développement pour votre région, soit d'en avoir plus ou d'avoir une meilleure utilisation de la biomasse? Parce que vous en avez, là, une quantité assez appréciable. J'aimerais vous entendre là-dessus, là. Et quelles sont vos relations avec l'utilité de ces usines «cogen»? Avez-vous, par exemple, des ententes avec Hydro? Il y a-tu possibilité d'en faire plus?

M. Simard (Georges): Avec 20 % de moins de possibilité forestière, nos usines de cogénération ont trouvé ça plus difficile. Quand on dit qu'on a autant de tonnes métriques de biomasse, je vais vous dire, ce n'est pas qu'on pense qu'il faut toute l'utiliser parce que, nous, on pense, qu'il y a des études à faire là-dessus parce qu'on ne veut pas... Écoute, c'est un peu de l'engrais dans la forêt, etc. Moi, en ce qui concerne la cogénération, là, c'est quelque chose à étudier, mais, à la MRC Maria-Chapdelaine, en ce moment, parce qu'on avait des sites où on déposait avant les écorces, on est en train de faire un projet pilote et même on accepte d'investir près de 100 000 $ là-dedans, là, pour essayer de récupérer, pour voir s'il n'y aurait pas des possibilités. Mais, pour ce qui est de celle en forêt, là, je vais vous dire, même s'il y a ça, ça ne veut pas dire qu'on va tout la sortir, et il va falloir étudier ça. Peut-être sur la cogénération, M. Goulet.

n(17 h 20)n

M. Goulet (Gilbert): Oui. On essaie toujours, dans notre test qu'on est en train de faire, le mixage aussi des anciens sites avec les nouveaux. Alors, c'est un projet qui est en marche avec notre compagnie qui gère le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Disons que ça va assez bien, mais, sur la cogénération, il faut être prudent. Comme M. Simard le disait, il y a des scientifiques qui nous disent: Si on va trop vite, on peut peut-être bien faire des déserts aussi, là, Ca fait que c'est tout ça qu'il faut mettre dans la balance, mais actuellement ça va bien. Puis, pour la communication avec les usines, ça va très, très bien. On en aurait plus, ils en prendraient plus, mais là...

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, je vous remercie. Je céderais maintenant la parole au député de René-Lévesque. Oui, on commence par vous ou...

M. Dufour: Oui, oui, Vous allez voir, ce ne sera pas long. Alors, merci, Mme la Présidente. Messieurs, bienvenue à cette commission parlementaire. Les premiers mots vont être de vous remercier de nous remercier d'avoir consenti d'extensionner le délai parce qu'on aurait trouvé ça inconcevable de ne pas rencontrer la première région forestière au Québec ? ça, je tiens à vous le souligner ? et on aurait fait les efforts nécessaires, comme la ministre l'a dit tout à l'heure, pour vous recevoir. Ceci étant dit, j'ai des collègues de travail députés qui sont là, avec moi, et qui viennent de votre région qui vont vous interpeller, alors je leur laisse la parole. Peut-être, mon ami Sylvain.

La Présidente (Mme Gonthier): On va débuter avec le député de Jonquière.

M. Gaudreault: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue. C'est effectivement un très grand plaisir de vous revoir, parce qu'on se côtoie souvent à travers nos fonctions respectives. Je suis effectivement, comme le disait mon collègue de Montmagny-L'Islet, très fier d'être du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je pourrais dire que j'ai mon grand-père qui est Beauceron, alors j'ai double fierté. Mais d'autant...

Des voix: ...

M. Gaudreault: On s'en reparlera tout à l'heure. Alors, d'autant plus fier qu'effectivement ? je pense que c'est important de le redire ici, en commission parlementaire ? le Saguenay?Lac-Saint-Jean est la première région forestière, vous le démontrez bien dans votre mémoire. Puis ça fait même partie de notre identité, hein? Vous savez, chacun ici ont leur petite épinglette du drapeau du Saguenay?Lac-Saint-Jean, qui a été adopté 10 ans avant le drapeau du Québec, 1938, et le vert qui est à la base représente l'industrie forestière, et en bas... en haut c'est-à-dire du... c'est en haut parce que c'est la première industrie du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Et je voudrais rappeler également que, dans le mémoire, sur la question de la gestion des ressources, le mémoire de la CRE dit qu'il y a 95 180 citoyens qui ont voté le 6 novembre à l'occasion d'un référendum visant la décentralisation de la gestion des ressources naturelles. Mais ce qui est encore plus parlant, c'est de savoir que ce chiffre, 95 000 citoyens, représente 92 % des électeurs qui se sont exprimés à ce moment-là, en 2005. Je pense que, ça, c'est fort comme chiffre, et ça donne un rapport de force extrêmement important à la région et aux représentants de la CRE que nous avons ici.

Saguenay?Lac-Saint-Jean, première région forestière du Québec, très fière de l'être. Un peu comme une île, mais, au lieu d'être entourés d'eau, on est entourés de forêt. Alors, c'est pour ça que c'est une industrie qui est importante pour nous.

Maintenant, le mémoire met, je dirais, quasi exclusivement l'accent sur la décentralisation en réclamant des projets pilotes et un rejet très, très clair des sociétés d'aménagement forestières telles que proposées par le gouvernement. Et je suis heureux de voir, à la page 4 du mémoire, une définition de «décentralisation» parce que, souvent, on dit un peu n'importe quoi ou tout sur la décentralisation. Il y a des mots clés, hein, transférer des fonctions, des pouvoirs, on parle autonome, d'autonomie, mais... Oui, je vois sursauter mes collègues, mais...

Une voix: ...

M. Gaudreault: Une instance distincte, et on parle évidemment de sources de revenus autonomes. Alors, moi, j'aimerais vous entendre sur la question des revenus. Donc, si vous pensez à un pouvoir décentralisé en matière de gestion forestière, qu'en est-il au niveau des revenus autonomes qui pourraient être gérés à partir de la région?

M. Chiasson (Serges): Écoutez, anciennement... Bien, avec le nouveau régime, on parle maintenant d'une rente, on parle de bois mis aux enchères, un prix de bois. Il est clair qu'un projet de décentralisation, il ne faut pas que ce soit basé sur une subvention que le gouvernement donnerait à l'organisation pour gérer son territoire forestier, il va falloir qu'on ait un partage de ressources qui permette effectivement d'arriver à avoir des revenus autonomes qui seraient générés par cette même activité là qui s'appelle gérer le parterre forestier du Saguenay?Lac-Saint-Jean. On le disait dans le document, on est une des seules régions qui contribue positivement aux redevances, à l'heure actuelle, là, qui est positive au niveau québécois. Donc, on a un parterre forestier suffisant, ce qui nous permet effectivement de penser que, dans l'entente qu'on aurait avec le gouvernement, il faudrait qu'on soit capables d'établir un niveau de ressources autonomes qui nous permettra de mettre en valeur ce parterre forestier là. Donc, ce ne seraient pas comme telles des subventions, ce serait une forme de redevance ou une forme de coût de la fibre qui reviendrait directement dans les coffres de la région pour faire de la mise en valeur.

M. Gaudreault: La Conférence régionale des élus de la Gaspésie est venue plaider ici un peu dans le même sens. Eux, ils parlaient d'une rente forestière. Je pense qu'on peut en tout cas examiner peut-être, à partir de vos préoccupations, de ce que vous venez de nous dire... également avec eux, là, voir de quelle manière ça pourrait s'exprimer.

Toujours dans le même sens, Mme la Présidente, à la page 11, bon, qui est un peu le coeur du mémoire au fond, vous dites que le terrain d'atterrissage de cette décentralisation serait... ou vous souhaitez que ce soient les MRC, ce que je trouve extrêmement intéressant. D'ailleurs, vous n'êtes pas les seuls à nous dire ça. Nature Québec, le groupe Nature Québec est venu nous dire ça ici même, il y a quelques jours, là.

Maintenant, vous dites dans... si je prends l'encadré, là, de la page 11: «Des mécanismes d'ajustement et d'arbitrage seront nécessaires...» J'aimerais vous entendre un petit peu plus. Puis j'aimerais vous donner un exemple, surtout quand vous dites: «...ce qui permettra de transcender les frontières administratives et forestières des territoires impliqués.» On a entendu ici, à votre table, là, des gens qui sont venus nous dire... par exemple, les camionneurs artisans, qui, eux, sont contre une mobilité de leur main-d'oeuvre entre régions, ils veulent respecter les contrats, là, fermés entre régions, tandis que les propriétaires de machinerie forestière dont le siège social est à Jonquière justement, eux, c'est le contraire, ils sont pour une mobilité de la main-d'oeuvre. Alors, voici un exemple, un bel exemple. Comment une structure régionale, tel que vous le proposez, pourrait proposer des ajustements ou des arbitrages dans un cas comme ceux-là, par exemple?

M. Généreux (Bernard): Je pense qu'on faisait surtout référence, dans cette réflexion-là ou ce... au découpage forestier lui-même, hein? C'est que le découpage des UAF n'est pas nécessairement celui toujours de la MRC. Mais on comprend que, dans l'espace régional, on va tous les rattraper, là, et que ramener ça dans l'espace MRC, souvent on... bien, comment est-ce qu'on va faire l'ajustement entre l'UAF puis le territoire de la MRC, qui n'est pas tout à fait comparable ou en tout cas ajusté... Ça, on le fait par ailleurs, puis je me dis: Il faudra trouver, entre nous, les mécanismes qui feront en sorte qu'on sera capables de sortir de nos limites territoriales MRC, là, telles qu'on les gère mais qu'à travers l'exercice de planification, qui relève, entre autres, de la CRE via son conseil sur les ressources naturelles, bien il y a là une opération de planification qui transcende les territoires. Puis il faudra également ? puis c'est la proposition qu'on va vous déposer éventuellement ? que ces découpages outre-frontières, là, bien qu'on puisse quand même les gérer intelligemment dans une approche régionale qui fait en sorte que ça transcende les territoires immédiats des MRC.

M. Simard (Georges): Vous allez comprendre aussi que, dans le Saguenay?Lac-Saint-Jean, avec cinq territoires, si on veut, de MRC, qu'il y a des MRC qui ont beaucoup plus de bois que d'autres. Donc, il va falloir justement s'entendre et partager, et ça va prendre justement des mécanismes comme ça.

Quand vous parliez tout à l'heure des gens qui travaillent en forêt, eux sont pour qu'il n'y ait pas de limite, je dois vous dire qu'à travers tout le Québec, là, des producteurs... en tout cas, des propriétaires de machinerie forestière sont partout au Québec. Pour moi, dans bien des régions, il n'y a pas beaucoup de personnes qui veulent faire ce métier-là. Et, de chez nous, il y en a partout sur la Côte-Nord, il y en a en Ontario. En tout cas, il y a beaucoup, beaucoup de personnes. Donc, même s'ils voulaient mettre des frontières, je pense, pour ces travailleurs forestiers là, je pense, ce sont les régions elles-mêmes qui perdraient, alors que, quand on parle de camionneurs, bien là il y en a beaucoup. Ça fait que je comprends qu'eux veulent avoir certaines limites.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, M. le député de Jonquière, rapidement. Il nous reste 1 min 30 s, à peu près.

M. Gaudreault: O.K. Alors, une dernière question rapidement. Vous avez choisi de mettre l'accent sur la décentralisation, et je le salue. J'aurais aimé vous entendre néanmoins un peu sur la mise en marché du bois.

M. Généreux (Bernard): Bien, je pense que c'est la grande inconnue, hein, tout ce bureau de mise en marché. Puis les études d'impact, là, entre autres, là, dont le nom m'échappe...

Une voix: Del Degan.

n(17 h 30)n

M. Généreux (Bernard): ...Del Degan ou... Bon, je pense qu'il n'y a pas de vérité vraie là-dedans, là, tu sais, de certitude totale, mais on comprend qu'on veut être associés à ça d'une façon très explicite, la région, parce que toute cette mécanique qu'on va devoir mettre en place autour de la définition de la valeur des bois, bien ça devra faire l'objet d'une opération très ouverte et, encore là, où on est au premier chef impliqués. Parce qu'on entre dans un univers nouveau qu'il faudra comprendre entre nous, apprivoiser, puis de faire en sorte que la valeur attribuée au bois, bien ce soit quelque chose qui tient la route, là, non seulement pour la région, mais pour l'ensemble du territoire québécois.

M. Simard (Georges): Donc, la valeur réelle.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, messieurs de la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean, un gros merci. Oui, M. Simard.

M. Simard (Georges): ...en vous disant quelque chose. Parce qu'on parle de décentralisation, je voudrais vous dire: Souvenez-vous quand René Lévesque a voulu décentraliser les pêches commerciales vers la Gaspésie, à la fin de cette opération, il a dit: Il aurait été plus facile de déménager les poissons de Percé à Québec que de déménager les fonctionnaires de Québec à Percé. Donc, j'espère qu'on ne dira pas la même chose, que ça va être plus facile de déménager la forêt à Québec que de déménager justement les fonctionnaires chez nous.

La Présidente (Mme Gonthier): Un gros merci, messieurs.

Alors, je vais suspendre quelques instants et j'inviterais les gens de Greenpeace à prendre place immédiatement.

(Suspension de la séance à 17 h 31)

 

(Reprise à 17 h 33)

La Présidente (Mme Gonthier): Nous allons reprendre les travaux. Nous accueillons maintenant les gens de Greenpeace. Alors, j'aimerais obtenir le consentement des membres de la commission pour que nous puissions continuer nos travaux un peu après 6 heures. Alors, y a-t-il consentement?

Une voix: Consentement.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci. Alors, nous accueillons M. Darier, c'est ça? Non? Oui? Oui, M. Darier. Alors, c'est ça. Si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 10 minutes pour nous présenter votre position sur le document de travail, et par la suite nous allons échanger avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous, M. Darier.

Greenpeace

M. Darier (Éric): En fait, c'est Mme Filion qui va parler.

La Présidente (Mme Gonthier): Allez-y, alors, Mme Filion.

Mme Filion (Mélissa): Merci. Alors, oui. Bon, je me présente, Mélissa Filion, je suis la responsable de la campagne Forêt boréale chez Greenpeace.

Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre et MM., Mmes les députés, d'abord, merci d'avoir ajouté Greenpeace comme intervenant de cette commission parlementaire. Étant donné que la commission traite de l'économie et du travail, il nous semblait essentiel de pouvoir vous présenter directement nos recommandations, puisque Greenpeace est une organisation qui exerce des pressions sur les entreprises forestières québécoises et sur certains de leurs clients nationaux et internationaux, et cela peut engendrer, vous le savez, des conséquences économiques et sociales.

À Greenpeace, nous sommes d'avis que la réforme du régime forestier s'impose et nous croyons également qu'un changement de paradigme s'impose. Et j'entends par là un changement de vision pour cesser de véhiculer l'idée que de protéger l'environnement et que de protéger nos forêts, ça veut dire moins de volume de bois et donc ça veut dire faire du tort à notre économie. Vous pourrez difficilement être en désaccord avec le fait que l'économie et l'environnement sont étroitement liés, mais, encore trop souvent, les enjeux environnementaux et économiques sont confrontés l'un à l'autre, et en conséquence, quand vient le temps d'élaborer des politiques publiques ou des plateformes électorales, les politiciens font à tort le choix entre l'un ou l'autre. Or, on ne peut baser une économie forte, viable et durable sur l'exploitation et la dégradation d'écosystèmes forestiers dans une perspective exclusivement marchande. Selon Greenpeace, une réelle protection de l'environnement va de concert avec une économie forte. Et la crise forestière nous le démontre, tant et aussi longtemps que le gouvernement cautionnera la vision économique du profit à court terme au détriment des écosystèmes forestiers et au détriment des communautés forestières et des autres intervenants et utilisateurs du secteur, notre économie sera en danger. Et donc c'est un message important que je veux vous lancer ce soir: le maintien de l'intégrité écologique des écosystèmes et des forêts est un facteur directement lié à la force de notre économie.

Si un groupe écologiste international comme Greenpeace est forcé de faire des pressions au Québec, incluant des pressions économiques, c'est parce que le gouvernement n'a pas fait son travail de protéger les dernières forêts intactes du Québec, de protéger également les communautés forestières et de diversifier l'économie de ces communautés. Aujourd'hui, s'il y a une seule de nos recommandations que je souhaiterais que vous reteniez dans le cadre de cette commission et dans le cadre des différentes plateformes électorales également, c'est celle qui vous empresse de déterminer ce qui doit être protégé pour maintenir l'intégrité écologique des écosystèmes forestiers avant même de déterminer ce qui peut être coupé, développé, exploité ou même reboisé. C'est la recommandation de mettre en oeuvre le principe de précaution à l'égard du développement industriel, qui prime actuellement en forêt au détriment du maintien de l'intégrité écologique des forêts et de d'autres utilisations du territoire.

Bon, les forêts intactes. Donc, la dégradation des dernières forêts intactes, c'est un enjeu mondial, comme les changements climatiques, d'ailleurs. Et, pour permettre d'atténuer ces deux phénomènes, le Québec a un rôle important à jouer. Greenpeace est d'avis que le gouvernement doit accroître le réseau d'aires protégées dans le but notamment de protéger davantage et de préserver les dernières forêts intactes du Québec, d'inclure des corridors de migration pour les espèces et assurer également la protection d'espèces à grand domaine vital comme le caribou forestier.

Et, s'il vous vient à l'esprit de croire que cette façon d'aménager le territoire, qui donne la préséance, par exemple, au principe de précaution et à la protection des forêts intactes... Bien, je vous invite à ne pas croire que ça ne peut être qu'une utopie. En fait, je vous ai inclus, en annexe du mémoire, une copie de l'article de loi de l'Argentine, adopté en 2007, qui applique le principe de précaution, qui instaure un moratoire de développement industriel sur tout nouveau développement en forêt, le temps de déterminer ce qui doit être préservé dans les zones... bon, déterminer les zones de conservation prioritaires pour éviter la fragmentation des écosystèmes, et qui oblige également le gouvernement à réaliser des études d'impact environnemental et des audiences publiques avant d'autoriser tout projet de déboisement.

Disons que cette façon de faire s'apparente un peu au zonage que le document de travail souhaite mettre en place mais que les étapes sont inversées. Et, avec cette façon de faire, je pense que ce n'est pas juste la réputation de l'industrie forestière québécoise qui est en jeu, mais aussi la réputation du Québec sur la scène internationale. Et je n'insisterai pas assez sur le fait que ça peut être de très mal gérer l'argent des contribuables québécois que de se lancer dans des campagnes de publicité ou de promotion de notre gestion forestière actuelle parce qu'actuellement ce qu'on est en train de faire, c'est de liquider un patrimoine mondial qui se trouve ici, chez nous.

n(17 h 40)n

Cela dit, il y a d'autres éléments plus précis du document de travail que je souhaite commenter et qui se trouvent également dans notre mémoire. Premièrement, la stratégie d'aménagement durable des forêts. Dans le cadre du livre vert qui a été, bon, déposé en février, plusieurs des éléments environnementaux s'y retrouvaient. Je pense, par exemple, aux superficies, dans le cadre du zonage forestier, des superficies en termes d'aires protégées, en termes d'aménagement intensif. Et, actuellement, beaucoup de ces détails-là ont été évincés du document de travail, et on se rapporte beaucoup à une éventuelle stratégie de développement durable des forêts, stratégie qui pourrait être rendue publique, qui ne semble pas être soumise, pour l'instant, à des consultations et qui sera rendue publique une fois seulement que la réforme forestière aura été adoptée. Et je vous pose une question: Est-ce qu'il y a lieu là de croire que le gouvernement ne souhaite pas débattre des véritables enjeux environnementaux qui seront à l'intérieur même de cette stratégie de développement durable des forêts là?

À propos maintenant des changements climatiques, je pense que ce qu'il est important de considérer, c'est que, bon, la forêt boréale, c'est un important réservoir de carbone. Vous n'êtes pas sans savoir, j'espère, que près de... en fait, la majorité, près de 84 % du carbone en forêt boréale se trouve dans le sol et non dans les arbres, et donc la meilleure façon d'atténuer finalement les changements climatiques et de lutter contre les changements climatiques, c'est de protéger les forêts intactes et non pas nécessairement d'aller vers des aires de captation de carbone, comme il est présenté actuellement dans le document de travail.

Et, finalement, notre dernier point, mais non le moindre, je vais laisser la parole à mon collègue Éric Darier pour vous parler davantage de la biomasse forestière.

M. Darier (Éric): Merci. Simplement, très brièvement. En fait, j'ai été très heureux d'entendre la présentation avant la nôtre, lorsque vous avez posé des questions sur les bioénergies et sur l'utilisation de la biomasse. Et c'était très intéressant parce que les représentants du Lac-Saint-Jean ont justement souligné le fait qu'on ne peut pas simplement passer l'aspirateur dans toutes les forêts pour utiliser la biomasse pour des réquisitions énergétiques. Et je pense que cette commission et ce projet est important parce qu'il ne faut surtout pas répéter les mêmes erreurs qu'on a faites ? pas uniquement ici, mais également ailleurs dans le monde ? de se précipiter sur notamment les agrocarburants d'origine agricole, notamment, sans avoir, avant, eu et mis en place des critères très stricts en matière de ce qui est vraiment durable au niveau écologique. Comme les représentants du Lac-Saint-Jean ont rappelé, hein, ce qu'on appelle déchets forestiers, c'est également de la matière organique et c'est de la matière qui permet au sol de demeurer riche et qui permet également au sol de garder ce carbone.

Donc, je pense qu'on peut être fiers, au Québec, d'avoir une stratégie sur Kyoto, sur la lutte aux changements climatiques, il faudrait également qu'il y ait l'intégration de ces politiques dans l'ensemble des autres politiques à ce niveau-là et maintenir justement l'intégrité des sols en maintenant... Justement, le fait que les déchets forestiers peuvent être également source d'engrais et donc source de fertilité des sols doit être également maintenu. Donc, avant d'aller de l'avant trop rapidement sur les bioénergies ou la deuxième génération des agrocarburants qui peuvent venir du secteur forestier, mettre des critères très stricts dans ce domaine-là. Donc, j'arrête là et puis, s'il y a des questions, je serai très heureux de répondre.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, merci. Je passerais maintenant la parole, je céderais maintenant la parole à Mme la ministre.

Mme Boulet: Alors, merci d'être présents. Alors, merci d'être avec nous. Vous apportez un volet qui est complètement... bien, qui est différent, qui est beaucoup plus axé sur l'environnement, et je pense qu'il faut trouver l'équilibre dans toute la démarche. Vous soulevez le point, là, que... vous demandez, lorsque ce sera le temps d'établir la stratégie d'aménagement durable des forêts, qu'elle aille en consultation. Alors, je tiens à vous le dire, il y aura des consultations à l'égard de cette stratégie. Alors, je tiens à vous rassurer là-dessus.

J'aimerais vous entendre... Vous avez terminé votre point avec la biomasse, dites-moi... Je pense que c'est bien d'utiliser la biomasse, là, à des fins de transformation, là, mais que, maintenant, il faut en même temps en préserver une certaine proportion pour alimenter, nourrir la forêt. Avez-vous un chiffre à nous donner? Parce qu'on sait qu'il y a un chercheur de l'UQAM qui est venu nous voir, M. Messier, qui est venu nous voir et qui, lui, nous parlait qu'il fallait conserver 50 % de la biomasse pour des fins de régénération, là, pour l'usage finalement de la forêt mais qu'on pouvait en prendre un 50 % pour soutenir des projets de cogénération, de développement de biomasse pour diminuer les coûts d'exploitation des entreprises, diminuer les gaz à effet de serre, augmenter la productivité. Alors, est-ce que vous êtes capables de nous dire quel chiffre, vous, vous préconisez dans la proportion de biomasse qui pourrait être convertie pour des usages énergétiques?

Mme Filion (Mélissa): À propos de la biomasse forestière, moi, à ce moment-ci, je ne vous dirais pas qu'il y a un chiffre magique, comme ça, qu'on peut lancer actuellement au Québec, considérant, par exemple, plusieurs aspects scientifiques qui sont encore, je pense, à développer, et donc je vous dirais davantage d'aller vers la consultation de différents scientifiques crédibles et indépendants pour pouvoir avoir un état de la situation clair, pour savoir, bon, quelle proportion de biomasse est-ce qu'il pourrait être retiré des écosystèmes forestiers, à quel endroit exactement également.

Je pense que certains groupes écologistes également vous auront parlé de l'aspect de l'acidification des sols. Moi, je vous inciterais à valider ces pourcentages-là également, considérant le fait que la majorité du carbone, en forêt boréale, se retrouve dans le sol, et donc la matière organique qui est présente en forêt qui se décompose va servir, lorsque que cette composition-là aura lieu, de stockage de carbone dans le sol de la forêt boréale, et donc de tenir en compte des aspects, par exemple, pour la fertilité des sols, mais également des aspects des changements climatiques et de consulter des équipes de scientifiques crédibles et indépendantes pour être capable de déterminer un tel pourcentage.

Mme Boulet: Oui. Vous avez entendu le groupe qui est passé avant vous, qui sont, eux, pour la pleine et entière... je vais dire la pleine et entière décentralisation, vers une régionalisation de la gestion des forêts. Comment Greenpeace voit ça, cet élément-là? Est-ce que vous avez certaines craintes à l'égard qu'on décentralise, qu'on donne beaucoup plus de responsabilités aux régions? Est-ce que, pour vous, c'est inquiétant ou si vous pensez qu'on peut leur faire pleinement confiance à l'égard de cette responsabilité-là?

M. Darier (Éric): Bien, si je peux répondre brièvement ? et j'espère que ma collègue pourra également ajouter peut-être quelques éléments ? je pense que l'élément de faire confiance aux régions, je pense que c'est très important. Mais également je pense qu'il faut être très prudent et je pense que vous, comme représentants au niveau de l'Assemblée nationale, devez faire en sorte aussi qu'il y ait une certaine égalité également entre les régions et que les régions aient une certaine compétence pour gérer ces ressources.

Ce qui peut être... Ce n'est pas nécessairement un commentaire de Greenpeace en tant que tel, mais, nous, on le voit très bien, vous savez, certaines des régions sont très dépendantes d'un secteur économique. Et c'est le cas de beaucoup de régions sur des.. par exemple, sur la foresterie, et le gros problème, c'est que généralement c'est une, ou deux, ou peut-être trois grosses compagnies qui sont là. Donc, est-ce que les régions où il y aura une forte décentralisation ne seront pas à la merci nécessairement de certaines grandes entreprises ou d'intérêts économiques et qu'elles seront plus susceptibles à être sous des pressions pour accepter des choses peut-être que collectivement, comme société, au Québec, on ne serait peut-être pas prêts à accepter? Donc, c'est une question d'équilibre entre la volonté, le désir de décentralisation, mais également de faire en sorte ? et je pense que c'est votre devoir à l'Assemblée nationale et au gouvernement du Québec ? de s'assurer que les régions ne se retrouvent pas non plus otages de certains intérêts économiques locaux qui ont plus de pouvoir, des fois, que même la bonne volonté des gens localement. Donc, c'est toujours cet équilibre, et c'est... comme vous le savez, hein, toujours cette tâche.

Mme Filion (Mélissa): Oui. Merci, Éric. En fait, ce que je vous rajouterais en fait, c'est que la forêt, bien, c'est un bien commun, d'une part, et que, bon, dans cet effort de décentralisation là, je pense qu'il ne faut pas oublier le rôle du gouvernement. Et, bon, je vous l'ai dit tout à l'heure, et je n'insisterai pas encore assez sur le fait de définir préalablement ce qui doit être protégé. Et je pense que, ça, ça peut être fait, par exemple, en concertation avec les communautés régionales mais qu'il doit y avoir une vision d'ensemble de cet écosystème-là et de ce patrimoine-là qu'on a au Québec qui est la forêt boréale et nos dernières forêts boréales intactes, et que ça doit être un exercice qui doit être fait préalablement, par exemple, à la décentralisation de la gestion du territoire.

Mme Boulet: J'aurais une dernière question. En fait, avec le défi des changements climatiques, là, puis au-delà de l'aspect économique, vous êtes sûrement en faveur de l'utilisation plus importante du matériau bois dans la construction et également de l'énergie verte, là, le programme de biomasse afin de réduire les gaz à effet de serre. Pour vous, est-ce que c'est conciliable finalement qu'on aille... tu sais, qu'on favorise l'utilisation du bois dans la stratégie du bois, finalement l'utilisation accrue du bois dans les constructions du Québec? Donc, par conséquent, évidemment, il faut produire du bois, il faut avoir de la production forestière dans nos forêts. Vous êtes capables de trouver un équilibre là-dedans? Parce qu'on sait qu'au niveau des gaz à effet de serre il y a des gains importants, significatifs à l'égard de l'utilisation... qu'on utilise davantage le bois dans les constructions et qu'on utilise également la biomasse pour la transformation finalement en bioénergie, alors vous êtes... Ce qu'on dit, c'est: Est-ce que Greenpeace peut être à l'aise ou peut trouver un équilibre ou un confort finalement dans cet équilibre-là qu'on doit trouver entre l'utilisation de la forêt puis utiliser davantage le matériau bois dans la construction au Québec?

n(17 h 50)n

Mme Filion (Mélissa): Je trouve ça intéressant que vous souleviez la question. Je vous demanderais... en fait, je vous mettrais au défi de nous amener des analyses, par exemple, de cycle de vie qui démontrent, par exemple, l'aspect important du bois, par exemple, dans la lutte aux changements climatiques parce que, comme je vous le disais, la principale source de carbone en forêt, c'est le sol.

Par contre, bon, je pense que c'est important de considérer également le fait que Greenpeace est une organisation environnementale qui prône la protection des forêts, qui prône la protection de l'environnement. Par contre, on pense que ça peut être concilié avec une gestion forestière véritablement durable, et je pense que c'est actuellement ce qui fait défaut du document de travail. On a inséré des thèmes comme, bon, l'aménagement durable des forêts, l'aménagement écosystémique également. Tout ça va se retrouver dans la stratégie d'aménagement durable des forêts, et actuellement on ne fait pas l'exercice de savoir ce qui doit être protégé. Quand on regarde la cible d'aires protégées au Québec, qui est de 8 %, bon, d'abord, je voudrais féliciter le gouvernement libéral actuellement qui finalement va arriver au terme de cet objectif-là. Parce que c'est un objectif qui date de 1999, donc, finalement, le gouvernement aura mis l'épaule à la roue et créé des aires protégées. Maintenant, l'objectif de 8 %, c'est un retard sur le reste du Canada, sur la scène internationale. Et il n'y a pas de consensus scientifique qui va être capable de dire que c'est suffisant finalement, donc on vous demande, avant même d'aller augmenter la pression sur les forêts, que ce soit par augmenter l'utilisation du bois, que ce soit par la biomasse forestière, que ce soit par, bon, par exemple, des produits à valeur ajoutée ou davantage de deux-par-quatre et de papier journal, d'aller vers un exercice indépendant et crédible avec des scientifiques pour déterminer ce qui doit être protégé en forêt boréale.

M. Darier (Éric): Si je peux ajouter très brièvement, nous avons fait une étude internationale sur les différentes formes de bioénergie, parce qu'il y a les agrocarburants, il y a l'éthanol, bon, il y a toutes sortes... ou l'huile de palmier même dans certaines régions du monde, et ce qui était très intéressant au niveau des résultats de ces études, c'est qu'il y avait très, très peu de ces agrocarburants... La conclusion principale, c'est que ça peut être une contribution, dans certains cas, localement, à petite échelle, pour la cogénération mais que, dans les autres cas, le cas n'était pas encore fait. Donc, c'est pour ça qu'on lançait un appel à la prudence, de ne pas se précipiter dans la porte grande ouverte sur: on va faire rouler les voitures au Québec avec la biomasse forestière, là. Ça peut être des solutions locales, ponctuelles, mais ça ne peut pas faire partie de l'élément central. Merci.

Mme Boulet: Ça va être correct.

La Présidente (Mme Gonthier): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour. C'est la deuxième fois qu'on a la chance de se rencontrer, on a déjà soupé ensemble au tout début de notre mandat. Je ne sais pas si vous vous en rappelez, mais en tout cas... Et c'est toujours difficile, pour un chasseur et pêcheur comme moi, de rencontrer les gens de Greenpeace avec autant d'ouverture d'esprit, mais on l'avait quand même fait dans une première approche. Et vous comprendrez que vous êtes de grands protectionnistes. D'un autre côté, nous, on se targue de dire que nous également. Même si on capture des poissons et on prélève des gibiers, on le fait dans le respect de l'environnement et dans le respect des animaux pour, je vous dirais, l'ensemble de mes confrères et consoeurs Nemrod du Québec ou du monde entier.

Vous nous parlez beaucoup de protection, mais j'aimerais savoir où vous mettez les autochtones. Parce que la feuille que vous nous avez apportée, oui, c'est correct, c'est les forêts protégées, mais, ici, au Québec, on a eu les autochtones qui sont venus revendiquer à la limite l'ensemble du territoire québécois. Où on les place dans l'échiquier selon Greenpeace?

Mme Filion (Mélissa): Bien, écoutez, je pense qu'en considérant les premières nations ce qu'il est important, bon, de reconnaître selon moi, c'est qu'actuellement ni le gouvernement ni les industriels qui exploitent le territoire n'ont l'exigence d'obtenir le consentement des peuples des premières nations avant d'aller exploiter les territoires. Il peut y avoir des consultations, mais le consentement n'est pas nécessairement exigé. Et c'est une des positions de Greenpeace, d'avoir le consentement des premières nations avant d'aller faire l'exploitation de leurs territoires, alors c'est, bon, notre position, d'une part.

Deuxième part, bon, je pense, par exemple, à l'exemple de l'Île René-Levasseur. Il y a quelques années, Greenpeace était avec les Innus de Betsiamites pour, bon, promouvoir la protection de l'île et demander également la cogestion du territoire forestier avec les premières nations, par exemple. Donc, je vous dirais que globalement notre position en est là.

Et, d'autre part, Greenpeace, on est une organisation qui appuie la certification FSC, qui est une certification forestière pour assurer un meilleur aménagement durable des forêts. Et c'est actuellement la certification forestière qui assure qu'il y ait des consultations suffisantes et appropriées auprès des peuples de premières nations et un consentement des premières nations également. Donc, la norme de certification FSC, c'est celle qui va reconnaître davantage les droits des premières nations.

M. Roy: Je vais vous poser une question qui n'est pas une question piège, là, c'est simplement une interrogation que j'ai concernant FSC: Est-ce que la certification FSC n'est pas une marque de commerce de Greenpeace? Est-ce que vous n'êtes pas partie prenante de la marque FSC? Est-ce que je suis dans l'erreur en ayant entendu ça comme de quoi que FSC appartenait à Greenpeace comme principe de base, comme vous détenez la marque de commerce FSC?

Mme Filion (Mélissa): Bien, je pense que c'est important de poser la question. Si vous êtes dans le doute, c'est important de poser la question. C'est totalement faux, Greenpeace, non, n'a pas de marque de commerce, on est une organisation à but non lucratif.

La certification FSC, bon, elle date des années 1980. C'est une certification qui a été élaborée par différentes, je vous dirais, chambres, la chambre environnementale, des industries également, des peuples des premières nations. Parce qu'à ce moment-là il y avait des produits forestiers de certains pays qui étaient, bon, sous boycott, si on veut, et, pour être capable de faire la différence non pas entre certains pays, mais entre certains produits et certaines techniques d'aménagement ou pratiques d'aménagement forestières, la certification FSC est née.

Donc, Greenpeace, on appuie cette certification-là. Par contre, je vous dirais que c'est une certification qui a également ses limites. Ce n'est pas une solution miracle, mais c'est une façon de se distinguer dans les marchés, se distinguer sur la scène internationale, et actuellement c'est la certification qui nous offre des garanties minimales de l'aménagement forestier durable. Et je pense que, s'il y a une stratégie, par exemple, pour donner davantage d'utilisation... de promouvoir l'utilisation du bois au Québec, je pense qu'on devrait allier cette stratégie-là avec la certification FSC.

M. Roy: On a parlé d'une possibilité de régionalisation parce que c'est très dispendieux. Vous allez dire pas dispendieux, mais c'est très dispendieux pour un producteur privé, qui a des lots privés, de se certifier FSC lui seul. On a évoqué la possibilité de faire ça d'une façon régionale, donc une régionalisation de la marque FSC. Qu'est-ce que vous en pensez?

Mme Filion (Mélissa): Bien, écoutez, je pense que plus il y aura d'entreprises, que ce soient des entreprises privées ou des entreprises publiques, qui choisiront la certification FSC, je pense qu'on risque d'en sortir tous plus gagnants, que nos forêts risquent d'en sortir gagnantes, et, bon, je pense que la reconnaissance également de nos produits risque d'en sortir gagnante également. Je pense que ça pourrait être une façon, pour certaines régions, également de se distinguer. Donc, encore là, je pense que la certification FSC a ses limites, mais actuellement c'est la meilleure certification, la plus rigoureuse sur le plan environnemental.

M. Roy: Vous avez parlé d'une crédibilité et d'une indépendance des scientifiques. Est-ce qu'on va devoir vous demander ou vous faire accréditer les gens qu'on va trouver ou qui vont cogner à notre porte en disant: On est indépendants et on est crédibles? Est-ce qu'on va devoir demander à Greenpeace si eux les savent crédibles et indépendants?

n(18 heures)n

M. Darier (Éric): Non. Si je peux intervenir là, sur tout ce qui est la crédibilité au niveau scientifique, c'est toujours une controverse, de toute manière. Mais je pense qu'il y a certains critères très simples, que ce soient des scientifiques qui publient dans des revues scientifiques, qui sont évalués par des pairs, il y a... Au niveau scientifique, il y a toute une série de critères au niveau de la crédibilité des scientifiques. Et donc, que ce soit en forêt ou ailleurs, dans toutes sortes de domaines, je pense que ça doit être le critère de base. La Société royale du Canada, par exemple, qui a l'Académie des sciences, pourrait donner plus d'éléments là-dessus, mais je pense que c'est également faire le tri entre les scientifiques les plus crédibles basé sur des critères scientifiques là-dedans.

Il faut comprendre aussi que beaucoup de scientifiques dans le milieu universitaire dépendent de contrats public-privé, et donc ont une certaine dépendance parfois à certaines entreprises dans certains secteurs, et donc il faut faire attention aussi pour maintenir l'indépendance de la science, pour que vous, comme élus, puissiez faire vraiment une évaluation indépendante sans qu'il y ait trop d'influence. Je ne pense pas que Greenpeace est là pour homologuer les scientifiques, je pense qu'il y a plein d'organisations internationales ou des académies des sciences qui peuvent le faire.

M. Roy: Sommes-nous à l'aube d'un nouveau Greenpeace un peu plus ouvert, un peu moins contraignant, un peu moins restrictif, un peu moins... je ne dis pas engagé, vous serez toujours engagés, mais est-ce que je ne sens pas dans votre approche une plus grande ouverture que le Greenpeace traditionnel, très batailleur, qu'on avait habitude de voir? Est-ce que je trompe ou si vous avez une plus grande ouverture d'esprit?

M. Darier (Éric): Bien, moi, personnellement, ça fait quoi, neuf ans que je suis là, je n'ai pas vu de changement radical là-dessus, mais... Non, mais ce qu'il faut comprendre, on est une organisation non gouvernementale et on a un certain style, mais on ne fait pas des actions pour simplement le plaisir de les faire pour nous-mêmes. Bon, ça peut être plaisant de temps en temps, mais ce n'est pas ça, le but. Le but premier, c'est d'appuyer sur le bouton d'alerte, sur un problème réel pour que vous et d'autres puissent prendre des mesures pour résoudre ce problème. On ne fait pas par plaisir, hein, c'est certain. Et malheureusement je regarde les grands dossiers qu'on a pris, vous savez, sur les changements climatiques, vous retournez il y a à peu près il y a une douzaine d'années, quand on soulevait les changements climatiques, tout le monde pensait qu'on était des espèces de fous. Bien, malheureusement ? je dis malheureusement, là ? maintenant, on commence à se dire oui. Alors, c'est ça aussi, le... Je ne pense pas qu'il y a un changement de... On a toujours eu un engagement, oui, de dénoncer, mais on a toujours été là aussi pour proposer, et je pense que c'est aussi un autre élément de ça. Peut-être que ça n'a pas été mis en lumière, mais c'est là.

M. Roy: Mais je comprends... Remarquez bien que j'ai posé la question parce que je connaissais déjà une partie de la réponse. Parce qu'il y a quelques années passées, quand on parlait d'environnement... Il y a 25 ans passés, là, quand on a construit Manic-5, le mot «environnement» n'existait pas, et déjà là... Donc, si, vous, à l'époque, vous étiez avant-gardistes, nous, on était reculés. Aujourd'hui, on s'est peut-être rejoints parce qu'on a peut-être fini par comprendre.

Dernier des points, forêt surannée. On en a parlé, vous étiez dans ce débat-là le soir que je vous ai rencontré, où on voulait essayer de tout protéger les forêts surannées. Et on voit que, dans les forêts surannées, on pourrait en prendre une partie, en laisser une partie. Qu'est-ce que vous en pensez? Et je termine là-dessus.

Mme Filion (Mélissa): Bien, je pense que... En fait, ce que je déplore, c'est l'article de loi de la loi n° 39 qui permet... bon, qui donne un pouvoir discrétionnaire au ministre et qui peut permettre, par exemple, la liquidation des dernières... ou en fait des forêts surannées, des dernières vieilles forêts du Québec. Donc, à ce moment-là, je vous dirais, bon, d'une part, que les forêts surannées, les vieilles forêts et les forêts intactes, ce sont des forêts qui ont une importante valeur sur le plan de la biodiversité. Bon, il y a différentes espèces, soit des espèces d'insectes ou autres, qui ne se retrouvent que dans ce type d'écosystème là, d'où l'importance de les protéger, donc des forêts qui sont plus riches sur le plan de la biodiversité, sur le plan de réservoir de carbone, de stockage de carbone. L'importance de les protéger est là, et c'est justement ce qu'on demande au gouvernement de faire, de définir préalablement ce qui doit être protégé.

Et ce que je déplore, c'est qu'actuellement il y a très peu d'attention qui est portée, au Québec, sur la quantité de forêts intactes qu'il nous reste, des forêts qui sont vouées à l'exploitation si on ne s'attarde pas à définir combien on doit en protéger et qu'on mette l'épaule à la roue pour les protéger.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, merci. Je passerais maintenant la parole au député de René-Lévesque.

M. Dufour: Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Mme Filion, M. Darier, ça me fait plaisir de vous voir. Je reçois beaucoup de courriels, mais je n'ai pas eu l'occasion de m'entretenir avec vous souvent. D'ailleurs, c'est la première fois.

Vous dites: Bouton alerte. Vous avec le don de mettre sur la place publique des débats, effectivement. Et vous le dites en page 1 de votre mémoire: «Greenpeace est une organisation militante indépendante qui utilise la confrontation créative et non violente...» Alors, c'est un non-violent, mais par contre vous êtes assez visibles médiatiquement. Alors, on le voit régulièrement.

Sur ce que vous venez de répondre au niveau des forêts surannées, je vais y aller tout de suite avec la question, là. Moi, j'ai de la forêt surannée dans mon coin de pays, sur la Côte-Nord, et on est en train de mettre en place des logiciels pour être capables de mieux vérifier les forêts surannées avant de les retrouver en chablis. Alors, effectivement, comment vous voyez ça, vous? Parce que, les chablis, là, on est-u mieux d'aller chercher la ressource avant qu'elle devienne chablis puis risquer de perdre la ressource? Parce que j'ai un coin où est-ce que j'ai 300 000 m³ de bois de chablis au moment où on se parle et où l'industrie est en train de faire des recherches, combien de temps la ressource va rester bonne longtemps pour s'en servir. Puis ça coûte 30 % plus cher à aller chercher. Alors, c'est quoi, votre vision, là-dessus?

Mme Filion (Mélissa): Bien, je vous dirais que les perturbations naturelles, ça fait partie ? je pense au chablis, je pense aux feux de forêt; ça fait partie ? de la dynamique naturelle des écosystèmes et qu'actuellement, bien, on considère il y a une certaine... je vous dirais, il y a certains mythes qui sont véhiculés, bon, de la part de l'industrie, par exemple, que, si on laisse ce bois-là en forêt, bien ce bois-là risque de pourrir, aussi bien aller le récolter. Je vous dirais que chacune de ces perturbations naturelles là a un rôle à jouer dans l'écosystème, et donc il faut définir d'abord quels sont les pourcentages, par exemple, de ce bois-là qui doit rester en place.

Je prends l'exemple également, par exemple, du feu plutôt que du chablis, mais l'exemple, des feux de forêt. La coupe forestière qui a lieu après un feu de forêt, l'impact sur l'écosystème, sur les sols forestiers peut être encore plus dommageable qu'une coupe à blanc principalement. Donc, il y a des considérations à avoir, et je pense qu'il faut s'assurer, par exemple, de définir donc ce qu'on doit protéger. Je pense, par exemple, dans le cas de feux de forêt, je pense dans le cas de chablis, ce qu'on doit protéger à l'aide d'études scientifiques, crédibles et indépendantes.

M. Dufour: Je veux revenir sur la régionalisation. Il y a une table de concertation, et, dans votre document, vous parlez effectivement, à la page 9, de mémoires que vous avez présentés au Bureau d'audiences publiques concernant les monts Groulx et Uapishka puis qui incluent l'île René-Levasseur. Et vous savez qu'on a été accrédités par l'UNESCO et qu'on a une belle table de concertation où est-ce qu'on a l'ensemble des organismes qui sont autour de notre CA d'administration, autant secteur faune, autant secteur forêt, secteur paysage par rapport à l'île René-Levasseur, dont le deux tiers est protégé au niveau des aires protégées des monts Groulx et Uapishka.

Au niveau de la régionalisation, oui, ça prend une ligne directrice du ministère. Il ne faut pas que ce soit du mur-à-mur partout, mais comment vous voyez ça, vous, parce que... Est-ce que c'est mieux que ce soit du monde qui connaissent leur milieu, en région, pour qu'ils soient justement capables de protéger... d'harmoniser les schémas d'aménagement, harmoniser l'aménagement intensif? Bref, est-ce qu'on ne serait pas mieux d'avoir du monde qui connaissent leur terrain, puis que ça ne soit pas du mur-à-mur partout, puis qu'on ait un ensemble de joueurs autour de la table qui soient capables d'avoir une vraie prise en main au niveau des territoires?

Mme Filion (Mélissa): Bien, je pense que, bon, les écosystèmes forestiers de l'ouest du Québec, de l'est du Québec ne sont pas nécessairement les mêmes. Donc, je suis d'accord avec vous, le mur-à-mur... Même chose pour l'aménagement écosystémique des forêts, ce n'est pas nécessairement les mêmes écosystèmes d'est en ouest. Donc, l'approche du mur-à-mur, je pense qu'on voit ce que ça donne actuellement avec le régime forestier actuel, donc, d'une part. D'autre part, bien, je reviendrais par contre avec certains dangers de glissement, je pense, parce que, bon, mon collègue Éric Darier vous a dit tout à l'heure, bon, il y a des dangers, par contre. Quand je pense à la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, où, en termes de volume de bois, c'est la compagnie AbitibiBowater qui contrôle 85 %, 90 % des volumes de bois de la région, bien il y a danger d'avoir une influence indue de l'industrie, par exemple, sur les représentants régionaux. Donc, je pense, il peut y avoir, là, un terrain glissant de ce côté-là.

La Présidente (Mme Gonthier): Mme la députée...

M. Dufour: Le député de Roberval.

La Présidente (Mme Gonthier): Ah! M. le député, j'aurais besoin du consentement des parlementaires avant de donner la parole au député de Roberval.

Une voix: Consentement.

La Présidente (Mme Gonthier): Consentement, oui.

M. Trottier: Merci, Mme la Présidente. Sur la question des aires protégées, je pense qu'on convient qu'on est mieux d'identifier les aires protégées avant qu'on coupe parce qu'à ce moment-là il y a comme un illogisme, là. Mais il existe quand même un problème, c'est qu'entre autres, en région ressource, les gens ne sont pas contre l'idée des aires protégées mais que, souvent, c'est qu'aires protégées égalent chômage, dans le sens qu'on sort une partie du bois, on met une cloche à fromage sur une grande partie de territoire forestier, à ce moment-là il y a moins d'emplois. Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen que Greenpeace fasse la promotion d'aires protégées qui seraient mises en valeur et qui pourraient créer des emplois? Parce que, tant et aussi longtemps qu'on va juste s'en tenir à l'idée de protéger, c'est bien évident que, pour la personne qui perd son emploi, les aires protégées, c'est moins vendant un peu. Je voudrais vous entendre par rapport à ça.

n(18 h 10)n

Mme Filion (Mélissa): Oui. Bien, en fait, j'ai deux points à ma réponse. La première, c'est qu'avec, bon, la possibilité, l'éventualité qu'on retire, par exemple, les CAAF et qu'on réalloue les forêts à différentes sociétés d'aménagement du territoire, bien là, à ce moment-là, je pense qu'on peut justement avoir cette réflexion-là. Et c'est la réflexion qu'on demande au gouvernement d'avoir avant même de réallouer l'ensemble des forêts, de s'assurer qu'on va faire l'exercice de définir ce qu'on doit protéger pour avoir une certitude par la suite et pouvoir, par exemple, faire des investissements en forêt, d'une part. Donc, il y a une opportunité de faire cet exercice-là de création d'aires protégées avant même de réallouer l'ensemble des forêts du Québec, d'une part.

D'autre part, bon, effectivement, je pense qu'il y a un problème actuellement au Québec quand on regarde qu'il y a plusieurs communautés qui sont mono-industrielles, et que d'aller vers une mise en valeur, par exemple, des aires protégées, de permettre, par exemple différentes utilisations du territoire également, de la préservation, pas nécessairement des cloches de verre... Mais je pense que, quand on regarde en Gaspésie, pas très loin d'ici également, les parcs nationaux, ce sont des territoires où on peut avoir certaines activités récréotouristiques. Je pense, bon, par exemple, à la récolte non industrielle, par exemple la récolte de champignons, qui pourrait possiblement avoir lieu. Je pense qu'il y a différentes avenues à voir de ce côté-là pour permettre justement d'augmenter les emplois et d'augmenter la création d'aires protégées. d'une part.

Et, en Colombie-Britannique, dans le cadre d'un grand conflit avec Greenpeace et les différents industriels forestiers, il y a 200 millions de dollars qui ont été récoltés pour être capable de s'assurer qu'on va diversifier l'économie et s'assurer qu'on va baser l'économie sur une plus grande conservation et non pas sur une exploitation, et une dégradation, et une surexploitation des ressources naturelles. Donc, il y a tout un travail à faire de ce côté-là.

M. Darier (Éric): Et, si je peux ajouter, je pense que la crise financière actuelle, la récession probablement qui est là, est également une possibilité, pour nous collectivement, de revoir le modèle de développement économique. C'est-à-dire que je pense, comme ma collègue le disait au départ, ce n'est pas opposer environnement et protection de l'environnement. Après tout, l'économie est basée sur l'environnement. Donc, je pense qu'il va falloir faire cette transition. Je n'ose pas dire le virage vert parce que ça a porté malchance à quelqu'un, mais je pense que c'est important de le faire de toute manière parce qu'on va être poussés à ça.

Bon, nous, on vient d'une région éloignée, puisque que nous venons de Montréal, mais nous savons... nous avons entendu des rumeurs d'élection, et donc je pense que ça va être très important pour tous les partis d'avoir un programme, d'avoir un message porteur qui n'est pas de dire environnement ou économie, mais c'est environnement et économie. Merci.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, Mme la députée... Ah! Mme la députée de Rouyn-Noranda? Témiscamingue, il reste à peine une minute.

Mme Morasse: Je vais aller vite. Vous avez émis certaines réserves quant à l'usage de la biomasse ou des peuplements surannés parce que, vous l'avez répété à plusieurs reprises, le principal capteur de carbone, c'est le sol. Sachant que la photosynthèse des arbres peut produire jusqu'à 25 tonnes de bois par hectare par année, j'aimerais ça savoir par quel processus et sous quelle forme le carbone peut-il être séquestré de façon plus efficace que le feuillage des arbres peut le faire.

Mme Filion (Mélissa): Bien, en fait, quand on regarde la composition de la forêt boréale comparativement, par exemple, aux forêts tropicales dans le sud, qui peuvent être en Amazonie, en Indonésie également, bon, les études démontrent que, par exemple, dans les forêts tropicales, la majorité du carbone se retrouve dans les arbres. Par contre, en forêt boréale, la majorité du carbone se retrouve dans le sol, un sol qui est beaucoup plus riche, plus épais, et, bon, par la décomposition, par exemple, de la matière organique, bien il y a davantage de carbone qui va se retrouver dans le sol.

M. Darier (Éric): Et, si je peux me permettre un complément d'information également, au niveau même de l'agriculture c'est exactement la même chose. L'agriculture actuellement, les activités agricoles sont des émettrices au niveau des gaz à effet de serre, mais en fait une grande partie de ces émissions proviennent des sols, et en fait des sols plus riches permettent justement que l'agriculture devienne également un puits de carbone. Donc ça, c'est un domaine scientifique qui est vraiment sous... qui n'est pas très, très étudié, là, la composition des sols, et ça manque à la fois à l'agriculture, mais, je pense, également peut-être en foresterie, je suis moins expert là-dessus. Donc, c'est un peu ça, la réponse.

La Présidente (Mme Gonthier): Alors, Mme Filion, M. Darier, je vous remercie, au nom des membres de la commission, pour votre participation.

Alors, j'ajourne maintenant les travaux jusqu'à 9 h 30, demain matin, où la commission se réunira afin de poursuivre ce mandat. Alors, merci et bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 18 h 15)


Document(s) associé(s) à la séance