(Neuf heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Jutras): Alors, nous allons commencer nos travaux étant donné que nous avons quorum. Je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je rappelle le mandat de la commission: le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 99, Loi modifiant la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw.
Alors, Mme la secrétaire, est-ce que vous avez des remplacements à annoncer?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Dionne-Marsolais (Rosemont) remplace Mme Doyer (Matapédia); M. Côté (Dubuc) remplace M. Dufour (René-Lévesque); et M. Pinard (Saint-Maurice) remplace Mme Richard (Duplessis).
Le Président (M. Jutras): Alors, je donne l'horaire de la journée. Alors, nous commencerons par des remarques préliminaires du groupe parlementaire formant le gouvernement pour une période de 10 minutes; par la suite, pour un autre 10 minutes, les remarques préliminaires des députés de l'opposition. Vers les 9 h 50, là, après les remarques préliminaires, nous entendrons la MRC du Fjord-du-Saguenay; à 10 h 50, la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt conjointement avec le Syndicat national des travailleurs et travailleuses des pâtes et papiers de Kénogami, pour suspendre nos travaux vers 11 h 50. Nous reprendrons à 14 heures, pour entendre le Conseil de l'industrie forestière du Québec; à 15 heures, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et syndicats affiliés; à 16 heures, la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean conjointement avec la municipalité de Saint-David-de-Falardeau; à 17 heures, Abitibi-Consol. Et, à 18 heures, nous ajournerons nos travaux.
Alors, je demanderais dès maintenant, là, à tous ceux et celles qui peuvent avoir un téléphone cellulaire en leur possession de bien vouloir le fermer, s'il vous plaît.
Remarques préliminaires
Alors, nous procédons, sans plus tarder, par les remarques préliminaires. Alors, M. le ministre des Ressources naturelles, la parole est à vous.
M. Pierre Corbeil
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Chers membres de la commission, c'est avec grand plaisir que je suis ici pour ces consultations particulières sur le projet de loi n° 99 intitulé Loi modifiant la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. J'estime que ce projet de loi est fort important pour la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean et je suis convaincu que les discussions que nous aurons nous permettront de partager nos points de vue sur cette question.
J'aimerais d'abord rappeler brièvement que le but recherché par le projet de loi est d'inciter Abitibi-Consolidated à consolider et à développer ses activités économiques dans la région. Nous proposons donc d'imposer graduellement des redevances additionnelles à cette entreprise plutôt que de mettre fin à la location des forces hydrauliques qu'elle détient, ce qui produirait l'effet contraire à celui que nous recherchons. Nous souhaitons également donner à cette entreprise qui, je vous le rappelle, soutient plus de 4 000 emplois dans cette région la possibilité de réduire ses redevances additionnelles si elle procède à la création de nouveaux emplois et/ou réalise des investissements structurants au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Essentiellement, la location des forces hydrauliques du domaine de l'État vise à mettre en valeur cette ressource naturelle et à soutenir le développement économique et social du Québec et de ses régions. Il va de soi, M. le Président, que le fait de mettre fin à la location des forces hydrauliques à ce moment-ci irait à l'encontre de cet objectif.
Les enjeux sous-entendus par ce projet de loi sont donc importants. Plusieurs groupes ont d'ailleurs des attentes élevées et précises à notre endroit. Par exemple, la municipalité de Saint-David-de-Falardeau perçoit des taxes auprès d'Abitibi-Consolidated. Le fait de mettre fin à la location des forces hydrauliques lui ferait nécessairement perdre d'importants revenus. L'usine de papier journal de Kénogami est relativement âgée. Elle nécessite d'importants investissements pour sa modernisation, ça, tout le monde est d'accord là-dessus. Je considère que de retirer les avantages reliés aux forces hydrauliques ne favoriserait pas cette modernisation. Il faut savoir, M. le Président, qu'Abitibi-Consolidated, le locataire des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw, a annoncé, en janvier dernier, la fermeture définitive de son usine de Port-Alfred. Dans les faits, la loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw prévoit la possibilité de résilier la location sans indemnité ni formalité, en cas de fermeture d'une usine exploitée par le locataire dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Nous croyons toutefois que la perte complète et irrévocable de l'avantage économique que procure la location des forces hydrauliques du domaine de l'État risquerait de mettre en difficulté d'autres usines de l'entreprise dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean et peut-être même ultimement ailleurs au Québec. Conséquemment, nous voulons mettre toutes les chances de notre côté et nous donner le temps nécessaire pour encourager les activités industrielles du secteur forestier dans cette région. Comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui prévoit également que le locataire devra payer au ministère des Ressources naturelles une redevance additionnelle. Elle sera additionnelle à celle déjà fixée en vertu de la politique intitulée Nouveau régime d'octroi et d'exploitation des forces hydrauliques du domaine de l'État pour les centrales hydroélectriques de moins de 50 MW. Le projet de loi prévoit aussi que nous puissions alléger le fardeau d'Abitibi-Consolidated si elle démontre sa volonté d'agir pour la région. En effet, nous aurons ainsi la possibilité de réduire la redevance additionnelle si l'entreprise réalise des projets structurants visant à créer ou à consolider des emplois.
Voilà qui résume le projet de loi n° 99. Je serai heureux d'entendre les commentaires des intervenants qui sont invités à ces consultations particulières, mais, avant de terminer, M. le Président, permettez-moi de rappeler aux membres de cette commission et aux gens qui prendront la parole ici, aujourd'hui, que nous devons agir dans le meilleur intérêt du Saguenay?Lac-Saint-Jean et au mieux des intérêts de ses travailleurs. Il en va de la santé de cette région. À titre d'élus, nous avons la responsabilité de mettre toutes les chances de notre côté, pour préserver le tissu social et économique de ce coin de pays, d'où l'importance de faire preuve d'ouverture d'esprit à l'égard de ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires du côté du gouvernement? Alors, je cède la parole maintenant à la députée de Rosemont qui est porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie.
Mme Rita Dionne-Marsolais
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Merci, M. le ministre ? et j'aimerais souligner dès le départ que je suis heureuse de l'ouverture, que le ministre a consenti à entendre les groupes qui viendront expliquer leurs points de vue sur le sujet ? et bonjour, mesdames et messieurs.
Bien que le ministre était prêt à passer rapidement à l'adoption de ce projet de loi en juin dernier, il nous semblait un peu tôt, à l'opposition officielle, pour connaître les conséquences de ce projet de loi, et nous souhaitions entendre les intervenants régionaux sur cet enjeu extrêmement important.
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(9 h 40)
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Si nous sommes ici, ce matin, avec le projet de loi n° 99, c'est parce qu'il y a eu une catastrophe: 640 travailleurs ont perdu leur emploi après que la compagnie Abitibi-Consol eut décidé de fermer son usine de Port-Alfred. Pourtant, en 1999, l'Assemblée nationale avait adopté la loi n° 8 avec l'appui du Parti libéral. Cette loi prévoyait précisément que le gouvernement pouvait reprendre possession des droits hydrauliques advenant la fermeture d'une des usines exploitées par le locataire le 19 juin 1999, dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. L'entreprise avait accepté cette entente et comprenait bien les enjeux. Le ministre soutient qu'en appliquant la loi n° 8 on met, aujourd'hui, en péril les 5 000 emplois de la région pour Abitibi-Consol, appliquer la loi et l'entente passées nuirait au développement régional. Pourtant, on pourrait aussi dire, M. le Président, que les redevances additionnelles qu'il demande à l'entreprise avec le projet de loi n° 99 sont contraignantes et coûteuses et vont certainement nuire au développement de cette entreprise. C'est sans doute ce que la compagnie viendra nous dire cet après-midi.
Dans les faits, si l'entreprise décide de réaliser son plan de modernisation de 500 millions à ses installations de Kénogami, est-ce que le gouvernement réclamera les redevances additionnelles? Bien sûr que non. Le gouvernement prévoit précisément, dans le projet de loi n° 99, un retrait des redevances additionnelles advenant des investissements majeurs. Donc, c'est un faux débat que de dire que le projet de loi n° 99 mettrait en péril le projet de modernisation de Kénogami. Dans les faits, ce projet de loi n° 99 finance en partie la modernisation de Kénogami. La question qu'il faut se poser est la suivante: Les Québécois sortent-ils gagnants avec le projet de loi n° 99? Est-ce que ce sont les employés de Port-Alfred? Certainement pas. Est-ce que c'est la région? On peut en douter, puisque les redevances additionnelles, s'il en est, ne seront pas versées à la région uniquement mais iront directement au fonds consolidé de l'État. En juin dernier, sur ce projet de loi, le ministre a dit que l'entreprise économisait 10 millions pour ses coûts annuels d'énergie avec ce projet de loi n° 99. Et je le cite: En retirant les droits d'eau, la facture annuelle de l'entreprise augmente de 10 millions. C'est le ministre qui l'a dit en commission parlementaire: 10 millions par année.
De plus, si le projet de loi est appliqué mais que la compagnie ne fait pas son projet de modernisation, le ministre prétend qu'il y aura des redevances additionnelles, au Trésor québécois, de 25 millions pour les quatre années suivantes. Je le souligne, le projet de loi ne prévoit pas ces redevances de 25 millions à la région mais encore au Trésor. J'ai fait un petit calcul, M. le Président, et je vous donne les résultats. Avec la fermeture de Port-Alfred, si on appliquait la loi n° 8, cela coûterait 10 millions par année ou 40 millions sur quatre ans à l'entreprise. Si maintenant on applique la loi n° 99 et pas la loi n° 8, cela pourrait coûter 25 millions sur quatre ans. Donc, le bénéfice net pour l'entreprise, c'est 15 millions au minimum sur quatre ans. C'est le cadeau du gouvernement à l'entreprise, c'est le cadeau des Québécois aux actionnaires d'ACI avec le projet de loi n° 99. Je peux répéter, je peux faire la démonstration. Je vois des petits yeux qui froncent les sourcils.
Il faut quand même savoir à qui on a affaire. Abitibi-Consol, c'était la Gaspésia. D'un côté, des gens... pardon, c'est aussi et c'était Port-Alfred. Quelle garantie avons-nous qu'en appliquant la loi n° 99 elle respectera ses engagements? Aucune. Si le passé est garant de l'avenir, je suis très inquiète, M. le Président. Maintenant, nous sommes ici, pour entendre les intervenants régionaux et pour entendre l'entreprise. D'un côté, des gens ayant vécu et vivant toujours le drame de Port-Alfred; de l'autre, des gens anxieux par le chantage que fait actuellement l'entreprise quant au projet de modernisation de Kénogami. Et j'ajoute, en trame de fond, une dernière nouvelle de la fin de semaine: une demande de l'entreprise pour une autre réduction de 2 % des coûts de production à Kénogami.
M. le Président, le défi de cette commission, c'est de respecter l'ensemble des citoyens du Québec en servant au mieux les citoyens du Saguenay?Lac-Saint-Jean et surtout les hommes et les femmes encore à l'emploi de cette entreprise, et c'est dans cet esprit que nous allons écouter très attentivement tous les intervenants, incluant l'entreprise, bien sûr. Merci, M. le Président...
Le Président (M. Jutras): Est-ce qu'il y a d'autres députés de l'opposition qui veulent faire des remarques préliminaires? Non?
Auditions
Alors, nous commençons donc en entendant la MRC du Fjord-du-Saguenay. Alors, est-ce que les représentants de la MRC du Fjord-du-Saguenay sont présents? Alors, si vous voulez vous approcher et prendre place.
M. Claveau (Jean-Marie): Alors, bonjour, M. le ministre.
Le Président (M. Jutras): Alors, un instant, s'il vous plaît. Alors, bienvenue, madame, bienvenue, messieurs, à la Commission de l'économie et du travail. Alors, je vous rappelle les règles avec lesquelles nous procédons: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; par la suite, il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre et les députés ministériels et par après un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition.
Alors, je comprends, monsieur, que vous êtes le porte-parole? Oui? Alors, voulez-vous vous identifier, s'il vous plaît, et présenter les personnes qui vous accompagnent, et par la suite bien nous présenter votre mémoire?
Municipalité régionale
de comté du Fjord-du-Saguenay
M. Claveau (Jean-Marie): Alors, bonjour, M. le Président, M. le ministre, mesdames messieurs. Mon nom est Jean-Marie Claveau. Je suis préfet de la MRC du Fjord-du-Saguenay et je suis accompagné, à ma droite, du directeur général, M. Denis Jubinville; Mme Marie-Luce Martin, mairesse de Saint-Honoré; et M. Bertrand Couture, préfet suppléant et maire de Saint-Charles-de-Bourget.
Alors, sans plus tarder, je vais vous présenter le mémoire. Alors, la MRC du Fjord-du-Saguenay est située dans la région administrative 02. Elle compte une population de 20 058 résidents. On y dénombre 13 municipalités rurales et des territoires dits non organisés. Les 13 municipalités rurales sont situées en périphérie de la ville de Saguenay: cinq d'entre elles sont localisées dans le Bas-Saguenay, soit Ferland-Boilleau, L'Anse Saint-Jean, Petit-Saguenay, Rivière-Éternité et Saint-Félix-d'Otis; une est située à l'extrême ouest de la ville de Saguenay, soit Larouche, alors que les sept autres sont situées au nord du Saguenay, soit Bégin, Saint-Charles-de-Bourget, Saint-Ambroise, Saint-David-de-Falardeau, Saint-Fulgence, Saint-Honoré et Sainte-Rose-du-Nord. Le territoire de ces 13 municipalités couvre 8 % de la superficie totale du territoire de la MRC, soit environ 3 540 km². La plus grande partie du territoire de la MRC est constituée de territoires non organisés, soit plus de 40 000 km² représentant 92 % du territoire. L'ensemble, c'est plus grand que le territoire même de la Suisse. Les ressources naturelles sont situées en grande partie sur les territoires non organisés de la MRC et sur les terres publiques intramunicipales dont la MRC détient la gestion.
La région du Saguenay?Lac-Saint-Jean a concentré son développement économique sur l'exploitation de ses ressources naturelles: le développement hydroélectrique, la coupe et la production de bois de sciage, l'extraction des minerais et la valorisation de son territoire par l'émission de baux de villégiature. Actuellement, la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean connaît l'un des plus hauts taux de chômage au Canada avec un taux de 10,4 % pour la région métropolitaine de Chicoutimi-Jonquière et de 11,8 % pour le reste de la région, dont la MRC du Fjord. Cette situation est le résultat de plusieurs facteurs conjoncturels, dont notamment: une économie régionale principalement liée à l'exploitation et la mise en valeur de ses ressources naturelles ? les activités manufacturières y sont entre autres moins développées que dans l'ensemble du Québec; un esprit entrepreneurial plus faible en raison de la présence de la grande entreprise; et un bilan migratoire négatif. Le poids démographique de la région est en constante régression depuis 20 ans, en particulier chez les jeunes de 15-29 ans. L'exode des jeunes et le vieillissement de la population engendrent également un phénomène de rareté de la main-d'oeuvre qualifiée.
Au cours des dernières années, la population régionale a dû faire face à plusieurs fermetures d'usine qui ont entraîné de nombreuses mises à pied. L'industrie forestière, tout comme l'industrie de l'aluminium, n'a pas été épargnée. Après la fermeture, en 2003, de la Coopérative forestière Laterrière qui employait 400 personnes, l'usine d'Abitibi-Consolidated de Port-Alfred fermait définitivement ses portes le 26 janvier 2005, après plusieurs arrêts temporaires des opérations à partir de décembre 2003, entraînant la perte de 640 emplois directs, et ce, malgré les nombreux efforts déployés par les leaders régionaux pour assurer sa survie. Dans une région où l'industrie forestière prédomine comme celle du Saguenay?Lac-Saint-Jean ? la région détient tout près de 25 % de la possibilité forestière québécoise ? la récente décision du gouvernement de diminuer de 20 % les attributions forestières vient accentuer d'autant plus cette situation déjà difficile pour une région ressource.
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(9 h 50)
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Ainsi, bien que nous adhérions aux conclusions du rapport de la commission Coulombe, nous déplorons le manque de mesures d'atténuation ainsi que le manque de collaboration avec les régions les plus durement touchées. Ces mesures d'atténuation auraient dû être mises en oeuvre bien avant l'application de la diminution des possibilités forestières, et ce, afin de minimiser les impacts significatifs sur l'emploi et l'économie régionale déjà durement affectée par les fermetures d'usine et la rationalisation, sans compter que l'industrie doit faire face à la surtaxe imposée par les Américains sur le bois d'oeuvre, à la hausse du dollar canadien de même qu'à celle du prix du pétrole, trois autres variables non négligeables qui affectent durement l'industrie et l'ensemble de l'économie régionale.
Dans le contexte socioéconomique difficile décrit précédemment, nous faisons les constats suivants quant à l'application de la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw à Abitibi-Consol inc.
L'article 9, premier paragraphe, de la loi n° 8 concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière n'a pas été respecté par le locataire. Cet article stipule qu'«outre les cas de résiliation sans formalité ni indemnité que pourra prévoir le bail, celui-ci pourra être ainsi résilié par le ministre dans les cas suivants ? entre autres, premier: la fermeture d'une des usines exploitées par le locataire le 19 juin 1999, dans la région administrative du Saguenay?Lac-Saint-Jean». La fermeture définitive de l'usine ACI de Port-Alfred au début de l'année 2005 contrevient à cet article.
Deux, les redevances et avantages financiers découlant de l'exploitation des ressources naturelles ne reviennent pas de façon équitable, dans la région. La région du Saguenay?Lac-Saint-Jean produit 34 % de toutes les redevances québécoises reliées aux ressources naturelles. Nous générons 127,8 millions sur le total provincial de 428,9 millions, alors que seulement 50 % de ces redevances est retourné dans la région. Les redevances tirées des ressources naturelles et versées au gouvernement du Québec vont directement dans le fonds consolidé de la province.
Nos recommandations. Compte tenu que la compagnie Abitibi-Consol n'a pas respecté ses engagements en regard des privilèges consentis par la loi n° 8 concernant l'utilisation des forces hydroélectriques de la rivière Shipshaw, la MRC du Fjord-du-Saguenay demande au gouvernement du Québec que, s'il maintient la pénalité imposée à la compagnie à titre compensatoire, cet argent soit retourné à la région pour être dédié exclusivement à son développement socioéconomique. Advenant le retrait de ces privilèges, il faudra nécessairement que cette énergie soit utilisée à des fins industrielles pour de nouveaux projets structurants et créateurs d'emplois au Saguenay?Lac-Saint-Jean et que la municipalité de Saint-David-de-Falardeau conserve ses compensations de taxes sur les barrages.
Dans le cas de l'usine d'Abitibi-Consol de Kénogami, nous demandons au gouvernement de poser immédiatement des actions concrètes visant le maintien et le développement de l'usine par les moyens appropriés. Dans le cas de cette usine, le maintien des avantages hydroélectriques, par exemple, permettrait de soutenir un rendement concurrentiel aux plans provincial et national. De plus, nous demandons que les besoins en approvisionnement de matières naturelles ou de ressources naturelles soient assurés aux entreprises afin de leur permettre d'acquérir une plus grande stabilité financière et d'accroître la production et les effectifs en place. De même, l'approvisionnement supplémentaire en ressources forestières pourrait être exploré afin d'assurer une forme de pérennité à l'usine d'ACI de Kénogami.
Advenant la fermeture d'une usine d'Abitibi-Consol, la MRC du Fjord-du-Saguenay recommande fortement au gouvernement de maintenir les avantages financiers que celle-ci détient dans la région. Ainsi, une somme de 10 millions en avantages hydroélectriques détenue par une usine pourrait être réinvestie dans la région et octroyée de diverses façons. On ne veut pas que ça retourne à Hydro-Québec pour que la production et les revenus y découlant retournent au fonds consolidé de la province. Ils n'ont aucun impact direct dans la région. De plus, des mesures compensatoires devraient être prévues tant pour la région que pour les travailleurs affectés par une telle fermeture. Prenons un exemple: la fermeture de l'usine de Port-Alfred. Aucune mesure compensatoire n'a été versée, alors qu'une partie entière de la région du Saguenay a été durement affectée. Aucune mesure d'atténuation structurante et permanente n'a été annoncée.
L'économie de la province dépend particulièrement des ressources naturelles. Paradoxalement, ces ressources naturelles sont présentes dans les régions qui sont le plus aux prises avec les difficultés économiques. Cette réalité des régions ressources n'est pas sans avoir un impact sur l'ensemble de l'économie provinciale. Le gouvernement du Québec a été élu sur des promesses de soutien aux régions. Actuellement, les investissements se font très rares, alors que l'économie régionale en a excessivement besoin. Pour assurer l'autonomie et l'indépendance financière de la région, il est nécessaire que le gouvernement redonne sa juste part à la région et procède à la décentralisation des ressources humaines et financières provenant de l'exploitation des ressources naturelles du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
En effet, nous profitons de l'occasion pour rappeler au gouvernement que, sur le total de 3 580 fonctionnaires travaillant au ministère des Ressources naturelles et de la Faune, seulement 236 oeuvrent dans la région, soit 6,6 % des effectifs. Il est anormal qu'une région durement touchée par les pertes d'emploi et aux prises avec de grandes difficultés économiques continue à donner une grande partie de sa richesse au profit du Québec, sans obtenir un retour équitable en regard de cette contribution. Avec les moyens technologiques actuels et le départ massif de fonctionnaires projeté au cours des quatre prochaines années, nous demandons au gouvernement de réaffecter 700 à 800 postes opérationnels au Saguenay?Lac-Saint-Jean et ainsi compenser les pertes d'emploi.
Donc, en conclusion, il est impératif que le gouvernement du Québec s'engage dans les plus brefs délais à:
Garantir les approvisionnements des matières nécessaires au fonctionnement des usines de la région, dont l'usine de Kénogami. Et là-dessus on demande pour une fois d'être proactif. On sait qu'il y a des annonces de faites. En tout cas, au niveau de la compagnie et de l'usine de Kénogami, on est très inquiet et on ne veut pas que le gouvernement soit en réaction à une situation, devant des faits accomplis, mais prenne le taureau par les cornes, et devance cette situation, et mette un comité en place pour trouver une solution à l'usine de Kénogami;
Subventionner les coûts d'infrastructures nécessaires à la survie de l'usine de Kénogami. Alors, il faut nuancer: subventionner en collaboration avec la mise en place d'un tel comité, voir comment on peut réaliser, dans un partenariat avec l'entreprise, assurer la pérennité de l'usine de Kénogami;
Instaurer un fonds de développement régional, advenant la fermeture d'une usine, d'une somme équivalente à l'avantage économique résultant des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw qui sont utilisées par ladite usine. Et, si des pénalités sont maintenues, que ces pénalités-là servent à un fonds régional pour le développement du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Voici l'essence des propos retenus par la MRC du Fjord-du-Saguenay concernant la situation.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci pour votre présentation. Je cède maintenant la parole au ministre des Ressources naturelles. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. le préfet, madame, messieurs, si on va dans votre mémoire, à la page 6, vous recommandez qu'advenant qu'Abitibi-Consolidated perde ses privilèges d'exploiter les forces hydrauliques du domaine de l'État cette énergie soit utilisée à des fins industrielles pour de nouveaux projets structurants au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Auriez-vous des idées ou des suggestions quant à la nature des projets susceptibles d'être attirés par cette énergie?
M. Claveau (Jean-Marie): On n'a pas nécessairement exploré, au niveau de la MRC, mais régionalement, sûrement. Au niveau de la Conférence régionale des élus, il y a des comités en place, et sûrement qu'avec des avantages et privilèges... Vous savez qu'au Québec c'est à peu près la seule région ou presque où certaines entreprises bénéficient de privilèges d'utilisation de forces hydroélectriques, alors je pense qu'il pourrait sûrement être intéressant pour des entreprises... Et ce serait un avantage sûrement d'arriver avec des possibilités d'utiliser ces privilèges-là pour implanter une entreprise, de faire la promotion ou de faire du démarchage pour aller en chercher.
M. Corbeil: Merci. Vous recommandez que la municipalité de Saint-David-de-Falardeau conserve ses compensations de taxes sur les barrages. Cette compensation ? un petit rappel historique, là ? cette compensation est due à une particularité de la Loi sur la fiscalité municipale qui prévoit exceptionnellement que les producteurs privés qui payaient des en-lieu de taxes à des municipalités en 1979 continuent de le faire. Si le gouvernement met fin à la location des forces hydrauliques à Abitibi-Consolidated, cette disposition ne s'applique plus, et le nouveau producteur, quel qu'il soit, sera assujetti à la nouvelle taxe sur les services publics communément reconnue comme étant la TSP, l'écart entre les compensations tenant lieu de taxes et la TSP étant de 1,5 million de dollars.
Alors, qu'est-ce que vous préconisez pour éviter cette situation?
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(10 heures)
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M. Claveau (Jean-Marie): Bien, par une adaptation, une modification de la loi pour garder ces privilèges-là. Vous savez, quand une municipalité a basé son économie et son mode de fonctionnement avec un revenu à la hauteur, là, d'au-delà de 1 million de dollars, pour une petite municipalité comme Saint-David-de-Falardeau, s'il fallait lui enlever un tel revenu, ça vient changer tout le mode de fonctionnement et avoir un impact majeur pour une telle municipalité et pour la région également, parce que, si ces revenus-là sont retournés encore une fois au fonds consolidé de la province, on ne les aura pas directement au niveau de la région. C'est ce qui se produit présentement. Alors, vous prenez comme Hydro-Québec, pour les barrages, les municipalités ne retirent pas de revenus directement, de compensations pour les barrages situés dans leur milieu.
Alors, nous, il serait très important qu'une municipalité comme Saint-David-de-Falardeau maintienne ses revenus, et ça y va au niveau de la contribution de la Sûreté du Québec, au niveau du mode des cotisations au niveau de la MRC. Comme vous avez pu voir, la MRC est grande, elle est vaste, elle est peu populeuse. S'il y a des revenus de moins au niveau de la MRC, ça met en cause, ça touche également l'ensemble du territoire. Alors, une situation semblable pourrait être très dommageable en premier lieu pour la municipalité de Saint-David-de-Falardeau, en deuxième lieu pour la MRC et pour la région par la suite, parce que c'est de l'argent dans l'économie régionale.
M. Corbeil: Alors, si je comprends bien, dans le cas bien particulier, ici, pour cette municipalité-là, pour ses installations de production d'énergie hydroélectrique, vous préconisez une mesure d'exception.
M. Claveau (Jean-Marie): Absolument. Ou la maintien de la situation actuelle pour Saint-David-de-Falardeau.
M. Corbeil: Finalement, est-ce que vous pensez que le projet de loi n° 99, qui est un peu une exception par rapport à ce qui avait été prévu préalablement, est à propos?
M. Claveau (Jean-Marie): Alors, le projet de loi n° 99, on pense qu'au niveau... Il y a une situation. Il faut aller au-delà de ce qui est proposé un petit peu. Quand on vous faisait un parallèle tantôt, M. Corbeil, au niveau du rapport Coulombe, on aurait aimé que les mesures d'atténuation soient appliquées avant les pénalités. Alors, l'impact aurait été moindre que la situation actuelle au niveau de l'industrie forestière. On vient de subir, de la compagnie, une fermeture. 640 emplois directs ? alors on ne compte pas les indirects ? c'est tout un secteur de l'économie régionale. C'est toute une partie du Saguenay, du Bas-Saguenay qui est affectée.
Alors, le projet de loi n° 99, on ne peut passer inaperçu, je pense ? il y avait une loi à respecter qui était au niveau de la loi n° 8 ? qu'on ferme les livres, puis qu'on efface, puis on dit: Ce n'est pas grave, vous n'avez pas respecté votre engagement, on passe à autre chose, on comprend, c'est difficile, mais vous avez déjà un privilège. Il y a sûrement une mesure compensatoire. Vous parlez des droits ou de pénalité, là, qui pourrait être administrée à la compagnie. D'abord, avant d'appliquer cette pénalité, c'est la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui est directement affectée. Il devrait être prévu, dans le projet de loi, que cette pénalité-là soit retournée au Saguenay?Lac-Saint-Jean, parce que c'est un avantage que la compagnie a pour utiliser la ressource du Saguenay?Lac-Saint-Jean, la matière première, et d'avoir le privilège au niveau des barrages, même si Port-Alfred, au niveau de l'opérationnel, de la compagnie, n'était pas relié directement avec l'électricité des barrages de la compagnie. Mais ça faisait partie de la loi n° 8, d'un tout, c'était géré globalement.
Alors, on dit: Vous n'avez pas respecté, il y a sûrement une forme... Par contre, on veut bien croire la compagnie. On est même prêts à dire: Bien, cette pénalité-là pourrait servir ou pourrait être réutilisée dans un projet de développement. Si la compagnie garantit, est vraiment sérieuse de moderniser, entre autres, Kénogami ou d'autres usines... La compagnie a beaucoup de droits de coupe forestière au niveau du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Ça peut être d'autres entreprises de la compagnie. Mais présentement celle à laquelle tous les regards se posent, c'est sur Kénogami, puis il y a beaucoup d'inquiétudes. C'est au-delà de 400 emplois. Alors, il faut trouver des solutions à cette compagnie-là, à cette entreprise-là directement, cette papetière-là parce qu'on ne peut plus subir d'autres fermetures, sinon, tout à l'heure, ça va être la déstructuration du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
M. Corbeil: M. le préfet, justement, puisque vous parlez d'une autre installation de l'entreprise dans la région, vous préconisez, dans votre mémoire, que le gouvernement pose des actions concrètes, immédiates pour le maintien et le développement de cette usine. Pouvez-vous nous faire état ou nous donner des exemples de moyens que vous jugeriez approprié de prendre immédiatement, parce que vous avez, dans vos conclusions, parlé de subventions? Est-ce que vous voyez juste les subventions? Est-ce que vous voyez d'autre chose? Est-ce que vous voyez... Jusqu'à quel niveau, les subventions?
M. Claveau (Jean-Marie): Alors, subventionner, il faut quand même prendre ça avec certaines réflexions. Ça pourrait être, par exemple... Avec la fermeture d'Abitibi-Consol à Port-Alfred, il y avait des droits d'approvisionnement aussi, des quantités, là, d'approvisionnement rattachées à cette usine-là. Et ils sont partis. On n'en a plus réentendu parler avec le dépôt du rapport Coulombe. C'est une diminution, veux veux pas, directement, c'est 640 emplois directs. Ça a parti dans l'ensemble de la situation forestière du Québec. On ne peut pas l'ignorer.
Tout projet de relance, quand on parle de subventions, subventions, ce n'est pas nécessairement de l'argent directement. C'est-u des compensations? Avec des machines beaucoup plus productrices ou plus efficaces, ils vont peut-être avoir besoin d'approvisionnement supplémentaire. C'est des formes de garantie en tout cas qu'on devrait s'asseoir puis regarder s'il y a des possibilités. Avec un investissement d'une machine ou de deux machines ? ce serait encore mieux ? plus performantes, ils vont sûrement avoir besoin d'approvisionnement supplémentaire, de regarder l'ensemble. Alors, moi, je pense que vous avez la situation de la compagnie. Nous, comme MRC, on ne peut pas voir les chiffres de la compagnie. On n'a pas les résultats directs. Votre ministère a beaucoup d'informations, et je pense qu'il pourrait regarder dans l'ensemble du traitement, déjà mettre un comité en place avec la compagnie pour trouver des moyens. On parlait tantôt de pénalités qui pourraient être demandées à la compagnie suite à la fermeture de Port-Alfred. Il y a peut-être ces pénalités-là, un retour qui pourrait être une forme de subvention à l'implantation de l'usine. Mais je suis certain, M. le ministre, avec le nombre de fonctionnaires qu'il y a à Québec ? je vous les ai nommés tout à l'heure, là, la quantité, je pense, c'est 2 500 quelque chose ? il doit sûrement y en avoir quelques brillants au travers pour faire partie d'un comité avec des experts pour analyser toute la situation.
Puis la compagnie en a plusieurs aussi parce qu'ils n'ont pas seulement que des agents de communication, ils doivent avoir des gens aussi qui pensent. On voit beaucoup les gens de communication de part et d'autre, mais il y a sûrement des professionnels à l'intérieur, et autant financiers qu'autant opérationnels, qui pourront s'asseoir et puis, dans une véritable recherche de solutions, proposer des solutions au gouvernement. Ça ne veut pas dire de tout accepter ce que la compagnie veut avoir comme subventions ou de fonctionnement, mais au moins de s'asseoir avec de franches discussions puis éviter d'autres fermetures au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
M. Corbeil: Je peux vous rassurer tout de suite, M. le préfet, tous les fonctionnaires du gouvernement du Québec sont brillants. Inquiétez-vous pas là-dessus.
M. Claveau (Jean-Marie): Je n'en doutais pas.
M. Corbeil: Bien, vous avez dit: On peut essayer d'en trouver quelques-uns de brillants au travers. Je peux vous le dire, ils le sont tous.
M. Claveau (Jean-Marie): Bien, je ne le sais pas. Je me posais la question parce que, là, on n'a jamais... ou bien on ne les fait pas travailler sur ces questions-là.
M. Corbeil: Je vous donne la réponse: ils sont tous brillants. Alors, M. le préfet, le projet de loi ? puis on va rester autour du n° 99 ? le projet de loi prévoit que le taux de redevance additionnelle pourra être réduit pour tenir compte des emplois puis des investissements structurants réalisés par l'entreprise dans la région. Pensez-vous qu'une telle approche est susceptible d'inciter l'entreprise à consolider et développer ses activités chez vous?
M. Claveau (Jean-Marie): Hein? Répétez.
M. Corbeil: Pensez-vous qu'une telle approche fait en sorte que ça va inciter l'entreprise à consolider puis à développer ses activités chez vous?
M. Claveau (Jean-Marie): Je pense que...
M. Corbeil: ...des redevances additionnelles progressives et/ou dégressives, s'il y a des investissements puis des créations d'emplois.
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(10 h 10)
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M. Claveau (Jean-Marie): Moi, je pense, M. le ministre, que c'est un message clair lorsqu'on ne respecte pas des engagements ou on ne respecte pas une loi. C'est symbolique comme message, et il y a possibilité de dire: Bien, maintenant que c'est appliqué, je crois que le message est clair. Ça ne veut pas dire que le gouvernement ne sera pas en démarche de solution de problème et ne contribuera pas à une relance des activités, mais il faut être clair au départ, avec ces gens-là, que, nos ressources naturelles ? on a fini la colonisation au Québec ? on ne les utilise pas comme bon nous semble, c'est un bien collectif qu'il faut protéger. Et il faut donner un message clair aux entrepreneurs, aux entreprises que, ces ressources-là, comme bien collectif, le gouvernement est là comme chien de garde, est là pour trouver de l'activité économique au bénéfice de l'ensemble de sa population, et on ne l'utilise pas comme bon nous semble. Ça, c'est une chose.
Puis, deuxièmement, je pense que le message va être clair parce que, si, parallèlement à ça, on met en place des dispositions pour assurer une relance de l'entreprise, ce qui veut dire par une contribution ? qui prendra quelle forme? Ce sera à vous, là, de juger le meilleur moyen en partenariat avec l'entreprise ? je pense que le message serait clair, et ce ne serait pas difficile à faire comprendre.
M. Corbeil: Je ne sais pas s'il y a de mes collègues qui veulent poser des questions.
Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député de Roberval.
M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, M. Claveau, Mme Martin, M. Couture, M. Jubinville, bonjour et bienvenue à cette commission parlementaire, qui, je pense, est extrêmement importante, concernant le dossier bien sûr d'Abitibi-Consol sur le territoire de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean et particulièrement le dossier de Port-Alfred, qui est intimement lié, je dirais, avec ce qui se passe avec l'industrie et le dossier de Kénogami.
Dans votre mémoire, M. Claveau, il y a certains éléments que vous énoncez, qui me font sursauter un petit peu, par rapport, entre autres, à l'utilisation de la ressource forestière. Aujourd'hui, on a grosso modo le même nombre de personnes dans l'industrie forestière au Québec qu'il y a à peu près une centaine d'années, mais on coupe deux fois plus d'arbres. Ça s'est fait avec la modernisation des entreprises, mais ça ne s'est pas fait avec un gain important de création d'emplois. Et, de ce que je constate dans le mémoire que vous nous proposez, vous nous dites un peu de continuer dans la même façon qu'on faisait les années auparavant. Et je prends pour exemple la recommandation 4 quand vous nous dites: «Nous demandons que les besoins en approvisionnement de matières naturelles soient assurés aux entreprises afin de leur permettre d'acquérir une plus grande stabilité financière et d'accroître la production.» C'est ce qu'ils ont toujours fait au cours des 100 dernières années, mais pas nécessairement les effectifs.
Et, compte tenu de la rareté de la ressource, compte tenu de la réalité qu'on vit sur le territoire du Québec, comment on peut arriver à concilier le fait de continuer de faire les choses comme on les a toujours faites au cours des 100 dernières années ou avec la modernisation des années qui viennent et qu'on ne se pose pas les vraies questions, de dire: «Bon, bien, maintenant, on a un constat qui est là»? Comment on peut arriver à faire les choses différemment? Comment on peut arriver ? et l'exemple que le ministre avait utilisé lors d'une consultation m'avait particulièrement frappé ? comment on peut arriver à mettre de l'intelligence dans le deux-par-quatre, d'arrêter de faire du steak haché avec du filet mignon? C'est un exemple que j'utilise régulièrement, compte tenu de ce qu'on fait avec la fibre qui pourrait avoir des valeurs ajoutées. Est-ce que c'est ce que je comprends dans le mémoire que vous nous avez déposé, quand vous nous dites qu'il faut qu'on continue de maintenir l'approvisionnement pour ces usines-là sans nécessairement leur demander des investissements, ou des modernisations, ou des orientations beaucoup plus précises quant au futur?
M. Claveau (Jean-Marie): Bon. Alors, je vous ramène, M. Blackburn, à tous les mémoires déposés au niveau de la commission. Vous savez très bien qu'entre autres on a l'étude, là, les recherches, là, de M. Réjean Gagnon qui montraient, entre autres, dans les mesures qui pouvaient être prises, dans les mesures d'atténuation, entre autres, de remonter la limite nordique. Alors, déjà là, si on va dans l'application de cette recommandation-là ? je pense qu'il y a un comité en place là-dessus ? on vient de changer un petit peu la situation au niveau de l'approvisionnement.
Et, deuxièmement, c'est certain que, tout développement, toute façon de faire, il y a évolution de la technologie, et ce n'est pas pour créer de l'emploi direct nécessairement, dans tous les secteurs d'activité économique. Ceci dit, il y a de nouvelles formes d'exploitation qui sont à explorer. On peut importer, par exemple, des façons de faire des pays nordiques européens, certains pays nordiques. On a peut-être un peu négligé la partie travaux sylvicoles, travaux de plantation au niveau de notre industrie forestière. Alors, on n'a pas détaillé parce que ce n'était pas l'essence de la présentation aujourd'hui, mais vous savez très bien, M. Blackburn, qu'il existe beaucoup des façons différentes de faire qu'on n'a pas exploitées au Québec.
On avait une formule, une façon d'exploiter, on était en abondance au niveau de la richesse. Alors, quand on est en situation d'abondance, on ne fait pas nécessairement une utilisation efficace, efficiente de toutes nos richesses au niveau de l'exploitation. Quand on prend ? vous savez, ça n'arrive pas, mais ça a arrivé déjà ? quand on prend des grosses billes pour en faire des «chips», au lieu d'en faire des deux-par-quatre, ou d'en faire des quatre-par-huit, etc., ou d'être utilisées à d'autres fins, il y en a qui ont passé en «chips». C'est scandaleux.
Un autre exemple: par exemple, on ramasse les petites billes et, dans certains endroits, on n'a pas pensé, par exemple, que, des «chips», on pourrait en faire avec les branches des arbres. Ça nécessiterait peut-être un coût supplémentaire, mais c'est quoi quand la richesse ou quand la ressource devient moins abondante? Alors, on pense d'avoir une utilisation encore plus optimum de la ressource. Alors, c'est tout ça. Ce n'est pas restrictif au niveau de recommandations.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Pas d'autres questions? Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, madame, messieurs, bonjour et bienvenue. Je dois dire que, si je comprends bien votre mémoire, il y a une grosse réflexion là-dedans, et je constate la situation, le changement, là, de paradigme auquel vous faites face, là, dans la région.
Je veux quand même vous apporter quelques éléments. Quand on se compare, on se console. Ce n'est pas vous consoler, mais je pense qu'il faut aussi mettre les choses en perspective. Vous parlez, dans votre mémoire, là, du taux de chômage à 11,8 %. Je lisais, ce matin, que l'Allemagne est rendue avec ce taux-là aussi. Donc, il y a des économies qui sont en changement et qui ont des taux de chômage aussi élevés que ça, et c'est à ça qu'il faut s'adresser: Comment on le baisse? Vous dites aussi que l'esprit entrepreneurial est plus faible en raison de la présence de la grande entreprise. Et je pense que c'est ça qu'il faut développer: il faut développer l'esprit entrepreneurial, et pour ça ça vous prend des fonds et des ressources. Puis je crois que, de ce côté-ci en tout cas, c'est à ça qu'on essaie de travailler pour trouver le moyen que l'entreprise fasse ressortir ses qualités, pas l'entreprise, mais que la région fasse ressortir, auprès des hommes et des femmes, leurs qualités entrepreneuriales. Et on sait qu'il y en a beaucoup dans la région. En tout cas, il y a du potentiel.
Je voudrais, moi, vous demander quelques questions. Je voudrais qu'on revienne à la loi n° 8 parce que, je l'ai dit au début ? et je le répète puis je vais le réexpliquer ? parce que je pense que c'est très important. Ce que je comprends de votre position, c'est pour forcer l'entreprise à investir dans la région et c'est aussi ce que nous devons chercher à faire, le moyen de les forcer. Quand j'ai fait mon petit calcul, là, moi, je me suis basée sur... Dans la loi n° 8, si on appliquait, c'est-à-dire on retirait les droits hydrauliques et puis qu'on appliquait les tarifs d'Hydro-Québec, ça coûterait 10 millions par année de plus à l'entreprise. C'est le ministre qui a fait ces calculs-là.
Une voix: Le tarif L.
Mme Dionne-Marsolais: Le tarif L. Sur quatre ans, ça fait 40 millions de plus. Bon. Par contre, si on applique la loi n° 9, le projet de loi n° 9, le ministre a dit que les redevances donneraient à peu près, d'ici quatre ans, 25 millions sur quatre ans. Donc, je fais la différence entre 40 millions moins 25 millions, ça veut dire qu'il reste 15 millions, et c'est finalement ce 15 millions là qui représente la contribution de tout le monde aux coffres des actionnaires d'Abitibi. Pourquoi je dis «aux coffres des actionnaires d'Abitibi»? Parce que, moi, j'ai un background... pardon, j'ai un passé financier et j'ai fait ressortir beaucoup de... j'ai regardé les analyses qui sont très récentes, hein, parce que vous savez que les entreprises cotées en Bourse produisent des résultats trimestriels, semestriels.
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(10 h 20)
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Et donc, dans une dernière étude qui date du mois d'avril 2005 ? ce n'est pas tellement loin ? on parle des trois actifs de l'entreprise. Et pourquoi j'ai regardé ces documents-là? C'est parce que je voulais, moi aussi, être rassurée quant à la capacité et l'intérêt de l'entreprise à poursuivre ses investissements ou ses activités au Québec. On se rappelle que c'est une entreprise qui a fermé la Gaspésia avec des conditions très exigeantes, en ce sens qu'elle ne voulait pas la laisser aller, elle ne voulait même pas vendre, elle avait mis même des conditions quant aux acquéreurs potentiels. Elle va sans doute faire la même chose à Port-Alfred, si ce n'est déjà fait.
Et donc j'ai regardé quel était son intérêt de poursuivre ses activités au Québec. Et, dans une des études de ce mois d'avril, qui est faite par une firme assez connue, là, Crédit Suisse First Boston, on lit qu'elle a trois actifs cachés et on fait l'évaluation de ces actifs-là dans la contribution aux profits de l'entreprise ou à la valeur de l'action, surtout. Pas le profit, mais la valeur de l'action, parce que, les profits, elle n'en fait pas ça fait un petit bout de temps. Donc, parmi ces actifs-là, il y a les actifs hydroélectriques, et l'analyste qui a fait ce rapport-là évalue que la valeur de ces coûts, si vous voulez, d'énergie hydroélectrique, c'est 9 $CAN du mégawattheure, alors que le prix du marché moyen est de 44 $ du mégawattheure en 2004. Donc, c'est la plus forte contribution à la valeur de l'action. Ils estiment à 2 $ la contribution de cet actif hydroélectrique à la valeur de l'action d'Abitibi-Consol.
Pourquoi je vous dis ça? C'est parce que ça vaut énormément, pour une entreprise, les ressources hydrauliques auxquelles elle a accès. Et l'entreprise sait très bien et elle savait très bien. Quand, en 1999, elle a accepté la loi n° 8, elle savait très bien qu'elle aurait des obligations et qu'elle devrait faire des choix. Elle a fermé Port-Alfred. Moi, je mettrais ma main au feu que c'est parce que Port-Alfred n'était peut-être pas approvisionné par la Shipshaw. Est-ce que je me trompe? Peut-être que, vous, vous pouvez me répondre, mais je vais poser la question à l'entreprise cet après-midi. Mais j'en suis persuadée.
M. Claveau (Jean-Marie): Port-Alfred n'était pas...
Mme Dionne-Marsolais: Ils ne l'étaient pas, hein? Bon. Alors, pourquoi ils l'ont fermé? Probablement qu'ils devaient avoir un contrat d'achat avec Hydro-Québec. Ils devaient avoir leur électricité d'Hydro-Québec ou ils avaient leur propre source d'énergie à Port-Alfred. Êtes-vous capable de nous le dire?
M. Claveau (Jean-Marie): Comment vous dites ça?
Mme Dionne-Marsolais: À Port-Alfred, est-ce qu'ils avaient leur propre source d'énergie ou ils achetaient au tarif L?
M. Claveau (Jean-Marie): Bon. Ils achètent d'Hydro.
Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, on voit déjà le raisonnement, hein, de l'entreprise, et je ne les blâme pas. Ce sont des décisions d'affaires, je comprends ça, sauf qu'au gouvernement aussi nous devons prendre des décisions d'affaires, et ces décisions d'affaires là, elles doivent tenir compte des citoyens que nous représentons.
Et, dans ce contexte-là, moi, je voudrais vous demander qu'est-ce qu'on pourrait faire pour les engager à investir ou à poursuivre leurs activités. Qu'est-ce qu'on pourrait faire? Est-ce qu'il y a une obligation que l'on pourrait mettre dans la loi? On en avait mis une. Bien, on l'avait mise. Dans la loi n° 8, on dit: Si elle ne fait pas, enfin, si elle ferme une de ses usines, le gouvernement pourra. Il ne dit pas qu'il va le faire, il dit qu'il pourrait enlever les droits hydrauliques. Mais, quand on l'a fait, ça, comme nous étions au gouvernement, à cette époque-là, on avait une arrière-pensée, c'était pour s'assurer que l'entreprise garde ses activités dans la région, au Québec. Alors, c'est très difficile. On est un peu, là, face à une entreprise, qui elle aussi a des difficultés financières, qui fait face, il faut se le rappeler, aux mêmes difficultés que la région parce qu'elle voit des taxes sur ses exportations, elle voit la diminution de son potentiel de ressources accessibles. Puis d'un autre côté elle voit le prix de son produit qui, pour des raisons de valeur de dollars canadiens, américains... Alors, elle aussi, elle se pose les mêmes questions. Puis là elle nous dit en plus, elle demande, et ça se comprend, que l'entreprise soit plus compétitive.
Alors, qu'est-ce que vous nous suggérez? Mettons, là, qu'on décide d'appliquer la loi n° 8. Si vous étiez à notre place, qu'est-ce que vous feriez?
M. Claveau (Jean-Marie): Mais, avant de vous répondre... Puis, les constats que vous avez faits, vous allez comprendre un peu les... Enfin, je veux profiter de l'occasion pour vous rappeler, autant à l'opposition qu'au gouvernement, les revendications de la région concernant les ressources hydroélectriques et concernant les ressources naturelles. Les revendications sont que, l'utilisation de ces ressources naturelles, on ne veut plus ? et de plus en plus le ton va monter ? on ne veut plus contribuer pour l'ensemble de la province alors que notre région décroît. Donc, peu importent les décisions qui vont se prendre, il faut trouver le moyen que ces ressources, autant hydroélectriques que forêt ou autres, soient utilisées au bénéfice de la région.
Ceci dit, particulièrement le cas d'ACI ou Abitibi-Consol, avec la loi n° 8, moi, je pense qu'on devrait retourner. C'est sur la bonne foi d'une entreprise ou la bonne foi d'un individu. Alors, on va y revenir, au niveau de la bonne foi. Le juger? C'est par les faits qu'on peut juger. Moi, je serais prêt à faire confiance encore une fois aux engagements de la compagnie, s'ils sont formels, mais une confiance limitée en incluant qu'après un certain délai, si la compagnie n'a pas reçu ses engagements ? ce que je prévoirais dans mon projet de loi ? on pourra retirer les privilèges.
Mme Dionne-Marsolais: On devra ou on pourra?
M. Claveau (Jean-Marie): On pourra se rasseoir puis réanalyser.
Mme Dionne-Marsolais: Mais c'est ce qu'on fait, là.
M. Claveau (Jean-Marie): Ce qu'on fait.
Mme Dionne-Marsolais: Là, c'est: on peut.
M. Claveau (Jean-Marie): On peut.
Mme Dionne-Marsolais: Et c'est ce qu'on fait.
M. Claveau (Jean-Marie): Absolument. Mais il faut prévoir de le faire à un certain moment, un certain laps de temps encore, si la compagnie n'a pas respecté ses engagements. Mais là, plutôt que de tout fermer puis de dire: Aujourd'hui, on t'enlève tous tes privilèges... Ça aura un impact trop négatif pour le Saguenay?Lac-Saint-Jean, puis on n'en veut plus.
Alors, on est bien prêts à croire la compagnie dans une solution, dans une résolution de problème. Ils ont d'autres entreprises dans la région. Par contre, il faudra trouver, dire: On va se donner un échéancier: C'est-u trois ans? C'est-u cinq ans? On va se rasseoir avec vos privilèges, et là... ou, toute situation pouvant changer au niveau du Saguenay?Lac-Saint-Jean, du côté opérationnel, on pourrait d'ores et déjà prévoir de façon exceptionnelle, pas en cours de mandat, mais en cours de durée de projection, de réanalyser, là, la situation de privilèges accordés à la compagnie pour être rétablie à n'importe quel moment donné, dans telle circonstance.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Mon autre question: Est-ce que vous seriez prêts, comme organisation, comme MRC, à reprendre ce barrage-là vous-mêmes et à le mettre en valeur vous-mêmes comme ? ou être copropriétaires, là, je ne sais pas ? comme un des moyens d'avoir entre vos mains un avantage à offrir à des promoteurs ou à des investisseurs éventuels? Est-ce que cette intervention de votre part, seuls ou avec d'autres, là ? puis, quand je dis d'autres, ça peut être à la fois Hydro-Québec ou ça peut être d'autres municipalités ? est-ce que c'est une option qui, dans votre esprit, est un moyen, qui pourrait être intéressant pour une région comme la vôtre, comme première étape de prise en charge d'un de ses leviers, qui est un levier important si on se fie à sa valeur au marché, pour son développement économique?
M. Claveau (Jean-Marie): Ah, c'est certain que, si on avait l'occasion d'avoir un privilège semblable, ce serait un outil supplémentaire au niveau du développement, et on prendrait les mesures nécessaires à aller chercher des investissements pour avoir des retombées maximales au niveau de la région. C'est certain que la MRC seule ne le prendrait pas ou s'assurerait, en partenariat soit avec des gens en finances, des gens dans d'autres domaines, et y mettre une équipe de démarcheurs, une équipe de spécialistes pour aller chercher des entreprises intéressées à investir dans la région. C'est sûr qu'un outil semblable on sauterait dessus à pieds joints.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, M. le préfet, Mme la mairesse de Saint-Honoré, M. le maire Couture de Saint-Charles, M. Jubinville, bienvenue à cette commission. Ça me fait plaisir de vous rencontrer ce matin.
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(10 h 30)
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D'abord, je voudrais vous remercier d'avoir préparé ce mémoire sur le projet de loi n° 99. Et je vais surtout m'en tenir à ce que vous avez indiqué dans votre mémoire, mais j'aimerais simplement peut-être avant rappeler une chose qui est très importante, c'est: lorsque le gouvernement avait adopté la loi n° 8, c'est que l'objet principal de cette loi, je pense c'est important de le dire et de le redire, c'était tout simplement de soutenir le développement économique de la région du Saguenay? Lac-Saint-Jean et faire en sorte de maintenir les opérations des usines d'Abitibi-Consol au Saguenay?Lac-Saint-Jean. C'était ça, l'objet de la loi n° 8, et c'est pour ça qu'on avait adopté cette loi. Et, aujourd'hui, on vient nous dire: On n'applique plus cette loi-là, on ne veut plus l'appliquer. Est-ce que c'est parce qu'on ne veut plus soutenir le développement économique ou on ne veut plus maintenir les opérations de la compagnie? Le discours est un peu contradictoire en ce sens qu'on avait un projet de loi qui avait des objectifs précis, et là on vient renier ce projet de loi là. Comme vous l'avez dit tout à l'heure, on n'applique pas les propres lois que nous avons adoptées.
Ceci étant dit, je voudrais revenir à votre mémoire. Lorsque vous dites, à la recommandation n° 5: «De plus, des mesures compensatoires devraient être prévues tant pour la région que pour les travailleurs affectés par la fermeture», j'aimerais peut-être que vous élaboriez un petit peu, là, de quelle façon vous voudriez voir ces mesures compensatoires en faveur des travailleurs. C'est quoi que vous avez dans la tête, lorsque vous parlez de ces mesures compensatoires?
M. Claveau (Jean-Marie): Bien, au niveau des mesures compensatoires, si on parle directement des travailleurs. Mais juste avant, pour compléter un peu suite à Mme Marsolais, à ses propos tout à l'heure, il est clair que la MRC du Fjord ? même la situation au niveau d'Abitibi-Consol ? ne voudrait pas, par un changement, mettre en danger de nouveaux emplois au niveau de la compagnie. Toute action devra permettre au moins de consolider ce qui reste. On ne veut plus en perdre. Alors, avant de prendre n'importe quelle décision, il faut s'assurer qu'on a pris tous les moyens pour garantir le fonctionnement actuel.
Concernant les travailleurs, des mesures d'atténuation, ce qu'on peut regarder, on ne peut pas dire: Demain matin, on rouvre l'usine, ça ne nous appartient pas. Par contre, les travailleurs, des situations, pour en avoir en milieu rural qui travaillaient à Port-Alfred, comme on en a qui travaillent qui demeurent en milieu rural, qui travaillent à Kénogami, on sait qu'il y a une partie des employés qui n'auront pas droit à leur retraite avant un certain nombre d'années. On a des parents, on a des amis, on a des connaissances qui sont dans une situation et qui, dès cet automne, seront sans revenu. Alors, ces travailleurs-là sont laissés, pour ainsi dire, face à leur situation, avec des problématiques très graves au niveau de leur mode de fonctionnement. Puis, les emplois dans la région, avec les taux de chômage... Mais, il faut bien dire, avec les taux de chômage, tantôt Mme Marsolais faisait référence avec l'Allemagne, il faut faire attention: on dit 10,4 % puis 11,2 %, mais ça ne tient pas compte des gens qui sont tannés de chercher. Ils ne font pas partie de la statistique. Puis le taux serait beaucoup plus élevé. En période hivernale, dans nos milieux ruraux, on monte, dans certains endroits, à 40 %.
Alors, pour ces travailleurs-là, ils vont vivre la situation, là. Tomber sur le bien-être social après avoir gagné des revenus de 60 000 $ par année, là, il va y avoir puis il a déjà commencé à y avoir des problèmes sociaux. Il faut trouver des solutions, il faut trouver des mesures pour remettre en activité ces gens-là ou pour favoriser l'utilisation de leurs fonds de pension ou changer les règles. Je ne le sais pas, comment ça peut se faire. Je peux facilement l'avancer, mais il faut s'attarder à la situation de ces gens-là qui vont vivre une situation extrêmement difficile ou qui ont débuté à vivre cette situation-là. Il ne faut pas les laisser.
Vous savez, c'est fermé. Il y a eu un gros show. On en a parlé dans les médias, c'était à tous les jours, puis là on n'en parle plus. Mais 640, là, elles ne sont plus là, les jobs, avec l'indirect, là, que ça va toucher grandement, prochainement. Mais, particulièrement eux autres, là, c'étaient les gens, là ? je ne me rappelle plus les brackets d'âge, là ? qui n'ont pas accessibilité au niveau de leurs fonds de pension. C'est difficile.
M. Côté: Mais est-ce que vous voudriez, à ce moment-là, que le gouvernement et la compagnie s'assoient ensemble, à une même table, puis essaient de trouver une solution? Parce que vous parlez des brackets d'âge, là. Moi, je peux vous dire une chose, c'est qu'un type, par exemple, de 53 ans qui va n'avoir droit à son fonds de pension qu'à 65 ans, puis mettons qu'il avait droit à 20 000 $ de pension, bien il perd 250 000 $, là, avant d'avoir son fonds de pension, mettons, en autant qu'il a 20 000 $ par année de pension. Alors, c'est ça que ça fait. Et il y en a que ça va jusqu'à 300 000 $.
Maintenant, qu'est-ce qu'on peut faire avec ça? Est-ce que c'est au gouvernement à aider ces travailleurs-là? C'est ça, c'est la façon. J'essaie de trouver une solution à ça. Je sais qu'aujourd'hui il y en a une, rencontre, là, entre des travailleurs ici même, à Québec, je pense. Et, avec la compagnie, je ne sais pas, sur ce sujet-là, je ne sais pas exactement sur quoi on va discuter, mais il faut trouver une façon d'aider ce monde-là. On ne peut pas les laisser comme ça, comme vous le dites si bien, là. Allez-y si vous voulez faire un commentaire. Après ça, j'aurai une autre petite question avant de terminer.
M. Claveau (Jean-Marie): C'est bien. Alors, on parlait tantôt de bonne foi de la compagnie dans des engagements futurs, enfin le commentaire pour Kénogami. Bien, je pense que c'est la même chose au niveau des travailleurs ou des ex-travailleurs de Port-Alfred. Et au gouvernement bien je dis: la solution va venir de la compagnie.
On peut peut-être demander au gouvernement de surveiller les discussions, d'être présent au niveau des discussions et puis, s'il le faut, réglementer par la suite ou essayer d'avoir des obligations, demander à la compagnie d'appliquer certaines règles. Mais c'est très facile, toujours facile de dire: Le gouvernement règle tout, mais ça appartient à la compagnie, au départ. Mais sûrement le gouvernement d'assurer une surveillance pour s'assurer que les discussions, et l'application, et l'intérêt des employés ne soient pas mis en cause dans cette situation-là. Et peut-être que, s'il y a des trous dans les lois, dans nos programmes sociaux au Québec, bien profiter de cette situation-là pour essayer de régulariser pour ne plus que ça se produise. Mais il va falloir trouver. Si la situation doit continuer, bien, là, on a un rôle, comme État, d'essayer de compenser et de trouver des mesures d'atténuation, parce que c'est des cas réels qui se vivent et ce n'est pas des situations faciles pour ces gens-là.
M. Côté: Une dernière petite question, M. le Président. J'ai encore du temps, oui?
Le Président (M. Jutras): Non, il n'en reste plus. Je regarde ça, là, il n'en reste plus.
M. Côté: Mon collègue voulait même poser une question.
Le Président (M. Jutras): Oui, mais là, qu'est-ce que vous voulez, vous aviez 20 minutes. Donc, merci pour votre présentation, M. le préfet, madame, messieurs.
Et je vais demander à la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt, conjointement avec le Syndicat national des travailleurs et travailleuses des pâtes et papiers de Kénogami, de bien vouloir s'approcher et prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Messieurs, bienvenue à la Commission de l'économie et du travail.
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(10 h 40)
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Alors, je vous rappelle les règles de procédure: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; par la suite, il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre et les députés ministériels, pour par la suite procéder à un autre échange avec les députés de l'opposition. Alors, qui est le porte-parole?
M. Parent (Sylvain): Sylvain Parent.
Le Président (M. Jutras): Oui. Alors donc, bienvenue, M. Parent. Je vous demanderais, dans un premier temps, de présenter les personnes qui vous accompagnent et par la suite d'y aller avec la présentation de votre mémoire.
Fédération des travailleurs du papier
et de la forêt (FTPF) et Syndicat
national des travailleurs et travailleuses
des pâtes et papiers de Kénogami inc.
M. Parent (Sylvain): M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les députés, nous vous remercions, dans un premier temps, de nous permettre d'intervenir dans le cadre de la présente commission.
Je me présente, Sylvain Parent, je suis président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du papier et de la forêt de la CSN. Je suis accompagné, à ma droite, de M. Élie Cyr, président du syndicat de Kénogami, et, à ma gauche, de M. Raynald Lapointe, qui est président du syndicat d'Alma. Pour ce qui est de M. Robert Émond, qui est président du Syndicat des travailleurs de Port-Alfred, celui-ci aurait fortement apprécié être présent aujourd'hui, mais présentement il est retenu en cour, pour débattre d'un important grief relatif à l'application des règles du fonds de pension suite à la fermeture de l'usine de Port-Alfred. Donc, nous tenons à excuser son absence.
M. le Président, le présent document que nous présentons est en trois volets: dans un premier temps, on veut aborder la question du projet de loi n° 99 sous l'angle du dossier de Port-Alfred; dans un deuxième temps, nous voulons aborder le projet de loi n° 99 sous l'angle des usines de Kénogami et d'Alma; et finalement notre conclusion concernant le projet de loi n° 99. En ce qui en est du projet de loi n° 99 sous l'angle du dossier de Port-Alfred, d'abord, M. le ministre, nous tenons à apporter une clarification préliminaire: le courant produit par les forces hydrauliques de la rivière Shipshaw n'a jamais profité au moulin de Port-Alfred. Historiquement, il a toujours été destiné au moulin de la défunte compagnie Abitibi-Price, à savoir les usines de Kénogami et d'Alma. C'est à partir de cette certitude que nous avons toujours fait nos interventions et c'est dans ce sens que nous avons élaboré ce mémoire. D'ailleurs, nous aimerions vous rappeler que, dans la semaine qui a précédé les annonces du 26 janvier 2005, nous avons rencontré Mme la ministre Françoise Gauthier pour lui faire connaître notre position sur cette question.
Essentiellement, nous lui avons indiqué que l'exécutif du syndicat de Port-Alfred ne revendiquait pas le retrait du bail de la rivière Shipshaw en réponse à la fermeture de leur usine. Pour l'exécutif de Port-Alfred et la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt, c'est la matière ligneuse, avec son contrat en approvisionnement et en aménagement forestier public, entre autres, qui a toujours été l'élément stratégique dans le dossier de Port-Alfred. C'est sur le bois que nous réclamons une redevance additionnelle et non sur l'eau. Dans ce sens, le projet de loi n° 99 est très décevant et nettement insuffisant. Nous nous sommes interrogés: Le projet de loi n° 99 favorise-t-il les travailleurs et les travailleuses de Port-Alfred? De leur point de vue et celui de la Fédération du papier et de la forêt, la réponse est non. Pourtant, ce sont elles et eux, avec l'organisation, qui ont livré la bataille.
Une autre question se pose: Le projet de loi n° 99 favorise-t-il une relance des activités de l'usine de Port-Alfred? De leur point de vue et celui de la Fédération des travailleurs du papier, la réponse est la même, c'est non. Pourtant, ce sont elles et eux, avec l'organisation, et ce, de façon exemplaire, qui ont livré la bataille. Même du point de vue de la compagnie Abitibi-Consol, le projet de loi n° 99 ne leur impose nullement une pression supplémentaire pour trouver une solution et une reprise des activités de Port-Alfred. Nous dirons même que l'effet est contraire. Le projet de loi n° 99 détourne notre attention de l'usine de Port-Alfred, met celle de Kénogami en priorité et d'Alma. Même le président-directeur général de la compagnie, M. John W. Weaver, l'a confirmé récemment, lorsqu'il a mentionné qu'il avait de façon préliminaire deux éléments importants pour considérer le dossier de Kénogami, soit l'approvisionnement et le projet de loi n° 99. Il a donc toujours été très clair, dans notre vision du dossier, que les droits d'eau n'étaient pas la solution pour Port-Alfred. Nous l'avons manifesté en temps opportun. Notre point de vue n'a malheureusement pas été retenu.
De plus, dans les semaines qui ont suivi votre annonce du 26 janvier d'un plan d'action à quatre points, l'exécutif du syndicat de Port-Alfred, en étroite collaboration avec la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt, a fait parvenir un document d'une quinzaine de pages dans lequel nous exprimions clairement notre point de vue et notre déception à l'égard de votre plan d'action. Nous n'avons jamais eu de réponse à ce document. Aujourd'hui, les faits nous donnent raison. Dans le dossier de Port-Alfred, la réelle volonté politique se situait au niveau de la matière ligneuse et de l'imposition d'une redevance spéciale rattachée à celle-ci.
En deuxième volet, le projet de loi n° 99 sous l'angle du dossier de Kénogami et d'Alma. Pour la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt ainsi que pour le syndicat de Kénogami et d'Alma, le dossier jugé prioritaire à court terme est celui de Kénogami. À l'usine de Kénogami, à une époque plus faste, il y a déjà eu 1 200 travailleurs. Aujourd'hui, après plusieurs fermetures de machines à papier et de nombreuses réorganisations, ils sont environ 450, une baisse dramatique qu'il faut à tout prix interrompre. Malheureusement, la menace plane encore au-dessus de l'usine de Kénogami et elle vient de la machine n° 6. Cette machine, selon des rapports de consultants, selon les dires mêmes de la compagnie et selon les travailleurs et l'organisation, en est une survie et la durée de sa vie utile est déjà dépassée depuis deux ans. Des questions se posent. Qu'adviendra-t-il du moulin de Kénogami advenant un arrêt de la production de la machine n° 6? Pour les intervenants syndicaux de la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt, il est difficile de concevoir l'opération de l'usine de Kénogami avec seulement une machine à papier spécialisé. Pour nous, la fermeture de la machine n° 6 place l'usine de Kénogami très à risque pour une fermeture complète de ses installations, c'est pourquoi nous revendiquons des investissements pour l'achat d'une machine neuve pour remplacer la machine n° 6 et ainsi sauvegarder ce qu'il reste d'emplois à Kénogami.
Bien que des discussions embryonnaires ont actuellement lieu avec les instances gouvernementales, les syndicats et la direction de la compagnie, il n'y a toujours aucun projet de déposé par l'entreprise allant vers la construction de nouvelles machines à papier. Bien au contraire, selon les dires mêmes de M. Alain Grandmont, vice-président de l'entreprise au niveau du papier à valeur ajoutée, il n'y a actuellement aucun projet à l'étude pour Kénogami. Pour sa part, bien que considérée à court terme moins à risque, la situation de l'usine d'Alma doit être suivie avec attention. Cette usine a déjà elle aussi employé beaucoup de travailleurs. Aujourd'hui, ils sont environ 500 à y oeuvrer. Nous pouvons dire que les investissements récents réalisés sur la machine 14 sont fortement positifs. Par contre, des interrogations se soulèvent relativement aux machines 9 et 10 qui produisent actuellement du papier annuaire. À moyen terme, leur avenir sera aussi questionné.
Dans ce contexte, comment doit-on utiliser le levier que sont les droits d'eau pour favoriser la prospérité, le maintien et le développement des usines de Kénogami et d'Alma? Certainement pas selon nous de la manière prévue dans le projet de loi n° 99. Nous l'avons dit précédemment, le projet de loi n° 99 place le dossier de Kénogami, entre autres, sur la sellette, dans la mesure où il touche à l'un des avantages historiques les plus stratégiques pour l'usine de Kénogami. Dans ce sens, tant qu'à légiférer pour modifier la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw, aussi bien le faire pour assurer une survie à long terme des usines de Kénogami et d'Alma. Ce que l'on nous propose au paragraphe 7.1 du projet de loi n° 99, c'est un texte juridique rédigé avec beaucoup de souplesse, imprécis et qui laisse place à beaucoup d'appréciations, qui n'apporte aucune garantie sur sa mise en application. Quel sera le taux de redevance additionnelle maximal qui sera imposé à Abitibi-Consol pour l'utilisation des forces électriques? Combien d'emplois devront-ils être créés par Abitibi-Consol pour obtenir une réduction de la redevance additionnelle? Quel niveau d'investissement devra-t-il être atteint par Abitibi-Consol pour obtenir une réduction des redevances additionnelles? De quelle manière les travailleurs de la communauté visée feront-ils connaître leurs points de vue à l'égard de la gestion de cette partie de la loi?
M. le ministre, c'est ici que nous abordons la conclusion de notre position. La Fédération des travailleurs du papier et de la forêt et ses syndicats affiliés favorisent des mesures beaucoup plus coercitives et d'application automatique. La Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw doit être modifiée afin d'inclure une obligation pour Abitibi-Consol de maintenir le niveau d'emploi actuel pour ses usines de Kénogami et d'Alma.
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(10 h 50)
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À défaut de maintenir ce niveau d'emploi en raison de la fermeture d'une usine, d'une machine ou pour toute autre raison, la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt et ses syndicats affiliés recommandent que la loi prévoie la résiliation pure et simple du bail de la rivière Shipshaw.
De plus, il y a très longtemps, le gouvernement du Québec a concédé à M. William Price des droits sur les rivières aux Sables et Chicoutimi. Depuis ce jour, les fonds de ces rivières et les barrages qui ont été érigés sont la propriété de la compagnie. En contrepartie de cette concession, Sir William Price devait s'engager à faire travailler les gens des usines de Kénogami et d'Alma. Cet engagement a toujours lié toutes les compagnies qui ont été propriétaires des usines. Dans ce sens, l'actuelle Abitibi-Consol est liée, encore aujourd'hui, par l'obligation d'opérer ses usines et de faire travailler des gens en contrepartie des droits concédés précités. M. le ministre, pour la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt et ses syndicats affiliés, il est impératif qu'un rééquilibrage s'opère entre l'utilisation des ressources naturelles, entre autres l'eau et le bois, par les entreprises et le nombre d'emplois qui en découlent. Depuis plusieurs années, des emplois se perdent et les entreprises continuent de profiter des mêmes avantages.
Également, nous aimerions aborder brièvement la question de la régionalisation. Nous avons mentionné, au début de notre présentation, que les forces hydrauliques ont toujours été reliées aux moulins de Kénogami et d'Alma. Pour nous, le fait d'utiliser les forces hydrauliques de la rivière Shipshaw pour maintenir des emplois de qualité à Kénogami et Alma, c'est aussi de développer la région.
Finalement, nous réitérons: le projet de loi n° 99, tel que libellé, n'est d'aucune utilité selon nous pour l'avancement des dossiers concernés. Il ferme définitivement le dossier de Port-Alfred. Il impose une pression supplémentaire aux dossiers de Kénogami et d'Alma. C'est pourquoi, à moins d'y apporter les modifications suggérées dans le présent document, la Fédération des travailleurs du papier et de la forêt demande de conserver le statu quo sur l'actuelle loi n° 8. De plus, avant d'aborder toute modification de l'actuelle loi n° 8, le gouvernement du Québec devrait exiger d'Abitibi-Consol de déposer des projets d'investissement pour la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, particulièrement pour l'usine de Kénogami.
M. le ministre, M. le Président, on vous remercie de nous avoir reçus.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Parent, pour votre présentation. Maintenant, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Parent, M. Cyr, bienvenue à la commission, ce matin. Je voudrais juste avoir une petite précision sur la dernière phrase de votre document, où vous nous dites, là, qu'à moins d'y apporter des modifications suggérées dans le présent document vous demandez de conserver le statu quo sur l'actuelle loi n° 8, donc que la loi n° 8 s'applique telle qu'elle est présentement, c'est-à-dire en enlevant les droits d'eau sur la rivière Shipshaw. C'est ça?
M. Parent (Sylvain): Oui. Mais, nous, essentiellement l'approche de notre document se résume à trois éléments bien précis. Nous, on dit tout simplement que, si, adonnant que le niveau d'emploi des usines de Kénogami ou d'Alma est réduit, à partir de ce moment-là, nous demandons de résigner le bail de la rivière Shipshaw.
Dans un deuxième temps, advenant qu'il n'y a aucun investissement de la part d'Abitibi-Consol, dans les usines de Kénogami et d'Alma, nous vous demandons, à partir de ce moment-là, de maintenir le statu quo sur le projet de loi n° 8 concernant les avantages des droits électriques. Et, si dans le cas vous avez l'intention de les maintenir, les droits, nous vous demandons l'approche suivante, c'est qu'à tout le moins Abitibi-Consol dépose des projets avant l'adoption de la loi.
M. Corbeil: O.K. On se comprend bien. Que la loi n° 8 existe et continue d'exister et que la loi n° 99 vienne juste donner au gouvernement l'opportunité d'ajouter des redevances additionnelles aux baux existants avec la loi n° 8, c'est ça?
M. Parent (Sylvain): Exactement.
M. Corbeil: Et que les autres dispositions de la loi n° 8 s'appliquent, les investissements dans la région, avec un certain quantum quant aux montants et quant au temps, c'est-à-dire sur un certain nombre d'années, etc., ça continue, ça s'applique? O.K.
Donc, à ce moment-là, si on continue à appliquer la loi n° 8 telle qu'elle existe plus les dispositions du projet de loi n° 99, pourquoi vous nous dites que ce n'est d'aucune utilité selon vous pour stimuler la création d'emplois, la consolidation d'emplois, les investissements dans la région, par l'entreprise dans ses installations ou dans de nouvelles installations?
M. Parent (Sylvain): Bon. Dans un premier temps, je pense qu'il faut quand même se rappeler historiquement qu'est-ce qui s'est passé à l'usine de Port-Alfred. On a indiqué clairement que l'usine de Port-Alfred n'avait pas d'avantage hydroélectrique, un avantage qui est connu pour l'usine de Kénogami et d'Alma.
Prenons le dossier de Port-Alfred. On peut reposer la question suivante: S'il y avait eu des avantages hydroélectriques pour l'usine de Port-Alfred, est-ce que ça aurait sauvé l'usine de Port-Alfred? Nous, on se pose la question, et la réflexion qu'on en conclut, c'est que la réponse est non. Abitibi-Consol utilise des ressources qui sont l'eau et la forêt, et pour nous c'est un ensemble, c'est un utilisateur qui utilise deux ressources. Et nos usines chez nous, entre autres, au Saguenay? Lac-Saint-Jean, utilisent ces deux ressources qui sont l'eau et l'électricité. Donc, c'est un complément puis c'est une complicité des deux.
L'autre point. En termes de redevances, quand on a eu l'occasion de partager ce dossier à quelques reprises, avec l'équipe ministérielle, entre autres, au Saguenay, et je vous dirais que l'apport que ça peut apporter, à la hauteur de 30 millions, basé sur quatre ans, vous allez comprendre que, dans une industrie comme la nôtre, qui est les pâtes et papiers, nous, on vulgarise ça de la façon suivante: avec 50 millions, tu ne réussis même pas à changer les poignées de portes de l'usine, donc ce n'est pas avec 30 millions qu'on va être capable de maintenir le même niveau d'emploi, qui a été perdu à Port-Alfred, pour justement répondre à un besoin bien précis.
D'ailleurs, si on se rappelle des déclarations qui ont été faites au niveau de certains communiqués au niveau du gouvernement, des discussions qui ont eu lieu dans des rencontres avec l'équipe ministérielle, c'est que, nous, on a de grandes préoccupations par rapport à toute la question des redevances. D'ailleurs, à l'époque, de façon publique on a dit que le 30 millions des redevances est utilisé pour répondre à un besoin de la région, mais, entre quatre murs, on se disait que cette somme d'argent là devrait être utilisée justement pour répondre à des besoins pour l'usine de Port-Alfred, Kénogami à l'époque et d'Alma de façon plus pointue. Parce que, là, on s'est dit: Est-ce que c'est un élément qui pourrait être un facilitateur pour le dossier de Port-Alfred? On connaît les résultats aujourd'hui. La réponse est non.
Tantôt, j'écoutais l'interlocuteur qui nous précédait. Il y a une réalité à laquelle Port-Alfred est confrontée aujourd'hui, c'est toute la dure réalité où il y a une moyenne d'âge de tout près de 50 ans de l'ensemble des travailleurs et qu'aujourd'hui ces gens-là qui ont contribué pendant 20, 25 ans à un régime de retraite ne sont même pas en mesure d'utiliser les sommes qui ont été mises à leur disposition et les investissements qu'ils ont faits pour prendre une retraite décente. À tout le moins, on avait suggéré, dans un document ? on a fait un document, qu'on vous a fait parvenir, de 15 pages ? d'utiliser les redevances pour venir en support à l'ensemble des travailleurs de l'usine de Port-Alfred. En contrepartie, quand on regarde les redevances qui sont mises en place, avec qu'est-ce que ça coûte pour investir dans une usine à papier ? puis, quand on parle directement de Kénogami, un projet d'une machine à papier, c'est 500 millions ? vous allez comprendre qu'avec les redevances ce n'est pas ça qui va nous permettre de construire un avenir pour l'usine de Kénogami.
D'ailleurs, malgré tout l'ensemble des restructurations qui ont été vécues à l'usine de Kénogami, l'implication syndicale, ils sont rendus à bout de souffle, là. La machine 6, là, ça vit sur du temps emprunté depuis deux ans. S'il n'y a rien qui est fait puis qu'il n'y a pas un investissement majeur qui se passe à l'usine de Kénogami, bien on va vivre un autre drame social encore au Saguenay. On en a vécu un. On devrait apprendre de qu'est-ce qui a été vécu à Port-Alfred puis construire justement là-dessus, puis on doit se donner les outils, comme gouvernement, puis comme entreprise, puis comme organisation syndicale, pour se redonner une nouvelle vie ou au moins, à tout le moins, assurer une vie à moyen terme pour les usines de Kénogami. Puis sans tenir compte aussi... Alma, là, c'est une question de temps, ça aussi. Puis, quand on parle de court et moyen terme, là on parle de trois ans et de cinq ans. Les machines à papier annuaire 10 et 11, là, ça n'a pas une survie, ce n'est pas un marché qui est en développement, bien au contraire.
Puis là c'est pour ça, M. Corbeil. Nous, on dit que, si, à partir du moment ou Abitibi-Consol décide de fermer une usine, une machine, bien, à partir de ce moment-là, on vous demande de retirer les baux électriques, de légiférer dans ce sens-là. Il y en a d'autres, acteurs, au Québec, qui pourraient être intéressés justement à utiliser des ressources avec des conditions gagnantes, et c'est ça qu'on veut se donner comme mission.
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(11 heures)
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On a parlé de Chandler tantôt, on a parlé de Port-Alfred. C'est une question de volonté. On a eu de maintes rencontres dans le dossier de Port-Alfred, avec des représentants d'Abitibi-Consol et du gouvernement. Nous, qu'est-ce qu'on vous dit, donnons-nous les moyens, à une population, à des travailleurs, qu'ils aient la plus grande opportunité pour être capables de se donner une nouvelle vie. Puis le cas de Port-Alfred, il est pathétique dans ce sens-là. Parce qu'on veut éviter la compétition à l'intérieur d'un groupe qui s'appelle Abitibi-Consol, on ne donne pas d'opportunité à l'usine de Port-Alfred d'être mise sur le marché où d'éventuels acheteurs pourraient être intéressés. Au moins se donner la chance. Et, à l'intérieur du projet de loi qui est en place, nous, on est convaincus d'une chose, ce n'est pas avec le projet de loi n° 99 actuellement, tel qu'il est conçu, qu'on va avoir les outils nécessaires pour garantir des investissements importants et majeurs aux usines de Kénogami et d'Alma.
Vous savez, là, quand on a sacrifié 640 emplois à Port-Alfred puis qu'on dit: On va utiliser des redevances pour la région... Puis, si on se rappelle les... qui ont été faites, c'est que ces redevances vont être utilisées pour maintenir le même niveau d'emploi, 640. Ce serait très intéressant si on était capable de créer 640 emplois avec 30 millions, mais j'en doute fort. Puis pour nous notre activité première, c'est de se concentrer sur une activité économique. D'ailleurs, au Canada, l'industrie des pâtes et papiers, c'est la deuxième économie à la grandeur du Canada, après l'automobile. C'est une richesse qu'on a, qu'on a laissé aller au fil des ans, où l'entreprise a manqué de responsabilité pour justement répondre aux besoins des actionnaires en leur donnant des dividendes. Et, à partir de ce moment-là, on a sacrifié ? on a sacrifié ? un investissement entretenu année par année au profit d'une compétition mondiale, aujourd'hui, à laquelle on n'est pas capable de répondre. Et c'est l'ensemble des travailleurs, entre autres, du Saguenay? Lac-Saint-Jean, de façon plus précise les travailleurs de Port-Alfred, de Kénogami et d'Alma, qui vont payer la note dans les années à court terme et moyen terme.
Et on vous dit, M. le ministre, on réitère notre position, vous connaissez notre position là-dessus, ce n'est pas en allant sur cette approche qu'on va régler les problèmes structurants de notre entreprise.
M. Corbeil: M. Parent, on s'entend ici que la loi n° 99 est un cadre qui nous donne l'opportunité, par règlement, de mettre un certain niveau de redevances additionnelles, un certain nombre d'emplois qui devraient être créés, un certain nombre d'investissements qui devraient être réalisés.
Je suis d'accord avec vous que ce n'est pas avec 30 millions qu'on va, peut-être dans quatre ans, remplacer 640 emplois. Ça, je pense que tout le monde ici peut être d'accord avec le constat que vous faites. Mais ce 30 millions là en soi n'est pas une fin, c'est un levier et c'est une possibilité qui, après quatre ans, va avoir généré ce montant d'argent là. On peut le qualifier de théorique au moment où on se parle, mais mettons entre 25 et 30 millions de dollars, et ce qui va se perpétuer si l'entreprise n'investit pas dans votre région.
Maintenant, moi, j'aurais envie de vous retourner ces questions-là. Quels seraient selon vous les niveaux d'emploi puis d'investissement qui seraient acceptables s'il était décidé en définitive de ne pas mettre fin à la loi ou à la location des forces hydrauliques? Mettons qu'on garde le statu quo ou qu'on introduit la mesure. Comment on peut jauger des investissements et des emplois pour envisager la réduction des redevances?
M. Cyr (Élie): Moi, j'aimerais vous répondre. Dans un premier temps, on pense que le levier que vous dites que ça va avoir, les pénalités, on pense que ce ne sera pas un levier parce que, si on a des pénalités à l'usine de Kénogami puis à Alma, ça veut dire que c'est les travailleurs, au bout de la ligne, qui vont payer la note.
Disons que l'usine de Kénogami ne fait pratiquement rien que flotter de ce temps-ci. Si on a une pénalité additionnelle, je pense que ça va avoir un effet. Puis, quand on parle d'emploi, la moyenne d'âge, dans les usines de papier, est rendue à 51, 52, 53 ans. Si on parle d'ici quatre ans... Si on a un investissement majeur à Kénogami, on parle d'ici trois, quatre ans, cinq ans maximum, tout le monde va être sorti à la retraite, ça va faire de l'emploi pour les jeunes dans la région. Tous les partis politiques que je vois depuis 25 ans, ils parlent d'exode des jeunes dans les régions. Aujourd'hui, tu n'as pas rien que l'exode des jeunes, tu as l'exode des vieux parce que les jeunes ne travaillent plus dans les régions. Ça fait que, quand que les vieux prennent leur retraite, ils quittent les régions. Ça fait qu'aujourd'hui on a les deux bords de la médaille.
Puis, moi, je pense que, si on veut avoir un effet de levier, comme vous dites, il faut que, Kénogami, il y ait un plancher d'emploi. Puis ces réseaux hydroélectriques là, ils ont toujours été pour l'usine d'Alma et de Kénogami. Ça n'a jamais été marqué dans les mots, mais ça a toujours été pour ces deux usines-là. Puis, moi, je pense que, si Abitibi-Consol ne veut pas investir à Kénogami comme à Alma plus tard, c'est qu'à un moment donné, si on a les forces hydrauliques puis on a une usine de papier... Venez la visiter. Il y a une très belle usine à papier. On a un plan de pâtes qui est flambant neuf, une enveloppeuse qui est neuve aussi. Ça nous prend une machine. Puis, si on a des baux hydroélectriques qui sont collés après ces usines-là plus l'usine, puis vendre cette usine-là, il y en a un autre qui va venir s'installer parce que les ressources naturelles sont là, les choses sont là.
On peut distribuer des baux hydroélectriques à n'importe qui. Tout le monde va avoir toutes sortes d'idées. Mais, moi, je pense que, quand tu as des emplois de qualité qui sont bien rémunérés, c'est ça qui fait virer l'économie dans nos régions. Ce n'est pas avec des usines de transformation avec des petits salaires qui vont faire que l'économie d'une région va vivre.
M. Lapointe (Raynald): ...pour rajouter, vous savez, en tant que représentants des travailleurs, on se bat ça fait des années pour garder au moins ce qu'on a. En 1996, quand il y a eu ces vagues-là, on y était présents. On voulait avoir de l'investissement chez nous. On ne voulait pas que ces barrages-là soient vendus. On voulait les garder parce qu'on savait qu'un jour ça allait nous rapporter. Heureusement, à Alma, on a commencé à toucher un peu à ce que ça pouvait donner. Un investissement, on en a eu un.
Ce n'est pas par... solidarité avec les gens de Kénogami que je me présente ici, aujourd'hui, mais la modification que vous proposez à votre projet de loi 1999 ne leur apportera rien. C'est clair? Alors, y a-tu d'autre chose qu'on peut faire? Moi, là, je ne suis pas capable de dire. Puis je l'ai relu, lu et relu à maintes et maintes fois, le projet de loi n° 99. J'ai essayé de le comprendre. Ces investissements d'emploi là, est-ce que c'est des emplois de qualité comme on pouvait avoir avant, je veux dire, à Port-Alfred? Il y avait 54 000 $ par année de salaire moyen, à Port-Alfred. Ce n'est pas le salon de coiffure en avant, excusez-moi, là. Alors, si l'énergie peut garder des emplois de qualité comme ça, alors ne le modifiez pas avec votre projet de loi n° 99. Chez nous, on s'est battus et on récupère un peu. On fait des projets. On est en partenariat. On participe à tout. On le sait, comment est-ce que ça vaut, l'énergie. Puis je ne veux pas reprendre les chiffres qui ont été soulevés tout à l'heure, là, mais on le sait aussi, comment est-ce que ça vaut, l'énergie au kilowattheure, et on y participe, à ça. Et, si on n'avait pas eu ça chez nous, si on n'avait pas eu l'obligation d'investir pour ne pas que le gouvernement puisse résilier ces baux-là, bien peut-être que c'est moi qui serais Port-Alfred aujourd'hui.
M. Parent (Sylvain): Je vais vous répondre, M. Corbeil. Vous me le permettez? Tantôt, M. Cyr, il a très bien décrit la situation de son usine chez eux. Il y a un plan de pâtes de classe mondiale, une expédition de classe mondiale, mais il n'y a pas de coeur dans cette usine-là, qui s'appelle les machines à papier. On a une entreprise qui est criblée de dettes. Il y a 640 travailleurs qui ont payé pour l'entreprise qui était criblée de dettes puis il y en a d'autres qui se préparent à vivre la même situation.
Nous, qu'est-ce qu'on vous dit clairement, c'est qu'il y a des ressources naturelles qui sont disponibles, au Québec, pour les entreprises telles qu'Abitibi-Consol, entre autres, au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Nous, on vous dit: S'ils ne sont pas capables d'assumer leurs responsabilités à l'égard des ressources qu'ils utilisent, autant l'eau que la forêt, bien, à partir de ce moment-là, on vous dit tout simplement: Comme gouvernement, y a-tu moyen de légiférer puis dire: «On va se donner des règles»? Vous n'êtes pas capables de rencontrer vos responsabilités? Bon. Bien, on va les concéder à quelqu'un d'autre qui va être capable de prendre le relais. C'est ça qu'on vous dit dans le cas d'Abitibi-Consol.
L'autre élément. En termes de redevances, on se dit: Pour nous, si on veut être capables ? parce qu'on a un problème structurant dans notre entreprise, dans notre industrie ? si on veut corriger le tir, ça prend la participation de tout le monde. La forêt, elle est publique. L'eau, elle est publique. Les utilisateurs devraient payer justement pour permettre. Ils devraient payer une redevance pour permettre à chacune des entreprises qui utilisent ces ressources d'être capable de mettre des fonds pour justement de maintenir un certain niveau d'investissement dans chacune de ces usines. Et ça, pour nous, c'est important si on veut être capables d'avoir un regard vers l'avenir. Et c'est là que, nous, on vous dit: Le projet de loi n° 99 n'a pas le mordant nécessaire et voulu pour corriger une lacune qui est profonde.
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(11 h 10)
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M. Corbeil: Merci, messieurs. Je veux bien qu'on s'entende, là. Vous me dites: Le projet de loi n° 8 est là, le n° 99 s'ajoute. On s'entend. Mais vous me dites que le n° 99 n'a pas assez de mordant. Et, si je reprends une expression qui est dans votre document, vous favorisez des mesures beaucoup plus coercitives et d'application automatique. Donc, on ne prend pas en considération le 99, on s'en tient au 8 puis on tire la plug. C'est ça?
M. Parent (Sylvain): Je vais vous dire...
M. Corbeil: C'est clair, c'est net, c'est précis comme ça?
M. Parent (Sylvain): Je vais être encore plus précis.
M. Corbeil: Ah, c'est bien.
M. Parent (Sylvain): Ils ferment une machine à papier, machine 6, à Kénogami. Qu'est-ce qu'on vous dit? Retirez les baux électriques à Abitibi-Consol à rivière Shipshaw. C'est ça qu'on vous indique.
M. Corbeil: Mais...
M. Parent (Sylvain): S'ils maintiennent le même niveau d'emploi, qu'il n'y a pas d'investissement, on vous dit: Maintenez l'application de la loi n° 8 actuelle. Si vous avez l'intention ? nous, c'est des propositions qu'on vous fait ? mais, si vous avez l'intention de la modifier, la loi, dans un troisième volet, à tout le moins, exigez d'Abitibi-Consol qu'ils déposent un projet d'investissement à l'usine de Kénogami, avant l'adoption de la loi. C'est comme ça qu'on vous présente le document et le dossier.
M. Corbeil: Mais vous comprenez que le projet de loi n° 99 n'annule pas le projet de loi n° 8, qu'il vient ajouter au gouvernement ou donner au gouvernement la possibilité d'imposer des redevances additionnelles.
M. Parent (Sylvain): Exactement. On comprend ça.
M. Corbeil: D'accord. Maintenant, tantôt, j'avais posé une question. Là, vous me dites: On va rattacher ça à un seuil d'emploi dans deux usines données, on va rattacher ça à des investissements pour moderniser, pour consolider ces emplois-là. C'est quoi, le niveau? Le niveau d'emploi, ça, c'est facile à définir. Le niveau d'investissement, est-ce que vous le quantifieriez? Le coût que ça prend pour remettre un coeur à l'usine de Kénogami, c'est ça?
M. Parent (Sylvain): Un coeur à l'usine de Kénogami, dans notre industrie, où j'ai dit tantôt: Avec 50 millions, on ne change même pas les poignées de porte d'une usine. Ça coûte 500 millions pour une machine à papier.
M. Corbeil: C'est beau.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors, il reste une demi-minute. Alors, merci. Maintenant, Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, votre mémoire est très clair. J'aimerais que l'on revienne sur un certain nombre de points. Vous avez dit que, depuis deux ans, l'entreprise n'avait rien investi, mais est-ce qu'à votre connaissance elle a investi ailleurs?
M. Parent (Sylvain): Oui. On vous a donné l'indication qu'elle a investi à la machine 14, Alma, entre autres.
Mme Dionne-Marsolais: À Alma? Et ailleurs au Canada ou dans le monde? Vous ne savez pas?
M. Parent (Sylvain): Bien, je veux dire, en Asie, PanAsia Paper a eu quand même une «jointedness» entre Abitibi-Consol et l'Asie.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Non, je pose la question parce que, quand on regarde les chiffres de l'entreprise, son ratio dettes sur équité est quand même assez élevé, c'est le plus haut de l'industrie. Donc, sur le plan de l'investissement, il y a des décisions quelquefois qui... Vous dites aussi, et ça, ça m'intéresse: La machine 6, là, bon, visiblement, si elle a passé sa durée de vie utile, elle est en voie d'être mise au rancart. Elle produisait quoi, cette machine-là?
M. Cyr (Élie): C'est du papier SCB, c'est du papier à encart publicitaire.
Mme Dionne-Marsolais: En anglais, c'est quoi? Parce que j'ai les analyses financières tout en anglais ici. Savez-vous? Ce n'est pas du papier journal, ça.
M. Cyr (Élie): Non, non, c'est du papier spécialisé. C'est une usine de papier spécialisé à Kénogami. Sur la 7, il y a du SCA, puis, sur la 6, il y a du SCB.
Mme Dionne-Marsolais: O.K. Si on voulait suivre vos recommandations, si je comprends bien, on garde la loi n° 8 et puis là on fait un contrat en bonne et due forme ou une entente avec l'entreprise. Il faudrait qu'elle investisse combien pour moderniser cette machine-là soit pour une nouvelle ligne de production ? là je ne le sais pas, je ne connais pas du tout ça ? soit pour avoir un meilleur équipement pour produire à moindre coût le même type de produit à circulaires ou de papier à circulaires? Et, moi, je n'ai pas d'idée, là. Ça représenterait combien en valeur?
M. Cyr (Élie): Aux alentours de 500 millions.
Mme Dionne-Marsolais: 500 millions pour une machine?
M. Cyr (Élie): Là, il faut comprendre aussi qu'au niveau de l'usine Kénogami le 6, disons qu'il est sur sa fin normale, là, puis ça va nous prendre... C'est le marché qui va nous former, à Kénogami, et non la machine qui va former, parce que l'efficacité de cette machine-là est au maximum. Elle est au maximum. C'est le marché qui va nous former. C'est à cause que, les autres dans l'industrie, il y a eu des machines neuves qui se sont fait créer, ce qui fait qu'ils font le même grade de papier que nous autres. On ne peut pas suivre la qualité de papier que ces nouvelles machines là sont sur le marché, ça fait que ce qui fait qu'il va dégrader, le papier du 6, qu'il va descendre de grade, puis qui fait qu'à un moment donné on ne sera plus capable de le vendre. Ils ne seront plus capables de le vendre, les employeurs.
Ce qui fait qu'il y a beaucoup d'autres industries qui ont posé des machines neuves, ce qu'Abitibi ne fait pas jamais. À l'heure actuelle, là, il y a eu une machine qui s'est faite, c'est Donahue qui l'a faite aux États-Unis. Bien, Abitibi, il n'est pas dans leurs habitudes de faire des machines à papier neuves. Leurs habitudes, c'est plutôt de presser la poire, comme on dit dans notre jargon. Ça fait qu'à un moment donné ils ont fait beaucoup de profits au Saguenay?Lac-Saint-Jean, ils ont eu des redevances d'électricité puis ils ont déjà fait beaucoup de profits. Ça fait qu'à un moment donné, s'ils avaient suivi ce que les autres ont fait, d'installer des nouvelles machines quand c'était le temps, on ne serait pas ici, pour se parler, aujourd'hui.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, ce que vous nous dites, là, c'est que l'entreprise n'a pas...
M. Cyr (Élie): La machine 6 est dépassée. Excusez.
Mme Dionne-Marsolais: ...elle est dépassée, puis l'entreprise n'a pas procédé à des investissements, dans ces usines-là, ni au niveau de la technologie ni au niveau de la croissance de production pour rester à niveau ? bon. Est-ce qu'elle l'a fait parce que le marché est tombé, je ne le sais pas, là ? et qu'en contrepartie, vous le dites bien dans votre mémoire, elle a toujours ses avantages hydrauliques. Et même, je l'ai dit tantôt puis je le répète, les estimations sont de 2 $ de contribution par action avant taxes. Ce n'est quand même pas rien, là. Je ne dis pas qu'elles viennent toutes du Québec, mais je serais tentée de croire qu'il y en a pas mal qui viennent du Québec.
Dans ce contexte-là, vous suggérez aussi donc de ne pas donner \suite au projet de loi n° 99 et vous dites: Bon, bien, qu'on les force à investir si on veut maintenir le projet de loi n° 8, c'est-à-dire leur laisser leurs droits hydrauliques mais qu'ils nous donnent un plan d'investissement pour les usines en question. Et ça, ils pourraient le faire sur un certain nombre d'années, s'ils étaient sérieux par rapport à leurs activités dans votre région. Mais vous dites aussi, et je vous cite, je l'ai noté: S'ils ne font pas leurs investissements, bien on va donner ces droits-là à d'autres qui vont investir chez nous. C'est peut-être facile à dire, là, mais vous savez que dans le passé cette entreprise-là a refusé. Pas refusé, mais elle a lié la vente de ses usines à un certain nombre de conditions qui ont fait que c'était très difficile d'attirer des investisseurs pour reprendre ces usines-là, parce qu'elle mettait des conditions de non-compétition. Elle a quand même un champ d'action important, là. Alors, ce n'est quand même pas facile, là, de s'en aller puis de dire: On va solliciter de nouveaux investissements.
Est-ce que vous croyez sincèrement qu'il serait possible que ce soit vous ou que le gouvernement puisse attirer de nouveaux investisseurs pour prendre la place de ces gros investisseurs, parce que, vous l'avez dit vous-même, c'est des salaires élevés, c'est une main-d'oeuvre formée, etc., là?
M. Parent (Sylvain): Je ne voudrais pas revenir dans l'histoire, mais des fois il faut vivre avec les décisions qui ont été prises dans le milieu financier. Historiquement, Abitibi a acheté la compagnie Donahue. Moi, par expression, en conférence de presse, j'avais dit: C'est le pauvre qui achète le riche. Puis, aujourd'hui, il est encore pauvre, puis il ferme, puis il ferme, puis il n'est même pas capable de maintenir un certain niveau d'investissement pour maintenir l'immobilisation de ses équipements. Puis ça, c'est dramatique. Puis en même temps on lui maintient des ressources qui sont l'eau et l'électricité.
Nous, on vous dit: Si Abitibi... Puis, le problème qu'on rencontre, on va vous donner l'expérience qu'on a vécue avec Port-Alfred. Je pense que c'est bon de revenir là-dessus. On a dit: On peut-u se donner des moyens ou des solutions pour être capables de redémarrer l'usine de Port-Alfred? On a regardé, on a exploré différents terrains, différentes solutions, mais on a frappé un mur à un moment donné, qui est le suivant: on a demandé à Abitibi-Consol: Pourquoi vous ne la mettez pas sur le marché, à vendre, avec des gens qui pourraient acheter, qui produisent le même créneau que vous qui est le papier journal? Parce qu'à Port-Alfred c'est du papier journal qu'ils produisaient. Vous allez comprendre. Abitibi-Consol, par sa stratégie d'entreprise, ne veut pas être compétitionnée. Par contre, on vous dit qu'il y a des propriétaires d'entreprise qui produisent du papier journal aujourd'hui, qui ont des machines moins rapides, moins larges qu'il y avait à l'usine de Port-Alfred puis qui génèrent des profits, même si ce secteur, même si le papier journal est en déclin.
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(11 h 20)
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Quand on supporte la démarche à dire: S'ils sont pour fermer une machine, s'ils sont pour fermer une usine, on dit: Retirez les avantages à Abitibi-Consol. Puis y a-tu moyen, de la part du gouvernement, parce que le gouvernement a un rôle social auprès de la population, de dire: Vous avez une responsabilité, Abitibi-Consol. On veut que vous donniez l'opportunité à ces travailleurs-là de se trouver un emploi mais que les chances égales soient données à tout le monde puis que toutes les chances de relance soient mises sur la table.
Qu'est-ce qu'on a vécu à Chandler? C'est un autre exemple. Abitibi-Consol a dit: Oui, je vends, mais je ne vends pas dans le même créneau. On connaît l'aventure qui s'est passé. Ça s'est répété avec Port-Alfred. Puis, si ça arrive à Kénogami, probablement que ça va être encore le même «pattern» qui va se produire. Puis, tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas personne qui va mettre le poing sur la table pour dire: On change cette direction-là, bien on va toujours être assis, on va toujours trouver des situations qui sont dramatiques, qui sont déchirantes, comme on a vécues à Port-Alfred puis qu'on vit dans d'autres places. Mais ça, on vous dit: Il faut que ça change, puis ce n'est pas avec les règles qu'on a actuellement en place qu'on va être capables de changer le courant puis le futur. Abitibi-Consol, là, madame, là, ils utilisent au-dessus de 3 millions de mètres cubes de bois. Posez la question à M. Corbeil: Comment ça coûte, un mètre cube de bois? Vous allez avoir la réponse qu'il y a peut-être des choses qu'on peut travailler à cet égard-là peut-être, pour se donner un certain futur d'investissement.
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que le fait de prendre possession de l'usine de Port-Alfred, ce serait d'intérêt à votre avis pour la région?
M. Parent (Sylvain): Comment vous dites ça? Excusez, je n'ai pas compris votre question.
Mme Dionne-Marsolais: Bien, là, actuellement la propriété est fermée, là, on se comprend, mais ce que vous dites, c'est que, si on reprend nos droits d'eau, on pourrait s'en servir pour faire d'autres promotions en investissement, trouver de nouveaux investisseurs. L'usine de Port-Alfred en ce moment, elle est la propriété d'Abitibi-Consol. Ils ne veulent pas la vendre comme ils ont fait à Chandler, à moins d'un certain nombre de conditions. S'ils la cédaient en échange des droits d'eau, est-ce que vous trouvez que c'est quelque chose qui a du bon sens?
M. Parent (Sylvain): À mon avis, la porte, elle est soudée, puis c'est une expérience qui est en arrière de nous. Puis, si on veut faire de quoi de Port-Alfred, parlons des redevances puis regardons qu'est-ce qu'on est capable de faire avec le 30 millions pour aider les travailleurs qui ont contribué à un régime de retraite. Ça, c'est la première des choses qu'on devrait faire, puis qui est tout à fait logique, et ça commande une responsabilité sociale autant de la part d'Abitibi-Consol qu'autant de la part du gouvernement. D'ailleurs, on a adressé une correspondance à la ministre justement pour dire: Y a-tu moyen de regarder les dispositions de la Loi sur les régimes de la retraite puis être capable de contrecarrer ce type de situation là qu'on vit présentement?
Dans un deuxième temps, on a une usine qui cogne à nos portes ? la situation est alarmante ? c'est Kénogami. On vous le dit: S'il y avait une entreprise qui aurait un minimum de santé financière, c'est le plus beau projet pour investir dans une usine, parce que les extrémités sont de classe mondiale. Tu sais, c'est catastrophique.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, vous dites: On investit à Kénogami ou on retire les droits d'eau.
M. Parent (Sylvain): On vous dit que, s'il y a...
Mme Dionne-Marsolais: C'est ça que vous nous dites.
M. Parent (Sylvain): Nous, notre position, la première position, c'est la suivante. Si vous arrêtez une machine à papier, que ce soit Kénogami ou Alma, vous n'êtes pas capables de maintenir le même niveau d'emploi actuel qui est reconnu aujourd'hui, on vous demande de retirer les droits d'eau de la rivière Shipshaw. On parle de la rivière Shipshaw, mais, vous savez, il y a la rivière aux Sables puis la rivière Chicoutimi aussi qui est attachée à tout ça.
Le Président (M. Jutras): Oui. Qui veut la parole, là? Alors, M. le député de Saint-Maurice.
M. Pinard: Merci, M. le Président. Je suis très, très sensible aux propos que vous tenez. Considérez que je suis de Shawinigan, comté de Saint-Maurice, et les deux régions sont parallèles, les deux régions vivent de l'eau, les deux régions vivent de la forêt, les deux régions vivent de l'aluminium. Surtout, les deux régions vivent du papier. Par contre, je suis quelque peu jaloux de voir que, votre région, vous avez quand même des barrages hydroélectriques qui ont permis à certaines entreprises, en aluminium et en papetières, de bénéficier de droits qui ont permis d'avoir une diminution sensible au niveau des coûts de production.
Tout à l'heure, vous nous parliez de Kénogami, vous nous parliez de la machine n° 6. Entre syndicats, vous vous parlez également et vous connaissez très bien des difficultés qu'on avait au niveau de la Mauricie, au niveau de nos ancêtres de machines à papier, parce qu'on peut parler d'ancêtres, hein? Que ce soit chez vous ou chez nous, au niveau des machines à papier, c'est des ancêtres. C'est des ancêtres parce que les compagnies n'ont jamais renouvelé leurs équipements.
Moi, je voudrais connaître. Cette année, Abitibi-Consol, dans son exposé annuel que le P.D.G. a fait lors de l'assemblée des actionnaires, a annoncé un investissement majeur pour la compagnie, cette année, de 15 millions de dollars. 15 millions de dollars, on sait que c'est ridicule au niveau des investissements qui peuvent être faits à l'intérieur du monde des pâtes et papiers. Moi, je voudrais connaître: Port-Alfred: Quand est-ce que la compagnie Abitibi-Consol a véritablement investi massivement, dans l'usine de Port-Alfred, et quel était le montant?
Au niveau d'Alma, les derniers investissements majeurs ? on ne parlera pas, là, de quelques millions, là, on parle de majeurs ? à Alma, quand est-ce que ça a eu lieu ? et également à Kénogami ? des investissements majeurs? Parce que, là, tu me parlais des extrémités, là. Tu as un nouveau système de pâtes, pâtes thermo, je suppose?
Une voix: ...
M. Pinard: O.K. Mais quand est-ce que les investissements majeurs ont été faits dans ces trois usines-là?
M. Parent (Sylvain): Peut-être que je peux laisser la parole à mon confrère de Kénogami. Il est en meilleure position pour vous répondre que celui d'Alma. Puis je vais vous répondre pour Port-Alfred par la suite.
M. Cyr (Élie): Bon. En 1998, il y a eu un investissement majeur à Kénogami et dont je ne me souviens plus du chiffre ? alentour de 126 millions ? qui est un nouveau plan de pâtes, à l'époque. Mais, je peux vous dire, c'est qu'à l'époque aussi il y avait eu un débat sur les droits d'eau. Il y avait eu des débats qui avaient été faits, puis disons qu'on avait eu un levier dans ce sens-là, pour investir à Kénogami. Mais le point de mire était là, en 1998, que c'était que ça nous prenait une machine neuve si on veut compétitionner le marché. Puis là on est encore assis. En 1998, ça avait été annoncé qu'en 2006-2007 la machine n° 6 était pour fermer, puis ça nous prenait un... Là, on arrive en 2006.
Il y a eu un investissement aussi au niveau de l'hydroélectricité sur la rivière aux Sables, qu'Abitibi-Consol est en train de faire, là, au moment où est-ce qu'on se parle. Ça faisait depuis 2001 qu'on mettait de la pression à Abitibi pour qu'ils investissent dans un barrage qu'on avait. Il y avait un barrage flambant neuf au bout de l'usine, durant le déluge, qui a été remodernisé durant le déluge. On avait le tuyau d'eau qui allait au plan de pâtes mécaniques, avant, que, là, le plan de pâtes qui était enlevé, qu'on avait un tuyau d'eau qui était flambant neuf. Il y a un investissement entre 15 et 18 millions, là, pour mettre une turbine aussi, mais il a fallu se battre puis il a fallu crier pour qu'ils fassent cet investissement-là.
Puis, en hydroélectricité, c'est un investissement qui était majeur au Québec. Imaginez que vous avez un barrage, vous avez un tuyau, qui est là, en acier puis avez à mettre seulement la turbine dans le trou. C'est un investissement majeur, mais ça rapporterait à peu près 3,5 millions par année puis ça a pris quatre ans avant qu'Abitibi-Consol se décide à regarder pour que l'eau ne passe pas tout droit puis qu'ils le mettent dans le tuyau, pour faire du courant avec. Ça fait que pour Kénogami c'est ça.
Après ça, pour les autres, bien les autres...
M. Lapointe (Raynald): Bien, Alma, moi, je pourrais dire que, depuis les 10 dernières années, on a eu un plan de désencré, on a eu un PTM, communément appelé un plan de pâtes thermomécaniques. Ça, c'est en 1996. Et le dernier investissement majeur à Alma a été en 2004, avec la transformation de la machine 14 en papier spécialisé, aussi en papier Equal Offset. Et ça, ça a totalisé, en 2004, dans les alentours de 200 millions ? là, je n'ai pas... Bon. Ça veut dire que chez nous, depuis à peu près 10 ans, on peut sûrement parler de 400 millions à Alma.
M. Pinard: O.K.
M. Parent (Sylvain): Je peux vous dire que Port-Alfred, c'étaient les enfants pauvres probablement du groupe. Eux, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils ont été constamment en réorganisation du travail. Ils ont été obligés de concéder. Ils ont été obligés, le syndicat, d'initier 89 coupures d'emplois pour être capables de réduire le tonnage, pour donner un certain souffle de vie à l'usine de Port-Alfred. On peut dire qu'aujourd'hui probablement que c'est une sage décision des travailleurs parce que ça a permis de prolonger leur vie, mais malheureusement les investissements n'ont jamais été au rendez-vous pour être capables de maintenir, à tout le moins, une certaine santé à l'usine de Port-Alfred.
En 1995, le dernier investissement.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui. Alors, merci, M. le Président. Alors, M. Parent, M. Cyr, M. Lapointe, bienvenue à la commission. D'abord, je voudrais vous remercier pour la présentation de votre mémoire. C'est un mémoire, comme l'a dit ma collègue, c'est un mémoire qui est clair, qui est précis et qui dit ce qu'il veut dire. Et ça, je l'apprécie grandement.
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(11 h 30)
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Je voudrais, M. Parent, vous demander une chose, toutefois. C'est que vous avez dit tout à l'heure: Si Abitibi-Consol n'investit pas dans la machine n° 6, à Kénogami, que le gouvernement applique la loi n° 8, qu'il retire les droits d'eau à Abitibi-Consol. Pourquoi attendre? Pourquoi pas maintenant? Pourquoi attendre un investissement d'Abitibi-Consol?
Si le gouvernement vous garantissait, par exemple, appliquait la loi n° 8 et garantissait les mêmes avantages énergétiques à la compagnie, et qu'il s'assoyait avec la compagnie, et qu'il forçait celle-ci à investir le 500 millions en question dans l'usine Kénogami, est-ce que pour vous ça ferait une différence qu'on applique ou qu'on n'applique pas la loi n° 8? Parce que dans le fond la loi n° 8, qu'est-ce qu'elle dit, c'est essentiellement que le gouvernement va redevenir propriétaire des barrages. Et, si le gouvernement redevient propriétaire des barrages, il peut, par l'entremise de la MRC ou d'un autre organisme, ou il peut lui-même directement déterminer les droits d'eau à la compagnie. Il peut lui charger les mêmes coûts d'opération que ça coûte aujourd'hui, mais c'est le gouvernement qui redevient propriétaire du barrage. C'est ça, la loi n° 8.
Et l'autre question que je voulais vous demander, ça va être très court, c'est que, dans la loi n° 8 justement, on prévoyait des investissements de 390 millions à faire par Abitibi-Consol en valeurs de 1998. Mais je viens de comprendre, avec les réponses de MM. Cyr et Lapointe, là, que c'est accompli. Cette condition-là, c'est accompli.
M. Parent (Sylvain): Peut-être, dans un premier temps...
Le Président (M. Jutras): Il vous reste une minute. Allez-y.
M. Parent (Sylvain): Oui. Alors, rapidement. Je veux juste rappeler essentiellement la position. C'est qu'on vous dit tout simplement: Nous, notre position première, c'est de maintenir le statu quo sur la loi n° 8. Advenant qu'Abitibi-Consol ne maintient pas le niveau d'emploi actuel aux usines de Kénogami et d'Alma, on demande au gouvernement ce qui est prévu dans la loi, retirer les baux électriques d'Abitibi-Consol.
Dans un deuxième temps, advenant que le projet de loi n° 99... Pour nous, on vous le dit, là, il n'y a aucune utilité pour l'usine de Kénogami et d'Alma actuellement, si à la limite... Vous autres, vous allez prendre une position en tant que gouvernement. À tout le moins, maintenir le statu quo, parce que les redevances qui sont mises en place n'aideront d'aucune façon l'usine de Kénogami et d'Alma. Et, avec toute la flexibilité légendaire des organisations syndicales, on vous dit, dans un même temps... Tantôt, on vous l'a dit. On vous a déposé un document, puis on n'a pas toujours eu une écoute attentive. On vous le dit: Si vous décidez d'aller de l'avant avec le projet de loi n° 99, on vous dit tout simplement: Avant d'adopter, demandez au moins à Abitibi-Consol qu'ils aient l'obligation de déposer des projets, le projet d'usine de papier pour Kénogami. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, c'est nous qui vous remercions. Alors donc, les débats sont suspendus. Nous reprenons nos travaux à 14 heures.
(Suspension de la séance à 11 h 33)
(Reprise à 14 h 1)
Le Président (M. Jutras): ...reprendre nos travaux. Alors, la Commission de l'économie et du travail reprend donc ses travaux et poursuit sa consultation sur le projet de loi n° 99, Loi modifiant la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw.
Alors, cet après-midi, nous entendrons, dans les minutes qui suivent, le Conseil de l'industrie forestière du Québec; à 15 heures, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et syndicats affiliés; à 16 heures, la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean conjointement avec la municipalité de Saint-David-de-Falardeau; et, à 17 heures, Abitibi-Consolidated, pour ajourner nos travaux à 18 heures.
Alors, nous sommes prêts à entendre les représentants du Conseil de l'industrie forestière. Alors, bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Je vous rappelle les règles: 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; 20 minutes par la suite d'échange avec le ministre et les députés ministériels; et par après 20 minutes d'échange avec les députés de l'opposition. Alors, M. Guy Chevrette, bonjour.
M. Chevrette (Guy): Bonjour.
Le Président (M. Jutras): Et je vous demanderais, M. Chevrette, de présenter les personnes qui vous accompagnent et immédiatement la présentation de votre mémoire.
Conseil de l'industrie forestière
du Québec (CIFQ)
M. Chevrette (Guy): Oui, merci, M. le Président. M. le ministre, M. l'adjoint parlementaire, Mme et MM. les députés, je vous présente tout d'abord, à ma gauche, M. Pierre Vézina, qui est directeur du secteur Énergie au Conseil de l'industrie forestière du Québec, et, à ma droite, M. Michel Vincent, qui est économiste et qui est aussi directeur du commerce international nouvellement nommé, en remplacement de M. Marc Boutin. Ce n'est pas un sujet non plus qui est hors notoriété de ce temps-ci.
Donc, je voudrais, dans un premier temps, vous remercier de l'invitation que vous nous avez faite de nous présenter pour la loi n° 99, projet de loi qui à notre avis peut toucher la vie économique du Saguenay?Lac-Saint-Jean de façon assez tangible, merci. Donc, on pensait au départ, en lisant la loi n° 99 et en lisant la loi n° 8, que ça aurait pu être un simple contrat qui aurait pu être signé entre l'industrie et le ministère ou le gouvernement. Parce que la loi n° 8 dit fort bien que le ministre «peut» et non pas «doit», et, de la façon dont on interprétait, au début en tout cas, la loi n° 99, c'est que le ministre a interprété «peut» par «doit» en présentant 99. Mais, si 99 a pour effet de ne pas éliminer les droits hydrauliques, je suis bien obligé de vous dire qu'on est heureux pour les motifs suivants. Tout d'abord parce que l'importance assez grande de la compagnie, de l'entreprise elle-même, ACI, Abitibi-Consol, sur le territoire du Saguenay?Lac-Saint-Jean est plus qu'importante, vous le savez, il y a de nombreuses usines, des scieries, pâtes et papiers.
Et je dois vous avouer que, dans un contexte de nos économies mondialisées, il faut tenir compte du contexte général avant d'en arriver à imposer des coûts additionnels ou des redevances additionnelles à une entreprise. Et tantôt mon collègue Michel Vincent vous exposera la situation économique de l'industrie en général et plus particulièrement des pâtes et papiers. On verra que ce n'est pas rose, ce n'est pas drôle et qu'il faut faire énormément attention à la compétitivité de nos entreprises. D'ailleurs, on a présenté à M. Charest nous-mêmes la création d'un comité sur la compétitivité parce que nos entreprises ne sont plus à l'échelon canadien et même avec nos voisins, les Américains.
Donc, parlons un peu de l'industrie tout d'abord des pâtes et papiers. On sait que c'est un pilier du développement des régions du Québec, et ce, depuis plusieurs décennies. À ma grande surprise, je n'avais pas remarqué, mais 16 à 17 régions du Québec ont au moins une papetière. Il y en a 63 au Québec. Donc, cette industrie rayonne à travers tout le Québec. Il y a 250 communautés, ou municipalités, ou villages, appelons-les comme on voudra, qui vivent, pour un certain nombre, à 100 % de cette industrie, d'autres, à 80 %, mais on sait qu'il y a 250 communautés qui en grande partie vivent de cette industrie. Il y en a beaucoup, nos détracteurs en particulier, qui disent qu'on prélève la ressource sans considération puis qu'on empoche des profits. Je peux-tu vous dire qu'ils devraient se renseigner, qu'il y a des multinationales, il y a des grosses entreprises québécoises purement aussi de chez nous, familiales qui investissent depuis des années, et, si on faisait la moyenne des revenus ou des profits depuis 15 ans, vous en seriez surpris: dans certains cas, ça ne dépasse même pas 4 %. Donc, le mythe de prélèvement de la ressource, là, puis des marges désordonnées de profit, là, on serait mieux de se renseigner, s'il vous plaît.
Combien d'emplois créent exclusivement le secteur des pâtes et papiers? Quelles sortes de conditions de travail ont-ils? Quels sont les traitements annuels? Eh bien, quand on fait des comparaisons, on se rend compte que 44 % des revenus sont plus élevés pour les salariés de 44 % par rapport aux produits électriques et électroniques. C'est de très bons revenus pour nos employés. Ils sont de 24 % plus élevés que ceux dans le matériel de transport. C'est quelque chose. C'est des emplois de qualité que l'on a, très rémunérateurs. Et, uniquement dans le secteur des pâtes et papiers, le traitement et les salaires, tous les avantages combinés, c'est 1,6 milliard de dollars. C'est 60 000 emplois. Et, quand je dis «au niveau des pâtes et papiers», c'est 60 000 emplois directs, indirects et induits. Dans toute l'industrie, c'est 150 000. Ça veut dire le sciage, le déroulage de feuillus.
Et, quand nos détracteurs disent qu'il n'y a aucun investissement dans la modernisation de nos entreprises, ils ont tort. S'ils avaient précisé que, depuis trois ans, ça a diminué, on dirait oui. Mais, de 1999 à 2002, je vous dirai que c'est 3 milliards de dollars, plus de 14 % d'ailleurs de toutes les dépenses manufacturières, qui ont été investis au niveau des pâtes et papiers. Dans la même période, c'est 2,3 milliards exclusivement en réparation et en entretien, ce qui fait 500 millions par année, de 1999 à 2002. C'est plus de 600 millions en impôts payés au gouvernement en plus des 900 millions provenant des impôts de nos employés, pour un total de 1,5 milliard. C'est beaucoup de chiffres, puis je vais en ajouter un autre en plus: c'est plus de 7,5 milliards en exportations, et ce, même si le papier journal a chuté de 10 % depuis 25 ans.
Je vous dirai que j'en ai entendu des vertes et des pas mûres, mais je vous les réserve pour la fin. Nous sommes ici parce que nous avons la conviction que la compagnie peut expliquer clairement sa position, peut se défendre comme une grande fille, comme on dit en bon québécois, peut se défendre très bien sur son passé, mais, nous, on veut profiter de l'occasion pour vous parler de la situation économique de l'industrie. Je vais demander à Michel Vincent de vous donner le portrait et je conclurai, moi, sur ce que j'ai entendu et, après vérification, ce qui est la vérité.
Le Président (M. Jutras): M. Vincent.
M. Vincent (Michel): Alors, merci, M. le Président, M. le ministre. Merci, M. Chevrette. Je voudrais tout simplement et très rapidement brosser un tableau de l'environnement économique à l'intérieur duquel nos entreprises, particulièrement celles du papier journal, oeuvrent.
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(14 h 10)
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Vous le savez sans doute, le Canada est le plus gros producteur de papier journal au monde, et, à l'intérieur du Canada, le Québec est le plus gros producteur canadien de papier journal. Et, à l'intérieur du Québec, bien Abitibi évidemment est forcément la plus grosse compagnie, le plus gros producteur mondial de papier journal, puisqu'il est le plus gros. Il est le plus gros au Québec, puisqu'il est le plus gros mondialement. En fait, l'industrie du papier journal est à ce point grosse qu'elle suffirait à elle seule à faire basculer la balance commerciale du Québec à son surplus de 5 milliards qu'elle a présentement. Si l'industrie du papier journal disparaissait, la balance commerciale deviendrait négative, ce qui ferait du Québec un importateur net. Alors, c'est pour vous dire que l'industrie du papier journal est d'une très grande importance pour le Québec.
Alors, une fois que ces superlatifs-là sont utilisés, on peut parler d'un géant, mais on doit parler d'un géant plutôt fragile. Vous savez que l'industrie du papier journal est une industrie dont la plupart des coûts sont en dollars canadiens mais dont les revenus sont pratiquement exclusivement en dollars américains, ce qui fait qu'on est très vulnérables face à une montée du dollar canadien, comme on l'observe depuis un peu plus d'un an. En fait, le dollar canadien a tellement joué sur les finances de nos entreprises que, même si le prix du papier journal en dollars américains est, on pourrait dire, pas si mal par rapport à ses niveaux historiques, les revenus sont fortement à la baisse quand on les convertit en dollars canadiens. Donc, l'industrie du papier journal, évidemment elle est prise sur les marchés, avec un dollar canadien à la hausse et aussi avec des concurrents qui proviennent des pays, des pays en développement notamment, qui connaissent une croissance fulgurante pour nos marchés traditionnels. Donc, en amont de... pardon, en aval de nos usines, on a une situation qui est précaire et en amont aussi, puisque l'industrie du papier journal au Québec fait face aux coûts d'approvisionnement, aux coûts de la fibre les plus élevés au monde aussi. Donc, l'industrie est prise dans une sorte d'étau, entre des coûts qui sont de plus en plus élevés en amont et des revenus qui sont de plus en plus faibles en aval, c'est-à-dire sur les marchés.
Les cas, qu'on a vus depuis les dernières années, de Chandler, de Port-Alfred ne sont pas malheureusement des cas isolés, ce sont plutôt le reflet de la santé financière d'une industrie qui est en grave difficulté. Pour finaliser mes propos, je vous demanderais de prendre le graphique...
M. Chevrette (Guy): On peut-u vous distribuer un graphique?
Une voix: C'est fait, M. Chevrette
M. Vincent (Michel): ...le graphique en fait qui met en évidence ou en comparaison la situation des entreprises forestières de l'Est du Canada versus ceux de l'Ouest et de l'économie canadienne dans son ensemble. Et vous pouvez voir ici que ce n'est pas nous qui parlons, ce n'est pas l'industrie qui parle, mais ce sont plutôt des dizaines de millions de personnes qui ont la capacité de vendre ou d'acheter.
Le Président (M. Jutras): Attendez donc, là, M. Vincent. Moi, je l'ai, là, le tableau. Est-ce que tout le monde l'a? Est-ce que tous les parlementaires l'ont?
Une voix: C'est celui-là?
Le Président (M. Jutras): Oui. Ça va? Parfait. Bon. On va en fournir une copie. Alors, vous pouvez continuer, M. Vincent.
M. Vincent (Michel): Alors, il s'agit du reflet de décisions d'affaires quotidiennes de dizaines de millions d'investisseurs qui ont eu le loisir d'acheter ou de vendre des actions, et vous voyez que les entreprises au Québec ont perdu la cote auprès des investisseurs. Alors, cette situation-là est extrêmement préoccupante au sein du Conseil de l'industrie forestière du Québec. Nous sommes très préoccupés par la situation précaire de l'industrie forestière en général et particulièrement de celle du papier journal. Je vous remercie.
Le Président (M. Jutras): M. Chevrette.
M. Chevrette (Guy): M. le Président, pour terminer, je voudrais vous dire que, dans ce dossier, j'en ai entendu des vertes puis des pas mûres. Il a été un bout de temps, l'an passé, au moment de la fermeture de Port-Alfred, on me disait: Bien sûr, ils ont des droits hydrauliques qui alimentaient Port-Alfred. Après vérification, c'est faux. Après ça, j'ai entendu ceci: ACI vend des kilowattheures à des privés, à qui elle veut. Après vérification, non seulement elle n'en vend pas, elle est obligée d'en acheter. J'ai vérifié comment elle en achetait, c'est plus de 40 MW d'Hydro-Québec, au tarif L. Donc, c'est un autre bobard.
Donc, notre objectif, ici, c'est de démontrer aussi que, quand un gouvernement négocie avec une compagnie et lui crée des exigences, ce n'est pas un privilège. Si c'était un privilège, eh bien, il ne demanderait pas en contrepartie des obligations d'investissement. Est-ce que, les autres compagnies, est-ce qu'on leur donne des privilèges sans exigence d'investissement, par exemple? Non. Si vraiment ACI bénéficiait de privilèges sans exigence, je pense qu'on pourrait se plaindre effectivement. Mais, quand on demande en contrepartie de l'octroi, par exemple, de droits hydrauliques, qu'on demande en contrepartie des investissements majeurs, ce n'est pas un privilège, c'est un contrat en bonne et due forme d'échange. Je peux-tu vous dire que 10 millions de redevances versus 500 millions d'investissement, si tu n'es pas sûr de rentrer dans ton investissement, c'est loin d'être un privilège, ça dépend des conjonctures, d'où notre mise en garde d'exiger des conditions qui ne peuvent être rencontrées et qui, à toutes fins pratiques, ne changeraient rien à la situation actuelle.
Je pense sincèrement que l'industrie fait face à une obligation de consolidation, et ça, c'est à tous les niveaux de l'industrie, c'est évident. Et, quand on fait face à une obligation par la force des marchés, à une consolidation, à une restructuration, je peux-tu vous dire que c'est par le dialogue qu'on doit le faire, c'est par des ententes qu'on doit le faire, c'est par des échanges soutenus qu'on doit le faire. On doit s'accompagner. À mon point de vue, on ne doit pas laisser exclusivement les forces du marché ? en tout cas, c'est mon opinion bien personnelle ? sinon, les forces du marché, vous savez que ça ne tient pas compte nécessairement des populations, ça ne tient pas compte des régions, ça ne tient pas compte des bassins de concentration de population. Et je pense qu'on a avantage, gouvernement et industries, à se parler, on a avantage à échanger, on a avantage à être prudents dans nos exigences. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Je cède la parole maintenant au ministre des Ressources naturelles. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Chevrette, M. Vincent, M, Vézina, bienvenue aux travaux de la Commission de l'économie et du travail dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 99, lequel projet de loi prévoit, en plus des dispositions déjà inscrites dans le projet de loi n° 8, imposer des redevances additionnelles graduelles plutôt que de mettre fin à la location des forces hydrauliques. Quelle est votre approche là-dessus dans... Quelle est votre opinion de cette approche-là versus les dispositions actuelles de la loi n° 8?
M. Chevrette (Guy): Bien, comme je vous disais d'entrée de jeu, moi, je me basais sur l'article 9 de la loi qui disait: La fermeture d'une des usines exploitées par le locataire le 19 juin 1999, dans une région administrative du Saguenay?Lac-Saint-Jean, là, c'est-à-dire qu'«outre les cas de résiliation sans formalité ni indemnité que pourra prévoir le bail, celui-ci pourra être ainsi résilié par le ministre ? pourra». On ne croyait pas qu'il y avait une obligation formelle dans la loi. C'est ce qu'un peu d'entrée de jeu ce que je vous disais. C'est pour ça que, moi, je pensais un simple contrat réouvert, parce qu'il y a eu des ententes par la suite de cette loi n° 8 là, pour découvrir que ça fait seulement trois ans de bail, puis c'est voté en 1999, c'est parce qu'il y a eu des ententes en quelque part. Je ne les connais pas, personne ne me les a montrées, et je ne les ai pas demandées non plus. Mais, à mon point de vue, c'est strictement sur une base de pouvoir.
Maintenant, si c'est interprété par les juristes comme étant une fin automatique et que ça redemande une loi, bien je pense qu'on peut reconduire une loi mais en négociant des obligations qui tiennent compte de la conjoncture économique à la fois mondiale et à la fois la situation de non-compétitivité de l'industrie québécoise. On ne peut pas se faire plaisir en augmentant des redevances puis que ça ne sauverait même pas la fermeture d'une usine, par exemple. Je pense qu'il faut y aller avec la capacité de l'entreprise, qui a à démontrer, qui a à faire la preuve ? ça, je n'en disconviens pas ? là, devant le pouvoir public. Mais je peux vous dire que, vérification faite, vous savez très, très bien, M. le ministre, que notre industrie a de graves problèmes.
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(14 h 20)
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Et, si le premier ministre du Québec, M. Charest ? en votre présence d'ailleurs, vous étiez là ? a accepté de créer un comité sur la compétitivité de l'industrie dans son entièreté, c'est parce qu'on vous a fait la démonstration que tout ne tourne pas rond. Et ce projet de loi là qui ne touche qu'une compagnie bien doit être pris dans le même esprit. On ne peut pas travailler sur un comité national sur la compétitivité de l'industrie puis arriver avec une loi que peut-être vous vous efforcez de... Je ne veux pas vous obstiner là-dessus, je ne suis pas légiste, mais je croyais que.
Mais, ceci étant dit, il y a une loi sur la table. Vous nous demandez notre avis. On dit, nous: Attention, s'il vous plaît, à des demandes qui n'atteindraient pas plus l'objectif ou ne réussiraient pas. Je suis convaincu que votre objectif premier, c'est de sauver l'ensemble des entreprises ou en tout cas la très grande majorité des entreprises appartenant aux mêmes actionnaires et qu'on ne pourrait pas arriver à une fermeture ou à des fermetures parce qu'on a des exigences différentes, qui peuvent plaire à court terme, en passant, à certains groupes, qui peuvent plaire à certains groupes ? les détracteurs, là, qui nous traitent d'arracheux d'arbres puis: Ils ne doivent avoir aucun souci de la forêt ? alors que la pérennité de la forêt, c'est indispensable à notre industrie, là. Ils vont avoir réponse maintenant. Ils ne sont pas tout seuls sur la glace, je peux-tu vous dire ça.
Le Président (M. Jutras): M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Oui, M. le président du conseil, j'ai compris, dans votre introduction, la nuance que vous mettiez entre les mots «peut» et «doit». Mais j'aimerais avoir votre opinion là-dessus: Est-ce que vous pensez que l'approche proposée par les redevances additionnelles graduelles et même dégressives, s'il y a des investissements, c'est une approche qui est susceptible d'inciter l'entreprise à consolider puis à développer ses activités dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean? Est-ce que vous pensez que ça peut être un incitatif dans une direction comme dans l'autre?
M. Chevrette (Guy): Bien, comme formule, là, je ne dis pas, c'est toujours les quanta, hein? C'est les quantums qu'on y met. Comme formule, moi, si vous me concédez un avantage, puis je suis sûr de rentrer dans l'investissement que vous me demandez, pas de problème avec ça. Le problème, c'est toujours dans le quantum. Puis c'est une entreprise qui vous a donné des exemples concrets, je pense, de vouloir y demeurer, dans le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je pense à Saint-Prime, là. On vient d'utiliser du deux-par-trois qui n'était pas d'une qualité d'exportation puis qui est une valeur ajoutée. Ils ont fait la démonstration, ils ont investi 200 millions à Alma. Puis je ne sais pas comment ils ont mis, ils connaissent plus leurs chiffres que nous. Mais, si les demandes sont raisonnables en fonction d'être capables de rentabiliser leurs immobilisations, la formule, moi, quant à la formule, je n'ai rien contre. C'est toujours dans les quantums du raisonnable puis c'est pour ça que je vous dis «attention», parce que la conjoncture économique mondiale, la conjoncture économique même canadienne et américaine, parce qu'on n'est même plus compétitifs avec nos deux voisins... Il faut faire énormément attention sur les quantums qu'on peut imposer à des compagnies québécoises.
M. Vézina (Pierre): Je me permettrai peut-être un complément d'information ou dans le même ordre d'idées. Il faut bien comprendre qu'actuellement, là, à peu près l'ensemble des compagnies terminent leur semestre dans le rouge, et on pourrait voir les résultats de très nombreuses usines qui sont dans le rouge. Je pense qu'Abitibi va être relativement transparente avec vous sur ces aspects-là. Et, si le fait de mettre des redevances additionnelles fait en sorte que cette usine-là en particulier se retrouve encore moins rentable, bien peut-être que la formule semble, je dirais, atténuer les effets. Mais elle va quand même en produire. Et il ne faudrait pas se retrouver dans une situation où ce sera la prochaine usine qui sera la moins rentable du groupe.
Puis, j'ajouterai ceci: c'est qu'en Ontario présentement on est en train de travailler à des solutions pour aider l'industrie. Alors, est-ce que des usines ontariennes ne se retrouveront pas en meilleure situation que des usines québécoises? Et, si c'est le cas, à cause des supports, je dirais, du côté de la province ontarienne, il faut se questionner, là, hein? Je pense que M. Chevrette a été assez clair sur la situation que connaît l'industrie actuellement. Il faut le regarder de manière encore plus précise, là, dans le domaine du papier journal et pour les usines, dont celle de Kénogami.
M. Chevrette (Guy): Michel...
Le Président (M. Jutras): M. Vincent.
M. Vincent (Michel): Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais vous référer à la figure 6 de la page 11 du mémoire du CIFQ, où on indique clairement quel est le rendement sur le capital utilisé dans le domaine du papier journal. Vous voyez qu'on a des chiffres qui viennent juste de sortir ? la valeur de 2004 n'a pas une semaine de vie déjà, là, on vient de l'avoir ? on a fait un rendement de 3,4 %. Mais il faut comprendre que ce n'est pas 3,4 % de profit. Le rendement sur le capital utilisé doit être comparé avec le coût du capital.
Or, dans notre industrie, on considère que le coût du capital utilisé est d'environ 10 %. On va de 10 % à 12 %, mais mettons-le seulement à 10 %. Ça veut dire qu'en 2004 on a utilisé du capital qui nous coûtait 10 % en intérêt et qui nous a rapporté du 3,4 %. Dans les six dernières années, il y a seulement eu une année où on a vu le rendement sur le capital égaler son coût. Alors, c'est l'équivalent, là, d'emprunter de l'argent à la banque à du 10 % et de l'investir à du 4 %. C'est ça que notre industrie vit année après année. Alors, dans les hauts de cycle, on arrive à peine à, comme on dit, «break even», là, à finir égal.
Des voix: Au point mort.
M. Vincent (Michel): Au point mort, voilà, le point mort. Merci beaucoup.
M. Chevrette (Guy): Tu ne vis pas, mais tu ne meurs pas.
Le Président (M. Jutras): M. le ministre.
M. Corbeil: Merci. Je comprends que vous invitiez le gouvernement à la prudence. Je comprends parfaitement aussi la situation. Maintenant, on veut agir de façon responsable et on pense que la formule qui est là rejoint un certain nombre d'objectifs mais d'une façon, comme j'ai dit tantôt, responsable.
Si ce n'est pas cette formule-là qui était retenue, est-ce que vous en suggéreriez un autre, moyen, qui pourrait être pris pour inciter l'entreprise à consolider les emplois, maintenir et consolider les emplois dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean?
M. Chevrette (Guy): Bien, il n'y a pas une compagnie qui a la même situation exacte. Donc, je dois vous dire que, dans ce domaine, dans le domaine de la concession de droits ou de l'octroi de droits sur une base de bail ? j'ai témoigné devant vous, je ne serai pas incohérent avec ce que je vous ai dit la fois que je suis passé, parce que je suis convaincu que vous auriez un acolyte de droite qui vous sortirait mon mémoire puis qui vous le mettrait sous le nez, puis vous me citeriez des belles petites phrases ? je reconnais que, lorsqu'on reçoit un avantage ? et puis ça peut être aménagé de conditions, ça, je concède ça... Mais ce n'est pas un privilège quand tu négocies un avantage en revanche d'obligations. Contrairement à ce qui se dit, ce n'est pas un privilège, c'est une négociation de bonne foi. Je te concède un avantage, mais je t'oblige à faire ça. Et, l'un et l'autre, c'est gagnant-gagnant pour les deux. C'est de même qu'on doit le percevoir. C'est un contrat d'affaires.
À mon point de vue, il peut y avoir des contrats d'affaires. Mais je comprends que, quand tu es au gouvernement, il faut que tu sois très transparent, je reconnais cela, et que ça peut être connu du public. Moi, que vous y alliez par loi, en soi ça ne me crée pas de problème. Ce qui me créerait un problème comme président du Conseil de l'industrie forestière, c'est que les conditions que vous mettriez ne permettent pas à l'entreprise, à la papetière de survivre puis que vous n'atteindriez pas les objectifs vous-mêmes que vous vous fixez, c'est la survie de l'entreprise. Donc, à ce moment-là, c'est vraiment une négociation de bonne foi, avec beaucoup de transparence, chiffres sur la table.
Vous allez peut-être arriver, avec la loi n° 99, en discutant d'affaires avec Abitibi-Consol, que vous ne pouvez pas changer tellement les redevances qu'il y a là, à moins que l'économie reprenne son envol épouvantable. Mais je ne crois pas que vous pouvez ajouter bien, bien d'obligations. Eux peuvent le dire beaucoup mieux que moi, mais je suis persuadé qu'avec les chiffres actuels que nous avons c'est beaucoup plus l'aide gouvernementale que l'on a besoin pour faire de notre industrie une industrie plus compétitive. Puis je pourrais vous sortir tous les chiffres que vous avez vus de toute façon, qu'on a déposés à M. Charest, qu'on a déposés à l'ensemble des ministres, qu'on va déposer d'ailleurs au ministre des Finances également, parce qu'il y a une taxe sur le capital de 100 millions qui est agaçante.
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(14 h 30)
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Quand tu sais qu'en Colombie-Britannique, par exemple, il n'y a aucune taxe sur le capital, déjà on part perdants vis-à-vis eux autres. Et, vous le savez très bien, en Colombie-Britannique, avec leur «pine beetle», ils paient 0,25 $ du mètre cube. On en paie 13,50 $ de moyenne. C'est bien plus sérieux qu'on le pense, la situation de l'industrie. Et je sais que j'ai débordé largement la question qui m'avait été posée, mais j'ai réussi à passer mon message pareil.
Mais je vous dirai, M. le ministre, que l'important, je pense, c'est une négociation transparente pour permettre d'atteindre les objectifs que vous visez vous autres mêmes comme gouvernement pour la population du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je ne voudrais pas qu'on utilise par là une notion qu'on pense qu'on vient faire du chantage. Ce n'est pas du chantage. Vous le savez mieux que moi encore, que l'industrie s'en va vers une consolidation et que ça va faire mal à des places, qu'on le veuille ou pas. Mais où est-ce qu'on veut que ça fasse mal puis comment on veut que ça fasse le moins mal possible? Et c'est ensemble qu'on va faire la discussion, puis je suppose que l'industrie est très capable de négocier. L'industrie régionale est appuyée si je me base sur le syndicat qui a témoigné ce matin. Il y a un autre syndicat qui vient cet après-midi. Il y a des élus municipaux qui sont venus vous le dire. Même ceux de la région de Port-Alfred sont venus vous dire: Attention à ce que vous faites, c'est dangereux. Ils le savent en maudit, que c'est dangereux, eux autres.
M. Corbeil: Bien, puisqu'on continuerait dans le même sujet des forces hydrauliques, vous conviendrez avec moi que l'exploitation des forces hydrauliques, ça confère un avantage économique, et tantôt on a eu une remarque à l'effet que ça pourrait infléchir le bilan d'une installation de la compagnie. Est-ce que vous pensez qu'on doit calculer ça en fonction de l'utilisation de cette énergie-là dans une ou deux usines ou si on doit regarder ça plus globalement comme étant un avantage concurrentiel pour la compagnie de faire affaire au Québec?
M. Chevrette (Guy): M. Vézina va...
M. Corbeil: Parce qu'il y en a d'autres. Là, on parle des forces hydrauliques partielles de la rivière Shipshaw, mais il y a des installations qui sont privées, entièrement privées, qui appartiennent à la compagnie, qui lui procurent encore là un avantage concurrentiel. Mais, si on destine ça à une installation, ça veut-u dire que, quand cette installation-là va cesser, on peut faire ce qui est prévu dans la loi n° 8? Je veux dire: Je regrette, il n'y aura plus de baux, il n'y aura plus de forces hydrauliques, de baux convenus avec le gouvernement. Je voulais juste savoir si on doit regarder ça au global ou par entité.
M. Vézina (Pierre): Bien, je pense qu'il faut remettre ça dans un contexte d'opération d'entreprise et de décisions d'investissement, hein? Les décisions d'investissement sont prises sur la base des résultats d'une usine et des possibilités de rendement de cet investissement-là à cette usine-là en particulier. Si Abitibi choisit d'affecter le bénéfice spécifique des droits hydrauliques aux usines qui bénéficient réellement de ces droits-là, à savoir l'usine d'Alma et l'usine de Kénogami, je pense qu'il faut respecter ça. Et probablement qu'Abitibi prendra ces décisions, puis même ils les ont peut-être déjà prises dans le passé, des décisions d'investissement sur le bénéfice déjà escompté.
Alors, si on change la donne, il y a peut-être même des résultats de décisions antérieures qui vont être passablement détériorés suite à des redevances additionnelles. Je leur laisse le soin de faire cette démonstration-là. Mais dans ma perspective je ne pense pas que l'entreprise... Même si au global il y a des bénéfices qui sont consolidés, les décisions spécifiques sont prises sur la base des usines.
M. Corbeil: Puisque M. Chevrette tantôt parlait de l'occasion de passer un message, je peux lui rappeler que 75 % des entreprises au Québec ne paient plus de taxe sur le capital et que, lors du dernier discours sur le budget, le ministre des Finances a pris l'engagement de le réduire pour les moyennes et grandes entreprises pour le ramener à la moyenne canadienne, si je ne m'abuse. Alors, moi aussi, je veux passer un message. Alors, je pense qu'on va dans la bonne direction.
M. Chevrette (Guy): La bonne direction, mais il ne faut pas mettre l'accélérateur parce que l'industrie a besoin de ce souffle-là, en particulier sur la compétitivité du marché canadien. Vous savez que le marché canadien va être envahi par le bois de la Colombie-Britannique, et puis, avec les conditions qu'ils ont pour le prélèvement de leurs ressources, pas de taxe sur le capital, je peux-tu vous dire que ça va avoir un effet dramatique sur les prix. Et déjà notre industrie est mal en point. Et que le ministre des Finances aille dans la bonne direction, je pense que... Vous l'avez déjà fait pour les mines. Je ne vois pas pourquoi qu'on ne le ferait pas pour la forêt. C'est une ressource naturelle.
Le Président (M. Jutras): Oui, M. le député de Roberval. Deux minutes.
M. Blackburn: Merci, M. le Président. D'abord, M. Chevrette, messieurs, bienvenue ici, à l'Assemblée nationale.
Je pense qu'on est en face d'un défi qui est extrêmement important pour l'ensemble du Québec, mais particulièrement pour les régions du Québec, avec l'industrie forestière, entre un discours qui est de plus en plus régionaliste, que les gens provenant des régions veulent tirer davantage, je dirais, de développement économique avec l'utilisation de leurs ressources naturelles, mais en même temps il faut être en mesure aussi d'assurer la pérennité de l'industrie forestière. Une chose est sûre, si on ne fait rien, je ne suis pas sûr qu'on va avoir une solution qui va être viable à long terme, compte tenu des enjeux qu'on connaît de part et d'autre.
Et là ce qui nous est proposé devant nous, c'est bien sûr: Comment peut-on arriver, avec les avantages qui sont disponibles sur le territoire du Québec, comment peut-on arriver à d'une part satisfaire la réelle volonté des régions de se développer à partir de leurs ressources naturelles et d'avoir un plus grand rôle à jouer avec leurs ressources naturelles, mais en même temps s'assurer que l'industrie puisse elle aussi prendre part à ce développement économique là en maximisant les retombées et en maximisant les investissements dans leurs usines?
Lorsqu'on regarde par rapport au tableau que vous avez à la page 2, sur la répartition des coûts dans l'industrie papetière, mais j'imagine que, par rapport à l'industrie générale forestière, le pourcentage que l'énergie occupe, on parle de 24 % ici ? dans l'industrie forestière, ça doit être quand même assez important aussi, l'utilisation de l'énergie ? comment peut-on arriver, outre ce qui est proposé sur la table actuellement avec le projet de loi n° 99, qui vient en renfort du projet de loi n° 8, comment peut-on arriver à concilier les deux volontés, qui à mon sens, pour le futur, sont indissociables?
M. Vézina (Pierre): O.K. Bien, je suis tout à fait d'accord, du fait que ce soit indissociable. Maintenant, les solutions, il y en a un certain nombre pour trouver des avenues qui permettraient à l'industrie de maintenir sa présence et même d'investir, hein? J'entendais, ce matin, les gens des syndicats qui réclamaient la mise en place d'une nouvelle machine à papier. Alors, vous savez, c'est 500 à 600 millions de dollars, là, ce n'est pas rien. Regardez, il faut s'assurer d'une part que... Hein, vous voyez le graphique, là, hein, le coût de l'énergie, électricité, il est en hausse quand même de façon significative depuis les dernières années. On fait face à des décisions réglementaires qui pourront éventuellement nous affecter de façon importante, et là-dessus on est vraiment en attente avec beaucoup d'anxiété de la stratégie énergétique qui sera rendue publique très prochainement. Mais, sur ce plan-là, du point de vue des coûts de l'électricité, il y a du travail à faire en tout cas, au moins s'assurer qu'ils ne vont pas continuer à croître aussi rapidement. On se rappellera, là, que l'industrie contribue pour près de 120 millions dans l'interfinancement.
Du point de vue de la fiscalité également, il y a un ensemble de mesures. On a parlé effectivement de la taxe sur le capital, mais tout ce qui touche la parafiscalité coûte extrêmement cher au Québec puis au Canada. Je suis d'accord quand on dit que le Québec est un des endroits où on est le plus compétitifs sur le plan de la taxation ou de l'imposition des profits. Maintenant, quand on le regarde dans son ensemble, une étude qui a été faite par Price Waterhouse pour le compte de l'association canadienne met le Canada bon dernier sur le plan de la fiscalité, avec plusieurs autres pays. On en parle dans notre mémoire. Et la question de la fibre est centrale dans tout ça. On a le coût de la fibre le plus cher au monde. Écoutez, là, on part avec au moins deux prises et demie, là, ce n'est pas facile. Les coûts de transport qui sont aussi relativement élevés, donc. Puis, la fibre, il y a un autre élément qu'il faut considérer maintenant ? le contexte actuel: Y aura-t-il de la fibre? Il va falloir qu'on trouve des solutions. S'il y a des projets d'investissement, il faut être en mesure de s'assurer que cette fibre-là soit disponible à long terme.
Et il y a énormément d'incertitudes actuellement. On fait face à des réductions de la possibilité forestière de 20 %, pour les trois prochaines années, qui sont une mesure préventive, mais, à partir de 2008, une fois que les calculs auront été complétés, on fera face à quoi exactement? On ne sait pas non plus.
n(14 h 40)n Alors, on ne peut pas dire qu'on a un climat d'affaires, là, qui est présentement, particulièrement, réjouissant, et bien, dans ce contexte-là, ce n'est pas facile et il va falloir trouver des pistes de solution, parce qu'on risque de voir...
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Alors, M. Vézina, vos propos sont fort intéressants, mais je me dois de vous interrompre, on a écoulé votre temps.
M. Vézina (Pierre): D'accord.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Maintenant, la parole à l'opposition.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue. Et votre mémoire est extrêmement intéressant, il y a beaucoup de choses.
Vous reprenez aussi un certain nombre de choses que vous avez dites lors de la commission parlementaire sur l'énergie. Donc, à la page 20, vous demandez au gouvernement de surseoir à son intention de demander une redevance additionnelle à la compagnie. Donc, en fait, ce que vous dites, c'est que, le projet de loi n° 99, vous souhaitez qu'on le mette sur une tablette. C'est ce que vous dites?
M. Chevrette (Guy): Bien, je vous ai dit d'entrée de jeu que je croyais qu'un simple contrat pouvait régler la situation, compte tenu du fait qu'on est en discussion pour rendre notre industrie plus compétitive, qu'il nous apparaissait fort d'en arriver avec une loi qui ajouterait aux obligations.
Mme Dionne-Marsolais: Je comprends puis je tiens à vous le faire répéter parce que je pense que c'est important que l'on se comprenne bien.
Juste une petite précision. Vous avez dit qu'Abitibi-Consol ne vendait pas d'électricité à d'autres. Peut-être qu'elle ne vend pas de l'électricité de la Shipshaw à d'autres, mais elle vend de l'électricité à d'autres à Baie-Comeau, je crois. Non?
M. Vézina (Pierre): À ma connaissance, ils sont partenaires dans un projet.
Mme Dionne-Marsolais: Ah, d'accord.
M. Vézina (Pierre): Alors, je ne sais pas exactement.
Mme Dionne-Marsolais: Ils ne vendent pas vraiment, mais ils sont partenaires dans le projet. O.K.
M. Vézina (Pierre): Alors, effectivement, ils ont conjointement une centrale avec Alcoa, et les deux usines sont alimentées, autant celle d'Abitibi-Consol que celle d'Alcoa, par cette centrale-là, selon mes informations.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Ce matin, je ne sais pas si vous étiez là, mais je citais Credit Suisse First Boston dans un rapport du 25 avril où est-ce qu'on dit qu'Abitibi elle-même estime que le coût de sa production d'électricité hydroélectrique est de l'ordre de 9 $ CAN du mégawattheure contre un prix du marché à 44 $ CAN du mégawattheure, en 2004. Donc, ils ont vraiment ? c'est cinq fois, ça, hein? ? cinq fois moins que l'industrie, parce que les autres, eux paient le tarif d'électricité courant, le prix du marché.
On sait, au Québec, qu'on a un prix d'électricité avantageux heureusement, mais, depuis ? et vous le dites dans votre mémoire ? depuis 18 mois, les tarifs d'électricité ont augmenté deux fois plus vite que l'inflation et de façon subite et imprévisible. Alors, vous dites en fait: Il y a deux gros aléas sur lesquels on peut avoir une influence comme gouvernement: le premier, c'est les tarifs d'électricité et la disponibilité d'électricité; le deuxième, c'est la disponibilité de la fibre et donc de l'approvisionnement. Et vous dites aussi à la page 14, quand vous parlez des récentes décisions du gouvernement à l'effet de réduire de 20 % la possibilité forestière: «...posent toute la question de l'approvisionnement». Et vous dites: «Cette réduction en vigueur pour trois ans est non seulement néfaste pour l'industrie, mais elle porte sa part d'incertitude, car nul ne sait si des réductions additionnelles ne seront pas décrétées en 2008. Comment justifier un investissement dans un tel contexte?» Je vous pose la question: Est-ce que vous pensez qu'une compagnie responsable, ne sachant pas ce qui lui pend au bout du nez, dans trois ans, au niveau de la disponibilité de la fibre, va procéder à un choix d'investir dans une usine comme Kénogami ou Alma?
M. Chevrette (Guy): Je pense que, si elle a la certitude d'approvisionnement, oui. Ça, c'est clair.
Mme Dionne-Marsolais: Mais ça, c'est qu'elle ne l'a pas, là, en ce moment. Donc, il faudrait le lui donner.
M. Chevrette (Guy): Qu'elle ne l'a pas. Si on lui donne le choix. Je vais vous donner un exemple. On parlait de consolidation. Si on lui permet, à l'intérieur des approvisionnements qu'elle a, de faire un choix d'investissement, il se peut qu'elle le fasse ? il se peut. Elle pourrait décider. Je vous donne un exemple théorique, là. Il se peut qu'il y ait une scierie, par exemple, qui a tant de mètres cubes et puis que, s'ils en ont deux puis ils décident d'en avoir une seule, ça leur donne une rentabilité additionnelle pour elle et que ça leur donne les copeaux nécessaires pour investir dans une nouvelle machine. Il est possible, mais c'est eux seuls qui peuvent faire les calculs. C'est pour ça que je parlais de la négociation d'un véritable contrat. Mais ça suppose aussi que le ministre qui a les pouvoirs permette une certaine consolidation qui leur permette de rentabiliser.
Vous ne demanderez pas à personne, à un individu d'aller risquer du capital s'il est à peu près sûr de le perdre. Mais vous aller lui demander par contre... vous pouvez négocier avec lui une certaine certitude, et, à ce moment-là, moi, c'est pour ça que je parlais de contrat bilatéral entre un gouvernement qui dit: Bon, bien, je te laisse ton approvisionnement, je te laisse tes droits hydrauliques, je vais te permettre une consolidation dans tel sens, est-ce que ça t'assure? C'est à la compagnie de dire: Oui, ça m'assure, et là je prends le risque d'investir. C'est pour ça que je disais que le gros fardeau, la grande décision... Le ministre a une grande décision à prendre, effectivement.
Mme Dionne-Marsolais: On comprend. Le ministre a une grosse décision, puis ce n'est pas facile. Puis on comprend votre message: l'industrie est dans une situation extrêmement difficile, et ça, c'est très vrai. D'autant que, on le sait, dans la dispute sur le bois d'oeuvre, cette entreprise-là, elle-même a payé des droits compensatoires. Si mes lectures sont bonnes, je pense que même ça atteint quasiment 200 millions de dollars, ce qui est énorme...
M. Chevrette (Guy): Je pense que c'est celle qui a le plus d'argent en fidéicommis.
Mme Dionne-Marsolais: ...ce qui est énorme. On peut espérer, un jour, que le gouvernement fédéral fera son travail et qu'on va les récupérer en tout ou en partie. Mais c'est une réalité. Par contre, nous, on doit aussi regarder à une certaine équité dans les décisions que l'on prend comme parlementaires.
Et vous avez parlé de concurrence tout à l'heure, et, moi, je trouve étonnant les propos au niveau de la concurrence puis je vais vous expliquer pourquoi. Vous avez là une des plus grosses entreprises de l'industrie des pâtes et papiers à la fois au niveau du papier journal et aussi peut-être pas la première au niveau des autres sortes de papiers, peut-être la deuxième pour ? je n'ai pas le mot en français, là, mais, dans un document du 1er juin, là, d'analystes financiers, là ? c'est du «uncoated groundwood», là. Ça inclut le «supercalendered grades», là, dont on a parlé ce matin pour Kénogami, là. Donc, ils sont au deuxième rang en termes de capacité. Ils sont très, très près des premiers, mais ils sont quand même...
Et ce que ce projet de loi là fait en fait, il charge 25 millions, à peu près sur quatre ans, à Abitibi-Consol par des redevances additionnelles. En contrepartie, si on reprenait les droits hydrauliques, tel qu'on l'a déjà discuté en commission parlementaire, il en coûterait 10 millions par an, de plus, à l'entreprise. Ça veut dire 40 millions par année pour quatre ans. Donc, 40 millions moins 25 millions, on demande ? c'est ça qu'on fait, là, avec le projet de loi n° 99 ? on demande aux Québécois d'assumer 15 millions au bénéfice d'une entreprise. C'est ça qu'on fait, là. Et, moi, je trouve que, si on prenait ce 15 millions là ? je vais vous l'expliquer, M. Chevrette, si vous ne comprenez pas mes chiffres ? si on prenait ce 15 millions là...
M. Chevrette (Guy): ...froncer les sourcils que je ne comprends pas, c'est parce que je ne suis pas d'accord.
Mme Dionne-Marsolais: O.K., d'accord, d'accord. Alors, si on prenait ce 15 millions là puis qu'on le mettait dans un fonds pour l'ensemble de l'industrie, il me semble qu'on pourrait aider l'ensemble de l'industrie. Je conviens que ce n'est pas beaucoup, mais ce que je dis, c'est que, si l'industrie au Québec a des problèmes et si un de ces problèmes, c'est l'approvisionnement ou les tarifs d'électricité, on pourrait peut-être aider l'ensemble de l'industrie, peut-être qu'on pourrait mettre ce crédit de 15 millions là à l'ensemble des tarifs d'électricité de l'industrie des pâtes et papiers.
Je partage votre lecture qu'un contrat entre l'entreprise et le gouvernement serait préférable pour répondre spécifiquement aux difficultés de cette entreprise-là. Par contre, dans ce contrat-là, il faudrait que le gouvernement récupère au moins ses droits hydrauliques, sinon que les revenus attendus de l'exploitation de ces droits hydrauliques là servent au développement de la région.
M. Chevrette (Guy): Mais, à moins que je ne comprenne rien ? ce qui me surprendrait ? c'est qu'il y avait des droits hydrauliques d'octroyés à ACI dans la loi n° 8. À mon point de vue, le gouvernement pouvait, il n'était pas obligé. Je donne le raisonnement complet, là. Donc, vous n'auriez même pas pu manifester votre principe ou votre vision à vous si M. le ministre n'avait pas déposé la loi n° 99, et ACI continuerait à bénéficier des mêmes avantages et à subir les mêmes pressions pour respecter ses engagements. Vrai ou faux? Donc, à partir de là, en quoi, si, comme gouvernement...
Mme Dionne-Marsolais: Ce n'est pas, M. Chevrette, parce qu'ils ont fermé une usine.
M. Chevrette (Guy): Non, non, je m'excuse, à l'article 9 de la loi n° 8, là, je la lis ? puis j'en ai interprété pendant 25 ans, des lois, ici ? quand un ministre...
Mme Dionne-Marsolais: De la loi n° 8?
M. Chevrette (Guy): ...quand un ministre peut, il ne doit pas nécessairement, O.K.? Disons que c'est ça que dit l'article 9 de la loi n° 8. Je peux vous la lire en toutes lettres.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, oui, d'accord, le ministre «peut».
n(14 h 50)nM. Chevrette (Guy): Outre les cas de réalisation sans formalité ni indemnité que pourra prévaloir le bail, celui-ci pourra être ainsi ? pourra. Il aurait pu, mais il n'est pas obligé. Donc, on n'aurait pas pu s'exprimer là-dessus si on n'avait pas décidé de faire une loi.
À partir de là, un gouvernement ? c'est son droit ? peut demander de plus grandes obligations. Moi, je suis venu lui dire: si vous en demandez plus que la loi n° 8 n'en avait, vous risquez de ne pas atteindre votre objectif de maintenir Kénogami en vie. Il faut peut-être plutôt négocier des avantages qui lui permettent de garder Kénogami en vie puis de peut-être arriver avec un investissement. Mais il faut bien savoir que tu ne demandes pas à quelqu'un de te faire des cadeaux non plus, donc qu'il... avoir un espoir de rentrer dans ses investissements. Voyons, c'est le minimum dans l'affaire.
Deuxièmement, en quoi je crée un préjudice à quelqu'un? On ne demande pas du même coup, par exemple, à Domtar, à Kruger, à n'importe qui. Si tu ne leur demandes pas d'investissement, à eux, tu ne leur crées pas de préjudice. Si tu demandes un investissement à quelqu'un qui a un droit en compensation de ce droit, bien, là, c'est un contrat d'affaires. Ce n'est pas un privilège plus qu'à un autre, à mon point de vue. Moi, je vais dire à Mme Marsolais: Si tu investis une machine, je te donne des droits hydrauliques puis à tant de redevances, puis je te signe un contrat en bonne et due forme, puis mon obligation, c'est de faire face à mes redevances qu'on me charge et puis au contrat que j'ai signé, faire face aux obligations du contrat. Est-ce que je nuis aux autres compagnies? Non. Est-ce que j'ai un privilège? Non, parce qu'il y a un échange de privilèges qui fait en sorte que c'est un contrat d'affaires et non pas, pas du tout, un avantage au détriment d'un autre. L'autre n'a pas l'obligation d'investir, alors que vous lui créez l'obligation d'investir. Et c'est ça, je trouve, qui est un faux débat, de dire qu'il y a un... Puis ce n'est peut-être probablement pas ça que vous avez dit non plus, mais, moi, je l'ai entendu et je trouve que, ceux qui disent que c'est un privilège, c'est faux.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. On convient que ce n'est peut-être pas un privilège si l'entreprise ou l'entité avec laquelle on négocie et on signe livre la marchandise. Le projet de loi n° 8 était à l'effet qu'il ne fallait pas fermer d'usine, moyennant le maintien de ces droits-là. La première partie du contrat a échoué parce qu'on a fermé l'usine. Et, plus que ça, aujourd'hui, on vient nous demander de ne pas retirer les droits hydrauliques mais de donner une augmentation de charges, qui dans les faits est peut-être un avantage, dépendant comment on le calcule.
J'ai beaucoup de difficultés à vous suivre dans votre raisonnement au niveau de la concurrence, parce que la seule raison pour laquelle vous pouvez dire que ça ne pénalise pas les concurrents, c'est que ces droits hydrauliques là historiquement ont toujours été accordés à Abitibi-Consol. Alors, ce qu'on fait avec cette loi-là puis ce qu'on fait aujourd'hui, avec le projet de loi n° 99, c'est de continuer ce qu'ils ont déjà. On ne leur donne pas de l'argent, on leur donne les droits hydrauliques. Ce n'est pas pour rien que, dans les avantages secrets ou cachés de cette entreprise-là, on parle de sa valeur de l'énergie hydroélectrique, parce que ça vaut cinq fois ce que les autres paient. Alors, c'est sûr que ça vaut quelque chose. Mais, cela dit, ces avantages-là qui sont donnés, ce sont tous les Québécois finalement qui les assument, parce que, si on leur vendait au tarif L l'équivalent de cette énergie-là, bien on aurait plus d'argent, Hydro-Québec, dans le trésor québécois.
Moi, il y a une chose qui me préoccupe dans la position de l'entreprise, puis j'aimerais connaître votre opinion comme Conseil de l'industrie là-dedans. Quand une usine ferme, que ce soit Chandler, que ce soit Port-Alfred, cette entreprise-là ? et même Smurfit-Stone aussi ? refuse de vendre l'édifice, l'usine à des tiers qui sont dans des secteurs concurrents, mais, s'ils ne sont pas capables, eux, de faire de l'argent, pourquoi ils auraient peur que des concurrents reprennent leur usine puis fassent plus d'argent qu'eux? Vous ne trouvez pas que c'est curieux?
M. Chevrette (Guy): Là, on a tous de quoi à dire, les trois.
Mme Dionne-Marsolais: Bon, bien, je vous écoute.
M. Chevrette (Guy): Bon. Premièrement, madame, quand Hydro-Québec participe à un projet, par exemple, de cogénération avec l'argent des actionnaires que sont tous les Québécois, qu'ils mettent 20 millions dans le projet, trouvez-vous ça correct, vous? Pourtant, ça se fait quotidiennement, ça, ces affaires-là. Quand il y a eu les contrats par le passé, d'énormes contrats qui ont été signés avec la participation ou d'une société d'État, c'est de l'argent des Québécois. On crée une obligation collatérale, d'autre part, d'investissement.
Mme Dionne-Marsolais: Mais qui n'est pas respecté. C'est ça, mon point.
M. Chevrette (Guy): Oui, mais ça, c'est une autre affaire, ça, madame.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais c'est ça, la question.
M. Chevrette (Guy): Oui, mais il faut écouter la preuve. Est-ce que vous avez eu la preuve que ce n'était pas respecté à date? Est-ce qu'Abitibi-Consol...
Mme Dionne-Marsolais: Bien, si c'était respecté, on n'étudierait même pas le projet de loi n° 99.
M. Chevrette (Guy): Je m'excuse, 200 millions à Alma, là, c'est-u de l'argent, ça? Saint-Prime, l'investissement dans le milieu pour maintenir de l'activité économique? Ils vont vous répondre là-dessus. Moi, je ne répondrai pas à la place de la compagnie, là. Mais, si on veut qu'ils respectent un engagement, ne prenons-nous-en pas au principe, parce que le principe, à mon point de vue, si tu leur demandes d'investir, c'est précisément parce que... Si tu leur crées une obligation d'investir, c'est parce que tu leur donnes un avantage en contrebalance, et ça, je pense que ça se respecte, ça. Et ça, c'est une base d'affaires et c'est pour ça que je parlais...
Mme Dionne-Marsolais: Mais ça se respecte dans les deux sens.
M. Chevrette (Guy): Oui, je sais que ça se respecte dans les deux sens, madame, mais il faut donner la chance à l'individu touché, en l'occurrence c'est une industrie, à vous faire la démonstration qu'ils n'ont pas respecté d'abord. Ils n'ont pas encore passé.
Mme Dionne-Marsolais: Ils ont fermé l'usine de Port-Alfred. Ce n'est pas moi qui l'ai fermée, cette usine-là.
M. Chevrette (Guy): Ils ont fermé l'usine de Port-Alfred. Oui, ils ont fermé l'usine de Port-Alfred.
Mme Dionne-Marsolais: C'est dans la loi.
M. Chevrette (Guy): Oui, mais, dans la loi n° 8, il était dit que le ministre pouvait intervenir, il n'était pas obligé. Il aurait très bien pu. Tout le monde est désolé de la fermeture de Port-Alfred. Ils vont venir vous dire qu'ils cherchent puis ils travaillent même avec votre collègue de gauche à trouver un projet alternatif. Ça, je le sais, moi.
Deuxièmement, ils ont créé une industrie à Saint-Prime. Oui ou non? Dans le milieu, ils ont investi 200 millions à Alma. Regardez le tout, jugez du tout. En tout cas, vous ne viendrez pas me faire dire que cette compagnie-là n'a pas fait des efforts dans le Saguenay? Lac-Saint-Jean, pour maintenir des activités économiques...
Mme Dionne-Marsolais: Ce n'est pas ça qu'on dit.
M. Chevrette (Guy): ...extraordinaires et de l'emploi. Et qu'elle est encore prête à le faire mais sur une base de sa capacité de faire. Ne demandez pas de faire des cadeaux, là. Il n'y a pas personne qui fait des cadeaux. Il y a un bout que Pierre veut ajouter.
M. Vézina (Pierre): Bien, oui, je pense qu'il y a certains éléments qui ont été apportés. Effectivement, dans un contrat, il faut regarder l'ensemble. Il y a déjà une partie qui a été rencontrée, je pense, puis Abitibi-Consol vous fera cette démonstration-là.
Maintenant, du côté du prix de l'électricité, je vous mentionnerais qu'effectivement... Bon. Les calculs semblent donner un bénéfice de l'ordre de 10 à 12 millions de dollars. Maintenant, le retrait des droits puis l'approche que vous suggérez par rapport aux 15 millions, il faut faire bien attention. Si on retire les droits de ces usines-là et qu'on suppose qu'elles sont toujours en opération, bien ce qu'on va faire aux Québécois, c'est qu'on va leur demander de payer 17 millions de plus par année. Parce que ce que ça va faire, c'est qu'Hydro-Québec va être obligée de les alimenter pour les 70 MW supplémentaires au prix du marché actuel. Alors, on paie vous avez mentionné tantôt 44 $ du mégawattheure. Bon. De façon plus juste, dans l'industrie, on parle de 39 $, mais le coût d'approvisionnement de cette énergie-là, actuellement il est à 80 $ puis 85 $ du mégawattheure. On a atteint maintenant le 165 TWh de l'énergie patrimoniale. Donc, il faut aller chercher cette énergie-là à la marge, et, à la marge, elle va coûter 17 millions de plus à l'ensemble des consommateurs. Ça, c'est «basic», excusez-moi.
Mais, en plus de ça, vous avez mentionné le problème de compétitivité, de fermeture d'une usine. Pourquoi est-ce qu'on ferme des usines? C'est parce qu'on est en surcapacité de production. Est-ce qu'Abitibi-Consol devrait donner l'opportunité à un autre de venir ouvrir une usine qui va lui faire compétition? Ce que ça va donner dans le marché rajouter 200 000 tonnes à un marché qui est déjà en trop grande capacité de production, bien c'est tout le monde qui va souffrir, on va simplement rebaisser les prix. Ce qu'on demande en général dans le marché ou ce qu'on observe dans le marché, c'est que les principaux, les gros joueurs, c'est eux qui font le ménage. Excusez, elle est plate à prendre, là, mais c'est un peu comme ça que ça se fait puis c'est exactement ce que Smurfit-Stone vous a mentionné. On a des problèmes de marché, hein? C'est sûr que ce n'est pas la petite entreprise qui a deux ou trois usines qui est capable d'en fermer une. L'effet sur l'ensemble de ses actifs serait tout à fait dévastateur, alors qu'il l'est sur une grosse, même comme Abitibi-Consol. Mais il reste que ça permet quand même de maintenir le prix du papier dans le marché.
n(15 heures)n Mais, l'Amérique du Nord, et il ne faut pas se faire d'illusions, le papier journal actuellement est en décroissance.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais vous conviendrez qu'ils ne font pas seulement du papier journal.
M. Chevrette (Guy): Non, non, c'est...
M. Vézina (Pierre): Non, non, c'est certain.
M. Chevrette (Guy): Non, c'est diversifié, effectivement.
M. Vézina (Pierre): Mais on comprendra également que c'est extrêmement difficile d'entrer dans le marché, avec même une nouvelle machine de 200 000, 250 000 tonnes, dans un marché qui est déjà relativement saturé.
Alors, la difficulté qu'on connaît, est-elle structurelle ou conjoncturelle? Bien, les spécialistes tergiversent encore sur cette question-là, mais on aura besoin d'attendre probablement encore un petit peu avant d'avoir, je dirais, de meilleures certitudes sur l'avenir dans le secteur.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, messieurs du Conseil de l'industrie forestière du Québec, MM. Chevrette, Vincent et Vézina. Le temps est terminé. Merci d'être intervenus à cette commission...
M. Chevrette (Guy): Ça nous a fait plaisir.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): ...et bon retour.
J'inviterais maintenant les gens de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et syndicats affiliés à venir se présenter à la table.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Bonjour messieurs. Je n'aurai pas à vous rappeler que votre temps alloué est de 20 minutes et de 40 minutes pour les échanges. J'aimerais maintenant que vous vous présentiez et présentiez vos accompagnateurs.
Fédération des travailleurs et travailleuses
du Québec (FTQ) et syndicats affiliés
M. Massé (Henri): À ma droite, c'est Serge Cadieux, SEPB et vice-président de la FTQ. À ma gauche, à l'autre bout, c'est Robert Demers, service de recherche de la FTQ, et, à ma droite, Clément L'Heureux, président du SCEP au Québec et vice-président de la FTQ. On voudrait d'abord vous remercier de l'opportunité de se faire entendre et on va essayer de vous faire ça assez brièvement. Ce n'est pas un projet de loi tellement compliqué, hein? Bon. Et je peux vous dire qu'on ne fera pas les jars ici non plus, aujourd'hui.
D'abord, je veux vous dire que la FTQ est assez divisée sur ce projet de loi là ? c'est assez rare que ça nous arrive ? divisée parce que, le monde de la région là-bas, nos syndicats en général, là, si on les avait écoutés, on n'aurait pas été capables de se présenter ici, avec la position qu'on va avoir aujourd'hui. Maintenant, à la FTQ, on prend nos responsabilités puis des fois, bien, on va un peu au-delà de nos mandats. On travaille pour les travailleurs et les travailleuses d'Abitibi-Consol puis, au nom de leurs emplois, et on est venus ici, pour appuyer le projet de loi. Ce n'est pas avec un grand enthousiasme, je vous le dis d'abord. Si on avait eu bien du temps devant nous, peut-être que ça aurait été une autre position qu'on aurait prise, mais c'est clair qu'on ne veut pas être les fossoyeurs des emplois dans la région, et on veut alléger le fardeau de ceux et celles, là, qui vivent des moments assez angoissants par les temps qui courent.
Et il faut rappeler que la situation dans l'industrie forestière est extrêmement difficile, et c'est pour ça qu'on va appuyer le projet de loi mais avec quelques bémols. Il faut rappeler aussi que le projet de loi n° 99 ne modifie pas selon nous, de façon substantielle, le projet de loi n° 8. Si on se trompe, vous nous le direz. On pense que le gouvernement conserve toujours son droit de reprise des installations d'Abitibi-Consol. Bon. Droit théorique, mais droit qui peut s'exercer. Chez nous, souvent on dit: Quand on est devant une vitrine puis on n'aime pas le gars en face, si on a une roche, on aime mieux la garder. Une fois qu'on a pété la vitrine, on n'a plus bien, bien le moyen de... Bon. Le projet de loi, à l'heure actuelle, qu'on a devant nous, je pense qu'on a encore la roche, puis on est encore capables de menacer Abitibi-Consol de faire des affaires comme elle devrait le faire. Et, dans notre mémoire, on revient sur la situation difficile dans l'industrie forestière, la hausse du dollar, la hausse du coût de l'énergie, la chute de la demande dans les pâtes. On a parlé de surproduction aussi et on peut parler de l'importance, chez nous, que prend l'industrie forestière, et le ministre va nous entendre de plus en plus à l'automne, là.
C'est une industrie qui représente 300 usines de sciage, 63 usines papetières, c'est dans 250 villes, villages au Québec, ça représente 150 000 emplois directs et indirects, et on croit à cette industrie-là. On pense que c'est extrêmement important pour le développement de l'économie régionale. La situation financière chez Abitibi-Consol, bien on ne s'étendra pas là-dessus, mais on en traite assez largement dans notre mémoire. On ne s'étendra pas là-dessus pas parce que ce n'est pas important, mais j'ai l'impression qu'Abitibi-Consol va s'étendre assez là-dessus qu'on n'est pas obligés de le faire. Mais c'est une situation financière ? à peu près tous les spécialistes le disent ? qui est en difficulté. Ça fait qu'on est d'accord avec le ministre pour sauver les emplois de Port-Alfred. Et je voudrais vous lire quelques pages... Excusez, Kénogami.
Je voudrais vous lire quelques pages là-dessus, là, dans notre mémoire, sur les raisons exactes, là. Cette perte, là, risquerait donc de mettre en difficulté d'autres usines dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Et l'objectif est d'encourager les entreprises à rouvrir des usines de pâtes et papiers ? Port-Alfred ? ou d'effectuer des investissements structurants et créer des emplois de façon à compenser pour les emplois perdus. La cessation de la location des forces hydrauliques n'aurait pas permis cet encouragement ou cet incitatif. Nous voyons là pour Abitibi-Consol une obligation de résultats en termes de maintien et de création d'emplois. Ces résultats doivent être quantifiables avec des objectifs précis en termes d'investissement et d'emplois. Nous croyons que les travailleurs et les travailleuses d'Abitibi-Consol doivent être associés au suivi de la réalisation des objectifs qui seront fixés. Les gens de la région et leurs élus tant de la Conférence régionale des élus que des municipalités régionales de comté doivent également pouvoir être associés à cet exercice dont nous exigeons la plus grande transparence, mais on dit que c'est un projet de loi à parfaire.
Premier constat, qui est de taille: nous ne possédons aucun chiffre sur les montants des redevances additionnelles. On avance le chiffre de 30 millions, là, mais on n'a pas de chiffre précis là-dessus et nous savons qu'Abitibi-Consol économise entre 10 et 15 millions par année, avec ses installations, en regard de ce qu'elle aurait payé au tarif L d'Hydro-Québec, alors qu'il y en a plusieurs qui se battent même pour avoir juste le tarif L. Sur 10 ans, nous croyons qu'il s'agit là d'une aubaine en or pour Abitibi-Consol, surtout si on compare nos tarifs avec les tarifs ontariens.
n(15 h 10)n Ça fait qu'avant d'obtenir quelque réduction sur les redevances additionnelles quelles obligations Abitibi-Consol devra-t-elle rencontrer, quels résultats devra-t-elle atteindre? Il n'y a rien à cet effet dans le projet de loi, puis on voudrait qu'il y ait des objectifs très clairs à cet effet-là. Nous ne savons pas non plus l'état des efforts réalisés par Abitibi-Consol pour atteindre les 390 millions d'investissement prévus à la loi n° 8. Et si Abitibi ne rencontrait pas ces objectifs qui seront établis? Dans la situation financière actuelle, faudrait-il pour le moins provisionner un éventuel manque à réaliser sur ces investissements promis? Nous croyons que ces montants devraient être inscrits comme des montants à faire valoir sur les installations d'Abitibi-Consol que le gouvernement pourrait reprendre à leur valeur aux livres afin de permettre à un investisseur de profiter tant des installations que des ressources forestières de la région.
En gros, c'est notre mémoire. Puis on finit avec une citation d'un ancien ministre des Terres et Forêts du Québec qui disait: «La province a substitué au régime des ventes autrefois en honneur celui des baux emphytéotiques. Elle loue ses forces hydroélectriques pour une période de 25 à 99 ans, le preneur s'engageant à exécuter certains travaux, à payer une rente annuelle et autres redevances qui peuvent lui être réclamées. Le baillé ou concessionnaire qui remplit ces diverses obligations devient, pour la durée du bail, le seul propriétaire à toutes fins pour la chute d'eau. Cependant, à l'expiration du bail, le bailleur reprend possession non seulement de la propriété, mais aussi des constructions qui y sont édifiées. Il peut donc bénéficier de toutes les améliorations qui ont été accomplies, à moins qu'il ne veuille louer à nouveau la propriété.» Et de conclure: «C'est pour ces motifs que dans le passé j'ai exigé et que je continuerai à l'avenir d'exiger que chaque concession de privilège effectuée par le ministère des Terres et Forêts comporte le dépôt pour le concessionnaire d'une somme suffisamment élevée comme garantie que seront exploitées les richesses qui font l'objet de la concession. C'est, croyons-nous, travailler non seulement dans l'intérêt des industriels, des manufacturiers, mais du public lui-même.» Ça fait que c'est un vieux ministre des Terres et Forêts. C'est l'honorable Honoré Mercier qui a fait cette déclaration-là en 1923. Ça fait qu'on pense qu'elle est d'actualité aujourd'hui, puis on doit avoir des engagements clairs, au niveau de ce projet de loi là, d'Abitibi-Consol puis des façons de le faire exécuter.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous avez terminé, M. Massé?
M. Massé (Henri): Oui.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre qui veut intervenir?
M. Massé (Henri): Ça va.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça va? M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Massé, M. L'Heureux, messieurs, merci de votre appui, même si vous le mettez conditionnel. Je pense que votre approche est constructive. Elle démontre un sens des responsabilités, dans ce dossier, assez grand, assez grand pour l'ensemble des travailleurs du secteur non seulement des pâtes et papiers, mais aussi de la forêt pour la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean puis pour les autres installations de la compagnie au Québec. Je dis «pour les autres installations de la compagnie au Québec» parce qu'elle a des ramifications à peu près partout au Québec, sur la Côte-Nord, dans le Nord-du-Québec, dans l'Abitibi-Témiscamingue et le Saguenay? Lac-Saint-Jean, bien entendu. Et je pense qu'il faut regarder ça pas nécessairement en silo, par entreprise, par unité de production ou par installation puis pas juste par région non plus, mais pour l'ensemble.
Vous avez effectivement raison quand vous avez tantôt demandé si les dispositions prévues à la loi n° 8 demeurent et pourraient s'appliquer. Oui, c'est ça. C'est le cas. Maintenant, en ce qui concerne votre mention à l'effet de projet de loi à parfaire ? on avance le chiffre de 30 millions ? c'est entre 25 millions et 30 millions de dollars à terme, tout dépendant de la quantité d'énergie consommée ou produite, tout dépendant aussi de l'inflation, parce qu'on parle de dans le temps. On parle aussi d'une augmentation graduelle des taux ou de la redevance comme telle. Si on arrivait d'une façon immédiate, ce serait une charge d'environ 10 millions de dollars, 10 millions de dollars, là, estimés avec une assez grande précision. Et je pense que vous avez raison quand vous dites que c'est un coût qui pourrait être important pour l'entreprise et qui pourrait menacer d'autres installations.
Maintenant, est-ce que vous verriez une autre façon de faire? Est-ce que vous avez envisagé, même si vous dites que le temps qui vous a été imparti pour vous faire une opinion sur le sujet était court, est-ce que vous auriez d'autres suggestions à nous faire que cette façon de faire?
M. Massé (Henri): Moi, je n'en aurais pas à soulever aujourd'hui, à moins que je passe la parole à Clément après, mais je peux vous dire que, dans la région, là-bas, il y a une série de solutions qui étaient envisagées. Mais, les unes après les autres, dans une situation de crise telle qu'on est puis d'urgence telle qu'on est, bon, la grange aurait le temps de passer au feu, puis on serait encore en train de discuter. Mais je vais passer la parole à Clément.
M. L'Heureux (Clément): Bien, nous, M. le ministre, comme vos propos le disaient au début puis comme on a mentionné aussi, là, ce que vous avez déclaré au mois de juin, c'est la sauvegarde des emplois. Mais qu'est-ce que c'est qui serait possible pour sauvegarder les emplois et principalement ceux de Kénogami? Parce que, si on regarde la région, à l'usine d'Alma, il y a eu des investissements. C'est peut-être moins en danger. Ce qui est en danger à l'heure actuelle, c'est l'usine de Kénogami et ce qui découle de l'usine de Kénogami, les usines de sciage puis tout le processus, là. On parle des exploitations forestières. C'est tout ça qui est en danger.
Alors, ce qu'on a commencé à regarder ? puis on n'a pas terminé, comme vous le disait Henri ? c'est de dire: Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour obliger ACI à investir dans l'usine de Kénogami? C'est ça, le point important, parce que tout passe par l'investissement. Alors, est-ce qu'on peut mettre quelque chose dans le processus? Est-ce qu'on pourrait mettre quelque chose dans le projet de loi qui nous amène à un investissement d'ACI à Kénogami? C'est ça qu'on n'a pas eu le temps de terminer, parce qu'on savait qu'il y avait des discussions avec le gouvernement, avec les gens de la région, et on ne voulait pas venir mettre du sable, là, si on veut, dans l'engrenage. Mais pour nous la sauvegarde des emplois, qui nous fait, aujourd'hui, se prononcer en faveur du projet, passe par un investissement d'ACI à Kénogami. Et comment le faire puis comment l'amener à l'intérieur du projet de loi, là, ça nous semblait un peu plus compliqué puis un peu plus difficile. Mais notre objectif premier, c'est de faire en sorte que cette compagnie-là mette des argents dans l'usine de Kénogami.
M. Corbeil: Merci. Le projet de loi est le cadre en définitive qui nous permettrait ou nous permettra peut-être de le faire. Le règlement qui va rentrer en vigueur suite à l'adoption du projet de loi pourrait stipuler ça. Mais vous semblez vouloir associer ça directement à une installation de la compagnie dans une région. Je suis d'accord avec vous qu'il y a une précarité, là, puis qu'il faut avoir une plus grande sensibilité puis une plus grande ? comment je pourrais... Il y a une urgence d'agir à ce niveau-là, on pourra en convenir.
Est-ce que vous pensez que ces redevances graduelles là sont suffisamment incitatives? Et, le fait qu'elles peuvent revenir à la normale après un investissement majeur, est-ce qu'on doit strictement le rattacher à ce projet-là ou si on doit le rattacher à des projets d'investissement et de création d'emplois dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean?
M. L'Heureux (Clément): Écoutez, nous, là, quand on regarde les actifs d'ACI au Saguenay?Lac-Saint-Jean, on pense qu'on doit les rattacher à l'usine de Kénogami parce que, comme j'ai dit tout à l'heure, les usines de sciage, ça demande moins d'investissement pour conserver les emplois. Mais là où on a besoin le plus d'investissement, qui fait en sorte que cette région-là va continuer à profiter des avantages de ses ressources naturelles, c'est de faire en sorte qu'on ait des investissements là où c'est le plus important, et, pour nous, là où est le plus important, c'est Kénogami. Parce que, comment qu'on mettra des argents dans les usines de sciage, puis ça ne veut pas dire qu'on va conserver l'usine de papier et ça ne veut pas dire qu'on va conserver ces usines de sciage là même par après. Parce que, vous savez, les emplois ? puis, nous, c'est notre préoccupation première, les emplois ? c'est dans la transformation de la matière première qu'ils sont. Ça fait que la première transformation, le sciage, ça crée des emplois, oui, mais le papier, ça en crée aussi davantage.
Donc, pour nous, c'est important, puis on tient compte aussi de la situation actuelle. L'usine d'Alma selon nous a déjà eu des investissements puis en demande moins. Ça en demande moins dans le sciage, malgré la conjoncture actuelle. Là où on en a besoin, pour qu'ACI puisse payer, si on veut, ses redevances, parce qu'elle va chercher des ressources naturelles, pour nous, c'est l'usine de Kénogami.
n(15 h 20)nM. Corbeil: Est-ce que vous lieriez ça, vous jumelleriez ça strictement au nombre d'emplois actuel à Kénogami ou si vous mettriez un coefficient de création d'emplois plus grand? Et est-ce que vous lieriez ça encore une fois strictement à l'investissement requis pour remettre Kénogami sur la voie de la pérennité, si on veut, ou si vous iriez à un montant ou à des investissements plus importants?
M. L'Heureux (Clément): Quand vous parlez...
M. Corbeil: Parce que, là, vous attachez ça au projet de Kénogami, les redevances, qu'elles soient graduelles ou dégressives, si on veut. Alors, à partir du moment où on va les ramener au niveau où elles sont aujourd'hui, est-ce que vous pensez que le coefficient, le montant soit d'investissement ou soit de création ou de maintien d'emplois, doit être autour des effectifs qui sont à Kénogami et du montant d'argent requis pour remettre ces installations pour être opérables pour 25, 30 ans encore?
M. L'Heureux (Clément): Pour nous, là, c'est un tout. Comment qu'on mettrait 5 millions dans toutes les usines de sciage d'Abitibi, ça ne sauvera pas l'usine de Kénogami. Le montant d'argent qui est le plus important, mettons, si on regarde, là, les installations d'Abitibi au Saguenay?Lac-Saint-Jean, là où il y a besoin le plus de capital, c'est dans l'usine de Kénogami pour le moment. Alors, bien sûr qu'on le rattache à ça.
L'objectif premier, c'est de sauvegarder les emplois qu'on a actuellement à Kénogami. Ça, c'est l'objectif premier. Bien sûr qu'en contrepartie de ça, ça va garder des emplois dans le sciage, parce qu'il faut qu'il y ait des copeaux puis il faut qu'il y ait des choses. Ça fait qu'on ne peut pas séparer les deux. Les investissements créent les emplois, puis les emplois sont créés par les investissements. Ça fait qu'on peut le mettre... Mettons, je ne sais pas, moi, si Abitibi-Consol a 5 000 emplois au Saguenay?Lac-Saint-Jean, moi, je pense qu'on dit: Le fait d'investir 200 millions ou 300 millions à Kénogami va sauvegarder ces 5 000 emplois là au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Les deux vont ensemble.
M. Corbeil: O.K. Donc, à partir du moment où l'entreprise aurait fait ces investissements-là, aurait consolidé ces emplois-là, vous convenez que les redevances devraient être ramenées au taux actuel pour la durée du bail qui resterait.
M. L'Heureux (Clément): Oui.
M. Corbeil: O.K.
M. Massé (Henri): Ah, vous pouvez toujours en demander un peu plus. Vous pouvez toujours en demander un peu plus.
M. Corbeil: Pardon?
M. Massé (Henri): Vous pouvez toujours en demander un peu plus. Et, un projet de règlement, on va vous en faire parvenir un.
M. Corbeil: C'est beau. Je ne sais pas si mes collègues ont des questions.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Roberval.
M. Blackburn: Juste peut-être pour faire un petit bout de chemin sur ce que le ministre vient de dire et la réponse de M. L'Heureux. Parce que, lorsque Port-Alfred a été fermée de façon définitive et que le gouvernement, de par l'entremise de Pierre, a déposé les orientations qu'on tenait en termes de compensation sur les dividendes qui étaient versés, on parlait, à ce moment-là, de ramener un projet important qui pourrait bénéficier de ces sommes d'argent là qui seraient réinvesties dans la région ? alors on parlait, à ce moment-là, de 500, 600 emplois ? qui pourrait être un projet intéressant, dans lequel les dividendes perçus pourraient être réinvestis.
Vous, ce que vous nous dites, il n'y a pas de nombre, là. Actuellement, il y a 450 emplois à Kénogami. S'il y a un investissement qui est fait et qu'on consolide les 450 emplois qui sont là, les redevances pour les compensations perçues pourraient être investies là, et ce serait assez. Donc, on perd les 640 emplois de Port-Alfred et on n'en parle plus, là? C'est ce que je comprends.
M. L'Heureux (Clément): Écoutez, moi, là, je ne connais pas le dossier de Port-Alfred, je ne connais pas l'état du dossier de Port-Alfred. Je le prends au niveau régional et je ne me prononce pas, là, sur un futur pour l'usine de Port-Alfred. Je le prends régional, sur ce qui se situe à l'heure actuelle.
M. Blackburn: Ça ne concernait pas le futur de Port-Alfred, ça concernait un éventuel projet majeur d'investissement dans la région qui permettrait de ramener à un niveau d'emploi acceptable. On parle des 600 emplois qui ont été perdus. Si on a un projet qui recrée 600 emplois, bien les compensations peuvent être investies dans ce projet-là.
M. L'Heureux (Clément): Écoutez, on connaît l'état de l'industrie forestière à l'heure actuelle. Penser qu'on peut créer 600 emplois dans l'industrie forestière ou papetière au Saguenay?Lac-Saint-Jean, avec ACI, je veux dire, écoutez, je n'y crois pas, là, présentement. Puis, écoutez, c'est ça qui fait qu'on prend position comme ça, aujourd'hui. Si, l'industrie, on pense qu'on pourrait créer des emplois, on aurait, je pense, une vision différente. Moi, là, la position, chez nous, qu'on regarde, c'est de ne pas essayer de créer des emplois. Sauvegarder ceux qu'on a, c'est le grand défi qu'on a pour les prochaines années, dans l'industrie forestière et papetière. C'est là qu'on est. Moi, en tout cas je ne pense pas. Chez nous ? je ne sais pas, Henri ? on n'a pas regardé la création d'emplois, on a regardé la sauvegarde des emplois qu'on a actuellement.
M. Blackburn: Donc, moi, je suis un homme d'affaires qui pense de développer mon industrie, puis je regarde en avant, puis je tente d'être optimiste le moindrement. Vous, ce que vous me dites, il n'y a pas nécessairement de potentiel de développement autre que de consolider ce qui existe actuellement, sur le territoire.
M. L'Heureux (Clément): On fait la consolidation. Justement, quelqu'un qui est un homme d'affaires, puis j'espère qu'Abitibi le regarde comme ça, c'est qu'à l'heure actuelle c'est de prendre une usine comme celle-là, puis de l'amener dans des créneaux d'avenir, puis sauvegarder tout ce qui est là parce que l'industrie est dans une ère de transformation. L'industrie papetière ou forestière québécoise ne peut pas demeurer ce qu'elle est aujourd'hui. Il faut qu'elle se transforme, et la vision des hommes d'affaires, j'espère, au Québec, c'est de transformer l'industrie. Et notre souhait à nous, c'est que cette transformation-là de l'industrie forestière et papetière se fasse sans la perte d'emploi. Ça, c'est un gros défi.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Roberval, c'est bien?
M. Blackburn: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le ministre.
M. Corbeil: En fait, tantôt, il y avait des questions qui planaient en ce qui a trait aux retombées économiques des usines d'Abitibi-Consol dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Je pense que l'entreprise va sûrement, M. le Président, tantôt tracer le portrait. Mais, en ce qui a trait aux obligations qui étaient convenues dans la loi n° 8 actuelle, avec les investissements à être réalisés, les informations dont je dispose sont à l'effet qu'il y aurait, au moins depuis 1998, c'est-à-dire jusqu'à décembre 2004 ? c'est une période de sept ans ? il y a un montant de 550 millions qui a été investi dans cette région-là, à travers différents projets dont on a parlé ce matin, avec d'autres interlocuteurs.
Alors, de ce côté-là, je pense qu'il n'y a pas véritablement de défaut, puisque les montants prévus à la loi sont sur le point d'être rencontrés, si ce n'est pas déjà fait. Et non seulement ils sont rencontrés, mais aussi c'est la fermeture de Port-Alfred qui est un peu l'élément déclencheur, qui fait qu'on se retrouve ici, aujourd'hui. Alors, l'idée ? et je comprends très bien votre message ? l'idée, c'est de travailler, dans l'état et dans la situation actuels de l'industrie de la forêt, la transformation des produits du bois, papiers, pâtes et cartons, à consolider ces emplois-là, à les rendre durables, si on veut, pour 25, 30 ans. Et je comprends aussi votre message de cibler Kénogami. Merci beaucoup.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): C'est bien. Mme la députée de Rosemont, à vous la parole.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. Merci, M. le Président. Alors, moi aussi, je comprends votre message, mais je ne comprends pas que ce projet de loi là réponde à votre message, tel qu'il est libellé en tout cas, et c'est pour ça sans doute que vous dites qu'il est à parfaire. Vous dites d'un côté que vous appuyez le projet de loi et vous dites, à la page 9: «Il faudra être clair, il n'y aura pas de deuxième chance sans un véritable changement de comportement chez Abitibi-Consol. On n'est pas pour toujours faire les frais de leurs mésaventures financières et d'un style de gestion caractérisé par l'absence d'investissement pour le renouvellement de leurs moyens de production.» Bien, c'est la deuxième chance qu'ils ont eue avec le projet de loi n° 8.
Le projet de loi n° 8, rappelez-vous, c'était pour garder Port-Alfred ouvert et garder en fait les trois usines ouvertes, et c'est écrit, dans le projet de loi, noir sur blanc, là. Et donc, là, ce qu'on fait, on donne encore. Et je suis certaine qu'en 1999, quand le gouvernement a soumis cette loi-là à l'Assemblée nationale et que tous les partis l'ont approuvée, nous étions tous conscients que c'était une chance que l'on donnait à Abitibi-Consol. Et là donc on est rendu à la troisième chance. Et dans le passé cette entreprise-là, si on se rappelle bien ? et je suis certaine que plusieurs d'entre vous qui avez mon âge vous rappelez du comportement de l'entreprise...
M. Massé (Henri): C'est quoi, votre âge?
Mme Dionne-Marsolais: J'ai 58 ans...
M. Massé (Henri): Ah, c'est correct. O.K.
Mme Dionne-Marsolais: ...ça fait qu'on est dans le bracket, hein?
M. Massé (Henri): Je disais ça comme référence.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. Je retiens mon commentaire. Cela étant dit, si me je reporte à votre mémoire toujours, honnêtement, quand on regarde ce que cette entreprise-là a eu comme comportement et vis-à-vis de ses employés et vis-à-vis de l'ensemble du Québec, que ce soit à son usine de Chandler, que ce soit à Port-Alfred et maintenant, à Kénogami, où est-ce qu'elle vient d'annoncer, il y a quelques jours, un objectif de réduction de 2 % de ses coûts d'exploitation, moi, je ne comprends pas votre logique, si ce n'est que de dire que vous voulez conserver les emplois. Et, moi, je la partage, cette préoccupation-là.
n(15 h 30)n D'ailleurs, la seule raison pour laquelle on est ici, aujourd'hui, c'est qu'au Parti québécois on a demandé d'entendre les groupes parce qu'on trouvait que ça n'avait pas de sens de donner aux actionnaires d'Abitibi-Consol 15 millions sur quatre ans alors que l'entreprise ferme une usine, puis il y a 640 personnes qui perdent leur job puis qui n'ont même pas leur régime de retraite s'ils n'ont pas 65 ans. Moi, personnellement, ça me scandalise.
Cela étant dit, j'ai exercé, avec mes collègues, ici, une pression pour qu'on puisse entendre tout le monde. Et effectivement tout le monde nous dit: Ce projet-là, on n'est pas favorables ou il faut le parfaire. Même, vous, vous dites: Il faut le parfaire. Bon. Mais, tout à l'heure, on a entendu le Conseil de l'industrie forestière qui nous dit: On n'est pas d'accord avec ce projet-là, puis il n'est pas nécessaire. Une entente, un contrat aurait peut-être plus de poigne avec l'entreprise. Autrement dit, mon point, c'est: si ce projet de loi là ne garantit pas les emplois à Kénogami... Et, tout à l'heure, vos collègues de l'usine de Kénogami sont venus nous dire que ce n'est pas ce crédit ou cet avantage de 15 millions qui fait... C'est un minimum de 15 millions qui peut aller beaucoup plus que ça, là, selon des estimations et différentes hypothèses. Mais, si l'entreprise devait payer ces redevances, ce qui est encore à démontrer, mais, si elle devait payer ces redevances additionnelles du projet de loi n° 99, ça redonne quand même 15 millions d'avantages sur quatre ans aux actionnaires.
Et j'ai beaucoup de difficultés, moi, à comprendre pourquoi vous voulez appuyer ça, alors qu'on sait très bien que ce projet de loi là ne fait rien pour Kénogami, il ne fait rien pour assurer les emplois de Kénogami. Et convainquez-moi du contraire, là, parce qu'il n'y a pas d'engagements par lesquels il faudra tenir l'entreprise responsable de ce qu'elle a demandé au gouvernement. Parce qu'elle n'a rien demandé, elle a juste dit: Si je n'ai pas ça, je vais fermer. Elle va fermer quand elle ne fera plus d'argent. Les bilans d'Abitibi, vous les avez vus aussi bien que moi. Elle perd de l'argent depuis beaucoup de temps. Dans certaines usines, elle en fait. Elle ne fait pas d'investissement parce qu'elle a un problème de cash-flow. Son problème de cash-flow, à moins qu'il arrive quelque chose ou que... Ça peut arriver. Les miracles, ça arrive. Mais elle a un problème de cash-flow majeur. Alors, comment est-ce qu'elle va faire pour investir 500 millions à Kénogami, ce qu'elle doit faire si elle veut maintenir le niveau d'activité là? Moi, j'ai bien de la misère à comprendre ça. Et j'aimerais mieux m'asseoir avec elle puis faire un plan d'investissement pour cette usine-là que de dire: Bien, on va donner un petit bout là, puis on va faire ça, puis on va espérer. Vous le savez aussi bien que moi, ce n'est pas comme ça qu'on fait avancer les choses. Si on n'est pas obligé de faire quelque chose dans l'industrie, quand la solution la plus facile, c'est d'aller chez le voisin, on va chez le voisin.
Et, nous, comme parlementaires, notre objectif, c'est de s'assurer que c'est ici que ça se fasse parce que ces ressources hydrauliques là, elles valent cher pour Abitibi, elles valent très cher. Et ce n'est pas moi qui le dis, là, ce sont les analystes financiers qui ont pris les chiffres chez Abitibi.
Alors, moi, je repose la question: Comment pouvez-vous? Puis en plus vous dites, dans le cas d'Abitibi, là, à la page 6: Une augmentation des tarifs d'électricité ou du coût d'électricité «pourrait être le coup fatal». On va leur demander quand même 10 millions de plus par année. Après vous autres, ils vont venir nous dire que c'est bien trop, ça, ça n'a pas d'allure. Pas 10 millions, pardon, on va leur demander 25 millions sur quatre ans. Ils vont venir nous dire, tout à l'heure, que c'est une charge bien trop élevée. Ils n'ont aucun plan d'investissement. Ils ne nous ont même pas... J'espère que, tout à l'heure, ils vont nous déposer leurs projets d'investissement comme ils vont faire à leurs actionnaires éventuellement, j'imagine, ou aux conseillers financiers. S'il y a du monde qui achète des actions, ils doivent se baser sur quelque chose. Alors, j'aimerais ça vous entendre sur ça.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Massé.
M. Massé (Henri): Bon. Bien, d'abord, je peux vous dire qu'on partage votre frustration. Et d'entrée de jeu j'ai dit que notre monde dans la région était très déçu des promesses non remplies, puis tout ça, mais en même temps on est dans une situation d'urgence, puis c'est là qu'on dit que c'est un projet à parfaire.
Nous, on veut qu'il y ait des obligations très claires dans le projet de loi, pour qu'ils s'engagent. Sinon, qu'ils aient des pénalités puis que les montants des pénalités soient là. On est assez clairs là-dessus, là, mais en même temps on pense qu'on peut faire un grand débat de société à l'heure actuelle. Dans la situation où on est à l'heure actuelle, avec tout ce qui se passe dans l'industrie forestière, on peut faire un grand débat de société, mais les travailleurs puis les travailleuses de Kénogami en tout cas qui sont membres chez nous nous disent: Bien, attention, là, il faut travailler puis il faut travailler vite.
Ça fait que je vais demander à Clément de continuer la réponse.
M. L'Heureux (Clément): Sur le plan d'investissement que vous parlez, moi, je ne suis pas sûr qu'il y a un plan d'investissement puis je ne suis pas prêt à gager que, demain matin, Abitibi-Consol a les moyens financiers d'investir à Kénogami. En tout cas, je ne connais pas, là ? ce n'est pas moi qui dirige la compagnie ? je ne connais pas l'état de la compagnie. Mais je ne suis pas sûr à 100 %.
À l'heure actuelle, on est plus sur la volonté. La volonté d'ACI à l'heure actuelle, c'est de fermer des usines. C'est ça, la volonté ? puis on ne se cachera pas, là ? la volonté d'ACI. Puis ils l'ont annoncé, hein? Ils ont annoncé la fermeture de certaines usines à Terre-Neuve, puis des machines, puis en Ontario aussi. Puis, au Québec, on connaît... Quand vous parlez ? puis Henri dit: On partage votre frustration, ça fait des années qu'on est frustrés sur les décisions d'Abitibi-Consol, hein? ? vous avez parlé de Chandler, on peut vous parler de Wayagamack, on peut vous parler de plusieurs dossiers qu'on a eus avec ACI. Mais, ce qu'on dit aujourd'hui, on le dit par rapport à la situation de l'industrie en général et d'ACI, parce que la situation de l'industrie puis celle d'Abitibi-Consol, d'après nous c'est la même situation à l'heure actuelle.
Et, si on regarde, à l'heure actuelle, cette position-là de l'industrie, dans quel état ils sont présentement, on peut essayer de faire l'autopsie, puis ça dépend de quoi. On est bons là-dedans, on est capables de lancer des roches, hein, on est capables, mais présentement on se doit de faire d'autre chose, on se doit de sauvegarder les jobs. Et je pense qu'à l'heure actuelle, si on faisait en sorte de faire en sorte que l'énergie coûte plus cher pour produire du papier à Kénogami, c'est nous-mêmes qui accélérerions le processus de virer la clé puis de mettre la clé dans la porte. Donc, on ne peut pas se permettre ça, c'est ça qu'on dit. Quand on parle, là, de l'état actuel, c'est qu'on dit: On ne peut pas se permettre ça.
Comment faire maintenant, compte tenu de la situation de l'industrie, la situation d'ACI? Comment on fait ça aujourd'hui, pour dire que le gouvernement doit se donner une poignée pour le futur? Parce qu'il va y en avoir un, futur, un coup qu'on va avoir fait nos devoirs. Moi, je suis convaincu qu'il va y avoir un futur. Comment on fait ça? Bien, on pense que, là, le projet de loi peut être, dans le bon sens, un élément qui va obliger, dans le temps, des compagnies comme celle-là d'investir dans leurs actifs pour sauvegarder les emplois. C'est ça qui est notre défi. Si on n'avait pas ce défi-là ? c'est la seule chose qui nous fait dire: Oui, il faut y aller dans ce sens-là ? sans ça, si on n'avait pas ce défi-là, on serait bien loin d'ici. Ce qu'on dirait, on dirait: Écoutez, chargez le plein tarif, puis qu'ils paient pour ce que c'est qu'ils prennent. Mais ce n'est pas ça, la situation. Les hommes puis les femmes qui travaillent à l'usine de Kénogami, aujourd'hui, après avoir vu ce qui se passe à Port-Alfred qui est à côté, puis après avoir vu ce qui se passe à Chandler, puis après avoir vu ce qui a failli se passer à Wayagamack ? puis on pourrait continuer la liste ? ces gens-là, ce qu'ils nous disent: Si vous êtes capables de sauvegarder nos jobs, faites-le. Bien, c'est ce qu'on fait.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le...
M. L'Heureux (Clément): C'est dans ce contexte-là... Excusez.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui. M. le député de Dubuc ou madame.
M. Côté: Oui. Madame voulait faire un commentaire.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): O.K. Madame.
Mme Dionne-Marsolais: Juste un commentaire. Je ne sais pas comment... Ce projet de loi là augmente les redevances de 25 millions pour Abitibi-Consol, et vous voulez qu'en plus de ça on leur demande un investissement de 500 millions. Je ne sais pas comment vous faites ça pour assurer l'avenir de Kénogami, là, mais ce projet de loi là, s'il n'était pas là, là, ça coûterait 25 millions de moins, selon votre raisonnement, parce que c'est ça qu'on... Ce projet de loi là, il augmente les redevances de 25 millions sur quatre ans.
M. L'Heureux (Clément): S'il n'y a pas d'investissement.
Mme Dionne-Marsolais: Bon. S'il n'y a pas d'investissement, c'est ça. Petite information, là, sur l'exposition ou la capacité financière de l'entreprise, là. Il y a un rapport du 1er juin 2005, là, le ? je ne sais pas comment le dire en français, là ? mais le «cash-flow return on investment», il est à 4,5 % pour Abitibi-Consol, un des plus élevés de l'industrie. Ceux qui le dépassent, c'est Weyerhaeuser, Temple-Inland, à 6 %, 5 %; Smurfit-Stone, 5,9 %; après ça Rock-Tenn à 5,1 % puis Pope & Talbot à 5,2 %. Donc, ils ont redressé leur situation financière, et le redressement va bien.
Toutefois, ils ont un problème de cash-flow, c'est vrai, mais leur retour sur investissement n'est pas mauvais.
Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, Mme la députée de Rosemont. M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui. Merci, M. le Président. Alors, M. Massé, M. Demers, M. L'Heureux, M. Cadieux, bienvenue. Merci pour votre présentation. Je voudrais vous assurer que, nous aussi, comme parlementaires, nous voulons que les emplois soient sauvés, surtout à Kénogami, parce qu'on en parle. Mais il ne faut pas oublier qu'il y en a 640 qui ont été perdus à Port-Alfred. Et pour nous la loi n° 8, c'était notre seule poignée, c'était notre seule bouée de sauvetage qu'on avait parce que le gouvernement pouvait, par cette loi-là, mettre fin au bail de la Shipshaw.
n(15 h 40)n Et je voudrais vous citer les paroles du ministre des Ressources naturelles de l'époque, M. Brassard, qui disait, à propos de l'objet du projet de loi: «C'est vrai que c'est de prévoir la location d'un site hydraulique, mais c'est aussi de soutenir le développement économique régional et de s'assurer du maintien des opérations des usines du locataire dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Alors, c'est donc un moyen de faire en sorte qu'on ne se retrouve pas, dans la région, avec une fermeture, purement et simplement, d'un établissement de l'entreprise. Si ça arrive, à ce moment-là, il y [aura] résiliation du bail.» Jacques Brassard qui a dit ça le 9 juin, lors de l'étude article par article du projet de loi n° 8.
Écoutez, vous parlez, dans votre mémoire, vous dites que vous êtes d'accord pour que Consol ait une obligation de résultats, que ces résultats-là doivent être quantifiables avec des objectifs précis. «Nous croyons [également] que les travailleurs et travailleuses [...] doivent être associés[...]. Les gens [...] de la Conférence régionale des élus[...], des municipalités régionales de comté, doivent également pouvoir être associés à cet exercice dont nous exigeons la plus grande transparence.» Mais comment voulez-vous que la région puisse forcer Abitibi à investir le fameux 500 millions ou encore puisse nous aider, comme... les travailleurs de Port-Alfred? Parce qu'on n'a plus rien? On a tout perdu, là, puis les travailleurs n'ont même pas leur fonds de pension qu'ils vont recevoir seulement à l'âge de 65 ans.
Quand on voit, par les déclamations du président d'Abitibi-Consol, qui est venu en région... Et justement le journaliste qui est ici, en arrière de vous, là, qui avait fait l'article, M. Marc Saint-Hilaire, où M. Weaver a dit: «"Le bois et l'eau représentent la clé du succès pour l'usine de Kénogami", a-t-il insisté.» Autrement dit, le président, le P.D.G. d'Abitibi-Consol vient nous dire, vient dire au gouvernement: Donnez-moi des avantages, donnez-moi l'eau, donnez-moi le bois, l'approvisionnement, puis après ça je verrai si je vais investir. C'est l'inverse qu'il aurait dû faire. Il aurait dû dire: Je vais investir, puis on va s'asseoir, puis on va négocier des avantages. C'est comme ça qu'on procède. Il a procédé par l'inverse.
Alors, moi, je pense que c'est presque du chantage puis je trouve qu'on a sacrifié actuellement les travailleurs de Port-Alfred pour sauver une autre usine dont on n'est même pas sûrs qu'elle pourra être sauvée. Et c'est ça que je trouve difficile. On essaie de trouver une solution. Au moins, avec la loi n° 8, on avait une façon de dire à Consol: Bien, écoutez, vous avez eu des avantages, le gouvernement va vous les retirer. Oui, on va négocier avec vous par après, on va peut-être vous concéder encore des droits d'eau d'une autre façon, mais, je regrette, le bail que vous aviez signé, vous ne l'avez pas respecté. C'était une loi, donc, à ce moment-là, on applique la loi. Et, en ce sens-là, c'est pour ça que, nous, on demandait tout simplement le retrait du projet de loi n° 99, parce que ça ne donne rien. Ça impose à Consol un 30 millions supplémentaire, comme ma collègue l'avait dit, 25 à 30 millions. Comment voulez-vous qu'ils investissent dans Kénogami?
Le Président (M. Morin (Montmagny-L'Islet): M. L'Heureux? M. Massé? M. L'Heureux.
M. L'Heureux (Clément): Écoutez, je suis d'accord avec votre déduction parce qu'on a fait la même. À chaque fois qu'Abitibi a fermé une usine, on a fait la même déduction, on se pose les mêmes questions. Comment on fait? Puis, moi, je me la pose encore plus dans un autre dossier, qui est très récent, là, c'est Smurfit-Stone qui ferme une usine à New Richmond. Comment on fait, au Québec, au Canada, en Amérique du Nord, là, comment on fait pour dire qu'on se garantit ou qu'on se prémunit contre des compagnies qui viennent exploiter nos ressources naturelles puis qu'ils ne partent pas, à un moment donné, en nous laissant la situation comme on la connaît dans l'industrie forestière? On essaie de se donner des lois, on essaie un paquet de choses, mais ça ne marche pas tout le temps. Si on regarde l'industrie forestière à l'heure actuelle ? moi, je regarde ça sur 30 ou 40 ans ? les compagnies qui sont venues, qui ont pris le bois, puis qui ont pris l'eau, puis qui sont parties avec le cash, il y en a eu une série, hein? On peut toutes les regarder: CIP ? puis, je veux dire, tu sais, ça n'existe plus; puis Canadien Pacifique. Bon.
Votre question, c'est la bonne. On se pose la question, nous autres aussi: Comment on fait? Une compagnie qui vient s'installer puis elle dit: Donnez-moi de l'électricité, donnez-moi de la ressource ? dans ce cas-ci, c'est de la forêt ? comment on fait pour s'assurer qu'un moment donné, quand ils auront fait leur argent, qu'ils ne diront pas: «Bye, bye, on s'en va puis on ferme tout ce qu'il y a là»? Comment on fait ça? Moi, je n'ai pas la réponse. Je ne sais pas si quelqu'un l'a trouvée à l'heure actuelle, mais on cherche en maudit. Moi, ce que j'ai déclaré dernièrement, dans le cas de New Richmond, c'est de dire: Il faudra trouver une façon pour que, lorsque le gouvernement s'assoit ? parce que c'est lui, comme propriétaire des ressources naturelles, le gouvernement s'assoit avec des compagnies ? il faudra qu'on trouve une façon de faire pour dire: Il y a des montants d'argent qui vont être mis à quelque part, qui vont être gelés, en cas où il arrive des choses comme ça, pour garantir ce que vous dites, garantir les régimes de retraite. C'est ça qu'il faut essayer de faire ensemble.
M. Demers (Robert): Mais c'est exactement ce qu'on avait en tête quand on a écrit: «Un projet de loi à parfaire». Je vais vous le relire tranquillement: «Il faut se prémunir contre des départs puis des fermetures sauvages.» Bon. Nous, on pense que, si les objectifs ne sont pas rencontrés, il faudrait peut-être provisionner un éventuel manque à réaliser sur les investissements produits. Si on leur donne tant, ça vaut tant. Vous en avez délivré la moitié, il en manque la moitié. C'est ce qu'Honoré Mercier disait en 1923. On leur demande de mettre des dépôts pour qu'on puisse en rester avec.
Les montants dans la région. J'ai été voir la région. J'ai vu comment les gens étaient déchirés, même dans les rangs de la FTQ, sur les solutions qu'on pouvait amener. Les montants, pourquoi, quand il ferme son entreprise? Justement, on a posé la question: Quelqu'un d'autre ne pourrait pas la racheter, faire quelque chose d'intelligent avec? Dans le mémoire, on a dit: «Nous croyons que ces montants devraient être inscrits comme des montants à faire valoir sur les installations d'Abitibi-Consol, que le gouvernement pourrait reprendre à leur valeur aux livres afin de permettre à un autre investisseur de profiter tant des installations que des ressources forestières hydrauliques.» Ça, c'est des idées qui circulent pas mal dans le coin, là-bas, là. Les gens, dans la région, se disent aussi: Les ressources hydrauliques ou forestières n'appartiennent pas juste au gouvernement, pas juste à la région, mais surtout pas rien qu'à Abitibi-Consol. Si quelqu'un d'autre est capable de le développer à leur place, si les redevances que doit Abitibi-Consol pouvaient être confiées à d'autres mains qu'Abitibi-Consol pour qu'on soit capable d'en faire le bilan de façon transparente, pour dire que tant d'argent doit servir à maintenir tant d'emplois ou à donner tant d'investissements structurants, on ne peut pas laisser ça n'importe comment, comme ça.
Moi, je pense que, ce genre d'affaire là, on ne veut plus, nous autres, qu'on continue à démolir de la façon qu'on le fait présentement, puis c'est pour ça que, dans les modèles à perfectionner, il faut quasiment les libérer sous caution, maudit, c'est aussi bête que ça. Merci.
Mme Dionne-Marsolais: Écoutez...
Le Président (M. Jutras): 20 secondes.
Mme Dionne-Marsolais: Oui. Alors, j'apprécie votre commentaire, et on partage cette même vision. Et en plus, nous, on a une responsabilité comme parlementaires. On a eu ici, pendant la commission parlementaire sur l'énergie, Alcoa qui est venue demander au gouvernement de l'appui pour développer, renouveler son usine à Baie-Comeau, et elle a reçu une fin pratiquement de non-recevoir, et, croyez-moi, on est très embêté aujourd'hui. C'est pour ça qu'on s'oppose, qu'on n'est pas prêts à accepter ce projet de loi là parce qu'on ne croit pas qu'il sert les intérêts des Québécois.
Et je termine en vous disant...
Le Président (M. Jutras): Oui, il faut terminer.
Mme Dionne-Marsolais: ...que c'est la même entreprise qui a refusé des offres d'achat, à Chandler, par des entreprises qui souhaitaient prendre la relève. Il faudrait s'en rappeler aussi, ça.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Pas de commentaires? Alors, merci, messieurs, merci pour votre présentation. Ah, on avait parlé de suspendre peut-être cinq minutes? Alors donc, suspension de cinq minutes.
(Suspension de la séance à 15 h 49)
(Reprise à 15 h 57)
Le Président (M. Jutras): Nous allons donc reprendre nos travaux et nous recevons maintenant la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean conjointement avec la municipalité de Saint-David-de-Falardeau. Je vous rappelle nos règles, que vous connaissez déjà, là, parce qu'on a déjà vu certains d'entre vous, mais vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, 20 minutes après d'échange avec le ministre et les députés ministériels et 20 minutes d'échange avec les députés de l'opposition par après.
Alors, le porte-parole, c'est...
M. Généreux (Bernard): Écoutez, on est en deux temps, si vous permettez.
Le Président (M. Jutras): Oui. Alors, les deux porte-parole, si vous voulez vous présenter, et présenter la personne qui vous accompagne, et y aller avec vos mémoires.
M. Corbeil: ...
Le Président (M. Jutras): Non, non. Comme dit le ministre, là, ce n'est pas 20 minutes, 20 minutes. Vous avez 20 minutes globalement.
M. Généreux (Bernard): Ah oui?
Le Président (M. Jutras): Ah oui.
M. Généreux (Bernard): Pour la présentation, on entend. O.K. D'accord. Donc, Bernard Généreux, président de la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean. M'accompagne Serge Chiasson, conseiller en développement à la Conférence régionale.
M. Dufour (Jean-Yves): Jean-Yves Dufour, maire de la municipalité de Saint-David, accompagné de Daniel Hudon, directeur général de la municipalité de Saint-David.
Conférence régionale des élus du
Saguenay?Lac-Saint-Jean conjointement
avec la municipalité de Saint-David-de-FalardeauM. Généreux (Bernard): Donc, si vous me permettez, M. le Président, nous allons rapidement passer sur l'introduction de notre mémoire, qui rappelle à la commission que les rivières et les ressources naturelles ont été au coeur du développement de notre région au cours, je dirais, du dernier siècle mais que les choses semblent vouloir bouger d'une façon accélérée, là, depuis quelques années, et rappeler également que notre région se distingue d'une façon particulière, en matière d'énergie, dans la mesure où la propriété privée de l'énergie, elle est presque en monopole ou en situation de monopole, contrairement au reste du Québec où, à l'issue de la nationalisation, Hydro-Québec a pris le relais de la plupart des entreprises, étant entendu à l'époque ou convenu que l'énergie disponible chez nous devait ou servait déjà au développement de la région tant par les emplois que par les investissements. Ça vaut autant pour Alcan que pour Abitibi ou d'autres ? principalement ces deux entreprises-là.
Donc, avec le constat maintenant que, cette disponibilité-là ou cette particularité-là, lorsqu'on la mesure en ratio emploi, elle est de moins en moins évidente, de moins en moins présente. Donc, c'est dans ce contexte que la Conférence régionale, dans son mémoire sur le secteur énergie au Québec, rappelait ou posait deux principales revendications, c'est-à-dire d'établir le principe que toute la production d'énergie d'électricité privée réalisée au Saguenay?Lac-Saint-Jean doit être consacrée au développement industriel de la région et que les redevances payées au gouvernement du Québec par les producteurs privés d'énergie doivent revenir au Saguenay?Lac-Saint-Jean aux fins, entre autres, d'appuyer la nécessaire conversion industrielle.
n(16 heures)n Donc, c'étaient les deux principaux axes, là, de notre mémoire sur l'énergie. Et rappelant également que, lorsque la Commission sur la maximisation des retombées de l'exploitation des ressources naturelles a siégé donc, elle concluait sur la nécessité des redevances, et à ce titre le Saguenay?Lac-Saint-Jean pourrait recevoir 6,4 millions en redevances, par année.
Maintenant, si on aborde, d'une façon un peu plus pointue, le cas d'Abitibi-Consol qui nous concerne aujourd'hui, il est clair qu'en fermant l'usine de La Baie on a en quelque sorte rompu une des conditions ou mis fin à une des conditions qui est liée à ce bail-là, bien qu'il faut le rappeler, l'usine de Port-Alfred n'était pas tributaire de la production produite par Abitibi-Consol dans la région. Elle était plutôt bénéficiaire du tarif L d'Hydro-Québec. Donc, notre position, ça se ramène à l'enjeu du développement pour notre région.
Étant donné que le gouvernement se doit de faire appliquer la loi n° 8; étant donné que la région, à l'instar de toutes les régions ressources, revendique un retour plus significatif des redevances pour appuyer leur développement économique et amorcer le virage de la nécessaire reconversion industrielle; étant donné que, si le gouvernement persiste dans son orientation d'imposer des redevances supplémentaires non escomptées, ce dernier devrait saisir l'occasion pour verser ces redevances dans un fonds régional de diversification de l'économie, nous demandons donc au gouvernement du Québec que toutes les redevances additionnelles prévues dans le projet de loi n° 99 soient versées dans le fonds de diversification de l'économie du Saguenay?Lac-Saint-Jean, lesquelles, sommes, devraient être disponibles, jusqu'à hauteur de 90 %, à Abitibi-Consol pour appuyer le projet de modernisation de l'usine de Kénogami dans un délai maximal de cinq ans, et, au bout de ce terme, ce fonds serait disponible pour appuyer des projets de développement industriel dans la deuxième et la troisième transformation. Nous demandons donc au gouvernement du Québec d'adopter une approche proactive et de s'asseoir avec la compagnie Abitibi, afin d'établir un environnement et un partenariat propices à un investissement de plus ou moins 500 millions pour la modernisation de l'usine de Kénogami.
En conclusion, la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, au cours des dernières années, a perdu plusieurs emplois, je dirais, plusieurs centaines d'emplois reliés à l'exploitation des ressources naturelles. Si dans le passé le retour de cette exploitation se situait dans le nombre d'emplois, il faut maintenant compenser les régions ressources pour ramener une juste part des retombées de l'exploitation des ressources naturelles dans les régions où on les puise, et le gouvernement doit, dans un système de péréquation issu des redevances, appuyer ces régions dans le développement et la création de richesse, en soutenant l'émergence de fonds régionaux. Ces fonds seraient complémentaires aux interventions du gouvernement et de ses sociétés d'État. Donc, on voit bien, là, qu'on essaie souvent de relier ce qui arrive dans le contexte d'Abitibi, particulièrement dans le secteur de la forêt, à ce qu'on a déjà vécu comme expériences passées, au cours des années. Et on se rend bien compte que, dans le contexte où on est maintenant confrontés à des enjeux de mondialisation, la concurrence de l'Asie, l'appréciation du dollar, à la hausse du pétrole, hein ? puis il faut rappeler que Kénogami, là, c'est une usine qui fonctionne au mazout, hein? ? donc ces enjeux-là, qu'on contrôlait relativement bien, sont en train de basculer les uns après les autres, et il est impossible de concevoir ou de réfléchir le développement ou la suite du développement de la même manière qu'on l'a toujours fait, surtout basés sur les ressources naturelles.
Et il ne faut pas s'étonner de voir que nos régions sont particulièrement revendicatrices quant au contrôle des ressources naturelles, notamment par les redevances, parce qu'on pense qu'il y a là un levier qui va nous permettre d'amorcer la nécessaire diversification de nos économies. On ne peut plus continuer de rouler sur la prétention que les ressources naturelles, ça va continuer d'être à la base de notre développement. Oui, ça va être, je dirais, un élément clé déterminant, mais il faut absolument s'engager sur la voie de la diversité. Et ça, bien je pense que, quand on parle d'investissement à Kénogami ? puis le débat nous ramène beaucoup autour de cette usine-là ? il est évident qu'on doit s'attendre à ce que, la responsabilité collective, par le gouvernement, d'accompagner le développement des régions, bien on puisse la mesurer de la même manière qu'on ne se gêne pas pour investir massivement dans la nouvelle économie. Et souvent ça, c'est des investissements qu'on retrouve dans les centres urbains, qu'on investit massivement chez Bombardier, par exemple, dans l'aéronautique.
Mais, lorsqu'on parle des ressources naturelles, bien, tout de suite, là, on dit: Bien, vous êtes des mauvais gestionnaires, vous ne savez pas gérer vos régions. Donc, il faut, je pense, sortir des paradigmes qui ont été ceux qui ont prévalu jusqu'à maintenant et que les opportunités de développement qui sont chez nous, notamment par la présence de réseaux hydroélectriques importants, constituent ou continuent d'être des leviers de développement plutôt que de dire: On va vous mettre en pénalité parce que vous n'avez pas réussi à maintenir les actifs qui étaient là. Faisons le parallèle avec ce qui s'est passé chez Alcan, au cours des deux dernières années, chez nous. Comment est-ce qu'on aurait pu? Est-ce qu'on peut taxer Alcan d'être un mauvais gestionnaire parce qu'il a fermé Söderberg? Non, c'étaient des usines qui étaient à bout d'âge. Puis il faut peut-être reconnaître que les usines qu'on a fermées chez nous sont peut-être des usines qui sont à bout d'âge.
Maintenant, qu'est-ce qu'on fait? Ça veut-u dire qu'il faut jeter le gant puis arrêter de se développer autour des ressources naturelles? Il faut absolument, si on veut demeurer compétitifs au plan mondial puis de confronter la compétition de l'Asie et de la Chine, bien être capables d'être performants avec des nouvelles technologies qui nécessitent des investissements majeurs dans un contexte où les entreprises forestières d'une façon générale, au Québec, en 2005, elles sont à peu près toutes dans la dèche ou réussissent pour certaines à se sortir la tête de l'eau, sans plus. Donc, il n'y a pas personne, je pense, qui roule sur l'or et il ne faudrait pas qu'en introduisant ce projet de loi là la conséquence de ce choix politique là entraîne l'entreprise dans une difficulté supplémentaire. Donc, quand on invite à s'asseoir et de regarder comment on peut redéfinir de nouvelles stratégies de développement autour des opportunités qui sont présentes sur notre territoire, bien je pense que c'est là où on en est et ce n'est probablement pas par la coercition qu'on va y arriver, mais plutôt par le partenariat et l'implication des régions elles-mêmes dans la gestion de ces ressources-là, dans la mesure où on pourra mettre au service des entreprises ou des promoteurs qui pourraient s'identifier pour venir participer au développement de nos territoires des opportunités d'investissement à même une partie des redevances qui pourraient être versées à nos régions et auxquelles on pourrait être associés, là, en termes de prise de décision.
Donc, vous voyez un petit peu l'approche, là, qui est la nôtre, et je pense qu'elle s'inscrit dans la continuité de ce qu'on a posé comme volonté lors de la commission parlementaire sur l'énergie.
Le Président (M. Jutras): Merci. M. Dufour.
M. Dufour (Jean-Yves): Au départ, M. le Président, je voudrais remercier la commission d'avoir permis à la municipalité de Saint-David de venir s'exprimer en ce qui concerne le projet de loi n° 99 et je vais vous dire que la municipalité de Saint-David-de-Falardeau est favorable au projet de loi n° 99.
Au départ, je voudrais vous dire que la municipalité de Saint-David-de-Falardeau est située à 25 km au nord de ville de Saguenay et que sa population permanente est d'environ 2 400 personnes, cette population triplant en période estivale, en raison des très nombreuses résidences secondaires. L'économie locale a de tout temps principalement découlé de l'activité forestière et de l'industrie qu'elle génère. Cette industrie est cependant, depuis de nombreuses années, affectée de plus de maux qu'elle ne peut en supporter, ce qui a eu, entre autres effets, au cours des 25 dernières années, de voir de nombreux emplois locaux disparaître, comme la fermeture et la démolition de l'usine de sciage au lac La Mothe. Bien que la municipalité de Saint-David soit considérée comme financièrement privilégiée, on ne peut en dire autant de l'ensemble de sa population. La municipalité de Saint-David-de-Falardeau est traversée du nord au sud par la rivière Shipshaw sur laquelle des ouvrages de retenue ont été construits à différentes époques, créant ainsi, sur le territoire de la municipalité de Saint-David, des réservoirs comme La Mothe, Brochet et Sébastien.
En plus de ces ouvrages de retenue, trois centrales appartenant à la division Hydro Saguenay d'Abitibi-Consol produisent, en tout ou en partie, l'électricité nécessaire au fonctionnement des usines de papier de Kénogami et d'Alma d'ACI. Ces centrales sont celles de Jimmy Gray, Cunningham et Chute-aux-Galets.
n(16 h 10)n Ces importantes infrastructures, comme d'autres ailleurs au Québec, n'étant plus portables au rôle d'évaluation de la municipalité depuis 1972, suite à des modifications législatives à la Loi sur l'évaluation foncière, la municipalité de Saint-David-de-Falardeau ne peut percevoir des taxes basées sur l'évaluation à l'égard de ces immeubles de valeur considérable. En lieu et place, la loi n° 222 de la Loi sur la fiscalité municipale prévoit une taxe basée sommairement sur un calcul dont le résultat correspond au... obtenu en divisant le total des revenus d'imposition de l'année courante par celui de l'année précédente multiplié par les taxes de l'année précédente.
Bien que la municipalité soit portée à penser que, si ces installations étaient demeurées au rôle d'évaluation, elles généreraient sans doute plus de revenus de taxation qu'actuellement, les revenus qu'elle perçoit présentement d'ACI constituent des sommes excessivement importantes et essentielles au fonctionnement de la municipalité. Elles contribuent notamment au soutien financier d'organismes travaillant au maintien d'un tissu social sain et humain notamment par l'aide aux plus démunis, par la mise en place aux moyens favorisant la rétention des aînés. À preuve, on a présenté un tableau qui démontre les taxes perçues par les installations d'ACI pour les 10 dernières années, et j'en ferai grâce de la lecture. Parmi les particularités qui permettent l'assujettissement à l'article 222, il importe de noter qu'il s'agit d'une personne, autre qu'Hydro-Québec ou l'une de ses filiales, qui exploite un réseau de production d'énergie et qui consomme tout ou en partie l'énergie qu'elle produit.
La position de la municipalité de Saint-David-de-Falardeau relativement au projet de loi n° 99 est essentiellement une position financière. À cet effet, la municipalité considère que la loi n° 8 adoptée en 1999 prévoit une solution unique et drastique advenant notamment la fermeture d'une usine exploitée par ACI, situation qui s'est malheureusement concrétisée par la fermeture de l'usine de Port-Alfred, cette solution étant la réalisation sans formalité ni indemnité du bail de location des forces hydrauliques. La municipalité estime que cette avenue présente des problèmes de mise en application évidente. Notamment, à notre connaissance, le bail découlant de la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques sur la rivière Shipshaw adoptée en 1999 n'a toujours pas été signé. Une telle résiliation aurait, entre autres effets, de mettre en péril certaines autres installations d'ACI fortement indépendantes de l'alimentation hydroélectrique générée par les forces hydrauliques.
À tout événement, advenant qu'une telle réalisation survienne, l'article 13 de la loi n° 8 stipule que «l'État [redeviendra] propriétaire sans indemnité ni compensation [dans les] ouvrages et améliorations ayant servi à l'exploitation des forces hydrauliques». Bien évidemment, un tel changement d'exploitant, quelle qu'en soit la cause, qui ne concernerait pas, en tout ou en partie, l'énergie qu'elle produit ne serait plus selon notre perception assujetti à l'article 222 de la Loi sur la fiscalité municipale, ce qui aurait un impact financier désastreux et démesuré pour la municipalité de Saint-David. Cet impact financier se répercuterait également sur l'économie locale et régionale, puisque les sommes perçues sur les infrastructures sont entièrement réinjectées par la municipalité pour faire un montant d'environ 1,8 million par année.
Et la capitalisation des revenus de taxation générés par les infrastructures d'ACI ayant un effet marqué sur la richesse foncière uniformisée de la municipalité, la faisant passer de 112 090 940 $ à 224 903 219 $, les constats suivants devraient être faits. La contribution de la municipalité au financement de la MRC du Fjord via ses quotes-parts versées serait sensiblement diminuée, obligeant l'ensemble des autres municipalités membres à absorber un manque à gagner récurrent de 41 000 $. Et on sait que les MRC, ce n'est quand même pas de grosses municipalités. La participation de la municipalité au coût de fonctionnement de la Sûreté du Québec passerait de 386 533 $ à 201 764 $, représentant un manque à gagner annuel pour le gouvernement de Québec de 184 769 $. Les taux de taxes foncières pour la municipalité de Saint-David-de-Falardeau passeraient de 1,09 $ à 2,56 $ du 100 $ d'évaluation. L'actuelle richesse foncière uniformisée élevée de la municipalité de Saint-David-de-Falardeau a également pour effet d'exclure la municipalité de l'ensemble des programmes de péréquation et d'aide financière gouvernementale où ces critères... pris en compte. Une réduction marquée de cette richesse aurait donc aussi comme conséquence directe d'obliger le gouvernement du Québec à verser une contribution financière substantielle et récurrente à la municipalité.
La municipalité de Saint-David estime que le projet de loi n° 99, lequel a essentiellement pour objet de modifier l'article 7 de la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques dans la rivière Shipshaw, constitue une solution plus constructive et mieux adaptée à la problématique à laquelle est soumise la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
En effet, en plus de l'imposition d'une redevance équivalente à celle fixée par le nouveau régime d'octroi et d'exploitation des forces hydrauliques du domaine de l'État pour les centrales hydrauliques de 50 MW et moins et de la redevance prévue à l'article 68 de la Loi sur le régime des eaux, l'imposition d'une redevance additionnelle dont le taux pourrait être réduit pour prendre en compte les emplois créés par ACI dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean pourrait s'avérer un élément efficace contribuant à protéger les infrastructures industrielles et les emplois existants parce que, dans un premier temps, applicable par le gouvernement et, dans un second temps, offrant un effet incitatif certain pour ACI à la recherche de solutions maximisant les retombées régionales et la consolidation des activités au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Dans l'intervalle, les effets positifs de cette mesure pourraient être multipliés si les revenus de cette redevance additionnelle étaient accumulés dans un fonds régional particulier destiné à soutenir des actions concrètes d'ACI de création de nouveaux emplois au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
En résumé, la municipalité de Saint-David-de-Falardeau souhaite transmettre à la commission sa perception favorable au projet de loi n° 99 parce qu'il contribue à notre avis, d'un point de vue local, à sensiblement réduire la probabilité d'un changement d'exploitant des installations productrices d'hydroélectricité et, d'un point de vue régional, à offrir un levier au gouvernement pour assurer le respect de l'esprit de la loi n° 8 tout sans mettre en péril l'exploitation des autres installations d'ACI au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Dufour, pour votre présentation, merci, M. Généreux, également. Je cède maintenant la parole au ministre. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci beaucoup, M. Généreux, M. le maire, M. Dufour, de la présentation des deux mémoires que vous nous avez transmis et présentés cet après-midi. Maintenant, je ne veux pas faire de parti pris, mais, puisqu'on vient de terminer avec la municipalité de Saint-David-de-Falardeau, je vais commencer avec mes questions sur le sujet.
Je pense, M. le maire, que vous avez brossé un tableau assez exhaustif des conséquences de l'application intégrale du projet de loi n° 8 et des conséquences directes sur votre municipalité et ses contribuables, et vous parlez d'une somme excessivement importante et essentielle au fonctionnement de la municipalité. On comprend ici que, comme les baux sont pour deux centrales sur trois, lesquelles vous avez fait mention tantôt, le montant n'est pas global de 1,8 million de dollars, mais il est d'à peu près 1,5 million de dollars pour lesquels vous auriez une compensation de TSP dorénavant, si ça changeait de propriétaire. Mais, la TSP puis ce que vous touchez comme taxes foncières, il y a une marge qui est assez importante. Alors, comment expliquer qu'il y a des gens qui persistent et qui continuent de dire qu'il faut adopter la ligne dure puis faire absolument appliquer la loi n° 8 coûte que coûte? Vous êtes le maire d'une municipalité. Vous connaissez les conséquences, vous les avez très bien présentées, et je vous remercie aussi même de faire référence au fait qu'il y aurait un manque à gagner pour le gouvernement du Québec en ce qui concerne le fonctionnement de la Sûreté du Québec. Ça, je ne l'avais pas envisagé. Mais vous faites passer le taux de taxes foncières de 1,09 $ du 100 $ d'évaluation à 2,56 $. Peut-être que votre hypothèse est sur le montant global de 1,8 million de dollars ramené à 1,5. C'est quand même important.
Comment vous expliquez ça, qu'il y a des gens qui continuent, à tout le moins, qui persistent et signent en disant: «C'est la loi n° 8, that's it, that's all»? Excusez l'anglicisme.
n(16 h 20)nM. Dufour (Jean-Yves): M. le ministre, il est évident pour la municipalité de Falardeau que ce serait pratiquement impossible, là, de se soustraire de ces revenus-là. Et vous savez que la municipalité de Falardeau, dans ses projets de développement, avec les taxes qu'elle perçoit, a un impact très important au niveau régional. Parce que vous savez que, depuis quelques années, quand on regarde ce qui s'est produit comme développement au niveau du village alpin, quand on regarde aussi tous les entrepreneurs... Parce que, même si vous soustrayez ces montants-là, la municipalité de Falardeau n'aura pas les mêmes moyens qu'elle a présentement d'investir, parce qu'on investit environ entre 1 million, 1,5 million par année, dans son développement au village alpin, ce qui permet de faire travailler l'ensemble des entreprises de la région. Et, au niveau touristique, ça a un impact. Je pense que c'est le centre à mon avis et je pense qu'il est prouvé aussi que c'est un des plus gros centres au niveau de la région, et que ça permet en même temps de consolider des emplois, puis que ça permet aussi aux entrepreneurs justement de rester en place.
Parce que, tout à l'heure, on parlait d'emploi, ça fait que, si vous nous enlevez cette possibilité-là, vous allez donner à la municipalité de Falardeau ? comment est-ce que je pourrais vous dire ça? ? sa mort, autrement dit, là, parce que c'est une des seules façons qu'elle a de pouvoir promouvoir son développement. Avec les fermetures, je l'ai cité d'ailleurs au départ, avec la fermeture des usines, qu'on a connue, d'Abitibi-Consol, au niveau de son moulin de sciage, au niveau du moulin de rabotage qui ne travaille plus rien que, là, pratiquement au quart de ce que ça a déjà fonctionné, ce qu'il reste aux citoyens de Saint-David, si vous leur enlevez ces sommes d'argent là, la municipalité aurait très de la difficulté à pouvoir continuer à développer et même à soutenir, par rapport à sa richesse foncière, l'ensemble des municipalités de notre MRC.
Ça fait que j'aurais de la difficulté, et ce serait difficile pour un gouvernement de priver la municipalité de Saint-David de ces montants d'argent là.
M. Corbeil: Merci, M. le maire. Je comprends, de façon très claire, très nette, que vous avez un besoin indispensable de ces sommes d'argent là non seulement pour assurer un bon fonctionnement des fonctions d'une municipalité, mais aussi pour travailler à suppléer à l'activité économique, qui peut avoir à certains égards été moins importante qu'elle ne l'a déjà été dans le passé. Et je suis content aussi que vous fassiez un clin d'oeil à l'industrie touristique parce que vous semblez avoir mis l'accent sur une activité probablement hivernale, puisque vous parlez d'un village alpin. Alors, je pense que c'est probablement aussi dans une période. Vu qu'on parle à l'occasion, dans des communautés comme les nôtres, de l'activité saisonnière, vous ajoutez une saison de plus au niveau des travailleurs de votre coin de région. Merci beaucoup.
Pour ce qui est de M. Généreux et de la CRE, vous parlez du principe que toute la production d'énergie électrique privée réalisée au Saguenay?Lac-Saint-Jean doit être consacrée au développement industriel de la région. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le président de la Conférence régionale des élus, que c'est le cas. Actuellement, Hydro-Québec ne produit pas encore d'énergie dans votre région, et votre région est consommatrice de 800 MW auprès d'Hydro-Québec. Alors, est-ce que vous pensez que ça, ça devrait être ensaché en quelque part au-delà de ce que c'est qui est l'esprit des ententes qui avaient été convenues à l'époque, quand les entreprises privées pouvaient utiliser les forces hydrauliques mais plus que les forces hydrauliques, même la rivière au complet, là?
M. Généreux (Bernard): Écoutez, je pense que ça fait partie des nouveaux paradigmes, hein? À l'époque, on pouvait peut-être accepter que ces entreprises qui produisaient de l'énergie pour leurs fins propres pouvaient en exporter une certaine partie, là, à d'autres fins. Et, dans le contexte des enjeux liés au développement de l'emploi et de nos régions, il y a un consensus très large et très fort chez nous à l'effet que l'avantage que l'on concède à ces entreprises privées de produire à des fins de développement de l'énergie hydroélectrique doit essentiellement servir à ces fins-là. Il n'est pas question qu'on produise de l'énergie pour mettre sur le réseau d'Hydro-Québec puis de vendre aux Américains, là. Je pense que là-dessus il y a une fin de non-recevoir.
Donc, la capacité ou la disponibilité de ces ressources-là, elle doit effectivement servir à la production ou au développement de nos régions puis au développement de l'emploi dans nos régions, c'est très clair. Et, si cette règle-là ne tient plus, il faudra la revoir, et c'est ce qui avait présidé au choix de la société québécoise de nationaliser des entreprises privées à l'époque. Et comme chez nous la totalité de... En fait, on atteignait cet objectif-là. On a fait une exception pour la région, mais il ne faudrait pas qu'on déroge à cette exception-là en faisant autre chose que du développement de la région et de la création d'emplois avec ces énergies disponibles.
M. Corbeil: Merci, M. Généreux. Tantôt, j'ai mentionné que prochainement Hydro-Québec, avec les installations qui sont en construction sur la rivière Péribonka, sera producteur d'énergie chez vous mais avec 385 MW. Il y a encore 415 MW qui vont venir des autres régions du Québec pour alimenter de l'infrastructure industrielle notamment, qui, on le sait, est assez énergivore dans votre coin, et aussi les autres consommateurs. Donc, il y aura encore un déficit.
Maintenant, je voudrais juste préciser. Vous avez dit «dans nos régions» versus «notre région». Est-ce que vous êtes d'accord que, si jamais il y avait un excédent de capacité de production chez vous, par rapport à la consommation de cette énergie-là ? vous avez exclu la possibilité qu'elle soit sur le marché extérieur ? elle soit utilisée pour ? probablement pas la Côte-Nord parce qu'ils y sont excédentaires ? peut-être le Nord-du-Québec, non, en tout cas d'autres régions du Québec?
M. Généreux (Bernard): Écoutez, moi, je pense que le patrimoine, je dirais, régional en matière d'énergie, il doit pouvoir ou devoir servir au développement de nos régions.
M. Corbeil: De nos régions.
M. Généreux (Bernard): Écoutez, moi, je pense qu'on ne se fera pas, là, de dessin sur l'enjeu que représente ce défi du développement de nos régions. Et ce à quoi on assiste depuis quelques années, c'est bien plus à de la perte d'emploi puis à des ratés dans le développement de nos régions. Et ça, bien, traditionnellement, on présumait que la disponibilité puis l'abondance des ressources allaient finalement faire en sorte qu'il y en aurait pour tout le monde puis un peu plus, mais on n'en est plus là, là. On est plutôt dans un mode où il faut, à travers de la rationalisation puis de la réingénierie d'entreprises, sauver le développement de nos régions, et il y a une part de cette capacité de se redéployer autrement qui doit passer par une meilleure gestion de nos ressources naturelles puis une utilisation chez nous des redevances qui sont prélevées sur les ressources naturelles. C'est, je pense, notre dada, là, si vous me permettez l'expression, sur lequel on insiste puis on va continuer d'insister de plus en plus, parce que c'est par là qu'on sera en mesure, je pense, de relever le défi du développement de nos régions ou de la relance de nos régions. Parce qu'on est bien plus en difficulté de développement qu'en mode croissance, là, depuis quelques années, là.
M. Corbeil: Merci. Vous faites référence à l'éventualité où on devrait s'asseoir ? et j'essaie de vous citer, là ? avec ACI et qu'on investisse, en partenariat, 500 millions pour l'usine de Kénogami. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur le partenariat et sur la contribution de fonds publics dans ces investissements-là?
M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, j'essayais d'illustrer que, dans le contexte où on a à réinventer ou à, je dirais, se repositionner en termes de performance, productivité, rendement, il faut réajuster les moyens de production qui ont été les nôtres. Et, quand on parle d'investissement dans des machines à papier, on comprend d'aisance que ce n'est pas avec une petite poignée de trente-sous qu'on va changer ces vieux équipements là qui ont fait l'objet, là, année après année, d'ajustements. Puis je pense qu'on a rendu nos entreprises, là, à la limite de ce qu'elles pouvaient produire puis je pense que les travailleurs pourraient en témoigner, comment on a poussé la performance de nos usines au maximum. Bon.
Est-ce qu'on n'a pas suffisamment réinvesti dans l'équipement? Ça, ça demeure souvent facile de faire le procès, là, de l'extérieur, mais il reste que je pense que, s'il faut se mettre en compétition avec des moyens de production qui sont autres ailleurs sur la planète, être efficaces, productifs et rentables, bien ça, je pense qu'il y a une responsabilité collective qui doit être prise en compte. Et, moi, je n'ai pas plus, je dirais, de malaise à concevoir qu'on pourrait faire du partenariat d'investissement avec Investissement Québec ou la Caisse de dépôt, ou peu importe, avec Abitibi-Consol, qu'on a réussi à le faire avec des entreprises privées comme l'aéronautique où on y va à coups de centaines de millions d'investissement.
n(16 h 30)n Et on est en compétition avec le Brésil puis avec l'Europe pour être capables de se faire une niche à nous autres d'excellence dans un type de production qui est particulier ? puis il n'est pas particulier au Québec ? mais pour lequel on a choisi, comme société, d'être performants et à la hauteur des attentes du marché mondial maintenant.
Donc, moi, c'est dans ce contexte-là que je conçois qu'on puisse mettre à l'avantage des entreprises les avantages qui sont chez nous, qui sont liés aux ressources naturelles, d'une part, et, d'autre part, bien, que, s'il y a nécessité d'investissement de l'État pour accompagner cette réorganisation-là de façon à ce qu'on puisse maintenir une activité économique importante autour de la transformation des ressources naturelles chez nous, bien, soit, allons-y. Sans oublier que, tout le volet de la deuxième et troisième transformation, on voit là que ? on l'appelle, depuis des années, ce secteur-là ? mais il y a encore beaucoup à faire dans ce champ-là de la deuxième et de la troisième et c'est là qu'on va faire appel à des compétences nouvelles, à de l'expertise nouvelle, à des technologies nouvelles pour sortir des créneaux traditionnels ou de bûcherons et de fabrication de pâtes, bien on sera capables d'aller beaucoup plus loin dans les processus de production et de transformation de la matière.
M. Corbeil: Merci beaucoup. Je trouve intéressante votre proposition à l'effet que ces redevances additionnelles soient versées et que des sommes devraient être disponibles, jusqu'à hauteur de 90 %, à la compagnie pour appuyer le projet de modernisation de l'usine de Kénogami dans un délai maximal de cinq ans. Est-ce que vous pourriez aller un petit peu plus loin? Pourquoi vous avez fixé cette barre-là à 90 % et vous avez fixé un échéancier aussi de cinq ans?
M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, je pense qu'il y a là un signal à la fois, que je traduirais de partenariat, de se dire: Bon, bien, on va faire les affaires ensemble, là, puis vous allez en céder, puis on va en céder, mais on va faire un deal ensemble. Et ça, bien ça fait partie d'une négociation qu'on pourrait avoir avec l'entreprise. On dit: Bien, écoute, on est prêts à reconnaître qu'il y a une partie de ces dividendes-là ou de ces redevances-là qui vont servir à la transformation puis en modernisation de Kénogami, en contrepartie de quoi vous allez céder une partie de vos dividendes sur les droits hydroélectriques au fonds de diversification de la région de façon à ce qu'on puisse continuer de développer puis sortir des créneaux traditionnels dans lesquels on est.
Et je pense qu'à travers toute la réflexion qu'on a faite, là, sur les mesures d'atténuation il y a cette volonté-là de sortir, hein, des réseaux traditionnels d'entreprise pour être capable, là, de relancer l'emploi sur des axes qui ne sont peut-être pas ceux auxquels on est habitués dans nos régions. Donc, ça pourra éventuellement servir à constituer ce fonds de diversification qu'on appelle, là, depuis des années et qu'on tente de mettre en place soit par les FIER ou autrement.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Roberval.
M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, mes salutations toutes particulières aux gens de la région, principalement le préfet de ma MRC à Roberval, qui est aussi le président de la CRE.
J'aurais besoin d'avoir un éclaircissement, M. Généreux, par rapport, je dirais, au parallèle que vous faites entre le projet de loi n° 8, si jamais on l'appliquait dans son intégralité, et les conséquences que ça peut avoir, et le projet de loi n° 99, qui, vous dites dans votre mémoire, peut avoir des impacts négatifs importants parce qu'il y a des redevances non escomptées. Par contre, sur ces impacts négatifs importants qu'il peut y avoir vous avez quand même une description très, très, très exhaustive de qu'est-ce qu'on pourrait faire avec ces sommes d'argent là. Et par la suite aussi le cinq ans de délai que vous demandez à Abitibi-Consol pour investir, parce qu'étant donné que le projet de loi n° 99 prévoit, pendant quatre ans, qu'il y a des redevances qui soient versées dans un fonds, est-ce que le délai de cinq ans débute immédiatement ou il débute à partir de la cinquième année ou de la quatrième année du délai?
M. Généreux (Bernard): Je pense que dans l'esprit, en présumant que cette loi-là est adoptée...
M. Blackburn: ...
M. Généreux (Bernard): ...on commence à compter maintenant, là, son application d'accumulation des sommes dans le fonds, là, qui est proposé. Maintenant, c'est évident que ? puis je rejoins, à cet égard-là, M. Dufour ? d'imaginer de rappeler ou d'annuler complètement l'effet de la loi n° 8, pour la région c'est non seulement priver la municipalité de Falardeau des revenus dont on... fait état, mais également se priver d'un levier de développement qui, bien qu'il y ait une partie de la loi qui a fait défaut par la fermeture, je me dis: Il ne faut pas pour autant jeter le bébé avec l'eau du bain, là.
Il faut regarder l'esprit qu'il y a dans cette approche-là et faire en sorte que, le contexte de développement qu'on a voulu créer ou mettre en place, bien on continue d'y travailler puis de le pousser. Parce que constamment, j'imagine, autour de la commission parlementaire, l'usine de Kénogami est revenue, hein? Donc, la fermeture de Port-Alfred, avec tout le drame que ça représente, c'est comme une étape qui est passée, puis on dit: Une usine qui ferme, sauf exception, là, ça ne réouvre pas. Puis on veut éviter qu'il y en ait d'autres, fermetures. Puis celle de Kénogami fait l'objet d'une attention particulière parce qu'on voit tous la fragilité dans laquelle elle se retrouve dans le contexte, que j'essaie d'illustrer, là, de la mondialisation et de la compétition internationale. Donc, si on ne réussit pas à «upgrader», là, cette entreprise-là ou cette usine-là en y investissant massivement ce qu'il faut pour qu'elle soit aussi performante que d'autres usines de la région ou ailleurs sur la planète, bien, effectivement, on pourra peut-être constater, dans une couple d'années, sa fermeture, puis ça, il n'y a pas personne qui veut arriver là.
Donc, il faut se mobiliser pour qu'il y ait les investissements nécessaires pour maintenir, autour de l'usine, là, toute la synergie d'emplois que ça doit générer puis ça doit continuer de générer. Écoutez, on veut bien appeler la diversification et la transformation de nos économies régionales, mais il faut y mettre le temps aussi, puis ça, ça ne se fera pas en criant ciseau. Donc, ça va prendre des moyens, de la concertation et de la mobilisation autour de projets qui vont être porteurs de développement aussi, là. Parce qu'on l'a vu avec tout l'exercice de réflexion qu'on a fait autour de la mesure de 20 %, combien ça a des impacts, l'industrie forestière, à tous égards. Et c'est la balance commerciale du Québec qui est en cause, là, quand on parle de l'industrie forestière. C'est elle qui contribue à la balance commerciale positive du Québec. Donc, tout le Québec est tributaire d'une activité forte, dynamique au plan de la forêt, découlant de la forêt, donc il faut y consacrer toutes les énergies que mérite cette industrie-là plutôt que de s'acharner sur le patient qui connaît des difficultés puis son lot de difficultés, là. Ne parlons que de la crise du bois d'oeuvre.
Je pense que, s'il faut en rajouter, bien, là, il y a assez de Bush et sa gang qui contribuent à creuser la tombe de l'industrie au profit de leurs propres règles à eux. Mais ça, je vous dis, c'est un autre débat.
Le Président (M. Jutras): Très, très rapidement, M. le ministre.
M. Corbeil: Une toute petite précision, M. le Président. Dans votre document, à la page 4, vous parlez: «Nous exprimons donc que l'approche punitive, même légitimée, n'est certes pas le bon moyen de garder...» Est-ce que vous pensez que l'approche proposée par le projet de loi n° 99 est punitive ou incitative? Moi, j'avais l'impression qu'elle était incitative.
M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, je pense que ça dépend du point de vue où on le regarde, là. Si on dit: On te soustrait ou on retire, il y a une pénalité de 25 à 30 millions sur cinq ans, là, bon, quatre ans, donc ça, dans un contexte où on est tout juste en équilibre, c'est dans ce sens-là que ça pourrait constituer une approche punitive.
C'est que, si on retire des revenus à une entreprise qui est à la limite de sa capacité de se redéployer, bien je me dis: Ce n'est peut-être pas l'approche la plus incitative ou proactive. Et c'est pourquoi on dit: Mettons ça dans un fonds, en attendant, puis ce fonds-là, il contribuera à la relance ou à la modernisation du projet de Kénogami dans la mesure où il y a un consensus qui s'établit autour de cette usine-là, tant au niveau du gouvernement que de la région.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Mme la députée de Rosemont.
n(16 h 40)nMme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Je comprends, de vos échanges et de votre mémoire, que vous êtes favorables avec l'esprit de la loi n° 8, mais je comprends que vous dites, comme ça n'a pas l'air acceptable, vous dites: On va appliquer la loi n° 99, mais il ne faudrait pas qu'il y ait trop d'impact sur l'entreprise. Maintenant, vous dites aussi: S'il y a des redevances, parce que la loi n° 99 prévoit des redevances, vous voulez qu'elles soient versées dans un fonds régional, que vous les réservez à 90 % pour les besoins d'Abitibi-Consol pour cinq ans, pour Kénogami. C'est ça, hein, que vous nous dites aujourd'hui?
M. Généreux (Bernard): Oui.
Mme Dionne-Marsolais: Bon. Alors, moi, je vous dirai ceci: je comprends que vous voulez développer ou aider à un développement de partenariat avec Abitibi pour que ses activités se poursuivent dans la région, se modernisent et continuent ? c'est ce qu'on cherche tous à faire ? la question, c'est: Comment on le fait, hein? Et avant vous le Conseil de l'industrie forestière nous a dit qu'il ne comprenait pas pourquoi on avait ce projet de loi là, parce que dans le fond il n'était pas nécessaire. Là, tout à l'heure, le maire de Saint-David-de-Falardeau nous a dit, nous a rappelé en fait, hein, que le bail qui découlait de la loi n° 8 n'avait même pas encore été signé. Donc, à date, les engagements de l'entreprise vis-à-vis de cette loi-là n'ont probablement pas été respectés, puisque ça n'a pas encore été signé.
Donc, là, ma question, c'est: Là, on veut un autre projet de loi qui prévoit des redevances dont on ne connaît pas l'envergure, qu'on nous dit de l'ordre de 25 millions, sauf si l'entreprise fait d'autres investissements dont on ne sait pas la nature. En fait, on gagne encore quatre ans, c'est ce qu'on fait avec ce projet de loi là, «on» étant l'entreprise. Et, au bout de quatre ans, si elle n'a pas payé ses redevances ou si elle n'a pas encore signé une entente, on ne sera pas plus avancé puis on n'aura pas plus d'argent. Peut-être que la municipalité de Saint-David, elle va avoir encore ses revenus, mais c'est peut-être la seule qui tire son épingle du jeu là-dedans. Non, je dis ça avec humour, mais honnêtement je ne trouve pas ça drôle puis je suis inquiète de ce projet de loi là. Et je partage votre lecture à l'effet qu'il faut trouver, avec l'entreprise, un terrain de coopération pour qu'ils puissent redresser leur situation financière, qui a commencé à être redressée parce que leurs activités de papier journal sont quasiment finies puis les autres activités, elles peuvent être lucratives. Mais j'aimerais ça qu'on... Et j'espère ? l'entreprise va nous parler tout à l'heure ? et j'espère qu'elle va nous donner les chiffres qui nous intéressent le plus.
Mais ce qu'il faut trouver, et je ne crois pas que ce projet de loi là l'a, c'est le moyen de nous assurer qu'ils soient intéressés à poursuivre des investissements, à continuer des investissements au Québec et qu'ils le fassent. Et le projet de loi n° 8 ouvre la porte à ça. Celui de 1999, tout ce qu'il fait, c'est qu'il gagne du temps, et il n'oblige pas l'entreprise à des actions concrètes. Et, moi, je suis d'accord avec vous sur le fonds. Je trouve que l'idée d'avoir ce fonds de diversification puis que ce fonds régional-là... je trouve que ça fait du sens, mais je n'ai pas l'impression qu'il va y avoir grand-chose dedans, en tout cas pas avant quatre ans. Et puis je dis ça bien candidement, là, parce que je ne crois pas qu'on a trouvé ou que le gouvernement a trouvé en ce moment, avec le projet de loi n° 99, le moyen d'amener l'entreprise à collaborer avec lui pour développer des emplois dans la région. Et d'ailleurs, je vous le dis, je suis même tellement étonnée de ça parce que ce même gouvernement n'a jamais voulu donner à un autre secteur d'activité qui est l'aluminium, puis à Alcoa, pour ne pas la nommer, des conditions qui avaient été négociées par le gouvernement précédent, qui auraient permis à cette entreprise-là de poursuivre ses investissements au Québec, dans une autre région qui n'est pas la vôtre, là, mais qui est plus lointaine.
Alors, je suis très sceptique, mais je comprends ce que vous nous dites et je comprends aussi l'importance, enfin l'approche constructive que vous avez avec ce mémoire-là. C'est tout ce que j'ai à dire, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, madame. Est-ce que vous avez un commentaire?
M. Généreux (Bernard): Je le reçois comme un commentaire, mais c'est sûr que, moi, je me dis: Dans cet échiquier nouveau, là, il y a peut-être un joueur qu'il va falloir, de plus en plus, intégrer à la réflexion, c'est les régions, hein...
Mme Dionne-Marsolais: Ça, on est d'accord, tout à fait d'accord.
M. Généreux (Bernard): ... ? là-dessus je pense qu'on se rejoint ? et que les régions soient partie prenante de la définition des projets puis du redéploiement des activités industrielles sur les territoires...
Mme Dionne-Marsolais: Votre message est reçu.
M. Généreux (Bernard): ...parce que c'est de notre avenir dont il s'agit, à tous.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui, merci, M. le Président. Alors, M. Généreux, M. Dufour, M. Chiasson, M. Hudon, bienvenue, merci pour vos présentations respectives.
Moi, j'aurais une question. C'est assez simple. J'aimerais poser la question à M. le maire de Saint-David-de-Falardeau. M. Dufour, s'il y avait d'autres dispositions législatives qui protégeaient la municipalité de Saint-David-de-Falardeau en ce qui concerne les revenus que vous tirez, là, de la fameuse Loi sur la fiscalité municipale, est-ce que vous auriez objection à ce que la propriété de ces ouvrages, de ces barrages soit transférée à une entité, par exemple, publique telle qu'une MRC ou encore qui agirait comme gestionnaire? Mais il faudrait, comme je l'ai toujours dit, que vous soyez garanti, autrement dit, là, bien garanti que vos revenus soient là à chaque année, comme vous les avez présentement.
M. Dufour (Jean-Yves): M. le député, j'ai de la difficulté à penser qu'un gouvernement peut établir un projet de loi qui affecterait une seule municipalité pour faire un calcul et de quelle façon le gouvernement pourrait établir un calcul au niveau de ces redevances-là, parce que vous le savez, que c'est en fonction de la progression de la municipalité que nos revenus augmentent. Ça fait que, comment un gouvernement peut estimer une évaluation et faire une loi principalement pour la municipalité de Saint-David, c'est là-dessus que j'ai de la misère à me situer par rapport à un changement.
M. Côté: Mais vous savez aussi, vous êtes au fait pertinemment que, si jamais ? écoutez, je dis «si jamais», probablement que ça n'arrivera jamais, mais il ne faut jamais dire ça non plus ? si jamais Abitibi-Consol avait des problèmes financiers énormes et qu'elle était obligée, par exemple, de faire une faillite, n'importe quoi, vous savez que le gouvernement ? vous vivriez la situation dont on parle aujourd'hui ? le gouvernement reprendrait les installations, et, à ce moment-là, on serait dans la même situation que vous avez peur de vivre présentement.
M. Dufour (Jean-Yves): Mais, M. le député, présentement, à l'heure actuelle, la municipalité de Falardeau ne le vit pas, ce problème-là, et je ne veux pas commencer à avoir à discuter sur les problèmes avant qu'ils soient arrivés, là. Moi, dans mon entreprise, j'attends que mes problèmes arrivent avant de trouver une solution.
M. Côté: Mais des fois il faut prévenir. Mieux vaut prévenir que guérir.
M. Dufour (Jean-Yves): Non, ce n'est pas ça, M. le député. Ça fait quand même 27 ans que je suis en affaires puis, des problèmes dans une entreprise ? d'ailleurs, je l'ai appris puis j'en faisais justement mention à mes garçons qui viennent de sortir de l'université ? parce que, quand on a un problème dans un livre puis que la solution est écrite à l'autre bout, c'est facile, mais, quand tu arrives sur un fait où la solution n'est pas écrite, c'est à ce moment-là qu'on doit prendre les décisions. C'est très difficile de trouver une solution à un problème qu'on ne connaît pas.
Là, présentement on la vit avec Abitibi-Consol. On sait que les entreprises ont de la difficulté, mais je pense qu'à l'heure actuelle, même si on appliquait la loi n° 8, je le vivrais tout de suite, présentement, là. Ça fait qu'à partir du moment où est-ce que je la vis présentement... Puis, si vous avez des propositions autres, je voudrais les entendre. D'ailleurs, on a déjà eu des discussions là-dessus, M. le député. Je n'ai pas toujours partagé votre point de vue. Vous avez quand même fait un bon travail, je ne dis pas que ce n'est pas... Je ne suis pas en train de remettre en question le travail qui a été fait, mais je vous donne la position par rapport à ma municipalité. Qu'est-ce qui se produirait demain matin, si la municipalité de Saint-David perdrait des redevances de 1,8 million? Ce serait catastrophique.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Saint-Maurice.
M. Pinard: Merci, M. le Président. Écoutez, depuis 9 heures ce matin, nous avons reçu plusieurs groupes. Nous avons eu le privilège d'entendre ces groupes-là s'exprimer sur la situation qui a été vécue à Port-Alfred, mais ce qui a été le plus troublant pour nous, ça a été la situation qui a été mise de l'avant concernant l'usine de Kénogami. On a mentionné à plusieurs reprises qu'il y avait eu des investissements très importants, majeurs, à l'usine d'Alma concernant l'apport, concernant d'autres équipements, qui font en sorte que cette usine-là, aujourd'hui, est une usine qui peut affronter ses principales rivales mondiales.
n(16 h 50)n On nous a également mentionné le peu d'investissement qui a été fait à l'usine de Kénogami, depuis l'entente qui a été signée à l'époque ? je pense que c'est en 1998 ou 1999 que le gouvernement du Québec a signé cette entente ? de sorte qu'il y avait deux usines chez vous, dans votre région, qui constituaient de plus en plus un problème majeur pour les autorités d'Abitibi-Consol, soit l'usine de Port-Alfred et éventuellement l'usine de Kénogami. M. Généreux, président de la CRE, tout à l'heure, vous nous avez fait part du fonds de diversification de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, un fonds de diversification qui tiendrait son origine de ces redevances qui devraient être versées directement à la région. Je suis issu de la région de la Mauricie, une région que vous connaissez bien, j'en suis persuadé, parallèle à la vôtre, une région qui a été érigée sensiblement dans les mêmes années, une région qui possède, tout comme la vôtre, un pouvoir électrique extraordinaire. Je pense qu'on est une des rivières les plus harnachées au Québec. Avec d'ailleurs une annonce qui a été faite dernièrement pour la construction au Rapide-des-Coeurs, Chute-Allard, etc., on va aller encore chercher d'autres mégawatts pour alimenter, bien entendu, des régions, la nôtre et d'autres régions également.
Nous sommes aussi une région qui a vu la naissance de l'aluminium et la naissance des papetières à Shawinigan. Nous avons connu ce qu'était la Shawinigan Water & Power, qui est le père et la mère d'Hydro-Québec aujourd'hui. Et, lorsque nous avons été étatiser à Shawinigan, les industries ont cessé graduellement de brancher l'extension sur le barrage pour fermer une à une, que ce soit le carbure, que ce soient les produits chimiques, que ce soit le vêtement. D'une ville de 38 000 habitants, nous sommes passés à 17 000 habitants. Et le fait que nous avons partagé cette merveilleuse richesse qu'est l'électricité avec l'ensemble du Québec ne nous a pas donné un fonds de diversification économique chez nous.
Ma question est la suivante: C'est que, comme président de la CRE, ne trouvez-vous pas que le fait d'avoir un fonds de diversification économique en plus de certains avantages tout à fait spéciaux concernant notamment l'aluminium ? et vous savez de quoi je parle parce que je viens de la Mauricie puis je ne me suis pas gêné pour vous le dire ? confère véritablement à votre région un plus, un véritable plus par rapport aux 16 autres régions administratives du Québec? Et est-ce qu'on devrait poursuivre dans cet élan de constituer un fonds pour vous et également des fonds régionaux tirés de nos matières premières ? parce que nous sommes une région ressource, nous aussi ? pour les autres régions du Québec? J'aimerais vous entendre là-dessus, M. Généreux.
M. Généreux (Bernard): Mais, écoutez, je ne voudrais pas changer le sens de cette commission parlementaire, mais il reste que la volonté de notre région de se doter d'un fonds de diversification, je souhaite que ça puisse être la volonté de toutes les régions du Québec qui ressentent ou qui vivent ce besoin de la diversification. Et c'est évident que le défi de vivre en région, de vivre dans des régions ressources particulièrement, est un défi qui va exiger des moyens importants pour être capables de le faire, le virage. Parce que partout on constate, dans les régions périphériques ou ressources, l'exode, vieillissement et baisse démographique. Donc, ces défis-là, il faut être capables de renverser la vapeur puis de faire en sorte que, dans 15 ans, là, il n'y ait pas, au Québec, que la vallée du Saint-Laurent.
Bien, il faut être capables non seulement de garder nos acquis, mais de faire en sorte qu'il y ait des défis, pour l'ensemble des générations à venir du Québec, d'aller participer au développement des régions. Puis ça, là, bien, écoutez, prenons l'exemple d'Alcan que vous énoncez. À l'époque, quand Alcan a fait son développement, bien c'est bien sûr qu'il était le pourvoyeur de tous les emplois de la ville et encore, puis ramenez ça dans le contexte de 2005, mais on ne peut plus imaginer ce type de développement là où Alcan embauche à la fois des fondeurs, des transporteurs, des gens qui font l'entretien des immeubles, etc. Donc, on n'est plus dans les mêmes paradigmes de développement. Puis je pense qu'on ne demande pas l'exclusivité des redevances sur les ressources, on demande qu'il y ait, chez nous, un fond consistant, puis on l'a établi à 450 millions sur 10 ans ? donc ce n'est pas extraordinaire, là ? mais que progressivement on puisse avoir un lieu où on va accompagner les régions pour être capables de les engager sur la voie de la diversité puis de la prospérité.
Puis ça, ça passe par le développement des compétences puis du savoir puis l'économie du savoir. Il faut qu'elle soit accessible autant aux gens de Shawinigan puis de La Tuque que de Roberval, ou de Saint-Félicien, ou de Chicoutimi, ou du Saguenay. Donc, je pense que c'est un défi qu'on a comme société, de maintenir les régions vivantes, dynamiques, prospères, puis l'occupation du territoire, ça passe par là aussi. Donc, c'est de ça qu'il est question quand on dit: Il faut faire en sorte que les régions puissent se doter de moyens pour faire face aux défis nouveaux auxquels on est confrontés comme société, autrement on va être juste une gang de petits vieux tantôt qui vont regarder partir les enfants puis qu'on va aller voir une fois par année, à Québec ou à Montréal. Puis ce n'est pas ça qu'on veut. On veut en garder quelques-uns puis que les gens aussi d'ailleurs viennent contribuer au développement de nos régions.
Le défi de l'immigration est posé aussi à nos régions. On n'a rien de fait là-dedans, on a une feuille blanche devant nous. Ça a été le fait de Montréal, puis de Québec, puis de Sherbrooke, ça, l'immigration. Donc, comment est-ce qu'on va le relever? Puis souvenez-vous qu'à l'époque où Alcan a développé ses entreprises il y en avait, des Polonais, puis il y en avait, des Anglais, puis il y en avait de toutes sortes de nationalités qui sont venus contribuer au développement des régions. Pourquoi est-ce qu'on ne serait pas capables de le faire en 2005? C'est de ça qu'on parle. Puis pour ça bien ça prend des moyens, puis, nous, on dit: Bien, c'est là qu'on met la barre. C'est le défi du XXIe siècle.
M. Pinard: Merci, monsieur.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Et je vais demander aux représentants d'Abitibi-Consolidated de bien vouloir s'avancer et prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Je souhaite la bienvenue aux représentants d'Abitibi-Consolidated. Alors, je vous rappelle les règles: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, par la suite un échange de 20 minutes avec le ministre et les députés ministériels et par après un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition. Alors, qui est le porte-parole?
M. Leclerc (Denis): Denis Leclerc.
n(17 heures)nLe Président (M. Jutras): Bon. M. Leclerc, vous vous identifiez avec la fonction que vous occupez chez Abitibi-Consol, parce qu'il n'y a rien qui nous avait été envoyé au préalable, là, et nous présenter les personnes qui vous accompagnent avec également leurs fonctions.
M. Leclerc (Denis): Avec plaisir, M. le Président. Mon nom est Denis Leclerc, je suis directeur principal des affaires générales pour l'entreprise. Je vais demander à mes collègues de se présenter. Au bout de la table, à ma droite...
Le Président (M. Jutras): À votre droite lointaine, oui.
M. Leclerc (Denis): À votre gauche.
M. Desjardins (Michel): Bonjour. Michel Desjardins. Je suis directeur général de la division Hydro Saguenay, Abitibi-Consol au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
M. Dahl (Carl): Mon nom est Carl Dahl, et je suis le directeur de l'usine d'Abitibi-Consolidated à Alma depuis maintenant presque sept ans.
Le Président (M. Jutras): Comment vous écrivez le nom de famille?
M. Dahl (Carl): D-a-h-l.
Le Président (M. Jutras): Et...
M. Lessard (Michel): Mon nom est Michel Lessard. Je suis directeur de l'usine de Kénogami.
Le Président (M. Jutras): Ça va. Alors, M. Leclerc, c'est vous qui prenez la parole en premier?
M. Leclerc (Denis): C'est ça, oui.
Le Président (M. Jutras): Oui. Alors, la parole est à vous.
M. Leclerc (Denis): Merci, mais je vais partager la parole avec mes collègues, bien entendu. Alors, merci beaucoup à tous et à toutes, et nous désirons profiter également de l'occasion qui nous est donnée pour clarifier...
Le Président (M. Jutras): M. Leclerc, avez-vous un mémoire écrit?
M. Leclerc (Denis): Oui, nous allons en avoir un à la fin de la présentation.
Le Président (M. Jutras): Ah oui?
M. Leclerc (Denis): Est-ce que ça vous va, M. le Président?
Le Président (M. Jutras): Bien, on aurait préféré l'avoir tout de suite. Est-ce que c'est parce qu'il n'est pas disponible, quoi?
M. Leclerc (Denis): Non, il est disponible. Je vais partager avec vous une certaine frustration: c'est que c'est décevant pour les gens d'ici de répondre à des questions lorsqu'on voit les intervenants se parler entre eux et ne pas écouter la réponse. Alors, s'il y a cette discipline, il n'y a aucun problème, on peut vous donner notre mémoire.
Mme Dionne-Marsolais: M. le Président?
Le Président (M. Jutras): Oui, Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que ce sera possible d'avoir une copie du mémoire?
M. Leclerc (Denis): Certainement.
Mme Dionne-Marsolais: Parce que ça nous permet de mieux comprendre ce que l'intervenant nous...
M. Leclerc (Denis): Si ça va, il n'y a aucun problème.
Mme Dionne-Marsolais: Et, quant à nos propos, nous sommes des parlementaires, et l'essentiel, c'est que nous comprenions ce que vous nous dites. Mais, quand vous le répétez six fois, permettez qu'on réfléchisse à la page suivante.
M. Leclerc (Denis): Il n'y a aucun problème. On se comprend.
Le Président (M. Jutras): Mais soyez assuré, M. Leclerc, que vous allez être écoutés attentivement.
Abitibi-Consolidated inc. (ACI)
M. Leclerc (Denis): Je vous remercie, M. le Président. C'était une petite pointe. Alors, on se comprend bien.
Quelques mots juste pour situer l'entreprise. Ici, au Québec, c'est une entreprise importante en termes d'employabilité et d'emplois directs ? 7 500 emplois directs ? et, si on regarde particulièrement la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est plus de 3 000 emplois directs, en plus des saisonniers, surtout au niveau des activités forestières. Nos installations au Saguenay? Lac-Saint-Jean ? vous avez, dans le mémoire, l'énumération de l'ensemble de nos installations ? génèrent près de 250 millions de dollars en achats de biens et services, de façon régulière, et la majorité de ces dépenses-là en biens et services est réalisée dans la région même. Depuis 1998 et contrairement à certaines perceptions populaires, l'entreprise a investi plus de un demi-milliard de dollars dans ses installations de la région, ce que M. le ministre Corbeil a précisé un peu plus tôt. Ces investissements ont ainsi permis de consolider plusieurs centaines d'emplois.
De plus, l'entreprise a créé, malgré le contexte difficile des dernières années, environ 400 nouveaux emplois dans la région. Je vais demander à mon collègue Michel Desjardins de nous donner un aperçu d'Hydro Saguenay.
M. Desjardins (Michel): Merci, Denis.
Le Président (M. Jutras): M. Desjardins.
M. Desjardins (Michel): Merci Denis. Les bases du réseau hydroélectrique d'Hydro Saguenay remontent au début du siècle. Le réseau hydroélectrique d'Abitibi-Consolidated au Saguenay?Lac-Saint-Jean comprend sept aménagements hydroélectriques pouvant produire 151 MW en période de pointe. La raison d'être du réseau d'Hydro Saguenay, autrefois appelé Hydro-Price, est de livrer l'énergie produite à ses deux divisions Price au Saguenay?Lac-Saint-Jean, soit Alma et Kénogami. La mission d'Hydro Saguenay est de maximiser les avantages énergétiques des deux usines d'Alma et de Kénogami afin d'en améliorer leur compétitivité. La division Hydro Saguenay représente également un apport important au budget des municipalités où les centrales sont localisées. Hydro Saguenay verse annuellement environ 2,3 millions de dollars en taxes municipales et scolaires ainsi que plus de 3 millions de dollars par année au gouvernement du Québec en redevances pour la production d'énergie.
En 1997, Abitibi-Price fusionnait avec Stone-Consolidated pour devenir Abitibi-Consolidated. La nouvelle société regroupait alors trois usines de papier dans la région: Alma, Kénogami, Port-Alfred. Le réseau d'Hydro Saguenay a continué à alimenter uniquement les usines de Kénogami et Alma, aucun surplus de génération ni d'infrastructure de transport d'énergie n'étant disponible pour alimenter l'usine de Port-Alfred. Il est à noter que la capacité de production d'Hydro Saguenay n'a jamais pu combler en totalité les besoins en énergie des divisions Kénogami et Alma, bien au contraire. Le degré d'autosuffisance en énergie de ces deux usines est présentement à 55 %. Par conséquent, les usines d'Alma et de Kénogami achètent de l'électricité au tarif industriel, le tarif L d'Hydro-Québec, pour environ 35 millions de dollars par année. Merci.
M. Leclerc (Denis): M. le Président, j'aimerais inviter mon collègue Carl Dahl de l'usine d'Alma.
Le Président (M. Jutras): M. Dahl.
M. Dahl (Carl): Alors, l'usine d'Alma actuellement emploie 545 personnes, opère trois machines à papier dans deux principaux produits: le premier produit qui est le marché de l'annuaire, dont on a parlé un peu aujourd'hui; l'autre produit qui est un investissement récent qu'on vient de faire pour convertir une de nos machines à papier qui produisait du papier journal vers du papier à valeur ajoutée qu'on appelle Equal Offset. C'est une invention récente, ce type de papier là, qui remplace d'autres applications de papier qui sont fabriquées actuellement, principalement, par des Américains.
L'historique de l'usine. Bien, on a été construits en 1925, et puis, en 1925, lorsque William Price a décidé de construire une usine, il a aussi en même temps demandé qu'on agrandisse les installations hydroélectriques qui existaient, à ce moment-là, pour l'usine de Kénogami afin de pouvoir fournir de l'électricité pour l'usine d'Alma. Donc, dès sa naissance, l'usine d'Alma était reliée à ces centrales et a utilisé ces centrales-là pour s'alimenter en électricité. J'aimerais vous citer quelques dates importantes du passé de l'usine parce qu'elles peuvent peut-être aider la réflexion de la commission. Alors, en 1985 ? je suis passé de 1925 à 1985, il y a eu plusieurs évolutions ? mais, en 1985, c'est une date importante, je pense, parce que l'usine, à ce moment-là, en 1985, opérait uniquement sur du papier journal ? toutes les machines à papier ? sur du papier journal. La corporation a décidé, à ce moment-là, de faire des investissements majeurs: convertir deux de ses machines à papier, donc à peu près la moitié de la production, sur le papier annuaire. Pourquoi? Parce que c'était une façon de maintenir les opérations rentables et puis d'assurer le futur de cette usine-là.
De 1990 à 1995, ça a été une époque extrêmement difficile. L'usine n'était pas rentable pendant cette période-là, et il y a même eu des rumeurs de fermeture qui ont duré pendant plusieurs années. Pour passer au travers de cette époque-là ? parce qu'on se retrouve avec une usine, en 1990-1995, qui ne fait pas de profit puis qui est menacée de fermeture ? alors, pour passer au travers, deux recettes. La première, les employés, la direction puis les syndicats ont décidé d'implanter le partenariat puis l'implication des employés et puis d'améliorer les performances de l'usine pour la rendre intéressante pour des investissements et puis pour la rentabiliser. Bien, ça a marché parce que, de 1994 à 1996, la corporation a investi plus de 200 millions dans cette usine-là. L'objectif, c'était de doter l'usine d'une place compétitive dans les marchés de l'annuaire et de rendre le marché du journal plus rentable pour l'usine.
Une autre date importante dans la vie de l'usine, puis qui est très récente, ce sont les années 2003, 2004 où l'usine a été choisie, parmi les 23 usines appartenant à Abitibi-Consolidated, pour réaliser un projet majeur de 200 millions de conversion du papier journal vers un nouveau type de papier du futur ou de l'avenir qui avait comme impact, entre autres, pour les employés d'assurer ou d'aider à assurer le futur à long terme de cette usine-là. Pour obtenir ce projet-là, on a travaillé là-dessus pendant trois ou quatre ans. Pourquoi? Parce qu'il fallait réussir à réunir les conditions qui allaient faire que la corporation allait décider d'investir, à l'usine d'Alma, pour ce projet-là au lieu d'investir dans les 23 autres usines de la corporation.
n(17 h 10)n Ce que j'ai eu l'occasion de me rendre compte... Puis une des premières questions qu'ils m'ont posées lorsque j'ai commencé à aller discuter avec l'exécutif de la compagnie ? après ça, j'ai discuté avec les actionnaires de la compagnie pour cet investissement-là ? une des premières questions, c'est: La fibre? As-tu de la fibre? Bien oui, on a de la fibre. On a des CAAF. On a des divisions forestières qui nous disent qu'on a le bois qu'il nous faut, et puis nos CAAF sont renouvelables tous les cinq ans, donc on est sûrs qu'on a de la fibre. Pourquoi ils posent cette question-là? Parce qu'on fait du papier. Si on n'a pas de fibre, dans trois ans, l'investissement, il sert à quoi? Absolument rien. Donc, c'est quelque chose d'extrêmement important.
La deuxième question qu'ils m'ont posée, c'est: As-tu de l'énergie? Bien oui, on a de l'énergie puis non seulement on en a, mais on est capables d'assurer des coûts d'énergie assez bas parce qu'on a des installations hydroélectriques qui nous permettent d'avoir de l'énergie à plus bas coût que les autres. Est-ce que cette énergie-là va être disponible dans cinq ans? Oui. On a un bail jusqu'en 2012 à peu près, et puis, avec ce bail-là, je suis capable de vous assurer qu'on a plus de chances, à l'usine d'Alma, d'avoir de l'énergie à long terme que dans les autres usines. L'autre chose qu'ils m'ont demandée, c'est: Quelles sont les chances que les promesses que vous faites dans ce projet-là ? parce qu'eux autres, ils investissent pour faire de l'argent ? qu'est-ce qui peut nous assurer qu'on va avoir les profits ou les bénéfices qui sont reliés à ce projet-là? Bien, c'est sûr que, quand tu regardes l'énergie puis le bois, ça représente au moins 35 %, 40 % des dépenses d'une usine. Quand tu es capable de dire comme usine: Moi, j'ai un avantage sur les autres parce que je suis capable de vous dire que je vais avoir des bons coûts d'énergie, je vais avoir des bons coûts de bois puis je vais avoir la fibre qu'il me faut, eh bien, c'est quelque chose d'extrêmement important dans la résolution d'un projet.
Finalement, au bout de plusieurs années, on a obtenu ce projet-là. Pour l'obtenir, la recette n'a pas été compliquée. Ça prend deux choses principalement, trois, je dirais. La première, ça prend un investissement qui va être meilleur que l'investissement qu'on pourrait faire ailleurs dans la corporation, donc il faut avoir une proposition d'affaires qui est extrêmement intéressante. La deuxième condition, c'est qu'il faut réussir à convaincre ces gens-là qu'il y a pas mal de chances que ce projet-là fonctionne bien puis qu'on en retire les bénéfices. Puis ça, l'usine d'Alma, avec la fibre ? on est directement dans la forêt boréale ? avec les droits hydroélectriques, on avait quand même des avantages pour aider à raffermir la certitude d'obtenir les bénéfices pour lesquels ce projet-là aurait lieu. Et puis aussi dans le passé, comme j'ai dit tantôt, on a eu d'autres investissements puis, à toutes les fois qu'il y a eu des investissements à l'usine d'Alma, on a livré la marchandise. Parce que, quand tu fais un investissement, il y a une espérance de bénéfice au bout, puis on l'a réalisé. Donc ça, ça a aidé la corporation à prendre cette décision-là, puis je pense que ces trois facteurs là ont été déterminants pour l'obtention de ce projet-là à l'usine d'Alma, une usine qui n'avait pas besoin d'investissement pour survivre nécessairement à court terme.
Dans ce contexte-là, avec ce que j'ai vécu à Alma, depuis sept ans, la loi n° 99 pourrait avoir deux impacts négatifs non négligeables pour le futur de l'usine d'Alma. Parce qu'on a eu 200 millions d'investissement, on en a eu 200 millions dans les années 1995, on en a eu 200 millions en 1985. Ça fait plusieurs millions. Ça se peut qu'on en ait encore besoin. On a deux autres machines qui sont dans le marché de l'annuaire, puis il y en a qui ont dit qu'ils étaient un petit peu inquiets du marché de l'annuaire. Nous autres aussi. Alors, dans ce contexte-là, toute augmentation des tarifs... d'électricité de l'usine, excusez-moi, vient changer la donne initiale, c'est-à-dire que, les promesses qu'on avait faites dans ce projet-là, bien il y en a une partie que je vais avoir de la difficulté à rencontrer puis que les employés avec moi vont avoir de la difficulté à rencontrer parce que la donne vient de changer, nos coûts d'électricité viennent de changer. Puis je ne dis pas que ce n'est pas légitime, mais c'est un fait.
Deuxièmement, le climat de confiance qui nous a bien servis pour obtenir cet investissement-là, bien c'est certain qu'il va falloir que je leur explique, à un moment donné, à ces gens-là qui ont pris la décision d'investir, que le bois qu'on avait avec les CAAF, puis tout, bien, là, c'est moins 20 %. Puis les coûts du bois normalement devraient augmenter parce que, quand tu enlèves 20 % puis tu as le même nombre d'usines, bien on va se les arracher, les copeaux, tantôt, puis les coûts devraient augmenter. Deuxièmement, peut-être, avec la loi n° 99, qu'il va falloir que je leur dise aussi que mes coûts d'électricité viennent de changer.
Donc, ça se peut que j'aie beaucoup de difficultés à livrer les bénéfices espérés de cet investissement-là ou de ce projet-là. En tant que directeur de l'usine d'Alma, je crois que le projet de loi n° 99 aura un impact négatif sur la capacité d'Alma d'assurer son avenir et de maintenir la confiance requise pour son futur. Merci.
Le Président (M. Jutras): Oui.
M. Leclerc (Denis): M. Lessard.
Le Président (M. Jutras): M. Lessard, oui.
M. Lessard (Michel): Kénogami. O.K. L'usine de Kénogami est en opération depuis 1912. Au fil des ans, différentes gammes de papiers y ont été manufacturées ? carton, papier journal, papier annuaire ? et le nombre des machines est passé de sept à deux.
En 1985, un programme de modernisation voyait le jour afin de fabriquer un nouveau type de papier sur la machine n° 7, le surcalandré SCA qui sert principalement à l'impression de magazines, catalogues et encarts publicitaires. Comme chaque tonne de papier SCA nécessite environ 25 % plus d'énergie que pour produire une tonne de papier journal, le choix de Kénogami pour cet investissement avait été basé notamment sur les avantages hydroélectriques et la qualité de la fibre qu'on retrouve dans notre région. Aujourd'hui, l'usine opère deux machines à papier produisant environ 200 000 tonnes de papier, par année, de qualité ou de catégorie SCA, SCB.
Nous employons 440 employés pour une masse salariale légèrement supérieure à 40 millions. Nous achetons environ 70 millions de dollars en biens et services, dont environ la moitié est achetée régionalement. Notre production est vendue presque en totalité aux États-Unis, nous rendant par le fait même très sensibles à l'appréciation du dollar canadien. À la fin des années quatre-vingt-dix, pour consolider notre position sur le marché du papier surcalendré et pour diminuer nos coûts de production afin de demeurer concurrentielle, Abitibi-Consol a investi 128 millions à notre usine de Kénogami. Alors, je pense que c'est une somme qu'on peut qualifier d'assez importante. Parce que, tout à l'heure, j'ai compris qu'on n'avait pas investi à Kénogami. Mais on a investi 128 millions, et, depuis 1998, c'est 145 millions. Ces investissements-là ont servi à construire un nouvel atelier dernière technologie de pâtes thermomécaniques, à construire un atelier dernière technologie de blanchiment au peroxyde comme celui qui vient de se construire à Alma, dans leur nouveau projet, à construire une nouvelle ligne d'emballage nous permettant de fabriquer et d'envelopper de gros rouleaux et diverses améliorations aux machines à papiers et aux supercalendres permettant la fabrication de gros rouleaux.
C'est évident que, comme à Alma, les droits hydroélectriques ont représenté un facteur clé dans le choix de faire cet investissement à Kénogami. Et, n'eût été de cet investissement et de la collaboration des syndicats et de tous les employés, l'usine de Kénogami n'aurait sans doute pas été en mesure de passer à travers la période extrêmement difficile qu'elle connaît depuis les dernières années. En effet, même après avoir amélioré considérablement tous les facteurs d'efficacité d'une usine, Kénogami, meilleure usine d'Abitibi-Consol au Québec, au niveau santé et sécurité, au cours des deux dernières années; Kénogami, entre parenthèses, «bench mark» d'Abitibi-Consol pour l'usine ayant la meilleure gestion en environnement; Kénogami, usine ayant diminué ses coûts de production d'environ 50 $ au cours de la dernière année; Kénogami ayant amélioré sa qualité, ça fait que Kénogami ne veut pas se laisser mourir. Kénogami est là, avec ses employés, pour rester attrayante pour d'autres investissements au niveau d'Abitibi-Consol.
Je vous dirais que, la performance de l'usine, depuis 2001, l'usine a augmenté sa productivité de 12 %. Malheureusement, des facteurs hors de notre contrôle ainsi que la situation difficile des marchés sont venus annuler les fruits de nos efforts. En ce qui concerne la situation actuelle des machines de l'usine, les opérations de la machine n° 6 sont particulièrement vulnérables compte tenu de l'âge de la machine et des marchés dans lesquels elle évolue. Les conséquences potentielles de la loi n° 99 viendraient malheureusement représenter un fardeau additionnel pour la poursuite des activités de la machine n° 6. C'est une réalité qu'il faut prendre en considération.
Pour terminer, il est trompeur de prétendre que le spectre de redevances additionnelles va forcer Abitibi-Consolidated à investir plus de 500 millions de dollars à l'usine de Kénogami, surtout dans le présent contexte économique, commercial et financier. Merci.
Le Président (M. Jutras): M. Leclerc.
n(17 h 20)nM. Leclerc (Denis): Rapidement, pour conclure, le choix du gouvernement de revoir ou non la loi n° 8 doit obligatoirement tenir compte du contexte économique et commercial passé et présent. Aucun expert ni spécialiste tant au niveau des marchés qu'au niveau des différents paliers de gouvernement n'avait pu prévoir ou n'aurait pu prévoir un contexte aussi difficile pour l'industrie forestière et papetière.
Comme l'ont souligné Michel et Carl, les avantages hydroélectriques ont représenté des éléments souvent essentiels dans les décisions d'investissement majeur dont ont bénéficié tant l'usine de Kénogami que celle d'Alma. Comme l'a souligné plus tôt le député de Dubuc, Abitibi-Consolidated est aussi convaincue que l'objectif premier de la loi n° 8, ça visait le maintien, voire l'accroissement des activités socioéconomiques de l'entreprise dans la région. Il est paradoxal de constater que le projet de loi n° 99, qui a été déposé pour amender la loi n° 8, pourrait avoir des conséquences tout à fait contraires et affecter d'autres usines et d'autres travailleurs dans la région tel que mentionné, aujourd'hui, par la majorité des intervenants. Il est aussi illusoire de penser punir uniquement l'entreprise. Tous ceux qui bénéficient de la présence des usines de l'entreprise dans la région seront aussi affectés par la décision du gouvernement s'il en résulte en des coûts additionnels.
Nous sommes persuadés que, si le gouvernement prenait en considération les cinq points suivants, la situation serait probablement tout autre: d'abord, les changements fondamentaux importants, au cours des dernières années, tant au niveau économique que commercial, qui étaient hors du contrôle soit de l'entreprise ou de l'industrie; deuxième, les 400 nouveaux emplois créés, dans la région, par Abitibi-Consolidated au cours des dernières années; troisièmement, le respect des conditions de la loi n° 8 quant aux investissements obligatoires ? M. le ministre a mentionné plus de 500 millions ? et le paiement annuel de plus de 3 millions de dollars de redevances au gouvernement du Québec; quatrièmement, les efforts de l'entreprise pour trouver une nouvelle vocation industrielle au site de l'usine de Port-Alfred, entre autres, avec le député de Dubuc; et cinquièmement, et surtout cinquièmement, comme les syndicats l'ont clairement mentionné, les conséquences potentielles sur les autres usines de l'entreprise dans la région et surtout ceux qui en bénéficient.
Conséquemment, le gouvernement devrait surseoir à l'idée d'imposer toute forme de redevance supplémentaire à Abitibi-Consolidated, car cela viendrait totalement à l'encontre de l'objectif visé par la loi n° 8. Et, au lieu de débattre, aujourd'hui, d'un projet de loi qui pourrait avoir des conséquences négatives sur les usines de Kénogami ou d'Alma, travaillons donc tous ensemble pour essayer de trouver des solutions afin de maintenir ou d'accroître les activités de l'entreprise dans la région. Merci beaucoup.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci, MM. Leclerc, Lessard, Dahl et Desjardins. J'ai visité l'usine de Kénogami. Je n'ai pas encore visité celle d'Alma. Maintenant, je suis un petit peu je ne dirais pas «décontenancé» mais surpris parce qu'on vient nous dire ici qu'on ne devrait pas adopter le projet de loi n° 99 et on ne devrait pas non plus appliquer la loi n° 8, la loi n° 8 qui prévoit que, s'il y a une installation de la compagnie qui ferme dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, on annule les droits hydrauliques. On pourrait annuler. On ne devrait pas nécessairement, mais on pourrait annuler les droits ou le bail préférentiel sur les forces hydrauliques de la rivière Shipshaw.
Alors, si on prend l'option «pourrait» au lieu de «devoir» et qu'on n'adopte pas le projet de loi n° 99, l'usine de Port-Alfred aura fermé, il y aura 640 emplois de perdus, puis on dira amen? Ce n'est pas plus compliqué que ça? Je suis surpris, je vous avouerai bien franchement, parce que ce qu'on essaie de faire, c'est d'essayer de trouver un équilibre. On est conscients de tout le tableau ou la situation que vous venez de nous dresser, mais il faut quand même, à plus d'un égard, faire en sorte qu'il y ait des investissements qui se réalisent dans cette région-là et faire en sorte qu'on maintienne et qu'on améliore le niveau d'emploi dans cette région-là. Je suis heureux que vous nous invitiez à le faire avec vous. Je pense qu'on ne peut pas le faire sans vous. On doit le faire aussi avec les travailleurs, avec les représentants des travailleurs puis on doit le faire avec la région.
Alors, si on ne suspend pas les forces hydrauliques sur la Shipshaw avec l'option qui était dans la loi n° 8, on n'adopte pas la loi n° 99, est-ce que vous pourriez me dire, M. Leclerc, si vous comptez investir prochainement, de façon significative et importante, dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean?
Le Président (M. Jutras): M. Leclerc.
M. Leclerc (Denis): Habituellement, M. le Président, je ne dirais pas amen ici. Non, il n'y a pas d'amen parce qu'il y a eu la fermeture de Port-Alfred, et les gens savent très bien, ceux qui ont été impliqués, tant dans votre ministère que dans différents autres ministères du gouvernement du Québec et les gens de la région, que le comité de relance de l'usine de Port-Alfred a évalué toutes sortes de scénarios pour trouver une solution à cette usine, pendant 13 mois. Malheureusement ? et tout le monde est d'accord pour le répéter ? malheureusement, on n'a pas pu trouver de scénario, de scénario viable à long terme. Et, vous savez, ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on ferme une usine. C'est des décisions difficiles bien souvent et très souvent trop souvent nécessaires. C'est nécessaire malheureusement, parce qu'il y a des changements structuraux importants qui arrivent.
Ceci étant dit, nous, comme entreprise, la façon dont on voit notre rôle suite à la fermeture de Port-Alfred, suite aux efforts qu'on a faits avec le syndicat, avec la communauté, avec le gouvernement pour essayer de trouver un scénario de production de papier pour l'usine, maintenant, étant donné que ça, c'est impossible, on continue à travailler avec les gens du milieu pour trouver une nouvelle vocation aux infrastructures industrielles de base de l'usine. Abitibi-Consolidated est engagée dans cette voie-là ? vous le savez, des gens un peu partout le savent parce qu'ils sont impliqués ? et on espère que le site de l'usine de Port-Alfred deviendra, je dirais, le plus rapidement possible, un site de création d'emplois pour l'arrondissement de La Baie, pour le Saguenay, pour toute la région de Saguenay?Lac-Saint-Jean.
M. Dahl (Carl): M. le Président, est-ce que vous me permettez de rajouter quelque chose en réponse à cette question-là.
Le Président (M. Jutras): Oui, M. Dahl.
M. Dahl (Carl): Quand on parle du comportement d'Abitibi, etc., l'usine d'Alma est l'usine qui a reçu le plus d'investissement actuellement, dans la corporation, dans les 10 dernières années, mais non seulement ça, c'est une des usines qui a reçu le plus d'investissement dans tout le Canada puis dans l'est des États-Unis ? une usine existante que je ne parle; pas la construction d'une nouvelle usine, mais une usine existante.
Alors, c'est la même compagnie, c'est la même région puis c'est à peu près la même mentalité, parce qu'on est au Saguenay?Lac-Saint-Jean, que l'usine de Port-Alfred. C'est sûr qu'il y en a qui disent: Regardez ce qu'ils ont fait à Port-Alfred. On voit bien que leurs intentions... et puis on voit bien quelle sorte de comportement, etc. Mais, si vous regardez l'usine d'Alma puis vous demandez à n'importe quel spécialiste en pâtes et papiers, à n'importe quelle autre usine qui est dans les mêmes marchés que nous autres, ils vont vous dire: L'usine d'Alma, tabarnouche, la compagnie qui était propriétaire de ça, je vais te dire une affaire, ils ont mis un paquet de fric là-dedans. 500 millions dans une usine, en 10 ans, trouvez-en une autre, il n'y en a pas beaucoup.
Puis, pour réaliser ces investissements-là, on n'a pas eu besoin d'un coup de pied dans le derrière ni d'une pénalité, etc., on l'a fait avec le bail qu'on avait là, à ce moment-là, avec les garanties d'approvisionnement puis avec un projet qui était viable à long terme, puis un des projets qui donnaient le plus de bénéfices à cette corporation-là pour les prochaines années.
Le Président (M. Jutras): M. le ministre.
n(17 h 30)nM. Corbeil: Merci, M. Dahl. Je suis heureux de vous entendre dire que vous continuez à chercher une nouvelle vocation industrielle au site de l'usine de Port-Alfred. Bravo. Félicitations.
Maintenant, vous n'avez pas nécessairement répondu à ma question tantôt. Est-ce que vous aviez des intentions d'investir de façon importante ou significative, prochainement, dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, dans cette usine-là ou dans une autre? Je ne sais pas quels sont vos plans en ce qui concerne une nouvelle vocation industrielle à l'usine de Port-Alfred. Est-ce qu'elle va rester dans le giron de la compagnie ou elle va être vendue, là? Je n'ai pas de...
M. Leclerc (Denis): Vous parlez de l'usine de Port-Alfred?
M. Corbeil: Oui. Vous parlez ici, dans votre mémoire: «...nouvelle vocation industrielle au site de l'usine de Port-Alfred».
M. Leclerc (Denis): Oui, oui, oui. Non, premièrement, on a investi plus de un demi-milliard depuis 1998. Je pense que ça démontre...
M. Corbeil: ...mentionné tantôt.
M. Leclerc (Denis): ...une volonté d'investir dans la région et de rester un élément, un joueur important au niveau de l'activité socioéconomique de la région.
Deuxièmement, si on n'avait pas l'intention d'investir dans la région, je ne pense pas qu'on aurait débuté la production à Saint-Prime, lundi dernier, de la nouvelle usine de bois d'ingénierie. Je ne pense pas qu'on aurait investi dans l'usine de Larouche, pour en faire une nouvelle usine de bois d'ingénierie. Je ne suis pas certain qu'on aurait investi le 200 millions également à Alma. Puis je peux vous parler des Produits forestiers Saguenay puis je peux vous parler de La Doré et de l'ensemble des investissements dans la région. Alors, je peux vous dire aujourd'hui: Oui, Abitibi-Consolidated est engagée à rester présente, forte dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
M. Corbeil: Je pense qu'à Kénogami on avait, lors de la visite... Vous utilisez les copeaux essentiellement. Il n'y a plus de bois rond qui rentre chez vous ou à peu près, là.
M. Lessard (Michel): On utilise, nous autres, des copeaux, de la glaise et de la pâte kraft qui vient de Saint-Félicien.
M. Corbeil: O.K. À Alma, on utilise également des copeaux?
M. Dahl (Carl): Oui. Oui, monsieur.
M. Corbeil: Oui?
M. Dahl (Carl): On utilise des copeaux mais aussi d'autres matières premières, de la glaise, des produits chimiques, etc., de l'énergie.
M. Corbeil: D'accord. Il n'y a plus nécessité d'avoir un CAAF à l'usine ni d'Alma ni de Kénogami, vos copeaux provenant probablement principalement de vos scieries dans un complexe intégré de la région ou d'autres unités d'autres régions. C'est ça?
M. Lessard (Michel): M. le ministre, moi, à Kénogami, les copeaux proviennent à 90 % de PFS, Produits forestiers Saguenay, et à 10 % de petites scieries environnantes.
M. Dahl (Carl): Pour nous autres, à 60 %, nos copeaux proviennent de nos installations de foresterie et de nos usines de transformation du bois, donc 60 %. Puis, ce 60 % là, il y a des CAAF de reliées à ce 60 % là, puis donc on peut rattacher l'usine à ces CAAF là quand on arrive pour parler d'investissement à des actionnaires ou des investisseurs.
M. Corbeil: Je connais la chaîne, là. Merci.
M. Dahl (Carl): Je m'excuse, M. le Président.
M. Corbeil: Je ne suis pas juste le ministre de l'Énergie. J'ai été le ministre de la Forêt avant et je le suis encore.
M. Lessard (Michel): Est-ce que je peux rajouter quelque chose, M. le ministre?
Le Président (M. Jutras): Oui, M. Lessard.
M. Lessard (Michel): C'est juste qu'avec... En tout cas, moi, je suis ingénieur forestier, puis, en 1987, lorsqu'on a changé la Loi sur les forêts pour attribuer des CAAF, une usine qui n'a pas de matière de bois rond ou... ne peut pas posséder de CAAF. Ça fait que, lorsque vous me demandez si j'ai un besoin de CAAF, bien, je veux dire, par l'essence même, je ne peux pas en avoir.
M. Corbeil: C'est parce que vous avez fait des investissements dans votre usine de préparation.
M. Lessard (Michel): Oui, oui. Exactement. Exactement.
M. Corbeil: Mais, à un certain moment donné, vous deviez avoir besoin de bois rond?
M. Lessard (Michel): Oui, oui. Exactement.
M. Corbeil: Pareil comme Port-Alfred avant?
M. Lessard (Michel): Exact.
M. Corbeil: Bon. Est-ce que vous utilisez d'autres formes d'énergie que l'électricité?
M. Lessard (Michel): Parce que, nous autres, à Kénogami, c'est l'électricité, et puis on a besoin de générer de la vapeur pour sécher notre papier, là. Puis c'est pour ça qu'il y avait un intervenant aujourd'hui qui a dit que Kénogami utilise du pétrole, là ? c'est du «bunker C» ? pour chauffer nos bouilloires.
M. Dahl (Carl): Pour l'usine d'Alma, on utilise de l'électricité, on utilise du mazout, du «bunker» puis on utilise aussi les résidus de scierie qui sont des écorces qu'on brûle pour fabriquer de la vapeur pour sécher le papier.
M. Corbeil: Donc, vous avez une usine de cogénération ou de biénergie à la biomasse à Alma?
M. Dahl (Carl): Non. Je ne pourrais pas qualifier ça exactement comme ça.
M. Corbeil: Non? C'est deux entités séparées?
M. Dahl (Carl): De la coénergie, vous avez une partie électrique puis une partie vapeur. On a seulement la partie vapeur.
M. Corbeil: Est-ce qu'il y a des vues d'installer des usines de cogénération à la biomasse dans ces installations-là, pour réduire vos coûts de production et vendre de l'électricité à Hydro-Québec, par exemple, mais pas avec du gaz naturel, avec de la biomasse?
M. Lessard (Michel): Moi, je peux vous dire qu'à l'usine même on regarde des possibilités d'installer une bouilloire à écorce, mais c'est encore embryonnaire. L'objectif est tout simplement de baisser nos coûts d'énergie.
M. Corbeil: Donc, c'est des scénarios que vous envisagez?
M. Lessard (Michel): Oui.
M. Dahl (Carl): Il y a eu des discussions aussi à l'usine d'Alma, dans la dernière année.
M. Corbeil: D'accord. Je ne sais pas si mon collègue le député de Roberval ou... des autres circonscriptions auraient des questions à poser. Allez-y.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Roberval.
M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Juste une question pour tenter de trouver un éclaircissement. Ça me permettrait de dire: quand on a les mémoires juste avant la présentation, comme ça, on n'a pas souvent la possibilité de pouvoir pousser davantage, mais vous allez m'aider, messieurs. Si je regarde la loi n° 8, l'article 9 disait: «Outre les cas de résiliation sans formalité ni indemnité que pourra prévoir le bail, celui-ci pourra être ainsi résilié par le ministre dans les cas suivants: la fermeture d'une des usines exploitées par le locataire.» Théoriquement, c'est le cas. Et là vous perdez vos droits d'eau à ce moment-là.
Tantôt, dans votre présentation, sur les droits d'eau, vous avez mentionné que ? et je vais tenter de me retrouver ? que vous étiez autosuffisants à peu près à 55 %.
Une voix: Exact.
M. Blackburn: Donc, l'avantage que ça vous procure, vos droits d'eau, c'est 28 millions par année.
M. Desjardins (Michel): Ça dépend des années hydrauliques, là, ça peut osciller, là.
M. Blackburn: Mais jusque-là ça se tient.
M. Desjardins (Michel): C'est ça. Ça peut osciller.
M. Blackburn: Donc, en termes de piastres et cents, l'avantage que vous avez par rapport à l'utilisation de vos droits d'eau, c'est 28 millions par année. De par la loi n° 8, vous étiez prêts à prendre le risque de perdre 28 millions, par année, d'avantages.
M. Leclerc (Denis): C'est une partie de...
M. Blackburn: Oui, ça, c'est une partie.
M. Leclerc (Denis): C'est une partie. Parce que ça, c'est la totalité...
M. Blackburn: O.K. Donc, au net-net, c'est 10 millions par année, donc c'est 40 millions sur quatre ans. Moi, si je m'en viens avec mon projet de loi n° 99, on parle de possiblement 30 millions sur quatre ans. Donc, le risque est à peu près le même pour l'entreprise, alors que vous venez nous dire que, si on applique le projet de loi n° 99, dans votre présentation de mémoire, on vient fragiliser de façon importante les opérations d'Abitibi-Consolidated dans la région, alors que vous avez pris le risque de dire: On met une croix sur 40 millions, au net-net, d'avantages hydrauliques qu'on détient. Est-ce que ma lecture...
M. Leclerc (Denis): Je pense que je vais préciser.
M. Blackburn: Oui, parce que ce n'est pas clair, clair.
M. Leclerc (Denis): Surseoir veut dire... en application certaines conditions de la loi n° 8. Comme entreprise, on a répondu et respecté l'ensemble des conditions. Malheureusement, à cause du marché et d'autres contextes hors de notre contrôle, il a fallu fermer Port-Alfred.
Ce qu'on dit aujourd'hui, c'est: Si le gouvernement, prenant en considération les fameux cinq points, cinq points que j'ai mentionnés, qui sont ? si vous voulez, je vais le répéter, je vais y aller par coeur ? qui sont d'abord le fait qu'on a payé nos redevances, qu'on a des changements fondamentaux. On parle ici de souplesse, là, principalement de souplesse, c'est-à-dire que, dans toute transaction... Parce que ça, c'est une transaction. C'est une transaction, et, comme M. Chevrette vous l'a expliqué dans ses mots, moi, dans mes mots, c'est que c'est une transaction. Il n'y a pas d'avantage. Finalement, en retour des droits d'eau, la compagnie s'est engagée à certaines conditions. Les changements fondamentaux ont fait qu'il y a eu un changement radical et qu'une des usines, une des trois usines devenait caduque. Les hauts coûts, la situation du papier journal, l'impossibilité de trouver une solution à long terme ont fait que l'entreprise a été forcée de prendre cette décision.
Maintenant, comme dans toute transaction, il y a des éléments hors de contrôle des deux parties. Comme, dans le cadre des discussions du projet de la loi n° 8, et, s'il y en a qui s'en souviennent, il y avait d'autres éléments également qui faisaient partie de la discussion. Ces éléments-là, malheureusement, le gouvernement n'a jamais été en position de les respecter. Quoi? Bien, on parle ici des mètres cubes, 200 m³ du CAAF de l'usine de Kénogami qui, dans le cadre des discussions en 1998, a trouvé une façon de pouvoir les utiliser dans le réseau Abitibi. On comprend que le contexte a changé. On est souples, on a une certaine souplesse, on comprend que, nous, les changements, on a des changements fondamentaux qu'il a fallu faire face.
n(17 h 40)n On comprend également qu'au niveau du gouvernement il y a des choses dont on n'a pas le contrôle. Alors, comme dans toute transaction, les deux parties, à ce moment-là, doivent regarder la situation et d'agir avec souplesse. Pourquoi? Parce que je suis persuadé ? je pense qu'ici M. Côté, le député de Dubuc, l'a mentionné ? l'objectif premier de la loi n° 8, c'était quoi? Maintenir, voire accroître les activités d' Abitibi-Consolidated dans la région. C'était ça.
M. Blackburn: Mais je comprends, sauf que ce n'est pas clair encore. Je reviens avec la loi n° 8. Indépendamment de toutes les circonstances et des cinq possibilités ou propositions que vous faites à la fin de votre mémoire, indépendamment de ça, lorsque vous avez pris la décision de fermer de façon définitive Abitibi-Consol à Port-Alfred, vous saviez que la loi n° 8 disait que, s'il y avait une fermeture, vous perdiez vos droits d'eau.
M. Leclerc (Denis): Bien, ce n'est pas la lecture.
M. Dahl (Carl): ...est-ce que je peux intervenir?
Une voix: Oui, allez-y. Allez-y.
M. Dahl (Carl): Lorsqu'à l'usine de Port-Alfred la fermeture a été annoncée, on commençait les investissements à Alma. Ces investissements-là avaient été regardés avec...
Une voix: ...
M. Dahl (Carl): Comment? C'est en 2003?
Une voix: 2003.
M. Dahl (Carl): 2003. On commençait les investissements à Alma et puis on avait regardé, dans le cadre de ces investissements-là, le gouvernement, dont Stéphan qui est là, qui a participé, avec la municipalité, tout le monde, on s'est mis ensemble, on a regardé ça. Et puis, au niveau des baux électriques, quand on a annoncé la fermeture de l'usine, je me suis fait poser la question par deux: mon syndicat qui me dit: On va-tu arrêter les investissements parce que tu perds les baux?, puis la compagnie qui me demandait: Qu'est-ce qui va arriver avec ces baux-là? On va-tu perdre les baux au complet?
Ce que j'ai répondu aux employés puis aux gens qui me fournissaient cet argent-là pour investir dans l'usine, c'est qu'au pire, si on regarde ce texte de loi là, on a rencontré les investissements de 371 millions qui étaient requis et on les a dépassés de beaucoup plus que 30 millions si vous faites l'addition. Deuxièmement, sur trois usines qu'on devait maintenir en opération, on en a encore deux en opération, dont une où on vient d'investir d'une façon majeure. Alors, j'ai répondu à ces gens-là: Au pire aller, peut-être qu'on perdra un quart ou un tiers mais pas tous les baux. Parce que le mot «pourra», je pense... Puis, lorsque j'ai eu les discussions avec les gens qui ont négocié ça, c'était pour dire: Bien, quand on sera rendus là. Parce que c'est une entente à très long terme. Mais, avant de les enlever automatique, on va s'asseoir pour voir si c'est ça qui fait le plus de sens. On va s'asseoir, si la situation recommande que c'est ça la meilleure décision, puis on prendra la décision à ce moment-là. Alors, c'est un peu comme ça que j'ai répondu, avec ma grande naïveté, à ces gens-là.
M. Corbeil: M. le Président, je ne peux pas m'empêcher d'intervenir ici parce qu'on dira: On les enlèvera au tiers, au quart, etc. Mais nos vis-à-vis d'en face préconisent qu'on les enlève complètement. Zéro. Bon.
Ça m'amène à revenir sur la présentation du préfet ou du président de la CRE ? il est aussi préfet aussi, M. Généreux ? de tantôt. Lui, il dit que les fonds générés par la loi n° 99 pourraient être versés dans un fidéicommis quelconque et conservés à 90 % pour l'entreprise si des choses surviennent d'ici cinq ans. Est-ce que vous seriez d'accord à ce qu'on aille dans cette voie-là?
M. Leclerc (Denis): Je pense que je vais demander à mes directeurs d'usine parce que le fonds va venir de leur structure de coûts directement.
M. Corbeil: Oui, mais c'est comme de l'argent qui est mis de côté.
M. Leclerc (Denis): C'est de l'argent qui n'est pas utilisé en ce moment, et on est présentement dans un programme de réduction des coûts. Alors, je vais laisser...
M. Lessard (Michel): Moi, regardez, je ne suis pas un économiste puis je ne prétends pas l'être. Tu sais, on se fend en quatre pour essayer de garder l'usine de Kénogami en vie avec tous les 440 employés qu'on a là. Tantôt, on s'est fait dire qu'on avait demandé encore une réduction de 2 % de nos coûts. L'objectif est bien simple, c'est de demeurer en opération parce que, tout le monde l'a dit ici, l'industrie traverse une période très pénible. Donc, moi, si, demain matin ? parce que les baux hydroélectriques ont un avantage, si vous voulez, d'à peu près 10 millions à Kénogami, 50 $ la tonne ? demain matin, que j'en perde la moitié, le tiers, il y a quelqu'un à quelque part qui va me dire: Michel, regarde, il va falloir que tu trouves une façon de réduire tes coûts qui viennent d'augmenter de ce niveau-là, parce qu'aujourd'hui, même avec l'avantage qu'on a, on a juste le nez en haut de l'eau. Je ne peux pas répondre plus clairement que ça.
Le Président (M. Jutras): Ça va? Alors, merci. Maintenant, la parole est à Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue. Je dois vous dire que, personnellement, j'apprécie votre proposition à l'effet de s'asseoir puis de trouver une solution. Je pense qu'avec tout le travail qu'on a fait à cette commission, depuis plusieurs jours, là ? une journée ici, mais on a travaillé...
Une voix: ...
Mme Dionne-Marsolais: Oui, mais on a travaillé ensemble, avant, disons, plusieurs heures. On va acheter la paix, là, parce que le travail de nuit, ça ne compte pas chez eux. Quand on est au gouvernement, ça arrive souvent, je pense, et je comprends.
Mais, cela dit, quand on parle de la loi n° 8, effectivement elle permet cela, et ce n'est pas pour rien qu'elle a été énoncée de cette manière-là, parce que je pense qu'il n'y a personne ici qui veut entraîner ou une fermeture d'usine ou une réduction d'emplois dans les usines d'Abitibi-Consol au Québec. Voyons donc, ce serait irresponsable de le faire. C'est pour ça que, dans tout l'exercice que nous avons fait, comme parlementaires, on cherche à comprendre qu'est-ce qui ferait que l'entreprise, en changeant un certain nombre de choses, pourrait travailler avec nous pour améliorer et la performance de Kénogami et la performance d'Alma. Dans votre rapport, dans votre sélection, là ? ou, attendez, le rapport, la circulaire, la notice annuelle ? on fait un grand éloge de l'usine d'Alma, qui effectivement est une des usines les plus...
Une voix: Performantes.
Mme Dionne-Marsolais: ...certainement performantes, là. Je vais retrouver la partie exacte où est-ce qu'on en parle. Mais en tout cas on fait un éloge de cette usine-là et on parle des investissements et du changement de sa vocation, et tout ça. Et je vous en félicite parce qu'en ce moment avoir une productivité comme ce que vous semblez avoir, selon les chiffres de la compagnie, c'est du travail, ça, ça ne se fait pas tout seul.
Kénogami, c'est un autre défi pour toutes sortes de raisons, et ça nécessite des investissements qui sont difficiles à faire dans le secteur industriel, en ce moment. Puis on le comprend, ça. C'est pour ça que nous avons regardé ce projet de loi là et que nous ne le souhaitons pas, parce que nous pensons que, si on s'assoit avec les hommes et les femmes qui dirigent ces activités-là puis qu'on travaille à trouver une solution, ça ne veut pas dire reprendre tous les droits hydrauliques, ça. Ça peut peut-être vouloir dire reprendre la propriété, mais renégocier des conditions qui vous permettraient de demeurer compétitifs, mais ne pas sacrifier nécessairement la propriété. C'est ça, l'enjeu, là. Il y a beaucoup de scénarios possibles pour trouver une solution. Ce qu'il faut faire, c'est trouver celui qui va être optimal pour tout le monde et c'est à ça qu'il faut travailler. Oui, c'est dur, oui, c'est difficile, mais c'est ça, le travail d'un gouvernement, trouver des solutions pour que les entreprises continuent à investir chez nous.
Et, moi, je pense que ce n'est pas en disant: On va vous donner tant de millions de plus par année de redevances, peut-être que, puis, si vous investissez, que. Il faut aussi réaliser non seulement la dynamique industrielle, mais aussi la situation de l'entreprise. Et ce n'est pas parce que... Moi, je pense que, si on s'assoit avec rigueur, et qu'on regarde les chiffres, et que les chiffres sont disponibles, les gens vont trouver une solution. Et, s'il y a des analystes financiers qui sont capables d'évaluer vos cash-flows, il y a du monde au ministère des Finances qui peuvent le faire aussi, là. Il y a des gens qui sont capables de faire des liens puis d'arriver peut-être avec des solutions ou des propositions qui ne sont pas conventionnelles, mais on n'est plus dans une situation conventionnelle, vous l'avez bien expliqué. Tout le monde qui est venu ici nous a dit: L'industrie est dans une situation de changement, l'économie canadienne est dans une situation de changement. Nous sommes dans une turbulence dont on ne contrôle plus ? je parle même de l'Amérique du Nord, là ? dont on ne contrôle plus la consommation. Elle se déplace en Asie, etc. D'ailleurs, vos investissements le traduisent, ça. Votre performance le traduit aussi.
n(17 h 50)n Alors, il faut que l'on trouve le moyen de vous aider à passer à travers une période qui est difficile pour que, d'ici 2006-2008, la situation se rétablisse et que le Québec puisse aider à votre modernisation et au repositionnement de l'entreprise en Amérique du Nord. Et, moi, c'est en ce sens-là que je pense qu'on devrait tabletter ce projet de loi là, là, et puis qu'on devrait commencer à négocier de manière j'allais dire d'homme à homme, mais de manière sérieuse et rigoureuse, retourner à la table à dessin. Le gouvernement a proposé quelque chose. Visiblement, tout le monde ici est venu dire que ce n'était pas tout à fait ce qu'il fallait. Alors, trouvons ce qu'il faut. Puis, s'il y a lieu, on reviendra.
Alors, moi, M. le Président, je n'ai pas d'autre question. Je vais passer la parole à mes collègues.
Le Président (M. Jutras): Peut-être un commentaire, une réaction de la part de nos invités?
M. Dahl (Carl): Bien, moi, je...
Le Président (M. Jutras): Oui. Bien, M. Dahl. Les mains se lèvent. Oui.
M. Lessard (Michel): Bien, je suis tout à fait en accord avec Mme Marsolais...
Mme Dionne-Marsolais: C'est ça, oui.
M. Lessard (Michel): ...la députée de Rosemont. Je voulais juste vous dire ? parce que ça me touche un peu, quand vous avez parlé de Kénogami, et vous les avez vantés...
Mme Dionne-Marsolais: ...dans le rapport que j'ai lu.
M. Lessard (Michel): ...oui, O.K. ? mais je voulais juste vous dire quelque chose. Moi, j'ai des amis qui sont en arrière, ici. Il y en a deux, là: M. Noël puis M. Élie Cyr. On travaille tous ensemble à Kénogami. Je veux juste vous dire, la machine n° 6, c'est une des machines les plus vieilles de la corporation ? je pense qu'il doit y en avoir à la Belgo comme ça, 1923 ? et je veux juste vous dire que c'est la machine la plus efficace de toute la corporation. Malheureusement, elle est petite puis elle est vieille. On a augmenté la productivité. On est passés, en 2001, de 160 tonnes par jour et on est rendus à 193 tonnes par jour ? c'est tout un défi ? quand les fabricants de machines nous disaient que cette machine-là ne pourrait jamais atteindre plus qu'environ 180 tonnes par jour. On l'a fait avec nos employés.
L'usine de Kénogami est la plus performante de toutes les usines d'ACI pour les papiers à valeur ajoutée. Malheureusement, je pense que, si on avait de l'argent, vous l'avez dit, je pense qu'il y en aurait, de l'argent, qui irait, puis, je veux dire, tout le monde serait heureux. Nous autres, ce qu'on essaie de faire, là, c'est de la garder, la garder, crime, en vie puis attrayante à de l'investissement pour que, quand on aura trouvé une solution, si on est capables, que cet investissement-là vienne à Kénogami. Parce qu'on a deux avantages, Carl le disait, bien trois avantages: on a le savoir-faire de nos employés ? ils l'ont prouvé avec tous les défis qu'ils ont relevés depuis des années; on a l'avantage hydroélectrique ? puis on l'a, puis il faut compter dessus puis il faut le garder, je pense; puis on a la fibre de qualité. Espérons qu'on ne sera pas trop affectés avec les réductions de 20 %.
Le Président (M. Jutras): M. Dahl.
M. Dahl (Carl): Oui. J'aimerais me permettre de vous faire part de ma réflexion. Pour qui je me prends pour vous faire part d'une réflexion? J'ai passé 23 ans dans l'industrie des pâtes et papiers puis j'ai passé au moins 14 ans à essayer de trouver une façon d'éviter des fermetures d'usine ou d'aller chercher des investissements.
Pourquoi j'ai passé ce temps-là? J'ai travaillé à Port-Alfred pendant huit ans de temps. Après ça, j'ai travaillé à Wayagamac pendant six ans de temps. Puis, pendant ces six ans-là, à tous les mois, ils m'annonçaient une date de fermeture, puis j'essayais de trouver une façon de la sauver, la maudite, pour les employés puis la communauté, etc. Après ça, je suis allé à Alma. Puis, à Alma, tout le monde disait: Pas besoin d'investissement. Voyons donc, Carl, tu travailles pour rien, on n'en aura pas d'investissement. Puis on a eu 200 millions. J'ai entendu plusieurs fois aujourd'hui: On va la forcer, on va l'obliger, on va l'inciter à investir. Je peux vous dire que, dans ma recherche, j'ai eu l'occasion d'aller voir, en Europe, comment est-ce qu'ils font les affaires ? au Japon. J'ai eu l'occasion d'aller «benchmarker», si vous voulez, ou me comparer avec des usines qui avaient eu des succès, des usines qui ont eu des échecs et je peux vous dire que, quand on force la main d'une compagnie pour embarquer dans un projet puis que ce projet-là n'est pas viable, à long terme le résultat est toujours le même: ça a marché une fois, on la ferme au bout de deux ans; on la réessaie au bout de deux ans, tout le monde a mis de l'argent dedans, tout le monde a mis des efforts, puis finalement on finit par la fermer complètement.
La façon d'éviter de fermer une usine, c'est de trouver un contexte où est-ce qu'on peut avoir un projet qui est excellent, un des meilleurs projets possible qui va être profitable, va donner un avenir aux employés puis un avenir à la communauté dans laquelle il est, avec la contribution de tous ces gens-là qui travaillent ensemble.
Le Président (M. Jutras): Rapidement, Mme la députée de Rosemont, parce qu'il y a le député de Dubuc qui veut intervenir et le temps passe.
Mme Dionne-Marsolais: Messieurs, je partage votre manière de voir et je crois que l'on peut trouver une étape commune. Et ce que je comprends: pour l'usine de Kénogami, avec ou sans le projet de loi n° 99, il n'y aura aucune garantie pour Kénogami, si ce n'est, un, que le marché s'améliore et que, deux, on trouve une solution pour investir là, et c'est sur quoi il faut travailler. Alors, vous avez la collaboration de l'opposition officielle.
Une voix: Bravo.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Dubuc.
M. Côté: Oui. Une simple petite question, je pense. Je m'adresse à M. Leclerc. Dans votre mémoire, M. Leclerc, à la page 5, vous dites, concernant la division Kénogami, là, que vous achetez pour 70 millions de dollars en biens et services, dont la moitié régionalement. Ça veut dire: un 35 millions se fait au niveau régional pour Kénogami seulement. Mais est-ce que c'est comme ça pour toutes les usines ou bien s'il y a des achats qui se font à l'extérieur de la région, en majorité? Je pense à Alma, par exemple, ou des scieries, n'importe quoi. Avez-vous des chiffres sur ça?
M. Leclerc (Denis): Je peux vous dire qu'on a fait une évaluation, en 2002, pour la Commission sur la maximisation des retombées économiques régionales des ressources naturelles et on s'est aperçus que la très grande majorité des achats de biens et services de l'ensemble des usines du Québec se faisait au Québec. Et on a regardé région par région, et c'était à peu près le même ratio. Mais il y a certains endroits où il y avait des achats un peu plus imposants dans les régions. Ça dépend des besoins en matières premières qu'on parle ici. On a parlé de glaise, on parle de produits chimiques. Ça dépend aussi, mais la majorité sont...
M. Côté: Oui, mais vous n'avez pas le ratio du Saguenay?Lac-Saint-Jean?
M. Leclerc (Denis): Non, malheureusement, je ne l'ai pas.
M. Côté: Mais c'était à peu près moitié-moitié?
M. Leclerc (Denis): Bien, là, si on pense, à Kénogami, que c'est plus de la moitié, c'est difficile présentement, je ne peux pas m'avancer sur un chiffre.
M. Côté: C'est beau. Merci.
Le Président (M. Jutras): Il y avait M. le député du Lac-Saint-Jean qui m'a demandé la parole. Cependant, étant donné qu'il n'est pas membre de la commission, ça prendrait le consentement des parlementaires pour qu'il puisse intervenir.
Des voix: ...
Le Président (M. Jutras): Il y a un flottement. Il y a un flottement, il y a une hésitation. Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix: ...
Le Président (M. Jutras): Alors, je comprends qu'il y a consentement. M. le député du Lac-Saint-Jean.
M. Tremblay: Merci, chers collègues. Salutations à tous. Salutations aussi à M. Lapointe et les membres du syndicat d'Alma. Je tente de le dire le plus souvent possible: parfois, on peut critiquer le syndicalisme régional, mais, dans le cas d'Abitibi-Consol, c'est un vrai miracle de coopération qui s'est produit à une certaine époque où de cette façon on est parvenu à sauver l'entreprise.
Mais, pour revenir à nos moutons, M. Dahl, vous avez dit, lorsque vous êtes allés chercher les argents en investissement, que vous aviez des garanties énergétiques et vous aviez des garanties en termes de bois, de quantité de fibres de bois. Or, aujourd'hui, même si vous aviez ces garanties gouvernementales, vous allez être obligés de vous retourner vers le conseil d'administration et dire que finalement, ce que le gouvernement du Québec vous avait écrit, sa parole ne tient plus.
Alors, est-ce qu'en faisant ce projet de loi on envoie un message de: «Bien, si vous négociez avec le gouvernement du Québec et qu'il vous signe un papier, finalement vous ne pouvez pas avoir confiance en lui»? Donc, au bout du compte, est-ce que ça envoie un mauvais message envers les investisseurs à l'égard du gouvernement du Québec?
M. Dahl (Carl): Moi, je pense que oui puis je pense que la preuve, c'est que j'ai même eu l'occasion de discuter avec quelqu'un qui était ici, aujourd'hui, qui n'est pas de l'industrie des pâtes et papiers, qui est d'une autre industrie, puis je lui ai demandé: Qu'est-ce que tu fais là? Bien, il dit: Nous autres aussi, on a des droits hydroélectriques puis on va voir qu'est-ce que le gouvernement fait avec ça parce qu'il faut savoir dans quoi on s'embarque à un moment donné. Alors, oui, je vous dis que ça peut avoir un impact, c'est sûr. La confiance qu'un projet se réalise dépend du passé, dépend du présent puis dépend de ce qu'on a à offrir.
M. Tremblay: Je n'ai pas d'autre question.
Le Président (M. Jutras): Il n'y a pas d'autre question? Bon. Alors, écoutez, il me reste, messieurs, à vous remercier pour votre présentation. Et vous avez vu, M. Leclerc, que vous avez eu une écoute très, très, très attentive. Et je veux vous dire ? parce que je suis resté un petit peu accroché à votre remarque ? je veux vous dire, là, à la défense de tous les parlementaires qui sont ici, là, que, toute la journée, il y a eu une écoute très attentive de tous les parlementaires des deux côtés de la table. Et, si parfois, effectivement, il y a un échange, entre deux parlementaires, à voix basse, je peux vous assurer que ce n'est pas pour des échanges de recettes de cuisine ou pour se raconter des histoires de pêche. Parfois, ce qu'on entend suscite une certaine réaction, mais il y a toujours eu, tout au court de la journée, une écoute très attentive, et je pense que vous en avez été témoin pour votre propre présentation.
M. Leclerc (Denis): Très bien. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors donc, merci.
Une voix: ...
Le Président (M. Jutras): Non? Est-ce qu'il y a des remarques finales? Non? Je comprends que non. Alors, merci, messieurs. Bon retour.
(Fin de la séance à 18 heures)