(Quinze heures une minute)
Le Président (M. Jutras): Nous allons commencer nos travaux. Étant donné que nous avons quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Alors, je rappelle le mandat de la commission...
Des voix: ...
Le Président (M. Jutras): S'il vous plaît! s'il vous plaît! Alors, le mandat de la commission est de tenir des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 94, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs et d'autres dispositions législatives.
Est-ce que, Mme la secrétaire, vous avez des remplacements à annoncer?
La Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a pas de remplacement.
Le Président (M. Jutras): Alors, je donne l'horaire de l'après-midi: à 15 heures, nous entendrons la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean; à 16 heures, le Conseil de l'industrie forestière du Québec; à 17 heures, M. Guy Coulombe, l'ex-président de la Commission d'étude sur la gestion de la forêt québécoise; à 18 heures, remarques finales des députés de l'opposition; à 18 h 15, remarques finales du groupe parlementaire formant le gouvernement. Et nous ajournerons nos travaux à 18 heures... 18 h 30 ? oui, parce que les remarques finales se font de 18 heures à 18 h 30.
Alors, ceux qui ont des téléphones cellulaires, si vous voulez les fermer, s'il vous plaît.
Auditions (suite)
Et les représentants de la Conférence régionale des élus de Saguenay?Lac-Saint-Jean ont déjà pris place. Alors, M. Généreux, alors, bienvenue, M. Bergeron aussi, bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Alors, si vous voulez commencer, M. Généreux, dès maintenant, présenter la personne qui vous accompagne. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, par la suite il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre et les députés ministériels, et par après un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition. Alors, vous pouvez y aller.
Conférence régionale des élus
du Saguenay
?
Lac-Saint-Jean
(CRE du Saguenay
?
Lac-Saint-Jean)
M. Généreux (Bernard): Merci, M. le Président. Donc, membres de la commission, d'entrée de jeu j'aimerais peut-être souligner, là, le dépôt un peu tardif de notre mémoire. Donc, il y a des copies, là, qui viennent tout juste d'être déposées. Et vous comprendrez qu'en raison des devoirs que nous impose le ministre dans le plan d'action qui doit être déposé le 3 juin, bien on a dû travailler très... en accéléré pour être ici au rendez-vous. Mais ce qui nous fait quand même un grand plaisir d'être là, parce que la question du forestier en chef est pour nous une question très importante et qui est à notre avis au coeur du rapport Coulombe.
Donc, m'accompagne pour la présentation de ce mémoire M. Réjean Bergeron, qui est le secrétaire général de la Conférence régionale des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Peut-être également vous signaler que nous aurions aimé être en partenariat avec les régions ressources quant à la présentation de ce mémoire-là, mais, encore là, des problèmes logistiques et de contrainte de temps nous empêchent de livrer un message concerté, bien que le message que nous présenterons aujourd'hui, le point de vue que nous présenterons est d'abord le point de vue du Saguenay?Lac-Saint-Jean, mais largement partagé, je pense, par nos collègues des régions ressources.
Donc, vous me permettrez, compte tenu du temps que nous avons et du caractère relativement bref du mémoire qui est devant nous... je vais tout simplement en faire la lecture, et on va en prendre connaissance ensemble compte tenu, là, qu'il est encore chaud et tout juste sorti des presses.
Donc, le 14 avril dernier, le ministre des Ressources naturelles et de la Faune, M. Corbeil, déposait à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 94 modifiant la Loi sur le ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs et d'autres dispositions législatives. Ce faisant, le ministre vise à donner suite à la recommandation 7.2 du rapport de la Commission d'étude sur la gestion de la forêt publique québécoise: «Que le gouvernement présente devant l'Assemblée nationale, dans les meilleurs délais, un projet de loi ayant pour objet d'instituer, pour le domaine de l'État, la fonction de "forestier en chef", de prévoir le mode de nomination de son titulaire, de déterminer ses responsabilités et d'établir un cadre institutionnel traduisant des caractéristiques d'autonomie, de neutralité et d'intégrité scientifique.» La création du poste de forestier en chef est l'une des recommandations centrales de la commission Coulombe et a été réclamée par plusieurs intervenants lors des consultations publiques conduites par cette dernière.
Sans vouloir faire le procès d'intention à qui que ce soit, la revendication du poste de forestier en chef était pour regagner la confiance du public envers les gestionnaires et utilisateurs de son patrimoine forestier et surtout pour rétablir la crédibilité quant au calcul de la possibilité forestière. C'est dans ce sens que le forestier en chef se devrait d'avoir un statut d'indépendance, de neutralité et de transparence, le tout permettant de rassurer la population sur l'intégrité de la gestion de son patrimoine forestier.
En conséquence, nous nous objectons au fait qu'il soit nommé par le gouvernement et, de surcroît, qu'il occupe un poste de sous-ministre associé. Nous exprimons l'opinion que cette façon de faire ne correspond pas à l'orientation prônée dans le rapport Coulombe à l'effet que le forestier en chef puisse jouir d'une grande indépendance vis-à-vis de tous les acteurs du milieu forestier de façon à maintenir une grande crédibilité. Il devrait donc être nommé par l'Assemblée nationale et redevable à celle-ci. Il est certain que, si le gouvernement persiste dans son approche, on passera à côté de la cible.
Maintenant, pour ce qui est de ses tâches, celle de la préparation du manuel d'aménagement forestier semble aller à l'encontre de la recommandation 6.4 du rapport Coulombe. Le rapport dit: «Que, de concert avec les instances régionales, le ministère procède à une révision du Manuel d'aménagement forestier et des Instructions relatives qui en découlent, dans la perspective d'en faire un guide sylvicole, lequel devra être revu régulièrement.» Le rapport Coulombe mentionne, en page 160, que «la transformation du Manuel d'aménagement forestier et des Instructions relatives qui en découlent en un guide sylvicole est un jalon important d'une nouvelle approche de gestion par objectifs, laquelle ferait place à l'innovation et s'appuierait sur la compétence des ingénieurs forestiers en matière de prescription sylvicole. [...]Ce guide sylvicole serait offert aux aménagistes en tant que "recueil des règles de l'art en sylviculture", et ce, pour guider leurs décisions d'aménagement. Il ne constituerait donc plus un répertoire de normes et de règles ayant un caractère obligatoire. Par ailleurs, ce guide devra être revu régulièrement par un comité constitué de spécialistes internes et externes au ministère, incluant des scientifiques ainsi que des représentants de l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, et s'inspirer des meilleures pratiques sylvicoles qui sont développées au Québec et ailleurs dans le monde.» Nous demandons donc que la description de la tâche du forestier en chef colle à l'orientation proposée par la commission Coulombe, celle de l'approche de gestion par objectifs.
Maintenant, pour ce qui est de la régionalisation et de la décentralisation, il semblerait que le dénominateur commun d'un très grand nombre... de la majorité des mémoires déposés à la commission tournait aux alentours d'une plus grande participation des régionaux à la gestion forestière. Cette orientation, ayant été retenue par les commissaires, a fait l'objet d'un des cinq virages visant à bâtir des forêts pour l'avenir, soit: «Décentraliser la gestion forestière dans la transparence, l'information et la participation. Pour s'éloigner d'une gestion très centralisée et normée, ce virage vise à régionaliser et à décentraliser des pouvoirs, permettant ainsi aux populations de participer plus activement à la protection et à la mise en valeur du milieu forestier, et à l'ensemble des Québécois de s'approprier leurs forêts publiques. Il est nécessaire d'établir une foresterie encadrée mais décentralisée, axée davantage sur des résultats et des objectifs définis sur une base régionale dont le niveau d'atteinte est mesuré périodiquement et interprété en fonction d'une stratégie adaptative qui valorise l'innovation et l'expérimentation, dans un cadre néanmoins rigoureux. La situation des communautés autochtones doit conduire à des mesures particulières, notamment sur les aspects de communication, de participation [...] de concertation régionale lors de la planification et de la réalisation des activités d'aménagement forestier. Tout ceci ne sera possible que dans la mesure où les processus seront transparents et permettront de rétablir la confiance envers le secteur forestier.»n(15 h 10)n Maintenant, nous nous posons beaucoup de questions quant au sens à donner au communiqué de presse du 14 avril dernier annonçant l'intention du ministre de créer le poste de forestier en chef, et dont nous reprenons la citation suivante du ministre: «C'est pour que le forestier en chef puisse être associé aux orientations qui se développent dans la foulée de la commission Coulombe que nous avons décidé d'aller de l'avant rapidement avec ce projet de loi. Nous poursuivons actuellement l'analyse des recommandations de la commission et nous prévoyons déjà que les responsabilités du forestier en chef soient élargies, dans un deuxième temps, pour tenir davantage compte de dimensions telles que la gestion intégrée et la régionalisation.» Que doit-on penser quand on repousse dans un deuxième temps la définition des responsabilités du forestier en chef liées aux aspects de la régionalisation? À quand ce deuxième temps? Pourquoi attendre pour envoyer un message fort sur la décentralisation de la gestion forestière?
M. le ministre, le signal nous inquiète. Les régions du Québec forestier sont prêtes à passer à l'action et veulent être des joueurs signifiants et non de simples exécutants. Elles réclament une approche décentralisée qui permettra de sortir du mur-à-mur et veulent participer à dessiner les structures organisationnelles mettant à profit l'expertise présente sur le territoire. Elles souhaitent donner des indications quant à l'utilisation de la ressource forestière dans une perspective de développement durable.
Nous demandons donc que le ministre campe dès à présent les orientations gouvernementales quant à la gestion décentralisée de la forêt afin que ceux qui bientôt géreront notre forêt le fassent en fonction de ces orientations et que l'on ne se retrouve pas avec des gens qui se sentiraient mal à l'aise face à ce mouvement incontournable.
En conclusion, en tant que principale région forestière du Québec, notre perception à l'application du rapport Coulombe nous semble faite à la sauce centralisatrice. À tout le moins, c'est le constat qui semble se dégager des actions entreprises jusqu'à maintenant. Est-il nécessaire de rappeler que le rapport Coulombe doit être pris dans un tout? Et nous nous permettrons de citer le paragraphe suivant: Que les «actions [...] ne doivent pas s'inscrire dans une logique chronologique, mais bien dans une logique de simultanéité; la majorité des changements ciblés par la commission sont interreliés et s'influencent entre eux, d'où la nécessité d'atteindre assez rapidement une masse critique de résultats concrets».
Quant au poste de forestier en chef, il est essentiel de garantir son indépendance, son intégrité et son autonomie financière quant à la poursuite de ses tâches, et c'est le prix à payer pour regagner la confiance du public envers le gestionnaire et les utilisateurs du patrimoine forestier.
Quant aux aspects de régionalisation et de décentralisation, les orientations gouvernementales doivent être dès maintenant connues, puisqu'elles teinteront plusieurs actions visant à la mise en oeuvre du rapport Coulombe.
En dernier lieu, le siège social du forestier en chef et son équipe devraient se retrouver dans notre région, ce qui enverrait un signal fort quant à la déconcentration et permettrait de passer le message que l'on va faire les choses autrement dès maintenant. Merci.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Généreux. Je cède la parole au ministre. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Généreux, merci de votre présentation. M. Bergeron, bonjour. Je veux présenter, M. le Président, à nos invités la sous-ministre associée à la mise en oeuvre, Mme Paule Têtu, qui m'accompagne, et aussi M. Michel Bordeleau, sous-ministre associé au secteur Forêt Québec, et le personnel de mon cabinet et des services juridiques.
D'entrée de jeu, M. Généreux, j'aurais envie de vous poser la question suivante: En ce qui concerne les attributs du forestier en chef, est-ce que vous croyez ou vous êtes d'avis que ça devrait être obligatoirement un ingénieur forestier? Je vous pose la question, on n'en a pas fait mention dans votre mémoire, est-ce que vous avez des suggestions à nous faire de ce côté-là?
M. Généreux (Bernard): Écoutez, moi, ça ne me semble pas être un a priori, là. On n'en ferait pas, je pense, une question préalable à la désignation. Maintenant, je pense qu'il faut au premier chef que cette fonction-là ou l'individu qui la représentera soit, comme on dit dans notre mémoire, là, exempt de toute partisanerie en regard de la gestion de la forêt. On sait que, la fonction, elle est au coeur de plusieurs écoles de pensée en regard de la foresterie. Que le personnage qui aura à assumer cette fonction-là puisse faire consensus quant à la façon de voir la gestion de la forêt.
Maintenant qu'il soit un ingénieur, ce n'est pas en soi non plus un défaut, là. J'imagine qu'il y en a quelques-uns au ministère qui se promènent avec cette bague-là. Mais, écoutez, on sait que la pratique de la forêt au Québec a toujours été le fait d'ingénieurs, d'une façon très large, donc ce serait surprenant que le forestier en chef ne soit pas un ingénieur. Mais, écoutez, je me dis: Si c'est quelqu'un qui fait consensus dans le domaine puis qui ramasse... ou qui développe une approche qui se met un peu au-dessus de la mêlée, bon je pense que c'est d'abord ça, l'objectif qui est recherché.
Le Président (M. Jutras): Oui. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Vous venez de m'envoyer une balle que j'ai envie de saisir au bond, parce que vous terminez votre mémoire en disant...
M. Généreux (Bernard): Ce n'est pas une balle de golf.
M. Corbeil: Non, non, non. On a de la misère...
M. Généreux (Bernard): On laisse ça à M. Chrétien.
M. Corbeil: ...les balles de golf, on a de la misère à saisir ça au bond, mais de toute façon: «En dernier lieu, le siège social du forestier en chef et son équipe devraient se retrouver dans notre région.» Et vous venez de terminer en disant... C'est-à-dire, vous avez répondu à ma question en disant qu'il devrait être exempt de toute partisanerie à l'égard de la foresterie. Comment qu'on va pouvoir le mettre à l'abri de toute partisanerie si on l'installe chez vous?
M. Généreux (Bernard): Je pense que ce serait encore pire de le mettre à Québec.
M. Corbeil: Ah oui, pourquoi?
M. Généreux (Bernard): Non, je pense que... Écoutez, on est dans un contexte, là, où le débat qui a cours autour de la décentralisation est ce qu'il est, et on sait que cette question-là est très sensible lorsqu'on réfléchit sur le fait de ramener des ressources, qui pourraient être à Québec, dans les régions. Alors que, dans le cas qui nous préoccupe, la fonction est à créer, donc on n'enlève rien à personne, et on envoie un puissant signal que la nouvelle façon de voir la gestion de la forêt au Québec, autour d'une instance nouvelle qu'on appelle le forestier en chef, bien il y a quelque chose de naturel que ça se retrouve en région. Et naturellement au Saguenay?Lac-Saint-Jean, pourquoi pas?
M. Corbeil: Merci pour votre précision. Alors, M. le Président, j'aimerais poser d'autres question, si vous permettez. Merci. Si on le voit en région, si on le voit indépendant, qu'est-ce que vous voyez comme avantage principal quand vous proposez qu'il relève de l'Assemblée nationale quant à l'exercice de ses fonctions au quotidien?
Et l'histoire nous apprend que quelqu'un qui relève de l'Assemblée nationale et qui a des fonctions horizontales, le Vérificateur général, le Protecteur du citoyen, et j'en passe, ils n'ont pas une grande, grande tendance à être installés en région. Alors, comment qu'on fait pour concilier ça, là? Ou, à tout le moins, quel avantage que vous voyez à ce qu'il relève de l'Assemblée nationale quant à l'exercice de ses fonctions?
M. Généreux (Bernard): Bien, si, dans le mandat que lui confie l'Assemblée nationale, c'est d'aller exécuter sa mission dans les régions, je pense qu'il l'assumera à partir du mandat de l'Assemblée nationale.
Et je pense que ce qu'il faut surtout voir à travers cette désignation par l'Assemblée nationale, c'est l'objectif de la neutralité de la fonction, de mettre cette fonction-là au-dessus d'une fonction habituellement rattachée à un ministère ou à un ministre. Bien, écoutez, on nous dit que ce serait probablement le sixième sous-ministre au ministère; si c'était le cas... je ne sais pas si mes informations sont correctes. Donc, je pense qu'il faut sortir ça d'une dynamique de ministère.
Puis, je pense que ce que nous dit le rapport Coulombe, c'est que la question de la propriété de la forêt ou la perception qu'on a en regard de la forêt, ce n'est pas juste une affaire de ministère, ça appartient aux Québécois dans l'ensemble. Et je pense que la propriété publique, le caractère public de la forêt, bien il s'exprime, il doit s'exprimer à travers cette fonction-là, qui doit être au-dessus de ce qu'on voit habituellement.
Et, je veux dire, il me semble que la recommandation de la commission en regard de cette fonction-là, elle est suffisamment claire et cohérente pour donner à la foresterie une nouvelle perception par rapport à ce qu'elle était. Et de créer de ce fait une fonction qui n'est pas une fonction qui relève d'un ministère mais de l'Assemblée nationale crée une nouvelle dynamique en regard de la perception des Québécois en regard de la forêt. Et il y a là une institution que l'on créerait qui relève, là, de l'ensemble des Québécois par l'Assemblée nationale.
n(15 h 20)nM. Corbeil: O.K. Mais comment on va pouvoir concilier cette position, qui chez vous semble être bien campée, avec tout le concept de gestion intégrée du territoire et des ressources, qu'on est à mettre en oeuvre au ministère des Ressources naturelles et de la Faune présentement avec l'interaction de tous les sous-ministres des secteurs concernés ? il y en a huit, là, pour vous dire le chiffre exact: mines, faune, forêt, Forêt Québec, mise en oeuvre, territoire, information foncière, etc. ? puis là de dire: On va sortir ça du ministère, puis ce monsieur-là ou cette dame-là va être un électron libre, dépendant de l'Assemblée nationale? Vous pensez qu'il ne serait peut-être pas libre et qu'il dépendrait de l'Assemblée nationale, mais ça va être un dirigeant d'un organisme qui va s'occuper des fonctions de calcul de possibilité forestière. Comment j'intègre ça, là, avec le concept de gestion intégrée des ressources?
M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, moi, je pense que la fonction de forestier en chef, là, est avant tout une question ? puis on le dit dans le mémoire, là ? qui est une fonction de s'assurer de la pérennité quant à la gestion de la forêt au plan de son exploitation, hein. Et on fait beaucoup référence, là, à tout le doute, là, qui a été soulevé quant aux instruments qu'on a développés en regard du calcul de la possibilité forestière. Donc, ça, moi, il me semble que ça doit être d'abord ça qui est le fait du forestier en chef. Le forestier en chef, là, c'est... je pense, son nom le dit, c'est quelqu'un qui doit d'abord être dédié à la gestion de la forêt au plan de son exploitation. Maintenant, je ne vois pas comment il pourrait passer au côté de la dimension intégrée, là, de...
Et, moi, je pense que le forestier en chef, ce n'est pas lui qui devient, là, à mon sens, le responsable de l'application puis du suivi des recommandations du rapport Coulombe, là, où là on retrouve tous les aspects, là, de la gestion intégrée des ressources, qui doit continuer d'être le fait du ministère. Mais le forestier en chef a une fonction particulièrement importante en regard de la gestion du parterre forestier au plan de son exploitation, là, industrielle et autre, là, mais surtout de s'assurer qu'il définisse ou qu'il développe des instruments qui assurent l'exploitation de la forêt sur le long terme et pour les générations futures.
Donc, c'est une fonction qui n'est pas... qui n'est pas peut-être aussi horizontale qu'on peut le croire. En tout cas, moi, je pense que ça ne devient pas le ministre des Ressources naturelles, le forestier en chef, là. Il a une fonction de foresterie essentiellement.
M. Corbeil: M. Généreux, vous voulez camper, d'après ce que vous venez de me dire, le forestier en chef dans un rôle surtout axé sur l'exploitation. Vous n'avez pas fait mention de protection, de gestion écosystémique. Alors, hier, il y a quelqu'un qui a participé aux travaux de la commission et qui parlait du «ligneux en chef». Est-ce qu'on doit véritablement créer une fonction de quelqu'un qui va s'occuper exclusivement de l'exploitation de la ressource ligneuse disponible dans le milieu forestier?
M. Généreux (Bernard): Écoutez, je pense que ce ne doit pas être aussi réducteur que ça, là. La pratique de la foresterie, ce n'est pas juste du prélèvement, mais c'est beaucoup du prélèvement. Et je pense que l'angle de préoccupation, je dirais, du forestier en chef, c'est d'abord par sa crédibilité, sa dimension, et il a comme... je dirais, comme mission de rétablir l'espèce de crédibilité en regard de la pratique forestière quant à son exploitation. Je ne pense pas, là, que ce soit lui qui aurait à gérer les secteurs de trappe puis l'activité des zecs et des pourvoiries, là. Je pense que la dimension intégrée des ressources naturelles ou la ressource naturelle forêt doit demeurer au ministère, là.
Moi, encore une fois, sans en faire le chef, là, comme vous dites, de... le grand chef ligneux, là, c'est celui qui a une attention particulière, en regard de l'exploitation forestière, de rétablir la crédibilité puis l'assurance des gens que, même si on prélève de la forêt au Québec, bien on le fait dans un contexte où il y aura suffisamment de forêt pour permettre les autres usages qu'offre la forêt. Mais son souci, c'est de s'assurer que la forêt demeure un levier de développement important non seulement pour l'industrie, mais... je dirais prioritairement pour l'industrie, parce qu'il y a plein de gens, puis plein de régions puis de communautés qui vivent de la forêt, là, au plan de son exploitation, son prélèvement. Mais les autres dimensions, elles doivent s'exprimer, là, à mon point de vue, pas nécessairement autour de la fonction du forestier en chef.
M. Corbeil: M. Généreux, dans un certain sens, je comprends assez clairement votre position, mais, dans un autre sens, j'ai de la misère un petit peu à la concilier. Parce que le forestier en chef va devoir établir le calcul de la possibilité forestière unité d'aménagement forestier par unité d'aménagement forestier, région par région, etc., selon les préoccupations d'utilisation du territoire exprimées par les gens. Parce que vous avez mentionné tantôt que vous étiez préoccupé par la régionalisation de la... pas de la ressource, mais de la gestion, régionalisation de la gestion, la transparence, la simplification. Un des principaux intrants dans le calcul de la possibilité forestière, c'est de savoir où on va en couper, du bois, puis où on n'en coupera pas. Alors, je pense qu'il ne peut pas véritablement être déconnecté de la réalité de votre région, de la réalité du Québec et de l'ensemble des utilisateurs du territoire et des ressources en milieu forestier, non?
M. Généreux (Bernard): Bien, je pense que, quand on retrouve dans ses fonctions, là, l'encadrement des plans régionaux de développement, bien il y a différentes dimensions effectivement qui doivent être prises en compte, là. Je pense qu'on ne prélève pas dans le virtuel ou on ne prélève pas sans tenir compte des impacts que ça peut créer au plan des autres utilisateurs. Mais est-ce que... Moi, je pense que la principale, je dirais, perte de crédibilité qu'on a vécue dans les dernières années, c'est: est-ce qu'en acceptant ou en autorisant du prélèvement on continue de s'assurer qu'il y a... qu'on garantit la pérennité de la forêt?
Maintenant, ça, ça ne se fait pas, là, sans nécessairement tenir compte de tout ce qui intervient dans la forêt. Puis on sait que ce n'est pas juste des industriels qu'il y a dans la forêt, là, c'est très clair, et ça, bien ça doit être quelque part pris en compte. Mais sa préoccupation ou sa fonction est là-dedans, mais pas essentiellement centrée sur la gestion intégrée, là, au sens large du terme. D'abord, je pense que c'est de s'assurer que, même s'il y a du prélèvement qui se fait, ça tient compte des autres usages et des autres fonctions qu'offre la forêt.
Mais, moi, je pense que la difficulté ou le doute qui a été semé dans les dernières années au Québec, c'était de dire qu'on était en rupture de stock, qu'on s'en allait vers l'exploitation du capital. Donc ça, je pense, c'est ces aspects-là, ces dimensions-là qu'il faut rétablir puis dont le chef forestier a principalement la responsabilité, bien sûr en tenant compte, là, des autres usages qui sont ceux de la forêt.
M. Corbeil: Merci, M. Généreux. Dans votre mémoire ? attendez, je veux juste vérifier la page; une, deux ? troisième page, vous étiez préoccupés par une partie du communiqué de presse qui a été émis le 14 avril, annonçant l'intention du ministre de créer le poste de forestier en chef. Et, moi, je dis dans le communiqué simplement, là, en toute franchise et confiance que je pense qu'il doit être nommé rapidement pour être associé aux orientations qui se développent dans la foulée de la commission Coulombe, quitte à revenir ultérieurement pour clarifier les responsabilités du forestier en chef et qu'elles soient élargies pour tenir davantage compte des dimensions telles que la gestion intégrée et la régionalisation.
Vous savez que, quand on instaure une fonction, si je dis: Le forestier en chef va intervenir, interagir avec les instances régionales, que dans le rapport de la commission on identifie comme étant les commissions forestières régionales, et que ces commissions forestières régionales là n'existent pas encore sur une base légale, je ne peux pas adopter mon projet de loi tant que je n'aurai pas défini les commissions forestières régionales.
n(15 h 30)n Alors, si je prends ça dans le sens de la préoccupation que vous avez signifiée ? que doit-on entendre?, qu'est-ce qu'on doit penser?, quand est-ce le deuxième temps? ? si ça, ça arrive à l'automne, est-ce que vous me suggérez de remballer tout ça puis de revenir avec le forestier en chef quand tout sera prêt, à l'automne, ou déjà de commencer puis d'ajuster quand la phase II sera complétée? Parce que, moi, je veux savoir, là, si je fais intervenir cet acteur important de la réforme du régime forestier qu'on a entreprise le plus rapidement possible ou si on attend, quand...
M. Généreux (Bernard): Bien, moi, je mets ça dans le contexte aussi de... souvenons-nous de la conférence téléphonique que nous avions eue, là, vers la fin décembre, là, dernier avec les présidents des conférences régionales des élus, où vous faisiez état de votre intention d'adopter rapidement une masse critique de résolutions pour que l'impact du rapport soit le plus consistant possible. Parce que c'est... Moi, je pense que notre conviction, puis je pense que vous la partagez, est à l'effet qu'il faut rapidement mettre en oeuvre un nombre important de recommandations si on veut être capables d'atteindre les objectifs poursuivis par le rapport.
Mais, ce faisant, il y a également... On ne voudrait pas, puis je pense que c'est un peu l'esprit du point de vue sur le... Comment on va séquencer la mise en oeuvre de tout ça dans le contexte de la décentralisation? On ne voudrait pas que toute l'opération soit menée, puis que, quelque part plus tard, on dise: Bien, là on va s'occuper de la décentralisation. Pour nous, c'est tellement intégré, ça, qu'il ne faut pas dissocier la désignation du signal de la décentralisation. Ça va ensemble, ça.
Puis c'est un peu ça qu'on... Peut-être qu'on le décodait mal, là, mais ce qu'on voyait dans le communiqué du 14 avril, c'est comme dire: Bien, maintenant, on va nommer le chef forestier, puis plus tard on verra à lui donner un mandat de décentralisation. Pour nous, il faut que ce soit fait en même temps, puis qu'en même temps qu'on va le nommer qu'on donne le signal de la décentralisation puis de la déconcentration, qu'on retrouve en horizontal dans le rapport Coulombe comme un élément de succès du rapport. Donc, il ne faut pas dissocier les deux opérations.
M. Corbeil: M. le Président, j'ai...
Le Président (M. Jutras): 30 secondes.
M. Corbeil: Pardon?
Le Président (M. Jutras): 30 secondes.
M. Corbeil: Bien, en fait, j'ai deux réponses à donner un peu à ça. Parce que, quand on a fait notre rencontre dans votre région en particulier, le 27 avril dernier, j'ai dit que je serais même prêt à commencer, sur une base de projets pilotes, des expériences de régionalisation avec des commissions forestières à être définies. Si ce que j'entends là, présentement, c'est qu'on devrait tout avoir tout bien campé avant de commencer quelque chose, on ne commencera pas, là, au mois de juin, dans votre plan d'action, on va attendre un petit peu plus tard, cet automne, quand la commission parlementaire aura statué sur la définition en noir et blanc... noir sur blanc des commissions forestières régionales dans un projet de loi, puis etc. On commencera en 2005-2006.
Moi, ce que j'entends du rapport de la commission Coulombe, là, c'est qu'on a une fenêtre de trois ans, une période de transition où on sort d'un régime forestier qu'on connaît, qu'on veut améliorer, puis on va rentrer dans un nouveau régime forestier. Et je ne veux pas perdre aucune opportunité d'amorcer, même sur une base pilote, le plus de projets possible pour qu'on initie un mouvement.
Et la réponse, M. le Président, elle est campée, elle est campée dans l'article 11.2 du projet de loi n° 94, qui dit que là on... On ne parle pas du forestier en chef, on dit qu'on modifie la loi du ministère des Ressources naturelles et de la Faune pour dire que, dans la poursuite de sa mission, le ministre favorise l'application d'une gestion écosystémique intégrée et régionalisée de l'ensemble des activités s'exerçant dans les forêts du domaine de l'État.
Alors, je pense que j'envoie un signal on ne peut plus clair, quand le projet de loi va être adopté, que le virage ? décentralisation, régionalisation ? ça va être un objectif pas juste d'un individu dans un organisme indépendant, mais d'une équipe dans un ministère d'un gouvernement. Alors, M. le Président...
M. Généreux (Bernard): Écoutez, je pense que l'objectif étant, là, que... ce rappel-là, qu'il n'y ait pas d'équivoque sur l'intention gouvernementale en regard de l'intégration des opérations de régionalisation et de mise en place de la gestion du forestier en chef. Et je suis très heureux de vous entendre réaffirmer cette volonté gouvernementale.
Le Président (M. Jutras): Alors, maintenant, autour de l'opposition. Mme la députée de Matapédia.
Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, d'entrée de jeu j'aurais le goût de vous dire que: Est-ce qu'on en a, de l'argent, ou pas pour faire le suivi au rapport Coulombe? Parce que, dans le dernier budget, on se vantait d'avoir 25 millions par année sur trois ans. Va falloir qu'on se décide. Alors, si... on ne peut pas choisir à la pièce ce qui fait notre affaire puis repousser ce qui ne fait pas notre affaire. Parce que 225 000 $ par année qui a été demandé par ma région, les commissions régionales, c'est de là qu'est venue l'idée.
Alors je m'enligne avec une question. M. Généreux, M. Bergeron, bienvenue chez nous. Et, dans le fond, c'est qu'à un moment donné, si on attend que ça vienne: une, et une, et une, et une, on va attendre longtemps. Et là on a sollicité les CRE pour justement vous donner des idées, des plans d'action, et là-dedans, là, il y a la formation de commissions forestières régionales. Hier, le ministre nous disait que ça va agir comme interface. Moi, ce que j'aimerais que vous nous parliez... ce dont j'aimerais que vous nous parliez, c'est toute cette question d'interface entre la région... par le biais des commissions forestières régionales, les liens avec le ministère et le chef forestier ? le chef forestier. Puis... Bon, on va commencer par ça.
M. Généreux (Bernard): Écoutez, c'est évident que les attentes que l'on signifie aux régions en regard de la mise en place des commissions et le rôle qu'aura à jouer le forestier en chef, à travers tout ça, dans sa relation avec le ministère, bon ça va exiger qu'on ait effectivement les mesures ou les moyens de supporter cette interface-là, hein. Je pense que la complexité des questions forestières exige qu'il y ait autour de ceux qui ont à s'exprimer sur ces questions-là les ressources et les compétences nécessaires à élaborer des positionnements de région, qui sont particuliers, encore là, à chacune des régions mais qui s'appuient sur non seulement des compétences locales, des relations de proximité aussi avec ceux qui ont à gérer au quotidien la forêt dans chacune de nos régions.
Et quand on nous demande... ou qu'on doit envisager la mise en place de ces commissions-là, bien les commissions devront à l'évidence être accompagnées des ressources nécessaires pour accomplir leur fonction, qui devient une fonction éminemment importante dans la relation entre le forestier en chef et le ministère. Donc, effectivement, il y a une question de moyens qui est à la base de l'opérationnalisation de ces commissions-là. Maintenant, est-ce que ce qu'il y a dans le budget, dans le 225 millions, je pense, qui était prévu...
Une voix: 205.
M. Généreux (Bernard): ...205, il y a là-dedans, à notre point de vue, là, les prévisions pour la mise en place du chef forestier et également pour le support aux commissions, quelle fonction ça exercera dans le 205 millions? Il faudra voir, là. Maintenant, on n'a pas d'analyse de faite sur cette question-là.
Mme Doyer: Oui. Pour votre information, je vous réfère à la page 210 du rapport Coulombe, dans lequel on disait: «Par ailleurs, une enveloppe annuelle de 2,5 millions à l'échelle du Québec, imputée à même le réaménagement de l'enveloppe globale du Ministère[...], devrait être mise à la disposition des CRE.» Et, en étude de crédits, il y avait un 7 millions dans lequel il y avait une partie rémunération, une partie fonctionnement puis une partie qu'on a questionnée, mais on n'a pas trop su à quoi ça pourrait servir, mais j'ai l'impression que ça pourrait servir à ça.
Et j'irais avec une autre question, M. Généreux ou M. Bergeron, par rapport... Est-ce que vous avez eu accès au mémoire présenté au Conseil des ministres, avec les différentes façons, je dirais, de créer le poste de forestier en chef? Et, lorsqu'on fait l'analyse de la création d'un organisme autonome... Parce qu'ici, là, tous ceux qui ont défilé ? j'ai l'impression que ça va être ça jusqu'à la fin des consultations particulières ? voudraient avoir la création d'une entité administrative autonome de la façon la plus correcte possible. Et on a une liste d'avantages et une liste de désavantages. Et, parmi les inconvénients, là, c'est que ça prend du temps pour amener un certain nombre de choses. Mais, parmi les avantages, c'est que ça respecte les recommandations du rapport Coulombe et ça donne une... En tout cas, je vous fais grâce de... Vous n'avez pas eu accès à ça, hein?
Mais j'aimerais que vous me parliez: Comment vous voyez ça pour que ça fasse... faire en sorte... Parce qu'il y a toutes sortes de choses. Bon, comment on le choisit? Comment on le choisit? Est-ce qu'il doit absolument être attaché... bien, être entériné par l'Assemblée nationale, comme le DGE? Il y a à peu près cinq postes... peut-être deux autres qui... Alors, comment on s'assure d'avoir la meilleure personne? Et est-ce que vous êtes d'accord avec la position...
n(15 h 40)nM. Généreux (Bernard): J'aurais tendance à vous retourner la question: Comment choisissez-vous le Vérificateur général? Comment choisissez-vous le Directeur des élections? C'est un choix de l'Assemblée nationale?
Mme Doyer: Entériné, je vous dirais.
M. Généreux (Bernard): Entériné?
Mme Doyer: Entériné. C'est vraiment le gouvernement.
M. Généreux (Bernard): Sur proposition, sur recommandation?
Une voix: Aux deux tiers.
M. Généreux (Bernard): Mais on comprend qu'en regard du dossier forestier on ne peut pas se tromper. On n'a pas le droit à l'erreur quant à la probité de la personne qui sera retenue. Et, je pense, toute la question de la crédibilité, qui a été attaquée, là, au Québec depuis L'Erreur boréale, doit nous redonner la crédibilité puis confiance aux Québécois en regard de la foresterie ou de la pratique forestière. Puis, la fonction en est d'autant plus importante que c'est ça, l'objectif ultime, et que, si on ne rétablit pas la crédibilité de la forêt à travers cette fonction-là, j'ai l'impression qu'on va continuer de réclamer des états généraux puis toutes sortes de patentes qui vont nous maintenir dans un état d'insécurité permanente. Puis ça, il faut en sortir, là.
Mme Doyer: Merci. Et de quelle façon... Parce que certaines personnes qui représentaient des groupes nous ont dit qu'on n'avait pas suffisamment d'idée ? et je pense que vous êtes de ceux-là ? de qu'est-ce que c'est, l'application d'une gestion écosystémique intégrée et régionalisée. Parce que ça fait quand même partie du rôle, je dirais que c'est quasiment pour ça qu'on veut faire... arriver à la création du poste de forestier en chef. Et on lui donne des responsabilités qui tournent autour de ça, de la gestion... quelqu'un parlait d'aménagement écosystémique. Et de quelle façon on pourrait le sentir davantage, dans le projet de loi, dans le cadre de son rôle?
M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, moi, j'ai l'impression, là, que, si on lui en demande trop, à ce monsieur-là ou à cette madame-là, là, on va constamment se questionner sur c'est qui, la perle rare qui sera capable d'intégrer tout ça. Moi, je pense qu'encore une fois, là, c'est de la crédibilité de la pratique forestière dont il faut se préoccuper. Et chercher à mettre dans une seule personne l'ensemble du rapport Coulombe... En tout cas, je pense qu'il y a des responsabilités à partager là-dedans.
Le forestier en chef est une fonction importante, là, parmi les recommandations, qui est au coeur, je pense, des recommandations. Mais, de là à dire que tout l'équilibre que l'on doit retrouver autour de la pratique forestière doit passer uniquement par le forestier en chef... En tout cas, j'aurais un petit peu de difficulté à dessiner ce personnage-là, là. Je pense qu'il y a des responsabilités qui doivent continuer d'appartenir, entre autres, au ministère puis au gouvernement, là, c'est clair.
Mme Doyer: Merci. Que pensez-vous de la proposition de la Conférence des coops forestières, d'hier soir, qui sont venus nous dire... Bon, leur sixième recommandation, c'est: «Que le forestier en chef soit chargé d'implanter un processus formel permettant à tous les acteurs concernés de connaître le cheminement de la vérification des opérations de calcul du volume attribuable, et que des mécanismes précis soient établis pour résoudre et arbitrer les difficultés qui vont se présenter, et que ces processus soient modulables en fonction des particularités régionales.» Je pense que, s'il y a une région à qui ça peut s'adresser, c'est la vôtre, parce que vous avez fait beaucoup de représentations en ce sens. Et les amendements que, nous, nous avions amenés par rapport à la loi n° 71, qu'on nous a passée par bâillon ? qu'on a votée, j'en conviens, mais... On avait apporté des amendements qui amenaient... Parce que le ministre se vante de ne pas faire de mur-à-mur, puis d'aller écouter les régions, puis des ajustements possibles, et tout. Mais, moi, quand je regarde ça et que je vois qui, quelle va être cette personne-là... Comment vous réagissez à cette proposition de la Conférence des coops forestières?
M. Généreux (Bernard): Bien, écoutez, moi, ça me semble correspondre pas mal à la définition qu'on s'en fait. Moi, je pense que la fonction dessinée autour d'une préoccupation de gestion puis de développement d'outils qui sont à tous égards à la fois impartiaux et crédibles par rapport à ceux qui voient ou qui reçoivent les rapports de... Parce que, tu sais, la reddition de comptes de ce qui se passe dans la forêt, là, on ne l'a peut-être pas suffisamment définie pour être capable de créer chez le citoyen un sentiment de sécurité en regard de la pratique forestière. Et le développement de ces outils-là qui semblent être proposés par les coopératives, moi, je pense que c'est un des éléments qui est essentiel, là, dans ce qu'il faut... de la confiance qu'il faut recréer en regard des outils utilisés pour la planification de la forêt.
Mme Doyer: Et, avec les conférences forestières régionales, c'est justement l'outil... Si le chef forestier fait vraiment du terrain, c'est là qu'on va voir que ça prend tout son sens, cette...
M. Généreux (Bernard): Moi, je pense que, tu sais, de se... Tu sais, là, on dit: L'effet région, là, il faut qu'il soit au coeur des préoccupations du forestier. C'est peut-être là qu'il va être de la meilleure façon contaminé par les réalités des régions. Et, «contaminé», là, dans le sens positif du terme, là, où, quand on parlait, tu sais, là, du multiressources, là, multi-usages qu'on doit faire de la forêt, bien, à vivre dans une région... ou dans une région forestière importante comme la nôtre, bien je vous en passe un papier qu'il ne pourra pas passer au côté du fait qu'il y a des pêcheurs, il y a des chasseurs, il y a des... tu sais, il y a des trappeurs, des autochtones puis il y a toutes sortes de monde qui vivent là puis qui veulent que la forêt serve à autre chose que juste ramasser des billots, là, tu sais, là. Mais, tout en ramassant des billots, bien on est capable aussi de faire d'autre chose puis de bien le faire.
Mme Doyer: Je vous remercie, M. Généreux. Alors...
Le Président (M. Jutras): M. le député de Vanier.
Mme Doyer: Ah! Comment ça? Il restait 10 minutes.
Le Président (M. Jutras): Bien là, c'est parce qu'il m'avait demandé la parole avant, c'est tout.
M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux, merci d'être là. Question concernant le projet de loi. Une des tâches, dans le projet de loi, puis je vais juste la lire évidemment rapidement, c'est d'établir un portrait quinquennal global de l'état des forêts publiques, de l'atteinte des critères d'aménagement durable des forêts publiques. Je veux savoir, vous en avez un petit peu parlé tantôt, on parlait de la confiance évidemment qu'on a à regagner; est-ce que vous croyez que ce serait mieux perçu par les citoyens du Québec si, évidemment, ce forestier en chef là serait... peut-être pas dans la ligne, je dirais, la ligne d'autorité du ministre... Puis, tantôt, le ministre parlait de... puis je veux revenir là-dessus, sur l'électron libre: s'il n'est pas dans la ligne d'autorité, ce serait peut-être un électron libre. On a ici des tâches bien précises.
Alors, j'aimerais vous entendre sur ces deux sujets-là: un, si ce serait mieux perçu par les citoyens; puis, deux, si ce forestier en chef là n'est pas dans la ligne d'autorité du ministre, est-ce qu'on risquerait d'avoir, pour rapporter les paroles du ministre, un électron libre?
M. Généreux (Bernard): Oui. Bien, il ne faut pas... Je pense que de toute façon, là, la pratique de la forêt, ça ne peut pas être désincarné, ça, des préoccupations puis du développement de nos régions, et il faut resserrer ces exercices de planification, ou en tout cas «resserrer» dans le sens de les rendre beaucoup plus accessibles et attrayants.
Je pense qu'on a eu, là, au cours des dernières années à côtoyer souvent les présentations des fameux plans quinquennaux d'aménagement. Y a-tu quelque chose de plus insomniaque que ça? Je veux dire, le citoyen ordinaire a l'impression d'être mis devant des... Oui, on le consulte, parce que la loi l'oblige bien souvent, mais c'est quoi, son sentiment de participer à quelque chose? Et je pense que, dans les nouvelles planifications, il faut effectivement trouver les façons de faire où le chef forestier est un peu, je dirais, le... encore là la validation que ces contenus-là sont le fait de la contribution des citoyens. Puis ça, il y a un défi à relever là-dedans. Et c'est peut-être une question d'animation, là, puis de rapprocher la gestion puis de trouver les moyens pour le faire... du citoyen qui souvent assiste à ces rencontres-là puis en perd son latin. Ce n'est pas accessible.
n(15 h 50)n Donc, tout en s'assurant qu'on fait correctement les choses, il faut être capable aussi d'associer les préoccupations des citoyens à la planification. Puis je pense que, là-dessus, quand on aura à revivre ces opérations-là, le bureau du forestier en chef devra être très impliqué là-dedans, là, très associé à ça, puis sa probité comme personnage, je pense, pourrait rendre ces opérations-là encore plus crédibles et plus impliquantes, là, pour le citoyen.
Maintenant, quant à l'électron libre, moi, je pense qu'il faut lui donner les marges de manoeuvre nécessaires pour être capable d'assumer cette fonction-là. Ce n'est pas un libre-penseur qu'on veut, là, de la forêt, non plus, mais quelqu'un qui a les coudées franches puis qui est capable de dire autant au gouvernement, au ministère qu'à l'appareil, qu'à l'industrie puis à tous ceux qui en font l'usage d'envoyer les messages qu'il faut, parce qu'il a le pouvoir puis l'autorité pour le faire.
M. Légaré: Merci, M. le Président. Je vais repasser la parole...
Le Président (M. Jutras): M. le député de René-Lévesque puis, après ça, M. le député de Dubuc.
M. Dufour: Oui. Alors, deux questions rapides. Je reviens encore à la nomination du chef forestier. Je vais vous dire que, si j'appliquerais là-dessus, moi, là, là, je regarderais la définition de tâche, puis croyez-moi sincère.
Alors, on disait hier... il y a plusieurs intervenants qui ont passé, et: Oui, Assemblée nationale, mais il y avait un aspect d'imputabilité. Alors, il y a un intervenant qui disait: Il faut que ça revienne absolument au ministre parce que c'est les élus qui sont imputables. Alors, entre le fait que tu as l'Assemblée nationale, qu'il soit nommé sous-ministre adjoint, et le ministre, il ne pourrait pas y avoir, je ne le sais pas, moi, une solution mitoyenne qui serait peut-être un comité de sélection qui a un encadrement bien précis, avec une définition de tâche, qui pourrait faire en sorte qu'il sélectionnerait ceux et celles qui vont avoir appliqué sur le poste de forestier en chef?
Ma deuxième question... tout de suite parce que mon collègue veut poser une question aussi. J'ai une région et je viens du comté René-Lévesque; c'est très grand comme région, au niveau de la foresterie, aussi. Alors, vous dites dans votre dernier paragraphe: En dernier lieu, le siège social du forestier en chef et son équipe devraient se retrouver dans notre région. Hier, je disais, bon: Ça pourrait se retrouver à Roberval, ça pourrait se retrouver à Baie-Comeau ou à Québec. Mais ce que je comprends de ce paragraphe-là ? ou ce que je veux comprendre ? c'est que, de votre propre fonds intérieur, même s'il n'est pas chez vous, est-ce qu'il faut qu'il se retrouve automatiquement en région, qui enverrait un message clair, ou nécessairement chez vous qu'il faut qu'il se retrouve?
Une voix: Elle est bonne, hein?
M. Dufour: C'en est une bonne, mais elle très importante.
M. Généreux (Bernard): Est-ce qu'il faut répondre, M. le Président?
Le Président (M. Jutras): Vous n'êtes pas obligé. Allez-y.
M. Généreux (Bernard): Je dirais: Nécessairement en région, obligatoirement en région, idéalement chez nous. Mais je pense que... Écoutez, notre préoccupation, elle est entièrement là, c'est que la fonction doit être une fonction associée aux régions, compte tenu que, bon, on ne fera de dessin, là, le prélèvement puis la question de la pratique forestière, c'est une question qui interpelle l'ensemble de la société québécoise mais qui origine des régions. Et ça serait peut-être un signal tout à fait dans le ton des engagements gouvernementaux que de dire: Pour cette fonction-là qu'on crée, on la fait partir des régions. On a mis en place, là, des services de garde, je pense, en Abitibi-Témiscamingue dernièrement, on est sûrement capable de mettre le chef forestier en région, idéalement au Saguenay?Lac-Saint-Jean, qui est la région forestière la plus importante au Québec.
Une voix: À Roberval...
M. Généreux (Bernard): Ah, à Saint-Prime, tant qu'à y être. Moi, je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Dubuc.
M. Généreux (Bernard): Je ne voudrais pas faire de chicane, là.
Le Président (M. Jutras): Sauf que ça prendrait le consentement des membres, étant donné que M. le député de Dubuc n'est pas membre de la présente commission. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'il puisse poser une question?
Une voix: La Côte-Nord est d'accord.
M. Côté: Merci, chers collègues. Merci, M. le Président. Alors, M. Généreux, M. Bergeron, bienvenue à l'Assemblée nationale. Je voudrais revenir à quelque... une phrase de votre mémoire: «Quant aux aspects régionalisation et décentralisation, les orientations gouvernementales doivent être dès maintenant connues, puisqu'elles teinteront plusieurs actions visant la mise en oeuvre du rapport Coulombe.» Bon, en ce qui concerne la régionalisation, je comprends qu'on touche davantage au rapport Coulombe avec les commissions forestières, avec le forestier en chef. Mais, lorsque vous parlez de décentralisation, j'aimerais peut-être que vous donniez quelques exemples de ce que pourrait être, en matière de forêt, une véritable décentralisation. Est-ce que vous pensez, par exemple, à une administration du fonds forestier en région? Est-ce que vous pensez à l'aménagement forestier, les montants qui nous sont attribués pour l'aménagement forestier, pour les travaux sylvicole en région également?
Parce que décentralisation suppose aussi des pouvoirs. Ça prend de l'argent pour décentraliser. On ne décentralise pas, là, virtuellement. Alors, dans ce sens-là, j'aimerais vous entendre, M. le préfet, ou M. le maire, ou M. le président de la CRE.
Le Président (M. Jutras): Le sujet est vaste...
M. Généreux (Bernard): Bien, si je vous disais tout ce qu'on concocte en regard de la décentralisation, chez nous, notamment en regard des ressources naturelles et de la forêt plus particulièrement... Je pense que ça ne surprendra personne que, dans le vaste mouvement de décentralisation, si, chez nous, ça doit prendre un sens puis une couleur particulière, c'est par la décentralisation en regard des ressources naturelles, notamment de la forêt.
Et le projet de décentralisation sur lequel le gouvernement nous invite à réfléchir, puis je pense que chaque région l'a été, on réfléchit chez nous comme ailleurs, il va, je pense, on ne se fait pas de grandes révélations, porter sur cette question-là. Et on voudrait profiter, pouvoir profiter de la mise en place de l'application du rapport Coulombe, qui... En fait, un des cinq virages proposés, c'est la régionalisation-décentralisation, et on dit: Pourquoi pas profiter de ça, de l'opportunité que nous offre la mise en place du rapport Coulombe, pour traduire chez nous ce qu'on entend en matière de projet de décentralisation?
Et je ne voudrais pas qu'on se ramène à la période des mémoires, mais souvenez-vous du mémoire que la région a déposé auprès de la commission Coulombe sur cette question-là, où on réclamait la responsabilité, je dirais, totale et entière. On prenait... On dit: On veut... On prend Forêt Québec, là, qu'on déplogue de Québec, puis on replogue sur la région, puis on dit: Forêt Saguenay?Lac-Saint-Jean. C'est de même qu'on voit les choses.
Donc, oui, ça prend des moyens, oui, ça prend des ressources, mais la décentralisation, c'est effectivement une question de responsabilités et des moyens pour les assumer. Autrement, on parlera de déconcentration ou d'aménagement administratif. Mais, quand on voudra parler de véritable décentralisation, c'est comme ça qu'on voit les choses. Et nos ambitions sont illimitées en regard des ressources naturelles.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Et je demanderai immédiatement aux prochains intervenants, le Conseil de l'industrie forestière du Québec, de prendre place.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Je souhaite la bienvenue au Conseil de l'industrie forestière du Québec. M. Chevrette, bonjour.
M. Chevrette (Guy): Bonjour.
Conseil de l'industrie
forestière du Québec (CIFQ)
Le Président (M. Jutras): Alors, je rappelle les règles, même si vous les connaissez bien: 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; 20 minutes d'échange par la suite avec le ministre et les députés ministériels; et, par après, 20 minutes d'échange avec les députés de l'opposition. Alors, vous pouvez commencer dès maintenant, M. Chevrette, présenter les personnes qui vous accompagnent.
M. Chevrette (Guy): Merci. À ma droite, M. Jacques Robitaille, qui est président de tout le secteur sciage et également sur le conseil de coordination du CIFQ; Jacques Gauvin, à mon extrême droite, qui est conseiller spécial du P.D.G. du CIFQ, et d'autres fonctions qui viendront lundi; et également, à ma gauche, M. Yves Lachapelle, qui, lui, est directeur de tout le domaine du sciage également, à mon ministère, et qui est ingénieur forestier.
n(16 heures)n Tout d'abord, merci, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, Mme la sous-ministre. Donc, je voudrais tout d'abord présenter très brièvement l'association, que vous connaissez. Depuis le temps que vous me rencontrez de ce temps-ci, vous savez qu'on aura toujours nos 300 usines de sciage, 63 usines de pâtes et papiers, de carton. Nous avons également au-delà de 250 municipalités au Québec qui ne vivent presque exclusivement de forêt, dont 150 exclusivement et une centaine à 90 %, 143 000 emplois et plus, directs, indirects et induits.
L'activité de l'industrie forestière représente environ 3 % du produit intérieur brut et ses dépenses en immobilisations avoisinent les 2 milliards de dollars annuellement. En plus de l'an passé... en l'an 2000, dis-je, nos exportations totalisaient plus de 12 milliards de dollars et 3 milliards de masse salariale. Tout ça pour vous dire qu'on pense que c'est une industrie assez importante, assez importante pour être écoutée, assez importante pour qu'il se crée un dialogue entre le gouvernement, ses ministères et l'industrie.
Nous représentons la presque totalité des entreprises, en tout cas la très grande majorité. Et le conseil oeuvre auprès des instances gouvernementales, les organismes publics, parapublics, des organisations et également dans plusieurs secteurs de la population. Il encourage un comportement responsable de ses membres en regard des dimensions environnementale, économique et sociale. Parce qu'on entend beaucoup de discours de ce temps-ci sur le développement durable. On s'aperçoit qu'on bloque sur un aspect et qu'on oublie toujours de parler des deux autres. C'est la recherche de trois objectifs simultanés: l'écologie, bien sûr, à respecter, mais le social et l'économique aussi font partie du développement durable. Malheureusement, dans plusieurs des mémoires, on se rend bien compte qu'on se fixe deux corridors chaque côté... c'est-à-dire deux murs de chaque côté du volet écologique mais qu'on oublie complètement le social et l'économique. Et, avec ce qu'il se prépare dans l'industrie, on est peut-être mieux de voir le développement durable sous toutes ses dimensions.
Maintenant, je vais vous parler dans un premier temps du forestier en chef et pourquoi on en arrivait à proposer, nous autres mêmes... C'est l'industrie qui a proposé à la commission Coulombe le forestier en chef, et, le 8 avril 2004, on émettait un communiqué à cet effet-là. Donc, cette position, elle a été prise il y a plus d'un an, et on disait ceci: «Nous proposons que le calcul de la possibilité forestière soit désormais réalisé par une entité complètement indépendante du gouvernement et de l'industrie forestière.» On disait ça... on s'est mouillés publiquement sur cette position le 8 avril 2004.
Il semble bien de toute évidence que le rapport Coulombe s'est approprié cette suggestion-là ou a trouvé qu'elle avait un certain sens, puisqu'on peut y lire, à la recommandation 7.2 du rapport Coulombe: «Que le gouvernement présente devant l'Assemblée nationale, dans les meilleurs délais, un projet de loi ayant pour objet d'instituer, pour le domaine de l'État, la fonction de "forestier en chef", [et] de prévoir le mode de nomination de son titulaire, de déterminer ses responsabilités et d'établir un cadre institutionnel ? et j'insiste là-dessus, d'établir un cadre institutionnel; ce n'est pas de placer un individu dans une institution existante, c'est bien ? d'établir un cadre institutionnel traduisant des caractéristiques d'autonomie, de neutralité et d'intégrité scientifique.» Ça, on peut lire ça à la recommandation 7.2 du rapport Coulombe.
Mais je veux ajouter un autre commentaire qu'on retrouve à la page 208 du rapport Coulombe et qui dit ceci: «L'application des six critères d'aménagement durable des forêts inscrits au préambule de la Loi sur les forêts exige une approche écosystémique et intégrée [de] la planification et [de] la gestion du milieu forestier. La commission constate qu'aucun agent de l'État ne s'acquitte efficacement et dans les faits des trois dimensions essentielles de cette gestion: environnementale, économique et sociale. Or, il apparaît que la gestion selon une telle perspective doit être encadrée de manière à assurer à l'instance responsable une grande indépendance vis-à-vis tous les acteurs du milieu forestier, de façon à maintenir une grande crédibilité.» Il parle d'une instance. Nous autres, on parlait de cadre institutionnel.
Tout ça pour vous dire qu'on est contre, et catégoriquement contre, la nomination d'un sous-ministre associé. Dans mon cas, je pourrais vous expliquer longuement... Ce n'est pas parce que je lève le nez sur un sous-ministre associé. Mais, un sous-ministre associé, c'est un bonhomme qui a au moins quatre autorités au-dessus de lui. Il a son sous-ministre en titre, d'abord. On sait très, très bien qu'il n'y a pas un papier qui se rend en Conseil des ministres sans que le sous-ministre en titre ait vu le papier. On sait très bien aussi que même le sous-ministre en titre n'a pas l'autorité exclusive vis-à-vis le Conseil des ministres. Il y a un secrétaire général. M. Coulombe le sait très bien, lui-même qui l'a été. Il avait le contrôle des sous-ministres, qui, eux, ont le contrôle sur les sous-ministres. Puis il y a le Conseil des ministres et il y a le ministre. Donc, voyez-vous l'indépendance dans ça?
Avec toute la confiance qu'on peut faire à une personne et par expérience personnelle, on sait très bien qu'un sous-ministre associé n'a pas les pleins pouvoirs pour assurer cette indépendance qui est indispensable pour assurer une crédibilité hors de tout doute de cette personne-là qui aura à définir les possibilités forestières. Et ça, pour nous, c'est quelque chose d'essentiel, c'est quelque chose de primordial, si on veut vraiment bâtir une crédibilité ou rebâtir une crédibilité du secteur forêt.
Et ce n'est pas seulement que l'industrie qui rebâtira sa crédibilité, là. Avec des phrases comme: «Aucun agent de l'État ne s'est acquitté de sa tâche», là, il n'y a pas seulement que les industriels qui ont à bâtir une crédibilité, il y a également les agents de l'État. Et, si on veut une personne qui est capable de critiquer en toute objectivité autant des mesures prises par le ministère ou par ses fonctionnaires et qui peut, avec toute la même neutralité, critiquer l'industrie dans ses manières de faire, il nous faut quelqu'un qui soit nommé par l'Assemblée nationale aux deux tiers.
Un poste équivalent à celui de Vérificateur, de DGE, de jurisconsulte, de commissaire au lobbying, des gens qui sont au-dessus de tout doute possible, nommés... suggérés sur une proposition du premier ministre mais adoptée par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, ça nous apparaît, personnellement, comme groupe, nous, comme industrie, être la formule qui assurerait la plus grande objectivité pour ce poste qui est, à notre point de vue, indispensable. Avec tout ce qui peut s'être passé au niveau des perceptions publiques en particulier, on a besoin de cette indépendance totale.
Maintenant, je voudrais aussi souligner... Il y aurait bien d'autres textes que je pourrais ajouter, mais vous pourriez lire dans un document, par exemple, que nous avons reçu je ne sais pas par quel hasard, signé par trois sous-ministres ou deux sous-ministres qui nous disent ceci... C'est un argumentaire adressé au personnel en région, le personnel du MRN, et on parle... On dit: «Le poste de forestier en chef est créé pour favoriser la restauration de la crédibilité de la gestion des droits auprès de la population.» C'est signé par, il me semble, quelques personnes hautement qualifiées, là: Mme Paule Têtu, M. Michel Bordeleau, M. Marc Ledoux. Et, quand on pousse la lecture de ce document, on sait très bien qu'on insiste beaucoup sur la valeur ajoutée. Quelle est la valeur ajoutée par la création du poste de forestier en chef? Et on répond à cette question. Et on est d'accord avec cet énoncé. C'est une valeur ajoutée.
n(16 h 10)n On est en désaccord d'autre part sur la tâche parce qu'il y a des contradictions avec la loi, là. «Déterminer le niveau maximal des récoltes ligneuses», on croyait que la loi disait que c'était de déterminer le rendement soutenu des possibilités forestières. Mais ça, on pourra en discuter dans d'autres tribunes. Et, dans la page 2 de ce document, il est écrit: «D'abord, le ministre lui déléguerait entièrement ses propres responsabilités en matière de détermination de possibilités annuelles de coupe et de rendement soutenu.» Un sous-ministre associé, tel que défini dans la loi... Dans la loi, il n'est pas dit que le... si le ministre délègue ces possibilités. Au contraire, il est dit que le ministre... sous-ministre délégué se rapporte au ministre. Il y a une incohérence dans la loi par rapport au discours ou à l'argumentaire qui dit qu'on veut qu'il soit indépendant. Ça ne marche pas, ça.
«Les ingrédients sont donc présents ? et j'ajoute un autre petit paragraphe: Les ingrédients sont donc présents ? pour permettre plus d'impartialité, plus d'indépendance et plus de transparence.» On ne dit pas «la totale impartialité», on ne dit pas «la totale indépendance», on ne dit pas «la totale transparence», on dit plus. C'est donc dire qu'il en manque, hein? Il va y en avoir un peu plus, mais pourquoi qu'on ne dit pas clairement: C'est toute l'indépendance, toute la neutralité qu'il faut pour réaliser pleinement... avec les objectifs d'une plus-value que je respecte et auxquels je concours d'ailleurs.
Également, dans un mémoire au Conseil des ministres du 23 février... du 23 février 2005, excusez, il est bien dit, il est bien dit que la quatrième option... Parce que vous préconisiez trois... quatre options, et on voit bien que l'entièreté de l'indépendance de ce forestier en chef relève carrément d'un poste particulier d'une personne votée par l'Assemblée nationale.
La seule réticence que je sens dans l'argumentaire du mémoire du ministre du 23 février, c'est que ça prendrait bien du temps, et ça, on est peut-être prêts à vous suggérer... faire des suggestions pour faire un pont temporaire. Mais qu'on ait vraiment dans la tête qu'il faut une structure totalement indépendante. On est prêts à vous suggérer, par exemple, que temporairement il pourrait être rattaché, par un amendement, au Vérificateur général, jusqu'à ce qu'il ait sa structure définitive; qu'il peut être rattaché à un autre... peut-être un type de conseiller ou de mandataire spécial relevant d'une structure complètement indépendante. Mais, si on ne sent pas une volonté hors de tout doute de faire de cette personne un peu l'ombudsman, la personne qui va décider des possibilités forestières à l'abri de tout soupçon, de toute influence sous-ministérielle ou ministérielle, on pense que ce n'est pas ça, l'esprit du rapport Coulombe, et ce n'est pas ça, l'esprit de la loi non plus.
Quand on lit la loi, on se rend bien compte qu'il y a une volonté d'en arriver à quelque chose de solide, mais le moyen qui est pris, à notre point de vue, ne concorde pas avec l'esprit qui semble animer le législateur de vouloir une indépendance. On ne me fera pas accroire, moi ? en tout cas pas à moi, après 25 ans dans cette Chambre ? qu'un sous-ministre a une indépendance totale d'esprit et une entière indépendance d'action, de pensée et de décision. Vous irez faire accroire ça à d'autres que moi.
Je vais passer la parole à M. Jacques Robitaille qui va vous expliquer les autres articles de la loi.
Le Président (M. Jutras): Oui. M. Robitaille.
M. Robitaille (Jacques): Merci. Tout d'abord, peut-être un élément qui, je pense, nous apparaît important. Et on dit qu'entre autres responsabilités, je dirais même première responsabilité du chef forestier, ça va être de superviser le calcul de possibilité. Si on retourne au rapport Coulombe, dans le rapport Coulombe, on faisait état aussi, quand on parle du calcul de possibilité, qu'il faudrait peut-être revoir cette notion et lui attribuer un volet de... Parce que, dans le mandat tel que présenté dans le rapport Coulombe, on parle de déterminer le niveau maximal de récolte, et on disait: Ça devrait comprendre, oui, une base qui est le calcul de possibilité à rendement soutenu et d'autres décisions que pourrait être appelé à prendre le chef forestier si les conditions forestières particulières dans une unité d'aménagement le commandaient. Ce pourrait être une épidémie d'insectes, ce pourrait être un surstocking en peuplement dépassé maturité, qui est en voie de dégradation. Donc, le chef forestier pourrait aussi être appelé à prendre des décisions de cette nature-là. Ça ne nous apparaît pas clairement dans le projet de loi tel qu'il est présenté, et on pense que ce devrait être une responsabilité importante du chef forestier quand les conditions évidemment le commandent.
On dit aussi que le chef forestier devrait avoir la responsabilité de superviser la préparation du manuel d'aménagement, ce avec lequel on est parfaitement d'accord. Mais aussi on pense que tout ça devrait continuer de se faire, comme ça se fait actuellement, en consultation avec les intervenants concernés, pour que chacun des intervenants puisse amener son apport, continuer à amener son apport, et que tout ça, ça devrait migrer vers un guide et non des normes. Donc, ce devrait être, je dirais, des balises qui soient données, sur ce plan-là, au chef forestier.
On parle aussi de «tout autre mandat». Là-dessus, je pense qu'il y a un mandat supplémentaire qui devrait être important pour le chef forestier. D'abord, il aura à expliquer ses décisions, et je pense qu'il devrait avoir le mandat de vulgariser ce que sont vraiment les calculs de possibilité et de détermination des niveaux de récolte, parce que malheureusement souventefois ce n'est pas du tout compris, ou très mal compris, ou encore la majorité, je dirais, des gens associent une rupture de stock à une forêt qui devient pratiquement sans arbres. Donc, je pense que, dans son mandat, ce serait important que le chef forestier ait ce mandat-là.
On dit «conseiller le ministre», aussi. Bon, sur le contenu des plans, ça va, sur les plans soumis. Mais on parle sur les orientations de recherche. Encore là, on pense qu'on devrait circonscrire un petit peu le mandat du chef forestier pour ne pas que ça devienne trop large puis qu'à un moment donné on en vienne à ce qu'on lui donne un mandat tellement large, qui devient tellement loin de son mandat principal. Donc, qu'il oriente le ministre en matière de recherche, on est d'accord avec ça, mais ce devrait être circonscrit: recherche requise par rapport à son mandat.
Le bilan quinquennal ? et je terminerais là-dessus ? le bilan quinquennal, on ne pense pas que ça devrait relever du chef forestier. On pense que ça pourrait donner, à un moment donné, une apparence de conflit, parce qu'il aura à évaluer dans le fond certaines de ses décisions, certaines des orientations qu'il aura prises. Même si on peut supposer que, oui, il y aurait moyen de cadrer ça, je pense qu'il faut se rappeler que, dans tout ça, on veut ramener une certaine crédibilité à certaines opérations. Donc, que ce soit lui qui ait la responsabilité du bilan quinquennal, il ne nous apparaît pas que ce soit souhaitable, et ça pourrait dans certains cas soulever des doutes et peut-être entacher la crédibilité.
Alors, je pense que ça fait le tour de l'ensemble, si on veut, des éléments principaux qu'on retrouve dans le mémoire du CIFQ.
Le Président (M. Jutras): M. Chevrette.
M. Chevrette (Guy): Oui. M. le Président, je conclurai tout d'abord en louangeant la commission Coulombe parce que les travaux de cette commission se sont déroulés dans la plus grande transparence. Chaque étude, chaque mémoire, chaque rapport ou position mis à sa disposition se retrouvait rapidement sur son site Internet. Il nous faudrait que, dans la mise en oeuvre des recommandations de cette commission, le gouvernement fasse preuve de la même transparence. C'est la crédibilité non seulement du gouvernement, mais aussi de tout le secteur forestier, qui en dépend. Merci.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Chevrette et M. Robitaille. M. le ministre.
n(16 h 20)nM. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci, MM. Chevrette et Robitaille, et bienvenue, MM. Lachapelle et Gauvin. Je pense qu'il y a peut-être des choses qui devraient être remises dans leur contexte un petit peu plus, parce que vous faites référence au mémoire et au projet de loi, et je pense qu'entre la rédaction ou la présentation du mémoire et la rédaction du projet de loi il y a eu des choses qui ont été améliorées ou bonifiées. Parce que, comme vous le savez, M. Chevrette, quand on prépare un mémoire, bien ça commence à passer dans les comités ministériels, et il y a des commentaires, des remarques, il y a des ajouts, etc. Et, après ça, ça peut arriver au Conseil des ministres, c'est la même chose.
Alors, il y a eu la notion d'indépendance, qui a été renforcée par la délégation, qui a été renforcée par la délégation, pour la bonne et simple raison que la Loi sur les forêts actuelle prévoit que c'est le ministre qui a «le pouvoir de déterminer, par essence ou [...]groupe d'essences, les possibilités annuelles de coupe à rendement soutenu» ? c'est prévu d'ailleurs à l'article 35.4 ? et là je le délègue, dans le projet de loi actuel, je le délègue, et ça va être exercé par le forestier en chef. Là, vous avez ce que j'appellerais l'indépendance.
L'autre phrase après dit: «Il rend publiques ses décisions ainsi que les justifications ayant conduit à les prendre.» Je comprends que M. Robitaille m'a suggéré peut-être d'introduire la notion de vulgarisation ici, mais je pense que là vous avez le deuxième ingrédient qui est la transparence. Alors, vous avez l'indépendance, vous avez la transparence.
Malheureusement, pour la crédibilité, je ne peux pas légiférer pour ça. Ça se gagne. Il va falloir que ça se fasse avec le temps. Et je pense que ça, il y a d'autres dispositions qui prévoient qu'il y ait un rapport annuel et qu'il fasse un bilan aux cinq ans. Mais le bilan aux cinq ans, là, on s'entend, je comprends que ce n'est pas lui qui va s'auditer, si on veut, ou qui va se vérifier. Là, on a d'autres mécanismes de prévus dans notre société, notamment le Vérificateur général, notamment, selon les dispositions à venir d'un projet de loi sur le développement durable, un commissaire au développement durable. Là, on a un avant-projet de loi présentement qui est en... pas en commission, mais qui a eu, oui, des consultations, etc.
Alors, je pense que cette disposition du bilan quinquennal, elle est dans le rapport de la commission. C'est la commission qui recommande que le forestier en chef produise un rapport sur l'état des forêts, incluant un jugement sur le suivi des indicateurs. On s'entend, là, probablement sur la question de vérification, mais je pense que là vous avez ? j'aimerais ça vous entendre là-dessus ? pas mal d'ingrédients au niveau de l'indépendance, de la transparence et des résultats.
M. Chevrette (Guy): Mais tout l'esprit du rapport Coulombe, M. le ministre, à moins que je l'aie mal lu, mal compris, c'est précisément l'indépendance au départ qu'il faut pour faire les modifications et bâtir la crédibilité, alors que vous me répondez qu'on ne légifère pas sur la crédibilité. Je suis entièrement d'accord avec vous, je comprends ça, qu'on ne légifère pas sur la crédibilité, mais, quand on est devant une situation où on n'est plus crédible, il y a une commission d'enquête qui nous arrive puis qui nous dit: Pour que ce soit crédible, assurez l'indépendance de l'individu. Et c'est dans cet esprit-là qu'on vous a écrit notre mémoire. Ce n'est pas qu'on vous demande de légiférer sur la crédibilité. On vous dit: Pour bâtir rapidement une crédibilité et l'assurer de a à z, faisons de cet inspecteur-chef... forestier en chef, excusez, faisons-en tout de suite un individu à qui on assure par législation...
Je comprends votre problème d'exécution, de rapidité. Ça, je le comprends et j'ai compris très bien, dans votre mémoire du 23 février, que vous vouliez aller plus rapidement. Donc, c'est bien évident que créer une entité, ça prend une législation spéciale, mais on l'a fait pour la SEPAQ, on l'a fait pour une foule de structures au gouvernement, puis, chaque gouvernement, on crée un organisme ou deux à chaque mandat, quand ce n'est pas plus. Donc, à partir de là, s'il dit, pour six mois, il n'y a pas de problème de le raccrocher à quelqu'un de neutre puis qu'il commence à travailler, commence à... Parce qu'il y a des échéances, dans le rapport Coulombe, qui sont importantes. Il faut préparer toutes les données de base pour en arriver aux échéances à respecter.
Mais je ne crois pas que le fait d'en faire un sous-ministre associé... Je dis bien humblement, là, en faire un sous-ministre associé, tel que perçu par le public actuellement puis par tous les connaisseurs de la scène politique, ce n'est pas d'assurer l'indépendance à un individu. Si vous le nommez sous-ministre associé, il va dépendre du sous-ministre en titre; s'il dépend du sous-ministre en titre, même si vous lui laissez le mandat, vous savez très bien ? en tout cas, si vous ne le savez pas encore, vous allez l'apprendre assez vite ? que les jeux d'influence, là, vont jouer entre fonctionnaires mêmes. Les fonctionnaires, qui ont été accusés d'être des agents complètement inefficaces, vont travailler dans la même salle que celui... dans la même bâtisse que celui ou celle que vous choisirez comme forestier en chef, et puis ça va collaborer? Bien, voyons! Vous savez bien que, l'indépendance qu'il lui faut, il lui faut la participation et la loyauté aussi de ses fonctionnaires pour en arriver à produire ça. Moi, en tout cas, je vous avoue que j'ai peine à croire qu'on n'ait pas fait ce type d'analyse.
M. Corbeil: M. Chevrette, vous m'avez mentionné tantôt ? puis je ne veux pas nécessairement jouer une partie de ping-pong après-midi, là ? mais vous m'avez mentionné: On a créé la SEPAQ. Mais la SEPAQ, elle relève d'un ministre. Je l'ai eue sous ma responsabilité comme délégué, elle est maintenant sous mon collègue du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, et je pense ici que... En connaissez-vous beaucoup, des sous-ministres associés qui ont leur définition de tâches dans un projet de loi?
M. Chevrette (Guy): Non. Non, mais...
M. Corbeil: Moi, je connais le directeur national de la santé publique, qui est quelqu'un qui a assez d'indépendance même s'il relève du ministre de la Santé et des Services sociaux. Il y aura le forestier en chef.
Hier, l'UQCN nous disait: «Une approche proposant de nommer un forestier en chef indépendant du ministre tombe dans le piège qui enlève l'imputabilité aux élus. [...]La responsabilité de rendre compte de la manière que sont gérées les forêts publiques doit donc revenir au gouvernement et à un ministre responsable.» Qu'est-ce que vous dites là-dessus?
M. Chevrette (Guy): Bien, ce que je réponds là-dessus, c'est que, chaque fois que l'Assemblée nationale du Québec a voulu assurer la neutralité, ils ont créé un poste particulier. Je pense au DGE. Le DGE, ils n'ont jamais voulu que ce soit un gouvernement, quel que soit son nombre, qui gère. Le Commissaire au lobbyisme, ils n'ont jamais voulu que ça relève d'un ministre. Ils ont dit: Il faut qu'il soit indépendant et qu'il soit jugé par l'Assemblée nationale pour assurer sa pleine indépendance. Moi, là, l'UQCN a le droit à ses perceptions puis nous avons le droit aux nôtres. Mais notre expérience nous dit qu'un sous-ministre associé qui a à poser des gestes, peut-être à l'encontre même des habitudes d'un ministère, en passant, là... Placez-vous dans le portrait où cette personne-là va avoir à définir des règles du jeu, à définir tout le ? comment dirais-je? ? le potentiel, là, puis il va avoir à participer avec des gens qui ont été jugés dans une commission d'enquête puis qui vont relever d'une personne qui arrive de nulle part, là, qui est un nouvel arrivant, qui va avoir à décider avec beaucoup d'autorité déléguée mais avec tous des employés qui relèveront du ministère pareil. Puis les autres qui ont été jugés... Il y a une question de relations humaines, M. Corbeil, dans ça. Je vous avoue, moi, que ça doit même être difficile, ça doit être même difficile pour les gens ? je le pense parce que j'ai vécu des expériences de vie ? ça doit être difficile pour ceux qui ont la tâche de réaliser, par exemple, le rapport Coulombe et puis qui sont entourés de ceux qui ont été blâmés, d'une certaine façon, par le rapport Coulombe. Ça ne doit pas être facile, ça. Il n'y a pas personne qui accepte ça, des blâmes. Ils disent toujours que tout est parfait.
Mon intuition à moi, c'est qu'on fait une erreur ? puis ce n'est pas une intuition, c'est une conviction ? on fait une erreur que de croire qu'un individu placé dans une boîte, qui a à juger lui-même... à prendre de grandes décisions, qu'il lui faudra la collaboration non pas des gens de son entité, sur laquelle il a entièrement responsabilité, mais du personnel du ministère comme tel. Ce n'est pas pour rien qu'on crée, quand on veut arriver à la neutralité, une entité. On dit: Tu es responsable devant l'Assemblée nationale, tu as tes fonctionnaires qui t'entourent, tes recherchiste, tes techniciens, tes ingénieurs; prends tes décisions, puis c'est l'Assemblée nationale qui va te juger. Mais le reste, là, les lunettes roses, moi, je les ai perdues.
M. Corbeil: M. Chevrette, quand j'ai parlé, tantôt, de délégation, il n'y a pas de dépendance au sous-ministre en titre; la délégation est directe au forestier en chef, elle passe du ministre au forestier en chef directement. Là, de ce côté-là, il n'y a pas de lien.
Pour ce qui est de savoir comment on se sent, vous pourrez questionner Mme Têtu après si vous voulez. Je pense qu'au Québec...
M. Chevrette (Guy): Mais je ne pensais même pas à elle. C'est parce que...
n(16 h 30)nM. Corbeil: Ah non? Bon. De toute façon, au Québec, on fonctionne sur la base, je pense, de la confiance et de la présomption de la bonne foi de tous. Et l'équipe du forestier en chef va relever du forestier en chef, va probablement recevoir sa paie du service de la paie du ministère, là, ou de je ne sais pas qui, là, mais, de toute façon, ça, ça n'a pas d'importance à ce moment-ci. Je pense que, si on parle d'une base de confiance puis de présomption de bonne foi... Puis vous semblez exclure cette approche sur les fonctionnaires. Ce n'est pas contraire à notre société de droit, je pense. Ces gens-là, ils fonctionnent puis ils travaillent avec toute la diligence et... Parce que vous semblez faire une distinction, là: quand on travaille pour le Directeur général des élections, on a un statut, puis, quand on travaille pour un ministère, on en aurait un autre. Je suis un petit peu... je suis un petit peu perplexe. Ça me laisse... ça me laisse...
M. Chevrette (Guy): Mais, M. Corbeil, on n'est ni avocat, ni l'un, ni l'autre.
M. Corbeil: Non, non, non.
M. Chevrette (Guy): Mais je sais une chose: en droit, par exemple, il faut qu'il y ait l'apparence, dès le départ, de droit. Ça, c'est la première leçon, 101, qu'on nous donne dans un cours de droit à l'université. Il faut qu'il y ait une apparence de droit. Et une apparence de neutralité puis une apparence de droit, je m'excuse, ça se prouve, ça.
Et vous savez très bien que, dans la structure d'État, depuis toujours ou presque toujours, chaque fois qu'il a fallu placer quelqu'un au-dessus de tout soupçon, le DGE... on place tout le monde au-dessus de... on le place là, c'est l'Assemblée nationale qui décide... qui lui donne cette autorité morale. Et, quand on le met entre les mains d'un ministre, l'histoire nous apprend qu'on a raison de douter de notre efficacité sur la neutralité et l'indépendance d'esprit. L'histoire a donné une foule de cas. Je vous dis que l'apparence de droit, monsieur, et l'apparence de neutralité, et l'apparence d'indépendance totale, vous ne l'avez pas dans votre projet de loi.
M. Corbeil: Si je suis votre raisonnement, M. Chevrette, la forêt étant une de nos principales bases de développement économique, en particulier en région, une autre base étant l'eau, si jamais il y avait un problème avec les ressources hydriques ou hydrauliques du Québec puis que le gouvernement x ou y dans l'avenir créerait une fonction d'hydrologue en chef ou hydrolicien en chef, il faudrait que ça relève de l'Assemblée nationale? S'il y a des problèmes dans la faune ? puis je sais que vous avez été très préoccupé par ces situations-là, au niveau des ressources fauniques, protection, mise en valeur; c'est toujours l'équilibre auquel il faut tendre ? puis qu'on décidait de dire: Bien, il faudrait qu'il y ait quelqu'un qui soit le gars de la faune en chef ou la fille de la faune en chef, il faudrait que ce soit toujours de l'Assemblée nationale?
C'est parce que je pense qu'on tombe facilement dans ce que j'appellerai la structurite. Qui dit structure dit organisme, dit fonctionnement, dit coûts, et tous ces argents-là qui vont dans les structures ne vont pas dans les services, ne vont pas sur le terrain. Puis là on a une forêt à remettre en état. Est-ce que vous pensez que de le mettre dans une structure, ça va aller mieux, ça va être plus efficace que de le mettre dans une équipe qui veut s'occuper de la gestion intégrée du territoire et des ressources?
M. Chevrette (Guy): M. Corbeil, je ne suis pas dogmatique. Je ne souffre pas de dogmatisme. La SEPAQ, ça fonctionnait vous savez comment à un moment donné? Et puis ça fonctionne...
M. Corbeil: Ça fonctionne encore, la SEPAQ. Mais je pense que vous faites référence à la FAPAQ.
M. Chevrette (Guy): Non, non. Je vous parle de la SEPAQ.
M. Corbeil: Elle fonctionne encore.
M. Chevrette (Guy): Oui. Le ministère ne réussissait pas à rentabiliser ça. On a créé une structure. Ce n'était pas un dogme. Ce n'est pas parce qu'on crée une structure qu'il y a du dogme. C'est ça que je veux vous expliquer. Il y a des... Dans certains cas, c'est important de créer une structure puis, dans d'autres cas, c'est superfétatoire, comme disait un de nos anciens collègues.
Mais je vous dirai une chose: que l'industrie est en crise, depuis L'Erreur boréale, elle est en crise. J'espère qu'on s'en rend compte, tout le monde. Et, si on ne se donne pas des chances minimales, de part et d'autre, pour bâtir une crédibilité, autant pour l'État qui gère la forêt que pour l'industrie qui soutire la ressource et la transforme, moi, je pense qu'on manque le bateau. C'est tout. Puis je n'en fais pas un dogme. Vous avez raison. Je ne suis pas une personne qui va vous dire: Il faut abolir toutes les structures. Il y en a qui ont essayé, puis ils ont manqué leur coup, d'en abolir. Il y en a d'autres qui ont réussi à en abolir un peu. Mais ça, il n'y a pas de dogme dans ça. Je pense qu'on peut se parler facilement.
Le Président (M. Jutras): M. le député de... Avez-vous terminé, M. le ministre?
M. Corbeil: Bien, je pense que mon collègue le député de Groulx voulait poser une question avant qu'on arrive à la fin de...
Le Président (M. Jutras): Oui. M. le député de Groulx.
M. Descoteaux: Merci, M. le Président. En fait, deux brèves questions. La première: On a entendu à quelques occasions, M. Chevrette, on s'est posé la question même: Est-ce qu'il fallait que ce soit un ingénieur forestier ou un autre professionnel du domaine? Est-ce que j'ai bien compris de votre présentation qu'en réalité ça importe peu que ce soit un ingénieur forestier ou un professionnel, un ingénieur, peu importe? Ce que, vous, vous recherchez, c'est la neutralité dans son entité comme telle et non pas le représentant d'un ordre ou un autre? Est-ce que je me trompe?
M. Chevrette (Guy): Bien, quand on a à définir la possibilité forestière, moi, je pense que ça prend une personne qui a la science forestière. Je pense que c'est un ingénieur forestier.
M. Descoteaux: Bon. Deuxième question, M. Chevrette, hier, l'Ordre des ingénieurs forestiers justement nous parlait de la gestion, et c'est le rôle en fait du forestier en chef. On parlait de l'approche de la gestion de la forêt par objectifs. Cet après-midi même, on entendait les gens de la Conférence des élus du Saguenay?Lac-Saint-Jean, et encore une fois ils ont évoqué cette gestion par objectifs. Dans un but de sauvegarde de la forêt telle qu'elle est à l'heure actuelle, on a appliqué la directive. Et, vous avez tout à fait raison, je pense que la commission justement, dans ses recommandations, veut sauvegarder la forêt. Est-ce que vous voyez une contradiction dans le 20 % qu'on a appliqué, peut-être un peu de mur-à-mur, par opposition à une gestion comme ça, par objectifs, qui pourrait être faite selon les régions, selon la capacité des régions, selon les industries et selon les citoyens dans ces régions-là?
M. Chevrette (Guy): D'abord, vous me permettrez, juste avant de répondre à votre question, de faire une suggestion au ministre. S'il veut absolument nommer un sous-ministre, il faudrait au moins prendre la loi de la Colombie-Britannique et insérer dans le projet de loi sur les forêts... Le forestier en chef, là, est dans la structure. Il est dans la structure, dans la loi, il retrouve complète indépendance d'une fonction de chef forestier. Ça, c'est dans la loi de la Colombie-Britannique. Au moins, s'il y avait ça, ce serait déjà un pas de plus que vous avez. Vous ne pourrez pas dire qu'on n'essaie pas d'être constructifs.
Deuxièmement, pour répondre à votre question, le problème du rapport Coulombe, c'est qu'il n'y a pas deux recommandations, il y en a 81, puis il y a des recommandations qui en atténueraient d'autres. Et vous avez fait un choix d'appliquer le 20 % sans étude d'impact, donc sans aucune mesure d'atténuation accordée. Je suis convaincu que les réactions ne seraient peut-être pas les mêmes si on avait une vision, une vision de l'application du rapport Coulombe. Mais la vision de gérer par objectifs, c'est loin d'être fou en soi. Moi, je suis d'accord avec ça. Mais, comme je vous dis, actuellement on est pris avec une proposition de 20 %, on a des mesures d'atténuation qu'on veut vous présenter au PC. Offrez-nous l'opportunité de le faire, puis on va vous en suggérer, des mesures d'atténuation pour permettre, conformément à ce que dit le rapport Coulombe, à l'industrie de s'adapter. C'est écrit, ça, dans le rapport Coulombe. C'est aussi écrit: Utiliser des stratégies pour ne pas avoir de catastrophe dans une baisse d'emplois. Il dit: Évitons les grands dérapages.
C'est tout écrit, ça, dans le rapport Coulombe. Il n'y a pas seulement que la recommandation X et la recommandation Y. C'est quand on le regarde dans son ensemble, on le lit dans son ensemble. Il y a des atténuations qui arriveraient par rapport à certains choix que vous pouvez faire mais qui feraient en sorte qu'il y aurait moins d'incertitude pour les industries. Ce n'est pas une industrie, là, d'une couple de mille piastres, ça, là. Vous regarderez. Depuis cinq ans, l'industrie n'a pas investi, presque, dans son industrie. Pensez-vous que l'incertitude actuelle est propice à l'investissement, dans l'industrie, quand on ne sait pas ce qui nous attend? Si on s'entendait sur quelques mesures d'atténuation pour recréer une certaine stabilité, on pourrait réenclencher le mouvement de l'investissement. On aura des belles discussions à faire, mais on vous l'offre, cette collaboration-là. L'industrie est ouverte pour faire ce genre de débat et d'être positive dans sa façon de travailler avec le ministère et avec le gouvernement.
Le Président (M. Jutras): Maintenant, c'est au tour de l'opposition. Mme la députée de Matapédia.
n(16 h 40)nMme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à vous, messieurs. Et, moi, j'irais tout de suite avec une question. Parce qu'hier la Conférence des coops forestières est venue nous faire une présentation puis elle a parlé aussi, comme vous, du manuel d'aménagement forestier. Parce que vous dites: «Par conséquent...» À la page 9 de votre mémoire, M. Chevrette ou M. Robitaille, vous dites: «Par conséquent, nous proposons le changement suivant au point 2°: "de préparer le manuel d'aménagement forestier en collaboration avec le Comité du manuel d'aménagement forestier"». Et eux, à la page 5 de leur mémoire, disaient comment est-ce qu'ils ont trouvé ça intéressant. Ils disent, bon: «Elles espèrent que le forestier en chef maintiendra le processus adopté depuis plusieurs années, qui implique la consultation d'un comité aviseur constitué des acteurs de la foresterie québécoise.» Alors, comment vous souhaitez ça, si je peux dire?
M. Robitaille (Jacques): Bien, c'est un petit peu ce que je soulignais tantôt. C'est que le manuel d'aménagement forestier devrait continuer à être élaboré et à évoluer en consultation avec les différents intervenants impliqués. Là, c'est mentionné que le Comité du manuel d'aménagement... Actuellement, c'est la structure de consultation qui est le Comité du manuel d'aménagement forestier. Ce qu'on dit, c'est qu'on devrait continuer à travailler comme ça mais en s'assurant qu'on implique les différents intervenants impliqués. Ça fait qu'on est d'accord avec cette position-là qu'a prise la Conférence des coops. Ce n'est pas incompatible avec ce qu'on a souligné.
Mme Doyer: Oui, moi... On aimerait, sur l'autre sujet dont vous avez parlé tantôt... Merci, M. Robitaille. Sur l'autre sujet, quand vous avez parlé du forestier en chef de la Colombie-Britannique, est-ce que ce serait possible de nous déposer la loi?
M. Chevrette (Guy): C'est la loi de la Colombie-Britannique.
Mme Doyer: Si c'est la loi, c'est accessible, hein, j'imagine, par Internet, et tout.
M. Chevrette (Guy): Oui.
Mme Doyer: Bon, ça va. Alors, moi, je reviendrais sur l'article 1 du projet de loi, dans le 11.2. Parce que, dans votre mémoire, à la page 4, M. Chevrette, vous nous dites: «Nous nous questionnons cependant quant à ce qu'implique, dans les faits, la gestion écosystémique, intégrée et régionalisée.» Et l'UQCN nous disait aussi que c'est important d'apporter une vision de l'aménagement écosystémique. Puis, dans le fond, on n'en a pas, de définition, là, puis on s'enligne avec le 11.2, dans lequel le ministre... Ils disent qu'il favorise... D'ailleurs, plusieurs ont dit: On devrait mettre «appliquer» plutôt que «favorise». Bon. «Le ministre favorise ? ou applique ? l'application ? bien là il faudrait trouver un autre terme, mais en tout cas ? d'une gestion écosystémique, intégrée et régionalisée.» Alors, il faudrait peut-être le définir dans le projet de loi. Quand on parle de régionaliser, est-ce que c'est des liens avec les commissions forestières régionales?
Alors, moi, je vous pose la question puis en même temps je me dis: Est-ce que ça n'aurait pas valu la peine de prendre son temps, de prendre notre temps? J'ai même proposé au ministre de venir légiférer en juillet, s'il fallait. Il n'a pas voulu. Je lui ai dit ça l'autre fois. J'ai dit: On va venir en juillet, on va prendre le temps de bien le faire, le projet de loi. Parce qu'on dirait qu'on s'enligne à ne pas savoir des choses, puis c'est comme si on aurait dû les savoir avant de choisir de... Et ça, on ne l'a pas défini. Moi, j'ai déjà vu des projets de loi, depuis 11 ans que je suis ici, où on a défini certains concepts ? et ça, ce n'est pas facile ? pour que justement l'ensemble des partenaires arrivent à un consensus sur un ensemble de concepts qui sont extrêmement importants pour la suite des choses.
M. Chevrette (Guy): Il va répondre à un bout, je vais répondre sur le régional.
M. Robitaille (Jacques): O.K. Bien, en fait, si on parle de la gestion écosystémique, intégrée, régionalisée... bien j'irais plus sur les aspects écosystémique et intégré. Prenons la gestion intégrée des ressources, ça s'appuie sur la recherche de consensus et où il y a des compromis à faire de part et d'autre. Moi, il nous apparaît prudent que le terme «favoriser», à ce stade-ci, soit, je pense, mis comme ça. Il ne faut pas oublier que... Bon, la gestion écosystémique, on en parle, c'est, je pense, abondamment décrit dans le rapport Coulombe, mais, il ne faut pas oublier, autant la gestion intégrée des ressources que la gestion écosystémique, il y a un prix à payer à ça, il y a des conséquences, et il va y avoir des choix à faire. Et c'est pour ça un peu que dans notre rapport on parle des commissions forestières régionales. Il y a des consensus à développer là-dedans. Ça fait que de dire qu'on s'en va tous azimuts dans ça, je pense que, quand viendra le temps d'évaluer les impacts de ça, bien je pense qu'il faut avoir cette prudence-là de dire: Il faudra tout mettre ça en équilibre. Et on tombe dans toute la question, si on veut, du développement durable. En quelque part, il faut rechercher l'équilibre entre le social, l'économique et l'environnemental.
Donc, moi, qu'il soit libellé comme ça, ça m'apparaît d'une certaine prudence, ça donne une orientation et, je pense, ça nous apparaît correct. Je pense que les commissions forestières régionales auront un rôle important à jouer là-dedans, et c'est pour ça que, dans notre rapport, on y fait référence.
Le Président (M. Jutras): M. Chevrette.
M. Chevrette (Guy): Oui. C'est parce qu'il l'a dit: Nous, on favorise... on veut au moins savoir qu'est-ce que ça signifie, la régionalisation, dedans, et puis ça, je pense qu'il va falloir que les indications se pointent assez rapidement. Parce qu'il y a des gens qui pensent que ça va être sous forme de forum, d'autres qui ont déjà des associations, ils pensent: Est-ce que ça va être ça qui va continuer? D'autres qui disent: Bien, c'est-u à partir des CRE? Quelle est la vision du ministère sur la régionalisation dans l'application du rapport Coulombe? Je pense qu'il y aura intérêt à la connaître assez rapidement de la part du ministre.
Mme Doyer: Merci, M. le Président. De quelle façon les liens entre le forestier en chef, le ministère et les bénéficiaires de CAAF pourraient-ils être précisés afin d'éviter toute ambiguïté? Parce que c'est important, là, c'est comme si on détachait avec une entité... bien pas une entité autonome, mais on le détache, avec le forestier en chef et son équipe. Et, dans le rapport Coulombe, d'ailleurs, on dit qu'ils peuvent rester... Je vous lis un petit peu parce que c'est important de bien se comprendre dans ce que je veux vous questionner. À la page 209, messieurs, on dit: «Le forestier en chef serait soutenu de façon opérationnelle dans l'exécution de ses principales fonctions par un personnel professionnel et technique multidisciplinaire, lequel pourrait être formé à même les effectifs du ministère.» Alors, ça va être quoi, les liens? Comment vous voyez ça? C'est un petit peu bizarre...
M. Chevrette (Guy): C'est parce que, dans son rapport, M. Coulombe voyait une entité, une entité de formée.
Mme Doyer: Bien oui, si on ne l'a pas...
M. Chevrette (Guy): Donc il disait... Comme ancien grand gérant de l'État ou commis de l'État, il a bien compris qu'on n'arriverait pas pour aller chercher du monde partout à l'extérieur. Donc, il nous dit: Créez une entité et puisez à même vos compétences, à même le personnel disponible au MRN. En région, on me dit que le MRN a environ... entre 800 et 1 000 employés en région. Il doit y avoir un 2 000 à Québec, ici, et plus; 2 000, 3 000. Donc, étant donné que ça se passe en région, eh bien, je suppose que le forestier en chef irait se chercher des ressources un peu en région, un peu au central, peut-être beaucoup au central puis pas trop dans les régions, il n'y en aura plus. Puis on va sûrement bâtir quelque chose, une équipe, à ce moment-là, qui lui permette de répondre à son mandat.
Et c'est pour ça que, nous, on pense que... Il y a une clause, par exemple, dans le projet de loi qui dit «et tout autre mandat confié par le ministre». Ça, c'est un vrai sous-ministre associé. Mais, si on veut en faire un forestier en chef puis avec un mandat précis, il faut définir son mandat précis, l'encadrer puis ne pas le mettre dans toutes les sauces, tous azimuts. Moi, je pense que ça vaudrait la peine de prendre une couple d'heures pour penser à des bons amendements, puis on est peut-être prêts, nous, à vous suggérer à court terme d'utiliser un moyen pour assurer l'indépendance, mais vraiment d'avoir une structure assurant l'indépendance totale à moyen terme.
Mme Doyer: Merci, M. Chevrette. Alors, moi, je vous réfère à la page 9 du mémoire, vous venez d'en parler, du mandat, du poste de sous-ministre. Dans le fond, c'est comme un sous-ministre associé auquel on confie un mandat ou des mandats, et on ouvre sur tout autre mandat. Et vous semblez avoir des réserves, des craintes. Pourquoi vous demandez le non-élargissement du mandat? À la page 9, vous dites: «Afin d'éviter une dilution des ressources [...] et de sa crédibilité, le CIFQ considère qu'il faudrait limiter son mandat aux aspects de la gestion forestière permettant de rassurer la population quant à savoir si on coupe trop, si on coupe de la bonne façon, [...]au bon endroit. Toute autre responsabilité en matière de foresterie risquerait de remettre en cause sa capacité d'assumer adéquatement son mandat de base.» Comment on fait ça, de ne pas trop élargir, et tout en réalisant l'objectif qui est d'avoir une vision écosystémique, une vision multiressources, et tout ça?
M. Chevrette (Guy): Nous autres, on ne veut pas un ministère à l'intérieur du ministère. On pense que le forestier en chef arrive avec une mission précise. On veut savoir si on coupe trop puis si on coupe correct. Donc, tu focusses son mandat bien déterminé, tu lui donnes les ressources nécessaires pour le réaliser en toute indépendance et en toute transparence.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Vanier, puis on reviendra à vous, madame.
Mme Doyer: D'accord.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Vanier.
n(16 h 50)nM. Légaré: Merci, M. le Président. Vous venez de... vous avez répondu tantôt à ma question sur son équipe, mais il m'en restait une, puis, moi aussi, j'en ai une sur la page 9. Vous parlez de modifier évidemment l'article 17.1.3, puis évidemment, si on garde à l'esprit du forestier en chef, sous-ministre associé, puis est-ce que ça pourrait être acceptable, je dirais, dans le contexte évidemment où la loi reconnaît son indépendance, vous trouvez que ce serait acceptable d'aller, tu sais... on modifie cet article-là puis on ajoute «indépendance», puis tout ça?
M. Chevrette (Guy): Bien, moi, je pense que, si on mettait le contenu de la loi de la Colombie-Britannique...
M. Légaré: Exactement.
M. Chevrette (Guy): ...au moins on aurait, on aurait clairement l'identification du rôle, de son mandat, et ça pourrait signifier que la législation... Mais, quand tu marques... quand tu lui donnes le statut de sous-ministre associé puis qu'il y a une clause, un peu plus loin, que tu dis que tu peux lui donner tout autre mandat, puis tu as une clause qui dit qu'il faut qu'il fasse son bilan, bien, là, minute!, on semble... ça semble être dilué au point de... Puis ce n'est pas une question de confiance ou de non-confiance, ça. Quand on... Le législateur n'est pas supposé de parler pour rien dire. Donc, on veut-u qu'il fasse le boulot pour lequel le rapport Coulombe a identifié l'importance de ce poste-là? Donc, qu'on détermine son mandat en fonction de cela et qu'on le mette dans la loi minimalement à la Colombie-Britannique, sinon en créant une entité, comme le suggère le rapport Coulombe, formellement, avec des employés indépendants et qui tombent sous la juridiction du forestier en chef.
M. Légaré: O.K. M. le Président, merci.
Le Président (M. Jutras): Mme la députée de Matapédia.
Mme Doyer: Il reste combien de temps?
Le Président (M. Jutras): Il vous reste sept minutes.
Mme Doyer: 17?
Le Président (M. Jutras): Sept.
Mme Doyer: Ah, sept. Ah, c'est de valeur! Bon, O.K. Alors, moi, je voudrais vous parler de l'équipe, de l'équipe du... Parce que, là, on a l'air de vouloir réserver toute latitude au chef forestier, un coup qu'il va être choisi, à choisir son équipe, et, vous, vous verriez quel type de personnes qui formeraient son équipe?
M. Chevrette (Guy): Ah, bien, là, je n'ai pas réfléchi longuement, mais je dois vous dire...
Mme Doyer: Idéalement, avec votre connaissance.
M. Chevrette (Guy): Ça lui prend sûrement en tout cas le personnel de soutien au départ, c'est très important pour partir, mais ça lui prend aussi les scientifiques nécessaires et des ingénieurs qui connaissent... des spécialistes qui sont capables d'évaluer les possibilités forestières pour venir... C'est lui qui va le décréter, là, puis il va le décréter pour un certain nombre d'années, hein, et donc c'est sérieux, cela. Est-ce qu'on pourra en appeler des décisions? On s'est interrogés, nous, là-dessus. Est-ce que... On ne peut pas revenir contre une personne, mais est-ce qu'on pourrait en appeler devant les tribunaux, par exemple, si, sur le plan scientifique, ça avait plus ou moins d'allure? Donc, on suppose qu'un chef forestier va être assez brillant pour s'entourer de compétences, si compétences il y a. Puis je suis sûr qu'il y en a à l'intérieur du ministère. Mais, si ça lui en prenait quelques autres, il négociera avec... comme dans le processus administratif de tout le monde, là: J'ai besoin de tel type de spécialiste et je ne l'ai pas.
Mais je pense bien que ça pourra se faire, ça. Même en créant une structure nouvelle et un forestier en chef, je pense bien que le ministère est capable de donner les ressources à cette structure-là de façon correcte. Je pense que oui. Il y a beaucoup d'ingénieurs forestiers, d'abord, au ministère. Il y a aussi des gestionnaires, des administrateurs. Puis il y en a qui ont de bonnes relations avec nous autres, là. Même si on est mal perçus, ce n'est pas tout le monde, là, qui nous regarde de travers. Il y en a une couple, par exemple.
Mme Doyer: Merci, M. Chevrette. Alors, vous avez semblé dire que ça va être assez inconfortable pour le forestier en chef, avec ses mandats qu'il a dans le projet de loi et par rapport surtout à sa responsabilité de réaliser le bilan quinquennal de l'état des forêts. Puis c'est parce que... Bon, mettons qu'il est créé cette année, qu'il est choisi cette année, et, à travers les années, il est supposé de nous donner un état de la forêt et d'avoir des avis. Il va aviser sur les choses à faire aussi en forêt, c'est ce que je comprends, là ? si je ne comprends pas bien, vous me le direz, ça ne me dérange pas ? et, dans cinq ans, il va devoir déposer le bilan quinquennal, mettons, et il va aussi devoir... C'est ça. C'est ça, l'inconfort puis en même temps le besoin qu'on a qu'il soit partie prenante d'une entité autonome, parce qu'il va pouvoir dire peut-être... Moi, là, si j'étais forestier... forestière en chef, je dirais: Sapristi, en 2006-2007, j'aimerais ça qu'il y ait x millions de mis en aménagement de la forêt publique, j'aimerais ça répondre aux besoins de la forêt privée. Parce que j'avais un article, là, sur l'Estrie dans lequel les gens disaient que la CRE de l'Estrie avait peur que ça exerce une pression sur sa forêt, compte tenu de ce qu'il se passe en forêt publique.
Alors, il va... En même temps, il est comme détaché du ministre et du ministère et il doit aussi donner des avis sur comment on doit intervenir en forêt pour faire en sorte qu'on ait la ressource au rendez-vous dans les années futures. Comment on fait pour que ça se vive vraiment dans la vraie vie, ça, puis qu'il puisse ne pas être en conflit d'intérêts, puis dire les vraies affaires quand il faut les dire?
M. Chevrette (Guy): Je ne suis pas certain que je comprends votre question...
Mme Doyer: Non, mais en tout cas.
M. Chevrette (Guy): ...mais je vais tenter une réponse.
Mme Doyer: D'accord.
M. Chevrette (Guy): Le forestier en chef a une tâche extrêmement délicate et importante: il doit décréter, à toutes fins pratiques, la possibilité forestière. Après qu'il l'a fait, ça lui prend du personnel pour contrôler si c'est respecté. Parce qu'il y a de la modulation dans ça, il peut avoir... Il y a une certaine souplesse, mais il y a un cadre à respecter, et je suppose que ça aurait l'air... Il a même un pouvoir d'enquête dans la loi. Donc, il a tous les pouvoirs qu'il faut pour donner ses avis et de les justifier aussi. Parce qu'on dit qu'il doit les justifier, si j'ai bien compris. Donc, s'il est obligé de les justifier aussi, vous comprendrez que ça prend une certaine sommité, qui connaisse à la fois la science de la forêt, la législation de la forêt puis qui a les ressources... qu'il s'entoure de ressources pour être capable de lui faire prendre la décision formelle.
Parce que, si on se ramasse, à chaque fois qu'il rend un avis, devant la Cour supérieure pour contester une décision, on ne sera pas trop, trop avancés. Je pense que c'est une équipe multidisciplinaire, mais de spécialistes, qu'il lui faut. Mais c'est pour ça qu'il lui faut une indépendance...
Mme Doyer: Oui, mais je ne suis pas...
M. Chevrette (Guy): ...pour ne pas avoir à courir non plus après ces ressources qui ne lui appartiennent pas en soi, qui appartiennent au ministère.
Il faut que cette personne-là ait la liberté complète d'agir avec son personnel, et je ne crois pas que la structure actuelle dégage cette souplesse. Moi, je m'excuse, mais, dans un ministère, il y a une hiérarchisation puis il y a des spécialistes dans chacun des secteurs. Puis, dans certains ministères, ça marche par silo, pas trop en réseau, vous le savez. Il y a d'autres ministères qui peuvent marcher en réseau. Je ne commencerai pas... Je ne ferai pas enquête avant pour vous donner mon point de vue là-dessus, mais je vous dirai une chose, par exemple: Si cette personne-là n'a pas la liberté totale de pensée et d'action, je pense que ça ne marchera pas. S'il a vraiment l'indépendance totale et les ressources nécessaires, je pense qu'il peut faire un travail extrêmement positif pour la crédibilité de l'État, à part de ça, dans la façon de gérer ses ressources, pour la crédibilité de l'industrie forestière, qui génère de l'emploi, qui génère de l'activité économique. Moi, je pense qu'on a tout à gagner de se trouver quelqu'un de fort et avoir toute la latitude, toute l'indépendance et toute la transparence pour redresser cette industrie forestière.
Le Président (M. Jutras): En une minute, M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: En une minute. À certains égards, en commission parlementaire, j'ai déjà vu le ministre des Ressources naturelles souhaiter qu'il y ait de la pluie pour remonter le niveau des barrages. Alors, sur la Côte-Nord, présentement on souhaite la pluie pour éteindre les feux de forêt.
Question rapide. Vous parliez de sommités; certains groupes nous ont dit hier, et même les ingénieurs forestiers nous l'ont confirmé, qu'ils voyaient en le poste de forestier en chef un ingénieur forestier. Quel est votre point de vue là-dessus?
n(17 heures)nM. Chevrette (Guy): Je pense avoir répondu, mais je vais vous dire que, pour nous, il faut un ingénieur forestier qui a la science de la forêt, qui connaît la forêt, qui est capable d'en faire l'évaluation, de la forêt, du type de travail à faire en forêt, tout ça. S'il n'a pas ces connaissances-là, il aura beau être bon gestionnaire, il jugera des rapports et des rapports, et je pense que l'efficience et l'efficacité ne seraient pas là. Moi, personnellement, je pense sincèrement qu'il faut un excellent ingénieur forestier, qui est considéré comme une sommité, qui a une connaissance scientifique assurée, qui est crédible aussi, qui est crédible et puis qui a des qualités de gestionnaire.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci à M. Chevrette, merci aussi à M. Robitaille.
M. Corbeil: M. le Président...
Le Président (M. Jutras): Attendez.
M. Corbeil: M. le Président, tout simplement, puisqu'on parle d'une gestion forestière transparente, en raison des feux de forêt, je viens d'autoriser la fermeture de la forêt sur une large partie du territoire de la Côte-Nord et du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Il y a deux quadrilatères situés dans les secteurs de feux multiples, qui sont autour de Manic-5 et, plus à l'ouest, entre le Lac-Saint-Jean, Mistassini et le réservoir Gouin, où là on est vraiment en difficulté. Alors, on utilise tous nos effectifs, et on a même fait appel à des renforts d'avions-citernes de l'extérieur et de ressources humaines aussi de l'extérieur. C'était une mise au point.
Le Président (M. Jutras): Et maintenant je vais demander à M. Guy Coulombe de bien vouloir s'avancer.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Alors, je souhaite la bienvenue à M. Guy Coulombe, qui a justement présidé la Commission d'étude sur la gestion de la forêt québécoise. Alors, bienvenue, M. Coulombe. Alors, j'ai vu que vous aviez suivi des travaux de la commission parlementaire. Je rappelle quand même les règles, là: 20 minutes pour votre présentation, par la suite un échange de 20 minutes avec le ministre et les députés ministériels et, par après, un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition. Alors, vous pouvez y aller, M. Coulombe. Peut-être présenter dans un premier temps les personnes qui vous accompagnent et procéder à votre présentation.
M. Guy Coulombe
M. Coulombe (Guy): Alors, merci, M. le Président. Je voudrais vous présenter M. Éric Bauce, qui est professeur à l'Université Laval, et M. Bouchard, qui est professeur à l'Université de Montréal, et qui étaient membres de la commission avec moi, partie de la commission. Nous avons l'intention de faire quelques remarques mais très limitées dans le temps, parce qu'on voudrait avoir le maximum de temps pour dialoguer et répondre aux questions.
Je voudrais faire une petite mise au point mécanique au début. C'est que, si vous me voyez mettre mes lunettes fumées, ce n'est pas parce qu'il y a une lumière aveuglante, c'est parce que j'ai perdu mes autres lunettes régulières. Alors, comme elles sont ajustées, je les mets pour lire.
Deuxièmement, je voudrais souligner qu'on ne représente pas de groupe, on ne représente pas la commission. La commission a remis son rapport au mois de décembre, c'est terminé, la commission n'existe plus. Donc, on ne représente aucun groupe d'intérêts, ni aucun groupe de pression, ni aucun groupe qui agit dans le secteur forestier. Nous sommes ici pour donner notre opinion personnelle dans le cadre de l'expérience qu'on a vécue, qui a été tout à fait remarquable, de l'expérience qu'on a vécue pendant 13, 14 mois dans le cadre de la commission. Alors, non plus, nous ne sommes pas impliqués avec le gouvernement dans quoi que ce soit ni à terme de contractuels ni à aucun autre terme. Donc, on est très indépendants dans notre position actuelle.
D'autres remarques préliminaires, c'est que... D'abord, on voudrait indiquer au gouvernement notre satisfaction, et aussi à l'opposition, puisque finalement la loi... la première loi qui découlait de l'application du rapport a été votée à l'unanimité. Même s'il y a eu des soubresauts, ça a été quand même voté à l'unanimité. Donc, on est très appréciatif de cette démarche et de ces décisions. Le présent projet de loi procède aussi du même respect de notre part pour la façon dont le gouvernement agit avec le rapport. Évidemment, le gouvernement, même s'il est bien intentionné, ne peut pas tout faire en même temps, ça, c'est clair, et c'est apparu dans plusieurs remarques qui ont été faites.
Il y a quand même quelque chose de fondamental qui est dans le rapport et qui sous-tend en fait toute la démarche qu'on a proposée, c'est que les trois prochaines années représentent une étape cruciale de transition pour opérer les changements nécessaires. Trois ans, on dirait que c'est long, mais ce n'est pas si long que ça, trois ans. Il y a déjà six mois de passés. Et pourquoi trois ans? Pourquoi 2008? C'est parce que, en 2008, ça va être la première opération de fabrication des plans opérationnels de gestion forestière dans les régions à partir du nouvel estimé de la possibilité forestière.
Vous savez que, quand on a présenté, dans notre rapport, la coupure de 20 %, il s'agissait de... basé sur des chiffres qui dataient de quelques années. Ces chiffres-là ont été en examen, et on nous dit que dans quelques mois de nouveaux chiffres vont être présentés concernant la possibilité forestière. Notre rapport a fait plusieurs remarques concernant l'élaboration de ces chiffres-là, et on espère qu'à partir des nouveaux chiffres qui vont être présentés on pourra y effectuer les transformations nécessaires en termes méthodologiques en y introduisant, à titre d'exemple, des logiciels concernant les problèmes de localisation et de qualité du... et de l'aspect économique du bois.
Donc, on pense que cette étape-là, la mise en place de la régionalisation, la mise en place des nouveaux calculs et tout ce qui est dans notre rapport, on pense que ça doit conduire, ce que le ministre appelle et le rapport appelait aussi, à une masse critique. Et ce n'est pas long comme période. C'est pour ça que, d'une façon globale, on pense que la loi actuelle, avec des changements ou des précisions minimums, pourrait enclencher cette dimension-là du rapport. Même s'il y en a d'autres, il faudra enclencher le plus rapidement possible.
Alors, je vais aller rapidement sur des sujets qui ont été traités et donner notre opinion tout simplement, clairement. Le premier problème évidemment, c'est tout le problème de l'Assemblée nationale, et ainsi de suite. Je n'épiloguerai pas longtemps là-dessus, parce que... Même si je n'ai pas l'expérience de M. Chevrette dans ces dimensions-là, j'ai d'autres types d'expériences, et je pense qu'il s'agit là un peu à mon avis d'un faux problème. Je pense que, lorsqu'on parle d'organismes comme le Vérificateur général ou d'autres organismes, c'est des organismes qui sont radicalement différents de ce qu'on veut faire avec le forestier en chef ou ce qu'on propose de faire.
n(17 h 10)n Le Vérificateur agit, étudie et présente des rapports sur ce qui est déjà fait. Il agit a posteriori. Il est le chien de garde de l'Assemblée nationale pour dire: Voici les lois qu'on a passées... On nomme un vérificateur qui va nous dire comment c'est exécuté dans le champ. Donc, le Vérificateur examine des choses qui sont déjà faites. Le chef forestier va fabriquer des choses. Il ne travaillera pas a posteriori, il va travailler a priori. Il va bâtir non seulement son équipe, et ainsi de suite, mais il va bâtir ses dossiers puis il va présenter ces dossiers-là comme quelque chose en devenir. Donc, c'est radicalement différent. Je dis la même chose sur les élections et la même chose partout. C'est tous des gens qui... sauf les élections, qui est opérationnel, mais là c'est par définition; on ne voit pas un ministère s'occuper des élections, c'est par définition. Mais les autres, ombudsman et ainsi de suite, réagissent à des situations, et c'est probablement normal que ça dépende de l'Assemblée nationale.
Alors, c'est pour ça qu'on pense que plus le débat entourant ce dossier-là... on pense sincèrement que ce qu'il y a dans la loi, à notre esprit, est correct, sauf que, si, et là je rejoins les commentaires de M. Chevrette, si on se disait... si on avait dit, ou le gouvernement avait dit dans sa loi: On nomme un sous-ministre associé pour s'occuper de la tâche, j'aurais été totalement d'accord avec M. Chevrette en disant que ce serait inutile parce qu'il n'a pas assez de pouvoirs pour remplir sa tâche. Mais la loi explicite clairement un statut très spécial pour un sous-ministre adjoint ? je n'en connais pas d'équivalent au gouvernement ? et très, très, très spécial, avec une autorité puis une indépendance très grandes.
Et je pense qu'il faut garder l'équilibre avec le fait que le forestier en chef doit travailler intimement avec les équipes, non seulement les équipes du ministère, les grands spécialistes, et ainsi de suite, mais les équipes régionales. Les calculs de possibilité sont faits par les régions à l'heure actuelle. Ils sont coordonnés par le centre mais sont fabriqués par les structures régionales du ministère en collaboration très souvent avec les compagnies, et ainsi de suite. Mais c'est issu de cette structure-là. Donc, il faut que le forestier en chef soit intimement lié, relié, avec toute l'indépendance nécessaire, aux produits de ces secteurs-là. Donc, nous, on pense que le forestier en chef devrait être nommé par le gouvernement. Quand on dit, dans la loi, qu'il a le statut de sous-ministre adjoint, ça exprime le statut administratif. Puis, en d'autres mots, il y a des structures, puis, si c'est nommé par le gouvernement, ça veut dire que ce n'est pas nommé nécessairement par la fonction publique, c'est nommé par le Conseil des ministres sur recommandation du ministre, et ça, avec les autres articles de la loi qui garantissent son indépendance et la transparence ? je n'insisterai pas là-dessus, parce que je pense que ça a été très bien expliqué par le ministre et même par plusieurs personnes qui se sont présentées.
Par contre, on pense aussi que, pour... donc nommé par le gouvernement, et on pense aussi que la fonction de retour sur l'action du forestier en chef, et, nous, nous sommes d'accord aussi à ce que le Vérificateur, via l'Assemblée nationale, puisse avoir un poste de vérificateur des forêts. Maintenant, ça s'est complexifié avec la loi de l'aménagement, qui parle d'un commissaire à l'aménagement ? oui, c'est ça, l'aménagement durable, au développement durable. Là, je ne connais rien des responsabilités de cette structure-là, mais en attendant que cette nomination ait lieu et puis qui appartienne au bureau du Vérificateur général, quitte, après ça, à le perfectionner si jamais il y a une synthèse à faire entre les deux postes... mais on pense qu'encore là c'est différent. Et là c'est parfaitement justifié que le Vérificateur inspecte et regarde la façon de procéder du forestier en chef et ait des rapports, critiques ou non, sur son action. Donc, c'est deux tâches différentes: quelqu'un qui bâtit et quelqu'un qui vérifie. Et ça, il faut que ce soit distingué, et je pense que... Le projet de loi ne fait pas mention du vérificateur, mais je pense que, si le ministre s'engage à ce que ce soit le cas, eh bien, ce sera le cas dans la prochaine mouture de la loi, parce qu'il va falloir évidemment qu'il y ait de nouvelle mouture éventuellement.
Là aussi, on pense que c'est... moi, je pense, on pense que c'est essentiel que cet individu-là soit nommé à la suite d'un concours public, avec une description de tâches publique, et soit choisi par un jury publiquement mis sur pied, avec des caractéristiques à venir. Je ne suis pas sûr que c'est bon de s'enfermer dans la loi, comme la loi... Évidemment, c'est différent dans le cas des procureurs parce que c'est très, très, très spécialisé, mais je ne pense pas que ce soit utile de dire: Ça va être tel organisme, tel organisme, tel organisme. Je pense qu'il faut laisser le choix au gouvernement de définir un jury de haut niveau, qui sera porté à être critiqué parce que, quand il sera nommé, bien, ceux qui ne seront pas d'accord, ils le diront, mais au moins ce sera un jury à la hauteur. Ce jury-là identifie deux ou trois candidats et dit au gouvernement: Nous autres, on a regardé ça, et ces deux ou trois candidats-là sont parfaitement capables de remplir la fonction de forestier en chef. Cinq ans, renouvelable pour cinq ans.
Les poursuites, pourquoi pas? Mais là je ne me prononce pas là-dessus, honnêtement, parce que je ne connais pas l'aspect juridique que ça peut impliquer. On m'a dit, on m'a informé qu'en Colombie-Britannique, par exemple, il avait été poursuivi... le forestier en chef avait été poursuivi sept fois. Il a gagné les sept fois. Et donc ce n'est pas l'individu qui est... Et ça, c'est ses actions, ses décisions. Mais je ne suis pas assez compétent en termes juridiques pour savoir comment ça peut s'articuler dans notre structure, ici.
La question de l'ingénieur forestier. Il est probable, dans l'état actuel des choses, que beaucoup de candidats vont venir de la fonction ingénieur forestier, il est normal et souhaitable. Moi, personnellement, je ne serais pas d'accord à marquer dans la loi que c'est nécessairement un ingénieur forestier. Je pense qu'il faut laisser ouverte la possibilité que d'autres personnes avec d'autres bagages scientifiques, d'autres expériences scientifiques, puissent se présenter et être évaluées en fonction, en rapport avec d'autres ingénieurs forestiers.
Je vous avoue honnêtement que j'ai rencontré, dans les 13 ou 14 mois où j'étais à la commission, j'ai rencontré beaucoup de monde publiquement et privément. Pas à la cachette, comme disait M. Chevrette. On a toujours dit qui on rencontrait, puis comment, puis quand. Mais on les a rencontrés de façon privée. J'ai rencontré beaucoup de gens très compétents qui n'étaient pas ingénieurs forestiers. J'ai rencontré beaucoup d'ingénieurs forestiers très compétents. Mais j'ai rencontré beaucoup de gens qui avaient une vision assez claire des documents, des perspectives fondamentales du renouveau forestier et qui étaient parfaitement, à mon avis, capables de remplir ce poste-là... je ne leur parlais pas du poste, parce qu'on ne le savait pas encore, mais enfin capables de remplir une fonction importante dans le développement forestier.
C'est évident que, si ce n'est pas un ingénieur forestier, sa première tâche, s'il est intelligent, ça va être de s'adjoindre un ingénieur forestier de haut niveau comme son bras droit, comme, s'il est intelligent, sa décision initiale... ou sa deuxième décision, ça va être de s'organiser pour avoir avec lui ou avec elle quelqu'un de très compétent dans le domaine économique et dans le domaine autre strictement que forestier à l'état pur. Donc, on parle un peu d'un triumvirat: celui qui dirige, qui doit avoir des qualités évidentes, mais aussi des qualités de vulgarisateur, des qualités de communicateur, des qualités de synthèse et des qualités d'interrelation, avec la multiplicité des organismes internes et externes qui vont agir ou tenter d'agir sur lui ou sur elle...
Donc, à mon avis, il ne faut pas faire une religion de ça. C'est plus que probable, probablement, que ce soit un ingénieur forestier qui soit choisi, avant que... Mais je pense que je ne fermerais pas la porte à la candidature de d'autres personnes. Et, en toute honnêteté, moi, ça ne me dérangerait pas que ce ne soit pas un ingénieur forestier qui soit nommé, à condition évidemment de s'entourer immédiatement, dans le triumvirat de tête de cet organisme-là, des deux autres types de spécialité: génie forestier et autre, soit écologiste, biologiste, économiste, ou ainsi de suite. Je pense qu'il faut... c'est ces trois personnes-là ou ces quatre personnes-là qui vont être les «king pin» de cette organisation-là. Donc, moi, je ne le marquerais pas dans la loi, mais ça, c'est mon opinion personnelle. En d'autres mots, un ingénieur forestier si nécessaire, mais pas nécessairement un ingénieur forestier.
Alors ça, c'est un peu notre opinion sur un peu la mécanique, mais c'est une mécanique qui est importante. Je pense qu'il y a la question du mandat. Et là je demanderais à M. Bouchard de dire quelques mots du mandat. Évidemment, on pourrait discuter longuement de tout un paquet de choses qui ont été discutées, mais on ne voudrait pas embarquer dans toutes ces discussions-là, on voudrait rester à la loi, et ça resterait...
M. Bouchard (André): En fait, quand on lit attentivement le projet de loi, on peut trouver, à travers ce qui est écrit, le mandat approprié, mais il faut reconnaître qu'il faut le chercher. Ce n'est pas assez explicite, mais on peut le trouver. On pourrait dire: Bien, tel mot couvrait ça puis, si on l'ajoute à tel autre, dans une série, ça le fait. Puis il ne faut pas oublier que l'ossature du rapport, c'est cinq virages, cinq virages majeurs, avec, comme moyens, parce que ça devient des moyens ? les virages sont importants ? des moyens: six réallocations de budget et 81 recommandations.
n(17 h 20)n Le premier virage qui est essentiel, c'est passer d'une gestion axée sur le ligneux à un aménagement écosystémique. Le bilan... On pense que cette notion de mandat, élargissement du mandat, doit venir par ajouter des précisions sur ce que le bilan quinquennal de l'article 17.1.7 doit comprendre. Or, on pense qu'il devrait s'ajouter ceci: «avec des données et des indicateurs ? parce que, des données puis des indicateurs, ça peut être deux choses différentes, mais avec des données et des indicateurs ? d'un aménagement écosystémique, multiressources et intégré ? parce que quelque chose peut être écosystémique sans être multiressources, quelque chose peut être intégré sans être les autres adjectifs ? dans le cadre des six critères d'aménagement durable des forêts», qui a fait le consensus canadien des ministres des Forêts, mais ceci ? donc, j'arrête là ce qui serait d'ajouter à la loi, pour ne pas créer d'ambiguïté ? mais ceci rejoint textuellement la recommandation 4.5 du rapport de la Commission sur la gestion de la forêt publique. Alors, c'est là que je ferais la... c'est là que j'élargirais, pour qu'on comprenne bien, le mandat, je l'élargirais.
Parce que c'est sûr que c'est ce bilan-là qui va rassurer et, dans toute la transparence qu'il aura, c'est ce bilan-là qui va permettre aux gens de dire: Bien, la forêt, elle évolue vers ou elle n'évolue pas vers, mais elle évolue vers nos objectifs, et c'est ce bilan aux cinq ans qui va permettre de créer cette confiance et ce lien entre les citoyens et l'administration.
M. Coulombe (Guy): Avant de peut-être donner la parole à M. Bauce, je voudrais juste... On a mentionné dans les discussions que le bilan mettait le forestier en chef en conflit d'intérêts. Moi, je ne le crois pas. Le bilan est là pour justifier toutes les démarches qu'il a prises et l'expliquer à la population, et dire à la population: Toutes les démarches, tous les efforts, toutes les recherches, tous les documents qu'on vous a donnés et qu'on a mis à votre disposition, la synthèse, c'est ça que ça donne. Et ça, je pense que c'est fondamental pour le forestier en chef, si on veut de la transparence, de lui donner la possibilité qu'il fasse ça. Encore une fois, ce n'est pas un bilan. C'est: Est-ce que mon bilan est bon ou pas bon? Il faut qu'il dise: Voici ce que j'ai fait et voici pourquoi je l'ai fait, voici les recommandations que j'ai faites et voici pourquoi j'ai fait ça. Que le Vérificateur vienne après puis qu'il dise: Écoute, tu as bien beau dire ce que tu voudras, mais, ton bilan, il est mal fait parce que tu n'as pas suivi tes propres règles, parce qu'il y a eu ci, il y a eu intervention de... bon, ça, c'est un autre département. Mais je pense que le bilan du forestier en chef doit être maintenu, c'est une condition essentielle de la transparence, parce que là il s'expliquerait devant tout le monde.
Pour la question des inventaires de la possibilité forestière, je pense qu'il y a quelques mots à dire aussi, importants.
M. Bauce (Éric): Je vais être assez bref. Mais évidemment la première question que je me suis posée, c'est le lien qui existe entre ce projet de loi là et ce que ça va faire, un forestier en chef, face aux défis de la foresterie. Est-ce que ça cadre assez bien avec les défis que cette personne-là ou que cette équipe-là va avoir à relever? Et, pour ce faire, je vais faire juste un petit peu de background pour voir où on en est présentement dans cette activité de calcul de la possibilité, qu'on peut dire, la possibilité ligneuse actuelle.
Les calculs... Ces niveaux de coupe actuels sont des niveaux de coupe qui ont été établis autour de 1998, avec les connaissances de 1998. La commission a regardé un peu ces choses-là et évidemment s'est aperçue que les connaissances ont évolué, que les outils ont évolué et qu'il y a des défis, des défis de mise à niveau des outils qui existent ailleurs, qui ne sont pas utilisés au Québec et qui devront être utilisés au Québec. Ça, c'est un des grands défis que cette personne, que ce groupe va avoir à relever. Et une des choses qui m'apparaît très importante dans les fonctions de cette personne-là et dans l'encadrement légal de son travail, c'est qu'il va encadrer la qualité des données ? ça, c'est bien dit dans la loi ? et aussi la qualité des outils qui vont être utilisés. Alors, il va falloir absolument que cette personne-là puisse utiliser les outils contemporains qui sont utilisés ailleurs, dans d'autres provinces, dans d'autres pays, et qui permettent, entre autres, de faire face aux défis de l'utilisation multiple des ressources.
L'utilisation multiple des ressources, ça ne peut pas se faire s'il n'y a pas de considérations géographiques de prélèvement. Que ce soit du prélèvement ligneux ou autre, il faut que ce soit spatial, cette chose-là. Présentement, les approches ne sont pas spatialisées, et c'est une chose qui ressort, qui a été décrite amplement dans le rapport, l'importance de spatialiser les choses pour que les gens sachent où on fait les prélèvements, que ce soient des prélèvements ligneux ou d'autres prélèvements des multiples ressources forestières. Et ça, ça m'apparaît personnellement comme un aspect excessivement important du rôle de cette personne-là qui va finalement avoir le défi de faire faire un saut à la foresterie, un saut, je dirais, très important dans la gestion forestière via ces outils-là. Et cette personne-là devra être en mesure d'être alerte, et pas seulement alerte au niveau technique, au niveau technologique, mais aussi alerte face aux besoins des gens, aux besoins de tous les utilisateurs. Donc, à mon avis, c'est une personne qui va devoir avoir une grande capacité d'écoute.
Il faut comprendre que le rapport est un tout. On a mentionné qu'il y avait un certain nombre de recommandations dans ce rapport-là qui sont interreliées les unes aux autres. On parle du forestier en chef, on parle de l'implication des régions dans la détermination des plans de développement via les commissions forestières régionales. C'est ces commissions-là, c'est les régions qui vont déterminer qu'est-ce qu'elles veulent faire avec leur forêt, qu'est-ce qu'elles veulent faire avec leur développement économique, et le forestier en chef va devoir répondre à ces choses-là et intégrer ça pour que ça se traduise dans des calculs, dans des volumes maximums de récolte. Et ça, c'est excessivement important. Et c'est pour ça que cette équipe-là devra être en connexion tout le temps avec les orientations régionales.
Je ne voudrais pas aller trop loin dans mon intervention outre le fait que 2008, ça vient vite. Pour qu'il y ait des choses qui soient mises en branle, des plans d'aménagement qui soient instaurés en 2008, ça prend des calculs en 2007. Là, il y a des calculs qui vont s'en venir bientôt, il y a un exercice qui est en cours, et les résultats de ces calculs-là devront... il y a des modifications, des modifications profondes qui vont devoir être faites à l'intérieur de ces résultats-là, de ces façons de calculer là, pour justement amener ces dimensions spatiales, économiques, etc.
Ça nous amène à 2007. 2007, ça arrive très vite. Et ce que je voudrais souligner, c'est l'urgence, l'urgence d'agir, l'urgence de mettre en branle cet aspect-là de modernisation de nos outils, l'importance d'encadrer la qualité de ces outils-là. Et je ne parle pas juste en termes de qualité de logiciels pour faire des calculs, mais aussi tout ce qui touche l'acquisition des données sur le terrain. Donc, ça part de l'inventaire, de la façon qu'on traite les choses, jusqu'aux hypothèses. Évidemment, la calculette, là, c'est une chose, mais tout est dépendant de ce qu'on met dedans et des hypothèses.
Un des aspects qui nous a amenés à recommander une baisse de 20 % de la possibilité forestière, c'est un aspect d'hypothèses et de calculs principalement face notamment à des hypothèses sylvicoles qui avaient été mises en 1998, et on s'est rendu compte que ces hypothèses qui prévoyaient des volumes dans le temps n'étaient pas vraies, ne fonctionnaient pas. Les gens se sont rendu compte de ça. Donc, il y a un ajustement face à des outils de traitement sylvicole qui était appliqué à la grandeur du Québec en très, très grande quantité. On s'est rendu compte que, dans cette machine-là, on ne considérait pas les feux. Présentement, ça brûle sur la Côte-Nord. C'est des facteurs de prélèvement, les feux. Et c'est toutes des choses qu'il faut, dans un aspect de bonification en continu de nos outils d'évaluation de la possibilité ligneuse et, ultimement peut-être, un jour, dans un deuxième temps, je dirais, forestière, d'un point de vue de ce qu'on ressort économiquement de la forêt, donc d'un rendement financier de la forêt, je dirais, au-delà d'un rendement ligneux... On n'est pas rendu là, on a des années à refaire pour arriver à un concept comme ça. Mais, évidemment, comme je me plais à le dire, il faut marcher avant de partir à courir.
J'aimerais juste mentionner deux aspects directement qui touchent le projet de loi, deux suggestions...
Le Président (M. Jutras): En conclusion, oui.
M. Bauce (Éric): La première suggestion, c'est au niveau de l'article 17.1.2, où je suggérerais qu'on ajoute, au point n° 3, les aspects... les outils, pas seulement les données, mais les outils... «les méthodes et outils d'acquisition de données». Ça pourrait être rajouté là-dessus. Et finalement, au point 17.1.8, d'introduire la notion d'obtention de toute information biophysique sur le territoire. On parle d'information qui touche les organismes publics; il y a de l'information qui va être nécessaire pour cet organisme-là, cette personne-là, qui va venir de d'autres sources, que ce soit de sources privées, de l'industrie forestière ou autre, et cette personne devra avoir la possibilité d'avoir accès à cette information-là.
Le Président (M. Jutras): Merci. Alors, M. le ministre.
n(17 h 30)nM. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Coulombe, M. Bouchard, M. Bauce, merci de votre participation et de votre éclairage aux travaux de cette commission. Merci aussi pour l'excellent travail que vous avez fait avec toute l'équipe de la commission, parce que je pense qu'il y avait non seulement une analyse de la situation à faire, mais aussi des améliorations à apporter, et vos recommandations et votre rapport sont très éloquents et éclairants à cet égard.
J'ai plein de questions. Il y en a plusieurs que vous avez répondu, là, espèce d'interaction avec ce que vous avez entendu au cours des derniers jours. Je voudrais vous entendre sur l'intention gouvernementale, contenue à l'article 1, de favoriser une gestion écosystémique, intégrée et régionalisée, de modifier la loi du ministère pour justement faire en sorte qu'il y ait des nouvelles façons de faire qui soient reconnues, établies.
M. Coulombe (Guy): Nous, on pense que c'est extrêmement important, et c'est le fondement même du rapport. De faire une réforme forestière strictement en fonction du ligneux, à notre avis, ce serait très incomplet. Il faut introduire de façon délibérée, tout en étant conscient que, dans le domaine des écosystèmes, et ainsi de suite, il y a beaucoup de chemin à faire en termes de connaissances, en termes d'aspects concrets, il y a beaucoup de chemin à faire, mais il faut que la démarche soit entreprise le plus rapidement possible. Ça nous semble extrêmement important et c'est là qu'est la base même du rapport.
Maintenant, il n'y a personne d'entre nous qui se faisons des illusions pour dire qu'il y a un dictionnaire qui existe à quelque part puis qui va donner toutes les recettes de ce qu'on peut entendre par «développement des écosystèmes». C'est à bâtir. Il faut commencer, et je pense que c'est fondamental que ce soit dans le projet de loi, ça.
M. Corbeil: Dans le cadre de nos discussions jusqu'ici, on a toujours tourné notre réflexion, nos commentaires... bien, pas toujours, mais généralement ou globalement, autour d'un individu, et vous avez introduit tantôt la notion d'équipe. Vous introduisez une dimension d'équipe. J'aimerais ça vous entendre ou que vous puissiez élaborer un peu plus là-dessus.
M. Coulombe (Guy): La pire erreur qu'on pourrait faire, ce serait de dire: On met en place un chef forestier qui est un peu sur un piédestal à quelque part, qui, par science infuse, va dire: Bang! c'est ça, puis bang! c'est ça. C'est impossible. Le chef forestier va être le chef d'une équipe. Bien, est-ce que ça va être une grande équipe, une petite équipe? Bien, là, ce sera à décider par ceux qui seront dedans, là. Mais il y a un fondement de base, puis il faut que cette équipe-là ? et ça, Mme la députée de Matapédia a insisté beaucoup là-dessus ? il faut que ce soient des spécialistes de différentes disciplines qui soient dans cette équipe-là. Mais, les «king pins», moi, je vois que le chef forestier devrait avoir un... malheureusement, il n'y a pas trois bras droits. Il y a un bras droit qui est surtout genre biologiste ou économiste, si c'est un ingénieur forestier. Si ce n'est pas un ingénieur forestier, bien le contraire. Et il y en a un autre qui est dans une des disciplines complémentaires.
En dessous, et ça, on a pris le pari, et ça, peut-être qu'on voudrait le souligner, on a pris le pari qu'au ministère, dans les régions et au centre, il y a des gens compétents, des gens compétents à qui il faut donner la chance, avec un environnement renouvelé, d'exprimer leurs compétences, d'avoir la volonté, puis le dynamisme, puis l'audace de faire des choses nouvelles. On pense que ça existe. On en a rencontré. On ne dit pas que c'est partout, on ne dit pas que c'est tout le monde. On en a rencontré. Et on pense qu'avec un chef forestier qui a des pouvoirs très précis, qui a un devoir de transparence, qui a une exigence de transparence, ça va donner de l'ampleur, pour beaucoup de fonctionnaires, à leurs travaux qu'ils vont faire dans ce cadre-là. Et ça, c'est le pari du... Sans ça, et je pense que M. Chevrette l'a mentionné, sans ça, on crée une autre structure puis on engage du monde, puis on dit aux fonctionnaires: Bien, continuez à faire vos inspections, continuez à faire ci, continuez à faire ça, puis on engage du monde nouveau, ce qui serait absurde, et non seulement absurde, mais ce serait du gaspil public, d'argent public.
Donc, le pari est très important, et c'est pour ça qu'il faut qu'il y ait une proximité, tout en ayant des pouvoirs très précis, totalement nouveaux. Je pense que c'est important que l'équipe soit multidisciplinaire et qu'il y ait des tâches à remplir, et ça, avec les régions. Et ça, le chef forestier, même s'il a une équipe centrale importante, je ne sais pas, 10, 12, 15 personnes, 20 personnes, même avec ça, il ne pourra rien faire s'il n'y a pas en arrière de lui ou de cette équipe-là les équipes régionales en constante, constante communication. Et les infrastructures de connaissances viennent des régions, et ça, je pense qu'on l'a souligné tant et plus dans le rapport. Donc, il faut qu'il y ait une continuité, il faut qu'il y ait un continuum, mais avec une équipe de base du plus haut niveau.
Le Président (M. Jutras): M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. Coulombe. Il a été beaucoup question de rebâtir la confiance, rebâtir une crédibilité perdue. D'après vous, comment selon vous les différents joueurs peuvent-ils contribuer à rétablir la confiance de la population à l'égard de la gestion de la forêt publique, de l'industrie forestière puis ainsi que de tous ceux qui oeuvrent en foresterie?
M. Coulombe (Guy): D'abord... Là, encore là, j'insiste pour dire que c'est mon opinion personnelle, là, je parle pour... Je pense que la question de la crédibilité va s'améliorer, ou les inquiétudes vont s'estomper dans la mesure où il va y avoir des choses concrètes qui vont se faire, et des choses concrètes que la population va comprendre. Toute la régionalisation, toutes les conférences forestières, tout le rôle des CRE avec des pouvoirs un peu plus précis, qui, j'espère, vont être mis sur la table à l'automne ou je ne sais pas quand, et le regroupement des forces régionales avec des perspectives très territoriales, comme M. Bauce l'a dit, avec des instruments qui vont faire comprendre comment ça peut influencer le stock forestier, je pense que ça est l'aspect public des opérations: Voici exactement ce qu'on a fait puis voici comment ça fonctionne.
Moi, je ne crois pas que l'industrie forestière est en trouble à cause de l'action... comment il s'appelait, le film... Boréal, là... L'Erreur boréale... Je ne crois pas à ça. Le secteur forestier, du côté industriel, est en trouble par tout ce qu'on connaît, ce que tout le monde connaît puis la population en comprend: les relations avec les Américains, l'invasion des produits qui viennent de Chine, et ainsi de suite, dans les meubles, puis tout ça, la baisse de production du papier journal, la baisse d'intérêt ou d'augmentation des coûts, des prix du papier journal et le fait qu'on produit beaucoup de «commodities», puis les marchés ne sont pas contrôlés par le Québec. En d'autres mots, le Québec subit les écarts de coûts qui arrivent à gauche puis à droite. C'est ça, l'explication du malaise qu'il y a dans le secteur industriel.
Alors, pour reprendre ça, il faut... et j'étais content d'écouter M. Chevrette, le représentant de l'industrie forestière, qui disait: On en a, des idées, on en a, des innovations à vous proposer. Moi, je trouve ça fantastique, puis je n'ai aucune crainte là-dessus. Si on regarde ce qui s'est passé dans les 10 dernières années, la création d'emplois très importante qu'il y a eu de la part d'entrepreneurs, aidés par le gouvernement mais pas toujours, des vrais entrepreneurs qui ont créé de l'emploi dans la deuxième et la troisième transformation, des milliers d'emplois, bien ce n'est pas les anges qui ont inventé ça, c'est des Québécois, des entrepreneurs qui ont inventé des nouvelles méthodes, des nouveaux produits, des valeurs ajoutées. Et, moi, je suis persuadé que les grandes corporations sont capables, et ça a été affirmé tantôt... puis ils ont des idées, bien, coudon, qu'ils les mettent sur la table, puis que ce soit public, puis que ce soit clair, puis que ce soit intégré au reste du développement forestier, puis je pense que la crédibilité va revenir. Moi, je n'ai pas d'inquiétude là-dedans. La crédibilité... puis vous avez raison, puis tout le monde a raison, on dit: Tu ne légifères pas là-dessus, tu n'en parles même pas, tu dis: Bon, bien, voici ce qu'on fait, puis la crédibilité va se bâtir.
M. Corbeil: Merci, M. Coulombe. La question autochtone prend de plus en plus d'importance au Québec. Vous avez une expérience personnelle de ces enjeux. Comment croyez-vous qu'il serait possible de réussir un rapprochement, qui m'apparaît comme un défi incontournable, pour implanter une gestion régionalisée des forêts en participation avec les communautés autochtones?
M. Coulombe (Guy): Là, je ne voudrais pas laisser l'impression que j'ai des recettes là-dessus, parce que beaucoup de gens extrêmement brillants se sont penchés sur le problème, et ça ne change pas vite puis ça n'aboutit pas vite. Mais c'est évident qu'on revient à la base, et, si on regarde les jugements de la Cour suprême, et ainsi de suite, on revient à la base fondamentale qui est l'ouverture, puis qui est le dialogue, puis d'avoir des règles du jeu qui sont compréhensibles par les interlocuteurs, que ce soient les autochtones, mais aussi la population qui n'est pas définie comme autochtone, dans les milieux où ça se passe, où la réalité se passe. Donc, l'ouverture, le dialogue, la communication, et ainsi de suite. Mais j'ai l'impression qu'en disant ces mots-là je dis des lieux communs, mais je pense que c'est la base de tout règlement éventuel, et ça, c'est difficile, c'est long et c'est compliqué.
M. Corbeil: Merci beaucoup. Vous avez... en fait, la commission a insisté, dans le rapport, sur la gestion par objectifs, la simplification des normes. J'aimerais beaucoup vous entendre sur cette question. Et comment on pourrait faire le lien avec ces suggestions de simplification des normes, gestion par objectifs, et la venue du forestier en chef? Comment qu'on pourrait faire?
n(17 h 40)nM. Coulombe (Guy): Je pense que ça devrait être une synthèse. Nous, nous partageons, moi, je partage que l'idée de gestion par objectifs est tout à fait valable. Mais encore là il ne faut pas en faire un mythe. Ce n'est pas vrai que ? et, là-dessus, moi, je m'inscris en faux contre certaines choses qui ont été dites ? ce n'est pas vrai que, dans une région, vous allez avoir la liberté absolue de faire des normes, puis de les changer, puis de les modifier, puis ainsi de suite. Il y a une espèce de cohérence générale qu'il va falloir garder. Mais, après avoir dit ça, autant il ne faut pas en faire un mythe, autant il ne faut pas se servir de ce prétexte-là pour ne rien changer. Il faut changer des choses, il faut donner plus de souplesse, plus de liberté d'action et plus de...
Alors, ça veut dire quoi, la gestion par objectifs? Ça veut dire qu'au lieu de suivre un manuel, de dire: Tu fais le pas x après le pas y, puis la porte z après telle chose, c'est que ça donne des objectifs: Voici ce qu'il faut atteindre, voici le type de boisement, voici le type de reboisement qu'on veut atteindre, voici le type de travaux sylvicoles globaux qu'il faut faire pour atteindre tel objectif de production ligneuse ou de d'autres productions dans la forêt.
Donc, nous partageons cette opinion-là et nous pensons que le forestier en chef, avec ses... Ça va être indispensable que le forestier en chef puisse évaluer ce genre de choses là. M. Bauce mettait l'accent tantôt sur le fait qu'il y a des connaissances qu'on n'avait pas, qu'il n'y avait pas en 1998 ou en 2000, bien qui s'accumulent. C'est-à-dire, pour savoir qu'est-ce que les travaux sylvicoles donnent, il va falloir qu'il y ait une définition pas mal claire des travaux sylvicoles puis qui puissent être suivis, qu'il puisse y avoir des méthodes pour dire, au bout de cinq ans, au bout de 10 ans: Bien, ça ne marche pas, on pensait ça, mais ça ne marche pas, et voici les conséquences qu'il faut en tirer.
Donc, c'est une harmonisation. Et je pense que le mythe de dire qu'il faut que les régions soient parfaitement autonomes dans toutes les décisions là-dedans, à mon avis, c'est un mythe. Il va falloir qu'il y ait un équilibre entre ce que les régions vont décider, ce que le forestier en chef va colliger puis qu'il va rendre public au niveau de l'ensemble du Québec comme conséquences des actions prises par les régions.
M. Corbeil: Merci. Au niveau de la commission, on a parlé d'aménagement écosystémique. J'aimerais vous entendre un peu plus sur votre vision, parce qu'on a remarqué, dans le cadre de nos échanges jusqu'ici, que c'est un sujet qui porte à diverses interprétations.
M. Coulombe (Guy): Allez-y, M. Bouchard ? c'est sa spécialité ? et je pourrai dire quelques mots après.
M. Bouchard (André): Écoutez, il y a une définition qui a été mise dans le rapport, je vous la relis, à la page 47: «Un concept d'aménagement forestier ayant comme objectif de satisfaire un ensemble de valeurs et de besoins humains en s'appuyant sur les processus et les fonctions de l'écosystème et en maintenant son intégrité.» La définition évidemment est suffisamment large pour laisser plusieurs interprétations, on en est... ça est clair, et la plus grosse interprétation évidemment qu'on peut avoir dans ceci, c'est qu'évidemment les savoirs sont en évolution. Évidemment, quand on dit «les processus et les fonctions de l'écosystème et [...] son intégrité», ce serait naïf de penser que tout est su, en 2005, sur comment fonctionnent les écosystèmes, puis il n'y aura pas quelque chose de différent. Mais c'est pour ça qu'on dit que ceci est adaptatif, aussi. Mais c'est la définition qu'on a mise, qui nous semble raisonnable. Évidemment, dans le texte, si vous le regardez, ça parle de choses qu'on a entendues lors des audiences: approche... «aménagement proche de la nature» ou «aménagement écologique» étaient des termes qu'on a retenus dans notre texte, mais on a fait une définition qui est celle-là.
M. Corbeil: Donc, vous parlez définitivement, là, de quelque chose qui va modifier dans le temps, d'amélioration continue, d'adaptatif... d'adaptation, des choses comme ça.
M. Bouchard (André): Sûrement. Mais, d'un autre côté, il ne faut pas, en disant ça, vouloir dire que tout va changer complètement, parce qu'il y a quand même... ça fait... l'écologie, c'est une discipline qui existe depuis une centaine d'années mais qui a pris sa force, là, quand même réellement depuis 20 ans, 20, 25 ans. Il y a quand même un nombre assez considérable d'acquis...
M. Corbeil: Principes de base.
M. Bouchard (André): ...qui ne seront pas chambardés automatiquement parce qu'il risque d'avoir une trouvaille qui vient tout changer ça, là. Disons, il y a quand même des concepts de base qui normalement vont demeurer stables pendant plusieurs années.
M. Corbeil: On a beaucoup... Les discussions ont été à l'effet de la neutralité, l'intégrité scientifique, l'autonomie ? c'est la recommandation 7.2 du rapport ? et vous parliez d'établir un cadre institutionnel qui traduirait ces caractéristiques-là. Vous avez élaboré tantôt en disant que ce n'est pas nécessairement quelque chose qui doit être détaché du ministère. Qu'est-ce que vous pensiez quand vous avez écrit...
M. Coulombe (Guy): Peut-être que le mot «cadre institutionnel» était un mot peut-être pas bien choisi, là, compte tenu des discussions que j'entends. Mais, «cadre institutionnel», ce qu'on voulait dire, c'est ce qui est proposé là. En d'autres mots, c'est un encadrement: voici un chef forestier qui va avoir telles responsabilités, il va avoir des garanties d'indépendance, il va avoir des exigences de transparence, il va avoir des liens avec les régions. C'est ce que j'appelle un cadre institutionnel. D'autres peuvent dire: Un cadre institutionnel, ça veut dire des nouvelles structures. Pas nécessairement.
Mais, dans un sens, le forestier est une nouvelle structure, ça n'existait pas avant, puis il n'y a pas beaucoup d'autres exemples, dans l'organisation du gouvernement, de ce type-là. Alors, c'est ça qu'on voulait dire par «cadre institutionnel», c'est-à-dire, c'est l'organisation du travail et de l'équipe, des interrelations qui vont se faire entre cette tâche-là, mais dans un souci d'indépendance et dans un souci de transparence. Et l'indépendance, je pense, est garantie par le fait qu'il y a une obligation de rendre publiques des choses, et, avant de contrevenir ça, il va y avoir beaucoup de chemin à faire pour passer au travers.
M. Corbeil: M. Coulombe, je pense que c'est... Je ne sais pas quel temps qu'il me reste, là.
Le Président (M. Jutras): Il vous reste trois minutes.
M. Corbeil: Trois minutes? J'aurais envie de vous demander: Est-ce que ça vous intéresserait de postuler pour le poste?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Coulombe (Guy): Bien, si j'avais 15 ans de moins, ça me fascinerait, parce que ça doit être... ça va sûrement être un des plus beaux postes qu'il y aura à Québec, parce que c'est général, il y a du contenu, il y a des interlocuteurs de tous les niveaux, de toutes les régions. Ça va être une fonction fantastique. Et je souhaite que vous trouviez... que le jury que vous allez mettre sur pied, parce que je souhaite qu'il y ait un jury puis que ce soit public, qu'il puisse trouver le meilleur individu possible, qu'il soit ingénieur forestier ou non.
M. Corbeil: Vous avez laissé échapper, dans votre réponse: le plus beau poste à Québec.
M. Coulombe (Guy): Au Québec.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Corbeil: Ah! O.K. Excusez.
Des voix: Au Québec.
M. Coulombe (Guy): Bien, «à Québec», je référais à l'entité géographique du Québec.
M. Corbeil: O.K., O.K., c'est beau. En fait, moi, j'en aurais une, dernière question, M. le Président: À vos yeux, quels sont les prochains changements auxquels je devrais m'attaquer en priorité au cours des prochains mois?
M. Coulombe (Guy): Bien, écoutez, c'est présomptueux un peu de ma part de vous répondre, parce que finalement c'est au gouvernement à prendre ses décisions là-dessus. Mais, si j'avais un mot à dire là-dessus, c'est évident qu'il faut que l'encadrement régional soit précisé au plus tôt possible. C'est quoi les pouvoirs éventuels des CRE? Quels sont leurs rôles? Quels sont les rôles... Les rôles sont assez bien définis dans le rapport, mais quel est le mandat exact et les pouvoirs et les moyens nécessaires pour remplir leur mandat des conférences... Je ne me rappelle plus, comment on les appelle donc?
M. Corbeil: Les commissions forestières régionales.
Une voix: ...
M. Coulombe (Guy): Voilà. Alors ça, c'est prioritaire. La nomination au plus rapido du chef forestier.
Une voix: Au Québec.
M. Coulombe (Guy): Au Québec. Et, je pense, l'organisation du régional me semble fondamentale. Et redéfinir les relations des fonctionnaires des régions avec les structures de la conférence et de... de conférence des... l'aspect politique et l'aspect administratif. Ça, ça me semble superprioritaire, et c'est là que vont commencer à prendre forme les exigences de la réforme. Mais j'espère que le gouvernement va trouver les moyens financiers, qui ne sont pas tellement onéreux et très considérables, mais un minimum, pour que ça, ça ait un sens. Et je pense que c'est l'étape la plus importante et la plus exigeante, parce que ce ne sera pas facile de faire à l'automne. Il faut que ça se fasse.
M. Corbeil: Et j'aurais envie de vous demander: Est-ce que vous pensiez, lors du dépôt de votre rapport, qu'il y aurait cet accueil-là et que non seulement il y aurait cet accueil-là, mais que le train de mesures qui sont à être mises en oeuvre se feraient avec autant, je dirais... je ne dirais pas de célérité, ça pourrait peut-être paraître présomptueux, là, mais quand même assez rondement?
M. Coulombe (Guy): Tout en étant convaincu que vous ne cherchez pas les félicitations nécessairement...
M. Corbeil: Non, non, non.
n(17 h 50)nM. Coulombe (Guy): ...je pourrais les faire. Mais, quand on a déposé le rapport, on était confiant, et je pense qu'on est confiant encore que le gouvernement... Je pense que c'est trop fondamental, la forêt comme secteur d'importance économique et d'emploi et étendu au niveau de l'ensemble du Québec, c'est trop important pour perdre une autre... pour employer des grands mots, là, mais une autre décennie pour tourner en rond puis se demander... à couper des cheveux en quatre, là, si... est-ce qu'on fait ci, est-ce qu'on fait ça, puis c'est une... ici puis c'est une... là, il va falloir se fier à l'audace puis à l'imagination des gens pour innover, et je pense que le temps est mûr. Et l'accueil que le rapport a reçu, on en est extrêmement heureux. Je ne dis pas qu'on avait prévu tout ça, mais on très heureux, et plus ça va aller dans le sens des choses... Et, si on remarque le tempo qui était proposé dans le chapitre 9 du rapport, bien c'est le tempo auquel on assiste à l'heure actuelle. On est donc très heureux.
M. Corbeil: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Merci. Mme la députée.
Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, messieurs, M. Coulombe, M. Bouchard, M. Bauce. Alors, je vous avais vus justement dans le Bas-Saint-Laurent quand il y avait toute ma région, il y avait aussi ceux qui avaient manifesté, vous vous souvenez, nos travailleurs forestiers qui étaient représentés par les différentes sociétés d'exploitation. Alors, vous avez vu effectivement, après ce périple que vous avez fait qui a été quand même assez long, vous avez vu vraiment, là, tout ce qui bouge au niveau, je vous dirais, de la forêt, mais pas juste effectivement de la matière ligneuse. Vous avez vu des gens qui sont occupés au niveau de la faune, les zecs qui sont allées vous voir, les gens des réserves fauniques aussi, je pense à la réserve de Rimouski. Alors, c'est ça dans le fond, je pense que, quand... Je ne sais pas qui a dit, je pense que c'est le premier groupe qu'on a vu aujourd'hui, et peut-être que vous l'avez dit, sûrement que vous l'avez dit même déjà, que le chef forestier va être un agent de changement, et cet agent de changement va devoir nous amener à réfléchir que la forêt, oui, effectivement, c'est tout le monde qui en vivent, de la forêt, de toutes sortes de façons, mais c'est aussi, comment je dirais ça, tout le milieu de vie et tout ce qui est touristique, faunique, observation.
L'observatoire du Bas-Saint-Laurent, qu'on avait créé dans la première vague de coupures, je dois le dire, de baisse de possibilité qu'on avait vécue, qui allait chercher entre 25 % et 30 % de perte de possibilité forestière en l'an 2000... après ça, on avait eu de l'argent puis on avait créé l'Observatoire de la foresterie, et cet observatoire nous amenait à avoir une vision davantage globale aussi, de voir que forêt publique, forêt privée... le RESAM, hier.... vous étiez là quand M. Rioux et M. Bernier sont venus nous présenter qu'à quelque part il y a là aussi des vases communicants, que, si on exerce une pression sur la forêt publique indûment ou sur la forêt privée... Parce que, si on n'en prend pas soin non plus, de la forêt privée... Ce qui est moins évident aussi parce que c'est laissé, la forêt privée, complètement à la liberté des gens, hein, c'est vrai. Alors, que tout ça est aussi en lien, qu'à un moment donné d'établir ou de réétablir le cerf de Virginie, ça lui prend des forêts qui sont correctes aussi, ça prend de la forêt qui est mélangée des fois. Et d'aller vers de la sylviculture où on retrouve uniquement certaines essences, ce n'est peut-être pas, dans certains endroits du Québec, les bonnes choses à faire.
Alors, moi, j'ai plusieurs questions. L'aménagement écosystémique... Parce que, dans le projet de loi, moi, je... Vous ne semblez pas être d'accord à le mettre dans le projet de loi, mais vous semblez être d'accord à ce que ça presse de mettre en fonction les commissions forestières régionales. Parce que, si on veut aller dans l'application du rapport Coulombe, dans une masse critique... Comme le ministre, M. le Président, nous dit souvent, il faut aller le plus vite possible vers une masse critique, mais on ne peut pas aller juste vers la baisse de possibilité, puis récolter, si je peux dire, les pertes d'emplois, et ne rien remplacer, et ne rien faire non plus. Alors, comment ça peut s'arrimer le plus vite possible? Et on est supposé d'avoir de l'argent là-dedans, là, pour ça, dans le budget.
M. Coulombe (Guy): Bien, de ce que j'ai... Je partage votre opinion là-dessus, sauf que, si je pense qu'il est possible de faire des choses assez rapidement en ce qui concerne ce projet de loi là, à mon avis il faudrait... je souhaite que ce projet de loi là, avec le minimum de trouble, passe au plus vite pour mettre en marche les mécanismes dont on a parlé tantôt. Sans ça, vous n'arriverez pas au bout.
L'autre aspect, qui est la régionalisation, puis ainsi de suite, ça va être un peu plus délicat que ça, parce que le rapport dit: Bien, c'est ça, ça, ça, mais je sais, pour en avoir discuté pendant un an, qu'il y a différentes régions qui ont différentes perspectives dans l'organisation de leurs travaux. Il faut donc que le projet que le ministère va sortir sur la régionalisation puis les pouvoirs, puis ainsi de suite, qui sont issus ou non du rapport, il va falloir qu'il soit présenté aux régions. Je ne sais pas si ça a été fait à l'heure actuelle, mais ça va demander un minimum de... De toute façon, à l'Assemblée nationale... S'il faut une loi, l'Assemblée nationale n'est pas là à l'été, donc ça donne le temps suffisant pour que les régions réagissent et puis qu'à l'automne, que ce soit... soit sous forme législative, réglementaire ou autre, que ça se mette en marche. Et ça, ça ne créerait pas de rapport indu et ça pourrait permettre, là, de donner le temps nécessaire pour mettre en place, c'est ça.
Parce que ce ne sera pas facile de mettre ça en place, le forestier en chef, mais ça donnerait le temps de préparer l'autre étape, qui pourra se faire à l'automne. Donc, ce n'est pas contradictoire, et je pense qu'essayer de tout faire en même temps, là il y a quelque chose qui va craquer à quelque part, parce qu'il y a bien des gens qui ne se retrouveront plus là-dedans. Donc, cette étape-là est très importante, avec ou sans les commentaires qui seront faits dans votre examen, là, article par article.
L'autre, je pense, la réforme, je l'ai mentionné tantôt, la réforme au point de vue régional doit être la priorité de l'automne, et ça va demander beaucoup de contacts avec les... Je suis persuadé, si on veut être logique avec tout ce qu'on a dit, je suis persuadé qu'il n'y aura pas une formule qui va s'appliquer partout. Ça va s'ajuster aux réalités régionales et c'est souhaitable, mais... c'est souhaitable, mais c'est un peu plus long. Parce qu'il ne faut pas qu'il y ait d'uniformité, mais non plus il ne faut pas que ça aille dans 50 façons différentes. Donc, ça va être compliqué, puis je pense qu'à l'automne ça va être le bon temps pour régler tout ça.
Mme Doyer: D'accord. Alors, j'ai une autre question qui touche... M. Bauce nous a amenés sur... et effectivement toute cette partie de la problématique qui est liée aux outils qu'on avait, qui étaient ? je vais le dire comme je le pense ? un peu tout croches, pour évaluer les possibilités forestières. À quelque part, c'étaient des outils un peu tout croches qui faisaient en sorte que probablement qu'à quelque part on a donné en certains endroits des attributions qu'on ne devait pas donner, qu'à d'autres on n'en a peut-être pas donné alors qu'on aurait dû en donner ? on se comprend? ? et qu'on ne disposait pas nécessairement des bons outils pour nous dire les vraies affaires. Et c'est ça, je pense, qui a heurté l'ensemble des Québécois et Québécoises, de se dire qu'en l'an 2000, à quelque part, on n'a pas encore les bons outils.
Et, moi, j'ai lu et relu, parce que je savais que vous viendriez ici, et j'ai lu le chapitre 5 de votre rapport, qui est très technique. Les placettes... On dit-u «placettes» ou «plaquettes»?
M. Bauce (Éric): Placettes.
Mme Doyer: Placettes, les placettes, hein? Puis le ministre qui n'était pas dans ce domaine-là, et, moi, je suis sociologue de formation, spécialiste en développement régional, on n'est pas des spécialistes. Mais, quand on regarde ça, moi, ça me semble à quelque part inconcevable.
Alors, je veux bien qu'on dise: Le Parti québécois a mal géré, bla, bla. Je n'en suis même plus là actuellement, j'en suis sur: on n'avait pas des bons outils en l'an 2000, et même dans les dernières décennies, au Québec, malgré toutes nos connaissances, malgré les universitaires, malgré des facultés qui ne font que ça, de réfléchir sur la foresterie, une bonne foresterie.
Et vous me dites: Il faut que le chef forestier aille chercher des outils... vous dites: des données et des outils, puis j'ai manqué parce que... j'ai manqué, même si j'écoutais... Dans le fond, est-ce que vous parlez de géomatique? Vous parlez de physique, de biophysique, de géophysique? M. Bauce, je vous laisse... Parce que le mandat du forestier en chef est un mandat de recherche aussi, hein, puis on oublie...
M. Coulombe (Guy): Mais peut-être...
Mme Doyer: De connaissances.
M. Coulombe (Guy): Avant que peut-être Éric s'avance dans ça, parce que c'est un de ses sujets favoris, puis ça peut être... Je voulais juste vous dire qu'il ne faut pas se décourager, parce que ce qui est conçu aujourd'hui... comme vous dites, des instruments qui étaient fautifs ou pas tout à fait à point, je suis à peu près convaincu que, dans 25 ans...
Mme Doyer: On va se dire la même affaire.
M. Coulombe (Guy): On ne sera peut-être pas là, personne... mais enfin je souhaite que, vous autres, vous soyez là. Dans 25 ans, ils diront: Ah! c'était épouvantable en 2005; les outils qu'ils ont mis sur pied, c'est dépassé. Mais c'est ça, la vie.
Mme Doyer: Ça fait du bien de l'entendre.
M. Coulombe (Guy): C'est ça, le changement, puis c'est ça, la vie. Mais...
M. Bauce (Éric): Quand j'ai parlé des aspects biophysiques, je faisais référence aux informations que le forestier en chef va avoir besoin, c'est-à-dire toutes des informations biophysiques sur le territoire, toute l'information qu'il y a sur le territoire, que ce soit dans un milieu public ou non public.
Au niveau des outils, c'est évident qu'en 1998 il y avait des outils, et aujourd'hui il existe d'autres outils qui sont plus performants. On est dans un processus de détermination de possibilité forestière, et les outils sont là, donc il faut les utiliser. En 1998, ils n'étaient probablement pas là. Il y a des hypothèses qui étaient là, des hypothèses qui étaient bonnes, d'autres hypothèses qui étaient fausses, puis les gens se sont rendu compte que ce n'étaient pas les bonnes hypothèses. Donc, effectivement, c'est un système qui évolue. Et c'est une caractéristique très importante de cette équipe-là du forestier en chef, d'être à l'affût des meilleurs outils qui existent et des hypothèses les plus valides possible.
Mme Doyer: D'accord, merci, et merci de répondre succinctement, ça va me permettre de poser plus de questions.
Et je voudrais revenir sur quelque chose, parce qu'il y en a... Le rôle du forestier en chef par rapport à la forêt privée, ça va être quoi? Parce que tantôt je parlais de vases communicants un peu aussi, parce qu'effectivement la tenure des terres, la tenure de la... la composition de la forêt n'est pas la même partout, hein? On a vu, l'Estrie, c'est beaucoup feuillu; chez nous, c'est 50 % forêt publique, forêt privée, et c'est un mélange, tu sais... alors que, sur la Côte-Nord, forêt boréale, Abitibi-Témiscamingue, Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est plus une forêt d'épinettes noires, et tout. Alors...
n(18 heures)n Et, par rapport à la forêt privée, le forestier en chef, il va avoir un rôle par rapport à la forêt publique, mais... et ce n'est pas dans le projet de loi du tout, mais il va être obligé d'en tenir compte, de la forêt privée. Comment vous voyez ça?
M. Bauce (Éric): Le forestier en chef va avoir à faire un calcul de possibilité ligneuse sur la forêt publique. Il va déterminer un niveau de coupe maximum. La forêt privée intervient dans l'aspect des approvisionnements, donc au niveau des attributions que le ministre va faire. Ça, ce n'est pas la job du forestier en chef. Donc, il y a un niveau maximum de récolte que cette personne-là va déterminer, en forêt publique.
Et ce qui se passe en forêt privée, c'est évident que le forestier en chef pourra conseiller au ministre certaines approches sylvicoles ? il y a quand même du financement du public qui va en forêt privée; certaines approches sylvicoles ? pour venir aider l'industrie à avoir les quantités de bois nécessaires pour faire rouler l'économie. Mais il faut comprendre que cet individu-là a un calcul à faire sur la tenure publique de la forêt.
Mme Doyer: Merci. Je voudrais revenir sur «une nomination faite par l'Assemblée nationale». Parce qu'on a réfléchi pas mal fort là-dessus, hein, je pense, puis qu'on a fait des bouts, aussi. Et on n'en a pas parlé ensemble trop, trop, non plus; vous l'avez abordé, mais... Là, il y a le Commissaire au développement durable, hein, avec... il y a le Vérificateur des forêts qui est aussi dans le décor, malgré que le ministre, hier, il a semblé réfléchir très fort: est-ce que, oui ou non... vu qu'on a le commissaire, est-ce qu'on va aller vers un vérificateur des forêts aussi? Et, le jury de sélection, M. Coulombe, vous avez parlé d'un jury de sélection. Dans le fond... Parce que, vous le savez, avec votre grande expérience que vous avez de l'appareil public, de l'appareil politique, administratif, vous le savez, quel type de nominations on a, hein, dans ces postes-là, DGE, etc., les gens... c'est le Conseil des ministres, le premier ministre, des fois, qui suggèrent des nominations, ensuite c'est entériné aux deux tiers par l'Assemblée nationale, et, merci beaucoup, bonjour la musique, et c'est présenté au représentant de l'opposition officielle, puis, s'il dit: Non, pas question... Souvent, c'est plusieurs candidatures.
Et là, est-ce que c'est nouveau, cette façon de faire, dans un jury de sélection? Parce qu'il... Comment je dirais ça? On a le meilleur choix à faire de la personne dans un processus... Vous avez parlé d'un jury de sélection très spécialisé, un peu comme on a dans le projet de loi n° 109, où ce sont des spécialistes du domaine juridique, etc.; là, ce seraient des spécialistes d'un autre domaine, et ensuite on entérine avec l'Assemblée nationale. Mais ça ne pourrait pas se vivre autrement que ça et avoir toute la légitimité, et la crédibilité, et l'autonomie, et l'indépendance, et la transparence?
M. Coulombe (Guy): Mais on n'a pas suggéré que ce soit entériné par l'Assemblée nationale.
Mme Doyer: Non? Vous ne l'avez pas suggéré, hein?
M. Coulombe (Guy): Non.
Mme Doyer: Ce n'est pas nécessaire.
M. Coulombe (Guy): Mais, le jury non plus, on n'a pas suggéré que ce soient uniquement des spécialistes. Moi, si j'avais...
Mme Doyer: Parlez-moi-z-en.
M. Coulombe (Guy): Bien, le jury, dans mon esprit, il faudrait qu'il contienne des gens qui connaissent parfaitement l'aspect forestier, y compris l'aspect scientifique, mais pas uniquement ça. Il faut des gens qui sont capables d'évaluer des candidats au point de vue de leurs capacités, comme je parlais tantôt, de communication, d'intégration, de leadership, et ainsi de suite. Donc, ça prend un jury qui est multifonctionnel, si on veut, polyvalent. Bon, il ne s'agit pas d'avoir 50 personnes non plus, mais cinq, six personnes, et avec une base de scientifiques, avec une autre base de gens qui ont l'expérience de ce genre de poste là, et identifier un, deux ou trois candidats susceptibles de remplir le poste. Bon.
Et là le jury dit au gouvernement, via le ministre: Bien voici le résultat de nos travaux: c'est monsieur X, madame Y, puis ainsi de suite; puis voici pourquoi, voici comment on justifie ça, il y a eu tant de candidats, puis ainsi de suite. Puis là, bien le ministre puis le gouvernement, le Conseil des ministres réfléchissent puis le nomment, ou ils ne le nomment pas. Mais, s'ils en nomment... Moi, je souhaiterais que ce soit public. En d'autres mots, si ils mettent tout de côté, tout le travail du jury, puis qu'ils en nomment un quatrième, là il faudrait que ce soit justifié drôlement. En d'autres mots, il faudrait que les règles du jeu soient acceptées d'avance par le ministre puis le Conseil des ministres, dans un certain sens.
Mme Doyer: Une dernière, je pense bien, la dernière en lien avec ça. Tantôt, vous avez parlé d'un triumvirat, du fait que, si c'est un ingénieur forestier ou si ça ne l'est pas, on devrait aller chercher d'autres types de compétences. Et ça ne pourrait pas être... Vous nous parlez d'un jury de sélection. Ça ne pourrait pas être un ensemble de critères? Parce que, là, moi, ça m'inquiète un peu, du fait qu'on n'ira pas chercher les meilleures conditions justement pour le suivi au rapport Coulombe. Ça m'inquiète un peu justement de laisser ça complètement au forestier en chef, le choix de son équipe. Ça ne pourrait pas être un ensemble de deux... de trois personnes, de quatre personnes, ou si vous êtes d'accord que, lui, il doit avoir toute la latitude?
Parce qu'en même temps il faut qu'à quelque part on s'assure, le ministre entre autres... le ministre, il a quand même son mot à dire, le Conseil des ministres, bon, et nous, comme partis politiques, sans aller nécessairement à l'Assemblée nationale, il me semble qu'on pourrait innover. Et, moi, je le dis, là, en toute franchise, en toute franchise ? les collègues, là, vous le savez, moi, je suis quelqu'un d'honnête ? et il me semble que, si on veut avoir toute la crédibilité, là, pourquoi on n'essaie pas, avec cette question du forestier en chef et de son équipe, quelque chose de nouveau en termes de nomination, en termes de sélection des meilleures personnes?
Parce que des fois on a quatre, cinq personnes en avant de nous, on va choisir le forestier en chef, mais on va en échapper un ou deux autour qui vont probablement faire... ils auraient fait, ça aurait été la meilleure équipe. Je ne sais pas, je réfléchis tout haut, M. Coulombe... messieurs, excusez-moi.
M. Coulombe (Guy): En fait, c'est toujours possible d'innover, mais, devant la multiplicité des tâches qu'il faut faire, et ainsi de suite, je me demande si c'est un secteur qui est prioritaire en termes d'innovation. Parce que la méthode... Il faut quand même que le forestier... Le forestier en chef, mettons que la méthode est sur la table, on la propose, bien ça marche ou ça ne marche pas. Mais, pour son équipe, il faut que le forestier en chef non pas qu'il décide unilatéralement d'engager n'importe qui, mais il faut que le forestier en chef soit en place, ait compris, dans des interrelations, dans des discussions puis ainsi de suite, quelle est la tâche exacte, quand il va aller dans les moindres détails. Et, à partir de là, il ne peut pas ne pas arriver à la conclusion que ça lui prend une équipe polyvalente, c'est impossible, à moins d'engager un parfait imbécile, mais c'est impossible, bon.
Alors, dans ce sens-là, il faut lui laisser la chance de s'exprimer, de bâtir son... Et là, après ça, à ce moment-là, dans les semaines après qu'il ait été nommé, bien si ça prend une méthode complètement nouvelle, ça, il s'arrangera avec ses problèmes. Mais je me dis: Ce qui est important, c'est d'avoir une méthode reconnue, parce que finalement on ne réinvente pas le bouton à quatre trous, là-dedans, c'est-à-dire qu'il y ait un jury de haut niveau avec une description de tâches qui est acceptée puis qui est voulue par les autorités politiques.
À partir de là, bien, coudon, il faut bien se fier à quelqu'un. On va mettre autour de la table des gens compétents, puis là ils s'organiseront pour choisir. Puis, quand il sera choisi, bien il y aura le même processus: il réfléchira puis... mettre ses priorités à un autre... Encore là, ça dépend, si c'est ingénieur forestier, si c'est un biologiste, si c'est un économiste qui est choisi, ça dépend des choses. Alors, à partir de là, bien il fera sa feuille de route, puis elle sera mise en cause par soit le gouvernement soit le ministre, si ça ne marche pas.
Mme Doyer: Alors, je vous remercie, messieurs. Ça va être tout pour moi. Merci infiniment de vos réponses.
Remarques finales
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Coulombe, et merci, M. Bauce et M. Bouchard. Nous allons passer aux remarques finales quand vous serez prêts.
Bon. Alors, est-ce que vous êtes prêts? Si vous êtes prêts, on va y aller immédiatement. Alors, nous en sommes rendus aux remarques finales. Nous commençons par les remarques finales de l'opposition, et par la suite ce seront les remarques finales du groupe parlementaire formant le gouvernement. Mme la députée de Matapédia, nous vous écoutons.
Mme Danielle Doyer
Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir de terminer ces deux journées de consultations particulières sur le projet de loi n° 94 en vous disant d'entrée de jeu, M. le Président, que je pense qu'on a été nourris de ce que les gens, les différents groupes... même s'ils n'ont pas été nombreux, ils ont été de qualité et ils ont pu nous apporter, je dirais, un éclairage encore plus productif sur les choses qu'on a à faire pour améliorer, je dirais, la foresterie dans une vision multiressources au Québec.
n(18 h 10)n Alors, tout au cours de ces deux jours consacrés au projet de loi n° 94, différents groupes sont donc venus nous dire, dire au ministre aussi des Ressources naturelles deux choses importantes: la première, il y aura un déficit de crédibilité envers le forestier en chef si le projet de loi ne campe pas mieux son indépendance; la deuxième, il faudrait voir à mieux intégrer le concept d'aménagement écosystémique dans le mandat du forestier en chef.
La Conférence des coops forestières a dit à propos de l'indépendance du forestier en chef, et je cite: «Le déficit de crédibilité qui affecte actuellement l'ensemble de l'industrie forestière concerne également le ministère directement et il limite la recevabilité de cette option. Puisque l'établissement de calcul de possibilité dépendait déjà du ministère sous l'autorité d'un sous-ministre associé, en quoi le projet de loi permet-il de rassurer davantage le public?» De son côté, l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec explique que, et je cite: «Dans le libellé actuel du projet de loi, nous constatons que cette indépendance n'est pas suffisamment marquée pour satisfaire au maintien [du] degré élevé de crédibilité susceptible de répondre aux préoccupations du public. Il s'agit d'un élément essentiel à cette fonction et à l'esprit des recommandations de la commission [Coulombe].» Pour sa part, le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement croit que le processus de nomination et de rattachement proposé pour le forestier en chef ne semble pas permettre de rencontrer les attentes du regroupement en matière d'indépendance. En outre, le regroupement doute que la proposition puisse permettre de rencontrer les attentes de la commission à l'égard de l'autonomie, de la neutralité et de l'intégrité scientifique.
Plusieurs solutions ont été proposées au ministre des Ressources naturelles afin d'assurer plus d'indépendance et de crédibilité au forestier en chef. L'Ordre des ingénieurs forestiers estime que le poste de forestier en chef doit être comblé selon un processus de sélection ouvert et public.
L'ordre n'est pas le seul à appuyer cette thèse. Le RESAM propose de procéder à un appel de candidatures ouvert et de réaliser la sélection de manière transparente dans la composition du comité de sélection, dans les critères de sélection et dans la décision.
L'Association des consultants en foresterie explique que le processus de nomination du forestier en chef devrait s'inspirer de celui prévu par le projet de loi n° 109, présentement à l'étude devant l'Assemblée nationale, en ce qui concerne le comité de nomination: un mandat de sept ans non renouvelable, entre autres.
Des nombreux groupes ont aussi appuyé l'idée que le forestier en chef soit sommé par l'Assemblée nationale, estimant ainsi garantir toute l'indépendance voulue à ce poste stratégique.
Dans son mémoire au Conseil des ministres, le ministre des Ressources naturelles a évalué la pertinence de créer une entité administrative autonome. Selon le mémoire, la solution offre plusieurs avantages, dont celle d'accorder une très grande indépendance à la fonction de forestier en chef et celle de transmettre un signal fort indiquant que le gouvernement entend respecter le plus intégralement possible les recommandations du rapport Coulombe.
Est-ce qu'il doit y avoir un processus de nomination transparent? Est-ce que le mandat de forestier devrait être non renouvelable? Devrait-il être nommé par l'Assemblée nationale? Une chose est claire, il faudra que, d'une manière ou d'une autre, le ministre apporte des amendements à son projet de loi pour rendre la nomination du forestier en chef plus crédible et indépendante. Il s'agit d'une lacune importante de ce projet de loi, puisque tous les groupes entendus l'ont soulignée.
La notion d'aménagement systémique a également fait l'objet de nombreuses questions. Devrait-on mieux camper l'idée d'aménagement écosystémique dans le mandat du forestier en chef? Est-ce que le comité consultatif proposé par le rapport de la commission Coulombe devrait être inscrit dans la loi?
L'Union québécoise pour la conservation de la nature recommande que le comité consultatif pour le bilan forestier, tel que recommandé par la commission Coulombe, soit institué dans la loi. Le RESAM s'est également prononcé positivement en ce sens.
Une chose est certaine, il faudra que l'équipe entourant le forestier en chef soit une équipe multidisciplinaire d'experts très compétents. C'est ce qu'une majorité de groupes ont souhaité. Le ministre devra à ce sujet ainsi qu'en ce qui concerne l'aménagement écosystémique apporter des changements à son projet de loi afin de s'assurer que la vision de développement durable soit concrètement associée au forestier en chef. Certains m'ont même suggéré qu'il se nomme plutôt «conservateur de forêt». Peut-être que vous l'avez reçu aussi, hein? Ça, c'est à regarder. On est quasiment en train de s'habituer au forestier en chef, hein, au chef forestier, mais c'est une opinion: conservateur de forêt.
Un questionnement s'est posé également en ce qui concerne la localisation du forestier en chef. Certains groupes ont soulevé des objections, expliquant qu'il fallait avant tout assurer que le forestier en chef puisse être efficace; son bureau devrait alors se situer là où se trouvent les calculs de possibilité forestière. Il s'agira pour le ministre de prendre une décision objective et rationnelle.
Enfin, le ministre semble dire qu'il y aura une deuxième étape, à l'automne, concernant la gestion intégrée et la régionalisation. Pour l'instant, rien ne nous garantit que ça se fera. Il nous semble important, à cette étape-ci, de bien comprendre les intentions du ministre pour bien faire notre travail. Alors, je l'invite à préciser un certain nombre de choses. Peut-être, lorsqu'on va entrer en étude article par article, ce serait peut-être intéressant qu'on agisse un petit peu plus clairement.
Alors, voilà ce que nous retenons de notre côté des différents échanges entendus au cours des deux derniers jours. Nous attendrons les amendements du ministre en ce sens, en tout cas dans le sens qu'il voudra bien le faire, avec sa propre réflexion, et nous espérons avoir le temps de les étudier avant la tenue de l'étude détaillée article par article. Je vous remercie.
Le Président (M. Jutras): M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Collègues de l'Assemblée nationale... Oui?
Mme Doyer: Si vous me permettez de vous interrompre, c'est pour une bonne cause. C'est parce que j'ai oublié de remercier toutes les personnes présentes de la bonne collaboration, ainsi que le ministre bien sûr, de la bonne collaboration ? j'avais dit que je travaillerais de façon constructive, et je pense que ça a été le cas, M. le Président ? le personnel de l'Assemblée nationale, le personnel du ministère des Ressources naturelles, les collègues et toutes les personnes qui sont venues nous faire part de leurs positions.
Le Président (M. Jutras): Merci. M. le ministre.
M. Pierre Corbeil
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Je vais vous livrer mes remarques finales dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 94 instituant la fonction de forestier en chef. Ma collègue critique de l'opposition en matière de forêts m'a précédé, et j'allais commencer mes remarques en remerciant les représentants des groupes et les individus qui ont participé aux travaux de la commission. Ça a été des consultations intéressantes qui nous ont permis d'entendre des points de vue constructifs d'un spectre d'intervenants du secteur forestier québécois.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que le projet de loi suscite beaucoup d'intérêt et que la gestion de la forêt publique constitue un défi stimulant non seulement pour celui qui vous parle, mais pour toute l'équipe du ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Comme dans le cadre des consultations de la commission Coulombe, ceci confirme encore une fois la volonté des acteurs du monde forestier de participer à l'évolution du régime forestier. Et, quand je parle des acteurs du monde forestier, j'inclus tout le monde, y compris les cadres et employés du ministère, des secteurs forêts, des secteurs Forêt Québec, des secteurs de l'équipe de mise en oeuvre, mais aussi de tout le ministère des Ressources naturelles et de la Faune, incluant le nouveau sous-ministre en titre, parce qu'on est véritablement engagés dans une démarche de gestion intégrée du territoire et des ressources.
Tous ceux qui ont participé ont souligné l'importance de la fonction de forestier en chef pour améliorer la gestion des forêts publiques. Tous les participants ont reconnu aussi la pertinence de faire en sorte que le forestier en chef puisse entrer en fonction dans les meilleurs délais pour être en mesure de participer aux orientations et aux décisions concernant les virages forestiers qui doivent avoir lieu dans les prochains mois et les prochaines années pour nous aider à mettre en oeuvre non seulement les recommandations du rapport de la commission Coulombe, mais aussi commencer à poser les pierres de ce que j'appellerai l'édifice de la confiance et de la crédibilité dans l'usage que l'on fait de nos ressources en milieu forestier.
n(18 h 20)n Est-il nécessaire de rappeler que les calculs de possibilité forestière, sur lesquels on vient de donner une réduction de 20 %, remontent, comme on le disait tantôt, aux années quatre-vingt-dix-huit et qu'ils avaient été établis, pour leur majorité ou la plus grande partie, par l'industrie à l'époque. Ce n'est que depuis que la Loi sur les forêts a été modifiée, en 2001, que c'est devenu une responsabilité du ministère des Ressources naturelles et de la Faune et qu'on est en train de faire la démarche qui va donner les résultats qu'on veut bonifier, suite au dépôt du rapport de la commission.
Alors, je pense, M. le Président, qu'on a aussi bien entendu les attentes très élevées des participants quant à l'autonomie et l'indépendance que doit avoir le forestier en chef. Ce sont en effet des principes fondamentaux qui sont clairement établis dans le rapport de la commission et que le projet de loi n° 94 vise à enchâsser le plus rigoureusement possible.
Si je prends, par exemple, le volet des calculs de possibilité et la détermination des volumes récoltables, le projet de loi prévoit que la délégation des responsabilités au forestier en chef sera essentiellement totale. Nous avons entendu quelques propositions dans les derniers jours et nous allons les examiner attentivement pour s'assurer que le forestier en chef a bel et bien, sur le plan légal, l'indépendance et l'autonomie requises pour réaliser son mandat. Ce sera ensuite au titulaire du poste d'exercer pleinement les responsabilités et les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi. Certains ont suggéré que la durée de son mandat soit prédéterminée et renouvelable. Nous allons examiner s'il est requis que soient spécifiées ces dispositions dans la loi.
Plusieurs ont fait des comparaisons avec le projet de loi qui entoure la création du poste de Directeur des poursuites publiques. Il est intéressant de noter que le ou la titulaire de cette fonction serait aussi nommé par le gouvernement, comme le serait le forestier en chef.
Je retiens que les participants apprécient la célérité avec laquelle le gouvernement cherche à mettre en place le forestier en chef de façon à ce que son influence sur nos modes de gestion puisse se faire sentir le plus rapidement possible. D'ailleurs, dans la majorité des échanges des deux derniers jours, j'ai senti que les participants veulent un équilibre entre l'efficacité des processus de gestion et la mise en place d'une gestion qui permettra de regagner la confiance de la population, cet équilibre que nous visons par le projet de loi n° 94. Et c'est justement pour cette raison que nous souhaitons l'entrée en fonction du forestier en chef le plus rapidement possible.
En ce qui a trait au processus de sélection du forestier en chef, plusieurs ont fait des propositions ou exprimé des attentes. Nous avons pris bonne note, et encore une fois je comprends que les préoccupations se situent beaucoup au chapitre de l'indépendance et de l'autonomie.
Je retiens aussi que tous accueillent favorablement la volonté du ministère d'inscrire dans la loi sa volonté ferme envers l'aménagement écosystémique et la gestion intégrée et régionalisée des ressources du milieu forestier.
Nous avons aussi entendu des préoccupations quant à la dimension multiressources des fonctions du forestier en chef. Comme le mentionne le mémoire qui accompagne le projet de loi, notre volonté est clairement que, dans une deuxième étape qui aurait lieu dans les meilleurs délais possibles, le ministre puisse préciser les fonctions que le forestier en chef serait appelé à exercer pour encadrer la planification des activités en milieu forestier dans une perspective d'aménagement écosystémique et de gestion intégrée. Il faudra également définir plus précisément les responsabilités du forestier en chef en lien avec la régionalisation de la gestion forestière.
Tous ont aussi mentionné, de différentes façons, que le ministre devait garder la responsabilité d'encadrer l'aménagement durable des forêts du Québec et d'en être imputable. Sur cette question, je tiens à souligner que nous n'avons pas l'intention de faire autrement.
Je conclurais en disant que nous comprenons l'importance de bien camper l'indépendance du forestier en chef dès le départ. Il en va de la crédibilité de la fonction et de la crédibilité du régime forestier. Plusieurs ont reconnu que ce nouvel acteur sera définitivement un agent de changement.
Je tiens à remercier tous ceux et celles qui ont pris le temps de nous faire part de leurs opinions. Elles sont importantes pour comprendre les enjeux. Bien entendu, la prochaine étape sera d'entreprendre dans les meilleurs délais l'étude détaillée, prévue pour la semaine prochaine. Mais la suite des choses, elle nous est, si on veut, dictée dans le rapport de la commission, à la page 251: «La commission a tracé la voie quant aux principaux axes de changement qui doivent progressivement être mis en place, d'ici au début de 2008, afin d'atteindre une masse critique de résultats concrets qui permettront d'en arriver à déplacer le centre de gravité de la gestion forestière.» Eh bien, M. le Président, c'est sûr que la clé réside dans l'atteinte d'une masse critique de changements recherchés, au cours des prochaines années, et nous allons tout faire pour aller au fond de ce dossier, M. le Président. Merci de votre attention.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci à chacun et chacune d'entre vous. La commission ayant accompli son mandat, les travaux sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 18 h 25)