(Neuf heures trente-cinq minutes)
Le Président (M. Jutras): Alors, étant donné que nous avons quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je rappelle le mandat de la commission: l'objet de cette séance est de poursuivre la consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements. Mme la secrétaire, est-ce que vous avez des remplacements à annoncer?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Mercier (Charlesbourg) remplace Mme James (Nelligan) et M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) remplace Mme Doyer (Matapédia).
Le Président (M. Jutras): Alors, avant d'aller plus loin, je demanderais à toutes les personnes qui sont dans la salle, s'il y en a qui ont des cellulaires, de bien vouloir les fermer.
Je donne lecture de l'ordre du jour d'aujourd'hui. Alors, à 9 h 30, nous entendons le Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada ? TCA? Saguenay?Lac-Saint-Jean; à 10 h 30, nous entendrons le Conseil des Atikamekw de Wemotaci; à 11 h 30, le Regroupement pour la surveillance du nucléaire. Nous suspendrons nos travaux à 12 h 30, pour les reprendre à 15 heures, après la période de questions, et, à ce moment-là, nous entendrons Rabaska; à 16 heures, le Comité national sur l'environnement et le développement durable et Comité des jeunes du Parti québécois; à 17 heures, M. Sébastien Rioux; à 17 h 30, M. Gilles Fortin; et, à 18 heures, nous ajournerons nos travaux.
Auditions (suite)
Alors, je constate que les représentants du Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada ? TCA?Saguenay?Lac-Saint-Jean sont déjà en place. Alors, je vous souhaite la bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Je vous rappelle les règles: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; par la suite, il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre des Ressources naturelles et les députés ministériels et, par après, un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition.
Alors, vous pouvez donc... Je vous invite à procéder immédiatement, mais je demanderais en premier au porte-parole de s'identifier, et de présenter les personnes qui vous accompagnent, et par après faire la présentation de votre mémoire. Alors, qui est le porte-parole?
M. Proulx (Alain): C'est moi.
Le Président (M. Jutras): Votre nom, c'est?
M. Proulx (Alain): Alain Proulx, représentant régional des TCA au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Le Président (M. Jutras): Alors, bonjour, Alain Proulx, et si vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent.
Syndicat national de l'automobile,
de l'aérospatiale, du transport
et des autres travailleurs et travailleuses
du Canada ? TCA?Saguenay?Lac-Saint-JeanM. Proulx (Alain): À ma gauche, M. Roger Boivin, notre conseiller économique; M. Pierre Simard, président du Syndicat des employés d'énergie électrique Québec, TCA, local 1926; M. Jean-François Blain, expert en énergie et auteur de notre mémoire; à ma droite, M. Pierre-F. Côté, qui était chef de cabinet de M. René Lévesque dans le gouvernement de Jean Lesage; et M. André Marier, qui était chef de la Direction générale de l'électricité et haut fonctionnaire du Québec associé de près à la nationalisation de l'électricité.
Le Président (M. Jutras): Allez-y.
M. Proulx (Alain): M. le Président, M. le ministre, Mme la porte-parole de l'opposition officielle, Mmes et MM. membres de la Commission de l'économie et du travail. Nous venons aujourd'hui vous faire part de nos expériences, et de nos constats, et des solutions que nous proposons pour assurer un avenir où le Québec et Alcan gagnent tous les deux. Forts de notre vécu de région productrice d'aluminium avec le plus important producteur d'énergie privée du Québec, nous croyons sincèrement que le temps est venu de moderniser le pacte de l'aluminium qui garantissait l'équilibre entre les privilèges énergétiques consentis à l'Alcan et ses obligations en matière de développement économique.
Alcan procure de moins en moins d'emplois aux Québécois et aux Québécoises. En 1980, une étude réalisée pour Alcan établissait l'impact emplois de la compagnie au Québec à 32 285 postes. Notons qu'un des auteurs de cette étude n'était nul autre que M. Carmine Nappi, qui est aujourd'hui économiste en chef chez Alcan. En 2004, l'impact emplois d'Alcan a fondu de 50 %, une hémorragie de plus de 16 000 postes. Ce portrait de la situation est en nette contradiction avec une déclaration faite devant vous le 17 février dernier par M. Jean Simon, président d'Alcan Métal primaire Québec et États-Unis, et je le cite textuellement: «Il ne faut jamais perdre de vue que l'apport économique d'Alcan croît année après année dans le milieu.» Ce n'est certainement pas vrai pour ce qui est des emplois.
Alcan a un poids économique de plus en plus faible au Québec. En effet, les dépenses totales de la compagnie ont connu une baisse importante entre 1980 et 2004, passant de 1 859 000 000 $ à 1 395 000 000 $. Il s'agit d'une importante diminution de 464 millions, ce qui contredit encore une fois les propos de M. Simon.
n(9 h 40)n Alcan poursuit la réduction de ses activités au Québec. En effet, pour l'année 2004 seulement, les décisions prises par Alcan ont fait perdre 700 emplois directs de plus et ont entraîné une diminution de 99 millions de l'impact économique annuel de la compagnie au Québec. Malheureusement, l'année 2005 ne s'annonce pas plus positive, puisqu'à ce jour l'entreprise a déjà fait connaître son intention de réduire ses activités au Québec d'un autre 50 millions par an.
En dépit des déclarations officielles répétées de la compagnie pour souligner ses efforts afin d'aider le Québec et le Saguenay?Lac-Saint-Jean, la réalité est bien différente et porte plutôt à croire que, dans le cadre actuel, Alcan prend le Québec pour acquis. Souvenons-nous de quelle façon insultante Alcan a annoncé, en janvier 2004, la fermeture prématurée des salles de cuves Söderberg au premier ministre Charest, qui se trouvait alors à Davos. Souvenons-nous du reniement par Alcan de ses propres engagements publics qu'elle avait pris pour la construction d'une aluminerie de remplacement à Jonquière. Souvenons-nous de la déclaration de M. Jean Simon au journal La Presse, le 19 novembre dernier, où il disait textuellement qu'Alcan ne grandira plus au Québec. Ces actions et déclarations ne sont pas de simples maladresses, puisque nous connaissons l'expertise des services de relations publiques d'Alcan. Il s'agit plutôt de gestes commis par une multinationale trop sûre d'elle-même qui prend le Québec pour acquis.
Malheureusement donc, les incitatifs actuels ne suffisent pas à s'assurer qu'Alcan crée des emplois en première, deuxième, troisième transformation de l'aluminium au Québec. Et ça va continuer aussi longtemps qu'on ne comptera que sur la seule bonne volonté d'Alcan pour que ça se fasse. Il faut prendre les moyens pour inciter réellement Alcan à remplir ses engagements. Il nous faut revenir à l'esprit de la nationalisation de 1962, où le Québec a accepté qu'Alcan conserve ses barrages pour la seule et unique raison qu'ils servaient à créer du développement économique au Saguenay? Lac-Saint-Jean.
La question de l'énergie est un autre élément qui nous démontre qu'il faut rapidement moderniser le cadre de relation entre Alcan et le Québec. Alcan bénéficie, au Québec, de conditions d'opération extraordinaires qui lui procurent un avantage concurrentiel unique au monde. En effet, lorsque l'on compare le coût de l'électricité livrée à l'ensemble des 203 alumineries du monde en 2003, on découvre que seulement 6 % des producteurs d'aluminium paient leur électricité moins cher qu'Alcan au Saguenay?Lac-Saint-Jean, ou, si vous préférez, 94 % des producteurs d'aluminium du monde paient leur électricité plus cher qu'Alcan au Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Autre constat étonnant, la production électrique d'Alcan des trois derniers mois de 2004, assez curieusement, on remarque qu'elle est inférieure de 26 % à la moyenne historique d'Alcan pour cette période. Pourtant, 2004 a été, selon la compagnie, une excellente année en termes d'apport d'eau. Concrètement, ces 26 % sont l'équivalent d'une sous-production par Alcan de 123 MW. Sans cette baisse de production subite et providentielle, Alcan aurait donc été, en 2004, non pas un acheteur net de 24 MW, comme elle l'a prétendu, mais bien un vendeur net d'énergie de 100 MW. Considérant l'importance pour Alcan de démontrer qu'elle était un acheteur net d'électricité en 2004, il est clair qu'Alcan a créé délibérément cette sous-production pour créer artificiellement un supposé déficit énergétique.
Depuis 1998, Alcan est tenue d'acheter à Hydro-Québec, chaque année, un minimum de 114 MW d'énergie annuellement, contrat demandé par Alcan pour la construction de l'aluminerie d'Alma. En 2004, Alcan n'aurait acheté, au net, que 24 MW d'Hydro-Québec. Ainsi, en 2004, Alcan a nécessairement revendu 90 de ses 114 MW à Hydro-Québec. À quel prix et à quelles conditions? Nous n'en savons rien.
Un autre élément important dans le bilan énergétique d'Alcan est la question des ventes de surplus d'énergie. En effet, le tableau qu'Alcan a rendu public ici le 17 février démontre qu'elle a vendu, de 1984 à 2000, 3 420 MW, ce qui lui a rapporté suffisamment d'argent pour payer entièrement les 840 millions de dollars de redevances payées par Alcan au gouvernement du Québec de 1984 jusqu'à aujourd'hui.
Je vous ai parlé jusqu'à présent de l'important avantage énergétique consenti par l'État québécois à Alcan. Combien vaut cet avantage? Selon le journal Les Affaires, l'Université du Québec et nos propres calculs, on parle de 490 millions d'économie pour Alcan par rapport au prix électrique que doit payer ses concurrents. C'est pour ça qu'Alcan est dans une classe à part dans l'industrie de l'aluminium. C'est donc très clair, Alcan est l'entreprise la plus subventionnée au Canada. Ce n'est pas Bombardier, c'est Alcan. En effet, l'avantage énergétique consenti par le gouvernement pour la période 1984 à 2003 équivaut au faramineux montant de 9,8 milliards. Cette aide gouvernementale indirecte est donc supérieure aux 8,5 milliards de dollars qu'Alcan a investis au Québec durant ces 20 ans. Dans le fond, c'est l'État québécois qui a payé la facture pour permettre à Alcan de demeurer concurrentielle.
Cette générosité de l'État envers Alcan ne s'arrête pas là, puisque, d'ici jusqu'à la fin du bail de la Péribonka, prévue en 2059, Alcan bénéficiera encore d'un total de 26,4 milliards de dollars d'avantage énergétique. Le plus désolant, c'est que, même si le gouvernement subventionne Alcan à coups de centaines de millions de dollars par année, cela ne l'a pas empêchée de fermer les salles de cuves Söderberg d'Arvida au début de 2004, 10 ans avant la date prévue. Pourtant, il s'agissait de salles de cuves rentables. Si Alcan a décidé de fermer ces salles de cuves, c'est parce que ça devrait être plus payant pour la compagnie de diminuer ses achats d'électricité à Hydro-Québec.
Suite à cette fermeture, Hydro-Québec a empoché 56 millions en 2004 en revendant cette énergie libérée par Alcan. Voici d'ailleurs ce qu'en dit le professeur d'économie, M. Gilles Bergeron, de l'UQAC: «Pendant que la région s'appauvrit par la disparition de plus de 550 emplois, le gouvernement en retire des avantages énergétiques de 56 millions par an. Pourquoi ne pas verser cette somme d'argent dans un fonds de reconversion industrielle de la région?» Fin de la citation.
Voici un graphique produit par Alcan qui démontre clairement que le coût de la production d'aluminium au Saguenay?Lac-Saint-Jean ? 1 038 $US la tonne ? est l'un des plus bas au monde. Remarquez que le coût de production en Chine est bien plus élevé, avec 1 502 $US la tonne. Dans la production d'aluminium, le Saguenay?Lac-Saint-Jean bat la Chine à plate couture. Pourtant, M. Jean Simon, d'Alcan, soutient publiquement que les coûts de production en Chine sont le tiers de ceux du Québec et que c'est pour cela qu'Alcan ne veut plus investir au Québec. Ses propres tableaux disent pourtant le contraire.
Permettez-moi maintenant de vous soumettre une hypothèse sur ce qui se passerait sur le plan énergétique advenant la fermeture de l'ensemble des salles de cuves Söderberg d'Alcan au Québec et des usines d'Alcan utilisant de vieilles technologies. Si on tient compte du droit d'Alcan d'acheter 350 MW auprès d'Hydro-Québec, Alcan dispose de 327 MW. Si l'on ajoute l'énergie qui serait libérée par la fermeture des Söderberg de Shawinigan et de Beauharnois et des précuites d'Arvida, Alcan disposerait alors de 929 MW, soit de l'énergie nécessaire pour la construction de deux nouvelles alumineries.
Cette énergie, produite en grande partie par Alcan au Saguenay?Lac-Saint-Jean, ne nécessite donc aucunement la construction de nouveaux barrages. L'énergie requise pour de nouvelles alumineries est là, et cette énergie libérée par Alcan n'augmentera pas d'un seul sou la facture énergétique des Québécois. Il est donc très clair qu'Alcan aura l'énergie disponible pour des usines d'aluminium primaire et pour des projets de transformation.
Cependant, nous devons éviter à tout prix que cette énergie ne soit vendue à l'exportation. Nous sommes d'ailleurs d'accord avec l'Association de l'aluminium du Canada quand elle affirme que «les gens des régions accepteraient mal que les fils qui passent au-dessus de leur tête transportent notre richesse chez nos voisins plutôt que de contribuer à leur développement chez eux». Fin de la citation.
Il en est de même, à notre avis, des immenses lingots qui sortent de notre région pour aller se faire transformer ailleurs. De plus, il faut éviter qu'Alcan utilise ses 929 MW pour simplement remplacer de l'électricité qu'Hydro-Québec fournit actuellement pour les alumineries de Bécancour ou de Sept-Îles, dans lesquelles Alcan détient des participations. La tentation sera très grande pour Alcan. Mais, pour le Saguenay? Lac-Saint-Jean, ce serait un scénario inacceptable, une trahison de la non-nationalisation des barrages d'Alcan au Saguenay?Lac-Saint-Jean, là où les terres ont été inondées.
Mais comment s'assurer que cela n'arrive pas? Pour arriver à moderniser correctement le pacte de l'aluminium, voici ce que nous proposons.
Premièrement, nous devons nous assurer que toute énergie électrique serve à notre développement. Nous demandons donc au gouvernement du Québec de rendre public tout le bilan énergétique d'Alcan au Saguenay?Lac-Saint-Jean de 1980 à 2004 et chaque année par la suite, incluant les prix et l'utilisation de l'énergie pour chacune de ses installations. Dans le cas de l'énergie produite et effectivement utilisée par Alcan, nous proposons d'établir des objectifs minimums d'emplois à maintenir au Saguenay?Lac-Saint-Jean pour chaque mégawatt. Cette demande ne devrait pas causer de problèmes, puisqu'Alcan a accepté de son plein gré ce principe en 2002 en retour de l'obtention des 500 MW d'Alouette 2. Quand les règles du jeu ne donnent plus les résultats escomptés, il faut revoir les règles.
Nous proposons donc au gouvernement, et celui-ci en a déjà la possibilité légale, de déclarer que toute quantité d'énergie excédentaire produite par Alcan revienne sous le contrôle du Saguenay?Lac-Saint-Jean en la désignant «bloc d'énergie patrimonial additionnel». Ce bloc d'énergie pourrait servir à l'un ou l'autre des scénarios suivants, soit: fournir de l'énergie à prix concurrentiel aux entreprises déjà existantes; attirer de nouvelles industries; dans le cas de vente de cette énergie à l'extérieur de la région, à retourner tous les profits au Saguenay?Lac-Saint-Jean afin de financer notre reconversion industrielle; et finalement à réaliser des projets d'Alcan chez nous. La faisabilité technique du concept de bloc d'énergie patrimonial additionnel est d'ailleurs démontrée clairement dans notre mémoire.
n(9 h 50)n Le deuxième moyen est le retour au Saguenay? Lac-Saint-Jean des redevances hydrauliques payées par Alcan et Abitibi-Consol, environ 60 millions de dollars par an, afin de financer notre reconversion industrielle. Troisièmement, nous proposons que la société de la vallée de l'aluminium devienne le vendeur des 50 000 tonnes d'aluminium liquide qu'Alcan dit rendre disponibles au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Cela évitera tout conflit d'intérêt potentiel entre Alcan et d'éventuels acheteurs.
Pour conclure, je vous dirais que l'accroissement exceptionnel de la productivité d'Alcan au Québec lui a permis d'être un des grands gagnants de la mondialisation. Cet accroissement de productivité, obtenu entre autres avec la collaboration des travailleurs et des travailleuses et des syndicats, doit absolument se traduire par des investissements créateurs d'emplois au Québec dans les secteurs de la production primaire et de la transformation. Nous sommes convaincus que le cadre de relations actuel entre Québec et Alcan est nettement insuffisant pour atteindre cet objectif. Les résultats du pacte doivent dorénavant être profitables à toutes les parties: Alcan, le Québec et les communautés où Alcan est présente, et non pas uniquement à Alcan, comme c'est de plus en plus le cas. Ce point de vue est d'ailleurs largement partagé par la population du Saguenay? Lac-Saint-Jean. Comme l'a démontré une récente enquête scientifique, la modernisation du pacte de l'aluminium est le voeu de la très vaste majorité de la population du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Le statu quo est inacceptable.
Je vais maintenant céder la parole à MM. Côté et Marier, qui ont été deux personnages de premier plan lors de la nationalisation de l'électricité, en 1962. Pour le bénéfice de tout le monde, M. Côté était chef de cabinet de M. René Lévesque et M. Marier était chef de la Direction générale de l'électricité du Québec. On les a invités à nous accompagner pour qu'ils rappellent à tout le monde pourquoi les barrages de la compagnie Alcan ont échappé à la nationalisation de l'électricité, pourquoi un tel privilège. C'est donc un honneur pour moi que de céder la parole à ces deux acteurs, témoins d'une des réalisations les plus importantes du Québec moderne qui devait nous permettre de demeurer maîtres chez nous et de retrouver l'esprit de la nationalisation de 1962. Merci.
Le Président (M. Jutras): Alors, qui parle en premier? M. Côté? M. Côté.
M. Côté (Pierre-F.): M. le Président, en fait on me demande de rendre témoignage un petit peu de l'histoire, qu'est-ce qui s'est passé en 1962, lors de la nationalisation de l'électricité. Je veux vous signaler que j'ai retrouvé dans mes archives copie d'un document, il porte le numéro 22, qui a été rédigé en collaboration avec plusieurs personnes du ministère des Richesses naturelles. M. Marier assurait la coordination de ce travail. Ce qui est remarquable dans ce document, c'est qu'on retrouve les arguments essentiels pour lesquels il faut nationaliser les entreprises qui produisaient de l'électricité: bon, évidemment, Shawinigan, Québec Power, Gatineau Power, les coopératives d'électricité. Et, quand on parle très brièvement de l'Alcan dans ce document, c'est comme par accident, je dirais, parce qu'à l'époque il n'a jamais été envisagé ? dont je me rappelle ? qu'on puisse nationaliser l'électricité produite par Alcan, parce que c'était évident pour tout le monde que l'électricité produite par l'Alcan, c'était pour les fins industrielles, production d'aluminium, et vous savez que, pour produire de l'aluminium, ça prend beaucoup d'électricité.
Alors, c'était plutôt une exception, dans le projet de la nationalisation de l'électricité. Et je voudrais signaler que ce projet-là, en vertu du document que j'ai en main, a été suivi presque à la lettre, puis c'est comme ça que s'est réalisée la nationalisation de l'électricité à l'époque. Je voudrais juste vous signaler que je me rappelle avoir rédigé les baux, les nouveaux baux pour l'Alcan, ils venaient à expiration. Autrefois, c'était rédigé en anglais, et, pour la première fois, avec le secrétaire de l'Alcan de l'époque, M. Claude Aubin, on avait rédigé ces contrats en tenant les dictionnaires à la main. C'est un beau souvenir pour moi. Alors, je passe la parole à M. Marier.
Le Président (M. Jutras): Alors, M. Marier, la parole est à vous.
M. Marier (André): M. le Président, bonjour. Eh bien, ce qui a été dit essentiellement, c'est qu'il y a eu, au moment de la nationalisation, constat que les autoproducteurs d'électricité suscitaient déjà une activité industrielle. Ils ne distribuaient pas, pour l'essentiel, sauf marginalement, de l'électricité, et donc ils ne devaient pas faire partie d'une opération de rationalisation de l'ensemble de la production et de la distribution d'électricité. C'est une sorte de pacte social, si on veut, entre des gens qui produisent pour leur propre compte de l'électricité. Il y a un rapport étroit entre le privilège qui leur est consenti sous forme de baux ou sous forme d'attribution, de quelque manière que ce soit, des ressources hydroélectriques du Québec et l'activité industrielle qui en est suscitée. Dès le moment qu'il y a un écart qui se creuse entre le privilège qui est accordé et l'activité économique suscitée, il y a un problème.
Il y a un problème qui peut se régler dans ce cas-ci, compte tenu que cette production d'électricité excédentaire de l'Alcan est évaluée par les gens du syndicat à 500 millions de dollars par an, il y a d'une part une pression sur Alcan à faire, une pression réglementaire ou législative pour qu'Alcan consente au Saguenay?Lac-Saint-Jean des activités économiques de façon à rétablir l'équilibre entre le privilège et le résultat. Ça veut dire, ça, qu'Alcan doit aller beaucoup plus loin que les quelques centaines d'emplois qu'elle a créés antérieurement à l'année dernière. Cette année, apparemment, elle n'en a pas créé de nouveaux. Et on s'étonne toujours que l'Alcan, qui produit son électricité au Lac-Saint-Jean, ait son centre de recherche à Kingston et que non seulement elle ne trouve pas ça excessif, mais elle a eu l'idée de transporter le petit centre de recherche qu'il y avait au Saguenay?Lac-Saint-Jean à Kingston même.
Alors ça, c'est l'Alcan. Personne ne cherche à faire quitter l'Alcan de la région, bien sûr, mais le surplus, eh bien, c'est une cassure, dans le pacte social, dont l'État désormais doit s'approprier. Ce n'est pas à l'Alcan de faire des bénéfices sur un privilège qui lui avait été attribué pour faire de l'activité économique. L'État doit reprendre en main, d'une certaine façon. On l'avait fait, quelques années après 1962, en mettant une taxe sur le nombre de kilowattheures additionnels produits par les producteurs privés. C'est une façon. À l'époque, c'était ça. Mais il y a d'autres façons. Pour ma part, je pense que, à chaque fois qu'on a été pris dans les situations comme celle qui se présente maintenant, eh bien, il y a un changement dans les règles du jeu qui doit s'opérer, et ce sera à l'État de voir quelles sont les méthodes qui peuvent être utilisées pour que les règles du jeu qui s'appliquent correspondent au pacte social qui avait été convenu à l'époque. Voilà.
Le Président (M. Jutras): C'est terminé pour ce qui est de votre présentation?
M. Marier (André): Oui.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Nous allons procéder maintenant à l'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour, bienvenue. Je ne vais pas nécessairement entamer, avec les représentants des travailleurs ou les représentants de la région, une dynamique de guerre de chiffres, qui a tort et puis qui a raison. On pourra toujours essayer de départager les perceptions, la réalité, les hypothèses et ce qui est dans les faits. Mes questions seront plus de principe. Je voudrais juste vous entendre sur un certain nombre de choses, parce qu'une partie importante de l'argumentaire de votre mémoire est basée sur l'existence de surplus de production annuelle d'Alcan. Or, les informations, qui sont elles aussi publiques... En 1997, Alcan s'est adressée au gouvernement du Québec et à Hydro-Québec afin d'obtenir un bloc de 350 MW de puissance et d'énergie au tarif grande puissance pour satisfaire une partie des besoins de l'aluminerie d'Alma. En effet, cette aluminerie consomme plus d'énergie que celle de l'Isle Maligne qu'elle a remplacée.
Ce contrat permet à Alcan d'équilibrer son bilan énergétique annuel en comblant l'écart entre sa production et ses besoins. Cet écart varie selon les apports hydrauliques pour... la même chose que la production d'hydroélectricité d'Hydro-Québec. Par ailleurs, malgré la fermeture de la section Söderberg du complexe d'Arvida ? environ 200 MW, selon nos informations ? Alcan nécessite toujours de l'énergie d'Hydro-Québec. Comment pouvez-vous affirmer qu'Alcan dispose de surplus annuels susceptibles de soutenir une activité économique et des emplois?
Le Président (M. Jutras): M. Proulx.
n(10 heures)nM. Proulx (Alain): Une chose est claire, je suis d'accord avec vous, on ne s'embarquera pas dans une guerre de chiffres au niveau de l'énergie hydroélectrique. Notre position n'est pas tellement à court terme. On pense qu'à court terme on a eu des échanges, on a des documents qu'on est en train d'analyser, qu'on a reçus, mais, M. le ministre, je vous rappelle que nos préoccupations sont pour un futur moyen terme, un peu plus loin. C'est pour ça qu'on vous a déposé une hypothèse, qu'on sait qu'il y a des... Alcan, via le bail de la Péribonka, devait moderniser ses installations. Il reste des installations à moderniser au Québec. Il y avait les salles de cuves Söderberg, qui ont fermé prématurément. Il y a également les salles de cuves à Shawinigan et à Beauharnois et il y a les précuites, qui sont une technologie un peu plus nouvelle mais qui éventuellement devront être modernisées.
À ce stade-là, M. le ministre, ça va faire près de 1 000 MW de disponibles. On n'est pas dans des discussions de surplus à court terme, on est dans des projections à plus long terme. Qu'est-ce qu'Alcan... puis c'est la question qu'on a posée à l'Alcan puis qu'on voudrait s'assurer que, dans le cadre de la proposition qu'on fait... on pense que c'est une proposition qui peut nous garantir que ces 1 000 MW là futurs dégagés vont effectivement être utilisés pour bâtir de nouvelles alumineries. C'est dans ce contexte-là que l'on pose cette question-là de surplus éventuels, parce qu'ils vont être très réels. Alcan a l'obligation de moderniser ses installations.
M. Corbeil: Oui. Je voudrais, M. Proulx, corroborer. Parce qu'effectivement, lorsque le bail a été signé, en 1984, en contrepartie de l'avantage économique associé aux forces hydrauliques du domaine de l'État sur la rivière Péribonka, il a été demandé à Alcan d'avoir complété vers 2015 un programme d'expansion et de modernisation de ces usines d'aluminium primaire de 3 milliards de dollars, en dollars de 1983 ? je vois à votre mouvement de la tête que vous acquiescez à cette information, je pense qu'elle est véridique et connue, je pense qu'on va la partager ensemble ? et devant porter la capacité totale des installations de la compagnie au Québec à environ 1 million de tonnes métriques par année. Alors ça, je pense que c'est déjà dans le décor et c'est pour ça que vous parlez du moyen terme. On parle ici de 2015. On va commencer à avoir des indications dans ce sens prochainement, parce que c'est des investissements significatifs et qui devraient être pour le moins visibles, vous en conviendrez.
Maintenant, vous avez fait référence tantôt à un contrat, et je viens de faire appel à une particularité de ce contrat-là. Comme vous le mentionnez, ces conditions sont enchâssées dans un contrat de location de force hydraulique connu sous le nom de bail de la Péribonka. Ce contrat arrivera à échéance en 2033, avec une option d'extension de 25 ans pour l'amener en 2050. La question que j'aurais envie de poser, c'est: Est-ce que vous suggérez que le gouvernement renie ses liens contractuels avec Alcan? Et, deuxièmement: Ne croyez-vous pas qu'une telle décision pourrait nuire à la crédibilité du Québec sur le plan international?
M. Proulx (Alain): Absolument pas. Notre position là-dessus est très claire. Pour nous, le contrat, le bail de la Péribonka est... effectivement, il y a un manque évident qu'on aurait... en tout cas, nous, on croit qu'il aurait dû y avoir un nombre d'emplois créés en vertu du bail de la Péribonka, mais on ne vous demande pas de réouvrir le bail de la Péribonka. On pense que les conditions ont été établies. Alcan est venue pour le dire, les conditions sont déjà établies au moment où on se parle. Ce qu'on dit, nous, c'est que, par règlement, le gouvernement du Québec peut dès maintenant, par règlement, sans toucher au bail de la Péribonka, s'assurer que tout surplus éventuel puisse être utilisé dans l'esprit de la nationalisation de 1962.
M. Blain (Jean-François): J'aurais peut-être un complément de réponse sur vos deux questions précédentes, M. le ministre. Vous avez d'abord évoqué l'existence de surplus. Alors, moi, j'ai été appelé à tenter d'évaluer, à la lumière de la puissance actuellement disponible pour la compagnie Alcan, dans des conditions d'hydraulicité normales et en fonction de rendements de ses centrales correspondant à ces résultats historiques, si la capacité totale de production en énergie, sur une base annuelle, pouvait effectivement excéder les besoins totaux de ces usines existantes. Et ma conclusion est que, oui, dans des conditions d'hydraulicité normales, à compter de 2005, il devrait théoriquement y avoir un surplus d'un demi ou 0,5 à 0,7 TWh, ce qui est tout de même substantiel, sur une capacité de production totale à rendement moyen d'environ 21 TWh.
Maintenant, en ce qui concerne la référence aux 350 MW qu'Alcan aurait requis comme approvisionnement additionnel d'Hydro-Québec, cette possibilité d'approvisionnement là s'inscrit dans un contrat d'échange qui avait été négocié dès 1996, discuté et signé en 1998 et mis en vigueur à compter de 2000-2001, après la déréglementation de la production. Et ce même contrat-là donne également ouverture à Alcan de fournir à Hydro-Québec, en sens inverse, jusqu'à 740 MW. Donc, au total, si les conditions d'hydraulicité sont favorables, Alcan a la possibilité, en vertu de ce contrat-là, de fournir à Hydro-Québec beaucoup plus d'énergie sur une base annuelle qu'elle ne serait susceptible d'en recevoir d'Hydro-Québec au maximum.
Et pour ce qui est finalement des surplus réels, bien disons que, dans la situation de l'état de la production réelle pour l'année 2004, entre les mois de mai et septembre, Alcan a effectivement produit au-delà de 1 TWh de plus, qui a été vendu à Hydro-Québec, seulement pour les mois de mai à septembre 2004, compte tenu justement de conditions d'hydraulicité particulièrement favorables. C'est une quantité importante.
M. Corbeil: Vous faites référence, M. Blain, à des notions ici d'hydraulicité qui, comme par définition, sont fluctuantes et variables, alors que le besoin ? l'entreprise et toute l'aluminerie, pas celle-là plus qu'une autre ? d'une source d'énergie stable, prévisible, à la journée longue, à la semaine longue, à l'année longue. Alors, je pense que, de ce côté-là, il y a des précautions à être prises au niveau des approvisionnements en termes de leur variabilité, de leur fluctuation, qu'il faut quand même avoir des précautions, parce qu'on parle aussi de beaucoup d'emplois, là.
M. Blain (Jean-François): C'est exact, M. le ministre. Et les risques liés à la variabilité de l'hydraulicité, dans le cas d'Alcan, sont gérés essentiellement par sa très grande capacité d'emmagasinage relativement à son parc, qui est composé des bassins, en amont, lac Manoine et Chute-des-Passes, qui est le réservoir de la Chute-des-Passes, à lui seul, est d'une superficie trois fois moindre que celle du lac Saint-Jean et contient presque autant d'eau, c'est colossal, et, en aval, évidemment le lac Saint-Jean, au profit des trois dernières centrales situées sur le Saguenay. Donc, il y a une flexibilité considérable en termes de gestion pour Alcan pour compenser les variations de l'hydraulicité.
M. Corbeil: D'accord. Maintenant, je pense que, lors de travaux antérieurs de la commission parlementaire, je crois, la compagnie est venue ici le 17 février et elle nous mentionne, dans les graphiques, que depuis 2001 elle procède à des achats nets à Hydro-Québec, de 2001 à 2004, même si, cette année, vous avez reconnu que c'étaient des achats faibles parce que l'hydraulicité a été bonne pour tout le monde. Alors, comment vous conciliez ça, là, le fait que... Bien, je pense qu'on va revenir à M. Proulx, qui nous disait tantôt que là on parle du moyen terme et du long terme. Là, on peut passer par dessus des situations temporaires ou qui ne seront pas permanentes, mais vous pensez pour le moyen et le long terme. C'est ça?
M. Proulx (Alain): Exact.
M. Corbeil: D'accord. Moi, M. le Président, avec votre permission, je pourrais juste transmettre des éléments d'information additionnels. Je pense qu'ici, derrière votre démarche, qui est légitime, je pense que la préoccupation de la région à l'effet que toute l'énergie produite dans la région soit utilisée pour soutenir des activités industrielles au Saguenay?Lac-Saint-Jean... Il convient de mentionner que la région du Saguenay? Lac-Saint-Jean ? et là, je vais sortir du cadre strict d'Alcan ? la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean est en déficit à ce chapitre. Hydro-Québec ne produit pas d'électricité dans cette région, c'est vrai, mais elle y vend près de 800 MW d'énergie, 9,6 GWh.
Et j'aimerais aussi, M. le Président, rappeler aux gens que, si Alcan décidait de réduire la consommation annuelle d'énergie de son contrat à Hydro-Québec, la société d'État utiliserait cette énergie pour satisfaire l'ensemble des besoins de sa clientèle, notamment les autres clients de la même région qui est en déficit de production.
L'option pour Alcan d'exporter cette électricité n'est pas possible, car, en vertu du contrat qui lie Hydro-Québec à Alcan, tout surplus d'énergie dont Alcan disposerait doit être retourné, soit non consommé, soit revendu au même tarif qu'à l'achat à Hydro-Québec. Alors, les achats sont, si on veut, ou transactions sont à coûts constants. Hydro en vend à Alcan et, si Alcan en vend à Hydro, c'est le même prix. Alors, de ce côté-là, je pense que ce n'est peut-être pas des éléments, là, qui sont en rapport avec les affirmations que vous faites, là, mais juste replacer ça dans le contexte, c'est des échanges qui vont dans les deux directions, à coûts constants.
n(10 h 10)nM. Blain (Jean-François): Bon. Alors, peut-être juste pour compléter les précisions, M. le ministre. Étant donné que le contrat de 22 ans, qui est le principal contrat d'échange de puissance et d'énergie entre Hydro-Québec et Alcan, prévoit pour Hydro-Québec la possibilité de recevoir deux fois plus de puissance qu'elle n'en livre au maximum à Alcan, il y a une possibilité de disposer d'une quantité importante d'énergie qu'Hydro-Québec a la possibilité, dans ses activités non réglementées, d'exporter elle-même. Donc, la société d'État se trouve à faire indirectement ou est laissée ou autorisée par son actionnaire à faire indirectement ce qui est formellement interdit à Alcan. Il y a un problème, là.
M. Corbeil: Est-ce qu'il y en a qui ont d'autres questions, collègues?
Le Président (M. Jutras): Oui. M. le député de Roberval.
M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, Alain, bonjour, messieurs, bienvenue chez vous. Et ça me fait bien plaisir, d'abord, d'avoir l'occasion d'échanger avec vous. On a eu l'occasion de le faire il y a quelques semaines, à mon bureau, pour faire votre présentation. Tantôt, je pense qu'Alain, tu as été clair, et M. le ministre a été clair aussi, à l'effet... c'est un peu embêtant d'embarquer dans une guerre de chiffres, parce que ce n'est pas toujours évident de mettre le doigt sur le bon chiffre. Parce que, vous savez, ici, ce qui se dit, c'est un peu comme un tribunal, sauf que les gens n'ont pas nécessairement la responsabilité de ça. Sauf que ce qui est...
Une voix: ...sens coupable.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blackburn: Non, non, non. Ce que je veux dire, c'est que ce qui se dit ici demeure, parce qu'il y a des écrits qui vont faire en sorte qu'ils vont être disponibles pour l'histoire. Et, M. Côté, vous avez été assez longtemps associé à ce domaine-là que vous savez qu'est-ce que je veux dire. Et effectivement, Alcan, il y a une dizaine de jours, sont venus ici et nous ont très clairement démontré, en tout cas très clairement dit, qu'ils étaient... que 100 % de la production de l'énergie qu'ils faisaient servait à faire de l'aluminium. Bon.
Donc, à partir de ce moment-là, si je prends ce principe-là, je considère qu'il n'y a pas nécessairement d'exportation d'énergie qui est faite. Il peut y avoir des fluctuations par rapport à certains mois, là, parce que... par rapport à l'hydraulicité. Alors, dans ce contexte-là, c'est un peu difficile de faire le juste parallèle entre d'avoir un plus grand contrôle effectivement sur cette ressource-là et bien sûr d'en maximiser les retombées.
Et ça m'amène à dire un peu ce que tu disais tantôt, Alain, par rapport à Beauharnois et Shawinigan, qui vont fermer. Donc, à partir de ce moment-là, est-ce que ça voudrait dire que l'énergie qui va être dégagée là devrait servir exclusivement à ces régions-là?
M. Proulx (Alain): J'aimerais bien préciser que, si l'ensemble de la région est très inquiète de l'avenir au niveau d'Alcan, c'est parce qu'Alcan a fait des déclarations quand même préoccupantes dans les derniers mois et a eu des gestes également préoccupants. Quand le président d'Alcan Métal primaire vient dire qu'Alcan ne grandira plus au Québec puis qu'on sait qu'il va y avoir un 1 000 MW de disponible éventuellement... Que ce soit pour le Saguenay?Lac-Saint-Jean ou pour la région de Shawinigan, Beauharnois, une chose est claire, c'est que l'énergie... Le gouvernement, nous, je pense que ce qu'on considère, c'est qu'on a la responsabilité de s'assurer que l'activité industrielle, l'esprit de la nationalisation, c'était pour créer de l'activité industrielle. Mais, quand tu signes un bail... Alcan a décidé de le réouvrir en 1984. Bien, nous, ce qu'on dit, là, c'est qu'il faut regarder les règles du jeu. 35 % moins d'emplois Alcan. O.K.? Ça continue à baisser avec les augmentations.
Donc, les avantages sont toujours aussi considérables, et le nombre d'emplois diminue aussi de façon dramatique. Quand on parle d'activité industrielle, moi, je pense qu'il faut regarder ça pas seulement qu'en termes d'usines. Si on met des robots là-dedans puis il n'y a pas personne qui travaille, est-ce qu'une compagnie... est-ce qu'on peut politiquement ou légitimement penser que c'est normal de l'avantager d'un demi-milliard par année? Nous, on pense qu'il y a comme un équilibre entre le nombre d'emplois créés, O.K. ? puis je pense qu'on est en droit de réfléchir là-dessus ? et les avantages énormes qu'on offre à cette entreprise-là.
Et pour le futur, nous, je pense qu'avec les déclarations qui ont été faites on est en droit de demander au gouvernement de garantir, sans réouvrir le bail, mais de garantir que le cadre, l'esprit... par règlement, s'assurer que les surplus ne seront pas soit vendus à Hydro-Québec ou, dans un autre contexte, transférés soit à Alouette ou à Bécancour, où il y a des alumineries, puis Alcan paie son énergie au tarif L. Mais qu'est-ce qu'on va avoir gagné? C'est ce que je vous disais tantôt. Dans cet esprit-là.
Le Président (M. Jutras): Alors, Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Et je dois vous dire que vos réflexions et votre mémoire sont extrêmement intéressants et différents. Je voudrais juste m'assurer qu'on vous a bien compris et... parce que je sais que mon collègue du Lac-Saint-Jean a beaucoup de questions, et je vais prendre juste deux, trois minutes pour...
Ce que vous nous demandez en fait, là, et vous l'avez dit, je crois, c'est de rétablir l'équilibre entre les privilèges qui ont été accordés ou que l'on a implicitement accordés, parce que, d'après M. Côté, on n'en a même pas... ça n'a pas été vraiment discuté parce qu'il y avait une responsabilité qui était assumée, de développement économique local ou régional. Et puis vous dites: Là, le gouvernement doit... Vous l'avez bien dit: Quand les règles du jeu ne donnent pas les résultats escomptés, il faut revoir les règles. Mais je pense que vous avez un point très important là-dedans. Et, parmi ces règles-là, vous dites: À court terme, le gouvernement pourrait, par son pouvoir de directive, si je vous ai bien compris, là, demander... ou forcer Hydro-Québec à travailler avec Alcan pour optimiser la gestion de leurs réservoirs communs ou de leurs réservoirs, chacun, là. Vous avez bien dit: C'est une manière, à court terme, d'optimiser la disponibilité d'énergie. Puis, à long terme, vous dites: Il faut planifier le retour à l'énergie aux Québécois.
Alors, ici, on a eu ? puis je tiens à le dire parce que c'est très important, puis, de ce côté-ci de la Chambre, nous en sommes convaincus ? on a eu à date, là, trois, peut-être plus, mais trois mémoires qui nous ont extrêmement... qui sont très parlants. Le premier, c'était le mémoire des manufacturiers et exportateurs du Québec, qui, le 11 janvier, a déposé un mémoire dans lequel il dit que le Québec récupère ou retire 0,69 $ du kilowattheure consommé par les entreprises manufacturières qui exportent. L'Association de l'industrie de l'aluminium du Canada est venue dire ici, un peu plus... le 15 février, que le Québec retire 0,143 $ du kilowattheure par exportation d'aluminium en provenance du Québec. Et Pierre Fortin était venu au mois de décembre dire: Si on exporte de l'électricité, au Québec, le Québec retire 0,088 $ du kilowattheure. Donc, la démonstration de l'utilisation de l'électricité à des fins de développement, même dans des alumineries, elle n'est plus à faire, en tout cas pas de ce côté-ci de la Chambre. Et ces études-là, ce ne sont pas nous qui les avons commandées, ce sont les industriels, et ce sont les professionnels qui les ont faites.
Ma question, c'est: Compte tenu de la réalité, d'une part, je comprends qu'il faudrait qu'Hydro-Québec Production soit plus limpide et transparente, pour qu'on puisse suivre également le commerce d'électricité entre l'Alcan et Hydro-Québec, donc je comprends qu'on doit modifier la loi n° 116, sinon l'abroger. Je comprends aussi... puis ça, ça m'inquiète quand... C'est M. Marier, je crois, qui a dit que le centre de recherche de l'Alcan était parti du Saguenay, un petit en tout cas, pour se déplacer vers Kingston. Je serais tentée de dire que l'histoire du Canada se répète, là, mais... parce qu'on se rappelle qu'à un moment donné le Parlement s'était déplacé là aussi.
Mais, cela dit, est-ce que vous pouvez nous dire ce que, sur le plan de la recherche ? parce que le reste, on va en discuter plus tard ? qu'est-ce que le gouvernement pourrait faire? Parce que, ça, je n'ai pas vraiment... en tout cas, peut-être que je n'ai pas tout saisi les nuances du mémoire, mais qu'est-ce qu'on pourrait faire pour forcer un peu la main, pour que les efforts de recherche de l'Alcan se fassent aussi au Québec, pour profiter justement de leurs résultats de recherche au Québec? Est-ce que vous avez une idée là-dessus aussi?
M. Proulx (Alain): Mais, sur la question de la recherche, l'exemple de M. Marier au niveau de Kingston a donné sur un exemple... d'ailleurs, il y a eu une mobilisation. Alcan a tenté, voilà quelques années, de transférer effectivement le centre de recherche d'Arvida à Kingston. Il y a eu une mobilisation régionale qui a permis finalement de garder le centre de recherche ici. Au niveau de la recherche, on ne nie pas qu'Alcan fait de la recherche ou qu'il y a beaucoup de recherche... il y a d'ailleurs un centre de recherche, au niveau canadien, qui a été bâti à Chicoutimi récemment, sauf que ce qu'on est persuadé, c'est que, si on n'a pas de contrainte supplémentaire pour garantir le nombre d'emplois ou que l'énergie serve réellement à la création d'emplois, Alcan va accompagner, comme il l'a présenté, les entrepreneurs au niveau de l'aluminium, peut-être en deuxième ou en troisième transformation, mais on est persuadé qu'il serait capable de faire beaucoup plus que ça selon l'ampleur des privilèges qu'on leur consent.
M. Marier, vous vouliez rajouter quelque chose, non?
M. Marier (André): Tout simplement pour préciser, ce que vous avez déjà fait, là.
n(10 h 20)nM. Blain (Jean-François): ...Mme Marsolais, sur les deux premières parties de votre question, il y avait tout de même des choses importantes à soulever. Quant à l'optimisation de la gestion des parcs de production et des obligations, en fait, du côté d'Hydro-Québec comme distributeur versus la gestion d'Alcan, les contrats actuels permettent déjà aux deux parties d'optimiser leurs opérations.
Du point de vue d'Hydro-Québec, le contrat général, de la lecture que j'en fais, lui donne la possibilité justement d'acheter les excédents principalement énergétiques sur une base actuelle, le contrat d'échange principal, mais aussi deux contrats additionnels qui sont toujours en vigueur, un pour une tranche de puissance de 175 MW qui consiste essentiellement, à Hydro-Québec, en un moyen additionnel de gestion de la pointe, et une autre toute petite tranche de 75 MW, qui était négociée récemment, qui était, celle-là, l'équivalent d'une possibilité d'énergie interruptible à un coût très élevé, là, comme il y en a des ententes avec d'autres grands clients industriels, qui est un moyen de gestion de la très fine pointe. En fait, quand Hydro-Québec se résigne à interrompre les clients interruptibles, c'est qu'elle a vraiment déployé tous les autres moyens à sa disposition et que la pointe de la demande hivernale est vraiment trop élevée, et c'est le dernier recours avant le délestage. Donc, c'est tout à fait exceptionnel, bon, et de peu d'intérêt d'ailleurs. Financièrement, il ne faut pas avoir le choix.
Bon. Donc, pour ce qui est de la mécanique de restitution, la question qui m'a été posée par les syndicats, Alcan, dans la situation où il y aurait des excédents ponctuels ou dans l'éventualité où il y aurait des excédents plus réguliers et plus importants, bien, soit qu'on déverse cette eau-là soit que quelqu'un l'achète, hein, parce que, si Alcan ne vend pas, personne ne va en profiter.
Alors, la question qui suit, c'est: qui est le seul acheteur qui est en position d'acquérir les excédents d'Alcan et de les restituer à la région, donc de les restituer à leur vocation originale? Et il y a juste Hydro-Québec qui est dans cette position-là.
Alors, la mécanique d'entreposage qui est impliquée ? parce que là il faut réfléchir au mouvement d'énergie.. Entre le moment, disons, en 2005, où Hydro-Québec achèterait des excédents hypothétiques, là, même un dixième de térawattheure, d'Alcan, et le moment où des projets de première, deuxième ou troisième transformation nouveaux, des investissements nouveaux se concrétisent et que de nouvelles entreprises entrent en service, bien, cette énergie-là, il faut qu'elle serve à quelque chose ou qu'elle soit entreposée. Et, encore une fois, il n'y a qu'Hydro-Québec, la société d'État, qui peut acheter et qui peut entreposer.
Donc, provisoirement, pour deux ans, trois ans, quatre ans, jusqu'à ce que ses premiers projets d'investissement entrent effectivement en service et que Hydro-Québec Distribution ait à restituer l'énergie régionalement, il faut que l'énergie soit entreposée. Et là il y a un avantage pour tout le monde, parce qu'Hydro-Québec augmenterait sa marge de manoeuvre pour surseoir à des conditions de très faible hydraulicité, et, à partir du moment où la restitution de cette énergie-là peut se faire, le coussin de quelques térawattheures d'excédent accumulé servirait à garantir la fiabilité de l'énergie que le distributeur doit garantir, là, au nouveau projet d'investissement. Donc, cette mécanique-là est tout à fait conforme aux lois existantes, aux dispositions réglementaires qui existent déjà, au pouvoir de directive, et le seul ingrédient qu'il faut y ajouter, c'est la volonté politique, M. le ministre.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Tremblay: Oui, merci. M. Côté, vous avez été Directeur général des élections, vous êtes un homme impartial, donc vous avez été un espèce d'arbitre. Moi et mes collègues du Saguenay?Lac-Saint-Jean, Stéphane, Jacques, M. Landry, avons tenté de savoir quel était le bilan actuel énergétique, si Alcan était acheteuse ou vendeuse. Et le seul organisme qui peut nous le dire, c'est Hydro-Québec, puisque c'est Hydro-Québec qui est la seule qui peut acheter de l'électricité normalement d'Alcan.
Or, actuellement, on a des gens ici de notre région qui disent: Alcan produit des surplus. Et, d'un autre côté, nous avons le nouveau ministre qui dit clairement aujourd'hui, parce que ça fait longtemps qu'on tente d'avoir une affirmation réelle du ministre, mais là, aujourd'hui, il vient de nous le dire, qu'il corrobore les chiffres d'Alcan comme de quoi Alcan est un acheteur. Moi, je suis un député de la région et je me dis: Bon, bien, qui dit vrai? Et, vous qui avez été un arbitre, quelqu'un d'impartial, est-ce que je dois croire, est-ce que vous croyez les chiffres du ministre ou vous croyez les chiffres de nos travailleurs? Aidez-moi à trouver une solution, puisque nous sommes dans l'impasse.
M. Côté (Pierre-F.): En fait, la question que vous me posez, c'est une question à caractère politique. Et je ne me suis jamais engagé sur ce terrain-là. Et, étant à la retraite de ma fonction de Directeur général des élections, j'ai toujours conservé ce devoir de réserve et d'impartialité. Alors, j'ai peut-être une idée sur la question que vous me posez, mais je m'en voudrais de l'exprimer.
M. Tremblay: D'accord. Alors, moi, je pense que, bon, pour la question du bilan actuel, moi, j'invite le ministre à venir à la conférence régionale des élus, qui, eux aussi, veulent avoir la réponse. Et puis, plutôt que de livrer les chiffres sur la place publique, pourquoi est-ce qu'on ne pourrait pas ensemble tenter de voir qui dit vrai, qui dit faux, avec un débat, tout le monde autour de la table, pour régler ce premier problème qui est celui du bilan actuel?
Deuxième élément qui est fondamental, c'est que vous dites qu'il va y avoir des surplus, et donc que ces surplus doivent absolument être utilisés pour l'activité économique régionale, chose à laquelle je suis entièrement d'accord. Donc, il faut qu'aujourd'hui le ministre s'engage à respecter l'esprit de la loi de la nationalisation de l'électricité et adhère à cette idée que tout surplus d'électricité qui sera libéré d'Alcan puisse entrer dans une espèce de bloc patrimonial, comme vous le proposez, pour assurer une reconversion industrielle du Québec. Vous êtes d'accord avec ça, et je suppose que c'est la demande que vous faites directement au ministre aujourd'hui?
M. Proulx (Alain): Bien, c'est effectivement... c'est la proposition qu'on espère que le gouvernement va comprendre, va entendre nos motivations puis s'assurer que ce soit... ce qu'on dit, que ce soit pour le court terme et pour le long terme, et pour sûrement garantir une chose qui avait été établie depuis longtemps, c'est: l'esprit de la nationalisation, en 1962, doit servir l'activité industrielle. Puis on entend par «activité industrielle»... l'activité industrielle, également, ça se traduit en termes de nombre d'emplois.
M. Tremblay: Une dernière question pour... Après ça, je passerai la parole à mes collègues de la région. Dans un article du journal Le Quotidien, Marc Saint-Hilaire avance deux choses, il avance que la compagnie Novelis, au Saguenay, qui est une entreprise indépendante, mais où j'ignore le pourcentage de participation d'Alcan, mais c'est Alcan qui a acheté Novelis...
Une voix: ...
M. Tremblay: Elle est vendue? Donc, ce que je comprends, c'est qu'Alcan vend 5 MW à la compagnie Novelis. Donc, ça voudrait dire qu'elle va à l'encontre de l'esprit de la loi sur la nationalisation.
M. Proulx (Alain): Bien, c'est très clair, Alcan ne doit pas être un vendeur d'énergie, O.K.? J'ai entendu ici, à cette commission-là, M. Cossette, représentant d'Alcan. Alors, la question, quand on lui demandait si... Mme Marsolais lui a posé la question à plusieurs reprises, M. Tremblay est revenu, M. Cossette est venu dire que, dans le contrat d'énergie avec Hydro-Québec, il y a une clause d'exclusivité qui fait que, si jamais on avait des surplus, ils devaient être vendus exclusivement à Hydro-Québec.
On a sursauté, la semaine dernière, parce que le porte-parole d'Alcan a confirmé qu'il vendait 5 MW d'énergie directement à la compagnie Novelis, qui est l'usine de laminage qu'Alcan a créée. C'est scindé, c'est une autre entreprise tout à fait, Alcan n'a plus aucune participation là-dedans, c'est une autre entreprise. Alcan vend à cette compagnie-là, pour un contrat de trois ans, 5 MW. À quel coût? Ils ont refusé, ils nous ont répondu que c'étaient des ententes commerciales. Donc, dans ce cadre-là, si on est en déficit ou si on peut en vendre, des 5 MW, en tout cas, on a un certain nombre de préoccupations là-dessus. On a d'autres compagnies également qu'on croit qu'Alcan vend directement: une cession d'entreprise, qui s'appelle Scepter Industries, qui a été vendue à un Américain, une compagnie qui consommerait un certain nombre d'énergie, et on croit qu'Alcan est également vendeur directement là-dessus.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Chicoutimi.
M. Bédard: Merci, M. le Président. Alors, salutations à M. Proulx, M. Blain, M. Simard, aussi M. Côté et M. Marier. Évidemment, j'ai eu l'occasion d'avoir votre présentation à quelques reprises, donc il y a des éléments que je maîtrise mieux que peut-être l'ensemble des membres de la commission et peut-être aussi que le ministre, tout respectueusement, parce qu'on a un avantage, quand même, étant donné qu'on vient de la même région, d'avoir des représentations. Tout d'abord, pour éclaircir une chose, vous avez dit qu'Alcan était assis sur un avantage concurrentiel important, que vous estimez actuellement à 8 milliards de dollars sur une période de, je pense, de 1982 environ à aujourd'hui... 1984 à aujourd'hui. Autrement dit, c'est que cet avantage, annuellement et récurrent et qui va continuer dans l'avenir, est d'environ 500 millions. Lui, il s'explique de quelle façon?
M. Proulx (Alain): Bien, c'est très clair, c'est la différence entre le coût de la grande entreprise et le coût de production d'Alcan, on vous le... Le coût de production d'Alcan est de ? on l'a démontré tantôt ? entre 8,10 $US... Ce n'est pas nos chiffres, c'est les chiffres qui ont été démontrés... D'ailleurs, je pense qu'Alcoa est venu vous faire une présentation, c'est les chiffres d'une entreprise, une coopérative internationale qui s'appelle le CRU. Oui.
M. Bédard: Autrement dit, l'avantage qui lui a été concédé à l'époque fait en sorte qu'aujourd'hui, de façon récurrente, ils ont un avantage concurrentiel de 500 millions annuellement.
n(10 h 30)nM. Proulx (Alain): Année après année, la Côte-Nord a demandé des mégawatts au tarif L, puis Alcan... Si on avait accordé ces coûts-là... le nombre de mégawatts qu'Alcan produit, au tarif de son coût de production, avec la différence avec le tarif L, c'est effectivement, cette année, c'est 490 millions, puis, s'il y a une augmentation du tarif L, bien ça va s'en aller en croissant année après année.
M. Bédard: Et ce coût-là évidemment inclut aussi les coûts de production et tous les coûts inhérents à la production hydroélectrique par Alcan.
M. Proulx (Alain): Les coûts d'entretien et les redevances également. Et les coûts de réseau.
M. Bédard: Alors, c'est un avantage quand même assez important pour une entreprise de partir avec plus 500 millions une année, ce n'est quand même pas mauvais.
M. Proulx (Alain): Oui, on peut penser que c'est une excellent avantage.
M. Blain (Jean-François): L'équation, tout simplement, c'est la différence entre des coûts de production qui atteignent un maximum de 0,012 $, estimé de façon la plus conservatrice possible, dans notre sens, là, et le coût d'approvisionnement au tarif L, de 0,037 $, incluant le transport, donc c'est 0,025 par kilowatt ou 25 millions de dollars par térawattheure, appliqué sur une consommation annuelle de 18, 19 TWh, ça donne presque 500 millions de dollars.
M. Bédard: Merci. Vous affirmez aussi... vous avez des craintes par rapport à l'avenir. Au-delà du débat des kilowatts, puis, bon, selon la stratégie d'Alcan, par rapport à la gestion de leurs barrages actuellement, ce qui est clair, c'est que vos craintes, dans un avenir rapproché, peuvent faire en sorte qu'Alcan va avoir, je vous dirais, une possibilité énergétique qui va se libérer de façon importante. Vous l'avez appuyé sur une chose, entre autres, la déclaration du président régional d'Alcan, qui a maintenant d'autres fonctions, à l'effet qu'il ne bâtirait plus dans la... qu'il ne bâtirait plus au Québec, qu'il ne développerait plus.
Mais votre graphique, aussi, parle de la production actuelle, à la page 22, où on retrouve, entre autres, Shawinigan, Beauharnois et Jonquière qui ne se retrouvent pas dans l'autre partie. Autrement dit, ces usines sont à risque. Et ce que je sais évidemment, dans ma région, c'est que ces risques-là ne viennent pas d'une boule de cristal, Alcan a clairement affirmé qu'il y avait des risques par rapport à ces usines et qu'il y aurait des décisions à prendre à court terme, là. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus.
M. Proulx (Alain): Bien, déjà, Alcan, on l'a exprimé tantôt, il y a quatre salles de cuves qui ont été fermées prématurément, qui devaient fermer aux alentours de 2013 ou 2014. Mais cette entente-là, quand Alcan a négocié avec ses syndicats puis d'ailleurs avec la communauté... Ce n'est pas appuyé seulement sur une déclaration; l'ensemble des échanges qu'on a eus avec Alcan avaient clairement dit aux travailleurs et à la région ? il y avait même des terrains de localisés dans Jonquière ? qu'il allait y avoir une nouvelle aluminerie à Jonquière. Alcan nie, à l'heure actuelle, nie cet engagement-là, dit: Je n'ai pas pris cet engagement-là. C'est quand même assez imposant!
Puis, l'hypothèse qu'on vous soumet: à l'heure actuelle, les syndicats de Shawinigan et de Beauharnois sont en discussion avec Alcan, puis Alcan dit qu'elle ne construira pas de nouvelles alumineries. Si on peut penser qu'ils ont fermé prématurément de 10 ans les vieilles salles de cuves Söderberg, qui devaient normalement fermer même après Shawinigan et Beauharnois, bon, on peut penser qu'on est dans un avenir pas trop lointain. L'hypothèse qu'on vous soumet: ces mégawatts-là qui vont être libérés par Shawinigan, Beauharnois et qui ont été libérés par Arvida, 200 MW, donc Alcan a 200 MW de moins à acheter pour l'usine d'Alma, sur les 350, plus les salles de cuves précuites, qui sont une technologie plus ancienne, va faire que tantôt, dans un avenir assez prévisible, si on est... tu sais ce que je veux dire, quand on suit le dossier, elle va avoir 1 000 MW. Qu'est-ce qu'Alcan va faire de ces 1 000 MW là? Si elle refuse de s'engager sur la construction d'une aluminerie à Jonquière, si elle dit clairement aux citoyens puis aux communautés de Shawinigan et Beauharnois qu'il n'y aura pas d'aluminerie là ? on va vous accompagner pour faire de la transformation, ce qui n'est pas mauvais ? il va demeurer 1 000 MW.
M. Bédard: Ce que vous dites en même temps, c'est qu'il ne faut pas se faire prendre les culottes baissées comme la dernière fois. Commençons à négocier tout de suite pour que, quand Alcan prendra une décision, bien elle en saura les conséquences. Puis il faut mettre notre poing sur la table tout de suite pour se créer un rapport de force.
Autrement dit, vous dites au ministre: Occupez-vous de nos affaires, puis occupez-vous de vos affaires, pour qu'à courte échéance on ne se retrouve pas avec une décision d'Alcan qui va désavantager le Québec et la région, mais pas seulement notre région.
M. Proulx (Alain): On ne veut pas se retrouver devant un fait accompli puis on veut s'assurer qu'Alcan ? puis on ne veut pas lui enlever l'énergie qu'elle a à bon coût ? on veut s'assurer qu'Alcan effectivement utilise cette énergie-là pour du développement industriel.
Le Président (M. Jutras): Alors, je voulais vous dire de conclure, vous venez de conclure. Parce que le temps est épuisé. Alors, merci pour votre présentation, messieurs.
Alors, je demanderais au Conseil des Atikamekw de Wemotaci de s'approcher.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Je demanderais aux représentants du Conseil des Atikamekw de s'installer.
Alors, le Conseil des Atikamekw, s'il vous plaît. M. Chevrette, si vous voulez prendre place avec ceux qui vous accompagnent.
Nous continuons donc nos travaux. Nous accueillons maintenant le Conseil des Atikamekw de Wemotaci. Alors, est-ce que, messieurs, vous êtes prêts pour votre présentation? Oui? Alors, je vous souhaite la bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Je vous rappelle rapidement les règles: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, par la suite il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre des Ressources naturelles et les députés ministériels, et, par après, un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition. Qui est le porte-parole? Vous êtes monsieur?
M. Neashit (François): François Neashit.
Le Président (M. Jutras): Alors, si vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent et procéder à la présentation de votre mémoire.
Conseil des Atikamekw de Wemotaci
M. Neashit (François): Merci, M. le Président. Je représente la communauté de Wemotaci en tant que chef de la communauté. Ici, je suis accompagné aujourd'hui de M. Guy Laloche, ici, à ma droite, qui est le conseiller délégué au développement des ressources humaines et de la vie économique; il y a aussi M. Michel Mongeon, qui est consultant pour la communauté de la Wemotaci; et aussi M. Guy Chevrette, homme d'honneur et de parole.
n(10 h 40)nM. Chevrette (Guy): Je n'en avais pas demandé autant!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Jutras): Alors, bonjour. Bienvenue. Allez-y.
M. Neashit (François): Je voudrais d'abord vous remercier de nous accueillir, là, à votre table. On est dans une situation actuellement où est-ce que, nous, on doit faire aussi des représentations auprès de gouvernements, provincial et fédéral, pour éventuellement aspirer à une meilleure qualité de vie. Nous avons préparé un texte, là, sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui.
Le territoire de la communauté attikamek de Wemotaci occupe une proportion importante, là, du bassin de la rivière Saint-Maurice, bassin qu'il partage avec les deux autres communautés attikameks, soit Manawan et Obedjiwan. La population de la communauté est de 1 234. 54 % de la population a moins de 20 ans et actuellement 75 % de la population se retrouve sous la barre des 35 ans. Le territoire traditionnel de la communauté de Wemotaci est réparti en 12 territoires familiaux qui couvrent une superficie de 20 500 km². La superficie moyenne des territoires familiaux est d'environ 1 707 km² avec un minimum de 238 km² et un maximum de 5 048 km² chacun, et sous la gouverne d'un chef de famille.
Encore aujourd'hui, la grande majorité des Attikameks de Wemotaci pratiquent régulièrement leurs activités traditionnelles. Au fil du temps, la population attikamek a été fortement influencée par le développement qui a affecté son territoire. Dans un premier temps, la colonisation a repoussé lentement l'occupation de certaines familles hors de leur territoire traditionnel. Par la suite, le développement simultané de la foresterie et de l'hydroélectricité ainsi que la construction de la voie ferrée a généralisé les impacts sur l'ensemble du territoire de la communauté. Aujourd'hui, ces derniers types de développement ont étendu leurs répercussions sur le milieu jusque dans les moindres parties du territoire. De plus, le développement des réservoirs, accentué par la récolte forestière, a eu pour effet de hausser le taux de contamination par le mercure chez le poisson et affecter la santé des Attikameks.
Si auparavant il y avait des possibilités de fuir le développement, aujourd'hui il n'y a aucune autre solution que d'assurer une intégration adéquate de l'ensemble des besoins de la communauté à toutes les facettes de la gestion, de l'aménagement et du développement des ressources dans notre territoire ancestral. Nous, les Attikameks de Wemotaci, avons su nous adapter tant bien que mal à des pressions constantes sur nous ainsi que sur nos territoires. Jamais nous n'avons renoncé à notre droit et à notre devoir de gestion et nous avons assumé pendant toutes ces années notre responsabilité en assurant la pérennité de nos ressources sur l'ensemble de nos territoires.
La première nation attikamek de Wemotaci s'est donné une stratégie de développement durable dans laquelle la préservation de la qualité du territoire et la pérennité des ressources est l'enjeu de la plus grande importance. À cet effet, le territoire de la communauté de Wemotaci doit être au minimum d'une qualité suffisante pour perpétuer sa culture, son organisation sociale à travers l'exercice des activités traditionnelles. Dans une optique de développement durable, une première étape est de déterminer les seuils d'acceptabilité écologique, environnementale, sociale et culturelle des répercussions sur le milieu et d'en déterminer les seuils d'intégrité minimale. Ensuite, il importe d'établir les potentiels de développement des ressources disponibles qui respectent les seuils déterminés.
L'établissement de ces seuils implique qu'un plan d'affectation du territoire attikamek soit établi et qu'il soit conforme à la vision de la communauté, qu'on y classe les rivières en fonction de leur potentiel écologique, culturel et économique. La gestion du territoire et des ressources est une tâche exigeante, particulièrement dans une approche de développement durable. La participation de la communauté requiert un apport financier constant et adéquat afin de participer convenablement à cette tâche. De plus, les exigences quant aux consultations publiques et à la participation de la communauté au processus décisionnel demandent encore plus d'encadrement, que la structure soit efficace à protéger les droits, les besoins et les intérêts de la communauté.
La mise en place du développement durable devrait pouvoir permettre de bénéficier de la meilleure alternative de développement énergétique, ce qui nécessite d'associer plusieurs sources énergétiques au bilan global. Cela signifie que tous les potentiels de développement énergétique raisonnablement disponibles devraient être évalués, incluant l'éolien, le solaire, la géothermie, la biomasse et l'hydroélectricité. Il y aurait lieu d'envisager le développement de production multiénergie dans le but de minimiser les impacts sur l'environnement et assurer la plus grande efficacité énergétique, tout en minimisant les coûts pour chaque ménage ainsi que pour les équipements collectifs.
Des recherches sont nécessaires afin de connaître les potentiels d'optimiser les ressources d'énergie renouvelable tels que l'hydroélectricité, l'éolien, le solaire, le géothermique, la biomasse ou autre. Tel qu'abordé précédemment, le développement d'un territoire nécessite une très bonne connaissance de ses caractéristiques écologiques, environnementales, sociales ou culturelles avant d'articuler une mise en valeur de ses ressources qui en préserve son intégrité. Cette pratique est un des fondements du développement durable et une partie intégrante des valeurs attikameks. Dans cette démarche, il importe de connaître jusqu'à quel point un territoire peut supporter une gamme de répercussions avant d'affecter la résilience de ses écosystèmes et détruire les organisations sociales et culturelles qui dépendent de ces territoires. Cet élément fait partie du droit de la communauté attikamek de Wemotaci.
Actuellement, la communauté ne dispose pas des données pour dresser un bilan des impacts cumulatifs qu'a subis le territoire et d'évaluer jusqu'à quel point ce dernier peut supporter d'autres répercussions sans affecter son intégrité. Nous sommes à développer nos outils de planification, d'aménagement et de développement du territoire, et il sera nécessaire de les arrimer avec ceux du gouvernement du Québec. Par la suite, il sera nécessaire de mettre en place un processus bipartite de gouvernement en gouvernement et amorcer un processus de cogestion des ressources du territoire. Une fois que les potentiels de développement sont connus, il faudra établir comment leur développement pourra bénéficier équitablement aux collectivités locales, et particulièrement à la communauté attikamek de Wemotaci.
La communauté doit avoir la possibilité d'agir comme gestionnaire de son territoire et participer avec le gouvernement à toutes les décisions de gestion sur son territoire. C'est la façon qui peut assurer que le développement répondra aux priorités de la communauté. Une approche de gouvernement à gouvernement demande que de chaque côté on développe ses orientations, ses objectifs, ses priorités et ses stratégies. Dans une approche de cogestion, ces composantes doivent s'arrimer afin que la mise en valeur des ressources réponde aux droits, aspirations et besoins de chacun. La seule façon pour que la communauté puisse répondre à ses besoins est qu'elle soit impliquée en amont des décisions. Actuellement, la communauté ne peut que réagir aux propositions de projets, politiques ou programmes sans avoir en main les éléments nécessaires pour protéger ses droits de base et ses besoins essentiels.
On ne peut aborder avec plus d'emphase l'importance que la communauté agisse à titre de cogestionnaire de son territoire et des ressources, mais il y a plusieurs alternatives à examiner à cet effet, afin d'assurer ce rôle. Une des alternatives est que la communauté soit copropriétaire à court et à long terme des infrastructures de développement énergétique mises en place sur son territoire. Ainsi, elle pourrait profiter des retombées du développement et des opérations de ces infrastructures.
n(10 h 50)n On a préparé un sommaire des recommandations, qui figure dans les deux dernières pages. Je pourrais vous lire... passer assez rapidement.
Le territoire de la communauté de Wemotaci doit être au minimum d'une qualité suffisante pour perpétuer sa culture à travers l'exercice des activités traditionnelles; il faut déterminer les seuils d'acceptabilité écologique, environnementale, sociale et culturelle; la communauté doit bénéficier des meilleures retombées économiques possible; il faut identifier tous les potentiels de développement en respectant ces seuils et en assurer un développement équitable.
La communauté doit pouvoir bénéficier de la meilleure alternative intégrée de développement énergétique, mettre en valeur chacun de ces potentiels en respectant les seuils d'intégrité, répondre le plus justement possible aux besoins d'énergie en fonction des ressources disponibles les plus appropriées; viser une grande autonomie des ménages en diminuant les besoins énergétiques avec des alternatives de sources d'énergie disponibles, telles des habitations combinant appareillages économes en énergie, utilisation de panneaux solaires associés à d'autres sources d'énergie; améliorer le rendement énergétique des produits qui consomment de l'énergie; mettre de l'avant des programmes de recherche afin de connaître les potentiels d'optimisation des ressources énergétiques renouvelables, tels l'hydroélectricité, l'éolien, le solaire, la géothermie, la biomasse ou autres; sélectionner et favoriser les combinaisons des ressources énergétiques qui permettent les meilleurs rendements.
S'assurer de disposer des meilleures connaissances des caractéristiques écologiques, environnementales et sociales avant d'articuler une mise en valeur des ressources d'un territoire, afin de conserver son intégrité et utiliser son plein potentiel; connaître jusqu'à quel point un territoire peut supporter une gamme de répercussions avant d'affecter la résilience de ses écosystèmes et détruire les organisations sociales qui dépendent de ces territoires; disposer d'un bilan des impacts cumulatifs qu'a subis le territoire et évaluer jusqu'à quel point ce dernier peut encore supporter d'autres répercussions sans affecter son intégrité.
Donner les moyens, dont le financement, à la communauté de développer d'autres outils essentiels afin d'établir les stratégies de gestion et de développement des ressources énergétiques qui respectent la vision des Attikameks; réaliser les travaux préalables et développer d'autres outils afin de pouvoir établir les seuils d'acceptabilité sociale, culturelle, écologique et statuer comment la mise en valeur des ressources peut demeurer dans le cadre du développement durable; donner à la communauté les opportunités nécessaires afin qu'elle puisse rehausser son niveau de développement afin qu'il soit comparable aux collectivités environnantes.
Tout développement des ressources sur les terres de la communauté devra participer très activement à assurer ce développement requis à la communauté; le modèle de développement devra respecter les droits des Attikameks de Wemotaci et répondre à leurs intérêts; mettre en place un processus décisionnel relativement à la priorisation des options de développement en s'assurant d'optimiser les retombées locales; assurer que la communauté sera en amont des décisions pour qu'elle n'ait plus à réagir à des projets ou propositions de projet, mais serait au centre des orientations de développement; que la communauté puisse de doter d'outils de gestion, de données et de personnel technique, des infrastructures et une organisation communautaire pour remplir son rôle de cogestionnaire.
Afin d'assurer que la communauté agisse à titre de cogestionnaire, elle pourrait devenir copropriétaire des infrastructures de développement énergétique mises en place sur son territoire; réaliser des recherches sur la contamination par le mercure et mettre en place un soutien afin de diminuer les impacts de cette contamination.
Notre territoire compte plusieurs sites intéressants à développer tant sur le plan économique qu'environnemental. La rivière Saint-Maurice est déjà harnachée, et nous croyons qu'avant de procéder à l'harnachement de d'autres rivières il serait préférable de développer le potentiel des rivières déjà harnachées. Nous favorisons les projets qui sont les moins dommageables pour l'environnement. Notre taux de sans-emploi est actuellement de 60 %. Nous nous devons de tout faire pour créer des emplois pour cette jeunesse qui nous presse d'agir, et avec raison. Si nous n'agissons pas maintenant, nous devrons faire face à des problèmes majeurs.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, pour votre présentation. Je cède maintenant la parole au ministre des Ressources naturelles. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Chef Neashit, bonjour, bienvenue, M. Chevrette, M. Coocoo, M. Laloche. C'est ça? Excusez. En fait, bienvenue pour faire participer les membres de cette commission du désir de la communauté attikamek de Wemotaci de travailler au développement de sa communauté et du Québec à travers la filière énergétique.
Vous êtes intéressés à ce que ce développement-là, qu'il soit hydraulique ou éolien, qui pourrait avoir des retombées dans votre communauté, se fasse en partenariat et vous êtes même prêts, selon les écrits, à vous associer ou à réaliser des projets, un ou deux projets de plus de 50 MW. Alors, est-ce que vous pourriez nous donner un peu plus de détails sur les projets en question et comment vous envisagez ce partenariat?
M. Neashit (François): Actuellement, on est en train de voir, là, les possibilités qui existent sur la rivière Manawan ainsi que sur la rivière Saint-Maurice. Sur la rivière Manawan, il y a un projet, là, qui nous intéresse beaucoup. On a d'ailleurs déjà commencé à faire certaines études, là, de potentiel, là, de source d'énergie de cette rivière-là, et les premières études nous confirment qu'il y aurait possibilité que cet endroit puisse être rentable, compte tenu qu'éventuellement il va y avoir la construction d'un barrage, là, sur la Chute-Allard, qui est située à 5 km en aval de la communauté de Wemotaci. Partant de là, ce projet nous semblait très intéressant. C'est un projet qui serait de moins de 50 MW.
M. Corbeil: Moins de 50?
M. Neashit (François): Oui.
M. Corbeil: O.K.
M. Neashit (François): Par ailleurs, sur la rivière Saint-Maurice, il y a deux sites qui nous intéressent, qui sont situés dans les territoires de la communauté de Wemotaci. C'est sur la rivière Saint-Maurice, c'est en aval du réservoir Gouin. C'est deux chutes d'eau qui sont quand même assez rapprochées, puis, selon les études préliminaires qui ont été effectuées, le potentiel de ces deux endroits-là serait de plus de 50 MW.
Actuellement, la loi nous empêche, là, de pouvoir faire des projets à ces deux endroits-là. C'est pour ça qu'on parle de cogestion puis de copropriété des futurs sites, là, des projets d'hydroélectricité.
M. Corbeil: O.K. Alors, si je...
M. Chevrette (Guy): Peut-être ajouter, 30 secondes, M. le ministre.
Le Président (M. Jutras): M. Chevrette.
M. Chevrette (Guy): Vous aurez observé que la Saint-Maurice est déjà une rivière harnachée. Donc, ce n'est pas... on ne viole pas un nouveau cours d'eau; et, deuxièmement, le projet que le chef a parlé, sur la Manawan, c'est un projet qui est situé dans une gorge dont le résultat est très, très minime, moins d'un kilomètre d'ennoiement. Donc, sur le plan environnemental et développement durable, les impacts sont à peu près nuls pour les trois projets dont a parlé le chef.
M. Corbeil: D'accord. Alors, je comprends ici que vous soulevez la limite du 50 MW, là. Ce que vous soulevez comme préoccupation pour le développement de votre communauté ou des infrastructures hydroélectriques dans l'environnement de la communauté de Wemotaci, c'est, pour un barrage sur la rivière Manawan, on parle de moins de 50 MW. Ça, il n'y a pas trop de problème; et les deux autres, ce serait plus de 50 MW. Bon.
Pourriez-vous nous donner des exemples de retombées, ou en fait identifier des besoins que votre communauté pourrait satisfaire en termes de réalisation de ces projets-là dans des ententes de partenariat et avec le développement de tout ce potentiel hydroélectrique là que vous avez identifié comme étant possible?
n(11 heures)nM. Neashit (François): Ce qui nous préoccupe dans ces projets de développement là, ce n'est pas tellement les emplois, là, à long terme, là, qui découleraient de ces constructions-là. On sait que la construction d'un barrage de moins de 50 MW, ça peut se situer entre deux et trois ans. À ce moment-là, là, les emplois, ils se créent seulement sur deux et trois ans. C'est surtout les retombées économiques qui nous intéressent, par la suite. Si on est propriétaire, là, d'un barrage, c'est à long terme, c'est à très, très long terme. Actuellement, on a, si on fait un juste retour en arrière, là, avec les projets de Chute-Allard et Rapide-des-Coeurs, on a signé une entente avec Hydro-Québec, en juillet 2002, où est-ce qu'on a des avantages financiers qui vont s'étaler sur 50 ans. Ça, c'est les règles, là, qui dictent... je pense que c'est standard, là, dans toutes les négociations que mène Hydro-Québec avec les communautés autochtones et aussi avec d'autres municipalités.
À ce moment-là, nous, on se sent limités dans le temps, parce qu'on occupe un territoire où est-ce qu'on est depuis longtemps, puis on ne voudrait pas voir les jeunes, là, que je parlais tout à l'heure, là, qui ont 20 et 35 ans et moins, qui représentent plus de 70 % de la population, quitter ou encore se donner des problèmes, créer des problèmes à travers tout ça.
Parce que, connaissant les gens de Wemotaci... je ne sais pas si vous avez déjà eu l'occasion de passer dans le coin, on est dans un endroit complètement isolé, et la ville la plus proche est à 115 km par une route forestière, là, qui est non asphaltée. Je pense qu'on est un des rares, là, villages, là, communautés au Québec où est-ce que la route n'est même pas asphaltée. C'est quand même un endroit que, nous, on considère très isolé.
Et, si on n'a pas une assurance pour l'avenir, qu'on va avoir des retombées économiques importantes, appréciables, on se dirige tout droit, tu sais, vers de gros problèmes, tu sais, vers un cul-de-sac, où est-ce que nos jeunes vont devoir s'orienter ailleurs ou faire des choses, là, qui ne sont pas acceptables.
Le Président (M. Jutras): M. Chevrette...
M. Chevrette (Guy): M. le ministre me permettra sans doute, parce que j'ai été à la tête de ce ministère délégué aux Affaires autochtones. Et des peuples, des villages comme... des communautés qui doublent leur population en 10 ans, il n'y en a pas gros au Québec. 60 %, 74 % en bas de 35 ans. Pour quelqu'un qui est un tant soit peu responsable, il est inquiet. Les retombées économiques dont le chef parle sont d'une importance capitale pour générer des projets, d'autres projets de développement économique plus permanents qui créent de l'emploi.
Les chefs, sans le dire haut et fort, ces gens-là sont pressés par leur jeunesse. Ce n'est pas croyable! Puis on n'a qu'à regarder l'ensemble des communautés autochtones. Quand j'ai démissionné, le 29 janvier, j'ai dit qu'il y a un dossier sur lequel je me mouillerais davantage, c'est le dossier autochtone et le développement des régions, et j'ai essayé de tenir parole parce que je suis très inquiet, très inquiet de voir que ces communautés doublent dans l'espace de 10 ans leur population et ont des taux de chômage astronomiques, des taux de suicide qui dépassent... encore ce matin, on me dit qu'il y en a un à Wemotaci, hier, un à la Manouane, un suicide. Écoutez, c'est une responsabilité collective et sociale que l'on a, puis c'est un peu un cri du coeur que vous lance le chef vis-à-vis sa population qui est jeune.
Le Président (M. Jutras): M. le ministre.
M. Corbeil: M. le Président, M. Chevrette, je souscris entièrement à la dynamique que vous soulevez, parce que je suis député d'Abitibi-Est et, dans une vie antérieure, j'étais dans le domaine de la santé à intervenir auprès des Algonquins, les Algonquins qui sont très présents sur le territoire de l'Abitibi. Et, depuis mes nouvelles fonctions, j'ai aussi à intervenir au niveau du développement, une démarche d'association au développement des communautés des premières nations.
Est-ce que je dois comprendre de l'intervention du chef tantôt qu'avec le fonds de développement ou avec l'entente qui a été signée avec Hydro-Québec pour le développement du complexe Chute-Allard et Rapide-des-Coeurs vous allez non seulement ? j'espère ? participer à la réalisation de ces projets-là comme peut-être travailleurs ou membres de votre communauté qui vont pouvoir être recrutés pour faire la réalisation de ce projet-là, mais aussi vous allez amorcer la démarche de réalisation des autres projets?
Et ce que j'ai cru entendre, c'est que vous ne vouliez pas le faire d'un seul coup, les trois projets en même temps puis ne plus avoir d'ouvrage après quatre ans, les faire de façon concurrente, les uns après les autres, pour justement faire perdurer l'activité économique, l'activité auprès des travailleurs de votre communauté. Est-ce que je dois comprendre que c'est à peu près vos prévisions de réalisation de ces projets-là?
M. Neashit (François): Pour la partie, là, Chute-Allard et Rapide-des-Coeurs, dont l'entente a été signée en juillet 2002, je vais laisser à M. Guy Laloche le soin de répondre à la première partie de vos commentaires.
Le Président (M. Jutras): M. Laloche.
M. Laloche (Guy): Bonjour. C'est qu'actuellement, bon, l'entente, comme vous le savez, les travaux vont débuter bientôt. C'est à peu près, quoi?, ils l'estiment à 138 MW. Et puis, nous, ce qu'on souhaite, c'est qu'on va avoir des emplois qui vont se créer pendant la durée du chantier, mais après, quand on parle de copropriétaire pour les infrastructures à venir, c'est qu'actuellement l'entente qu'on a, sur 50 ans, on a des fonds qui nous sont octroyés, des fonds de développement communautaire; maintenant, après 50 ans, nous, on n'a plus rien de ça. Qu'est-ce que ça peut amener comme effet d'entraînement entrepreneurial, là, c'est ça qu'on souhaite. Mais, pour l'avenir, on voudrait participer, un partenaire financier, avec soit Hydro-Québec ou, dans le cadre des projets d'en deçà de 50 MW... ça, on veut être propriétaires aussi de ces projets-là à venir. Je ne sais pas si ça répond à la question, là?
M. Corbeil: Non, je comprends la dynamique. Je pense qu'ici la lecture, là, du rapport du BAPE, on parle d'objectifs de contrats et d'emploi pour les Attikameks de Wemotaci, qui sont prévus dans l'entente, pour faire participer directement les membres de la communauté dans le projet. L'entente prévoit aussi le raccordement de la communauté au réseau d'Hydro-Québec pour fermer la centrale au diesel alimentant actuellement la réserve en électricité ? je pense que là il y a un gain environnemental significatif. Et la mise en oeuvre et le suivi de l'entente seraient confiés à un comité composé des représentants des deux parties. Alors, je pense que c'est porteur, c'est vraiment quelque chose qui va initier une démarche pour vous appuyer dans le développement d'entrepreneurship local, si on veut. Et je pense que cette initiative-là va justement peut-être, dans un délai passablement, peut-être court aussi, donner, entamer le processus de réalisation des projets que vous caressez, notamment celui de la petite centrale sur la rivière Manawan, qui est en deçà de 50 MW, avec un partenaire qui reste à être identifié par vous.
Moi, je pense que c'est une belle voie, une belle piste, belle piste à suivre et qui est pleine d'opportunités en termes d'occupation de cette jeunesse qui ne demande qu'à participer au développement de son territoire.
Juste une dernière question. En ce qui concerne l'éolien, est-ce que... on parle d'hydroélectricité, on n'a pas nécessairement parlé de l'autre forme d'énergie qui y est souvent associée, est-ce que vous pensez que ce serait intéressant pour votre communauté d'envisager cette filière-là ou si, au moment où on se parle aujourd'hui, vous n'avez pas développé plus qu'il faut dans cette avenue?
n(11 h 10)nM. Neashit (François): On a déjà par le passé discuté comment est-ce qu'on pourrait calculer la fréquence puis la vitesse des vents qui circulent sur la vallée de la rivière Saint-Maurice. Je sais qu'il y a une dizaine d'années, je crois, Hydro-Québec avait installé ses appareils de détection au haut d'une montagne, là, près de... bien sur la réserve de Wemotaci. Puis, je ne sais pas si les équipements sont encore là. On nous disait à l'époque là que c'était pour justement mesurer la fréquence et la vitesse des vents qui circulent dans la vallée de la rivière Saint-Maurice. Parce que quand on regarde comment... où est-ce qu'on est situés, où est situé le village de Wemotaci, il est au confluent de trois rivières: la rivière Saint-Maurice, qui arrive directement du réservoir Gouin, et la rivière Manawan, qui est vers l'ouest, où est-ce qu'il y a déjà trois retenues d'eau, trois réservoirs, ce qu'on appelle, ce qu'Hydro-Québec appelle dam C, dam B et dam A. Il y a une autre rivière là qui est entre les deux, qui se jette sur la rivière Manawan. Sauf que, ce coup-ci, c'est un couloir, là, où est-ce que les vents peuvent passer. Maintenant, je n'ai pas le résultat, tu sais, je n'ai pas... Probablement que les gens d'Hydro-Québec pourraient nous informer davantage là-dessus: quelles sont la fréquence des vents puis la vitesse que les vents circulent, là, dans la vallée, là, près du village de Wemotaci.
Pour répondre à l'autre partie de la question que vous posiez tout à l'heure, concernant les trois sites qui nous intéressent, là, les trois projets qu'on voudrait entreprendre. Évidemment, on n'a pas les capacités, on n'a pas les équipements puis on n'a pas l'expertise pour tout faire ça en même temps. Je crois qu'il faut partir, là, d'un projet plus modeste comme celui de la rivière Manawan pour acquérir de l'expertise, là, pour acquérir une certaine façon de faire avec des gens, là, des entreprises qui ont des connaissances meilleures que nous autres dans ce domaine-là. Ce seraient des projets, là, qui pourraient se faire dans un horizon, là, de 15 à 20 ans.
M. Corbeil: Moi, je n'aurai pas d'autre question, M. le Président, si ce n'est un commentaire peut-être d'être agréablement, je dirais, impressionné par votre pragmatisme, votre détermination et aussi votre souci de mettre en valeur des rivières qui sont déjà harnachées. Je pense que c'est une préoccupation environnementale qui vous honore, et aussi de réaliser des projets qui, tout en étant à dimensions un peu plus humaines, provoquent moins d'impact sur l'environnement. Félicitations.
Le Président (M. Jutras): M. le député de Roberval.
M. Blackburn: M. le Président, chef, MM. les conseillers, M. Chevrette, bonjour. Je vous avouerai que j'ai entendu avec grand intérêt votre présentation de mémoire, et il y a beaucoup d'éléments à l'intérieur de votre mémoire que je partage tout à fait. Juste pour bien vous situer, moi, je viens de Roberval, donc je suis voisin de la communauté montagnaise de Mashteuiatsh. J'ai grandi avec eux. J'ai beaucoup d'amis sur la réserve voisine, et je vous dirais qu'il n'y a pas une semaine où on n'a pas l'occasion d'intervenir, entre autres avec chef Dominique. On est... Je dirais, on est partenaires d'aréna, parce qu'on partage un peu la même passion: il est entraîneur et je suis entraîneur, alors on a l'occasion de se côtoyer presque à chaque fin de semaine.
Et un des éléments que je remarque par rapport à ce qui se produit actuellement, entre autres sur le chantier de la Péribonka... Parce que vous mentionniez tout à l'heure que la construction d'ouvrages via des ententes de négociation ou de compensation permettait aux communautés touchées de recevoir des montants d'argent sur une période donnée pour compenser justement ou contribuer à l'essor économique de ces milieux-là.
Mais ce que je constate sur la communauté montagnaise de Mashteuiatsh, c'est qu'actuellement il y a des compagnies qui se sont formées, qui bien sûr profitent des contrats qui sont en lieu, qui sont en train de se réaliser pour développer une expertise. Mais ce que ces compagnies-là sont en train de faire aussi, c'est de prendre ce genre d'expériences là pour pouvoir exporter leurs connaissances dans d'autres secteurs d'activité, ce qui va permettre, je pense, de bien structurer ces entreprises via les retombées que la construction des barrages pourrait permettre.
Alors, je ne le sais pas si c'est ce genre d'interaction là ou c'est ce genre d'attentes que vous avez, par rapport à des compensations financières, par rapport à des engagements qui seraient laissés dans le milieu pour l'utilisation des ressources, la création de richesse par l'utilisation des ressources. Est-ce que c'est un peu comme ça que vous percevez l'utilisation des sommes d'argent qui doivent être faites pour développer nos milieux?
M. Neashit (François): Nous sommes aussi en bon voisinage avec les gens de Pointe-Bleue. On les fréquente régulièrement. D'ailleurs, en fin de semaine dernière, là, il y avait une grande manifestation sportive, là, des jeunes qui se déroulait justement à Pointe-Bleue. Évidemment, quand on a commencé à parler des projets d'Hydro-Québec sur la rivière Saint-Maurice, celui de la Chute-Allard et Rapide-des-Coeurs, quand l'entente a été signée avec Hydro-Québec, nous, on avait des avantages, on avait des choses, là, qu'on pouvait retirer de cette entente-là, et c'est justement ce que vous mentionnez, là. On pourrait avoir des contrats. Et, à partir de là, on s'est tournés vers les gens de Pointe-Bleue. On est allés les voir, on est allés voir comment ils avaient fonctionné. Puis je vais laisser M. Guy Laloche, c'est son dossier, vous parler plus de ce qu'on a fait avec les gens de Mashteuiatsh.
Le Président (M. Jutras): Alors, M. Laloche et, après, M. Chevrette.
M. Laloche (Guy): Ça fait que, comme première expérience, là... parce que, dans le passé, bon, on n'était pas trop impliqués quand il y avait du développement, là. Là, ils nous consultent, on a une entente de signée avec eux autres, comme ça a été mentionné, là, en 2002. Et puis, les conditions préalables sont assez difficiles pour une première fois, là, tu sais, parce qu'il faut travailler avec la Loi de la CCQ, là, la loi de la construction du Québec, et puis, tout ça mis ensemble, là, dans les conditions préalables, c'est là qu'on a senti le besoin d'aller consulter nos cousins, si je peux m'exprimer ainsi, qui sont à côté, étant donné qu'ils avaient déjà l'expérience avec Hydro-Québec. Ça fait qu'on a abordé ça assez large, là, pour d'éventuels partenariats. On a aussi eu une entente dans le sens qu'ils vont engager des gens de Wemotaci pour le projet de Péribonka, concernant le lot... ça, c'est l'alimentation et l'entretien des camps, là. Ils vont prendre jusqu'à 15 personnes de Wemotaci. Nous, on est satisfaits de ça parce que ça amène aussi les gens à aller chercher de l'expérience. Aller chercher de l'expérience. Et puis, on a aussi discuté de d'autres développements, tu sais, mais beaucoup en lien avec les projets hydroélectriques, là.
Et puis c'est sûr que, comme je mentionnais dans mon introduction de tantôt, là, c'est que les conditions préalables, il y a une certaine souplesse pour les autochtones par rapport à l'emploi, par rapport aux cartes de compétence, là, aux cartes d'exemption, c'est ce qui se fait, là. Puis on va avoir des gens qui vont être sur le chantier, et puis on travaille aussi pour, par exemple, les différents corps de métier qui vont être interpellés dans le projet. Si je prends le côté menuiserie, là, on est en train de faire en sorte que nos menuisiers puissent avoir une formation pour éventuellement aller passer le test requis pour avoir les cartes de... compagnon, je pense, que c'est appelé, là.
Ça fait que c'est tout ça, là, on travaille beaucoup là-dessus. Ce n'est pas toujours facile, mais on va passer à travers et puis on espère maximiser les retombées économiques des deux centrales qui vont être construites bientôt, là. Et puis ça nous amène aussi le fait qu'on va être reliés au réseau provincial, ça, c'est déjà... c'est quelque chose pour nous. Parce que, dans le passé, on avait un projet de scierie, et puis le projet de scierie et la communauté, les génératrices qu'on avait ne suffisaient pas à fournir de l'énergie en même temps. Ça fait que, pour le futur, là, c'est déjà... c'est bien, tu sais, c'est bon.
Le Président (M. Jutras): M. Chevrette, rapidement, parce qu'il faudrait passer à l'autre bloc d'échange.
M. Chevrette (Guy): 30 secondes. Je veux tout simplement dire qu'il y a un début à tout, mais, un début sans argent, il ne peut pas y avoir de début. Quand la communauté signe des ententes avec Hydro-Québec ou avec des sociétés privées pour faire du développement, c'est précisément pour aller chercher des fonds pour soutenir quelqu'un de chez eux. Que voulez-vous? Comment un autochtone de Wemotaci peut partir une petite compagnie sans le soutien ou de la communauté ou d'un fonds externe? La mise de fonds initiale n'y est pas. On a travaillé ça combien de fois ensemble pour se rendre compte que la seule façon d'arriver à certaines fins, c'est d'avoir un fonds de développement économique qui est le résultat d'ententes avec Hydro-Québec, ça pourrait être avec une société en commandite privée qui développe en copartenariat un minibarrage, ou encore la transformation, de la seconde transformation dans le bois. C'est tout ça.
Et je dois vous avouer qu'ils ont beaucoup de mérite à travailler... en tout cas, pour m'en être rendu compte, là, depuis plusieurs mois en particulier, même après mon retrait de la politique, je peux-tu vous dire qu'il faut travailler très fort dans une communauté, parce qu'on ne peut pas d'abord donner un projet sans formation. Ils ont la responsabilité même de... la communauté doit faire même des démarches pour obtenir de la formation dans tous les secteurs qu'elle aborde dans son développement. C'est beaucoup d'ouvrage, mais c'est une perspective encourageante pour un chef qui s'engage. Et puis, chapeau!, moi, en ce qui me concerne, de voir aller cela.
Le Président (M. Jutras): Mme la députée de Rosemont.
n(11 h 20)nMme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour et bienvenue. C'est vrai qu'une communauté qui double sa population à tous les 10 ans, là, il y a un énorme défi là. Et je pense qu'on a en commun avec vous l'intérêt d'occuper le territoire du Québec, et je pense que c'est ça qui doit nous guider dans la recherche de solutions pour le progrès et le développement à tous égards de vos communautés.
Et, moi, j'ai des petites questions puis j'aimerais prendre certaines de vos recommandations une à une. Vous avez dit tout à l'heure que ? peut-être je n'ai pas bien compris, là, mais ? avec l'aménagement de Chute-Allard et de Rapide-des-Coeurs, vous allez relier votre communauté au réseau d'Hydro-Québec. Actuellement, vous n'êtes pas reliés? Mais alors, vous obtenez votre électricité comment?
M. Chevrette (Guy): Diesel.
M. Laloche (Guy): Diesel.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, sur le plan de la recherche de l'atteinte des objectifs de Kyoto, c'est un investissement que vous faites, par rapport à la réduction des gaz à effet de serre. Parce que le fait d'être relié avec le réseau d'Hydro-Québec devrait ? c'est vrai! ? devrait... ? oui, mais je vais aller plus loin ? devrait donc contribuer à nos chances d'atteindre les objectifs de Kyoto. Cela étant dit, est-ce que, dans les échanges que vous avez actuellement... parce que, comme l'a dit M. Chevrette, il faut quand même une masse critique financière, et on sait que les autochtones ont beaucoup de contraintes au niveau du financement qu'on pourrait qualifier de privé. Et donc, actuellement, par rapport au potentiel que vous avez identifié, là, vous avez dit, vous aviez deux sites sur la Saint-Maurice, dont un entre autres... en fait, si je comprends bien, tous les deux sont d'une capacité supérieure à 50 MW. Donc, la loi actuelle ne vous permettrait pas de faire ça.
Avez-vous commencé à discuter avec le ministère ou avec le gouvernement, disons, du Québec pour trouver une approche d'intérêt commun pour ces développements-là? Est-ce que des échanges ont eu lieu, des demandes ont été faites? Est-ce que ça va bien?
M. Neashit (François): Juste avant la période des fêtes, nous avions rencontré le prédécesseur de M. Corbeil, là, M. Hamad, pour échanger avec lui des possibilités, là, que pouvait nous offrir le gouvernement du Québec quant à un projet, là, de 50 MW et plus. Puis évidemment il a été très prudent dans ses commentaires, là, dans sa réponse. Il nous a informés qu'il attendait la fin de la présente commission, là, pour donner des orientations à ce sujet-là de son gouvernement.
Quand vous nous dites que... je pense, moi... je ne connais pas tellement Kyoto, je ne suis allé. Tout ce que j'en sais, là, c'est que c'est un sujet qui est à la mode, on en parle beaucoup de ce temps-ci. C'est sûr que, nous, on n'avait pas tellement le choix. Si on voulait avoir un courant électrique, on est en territoire complètement isolé, la ville la plus proche, je disais tout à l'heure qu'elle était à 115 kilomètres. On a déjà fait dans le passé des représentations auprès des personnes concernées pour qu'on soit reliés au réseau provincial, mais on nous a dit à l'époque que les coûts étaient trop grands, ça coûtait trop cher. À partir de là... Ça ne fait pas tellement longtemps de ça, c'est en 1970, là, où est-ce qu'on n'avait même pas encore d'électricité dans les maisons qu'on habitait. C'est juste par la suite, suite à des pressions, que le gouvernement fédéral, dans sa grande générosité, a installé des groupes électrogènes, là, dans les communautés. À partir de là, l'histoire, ça a commencé là, l'électricité dans la communauté de Wemotaci.
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que vous avez... je ne sais pas si vous avez pris connaissance du dernier budget du gouvernement fédéral, qui a été approuvé hier. Dans ce budget-là, il y a plusieurs millions ? je n'ai pas le chiffre en mémoire, mais c'est au moins 50 millions par année ? pour la construction de lignes de transport d'électricité. Je vous le souligne, parce que les conditions de ces lignes-là sont essentiellement dans le but d'aider le Canada à rencontrer ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre. Alors, moi, je pense que... Vous connaissez les difficultés qu'il y a entre obtenir du financement de Québec, Ottawa. Mais, déjà, par rapport aux travaux qui sont en cours chez vous, il serait peut-être intéressant d'explorer cette avenue-là, parce que, dans une première lecture, il me semble que vos projets... en tout cas, tout ce qui s'appelle lignes de distribution ou de transport pour vos projets serait susceptible d'être reconnu par ce fonds-là. C'est les fameux fonds verts, là, que le ministre Goodale a annoncés dans son budget.
L'autre question, toujours sur la capacité de développer des centrales chez vous... Parce que c'est important de trouver ? et vous l'avez très bien dit ? le moyen à long terme de soutenir votre développement. Évidemment, ça fait appel aux ressources humaines, matérielles et financières puis ça fait aussi appel à ces choix, là, dont vous avez parlé dans votre texte, à ces seuils d'acceptabilité écologique, environnementale, sociale et culturelle. Moi, ça m'intéresse, parce que c'est toujours un équilibre, hein, entre le développement économique et puis la capacité d'absorption d'un milieu, surtout des milieux qui sont, je dirais, de grande qualité naturelle que ceux que vous habitez.
Et donc, vous dites dans vos recommandations que c'est un effort que vous voulez faire et vous dites aussi que vous devez développer des outils pour arriver à établir ces seuils-là. Est-ce que vous avez commencé, au sein de vos communautés, à travailler là-dessus? Est-ce que vous avez le financement pour le faire? Et, encore là, je pense, je reviens avec le fonds vert fédéral, mais est-ce que ce ne serait pas intéressant d'aller chercher une partie de ces fonds-là? Parce que ça rencontre les objectifs d'un développement durable et équilibré, ça.
M. Neashit (François): Je vous remercie des informations que vous me transmettez aujourd'hui.
Mme Dionne-Marsolais: Du tuyau?
M. Chevrette (Guy): La ligne.
M. Neashit (François): On ne connaît pas tellement le... Bien, on ne connaît pas le fonds vert, là, comme vous dites, là. Étant donné que ça doit être assez récent, là, je n'ai pas connaissance de tout ça.
M. Chevrette (Guy): 50 millions par année pour des lignes de transport en hydroélectricité, là, tu ne fais pas grand millage, tu ne plantes pas gros de poteaux, dans certaines régions, là. Si on met en plus la dimension recherche de tous les impacts, je dois vous avouer qu'à la... Puis c'est à la grandeur du Canada, le 50 millions, vous me dites?
Mme Dionne-Marsolais: Bien, je vous dis ça de mémoire. Je sais qu'au total ça monte à... Enfin, c'était de l'ordre de 250 millions. Mais il y a un certain nombre de... Le fonds total, c'est 1 milliard, 1,5 milliard, là, c'est beaucoup d'argent. Donc, il y a une partie pour les lignes qui est autour de ça, 250 millions. Mais, cela dit, il y a une marge de manoeuvre aussi, là, pour sans doute aller chercher d'autres capitaux avec cette mise de fonds là. C'est un peu le sens de ma démarche, là. Enfin, c'est le sens de mon commentaire. Il y a au moins de l'argent là.
Le Président (M. Jutras): Il y a M. Laloche qui veut intervenir puis il y a M. Mongeon également.
n(11 h 30)nM. Laloche (Guy): Oui, O.K. C'est que, dans une des recommandations, des nombreuses recommandations, la 19, là ? mais, pour préciser, ce n'est pas nécessairement en ordre de priorité, là ? c'est qu'on veut aussi participer au développement sur le territoire, là, en amont des décisions, là, dans la planification, tout ça, et puis actuellement, à Wemotaci, on a un organisme, une organisation qui s'appelle Les mesures d'harmonisation. Lui, il sert un peu de... Bien, il sert de... Comment on dit? Entre l'industrie, mettons, forestière et la communauté, il est situé au milieu, c'est lui qui sert de lien pour la consultation justement avec les gens concernés, les gens de Wemotaci, et puis ça, c'est financé avec le volet 1, je crois, le volet 1, et puis on est toujours à se demander si on est encore admissibles au financement pour les prochaines années. Et puis c'est difficile d'être dans un cas d'incertitude pour le financement, alors que, pour l'avenir, la consultation va être encore plus importante, avec ce qu'on a vécu cet automne, des jugements par rapport aux autochtones, tu sais. Et puis on aimerait avoir un financement... trouver un moyen pour avoir un financement, de mettre un fonds, un budget plus permanent, qui va être récurrent, pour pouvoir se concentrer sur la mission de l'organisation qui est en place actuellement. Je vais laisser Michel compléter.
M. Mongeon (Michel): Bien, c'est justement...
Le Président (M. Jutras): Oui, M. Mongeon.
M. Mongeon (Michel): ...pour apporter plus d'information. Actuellement, la responsabilité relativement à la planification du développement sur le territoire et des ressources est une responsabilité de la province. Maintenant, les budgets disponibles au niveau du fédéral, lorsqu'on doit essayer d'aller chercher des sous pour nous aider ou aider la communauté à gérer avec la province, ça pose des problèmes, parce que, déjà là, on met devant nous le problème de conflit fédéral-provincial. Lorsque les communautés autochtones sont financées par le fédéral pour être capables de s'associer avec le provincial, pour voir s'il y a des problèmes qui vont être réglés ou gérés, ça pose certaines difficultés.
Cependant, il y a des fonds disponibles, qui sont largement insuffisants, pour permettre à la communauté d'être partie prenante de la planification du développement, et c'est là où il n'y a absolument rien pour faire en sorte que la communauté soit cogestionnaire, mais aussi coplanificatrice de son territoire. Pourtant, quand on regarde les récents jugements, il y a ou il doit y avoir consultation. Ça prend du financement pour être capable d'aller chercher l'information, d'aller structurer les projets pour que la communauté participe. Et ça, c'est ça, en fin de compte, un des problèmes principaux que fait face la communauté actuellement relativement à la planification de son territoire, la planification de son développement et des options, par exemple, si on parle d'énergie.
Mme Dionne-Marsolais: Je suis contente que vous abordiez cette question-là, parce que c'est effectivement très important d'être là au bon moment, c'est-à-dire de s'asseoir à la table au moment de la planification et d'envisager, avec notamment Hydro-Québec et le gouvernement, les voies possibles de développement puis où est-ce qu'il faut aller documenter davantage.
Est-ce que vous avez établi des relations avec Hydro-Québec maintenant que ses projets sont connus, maintenant que vous avez déjà une entente concernant les retombées de Rapide-des-Coeurs et Chute-Allard? Est-ce que vous avez abordé avec Hydro-Québec Production ? j'imagine? ? des échanges pour continuer à participer à la planification sur ces rivières qui vous intéressent?
M. Chevrette (Guy): Il y a un consultant qui fonctionnait avec Hydro dans le projet de 27 MW, dont on a parlé avec le ministre tantôt, mais eux aussi sont sur le frein présentement. J'ai appelé, hier, les consultants... les ingénieurs consultants qui avaient un dialogue régulier avec Hydro-Québec, mais ils attendent également le fruit de la commission parlementaire présentement. On sent très bien qu'il y a eu un arrêt dans les échanges, là.
Le Président (M. Jutras): M. Neashit, vous vouliez intervenir?
M. Neashit (François): Pour compléter M. Chevrette, c'est qu'à l'intérieur de l'entente qu'on a signée en 2002 il est prévu qu'il y ait un comité de mise en oeuvre des deux projets, celui de des-Coeurs et de Chute-Allard. Mais, à l'intérieur de ce comité-là, il n'y a rien qui nous empêche de discuter... de déborder le cadre de l'entente, de parler d'autres projets qui nous intéressent sur la rivière Saint-Maurice et sur la rivière Manawan.
M. Chevrette (Guy): À supposer que le ministre, par exemple, recommande au gouvernement que les projets de 50 MW et plus peuvent aussi faire l'objet d'un partenariat, par exemple dans le milieu, puis qu'il y ait amendement législatif, ça change la nature du débat et ça change la nature des positions d'Hydro-Québec, parce que là Hydro-Québec se verrait placée dans un autre cadre qui permettrait au Conseil de Wemotaci d'aspirer à un partenariat sur des projets supérieurs à 50 MW. Et ça change toute la dynamique de discussion. Sinon, actuellement, ils sont assis sur la loi, qui dit: C'est ça, c'est les projets de 50 MW et moins. Vous comprendrez que la dynamique changerait complètement, et ce serait drôlement intéressant, surtout sur une rivière déjà harnachée en l'occurrence et qui passe dans les territoires revendiqués par les communautés autochtones. Ça change toute la dynamique, toute l'approche, et probablement un avenir économique très différent pour tout ce secteur-là. Je suis convaincu de cela.
Le Président (M. Jutras): Monsieur... Oui, avez-vous une autre question?
Mme Dionne-Marsolais: Oui.
Le Président (M. Jutras): Puis après ce sera le député de Vanier.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Alors, deux petites questions. Pour que cela se réalise, vous allez devoir travailler avec Hydro-Québec Production. Est-ce que je peux vous demander si vous souhaitez qu'il y ait plus de transparence au niveau des coûts d'Hydro-Québec Production et donc ? et je sais, M. Chevrette, que vous avez été un des partenaires au moment de la définition de la loi... de la mise au point de la loi n° 116 ? est-ce que vous croyez aujourd'hui que nous devrions la revoir?
M. Chevrette (Guy): J'étais convaincu, madame, qu'il fallait la revoir en partant, tout comme vous, et je me souviens.
Mme Dionne-Marsolais: Merci.
M. Chevrette (Guy): Et ma devise, ce n'est pas Je me souviens, mais je me souviens très bien de ça.
Mme Dionne-Marsolais: J'ai une autre petite question, sur la sécurité des barrages. Est-ce que, messieurs, le reportage que vous avez vu à Radio-Canada sur la sécurité des barrages vous a inquiétés?
M. Chevrette (Guy): Moi, je peux répondre d'une partie. Ma perception, c'est qu'on s'est fait à l'idée que c'était... Les trois quarts des barrages sont tellement loin des populations qu'on ne s'inquiétait pas. C'est plutôt cette impression. C'est l'impression que ça m'a laissée.
D'autre part, je vous dirai que j'avais... j'ai toujours une tendance à être au départ contre toute dramatisation face à la population. Ça, au départ, moi personnellement, pour avoir été responsable tout comme vous, je n'aime pas les dramatisations face aux populations. Mais je dois vous dire sincèrement qu'Hydro-Québec doit avaler de travers, parce que ce n'est pas normal que, deux soirées consécutives... Le lendemain, moi, je ne suis pas sûr que TVA serait entré, si j'avais été ministre de l'énergie, en tout cas. Il a rentré la veille... Radio-Canada rentrait la veille, je ne suis pas sûr que, le lendemain, TVA aurait eu la vie facile.
Mais ça prouve une chose: c'est qu'à un moment donné des contrôles, ça s'impose pour la sécurité des gens, c'est évident, et on doit assumer nos responsabilités. Même si ce n'est pas la faute des ministres, même si ce n'est pas la faute du président, même si ce n'est pas la faute du vice-président, il reste qu'il y a une responsabilité à assumer, puis, quand tu as accepté la charge, tu dois l'assumer, même si ça fait mal de l'assumer quand tu penses...
Bien souvent, on a reçu... on a reçu, la veille ou l'avant-veille, toute la sécurité qui s'imposait, on nous a dit que tout était parfait; le lendemain, tu t'aperçois que ce n'est pas parfait. C'est ça, là, qui est le lot, le résultat de la responsabilité que tu dois assumer, même si ce n'est pas de ta faute.
Mme Dionne-Marsolais: À qui le dites-vous!
Le Président (M. Jutras): M. le député de Vanier.
M. Légaré: Merci, M. le Président. Bonjour. Merci d'être là. Évidemment, lorsqu'on parle de minicentrales, on parle de retombées économiques qui sont souvent extrêmement importantes pour les régions ou les communautés, peu importe. Hier, on a eu un groupe qui sont venus chiffrer un peu les retombées économiques et ils ont même donné un pourcentage disant que c'est... tu sais, pour nous montrer que le projet était extrêmement important pour l'endroit.
Moi, je veux savoir, de votre côté, est-ce que vous avez chiffré les retombées économiques, pour un peu nous montrer l'importance du projet? Est-ce que vous avez des montants à nous donner, un peu comme le groupe a fait hier, et même un pourcentage sur le budget total ou... pour effectivement nous montrer l'importance du projet face à la communauté qui... Vous avez prouvé qu'il y avait des... qui doublait en 10 ans. Alors, ce n'est pas négligeable, je trouve, hein?
M. Neashit (François): Actuellement, les seuls chiffres qu'on connaît, c'est ce qu'on a vécu avec les projets Chute-Allard et Rapide-des-Coeurs. Concernant les trois autres projets, là, qu'on discute, là, on est encore à l'étape embryonnaire du projet. On n'a pas encore de pro forma, on n'a pas encore de chiffres, là. On n'est même pas sûrs encore du nombre de mégawatts qu'on va produire sur la rivière Manawan. On parle de 27 MW un jour, le lendemain, on parle de 20, tu sais. C'est encore des études, là, qui se font par une firme, là, avec laquelle on travaille.
M. Légaré: J'imagine que, si on peut faire la comparaison avec les deux projets, j'imagine que c'est des retombées économiques qui vont être... des retombées régionales qui devraient être extrêmement importantes pour la région, pour la communauté, là.
M. Neashit (François): Si on est propriétaires, oui.
n(11 h 40)nM. Chevrette (Guy): Mais il y a plusieurs approches. Ils peuvent négocier un système comme Hydro-Québec a fait avec Rapide-des-Coeurs; ils peuvent être copropriétaires, comme ils le disent dans le mémoire; ils peuvent être actionnaires majoritaires. Il y a une foule de possibilités, mais chaque projet avec ses spécificités est différent au niveau de la rentabilité. Si tu n'as pas... si tu es dans le roc solide, si tu es dans le roc friable, ça change toute la donne de la préparation ou de la construction. Il y en a que c'est une chute naturelle d'où l'eau tombe suffisamment de haut que les turbines peuvent facilement fonctionner sans que ce soit compliqué à construire.
Mais je pense qu'au Québec, il reste quand même, selon le ministère ? et je remercie le ministère et ses fonctionnaires de m'avoir fourni des données ? il demeure un fort pourcentage de mégawatts exploitables d'une façon rentable, par rapport au potentiel global. Donc, si on vise à court terme le potentiel exploitable et rentable, profitable, eh bien, on peut s'attendre à ce que l'ensemble des communautés autochtones sur le territoire québécois, même de façon plus spécifique bien sûr Wemotaci, qui est placé en position naturelle de force parce qu'il y a encore des possibilités passablement intéressantes sur Wemotaci, à Wemotaci, pour participer au développement énergétique du Québec... Et c'est un peu le message que le chef vous passe ce matin.
Le Président (M. Jutras): M. Mongeon, 30 secondes. 30 secondes.
M. Mongeon (Michel): Qu'est-ce qui est mentionné, c'est justement le besoin de planification et d'être inséré dans le processus de planification. Ce qui est important, c'est de connaître l'ensemble de besoins pour rendre la communauté autonome financièrement. Un projet peut être à 100 % au bénéfice de la communauté, mais, si ça remplit rien que 5 % des besoins, il y a un déficit à combler. Et là, il y a un besoin d'insertion de la communauté dans la planification au niveau de l'ensemble du développement, et aussi combler le déficit qu'il importe à combler pour donner un avenir à la communauté.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs, pour votre... Oui, en deux mots, parce que... Oui.
M. Neashit (François): Juste pour vous dire que, nous, chez nous, en attikamek, quand on a fini de parler à un groupe, on dit: (S'exprime dans sa langue), ce qui veut dire: Merci de nous avoir écoutés. Puis, merci de nous avoir écoutés, ce n'est pas seulement d'avoir écouté, il y a toujours quelque chose qui suit, des actions qui doivent être prises après qu'on ait discuté avec quelqu'un. C'est le sens de la phrase que je viens de dire. Merci beaucoup.
Le Président (M. Jutras): Le message est entendu. Merci.
M. Chevrette (Guy): Vous avez écouté, avisez.
Le Président (M. Jutras): Alors, le Regroupement pour la surveillance du nucléaire, si vous voulez vous approcher, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Jutras): Le Regroupement pour la surveillance du nucléaire. Si vous voulez, messieurs, prendre place, nous allons recommencer nos travaux avec vous.
Une voix: ...
Le Président (M. Jutras): Oui, alors, il y a des documents à distribuer. Alors, messieurs, bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Vous connaissez les règles: 20 minutes pour votre présentation, 20 minutes d'échange par la suite avec le ministre et les députés ministériels, 20 minutes d'échange par après avec les députés de l'opposition. Je vous demanderais, dans un premier temps, de vous identifier, là, de demander au porte-parole de s'identifier, présenter les personnes qui sont avec vous et procéder sans plus tarder à la présentation de votre mémoire.
Regroupement pour
la surveillance du nucléaire
M. Fugère (Michel): Alors, merci de votre accueil. Mon nom est Michel Fugère, je suis président d'une organisation qui s'appelle le Mouvement Vert Mauricie, qui existe maintenant depuis plus de 20 ans. Le Mouvement Vert Mauricie est depuis 17 ans particulièrement impliqué dans tous les sujets qui concernent l'énergie, mais plus particulièrement les dossiers qui concernent notre unique centrale, Gentilly-2, centrale électronucléaire.
Alors, je vous présente M. Gordon Edwards, qui est le président du Regroupement pour la surveillance du nucléaire, ainsi que M. Marcel Jetté, qui est pour le Regroupement des travailleurs accidentés victimes du nucléaire.
Alors, juste pour mettre la table, je pense que la question qu'on a adressée à la commission à travers le mémoire qu'on vous a remis, grosso modo, pourrait se résumer ainsi: Le Québec doit-il continuer de produire des déchets radioactifs ou bien le Québec doit-il éliminer entièrement ces déchets de son territoire?
Actuellement, il y a au Québec un contexte historique qui nous permet d'agir, qui permet à l'Assemblée nationale de prendre les décisions appropriées pour assurer que le Québec va se positionner dans un contexte traditionnel. Parce que, depuis toujours au Québec, depuis le gouvernement Lévesque, depuis le gouvernement de M. Bourassa, les engagements de M. Charest en témoignent aussi, nous avons toujours manifesté une très grande réticence par rapport à l'énergie nucléaire. Nous avons toujours maintenu le cap qui dit que le Québec va sortir du nucléaire à la fin de la vie utile de sa centrale Gentilly-2, soit en 2013.
L'échéance arrive. Cependant, un contexte particulier risque de court-circuiter cette entente sociale et politique au Québec par rapport au nucléaire, et ce contexte-là est lié au fait qu'Hydro-Québec actuellement souhaite agrandir les aires d'entreposage de ses déchets de combustible irradié, entre autres, et procéder soi-disant à une réfection de sa centrale nucléaire, alors qu'on sait très bien qu'il s'agit de reconstruire un nouveau réacteur dans l'enceinte du vieux réacteur.
Alors, c'est le contexte général dans lequel nous désirons échanger avec vous, nous voulons avec vous préciser les opportunités qui s'offrent à nous. Nous avons pris la peine de vous témoigner des pistes que le gouvernement devrait suivre pour s'assurer que nous arriverons à bonne fin et que nous pourrons tous joyeusement fêter la fin de la production de déchets radioactifs au Québec. Alors, je vais laisser la parole à M. Edwards, et on pourra prendre les questions après.
Le Président (M. Jutras): C'est qui en premier? M. Jetté?
M. Fugère (Michel): On va commencer par M. Gordon Edwards, s'il vous plaît.
n(11 h 50)nLe Président (M. Jutras): C'est à vous à vous entendre.
M. Edwards (Gordon): Merci. Je suis très heureux d'être ici. Je m'excuse pour mon français, ce n'est pas si bon, mais j'essaierai à communiquer avec clarté. Je pense que, comme Michel a dit, l'heure de décision est arrivée, ici, au Québec, pour une décision politique bien informée concernant le futur de cette technologie. La chose importante, la chose la plus importante concernant cette technologie, dans un contexte politique, ce n'est pas la mesure d'électricité produite par ce réacteur ? c'est environ 2,5 % du total ? mais c'est le... ? «legacy»? ? c'est la question des déchets qui restent ici, au Québec, pour combien d'années?
Le problème est que ces déchets, le combustible irradié nucléaire est si radioactif que ça reste dangereusement toxique pour des milliers, même des millions d'années. C'est difficile à comprendre pour une personne pas éduquée dans ce sujet, mais, ici, on a le problème que, dans le combustible irradié, les atomes ont été brisés et ça a créé des centaines de nouvelles substances, qui n'existent pas dans la nature mais qui restent dans le combustible irradié, qui, pour cette raison, est un million de fois plus toxique et plus radioactif que le combustible avant utilisation.
Ce combustible reste un problème pour des générations et des générations. Maintenant, c'est stocké dans les paquets temporaires près du fleuve Saint-Laurent, au site de Gentilly-2, mais il n'y a aucune décision quoi faire avec ces déchets.
Si on donne la permission à Hydro-Québec d'élargir des sites extérieurs et créer un nouveau site aussi pour le stockage des autres substances radioactives que sont des milliers de tubes «removed» du réacteur pendant la réfection du réacteur... ces déchets constituent une nouvelle catégorie de déchets radioactifs ici, au Québec, et pour cette raison Hydro-Québec veut créer un nouveau site de stockage pour ces déchets qui restent radioactifs pour des dizaines de milliers d'années.
La question est pourquoi, pourquoi le Québec veut produire et continuer à produire ces déchets qui constitueront un problème, un «hazard» pour l'environnement, pour les personnes et une cible pour les terroristes, pour des générations à venir? Même si le réacteur est fermé, le stockage de ces déchets près du fleuve Saint-Laurent, c'est une danger, parce que ces sites sont temporaires: quoi faire avec les déchets plus tard?
On a à ce moment une opportunité unique. Parce qu'Hydro-Québec doit chercher la permission du gouvernement de Québec de continuer ou non avec l'expérience nucléaire. Si le gouvernement dit non au projet d'élargir ces déchets, des sites de déchets, ça marque la fin de l'expérience électronucléaire ici, au Québec. Je pense que c'est un bon scénario à considérer, parce qu'on a une opportunité pas simplement d'arrêter la production de ces déchets, mais peut-être d'avoir ces déchets... de débarrasser le Québec de ces déchets.
Pourquoi? Maintenant, il y a une partie du combustible irradié à Gentilly qui est la propriété du gouvernement fédéral. Un des réacteurs au site Gentilly, Gentilly-1, c'est la propriété d'Énergie atomique du Canada ltée, c'est une corporation de la couronne, du gouvernement fédéral. Le combustible irradié appartient au gouvernement fédéral. Si le Québec annonce qu'il ne continue pas avec l'électronucléaire, il serait vraiment possible de faire pression sur le gouvernement fédéral de «remouvoir» ces déchets du territoire du Québec et peut-être à négocier que tout le combustible irradié soit «remu» du territoire du Québec. C'est important de réaliser que c'est un moment propice maintenant, parce qu'il y a un organisme, qui se nomme la Société pour la gestion des déchets nucléaires, qui fera un rapport au gouvernement fédéral en novembre de cette année, et ce rapport fera des recommandations concernant la gestion à long terme des déchets nucléaires, et précisément ce type de combustible irradié, les plus dangereux déchets, de n'importe quelle industrie dans tout le monde. «So», il y a une opportunité pour négocier que tous les déchets soient «remus» du territoire.
C'est important de réaliser que le gouvernement fédéral, au moment où le réacteur Gentilly a été conçu ? c'est dans l'année 1973 ? jusqu'à ce moment, il n'y a aucune reconnaissance officielle de la part du gouvernement fédéral que ce problème existe et que ce problème pose... de tels problèmes. Par exemple, la Société de gestion des déchets nucléaires a estimé le coût de gestion. N'importe quelle option au choix, le coût est au moins 15 milliards de dollars pour le Canada, pour tous les réacteurs. Et le Québec doit payer sa part de ces coûts. Ces coûts montent, parce que, juste il y a 10 ans, le coût estimé pour la gestion de ces déchets a été 8 milliards de dollars, maintenant c'est presque 16 milliards de dollars, et les coûts continuent à monter, les coûts estimés. C'est vraiment probable que les coûts doublent encore, et c'est une «liability» pour le Québec d'avoir ces déchets.
Juste pour confirmer la situation, je veux dire que, dans l'année 1978, une commission... de la planification d'électricité en Ontario a publié un rapport, et voici un graphique de ce rapport qui est annexé dans votre document que nous avons soumis. Ce graphique montre... la ligne bleue montre la toxicité du combustible irradié d'un réacteur CANDU, comme Gentilly, dans une période de temps de 10 millions d'années. Et on observe que la toxicité diminue vers 5 000 ans et puis s'accroît parce qu'il y a des changements dans le combustible qui continuent pour créer des nouvelles substances radioactives qui n'existent pas originairement. «So», c'est un problème.
n(12 heures)n Un autre graphique, qui vient d'Énergie atomique du Canada ltée, concerne la possibilité de mettre ces déchets sous terre, dans les cavernes souterraines, dans la roche, et ce graphique montre... les couleurs indiquent la température. Le premier graphique indique la chaleur générée par la radioactivité des déchets eux-mêmes immédiatement après l'emplacement dans le dépotoir. Le deuxième graphique montre la chaleur dans la roche, qui est transmise dans la roche après 4 400 ans, et le deuxième graphique montre la chaleur dans la roche, la température dans la roche après 8 800 ans. Selon le rapport d'Énergie atomique du Canada, la température de la roche n'approche la température originale qu'après 50 000 ans. À ce moment, les déchets ne deviennent plus toxiques. C'est un problème très, très difficile, c'est un problème pas nécessaire pour le Québec, parce que le Québec ne dépend pas sur le nucléaire.
Et la question est, pour les membres de l'Assemblée nationale: Est-ce juste une décision technique de continuer de produire ces déchets ou est-ce une question politique très importante pour les politiciens à décider? Oui ou non, doit-on continuer ou doit-on arrêter? Et nous espérons que les membres de l'Assemblée nationale appuieront la Campagne sortir le Québec du nucléaire, parce que nous croyons que c'est dans les meilleurs intérêts des générations et générations de Québécois et Québécoises. Merci.
Le Président (M. Jutras): Mais alors, merci donc pour votre présentation. Ah! Est-ce que, M. Jetté, vous aviez quelque chose à rajouter? Oui? Allez-y, M. Jetté.
M. Jetté (Marcel): Mon nom est Marcel Jetté, je suis président du Regroupement des travailleurs accidentés par le nucléaire. J'ai un cancer incurable et je crois qu'il a été causé par le rayonnement que j'ai reçu au travail dans le domaine de l'électronucléaire. Je crois que la réfection de Gentilly-2 serait très dangereuse pour les travailleurs, pour les citoyens et pour l'environnement. Plusieurs centaines de contractuels seront exposés et possiblement contaminés par ce projet. La période recommandée pour des travaux de ce genre après l'arrêt du réacteur serait d'un minimum de 40 ans pour laisser la radioactivité diminuer d'intensité. Dire aux travailleurs que c'est absolument sécuritaire de travailler selon les normes d'exposition établies par les promoteurs du nucléaire est mensonger. Plusieurs organismes scientifiques et indépendants ont affirmé qu'il n'existe pas un niveau d'exposition sécuritaire. Les organismes de réglementation eux-mêmes admettent que les niveaux dits acceptables peuvent provoquer un cancer ou d'autres maladies.
Hydro-Québec admet que la centrale de Gentilly-2 relâche régulièrement dans l'environnement des éléments radioactifs. Ces substances radiotoxiques entrent dans la chaîne alimentaire en se déposant sur les végétaux que les animaux consomment. Aussi, ces substances se retrouvent dans l'air et dans les eaux tant de surface que souterraines. Il semble qu'il y a déjà une incidence élevée de cancers à la municipalité de Champlain, qui se situe près de Gentilly-2. Quand procéderons-nous à de vraies études sur la santé pour cette communauté afin d'avoir l'heure juste? Surtout pas des études faites par Hydro-Québec ou payées par eux, ni surtout par une personne qui gagne sa vie comme consultant avec le nucléaire, mais par des professionnels compétents et indépendants du promoteur.
La réfection de la centrale Gentilly-2 ferait qu'il y aurait encore plus de déchets hautement radioactifs pour de très longues périodes de temps, voire des centaines de milliers d'années. Pourquoi les États-Unis ont diminué leur recours à l'énergie nucléaire? Pourquoi plusieurs pays en Europe abandonnent cette source d'énergie? Le gouvernement québécois doit proscrire la réfection de Gentilly-2, il doit quitter le domaine de l'électronucléaire à la fin de vie utile de Gentilly-2, tel que préconisé dans l'actuelle politique énergétique, et mandater Hydro-Québec de s'orienter vers l'énergie propre, comme le font plusieurs pays maintenant. Les gens d'Hydro-Québec doivent s'investir dans l'efficacité énergétique et travailler à développer les alternatives de production d'énergie renouvelable et décentralisée. Je vous remercie de m'avoir écouté.
Le Président (M. Jutras): Merci, M. Jetté. Alors, merci, messieurs. Nous allons procéder maintenant à l'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci, MM. Edwards, Fugère et Jetté. Vous soulevez la question sous plusieurs angles. Maintenant, quand vous parlez qu'on devrait se retirer du nucléaire, que ça n'a pas sa place au Québec, vous interpellez le concept de la diversification des approvisionnements. Vers quelles autres sources vous suggéreriez qu'on se réoriente pour se passer des 3 % de production de la centrale en termes d'énergie électrique?
M. Fugère (Michel): Bien, M. le ministre, à ce niveau-là, permettez-moi de vous dire que, déjà, une série d'organisations à travers le Québec ont médité la question, et plus d'une trentaine d'organisations à travers le Québec ont conclu que l'alternative au nucléaire, pour nous, fondamentalement concerne l'efficacité énergétique ainsi que la conservation de l'énergie par l'approche communautaire.
Je pourrais peut-être juste vous mentionner un fait pour illustrer à quel point la conservation de l'énergie par une approche communautaire peut avoir des impacts foudroyants sur notre consommation d'énergie, beaucoup plus qu'on peut se l'imaginer. Dans la région de Shawinigan, un prix énergétique a été remis à la Commission scolaire de l'Énergie. À cette commission scolaire, il y a une polyvalente, l'école secondaire des Chutes, qui a investi la modique somme de 450 000 $ pour procéder à des travaux, à des investissements de conservation de leur énergie. Deux ans après avoir fait leurs investissements, ils avaient recouvré cet investissement. Ils avaient, à chaque année, 200 000 $ de plus dans leurs poches pour faire fonctionner l'institution; ils consommaient 68 % moins d'électricité et utilisaient 18 % moins de combustible fossile pour répondre à leurs besoins de chauffage.
Alors, nous sommes totalement conscients que la conservation d'énergie devrait toujours être prioritaire lorsqu'il est le temps de se donner une politique énergétique. Pour la bonne et simple raison également... du fait que, lorsque les investissements en conservation d'énergie auront été faits, ils permettront que les investissements de production d'énergie renouvelable et décentralisée puissent se retrouver dans un contexte économiquement viable.
n(12 h 10)nM. Edwards (Gordon): Juste pour ajouter une pensée. Je pense que c'est très important de demander une étude de combien d'énergie doit être conservée par l'investissement de 1,2 milliard de dollars directement dans les communautés du Québec. Je crois qu'on trouve que beaucoup plus d'énergie doit être récupérée par l'épargne et que beaucoup plus d'emplois soient créés par un semblable investissement que celui-ci, qu'Hydro-Québec demande pour la réfection de Gentilly-2. Aussi, je veux ajouter que le 1,2 milliard de dollars estimé aujourd'hui est déjà 50 % plus que l'estimé d'il y a deux ans, qui est environ 800 millions de dollars pour la réfection.
J'ai beaucoup de raisons pour croire que le vrai coût de la réfection doit peut-être doubler encore. En Ontario, j'ai... Dans votre dossier, si vous examinez l'annexe E, la dernière annexe, on voit un graphique de l'Ontario qui montre que le coût de redémarrage des réacteurs en Ontario a plus que trois fois... c'est magnifié par plus de trois fois, presque quatre fois le coût original. C'est maintenant entre 3 milliards et 4 milliards de dollars, juste pour redémarrer ces réacteurs fermés. Et ces réacteurs que l'on veut redémarrer, en Ontario, ont déjà été retubés. Je pense que la difficulté est que, quand on commence un projet si ambitieux et si radioactif, c'est presque impossible à prédire les coûts éventuels, parce qu'on découvre beaucoup de choses qu'on n'imagine pas quand on commence le travail.
Le point final est que ce réacteur est si radioactif que c'est dangereux et difficile à faire sa réfection. Pourquoi faire ça? Pourquoi pas investir cet argent dans les projets qui ont un bon futur pour le Québec, pas une technologie qui est un cul-de-sac?
M. Corbeil: Merci. Je dois comprendre que vous avez souscrit au concept de l'efficacité énergétique et vous avez illustré un exemple probant. Le problème de l'efficacité énergétique, c'est qu'on ne peut pas le multiplier par deux, puis par trois, puis par quatre. La même commission scolaire ne peut pas refaire deux fois, trois fois puis quatre fois l'économie. On ne peut pas amener la consommation de l'énergie à zéro. On peut ralentir la croissance, on peut peut-être la réduire, mais on ne peut pas l'amener à nulle, là. Alors, je pense que, oui, il y a une opportunité au niveau de l'efficacité énergétique, mais on ne peut pas dire que c'est répétable dans le même endroit six fois, là. Alors, on se comprend là-dessus, je pense que vous allez être d'accord avec moi.
En matière environnementale, la performance de Gentilly-2 est remarquable, comme en témoignent les très faibles quantités de rejets radioactifs atmosphériques et aquatiques, lesquels se situent à moins de 1 % de la norme canadienne autorisée. Juste avant de donner une réponse, juste vous demander, vous dites que le prolongement de la vie utile... avant d'entreprendre le prolongement de la vie utile de Gentilly-2, vous qualifiez que ce projet-là correspond à construire un nouveau réacteur à l'intérieur de celui déjà existant. Pourtant, la Commission canadienne de la sûreté nucléaire étudiera le projet dans le cadre de sa procédure normale de renouvellement de permis. Sur quelles bases affirmez-vous que l'ampleur des travaux correspond à construire un nouveau réacteur à l'intérieur du réacteur existant? Ça, c'est à la page 3 de votre mémoire.
M. Edwards (Gordon): Je ne comprends pas complètement la question, la dernière partie, mais je peux dire quelque chose. Même s'il n'y a aucune émission radioactive dans l'atmosphère ou dans l'environnement pendant l'opération normale, ce n'est pas la question ici. La question, c'est les déchets, qui sont incontestables et qui doivent être maintenus et gardés pour des milliers d'années. Aussi, si on regarde le monde d'aujourd'hui, après «nine eleven», après l'attaque sur la ville de New York, le monde a changé. Et, si on regarde la voie maritime du fleuve Saint-Laurent, la cible la plus attirante pour les terroristes est Gentilly-2. Il n'y a aucune autre installation à la longueur du fleuve qui est une cible plus attirante pour les terroristes. Et ça reste le cas même si le réacteur est fermé. Parce que c'est nécessaire de prendre ces déchets et «remouvoir» ces déchets du fleuve Saint-Laurent.
Éventuellement, si le Québec veut éventuellement se débarrasser de ces déchets, pourquoi pas maintenant? Parce que je crois que maintenant il y a une bonne opportunité. C'est garanti que la question du combustible irradié sera sur la table dans le prochain an, parce que «the wheels are already in motion, you know». Il y a une loi fédérale, qui se nomme le Nuclear Fuel Waste Act, «and the deadline»...
Une voix: La date limite.
M. Edwards (Gordon): ...la date limite pour cette loi à arriver à une décision est l'an prochain, l'an prochain.
Je pense que c'est une très bonne opportunité politiquement pour lever la question avec le fédéral maintenant. Pourquoi ne pas «remouvoir» ces déchets du Québec? Parce que, quand le premier réacteur a été construit et le deuxième réacteur a été construit ici, au Québec, c'est avec la pression du gouvernement fédéral, et il n'y a eu aucune information à ce moment du problème des déchets hautement radioactifs qui restent. À ce moment, originellement, le nucléaire a été présenté comme une technologie totalement nette, totalement sans problème, et ce problème des déchets nucléaires est moralement la responsabilité du gouvernement fédéral.
Si le Québec décide de renouveler ce réacteur, de dépenser 1 milliard de dollars pour continuer à produire ces déchets, ce sera très difficile à faire l'argumentation plus tard que c'est la responsabilité du fédéral ou de quelqu'un d'autre.
Ces nouveaux déchets que j'ai mentionnés, les tubes de force qui sont retirés du réacteur sont très radioactifs, ils sont les plus radioactifs objets, sauf le combustible irradié lui-même, O.K., et ces tubes ne sont pas la responsabilité du gouvernement fédéral. La Société pour la gestion des déchets nucléaires a refusé de considérer ces déchets comme leur responsabilité.
«So» la question est: est-ce que le Québec est prêt à faire le «commitment»...
Une voix: L'engagement.
M. Edwards (Gordon): ...l'engagement de gérer ces déchets pour des milliers d'ans, juste pour «réfecter» ce réacteur? C'est un problème très sérieux, je pense. Ce n'est pas juste d'un problème opérationnel, ce n'est pas juste un problème routinier, ce n'est pas juste un problème technique, c'est un problème politique très, très important.
M. Fugère (Michel): Pour ce qui est de la partie qui concerne plus...
M. Corbeil: Vos réponses sont longues, on ne pourra pas poser beaucoup de questions, hein?
Le Président (M. Jutras): C'est ça, l'échange ne sera pas...
M. Corbeil: On n'aura pas un grand échange, là.
Le Président (M. Jutras): Il y avait le député d'Arthabaska.
M. Bachand: M. le Président, que vous êtes gentil! Je vous remercie. Pour quelques minutes.
Le Président (M. Jutras): Pour peu de temps.
M. Bachand: Si Mme la députée de Rosemont est bien gentille. Elle l'est tout le temps, mais exceptionnellement encore aujourd'hui.
Donc, messieurs, bienvenue à la commission. Écoutez, comme membre de la commission, j'ai de la difficulté à départager entre les tenants et les gens qui sont plutôt les opposants du nucléaire. Il y a des gens qui sont venus nous présenter, hier, la Société nucléaire canadienne, une position qui allait dans la partie des tenants, et vous, vous êtes les opposants, pour résumer un peu.
Mais, moi, je vous avoue que, si, moi, j'ai de la difficulté un peu, je regarde le public, là ? en fait, ce n'est pas moi qui les regarde, c'est plutôt eux qui nous regardent ? je ne suis pas sûr qu'ils sont encore plus éclairés qu'ils l'étaient au départ. Et pour une seule et bonne raison, c'est qu'il y a un élément scientifique qu'on contrôle mal. Parce que, comme vous l'avez bien dit, M. Edwards, il y a un élément scientifique qu'on doit absolument connaître; il faut savoir comment est fait l'atome, comment ça se fait qu'il est radioactif, qu'est-ce qu'il produit comme effet puis c'est quoi, la réaction qu'il a, c'est quoi, ces rayons gamma là. Donc, ce n'est pas à la portée de tout le monde, comme vous l'avez bien dit.
n(12 h 20)n Et c'est pour ça qu'il faut être prudents, pour ne pas virer dans la démagogie, et d'un bord et de l'autre, en disant, par exemple, pour les tenants, que le nucléaire, c'est la fabuleuse quantité d'énergie potentielle qu'on peut produire, et, d'un autre côté, la vision qui serait, comme vous l'avez bien présentée, communautaire, plus... mais pas nécessairement. Vous, vous l'avez... ? mais, moi, je ne pense pas que c'est nécessairement communautaire, rattaché à ça ? mais une vision qui serait plus écologique, bon, etc. Mais là, tu sais, quand on vient me parler de terrorisme, bien là je vous avouerai que, si on me parle de la fabuleuse quantité énergétique potentielle, d'un côté et, d'un autre côté, de l'aspect terrorisme puis du danger potentiel, bien là, moi, j'ai de la misère à me retrouver dans le centre, là.
Donc, je sais que ce n'est pas tellement une question, là, mais je me pose beaucoup de questions à ce niveau-là, parce que la gestion... et je pense qu'en quelque part la réponse est dans la gestion du risque. Parce que, sur le plan scientifique, que vous connaissez, je connais, et Mme la députée de Rosemont aussi a des connaissances scientifiques, et d'autres aussi dans la commission, pour comprendre c'est quoi, l'effet du nucléaire... Mais il faut bien dire une chose, c'est que, moi, quand je vais chez le dentiste, là, puis vous, vous allez chez le dentiste aussi, là, il y a des rayons X qui sont chez le dentiste ? et là, la ministre pourrait en parler compte tenu de ses compétences en la matière ? ils nous mettent une espèce... bien en fait la technicienne nous met un gilet de plomb, là, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années, à peine 10 ans, parce que, le plomb, il y a une barrière physique, ce dont nous parlait la madame de la Société nucléaire canadienne hier, cette barrière physique là empêche le rayonnement des rayons X...
Le Président (M. Jutras): M. le député d'Arthabaska.
M. Bachand: Oui.
Le Président (M. Jutras): En conclusion.
M. Bachand: Ah zut! Que je suis déçu! Bien en tout cas, M. Edwards, pensez-vous que... donc, ma question: La gestion du risque ne serait-elle pas la réponse?
M. Edwards (Gordon): Le problème est: Pourquoi «gestionner» un risque qu'on n'a pas besoin originellement? Je pense que le Québec n'a pas besoin de gérer ce risque. Ontario peut-être, mais pourquoi Québec? Québec a un réacteur nucléaire. C'est un accident historique; ce n'est pas une partie de la planification d'Hydro-Québec en général. Si on cherche les plans d'Hydro-Québec, il n'y a aucune place pour le nucléaire. «So», pourquoi manager et gérer un risque qu'on n'a pas besoin du tout? O.K., si les autres doivent gérer le risque, bien, O.K., mais je pense que c'est une question pour les gens ici: Pourquoi avoir le risque ici?
Le problème avec la comparaison avec les risques de barrages, les risques du nucléaire, la différence est ça: dans le cas de barrages, on doit avoir un désastre, une explosion, etc. En cas de nucléaire, dans le pire cas, on a un cas de contamination de l'environnement qui dure pour des siècles, et c'est un problème. Ce n'est pas comparable à d'autres sortes de risque. C'est une autre catégorie de risque qui surpasse les risques que... Tout le monde admet ça. Toutes les études concernant les déchets hautement radioactifs admettent... même la Société de gestion des déchets nucléaires admet que c'est un très, très grave problème. Ce n'est pas un problème... Ce n'est une simple comparaison entre le numéro de morts, c'est un problème de «sustainability», de viabilité à long terme.
Le Président (M. Jutras): Alors...
M. Bachand: Vous avez été bien bon avec moi.
Le Président (M. Jutras): Oui. Alors, Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue, bonjour. Je m'étonne de votre démarche aujourd'hui, bien que je la comprenne, parce que vous avez reçu une lettre, le 8 avril 2003 ? c'est dans les documents que vous nous avez remis ? de M. Jean Charest, chef du Parti libéral du Québec, et on y lit une phrase, dans cette lettre-là: «Le Parti libéral du Québec s'est prononcé contre le développement de l'énergie nucléaire.» Et en plus on dit: «Un prochain gouvernement libéral entend revaloriser le rôle de la Régie de l'énergie en lui donnant les moyens et en lui permettant de soumettre des programmes d'efficacité énergétique.» Donc, est-ce que vous avez des inquiétudes à l'effet que le gouvernement du chef du Parti libéral ne respecte pas son engagement?
M. Edwards (Gordon): Bien, je pense que ce n'est pas clair si, oui ou non, le gouvernement respectera son engagement ou si, oui ou non, Jean Charest respectera son engagement, parce que la décision n'est pas faite. Mais je pense que ce n'est pas juste une issue pour un seul parti ou pour un seul politicien, c'est un problème qui affecte tout le monde, tous les politiciens, tous les représentatifs des citoyens du Québec et tous les citoyens du Québec. Le problème est que... «it's like a wake-up call», nous dormons, parce que nous n'apprécions pas la grandeur du problème. Et, pour cette raison, c'est sous la surface et ce n'est pas visible, ce n'est pas un problème très visible pour la population ou pour les politiciens. Mais, moi, je crois que c'est irresponsable pour quelqu'un de ne pas prendre une position regardant ce sujet, parce que ça devra avoir des conséquences pour beaucoup longtemps pour la province de Québec.
«Now», le premier ministre Bourassa a déclaré qu'il ne sera jamais un dépotoir permanent sur le territoire du Québec ou sur la frontière du Québec pour les déchets hautement radioactifs. «Well», si ça reste la volonté de la population du Québec ou du gouvernement du Québec ou des représentatifs de Québec, puis je pense qu'on commence par arrêter la production de ces déchets. Et, secondairement, pour chercher une résolution du problème: quoi faire avec les déchets qui restent là maintenant ? et nous avons des idées dans cette direction... Mais c'est impossible de planifier une stratégie si on ne reconnaît pas le problème. On doit planifier des scénarios, et un des scénarios doit être de sortir le nucléaire.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Mon autre question. M. Jetté, vous dites que vous êtes... vous croyez être victime d'un rayonnement, là. Qu'est-ce que vous faisiez dans le domaine électronucléaire, pour penser cela?
M. Jetté (Marcel): Bien, j'ai travaillé pour un contracteur en 1995, mais j'avais travaillé, en 1970-1971, sous rayonnement à G-1, le premier réacteur. Après ça, je suis allé pour un contracteur, qui s'appelle Babcock & Wilcox, à Gentilly, en 1993 et 1995. À ce moment-là, c'était hautement radioactif, puis on était appelé à travailler à l'intérieur du circuit primaire du réacteur. Moi, qu'est-ce que je trouve déplorable, c'est qu'Hydro-Québec nous a induits en erreur ou ils ne nous ont pas dit la vérité, que les doses qu'ils nous suggéraient de prendre, c'était un rem de radioactivité, mais qu'en réalité on en a pris deux, puis qu'à ce moment-là ils savaient qu'à un rem il y a des études qui... dans les papiers qui vous ont été remis, là, il y a des lettres de médecins qui disent que des doses de rayonnement, il n'y en a pas qui sont sécuritaires. Mais Hydro ne nous a pas dit ça, Hydro nous a dit que c'était complètement sécuritaire, qu'il n'y avait aucun danger.
Moi, je ne suis pas le seul à avoir eu un cancer après avoir travaillé à Gentilly, il y en a d'autres. Il y en a qui ont été réglés en conciliation, il y en a un qui aurait été réglé en conciliation, mais c'est tellement difficile d'essayer de faire reconnaître une maladie, surtout par des rayonnements ionisants, qui ne se voient pas, qui ne se sentent pas, on n'a aucun effet quand on les reçoit. Puis, aller travailler à l'intérieur d'un vaisseau hautement radioactif, là, même s'ils disent, tu sais, que c'est sécuritaire, ça ne l'était pas. Parce que, moi, j'ai toujours mené une vie très stable, puis je me suis retrouvé avec un cancer, puis il y en a d'autres aussi qui ont été... Puis même qu'Hydro ne voulait même pas admettre qu'il y avait un travailleur qui avait travaillé à Hydro en 1984 puis qu'il avait été contaminé puis qu'il a eu un cancer; il ne pouvait pas faire sa démarche pour faire reconnaître sa maladie.
n(12 h 30)n Moi, j'ai attendu huit ans pour faire reconnaître ma maladie, puis là j'ai passé au 1er février. Ça s'est terminé, mais je n'ai pas encore le résultat de ça, puis je... Mais je vis avec un cancer incurable, puis je trouve ça déplorable de ne pas avoir été informé par Hydro-Québec. C'est ça que je regrette, que j'ai... c'est ça que je trouve déplorable.
Puis, tous les 800 travailleurs qui seront appelés à la réfection de la centrale de Gentilly-2, si elle a lieu, il y en aura certainement qui auront des cancers. Quel est le coût social de ça? Il y a un coût à ça, là, ça coûte terriblement cher. Moi, mon problème de santé puis des autres qui ont passé par là, ça coûte énormément cher, puis ça, c'est criminel, à mon point de vue, de dire à des personnes que c'est sécuritaire, puis ce ne l'est pas. Même si, eux autres, ils vont dire que c'était en deçà des normes, mais les normes... il n'y en a pas, de normes, au point du vue que c'est complètement sécuritaire. Ça fait que c'est un point qui devrait être pris en considération. Je vous remercie.
Mme Dionne-Marsolais: Ma dernière question, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Oui, Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Dans l'hypothèse où on ne «réfecte» pas Gentilly-2, il faudra la remplacer par une autre source de production. À ce moment-là, ce sera sans doute une turbine à gaz ou un ensemble de turbines à gaz. Quelle est votre opinion là-dessus?
M. Fugère (Michel): Moi, je pourrais peut-être répondre à ça.
Le Président (M. Jutras): Oui, allez-y.
M. Fugère (Michel): Je ne vois pas l'intérêt à ce qu'on comble ce manque-là par le gaz. Je pense qu'on a parlé tantôt d'efficacité énergétique, c'est sûr que j'ai donné un exemple, j'aurais pu étendre, j'aurais pu vous donner des dizaines d'exemples. Mais il y a aussi quand même les énergies renouvelables et qu'on pourrait avoir décentralisées qui seraient intéressantes: on parle d'éolien, on parle de solaire, on parle de géothermie. Des scénarios pour produire de l'énergie de manière socialement responsable, il y en a plus d'un. Alors, je pense que, lorsqu'on regarde l'input finalement de 2,5 % d'énergie attribuable à Gentilly, c'est vraiment mineur, tu sais, je pense qu'on n'a pas un gros défi à relever, surtout si on considère l'échelle de temps qui nous est allouée pour y arriver. Parce qu'on sait que, d'ici 2013, on a quand même du temps devant nous pour planifier ce manque à gagner que représentera la fermeture de G-2, mais je pense qu'avec ce qu'on a devant nous il y a vraiment possibilité de faire le passage de façon très sereine à une utilisation postnucléaire.
M. Edwards (Gordon): Si je peux ajouter...
Le Président (M. Jutras): Rapidement, monsieur...
M. Edwards (Gordon): O.K., non.
Le Président (M. Jutras): Non, non. Allez-y, mais rapidement.
M. Edwards (Gordon): O.K. Juste un exemple. En Colombie-Britannique, il y a un plan de BC Hydro pour construire un «dam», un barrage, «called» Site C. Et ils ont été forcés d'étudier le problème d'obtenir le même montant d'énergie par efficacité énergétique, le coût, les emplois, etc. Et ils ont trouvé qu'ils peuvent obtenir la même énergie qui est produite par le barrage en investissant directement dans l'efficacité énergétique.
Ce n'est pas juste un problème d'«advertisement», mais pour investir directement en efficacité énergétique. Et ça vous coûte la moitié du coût d'un barrage, et les emplois sont le double. «So», aussi, en Ontario, ils ont étudié la situation d'obtenir les générations... de la cogénération, pas une nouvelle cogénération, mais existante, les usines existantes, pour générer de l'électricité à côté. Et ils ont trouvé que c'est possible d'obtenir quatre fois l'énergie de la centrale nucléaire Darlington. «So», si on ne fait pas les études, ce n'est pas possible de faire une décision rationnelle.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci...
Une voix: ...30 secondes.
Le Président (M. Jutras): 30 secondes.
M. Fugère (Michel): Bon. Je dois avouer... d'abord, je vous remercie de nous avoir accueillis, ça va de soi. Mais, si on fait référence à la lettre que M. Charest nous a envoyée lors de la campagne électorale, vous allez noter, là-dessus, qu'il promettait finalement à la société québécoise une commission scientifique indépendante pour travailler à l'établissement d'une politique énergétique responsable au Québec. Moi, je pense que la commission, ici, a sa place, elle fait le travail qu'elle a à faire, mais je pense qu'on a besoin d'aller beaucoup plus loin que ce que l'on fait actuellement, je pense qu'on a besoin d'un cadre de travail qui nous permettrait d'aller plus profondément, nous permettre d'échanger avec l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale dans un contexte où les ressources seront appropriées pour faire un travail pertinent. Merci.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, messieurs, pour votre présentation. Et les travaux de la commission sons suspendus jusqu'à 15 heures cet après-midi, après la période de questions.
(Suspension de la séance à 12 h 36)
(Reprise à 15 h 23)
Le Président (M. Jutras): Nous reprenons nos travaux, les travaux de la Commission de l'économie et du travail portant sur la sécurité énergétique au Québec. Nous accueillons maintenant Rabaska, les représentants de Rabaska. Alors, messieurs, je vous souhaite la bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Je vous rappelle les règles: vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; par après, il y aura un échange de 20 minutes avec le ministre et avec les députés ministériels et, par la suite, un échange de 20 minutes avec les députés de l'opposition.
Je vous demanderais dans un premier temps ? qui est le porte-parole? ? de bien vouloir vous identifier, de présenter les personnes qui vous accompagnent et, par la suite, procéder à la présentation de votre mémoire. Vous pouvez y aller.
Rabaska inc.
M. Kelly (Glenn): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, j'aimerais, comme vous l'avez souligné, d'abord présenter les deux personnes qui m'accompagnent. À ma gauche, M. Philippe Hochart, président de Gaz de France, Amérique du Nord, et, à ma droite, M. Martin Imbleau, président du conseil de gestion de Rabaska. Mon nom est Glenn Kelly, je suis le président et le chef des opérations de Rabaska.
L'avenir et la sécurité énergétiques d'un pays sont des enjeux qui, comme l'éducation et l'instruction publique, conditionnent l'avenir et la prospérité pour les décennies à venir. Permettez-nous donc de nous réjouir de la création de cette commission et de vous remercier de l'opportunité qui nous est offerte d'apporter notre contribution en vous exposant les motivations derrière le projet de terminal méthanier Rabaska de même que ses composantes.
Rabaska vise à doter le Québec d'infrastructures nécessaires à l'importation de gaz naturel étranger sous sa forme liquide. Rappelons que le GNL est simplement du gaz naturel refroidi à une température de moins 160 °C afin d'en réduire le volume de 600 fois, le rendant ainsi économique à transporter par navire sur de grandes distances. Nous reviendrons dans quelques instants sur les composantes du projet.
Les promoteurs du projet Rabaska ont initié ce projet sur la base de trois constats importants. Premier constat: la nécessité. Le gaz naturel est une composante essentielle du mixte énergétique de toute économie développée et moderne. Par ses propriétés énergétiques et environnementales, le gaz naturel est devenu l'énergie de choix des consommateurs. Deuxième constat: la réalité présente et future, le continent nord-américain ne sera bientôt plus autosuffisant en matière de gaz naturel. Et, finalement: la diversité; la sécurité de l'approvisionnement énergétique et une économie concurrentielle reposent sur la variété des options offertes aux économies et à leurs acteurs.
Le projet Rabaska est l'initiative d'un consortium formé de trois entreprises reconnues du secteur énergétique et très solides financement, soit Gaz Métro, Enbridge et Gaz de France. Gaz Métro a eu l'opportunité de venir présenter sa vision dans le cadre de la présente commission, et nous comprenons qu'Enbridge fera de même sous peu. Il suffit donc de rappeler que Gaz Métro transporte et distribue du gaz naturel sur le territoire québécois depuis plus de 30 ans et dessert plus de 157 000 clients industriels, commerciaux et résidentiels. Quant à Enbridge, elle exploite de grands systèmes d'oléoducs et gazoducs totalisant une distance de près de 15 000 kilomètres en Amérique du Nord, en plus d'être active dans le transport, le stockage et la mise en marché du gaz naturel, elle détient également une franchise de distribution de gaz naturel en Ontario, la plus importante au Canada.
Enfin, Gaz de France est un leader mondial de l'industrie du gaz naturel et du GNL. Gaz de France est sans contredit l'une des pionnières de cette industrie et possède plus de 40 ans d'expérience. Son expertise se situe à chaque niveau de l'industrie, que ce soit dans la production, la liquéfaction, le transport, l'entreposage ou la regazéification du GNL. Gaz de France est le premier acheteur de GNL en Europe et le quatrième plus important au monde.
Donc, fait unique dans ce genre de projet, ces trois entreprises représentent l'ensemble des maillons de la chaîne de GNL, qui s'étend des bassins de production dans les pays étrangers jusqu'à la distribution chez les consommateurs de gaz naturel, en passant par le transport maritime et le transport par gazoduc.
Revenons donc en détail sur chacun des constats. D'abord la nécessité. Le Québec a la chance et l'avantage de disposer de ressources hydroélectriques considérables qui ont été développées pour le bénéfice de l'économie du Québec. Mais l'énergie hydroélectrique ne peut à elle seule pourvoir à tous les besoins, et le gaz naturel a pris une place importante et croissante dans de nombreux secteurs de notre économie. L'économie de l'Ontario, quant à elle, a déjà fait une place importante au gaz naturel dans le secteur industriel, le secteur commercial et le secteur résidentiel. Les raisons de l'attrait pour le gaz naturel sont bien connues: facilité d'utilisation, efficacité énergétique et qualités environnementales. Le gaz naturel n'est rien de moins que l'énergie fossile la plus propre.
Je ne reviendrai pas ici sur la place que devrait prendre le gaz naturel au Québec et les bénéfices collectifs qui en résulteraient. Certains intervenants l'ont fort bien exposé, en particulier Gaz Métro, et Rabaska partage en tous points son analyse.
La situation du marché nord-américain du gaz naturel a d'ores et déjà produit des effets négatifs pour les consommateurs: hausses importantes des prix et une volatilité créant une perception d'incertitude quant à la disponibilité des approvisionnements. Un exemple suffit de s'en convaincre, depuis 2001, environ 30 BCF, soit environ 15 % de la demande totale du Québec, donc environ 30 BCF de consommation industrielle sont retournées à l'huile lourde, avec des conséquences environnementales que nous connaissons. Pour Rabaska, le constat est clair: le gaz naturel est l'énergie fossile la moins nocive, et aucune ? et je dis bien aucune ? forme d'énergie n'est sans effet ni conséquence sur l'environnement. Son marché au Québec et en Ontario ne demande qu'à se développer, et, tant du point de vue de ses sources d'approvisionnement que du transport du gaz naturel, le Québec ne pourra que bénéficier d'alternatives qui lui offriront une diversification.
n(15 h 30)n Deuxième constat: La réalité du marché nord-américain et la positon du Québec. Le constat que Rabaska a fait est le même que celui qui a été fait par le gouvernement du Québec dans le document de référence de la présente consultation. La position du Québec quant à ses approvisionnements en gaz naturel se doit d'être améliorée, et un approvisionnement en GNL pourrait satisfaire cette fin. Au cours de la dernière décennie, le marché canadien du gaz naturel s'est transformé, passant d'un marché national à un marché continental. Du coup, la demande pour le gaz naturel de l'Ouest canadien s'est significativement accrue, imposant une très forte pression sur une offre déjà stagnante. Bien que le Québec puisse compter sur cette source de gaz naturel fiable venant de l'Ouest canadien pour les années à venir, il n'en demeure pas moins qu'il en coûte de plus en plus cher de forer des puits dans les bassins continentaux et que de plus en plus de ces puits sont nécessaires simplement pour répondre à la demande existante.
Il y a donc présentement en Amérique un certain déséquilibre entre l'offre et la demande, lequel déséquilibre exerce une pression importante sur les prix du gaz naturel. Par exemple, le prix moyen est passé d'environ 3 $ du 1 000 pi³ en 2000 à environ 6 $ en 2005. Pourquoi ce déséquilibre? L'Amérique du Nord représente 30 % de la consommation mondiale de gaz naturel et n'en possède que 5 % des réserves. Permettez-moi de me répéter: Le Canada et les États-Unis représentent 30 % de la consommation mondiale, alors qu'ils ne possèdent que 5 % des réserves. Cependant, il importe de souligner qu'au niveau international les réserves sont abondantes et disponibles. Aujourd'hui, les réserves prouvées sont l'équivalent d'environ 70 années de consommation de gaz.
Enfin, le dernier constat et le plus important: la diversité. Autre aspect qui nous semble primordial et qui incite les promoteurs de Rabaska à développer le projet est la diversification, élément essentiel de la sécurité d'approvisionnement. Le Québec fait face à une situation de captivité et de double dépendance. En effet, le Québec dépend du bassin de l'Ouest canadien en plus de dépendre d'un seul transporteur, soit TransCanada. Depuis quelques années, les régions à l'ouest de l'Ontario se sont dotées d'alternatives pour être en mesure d'arbitrer une certain concurrence parmi les transporteurs. Mais, à l'heure actuelle, le Québec reste seul captif avec l'Est ontarien du transporteur TransCanada.
Comme dans n'importe quel domaine d'activité économique, la dépendance à un seul fournisseur nuit au développement. Les acheteurs étant incapables de faire jouer les forces du marché, ils se retrouvent forcés à payer le seul prix offert. Pour Rabaska, le constat est clair: tant du point de vue de ses sources d'approvisionnement que du transport du gaz naturel, le Québec a un grand besoin de diversification. Notre dépendance à l'énergie sous quelque forme que ce soit met en lumière l'importance d'assurer une sécurité d'approvisionnement. Or, la sécurité énergétique, nous croyons, n'est plus l'affaire d'une seule commodité comme le pétrole ou d'une ressource présente chez nous comme l'électricité, elle passe par la mise en place de vastes réseaux locaux, régionaux, nationaux, continentaux et internationaux de vente et d'achat de sources d'énergie variées. Le GNL, comme son développement récent le démontre de manière si éloquente, s'insère parfaitement dans ce continuum visant l'obtention d'une véritable sécurité énergétique pour les marchés du gaz naturel, soit la disponibilité de sources d'énergie fiable, sécuritaire et concurrentielle.
La sécurité énergétique passe par la mise en place d'infrastructures sur le territoire visé, ici, le Québec. On le sait, les infrastructures, qu'elles soient de production, de transport, de distribution ou de stockage, demandent beaucoup de capitaux. Dans bien des cas, la mise en place de ces installations requiert une participation financière des gouvernements. Rabaska ne demande rien de cela. Au contraire, Rabaska propose de construire ces installations, d'une valeur de plus de 700 millions de dollars, financées entièrement par des capitaux privés et supportées par une série d'ententes à long terme s'étendant jusque dans les bassins de production outre-mer. De nombreux pays qui ne disposent pas ou peu de ressources de gaz naturel ont depuis longtemps recours au GNL comme une des sources d'approvisionnement. Ainsi, le Japon dépend de façon exclusive du GNL et de ses 20 terminaux d'importation pour son approvisionnement en gaz naturel. La France, quant à elle, a recours au GNL pour l'approvisionnement d'environ 25 % de son marché, et ce, depuis plus de 40 ans. La demande croissante du gaz dans le monde et la baisse des coûts pour la liquéfaction et le transport du GNL sont des facteurs qui, ces dernières années, ont favorisé l'essor de cette industrie. De nombreux projets de production et de liquéfaction dans les pays producteurs traditionnels et nouveaux ainsi que de nombreux projets de terminaux de réception en Asie, en Europe et en Amérique du Nord se développent.
Il n'est pas impensable d'imaginer que le marché du GNL suivra les mêmes étapes dans son développement que celui du pétrole. Des échanges multiples entre diverses zones de production et de consommation effectués sur la base de prix de marché prendraient progressivement la suite de transactions bilatérales basées sur des contrats à long terme. Actuellement, ce type de transaction, c'est-à-dire les contrats à long terme, reste la norme dans l'industrie du GNL, dont le développement requiert des investissements considérables, soit la production et la liquéfaction ? une usine de liquéfaction coûte environ 1,5 milliard de dollars canadiens ? en passant par le transport maritime ? un méthanier coûte environ 150 millions de dollars canadiens ? ou la regazéification ? le coût d'un projet comme Rabaska se chiffre autour de 700 millions de dollars canadiens.
L'accès au GNL créera les conditions favorables, notamment par une concurrence accrue, pour l'ensemble de la clientèle et plus particulièrement à une clientèle située à proximité des infrastructures. C'est ainsi que la réalisation de cette vision doit passer par la mise en place d'infrastructures telles que nous proposons et supportée par des ententes à long terme par des partenaires financièrement très solides. Ce sont elles qui forment la pierre angulaire de ce commerce et permettront son développement. La mise en place de cette chaîne représente des investissements se chiffrant en milliards de dollars. Outre les installations de Rabaska, Gaz de France et ses partenaires producteurs et transporteurs sont disposés à consentir et à prendre des engagements sur ces milliards de dollars pour la mise en place d'une chaîne complète de GNL pour alimenter le projet Rabaska et les marchés du Québec et de l'Ontario.
Vous me permettrez maintenant de vous décrire dans ses grandes lignes le projet Rabaska que nous proposons de réaliser et lequel peut être résumé assez simplement. Il s'agit d'établir sur le territoire de Lévis un terminal méthanier qui accueillera des navires, qu'on appelle des méthaniers, contenant du gaz naturel liquéfié provenant d'outremer. Une fois arrivé à bon port, le GNL est stocké dans des réservoirs d'une sécurité supérieure pour ensuite être regazéifié. Sur une base annuelle, on estime qu'environ 200 BCF de gaz naturel proviendront de ce point d'approvisionnement, soit l'équivalent de la consommation annuelle du Québec. Le Québec possède des caractéristiques qui rendent l'approvisionnement par méthanier très avantageux, soit une position géographique parmi les plus proches des principales sources de GNL et un fleuve en eau profonde qui pénètre loin dans ses terres. Ces caractéristiques donnent donc une position stratégique au Québec en le faisant passer de la queue à la tête de pont d'un système d'approvisionnement majeur en gaz naturel.
S'il est vrai que nous avons généralement la politique de notre géographie, le fleuve Saint-Laurent, unique par sa dimension, unique par sa pénétration dans les terres et les marchés qu'il peut rejoindre, représente une nouvelle fois dans l'histoire du Québec une opportunité à saisir pour le bénéfice de tous les Québécois et les Québécoises. Rabaska a dû identifier un site pouvant accueillir les installations nécessaires le long du fleuve, soit un port et des réservoirs. À cet effet, la facilité et la fiabilité de l'accès aux installations portuaires pour les méthaniers constituent la clé de succès d'un tel projet. De nombreux sites tout au long du fleuve ont donc été scrutés sous plusieurs angles: l'environnement, la sécurité, l'économie, naturellement le milieu maritime ont tous fait partie de la grille d'analyse rigoureuse mise en place par l'équipe de Rabaska.
n(15 h 40)n Il est donc ressorti de nos analyses que seul le site de Lévis possède les caractéristiques nécessaires à l'implantation et l'exploitation sécuritaire et fiable d'un terminal méthanier. À cet égard, il nous importe de souligner que le site envisagé constitue l'une des seules zones industrialoportuaires au Québec pouvant accueillir ce projet. La qualité du port et la fiabilité de son accès sont primordiaux pour l'approvisionnement quotidien des clients et leur sécurité d'approvisionnement à court terme, mais aussi pour la sécurité d'approvisionnement à long terme.
Sur le plan de la sécurité des installations, nous désirons souligner que le commerce du GNL est régi par un grand nombre de codes et de standards nationaux et internationaux qui visent l'utilisation de matériaux, de méthodes de construction et de méthodes d'opération éprouvées qui font de cette industrie une des plus sécuritaires qui soient.
De plus, les promoteurs du projet Rabaska se sont engagés à répondre aux exigences les plus sévères de l'industrie et à utiliser les meilleures technologies disponibles, par exemple, dont deux réservoirs à double paroi dits à intégrité totale.
Enfin, on doit souligner les impacts économiques majeurs et directs du Rabaska aux niveaux local et régional. Ainsi, lors de la période de construction, près de 3 500 emplois directs et indirects seront créés sur une période de trois ans. Enfin, environ 40 millions de dollars seront générés en taxes et impôts provinciaux. Par la suite, pendant l'exploitation du terminal, 70 emplois permanents de qualité seront créés et, chez nos fournisseurs, environ 280 emplois seront générés. Finalement, près de 10 millions de dollars par année seront payés en taxes municipales, 1 million de dollars par année en taxes scolaires et 4 millions en impôts et taxes provinciaux. Le Québec, quant à lui, se retrouvera dans une situation concurrentielle améliorée et aura une place dans une industrie en pleine expansion.
Ce projet, le projet Rabaska, répond, j'en suis convaincu, à des besoins réels et à des impératifs stratégiques pour le Québec. En matière de gaz naturel, au risque de me répéter, le Québec a toujours été la dernière station. On a toujours été la dernière. Le Québec est en effet entièrement tributaire des choix faits par l'industrie et ses voisins à l'ouest de ses frontières. Rabaska se propose d'être le point de départ, la porte d'entrée d'une denrée appelée à jouer un rôle majeur au Québec et en Amérique du Nord, mais aussi partout dans le monde. Le Québec ne doit pas être à la remorque mais plutôt être le fer de lance de cette nouvelle économie. Rabaska vise à faire d'une contrainte une opportunité. Rabaska vise à retourner la table et éloigner le Québec de cette situation de captivité alléguée d'entrée de jeu. Rabaska et le GNL représentent une solution d'avenir, une solution toute naturelle. Nous vous remercions.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci, M. Kelly. Je cède maintenant la parole au ministre. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Kelly, M. Trudelle, M. Denoux. Permettez-moi, M. le Président, de saluer un Abitibien de souche, issu d'une illustre famille valdorienne, que je n'ai pas eu le plaisir de rencontrer avant aujourd'hui parce qu'il a quitté la région alors que, moi, j'y arrivais, tous les deux probablement pour des raisons professionnelles. Ça me fait plaisir de vous saluer, M. Kelly.
D'entrée de jeu ? j'ai déjà entendu un peu parler du projet Rabaska, du projet de port méthanier, de l'environnement du gaz naturel liquéfié et aussi de différents aspects concernant l'approvisionnement en gaz naturel ? ma question serait que, au moment où on se parle, il y a trois autres projets de port méthanier qui ont été annoncés dans l'Est canadien, ou qui sont dans l'air, soit celui d'Énergie Cacouna à Gros-Cacouna, celui d'Irving Oil Ltd à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, et aussi celui d'Anadarko à Point Tupper, en Nouvelle-Écosse. Quel est votre avis sur les perspectives de croissance du marché du gaz naturel du Nord-Est américain et sur la capacité de ce marché à justifier la présence de plusieurs ports terminaux de gaz naturel liquéfié? J'ai une petite idée que vous allez me redonner les statistiques concernant la consommation nord-américaine et la quantité qu'on est capable de produire, mais est-ce que vous pourriez aller un petit peu au-delà de ça?
M. Kelly (Glenn): Parlons d'abord des marchés visés par les trois ou les quatre projets de terminaux méthaniers. Les deux projets dans l'Est du Canada, soit à Point Tupper, à Bear Head et le projet Canaport, à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, visent le marché du Nord-Est américain, tandis que les deux projets québécois, soit d'Énergie Cacouna et de Rabaska... Le projet Rabaska vise le marché ontarien et québécois, et je comprends que le projet d'Énergie Cacouna vise les mêmes marchés aussi. Donc, c'est deux marchés différents visés par les quatre terminaux. Et M. Imbleau pourrait compléter ma réponse.
M. Imbleau (Martin): Merci, M. Kelly. M. le Président, j'ajouterais simplement qu'il y a effectivement sur la table à dessin présentement un nombre assez élevé de projets. On en a mentionné trois ou quatre, il y en a sur la côte Est américaine encore plusieurs autres, mais, comme le disait M. Kelley, aucun autre ne peut desservir de façon économique et concurrentielle le marché visé par Rabaska. Cela dit, pour répondre à votre question, M. le ministre, sur la capacité nord-américaine d'absorber tout ce gaz, il est clair qu'aujourd'hui, plus particulièrement dans la zone du golfe du Mexique, qu'il y a trop probablement de projets pour la demande de gaz naturel. Donc, tous ces projets ne se feront pas.
Cela dit, aucun autre projet, en termes géographiques et économiques, ne peut desservir les besoins du Québec et de l'Est ontarien. Donc, on considère que les autres projets ne sont pas en réelle concurrence. Cela dit, pour l'industrie gazière en général, on est tous d'accord que plus d'installations, plus d'infrastructures et plus de gaz, bon, bien c'est de nature à aider de façon générale l'industrie dans laquelle on oeuvre.
M. Corbeil: Merci beaucoup. La deuxième question va toucher l'aspect de l'acceptabilité. Il existe une forte perception au sein de la population en général à l'effet que les installations d'un terminal méthanier sont potentiellement dangereuses, pour ne pas dire dangereuses. La commission aimerait vous entendre à ce sujet.
M. Kelley (Glenn): O.K. J'ai aimé votre mot, qu'il existe une perception, et, comme vous le savez probablement, nous travaillons depuis plusieurs mois maintenant à informer les citoyens de Lévis sur le GNL... premièrement sur le gaz naturel, forme d'énergie très peu connue au Québec, ensuite sur le GNL et sur les technologies, l'industrie et les méthodes utilisées par l'industrie du GNL. On doit se rappeler que c'est une industrie parmi les plus sécuritaires au monde, industrie qui existe depuis plus de 40 ans. On parle de 46 terminaux méthaniers similaires à celui qu'on propose chez Rabaska, 46 terminaux méthaniers en opération dans le monde, sans aucun accident ou incident majeur; 162 navires qui parcourent nos océans à tous les jours; 40 000 voyages aller-retour ou environ 160 millions de kilomètres parcourus sans perte de cargaison aucune, et arrivés à bon port à chaque fois. Donc, c'est une industrie très, très sécuritaire.
En ce qui concerne l'acceptabilité sociale, je le sais, que c'est le souhait du gouvernement en place que le projet ou n'importe quel projet industriel au Québec doit rencontrer ce critère, et nous croyons, de par le processus d'information et de consultation qu'on fait avec le peuple lévisien, que le projet Rabaska est au moins acceptable localement, ou accepté localement dans la communauté de Lévis. Je vous rappelle, et nous avons inséré dans les dépliants d'information un récent sondage que nous avons mené à Lévis qui démontre que la majorité de la population, c'est-à-dire 65 % de tous les Lévisiens, sont en accord avec l'implantation du projet de terminal méthanier de Rabaska. Donc, ce n'est pas facile, on doit expliquer une technologie qui est peu connue ici, une forme d'énergie qui n'est pas connue ici, mais on croit et on voit qu'avec une information claire et transparente, que le monde, les citoyens viennent à comprendre notre industrie et l'apprécier autant que nous.
M. Corbeil: Merci beaucoup, M. Kelley, M. Pleau... c'est ça, M. Pleau?
M. Imbleau (Martin): Imbleau.
M. Corbeil: Imbeau?
M. Imbleau (Martin): Imbleau.
n(15 h 50)nM. Corbeil: Imbleau. Excusez. Justement, à votre mémoire, en page 23, vous suggérez qu'après avoir élaboré la stratégie énergétique le gouvernement mette en place les moyens visant à assurer que les projets qui s'inscrivent dans le cadre de cette politique ne soient pas prématurément bloqués avant d'avoir eu la chance d'être présentés de façon objective, rigoureuse et transparente.
C'est un peu une sous-question de la précédente: Selon vous, quels sont les moyens qui pourraient être mis en place afin de répondre à votre préoccupation?
M. Kelly (Glenn): Je demanderais à M. Imbleau de répondre en premier lieu.
M. Imbleau (Martin): En fait, l'une des difficultés dans laquelle tout promoteur se retrouve provient de l'objectif même des législations qui sont en place, qui tombe sous le sens, c'est-à-dire d'informer le plus possible l'ensemble des intervenants, le plus tôt possible, de manière à affecter et influencer non seulement le projet lui-même qui sera développé, mais également tenter d'influencer les études qui devront être amorcées par le promoteur.
Cela dit, il y a peut-être un certain nombre de choses qui peuvent être faites pour améliorer, pour bonifier en fait les processus, et l'un des plus importants selon nous est probablement de crédibiliser encore davantage les processus qui sont mis en place tant par les paliers de gouvernement... par le palier de gouvernement provincial que fédéral, c'est-à-dire que des agences, tels que le ministère de l'Environnement, le BAPE et, au fédéral, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et les processus en vertu de l'Office national de l'énergie sont là dans un but très précis d'arbitrer les différends entre les citoyens et les promoteurs, à bien des égards. Or, ces agences-là malheureusement sont souvent inconnues et leurs processus de même que leur calendrier et leurs objectifs le sont encore davantage.
Donc, l'une des choses qui pourrait selon nous être entreprise, c'est un certain activisme un peu plus grand de la part de ces agences-là, par exemple des séances d'information des agences elles-mêmes, sur qui la population pourrait compter, plutôt que de se fier sur le promoteur seulement, d'avoir des représentants du BAPE qui expliquent à la population en temps et lieu quel est le processus qui sera suivi et justement quelle est la finalité précise du processus qui est d'arbitrer certains différends entre les promoteurs et la population.
Donc, c'est l'une des choses qui pourraient facilement être faites, selon nous. Dans un autre ordre d'idées, c'est une idée qu'on a déjà lancée dans le passé, il serait intéressant également pour la population de pouvoir compter sur une source d'information neutre par rapport au projet, par rapport au produit que l'on gère et notamment par rapport à la sécurité. Par exemple, une source d'information émanant du gouvernement du Québec qui permettrait à la population de se fier, de se rapporter à une source qui n'est pas la nôtre, qui n'est pas la leur mais qui provient bel et bien d'une source neutre qui serait, dans ce cas-ci, par exemple le gouvernement du Québec. C'est le genre de chose basée essentiellement sur un transfert d'informations qui serait vraiment de nature à bonifier la relation et permettre davantage à la fois à la population mais au promoteur d'avancer et de procéder aux études pour se rendre au but, c'est-à-dire les audiences publiques visant l'approbation des différents projets.
M. Corbeil: Merci beaucoup. Quand vous parlez que le gouvernement du Québec pourrait être un interlocuteur neutre, j'ai l'impression qu'il y a des personnes qui ne sont pas tout à fait de votre avis, même si c'est le cas. Les gens pourraient nous prêter des intentions, hein, Mme Marsolais? Vous avez déjà vécu ça. Alors, c'était mon éditorial, excusez-moi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Corbeil: Juste pour revenir à votre mémoire, à la page 3, puis ça retouche encore l'aspect de la diversification, vous faites état de la stagnation de la production du gaz naturel en provenance du bassin sédimentaire de l'Ouest canadien. Dans votre présentation, vous parliez de deux dépendances: un transporteur, un bassin.
Alors, dans quelle mesure la mise en valeur des nouvelles réserves gazières comme celles du delta de Mackenzie ou de l'Alaska pourrait-elle atténuer la tendance à la baisse de l'offre canadienne en gaz naturel? Tendance à la baisse prévisible, là.
M. Kelly (Glenn): Deux choses. On doit d'abord se rappeler de l'échéancier ou du «timeline» pour la mise en production de ces réserves. On parle d'un horizon de 2012 à 2015. Et la mise en place ou la mise en production de ces réserves ont, je dirais, des échéanciers réglementaires assez longs et ardus à traverser aussi. Donc, oui, il peut y avoir une atténuation due à la mise en production de ces réserves, et on doit ne pas oublier que le gaz naturel, côté demande, côté marché, notamment aux États-Unis, la demande continue de croître d'une façon très soutenue. Et donc, d'ici 2015, avant l'arrivée de ces réserves, on doit apporter une autre source d'approvisionnement à court terme, et c'est là le rôle clé que peut jouer le GNL ou l'importation de gaz naturel liquéfié.
M. Corbeil: Merci, M. Kelly. Toujours en ce qui concerne les opportunités de développement. Dans votre mémoire, vous exprimez l'avis qu'il y a lieu de favoriser l'implantation d'un terminal méthanier qui permettrait au Québec de disposer d'une nouvelle source d'approvisionnement, le gaz naturel. Comment un accès à cette nouvelle source d'approvisionnement pourrait-elle contribuer au développement de l'industrie québécoise? Vous avez fait mention des retombées directes et indirectes d'un projet comme le vôtre dans une communauté comme dans la région de Lévis, ou Québec, si on veut, en termes d'emplois directs bien rémunérés ? de mémoire, vous avez dit, je pense, 70, et vous avez parlé d'un certain montant d'emplois indirects auprès de vos fournisseurs, 280, je crois ? alors, qu'est-ce qui pourrait être des retombées additionnelles immédiates, ou régionales, ou ultimement un peu plus à la grandeur du Québec?
M. Kelly (Glenn): Deux niveaux. Revenons à...
M. Corbeil: ...industries aussi.
M. Kelly (Glenn): Pardon?
M. Corbeil: Ça pourrait être dans d'autres secteurs, d'autres industries.
M. Kelly (Glenn): Oui. Revenons d'ailleurs au niveau de la province ? ou du Québec ? elle-même et l'impact d'avoir une source additionnelle de gaz naturel, qui va amener une pression à la baisse ou stabilisatrice à tout le moins sur les prix du gaz naturel. Donc, les effets sur la concurrence ou l'aspect concurrentiel de nos entreprises et nos industries va être ressenti au niveau de la province.
Plus localement, autour du terminal lui-même, il peut y greffer des industries, notamment l'industrie recherchant le froid. Mais, sur cette question, on a travaillé et on travaille avec la municipalité de Lévis, et ce n'est pas à nous de décider ou d'intervenir sur le choix de développement qui peut éventuellement entourer le site de Rabaska. Donc, c'est quelque chose, s'il est désiré au niveau local, qu'on est prêts à travailler avec les intervenants du milieu, à évaluer le développement autour de Rabaska dans le futur, mais aucunement c'est notre objectif ou notre raison d'être.
M. Corbeil: Juste pour ma curiosité, on voit des schémas de projets semblables au vôtre, on installe un, deux, trois réservoirs. Est-ce que vous pourriez me dire la quantité de réservoirs qui seront nécessaires pour le stockage du gaz naturel liquéfié avant sa reconversion? Dans votre projet à vous.
M. Kelly (Glenn): Oui. Notre projet à nous, c'est deux réservoirs, comme je le disais tout à l'heure, deux réservoirs qu'on appelle «full-containment», en anglais, ou double paroi, une paroi externe en béton, de près de un mètre d'épaisseur de béton, en dessous, sur les côtés et au-dessus, et, à l'intérieur, un réservoir en métal d'aspect cryogénique pour contenir le GNL. Donc, l'un ou l'autre des réservoirs peut contenir le GNL. Et, à ce que je sache, on est le seul projet canadien d'avoir déjà confirmé l'utilisation de ces réservoirs qu'on appelle «intégrité totale». Donc, deux réservoirs pour le site de Rabaska, reliés aux installations portuaires qui accueilleront un navire ou un méthanier à tous les six jours.
M. Corbeil: M. le Président, je suis prêt à passer le relais à mes collègues.
Le Président (M. Jutras): M. le député d'Arthabaska.
M. Bachand: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, bienvenue à la commission. Vous avez dit qu'il y avait 162 navires qui appartiennent à une flotte. Votre flotte ou une flotte que vous affrétez?
M. Kelly (Glenn): Non, c'est la flotte mondiale de navires ou de méthaniers présentement en service.
M. Bachand: Est-ce que vous pouvez me dire, M. le président, donc me dire: est-ce que ces navires-là sont des navires à double coque?
M. Kelly (Glenn): Définitivement, navires à double coque. Vous allez voir, dans notre mémoire, il y a une photo d'un navire de Gaz de France en construction, et on peut voir la coque extérieure et la coque intérieure. Important de souligner qu'à l'intérieur de la coque interne, si je peux dire ainsi, qu'on retrouve deux autres barrières ou deux autre membranes avant d'arriver au GNL. Donc, le produit transporté par les méthaniers, il y a quatre barrières d'imperméabilité avant d'arriver... de passer de l'eau au GNL. C'est des navires de construction très forte, qui ont largement inspiré les nouveaux navires qui transportent le pétrole, les doubles coques pétroliers.
M. Bachand: M. le Président, si vous me permettez, parce que c'est toujours une question de sécurité, surtout quand on transporte à moins 160 °C, là. Dites-moi donc, avez-vous déjà fait une simulation, pas pendant le transbordement, mais pendant le transport, s'il y avait un bris de coque ou s'il y avait une fuite, qu'est-ce qui arrive en fait? Est-ce que c'est mis sous forme gazeuse, puis on perd le contenu? Parce que, avec raison, vous soulignez qu'il n'est jamais arrivé d'accident, mais, oui. Mais, à moins 176 °C, 160 °C, là, quand ça tombe à la température de la pièce, à 20 °C, là, j'aimerais savoir la simulation que vous avez faite de cette... si jamais ça arrivait, ça donnerait quoi à peu près?
n(16 heures)nM. Kelly (Glenn): O.K. Simulations qu'on a faites et qui sont toujours en cours, parce que c'est notamment des sujets qu'on doit traiter et présenter au ministère de l'Environnement du Québec. Et je dirais même qu'on est dans un des endroits en Amérique du Nord qui le plus exigeant en termes d'analyse de risques et la profondeur et l'étendue de l'analyse de risques qui doit être faite non seulement de nos installations terrestres, mais aussi des navires.
Donc, vous avez demandé si on a fait des simulations. Première chose, le gaz naturel liquéfié ne brûle pas, il est ininflammable, n'explose pas, il est en forme liquide. Donc, si jamais il y a fuite de GNL, le GNL va reprendre les caractéristiques qu'il avait avant de devenir liquide, c'est-à-dire les caractéristiques du gaz naturel lui-même, et donc il va s'évaporer dans l'atmosphère ou s'enflammer si les propriétés de mélange de gaz naturel avec l'air sont entre 5 et 15 %. Mais c'est, autant pour nos installations terrestres que pour les navires, des scénarios qui sont regardés et qui seront présentés au ministère de l'Environnement.
M. Bachand: M. le Président, si vous permettez, c'est un argument qui est revenu, et on comprend bien. On peut aussi dire que la gazoline, en phase liquide, est ininflammable, ce sont toujours les vapeurs qui le sont. Je peux vous assurer que, si je prends une allumette puis je trempe ça dans le gaz, l'allumette va s'éteindre, ça, c'est clair et net, il n'y aura pas explosion, il faut qu'il soit en phase gazeuse. Donc, à ce niveau-là, ce n'est pas différent.
Par contre, je trouve intéressant ce que vous dites. Et, au niveau du transbordement, c'est souvent l'inquiétude des citoyens... puis vous avez fait un bon travail là-dessus. Et ce travail-là vous permet en fait de présumer, puis peut-être avec raison aussi, qu'il y a de l'acceptatibilité au projet de développement puis un certain consensus social. Dans le document que vous avez mis à l'intérieur, c'est marqué «Projet d'implantation d'un terminal ? Opinion des citoyens de Lévis à l'égard du projet Rabaska.» Puis là vous expliquez un petit peu la façon dont ça s'est fait, le rappel méthodologique, puis vous précisez que c'est bien un échantillonnage que vous avez utilisé, 819 citoyens. Parce qu'à la première lecture j'étais interrogé. Et, au numéro 1, vous dites: «La majorité des citoyens de Lévis sont d'accord avec le projet d'implantation du terminal méthanier Rabaska.» Ne devrait-on pas plutôt lire «la majorité des citoyens de Lévis interrogés», à votre avis?
M. Kelly (Glenn): Peut-être que vous pourriez m'aider avec ça, parce que normalement les politiciens ont affaire avec des sondages plus souvent que des développeurs de projets. Et je n'ai pas Léger Marketing avec moi aujourd'hui, mais ils m'affirment que, sur la base scientifique, ce sondage est très, très représentatif. Et, si ma mémoire est bonne, on a une marge d'erreur d'environ 3,5 % 19 fois sur 20, et M. Léger nous confirme que, sur les 810 ou 809 personnes qui ont été sondées, l'opinion qui en découle est très représentative de tout Lévis, et même, vous allez voir, on a aussi l'échantillonnage par arrondissements dans la ville de Lévis.
M. Bachand: Je ne remets pas du tout en doute les données du sondage, là n'est pas mon propos, puis je suis d'accord avec vous, puis je rejoins propos. C'est simplement parce qu'au numéro 4, à la page 7, donc vous disiez que pour 90 % de la population de Lévis la tenue d'un référendum devrait se faire dès ce printemps. Donc, vous avez aussi l'intention de requestionner, mais là l'ensemble de la population et non pas seulement qu'un échantillonnage, sur les paramètres que vous leur avez présentés. Quels sont ces paramètres-là que vous allez soumettre lors du référendum, ou un aperçu de ces paramètres?
M. Kelly (Glenn): Une couple de questions, là, je veux revenir... le rapport que vous avez devant, c'est le rapport non pas de Rabaska mais de Léger Marketing, qui ont effectué le sondage. Et votre prochaine question était: Quand... Est-ce que nous souhaitons ou quand...
M. Bachand: Quelles questions qui seraient soumises à la population lors d'un référendum qui pourraient vous faire convenir que, oui, il y a une certaine acceptabilité sociale du projet, pour laquelle vous vous sentiriez à l'aise d'agir?
M. Kelly (Glenn): O.K. Un point très important. Le projet Rabaska se trouve dans une zone grise ou une zone d'incertitude présentement. Nous avons, depuis le 4 octobre dernier, une résolution du conseil municipal de Lévis, résolution majoritaire qui est contre le projet Rabaska. Nous avons tout de même continué à travailler et rencontré les élus municipaux de Lévis au début de la nouvelle année, début 2005, pour présenter le projet Rabaska, qui n'avait pas encore été présenté, suivi de trois séances d'information publiques qui ont été suivies par 1 600 ou 1 700 citoyens de Lévis. Donc, on se retrouve aujourd'hui avec un conseil municipal qui, je crois, a évolué sur la question, qui semble beaucoup plus ouvert à notre projet, avec des citoyens aussi qui, de par les commentaires qu'on a reçus lors de nos trois séances d'information, voulaient apprendre, qui voulaient connaître, qui voulaient savoir c'est quoi, le GNL. On se retrouve aujourd'hui avec une certaine mesure d'acceptation locale, mais ce n'est pas nous qui décide s'il va y avoir ou non un référendum, c'est la municipalité ou la ville de Lévis. Nous, on veut savoir: Est-ce qu'on continue ou est-ce qu'on arrête le projet Rabaska? Et c'est à la ville de Lévis de décider s'ils modifient la résolution du 4 octobre ou si eux tiennent un référendum.
M. Bachand: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jutras): Alors, merci. Maintenant, Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bonjour. Je regrette d'avoir été un petit peu en retard, mais j'étais retenue à l'Assemblée pour la défense d'un rapport de la Commission de l'administration publique dont je préside les échanges. Mais, néanmoins, j'ai lu votre rapport et j'ai eu le plaisir d'en discuter.
J'ai quand même quelques petites questions sur un certain nombre de choses, parce que je pense que, et vous le dites bien dans votre rapport, le gaz naturel est bien méconnu par l'ensemble de la population. Puis évidemment, au Québec, on n'a pas eu vraiment beaucoup d'occasions, sauf peut-être en milieu urbain, je pense ici évidemment à Montréal, peut-être à Québec aussi, de faire l'expérience du gaz naturel. Et le gaz naturel liquéfié, en plus, c'est encore un autre inconnu, là, même si on a fait des cours de chimie ou de physique, ou je ne sais pas, ou de sciences, là, c'est quand même... on n'est pas familiers avec ça. Mais, il y a une chose que l'on a entendue dans le cadre des séances de cette commission, parce que ça fait quand même depuis le mois de janvier qu'on entend beaucoup d'intervenants du monde de l'énergie, et je ne me souviens plus qui nous a dit ça, mais on nous a dit que le gaz naturel était un facteur de développement économique. La disponibilité du gaz naturel dans une région entraînerait du développement économique. En fait, c'est même une affirmation. Pourriez-vous nous expliquer un peu ce que ça veut dire puis qu'est-ce qu'on devrait retenir de ça?
M. Kelly (Glenn): Bien, d'abord ? et je vais demander à M. Imbleau d'ajouter des commentaires ? mais, premièrement, personnellement, j'ai vu et appris que, lors des trois séances d'information et les multiples rencontres à Lévis, le gaz naturel n'est pas connu très bien au Québec. Comme vous le disiez, en milieu urbain, oui, en milieu urbain et périphérique, ce n'est pas toujours le cas. Donc, il y a de l'information, de la formation à faire sur le gaz naturel, sa provenance, son utilisation et ses propriétés.
Le gaz naturel comme facteur de développement économique, naturellement le gaz naturel peut être utilisé pour la chauffe mais peut aussi être utilisé dans les procédés industriels, dans certains procédés où on ne peut utiliser autre chose que le gaz naturel. Donc, double effet: source d'énergie efficace au niveau physique, source d'énergie fiable, source d'énergie environnementalement avantageuse et des fois seule source d'énergie qu'on peut utiliser, dans certains procédés industriels. M. Imbleau.
M. Imbleau (Martin): Je pense que vous avez répondu à l'essentiel de la réponse, M. Kelly, mais Je me contenterais de dire effectivement que le gaz naturel lui-même est un intrant très important pour certaines industries. On n'a qu'à penser à la pétrochimie ou à l'industrie du verre, où c'est la matière première qui est utilisée, et en son absence... et ça ne peut pas être remplacé. Et, dans un deuxième temps, bon, l'aspect économique est tout aussi important. La concurrence entre les sources d'énergie est une préoccupation première de toutes les industries et des consommateurs québécois ou autres, et bien des régions n'ont pas cette alternative du gaz naturel. Donc, la pénétration du gaz naturel dans ces marchés permet de créer une concurrence entre les sources d'énergie, que ce soit l'huile, le gaz ou encore, en région, de façon encore plus claire, le propane. Donc, c'est clair que l'arrivée... et on l'a vu dans certaines régions et on espère que le gaz est mieux connu dans d'autres régions qu'à Montréal, parce que Gaz Métro pénètre des territoires où elle n'était pas dans le passé. Donc, on a vu le caractère économique et les aspects positifs qu'a amenés la percée du gaz naturel dans les régions.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée, allez-y, oui.
Mme Dionne-Marsolais: Merci. Est-ce que le gaz naturel peut être un facteur important dans le développement agroalimentaire? Dans l'industrie, dans le secteur agroalimentaire, est-ce qu'il peut jouer un rôle dans ça?
n(16 h 10)nM. Imbleau (Martin): Absolument. Je crois même que... J'ai croisé rapidement tout à l'heure le député de Saint-Hyacinthe, les gens de la région de Saint-Hyacinthe, qui sont dans ce qu'on appelle un peu la ceinture verte, donc le grenier du Québec, bénéficient depuis quelques années de la présence du gaz naturel, qui est utilisé à bien des procédés dont le séchage des céréales et qui a remplacé à bien des égards des sources, d'autres sources d'énergie plus problématiques et plus coûteuses, comme le propane. Donc, c'est un marché d'ailleurs qui est desservi maintenant et sur lequel focusse énormément le distributeur Gaz Métro au Québec.
Mme Dionne-Marsolais: Mais évidemment, au Québec, le gaz naturel ne se rend pas partout. Il est quand même limité sur... enfin par le réseau de transport. Est-ce que la présence de ports méthaniers, s'il y en avait deux, par exemple, ou même juste un, est-ce que cette augmentation de disponibilité de gaz naturel pourrait avoir un effet sur l'extension du réseau gazier par l'industrie?
M. Kelly (Glenn): Sur l'extension... Si on parle des deux projets, soit le projet d'Énergie Cacouna, la présence d'Énergie Cacouna en région éloignée et le fait qu'Énergie Cacouna doit se brancher au réseau, je présume au réseau existant de transport, permettrait d'amener ou d'avoir, dans une région de Québec qui n'a pas accès au gaz naturel présentement, d'en avoir accès. Ça, c'est indéniable comme constat.
Sur la question d'avoir deux... Est-ce que deux terminaux méthaniers pourront faire en sorte qu'on extensionne le réseau ailleurs au Québec? Je crois que non, mais je demandais à M. Imbleau d'ajouter.
M. Imbleau (Martin): J'ajouterais simplement que, d'abord et avant tout, le projet Rabaska vise à pallier la situation de captivité du Québec. Cela dit, une concurrence entre les sources d'approvisionnement aura un effet bénéfique sur les prix. Un effet bénéfique sur les prix, bien ça ne peut que favoriser à long terme une extension de réseau. Est-ce qu'on prévoit, dans les prochaines années, à cause de Rabaska, il y aura une extension, jour 1, du système de distribution. Ce n'est pas du tout ce que l'on prétend. Mais, par contre, de façon un peu macroéconomique, si je peux me permettre, c'est clair qu'un prix moins cher ne peut que favoriser l'atteinte de nouvelles zones de marché, là.
Mme Dionne-Marsolais: Avant de passer la parole à mon collègue du Saguenay?Lac-Saint-Jean, j'aimerais vous poser une question. Est-ce que vous avez été surpris et inquiet par le reportage de Radio-Canada sur la sécurité des installations d'Hydro-Québec? Je ne parle pas de panique, là, je parle de surprise et d'inquiétude.
Le Président (M. Bachand): M. Kelly.
M. Kelly (Glenn): Surpris, un peu, inquiet, je dirais non, pas à en paniquer. On a des installations hydroélectriques, au Québec, robustes et fiables, et je peux vous assurer que notre terminal, en termes de mesures de sécurité, c'est une double clôture qui fait le tour de toutes les installations terrestres et même maritimes, la partie terrain près du fleuve avec détecteur de mouvement et caméras. Donc, au niveau sécurité, nous allons avoir, et nos partenaires ont, en France, des mesures très, très larges et utilisant la meilleure technologie disponible.
Le Président (M. Bachand): Merci, Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie.
Mme Dionne-Marsolais: Surpris, inquiet, mais pas de panique.
M. Kelly (Glenn): Non, non pas de panique.
Mme Dionne-Marsolais: C'est à peu près ça, hein? C'est ça que vous venez de dire. D'accord. Je vais passer la parole à mon collègue du Saguenay?Lac-Saint-Jean.
Le Président (M. Bachand): Donc, comme vous le disiez si bien, je vais passer donc la parole au député de Lac-Saint-Jean. Allez-y, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Tremblay: Vous êtes trop aimable. Alors, ma question... Vous dites qu'à la suite de votre présence, en fin de compte, il est possible que le prix du gaz diminue, et on sait que, lorsque le prix du gaz diminue, la demande va probablement augmenter, et le gaz naturel sera une source d'énergie plus compétitive que d'autres. Cependant, il y a beaucoup de gens au Québec, je suis porte-parole en environnement, je tente de les représenter du mieux que je peux, ce souci d'une trop grande carbonisation de l'industrie québécoise, si on peut dire, et je doute que votre action puisse permettre une décarbonisation, si on peut dire, de l'industrie québécoise.
Mais, justement, quel est l'avantage par rapport aux autres sources d'énergie, comme si on prend, par exemple, un mazout qui est extrêmement bien raffiné, si j'utilise un mazout très bien raffiné, combien de pourcentage de GES de moins le gaz naturel engendrera?
Le Président (M. Bachand): M. Kelly.
M. Kelly (Glenn): Le chiffre exact pour un mazout très bien raffiné, je ne l'ai pas au bout des doigts. Je pourrais demander à mes deux collègues. Mais ce que je peux vous dire, c'est que, pour chaque BCF de gaz naturel qui est perdu auprès du mazout lourd, c'est 45 000 à 50 000 tonnes de gaz à effet de serre additionnelles qu'on émet dans l'environnement ou dans l'air québécois à chaque année. Rappelez-vous que, depuis 2001, nous avons perdu 30 BCF, des ventes de gaz naturel, au mazout lourd, et c'est 1,5 million de tonnes de gaz à effet de serre de plus.
Donc, on a des choix à faire au Québec. Et ce serait facile de dire qu'on peut décarboniser notre province, mais je pense que c'est utopique, et on doit faire des choix entre les énergies les moins polluantes. Rappelons-nous qu'en termes d'énergie carbonique, pour utiliser vos termes, le gaz naturel est l'énergie la plus performante. Et rappelons-nous, dernièrement, le smog à Montréal, et les évaluations effectuées par certains de vos confrères environnementalistes, qui ont statué qu'une des raisons du smog qu'on a vécu cette année était notamment l'augmentation de l'utilisation du mazout au Québec, aux dépens du gaz naturel. C'est une situation qu'on veut renverser.
Le Président (M. Bachand): M. le député.
M. Tremblay: Hier, nous avons reçu l'industrie nucléaire et nous avons posé des questions à l'égard de la sécurité. Et, d'ailleurs, je pense qu'il y a 39 % des gens, dans votre sondage, qui ne veulent pas de votre projet ou du moins sont inquiets à cause des questions de sécurité. Et, hier, nous avons posé la question: Si un avion ou même un de vos bateaux, dans le fleuve Saint-Laurent, avait une collision avec un autre gros bateau ? je sais bien que vous nous dites que ce n'est pas encore arrivé, mais, bon, bien, ça peut toujours arriver, le fleuve n'est pas trop large, et des accidents d'avion peuvent toujours arriver ? quelle serait la conséquence?
M. Kelly (Glen): Très bonne question, c'est des choses qu'on a regardées et qu'on va présenter au ministère de l'Environnement.
M. Tremblay: ...
M. Kelly (Glen): Pardon?
M. Tremblay: Vous ne l'avez pas essayé?
M. Kelly (Glen): Je ne l'ai pas essayé. Non, non. Mais il existe quand même un retour d'expérience. Permettez-moi. Un navire, l'El Paso Kaiser, qui a eu un accident à pleine vitesse, c'est-à-dire entre 18 et 19 noeuds, dans le détroit de Gibraltar, qui a eu un «grounding», je m'excuse, un échouement à pleine vitesse. Pardon?
Une voix: Il y a 20 ans.
M. Kelly (Glen): Il y a 20 ans, oui, en 1900... il y a 20 ans. Et il y a eu un dommage important à la coque externe ou extérieure du bateau. Mais, comme on parlait tout à l'heure, c'est des navires à double coque, et il n'y a pas eu de dommages au réservoir de GNL à l'intérieur. Donc, on a quand même un retour d'expérience. Je dirais aussi, une partie des analyses qu'on fait et qu'on doit faire, c'est justement les impacts. Si deux navires de la taille d'un méthanier se rencontraient à 90 °, quelle serait la vitesse requise du navire pour pénétrer quand même un espace de trois mètres, de 10 pieds, entre la coque extérieure, la coque interne, et aller causer un trou dans le réservoir interne? Ça prend un navire énorme, de un, on parle de 100 000, 150 000 tonnes et à une vitesse d'environ sept à huit noeuds, et l'impact doit être à 90 °. Donc, on sait que la probabilité que cela arrive est très basse, et, même si cela arrivait, le GNL qu'on perdrait du trou dans le navire et son inflammation, les impacts seraient à l'intérieur de 400 mètres du navire. Et nos zones d'exclusion, pour le projet Rabaska, prennent notamment en compte de tels scénarios.
Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque.
M. Tremblay: Puis... Ah, oui. O.K., vas-y.
Le Président (M. Bachand): Ah non! Excusez, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Tremblay: Bien, c'est parce qu'il n'a pas parlé... vous n'avez pas parlé d'avions. Vous avez fait des simulations aussi... Je sais que c'est peut-être de la paranoïa, mais, hier, on a posé ces questions-là dans le monde du nucléaire, et donc je me dis qu'il faut voir...
M. Kelly (Glen): Sur les avions, non, on n'a pas fait de simulations. En ce qui concerne les installations terrestres, nos scénarios de zones de sécurité, pour établir les zones de sécurité, font même l'hypothèse de ce que j'appelle la main de Dieu, où est-ce qu'on prend notre réservoir, qui contient 160 000 m³ de GNL, réservoir à double paroi, un mètre de béton ? et si c'est un Cessna, je ne voudrais pas être le pilote du Cessna, parce que le réservoir ne serait pas égratigné ? et on fait l'hypothèse de la main de Dieu, où est-ce qu'on lève ce réservoir et on laisse fuir tout le GNL. Nous avons un troisième niveau de sécurité, qui sont des bassins de rétention, et donc laisser fuir tout le GNL, le laisser s'évaporer et l'allumer. Les effets d'un tel scénario seraient contenus à l'intérieur des terrains dont nous possédons. Donc, c'est des scénarios qu'on regarde, pas directement l'avion, mais des scénarios du même type, et qu'on devra aussi présenter d'une façon très élaborée au ministère de l'Environnement du Québec et de la Sécurité publique, notamment.
M. Tremblay: Combien il reste de temps?
Le Président (M. Bachand): Bien oui, absolument. Allez-y, allez-y.
n(16 h 20)nM. Tremblay: Certains écologistes disent que vos projets sont en fait une porte de sortie, puisque les États-Unis ne sont pas intéressés à avoir ce genre de projets. C'est quoi, la présence de ports méthaniers aux États-Unis?
M. Kelly (Glenn): Il y a présentement quatre projets... pas quatre projets, quatre sites ou quatre terminaux qui sont déjà en opération aux États-Unis et une quarantaine d'autres projets. Le fait de dire que les Américains ne veulent pas de terminaux méthaniers, c'est totalement, mais totalement faux. Oui, il y a des projets où est-ce que l'opposition locale se fait entendre, mais c'est totalement faux de dire que les projets aux États-Unis... ou que les Américains n'en veulent pas, tu sais.
Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque, et je sais que votre collègue veut aussi intervenir à la fin. Allez-y, M. le député.
M. Dufour: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, messieurs, à l'Assemblée nationale, Alors, en page 20, vous parlez que, bon, il y a 46 terminaux de regazéification et qu'on ne dénombre aucun accident majeur. Et, plus bas, au niveau des normes respectées par Rabaska, non seulement l'industrie GNL s'impose-t-elle elle-même des normes de sécurité très élevées, mais elle doit aussi répondre à des codes et standards internationaux, nationaux et locaux très contraignants.
Un peu plus bas, on parle de 30 codes. Je ne veux pas que vous m'énumériez les 30 codes, là, mais quelques-uns de ces codes, juste pour nous donner une idée, là.
M. Kelly (Glenn): Au niveau des installations, on devra respecter la NFPA-59 américaine, la CSA Z-276, et on a mis sur nous de respecter aussi la EN-1473 qui est la norme européenne traitant des installations de GNL. Ensuite, la liste des normes, vous en avez une liste dans un des pamphlets qu'on vous a donnés, mais ça va être des normes canadiennes, notamment de la CSA ou des normes de la NFPA, pour les matériaux utilisés, les normes API aussi, American Petrolium Institute, et je dirais que la liste exhaustive est beaucoup plus longue que les 30 qu'on mentionne, c'est probablement de l'ordre de 50.
M. Dufour: Dans les documents que vous nous avez donnés?
M. Kelly (Glenn): Oui, je peux vous le retrouver et vous le montrer tout à l'heure.
M. Dufour: Il n'y a pas de problème, je vais les parcourir.
Le Président (M. Bachand): Ça va, M. le député? Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci. Une petite question additionnelle. Dans votre document, vous parlez des réserves mondiales de gaz naturel et vous avez en premier lieu la Russie, en deuxième lieu l'Iran; et, dans votre paragraphe 4.3, quand vous faites le portrait du gaz naturel liquéfié dans le monde, vous parlez des pays exportateurs et vous ne parlez pas de la Russie ni de l'Iran. Est-ce que ça veut dire que... C'est parce qu'une des questions que l'on a discutées avec... je crois que c'est les gens... enfin les promoteurs du projet Cacouna, là, c'était que la source d'approvisionnement serait... ? non, je pense que c'est avec Gaz Métro qu'on a discuté ça ? parce que, quand même, le gaz naturel, c'est une forme d'énergie qui s'épuise, aussi, qui n'est pas renouvelable, donc on se base sur les réserves disponibles, mais, si l'intérêt pour le gaz naturel liquéfié est si grand, des pays qui ont des réserves aussi importantes comme la Russie devraient être intéressés, et d'ailleurs c'est un peu ce qu'on nous a laissé entendre, qu'il y avait un potentiel énorme là-bas. Mais ils ne sont pas exportateurs. Est-ce qu'ils en fabriquent, du gaz naturel liquéfié, en Russie?
M. Kelly (Glenn): Présentement, pas à ma connaissance, mais je vais passer la parole à M. Hochart, qui peut nous parler de la Russie et de l'Iran et des réserves russes.
Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Hochart.
M. Hochart (Philippe): Oui. Effectivement, les réserves mondiales de gaz sont réparties en Russie, en Iran, au Qatar, mais il existe aussi énormément de réserves dans des pays exportateurs de GNL, comme l'Algérie, qui sont très importantes. Alors, la Russie, pour vous figurer, ce sont des réserves qui représentent entre 30 % et 40 % des réserves mondiales de gaz. Donc, c'est un potentiel énorme. La Russie exporte énormément de gaz en Europe par voie de pipeline, vient de lancer un projet qui a mis 15 ans à déboucher, dans les îles Sakhaline, c'est-à-dire à l'extrême est de la Russie, au nord du Japon. C'est un projet qui vise à exporter du GNL aux États-Unis, au Japon, dans les pays d'Asie, donc c'est le premier projet d'exportation de GNL en Russie. Je vous dis, il a mis 15 ans à être élaboré. L'Iran est un pays gazier à fort potentiel. Le Qatar est un autre pays gazier à fort potentiel. Mais l'économie des choses a fait aussi que d'abord on s'est intéressé aux pays qui étaient proches des zones de consommation, comme l'Algérie, comme le Nigeria, comme l'Égypte, qui sont des pays exportateurs de gaz, pour citer les pays importants.
Donc, vous avez dit: Les réserves s'épuisent. C'est vrai, mais, comme il a été mentionné dans l'exposé de M. Kelly, les réserves mondiales sont aujourd'hui d'environ 70 ans de la consommation, et ça fait une dizaine d'années que ce chiffre est maintenu. C'est-à-dire que, chaque année, on trouve à peu près autant de réserves que celles qu'on consomme. Donc, c'est un potentiel qui n'est pas inépuisable, mais le progrès technique, la baisse des coûts font qu'on est capable maintenant d'aller chercher du gaz un peu plus loin. C'est pour ça, par exemple, que les États-Unis sont capables d'envisager ? ou l'Amérique du Nord ? d'avoir du gaz venant du Qatar.
Le Président (M. Bachand): Merci.
Mme Dionne-Marsolais: Un des problèmes qui se posent dans l'avenir en termes de sécurité énergétique, ou je devrais dire de l'avenir énergétique, c'est le secteur du transport. Si on pouvait trouver quelque chose qui remplace le pétrole dans le transport, on serait tous bien contents. Et, dans le bilan du Québec en particulier là, c'est une grosse partie de notre dépendance.
Est-ce que vous pouvez nous parler... Est-ce que le gaz naturel peut jouer un rôle dans le secteur du transport?
Le Président (M. Bachand): Très rapidement et en conclusion, M. Kelly.
M. Kelly (Glenn): Pardon?
Le Président (M. Bachand): Très rapidement et en conclusion, s'il vous plaît.
M. Kelly (Glenn): Oui, il peut. Vous sortez un peu de mon champ de compétence, mais je sais qu'il y a des flottes de camions aux États-Unis qui fonctionnent au GNL, et donc c'est possiblement un débouché ou une filière à regarder dans l'avenir pour les réseaux de transport ou le côté transport. C'est l'utilisation de gaz naturel sous sa forme liquéfiée pour certaines flottes de véhicules.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. Kelly. Il ne nous reste plus qu'à vous remercier de vous être présenté à cette commission. Donc, M. Imbleau, M. Kelly et M. Hochart, bon retour chez vous. Merci infiniment de vous être présentés devant cette commission. Je vais suspendre les travaux quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 27)
(Reprise à 16 h 29)
Le Président (M. Bachand): Donc, nous allons reprendre les travaux. Je vais donc inviter le Comité national sur l'environnement et le développement durable et le Comité des jeunes du Parti québécois à venir s'asseoir, s'il vous plaît.
n(16 h 30)n Donc, messieurs du Comité national sur l'environnement, veuillez prendre place, s'il vous plaît. Donc, je vous souhaite la bienvenue à la Commission de l'économie et du travail. Je vous rappelle rapidement les règles, messieurs. Vous avez 20 minutes pour votre présentation, et 20 minutes de questions de part et d'autre. Et, sans plus tarder, pour le bénéfice de nos collaborateurs et de nos collègues, si c'est possible de vous présenter, messieurs.
Comité national sur l'environnement
et le développement durable (CNEDD)
et Comité national des jeunes
du Parti québécois (CNJPQ)
M. Rousseau (Guillaume): Oui. Bonjour, M. le Président, Mme, MM. les députés. Je suis Guillaume Rousseau, vice-président responsable du contenu au Comité national des jeunes du Parti québécois, et mon collègue ici présent est Christian Ouellet, président du Comité national de l'environnement et du développement durable. Nous tenons d'abord à remercier les membres de cette commission qui nous entendent aujourd'hui sur un sujet important, et ce, à un moment propice. En effet, nous croyons qu'il n'y a pas eu de moment aussi important dans l'histoire énergétique du Québec depuis 1962. Nous devons foncer vers le Protocole de Kyoto, les énergies vertes, l'élimination de la surconsommation, l'efficacité énergétique, la recherche et la tarification équitable. Les Québécois et les Québécoises sont fiers d'Hydro-Québec, ils seront fiers d'une politique verte de l'énergie. C'est parce que nous croyons à cette réforme que nous sommes ici aujourd'hui au nom du Comité national de l'environnement et du développement durable et du Comité national des jeunes.
Au Parti québécois, il y a des comités de réflexion qui formulent des propositions principalement à l'intention des conseils nationaux, mais nous tenions à aller plus loin en déposant un mémoire devant cette commission. Nos comités sont élus par les membres, mais ils n'engagent pas la position générale du parti. Ceci dit, ce document s'inscrit dans la continuité des politiques du Parti québécois. En tant que bénévoles d'allégeance au développement durable, nous profitons de cette commission parlementaire pour dire et faire savoir les préoccupations des gens sensibles à leur milieu de vie, et plus particulièrement des jeunes. Ce mémoire parle des véritables enjeux auxquels est confronté le Québec. Notre position, nos propos ne se veulent pas partisans, ils se veulent plutôt une analyse objective fondée sur un principe tout aussi objectif, celui du développement durable. Cependant, nous ne pouvons nous empêcher de déplorer le fait que le gouvernement a pris un certain nombre de décisions s'écartant de la politique de 1996, et ce, avant même le début de cette commission parlementaire.
Maintenant, permettez-moi d'entrer dans le vif du sujet.
Pour atteindre la sécurité énergétique, le Québec devra réformer en profondeur le secteur énergétique par le développement durable et la mise en place d'un véritable plan vert, un plan pour les jeunes, un plan d'avenir. Plus précisément, il faut réduire la surconsommation, accroître les mesures d'efficacité énergétique et accroître la production au niveau d'énergies vertes. La réforme proposée doit tirer profit des fondements de l'extraordinaire héritage de Jean Lesage et de René Lévesque, qui ont jeté les bases d'une électricité conviviale, une électricité nationale. L'accès à l'électricité pour tous au même prix partout au Québec a permis un développement équitable sur l'ensemble du territoire.
Les grands principes des fondateurs ne sont donc pas à remettre en question, au contraire. Il faut simplement ajouter le développement durable et revenir aux missions essentielles d'Hydro-Québec. Ces missions consistent à garantir un service sans faille, garantir un service de qualité, garantir des tarifs domestiques respectant la capacité de payer des usagers, favoriser la viabilité des PME partout au Québec, garantir le maximum de bienfaits de l'énergie nationale avec le minimum de quantité, autrement dit être efficaces énergiquement, garantir le maximum de sécurité d'approvisionnement avant de penser à l'action sur les marchés étrangers, garantir des dividendes à notre gouvernement, certes, mais pas à n'importe quel prix, il y a d'autres considérations. Et une chose qui est sûre, c'est que le gouvernement ne doit pas presser le citron des sociétés d'État pour faire de l'argent et penser ainsi s'épargner la bataille qu'il doit faire avec Ottawa au niveau du déséquilibre fiscal. Cette bataille, il doit la faire, peu importe, même si elle risque d'être perdue, mais, au moins, il a des chances de faire des petits gains ou, a contrario, de prouver que la solution est tout autre, soit la souveraineté. Mais ça, c'est une autre histoire.
Par ailleurs, en plus des missions traditionnelles d'Hydro-Québec, cette société d'État doit maintenant appliquer le développement durable. Évidemment, Hydro-Québec parle de développement durable depuis plusieurs années, mais ça se traduit par trop peu d'action dans les faits, selon nous. Et, à ce sujet, le développement durable peut être appliqué dès maintenant. On n'a pas besoin d'atteindre la loi cadre, on peut agir dès maintenant, le cadre législatif est en place: il y a l'article 10 de la Loi sur le ministère de l'Environnement qui établit que le ministre de l'Environnement est chargé d'assurer, dans une perspective de développement durable, le respect de la loi; il y a la Loi sur le ministère des Ressources naturelles qui parle d'aménagement durable; il y a l'article 5 de la Loi sur la Régie de l'énergie et il y a le principe de précaution environnementale, qui lui-même est... inclus au principe de développement durable, et ce principe de la précaution environnementale est considéré par la jurisprudence comme un principe essentiel pour l'interprétation des lois et règlements tant fédéraux que provinciaux. Le cadre législatif est donc en place pour mettre en place le développement durable et atteindre plusieurs objectifs, dont l'intégration de l'environnement et de l'économie, la protection des écosystèmes, la promotion de l'équité et de la justice sociale, la prévention de la pollution, le respect de la nature, le respect des générations futures et l'application d'une approche intégrée pour la planification et la prise de décision grâce au système de l'évaluation environnementale.
Cela étant dit, la première chose à faire pour assurer notre sécurité énergétique consiste à mettre fin au déficit énergétique. Vous le savez tous, en 2004, le Québec a été un importateur net d'électricité, et ce, pour une première fois dans son histoire récente, et ça, ça doit être interprété comme une sonnette d'alarme. L'heure du réveil a sonné, il faut maintenant mettre en place des mesures pour réduire la surconsommation, améliorer notre bilan en matière d'efficacité énergétique et développer les énergies vertes. Je vais maintenant laisser la parole à M. Christian Ouellet, qui va élaborer au sujet de ces trois priorités notamment.
Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Ouellet.
M. Ouellet (Christian): Merci, Guillaume. M. le Président, reprenons la sécurité énergétique pour nous et pour les futures générations du Québec, car nous sommes convaincus que cette sécurité serait assurée par la réduction de la surconsommation; deuxièmement, l'accroissement des mesures en efficacité énergétique. D'ailleurs, le Vermont vient récemment de nous démontrer qu'ils ont été capables de réduire leur demande de 3 % sur ces deux premiers points-là. Troisièmement, par l'accroissement de la production pour rencontrer une demande réduite; par les énergies vertes et aussi comme énergie de remplacement sur une longue échelle du temps... et de remplacement, je veux dire, du mazout et du gaz afin de réduire notre dépendance. Ceci doit s'appliquer dans les quatre verts: le transport vert, le bâtiment vert, l'usine verte et la production d'énergie verte.
Nous recommandons que les priorités dans la réforme de la politique énergétique soient les stratégies suivantes. Premièrement, que le véritable développement durable soit le principe inspirant la réforme, l'élaboration et l'interprétation de la politique énergétique.
Deuxièmement, la diminution de la surconsommation avec une campagne de sensibilisation de l'ensemble de la population par l'État.
Troisièmement, l'efficacité énergétique à long terme, ce qui suppose notamment que les objectifs soient considérablement augmentés et que l'Agence de l'efficacité énergétique soit le responsable du dossier et que l'État mette en place une politique globale comprenant une combinaison d'incitatifs financiers, de marketing, d'information et de services déployée sur plusieurs années.
Quatrièmement, le développement des énergies vertes alternatives comme la géothermie, le solaire passif, le photovoltaïque grâce, d'une part, à la mise sur pied d'un vaste programme de recherche et de développement sous la direction de l'Agence de l'efficacité énergétique en tant que maître d'oeuvre. De plus, il faut que le gouvernement fasse la promotion de l'autoproduction d'énergie verte, en excluant les minicentrales.
Cinquièmement, la diminution réelle des émissions de gaz à effet de serre au Québec. Kyoto n'est qu'une étape, mais elle est importante et il faut la réaliser.
Sixièmement, la réduction et le contrôle par tous les moyens possibles de l'énergie consommée dans le secteur du transport.
Septièmement, le développement lorsque nécessaire, après les autres énergies vertes alternatives, des grands barrages hydroélectriques pour lesquels des ententes existent avec les premières nations, la Paix des Braves.
Huitièmement, le décret d'un moratoire permanent sur tous les projets de production par le thermique, incluant les projets de cogénération à 90 % pour fabriquer de l'électricité, tel que ça nous a été présenté par Gaz Métro en octobre dernier. Et aussi le moratoire sur le nucléaire. Exception faite au niveau thermique, de faire de la biomasse pour fabriquer de l'électricité.
n(16 h 40)n Neuvièmement, il faut établir une vision d'avenir sur les grilles tarifaires de l'électricité. Alors, nous suggérons que l'augmentation sur une longue période du prix de l'électricité permettra de rendre équitables des nouvelles énergies, les énergies vertes et alternatives, ainsi que l'efficacité énergétique. Nous proposons donc une réforme de fond de la tarification qui permettra de jouir du bloc patrimonial d'électricité de 165 TWh au même tarif qu'actuellement comme consommation de base pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Puis, progressivement, les tarifs augmenteraient substantiellement pour la consommation de luxe.
Une telle réforme de la tarification n'apporterait pas plus de problèmes que la tarification selon les heures d'utilisation dont on parle actuellement et qui devrait être intégrée. De plus, un programme d'aide en économie d'énergie aiderait à régulariser les besoins de base des ménages. Une telle tarification permettrait d'inclure les externalités. Ceci est longuement discuté dans notre mémoire.
Nous soulignons au passage que nous sommes contre toute augmentation tarifaire uniforme pour tous les types de consommation domestique. Ça ne correspond pas au développement durable.
Dixièmement, sur le plan de gestion de l'électricité, nous devons abolir la loi n° 116, qui n'a plus sa raison d'être, et redonner à la Régie de l'énergie ses responsabilités, comme l'approbation des grilles tarifaires.
Permettez-nous de revenir sur la nécessité de mettre en place les sept énergies vertes suivantes: l'installation d'éoliennes, au rythme de 1 000 MW par année; par la géothermie ? par la géothermie, on veut dire extraire l'énergie renouvelable du sol ? on devrait prévoir, pour toutes les maisons neuves et les bâtiments neufs, la mise en place d'un programme incitatif à long terme... du parc total existant des bâtiments la mise en place de la géothermie. Le solaire passif ? obtenir du chauffage du soleil par les ouvertures naturelles des bâtiments ? devrait être inclus pour tous les nouveaux bâtiments, tant résidentiels que bâtiments autres; d'ailleurs, le Code du bâtiment, de 1981, doit être mis à jour en fonction des nouvelles connaissances des techniques de 2005.
Le photovoltaïque, qui est de faire de l'électricité avec de l'énergie solaire: il faut mettre sur pied, en partenariat avec l'entreprise privée et le gouvernement, un programme de recherche pour réduire les coûts de production et augmenter l'efficacité et son intégration aux bâtiments. Et puis les biogaz, qui sont les gaz de méthane compressibles émis par la décomposition des matières organiques, il faut se servir de tous lieux d'enfouissement sanitaires, les LES existants, et aussi des déjections bovines. Cependant, nous devrons encourager le compostage universel afin de réduire les lieux d'enfouissement sanitaires et les gaz à effet de serre qui y sont produits.
L'énergie du bois, enfin. Il faut établir des normes pour toutes les unités de chauffage au bois et prévoir le remplacement des unités polluantes actuelles, car le bois peut être et doit être un apport sain et efficace de notre société.
Enfin, il faut mettre en place un programme de recherche sur l'hydrogène pour évaluer l'énergie intrinsèque nécessaire à la production et à l'utilisation de l'hydrogène. Il faut donc voir si à long terme cette énergie de transfert peut être en accord avec le développement durable. Il est important de faire ces études avant de dépenser en recherche sur la mise en oeuvre. Guillaume va maintenant conclure sur notre proposition.
Le Président (M. Bachand): Oui, allez-y, M. Rousseau.
M. Rousseau (Guillaume): Merci. Donc, je vais revenir un instant sur la tarification. Je suis sûr que c'est un sujet qui vous intéresse particulièrement. M. Ouellet a bien expliqué notre proposition, qui se trouve à être une augmentation de tarifs modulée, progressive, respectueuse de l'équité sociale, donc qui n'affecte pas trop les ménages à faibles revenus. Mais, en fait, je veux préciser que cette proposition-là, elle est très bonne, mais elle sert surtout à lancer le débat. Donc, au-delà de notre proposition, ça ne doit pas être vu comme un dogme. Au-delà de cette proposition-là, ce qui importe, c'est le débat, parce que là on assiste depuis quelques années à des hausses de 1 %, 1,5 %; ce n'est pas très important, mais, à tous les six mois, à un moment donné ça commence à être important et ça fait une pression sur les citoyens. Et le problème, c'est qu'il ne semble pas y avoir de vision de ce que doit être une politique tarifaire. C'est seulement des hausses comme ça, à coûts plus ou moins justifiés, donc ça prend vraiment, d'après nous, une vision.
Et, pour que se dégage une vision, il faudrait vraiment un grand débat public, et c'est vraiment important. Ce n'est pas seulement une question de chiffres, d'experts, de grilles, il y a des valeurs en arrière de ça, par exemple, à savoir: est-ce qu'on doit moduler les tarifs? Nous, on pense que oui pour ne pas trop affecter les personnes à faibles revenus, mais il y a d'autres personnes qui nous disent: Non, ça, c'est la pauvreté, ça concerne le ministère des Affaires sociales, c'est un autre département, Hydro-Québec n'a pas à s'occuper de ça. Donc, c'est une autre vision, à travers ces débats de chiffres qui peuvent concerner des experts, ça concerne aussi le citoyen et des valeurs importantes comme l'équité sociale.
Enfin, c'est important de préciser aussi un autre point, c'est les surplus. Lorsqu'il y aura des surplus énergétiques importants, parce qu'on pense qu'effectivement, si on respecte les priorités qu'on a énoncées plus tôt, il y aura des surplus énergétiques qui vont se dégager, et, à ce moment-là, qu'en faire?
Tout de suite nous vient à l'esprit l'exportation, puisque c'est un peu dans cette mentalité-là qu'Hydro-Québec est embarquée depuis quelques années. On a entendu des leaders d'opinion aussi favorables à cette idée-là il n'y a pas longtemps. Mais, nous, on pense que l'exportation, même en cas de surplus, ça ne doit vraiment pas être une priorité. La priorité, ce doit être la création d'emplois chez nous. On a vu que ça s'est fait avec les grandes alumineries grâce à des tarifs préférentiels, mais, nous, on pense qu'il faut étendre cette politique-là, ces tarifs-là aux PME, parce que ce sont les PME qui créent le plus d'emplois au Québec.
En conclusion, l'énergie étant à l'économie ce que l'eau est à la vie, l'enjeu de la présente commission parlementaire est d'une importance cruciale. À l'heure où plusieurs régions et plusieurs secteurs d'activité industrielle connaissent des difficultés, on ne peut manquer cette occasion d'élaborer une politique énergétique dynamisante sur le plan socioéconomique. Ceci doit prendre l'allure d'une véritable révolution en 2005.
Cela dit, toute politique, et a fortiori une politique énergétique, doit être écologiquement responsable, tant l'environnement est un enjeu important pour l'opinion publique et particulièrement pour les jeunes. L'autre volet important, et je viens d'en parler, c'est la lutte à la pauvreté. Pour nous, une politique énergétique, ça doit être équitablement... et socialement équitable.
Il y a donc ces trois impératifs universels qu'il faut avoir en tête. Mais il y en a un autre qui fait la particularité du Québec, c'est l'enjeu identitaire. Parce qu'à travers la politique de l'électricité, c'est la fierté nationale qu'il faut raviver au Québec. Je me souviens, lorsque j'étais petit, il n'y a pas si longtemps, il y avait une campagne de publicité qui disait à peu près ce qui suit: Nous sommes tous Hydro-Québécois, et ça marchait, les gens s'identifiaient à ça. Est-ce que les gens s'identifient aujourd'hui autant à Hydro-Québec? J'en doute. Le lien de confiance a été légèrement miné, et c'est pourquoi il est important qu'Hydro-Québec se rebranche sur les valeurs québécoises, notamment les valeurs de solidarité, les valeurs environnementales, mais aussi une plus grande transparence. Le débat dont je parlais plus tôt sur la tarification, c'est une bonne occasion pour Hydro-Québec de reprendre contact avec la population.
Donc, le défi est à la fois économique, social, écologique et identitaire. C'est un défi immense, on en convient, mais heureusement il existe un concept tout aussi vaste qui permet d'avoir une ligne directrice à travers cette politique-là, et ce principe-là, vous l'aurez compris, c'est le principe du développement durable.
De ce grand principe là découlent les trois grandes priorités qu'on a énoncées: diminution de la surconsommation, efficacité énergétique et développement des énergies vertes. Nous sommes persuadés que la majorité des intervenants et des intervenantes à cette commission iront ou sont allés dans le même sens, de sorte qu'à la fin, à l'issue de cette commission parlementaire là, les grandes lignes d'un consensus social devraient se dégager. À ce moment-là, il n'en tiendra plus qu'à vous, chers parlementaires, d'être à la hauteur des Québécois et des Québécoises qui, à l'image de leurs barrages, savent être à la fois grands et respectueux de l'environnement. Merci.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. Rousseau, vous avez fait des heureux. Je voyais, au visage de certains, que vous étiez les bienvenus à la commission. Mais c'est le cas pour l'ensemble des parlementaires. Donc, je vais donner l'opportunité au ministre des Ressources naturelles et de la Faune de vous poser des questions. M. le ministre.
M. Corbeil: Merci, M. le Président. M. Ouellet, M. Rousseau, bonjour. Vous avez terminé votre présentation en faisant référence à la tarification. Je m'en voudrais de ne pas vous poser la question suivante, parce qu'il y a quelque chose qui serait à préciser, à mon point de vue, c'est en page 55 de votre mémoire, vous suggérez une tarification à paliers de l'électricité au secteur résidentiel. «Ainsi, les petits consommateurs ? je n'aime pas l'expression "petits consommateurs", mais en tout cas, tous ceux qui consomment moins, faibles consommateurs ? continueraient d'acquérir l'électricité à un prix équitable tout en permettant une hausse substantielle du prix pour la consommation de luxe», que vous définissez comme étant de luxe.
À la page 56, à titre d'exemple, vous proposez une première tranche de 20 KWh par jour à 0,05 $, puis une deuxième de 10 à 30 KWh par jour à 0,06 $, et un tarif croissant pour les blocs additionnels de 10 à 20 KWh par jour. Ça, c'est votre modèle, celui que vous préconisez ou que vous suggérez.
n(16 h 50)n Actuellement, là on va regarder la réalité, là, actuellement, un mélange québécois moyen, maison unifamiliale, chauffage électrique, consomme environ 26 000 kWh par année ou 71 kWh par jour. En été, c'est moins, vous en conviendrez, mais, en hiver, la consommation dépasse aisément 100 kWh par jour. Ce Québécois moyen vous dira qu'il ne fait pas de gaspillage; il n'en a pas les moyens. En conséquence, en période de chauffage, vous proposez ni plus ni moins d'accroître de façon substantielle ? j'utilise votre terme ? les tarifs d'électricité sur plus de la moitié de sa consommation.
Dans ce contexte, j'aimerais que vous m'expliquiez votre conception de ce qu'est une consommation de luxe.
Le Président (M. Bachand): M. Rousseau ou M. Ouellet.
M. Ouellet (Christian): Oui. Alors, écoutez, on l'a bien dit dans notre mémoire: Ce n'est qu'un exemple de tarification. On l'a travaillé, on l'a essayé avec des cas concrets, et ça fonctionnait; les augmentations étaient petites quand les gens ne consommaient pas trop et étaient assez substantielles quand les gens consommaient beaucoup plus. C'est évident qu'on donne deux tarifs, parce qu'on ne pourra jamais arriver à un seul tarif, si les gens chauffent à l'électricité ou si les gens ne chauffent pas à l'électricité. Il faut respecter le fait qu'on a offert aux Québécois de chauffer à l'électricité et que maintenant ces gens-là vont chauffer à l'électricité. Mais il y a des gens qui ne chauffent pas à l'électricité, donc on ne peut pas leur donner la même quantité de base d'électricité patrimoniale au même prix, d'une part.
D'une autre part, ce qu'on a calculé, nous, ne correspondait pas du tout aux chiffres que vous avez faits, mais ce n'est qu'un exemple pour donner l'idée de comment il pourrait y avoir, par paliers, des augmentations rapides. Et ce qu'on considère de l'énergie de luxe, de la consommation de luxe, c'est très simple, c'est l'éclairage extérieur inutile dont on ne récupère jamais la chaleur, c'est les appareils qui fonctionnent à l'intérieur... Vous savez qu'actuellement la plupart des maisons, au Québec, si on arrête toute l'électricité et le chauffage, le compteur continue à tourner, parce qu'il y a un tas de choses qu'on ne se rend pas compte qui tournent, comme les gens ne ferment pas bien la radio, ne ferment pas l'ordinateur, etc., mettez-en, mettez-en. Et ça, on considère que c'est du gaspillage, c'est de la consommation de luxe. Autrement dit, les gens ne se donnent même pas la peine de peser sur le piton pour fermer.
Mais il y a aussi le fait que les gens vont laisser allumées des lumières un peu dans n'importe quelle pièce, etc., ou vont chauffer des pièces qui ne sont pas nécessairement très utiles. Et ça, les gens peuvent le faire s'ils ont l'argent pour le faire. On est tout à fait d'accord avec ça. Ce qu'on ne veut pas pénaliser, c'est les gens qui ont des petits moyens. On ne veut pas les pénaliser, eux. Ils vont continuer à avoir, contrairement à une augmentation de tarif qui serait, pour tout le monde, égale, ceux-là continueraient... tout le monde continuerait à avoir un tarif de base. Si les gens sont capables de se réduire à un tarif de base qui ne soit pas nécessairement celui qu'on a mis là ? mais c'est juste un exemple de nombre de kilowattheures à bon marché ? eh bien, les gens... Puis on les aiderait, en plus de ça. Je pense que ce serait important que l'État fasse un programme pour montrer comment est-ce qu'ils peuvent faire des économies d'énergie. Eh bien, à ce moment-là, les gens pourraient ne pas être pénalisés, sauf s'ils veulent absolument consommer de luxe.
M. Corbeil: Mais j'ai un peu de misère à vous suivre, parce qu'on a de nos concitoyens qui vivent à Lorraine, qui ont accès au gaz naturel, qui chauffent leur eau, qui font leur nourriture puis qui chauffent leurs maisons au gaz naturel, et qui paient une facture d'électricité pour l'éclairage. Il y a des gens qui vont se ramasser dans une situation où ils ont un grand quatre et demie ou cinq et demie, avec des moyens modestes, et qui est mal isolé, et qui vont consommer beaucoup d'énergie. Alors, dans votre équilibre de hausser les tarifs au fur et à mesure de l'accroissement de la consommation, je pense qu'on ne leur rend pas service, surtout en hiver.
M. Ouellet (Christian): C'est évident qu'il faut absolument que...
M. Corbeil: Alors, la consommation de luxe...
M. Ouellet (Christian): Oui.
M. Corbeil: ...la surconsommation, etc., c'est un concept qu'on peut théoriquement énoncer comme ça, mais comment on «ground» ça ? sans faire de jeu de mots avec l'électricité ? comment on «ground» ça avec la réalité de tous les jours de M. et Mme Tout-le-monde?
M. Rousseau (Guillaume): Oui. Si je peux répondre...
Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Rousseau. Bien sûr.
M. Rousseau (Guillaume): Oui. Donc, quand on parle de surconsommation ou de consommation excessive, bon, c'est subjectif, mais, avec des comparaisons, on peut trouver la réponse.
Par exemple, avec une tarification à paliers, le palier supérieur, ça pourrait être le 10 % des ménages les plus énergivores. Donc, ils font de la surconsommation. On peut présumer qu'ils le font, puisqu'ils sont dans le 10 % plus énergivore, en comparant. Effectivement, il y a le cas des mauvaises isolations de maisons, et tout, mais c'est pourquoi on mentionne que l'efficacité énergétique, c'est une des grandes priorités et qu'il faut mettre beaucoup d'argent là-dessus. Et on dit notamment dans le mémoire que le but, c'est d'offrir tellement de mesures incitatives à l'efficacité énergétique que, même si les tarifs sont plus élevés, ça ne coûtera pas plus cher au citoyen qui va participer à ces mesures d'efficacité énergétique puis de baisse de la surconsommation. Donc, c'est cet équilibre-là qu'on cherche. Mais, pour répondre à votre question directement, c'est ça, la surconsommation, on a juste à aller chercher le 10 % le plus énergivore, tout simplement.
M. Corbeil: Dans mon exemple que j'ai donné tantôt, au niveau du citoyen qui habite une résidence cossue dans Lorraine versus une famille qui est installée dans un cinq et demie qui est mal isolé, puis qu'il y a cinq enfants ? ça veut dire, ça, c'est cinq bains, c'est cinq fois plus de linge à sécher, c'est cinq fois plus de quantité de nourriture à faire chauffer ? vous ne lui rendez pas bien, bien service, là, dans votre approche.
M. Ouellet (Christian): Je pense qu'effectivement il est question, comme disait mon collègue, de faire de l'efficacité énergétique dans ces logements-là, d'une part; d'une autre part, les gens qui se chauffent comme ça puis qui sont cinq dans une maison auraient un bloc patrimonial qui leur serait accordé à un tarif actuel beaucoup plus grand que celui qui vit dans une maison à Lorraine et qui, lui, ne chauffe pas à l'électricité. Mais, en plus, c'est que c'est un principe qu'on essaie de démontrer, on essaie de démontrer qu'il ne faut pas augmenter l'énergie de base pour les gens, mais il faut l'augmenter pour ceux qui veulent consommer.
M. Corbeil: Quand vous parlez de gaspillage, de surconsommation et de luxe, est-ce qu'on devrait revoir l'approche de la Commission de la capitale nationale, qui subventionne des mises en lumière et qui éclaire des édifices publics à Québec de façon très abondante. Sans vouloir faire un éditorial, là, moi, personnellement, je pense que c'est quelque chose qu'on pourrait réviser, ça.
M. Ouellet (Christian): Tout à fait, M. le ministre. Actuellement, il y a eu une étude qui a été faite, il y a eu plusieurs études qui ont été faites, en 2001, 2002, puis ils viennent de sortir, en 2003, ces études-là, et ils démontrent que, au Québec, on dépense 30 % de plus d'énergie en éclairage extérieur qu'en Europe ou aux États-Unis et que, aussi, 30 % de plus que les... pour que l'éclairage soit efficace, joli, beau, mais sécuritaire en même temps. Et, avec ça, on pourrait économiser 760 GWh par année, ce qui est énorme, ce qui est une centrale au gaz, là, hein. Donc, ça veut dire qu'on peut très bien s'imaginer que les Québécois, qui dépensent deux à trois fois plus d'énergie, pourraient couper non pas l'éclairage, l'ensemble des éclairages sur l'extérieur, mais pourraient trouver des moyens plus efficaces pour éclairer leurs bâtiments à l'extérieur et en donner plus d'intérêt sur certaines parties et non pas sur l'ensemble.
M. Corbeil: Justement concernant la hausse des tarifs, et tantôt vous avez fait référence à la loi n° 116, et vous savez, et je ne vous apprends rien sûrement, que c'est la Régie de l'énergie, qui est un organisme indépendant et neutre, qui a la compétence exclusive pour fixer les tarifs d'électricité appliqués par Hydro-Québec. La Régie traite les requêtes tarifaires de façon juste et raisonnable, avec toute l'indépendance nécessaire, et rend des décisions objectives qui tiennent compte de l'intérêt des consommateurs québécois.
Tantôt, on faisait référence au fait qu'il y avait eu des hausses rapprochées. Oui, effectivement, elles ont été annoncées peut-être dans un délai de calendrier rapproché, mais le premier 3 % a été octroyé par la Régie à Hydro pour l'année 2003-2004, le 1,4 % suivant, pour 2004-2005, et le dernier, 1,2 %, 2005-2006. Donc, on parle de trois années de calendrier, 5,7 %, et, deux fois sur trois, la Régie a révisé à la baisse les demandes faites par Hydro-Québec. Alors ça, ça nous place dans une situation où, si on excepte le Manitoba, au Canada, c'est nous payons le moins cher l'énergie hydroélectrique. Est-ce qu'il n'y a pas une corrélation à faire entre l'accessibilité en grande quantité à un prix aussi bas et ce que vous identifiez comme étant la consommation de luxe, éventuellement, et surtout le gaspillage?
n(17 heures)nM. Ouellet (Christian): Tout à fait. C'est pour ça qu'on préconise que l'énergie soit augmentée, sauf qu'on est contre l'augmentation tous azimuts pour les tarifs domestiques, autrement dit que les tarifs domestiques soient augmentés pour tout le monde, autant pour les gens qui ont des petits revenus ou les gens qui sont supportés par l'État. Mais nous sommes tout à fait d'accord pour l'augmentation du prix de l'électricité. Actuellement, si vous regardez à la page 53, on dit bien: le bas coût de l'électricité au Québec a permis les anomalies suivantes: le non-développement des énergies renouvelables, la non-rentabilité de l'efficacité énergétique, l'encouragement à la surconsommation et l'augmentation de la pollution, parce qu'on prévoit maintenant des projets au gaz pour être capable... et la distorsion économique.
Nous sommes tout à fait d'accord avec vous, M. le ministre, là-dessus, il faut que l'électricité augmente, sauf qu'on trouve qu'il faut que ça augmente dans un périmètre de développement durable qui fait qu'on ne fait pas payer le même prix aux gens qui sont justement cinq dans un logement mal isolé que la personne qui est à la ville, Lorraine, que vous avez mentionnée.
M. Corbeil: ...parce que le gaz naturel est accessible, et puis ça c'est probablement, quand on parle du... meilleure énergie au meilleur endroit, là, pour la chauffe, c'est reconnu, un des moyens les plus efficaces.
M. Ouellet (Christian): Oui, mais le gaz naturel, il reste quand même, M. le ministre, qu'il est... ça pollue, 6 % moins de CO2 . Si le monsieur ne le savait pas tout à l'heure, moi, je vous le dis, 6 % de moins de projection de gaz à effet de serre que le pétrole qui serait brûlé dans deux chaudières égales au niveau de l'efficacité. Mais, si on fait ça, c'est vrai que, de l'autre côté, le mazout a d'autre chose qu'il lance dans l'air au niveau de la pollution, mais, au niveau des gaz à effet de serre, c'est 6 % de moins. Alors, quand ils viennent nous dire qu'ils protègent l'environnement! Écoutez, nos propositions protègent l'environnement. Les énergies vertes, la géothermie, ça, ça protège l'environnement; et l'efficacité énergétique et la réduction de la consommation. Ça, c'est des protections de l'environnement. Il n'y a aucune pollution avec le solaire passif, il n'y a aucune pollution, en tout cas pour les 75 % de l'énergie créée, par la géothermie. Et la géothermie, c'est fait pour les pays du nord. Comment ça se fait que, nous, on ne s'en sert pas ici? Il faut absolument le prendre en main. Actuellement, les pays du Nord, comme la Suède et la Norvège, ont des nouveaux programmes qui sont instaurés à partir de cette année puis de l'an passé qui font que toutes les maisons neuves sont à la géothermie.
Le Président (M. Bachand): M. le ministre.
M. Corbeil: Avant de céder la parole à mon collègue de Montmagny, M. le Président, j'aurais juste une petite question, parce que tantôt ça m'a fait un petit peu sursauter. Vous préconisez l'éolien à 1 000 MW par année. Pendant combien de temps? Vous avez parlé de s'installer ou de développer le facteur éolien à 1 000 MW par année, puis...
M. Ouellet (Christian): Pendant très longtemps.
M. Corbeil: ...vous avez arrêté ça là, là.
M. Ouellet (Christian): Oui. Bien, tant qu'on a les sources de... où on peut les installer avec du vent, il n'y a pas de raison. Ça peut être une façon de prendre la petite demande de plus pour créer des PME en électricité. Donc, si on augmente la demande pour créer des PME, qu'on le fasse au moyen des éoliennes. Donc, chaque année.
M. Corbeil: La contrainte d'arrimage du réseau éolien-hydroélectrique, 10 %, là, est-ce que ça, on envoie ça...
M. Ouellet (Christian): On n'envoie pas ça, M. le ministre, c'est qu'Hydro-Québec actuellement n'est pas de bonne foi face à ça. C'est bien évident que c'est très faisable. Moi, j'ai justement de mes copains qui travaillent dans ce domaine-là aux États-Unis et qui nous démontrent très facilement que l'arrimage peut être fait facilement. C'est qu'il y a un blocage à quelque part, puis on ne le veut pas. C'est pour ça que c'est vous, au gouvernement, qui devez débloquer ce blocage à Hydro-Québec.
M. Corbeil: Mais là, si on tient compte, là, de ce qui est installé présentement, l'appel d'offres de 1 000 MW qu'on va mettre en place, du second 1 000 MW, vous savez qu'à terme c'est au Québec qu'il va y avoir 50 % de la capacité éolienne installée au Canada. Ce n'est pas rien, ça.
M. Ouellet (Christian): Mais on peut continuer, parce que ça, c'est la sécurité des régions, les éoliennes. On peut faire des éoliennes en région qui évitent d'avoir des lignes à haute tension pour transporter l'énergie. Et en plus de ça, si on met les maisons à la géothermie et qu'on se sert du solaire passif... Sur la Côte-Nord, on a les plus beaux soleils, plus beaux qu'à Miami. Donc, pourquoi on ne s'en sert pas? C'est l'hiver, en plus de ça, qu'il y a des soleils extraordinaires sur la Côte-Nord. Non, on fait des lignes de transmission qui, elles, peuvent briser avec la glace, qui coûtent cher d'entretien, etc. Donc, les éoliennes et les énergies vertes, c'est la sécurité dans les régions.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. le ministre. Donc, M. le député de Montmagny-L'Islet, très rapidement.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Oui. Ça va être rapide, M. le Président. Vous dites: L'IREQ doit être indépendante d'Hydro-Québec et financé à partir d'une taxe sur toutes les formes d'énergie. J'aimerais vous entendre sur cette taxe.
Le Président (M. Bachand): M. Ouellet.
M. Ouellet (Christian): Oui. Sur la taxe, écoutez, il faut avoir un système de recherche sous la gouverne des universités et de l'Office de l'efficacité énergétique. Il faut que l'argent pour cette recherche-là qui va aller vers les énergies vertes vienne de quelque part. On a trouvé que... Nous autres, on suggère qu'une petite taxe minime qui viendrait de l'Hydro-Québec pour payer la recherche serait une bonne façon... qui ne serait pas obligée d'être gérée par les gouvernements en place, qui sont toujours mal pris pour donner de l'argent à la recherche. Alors, si l'Hydro-Québec n'a plus l'IREQ en dessous d'elle au niveau au niveau du choix de la recherche qui va être faite, forcément on a beaucoup plus de chances qu'il y ait de la recherche qui soit faite qui ne vienne pas en compétition avec la mission que l'Hydro-Québec s'est donnée, de gros barrages anciennement et de, maintenant, de travailler avec le gaz aussi.
Donc, on a des chances de travailler avec et de développer des énergies alternatives, qui sont justement la photovoltaïque, les choses comme ça, la géothermie et, tout ça, ça pourrait être travaillé... ou même, la surconsommation, il faut faire des projets de recherche. C'est évident que, la surconsommation, du jour au lendemain, on n'est pas capable de la supprimer. On n'a pas les outils, nous. On sait qu'il y a une surconsommation, mais il faut être capables pour établir au Québec ce que ce serait puis comment on pourrait y arriver. Et l'IREQ, qui a une expertise extraordinaire, devrait être sous la juridiction d'une université, mais subventionné par Hydro-Québec.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. Ouellet, merci, M. le député. Donc, Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie. Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, bienvenue. Il y a beaucoup de choses dans votre mémoire. Elles sont toutes aussi intéressantes les unes que les autres. Je vais un petit peu continuer sur l'augmentation de tarifs, parce que, moi, ça me préoccupe puis je ne partage pas vraiment cette idée qu'il faille augmenter les tarifs, bien que je comprends le raisonnement, la justification. Mais je suis toujours préoccupée quand on parle d'utiliser la tarification à des fins de partage de revenus ou à des fins fiscales. Ça m'apparaît... je ne suis pas convaincue de ça, mettons, là. Je réfléchis, mais... Et d'ailleurs on a eu trois hausses ou augmentations de tarifs, hein, depuis 18 mois, en 18 mois en fait, à peu près. Est-ce que vous trouvez que ce sont des augmentations raisonnables, ça?
Le Président (M. Bachand): M. Rousseau? M. Ouellet... M. Rousseau, allez-y.
M. Rousseau (Guillaume): Oui. Donc, ce n'est pas raisonnable, dans la mesure où elles sont arrivées coup sur coup, donc ça dépasse nettement l'inflation, d'une part. D'autre part, elles s'appliquent uniformément, sans modulation, ce qui pour nous est un problème. Et, comme je vous dis, ça dépasse largement l'inflation. Dès lors, ça affecte les ménages à faibles revenus. Et, quand on regarde ça, d'une part, les ménages à faible revenus qui sont affectés par des hausses, des hausses qui vont permettre d'engranger de l'argent pour l'État, ces argents-là pourraient permettre des baisses d'impôts pour les plus riches. Donc, là, quand on met ça en lien, ça devient effectivement très déraisonnable, mais, en tant que tel, des hausses, il en faut. C'est comme un mal nécessaire.
Plus tôt, le ministre parlait du lien entre la surconsommation et les frais qui sont bas; effectivement, ce lien-là, on le fait, quoiqu'il y a parfois des exceptions, comme au Vermont, où les frais sont bas, et c'est un succès en matière de baisser la surconsommation.
Donc, c'est un mal nécessaire, et il faut donc y faire attention, surtout pour les personnes à faibles revenus. C'est pour ça la modulation, et c'est pour ça que ce doit être progressif, donc pas trois fois en six mois. Même si c'est pour être appliqué plus tard, ça fait des hausses successives. Donc, on doit être beaucoup plus progressifs. Et, quand on parle de vision, c'est ça, dans le fond, c'est de voir à long terme. Si on dit aux consommateurs: Voilà, vous allez avoir telle hausse, mais que c'est échelonné dans le temps, c'est fait avec une vision d'avenir, ça passe beaucoup mieux qu'annoncer des hausses coup sur coup, puis il n'y a pas vraiment de vision. Donc, c'est déraisonnable dans ce sens-là, dans le sens de ne pas avoir de vision, de ne pas être modulé puis de servir potentiellement à des baisses d'impôts pour les plus aisés.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: D'ailleurs, vous n'êtes pas les premiers, hein, qui nous disent ça, en commission, depuis le début de nos échanges. On a eu, encore hier, là, on a eu la majorité des secteurs industriels qui sont venus dire que le fait de ne pas avoir une vision claire, établie sur une période de temps, bien campée les pénalise, parce que, dans leur programme d'investissement, ils ne peuvent pas faire de prévision, et donc leurs choix d'investissements en souffrent. Et on a même eu l'Association des consommateurs industriels qui est venue nous dire qu'il y avait pour 5,7 milliards de projets dans les dossiers de l'industrie, des projets d'investissement, et que ces projets-là étaient suspendus en ce moment, depuis les annonces d'augmentation de tarifs et leur multiplication dans le temps ponctuellement. Alors, on voit que ce n'est pas seulement le consommateur résidentiel qui en souffre finalement, il est peut-être heurté de plein fouet parce que, lui, il n'a pas le choix, mais le développement économique du Québec en souffre aussi.
n(17 h 10)n Et on a eu aussi, dans le cadre de ces auditions, trois informations ? on en a eu plus, là, mais, disons ? trois informations qui sont très importantes et qui rejoignent un peu une de vos préoccupations, quand vous dites dans votre résumé que «l'électricité doit être totalement utilisée pour produire des biens et des services par les PME ici, au même tarif que les grosses industries, avant même de penser à exporter cette ressource première à l'extérieur. Dans l'intérêt des Québécoises et Québécois, l'exportation d'électricité ne doit pas passer avant la stimulation économique du Québec». C'est tellement vrai!
On a eu devant nous les manufacturiers et exportateurs du Québec qui ont présenté un mémoire, qu'ils ont déposé le 11 janvier, et, dans ce mémoire-là, ils sont venus nous dire que le revenu par kilowattheure consommé par l'industrie manufacturière exportatrice équivalait à 0,69 $ du kilowattheure consommé. L'Association de l'industrie de l'aluminium du Canada, elle, à qui on a posé la même question, est venue nous dire que les exportations d'aluminium du Québec rapportaient 0,143 $ du kilowattheure consommé.
Et enfin, le chiffre que l'on nous avait donné en décembre, par une étude fort contestée et fort contestable du professeur Fortin, bien connu, dans son mémoire, lui, il nous disait que les revenus du Québec, donc d'Hydro-Québec, quant aux exportations d'électricité, dans la période qui était 2003, je crois, la plus lucrative, étaient de l'ordre de 0,088 $ du kilowattheure vendu.
Alors, c'est clair que toute utilisation de l'électricité à des fins de développement économique est préférable à l'exportation d'un kilowattheure. Quand on a le choix, c'est sûr. Alors, je pense que c'est un message très important, ça.
Ce qui fait que, quand on parle de la consommation résidentielle ? parce que ça nous préoccupe aussi ? on a moins de marge de manoeuvre, n'est-ce pas? Vous, vous nous proposez un certain nombre de solutions, dont certaines sont plus coûteuses que d'autres. Je pense que j'ai lu quelque part que vous étiez favorable à la production distribuée ou à l'autoproduction, n'est-ce pas?
M. Ouellet (Christian): Autoproduction verte, d'énergie verte.
Mme Dionne-Marsolais: D'énergie verte, c'est ça. Parce que, si... Vous, vous parlez, par exemple dans vos énergies vertes, l'éolien, au rythme de 1 000 MW par année, bon, on est déjà en retard, le premier 1 000 MW, on l'avait déjà lancé, ça fait que là, il nous en manque un peu là, mais je pense qu'à la suite de ces travaux le ministre sera en mesure, du moins c'est ce qu'il a dit, peut-être de faire des recommandations à l'effet d'aller chercher une capacité additionnelle. Mais on va aussi se heurter à un moment donné à la capacité d'absorption du territoire, même si le Québec est trois fois la France, là, il y a quand même le syndrome de «pas dans ma cour», là, qui va arriver à un moment donné ? sept fois la France?, pardon, on grandit chaque jour. Mais enfin, c'est encore mieux. Mais c'est quand même une réalité, là, parce que...
Mais, par contre, des petites éoliennes, dans certaines régions où certains groupes pourraient se regrouper et investir dans une production qui pourrait leur servir seraient aussi, j'imagine, une solution. Et, à ce moment-là, est-ce qu'on ne devrait pas avoir une capacité de recevoir un crédit de la part de l'Hydro... pour de l'énergie dont on n'aurait pas besoin mais qu'on pourrait produire à un moment donné?
Le Président (M. Bachand): M. Ouellet.
M. Ouellet (Christian): Oui, merci. Moi, j'aimerais bien répondre à ça en disant qu'effectivement on peut s'imaginer actuellement qu'on va avoir trop d'éoliennes pour produire trop d'énergie. Mais ce ne sera pas le cas, parce que, vous voyez, on a dit qu'il fallait, d'ici 25 ans, en tous les cas, couper notre dépendance dans le gaz et dans le mazout. Ça veut dire que, si on s'en va vers la géothermie, où on a un facteur trois dans un, donc ça veut dire 25 % d'énergie électrique nécessaire, puis on va produire 75 % de nouvelle énergie prise dans le sol et que donc on peut faire quatre maisons nouvelles avec la même énergie en électricité, il reste quand même qu'on va pouvoir à ce moment-là s'embarquer sur les maisons qui sont au gaz avec de l'énergie... de l'électricité nouvelle. Donc, réduire le gaz dans les maisons, réduire le mazout qui est utilisé dans les maisons, donc réduire notre dépendance à l'étranger, sur les énergies étrangères.
Mme Dionne-Marsolais: Ah oui. Donc, même au niveau du chauffage des locaux, vous considérez l'élimination du gaz naturel?
M. Ouellet (Christian): Oui, remplacé par la géothermie. La géothermie, écoutez, là, c'est quelque chose qui peut être partout, même à Montréal, qui est merveilleusement... et sur un cap de roche. À Québec, ici, on est sur un cap de roche. On pourrait très bien forer ici, autour du parlement, des puits dans le roc, qui est l'endroit où c'est le plus efficace, la géothermie, et chauffer l'ensemble du parlement avec la géothermie, où on aurait seulement un facteur d'électricité de 25 % de l'ensemble de l'énergie pour chauffer totalement et refroidir en même temps. Ce n'est pas juste chauffer, mais c'est refroidir avec le même puits pendant l'été à l'air climatisé.
Donc, on a un gisement d'énergie incroyable qui nous permettrait, avec justement des éoliennes qu'on peut mettre un peu partout, qui nous permettrait, avec un nouveau Code du bâtiment plus agressif, de réduire notre dépendance sur le gaz et la pollution, quoi, en somme, sur des éléments de... des énergies polluantes.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Donc, pour vous, réduire la dépendance vis-à-vis d'une forme d'énergie importée, ça fait aussi partie d'une politique énergétique.
M. Ouellet (Christian): Ah, il faut absolument. Parce que, dans un Québec qui veut vivre, conserver son niveau de vie d'ici 25 ans ou 50 ans, il faut absolument qu'on devienne le plus indépendant. Les pays qui ont un train de vie important sont ceux qui ont leur énergie chez eux, qui ont même un surplus d'énergie. Et donc, nous, on est capable de l'avoir en électricité.
Vous disiez tout à l'heure qu'il y aurait peut-être trop d'éoliennes. Vous savez, il y a eu une étude qui a été faite aux États-Unis, que, s'il y avait une éolienne ? dans les grosses éoliennes, là ? par mille carré, les États-Unis seraient fournis en électricité du nord au sud. Bien, on sait bien qu'on ne peut pas mettre des éoliennes partout, parce qu'il n'y a pas les vents partout, mais c'est une figure. Autrement dit, ça n'en prend pas tant que ça pour être capable de réduire. Sauf que, nous, notre 1 000 MW par année, on est capable de l'absorber. Je trouve ça franchement très important.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, merci. Je n'ai pas dit qu'on aurait trop d'éolien. Ce que j'ai dit, c'est qu'il va arriver à un moment donné où est-ce qu'on va se heurter à la résistance locale des gens, qui vont dire: Bien, je n'en veux pas dans ma cour, là. C'est ça que je voulais dire. Ce n'était pas... En théorie, l'utilisation des éoliennes peut se faire entièrement... Je veux dire, on a vu des études de prospectives faites sur le territoire du Québec, on a vu les études de vents qui ont été produites par le gouvernement fédéral sur tout le Canada qui ont bien indiqué les potentiels de puits de vents au Québec. Non. Ces choses-là existent.
Et ce n'était pas dans ce sens-là, ce n'était pas dans le sens de limiter. C'était vraiment dans le sens de dire: À un moment donné, on va frapper de la résistance, là. Et c'est pour ça que j'amenais la question du microéolien, c'est-à-dire l'éolien plus décentralisé.
M. Ouellet (Christian): Vous permettez, Mme la députée...
Mme Dionne-Marsolais: Oui.
M. Ouellet (Christian): ...que je réponde à ça? Je crois que c'est le rôle de l'État de sensibiliser la population au fait que les éoliennes ne sont quand même pas pires visuellement que les poteaux électriques. Ce n'est pas pire. L'État a un rôle à jouer pour montrer aux gens...
Quand on sait maintenant que la population du Québec trouve que l'environnement est le problème le plus important à régler au Québec, même avant la santé, eh bien ? avant ça, ils disaient que c'était le sexe, mais maintenant on est rendu à des choses plus sérieuses! Eh bien, on voit qu'à ce moment-là les gens vont être prêts à prendre une énergie qui est absolument non polluante. La seule pollution, ça fait un petit peu de bruit, mais c'est surtout visuel. Mais ça, c'est culturel.
Le Président (M. Bachand): Allez-y, M. Rousseau.
M. Rousseau (Guillaume): Oui. Donc, le syndrome «pas dans ma cour» est effectivement très important. Il faut en tenir compte. Christian parlait de la sensibilisation, effectivement, mais une autre réponse qui est très importante, c'est la diversité des sources.
Effectivement, si on met des éoliennes à la grandeur du Québec, il y a des gens qui vont grincer des dents. Et d'ailleurs on le dit dans le mémoire: Il ne faut pas seulement miser sur l'éolien ou seulement miser sur l'hydroélectricité. On a fait ça pendant longtemps, miser seulement sur l'électricité. Mais, à un moment donné, on a réalisé que ça ne plaisait pas notamment aux peuples autochtones.
n(17 h 20)n Donc, ce serait une erreur de miser uniquement sur l'éolien. C'est pourquoi on parle de géothermie, de photovoltaïque. Et la diversité des sources d'éolien, c'est très important, puisque c'est une des façons de favoriser la sécurité énergétique. Si on dépend d'une seule forme d'énergie, on est à ce moment-là très vulnérable. Donc, la diversité des sources d'énergie, c'est très important, et aussi la diversité... ou plutôt la multiplication des sites de production, c'est aussi très important, d'où l'importance de l'autoproduction, où là il y a plein de sites et il y a aussi une diversité des sources. Pour une personne, ça peut être avantageux de faire du voltaïque; pour une autre, une petite éolienne. Donc, dans l'autoproduction, il faut beaucoup miser là-dessus.
La première chose, c'est la tarification inversée, c'est absolument essentiel, mais ce n'est pas assez, il faut aussi informer les gens. Parce que l'autoproduction, on dit ça à M. et Mme Tout-le-monde, les gens, ils ne savent pas trop ce que c'est, donc il faut faire beaucoup de promotion de l'autoproduction. Et ça, ce n'est pas évident pour Hydro-Québec, parce qu'Hydro-Québec, c'est une entreprise nationalisée, donc centralisée, avec cette mentalité un peu de mur-à-mur qu'on dénonce parfois, eh bien, Hydro-Québec doit s'adapter à la nouvelle mentalité plus favorable à la décentralisation. Et ça, l'autoproduction d'énergie verte, c'est un très bon exemple de cette évolution-là qu'on doit imposer à Hydro-Québec.
Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Très rapidement, M. le Président. Alors, bienvenue à l'Assemblée. Alors, dans ma cour à moi, sur la Côte-Nord, j'ai de la place pour 37 700 MW.
Une voix: ...
M. Dufour: Au niveau du bloc patrimonial, bien on sait que c'est la loi, le tarif L qui s'applique, au niveau des tarifs des blocs patrimoniaux, et il me semble que j'ai compris que vous voulez que ce soit reconduit au niveau de la PME, la petite et moyenne entreprise. Ça se peut-u que j'aie entendu ça?
M. Ouellet (Christian): Non. On pensait que ce serait surtout conservé pour l'énergie domestique, et c'est que, par contre, on voyait que l'énergie qui serait soit économisée en enlevant la surconsommation, soit économisée avec l'efficacité énergétique, soit produite avec des énergies vertes, pourrait créer une tarification fort intéressante pour la PME et créer de l'emploi.
M. Dufour: D'accord. C'est beau.
Le Président (M. Bachand): Alors, merci infiniment, Mme la porte-parole, M. le député de René-Lévesque. Merci, messieurs, de vous être présentés à la commission, vous êtes toujours les bienvenus. Bon retour chez vous. Je vais donc demander immédiatement au groupe... en fait à la personne, M. Sébastien Rioux, de venir prendre place pour nous présenter son mémoire.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Bachand): Donc, M. Rioux, bienvenue à la commission. Je vous rappelle rapidement... je vous ne demanderai pas de présenter vos collègues... donc, compte tenu du fait que vous êtes seul. Je vais donc vous rappeler rapidement les règles de la commission: c'est 20 minutes pour votre présentation... Ah non, en fait, il y a une petite modification, c'est 10 minutes, pardon, pour votre présentation et 10 minutes, de part et d'autre, pour les questions. Donc, sans plus tarder, pour ne pas vous retarder, allez-y. Bienvenue à la commission, M. Rioux.
M. Sébastien Rioux
M. Rioux (Sébastien): Merci. Alors, bonjour, M. le Président, bonjour, Mmes et MM. les députés et ministres. Je me présente, Sébastien Rioux, Pistolois de souche et principalement auteur-compositeur-interprète engagé, engagé dans la vie, sa conservation et son appréciation et à la faire partager par les valeurs de la non-violence, le dialogue et l'échange. Alors, voilà pourquoi je me retrouve ici, devant vous, aujourd'hui.
Je prône, comme le font les groupes écologiques et la population québécoise, l'économie d'énergie et l'efficacité énergétique. Il y a bien d'autres alternatives, puis il ne faudrait pas, en tant que société responsable de l'avenir de ses enfants, négliger dans le futur l'éolien, la géothermie, le photovoltaïque, l'hydrogène, la quasiturbine, et j'en passe. D'ailleurs, une quantité importante de témoignages d'experts en la matière vous ont été présentés par des gens beaucoup plus qualifiés que moi pour vous donner des valeurs quantitatives et scientifiques. Je m'en tiendrai donc aujourd'hui aux réalités visualisables et réalisables par tout le monde. Je ne vais pas réinventer la roue mais seulement essayer de vous faire comprendre que la population québécoise veut la faire tourner vers une autre direction.
En m'appuyant sur la grande corvée de rénovation présentée par l'UQCN dans les années quatre-vingt-dix, selon le rapport de la table de consultation du débat public sur l'énergie pour un Québec efficace, de 1996, prônant également l'efficacité énergétique et les énergies propres, en se basant sur le plan d'économies d'énergie de groupes d'experts en efficacité énergétique, telle la compagnie Négawatts, qui est une compagnie du Saguenay, en analysant l'événement de janvier 2004 où les Québécois et Québécoises ont réussi, à la demande d'Hydro-Québec, à économiser près de 600 MW d'électricité pendant quelques heures, et ce, en pleine période hivernale, en m'appuyant également sur la logique du vivant, de l'interdépendance étroite entre la planète et ses habitants, je garde une position claire: Notre société entière se doit de transférer, de réorienter ses gestes dans le but de réaliser une diminution considérable de notre consommation d'énergie ? et certains groupes qui se sont présentés devant vous sont allés de l'ordre de 40 jusqu'à 50 % de possibilité d'économies ? et notre société se doit de rendre les installations recourant à l'électricité plus efficaces énergétiquement. En faisant des économies d'énergie substantielles, cela nous permettrait du même coup, sans saccager notre environnement, de vendre nos surplus aux États-Unis en augmentant nos coûts s'il le faut. Nous n'avons pas à sacrifier à bas prix nos ressources naturelles ni les privatiser pour satisfaire les besoins énergivores de nos voisins amis-requins.
J'aimerais parler et élaborer plus sur le sujet des économies d'énergie réalisables, mais je crois que la présente vous a été démontrée et redémontrée, comme j'ai dit plus tôt, par de nombreux mémoires et présentations lors de cette commission. Alors que la preuve que l'efficacité énergétique se doit d'être la voie numéro un pour votre gouvernement vous a clairement été démontrée lors de ces présentations et lors d'autres événements de la sorte, je suis ici pour vous faire réfléchir sur la pertinence de permettre, encore aujourd'hui, des petits projets privés de production hydroélectrique.
Une petite centrale de 3,5 MW, c'est environ deux éoliennes avec les impacts environnementaux en plus, c'est l'ensemble des Québécois et Québécoises qui économisent quelque watts d'électricité à chaque jour sans trop d'efforts, mais, surtout, c'est la destruction d'une rivière et de ses rives et le déchirement d'une petite population déjà éprouvée par les problèmes sociaux.
Je considère que l'ensemble des facteurs déterminants n'a pas été examiné et que la volonté générale du peuple québécois à se tourner vers l'énergie propre ne sera point réalisée tant et aussi longtemps que des projets de petites centrales hydroélectriques du genre seront autorisés au Québec. Le cas de la rivière Trois-Pistoles a fait couler de l'eau sous les ponts et a fait le tour de la province, du pays et même du monde, et, partout où en parle, de cette petite rivière, les gens se sentent touchés par le sort atroce que l'on veut accorder à celle-ci. Elle est majestueuse et inspirante, cette rivière, ses nombreuses petites chutes qui la sillonnent, ses crêtes rocheuses matures et imposantes et ses rives remplies de richesses fondaient un trésor incomparable pour la région. L'implantation encore toute récente de la Route verte, qui a coûté beaucoup de sous ? et la Route verte passe, juste pour vous signifier, au-dessus tout simplement de où la turbine va être, où les chutes ne vont plus exister, tout simplement. Alors, après qu'on vient d'installer cette Route verte, qui attire de plus en plus d'adeptes, ses visiteurs découvrent et redécouvrent passionnément cette rivière Trois-Pistoles.
n(17 h 30)n Tout le monde a déjà entendu parler de ce petit village du Bas-Saint-Laurent, Trois-Pistoles, la légende, la petite ville dont tout le monde connaît le nom et de plus en plus l'emplacement. Difficile de savoir exactement quelles ont été les retombées récréotouristiques suite à la médiatisation de la rivière, mais il y a eu une hausse remarquée de l'achalandage. Je n'accepte pas que cette richesse soit détruite par manque de vigilance de nos instances politiques en regard d'efficacité énergétique. Avons-nous vraiment besoin de détruire l'avenir d'une région et celle de ses enfants avec un projet désuet comme celui-ci, non créateur d'emplois, non rassembleur, pour un simple petit 3,5 MW? Ma réponse est négative et finale.
Il est à noter que c'est plusieurs millions de dollars pour dédommagement ou profits anticipés qui ont été versés par les contribuables québécois à Grade Trois-Pistoles, ancien promoteur du premier projet de barrage qui a été arrêté en novembre 2002 par le gouvernement Landry. Grade Trois-Pistoles avait comme premier actionnaire la même compagnie, Gestion Conseil SCP, qui remet le projet sur la table aujourd'hui. Je sais qu'ils sont venus vous visiter hier. Les Québécois et Québécoises ont déjà payé pour ne pas avoir de barrage sur cette rivière, et on ne veut pas que cet argent finance ce même projet. Mon et notre désir est de voir notre argent dépensé pour préserver l'environnement, revitaliser les régions d'une manière responsable et que des économies d'énergie soient réalisées dans tous les domaines.
Notons également que le sort énergétique de cette région et du Québec en entier a été laissé aux mains des citoyens de cette seule région par le biais d'un référendum sur le sujet. Je voudrais vous signaler ici les dommages que peut avoir un référendum mal organisé, non démocratique et à la fois imposé et manipulé. Ce n'est pas que la population ne peut pas s'exprimer, bien au contraire, mais c'est qu'elle doit avoir les mêmes droits, les mêmes ressources et surtout la même écoute que le parti qui présente le projet. Le facteur grosseur du portefeuille ne doit pas et ne doit jamais avoir d'influence sur l'égalité entre les parties et l'écoute reçue de votre part.
J'affirme que l'avenir énergétique des Québécois et Québécoises doit être décidé et entrepris par l'ensemble et non seulement par une petite partie de ceux-ci. Notre avenir énergétique nous touche tous et toutes, et c'est à cette commission qu'un choix intelligent et responsable devra se faire. Tout au cours de cette commission, le peuple québécois vous dit haut et fort: il est prêt pour un plan d'économie d'énergie et d'efficacité énergétique solide et efficace. Mais le fait d'avoir un plan détaillé et concurrentiel ne suffit pas, comme le passé nous le rappelle. À plusieurs reprises, le gouvernement provincial a reçu ou a eu la possibilité d'examiner des plans professionnels mais ne leur ont soit jamais porté attention ou n'ont jamais appliqué fermement ces plans. Le gouvernement actuel devra démontrer qu'il surpasse les autres en matière d'application de plan d'économie d'énergie et d'efficacité énergétique et devra s'assurer que le plan est suivi à la lettre par tous les secteurs, et ce, même après la fin de son mandat, dans un esprit de développement responsable véritable.
La rivière Trois-Pistoles demeure une richesse pour la province de Québec, et la conservation de tous les cours d'eau québécois devrait faire partie des priorités environnementales de votre gouvernement. En interdisant la création de petites et minicentrales hydroélectriques sur nos rivières québécoises, le gouvernement prépare son virage vers les énergies propres. Il est de son devoir de s'assurer que l'énergie que les Québécois et Québécoises utilisent n'est pas responsable de la destruction d'une petite rivière et de ses rives. Il est également de son devoir de réglementer l'octroi de contrats secrets entre un promoteur privé et Hydro-Québec. Le peuple se doit de savoir comment son énergie est utilisée et qu'il n'encourage pas ces projets non écologiques.
J'aimerais ouvrir une parenthèse sur quelque chose qui est revenu tout au cours de cette commission, qui a été présenté par différents groupes de citoyens de défense de rivières, qui est le manque de transparence. Lors de projets de la sorte, le simple citoyen ou les groupes organisés de défense environnementale se frappent à un mur lorsque vient le temps d'avoir de l'information pertinente relative à ce projet. Il y a une réticence flagrante de la part et du gouvernement et du côté des promoteurs à bien informer la population. Les documents se doivent très souvent d'être obtenus par le long processus de l'accès à l'information. Cela demande beaucoup d'énergie et d'argent pour se mettre au courant de ce qui se passe. Il est vrai qu'une population mal informée est une population qu'on contrôle.
En annexe de mon mémoire, je vous ai présenté une pétition ? chacun ne l'a pas eue, je l'avais envoyée seulement une fois pour économiser le papier ? qui a été signée par plus de 400 jeunes de 12 à 17 ans de la région de la MRC des Basques et 400 jeunes de 12 à 17 ans ? c'est environ 80 % des jeunes de 12 à 17 ans de la région. Alors, les gens ont embarqué beaucoup, ont signé très rapidement la pétition. On a présenté cette pétition devant le conseil des maires de la MRC, mais celui-ci l'a accueillie avec une très grande indifférence. Je réclame que les jeunes aient également leur mot à dire sur l'avenir énergétique du Québec, et que ceux-ci doivent être écoutés. Ils et elles seront ceux qui vivront avec nos choix d'aujourd'hui. Alors, pourquoi ne sont-ils pas écoutés lorsque l'on parle de leur avenir?
Mon mémoire devait se terminer là, mais il y a une grosse nouvelle qui circulait dans les médias au Bas-Saint-Laurent, qui a été annoncée hier, c'est que le préfet Leblond, qui est venu vous voir hier, se lance dans la production d'éoliennes. Et il a annoncé son projet hier, en même temps qu'il venait. Je ne sais pas s'il vous en parlé, j'aurais aimé ça être un petit oiseau pour voir de quoi il parlait. Mais c'est juste pour vous dire qu'à un moment donné il va falloir faire un choix, là: Est-ce qu'on s'en va vers les éoliennes ou on s'en va vers les barrages? Il annonce un projet qui peut rapporter jusqu'à 600 000 $ par année, que le projet de barrage va apporter environ 100 000 $, 125 000 $ par année, alors il va falloir faire un juste milieu à un moment donné et se brancher.
Le Président (M. Bachand): M. Rioux, en conclusion, si c'est possible.
M. Rioux (Sébastien): C'est fini. Je vous remercie d'avoir pris la peine de m'écouter puis j'espère qu'on va être bien entendu.
Le Président (M. Bachand): C'est moi qui vous remercie, M. Rioux. J'ai vu que votre pétition a été déposée.
M. Rioux (Sébastien): ...encore.
Le Président (M. Bachand): La pétition, elle a été imprimée recto seulement, hein? O.K. M. le ministre des Ressources naturelles et de la Faune.
M. Corbeil: M. le Président, M. Rioux. Vous faites référence à la présentation qui a été faite hier par un groupe, qui est dans un registre totalement opposé au vôtre, qui préconise le développement hydroélectrique pour permettre la création de richesse ou à tout le moins de revenus, pour permettre de continuer à fournir aux citoyens des services de qualité. Et c'est assez paradoxal, parce que le projet qui nous a été présenté hier, avec illustrations à l'appui, marie ou à tout le moins essaie de concilier le récréotourisme et le développement économique dans des territoires contigus, illustre un aménagement responsable et demande ou à tout le moins implore le gouvernement de leur laisser la latitude de faire ce développement-là sur leur territoire.
Moi, j'aurais envie de vous demander qu'est-ce que vous répondriez au préfet de la MRC puis aux maires des municipalités qui sont favorables au développement de cette petite centrale dans ces circonstances-là, pour justement leur permettre d'entretenir la piste cyclable à laquelle vous faites référence, qui part de Trois-Pistoles et qui va jusqu'aux abords de la chute au pied de laquelle serait la sortie d'eau, là. Alors, moi, je voudrais savoir qu'est-ce que je vais dire à ces gens-là.
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Oui. Bien, à plusieurs reprises, des gens de la région ont présenté des projets qui étaient beaucoup plus créateurs d'emplois et, à toutes les reprises, ils ont été retournés du revers de la main sous prétexte que ce n'était pas assez élaboré ou qu'on n'avait pas le temps d'examiner ça parce qu'il fallait examiner le projet de barrage ou... Donc, à plusieurs reprises, d'autres projets ont été présentés. Un projet de parc a déjà été présenté et qui a été refusé parce que le promoteur veut faire son parc avec le barrage. Et, comme je le dis dans mon mémoire, je prône l'efficacité énergétique. Donc, avec des plans d'efficacité énergétique mis à la lettre, pourquoi ne pas faire de la régions des Basques une région verte où l'économie d'énergie, l'énergie qui serait sauvée serait revendue à Hydro-Québec, ou peu importe, je ne veux pas m'avancer là-dedans. Mais les possibilités sont énormes, et il y en a beaucoup... Les possibilités, il y en a des meilleures avant de construire un barrage sur rivière, si on veut attirer des gens. On l'a vu en consultant les gens et surtout les jeunes qui ont signé une pétition, la majorité des jeunes disaient: Bien, si jamais il se fait un barrage, moi, jamais je ne reviens à Trois-Pistoles.
M. Corbeil: Est-ce que vous avez été à même de prendre connaissance du projet, avec les illustrations, les débits réservés...
M. Rioux (Sébastien): Bien oui, à plusieurs reprises, même.
M. Corbeil: ...la réduction du volume de prise d'eau à en deçà d'un minimum en période d'étiage, etc.? Vous avez eu l'occasion de prendre connaissance de ça?
M. Rioux (Sébastien): À plusieurs reprises, oui.
n(17 h 40)nM. Corbeil: Ce qui amène la question suivante, c'est que vous semblez dire qu'on doit déconnecter cette décision-là des décideurs locaux pour considérer ça sur le plan de l'ensemble des Québécois et des Québécoises; ils doivent être non seulement concernés par un projet de production d'énergie, mais c'est au-delà du strict intérêt local ou régional ? parce qu'on parle de MRC ici, municipalité régionale de comté, donc il y a plusieurs municipalités qui sont concernées. Pouvez-vous nous parler un peu plus du fondement puis des implications de votre affirmation? Parce que le courant général est à l'effet de décentraliser, est à l'effet de régionaliser, est à l'effet de responsabiliser les décideurs locaux quant à l'avenir du... ce qui concerne le développement de leurs communautés.
Et, hier, malgré le fait que vous disiez que le sondage, le référendum était déficient, selon votre interprétation, on nous a mentionné qu'il avait été supervisé par le Directeur général des élections pour nous donner... pour donner des orientations quant à la tenue du référendum. Alors, moi, j'aimerais ça vous entendre, là, savoir: Est-ce que véritablement, les décideurs locaux et régionaux doivent être impliqués dans le développement de leur territoire ou si on dit: Oubliez ça, c'est le central qui va décider, puis le gouvernement va penser pour vous dorénavant, là?
M. Rioux (Sébastien): Je pense qu'il faut... premièrement, pas mettre tous les oeufs dans le même panier, un. Juste pour vous signaler que le référendum est présentement sous enquête, dû à un trop grand nombre de plaintes et de gens qui ont dénoncé le processus référendaire. Donc, je ne veux pas trop m'avancer là-dedans pour ne pas nuire au processus.
Pour ce qui est de faire décider une région particulière de son sort, je suis pour que la région décide et qu'ils aillent en référendum, oui, il faut des référendums. Un référendum organisé, je l'ai vécu, je l'ai vu, j'étais sur place. Et tout l'argent qui a été mis a été mis pour le parti qui présentait le projet, toute la publicité a été faite par ces gens-là. Et les gens qui essayaient d'avoir de l'information, les séances d'information ont été annoncées, je vous dirais, quelques heures à l'avance... ont à peine été affichées. Si on consulte la population, il faut l'informer. Et c'est la grosse lacune qu'il y a présentement dans ce genre de référendum là: Ceux qui présentent le projet sont les seuls à faire la promotion.
Et la question était tout simplement: êtes-vous pour ou contre un barrage sur la rivière Trois-Pistoles? Si la question aurait été: êtes-vous pour sauver la rivière Trois-Pistoles ou pour faire un barrage?, le résultat aurait été sûrement très différent. La preuve que les gens ont été mal informés, seulement 32 % de la population sont allés voter cette journée-là. Donc, ce n'est pas beaucoup. Je ne pense pas que c'est représentatif. Loin de là, ça... Le résultat est quand même de 60-40, 60 % ont voté pour, mais c'est 60 % de 32 % qui sont allés. Le reste du pourcentage qu'il reste, je ne veux pas dire qu'ils ne sont pas intéressés par le projet, mais n'ont pas été assez stimulés pour se rendre cette journée-là pour dire qu'ils en voulaient. Donc, il y a une grosse lacune au point de vue de l'information. Consulter les gens, il n'y a pas de problème, mais...
Et, pour ce qui est de consulter le Québec en entier pour le sort des rivières, oui, je suis d'accord, parce que les rivières appartiennent aux Québec au complet, ce n'est pas à... Je ne me vois pas en train de choisir moi-même si on va mettre un barrage sur une rivière quand, moi, je considère vraiment que cette rivière-là ne m'appartient pas. Elle n'appartient pas à mon voisin, elle n'appartient pas au comté, elle appartient, l'eau appartient à tout le monde, et ça, c'est à tout le monde de prendre le bon choix. Et c'est ça.
Le Président (M. Bachand): M. le ministre.
M. Corbeil: Dans la présentation qui nous a été fait hier, on ne parle pas d'installer quelque chose qui n'a jamais existé. C'était un site qui est industriel, c'est un site qui a déjà été aménagé pour faire de la production hydroélectrique. On veut en quelque sorte... pas restaurer, parce que c'est assez ? comment je pourrais dire ça? ? pas nécessairement réutilisable, là, mais il y a encore des installations qui sont là. Je comprendrais peut-être la position que vous défendez si on parlait d'harnacher une rivière qui n'avait jamais eu d'installation dessus. Mais là, il y en a déjà eu.
M. Rioux (Sébastien): Je ne sais pas de quelle installation vous parlez.
M. Corbeil: Bien, il y a...
M. Rioux (Sébastien): Il y a un ancien barrage désaffecté des années trente.
M. Corbeil: Oui, exactement.
M. Rioux (Sébastien): Exactement.
M. Corbeil: Et il y a eu de l'industrie là qui avait des prises d'eau puis qui avait des rejets aussi à l'époque, avant que ne cessent les opérations.
M. Rioux (Sébastien): Les jeunes vont se faire griller sur le barrage. Donc, j'ai peut-être l'impression que c'est ça qui va arriver dans une autre vingtaine d'années aussi, là.
M. Corbeil: C'est beau. Pas d'autre question.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. Rioux. Pour la bonne marche de nos travaux, ça va me faire plaisir de vous donner la parole, M. Rioux, au moment où l'interlocuteur a terminé de poser sa question; ça va éviter que les questions soient posées à, finalement, et entrecoupées d'interventions. M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Qu'est-ce que vous répondriez? On a eu la visite cet avant-midi du Conseil des Atikamekw de Wemotaci, hein. Eux, ils disent: «Un projet hydroélectrique, un parc éolien peut nous permettre de constituer un fonds servant au développement économique et au développement de l'emploi. Nous avons la ferme conviction que le gouvernement gagnerait au change et que notre communauté pourrait se sortir de cette dépendance économique dans laquelle on nous a toujours maintenus.»Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Regardez, comme je viens de vous dire, il vient d'annoncer un projet d'éoliennes. Donc, je trouve qu'un barrage est trop destructeur, même à petite échelle. Je ne néglige pas le fait que ça peut aider une région, mais ce n'est pas le barrage sur la rivière Trois-Pistoles qui va sortir la MRC des Basques du trou, loin de là. Il y a des projets, comme je vous ai dit, qui ont déjà été présentés, qui étaient beaucoup plus créateurs d'emplois, beaucoup plus... qui allaient revitaliser la région beaucoup plus, le côté touristique était primé, et je ne pense pas qu'un barrage prime le côté touristique, loin de là.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Simplement, pour l'ensemble des collègues, M. Rioux, votre adresse permanente, c'est?
M. Rioux (Sébastien): À Montréal.
Le Président (M. Bachand): Merci beaucoup. Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. M. Rioux, est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur les projets éoliens de...
M. Rioux (Sébastien): ...
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que c'est le... Je n'ai pas saisi, là. C'est le promoteur ou le président de la... le préfet de la MRC? C'est qui?
M. Rioux (Sébastien): Je peux vous lire l'extrait qui était à Radio-Canada...
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): ...
Le Président (M. Bachand): M. Rioux, allez-y.
M. Rioux (Sébastien): Merci. Pardon. Les maires de la MRC acceptent une motion pour pouvoir percevoir des redevances sur l'éolien. C'est un investissement de 15 millions; entre cinq et six éoliennes mises en fonction en 2006, le rendement, à 25 %, qui rapporterait environ 600 000 $ par année. C'est l'information que j'ai notée rapidement. J'ai étés surpris, en me levant, hier matin, de voir ça. Donc, c'est tout ce que je peux vous donner comme information, mais je tenais à vous la transmettre aujourd'hui.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Est-ce que votre interprétation, c'est un projet en ajout à celui de la rivière ou en remplacement, là, de?
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Aucune idée. Je ne voudrais pas m'avancer, parce que justement c'est tout frais comme nouvelle. J'espère que c'est pour mettre le barrage à l'eau, si on peut dire, et reprendre les éoliennes. Mais je ne voudrais pas m'avancer trop, trop là-dessus.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée de Rosemont.
Mme Dionne-Marsolais: Des éoliennes... Je connais bien Trois-Pistoles, c'est un endroit que j'aime beaucoup, comme beaucoup d'autres Montréalais, sans doute. Des éoliennes à Trois-Pistoles, ça va se placer où, à votre avis?
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Je sais qu'il y avait déjà eu un projet qui était dans les terres, à l'arrière, je dirais probablement dans les rangs. Je n'ai pas d'idée sur ce projet d'éoliennes là, malheureusement, comme je vous répète. Je sais qu'on avait présenté l'alternative des éoliennes à des séances d'information qu'il y avait eu pour parler du barrage et qu'il y avait, là encore, ici, le problème de «pas dans ma cour», qu'il y a des gens qui disaient: Bien, moi, je veux avoir le barrage parce que je ne veux pas le voir, mais je ne veux pas avoir les éoliennes parce que je vais les voir. Le problème de «pas dans ma cour», oui, se retrouve là aussi.
Je suis encore pour qu'il faudrait aller vers l'économie d'énergie et l'efficacité énergétique avant tout nouveau projet électrique, tout simplement.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Je partage votre choix à cet égard-là. Est-ce que... Mais vous n'avez pas beaucoup abordé... vous abordez la question des négawatts, là, mais... Est-ce qu'à votre avis l'Agence de l'efficacité énergétique qui existe en ce moment, qui est sous l'autorité du ministère des Ressources naturelles... Est-ce que l'Agence de l'efficacité devrait être plus agressive? Est-ce qu'elle devrait être isolée du ministère? Comment est-ce qu'elle devrait être financée?
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Je ne vais pas m'avancer sur qui devrait faire quoi, mais, oui, on devrait avoir une attaque plus agressive tout simplement pour l'efficacité énergétique, peu importe qui va la mettre en branle. Ça a été prouvé à maintes reprises que l'efficacité énergétique, l'économie d'énergie est environ doublement créatrice d'emplois que tout projet électrique. Donc, si c'est ce qu'on veut pour la MRC des Basques, créer de l'emploi, ce n'est pas avec un barrage qu'on va en faire, tout simplement. C'est 0,5 emploi à long terme; c'est quelqu'un de Rivière-du-Loup qui va venir une fois par semaine à Trois-Pistoles pour enlever la poussière sur les boutons et retourner. Ce n'est pas créateur d'emplois, à part pendant la construction, j'avoue. Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
n(17 h 50)nMme Dionne-Marsolais: Merci. Vous avez dit tout à l'heure que, dans le reportage que vous avez entendu, la MRC retirerait 600 000 $ par année?
M. Rioux (Sébastien): C'est ce qui est écrit, à 25 % de rendement.
Mme Dionne-Marsolais: Ce serait beaucoup. Parce que je crois qu'hier les chiffres qui nous ont été déposés ou présentés étaient plutôt de l'ordre de 500 000 $ par année de redevances pour...
M. Rioux (Sébastien): Pour les éoliennes?
Mme Dionne-Marsolais: Non, pour la minicentrale.
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Bien, je veux juste vous dire qu'au dernier... à la dernière diffusion d'information par les promoteurs lors des séances d'information, le chiffre officiel qu'ils nous ont dit était de 125 000 $. Si ça a changé depuis la dernière fois, c'est récemment.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: D'accord. Pour les premiers 20 ans, c'est effectivement 160 000 $ par année. Mais, si on regarde ces chiffres-là puis on regarde les chiffres qui ont été annoncés pour l'éolien, il me semble que le préfet de la MRC n'aurait pas un gros travail à faire pour conclure l'intérêt de développer des éoliennes.
M. Rioux (Sébastien): Exactement, c'est ce que je me dis.
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Pardon. Et l'acceptation du public devrait probablement mieux se faire également parce que c'est des projets pas mal moins destructeurs, donc...
C'est sûr que là on parle de 600 000 $. Si les chiffres sont justes et c'est vraiment ce qui va se passer, il me semble que le choix est assez facile à faire: On choisit-u 125 000 $ ou on choisit 600 000 $? Et est-ce qu'on choisit un projet destructeur ou un projet rassembleur?
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Vous dites aussi... Bon, c'est un peu... moi, je suis toujours intéressée à chercher des solutions, et j'ai de la misère à en trouver dans votre mémoire. Mais votre... ce que je comprends, c'est que votre position par rapport à Trois-Pistoles, il s'applique à toutes les rivières du Québec?
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
Mme Dionne-Marsolais:«Elle» s'applique à toutes les rivières...
M. Rioux (Sébastien): Majoritairement, oui, oui, oui.
Mme Dionne-Marsolais: Oui, hein? D'accord. Moi, je n'ai pas d'autre question. À partir de ce que j'ai là, là, je pense que je...
Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque, rapidement.
M. Dufour: Juste une question technique: Pourriez-vous me rappeler les pourcentages et le résultat du vote, là, que vous m'aviez dits tantôt?
M. Rioux (Sébastien): 32 % des gens se sont déplacés pour aller voter, et c'est 60 % pour, 40 % contre.
Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Alors, 32 % des gens ont été voter, mais c'est du 60-40. Habituellement, en tout cas dans ce que j'ai vécu antérieurement, c'est que, quand tu es contre, tu vas voter, quand tu es pour, tu laisses les autres aller voter pour toi. Qu'est-ce que vous pensez de cette logique-là?
Le Président (M. Bachand): M. Rioux.
M. Rioux (Sébastien): Moi, je ne suis pas d'accord. Les gens ne se sont pas déplacés également parce que c'est une population vieillissante, puis il fallait faire le transport pour les gens, il fallait les apporter au lieu de vote. Ce n'est pas tous les gens qui ont fait l'effort de se trouver un transport pour se rendre, aussi.
L'information n'a pas bien passé. Il y a des gens que j'ai rencontrés après le référendum, et ils venaient de la région, ils ont dit: Il y a eu un référendum? L'information a très mal été passée, a mal circulé, et c'est ce qui en... Le résultat en dit long, je crois, qu'il y a 32 % des gens qui sont allés. Que ce soit pour ou contre, le projet n'a pas stimulé les gens à aller voter, d'un côté ou de l'autre.
Les gens ont toujours resté... La plupart des gens qui disaient qui n'allaient pas voter étaient plutôt... ne voulaient pas se mêler à ça, premièrement, ils disaient que ce n'était pas à eux autres de choisir ça, qu'ils laissaient le préfet choisir pour lui et que... Et, moi, je trouve ça aberrant, là, je trouve que tout le monde devrait avoir son droit de parole. Mais c'est ça.
Et, dès qu'on l'a présenté... on essayait beaucoup de présenter l'opinion des jeunes, parce que c'est eux qui vont avoir à vivre avec ce projet-là, et ça a été une grosse barre avec un zéro pour l'écoute.
Le Président (M. Bachand): Donc, il ne me reste plus qu'à vous remercier, M. Rioux, de vous être présenté en commission, et bon retour chez vous. Merci à tous. Donc, je vais demander à M. Gilles Fortin de prendre place. M. Fortin, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Bachand): Bienvenue, M. Fortin, à la Commission de l'économie et du travail, en consultation générale sur le document intitulé Le secteur énergétique au Québec ? Contexte, enjeux et questionnements. Donc, je vous rappelle que vous avez donc 10 minutes pour votre présentation et 10 minutes de part et d'autre pour la période de questions. Allez-y, M. Fortin, nous vous écoutons.
M. Gilles Fortin
M. Fortin (Gilles): Excusez-moi, je vais juste me brancher. Mon texte est... je l'ai un petit peu modifié, donc il est sur informatique.
Alors, je suis l'auteur d'un guide de rivières ? il y en a un exemplaire ici, que j'ai fait il y a 25 ans ? qui faisait le tour des plus belles rivières du Québec, essentiellement les rivières méridionales, donc je n'ai pas abordé... enfin répertorié les rivières de la Côte-Nord ou de la Gaspésie.
Et donc j'ai peut-être rajouté quelques points à mon mémoire, donc qui ne sont pas dans le texte, que je vais vous parler maintenant. Il m'est apparu la question des effets de système imprévus. Je vais vous donner trois exemples d'effets de système imprévus et voir un peu: est-ce qu'il y a des effets de système imprévus dans la problématique énergétique? Alors, le premier exemple, c'est la disparition de la morue. Le gouvernement fédéral a imposé un moratoire à la pêche à la morue il y a 10 ans. Pourquoi les stocks de poisson ne se sont pas régénérés? Je vous donne un petit entrefilet que j'ai lu dans La Presse en 2004: Des chercheurs québécois ont découvert une diminution de 70 % du plancton, en 10 ans, dans la couche d'eau intermédiaire de l'estuaire du Saint-Laurent. Cette couche se serait refroidie de quelques degrés, et ce serait donc la fonte des glaces de l'Arctique, due au réchauffement planétaire, qui serait ultimement responsable de la non-résurrection de la morue. Donc, on a un exemple d'un effet de système imprévu. Ça, personne n'avait prévu ça.
Un autre exemple d'un effet de système: Est-ce qu'il y a des coupes de forêts excessives? Si c'est le cas, les économies forestières en région vont en souffrir dans quelques années. C'est encore un effet de système qu'on n'avait pas prévu. Un autre exemple, plus récent: les loteries en région. Si les loteries en région ont pour conséquence de faire faire faillite à beaucoup de gens, il est possible que, dans cinq ans, le budget de l'assistance sociale en région soit supérieur aux revenus de Loto-Québec, mais, comme Loto-Québec et puis le ministère social, ce n'est pas la même juridiction, c'est un effet de système que personne va voir. Alors, est-ce qu'il y a des effets de système imprévus pour l'énergie? Je pose la question et je vais apporter quelques amorces de réponse à la fin.
Alors, je rentre dans mon mémoire. Donc, un mythe répandu, c'est l'abondance des rivières sportives. Malgré les 90 rivières sportives que j'ai répertoriées dans mon guide, il y en a très peu près des régions habitées. Donc, à Montréal, il y a le bas de la Rouge et il y a les rapides de Lachine, qui sont de réputation internationale. Dans la région de Hull-Ottawa, il y a le chenal du Rocher fendu, sur la rivière des Outaouais, qui est également de réputation internationale, c'est-à-dire qu'il y a des gens qui viennent de partout à travers le monde pour descendre ces parcours. Dans la région de Québec, il y a la rivière Jacques-Cartier, plusieurs parcours sur la Jacques-Cartier et, dans une moindre mesure, la Montmorency.
n(18 heures)n Pourquoi j'amène ce point? C'est que les descentes sportives, c'est-à-dire les rapides et les barrages sont en conflit. Il y a vraiment un conflit d'usage. Mais je veux aussi vous mentionner que les chutes et les rivières sont également des moteurs économiques intéressants. Est-ce qu'on penserait à harnacher les chutes du Niagara? J'ai eu, à l'automne dernier, une étudiante allemande, que j'ai hébergée pendant deux semaines, qui est venue suivre un cours de français à Montréal, et, durant le week-end entre les deux semaines, elle a pris un autobus et est allée voir les chutes du Niagara. Je vous avoue sincèrement que je ne suis jamais allé les voir, mais, pour une personne d'Europe, voir les chutes du Niagara, c'est vraiment un must. Et je vous suggère que nos rapides et nos chutes en région, comme celle de Trois-Pistoles qu'on a vue tantôt, sont également des moteurs économiques intéressants.
Il y a ce qu'on appelle le tourisme sportif. Sur la Rouge, à Rivière-Rouge, on estime qu'il y a 3 millions de revenus qui sont générés par les trois compagnies de rafting qui font des descentes commerciales sur la rivière Rouge. Je vous mentionne que les descentes du Grand Canyon du Colorado sont contingentées à environ 10 000 personnes par année. Le temps d'attente est de sept à 10 ans si vous voulez faire une descente par vous-même du Colorado. Par contre, si vous utilisez des descentes commerciales, ça va aller plus vite, mais ça va vous coûter à peu près 5 000 $US pour faire une descente du Colorado. Multipliez 10 000 par 50 000 $US, ça vous fait un revenu de 50 millions US... de revenus potentiels de la descente du Colorado.
Un autre exemple de descente sportive intéressante, il y a un Festival d'eau vive de la Gatineau, à Maniwaki, depuis huit ans maintenant, qui regroupe, à la fin août, environ 1 000 kayakistes et 1 000 canoéistes. Alors, si vous turbinez les rapides ? il y a six rapides sur la Gatineau ? qui sont d'un intérêt pour ces 1 000 personnes qui viennent de Hull, de Montréal, de Québec, si vous turbinez ces rapides-là, bien il va y avoir 1 000 personnes de moins durant un week-end qui vont aller à Maniwaki. Donc, la région de Maniwaki va en souffrir.
Enfin, je vous mentionne les chiffres de Val-Jalbert, sur le Lac-Saint-Jean, qui est un must. Il y a des chutes qui sont méconnues, la chute MacDonald, à Port Cartier, et la chute Manitou, entre Sept-Îles et Havre-Saint-Pierre. Ce sont toutes des raisons pour lesquelles les touristes vont s'arrêter en région; c'est une façon de faire sortir les citadins de la ville. Donc, l'intérêt de la descente sportive est suffisant pour attirer 1 000 personnes un week-end d'août à Maniwaki, c'est donc un facteur d'attrait, de développement régional important.
Alors, je me hérisse quand j'entends parler des gens qui disent: Bon, bien, on va harnacher toutes les rivières, on va turbiner toutes les chutes, et puis on va régler le problème de l'énergie au Québec. Alors, est-ce que c'est l'héritage qu'on veut laisser à nos enfants?
Et je vous suggère qu'il y a ici un effet de système imprévu, c'est-à-dire qu'une fois qu'on aura harnaché tous les rapides et turbiné toutes les chutes, on va se plaindre après ça: Ah, il n'y a plus personne qui vient en région. C'était une des raisons parmi d'autres qui faisaient que les gens de la ville se déplacent à la campagne.
Maintenant, la contribution des centrales au fil de l'eau ? on parle des petites centrales. Vous n'êtes pas sans savoir que l'étiage, donc le débit minimal annuel d'une rivière, se trouve en hiver, dans les mois de janvier et février. C'est exactement la période où le Québec a le plus besoin d'énergie. Dans mon mémoire, à la fin, vous avez une courbe qui représente l'hydrogramme de la rivière Magpie ? ou Magpie ? et cette courbe est typique; toutes les rivières du Québec suivent cette courbe. Donc, vous remarquez qu'il y a une courbe, il y a une pointe à la crue hivernale, et il y a une période d'étiage qui s'étend généralement janvier-février à avril.
Alors, je vais vous donner un exemple, ici, de la rivière Magpie, où un promoteur propose de faire un barrage. La proposition du promoteur a été acceptée par le BAPE, en fait, mais il y a quand même une réserve que je vais vous mentionner tantôt. Le promoteur affiche une capacité de 40 MW, mais en fait cette capacité-là va être produite seulement pendant deux mois dans l'année, donc de la mi-mai à la mi-juillet, parce qu'elle correspond à un débit de crue au-delà de 210 m³/s. Pendant cinq mois, donc de décembre à avril, le débit moyen va être proche ou inférieur à 50 m³/s, donc il ne pourra produire que 9,6 MW. Et c'est la même chose pour toutes les rivières. Donc, la petite rivière de Trois-Pistoles, durant l'hiver, va produire très peu d'énergie, très, très peu. Si son débit maximal est de 3 MW, ça va être des poussières en hiver, quand ça compte.
Alors, le budget du promoteur était de 54,5 millions. Alors, avec le même budget, on pourrait installer sur la Côte-Nord 36 éoliennes, à 1,5 million, qui vont produire 72 MW, à 2 MW par éolienne, et ce, sûrement pendant plus que deux mois par année. Alors, même si la Côte-Nord est connue pour la constance de ses vents en hiver, j'utilise le facteur habituel de 36 % d'efficacité pour les éoliennes, ça va nous donner quand même 25,9 MW en hiver, comparativement aux 9,6 MW que la centrale aurait produits.
Le Président (M. Bachand): M. Fortin, désolé de vous interrompre. Si vous pouvez conclure dans une minute, si c'est possible.
M. Fortin (Gilles): Oh! Ça va être difficile.
Le Président (M. Bachand): Je suis sûr que vous êtes capable de faire ce tour de force là.
M. Fortin (Gilles): Bon, le problème de ce barrage, c'est qu'il va noyer le dernier rapide ? dont j'ai une photo ici, vous pouvez venir voir, parce que je l'ai descendu au mois de septembre ? est que la rivière Magpie, selon mon expérience, c'est la plus belle rivière sportive au Québec. Donc, elle a un potentiel économique, je dirais, aussi important que le bas de la Rouge, donc 3 millions de dollars par année pour l'économie locale, de revenu local.
Certains la considèrent comme la quatrième au monde, derrière de Grand Canyon du Colorado, le Futaleufu au Chili et les hautes gorges du Tibet. Donc, on aurait la quatrième plus belle rivière sportive au monde et on veut faire le barrage qui va noyer le dernier rapide et la dernière chute. Et donc on se prive des revenus vraiment en apport régional.
Bon. J'avais d'autres points dans mon mémoire, que vous pouvez lire. Je parlais de consommation frivole, que mes prédécesseurs ont appelé du luxe. Je veux juste attirer votre attention, qu'il faut une réglementation pour empêcher la consommation frivole, que ce n'est pas en haussant des tarifs qu'on va y arriver. Une réglementation toute simple, par exemple, sur les minuteries, ou si gouvernement bannit les antidémarreurs sur les autos, déjà on va réduire la pollution de façon énorme. Donc, il y a une façon, par une réglementation appropriée, de faire des économies d'énergie.
Le Président (M. Bachand): Donc, merci, M. Fortin, pour votre... À moins qu'il y ait consentement, là, pour... Donc, je comprends qu'on passe à la période de questions. De toute façon, M. Fortin, vous aurez l'occasion absolument, comme dit le député de René-Lévesque, de compléter votre présentation à même les questions. Donc, M. le ministre des Ressources naturelles et de la Faune.
M. Corbeil: Merci, M. Fortin, de votre présentation et aussi de nous avoir parlé des effets de système. Ça me donne l'occasion, votre présentation, de rappeler aux gens qu'au Québec il y a au moins 4 500 rivières et qu'il y en a seulement 65 d'entre elles qui ont été aménagées pour la production d'hydroélectricité. Quelques-unes à plusieurs endroits, parce qu'on parle de complexes hydroélectriques, et il y a 155 installations hydroélectriques sur ces 65 rivières qui ont été aménagées.
Et c'est curieux, c'est curieux que vous ayez cité plusieurs endroits non seulement au Québec, mais dans le monde, parce que vous parlez... Est-ce qu'on aurait pensé à harnacher les chutes du Niagara? Il y a des aménagements hydroélectriques du côté ontarien puis du côté de New York, de l'État de New York, sur la rivière qui alimente les chutes du Niagara.
Vous avez parlé du Grand Canyon du Colorado, et il y a le «over dam» sur la rivière du Grand Canyon du Colorado. Val-Jalbert, la rivière Ouiatchouan. La rivière Ouiatchouan, les installations qui ont été faites là au début du développement du Lac-Saint-Jean, c'était d'utiliser justement le pouvoir hydraulique de cette imposante chute, que j'ai visitée à trois, quatre reprises, pour faire tourner un moulin à scie. Le lac Saint-Jean lui-même est un réservoir ? c'est assez paradoxal ? et la rivière Magpie ? Magpie, tout dépendant de comment on l'appelle ? elle a 284 km de long. Et il y a déjà un barrage dessus, dans lequel on va installer une installation pour produire de l'énergie hydroélectrique. Ça cancellerait probablement la dernière chute de cette rivière-là, mais c'est quand même un endroit, un endroit qui est utilisé, M. Fortin, par des gens qui pratiquent le sport que vous proposez comme un endroit de mise à l'eau. En bas de ce barrage-là, les gens vont s'installer dans leur kayak et entreprendre la descente de la rivière sur toute la portion qui reste en aval des installations ou du barrage qui a déjà été là. Non?
Le Président (M. Bachand): M. Fortin.
M. Fortin (Gilles): Oui. Le barrage est à l'embouchure, avec le fleuve.
M. Corbeil: Ah, il est au bord du fleuve Saint-Laurent?
M. Fortin (Gilles): Oui, oui. C'est à 500 mètres du Saint-Laurent.
M. Corbeil: O.K.
Le Président (M. Bachand): M. le ministre.
n(18 h 10)nM. Corbeil: Mais, de toute façon, vous êtes quand même... il y a un barrage qui est là.
M. Fortin (Gilles): Oui, il y a un barrage, oui, où c'est...
M. Corbeil: Et ça ne vous empêche pas de descendre en canot.
M. Fortin (Gilles): Bien, c'est là où on termine...
M. Corbeil: C'est là où vous terminez?
M. Fortin (Gilles): ...on termine au barrage.
M. Corbeil: O.K. Donc, je pense qu'il y a quand même place pour une utilisation raisonnable, responsable du potentiel hydroélectrique du Québec. Et, comme vous le savez, la présente commission se penche sur l'avenir et la sécurité énergétiques du Québec. Je pense que vous avez des réserves importantes sur le développement de l'hydroélectricité. Pouvez-vous nous parler de votre vision de l'avenir énergétique du Québec?
Le Président (M. Bachand): M. Fortin.
M. Fortin (Gilles): Bien, je pense que plusieurs groupes avant moi en ont parlé, je pense que j'abonde dans ce sens-là. Tout ce que je veux dire, moi, c'est qu'il ne faut pas voir les petites centrales au fil de l'eau comme étant une contribution importante à la production énergétique, parce que, comme je vous le disais tantôt, en hiver, la production, elle est nulle. En fait, pour un investissement comparable, vous êtes mieux avec des éoliennes. C'est ce que j'essaie de vous démontrer. Pour toutes les petites centrales où il n'y pas de barrage, il n'y a pas de retenue, bien c'est préférable d'avoir des éoliennes. Pour le même investissement, ça va produire plus en hiver.
Donc, c'est le point que je veux faire, je pense, le point crucial. Donc, c'est clair que, moi, je pencherais pour l'éolien dans des cas comme ça. Pour un investissement comparable, vous avez un meilleur rendement.
Pour ce qui est de la Magpie, je veux juste vous mentionner qu'ils vont hausser le barrage de neuf mètres, le barrage actuel, ce qui va inonder le dernier rapide classe V ? dont j'ai une photo ici ? et la dernière chute. La dernière chute, quand je l'ai descendue, on était 12 kayakistes, et les trois quarts des kayakistes ont sauté la dernière chute, et c'était pour eux une expérience tout à fait fantastique, et c'est ce qui va faire qu'il va y avoir des comptes rendus de publiés dans les magazines cet hiver, et il va y avoir une affluence internationale de gens qui vont vouloir faire cette descente-là. Et le point culminant de la descente, c'est cette dernière chute qu'on peut sauter, une chute d'à peu près 15 mètres, et ce rapide classe V ? dont vous pouvez apprécier ici la photo...
Alors, c'est comme, je vous dirais, le Grand Canyon du Colorado, il y a cinq rapides dessus, en aval du barrage, on s'entend, là. Le dernier rapide, Lava Falls, est à deux jours des autres rapides. Donc, il faut endurer deux jours de plat sous un soleil de plomb pour faire le dernier rapide. À 1 000 $ US par jour, il faut alors pagayer. Les gens le font parce que c'est Lava Falls, c'est le plus gros rapide au monde. Et c'est un peu la même chose avec la Magpie. Si on enlève la dernière chute, le dernier rapide, bien vous coupez une grande partie de l'intérêt de la descente, donc de l'attrait international du parcours.
Le Président (M. Bachand): M. le ministre.
M. Corbeil: Est-ce que vous pouvez nous donner une idée de l'achalandage de la rivière Magpie, en termes d'utilisation par les kayakistes?
M. Fortin (Gilles): Actuellement, elle est méconnue. Personne ne la connaissait. Moi, je vous avoue qu'il y a 25 ans, quand j'ai fait mon guide, j'ai répertorié sur les cartes topos la Magpie, mais je ne l'ai pas fait à cette époque-là, parce que ça prend un hydravion, ça prend au moins trois jours, trois à quatre jours de descente en kayak, sur les 55 derniers kilomètres. Donc, ça vous prend un support en radeau. On ne peut pas, dans un kayak, amener sa tente, son bagage, etc., pour trois jours de... en fait, c'est plus compliqué à faire, là.
Et donc c'est pour ça que c'est assez méconnu. C'est un Américain qui fait, chaque année, trois, quatre descentes, à 2 000 $, 3 000 $ pièce, de cette rivière-là, qui la gardait bien cachée et qui, quand il a vu qu'elle était en danger, il s'est mis à faire une publicité. M. Kennedy est venu d'ailleurs cet été pour en parler. Mais, dans les 12 kayakistes qui étaient avec moi, il y avait plusieurs champions du monde. Il y avait des gens du Costa Rica, de l'Afrique du Sud, et ils ont tous été emballés par la rivière. C'est une rivière sauvage, incroyable, qu'il faut garder comme ça et qui, si elle est connue, va vraiment amener des revenus très intéressants dans la région.
Le Président (M. Bachand): M. le ministre.
M. Corbeil: C'est quoi, les retombées économiques de cet achalandage ou de l'utilisation de la rivière Magpie en question à des fins récréotouristiques?
Le Président (M. Bachand): M. Fortin.
M. Fortin (Gilles): Oui. Actuellement, il y a à peu près deux, trois descentes de planifiées par ce groupe américain. Je ne connais pas d'autres groupes québécois qui planifient des descentes, parce que la demande n'est pas là. Moi, j'en ai parlé au Club de kayak de Montréal l'été dernier. Ils sont 300 membres. Et, quand ils ont su que c'était une rivière si fantastique que ça, bien ils se sont intéressés à la faire. C'est un peu lorsque la demande... Si on regarde le bas de la Rouge, 3 millions de revenus annuellement; évidemment, je ne pense pas qu'on puisse aller chercher autant, parce que la saison est plus courte, les mouches sont là jusqu'en juillet, donc il y a le mois d'août puis la mi-septembre comme saison. Si vous faites une descente en radeau par jour, généralement les groupes ont trois radeaux, donc il y a à peu près 20 personnes payantes, mettez à peu près 1 000 $ par jour, donc... en tout cas, il faudrait faire des calculs, là, mais, c'est définitivement un potentiel très intéressant.
Le Président (M. Bachand): M. le ministre.
M. Corbeil: Non, M. le Président, c'est terminé pour moi. Peut-être que mes collègues auraient des questions à poser.
Le Président (M. Bachand): Ça va. Messieurs, madame? Oui, Mme la députée de La Peltrie.
Mme Hamel: Bonjour, monsieur. Vous mentionnez, à la dernière page de votre mémoire: «Si Hydro-Québec veut augmenter considérablement ses tarifs électriques de base, elle a la responsabilité de subventionner la conversion des résidences à chauffage par plinthes électriques vers un autre système de distribution calorifique.» Quel genre d'installation de chauffage vous privilégieriez?
Le Président (M. Bachand): M. Fortin, rapidement.
M. Fortin (Gilles): Oui. Écoutez, bon, vous connaissez la problématique un peu. Il y a 10 ans, Hydro-Québec disait: Chauffez à l'électricité. Bon, c'était comparable aux autres sources. Les plinthes sont moins chères que n'importe quel autre système électrique, donc beaucoup de gens se sont mis aux plinthes.
Maintenant, de convertir une installation aux plinthes électriques à d'autre chose, il faut soit aller à l'eau chaude ou à l'air chaud comme conducteur, vecteur de l'énergie, donc ça demande des réaménagements assez importants à l'intérieur d'une maison quand ça n'a pas été planifié pour ça. Maintenant, la chaudière principale, ça pourrait être du géothermique. C'est ce qui semble le plus prometteur, d'après ce que je peux en voir.
Le problème, ce n'est pas tellement ça, c'est d'amener la source de chaleur à chauffer la maison. Généralement, en géothermique, vous allez aller avec des tuyaux, donc des grosses gaines, et, si la maison ou le logement n'a pas été prévu pour ça, c'est des travaux majeurs.
Le Président (M. Bachand): Merci, Mme la députée, merci, M. Fortin. Pour préciser, simplement pour le bénéfice des collègues, j'ai cru comprendre: Êtes-vous de la région ou... de la région de la rivière ou...
M. Fortin (Gilles): J'ai affronté la tempête de neige pour venir vous voir aujourd'hui.
Le Président (M. Bachand): Dites-moi de quelle...
M. Fortin (Gilles): Je réside à Montréal.
Le Président (M. Bachand): À Montréal. Merci beaucoup. Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie.
Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Nous aussi, on a affronté la tempête de neige pour nous rendre, et on était très contents d'avoir de l'électricité disponible. Je peux vous dire ça.
Cela dit, vos réflexions sont intéressantes. En fait, ce que vous dites, c'est: une distribution de la production ? vous ne l'avez pas dit, là, mais, dans votre texte, vous le dites ? une production décentralisée, donc qui pourrait solliciter les individus à contribuer au réseau d'Hydro-Québec... C'est effectivement très intéressant, cette production décentralisée, mais la question qu'il faut poser... Évidemment, il y a toute une éducation puis tout... le prix est une grosse variable dans ces cas-là, parce que c'est quand même une mise de fonds, quelle que soit la forme, qu'on pense géothermie, que l'on pense à l'éolien, qu'on pense au solaire, il y a une grosse mise de fonds, donc, au fur et à mesure où les coûts vont baisser, ça va être bien.
Mais, moi, j'aimerais vous entendre un peu sur la consommation frivole. Je veux vous entendre, parce que vous dites, bon, les décorations de Noël, ça peut... peut-être que vous pourriez... on pourrait considérer ça comme frivole, bien qu'il y en a qui considèrent que c'est bien important. L'éclairage décoratif extérieur des immeubles et des stationnements. Vous êtes d'un milieu urbain, vous savez que l'éclairage des immeubles et des stationnements, là, moi, je vous parle en tant que femme montréalaise, là, ce n'est pas frivole du tout, ça. Moi, quand je vais chercher mon auto dans un stationnement, là, je ne suis pas très, très, très, très grosse dans mes souliers quand il n'y a pas de lumière. Puis je suis certaine que j'ai des collègues ici qui ont la même chose, qui considèrent aussi... Ce n'est pas frivole, ça. L'éclairage des autoroutes, là, il y a des portions d'autoroute où c'est très important d'avoir de l'éclairage. L'utilisation abusive de l'eau chaude, encore là, c'est une question de jugement personnel.
n(18 h 20)n Plutôt que de qualifier ou de décider qu'est-ce qui est frivole ou pas, parce que chacun... vous, vous êtes un grand garçon, ça vous fait moins peur, les corridors noirs, mais, moi, je suis une petite fille, puis c'est plus fragile, mettons, en tout cas, psychologiquement, on peut comprendre ça, mais j'aimerais mieux que l'on fasse une sensibilisation à une utilisation plus rationnelle de l'électricité ou de l'énergie. Et, dans ces mesures-là, on a eu ici les gens du gaz naturel qui sont venus nous dire que, pour une bonne partie, une certaine partie du chauffage des locaux et de certains usages industriels, l'utilisation du gaz naturel était préférable. Je vous pose la question: Est-ce que c'est un jugement que vous partagez, ça?
Le Président (M. Bachand): M. Fortin.
M. Fortin (Gilles): Écoutez, je n'ai pas tellement d'opinion là-dessus, mais ce que je voulais souligner par la frivolité, tout simplement, c'était que ce n'est pas avec une tarification qu'on va réduire ces usages qu'on pourrait qualifier de frivoles. Moi, je vous suggérerais de mandater un office quelconque, là, d'économie d'énergie pour étudier la question, parce que je ne pense pas qu'on puisse... Déjà, les gens avant moi, là, du Parti québécois arrivaient avec ces histoires de tarification modulée, et tout, et puis, à un moment donné, on n'arrive pas à sauver la chèvre et le chou. Les gens qui chauffent, hein, à l'électricité ont un problème... puis il faudrait les encourager à se convertir.
Tout ce que je veux dire, c'est qu'il ne faut pas oublier la réglementation. Je sais qu'en Europe ou dans d'autres pays il y a des réglementations, il y a des minuteries, il y a des choses comme ça qui font qu'on baisse la consommation soi-disant frivole. Et donc je pense qu'il faudrait y aller par la réglementation plus que par la tarification. On va en sauver plus, c'est tout ce que je veux dire.
Évidemment, je ne suis pas en mesure de vous proposer quoi que ce soit. Je pense que ce serait à des offices d'économie d'énergie de regarder la question puis d'arriver à des choses bien étudiées, et tout. Mais je ne vois pas comment quelqu'un qui n'a pas assez d'argent pour arriver va investir pour mettre une minuterie pour économiser... de l'énergie. Je ne vois pas une grande corporation qui gère beaucoup d'immeubles se concentrer sur réduire ses dépenses, là, de quelques cents, qu'il y ait un impact, là, sur la consommation générale du Québec parce qu'il va investir pour faire des minuteries qui vont faire qu'il va sauver de l'énergie. Je veux dire, c'est comme... ce n'est pas dans notre esprit, en tout cas notre mentalité nord-américaine de faire ça. Et je pense qu'une réglementation s'impose, et puis c'est au gouvernement à se mouiller dans cette question-là.
Le Président (M. Bachand): Mme la députée.
Mme Dionne-Marsolais: Pour votre information, il y a une entreprise industrielle de Montréal, je pense que c'est Johnson & Johnson ? je donne le nom parce qu'ils ont accepté dans le passé, là, de recevoir un prix pour cela ? qui avait mis en place, de par les exigences de concurrence de l'usine de Montréal par rapport aux autres usines du réseau de Johnson & Johnson, un plan d'économie... d'efficacité énergétique, pas d'économie. Ils ont modifié... ils ont fait des investissements pour modifier leurs procédés de fabrication; ils ont réduit de 15 % leur facture de consommation d'énergie. Et ça, ils l'ont fait par les exigences de la concurrence du marché nord-américain.
Alors, il se fait déjà des choses. C'est juste un commentaire, mais il ne faut pas sous-estimer non plus l'encouragement que l'on peut avoir à partir... en se fixant des objectifs. Et je partage votre ? je termine là-dessus, M. le Président ? je partage votre avis sur le fait que le gouvernement doit donner des objectifs et qu'on peut établir des cibles pour encourager et diriger une efficacité, une utilisation plus efficace de l'énergie.
Le Président (M. Bachand): Commentaires, M. Fortin? M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Alors, M. Fortin, bienvenue à l'Assemblée nationale. Alors, la rivière Magpie n'est pas dans mon comté mais dans le comté de ma collègue Lorraine Richard, dans Duplessis. Dans le plaidoyer que vous nous avez fait, vous avez parlé d'une réserve par rapport à la Magpie, puis vous n'avez pas souligné quelle réserve vous aviez.
Le Président (M. Bachand): M. Fortin.
M. Fortin (Gilles): Non, ce que je voulais dire, c'est que le rapport du BAPE était mi-figue, mi-raisin. Le lendemain de sa parution, le rapport du BAPE ? c'est le rapport n° 198 ? était mi-figue, mi raisin. Il y a des journaux qui ont dit: Le BAPE dit oui à la centrale, d'autres ont dit: Dit non. Donc, c'est un rapport assez ambigu. Et toujours est-il que, dans sa conclusion... Et puis je vais vous lire texto parce que ça vous concerne, là: «Plusieurs participants à l'audience publique ont réclamé par ailleurs une actualisation de la politique énergétique du Québec ? ce que vous êtes en train de faire aujourd'hui. Ils souhaitent que la commission parlementaire portant sur l'énergie [...] soit l'occasion de discuter, entre autres, du choix des filières énergétiques et du rôle des petites centrales hydroélectriques.» Donc, je pense que vous allez sûrement trancher cette question-là. Moi, évidemment, je suis pour les petites centrales, mais...
Une voix: ...
M. Fortin (Gilles): Je suis pour... je suis contre les petites centrales, excusez-moi.
M. Dufour: Ah bon! Sans ça, je n'aurais plus eu de question à vous poser.
Le Président (M. Bachand): M. le député de René-Lévesque.
M. Dufour: Oui. Vous avez parlé de coûts pour les descentes, là, quand vous allez du côté américain. Au niveau de la rivière Magpie, est-ce qu'il y a un coût pour la descente de la rivière, par rapport aux retombées économiques de Magpie?
M. Fortin (Gilles): Bien, écoutez...
M. Dufour: Au moment où on se parle.
M. Fortin (Gilles): Écoutez, actuellement, si, moi, je veux aller descendre la Hudson, aux États-Unis, je ne pourrais pas, puis si je veux amener des gars pour descendre la Hudson, aux États-Unis, je ne pourrai pas, parce que les garde-frontières américains vont me dire que j'enlève du travail des Américains. Si les Américains viennent descendre ici avec des groupes, il n'y a aucun problème, le gouvernement canadien laisse passer ? parce que c'est eux qui s'occupent qui s'occupent des frontières ? ils vont descendre les rivières, et ils empochent tout l'argent, et ils ne donnent rien à personne. Alors, on est dans une totale incurie à ce niveau-là, au niveau de la réglementation.
M. Dufour: Alors, un commentaire et une dernière question...
Le Président (M. Bachand): Allez-y, monsieur, bien sûr.
M. Dufour: Alors, juste comme commentaire, je vous dirais que c'est vrai que le législateur va avoir tout un travail à faire à la fin de cette commission, parce que beaucoup de gens sont pour, les localités des MRC, parce que c'est une aide pour la municipalité par rapport à des retombées économiques, la diversification économique, d'autres sont contre, comme vous, et on prend bonne note de ce que vous dites.
Mais, comme dernière question, puis on l'avait posée tout à l'heure, ça s'est posé tout à l'heure à celui qui vous précédait: Est-ce que la décision ou non d'avoir une minicentrale appartient au milieu, à la localité, à la MRC, d'après vous?
Le Président (M. Bachand): M. Fortin.
M. Fortin (Gilles): Bien, écoutez, on ne se fera pas de cachette, là, les promoteurs, ils donnent un petit pourcentage aux gens de la région, ils leur assurent un revenu. Ces gens-là, c'est mieux que rien, puis ils se disent: pourquoi pas, on est d'accord. Même le conseil innu d'Ekuanitshit, là, a dit: Oui, oui, on est d'accord, puis, après ça, ils se sont plaints qu'ils n'avaient pas de ristourne. Alors, les dés sont un peu pipés, là, quand on donne des redevances aux gens de la région; c'est sûr qu'ils vont être pour.
Par contre, dans le cas de la Magpie, ce qu'ils ne voient pas, c'est qu'il y a un potentiel énorme de cette rivière-là, ce qui n'est peut-être pas le cas de la rivière qu'on a vue tantôt, de Trois-Pistoles, mais il y a un potentiel énorme de revenus locaux qui vont générer de l'emploi localement, qui vont faire que des guides innus pourraient guider des descentes, etc., qui vont se trouver drôlement handicapés s'ils disent oui à ce barrage-là. Puis ce qui ne va pas, c'est les alternatives. Moi, quand je vous dis que, pour le même investissement, vous allez avoir plus d'énergie en éoliennes, bien, ça, la MRC est incapable de voir ça. Ils se font présenter un projet par des promoteurs qui leur donnent une ristourne, donc forcément ils ne diront pas non à ça. Par contre, ils ne voient pas les alternatives.
M. Dufour: O.K.
Le Président (M. Bachand): M. Fortin. Oui, très rapidement, monsieur...
M. Dufour: Juste un commentaire. Je peux vous dire que je reçois... ou on reçoit, nous, les législateurs et les parlementaires, les maires de la Basse-Côte-Nord la semaine prochaine. Alors, effectivement, on va leur poser la question véritablement si les dés étaient pipés.
M. Fortin (Gilles): Est-ce que je pourrais juste...
Le Président (M. Bachand): Très rapidement.
M. Fortin (Gilles): ...vous laisser deux questions? Est-ce qu'il y a des effets de système imprévus dans le domaine de l'énergie? Alors, je vous en pose deux parce que je n'ai pas les réponses.
Alors, quel sera l'effet du réchauffement climatique sur l'hydraulicité? J'espère que vous allez avoir des experts qui vont vous éclairer là-dessus. Parce que, si on privilégie les centrales hydroélectriques puis si, dans cinq, 10 ans, il va pleuvoir moins qu'il pleut maintenant, ça veut dire que c'est un investissement qui est au mauvais endroit. De la même façon, quel va être l'impact climatique sur le vent, les éoliennes? Il faudrait qu'il y ait des experts qui vous conseillent là-dessus pour faire une décision éclairée à long terme. Merci.
Le Président (M. Bachand): Merci, M. Fortin. Merci de vous être présenté à la commission. Le printemps s'en vient. On vous souhaite une bonne saison de kayak. Et, sur ce, j'ajourne les travaux à jeudi le 10 mars, à la salle Louis-Joseph-Papineau, parce qu'il y aura vidéoconférence.
(Fin de la séance à 18 h 28)