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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 27 janvier 2000 - Vol. 36 N° 50

Examen du plan stratégique 2000-2004 d'Hydro-Québec


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Organisation des travaux

Documents déposés

Présentation thématique d'Hydro-Québec: Saisir les occasions d'affaires

Présentation thématique d'Hydro-Québec: Perspectives économiques et financières

Remarques finales


Autres intervenants
M. Jacques Brassard
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Jean-Claude Gobé
M. Guy Lelièvre
Mme Manon Blanchet
M. Rémy Désilets
*M. Yves Filion, Hydro-Québec
*M. Thierry Vandal, idem
*M. Michel Gourdeau, idem
*M. Daniel Leclair, idem
*M. Roger Lanoue, idem
*Mme Marie-José Nadeau, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures trente-cinq minutes)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission de l'économie et du travail va donc reprendre ses travaux. Nous poursuivons donc l'examen du plan stratégique 2000-2004 de la société Hydro-Québec.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Jutras (Drummond) remplace M. Kieffer (Groulx) et Mme Houda-Pepin (La Pinière) remplace M. Marsan (Robert-Baldwin).


Organisation des travaux

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je vous remercie. Alors, aujourd'hui, évidemment, nous débutons par les orientations 5, 6 et 7, et il y aura poursuite avec les échanges avec les parlementaires.

À ce moment-ci, la présidence aurait besoin, en fait, d'une information. Je sais que ce n'est pas simple, que nos débats doivent quand même se faire... On essaie d'avoir la meilleure fluidité possible. Par ailleurs, je suis tenue, moi, de donner de façon équitable la même période, autant que faire se peut, à chacun des groupes parlementaires. Alors, moi, à ce moment-ci, je sais qu'on a procédé de deux façons différentes: dans une première partie, on avait procédé avec échanges, et le temps est toujours calculé en arrière; la deuxième partie de nos débats a été faite par blocs de 20 minutes. Pour la présidence, c'est bien évident que c'est beaucoup plus simple de procéder par blocs de 20 minutes pour contrôler, évidemment, l'équité, pour que ce soit équitable pour le temps comme tel. Alors, moi, j'aimerais avoir des parlementaires un avis: Est-ce qu'on poursuit avec des blocs de 20 minutes ou si je fais l'échange et qu'on calcule le temps au niveau des débats, comme c'est possible de le faire? Est-ce que je procède par blocs de 20 minutes?

Mme Houda-Pepin: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Oui, oui. Je n'ai aucune objection à ce qu'on procède par des blocs de 20 minutes. Compte tenu qu'on a très peu de temps, je vous demanderais aussi de demander aux représentants d'Hydro-Québec de donner des réponses relativement courtes pour qu'on puisse avoir un échange, puisque vous parlez de fluidité.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je pense que le message a été entendu. Est-ce que ça va aux deux parties?

Une voix: Je pense que ça va.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): On va fonctionner par blocs de 20 minutes. Alors, moi, aux 20 minutes, je changerai. Oui, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Question d'information. Je comprends bien que, à l'intérieur du bloc, n'importe quel député d'un groupe parlementaire peut questionner, et non pas un seul député pendant 20 minutes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Tout à fait. Alors, moi, je procède selon les demandes de parole que j'ai.

M. Gobé: Je pense que c'est tout à fait raisonnable et une bonne manière de fonctionner.

M. Brassard: Chaque formation gère son 20 minutes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Exactement. Alors, je vous remercie. Nous allons donc procéder. Alors, M. Caillé, pour votre présentation.

M. Caillé (André): Bonjour, Mme la Présidente. Bonjour, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission. Avec votre permission, Mme la Présidente, je déposerais les documents en réponse à des questions qui ont été posées hier.


Documents déposés

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Tout à fait.

M. Caillé (André): Avant-hier, pardon. Alors, le premier document, c'est une liste des États, aux États-Unis, où la production n'est pas réglementée par un organisme de réglementation. C'est une demande qui avait été faite par M. Sirros. Et, par M. Sirros également, la liste des provinces au Canada dont la production n'est pas réglementée par un organisme de réglementation.

Nous déposons également l'entente sur le projet de dérivation partielle des rivières du bassin de la Betsiamites entre Hydro-Québec et les MRC du Saguenay et de la Côte-Nord.

Quant à l'entente avec Essipit, je pense...

Une voix: Betsiamites.

M. Caillé (André): Bien, celle de Betsiamites, on a tenté de rejoindre les gens pour obtenir leur accord. Dès qu'on aura leur accord, on pourra faire le même dépôt.

(9 h 40)

Je dépose également un document qui s'appelle Les faits saillants 1998 en recherche et développement à Hydro-Québec ainsi qu'un dernier document, un suivi sur l'état du dossier de la vente du Tokamak. C'est une information qui tient sur une page. On nous demandait, vous vous souviendrez, quels avaient été les coûts initiaux, qu'est-ce qui a été vendu et qu'est-ce qui n'a pas été vendu, puis ce qui a été vendu a été vendu à qui. Alors, les documents vous sont fournis ce matin.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Merci. Alors, vous pouvez donc procéder maintenant à votre présentation.


Présentation thématique d'Hydro-Québec: Saisir les occasions d'affaires

M. Caillé (André): Très bien. J'enchaîne avec ma présentation. Nous avons vu, mardi, qu'Hydro-Québec entend d'abord mieux servir ses clients et assurer sa croissance rentable. Cela dit, nous sommes toujours déterminés à saisir les occasions d'affaires qui se présentent sur les marchés énergétiques, que ces marchés soient continentaux ou mondiaux. Il y a, bien sûr, les ventes d'électricité hors Québec, nous en avons déjà traité plus tôt. Il y a aussi l'ouverture et la croissance des marchés continentaux de l'énergie, de même que l'accroissement de la demande énergétique mondiale.

Ainsi, les trois dernières orientations du plan stratégique 2000-2004, les orientations 5, 6 et 7, comme vous le disiez, se lisent comme suit: premièrement, participer au développement du secteur électrique continental; deuxièmement, participer au développement du secteur gazier continental; et, troisièmement, poursuivre le développement d'Hydro-Québec à l'international.

En ce qui concerne notre participation au développement du secteur électrique continental, nous misons ici surtout sur notre compétence dans le domaine du transport à haute tension. En effet, les réseaux de transport jouent un rôle stratégique essentiel dans le bon fonctionnement et le développement du marché de gros de l'électricité. Après quelques années de libre concurrence entre les producteurs d'électricité aux États-Unis, les autorités constatent que le jeu du marché est parfois limité par des goulots d'étranglement sur les réseaux de transport. Hydro-Québec possède des technologies à cet égard. Hydro-Québec entend donc participer au développement de l'implantation de ces nouvelles technologies qui visent finalement à désengorger certains corridors de transport électrique. Des projets rentables et qui permettent de maximiser l'utilisation des interconnexions existantes – je dis bien «existantes»; ici, il ne s'agit pas de construire de nouvelles interconnexions – afin d'atteindre des marchés actuellement difficiles d'accès seront privilégiés. Il y a un premier projet, dont on pourra vous parler, qui fait actuellement l'état de démarches. C'est un projet qui vise à interrelier le Connecticut avec Long Island.

La sixième orientation du plan stratégique d'Hydro-Québec prévoit la participation de l'entreprise au développement du secteur gazier continental. Hydro-Québec, vous le savez, est déjà active dans ce secteur depuis 1997, au moment où on a fait l'acquisition de 41 % des actions ordinaires en circulation de Noverco ainsi que l'acquisition d'options pour une tranche additionnelle de 9 %. Bref, Hydro-Québec détient 50 % des actions de Noverco. Par le biais de Noverco, Hydro-Québec détient indirectement des participations dans Gaz Métropolitain, on le sait, et également dans une entreprise de transport de produits pétroliers et de gaz naturel qui s'appelle Enbridge et dont le siège social est à Calgary.

Pour la période du plan stratégique, Hydro-Québec compte appuyer sa participation au développement gazier sur deux stratégies qui sont les suivantes. Premièrement, à travers justement notre participation dans Noverco, Hydro-Québec entend appuyer les initiatives de développement stratégique de Gaz Métropolitain et d'Enbridge dans les domaines du transport et de la distribution du gaz naturel. Cette stratégie d'Hydro-Québec, finalement, qu'est-ce qu'elle fait? Elle vient confirmer les missions de base de Noverco et de ses filiales. Deuxième stratégie, on entend profiter de l'essor considérable que connaît le secteur gazier sur la côte est du Canada. L'entreprise compte développer d'ici la fin de l'été un plan stratégique puis, par la suite, un plan d'investissement, dépendant des choix qui auront été faits, dans le domaine gazier.

Ces investissements complémentaires qui sont envisagés par Hydro-Québec dans le secteur gazier, je tiens à le préciser, ne remettent pas en cause la valeur de la filière hydroélectrique à nos yeux. À un coût de production, encore une fois, de 0,03 $ par kWh, les projets hydroélectriques ne sont pas menacés par le gaz naturel pour la production d'électricité, et il n'y a aucun moyen qu'on puisse produire de l'électricité à un coût comparable avec le coût des projets hydroélectriques. Mais il reste que – et c'est là l'intérêt – juste à l'est de nous, ici, il se développe des ressources de gaz naturel considérables, et on cherche à trouver nos opportunités, à identifier des opportunités pour nous autres puis, après ça, les mettre en valeur puis aller chercher de la valeur pour notre entreprise.

À plus long terme. Je disais que, à court terme, ici, c'est l'hydroélectricité d'abord, mais à plus long le gaz naturel pourrait être appelé à jouer un rôle dans la nouvelle production d'électricité au Québec, notamment lorsque les nouvelles technologies commenceront à transformer de manière significative le marché de l'énergie en favorisant la production décentralisée de petite capacité.

Je m'explique ici. À l'heure actuelle, dans le moment, développer de la production d'électricité à partir du gaz naturel, ça signifie faire appel à des technologies de turbines à gaz, des turbines qui ont des capacités optimales pouvant aller de 50 MW jusqu'à 250 MW et plus. C'est les technologies qui existent actuellement. On n'a pas besoin, nous, on n'a pas de dépendance de cette technologie-là maintenant, parce que notre meilleur choix, c'est l'hydroélectricité, mais, plus tard, quand on aura parachevé le développement hydroélectrique du Québec, on pourra vouloir utiliser ces technologies-là, et, nous, on pourra sauter possiblement – c'est ce qu'on vise – une génération technologique dans le secteur gazier pour aller directement à la génération de la production décentralisée, d'où notre intérêt en recherche et développement, comme je le disais hier, pour ces filières de production décentralisée, notamment celles qui utilisent le gaz naturel.

Bien évidemment, les occasions d'affaires sur les marchés de l'énergie ne se limitent pas au continent nord-américain. Ailleurs dans le monde, particulièrement en Asie et en Amérique du Sud, il existe d'énormes besoins en nouvelles infrastructures énergétiques et en amélioration de la productivité des infrastructures existantes. C'est pourquoi la septième orientation du plan stratégique d'Hydro-Québec vise à poursuivre le développement à l'international. Outre des besoins évidents d'optimisation de leurs entreprises d'électricité, plusieurs régions du monde font face à une très forte croissance de la demande énergétique. Le marché d'investissement pour les nouveaux projets est évalué à 2 350 000 000 $ pour la période allant de 1995 à 2010, dont 71 % en production, 8,5 % en transport et 20 % en distribution. Au cours de cette période, on devra procéder à l'installation de près de 1 500 000 nouveaux mégawatts de production d'électricité dont 15 %, selon les experts, seront d'origine hydroélectrique. Quant à nous, Hydro-Québec, à cette date, a investi au cours des dernières années, donc des années 1998 et 1999, 279 000 000 $ de fonds propres dans 10 projets internationaux qui totalisent, quant à eux, des investissements de 2 800 000 000 $ d'actifs.

L'intention de l'entreprise n'a pas changé, c'est-à-dire qu'elle est, dans le nouveau plan, la même que ce qu'elle était dans le plan de 1998-2002: c'est celle d'avoir pignon sur rue dans diverses régions du monde ou, autrement dit, d'établir des têtes de pont pour le développement futur. Nous continuons de croire qu'il est préférable d'agir ainsi, d'agir prudemment et même lentement s'il le faut afin de mieux gérer les risques, ce qui signifie, en termes pratiques, que les budgets annuels d'investissement pour le plan 2000-2004 sont très exactement les mêmes que les budgets d'investissement qui avaient été prévus pour le plan 1998-2002.

(9 h 50)

Notre développement à l'international, il va s'appuyer sur deux stratégies: premièrement, concentrer nos activités dans des secteurs de haute compétence de l'entreprise et préciser une approche de partenariat d'affaires. Il s'agit de cibler les efforts de l'entreprise à l'international et de les concerter dans des domaines où sa compétence est largement reconnue, soit principalement en construction et en gestion de production hydroélectrique et en transport à haute tension. À cet égard, l'organisation des activités internationales de l'entreprise confie aux grandes unités d'affaires la responsabilité de négocier et de réaliser les contrats à l'étranger, tandis que les activités de démarchage sont confiées à une filiale d'Hydro-Québec, la filiale Hydro-Québec International. C'est essentiellement le changement d'organisation auquel nous avons procédé au cours de l'automne dernier. Cette façon de faire permet, d'une part, de réduire les coûts et de constituer, dans chaque cas, dans chaque domaine de compétence, les équipes les plus aguerries pour accomplir ce travail.

En matière de construction et en gestion de production hydroélectrique, nous sommes déjà présents au Costa Rica, dans une centrale qui s'appelle la centrale de Río Lajas. C'est une petite centrale de 10,6 MW. Nous sommes au Panama, dans une centrale qui s'appelle la centrale de Fortuna, qui est d'une puissance nominale de 300 MW. Nous sommes également en Chine, de deux manières: dans une petite centrale de 20 MW, directement à Qingshan, et nous détenons 20 % du capital-actions d'une entreprise qui s'appelle Meiya Power. Nous y sommes associés avec une entreprise américaine, d'une part, et avec des banques, notamment des banques asiatiques, d'autre part. Des efforts dans ce secteur-là se poursuivent pour identifier de nouveaux projets.

En matière de transport à haute tension, l'entreprise, on le sait, offre déjà depuis plusieurs années des services spécialisés d'expertise technique. Depuis deux ans, on l'a fait en Australie, en Europe et en Amérique latine. Par ces investissements dans des projets en Australie et au Pérou... En Australie, il s'agit de relier les réseaux de deux... On ne les appelle pas «provinces», on les appelle... Enfin, de deux provinces de l'Australie – je les appellerai comme ça – de même que de relier – au Pérou, c'est le même type de projet – par une ligne à haute tension deux réseaux de distribution, l'un situé au nord du Pérou et l'autre situé au sud.

Outre ces projets, l'entreprise explore les possibilités d'étendre sa présence en Asie, en Amérique latine ainsi qu'en Afrique. Pour la poursuite du développement international, nous visons de façon nécessaire – on se crée une obligation – des partenariats d'affaires formés d'abord avec des entreprises établies au Québec. Nous voulons nous entendre dès le démarrage d'un projet avec des investisseurs, des manufacturiers et des firmes de génie-conseil prêtes à partager, bien sûr, avec nous les risques et prêtes à partager avec nous la réalisation de ces projets, de sorte que nous nous serons entendus ici d'abord avant de faire des partenariats avec des entreprises internationales dans le domaine ou encore, comme c'est nécessaire, avec des entreprises nationales là où on se trouve. L'objectif, ici, Mme la Présidente, c'est de maximiser les retombées économiques au Québec de chacun de ces projets-là, et c'est pour ça qu'il faut d'abord s'entendre ici et former nos équipes ici, au Québec – c'est Hydro-Québec et c'est ses partenaires, à Hydro-Québec – par la suite, faire des ententes avec d'autres avant de soumettre des propositions. Nous voulons aussi nous associer à l'Association de l'industrie électrique du Québec pour mieux préparer les entreprises québécoises à répondre aux exigences des marchés internationaux en matière de qualité et de coûts concurrentiels.

La deuxième stratégie sur laquelle s'appuie la poursuite du développement international, c'est une stratégie financière. Elle se dit facilement, nous visons l'obtention d'un rendement moyen sur l'avoir propre de 15 %, d'un rendement, donc, supérieur au rendement que nous visons et que nous qualifions ici de raisonnable quand il s'agit de nos activités au Québec. Compte tenu du degré de risque élevé caractérisé par les activités internationales – à tout le moins plus élevé – on croit qu'il est normal que l'entreprise attende de ces activités un rendement plus élevé. Cet objectif de rendement sera revu et ajusté périodiquement, bien sûr, en fonction de l'évolution du portefeuille de projets et en fonction également de l'évolution du profil de risque des portefeuilles de projets développés.

Voilà, Mme la Présidente, qui complète mes remarques d'introduction sur les trois orientations.


Discussion générale

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je vous remercie, M. Caillé. M. le ministre.


Objectifs en matière de transport continental d'électricité

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Alors, je pense que nous avons là trois sujets fort intéressants sur lesquels nous allons échanger avec les autorités d'Hydro-Québec pour mieux comprendre les stratégies, les politiques, les orientations de la société d'État. Alors, je commencerai d'abord par le premier sujet qui est l'orientation 5 et qui porte sur la participation d'Hydro-Québec au développement du secteur électrique continental.

Je comprends d'abord que, compte tenu de la réalité continentale sur le plan énergétique, vous avez fait le choix de cibler le transport. C'est dans le secteur du transport qu'on retrouve ou que vous êtes en mesure, comme vous le dites dans votre plan stratégique, de saisir les occasions d'affaires, plus que dans le secteur production ou distribution. Donc, c'est le secteur transport qui est ciblé parce qu'il y a des problèmes majeurs. Vous avez parlé d'engorgement ou de goulots d'engorgement, des problèmes majeurs donc qui exigent des investissements. Et, comme vous êtes en mesure également de vendre de l'énergie sur le marché américain, particulièrement nord-est américain, à cause de vos prix, vous êtes forcément aussi intéressés à faire des investissements en partenariat, ce qui est déjà le cas, mais particulièrement dans le secteur du transport de l'énergie. Vous dites, entre autres, que l'entreprise participera au développement et à l'implantation de nouvelles technologies avec comme objectif de désengorger certains corridors de transport d'électricité, particulièrement dans le nord-est à cause de la proximité de ce territoire. Donc, c'est dans le nord-est du continent que les projets seront privilégiés.

Je pense qu'il serait intéressant de savoir de votre part quels sont les objectifs que vous poursuivez en investissant dans le transport d'électricité aux États-Unis. Ça veut dire quoi comme implication en termes de sécurité des approvisionnements et en termes d'accès amélioré à de nouvelles sources d'approvisionnement compétitives pour les Québécois? Donc, c'est quoi, votre stratégie d'investissement dans le secteur des transports? Qu'est-ce que vous visez? Quels sont les objectifs que vous poursuivez? Puis ça a quoi comme implications pour les Québécois, particulièrement en ce qui a trait à la sécurité des approvisionnements?

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): ...alors, en termes de sécurité d'approvisionnement puis d'interconnexions, on a des interconnexions avec les États-Unis dont nous sommes satisfaits, c'est-à-dire qu'il y a là la puissance au total qui est requise, on n'a pas de besoins additionnels d'interconnexions avec le marché des États-Unis. Il y a une interconnexion qui va être construite avec l'Ontario, comme l'on sait et justement comme vous le signalez, pour sécuriser encore mieux toute la partie ouest du Québec. On pourra importer de l'électricité advenant qu'on ait des pannes majeures causées par des événements climatiques externes ou autrement dans ces régions-là. On veut sécuriser. Ça va servir l'Outaouais, en quelque sorte, mais ça peut servir l'ensemble du réseau québécois également. Alors, c'est le seul ajout au niveau des interconnexions qui est prévu dans ce plan.

(10 heures)

Bien sûr, toutes ces interconnexions peuvent être opérées dans les deux sens, mais elles n'ont pas la même capacité dans un sens que dans l'autre, et ça, ça ne tient pas seulement, mais principalement aux critères de sécurité d'exploitation. Alors, la capacité d'une interconnexion, quand on applique les critères du NPCC, quand on s'en va dans une direction, ça peut donner une puissance maximale une telle, mais, quand on s'en va dans l'autre, ça peut donner une autre puissance maximale. Mais, quoi qu'il en soit, c'est une proportion quand même élevée, au-delà de 3 800 MW, au moment où on se parle, qu'on peut rappeler de cette façon-là avec ce que l'on a déjà, puis il va s'ajouter ce dont je parlais tantôt pour l'Ontario. Alors, oui, ça peut servir au niveau de la sécurité d'approvisionnement.

Autre objectif. Les goulots d'étranglement dont je parlais, ils se situent aux États-Unis, ils prennent leur source puis ont leur fin aux États-Unis. Mon collègue va vous parler à l'instant de son projet entre le Connecticut et Long Island, mais il y a d'autres endroits où on constate géographiquement des différences de prix dans le marché très, très élevées entre un endroit puis un autre, ici. Et la réponse, l'explication, c'est qu'il n'y a pas possibilité de faire voyager l'électricité de cet endroit à l'autre. Sinon, les prix seraient les mêmes aux deux extrémités, bien entendu tout en tenant compte du coût de l'acquisition de cette capacité sur cette nouvelle ligne. On a intérêt, nous, à ce qu'il y ait le moins de goulots dans le marché américain, le moins de goulots de cette nature-là possible, parce que ça nous permet de faire les meilleures affaires avec notre production et que ça nous permet de faire des affaires avec un plus grand nombre de clients. C'est le deuxième objectif.

On a écarté la production, comme vous l'avez signalé, jusqu'ici parce que les opportunités qui se présentaient à nous, c'étaient des opportunités d'acquisition d'actifs existants, et, très honnêtement, ces actifs se sont transigés à des prix, et c'est normal, à des multiples qui correspondent à des prix qui eux-mêmes correspondent aux coûts de l'alternative, c'est-à-dire du développement de capacité de production à partir des grandes turbines à gaz, lesquels sont plus élevés que, comme on vous l'a répété souvent, de la production hydroélectrique au Québec. Alors, nous, le choix, à l'évidence, en production, c'est le développement hydroélectrique au Québec. Tant et aussi longtemps qu'il y a un potentiel de développement, c'est le meilleur choix, je l'ai dit, à la fois économique et environnemental. C'est pour ça qu'on a écarté, à date, ceci sur les autres marchés.

Si on regarde plus loin dans le temps – là je reviens à ce que je disais dans mon introduction – la production distribuée. Alors, petite turbine à gaz ou pile à combustible, je ne sais pas laquelle des deux viendrait la première, mais c'est des technologies auxquelles nous devons nous intéresser. Et il y a une autre technologie à laquelle on doit s'intéresser, c'est sur le comment relier de la production distribuée avec de la production centralisée. C'est une question, une problématique technique qui va se poser à tout le monde d'ici l'an 2010, à tous ceux qui voudront être actifs d'ici l'an 2010.

Je ne veux pas être trop long dans mes réponses, alors je m'arrête ici. Je l'ai déjà été, je crois. J'essaierai de faire mieux, Mme la Présidente, à la prochaine question. Je cède la parole à mon collègue ici pour qu'il vous parle un peu de ce projet de Long Island Sound.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente, si vous permettez, aussi je pense qu'il serait pertinent de faire un petit peu d'historique sur ce qui s'est passé au cours des deux dernières années dans l'ouverture du marché. Juste un rappel. Hydro-Québec a ouvert son réseau de transport au marché de gros de l'électricité en 1997. Cette orientation a été approuvée par le gouvernement du Québec à la fin de 1996. Je pense qu'on peut dire aujourd'hui que ça s'est avéré une décision fort judicieuse et fort rentable pour les Québécois.

Depuis trois ans, je dirais que le marché de gros a commencé à s'ouvrir aux États-Unis. Le gouvernement fédéral ou l'organisme de réglementation du gouvernement fédéral américain a constaté que l'ouverture au marché de gros était freinée par des goulots d'étranglement au niveau du transport qui limitaient la véritable compétition sur le marché, qui doit se faire à partir de la production et non, bien sûr, d'une position privilégiée sur le transport.

Je tiens à vous dire que cette orientation-là, elle est entièrement partagée par la division TransÉnergie d'Hydro-Québec qui doit offrir un service de transport à tous les clients Hydro-Québec, mais aussi les autres clients, de façon non discriminatoire. Donc, il est grandement dans l'intérêt de TransÉnergie de participer à l'élimination de ces goulots d'étranglement et de participer à l'orientation d'avoir un réseau de transport dans le continent nord-américain qui n'est pas une limite à la libre circulation de l'énergie pour que la compétition puisse se faire véritablement à partir de la production.

Alors, dans ce cadre-là, il y a donc dans le plan stratégique une orientation précise qui vise à utiliser l'expertise d'Hydro-Québec et de nos partenaires pour éliminer de tels goulots d'étranglement. Alors, l'un de ces projets est effectivement de relier le Connecticut à Long Island, dans l'État de New York. Donc, Long Island est un endroit où le prix de l'électricité est très élevé. Bien sûr, le lien entre le Connecticut et Long Island permettrait d'ouvrir un nouveau débouché à la production hydroélectrique du Québec et, plus particulièrement au niveau du transport, permettrait de concrétiser une vocation future à notre ligne à réseau à courant continu qui alimente la Nouvelle-Angleterre et qui, bien sûr, écoule actuellement beaucoup d'énergie sur un contrat à long terme qui se termine en 2001 avec les différentes utilités de la Nouvelle-Angleterre.

Donc, c'est un exemple, mais il y en a d'autres également – si vous souhaitez en obtenir, je pourrai donner d'autres exemples tout à l'heure – alors qui confirment cette nouvelle mission qu'on s'est donnée pour participer activement à l'ouverture du réseau de transport de façon libre et éliminer ce genre de goulot.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci. M. le ministre.

M. Brassard: Oui. Alors donc, pour bien comprendre, vous souhaitez évidemment vendre de l'énergie sur le marché nord-américain, ce que vous faites déjà. Vous parliez tantôt de la ligne continue, avec des contrats fermes, mais, comme ils vont prendre fin, ça veut dire à ce moment-là qu'Hydro-Québec va être en mesure de vendre à d'autres clients, peut-être à meilleur prix.

Pour ce faire, je comprends bien qu'il faut un réseau de transport efficace, particulièrement dans le nord-est des États-Unis, aussi efficace que celui d'Hydro-Québec au Québec – dans le fond, c'est un peu ça – où l'énergie peut circuler sans entrave. Comme il y a ce que vous appelez des goulots d'étranglement, donc des problèmes de transport d'énergie sur ce territoire américain, votre stratégie, avec des partenaires – j'aimerais ça que vous nous les indiquiez tout à l'heure, les partenaires, et quelle est la forme que ce partenariat a prise, avec qui, quelle entreprise américaine, comment ça s'est configuré, ce partenariat-là – vous investissez dans le but justement de rendre plus efficace le réseau de transport du nord-est des États-Unis, de telle sorte que les occasions de vente d'énergie à bon prix, donc de façon rentable, se multiplient et augmentent au bénéfice d'Hydro-Québec.

Les deux questions que je vous pose. D'abord, comment ça se configure, votre partenariat, d'une part? Vous avez parlé d'un investissement dans une interconnexion entre le Connecticut et l'État de New York. Donc, d'autre part, est-ce que vous avez d'autres projets majeurs en vue, d'autres investissements importants en vue? Dernière question à cet égard: Du point de vue des Québécois, est-ce que ça a un impact positif, ces investissements-là? Autrement dit, est-ce que c'est rentable pour les Québécois? Est-ce que ça leur rapporte ou est-ce que, plutôt, ils sont obligés de supporter une activité qui n'est pas très, très rentable? Est-ce que c'est rentable pour les Québécois? Je pense que la question se pose.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé, il reste à peu près cinq minutes à la période allouée au gouvernement.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, ma réponse sera courte. Oui, ce sera rentable pour les Québécois ou nous n'en serons pas, parce que la rentabilité visée ici, ça va être de l'ordre de 15 %. Alors, il y a des projets, on les étudie à chaque fois, puis on se donne un objectif de rendement. Il faudra que ce soit rentable pour les Québécois, qu'on trouve la rémunération de notre capital.

Par ailleurs, je laisserai mon collègue poursuivre sur la question de nos partenaires dans le Long Island Sound et puis quels sont les autres projets potentiels de cette nature.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

(10 h 10)

M. Filion (Yves): Merci, Mme la Présidente. Un peu plus de précision sur le projet. C'est un projet, donc une interconnexion à courant continu d'une capacité de 600 MW, qui sera sous-marine et qui sera dotée d'un contrat à long terme de l'utilité électrique à Long Island, et qui sera bien sûr soumise à la position du Long Island Power Authority, et qui va nous donner un rendement, je dirais, qui va varier en fonction du risque, donc de la durée du contrat et des modalités du contrat. Mais, une chose qui est certaine pour nous, le rendement, même s'il y a un contrat à long terme, donc qui élimine à toutes fins pratiques tous les risques, sera un rendement supérieur au rendement réglementé du transport au Québec, qui devrait se situer autour de 9,8 % ou 10 %. Alors donc, c'est un projet qui est rentable, où on veut éliminer à peu près tous les risques, mais surtout qui est très important, qui ouvre un nouveau marché au niveau des ventes d'électricité et qui permet de continuer à optimiser le réseau de transport.

Notre partenaire, maintenant. Nous avons un partenaire important dans ce projet, qui est la compagnie ABB. La compagnie ABB est une multinationale qui a beaucoup d'expérience dans les systèmes à courant continu. C'est l'entreprise qui a été notre principal fournisseur dans la ligne RNDC, donc la ligne à courant continu qui dessert l'énergie de la Baie-James à exporter aux États-Unis.

Il y a d'autres projets à l'étude. Nous en avons réalisé un aussi en 1998 – je tiens peut-être à le mentionner – qui est déjà installé, qui est déjà en place, et qui visait à désengorger une ligne de la compagnie New York Power Authority. C'était un petit projet qui touchait environ 30 MW à 50 MW, mais une technologie qui a été développée par Hydro-Québec et ABB également, dans une filiale qui s'appelle CITEQ. Ce nouvel équipement qui a été implanté s'appelle un régulateur de puissance interphase.

À Hydro-Québec, on peut être fier, je pense, de l'expertise que nous avons développée au cours des années en transport. Cette expertise-là est souvent sollicitée par des entreprises de compagnies de transport dans le nord-est américain qui font face maintenant à de nouveaux problèmes que nous avons eu à résoudre. Nous avons dû développer des logiciels, par exemple des automatismes pour contrôler notre réseau, qui peuvent trouver des applications intéressantes à l'extérieur du Québec actuellement. Entre autres, il y a des limites importantes entre deux réseaux interconnectés qui sont le réseau de New York et le réseau PJM, qui est le réseau de Pennsylvanie, New Jersey et Maryland, et d'autres limites entre le Maine et le Massachusetts. Donc, ce sont des dossiers sur lesquels nous travaillons actuellement. Nous souhaitons voir quelles sont les technologies qui pourraient être appliquées et l'expertise qu'on pourrait y amener pour trouver des solutions.

Mais aussi, si la solution passe par des investissements, nous souhaitons également être partenaire dans les investissements pour faciliter la réalisation de ces projets. Je tiens à le rappeler parce que, selon moi, c'est un point important. Et je parle ici, je dirais, un peu plus en tant que responsable de TransÉnergie, qui est une unité qui doit gérer ses activités, à l'entreprise, en respectant une séparation fonctionnelle du reste de l'entreprise, puisque dans le réseau de transport il ne faut pas oublier que la production, Hydro-Québec est un client important du réseau de transport. Notre mission est d'ouvrir le réseau de transport le plus possible pour qu'il n'y ait pas de limite à la libre circulation de l'électricité dans le continent nord-américain. C'est là-dessus que nous travaillons, et c'est une mission qui respecte tout à fait les principes de l'ouverture du marché.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Filion. Il ne reste pas suffisamment... Je vais gérer le mieux possible. Alors, je passerais maintenant la parole à Mme la députée de Bonaventure.


Implication dans le projet de lien entre le Connecticut et l'État de New York

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Caillé, dans le dernier plan stratégique et dans le plan actuel, on constate que le marché américain représente effectivement un attrait important pour Hydro-Québec. De toute évidence, vous tentez de nous faire la démonstration que c'est un marché qui pourrait s'avérer très, très payant dans le futur. L'orientation que vous avez choisie, la stratégie, l'orientation 5, effectivement, est importante.

Dans toutes les explications que vous nous avez livrées depuis tout à l'heure, en fait, c'est des explications qui relèvent davantage de la technicalité. En fait, ce qu'on aimerait entendre, nous, c'est des explications qui vont rejoindre à peu près tout le monde, c'est-à-dire la notion de rentabilité dans une stratégie comme celle-là, et plus spécifiquement, par exemple, dans le projet qui lie New Haven, Connecticut, et New York, également toute la question du partage de risque dans un projet comme celui-là. Avant-hier, vous nous avez fait des révélations assez étonnantes avec le projet M4, sur les risques qui étaient assumés par la société d'État. Et on se demande bien si, en fait, le modèle de partage de risque va être calqué, dans ce projet-ci, sur celui du projet de moteur-roue électrique.

Mais, tout d'abord, il y a une chose qui est frappante. Dans le plan stratégique, à la page 36, on constate que les ventes à l'exportation, les ventes externes, en fait, vont en diminuant de 1999 à 2004. On diminue. En fait, le tableau nous démontre qu'il y a une diminution de 14 TWh. Alors, je m'explique difficilement, sur la base de ces données-là et sur l'attrait que représente donc le marché américain, qu'Hydro-Québec décide justement d'investir dans son développement de réseau de transport ou dans la consolidation du réseau qui existe actuellement.

Et on aimerait savoir, donc, ça va coûter combien aux Québécois, ça, cette orientation-là, cet investissement-là qui est fait. On y parle du projet plus concret entre deux États américains, le Connecticut et New York, mais est-ce qu'il y a d'autres projets? Si oui, combien ça va nous coûter, ça? Et j'aimerais qu'on puisse déposer, peut-être, l'analyse de risque qui a été effectuée pour se lancer dans le projet entre les deux États et qu'on nous donne davantage de précisions justement sur la rentabilité du projet et sur le partage de risque qui sera assumé par la société d'État dans le projet qui liera le Connecticut et l'État de New York.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, Mme la Présidente, quand on parle ici de rentabilité, on parle de rentabilité pour les Québécois. Pour nous, il n'est pas question que ça coûte un traître sou aux Québécois. Si c'était juste pour échanger 1 $ pour 1 $, là, on ne le ferait pas non plus. On le fait pour gagner. Alors, la réponse que je peux vous fournir, c'est combien les Québécois vont gagner de cela et non pas comment, au contraire, ça va leur coûter quelque chose.

Alors, le projet existe, il est pro forma, c'est un projet qui est en démarchage. C'est une bonne question, la question qui est relative à comment on partage le risque. Ici, mon collègue l'a effleurée en disant que ça nous prend des contrats à long terme. Quand on a un contrat à long terme avec une entreprise qui a une cote de crédit fiable puis qui paie tous les coûts, c'est sûr que, là, la rentabilité normalement diminue, en passant, parce que le risque est beaucoup, beaucoup moins grand, mais il demeure toujours une rentabilité. On fait ça pour faire plus de bénéfices. On fait ça en valorisant les connaissances et l'expertise d'Hydro-Québec. On ne fait pas ça pour que ça coûte aux Québécois. Mais il va y avoir un montant qui devra être investi, parce que, dans les projets, on ne peut pas faire de retour si, évidemment, on n'investit pas. Quand vous...

Mme Normandeau: Si vous permettez, là, est-ce qu'on peut être très, très concret? Là, vous nous servez évidemment des belles grandes phrases à l'effet que ça devrait être un projet qui soit gagnant pour les Québécois. Mais, concrètement, pouvez-vous nous servir un chiffre? Un projet comme celui-là, si on a évalué les risques, si on a fixé un échéancier, ça va coûter 500 000 000 $, 300 000 000 $, 400 000 000 $, 1 000 000 000 $? Combien ça va coûter?

M. Caillé (André): Je voulais simplement, madame, qu'on soit clair en disant: Bien, voici comment on va l'investir puis combien ça va rapporter aux Québécois.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. D'abord, je tiens à mentionner que la capacité de construction du câble sera établie en fonction de la capacité requise du contrat à long terme. Donc, je vais vous donner les données maximales. Ça ne veut pas dire que ce seront les données retenues. Alors, la donnée maximale est une capacité de 600 MW, qui entraîne un coût estimé d'environ 180 000 000 $US.

Vous avez parlé de risques. Effectivement, il y a des risques, il y a deux grands risques. Il y a le risque, bien sûr, de construction du câble. Alors, ce risque, pour nous, sera assumé entièrement par notre partenaire ABB. Et le deuxième risque est le risque commercial, donc le risque des revenus de cette ligne-là et qui eux seront assurés par un contrat à long terme. Donc, nous considérons que les risques sont minimes et que le rendement est un rendement intéressant, et surtout qu'il apporte, là, une ouverture à l'utilisation future de notre ligne à courant continu dans ce marché des États-Unis.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui. J'aimerais revenir sur justement la dernière précision, au niveau des contrats à long terme. Compte tenu qu'il ne s'en fait plus, de contrats à long terme, comment vous pensez effectivement conclure un contrat à long terme dans un projet comme celui-là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Mme la Présidente, s'il n'y a pas de contrat à long terme, il n'y aura pas de projet. Alors, en gros, pour nous, nous en faisons une condition. C'est une ligne... Je pense que, dans ce cas-ci, nous parlons, aux États-Unis, de ce qu'on appelle une ligne marchande, donc une ligne qui n'existe que parce qu'il y a un besoin spécifique, qui fait l'affaire des parties concernées. Pour nous, il doit être associé d'un contrat à long terme.

(10 h 20)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Une précision, Mme la Présidente. Il n'y a plus de contrats à long terme en production, quand il s'agit de la commodité, mais il y a toujours des contrats à long terme en ce qui concerne le transport. Alors, il est possible d'avoir un contrat à long terme en termes de transport.

Finalement, notre client ici, il va comparer deux choses: produire avec du thermique à Long Island plus pour éviter les... l'été ou construire une ligne pour interconnecter avec le Connecticut. C'est les chiffres qu'il va comparer, puis il va se faire... Du côté du gaz, il devrait prendre un engagement à long terme aussi. C'est pour ça qu'il va être prêt à considérer un engagement à long terme au niveau du transport. Il n'y a pas le problème de l'engagement à long terme ici.

Vous parliez du 14 TWh. Alors, je me réexplique à cet égard. Les ventes d'Hydro-Québec, en 2004, aux États-Unis, sur les marchés voisins – ça pourrait être en Ontario également – vont demeurer de l'ordre de 20 TWh, en ordre de grandeur, 20 TWh. Par ailleurs, il y a une chose qui va changer: comment Hydro-Québec va s'approvisionner pour faire ce 20 TWh. Dans le moment, quand on a des surplus de... Je ne sais pas combien on en avait cette année. Supposons que, cette année, on a vendu 14 TWh de notre propre production, parce qu'on l'avait, puis l'autre 6 TWh, on s'est approvisionné. Hors pointe, après le transport le matin, dans les deux périodes d'épaulement, entre la pointe d'été pour la climatisation puis la pointe d'hiver pour le chauffage, on s'est approvisionné de la balance, à 6 TWh. En 2004, qu'allons-nous faire? En 2004, on va vendre le 20 TWh, comme je disais à l'instant, sauf qu'au lieu d'en approvisionner six sur les marchés extérieurs – ça pourrait être l'Ontario aussi – on va en approvisionner 14.

Ce 6 TWh aujourd'hui et ce 14 TWh dans le futur, qu'est-ce qu'on fait? Pourquoi c'est rentable de faire ça? C'est parce que nous achetons quand les prix sont bas – et, pour Hydro-Québec, naturellement c'est assez facile pour nous, ça ne prend pas une grande voltige de gestionnaire, ce n'est pas une grande trouvaille – à partir du moment où on a la capacité de stocker de l'énergie. Chacun sait qu'à New York le prix de l'énergie, il va être plus élevé le matin, quand les transports en commun fonctionnent. Ça commence à 4 h 30 le matin, ça finit vers 8 heures. On sait qu'un peu plus tard ça va être moins cher. Ce n'est pas mystérieux, c'est comme ça à chaque jour. C'est la même chose en été durant la pointe, quand il va faire très chaud, on sait que les prix vont être très élevés. Puis on sait aussi que, pendant l'hiver, ils risquent d'être élevés, quoiqu'il faut tenir compte des réserves de gaz. Enfin, il y a des modèles pour faire ça. Mais, entre ces deux périodes-là, on le sait d'avance, que les prix vont être plus bas. Ce n'est pas mystérieux. Alors, on achète au mieux. On dit à nos acheteurs: Jusqu'à tel prix, vous achetez. Puis, quand on vient pour vendre, bien, ça dépend de la période, on regarde les courbes de prix futurs, etc., puis on donne les commandes de vendre à tel prix qui est nécessairement plus élevé.

Qu'est-ce qu'on fait en faisant ça? Nous valorisons des actifs existants d'Hydro-Québec, par rapport à une situation où on ne ferait rien. Si on ne faisait rien, on ne ferait rien de tout ça, on se refuse d'acheter bas puis vendre haut, on perd de la valeur de ce qui existe déjà. Quand on le fait, on crée la valeur, on va chercher la valeur sur le marché à cause que sa condition, le marché, est celle que je viens de décrire, et on réalise ce bénéfice pour nous.

C'est pour ça qu'on vous a déposé un document qui disait que non seulement les exportations couvraient le prix du tarif L, mais qu'en plus de ça on a fait 145 000 000 $ en 1998, sur la base des résultats vérifiés. C'est avantageux. L'alternative pour Hydro-Québec, pour maintenir... c'est des augmentations de tarifs. Quand on vous dit: Notre stratégie, c'est gel des tarifs, c'est appuyé sur des choses réelles. On a des coûts qui augmentent, à Hydro-Québec. Les salaires augmentent, il y a toutes sortes de choses qui augmentent. Si on veut stabiliser les tarifs, il faut des moyens qui vont compenser pour ces coûts qui augmentent. Ça, c'est un des moyens qui, à court terme – parce que tout est en place – nous permet de faire cela.

C'est très différent – je ne sais pas si je suis devenu trop long – de la situation du moteur-roue, où on a décidé d'investir dans une technologie qui était à l'étape de la recherche – puis je ne veux pas faire de blâme à personne ici, moi – puis on a décidé de le faire tout seul. Bon, bien, c'est pas mal différent. Mon collègue ici a identifié son client. S'il n'avait pas identifié son client, je peux vous assurer une chose, c'est qu'il aurait beaucoup moins d'écoute de moi. Parce que, quand on fait du commerce, la première étape, c'est d'identifier qui voudrait bien acheter ça. Dans le moteur-roue, on n'avait pas ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Oui. M. Caillé, ce qui est déplorable, c'est que toutes les précisions que vous nous amenez, malheureusement, dans le plan stratégique, on fait référence à des projets comme ceux-là, d'envergure, en quelques lignes seulement. Alors, évidemment, ça aurait été intéressant d'avoir plus de précisions dans le plan stratégique.

J'ai d'autres petites questions. Quels sont les producteurs qui vont vous concurrencer sur une ligne comme celle-là, du côté du développement de cette ligne entre l'État de New York et le Connecticut? Également, si le projet s'avérait déficitaire dans le futur, qui assumerait les risques? Est-ce que c'est les consommateurs? Est-ce que c'est nous, comme Québécois, qui assumerions les risques d'un échec comme celui-là? Parce que cet échec-là, dans l'analyse de risque que vous avez faite, j'imagine qu'il est bien réel. S'il y avait d'autres réseaux de transport qui se construisaient et que les producteurs abandonnaient dans un avenir qui ne serait peut-être pas si lointain, à ce moment-là, cet investissement-là deviendrait caduc.

J'aimerais savoir également quel est l'échéancier qui est prévu de la part d'Hydro-Québec dans la construction de cette ligne-là entre New York et le Connecticut.

M. Caillé (André): En premier élément de réponse, madame: qui assumera le risque si jamais ça devient caduc, ce projet-là – pour une raison qu'on ignore aujourd'hui, mais il devient caduc, il n'y a plus personne qui l'utilise – c'est l'entreprise qui aura fait le contrat de l'utilisation à long terme de la ligne de transport en question, c'est-à-dire le client actuel. C'est pour ça que M. Filion disait que ça nous prend un contrat, un engagement à long terme d'une entreprise qui a une crédibilité aussi. Ça ne peut pas être avec n'importe qui, parce que, ça, ça va durer plusieurs années. Ça prend une entreprise qui a une cote de crédit qui puisse être acceptable par nous.

Mme Normandeau: Êtes-vous en train de nous dire, M. Caillé, que le risque pour Hydro-Québec, pour les consommateurs québécois, il est zéro? Il n'y a pas de risque? Il est nul?

M. Caillé (André): Il y a toujours, comme mon collègue l'a dit, certains risques résiduels. Il y a toujours des risques à un projet. On vous dit comment on les gère. La gestion, il y a un risque. Il y a telle chose, puis la ligne pourrait devenir caduque.

Mme Normandeau: Mais soyez plus précis, M. Caillé. Quand vous nous dites qu'il y a peut-être un risque que vous qualifiez de résiduel, il y a sûrement... Lequel, précisément, là?

M. Caillé (André): Je vais revenir là-dessus. Je vais vous expliquer comment on opère. On a un projet. Il y a des...

Mme Normandeau: Je veux avoir une réponse pas compliquée, M. Caillé, sans aller dans les détails techniques d'opération, et tout ça. Concrètement, c'est quoi, le pourcentage de risque, dans le contexte... si le projet s'avérait caduc, que nous aurions à assumer?

M. Caillé (André): Bien, dans un projet comme celui... À partir du moment où il y a quelqu'un qui les a tous engagés, les risques, à notre place, pratiquement, il n'y a pas de risque pour nous.

Mme Normandeau: Bon, vous êtes en train de nous dire que c'est nul pour Hydro-Québec, pour les Québécois?

M. Caillé (André): Essentiellement, c'est ça.

Une voix: Pratiquement nul.

Mme Normandeau: C'est ce qu'on comprend, bon. Il y a d'autres questions.

M. Caillé (André): Et la façon de l'expliquer, c'est qu'on les transfère à un autre, les risques.

Mme Normandeau: Alors, il y a les autres questions sur l'échéancier, et tout ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, c'est M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Je vais essayer de répondre, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous avez à peu près cinq minutes, monsieur.

M. Vandal (Thierry): Oui, je vais répondre rapidement, Mme la Présidente, à la question du contexte concurrentiel. Pourquoi est-ce que ce projet là se fait? Il faut comprendre que ces projets-là existent, et les occasions d'affaires, parce qu'il y a des écarts de prix entre différents marchés. Ces écarts de prix là, ça peut exister pour bien des raisons.

Il y a des écarts de prix qui sont durables. C'est le cas du Québec avec les marchés avoisinants, parce que les structures de production sont différentes entre les marchés. Au Québec, c'est de l'hydroélectricité. C'est bas aujourd'hui, ça va être bas pour longtemps. Donc, c'est des écarts de prix qui sont appelés à être durables. Ce n'est pas des écarts de prix qui existent parce qu'il y a plus ou moins de capacité de transport ou d'interconnexion. C'est donc des écarts de prix durables qui correspondent à des structures différentes de production dans les différents marchés.

Le Québec bénéficie de l'hydroélectricité. Hors Québec, c'est du nucléaire, c'est du thermique, c'est différent. Dans la situation du marché, à titre de producteur, auquel on s'intéresse, les marchés en Nouvelle-Angleterre, dans l'État de New York, c'est les mêmes types de production. C'est de la production thermique dans les différents marchés.

(10 h 30)

Les écarts de prix, dans ce contexte-là, sont essentiellement dus à deux choses: des équilibres d'offre et de demande locales, localisées, différents. Par exemple, Long Island, une très forte croissance de la consommation à Long Island, beaucoup de développement résidentiel, etc., qui met de la pression sur les approvisionnements locaux. Donc, les projets de transport existent parce que les investisseurs – c'est le cas de TransÉnergie US – voient une perspective pour installer des infrastructures qui viendront profiter d'un déséquilibre de prix entre les deux marchés. Il y a des gens qui vont vouloir contracter ce projet-là, prendre les risques de ce projet-là pour essentiellement aller capter un arbitrage de prix entre deux marchés.

Ça peut se faire différemment. Comme producteur, on pourrait dire: On ne contractera pas de transport. On va installer des capacités de production à Long Island. C'est donc dans un contexte qui est un contexte essentiellement de déséquilibre de prix entre différents marchés. Ça peut se régler par du transport ou ça peut se régler par de l'installation additionnelle de production. C'est ce qui se passe à Long Island, c'est ce qui se passe ailleurs en Amérique du Nord.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: En terme d'échéancier, pour un projet comme celui là, qu'est-ce qui est prévu?

M. Filion (Yves): Oui. Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Filion.

M. Filion (Yves): Je vais répondre au niveau de l'échéancier, mais je tiens aussi à vous dire, si vous le permettez, une information. Hydro-Québec a réalisé une étude sur ce dossier-là, et par la suite Long Island Power Authority a procédé par appel d'offres. Nous avons été les seuls à soumettre une offre technologique d'une ligne pour satisfaire aux besoins, et Long Island Power Authority aura à comparer notre solution technologique, qui vise à amener du transport pour que de l'énergie d'ailleurs puisse être disponible à Long Island, versus l'installation d'une centrale directement dans Long Island qui, elle, pourrait aussi satisfaire les mêmes besoins. Alors, je pense que c'est un peu ce qui se passe comme choix qui se présente aux autorités à ce niveau-là.

Alors, maintenant, nous ne contrôlons pas, bien sûr, le processus de décision, qui appartient aux Américains, mais, selon l'échéancier que nous estimons actuellement le plus tôt, ce serait une mise en service vers le mois de mai de l'an 2002. Mais c'est possible qu'il y ait un décalage de quelques mois, selon les prises de décision qui seront à prendre dans ce dossier.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure, il reste deux minutes, là. Ça serait plutôt un commentaire ou...

Mme Normandeau: Oui, un commentaire effectivement, c'est l'absence évidemment de toute précision dans le plan stratégique concernant ce projet d'envergure et le fait... On nous a parlé tout à l'heure de TransÉnergie, et je dois vous dire que ce n'est pas simple pour le commun des mortels de comprendre des investissements comme ceux-là, qui assumera, à l'intérieur d'Hydro-Québec, dans les filiales, des projets d'envergure comme ceux-là.

Cependant, je pense que ma collègue de La Pinière a peut-être une question à vous poser en regard de cette orientation-là. Alors, je vais peut-être lui laisser, s'il reste, quoi, quelques secondes, une minute?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Si c'est une question avec une réponse, on va avoir de la difficulté à entrer dans le 20 minutes. Il reste combien de temps? Une minute, madame. Alors, on peut peut-être s'organiser pour la poser au début du prochain. Je conserve le temps qui n'a pas été utilisé.

Mme Houda-Pepin: Vous me le conserverez? D'accord.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le ministre.


Conformité à l'ordonnance 2000 de la FERC

M. Brassard: Oui. Mme la Présidente, concernant toute cette mutation dans le marché de l'énergie sur tout le continent nord-américain, on sait que la commission fédérale américaine de l'énergie, la FERC, a adopté tout récemment une ordonnance, c'est très récent, l'ordonnance 2000, qui entend favoriser la création de grandes organisations régionales de transport d'électricité en Amérique du Nord, et elle invite même le Canada et le Mexique, deux partenaires américains dans le cadre de l'ALENA, à participer à cette initiative.

La FERC désire, veut notamment que le transport soit géré de façon davantage indépendante par rapport aux fournisseurs d'électricité, aux producteurs d'électricité, et que la tarification du transport soit, d'une part, simplifiée, mais également, d'autre part, capable de donner les signaux appropriés en présence – on en parlait tout à l'heure – de congestion sur certaines portions des réseaux de transport. C'est évident que c'est une ordonnance tout à fait récente, mais qui pourrait provoquer des changements considérables dans les réseaux de transport en Amérique du Nord.

Évidemment, vous êtes sûrement très vigilant quant à tout ce qui se passe, quant à tous les changements qui surviennent sur le marché de l'énergie, particulièrement dans le domaine du transport. Je voudrais savoir de la part d'Hydro: Comment vous appréciez, quel est votre point de vue, votre opinion ou votre évaluation des impacts, des conséquences sur le secteur du transport de l'électricité de cette décision de l'organisme régulateur américain, et comment vous entendez en quelque sorte – parce qu'il y a une invitation pressante de la part de la commission fédérale américaine, au Canada comme au Mexique, de se joindre, d'embarquer dans cette voie-là – comment vous entendez réagir ou vous positionner à l'égard de cette ordonnance, de cette décision de la commission fédérale américaine de l'énergie, la FERC?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, la FERC, essentiellement, a deux exigences. La première, c'est qu'il y ait un libre accès à tout producteur au réseau de transport, un accès non différencié, un accès qui ne privilégie pas, dans notre cas, par exemple, Hydro-Québec, dans son unité d'affaires de production, par rapport à quelqu'un d'autre qui produit de l'électricité. Cette question-là, on l'a déjà résolue en faisant une séparation fonctionnelle sous le président-directeur général, à savoir que les gens de transport n'ont pas de liens directs ou de rapports avec nos gens de production, qui puissent donner quelque avantage que ce soit à Hydro-Québec production par rapport à d'autres producteurs.

M. Brassard: Cette réorganisation, cette restructuration, ça a donné satisfaction à la FERC?

M. Caillé (André): Oui.

M. Brassard: Elle a considéré que TransÉnergie était suffisamment autonome dans son fonctionnement pour que ça la satisfasse?

M. Caillé (André): C'est ça. C'est très exactement cela. Quand on l'a fait, au point de départ, quand on a fait les changements de structures, plus récemment, où j'ai confié à mon collègue ici, à ma gauche, les responsabilités au niveau de tout ce qui est transport et distribution, je me suis également assuré que ce changement n'allait pas modifier l'appréciation de la séparation fonctionnelle existant entre le transport et la production, ce qui m'a été confirmé. J'ai des avis juridiques à cet égard, etc. On respecte en tous points les exigences de la FERC à cet égard. D'ailleurs, ça a été reconnu par plusieurs intervenants dans le milieu.

Quant à l'ordonnance 2000, celle qui est plus récente, où la FERC a décidé qu'il y avait un avantage pour le marché américain – parce que ses considérations portaient sur le marché américain – à ce qu'il y ait un regroupement de réseaux de transport jusque-là gérés séparément, que ce soit regroupé, et finalement dans une seule base de tarification, parce que, comme, chez nous, le transport, c'est réglementé aux États-Unis, et qu'il y ait un seul tarif pour tout le monde, plutôt que la situation qui prévaut présentement, où il y a un tarif pour chaque compagnie, ils appellent ça du «pancaking» de tarif... Parce que, pour un client qui se situe à l'autre bout, on part avec le prix de la production et on ajouter le tarif de chacun en chemin. Alors, ils veulent des organisations de transport plus grandes, avec un tarif uniforme, pour qu'il y ait justement plus de fluidité dans le marché et qu'il y ait un accès plus facile à un plus grand nombre de producteurs et à un plus grand nombre de clients pour créer un marché qui soit plus efficace, quoi. Alors, ils ont mis ça de l'avant.

(10 h 40)

Quand on a pris connaissance de l'ordonnance 2000, ça a été pour constater que TransÉnergie est déjà, au sens de la FERC, un RTO. On a quoi? On a un grand réseau de transport, c'est un tarif timbre-poste, il est valide pour tout le monde, il y a un accès ouvert. Évidemment, ça n'avait rien à voir... Parce que, ça, c'est ce qui a été construit au cours des âges, des années, je devrais plutôt dire, depuis 1960, mais il arrive que ça respecte les critères de la FERC pour un RTO. Alors, nous sommes déjà un RTO. Est-ce qu'on va vouloir grandir ou pas grandir ce RTO? Qu'est-ce qui va se passer dans l'Est du Canada? Est-ce que ce sera plus grand? On pourra s'associer avec qui? Etc. C'est toutes des questions pour interrogation à ce moment-ci, il n'y a pas de décisions de notre part qui ont été prises.

Tout ce qu'on sait, c'est que les choses se présentent plutôt bien pour nous puisqu'on l'est déjà. Là où ça va avoir un véritable impact, ça, c'est aux États-Unis, hein, par le regroupement de plusieurs transporteurs, et ça, ça ne peut être que favorable à Hydro-Québec. Il n'y a pas de menace là, parce que ça va faire juste un tarif plutôt qu'une série de petits tarifs à ajouter.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le ministre. Oui. Ah! M. le député de Gaspé.


H.Q. Energy Services (U.S.)

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. Vous venez de nous faire une distinction entre le transport et les activités de production et vous dites, d'autre part: La FERC accepte les façons de fonctionner à l'intérieur d'Hydro-Québec. Mais Hydro, dans le fond, c'est un tout quand même. La planification stratégique que vous nous présentez ne doit pas laisser voir qu'on ne se parle pas à l'intérieur de la boîte. Je pense que la planification dans son ensemble est gérée également.

Moi, j'aimerais savoir, par rapport à H.Q. (U.S.), vous dites: On est présent, on est en train de faire des choses, mais ce n'est pas tellement avancé. Mais vous êtes déjà là, aux États-Unis. Vous avez déjà des partenariats avec des entreprises, vous avez déjà des contrats d'affaires là-bas. Alors, c'est quoi actuellement, H.Q. (U.S.), puis c'est quoi, les résultats que vous avez obtenus là-bas?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, H.Q. (U.S.), c'est l'entreprise qui nous représente auprès de la clientèle pour vendre la commodité, pour vendre l'énergie. Ils ont été actifs depuis deux ou trois ans. Ils nous ont fait un bon travail. On constate maintenant qu'il est nécessaire de toujours avoir une présence aux États-Unis – si vous parlez ici des gens en production, ils sont à Pittsburgh et localisés à Pittsburgh – mais ce n'est pas nécessaire d'avoir une aussi grande présence aux États-Unis, si on parle de marché de gros. Parce que finalement on transige surtout au niveau des marchés de gros, et l'information est rendue, avec les moyens technologiques d'aujourd'hui, tellement fluide qu'on peut très bien faire ça, une grande partie, la très, très grande, la plus grande partie, à partir de Montréal.

Alors, il y a des ajustements que nous allons apporter, et ça va dans le sens de regrouper des activités à Montréal, plus que de développer des activités à Pittsburgh, ce qui n'empêche pas qu'il y ait une nécessaire présence à Pittsburgh, selon moi, parce qu'il faut avoir des relations avec des clients, ça ne se passe pas tout sur des claviers d'ordinateur et sur des écrans.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. Je pourrais peut-être ajouter un point ici pour être sûr qu'il n'y ait pas de confusion, parce qu'il y a aussi une autre filiale aux États-Unis qui s'appelle TransÉnergie US, qui est différente de H.Q. (U.S.), qui est une filiale associée à la production. Alors, il y a une filiale, qui s'appelle TransÉnergie (U.S.), par laquelle nous allons réaliser les projets dont on vous a parlé tout à l'heure. Donc, le projet de Long Island et d'autres projets aux États-Unis seront faits dans une filiale de TransÉnergie qui s'appelle TransÉnergie (U.S.), et ceci pour des considérations d'ordre fiscal et d'autres de fonctionnement légal pour faire affaire aux États-Unis.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Allez-y.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, c'est juste que mon collègue...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): ...ici est très fier d'un résultat: il n'y a eu aucune plainte quant à la séparation fonctionnelle entre le transport et la production, aucune plainte adressée à Hydro-Québec, ce qui n'est pas le cas – évidemment, je ne les nommerai pas – d'autres entreprises dans le domaine.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Merci. M. le député de Gaspé.


Secteurs d'activité aux États-Unis

M. Lelièvre: Oui. Au niveau de TransÉnergie, tout à l'heure, la députée de Bonaventure cherchait à savoir quelle était la hauteur des investissements, la hauteur des projets, les risques qu'il y avait. Mais est-ce que vous avez d'autres projets autres que relier Long Island avec le Connecticut?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente. Nous avons un autre projet que nous regardons actuellement. Il y a des entreprises dans la Nouvelle-Angleterre actuellement qui se départissent de certains actifs, dont, entre autres, des droits d'utilisation de lignes de transport qui nous intéressent. Alors, nous prévoyons être actifs à ce niveau-là pour acquérir des droits de transport qui pourraient nous permettre, encore une fois, de contribuer à l'ouverture du marché et à la libre circulation de l'électricité dans le continent nord-américain.

Les autres projets actuellement sont à l'étape d'étude. Donc, il n'y a rien de concret que je peux anticiper, je dirais, pour les prochains mois, sauf des droits d'acquisition, des droits d'utilisation des lignes de transport qu'on pourrait obtenir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui. J'ai bien compris que TransÉnergie est dans le transport, hein? C'est uniquement ça. H.Q. américain est dans les occasions d'affaires, autrement dit le partenariat.

Vous parlez de production américaine. Je comprends que les États-Unis sont principalement dans le thermique. Est-ce que vous envisagez également de faire des investissements dans le thermique avec les Américains, ou c'est un créneau que vous n'aborderez pas? Parce que, si on regarde, par exemple, les orientations futures pour la réduction des gaz à effets de serre, le thermique contribue largement à l'augmentation.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, non, il n'y a pas de projet actuellement pour investir au niveau de plants thermiques aux États-Unis. Comme je l'ai dit, on en a regardé, mais c'était tellement loin en termes de coût de revient pour produire de l'électricité de ce que c'est qu'on a déjà au Québec en termes d'hydroélectricité qu'il n'y a personne qui pourra se convaincre, jamais, qu'il faut faire quelque chose comme ça aujourd'hui. Plus tard dans le temps, bien, on verra.

Au niveau, par exemple, de la production distribuée, ça pourrait être intéressant de faire de la production distribuée, d'abord aux États-Unis, parce que les coûts de la production distribuée, au début, ça ouvre tellement et ça va être sûrement plus élevé que ce que c'est qu'on a déjà. Alors, ça serait peut-être mieux de les faire au niveau des États-Unis, mais on est encore loin, une dizaine d'années, de ces décisions-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. M. le ministre, il reste quelques minutes pour ce bloc-ci.

M. Brassard: Quelques minutes. Moi, je préférerais plutôt aborder l'autre orientation, concernant le gazier. Je peux garder mon six minutes, le mettre en banque peut-être...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Pas de problème.

M. Brassard: ...et permettre à l'opposition de...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, d'accord.

M. Brassard: Pour éviter d'avoir des séparations.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bien, c'est ça, c'est plus facile, mais en tout cas. Alors, Mme la députée de Bonaventure.


Implication dans le secteur gazier

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Effectivement, je souhaitais également aborder le prochain bloc, au niveau de toute la présence d'Hydro-Québec dans le secteur gazier sur le continent.

Je dois vous dire que, comme nouvelle parlementaire, et je suis critique officielle des ressources naturelles depuis un an, ça m'a frappée quand j'ai constaté qu'effectivement Hydro-Québec, dans son plan stratégique 2000-2004, avait l'intention de se lancer, dans toutes ses activités, au niveau du gaz naturel. C'est d'autant plus surprenant qu'il me semble qu'il y a comme, au départ, une incompatibilité entre la mission première d'Hydro-Québec et le choix que vous avez fait de vous lancer dans le secteur gazier. Je me demande jusque dans quelle mesure justement cette orientation-là, cette décision de se lancer dans un secteur comme celui du gaz, ne viendrait pas en quelque sorte hypothéquer la mission première d'Hydro-Québec.

Ce qui est surprenant également, c'est que vous ayez choisi – ça a été identifié dans la stratégie 6.1 – de vous consacrer, vous lancer dans des activités en amont du secteur du gaz naturel, dans l'exploration notamment. C'est d'autant plus surprenant que, dans le plan stratégique, Hydro-Québec veut saisir les nouvelles opportunités ou occasions d'affaires, alors que le secteur qui est lié à l'exploration, à mon sens, est un secteur qui est sans valeur ajoutée. Alors, je m'explique difficilement comment Hydro-Québec peut choisir, compte tenu de l'intention avouée de saisir les occasions d'affaires, donc, de se lancer dans des activités en amont, alors que les nouvelles technologies justement qui sont développées et qui sont en lien avec le secteur du gaz naturel – on pense aux microturbines ou encore aux piles à combustible – elles représentent des valeurs ajoutées. Il me semble que le potentiel de profit est davantage concentré à ce niveau-là, plus que dans les activités d'exploration.

Alors, est-ce que c'est possible de nous expliquer les motivations d'Hydro-Québec à se lancer dans des activités d'exploration pour le gaz naturel?

M. Caillé (André): D'abord, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): ...une explication en ce qui concerne l'exploration. Nous n'avons pas l'intention de nous lancer dans ce qui est appelé l'exploration. L'exploration, c'est les études sismiques et autres qui visent à identifier là où il peut y avoir des gisements ou pas de gisement. Nous n'avons pas l'intention de le faire, si ce n'est que je crois opportun à ce moment-ci, compte tenu de ce qui a été découvert ailleurs qu'au Québec, dans le golfe Saint-Laurent, sous la mer, offshore, qu'on fasse à tout le moins le bilan des données que nous avons, parce qu'il y en a déjà eu, de l'exploration, au Québec.

(10 h 50)

Je voyais aussi que les travaux qui se font par les grandes entreprises qui ont la compétence et l'expertise dans ce domaine – incidemment qu'Hydro-Québec n'a pas – ça se rapproche de chez nous, ça se rapproche du Québec. Alors, au niveau de l'exploration, on n'a pas la compétence à Hydro-Québec pour faire ça, mais, au niveau de l'exploration, il y a des grandes entreprises avec lesquelles on pourrait développer des relations qui pourraient peut-être le faire plus tard.

Mais, actuellement, il n'y a pas de volonté autre que d'essayer de saisir exactement ça peut être quoi, la situation ici, au Québec même, où on pourrait perdre des opportunités. Ce qu'il ne faudrait pas qui arrive, c'est qu'on découvre que finalement on avait du gaz puis qu'on n'y a pas été présent du tout. Alors, c'est seulement ça. Mais il n'est pas question d'aller faire du sismique, d'aller faire de l'exploration au sens où les gens de ce métier-là définissent l'exploration.

Par ailleurs, en amont, il n'y a pas seulement de l'exploration. La première étape consiste à, en amont...

Une voix: ...

M. Caillé (André): Là, il faut que je sois court. Alors, en amont, ça consiste à découvrir s'il y a présence ou pas présence de réserves. Après ça, il y a des opérations. Il faut faire de la production. Quand on se lance en production... On sait que le gaz est là, on se lance en production. On fait de la production, on fait des pipelines pour amener cette production-là aux marchés. Ça, c'est peut-être quelque chose où il y a un intérêt, pour nous, très différent maintenant d'il y a quelques années, à cause de ce changement justement de perspective. On sait depuis plusieurs années qu'il y a des gisements à l'île de Sable. On commence à comprendre qu'il y en a aussi beaucoup au sud de Terre-Neuve et qu'il y en a également possiblement beaucoup vers l'ouest de tout ça, et ça se rapproche de chez nous. Alors là, je veux dire, on va laisser faire l'exploration aux gens qui savent faire de l'exploration. On va s'y intéresser pour être sûr qu'on ne manque rien là. On n'aura pas d'indifférence, mais on n'aura pas de grands investissements en exploration, je vous rassure.

Mais produire, mettre la main sur des réserves en fonction des stratégies d'alimentation du marché maintenant ou encore de l'alimentation du marché éventuellement, dans 10 ans, quand on passera, au Québec, à la production distribuée parce qu'on aura complété le parachèvement du développement hydroélectrique, ça, ça peut représenter un intérêt. C'est ce que nous étudions présentement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Bien. Merci, Mme la Présidente. Qui assumera le leadership à ce niveau-là? Est-ce que c'est Noverco, Hydro-Québec? Si oui, votre intention d'investir dans l'exploration de gisements en périphérie du Québec... Quels sont les gisements qui ont été identifiés, à l'heure où on se parle, de ce côté-là?

M. Caillé (André): On n'en est pas à l'identification de gisements à l'heure où on se parle. Des gens viennent nous voir... Enfin, des gens d'ailleurs en Amérique du Nord viennent nous voir pour dire: Auriez-vous un intérêt? Mais c'est toujours dans la production. Je leur réponds toujours qu'en exploration, nous, on n'a pas de connaissances. Il y a trois ou quatre entreprises au monde qui ont de la connaissance là-dedans. Alors, on n'apporterait rien. Par conséquent, ça ne serait pas normal qu'on réalise des valeurs, non plus. Mais ceux qui ont déjà des réserves démontrées, parce qu'ils ont fait justement les travaux d'exploration, posent la question à Hydro-Québec: Êtes-vous intéressé au volet production, au volet collecte? En amont, il faut faire des trous, il faut faire des forages pour aller chercher la production, il faut faire des réseaux pour collecter, il faut faire des réseaux pour transporter. Alors, possiblement qu'on sera intéressé par cela, mais il n'y a aucun projet que je peux vous dire qui est identifié aujourd'hui.

Là où nous en sommes, c'est d'avoir fait la liste des opportunités, tout ce qui se présente. On doit revenir à notre conseil dans quelques mois pour lui dire: On a fait l'analyse de tout ce catalogue d'opportunités, on pense que ça vaut la peine de continuer nos analyses dans telles et telles activités, mais, pour les autres, on laisserait tomber. Alors, il y a un élagage à faire au niveau de tout ce que c'est qui peut être possiblement d'intérêt pour nous.

J'ajoute simplement une chose, toujours pour être rapide. Ceci ne change en rien les missions, bien entendu, de Gaz Métropolitain. Alors, dans le transport, transmission, on va agir à travers une filiale; on l'a déjà, c'est Gaz Métropolitain. On est majoritaire... On a 50 % dans Noverco, puis Noverco contrôle Gaz Métropolitain. Il n'y a pas nécessité de créer de nouvelles structures. En passant, il faut la gérer. Et, quant à se lancer dans le domaine... le lancement a eu lieu en 1997, au tout début de 1997. Ce n'est pas nouveau pour nous cette année. Pour ce qui est d'autres activités, bien, on verra; on n'est pas rendu là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci. M. Caillé, vous n'avez pas répondu à ma première question à l'effet d'une incompatibilité évidente entre la mission d'Hydro-Québec et le fait de se lancer dans le secteur gazier. On connaît évidemment votre passé. Je pense que ça peut peut-être expliquer grandement le fait qu'Hydro-Québec se lance dans l'aventure du gaz naturel. Mais plusieurs observateurs s'entendent pour dire que, à plus ou moins long terme, Hydro-Québec, dans sa participation à Noverco, s'assure d'éliminer la concurrence au niveau du gaz naturel. Il y a plusieurs analystes qui s'entendent pour dire qu'à plus ou moins long terme justement ce n'est pas une stratégie qui pourrait bien servir les PME, par exemple. Alors, c'est un peu comme si Microsoft achetait IBM, dans le fond; on fait des logiciels, on achète la compagnie qui fait les ordinateurs.

Donc, bref, compte tenu du marché de l'énergie au Québec, il me semble qu'il y a un danger là en termes d'élimination de la concurrence, puis je pense qu'on a le droit de s'inquiéter, puis je pense que c'est légitime de le faire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): La question, Mme la Présidente, est très bonne. En 1997, au moment de la transaction, il nous a été demandé puis j'ai pris des mesures pour s'assurer que cette transaction ne changeait en rien la compétition qu'il y a entre le gaz et l'électricité dans le marché québécois. En d'autres mots, celui qui vous parle s'abstient de tout commentaire à des vendeurs, d'ex-collègues de travail chez Gaz Métropolitain ou mes nouveaux collègues de travail chez Hydro-Québec. Je les entends, je les écoute, ils compétitionnent. D'ailleurs, des clients me rapportaient qu'ils ont l'air à compétitionner aussi fébrilement que dans un autre temps. Et ça, c'est normal, il faut que ça reste comme ça, il faut que les clients se fassent faire la meilleure offre par l'une et l'autre des entreprises, parce que les intérêts, au niveau des actionnaires, s'ils ne sont pas les mêmes, hein... Dans Gaz Métropolitain, les actionnaires, ce n'est pas les mêmes que dans Hydro-Québec. Alors, en toute équité pour tout le monde, il faut que cette concurrence-là joue et joue pleinement. On ne s'en mêle pas, de ça.

Par ailleurs, Hydro-Québec peut contribuer beaucoup à aider au développement de Gaz Métropolitain justement au niveau du transport. Gaz Métropolitain a une mission de distribution qui est bien connue, je pense, mais s'est aussi impliqué dans des activités de transport, des pipelines de gaz naturel. Ils sont présents dans un projet qui s'appelle PNGTS, et d'autres, ils sont présents dans TransQuébec & Maritimes, TQM. Alors, on peut, nous, par nos activités, contribuer.

J'ai des rapports très cordiaux. La collaboration – je pense qu'ils vous diraient la même chose que moi – est très bonne avec mon successeur à Gaz Métropolitain à cet égard. Il n'est pas question ici de changer en aucune façon la mission de Gaz Métropolitain, a fortiori de changer la mission de Enbridge – on en a seulement 12 % de toute façon – et il n'est pas question non plus de favoriser les ventes d'Hydro versus les ventes de Gaz Métropolitain, à mon niveau. Je constate les résultats.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, à quelle date a été créée la société Noverco? À quelle date a été créée Noverco?

M. Caillé (André): C'est le milieu des années quatre-vingt, ça, je me souviens de ça. C'est en 1986, je crois.

Mme Houda-Pepin: O.K. Dans le plan stratégique 1998-2000 que vous nous avez présenté au mois de février 1998, il n'était nullement question de cette orientation, de l'implication d'Hydro-Québec dans le secteur gazier. Et, aujourd'hui, ça apparaît tout d'un coup comme un fait accompli, finalement, dans le plan stratégique que vous nous présentez.

Est-ce que vous estimez que les parlementaires n'avaient pas à connaître auparavant cette orientation et à en débattre avant qu'Hydro-Québec s'y engage?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): À ma connaissance, la politique énergétique du gouvernement du Québec parlait déjà de cette convergence entre le gaz et l'électricité, parlait de...

Mme Houda-Pepin: Je parle de l'orientation dans le plan stratégique.

M. Caillé (André): Oui. Et, en 1998, quand nous sommes venus ici, c'était déjà connu. Je ne me souviens pas s'il y a eu des questions ou des discussions, mais l'acquisition de 41 % plus 9 % d'options était également connue.

Une voix: ...

M. Caillé (André): Page 9, plan 1998.

Mme Houda-Pepin: Pardon?

M. Caillé (André): Page 9, plan 1998. Ça dit: «Les années...»

Mme Houda-Pepin: Mais vous ne l'avez pas identifié comme une orientation en tant que telle, une orientation stratégique. Pourquoi est-ce qu'on n'a pas eu, par exemple, à en débattre en 1998 et qu'aujourd'hui ça apparaît comme une orientation majeure? Parce que vous dites que c'est un secteur d'avenir, c'est un secteur en croissance. Qu'est-ce qui explique qu'en 1998 ce n'était pas une orientation, puis tout d'un coup ça le devient?

(11 heures)

M. Caillé (André): Alors, déjà, Mme la Présidente, en 1998, on parlait – il me semble bien en avoir parlé ici – de convergence entre le gaz et l'électricité, de l'acquisition qu'Hydro-Québec avait faite de 41 % plus 9 % de Noverco. Alors, c'était là, on parlait de la convergence. Ce que vous voyez cette année, c'est que la structure de base était en place à ce moment-là, puis là on tente... Et là on n'a pas un plan qui est encore élaboré, on dit qu'on est en train d'élaborer un plan pour justement aller chercher tous les avantages, l'opportunité qui pourrait exister pour nous ici, au Québec, de cette convergence entre le gaz et l'électricité.

Voyez-vous, le gaz naturel, de plus en plus, il est produit pour être transformé en électricité dans des machines qui ne peuvent pas stocker l'électricité. Nous, on est dans l'hydroélectricité, dans les machines qui peuvent produire l'électricité mais qui peuvent aussi la stocker. Alors, il y a une convergence entre les deux, puis là on est en train d'élaborer puis d'identifier surtout, je devrais dire – de sorte que, la prochaine fois, il y en aura encore plus d'identifiés – de quelle façon précise on peut aller chercher les avantages de cette convergence. Mais je suis d'accord avec vous qu'en 1998 nous ne pouvions parler que de la politique énergétique, de l'acquisition que nous avions faite et de notre volonté d'actualiser pour nous les avantages de la convergence. Mais ça n'allait pas plus loin.

Ici on dit: On a pris les moyens pour élaborer des programmes, projets pour actualiser les avantages de cette convergence. C'est vrai que nous allons plus loin, mais, par ailleurs, on n'est pas encore au bout de la route ici, ça va prendre quelque chose... Mon collègue, ici, a beaucoup de travail à faire pour élaborer le programme, projet précis que nous n'avons pas ici aujourd'hui. Notre conseil d'administration nous a mandatés d'ailleurs pour le faire. On a eu une première rencontre avec lui pour décrire l'ensemble des possibilités sans faire de choix. Alors, ils sont déjà au courant de ça. Dans une étape subséquente, on va éliminer de ces possibilités-là, en retenir d'autres puis faire l'analyse, l'examen de ce que c'est qui est possible.

Parallèlement à cela, comme je vous disais, il y a des gens, des Américains ou même d'autres Canadiens, qui nous approchent parce qu'ils se demandent: Que faites-vous, Hydro-Québec, compte tenu de tout ce qui se développe dans l'est? Alors, j'imagine que c'est pour ça qu'ils viennent à Montréal, qu'ils demandent qu'est-ce que c'est qu'on a l'intention de faire. La réponse qu'ils obtiennent pour l'instant est essentiellement celle que je vous donne: On est en voie d'élaboration de ce que c'est qu'on voudrait faire, nous. Je leur dis aussi qu'on a un intérêt, là, à sauter une génération au niveau de la production thermique. On voudrait aller directement à la production décentralisée, sans passer par la grande production centralisée. On a un intérêt à faire en sorte d'aller chercher ce qu'on peut aller chercher du fait que... C'est un gros changement pour l'industrie canadienne du gaz, ça, autant de réserves de gaz dans l'est qu'il y a maintenant. Alors, qu'est-ce qu'il y a pour nous? On est en train de le trouver. Alors, la prochaine fois, vous allez nous entendre parler avec plus de précision de tout ça. Ça va apparaître encore probablement comme un grand changement par rapport à aujourd'hui.

Mme Houda-Pepin: À combien s'élèvent les investissements d'Hydro-Québec dans le secteur gazier? À ce jour, à combien s'élèvent les investissements d'Hydro-Québec?

M. Caillé (André): Oui, je voudrais vous fournir le chiffre très précis. Ça ne sera pas long de le trouver. Probablement que je vais vous le trouver d'ici quelques minutes.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Et le taux de rentabilité des ces investissements.

M. Caillé (André): D'accord.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, vous attendez une réponse, Mme la députée de La Pinière?

Mme Houda-Pepin: Oui, j'attends la réponse. Est-ce qu'il va la donner?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il reste quoi, là? Il reste combien? Trois, quatre...

(Consultation)

M. Caillé (André): On a déjà la réponse.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui? Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): M. Gourdeau va vous donner la réponse.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce que vous pourriez vous identifier, s'il vous plaît?

M. Caillé (André): Je m'excuse, c'est Michel Gourdeau. C'est le vice-président exécutif, secteur gazier, justement.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, c'est pour les besoins de la transcription, aussi.

M. Caillé (André): Très bien.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous comprendrez...

M. Caillé (André): Je m'excuse auprès de lui et auprès de vous de ne pas l'avoir fait plus tôt.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Gourdeau.

M. Gourdeau (Michel): Alors, voilà, Mme la Présidente, l'investissement que nous avons présentement est de 482 000 000 $, investis dans Noverco, qui possède à la fois Gaz Métropolitain et la participation dans Enbridge. Et, au cours de l'année 1999, la rentabilité qui se reflète dans les états financiers d'Hydro-Québec est de 12 % sur l'investissement de 482 000 000 $.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: ...non?

Mme Normandeau: On va conserver en banque, s'il reste une minute ou deux.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, c'est ça. Alors, écoutez, puisque ça semble bien rouler et que tout le monde semble être satisfait de la façon dont on procède, alors, à ce moment-ci, compte tenu... depuis le temps qu'on est en commission, et tout ça, je vous propose donc de suspendre pour une dizaine de minutes, prendre une pause, puis on va être de retour dans quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 5)

(Reprise à 11 h 18)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission va donc reprendre ses travaux. Nous étions rendus à la partie gouvernementale. Alors, M. le ministre.

M. Brassard: Merci, Mme la Présidente. Alors, je pense qu'il m'apparaît important qu'un peu tout le monde, y compris la population du Québec, soit en mesure de bien comprendre ce que certains appellent, de la part d'Hydro-Québec, son virage gazier. Bon.

Moi, je le comprends de cette façon-là, c'est que – vous l'avez d'ailleurs bien expliqué – pour un bon nombre d'années encore, le choix d'Hydro-Québec – je pense que c'est aussi le choix de la société québécoise – c'est de poursuivre le développement hydroélectrique. Il y a encore des projets majeurs à un coût tout à fait intéressant de production hydroélectrique. On a parlé du bas Churchill, il est toujours question d'Eastmain et il y en a un certain nombre d'autres. Quand on additionne tout ça, ça fait pas mal de mégawatts encore, et donc, pour 10, 15 ans encore, c'est clair que l'orientation privilégiée, c'est le développement hydroélectrique. C'est ça que j'ai compris, puis je pense que ça m'apparaît évident aussi que c'est ça qu'il faut faire.

(11 h 20)

Mais il faut faire de la prospective aussi. Au fond, ce qu'Hydro-Québec fait, c'est de la prospective. Qu'est-ce qui arrive dans 15 ans? Quand on aura complété et réalisé tous les projets hydroélectriques rentables, économiques, qu'est-ce qui va arriver? Il va y avoir des besoins énergétiques qu'on va devoir satisfaire, et ce que vous dites, à ce moment-là, c'est que ce qui s'en vient... Actuellement, quand on regarde ce qui se passe dans le secteur du gaz, c'est les turbines à gaz, qui sont de gros équipements, et le coût de l'électricité, d'ailleurs, le coût du kilowatt est assez élevé, mais c'est ça, là. Pour le moment, on en est rendu là.

Mais ce que vous nous dites également, c'est que, dans 15 ans d'ici, on va être passé à quelque chose d'autre, ce que vous appelez la production décentralisée, avec des petites centrales au gaz. C'est ce qui se prépare. Je comprends qu'il y a des recherches, là, qui se poursuivent, puis c'est ce qui se prépare, c'est ce qu'on peut anticiper. Et, dans cette perspective-là, c'est comme ça que je comprends votre virage gazier, c'est que vous vous dites: Il faut être prêt quand ça, ça va arriver. Quand on aura complété l'ensemble de notre programme hydroélectrique, il faudra être prêt, parce que c'est ça qui va apparaître, cette production décentralisée, avec comme forme d'énergie le gaz, et qu'il faudra donc être présent dans ce secteur-là.

Et ce que vous nous dites également, c'est qu'Hydro-Québec n'est pas intéressée à l'exploration. Vous n'avez pas d'expertise là-dedans, il y a des entreprises dont c'est la mission, puis elles le font bien. Cependant, vous dites: On va être très vigilants sur ce qui se passe dans ce secteur-là, dans le secteur de l'exploration, parce que effectivement il y a des chances que, dans le golfe, dans les années qui viennent, il puisse se faire des découvertes intéressantes et qui pourraient nous permettre de passer au stade de la production même de gisements gaziers dans le territoire québécois. C'est à ce moment-là qu'Hydro-Québec dit: Nous, compte tenu de ce qui va arriver dans l'avenir, nous avons intérêt à être présents si, par chance – ce serait une chance – on voit apparaître non pas seulement de l'exploration – il s'en fait – mais de la production de gaz au Québec même. On veut être présents, parce que, à ce moment-là, on aura à être un acteur dans ce qui va arriver dans 15 ans, puisque vous aurez à fournir à la demande d'énergie des Québécois, et donc vous serez un acteur, avec les nouvelles façons de produire de l'énergie qui vont prédominer à ce moment-là.

Et, dans le fond, ce que vous nous dites, c'est que le virage gazier d'Hydro-Québec, il n'est pas encore vraiment défini. C'est ce que vous êtes en train de faire, vous êtes en train de préparer une stratégie qui porte sur du long terme pas mal, là – on est dans le long terme – une stratégie qui ferait en sorte que, lorsque ça arrivera, vous serez en mesure d'être présents, d'être un acteur important. Avec d'autres partenaires, d'être un acteur. C'est pour ça que vous n'êtes pas en mesure de nous donner des précisions, des détails sur ce qui n'existe pas encore. Vous n'avez pas de plan d'affaires encore en matière de gaz. Votre virage gazier, il n'a pas pris la forme encore d'un plan d'affaires, vous y travaillez.

Mais il faut comprendre, cependant, que ça ne prendra pas la forme d'une implication majeure d'Hydro-Québec dans le secteur de l'exploration, par exemple, d'aucune façon, mais qu'il faut vous préparer à devenir un acteur si, un jour, des découvertes conduisent le Québec à la production de gaz. Là, vous voulez être présents compte tenu de ce qui s'en vient en matière d'énergie, de façons de produire de l'énergie dans 10 ou 15 ans, au moment où vous aurez complété ou que vous serez près de compléter votre programme de projets hydroélectriques.

Projets économiques, là, parce que, en matière hydroélectrique, c'est sûr que vous en avez un certain nombre, de projets, dans vos cartons. On pourrait en ajouter beaucoup, mais la question, c'est que ça ne serait pas nécessairement économique par rapport aux autres formes d'énergie compétitives. Parce qu'il y a tellement de rivières au Québec qu'on pourrait envisager d'en harnacher pendant 50 et 60 ans encore. Le problème, c'est que ce ne sont pas tous des projets économiques. Alors donc, ça explique que, à un moment donné, le nombre de projets est limité et puis que ça va prendre fin dans le temps, et qu'à ce moment-là il faut vous préparer pour être un acteur au niveau de la production de gaz. Mais c'est toujours imprécis, tout ça.

Est-ce que je saisis bien votre orientation? Mais aussi, je me dis que, d'ici un certain temps, il faudra que l'État, que le gouvernement actionnaire soit en mesure de prendre connaissance de votre plan d'affaires, de votre stratégie, de la façon dont vous envisagez de jouer un rôle dans le secteur gazier, comment le virage gazier va se configurer. Ça, c'est évident que, ultérieurement, le gouvernement, qui est l'actionnaire unique d'Hydro-Québec, va devoir prendre connaissance de ce plan d'affaires.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, si je peux ajouter, Mme la Présidente, effectivement, une valeur de gestion importante à Hydro-Québec, puis je pense qu'elle y est nécessaire et qu'elle y est par conséquent présente, c'est la stabilité. On veut d'une entreprise, et je comprends de nos clients aussi qu'ils veulent une entreprise stable. On a parlé de stabilité tarifaire, mais, incluant la stabilité tarifaire et au-delà, les gens, ils aiment la stabilité.

C'est vrai qu'on parle ici d'un virage gazier. Il y a deux façons de le faire. Si on place ça à l'horizon 2010, je veux dire, le faire très rapidement quand ça va se présenter, dans 10 ans, ou s'y préparer. Moi, je pense que le risque en affaires, quand on fait des changements brusques, il augmente très rapidement. On a ici l'opportunité – on est en l'an 2000 – de planifier mieux nos choses, de les faire progressivement, de mieux se préparer et de faire un virage progressif et non pas un virage brusque. À un moment donné, parce qu'on découvre que là, maintenant, ça doit être le gaz, on en a besoin, puis il faut faire tout ça et il faut faire tout ça rapidement, on risque très grand quand ça se présente comme ça. Alors, on veut faire ça progressivement. C'est une stratégie, à cet égard, qui est très semblable à celle de notre stratégie au niveau d'Hydro-Québec International, parce qu'on ne veut pas faire ça d'un coup sec, on veut faire ça progressivement, on veut minimiser les risques, parce qu'on cherche la stabilité à l'intérieur de l'entreprise.

(11 h 30)

Le ministre a... Puis je pense que tout le monde est d'accord ici, le meilleur choix pour le Québec, c'est l'hydroélectricité. C'est vrai pour des raisons économiques, c'est aussi vrai pour des raisons environnementales. Et j'ajouterai à ce que le ministre disait: qu'on manque quelque chose ici. Il y a un rendez-vous qu'il ne faudrait pas manquer au Québec: On est la solution, avec l'hydroélectricité, au problème – une partie importante de la solution – des gaz à effet de serre. Je disais, je pense, mardi, qu'il y avait deux grands problèmes environnementaux: celui de l'eau polluée, puis qu'il fallait bien nettoyer – ça s'est fait il y a 30 ans – puis il y a maintenant ce problème avec la pollution de l'atmosphère.

Ici, la solution, il faudrait valoriser... Au Québec, on a tout intérêt à valoriser la filière hydroélectrique, d'autant que c'est notre meilleur choix économique en même temps. Ici, on est chanceux. Alors, c'est ça qu'il faut faire en tout premier lieu. Ça ne nous empêche pas de nous préparer, parce que, après, on veut qu'il y ait une continuité dans tout ça. On ne veut pas que, quand le parachèvement sera terminé, tout s'arrête là. On va vouloir continuer à faire quelque chose. On a une chance extraordinaire en termes de technologie, c'est qu'on peut être patients, on n'a pas à se lancer dans ces grands projets avec des grandes turbines à gaz. Ce n'est pas nécessaire pour l'instant. Alors, on a la chance d'attendre puis de voir... Puis là il va falloir qu'il y ait quelque chose sur mon collègue de gauche, enfin de M. Lanoue, en recherche-développement, qu'on voie, qu'on s'implique dans ces équipements de production distribuée, mais ça, j'en ai déjà parlé hier. Les piles à combustible et puis les petites turbines à gaz, ça pourrait être en recherche-développement. Ça pourrait être aussi au niveau du capital de risque, pour avoir accès à toutes ces technologies-là, pour qu'on soit des gens au fait de la situation, des gens prêts à agir qui ne le fassent jamais d'une façon empressée. Ce n'est pas bon d'être empressé en affaires. Vaut mieux se préparer puis faire les choses progressivement que subitement.

Je termine en vous disant que le plan d'affaires dans le secteur gazier, selon les échéanciers avec notre conseil, je pense qu'il devrait être disponible l'automne prochain, possiblement au début de l'automne prochain, et, évidemment, ce volet de nos activités, comme toutes nos activités – et c'est notre intention de le faire – devra être soumis au gouvernement, notre actionnaire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le ministre.


Recherches sur les conséquences environnementales d'autres filières de production

M. Brassard: Justement, vous avez évoqué la dimension environnementale. Ça m'apparaît être intéressant, parce que, c'est vrai, ce que vous dites, quand on regarde en particulier sous l'angle de la production de gaz à effet de serre, c'est clair que la filière qui bat tous les records, qui est la meilleure, c'est la filière hydroélectrique. Évidemment, à l'autre bout, tu as la filière charbon qui, elle, est très polluante, produit beaucoup de gaz à effet de serre. Le mazout aussi. Les centrales thermiques, ça produit beaucoup de gaz à effet de serre. Le gaz, moins, mais ça en produit aussi. Les turbines à gaz, ça produit quand même des gaz à effet de serre. C'est l'hydroélectricité qui est la meilleure filière à cet égard. Mais, compte tenu justement de cette réalité et que, même si une turbine à gaz produit moins de gaz à effet de serre qu'une centrale thermique au charbon, ce qui est évident, elle en produit quand même, donc c'est une moins bonne filière que la filière hydroélectrique à cet égard. Donc, ça veut dire que...

Est-ce que les recherches qui se font présentement dans ce secteur-là pour en arriver à ce que vous évoquez, dans 10, 15 ans, où on pourra envisager la production décentralisée avec des petites turbines à gaz... Est-ce que les recherches qui se font présentement pour mettre au point ces technologies de l'avenir, elles prennent en compte cette dimension environnementale pour en arriver à faire que, si survient le moment où Hydro-Québec devra s'orienter vers cette forme de production... Est-ce que les recherches qui se font pour mettre au point ces technologies prennent en compte la dimension environnementale, pour en arriver encore davantage sinon à annuler, à réduire considérablement encore la production de gaz à effet de serre de ces technologies?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, il y a des recherches qui se font. Nos voisins utilisent beaucoup les combustibles fossiles pour produire de l'électricité, et ça commence d'abord par le charbon, comme on le sait. La plus grande partie est produite avec du charbon. Vous avez raison de signaler que, parmi les combustibles fossiles, le meilleur, c'est le gaz naturel. Mais il reste que le gaz naturel produit, lorsqu'on l'utilise, du CO2, parce que par définition il s'agit toujours d'une combustion, et ça produit toujours du CO2 et de l'eau invariablement. Mais, le gaz naturel, je me souviens d'avoir... Je fouille dans ma mémoire, il me semble que c'était 30 % de moins d'émissions de gaz à effet de serre, pour le gaz naturel, que l'huile ou que le charbon.

Et, oui, il se fait des recherches par les entreprises qui sont impliquées dans le thermique pour réduire leurs émissions. Je dois dire: leurs émissions de toutes sortes, parce que, on parle du charbon, il y a d'autres émissions qui viennent en même temps, notamment beaucoup d'acide, qui contribue au phénomène des pluies acides.

Alors, nous, on choisit la meilleure filière de toutes les filières du point de vue combustible thermique en choisissant le gaz naturel. Ça, on le sait déjà et on pense que, oui, on a le temps, puis il faut travailler sur des machines qui vont être les plus efficaces possible. Il y a deux volets qu'il faut travailler: moins de pollution atmosphérique et les machines les plus efficaces possible, parce que, plus elles sont petites, ces turbines-là, moins elles sont efficaces. Alors, il y a encore des problèmes d'efficacité avec les petites turbines.

Avec mon collègue, j'ai visité un fabricant de... Je dois dire qu'il fabrique, lui, les génératrices, et c'est à Londres. Alors, il y a une machine, je pense que c'était 50 kW, ça tourne à 40 000 tours-minute, ça ne fait pas plus de bruit qu'un climatiseur et ça utilise une petite turbine à gaz – celle-là était fabriquée en Hongrie – puis c'est un équipement, ça, qui tient sur la table qu'il y a devant moi, ici. Alors, ça existe déjà, mais il y a encore des problèmes d'efficacité, ce sur quoi ils doivent travailler. Il y a encore des problèmes de coûts, ce sur quoi ils doivent travailler, et, bien entendu, il faut faire en sorte de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Eux voient qu'ils ne sont pas prêts pour le marché, de toute manière – il y aura des essais-pilotes, mais ils ne sont pas prêts pour le marché aujourd'hui – et voient la nécessité aussi de travailler, comme vous le suggérez, sur la réduction des émissions. Dans 10 ans, la situation peut être fort différente. Et ça ne se présente pas de la même manière, de nettoyer l'effluent d'une machine de 250 MW que d'une machine, évidemment, de 15 kW. Il y a une différence considérable au plan de la technologie pour faire l'assainissement de l'air.

J'en parle, puis je suis content qu'on aborde le sujet. On le sait, il semble y avoir des changements climatiques. Celui qui vous parle... Ça a commencé en 1997 avec un verglas dans Lanaudière, ça s'est poursuivi en 1998 de la manière que l'on sait et puis, en 1999, les coups de vent de l'été passé. Puis, en France, quatre fois à l'automne: deux inondations dans le sud-ouest de la France, puis après, bien, les deux coups de vent. Alors, il y a peut-être quelque chose qui se passe là, puis...

M. Brassard: Ajoutons le déluge de 1996 dans ma région.

M. Caillé (André): Le déluge de 1996, en effet. Alors, moi, les spécialistes, vous comprenez que je les talonne. Je leur dis: Bien, est-ce qu'il y a ici ou pas changement climatique? Réponse: On ne peut pas vous confirmer qu'il y a un changement climatique. Alors, je suis un peu comme le boxeur qui trouve qu'on se fait frapper souvent même si on est en train de gagner. Mais enfin, il y en a beaucoup, c'est à peu près évident. Pour moi, en tout cas, il semble se passer quelque chose. Moi, je ne peux pas l'affirmer plus qu'eux puis je ne n'ai pas de données scientifiques plus que les spécialistes pour l'affirmer, mais on s'inquiète. Puis on n'est pas seuls, il y a bien des gens, aux États-Unis et ailleurs, qui s'inquiètent de ces changements-là, comment on va faire... Moi, je pense qu'on va être bien positionnés pour compléter notre développement hydroélectrique.

Incidemment, s'ils n'en parlent pas ailleurs, en Amérique du Nord, c'est qu'ils l'ont déjà fait. Vous savez, aux États-Unis, le potentiel hydroélectrique qui pouvait être développé, il est déjà développé. Alors, c'est déjà fait. Ils ne peuvent pas compter là-dessus, eux, et c'est pour ça que, quand ils parlent de nettoyer l'atmosphère aux États-Unis, ils parlent du gaz naturel comme le sauveur, parce que ça a moins d'émissions que du charbon ou que de l'huile. Je pense qu'ils utilisent plus qu'à 50 % le charbon pour produire l'électricité.

Alors, je pense qu'on ne se trompe pas de filière ici en choisissant comme seconde filière, pour dans 10 ans, le gaz naturel, mais il reste qu'il y a encore des travaux de recherche et de développement à faire avant qu'on puisse parler de production distribuée. Mais là on a un gros avantage, c'est celui de pouvoir sauter par-dessus une technologie sans en payer le coût, parce qu'on pourrait être dans une technologie puis, après, devoir sortir d'une technologie pour entrer dans l'autre. Alors, c'est un gros avantage, ça, pour nous autres de ne pas avoir à payer le coût de l'expérience de la première génération de technologies.

Il y a des chiffres, incidemment, Mme la Présidente, au niveau des émissions atmosphériques, à la page...

M. Brassard: Oui, j'ai vu ça à la page 24, je pense, oui.

M. Caillé (André): ...24 du plan.

M. Brassard: Un beau tableau, intéressant, oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, maintenant, on passerait du côté de l'opposition. J'ai le député de Laurier-Dorion qui m'a demandé la parole.

(11 h 40)

M. Sirros: Ça adonne bien, parce que ce serait un peu sur la même lignée, en quelque sorte, parce que ça rejoint les préoccupations ou les questions que je posais hier par rapport aux nouvelles technologies puis la production distribuée. Il y a quelques années, deux ans, trois ans, Hydro a fait un premier virage stratégique en prenant position dans le gaz. Là on est en train, si je comprends bien, de viser un deuxième virage qui est de voir la venue des nouvelles technologies au niveau de la production distribuée. Plus particulièrement, je parle des piles à combustible, qui me semblent offrir des potentiels très intéressants. On le voit dans d'autres secteurs comme le transport, où effectivement il y a des millions puis des millions de dollars qui sont investis en... plus que dans la recherche, on est maintenant dans l'application de ces technologies au niveau du transport, donc, et ça existe déjà, si ma lecture de la chose est correcte, au niveau de la production électrique, en France en particulier, je pense. Et vous avez raison, je pense, de garder un oeil attentif sur le développement de ces nouvelles technologies.

Ceci étant dit, ça représente évidemment d'énormes opportunités pour la société, pour Hydro-Québec, etc., mais ça représente en même temps, je pense, un énorme risque, par rapport au plan de développement d'Hydro-Québec, à l'heure actuelle aussi. On mise, à l'heure actuelle, beaucoup sur Churchill Falls qui, lui, va coûter d'énormes sous, va être construit dans 10, 15 ans, va être prêt à produire dans 10, 15 ans, qui risque d'être le même temps où on saute par-dessus, comme vous venez très bien de dire, une génération de technologie puis on arrive directement dans la production distribuée. Et là on risque de se retrouver dans une situation où les nouvelles technologies auraient rendu quelque chose comme Churchill Falls – on ne peut pas prévoir, mais c'est possible; on sait comment, de façon fulgurante, ça se développe – auraient pu rendre Churchill Falls désuet, et qu'on se retrouve en quelque sorte, nous aussi, avec notre propre éléphant blanc, un peu comme les États-Unis ont avec les centrales nucléaires, avec des «stranded costs» énormes parce qu'il y a une autre technologie qui nous a dépassés à gauche ou à droite, peu importe. Est-ce que ce ne serait pas plus prudent d'envisager, dans la perspective de remplir la demande énergétique au Québec, de procéder par des étapes plus petites en attendant de voir l'émergence de cette technologie qui s'en vient? Je veux dire, ce n'est pas de la science-fiction maintenant, on est vraiment dans l'appliqué.

Donc, où sont les autres plans, les autres projets qui pourraient nous permettre de remplir nos besoins domestiques de façon plus incrémentale afin de ne pas se retrouver avec le risque d'avoir investi des milliards puis des milliards et se retrouver dans 10, 15 ans avec quelque chose qui est dépassé?


Compétitivité à long terme de l'hydroélectricité

M. Caillé (André): Alors, les experts consultés, pour que ces technologies-là voient le jour ou encore pour qu'elles soient commercialisables, de leur aveu même, c'est justement la période entre 10 et 15 ans. Alors, c'est loin dans le temps avant que ces technologies... Je ne veux pas vous laisser sous l'impression que ça va arriver maintenant, qu'elles pourront être compétitives dans le marché, même par rapport aux autres qui ont des gros projets. Un projet comme Churchill Falls par rapport à ça, c'est un projet extraordinaire. La production distribuée, en termes de coûts, en termes d'environnement, ne remplacera jamais les projets hydroélectriques. Je vous assure que, ça, on est absolument convaincus de cela, premièrement, parce que ce n'est pas là maintenant. Deuxièmement, ça va prendre du temps avant que ça arrive, et ça n'arrivera jamais aux coûts de Churchill Falls, ça. Il faut oublier ça, c'est impossible. Ça va être plus cher, ça, c'est sûr.

M. Sirros: Jamais, M. Caillé, c'est un gros mot, et le problème, c'est que ni vous ni moi, on sera ici dans 15 ans pour en débattre. En tout cas, moi, je ne serai pas ici dans 15 ans pour vous questionner, si jamais vous êtes toujours là dans 15 ans, mais, «jamais», c'est un gros mot. Je me rappelle d'autres personnes qui ont dit que jamais ça arriverait, par exemple, qu'on se retrouve aujourd'hui là où on est, au niveau de la façon de changer radicalement le fonctionnement économique des business, en quelque sorte, et pourtant ça se fait. Il y a juste cinq, six ans, on parlait de l'Internet comme quelque chose qui était complètement pour des flyés puis des farfelus. Et, quand on parle de 10, 15 ans pour l'application de ces technologies, on ne parle pas de 10, 15 ans pour l'application de ces technologies au niveau de la production électrique, on parle de la mise en vigueur de ces technologies pour le transport.

Et déjà il y a des autobus qui fonctionnent avec des piles à combustible – vous êtes sans doute au courant – et la technologie de production électrique par ces piles-là est plus facile que la miniaturisation au niveau des véhicules, et pourtant on dit que, dans 10, 15 ans, c'est fort probable que les véhicules marcheront en grande partie comme ça. Alors, qu'est-ce qui vous fait être si certain que Churchill Falls, on peut y aller? Et pourquoi avez-vous écarté la possibilité de garder dans vos tiroirs, en cas de besoin de production supplémentaire énergétique, d'autres projets? Et où sont-ils, ces autres projets, s'ils existent, qui pourraient nous permettre de marcher avec des pas un peu plus petits que Churchill Falls?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, les gens dans cette technologie, c'est des entreprises dans la haute technologie. Enfin, elles se définissent ainsi. Ce qu'elles tentent de faire, et ce dont elles parlent pour dans 10 à 15 ans, c'est de rejoindre le coût de la grande production thermique d'aujourd'hui. Quand je leur dis: Nous, on était à 0,03 $, ils disent: Oublions ça. C'est les spécialistes du domaine, ceux qui investissent là-dedans. Rejoindre le coût de l'électricité produite au Québec à 0,03 $ par kilowattheure, ils ne sont pas là. Ils ne seront pas là non plus plus tard. Enfin, c'est eux qui le disent.

M. Sirros: Je veux vous interrompre, si vous permettez, parce que vous parlez toujours du coût de production à 0,03 $, mais la différence, c'est qu'il faut que vous ajoutiez aussi le transport, parce qu'il s'agit d'une électricité qu'il faut que ça soit transporté, tandis que l'autre, elle est déjà transportée sur place. Donc, les comparaisons, il faut les faire correctement.

M. Caillé (André): Oui, d'accord, mais...

M. Sirros: Une deuxième petite chose. Au niveau des prévisions, on est en train de revoir des prévisions où... Vous nous avez donné des prévisions, il y a deux ans, qui nous plaçaient à une demande x qu'on vient de baisser de deux ans. Alors, si on prévoit, d'ici 15 ans, ce qui peut arriver... Tout ce que je vous demande, c'est: Est-ce que ça ne serait prudent de nous dire aussi que peut-être on devrait pendant un certain temps procéder avec des pas plus petits et plus modestes au niveau de l'accroissement pour voir effectivement comment ça évolue de l'autre côté?

M. Caillé (André): Oui. Et la précision que je veux faire ici, c'est que ces technologies-là, de l'aveu des gens, incluant le fait qu'ils sont dans le marché et que, dans notre cas, il faut ajouter transport et distribution, toutes choses prises en considération, ce n'est pas pensable qu'elles rejoignent le prix de l'hydroélectricité au Québec. Mon collègue va vous donner plus de détails là-dessus, ce n'est pas pensable, ça n'arrivera pas. Nous avons la meilleure technologie, d'un point de vue économique – là je parle de développement hydroélectrique – et du point de vue environnemental. Ça, on est confortable par rapport à ça.

Par ailleurs, notre potentiel, hélas, il va finir par être tout aménagé, parce que le potentiel, bien, c'est limité. Alors, on doit aujourd'hui se préparer pour l'avenir. Quel sera le deuxième meilleur choix? On pense que peut-être le deuxième meilleur choix, ce sera ceci, surtout que ça nous donnerait l'avantage de sauter par-dessus la génération des grandes turbines à gaz. Pour ce qui est de la compétitivité, maintenant et pour plus tard, de l'hydroélectricité, je vais demander à mon collègue, ici, d'ajouter des précisions.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Merci, Mme la Présidente. C'est justement dans ce contexte-là qu'on a procédé depuis trois ans à un certain réalignement dans la façon dont on envisage le parachèvement. On a une obligation, avec l'ouverture des marchés, de faire preuve aujourd'hui d'une prudence et d'une rigueur dans le choix des projets qui vont faire l'objet d'une initiative de développement. Et, dans ce sens-là, il y a des projets qui ne pourraient plus faire l'objet d'un développement aujourd'hui, si on envisage des projets qui ont été développés dans un contexte où l'économique était significativement plus élevé et des projets également qui ont été développés dans un contexte où on reportait aux prochaines générations le coût comptable de ces projets-là.

Et c'est dans ce contexte-là qu'on a changé deux choses. On a changé essentiellement, dans la façon dont on analyse les projets qui entrent dans le portefeuille de parachèvement, deux choses. D'abord, la méthode d'amortissement. Quand on étudie un projet, qu'on fait un pro forma sur un projet, on parle d'amortissement linéaire. Fini le temps où on faisait de l'amortissement croissant et où on reportait aux prochaines générations le coût comptable des projets en escomptant le fait que les prix de l'énergie seraient croissants. Et là je rejoins votre propos, cette pratique-là faisait porter aux prochaines générations le risque d'une discontinuité quant aux technologies. Ça, c'est fini, on ne fait plus ça.

(11 h 50)

Deuxième chose que l'on fait, l'idée... Et j'ai eu l'occasion d'en parler avec des collègues ailleurs dans l'industrie, ce que l'on veut, nous autres, c'est être capables de battre haut la main la technologie qui est aujourd'hui et la technologie qu'on peut anticiper sur un cycle de 15 ans. Et c'est dans ce contexte-là que tous nos projets sont analysés, avec des pro forma où la dette est éteinte dans 30 ans. Et, dans 30 ans, on va avoir, avec l'hydroélectrique, pour encore des décennies et des décennies des projets pour lesquels la dette aura été amenée à zéro et on va pouvoir voir venir n'importe quelle technologie. C'est dans ce contexte-là qu'on envisage le parachèvement. C'est uniquement dans ce contexte-là.

M. Sirros: Mais là vous parlez de l'amortissement dans 30 ans des projets, à partir du moment de leur construction?

M. Vandal (Thierry): Voilà.

M. Sirros: Donc, si on se met dans le contexte de Churchill Falls, là vous mettez une échéance de 45 ans...

M. Vandal (Thierry): Churchill Falls...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Sirros: ...tandis que ce qui existe... Ce que je veux comprendre, moi... Parce que Churchill Falls, la façon de procéder est exactement ce qu'on faisait dans le temps aussi, depuis longtemps, c'est-à-dire qu'on planifiait un gros projet. Dans le temps, il y avait des contrats fermes qui nous permettaient de le devancer parce qu'on savait que ça donnerait des surplus. Pendant ce temps-là, on vendait ces surplus-là à contrat ferme. Quand ces contrats se terminaient, on avait besoin de l'électricité domestique. Actuellement, il n'y a pas de contrats fermes, mais on va avoir toujours des surplus énormes créés par la construction de Churchill Falls par rapport à nos besoins domestiques, avec l'espoir qu'on va pouvoir les écouler sur les marchés, et ça, ça va arriver en production en même temps qu'il y a d'autres énergies qui vont être à la source. Donc, le 0,03 $ ne tient plus, parce qu'il va falloir que vous commenciez à ajouter, sur le 0,03 $, le coût de le rendre à New York ou ailleurs pour compétitionner avec les nouvelles technologies.

Et vous ne me ferez pas croire qu'on peut déjà dire que c'est impossible, dans 15 ans, que ces nouvelles technologies viennent rattraper le 0,045 $, 0,05 $ que sera le coût pour le rendre à New York, parce qu'on voit les coûts baisser dans tous les domaines, au niveau de l'émergence des nouvelles technologies puis...

M. Vandal (Thierry): Ce que je me permettrais...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): ...de dire, c'est qu'il est plus prudent d'envisager un projet comme Churchill, avec de la dette éteinte sur 30 ans et un amortissement, donc, de dette sur 30 ans et un amortissement linéaire, que d'envisager un projet, par exemple, comme le dernier projet qui est en construction en ce moment, le projet SM 3, dont les coûts sont plus élevés, et on est, là, engagés sur un amortissement croissant.

Et l'autre élément, si vous me permettez, qu'il faut vraiment... Il y a un mythe autour de l'idée que la production qui est loin des zones de charge fait face à un défi qui est le défi du transport d'électricité. La seule distinction ici, c'est qu'on bénéficie – et c'est un grand avantage – d'une technologie, l'hydroélectricité, qui par définition fait appel à des territoires qui sont situés loin des zones de charge. L'économique à l'endroit de production est très avantageux. Le transport, après ça, doit être payé. Les autres technologies sont obligées de transporter leurs matières premières. Nous, on n'a pas à transporter notre matière première, il y a quelqu'un en haut qui s'en charge. Les autres technologies, que ce soient les centrales thermiques, les centrales de charbon, les centrales au mazout et, tantôt, les centrales distribuées, doivent transporter leurs matières premières, et, dans ce sens-là, il y a un équilibre qui est un équilibre tout à fait durable, qui peut être maintenu sur le volet de la composante transport. Donc, il n'y a pas de perspective de problématique à long terme.

M. Sirros: C'est intéressant, cette discussion, parce que...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: ... – s'il reste du temps – les autres filières, si vous voulez... le réseau gazier est déjà amorti pour plusieurs... ou il le sera dans 10 ans, 15 ans. Donc, ils seront aussi dans la même situation, ils n'auront pas à payer pour le... C'est-à-dire que ça va être la même chose. Mais là n'est pas... Ma vraie question, c'est: Il y a deux ans, vous nous aviez parlé de toutes sortes de projets de dérivation de rivières, qui donnaient 50 MW, 100 MW, 150 MW, etc., où sont-ils maintenant? Où sont-ils? Là, vous nous parlez seulement de Churchill Falls.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal...

M. Sirros: Et c'est là où je veux comprendre pourquoi on a abandonné cette façon d'envisager comme potentielle source de nouvelles énergies, en plus petit...

M. Vandal (Thierry): Mme la Présidente, je voudrais rassurer la commission, à ce sujet-là, il n'y a rien d'abandonné. Il y a des projets qui sont des projets qui ont fait l'objet de démarches significatives au cours des dernières années, et, dans le cadre de ces démarches-là, on peut en parler d'une façon un peu plus directe que par le passé. Le projet Churchill fait l'objet de démarches importantes. Hier encore, je peux vous dire, il y avait des contacts qui se faisaient avec... et on souhaite que ça se fasse avec tous les partenaires qui peuvent être impliqués dans ce développement-là. Le projet Churchill est donc un projet qui est placé dans notre portefeuille de parachèvement d'une façon évidente. De la même manière, il y a deux ans, à cette commission, et après en avoir parlé avec les partenaires éventuels de la communauté crie, on avait évoqué ici l'existence potentielle du projet Eastmain-Rupert, et c'est un projet qui continue de faire partie de nos carnets.

Il y a plusieurs autres projets pour lesquels on fait du travail. On fait du travail à l'interne, on établit des contacts avec des partenaires du milieu, mais je vous dis une chose, c'est que, avant d'en parler d'une façon... et de les mettre de l'avant, on va vouloir s'assurer de confirmer leur économique, dans un contexte qui est un contexte d'aujourd'hui et de demain, et de faire en sorte que les partenaires, les gens qui sont les plus directement touchés par ces projets-là, soient également bien sensibilisés, bien informés et prêts à s'avancer dans le contexte que je décrivais plus tôt cette semaine, un contexte où on a un périmètre d'intérêts qui coïncident. Mais il n'y a rien d'abandonné.

M. Sirros: Juste une dernière petite question en ce qui me concerne, peut-être pour changer un peu le...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. le député de Laurier-Dorion. Il reste à peu près cinq minutes à ce bloc-ci.


Participation à la recherche sur la pile à combustible

M. Sirros: Cinq minutes. Alors, juste pour changer un peu le créneau, je ne sais pas si je l'ai vu dans le plan stratégique, mais pourriez-vous faire état un peu du niveau de présence et de participation d'Hydro-Québec dans des entreprises qui sont dans le domaine de la recherche ou de la production des piles à combustible? Je sais que CapiTech est impliquée avec H Power, ou quelque chose comme ça, là. Où sommes-nous et quel est le niveau d'implication?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, on va donner la...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Sirros: Et je sais que mon collègue, ici, a une question aussi. Alors, si vous pouvez garder les réponses courtes, ça serait apprécié.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, je comprends qu'il y a deux...

M. Caillé (André): Mon collègue connaît la réponse... M. Filion va vous répondre.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente, je peux répondre parce que je suis, pour un certain temps encore, président du conseil d'administration d'Hydro-Québec CapiTech.

Effectivement, Hydro-Québec CapiTech a pris il y a quelques mois une participation dans H Power, qui est l'une des entreprises américaines impliquées dans les piles à combustible. Pour vous donner quelques références, si on compare à ce qui se fait dans le continent nord-américain, il y a Ballard Systems, en Colombie-Britannique, et Plug Power, qui est une autre entreprise américaine, qui produisent des piles à combustible. Vous aviez raison de le dire, M. le député, qu'il y en a qui existent, qu'il y en a qui sont en fonction, mais il y a les coûts très élevés qui représentent encore des défis technologiques importants.

Alors, la raison pour laquelle HQ CapiTech a pris une participation, c'est parce que, effectivement, H Power s'oriente maintenant vers le développement de piles à combustible pour de la production distribuée, et nous voulons donc suivre l'évolution de cette technologie. Et il y aura d'ailleurs un centre d'études qui sera au Québec, à ville Saint-Laurent, pour poursuivre le développement de cette technologie-là, en partenariat avec H Power.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Pour compléter, Mme la Présidente. Quand on compare deux filières, je ne l'ai pas dit au tout début, les gens qui ont des prototypes, ils partent pour réduire leur coût de 0,10 $US par kilowattheure, premièrement. Je parle des turbines à gaz. Deuxièmement, il y a une variable qu'eux autres ne connaissent pas – puis, dans l'hydroélectricité, on a l'avantage de les connaître toutes, parce que c'est du financier – c'est le coût du combustible. Le coût du combustible, bien là ça va être un prix qui va être dans le marché et ça représente une part importante du prix final, du prix de l'électricité produite. Alors, ça, ils ne le savent pas. Nous, on a l'avantage de le connaître. Comme mon collègue le disait, on fait de l'amortissement linéaire ici maintenant. On n'envoie rien aux générations futures. Alors, c'est sur 30 ans, puis on... Le parachèvement hydroélectrique au Québec, ça va faire la même chose que ça a fait, puis nos descendants connaîtront la même histoire que la nôtre, à savoir qu'on ne trouvera pas ça cher, ce qui est produit à Beauharnois. Ce n'est vraiment pas cher.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de LaFontaine. Il reste très peu de temps, mais c'est vrai qu'il en reste un petit peu dans l'ensemble de l'enveloppe. Alors, rapidement.

M. Gobé: Oui. Merci, Mme la Présidente. J'avais une question à poser à M. Vandal, mais je pense qu'il s'est rassis. Peut-être, s'il veut revenir en avant...

(12 heures)

M. Caillé (André): Il peut revenir.


Recherche sur les conducteurs

M. Gobé: C'est parce qu'on a beaucoup parlé d'une nouvelle technologie pour produire de l'électricité qui serait peut-être moins chère et peut-être nécessitant moins de transport, en tout cas sur des distances beaucoup moins longues. Par ailleurs, on sait aussi que le transport de l'électricité sur les longues distances crée une perte d'énergie entre le point de départ et le point d'arrivée. Est-ce qu'Hydro-Québec, actuellement, seule ou en partenariat avec des entreprises, fait de la recherche sur les nouveaux conducteurs? Et est-ce que l'on peut penser que dans 10, 15 ans une nouvelle technologie, une nouvelle génération de conducteurs pourrait faire en sorte de réduire les pertes d'énergie qui sont occasionnées par ces grandes distances de 2 000 km, 3 000 km de transport, et qu'à ce moment-là on se retrouverait avec des économies d'échelle importantes ou une énergie supplémentaire qu'aujourd'hui on ne peut pas prévoir?

M. Caillé (André): Le premier élément de réponse, d'abord, Mme la Présidente, avec votre permission, de mon collègue ici, à mon extrême gauche, puis une autre partie par le directeur général adjoint.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Vandal, assez rapidement, si possible.

M. Vandal (Thierry): Oui, très rapidement. Merci, Mme la Présidente. Juste clarifier également, parce je pense qu'il faut vraiment jeter la lumière là-dessus. Les technologies qui produisent de façon décentralisée, les technologies qui produisent plus près des zones de charge, comme les technologies thermiques, typiquement thermiques, sont des technologies qui effectivement font face à moins de transport du produit fini mais qui font face à énormément de transport de la matière première, pour laquelle il y a également des pertes. Le gaz naturel qui est utilisé en Nouvelle-Angleterre, il vient de très, très loin. Alors, dans ce sens-là, il faut faire attention de bien comparer les éléments sur le cycle complet de production, et transport du produit fini doit être comparé à transport de matière première pour les deux structures.

Ceci étant, sur les gains technologiques...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente, je dois d'abord dire que les pertes sont un élément très important, au niveau du transport. Ça représente un volume d'énergie assez important qu'on leste sur nos lignes, finalement, par dégagement de chaleur lors du transport. Hydro-Québec s'y intéresse depuis longtemps. Nous avons réalisé plusieurs projets pour réduire les pertes.

Plus particulièrement par rapport à votre question sur les conducteurs, il y a aussi de la recherche et développement qui s'est faite pour développer des conducteurs plus compacts qui pourraient effectivement, s'ils étaient dimensionnés de façon appropriée, réduire les pertes, mais qui pourraient avoir une autre application fort intéressante pour nous dans le futur, c'est qu'on pourrait augmenter la capacité de transport des lignes existantes en remplaçant les conducteurs actuels par des conducteurs plus performants, des conducteurs compacts. Donc, on s'intéresse bien sûr à cette technologie.

M. Gobé: Est-ce que vous pourriez peut-être rapidement nous dire à quel stade de recherche...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Là, M. le député de LaFontaine...

M. Gobé: ...vous êtes rendu? Est-ce que, dans un avenir prévisible ou quantifiable, en tout cas, dans le temps, on peut penser voir arriver ces nouveaux conducteurs que vous développez? Puis nous dire si vous le faites en partenariat avec une entreprise privée canadienne, québécoise, internationale.

M. Filion (Yves): Oui. Je dois vous admettre qu'on suit l'évolution technologique qui se fait. Les grands fabricants de câbles à l'échelle mondiale s'intéressent à cette technologie, donc des grandes compagnies telles qu'Alcatel, Pirelli et d'autres. Je ne veux pas en oublier, mais il y en a d'autres bien sûr qui s'intéressent à cette technologie.

On pense qu'il pourrait y avoir quand même des avances ou des avenues technologiques importantes déjà au cours des prochaines années. Quand on aura à se positionner sur l'augmentation de la capacité de notre réseau, nous allons envisager ces possibilités. Déjà, au cours des prochaines années, je pense que c'est quelque chose de réaliste, certainement d'ici 2010.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, pour le bénéfice des parlementaires, pour ce qui nous reste de temps d'ici la fin de la commission, j'ai 16 minutes pour le groupe du gouvernement et 11 minutes pour le groupe de l'opposition. C'est le temps qui reste. Alors, M. le ministre.

M. Brassard: Mme la Présidente, on a beaucoup parlé du virage gazier d'Hydro-Québec. Je ne savais pas qu'en parlant du virage gazier on allait aussi être en mesure de prendre acte du virage du Parti libéral en matière d'énergie. Les propos du député de Laurier-Dorion sont fort intéressants à cet égard. Le Parti libéral a toujours été associé aux grands projets, aux mégaprojets hydroélectriques. Les gouvernements libéraux, que ce soit celui de M. Lesage ou de M. Bourassa, ont été à l'origine des grands projets hydroélectriques. Je constate un refroidissement considérable de la part du Parti libéral à l'égard des grands projets hydroélectriques. C'est deux virages. Je pensais qu'on avait juste le virage gazier en face de nous; on a maintenant un virage du Parti libéral en matière d'énergie, ou, au moins, c'est l'opinion unique...

M. Sirros: ...

M. Brassard: ...c'est juste l'opinion du député de Laurier-Dorion. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous aurez le temps à votre période.

M. Sirros: ...peut pas s'empêcher, en tout cas, d'interpréter à sa façon...

M. Brassard: Ah bon!

M. Sirros: ...les propos sans donner l'occasion...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Sirros: ...de donner la vraie interprétation.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je pense que...

M. Sirros: Je ferais remarquer que tous les projets qui ont été construits ont été construits sans aucune possibilité d'éléphant blanc à la fin.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Bon! M. le député de Laurier-Dorion...

M. Brassard: Ah oui! Très bien.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre...

M. Sirros: Et, dans ce sens-là, on est toujours pour ça.

M. Brassard: Oui, bien, c'est ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Je pense qu'il reste très peu de temps. Alors, ce serait peut-être intéressant qu'on poursuive.

M. Brassard: Le Complexe La Grande n'est pas un éléphant blanc, Manic non plus. Bon. Alors, je ne vois pas pourquoi Churchill serait un éléphant blanc. Ceci étant dit...

M. Sirros: ...expliquer ça, M. le ministre.

M. Brassard: Non, non, non.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): À l'ordre!


Activités internationales

M. Brassard: Non, non. On prend acte du virage. Si ce n'est pas du Parti libéral, c'est à tout le moins du député de Laurier-Dorion.

Je voudrais quand même aborder la dernière orientation, consacrer au moins quelques minutes à l'orientation 7, concernant le développement à l'international. Je voudrais d'abord, dans un premier temps, que vous nous expliquiez avec le plus de précisions possible la restructuration des activités d'Hydro-Québec sur la scène internationale, à partir d'Hydro-Québec International. Pourquoi, quelles sont les motivations qui justifient ces changements, d'une part? Et, d'autre part, évidemment, la question qu'on se pose toujours... Vous indiquez, par exemple, dans votre plan stratégique, que Hydro-Québec a investi jusqu'à maintenant 279 000 000 $, tout près de 300 000 000 $, dans l'avoir propre de projets à l'international au cours des dernières années. Je pense que les Québécois sont sûrement intéressés de savoir si c'est rentable, ces investissements à l'étranger, de la même façon qu'il est important de savoir si les investissements sur le marché nord-américain, c'est rentable. On en a discuté tout à l'heure, mais c'est aussi important de savoir si, à l'international, ces investissements-là sont rentables.

D'abord, donc c'est quoi, les changements? Puis pourquoi les changements? Puis, jusqu'à maintenant, les investissements qui ont été faits à l'international, est-ce que ça s'est révélé, dans l'ensemble, rentable et bénéfique, au fond, pour les Québécois? Et est-ce que, sur ce plan-là aussi, vous avez révisé vos objectifs en termes de taux de rendement, par exemple, des projets à venir?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. Premièrement, au niveau du changement organisationnel, ce qu'on a constaté après une douzaine, une quinzaine de mois d'opération à l'intérieur de HQI, depuis qu'on leur avait donné la mission non seulement de fournir de l'expertise technique au niveau des marchés internationaux, on leur avait donné, dis-je, en plus, la responsabilité d'investir, de devenir des investisseurs au niveau international, on a constaté que ça nous était très difficile de constituer, dans chacun des domaines, des équipes expertes comme on le souhaitait. Je m'explique.

À partir du moment où HQI opère séparément de HQ puis de chacune des unités d'affaires de HQ, il fallait avoir des équipes compétentes chez HQI tout autant que chez Hydro-Québec elle-même. Par exemple, en production, il fallait avoir des gens chez HQI avec des compétences comme chez HQ. On a pensé, au tout début, enfin il y a 15 mois, donc, ou il y a deux ans, que c'était possible de faire ça puis d'établir une collaboration. J'ai constaté que, beaucoup plus simple... Faisons beaucoup plus simple. Constituons dans chacun de nos métiers de base, production, transport, distribution, une seule équipe, puis, comme ça, une équipe encore plus compétente, puis une seule équipe.

Alors, que les projets soient au Québec, que les projets soient ailleurs en Amérique du Nord ou qu'ils soient carrément sur d'autres continents, à l'international, on a des équipes, et c'est toujours les mêmes équipes qui apportent... Je trouve ça très important, toujours d'apporter toute l'expertise et toutes les connaissances attendues de la part de nos partenaires. Hydro-Québec, ça a une très grande réputation – très honnêtement, je vous le dis en toute humilité, là – au niveau international, surtout à cause de la compétence puis de l'expertise de nos employés. Alors, il faut s'assurer qu'à chaque fois tout soit là. Alors, c'est plus simple et c'est surtout moins cher, ça prend moins de moyens de constituer une seule équipe, que les travaux se fassent ici ou qu'ils se fassent ailleurs. Première raison. Voilà pourquoi on a changé le rôle de HQI.

(12 h 10)

Par ailleurs, en même temps, HQI avait un avantage à la structure initiale. C'est que ça évitait les dédoublements au niveau du démarchage des projets. Et c'est pour ça qu'on a conservé la structure HQI. Il y a encore une dizaine de personnes qui travaillent chez HQI, mais leur rôle et leur mandat ont été bien définis, et on a bien précisé qu'il s'agissait pour eux de faire le démarchage pour l'ensemble des unités d'affaires. Ce qu'on ne veut pas qu'il se produise, c'est que ce qu'on a économisé d'un côté, on le redépense de l'autre. Alors, c'est pour ça que HQI conserve cette responsabilité de faire le démarchage.

Également, au plan structure financière, HQI va être le véhicule corporatif pour faire les investissements, pour mettre ces investissements à distance du véhicule principal qui est HQ elle-même. Alors, voilà pour ce qui est des changements de structure. Ça s'est bien opéré. On a fait ça d'une façon, je pense, harmonieuse, de sorte que l'on a maintenant, en production, en transport, en distribution et également en construction, des équipes, et une seule équipe dans chaque cas, qui sont capables de faire les projets autant ici qu'ailleurs. Ça nous donne plus de confort, et là on y met vraiment toute la compétence qui est requise. On ne décevra pas les gens dans les pays où on sera actif et on n'a pas à s'inquiéter de ne pas avoir mis nos meilleures ressources en jeu. Alors, voilà pour ce qui est des changements.

Vous posez la question sur les objectifs. Les objectifs, ils demeurent inchangés. Ça n'a rien changé, ce changement d'organisation, aux objectifs de l'entreprise. Et, encore là, c'est un peu comme on en parlait tantôt au niveau des activités du secteur gazier, on souhaite surtout se préparer. Il y a beaucoup à faire ici, là, au Québec, en Amérique du Nord – je parle des provinces voisines, je parle du projet au Labrador – pour faire le parachèvement du développement hydroélectrique. On a plusieurs partenaires, nous, au niveau du génie-conseil, au niveau de la fabrication d'équipements, présents ici, au Québec, qui créent de l'emploi au Québec et qui travaillent en travaillant pour nous, finalement, en travaillant en commandes pour nous.

Quand le parachèvement aura été complété, qu'est-ce qui va arriver si on n'a prévu rien d'autre en termes de continuité d'activités de développement? On pourrait mettre à risque l'emploi de ces gens-là dans les usines au niveau de la fabrication, encore une fois, de turbines ou de tout autre équipement qui sert dans le domaine de l'électricité. Alors, on s'est dit: Plutôt que d'être obligé d'agir en catastrophe, rapidement, dans 10 ans, quand le parachèvement aura été complété, agissons maintenant, progressivement. Établissons-nous des têtes de pont dans différentes parties du globe, dans les différents marchés qu'on considère prometteurs pour l'avenir, de sorte que l'on pourra, avec des investissements qui demeurent modestes à l'échelle internationale, développer connaissances et expertise à faire des affaires en tant qu'investisseur à l'étranger. Et, dans 10 ans, ce sera en continuité qu'on pourra continuer à travailler avec les partenaires québécois d'aujourd'hui, les fabricants, les ingénieurs-conseils, les fournisseurs de services, au niveau international.

Il y a deux choses sur lesquelles j'ai insisté plus qu'il y a 24 mois encore, c'est la rentabilité. On veut un rendement moyen, dans ces activités, de 15 %. Ça veut dire que, dans des cas, on va viser 20 % de rendement, parce que ce n'est pas à tous les coups qu'on atteint le rendement visé, mais on veut finir avec un rendement, compte tenu des risques pris, de l'ordre de grandeur de 15 %.

On veut aussi – ça, c'est un autre changement important – optimiser les retombées économiques ici, au Québec. HQI, comme elle fonctionnait, évidemment, il s'établissait des partenariats avec des entreprises qui faisaient le démarchage – ça n'aura pas changé – puis s'établissaient des partenariats avec des entreprises au niveau international et national, c'est-à-dire à l'étranger, dans les pays où on voulait être actif. Ce n'est qu'en deuxième lieu qu'on établissait des partenariats avec les entreprises québécoises. Ça, il y avait risque, ici, de faire moins que le maximum de retombées économiques québécoises.

Alors, avec les collègues de l'industrie à travers l'Association, on s'est entendu qu'à partir de maintenant chacune des unités d'affaires... Nous sommes déjà très étroitement en relation avec tous ces gens-là. Cette relation existe déjà, pour des raisons qui sont propres à nous, au développement du potentiel hydroélectrique. Alors, le partenariat avec l'ingénieur-conseil, avec l'équipementier, il aura été fait ici avant. HQI fait son démarchage, il n'y a rien de changé. On confie les projets à l'unité d'affaires correspondante, qu'il s'agisse de production, de transport ou de distribution. Le partenariat est établi ici avec l'équipementier et avec l'ingénieur-conseil. Après, on fait une offre, avec d'autres partenaires si on a besoin d'autres partenaires, au niveau international.

Voilà les changements. Mais, en termes de budget d'immobilisation, Mme la Présidente, on a les mêmes chiffres ici que dans le dernier plan, c'est-à-dire de l'ordre de 170 000 000 $ par année.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Caillé. Il reste quatre minutes à votre formation politique. Alors, M. le député de Gaspé, rapidement.


Intégration des fournisseurs québécois au démarchage international

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, vous parlez des partenariats d'affaires avec les entreprises dans le génie-conseil. Mais les entreprises de fabrication québécoises, comment sont-elles associées à ce développement international, à ces opportunités d'affaires? Parce qu'on parle plutôt de stratégie pour aller chercher les contrats, ensuite de ça, concevoir les projets. Maintenant, est-ce que les fabricants québécois peuvent bénéficier de cette stratégie? Et comment vous les intégrez?

M. Caillé (André): Alors, on a convenu...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, excusez-moi, Mme la Présidente. On a convenu de la démarche suivante. Je vais parler avec un exemple. Supposons que HQI ait fait un démarchage, ait identifié un projet de production aux Indes. Alors, il faut des turbines, il faut de l'ingénierie, il faut toutes sortes de choses pour arriver à produire, à développer ce projet. Ce que nous allons faire... Et, des fois, ça a pu nous être suggéré, ce projet, aussi ça a pu être suggéré à HQI par l'équipementier ou par l'ingénieur-conseil. Des fois, c'est l'un, des fois, c'est l'autre. Supposons que, dans ce cas-ci, ça ait été par un équipementier. Alors, ensemble, avec l'équipementier, on va choisir un ingénieur-conseil québécois avec qui on va travailler là-dessus, comme si on travaillait à la Baie-James, ou sur la Côte-Nord, ou n'importe où ailleurs. Il n'y a pas de différence, c'est le même modèle qui s'applique, le même modèle de développement.

C'est après que ça commence à être différent. Là, on va se dire ensemble: Voici le projet qu'on veut faire. Toi, équipementier, on va discuter un peu de tes coûts, n'est-ce pas, et ça nous prend des coûts, ici, là, pour les turbines qui vont être compétitifs au niveau international. L'ingénieur-conseil va travailler avec nous à faire cette discussion-là. On va se monter un projet. En général, des projets à l'international – ça dépend de leur taille, bien sûr – ça prend toujours un partenaire national. On ne peut pas aller dans un autre pays seulement avec des partenaires qui sont tous étrangers à ce pays, on se prend toujours un partenaire national. Des fois, ça prend un partenaire international; des fois, ça n'en prend pas. Supposons que, dans ce cas-ci, ça n'en prend pas.

C'est avec ce partenaire national et des alliés québécois, des partenaires québécois déjà choisis, qu'on va décider de faire une offre. Nous allons gagner ensemble ou nous allons perdre ensemble, parce que, en général, il y a de la compétition, évidemment. Alors, gagner ou perdre ensemble. Si on gagne, on sait d'où viendra l'équipement, parce que l'équipementier a participé à ça, lui, parce qu'il avait pensé avoir l'opportunité, puis à juste titre, de contribuer de sa production en termes d'équipement. Et l'ingénieur-conseil, la même chose. S'il a participé dans le groupe, c'est parce qu'il pense qu'il va y avoir des besoins en termes de services d'ingénierie. Mais ce sera automatique après, les retombées, parce qu'on l'a établi au point de départ. On gagne ou on perd ensemble. Quand on perdra, puis ça va nous arriver, on ira s'essayer ailleurs; puis, quand on gagnera, bon, on sera tous contents. Mais tout aura été établi d'abord, ce qui n'est pas possible quand l'association se fait avec un partenaire international dans un premier temps.

Imaginez le même projet, puis on s'est entendu avec le partenaire international. Il y en avait un, partenaire international, puis on s'est entendu avec lui dans un premier temps. Quand il nous entend dire que, nous, on veut nécessairement avoir un ingénieur-conseil québécois puis un équipementier québécois, la question qu'il se pose, c'est: Combien ça va me coûter de plus cher, moi? On peut le reconnaître, il n'y a pas de gêne à cela, là, c'est explicable que quelqu'un, un étranger ne veuille pas contribuer aux retombées économiques québécoises. Pour éviter tout ça, et je termine là-dessus, on fait les partenariats ici, au Québec, avant de débuter. Je m'excuse d'avoir été long, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Caillé. Alors, Mme la députée de Bonaventure.


Activités internationales (suite)

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, toujours au niveau d'Hydro-Québec International. M. Caillé, compte tenu du potentiel de croissance que représente le marché de l'électricité sur le plan mondial, c'est surprenant qu'Hydro-Québec ait décidé de démanteler Hydro-Québec International. C'est surprenant. Je dois vous dire qu'on se pose beaucoup de questions sur les motifs qui ont conduit Hydro-Québec...

Vous nous avez donné quelques explications tout à l'heure, mais je reviendrais peut-être à l'analyse du plan qui a été fait par les parlementaires en 1998. Il y a un addenda, en fait, qui a été apporté au plan, la note 11, pour être plus précise, qui précisait, je vais citer, que «les investissements réalisés par Hydro-Québec International feront l'objet d'un suivi rigoureux permettant une reddition distincte des comptes».

(12 h 20)

Alors, aujourd'hui, deux ans après cet engagement, il serait intéressant que vous puissiez effectivement déposer aux membres de la commission cette reddition des comptes et qu'on puisse avoir une idée très précise des activités d'Hydro-Québec International. Quels ont été les résultats de ces activités?

Autre élément aussi qui, à mon sens, présente une difficulté: compte tenu qu'Hydro-Québec International maintenant sera fondue dans les activités d'Hydro-Québec, je me demande comment on va faire pour déterminer les coûts des activités à l'international, également comment on va faire pour évaluer la rentabilité des projets à l'international. Et ça pose un problème de fluidité de l'information, également d'imputabilité d'Hydro-Québec à l'endroit des activités à l'international.

Comme parlementaires, je dois vous dire qu'on déplore cette situation-là. Parce qu'on déplore déjà que, dans le plan stratégique, ce soit très difficile d'analyser les informations qui y sont contenues, alors je pense que, dans le contexte, on va avoir encore plus de difficultés à mesurer les résultats d'efficacité d'Hydro-Québec à l'international.

Est-ce que vous pouvez vous engager aujourd'hui à nous déposer, justement suite à l'engagement de 1998, d'après l'analyse du plan, une reddition de comptes carrément sur les activités de HQI?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente, il y aura – et effectivement ça a été demandé, je pense bien, lors de notre dernière présence devant cette commission – un rapport avec des résultats vérifiés par des experts comptables, des résultats vérifiés sur les activités internationales. Elles vont continuer à être réalisées... Toutes les filiales vont toujours être sous le chapeau corporatif de HQI.

Pour ce qui est des difficultés de facturer le temps des gens, par exemple – il n'y a pas juste le temps, mais enfin, prenons cet élément de dépense là comme un exemple – on a un système à l'intérieur d'Hydro-Québec déjà qui permet, pour chaque projet, on a ça en construction, on a ça en production, en transport, distribution, que ces projets-là soient au Québec ou ailleurs... Parce qu'il faut mesurer aussi la rentabilité des projets. Ça, c'est un par un. Qu'ils soient au Québec ou qu'ils soient ailleurs, il faut que ça soit bien comptabilisé. On ne comptabilisera pas juste dans un seul registre toutes les dépenses pour Churchill, pour Eastmain puis pour d'autres choses. On fait tout ça bien, bien, bien séparé. On va faire la même chose, naturellement, qu'on fait déjà pour HQI. Puis on va vous produire – c'est maintenu, ça, là, on a compris votre demande – des états vérifiés pour HQI.

Mme Normandeau: Ce qui serait intéressant, Mme la Présidente, c'est également... Il y a évidemment l'aspect chiffres, mais il serait intéressant aussi d'avoir un tableau aussi sur les activités de HQI dans les différents continents ou pays. Bon. Je pense, par exemple, à l'Afrique, avec le Sénégal, je pense notamment au Mexique. Donc, est-ce qu'on peut nous donner un tableau très, très clair? HQI, à l'international, est où, dans quel pays? Mais, avant de déposer un tableau, est-ce qu'on peut avoir peut-être un portrait très rapide de vos activités à l'international, peut-être les activités les plus importantes?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Il reste à peu près sept minutes.

M. Caillé (André): Je vais essayer rapidement de vous le dire de mémoire. En Amérique centrale, nous sommes au Panama et au Costa Rica, dans les projets que j'ai mentionnés ce matin, à savoir: c'est un petit projet, au Costa Rica, de production; au Panama, c'est 200...

M. Vandal (Thierry): C'est la plus grande centrale du Panama.

M. Caillé (André): C'est la plus grande centrale de production. On est dans la production hydroélectrique dans ces deux cas-là. C'est celle-là qui s'appelle Fortuna. Je vais reprendre selon la liste qu'il y a ici. En Chine, il y a un petit projet qui est en cours, toujours du démarchage et de la construction, c'est le projet Qin Shan. De mémoire, c'était une vingtaine de mégawatts. C'est pour une vingtaine de mégawatts, ce projet-là. Après ça, il y a Meiya, qui est une compagnie de développement et d'investissement en Chine, nos partenaires y sont: une entreprise américaine qui est PSENG et deux groupes financiers asiatiques dont la Banque asiatique de développement. Il y a déjà cinq projets dont quatre, je crois, sont de nature thermique. C'est de la production thermique, en Chine. Il y en a un qui est hydroélectrique. Dans notre entente avec ces gens-là, c'est nous qui serons, Hydro-Québec, responsables du développement, partie hydroélectrique. Attention! Ici, ce n'est pas des projets d'ordre de grandeur des Trois Gorges. Je le dis encore, nous, c'est des têtes de pont. Attendez-vous à des projets 100 MW, 200 MW, 300 MW, mais pas à des projets de 15 000 MW ou 20 000 MW.

Mme Normandeau: Si vous permettez, vous avez un tableau entre les mains, ça serait intéressant d'en avoir une copie puis également, dans le tableau, avoir les partenaires qui sont associés avec Hydro-Québec à l'international, également le taux de participation d'Hydro-Québec dans ces projets-là. Tout est là? Bien, mon Dieu! c'est merveilleux.

M. Caillé (André): On me dit que tout est là. On a déjà l'information.

Mme Normandeau: Alors, vous pourrez peut-être nous déposer le tableau. Ça pourra être intéressant, effectivement, dans le futur, d'avoir ces information-là dans le futur plan stratégique.

M. Caillé (André): Je ne suis pas sûr qu'il soit complet, par ailleurs, de ce que j'ai vu. Le Sénégal, c'est seulement la production. Il faudrait compléter avec transport et distribution. Mais on va faire ça sur la même base qu'ici: chaque pays, quels sont les projets, quels sont les partenaires.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, moi, j'ai Mme la députée de La Pinière.


Démembrement d'Hydro-Québec International

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, Mme la Présidente. En fait, la question qui a été posée par ma collègue et qui n'a pas été répondue, c'est: Pourquoi Hydro-Québec International a été démembré? Surtout qu'on est à l'ère de la mondialisation, de l'ouverture sur le monde. Hydro-Québec, c'est un fleuron de l'économie du Québec. Et vous êtes venus, en 1998, nous dire combien il était important pour Hydro-Québec de jouer un rôle majeur au plan international. Puis, tout d'un coup, on apprend que l'axe le plus important sur lequel vous devez vous appuyer pour vous ouvrir au monde a été démembré. On ne démembre pas quelque chose qui marche. Qu'est-ce qui n'a pas marché dans Hydro-Québec International, clairement et simplement?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, quatre minutes, M. Caillé, pour nous expliquer ça.

M. Caillé (André): Oui. La croissance des coûts et la difficulté de maintenir en double des équipes, avec la compétence et l'expertise attendues de la part de nos clients, une compétence dans HQI et une compétence dans HQ.

Mme Houda-Pepin: O.K.

M. Caillé (André): Maintenant, je veux préciser tout de suite, Mme la Présidente, avec votre permission...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, c'est vous qui avez la parole, M. Caillé.

M. Caillé (André): On ne peut pas parler séparément ici de démantèlement de HQI sans parler en même temps de responsabilités additionnelles confiées à chacune des unités dont c'est le métier, à savoir: production, transport, distribution, construction de HQ. Des mêmes responsabilités, alors, ce n'est pas pour en faire moins, c'est pour en faire mieux, voire pour en faire plus. C'est un redéploiement d'une façon différente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Donc, ce que vous êtes en train de nous dire, M. Caillé, c'est que la création d'Hydro-Québec International était une erreur, parce que, à l'intérieur d'Hydro-Québec, vous avez l'expertise dans les différentes directions, vous avez les connaissances pour attaquer le marché international. Donc, vous avez créé une structure bidon qui s'est avérée, à l'expérience, inutile. On a donc dépensé, peut-être, l'argent des contribuables dans un dédoublement de structures sans résultats concrets vis-à-vis des attentes qui avaient été, en tout cas, exprimées dans le plan stratégique de 1998-2000.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Alors, la structure de HQI existe toujours. Elle est là pour faire le démarchage et elle est là aussi au plan financier. Ça demeure. La corporation qui va comptabiliser, faire un rapport, comme on le disait à l'instant, un rapport annuel complet sur l'ensemble de ses activités, ça, ça demeure. Et les personnes qui avaient été embauchées dans HQI, les spécialistes dont on avait besoin pour compléter, pour faire une équipe plutôt que le dédoublement d'équipes, se retrouvent actuellement dans chacune des unités d'affaires de HQ.

Alors, on a trouvé un moyen de mieux faire. C'est sûr que c'est une façon de faire qui est différente de ce qu'on avait pensé en 1997, mais ce n'est pas parce qu'on a pensé une chose en 1997 qu'on ne peut pas la changer si on trouve quelque chose de meilleur. Enfin, c'est ce qu'on s'est dit.

Parce que le développement international, nous y croyons. C'est à un moment où il y a globalisation, etc., et à un moment où on sait d'ores et déjà que dans 10 ans il va y avoir ce besoin de continuité. C'est sûr qu'on y croit. C'est sûr qu'on veut le faire. C'est pour ça que, si vous regardez les chiffres, en termes d'investissements, on n'a rien changé. On a fait le changement à HQI, on a fait le redéploiement dans des unités d'affaires. Et, personnellement, je tiens à ce que ces gens-là qui se succèdent ici, ils prennent chacun leurs responsabilités: production, transport, distribution, construction. Qu'il s'agisse de travaux ici, au Québec, ailleurs au Canada, je pense au Labrador, ou encore à l'international, chacun prendra ses responsabilités. Il va y avoir une équipe de compétence. On va livrer la marchandise à nos clients, bien important, on va mieux livrer la marchandise à nos clients. Alors, c'est un redéploiement. Ce n'est pas un démembrement pour mettre fin à nos activités. Au contraire, c'est pour faire mieux et faire plus.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, c'est tout le temps qu'on avait. Je vous remercie, M. Caillé. À ce moment-ci, je suspends donc les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 14 h 9)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): La commission va donc reprendre ses travaux. Nous commençons par la présentation d'Hydro-Québec. Alors, M. Caillé.


Présentation thématique d'Hydro-Québec: Perspectives économiques et financières

M. Caillé (André): Mme la Présidente, la stratégie de croissance et de rentabilité mise de l'avant depuis 1998 se traduit, pour la période 2000-2004, par une amélioration – une amélioration que je qualifierais de soutenue – de la situation financière d'Hydro-Québec.

Cette performance financière de l'entreprise est d'autant plus importante à nos yeux qu'Hydro-Québec représente pour la collectivité québécoise, comme on le sait tous, un investissement majeur, un investissement de quelque 57 000 000 000 $.

(14 h 10)

Ce que nous visons, Mme la Présidente, c'est la stabilité – j'ai eu l'occasion de le répéter maintes fois au cours de cette commission – la stabilité financière également pour assurer la stabilité tarifaire également. La stabilité financière, donc, d'Hydro-Québec représente pour nous et pour la collectivité un enjeu de premier ordre. Pour y arriver, l'entreprise doit viser la plus grande prévisibilité possible, bien entendu, dans ses résultats financiers.

Hydro-Québec a déployé au cours des années des efforts importants visant une gestion rigoureuse des facteurs externes pouvant avoir un impact sensible sur les résultats de l'entreprise. Le premier de ces facteurs, on le sait tous, c'est l'hydraulicité. Le plan stratégique en fait d'ailleurs état dans la dernière partie, dans le dernier chapitre.

Hydro-Québec, cette année, a établi son plan sur la base de prévisions conservatrices en termes d'apport d'eau. C'est ainsi qu'un montant de 1 800 000 000 $ sur la période a été intégré aux perspectives 2000-2004, ceci par prudence budgétaire pour couvrir les aléas de l'hydraulicité. Ainsi, nos prévisions d'apport d'eau ont 86 % de chance de se produire, plutôt que 50 % comme c'était le cas auparavant, lorsqu'on établissait nos pro forma financiers sur la base de l'hydraulicité moyenne.

À ce moment-ci, je tiens à répéter, pour être bien clair, ce que je disais déjà mardi: Les mesures nécessaires pour assurer la sécurité d'approvisionnement au Québec – les livraisons au Québec au cours des deux prochaines années – elles sont déjà prises. Ce n'est pas de cela qu'on parle.

Les sommes ici qui sont prévues, par prudence, c'est celles qui pourraient être utilisées, qui ne sont pas encore utilisées, donc, mais qui pourraient être utilisées pour couvrir des événements de faible hydraulicité qui pourraient se produire durant la période du plan, c'est-à-dire à compter de maintenant jusqu'à 2004.

Le troisième facteur, c'est les taux d'intérêt et les variations de taux de change qui influent sur la dette d'Hydro-Québec et qui constituent, comme vous le savez tous, un poste important des charges totales de cette entreprise. Ces charges représentent de fait pour la société une quarantaine de pour cent de toutes ses charges. À cet égard, nous déployons, depuis plusieurs années déjà, des moyens sophistiqués de gestion qui permettent d'atténuer l'impact des variations de taux d'intérêt et des taux de change sur nos charges d'exploitation.

Durant la période du plan, le taux de capitalisation va passer de 26 % à 32 %, un autre facteur qui renforce la stabilité financière d'Hydro-Québec et qui lui donne un meilleur coussin pour absorber des chocs éventuels liés à des variations extrêmes d'éléments hors de notre contrôle tels que, encore une fois, l'hydraulicité, la température, les paramètres économiques et financiers.

En plus de la stabilité financière, Hydro-Québec vise à améliorer sa rentabilité. Pour nous, la rentabilité est un objectif essentiel. Elle découle d'exigences tout à fait normales des investisseurs qui souhaitent bien entendu que cette entreprise opère avec des critères financiers sains. Également, en maintenant une rentabilité acceptable, Hydro-Québec place ses clients à l'abri d'augmentations tarifaires subites. La stabilité financière, c'est ça qui engendre aussi – ça engendre aussi – la fameuse stabilité tarifaire. De la même manière, une entreprise rentable est en mesure de faire face à ses obligations vis-à-vis la pérennité de ses actifs. Avec de la stabilité financière, on pourra prévoir d'année en année les sommes qui sont requises dans les programmes d'entretien et les réaliser comme il se doit pour rendre aux générations futures des équipements qui sont en état, comme ils le sont aujourd'hui.

Ainsi, sur l'horizon 2000-2004, le bénéfice net consolidé de l'entreprise, qui va être d'environ 900 000 000 $ – comme mon collègue le disait mardi – en 1999, passera à 1 600 000 000 $ en 2004. Cela fera passer notre rendement sur l'avoir propre sur le même horizon, c'est-à-dire l'horizon du plan, à 9,8 %, ce qui représente, encore une fois, simplement un minimum pour faire partie de la catégorie de ces entreprises qui offrent à leurs actionnaires un rendement dit raisonnable. Malgré une amélioration notable du bénéfice net en chiffres absolus, il n'en demeure pas moins, Mme la Présidente, que cette performance place Hydro-Québec, encore une fois, en dessous – n'allons pas croire qu'on est au-dessus de la moyenne ici, on va demeurer en dessous – de la moyenne du bassin des entreprises les plus performantes dans notre secteur. C'est pourquoi nous poursuivons un objectif d'amélioration de l'efficacité de l'entreprise par un contrôle rigoureux de nos charges d'exploitation. Nous voulons finalement faire mieux pour moins cher et obtenir le maximum pour chaque dollar dépensé.

La couverture des intérêts, facteur crucial pour les investisseurs, progressera de 1,27 à 1,48 au cours de la période. L'amélioration continue de ce ratio est pour nous très importante, car il maintient le titre d'Hydro-Québec comme véhicule de première classe auprès des investisseurs. Pour ce qui est du passif, la dette à long terme diminue, la dette à long terme pendant la période, elle va diminuer sous l'effet conjoint de l'attribution de nos liquidités excédentaires au remboursement de la dette et au raffermissement du dollar canadien. L'avoir de l'actionnaire s'accroîtra de plus de 3 000 000 000 $ sur la période, passant de 13 700 000 000 $ à 16 700 000 000 $ en 2004.

En conclusion, Mme la Présidente, j'aimerais souligner de nouveau que la situation financière d'Hydro-Québec est bonne, qu'elle s'améliore et qu'elle va continuer de s'améliorer. Merci, et voilà qui complète mes remarques.


Discussion générale

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Caillé. M. le ministre.


Provision budgétaire pour parer à une faible hydraulicité

M. Brassard: Mme la Présidente, je voudrais qu'on clarifie d'entrée de jeu toute cette question de provisions concernant ce que vous appelez les aléas de l'hydraulicité. Je comprends d'abord que c'est inclus dans l'item Autres charges. Ce n'est pas ventilé. Mais ça veut dire que, sur la période du plan, de façon progressive, vous avez prévu au total 1 800 000 000 $ à cette fin. Il n'y a rien de prévu, je pense, cette année, l'an prochain aussi... L'an prochain, oui, ça commence...

M. Caillé (André): L'an 2001, oui.

M. Brassard: ...avec... Mais ça se termine, dans les deux dernières années, avec 600 000 000 $, une provision de 600 000 000 $.

Évidemment, quand on a pris connaissance de votre plan stratégique, et particulièrement de la dimension financière, à Hydro-Québec, sur la période, ça a frappé beaucoup de monde, y compris moi-même; quand on regarde Autres charges, on passe de 3 600 000 000 $ en 1999, puis on se retrouve à la fin de la durée du plan à presque 5 000 000 000 $, 4 900 000 000 $. C'est une progression considérable, alors...

(14 h 20)

Mais il y a cet élément nouveau, qui n'existait pas, si je comprends bien, c'est la première fois qu'Hydro-Québec prévoit une réserve ou une provision dans ses budgets pour faire face à des risques de faible hydraulicité. D'abord, vous me confirmerez si c'est nouveau, puis, si c'est nouveau... j'aimerais évidemment savoir surtout quel est le rationnel, en d'autres termes, derrière ces chiffres. Quand on arrive au bout de l'exercice, à la fin de la durée du plan, avec des montants aussi considérables que 600 000 000 $, ce n'est pas rien. C'est une réserve, donc ça ne veut pas nécessairement dire que ça va être vraiment dépensé; ça dépend, c'est lié à l'hydraulicité. C'est ça que je comprends. Ça veut dire que, si l'hydraulicité est bonne, qu'elle est forte, Hydro-Québec n'aura pas à puiser dans cette réserve. Si elle est faible, là elle y aura recours pour être en mesure évidemment d'approvisionner et de répondre à la demande puis d'approvisionner les consommateurs québécois de toute nature en achetant de l'énergie sur les marchés étrangers.

C'est une nouveauté, et je vous avoue que ça suscite bien des questions chez pas mal de monde, sûrement, qui regarde ça. Pourquoi a-t-on fait ce choix-là? Est-ce que des entreprises similaires à Hydro-Québec, qui produisent surtout par le biais de la filière hydroélectrique aussi, ont recours à ce genre de provision pour faire face au risque de faible hydraulicité? Est-ce que c'est une nouveauté dans le domaine, dans le secteur, dans l'industrie?

Puis comment en êtes-vous et pourquoi en êtes-vous arrivé à fixer à cette hauteur-là la provision budgétaire? Qu'est-ce qui justifie qu'on aille progressivement à une hauteur de 600 000 000 $, sachant évidemment que, si on n'a pas besoin d'y recourir, bien, c'est un 600 000 000 $ qui vient à ce moment-là s'ajouter aux bénéfices de l'entreprise cette année-là? Alors, j'aimerais bien comprendre pourquoi ce choix, puis comment vous êtes arrivé à fixer à ce niveau-là, à cette hauteur-là, la provision – c'est progressif, mais, à un moment donné, ça va s'arrêter, là – dans les deux dernières années à 600 000 000 $.

Évidemment, une dernière question que je me pose également, pour des raisons ou des motifs de transparence: Pourquoi l'avoir incluse dans Autres charges? Pourquoi ne pas avoir fait un item budgétaire bien distinct?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, Mme la Présidente, je peux confirmer que c'est bien 1 800 000 000 $ qui a été mis dans le poste Autres charges, confirmer également qu'il s'agit d'un élément nouveau, qui n'existait pas les années antérieures, et que ça explique pour une très grande partie la croissance de ce poste Autres charges. Pourquoi? C'est effectivement une très bonne question à laquelle on a longuement réfléchi nous-mêmes avant d'établir nos provisions pour le futur.

On cherche la stabilité. On cherche la stabilité financière pour assurer la stabilité tarifaire. Dans le passé, quand on faisait des prévisions pour le futur en se basant sur l'hydraulicité moyenne, c'était admettre au point de départ qu'il y avait une chance sur deux de se tromper. D'ailleurs, ça a été rapporté souvent, que les prévisions d'Hydro-Québec ne se réalisaient que rarement, surtout dans les dernières années du plan. Parce que plus on s'éloigne, évidemment, plus il y a d'inconnues à cet égard-là.

Alors, on s'est dit: Ça, c'est un risque trop grand, ça, ça nous expose à trop de fluctuations du point de vue des résultats financiers. Ce que j'ai demandé, c'est: Vous allez me faire une prévision en tenant compte d'un sigma, un écart type, qu'on dit en statistique, par rapport aux données qu'on a depuis 1943. On va faire l'hypothèse. On n'en sait rien, on est ici comme les cultivateurs, on va vivre avec ce qui va se produire. On ne sait pas ce que c'est qui va se produire, mais on a dit: On a des données depuis 1943, vous allez nous faire une prévision avec un écart type négatif. Ce qui signifie, quand on fait ça, que nos prévisions maintenant ont 84 % des chances de se réaliser.

Je me base, là-dessus, évidemment sur le calcul des moyennes puis des écarts, des données réelles depuis 1943. Alors, plutôt que d'avoir une chance sur deux, on a 84 chances sur 100. Au lieu d'avoir 50 chances sur 100, on en a maintenant 84, chances sur 100, que ça se produise. Je vous ferai remarquer qu'il y a encore un 16 % de chances que ça pourrait être inférieur. Bon, bien, c'est ça que les données statistiques nous donnent. Mais, une chance sur deux, pour des gens qui cherchent la stabilité, c'est trop. C'est là la raison fondamentale du changement. Quand on fait à 84 % de chance, ça donne... il faut anticiper que possiblement il y aura des apports d'eau de 60 TWh en moins, avec des conséquences forcément au niveau de ce poste budgétaire puis sur les résultats.

Rien n'est engagé à date de ces sommes-là. C'est pour qu'on vous soumette, à vous, l'actionnaire, des prévisions, puis à nos clients, quand on leur parle de stabilité tarifaire, qu'on ait les vrais moyens de livrer la marchandise, de livrer ce qui est attendu. Mais il n'y a rien de dépensé à date. Parce que, encore une fois, pour ce qui est de ce qui a pu se passer dans le passé au point de vue précipitations, c'est déjà tout prévu, comme je l'ai expliqué mardi. Alors, voilà pour ce qui est du pourquoi. C'est pour ça qu'on met ça là, cette prévision-là.

Qu'est-ce qu'on va faire en pratique? En pratique, on va avancer dans le temps, on va avoir des données réelles qui vont nous arriver et on va appliquer notre critère de 64 TWh en moins pour assurer une sécurité, parce que c'est un incontournable, hein, je l'ai dit mardi, c'est un incontournable, la sécurité d'approvisionnement des Québécois. Il y aura, Mme la Présidente, de l'électricité pour les Québécois à demande. C'est dans notre mission, c'est une obligation qu'on a par la loi, une obligation. Alors, il y en aura.

On va avancer dans le temps. Si les conditions ne se produisent pas comme celle-là, s'il y a plus, parce qu'il pourrait y avoir plus aussi, encore une fois, on est comme des cultivateurs, on ne sait pas ce qui va arriver, on est comme des agriculteurs, s'il y en a plus, il y en aura plus. Mais on va prendre les décisions en temps opportun, comme on l'a toujours fait, puis on va choisir le moyen. Est-ce qu'il faut acheter? Est-ce qu'il faut renoncer à des ventes ou est-ce qu'il faut opérer la centrale de Tracy plus longtemps? Au moment où on se parle, bien, ça dépend de toutes sortes de facteurs que je ne connais pas aujourd'hui. Je ne connais pas le prix du pétrole pour faire fonctionner Tracy dans deux ans, dans trois ans, dans quatre ans. On choisira en temps et lieu, mais toujours pour protéger la sécurité d'approvisionnement de nos clients québécois, à demande.

Dans votre question, vous dites deux choses de plus. Pourquoi le mettre sous ce poste-là plutôt qu'un autre? On aurait pu effectivement. Je ne sais pas si ce sera des ventes auxquelles on va renoncer, toujours advenant que ça se produise, ou si c'est Tracy qu'on opérera plus longtemps, ou si on achètera simplement hors pointe dans les marchés voisins, en Ontario ou ailleurs ou aux États-Unis. On ne le sait pas. Enfin, on a fait un choix de le placer là plutôt que de le placer ailleurs. Il y a au moins deux des moyens qui font en sorte qu'on le placerait sur ceci, sur cette ligne-là, sur la ligne Autres charges.

Est-ce qu'il y a d'autres entreprises qui font la même chose? J'ai deux éléments de réponse, ici, pour vous, Mme la Présidente, à savoir que des entreprises dans notre domaine qui publient des plans de cinq ans à l'avance pour dire exactement ce qu'elles vont faire, il n'y en a pas. Alors, je n'ai pas accès à ce genre de données là. Par ailleurs, je siège sur des conseils d'administration d'entreprises dans le domaine de l'énergie et je peux vous dire que les gens ne nous soumettent pas des prévisions financières pour l'avenir avec une chance sur deux de réussir. Ce n'est pas ça qui est exigé, ce n'est pas ça qui est demandé.

(14 h 30)

Ce changement intervient maintenant. Il aurait pu intervenir, me direz-vous, dans le passé. On aurait peut-être pu le faire nous-mêmes il y a deux ans, on aurait pu ne pas le faire, puis dire: On continue avec la moyenne. Moi, je pense qu'ici il y a une raison de le faire aujourd'hui. C'est la stabilité financière qui engendre la stabilité tarifaire. On veut d'une entreprise où il n'y en aura pas, de surprises, il n'y en aura pas, de mauvaises surprises, puis, quand on va vous soumettre des prévisions, elles vont être bonnes, nos prévisions. Ça va tenir la route, puis ça va tenir la route jusque dans cinq ans, pas la première année puis, la deuxième, moins vrai, puis, la dernière année, plus rien à voir avec ce qui avait été dit la première année. Mais tout ça reste, et vous avez raison aussi de dire que, si ça ne se produit pas, ça va s'ajouter à la ligne du bénéfice net. Parce que ce n'est pas parce qu'on le prévoit ici qu'on va passer aux actes si les apports d'eau sont la moyenne ou encore s'ils sont plus grands, parce que ça serait inutile, ça serait un coût additionnel pour rien. Mais, quand on le saura, on va agir au fur du temps. Mais, ce qu'on vous donne, ce qu'on vous livre aujourd'hui, ce n'est pas la garantie qu'on va procéder à ces achats-là, etc., c'est la sécurité d'approvisionnement et une stabilité à la fois financière et tarifaire plus grande.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le ministre, quelques minutes.

M. Brassard: Oui? Ah bon.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, il faut gérer le temps aussi.

M. Brassard: D'accord. C'est parce que je veux bien comprendre. Ça m'apparaît essentiel, ça. Ça serait quoi, la situation qui vous contraindrait à utiliser au complet la provision de 600 000 000 $?

M. Caillé (André): ...excusez-moi.

M. Brassard: Il vous manquerait combien de térawattheures, par exemple, pour satisfaire à la demande?

M. Caillé (André): Pour 600 000 000 $, c'est 20 TWh. C'est en moins.

M. Brassard: 20 TWh. À quel prix?

M. Caillé (André): À 0,03 $.

M. Brassard: À 0,03 $?

M. Caillé (André): Oui. C'est ce qui fait 600 000 000 $.

M. Brassard: Ça veut dire que ce 20 TWh, vous l'achetez sur les marchés externes...

M. Caillé (André): Ça, on ne le sait pas encore. C'est pour ça qu'on...

M. Brassard: ...ou vous partez Tracy, comme vous dites.

M. Caillé (André): Dépendant des prix qu'on peut obtenir, ou on part Tracy ou on...

M. Brassard: Mais vous l'avez fixé... Ça, c'est la pire des situations.

M. Caillé (André): Pire des situations.

M. Brassard: C'est la pire.

M. Caillé (André): Prévue ici.

M. Brassard: Il vous manque 20 TWh compte tenu de la faible hydraulicité, compte tenu du niveau des réservoirs, et vous devez évidemment... Et la demande est là, il faut les fournir, ces 20 TWh. Il faut les acheter ou il faut les produire, puis vous avez fixé le prix à 0,03 $ du kilowattheure.

M. Caillé (André): Voilà. C'est une hypothèse qu'on a faite, le 0,03 $.

M. Brassard: Mais il reste quand même que, dans ce 20 TWh, il y en a sans doute une partie que vous allez pouvoir acheter à moins de 0,03 $.

M. Caillé (André): Oui, possiblement une...

M. Brassard: Si j'ai bien compris votre démonstration de ce matin, sur le marché spot, il y en a certainement une partie que vous allez pouvoir acheter comme ça, donc ça va être moins que 600 000 000 $.

M. Caillé (André): Il y en a peut-être une partie qui serait à moins, puis il y en a une partie qui pourrait l'être à plus aussi, ça dépend des conditions de marché. Là on a voulu être... Les hypothèses, c'est moins 60 sur la période, moins 20 sur la dernière année, et 0,03 $. En pratique, de quoi ça va avoir l'air, le prix des marchés dans cinq ans, à la fin de ce plan? Bien, peut-être que ça sera mieux, peut-être que ça sera pire. Je doute que ce soit pire, mais, ici, l'objectif étant de s'assurer de la stabilité, bien, on a pris le chiffre de 0,03 $.

M. Brassard: Étant donné que vous avez les données, toutes ces données-là depuis 1944, ça me fait penser, je compare ça à l'Alcan, qui gère le lac Saint-Jean depuis 75 ans, depuis les années vingt. Alors, évidemment, ils ont un modèle de gestion qui... Il n'y a pas grand surprise dans leur façon de gérer le bassin du lac Saint-Jean, les données s'étalant sur trois quarts de siècle. Vous, vos données s'étalent à partir de 1944, mais ça ne porte pas sur l'ensemble de vos équipements. Il y a des équipements qui ont été construits uniquement dans les années soixante-dix – je pense aux grands barrages du Nord – alors donc, vous avez des données qui sont moins nombreuses, ce qui introduit un élément d'incertitude plus, j'imagine.

M. Caillé (André): Oui.

M. Brassard: Non, mais, compte tenu de vos données puis du passé, quelle est la pire situation qui est arrivée, l'année où vous avez connu le déficit le plus important en termes de térawattheures en manque?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, rapidement, s'il vous plaît, M. Vandal.

M. Caillé (André): Mon collègue va vous donner cette réponse.

M. Vandal (Thierry): Mme la Présidente, je vais donner l'information statistique ici. On a des statistiques depuis 1943. Les premières années, bien sûr, les barrages, les installations n'étaient pas là, alors on utilise des données qui proviennent de stations gouvernementales installées sur le territoire. On est capables, à partir de ça, par corrélation, d'établir combien il y aurait eu d'eau. Donc, l'information est une information qui est de qualité. Bien sûr, l'information la plus récente, qui correspond à l'information sur les sites mêmes, est plus directe que l'information qui est obtenue par corrélation. On a donc des données depuis 1943.

Un écart type, ça couvre essentiellement 68 % de probabilités, auxquelles on ajoute, bien sûr, à la hausse... C'est plutôt favorable, donc on ajoute 16 %. Ça donne le 84 %. Et cet écart type là, pour Hydro-Québec, dans une année, c'est 20 TWh. Sur des périodes, on a été plus loin que ça. On a pris des années consécutives de cinq ans, des blocs de cinq ans consécutifs, et, pour des blocs consécutifs de cinq ans, depuis 1943, le scénario de 84 %, c'était le scénario de 60 TWh. Donc, le pire que l'on peut anticiper, pour un scénario de 84 %, bien sûr, c'est la situation de 60 TWh qui est à la base de cette prudence budgétaire mise de l'avant.

Quant aux meilleures et pires années, la meilleure année, c'est une année de l'ordre de 50 TWh à la hausse, et la pire année, c'est une année qui est de l'ordre de grandeur d'une quarantaine de térawattheures à la baisse. Donc, il y a de la volatilité, mais ce qui est plus important, c'est quelle est la volatilité sur des périodes consécutives de cinq ans, parce que ici on parle d'un plan de cinq ans et on essaie de se projeter sur l'avenir. Alors, on a pris donc vraiment, par mesure, méthode statistique extrêmement rigoureuse et à partir de bases de données rigoureuses, cette approche statistique de cinq ans.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Bonaventure.


Écart entre les prévisions précédentes et les résultats

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Je dois vous dire que l'étude des perspectives financières et économiques d'Hydro-Québec, qui tiennent en, quoi, quatre, cinq pages dans le plan stratégique, c'est loin d'être évident. Et vous savez comme moi que c'est un bloc qui est très, très complexe, et, comme parlementaires, on nous donne quelques tableaux pour nous expliquer, dans le fond, où s'en va Hydro-Québec jusqu'en 2004, et ça complique encore plus notre travail, dans la mesure où on est obligés d'aller chercher toutes sortes d'informations ailleurs que dans le plan stratégique – je pense notamment au rapport annuel, au profil financier d'Hydro-Québec – pour essayer de corroborer et comprendre exactement les perspectives financières, donc, d'Hydro-Québec. Et, dans ce sens-là, je dois vous dire que c'est déplorable, et c'est loin d'être évident pour nous de comprendre où exactement Hydro-Québec s'en va. On a consulté des analystes, et je dois vous dire que, pour eux autres, c'est loin d'être évident. De toute évidence, il manque des informations dans le plan stratégique – je dirais dans tout le plan stratégique, mais plus particulièrement au niveau des perspectives financières – pour bien comprendre, là, la validité, dans le fond, des chiffres qui sont avancés.

Et, d'entrée de jeu, par contre, compte tenu qu'il n'y a aucun indicateur dans l'actuel plan stratégique sur les résultats que vous avez obtenus dans le dernier plan stratégique versus le plan stratégique 2000-2004, je me permettrais tout de suite de vous demander de nous donner un tableau comparatif des résultats obtenus dans le dernier plan stratégique versus les prévisions que vous nous amenez ici, dans le plan 2000-2004. Alors, j'imagine que vous avez sûrement un tableau avec vous, avec les comparatifs, parce que plusieurs s'entendent pour dire que le premier plan a été un échec sur le plan commercial. Le virage commercial, finalement, n'a été qu'un mirage commercial pour plusieurs.

Alors, est-ce qu'on pourrait nous faire la démonstration aujourd'hui, puisqu'on a du temps devant nous, là, des résultats du dernier plan versus celui-ci, des prévisions contenues dans le plan actuel?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui, Mme la Présidente. J'ai demandé à mon collègue de faire une réconciliation sur les années des deux plans qui correspondent l'une à l'autre, c'est-à-dire jusqu'en 2002. On peut faire la comparaison pour 2000, 2001, 2002. Évidemment, pour 2003, 2004, ce n'est pas possible, parce que le premier plan, bien, il ne couvrait pas cette période-là, mais on va vous faire toute cette réconciliation-là, et je demanderais, avec votre permission, à mon collègue de prendre la parole.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, monsieur, si vous voulez vous identifier, s'il vous plaît, pour les besoins, bien sûr, de la transcription.

M. Leclair (Daniel): Daniel Leclair.

Mme Normandeau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, un moment...

Mme Normandeau: M. Caillé, vous allez nous servir une série de chiffres, évidemment, là, pour nous. Est-ce que c'est possible d'avoir un document, qu'on puisse suivre? Ça va faciliter notre travail.

(14 h 40)

M. Caillé (André): On pourrait le déposer, le document. Mon collègue me dit, ici, qu'il n'a pas le document en main, mais c'est... Enfin, ça sera à vous d'en juger, là, mais ce n'est pas si compliqué. On n'essaiera pas de vous inonder de chiffres, pas plus qu'on n'a jamais essayé, si j'ai bien compris, de le faire.

Mme Normandeau: Mais ça aurait été acceptable de l'avoir avant, bien sûr, le document.

M. Caillé (André): Oui, bien sûr.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce que vous pouvez vous présenter, monsieur, s'il vous plaît?

M. Leclair (Daniel): Daniel Leclair.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Leclair...

M. Leclair (Daniel): Merci, madame.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...quel est votre titre, s'il vous plaît, aussi?

M. Leclair (Daniel): Vice-président finances et chef des services financiers.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Alors, M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Merci, Mme la Présidente. En fait, si vous faites allusion à nos prévisions économiques contenues dans le plan 1998-2002 et la réalité, il est vrai que, pour différentes raisons, ces prévisions se sont avérées, dans le cas d'une prévision, au niveau du dollar canadien, très loin de la réalité. Nous avons sous-estimé le prix de l'aluminium, qui était une composante importante dans la gestion des risques financiers. Et, troisièmement, nous avons surestimé le niveau des taux d'intérêt.

Si vous me permettez de vous donner quelques faits, concernant le dollar canadien... Concernant nos prévisions, premièrement, et comme l'expliquait M. Vandal hier, on a une méthode, je crois, rigoureuse. On a un processus qui se veut, au moment où nous faisons nos prévisions, dans les meilleures connaissances des différents facteurs économiques... arriver à faire des prévisions. Plus on s'éloigne de la situation actuelle, plus le facteur d'incertitude est important.

Ceci étant, une des raisons pourquoi nous avons sous-estimé la performance du dollar canadien... Je pense qu'il y a deux raisons majeures. Premièrement, lors de la mise en place de ces prévisions-là, en 1997, on était au niveau de la période du mois de juin, juillet, la perspective de l'amélioration financière des finances publiques canadiennes, américaines et québécoises était un élément très important dans notre prévision, un facteur important dans la fabrication de ces prévisions. Deuxièmement, amélioration des finances publiques signifiait réduction des déficits, réduction des programmes d'emprunt des différents gouvernements, donc favorable pour le dollar canadien. L'économie était anticipée d'être beaucoup moins forte que ce qu'on a eu. Le résultat, les déficits gouvernementaux se sont améliorés, ce qui a fait réduire les déficits, même parler de surplus dans certains cas, et une réduction importante de la dette. Compte tenu que la dette canadienne, la dette d'Hydro-Québec, la dette de la province de Québec est détenue dans une proportion importante par des étrangers et l'incertitude qui a entouré les marchés en 1998... Vous vous rappelez le défaut de l'URSS, la crise asiatique et de l'Amérique latine ont fait que les investisseurs détenant des titres canadiens libellés en dollars canadiens ont préféré ramener leur argent soit chez eux ou dans un refuge, un paradis de refuge que sont les États-Unis.

L'autre élément est que la politique monétaire de la Banque du Canada a été expansionniste, ce qui a permis aux taux canadien d'être sous les taux américains. Donc, aucun intérêt pour un étranger de venir acheter des titres canadiens, soit obligataires ou de l'équité. Et une sous-performance des titres en termes de matières premières. Donc, l'ensemble de ces éléments-là a fait... Et vous vous rappelez qu'au mois d'août 1998 le dollar canadien a atteint le plus bas niveau de son histoire, avec une réaction importante de la Banque centrale avec une hausse des taux d'intérêt qui a duré – merci, Dieu! – d'une façon très restreinte et un marché des matières premières très bas. Donc, ces éléments-là, ces trois facteurs-là ont eu une importance majeure sur les résultats d'Hydro-Québec, comparé aux prévisions du plan.

1998. Nous avions prévu dans le plan des bénéfices nets de 925 000 000 $. Résultat: 679 000 000 $; écart: 246 000 000 $. En plus du dollar, de l'aluminium, on a eu le verglas. Le verglas nous a coûté 84 000 000 $, sur les charges de 1998. Autre facteur, que M. Caillé mentionnait dans son allocution, les températures. Le climat change. Seulement en 1998, si on compare la température moyenne et le réel, ça a coûté à Hydro-Québec en pertes de ventes 225 000 000 $. 225 000 000 $, c'est presque quatre écarts types. M. Vandal parlait d'un écart type, c'est presque quatre écarts types. Et, si on compare avec l'année 1997, on était 275 000 000 $ défavorable en termes de facteur température, élément que nous ne pouvons pas contrôler, et les marchés financiers offrent très peu, pour l'instant, de produits pour se protéger contre ces phénomènes.

La révision des paramètres économiques, un dollar beaucoup plus faible. Vous savez que nous avons des emprunts sur les marchés américains, donc un dollar beaucoup plus faible qui a eu pour impact 122 000 000 $. Donc, si vous regardez ici, vous avez 225... Température, le verglas – mais ça, ça arrive une fois, j'espère, tous les 400 ans – et la révision des paramètres économiques.

1999. À date, nous parlons d'estimés. Si on estime aux alentours de 900 000 000 $ les revenus de 1999, le plan originel prévoyait 1 100 000 000 $, donc 200 000 000 $ défavorable. Encore une fois, Dame Nature a fait des siennes. Nous estimons – puis, encore, je suis très prudent, parce que nos chiffres ne sont pas encore sortis – que l'impact de la température a eu pour 144 000 000 $ d'effets, de ventes de moins en 1999. Vous vous rappelez, décembre, on se promenait encore avec presque un manteau de printemps. Ces pertes-là ont été compensées par une légère augmentation des ventes au Québec et qui est due en grande partie à la croissance économique plus forte qu'anticipée dans le plan stratégique. La révision des paramètres économiques – taux de change encore – un autre 60 000 000 $; et des amortissements moins importants de 50 000 000 $. Donc, vous avez les trois facteurs qui ont contribué, encore une fois, dont la grande partie hors de notre contrôle, la température.

Donc, ça, c'est de réel à plan stratégique. Si on compare le plan A, comme je l'appelle, 1998-2002, puis 2000-2004, pour les années 2000 à 2002, on parle, selon prévisions à prévisions, aux alentours de 1 500 000 000 $ de moins.

M. Caillé faisait allusion à la réserve ou, je dirais, une approche prudente en termes de gestion pour les aléas hydrauliques, il y a 180 000 000 $ compris en 2001, 420 000 000 $ en 2002. Donc, vous avez 600 000 000 $, ce qui vient expliquer 30 % à 35 % de la réduction, et les paramètres financiers – j'ai encore à vivre avec mes prévisions de 1997 – qui comptent pour 500 000 000 $.

Alors, vous voyez, il y a trois grands blocs: paramètres financiers; vous avez la température qui, encore là, est un élément très important; le verglas. Et le quatrième est les réserves ou l'approche budgétaire pour aléas hydrauliques, de 600 000 000 $.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...qu'il y aurait un dépôt de ce document-là...

M. Leclair (Daniel): Je l'ai demandé...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...ou s'il y a un document qui nous sera acheminé à la commission?

M. Caillé (André): Oui, on va demander de préparer, pour que ce soit très clair... qu'on parte de l'ancien plan puis qu'on remonte les chiffres, les écarts jusqu'à cette version-ci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): D'accord. Alors, il y aura donc un document qui sera acheminé au secrétariat de la commission pour que les membres puissent en disposer?

M. Caillé (André): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci. Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, si je comprends bien, M. Caillé, on vient de nous expliquer – comment dire? – que le fait que les prévisions de 1998-2002 ne se soient pas réalisées, c'est dû notamment au fait qu'on ait sous-estimé le prix de l'aluminium, par exemple, surestimé les taux d'intérêt et sous-estimé le dollar canadien.

Lorsqu'on regarde un document, Cycles et tendances , qui est produit par la Caisse de dépôt et placement, on est en mesure donc de comparer vos prévisions à leurs prévisions. Et c'est surprenant, parce qu'on se rend compte qu'il y a une distorsion assez importante entre ce que la Caisse de dépôt prévoit et vos prévisions.

Je vous donne un exemple concret, pour l'an 2000, par exemple – et là je me réfère à la page 57 du plan stratégique – juste pour l'an 2000 donc, Hydro prévoit un taux d'inflation de 1,6 %, alors que la Caisse de dépôt, elle, prévoit son taux d'inflation à 2,2 %.

Le prix de l'aluminium est prévu à 0,70 $ la livre, donc, par la Caisse de dépôt, contre 0,63 $ la livre par Hydro-Québec. Aujourd'hui, là, le prix est à peu près à 0,70 $ la livre.

(14 h 50)

Du côté du dollar canadien, c'est la même chose. Dans vos prévisions, on fait état d'un dollar à 0,666 $, alors que la Caisse de dépôt, elle, fait état d'un dollar canadien à 0,719 $. Alors, il y a vraiment une différence importante, de plus de 0,05 $, et le dollar, hier, frôlait à peu près les 0,70 $.

Alors, dans cette optique-là, j'ai comme l'impression qu'on se dirige encore vers des difficultés, et ce que ça dénote, c'est peut-être qu'Hydro-Québec, en sous-estimant ses prévisions par rapport à celles de la Caisse de dépôt et placement, pourrait donc se dégager une marge de manoeuvre additionnelle et arriver à la fin de l'exercice 2004 en nous disant que, contrairement au premier plan statistique, hourra! on a atteint nos prévisions, on a même dépassé nos prévisions. Alors, on se demande si ce n'est pas une stratégie, dans le fond, de la part d'Hydro-Québec pour se dégager une marge de manoeuvre additionnelle.

J'aimerais vous entendre là-dessus. Compte tenu que justement la Caisse de dépôt et placement, à mon sens, est un organisme de référence important, sur quoi vous vous appuyez pour avoir des prévisions en deçà de ce que la Caisse de dépôt et placement prévoit? Pourquoi c'est si pessimiste?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Il y a une réponse très claire: Il n'y a pas de stratégie, ici, pour tenter de s'aménager une marge de manoeuvre en ayant d'autres prévisions, qu'il s'agisse des taux d'intérêt, des taux de change ou de quelque autre facteur financier. Les gens qui travaillent pour nous... Notre équipe est une équipe, je peux vous dire, reconnue pour son talent et ses connaissances et son expertise. Il leur arrive de se tromper. Les gens qui font des prévisions financières, sur les taux d'intérêt, j'en connais plusieurs à qui il arrive de se tromper. Il y a des années où ils sont évidemment plus heureux dans leurs prévisions que d'autres, et généralement ce n'est pas toujours les mêmes qui sont heureux. Nos gens l'ont été à un certain nombre de reprises, il y a des fois où ils se sont, comme les autres, trompés.

J'aimerais, Mme la Présidente... On va vous fournir, comme vous le demandiez tantôt, les données plus détaillées, ce que je vous dis... mais je voudrais, pour la poursuite de vos travaux cet après-midi, préciser quand même les choses pour ce qui est de ces fameux écarts.

Pour l'an 2000, ça tient aux frais financiers, 250 000 000 $, on vient de le dire. Je vous donne juste, là, grossièrement la situation, je n'essaie pas de rentrer dans les détails.

Pour l'an 2001, il y a deux facteurs. Il y a le facteur de 180 000 000 $, la prudence budgétaire au niveau des aléas de l'hydraulicité, et une variation de 120 000 000 $ qui s'explique de la même façon que pour l'an 2000, le 250 000 000 $. Donc, 180 000 000 $ puis 120 000 000 $.

Pour l'an 2002, les variations, elles s'expliquent par 420 000 000 $ pour les aléas de l'hydraulicité et 140 000 000 $ pour les frais financiers.

Si vous prenez juste ces chiffres-là, ça explique la très grande partie de l'écart. Mais, évidemment, la vie n'est jamais aussi simple que cela, il y a des écarts dans un sens, il y a des écarts dans l'autre. On va faire préparer les documents qui sont requis, puis on les soumettra à votre commission dès qu'ils le seront.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Caillé. Il reste trois minutes, alors...

Mme Normandeau: Juste une petite question.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui.

Mme Normandeau: Combien de personnes travaillent chez vous à l'élaboration des prévisions financières? L'équipe est de combien, l'effectif, à Hydro-Québec?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Dans l'équipe des finances, ceux qui sont responsables de la gestion de financement et trésorerie, vous avez une vingtaine de spécialistes. Ceux qui travaillent aux prévisions économiques, il y en a seulement un. Toutefois, nous faisons affaire avec l'agence – je pense qu'elle est très bien connue – WEFA. C'est le Wharton Econometric Forecasting Associates. Donc, étant dans ce métier depuis une trentaine d'années, les prévisions sont des prévisions, elles ne sont pas garantes du futur, et, à toutes les fois, il est important pour nous d'avoir les prévisions les plus exactes. Si personne ne se trompait, il n'y aurait pas de prévisionnistes, et ce serait très facile de faire des affaires.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, il y a le temps d'un commentaire. Oui, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Il me semble, Mme la Présidente, que c'est une discussion que j'ai déjà vue passer ici il y a à peu près deux ans. Il y avait les mêmes prévisions optimistes il y a deux ans. Ça a été mis en relief, il y a deux ans, avec les mêmes institutions financières, par exemple les banques, qui prévoyaient les taux d'intérêt plus élevés que ce que Hydro-Québec prévoyait. Le dollar canadien était prévu par les banques, entre autres la Banque de Montréal à l'époque, même la Caisse Desjardins, plus bas que ce qu'Hydro-Québec prévoyait. On avait eu la même réponse.

Puis là, deux ans plus tard, on dit: Voici les chiffres des institutions financières qui se projettent pour l'avenir. Ils sont moins favorables pour Hydro. Les chiffres d'Hydro sont plus favorables pour Hydro. On dit: Bon, on va prévoir quand même. Le résultat net, par exemple, c'est que, deux ans plus tard, vous baissez les dividendes, les prévisions, etc. Mais est-ce qu'on n'est pas en train de refaire le même cycle d'erreurs, en quelque sorte? Parce que la business d'Hydro n'est pas la prévision financière, nécessairement. S'il y a des écarts si importants avec des institutions dont le pain et le beurre, c'est exactement ça, est-ce qu'il n'y a pas lieu de se poser des questions?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): En quelques minutes.

M. Caillé (André): Encore une fois, Mme la Présidente, on pourra, ici, encore se tromper en haut ou en bas, mais il n'y a pas de biais. Vous n'avez pas devant vous un plan qui a été préparé en disant: Donnez un biais à ceci pour vous assurer que la prochaine fois on apparaisse mieux en haut ou en bas. Alors, je tiens à le préciser encore une fois. Mon collègue souhaite ajouter à ce qu'il disait en ce qui concerne ce qui s'est passé il y a deux ans puis ce qui se passe maintenant.

M. Sirros: Ce qui m'a tout simplement frappé, c'est que c'était la même discussion qu'on a eue il y a deux ans.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Merci, Mme la Présidente. Si vous le permettez, les prévisions sont faites aux alentours du mois de juin, juillet, celles que vous voyez ici. Cette année spécialement, l'évolution économique depuis le mois de juillet au mois de janvier a changé de façon drastique. On a vu le Federal Board du Canada réviser deux fois ses taux de croissance pour l'an 2000. Les marchés ont performé de façon extraordinaire en tant qu'équité, ce qui était une minime possibilité, si vous remontez en juin. Donc, il est important de toujours avoir, si on veut comparer des prévisions, les mêmes moments de prévision. Et, je vous le dis, c'est important, à Hydro-Québec, d'avoir des bons rendements financiers dits gestion de la dette, ça représente 40 % de nos dépenses totales. Donc, chaque point de base sauvé... Et je pense que notre performance au cours des dernières années a été bonne, et j'en suis fier, on a une équipe extraordinaire. On a mis de l'avant une gestion proactive de la dette. Pour une institution non financière, je pense qu'on est à la fine pointe, on est dans le premier quartile au niveau de la gestion des risques financiers. Mais, des prévisions, c'est des prévisions, madame, puis j'aimerais ça, les connaître demain.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. Leclair. Alors, Mme la députée de Crémazie.


Données relatives à la stabilité tarifaire

Mme Blanchet: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, lors de votre présentation, à la reprise des travaux tout à l'heure, vous avez maintes fois répété: La stabilité financière d'Hydro-Québec, elle doit être là pour pouvoir assurer une stabilité tarifaire à nos clients. Donc, justement, je voulais revenir plus sur cet aspect-là. Pour la période du plan 2000-2004, pour une famille moyenne au Québec, quels sont les gains en dollars de cette famille-là compte tenu du gel que vous proposez? Et aussi, justement, si vous étiez dans l'impossibilité d'assurer une stabilité tarifaire, à ce moment-là, l'augmentation normale de vos tarifs serait de l'ordre de combien? Est-ce qu'on revient au 22 %, si je me souviens bien, que l'on avait vu dans les documents que vous nous avez donnés sur l'interfinancement?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Nos clients résidentiels consommant entre 500 $ jusqu'à 3 000 $, évidemment, dépendant de la grandeur de leur maison, 10 %, ça peut représenter 50 $ pour les plus petits logements, puis ça peut aller jusqu'à 300 $ pour les plus grandes maisons. Disons qu'en moyenne ça doit se situer, pour chaque famille, entre 150 $ et 200 $ d'économie par année.

Mme Blanchet: Par année. Si jamais vous étiez dans l'impossibilité d'assurer la stabilité tarifaire?

M. Caillé (André): Ça, c'est avec la stabilité tarifaire.

Mme Blanchet: Ah! O.K. L'économie.

M. Caillé (André): Ça, ça veut dire qu'est-ce qu'ils épargnent, plutôt que des tarifs qui suivraient l'inflation ou l'indice des prix à la consommation. C'est ça que ça va faire pour eux.

Mme Blanchet: O.K. Donc, dans un document que vous nous aviez remis mardi, lorsqu'on parlait d'interfinancement, un des documents, il y avait un plus 22 %, si je me souviens bien, 21 % ou 22 %. Ce ne serait pas nécessairement ce taux-là qui serait appliqué, mais plutôt l'indice des prix à la consommation, si jamais il devait y avoir une hausse?

(15 heures)

M. Caillé (André): Oui, oui, c'est ça. Les calculs, ici, sont faits avec qu'est-ce que ça représente en valeur réelle, l'économie, le fait de geler les tarifs. Ça n'a pas à voir avec l'autre calcul qui est fait. À savoir, si on faisait des tarifs basés sur les coûts, réglementation basée sur les coûts conventionnels, bien là, ça voudrait dire plus 22 %, et c'est plus 22 % de la même facture, dépendant... Quand on corrigerait, ça ferait ça. Encore une fois, ça, ce n'est pas ça, le pacte social. Le pacte social, c'est le contraire de ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Dans votre plan stratégique, il y a une carte avec les différentes couleurs pour différents taux d'électricité qui sont justement demandés par les différentes compagnies. Mais est-ce que vous êtes en mesure de faire une comparaison entre les tarifs payés par les clients vivant dans les régions autour du Québec, de façon plus détaillée que ce qu'il y avait dans le plan, ou si ce que vous avez dans le plan stratégique, c'est ce qu'il y a de plus près de ce qui est payé par les gens autour?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): J'ignore, honnêtement, si les autres entreprises publient leurs tarifs puis ce qu'il en coûte en moyenne pour chaque famille. Possiblement qu'elles le font. S'il y a des comparaisons comme ça qu'on peut faire, on les fera.

Dans le document qu'on vous a remis, quand on dit 100, ça, c'est le prix au Québec. Quand c'est plus que 100, ça veut dire que... C'est un pourcentage, ça. Par exemple, si c'est 103, ça veut dire qu'ailleurs ils paient 3 % plus cher. Bon.

Le 22 % s'appliquerait, bien entendu, dont on parlait tantôt. Je reviens sur votre première question. C'est 22 % de la même facture de 1 500 $. Alors, ça fait – je ne sais pas, 22 % de 1 500 $, ça fait beaucoup d'argent – 300 $ à 400 $ de plus par année.

Mme Blanchet: O.K. Je vous remercie. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Maskinongé.


Ventilation des investissements

M. Désilets: Merci, Mme la Présidente. À la page 54 du plan, on parle d'investissements de plus de 11 900 000 000 $, tout près de 12 000 000 000 $. Mais, dans le plan, j'aimerais avoir des précisions, parce que depuis le début on parle de production, de transport puis de distribution, les trois grands volets, mais, de ce montant-là, il y a combien d'argent investi dans chacun des volets?

M. Caillé (André): Alors, vous avez devant vous le chiffre de 10 355 000 000 $ qui est le total des investissements prévus sur la période. Le partage entre production, transport et répartition, distribution et autres immobilisations est le suivant: pour production, 4 686 000 000 $; transport et répartition, 2 752 000 000 $; distribution, 1 561 000 000 $; et autres immobilisations, bâtiments, soutien, télécommunications, technologies, 1 355 000 000 $. Et ça, c'est pour Hydro-Québec. Ça ne tient pas compte des investissements dans Noverco, ou enfin dans Gaz Métro et Enbridge à travers Noverco, non plus que des investissements d'Hydro-Québec International, qui sont à hauteur de 170 000 000 $, prévus dans ce plan, par année.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Oui, merci. Là-dedans, est-ce qu'il y a un montant de prévu pour – je ne sais pas, moi – satisfaire la demande de la clientèle au niveau de la fiabilité ou autre?

M. Caillé (André): Oui. Alors, en termes de fiabilité des réseaux, de mémoire, il y a 850 000 000 $ qu'on va investir dans le bouclage et l'accroissement de la robustesse du réseau de transport. Il y en a déjà une partie de faite. Ça fait qu'elle n'est pas dans ce plan-là, ça a été réalisé à la fin de 1998, évidemment, puis en 1999. Il en reste pour 600 000 000 $ et quelques, de mémoire, à faire. Il y a 175 000 000 $ à investir dans le réseau de distribution pour la même raison, pour en accroître la robustesse. Il y a 100 000 000 $ par année pour l'enfouissement. Et il y a aussi une augmentation des investissements. Ça, c'est des charges d'exploitation que nous faisons pour la maîtrise de la végétation.

Grosso modo, là, pour améliorer la fiabilité du service aux Québécois, c'est 1 000 000 000 $. Si vous prenez ça au total, c'est 1 000 000 000 $ qu'Hydro-Québec va investir, compte tenu des événements climatiques qu'on a connus, 1 000 000 000 $ pour accroître la robustesse et, par conséquent, la fiabilité du service pour les Québécois, 1 000 000 000 $ qui s'ajoutent à un montant qui est approximativement également de 1 000 000 000 $ qu'on dépense à chaque année en entretien des mêmes actifs, de l'ensemble des actifs d'Hydro-Québec. Tout ça, c'est pour les Québécois. Quand on a préparé notre plan, quand on prépare nos prévisions futures, ça, on prend ça comme une nécessité de la vie, qui est l'obligation. C'est après ça qu'on pense stabilité tarifaire, stabilité financière, etc.

M. Désilets: O.K.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): ...M. le député de Maskinongé?

M. Désilets: Moi, ça me va.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Ça va. M. le député de Gaspé.


Taux de rendement selon les secteurs d'activité

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Caillé, cette semaine, il a été question d'interfinancement, et certains membres de la commission avaient des inquiétudes en ce qui a trait à la possibilité de voir les clients du Québec supporter, par le biais des tarifs, une partie des activités ou des activités non réglementées. Ça serait peut-être important de pouvoir illustrer, pour chacune de ces activités, au niveau de la rentabilité de l'entreprise, les impacts, les secteurs.

Pour faire en sorte que les Québécois comprennent bien et que nous comprenions tous la même chose, vous prévoyez, dans le fond, des bénéfices, en 2004, pour différents groupes d'activités. Également, vous nous dites que les exportations d'électricité, la vente de gaz naturel, les activités dans les filiales et participations sont des activités de l'entreprise.

Les taux de rendement que vous avez dans ces divers groupes d'activités, est-ce que vous êtes en mesure également de nous informer adéquatement pour qu'on puisse comprendre que l'interfinancement va continuer à s'effectuer? Et comment ça va procéder?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, Mme la Présidente, mon collègue précisera les chiffres. Dans le domaine du gaz, on a, l'ordre de grandeur, 480 000 000 $ d'investis. Le taux de rendement est de 12 %. Qu'est-ce que ça veut dire, ça? À partir du moment où on a 6,8 % actuellement dans le domaine de l'électricité, la production, le transport, distribution, puis on s'en va à 10 %, ça veut dire que, sur toute la période du plan, l'activité dans le secteur gazier est favorable. Non seulement ce n'est pas un interfinancement de clients de l'électricité vers le gaz, mais c'est plutôt l'inverse.

Deuxièmement, pour ce qui est HQI, je vous dis que, projet par projet, on vise 20 %, mais on s'attend qu'en moyenne ça va donner du 15 %. Le même commentaire existe. En ce moment, on a 280 000 000 $ d'investis. On anticipe en investir 170 000 000 $ additionnels par année, dans le plan stratégique qu'on vous a soumis.

Si on parle des activités technologiques, il y a CapiTech, il y a une centaine de millions qui vont être investis en fonds propres pour aller chercher la connaissance, l'expertise, les technologies qui peuvent nous être utiles en production, transport, distribution. C'est 20 % de rendement qui est cherché.

Là où il y a eu des pertes, c'est dans les activités de commercialisation des technologies développées par nous. Très honnêtement, le moteur-roue avec TM4, la compagnie, bien, on a investi 50; on a radié, à date, 35. Dans ACEP, je ne me souviens plus du montant d'investissement, mais on a aussi, là, procédé à des radiations. Pardon?

Une voix: ...

M. Caillé (André): On a investi 75, mais on a fait des radiations aussi. Alors, ça, ça a coûté, mais c'est ça, les montants: 50 puis quelque chose de l'ordre de grandeur de 70. Puis, on peut encore travailler pour valoriser. J'ai dit qu'on allait concentrer nos activités dans le domaine technologique dans nos produits de base, produire, transporter et distribuer, mais on a encore celle-là. On l'a fait dans le passé. On ne dit pas: Ça, c'est le problème des autres, puis on le laisse de côté. C'est notre responsabilité à nous d'aller chercher la meilleure valeur possible pour les Québécois. Alors, comment on va en récupérer du 35 qu'il y a dans le moteur-roue, comment on va en récupérer dans ce qu'on a effacé dans ACEP? Je ne peux pas vous le dire aujourd'hui, mais le pire montant, c'est celui-là.

(15 h 10)

Si vous faites le total de tout ça: 12 % dans le gaz, 15 % dans les activités internationales, 20 % dans les activités de CapiTech, j'ajoute à ça 145 000 000 $, comme on a fait dans les activités d'exportation, de dire que c'est à partir des tarifs d'électricité au Québec qu'on supporte les activités autres d'Hydro-Québec, bien, ma foi, ces chiffres-là, ce que ça dit, c'est le contraire. C'est le contraire, et c'est bien sûr notre stratégie. C'est exactement ça, notre stratégie: stabilité tarifaire, augmentation du rendement non pas avec des augmentations de tarifs, encore une fois, mais en développant des activités où on va aller chercher plus. On va améliorer le rendement à l'actionnaire. On va atteindre le minimum de ce qu'est un rendement raisonnable, en faisant ça. Le parachèvement du développement hydroélectrique est là-dedans également, à 0,3 $ du 10 kWh. C'est ça qu'on va faire pour améliorer le rendement et non pas, Mme la Présidente, augmenter les tarifs.

Alors, à l'inquiétude de certains qui disent: C'est avec les tarifs de l'électricité qu'on supporte les autres activités, ma réponse, c'est: C'est l'inverse. C'est avec les autres activités déjà qu'on supporte un rendement meilleur plutôt qu'avec des augmentations de tarifs.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Gaspé.


Répartition des bénéfices

M. Lelièvre: Oui, en 2004, vous prévoyez avoir 1 600 000 000 $ de bénéfice net.

M. Caillé (André): Oui.

M. Lelièvre: Alors, quelles seraient les proportions que vous attribueriez aux différentes filières? On a parlé de l'électricité, les exportations, le gaz naturel ou les autres filiales. Comment ça se répartit, ce bénéfice-là?

M. Caillé (André): La plus grande partie proviendra évidemment des exportations d'électricité. Je n'ai pas le calcul précis. On pourra demander à mon collègue de faire ce calcul...

M. Lelièvre: Non, mais vous le faites sur...

M. Caillé (André): ...pour qu'on puisse vous le dire. J'ai les chiffres pour 1998, par exemple, avec des exportations aux États-Unis et au Nouveau-Brunswick, je pense qu'on en a fait en 1998. Également, en Ontario, il y en avait peut-être, mais peu. C'est 4 % de tarif que ça représente. Ça veut dire qu'à rendement égal les tarifs au Québec sont 4 % moins chers parce que nous avons fait ça. Et, dans le cas contraire, ils auraient augmenté de 4 %, les tarifs, pour faire le même résultat.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: ...mes questions. Mes collègues ont d'autres questions?

Mme Blanchet: Oui, une petite.

M. Lelièvre: Oui? Je vais vous donner la chance.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Crémazie.


Évolution des ventes à l'exportation

Mme Blanchet: Pour continuer dans le même sujet que mon collègue, où on parlait d'exportation, M. Caillé, est-ce que vous pouvez nous faire un état de l'évolution, justement, des ventes à l'exportation d'Hydro-Québec depuis les 10 dernières années? Parce que j'en ai fait la lecture, là, mais je ne me souviens pas; je voulais le retrouver dans votre plan. Comment vous voyez ça aussi dans le futur, l'horizon du plan? Ou peut-être un peu déborder de cet horizon-là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, je vais donner un début de réponse pendant que mon collègue, à l'évidence, se prépare. Alors, notre objectif, c'est d'avoir une présence sur les marchés – si je fais exception de ce qui pourrait nous arriver en Ontario – d'une vingtaine de térawattheures par année. Encore une fois, il y aura ici évolution quant à comment on s'approvisionne, comment on approvisionne ce 20 TWh là. Il y a une partie de la production québécoise qui va être rapatriée sur le marché québécois, puis on va en acheter plus, d'énergie, sur les marchés extérieurs. Il pourrait arriver, en passant, qu'on l'achète en Ontario puis qu'on la vende aux États-Unis, ou l'inverse. Mais, dans notre jargon, vous me passez l'expression, on appelle ça des achats-reventes, ça veut dire des achats sur les marchés extérieurs. Somme toute, ça devrait rester dans l'ordre de 20 TWh, peut-être un petit peu plus vers la fin de la période.

Je vais demander à mon collègue ici, M. Vandal, d'apporter plus de précisions quant à la croissance possible ou enfin quant à la situation qui va prévaloir.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Mme la Présidente, peut-être d'abord situer les ventes d'exportation par rapport à l'ensemble des ventes d'Hydro-Québec. Bon an, mal an, si on prend une année comme 1998, on a vendu, en 1998, des volumes de l'ordre de 140 TWh au Québec. La même année, on vendait, hors Québec, environ 18 TWh de ventes sur des contrats long terme, sur des contrats court terme. Donc, les proportions sont des proportions qui sont plus près de 90 % au Québec, 10 % hors Québec que d'autre chose.

Ce qu'il est intéressant de signaler... Je n'ai pas, malheureusement, Mme la députée, toutes les données jusqu'aux années quatre-vingt, mais, si on prend, par exemple, en 1994, on était très près de 20 TWh hors Québec; après ça, en 1995, ça a monté un petit peu, à 24 TWh, pour redescendre en 1996, se situer tout juste en bas de la barre de 20 TWh; un petit peu plus bas en 1997, à 15 TWh; ça s'est replacé par la suite à près de 20 TWh.

Et la perspective du plan, c'est une perspective qui, encore là, est une perspective de stabilité de notre présence. Ce qui est important pour nous pour maintenir l'expertise, maintenir la reconnaissance de ces marchés-là, c'est également d'avoir une stabilité, idéalement une petite progression, mais au moins une stabilité de notre présence. Et ça, ça veut dire une vingtaine de térawattheures. Donc, on peut dire, là, que, depuis le début des années quatre-vingt-dix, on est à ce niveau-là d'une vingtaine de térawattheures de présence. Et c'est une présence importante, parce que, quand on regarde les marchés qui nous entourent, 20 TWh, c'est significatif. Donc, par rapport à l'ensemble de notre production, ce sont des proportions raisonnables. On parle de quelque chose de 90-10, mais, par rapport à ce que ça veut dire en termes de présence et de rayonnement de l'entreprise hors Québec, c'est quelque chose qui est significatif, ce qui fait en sorte qu'Hydro-Québec est un joueur majeur dans l'ensemble du Nord-Est.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de La Pinière.


Écart entre les prévisions précédentes et les résultats (suite)

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Tantôt, M. Leclair, vous nous avez expliqué que les chiffres sur lesquels Hydro-Québec s'est basée pour établir les perspectives financières n'étaient pas fiables parce que c'étaient des données un peu hors de votre contrôle, si j'ai bien compris, parce que c'est des facteurs économiques sur lesquels vous n'avez pas beaucoup de contrôle.

Aujourd'hui, on a un autre plan stratégique, avec des données sur lesquelles on ne peut pas nécessairement se fier, pour les mêmes raisons que vous nous avez données. Il n'en demeure pas moins une différence, par exemple, de l'ordre de 700 000 000 $ de moins en termes de baisse de bénéfice net consolidé. Je fais ici référence à votre plan stratégique 1998-2002, où on nous disait, à la page 54, que le bénéfice net consolidé pour 2002 serait de 1 800 000 000 $. Dans le plan stratégique que nous sommes en train d'étudier, 2000-2004, pour la même année, 2002, le bénéfice net consolidé est de 1 100 000 000 $.

Alors, c'est quand même une différence assez importante que vous pouvez peut-être expliquer par les facteurs que vous ne contrôlez pas, mais le commun des mortels et nous, comme parlementaires, on ne peut pas s'empêcher de questionner la fiabilité des données d'Hydro-Québec qui sont contenues dans le plan stratégique. Donc, il est extrêmement difficile de vous suivre et de savoir exactement où va Hydro-Québec au niveau de ses perspectives financières. Vous avez peut-être, à mon avis, surestimé le résultat des ventes aux États-Unis. Est-ce que ça peut être un facteur qui expliquerait également cette différence par rapport au bénéfice net et la baisse significative?

Deuxièmement, vous avez dit également, dans votre explication, que Hydro-Québec a dû supporter des coûts de l'ordre de 84 000 000 $ pour le verglas. Je crois qu'Hydro-Québec a également reçu des montants des gouvernements, je crois, de l'ordre de 200 000 000 $, si je ne me trompe, pour aider Hydro-Québec à reconstruire son réseau. Alors, le 84 000 000 $ dont vous avez parlé, c'est en plus de ce que vous avez reçu? Si vous pouviez nous donner des explications là-dessus.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Mme la Présidente, j'aimerais, disons, préciser ou éclaircir. Les prévisions, ce que je viens de mentionner tout à l'heure, c'est que, lorsqu'on fait des prévisions, il faut comparer des prévisions faites au même moment. D'accord? Parce que l'évolution économique change tous les jours ou change toutes les minutes.

Deuxièmement, je ne crois pas que la Caisse de dépôt fasse des prévisions sur une période de cinq ans. Il est très rare, au Canada, des institutions, Banque du Canada, les banques, les courtiers, la Caisse de dépôt, avec tout le respect – et j'ai travaillé là à mon premier emploi – de faire des prévisions sur cinq ans. Il est très difficile d'être précis et exact.

Ceci n'enlève pas le fait que nous travaillons... En ingénierie financière, je crois qu'on est à la fine pointe de la technologie. Et nous cherchons en ce moment, avec l'institut CIRANO, qui est le centre de recherche, à trouver des méthodes qui vont venir, disons, préciser puis améliorer la qualité des prévisions, pas seulement les nôtres, de l'ensemble. Est-ce que c'est les modèles qu'on change? Est-ce que nous avons les bons paramètres? Est-ce que les paramètres qu'on utilisait depuis des années sont encore valables dans un monde qui change aussi rapidement que le nôtre? Ceci étant, les prévisions ont été faites dans le meilleur de notre connaissance, et c'est vrai que ça a eu des impacts majeurs.

(15 h 20)

Je vais revenir à l'année 2002, où vous avez fait allusion à un 700 000 000 $ entre le plan A et le plan B, 1998-2002 et 2000-2004. Pour revenir aux impacts du verglas, le 84 000 000 $ dont j'ai parlé tout à l'heure, c'est la charge qui a été prise en 1998 qui correspondait à la perte d'électricité qu'on n'a pas vendue. Donc, dans les ententes gouvernementales, oui, il y a eu des versements, une aide gouvernementale d'environ 434 000 000 $. Vous trouvez ça à la page 86 de notre rapport annuel 1998. Il y a eu 434 000 000 $, dont 182 000 000 $ ont été déduits des charges, 17 000 000 $ pour réduire les frais financiers associés au financement de nouveaux équipements et 235 000 000 $ ont été soustraits des coûts d'immobilisation. D'accord? Mais qu'est-ce qui a frappé Hydro-Québec, ou qu'est-ce qui a affecté, je devrais dire, son bas de page 1998, c'est de l'ordre de 84 000 000 $. Mais il y a eu des sommes qui ont été avancées pour fins de rebâtir notre réseau, dont M. Caillé parlait tout à l'heure.

En ce qui concerne l'impact de 700 000 000 $ pour l'an 2002, parce que c'est le seul qu'on peut comparer: l'augmentation des frais financiers et le taux de change. Je n'ai pas d'autres raisons. Les prévisions – parce que ça demeure encore des prévisions, et on n'est pas rendu encore à l'an 2002; espérons que le dollar canadien va s'apprécier et continuer le bon travail qu'il a fait: il y a un écart de 265 000 000 $ ou 300 000 000 $, mettons. Si vous regardez au niveau des charges d'exploitation – et je suis toujours au consolidé, là – on parle d'une centaine de millions, qui se divisent à peu près 50-50 entre les frais associés au nouveau mandat salarial qu'on a négocié à l'automne dernier et une cinquantaine ou une soixantaine de millions qui sont associés aux dépenses qu'on va faire pour la qualité du service, je pense, qui a été élaborée par M. Filion et M. Caillé au cours de cette session. Vous avez toujours notre prudence budgétaire pour fins d'aléas hydrauliques, qui compte pour 420 000 000 $. Et les autres produits. La commercialisation qui avait été prévue dans l'ancien plan, qui a été revue, qui compte pour à peu près entre 35 000 000 $ et 50 000 000 $.

Donc, vous avez une réconciliation des principaux éléments qui ont affecté ou qui affectent les prévisions ou les résultats anticipés dans le plan 1998-2002 et ceux avancés dans le plan 2000-2004. Encore là, on tourne toujours autour des mêmes grandes variables. Le dollar canadien, c'est un élément qui est très important pour nous, mais on prend les mesures nécessaires. On a des mandats de gestion très serrée qui nous permettent de réduire la volatilité. On ne peut pas éliminer tout à fait le risque de change, mais on peut diminuer la volatilité, et c'est le mandat que je prends ou que je reçois tous les ans de notre conseil d'administration.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Je voulais juste ajouter, pour rassurer les membres de votre commission, madame, que, en termes de gestion financière, au jour le jour, les gestes qui sont posés, c'est en fonction de la situation réelle. À chaque année, par exemple, toujours dans cet objectif de stabilité, il y a une gestion qui est faite de notre dette pour assurer le maximum de risques possible en termes de fluctuation, un chiffre qu'on établit avec le comité de vérification du conseil d'administration, dont c'est le mandat, la mission au sein du conseil d'administration.

Par ailleurs, quand on regarde loin – et mon collègue a raison ici de dire, évidemment, plus on regarde loin, moins c'est précis – il n'y a pas nécessairement des gestes qui sont posés ici en partant de ces hypothèses-là, où on pourrait dire: On va se tromper, et là on va dépenser des sommes d'argent, on va engager des dépenses qui vont par la suite être plus grandes, et on va les regretter. On fait les prévisions pour dire à chacun, pour se conforter, autant du point de vue de l'actionnaire que du client, n'est-ce pas: stabilité tarifaire. Mais ça ne veut pas dire qu'on pose tous les gestes demain matin pour dans deux ans, pour dans trois ans, sur la base de ces prévisions-là. Notre collègue ici, même s'il n'a pas toujours de succès dans ses prévisions, il en fait régulièrement. Alors, il va continuer à en faire régulièrement, au fur et à mesure qu'on avance dans le temps. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui. Alors, Mme la députée de La Pinière.


Charges d'exploitation

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais avoir quelques explications sur le poste de charges d'exploitation. Comment il est ventilé? Ça comprend quoi exactement? Je suis à la page 54 du plan stratégique.

M. Caillé (André): Je vais commencer l'explication de ce que je sais de mémoire, puis mon collègue va vous donner les chiffres. Alors, dans les charges d'exploitation, il faut comprendre tout de suite que l'on consolide déjà les charges d'exploitation d'entreprises filiales, par exemple, comme Gaz métropolitain. D'accord? Alors, évidemment, si eux augmentent beaucoup, si vous regardez le total, ça va se refléter au niveau de l'augmentation. Je vais vous parler seulement d'Hydro-Québec, je ne connais pas les autres. Il va vous trouver ça. Au niveau d'Hydro-Québec, je pense que la croissance totale sur les cinq ans, c'est 100 000 000 $ dans la dernière année.

Mme Houda-Pepin: Je voudrais savoir la ventilation, c'est-à-dire ça comprend quoi, charges d'exploitation?

M. Caillé (André): Alors, il va vous la donner à l'instant.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup.

M. Caillé (André): Ce que je voulais juste préciser, c'est que...

Mme Houda-Pepin: Les chiffres, je les ai au plan stratégique. Je veux savoir les détails de ce que ça comprend, charges d'exploitation.

M. Caillé (André): Ah! Vous les avez peut-être déjà. Je ne sais pas.

Mme Houda-Pepin: O.K., merci.

M. Caillé (André): Très bien.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, là, c'est M. Leclair?

M. Caillé (André): Oui.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Mme la Présidente, par exemple, si on prend l'an 2000, vous avez 1 925 000 000 $ au consolidé. Pour Hydro-Québec seule, vous avez 1 691 000 000 $, dont 1 100 000 000 $ est la masse salariale des employés d'Hydro-Québec. L'autre 500 000 000 $... Laissez-moi réfléchir un peu, blanc de mémoire.

(Consultation)

M. Leclair (Daniel): Donc, tous les autres frais reliés à l'achat, disons, d'équipements pour servir la clientèle, donc notre équité d'achat, et les différentes dépenses reliées au fonctionnement de l'institution.

Mme Houda-Pepin: O.K.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Alors, si je reviens à la comparaison entre les plans stratégiques 1998-2002 et 2000-2004, je constate qu'il y a une sous-estimation dans le plan stratégique, le premier, en tout cas une augmentation des charges d'exploitation.

Tantôt, vous nous avez expliqué que la raison pour laquelle vous avez surestimé les bénéfices à hauteur de 700 000 000 $, c'est parce qu'il y avait des facteurs externes que vous ne contrôlez pas. Là, vous me parlez de salaires, vous me parlez d'achat d'équipements, des choses qui peuvent être estimées et évaluées à une hauteur assez raisonnable par une grande entreprise comme Hydro-Québec.

Alors, quels sont les autres facteurs que vous ne contrôlez pas dans les charges d'exploitation qui font que vous êtes passés de 1 600 000 000 $, selon le plan stratégique n° 1, à 1 900 000 000 $ pour 1999, 1 900 000 000 $ pour 2000, 1 900 000 000 $ pour 2001 et 2 000 000 000 $ pour 2002, alors que, dans votre plan stratégique, vous étiez situés à 1 600 000 000 $?

M. Leclair (Daniel): D'accord. Donc...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Excusez-moi, Mme la Présidente. Lorsque vous regardez le plan stratégique, on parle d'Hydro-Québec consolidée. Comme M. Caillé le disait tout à l'heure, donc, en termes de comptabilité, vous avez les dépenses qui s'appliquent à Hydro-Québec et famille, donc l'ensemble de ses filiales et activités.

(15 h 30)

Donc, si vous prenez, dans le plan stratégique 2000-2004, la croissance des dépenses, Hydro-Québec consolidée compte pour à peu près 9,2 %; Hydro-Québec seule, Hydro-Québec au Québec, les activités de base au Québec, c'est 0,6 %, 60 points de base d'augmentation en moyenne au cours du plan; et 8,3 % pour les filiales et participations. Donc, filiales et participations, on inclut Noverco, qui est consolidée de façon proportionnelle, vous avez les activités de HQI, vous avez les activités dans les différentes filières: Hydro-Québec CapiTech, TransÉnergie. Donc, vous consolidez l'ensemble des activités dans les filiales, et c'est là que la grande augmentation vient, parce qu'il y a des projets de développement que nous avons prévus, de l'expansion qu'on a prévue au cours du plan 2000-2004.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure, tout en vous rappelant qu'il reste à peu près cinq minutes à ce bloc-ci.

Mme Normandeau: Oui, Mme la Présidente. M. Leclair, c'est ça? Vous venez d'ouvrir une porte intéressante qui pourrait peut-être nous faire comprendre davantage pourquoi en fait le trois quart de la hausse des charges d'exploitation est attribuable aux filiales. Parce que, si on fait la différence entre les coûts qui sont aux Charges d'exploitation moins les coûts qui sont à la ligne Excluant filiales et participation, donc on arrive au résultat que le trois quart de l'augmentation des charges exploitation est dévolu aux filiales.

Alors, je pense que c'est très important, compte tenu des montants qui sont en cause. Il y a beaucoup de questions qui se posent: Est-ce qu'il y a un contrôle des coûts sur les filiales? De quelles filiales très précisément on parle? Est-ce qu'on peut avoir une ventilation très détaillée de ces coûts-là en fonction des différentes filiales ou de ce que vous appelez la famille, dans le fond, d'Hydro-Québec? Et qu'est-ce qui explique justement que les charges des filiales passent de 261 000 000 $ à 219 000 000 $ de 1999 à 2001, pour monter en flèche par la suite donc jusqu'à 389 000 000 $ en 2004?

Évidemment, il y a des questions importantes qui se posent. Là, vous allez nous livrer une série de chiffres en à peu près deux minutes et demie; bien, ce serait intéressant d'avoir un beau tableau complet avec tout ça pour qu'on puisse regarder ça avec beaucoup d'attention par la suite.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Mme la Présidente, lorsque vous parlez de «si on a un contrôle sur nos charges d'exploitation», je crois que pour Hydro-Québec, au cours des dernières années et au cours du plan, il est démontré très clairement que nous avons un contrôle adéquat. Au niveau des filiales – lorsque je parle de filiales, je parle de Noverco, je parle de Gaz Métropolitain, je parle de nos partenaires, Enbridge. Parce qu'il ne faut pas oublier que nous prenons la proportion que nous avons dans chacune de ces compagnies-là.

M. Caillé parlait, au début de la commission, que nous détenons environ entre 10 % et 11 % des actions en cours de Enbridge. Donc, lorsqu'on va venir consolider les chiffres pour Hydro-Québec consolidé, nous allons tenir compte: 10 % des ventes que Enbridge fait, et la famille Enbridge, qui inclut Consumer Gas, en Ontario, qui est la similaire de Gaz Métropolitain, donc nous allons prendre, ligne par ligne, notre 10 %; la proportion que nous détenons dans Gaz Métropolitain, on va prendre 10...

Une voix: ...

M. Leclair (Daniel): ...ou 50 %, je m'excuse. Je change de compagnie, de chacune des lignes de leurs états financiers, et c'est là que vous arrivez avec des chiffres qui démontrent une croissance de 8,3 pour l'ensemble des charges d'exploitation, Hydro-Québec consolidé. C'est des corporations qui ont des plans, des plans de développement, des corporations qui vont livrer un bénéfice, donc c'est ça qui vient faire l'impact.

On a parlé de HQI qui a un programme de développement au cours des cinq prochaines années. On a parlé de CapiTech qui veut investir et avoir un retour de 20 %. Donc, tous les investissements que ces différentes filiales là vont être considérés dans les états consolidés.

Mme Normandeau: Mme la Présidente, tout simplement pour rassurer l'ensemble de mes collègues, on va nous donner toute l'information sur papier, avec les détails, justement des résultats des différentes filiales?

M. Leclair (Daniel): Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Nous attendons donc de recevoir au secrétariat des commissions les documents qui sont demandés.

M. Leclair (Daniel): Concernant les charges d'exploitation. Merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Moi, je vais vous proposer une suspension. Mais auparavant, je viens d'entendre sonner un cellulaire; alors, je demanderais à tous les gens qui sont ici, qui ont des cellulaires en leur possession, de les fermer, s'il vous plaît. C'est absolument intolérable, là. Je ne veux pas entendre de cellulaire sonner durant les travaux de la commission. Là-dessus, je suspends les travaux pour une dizaine de minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 34)

(Reprise à 15 h 48)

Le Président (M. Sirros): Est-ce que je peux demander à tout le monde de reprendre place? Si vous voulez bien, on va reprendre nos travaux puis entamer en quelque sorte le dernier stretch, dernier sprint de nos travaux, ce qui va nous amener jusqu'à 17 h 30 pour les remarques de clôture. Actuellement, si mes informations sont exactes, selon la secrétaire qui me les fournit toujours très exactement, la parole est au ministre.


Estimation de la consommation domestique

M. Brassard: Merci, M. le Président. Alors, dans le plan stratégique 2000-2004, on se rend compte qu'Hydro-Québec a modifié, je pense qu'on peut dire comme ça, sa stratégie d'exportation, par rapport à celle du plan précédent, pour maintenir son programme d'investissements à une hauteur de presque 12 000 000 000 $, dans le nouveau plan. Il y a certains analystes du secteur de l'électricité qui pensent et qui affirment qu'Hydro-Québec surestime, par rapport à ce programme d'investissements, la demande québécoise d'électricité. Je pense que c'est un point majeur qui mérite d'être clarifié, je n'appellerais pas ça une accusation, mais cette affirmation de certains, qu'il y a de la part d'Hydro-Québec surestimation de la demande domestique interne.

(15 h 50)

Est-ce que vous pouvez nous expliquer, à partir de là, sur quelles bases s'appuient les prévisions de la société d'État, les prévisions de demande, et comment ça se compare avec celles des entreprises publiques d'électricité de notre environnement, particulièrement du Nord-Est des États-Unis? De façon plus particulière, est-ce que les prévisions de l'entreprise au niveau du secteur industriel, par exemple... comment sont-elles fondées pour ce qui est de la demande du secteur industriel?

En d'autres termes, vous prévoyez des investissements massifs, majeurs, dans des projets d'envergure, ça veut dire presque 12 000 000 000 $ d'investissements sur la durée du plan. Ça, ça s'appuie sur des prévisions de demande à l'interne, québécoise. Comment en êtes-vous arrivé à fixer ces niveaux de demande, puisque, encore une fois, il y a des doutes chez certains analystes qui prétendent que vous avez gonflé la demande québécoise pour justifier des investissements massifs? On pense au projet dont on a déjà parlé, développement du bas Churchill. Est-ce que vous pourriez clarifier ces questions-là puis préciser davantage sur quoi vous vous êtes appuyé, fondé pour prévoir un pareil plan d'investissements?

M. Caillé (André): Eh bien, M. le Président, je demanderais à mon collègue de donner les éléments de réponse à cet égard, il était responsable de la préparation du plan au moment où ces prévisions ont été faites.

M. Vandal (Thierry): M. le Président, donc: Comment? Je vous dirais d'abord: avec prudence. Parce que ces prévisions-là, après ça, servent à engager certaines actions dans l'entreprise et le déploiement des ressources de l'entreprise. Ceci étant, il y a un contexte, qui est un contexte assez favorable, qui ajoute à cette prudence requise sur la période du plan. Je m'explique.

Sur la période du plan, on prévoit des augmentations sur le marché québécois de l'ordre de 17 TWh. C'est concentré dans deux grands secteurs. Le secteur industriel, où on parle d'une dizaine de térawattheures est plus facilement, prévu parce qu'on parle d'un nombre limité, d'une ventilation plus limitée de projets qui sont des projets à très forte consommation.

Prenons, par exemple, une aluminerie comme l'aluminerie d'Alma, bien, je veux dire, on parle, si ma mémoire est bonne, de 3 TWh, à Alma. Donc, déjà, du 10, il y en a trois qui s'en vont à Alma. Magnola, c'est 1 TWh; donc, à Magnola, déjà, je veux dire, on est certain qu'il va y avoir 1 TWh. Donc, il y a une part importante du 10 TWh qui, à toutes fins pratiques, est acquise dans la mesure où c'est des choses qui sont largement engagées.

L'autre partie, l'autre 7 TWh, c'est de la croissance qui se fait dans les secteurs, disons, de la consommation plus large, c'est-à-dire les secteurs résidentiel, commercial et petite industrielle. Et de ce côté-là, s'il y a un élément – et mon collègue Yves Filion pourra ajouter au besoin – que je dois vous souligner, c'est qu'entre le moment où on a commencé à faire les prévisions pour le cycle de planification actuelle, planification stratégique actuelle pour 2000-2004, et le mois de janvier 2000, la tendance a été plutôt d'excéder la trajectoire qu'on avait anticipée. Autrement dit, en clair, l'économie au Québec performe d'une façon qui met de la pression plutôt légèrement à la hausse par rapport aux prévisions. Donc, les prévisions aujourd'hui nous paraissent d'autant plus conservatrices sur le marché québécois.

Mais là où le facteur de prudence est, je pense, encore plus assuré, c'est qu'il y a un autre phénomène qui arrive sur cette période-là, la période de cinq ans. C'est qu'au même moment où on connaît une croissance – et on doit s'en féliciter – du marché québécois, parce que le marché québécois, c'est notre marché premier, au même moment on connaît une période de terminaison, de fin de contrats long terme sur les marchés hors Québec. Donc, les marchés contractés, pour lesquels on a des obligations fermes hors Québec, passent de 16 TWh à 2 TWh sur la période, une baisse de 14 TWh. Si le marché québécois – et ce n'est pas ce que l'on souhaite, ce n'est pas ce que l'on croit – devait performer un peu moins bien, il serait facile de placer cette énergie-là sur les marchés hors Québec, comme on le fait depuis toujours, de le placer à partir de nos moyens propres de production ici, au Québec, et de le faire le temps que la demande au Québec prenne le relais.

Ce que l'on va faire pour maintenir notre présence des marchés hors Québec en 2004, on va maintenir une présence – je le mentionnais un peu plus tôt – de 20 TWh. Mais, de ce 20 TWh là, il va y en avoir uniquement 7 TWh qui va être notre propre production. Si le marché québécois performe un petit peu moins bien, bien, plutôt que d'avoir 7 TWh que l'on produit nous-mêmes pour exporter, il va y en avoir quelques terawattheures de plus. Donc, il y a un effet ici de vases communicants qui est à l'avantage de la clientèle, qui est à l'avantage bien sûr de l'actionnaire et de l'entreprise, parce que ça nous donne une souplesse additionnelle pour faire face aux aléas de croissance du marché principal qui est notre marché au Québec.


Stratégie en matière d'exportation

M. Brassard: Ça veut donc dire qu'il y a aussi un lien... Je pense que ce que vous expliquez nous confirme qu'il y a un lien étroit avec les changements qui interviennent sur le marché de l'exportation. Est-ce que j'interprète bien vos propos en disant que l'ère des contrats à long terme, de vente ferme, est révolue et qu'Hydro-Québec n'a pas l'intention de s'engager à long terme dans des ventes sur les marchés extérieurs d'un grand nombre de térawattheures et donc de plutôt se limiter, en termes d'exportation, sur les marchés à court terme et même les marchés très, très à court terme, le marché spot, là, de se limiter à ces marchés-là?

M. Vandal (Thierry): M. le Président, c'est tout à fait exact. Et, encore là, c'est un développement. Ces changements structurels dans les marchés de l'électricité en Amérique du Nord, c'est un changement qui nous est favorable. Parce que, encore là, si la croissance au Québec était légèrement moins forte, contrairement au passé, on n'aurait pas à dépendre de gens, de clients qui veulent s'engager avec nous pour de très longs termes. Et ça, ce n'était pas toujours facile de trouver des gens, par le passé, qui étaient prêts. On l'a vu, par exemple, avec l'État de New York à une certaine période. C'est toujours plus difficile de signer des contrats de long terme.

Aujourd'hui, on n'a plus cette difficulté-là. Aujourd'hui, si l'énergie et la croissance ne sont pas au rendez-vous, on peut placer cette électricité-là d'une façon extrêmement simple dans des marchés qui sont des marchés justement de très court terme, on dit «les marchés spot». Comment ça fonctionne? Essentiellement, ça fonctionne avec des bourses d'échange physique d'électricité. Il y en a une qui est concentrée sur le marché de New York, il y en a une sur le marché de la Nouvelle-Angleterre, il y en aura une bientôt sur le marché de l'Ontario, qui s'ouvre.

Ces bourses-là nous permettent, sur une base même horaire, de placer de l'énergie de telle sorte que, par exemple, une semaine comme la semaine d'il y a deux semaines où il y avait une pointe de consommation au Québec, on continuait néanmoins de faire en sorte que, si la demande au Québec fléchissait un petit peu, on utilisait de façon instantanée les surplus, la capacité de production, pour placer à des prix fort avantageux sur cette bourse d'échange physique de New York. Et ça, c'est une façon – et c'est un des axes majeurs du plan – de rentabiliser, d'optimiser l'utilisation des actifs à l'avantage de l'ensemble de nos clients ici, au Québec, et de faire en sorte justement de contribuer par ces marchés à cette période de stabilité tarifaire et de croissance de rentabilité que l'on souhaite être la plus longue possible.

M. Brassard: Je veux bien comprendre, mais – il y en a peut-être quelques-uns qui nous écoutent, là, pour qu'ils comprennent bien – il y a maintenant ce genre de bourse d'électricité, d'énergie électrique. Et, à Hydro-Québec, à Montréal, à votre siège social, il y a une équipe, j'imagine, d'acheteurs et de vendeurs reliés à ces bourses et qui savent, à la minute près ou presque, le prix de l'énergie sur la Bourse de New York, le prix de l'énergie sur la Bourse... il va y en avoir une à Toronto, ce que vous dites, et en Nouvelle-Angleterre, et puis qui, à ce moment-là, savent que c'est intéressant de vendre ou d'acheter. Et ça se fait comme ça, là, quotidiennement.

(16 heures)

Et c'est de cette façon-là que les activités d'exportation d'Hydro-Québec s'avèrent rentables. Donc, ça génère des bénéfices. Ce n'est pas une charge et un fardeau pour les consommateurs québécois, c'est un bienfait. Ça rapporte, contrairement à ce que certains pensent, je veux dire. Certains prétendent, ils disent: Bon, les exportations, c'est à la charge des consommateurs québécois. C'est le contraire. Ce que vous me dites, c'est que ça génère des profits pour le plus grand bien des consommateurs québécois.

M. Vandal (Thierry): M. le Président, c'est effectivement quelque chose qui contribue à la rentabilité de l'entreprise et à l'enrichissement collectif, dans la mesure où on est capable de réaliser là des revenus qui excèdent une décision alternative qui aurait été de conserver cette eau-là pour la placer sur un marché, par exemple – on prend l'exemple, c'est une référence, c'est un prix de référence – le tarif de la grande entreprise. Donc, quand ce choix-là est fait, il est fait d'une façon qui vise à réaliser un gain additionnel par rapport à une vente qui aurait pu être réalisée et qui sera satisfaite de toute façon, pour l'ensemble de la clientèle, ici, au Québec.

Et ça, c'est le propre justement de ces bourses qui ont émergé. C'est très récent, hein? La Bourse de New York, c'est un développement que l'on anticipait déjà dans notre dernier plan, mais qui est en place, cette Bourse de New York là, depuis l'automne 1999. Et certainement la performance des premiers mois est fort encourageante pour l'entreprise. On a donc une équipe qui fonctionne justement comme des cambistes, comme – l'expression anglaise, si vous me la permettez – des traders, comme se transigent d'autres commodités, le grain, d'autres commodités, là, qui sont transigées sur les marchés internationaux. Donc, des cambistes qui sont en mesure de suivre de façon très précise l'évolution des prix.

Et, comme l'électricité est un marché qui a une volatilité très forte parce qu'il n'y a pas vraiment, à part Hydro-Québec et ses réservoirs, des moyens de stocker l'électricité, c'est quelque chose qui se consomme en temps réel. Tant que les gens, je crois que je le mentionnais l'autre jour, vont dormir la nuit et vont connaître une pointe de consommation le matin en se préparant pour aller au boulot et en fin de journée lorsqu'ils reviennent à la maison puis qu'ils mènent l'ensemble de leurs tâches, de leurs activités à la maison, on va connaître ces pointes-là. On va connaître également des pointes qui sont le phénomène tout simplement de facteurs climatiques, des pointes de consommation qui sont associées à la qualité de vie également, la qualité de vie qui est souhaitée par l'ensemble de la clientèle, la climatisation l'été, un chauffage adéquat l'hiver.

Donc, ça, ça nous donne des pointes qui nous permettent, grâce à des actifs, où on peut vraiment choisir... Et c'est ce qui est unique à Hydro-Québec, on peut choisir le moment où on produit, sans par ailleurs avoir à payer un coût pour une décision d'attendre. Et ça, c'est majeur. D'autres producteurs doivent produire à tout instant; s'ils ne produisent pas, il y a une perte pour eux, il y a une perte immédiate, il y a des coûts. Nous, il n'y a pas de coût marginal. Décider de laisser l'eau derrière le réservoir, c'est quelque chose qui n'entraîne pas comme tel une dépense. Donc, on peut choisir, d'une façon qui est vraiment quasi unique, les moments où on lance cette énergie-là sur les marchés, et on peut donc être vraiment très, très ciblé sur les périodes où on réalise des transactions avec les marchés hors Québec.

M. Brassard: Comme c'est un phénomène récent que ce phénomène des bourses d'énergie et qu'Hydro-Québec est d'abord présent dans l'hydroélectricité avec ses barrages et ses réservoirs d'eau, ça vous permet également, ça nous permet de valoriser ces actifs-là, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années. Ce n'était pas le cas il y a quelques années.

M. Caillé (André): Et, si vous me permettez, M. le Président, c'est un des moyens importants que nous utilisons pour améliorer le rendement plutôt, encore une fois, que d'augmenter les tarifs. Pour ceux qui se demandent où est le mystère, comment se fait-il que le rendement augmente avec des tarifs stables, voilà une partie de la réponse. Et, encore une fois, les gens qui font des projections de revenus des ventes d'Hydro-Québec en prenant des prix moyens sur les marchés n'ont pas la réalité des choses. Hydro-Québec, on ne vend pas au prix moyen puis on ne vend pas au prix de bas non plus; on attend, on connaît les cycles, puis on vend au prix le plus élevé.

Et ça, ça se passe... mon collègue vous l'a déjà dit, c'est en temps réel, tout ça. Il y a trois groupes: il y a les vendeurs, il y a ceux qui font les prévisions, et des prévisions très immédiates, ils n'ont pas le problème de mon voisin, ici, à essayer de faire des prévisions pour cinq ans, là, c'est des prévisions pour la journée, O.K., puis il y a les comptables qui font les factures puis qui envoient les factures à la fin de la journée puis qui comptent les revenus. Tout ça se passe en temps réel. Ce n'est pas une affaire qu'on fait des prévisions, puis on va dire: On va vendre tant dans un mois. Il n'y a pas de choses comme ça qui se font. Ça se fait jour par jour, heure par heure, et la nuit, même. Tout le temps.

Une voix: C'est unique.

M. Vandal (Thierry): M. le Président, si vous permettez, c'est une activité, aussi, qui coïncide avec un développement intéressant dans l'ensemble des marchés financiers. Si on regarde l'évolution, par exemple, du secteur financier, la Bourse de Montréal qui se dirige, enfin dans un certain niveau, vers des produits qu'ils appellent des produits dérivés, le marché des options, etc., il y a ici une convergence intéressante d'expertises et de formations qui va pouvoir se faire pour avoir des personnes qui peuvent travailler dans ce métier-là, qui est un métier extrêmement intéressant. Ça prend des gens qui sont capables de faire justement des modèles mathématiques extrêmement précis, ça prend des gens qui ont des capacités transactionnelles, ça prend des gens qui ont des capacités d'intégration d'informations à travers des plateformes technologiques, et ça, c'est une activité, et ça fait partie des choix que l'on est en train d'effectuer.

Ça fait partie d'une activité qui vraiment est au coeur de la rentabilité actuelle et future d'Hydro-Québec. C'est vraiment, je pense, un créneau dans lequel il n'y a aucune raison qu'Hydro-Québec ne soit pas vraiment, là, parmi les leaders mondiaux, avec des actifs d'une très, très grande qualité. Et on souhaite, au cours des prochains mois et des prochaines années, pouvoir recruter des personnes pour s'intégrer à cette activité-là et la faire développer d'une façon qui coïncide avec l'émergence de ces bourses.


Participation au développement hydroélectrique du Labrador (suite)

M. Brassard: Je voudrais revenir à un sujet qu'on a abordé mardi en après-midi, on a échangé sur plusieurs aspects d'un projet majeur qui est en discussion avec Terre-Neuve, qui est le projet du bas Churchill, l'aménagement du bas Churchill, et ça porte plus particulièrement non pas sur le volet production, mais sur le volet transport. Parce qu'il va y avoir des lignes de transport évidemment qui vont devoir être construites. Vous avez même parlé d'en profiter pour boucler, donc pour augmenter le niveau de sécurité d'approvisionnement, faire le bouclage, comme on le fait dans certaines régions qui ont été touchées par le verglas puis qui n'étaient pas bouclées.

Parce qu'on peut s'interroger évidemment sur le fait que cette infrastructure de transport afférente au projet de Gull Islands soit réalisée en faisant porter le fardeau de ses coûts sur des catégories de clientèles domestiques, clientèles québécoises. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur l'infrastructure de transport qui est prévue, particulièrement en ce qui a trait au raccordement de la centrale de Gull Islands et aux marchés qu'elle va desservir? Est-ce que vous pourriez nous informer sur les marchés que permettra de desservir cette infrastructure de transport? Parce que certains prétendent que ça va être fait surtout pour des fins d'exportation. Alors, est-ce que vous pourriez clarifier cette question-là qui m'apparaît quand même majeure dans le dossier du projet du bas Churchill?

M. Vandal (Thierry): Alors, il y a deux volets à votre question, M. le Président. Il y a d'abord le volet des infrastructures de transport. De quelle nature sont-elles? Qui en porte les coûts? Et quels sont les avantages pour l'ensemble des clients au Québec? C'est le premier volet.

Il y a l'autre volet qui est: D'accord, c'est un grand projet, mais qu'est-ce qui va se passer avec cette électricité-là? Où va aller cette électricité-là?

(16 h 10)

Le premier volet d'abord, il faut distinguer deux éléments, le volet transport. Le fait de réaliser des investissements majeurs, comme ceux qui seront réalisés par mon collègue Yves, responsable du réseau de TransÉnergie, ça se fait dans l'émergence justement de ces grandes plateformes de transport à tarif intégré, les RTO, dont on parlait un peu plus ce matin. En faisant ce grand investissement là, on l'évoquait l'autre jour, on va également pouvoir faire bénéficier à la collectivité des usagers de certains avantages. Par exemple, le bouclage du réseau du Labrador, c'est à l'avantage de tous les utilisateurs. Le fait de faire transiter plus d'énergie sur l'ensemble du réseau, bien, il y a une partie de coûts fixes, hein, de charges qui peut être répartie sur des volumes plus grands. Donc, il y a une partie de coûts qui est étalée sur de plus grands volumes.

Mais là où une inquiétude tout à fait légitime pourrait exister, c'est de dire: Oui, mais attention, ça coûte très cher, cet investissement-là, et est-ce que, en définitive, ce n'est pas les clients québécois – le client résidentiel, le client commercial, le client industriel – qui vont faire les frais de cette chose-là?

Ce que je peux dire, M. le Président, c'est que ce projet-là, de la façon qu'Hydro-Québec souhaite le réaliser – c'est un projet potentiel, avec des partenaires – ça peut se réaliser sans qu'il y ait d'impact tarifaire pour la clientèle du Québec. Autrement dit, il y a moyen de réaliser cet investissement-là, et la qualité de la production est telle qu'il y a moyen que les investissements se fassent sans qu'il y ait de pression à la hausse qui serait transférée sur des catégories de clientèles comme le secteur résidentiel, le secteur commercial ou le secteur industriel québécois. Et c'est ça, l'objectif que l'on poursuit actuellement.

Je peux vous dire qu'il y a des discussions qui se poursuivent dans ce sens-là. Hier, justement, j'ai eu l'occasion de continuer ces échanges. Donc, l'objectif, il peut être atteint. Il y a moyen de réaliser ce projet-là en assurant que la clientèle québécoise soit tenue indemne d'effets d'augmentation à la hausse du transport. Ça, c'est le volet transport.

Le volet marché est important. Cette énergie-là, l'ensemble de l'énergie qui va être produite au Labrador à la fois par la dérivation Romaine en ajout à la centrale existante des Churchill Falls, mais également à cette centrale de Gull Islands, toute cette énergie-là est achetée par Hydro-Québec. C'est un élément de plus dans le portefeuille d'approvisionnement d'Hydro-Québec, comme l'est la centrale actuelle de Churchill Falls. Et cette énergie-là va être utilisée pour servir des besoins qui sont des besoins qui correspondent à l'ensemble du marché régional.

En pointe d'hiver, c'est bien certain que l'essentiel de cette énergie-là va servir les marchés ici, au Québec, mais c'est également vrai que, durant les pointes d'été, une partie importante de cette énergie-là va trouver sa place sur des marchés où les prix sont forts, par exemple les prix de New York, les prix de la Nouvelle-Angleterre.

Hydro-Québec va utiliser cette énergie-là d'une façon qui est optimale d'un point de vue commercial. On s'est placé dans un rôle d'intermédiaire et on est compensé comme intermédiaire et on peut utiliser cette énergie-là comme intermédiaire vis-à-vis le producteur au Labrador pour réaliser une optimisation qui est une optimisation qui va bien servir, encore là, la stabilité tarifaire au Québec. Donc, il y a énormément d'avantages parce qu'on se place dans le siège du conducteur de cette énergie-là.

M. Brassard: En d'autres termes, vous allez la payer à un prix fixe et pouvoir la vendre à des prix beaucoup plus élevés dans bien des cas.

M. Vandal (Thierry): Un élément important justement, si on parle des prix. Hydro-Québec a deux rôles ici, dans ce projet-là. On est à la fois investisseur, donc on fait de l'argent en investissant dans les nouvelles installations... Plus les prix sont élevés, en principe, plus ce volet-là est rentable. Mais, par ailleurs, Hydro-Québec ne souhaitait pas prendre de risques indus. Ce sont de longues périodes. Les producteurs qui veulent s'engager sur des prix fixes long terme, il n'y en a plus; de la même manière, il aurait été pour le moins imprudent pour Hydro-Québec d'acheter cette énergie-là sur un prix fixe ou un prix indexé long terme.

Ce que l'on fait, c'est qu'on achète cette énergie-là basé sur ce que l'on appelle des prix de revient, des «net back» à la centrale, basé sur un panier de prix en temps réel, avec un effet, après ça, de ramener ces prix-là au point de production en y déduisant une série de coûts comme le transport. Ce qui fait en sorte que c'est de l'énergie qui est très attrayante au point de production, mais de l'énergie qui fluctue avec les marchés, de telle sorte qu'Hydro-Québec ne prend pas de risque ici.

Si les prix sont élevés, Hydro-Québec est en mesure de transférer ce risque-là. On est payé pour faire ça. On réalise de l'argent en jouant ce rôle d'intermédiaire là. On a essentiellement évité de prendre un risque de marché sur une perspective de long terme.

Donc, c'est un équilibre où il y a de la valeur qui se crée à bien des endroits, mais où, ce qui est essentiel, c'est qu'Hydro-Québec se met dans le siège du conducteur pour décider où cette énergie-là peut être placée en temps réel à chaque heure, à chaque jour, à chaque semaine pour les années où ça se reproduit.

Le Président (M. Sirros): Je vais passer la parole à Mme la députée de Bonaventure.


Bénéfices anticipés

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Tout à l'heure, M. Leclair, vous avez affirmé que vos prévisions ont été faites en juin ou juillet 1999, enfin, c'est ce qu'on a cru comprendre. Est-ce que vous pensez aujourd'hui que vos prévisions sont encore bonnes, compte tenu que les données s'appuient sur des informations d'il y a déjà plusieurs mois?

M. Leclair (Daniel): M. le Président, nos prévisions, comme vous l'avez mentionné vous-même, le dollar canadien, on l'a sous-estimé. Je crois qu'avec les dernières données que nous avons en termes d'économie mondiale, américaine, canadienne... On voyait le Conference Board qui prévoyait un taux de croissance important, légèrement plus bas que 1999, mais 2000 demeure très intéressant. Il ne serait pas surprenant de voir la banque centrale canadienne resserrer légèrement l'étau, le gouvernement fédéral relâcher sa politique fiscale. Donc, c'est tous des éléments qui doivent favoriser un dollar plus fort. Pour nous, c'est intéressant, compte tenu de la charge qui est reliée au dollar.

La performance de la Bourse canadienne, des commandités, fait qu'on commence à attirer, depuis à peu près six mois, des investisseurs étrangers, des gens qui prennent des dollars américains ou des euros qu'ils convertissent en dollars canadiens et achètent des actions canadiennes. Donc, ça crée un besoin de dollars canadiens, donc automatiquement une appréciation. La commodité est bonne dans l'aluminium. Je l'ai dit tout à l'heure, c'est un élément important dans la gestion. Les prix sont à la hausse. Alcan a annoncé de nouveaux projets. Alcoa, la semaine dernière, a ouvert de nouvelles productions au niveau mondial. Donc, l'économie mondiale, elle est bonne, et nous croyons que nos prévisions actuelles sont peut-être conservatrices en termes de résultats qu'on va observer au cours des prochains mois.

Mme Normandeau: À ce moment-là, M. Leclair – c'est ce que je cherche à savoir – quel est l'impact sur les bénéfices qui sont anticipés, compte tenu que ça va, selon ce que vous semblez dire, plutôt bien? Alors, quel est l'impact sur les bénéfices qui sont anticipés?

M. Leclair (Daniel): L'impact pourrait être intéressant, M. le Président. J'aimerais vous expliquer la façon dont on gère. On gère nos différents risques financiers, depuis environ quatre ans, avec une approche de portefeuille. Je n'irai pas en détail des techniques qu'on utilise, mais ça nous permet d'optimiser les couvertures que nous prenons soit sur la devise, sur l'aluminium ou les taux d'intérêt, parce que nous sommes un des grands utilisateurs de produits dérivés. M. Vandal parlait des marchés de l'énergie qui se développent; les marchés financiers ont développé des produits, et nous en sommes de grands utilisateurs.

À vous donner un résultat pour la fin de l'année – je me rappelle mon patron qui me demande tout le temps ce que ça va donner, le dollar s'améliore, puis ainsi de suite – c'est quoi? Dans le moment, ça va bien. On a un mandat, par le conseil, qu'on est limité à des risques maximums. Parce qu'on ne fait pas de spéculation; on gère la volatilité, on gère le risque. Il faut optimiser notre gestion.

Dans le moment, ça va bien, mais c'est seulement des résultats papier. C'est comme notre portefeuille d'investissements à la Bourse, aujourd'hui, il va très bien parce que... les bonnes annonces d'hier, mais il pourrait se corriger. J'aime mieux attendre, madame, d'avoir encaissé les réductions de frais ou les profits et de le livrer. Mais dans le moment on s'en va sur une bonne voie.

Mme Normandeau: Est-ce qu'on doit conclure à ce moment-là, M. Leclair, qu'on se dirigerait vers un bénéfice de plus de 1 000 000 000 $ pour l'an 2000, sur la base de vos prévisions qui sont de, quoi, 950 000 000 $ pour 2000? Est-ce que le ministre des Ressources naturelles et son collègue des Finances ont à se réjouir à l'heure où on se parle, ou...

M. Leclair (Daniel): M. le Président, j'espère. L'économie est meilleure. Je pense que l'économie est meilleure. On parlait d'une bonne demande au niveau de l'électricité au Québec. On a vu les impacts en 1999, 2000 devrait être intéressant. De m'engager sur 1 000 000 000 $, madame, je pense que c'est trop tôt; il me reste encore 11 mois à faire, et je préférerais vous en dire plus après le premier semestre.

Mme Normandeau: Bien. Si on demeure toujours, M. Leclair, au niveau des bénéfices, qui sont les bénéfices nets, en fait, à la page 54, j'imagine que vous avez établi des scénarios de probabilité que ces bénéfices-là se réalisent pour chacune des années qui sont identifiées, soit entre 1999 et 2004. On aimerait savoir quelles sont justement ces probabilités que les différents scénarios, les différentes prévisions qui sont amenés se réalisent. J'imagine que vous avez une échelle de probabilités, en termes de réalisation de bénéfices, qui a été pensée, réfléchie. C'est des calculs complexes qui sont à l'origine de tout ça, mais quels sont ces scénarios de probabilités pour chacune des années entre 1999 et 2004, pour les bénéfices?

(16 h 20)

M. Leclair (Daniel): Dans le moment, M. le Président, les scénarios... C'est intéressant que vous me posiez la question, parce que depuis le début de 1998, comme je vous ai dit, on est toujours à la fine pointe, tant au niveau de notre business de base, je m'excuse, de nos travaux de base qu'en finances. Nous avons développé ce qu'on appelle – et vous le voyez ici, à la page 57 – on parle d'analyse de sensibilité, analyse des risques. Donc, nous avons copié sur ce que fait le département des finances, donc l'approche portefeuille, pour évaluer l'ensemble des risques d'affaires. Donc, on a une approche de gestion intégrée des risques d'affaires. «Risques d'affaires» inclut les risques financiers, les risques hydrauliques, les risques reliés à la température, à la compétition. Donc, on a une approche de portefeuille.

Depuis deux ans, on travaille très fort à essayer de développer des modèles à l'interne et avec les universités. On travaille en étroite collaboration avec les différents centres de recherche des universités québécoises. On fait partie de l'institut de finances et mathématiques qui vient d'être créé à peu près il y a un mois pour favoriser ces jeunes-là qui se dirigent en ingénierie financière, et l'objectif, c'est d'arriver à pouvoir... Parce que Hydro-Québec a toujours géré ses risques, mais a géré ses risques auparavant en cheminée, on pourrait dire. Donc, on n'utilisait pas les corrélations qui pouvaient exister entre un risque et un autre. Et, avec cette approche-là – on est au début de nos travaux, il y a encore beaucoup de travaux à faire – mais c'est d'arriver à pouvoir modéliser le risque résiduel de l'institution. Ce que j'entends par «risque résiduel», c'est les risques qu'il n'est pas possible de mitiger de façon... à 100 %.

Pour nous, on n'est pas contre les risques. Ce qui est important, c'est d'avoir le bon ratio risque-rendement. Si on peut quantifier, évaluer et modéliser ce risque résiduel là, ça va permettre à la direction de prendre des choix beaucoup plus éclairés et d'optimiser les opportunités de le faire qui nous sont présentées.

Alors, l'approche est là. Je n'ai pas de chiffres en termes de pourcentage à vous donner, mais généralement nos budgets... advenant des chocs exogènes à notre société, bien, il a des bonnes chances d'être réalisé au cours des prochaines années.

Le Président (M. Sirros): Oui, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, M. Leclair, pour toutes ces précisions. Mais la probabilité, par exemple, que, pour 2000, on atteigne 950 000 000 $, un peu plus d'un milliard pour 2001, c'est quoi? C'est 50 % pour une année, c'est 80 %, c'est 70 %? C'est quoi très précisément cette probabilité?

M. Leclair (Daniel): Précisément, je n'ai pas de réponse, mais je vous dirais que c'est en haut de 50 %.

Mme Normandeau: C'est en haut de 50 %?

M. Leclair (Daniel): 50 %.

Mme Normandeau: D'accord.

Une voix: ...

M. Leclair (Daniel): Oui, oui. D'atteindre nos résultats, là, on est plus haut que 50 %.

Mme Normandeau: Bien. M. le Président, si vous permettez.

Le Président (M. Sirros): Oui.

Mme Normandeau: Puisque vous nous parlez, là, de risques que vous avez qualifiés de résiduels, vous nous avez donné une définition. Moi, peut-être que je vous reporterais à la page 57, où on parle d'analyse de sensibilité. Et puis, ce qui est un peu surprenant, c'est que cette analyse-là se fait seulement pour 2002 et, lorsqu'on regarde le petit graphique à la droite, c'est qu'on se rend compte que les risques conjoncturels négatifs et les risques positifs en fait sont de même proportion. C'est égal des deux côtés. Alors, je dois vous dire que je suis un peu surprise. Pourquoi les risques sont du même ordre, autant du côté négatif que positif?

M. Leclair (Daniel): Nous faisons affaire avec une courbe normale, une distribution normale. On ne prend des statistiques... Je crois que les risques financiers, nous avons un historique – et c'est à confirmer – je pense qu'on travaille sur 20 ans. Donc, on a une distribution normale, puis à l'intérieur d'un écart type vous arrivez avec un plus ou moins... taux d'intérêt, c'est 250 000 000 $. Mais, encore là, ce qu'on fait, pour le premier risque, le taux de change...

Tout à l'heure, quand je vous parlais de l'approche de portefeuille... Prenez le taux de change, avec les données que vous avez ici, vous prenez les taux d'intérêt et vous prenez l'aluminium. Ce qu'on fait, on prend l'approche Markowitz, qui est l'approche qui a été utilisée dans la gestion des portefeuilles d'actifs. Donc, la somme des risques que vous voyez ici, lorsqu'on tient compte des corrélations, des liens que ces risques-là peuvent avoir entre eux, il y a un lien intéressant entre la fluctuation des taux d'intérêt canadien et du dollar canadien. Vous avez des liens intéressants ou importants entre l'activité économique et le prix des matières premières. Donc, l'ensemble de ces risques-là sont pris en compte, sont modélisés. Donc, la somme des risques n'égale pas le risque auquel on a affaire lorsqu'on tient compte de corrélations. Donc, on peut se permettre de jouer avec les différentes variables. Je ne sais pas si je suis trop technique. Donc, l'important pour nous, c'est de gérer ce risque-là à l'intérieur de fourchettes.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée.

Mme Normandeau: Oui. Ça semble un peu abstrait. Si vous aviez peut-être à concrétiser davantage, c'est quoi effectivement, la somme de ces risques-là? Parce que là on est un peu dans les concepts plus que dans le concret. Est-ce que c'est possible d'être plus...

M. Leclair (Daniel): J'essaie d'être...

Mme Normandeau: Oui, je sais. Je sais que vous faites beaucoup d'efforts effectivement pour vulgariser vos explications. Mais plus concrètement?

M. Leclair (Daniel): Bon. Compte tenu de l'enveloppe de dettes que nous avons à gérer, le taux d'intérêt que nous avons à gérer, compte tenu des quantités de devises que nous avons soit à acheter ou à vendre, une année, il est possible, par les instruments de nos activités, de réduire la volatilité de l'impact négatif de ces différentes variables là. Donc, pour nous, il est important de considérer l'enveloppe.

Tout à l'heure, on parlait que les taux d'intérêt et le taux de change contribuent environ à 40 % de la charge totale d'Hydro-Québec ou des dépenses totales d'Hydro-Québec. Donc, pour nous, il est important de pouvoir assurer l'administration que, malgré des chocs extrêmes de dévaluation du dollar canadien, comme on en a vu en 1998, ou d'augmentation importante des taux d'intérêt, la corporation ne fera jamais face à plus de tant de dollars ou de charges additionnelles dus à ces mouvements-là.

Donc, c'est l'approche qu'on met sur pied, qu'on est après perfectionner de façon continue avec nos gens. Je ne sais pas si je réponds à votre question.

Mme Normandeau: Vous savez... Bien, en fait, oui, ça répond partiellement à ma question. Mais, le premier réflexe que j'ai quand je vous entends, je me dis: Si la Régie de l'énergie était effectivement habilitée à entendre la cause tarifaire puis tout le volet production d'électricité, vous seriez en mesure évidemment d'aller témoigner à la Régie et, comme expert, effectivement vous pourriez expliquer les tenants et aboutissants d'une analyse comme celle-là. Et je dois vous dire: Comme parlementaires, à ce moment-là, on faciliterait drôlement notre travail.

M. Leclair (Daniel): Vous avez...

Mme Normandeau: Je n'ai pas pu m'empêcher de livrer ce commentaire-là, parce que, écoutez, je pense que la Régie de l'énergie a un rôle important à jouer, qu'elle ne joue pas en ce moment, et on a un exemple, là... Sur la base de votre témoignage, malgré tous les efforts que vous avez déployés, j'en conviens, on a un exemple très, très concret, là, de la difficulté à laquelle font face les parlementaires lorsqu'il s'agit d'analyser des questions aussi complexes qui sont contenues dans un plan stratégique comme celui de 2000-2004.

Mais, ceci étant dit, Mme la Présidente, après un commentaire comme celui-là, s'il nous reste encore un peu de temps...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Vous avez le temps, Mme la députée.


Méthodologie utilisée pour les prévisions

Mme Normandeau: ...je souhaiterais peut-être revenir sur les scénarios qui sont... Dans le passé, Hydro-Québec, lorsqu'elle déposait, par exemple, son plan de développement – et j'en ai fait état dans mes remarques préliminaires – on avait une série de volumes, il y avait plusieurs centaines de pages – le plan de développement 1993 contenait en fait 13 volumes – il y avait différents scénarios qui étaient avancés par Hydro-Québec, dans un contexte optimiste, pessimiste. Et là, ce qui est assez surprenant, c'est que toutes les prévisions financières d'Hydro-Québec sont basées sur un seul scénario; il n'y a aucun scénario faible, aucun scénario plus optimiste. Alors, ça me semble être un peu – comment dire? – peut-être imprudent de la part d'Hydro-Québec, donc, de baser ses prévisions sur juste un scénario. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi effectivement Hydro-Québec base ses prévisions sur un seul scénario?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Mme la Présidente, excusez-moi, je n'avais pas vu qu'il avait changé. On demeure encore à faire les scénarios – les scénarios forts, les scénarios centrés et les scénarios extrêmes – et spécialement au niveau finances. Nous utilisons en finances ce qu'on peut appeler la valeur à risque, qui tient compte de différents scénarios, qui tient compte de scénarios extrêmes de volatilité, de variations.

Au niveau de la planification stratégique, je vais demander à Thierry de compléter sur la méthodologie utilisée pour les paramètres autres que financiers.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

(16 h 30)

M. Vandal (Thierry): Oui. Merci, Mme la Présidente. Je crois qu'on le mentionnait un peu plus tôt, un des avantages de la restructuration des marchés, c'est justement de nous isoler de certains de ces risques, disons, de fluctuation, de variabilité, au niveau de ces scénarios, par exemple, sur un des autres facteurs qui par le passé était très significatif, le facteur de la demande. La réalité, c'est qu'on peut faire des prévisions de la demande au Québec, mais, si la demande au Québec est légèrement plus forte, légèrement plus faible, l'effet, le vase communicant des marchés d'exportation essentiellement est là pour absorber ces variations-là. De telle sorte que, avec cet autre élément là significatif qui est combien d'énergie va-t-on vendre, on se retrouve aujourd'hui avec des facteurs où, bien franchement, ce n'est pas aussi sensible à l'évolution de la demande au Québec.

Sur la question des prix, la volatilité à l'intérieur des journées et des semaines est telle que ce n'est pas sur un horizon de cinq ans... Sur un horizon de cinq ans, on peut, comme André le mentionnait tantôt, lisser les choses avec des prix moyens. La réalité qui est derrière ça, c'est une réalité de volatilité très, très forte à l'intérieur des journées. De telle sorte que c'est moins applicable de parler d'un scénario fort, un scénario faible, un scénario moyen.

Ce qui est important ici, c'est essentiellement de s'assurer que les projets de développement qu'on met de l'avant, c'est des projets qui correspondent à nos critères de rentabilité prudents, le 0,03 $. Si on colle à ça, si on est prudent avec les investissements, le réinvestissement qui est fait dans la pérennité des actifs, et si par ailleurs, sur le volet financier, tel que mon collègue Daniel le mentionnait – tout de même parce que c'est des facteurs importants dans nos coûts – il y a une prévision qui est bien appuyée, et si par ailleurs, sur l'autre risque, le risque majeur, celui qui survole tous ceux-là, le facteur d'hydraulicité, si on intègre, plutôt que d'être à la moyenne, une chance sur deux ou 50 % de chances, si on se range plutôt maintenant sur quelque chose de plus prudent, à 84 %, bien, je vous dirais qu'on a des données qui sont des données qui sont appelées à être assez robustes pour le futur.

M. Caillé (André): Madame...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Caillé.

M. Caillé (André): Si vous permettez, Mme la Présidente, une façon complémentaire. Il y a cinq ou six ans, en tout cas, à ma connaissance, jusqu'à il y a six ans, c'est de la façon que je le faisais, à savoir qu'on faisait un scénario moyen, pessimiste, optimiste. Voilà la façon dont ça se faisait.

Maintenant, ce qu'on fait, c'est ce qu'on appelle la gestion intégrée des risques. Puis on ne fait plus de scénarios pessimistes, scénarios optimistes. On fait ce qu'on voit ici, à la page 57, où on énumère les risques, qui peuvent aller d'un côté ou de l'autre. Mon collègue a dit: C'est toujours des distributions gaussiennes, normales. Elles ne le sont pas toujours. Des fois, elles sont... Par exemple, quand on dit: Pour le taux de change, moins 51 000 000 $, 38 000 000 $ de l'autre côté, ça veut dire qu'elle n'est pas tout à fait symétrique selon les données qu'on utilise.

Alors, qu'est-ce qu'on fait par la suite? On ne fait plus qu'un scénario, puis on se dit: On va gérer ces risques-là d'une façon globale. Comme il a dit: D'abord, il y en a, des risques, qui sont compensés par d'autres. M. Vandal vient de dire: Il y a un risque d'une demande plus faible au Québec, mais, d'un autre côté, ce risque-là est compensé par la capacité de vendre plus à l'extérieur. Ça fait qu'on ne serait pas frappé complètement par le manque de revenus de ventes parce que ça serait compensé. Des fois, le prix est plus élevé. Ça nous améliorerait, même si on parle des tarifs de ventes au grand débit.

C'est la gestion de ce risque que l'on fait à chaque année. C'est la gestion intégrée des risques. C'est ça qui a remplacé ce qu'on faisait jadis par, pour avoir une idée, les fameux scénarios pessimistes et optimistes. Le grand avantage de la gestion, ça dit qu'est-ce qu'il faut faire. Un exemple concret, c'est ce qu'on a fait, ce qu'on a appelé les aléas d'hydraulicité. Vous voyez que, ici, c'est le plus grand, de moins 491 000 000 $ à 592 000 000 $. Là, on dit ici: On va prendre des moyens, on va se donner des moyens financiers pour y faire face. Ce qui nous donne une stabilité, ce qui nous permet de dire: Voici, la situation est beaucoup plus prévisible, on va être beaucoup plus près de la réalité. Et l'objectif derrière tout ça, c'est la stabilité.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Pour bien comprendre, M. Caillé, puisque vous parlez d'hydraulicité, si je comprends bien, on parle de gestion intégrée des risques, à ce moment-là, pourquoi avoir fait une provision de 600 000 000 $ en 2004 pour justement parer à un scénario pessimiste au niveau de l'hydraulicité?

M. Caillé (André): ...mitiger le risque.

Mme Normandeau: Pardon?

M. Caillé (André): C'est le moyen de mitiger ce risque. On va prendre un sigma. Tous les risques ici, c'est un sigma. Alors, on a pris un sigma d'écart. On s'est dit: Ici, on va se donner une probabilité de 84 % d'avoir raison, plutôt que ce qu'on faisait dans le passé: on va tirer ça dans le milieu, chances de chaque côté, qu'est-ce qu'on en pense ici, alentour de la table, plus d'un bord, moins de l'autre. On ne fait plus ça comme ça. On dit: L'hydraulicité moyenne, c'est telle chose. On veut un sigma d'écart. Ça, on regarde ça, on dit: Trop gros. Ça, là, si on laisse aller les choses comme elles sont, on va aboutir à une situation où possiblement, un jour, on va être obligé de dire: Écoutez, on vous avait dit stabilité tarifaire, mais, que voulez-vous, il est arrivé telle chose puis on ne peut plus. Plutôt que de faire ça, quand on constate qu'une variation comme celle-là nous empêcherait d'avoir la stabilité tarifaire, on dit: Oups! ici, nous allons la prévoir. Ça nous prend un moyen maintenant. On fait tout de suite la mitigation. «Mitigation», ça veut dire: on pose un geste pour faire en sorte que ça, cet événement-là, on n'ait pas à y faire face...

Mme Normandeau: À ce moment-là...

M. Caillé (André): ...dans ses conséquences...

Mme Normandeau: O.K. Pour vraiment que je comprenne bien, à ce moment-là, sur la base de cette nouvelle gestion intégrée des risques, comment se fait-il qu'en fait ça donne seulement... En termes de probabilité que les bénéfices se réalisent, on parlait tantôt d'une probabilité de plus de 50 %. Il me semble qu'il y a un lien très étroit entre les deux. Est-ce qu'effectivement il y a un lien très étroit entre cette nouvelle façon de gérer les risques et l'assurance que nos bénéfices, effectivement, se réaliseront sur la base des prévisions qui ont été amenées? Il me semble qu'il devrait avoir une probabilité que les bénéfices se réalisent plus élevée que 50 % compte tenu de cette nouvelle gestion. Est-ce qu'on doit faire un lien entre les deux?

M. Caillé (André): Oui, vous avez raison. À partir du moment où on dit 84 % pour l'hydraulicité, ici, de chances que ça se réalise, c'est sûr qu'on est mieux que 50 %. C'est ça qu'on voulait. C'était l'objectif. On ne veut pas vous soumettre un plan qui dit qu'il y a une chance sur deux seulement qu'il se réalise. Vous avez raison, c'est mieux que 50 %, mais je pense mon collègue répondait pour les risques financiers, ici.

M. Leclair (Daniel): C'était pour l'an 2000. Et un facteur, un risque dont vous avez à tenir compte ici, vous voyez la température, on parle de plus ou moins 47 000 000 $. Ça, c'est sur l'historique. L'expérience des deux dernières années a été de 225 000 000 $ et de 145 000 000 $, respectivement en 1999 et 1998. Donc, encore là, ici, vous voyez une carte de risques avec un degré de probabilité, mais ça, avant gestion.

Donc, la gestion des risques financiers se fait par des produits dérivés. Vous avez entendu parler de contrats à terme, vous avez entendu parler d'options. Le risque hydraulique a été géré par notre prudence budgétaire pour les aléas hydrauliques. On a fait quelques recherches sur comment utiliser des produits financiers pour venir gérer ce risque hydraulique là. Le marché n'est pas encore là, n'a pas encore évolué, d'où les difficultés que nous avons à concrétiser cette chose-là.

Donc, cette carte-là, ici, c'est avant gestion. Donc, l'objectif, c'est de réduire cette volatilité-là qui vient augmenter les probabilités de rencontrer les objectifs budgétaires qu'on s'est fixés.

M. Caillé (André): Peut-être juste pour donner encore plus d'informations de la situation qui est sous-jacente à tout cela, sur la température, ici, un sigma, c'est quelque chose avec lequel on peut plus facilement vivre que ce que c'est qu'on a vécu en réalité au cours des dernières années. Et je vous ai dit dans mes remarques initiales qu'ici, là, on n'avait pas encore un outil, mais qu'on recherchait un outil. On sait les événements climatiques. On connaît des extrêmes ces années-ci, puis on se demande si ça va rester comme ça ou si ça ne restera pas comme ça. Honnêtement, ça m'inquiète. Ça m'inquiète que ça puisse changer du tout au tout de cette façon-là.

Alors, il y a différents moyens. C'est juste une hypothèse, on n'a rien à proposer pour cette année. C'est des assurances contre le froid. Un risque qui va en sens inverse de ça, c'est... Parce que, nous, on a un risque de moins de revenus, par exemple, s'il fait chaud, tandis que notre client, lui, il a un risque de plus de coûts s'il fait froid. Alors, on est peut-être faits pour se rencontrer, nous qui aimons la stabilité. Dans le marché, les gens sont pareils, les gens qui font du commerce, partout, ce qu'ils cherchent, c'est la stabilité. Alors, on est peut-être faits pour se rencontrer puis ensemble convenir d'une relation qui va faire en sorte que leur risque va être moins grand puis le nôtre aussi.

(16 h 40)

Ça s'appelle de la police, enfin de l'assurance contre une température froide, vendue au client. En d'autres mots, s'il faisait froid, on vendrait plus d'énergie, mais, lui, il aurait eu une police d'assurance, il nous aurait donné quelque chose, ça lui coûterait moins cher. Puis, s'il fait chaud, bien, on va lui vendre moins d'énergie, mais on va avoir le revenu de la police d'assurance qu'il a payée au cas, lui, où il ferait froid. Il y a des gens, il y a des entreprises qui pensent déjà à cela, parce que le marché s'est globalisé en Amérique du Nord. Il y a des effets d'optimisation qui peuvent avoir été cherchés, parce qu'il ne fait pas froid partout en même temps puis parce que le jour se déplace en Amérique du Nord, enfin selon ce que vous savez, les fuseaux horaires. Il y a toutes sortes d'optimisation et de valeurs. Il y a de la valeur qui peut être créée.

Bien entendu, on veut être partie de ça. Alors, on suit de très près. J'ai demandé à notre vice-président aux finances de voir... On a fait un cas, je pense, hein, on a fait une transaction justement pour se protéger contre la température. C'est un essai. Il n'y a pas de liquidité dans le marché. Pour que ça fonctionne bien, il faut qu'il y ait de la liquidité, évidemment, et on n'a pas ça encore. On a quand même fait des essais. On se tient au courant de ce qui pourrait être développé.

Nous, nos rapports avec la clientèle, ils sont significatifs, disons, à l'échelle de la Nouvelle-Angleterre, on l'a dit, de 10 % à 15 % des marchés, dépendant où est-ce qu'on est. On est au Québec à la fois dans le gaz et dans l'électricité. En Ontario, à travers Enbridge, on est dans Consumers', et donc, par voie de conséquence, dans le gaz à Toronto. Il y a peut-être là, dans notre famille, comme on l'a appelée plus tôt, un ensemble sur lequel on pourrait établir quelque chose. Ça reste à être développé. Ce n'est pas fait, ça reste à être développé.

Bien entendu, nos collègues de ces autres entreprises là, ils ont exactement la même situation. L'hiver dernier, qui a été chaud, Consumers' Gas – c'est son nom – le distributeur à Toronto, ça lui a coûté extrêmement cher. Il n'a pas fait les revenus anticipés, et, en passant, nous non plus puisqu'on a 12 % à travers Consumers'. Mais, d'autres hivers... Comme cet hiver, je les ai vus il n'y a pas si longtemps, ils souriaient parce qu'ils ont connu le même mois de janvier qu'il y a eu au Québec, ils étaient plus encouragés. C'est fini, le temps où on regardait un minimum, maximum. Ce qu'on veut, c'est gérer ça puis éliminer l'inconnu qui est là-dedans le plus possible. Quand on fait ça, finalement, dans une économie, on crée de la valeur. Tout le monde peut gagner de cela. Il ne fera ni plus chaud ni plus froid, quel que soit le moyen qu'on prend, évidemment, mais le fait de le connaître permet de créer de la valeur. C'est ce qu'on va essayer de faire, mais on n'est pas là encore.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Caillé. M. le député de Gaspé.


Participation au développement hydroélectrique du Labrador (suite)

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais revenir sur le projet d'aménagement du bas Churchill. Tout à l'heure, on a évoqué certaines parties du projet. Moi, j'aimerais savoir si la société d'État va avoir besoin de nouveaux équipements pour l'exportation d'électricité.

M. Caillé (André): Mme la Présidente, est-ce qu'on parle ici d'interconnexions additionnelles?

M. Lelièvre: Des nouvelles lignes. Qu'est-ce que vous allez avoir besoin de nouveau et qu'est-ce qu'on a d'existant?

M. Caillé (André): Il n'y a pas, dans ce plan, d'interconnexions additionnelles de prévues avec les États-Unis. Il y en a une, par ailleurs, dans ce plan, qui est celle avec l'Ontario, de 1 250 MW.

M. Lelièvre: Est-ce qu'on va avoir des nouvelles constructions de lignes? C'est ça qu'on voudrait clarifier, là, pour les gens qui nous écoutent. Est-ce qu'on va construire...

M. Caillé (André): Je pensais que vous parliez pour le projet Churchill. Alors là, je vais laisser mon collègue répondre. Excusez-moi. Je ne croyais pas que vous parliez du projet Churchill. Je vais laisser mon collègue répondre.

M. Lelièvre: O.K. C'est Churchill, là. Une fois qu'on a fini l'aménagement, là, il faut sortir l'eau et faire tourner les turbines, il faut envoyer ça quelque part.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Vandal.

M. Vandal (Thierry): Merci, Mme la Présidente. Donc, dans le cas du projet Churchill, il y a des aménagements, bien sûr, en production et il y a également des installations importantes qui vont être réalisées du côté du réseau de transport, par mon collègue Yves et la division TransÉnergie. À titre de producteur, à titre d'acheteur de cette énergie-là, on sera client de cette infrastructure, et cette infrastructure-là va essentiellement se greffer à l'ensemble du réseau québécois.

Autrement dit, il va y avoir des installations développées entre les sites de production au Labrador et le poste Montagnais, qui est le premier poste d'entrée au Québec, de l'autre côté de la frontière du Labrador. Après ça, il va y avoir une ligne qui va descendre jusque dans la région de Sept-Îles. L'essentiel des infrastructures sont concentrées, si on veut, là, dans la région de Baie-Comeau, à l'est, donc Baie-Comeau, Sept-Îles et vers le poste Montagnais, avec le bouclage qui est avantageux pour l'ensemble du réseau de la production. C'est là que sont concentrées les infrastructures de transport. Rendue là, cette énergie-là, l'énergie qui arrive est diffusée sur l'ensemble du réseau québécois.

Donc, essentiellement, c'est des infrastructures qui viennent se greffer à un réseau intégré qui est le réseau québécois. Il n'y a pas, pour le projet Churchill, de nouvelles interconnexions requises, prévues, ou quoi que ce soit. Essentiellement, cette énergie-là, rappelons-le, c'est de l'énergie qui entre sur l'ensemble du réseau québécois. Et, selon les besoins du moment, l'évolution des besoins, bien, l'énergie sera placée. Alors, c'est vraiment une infrastructure qui vient se greffer à un grand réseau québécois, qui couvre déjà une très grande étendue, avec des infrastructures concentrées, donc un investissement qui est concentré vraiment dans la partie est du réseau de TransÉnergie.

M. Lelièvre: On n'a pas besoin de nouvelles lignes pour se rendre aux marchés d'exportation?

M. Vandal (Thierry): Absolument pas. Il n'y a pas de lien ici à faire, il n'y a pas de lien direct à faire entre une production au Labrador et un marché d'exportation. Ce lien-là n'existe pas. L'interconnexion à laquelle André référait il y a quelques instants, l'interconnexion avec l'Ontario, c'est quelque chose qui vient bien avant le projet Churchill, qui n'est pas lié au projet de Churchill, qui se fait dans un contexte où essentiellement, là, en termes de sécurité d'approvisionnement, on rétablit ce qui est un petit peu une anomalie historique: deux grands réseaux, le réseau d'Hydro-Québec, le réseau de l'Ontario, des réseaux de 30 000 MW et plus qui sont très, très peu interconnectés. C'est une anomalie d'un fonctionnement normal de réseau. Ça va ajouter, cette interconnexion-là, à la sécurité des deux réseaux, à la sécurité d'approvisionnement réciproque, mais ça n'a rien à voir avec le projet Churchill.

Le projet Churchill se fait dans un contexte où les infrastructures de transport sont essentiellement concentrées dans la partie est. Une fois l'énergie arrivée là, bien, elles diffusent sur le réseau qui existera à ce moment-là, le grand réseau québécois, dans un contexte de service intégré, service intégré, rappelons-le, qui ne se fera pas en faisant porter les coûts à quelque catégorie de clientèle que ce soit au Québec. Donc, ça n'affecte pas cet engagement de stabilité tarifaire auquel André a eu l'occasion de référer à plusieurs reprises.

M. Lelièvre: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, Mme la députée de Crémazie.


Contrat de travail et régime d'intéressement des employés

Mme Blanchet: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, j'aimerais aborder un sujet auquel vous avez fait référence mardi dans vos remarques d'ouverture, c'est-à-dire le dernier contrat de travail signé avec les employés de la société d'État et aussi les différentes mesures de rémunération incitatives sur lesquelles vous vous êtes entendus. Vous l'avez mentionné, et aussi à la lecture du plan, on sent que c'est effectivement très important pour faire participer tout le monde à la vie de la société d'État.

J'aimerais, si ça vous était possible... de nous rappeler grosso modo quels sont ces objectifs-là qui vous sont fixés, qui vous sont demandés par le conseil d'administration, et aussi comment va fonctionner le régime d'intéressement, justement, des cadres et des employés syndiqués.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Oui. Alors, au niveau des objectifs corporatifs, il y en a de trois ordres: il y en a qui visent très directement la clientèle, il y en a qui visent les employés et il y en a qui visent l'actionnaire.

Au niveau de la clientèle plus spécifiquement, on a pour objectif de maintenir le niveau de satisfaction des satisfaits et des très satisfaits au-delà de 90 % et, en même temps, d'amener le pourcentage des clients très satisfaits, de mémoire, de 37 % à – 2 %, je pense que c'est – 39 %, pour regagner ce qu'on avait perdu.

Deuxièmement, pour satisfaire les clients, on a des objectifs en ce qui concerne l'indice de satisfaction des clientèles résidentielles et d'affaires, plus spécifiquement, des questions plus spécifiques, et de l'indice de satisfaction des clientèles grandes entreprises, et finalement un objectif au niveau de l'indice de continuité. Ça, c'est le nombre d'heures pendant lesquelles un client est privé d'électricité par année. On fait une moyenne de tout ça. Alors, ça, c'est ce que nous avons pour les clients.

(16 h 50)

Pour les employés, on va mesurer leur mobilisation. Ce qu'on dit à nos employés, c'est un objectif qu'on partage avec eux en même temps: On va vous mesurer votre degré de mobilisation. C'est-à-dire, on veut savoir... Puis il y a une façon de faire le sondage, ici, là, et ça ne pourra pas être biaisé volontairement. Parce que, vous connaissez ça encore mieux que moi, il y a des façons de faire pour éviter que ce genre de mesure soit biaisée systématiquement par les personnes. Alors, on va mesurer leur degré de mobilisation puis se donner un objectif à cet égard. On veut que de plus en plus, en pratique, là, quand nos employés arrivent au travail le matin, ils viennent pour travailler comme si c'était dans leur propre entreprise. On veut qu'ils se lèvent pour venir travailler. On veut qu'ils viennent au bureau, on veut qu'ils viennent dans nos différentes installations pour travailler. Ils sont mobilisés pour travailler. Ça se mesure. On va le mesurer puis on va se donner les objectifs pour voir que ceci puisse s'améliorer avec le temps.

On a aussi un objectif pour notre actionnaire. On en a pour tous nos publics, n'est-ce pas, toutes les parties intéressées, je devrais dire. Notre objectif pour un actionnaire, c'est bien entendu au niveau du bénéfice net consolidé, le 950 000 000 $ dont il était question.

Alors, comment ça opère, en pratique? À la cible. On a trois niveaux ici qu'on va identifier a priori au début de l'année: un seuil, en deçà du seuil, ça donne zéro sur un ou l'autre de ces indices-là; au seuil, ça commence à compter; à la cible, c'est comme le budget. Et on a aussi un idéal. Tout va bien. Tous les risques qu'il y a là, tout tombe du bon côté, tout va bien, c'est magnifique, les clients sont très satisfaits, etc. On marche sur l'eau. Alors là, on atteint l'idéal.

Si on atteint la cible pour nos employés, on a dit, dans le contrat de travail, c'est 3 % maximum. À la cible, si on réalise le budget, c'est 2 % de leur salaire qu'ils vont pouvoir toucher en termes de boni. Pour avoir 3 %, là, il faut vraiment... En pratique, ce n'est presque pas possible, mais enfin on ne veut pas, jamais, que ça soit carrément impossible, parce que, à chaque matin, si c'était possible, je les appellerais avant qu'ils partent de chez eux pour dire: N'oubliez pas qu'on a ça ici, puis que ce serait aussi bien 3 % que 2 %. Ce serait bon pour tout le monde. Ce serait bon pour les clients, ça serait bon pour les actionnaires, ça serait bon pour eux et ce serait bon pour moi aussi, puisque je partage très exactement les mêmes objectifs et que, moi aussi, dans ma rémunération, il y a une partie qui est incitative. Alors, j'ai exactement, très exactement, au chiffre près, les mêmes objectifs. Il y a moi qui suis comme ça, il y a le directeur général adjoint et il y a l'ensemble des employés syndiqués.

Les objectifs qu'on se donne, vous voyez, reflètent le plan stratégique. Qu'est-ce qu'il dit, le plan stratégique? On veut mieux servir les Québécois. Bien, ça doit se mesurer. On veut leur donner plus de fiabilité de réseaux, bien, ça doit se mesurer d'une certaine façon.

À nos employés, on dit: Bon, on va travailler ensemble, tout ça, on va mettre des moyens en place. On peut bien parler de satisfaction, de motivation puis de toutes sortes de choses, mais ce qui est important, c'est, quand ils se lèvent le matin, il faut qu'ils viennent au bureau, il faut qu'ils aillent travailler sur nos réseaux avec à l'idée... des gens mobilisés qui viennent là pour faire quelque chose puis qui ont envie de le réaliser, puis de le réaliser complètement, avec le plus haut degré de professionnalisme et de satisfaction pour les clients.

Quant à l'actionnaire, c'est comme ça dans toutes les entreprises, ça fait plusieurs années que je gère avec un système comme celui-là, c'est normal, c'est juste normal qu'on ait un objectif pour l'actionnaire, où on lui dit: Votre bénéfice, bien, à la cible, le 950 000 000 $, ça donne les deux tiers. Évidemment, pour ce qui est du 3 %, il est réparti entre chacune des catégories que voici. Sur 30 points, 12 points, c'est pour la satisfaction des clients, neuf respectivement pour employés et actionnaire.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de Crémazie.

Mme Blanchet: Je vous remercie. Juste une petite précision. Pour ce qui est des masses salariales justement rattachées à ces bonis-là qui pourraient être versés, 2 % ou 3 % dépendamment des résultats, vous prévoyez que ce sera un déboursé de combien de plus que prévu par la masse salariale de tous les jours?

M. Caillé (André): Puisque la cible est au budget, on prévoit la cible. On prévoit que ce sera 2 % de la masse salariale à chaque année.

Mme Blanchet: Ah! O.K.

M. Caillé (André): Les bonis ne sont versés que sur des résultats vérifiés, par ailleurs. Il faut avoir des maisons indépendantes de nous qui vont donner toute la crédibilité à la mesure pour faire les sondages, que ce soit auprès des clients ou que ce soit auprès des employés. Pour l'actionnaire, le 950 000 000 $, on attend d'abord que nos comptables, nos vérificateurs externes rapportent à notre conseil que le chiffre a bel et bien été de... C'est fait, donc, sur la base de résultats vérifiés. Ce n'est pas fait sur la base de résultats qu'on peut calculer approximativement. Par exemple, on a dit, pour cette année, c'est de l'ordre de 900 000 000 $. La vérification n'est pas terminée. Les livres ne sont pas fermés. C'est seulement quand les livres seront fermés qu'on pourra leur dire.

Je ne sais pas si j'ai un petit plus de temps pour vous dire comment ça peut être intéressant. Hier, puisque j'étais à Québec, j'en ai profité pour rencontrer des employés, discuter de toutes sortes de choses, comment ça allait. Tout ne va pas, évidemment, selon la façon dont ils le souhaitent par rapport à leur mobilisation. Je leur ai expliqué qu'on avait possiblement ensemble un problème ici, qu'on était aussi bien de trouver la solution au plus vite, parce que la mobilisation, n'est-ce pas, ça compte beaucoup. Et là, évidemment, c'est la première année, les gens commencent à s'habituer à un système comme ça, là. Ils vont en prendre l'habitude. Et je voyais la réaction chez eux de dire: Bon, bien oui, effectivement, il y a peut-être des choses qu'on devrait faire parce que là, là, c'est ça qui compte.

Alors, mon expérience depuis 20 ans, c'est que, quand on donne la rémunération incitative, il y a deux choses qui vont animer les gens, il y a deux choses qui vont inciter les gens à une meilleure performance. Il y a bien sûr la rémunération, mais il n'y a pas juste la rémunération. Tant à Hydro qu'ailleurs, j'ai constaté aussi que l'orgueil, la fierté, ça joue pour beaucoup. Les gens, ils prennent leurs objectifs puis ils disent: Ça, c'est mes objectifs, puis il n'est pas question que je les manque. C'est pour cinq ans, notre entente avec nos employés syndiqués. Moi, je suis convaincu que, avec le temps, vous allez voir, ces gens-là vont dire: Aïe, ça, c'est mes objectifs. Comment tu as fait, toi, dans ton objectif, cette année? Vous savez, le genre: Moi, j'ai fait tant. Toi, tu as fait tant.

Ça, ça fait beaucoup pour changer la culture d'une entreprise, pour la tourner, pour amener tout le monde... On en a 19 500 à convaincre, à les amener dans la même direction, à prendre en considération les attentes des clients, à prendre en considération le fait aussi qu'ils doivent trouver en eux... Ce n'est pas juste le patron, là, qui va les mobiliser chaque matin comme par une opération du Saint-Esprit, il y a quelque chose à faire par eux-mêmes aussi, là.

Des résultats financiers dans une entreprise, ça fait partie des considérants. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut mettre à côté puis dire: On est autre chose. Nous autres, ce n'est pas tellement nécessaire. On ne peut pas mettre ça à côté. Ce n'est pas comme ça qu'on va y arriver. D'ailleurs, on finirait – bon, enfin, je me répète encore – par décourager nos clients, parce que ça finirait par une augmentation... Mauvaise gestion financière, ça finit, automatique, par des augmentations tarifaires, comme deux et deux font quatre. Alors, voilà ce qu'est ce système. Je m'excuse d'avoir été long un peu.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le député de Maskinongé.


Croissance des immobilisations

M. Désilets: Merci, Mme la Présidente. M. Caillé, moi, j'ai deux, trois petites questions – je vais essayer d'être assez vite – concernant les immobilisations puis l'avoir des actionnaires.

Concernant l'immobilisation, j'ai vu dans les tableaux, là, que l'immobilisation devrait augmenter de 1 500 000 000 $ dans les cinq premières années. Pourtant, les investissements, eux, augmentent de presque 12 000 000 000 $, 11 900 000 000 $, les investissements. Puis on voit aussi que la dette à long terme baisse de 2 500 000 000 $.

Je voudrais juste me faire démêler, là. C'est quoi, les facteurs qui expliquent la croissance de 1 500 000 000 $? Ce n'est pas rien, là, 1 500 000 000 $ en immobilisation. Mais c'est quoi, au juste? Sur quels facteurs?

M. Caillé (André): Alors, il y a les investissements nouveaux qui jouent dans un sens; il y a l'amortissement qui joue dans l'autre; il y a la croissance du taux de capitalisation de 25 % à 32 % d'équité. Je vous donne ça comme une réponse préliminaire en laissant le temps à mon collègue ici, à gauche, de trouver le détail de ce que je dis.

M. Leclair (Daniel): Donc, vous avez un programme d'environ 2 000 000 000 $ et quelques par année au niveau des immobilisations. Donc, lorsque vous parlez d'immobilisation, l'immobilisation prend effet au moment où vous mettez une facilité en service. Je m'explique. SM 3, qui va être complété en 2001, depuis le début de la construction de SM 3, les intérêts sont capitalisés. Au moment où la centrale va être mise en service, vous allez avoir les amortissements qui vont commencer pour une durée de vie différente si c'est une facilité au niveau production, transport ou distribution.

(17 heures)

En ce qui concerne la diminution de la dette, de mémoire, on parle d'à peu près 400 000 000 $, avec nos prévisions, ici, au cours de la période. Premièrement, l'appréciation du dollar canadien fait que notre dette va diminuer, et, deuxièmement, les fonds autogénérés par l'institution, qu'on appelle le taux d'autofinancement, se maintiennent à des niveaux d'environ 60 %, entre 55 % et 60 %, au cours de la période visée du plan.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Est-ce qu'il y a d'autres questions? Vous aviez terminé, M. Leclair?

M. Leclair (Daniel): Oui. Je ne sais pas si ça répond à votre question, monsieur.


Avoir de l'actionnaire

M. Désilets: Oui. Concernant les avoirs de l'actionnaire, il y a un accroissement de l'avoir de 3 000 000 000 $. Est-ce que ça correspond, le 3 000 000 000 $, aux bénéfices nets moins les dividendes? C'est-u ça qui se trouve à faire partie de l'avoir?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, M. Leclair.

M. Leclair (Daniel): Mme la Présidente, selon la Loi sur Hydro-Québec, Hydro-Québec doit verser un dividende à l'actionnaire si le taux de capitalisation est supérieur à 25 % et si la couverture des intérêts est plus grande que 1. Ça, c'est dans la loi.

M. Désilets: Et de quoi, le dernier bout?

M. Leclair (Daniel): La couverture des intérêts. Donc, la couverture des intérêts, ce sont les revenus bruts avant la charge d'intérêts divisé par les intérêts. Donc, ça veut dire: Est-ce que vous avez... un ratio de 1 signifie que vous avez assez de revenus pour rembourser les intérêts reliés à votre dette. Donc, c'est un ratio minimum. L'idéal, c'est d'avoir un ratio de 1,24, 1,25, 2. Donc, vous avez deux fois les revenus nécessaires pour rencontrer votre dette. Donc, les chances d'être en défaut sont très minimes, et c'est un ratio très, très important dans l'appréciation par les agences de notation de crédit de sociétés. Ça permet à la société de pouvoir absorber des chocs de toutes sortes.

Alors, la croissance du capital ou de l'avoir de l'actionnaire vient du fait qu'on a pris les bénéfices nets de la société chaque année et que 50 % vont être versés sous forme de dividendes à l'actionnaire. Donc, si vous prenez 50 % du total du bénéfice net de 2000 à 2004, ça devrait correspondre à l'augmentation que vous mentionnez dans l'avoir de l'actionnaire. Donc, l'actionnaire s'entend avec nous, est d'accord, favorise Hydro-Québec dans le sens d'améliorer ses ratios financiers, et c'est la raison pourquoi nous allons avoir un ratio de capitalisation beaucoup plus important au cours des prochaines années, une couverture des intérêts meilleure, donc vraiment favorise la qualité et la saine gestion financière d'Hydro.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Merci. La capitalisation que vous mentionnez, est-ce que c'est la même façon de la calculer pour l'ensemble des entreprises d'État?

M. Leclair (Daniel): Oui. Mme la Présidente, c'est l'avoir propre de l'actionnaire par rapport à l'ensemble de sa dette. Donc, on a 25 % d'avoir propre, 75 % d'avoir emprunté ou d'argent emprunté sur les marchés.

M. Désilets: Mais ce que je veux savoir: Est-ce que c'est la même chose dans l'ensemble? Est-ce que vos compétiteurs, que ce soit en Ontario ou ailleurs, ils ont le même pourcentage ou est-ce que c'est pareil?

M. Leclair (Daniel): Non. C'est à ça que M. Caillé faisait allusion.

M. Caillé (André): Pardon. Mme la Présidente, en Ontario, avec les difficultés qu'ils ont eues avec le nucléaire, la partie de l'équité a fondu à presque à rien. Même, il y a eu une période de temps où l'avoir de l'actionnaire était négatif. Ça veut dire que quelqu'un prêtait de l'argent pour combler le manque qu'il y avait, l'avoir était rendu négatif à cause des radiations qui ont été faites, notamment dans des actifs nucléaires. Mais, si on se compare avec les entreprises de l'EEI, l'association de l'électricité aux États-Unis, notre avoir, à 25 %, est largement inférieur. Ils sont plus, eux, dans le 40 %, 45 % d'équité, alors que nous, on est à 25 % présentement et qu'on va évoluer vers 32 %. Plus la capitalisation d'une entreprise est forte, moins le risque, en termes de taux de rendement, est élevé évidemment, parce qu'il y a moins de charges financières fixes, qui, elles, sont fixes.

M. Désilets: On tend vers ça.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): C'est terminé, M. le député de Maskinongé. Alors, Mme la députée de La Pinière.


Hausse du nombre d'emplois en 2003-2004

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Concernant les emplois qui sont soutenus par les activités d'Hydro-Québec, je suis à la page 58 du Plan stratégique , je note qu'il y a une augmentation assez sensible du nombre d'emplois entre 2003 et 2004, une hausse de 6 000 emplois, alors que pour les années antérieures on avait quand même des chiffres qui se comparaient. Qu'est-ce qui justifie, en l'espace d'une année, 2003-2004, une hausse de 6 000 emplois dans les emplois reliés à l'investissement seulement?

M. Caillé (André): Mme la Présidente, M. Lanoue, qui fait ces calculs de retombées économiques et de création d'emplois au Québec suite à nos activités depuis un certain nombre d'années, va donner la réponse à Mme la députée.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. Lanoue.

Mme Houda-Pepin: Très rapidement, parce que j'ai plusieurs questions.

M. Lanoue (Roger): Oui. Mme la Présidente, ce à quoi est reliée l'augmentation des emplois de 2003 à 2004, c'est essentiellement le début des projets en production, soit Betsiamites, Toulnustouc, le début possiblement de Eastmain-Rupert et Churchill. C'est le facteur principal qui explique.


Situation des chercheurs de l'IREQ (suite)

Mme Houda-Pepin: D'accord. Dans le plan stratégique 1998-2002, il y avait une orientation qui était très importante, qui était celle de faire de la recherche et du développement un instrument de croissance et de rentabilité pour l'entreprise. Évidemment, on ne la retrouve pas en tant que telle dans le plan stratégique 2000-2004, mais je voudrais savoir, dans le cadre justement de déploiement des ressources humaines à Hydro-Québec: Il y a combien de chercheurs actuellement à l'IREQ, et ils seront combien en 2004?

Deuxième volet à ma question: le fameux recentrage des chercheurs de l'IREQ. Et vous comprendrez ma sensibilité, c'est dans mon territoire. J'ai rencontré ces gens-là et je suis très préoccupée par l'avenir des chercheurs de l'IREQ. Je voudrais savoir, dans l'opération de recentrage, où seront ces gens-là, comment va être utilisée leur expertise et leur expérience par Hydro-Québec.

M. Caillé (André): Pendant que mon collègue me fournit les chiffres concernant l'évolution de la main-d'oeuvre de chercheurs à l'IREQ ou aux laboratoire de LTEE, à Shawinigan, laissez-moi vous dire, d'abord vous rappeler que ce plan stratégique, celui de 2000-2004, fait encore – je veux vous donner un réconfort à cet égard – de la recherche et du développement un outil pour améliorer la performance d'Hydro-Québec tant en termes de qualité de service à sa clientèle que sa performance financière par réduction de coûts, par trouver des façons pour enfouir les réseaux de distribution, etc.

Alors, c'est encore une préoccupation. C'est même la préoccupation centrale, quoiqu'on l'amène, comme je l'ai dit, vraiment... on veut s'améliorer dans nos métiers de base. On pense qu'il y a beaucoup d'opportunités, beaucoup de places où on peut s'améliorer par le développement de nouvelles technologies. Alors, ça fait partie encore, les chercheurs et l'IREQ, des moyens pour arriver à améliorer cette entreprise à tous égards, donc.

Pour ce qui est du nombre d'employés en recherche, il y a ceux qui sont dans ces activités-là puis il y a ceux qui ne sont pas dans ces activités-là. Un dernier commentaire. Alors, ceux qui font de la recherche sur des activités connexes, c'est des gens qui, très souvent, sont avec nous depuis longtemps puis qui ont déjà été dans des activités de recherche, de production, de transport et de distribution. Il s'agira pour eux de réorienter leur carrière dans ces secteurs-là. S'il restait des difficultés, je pense que, par une ouverture... J'aimerais bien qu'on réussisse à créer une véritable ouverture entre IREQ et les autres milieux de la recherche scientifique au Québec. Ça serait profitable aux gens de l'IREQ comme, je pense, ça serait profitable aux gens de ces autres milieux, universitaires ou autres, où il se fait de la recherche. Dans le domaine de la recherche, il y a avantage à décloisonner le plus possible, à offrir des opportunités à nos employés.

Mme Houda-Pepin: Oui. Sur ce point, M. Caillé, je pense que le décloisonnement ne signifie pas nécessairement le démembrement à longue échéance de l'IREQ. On peut décloisonner, on peut recentrer...

M. Caillé (André): Bien sûr.

Mme Houda-Pepin: ...on peut mieux cibler tout en consolidant la recherche et le développement à l'intérieur d'Hydro-Québec.

(17 h 10)

M. Caillé (André): Oui. Je ne souhaite pas vous inquiéter – ni les chercheurs, d'ailleurs – en vous parlant de décloisonnement. Je parle d'une ouverture plus grande sur le reste du monde. Ça ne les chasse pas ou ça ne change pas le fait qu'ils seraient rattachés à l'IREQ, ça. On aimerait les voir peut-être, dans des activités de recherche, participer à des programmes dans les universités, comme des fois il y a des chercheurs dans les universités qui participent à des programmes à l'intérieur de l'IREQ; faire plus de ce genre d'activités là. Je n'en parle pas, là, dans le sens de dire: On va décloisonner pour diminuer, etc. J'ai dit: Notre objectif en recherche, là – je veux vous rassurer, puis vous pourrez rassurer les chercheurs que vous rencontrez – l'idée ici n'est pas de réduire nos dépenses dans la recherche. Ce n'est pas ça, l'objet. Ce n'est pas du tout l'objectif. L'objectif, c'est d'améliorer notre performance en production, transport et distribution.

Si on a des bons projets dans ces domaines-là, ils vont tous se voir financés, parce que les gains, à cause de la taille d'Hydro-Québec puis des actifs que l'on a en production, transport, distribution, c'est assez facile de prendre les décisions d'investissement quand c'est proche de nos affaires. Puis ça va bien aller, parce que, encore une fois, on sait qui est le client, c'est nous; alors, on va pouvoir appliquer la recherche chez nous.

Pour ce qui du nombre, je vais laisser mon collègue vous donner les réponses.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Lanoue.

M. Lanoue (Roger): Mme la Présidente, il y a actuellement 620 employés à l'IREQ et au LTEE à Shawinigan. Sur ces 620 là, il y en quelque 70 à Shawinigan, le reste étant à Varennes. Sur ces 620 là, il y en a 576 qui ont des postes permanents. Alors, ça, c'est la photo actuelle, et il n'y a pas de plan particulier pour réduire significativement ou augmenter significativement. Il s'agit essentiellement, comme vient de le dire M. Caillé, de faire, avec les unités d'affaires, le plan directeur de recherche de façon à focaliser le plus possible le travail de chacun vers les unités d'affaires en tant que clients.

Mme Houda-Pepin: Une dernière question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de La Pinière.


Politique de déclaration de participation dans les filiales

Mme Houda-Pepin: Est-ce qu'il y a une politique de déclaration de participation dans les filiales d'Hydro? Est-ce que les cadres d'Hydro ont une interdiction de détenir des actions ou des options d'achat dans les filiales d'Hydro?

M. Caillé (André): La réponse, c'est oui. Je sais qu'il y en a qui en ont déjà eu, j'en ai croisé à mon arrivée à Hydro-Québec, des gens qui, enfin, à tout le moins prétendaient avoir des participations dans des activités industrielles qui découlaient de recherches ayant déjà eu lieu à Hydro-Québec.

Je pense que c'est une pratique, ici, qui est pour le moins difficile à accepter. S'il y a des exceptions, il faudra encore qu'on me convainque pourquoi c'est nécessaire qu'il y ait des exceptions.

Mme Houda-Pepin: Donc, il n'y a aucun cadre qui détient des actions reliées à une filiale d'Hydro, Noverco ou autre, par exemple?

M. Caillé (André): Moi, j'en avais dans Gaz Métropolitain; j'ai été tenu de m'en défaire quand j'ai changé d'emploi, pour ne pas détenir des actions puis compétitionner. Je détiens également des actions d'Enbridge parce que c'est une politique d'Enbridge que ses administrateurs – je suis administrateur d'Enbridge – aient des actions dans la compagnie. C'est leur politique. Je me suis simplement plié ici à leur politique.

Quand aux autres, honnêtement... Ils font une déclaration à chaque année au secrétariat de la compagnie, mais je n'en ai jamais pris connaissance. Peut-être que Mme Nadeau...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme Nadeau.

Mme Nadeau (Marie-José): Oui. Marie-José Nadeau, vice-présidente exécutive affaires corporatives et secrétaire générale.

Dans les 60 jours du début de l'année, depuis donc le 1er janvier de chaque année, et ceci depuis 1993, chacun des membres de la direction supérieure est tenu de faire sa déclaration d'intérêts, de la mettre à jour, de même que chaque membre de la direction supérieure est tenu d'informer dans les 60 jours de l'acquisition d'un nouvel intérêt, par exemple à des fins personnelles – je ne parle pas d'intérêt lié à l'entreprise – donc d'informer officiellement le président du conseil d'administration de ses intérêts dans des entreprises.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, Mme Nadeau. Mme la députée de Bonaventure.


Existence d'une marge de manoeuvre permettant une baisse des tarifs

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Hier, la coalition Arc-en-ciel a tenu une conférence de presse à laquelle j'ai assisté. Je souhaiterais qu'on puisse regarder ensemble un tableau qu'elle nous a distribué. Je vais peut-être demander qu'on vous le distribue tout de suite, ce tableau, en fait, sur les tarifs.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Donc, vous demandez un dépôt?

Mme Normandeau: Oui, effectivement je demande un dépôt de document.


Document déposé

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, le dépôt est accepté. On va faire la distribution.

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors donc, dans ce tableau, la coalition Arc-en-ciel, que vous connaissez probablement, qui est un regroupement de divers organismes qui représentent des intérêts de toutes sortes, autant des intérêts des consommateurs, des industriels, des environnementalistes, soutient en fait qu'Hydro-Québec possède une marge de manoeuvre suffisante pour réduire les tarifs de 7 %.

Leur argumentaire s'appuie notamment sur les marges bénéficiaires qui sont dégagées au niveau des ventes d'électricité. Je vais attendre peut-être quelques secondes pour que vous puissiez avoir le tableau devant vous pour qu'on puisse ensemble regarder justement ces marges bénéficiaires qui sont...

Donc, alors, si on regarde le tableau, on constate que la marge bénéficiaire qui est liée à la vente d'électricité de 1999 à 2003 passerait de 10,3 % à 13,7 % et que la marge bénéficiaire au niveau des ventes assujetties passerait, elle, aussi de... on parlerait de, c'est encore plus élevé, 13 % à 17 %.

J'aimerais savoir de votre part qu'est-ce que vous pensez évidemment d'une demande comme celle-là. Est-ce que l'analyse sur laquelle se base la coalition en est une qui est réaliste? Et, pour la coalition, l'écart qui existe entre les ventes assujetties et les ventes totales permettrait effectivement donc de fournir ou de permettre aux Québécois, et autant la clientèle résidentielle qu'industrielle, donc de subir une diminution des tarifs de 7 %. C'est une question importante. Là, on a un tableau sur lequel on peut s'appuyer. Vous nous avez évidemment... depuis deux jours, vous avez tenté de nous convaincre effectivement du contraire, mais qu'est-ce que vous pouvez nous dire de ce tableau-là que la coalition a déposé?

Une voix: Mme la Présidente, mes collègues ici ne reconnaissent pas ces chiffres, moi non plus, du reste. Et, moi, je ne voudrais pas simplement répéter. Vous avez raison, je pense qu'au cours des derniers jours j'ai montré qu'un 7 % ou un 5 %, ou une baisse de tarif, ça n'existait pas dans les possibilités. Quand ils parlent de 7 %, là, dites-vous que c'est de l'ordre de grandeur... c'est 500 000 000 $. Moi, il n'y en a pas, de 500 000 000 $, qui traîne quelque part à Hydro-Québec pour faire quelque chose de cette nature-là. Ça, je peux vous dire ça. Mais, comme je ne reconnais pas les chiffres, je pourrais... On va prendre les données puis on va regarder; on vous fournira ce que c'est qu'on pense de ces chiffres-là. On essaiera de réconcilier les choses.

Mais, encore une fois il n'y a pas 500 000 000 $ à Hydro-Québec. On le sait, on est de l'ordre de grandeur de 900 000 000 $ en 1998, moins 500 000 000 $, ça ferait 400 000 000 $. Ça, ça veut dire retourner à une époque où, dans cette même salle, on décriait – peut-être mon expression est trop forte, je la retire, Mme la Présidente, mais enfin c'est ce que j'en avais compris – le piètre rendement d'Hydro-Québec.

Et ça, c'est tout ce qu'il faudrait pour s'exposer à l'instabilité tarifaire. Ça, je peux vous dire ça aussi. Et, à l'instabilité tarifaire, bien, rappelez-vous, dans ce métier, les investisseurs, pour qui l'énergie, c'est une dimension importante des dépenses futures quand ils auront réalisé leur investissement, quand on peut leur parler de stabilité, donc on peut démontrer qu'on a des raisons d'avancer ça, qu'on peut démontrer des choses, ça, ça parle. Ça, c'est incitatif à l'investissement. Mais, si on s'en va comme une montagne russe au niveau des tarifs, je peux vous dire qu'on décourage à peu près tout le monde, parce que là on dit: Le tarif d'électricité, bien, sais pas. Mais, tout ça étant dit, j'imagine qu'on trouvera le moyen de savoir comment ces chiffres-là ont pu être constitués.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Oui, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Normandeau: Merci, Mme. la Présidente. Ce serait intéressant d'avoir votre son de cloche sur justement les prétentions de la coalition Arc-en ciel à l'effet qu'effectivement Hydro-Québec disposerait de toute la marge de manoeuvre suffisante pour réduire ses tarifs de 7 %, puis une diminution évidemment qui profiterait à l'ensemble de la clientèle. Et évidemment, le scénario qui est proposé, qui est projeté par la coalition, il semblerait qu'il n'hypothèquerait pas, évidemment, le taux de rendement, ou très peu, d'Hydro-Québec. Alors, dans ce sens-là il y aurait une conciliation possible entre, donc, ce qui est proposé ici et le taux de rendement de la société. Mais il serait intéressant effectivement d'avoir plus de précisions de votre part.

M. Caillé (André): Alors, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): ...si on peut... Hélas, ce n'est pas ainsi, mais, si on pouvait réduire les tarifs sans changer le rendement d'une entreprise, le prix de plusieurs commodités diminuerait dans ce marché. Je peux vous dire ça. Mais la vie n'est pas comme ça. Il n'y a pas de génération spontanée. Le travail... Ce n'est pas une critique que je fais de personne, c'est plus difficile que ça, notre métier. C'est difficile arriver à faire ce que c'est que nous essayons de faire ici puis de... Il y en a pas beaucoup d'entreprises qui vont aller jusqu'à s'engager jusqu'à 2002 puis dire qu'on se donne l'objectif jusqu'en 2004 de geler des tarifs. Il y en a pas beaucoup dans ce métier-là. Il y en a qui ont gelé leurs tarifs, c'est arrivé, mais il y en a pas beaucoup.

Encore une fois, moi, je pense que ce n'est pas sérieux que de dire: On va baisser les tarifs de sommes aussi importantes que 500 000 000 $ puis ça n'aura pas d'effet nulle part ailleurs. Ça, ça ne peut pas arriver. Je n'ai pas besoin d'analyser les chiffres pour vous dire ça.

(17 h 20)

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la députée de Bonaventure.


Tarif pour les serristes

Mme Normandeau: Mme la Présidente, puisqu'il nous reste très, très peu de temps, en fait moins de 10 minutes, et qu'on parle de diminution des tarifs, je souhaiterais peut-être, M. Caillé, vous sensibiliser à un cas important que m'a rapporté un de mes collègues, le député de Richmond, qui est critique aussi en matière d'agriculture, concernant toute la question des productions en serriculture, des productions maraîchères. C'est un dossier important, pour lequel d'ailleurs le ministre a été sensibilisé par mon collègue. Et malheureusement, les producteurs en serre aujourd'hui sont très, très inquiets, et je pense que l'occasion est bonne aujourd'hui peut-être, de votre part, d'avoir des précisions.

En fait, les producteurs, tout le domaine de la production en serriculture, les producteurs en question souhaiteraient avoir accès au tarif qu'on appelle «de type BT», c'est un tarif à 0,025 $ le kWh, et il y a des intérêts évidemment qui sont en jeu, qui sont très importants. En termes d'emplois, on parle de la consolidation de 250 emplois, de la création de 250 nouveaux emplois et de la création de 600 emplois indirects. Il y a plusieurs régions au Québec qui seraient touchées, donc, par cette situation-là. On parle de la région de l'Estrie, de l'Outaouais, de la région de Portneuf, par exemple. Et un des principaux motifs qui est avancé par les promoteurs en question, c'est le fait qu'ils subissent une compétition féroce de la part de leurs vis-à-vis en Ontario, qui s'alimentent notamment au niveau du gaz. Et, dans le passé, il semblerait que ces producteurs bénéficiaient de certains avantages au niveau des tarifs, des avantages qui se sont vus, là, envolés avec le temps.

Et je souhaiterais vous entendre là-dessus. Qu'est-ce qu'on peut dire aujourd'hui à ces producteurs-là, en serriculture, qui nous disent dans le fond que, s'ils n'obtiennent pas des avantages au niveau de leurs tarifs, c'est toute cette production-là au Québec qui est hypothéquée? Alors, qu'est-ce que vous pouvez leur dire aujourd'hui, à ces gens-là?

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): M. Caillé.

M. Caillé (André): Ce que je leur dis, moi, c'est qu'il y a ceux qui ont fait leurs investissements en connaissance de cause. Parce que vous avez raison de dire que le tarif pratiqué était le tarif BT, qu'il y avait même des escomptes par rapport au tarif BT, de 25 % au point de départ, mais avec un engagement d'Hydro-Québec qui se terminait dans le temps. Je pense que ça a commencé en 1995, puis, en 1997, à moins que je ne m'abuse, ça devait être terminé. Alors, tous ceux qui ont investi sur la base d'un tarif BT avec un escompte de 25 % savaient qu'en 1997 c'était terminé, que cet escompte allait disparaître.

En cours de route, bien pour faire preuve de flexibilité – c'étaient déjà mes collègues, c'est-à-dire que c'étaient déjà mes prédécesseurs, c'étaient encore mes prédécesseurs – on a dit: Bon, bien, on va diminuer l'escompte progressivement. Alors, c'est passé de 25 %, je pense, à 16 %, puis à 8 %, puis c'est supposé passer à 0 %...

Une voix: ...

M. Caillé (André): À 8 % en septembre prochain et à 0 % en septembre de l'an 2001. C'est ça.

Alors, il y en a qui ont fait leurs investissements en connaissance de cause. Ça ne change rien, tout ce que je viens de dire, évidemment pour ceux qui songent à faire des investissements; eux, bien, enfin, ils doivent se dire: Nous, on n'a pas la possibilité de faire la même chose, puisqu'on n'a pas au point de départ, dans nos premières années de production, le même genre d'avantage que d'autres ont eu en 1995. Et ils se disent aussi, je pense, désavantagés par rapport à l'Ontario. Ils m'ont expliqué, un d'entre eux à tout le moins m'a expliqué qu'en Ontario la période où ils doivent chauffer est plus courte qu'au Québec. Alors, ça aussi, ça les avantage forcément d'un point de vue coût de l'énergie.

Qu'est-ce qu'on peut dire par rapport à ces gens-là? Pour ma part, en tout cas, moi, je leur rappelle qu'il faut qu'il y ait une équité entre les tarifs, aussi. On ne peut pas faire quelque chose pour les uns qu'on ne serait pas prêt à faire pour les autres. Je vais vous dire franchement, dans le cas des agriculteurs, il y a quelque chose qui a déjà été fait. De toute façon, le précédent est là, hein, puis c'est le cas des agriculteurs.

Mes collègues, des fois, parce que j'ai des antécédents en milieu agricole, me disent: Oui, mais ça, si on fait ça pour les uns, on va devoir le faire pour les autres. Ils ont raison en ce sens que, si on commence à faire des passe-droits à gauche et à droite, on va finir par en faire beaucoup, de passe-droits, puis il faut tenir une certaine discipline qui est la garante de l'équité entre les différents types de clients puis les différents types d'entreprises. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire? En fin de compte, c'est... S'il y avait, puis honnêtement je ne sais pas s'il y a, mais, s'il y avait possibilité de modifier les pratiques, si on pouvait faire un nouveau type de tarifs avec une consommation différente, par exemple n'utiliser l'électricité que pour l'éclairage, ceux qui utilisent l'électricité pour le chauffage en plus, bien là c'est sûr que ça devient extrêmement compliqué pour eux, dans le sens qu'ils ont des difficultés à compétitionner avec les autres.

Il y a peut-être des – peut-être, je dis bien – modalités. Moi, je ne les connais pas au moment présent. Ce que je vous dis là n'est pas différent de ce que je vous disais quand on parlait des papetières et qu'on parlait de grandes entreprises qui auraient intérêt, par exemple, à ce qu'on ait un tarif d'équilibrage qui pourrait être interruptible. On n'a pas à donner un avantage dans ce temps-là, parce qu'il y a une valeur qui revient à Hydro-Québec. Alors, on n'enlève rien à personne d'autre. On demeure équitable, quoi. Alors, si on pouvait trouver, pour les serristes, quelque chose du genre, bien je pense qu'on aurait véritablement... là on pourrait parler – puis ça fait plaisir de le faire, à part de ça: Voici ce que c'est qu'on pourrait faire. Et ce n'est pas au désavantage de personne d'autre. Il n'y a pas de passe-droit ou il n'y a pas quelque chose qui est rendu plus facile pour eux que pour d'autres. Alors, la difficulté qu'on a, ça tient à cela. On voudrait bien aider d'un côté, mais, d'un autre côté, on ne veut pas tout déséquilibrer notre relation avec la clientèle puis être, à l'évidence, inéquitable pour certains.

Mme Normandeau: Mais, Mme la Présidente, si je comprends bien, M. Caillé, ce que vous nous dites, dans le fond, pour ces gens-là, c'est qu'il y a peu d'espoir, sur la base du principe d'équité, qu'ils reçoivent un tarif qu'on pourrait qualifier de préférentiel, donc pour assurer une relance ou une consolidation des activités en serriculture. Mais le ministre des Ressources naturelles y a fait allusion, à toute la problématique au niveau des industries forestières et les stations de ski qui revendiquent aussi des tarifs moindres pour, par exemple, la production de neige. Il y a comme une pression de la part des différents secteurs au niveau de l'industrie, autant au niveau forestier – ici, c'est au niveau agricole – au niveau récréotouristique. Il me semble qu'il y a lieu... C'est toute l'industrie, en fait, au Québec qui vous demande une réduction des tarifs pour assurer une meilleure compétitivité; il me semble qu'il y a là matière à s'interroger de la part d'Hydro-Québec pour s'assurer que dans le futur on n'hypothèque pas justement la compétitivité des entreprises, là.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, est-ce qu'il y a une réponse?

M. Caillé (André): M. Filion va donner des informations additionnelles sur les...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): S'il y a une réponse, il faudrait que ça soit très bref. Je pense que le temps... M. Filion.

M. Filion (Yves): Oui, Mme la Présidente, je vais donner une réponse très rapide. Je voulais juste mentionner que le tarif BT, qui est un tarif biénergie, constitue déjà un rabais tarifaire important par rapport au tarif normal qui devrait s'appliquer aux serriculteurs. Je dois aussi dire que nous avons poussé à peu près à la limite l'interprétation de l'application du tarif biénergie, puisque les serriculteurs utilisent dans les serres un procédé qu'on appelle la photosynthèse, donc l'éclairage par les lumières. Donc, je dois vous admettre que c'est très difficile, au niveau de l'équité, d'aller plus loin, et toute modification de tarif devra être soumise à la Régie de l'énergie éventuellement pour approbation, s'il y a lieu.


Documents déposés

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Filion. À ce moment-ci, avant de passer aux remarques finales, tel qu'il a été entendu lors de notre séance de travail, je vais donc déposer à la commission les différents documents qui ont été utilisés pour les recherches ou pour le travail préparatoire à la commission, donc la présentation, bien sûr, par Hydro-Québec du plan 2000-2004, Planification de l'offre et de la demande d'électricité au Québec dans une perspective nord-américaine , plus un document afférent de M. Dominique Newman, et Analyse critique du plan stratégique 2000-2004 de la société Hydro-Québec , qui a été déposé par le centre Hélios, M. Dunsky et M. Raphals. Voilà. Alors, les documents sont déposés.


Remarques finales

Maintenant, pour les remarques finales, Mme la députée de Bonaventure, je serais prête à vous reconnaître pour une période de 15 minutes.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, d'entrée de jeu, à l'issue de ces audiences sur le plan stratégique 2000-2004 d'Hydro-Québec, nous persistons à croire que deux jours d'échanges s'avèrent nettement insuffisants pour questionner les dirigeants et gestionnaires d'Hydro-Québec, et ce, de façon satisfaisante. Je vous dirais qu'à plusieurs égards l'exercice a été décevant et frustrant.

(17 h 30)

Compte tenu du temps à notre disposition, des questions d'importance n'ont pu être abordées à fond. Je pense notamment ici à la question des réservoirs, à l'avenir réservé aux grands projets électriques ou encore à la question qui touche l'interfinancement. Et à cet égard, la recommandation que nous formulons pour l'avenir est de tenir des audiences sur une plus longue période, une plus grande période, afin de laisser aux parlementaires le temps de poser toutes les questions.

Un autre élément négatif tient à l'organisation de l'ordre du jour de nos travaux. Plutôt que de procéder à un examen orientation par orientation, il aurait été souhaitable d'aborder le plan sous un angle global, nous donnant ainsi la latitude nécessaire pour choisir nous-mêmes les orientations que nous jugeons les plus prioritaires. Évidemment, Mme la Présidente, nous souhaiterions que ce soit une recommandation et que, dans le futur, on puisse avoir cette latitude.

Par ailleurs, on s'explique encore mal pourquoi le ministre des Ressources naturelles a refusé la participation de plusieurs groupes à ces audiences. Il s'agit là d'une décision qui nous laisse croire que le ministre et son gouvernement voulaient s'assurer qu'il n'y aurait pas de note discordante durant ces deux jours d'audiences. Évidemment, de notre côté, nous déplorons le fait que les parlementaires ont été ainsi privés d'analyse critique du plan stratégique 2000-2004, des points de vue différents qui nous auraient fourni des outils additionnels et qui auraient permis de susciter des débats sur plusieurs questions, des questions d'importance. Évidemment, on prive ces groupes d'une tribune et d'un lieu qui se veulent en principe accessibles à tous, c'est-à-dire l'Assemblée nationale. C'est ce même gouvernement qui assurait la population, via la politique énergétique qui a été adoptée en 1996, que les débats sur l'énergie se feraient en toute transparence. Ce gouvernement vient donc de manquer à un engagement de taille.

Enfin, on peut s'indigner face au refus du gouvernement et du ministre d'entendre ces groupes. Je pense qu'il est inacceptable que le gouvernement refuse à des citoyens le droit de s'exprimer à l'Assemblée nationale et de venir ici, en commission parlementaire, nous livrer leur vision du plan stratégique 2000-2004.

Hier, en conférence de presse, des représentants de la coalition Arc-en-ciel dénonçaient cette attitude et protestaient contre ce refus de se faire entendre en commission parlementaire. C'est une décision qui s'explique mal, dans la mesure où le gouvernement avait accepté, lors de l'analyse et de l'étude du premier plan stratégique d'Hydro-Québec, d'ouvrir les portes de la commission à la population et à ces groupes. Compte tenu des nombreux changements dans les orientations d'Hydro-Québec et dans le domaine de l'énergie, il aurait été nécessaire et pertinent de connaître la vision de ces groupes.

Dans mes remarques préliminaires, j'ai souligné qu'Hydro-Québec détient d'énormes moyens comparativement à ceux que nous, les parlementaires, et en particulier ceux de l'opposition officielle, possédons. Au cours de nos travaux, je dois vous dire que nous avons été à même de mesurer cette distorsion entre les moyens.

Dans ce contexte, Hydro-Québec n'a pas toujours facilité notre travail en ne fournissant qu'à la toute dernière minute les tableaux, les graphiques et autres documents servant à sa présentation. Il aurait été pertinent et utile que ces documents nous soient distribués plusieurs jours avant le début des travaux plutôt que de nous remettre les documents au moment où les échanges s'amorçaient. Évidemment, nous en faisons une recommandation et nous pensons que ce serait faire preuve de respect à l'endroit des parlementaires et à l'endroit de l'institution qu'est l'Assemblée nationale si Hydro-Québec, effectivement, prenait le soin et l'attention de nous expédier les documents à l'avance. D'autre part, si ces tableaux et graphiques s'étaient déjà retrouvés dans le plan stratégique, ce problème du manque de transparence ne se serait pas posé, bien évidemment.

Tout au long de l'étude et de l'examen du plan stratégique 2000-2004, nous avons déploré donc le manque de précisions et d'informations contenues dans chacune des orientations. Je dois vous dire qu'il est assez étonnant qu'une société d'État qui possède des actifs de plus de 50 000 000 000 $, qui prévoit des bénéfices de plus de 900 000 000 $ pour seulement l'an 2000, dépose un plan, un plan stratégique, qui tienne uniquement en 60 pages. À bien des égards, celui-ci s'apparente davantage à un plan de communication. Et les perspectives financières et économiques d'Hydro-Québec, par exemple, et de l'ensemble de ses filiales ne tiennent qu'en quatre pages. C'est, à notre sens, un autre exemple qui témoigne du très peu de précisions qui sont contenues dans le plan stratégique. Dans ce contexte, évidemment, il n'est pas étonnant que plusieurs analystes disent manquer d'informations pour juger des prévisions d'Hydro-Québec, ce qui complique encore le travail des parlementaires.

Un autre élément que nous déplorons tient au fait que la Régie de l'énergie ne soit toujours pas habilitée à examiner toute la question des tarifs. Pourtant, cette disposition constituait l'un des éléments majeurs de la politique énergétique adoptée en 1996.

Lors de la première journée d'audiences, par exemple, nous avons passé près de deux heures à discuter de la question très complexe des tarifs, et ce, sans avoir aucun moyen de vérifier les coûts de production d'Hydro-Québec. De plus, comme le gel des tarifs est basé fondamentalement sur le taux de rendement de la société, il n'existe en ce moment personne qui peut, avec indépendance, déterminer le taux de rendement juste, un taux de rendement qui soit à la fois juste pour la société et l'ensemble de la population du Québec. En ce moment, les seules personnes qui décident de la justesse du taux de rendement sont celles qui en profitent, soit Hydro-Québec et le gouvernement. Il y a donc lieu de s'inquiéter sur la volonté d'Hydro-Québec d'atteindre des taux de rendement toujours plus élevés.

Ce vide réglementaire pèse très lourd dans la mesure où, comme parlementaires, nous ne possédons pas l'expertise nécessaire pour analyser et questionner Hydro-Québec de façon détaillée et pointue sur cette question importante des tarifs. De là donc découle l'importance d'avoir devant la Régie de l'énergie une cause tarifaire. Le ministre, lui, de son côté, affirme que, sur la base d'un gel des tarifs, il est inutile de tenir un tel débat à la Régie de l'énergie. Je lui répondrai évidemment qu'il dénature le rôle de cet organisme, puisque la tenue d'audiences nous éclairerait de façon satisfaisante sur la proposition de gel des tarifs qui est avancée par Hydro-Québec, et la Régie, peut-être – peut-être – pourrait statuer sur la nécessité et la pertinence d'envisager une baisse des tarifs.

Par exemple, la coalition Arc-en-ciel – et on en a fait mention tout à l'heure – prétend, sur la base de données d'études, qu'Hydro-Québec dispose de la marge de manoeuvre nécessaire pour diminuer les tarifs de 7 %. Si la Régie pouvait les entendre et vous entendre, on serait en mesure d'avoir l'heure juste sur cette importante question. Est-ce que ces affirmations de la coalition Arc-en-ciel sont fondées ou non? Malheureusement, l'absence de débat à cette commission ne nous a pas fourni les moyens de le vérifier, bien qu'Hydro-Québec se soit engagée à le faire.

Dans cette optique, le gouvernement a l'obligation, donc, de donner suite à son engagement et de doter la Régie de l'énergie des pouvoirs nécessaires pour lui permettre d'exercer son rôle de régulateur du volet production d'électricité au Québec. Évidemment, le ministre des Ressources naturelles, on le sait, n'est pas chaud à cette idée. Peut-être tient-il sa commande directement de son collègue le ministre des Finances, qui tient absolument à voir gonfler ses coffres. Mais, évidemment, Mme la Présidente, je ne lui prêterai pas pareille intention, comme lui l'a fait à plusieurs reprises au cours de cette commission parlementaire à notre endroit, bien évidemment.

Le Parti libéral du Québec a toujours été et demeurera un fidèle partisan du développement hydroélectrique au Québec. Je pense que nous n'avons pas à vous en faire l'illustration, compte tenu du leadership qui a été assumé dans le passé par le Parti libéral du Québec. Nous convenons toutefois que ce développement doit se faire en toute transparence et dans le respect des préoccupations des Québécois, tant sur les plans économique, social et environnemental.

Le gouvernement demande aujourd'hui, Mme la Présidente, aux parlementaires de l'Assemblée nationale, et plus particulièrement à ceux de cette commission, de donner carte blanche aux dirigeants d'Hydro-Québec sur la foi du plan stratégique 2000-2004 et de cautionner leurs choix. Je dois vous dire que, avec le peu de capacité de contre-expertiser dont nous disposons et tenant compte de l'échec retentissant des prévisions du plan stratégique 1998-2002, la commande est très lourde. Comment nous assurer que les prévisions actuelles tiendront mieux la route que celles du plan précédent?

Mme la Présidente, je conclurai ces remarques préliminaires avec un dernier commentaire. Quand on veut connaître les orientations véritables d'une entreprise, il ne faut pas trop faire confiance à son plan stratégique, qui se veut davantage, comme je l'ai souligné précédemment, un outil de communication sans pareil pour plaire à la fois à ses clients et à son actionnaire. Il faut plutôt écouter attentivement les propos du président du conseil d'administration de cette entreprise, celui-là même qui est au coeur des orientations et des décisions.

Et quel a été le premier message de M. Jacques Ménard lors de l'ouverture de cette commission parlementaire? Évidemment, je pense qu'il y a lieu ici de vous citer un extrait qui est non moins éloquent sur les prétentions d'Hydro-Québec. M. Ménard nous a dit d'entrée de jeu, et je le cite: «Le plan stratégique que nous vous avons proposé il y a deux ans visait à remettre Hydro-Québec sur le chemin de la croissance et de la rentabilité. L'évolution du taux de rentabilité de l'entreprise nous donne la mesure du défi. De 3,3 % en 1995, il est passé à 5,8 % en 1998, et notre objectif pour l'horizon du présent plan est de 9,8 %.»

Les premiers mots du président du conseil d'administration d'Hydro-Québec décrivent mieux que toute autre explication les réelles intentions de la société d'État et reflètent ce qu'elle est devenue. En soi, ce n'est pas négatif, je tiens à le dire, mais, 9,8 %, est-ce le meilleur taux de rendement pour Hydro-Québec et les Québécois? Après ces deux jours d'audiences, je pense que la question se pose encore.

(17 h 40)

En terminant, évidemment, je sais qu'Hydro-Québec, M. Caillé et l'ensemble de ses collaborateurs estiment avoir fait preuve d'une véritable transparence lors de ces deux jours d'audiences. Nous formulons, Mme la Présidente, le souhait d'entrer, évidemment, à la suite de ces deux jours d'audiences, dans une ère de véritable transparence qui mettra fin à un système où les décisions se prenaient dans les officines gouvernementales. Dans cette optique, nous espérons que le ministre donnera dans les meilleurs délais tous les pouvoirs qui permettront à la Régie de l'énergie d'effectuer véritablement son travail dans tout le domaine de la production d'électricité au Québec.

Afin de corroborer leur intention de ne rien cacher aux Québécois, j'invite M. Caillé, j'invite Hydro-Québec et l'ensemble de ses collaborateurs à poursuivre cet exercice, ici ou ailleurs, afin d'écouter toutes nos questions et celles des groupes qui sont intéressés par son avenir. Je pense qu'il s'agirait là d'un geste bien sincère et crédible qui permettrait une fois pour toutes – et les parlementaires de ce côté-ci ne souhaitent que cela – de lever les doutes qui subsistent quant à la crédibilité d'Hydro-Québec et les choix qui sont effectués dans le plan stratégique 2000-2004. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, M. le ministre, pour vos remarques finales.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Mme la Présidente, quelques remarques. D'abord, je suis un peu surpris des propos de la députée de Bonaventure. À tout bout de champ à l'Assemblée nationale, je le sais, c'est coutumier, sur n'importe quel sujet, n'importe quel projet de loi, n'importe quelle activité qui implique plus ou moins le gouvernement ou ses sociétés d'État, l'opposition officielle a l'habitude, bien légitime, de réclamer à tout bout de champ une commission parlementaire pour qu'on regarde telle chose, pour qu'on examine plus attentivement telle politique, pour qu'on scrute un peu plus les activités de telle société d'État. C'est fréquent. Vous le savez, vous êtes à l'Assemblée depuis un certain nombre d'années. Moi, ça fait pas mal de temps aussi. C'est constant, c'est fréquent, c'est habituel. Commission parlementaire. Convoquez-la. On harcèle le gouvernement pour convoquer une commission parlementaire pour que les députés, les élus du peuple, les représentants de la population puissent être en mesure de faire un examen de tel dossier, de telle problématique, de tel projet de loi, de telle politique du gouvernement, de telle activité de telle société d'État. C'est constant.

Là, dans le cas majeur qui intéresse tout le monde, le plan stratégique d'Hydro-Québec qu'Hydro-Québec est tenue de déposer à l'Assemblée nationale devant les élus de toute la population, qui constitue, dans le fond, tous les actionnaires de Hydro-Québec, là, ça n'a pas de bon sens, c'est insuffisant, et ce n'est pas vraiment le bon moyen, et ce n'est pas le bon forum, les députés sont pratiquement impuissants ou inaptes à faire l'examen du plan stratégique. En toute autre circonstance, c'est la commission parlementaire qui est le forum idéal. Là, curieusement et paradoxalement, pour ce qui est du plan stratégique de la plus grande société d'État du Québec, la plus importante société d'État du Québec, la commission parlementaire, c'est un forum inapproprié. Ce n'est pas suffisant. Il faudrait aller ailleurs puis il faudrait surtout inviter d'autre monde à nous aider, nous, pauvres élus, à faire le travail.

J'ai de la misère à suivre le cheminement de l'opposition, j'ai beaucoup de misère, parce que le plan stratégique, c'est un élément majeur concernant Hydro-Québec. Et, pour une fois, sans même qu'on ait besoin de le réclamer, c'est prévu comme ça, il y a une commission parlementaire qui doit prendre acte du plan stratégique, l'examiner, échanger avec Hydro-Québec, face à face avec Hydro-Québec pendant, là, deux jours. Peut-être que c'est insuffisant. Il aurait fallu peut-être ajouter deux autres journées. Mais c'est un échange face à face avec les autorités d'Hydro-Québec sur ce qu'ils ont l'intention de faire pendant les cinq prochaines années. Ça s'appelle le plan stratégique.

Il y a des choses qui sont complexes là-dedans, j'en conviens. Peut-être, même, certaines choses sont, on peut même dire, compliquées. Mais c'est justement le temps, par les échanges, via les échanges avec les autorités d'Hydro-Québec, de mieux comprendre ces données puis ces éléments qu'on peut juger, avec raison, complexes. Il me semble que les élus sont capables de faire ça.

En plus, j'insiste, les parlementaires, les élus qui ont été choisis par la population au suffrage universel, il me semble que, en termes de représentativité, ils n'ont pas de leçon à recevoir de quiconque, de quelque organisation que ce soit, même des coalitions. Ils n'ont pas de leçon à recevoir en termes de représentativité, ils sont issus de la démocratie. Aussi bien de l'opposition que du parti ministériel, je trouve ça déplorable, moi, qu'à tout bout de champ on discrédite les élus, les parlementaires. Ce n'est jamais là que les choses doivent s'examiner, c'est toujours ailleurs, puis c'est toujours d'autres organisations qui sont bien plus aptes à faire tel examen, à faire telle analyse de tel dossier.

Pourquoi les élus ne seraient pas capables de le faire? Ils sont capables de le faire pour un projet de loi, ils sont capables de le faire pour une politique, pour un livre blanc. Pourquoi ils ne seraient pas capables de le faire pour le plan stratégique d'Hydro-Québec? Je ne vois pas pourquoi. Donc, on le fait. Puis je pense que ça a été bon, cet exercice-là, puis que ça a été bon que ce soit fait par les élus, sans intermédiaires, directement, en échangeant avec les autorités d'Hydro-Québec. C'est une très bonne chose. Et ça doit rester comme ça. Je ne vois pas pourquoi, sur ce plan-là, on doit se départir de nos responsabilités, se décharger de nos responsabilités puis confier ça à d'autres.

Le plan stratégique, c'est une obligation d'Hydro-Québec de l'élaborer, de le concevoir, de le déposer à l'Assemblée nationale, de le transmettre au gouvernement actionnaire, et c'est le devoir et la responsabilité des élus de l'examiner, de le comprendre puis de faire aussi les commentaires que les élus jugent appropriés. À cet égard-là, je suis parfaitement d'accord avec cette partie-là de l'intervention de la députée de Bonaventure. Elle a parfaitement le droit, comme élue, de faire des critiques, de faire des commentaires, de signaler des lacunes dans le plan stratégique. Ça, c'est parfaitement normal que ça soit fait. Mais c'est aussi parfaitement normal que cet exercice-là se fasse devant la commission parlementaire et devant les élus, parfaitement démocratique.

Ceci étant dit, Mme la Présidente, moi, je suis très heureux de cet exercice, très content d'avoir fait ces deux jours d'échanges avec les autorités d'Hydro-Québec. J'ai appris beaucoup, je pense que nous avons appris beaucoup, et je pense mieux comprendre le plan stratégique maintenant que ce n'était le cas avant l'exercice.

Quelques commentaires au sujet du plan stratégique, Mme la Présidente. D'abord, sur le plan des tarifs. D'abord, il faut bien préciser que, oui, la Régie a maintenant l'autorité en matière de tarifs. C'est clair qu'elle a l'autorité en matière de tarifs. J'entendais tout à l'heure la députée parler des serriculteurs, par exemple, et des stations de ski. Bien, Hydro-Québec n'a plus – le gouvernement non plus – l'autorité, ni la compétence, ni le pouvoir de changer, de modifier les tarifs. On les a gelés pour un certain nombre d'années avant qu'on transmette les compétences en matière tarifaire à la Régie, mais maintenant, à partir de 2002, c'est clair que toute modification tarifaire devra être examinée, et autorisée, et approuvée par la Régie de l'énergie. C'est un pouvoir que le gouvernement n'a absolument pas l'intention de modifier et d'abolir. La Régie va pleinement conserver ses compétences en matière tarifaire.

Mais ce qu'Hydro-Québec dit, au fond, c'est: Jusqu'en 2002, Hydro-Québec n'a pas l'intention de présenter une cause tarifaire devant la Régie, certainement pas pour augmenter les tarifs, mais pas non plus pour les abaisser. Sa position tarifaire, c'est le gel jusqu'en 2002, et son intention, c'est de le poursuivre jusqu'en 2004.

(17 h 50)

Je trouve que ça, c'est une bonne nouvelle pour les consommateurs québécois. C'est une excellente nouvelle. Je sais bien qu'il y en a qui réclament des baisses, mais là il faut voir qu'est-ce que ça signifie comme impact. Je pense que la meilleure nouvelle du plan stratégique, c'est cette décision, cette orientation sur le plan tarifaire. C'est extraordinaire pour les consommateurs québécois. Ils savent maintenant que, jusqu'en 2002, il n'y aura pas d'augmentation de tarifs puis ils savent que leur société d'État, jusqu'en 2004, a l'intention également de ne pas augmenter les tarifs, maintenant ainsi ce fameux pacte social dont on a parlé souvent dans nos échanges en commission parlementaire, pacte social qui est fort ancien, qui date des années soixante, mais qui a toujours été maintenu de gouvernement en gouvernement, toujours. Tous les gouvernements qui se sont succédé l'ont maintenu, ce pacte social, parce que c'est fondamental pour l'ensemble de la population du Québec.

Le rendement. Écoutez, moi, je pense que... Moi, j'ai été très convaincu... En tout cas, je trouve ça tout à fait normal et légitime qu'Hydro-Québec cherche à augmenter son rendement. Ce n'est pas normal qu'elle ait des rendements comme c'est le cas présentement, puis comme c'était le cas il y a quelques années, puis autrefois. Ce n'est pas normal. C'est tout à fait légitime, non seulement souhaitable, mais nécessaire qu'Hydro-Québec vise à obtenir des rendements qui vont au moins se rapprocher de 10 %.

Ça va se traduire effectivement par des dividendes substantiels dans les coffres de l'État. Et alors? Tant mieux! Tant mieux! Tant mieux pour tout le monde. Tant mieux pour l'État, tant mieux pour le gouvernement, mais tant mieux aussi pour les Québécois et les Québécoises. Ils n'auront pas à payer ça en impôts puis en taxes. Que ça atteigne plusieurs centaines de millions, les dividendes dans les coffres de l'État, tant mieux. Je pense que c'est tout à fait un objectif, une orientation à laquelle, moi, j'adhère pleinement, que cette volonté d'augmenter le taux de rendement d'Hydro-Québec.

Ce qu'on a appris aussi, c'est que les activités d'Hydro-Québec, en particulier les activités d'exportation, les activités reliées à des investissements à l'étranger, aux États-Unis par exemple, sur la scène internationale, ces activités, Hydro-Québec les initie, les met en oeuvre avec comme objectif, avec comme condition essentielle que ce soient des activités rentables – rentables. Alors, je pense que c'est faux de prétendre que ce sont les consommateurs québécois et les clients québécois qui paient pour des activités d'Hydro-Québec sur la scène internationale ou sur les marchés d'exportation qui ne sont pas rentables. Je pense que la preuve a été faite. La preuve a été faite que ce sont des activités rentables et bénéfiques pour les Québécois et les Québécoises, avec, entre autres, comme conséquence qu'Hydro-Québec peut se permettre une grande stabilité tarifaire. M. Caillé l'a souvent mentionné, une grande stabilité tarifaire, c'est possible, entre autres parce qu'il y a des activités d'exportation qui génèrent des profits intéressants.

Les changements quant à la recherche. Moi, je pense que c'est une orientation qui est tout à fait pertinente, qu'Hydro-Québec se recentre sur ses missions essentielles. C'est ce qu'elle entend faire. Il y a une politique de recherche qui est en cours. On va voir ce que ça va donner. Mais je pense que l'orientation, elle est tout à fait opportune dans les circonstances. Il y a un arrimage qu'il faudra faire aussi, cependant, avec ce qu'est en train de préparer mon collègue, M. Rochon, qui est en train de concevoir et d'élaborer une politique de recherche plus large, là, plus englobante. Je pense qu'il y a un arrimage qui devra se faire avec cette politique en gestation. Aussi, je pense qu'on attend également un plan d'affaires relativement à vos intentions concernant le domaine gazier.

Moi, je pense aussi, cependant, qu'il y a des améliorations que vous devrez apporter à votre plan stratégique. Il y a des choses qui devraient être davantage ventilées, il y a des précisions qui devraient s'y retrouver pour que les députés aient une meilleure connaissance de ce que vous avez l'intention de faire et des orientations que vous avez l'intention d'adopter. Il y a beaucoup d'informations dans le plan stratégique, mais je pense aussi qu'il faut en ajouter pour qu'on soit mieux informés. Je vous l'ai tout à l'heure, Autres charges, là, c'est un poste qui englobe pas mal de choses, ça mériterait certainement d'être ventilé. Puis, les provisions pour faible hydraulicité, je pense qu'il faut le dire carrément puis l'indiquer très clairement dans le plan stratégique, en quoi ça consiste.

Alors, moi, je suis content de l'exercice, Mme la Présidente. Je pense que c'est un bon exercice. On en ressort mieux informés. Et les élus, les parlementaires ont assumé pleinement leurs responsabilités.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. le ministre. Il reste trois minutes aux membres du groupe parlementaire de l'opposition.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Juste assez de temps, Mme la ministre...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Mme la Présidente, maintenant, oui.

M. Sirros: ...Mme la Présidente, pour rappeler le ministre à l'ordre, qui a cette tendance à dénaturer constamment les propos qui sont donnés ici.

Les parlementaires de l'opposition, en particulier, n'ont jamais voulu éviter la possibilité de questionner directement Hydro-Québec. Ce qu'on a voulu avoir, ce que les ministériels ont refusé, c'est la possibilité de permettre aussi à d'autres de venir nous présenter leurs points de vue, justement comme on le fait dans le cas des livres blancs, par exemple, dont parlait le ministre quand il comparait le plan stratégique avec des livres blancs. Effectivement, on tient des commissions parlementaires où on permet à des gens de venir.

Mais, plus fondamentalement que ça, ce qu'on réclame, c'est que le débat qui suit la mise en application des orientations se fasse devant la Régie, où une vraie contre-expertise peut être faite en débat contradictoire, finalement, entre ceux qui s'y connaissent à fond dans le dossier. Ce n'est pas minimiser notre capacité, de dire qu'on n'est pas des experts dans l'énergie et que ça serait intelligent et même responsable de le faire de façon correcte devant la Régie, qui a été constituée justement parce que les parlementaires, des deux côtés, se sentaient incapables de vraiment être juges dans le cas des causes tarifaires.

Du côté ministériel comme du côté de l'opposition, on a tous convenu que le temps était venu au Québec de se mettre au diapason de la plupart des autres États en Amérique du Nord et de réglementer un monopole d'État de façon indépendante et surtout transparente. C'est tout ce qu'on réclame. On veut bien faire notre travail comme représentants de la population, mais on rappelle au gouvernement de tenir les promesses qu'il a faites à la population quant à la transparence et de permettre à la Régie de jouer son rôle pleinement et ouvertement, avec la participation de tout le monde.

Et je demanderais au ministre de se retenir, si c'est possible, de cette façon qu'il a d'essayer de prendre un bout et de dénaturer les propos qui sont faits, parce que ça nous amène constamment à l'obligation de rectifier les faits et prendre même les quelques minutes qu'il nous reste. Alors, merci.

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. À ce moment-ci, j'aurais besoin d'un consentement de la commission pour donner quelques minutes à M. Caillé, aux gens d'Hydro-Québec qui ont demandé la parole, et aussi bien sûr parce qu'on va dépasser, ce faisant.

Des voix: ...

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, il y a consentement. M. Caillé.


M. André Caillé, président d'Hydro-Québec

M. Caillé (André): Oui, je serai très bref, Mme la Présidente. C'est pour vous remercier, vous-même et tous les membres de votre commission, pour votre accueil ici et aussi pour toute la considération que j'ai sentie que vous aviez tous, autant pour moi que pour mes collaborateurs.

Bien entendu, on a compris le message en ce qui concerne la ventilation des données. On vous fournira des données plus ventilées, plus explicites, soit en annexe ou autrement. Enfin, vous aurez les données plus ventilées dans les prochains plans.

(18 heures)

Je voudrais également, et je termine là-dessus, remercier publiquement, devant vous, mes collaborateurs et mes collaboratrices. Pour nous, c'est une longue préparation avant de se présenter devant vous. Ils ont fait, cette année, un travail exemplaire. Ils nous ont beaucoup aidés. Ils m'ont beaucoup aidé, moi, à faire les présentations puis à répondre aux questions comme on l'a fait. Alors, ça vaut pour tous mes collaborateurs ici et mes collaboratrices. Et je veux leur dire aussi devant vous, à eux, que je suis toujours très, très, très fier de travailler avec eux. Merci de m'avoir laissé ce moment pour m'exprimer publiquement.


Mme Denise Carrier-Perreault, présidente

La Présidente (Mme Carrier-Perreault): Alors, merci, M. Caillé. À mon tour, à titre de présidente de la commission, j'aimerais vous rappeler que la commission est effectivement parfaitement autonome et que la décision de recevoir ou de ne pas recevoir des groupes, de procéder à un mandat d'initiative, est une décision qui appartient aux membres de la commission, qui a été aussi résolue en séance de travail après discussion, et qu'il y a eu un choix qui a été fait, que, étant donné notre difficulté à analyser ces données qui sont si compliquées et si complexes, nous avons retenu d'ailleurs les services d'experts qui sont venus quand même nous aider. Alors, ceci étant dit, je pense qu'il faut quand même rappeler de temps en temps que notre commission a aussi certains pouvoirs et qu'elle agit aussi de façon autonome.

Alors, je voudrais remercier à mon tour les membres de la commission ainsi que toute l'équipe d'Hydro-Québec pour la collaboration. Là-dessus, notre mandat étant complété, j'ajourne donc les travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 1)


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