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(Onze heures trente-six minutes)
Le Président (M. Joly): Alors, bonjour. Je déclare
la séance ouverte. Je rappelle que notre mandat est de procéder
à des consultations particulières dans le cadre de l'étude
détaillée du projet de loi 142, qui est la Loi modifiant la Loi
sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la
main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et modifiant d'autres
dispositions législatives.
Mme la secrétaire, avons-nous des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. MacMillan
(Papineau) remplace M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine); M. Fradet (Vimont)
remplace M. Leclerc (Taschereau); Mme Blackburn (Chicoutimi) remplace M. Blais
(Masson) et M. Dufour (Jonquière) remplace M. Claveau (Ungava).
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, madame.
Je vous rappelle l'ordre du jour. Nous entendrons l'Association des
manufacturiers du Québec, l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec inc., l'Association des constructeurs de routes
et grands travaux du Québec, la Confédération des
syndicats nationaux (CSN-construction), La Corporation des maîtres
électriciens du Québec, la Centrale des syndicats
démocratiques-construction, la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec et le Syndicat de la
construction de la Côte-Nord inc.
Alors, il me fait plaisir, maintenant, d'accueillir le premier groupe,
qui est l'Association des manufacturiers du Québec. Je demanderais
à M. Le Hir de bien vouloir identifier les gens qui l'accompagnent, s'il
vous plaît.
Auditions Association des manufacturiers du
Québec (AMQ)
M. Le Hir (Richard): Merci, M. le Président. J'aimerais
vous présenter, d'abord, à ma droite, M. Gaston Charland, qui est
le directeur des relations industrielles et ressources humaines à
l'Association, et, à ma gauche, Charles Patry, qui est directeur
général de la raffinerie de Québec d'Ultramar.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie. Je vous rappelle
les règles, quoique vous les connaissiez sûrement, à date,
depuis le nombre de fois que vous comparaissez ici, en commission. Vous avez
une vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire ou, en
fait, les propos dont vous voulez bien discuter sur le projet de loi 142 et,
par après, les parlementaires échangeront avec vous. M. Le Hir,
je vous reconnais la parole.
M. Le Hir (Richard): Merci beaucoup, M. le Président. Un
mot, d'abord, pour vous remercier d'avoir modifié l'ordre de
présentation et, aux autres organismes, d'avoir accepter que vous le
fassiez.
L'Association des manufacturiers du Québec remercie les membres
de la commission de l'économie et du travail pour cette occasion de
faire valoir le point de vue de ses membres sur le projet de loi 142, Loi
modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et
la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et modifiant
d'autres dispositions législatives.
Dès le départ, précisons que le projet de loi 142
pourrait avoir des impacts sur l'industrie manufacturière autant par les
dispositions qui ont un effet direct sur son fonctionnement que par celles qui
peuvent affecter la position concurrentielle du Québec dans un
marché qui se mondialise.
Notre exposé comprend essentiellement deux volets principaux.
Premièrement, j'aimerais vous faire part de la performance de
l'industrie manufacturière face à nos principaux concurrents.
Deuxièmement, j'aborderai les principaux points du projet de loi 142 et
les réactions qu'il suscite chez les employeurs du secteur
manufacturier.
Notre association procède sur une base annuelle à
l'évaluation de la performance du pays en matière d'excellence
manufacturière. Cette évaluation permet de mesurer notre position
dans huit domaines: l'investissement en équipement et en outillage en
pourcentage du produit intérieur brut; l'investissement en recherche et
développement en pourcentage du produit intérieur brut
également; la part du marché intérieur détenue par
la production domestique; la croissance des exportations en biens et services
depuis 1987; le taux préférentiel moyen au cours de la
dernière année; le pourcentage d'augmentation des coûts
unitaires de main-d'oeuvre depuis 1987; le pourcentage d'augmentation de
l'influx technologique depuis 1987 et la productivité
manufacturière exprimée en dollars US de production par
employé.
Prise dans son ensemble, l'analyse de ces huit facteurs nous indique que
la performance canadienne et québécoise est la pire de toutes
celles des pays du Groupe des Sept. Qu'il suffise de considérer que le
Canada et le Québec se classent bons derniers en matière de
croissance des exportations et au chapitre des investissements en outillage et
en équipement en pourcentage du produit intérieur brut pour
comprendre la nécessité
de remettre en question notre façon d'agir et nos attitudes.
Plusieurs autres données nous permettraient d'identifier les
faiblesse structurelles des économies canadienne et
québécoise. Nos manufacturiers doivent, en effet, livrer une rude
bataille à des pays qui ont réussi à transformer leurs
pratiques et politiques en matière de production manufacturière.
Les clients exigent de plus en plus ce qu'il y a de mieux à des
coûts moindres. Il faut faire face à cette réalité
des années quatre-vingt-dix, et c'est dans cet esprit que l'Association
des manufacturiers du Québec a tenu à vous rencontrer pour vous
souligner les dangers qui guettent notre industrie. (11 h 40)
Les sceptiques qui ne croient pas en ces dangers n'ont qu'à
considérer qu'il y a eu entre octobre 1989 et octobre 1993 une
diminution réelle de 112 000 emplois dans le secteur manufacturier au
Québec. Cette réalité justifie amplement nos
démarches répétées pour éviter que des
coûts additionnels soient imposés à l'industrie. Elle nous
permet aussi de déplorer le manque de vision de l'ensemble de
l'industrie de la construction en ce qui a trait aux changements
nécessaires pour rendre cette industrie concurrentielle et, par le fait
même, augmenter la compétitivité du secteur manufacturier.
Je vous signale, en passant, que les pertes d'emplois dont on parle sont
uniquement celles du secteur manufacturier, mais, s'il fallait tenir compte
également des effets d'entraînement du secteur manufacturier sur
les autres secteurs, on voit qu'on pourrait facilement doubler si ce n'est
tripler le chiffre en question.
À titre d'exemple, est-il responsable que, en une période
de contrainte économique, le Sommet sur l'industrie de la construction
n'ait pas approuvé une décision qui aurait permis de s'assurer
que le travailleur accidenté ne touche pas de prestations
supplémentaires à ses gains réels? Voilà un exemple
des coûts que l'industrie manufacturière absorbe indirectement par
le partage de l'expérience de la CSST entre les différents
secteurs de l'économie.
La performance de l'industrie manufacturière est liée
à sa capacité concurrentielle sur le marché international,
et c'est dans cette perspective que nous apporterons des commentaires sur les
éléments du projet de loi 142.
Avant de commencer, nous aimerions préciser que nous avons
assisté au sommet de la construction à titre d'observateurs et
que, à ce titre, nous nous sommes demandés si l'industrie de la
construction avait subi les effets de la récession. Celle-ci a
frappé durement l'industrie manufacturière et a forcé les
manufacturiers à revoir complètement leur mode de gestion. Nous
n'avons rien décelé de semblable dans l'industrie de la
construction.
Si les divers intervenants au sommet de la construction ont
discuté de leurs préoccupations quant au fonctionnement et
à la survie de leur industrie, les donneurs d'ouvrage, souvent les
manufacturiers, ne comprennent pas pourquoi toutes les interventions lors de
ce
Sommet n'ont pas été marquées par les nouveaux
impératifs que l'on rencontre aujourd'hui dans toutes les industries,
c'est-à-dire la satisfaction du client au meilleur prix.
Ce raisonnement s'applique à toutes les sphères de
l'activité québécoise, et l'industrie de la construction
devrait s'assurer que la poursuite de ses intérêts réponde
aux besoins du client, que ce soit l'industrie manufacturière ou le
consommateur individuel. Cette approche est une condition sine qua non de
réussite dans une économie compétitive. Pour rencontrer
cet impératif, l'industrie de la construction doit revoir en profondeur
son fonctionnement.
Tel qu'il est présenté, le projet de loi 142 ne jette pas
les bases du changement de mentalité requis par la gravité de la
situation économique et par le retard que nous accusons par rapport
à nos principaux concurrents en termes de compétitivité.
Il représente, tout au plus, les premiers pas d'une action visant
à remettre sur le chemin de la compétitivité une industrie
bloquée par des coûts élevés.
Ceci dit, procédons maintenant à une analyse plus
détaillée des principes du projet de loi 142. En premier lieu,
les manufacturiers constatent avec satisfaction que les intervenants de
l'industrie de la construction ont décidé de prendre les mesures
appropriées pour faciliter la mobilité de la main-d'oeuvre.
Autant les commentaires émis lors du sommet de la construction que les
dispositions de la loi reflètent l'obligation de s'assurer que la
mobilité de la main-d'oeuvre soit respectée entre les provinces.
L'élimination graduelle du règlement du placement et la
présence des clauses restrictives lors des négociations
sectorielles nous portent à croire que les difficultés
liées à la mobilité de la main-d'oeuvre
disparaîtront ou du moins pourront être équivalentes partout
sur le marché du travail canadien.
Ce point répond directement à une préoccupation
majeure des manufacturiers québécois qui sont présentement
les otages d'une guerre commerciale que l'Ontario livre au Québec sur le
principe de la mobilité de la main-d'oeuvre. Cette guerre menace
directement des milliers d'emplois au Québec. De plus, nous demeurons
convaincus que cette libéralisation permettra à nos travailleurs
de bénéficier de clauses comparables aux travailleurs des autres
provinces et facilitera, surtout pour les régions limitrophes,
l'exercice de leur métier dans une autre province.
Le deuxième point est lié à l'élimination de
l'obligation d'avoir une place d'affaires au Québec pour l'obtention
d'un permis d'entrepreneur. Cette décision, qui permettra elle aussi une
plus grande mobilité, répond aussi aux préoccupations que
nous venons d'exprimer. La libre circulation des entrepreneurs et des
entreprises abolit enfin la tradition coûteuse d'avoir une place
d'affaires au Québec. Elle s'inscrit dans l'optique que préconise
depuis longtemps l'Association des manufacturiers du Québec,
c'est-à-dire celle de l'existence d'un marché commun au Canada
où il y a libre circulation des biens, des services et des
personnes.
Le troisième point que nous désirons soulever porte sur
l'agencement des secteurs. La présentation initiale du document de
travail au sommet de la construction prévoyait la division de
l'industrie en trois secteurs: institutionnel, commercial et industriel. Les
manufacturiers ne sont pas du tout convaincus de la pertinence de former un
secteur industriel distinct. En effet, l'approche sectorielle retenue par le
ministre identifie l'ACQ comme responsable de la négociation dans ce
secteur. Quels sont les éléments déterminants qui
sous-tendent cette segmentation? Les manufacturiers aimeraient obtenir des
informations additionnelles qui leur permettraient de s'assurer que ce
changement a sa raison d'être. Les manufacturiers craignent que la
division excessive de ce secteur entraînera une augmentation inutile de
leurs coûts d'opération.
En quatrième lieu, l'assujettissement des travaux d'installation,
d'entretien et de réparation de la machinerie de production dans le
secteur industriel qui ne sont pas exécutés par les
employés permanents d'une usine, du fabricant ou de son distributeur
constitue un élargissement non justifié du champ d'application du
décret qui entraînera inévitablement une augmentation des
coûts d'opération d'une usine. Les manufacturiers croient que
cette clause apportera, en plus des coûts, des difficultés de
fonctionnement importantes.
Dans le cadre des activités d'une usine, les changements
technologiques obligent les entreprises à se pourvoir de pièces
d'équipement sophistiquées dont l'entretien et la
réparation ne peuvent être effectués par les
employés réguliers. De plus, le fabricant ou le distributeur a
souvent recours à une main-d'oeuvre ultraqualifiée qui agit
à titre de sous-traitant. Il arrive même que la main-d'oeuvre
qualifiée ne soit tout simplement pas disponible dans un pays
donné lorsque la technologie impliquée n'est pas encore
très répandue. Cette forme d'organisation permet d'éviter
des coûts qui, s'ils n'étaient pas maintenus à des niveaux
compétitifs, risqueraient autrement de limiter l'achat et la mise en
marché d'outils de production essentiels au développement de la
capacité concurrentielle de nos entreprises. À lui seul, cet
argument devrait convaincre les membres de cette commission qu'il est
absolument nécessaire de retirer cette disposition du projet de loi.
Avant d'entreprendre toute action d'assujettissement, il faudrait
être en mesure d'en évaluer les coûts, car ce sont les
coûts qui sont à la base des décisions des manufacturiers
d'augmenter ou de diminuer leur production et, souvent même, de changer
de lieu de production. Il est absolument aberrant que, en cette période
de chômage élevé et de faible compétitivité,
on considère alourdir la structure de coûts des manufacturiers et
leur imposer des contraintes additionnelles. C'est littéralement se
tirer dans le pied, et même dans les deux pieds.
Vous nous permettrez également de citer, sur ce sujet, le
commentaire émis par un cosignataire du rapport du groupe de travail
pour évaluer l'impact des recommandations du rapport Sexton-Picard sur
le champ d'application de la loi sur les relations du travail dans l'industrie
de la construction.
Je cite: «Le coprésident Lavallée ne peut endosser
cette recommandation eu égard à l'installation et le
montage de la machinerie de production lorsque ce n'est ni le fabricant, ni
l'utilisateur qui s'en charge tant et aussi longtemps que les structures
et modes de fonctionnement de l'industrie de la construction demeureront les
mêmes; tant et aussi longtemps que les fabricants de machinerie de
production, du Québec ou de l'extérieur, qui ne veulent ou ne
peuvent faire eux-mêmes de l'installation, ne pourront avoir recours
à des installateurs polyvalents, au sein d'équipes stables, dont
la qualité du travail, par l'expérience qu'ils en ont, permet au
fabricant d'émettre les garanties de fonctionnement et d'assurer, par
l'entremise de ces mêmes entreprises, le service ultérieur
nécessaire, le tout à des coûts qui font que
l'équipement vendu demeure compétitif sur le
marché.» Fin de citation.
Ce raisonnement est exactement celui des manufacturiers, et les
garanties en question sont loin d'être acquises.
Le cinquième point que nous aimerions apporter peut être
considéré comme complémentaire au précédent.
La réorganisation du travail, présentée avec une
révision de la juridiction des métiers, des ratios
compagnon-apprenti, ne suffit pas à convaincre les manufacturiers que
l'assujettissement n'entraînerait pas des augmentations de
coûts.
La réorganisation du travail, telle qu'elle est vécue dans
le secteur manufacturier, repose, d'abord et avant tout, sur l'obligation
d'offrir un produit de qualité à un coût compétitif.
La main-d'oeuvre joue un rôle déterminant dans la capacité
d'un manufacturier à remplir cette obligation dictée par la
concurrence.
Présentement, les facteurs recherchés sont la polyvalence
et la flexibilité de la main-d'oeuvre pour répondre aux besoins
de l'entreprise et du client. A ce chapitre, le recyclage de la main-d'oeuvre
en provenance de secteurs en déclin permet également de continuer
les opérations de certaines petites et moyennes entreprises à des
coûts abordables.
L'industrie de la construction n'a pas, à notre connaissance des
faits, considéré ces questions pourtant cruciales lors du sommet
de la construction. En conséquence, les manufacturiers sont
obligés de constater que la révision et la réorganisation
proposées reposent principalement sur de bonnes intentions. Comme vous
le savez, l'enfer est pavé de bonnes intentions, et les manufacturiers
veulent avoir des preuves concrètes qu'une réorganisation du
travail n'entraînerait pas une augmentation des coûts qu'ils
devraient supporter avant d'accepter quelque changement que ce soit.
Le sixième point concerne la déréglementation de la
construction résidentielle. À ce chapitre, nous sommes d'avis que
la proposition du ministre du Travail de ne plus assujettir les travaux de
construction d'immeubles de huit logements ou moins consacrés à
l'habitation représente un effort valable pour essayer de diminuer
les
activités clandestines qui rongent ce secteur d'activité.
Nous sommes heureux de voir que le gouvernement est prêt à agir et
tente de s'attaquer au problème plutôt que de laisser les choses
aller. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une solution miracle, la situation actuelle
est totalement inacceptable et elle ne peut que s'empirer si rien n'est
fait.
Pour illustrer l'ampleur de ce fléau, reprenons les conclusions
d'une étude du ministère du Travail du Québec
effectuée en 1993, basée sur l'estimation des heures non
déclarées par l'AEÇQ. Cette étude estime que, pour
chaque million d'heures non déclarées, le coût des fonds
perdus impôt provincial, fédéral, fonds au profit
des salariés, cotisations à la CSST, cotisations au régime
d'assurance-chômage, cotisations à la Régie de
Fassurance-maladie, TVQ, TPS et autres prélèvements et
cotisations représente 16 809 500 $. Il y aurait eu 25 000 000
d'heures non déclarées en 1992 pour un coût total de 420
237 500 $. (11 h 50)
Si tel est le cas et que les enquêtes de la Commission de la
construction du Québec en démontrent la véracité et
surtout l'aggravation, les tenants d'une autre approche que la
déréglementation sont tenus de faire la preuve qu'ils ont une
meilleure façon de limiter ce fléau. À cet effet, nous
croyons que la solution policière, retenue par les intervenants lors du
Sommet, n'est pas une alternative valable.
Le septième point concerne les investissements à long
terme. L'industrie de la construction doit prendre conscience de la
globalisation des marchés et comprendre les effets de cette
globalisation sur les choix de localisation d'une entreprise. Un des facteurs
principaux de localisation est le coût d'installation des usines. Une
diminution sensible de ces coûts représente un des meilleurs
leviers pour générer des emplois dans la construction et dans nos
usines.
Comme vous l'aurez noté tout au long de cet exposé, les
manufacturiers manifestent le plus grand intérêt pour l'industrie
de la construction. Leur propre santé en dépend. Tous les
changements que vous considérez présentement peuvent soit
susciter les conditions de réussite dont nous avons besoin pour
affronter la concurrence féroce qui caractérise le nouveau
contexte économique ou tuer dans l'oeuf des projets créateurs
d'emplois.
Les manufacturiers connaissent, depuis la récession de 1982, les
exigences de ce nouveau contexte dans lequel ils ne peuvent survivre que s'ils
s'ajustent mieux et plus rapidement que leurs concurrents aux besoins des
clients en termes de qualité et de prix. Nous espérons
sincèrement que cette commission saura faire la distinction entre les
changements qui sont nécessaires pour que l'industrie de la construction
devienne elle aussi concurrentielle et les changements qui n'auront d'autre
effet que de retarder ces ajustements en pénalisant le secteur
manufacturier, largement exposé à la concurrence, qui, lui, se
bat pour sa survie et réussit quand même à soutenir la
faible croissance économique que nous connais- sons grâce aux
exportations. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. Le
Hir. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Première
question, M. Le Hir, concernant la mobilité de la main-d'oeuvre et les
difficultés. Pourriez-vous nous expliquer de quelle façon,
là, les membres chez vous sont affectés par ce problème de
barrières interprovinciales?
M. Le Hir (Richard): Depuis deux mois, je reçois
régulièrement des appels désespérés à
mon bureau, des lettres de membres qui m'envoient copies des règlements
qu'on leur signifie en Ontario. J'ai à l'esprit deux cas, là, qui
me sont venus encore tout récemment. Dans un cas, c'est une corporation
d'un hôpital qui stipule très clairement que, tant et aussi
longtemps que le litige entre le Québec et l'Ontario subsistera sur la
question de la mobilité de la main-d'oeuvre, les entreprises
québécoises ne sont pas invitées à
soumissionner.
Dans l'autre cas, c'est une commission scolaire qui a besoin de faire
installer des partitions, des cloisons acoustiques entre des
établissements. Une des entreprises membres de l'Association, Moderco,
sur la rive sud de Montréal, produit de telles partitions. Elle vient de
perdre ce marché-là. Et, pour cette entreprise-là, la
perte du marché ontarien représente presque 40 % de son chiffre
d'affaires annuel. On parle de sommes qui commencent à être
impressionnantes. Il y a même des entreprises qui ont des
établissements en Ontario et au Québec et dont la production en
Ontario n'est plus acceptée en Ontario. Alors, c'est une situation qui
devient franchement intenable et qui compromet directement des dizaines de
milliers d'emplois au Québec.
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Cherry: Donc, ce que vous nous dites, c'est que, bien
sûr, à cause de la situation de la mobilité ou de la
non-mobilité dans le secteur de la construction, ça a un impact
non seulement pour les travailleurs de la construction, mais pour un secteur
important de l'activité économique du Québec. C'est ce que
vous venez de décrire, là, qu'il y a des marchés qui lui
sont bloqués à cause de ça.
M. Le Hir (Richard): Absolument.
M. Cherry: Bon. Deuxième question où j'aimerais
attirer votre attention, bien sûr, sur l'aspect de l'installation,
l'entretien de l'équipement de machinerie de production. On a eu
l'occasion, hier soir, à un groupe qui était devant nous, de
poser des questions. Par exemple, là, un des représentants
était impliqué chez GM à Sainte-Thérèse et
nous faisait valoir des arguments, là, semblables à ceux que vous
avez invoqués ce
matin, concernant l'aspect des sous-traitants, concernant l'installation
d'équipement, la robotisation.
Bien sûr, je n'ai que quatre ans en politique, mais mon
expérience antérieure dans le secteur privé me rappelle
que de nombreuses fois, lors d'installation ou de modernisation de
l'entreprise, le fabricant ou celui qui avait le contrat d'installation, pour
en assurer la garantie et le maintien, exigeait que ce soit son personnel avec
ses sous-traitants. C'était la seule façon qui était
invoquée pour qu'ils puissent, par la suite, en assumer la
responsabilité. Donc, c'est quelque chose qu'on connaît bien.
Bien sûr, ça dépend du volume dont vous avez besoin.
Chez GM, par exemple, quand il s'agit de changer complètement la ligne
de montage, vous ne pouvez pas faire ça uniquement avec votre personnel.
Donc, c'est des centaines de travailleurs qui sont appelés, en grand
nombre des gens du secteur de la construction, parce que le contrat est
donné à un sous-traitant. Il y a des gens qui nous ont
indiqué, hier soir, aussi, que, quand des travaux de cette
nature-là peuvent être sur une longue durée, il semble
qu'il y aurait des exemples qui commenceraient à pointer que des
demandes d'accréditation pourraient circuler, ce qui aurait comme
résultat, si elles étaient menées au bout de cette
démarche, que l'entreprise qui aurait invité des travailleurs
chez elle pour exécuter ce genre de travaux là se trouverait avec
une convention collective additionnelle dans son sein. À date, il n'y a
pas d'exemple autre qu'à quelques endroits des activités de cette
nature-là.
Donc, je veux que vous sachiez qu'on est sensibles à ça.
Je vous l'avoue bien honnêtement, l'objectif du gouvernement du
Québec, c'est de donner un message positif à ceux qui ont
à prendre des décisions, premièrement, concernant
l'installation d'industries au Québec.
Deuxièmement, ceux qui ont des décisions à prendre
concernant la modernisation des industries au Québec, non seulement dans
l'aspect de la compétitivité des entreprises, mais dans le
respect de l'environnement aussi, on sait qu'il devra y avoir là des
investissements importants.
Donc, c'est un secteur qu'on peut appeler d'avenir. Il sera d'avenir en
autant que le signal que le gouvernement du Québec dégagera en
sera un de respect des coûts, de s'assurer de la qualité. Et c'est
dans ce sens-là qu'on veut profiter de ce projet de loi là pour
donner le signal que... Bien sûr, il y en a, des travaux qui sont faits
par des gens de l'industrie de la construction quand ça a du volume,
mais il est important de donner le signal que, quand vous viendrez le faire
ici, et on le dit bien, là hier, il y a des gens qui nous ont
critiqué pour le faire de cette façon-là ça
ne pourra être considéré par le gouvernement ou mis en
exécution uniquement que quand on aura mis de l'ordre dans le
problème qui dure, il y a des gens qui me disent depuis au moins 20 ans,
25 ans, la juridiction de métiers. «C'est-u» la
responsabilité des électriciens, «c'est-u» la
responsabilité des mécaniciens de production? Enfin, on
connaît tous les problè- mes qui peuvent découler de
ça. Le ratio apprenti-compagnon a un effet direct sur les coûts.
C'est important, ça, de le dire. Ce n'est pas seulement le taux horaire
qui a des problèmes là-dedans, c'est tout ce qu'il y a de
réglementation autour de ça qui a un impact extrêmement
important sur les coûts. Ça aussi, on est sensibles à
ça.
Et, troisièmement, bien sûr, il y a des primes qui,
à l'époque, certaines d'entre elles, pouvaient avoir une
justification, parce que certaines datent de 20 ans, 25 ans, et qui sont
souvent présentées comme des acquis, mais qui, aujourd'hui, dans
les temps modernes, n'ont plus nécessairement leur raison d'être
autre que celles qui peuvent être invoquées: C'est un acquis, on
l'a depuis x temps, puis on va le garder. Mais je le dis, là, en
commission parlementaire, conscient que je suis devant les caméras,
combien de fois, combien de fois des gens sont venus me dire: Ne touchez pas
aux primes. Mais ce sont des arguments pour monnayer. Si vous prenez mes
travailleurs plutôt que ceux de l'autre, vous n'aurez pas à payer
telle ou telle prime. On ne peut pas, il me semble, dans une industrie d'avenir
comme celle-là, maintenir artificiellement des primes comme
celles-là, qui servent de monnaie d'échange. C'est dans ce
sens-là qu'on l'a mis comme troisième condition. (12 heures)
Parce qu'il est important, et je le répète, que le message
qu'on donne à ceux qui veulent investir au Québec, ou s'y
installer, ou moderniser nos entreprises dans l'aspect de
compétitivité, dans le respect de l'environnement, c'est que le
Québec se positionne de façon favorable. Parce que, bien souvent,
les décideurs ne sont pas nécessairement au Québec ou pas
nécessairement au Canada. Il est important qu'ils sachent qu'il y a une
volonté, une volonté du gouvernement de faciliter ces
arrivées-là de capitaux et cette modernisation, qui sont
essentielles à la survie économique et tous les acquis sociaux
dont on s'est dotés. Alors, dans ce sens-là, est-ce que j'ai bien
cerné l'ensemble de vos préoccupations? Est-ce que vous
souhaiteriez y ajouter?
Le Président (M. Joly): M. Le Hir, s'il vous
plaît.
M. Le Hir (Richard): M. le ministre, vous avez assez bien
résumé la situation, vous avez compris les préoccupations
que nous avons. La chose qui me surprend, c'est que, si tel est le cas, je
m'explique mal le libellé du projet de loi. Tel qu'il est à
l'heure actuelle, nous nous sommes sentis suffisamment inquiets pour demander
à vous rencontrer. C'est donc dire que, tel qu'il se présente
à l'heure actuelle, le projet de loi ne nous donnait pas satisfaction.
J'espère simplement que je comprends de votre message que vous
êtes parvenus à mieux saisir la réalité à
laquelle nous sommes confrontés.
J'aimerais laisser mon collègue, Gaston Charland, rajouter des
commentaires.
Le Président (M. Joly): M. Charland, s'il vous
plaît.
M. Charland (Gaston): M. le ministre, évidemment, une
telle disposition à l'intérieur d'un projet de loi a
demandé de notre part un effort de rencontrer divers intervenants. Vous
avez identifié un intervenant; nous avons aussi rencontré des
personnes de cette organisation-là. Nous avons rencontré aussi
des petites et moyennes entreprises. Et la perception que vous avez,
l'inquiétude que vous avez que, si vous ne réglez pas ça
en incluant ça à l'intérieur de votre projet de loi que ce
soit assujetti comme tel, l'entreprise, surtout la grande entreprise, va se
retrouver prise avec un problème, que vous mentionnez,
d'accréditation, là je pense que vous extrapolez un petit peu. Je
ne pense pas que ce soit la préoccupation de la grande entreprise, parce
que les travaux sont vraiment faits d'une façon ponctuelle.
Maintenant, en réfléchissant un petit peu plus sur les
troubles que ça peut occasionner, on s'aperçoit que la grande
entreprise représente une partie du marché manufacturier, mais
une partie qui va peut-être en décroissant. C'est la petite et
moyenne entreprise. Et, dans la petite et moyenne entreprise, la façon
de travailler, on travaille par des sous-contrats qui sont donnés de
diverses façons. La main-d'oeuvre est très variable et, à
ce moment-là, c'est une main-d'oeuvre qui est ultraqualifiée. Et,
nous autres, ce que nous croyons, c'est que, si on inclut ça à
l'intérieur du projet de loi, on met des conditions d'application qui ne
seront simplement pas applicables.
L'autre raisonnement aussi sur lequel nous avons fait un consensus,
c'est que vous nous arrivez avec des bonnes intentions. Maintenant, ce que nous
vous soulignons dans notre mémoire, c'est que l'Association des
manufacturiers du Québec est un petit peu le client de l'industrie de la
construction, et on souhaite être, dans le futur, plus impliqué
dans certaines discussions. Mais pourquoi devrions-nous prendre pour acquis que
les problèmes vont être réglés avant d'en avoir
discuté? Et ce que vous nous dites, c'est que: Eh bien! écoutez,
je vais inclure ça dans un projet de loi qui sera applicable à un
moment où nous serons assurés de la cohésion sociale
autour de ces dispositions-là. Le raisonnement que nous faisons
présentement, c'est que nous sommes loin d'être convaincus que,
pour les entreprises manufacturières québécoises, ce soit
applicable et, deuxièmement, si vous voulez en discuter par d'autres
groupes, nous sommes disponibles à le faire, mais nous ne pensons pas
que c'est en l'incluant dans un projet de loi et en mettant un certain
délai d'application qu'on va réussir à régler cette
situation-là. Parce qu'il y a des cas qui sont excessivement
différents. N'oubliez pas, et je vous le répète, que la
petite et moyenne entreprise au Québec, c'est l'avenir des emplois dans
le domaine manufacturier.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Charland. M. Cherry:
Nous avions, hier soir... J'ai référé au cas GM. Il y
a aussi des gens qui avaient des petites scieries et des moyennes, qui.nous
parlaient aussi, hier soir, de l'entretien de leur équipement de
machinerie, et tout ça. On est quand même sensible à
ça.
Ma dernière question: Comme vous avez de vos membres qui
opèrent également dans d'autres provinces canadiennes, et je
référerais particulièrement à l'exemple de
l'Ontario, comment est-ce que ça fonctionne pour le même genre
d'activité dans cette province-là qui est une concurrente directe
chez nous?
M. Le Hir (Richard): Écoutez, M. le Président, dans
un contexte de mondialisation comme celui dans lequel nous vivons, les exemples
de l'Ontario sont valables, mais on ne peut pas se limiter simplement au cas de
l'Ontario, et j'aimerais bien demander à M. Patry, ici, de vous
répondre sur cette question-là.
Le Président (M. Joly): M. Patry, s'il vous
plaît.
M. Patry (Charles): Vous savez comme moi que la grande entreprise
et, même, les PME, généralement, sont installées
à travers le monde. Mais, quand on fait une comparaison et je
veux parler ici au nom d'Ultramar quand on compare le contexte dans
lequel on est pour faire des investissements, au Québec, et le contexte
californien je prends le contexte californien parce qu'on a une usine
importante en Californie et qu'on doit justifier financièrement
des projets importants, nous avons à concurrencer inévitablement
sur une même base la raffinerie de la Californie. Et, quand on regarde,
en Californie, la façon dont les choses fonctionnent là-bas, on
réalise que l'industrie, tout le secteur industriel est
déréglementé. Ça fonctionne de la façon
suivante: c'est que, s'il y a un projet, si le projet dure six mois, à
ce moment-là, il y a une espèce de convention collective, il y a
une entente qui est faite entre les entrepreneurs et les employés, il y
a une entente qui est signée pour la durée même du contrat.
Et, évidemment, tout ça, quand on parle d'entente, inclut
évidemment tout ce qui est salaire, tout ce qui est avantage marginal,
tout ce qui est vacances, tous ces éléments-là. Donc, il
faut bien comprendre que, si, au Québec, on n'est pas en mesure de
changer la réglementation au niveau de l'industriel, nous partons
défavorisés par rapport à d'autres endroits dans le monde
et là je parle de la Californie, mais ça va plus loin que
ça. Mais tout ça pour dire que l'industrie de la construction, en
Californie, est déréglementée; c'est quand même bien
structuré, mais c'est déréglementé.
Donc, il y a toujours une négociation qui se fait pour des
projets spécifiques. Pour des gros projets, il y a des
négociations qui se font entre les donneurs d'ouvrage, les entrepreneurs
et les employés qui exécuteront l'ouvrage.
M. Le Hir (Richard): J'aimerais rajouter un point...
Le Président (M. Joly): M. Le Hir, s'il vous
plaît.
M. Le Hir (Richard): ...s'il vous plaît. C'est que vous
êtes également familiers avec cette nouvelle réalité
des mandats mondiaux qui sont confiés par des grands groupes industriels
internationaux à une usine ou à une autre. Lorsque de tels
mandats sont accordés, il faut bien comprendre que tous les facteurs
sont pris en compte dans l'octroi du mandat en question pour s'assurer que les
coûts de production pour l'entreprise vont être les plus bas, non
pas dans le but d'écumer qui que ce soit, mais bien dans le but de
maintenir la position concurrentielle de l'entreprise et la survie de
l'entreprise et dans un contexte concurrentiel de plus en plus agressif. Si
bien qu'aujourd'hui arriver à produire et arriver à justifier des
investissements, ça requiert un effort d'éla-gage des coûts
qui est sans précédent et qu'on n'a jamais connu.
M. Cherry: Donc...
Le Président (M. Joly): M. le ministre.
M. Cherry: ...pour revenir à celui qui a
débuté la réponse, ce que vous me dites, c'est qu'en
Californie vous avez préféré prendre cet
exemple-là plutôt que l'Ontario quand il y a un projet
important comme ça, il y a quand même une négociation, il y
a quand même des conditions de salaire et l'ensemble, là, de tout
ça, qui est fait. Donc, c'est comme ça que ça fonctionne
dans cette industrie-là. Ici, parce que ça ne l'est pas,
dépendam-ment, là, du volume et de la durée des travaux,
quand on a à faire appel à nos gens à l'interne, il n'y a
pas de problème s'il y a déjà la convention collective qui
s'applique. Quand on embauche des sous-traitants, s'ils sont syndiqués,
bien sûr, dans la soumission, le soumissionnaire en a tenu compte et,
quand on va à la sous-traitance générale et que lui est
actif dans le secteur de la construction, bien sûr, ça s'applique
là également.
Donc, dans votre préoccupation, vous dites:
L'élément premier, c'est les coûts, il ne faut pas se le
cacher. Donc, c'est pour ça que j'ai tenté de vous
répondre en vous disant que les prérequis pour que, comme
gouvernement, on y aille, c'est qu'il faut mettre de l'ordre dans les choses
qui sont extrêmement coûteuses dans ce secteur-là, à
savoir: les juridictions de métiers; deuxièmement, les ratios
apprenti-compagnon et, troisièmement, l'ensemble des primes qui sont
souvent décrites comme improductives. Donc, en se plaçant de
façon compétitive là-dessus, à ce moment-là,
je pense que des préoccupations que vous invoquez ici pourraient,
là, aller en diminuant.
M. Le Hir (Richard): C'est bien ça.
M. Cherry: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre. Je
vais maintenant reconnaître M. le député de
Jonquière. S'il vous plaît, M. le député.
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Je pense que la
présentation du mémoire permet à l'Association des
manufacturiers de passer un message très clair qu'ils sont dans un
domaine compétitif, et qu'ils ont affaire à la globalisation des
marchés, et, en même temps, qu'ils ont certaines
préoccupations vis-à-vis de leurs clients. Je pense que ça
peut manifester aussi une certaine déception, parce que le projet de loi
qu'on a devant nous ne répond pas à ces questions-là.
D'abord, le Sommet n'a pas été fait dans ce sens-là, et je
ne crois pas qu'on aurait pu trouver réponse avec le projet de loi qu'on
a devant nous, à moins qu'on se serait inspiré d'une autre
philosophie. Et ce qu'il y a dans le projet de loi, c'est surtout ce qui touche
les relations de travail, en gros. Et la constatation que, moi, je fais en vous
écoutant, c'est que partout où l'industrie est touchée
l'industrie manufacturière ça s'appelle la
mobilité de main-d'oeuvre, non pas à l'interne, mais concernant
les dangers qu'il y a que les produits du Québec n'entrent pas à
l'extérieur. Ça, c'est préoccupant pour vous autres, c'est
bien exprimé. Mais il y a d'autres facettes aussi de la mobilité
de la main-d'oeuvre qui peuvent causer problème ailleurs. Ça, je
pense qu'on est bien conscients de ça. (12 h 10)
Vous avez l'installation de machinerie où le Conseil du patronat
nous a fait les mêmes représentations. Vous n'avez pas fait
allusion à l'article 65.1 de la Loi sur l'évaluation
foncière au point de vue des municipalités, mais ça
pourrait représenter un certain danger. On a éveillé le
ministre vis-à-vis de ce problème-là qui est potentiel,
puis qui a existé, puis qui existe réellement au point de vue de
l'évaluation, et ça pourrait être la même chose. Mais
il ne faut pas non plus qu'il y ait un abus par rapport à ça. Il
faut que ça se fasse dans des règles. Donc, si d'un
côté les domaines qui vous touchent, vous êtes sensibles,
puis vous nous présentez des espèces de solutions où vous
ouvrez des lumières rouges... Par exemple, lorsque vous nous dites:
L'enfer est pavé de bonnes intentions. On n'est pas sûrs si, la
réorganisation du travail, ça n'entraînerait pas une
augmentation des coûts. Vous nous dites ça dans votre
mémoire à la page 12. Bien, ça, donc, vous dites: On n'est
pas tout à fait sûrs. Vous n'êtes pas complètement
convaincus. Le ministre ne vous a pas convaincus par son projet de loi.
Mais, un peu plus loin, vous dites: Si vous désas-sujettissez les
travaux de construction d'immeubles de huit logements et moins, ah! ça,
ça va faire un effort valable pour diminuer les activités
clandestines. Sur quoi vous vous basez pour avoir un jugement... D'un
côté, vous portez un jugement de valeur là-dessus en
disant: La déréglementation, ça, là, ça va
régler des activités clandestines, mais les relations de travail,
vous n'êtes pas sûrs si ça va les améliorer. Moi, je
dis: Ce jugement de valeur là, sur quoi vous l'appuyez? Parce qu'il
faut
se rappeler que la rénovation a été
déréglementée et ça n'a pas diminué le
travail au noir; c'a continué à se faire, ça n'a pas
abaissé les coûts non plus. Moi, j'aimerais que vous explicitiez
sur quoi vous vous basez pour nous affirmer ça.
M. Le Hir (Richard): Sur la première question, lorsqu'on
dit qu'on n'est pas convaincus que ça n'entraînera pas
d'augmentation de coûts, c'est que, ça, ça se mesure. On
est capables de faire un calcul et puis de dire en bout de ligne: Bien,
ça va coûter tant de plus. Et M. Patry pourra vous fournir des
exemples de ce que ça pourrait coûter en plus si on avait un tel
assujettissement.
Dans le cas de l'évaluation du travail au noir dans le secteur
résidentiel, c'est une observation qui est à caractère
empirique, c'est simplement être un témoin de son temps et voir ce
qu'il se passe dans notre société et voir comment ça se
passe aussi. Et on ne prétend pas être des devins, on ne
prétend pas être meilleurs que les autres, mais on est quand
même capables de voir ce qui se passe et de voir la prolifération
des activités clandestines, du travail au noir, et on est capables de
voir aussi l'impact que ça a sur la société dans son
ensemble, la démotivation des jeunes qui n'arrivent pas à trouver
d'emploi parce qu'il y a des contraintes.
J'ai été récemment, pour une contravention de
circulation, à la Cour municipale à Drummondville, et il y a un
monsieur qui est là et qui est accusé d'avoir travaillé
sans permis. C'est un monsieur qui est plombier, il est dans l'industrie de la
construction, enfin il est dans l'industrie de la construction au noir, et on
lui demande pourquoi il a fait ça. Bien, il dit: Écoutez, il faut
que je travaille ou bien je m'en vais sur le bien-être social. Et, ce
monsieur-là, on le condamne à une amende de 700 $, puis le juge
est gêné de lui imposer cette amende-là parce qu'il
réalise fort bien que l'alternative du pauvre gars, c'est soit d'aller
sur le bien-être social... puis là de toute façon il ne
joindra pas les deux bouts, puis il recommencera à faire du travail au
noir. Je veux dire que, ça, c'est le genre de système dans lequel
on est en train de s'enfermer. Ça ne prend pas des universitaires pour
venir tracer un bilan de la situation et puis un système qui est en
train de miner les fondements du tissu social.
M. Dufour: Mais ce que je voudrais vous rappeler, M. Le Hir,
c'est que, dans l'industrie, il y a des règles d'embauché puis de
maintien de l'emploi. Ça existe ça chez les manufacturiers. Et,
dans le domaine de la construction, selon ce que vous dites, ça permet
juste de travailler au noir. Ça ouvre tellement les portes que tout le
monde devient avec un problème majeur. Mais, moi, je n'ai pas de
réponse à l'effet que: Est-ce que ça augmente le travail,
est-ce que ça règle le problème de 50 % des travailleurs
qui actuellement ne travaillent pas? Est-ce que, le fait que nos jeunes vont
pouvoir aller sur le travail pour aller arracher le morceau de pain à
celui-là qui travaille ou le diviser, ça va régler la
situation, puis est-ce que vous pensez que le travail au noir ne
proliférera pas?
La rénovation résidentielle est un exemple assez frappant.
Le même ministre, qui présente le projet de loi, ce matin, il
était favorable à poser des lois, la loi 186, avec des normes
très précises. Ils ne l'ont pas appliquée. Est-ce que
c'est inapplicable ou pas, ça, c'est une autre paire de manches. Moi, je
dis toujours: Si la loi n'est pas nécessaire, si on n'est pas capable de
l'appliquer, ne la faisons pas. Parce que des fois le bien qu'on veut faire, il
est pire que le mal qui existe. On ne coupera pas une jambe à quelqu'un
parce qu'il fait de l'eczéma. On va se poser d'autres questions, hein?
On va s'essayer à le soigner. Faites donc pareil pour l'industrie. Il me
semble que ça pourrait se régler. En tout cas, ma question est
là.
M. Le Hir (Richard): II reste que, dans le secteur manufacturier,
il n'y a pas de contingentement au travail. Et puis, dans l'industrie de la
construction, la réglementation qui existe constitue un tel
contingentement.
Le Président (M. Joly): M. Chevrette, s'il vous
plaît, oui.
M. Chevrette: M. Le Hir, des manufacturiers, il y eh a beaucoup
de syndiqués, et vous en arrivez à la conclusion d'entente de
convention collective. Comment pouvez-vous expliquer, sur le plan des
principes, qu'on puisse donner le droit, par exemple, à des gens en
usine d'avoir une certaine protection de l'emploi, puis qu'on ne pourrait pas,
dans le secteur de la construction, donner également cette protection de
l'emploi, à partir de l'exemple que vous avez donné de votre
plombier qui travaillait sans permis? Celui qui a le permis, lui, puis qui a
travaillé, puis qui a sa carte de compétence, puis qui est
remplacé par quelqu'un qui n'a pas son permis, qui peut avoir sa carte
de compétence mais qui n'a pas son permis, vous ne considérez pas
que c'est un avantage similaire à celui que vous pouvez accorder
à un travailleur, par exemple, dans une manufacture?
M. Le Hir (Richard): Encore une fois, dans le secteur
manufacturier, il n'y a pas de contingentement. Je veux dire, il y a... Vous
avez les compétences et qualifications, et puis on vous embauche, et
puis vous avez les droits de la convention collective, lorsqu'il y en a. Et,
dans le secteur de la construction, la situation est différente.
M. Chevrette: La situation est différente, mais il y a une
culture de travail, ici. Vous savez pourquoi on en est arrivé à
des décrets? C'était pour éviter que, d'une
accréditation syndicale à une autre, il se crée une
concurrence tout à fait déloyale entre certains entrepreneurs.
Parce qu'il y a des entrepreneurs qui, étant accrédités,
étant syndiqués, avaient des conventions collectives à
tant de dollars de l'heure et, l'autre, à côté, parce
qu'il avait eu la chance de contrôler ses hommes ou bien, en tout
cas, d'en arriver à ne pas se faire syndiquer, il pouvait, en tout cas,
avoir une concurrence tout à fait disproportionnée par rapport
à celui qui était syndiqué. C'est à ça qu'on
s'en va, là, avec la déréglementation dans le
domiciliaire. Et vous savez qu'il y a des gens qui vont être
accrédités vite vite, parce que ça s'y prête bien,
alors que d'autres ne le seront probablement pas, puis ce sont les premiers qui
vont venir nous redemander d'être protégés par la loi des
décrets et des conventions collectives. Ça va être ceux qui
seront justement accrédités en fonction du Code. Est-ce que ce
n'est pas changer le mal de place seulement ou si ce n'est pas plutôt de
regarder froidement la situation, puis dire: Le domiciliaire, sous ses aspects
particuliers, pourrait-il être traité spécifiquement,
à partir d'un tronc commun quelconque, mais spécifiquement dans
une section, pour ne pas créer cette concurrence tout à fait
déloyale, puis comme ça fait partie, et je le
répète, d'une culture québécoise, en matière
de relations de travail, qui est propre à nous?
Le Président (M. Joly): M. Le Hir.
M. Le Hir (Richard): Je vais laisser, d'abord, mon
collègue, M. Charland, répondre et je rajouterai peut-être
quelques commentaires.
Le Président (M. Joly): M. Charland, s'il vous
plaît.
M. Charland (Gaston): Vous allez comprendre, M. Chevrette, que je
n'essaierai pas d'argumenter, connaissant votre expérience sur tous les
détails de l'industrie de la construction. Par contre, ce que je peux
apporter, c'est que, dans les questions de décret dans l'industrie
manufacturière, on s'est aperçu que la
non-compétitivité qu'on essayait de favoriser est
présentement remise en question. On a déposé,
récemment, un mémoire et on s'est présenté à
un comité interministériel où on a dit, on a
demandé l'abolition de la Loi sur les décrets de convention
collective, parce qu'on s'est aperçu qu'on était en train,
littéralement, de jeter à terre la compétition dans
l'industrie manufacturière et que, à cause de toutes les
régulations, de tous les règlements qui régissaient cette
industrie-là, ça faisait qu'on ne pouvait plus être
compétitifs sur le marché international. Les gens, à la
place de partir des usines, au Québec, allaient les partir aux
États-Unis ou ailleurs. Ça fait que, là, si vous
m'expliquez que dans le secteur de la construction ça prend absolument
des décrets, vous allez comprendre que nous avons certains points
d'interrogation. (12 h 20)
Maintenant, le point que l'Association des manufacturiers du
Québec mentionne, c'est que nous vous avons expliqué,
exprimé un point qui est nettement reconnu, et je pense qu'il a
été cité par M. Alcide Four-nier hier: il y a quand
même un pourcentage de travail au noir qui est littéralement
important. Et ce qui est mentionné dans le projet de loi qui est soumis,
c'est une voie de résoudre ce problème-là. L'alternative
dont vous parlez, que les gens pourront toujours se syndiquer s'ils ne sont pas
régis par la convention de secteur, évidemment, je pense que les
lois, le Code du travail leur permettra tout le temps de le faire. Ça,
je pense qu'il faut en être conscient.
Vous savez comme moi que, dans le marché du travail, vous avez
à peu près 42 %, si on se base sur l'industrie
manufacturière, 42 % des gens qui sont syndiqués comme tels, et
vous avez aussi toutes les autres industries qui vont à peu près
accorder les mêmes conditions de travail à leurs travailleurs et
travailleuses comme tels. Ça fait que, certaines de vos
inquiétudes et je vous le répète, nous ne voulons
pas intervenir dans le détail de l'industrie de la construction
mais, certaines de vos inquiétudes, nous ne pouvons pas les partager
comme telles à cause des éléments que je viens de vous
apporter.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Le Hir, vous
avez abordé votre mémoire sous l'angle de l'industrie
manufacturière et ça se comprend, je pense bien que... Cependant,
sous les autres aspects, je voudrais en retenir deux: le travail au noir et
l'administrabi-lité de ce projet de loi par l'entrepreneur.
Le travail au noir, à la page 12, vous dites: «....ne plus
assujettir les travaux de construction d'immeubles de huit logements ou moins
consacrés à l'habitation représente un effort valable pour
essayer de diminuer les activités clandestines qui rongent ce secteur
d'activité.»
Pouvez-vous me dire comment ça va être différent
quand on va déréglementer, comment ça va diminuer le
travail au noir, alors que ça n'a pas eu cet effet dans la
rénovation domiciliaire?
Parce que, généralement, on confond deux choses lorsqu'on
parle du noir. On parle de travailler en ne respectant pas les décrets,
et l'autre c'est de travailler sans déclarer ses revenus. Et,
actuellement, c'est généralement les deux. Mais ce n'est pas
en... La seule chose que ça va corriger c'est qu'ils n'auront plus
à respecter le décret, n'ayant plus de décret dans le
domiciliaire. Mais, pour le reste, ce qui est plus grave, c'est qu'on ne
déclare pas les revenus. On ne paie pas les cotisations. Et en quoi,
ça, ça pourrait régler cette situation?
La deuxième question parce que je sais que le temps court,
puis je vais manquer de temps c'est sur le caractère tout
à fait, absolument inadministrable de cette loi. C'est ça que
j'ai de la difficulté à comprendre. Vous, comme entrepreneur,
vous avez quatre secteurs d'activité. Les entrepreneurs travaillent,
généralement, dans deux ou trois secteurs d'activité.
Alors, vous allez avoir un secteur qui est désassujetti, celui du
résidentiel. Vos employés vont travailler une semaine, deux
semaines dans le résidentiel. Le même employé fait,
et peut-être même dans la même semaine, du commercial, de
l'industriel. Comment allez-vous gérer ça? Moi, ça, juste
ça, là, je trouve que, ça, ça ne sera pas
administra-ble. Je ne sais pas comment vous allez fonctionner. Aucune
idée. Alors, c'étaient les deux questions.
Le Président (M. Joly): M. Le Hir, s'il vous
plaît.
M. Le Hir (Richard): Certainement. D'abord, sur le premier point
que vous avez soulevé, vous avez raison de souligner qu'il y a deux
aspects. Il y a, d'une part, la réglementation et, d'autre part, toutes
les autres choses, là, les contributions sociales, etc. Puis vous avez
tout à fait raison de souligner que ça ne résout qu'une
partie du problème mais pas la deuxième partie. Je vous
concède ça volontiers.
Sur la question de l'administrabilité, écoutez, si les
gens de la construction sont capables de vivre avec ça, eh bien, mon
Dieu, nous, ce n'est pas le secteur manufacturier qui allons leur dire de ne
pas le faire. Nous, c'est certain qu'on ne fonctionnerait pas comme ça.
Mais, si les gens de la construction sont capables de vivre avec ça,
ça les regarde.
M. Chevrette: M. le Président, moi, je voudrais soulever
un nouveau problème qui n'a pas été soulevé en
commission ici. Il y a beaucoup d'entrepreneurs en construction qui font des
soumissions publiques. Et ils arrivent avec la liste des sous-contractants et
les cotations. Et, après qu'ils ont été choisis parce
qu'ils sont les plus bas, la négociation commence avec les
sous-contractants. Là, ils disent: Si tu me baisses de 200 000 $, toi,
mon électricien, là puis si vous voulez des preuves
écrites, je vous en donnerai à la tonne je te prends,
même si c'est un autre qui a coté pour moi, au moment où
j'obtenais la soumission. Et celui qui veut avoir le contrat à tout
prix, là incite les travailleurs à travailler au noir aussi. Il
n'y a pas seulement un fautif dans ça, là, ils sont deux. Il y a
un travailleur qui travaille peut-être au noir, mais il y a un employeur
qui pose ces conditions-là pour réaliser son histoire. Et, s'il
gagne ça, ce n'est pas sa marge de profit qu'il vient de dégager
au détriment à la fois des manufacturiers qui font construire,
à la fois des donneurs d'ouvrage que sont l'État ou les
sociétés d'État. C'est devenu bordélique, cette
histoire-là. Et il doit se dégager des marges de profit
exorbitantes à partir de ces tactiques-là. Puis ça, c'est
vécu par nos citoyens. Est-ce que vous êtes conscients de
ça? Est-ce que vous avez été mis au courant de
ça?
M. Le Hir (Richard): Certainement que nous sommes conscients. Et
je peux vous dire que vous avez indiqué que ça ne s'appliquait
que dans le secteur public. Je peux vous dire que c'est également vrai
dans le secteur privé. Cependant, là où je ne vous suis
pas du tout, c'est quand vous dites qu'il se dégage des marges de profit
absolument ahurissantes. À l'heure actuelle, des marges de profit
ahurissantes, je n'en connais pas beaucoup. Tout le monde travaille avec des
petites marges et il y a bien des gens qui font faillite.
M. Chevrette: M. Le Hir, si j'ai coté pour 5 000 000 $
avec un type qui avait un sous-contrat en électricité de 500 000
$, puis que je réussi à faire signer un sous-contractant à
300 000 $ par rapport à ma soumission pour laquelle j'ai obtenu le
contrat, c'est toujours bien 200 000 $ de plus dans ma poche. Parce qu'il leur
dit bien: Prends une garantie puis procède à 300 000 $ parce que
tu vas y goûter. C'est la jungle, dans ça, vous le savez.
M. Le Hir (Richard): Écoutez, on vit là-dedans,
donc on le sait. Mais je ne pense pas qu'à l'heure actuelle la situation
soit aussi profitable que vous l'indiquez, pour personne.
M. Chevrette: Mais, si elle n'est pas profitable M. le
Président, je vais parler à M. Le Hir si elle n'est pas
profitable, tout le jeu de la soumission publique devient tout faussé,
d'abord. Tu cotes à n'importe quel prix pour l'avoir sous
prétexte que tu vas étouffer à peu près les
sous-contractants, puis tu vas forcer, d'une certaine façon, le travail
au noir en l'incitant. Et c'est ça que je trouve vicieux dans notre
système, présentement. On est portés à croire qu'il
y a seulement la rénovation qui se fait. On m'informe qu'au
«bunker», lors de la rénovation du «bunker», il
y a eu du travail au noir. On m'informe que, dans plusieurs contrats d'ordre
public on pourra vous nommer les endroits il y a du travail au
noir qui se fait. Il y a toujours des maudites limites à continuer de
même. On va se ramasser à une économie au noir. C'est de la
cigarette, c'est de l'alcool, c'est les parfums puis c'est d'autres choses. Et
également le travail au noir dans la construction. On s'en va où,
comme économie? C'est un malaise très profond, et il faut
être aidés par tous les groupes de la société, pas
seulement des travailleurs, qui se nuisent eux-mêmes en travaillant au
noir, en passant, mais aussi l'entreprise en général. À
continuer de même, on s'en va où?
Le Président (M. Joly): M. Le Hir, s'il vous
plaît.
M. Le Hir (Richard): Écoutez, vous avez raison quand vous
soulignez ces choses-là. Comme association, nous avons pris la peine,
cet été, de rendre publique une étude que nous avons faite
sur l'économie souterraine et son ampleur, et on est très
sensibles à ce phénomène-là. Il a des incidences
sur nos activités, puis des incidences lourdes, difficiles.
Cependant, la solution à ce problème-là n'est pas,
à notre sens à nous, l'assujettissement à des
réglementations encore plus lourdes. Au contraire, on pense que la seule
façon de pouvoir résorber cette économie
souterraine, l'amener à refaire surface, c'est justement de
libéraliser de telle façon que les gens puissent fonctionner au
grand jour et non plus de façon souterraine.
Le Président (M. Joly): Merci. Je vais maintenant
reconnaître, pour une très courte et dernière question, M.
le député de Jonquière, pour ensuite reconnaître M.
le député de Drummond.
M. Dufour: Bon. Je reviens toujours à votre mémoire
avec le travail au noir, où vous dites: La
déréglementation, ça pourrait diminuer le travail au noir.
Mais, dans un autre endroit, vous dites... Parce que, si ce n'est pas
l'approche de la déréglementation, il en faut une autre. Et
l'autre qui est proposée, vous dites que vous ne l'acceptez pas parce
que vous dites: Les tenants d'une autre approche que la
déréglementation sont tenus de faire la preuve qu'ils ont une
meilleure façon de limiter ce fléau. Donc, si on veut travailler
puis empêcher le travail au noir, il va bien falloir qu'on mette des
moyens de contrôle quelque part. Mais, si vous me dites que vous
êtes contre des moyens de contrôle, là, vous demandez une
preuve venant du Saint-Esprit! Je ne le sais plus, comment on va aborder le
problème. Mais, à mes yeux, ce n'est pas tout à fait la
bonne façon.
On a démontré, hier, que la CCQ et vous en faites
partie voit des choses, mais ne peut les rapporter. On ne peut pas
contrôler, donc ça prend un contrôle supplémentaire.
Non, ils ne sont pas...
Le Président (M. Joly): M. Le Hir, voulez-vous corriger
certains aspects de la déclaration du député?
M. Le Hir (Richard): Oui, certainement. On n'est pas membres de
la Commission de la construction du Québec. Ça, c'est bien
important de le souligner.
M. Dufour: O.K., vous n'êtes pas membres, je retire ce
bout-là.
M. Le Hir (Richard): Ensuite, mon collègue, M. Charland,
aimerait vous rajouter quelques précisions. (12 h 30)
M. Charland (Gaston): O.K. M. le Président, c'est pour
préciser que ça réfère à une approche qui a
été adoptée lorsque a été faite la
consultation avec les organismes de la construction, où on
référait à l'augmentation du contrôle par le nombre
de surveillants. Et, nous autres, ce qu'on dit, bien, écoutez, c'est
qu'on ne pense pas que c'est la façon de faire, et c'est dans ce
sens-là que vous devez interpréter ces propos-là. Parce
qu'il y a des coûts à ça et ce n'est pas en augmentant le
nombre... D'ailleurs, le texte est assez clair, la solution policière,
aujourd'hui, on s'aperçoit que, dans quelque occasion que ce soit, ce
n'est pas la meilleure stratégie sur les chantiers
présentement.
M. Dufour: La solution policière n'est peut-être pas
la réponse, mais le laisser-faire non plus.
Le Président (M. Joly): Merci. M. le député
de Drummond, s'il vous plaît.
M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. M. le
Président, lorsqu'on a fait l'étude des crédits du
ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie en mai
dernier, j'avais soulevé cette question-là de libre circulation
des biens, des capitaux et des services comme étant une des
problématiques majeures auxquelles nous aurions à faire face en
tant qu'économie québécoise. Alors, je souscris à
ce que M. Le Hir dit aussi, parce que, chez moi, je l'ai souligné hier,
d'ailleurs, il y a Tapis Venture ltée ce sont des fabricants de
tapis qui sont pris avec le «public housing», avec des refus
de contrats, parce que ce sont des produits québécois.
On avait demandé aussi à ce moment-là de voir
quelle était la position du ministère de l'Industrie et du
gouvernement du Québec pour attaquer cette
problématique-là. Je dois conclure, M. le Président, que
la première chose qu'on voit comme mesure concrète est ce qui
apparaît dans le projet de loi 142. Alors, ma question et vous le
soulevez d'ailleurs avec justesse à la page 7 de votre mémoire:
Est-ce que vous croyez, avec l'expertise que vous avez maintenant, que les deux
mesures que vous appuyez ici, qu'on retrouve dans le projet de loi 142, vont
régler cette problématique-là de la libre circulation des
personnes et des biens dans ce cas-ci?
Le Président (M. Joly): M. Le Hir, s'il vous
plaît.
M. Le Hir (Richard): Écoutez, si les revendications de
l'Ontario ne tenaient qu'à ces deux seuls points là, je pense
qu'effectivement on serait en mesure de leur donner gain de cause. La
compréhension que j'ai des revendications de l'Ontario m'amène
à penser qu'il va falloir évidemment envisager d'autres actions,
et je suis certain que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie doit déjà être au fait de la nature des
revendications de l'Ontario.
M. St-Roch: Alors, M. Le Hir, parce qu'on est à l'audition
publique, il y a beaucoup de demandes pour qu'on retire le projet de loi 142,
mais, si c'était le cas je ne veux pas mettre des paroles ni des
pensées dans la tête du ministre est-ce que vous croyez que
l'Assemblée nationale devrait légiférer quand même,
de toute urgence, extraire ces deux articles-là et les passer de toute
urgence?
M. Le Hir (Richard): Écoutez, certainement que ces deux
dispositions-là sont essentielles pour au moins commencer à
montrer à l'Ontario qu'on est de bonne foi dans ce dossier-là,
que le Québec est prêt à tenir compte des
représentations qu'on lui fait. Et je vous avoue que c'est un dossier
qui est extrêmement grave, extrêmement dangereux et que, moi,
j'essaie autant que possible d'éviter de jeter de l'huile sur le
feu.
Le Président (M. Joly): Très courte, M. le
député.
M. St-Roch: Oui, très courte. Ça va être un
souhait, M. le Président. Devant la gravité de la situation, et
je pense qu'on en prend conscience encore davantage depuis deux jours,
j'espère, moi, voir une déclaration ministérielle ou au
moins énoncer, tel qu'il avait été discuté lors de
la commission de l'économie et du travail en mai, quelles sont les
demandes de l'Ontario et quelle est la position du gouvernement
québécois, parce que cette problématique-là
déborde largement le secteur de la commission ici, mais est
drôlement importante pour la création d'emplois au Québec.
Alors, on va se fier au ministre dans les jours qui suivent.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. le
député de Drummond. Je reconnais maintenant M. le ministre. Vous
avez encore trois minutes à votre fiche de temps, M. le ministre.
M. Cherry: Alors, bien rapidement, M. le Président, il
semble que c'est une préoccupation qui est invoquée
périodiquement par des membres de l'Opposition et à juste titre:
Comment est-ce que ça va se gérer, des travailleurs qui vont
aller dans différents secteurs? Bon. Il faut se souvenir d'abord, comme
le disait M. Le Hir, que les gens de la construction, les entrepreneurs de la
construction, eux autres, ils ont exprimé qu'ils voulaient des secteurs
différents. Je pense que ça, là, on va commencer par leur
faire confiance. Ils doivent savoir comment ça marche leur
entreprise.
Deuxièmement, il faut quand même ramener le problème
dans sa vraie dimension: 85 % des entreprises dans le secteur de la
construction ont cinq travailleurs et moins, ce n'est pas trop, trop
compliqué à suivre, et celles qui en ont plus que
ça...
M. Chevrette: ...en a un.
M. Cherry: ...elles sont équipées, elles sont
capables de le faire. Eux autres, elles prétendent qu'elles sont
capables de vivre avec ça. Donc, je pense qu'il faut au moins leur faire
confiance pour reconnaître qu'étant dans leur secteur
d'activité économique, connaissant l'utilisation de leur
personnel, elles, elles pensent qu'elles sont capables de vivre avec
ça.
Troisièmement, je vais rappeler que, dans le décret actuel
de la construction, qui est régi depuis longtemps, il y en a, des
clauses sectorielles, il y en a, des conditions différentes,
dépendamment dans quel champ d'activité vous êtes. Ils ont
appris à vivre avec ça au cours des années. On ne pense
pas qu'on va introduire une notion nouvelle. Ils savent déjà
comment s'ajuster à ça. Vous avez des horaires qui sont
différents pour faire les routes qu'ils sont dans d'autres secteurs
d'activité. Ça, c'est reconnu, à cause des
particularités qui sont propres au champ d'activité dans lequel
les entrepreneurs vivent. Ils sont capables de s'ajuster à
ça.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Au nom des
membres de cette commission, je tiens à remercier M. Le Hir, M. Patry et
M. Charland d'avoir été présents avec nous.
J'aimerais aviser les gens, afin de mieux planifier peut-être
votre cédule de temps pour la balance de la journée, qu'à
15 heures ce sera nécessairement l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations; à 16 heures, l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec; à 17 heures,
la CSN; à 20 heures, La Corporation des maîtres
électriciens du Québec; à 21 heures, la Centrale des
syndicats démocratiques-construction et, à 22 heures, la
Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du
Québec.
Donc, nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 heures cet
après-midi, dans le même salon. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 37)
(Reprise à 15 h 9)
Le Président (M. Joly): Alors, bonjour. Je déclare
la séance ouverte. Il me fait plaisir de vous accueillir à cette
commission.
Alors, déjà je m'aperçois que les gens
représentant l'Association provinciale des constructions d'habitations
du Québec sont présents. Je reconnais M. Bolduc, son
dévoué président, résident de mon comté.
Alors, il me fait plaisir de vous saluer et de vous accueillir. M. Bolduc,
pourriez-vous nous introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous
plaît.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec inc. (APCHQ)
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Si vous n'avez pas objection...
Le Président (M. Joly): Pas d'objection, M. Rousseau.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Alors, M. le Président, MM.
les ministres membres de cette commission parlementaire, mon nom est Orner
Rousseau, je suis le vice-président exécutif à l'APCHQ.
À ma gauche, il y a M. Serge Crochetière, conseiller juridique,
et, à mon extrême droite, M. François Bernier, directeur du
service économique, et évidemment, notre président, M.
Bolduc.
Le Président (M. Joly): Je vous rappelle que vous avez une
vingtaine de minutes pour nous livrer le fruit de votre mémoire et, par
après, la balance du temps sera répartie de façon
égale entre les deux formations pour pouvoir échanger avec nous.
(15 h 10)
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): C'est bien. D'ailleurs, nous, nous
allons répartir le temps, c'est-à-dire entre nous quatre.
Merci.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, je reconnais M.
Bolduc. S'il vous plaît.
M. Bolduc (Alain): Très bien. Alors, M. le
Président, hier à cette commission des remarques en apparence
anodines ont été prononcées par M. Maurice Pouliot sur mon
compte et sur l'entreprise que je représente quand il m'a
qualifié de broker. Alors, s'il ne s'agissait que d'une boutade dans un
débat, j'en rirais, mais c'est beaucoup plus sérieux, puisque
cette affirmation traduit tout à fait l'ignorance entretenue à
l'égard du secteur résidentiel. Le broker que je suis est de la
deuxième génération d'une entreprise qui a construit plus
de 7000 maisons au cours des 30 dernières années. Je suis un
broker dont l'entreprise a versé 70 000 000 $ en salaires aux milliers
de travailleurs que nous avons employés. Nous sommes des
promoteurs-constructeurs et, à titre de donneurs d'ouvrage, nous
employons indirectement à l'heure actuelle plus d'une cinquantaine
d'ouvriers de la construction par le biais de nos sous-traitants.
Quand on qualifie les entrepreneurs généraux de brokers,
on tente de ridiculiser notre importance dans l'industrie de la construction.
Pire encore, on tente de laisser croire que nous nous usurpons le droit de nous
prononcer sur les relations de travail, comme si l'habitation pouvait
être réduite à une simple question de relations de
travail.
M. le Président, cet incident illustre parfaitement le
fossé qui sépare la position traditionnellement exprimée
par l'APCHQ de celle des autres parties patronale et syndicale. Nous sommes les
seuls à être à la fois promoteurs, financiers, vendeurs et
constructeurs de nos projets d'habitations. Cette réalité est
méprisée par les autres parties de notre industrie qui
s'acharnent à ne considérer la construction résidentielle
que sous l'angle des relations de travail et purement de la production. Ils
ignorent ainsi tous les autres aspects de la gestion de notre travail qui sont
soumis aux aléas de la conjoncture économique et du
marché. Comment peut-on à la fois déplorer le manque de
planification des travaux dans l'industrie de la construction
résidentielle, comme le fait la partie syndicale, et en même temps
nier le droit de parole aux entrepreneurs qui sont responsables de près
de 8 000 000 000 $ de travaux résidentiels par année sur les 18
000 000 000 $ que totalisent l'ensemble de l'industrie?
Cet aveuglement est la cause du manque du vision des parties syndicales,
qui croient qu'il y aura toujours un payeur capable d'assumer les prix qu'ils
exigent tout en niant à ce payeur le droit de discuter des conditions de
travail. Cette attitude explique également le débat
stérile où nous nous trouvons présentement. Ce
débat se perpétuera tant et aussi longtemps que le
caractère distinct du secteur résidentiel ne sera pas
reconnu.
La capacité de payer du consommateur est différente de
celle des donneurs d'ouvrage des autres secteurs et sa motivation est
fondamentale: le consommateur doit se placer sous la sécurité
d'un toit pour lui et sa famille. Le résidentiel a une organisation du
travail qui lui est propre: c'est une réalité qu'il va falloir
reconnaître. Le projet de loi 142 est bienvenu. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Bolduc. M.
Beaudoin-Rousseau (Omer): Oui...
Le Président (M. Joly): M. Rousseau, s'il vous
plaît.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): C'est très bien. Je vous
remercie, M. le Président. Alors, M. le Président, MM. les
membres de cette commission, je dois dire ceci: Face, un peu, à ce qui
s'est dit hier en commission parlementaire, je dois avouer bonjour, Mme
Blackburn que j'ai été obligé un peu de modifier
mon discours de ce matin. En fait, je pense que je m'en vais un peu dans la
même ligne que mon président. Évidemment, j'ai retenu que
l'on citait à profusion le nom de l'APCHQ et qu'on s'en servait à
peu près à toutes les sauces pour défendre,
c'est-à-dire, un point de vue.
J'ai aussi, également, constaté, à ma très
grande surprise, d'ailleurs, que plusieurs voyaient mon nom dans leur soupe.
J'ai aussi remarqué que M. Robert Brown, le directeur
général de l'AECQ et sans aucune méchanceté,
Robert reconnaissait au moins une qualité à l'APCHQ,
à savoir la constance dans ses propos. Il y a aussi une qualité
que je dois lui retourner, c'est également, c'est-à-dire, sa
grande honnêteté par rapport à nos propos. Soyez
assuré, M. le Président, que nos propos d'aujourd'hui vont avoir
probablement la même constance, à savoir qu'ils se traduiront
évidemment par la recherche de conditions particulières pour le
secteur de l'habitation. Nous reviendrons un peu plus tard sur cette
question.
Avant de discuter du fond de la question du projet de loi 142, j'ai
quelques remarques à ajouter. La première a trait à la
question des avantages sociaux. Il y a deux jours, évidemment, l'APCHQ
faisait paraître des annonces même, aussi, des
communiqués afin de dévoiler quelques faits relativement
aux avantages sociaux dans l'industrie de la construction, concernant les
travailleurs. Comme vous l'avez sans doute constaté vous-même, M.
le ministre, et vous tous, membres de cette commission, ce débat a
commencé quand M. Gé-rald Larose s'est mis à dire
qu'advenant, c'est-à-dire, la déréglementation du secteur
de l'habitation, les travailleurs ne retrouveraient plus aucuns
bénéfices marginaux. Évidemment, nous ne pouvions,
c'est-à-dire, laisser passer sous silence ce genre de remarques, parce
qu'il s'agissait, à notre avis, d'une manoeuvre pour éviter
d'aborder franchement, c'est-à-dire, le débat.
Mais là où nous avons été le plus surpris,
c'est
quand nous avons entendu le témoignage de M. Maurice Pouliot,
hier, alors qu'il comparaissait devant cette commission. Je vous cite M.
Pouliot, mot à mot, à part de ça, alors qu'il parle de
notre publicité: «Ce que mentionne l'article de l'APCHQ dans Le
Journal de Montréal, c'est qu'en 1987 les crédits que
retiraient les travailleurs de la construction étaient de 375 $ du 1000
heures travaillées et enregistrées à la Commission de la
construction du Québec. Évidemment, avec les années, en
1993, le montant a été augmenté à 469 $. C'est
clair qu'avec l'argent nouveau, avec le rendement, avec l'ajustement des rentes
il faut que l'argent remonte. On ne peut pas dire que le régime est mal
en point; il est effectivement en santé.» Fin de la
parenthèse. De deux choses l'une: Ou bien M. Pouliot ne sait pas lire,
ou bien, c'est-à-dire, il est intellectuellement malhonnête.
Voici ce que Le Journal de Montréal disait le 30 novembre,
et je l'ai ici: «Depuis 1987, les rentes versées aux
retraités sont passées de 469 $ à 385 $.» Il me
semble, c'est-à-dire, dans le fond, que c'est tout à fait
l'inverse de ce qu'il a avancé hier. Alors, depuis 1987, effectivement,
les rentes ont baissé. Il s'agit d'une diminution de 18 %, M. le
Président, sur six ans.
Pour ce qui est du fonds d'assurance, nous avons d'autres
données, d'ailleurs, et nous pourrons en parler tout à l'heure.
M. Bernier pourra le faire si, effectivement, il y a des questions à ce
sujet.
Alors, comme à peu près, évidemment, tout le monde
m'a accroché au passage, je m'en voudrais, évidemment, de ne pas
leur rendre un peu la politesse. J'ai un grand ami, évidemment,
c'est-à-dire Yves Paré on s'entend bien qui faisait
référence, hier, à un article de La Presse qui donnait
tous les taux de salaire du décret, tableau tiré d'une
publication de notre association.
Le Président (M. Joly): Je m'excuse, M. Rousseau, mais je
tiens à vous souligner la pertinence.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Oui.
Le Président (M. Joly): Si vous voulez jaser sur votre
mémoire, je pense que vous êtes entièrement libre de le
faire. J'imagine que vous voulez peut-être profiter de cette tribune pour
remettre les choses dans un contexte que, vous, vous voulez favoriser, mais,
pour faire avancer la commission, j'apprécierais beaucoup qu'on revienne
sur le projet de loi 142.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): Volontiers, M. le Président,
j'arrivais d'ailleurs sur le fond de la question. J'arrive au coeur du
débat, le projet de loi 142, et je dis ceci: Si le gouvernement a
décidé de déposer le projet de loi 142, qui prévoit
désassujettir une partie du résidentiel tout en modifiant la
structure des négociations, la faute ou la cause est principalement
imputable, c'est-à-dire, aux parties syndicale et patronale responsables
de la négociation. En fait, on a toujours refusé, jusqu'à
ce jour, de reconnaître les réalités et les
spécificités de notre secteur que sont la capacité de
payer du consommateur qui est limitée et la nécessité,
c'est-à-dire, pour les entrepreneurs qui ont des intérêts
homogènes de négocier, de se prononcer sur leurs propres
conventions collectives. d'ailleurs, un bref rappel vous permettra sans aucun
doute de comprendre pourquoi on en est arrivés là. en 1982, alors
que notre société vivait une crise économique difficile,
alors d'ailleurs que le gouvernement révisait les salaires de ses
employés, alors aussi que, dans tous les autres secteurs
économiques, on réaménageait les conventions collectives,
alors que les gels de salaires étaient chose courante, l'aecq, toujours
aussi soucieuse de l'intérêt des entrepreneurs, proposait de son
propre chef des augmentations de salaires de 10 %. et vous savez d'ailleurs ce
qui s'est produit. le monde patronal du secteur résidentiel s'est
réuni et il a voté contre ce projet. malheureusement,
malgré que cette convention collective ou ce projet d'entente a
été refusé par les entrepreneurs du secteur
résidentiel, d'ailleurs auxquels s'étaient ajoutés un
certain nombre d'entrepreneurs dans le domaine commercial et industriel, le
gouvernement a décidé, évidemment, de
décréter les augmentations. (15 h 20)
Alors, non contente également aussi de ce résultat, l'AECQ
obtenait du gouvernement des modifications à ses statuts, de
façon à expulser les associations patronales de leur conseil
d'administration et, également aussi, d'ajouter un vote
pondéré, ce qui faisait, dans notre secteur, à toutes fins
pratiques, évacuer la possibilité de décider de ses
propres conditions de travail. Par ailleurs, je pense qu'on doit l'avouer, 11
ans plus tard, on est encore au même résultat. Il n'y a pas eu de
négociations. Évidemment aussi, dans le cadre du Sommet, il y a
eu un constat et tout le monde l'a admis, tant de la partie patronale que de la
partie syndicale: le régime des relations de travail, c'est un
échec.
Alors, M. le Président, je voudrais simplement rappeler que le
rapport Scowen en 1986 et le rapport des députés sont
arrivés aux mêmes conclusions auxquelles nous sommes
arrivés et, d'ailleurs, enfin, que nous déclarions depuis 1982 et
même avant. C'est pourquoi nous disons oui, c'est-à-dire, au
projet de loi 142. Il vient, c'est-à-dire, dans le fond, donner un coup
de main à notre industrie qui est en train de mourir.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Maintenant, M.
Crochetière.
M. Crochetière (Serge): Oui, d'accord. Alors, M. le
Président, Mmes, MM. les membres de la commission. Ça fait
plusieurs années que je viens en commission parlementaire
représenter le secteur de l'habitation. Encore, j'ai assisté aux
délibérations, là, depuis hier. Il y a une chose qui me
frappe, c'est qu'on ne parle, quand on parle du secteur résidentiel, que
des conditions de salaires. Or, quand on dit qu'il faut sortir l'habitation du
décret, ce n'est pas uniquement à cause
des conditions de salaires. Tout le découpage, toute la structure
a été faite à partir de métiers eux-mêmes
calqués uniquement sur les grands chantiers. Tout le devis
d'apprentissage découle essentiellement de ça, ce qui fait en
sorte que c'est inapplicable dans le secteur résidentiel.
M. Pouliot, hier, faisait état d'un grand nombre de
réclamations présentées par la CCQ. On a parlé
aussi d'employeurs véreux qui travaillaient au noir. Vous allez toujours
en avoir. C'est impossible de définir les métiers par rapport
à nos besoins dans l'habitation. Un exemple qui est connu de tous: les
gars de coffrage dans l'habitation. Us ont toujours beaucoup de
difficultés ou il faut qu'ils aient des cartes à utilisation
restreinte. Comment un gars qui fait du coffrage peut devenir un
charpentier-menuisier? Comment un gars qui fait du crépi sur des
fondations peut devenir un cimentier-applicateur? Dites-nous comment? Il va
pouvoir avoir une carte à utilisation restreinte, puis il va rester
toujours là-dedans? Puis, s'il n'y a pas de travail, qu'est-ce qu'il va
faire? Il va faire autre chose. C'est là que le noir se fait. C'est
ça la vérité. Vous ne pourrez pas, en mettant des dents,
continuer à imposer une structure qui n'est pas faite pour le secteur
résidentiel. Ce n'est pas la même réalité. Ce n'est
pas le même devis d'apprentissage, ce ne sont pas les mêmes travaux
qui sont confiés.
Si vous voulez aussi avoir une illustration de ce fait-là,
comparez la définition de tâche aux catégories
établies par la Régie du bâtiment et essayez de les
rejoindre ou de les regrouper. Je vous souhaite beaucoup de plaisir. C'est un
fractionnement de tous les métiers qui correspond à la structure
des industries réellement.
Quant au devis d'apprentissage en lui-même, ça fait, pour
ma part, 17 ans que je siège ou que j'assiste à des
conférences, à des tables de concertation. On n'a jamais
été capable de redéfinir les fonctions et de les adapter
au secteur de l'industrie dé la construction résidentielle. C'est
une vache sacrée. Tout part à partir de là, et ce n'est
pas adapté aux besoins du secteur résidentiel. Alors, ce ne sera
jamais possible d'empêcher qu'il y ait du travail au noir. Ce ne sera
jamais possible d'établir, encore une fois, un habitacle ou une
structure qui puisse contraindre le résidentiel à avoir les
mêmes conditions de travail. Et ça, d'une part, ça
occasionne beaucoup de travail au noir et, d'autre part, ça fait en
sorte que les gens du résidentiel ne se sentiront jamais à l'aise
dans un décret où ils ne peuvent absolument pas négocier
les conditions.
Le temps fuit. Je vais juste vous souligner, d'autre part, que, si
jamais il y avait des questions quant à la qualification et à la
qualité des travaux, on va être disposé ou on va tenter de
répondre à toutes vos questions là-dessus.
Enfin, quant au projet de loi, quant à certaines dispositions, je
voudrais juste vous faire remarquer que la notion d'«exclusivement
à des fins résidentielles», lorsqu'on parle du secteur dans
la définition, tant à l'article 1 que dans l'article 19, devrait
faire en sorte qu'on tienne compte d'utilisation parfois extérieure au
résidentiel et qui ferait en sorte que ça disqualifierait ces
bâtiments, de sorte que ce serait des gens du secteur institutionnel ou
commercial qui viendraient déterminer les conditions de travail dans ce
secteur. Je passerais maintenant à la question de ce qu'on...
Le Président (M. Joly): M. Bernier.
M. Bernier (François): Merci. Combien de temps me
reste-t-il, M. le Président?
Le Président (M. Joly): Vous avez environ quatre
minutes.
M. Bernier (François): Merci. Alors, je vais...
Le Président (M. Joly): Mais vous pouvez déborder.
J'imagine qu'à l'intérieur d'une période raisonnable on
peut...
M. Bernier (François): ...essayer d'être le plus
succinct possible, d'abord pour illustrer trois points: d'abord, pour illustrer
le fait que, selon nous, la déréglementation apporte une
véritable possibilité, je pense, de baisser les coûts de la
construction et une baisse de coûts qui serait profitable au
consommateur; deuxièmement, de faire un commentaire à propos de
l'applicabilité de ce système, si le terme est français,
en tout cas que ce système est viable, qu'on peut fort bien l'imaginer,
et, finalement, quelques commentaires concernant les régimes d'assurance
sociaux. alors, au niveau du prix, il y a plein d'exemples autour de nous,
partout en amérique du nord, de ce qui est une industrie de l'habitation
déréglementée au niveau de la main-d'oeuvre. il suffit
d'en prendre la photo, de lire les ratios de main-d'oeuvre et de
matériaux dans les maisons construites hors du québec et de
s'imaginer si ces ratios s'appliquaient maintenant chez nous, qu'est-ce qu'on
obtiendrait comme résultat. or, sommairement, pour une maison et
je ne vous parle pas du terrain et de rien qui l'entoure, les taxes, les
infrastructures, quoi que ce soit, mais juste des matériaux et de la
main-d'oeuvre au québec, vous observerez,
généralement, entre 38 % et 40 % de la maison elle-même qui
est de la main-d'oeuvre, le reste étant des matériaux. vous allez
en ontario, vous allez trouver 33 %, 34 %, comme ratio de main-d'oeuvre par
rapport aux matériaux. vous allez plus loin, peut-être en alberta,
vous allez trouver 29 %, 30 %, en termes de ratio de main-d'oeuvre, dans
l'ensemble de la maison. amenez ces ratios chez nous.
Prenons l'hypothèse, celle qu'on a retenue en tout cas, que, en
moyenne, on passerait peut-être de 38 % de proportion de main-d'oeuvre
à 32 % de proportion de main-d'oeuvre. Sur une maison de 100 000 $, vous
obtiendrez, dans ces circonstances, une économie potentielle de l'ordre
de 3000 $, 3500 $. C'est par cette logique qu'on avance et qu'on croit
par une photo prise à l'extérieur de chez nous et qu'on apporte
chez nous qu'on s'aligne vers une réduction des prix
véritables. Je vous signale, juste en passant, dans cette
évaluation, qu'il s'agit de photos prises sur le marché, chez
nous, où les maisons ne sont parfaitement pures au blanc, ni au Canada,
d'ailleurs. Alors, ne me parlez pas que c'est une évaluation, je veux
dire, faite en fonction des taux hypothétiques du décret,
là, qu'on a simplement fait des règles trop faciles.
C'étaient des évaluations de marché.
À propos de l'applicabilité du système, je tiens
seulement à vous signaler que, autre que la question des salaires, on a
des individus, évidemment, il faut dire qu'on en voit
déjà, aujourd'hui, ce matin, dans d'autres secteurs que le
secteur de l'habitation et, lorsqu'on fait leur paye, à ces
gens-là, on se met, évidemment, à tenir compte du fait
que, ah! tiens, on est rendu dans un autre secteur où certaines
règles s'appliquent. Par exemple, on doit lui payer une heure pour qu'il
se présente sur le chantier, hein. Alors, on est déjà
conscient, quand on fait des payes, que, quand on change de secteur, on tombe
parfois dans des différences et c'est le même employé.
L'employé sait fort bien qu'il vient de tomber dans un autre secteur,
qui sera rémunéré selon des conditions différentes,
et on revient au secteur de l'habitation où certaines conditions
n'existent pas. On sait très bien comment calculer une paye. C'est la
même idée, évidemment, s'il fallait
déréglementer. Encore une fois, il s'agirait de s'entendre, de se
comprendre, et il serait tout à fait possible d'appliquer un
système qui reconnaît ces différences. C'était
à propos de l'applicabilité.
En dernier lieu, en ce qui concerne les avantages sociaux. Nous avons
avancé... En fait, certains chiffres ont été
rappelés plus tôt, que, au niveau du premier bloc, à savoir
les fonds de pension, on a, depuis 5, 6 ans, observé une baisse de 18 %
des rentes qui sont versées aux travailleurs. C'est une pente qui est,
en tout cas, un signal, peut-être, que le régime commence à
donner des signes de faiblesse.
On a également, ici, à préciser quelques
commentaires au niveau du deuxième bloc, celui des assurances.
Évidemment, qu'est-ce qu'il y a, derrière tout ce débat?
C'est un argument que le désassujettissement du secteur
résidentiel place ce régime, qui est, apparemment, très,
très valorisé, en péril, en péril à
l'échelle de l'industrie, pour les 120 000 travailleurs, à
l'échelle aussi du secteur résidentiel où, nous dit-on,
peut-être une trentaine de milliers de travailleurs seront
potentiellement impliqués. (15 h 30) alors, certaines données
portent à croire que le régime a beaucoup moins d'applications
que ça. je vous en dévoile quelques notions. d'abord, et portant
strictement sur la question des assurances, il y a eu, entre 1991 et 1993, une
diminution d'environ 25 % du nombre d'assurés. ilya 120 000 travailleurs
dans l'industrie; en 1993, il y en a 64 000 qui sont encore assurés.
récemment, histoire de renflouer un peu la situation fortement
déficitaire des régimes d'assurance... en tout cas, en ce qui
nous concerne, on estime qu'on s'aligne vers un déficit de 60 000 000 $,
cumulé, quand on va le calculer comme il faut à la fin de 1993.
Alors, de nos 64 000 assurés, ici, la CCQ vient de prendre des mesures
pour en exclure un certain nombre. À cet égard-là, les
mesures prises, je veux dire, je pense, vont placer très, très
proche de la porte de sortie nombre de travailleurs résidentiels.
Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à
conclure, M. Bernier, s'il vous plaît.
M. Bernier (François): Je vous signale tout simplement que
10 000 salariés n'auront plus droit à l'assurance long terme
à compter de janvier 1994, que 16 000 autres assurés n'auront
plus droit à l'assurance-salaire court terme et que, pour 26 000
assurés, à toutes fins pratiques, des employeurs vont continuer
à payer, sachant fort bien qu'en donnant des sous au régime leurs
salariés n'auront droit à rien.
Alors, je vous invite à réfléchir,
évidemment, au fait que, sur 120 000, il y en a 60 000 et qu'on vient
d'avancer ici un nouveau chiffre de 26 000 qui s'approchent de la porte de
sortie. Que perd-on exactement comme régime lorsqu'on le regarde
évoluer? Et que perdra-t-on dans deux, trois ans si on ne fait rien?
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. Bernier.
C'était le temps qui vous était dévolu. Alors, M. le
ministre, à vous la parole.
M. Cherry: Merci, M. le Président. J'aurai deux questions
parce que j'ai des collègues, également, de notre formation qui
souhaiteraient vous poser des questions sur votre mémoire. vous avez
utilisé la proportion de la main-d'oeuvre dans le coût d'une
maison. si je vous ai bien entendu parce qu'on n'a pas
nécessairement suivi le mémoire vous avez parlé de
38 %. est-ce que j'ai bien compris? des groupes qui vous ont
précédés depuis hier, certains utilisaient puis, il
me semble que c'est la ccq, mais au cas où je me tromperais d'organisme
certains ont parlé de 20 % des coûts, d'autres ont
parlé entre 20 % et 30 %. pouvez-vous nous expliquer vous autres,
dont c'est la principale activité comment, vous autres, vous
arrivez à 38 %, puis qu'un organisme comme la ccq, elle, peut arriver
à 20 % ou à un maximum de 30 %? des pourcentages comme
ceux-là ont une incidence importante sur le projet qui est devant
nous.
M. Bernier (François): Oui. Avec plaisir. Le
Président (M. Joly): M. Bernier.
M. Bernier (François): On ne disconvient pas du chiffre de
20 %, parce qu'il s'agit probablement d'une mesure simplement par rapport au
prix de vente. Alors, si vous voulez faire dessiner une maison, cette
maison-là vaut 55 000 $, juste matériaux et main-d'oeuvre. En
dessous, il y a un terrain; il y a des taxes; il y a des
infrastructures; il y a des permis municipaux, des règles de
développement. Tout ça, c'est 45 000 $ qui sont en dessous de la
maison. Après, quand on frappe sur les clous, puis qu'on met les
matériaux ensemble avec de la main-d'oeuvre, il y a 55 000 $ ou 55 % qui
est la maison. maintenant, je la regarde, la maison. là, je cherche la
proportion, exactement, qui est de la main-d'oeuvre et des matériaux.
c'est là que vous trouvez 38 % à 40 % de main-d'oeuvre, le reste
étant simplement des matériaux.
M. Bolduc (Alain): Excusez...
Le Président (M. Joly): M. Bolduc, oui, s'il vous
plaît.
M. Bolduc (Alain): si vous faites la multiplication de 38 % par
55 %, vous aller arriver...
M. Bernier (François): Vous allez tomber à 20%.
M. Cherry: O.K. Dans les pages 28 et 29, l'ensemble de vos
remarques... Par exemple, je prends votre deuxième paragraphe, à
la page 29: «II serait donc opportun de changer la notion d'immeubles
réservés exclusivement à l'habitation...» Puis, tout
cet aspect-là vous savez ce que je veux dire par rapport
à ce qu'il y a dans le projet de loi, voulez-vous expliciter le genre de
problème ou de difficultés que ça pose dans votre secteur
d'activité, s'il vous plaît?
Le Président (M. Joly): M. Beaudoin-Rousseau... M.
Crochetière, s'il vous plaît.
M. Crochetière (Serge): Par exemple, si on parle de
«exclusivement». Vous avez un six logements. Si on le prend avec le
projet de loi, tel qu'il est, où il y a un commerce quelconque à
l'étage, d'accord, il ne serait plus exclu, d'une part, et il ne serait
pas non plus compris dans la définition du secteur résidentiel.
Ni dans un cas, ni dans l'autre il ne s'agirait d'un bâtiment à
des fins exclusivement résidentielles. Ce serait donc, comme je le
disais tantôt, des gens des secteurs institutionnel et commercial qui
imposeraient les conditions de construction de ce bâtiment-là,
uniquement parce qu'une partie a été à vocation, disons,
commerciale.
M. Cherry: Donc, ce que vous dites, c'est...
M. Crochetière (Serge): II faudrait que ça soit
«principalement» résidentiel, qu'on se réfère
à des définitions comme on va les trouver dans la Loi sur le
bâtiment ou dans le Code national du bâtiment, où on se
réfère à des bâtiments...
M. Cherry: Quelles sont les normes auxquelles vous vous
référez, dans ce cas-là?
M. Crochetière (Serge): De mémoire, je crois qu'on
se réfère à «principalement
résidentielle», «vocation principalement
résidentielle».
M. Cherry: «Principalement résidentielle».
M. Crochetière (Serge): Résidentielle.
M. Cherry: Est-ce qu'il y a un pourcentage, ou est-ce qu'il y a
une mesure commune à laquelle, dans le secteur, on se
réfère?
M. Crochetière (Serge): Les gens s'entendent...
M. Cherry: C'est 10 %, 15 %, 20 %, 25 %? Je ne sais pas,
là. Je veux vous l'entendre dire, c'est votre secteur.
M. Crochetière (Serge): c'est-à-dire, on parle de
75 %, 80 % à vocation résidentielle...
M. Cherry: À vocation résidentielle?
M. Crochetière (Serge): ...ou d'utilisation
résidentielle, oui.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): D'ailleurs, M. le ministre...
Le Président (M. Joly): M. Beaudoin-Rousseau.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): ...vous auriez le même
problème lorsqu'il s'agit de travaux assujettis à la convention
collective dans le secteur de l'habitation par rapport à la convention
collective dans le secteur commercial. Si vous avez un immeuble, je ne sais
pas, moi, de huit ou neuf étages, et qu'au premier étage vous
retrouvez un dépanneur et aussi, peut-être, une clinique
médicale, ça serait considéré comme un immeuble
à caractère commercial. Donc, il tomberait sur la convention du
secteur commercial. Évidemment, à ce moment-là, ça
pourrait représenter strictement 10 %, peut-être, en fait, de la
superficie de l'édifice. Donc, c'est pour ça qu'on dit qu'il
faudrait revoir la notion de «exclusivement» pour mettre
«principalement», pour voir une application.
Le Président (M. Joly): M. le ministre. Oui...
M. Crochetière (Serge): Sinon, ça risque
d'interdire à plusieurs de construire des bâtiments avec des
locaux commerciaux et, après ça, ils vont faire de la
transformation. Il faut être logique, là.
M. Cherry: Voulez-vous me préciser ça? Je n'ai
pas...
M. Crochetière (Serge): Alors, écoutez. Si,
vraiment, l'écart des prix est très différent, les gens
vont construire suivant les coûts du décret résidentiel,
sans
locaux commerciaux. Ils feront probablement des transformations plus
tard, quand même, si c'était ça l'objectif, ou si le zonage
municipal le permet. Alors, aussi bien légaliser tout de suite la
situation en tenant compte d'une vocation principalement
résidentielle.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Ce qu'il faut s'assurer, quand
même, c'est que, quand on parle d'un édifice à
caractère d'habitation, il ne faudrait pas que la convention collective
du secteur commercial s'applique, en tout cas, à des fins d'habitation
essentiellement. Sinon, si on regarde le projet de loi et qu'on prend neuf
logements et plus, ce qui peut représenter aux environs,
peut-être, de 20 % de tout ce qui se fait dans le domaine de
l'habitation, si je dois enlever, à ce moment-là, à peu
près tous les immeubles dont une certaine superficie a un
caractère commercial... Je vous le dis, il y en a très peu.
D'ailleurs, ce pourrait être un dépanneur. Je vous parlais
tantôt d'une petite clinique médicale, parce qu'il y a des
personnes âgées dans l'édifice. À ce
moment-là, la convention collective du secteur de l'habitation, elle
aurait quoi comme valeur? Ça serait quoi? Pour représenter un
marché de quoi? De 10 %? Alors, c'est pour ça que je vous dis
qu'il y a lieu qu'on change ce terme pour mettre
«principalement».
Le Président (M. Joly): M. le député de
Salaberry-Soulanges, s'il vous plaît.
M. Marcil: Pour être dans la même ligne, si on
appliquait ce que vous proposez, ça pourrait même aller
jusqu'à... Lorsqu'on construit un 10 étages ou un 15
étages en béton et structure d'acier, avec ascenseur, où
il y aurait six étages de logements et, je ne sais pas, moi, quatre
étages commerciaux, il faudrait considérer ça comme
étant du résidentiel. Ce n'est pas du tout les mêmes
technologies qu'on applique dans le domaine de la construction
d'édifices de ce genre par rapport à un huit logements avec une
structure en bois. Il y a une grosse différence.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Je suis entièrement d'accord
avec vous. D'ailleurs, on a de nos entrepreneurs, dans le secteur
résidentiel, même bas, qui vont dans ce secteur-là
d'édifices en hauteur. Mais il y a quand même une chose qu'il faut
regarder. C'est qu'avec une convention collective et c'est ça,
d'ailleurs, qui est important on peut établir des conditions en
fonction de ce que tu as comme problème pour son application, parce
qu'il ne faut pas oublier...
M. Marcil: Vous êtes d'accord avec nous, M.
Beaudoin-Rousseau, qu'on n'est pas ici, nous, comme législateurs, pour
créer un membership. On est ici pour essayer de trouver...
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Non, non, je ne pense même
pas à ça. Je parle d'ailleurs simplement, c'est-à-dire en
termes...
M. Marcil: O.K. Merci.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): II ne faut pas oublier non plus que
les tours d'habitation, dans le fond, et même de six étages ou
sept étages... Vous avez du condominium qui se vend à 100 000 $.
Donc, il y a quand même aussi, encore, toujours la même chose, la
problématique, c'est-à-dire, en regard du consommateur qui doit
acheter une unité résidentielle. Moi, je dis que, dans une
convention collective, il est possible de négocier des clauses en
fonction, enfin, des intérêts en place. C'est-à-dire que,
là, c'est clair que, par exemple, avoir une convention collective
commerciale qui s'applique dans le domaine de l'habitation, ça pourrait
être, à un moment donné, tout à fait aberrant. C'est
ce qu'on dit.
M. Marcil: M. Beaudoin-Rousseau, vous... Tous ceux qui sont
passés ici, toutes les associations, on a parlé du travail au
noir.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): Oui.
M. Marcil: Après plusieurs études qui ont
été faites, même nous, le comité des
députés, les sept députés qui avons
travaillé sur le comité de la construction, nous étions
arrivés à la conclusion qu'il fallait qu'il y ait des
particularités dans le domaine de la construction. Nous avions
recommandé que le résidentiel soit exclu du décret actuel.
On a bien pris la précaution de mettre ça entre guillemets. (15 h
40)
On sait également que le travail au noir est dû, je ne
dirais pas partiellement ou majoritairement... Par expérience, il est
dû, presque en totalité, aux entrepreneurs qui décident de
payer autrement que ce que le décret prescrit. On sait pourquoi, c'est
parce que les coûts sont probablement trop élevés dans le
domaine de la construction résidentielle. Donc, ça amène
les entrepreneurs à développer un autre style, je ne dirais pas
de gestion des affaires, mais, au moins, de soumission. À partir de
ça, on avait décidé de faire en sorte que l'habitation
soit considérée différemment, pour établir un
coût de marché permettant de développer l'industrie de la
construction résidentielle.
Vous avez signé un document avec les membres de la FTQ, de
même que le Conseil provincial, à l'effet que vous
considériez que le résidentiel là, on ne parlait
pas du huit logements, on parlait du six étages, et même moins
devrait être considéré comme étant
étudié dans un secteur particulier. Aujourd'hui, en date du 2
décembre, est-ce que vous maintenez la même position? Est-ce que
vous maintiendrez la même position, telle que vous l'avez
présentée, définie dans ce document, qu'il y ait un
secteur résidentiel qui engloberait les six étages et moins, avec
des conditions de travail particulières, différentes de celles
qui existent dans le secteur industriel, commercial et institutionnel?
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): M. Marcil, je voudrais simplement
dire ceci. Il faut savoir que l'APCHQ a toujours demandé des conditions
particulières pour le secteur de l'habitation, mais, évidemment,
ça date de bien des années. Et, dans le cadre de son
congrès de 1992, justement, un peu précédant les
négociations dans l'industrie de la construction, les entrepreneurs ont
dit: On veut des conditions particulières. A défaut, vous allez
tout faire pour être capables de nous sortir du décret de la
construction, donc de l'assujettissement à la loi. Je ne ferai pas les
fictions légales, là.
Alors, c'est effectivement ça qui est arrivé, parce qu'on
a fait, évidemment, en même temps, des pressions pour être
capables de se faire sortir du secteur résidentiel, sauf que le Sommet
est arrivé. Il y avait des propositions sur la table, où on
questionnait encore le système des relations de travail. On disait:
Bien, c'est clair, il devrait y avoir quatre secteurs où on pourrait
retrouver les intérêts des entrepreneurs, en fait les
intérêts qui sont homogènes, dans une même convention
collective, etc. Alors, nous autres, on s'est posé la question, à
savoir: Bon, est-ce qu'on devrait peut-être tenter de trouver des
éléments de solution à l'intérieur de ça?
Évidemment, on a, à l'intérieur du Sommet, défendu
que, peut-être, ce serait possible, que, peut-être, on pourrait
obtenir dans le temps des conditions particulières.
Mais, à la fin du Sommet, on s'est bien rendu compte...
D'ailleurs, on l'a dit qu'on était très sceptiques quand on est
entrés au Sommet, que probablement que les gens auront tellement peur du
changement, qu'il n'y a rien qui va se passer. Alors, on est arrivés
à un genre de constat d'échec. Tout de suite après le
Sommet, on a rencontré la FTQ, le Conseil provincial, l'AECQ. On voulait
qu'il se passe quelque chose dans l'industrie de la construction, donc qu'il y
ait un changement au niveau du système des relations de travail parce
que tout le monde l'avait admis, au Sommet, qu'on ne s'en allait nulle
part.
Alors, l'objectif, c'était d'obtenir des changements. Ce qu'on a
fait, c'est qu'on s'est entendus avec le monde patronal et syndical. Il faut
dire, à ce moment-là, aussi, que l'AECQ ne voulait pas que le
secteur résidentiel soit plus que du bungalow. Pour nous, c'était
d'être capables de dire: Le secteur de l'habitation, il faut qu'il soit
reconnu avant qu'il ne se passe quelque chose d'autre. L'AECQ a reconnu, et les
autres aussi, que le secteur de l'habitation c'était au moins six
étages. C'était une formule de compromis. Sauf qu'on doit vous
dire que c'est clair que, quand on a vu le projet de loi, on était
d'accord, évidemment, avec la réglementation telle qu'elle
était présentée, parce que c'est toujours ça qu'on
a voulu.
M. Marcil: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Beaudoin-Rousseau. M. le
député de Vimont, s'il vous plaît.
M. Fradet: Merci, M. le Président. M. Beaudoin-Rousseau,
il y a une chose qui est très importante dans te projet de loi actuel,
dans la déréglementation du huit logements et moins, c'est la
protection du consommateur. Comment allez-vous vous assurer, en tant
qu'association patronale, que le produit que le consommateur va acquérir
est un produit de qualité, avec toutes les garanties possibles?
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): Je pense que c'est relativement
clair d'ailleurs, j'ai toujours expliqué ça à nos
entrepreneurs, lorsque j'ai fait la tournée, dernièrement
que le projet de loi 142 doit aussi se lire à la lumière de ce
qui existe actuellement, c'est-à-dire en termes de législation.
Il existe évidemment la loi 186, et la loi est très claire
là-dessus, c'est qu'elle donne des pouvoirs de réglementer, de
façon à obliger éventuellement l'entreprise de
construction à fournir des garanties. Alors, ces garanties seraient
supervisées, entre guillemets, par la Régie du bâtiment.
Mais plus loin, elle pourrait et elle peut, via une
réglementation être capable de dire à l'avenir...
Puis, les compagnies prêteuses, si c'est marqué dans une
réglementation et encore plus, dans une loi devront
s'organiser pour faire en sorte de contrôler que les hypothèques
qui vont sortir sur les unités résidentielles comportent une
garantie. Or, qui peut obtenir des garanties, si ce n'est les entrepreneurs?
Point à la ligne. Personne d'autre ne peut obtenir de garantie pour
l'offrir aussi aux consommateurs.
Il y a aussi toute la question du Code civil. D'ailleurs, mon
confrère pourrait en parler. Mais, avant tout, le projet de loi 186,
c'est-à-dire la loi 186, elle est là. Il s'agit tout simplement
de mettre ça en application, et ce n'est pas sorcier. Le travail au
noir, il va revenir au blanc.
Ça ne règle pas, par contre, le problème ou le
phénomène de l'autoconstruction. Ça, d'ailleurs,
François Bernier pourrait vous en parler, parce que le
phénomène de l'autoconstruction est peut-être encore pas
mal plus important que le travail au noir qui se fait ou, c'est-à-dire,
les gamiques qu'il y a entre entrepreneurs et salariés. Puis ça,
je pense qu'on n'a pas besoin de se le cacher. On connaît la question des
banques d'heures, etc.
Mais, pour vous dire que, le 186, s'il était appliqué, il
n'y aurait pas de problème au niveau de la qualité des travaux.
Il y a aussi la protection du consommateur quant à ses
dépôts, aux défauts de structure, aux vices cachés.
Contrairement à ce que les gens disent, au Québec, il se
construit des cabanes qui sont solides, puis elles sont bien faites.
M. Fradet: Alors, ce que vous me dites, c'est tout à fait
le contraire de ceux et celles qui prétendent qu'en
déréglementant les consommateurs n'auront plus accès
à un produit de qualité et que ce sont les
«chaudrons», entre guillemets, qui vont construire ces
résidences-là. Vous, ce que vous dites, c'est que l'entrepreneur
sera responsable de son produit, qu'il aura une
assurance et des garanties à donner. Selon vous, l'entrepreneur
va engager des travailleurs compétents pour, justement, promouvoir la
garantie et assurer la garantie au consommateur qui achètera sa
propriété.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Écoutez, si, demain matin,
pour opérer dans l'industrie de la construction, ça prend la
licence d'entrepreneur... Puis, d'ailleurs, ça la prend. Si, en plus, on
met comme condition, pour l'obtention de sa licence, l'obligation de
détenir...
M. Fradet: Un plan de garantie.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): ...un plan de garantie ou un
cautionnement... Il va y en avoir de toutes les sortes, tout à l'heure.
Mais, en autant qu'il rencontre ses obligations, je ne vois pas comment
l'entrepreneur pourrait prendre les risques d'engager et de faire de la
cochonnerie, parce que, dans le fond, demain matin, il ne pourrait plus
opérer, sa licence lui serait enlevée. D'autre part, il n'y a pas
un programme de garantie ou une caution qui garderait une entreprise de
construction qui lui créerait des problèmes.
Mais il y a une autre question, je pense, qui est en haut de tout
ça. Il ne faut pas croire que les entrepreneurs, demain matin, vont
prendre leur main-d'oeuvre et qu'ils vont la traiter comme, enfin, rien. Les
entrepreneurs en construction sont conscients des salariés qu'ils ont
actuellement à leur emploi, qui sont compétents, puis ils vont
continuer à bien les traiter. C'est clair, ils en ont besoin, mais c'est
aussi une garantie pour la qualité des travaux. En tout cas, à
moins qu'on prenne les entrepreneurs pour des imbéciles...
Je ne parle pas, évidemment, de ceux qui seront au noir ou des
salariés qui s'improvisent entrepreneurs une fois de temps en temps,
puis qui font, justement, le phénomène de l'autoconstruction. Je
parle des entreprises dans la construction qui ont une place d'affaires au
Québec.
Comme pour mon président, c'est clair. N'importe quand, vous
pouvez aller sur son chantier. Vous pouvez aller vérifier la
qualité de ses travaux. Ça, évidemment, c'est pour
à peu près la grande majorité des entreprises de
construction. Alors, moi, demain matin, ma crainte, je ne l'ai pas au niveau de
la qualité.
M. Fradet: Je vous remercie, M. le Président. Je vous
remercie aussi. Je pense que c'est important, et je vous le rappellerai en
temps et lieu si ce que vous venez de dire ne s'applique pas. Ce qui est
important, bien entendu, c'est de protéger les travailleurs et les
entrepreneurs, mais il y a davantage: d'abord et avant tout, les consommateurs
qui seront acheteurs de ces produits-là. Je pense que vous m'avez
rassuré à ce point de vue là. Je vous remercie, M. le
Président.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Oui. Je veux juste ajouter une
petite note. D'ailleurs, tout le monde était au courant que,
dernièrement, il y a eu des cas où l'entrepreneur a eu des
difficultés. Les programmes de garantie étaient là,
c'est-à-dire qu'on a ramassé le paquet, réparé les
travaux ou remboursé les dépôts, etc. Donc, il n'y a pas de
crainte à ce niveau-là.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup. Je vais
maintenant reconnaître M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Depuis le
dépôt de la loi 142, puis ce qui a précédé,
on a bien compris que, d'une part, le ministre de l'Industrie et du Commerce
était l'homme, avec sa lanterne, qui cherchait, qui voulait des
solutions. Le ministre du Travail, par tout son comportement, était la
personne qui voulait être le Salomon dans le dossier. Il a voulu tout
régler. (15 h 50) puis, quand on vous a écouté, depuis le
début, l'apchq semble, en tout cas, à mes yeux, le grand
défenseur du consommateur. comme trame de fond de vos prises de
position, ça a toujours été le consommateur qui a
été mis en évidence, en disant: ça va faire une
économie. ça va nous permettre de mieux aller. souvent, le
québec se compare avec les autres provinces pour les coûts, les
coûts comparables avec d'autres provinces. on sait, nous autres, que le
dossier de la construction... ottawa par rapport à gatineau, un à
côté de l'autre, c'est 30 % inférieur pour une maison.
donc, on ne peut pas dire que le québec n'est pas compétitif.
toronto et montréal: toronto, 250 000 $ pour une maison moyenne;
montréal, 130 000 $. encore là, il me semble qu'on est
compétitif. là, il n'y a plus de compétition, on est
à l'intérieur de nos murs.
Donc, vous nous dites que le coût de la construction va baisser de
3000 $. Moi, je fais une analyse assez rapide. Si la construction moyenne au
Québec est d'environ 100 000 $, 125 000 $ et que le coût de la
main-d'oeuvre est de 20 000 $... C'est-à-dire que le coût de la
main-d'oeuvre, c'est 20 %. Pas 20 000 $, ce n'est pas pareil. À
l'intérieur du coût de la maison, on inclut le coût des
terrains et le coût des matériaux. Vous n'avez pas de
contrôle sur le coût des matériaux, vous les achetez comme
tout le monde au magasin. Les services, vous n'avez pas de contrôle non
plus, c'est la municipalité, normalement, qui le fait. Les services
professionnels non plus, vous n'avez pas de contrôle. Les frais de
notaire, les frais d'arpentage, tout ça, ce n'est pas vous autres qui
contrôlez ça; les taxes municipales, non plus; les permis, non
plus. Les profits de vos entrepreneurs, je ne pense pas que vous alliez
jusqu'à ouvrir leurs livres pour voir ce qu'ils font. Il nous reste un
item sur lequel votre prétention, à mon point de vue, se base:
c'est sur les 30 000 $ ou le 20 % des coûts de la construction. Donc,
c'est l'employé qui va construire la maison.
Sur quoi vous vous basez pour être sûrs que cette baisse de
coûts... Parce que ça va se répercuter, hein. Je l'ai
calculé. C'est facile, c'est 20 % du coût de la
main-d'oeuvre qui va baisser. C'est ça que vous demandez,
là, si ça baisse de 3000 $. Est-ce que vous êtes capables
de me garantir, en votre âme et conscience, que le montant qui va
être économisé, ça va être le consommateur qui
va le recevoir? Est-ce que vous êtes capables de me dire, par le fait
même, que les gens, ils n'auront plus à payer, eux autres... Ils
vont payer leurs impôts, et il n'y aura plus de travail au noir?
Moi, j'aimerais ça que vous soyez capables de me prouver
ça. Là, il me semble qu'il y a juste vous autres qui vous
êtes avancés très fort là-dessus. Il me semble que
ça demande des explications.
Le Président (M. Joly): M. Bolduc, s'il vous
plaît.
M. Bolduc (Alain): Très bien. Nous allons répondre
en deux temps. Je vais laisser François répondre en premier.
Ensuite, je vous répondrai pour la deuxième partie de votre
question.
Le Président (M. Joly): M. Bernier.
M. Bernier (François): Moi, je vais vous offrir la
réponse théorique. Lui, il va vous offrir la réponse
pratique. Mais c'est la même. C'est que, dans le contexte
économique actuel, il nous semble, en tout cas, vraiment difficile
d'imaginer que quelqu'un qui est là et qui essaie de vendre des maisons
empoche l'économie réalisée parce qu'il a mieux
organisé le travail de ses opérations, que cette
personne-là, dans le contexte économique actuel, va l'empocher.
Ça nous semble curieux" d'imaginer ce scénario-là, parce
que son voisin, plus habile peut-être ou plus avisé, va clairement
essayer de la transférer au consommateur. Il va être moins cher,
il va être en meilleure position pour vendre sa maison. C'est tellement
compétitif. Alors qu'une économie nous tombe... ou, en tout cas,
qu'une économie gagnée par une réorganisation du travail
est là, comment pourrait-on imaginer qu'elle ne soit pas
transférée au consommateur, ce matin?
M. Dufour: Si je comprends bien, vous êtes en train de me
dire que la réorganisation du travail peut occasionner des
économies au consommateur. Ce n'est pas le coût des salaires qui
sont payés.
La rénovation. Vous étiez sûrement prêts, et
vous deviez avoir un bon lobby aussi, pour faire baisser les coûts de la
rénovation, pour enlever ça du décret. Est-ce que
ça a baissé, le coût de la rénovation?
Extérieurement, les gens qui font des rénovations, à ce
que je sache, ils paient encore le prix. Il y a des fuites en quelque part. Ils
ne l'ont pas. Est-ce que c'est le consommateur qui en profite?
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Écoutez, sur la
rénovation, je vous répondrai ceci. Lorsque le gouvernement a
décidé d'exclure la rénovation, par rapport à un
propriétaire occupant, de la Loi sur les relations du travail, ce n'est
pas parce qu'il n'y avait pas de travail au noir; c'est parce qu'il y en avait
du travail au noir. Le travail au noir, c'était quoi? C'était le
problème du système qui était trop rigide. Il n'avait pas
de flexibilité. Pourquoi, aujourd'hui, d'ailleurs, on fait ça, le
projet de loi 142? Parce que le régime n'a pas de flexibilité et
parce qu'on a développé le travail au noir. À un moment
donné, si, évidemment, on est capable d'arriver avec un
système qui est souple, qui permet aussi à l'entreprise de
construction de compétitionner justement le travail au noir, celui qui
fait des travaux à 25 $ et 30 $ de l'heure, et même en bas de
ça, si on est capable de permettre à l'entrepreneur d'avoir des
gangs d'hommes qui travaillent un nombre d'heures par année à des
salaires décents et avec des bénéfices et qu'il est
capable aussi, dans le fond, de le compétitionner, ce travail au noir,
j'imagine que, nous autres, on va récupérer un certain
marché, mais aussi on va s'ajuster à la capacité de payer
du consommateur. Actuellement, le système dans lequel on est,
l'entrepreneur n'est pas capable de s'ajuster à la rénovation,
qui n'est pas assujettie, parce qu'il est pris dans une structure de
décret, etc.
M. Dufour: Moi, je pense que la souplesse que vous
réclamez est difficile à accorder. Puis, tout en voyant ce qui se
passe sur le terrain, je doute que ça puisse donner les résultats
que vous escomptez. Moi, j'y crois difficilement, parce que, dans le fond, s'il
y a moins de travail aujourd'hui, un, il faut toujours bien regarder ce qui se
passe autour de nous. La démographie, les gens, il y en a moins qui
arrivent sur le marché. Il n'y a pas d'argent. Les gens ne travaillent
pas. Comment est-ce que vous voulez qu'ils aillent se faire bâtir? On ne
peut pas entrer ça dans la gorge au monde, des bâtisses! Il faut
qu'ils aient de l'argent pour payer. Il faut avoir un salaire pour acheter une
maison.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Oui, mais ça...
Évidemment, si la demande est moins forte, pensez-vous que les
entrepreneurs vont être capables de charger un prix incroyable?
M. Dufour: Non.
M. Beaudoin-Rousseau (Orner):non. puis, d'autre part, il faudrait
regarder que le marché actuel de la rénovation prend de plus en
plus de place. c'est aux environs de... françois pourra y aller
là-dessus, mais je pense que c'est aux environs de 40 %, 45 % de tout le
pnb de l'habitation, alors qu'il y a quelques années on était
peut-être à 20 %, 25 %. les maisons, quand elles commencent
à vouloir se délabrer, tu n'as pas le choix, il faut que tu les
rénoves. dans le fond, tu es propriétaire, il faut que tu la
protèges. or, c'est très évident que le consommateur va
continuer à rechercher un prix pour sa rénovation. alors,
qu'est-ce qui va arriver? il va chercher un prix qui est abordable. si on
laisse l'entreprise de construction être capable de compétitionner
le travail au noir, elle va s'ajuster et elle va être capable de
travailler et de récupérer le travail au noir.
M. Dufour: Vous savez, M. Rousseau, je ne suis pas un
entrepreneur, mais il me semble que, le gros bon sens, il est là. Vous
nous dites: Ça va baisser le coût de la construction. Vous dites
que la loi 186 va valoriser l'entrepreneur. Je veux juste revenir au
mémoire que la CCQ nous a présenté, la Commission de la
construction du Québec, hier: «Un mot concernant la qualification
professionnelle des employeurs. La Commission vérifie actuellement la
détention des licences d'entrepreneur délivrées par la
Régie du bâtiment du Québec sur les chantiers de
construction. En 1992, nous avons signalé à la Régie du
bâtiment du Québec quelque 6200 constats d'infraction. Comme la
CCQ...» Elle ne serait plus là, parce que c'est
déréglementé. Qui va régler vos licences de
contracteur? Qui va aller surveiller? C'est basé sur des faits,
ça. C'est plus de 30 plaintes par jour de travail.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): Oui, sauf que je n'ai pas
regardé de quel genre de plaintes il s'agit. Il faudrait peut-être
les catégoriser. C'est comme le système sur la route. À un
moment donné, tu as l'infraction; ça te coûte, je ne sais
pas trop quoi, 25 $, 50 $. Tu n'as pas tué quelqu'un. C'est une autre
paire de manches. Alors, je pense qu'il faudrait peut-être regarder
ça. Moi, avoir 6000 plaintes dans les airs et essayer de savoir,
mettons... Oui, aïe, c'est effrayant! Peut-être que c'est 6000
plaintes et qu'il y en a peut-être 5500 que c'est des grenailles, des
niaiseries. Je ne sais pas, je ne peux pas vous le dire.
M. Crochetière (Serge): II y a d'autres moyens aussi qui
seraient peut-être plus adéquats. Justement, si, même avec
la CCQ, vous avez au-delà de 6000 plaintes par année, c'est que
l'inspection de la CCQ est plus ou moins efficace.
Par ailleurs, dans le projet de loi 186, vous avez des dispositions qui
font en sorte que la Régie du bâtiment pourrait avoir des ententes
pour transférer des pouvoirs aux municipalités. Là, le
contrôle se ferait directement. Pas de licence, pas dé permis.
Vous n'auriez pas besoin d'avoir 200 inspecteurs. Vous pourriez avoir des gens
qui construiraient illégalement sans permis? C'est très rare.
Aujourd'hui vous le savez mieux que moi, vous venez du monde municipal
il y a très peu de construction sans permis. Je ne parle pas de
la rénovation dans un sous-sol, je parle du vrai bâtiment qui se
monte. Il n'y en a à peu près plus. C'est vérifié
par les services municipaux. Si cette mesure-là était
appliquée, bien, la CCQ n'aurait plus besoin de vérifier. Est-ce
que vous vérifiez s'il a effectivement, celui qui est sur les lieux, la
sous-catégorie adéquate? Mais la CCQ ne pourra pas
vérifier ça. Même aujourd'hui, elle ne peut pas le faire.
(16 heures)
M. Dufour: Ça fait qu'avant de conclure, M. le
Président, ou de passer la parole à mon collègue de
Joliette, je voudrais juste me permettre de vous dire, en tout cas, à
l'APCHQ, que je doute beaucoup de l'assertion que vous faites à l'effet
que le coût des maisons baisserait entre 3000 $ et 4000 $. Si ça
arrivait, ce fait-là, c'est qu'il y a des employés qui seraient
lésés. Il y aurait des employés qui en paieraient le prix.
On n'a pas le droit de bâtir une société, à mon
point de vue, au détriment d'une bonne partie de nos gens et de notre
société, parce qu'on s'appauvrit collectivement. À mon
point de vue, à ce moment-là, je trouve que ce sont des chiffres,
ce sont des assertions que vous faites, des affirmations qui ne sont pas
appuyées par des faits précis. Donc, je mets ça en doute,
d'autant plus que, nous, on sait qu'il y a des travaux qui se font à 49
$ de l'heure et que les gens sont payés 10 $ de l'heure. Donc, à
ce moment-ci, ce n'est pas les formules que vous proposez, qui sont de
nature... qui font plaisir à entendre à beaucoup de monde, mais
qui, dans les faits, ne se concrétiseront pas et ne se
réaliseront pas.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): Moi, en tout cas, j'ai juste un
premier élément de réponse, et Serge continuera
après. Je pense que tout ce sur quoi vous vous basez, c'est toujours au
regard, évidemment, de la question salaire. Je pense qu'il y a autre
chose dans une convention collective qu'une question de salaire. Il y a,
évidemment, quand on déréglemente, une question de
polyvalence qui peut s'appliquer, la question des ratios des apprentis et,
aussi, quand on considère que, dans le fond, on est obligé de
payer peut-être quelqu'un à 16 $ pour ramasser les bouts de bois
et les roches à côté, sur le bord d'un solage, alors que,
normalement quelqu'un pourrait te le faire facilement à 10 $ ou 12 $, et
il se trouverait bel et bien payé. J'imagine qu'il va y avoir des
économies de coûts, ici et là, à quelque part.
Alors, je pense qu'il ne faudrait pas dire que, demain matin, on se base
sur la question du salaire, à proprement parler, pour être capable
de simplement justifier qu'on pense qu'il peut y avoir une économie de
3000 $ à 4000 $ par unité résidentielle.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Rousseau. M. le
député de Joliette, s'il vous plaît.
M. Chevrette: J'ai lu le mémoire très
sérieusement et très attentivement et je voudrais attirer votre
attention, les parlementaires, à la page 13 du mémoire, où
M. Rousseau et son groupe parlent du rapport Sco-wen, qui dit ceci: «La
construction résidentielle de structure légère dans les
zones métropolitaines de Montréal et de Québec et toute la
construction de bâtiments de structure légère dans le reste
du Québec.»
C'est bien beau citer une phrase, mais il faudrait citer Scowen au
complet. Et la phrase, immédiatement après le bout que vous avez
signé, se lit comme suit: «Une telle recommandation ne peut
être mise en oeuvre ne peut être mise en oeuvre avant
que différentes modalités soient prévues.» Et, dans
les modalités, M. Scowen, qui demande la déréglementation,
dit ceci:
Le ministre du Travail devrait élaborer «les
modalités d'application du Code du travail aux travailleurs du secteur
résidentiel de la construction et à leurs syndicats,
particulièrement quant aux règles d'accréditation et de la
représentativité syndicale». À ce que je sache, le
ministre n'a pas déposé encore, conformément au rapport
Scowen, avant de déréglementer, des modifications au Code du
travail pour les travailleurs du résidentiel dans la construction.
Et il continue, M. Scowen quant à le citer, c'est
intéressant. À la page 181 du rapport Scowen, M. Scowen dit ceci:
«Que le ministre du Travail élabore des modalités
spécifiques d'application de la Loi sur les normes du travail aux
travailleurs du secteur résidentiel, en particulier quant aux heures de
travail, aux vacances annuelles, aux congés fériés et
à toutes les questions relatives à la mise à pied ou au
licenciement.» Ça, c'est avant de déréglementer, M.
Rousseau; M. Scowen dit ça. Et il continue, M. Rousseau. M. Scowen
ajoute: «Qu'en matière d'avantages sociaux, spécialement
pour le régime de retraite, le ministre du Travail prévoie les
modalités qui assureront le respect des droits acquis des travailleurs
visés par le changement de régime et que ceux-ci puissent, si
possible, y poursuivre leur participation sur une base volontaire ou
organisée par convention collective.» Ça fait beaucoup de
conditions, ça, M. Rousseau. Et on lit, à la page 184, toujours
dans le rapport Scowen, et toujours en fonction de la
déréglementation, qu'on ne retrouve pas dans le projet de loi
142: «Que soit abrogée l'obligation de la licence pour les
entreprises de construction résidentielle et autres entreprises de
construction de bâtiments de structure légère, au sens
défini plus haut.»
Quand on cite quelqu'un, il faut avoir la rigueur de dire exactement ce
qui est proposé. Et, dans la loi 142, est-ce que vous pouvez me dire, M.
Rousseau, si la déréglementation proposée rejoint le
rapport Scowen?
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Je vais laisser Serge
répondre là-dessus.
Le Président (M. Joly): M. Crochetière, s'il vous
plaît.
M. Crochetière (Serge): Juste pour répondre
à votre question. À l'époque, on a endossé
intégralement le rapport Scowen. Le projet de loi 142, sur lequel on a
à se prononcer aujourd'hui, quant à nous, reçoit
également notre accord. La question que vous nous posez contient sa
réponse: II n'y a pas d'autres modifications, et, malgré tout,
oui, nous sommes d'accord avec le projet de loi 142.
M. Chevrette: Donc, malgré qu'il n'y ait aucune
modification, si le rapport Scowen, à l'époque, prenait autant de
précautions avant de déréglementer,
précisément en sauvegardant les droits de ceux dont vous avez
l'air de vous fouter, de préserver, là, vous autres... Il y a des
travailleurs dans ça, il y a du monde qui a de l'argent, dans ça,
d'investi, il y a du monde qui a le droit à des vacances, il y a du
monde qui a le droit à des congés fériés. Comment
pouvez-vous, très correctement, là, ne pas souscrire à des
modalités au moins de protection minimale, que même le
gouvernement avait la précaution de prendre qu'il ne prend plus
dans son projet de loi 142 au moment où la grande vague de
déréglementation était en vogue et faisait partie
d'à peu près tous les discours gouvernementaux? Comment
pouvez-vous soutenir ça vis-à-vis du monde qui vous servent bien,
quand même, vous autres?
M. Crochetière (Serge): Deux choses. Dans un premier
temps, vous nous demandez de soutenir ou de discuter d'une proposition qu'on ne
nous a pas soumise. D'accord? Par ailleurs, vous dites qu'on se fiche de nos
travailleurs. Au dernier congrès celui qu'il vient d'y avoir
dernièrement nos entrepreneurs, en congrès, ont
demandé à ce qu'on étudie des programmes d'avantages
sociaux privés pour nos travailleurs, parce qu'on pense qu'ils vont
être aussi contraints à en fournir à leurs travailleurs.
Ils ne s'en fichent pas, M. Chevrette. Et, comme il n'y a...
M. Chevrette: Est-ce que vous l'avez mis dans le
mémoire?
M. Crochetière (Serge): Je m'excuse. Comme il n'y a pas
d'autres mesures, justement, on est à étudier des
possibilités d'en créer.
M. Chevrette: O.K. Là, vous seriez prêts à
mettre certains avantages.
M. Crochetière (Serge): Absolument.
M. Chevrette: Mais, vous vous êtes assis... Je sais que
vous avez répondu au député de Salaberry-Soulanges que
vous ne connaissiez pas le contenu d'une éventuelle loi, mais vous
n'avez pas hésité à signer un document qui reconnaissait
une certaine forme de réglementation, en autant que vous aviez une table
sectorielle. Vous convenez de ça?
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Allez-y, oui.
M. Chevrette: Vous reconnaissez donc que vous en avez eu plus que
le client en demande, par le projet de loi 142.
M. Beaudoin-Rousseau (Omer): Nous, ce que l'on voulait
protéger en tout cas, au départ c'est que,
déjà, avec les propositions qui étaient sur la table au
Sommet, on faisait déjà un pas dans le sens de la
déréglementation, parce qu'il faut tenir en parallèle,
aussi, que la négociation ne donnait rien. Donc, on pouvait,
évidemment, dans un premier temps, être capable d'arracher quelque
chose.
Secondairement, quand j'avais aussi... Les autres
associations disaient: Le secteur résidentiel, c'est du bungalow,
il n'y a rien d'autre. Je pense que l'enjeu était fort important. Et
j'avais, moi, pour le secteur à défendre, à m'organiser
pour que les gens signent et reconnaissent, évidemment, un secteur
d'habitation qui a, au moins, une certaine caractéristique d'habitation,
et non pas strictement du bungalow.
M. Chevrette: Donc, si le ministre, demain matin, disait: Compte
tenu de l'ampleur qu'a pris tout le débat, je vais me rendre aux papiers
signés par l'APCHQ, par le Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction, par la FTQ, que diriez-vous?
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Je dirais, dans le fond, que le
projet de loi 142 est sur la table, et tous les entrepreneurs, d'ailleurs
en tout cas, pour ceux qu'on a rencontrés, et c'est à peu
près 1000 depuis le dépôt du projet de loi ont dit
oui au projet de loi 142. Alors, je n'aurais pas d'autre chose que de dire oui
au 142, parce que je suis aussi tenu par une résolution du
congrès qui a eu lieu en octobre dernier 18, 19 qui
disait: À défaut d'obtenir des conditions de travail
particulières, s'il vous plaît, sortez-nous du décret.
M. Chevrette: M. le Président, moi...
M. Beaudoin-Rousseau (Orner): Puis, dans le cadre du
congrès, ils ont dit oui au 142.
M. Chevrette: Moi, M. le Président, mes propos vont aller
au ministre. Je sais qu'il profitera peut-être d'un autre moment pour me
répondre. Mais, je trouve ça très sérieux, moi, que
le champion ou le père de la déréglementation, pour le
gouvernement libéral, n'ait même pas respecté, dans son
processus, en ce qui regarde la construction... Et ça, c'est très
sérieux. On parle de 25 000, 30 000 travailleurs, et peut-être
plus, à qui on ne prévoit pas des conditions minimales, comme l'a
dit et l'exigeait Scowen, on ne prévoit aucun amendement au Code du
travail, au niveau de l'accréditation, on ne prévoit aucun mode
de licenciement ou de congédiement, comme l'exigeait le rapport
Scowen.
Moi, je veux savoir du ministre s'il est prêt, comme ministre du
Travail, à prendre l'engagement de respecter le processus proposé
par Scowen, tout au moins. Parce que, là, vous faites fi de cela
complètement. Et, moi, je n'ai aucune honte, j'ai même une
fierté à vous dire que je suis prêt à tout faire
pour qu'on donne le minimum à ces hommes qui ont oeuvré 20, 25
ans. Ce n'est pas chercher à faire de la politique, ça. C'est
votre propre groupe, votre propre père de la
déréglementation qui vous recommande un processus civilisé
dans ces relations de travail, dans le résidentiel très
spécifiquement, et qui fait face à un groupe qui était
prêt à aller plus loin que le projet de loi 142, puisque M.
Rousseau a apposé sa signature dans un document où il acceptait
de maintenir une réglementation.
Vous ne réservez rien pour ce monde-là, n'amendez pas le
Code, n'amendez pas les normes, vous ne prévoyez rien. À mon
point de vue, c'est une erreur monumentale que vous faites, dans une industrie
aussi fragile qu'est l'industrie de la construction. Et, moi, je vous dis,
personnellement, qu'il est toujours temps pour bien faire. Ce n'est pas encore
fini, cette discussion-là sur le projet de loi, et vous devriez, au
moins, être cohérents et conséquents avec ce que vos
propres membres vous ont recommandé, vos propres partisans, vos propres
députés. Il me semble que c'est ne pas respecter ce que,
vous-mêmes, vous avez prêché. C'est une forme de
mépris vis-à-vis des salariés de la construction. (16 h
10)
Le Président (M. Joly): Je vous remercie, M. le
député de Joliette. M. le député de Drummond, s'il
vous plaît.
M. St-Roch: Merci, M. le Président. Vous allez comprendre
que j'aurais mille et une questions à vous poser, mais, dans le peu de
temps qui m'est imparti, je suis heureux de voir M. le ministre de l'Industrie
et du Commerce ici, parce que je partage une conviction profonde avec lui,
qu'on est dans un monde où il faut être à la recherche de
l'excellence et de bien faire à tout coup, du premier coup. Le tout se
doit d'être basé sur des qualifications. or, à ma grande
surprise, je reprends vos paroles, m. rousseau, lorsque vous dites: je suis
d'accord avec 142, donc vous êtes d'accord à ce qu'il n'y ait pas
de cartes de compétence d'entrées dans le secteur
résidentiel. et je vais citer, là... j'ai déploré
aussi, m. le président, hier, d'entrée de jeu, qu'on n'ait pas de
perspective globale au niveau du vieillissement de la population au niveau de
nos travailleurs du secteur de la construction, ainsi que de leurs
qualifications. alors, je vais me rabattre sur les chiffres de l'acq, qui dit,
et je cite textuellement, m. le président: «nous vivons un taux
catastrophi-quement élevé d'analphabétisation. les
chiffres font frémir: 14 % des travailleurs sont analphabètes, 37
% sont en dessous des compétences du milieu.»
Alors, lorsqu'on demande pour aucune carte de compétence, et
lorsqu'on se bat, ici, en tant que parlementaires, pour faire en sorte que les
47 % ou 48 % de décrocheurs que nous avons dans nos écoles
puissent avoir au moins un secondaire... Lorsqu'on ôte la carte de
compétence, on ôte cette qualité. Et, lorsque je regarde,
moi, les analyses qui ont été faites au niveau des grappes de
l'industrie, où est-ce qu'on déplore le manque de recherche et de
développement, lorsqu'on déplore le manque d'innovation
technologique, et lorsqu'on essaie de projeter dans le temps la construction de
demain, lorsqu'on parle de robotique, de domotique, et nommez-les, eh bien,
à ce moment-là, on va faire face à une pénurie de
travailleurs qui n'auront pas leur carte de compétence, qui auront
appris sur le tas. Et c'est ce que je déplore, moi, dans cette partie du
projet de loi, à ce moment-ci, M. le Président: c'est le retrait
de la carte de compétence. Parce que, pour moi, c'est la clé du
futur.
Et, lorsqu'on parle de non-compétence, avec le taux de
décrocheurs, et quand on connaît un peu l'industrie, on sait que
la plupart de nos décrocheurs, sans compétence, vont aller dans
votre domaine, si on déréglemente le résidentiel, sans
carte de compétence. On est en train de fabriquer une deuxième
classe de citoyens, des citoyens qui seront à la merci du secteur de la
construction et qui n'auront aucune chance d'aller travailler dans la
construction plus élevée parce qu'ils n'auront pas cette
carte-là; à moins, plus tard, lorsqu'ils auront vieilli un peu,
d'aller chercher ce certificat-là. Alors, moi, je pense, pour le
bienfait de l'industrie aussi...
Et je peux comprendre, à court terme, une vision à
très court terme, un contracteur qui dit: Bien, quand je regarde, moi,
et que je circule dans mon milieu, bien oui, il y a encore une main-d'oeuvre
qualifiée qui a des cheveux blancs, qui a entre 45 et la cinquantaine.
Mais, lorsque j'essaie de projeter votre industrie, par contre, dans 10 ans
d'ici, dans IS ans d'ici, si on laisse aller les cartes de compétence,
on aura des gens qui auront appris sur le tas. Alors, si on veut fabriquer deux
classes de main-d'oeuvre, une main-d'oeuvre à bon marché,
ôtons-leur leur carte de compétence, parce qu'ils iront... Et vous
allez m'expliquer comment est-ce que ces gens-là pourront penser, dans
le futur, avec le projet de loi tel qu'il est là, avec trois niveaux,
aller travailler dans le secteur institutionnel, ou industriel, ou dans le
secteur des grands travaux s'ils n'ont pas leur carte de compétence.
Parce que, tel qu'on comprend le projet de loi, ça, ça va
être un acquis.
Le Président (M. Joly): M. Crochetière, s'il vous
plaît.
M. Crochetière (Serge): Oui. D'une part, tantôt,
dans mon bref exposé, je vous ai dit que, justement, tout le
découpage de l'apprentissage des métiers était fait en
fonction des chantiers institutionnels et commerciaux et qu'on le regrettait.
On décrie cette situation-là. Ce que vous nous proposez, c'est de
la maintenir. Ce n'est pas adéquat. Vous allez maintenir, encore une
fois, une main-d'oeuvre qui n'arrive jamais à se qualifier.
Si vous lisez notre mémoire, par ailleurs, on a fait le
parallèle avec d'autres provinces, avec d'autres régions. Il y en
a, de la qualification, et on est prêt à l'accepter. Il y a des
examens qui se passent, aussi. Il y a des entrepreneurs et des employeurs qui
s'engagent à donner des nombres d'heures, à faire
vérifier. Il y a des examens qui sont passés et il y a des sceaux
de compétence, le sceau rouge, aussi, qui est reconnu à travers
le pays, qui existe, et c'est à ça qu'on réfère. On
n'est pas des imbéciles. Nos entrepreneurs n'ont pas l'intention de
faire construire des maisons par des gens incompétents.
Vous dites que, pour le moment, il n'y a pas de problème, et
c'est un fait. On a une main-d'oeuvre compétente et on dit qu'on veut la
garder. On veut aussi travailler à la mise en place d'un
mécanisme d'apprentissage, mais qui va être adapté à
nos besoins à nous et à notre réalité
économique à nous. C'est ça qu'on se tue à vous
dire depuis 15 ans, et que vous ne semblez pas vouloir accepter.
Le Président (M. Joly): Merci.
M. St-Roch: La carte de compétence serait maintenue?
M. Crochetière (Serge): Je vous ai dit qu'il y a des
mécanismes de compétence...
M. St-Roch: Parce que vous ne mentionnez seulement que huit
secteurs dans votre mémoire.
M. Crochetière (Serge): ...qui reflètent les
besoins des métiers dans le résidentiel, et non pas essayer de
les calquer de l'institutionnel et du commercial au résidentiel.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Merci. M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Cherry: Bon, rapidement, merci de votre présence, de
votre mémoire, et on va continuer à collaborer ensemble.
Merci.
Le Président (M. Joly): M. Bolduc, à vous et aux
membres de votre groupe, il me fait plaisir de vous remercier d'avoir comparu
devant nous. Merci.
M. Bolduc (Alain): Alors, nous vous remercions. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Je demanderais
maintenant aux gens représentant l'Association des constructeurs de
routes et grands travaux du Québec de bien vouloir prendre place, s'il
vous plaît. S'il vous plaît, j'apprécierais la collaboration
des gens de l'APCHQ, s'il vous plaît, de bien vouloir libérer la
tribune. Mme la députée de Chicoutimi, merci.
Alors, s'il vous plaît, je demanderais aux membres de cette
commission de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.
Il me fait plaisir, messieurs de l'Association des constructeurs de
routes et grands travaux du Québec, de vous accueillir à cette
commission. Je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour livrer
votre mémoire et, par après, les parlementaires auront le
privilège d'échanger avec vous. Alors, M. Brassard,
j'apprécierais si vous pouviez nous présenter les gens qui sont
avec vous, s'il vous plaît.
Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec (ACRGTQ)
M. Brassard (bernard): m. le président, j'ai, à ma
droite, m. richard gagné, vice-président de l'entreprise ebc
construction et vice-président de vacrgtq,
et, à ma gauche, j'ai M. Gabriel Richard, directeur
général.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, la parole
est à vous, M. Brassard.
M. Brassard (Bernard): M. le Président, Mme la
députée de Chicoutimi chère concitoyenne, ça
me fait plaisir messieurs. L'Association des constructeurs de routes et
grands travaux du Québec célébrera son 50e anniversaire
l'an prochain. Elle regroupe maintenant, sur une base volontaire, quelque 500
entreprises de construction et fournisseurs de biens et services oeuvrant dans
le secteur de la voirie et du génie civil, de sorte que nos membres et
leurs prédécesseurs ont construit la plupart des infrastructures
urbaines et municipales du Québec. Son conseil d'administration est
composé de 25 membres provenant de toutes les régions du
Québec et représentant les entrepreneurs de toutes tailles.
Nous vous remercions bien sincèrement de nous accorder la
possibilité de vous présenter notre point de vue sur le projet de
loi 142. Lors de la consultation des 6, 7 et 8 octobre 1993 du ministère
du Travail, à Saint-Hyacinthe, nous l'avons félicité pour
son initiative et l'ampleur du travail accompli afin de solutionner les
problèmes des relations actuelles de travail tout en projetant d'adopter
des mesures pour contrer le travail au noir et relancer notre industrie,
dangereusement malade. (16 h 20)
Nous invoquions que le décret que nous connaissons
présentement résulte des années fastes qui
prévalaient dans le domaine de l'industrie de la construction au cours
des années soixante-dix, alors que des mégaprojets étaient
en chantier, tels qu'autoroutes, métro à Montréal, phase I
de la Baie James, Parc olympique, usines de filtration, etc. Ces années
euphoriques sont révolues. Diminution des travaux, conventions
collectives ne reflétant plus la réalité d'aujourd'hui,
négociations qui nécessitent l'intervention gouvernementale,
surcroît de taxes, contexte économique alarmant, tous ces facteurs
ne contribuent qu'à étouffer la santé financière de
l'entrepreneur et le développement de l'industrie en
général.
Nos interventions durant cette consultation ont donc consisté
à appuyer, en général, les 17 recommandations du
ministère du Travail, et, en particulier, nous acceptions le
découpage de l'industrie en trois secteurs, et nous ajoutions que, selon
une résolution adoptée unanimement par le conseil
d'administration de l'ACRGTQ, les associations sectorielles d'entrepreneurs
devraient se regrouper au sein d'un nouvel organisme qui représenterait
l'industrie québécoise de la construction. Aussi, ce nouvel
organisme, qui pourrait être l'AECQ modifiée, devrait relever des
trois associations sectorielles.
Poursuivant nos démarches et nos réflexions, nous avons
participé au sommet de la construction des 27, 28 et 29 octobre dernier.
Peu de résolutions y ont été adoptées, et encore
moins de consensus. En conséquence, ce qui a fait l'objet de l'accord de
la majorité au deux tiers des représentants est fort
éloquent. Nous vous référons plus spécifiquement au
consensus sur la proposition d'amendement permettant la négociation
d'une seule convention collective, en tenant compte des particularités
sectorielles. Et, à l'occasion de notre discours de clôture
à ce Sommet, nous recommandions au législateur de tenir compte de
la majorité de la partie syndicale ou patronale concernée et qui
devrait avoir le privilège de décider de son avenir, en autant,
bien sûr, que l'intérêt public soit protégé.
Nous ajoutions avoir accepté le principe d'une convention collective
à trois ou quatre secteurs, à partir de l'organisme de
coordination prévu dans la proposition no 2.
Les articles du projet de loi 142 ont été portés
à la considération du conseil d'administration de l'ACRGTQ lors
de la réunion spéciale tenue le 29 novembre dernier. En
général, M. le ministre, l'ACRGTQ vous accorde son appui et le
qualifie d'audacieux et de prometteur pour initier des solutions aux
problèmes des relations actuelles de travail dans notre industrie. Nous
nous limiterons donc à proposer trois amendements, afin que la loi soit
adéquate pour l'atteinte des objectifs des propositions dont nous vous
faisions part en introduction.
Premier amendement. Concernant les quatre conventions collectives
sectorielles correspondant aux secteurs identifiés, soit le
résidentiel, l'institutionnel et le commercial, l'industriel et voirie
et génie civil, nous préconisons une seule convention collective,
qui tiendra compte des particularités sectorielles et d'un tronc
général pour les clauses communes. En conséquence, nous
croyons que les articles 12, 41, 46, 47 et 48, ainsi que les autres
concernés pour des fins de concordance, devraient être
amendés pour prescrire la seule convention que nous
préconisons.
Deuxième amendement. La composition du nouveau conseil
d'administration de l'AECQ, telle que formulée à l'article 94,
serait inappropriée pour empêcher, d'abord, l'émergence
puis l'intensification d'un malaise et d'un désenchantement grandissants
chez les membres des deux corporations qui deviendraient nuisibles à
l'industrie en général. Au lieu, nous proposons un conseil
formé d'un maximum de quatre membres désignés par chacune
de l'APCHQ, de l'ACQ et de l'ACRGTQ, ainsi que d'un maximum de deux membres
désignés par chacune de la CMEQ et la CMMTQ, tous avec droit de
vote. Nous ne pouvons déceler de conséquences néfastes qui
résulteraient de la composition que nous suggérons et nous
croyons que l'article 94 et les autres concernés pour des fins de
concordance devraient être conformément amendés.
Troisième amendement. L'article 40, qui traite de
l'adhésion obligatoire, devrait être modifié pour
préciser que tout employeur est tenu d'adhérer à
l'association sectorielle ou aux associations sectorielles de son champ
d'activité. De plus, et afin de permettre aux associations sectorielles
d'agir dans l'intérêt général de leurs membres pour
contribuer à la correction et à l'amélioration
d'irritants dans notre industrie, la loi devrait comprendre les
dispositions voulues afin que les organismes gouvernementaux,
paragouvernementaux et municipaux puissent indiquer dans leurs appels d'offres
que sont admis à soumissionner et à signer le contrat
échéant, les membres en règle des associations
sectorielles concernées. Nous envisageons particulièrement des
sujets qui touchent au travail au noir, à la qualité des travaux
et à la qualification des entrepreneurs.
Nous désirons maintenant vous formuler une recommandation
spéciale: mobilité des employeurs et des salariés. Dans le
souci de l'équité pour les Québécois, nous croyons
que les articles du projet de loi qui se rapportent à la mobilité
des employeurs et des salariés devraient être sujets à des
ententes de réciprocité avec les autres provinces
participantes.
En concluant, nous vous soumettons respectueusement que nos remarques
visent essentiellement à la bonification du projet de loi 142, que nous
appuyons en général. Nous croyons qu'il est audacieux et
prometteur pour nous initier des solutions aux problèmes des actuelles
relations de travail dans l'industrie de la construction. C'est un grand pas
dans la bonne direction qui était recherché lors du sommet de la
construction des 27, 28, 29 octobre dernier. Mais il y en a d'autres à
faire pour relancer notre industrie et contrer le travail au noir.
Afin de contrer le travail au noir, nous répétons qu'un
moyen efficace serait une modification à la loi de la CSST, une
modification qui, selon les critères de l'assurance-chômage,
ferait en sorte que les indemnisations correspondraient aux primes
versées par l'employeur et par le salarié. Aussi, les deux
seraient incités à déclarer les salaires pour promouvoir
le travail au blanc.
Nous attendons donc des initiatives de la part du ministère du
Travail et nous sommes prêts à coopérer. Vous remerciant
pour votre attention, nous demeurons à votre disposition.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M.
Brassard. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Cherry: Première question, monsieur: Qui
négocierait les secteurs et d'où viendraient les mandats,
basé sur votre proposition qu'il y a ici, là?
M. Brassard (Bernard): En somme, on respecte le projet de loi,
qui veut dire qu'on récupère l'AECQ, et les mandats viendraient
de chacune des associations patronales actuelles.
M. Cherry: Voulez-vous expliciter un peu plus, là? Des
fois, il y a des choses qui sont bien claires dans l'esprit de celui qui les
exprime, mais, pour faciliter la compréhension des gens autour de la
table, voulez-vous y aller un peu plus de temps, s'il vous plaît?
M. Brassard (Bernard): O.K. En somme, le nouveau conseil
d'administration de l'AECQ, si on peut dire, serait formé, de ce qu'on
dit, de 16 membres, dont les trois associations traditionnelles auraient
chacune quatre droits de vote. Ce nouveau conseil d'administration, ni plus ni
moins, récupérerait, comme vous le prévoyez dans la loi,
l'organisme qui est l'AECQ présente et donnerait les mandats pour
négocier la convention collective, et chaque secteur donnerait ses
exigences requises pour qu'elle soit négociée.
M. Cherry: O.K. Bien sûr, il faut réaliser que,
même si vous ne l'aviez pas signé en tant qu'organisme, lors de la
rencontre, deux jours avant la déposition du projet de loi, la
présence de votre organisme pouvait indiquer à celui qui vous
parle qu'il y avait acquiescement. Mais ce que je comprends, en lisant bien
votre mémoire, c'est que l'assemblée de votre conseil
d'administration, qui a suivi, a jugé de prendre la position qui
était présentée dans le mémoire, aujourd'hui.
M. Brassard (Bernard): En somme, M. le ministre, c'est la
position que nous avions prise lors du Sommet et c'est une décision qui
était prise après consultation des gens de l'AECQ, qui nous
garantissent qu'ils peuvent nous négocier une convention collective par
secteur et signer un secteur sans signer l'ensemble de la convention. Alors, M.
Brown nous a garanti que c'était une chose possible.
Alors, c'est une des raisons qui a impliqué M. Gagné, M.
Richard et moi-même, lors du sommet de la construction. Je pense que M.
Brown en parlait, hier, que tout le monde s'était rallié à
cette proposition, même l'ACQ c'était sur la proposition 1
et c'est suite à une discussion que nous avions eue avec l'AECQ,
qui nous disait que c'était une possibilité. Alors, l'ACRGTQ est
consciente qu'une convention peut se signer par secteur.
M. Cherry: O.K. Sans, bien sûr, impliquer les gens qui
constituent votre délégation, aujourd'hui, depuis les trois
années que j'occupe la fonction de ministre du Travail, à de
nombreuses reprises et je l'ai dit, hier j'ai rencontré
des entrepreneurs, et ce, de tous les secteurs d'activité de la
construction, qui se plaignaient de n'être pas adéquatement
représentés par leur organisme, qui est l'AECQ. Et, quand l'AECQ
est venue me rencontrer, avant le dépôt du projet de loi, avec une
vingtaine d'entrepreneurs, on a fait le tour de la table, et je les ai tous
écoutés. Je leur ai dit, en terminant, aux porte-parole, j'ai
dit: Je suis bien content. Depuis trois ans, c'est la première fois que
j'entends véritablement des gens me parler en bien de l'AECQ. Parce que
toutes les rencontres que j'ai eues, là, dans les trois dernières
années, c'était presque tout le temps pour se plaindre. Puis
très souvent, aussi, la réunion se terminait comme ça:
Mais, M. le ministre, la réunion d'aujourd'hui n'a pas eu lieu! Et je
trouvais cela, comme ministre du Travail, extrêmement difficile. Comment
est-ce qu'on fait pour régler des problèmes si on est pour avoir
des conversations qui doivent se terminer comme si elles n'avaient pas eu lieu?
(16 h 30)
Alors, de là, peut-être, des suggestions qui ont
été qualifiées d'audacieuses pour le Sommet. Mais je
souhaitais qu'on en parle entre nous autres, ouvertement, qu'on les mette sur
la table. Bon. Ça n'a pas été aussi loin que ce que je
viens de vous décrire, puis je peux comprendre pourquoi, aussi. Il y a
des difficultés. Il y en a qui ont dit: Ecoutez, moi, je n'ai pas de
problème, là, puis je n'en veux pas. Mais ça ne change
rien au fait que...
Donc, ce que vous dites, c'est que, maintenant que vous avez obtenu
l'assurance que vous pourriez non seulement être
représentés adéquatement au conseil d'administration de
l'AECQ, mais que vous avez maintenant l'assurance que le mandat qu'elle
obtiendrait serait celui que votre organisme lui aurait confié,
là, à ce moment-là, vous vous sentez plus à l'aise
pour, si vous voulez, ajouter au tronc commun et dire que, dans le cas de votre
organisme, vous vous sentiriez à l'aise parce que vous auriez obtenu de
l'AECQ la forme de sécurisation nécessaire par rapport aux
spécificités de vos genres d'activités. J'ai bien
compris?
M. Brassard (Bernard): Je crois que c'est ça, M. le
ministre. Plus que ça, je crois que notre association est consciente
qu'il faut récupérer l'expertise que détient l'AECQ. Dans
l'AECQ, il y a quand même une expertise de relations de travail que je ne
crois pas que l'ACRGTQ détienne.
M. Cherry: Ah! c'est bien sûr. Et ce qui est vrai pour
votre organisme est vrai pour l'ensemble des autres organismes dans la
construction parce qu'à cause de la structure de négociation le
seul organisme patronal au Québec qui possède l'expertise est
l'AECQ, à cause de la nature même... Son mandat est exclusif
à des relations de travail. Donc, bien sûr, se priver de cette
expertise-là, de ces connaissances-là... Il me semble, si
j'étais membre d'une association d'employeurs, que je voudrais mettre le
plus de chances possible de mon bord en m'assurant d'être
représenté par des gens qui ont la connaissance puis la
compétence de ce secteur d'activité économique.
Bien sûr, un des problèmes de l'existence de l'AECQ, c'est
que, dans un premier temps, son existence découle d'une loi, c'est
ça qui l'a créée. Donc, les gens, c'est facile à
dire: On est obligés d'être membres de l'AECQ. Et, dans un
deuxième temps, en restreignant sa raison d'être uniquement aux
relations de travail, qui est peut-être la partie la moins
agréable mais nécessaire dans ce champ d'activité
économique, pardonnez-moi l'expression, mais ils se déguisent en
cible un peu; ils héritent de tout ce qui ne va pas bien puis c'est
toujours de leur faute, puis d'autres organismes se spécialisent dans
d'autres services. Je reconnais qu'ils ont un rôle ingrat puis difficile
à jouer, mais, en même temps, je trouve intéressant
d'entendre des organismes qui disent: Moi, je serais prêt à le
leur confier maintenant que j'ai obtenu l'assurance nécessaire.
Merci.
M. Brassard (Bernard): M. Gagné aurait peut-être
quelque chose à ajouter.
Le Président (M. Joly): M. Gagné, s'il vous
plaît.
M. Gagné (Richard): Bien, je suis d'autant plus d'accord
avec ce que vous dites que j'écoutais, hier, les propos de M. Couillard
qui disait: L'AECQ, c'est certain, c'est le point de mire de tous les
entrepreneurs, c'est le point de mire de toutes les associations patronales. Us
ont à négocier, ils ont eu à négocier, excusez
l'expression, les mains attachées à plusieurs conventions
collectives au nom de plusieurs secteurs d'activité qui sont quand
même relativement disparates. Je pense qu'ils ne pouvaient pas satisfaire
tout le monde.
Comme il faut vous avouer aujourd'hui qu'en tant que
représentants de l'ACRGTQ il y a sûrement des membres de l'ACRGTQ
qui, dans le passé, vous ont dit qu'ils se sont plaints de l'AECQ. On ne
peut pas satisfaire tout le monde. Mais ce qu'on sait, par contre, c'est que,
depuis la création de l'AECQ, traditionnellement, l'ACRGTQ a
été en faveur. Quand l'AECQ a pris un mandat additionnel au
niveau de la santé et de la sécurité, l'ACRGTQ a
été encore pour. Ça fait qu'on se dit: L'AECQ a bâti
quelque chose de quand même important où on est à
l'écoute de nos membres qui ont à se plaindre. On se dit: On va
peut-être être mieux représentés à l'AECQ en
étant avec un conseil d'administration différent. C'est dans ce
sens-là qu'on fait la proposition.
M. Cherry: O.K. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre. M.
le député de Jonquière, s'il vous plaît.
M. Dufour: Oui, M. le Président. C'est évident que
le mémoire qui nous est présenté démontre que
l'association des grands travaux et des grandes routes, là, ils sont
touchés par le projet de loi possiblement à deux endroits parce
qu'ils ne seront pas nécessairement déréglementés
par le fait même qu'ils sont inclus dans le projet de loi. En fait, il y
a la question des conventions collectives. Il semblerait que le ministre serait
peut-être prêt à faire des concessions. Je ne sais pas si je
l'ai bien compris, mais, en tout cas, sur ce point-là, il semblerait que
ça découle du Sommet. Ça ressemble à ce que le
Sommet a décidé, une partie dont le ministre n'a pas tenu compte.
Donc, vous le ramenez sur le droit chemin en disant: Bien, ça serait
peut-être une bonne façon de continuer à oeuvrer ensemble.
Il n'est pas là le ministre. Bon. Je n'ai pas le droit de lui
prêter d'intention. Il y a des collègues qui vont lui dirent.
Il y a quelque chose là-dedans qui, effectivement, nous semble
gros, de vouloir ramener des tables complètement séparées,
lorsque, nous, qui n'avons pas assisté au Sommet, on est bien conscients
que c'était un tronc
commun avec quatre tables sectorielles. Vous autres, vous le ramenez
à trois. Je ne pense pas qu'il y ait d'objection...
M. Brassard (Bernard): Non.
M. Dufour: À quatre, la même chose? Donc, vous
restez...
M. Brassard (Bernard): C'est que dans notre...
M. Dufour: ...vous demeurez complètement sur ce que le
Sommet a recommandé. Ça, avec ça, vous autres, vous seriez
heureux. Mais ça ne vous empêche pas pareil de vous prononcer sur
d'autre chose, parce que vous dites que vous êtes en accord avec le
projet de loi. Vous dites: Avec la déréglementation telle que
proposée, c'est un projet audacieux et on souscrit. Mais ce que je ne
comprends pas, c'est qu'à la page 6 de votre mémoire vous nous
dites «que les organismes gouvernementaux, paragouvernementaux et
municipaux puissent indiquer dans leurs appels d'offres que "sont admis
à soumissionner et à signer, le contrat échéant,
les membres en règle des associations sectorielles
concernées"».
Quand on déréglemente, dans le fond, c'est parce que vous
dites aux gens: Ça ne nous fait rien là, vous êtes libres
dans le champ. Mais, vous autres, vous nous demandez tout de suite, dans le
même souffle vous n'avez pas le temps de respirer ceci: On
devrait être couverts et vous devriez nous réglementer, nous
autres, pour qu'on soit bien protégés. Je vous dis: Attention,
là! On ne peut pas parler des deux côtés de la bouche en
même temps. Moi, j'ai peur de ça quand des gens me disent deux
messages comme ça qui sont contradictoires. J'ai de la difficulté
à l'accepter, connaissant les règles qui sont à l'origine
des contrats ou des soumissions publiques. On peut peut-être le faire,
mais là je vous dis qu'on est contradictoires, nous autres, comme
législateurs, si on suit ça.
M. Brassard (Bernard): M. Dufour, dans ça, c'est un peu
comme la licence. C'est un peu aussi comment je dirais bien pour
éviter peut-être du travail au noir, comme on parle, ou des
entreprises au noir. Ça va prendre des gens qui vont être
qualifiés. Le donneur d'ouvrage, à ce moment-là, en somme,
va être obligé de prendre un entrepreneur qui est
enregistré en bonne et due forme dans les associations que la loi va
reconnaître, que la loi va exiger. On dit: C'est définitivement un
plus. C'est définitivement un plus, maintenant, c'est une
réglementation qui peut permettre, je crois, beaucoup d'ordre dans
l'industrie.
M. Dufour: Mais, dans le fond, moi, je comprends ce que vous me
dites, mais, quand on parle de déréglementation dans le
résidentiel, le certificat de compétence des employés, on
n'en parle plus là. Là, c'est le contracteur qui va être
qualifié. J'essaie de trouver, dans ce que vous dites, s'il y a une
cohérence à quelque part.
Dans une déréglementation, il y a des buts précis.
On a ciblé, depuis deux jours... J'espère qu'on ne perd pas notre
temps, malgré que j'aie des doutes un peu, pas à cause des
intervenants, mais à cause de la façon dont on fonctionne.
J'espère qu'on ne perd pas notre temps et que ce n'est pas juste pour
jeter de la poudre aux yeux, que ce n'est pas juste pour faire des sparages en
public. Mais je dis que, par rapport à ce qu'on a cherché depuis
le début, on s'est rendu compte que la déréglementation
dans le résidentiel avait pour effet que les certificats de
compétence n'avaient plus la même valeur, c'était la
licence d'entrepreneur.
Tout à l'heure, il y a eu des intervenants. Je leur ai dit qu'on
découvrait, malgré que les entrepreneurs étaient
supposés, censés être qualifiés, 6200 plaintes par
année. Ce n'est pas les seules. La CCQ découvre ça, mais
il y en a plus que ça. Ça fait plus que 30 plaintes par jour.
Donc, si vous me dites: La qualification, oui, mais, quand on parle de
qualification, ça veut dire aussi des balises et des normes qui
réglementent à quelque part. Si vous me dites: Oui, ça va
bien, on est prêts à se plier à tout ça, bien,
là, on ne déréglemente plus, on réglemente.
M. Brassard (Bernard): C'est que, déjà, dans le
projet de loi, il y a une protection qui est là: l'entrepreneur, il faut
qu'il soit membre de l'Association, un. Ça, je pense que c'est une
partie très importante. L'addition à ça... Il faut que
vous compreniez, M. Dufour, que le type de travaux que notre association, que
nos entrepreneurs font, c'est un type de travail complètement
différent des gens du résidentiel. Le donneur d'ouvrage aussi est
un donneur d'ouvrage complètement différent du
résidentiel, ce qui fait que c'est facile pour le donneur d'ouvrage
d'ajouter ça s'il le veut. Puis, à ce moment-là, ça
devient ni plus ni moins encore, comme on dit, un genre... comment je dirais
bien, pour rétrécir un petit peu le champ de tout ce qui peut se
faire par en dessous.
M. Dufour: Je suis content des explications, mais, moi, je
connais un peu c'est quoi l'association des travaux routiers. Notre rôle,
c'est de sonder aussi les reins, et le coeur, et, en même temps, la
sincérité, et la valeur des gens qui viennent nous
présenter leur mémoire. (16 h 40)
Vous avez une entente de réciprocité concernant la
mobilité de la main-d'oeuvre. Moi, il me semble que c'est quelque chose
de raisonnable. Tu sais, depuis le début, on dirait que le Québec
est un peu à genoux vis-à-vis de ce que l'Ontario demande. J'ai
comme l'impression qu'il y a un peu d'hypocrisie dans la façon dont elle
se comporte. Ce qu'elle ne dit pas ouvertement, elle le fait à
l'intérieur des conventions collectives. Nous autres, on va faire un
petit peu la même chose, on va le faire à l'intérieur des
conventions collectives.
Je trouve que le point que j'aimerais que vous
développiez quelque peu, c'est concernant la
réciprocité dans l'approche de la mobilité de la
main-d'oeuvre.
M. Richard (Gabriel): Oui, M. Dufour.
Le Président (M. Joly): M. Richard, s'il vous
plaît.
M. Richard (Gabriel): Nous avons participé, à
travers l'Association canadienne de la construction, à de nombreuses
discussions au sujet des barrières interprovinciales et on s'est
aperçu que, dans d'autres provinces, il y a des barrières qui
sont peut-être pires que les nôtres en étant non
écrites. C'est des barrières qui sont, et je pense que les
syndicats l'ont même dit hier... On peut aller travailler ailleurs, dans
les autres provinces, en autant que le bassin soit vide dans les régions
ou que les syndicats locaux n'aient plus de main-d'oeuvre disponible.
Alors, nous, quand nous vous disons que nous voulons la
réciprocité, c'est que c'est bien beau qu'on ouvre la
frontière du Québec aux entrepreneurs et aux travailleurs des
autres provinces, mais il faudrait avoir au moins les mêmes avantages. Et
je vous dis, en Ontario, par exemple, qu'il y a un système de
qualification professionnelle des entrepreneurs qui relève du
ministère des Transports de l'Ontario. Pour être capable de
soumissionner, il faut être invité par le ministère de
l'Ontario et être membre du système de qualification
professionnelle. Alors, c'est une barrière non écrite: un
entrepreneur du Québec ne peut pas se qualifier là rapidement,
ça prend des années avant d'arriver à atteindre
l'échelon nécessaire pour être capable de réaliser
un contrat important.
Alors, c'est un peu dans ce sens qu'on dit que c'est beau qu'on permette
aux autres de venir travailler chez nous, mais qu'on puisse faire exactement la
même chose chez eux, et qu'il n'y en ait pas de barrières, ni
écrites ni non écrites.
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Chicoutimi, je pense que vous voulez échanger avec les gens de votre
comté aussi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Vous me permettez
de saluer M. Brassard, digne citoyen et contribuable de Chicoutimi. Le
mémoire est bref, mais je le trouve intéressant. Je le trouve
intéressant parce que vous ramenez le ministre au consensus qui
s'était dégagé à l'occasion du Sommet, et je trouve
habile que vous lui disiez que son mémoire... pas son mémoire,
mais son projet de loi soit audacieux, mais, en même temps, sur les
éléments les plus importants, que vous disiez: Voici nos
recommandations. Et je voudrais mieux comprendre vos recommandations.
Dans la première, vous dites: les quatre conventions collectives.
Vous convenez donc qu'on devrait avoir un négociateur unique, tel que le
consensus qui s'était dégagé, et vous continuez de penser
que même le secteur résidentiel devrait aussi être
négocié. Est-ce que c'est ça que je comprends dans la page
4, le premier amendement?
M. Brassard (Bernard): Bien, c'est qu'on croit qu'au niveau de
l'APCHQ il va y avoir encore des travaux qui vont être sous
décret, qui vont relever d'eux autres, en moindre partie, mais il va
définitivement y avoir certains travaux qui vont être faits par
l'APCHQ.
Mme Blackburn: D'accord. À ce moment-là, vous ne
prétendez pas que tout le résidentiel devrait être aussi
négocié?
M. Brassard (Bernard): En somme, la partie qui serait sortie du
décret, là, on ne le prétend pas.
Mme Blackburn: Et vous êtes d'accord qu'il y en ait une
partie qui soit sortie du décret? Parce que je n'avais pas vraiment
compris ça. Ce n'est pas explicite.
M. Brassard (Bernard): En somme, nous autres, du
côté, comment je pourrais bien dire...
Mme Blackburn: Vous ne vous êtes pas trop mouillés,
quoi!
M. Brassard (Bernard): Non. Du côté
résidentiel, ça ne nous touche pas.
Mme Blackburn: D'accord.
M. Brassard (Bernard): O.K.? En tant qu'entrepreneur, ça
ne nous touche pas. Ça touche plus les gens de l'ACQ et de l'APCHQ.
Mme Blackburn: Je dois dire que je n'ai pas très bien
compris votre troisième amendement, alors que vous dites: II faudrait
s'assurer qu'on puisse reconnaître les associations. Et, à la page
6, le dernier paragraphe du troisième amendement: «Nous
envisageons particulièrement des sujets qui touchent au travail au noir,
à la qualité des travaux et à la qualification des
entrepreneurs.» Mais je voudrais comprendre, là, comment vous
rattachez cette phrase-là au reste. Je n'ai peut-être pas saisi
rapidement, là, mais...
M. Richard (Gabriel): Alors, voici, madame. Dans le projet de
loi, il est indiqué que l'entrepreneur devra être membre d'une
association de son choix.
Mme Blackburn: Oui. Ça, ça va.
M. Richard (Gabriel): Par exemple, quelqu'un pourrait être
membre de l'APCHQ et oeuvrer dans le secteur des routes ou des grands travaux.
Il n'y a rien qui, d'après nous, là, empêcherait ça,
selon la rédaction du projet de loi. Alors, si, nous, comme
représentants des constructeurs de routes, nous voulons que nos
membres, dans l'intérêt public, dans leur
intérêt, dans l'intérêt des travailleurs, fassent
quelque chose qui va contribuer à améliorer un irritant de la
construction, comme le travail au noir, il ne nous servirait à rien de
convaincre tous nos membres de faire ça si d'autres peuvent oeuvrer dans
notre secteur sans être membres. Alors, c'est pour nous donner
l'opportunité d'être capables, dans l'intérêt public,
d'adopter des mesures que tous les entrepreneurs oeuvrant dans le secteur vont
être contraints de respecter.
Mme Blackburn: Parce que la loi 186 n'était pas suffisante
à cet égard.
M. Richard (Gabriel): Absolument. C'est ça. C'est au
niveau des soumissions que la règle de départ était
inscrite. Si le donneur d'ouvrage dit: J'admets ou j'invite à
soumissionner telle, telle personne ou tel groupe d'entrepreneurs, bien, c'est
parmi ce groùpe-là qu'il aura à choisir l'entrepreneur qui
exécutera ses travaux.
Mme Blackburn: Mais on prétend qu'actuellement les
soumissions, les contrats qui sont octroyés à la suite d'appels
d'offres par le gouvernement par d'autres entreprises, mais je pense au
gouvernement en particulier ceux qui obtiennent les contrats, c'est
souvent parce qu'ils soumissionnent en deçà des salaires au
décret. Ça ne changera pas cette
réalité-là.
M. Richard (Gabriel): Dans notre cas, je pense, dans le cas des
entrepreneurs de voirie et de grands travaux, c'est une situation que nous ne
rencontrons pas. Je pense qu'il y a tellement de contrôle.
Mme Blackburn: Oui, c'est vrai.
M. Richard (Gabriel): Les entrepreneurs sont plus grands. C'est
l'ordinateur qui fait la paye. Il y a beaucoup de monde, il y a beaucoup
d'inspecteurs, autant du côté syndical que du côté du
donneur d'ouvrage ou de F ingénieur-conseil. Les gens travaillent entre
eux, se côtoient tous les jours. Je pense que ce n'est pas l'endroit
où il y a du travail au noir.
M. Brassard (Bernard): Nos chantiers sont beaucoup plus
facilement contrôlables.
Mme Blackburn: Oui, c'est ça. Ils sont plus visibles.
M. Brassard (Bernard): Oui. On ne dit pas, par exemple, qu'il n'y
a pas des règles du décret qui ne seront pas appliquées
à certaines places, mais, quand on parle de salaire puis de l'ensemble
des salaires, on pense que c'est respecté beaucoup plus.
Mme Blackburn: En conclusion, et c'est ma dernière
question, vous suggérez qu'une des façons de contrer le travail
au noir et un moyen efficace serait une modification à la loi de la
CSST, une modification qui, selon les critères de
l'assurance-chômage, ferait en sorte que les indemnisations
correspondraient aux primes versées par l'employeur et par le
salarié. Pourriez-vous un peu élaborer, là?
M. Richard (Gabriel): Oui, madame. Si on s'inspire de
l'assurance-chômage, vous savez que, pour chaque paye, l'employé
et l'employeur font parvenir un montant, disons en résumé,
à F assurance-chômage, une prime qui est versée et, selon
le nombre de semaines du règlement ou de la loi et les primes
versées, le salarié en chômage reçoit une
indemnisation. Ce n'est pas le cas de la CSST. À la CSST, la compagnie
ne connaît même pas ses assurés. C'est peut-être la
seule compagnie d'assurances qui ne connaît pas ses assurés, parce
que l'employeur paie les primes au départ en février et, à
la fin de février, il doit faire une mise de fonds et se
réajuster à l'automne selon sa masse globabe salariale et son
secteur d'activité. Quand un travailleur se blesse, que ce soit la
première journée de son travail ou non, il reçoit la
même indemnité que le travailleur qui aurait travaillé
constamment 40 heures par semaine les 50 semaines précédentes.
Alors, c'est là qu'est l'aberration. C'est qu'il faudrait absolument
relier l'indemnité aux primes versées.
Mme Blackburn: Qu'est-ce que vous faites, à ce
moment-là, des travailleurs qui, dans la crise économique
actuelle... Le travailleur a un accident, il n'a même pas fait 1000
heures dans l'année, mais, Fan prochain, la reprise économique
étant, il pourrait en faire le double. Mais, là, il a eu le
malheur d'avoir un accident alors qu'il n'a pas travaillé beaucoup
d'heures. Ça veut dire qu'il est là cinq ans, parce que c'est un
accident grave, ou le restant de ses jours sur la CSST, toujours avec cette
malchance, parce qu'il a eu son accident alors que c'était dans une
année au cours de laquelle il n'a pas beaucoup contribué ou pas
beaucoup travaillé. Comment est-ce que vous allez régler
ça? C'est parce que j'ai suivi, puis j'ai trouvé l'idée
intéressante, mais, en même temps, tout de suite après, on
réalise que ça risque de créer des inéquités
tout à fait inacceptables.
M. Richard (Gabriel): Bien, madame, il y a plusieurs solutions,
je pense. Il y en a une qui serait d'établir un montant minimum vital
qui s'applique à chaque travailleur qui est blessé. Il ne faut
pas que quelqu'un qui est blessé ne soit pas capable de continuer
à vivre. Alors, c'est possible d'établir un minimum vital qui
dépendrait du statut du salarié: s'il est marié, s'il a
plusieurs enfants, etc. Et ce minimum vital là, il l'aurait dans
n'importe quelle condition.
Mme Blackburn: Est-ce que vous estimez que le minimum que vous
donnez à l'aide sociale, c'est ça, le minimum vital? (16 h
50)
M. Richard (Gabriel): Non... Mme Blackburn: Non.
O.K.
M. Richard (Gabriel): ...ce n'est pas mon rôle de vous dire
ce qu'est le minimum. Je pense qu'il y a des spécialistes qui sont
capables de faire ça. Mais ce qui est illogique, c'est qu'on donne
à celui-là qui n'a pas travaillé l'année d'avant,
pour toutes sortes de raisons... Il a peut-être travaillé dans
d'autres domaines, mais il n'a pas rapporté ses heures, il n'a pas
payé d'impôt, il n'a rien fait de ça. S'il est
blessé, on lui donne le même montant que le vrai travailleur de la
construction qui a travaillé 50 semaines de 40 heures. Ça n'a pas
de bons sens, ce système-là.
Mme Blackburn: Comme employeur, vous proposez des amendements.
Est-ce que vous estimez que, si ces amendements-là ne sont pas
adoptés, il est un peu périlleux d'adopter le projet de loi tel
que rédigé?
M. Brassard (Bernard): C'est vivable, c'est très
vivable.
Mme Blackburn: Bien.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le député de Drummond, la
parole est à vous.
M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. À la page
6 de votre mémoire, vous vous adressez à la mobilité des
employeurs et des salariés. Vous êtes une grande association
patronale, vous avez beaucoup de contacts, j'imagine, avec tout ce qui est
frontalier, principalement le Nouveau-Brunswick et l'Ontario. Est-ce que vous
croyez que les deux mesures ce sera ma première question
qui sont à l'intérieur du projet de loi 142 vont régler la
problématique de votre industrie, de votre section de l'industrie qui va
vous assurer la mobilité à vous au même titre que les
travailleurs et les entreprises des autres compagnies?
M. Richard (Gabriel): Peut-être, il faudrait continuer les
discussions avec les gens de l'Ontario pour utiliser ce que la loi nous accorde
et il y aurait peut-être moyen, entre gens de bonne volonté, de
trouver un terrain d'entente qui ferait l'affaire des deux. Mais il faudrait
aussi que les gens de l'Ontario veulent, comme il le faut, un échange
équitable entre les deux provinces.
M. Brassard (Bernard): II y a un de nos membres qui me parlait
cette semaine qu'ils font des travaux en Ontario depuis 25, 30 ans et que,
depuis un certain temps, ils ne peuvent même... En somme, ils sont au
Québec et en Ontario, je dirais plutôt du côté de
l'Abitibi, puis ils ne peuvent même plus soumissionner parce qu'ils
exigent le siège social ça, c'est pire que nous autres
de l'entreprise. Alors, j'ai l'impression qu'on est loin encore de
solutionner les problèmes.
M. St-Roch: Puis je l'interprète aussi comme étant
une des conditions, parce que, si on adopte le projet de loi, les deux articles
qui regardent les employeurs, les salariés, seront adoptés.
Alors, est-ce que je suis correct quand j'interprète la dernière
phrase: «...être sujets à des ententes de
réciprocité avec les autres provinces», de ne pas mettre
ces articles-là en vigueur tant et aussi longtemps que le ministre de
l'Industrie et du Commerce n'aura pas eu une entente avec les autres provinces?
Est-ce que c'est ça que ça veut dire?
M. Brassard (Bernard); Ah! bien, là...
M. Richard (Gabriel): Non, je pense que ce n'est pas à
nous de vous dire ça, vous avez certainement des moyens pour vous
assurer qu'il y aura réciprocité sans être obligés
de l'écrire dans cette loi-là.
M. St-Roch: Parce que, dès qu'elle est promulguée
et si on met les articles en vigueur, les employeurs peuvent venir ici du
côté ontarien. On n'a encore rien, nous.
M. Richard (Gabriel): Oui...
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le
député de Drummond. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Cherry: En terminant, merci de votre collaboration, et on
tiendra compte des remarques que vous avez dans votre mémoire. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de cette
commission, M. Brassard, M. Richard, M. Gagné, il me fait plaisir de
vous remercier.
Des voix: Merci.
Le Président (M. Joly): Alors, je demanderais maintenant
aux gens représentant la Confédération des syndicats
nationaux de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît.
La commission va suspendre ses travaux quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 54)
(Reprise à 17 h 1)
Le Président (M. Joly): La commission reprend ses travaux.
Comme vous voyez, nous sommes assez disciplinés, 17 heures pile, et,
déjà, nous pouvons reprendre.
Alors, il me fait plaisir d'accueillir la Confédération
des syndicats nationaux. M. Larose, j'apprécierais si vous pouviez nous
présenter les gens qui sont avec vous.
Confédération des syndicats nationaux
(CSN-construction)
M. Larose (Gérald): Merci, M. le Président. Des
voix: ...
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît! Excusez, M.
Larose. Je demanderais aux gens de bien vouloir prendre place ou de quitter
l'enceinte. M. Larose, je vous reconnais.
M. Larose (Gérald): Merci, M. le Président. Je vous
présente, à ma droite, le président de la
CSN-construction, M. Olivier Lemieux; à ma gauche, le coordonnâtes
des services à la CSN-construction, M. Jean-Noël
Bilodeau.
Le Président (M. Joly): Ça me fait plaisir. Alors,
M. Larose, je vous rappelle brièvement les règles du jeu. Vous
avez une vingtaine de minutes pour nous parler de votre mémoire,
incluant vos commentaires, et, par après, les parlementaires auront le
plaisir d'échanger avec vous.
M. Larose (Gérald): M. le Président, M. le
ministre, députés de la commission, les 27, 28 et 29 octobre
dernier, nous étions réunis dans un sommet de la construction,
tous les partenaires, tant du côté patronal que syndical. De notre
côté, nous nous étions livrés à une
préparation sérieuse. Nous avions fait une tournée des
assemblées générales. À ce Sommet, il y a eu un
débat de substance, je pense. À tout le moins, s'est
initiée une dynamique que nous avons qualifiée de stimulante.
J'entends le ministre nous dire que c'était un
événement historique, qu'il y avait des pas dans la bonne
direction qui avaient été faits, que c'était un exercice
de concertation jamais vu dans l'industrie de la construction. Nous avions
nous-mêmes conclu qu'il y avait eu là un débat costaud,
serré, civilisé et, vraisemblablement, un saut qualitatif. La
construction entrait dans l'ère moderne. Puis, bang! la loi 142, un
projet venu d'ailleurs, totalement étranger à l'exercice du mois
d'octobre, tuant les premiers pas et remettant en question le fragile
équilibre qui existe dans le secteur de la construction.
La méthode est plutôt cavalière, je dirais
méprisante. Le contenu l'est davantage. On s'était entendus,
c'était un des consensus, sur un point très précis, aux
deux tiers: une convention et non pas quatre. Le projet nous en propose quatre.
Sur le travail au noir, une volonté unanime de combattre la
clandestinité. Le projet nous propose de blanchir l'activité. Sur
la déréglementa- tion, personne ne pipa mot et, tout d'un coup,
on a un vaste programme de déréglementation sauvage. L'abolition
de l'article 51 sur les pouvoirs du ministre, c'était unanime, c'est le
seul article qui rencontre un consensus du dernier Sommet. Après un
moment de surprise, d'incrédulité, la fureur s'est
développée, la frustration. Nous sommes dans le bordel avec ces
extravagances, ces débordements, ces coûts, ces peurs.
M. le ministre, je veux être clair: la CSN, sa direction, son
président déplorent les événements,
dénoncent les agissements, condamnent ces actions. J'ai eu l'occasion de
le dire au moins quatre fois en public, nous l'avons écrit hier au
premier ministre, les scènes de violence vues, qui ont fait du bruit,
sont déplorables, sont condamnables, et nous le faisons sans
réserve. Nous condamnons ce type de violence, nous condamnons tous les
types de violence. Ce type de violence ne peut pas et ne doit pas être ou
devenir l'excuse de la violence politique, celle qui, par un trait de plume,
peut faire concrètement disparaître les droits de 30 000
Québécois.
Hier, vous étiez travailleurs de la construction,
compétents, fiers, reconnus, protégés; demain, vous ne
serez personne dans la construction, sans droits, sans reconnaissance, sans
protection, soumis à l'arbitraire et au total chantage à
l'emploi. Comment nommer cette violence qui, par une loi, fait
disparaître vos droits, vos conditions, votre dignité? Si vous
étiez un colonel, M. le ministre, on dirait: C'est la violence d'une
dictature. Si vous étiez membre d'un Politburo, on dirait: C'est la
violence totalitaire. Peu importe le nom, le phénomène est le
même, nous sommes en présence d'une violence politique qui nie des
droits, des conditions, une dignité.
La violence des vitres brisées, des bureaux cassés, des
coups portés, nous la condamnons sans réserve, et elle ne peut
pas occulter la violence économique et psychologique que vous faites
subir à des dizaines de milliers de familles qui, aujourd'hui, se
demandent si, demain, papa continuera ou retrouvera un emploi, si son maigre
revenu, en moyenne de 18 000 $, 15 semaines de travail par année, ne
fondra pas à 12 000 $, 10 000 $, 8000 $, contre sa volonté, alors
qu'il veut nourrir sa famille, bâtir l'avenir des siens. Cette violence
psycholqgique fait de terribles ravages. Cette violence économique est
de plus en plus insupportable. Non dénoncée, non
déplorée, cette violence concrète, réelle,
quotidienne fait mal tous les jours au travailleur de la construction et aux
siens.
Je suis toujours surpris du traitement différencié qu'on
fait de la violence. Je retiens surtout le fait que plus elle est ponctuelle,
bruyante, plus elle impressionne et est condamnée; plus elle est
régulière, silencieuse, plus elle se cache, plus elle est
acceptée. Ce que les bien-pensants dénoncent, ce n'est pas la
violence, c'est le bruit. Comme vous, ils tolèrent fort bien la violence
faite aux sans-pouvoir, aux sans-grade, violence faite par les honorables.
Ça aussi, la CSN, la direction, son président le
déplorent, le dénoncent, le condamnent sans réserve. (17 h
10)
M. le ministre, votre projet de loi va à contresens, il est
à l'envers de tout ce qu'on veut faire dans tous les secteurs
industriels. Parlez-en à votre ministre à droite. Alors qu'on
veut regrouper, faire des grappes, développer une synergie, on divise en
quatre groupes. Alors qu'on met de l'avant la qualité, on
déréglemente; il n'y aura plus de carte de compétence.
Alors qu'on veut valoriser la main-d'oeuvre, avoir des stratégies de
formation continue, n'importe qui pourra s'improviser travailleur de la
construction. Alors qu'on veut que l'État accompagne, facilite,
accommode, on propose qu'il disparaisse pour laisser le
«free-for-all». Alors qu'il y a eu des consensus, on n'en tient
absolument pas compte. Le projet de loi 142 est tout le contraire de l'approche
moderne.
Ça va baisser les coûts, il y aura une relance. Fumisterie!
Déjà, au Québec, c'est moins cher qu'ailleurs.
Déjà, au Québec, l'accès à la
propriété est dans les meilleurs au Canada. Les salaires
représentant 20 % du coût de la main-d'oeuvre, dans le
résidentiel, pouvant bénéficier d'un nombre d'apprentis
plus que dans d'autres secteurs, lesquels sont rémunérés
à 50 %, s'il y avait un problème de coûts dans le secteur
résidentiel, il faudrait s'attaquer à la spéculation
foncière, puisque l'augmentation des maisons, avant d'être une
augmentation des salaires, a été une augmentation des terrains.
Il faut pardonner à l'APCHQ, aussi à Alain Dubuc, aussi à
M. Gagné du journal Les Affaires; ils parlent souvent sans
connaître. S'ils prétendent connaître, il faut leur dire
qu'ils nous racontent des histoires ou qu'ils sont démagogues. Aucune
étude, aucune étude prouvant la réduction des coûts
n'a été produite.
La loi 142 ne crée aucune job. Elle va répartir la
misère, alourdir les charges sociales de chômage, de
bien-être social, désintégrer davantage le tissu social par
l'insécurité, la rapine, la désespérance. La loi
142 va mettre en péril la santé de petites et de moyennes
entreprises professionnelles qui ne veulent pas concurrencer avec la
«jobine» ou les «chaudrons». La loi 142 va produire
quatre régimes de droits, de conditions, de sécurité, de
protection. Les entreprises vont suivre? Les travailleurs sont se transformer
en bureaucrates pour connaître leurs conditions d'un secteur à
l'autre? La loi 142, dans la maison neuve, va reproduire ce qui se fait
déjà dans la rénovation: le travail clandestin, les
évasions fiscales, et ne rapportera aucun sou à l'État.
Mais, surtout, la loi 142 va produire un chantage insupportable à
l'emploi. Aucun avantage pour personne, ni pour les travailleurs, ni pour les
consommateurs, ni pour l'État.
Alors, pourquoi la loi 142? Par pure idéologie
néo-libérale de gens devenus intégristes, croyant que la
sauvagerie des règles du marché va produire plus de
bien-être pour l'ensemble de la population. Il faut retomber sur la
terre. La loi 142 recrée de toutes pièces les conditions
d'anarchie, de chaos, de violence, déjà connues, qui ont produit
tant de traumatismes sociaux, tant d'enquêtes et tant d'interventions
gouvernementales. Oh! qu'est-ce qu'il dit là, lui? C'est sûrement
un agent provocateur. On ne l'aurait pas dit qu'on nous aurait dit:
Vous n'avez rien vu venir? Vous dormiez sur la «switch»?
La vérité a ses droits et les responsabilités,
leurs obligations. La vérité, c'est que les mêmes causes
produisent les mêmes effets. Est-ce Aristote ou saint Thomas? Mon
père qui était lui-même travailleur de la construction nous
disait on était 11 pour l'entendre: Les enfants, si vous faites
la même chose, il va vous arriver la même affaire. Recréer,
en 1993, les mêmes conditions qu'en 1973 va créer, en 1993, les
mêmes effets qu'en 1973, c'est-à-dire l'anarchie, le chaos, la
violence. Peut-être souhaitez-vous vous soulager en tirant sur le
messager. Ça ne changera rien à la réalité. La
grêle ne refuse pas de tomber même si le météorologue
décide de ne pas vous avertir.
M. le ministre, la loi 142 est contraire à l'ère moderne.
On pense qu'on ferait mieux de la retirer et de discuter des vrais
problèmes dans le secteur de la construction. Il y en a très
exactement deux: laisser les parties négocier, donc soustraire le
ministre de sa capacité d'intervenir dans le dossier;
deuxièmement, lutter contre la gangrène du travail au noir et
donc donner le pouvoir aux inspecteurs de pouvoir arrêter les travaux de
ceux qui s'adonnent à cette perfidie, et qu'ils mettent leur nom dans la
machine du ministère du Revenu. On est à peu près
convaincus que la discipline va revenir.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Larose. M. le ministre,
c'est à vous la parole, s'il vous plaît.
M. Cherry: M. le Président, compte tenu des
déclarations récentes de l'intervenant précédent et
comme nous connaissons sa position, et surtout dans le but de contribuer
à l'assainissement du climat dans ce dossier, au nom de notre formation
politique, M. le Président, nous n'avons pas de questions à
poser. Merci.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Maintenant,
je vais reconnaître M. le député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, au-delà des
déclarations que peut avoir fait l'intervenant qui vient de
déposer, M. Larose, que vous partagiez ou pas le sens de ses propos
qu'il a tenus au début en condamnant officiellement tout acte de
violence, il m'apparaît, M. le ministre, et je vous le dis bien
humblement, que c'est un acte de mépris additionnel. Et c'est justement
ce que le législateur ne doit pas faire. À supposer même
que vous auriez raison, ce que je doute, ce que je réfute, à
supposer même que vous auriez raison cependant, dans une
hypothèse, je vous avoue très honnêtement que ça ne
fait pas bien, bien mature pour un gouvernement, et, moi, personnellement, on
va prendre l'heure pour questionner, M. le Président, sur les vrais
problèmes dans l'industrie de la construction.
Le Président (M. Joly): Alors, je vous reconnais, M. le
député.
M. Chevrette: Je vous avoue personnellement, M. le
Président je vais continuer parce que ça m'a saisi
je n'aurais jamais pensé qu'une absence de gouvernement irait
jusqu'à ce point. Je pense que les législateurs doivent se placer
au-dessus de ce qui peut se passer parce que les derniers intervenants, dans
une société dite démocratique, ce sont les
législateurs. Et je suis surpris qu'il y en ait qui se comportent encore
comme des matelots en goguette, des petits gars en culottes courtes. On va
essayer de ne pas mettre d'huile sur le feu, M. le Président, puis aller
cependant aux questions fondamentales. (17 h 20)
Vous dites que l'un des principaux problèmes, le premier, c'est
que le ministre fait partie du décor dans les négociations. Au
niveau des mécanismes, selon vous, c'est, à toutes fins
pratiques, le retrait, donc, de toute possibilité d'intervention sur les
contenus par voie de décret. C'est ce que vous voulez souligner, je
suppose. Est-ce que vous acceptez le processus normal du Code du travail,
cependant: médiation, conciliation, etc.?
Le Président (M. Joly): M. Larose, s'il vous
plaît.
M. Larose (Gérald): Nous avons eu l'occasion d'en
débattre assez largement au sommet sur la construction. Le principal
problème en matière de négociations dans ce secteur
industriel, c'est précisément l'échappatoire que
représente l'article 51 qui fait en sorte que, quand on arrive dans le
dernier «stretch» de négociations, il y a la
possibilité pour les parties de s'échapper à l'obligation
de conclure la négociation et, donc, de se transformer en
démarcheurs pour aller voir le ministre pour lui téter ou se
gpsser un décret qui pourrait davantage convenir à une partie ou
à une autre. Nous estimons que le processus de négociation est un
processus évolutif et que, sur la finale, les parties ne doivent avoir
aucune échappatoire et, donc, qu'elles doivent conclure.
À défaut de conclure, eh bien! c'est les
procédés réguliers qui existent. La partie patronale a le
droit de lock-out, la partie syndicale a le droit de grève. Et, avant
d'arriver là, elles ont droit à des moyens de pression. Dans ce
processus, il est tout à fait approprié que les mécanismes
réguliers de médiation ou de conciliation, de médiation,
soient disponibles pour les parties. Quant à nous, c'est tout à
fait souhaitable que ces mécanismes-là jouent à plein pour
favoriser le règlement de la convention collective. Alors, il n'y a pas
de particularité à avoir pour ce secteur-là.
M. Chevrette: Quant à votre deuxième point, sur le
travail au noir, le chef de l'Opposition, hier, a soumis une idée au
niveau d'un travail plus intégré du ministère du Revenu
avec, la CCQ, entre autres. Je sais que vos collaborateurs étaient ici,
de toute façon. Avec les moyens modernes présentement de
l'informatique, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu précisément
d'envisager... Parce que c'est une des responsabilités premières
du ministère du Revenu de voir à collecter les impôts et
à s'assurer que les revenus ne manquent pas. Il y en a qui n'ont pas
d'imagination et le seul réflexe qu'ils ont, quand les revenus ne
rentrent pas, c'est de couper dans les services. Mais je comprends que cette
gangrène que constitue le travail au noir dans l'industrie de la
construction peut être véritablement prise de front. Est-ce que
vous considérez que c'est une approche valable ou bien si vous avez
d'autres suggestions peut-être à faire aux parlementaires, en tout
cas à ceux qui veulent nous écouter, pour corriger cette
situation de travail au noir?
Le Président (M. Joly): M. Larose, s'il vous
plaît.
M. Larose (Gérald): Je ne suis pas sûr qu'il y en a
qui ne veulent pas nous écouter, ils ne veulent peut-être pas nous
parler.
Sur le travail au noir, ça aussi, ça aura
été une question largement débattue au Sommet. Il y a deux
types de dispositifs à mettre en place. Il y a, effectivement, un
dispositif d'amendes ou de sanctions qui doit être renforcé, parce
qu'à l'heure actuelle, si tu te fais prendre, ce n'est pas avec beaucoup
de conséquence. Alors, il y a à augmenter ce dispositif.
Deuxièmement, oui, nous, on pense qu'on devrait profiter de la
présence et de l'existence des inspecteurs, qui, dans leur travail
régulier, devraient se voir affecter des pouvoirs d'exécution
immédiate sur un défaut chez un travailleur ou chez un employeur
qui a des travailleurs qui travaillent au noir, qu'on puisse sur-le-champ faire
cesser ce travail et, avec le dispositif qui existe au niveau du
ministère du Revenu, on n'aurait qu'à mettre les numéros
d'assurance sociale ou de compagnie au ministère du Revenu. On pense
qu'ils sont passablement bien équipés, quand ils veulent obtenir
leur dû pour faire le travail qui s'impose.
La seule existence de ce dispositif devrait être un
désincitatif au travail au noir. On ne pense pas que ce seraient des
coûts exorbitants supplémentaires. De toute façon, on a vu
ce gouvernement mettre à la disposition des assistés sociaux une
armée de boubous macoutes pour discipliner les assistés sociaux,
récupérer quelques dizaines de milliers de dollars. On pense
qu'il pourrait consacrer moins d'argent que pour les boubous macoutes et
vraisemblablement que la cueillette serait autrement plus spectaculaire en
termes de centaines de millions de dollars. C'est une question de choix, hein!
C'est une question de priorité. Ça dépend qui est bon dans
cette société et qui est mauvais, vraisemblablement. Mais, nous,
on est soucieux de la santé financière de la caisse commune dans
laquelle, comme travailleur et comme travailleuse, on en met pas mal. On pense
que c'est pas mal notre business; on est l'actionnaire principal. On
souhaiterait que tout le monde contribue, puis ceux qui ne contribuent pas
devraient être disciplinés, puis, si on commençait par les
entrepreneurs fautifs, je pense qu'on ramasserait plus d'argent que chez les
assistés sociaux.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais demander
à M. Larose et à ses acolytes, qui ont sans doute
écouté le témoignage de l'APCHQ qui vous a
précédés à cette table, c'est-à-dire les
grands travaux, mais, avant les grands travaux, ce fut l'APCHQ qui faisait une
référence, très clairement, au rapport Scowen et qui
disait que c'était prévu, depuis 1986, la
déréglementation résidentielle, dans le rapport Scowen,
sans, bien sûr, dicter les conditions que Scowen mettait dans son rapport
avant de déréglementer. Je relatais les propositions, les
conditions qu'il posait: l'amendement au Code du travail, par exemple, pour
l'accréditation, des amendements aux normes minimales pour
prévoir les vacances, les congés fériés, on
prévoyait également des amendements, même, à la
licence de l'entrepreneur, etc. Mais j'ai été renseigné
depuis. Puis, qui plus est, le groupe de députés le nom
qu'il porte, le nom du rapport, c'est le rapport Audet, député de
Beauce-Nord reprend, en page 19, exactement les mêmes conditions
avant de déréglementer.
Donc, on a un groupe de parlementaires dont son principal artisan,
Scowen, député de Notre-Dame-de-Grâce à
l'époque, posait des conditions avant la déréglementation.
C'est repris dans le rapport Audet il n'est pas rendu encore
délégué du Québec à New York, lui; il
siège à l'Assemblée nationale avec le député
de Vimont, avec d'autres députés qui ont étudié
cela, M. le Président il arrive aux mêmes conclusions que
Scowen: Vous ne devez pas déréglementer sans prévoir une
série d'amendements à d'autres législations. Est-ce que
vous retrouvez ces conditions, M. Larose, ces conditions
préconisées par le rapport Audet, par le rapport Scowen, dans le
projet de loi 142?
Le Président (M. Joly): M. Larose, s'il vous
plaît.
M. Larose (Gérald): Alors, je vais demander à M.
Lemieux, si vous voulez, de répondre. (17 h 30)
M. Lemieux (Olivier): J'ai participé, comme
président de la CSN-construction, au fameux comité des sept qu'on
appelle, mais, maintenant, c'est devenu le comité Audet, où la
CSN-construction s'est fait entendre. Ils ont eu une rencontre qui a
duré au moins une heure, une heure trente, où on a
élaboré beaucoup de choses pour l'industrie de la construction.
Ce qui nous a surpris, lors du dépôt de la loi 142, puis ce qu'on
avait convenu avec les sept... Ça s'est assez bien
déroulé, la rencontre avec la CSN-construction. Ils nous avaient
dit, à la fin de la rencontre, qu'ils ne toucheraient pas au
résidentiel. Donc, on est très, très surpris quand on voit
le huit logements et moins qui va être soustrait à l'industrie de
la construction. Ce qui avait été convenu... Puis on a eu,
disons, une rencontre, sans dire amicale, de bons échanges entre nous.
Et une des dernières questions, ça avait été
ça: Est-ce que vous vous alignez sur une déréglementation
du résidentiel? Ils nous avaient dit non. Donc, vous comprendrez qu'on
commence à avoir une certaine crainte à assister soit à
des sommets, à des comités ou à diverses rencontres. Et le
travailleur, en bout de ligne, s'aperçoit qu'on se sert de ces
rencontres pour lui enlever des droits. Donc, la 142, qui va couper la job
à 30 000 travailleurs dans le résidentiel, on a été
très, très désagréablement surpris.
M. Marcil: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Salaberry-Soulanges.
M. Marcil: Je voudrais simplement demander à M. Lemieux de
retirer ce qu'il vient de dire là, parce qu'il n'y a jamais eu rien
d'autre, aucune entente n'a eu lieu entre aucune personne ni aucune association
qui ont participé à ce comité. Et la preuve: les
recommandations qui ont été émises, ça
démontre justement qu'on a touché à tous les secteurs, en
incluant également le résidentiel.
Le Président (M. Joly): Si je comprends bien, M. le
député, vous aimeriez que monsieur spécifie que ce sont
des échanges que vous avez eus...
M. Marcil: C'est des échanges...
Le Président (M. Joly): ...et non pas des ententes.
M. Marcil: ...mais il n'y a jamais eu d'entente à l'effet
que...
M. Lemieux (Olivier): Ah non, non! O.K. Je conviens que c'est des
échanges.
M. Marcil: Non, non, non, il avait dit
«ententes».
M. Lemieux (Olivier): Je n'ai pas dit des ententes... des
échanges, parce que c'était un comité qui
était...
M. Marcil: Ah! ça peut être ça.
Le Président (M. Joly): Enfin, merci.
M. Chevrette: De toute façon, M. le Président, on
ne peut pas poser de question de privilège quand on se refuse de
parler.
Mme Blackburn: De parler. C'est ça.
M. Chevrette: Ceci dit, M. le Président, je voudrais
continuer mon questionnement. Mon questionnement, M. le Président,
vous... Donc, vous ne retrouvez pas ou je ne retrouve pas moi non plus dans le
projet de loi 142 aucune des conditions proposées dans
le rapport Audet à la page 19, aucune des conditions
prévues dans le rapport Scowen qui vous mettent en garde que toute
déréglementation doit être précédée
nécessairement, dans cette industrie plus particulièrement, des
étapes suivantes.
Moi, je vous avoue personnellement, là, qu'on se demande qui
mène. Le comité de députés qu'on a fait travailler
pendant des bonnes semaines est, je pense, de bonne foi. Moi, je suis
prêt à leur prêter beaucoup de bonne foi, mais beaucoup de
candeur et de naïveté parce qu'on étale aux yeux du monde
les conditions préalables à une déréglementation,
on se targue d'avoir bien travaillé, puis, quand arrive le temps de
procéder, à la grande surprise de tout le monde, y compris de M.
Omer Rousseau et de son groupe... Ils étaient tellement sûrs
qu'ils observeraient le rapport de M. Audet et de ses collègues ou bien
le rapport Scowen qu'ils sont allés tout de suite s'asseoir et qu'ils
ont signé. Croyez-le ou non, ils ont signé un petit document. Je
peux l'exhiber ici. Je l'avais tantôt. Ils ont signé un document
en bonne et due forme pour que la déréglementation ne se fasse
pas mais qu'elle soit limitée aux six étages et moins.
Ce n'est pas moi qui ai signé ça, là, c'est des
employeurs. Est-ce qu'ils ont signé de bonne foi? Est-ce qu'ils se sont
fait tordre les bras pour faire ça? On arrive avec un projet de loi,
à peine quelques jours après, qui déréglemente,
à la grande surprise. Moi, j'ai dîné avec M. Rousseau, et
il avait le sourire accroché, vous savez, très haut parce qu'il
ne s'attendait pas à ça. C'est huit fois ce que le client
demandait c'est pour ça qu'il s'est accroché à huit
logements, là. C'est quasiment incroyable. Sans avoir analysé
toutes les répercussions et le chambardement! Et on dit n'importe quoi,
à part ça.
Hier, des représentants de la CCQ nous disaient que le
déficit accumulé était à peu près de quelque
30 000 000 $. Il y a des patrons qui parlent de 60 000 000 $ aussi, dans la
publicité. Ce n'est pas des farces, ça, là. Qui dit vrai
dans ça? On n'est pas ici pour se faire emplir. Nous, les
parlementaires, on ne peut pas savoir ce qui se passe au niveau d'une CCQ.
Mais, quand la CCQ et des dirigeants de la CCQ nous disent: C'est 33 000 000 $,
ou à peu près, de déficit accumulé sur deux ans et
qu'ils nous sortent une publicité dans le Journal de Montréal,
60 000 000 $, pour affoler les gens, apeurer les gens, leur dire: Voyez, on
veut ça, c'est à cause de ça, ce n'est même pas la
moitié de la vérité. Il faut faire attention à
ça. Ça ne peut pas continuer de même dans ce
secteur-là.
Ne croyez-vous pas, M. Larose, que, si le ministre décidait, s'il
avait un élan, là, de générosité et de
compréhension, mais surtout de maturité, s'il disait: Je vais
suspendre l'étude de ce projet de loi là et je vais donner la
chance aux parties, en indiquant clairement que c'est à eux de
régler leurs problèmes, puis rapidement, puis fixer un
échéancier très raisonnable, cependant, là, pour ne
pas... Comment vous réagiriez à un tel geste?
M. Larose (Gérald): II est clair que la solution à
terme dans l'industrie de la construction sera le résultat d'une
négociation. Même si la loi 142 était adoptée, je ne
pourrais jamais donner la garantie que la paix industrielle va exister. Je ne
donnerai jamais la garantie qu'il n'y aura pas de travailleurs qui vont faire
tout ce qu'il est possible de faire pour, comme vrais travailleurs de la
construction, travailler dans la construction. Dans le secteur de la
construction comme dans tous les autres secteurs, la paix industrielle, la
solution des difficultés passent par un processus de négociation
et, surtout, passent par un processus qui oblige la responsabilisation des
parties. Et, pour un, je serais éminemment favorable, effectivement,
à un processus qui remette en présence les parties, compte tenu
du contexte dans lequel on se retrouve, que le projet de loi 142 a produit,
où les gens non seulement se sentent éminemment
insécurisés, mais ils savent fort bien que, si ce projet de loi
là passe, c'est eux qui passent, leur emploi, leurs conditions. Moi, je
suis convaincu que si, effectivement, on arrêtait là ce
débat, qu'on retournait les parties à la négociation... Il
n'y a que la négociation qui va être porteuse d'avenir. C'est
clair.
M. Chevrette: Est-ce que, vous, vous avez l'impression que le
monde patronal, au-delà... Puis je m'adresse à vous autres, parce
qu'ils se sont permis de parler contre vous autres aussi. Donc, je suis fort
aise de vous poser la question que je vais poser. Est-ce que vous avez
l'impression que le monde patronal, placé devant
l'éventualité de devoir négocier, s'assoirait puis
discuterait? Est-ce que vous avez senti, chez le patron, cette volonté
aussi de négocier, tout autant que le monde syndical?
Sur ce point, vous êtes unanimes, si j'ai bien compris. Il y a une
unanimité de la part de tous les groupes syndicaux de l'industrie de la
construction de négocier sans avoir l'épée
ministérielle au-dessus de la tête. Est-ce que, du
côté patronal, vous avez senti cette volonté aussi, d'en
arriver... Parce que je n'ai pas eu la chance de le leur demander. Donc, je
vous le demande, si vous avez, dans vos discussions, eu l'impression qu'eux
aussi veulent négocier leurs conventions collectives?
M. Larose (Gérald): Olivier.
Le Président (M. Joly): M. Lemieux, s'il vous
plaît.
M. Lemieux (Olivier): Malheureusement, la CSN-construction
n'était pas à la table des négociations, mais, ce qu'on
entend, c'est que, oui, les patrons veulent négocier. Et j'ai
l'impression que, si jamais on faisait l'exercice, pour une fois, avec
l'article 51 de la loi enlevé, j'ai l'impression que beaucoup, autour de
la table, ici, seraient surpris. Je pense que, si jamais ils savaient qu'il n'y
avait pas une épée de Damocles au-dessus de leur tête, j'ai
l'impression que les parties
arriveraient à des conclusions qui seraient peut-être
surprenantes.
M. Chevrette: M. le Président, pour donner la chance
à mes collègues de poser des questions, je voudrais remercier les
représentants, leur dire que j'ai été personnellement
impressionné par leur déclaration de départ condamnant
toute violence physique. Et j'ose espérer que le déroulement des
activités dans le cadre des pressions se continuera dans la
non-violence. Je crois que l'opinion publique, sachant que vous ne recherchez
pas cette forme de violence, vous sera sans doute d'une grande sympathie, parce
que je considère que le projet de loi 142, personnellement, est une
agression pour les travailleurs.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le
député.
M. Marcil: C'est comme la loi antiscab que vous avez
passée.
M. Chevrette: Tu n'es pas supposé parler, toi.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, M. le
député.
M. Marcil: C'est la même chose. C'est comme la loi
antiscab.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît.
M. Chevrette: M. le Président, rappelez-les à la
cohérence.
(17 h 40)
Le Président (M. Joly): C'est déjà fait, M.
le député de Joliette. Alors, je vais maintenant
reconnaître M. le député de Jonquière, s'il vous
plaît.
M. Dufour: Oui, M. le Président. Moi aussi,
d'entrée de jeu, je voudrais déplorer un peu beaucoup l'attitude
du ministre du Travail. Parce que j'ai appris dans la société
j'ai seulement 30 ans de vie politique, et un petit peu plus, et
quelques années d'association; ce n'est pas d'hier que je discute avec
des groupes et j'ai compris une chose, c'est qu'on ne choisit pas
nécessairement ceux avec qui on parle lorsqu'on est en position de
responsabilité. On doit s'accommoder et on doit essayer d'en trouver le
meilleur parti. Et j'ai compris aussi que les groupes, ils durent plus
longtemps, pas mal, que ceux qui sont des élus, règle
générale. Donc, on a tout intérêt à maintenir
des dialogues; qu'on aime ou qu'on n'aime pas, ce n'est pas un mariage d'amour,
des fois ce sont des mariages forcés, mais il faut accepter tout de
même que d'autres ne pensent pas comme nous, que d'autres puissent avoir
d'autres attitudes.
Et, d'ailleurs, je veux juste rappeler au ministre le débat sur
la première lecture, où j'ai dit, et M. Larose l'a
répété exactement, peut-être pas dans les
mêmes termes, mais j'ai dit: Les formes de violence, ce n'est pas juste
dans des actes; c'est aussi, des fois, dans des paroles et dans des
écrits. La violence, ça ne s'exprime pas juste d'une sorte de
façon; il y a toutes sortes de manières de la faire, la
violence.
En tout cas, je pense que le ministre aura un certain temps pour
réfléchir avant d'étudier son projet article par article,
mais j'espère qu'il va avoir de meilleures intentions à
l'égard de ces intervenants. Vous ne l'avez pas choisi, comme ministre
du Travail; il ne vous a pas choisi, mais il y a une responsabilité,
tout de même, qui lui a été confiée par son premier
ministre, à l'effet qu'il est responsable au point de vue de la
population, au point de vue du gouvernement, non seulement des relations, mais
aussi du mieux-être de l'ensemble des citoyens dans son secteur
très propre. Je ne veux pas lui faire de leçon, mais juste lui
rappeler que les ministres passent, les associations demeurent, et ça,
à moins que, demain matin, on ne décide par une loi de faire
disparaître...
M. Audet: M. le Président, question de
règlement.
M. Dufour: ...les organisations.
Le Président (M. Joly): M. le député,
là, j'étais...
M. Audet: Question de règlement.
Le Président (M. Joly): ...sur le point de vous...
M. Dufour: M. le Président, je pense qu'il y a...
Le Président (M. Joly): ...ramener...
M. Dufour: ...des choses...
M. Audet: M. le Président...
Le Président (M. Joly): ...à la pertinence.
M. Dufour: Oui.
Le Président (M. Joly): Dans le fond, si...
M. Audet: Question de règlement.
M. Dufour: Mais...
Le Président (M. Joly): ...vous voulez faire...
M. Audet: Question...
Le Président (M. Joly): Excusez. Je m'excuse,
là...
M. Chevrette: Arrête, là.
M. Dufour: Oui.
Le Président (M. Joly): ...si vous voulez faire le
procès du ministre...
M. Audet: Ce n'est pas la place.
Le Président (M. Joly): ...ou des associations, ou ainsi
de suite, je ne pense pas, là, que ce soit la tribune. On est ici pour
jaser du projet de loi...
M. Audet: Ne pas imputer de motifs au ministre.
Le Président (M. Joly): ...142...
M. Dufour: Oui.
M. Audet: C'est ça.
Le Président (M. Joly): ...pour échanger. Alors,
vous aurez toutes les autres tribunes nécessaires: la presse, les
conférences de presse, ainsi de suite, pour dire ce que vous avez
à dire contre le ministre, si vous voulez le faire. Mais, pour le
moment, c'est la pertinence. J'apprécierais beaucoup si on revenait
comme on était tantôt.
M. Dufour: Mais...
Le Président (M. Joly): M. le député de
Joliette a très bien fait, tantôt; il a exprimé ce qu'il
avait à exprimer et il n'a pas dépassé la mesure. Vous,
vous me semblez dépasser la mesure. Alors, je vous ramène
à l'ordre et je vous demande de redevenir pertinent au sujet.
M. Dufour: En tout cas, je pense bien que ce qui est dit est dit,
là. Ha, ha, ha! On ne pourra pas changer les choses, l'ordre des
choses.
M. le Président, en s'adressant toujours à M. Larose, vous
avez dit tout à l'heure que, dans les meilleures conditions, au point de
vue des coûts, ça pourrait seulement augmenter les charges. Est-ce
que vous pourriez nous expliciter un peu le sens de vos propos?
M. Larose (Gérald): On sait que, dans le secteur de la
construction, depuis 30 ans, on est dans la plus faible période
d'activité. Le taux de chômage est parmi les plus
élevés comme secteur industriel. Une
déréglementation dans le secteur industriel invitant n'importe
qui à intégrer ce secteur, dans la conjoncture actuelle, c'est
nécessairement un partage de la misère. Ce faisant, bon nombre de
salariés vont effectivement, encore plus nombreux, se partager
l'assurance-chômage et le bien-être social.
Plus grave encore, mais ce sont souvent des coûts qu'on ne veut
pas évaluer, c'est la dégradation du tissu social. La
réalité du chômage produit beaucoup de dysfonctionnements,
de périodes de tension qui engendrent la violence familiale, qui
engendrent la criminalité. Bref, à étaler la
misère, ou plutôt à la partager, on accroît les
coûts. Au minimum, quand quelqu'un est sécurisé dans un
emploi, même si cet emploi, dans la période difficile, n'est
peut-être pas le plus rémunérateur, il y a une certaine
sécurité, il y a un certain nombre de revenus. On dégrade
moins le tissu social dans ces termes-là. Parce que, je le
répète, contrairement à ce qu'on essaie de faire accroire,
contrairement à ce que l'APCHQ dit dans sa publicité, la loi 142
ne représente rien au niveau de la création d'emplois et de la
relance dans le secteur industriel; aucune étude n'a été
produite là-dessus, ce n'est que de la propagande. Alors, pour nous,
étendre la misère, c'est la plus mauvaise stratégie.
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît.
M. Dufour: Qu'est-ce que vous croyez qu'il pourrait arriver, en
supposant que le ministre persiste, dans son projet de loi, à
déréglementer tel que proposé? Est-ce que vous croyez que
ce seraient les normes du travail, purement et simplement, qui
s'appliqueraient? Parce que les normes du travail n'empêchent pas la
syndicalisation, à ce que je sache. Est-ce que vous avez un
scénario qui pourrait être susceptible de se produire? Parce que,
si on déréglemente, à ce que j'ai compris, la seule
façon qu'on peut déréglementer, c'est d'essayer d'abaisser
des coûts quelque part, mais, ça, sur l'employé. Mais, si
vous avez plus d'imagination que moi, j'aimerais bien que vous me le
démontriez. Qu'est-ce qui pourrait arriver comme scénario par
rapport à ça? Est-ce qu'il y a des gains quelque part, pour
quelqu'un, en dehors de l'entrepreneur, point, à la ligne?
M. Larose (Gérald): Au chapitre de la syndicalisation, je
suppose qu'en étant déréglementé on se retrouve
avec le code régulier, donc c'est la syndicalisation que nous
connaissions à l'époque, au début des années
soixante-dix, chantier par chantier. Et, dans le secteur résidentiel,
ça ne veut rien dire. Avant qu'on ne dépose les cartes, le
chantier est fini. Alors, concrètement, ça n'enlève pas le
droit à la syndicalisation techniquement, j'entends. Mais,
concrètement, c'est évident qu'on ne pourra jamais syndiquer ces
travailleurs-là. Alors, dans ce sens-là, c'est effectivement la
recréation des conditions qui existaient dans les années
soixante, début des années soixante-dix. Olivier.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais renseigner
cette Chambre, pas sur une question de privilège, non, non...
Le Président (M. Joly): Les privilèges, en
commission, ici, là...
M. Chevrette: Non, non, j'y vais sur un renseignement.
Le Président (M. Joly): En Chambre, oui, mais pas en
commission.
M. Chevrette: Vous me permettez d'y aller, M. le
Président?
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, M. le
député.
M. Chevrette: Nous avons mis la main, nous venons de mettre la
main sur un rapport de la CCA, «Board of directors», qui, le 28
septembre dernier, rencontrait le ministre. C'est donc avant le sommet de la
construction. Et voici ce qu'ils disent, et nous pourrons le déposer
pour le bénéfice de la commission. C'est le 28 septembre qu'ils
le rencontrent, dans un meeting pas le ministre, excusez:
«L'obligation d'adhérer à l'ACQ c'était
décidé, ça aux grands travaux et à l'APCHQ
augmenterait le «membership» et améliorerait de façon
drastique la situation financière de l'ACQ. L'ACQ informait ses membres
que la déréglementation ne saurait tarder puisque un projet de
loi allant dans ce sens serait déposé bientôt et que ces
changements se produiraient rapidement.»
Donc, quand vous avez affirmé que le Sommet était quelque
chose de tout à fait artificiel, de cynique, une farce, on en a les
preuves, là, très claires, noir sur blanc. Et c'est cette forme
de folie furieuse qui crée de l'animosité, justement. Quand on
décide d'avance, puis, pour se couvrir, qu'on convoque du monde pour les
amuser, pour amuser la galerie et, après ça, changer quatre
trente-sous pour 1,00 $, quand c'est tout décidé d'avance, c'est
pour ça que les consensus, pour votre information, ne tiennent plus. (17
h 50)
Je voudrais demander puis je sais qu'il ne pourra pas me
répondre aujourd'hui parce qu'ils ont décidé de ne pas
parler, mais il pourrait me répondre: Est-ce que c'est à
ça que M. le ministre de l'Industrie et du Commerce faisait allusion
quand il a déclaré: Des groupes d'intérêts puissants
sont devenus si puissants qu'ils forcent les gouvernements à prendre des
décisions contraires aux intérêts de la population? Le
ministre de l'Industrie et du Commerce se rappellera d'avoir écrit
ça lors d'un moment décisionnel de sa vie politique, dans un
texte très clair. Est-ce que c'est à ça qu'il faisait
allusion, oui ou non? M. le Président, madame...
Le Président (M. Joly): Mme la députée de
Chicoutimi, s'il vous plaît, il vous reste exactement trois minutes et
cinquante.
Mme Blackburn: Bon. Quelqu'un dont j'ai oublié le nom
disait: Peu importe la réponse si on ne peut ignorer ma question. Je
pense que vous avez posé une question claire et certainement très
saisissante, pas seulement pour les membres de cette commission, mais, à
l'évidence, pour les membres de la partie ministérielle. Vous
avez condamné la violence en rappelant que la violence était
condamnable sous toutes ses formes, qu'elle soit physique, psychologique ou
morale.
La violence dont sont l'objet les travailleurs aujourd'hui, je ne sais
pas si on le réalise bien c'est le cadeau de Noël qu'on fait
à 26 000 ou à 30 000 travailleurs de la construction c'est
de dire: On vient de gommer vos conditions de travail, ce qui vous permettait
d'avoir un niveau de vie à peu près respectable. Alors, il ne
faut pas s'étonner, en même temps qu'il faut le condamner, ni se
surprendre que ça crée des réactions.
Ce qui me semble être mal saisi actuellement je parle de
façon générale dans la population... Parce qu'on a
réussi, au gouvernement, dans le dossier de la construction
domiciliaire, en travaillant l'opinion publique au corps, à créer
le même préjugé qu'on l'a fait à l'endroit des
assistés sociaux, qu'on l'a fait à l'endroit de ceux qui sont
victimes des accidents de travail et qu'on va continuer de le faire sur toute
la partie la plus fragile de la société. C'est le même
résultat. Alors, l'image qui s'est créée dans la
population, c'est que c'est vrai, ça pourrait faire augmenter le
travail, peut-être même que ça blanchirait, comme le dit le
ministre, le travail, on aurait moins de travail au noir.
Moi, ce que je voudrais que vous me disiez, pour que les gens vous
entendent: Ça va être quoi, la situation de mon travailleur moyen?
Il a 40 ans, il travaille la moitié du temps ou les trois quarts du
temps dans le domiciliaire. Parce que, là, rendu à huit
logements, ça commence à être considérable; ce n'est
plus du résidentiel unique, là. Alors, ça va être
quoi, sa situation, demain matin, ce monsieur de 40 ans, 45 ans, qui est
travailleur de la construction? C'est quoi, ses chances de pouvoir rester un
véritable travailleur de la construction?
M. Larose (Gérald): écoutez, déjà, la
réalité, la moyenne, c'est 600 heures dans l'année, 15
semaines, déjà, pour un bassin qui est fermé.
imaginez-vous si, demain, le bassin est ouvert et n'importe qui peut
s'improviser travailleur de la construction! je vous dirai que le peuple
québécois est plutôt bricoleur, et ce n'est pas
compliqué d'aller faire des travaux dans le secteur de la construction.
il y a, au moment où on se parle, 23 % de la main-d'oeuvre active sortie
du circuit du travail. c'est avec ce bassin que les travailleurs de la
construction seront mis en concurrence. il n'est pas besoin d'être grand
clerc, savant ou universitaire pour comprendre que très rapidement ceux
qui vivent à peine de leur métier dans la présente
période seront sortis, eux, gens compétents, gens qui ont investi
pour vivre de ce métier, de leur propre secteur industriel. il y a
là, je le répète, une violence psychologique et une
violence économique qu'il nous faut dénoncer et condamner.
Et je voudrais, si vous me permettez parce que je sais qu'on est
à la fin dénoncer l'hypocrisie du ministre qui, dans son
attitude à la présente commission, a voulu épingler des
déclarations pour excuser sa propre violence et faire entendre à
la population qu'il n'y a pas de problème dans la construction, il y a
quelques leaders qui sont un petit peu intempestifs. Je dénonce
cette
hypocrisie. Personne n'est dupe de cette stratégie, surtout pas
le président de la CSN.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Larose. M. le
député de Drummond, s'il vous plaît.
M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. M. Larose,
d'entrée de jeu, j'ai apprécié vos remarques
préliminaires et je souscris pleinement qu'il y a différentes
formes de violence, et la violence verbale et la violence de comportement
peuvent y être incluses. Et je peux vous dire que j'en sais quelque
chose.
Ceci étant dit, M. le Président, lorsque je regarde, moi,
règle générale, lorsqu'il y a des problématiques,
plus on garde les sujets dans l'ignorance, plus on fragmente l'information,
plus on en donne des parcelles, plus c'est facile, à ce
moment-là, de laisser courir toutes sortes de rumeurs ou de
scénarios, hypothétiques ou non.
Dans mes remarques d'entrée, j'ai dit que, oui, il y un principe
qui est fondamental: le droit d'union. C'est un droit qui nous est reconnu dans
la charte des droits de la personne, mais il faut donner la chance aussi que ce
droit d'association là existe. Alors, je souscris, moi, que, si on
déréglemente, ça va être puis selon les
petites connaissances que je peux avoir, parce que c'est difficile d'avoir
toute l'information aller regrouper dans le secteur résidentiel
plusieurs chantiers. Alors, il y a un droit d'association qui va être
brimé, là.
Vous étiez présents lorsque je me suis
inquiété au niveau de la formation, au niveau de la carte de
compétence. Je pense, moi, qu'un législateur doit prévoir
aussi le temps. Puis je pense que ceux qui me succéderont ici un jour
mettront peut-être dans une nouvelle charte des droits le droit à
l'excellence, le droit d'être capable d'avoir des compétences pour
être capable de se dépasser. Puis, ça, je pense que c'est
une chose, moi, qui est fondamentale, qu'on est en train d'enlever à des
groupes de travailleurs et je ne reviendrai pas sur mes propos, vous
étiez là.
Lorsque j'ai fait mes remarques préliminaires, j'ai
suggéré à M. le ministre, moi... Bien oui, même avec
tous les moyens qu'un député peut avoir, puis Dieu sait qu'ils
sont minimes il en a quand même beaucoup plus, davantage que la
majorité de la population il est difficile d'avoir un portrait
global de l'industrie de la construction présentement, mais aussi
projeté sur les huit à 10 prochaines années. Parce que,
j'ai eu la chance aussi de le signaler, je regarde juste les grands travaux au
niveau de l'assainissement des eaux, on arrive à la fin de cette
période-là. Alors, les montants de 650 000 000 $ qu'on retrouvait
vers les années 1985, on ne les retrouvera plus aux années 1995
ou 1998. On parle plutôt de 100 000 000 $ par année.
Alors, ne croyez-vous pas, dans un but, là, d'éclaircir et
de redonner cette image à la construction aussi, que ce n'est pas ce
qu'on essaie de montrer, l'histoire des gros bras... Parce que j'ai eu la
chance, dans ma circonscription, moi, avec les gars de la construction, de
faire un projet qui a été merveilleux parce qu'ils ont
donné leur bénévolat, puis on a fait quelque chose pour
les aînés, qui a été fantastique. Alors, c'est des
gens qui ont peut-être, à cause du métier, puis, comme je
l'ai signalé, une allure dure, parce que c'est un métier qui est
dur, dans des conditions climatiques qui sont dures au Québec, mais qui
ont des coeurs qui sont gros comme ça. Alors, ne croyez-vous pas qu'il
serait possible maintenant, dans un temps d'arrêt, d'ici le prochain mois
je pense qu'on a toutes les informations, mais elles sont en
pièces détachées de dresser le vrai portrait de la
construction? Quel est l'âge moyen de nos travailleurs? Quelle est la
qualification? Quels sont nos besoins de formation? Ça existe ici et
là. Quel est le portrait de l'industrie d'ici les 10 prochaines
années? Qu'est-ce que le ministre de la Santé, la ministre de
l'Éducation, le ministre de l'Environnement, le ministre des Transports
prévoient au niveau des grands investissements? Qu'est-ce qu'on
sait?
Parce que, lorsqu'on interroge ici Hydro-Québec, puis lorsqu'on
essaie d'aller un peu plus loin et de dire quels sont les grands projets, il
n'y a rien qui mijote, là, pour les trois prochaines années, au
niveau des grands contrats, là, qui requièrent
énormément de main-d'oeuvre. Alors, si on était capable de
dresser ce portrait-là du secteur de la construction, un peu aussi du
vécu de la problématique... Parce que je vois des travailleurs,
moi, venir chez moi, puis qui me disent: Bien, regarde, à cause de mes
habilités, j'ai pu apporter une plus-value à ma maison. Vous avez
raison de signaler qu'on est bricoleur, au Québec. Puis, les gens de la
construction, c'est des gens aussi que, leur maison, ils vont faire quelque
chose qui est fantastique. Mais, avec les lois, bien, vous avez fini
d'écouler votre assurance-chômage et, si vous avez réussi
à avoir une maison qui vaut 125 000 000 $, vous n'avez même pas
droit à l'aide sociale.
Alors, est-ce que vous croyez, en conclusion, M. le Président,
que, si on mettait ce portrait avant de commencer une vraie négociation,
ça pourrait aider à clarifier et à redonner une nouvelle
image au secteur, et la vraie image?
Le Président (M. Joly): M. Larose, s'il vous
plaît.
M. Larose (Gérald): Très brièvement... Le
Président (M. Joly): S'il vous plaît.
M. Larose (Gérald): ...l'ensemble des informations
existent, il s'agit de les corriger, mais elles existent et elles devraient
être mises en forme. Je pense qu'on est particulièrement
équipés pour, effectivement, réfléchir à une
véritable stratégie industrielle dans la construction, en tenant
compte de la composition de la main-d'oeuvre, en tenant compte qu'elle vieillit
ça aussi, il y a des caractéristiques
particulières. Si on voulait faire un travail pour le secteur
industriel, je pense qu'on
procéderait bien autrement que par un projet de loi comme celui
qu'on a devant nous. C'est clair. (18 heures)
Le Président (M. Joly): M. le ministre, est-ce que vous
avez un commentaire?
M. Cherry: En conclusion, M. le Président, je pense qu'il
est important qu'on travaille à partir des mêmes données,
en faisant référence à un document qu'a
évoqué le député de Joliette. Il faut se souvenir
que, le 22 septembre dernier, on a rendu publique la documentation pour le
Sommet. Et les parties, à ce moment-là, savaient qu'elles
seraient convoquées le 7, ou le 8, ou le 9 octobre et connaissaient le
contenu, donc l'exercice des 7, 8 et 9 était justement pour la
préparation du Sommet.
Donc, une semaine plus tard, après que les documents aient
été rendus publics, ces gens-là sont allés dans une
réunion en Ontario et on dit qu'ils avaient reçu des documents.
Et, une des propositions qu'il y avait dans les 22 du Sommet était
celle-là. Donc, c'est simplement pour dire qu'eux en ont déduit
ça suite à un document qui avait été rendu public
une semaine avant et qui était connu de l'ensemble des intervenants.
Merci, M. le Président.
M. Dufour: Mais, juste pour dire...
Le Président (M. Joly): Oui, je vous permets.
M. Dufour: ...par exemple, que ce qu'ils nous ont dit hier, c'est
que leurs finances étaient bien correctes, et qu'ils avaient de l'argent
de côté, et que ça allait bien.
Une voix: Ce n'est pas la même chose. M. Cherry: Ce
n'est pas de ça qu'on parle.
M. Dufour: Non, non, je sais bien que ce n'est pas la même
chose, mais les finances ne sont pas bonnes et eux autres elles sont
bonnes.
Le Président (M. Joly): Parfait. Alors, au nom des membres
de cette commission, je tiens à remercier les gens de la CSN d'avoir
été parmi nous. Alors, nous suspendons nos travaux jusqu'à
20 heures, dans ce même salon. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
(Reprise à 20 h 6)
Le Président (M. Joly): Alors, bonsoir. Il me fait plaisir
de vous accueillir à cette commission. Alors, ce soir, comme vous
remarquez, nous recevons La Corporation des maîtres électriciens
du Québec. Alors, j'apprécierais si M. Jean Grenier,
président, pouvait nous présenter les gens qui l'accompagnent,
s'il vous plaît.
La Corporation des maîtres électriciens
du Québec (CMEQ)
M. Grenier (Jean): Merci, M. le Président. Au nom de La
Corporation des maîtres électriciens du Québec, il nous
fait plaisir d'assister à cette commission de l'économie et du
travail concernant le projet de loi 142. J'ai ici, à ma gauche, M.
Jean-Guy Brown, qui est le président sortant de La Corporation des
maîtres électriciens, ainsi que M. Yvon Guilbault, qui est le
directeur général de la Corporation. Et je vais laisser le soin
à M. Guilbault de lire le mémoire que nous vous présentons
ce soir.
Le Président (M. Joly): Peut-être avant, M. Grenier,
vous rappeler les règles, là: vous avez une vingtaine de minutes
moins si possible pour nous présenter votre mémoire
et, par après, les parlementaires échangeront avec vous. Alors,
je vous remercie.
M. Grenier (Jean): Oui.
Le Président (M. Joly): Allez, M. Grenier, s'il vous
plaît.
M. Guilbault (Yvon): Alors, M. le Président, pour
accélérer, tenir compte de votre mise en garde, je vais
débuter le mémoire à la p. 3. ,11 faut bien admettre, M.
le Président, que le projet de loi 142 a décontenancé la
CMEQ. Son contenu est inattendu si l'on accorde une quelconque signification
aux discussions relatives aux 17 propositions gouvernementales qui ont
été déposées au sommet de la construction: jamais
il ne fut question de déréglementer le secteur
résidentiel. Bien plus, la tendance générale, s'il y en a
eu une, était l'assujettissement.
Quoi qu'il en soit, à la lecture des articles de presse parus
depuis le 11 novembre 1993, on constate que la CMEQ n'a pas été
la seule intervenante à être surprise par le projet gouvernemental
de déréglementation du secteur résidentiel et la mise en
place précipitée d'une structure patronale à des fins de
relations du travail. Bref, le projet de loi 142 est sérieux et la CMEQ,
malgré le peu de temps dont elle disposait pour analyser l'impact de ces
nouvelles données, désire transmettre à la commission
parlementaire des commentaires qui ont fait l'objet d'un consensus chez ses
membres consultés. Deux éléments ont
particulièrement retenu notre attention: le désassujettissement
du secteur résidentiel et la nouvelle structure patronale à des
fins de négociation.
Premièrement, la déréglementation du secteur
résidentiel. Le travail dans le secteur résidentiel est
particulièrement synonyme de travail au noir. Ce phénomène
est, de toute évidence, relié à la capacité de
payer de la clientèle, particulièrement dans le secteur
résidentiel, quoique de nombreux entrepreneurs électriciens
se
plaignent qu'ils n'arrivent plus à concurrencer le prix de la
main-d'oeuvre dans l'entretien industriel. De nombreuses industries
préfèrent maintenant embaucher de façon permanente un
électricien plutôt que de faire appel périodiquement aux
services d'un entrepreneur électricien.
Comment ça se passe dans le secteur résidentiel? Des
consultations avec des entrepreneurs électriciens ont permis de
dégager les commentaires suivants, qu'on peut facilement
généraliser: En 1993, l'installation électrique d'une
résidence coûte en moyenne entre 2400 $ et 3300 $ plus taxes, et
la tendance est plutôt à la baisse qu'à la hausse. De ce
prix, il faut retrancher environ 1800 $ pour les matériaux; le reste
représente le coût en main-d'oeuvre. On estime qu'il faut environ
le nombre est variable, un peu, en plus et en moins 40
hommes-heure pour compléter l'installation électrique d'une
résidence moyenne. Si l'on fait la différence entre le prix total
et le coût des matériaux, il faut en conclure que l'installation
électrique de la résidence est effectuée à 15 $
l'heure à son prix le plus bas et à 37,50 $ à son prix le
plus élevé. On présume que les entrepreneurs
électriciens qui demandent 3300 $ pour leur travail respectent les
clauses du décret. Cependant, ils ne trouvent pas facilement preneur et
bon nombre d'entre eux ont transféré leurs activités dans
les secteurs commercial et industriel. (20 h 10)
À des fins de comparaison, au coeur de la récession de
1982, l'installation électrique d'une résidence coûtait au
consommateur autoconstructeur ou au constructeur d'habitations promoteur entre
2200 $ et 2600 $, taxes incluses. Si l'on fait l'hypothèse que les prix
des matériaux étaient moindres qu'en 1993, c'est la main-d'oeuvre
qui a écopé de l'ajustement entre l'offre et la demande.
Actuellement, le consommateur peut obtenir les services d'un
électricien sur le marché noir au taux d'environ 15 $ l'heure. Ce
même électricien est payé 23,78 $ l'heure selon les normes
du décret, plus tous les avantages sociaux. Dans les faits, un
électricien coûte directement à un entrepreneur
électricien soucieux de respecter le décret 34,45 $ l'heure si on
inclut tous les avantages sociaux et tous les paiements gouvernementaux qui
doivent être effectués. À ce montant, il faut ajouter les
frais d'administration et le profit. L'écart entre les deux taux, le
noir et l'officiel, est tel que les entrepreneurs en règle sont,
à toutes fins pratiques, sortis du marché résidentiel. Il
n'est pas rare qu'un électricien en chômage désireux de
travailler offre ses services aux entrepreneurs électriciens à un
taux horaire de 15 $ au noir, à condition de ne pas perdre ses
prestations d'assurance-chômage.
Systématiquement, le consommateur offre à l'entrepreneur
électricien de le payer comptant si les taxes sont exclues du prix de la
facture. Il y a de moins en moins de travail pour l'entrepreneur qui refuse ce
genre de compromis. Le consommateur négocie de plus en plus le prix du
travail de l'entrepreneur électricien. Il n'est pas craintif de
s'associer à un travailleur au noir à qui il n'aura pas à
payer les taxes, TPS et TVQ, une économie préalable de 11,28 %.
L'entrepreneur en règle ne peut concurrencer ce genre de transaction. Si
le consommateur accepte de payer un prix plus élevé que celui du
marché noir, la facture reste souvent impayée pendant deux, trois
ou quatre mois, période pendant laquelle l'entrepreneur doit assumer le
financement de son travail.
Selon les entrepreneurs électriciens consultés, le
travailleur au noir cherche à égaler le revenu net qu'il
recevrait ou a déjà reçu en travaillant selon les normes
du décret de la construction. Cette approche lui permet de rencontrer
à court terme ses obligations monétaires. Un électricien,
payé selon les conditions du décret, qui travaille 40 heures par
semaine, reçoit un revenu net de 459,34 $ sur un revenu brut de 1059,83
$: 12 $ l'heure. Au montant hebdomadaire de 459,34 $ s'ajoute un montant de
104,63 $ que l'électricien recevrait de la CCQ en juillet ou en
décembre sous forme de chèques de voyage chèques de
voyage chèque de vacances, pardon.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: II doit être à la veille de partir quelque
part.
Une voix: C'est pour aller en voyage.
M. Guilbault (Yvon): J'y pensais justement.
Les taxes font un tort immense au marché réglementaire. La
TPS et la TVQ sont refusées par les consommateurs qui estiment qu'en
payant comptant ils seront dispensés de ces taxes par l'entrepreneur. Il
faut comprendre que 11,28 % en moins sur le prix d'un travail, c'est
énorme. Manifestement, ces taxes n'ont pas été
digérées par la population.
Dans le secteur résidentiel, tous les témoignages des
entrepreneurs électriciens concordent: ils ne peuvent plus être
compétitifs au taux du décret de la construction et à ses
avantages sociaux. Un électricien, comme je l'ai mentionné, en
règle leur coûte 34,45 $ l'heure, montant auquel il faut ajouter
les frais d'administration et le profit.
Le marché résidentiel s'est déjà
ajusté. Actuellement, le marché s'est déjà
ajusté à ce que le consommateur veut payer au moyen du travail au
noir, et les entrepreneurs qui y oeuvrent font preuve d'imagination pour
ajuster leur prix à la capacité de payer de leur
clientèle. Il appert cependant que le consommateur est prêt
à payer à un entrepreneur, pour des motifs de garantie, de
réputation, de fiabilité et de responsabilité, un prix
supérieur à celui exigé au travail au noir mais non un
taux de charge qui découle des conditions de travail fixées par
le décret de la construction.
Conséquemment, les entrepreneurs électriciens ne croient
pas qu'une déréglementation du secteur résidentiel aurait
un impact majeur sur la baisse des prix de la
main-d'oeuvre en électricité, puisque, dans la
réalité, l'ajustement est déjà fait. Les quelques
entrepreneurs électriciens qui tentent encore de travailler aux
conditions du décret en mettant l'accent sur leur réputation et
la qualité de leurs travaux réussissent difficilement et
péniblement à décrocher des contrats. Il est de plus en
plus fréquent dans le secteur résidentiel que les heures
rapportées à la CCQ soient en deçà des heures
réellement travaillées.
Le jeu de l'offre et de la demande s'exerce presque dans son état
le plus pur dans le secteur résidentiel. On négocie sur un
montant forfaitaire à la job, comme on dit couramment et
on exécute les travaux. Le taux du décret n'est pas pris en
considération. Par la suite, on divise le montant forfaitaire
versé à l'électricien par le taux du décret pour
obtenir le nombre d'heures à inclure dans le rapport mensuel soumis
à la CCQ par l'entrepreneur.
N'allez pas penser que le travailleur est nécessairement
berné. Il s'agit, dans bien des cas, d'une entente à l'amiable
entre le travailleur et son employeur. Ces derniers sont conscients que c'est
ce qu'il faut faire pour pouvoir travailler, et le travailleur reste couvert
par les avantages sociaux de la CCQ. Il est également eligible, le cas
échéant, aux prestations d'assurance-chômage.
Est-ce qu'il y aura encore du travail au noir après une
déréglementation? Si tous les entrepreneurs électriciens
sont d'accord pour affirmer que les conditions du décret sont trop
élevées pour la capacité de payer de la clientèle
résidentielle et qu'elles sont l'une des causes du travail au noir, en
revanche, la déréglementation du secteur résidentiel,
est-ce que ça va suffire à contrer le travail au noir? On a
posé la question aux entrepreneurs électriciens qui vivent ces
situations-là quotidiennement. Les réponses sont
intéressantes: tous conviennent que les conditions de travail
imposées par le décret au secteur résidentiel sont
disproportionnées par rapport à la capacité de payer du
marché actuel.
Pourtant, il y a un peu plus de un an, le gouvernement n'a pas
hésité, par l'adoption de la loi 185, à imposer des
amendes sévères aux entrepreneurs qui se rendaient coupables de
contrevenir à ce même décret sous prétexte de
combattre le travail au noir. Aujourd'hui, vous allez comprendre qu'ils
trouvent curieux que le gouvernement soudainement légalise toutes les
activités dans le secteur résidentiel en autant que les normes
minimales du travail soient respectées et dans le même but:
combattre le travail au noir.
Les entrepreneurs électriciens estiment que la
déréglementation du secteur résidentiel leur permettra de
compétitionner le travailleur au noir, qui a tendance à ajuster
son prix au taux officiel. Ils pourront ainsi embaucher légalement des
électriciens à un taux que la clientèle peut se permettre
de payer. Les électriciens pourront ainsi profiter du Régime de
rentes du Québec et se rendre éligibles aux prestations
d'assurance-chômage. Ils ne profiteront plus, cependant, de ce que le
décret leur offre en avantages sociaux, les protections de toutes
sortes, ce qui peut causer un problème.
Les entrepreneurs électriciens croient qu'un électricien
compétent sera rémunéré environ 18 $ l'heure sur le
marché libre, un peu plus que le taux du marché noir actuel. Les
apprentis seront rémunérés proportionnellement.
Les entrepreneurs électriciens ne croient pas que la
déréglementation du secteur résidentiel éliminera
le travail au noir, mais la mesure permettra aux entrepreneurs d'être
plus flexibles et plus compétitifs et de réagir en toute
légalité à la capacité de payer de la
clientèle. Par contre, la déréglementation attirera dans
le secteur résidentiel toute une panoplie de gens qui, profitant de
longues vacances professeurs, policiers, pompiers, chauffeurs de taxis,
etc. n'hésiteront pas à travailler à rabais et au
noir pour arrondir leurs fins de mois. Ce qu'une mesure combat, l'autre
amène évidemment aussi des abus dans l'autre sens.
De toute évidence, l'industrie de la construction est
demeurée inflexible aux nouveaux paramètres économiques et
a été incapable d'ajuster son offre. La diminution dramatique des
heures travaillées rapportées à la CCQ l'année
dernière par rapport à l'année précédente
est l'indice tragique de l'augmentation du travail au noir et, à toutes
fins pratiques, conséquence des mesures de rationalisation
effectuées par les entreprises des autres secteurs d'activité
économique pour ajuster l'offre à la demande: mises à
pied, pertes d'emplois, etc. En ce sens, la déréglementation du
secteur résidentiel est devenue inévitable puisque aucune
négociation significative n'a été entreprise pour tenir
compte des nouvelles réalités économiques.
Plusieurs membres de la CMEQ auraient préféré une
entente négociée sur des conditions de travail différentes
pour le secteur résidentiel à la mesure de la capacité de
payer de la clientèle. Aujourd'hui, ils acceptent la
déréglementation, même si, conséquemment, les
opérations quotidiennes de ces entreprises seront modifiées
profondément. Us croient difficilement en la capacité des parties
négociatrices de s'entendre à court ou à moyen terme sur
quoi que ce soit dans ce secteur où la notion d'accès à la
propriété prend le pas sur le rendement, sur l'investissement.
Ils font la distinction entre un consommateur qui rêve d'un toit et un
investisseur qui s'attend à un revenu sur son placement. La
capacité de payer n'est pas la même pour l'un et l'autre.
En conclusion sur ce volet du projet de loi 142, la CMEQ appuie la
volonté du gouvernement de déréglementer le secteur
résidentiel dans les circonstances actuelles. Les entrepreneurs ne
peuvent plus survivre dans ce marché devenu incontrôlable, et la
CMEQ est convaincue que ce n'est pas l'imposition de lourdes amendes et une
surveillance accrue qui y changeront quoi que ce soit.
En contrepartie, une autre thèse a été
soulevée lors des consultations avec les maîtres
électriciens, et, à cause de sa pertinence, nous croyons utile de
vous la transmettre. Plusieurs de ces entrepreneurs s'interrogent, à si
court terme, sur les effets profonds de la déréglementation quant
au taux de salaire versé aux électriciens
oeuvrant dans ce secteur. Ils croient qu'il serait justifié que
le gouvernement fixe un plancher horaire de 15 $ pour tenter d'uniformiser un
tant soit peu le tarif horaire. Cette option rallie de nombreux entrepreneurs,
qui imaginent mal un plancher horaire de 5,85 $ pour un électricien.
Alors, vous voyez un peu le genre de dissension qui peut régner aussi
chez nous.
Deuxièmement, le régime de négociation, un
élément aussi excessivement important et majeur, peut-être
à plus long terme. Il y a un vieux proverbe qui dit que le mieux est
l'ennemi du bien. À vouloir trop en faire, quelquefois on rate la cible.
La CMEQ n'est absolument pas convaincue, mais pas du tout, que le régime
de négociation proposé par le projet de loi 142 améliore
le régime actuel. Au contraire, il risque d'augmenter la confusion chez
les entrepreneurs déjà blasés par des changements sans
fin. Voyons-y de plus près. (20 h 20)
L'AECQ et l'art de se faire des amis. Ce n'est pas un livre de Dale
Carnegie, ce qui va suivre. Au fil des ans, il faut admettre que l'AECQ ne
s'est pas fait d'amis. Son attitude hautaine, son acharnement à ignorer
les associations traditionnelles, sa réputation méritée de
ne pas se coller à son «membership» et sa propension
à agir en secret n'ont pas contribué à faire monter sa
cote de popularité auprès des entrepreneurs. En décembre
1985, elle a rivé le clou aux associations traditionnelles en les
expulsant de ses structures par une modification de ses règlements. Elle
a contribué à diviser les entrepreneurs, qui n'ont pourtant
jamais cessé de manifester un fort sentiment d'appartenance aux
associations traditionnelles.
En fait, il y avait l'AECQ et les associations traditionnelles. L'AECQ,
par son monopole de représentativité en relations du travail, a
toujours mal toléré le droit à la dissidence et colportait
subtilement dans les officines gouvernementales le fait qu'une association qui
ne partageait pas sa position semait la discorde et contribuait à la
dissension patronale. Les entrepreneurs se sont constamment plaints du peu de
tribune que l'AECQ mettait à leur disposition pour faire entendre
collectivement leur point de vue. Celle-ci a toujours privilégié
les réunions de cuisine aux grandes assemblées collectives
d'où peuvent se dégager des consensus. C'est clair, et nous
l'avons déjà dit avant aujourd'hui, que l'AECQ a une mauvaise
image en raison de ses structures autocrates et de son manque de transparence
qu'elle a longtemps justifiée par des motifs de stratégie.
Par contre, les entrepreneurs ont toujours voulu une association
patronale forte et unifiée, où les forces vives de l'industrie
seraient réunies et où chaque entrepreneur pourrait se faire
entendre. Cette affirmation a d'ailleurs fait l'objet d'un consensus au sommet.
Le projet de loi 142, dans sa forme actuelle, ne répond pas à ce
besoin.
Le projet de loi 142 stipule qu'il devrait y avoir dans l'industrie de
la construction quatre conventions collectives et trois agents patronaux
négociateurs: l'ACRGTQ, l'ACQ et l'APCHQ. L'AECQ ferait office d'agent
de coordination entre les associations qui disposent d'un mandat de
négociation. Tout entrepreneur, à l'exception des membres des
deux corporations, devrait être membre de l'une des trois associations
responsables d'une convention collective. Le conseil d'administration de l'AECQ
serait formé de neuf membres, dont trois représentants des trois
associations précitées et deux observateurs en provenance des
deux corporations.
Cette structure est cousue de fil blanc et ne tient pas compte du fait
que les entrepreneurs et les travailleurs oeuvrent régulièrement
dans plusieurs secteurs. Il faut aussi entrevoir des problèmes de
définition de secteurs pour l'application d'une convention collective
par rapport à une autre. Il n'est pas réaliste de penser qu'un
entrepreneur ou un travailleur ait la possibilité d'être en
lock-out ou en grève dans un secteur, tout en continuant à
travailler dans un autre. En grève le matin, on travaille
l'après-midi, puis vice-versa le lendemain. Le cours quotidien des
affaires ne se divise pas de cette façon. Ce qu'il faut, c'est une seule
convention collective contenant des clauses relatives à trois secteurs,
si l'on tient compte du fait que le projet de loi 142
déréglemente le secteur résidentiel.
Il faut aussi que l'AECQ devienne un centre nerveux d'échanges
entre les principaux intervenants de l'industrie et qu'elle soit un lieu de
rassemblement dont le conseil d'administration serait composé de tous
les leaders des associations patronales traditionnelles. La CMEQ estime que
l'AECQ, dans une nouvelle orientation, doit devenir ce lieu où les
associations traditionnelles pourront mettre leur dynamisme au profit de
l'industrie et un centre d'échanges sur tout sujet
d'intérêt commun, le tout dans une structure où les
entrepreneurs seront consultés et écoutés.
Actuellement, sur nombre de dossiers, les associations traditionnelles
agissent de façon isolée, sans véritable consultation
entre elles. Il n'y a aucune structure pour régler ou atténuer
les divergences d'opinions ou ce que les observateurs extérieurs
pourraient appeler la dissension patronale.
Il ne faut pas être angélique non plus. Il existe des
points de vue différents selon le statut, le lieu d'origine,
l'activité ou la taille de l'entreprise: Entrepreneur
général? Entrepreneur sous-traitant? Viens-tu de Montréal?
Viens-tu de Québec ou des régions? Autonome ou important
entrepreneur? Résidentiel ou industriel?
La CMEQ estime qu'en plus de la négociation certains dossiers
devraient faire l'objet d'une meilleure concertation dans l'industrie pour
éviter les dédoublements, source de confusion et de coûts.
La CSST et la formation, par exemple, dont toutes les associations s'occupent
en partie, pourrait être l'objet d'un dossier majeur de l'AECQ. Il
pourrait y avoir d'autres dossiers communs, comme l'élaboration de plans
de relance de l'industrie ou la mise en place de moyens pour atténuer le
travail au noir. Les entrepreneurs pourraient profiter des bureaux
régionaux de l'AECQ pour avoir accès à ces services
communs.
Ce qui est proposé est une structure boiteuse de
négociation. Il faut faire preuve d'une certaine logique à la
lumière du contenu du projet de loi 142. L'intention gouvernementale est
de déréglementer le secteur résidentiel huit
logements et moins un volet qui n'avait pas été
annoncé et qui vient amputer la thèse des quatre conventions
collectives. Attendu qu'il est beaucoup plus approprié de
considérer le neuf logements et plus comme faisant partie du secteur
commercial en se basant sur le principe du retour sur l'investissement, il
devient inutile de conserver la thèse d'une convention collective pour
le secteur résidentiel devenu déréglementé. L'APCHQ
n'a donc plus à jouer le rôle qui lui était destiné
par le projet de loi 142: négocier au nom de la partie patronale les
conditions de travail du secteur résidentiel. De l'avis unanime de tous
les entrepreneurs consultés, en déréglementant le huit
logements et moins, le projet de loi 142 a rayé du tableau le secteur
résidentiel pour les fins de négociation. L'APCHQ n'a plus
personne à représenter.
Faisons ici une parenthèse. Certains entrepreneurs se sont
interrogés sur les critères retenus par le gouvernement pour
déréglementer le huit logements et moins. Pourquoi avoir choisi
huit logements? Pourquoi pas six? Pourquoi pas quatre? Fin de la
parenthèse. si le secteur résidentiel est
déréglementé, que l'apchq n'a plus de rôle à
jouer pour des fins de négociation et que, par hypothèse, le
secteur de la voirie et du génie civil, représenté par
l'acrgtq, occupe 10 % des entrepreneurs, il nous faut conclure que tous les
autres entrepreneurs en construction devront devenir membres de l'acq pour les
fins du régime de négociation, puisque le projet de loi
prévoit une exception pour les membres des deux corporations auxquelles,
suivant notre logique, il faut ajouter l'apchq, devenue observatrice. ainsi,
l'acq serait chargée de négocier les conventions collectives des
secteurs industriel, commercial et institutionnel, même si la grande
majorité des membres des deux corporations et de l'apchq oeuvrent
irrégulièrement dans ces secteurs.
D'autre part, un article du projet de loi permet à l'une des
associations responsables de négociations de confier son mandat à
l'AECQ. L'ACRGTQ a déjà exprimé son intention de
s'exécuter en ce sens, et rien ne dit que l'ACQ n'en fera pas autant,
compte tenu des responsabilités énormes qui lui seraient
confiées si le projet de loi était adopté sans
modification.
Par conséquent, c'est un retour au statu quo. L'AECQ n'aura plus
un rôle de coordonnateur, mais un véritable rôle de
négociateur, ce qu'elle fait actuellement. Il faut convenir que ce
scénario-là est plausible. Si la logique du projet de loi est
maintenue, c'est la composition du conseil d'administration de l'AECQ qu'il
faut questionner dans le nouveau contexte de la déréglementation
résidentielle. L'APCHQ n'est plus justifiée de détenir
trois votes au même titre que l'ACRGTQ et l'ACQ, mais doit être
confinée à un rôle d'observateur comme la CMEQ et la
CMMTQ.
Deux associations, l'ACQ et l'ACRGTQ, auraient des droits de vote et
trois autres associations seraient observateurs. Elles ne représentent
pas un secteur, mais elles ont des membres qui travaillent dans l'un et l'autre
des secteurs représentés par l'ACRGTQ et l'ACQ. Ironiquement, si
ces deux dernières associations transfèrent leur mandat de
négociateur comme le projet de loi le permet, les conditions de travail
de ces secteurs seraient potentiellement négociées par l'AECQ. Et
on vous a fait une figure de l'étrange image que représenterait
le conseil d'administration de l'AECQ: deux parties avec droit de vote et trois
parties qui seraient observateurs.
On a une vision différente de cette industrie-là, parce
que le projet de loi nous a quand même forcés à
réfléchir intensément et rapidement. La CMEQ ne croit pas
à la viabilité, à la vitalité et au dynamisme d'une
telle structure, qui fait fi du sentiment d'appartenance des entrepreneurs aux
associations traditionnelles, qui ne tient pas compte du va-et-vient continuel
d'un secteur à l'autre des entrepreneurs dans le cours normal de leurs
affaires et, surtout, qui ne permet pas de créer un véritable
centre de concertation entre les associations traditionnelles bien
ancrées dans la vie quotidienne des entrepreneurs.
L'AECQ, si elle doit continuer d'exister, et elle doit le faire, doit
être ce centre de concertation. Il faut, par contre, en changer la raison
d'être en fonction de sa mauvaise image. L'AECQ renouvelée doit
devenir un lieu de rencontre des représentants des cinq associations
traditionnelles pour traiter non seulement des négociations et des
relations de travail, mais de tout dossier commun à l'industrie qui,
comme nous l'avons dit, pourrait être la CSST ou la formation.
Actuellement, souvent, on se rencontre juste aux commissions parlementaires
elles sont assez fréquentes on se voit, mais on ne discute
pas nécessairement.
L'AECQ ne doit pas être une sixième association patronale
qui tente de se démarquer des cinq associations patronales
traditionnelles, mais une table d'échanges où les
délégués patronaux peuvent émettre leur point de
vue, discuter, se rallier à de nouvelles idées, dresser une
position commune sur des sujets communs, bref s'habituer à se rencontrer
dans un climat de respect, dans le plus grand intérêt des
entrepreneurs qu'ils représentent. À cette table, les
délégués patronaux devront faire abstraction de leurs
différences et se rallier autour de leurs points de convergence. Je
l'aime, cette phrase-là, en passant, M. le ministre.
Actuellement, l'AECQ et les associations...
Le Président (M. Joly): Voulez-vous la
répéter? Voulez-vous la répéter, s'il vous
plaît?
M. Guilbault (Yvon): Bien, je vais perdre mon temps.
Le Président (M. Joly): Non, non, non.
M. Guilbault (Yvon): Mais c'était juste pour voir si vous
m'écoutiez.
Le Président (M. Joly): Pour le bénéfice des
membres de cette commission.
M. Guilbault (Yvon): À cette table, les
délégués patronaux devront faire abstraction de leurs
différences et se rallier autour de leurs points de convergence. (20 h
30)
Actuellement, l'AECQ et les associations patronales traditionnelles se
partagent, à quelques exceptions près, le même
«membership». C'est ça qui est curieux, tout le monde parle
au nom des mêmes gens. Les deux groupes représentent les
mêmes entrepreneurs. Pourtant, il n'est pas rare qu'ils émettent
plusieurs points de vue différents sur un même dossier au nom de
ces mêmes entrepreneurs. Ces points de vue pourraient être
régulièrement conciliés si la structure patronale de
l'industrie était modifiée. Le projet de loi 142 peut devenir ce
catalyseur si le législateur prend en considération toutes les
forces patronales de l'industrie. L'AECQ a une mauvaise image c'est la
dernière fois que je le dis mais ses services et son expertise
sont tout de même appréciés des entrepreneurs. Il faut y
ajouter la cohésion et la structure nécessaires à
l'éclosion d'un dialogue permanent entre les leaders que ces
entrepreneurs-là se sont choisis.
Le projet de loi 142, dans son volet «régime de
négociation», ne répond pas à ces exigences, mais il
a tout de même provoqué, à l'intérieur des instances
de la CMEQ, un examen intéressant de la situation et a permis
l'émergence de propositions dont nous voulons faire part à la
commission.
Alors, on propose un conseil d'administration de l'AECQ, qui soit
formé de 20 entrepreneurs, soit quatre délégués
nommés par chacune des cinq associations traditionnelles: APCHQ, ACQ,
ACRGTQ, CMEQ et CMMTQ. Et chaque délégué aurait un droit
de vote. On se retrouverait avec un organigramme qui est beaucoup plus
plausible. Comme commentaire, c'est que l'objectif est de créer une
table commune où les leaders patronaux, choisis par leurs pairs, peuvent
se rencontrer, discuter et prendre des décisions. L'AECQ serait un
organisme autonome, mais la composition de son conseil d'administration
permettrait aux associations traditionnelles de se rapprocher, de comparer
leurs positions et de dégager des consensus.
Actuellement, l'AECQ et les associations traditionnelles se targuent de
parler au nom des mêmes entrepreneurs sur les mêmes sujets. L'AECQ,
la grosse association et la plus puissante par son nombre de membres, a
toujours tenté, comme je l'ai dit, d'écarter les leaders qui ne
pensaient pas comme elle. Il faut mettre fin à cela et impliquer les
leaders des associations traditionnelles qui ont aussi des comptes à
rendre à ces mêmes membres. Les communications entre l'AECQ,
renouvelée, et les associations traditionnelles devraient
s'améliorer. Il ne serait pas impensable que l'AECQ puisse utiliser les
structures des associations patronales, des associations traditionnelles pour
communiquer avec les entrepreneurs. Elle pourrait ainsi profiter du sentiment
d'appar- tenance que les associations traditionnelles entretiennent avec leurs
membres.
Il est à noter que chacune des associations traditionnelles
déléguerait quatre représentants au conseil
d'administration et que chacun aurait un droit de vote. Nous ne nous sommes pas
engagés dans un laborieux processus de calcul pour connaître
l'importance relative de chacune de ces associations. Nous nous sommes
basés sur le fait que, traditionnellement, l'industrie a reconnu cinq
associations patronales majeures et nous avons traduit cette reconnaissance au
sein du conseil d'administration de l'AECQ renouvelée. Nous avons voulu
créer un conseil d'administration basé sur le respect des
opinions des intervenants où les meilleures solutions prévalent
au gré des discussions plutôt qu'une table où une
association aurait tendance à croire en son ascendant uniquement en
fonction du nombre de votes qu'elle détient.
Le comité exécutif serait formé de 10 personnes,
dont deux en provenance de chacune des associations nommées au conseil
d'administration. Alors, comme commentaire, il est nécessaire
d'augmenter la synergie entre la nouvelle AECQ et les associations
traditionnelles. La composition du comité exécutif de l'AECQ
donne l'assurance que chacune des associations traditionnelles y serait
représentée. Le conseil d'administration a un droit de
décision sur le choix des officiers. Et cette structure permet que des
interlocuteurs valables de toutes les associations traditionnelles fassent
partie de chacune des instances de l'AECQ, ingrédient nécessaire
à toute bonne discussion.
Qu'une seule convention collective soit négociée par
l'AECQ pour tous les travaux assujettis à la loi sur les relations de
travail dans l'industrie de la construction. Mais cette convention devrait
tenir compte des clauses relatives à trois secteurs: la voirie et le
génie civil, l'industriel, le commercial et l'institutionnel. Une seule
convention doit être négociée dans l'industrie et cette
convention-là serait négociée par l'AECQ,
renouvelée, qui en serait, évidemment, l'agent
négociateur. Cette convention peut contenir des clauses
spécifiques à un secteur particulier d'activité. Et les
entrepreneurs consultés ne retiennent aucunement l'idée
d'introduire la notion de plusieurs conventions collectives, source, pour eux,
de nouveaux tracas administratifs. J'ai dû passer deux heures dans
l'industriel, ce matin; deux heures dans le commercial, après-midi; deux
heures dans l'institutionnel, après-midi. Faire une compilation à
la fin de la journée, à la fin de la semaine, à la fin du
mois. C'est un problème, des problèmes administratifs
incommensurables! Les entrepreneurs n'acceptent pas de comptabiliser les heures
travaillées par secteur.
Partout, ce sont les mêmes acteurs en présence. Il est tout
à fait théorique de penser qu'il peut y avoir entente dans un
secteur et grève dans un autre. L'entrepreneur est indivisible dans ses
activités. Il ne peut pas être à moitié en
grève et à moitié au travail. Ce serait inopérable
et inadministrable. Les entrepreneurs favorisent nettement une structure qui
conduit à la conclusion
d'une seule convention collective, et je pense que cette
opinion-là doit être écoutée.
En termes de «membership», c'est que tous les entrepreneurs
en construction doivent être membres de l'une ou l'autre de ces
associations traditionnelles j'ai presque terminé, M. le
Président, si c'est ça qui fait problème et
directement ou par association affiliée, et qu'une cotisation distincte
soit versée par chaque entreprise de construction à l'AECQ pour
les fins de relations du travail ou toute autre matière traitée
par l'AECQ.
Alors, par leur rôle au sein de l'AECQ et par leur vocation
respective, les associations traditionnelles seraient le pivot patronal de
l'industrie de la construction. Et il est conséquent que tous les
entrepreneurs en construction assujettis à la loi sur les relations de
travail dans l'industrie de la construction adhèrent à l'une ou
l'autre des association traditionnelles de leur choix, compte tenu des services
rendus par les associations et l'AECQ. Et, pour éviter les duplications
de «membership» et des coûts additionnels pour les
entrepreneurs, un entrepreneur sera également considéré en
règle s'il est affilié, s'il est membre d'une association
affiliée à une association traditionnelle. Alors, cette mesure a
pour objectif de respecter le choix de l'entrepreneur.
Il y a des comités permanents qu'on prévoit pour assurer
une liaison constante avec les entrepreneurs en construction. On veut
créer par cette structure une synergie, une synergie entre chacune des
associations, de telle façon qu'on puisse représenter valablement
le point de vue des entrepreneurs.
Le Président (M. Joly): M. Guilbault,
j'apprécierais si vous pouviez conclure. Comme vous voyez, j'ai
largement...
M. Guilbault (Yvon): Vous avez été gentil.
Le Président (M. Joly): ...largement dépassé
le temps. Au lieu de 20 minutes, je vous ai accordé 32 minutes...
M. Guilbault (Yvon): M. le Président...
Le Président (M. Joly): ...et même avec la belle
vitesse avec laquelle vous essayez de nous livrer ça, et compte tenu de
l'importance et de l'intérêt que votre mémoire
représente, j'ai essayé d'être assez indulgent. Alors, si
on veut avoir du temps pour échanger avec vous, il faudrait
peut-être arriver avec une conclusion.
M. Guilbault (Yvon): M. le Président, je vous remercie. Je
conclus. L'essentiel du message est livré, vous avez été
patient, et, moi, j'ai essayé d'être rapide, et ça n'a pas
suffit.
Le Président (M. Joly): Oui, tous les deux, on a
essayé, je pense, de se rapprocher l'un de l'autre, et je pense qu'on a
réussi à faire un bout de chemin ensemble, et je voudrais
continuer à le faire avec vous.
M. Guilbault (Yvon): Alors, j'ai terminé. Écoutez,
l'essentiel du message a été livré, je pense.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, je vais
reconnaître M. le ministre. M. le ministre, compte tenu qu'il nous reste
une vingtaine de minutes, je vous accorderais sept à huit minutes; sept
à huit minutes pour l'Opposition. Et M. le député de
Drummond aussi, sûrement, voudra intervenir.
M. Cherry: O.K. Rapidement, M. le Président, c'est parce
qu'on a convenu, les deux partis, de vous donner plus de temps en diminuant le
nôtre, parce qu'il y a quand même des choses là-dedans.
À la page 8, par exemple, vous reprenez des thèmes dont on a
déjà parlé ensemble: «Le jeu de l'offre et de la
demande s'exerce presque à son état le plus pur... On
négocie sur un montant forfaitaire, à la job...» Et,
après ça, vous expliquez que, basé sur cette somme
d'argent là payée, c'est divisé par le nombre d'heures, et
c'est ça qu'on rapporte à la CCQ.
Je me souviens de votre mémoire, à 185 ou 186, où
vous élaboriez cinq façons différentes de contourner le
système. Et vous terminiez à chaque fois le paragraphe en disant:
La raison pour laquelle on le fait, c'est parce que tout le monde le fait. Vous
nous revenez, un an ou un an et demi après, et ce que vous nous
décrivez, en d'autres mots, ce que vous nous dites, c'est que ça
continue encore et qu'il n'y a pas... Ce que vous nous dites, finalement, c'est
qu'il n'y pas moyen de faire autrement c'est ce que vous nous dites
dans le résidentiel. (20 h 40)
Vous avez entendu, sûrement, les gens qui ont passé avant
vous dire: Bon, c'est parce que les employeurs abusent et qu'ils nous
l'imposent, et on souhaiterait quasiment de ne pas être obligé de
le faire. Et là, quand on lit votre mémoire, vous dites: II y a
des gens qui disent: Moi, je vais le faire comme ça pour pas que
ça dérange mon chômage. Bien, là, ce que je
comprends de votre mémoire et je ne veux pas vous mettre des
paroles dans la bouche, que vous n'avez pas dites.... Est-ce que c'est des
propositions qui font l'affaire de tout le monde, ou si c'est simplement une
façon de faire de la pression des employeurs, pour dire: Tu travailles
comme ça, ou bien je vais en prendre 10 qui sont prêts à
faire la même chose? C'est des termes qu'on a entendus ici.
M. Guilbault (Yvon): M. le ministre...
Le Président (M. Joly): M. Guilbault, s'il vous
plaît.
M. Guilbault (Yvon): ...M. le ministre, ce qu'il y a
derrière tout ça, c'est que les gens ne sont plus capables de
payer ce qui est demandé par le décret de la construction. On
peut trouver des coupables, on peut tenter de fixer, déterminer des
amendes, mettre des
poursuites, le système n'est plus capable d'accepter, les gens ne
sont plus capables d'accepter ce que le système leur demande de payer.
Quand on mentionnait qu'un entrepreneur doit payer, un entrepreneur en
règle, 34,45 $ en cotisations de toutes sortes, on n'ajoute pas,
à ce moment-là, l'administration et le profit. Ce n'est pas
sûr que les gens sont intéressés et capables de payer 42 $
ou 43 $, 44 $, 45 $ l'heure pour quelqu'un qui veut respecter toutes les
clauses du décret, et c'est ça que ça produit comme
conséquence. Est-ce qu'on va commencer à chercher des coupables
pour savoir si c'est l'entrepreneur ou le salarié? On pense que le
système, dans le secteur résidentiel, est rendu
incontrôlable. C'est ce qu'on pense.
Le Président (M. Joly): M. le ministre. M. Cherry:
Merci.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Papineau, M. MacMillan.
M. MacMillan: Je trouve ça malheureux, M. le
Président. Il y a des gens qui se servent des caméras de la
télévision, en arrière, pour dire que ce que M. Guil-bault
dit ce n'est pas vrai. Si vous ne l'avez pas remarqué, moi, je l'ai
remarqué. Puis je pense que la commission parlementaire qui se passe ici
est très sérieuse, monsieur je ne vous connais pas, en
arrière mais c'est très sérieux. Vous avez
trouvé ça drôle, mais, ce que M. Guilbault vient
d'expliquer, l'association, c'est la vérité. C'est
peut-être... Si tout le monde avait pu faire ça aujourd'hui
tout le monde, je parle de tout le monde conter vraiment ce qui se passe
dans la construction, peut-être qu'on n'aurait pas de problème
aujourd'hui, puis qu'on n'aurait pas de commission. Vous n'avez pas
remarqué, M. Guilbault, mais c'est les gens en arrière de vous,
là.
Moi, j'aimerais féliciter votre association de mettre la
vérité dans votre document, de conter vraiment ce qui se passe.
Vous avez fait le tour de tous vos membres, 3000 membres, je pense, que vous
avez, et vous avez écrit ce que vos membres pensent. Si tout le monde
faisait ça, peut-être qu'on ne serait pas... On n'aurait pas
d'editorial qui dirait: Le règne des gros bras pour pouvoir avoir 1 000
000 $ qu'on perdrait en cotisations. Peut-être que ça n'arriverait
pas. Peut-être que nos collègues Maltais, puis Lemire, ne se
seraient pas fait brasser par ces gens-là. On remarquera que c'est dans
Le Journal de Montréal. Qui l'a fait? On n'a pas pu le dire
avant.
Alors, c'est inciter les gens à peut-être... le
sérieux qui se passe ici, alentour de cette commission-là...
C'est très important ce que vous avez dit. Vous avez conté la
vérité. Vous l'avez dit, que les gens ne peuvent plus payer. Vous
l'avez ici, dans votre document, à la fin, que vous comparez les
salaires de 32 $ à 22$, quand les gens... Est-ce que c'est les gens qui
vous ont dit ça, M. Guilbault? Ma question que j'aime- rais vous poser.
Puis, j'aurais un autre commentaire après. Les gens, dans votre
tournée que vous avez faite dans toute la province, est-ce que c'est les
gens qui travaillent chez vous qui déclarent ces heures-là, de 33
$ à 22 $, est-ce que c'est ce qui se passe vraiment dans les
régions, dans la construction résidentielle ou commerciale, ou
quoi que ce soit?
Le Président (M. Joly): M. Guilbault, s'il vous
plaît, vous avez la parole.
M. Guilbault (Yvon): Ce qu'on a voulu démontrer, c'est
que... On a voulu démontrer publiquement qu'un électricien qui
travaille selon le taux de la construction, à 23,78 $ l'heure, à
ce montant-là, il faut ajouter une foule de bénéfices qui
coûtent de l'argent à l'entrepreneur, comme les vacances, 11 %,
les avantages sociaux et taxes sur les assurances, 1,94 $, fonds
d'indemnisation, 0,02 $, et ainsi de suite. Et, quand on ajoute tous ces
montants-là, ce qu'un entrepreneur respectueux des lois et du
décret doit payer, ça lui coûte 34,45 $ l'heure.
Et, ce qu'on a voulu démontrer, c'est qu'avec un taux hors
décret, quelqu'un qui travaillerait au blanc hors décret à
18 $ l'heure, par exemple, ça coûterait à l'entrepreneur
22,85 $. Alors, vous voyez immédiatement la différence. C'est que
le taux de salaire qui est fixé par le décret, 23,78 $, ce n'est
pas fini, ça. Il y a d'autres charges qui s'ajoutent à ce
montant-là, contrairement, évidemment, à quelqu'un qui ne
travaille pas à l'intérieur du décret.
Alors, c'était pour montrer qu'entre les deux il existe un
différentiel d'environ 12 $ l'heure. Et ces choses-là ne sont pas
assez connues. Et c'est peut-être ce qui explique que les gens ne sont
plus capables d'acheter ces services-là, parce que l'entrepreneur
à qui ça coûte 34,45 $ doit ajouter son profit. Pas son
profit immédiatement, mais, d'abord, son administration. Et on s'entend
pour dire qu'en électricité, l'administration d'une entreprise se
chiffre à environ 15 % comme marge, et rajoutez un profit décent
pour que l'entreprise puisse fonctionner, vous vous retrouvez facilement autour
de 40$.
Alors, vous voyez que, quand vous appelez un entrepreneur
électricien pour faire des travaux dans le secteur résidentiel,
il y a immédiatement un problème d'offre versus la demande qui
explique les réactions des gens, qui, intelligemment, s'ajustent
à la demande. Et ce n'est pas en donnant des amendes aux travailleurs et
aux entrepreneurs qu'on va régler le problème. C'est un
problème de capacité de payer.
Ce qu'on dit, on ne dit pas que c'est strictement pour des salaires,
parce que, dans le système, on a aussi l'inspection, les fameux frais
d'inspection de la DGBRI, à l'époque, maintenant la Régie
du bâtiment, qui coûtent à un entrepreneur environ 1 $
l'heure. Alors, c'est beaucoup de sous. Et le public a le droit de savoir ce
qu'un entrepreneur doit charger, doit payer, parce qu'il y a beaucoup
d'entrepreneurs qui travaillent à 40 $
l'heure, qui respectent toutes les clauses et qui passent pour des
voleurs. Il faut comprendre qu'à la base il doit payer 34,45 $ l'heure
en frais de toutes sortes. La grande question à se poser, c'est: Est-ce
que les gens sont capables de se payer ça, envers et contre tous? Et les
entrepreneurs électriciens ont dit non. C'est ce qu'ils nous ont dit. On
peut être d'accord ou pas d'accord. C'est ce qu'ils nous ont dit.
Le Présidait (M. Joly): M. le député de
Papineau, je tiens à vous faire remarquer que les gens auxquels vous
faisiez référence ont déjà été
entendus. Ils ont déjà eu la possibilité de s'exprimer sur
les divers sujets concernant la loi 142. Alors, je vous reconnais, M. le
député de Papineau.
M. MacMilIan: M. le Président, c'est parce que, pendant
que M. Guilbault faisait des commentaires, il y avait des gens en
arrière qui disaient que ce n'était pas vrai, ce qu'il disait. Je
l'ai vu de mes yeux, et c'était dans la caméra. C'est pour
ça que je voulais faire le commentaire. Parce que c'est important ce que
ces gens-là disent. Je n'ai pas fini, c'était un commentaire.
Le Président (M. Joly): Parfait! Parfait, M. le
député de Papineau. Avant de vous reconnaître, je vais
reconnaître M. Brown, qui a quelque chose à rajouter.
M. Brown (Jean-Guy): Juste un complément d'information.
Les taux de salaire qu'on a pris, 23,78 $, sont les taux du décret, et
le taux de 18 $ l'heure, ce sont des entrepreneurs électriciens qui
donnent ça à leurs électriciens, à l'heure
actuelle, pour la rénovation, toutes les clauses qui sont
déréglementées. Alors, le 18 $ l'heure, on ne l'a pas pris
à peu près ou en termes de chiffres de comparaison. À
l'heure actuelle, on a des entreprises en électricité qui font du
décret et du hors décret, et c'est les taux qui se paient,
à l'heure actuelle, dans l'industrie au niveau de la
dernière page, au niveau du 18 $ l'heure, hors décret et
on voit que la différence au niveau des salaires nets n'est pas
énorme en fonction d'une personne qui travaillerait 40 heures à
18 $ l'heure. Mais, au niveau des frais de charge que l'entrepreneur
électricien aurait à charger au client, là, la
différence est énorme.
Le Président (M. Joly): Avant de reconnaître M. le
député de Salaberry-Soulanges, M. le député de
Papineau, une courte question.
M. MacMilIan: Juste un petit commentaire. C'est que je ne veux
pas me répéter, mais je veux vous féliciter pour la
franchise du document qui a été déposé, et,
deuxièmement, c'est malheureux que M. Guilbault ne s'appelle pas d'un
autre nom, et qu'on pourrait avoir les gens à la
télévision pour passer ce message-là. Parce que la
population devrait savoir vraiment la réalité, ce qui se passe
vraiment dans le marché de la construction. Alors, je veux vous
féliciter publiquement, messieurs.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Papineau. M. le député de Salaberry-Soulanges, s'il vous
plaît.
M. Marcil: Rapidement. Je regardais à votre page,
justement, lorsque vous totalisez le 34,45 $. Je vais être très
objectif quand je parle, là. Il y a 1,37 $, c'est les frais
d'entrepreneur; donc, c'est pour votre «membership» à droite
et à gauche. Il y a 4,62 $, c'est les avantages sociaux en rapport avec
les programmes gouvernementaux. Donc, ça vous fait à peu
près 5 $, tout près de 6 $, et vous avez un 4,68 $ qui a un
rapport direct avec le décret de la construction. O.K.? Je veux mettre
les choses dans leur contexte.
Question rapide: Vous semblez faire un bloc avec le commercial,
l'industriel et l'institutionnel, c'est-à-dire traiter ça
à part du résidentiel, et, dans votre rapport, vous dites que le
résidentiel devrait sortir complètement du décret. Dans
votre pensée, ce qui est écrit par rapport à ce que vous
pensez je veux juste que ce soit clair est-ce que vous dites par
là que le résidentiel doit être complètement
déréglementé, ou bien vous dites que le résidentiel
il faut qu'il soit traité à part du reste?
Le Président (M. Joly): M. Guilbault, s'il vous
plaît.
M. Guilbault (Yvon): Ce qu'on dit, dans le fond, là...
M. Marcil: ...dans une autre convention, dans une autre
structure.
M. Guilbault (Yvon): ...c'est qu'il faut une certaine logique.
Dans un projet de loi qui est présenté par un gouvernement, il
faut suivre une logique. Et, si le gouvernement dit et c'est
sérieux, un projet de loi on déréglemente le
résidentiel, huit logements et moins, on prend ça, nous autres,
au sérieux. Et, si c'est vrai, ce qui est écrit, si c'est
sérieux, on se dit: Qu'est-ce qui reste du vrai secteur
résidentiel? Et, si vous voulez faire coller aux gens que, neuf
logements et plus, où il y a de l'habitation, c'est du
résidentiel dans le sens commun où les gens l'entendent, non,
c'est du commercial. Parce que, neuf logements et plus, c'est les gens qui
placent leur argent là-dedans, attendent un retour sur leur
investissement. Or, si c'est du commercial, vous n'êtes pas pour avoir
quatre conventions collectives avec un petit bout de résidentiel qui
resterait neuf logements et plus.
M. Marcil: C'est parfait. J'ai compris.
M. Guilbault (Yvon): Vous voyez? Il y a une logique,
là.
M. Marcil: Pas pour moi.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Salaberry-Soulanges. M. le député de Jonquière, s'il
vous plaît. (20 h 50)
M. Dufour: Merci, M. le Président. C'est sûr que,
tout à l'heure, j'entendais des commentaires pour des gens qui ne sont
pas en audition. Pour les téléspectateurs, ça ne veut pas
dire grand-chose. On ne les a pas vus; donc, il faut se contenter de prendre
des remarques. Ça arrive des fois qu'il y en a qui veulent jouer aux
gros bras, même à l'Assemblée nationale. On a
déjà vu ça.
Moi, je veux juste vous dire: Vous êtes allés au sommet de
la construction, vous deviez avoir des attentes, là-dedans? Est-ce que
le projet de loi répond aux attentes que vous aviez manifestées
au départ? Parce que, là, je comprends qu'à un moment
donné vous dites, dans votre mémoire, à la page 10: On ne
croit pas que la déréglementation va régler le travail au
noir. Vous dites: Ça va amener une espèce... un groupe
d'aventuriers dans notre métier. Puis, après ça, à
la page 11, vous dites: On est d'accord avec le gouvernement pour qu'il
déréglemente. C'est quoi, là? Moi, je suis un petit peu...
Ça va un peu vite pour moi, là, dans deux pages.
M. Guilbault (Yvon): Oui? Je vais vous expliquer ça.
Le Président (M. Joly): M. Guilbault, s'il vous
plaît.
M. Guilbault (Yvon): Au Sommet, évidemment, il y a eu
beaucoup de déception, il n'y a pas eu beaucoup de consensus. J'ai
évité de lire les deux premières pages du mémoire
pour gagner du temps. J'ai bien fait, d'après ce que j'ai pu voir tout
à l'heure. Mais c'est sûr qu'il y avait des attentes et un certain
scepticisme, parce que c'est assez rare que 40 personnes s'assoient autour
d'une table, puis qu'on règle les choses en si peu de temps. Souvent et
rapidement, compte tenu de la procédure, on est tombé rapidement
dans des clichés et des lieux communs. Il reste qu'il y a eu un
consensus qui était ressorti assez clairement, peut-être dans une
certaine confusion, mais assez clairement: une convention collective avec
quatre secteurs et des clauses spécifiques à quatre secteurs. Et
c'en est resté là.
Et, très rapidement, quelque chose comme 10, 11 jours plus tard,
quelle ne fut pas notre surprise de voir dans le projet de loi quatre
conventions collectives, quatre secteurs, trois parties négociatrices.
Et ce n'était absolument pas un des consensus du Sommet. Et la cerise
sur le sundae, c'a été: déréglementation, huit
logements...
M. Dufour: Comment vous dites ça? La quoi? M. Guilbault
(Yvon): Pardon?
M. Dufour: Vous dites quoi? La dernière phrase.
M. Guilbault (Yvon): La cerise sur le sundae. Je ne vous visais
pas, M. le ministre. Je viens de faire un lapsus sérieux.
M. Cherry: J'ai été traité de pire que
ça dans ma vie.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: À 5 heures.
M. Guilbault (Yvon): En tout cas, sur le sundae?
Déréglementation du huit logements et moins. C'était tout
à fait inattendu, je peux vous le dire et je l'ai
mentionné au début du mémoire où les gens,
chez nous, sont restés totalement surpris. Mais, quand il y a quelque
chose qui se produit, qui est présenté dans un projet de loi,
c'est sérieux. Et c'est là qu'on a commencé notre
consultation le plus rapidement possible, et, les gens, c'est là qu'est
ressorti le fait... Écoutez, dans le résidentiel, c'est rendu
tout à fait incontrôlable: le marché noir est roi et
maître partout. Et, quand bien même on dirait: Oui, il va y avoir
un secteur résidentiel déréglementé, ou: Non, il
n'y en aura pas, ça ne changera rien à la situation. Et, ce qu'il
faut comprendre, ce qui décourage les gens, c'est que les entrepreneurs
ne croient pas, en aucune façon, qu'il peut y avoir une
négociation entre les parties assez sérieuse pour adapter les
taux que les gens peuvent payer à la réalité
économique. Il n'y a pas de négociation entre les parties.
Nous, on vient ici, on présente notre mémoire. J'ai
demandé au représentant d'une autre association patronale: Je
«peux-tu» voir ton mémoire? Qu'est-ce que tu as dit, toi? Il
n'y a pas eu de consultation, ce qui fait que ce n'est pas sérieux. Vous
ne pouvez pas demander aux entrepreneurs de penser que ça peut se
régler par négociation. Il n'y en a pas. Alors, ils ont dit: Tant
qu'à ne pas en avoir, tant qu'à travailler au noir, tant
qu'à ne pas être capable au taux du décret, on accepte la
déréglementation. Mais, en même temps, vous avez senti dans
notre mémoire qu'il y a énormément d'hésitation.
Aïe! On n'est toujours bien pas pour faire travailler un
électricien à 5,85 $ l'heure! Il y a un problème. Alors,
les gars ont dit: Y a-t-il moyen de demander au gouvernement de mettre un
plancher à 15 $? Peut-être que ça va avoir l'air plus
décent. Mais c'est comme ça que c'est présenté.
Mais les gens sont très mal à l'aise avec ça, une
proposition aussi subite. Ils ne comprennent pas, mais ils disent: Tant
qu'à choisir, moi, je ne suis toujours bien pas pour être
condamné à l'amende parce que je fais juste ma job. Et on parle
des taux de salaire, mais il faut que je rajoute aussi les taxes, la TVQ, la
TPS.
Vous avez souligné, à juste titre, qu'il y a les taux du
décret, les avantages du décret, mais il y en a bien d'autres. Il
n'y a pas juste ça. Mais on commence où? Par quel item abaisser
nos coûts, là? Ça fait déjà une couple
d'années qu'on demande au ministre du Travail d'essayer de baisser les
frais d'inspection de 3,75 % sur la masse salariale. C'est une de vos
vieilles
promesses; peut-être que vous allez l'exécuter. Mais
à 1 $ d'inspection, ce sont des frais encore, ça. Comment on va
baisser ça, ces 34 $ là? Alors, les gens, ce qu'ils disent: On va
baisser ça par le salaire. Mais il y en a un paquet d'autres.
Alors, vous voyez un peu l'espèce de distorsion dans laquelle les
gens sont placés. Et ça s'explique. Mettez-vous à leur
place dans le quotidien!
M. Dufour: Oui. Je trouve que, dans vos propos, il y a une
certaine fatalité; vous êtes fataliste, jusqu'à un certain
point. Vous dites: II n'y a pas moyen de faire autrement, et puis on
accepte...
M. Guilbault (Yvon): Je vais vous amener à une
réunion d'entrepreneurs, vous allez comprendre qu'ils sont très
fatalistes.
M. Dufour: Oui. On va s'ajuster avec ce que le gouvernement dit.
Mais, par contre, lorsqu'il y a eu un sommet, il y a eu tout de même un
certain nombre de diagnostics qui ont été posés. Moi, j'ai
lu la préparation du Sommet du ministre du Travail, puis je l'ai dit
aussi au début, les diagnostics ont été correctement
posés, mais les remèdes proposés, ça ne correspond
pas. Donc, visa le noir, tua le blanc; c'est un peu à ça qu'on
arrive. Vous nous dites: Nous autres, on peut s'accommoder, on va s'accommoder,
mais faute de mieux. Est-ce que vous pensez qu'il y aurait encore des
tentatives à faire? Vous dites: Le gouvernement, il
légifère. Le législateur n'était pas pour le dire,
mais ça arrive, des fois, que le législateur fait des lois et ne
les applique pas. La loi 186, par exemple, n'est pas toute en application.
M. Guilbault (Yvon): 185.
M. Dufour: 185! Excusez. Bon, il ne l'applique pas toute. Donc,
à ce moment-ci, est-ce que vous croyez que la loi qu'on a devant nous
pourrait être mise un peu à l'écart? Peut-être
régler les problèmes criants il y a un décret qui
finit le 14 décembre, là bon, et puis qu'on se remette
à l'étude un peu, parce que je veux vous parler d'un autre sujet
en passant: Est-ce que vous croyez que c'est une question de vie ou de mort, au
moment où on se parle, que le projet de loi 142 soit adopté,
même avec des amendements substantiels?
M. Guilbault (Yvon): Écoutez, tout ce que je peux vous
dire, c'est que cette déréglementation-là surprend
énormément et arrive à un moment où les gens ne
comprennent pas nécessairement qu'il y a urgence. Les gens auraient
souhaité voir un peu clair en termes d'impact. Ça, je peux vous
dire ça. Mais on n'est pas le gouvernement.
Mettez-vous à la place des gens qui disent: On a affaire avec le
gouvernement; le gouvernement est sérieux. Qu'est-ce que vous faites?
Vous finissez par être fataliste. Moi, la TPS, puis la TVQ, je
n'étais pas pour ça, puis le gouvernement les a passées
pareil. Vous allez dire que j'étais fataliste: je suis obligé de
payer pareil aujourd'hui. Alors, il y a des fois que tu n'as pas le choix, et
on essaie de bonifier des choses. On a tenté de le faire, par exemple,
dans le régime de négociation. On bonifie. Mais, si le
gouvernement n'écoute pas, qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse?
Mais, si vous voulez me demander si c'est rapide, si ça surprend,
oui, ça surprend; oui, c'est trop rapide; non, on ne comprend pas que,
le 1er janvier ça, c'est dans 28, 29 jours ça
puisse s'appliquer aussi rapide, on ne comprend pas. Mais ce qu'on peut vous
dire, c'est que le monde n'a plus le moyen de payer ce que ça
coûte. Ça, on peut vous dire ça.
M. Dufour: C'est sûr que, moi, j'avais fait juste un
rapprochement dans ma tête quand je vous écoutais. Vous disiez: On
n'est pas capable de payer le décret. Je sais aussi qu'il se fait du
noir dans ce dossier, dans ce domaine-là. Mais je regarde, par exemple,
les réparations d'automobiles. Quand on va dans les garages
là, en tout cas, où je vais c'est 59 $, puis 63 $,
à peu près, l'heure; quelque chose comme ça, là.
Puis la TPS, TVQ est encore par-dessus: ça veut dire que c'est 62 $, 63
$, 65 $, 66 $ l'heure. Eux autres, ils semblent être capables de faire
respecter le décret, mais, de plus en plus, il y a du noir que se fait
aussi. Ça, je suis conscient de ça.
M. Guilbault (Yvon): Oui, mais êtes-vous capable d'amener
le mécanicien chez vous, vous? Avec les outils? Chaque secteur a...
M. Dufour: Sa particularité.
M. Guilbault (Yvon): ...sa façon de fonctionner. Quand
votre automobile brise, là, vous allez au garage ou vous appelez un
remorquage. Puis, là, que ça coûte 300 $ ou 400 $, je n'ai
pas le choix, il faut que mon char marche.
L'électricité, ça, des fois, ça peut
attendre un peu, hein! Vous avez le temps de voir qu'est-ce qui se passe sur le
marché. Ce n'est pas pareil.
M. Dufour: On peut revenir sur des cas... En tout cas!
M. Guilbault (Yvon): Je connais des réparateurs de laveuse
à vaisselle. Quand elle ne marche pas chez nous, puis il m'arrive et
ça coûte 35 $...
M. Dufour: On paie!
M. Guilbault (Yvon): Je sais que ça ne me coûtera
pas plus que 100 $, parce que plus que 100 $, 150 $, je vais en acheter une
autre. J'ai des choix. Mais, en électricité, ce n'est pas
pareil.
Le Président (M. Joly): M. Brown voulait apporter un
commentaire. M. Brown.
M. Brown (Jean-Guy): Oui, si je peux rajouter quelque chose
là-dessus, c'est qu'à ce moment-là il y a des personnes
qui sont bien nanties, et c'est eux autres, les premières, qui cherchent
à négocier des contrats au noir. Vous parliez tantôt du
mécanicien. À ce moment-là, ce
mécanicien-là... Pourquoi, à ce moment-là, qu'elle
va appeler un électricien au noir pour refaire les réparations
à l'intérieur de son garage? Il charge 59 $ l'heure. C'est la
réalité qu'on vit, ça.
Ou, des fois, on négocie avec des personnes. Je ne pense pas que
les professeurs, ce soient les personnes qui sont une catastrophe au niveau des
salaires dans la province de Québec. Et ces personnes-là,
lorsqu'on négocie pour des contrats avec eux autres, elles veulent
éliminer les taxes et, si possible, payer sans facture, au noir. Et,
pourtant, c'est des personnes qui sont bien nanties dans la
société.
Alors, c'est un phénomène qui est rendu
généralisé. Ça ne s'applique pas strictement
à la construction au niveau du travail au noir.
M. Dufour: Je veux faire juste une remarque, puis passer la
parole à ma collègue de Chicoutimi.
Le Président (M. Joly): Oh! Vous n'avez pas grand temps
pour passer la parole à votre collègue, hein!
M. Dufour: Est-ce que je pourrais la laisser?
Le Président (M. Joly): C'est...
M. Dufour: Je trouvais que la structure...
Le Président (M. Joly): Si vous voulez passer outre vos
remarques, je vais reconnaître madame votre collègue.
M. Dufour: Je vais lui laisser... Mme Blackburn:
Merci!
Le Président (M. Joly): Alors, Mme la collègue, Mme
la députée de Chicoutimi, s'il vous plaît. (21 heures)
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonsoir! Ce que
vous nous dites, en gros: Ça ne règle pas le travail au noir;
ça ne crée pas de l'emploi. Vous estimez que le travail, le taux
horaire, devrait être de minimum 18 $, mais vous dites: Fixez-le-nous
à 15 $, sachant que ça peut descendre jusqu'à 5,85 $.
Puis, vous n'avez rien demandé de tel. Voulez-vous me dire pourquoi on
se retrouve avec un projet de loi comme ça, qui ne règle pas les
problèmes, qui risque d'en causer et qui se fait par-dessus la
tête et sans tenir compte des consensus? Je sais que vous n'êtes
pas le gouvernement, mais ça m'intrigue.
M. Guilbault (Yvon): Écoutez, tout ce qu'on peut vous
dire, c'est qu'on ne peut pas faire autrement que manifester notre surprise. Je
vous répète qu'on n'est pas capable, en un si court temps,
d'évaluer les impacts. Je vous répète qu'on n'est pas le
gouvernement. Quand le gouvernement arrive avec un projet de loi, moi, je les
prends bien, bien au sérieux. On s'imagine que c'est
éclairé, mais des fois on ne sait pas tout à fait comment,
par exemple. Alors, on dit: Us doivent être éclairés, mais
on n'est pas sûr. On n'est pas sûr que c'est un projet de loi
éclairé sur la déréglementation. Mais, si le
gouvernement est sérieux, on dit: On n'a pas le choix de l'accepter, les
gens ne sont plus capables de payer.
Qu'est-ce que vous faites quand vous êtes un entrepreneur
électricien qui doit faire son travail de tous les jours, et qu'il se
présente un client à qui vous dites: Moi, c'est 42 $ l'heure,
plus la TPS, plus la TVQ, et que le client ne veut pas payer? Il reste chez lui
et il n'est plus capable de travailler? Alors, on peut dire, pour des questions
de principe: Non, c'est épouvantable! Battez-les! Fouettez-les!
Ligotez-les! Mettez-les en prison et peut-être qu'ils vont comprendre
qu'ils doivent accepter 45 $ l'heure pour respecter les lois. Ce n'est pas
comme ça que les gens fonctionnent.
Mme Blackburn: Ce n'était pas tout à fait, non
plus, ce à quoi que je pensais.
M. Guilbault (Yvon): Alors, vous voyez, c'est un peu notre
position. Elle est peut-être ambivalente, mais on dit: S'il n'y a pas
d'autre solution, il faut l'accepter, celle-là, parce que les gens ne
croient pas à une négociation entre les parties. Ça aussi,
c'est important.
M. Brown (Jean-Guy): Oui, c'est là-dessus que je voulais
revenir.
Le Président (M. Joly): M. Brown, brièvement, s'il
vous plaît.
M. Brown (Jean-Guy): C'est que les entrepreneurs, à
l'heure actuelle, ne croient pas au système de négociation qu'il
y a pour baisser au niveau du secteur résidentiel. C'est ça qui
devient le gros problème, et les entrepreneurs, je pourrais dire, par
défaut, ont accepté le fait de la déréglementation
au niveau du résidentiel pour être capables de
récupérer ce marché-là, pour être capables de
faire vivre leur entreprise aussi. À ce moment-là, il n'y a rien
qui nous garantit... Je pense que les années antérieures, au
niveau des négociations, des relations de travail dans l'industrie de la
construction, ne nous ont pas prouvé qu'il était possible de
faire un secteur bien particulier, au niveau du résidentiel, pour
respecter la capacité de payer des gens, ce que les gens sont
prêts à payer.
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le député de Drummond,
s'il vous plaît.
M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président. D'entrée
de jeu, pour clarifier la rénovation, pour éclairer ma
lanterne, je vous ai bien compris tout à l'heure lorsque vous
avez dit que la rénovation est hors décret, que la
réparation est hors décret et que c'est 18 $?
M. Guilbault (Yvon): Rénovation mineure, oui.
M. St-Roch: lorsqu'on parle de 34,45 $, on parle de
résidence neuve, que les consommateurs se refusent de payer. il ne
serait pas plus exact de dire qu'à l'heure actuelle... parce que, encore
là, ce que j'ai pu trouver, c'est qu'il y a à peu près 25
% de la construction qu'on appelle autoconstruction: la personne va être
le maître d'oeuvre et va la construire elle-même. il reste 75 % de
l'ouvrage qui est donné par quelqu'un. ce quelqu'un-là, est-ce
que ça se pourrait, par hasard, que ce soit un contracteur qui est
membre de l'apchq ou de ces organisations-là? normalement,
là.
Ça se «peut-u», lorsque je regarde, moi, la
différence entre 34 $... Je vais finir, là? Oui? Bon. Lorsque je
regarde la différence entre 34 $ et votre 18 $, qui est hors
décret pour la rénovation... Alors, quand je fais venir un
électricien, moi, parce que ce n'est pas réglementé, je
vais payer 22,65 $ pour faire réparer une de mes prises
électriques. Si je construis une maison neuve, si je veux être
légal, je vais payer 34,45 $ fois 40 heures. Alors, la différence
sur une construction neuve est de 464 $. Là, je peux vous donner les 15
% d'administration, ce qui va faire alentour de 510 $.
Sur un bungalow, le prix moyen varie, de région en région,
entre 60 000 $ et 100 000 $. Ce n'est pas un fait de dire, là... Quand
je regarde votre mémoire et que vous dites que vous êtes
obligé de charger de 2400 $ à 3300 $, celui qui n'est pas capable
de payer sur une construction de 60 000 $... C'est le donneur d'ouvrage, le
contracteur ou le promoteur, lui, qui décide qu'il va vous donner 2400 $
et qu'il va en faire en série. C'est là que vous n'êtes pas
capable d'avoir votre prix de 34,45 $. Si vous voulez avoir les 10 ou 15
maisons du développeur, il va falloir que vous jouiez entre 2400 $, 2500
$ ou 2600 $. Est-ce exact?
M. Guilbault (Yvon): Exact. M. Grenier (Jean): C'est
exact.
M. St-Roch: Bon. Je vais continuer. Est-ce exact que, pour faire
une maison neuve, ça prend une autorisation? Même s'il y a un
permis, il faut que vous fassiez une demande à Hydro-Québec?
M. Guilbault (Yvon): C'est exact.
M. St-Roch: Ça «serait-u» possible
qu'Hydro-Québec, à un moment donné, on lui dise qu'elle
est obligée de transmettre à la CCQ toutes les demandes qu'on
fait?
Si c'est 40 heures que vous me dites, quand je regarde les 40 heures que
vous me dites que j'accepte, vous êtes les experts les 40
heures pour faire le filage d'une maison, à ce moment-là, si le
permis qui a été demandé par Hydro-Québec est dans
les mains de la CCQ, est-ce qu'on n'est pas capable et je ne vois pas
pourquoi, par informatique, aujourd'hui, on ne serait pas capable de
charger à l'entrepreneur les 40 heures fois les bénéfices
marginaux et de dire, à ce moment-là, que le donneur d'ouvrage
est aussi coupable que l'électricien, que, s'il n'est pas capable de le
payer, ça va être le donneur d'ouvrage qui va être
obligé de le payer? À ce moment-là, on éliminerait
un peu le travail au noir et on serait capable de rémunérer la
construction neuve à 34,45 $? C'est ça que j'ai de la
difficulté à comprendre lorsqu'on parle de travail au noir.
Avec l'informatique, aujourd'hui... Je regarde, cette année: 35
000 maisons. On va avoir 35 000 maisons, à peu près 10 000
logements locatifs; on est à 7285 après neuf mois. On n'est pas
capable de contrôler par informatique, aujourd'hui, 40 000 mouvements,
lorsqu'on est capable de remonter, au ministère du Revenu, trois ans en
arrière pour aller prendre les célibataires qui sont
déclarés non célibataires parce qu'ils vivent avec
quelqu'un? On est capable de tout faire ça. Alors, c'est ça que
j'ai de la difficulté à comprendre avec votre industrie, qu'on
n'est pas capable de la discipliner, aujourd'hui, avec l'informatique. Par le
permis qui est demandé à Hydro-Québec, on transfère
les informations à la CCQ et on va voir, à ce moment-là,
le nom du contracteur et le nom du donneur d'ouvrage. Puis, ça, vous
allez dire: Est-ce que c'est nouveau?
Moi, j'ai présidé une commission parlementaire dans
l'industrie du transport. On n'appelait pas ça du travail au noir, on
appelait ça des «gypsies», à ce moment-là,
dans ce métier-là, parce que ça change. Le travail au noir
varie de nom. Lorsqu'on a parlé de celui qui expédiait en
surcharge et de celui qui transportait, l'expéditeur était aussi
coupable que celui qui transportait. On a dit: C'est bien de valeur, mais tu
vas payer la même amende que l'autre. On a réglé le
problème, parce qu'on a été capable d'informatiser
ça. Moi, c'est ça que je ne comprends pas, qu'on n'est pas
capable, aujourd'hui, de mettre ça sur informatique.
Le Président (M. Joly): M. Grenier.
M. Grenier (Jean): Premièrement, M. le
député, c'est juste pour faire une annotation.
Présentement, on prend des permis à la Régie du
bâtiment et ces permis-là sont transmis à
Hydro-Québec pour le raccordement électrique seulement. C'est la
Régie du bâtiment, de par sa structure et tout ça, qui
contrôle les permis. On sait présentement que, dans l'industrie de
la construction, les inspecteurs qui font la surveillance et les
vérifications dans les maisons neuves et usagées, et tout
ça, ils y vont par sélection. Le personnel est coupé
à la Régie du bâtiment et, de ce fait, les inspections dans
les maisons sont faites à la pige et ne sont pas faites à 100 %.
Si tous les permis qui étaient pris en électricité
étaient faits à 100 %, il n'y aurait aucun problème
là, ça serait très contrôlable.
présentement, dans l'autoconstruction, vous avez parlé
tantôt de 25 % des constructions neuves qui étaient faites par un
autoconstructeur, et ces choses-là. dans bien des cas, maintenant, les
autoconstructeurs nous demandent de faire le branchement électrique,
l'entrée électrique, et tout ça, et la balance des travaux
est faite par des tierces personnes. on s'objecte à ça à
100 milles à l'heure, à 100 %. mais le problème qu'on vit
aujourd'hui, pour être capable de travailler un peu dans une semaine,
c'est qu'on est obligé, des fois, certains électriciens sont
obligés, des fois, de faire ces raccordements électriques pour
que, ensuite, ce soit des gens au noir qui fassent le raccordement
électrique, et tout ça. on a toujours été contre
ça, mais, à cause des règles et des normes établies
par le gouvernement, on ne peut pas se déloger de ça.
M. Brown (Jean-Guy): Est-ce que je pourrais juste vous donner une
précision?
M. St-Roch: En autant que le président me donne une petite
question après.
Le Président (M. Joly): Très brièvement, M.
Brown, parce je veux reconnaître M. le député de
Drummond.
M. Brown (Jean-Guy): Hydro-Québec et le Bureau des
examinateurs électriciens, à cette heure que c'est rendu à
la Régie du bâtiment, à ma connaissance, ça fait au
moins trois ou quatre ans qu'ils essaient d'avoir une compatibilité
d'ordinateur pour se transférer l'information, et ce n'est pas fait
encore. Imaginez-vous s'il faut la transférer en plus à la CCQ!
Ensuite, après ça, on a essayé aussi de le faire par les
municipalités. On dirait que tout ce monde-là ne peuvent pas se
parler.
M. St-Roch: Je disais la CCQ; ça peut être qui vous
voulez. Mais, moi, je peux vous dire une chose. J'ai des jeunes informaticiens
dans ma circonscription qui vont vous faire le programme en moins d'un mois, et
on n'a pas besoin d'un inspecteur pour aller voir si la job a été
faite ou non. Moi, je ne peux pas comprendre qu'aujourd'hui, à partir de
la demande de permis qui a été faite à
Hydro-Québec, on ne puisse pas dire, à ce moment-là, sur
la demande de permis, qu'il doit y avoir le nom de l'entrepreneur
électricien ou du maître et le nom du donneur d'ouvrage et,
à partir de ça, aujourd'hui, par informatique, qu'on ne soit pas
capable de mettre ça dans un ordinateur et, après ça, de
faire la compilation, de voir comment on va percevoir tous les
bénéfices marginaux qui sont là. Je rejoins ce qui a
été dit par M. le chef de l'Opposition. Lui, il dit: On va plus
loin, et on va envoyer ça au Revenu. Moi, je ne peux pas comprendre
aujourd'hui qu'on n'est pas capable de faire ça. À ce
moment-là, on protégerait réellement les
entrepreneurs...
Le Président (M. Joly): S'il vous plaît, M. le
député, en conclusion.
M. St-Roch: ...et on protégerait aussi le travailleur.
Parce que les deux sont un problème dans votre profession.
Le Président (M. Joly): Votre commentaire est
passé, M. le député. Si je comprends bien, vous n'avez pas
besoin de réponse. M. le député de Salaberry-Soulanges,
vous aviez...
M. Marcil: Rapidement, juste...
Le Président (M. Joly): Vite, vite, vite. Je sais qu'on a
déjà donné un petit peu plus de temps à l'autre
côté, moi, ça ne me dérange pas...
M. Marcil: On sait qu'au Québec le salaire moyen est
à peu près de 23 000 $, de 23 000 $ à 25 000 $. Si on
divise ça par 40 heures-semaine, ça donne à peu
près l'équivalent de 12 $ l'heure, ce que l'ensemble des
travailleurs et travailleuses du Québec gagnent en moyenne. Vous nous
dites que les travaux au niveau de la construction commandent à peu
près des montants de 34 $ à 38 $ l'heure. Donc, il y a une grosse
différence. Mais le problème, c'est que les employés de la
construction gagnent à peu près le salaire moyen, qui est
à peu près de 22 000 $ à 23 000 $. C'est ça qui est
un petit peu le déséquilibre dans tout le système.
Le Président (M. Joly): Pour être très juste,
M. Brown, très rapidement, s'il vous plaît.
M. Brown (Jean-Guy): Mon commentaire va être très
bref. L& seul problème, c'est que, quand l'électricien
travaille, il commande un salaire d'au-dessus de 50 000$.
M. Marcil: Quand il travaille.
M. Brown (Jean-Guy): Quand il travaille.
Le Président (M. Joly): Merci, parfait. M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Cherry: Merci de votre mémoire. Il y a
déjà des gens de notre formation qui ont fait des commentaires
sur la façon. Alors, on vous remercie beaucoup et on va en tenir
compte.
Le Président (M. Joly): Alors, au nom des membres de la
commission, je tiens à remercier les gens qui représentaient La
Corporation des maîtres électriciens du Québec. Merci
beaucoup, messieurs. (21 h 10)
Je demanderais maintenant aux gens représentant la Centrale des
syndicats démocratiques-construction de bien vouloir s'avancer s'il vous
plaît.
S'il vous plaît. Je vous demanderais de bien vouloir
dégager la tribune, s'il vous plaît merci pour
permettre aux gens de la Centrale des syndicats démocratiques de
s'avancer. S'il vous plaît, voulez-vous bien vous avancer?
Alors, messieurs, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue et
de vous accueillir à cette commission. J'apprécierais si M.
Gingras pouvait nous introduire les gens qui l'accompagnent, s'il vous
plaît.
Centrale des syndicats
démocratiques-construction
M. Gingras (Claude): Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir de vous souligner la présence, à ma gauche, de
Michel...
Le Président (M. Joly): Fournier.
M. Gingras (Claude): ...Fournier, le président du Syndicat
des travailleurs de la construction du Québec (CSD), et, à ma
droite, Louis Tremblay, qui est responsable du Service de la recherche à
la CSD.
Le Président (M. Joly): Alors, je vous souligne que
vous nous avez suivi, depuis le temps que vous êtes ici vous avez
une vingtaine de minutes pour nous communiquer le fruit de votre
mémoire. Par après, les parlementaires auront le loisir
d'échanger avec vous. Alors, M. Gingras, je vous reconnais.
M. Gingras (Claude): Merci, M. le Président. Membres de la
commission parlementaire, M. le ministre, d'entrée de jeu, je souhaite
ardemment, en tant que président de la CSD, que le spectacle ne
cède pas le pas et la place à la raison dans le présent
débat. On nous avait promis quand même une commission
parlementaire où la démocratie allait s'exercer, mais je pense
que ça doit être un forum qui se poursuit dans cette ligne de
pensée.
Je voudrais aussi, quand même, relever les assertions qui ont
été dites par le nouveau président de l'APCHQ, qui s'est
présenté un peu comme un bâtisseur du Québec et qui
a dénoncé, en fait, qu'il ne soit pas un véritable
employeur de l'industrie de la construction. Je pense que vous avez quand
même pris connaissance, comme nous autres, de l'annonce qui a paru dans
le journal à l'effet que le nouveau président de l'APCHQ est
sûrement une personne qui délègue ses travaux à
d'autres entrepreneurs. Ça, on ne le sait pas, parce qu'il avoue
lui-même qu'il a un employé à son emploi. Et ça,
c'est confirmé par la CCQ. C'est des statistiques
vérifiées. Or, il ne faudrait pas se prétendre employeur,
avoir bâti 7000 maisons au Québec, quand on délègue
à d'autres le soin de le faire. Les véritables employeurs, ce ne
sont pas ces genres d'individus, dans l'industrie de la construction.
Cette mise au point étant faite, il est important, en fait, qu'on
discute des enjeux avec les véritables entrepreneurs de l'industrie de
la construction et les véritables travailleurs de l'industrie de la
construction.
Le projet de loi 142 n'est ni plus ni moins que l'imposition totalitaire
d'une vision antisyndicale rétrograde et contraire au progrès
social. Sans aucunement tenir compte des orientations et consensus
dégagés lors du Sommet, le gouvernement prend la voie de
l'irresponsabilité et s'attaque à fond de train aux travailleurs
en désyndiquant le secteur résidentiel. Pour près de 30
000 travailleurs et leurs familles, c'est la Loi sur les normes du travail qui
s'appliquera.
La Centrale des syndicats démocratiques juge totalement
déplacé ce projet de loi, qui ne fait que consacrer la
volonté gouvernementale de sabrer dans les conditions de travail et dans
la qualité de vie de milliers de familles québécoises. En
1988, Paradis désassujettis-sait la rénovation. Maintenant,
Cherry fait de même avec le résidentiel. Demain, c'est la
construction au complet qui risque d'être morcelée,
dégradée, déqualifiée, bref qui sera livrée
à l'anarchie, synonyme de misère pour l'ensemble des travailleurs
de l'industrie de la construction.
Je veux vous souligner, ici, membres de la commission parlementaire, que
je suis un ex-travailleur de l'industrie de la construction. J'espère
savoir de quoi je parle, parce que j'ai vécu tout le cheminement de
cette industrie depuis plusieurs années. Les années soixante, je
les ai connues. Des pertes de revenus importantes pour le gouvernement sont
également au rendez-vous pour contribuer à alimenter une
stratégie visant à réduire les acquis sociaux au
Québec.
Il s'agit également d'un geste sans précédent pour
accélérer et encourager le développement du travail au
noir et de l'économie souterraine qu'une enquête récente
celle de Gallup, entre autres illustrait très bien: 42 %
des Québécois participent déjà à cette
économie souterraine.
Le projet de loi 142 constitue ni plus ni moins que la poursuite du
démantèlement et de la déstructuration de l'industrie de
la construction au Québec. En désassujettissant les travaux de
construction d'immeubles de huit logements et moins exclusivement
consacrés à l'habitation, le gouvernement du Québec
consacre l'ouverture de ce secteur à tous les aventuriers, puisqu'il n'y
aura plus de qualification obligatoire pour les entrepreneurs, sauf les
électriciens et les plombiers. En laissant tomber l'exigence du
certificat de compétence pour les travailleurs qui oeuvrent dans ce type
de construction, le gouvernement ouvre également ce secteur à
tous, sans aucune obligation quant à la formation et à la
qualification, avec les conséquences prévisibles que ça
comporte sur la qualité des produits et services fournis aux
consommateurs.
Malheureusement, ce ne sont pas les seules conséquences de ce
désassujettissement. En 1992, la Commission de la construction du
Québec a enregistré 72 000 000 d'heures. Ça, c'est une
statistique que vous connaissez très bien. De ce nombre, environ 16 000
000 sont déclarées pour les travaux de construction d'immeubles
de huit logements et moins, exclusivement consacrés à
l'habitation. C'est le nombre d'heures qui ne
seront plus incluses dans le champ d'application de l'industrie de la
construction si le projet est adopté. Les 125 000 travailleurs de la
construction devront se partager les 56 000 000 d'heures restantes dans le
champ d'application de l'industrie de la construction, soit une moyenne
annuelle de 448 heures déclarées par travailleur, comparativement
aux 576 actuellement déclarées dans le résidentiel
à cause de la situation de crise qu'on traverse. Cela
représentera un peu plus de 11 semaines de travail à 40
heures.
Bien sûr, ils pourront travailler dans le secteur
résidentiel désassujetti, mais ils subiront sûrement la
concurrence déloyale de combien de milliers de travailleurs sans
compétence reconnue, qui offriront leurs services à des
conditions qui se comparent plus à celles prévues dans la loi sur
les normes minimales de travail, pour ne pas dire inférieures, dans la
foulée du développement et de la prolifération de
l'économie souterraine. Ce n'est pas une cachette pour personne qu'une
partie de ces travaux se fait actuellement sous les conditions prévues
dans la loi sur les normes minimales de travail.
De plus, avec la possibilité pour les travailleurs des autres
provinces de venir au Québec librement, tel que prévu dans le
projet de loi, les 38 000 détenteurs du sceau rouge, habitant l'Ontario
ou le Nouveau-Brunswick, pourront eux aussi avoir accès aux travaux
inclus dans le champ d'application de l'industrie de la construction du
Québec, et ce, sans réciprocité pour les travailleurs du
Québec qui voudraient oeuvrer dans ces provinces. On assistera ni plus
ni moins qu'à l'aggravation de la misère que connaissent
actuellement les travailleurs de la construction. (21 h 20)
Le gouvernement, par la loi 142, incitera au travail au noir, la plaie
de l'industrie de la construction et de notre société. En 1988,
en excluant la rénovation résidentielle du champ d'application du
décret, le gouvernement a donné un élan additionnel au
travail au noir, puisqu'une infime minorité des entrepreneurs
déclarent leurs revenus et paient des impôts dans le secteur de la
rénovation. Les entrepreneurs offrent systématiquement aux
consommateurs de payer leurs rénovations sans facture, et il va de soi
qu'ils rémunèrent leurs salariés sous la table, sans
contribution à l'impôt ou au financement des régimes
sociaux.
Contrairement à l'Association des manufacturiers, qui venait
s'expliquer en début d'après-midi, je peux vous dire que j'ai
constaté personnellement, pour avoir fait des rénovations
chez-moi, que celui qui est venu s'offrir pour transformer mes fenêtres
chez-moi, après avoir enquêté sur la façon qu'il
pouvait arriver à des soumissions tellement plus basses que d'autres,
parce que je le connaissais très bien, j'ai réussi à
savoir que même la compagnie qui lui fournissait les fenêtres les
fournissait au noir. Ça, c'est des fabricants, hein, c'est des
manufacturiers.
Le même phénomène se produira, bien sûr, pour
les travaux de construction d'immeubles de huit logements et moins
exclusivement consacrés à l'habitation.
Les entrepreneurs offriront que le paiement pour les travaux soit fait
en liquide, pour que ces revenus n'aient pas à être
déclarés par les entrepreneurs et les travailleurs
installés confortablement dans l'économie parallèle.
Par ce projet de loi et par cette façon de voir les choses, le
gouvernement incite carrément les consommateurs, les entrepreneurs et
les travailleurs à contourner les lois, tout en déplorant les
déficits budgétaires et les dettes publiques qui atteignent des
niveaux record.
La déréglementation de la rénovation
résidentielle a été une des causes de la hausse
récente du travail au noir dans le secteur résidentiel.
J'espère qu'on ne se pose plus de question là-dessus. La
déréglementation des travaux de construction d'immeubles de huit
logements et moins exclusivement consacrés à l'habitation
entraînera également une croissance formidable du travail au noir
dans les autres secteurs non déréglementés, puisque la
population de travailleurs de la construction restera la même et que le
travail disponible diminuera.
Le projet de loi, loin d'apporter des solutions au problème du
travail au noir, l'accroîtra. Tous auront donc les mains libres pour
contourner à volonté les lois, les règlements et les
obligations sociales. Il est à prévoir qu'ils agiront
également dans les autres secteurs c'est ce que je vous disais
tout à l'heure qui demeurent assujettis, car ils ne se
contenteront pas d'agir dans ce seul secteur déréglementé.
Ça, il faut se le tenir pour dit, ça va se répandre comme
une tache de sang.
Avec l'adoption de la loi 142, on assistera à la
déqualification de la main-d'oeuvre, alors que l'objectif et le discours
du gouvernement sont, semble-t-il, l'amélioration de la
compétence des travailleurs et de la qualité comme conditions
essentielles de la réussite et de l'avenir pour une économie qui
se veut dynamique. Dans de nombreux cas, avec la déréglementation
qu'on propose, le consommateur, pour épargner, acceptera que le travail
soit effectué au noir, se privant ainsi d'une garantie ou d'un recours
possible face aux nouveaux aventuriers de la construction. Ça, vous le
savez fort bien. Puis, ceux qui se mettent la tête dans le sable et ne
l'admettent pas, je pense qu'ils font fausse route.
Au sommet de la construction, le ministre du Travail a proposé la
mise sur pied d'un régime de garantie obligatoire pour les logements
neufs et la rénovation de logements. Ce régime prévoyait
l'accréditation des entrepreneurs selon des critères qui
pourraient ressembler à ceux utilisés dans le système de
qualification des entrepreneurs.
En ne donnant pas suite à ce système immédiatement,
qui est un minimum insuffisant à notre point de vue, le ministre laisse
les consommateurs à la merci des aventuriers de toutes sortes, sans
recours possibles autres que ceux prévus par les tribunaux civils. Et on
sait ce que ça donne! Il y a tellement de nos gens qui sont incapables
d'aller se défendre avec les coûts que ça comporte devant
ces tribunaux-là. Si le régime était mis sur pied, il n'y
aurait pas nécessairement une véritable protection pour les
consommateurs, et son coût important leur serait refilé
rapidement.
Les travailleurs affectés aux travaux de la construction
d'immeubles de huit logements et moins seront dépossédés
de leur paye de vacances, de leur salaire, de leurs jours fériés,
de leurs régimes d'assurance-groupe, de leur fonds de pension et de
leurs autres conditions de travail. On leur propose en échange les
conditions prévues dans la Loi sur les normes du travail. La
syndicali-sation de ces travailleurs, possible, en théorie, en vertu du
Code du travail, est illusoire et farfelue: 16 000 travailleurs qui embauchent
cinq salariés et moins... La réponse est là.
Les travailleurs seront à la merci des employeurs et de leurs
pratiques arbitraires. Dans un secteur où le nombre des accidents de
travail est épouvantablement élevé, quel travailleur non
syndiqué osera se plaindre des risques élevés d'accidents
auxquels il est confronté tous les jours, et ce, sans service
d'association syndicale pour le défendre?
Le régime de négociation proposé nie de
façon cavalière un des seuls consensus obtenus lors du Sommet sur
l'industrie de la construction. En effet, si on se souvient, les parties, par
une large majorité de 19 votes contre huit, s'étaient entendues
pour que le régime de négociation prévoie une convention
collective ayant des clauses sectorielles. C'est un affront à la
démocratie et au sérieux déployé par les parties
dans cet exercice public, qui n'a peut-être pas donné tous les
résultats qu'on attendait, mais qui mérite quand même qu'on
respecte les consensus des parties qui y ont été adoptés.
Nous croyons que le gouvernement méprise sans scrupules le Sommet dont
il a été lui-même l'instigateur. Certains ont
mentionné que c'était tout simplement une tactique de diversion.
J'ose croire que ce n'était pas ça, mais l'évidence nous
dit que, déjà, ce projet semblait être
préparé dans les officines du gouvernement.
Le chaos sera causé, bien sûr, par le nouveau régime
de négociation qu'on tente de nous passer. L'administration de quatre
conventions collectives de travail et de conditions de travail prévalant
différemment dans ces secteurs-là, et de conditions
différentes aussi dans les immeubles de huit logements et moins, vous
comprenez que ce ne sera pas nécessairement facile à vivre et que
ce ne sera pas facile à appliquer administra-tivement pour les
entreprises. Si on voyait, dans cette proposition, une élimination des
irritants, bien, je pense que c'est un échec lamentable, car on les
multiplie, les irritants!
Connaissant leur mobilité intersectorielle, comment les
travailleurs réussiront-ils à se qualifier pour être
admissibles à leur régime d'assurance collective et à leur
régime de retraite? Quelle sera la limite d'heures quotidiennes ou
hebdomadaires qui prévaudra pour le temps supplémentaire? Prenons
un exemple. C'est faire preuve de grande naïveté que de croire que
chaque secteur ne se dotera pas d'un régime de retraite ou d'un
régime complémentaire d'assurances différent. Peu de
travailleurs réussiront à faire le nombre d'heures pour
être admissibles aux avantages sociaux.
Le gouvernement, dans son projet, fixe, bien sûr, aux parties des
règles auxquelles elles ne peuvent déroger. Entre autres, la
durée doit pouvoir varier de un à trois ans, quant à la
convention collective, et on dit que la date d'échéance de cette
convention doit être le 31 décembre. Je ne sais pas si vous savez
ce qui se passe un peu, le 31 décembre, et quel est l'ordre du rapport
de force qui peut s'établir entre les parties, le 31 décembre,
dans l'industrie de la construction? Je trouve que c'est pour le moins
très machiavélique. Je pense que ce n'est pas ça qui doit
être retenu. On doit, au minimum, maintenir le 30 avril, qui est une
tradition dans l'industrie de la construction. Sinon, on doit prévoir
que ça doit être toute autre date négociable par les
parties.
D'autre part, les parties doivent garder la possibilité de
négocier des clauses de rétroactivité dans cette
industrie, car si elles veulent donner toutes les possibilités à
la négociation de bonne foi, je pense qu'elles ne doivent pas être
pressées nécessairement dans le temps et risquer de ne pas
pouvoir s'entendre sur la possibilité de rétroactivité.
Ça inclut s'entendre aussi pour qu'il n'y en ait pas
éventuellement. Ça fait partie des accords qui peuvent être
convenus.
Le projet de loi crée également un tronc commun, mais sans
rapport de force. Le projet de loi, pour modifier le contenu de ce tronc
commun, nous propose qu'il faudra une majorité patronale et syndicale
dans chacun des secteurs pour que des modifications soient acceptées.
Or, il y a fort à parier qu'avec un système comme ça les
dispositions ne soient jamais améliorées, puisque l'entente des
parties et de l'ensemble des secteurs apparaît illusoire. Le fait
d'éliminer le droit de grève dans les conditions du tronc commun
vise à lui assurer une longévité, à notre avis,
centenaire, parce qu'il suffira que les employeurs d'un secteur refusent de
négocier pour assurer le statu quo permanent de ce tronc commun. (21 h
30)
Lors du Sommet, le ministre du Travail a présenté une
proposition à l'effet «de transférer la
responsabilité de l'application de la convention collective aux
partenaires de l'industrie». Or, la CSD s'est dite en accord avec cette
proposition et juge inefficace que cette responsabilité reste uniquement
entre les mains de la CCQ, qui a dû admettre, dans de nombreux cas, son
incapacité de faire appliquer le décret actuel. On fondait des
espoirs qu'on puisse être associés, les syndicats, à
l'application de nos conventions collectives. Or, avec les complications
additionnelles des quatre régimes proposés, comment pourra-t-elle
s'acquitter de cette responsabilité? Qu'on se pose des questions. Les
relations de travail seront sûrement un facteur irritant additionnel pour
l'industrie. Après avoir enlevé 15 % de ses ressources
financières à la CCQ, sera-t-elle seulement en mesure de
poursuivre son travail? Je pense qu'il faut se poser la question.
Le règlement de placement établit des règles de
mobilité et de placement qui permettent une mobilité et une
flexibilité de main-d'oeuvre aux employeurs, puisque les travailleurs se
déplacent d'un secteur à l'autre selon l'offre de travail et
changent d'employeur pour les
mêmes raisons. C'est ça, la réalité de
l'industrie. Le système actuel n'est pas sans problème, mais il
permet un certain degré de transparence, d'équité et de
flexibilité. Le Nouveau-Brunswick et l'Ontario se plaignent de ces
règles dans les zones limitrophes. L'Ontario, pour se faire du capital
politique actuellement sur le dos du Québec, a décidé
d'imposer des mesures protectionnistes favorisant les produits, les employeurs,
les travailleurs ontariens. En réponse aux pressions de ces provinces,
le projet de loi 142 propose d'éliminer les timides règles de
placement et de mobilité sans réciprocité.
La CSD revendique que le salarié conserve au Québec sa
priorité d'embauché en fonction de sa région de
résidence. C'est le minimum acceptable. La CSD favorise l'ouverture,
cependant, des frontières interprovinciales moyennant la
négociation d'ententes de réciprocité. On peut discuter
sur les normes, mais il faut qu'il y ait réciprocité. Puis, ces
mesures devront s'appliquer avec des limites pour favoriser quand même
qu'on ne transporte pas littéralement nos emplois à des
travailleurs de l'extérieur.
Il va de soi que nous sommes d'accord pour que les ententes
interprovinciales de reconnaissance de la qualification sceau rouge
soient renforcées également. On doit pouvoir faire en
sorte que pas plus de 25 %, à la limite, des travailleurs qui
répondent aux conditions de l'article 38 de notre règlement,
c'est-à-dire des travailleurs permanents d'un employeur... Il serait
aberrant de dire: Un employeur de l'Ontario embauchera des travailleurs qui
n'ont jamais travaillé pour lui en Ontario, puis il les amènera
au Québec parce qu'il a un contrat au Québec. Ce devra être
au moins des employés réguliers de cet employeur-là. C'est
une condition minimale. Puis la réciprocité, au Québec,
doit également s'appliquer.
La CSD est en accord avec l'abolition du règlement de placement,
et particulièrement sur la partie de l'accréditation d'agences de
placement, mais elle croit que les centrales syndicales doivent conserver un
rôle, auprès de leurs membres, d'aide à l'accès
à l'emploi.
En conclusion, il est inconcevable que le ministre du Travail ait fait
fi des maigres consensus obtenus lors du sommet de la construction quant
à la nécessité d'une convention régissant les
quatre secteurs de la construction. Le projet de loi, loin de régler le
travail au noir, tente plutôt de lui assurer sa légitimité
dans le secteur résidentiel et de l'encourager dans les autres secteurs.
Pourquoi ne pas plutôt favoriser la libre négociation avec la
participation de tous les partenaires sous le couvert d'une
réglementation minimale assurant des relations de travail
civilisées et adaptées au contexte particulier de l'industrie de
la construction? Ça devrait être ça, le modus vivendi et
l'orientation. La construction, sans aucun doute, mérite que son
régime de négociation soit modernisé et non
anéanti. C'est une question de paix sociale et de respect
élémentaire à l'endroit des bâtisseurs du
Québec. Dans un contexte difficile, vous offrez la frustration et le
désespoir aux travailleurs de la construction au moment où il
faut plutôt les aider à passer à travers cette
période de morosité sociale et économique.
Vous devez retirer le projet de loi 142. C'est le minimum requis pour
rétablir la crédibilité du gouvernement quant à sa
capacité d'agir dans l'intérêt social et économique
des travailleurs et de la société québécoise. Le
ministre du Travail doit proposer un projet qui tienne compte des consensus du
Sommet sur l'industrie de la construction et des nombreuses recommandations
découlant des aussi nombreuses études et commissions qui se sont
penchées sur l'industrie. Il en va de la plus élémentaire
justice sociale. Et j'ai la conviction sincère que ce n'est pas le
mépris qui doit être la pierre angulaire d'une réforme dans
l'industrie de la construction, mais ça doit être plus la
compréhension des problèmes. Et je convie les membres de cette
commission à agir dans le sens de ces grands principes, parce que le
climat social au Québec, je pense, puis la situation que vivent les
travailleurs de l'industrie de la construction méritent qu'on accorde
tout le sérieux à leurs frustrations actuellement. Alors, je suis
à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M.
Gingras. M. le ministre, s'il vous plaît, la parole est à
vous.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans un premier temps,
à un endroit, dans votre mémoire, là, vous faites
référence à la page 5, je crois, en bas de la page,
oui vous parlez, là, des plans de garantie qui étaient
traités au Sommet. Vous savez que, ça, ça fait partie de
la loi 186, et ce dont on a parlé, c'est que ça sera en vigueur
au début de l'année 1994. Donc, même si vous
décrivez que ce n'est pas suffisant, là, c'est pour vous dire
qu'il y a quand même un suivi qui s'en vient là-dedans. Juste pour
placer ça.
Deuxièmement, vous avez pris connaissance dernièrement,
là, puis je ne veux pas faire miens les chiffres qui ont
été utilisés par l'APCHQ, mais vous vous souviendrez qu'au
début, là, de la consultation, hier, j'ai utilisé des
chiffres qui nous venaient de la Commission de la construction du Québec
concernant la façon dont sont distribués les avantages sociaux.
Et on a réalisé, à la lumière de ça, que,
bien sûr, tout le monde est obligé d'y contribuer quand il y a des
heures. Quand c'est des avantages sociaux, bien sûr, c'est l'employeur
qui paie, puis, quand c'est la caisse de retraite, là, il y a un
partage, et ça dépend. On remarque là-dedans aussi que ce
n'est pas uniforme. Il y a des différences parce qu'il y a des secteurs
d'activité qui ont déjà décidé de contribuer
plus. Mais on réalise que, dans les faits, bien sûr, c'est un
système qui, quand on réussit à s'y qualifier, est, je le
mets entre guillemets, généreux. C'est un bon système.
Ça couvre un tas de choses, là, bon, de l'assurance-voyage au
plan dentaire, aux verres, bon, les prescriptions, un tas de choses.
Mais, ce qu'on réalise aussi, c'est que, à cause de la
façon dont on peut se qualifier, il y a certains secteurs
comme celui du résidentiel, par exemple, où, à la
fin de l'année, il y a à peu près 50 % des gens qui sont
disqualifiés parce qu'ils n'ont pas réussi à faire
suffisamment d'heures. bien sûr, pour celui qui réussit à
s'y qualifier, il va être content d'avoir un régime comme
ça. mais, je vous demande, là, est-ce que vous ne croyez pas...
puis, là, on le sait, là, c'est peut-être un régime
qui a été basé sur un nombre d'heures important, mais on
le sait que, ce nombre d'heures là, il n'est pas là. il n'est pas
là cette année, il ne sera pas là l'année prochaine
ni l'année d'après. selon les prévisions, là, on ne
peut pas prévoir un nombre d'heures comme celui-là.
J'aimerais entendre vos commentaires. Vous ne pensez pas,
peut-être, à un régime peut-être un peu moins
généreux mais qui assurerait au moins une base
d'accessibilité beaucoup plus large que celle qui est là? Parce
que, autrement, tout ce qu'on a à faire, c'est d'ajuster la façon
de s'y qualifier en augmentant les heures. On va avoir comme résultat
que ceux qui réussissent à s'y qualifier par le nombre d'heures
ou en payant leur contribution vont avoir accès, mais qu'il y aura de
plus en plus de travailleurs pas capables de se qualifier, dont l'employeur, au
niveau des avantages sociaux, aura contribué, mais on ne donnera aucune
forme de protection à 50 % des travailleurs dans le secteur du
résidentiel, puis, dans d'autres secteurs, ça varie aussi.
J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Joly): M. Gingras, s'il vous
plaît.
M. Gingras (Claude): Écoutez, sur la garantie, en premier
lieu, ce qu'on allègue... Je comprends que, par la loi, vous
entendez...
M. Cherry: La 186, oui.
M. Gingras (Claude): ...par la loi 186, mettre de l'avant un
régime de garantie. Mais ce régime de garantie, à notre
avis, est insuffisant dans le sens que je veux vous dire que même les
employeurs qui afficheront ce système de garantie auront à
lutter, pour obtenir les emplois et le travail dans l'industrie, avec d'autres
qui n'offriront pas ces plans de garantie. Vous savez fort bien que ça
va être ça, la situation, parce qu'il y en a qui vont continuer de
travailler au noir quand même et qui vont continuer d'offrir leurs
services sans nécessairement offrir de garantie. Et le consommateur va
avoir le choix entre un entrepreneur qui a une garantie et un entrepreneur qui
n'en a pas, qui n'en offre pas. Et celui qui en offrira... À moins que
vous ne mettiez une garantie universelle et que, même si c'est un
aventurier qui le fait, et puis qu'il ne s'est pas prémuni de
l'assurance-qualité, et puis qu'il a fait des travaux avec lesquels le
consommateur est aux prises... Si vous me dites que vous allez l'assumer et que
l'ensemble des entrepreneurs va assumer les obligations de ce genre
d'aventuriers, bien, je vous dis que peut-être que les consommateurs
auraient une protection minimum. Encore là, il va falloir qu'ils se
débattent avec les associations patronales pour faire reconnaître
que c'est des.,. (21 h 40)
En tout cas, je ne veux pas entrer dans tous ces détails, mais je
vous dis que ça ne sera pas une sinécure. Et ce n'est pas
nécessairement une assurance de qualité. O.K.? Parce que,
actuellement, je connais un peu l'industrie de la construction, je peux vous
dire que déjà l'APCHQ a des problèmes avec certains des
employeurs qu'elle assure, et elle dit que ça va bien. Il y a du monde
qui attend des années avant de faire reprendre des travaux qui ont
été faits par des entrepreneurs pourtant très solvables de
l'industrie, qui ont fait faillite. Et puis, deux ans après, ils se
retrouvent avec des problèmes de vices cachés dans leur maison et
qu'ils doivent faire reprendre à des coûts astronomiques.
Et, sur ce, je vous dis qu'actuellement le régime ne nous propose
rien de plus. Non seulement il ne nous propose rien de plus, mais, en
déqualifiant et en déréglementant ce secteur-là, on
aggrave le problème parce que ça va être un peu à la
va-comme-je-te-pousse et ça va être au plus fort la poche. Ceux
qui vont offrir les meilleures conditions vont obtenir, sur le coup, leur
contrat, mais demain matin on sera aux prises avec des problèmes de
qualité. Et ça, j'en suis convaincu. Pour connaître un peu
l'industrie de la construction et connaître la prolifération
actuelle du travail au noir, je suis convaincu qu'on se dirige carrément
là. Et ça, qu'on me fasse la démonstration du contraire.
Mais, si on met de l'avant cette réforme-là, l'expérience
nous démontrera que ça sera ça, le résultat qu'on
obtiendra. Et je ne suis pas certain que les consommateurs seront très
heureux du résultat. Et, si, justement, on n'est pas très strict
devant l'octroi de ces régimes d'assurance garantie, les coûts
vont être astronomiques et il va falloir qu'ils soient refilés.
Ça va être dans la facture de la construction quelque part,
ça. Ce n'est pas gratuit. Il n'y a personne qui va donner ça
gratuitement.
Sur l'autre question concernant les avantages sociaux, bien sûr
qu'il y a une obligation de contribuer dans le régime actuel. Bien
sûr qu'il y a des différences aussi dans les régimes par
rapport à certains métiers. Bien sûr qu'il y a 50 %,
peut-être, des travailleurs qui sont disqualifiés actuellement
dans le régime. Je pense que là-dessus on s'entend, vous avez
raison. Mais, tout ça, c'est négociable. Tout ça,
ça peut être changé actuellement. Et, si on
désyndicalise les 30 000 travailleurs, eux autres n'auront même
plus le choix de le changer; il n'en existera plus pour eux.
Ce que je peux vous dire, c'est que le régime, quand il a
été bâti, pouvait avoir sa nécessité ou sa
raison d'être avec les règles qu'il s'est données à
l'époque. Avec le contexte économique qu'on vit actuellement,
vous avez raison, plus de 50 % des travailleurs sont disqualifiés de
leur régime en fonction des règles qui existent. Et,
là-dessus, on n'est pas plus confortable avec ça. Et je pense
qu'il faut l'élargir, l'accès au régime. Ça, je
suis d'accord avec vous là-dessus, mais c'est une question de
négociation entre les parties, et je pense
qu'il va falloir qu'on ajuste ces questions-là. C'est comme dans
tout autre régime, à un moment donné, qui n'est plus
solvable, il faut les revoir, les règles.
Alors, dans l'industrie de la construction, et ça, contrairement
à ce qui se colporte et se dit, l'APCHQ, entre autres, avec ses annonces
de 60 000 000 $... Vous savez fort bien que c'est des chiffres surfaits. C'est
36 000 000 $, le vrai chiffre, et tout le monde s'entend là-dessus. Mais
on colporte toutes sortes de messages tout de travers actuellement dans
l'industrie. Moi, je vous dis, le problème peut se régler. Et,
déjà actuellement, les parties ont pris des dispositions pour
régler les problèmes de déficit d'une façon
temporaire, mais elles vont négocier entre-temps. Il va falloir qu'elles
regardent comment on va gérer différemment ce
régime-là. Dans une situation où l'emploi
décroît, est-ce qu'on va faire d'autres choses que ce qui
s'applique actuellement? Tout ça, c'est négociable. Mais, si,
demain matin, on n'a pas le loisir de les négocier, bien sûr que
ça va rester comme ça, bien sûr que ça va être
plate. Ça sera inapplicable, pour 50 %.
Et, sur la partie des différentiels, vous semblez dire: Ça
ne sera pas plus important, avec quatre conventions, d'avoir des
différentiels. Ça ne sera pas pareil, parce que la
mobilité des travailleurs est intersecteurs. Les électriciens qui
travaillent dans le résidentiel, qui travaillent dans le commercial et
institutionnel ou qui travaillent dans l'industriel, actuellement, ils ont le
même régime, ils contribuent à un régime
supplémentaire au régime de base, mais partout ils traînent
le même régime, par exemple. Ils n'ont pas un régime
différent quand ils changent de secteur. Mais, avec le régime que
vous proposez, ils risquent d'avoir des régimes différents par
secteur, et ça, ça va compliquer la vie de tout le monde. C'est
ça qu'on ne dit jamais. Parce que la mobilité des travailleurs,
actuellement, est intersectorielle. Il y en a quelques-uns qui se confinent
à un secteur en particulier, mais il y en a une grande partie qui font
à la fois du résidentiel non assujetti, ce que vous proposez, du
résidentiel assujetti, qui font du commercial et institutionnel et qui
vont faire aussi de l'industriel et, à l'occasion, même dans la
voirie, pour les viaducs, et tout ça. C'est les mêmes
travailleurs. Alors, ils vont avoir quatre conventions, cinq conventions. C'est
ce que vous proposez comme régime.
M. Cherry: Une dernière question, parce qu'il faut
partager le temps, aussi, avec d'autres. Dans la page 13... Je commence
à 12, par exemple, là. Vous parlez de la mobilité de la
main-d'oeuvre interprovinciale. Bon, vous y allez là-dedans. Bon. Vous
dites: «La CSD revendique un règlement prévoyant que le
placement soit sous la responsabilité d'un bureau central... La CSD
s'oppose énergiquement à ce que le Règlement sur le
placement des salariés dans l'industrie de la construction soit
intégré à la convention collective». Bon.
J'aimerais ça vous entendre. Pourquoi un syndicat... Parce qu'il
me semble que c'est la formule qui fonctionne, par exemple, en Ontario. Et,
là, vous venez de dire que vous êtes d'accord avec les
barrières interprovinciales. C'est comme ça que ça
fonctionne. Plutôt que de faire décider et réglementer par
le gouvernement, c'est à l'intérieur des conventions collectives,
puis, même quand on compare les deux, on s'aperçoit que, des fois,
c'est peut-être plus difficile puis plus rigide, d'ailleurs, mais ce
n'est pas le gouvernement qui décrète, donc c'est fait à
l'intérieur des conventions. Pourquoi votre centrale s'objecte à
ce que ça devienne un objet de négociation qui est introduit
à l'intérieur des conventions collectives? Pourquoi vous vous
objectez à ça?
M. Gingras (Claude): On ne s'objecte pas à ce que ce soit
négociable, au contraire, on s'objecte à ce que ce soit
intégré dans le système que vous proposez, dans une
convention collective. Il y a une mobilité actuelle de la main-d'oeuvre
qui est intersectorielle. Demain matin, avec les conventions que vous proposez,
quatre conventions collectives, prenons l'hypothèse qu'on règle
la mobilité de la main-d'oeuvre à l'intérieur d'une
convention d'une façon et qu'on la règle autrement dans une
autre, on va tendre à cloisonner ces quatre secteurs-là de
façon à ce qu'il n'y ait plus d'interchangeabilité entre
les travailleurs. Si on veut régler les mouvements de main-d'oeuvre, pas
à l'échelle de l'industrie mais à l'échelle des
secteurs, ce qu'on veut vous faire comprendre, c'est qu'on va cloisonner.
Ça veut dire qu'un travailleur qui va acquérir des droits dans un
secteur qui va être le résidentiel ne pourra plus demain matin
aller travailler dans l'institutionnel parce que, dans l'institutionnel, ils
vont s'être fixé d'autres critères qui vont faire en sorte
de l'empêcher d'y avoir accès. Et ça peut être des
règles d'ancienneté, ça peut être des règles,
à un moment donné, que vont se donner à l'intérieur
de chacune des conventions les parties, qui vont faire en sorte qu'il n'y aura
plus de mobilité intersectorielle. Si c'est ça qu'on recherche,
c'est ce qu'on va atteindre.
Nous autres, on dit: II faut que ça reste... Et,
là-dessus, on a de la souplesse. On vous dit que ça devrait
rester dans un règlement. Cependant, on serait d'accord à ce que
ça fasse partie d'un tronc commun, toute la question de la
mobilité de la main-d'oeuvre, pour qu'on n'arrive pas, dans des
conventions ou dans des conditions sectorielles, à empêcher les
travailleurs d'exercer leur métier dans l'ensemble des secteurs. Prenez
l'électricien, prenez le plombier, à cause du régime qu'on
va mettre pour le qualifier dans un secteur pour qu'il ait le droit d'oeuvrer
dans ce secteur-là, si on n'a pas un règlement uniforme pour
l'ensemble, comment, demain matin, s'il a acquis ses droits dans le
résidentiel, il va pouvoir oeuvrer dans le commercial et dans
l'institutionnel? Ça va être la bagarre. Comprenez-vous?
C'est pour ça qu'on vous dit: Si ça ne reste pas dans le
règlement, qui est universel à l'industrie, dans l'ensemble de
l'industrie, il faut que ce soit absolument régi dans un tronc commun.
On a de la souplesse là-dessus. On ne veut pas nécessairement que
ce soit vous, dans le règlement, qui le fassiez tout le temps. Mais, si
on prévoit un régime qui se tient et un régime qui a
des
chances de succès dans cette industrie-là, il faut
absolument que ce soit un régime universel quand on parle de la
mobilité de la main-d'oeuvre, que ce ne soit pas un régime par
secteurs, parce qu'on va arriver vite à cloisonner les secteurs et puis
à enlever la mobilité. Et ça, je pense que ce serait
regrettable, regrettable pour les travailleurs, regrettable aussi pour les
employeurs et regrettable en général pour l'industrie.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le
député de Jonquière, s'il vous plaît.
M. Dufour: M. Gingras, une question assez rapide, puis
j'espère que vous allez pouvoir ramasser, parce que M. le
député de Joliette veut aussi intervenir. Qu'est-ce qui est
arrivé? Vous avez assisté au Sommet. Qu'est-ce qui est
arrivé entre le Sommet et le projet de loi? Pouvez-vous nous dire,
là, qu'est-ce qui aurait pu arriver? Parce qu'on se rend compte qu'entre
le Sommet et le projet de loi ça ne se tient pas, et tous les
intervenants nous ont dit la même chose. La
déréglementation, ce n'était pas dedans, il y a toutes
sortes de choses qui se sont passées. C'est quoi, votre perception? (21
h 50)
M. Gingras (Claude): Bien, écoutez, quand on s'est
présentés au Sommet, on était peut-être naïfs,
comme d'autres. On croyait qu'on s'en allait faire un exercice de
démocratie qui, pour une fois, nous amenait dans un débat qui
avait peut-être des chances de nous diriger sur la voie de solutions dans
l'industrie de la construction.
Tant la forme et l'organisation de tout ça, puis la minutie qu'on
prenait pour délimiter le nombre de personnes, d'intervenants, puis la
façon de faire, on croyait que c'était, en tout cas que ça
pouvait être un exercice sérieux. Mais je vous prie de croire que
deux semaines après, quand on a pris connaissance du dépôt
du projet de loi, on a été fort déçus, parce que la
déréglementation, comme ont dit certains autres, ne faisait pas
partie du menu au Sommet sur l'industrie de la construction. On avait entendu
dire que les propositions du gouvernement, qui étaient sur la table au
Sommet, c'étaient des minimums et que, si ces minimums-là
n'étaient pas retenus par les parties, possiblement, ça pourrait
être pire. Oui, on avait entendu ça à travers les
branches.
Mais, cependant, on nous avait également dit que, si les parties
avaient des propositions à formuler, avaient des suggestions à
faire sur une façon autre de faire que les propositions
gouvernementales, elles pouvaient être étudiées
sérieusement à ce Sommet-là et pourraient faire l'objet,
s'il y avait des consensus... Et les consensus, même, étaient
fixés. Ça prenait une majorité des deux tiers pour qu'un
consensus soit considéré consensus. Il y en a effectivement eu
un, là, sur une négociation avec quatre secteurs, et puis il
n'est même pas dans le compte rendu du Sommet. C'est assez curieux. Puis
le ministre n'avait pas utilisé, pourtant, son droit de veto.
Je vous avoue qu'à partir de ce moment-là j'ai
commencé à douter du sérieux de l'exercice. Et, quand on a
vu le projet de loi 142, bien, le doute est devenu, à notre avis, une
réalité. On s'est dit: On est allé s'amuser dans un sommet
où la consultation véritable n'était pas
nécessairement l'objectif poursuivi, mais on voulait tout simplement
nous entendre et faire la preuve à ce Sommet-là qu'on ne pouvait
pas s'entendre. Et puis, déjà, la décision du gouvernement
était prise et on nous arriverait avec un projet de loi qui était
déjà tramé d'avance. Alors, c'est un peu le sentiment avec
lequel on vit depuis le dépôt du projet de loi 142.
M. Dufour: Le désassujettissement j'ai fait du
progrès, hein, je l'ai dit dans un bout des 29 000 travailleurs,
qu'est-ce qui arrive de leur fonds de pension ou de leurs
bénéfices marginaux qui se sont accumulés? Parce qu'il y
en a qui peuvent se déqualifier. Quand ils viennent
déqualifiés, qu'est-ce qui reste de tout ça, et quelles
sont les mesures que vous pensez qui pourraient s'appliquer dans ces
cas-là? Comment on pourrait les protéger? Est-ce qu'ils sont
protégés ou pas?
M. Gingras (Claude): Écoutez, ce qui va se faire...
Admettons que demain matin le projet de loi 142 est adopté puis qu'il y
a 30 000 travailleurs qui ne vont plus contribuer parce que c'est
ça qu'ils vont faire pour la partie des heures qu'ils vont faire dans
l'industrie non réglementée, ils ne contribueront plus à
cette partie-là bien, ils vont continuer peut-être de
contribuer dans la partie réglementée parce qu'ils oeuvrent dans
les deux. Vous savez qu'un travailleur de la construction dans votre
région, M. Dufour, quand il est capable de faire un domicile,
c'est-à-dire une maison unifamiliale, il fait un quatre, puis il fait un
huit, puis il fait un 16 logements aussi, hein. C'est le même
travailleur, ça. Puis, quand il y a un dépanneur qui se
bâtit, c'est le même travailleur qui va aller le faire. Ce n'est
pas un travailleur différent. C'est le même charpentier menuisier,
c'est le même électricien, puis tout ça. Or, ce
travailleur-là, pour une partie de ses heures, ne contribuera plus dans
le régime. Donc, ça va lui compliquer la vie. Pour être
eligible au régime, il va peut-être être obligé de
payer une cotisation volontaire plus souvent qu'il n'en payait avant. Il va
rester assujetti, mais il va être obligé d'en remettre dedans
parce qu'il n'aura pas contribué assez d'heures parce qu'on va avoir
déréglementé une partie de son travail.
Pour ceux qui vont travailler exclusivement dans le secteur
déréglementé, bien, ça va être
terminé, ils n'en auront plus. Alors, ça va être
terminé pour eux. Puis, en ce qui concerne le fonds de pension, bien,
c'est qu'après deux ans ils vont pouvoir demander l'argent qu'ils ont
versé dans leur fonds de pension. Et la part de l'employeur, elle, va
rester quand même dans le fonds, mais, eux, ils vont
récupérer uniquement leur participation parce qu'ils ne seront
plus considérés des employés de l'industrie et, à
ce moment-là, ils vont récupérer ce qu'ils ont mis dans
leur fonds de pension. Ça va être ça, le résultat de
la participation peut-être depuis 15 ans
dans un régime, en vue de s'assurer peut-être un revenu de
retraite éventuel. Ça va être ça, le résultat
qu'on va leur offrir, je ne veux pas dire sur un plateau d'argent, mais c'est
ça.
Le Président (M. Joly): M. Gingras, M. le
député a encore une petite question.
M. Dufour: Peut-être une petite, là, parce que
ça n'a pas été soulevé à nulle part.
Le Président (M. Joly): Vous empiétez sur le temps
de votre collègue, mais je n'ai pas d'objection.
M. Dufour: II y a le droit de grève que vous avez
soulevé, qui semble être une vue de l'esprit, ou fictif. Vous
pouvez élaborer quelque peu? J'avais cru voir ça dans le projet
de loi. Vous dites que, quand la convention est finie, elle est terminée
le 30 décembre, comme le négociateur ne peut pas avoir de
rétroactivité, etc., l'employeur pourrait dire: Moi, je ne
négocie plus, et ça enlève le droit de grève.
Est-ce que c'est le cas? Il faudrait peut-être que vous élaboriez
quelque peu par rapport à ça.
M. Gingras (Claude): Juste rapidement, pour répondre
à votre question, M. Dufour. Dans le tronc commun qu'on propose, de
conditions de travail dans le projet de loi 142, on dit clairement qu'on n'a
pas le droit de grève là-dessus. Il suffirait à Orner
Rousseau de l'APCHQ, demain matin, de dire: Nous autres, on ne veut pas le
changer, le tronc commun, et il suffirait qu'il dise ça de convention en
convention pour que jamais on ne réussisse à le changer,
même si les trois autres secteurs sont d'accord. Comprenez-vous? Et,
ça, dans la loi, c'est prévu que, dans ce tronc commun là,
on n'a pas le droit de faire la grève pour obliger M. Omer Rousseau
à dire d'autres choses. On n'a pas le droit de le dire. Donc, on vient
de consacrer ces dispositions-là pour 100 ans à venir. Ça,
je vous le prédis.
Le Président (M. Joly): M. le député de
Joliette, s'il vous plaît, c'est à vous. (22 heures)
M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le
Président, moi, je me pose des questions avant de poser une question au
groupe qui est devant moi, et les questions que je me pose, c'est: Qu'est-ce
qu'ont fait les députés qui ont travaillé
supposément très fort pour produire le rapport du Groupe de
travail sur l'industrie de la construction en juin 1993 pour que le contenu
qu'ils ont suggéré soit respecté? Qu'est-ce qu'ils ont
fait? Ont-ils demandé des explications, par exemple, au ministre du
Travail, pourquoi il n'avait pas retenu les recommandations faites à la
page 19 de leur rapport? Ils y croyaient. Pourquoi le ministre n'a pas tenu
compte des contraintes que fixait même Reed Scowen, qui s'apparentent
à la page 19 du rapport des députés qui ont
travaillé fort? Est-ce que le ministre vous a donné des
explications? Il faudrait que vous le disiez au monde, pourquoi le ministre n'a
pas amendé le Code du travail en même temps. Pourquoi il n'a pas
amendé les normes minimales de travail pour permettre à ces
gens-là d'avoir des congés fériés, d'avoir des
vacances, d'avoir des jours de vacances, d'avoir une accréditation
différente?
Ce serait intéressant de savoir pourquoi le ministre en est
arrivé à ne pas retenir la suggestion de ses propres
collègues. Est-ce qu'on amuse les députés comme on a
amusé les associations dans un sommet économique? Est-ce qu'on a
voulu leur faire croire qu'ils étaient consultés? Ça
ressemble à ça un peu. Je comprends que, par solidarité,
ils ne peuvent pas parler, mais j'aimerais ça, moi, qu'ils se
débouchent un peu et qu'ils disent pourquoi on n'a pas retenu leurs
recommandations. Ça aurait été intéressant de le
savoir.
Aussi, j'aimerais bien ça que le ministre... Il n'a
répondu à aucune question depuis le début. Pourquoi le
ministre en a donné plus que les entrepreneurs n'en demandaient dans le
domaine du résidentiel? C'est qui, ça? «C'est-u» vrai
que c'est deux bonzes, deux grands ministres qui ont fait des pressions au
Conseil des ministres et qui ont obligé le ministre à changer sa
recommandation? Parce qu'il partait en disant, dans son mémoire,
à la page 4, que ça n'avait pas d'allure, sur les
bénéfices marginaux, sur les avantages sociaux, de
déréglementer, et il arrive à la conclusion et il
déréglemente. «C'est-u» parce qu'il s'est fait
renverser au Conseil des ministres qu'il n'a pas... Comment ça se fait
qu'il en donne plus que le client n'en demande?
Moi, ça me dépasse toujours, ça. Ordinairement, le
gouvernement n'en donne pas plus que le client n'en demande. Pourquoi le
ministre s'est-il rendu à cela? Comment il se fait, par exemple, que
l'APCHQ, même s'ils ont tenté de donner une réponse
après-midi en disant: Bien, on n'était pas... Il faut croire que
la confiance ne régnait pas trop vis-à-vis du Conseil des
ministres. Mais comment une association patronale dite sérieuse peut
signer un document avec une centrale syndicale pour s'entendre sur une
non-déréglementation, puis signer la paix, à toutes fins
pratiques, entre syndicat et patron, puis qu'un ministre en donne plus que
ça, à leur grande surprise? Pourquoi, ça? C'est quoi, les
motifs? Quels sont les objectifs recherchés par le ministre ou par le
gouvernement pour agir de la sorte? Moi, ça me dépasse.
Ordinairement, quand on fait un projet de loi, on explique pourquoi on
arrive à telle conclusion. On explique quel est notre cheminement qui
nous a amenés à donner ça. Mais là le ministre
questionne sur des détails des mémoires sans toucher le fond des
choses. C'est quoi? Quel est l'objectif recherché? C'est de
contrôler le travail au noir dans la construction? «C'est-u»
ça, sa recette qu'il a donnée? Puis «c'est-u»
ça qui est le cheminement intellectuel qu'il a suivi pour arriver
à cela? Ça ne m'apparaît pas bien, bien sérieux,
cette histoire-là. Puis, moi, je me demande vraiment comment le ministre
du Travail peut en arriver, par exemple, à vous demander...
ii vous a demandé tantôt, ça m'a fait rire: vous ne
pourriez pas baisser un peu les avantages de vos régimes pour les
étendre à plus de monde? et, dans la même phrase, il dit:
50 % de votre monde ne se qualifie pas. mais il a oublié d'ajouter:
puis, moi, comme fin finaud, j'aimerais que vous embrassiez le triple de
ça. vous allez avoir un beau régime. il faut être
sérieux quand tu questionnes quelqu'un qui se présente devant
toi, puis à qui tu poses des questions. déjà il
reconnaît, dans sa question, que 50 % de votre monde ne réussit
pas à se qualifier.
Lui, il déréglemente pour permettre au double de
ça, peut-être, d'intégrer le bassin ou les bassins. Il vous
dit: Vous ne pourriez pas faire quelque chose pour faire en sorte de
protéger tout ce beau monde? Franchement. Franchement, il a beau
être 22 h 2, là, il faut être un petit peu sérieux,
puis connaître un peu son propre projet de loi, puis penser un petit peu
à ce qu'on demande au monde. Je n'en reviens pas. Ça ne fait pas
sérieux. Ça fait de l'improvisation au bout. Ça
fait...
Il y a deux types d'ignorance: il y a crasse, puis il y a ignorance tout
court. Puis vous savez la distinction entre les deux. Ignorance tout court, tu
ne le sais pas; ignorance crasse, tu feins de ne pas savoir. J'ose dire que
c'est le premier type d'ignorance. Mais c'est inconcevable pour celui qui
accepte de mettre son nom, par exemple, sur un projet de loi de demander
à des travailleurs, dont déjà 50 % des gens ne se
qualifient pas, d'en ajouter au bout, puis de leur dire: Peut-être que
vous pourriez négocier un régime qui aiderait votre monde. Il a
des syndics, imaginez-vous, puis il vous demande de les protéger.
«C'est-u» brillant, ça? Il leur dit: Vous ne serez pas
syndiqués, vous n'avez pas de protection, mais pourriez-vous les
protéger? Les protéger de qui? Vous n'avez même pas de
contrôle.
Franchement, moi, je vous avoue que c'est décourageant. C'est
décourageant de regarder ça aller, puis d'entendre ça. La
seule question que j'ai à vous poser face à tout ça, c'est
la suivante: Croyez-vous sincèrement que la seule solution c'est de
suspendre tout ça, puis de s'en remettre aux parties qui elles au moins
savent ce qui se passe dans leurs secteurs?
M. Gingras (Claude): Écoutez...
Le Président (M. Joly): M. Gingras, s'il vous
plaît.
M. Gingras (Claude): ...votre question, je pense que c'est une
question importante. Je sais que possiblement ma réponse ne fera pas
nécessairement l'unanimité, mais je peux vous dire
qu'après avoir connu les intentions du gouvernement, dans le cadre du
projet de loi 142, il m'apparaît que c'est le seul chemin qui
actuellement est acceptable, parce que je pense que les parties ne pourront pas
vivre avec la loi 142. Jamais l'avenir de l'industrie ne pourra être
assuré et la paix sociale dans cette industrie ne pourra être
assurée avec un tel projet de loi. Ça, c'est ma conviction la
plus sincère. Et je me dis: Si, demain matin, on essaie d'imposer de
force ce modèle aux parties, on les dirige carrément vers un
échec lamentable pour se donner bonne conscience éventuellement
d'aller encore plus loin dans la négation des droits fondamentaux des
partenaires de cette industrie-là.
Moi, j'ai écouté beaucoup de débats ici. On dit: II
faut diminuer les coûts, et tout ça. On est sensibles qu'il y a
des choses qui doivent être faites dans cette industrie-là, mais
je pense que les partenaires de cette industrie-là savent qu'il va
falloir qu'on pose des gestes pour améliorer la situation, la
consommation. Mais, encore là, on peut parler longtemps parce que, vous
savez, les taux d'intérêts ont baissé
considérablement. Vous savez que les taux d'intérêts
s'appliquent quand même sur la totalité des coûts des
résidences. Est-ce que ça a stimulé les travaux de
construction? Pas évident. Demain matin, on nous propose d'agir sur 15 %
ou 20 % des coûts d'une maison, c'est-à-dire la main-d'oeuvre, de
réduire ces coûts-là, puis demain ça va assurer le
plein emploi dans l'industrie de la construction; c'est se bercer d'illusions.
Moi, je vous dis que, si on avait pu relancer l'industrie de la construction,
le seul fait d'avoir baissé les intérêts de la façon
qu'ils ont baissé dans les mois qui viennent de passer aurait
été suffisant parce que, ça, ça s'applique au total
du coût de la maison. Là, on nous propose d'agir sur 15 %, on
prétend que ça va relancer l'industrie de la construction. Moi,
je vous dis que c'est un faux débat.
Votre proposition: Est-ce que les partenaires sont capables, si on
laisse de côté le projet de loi, de s'asseoir et de
raisonnablement essayer de regarder quel pourrait être l'avenir de
l'industrie, tant au niveau de la législation qui devrait nous gouverner
que des conditions qui devraient être applicables, en fait, sur une
façon de faire dans l'industrie qui tienne compte des problèmes?
Quant à nous, on est prêts à participer à cet
exercice-là, on est prêts à y travailler et à y
oeuvrer, ça c'est clair. On espère qu'on mettra de
côté un projet aussi inique, aussi inacceptable, aussi incapable
de prendre en charge les problèmes et qu'on confiera au moins aux
partenaires de l'industrie le soin d'essayer de définir, encore une
fois, quel devrait être le modèle pour les relations de travail de
demain dans cette industrie-là.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Gingras. M. le
député de Drummond, s'il vous plaît, une dernière
question.
M. St-Roch: Oui, merci M. le Président. Je ne reviendrai
pas, je pense que vous étiez ici depuis le début de la
journée... Vous connaissez, je pense, mes positions, mais juste, M. le
Président, peut-être comme déclaration de dire que je suis
de plus en plus convaincu de ce que j'ai dit dans mes remarques
préliminaires, qu'on devrait prendre un temps d'arrêt pour
déposer une vraie image de cette industrie-là de la construction,
qui est 20 000 000 000 $, qui est un huitième de notre produit
intérieur brut, à peu près à ce moment-ci.
Ça m'apparaît comme étant fondamental.
parce que j'entends aussi toute la problématique qui a
été faite au niveau du travail au noir. on parle de 420 000 000
$. ce serait important que, nous, les parlementaires, on ait les vrais chiffres
parce que, si j'en crois, moi... et je n'ai pas de raison de douter des figures
et des mémoires qui ont été présentés ici.
lorsqu'on me parle de 8 000 000 000 $ en coût de non-qualité et
que, dû à la non-qualification de la main-d'oeuvre, c'est 30 %,
c'est 2 400 000 000 $, ça, m. le président. si je fais un
bungalow à 100 000 $, c'est 3000 $, et, quand on parle de vouloir
baisser les coûts, il y a peut-être quelque chose là qui est
intéressant. il y a peut-être quelque chose là qui est
intéressant en parlant de non-qualification dans une période
où on sait qu'il y a un surplus et un bassin de main-d'oeuvre. mais, bon
dieu, arrêtons tout ça, puis, d'urgence, faisons un plan de
recyclage et de formation de la main-d'oeuvre! elle est sans emploi, m. le
président. elle est disponible 40 heures par semaine, 60 heures par
semaine, si on le veut, pour aller aider ce secteur de l'industrie là.
on parle ici de 8 000 000 000 $, 40 % reliés aux erreurs de conception
et 30 % à la non-qualification. alors, je pense qu'à un moment
donné j'ai dit au début, m. le président, qu'on utilisait
un leurre pour le travail au noir qui était de 420 000 000 $, si les
chiffres qui nous ont été donnés sont bons. mais, ici, on
a un volume et un potentiel de 2 400 000 000 $. et, quand on parle ici, et je
n'ai pas de raison de douter, moi, des entrepreneurs qui emploient les
travailleurs quand ils disent que l'industrie est à bout de souffle, les
entreprises souffrent d'une carence en formation, en recherche et
développement, en main-d'oeuvre qualifiée et en innovation
technologique, bien moi, je ne pense pas que c'est en enlevant la qualification
d'un secteur qu'on va améliorer ces paramètres-là. si
c'est vrai que ça fait 30 % du coût d'une propriété,
m. le président, je pense qu'on ne s'attaque pas au bon
problème.
Moi, je vais demander à M. le ministre la suggestion que j'avais
faite dans les remarques préliminaires: On arrive à la fin
maintenant; arrêtons, prenons un mois, prenons deux mois pour mettre
ensemble la vraie image de l'industrie. Rassoyons-nous à la commission
parlementaire et laissons les partenaires, après qu'ils auront vu toutes
ces figures, dire: Là, on va commencer à travailler sur des
choses aussi, M. le ministre, qui ne sont pas conflictuelles. Parce que, quand
je parle de formation professionnelle, il y a des patrons ici, il y a des chefs
syndicaux, et tout le monde a dit: Oui, il faut en faire et il faut en faire
vite. C'est peut-être des moyens où on peut commencer à
dégager des consensus dans un secteur de l'industrie, et, lorsqu'on
apprendra à travailler ensemble, après une dizaine
d'années où on a des décrets sur des choses qui sont non
conflictuelles, on sera peut-être capables d'arriver avec une convention
négociée parce qu'on se sera adressé, M. le
Président, aux vrais problèmes de la construction. (22 h 10)
Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le
député de Drummond. M. le ministre.
M. Cherry: Merci.
Le Président (M. Joly): Merci. Alors, à mon tour,
au nom des membres de la commission, je tiens à remercier les gens de la
CSD d'avoir comparu devant nous. Et, maintenant, je demanderais aux gens
représentant la Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec de bien vouloir s'avancer et prendre place, s'il
vous plaît. Je vous remercie.
Mémoire déposé
Alors, avant de débuter, je profite de ce petit moment afin de
déposer un mémoire qui est présenté par M. Germain
Dumas, qui a tenu à être enregistré ici à la
commission. Donc, pour le bénéfice des membres de cette
commission, je ferai circuler une copie du mémoire, qui sera
considéré comme lu et entendu. Alors, le mémoire sera
présenté aux membres de la commission pour leur
bénéfice.
Il me fait plaisir d'accueillir les membres de la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec. Je reconnais
M. Jean Brière, président, qui voudra bien nous introduire les
gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.
Je m'excuse si je vous bouscule un peu, mais vous aurez sûrement
le temps de même ralentir votre débit, si vous voulez, au moment
de votre présentation.
Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec (CMMTQ)
M. Brière (Jean): Alors, M. le Président, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés, confrères de
l'industrie, mesdames et messieurs. À ma gauche, M.
Évan-géliste Bourdages, un entrepreneur de Gaspé, et,
à ma droite, M. Michel Favre, directeur général de la
Corporation, et je suis Jean Brière, je suis le président de la
Corporation.
Le Président (M. Joly): Je vous rappelle brièvement
la règle, vous avez une vingtaine de minutes... Est-ce que vous entendez
bien, M. Brière?
M. Brière (Jean): J'ai des problèmes.
Le Président (M. Joly): Vous avez des
problèmes?
M. Brière (Jean): II y a des gens qui...
Le Président (M. Joly): Je vais demander peut-être
au contrôleur des ondes, ici, de bien vouloir peut-être corriger.
Alors, je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour livrer
votre mémoire et, par après, les parlementaires
échangeront avec vous. Alors, la parole est à vous, M.
Brière.
M. Brière (Jean): Merci, M. le Président. Il
nous fait plaisir de pouvoir vous présenter notre mémoire,
et, pour vous situer brièvement, permettez-moi d'abord de souligner que
la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie existe depuis
1949 et qu'elle regroupe les 2300 entrepreneurs spécialisés en
mécanique du bâtiment du Québec. Les membres de notre
corporation exercent leur profession dans des domaines aussi variés que
la plomberie, le chauffage, la ventilation, la réfrigération, la
protection contre l'incendie et la tuyauterie industrielle, pour tous les
donneurs d'ouvrage dans l'industrie de la construction.
Nous sommes à nouveau tous réunis, un peu plus de un mois
après la tenue du sommet de la construction. Nous savions que le
gouvernement voulait agir rapidement, mais nous n'avions pas cru qu'un projet
de loi comme celui-ci, qui est devant nous, serait présenté. Les
problèmes de l'industrie de la construction sont globaux et
débordent le champ des relations de travail. Malheureusement, le projet
de loi n'apporte qu'une réponse partielle aux problèmes de
l'industrie. Or, voilà que l'on voit poindre à l'horizon les
problèmes qui ont engendré les solutions, qui sont à la
base du régime actuel des négociations de travail dans
l'industrie de la construction. Nous ne sommes pas sûrs que vous avez mis
au jeu la même rondelle pour tous les joueurs. Sommes-nous à la
troisième période, ou sommes-nous en prolongation? Deux questions
primordiales sont posées par le projet de loi, et nous allons surtout
nous limiter à les examiner, bien que nous ferons d'autres
représentations. En premier lieu, nous traiterons du champ d'application
de la loi, puis nous nous exprimerons sur le régime des
négociations.
Que le gouvernement ait voulu faire réagir l'industrie de la
construction, nous le comprenons, mais les pistes de solution que vous
empruntez ne nous apparaissent pas, après un examen attentif, être
un gage de succès. Dans le document de consultation
préparé pour le Sommet, vous avez privilégié une
approche industrie. Nous sommes prêts à accepter cette approche.
Nous croyons qu'il n'y a qu'une industrie de la construction et que cette
industrie rend des services à différents donneurs d'ouvrage qui
ont des besoins et des moyens variés.
Nous comprenons que certains puissent se sentir frustrés ou
oubliés. Cela ne doit pas conduire aux actes de violence que nous
connaissons. La violence n'est pas un moyen de régler des
différends, et nous condamnons donc avec force tout acte de
violence.
Le secteur résidentiel fait partie de l'industrie de la
construction. Nous n'avons jamais demandé, et encore moins exigé,
que ces travaux ne soient plus assujettis à la loi. Bien que nous
connaissions les problèmes de ce secteur, nous ne croyons pas que la
déréglementation proposée par le projet de loi
règle le problème du travail au noir et qu'elle fasse diminuer le
prix des maisons. De toute façon, elle engendrera des problèmes
supplémentaires.
Bien que, pour notre profession, la déréglementation
proposée n'entraîne pas de conséquences graves pour la
qualification de la main-d'oeuvre, la situation sera très
différente, pensons-nous, pour plusieurs autres métiers. Cette
situation devient inquiétante pour le consommateur. L'investissement
majeur d'une famille québécoise est sans aucun doute
l'acquisition d'une maison. Malgré toutes les garanties que peuvent
donner un entrepreneur ou une association, la seule façon de s'assurer
de la qualité des travaux de construction, c'est d'abord de s'assurer de
la compétence et de la qualification des entrepreneurs et de leurs
salariés. Comment les travaux d'un entrepreneur peuvent-ils être
de qualité si, à la base, ces travailleurs ne sont pas
compétents et qualifiés? Si la main-d'oeuvre n'est pas
compétente et qualifiée, comment aurons-nous une relève de
qualité, comme entrepreneurs? Un grand nombre de salariés sont
devenus des entrepreneurs et des employeurs.
La compétence et la qualification de la main-d'oeuvre sont et
doivent être les premiers objectifs de la société
québécoise, afin d'assurer notre compétitivité et
notre place dans le monde. Permettre à n'importe qui d'exécuter
des travaux de construction est inacceptable et ne respecte pas les principes
de la qualité totale, qui est un des objectifs que nous acceptons. La
compétence et la qualification des travailleurs de la construction sont
les éléments de base pour atteindre l'excellence dans l'industrie
de la construction. Il ne peut être question d'y parvenir en diminuant
les prérequis ou en les faisant disparaître. Le professionnalisme
de nos entreprises et de nos travailleurs doit être augmenté et
non diminué.
Il ne faut pas non plus oublier les investissements majeurs qui ont
été faits au cours des ans dans la formation professionnelle de
la main-d'oeuvre, ni dans la prévention en matière de
sécurité du travail. Déréglementer équivaut
à oublier tous les entrepreneurs et les travailleurs de ce secteur qui
ont participé au financement de ces programmes. Il faudrait donc, au
minimum, que le gouvernement assure une transition harmonieuse entre les deux
régimes si vous décidiez d'aller de l'avant avec la
déréglementation, ce avec quoi nous ne sommes pas d'accord et que
nous n'acceptons pas.
Un grand nombre d'entrepreneurs membres de la Corporation
exécutent des travaux pour différents donneurs d'ouvrage. Leurs
salariés peuvent être appelés dans la même
journée à travailler sur des chantiers de construction
résidentielle, commerciale et institutionnelle. Ce chevauchement entre
un secteur réglementé et un qui ne l'est pas existe
déjà, et l'expérience de nos membres nous amène
à vous faire part de certains commentaires. Comment peut-on demander
à un employé qui travaille de façon permanente pour un
entrepreneur de changer de convention collective après trois heures de
travail? Comment lui dire que, pendant 20 heures par semaine, il aura un
régime de retraite et d'autres avantages mais pas pendant le reste de la
journée? Comment administrer efficacement et sans coûts
supplémentaires pour les entrepreneurs deux, trois, quatre
régimes pour le même travailleur? Il est clair, alors, que les
entrepreneurs, afin de conserver leur main-d'oeuvre de qualité, doivent
donner les meilleures conditions en tout temps,
ce qui les rendra moins compétitifs face au travail au noir.
De plus, il ne faut pas se faire d'illusions. Si le secteur
résidentiel ne fournit pas suffisamment de travail, il y aura rapidement
une prolifération de travailleurs qui viendront chercher de l'emploi
dans les secteurs réglementés, avec les inconvénients que
l'on peut rapidement entrevoir. Il risque donc d'y avoir une érosion
importante des travaux dans les secteurs réglementés. D'ailleurs,
l'existence de deux régimes dans le résidentiel, par la
déréglementation de la rénovation résidentielle, a
amené une pression supplémentaire qui entraîne la
déréglementation totale dans le résidentiel, un peu comme
une maladie qui progresse chez un malade.
Également, il faut s'interroger sur le régime des
relations de travail qui pourrait être instauré dans le secteur
déréglementé. Il est possible que les entrepreneurs
reçoivent des requêtes en accréditation, et cela sera
légitime. Quelle sera l'unité de négociation
appropriée? Le rapport du groupe de travail des députés
ministériels sur l'industrie proposait que des modalités
d'application du Code du travail soient élaborées. Il n'y a rien
dans le projet de loi à cet effet. Nous croyons qu'avant de
déréglementer on aurait dû au moins faire cet exercice, vu
les particularités de l'industrie. (22 h 20)
Nous ne croyons pas, non plus, que la solution retenue par le
gouvernement mettra un frein à la prolifération du travail au
noir. Il y a quelque temps, on attribuait la cause du travail au noir aux
artisans. Aujourd'hui, tous constatent que la cause du travail au noir est tout
autre, et la déréglementation ne réglera pas ce
problème. Le travail au noir n'est pas qu'un problème de
relations de travail ni de négociations; c'est un problème de
société. La majorité de la rénovation
résidentielle se fait encore au noir et la
déréglementation n'y a rien changé. Nous ne voulons pas
empêcher personne de travailler. Nous croyons cependant qu'il y a des
règles de base qui doivent s'appliquer dans toute l'industrie de la
construction et que ces règles ne doivent pas être
contournées. Quand le gouvernement, par ses ministères ou
organismes, respectera toutes les règles, surtout celles qu'il
établit, il y aura au moins une véritable expression de
volonté de contrer le travail au noir. Il ne faut pas seulement faire
des discours, il faut agir. Et il ne faut pas dire: Faites ce que je vous dis
et non ce que je fais, car, à ça, la population a répondu:
Tout le monde le fait, faites-le donc.
Nous ne croyons donc pas que le travail au noir diminuera suite à
l'adoption de ce projet de loi. Il est temps que l'on examine réellement
les mesures qui ont été adoptées unanimement lors du
Sommet pour contrer le travail au noir.
Quant au prix des maisons, les coûts de main-d'oeuvre ne sont pas
le seul critère qui le détermine. Il est donc à
première vue au moins incertain de prévoir une véritable
diminution du prix. De plus, s'il est vrai que la construction
résidentielle se fait déjà dans
l'illégalité, cela veut dire que la diminution de prix a
déjà eu lieu. Comment peut-on prévoir de nouvelles
diminutions dans de telles circonstances? Nous ne croyons donc pas qu'il y aura
une véritable diminution du prix des maisons par la
déréglementation et nous ne croyons pas non plus que l'on puisse
justifier cette solution par une diminution de prix. Nous ne croyons pas que la
déréglementation proposée réglera les
problèmes qui existent dans le résidentiel. Nous croyons
plutôt que la solution passe par une adaptation du régime de
négociation et l'adoption de véritables mesures pour contrer le
travail au noir. Il faut être capable de gérer la
décroissance de l'économie, mais il faut le faire d'une
manière harmonieuse.
La proposition de modification au régime de négociation
est semblable dans ses grandes lignes à une proposition qui a
été rejetée lors du Sommet. Ce n'est pas parce que l'on
n'a pas pu atteindre un consensus sur une proposition que l'on peut accepter le
régime proposé par le projet de loi. Nous connaissons les
demi-impasses auxquelles sont arrivées les négociations. Nous
sommes d'accord pour essayer une nouvelle formule et nous ne sommes pas
d'accord avec celle qui est proposée. On a décidé de faire
porter l'odieux des échecs à un seul coupable, alors que l'on
négocie à au moins deux parties. Vous voulez retirer à
l'AECQ son mandat sans nous fournir une raison valable. Personne ne peut mettre
en doute la compétence de l'AECQ dans le domaine des relations de
travail. Elle a une expertise enviable dans ce domaine, et d'ailleurs le projet
de loi le reconnaît expressément en obligeant les parties
patronales habilitées à négocier à
récupérer l'expertise de l'AECQ en la maintenant en vie pour en
faire un organisme de coordination et de support. Pourquoi faut-il refaire les
fondations quand le toit coule? La confiance, la transparence et
l'intégrité sont des valeurs essentielles pour mener à
bien des négociations. Nous croyons que l'on peut remodeler l'AECQ pour
qu'elle réussisse encore plus à atteindre ses objectifs. Ce n'est
certes pas en signant des documents avec quelques parties dans un corridor ou
en discutant dans des chambres d'hôtel qu'on agit de façon
transparente.
On se doit aussi, lorsqu'on agit dans ce domaine, de prendre en compte
l'intérêt de tous les employeurs et on doit agir avec
équité pour tous sans favoriser les gros, qui seraient les seuls
à faire des travaux de qualité, quant aux dires de certains, ni
les petits entrepreneurs. On doit aussi vérifier avant de donner un tel
mandat à des associations quels en sont les membres. Sont-ils des
entrepreneurs déclarés à la CCQ? Combien
déclarent-ils d'heures dans l'industrie? Sont-ils vraiment
représentatifs des employeurs? Quels sont les statuts de ces
associations et sont-ils compatibles avec le mandat qu'on veut leur confier?
Nous croyons qu'une association patronale unique pour fins de relations de
travail est nécessaire et que celle-ci doit être libre d'attaches
aux fins de son mandat. Les employeurs doivent pouvoir y être
représentés de façon directe, sans intermédiaires
et libres d'influences des conseils d'administration des autres
associations.
Lors du Sommet, nous avons déclaré que nous étions
d'accord pour une convention collective avec quatre secteurs. Nous sommes
encore prêts à accepter cette solution, même si nous
appréhendons certains problèmes d'application. Cependant, si
effectivement vous déréglementez le secteur résidentiel de
la façon proposée, cela amputera environ 85 % des
activités de ce secteur de l'industrie. Nous devons donc conclure que
certaines associations habilitées à négocier ne seront
plus vraiment représentatives et qu'une seule regroupera une très
grande partie du monde patronal de l'industrie.
Si votre intention est d'améliorer les relations de travail, de
les adapter aux quatre secteurs proposés, sans pour cela mettre en cause
la représentativité et les relations interpatronales, nous
pensons que cela peut être réalisé sans pour autant
éliminer tout ce qui existe déjà. Il est
préférable qu'il n'y ait qu'une seule partie qui négocie,
et cette partie doit être et doit demeurer l'AECQ. Les
événements récents démontrent sans l'ombre d'un
doute que l'existence de l'AECQ est et demeure essentielle. La proposition
faite à cet égard dans votre projet de loi va à rencontre
dés intérêts des entrepreneurs dont la
représentation sera par ailleurs grandement affaiblie devant des
organisations syndicales déjà très fortes.
Nos membres oeuvrent dans tous les secteurs de l'industrie. Ils
déclarent près de 8 000 000 d'heures par année à la
CCQ. La Corporation, consciente de l'importance de ses membres dans
l'industrie, doit s'assurer qu'ils sont représentés en
matière de relations de travail par une instance crédible
à la fois pour eux-mêmes et pour leur vis-à-vis syndical et
dans laquelle ils pourront se reconnaître, se sentir en confiance et
être à l'aise.
Nous croyons que l'AECQ doit être conservée, car elle est
l'association la plus habilitée pour négocier, la seule avec de
l'expérience, néanmoins. Nous n'acceptons donc pas les
propositions que vous faites. Les problèmes de relations du travail
nécessitent une implication constante et on ne peut le faire à
temps partiel. Les associations d'employeurs ont d'autres missions tout aussi
importantes à remplir, et elles doivent leur accorder tout leur temps et
toute leur énergie et ne pas commencer à s'impliquer dans les
relations de travail juste pour se donner du travail.
Quant à nous, la mission de qualification de nos membres et de la
formation nous apparaît déjà assez importante sans y
ajouter le volet des relations de travail dont nous nous sommes
déjà occupés avant la commission Cliche. Nous croyons
également qu'il est préférable que les conditions du
travail soient négociées et non imposées. Nous sommes
pleinement d'accord avec le retrait de l'intervention gouvernementale et nous
approuvons votre décision de retirer l'article 51 de la Loi sur les
relations du travail. En agissant ainsi, vous responsabilisez vraiment les
partenaires de l'industrie. Les parties à une négociation
collective doivent pouvoir s'entendre et, si cela est nécessaire, elles
doivent établir un rapport de force entre elles. Les négociations
doivent donc avoir lieu véritablement avec toutes les
conséquences qui en découlent. Il est préférable
d'avoir une convention collective plutôt que de se faire imposer un
décret. Nous proposons donc que le régime de négociation
soit modifié pour reconnaître quatre secteurs, qu'il n'y ait
qu'une convention collective et une seule association patronale
habilitée à négocier, soit l'AECQ. Nous croyons que
l'AECQ, puisqu'elle regroupe tous les employeurs, doit nous proposer
elle-même des modifications à ses structures pour mieux
représenter le monde patronal.
Nous ne pouvons laisser passer l'occasion qui nous est offerte pour ne
pas rappeler un problème juridique créé par le projet de
loi 185. Un employeur qui n'est pas le représentant
désigné d'une entreprise doit être membre d'un syndicat.
Prenez au moins la peine s'il vous plaît de régler ce
problème et cela pourrait se faire très simplement. De plus, nous
croyons que la Loi sur le bâtiment doit être modifiée pour
s'assurer que les travaux de plomberie et de chauffage doivent être
exécutés par des entrepreneurs, tout comme les travaux
d'électricité. La santé et la sécurité
publiques sont mises en jeu. Il s'agit de métiers demandant des
connaissances techniques importantes et pour lesquels un propriétaire
d'édifice ne peut devenir compétent du jour au lendemain. Il
faut, pour le bien-être de la population, s'assurer de la qualité
de ces travaux.
Comme nous l'avons dit au Sommet, nous ne croyons pas que la
modification au régime de négociation relancera l'industrie. Il
ne faut pas penser non plus que l'instauration d'un nouveau régime de
négociation permettra de diminuer les coûts, donc de relancer
l'industrie. Il faut trouver d'autres solutions. Certains consensus
dégagés au sommet de la construction devraient amener une relance
de l'industrie. Cependant, le projet de loi n'apporte pas de véritables
solutions au problème du travail au noir. Il est temps que les
entrepreneurs se respectent entre eux comme ils doivent respecter les
travailleurs et comme les travailleurs doivent respecter ceux-ci. C'est par une
augmentation de la qualité professionnelle des entrepreneurs et des
travailleurs que nous assurerons des travaux de qualité.
Donc, en définitive, nous ne sommes absolument pase d'accord avec
le régime de négociation de la déréglementation
proposée par le projet de loi. Nous ne l'acceptons pas et nous ne
voulons pas voir l'AECQ démantelée pour la voir remplacer par
trois parties qui seront plus vulnérables à des pressions qui
pourraient s'exercer sur elle. Nous ne voulons pas voir notre industrie
démantelée. Le projet de loi est inacceptable sur ces points. (22
h 30)
Maintenant, M. le ministre, si vous me permettez, j'aimerais
déroger quelque peu au mandat que mes confrères m'ont
donné et laisser parler l'entrepreneur que je suis et vous exprimer
quelque peu les sentiments qui m'ont animé aujourd'hui, depuis les deux
derniers jours du moins, et je vous avoue bien sincèrement, j'ai le plus
grand désir de régler les problèmes de la construction. Je
trouve incompréhensible que des gens de part et d'autre ne puissent
trouver une réponse à des
situations que l'on vit présentement. La crise économique,
ce n'est pas plus la faute des entrepreneurs que c'est la faute des
travailleurs, que c'est la faute du gouvernement. Alors, je me demande, quand
j'entends des gens qui se présentent... je vous avoue franchement, cet
après-midi puis je ne veux pas faire de particularités, je
le dis, je sais que ça ne plaira pas, mais il faut que je le dise
ça m'a fait mal dans les tripes. J'ai entendu, il me semble, des
Rhodésiens cet après-midi, des gens qui m'ont dit que la seule
chose qu'ils pouvaient compresser, c'était le travailleur, puis
ça, là, même si je suis un entrepreneur je pense que
mes confrères, on vient tous de la même base, on va tous
comprendre ça moi, le travailleur, M. le ministre, c'est mon
voisin, c'est mon ami. Des fois, c'est mon ennemi, mais ça ne dure pas
longtemps, on règle nos problèmes. Des fois ça dure un
petit peu plus longtemps. Mais on n'est pas pour se déchirer comme
ça. Il y a bien assez du côté patronal et syndical entre
nous autres là, on se déchire assez, mon Dieu, qu'on devrait
trouver une solution!
Moi, je vous demande, on est bien bon, dans l'industrie, pour
créer des problèmes on en a assez de ça, on n'en
créera pas d'autres mais créer des systèmes
d'apprentissage... Pouvez-vous nous permettre... Ça c'est un cri que je
vous fais et du plus profond de moi-même, y a-t-il moyen de nous donner
la chance de faire notre apprentissage?
On ne s'est jamais parlé, je pense, comme on devrait se parler.
Vous nous avez donné le Sommet. J'ai dit que vous aviez
réalisé un Bélanger-Campeau dans le sens que vous aviez
amené des gens qui ne se parlaient pas, qui ne se connaissaient à
peu près pas à s'asseoir alentour d'une table. Je vous avoue que
la première journée, ça n'a pas été facile.
J'ai passé proche de sacrer mon camp une couple de fois moi-même.
Mais, la deuxième journée, c'est allé un petit peu mieux,
et je pense que, si vous nous donniez la chance... Après ça, si
on n'est pas capables de s'entendre, de mettre les vrais problèmes sur
la table, que ça dure 12 mois... L'AECQ et les parties syndicales,
qu'elles s'entendent et qu'elles nous règlent ça pour un an ou
deux ans, là, vite; je leur demande, moi, là, de le faire. Et,
après ça, qu'on s'assoie.
Ne nous donnez pas d'argent, vous n'en avez pas, vous en avez besoin
vous autres aussi, donnez-nous juste le personnel cadre pour nous encadrer un
petit peu on a des grandes culottes, mais, des fois, il faut être
encadrés et donnez-nous la chance de se parler. Mettez-nous des
gens pour nous aider à se comprendre, auxquels on pourra emmener nos
idées, mettre ça sur la table, et, de là, on va essayer de
travailler quelque chose. Mais, si, au bout de, mettons, un exemple, et je
donne ça juste comme exemple, 12 mois, là, une fois par mois ou
deux fois par mois, là, on n'a pas réussi à régler
les problèmes de la construction et à s'entendre sur quelque
chose qui a de l'allure, bien, moi, je m'engage à acheter une paire de
culottes courtes à tout le monde et on retournera à
l'école. Parce que je ne comprends pas que des gens intelligents
puissent, aujourd'hui, ne pas trouver une solution.
Les problèmes sont là, c'est des problèmes de
société. Ce n'est pas le problème du syndicat, ce n'est
pas mon problème, ce n'est pas votre problème, c'est un
problème qu'on a ensemble. Et ça, je pense qu'il n'y a personne
qui peut dénier ça. Je né sais pas, je rêve
peut-être en couleur, mais je ne peux pas comprendre que des personnes
intelligentes ne puissent pas s'entendre. C'est notre pain, c'est notre pain
qui est en jeu, et il faut le trouver. Moi, je ne veux pas garrocher des
bêtises à tout le monde, à gauche et à droite, le
restant de mes jours en commission parlementaire juste pour le plaisir de vous
voir. Je vous aime bien des fois, pas tout le temps, mais des fois.
Et puis, dans la construction, M. le ministre, ce qu'on vit, ce qu'on
discute, ça, c'est la pointe de l'iceberg, parce qu'on a entendu des
gens après-midi, des Rhodésiens nous dire, bien clairement, bien
clairement, M. le ministre, je l'ai entendu, on a dit: Je suis un entrepreneur
de construction, un broker. Oui, bien, les brokers et les entrepreneurs
généraux genre nouveau style, ça, c'est un gros
problème dans la construction. Il y en a bien de ces gens-là, M.
le ministre, qui viennent me dire: Le problème dans la construction,
c'est que tes entrepreneurs se prostituent. C'est ça qu'ils me disent,
M. le ministre. C'est vrai que mes entrepreneurs, des fois, se prostituent, et
on essaie de les ranger quand on est capables. Mais, M. le ministre, je vous
ferai remarquer que la prostitution, ce n'est pas ça qui est
illégal. Ce n'est pas la prostitution qui est illégale, c'est la
sollicitation, et c'est vivre des fruits de la prostitution. Et certains
entrepreneurs généraux, M. le ministre, c'est exactement ce
qu'ils sont, des profiteurs. Et naturellement, quand l'entrepreneur se voit
pris à ne pas être capable d'exécuter son contrat au
meilleur prix qu'il a fait, bien, il se voit pris à se revirer contre
ses travailleurs et à faire la même chose, et ça, c'est
boule qui roule; ça crée des mauvaises situations pour tout le
monde.
Je pense qu'il y a moyen de s'asseoir. Vous avez dit, je me souviens,
vous avez dit: II y a des gens qui viennent me voir et ils me disent: Fais
comme si on ne s'était pas parlé. Bien, je me rappelle d'avoir
été vous voir, moi, et ça ne me fait rien que vous le
disiez, vous pouvez le dire à tout le monde. Moi, je ne le dirai pas,
mais, si vous le dites, ça va être correct. Il y a une seule chose
qui n'est pas arrivée en passant, vous m'aviez dit: Assitôt que je
reviens de vacances, je vous appelle. Êtes-vous revenu?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cherry: On s'est vus trois fois depuis ce temps-là.
M. Brière (Jean): Bien oui, bien oui, bien oui.
M. Cherry: Mais on n'a pas lunché ensemble, tu as
raison.
M. Brière (Jean): Mais j'ai bien d'autres choses....
M. Cherry: Ha, ha, ha! On s'est vus mais on n'a pas lunché
ensemble, tu as raison.
M. Brière (Jean): Mais, ce que je veux vous dire, c'est
qu'il faut faire l'exercice. J'ai parlé avec certains
députés, et puis, souvenez-vous, au sommet de la construction,
j'ai cité des paroles de M. Lincoln. Je vais les reciter parce qu'elles
sont encore de plus en plus vraies, et je vous promets de les reciter tant et
aussi longtemps qu'on ne comprendra pas. Quand vous serez tanné vous me
mettrez dehors. Il a dit: Ce n'est pas le langage, puisqu'on parle la
même langue. À ce que je sache, après-midi, depuis deux
jours, ça s'est tout passé en français et on parle tous le
français. Ce ne sont pas les mots, puisqu'on emploie les mêmes.
C'est dans le sens qu'on leur donne qu'est tout le problème.
M. le ministre, j'ai écouté l'Opposition, j'ai
écouté sur les deux côtés du mieux que j'ai pu,
parce qu'il y en a qui pensent j'ai un appareil et là il fait
défaut que c'est auditif, mais, dans le fond, c'est un
décodeur. Parce qu'il y a des choses qui se sont passées au
Sommet que j'avais mal comprises. Ça fait que je me suis acheté
un décodeur, et là il fait défaut, ça fait que je
suis encore aussi mal pris que j'étais.
Moi, ce que je voudrais là-dedans, c'est qu'on puisse s'asseoir
et qu'on aille au fond des choses. Pas parce que c'est l'Opposition qui l'a
présenté, mais, à un moment donné, j'écoute.
On a des petits bouts de chacun des côtés. Je pense qu'il est
normal que les gens qui travaillent dans l'industrie de la construction
puissent y vivre et progresser dans une industrie qui est la leur, comme le
policier peut faire, comme le politicien peut faire. Quand ils se
présentent quatre députés dans un comté, M. le
ministre, vous en élisez un, les trois autres, on n'est pas pour former
un autre gouvernement juste au cas.
Je pense que c'est un petit peu la même problématique au
niveau de la construction. Il est bien évident... et je ne vous dis pas
qu'il n'y a pas eu d'abus, mais j'ose croire que mes compatriotes, que ce soit
du côté patronal, que ce soit des confrères du
côté patronal ou du côté syndical, vont s'asseoir
ensemble et qu'ils vont oublier de se donner des tapes sur la gueule, ils vont
oublier de s'intimider, ils vont oublier de se faire des menaces; ils vont
s'asseoir et ils vont parler.
Mais, s'ils ne se parlent pas, on fera comme j'ai appris à
l'histoire générale. David et Goliath ont amené les deux
armées, ils ont pris les plus forts des deux bords, et c'est comme
ça que ça s'est produit. Ils étaient plus intelligents que
nous autres dans ce temps-là. Ça fait que c'est la grâce
que je nous souhaite. Et je ne suis pas curé, remarquez bien, mais je ne
peux pas comprendre... Je me suis vidé le coeur, et vous pouvez le dire
à tout le monde. Je termine là et je vais vous laisser parler le
reste du temps. Je vais vous répondre tout ce que je peux vous
répondre, mais je souhaite ardemment qu'on règle nos
problèmes et qu'on se mette à travailler. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Brière. M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Cherry: M. Brière, bien sûr, vous êtes venu
au sommet de la construction et vous avez donné votre performance ce
soir, et les gens qui vous entendent sont convaincus que, s'il y avait plus de
monde qui s'exprimaient comme vous, on n'aurait probablement pas la sorte de
problème qu'on a. Donc, je vais continuer sur la dernière partie,
celle que vous avez faite à coeur ouvert, et je vais vous poser le
même genre de problème.
Vous étiez ici, aujourd'hui, vous avez entendu les gens dont je
vais vous parler. Je vais rester dans le domaine résidentiel, dans ce
secteur-là. Que ce soit La Corporation des maîtres
électriciens qui est passée, il y a deux heures, que ce soit vous
maintenant les tuyauteurs, bon, dans le secteur résidentiel, votre
employeur, c'est l'APCHQ qui vous donne de l'ouvrage, à ses membres.
M. Brière (Jean): Je m'excuse. Voulez-vous
répéter la dernière partie? Mon employeur...
M. Cherry: Ceux qui vous embauchent dans le secteur
résidentiel...
M. Brière (Jean): Oui.
M. Cherry: ...c'est l'APCHQ?
M. Brière (Jean): C'est-à-dire oui.
M. Cherry: Dans le secteur résidentiel...
M. Brière (Jean): Dans ce sens-là.
M. Cherry: ...c'est ses membres, là. C'est ses membres,
bon.
M. Brière (Jean): L'Association, là.
M. Cherry: Pour ce secteur-là. C'est de ça que je
parle. O.K. Pour le même secteur, c'est les mêmes employeurs par
rapport à La Corporation des maîtres électriciens qui vous
a précédés il y a à peine deux heures. Bon. Celui
qui donne de l'ouvrage dans ce secteur-là, l'APCHQ, elle dit que
ça répond en partie au travail au noir. Votre parallèle
comme corporation, les maîtres électriciens viennent de dire, il y
a à peine deux heures, que oui.
Et là, vous autres, vous dites exactement le contraire, c'est les
mêmes sujets, c'est les mêmes problèmes. Je ne veux pas vous
embarrasser par rapport aux autres, mais je veux que vous me répondiez
par rapport à ça. Comment ça se fait que, dans la
même journée, face à la même situation, dans un
même secteur
d'activité... Je ne veux pas mélanger les trois autres, on
va se perdre. On va rester dans le secteur résidentiel. Ceux qui se
donnent de l'ouvrage, ceux qui exécutent, les deux corporations, comment
pouvez-vous avoir des analyses aussi opposées? C'est là-dessus
que je veux vous entendre.
M. Brière (Jean): Ce ne sera pas long, M. le ministre. Je
vais essayer avec ça...
M. Cherry: O.K.
(22 h 40)
M. Brière (Jean): ...et je ne la prends pas pour une
colle. Mais, je vais vous dire quelque chose. J'ai dit tantôt, je vous ai
cité des paroles de Lincoln, tantôt, et c'est le parfait exemple
que vous me répondez. La question que vous me posez, c'est le parfait
exemple. C'est que, est-ce que le taux... Quand ces gens-là vous disent
ça, vous me permettrez d'abord de penser que vous êtes quand
même chanceux d'avoir deux corporations. Tout le monde pense qu'on est
des petits frères jumeaux et on peut vous arriver avec deux
différents mémos, deux idées différentes sur la
même chose, et je vais vous dire qu'on va se rejoindre, ce ne sera pas
long. Pas parce que je vais aller faire des pressions, pas parce qu'ils vont
venir m'en faire, non. Mais je vais vous dire qu'on vise les mêmes buts.
moi, ce que je vous dis, m. le ministre, quand vous me parlez de
déréglementation, c'est que je vous dis: si le gouvernement est
capable de prendre un département, puis d'analyser ça, puis de
dire je ne veux pas porter de jugement sur personne: on va couper 1 %,
puis ce n'est pas nécessaire que ce soit sur les salaires ce que
j'ai entendu aux nouvelles comme tout le monde ça viendra
d'ailleurs, est-ce qu'on est capables, comme industrie, de s'asseoir puis de
trouver un solution semblable? est-ce que c'est possible?
Moi, M. le Président, M. le ministre, je me demande vraiment:
L'économie, est-ce qu'elle va au consommateur ou si elle va dans la
poche de l'entrepreneur, le broker? C'est ça que je me demande, M. le
ministre. Puis je me demande ça vraiment. Est-ce que l'entrepreneur
électricien dont on parlait tout à l'heure, est-ce qu'il n'est
pas forcé? Si la réponse est oui, M. le ministre, je vous promets
que je vais me plier. Mais est-ce que c'est possible qu'on fasse un exercice,
qu'on le fasse, l'exercice? Si le taux est moindre, si on doit trouver une
solution, si on n'est pas capables, patrons, syndicats, de trouver une solution
acceptable aux deux parties, pas pour le broker... Tant mieux si ça fait
son affaire. Tant mieux si ça fait son affaire. Des fois,
là...
Puis je ne veux pas mettre tout le monde dans le même bateau.
C'est toujours l'exception qui confirme la règle. C'est ça, le
problème. J'ai peur de mon voisin, j'ai peur de mon compétiteur.
Lui, il le fait; je suis obligé de le faire. C'est ça dans
l'industrie, M. le ministre. Puis, je vous convie; venez faire un tour, venez
voir. C'est effrayant. Puis je ne veux pas faire peur à personne, moi,
là. Je suis assez grand. Mais c'est ça, c'est du tordage de bras.
Puis là ce n'est pas le syndicat qui est là. Pantoute, pantoute,
pantoute. C'est du tordage de bras, c'est des menaces, c'est des lettres
d'avocat, des lettres enregistrées. Pas une; deux, trois par jour. C'est
constamment comme ça. Informez-vous aux architectes, informez-vous aux
ingénieurs. C'est le bordel dans la construction, M. le ministre. Puis
ça, là, je vous le dis, je n'ai pas peur, je vais vous amener des
cas, des dossiers, des noms, des adresses, des numéros de
téléphone, tout ce que vous voudrez. Je ne parle pas à
travers mon chapeau, soyez-en sûr.
Mais je vous demande de faire l'exercice de a à z. J'ai
écrit je ne sais pas où elle est; tiens, regarde donc
ça, je l'avais amenée... Ce n'est pas un adon. Il y en a qui ont
eu des adons...
Le Président (M. Joly): Au cas où.
M. Brière (Jean): ...comme ça, dans les corridors,
mais ça, ce n'est pas un adon, je l'ai amenée exprès.
J'avais dit, au mois de mai, dans la revue Inter-Mécanique du
bâtiment de la Corporation: L'urgence d'un nouveau contrat dans
l'industrie de la construction, M. le ministre. Je ne vous lirai pas tout
ça. Ce serait tricher sur le temps qui m'est alloué, puis je suis
sûr que je n'ai pas déjà fait ça.
Là-dedans, on disait qu'il fallait impliquer.
«C'est-u» possible de penser que, dans l'industrie de la
construction, on pourrait se respecter les uns, les autres?
«C'est-u» possible qu'on voudrait devenir plus professionnels?
«C'est-u» possible? Moi, je pense que, si on est une... On
évolue, là. Ce n'est pas le temps de regarder en arrière.
Vous avez vu, une automobile... Il y a quelqu'un qui me faisait la remarque
tantôt en s'en venant. Dans une automobile, M. le ministre, le
pare-brise, il a peut-être deux pieds de hauteur, cinq pieds de largeur.
Puis le miroir, il est juste grand de même. Ça veut dire qu'il
faut arrêter de regarder en arrière puis d'essayer de se donner
des tapes sur la boîte pour ce qui s'est passé v'ià 20 ans,
puis regarder en avant. C'est pas mal plus important. Même, ils ont mis
des «wipers» en avant. Regardez en arrière, il n'y en a pas.
Bien, à part des petites «vannes». C'est comme ça.
«Y a-tu» moyen? C'est ça qu'on veut faire.
Bien, on va les régler, les problèmes. On va se faire des
feuilles comme les comptables. Je les ai vu faire. Je ne suis pas comptable. On
va se faire des feuilles puis on va aller voir où on se rejoint et
où il y a des divergences. Si ça prend un an, M. le ministre,
à une fois par mois, dans 12 mois on va avoir réglé le
problème. Ça fait 30 ans que vous l'avez, le problème. Ce
n'est pas un an de plus, un an de moins... Je ne vous dis pas le statu quo. Je
vous dis: Prenez l'AECQ, prenez les syndicats. Je ne sais pas s'ils sont encore
là. Il y a des bureaux en arrière. Embarrez-les puis ils
sortiront de là quand ce sera réglé.
M. Favre (Michel): Peut-être, pour ajouter...
M. Brière (Jean): On les nourrira une fois par jour. Vous
allez voir, mon chum, Pouliot, il va sortir ce ne sera pas long.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Favre (Michel): Pour «complementer», M. le
ministre, on a souvent évoqué l'expérience ontarienne. Pas
loin, à Ottawa, il y a une convention collective qui régit le
secteur résidentiel. On a souvent dit que tout le secteur
résidentiel à travers le Canada n'est pas
réglementé. Ce n'est pas vrai. La majorité des maisons
construites dans la région d'Ottawa sont assujetties à la
convention collective quand je parle du Mechanical Trade en Ontario
avec des conditions particulières, puis ça marche. On se
dit: Pourquoi déréglementer alors qu'il va falloir faire des
modifications au Code du travail? Il y a toutes sortes de complications puis
d'irritants qui sont à venir dans les circonstances prévues. On
dit: Ça se passe ailleurs. Puis ce n'est pas loin, c'est ici, à
Ottawa. Ça se fait.
Le Président (M. Joly): M. Bourdages, s'il vous
plaît.
M. Bourdages (Évangéliste): Si je peux me permettre
de renchérir, je pense qu'il faut prendre garde de considérer que
les propos qui ont été tenus un peu plus tôt par La
Corporation des maîtres électriciens du Québec
étaient diamétralement opposés à ceux qu'on tient.
La CMEQ a clairement reconnu qu'ils étaient complètement
désabusés de la situation et qu'ils avaient complètement
perdu confiance dans les capacités du système de se recycler, ce
qui n'est pas du tout la position de notre corporation. On a reconnu
tantôt qu'on plaçait confiance dans les parties de pouvoir
s'entendre. Je pense que, si la CMEQ était animée du même
sentiment... Ça vient confirmer tout simplement ce que mon
président prétendait tantôt, que nos positions ne sont
quand même pas si diamétralement opposées.
M. Brière (Jean): Mais je suis convaincu, par exemple, que
la CMEQ a les mêmes buts et fins, M. le ministre. C'est juste qu'à
un moment donné tu te tannes. Tu te tannes, tu pousses sur le wagon et,
qu'est-ce que tu veux, le wagon n'avance plus. Avec la gang qu'on a, on doit
être capables de le prendre, le wagon. On va le tasser et on va pousser
dessus en gang. Et, si on ne réussit pas dans 12 mois, on va s'acheter
une paire de culottes courtes et on va retourner à l'école.
Ça finira là.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Brière. M. le
député de Salaberry-Soulanges, s'il vous plaît.
M. Marcil: Moi, je vous écoute, M. Brière, avec
attention. Vous avez un discours que j'endosse à 100 %. Pensez-vous que
c'est intéressant pour un gouvernement que ce soit le
gouvernement du Parti québécois ou le gouvernement du Parti
libéral, ou conservateur, ou NPD, nommez-les tous qui, depuis
1969, a presque toujours été obligé d'intervenir dans le
dossier? Et c'est toujours la même question: Pourquoi vous ne nous
laissez pas négocier? C'est ça la question. C'est qu'il y a
toujours eu des temps pour négocier, il y a toujours eu une certaine
négociation, et on n'a jamais eu la possibilité de s'entendre. On
est tous des adultes, là. Il n'y a pas un gouvernement qui est
intéressé à appliquer des lois pour forcer le monde
à accepter des conditions de travail, dans le fond. Si tout le monde
était assez mature pour dire: II y a une limite, on va analyser
l'industrie, on va analyser les conditions de travail et de l'employeur et du
travailleur... Parce qu'il ne faut pas qu'il y ait seulement un gagnant dans
ça. On est tous d'accord avec ça. C'est tout le monde. C'est
toute la société qui devrait être gagnante dans un dossier
comme ça. en ontario, il s'est négocié à peu
près 198 conventions collectives dans le domaine de la construction,
presque toutes à la baisse. il n'y a pas eu de holà dans les
journaux, rien de ça. comment se fait-il que d'autres, ailleurs, peuvent
réussir à s'entendre, à se négocier des choses et
que nous autres... regardez dans le dernier. vous autres les entrepreneurs,
vous demandiez une diminution de 20 %. les travailleurs demandaient une
augmentation presque de 10 %. un écart de 30 %. comment se fait-il qu'au
bout de la ligne... tout le monde sait qu'au bout de la ligne il y a quelqu'un
qui va «caller la shot» et il s'appelle comment? le ministre du
travail, en vertu de l'article 51. il n'y a pas d'entente, on a peur, on fait
une commission parlementaire et on décrète.
Dans le fond, on ne devrait même pas se mêler de ça.
C'est du secteur privé, ça. Ce n'est même pas de la
fonction publique. Ce n'est pas les citoyens qui paient des taxes pour
construire les maisons. Les citoyens paient des taxes pour payer les
employés de l'État. Ça, c'est un fait. Le gouvernement
devrait s'en mêler, et il s'en mêle. Mais, dans le secteur
privé, on ne devrait pas être dans ça du tout. Mais on est
obligés, à cause d'un contexte qu'on traîne depuis des
années et des années, depuis les années soixante. Et,
aujourd'hui, on est rendus en 1993, comme vous dites, et on vit encore la
même maudite situation. C'est comme si on n'avait pas
évolué d'un pouce. On n'a pas changé notre culture. Je
comprends. Là, vous dites: Pourquoi? Et tout le monde qui est
passé aujourd'hui a posé la même question: Laissez-nous du
temps, on va s'entendre. Mais oui, mais ça fait 20 ans...
Le Président (M. Joly): 25 ans.
M. Marcil: Combien? 25 ans. Mais c'est ça, dans le fond,
le problème, M. Brière. Moi, là, je suis d'avis, je suis
un partisan de la négociation. J'aimerais que le monde s'entende. Mais
cessons de penser juste à notre petit nombril et commençons
à penser à tout le monde. Il y a des concessions à faire.
On est en 1993, il y a des problèmes. Le gouvernement du Parti
québécois,
dans les années quatre-vingt, avait des problèmes. Ils ont
demandé aux travailleurs de faire un effort. Les travailleurs ont dit:
Non. Ils ont été obligés d'agir d'une certaine
façon.
Nous autres, on vit le même problème. C'est le gouvernement
du Québec, c'est la population qui l'a élu. On demande aux gens
de faire un effort. Les gens restent toujours ancrés sur leur position.
Mais il me semble que le problème, si on ne le règle pas
aujourd'hui, on va le régler quand? C'est le commentaire que je voulais
faire.
Le Président (M. Joly): M. Brière, aimeriez-vous
réagir à ça? Ou vous avez la réponse. (22 h 50)
M. Brière (Jean): En fait, je comprends très bien
votre position et croyez-moi que, quand on regarde le problème et qu'on
veut le régler, il y a des fois, que ce soit du côté
patronal, ou du côté syndical... Et, là, je ne veux pas me
faire l'arbitre, mais, quand on regarde ça, on regarde ça avec
nos yeux propres, habitués à faire ce qu'on est habitués
de faire. Puis, quand on est rendus où on est rendus, il ne reste
peut-être plus grand mèche sur la corde. Le pétard est
à la veille de sauter, parce que ça ne marche plus. Alors,
peut-être qu'on prend encore une dernière chance. Mais il n'y en a
plus. On est rendus au bout du tunnel. Il faut qu'on trouve une solution.
Mais, quand vous me parlez... Quand des gens arrivent, par exemple, vous
êtes un entrepreneur, puis vous voulez être professionnel, vous
voulez être respectueux des lois, puis qu'on vous dit: Écoute, ce
n'est pas un problème, mon chum, il est hors construction, lui,
ça fait qu'on ne peut rien faire, il passe droit. Il n'a pas ses
licences, mais casse-toi pas la tête, mon chum, il va les avoir
après l'obtention du contrat. Moi, si je me fais arrêter en
état de boisson sur la rue, le test de l'ivresso-mètre, c'est
à soir que je le passe, pas dans 60 jours. Ça fait que respectez,
dans ce sens-là, les entrepreneurs. Les entrepreneurs devraient
normalement respecter les travailleurs, puis, tous ensemble, on est
peut-être arrivés au point où il faut s'asseoir. Si tout le
monde a dit ça aujourd'hui, je ne comprends pas, comprend pas, comprend
pas, embarrez-nous dans une salle, puis, bon dieu, laissez-nous sortir quand ce
sera prêt.
Le Président (M. Joly): Ce que vous disiez tantôt,
l'air climatisé. Je vais vous reconnaître par après, M.
Bourdages.
M. Brière (Jean): Vous ne le reconnaissez pas? Il
s'appelle Bourdages.
Le Président (M. Joly): Oui. C'est déjà
fait: M. Bourdages et M. Favre. Alors, vous êtes déjà
connus et reconnus. Alors, je vais reconnaître aussi M. le
député de Jonquière, s'il voujs plaît.
M. Dufour: Oui. Il faudrait peut-être dire à
M. Brière qu'il rencontre les mauvaises personnes si vraiment il
ne trouve pas de solution après le discours qu'il nous a fait, puisque,
moi, je suis convaincu que vous aimez votre profession et que vous êtes
très engagé. C'est l'impression que vous nous donnez. Et, quand
j'examine votre mémoire... Il n'y aura pas beaucoup de questions de ma
part, parce que je pense qu'il n'y a pas de contradiction entre les deux
corporations. Les maîtres électriciens, je leur ai dit: II me
semble que vous êtes fatalistes. Ils ont dit: Non, nous autres, il faut
bien s'arranger. C'est ce qu'ils nous ont dit. Donc, moi, je n'ai pas senti de
contradiction entre vos propos et le mémoire des maîtres
électriciens.
Ceci étant dit, je trouve que votre mémoire, tout en
étant juste, est très sévère vis-à-vis du
projet de loi, et avec raison. Vous parlez que vous n'avez jamais
demandé le désassujettissement de la construction, jamais. Vous
parlez que ça ne règle pas les problèmes, avec raison.
Vous parlez que la compétence et les qualifications dont on parle tant
et dont le gouvernement nous parle régulièrement sont
enlevées. On n'en parle pas. Il y a un problème.
L'augmentation des coûts. Il y a des gens qui nous ont dit
régulièrement: Ça va baisser le coût des maisons.
Vous n'êtes pas sûr de ça. Moi, je suis sûr que
ça ne baissera pas le coût des maisons. À qui ça
profite? Il faut se poser des questions. Travail au noir, on ne règle
pas; le prix des maisons, il ne baissera pas; met en doute le modèle qui
nous est proposé, quatre conventions différentes; donc, le
constat est clair, le projet de loi est prématuré.
Et c'est vrai que, dans les négociations, il y a des
difficultés. On les connaît tous. Est-ce qu'on a vraiment fait les
efforts pour trouver des solutions? Peut-être que oui, peut-être
que non. On n'a jamais eu un temps aussi fort, à mon point de vue, pour
amener les parties à se parler et à négocier. Dans les
années d'abondance, on peut peut-être se permettre de jouer
à l'arbitre, puis de jouer au matamore, mais, là, ce n'est pas
ça. On est rendus au moment où on doit se parler, puisque
l'industrie est en train de s'en aller chez le diable. Il n'y a plus de
confiance de personne, il n'y a pas de création d'emplois.
Je pense que les esprits... Et tout le monde l'a dit, je les prends en
témoin, depuis deux jours on entend que l'industrie est en danger. Il y
a un manque de confiance, il y a un manque d'argent, il y a aussi un manque de
travail, il n'y en a pas. Ça fait qu'on ne créera pas avec rien
ce qui n'existe pas. Donc, il faut qu'on examine la situation telle qu'elle est
là. Moi, ce que je vous souhaite... Parce que je le dis, c'est la
première fois que je l'ai le plaisir de vous entendre, je trouve que
vous parlez avec beaucoup de sensibilité et d'amour de votre profession.
Ça, je pense que ça se sent à travers vos propos. Moi, je
souhaite juste une chose, c'est que le ministre vous écoute. Non
seulement vous entende, mais vous écoute, puis, en même temps,
mette à profit ce que vous nous avez dit, puis ce que d'autres
intervenants nous ont dit. Peut-être pas de la même
façon, mais on peut se rejoindre à beaucoup
d'endroits.
Moi, je souhaiterais que le ministre vous écoute, puis qu'il
mette à l'essai vos propositions, qu'il nous dise carrément qu'il
y a quelque chose à faire, parce que, dans le fond, ce que le ministre
se prépare à faire avec son gouvernement, c'est qu'il a
jeté le gant. Lui non plus n'a plus confiance. Il va arriver avec ses
gros sabots, puis il est prêt à casser tout et à mettre en
danger un large secteur de notre population. Les employés, vous avez dit
que ce n'est pas vos ennemis. Je suis sûr que ça ne sera jamais
vos ennemis. Ça pourrait être vos adversaires, parce qu'on
respecte des adversaires, mais pas pour longtemps, parce que vos
intérêts, ils sont au même endroit. Vous avez le droit,
d'abord, de vivre, et vos employés aussi, et vous le reconnaissez. Donc,
moi, de ce côté-là, je vous dis: Bravo, et j'espère
que le ministre, dans le peu de temps qu'il nous restera à partir de la
fin de ces audiences jusqu'à la reprise de l'étude du projet de
loi, vous aura entendu et donnera suite à ça en mettant
peut-être de côté son projet de loi et, en même temps,
en permettant aux parties, pour une fois, dans des conditions vraiment
propices, d'en arriver à une entente négociée et non pas
imposée.
Le Président (M. Joly): O.K. Merci. M. le
député de Joliette, s'il vous plaît.
M. Chevrette: M. le Président, je serais tenté de
faire la proposition suivante en ayant l'assurance que le député
de Salaberry-Soulanges m'appuie. Étant donné que nous partageons
entièrement votre vision et votre façon de faire, je proposerais
de recommander au ministre du Travail le cheminement que vous lui proposez pour
en arriver à une solution, en ayant l'assurance que le
député de Vaudreuil-Soulanges, qui dit respecter exactement votre
cheminement également... Eh bien, on se retrouverait, les deux partis
à l'Assemblée nationale, unanimes pour dire au ministre du
Travail: Voici votre solution que vous avez ce soir. Moi, je serais prêt
à faire ça si le parti ministériel est prêt à
accepter ça.
Deuxième chose que je veux dire, c'est que, moi, je voudrais vous
féliciter sur un point, comme employeurs, d'avoir reconnu que c'est un
faux problème, la relance dans l'industrie de la construction
présentement, en croyant que seule une baisse de traitement peut assurer
la relance économique. Il y a des limites. Les taux
d'intérêt n'ont jamais été si bas, vous le savez
tous, et on dirait que la trouvaille du siècle, qu'on aurait des jobs
demain matin si le domiciliaire baissait, alors que le travail au noir marche
à la grandeur du Québec. On essaie de faire croire que c'est
ça, la relance de la construction. Franchement, là! Il ne faut
pas prendre les gens pour des cons. On le sait tous, ça.
D'autre part, vous touchez un autre problème, et je suis content,
parce que je l'ai soulevé hier ou cet avant-midi, je ne me rappelle pas,
et il y a eu des sceptiques. Et je connais de mes amis qui sont contracteurs en
électricité et d'autres en plomberie, et ils soumissionnent pour
un contrat d'un hôpital, d'une prison, quelque chose du genre, ils
soumissionnent à tant pour le contrat d'électricité ou
à tant pour le contrat de plomberie et, après que le
soumissionnaire a gagné, ils sont obligés de couper des dizaines
et des dizaines de milliers de dollars. Et ils sont obligés, par exemple
en électricité, d'assurer le courant, de payer le courant
temporaire que ça leur prend, de couper de 100 000 $ leurs cotations
qu'ils ont faites. C'est qui, qui fait de l'argent? J'essaie d'expliquer
ça aux gens et ils m'ont expliqué cet avant-midi que ce
n'était pas sûr qu'ils faisaient de l'argent. Mais, s'ils sont
allés vous chercher pour coter à 400 000 $ sur un projet, je ne
sais pas, moi, global de 5 000 000 $ et qu'ils veulent vous couper à 300
000 $ après, et ils ont coté avec votre 400 000$, les 100 000 $,
ils ne doivent pas passer dans les limbes, bon dieu! Il ne faut pas être
naïfs. Et ça, là, c'est un problème majeur dans
l'industrie présentement: on égorge nos petits contracteurs qui
soumissionnent de bonne foi. Je ne sais pas qu'est-ce que le Bureau des
soumissions déposées fait dans ça, mais il va falloir
changer quelque chose. (23 heures)
On force l'entrepreneur à essayer d'aller voir sa main-d'oeuvre,
et il dit: On le «prend-tu» à ce prix-là? Allez-vous
faire quelque chose? Si vous me coupez 4 $ ou 5 $ l'heure, je vais le prendre.
Sinon, je ne suis pas capable. C'est ça qui arrive. Ça, M. le
ministre, c'est du vécu quotidien dans l'industrie. Et il y a des gens
qui n'osent pas trop parler, parce qu'ils vont être barrés chez ce
contracteur-là pour le restant de leurs jours s'ils parlent! Donc, ils
n'en parlent pas trop. C'est une gami-que qui n'a plus sa raison d'être,
ça, en 1994. Parce qu'on est à la toute veille de 1994 et, moi,
je prétends que, oui, il y a des gros changements à avoir lieu.
Mais des changements pas superficiels, pas pour faire croire qu'on va relancer
l'industrie avec une baisse de salaire ou une déréglementation
dans le domiciliaire. Ce n'est pas vrai. Il y a des problèmes majeurs
qu'il faut régler, puis ça ne se règle pas en une heure
avec un groupe, ça, un problème de même.
Si on décide de régler les problèmes, je suis
d'accord avec vous, si ça prend deux semaines pour en régler un,
on prendra deux semaines. On va régler tel volet, ça sera
réglé, puis tout le monde va partager la même idée.
C'est pour ça que, depuis deux jours, si avez remarqué, j'ai
quasiment posé toujours la même question, là: Seriez-vous
prêt à accepter un temps d'arrêt par rapport au processus
législatif, vous asseoir, puis régler ça cas par cas, puis
arriver si ça prend six mois, si ça prend huit mois,
ça prendra huit mois en bout de course avec une convention
collective dûment négociée? Après ça,
là, le ministre, il jouera son rôle de ministre du Travail et non
pas de gars qui va interférer dans les relations de travail, à
qui les parties vont s'en remettre parce qu'elles trouvent l'autre partie un
peu dure et qu'elles pensent gagner avec lui, puis l'autre pense qu'elle peut
mieux l'influencer qu'elle. C'est à ça qu'il se fie. C'est
ça, le climat actuel, vous savez.
Moi, je suis certain que, si le ministre réfléchit
beaucoup à la fin de ces audiences-là, avec l'assentiment qu'on a
reçu de presque tous les groupes à l'exception de un... Presque
tous les groupes unanimement nous ont toujours répondu à peu
près dans le même sens, qu'ils étaient prêts, sauf un
groupe, puis je les comprends. Qu'est-ce que tu veux, ils ont tout eu. Ce n'est
pas un problème.
Le Président (M. Joly): M. Bourdages... Oh! Excusez!
M. Chevrette: Bien, je vous dis tout de suite que j'embarquerais
dans ça, puis je suis prêt à le faire devant
l'Assemblée nationale. Puis, s'il faut les féliciter, on va les
féliciter, mais, bon Dieu, on va régler les problèmes.
Le Président (M. Joly): M. Bourdages, s'il vous
plaît.
M. Bourdages (Évangéliste): J'aimerais
peut-être me permettre d'enchaîner avec les propos de M. Chevrette
et aussi les propos que je voulais tenir tantôt quand j'ai, tout compte
fait, manqué de temps. Je vous ai entendu à plusieurs reprises,
justement, depuis ce matin, poser cette question-là. Vous avez obtenu
toujours une réponse quelquefois mitigée. Je pense que, moi, je
voudrais m'empresser de répondre oui, de façon
catégorique. La position de notre corporation est à l'effet de
s'asseoir et de continuer de discuter.
Par contre, je comprends très, très bien la position du
ministre du Travail, qui doute un peu de la capacité des parties de
s'entendre, compte tenu du fait que, depuis 25 ans, on n'a pas réussi
à trouver un terrain d'entente. Ça nous a
discrédités. Et mon père, dans sa grande sagesse, disait
toujours que, pour se battre, ça en prend deux. Il y a fort à
parier que c'est parce que, à quelque part, à l'intérieur
de chacune des parties, il y a un peu de mauvaise foi.
Pour avoir assisté aux audiences aujourd'hui, j'ai eu aussi
souvent l'occasion d'entendre des propos rassurants. À plusieurs
reprises, par différentes parties, on a eu l'occasion d'entendre que
l'exercice qui s'était tenu, le sommet de la construction, était
une première à l'effet qu'on avait réussi à asseoir
autour d'une même table tous les intervenants. Le sommet de la
construction, avec les 17 articles qui nous étaient proposés, on
n'est pas sorti de là avec un consensus sur l'ensemble des 17
propositions, mais il reste quand même qu'il y est sorti certains
consensus qu'on a pu discerner. C'est déplorable que, même sur les
points sur lesquels on a réussi à s'entendre, on n'ait pas
trouvé le moyen de les intégrer à la loi 142. Mais je
pense que ce début-là doit être perçu de
façon positive et, si on se chamaille depuis 25 ans, je pense que
ça a été un peu déraisonnable de demander aux
parties de régler leur conflit de juin avec une épée de
Damocles, comme date ultime Le 14 décembre.
Le Président (M. Joly): Merci, M. Bourdages. M. le
député de Drummond, s'il vous plaît.
M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. M. Brière,
vous êtes un homme de coeur, et, moi, je souscris à vos paroles,
je l'avais dit d'ailleurs dans mes remarques préliminaires. Je ne peux
pas croire, si des gens sont assez stupides pour faire des problèmes
à quelque part, que d'autres humains de bonne volonté ne peuvent
pas corriger cette situation-là. J'espère, moi, pas le ministre
du Travail, mais que, demain matin, le député de Sainte-Anne,
lorsqu'il regardera dans le miroir le ministre du Travail, il pensera aux
propos que vous avez tenus. Et je suis convaincu, moi, que le
député de Sainte-Anne peut convaincre le ministre du Travail de
dire: On va prendre un temps d'arrêt. Parce qu'on n'est pas à un
mois près, là, pour finaliser ce dossier-là. On peut
donner encore une dernière chance.
Et, moi, quand je regarde votre secteur d'activité, pendant les
25 dernières années, le patron traditionnel, on avait des hauts,
tout le monde travaillait, on pouvait avoir n'importe quoi, pas de
problème. On prenait un creux de vague qui durait à peu
près 18 mois, règle générale, tout le monde
commençait à brasser un peu, mais l'ouvrage revenait. Mais
là on est dans le creux depuis 1990, et on va être dans le creux
au moins pour un autre cinq, six ans, dans votre secteur. Je pense, moi,
qu'à un moment donné la nécessité fait qu'on peut
être capable de trouver des solutions. Et, moi, je pense que ça va
repartir à partir du moment où tous les intervenants vont avoir
une image fidèle de votre industrie pour les 10 prochaines années
et, après ça, dire: On va s'asseoir.
Vous avez été un peu prophète, vous savez, lorsque
vous avez parlé de Campeau, lorsque vous parliez des mots de Lincoln,
auxquels je souscris aussi, mais j'aurais le goût de vous faire une
boutade, M. Brière, parce que Campeau a été
créé par la loi 150. J'y ai cru, à
Bélanger-Campeau, à la loi 150. Malheureusement, en septembre
1992, il y a eu une autre loi qui nous a amenés dans un beau merdier. Je
ne reviendrai pas là-dessus. Alors, quand je regarde la comparaison
aujourd'hui, eh bien, en comparant avec Bélanger-Campeau, on se ramasse
avec autre chose qui s'appelle la 142, qui est aussi pire que celle dont j'ai
même oublié le numéro de septembre 1992, qui nous a
amenés à faire une campagne à la grandeur du
Québec.
Alors, ceci dit, je n'aurai pas d'autre question, excepté de vous
louer, moi, pour votre courage, votre sensibilité et surtout votre
grande sincérité et votre désir d'associer... Et je pense
que, quand on est patron, on n'est pas patron tout seul. Ça nous prend
des travailleurs pour avoir des bras droits, et vous avez utilisé le mot
compagnons de travail tout à l'heure.
Alors, moi, je suis convaincu que... Oui, j'ai le goût de vous
embarrer, moi, et j'ai le goût de dire au député de
Sainte-Anne, demain matin, qu'il convainque le ministre qu'on va vous enfermer.
On va vous laisser Noël et le Jour de l'an pour vous reposer de vos
négociations et, à quelque part vers le deuxième
mardi de mars, on va vous reconvoquer, et vous viendrez nous rendre un rapport,
ici, brièvement, pendant une couple d'heures, pour voir où vous
en êtes rendus. Et, si ce n'est pas réglé à ce
moment-là, on vous embarrera dans le salon rouge. Vous serez proche,
ça fait qu'on vous aura à portée de la main.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Drummond. M. Brière, vous vouliez réagir?
M. Brière (Jean): Quand le député me dit
qu'il va me faire une petite boutade, je dois lui avouer que je n'avais aucune
connotation politique à ça. Je parlais d'avoir réuni des
gens d'opinions différentes autour de la table. Maintenant, quand vous
dites m'enfermer, j'espère que ce n'est pas moi tout seul, je ne
réglerai rien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brière (Jean): Mais, ça pourrait peut-être
être à Louis-Hippolyte-LaFontaine. Je devais avoir une job,
là. Quant à ce qu'on disait tantôt au niveau du Bureau des
soumissions déposées du Québec, eh bien, j'ai le plaisir
de vous informer qu'il y a eu un nouveau code et qu'il va faire son petit bout
de chemin. C'est sûr qu'il va y avoir des corrections à faire,
c'est évident. Mais, c'a été dur, il a fallu travailler
fort pour l'avoir. On a une loi, là, et on est en train d'en
discuter.
Alors, de prétendre qu'on peut faire un code et de trouver tous
les règlements, tous les bons mots, ce n'est pas facile. Vu qu'on est
dans la construction, on est habitués avec des plans et devis. Des fois,
ça serait peut-être mieux, M. le ministre, au lieu de nous
écrire des documents qui disent: si; autrement; puisse; incluant; et
que... Ça, il faut que tu aies suivi un grand cours d'université,
et, quand tu es poigne avec les avocats, ça t'en prend trois: ça
prend le tien, ça prend celui du voisin, et ça en prend un pour
que ça en vienne à une décision. On n'a pas les moyens
d'avoir ça. On n'est pas capables. Faites-nous donc des dessins, des
plans complets, et on va se comprendre. Faites-nous un organigramme, un
«flow sheet», appelez ça comme vous voudrez, mais c'est
ça qu'il faut qu'on fasse. Il faut qu'on se parle comme ça.
Autrement, ça, là, ce n'est pas facile de venir ici. On s'en
vient dans... C'est beau, et il faut faire attention. Des fois on a le
goût de dire des choses qu'on n'a pas le droit de dire, mais des fois il
faut dire ces vrais mots là pour qu'on se comprenne. Et c'est ça
que je veux, c'est ça que je nous souhaite dans la construction, parce
qu'on a travaillé fort et on est venus...
Vous savez, je regardais dehors en m'en venant. Les gens, en 1700, ils
devaient avoir de l'avenir dans la construction, parce que, quand vous regardez
tout ça, ce n'était pas fait, ça, là. Aujourd'hui,
c'est différent, ça fait qu'il va falloir qu'on trouve la
solution, et on va la trouver.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Joly): M. le député de
Salaberry-Soulanges.
M. Marcil: c'est pour, au nom de notre formation, vous remercier,
m. brière. et le petit message que je pourrais laisser en passant, et je
le dis très, très, très objectivement, autant à
olivier, qu'à maurice, qu'à claude et qu'à yves, qui n'est
pas ici peut-être, c'est qu'à valleyfield, goodyear ftq, ils ont
signé un contrat, les employés ont fait des concessions; expro,
les employés ont accepté 15 % de diminution de leur salaire, 1
200 000 $ qu'ils ont mis de leurs poches dans la cagnotte; st-hubert, 30 % de
diminution de leur salaire; dominion textile, sur lequel on travaille, les
employés n'ont plus d'ouvrage, puis 90 gars sont prêts à
mettre i 000 000 $ dans le pot pour repartir l'usine. moi, je me pose encore la
question: comment se fait-il que, dans notre industrie de la construction, on
n'est pas capables de s'ajuster au marché dans lequel on vit
présentement? si ça repart, on augmentera les salaires, mais,
pour le moment, il me semble, autant les patrons aussi, là, les deux,
juste ça... je vous remercie, m. brière.
(23 h 10)
Le Président (M. Joly): Merci. M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Tout en vous remerciant, juste quelques remarques.
Moi, je veux bien que le monde mette de l'argent dans la cagnotte pour repartir
les industries, faire repartir la roue, mais il y a définitivement...
Depuis deux jours, on entend des intervenants qui nous ont dit carrément
qu'ils étaient prêts à faire des sacrifices pour aider
à régler la situation. Mais ça, ce n'est pas venu juste
des employeurs. Les employeurs, moi, je ne les ai pas entendus trop, trop dire:
On va mettre quelque chose. Il y a des syndiqués qui ont dit: On est
prêt à négocier sur nos salaires, mais dans des
règles précises avec l'espoir qu'on va conserver certains acquis
ou certaines façons de procéder. Si on perd tout, puis il n'y a
plus rien qui marche, je ne vois pas pourquoi on ferait tous ces
sacrifices-là. Je pense que, là, ce serait s'adresser à
des murs.
Moi, j'invite encore, en terminant, le ministre à bien
réfléchir avant de jeter le bébé avec l'eau du
bain. ii faudrait peut-être qu'il prenne le moyen, le temps de poser le
bon geste. ce qu'on n'a pas fait, on peut toujours le contrôler. ce qu'il
s'apprête à faire, ça c'est quelque chose qui va
démantibuler ce qui existe, et ça, ce serait malheureux, à
mon point de vue.
Le Président (M. Joly): Merci, M. le député
de Jonquière. Alors, à mon tour, M. Brière, M. Favre, M.
Bourdages, merci d'être parmi nous. Alors, la commission ayant
complété son mandat ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 12)