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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Audet): Je déclare la
séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Je
vous rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à
une consultation générale sur la proposition de plan de
développement 1993-1995 d'Hydro-Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui. M. Lemire (Saint-Maurice) est remplacé
par M. Fradet (Vimont) et Mme Dupuis (Verchères) est remplacée
par Mme Marois (Taillon).
Le Président (M. Audet): Merci.
Les membres de la commission ont pris connaissance de l'ordre du jour.
Est-ce que l'ordre du jour est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Audet): Adopté. Alors,
aujourd'hui, nous recevons la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec. Ensuite, suivra SNC-Lava-lin, la Banque Royale
du Canada et nous terminerons avec l'Association professionnelle des
ingénieurs du gouvernement du Québec.
Puisque les gens de la Fédération des travailleurs et
travailleuses ont pris place, messieurs, au nom de la commission, je vous
souhaite la plus cordiale bienvenue. Je vous rappelle brièvement nos
règles de procédure. Vous disposez d'une vingtaine de minutes
pour nous faire part de votre exposé. Ensuite, suivra un échange
qui durera environ une quarantaine de minutes. Avant de débuter votre
exposé, je vous inviterais même si M. Daoust est connu, je
pense, par la plupart d'entre vous pour les fins du Journal des
débats, à vous identifier ainsi que la personne qui vous
accompagne. Merci.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)
M. Daoust (Fernand): Celui qui m'accompagne, c'est M. Luc Chabot,
le coordonnateur des syndicats à Hydro-Québec. Il
représente ces groupes-là et le Syndicat canadien de la fonction
publique. Mon nom est Fernand Daoust. Je suis le président de la
Fédération des travailleurs et travailleuses du
Québec.
Je vous salue, M. le Président, Mme la ministre, Mme la
députée, mesdames, messieurs. Je vais peut-être
déborder quelque peu les 20 minutes. Vous avez dit que c'est à
peu près 20 minutes. Je voudrais lire le mémoi- re, et
peut-être le commenter quelque peu, et essayer de procéder le plus
rapidement possible, si vous me le permettez.
Le 3 mars 1981, la FTQ, commentant la stratégie de
développement d'Hydro-Québec, commençait par ces mots son
mémoire à la commission parlementaire de l'énergie:
«À l'aube des années quatre-vingt, les prévisions
économiques ne sont pas plus reluisantes pour les
Québécois. Aucune prévision, par exemple, n'envisage de
baisse du taux de chômage au cours des cinq prochaines années.
Douze ans plus tard, le diagnostic n'a guère changé, mais
le contexte économique, lui, s'est radicalement transformé.
Pronostic qui semblait encore lointain à l'époque, le virage vers
la mondialisation de l'économie s'est imposé avec une
brutalité et une rapidité que nous ne pouvions difficilement
soupçonner. La crise, aujourd'hui, n'est pas seulement celle du
Québec ou du Canada, encore que les politiques monétaires
canadiennes, maintes fois dénoncées par la FTQ, n'aient rien fait
pour améliorer la situation.
La décennie 1980-1990 aura certes été, en
Amérique du Nord, celle de l'enrichissement artificiel de quelques-uns
et de l'appauvrissement du plus grand nombre. Mais il y a pire: derrière
cette fausse prospérité se précisait un affaiblissement
dramatique de notre base industrielle, de notre capacité de recherche et
de développement, ainsi que d'un système scolaire et de formation
professionnelle qui est la base incontournable de tout progrès. Nous
subissons aujourd'hui les effets de cette négligence et nous pouvons en
mesurer l'étendue en évoquant la seule initiative
économique du gouvernement qui ait fait les manchettes ces derniers
mois: un casino sur l'île Notre-Dame.
Pas plus que les banquiers qui prêtaient à Olympia &
York en oubliant d'analyser sa structure et son bilan, Hydro-Québec n'a
échappé aux grands mirages de la dernière décennie.
À plusieurs reprises, nous lui avons souligné à quel point
il pouvait être dangereux de négliger l'entretien du
réseau, tout occupée qu'elle était à ne songer
exclusivement qu'à la conquête des marchés
étrangers. Nous avons également et souvent critiqué le
laisser-aller d'une administration plus préoccupée de multiplier
les cadres que les contacts avec le public, plus soucieuse du clinquant que
d'efficacité, plus dépendante de ses relationnistes que de ses
ingénieurs, et le reste.
Mais la réalité finit toujours par rattraper ceux qui s'en
éloignent. Un certain bon sens semble avoir trouvé droit de logis
à Hydro-Québec. Effectuant un virage que l'on dirait presque de
180' et que manifeste bien la sobriété graphique de sa
présentation, notre société d'État propose un grand
retour vers son public et une suite de mesures destinées à le
réaliser. Nous ne pou-
vons que nous en féliciter tout en y ajoutant quelques
commentaires ainsi que de sérieuses mises en garde sur certains aspects
de ces propositions.
Afin d'en faciliter la compréhension, nous formulons ces
remarques en suivant l'ordre et les titres des chapitres de son propre
document: «Plan de développement 1993».
Une entreprise à l'écoute. S'il fallait dater l'acte de
contrition d'Hydro-Québec quant à sa désinvolture
passée, il faudrait mentionner novembre 1991. Bien que poussée
dans le dos par le gouvernement du Québec, c'est en effet à cette
époque que la société s'est engagée dans le
processus de consultation préalable du plan 1993. La FTQ a
participé durant plusieurs mois à ces échanges. Les 28 et
29 mai 1992, la FTQ a présenté à la direction
d'Hydro-Québec un certain nombre de mesures sur lesquelles reviendra le
présent mémoire.
Au sujet de l'orientation nouvelle prise par HydroQuébec quant
à la reprise du dialogue avec ses clients, deux remarques s'imposent.
Premièrement, nous réitérons une observation maintes fois
énoncée en diverses occasions lors des rencontres de 1991-1992:
il est important que le processus devienne permanent et cyclique, mais aussi
que les données techniques et financières sur lesquelles s'appuie
l'entreprise demeurent accessibles. Un des avantages énormes que
possède HydroQuébec sur quiconque entend en contester les
orientations, ou même les bonifier, est son monopole quasi absolu des
données de base sur l'industrie de l'électricité au
Québec. Inévitable de par la nature même de l'entreprise
qui est monopolistique, cette exclusivité des données pose des
limites très nettes à une discussion saine et ouverte des options
énergétiques et financières ouvertes aux
Québécois. Hydro-Québec elle-même en reconnaît
le danger et s'est engagée, en novembre 1991, à rendre accessible
toute documentation utile à la discussion.
La FTQ prend acte de cet engagement, mais souhaite que toutes les
données pertinentes susceptibles de contre-expertises techniques,
financières ou méthodologiques soient considérées
comme utiles. Une information ne devient accessible qu'à la condition
que soit connue son existence, auquel cas seulement peut-on décider si
elle est utile ou non, une décision qui doit être celle de tous
les intervenants à une consultation. Dans cette perspective, nous
croyons importante, comme nous le notions en mai 1992, la création d'un
comité consultatif qui pourrait recevoir les demandes d'expertise
supplémentaire et préparer le terrain pour les consultations
futures.
Notre seconde remarque a trait à l'intention des dirigeants
d'Hydro-Québec de se montrer, et je cite, «plus proactifs en
matière de communication, non seulement au Québec, mais aussi au
niveau international», afin de «faire connaître clairement la
position de l'entreprise dans tous les dossiers qui ont des
répercussions à cette échelle». Dans la mesure
où Hydro-Québec persiste dans la voie de la consultation et de la
transparence et donc s'assure l'accord de la majorité de la population
dans ses orientations, nous croyons que la nature de son image de marque au
plan international doit être particulièrement soignée car
elle peut avoir des conséquences importantes pour les
Québécois en général et les travailleurs en
particulier, sans parler des effets financiers désastreux sur le
marché des emprunts d'une cote de crédit sous le feu de torpilles
politiques.
Il ne faut pas oublier que, comme nous le notions dans notre
présentation de mai 1992, l'exportation d'électricité chez
nos voisins du Sud s'effectuera toujours contre les puissants lobbies du
charbon et du nucléaire. Comme tout choix énergétique,
l'hydroélectricité implique des conséquences
environnementales et humaines précises dont il importe de faire
connaître non seulement les tenants et aboutissants, mais aussi et
surtout le satut comparatif par rapport à d'autres options, qu'elles
soient thermiques ou nucléaires. En ce sens, le calcul des
«external ités» devrait être systématiquement
développé par Hydro-Québec, y compris sur le mode
comparatif et intégré à ses analyses. Afin de contrer
certaines attaques ponctuelles dirigées de l'étranger contre la
filière hydroélectrique, il nous paraît essentiel de la
replacer dans une perspective environnementale planétaire, et, pour
cela, la mise en valeur des «externalités», même
lorsqu'elles sont difficilement quantifiables, est indispensable.
Une entreprise de service. La FTQ ne s'oppose pas en principe à
des politiques de qualité totale, encore faut-il que l'on s'entende bien
sur les termes en discussion. Certaines mesures que compte prendre
HydroQuébec étaient, à cet égard, attendues depuis
fort longtemps, notamment la réduction des postes d'encadrement
régionaux au profit des postes directement liés aux besoins de la
clientèle ainsi que l'amélioration de la sécurité
du travail. Ce sont là des points sur lesquels, à maintes
reprises et depuis longtemps, nos syndicats ont attiré l'attention. La
culture de la qualité qu'Hydro-Québec souhaite voir adopter par
ses employés n'est possible qu'à la condition que soit
perceptible et véritable le soin qu'apporte l'entreprise à la
sécurité des conditions de travail et le souci qu'elle manifeste
de tirer parti de toutes les compétences qui s'y trouvent. Le service
à la clientèle ne peut alors que s'en ressentir. (10 h 20)
Cependant, les annonces récentes par médias
interposés de compression et de suppression de postes à Hydro,
sans véritable concertation avec ses salariés, nous irritent au
plus haut point. Il faut une véritable boule de cristal pour trouver,
dans la proposition du plan de développement, des indices qui nous
auraient mis sur la piste lors de la période de consultation. La FTQ
entend suivre de très près, avec ses affiliés, la mise en
oeuvre de ces intentions.
Deux aspects de ce groupe d'orientations appellent quelques commentaires
additionnels: les retombées économiques des moyens de production
d'Hydro-Québec et le statut de recherche et développement. Sur la
première question, les chiffres disponibles sont éloquents. La
filière hydroélectrique, pour laquelle la FTQ a toujours
exprimé sans réserve sa préférence, propose un
coefficient d'emploi supérieur à tout autre mode de
production, à la fois dans la phase des investissements et dans
la phase de l'exploitation. Le coefficient d'emploi combiné, en
années-personnes par million de dollars constants, s'établissait
en 1992 à 10,8 pour les grandes centrales et 11 pour les centrales
moyennes, contre 9,1 pour la filière nucléaire et 4,3 pour la
filière thermique. Qui plus est, la technologie en cause est
particulièrement bien adaptée, comme le note le document,
à la structure économique du Québec. Nous ajouterions
volontiers qu'elle est en outre particulièrement bien adaptée aux
compétences des travailleurs québécois ainsi que, sur les
moyens et longs termes, au respect de l'environnement.
Nous voulons mettre Hydro-Québec en garde contre les chants de
sirène de certains ténors de la privatisation, de la production
et de la distribution d'électricité chez nous. Comme nous le
notions dans notre intervention de 1990, Hydro-Québec est un instrument
que les Québécois ont mis plus de 30 ans à construire et
son démantèlement, même partiel, serait, à terme,
une tragédie.
Ce n'est pas d'hier que nous insistons aussi sur l'impact
d'Hydro-Québec sur l'emploi au Québec. Dès ses premiers
travaux d'envergure, il y a plus de 25 ans, il est apparu que les
investissements dans les grands ouvrages allaient avoir une influence
bénéfique sur les variations cycliques de l'emploi en contribuant
à atténuer la fréquence et l'ampleur des courbes de
chômage conjoncturel. Il en est toujours ainsi, et
particulièrement au moment où nous faisons face à un
chômage nettement structurel dû à des réalignements
industriels dont les effets risquent d'être plus longs et plus
pernicieux. Dans cette perspective, Hydro-Québec est une des seules
entreprises québécoises dont la masse est suffisamment critique
pour influer de façon significative, par ses investissements, sur un
démarrage économique durable.
Tenant compte à la fois de la valeur environnementale de
l'hydroélectricité et des effets qu'elle entraîne sur
l'emploi au Québec, la FTQ souhaite que soit respecté
l'échéancier des grands travaux d'Hydro-Québec.
Qu'Hydro-Québec prenne en bonne considération les contingences
auxquelles sont confrontés ses fournisseurs en biens, produits, service
et main-d'oeuvre qu'elle aura à mobiliser pour réaliser ses
projets. Ces entreprises doivent pouvoir planifier leurs opérations
à moyen et long terme, en bon gestionnaire qu'elles doivent être.
Il y a là des débats de réalisation additionnels dont tout
le monde pourrait bien se passer.
À notre avis, le respect des populations nordiques et le souci de
l'environnement sont tout à fait compatibles avec la mise en place
d'infrastructures énergétiques qui recueillent l'adhésion
d'une écrasante majorité de la population et comptent parmi les
moins nocives sur la planète.
La taille d'Hydro-Québec et la place qu'elle occupe dans notre
paysage économique lui imposent par ailleurs un rôle
décisif dans le domaine de la recherche et du développement.
Selon d'éminents économistes, la croissance économique des
pays développés dépend, désormais, dans une
proportion de 40 %, de l'adoption de nouvelles technologies. Et ce pourcentage
aura ten- dance à croître dans les années qui viennent.
C'est pourquoi les grandes entreprises à travers le monde consacrent une
partie de plus en plus grande de leur budget à la recherche et au
développement. Or, sur ce point, comme on l'a maintes fois
rappelé, le Canada et le Québec sont dramatiquement en retard sur
tous les pays de l'OCDE. les dépenses actuelles d'hydro-québec
sont en r et d entre 1,7 % et 1,9 % de son chiffre d'affaires contre 1,4 % pour
l'ensemble des entreprises québécoises; d'autre part,
hydro-québec se donne comme objectif de porter ce pourcentage à 2
% d'ici l'an 2000. nous croyons que cela est nettement insuffisant et qu'un
effort beaucoup plus grand doit être consenti. en affirmant se comparer
sur ce point aux grandes entreprises publiques d'électricité
à travers le monde, sauf les japonaises qui investissent deux fois plus,
hydro-québec néglige le fait, à notre avis fondamental, de
son poids relatif sur l'économie québécoise. avec 20 % des
investissements totaux du québec, hydro-québec représente
infiniment plus pour notre produit intérieur brut que, par exemple,
électricité de france par rapport au pib français. dans
cette mesure, les résultats de la recherche-développement
menée à l'ireq, au laboratoire des technologies
électrochimiques et des électrotechnologies ou dans les
universités sont susceptibles d'impacts beaucoup plus grands sur
l'économie québécoise.
Hydro-Québec, répétons-le, a mis au point depuis 30
ans un réservoir de technologies et une expertise possiblement sans
égaux dans leurs applications aux pays nordiques. La recherche et le
développement de nouveaux produits et de nouvelles technologies relatifs
à la production d'électricité, à
l'efficacité énergétique, aux électrotechnologies
et, notamment, à l'environnement, ne peuvent que
bénéficier de notre économie dans la mesure où les
uns et les autres contribuent à la fois à une meilleure gestion
de nos ressources, à l'emploi et à notre balance de paiements par
l'exportation de produits, de savoir-faire et de technologies. Nous voyons un
créneau de développement fort prometteur dans la production de
l'hydrogène comme substitut «propre» aux autres
combustibles, particulièrement dans le domaine du transport. Dans une
grande mesure, Hydro-Québec est la seule de nos entreprises capable de
générer, de par sa masse, les synergies requises pour de telles
innovations. L'effort se doit, dès lors, d'être en proportion du
défi et des résultats possibles, et la FTQ estime que
l'entreprise devrait viser à atteindre le taux de recherche et
développement pratiqué au Japon plutôt que de se cantonner
dans la moyenne de l'industrie.
Offre et demande d'électricité: les options à long
terme. Le troisième chapitre du plan débute par ces mots, je
cite: «La collectivité québécoise est devant deux
grandes décisions à long terme en matière
d'électricité. D'une part elle doit décider quels moyens
prendre pour continuer de satisfaire ses besoins. D'autre part elle doit
décider s'il faut développer les marchés et de quelle
façon.» Fin de la citation.
Parce qu'elle s'est développée elle-même à
partir d'un choix de société, notamment à la suite de la
cam-
pagne électorale de 1962 on s'en souvient
hydroquébec a toujours été au coeur des orientations
économiques du québec. aujourd'hui, alors que plus de 70 % des
foyers québécois se chauffent à
l'électricité et que notre base industrielle s'appuie
traditionnellement sur cette source d'énergie, les directions que prend
l'entreprise deviennent, ipso facto, des choix énergétiques de
toute la société.
C'est pourquoi il était essentiel qu'Hydro-Québec formule
ses options de façon claire et s'engage dans une consultation qui
permette de dégager les grandes lignes de la volonté des usagers.
C'est ce qu'elle a fait. Mais il serait injuste d'en exiger qu'elle formule,
à elle seule, une politique de l'énergie pour l'ensemble du
Québec. Telle n'est pas, en dépit de sa taille et de son poids
économique relatif, sa mission.
Cette mission, elle appartient au gouvernement qui, sur ce point,
pourrait prendre quelques leçons d'Hydro-Québec. Au moment
où, comme toutes les sociétés industrialisées au
monde, le Québec vit difficilement les réalignements
économiques et technologiques de la mondialisation, le temps est venu de
se donner une politique de l'énergie qui soit le fruit d'une vaste
consultation et non le document quasi secret qu'on nous communiquait
cavalièrement en janvier 1992. Il importe de mener une réflexion
en profondeur sur l'ensemble de la gestion de toutes nos ressources
énergétiques, et ce, dans des termes qui permettent aux
Québécois d'évaluer des données comparables et de
se former un jugement sain.
Plus spécifiquement, il appartient selon nous au ministère
de l'Énergie du Québec d'entreprendre dût-on
emprunter quelques experts d'Hydro-Québec, et Dieu sait qu'il y en a
beaucoup une consultation globale sur le bilan et les perspectives
énergétiques totales dont dispose notre collectivité pour
aborder le prochain siècle. L'effort consenti sur ce point par
Hydro-Québec a été remarquable, mais, par
définition, incomplet. Il est urgent, dans la foulée, de le
compléter.
Ceci dit, nous croyons que toute prospective à long terme sur les
moyens de rencontrer nos besoins en énergie doit dépasser la
simple problématique de l'optimisation économique et du
coût marginal. Ceux-ci sont évidemment essentiels, mais doivent
être systématiquement intégrés dans une vision plus
large qui intègre notamment les «externalités»,
c'est-à-dire les éléments souvent non quantifiables qui
ont des répercussions sur la société. Ces
éléments, comme le note Hydro-Québec, incluent les
conséquences environnementales des options, mais aussi les
retombées socio-économiques. Qu'elles soient négatives ou
positives, les «externalités» doivent, nous le
répétons, faire partie des calculs et nous invitons l'entreprise
à développer les modèles nécessaires à leur
inclusion dans la planification. (10 h 30)
II demeure donc primordial que tout moyen prévu pour rencontrer
la demande doit, selon nous, satisfaire à des conditions précises
de sécurité environnementale, d'emploi et, nous y insistons, de
rentabilité économique pour le Québec. Le temps est
révolu où nous pou- vions mais le pouvions-nous vraiment?
nous contenter d'une simple hypothèse d'exportation
d'énergie brute sans égard aux emplois ainsi créés
à l'étranger. Le développement de notre parc
énergétique doit d'abord et essentiellement servir les
intérêts du Québec en termes d'emploi et d'infrastructure
industrielle. Nous le notions en mai 1992: «Hydro-Québec aurait
intérêt à planifier son développement dans le cadre
d'une véritable stratégie industrielle globale».
Offre et demande d'électricité: les orientations.
Hydro-Québec constate que l'efficacité énergétique
et l'amélioration du réseau ne suffiront pas à rencontrer
la demande d'ici une quinzaine d'années. À notre avis, cela veut
dire, nonobstant l'état désormais aléatoire des projets
d'exportation, que nous devons développer sans tarder la filière
hydroélectrique principale. Compte tenu des contraintes
environnementales et socio-économiques quant aux populations nordiques,
la poursuite et l'achèvement de notre parc hydroélectrique
potentiel doivent être assurés dans les plus brefs délais
possible.
La consultation publique de 1991-1992 a clairement fait ressortir le
rôle central que tous les intervenants reconnaissent à
Hydro-Québec en termes de locomotive économique et à
l'hydroélectricité en termes de qualité environnementale.
Or nous avons, au cours de la dernière décennie, franchi un point
de non-retour en ce qui a trait au développement économique
durable: il est devenu impossible, même au creux d'une récession
nord-américaine et quasi mondiale, de penser le développement
sans la sauvegarde de l'environnement.
Dans cette perspective, l'hydroélectricité deviendra, plus
que jamais auparavant, un moteur de développement en Amérique du
Nord. Il s'agit pour le Québec de mettre en place, dès
maintenant, les instruments de cette force. En outre, sur les moyen et long
termes, les grands travaux sont économiquement plus rentables, assurent
mieux la fiabilité du réseau, permettent la création d'un
savoir-faire profitable et sont hautement multiplicateurs d'emplois. Pour cela,
et pour les autres raisons évoquées au cours de ce
mémoire, la FTQ estime qu'Hydro-Québec peut et doit entreprendre
sans tarder les grands travaux inscrits à son agenda, notamment NBR et
Grande-Baleine.
Le prix de l'électricité. Sur la question du prix de
l'électricité, qui concerne l'ensemble de ses clients et plus
particulièrement le secteur résidentiel, les citoyens du
Québec, Hydro-Québec propose pour les prochaines années la
tarification zéro, c'est-à-dire s'engage à limiter en
moyenne les hausses de tarifs au taux d'inflation. l'analyse des moyens de
parvenir à un tel résultat laisse cependant songeur. l'entreprise
divise sa structure de coûts des services en deux parties: les frais
d'exploitation, qui incluent les salaires, et les autres charges et
intérêts. en termes de coûts par kilowattheure, les frais
d'exploitation, qui sont de 0,014 $, passeraient en l'an 2000 à 0,015 $,
soit une augmentation de 0,8 % et, en revanche, les autres charges et
intérêts subiraient une hausse de 4,3 %, passant de 0,039$
à 0,054$ par kilowattheure.
Selon Hydro-Québec, cette seconde partie de ses
coûts est relativement incompressible dans la mesure où
elle découle largement d'engagements antérieurs et que
l'entreprise ne prévoit pas de baisse des taux d'intérêt
réels. ce n'est donc pas là qu'elle entend faire des
économies qui lui permettront de maintenir ses hausses de coûts au
niveau de l'inflation prévue, c'est-à-dire approximativement 3,4
%. la conclusion est simple, hydro-québec entend, selon son plan 93,
accroître sa productivité de 20 % d'ici à l'an 2000 et,
sans le dire ouvertement, réduire son personnel. et c'est exactement ce
qu'elle a fait le 28 janvier dernier en annonçant une baisse de 3000
emplois d'ici l'an 2000, soit 1500 avant 1995 et 1500 par la suite.
Il y a là, selon nous, un signe alarmant de paresse
intellectuelle. Nous ne croyons certes pas qu'une entreprise doive, parce
qu'elle est publique, s'encombrer de personnel inutile. Et nous admettons bien
volontiers qu'à chaque année un certain nombre d'employés
prennent leur retraite. Mais qu'Hydro-Québec puisse s'alléger,
par la seule attrition de 425 employés par année durant sept
années consécutives, nous paraît un peu fort.
Il faut avoir du paysage économique une vison plus large. Dans la
mesure où Hydro-Québec ne fait pas l'effort intelligent de
reclassement que requiert toute rationalisation des effectifs, se contentant de
jeter à la rue ceux et celles qui ne conviennent plus à ses
projets, elle accroît inutilement un bassin de chômeurs et de
chômeuses dont le volume est déjà énorme; en outre,
elle se prive de personnel qualifié, déjà formé, au
moment même où ses propres prévisions de croissance
exigeraient à terme l'embauche de personnel additionnel. Où est
la logique?
Comme tous les consommateurs québécois, nous souhaitons
que les hausses de tarifs soient limitées au taux d'inflation, mais nous
refusons de croire, et la démonstration n'en a d'ailleurs pas
été faite, que les seules dépenses compressibles
d'Hydro-Québec soient celles consacrées à son personnel.
La culture de la qualité ne passe pas par le mépris envers ceux
et celles qui ont à la pratiquer.
Le Président (M. Audet): Si vous voulez conclure, s'il
vous plaît.
M. Daoust: Oui, j'y arrive. Conclusion. Ces importantes
réserves faites, la FTQ a, globalement, accueilli avec plaisir la
nouvelle orientation prise depuis deux ans par Hydro-Québec. Cette
orientation correspond, dans l'ensemble, à ce que nous souhaitions
depuis plusieurs années. Reste à voir comment elle se traduira
dans les faits, l'exemple précédent nous incitant à la
plus grande circonspection. Nous estimons que, dans la perspective d'ensemble
de notre économie, Hydro-Québec a un rôle central à
jouer et que ce rôle doit être défini par une politique
énergétique globale.
Recherche-développement, exploitation de technologies
innovatrices, d'un savoir-faire unique au monde, élément moteur
de la relance par l'instauration de grands travaux, pièce
maîtresse d'industries nouvelles de l'économie d'énergie et
de l'environnement, HydroQuébec doit, dans la mesure de ses moyens,
contribuer à la fois à notre maîtrise
énergétique et à son prolongement dans les industries de
l'avenir.
Deux brefs paragraphes. Quelques propos se sont élevés
récemment sur une hypothèse de privatisation. Il y a là,
selon nous, une attitude complètement dépassée.
Après une décennie de privatisation incontrôlée due
à une théorie économique de l'offre qui a lamentablement
failli, les économies occidentales reviennent à des notions plus
réalistes. Les années Thatcher-Reagan sont bien terminées,
laissant derrière elles la récession mondiale que l'on
connaît. Même les États-Unis, pays de la libre entreprise
sans contrôle, reviennent à des pratiques plus intelligentes,
comme en témoigne l'orientation Clinton dans le domaine de la
santé publique. Bref, l'intervention de l'État s'avère
encore nécessaire. Parler de privatiser, en tout ou en partie, un outil
collectif qui nous a dans l'ensemble bien servis, relève de la douce
folie.
La FTQ terminait par ces mots, en 1990, son mémoire, sur le plan
de développement d'Hydro-Québec: «Nous devons
également retrouver dans HydroQuébec le maître-d'oeuvre
principal du développement durable de nos ressources
hydroélectriques». Un pas dans cette voie a maintenant
été fait; les défis sont cependant plus grands que jamais;
pour l'essentiel, nous n'avons pas changé d'avis. Et voilà!
Le Président (M. Audet): Mme la ministre de
l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Alors, M. Daoust, M. Chabot, je voudrais vous
remercier d'être avec nous, ce matin. Vous n'en êtes pas à
votre première commission parlementaire ni à votre
dernière, mais je pense que le dossier que vous nous avez soumis est un
dossier qui s'ajoute à cette réflexion que nous faisons, depuis
déjà quelques semaines, sur le dossier d'Hydro-Québec, son
plan de développement, sa programmation. D'entrée de jeu, je
voudrais, peut-être, relever deux choses, deux sujets de votre dossier
sur les communications.
Au début, vous en avez parlé dans votre dossier qu'il y a
des communicateurs qui avaient dit et à HydroQuébec et au
gouvernement, par le biais du ministère de l'Énergie et des
Ressources, qu'Hydro-Québec, comme promoteur, n'avait pas la
crédibilité d'aller expliquer ses dossiers sur la place publique
à l'extérieur, non seulement au Québec, mais à
l'étranger, et, évidemment, que le ministère responsable
d'Hydro-Québec n'a pas, non plus, la crédibilité parce
que, lui aussi, il pousse sur les mêmes dossiers qu'Hydro-Québec.
Moi, j'aimerais ça avoir votre réaction à ça.
Et, quant à la privatisation, on n'a pas l'intention de
céder à une douce folie, M. Daoust, je dois vous dire, ni dans un
but de financement, ni dans un but de régler des dossiers
budgétaires. Je pense qu'Hydro-Québec a toujours
été un outil de développement important et c'est ce que
nous pensons encore, comme gouvernement. Mais j'aimerais avoir votre
réaction sur les
communications. (10 h 40)
M. Daoust: Bon. Oui. Il fut un temps où HydroQuébec
jouissait d'une crédibilité totale. On parle de qualité
totale, on peut parler de crédibilité totale. L'ensemble du
Québec, vous le savez, je répète ce que nous avons
vécu, éprouvait une fierté quasiment à nulle autre
comparable de voir cet instrument de libération économique jouir,
en fait, des plus grandes ouvertures à l'égard de tous les
problèmes où il était question
d'hydroélectricité. Il fut un temps. Je ne veux pas repasser
l'histoire du Québec, mais, aujourd'hui, on sent que ce n'est plus tout
à fait le cas et on est vivement touché et bouleversé de
voir ce phénomène-là, et, par voie de conséquence,
d'autres l'ont dit, je ne veux pas répéter ce qui a
été abondamment dit, c'est un peu et beaucoup le gouvernement du
Québec et l'ensemble du Québec qui sont au pilori de l'opinion
publique, surtout aux États-Unis et dans certains pays européens,
à l'égard de ce qui se passe ici, au Québec, sur le
développement hydroélectrique.
Je comprends que ça ne peut plus être le rôle seul
d'Hydro-Québec de redorer son blason, ou même du gouvernement du
Québec, bien que, là-dessus, les initiatives appartiennent aussi
bien à Hydro-Québec qu'au gouvernement du Québec, par
mille et une politiques et mille et une déclarations il s'en fait
et je ne veux pas les reprendre mais nous avons une
responsabilité collective. Qui que nous soyons, quelque groupe qui
puisse intervenir dans un débat comme celui-là devrait se faire
un impérieux devoir de le faire, dans tous les milieux. Ici, au
Québec, sans aucun doute c'est plus facile, mais aussi à
l'extérieur du Québec. Je crois qu'il est tout à fait
normal que vous invitiez l'ensemble des groupes je le
répète, ils sont fort nombreux au Québec ceux qui
peuvent intervenir à le faire à leur façon, selon leur
spécificité, avec leur originalité, et dans tous les
milieux, parce que c'est une bataille d'envergure. On commence à en
mesurer les conséquences, et je dois vous avouer qu'on devient quelque
peu effrayé de voir que certains produits qui sont fabriqués ici,
au Québec, pourront véhiculer avec eux les stigmates d'une
société qui n'aurait pas un comportement normal à
l'égard des premiers habitants de ce pays ou qui n'aurait pas une
attitude correcte à l'égard de l'environnement et des
phénomènes écologiques.
Nous autres, quant à nous, je ne peux pas parler au nom de toute
la société, mais on est profondément convaincu qu'il y a
une méchanceté dans ce type de propos, qu'on peut expliquer pour
toutes sortes de raisons et je ne veux pas me lancer dans des explications
sociologiques, philosophiques ou politiques, mais il y a là un
phénomène de méchanceté qui risque de nous faire
énormément mal. Il suffit de lire les articles je ne les ai
pas tous lus dans Le Devoir, de Miville Tremblay, je crois, il y
en a quelques-uns. Il suffit de voir les campagnes qui pourraient s'amorcer en
Europe et dans les pays où le Québec exporte à
l'égard des produits québécois pour sentir les dangers
potentiels. Là-dessus, je pense qu'il faut s'alarmer, sans être
alarmiste, évi- demment, mais il faut s'alarmer des conséquences
probables et porter le débat un peu partout. Ça me semble
important qu'on le répète.
Mais c'est bien beau d'avoir dit ça, c'est bien beau de s'inviter
et de dire: Nous aussi... Je pense à la FTQ et je ne ferai pas un
message trop, trop long qui a des relations avec les syndicats partout,
au Canada, et qui a des relations aussi avec des syndicats américains,
qui a des relations même avec des syndicats à l'échelle
internationale, on a un rôle à jouer dans ces milieux où
les problèmes de l'environnement et de l'écologie sont fort
discutés et les problèmes de discrimination lourdement et souvent
abordés à l'égard des aborigènes. Dans quelque pays
que ce soit, on a un rôle, une tâche, une mission.
Mais je disais: C'est bien beau... Et puis, ces tâches-là
qui sont les nôtres, elles ne sont pas exclusives à la FTQ. Il y a
un tas de groupes dans les entreprises, en fait chez les regroupements
patronaux, qui peuvent avoir le même type de relations, peut-être
pas avec les mêmes gens, mais les mêmes retombées. C'est
bien beau, mais il faut être doté des moyens de nos interventions.
Et je veux être un peu plus clair, c'est pour ça que, dans le
document, on parle d'un groupe de consultation, il faut être bien au fait
et bien au courant, et je dois vous dire que je n'ai aucune gêne, quant
à moi, à obtenir du gouvernement du Québec ou même
d'Hydro-Québec c'est notre propriété collective;
vous en êtes l'actionnaire principal, nous autres, on en est aussi par
vous; c'est notre propriété collective, Hydro-Québec
les moyens de ces interventions qui sont lourdes, coûteuses,
compliquées. Et il ne s'agit pas de «quêtailler» des
fonds, mais de dire: Écoutez, on a une tâche collective et ce
n'est peut-être plus vrai que seul le gouvernement du Québec ou
seule Hydro-Québec peuvent remonter un peu la cote de
crédibilité du gouvernement du Québec, du Québec
comme tel et d'Hydro-Québec. Je ne me lancerai pas dans les critiques
à l'égard de ce que vous auriez dû faire. Je pense qu'il y
en a d'autres qui sont assez compétents et dont c'est la tâche de
soulever ces problèmes-là de temps à autre, mais, quant
à nous et je vais conclure là-dessus on trouve
ça dangereux, on trouve ça méchant et on pense que
ça prend une réaction, parce qu'il y a des emplois. Si le
Québec a des difficultés à vendre ses produits, si des
campagnes se font contre le Québec, je pense qu'on en subit tous les
conséquences.
Je vais reconclure c'est la deuxième fois que je vous
menace de conclure en disant que nous avons été vivement
impressionnés par ceux qui sont venus vous voir hier, je crois, M.
Dansereau accompagné d'autres personnes. Enfin, sapristi, des gens qui
ont les immenses connaissances que l'on sait et le prestige qui est quasiment
universel, qui tiennent un langage simple, compréhensible et sans aucune
espèce de démagogie, parce qu'on était en train de sombrer
dans la démagogie à l'égard du développement
hydroélectrique, qui rétablissent les faits. Bravo! Tant mieux!
Là-dessus, j'ai vu qu'il y avait des critiques à l'égard
de ceux qui disaient: Bon, ils ont peut-être des liens avec
Hydro-Québec
parce qu'ils ont reçu des subventions, mais, là, il faut
être encore méchants tout comme si eux, et vous savez qui, n'en
recevaient pas, des subventions abondantes, je ne dirai pas trop abondantes,
parce que, là, je vais être obligé de faire des
comparaisons, mais fortement alimentés par les fonds publics, de
façon publique, je le dis, et peut-être insidieusement
alimentés. Il y a des parentés, de temps à autre, qui nous
inquiètent quant aux prises de position par les grands lobbies du
pétrole, du nucléaire ou du charbon, comme on l'a dit dans notre
document.
Sur la privatisation, bien, si je vous ai bien compris, comme disait un
personnage célèbre, vous nous dites que la privatisation ce n'est
pas dans l'air. Et je suis heureux de le constater parce que notre ami Le Hir
en parle beaucoup. Je sais qu'il est venu vous en parler et je pense que
ça a inquiété pas mal tout le monde. Peut-être qu'un
peu plus tard je pourrai vous dire pourquoi on est farouchement contre la
privatisation, mais, si le gouvernement actuel est aussi farouchement contre la
privatisation que nous, on est en bonne compagnie.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. C'est tout. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
Merci, M. Daoust, M. Chabot. Tout d'abord, je dois vous dire que, sur
plusieurs plans, vous vous inscrivez dans le sens des consensus qui se
dégagent. Entre autres sur un débat plus large en matière
d'énergie, je pense que vous vous inscrivez exactement dans le sens du
courant qui se développe de plus en plus au Québec. (10 h 50)
Quand vous exigez ou que vous demandez plutôt, vous favorisez un
geste plus proactif sur le plan national et international, je pense que vous
avez raison également parce qu'on a assisté béatement, et
Hydro-Québec en était peut-être responsable... C'est Hydro
qui avait même enlevé son représentant à New York,
un certain nombre d'années, pour rectifier les faits et faire le lobby
qui s'impose. Je pense qu'il était temps qu'il y ait un redressement de
ce côté-là, parce qu'on me dit que c'est l'ambassade du
Canada qui était le meilleur défenseur imaginez-vous!
des intérêts d'Hydro-Québec. Et c'est exactement ce
qui se dit à l'interne, à Hydro, comme à l'externe. Et je
pense que c'est une bonne chose que vous ayez rectifié cela et que le
Québec, par ses délégations aussi... Ce n'est pas des
manches de moppe qu'on envoie là-bas, des gens qui sont supposés
être assez à l'aise dans leurs souliers et assez proactifs pour
défendre les intérêts du Québec. Je pense que cette
commission contribuera, dans ce sens-là, à peut-être faire
comprendre à certains qu'ils ont un rôle à jouer au plan
international, et beaucoup, à part ça.
Quant aux effectifs, vous êtes un des rares groupes qui y touchez,
soit dit en passant. Ça fait une cinquantaine de mémoires qu'on
entend ou à peu près. Je vous dis qu'il n'y en a pas gros qui y
ont touché. On dirait qu'ils ont peur de se brûler avec ça.
Ils ne veulent pas se mettre la FTQ à dos et ils ne veulent pas se
mettre Hydro-Québec à dos. Tu les vois valser et patiner. mais,
fondamentalement, quand on analyse le plan de développement,
effectivement, moi, ce que je ne comprends pas, c'est qu'on parle de
défi-performance, on fait rêver le monde avec de grands mots
ronflants et, tout de suite après, on te flanque un plan de redressement
des effectifs qui n'a pas été prévu, qui n'a pas
été négocié, qui n'a pas été... c'est
gonthier, avec sa sagesse, dans hydro presse qui dit: coupure de 20 %
parce qu'il me manque 20 %... moi, je trouve ça, franchement, sur le
plan des relations humaines, d'abord, et ouvrières parce que la
base des relations ouvrières, c'est les relations humaines je
trouve ça quétaine et contradictoire, même avec le discours
officiel. je l'ai dit et je ne m'en suis pas caché. je suis content, il
y en a au moins un groupe qui est d'accord avec ce qu'on a dit à
l'ouverture de cette présente commission, parce qu'une large portion de
notre déclaration d'ouverture, comme opposition, ça portait
là-dessus et je suis content que vous y touchiez.
Au moment où on coupe 3000 je vais peser mes mots, mais je
vais les dire assez fort pour que tout le monde le comprenne au moment
où on annonce une coupure de 3000 personnes d'ici l'an 2000, il se paie
des primes de séparation de 1 000 000 $, 1 500 000 $ à certains
individus d'Hydro-Québec. Il s'agit de fouiller et de sortir ça,
c'est public, ça. Et on demande à la fonction publique
probablement encore un gel de deux ans. Il faut au moins être
cohérent, constant et avoir un poids et une mesure et donc pas deux
poids, deux mesures, là, avoir la même constance dans
l'application du geste qu'on pose.
Également, vous parlez d'une politique énergétique,
ça, je serais d'accord. Recherche et développement, vous
n'êtes pas les seuls, heureusement, il y en a plusieurs qui en parlent,
également. Il y a deux thèmes que vous avez ignorés, c'est
sur ça que je veux vous faire parler parce que, le reste, vous le
touchez passablement: le thème, tout d'abord, de l'efficacité
énergétique, vous n'en parlez pas, et vous ne parlez pas non plus
de cogénération. Donc, j'aimerais que vous me disiez, d'abord,
pourquoi vous n'en parlez pas. Est-ce parce que vous n'y croyez pas? Est-ce
parce qu'il y a trop de volte-face dans les plans de développement
antérieurs d'Hydro-Québec et que vous n'y croyez plus? Et la
cogénération, pourquoi vous n'en parlez pas également?
Ça, ça m'apparaît important que vous nous disiez quelque
chose là-dessus, vous autres.
M. Daoust: Si vous me permettez, M. le Président, je
voudrais faire quelques commentaires à l'égard de la gestion des
ressources humaines d'Hydro-Québec, un sujet qui vient d'être
abordé par le député de Joliette. C'est bien
ça?
Écoutez, la FTQ sort d'un colloque de trois jours sur tous les
problèmes de l'organisation du travail. C'est un sujet qui nous
préoccupe au plus haut point depuis de
nombreuses années. Il est maintenant, je pense, admis dans tous
les milieux que la gestion des ressources humaines à l'intérieur
d'une entreprise doit devenir la priorité des années à
venir. On ne cesse de le répéter, la plus importante de nos
ressources naturelles, c'est peut-être l'hydroélectricité,
sans aucun doute, au Québec, mais, globalement, ce sont ces hommes et
ces femmes qui travaillent dans les entreprises.
À l'occasion de ce colloque, on a critiqué abondamment,
critique constructive dans bien des cas, les gestes qui sont posés par
des entreprises au Québec et on a tâché de tracer des voies
d'avenir quant au comportement que celles-ci devraient avoir à
l'égard de l'ensemble de leur personnel.
Pour ce qui est d'Hydro-Québec, je dois vous dire
là, je vais employer le mot que c'est scandalisant et ça
n'a rien du fait que je sois le porte-parole de la FTQ, donc d'un groupe qui
représente les salariés d'Hydro-Québec, mais c'est
scandalisant, cette façon de procéder de cette
entreprise-là. Cette entreprise-là, qui doit être le
modèle sur bien des plans au Québec, qui est le point de mire
à cause de l'importance qui est la sienne, qui emploie de multiples
travailleurs partout au Québec, dont on scrute les moindres pas et
gestes, les moindres déclarations, les moindres comportements, devrait,
à l'égard de ses relations du travail, viser la qualité
totale, dans tous les sens du mot.
Ça ne veut pas dire qu'il y aura toujours un accord qui va se
dégager de rencontres avec les trois grands syndicats
d'Hydro-Québec, ce n'est pas ça du tout, mais elle doit avoir un
comportement de transparence, d'ouverture et de dialogue. Quand je dis qu'il y
a quelque chose de scandaleux à l'égard des mouvements de
personnels qui se préparent, ce n'est sûrement pas venu du jour au
lendemain, ça, ces annonces qui nous sont tombées dessus, qu'il y
aurait des coupures de tant de milliers de personnes d'ici telle ou telle
année et qu'on tiendrait compte de tel ou tel facteur. Il me semble
qu'il aurait été dans la normalité des choses
qu'Hy-dro-Québec, qui n'est pas sous-équipée dans ce
domaine-là, entame avec son syndicat les échanges, le mette au
courant des détails afin que l'on sache exactement dans quelle direction
Hydro-Québec devrait aller. Je pense qu'il faut le dire. Je pense que,
de ce côté-là, Hydro-Québec a des leçons
à prendre ou, tout au moins, des comportements à modifier
à l'égard de l'ensemble de ses relations avec le personnel.
À l'égard des deux autres problèmes que vous avez
soulevés sur l'efficacité énergétique, c'est de
celui-là que vous voulez parler, c'est entendu que, écoutez, oui,
mais oui, on est en faveur de toutes ces politiques qui ont leurs limites; les
documents d'Hydro-Québec les établissent et les
expériences à l'extérieur aussi. On ne peut pas
rêver que, par l'efficacité énergétique, si on a
bien lu les documents et bien analysé les problèmes, on puisse
éviter des travaux de grande envergure au Québec. Qu'il y ait des
campagnes dans ce domaine-là, on applaudit et tant mieux! Ça,
là-dessus, on ne voulait pas en parler, pas parce que d'autres en ont
parlé, mais ça me semble une évidence, les voies à
choisir, les moyens à prendre, ça, je pense bien que ça
relève de gens qui, techniquement, sont équipés, mais, sur
le principe général, aucune difficulté, aucun
problème. Mais, encore une fois, il ne nous semble pas que ça
puisse remettre en question, faire en sorte qu'il n'y ait pas de ces
développements que nous souhaitons. (11 heures)
À l'égard de la cogénération, mais oui, on
est froid, pour ne pas dire plus, pour toutes sortes de raisons. On n'est pas
sûr que, sur le plan économique, ce soit tellement avantageux; la
preuve n'en est pas faite, quant à nous. On a lu certaines
déclarations; je pense que vous en avez eu hier de ce groupe qui a
comparu devant vous, de M. Dansereau, où on parle des effets polluants
de certaines techniques de cogénération. Si on veut, d'un
côté, surmonter et assainir l'environnement et éviter des
pollutions et qu'on nultiplie les petits endroits ici et là qui vont
être pollueurs, je pense bien qu'on n'aura pas accompli l'objectif qu'on
s'est fixé et que c'est loin d'être générateur
d'emplois. On nous dit que les équipements qui pourraient servir
à ces usines de cogénération qui peuvent être
construites, que les équipements de toute nature sont des
équipements surtout fabriqués à l'extérieur du
Québec et même du Canada. Alors, on se dit: Mais, sapristi, quels
sont les avantages? Les équipements ne sont pas fabriqués
ici...
Le Président (M. Audet): Je vous invite à conclure,
s'il vous plaît.
M. Daoust: Oui. Même que la main-d'oeuvre qui pourrait les
installer n'est peut-être pas d'ici. En tout cas, tous ces
phénomènes-là font qu'on a beaucoup de réserves
à l'égard de la cogénération.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond. Une brève question et une brève réponse.
Allez-y.
M. St-Roch: Je vous remercie, M. le Président.
Alors, comme vous pouvez voir, M. Daoust, on va être
pressés dans le temps. Je suis d'accord avec vous que la privatisation,
c'est plus qu'une douce folie, qu'il faut laisser de côté. Mais,
moi, ce que je crains, suite aux mémoires aussi qu'on a entendus ici
à cette commission, tout particulièrement l'Union des
municipalités, c'est qu'on va avoir des pressions dans les mois ou les
années à venir pour que le milieu municipal assure une partie de
la distribution du réseau électrique. Est-ce que vous
considérez ça aussi comme une privatisation, faisant partie d'une
douce folie?
M. Daoust: Mais oui, absolument. Absolument. Je comprends qu'avec
les pelletages que vous savez, et c'est approprié, avec la neige qu'on a
eue, mais les finances publiques... d'un palier à l'autre, les
municipalités se cherchent des vocations, mais surtout des sources de
revenu. Nous autres, on estime que ce n'est pas là la voie, et que
ça serait une façon de morceler Hydro-Québec, de
rapetisser Hydro-Québec, d'éviter, en
fait, sans aucun doute, des économies d'échelle et des
expertises. À courte vue, ça peut être intéressant
je ne dis pas que, pour nous, ça l'est à courte
vue, ça peut sembler intéressant, mais, à cause de ce
qu'est Hydro-Québec, ça serait suicidaire et pas
particulièrement brillant pour être bien franc pas
particulièrement brillant.
Écoutez, je sais bien qu'on a peu de temps, mais
Hydro-Québec, c'est vraiment la seule multinationale que le
Québec possède, qui a tellement un rôle à jouer, sur
bien des plans, on le sait. En recherche et développement... Je sais
bien que vous lisez Le Devoir. Ce matin, je crois qu'il est question de
dizaines, si ce n'est de centaines de milliards dans le domaine de
l'environnement. On a une expertise, on a un savoir-faire, une technologie. On
a une compétence extraordinaire. On va tout couper ça en petits
morceaux, comme un saucisson, un petit peu à telle municipalité,
un petit peu à Pierre, Jean, Jacques, un petit peu à telle
entreprise ou à tel entrepreneur. On va prendre le plus beau de nos
biens et on va l'essaimer partout, comme ça, sans en mesurer les
conséquences, alors que, là, on a un réservoir de
ressources humaines incroyable qui peut faire, si on s'y met tous ensemble...
qui fait déjà l'orgueil du Québec.
Alors, privatisation: Non. Puis, d'autres formes de... Parce qu'une
municipalisation, il y a des gens qui peuvent dire que c'est encore le secteur
public. Mais, sapristi, qu'ils... En tout cas, je ne serai pas méchant
à l'égard de l'Union des municipalités, mais je ne les
vois pas trop, trop là-dedans. Bien qu'il y en ait quelqu'unes au
Québec, je pense que ce n'est pas là la voie.
Le Président (M. Audet): Merci.
M. St-Roch: Est-ce que je peux me permettre une brève
question?
Le Président (M. Audet): Très brièvement. On
manque de temps, M. le député.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
Juste pour confirmer. À la page 11 de votre mémoire, vous
mentionnez qu'il n'y a aucun plan de reclassement ou de recyclage pour
prendre un terme moderne des effectifs qui seront affectés par la
mise à pied, suite au plan de redressement qui est annoncé.
Est-ce que, depuis que vous avez écrit ce mémoire-là,
parce que ça fait quelque temps déjà, c'est encore pareil,
qu'il n'y a eu aucune approche pour essayer de mettre en place du reclassement
et du recyclage?
M. Daoust: On s'en prend à la façon... Je l'ai dit,
je ne le répéterai pas. Ils sont cachottiers,
Hydro-Québec, vous le savez, vous vivez avec eux depuis un bon bout de
temps. Ils sont drôlement cachottiers à l'égard du
syndicat. On a été agacés et, je l'ai dit, ce n'est pas
correct ce qu'ils ont fait. On les invite, par la ministre, à avoir,
à l'égard de tous ces problèmes-là, les plus
grandes ouvertures. Ce n'est pas une ouverture d'esprit, ça se fait
à deux. Ça se fait à deux, qu'on ait tous les
renseignements, que ce soit un esprit d'équipe. Enfin, quelqu'un qui est
mis à pied, ou qui est menacé de perdre son emploi, ou qui voit
des transformations profondes dans l'entreprise où il travaille, il a le
goût d'être informé. C'est le droit à
l'information.
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, c'est
déjà tout. Au nom des membres de la commission, messieurs, je
vous remercie de votre présentation, et, comme on dit souvent que les
bons politiciens sont de grands jaseurs, M. Daoust, je dois conclure que vous
avez de grandes qualités. Merci beaucoup.
À l'ordre, s'il vous plaît. Si vous voulez prendre place,
nous allons reprendre nos travaux. Nous recevons maintenant le groupe
SNC-Lavalin. Alors, M. Saint-Pierre, au nom des membres de la commission, je
vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Je vous rappelle brièvement
nos règles de procédure. Vous disposez d'une vingtaine de minutes
pour nous faire part de votre exposé. Ensuite, suivra une période
d'échanges d'une quarantaine de minutes. Je vous invite à vous
identifier avant votre présentation, s'il vous plaît. Merci.
SNC-Lavalin
M. Saint-Pierre (Guy): Mon nom est Guy Saint-Pierre,
président et chef de la direction du Groupe SNC et SNC-Lavalin. M. le
Président, Mme la ministre, Mme et MM. les députés, je
voudrais, en premier lieu, excuser l'absence de mon collègue,
André Gagnon, retenu à Montréal par une mauvaise grippe,
et vous dire que c'est un devoir, mais aussi un plaisir, pour l'entreprise que
je représente, SNC-Lavalin, de comparaître devant cette commission
afin de rendre publics ses commentaires quant au plan de développement
triennal déposé récemment par Hydro-Québec.
Vous vous souviendrez peut-être qu'en 1990 et SNC et Laval in
étaient chacune venues défendre leur point de vue devant la
même commission parlementaire au sujet du projet de Grande-Baleine.
Aujourd'hui, nos expertises sont réunies en une seule et même
entreprise comptant plus de 6200 employés. C'est donc pour nous un
devoir de commenter le plan de développement, car, comme plus importante
société-conseil, au Canada, dans les domaines de
l'ingénierie et de la maîtrise d'oeuvre de grands projets, notre
groupe possède une vaste expérience concrète dans les
études et la réalisation de centrales électriques de tous
les types: des centrales thermiques aux grandes centrales
hydroélectriques, en passant par les centrales nucléaires, des
équipements de production d'énergie solaire ou éolienne et
des petites centrales hydroélectriques.
Notre expérience concrète nous donne, je le dis en toute
modestie, une vision d'ensemble qui, je le crois, nous permet d'analyser avec
une certaine compétence les propositions d'Hydro-Québec en
matière de développement et de services. C'est un plaisir aussi
car, en l'occurrence, nous sommes pleinement en accord avec les grandes
orientations définies et proposées par HydroQuébec pour
développer nos ressources et répondre à la
demande des Québécois au cours des prochaines
années. Je crois que le plan triennal que nous avons
étudié tient compte de nombreuses consultations
déjà menées sur le sujet. Il représente, à
ce titre, un plan moderne, d'une qualité achevée, qui
démontre la détermination d'Hydro-Québec de satisfaire les
attentes de sa clientèle, d'aligner ses choix avec ceux de la
société québécoise. (11 h 10)
Nous sommes entièrement d'accord avec la nécessité
exprimée par Hydro-Québec de privilégier l'énergie
hydroélectrique comme principal moyen de répondre aux besoins des
Québécois en matière énergétique. Nous
appuyons la réforme de la tarification proposée par la
société d'État et nous reconnaissons l'utilité d'un
fonds de stabilisation destiné à réduire les impacts de la
faible hydraulicité lors des années plus sèches. Nous
sommes également en accord avec les moyens choisis par la
société d'État pour satisfaire les besoins et, notamment,
avec l'accent mis sur la cogénération et la préparation
hâtive de plans de développement de centrales de taille plus
modeste; celles-ci permettront d'obtenir, le moment venu, plus de souplesse
dans la mise en place de nouveaux équipements destinés à
combler la demande, même dans le cadre d'une évolution
imprévue de la demande.
J'aimerais situer rapidement notre intervention dans un cadre plus
général et ajouter quelques commentaires quant aux projets
d'envergure comme celui de Grande-Baleine avant de commenter point par point le
plan de développement d'Hydro-Québec.
En premier lieu, j'aimerais souligner de nouveau à quel point
l'énergie hydroélectrique privilégie le Québec en
matière de production d'énergie. Toutes les autres sources
d'approvisionnement, sans exception, comportent des coûts
élevés, souvent cachés, qui font en sorte que, dans la
mesure où le choix hydraulique est possible, il devrait être
privilégié, non pas à l'exclusion de toute autre source
d'énergie, mais comme premier recours. Les problèmes auxquels
doit faire face HydroOntario ces jours-ci nous permettent de croire que le
choix du nucléaire, comme source d'électricité, n'est pas
idéal. Même si nous croyons nous-mêmes à
l'énergie nucléaire comme source d'énergie d'appoint et
filière technologique complémentaire, les grilles tarifaires
pratiquées en Amérique du Nord nous indiquent que, presque sans
exception, les réseaux basés sur l'hydroélectricité
font bénéficier les consommateurs d'électricité de
tarifs nettement inférieurs.
Cette constatation vaut autant pour le nucléaire que pour les
centrales thermiques. Un État moderne qui miserait principalement sur
l'énergie thermique, alors qu'il dispose de sources d'énergie
hydroélectrique, s'exposerait à une inflation du prix du
carburant et à des coûts élevés pour la mise en
place de dispositifs de contrôle des émissions
atmosphériques.
L'énergie éolienne, de son côté, doit
nécessairement être couplée à d'autres types de
production énergétique. N'étant pas une source
d'énergie continue, son utilisation ne peut être que ponctuelle et
marginale, dans le but, par exemple, d'économiser le carburant
fossile.
L'énergie solaire demande une surface de captage très
importante et coûteuse et pose des problèmes d'emmagasinage qui ne
sont pas, à ce jour, résolus de façon satisfaisante, du
moins pas suffisamment pour en suggérer un usage intensif. Les
coûts de l'hydroélectricité nous semblent, tout comme
à Hydro-Québec, les plus avantageux à long terme. Ils
fournissent à la société d'État les moyens d'offrir
aux Québécois une source d'énergie propre, à
coût stable, une source d'énergie moins polluante que la
très grande majorité des sources d'énergie
disponibles.
Le Groupe SNC avait défendu ce point de vue devant les audiences
publiques sur Grande-Baleine, en mars 1991, je tiens à le
réitérer aujourd'hui: Un projet comme celui de Grande-Baleine,
s'il permettait à d'éventuels clients québécois ou
extérieurs d'éliminer des sources de production à base
d'hydrocarbures, constituerait un gain net pour la qualité
écologique de toute l'Amérique du Nord et en particulier pour
l'est du continent, y compris les territoires nordiques où le projet
Grande-Baleine doit être développé. Je suis très
heureux de constater que des écologistes québécois
intègres et réputés sont du même avis que des
personnes qui, comme nos professionnels, sont des spécialistes des
technologies et du terrain. Nous reconnaissons donc sans ambages que le choix
de l'hydroélectricité proposé par Hydro-Québec est,
à notre avis, le meilleur au plan économique et
écologique.
Nous reconnaissons également que ces grands projets doivent
entraîner un développement durable, écologiquement et
économiquement, pour les peuples qui habitent les territoires voisins de
zones comme celle de Grande-Baleine. Mais je suis persuadé qu'une
approche ouverte et de partenariat, telle que celle proposée par
Hydro-Québec, devrait permettre de créer un consensus et des
ententes à long terme avec les peuples autochtones du Nord
québécois, pour le bien de tous les Canadiens, les
Québécois ou autochtones qui composent ce pays.
J'aimerais maintenant aborder point par point les éléments
qui composent le plan de développement d'Hydro-Québec et vous
faire part, au passage, de certaines suggestions de SNC-Lavalin, visant
à rendre ce plan encore plus pertinent pour notre société
et pour HydroQuébec. Les orientations proposées par
Hydro-Québec dans son plan de développement découlent de
grandes décisions ayant un impact à long terme et qui doivent
être prises rapidement. Ces décisions sont les suivantes: Quels
sont les moyens à mettre en oeuvre pour répondre aux besoins de
notre société en matière d'électricité?
Quelles sont les actions permettant de bonifier les coûts de fourniture
dans le développement optimal du marché de
l'électricité?
Hydro-Québec propose une optimisation économique des
moyens de production tenant compte du coût financier global de chaque
option. Ces coûts sont basés sur la demande globale prévue,
tant en matière d'énergie que de puissance, et les
«externalités», ou coûts exogènes, les plus
difficiles à calculer, comprennent les impacts économiques et
environnementaux externes. Nous
sommes en accord avec l'approche d'optimisation des moyens contenue dans
le plan. Cependant, nous croyons que les facteurs externes, s'ils doivent
être pris en compte, devraient aussi, dans la mesure du possible,
être évalués en termes monétaires, une donnée
qui est évidente et utile tant aux décideurs qu'au grand public.
Par exemple, Hydro-Québec pourrait inclure dans ses calculs le
coût réel d'émissions élevées de
CO2 pour analyser en perspective certains choix
énergétiques. Elle pourrait faire de même en ce qui a trait
aux bénéfices économiques découlant de la
création d'emplois.
Comme le mentionne le plan de développement, il est courant aux
États-Unis d'attribuer un facteur financier aux économies
d'énergie qui permettent d'éviter l'émission de
matières polluantes. Ce type de mesure est acceptable uniquement
lorsqu'elle est basée sur le calcul d'avantages économiques
réels.
Le plan d'Hydro-Québec propose un recours contrôlé
à la cogénération, qui implique la production
combinée d'énergie et de vapeur. La cogénération,
avec une efficacité énergétique de 50 % à 80 %, est
plus efficace que la production thermique traditionnelle avec 30 % à 50
%. Nous endossons ce choix dans la mesure où il est
particulièrement utile à certains types de grande industrie,
notamment dans le secteur des pâtes et papiers. Il est susceptible
d'entraîner une élimination accrue de certains déchets, une
réduction des coûts énergétiques des entreprises et
une amélioration de leur capacité concurrentielle. Nous croyons
que cette option offre de nombreux avantages, outre une grande souplesse de
mise en oeuvre, et qu'elle est de nature à contribuer à maintenir
l'équilibre entre l'offre et la demande, dans l'hypothèse
où la hausse de la demande, qu'Hydro-Québec fixe à 2 %
annuellement, connaisse certaines fluctuations difficilement
prévisibles. Les équipements de cogénération
exigent un délai de mise en oeuvre de 3 à 4 ans au maximum,
comparativement à 8 à 12 ans pour les grands projets
hydroélectriques.
Nous estimons aussi que les projets de cogénération
permettent à Hydro-Québec d'obtenir des ressources
énergétiques supplémentaires à des coûts
intéressants qui n'altèrent pas le bilan financier de la
société, puisque celle-ci n'investit pas dans les projets de ce
type.
Hydro-Québec démontre aussi que le devancement de certains
projets et l'exportation temporaire de surplus d'énergie constituent une
source de rendement d'appoint considérable. Nous sommes en accord avec
la société à ce point de vue. La société
fixe le plafond de ses exportations à 10 % de sa production
régulière. Nous estimons que ce plafond est quelque peu
artificiel et qu'il pourrait être outrepassé, dans la mesure
où cette opération serait rentable pour la société
québécoise et acceptable sur le plan de l'environnement.
Le chiffre de 10 % avancé par Hydro-Québec nous semble
influencé par des facteurs conjoncturels comme les coûts actuels
très peu élevés du gaz naturel. À long terme, au
plan environnemental et économique, l'achat d'énergie
hydroélectrique par des clients externes pourrait devenir une solution
beaucoup plus populaire et crédible.
Notons aussi que plusieurs centrales thermiques et nucléaires de
l'est des États-Unis auront complété leur cycle de vie
dans quelques années. Il nous paraît douteux qu'elles puissent
être remplacées automatiquement par des centrales similaires.
Par ailleurs, l'écart entre la devise américaine et la
devise canadienne risque, selon certains analystes, de s'élargir de
façon durable au cours des prochaines années. Si tel est le cas,
la rentabilité des contrats de vente d'énergie à long
terme serait accrue et le risque relié à l'endettement
obligatoire d'Hydro-Québec en devises étrangères serait
réduit.
Quant aux énergies dites alternatives, soit l'énergie
solaire ou l'énergie éolienne, Hydro-Québec soutient que
l'intégration de ces sources énergétiques à son
réseau de base serait trop coûteuse pour être
considérée comme une solution rationnelle à court terme.
Nous partageons cette vision des choses et, tout en considérant ces
sources d'énergie comme très valables dans des contextes
spécifiques comme la rentabilisation de centrales thermiques par un
couplage avec des éoliennes sur la Côte-Nord ou aux
Îles-de-la-Madeleine, nous ne croyons pas qu'elles puissent constituer un
apport substantiel d'énergie dans la prochaine décennie.
À long terme, soit en l'an 2000 et après, la
société d'État propose le déploiement de centrales
hydroélectriques de moyenne envergure, soit des centrales de 100
à 500 MW. Ces centrales nécessitent des études d'impact
moins longues que de très grands projets, puisqu'elles touchent des
territoires beaucoup plus restreints. Nous sommes d'avis qu'Hydro-Québec
voit juste en recommandant que les plans de mise en oeuvre de ces projets
soient développés dès maintenant et, en quelque sorte, mis
en réserve, de façon à permettre de répondre
rapidement à des modifications imprévues de la demande. Nous
croyons sage et avisé de procéder de la sorte et de parcourir
à l'avance le processus entourant notamment l'évaluation
environnementale de ces projets. Nous croyons cependant que les grands projets
offrent toujours le meilleur potentiel de rendement à long terme et le
meilleur rapport économie-environnement. (11 h 20)
II existe une autre source d'énergie dont HydroQuébec
pourrait tirer un plus grand parti selon nous, c'est celle que constituent les
petites centrales électriques privées ou indépendantes.
Cependant, la limite de capacité actuelle de 25 MW, dans les normes
d'Hydro-Québec appliquées à ces centrales, nous
paraît trop restrictive. Nous croyons que les centrales
indépendantes devraient être autorisées jusqu'à une
puissance de 100 MW, ce qui demeure inférieur à celle qui est
autorisée pour les projets de cogénération. Nous croyons
qu'une harmonisation des deux politiques serait de nature à être
bénéfique pour les investisseurs privés
québécois, de loin mieux préparés à
l'hydraulique qu'au thermique.
Le dernier point sur lequel nous désirons revenir est celui de
l'énergie nucléaire. Nous croyons rationnel que la
société d'État ne mise que de façon marginale sur
l'énergie nucléaire, compte tenu de la qualité des
possi-
bilités de développement hydroélectrique au
Québec. Néanmoins, nous sommes d'avis que la
société d'État devrait maintenir une filière
nucléaire modeste, afin de conserver et de renouveler son expertise
technologique dans ce secteur. Dans ce but, Hydro-Québec devrait
conserver comme objectif de construire une centrale nucléaire de taille
modeste à tous les 20 ou 25 ans. L'énergie nucléaire
constitue un secteur industriel dans lequel le Canada et le Québec
disposent d'expertise et de technologie propres, et ce facteur mérite
d'être pris en considération.
SNC-Lavalin est donc, puis-je conclure, pleinement en accord avec les
choix proposés par HydroQuébec dans son plan de
développement triennal. Nous appuyons entièrement la
volonté de la société de miser, avant tout, sur
l'hydroélectricité, une valeur unique au Québec, une
valeur exceptionnelle au plan économique et écologique.
Nous endossons l'approche retenue par HydroQuébec pour optimiser
ses ressources et continuer d'offrir aux Québécois une
énergie propre à des coûts avantageux. Nous croyons que les
moyens choisis par la société sont adéquats et
qu'Hydro-Québec doit agir selon le plan proposé sans oublier,
toutefois, l'importance de réaliser, dans les meilleurs délais,
les grands projets qui sont déjà bien définis et pour
lesquels les processus d'approbation et d'évaluation sont
avancés.
Au nom de SNC-Lavalin, M. le Président, je remercie cette
commission parlementaire de nous avoir permis d'exprimer notre point de vue au
cours de cet exercice démocratique essentiel. Merci.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup. Mme la ministre
de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: M. le Président, merci.
M. Saint-Pierre, au nom de mes collègues, j'aimerais vous
remercier de votre participation et de votre contribution aux travaux de la
commission permanente de l'économie et du travail sur le processus de
consultation publique sur la proposition du plan de développement
d'Hydro-Québec.
Si on s'en va tout de suite à votre mémoire, vous indiquez
à la page 6, et là je vais vous citer: «Nous pensons qu'il
est temps d'élargir les frontières de l'analyse pour mesurer
l'effet des «externalités» sur l'économie
québécoise».
Est-ce que vous pouvez indiquer à cette commission la position de
votre groupe, SNC-Lavalin, sur la problématique des
«externalités», en dire davantage.
M. Saint-Pierre: Eh bien, nous croyons qu'il est possible... Dans
quelques États américains, les modèles sont de plus en
plus sophistiqués pour tenter d'être capable d'ajouter un contenu
quantitatif à des impacts que l'on peut mesurer. Nous avons
donné... Exemple: l'analyse des usines thermiques, l'effet des
émissions de CO2 additionnelles. Les économistes
conviennent de certaines relations, de créer des coûts pour une
société directs et indirects d'avoir à
absorber plus de ces effets de CO2.
Indirectement, Mme la ministre, on pourrait dire également qu'il
me semble que, pour permettre des choix encore plus lucides de la
société, dans les retombées au niveau des emplois, il est
possible peut-être de plus quantifier. On a peut-être trop
tendance, aujourd'hui, à voir une analyse économique de
coûts et à traduire ça en milles ou en sous par
kilowattheure et, d'un autre côté, à dire: Sur quatre ou
cinq points de vue, il y a plus de retombées, il y a plus de ceci, il y
a plus de ça.
Ce que nous suggérons, c'est que le second volet de ce dossier
soit peut-être plus quantifié. Vous me permettrez d'ailleurs
d'ajouter une expérience que notre groupe vit dans le moment. Je voyais,
dans les coupures de journaux de ce matin, des allusions qui ont
été faites sur les programmes d'Hydro-Québec aux
industries énergivores comme l'aluminium et autres. Je rappelle à
ce groupe et je ne sais pas si je peux inviter, un bon jour, des
médias... C'est dans des pays lointains. Nous travaillons dans 75 pays.
Mais, au moment où on se parle, des Québécois sont
à la tête dirigeante des 30 ou 40 groupes qui érigent, dans
le moment, et qui préparent les plans et devis pour la plus grande
aluminerie au monde, en Afrique. Les 40 cadres supérieurs de cela, c'est
des Québécois. C'est Pierre Lamontagne de Saint-Bruno, c'est
toutes des équipes... En bas d'eux, évidemment, il y a des
équipes internationales. À cause des coûts, on ne pourrait
pas se permettre de déplacer ces techniciens. On fait la même
chose en Corée du Sud avec de l'énergie nucléaire. On fait
la même chose en Australie avec des formes d'énergie, sans passer
sur nos multiples projets d'hydroélectricité à travers le
monde.
Et, moi, je dirai à tous ceux qui veulent mesurer le coût
des programmes d'Hydro-Québec aux industries de l'aluminium, qu'il ne
faudrait pas sous-estimer et que, pour nous, on ne serait pas dans tous ces
pays-là si on n'avait pas acquis une expertise récente et
pertinente au Québec même, avec les usines. Je cite un
communiqué de notre client, en Afrique du Sud, qui nous disait:
SNC-Lavalin a été le maître d'oeuvre et ses
ingénieurs de 8 des 10 dernières alumineries construites
au monde. Ça, c'est un honneur qui nous revient, ça procure des
emplois, et peut-être que j'insiste un peu là-dedans, parce que
c'est un volet que, quelquefois, on entend sous-estimer.
C'est la même chose dans le dossier Hibernia. Nous travaillons
dans le dossier Hibernia, mais, pour moi, un des avantages à long terme,
c'est qu'on sera demain en Norvège parce qu'on aura acquis une
expérience au Canada. Il ne faut pas sous-estimer l'effet
d'entraînement qu'on peut avoir avec certains choix qui sont faits par
Hydro-Québec. D'ailleurs, à ce titre, il faut dire et on
doit rendre hommage à plusieurs partis politiques et à plusieurs
gouvernements qui ont dirigé la province que, si le
génie-conseil québécois est si important au Canada et,
proportionnellement, si le génie-conseil canadien, dans son ensemble,
est si important par rapport à d'autres pays du monde, en fonction de
notre population, dans une large mesure, on le doit
aux politiques d'Hydro-Québec.
Mme Bacon: Je reviens encore aux «external
ités». L'identification et la quantification des
«externalités», ça ne fait quand même pas
l'unanimité, actuellement, aux États-Unis. Au plus, il y a 17
États qui ont adopté des lois et règlements qui encadrent
la planification intégrée des resssources. Est-ce que vous pensez
qu'au Québec, avec la prépondérance de
l'hydroélectricité dans notre parc de production et son
potentiel, qui est quand même très important, nous pourrions
arriver à une unanimité rapide sans débat orageux?
M. Saint-Pierre: Moi, je pense que, à son évidence
même, dans les grands choix entre l'hydraulique, le thermique et le
nucléaire et ça, on l'a dit l'écart sur le
plan économique pour la société est tellement
considérable qu'on ne pourrait pas, par des
«externalités», réussir à renverser les choix.
Plus que ça, je dirais même que, si on pouvait mesurer pleinement
ces «externalités», elles ne feraient qu'amplifier le choix
évident que représente l'hydraulique. Je pense que c'est à
sa face même que tous les pays du monde qui ont des ressources
hydroélectriques comme le Québec tentent de les développer
et que ceux qui développent le nucléaire ou le thermique, ce
n'est pas parce que c'est des choix qu'ils ont faits, c'est parce qu'ils n'ont
littéralement plus de ressources hydroélectriques non
aménagées, non harnachées.
Mme Bacon: Vous nous avez parlé, tantôt, des petites
centrales. Évidemment, c'est établi, la production hydraulique
indépendante, à 25 MW. Vous espérez, comme un autre groupe
qui est venu, évidemment, l'association des petites centrales, une
production de 100 MW. Quels seraient les avantages d'augmenter de 25 à
100 MW?
M. Saint-Pierre: C'est parce qu'il y a plusieurs projets au
Québec qui, pour toutes sortes de raisons, dans le moment, seraient
situés entre 25 MW et 100 MW. Peut-être que c'est des projets trop
petits pour réellement intéresser Hydro-Québec,
peut-être que c'est des projets qui... Finalement, vous savez, les petits
projets, c'est comme les petits magasins: ça demande beaucoup de
détails, beaucoup d'attention et peut-être que ce serait difficile
à gérer, je ne le cache pas. Peut-être qu'il y a dés
gens, dans le secteur privé, qui seraient prêts à prendre
ces risques, qui seraient prêts à... Remarquez bien, ayant dit
ça, il ne faut pas... Dans la cogénération et dans les
minicentrales hydroélectriques notre groupe en possède six
dans l'État de New York il y a quand même bien des
leçons à tirer. Je veux dire qu'il y a beaucoup de gens qui sont
prêts à investir dans cela, sans anticiper pleinement les
problèmes qui pourraient surgir. 11 y a des dépassements de
coûts, à l'occasion, dans les petites centrales, parce que le sol
ou la géologie n'ont pas été exactement comme les
recherches avaient pu l'indiquer. Mais, nous croyons qu'il y aurait plusieurs
projets que le secteur privé pourrait faire, et ces projets-là...
il faut bien se rappeler que les chances sont que les 2 % prévus par
hydro-québec, de la même façon qu'on ne le nie pas comme un
choix qui se justifie, il y a 1001 facteurs qui peuvent faire en sorte que ces
2 % de la croissance de la demande seront ou trop faibles ou trop grands. un
point que nous mentionnons, c'est qu'il est mieux d'avoir des réserves
disponibles pour satisfaire une demande imprévue, parce que
l'activité économique va mieux au québec, que l'inverse,
quand vous n'êtes plus capable de satisfaire la demande et que,
là, même les centrales à gaz demandent quand même un
temps assez récent.
Là, bien sûr, on vient de vivre une crise économique
très considérable, donc on est porté à avoir des
projections basses, mais on a déjà connu des périodes...
D'ailleurs, je voyais des analyses assez surprenantes des 10 dernières
années. La demande d'Hydro-Québec a été nettement,
nettement, beaucoup plus supérieure aux 2 %. (11 h 30)
Mme Bacon: Vous suggérez aussi, dans votre mémoire,
qu'Hydro-Québec conserve une expertise technique minimale en regard de
la filière nucléaire. Vous suggérez aussi qu'elle
entreprenne la réalisation d'une centrale nucléaire à tous
les 20 ans, en raison de l'écart de coûts qui existe entre la
filière hydroélectrique et nucléaire. Est-ce que votre
suggestion pourrait engendrer des pressions à la hausse sur les tarifs
d'électricité?
M. Saint-Pierre: La façon que nous l'avons fait, une
centrale modeste à tous les 20 ans, je pense que ça va avoir un
effet très marginal sur la hausse d'électricité. Par
contre, c'est de maintenir... Ce qui est important, c'est que, contrairement
à d'autres, moi je crois que, dans le XXP siècle,
l'énergie nucléaire va être plus acceptable parce que, dans
bien des cas, elle va sembler supérieure à l'énergie
thermique, sur le plan de la pollution et sur le plan des coûts. Bien
sûr, l'énergie nucléaire a traversé des
périodes difficiles, avec les incidents que l'on connaît, mais je
pense que, d'ici 10 ou 15 ans, ça va être un choix. Sur le plan
scientifique, je pense qu'il est très établi que, sur
l'environnement, les centrales nucléaires sont beaucoup moins nocives
que les centrales thermiques. Moi, je me dis que, même si vous avez une
force très, très grande, vous savez, ça vaut la peine de
maintenir la filière technologique que représente le
nucléaire.
Il faut dire également que c'est important pour nos entreprises
d'ici. Nous construisons des centrales nucléaires. Puis,
évidemment, si on dit: On n'en fait pas du tout, des CANDU, au Canada,
les gens en Corée se demanderont bien pourquoi ils devraient en acheter.
Alors, le fait qu'on en fait à l'occasion, ça nous aide à
l'exportation. Mais je pense que ce qui est le plus important, c'est... Vous
savez, c'est un peu comme on pourrait prendre bien des exemples
quand on joue au bridge: on peut avoir un jeu favorisé, mais,
exceptionnellement, on peut être obligé de jouer un autre jeu.
Donc, il est bon de se faire la main à cet autre jeu qu'on
pourrait être obligé de jouer à l'occasion.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
M. Saint-Pierre, je vais partir tout d'abord des contrats avec les
alumineries. Vous avez semblé dire que c'était une bonne chose
pour l'expertise que nous avons acquise dans la construction d'alumineries.
Mais on se rend compte que c'est à un coût social extraordinaire.
J'ai vu des projections jusqu'en l'an 2010, puis je vous avoue que c'est un
coût astronomique pour chacun des actionnaires que nous sommes, comme
Québécois. On ne vous a pas demandé, bien sûr, de
faire l'analyse des contrats, mais, si vous aviez à les analyser, demain
matin, est-ce que vous diriez que ça aurait pu être
atténué, que c'est vraiment un coût prohibitif,
indépendamment de l'expertise que l'on obtient? Est-ce qu'on n'aurait
pas pu, par exemple, exiger des usines de transformation rattachées
à cela, précisément pour atténuer le coup? Est-ce
qu'on n'aurait pas pu, pour augmenter les retombées... C'est là
que vous pouvez bien me dire qu'il y a 40 cadres qui sont en train de
bénéficier de l'expertise qu'on a obtenue, mais c'est à
quel coût pour le Québec?
M. Saint-Pierre: Alors, je n'ai pas vu les contrats. Donc, ma
connaissance se limite à ce que j'ai vu dans les journaux. Ce que je
dirais à M. le député, c'est qu'à plusieurs
endroits dans le monde la même approche a été retenue.
Donc, Hydro-Québec était en concurrence, et on peut dire,
peut-être, qu'au lieu que les gens de Portneuf puissent travailler dans
une usine moderne, qui est à la fine pointe, et qui va être
là encore dans 50 ans, c'est peut-être des gens en Australie, au
Brésil ou en Argentine qui auraient pu bénéficier de
cela.
Moi, ce que je reproche aux gens qui ont une vue catégorique sur
les coûts astronomiques que ça coûtera à la
société québécoise, c'est que, bien sûr,
c'est des gens qui partent des prix de l'aluminium, aujourd'hui, et qui les
projettent dans le temps, en nous disant: C'est impossible d'avoir des
études précises pour nous dire les coûts de l'aluminium.
Mais il faut se rappeler que les coûts de l'aluminium, il y a quatre ou
cinq ans, dans une période où même si l'inflation
est faible, il y a toujours une inflation les coûts étaient
plus de deux fois plus élevés qu'ils ne le sont aujourd'hui, ils
dépassaient 1 $ la livre. Si les coûts de l'aluminium... Et on
sait qu'actuellement la baisse de l'aluminium pour avoir discuté
avec Jacques Bougie et autres elle est reliée à un
phénomène très, très particulier, mais qui va avoir
une limite dans le temps, c'est le dumping que font les alumineries
soviétiques sur les marchés internationaux. Mais, dès que
ceci va cesser, la demande en aluminium continuera d'augmenter. Elle est
très, très saine: 2 %, 3 %, 4 % par année, même dans
des périodes, comme nous avons traversées, de cycles
économiques très difficiles. Alors, on peut se retrouver
très rapidement avec des prix de l'aluminium qui vont dépasser le
1 $ la livre, et là on va arriver avec des conclusions
complètement différentes.
Je vous rappellerai, à cet effet-là, que même les
cerveaux les plus brillants... Et j'ai déjà lu des livres qui
blâmaient, des livres dans lesquels on reprochait aux Américains
de ne pas avoir acheté l'énergie de Churchill Falls en 1967,
à 0,003 $ le kilowattheure, parce que les Américains, les
cerveaux les plus brillants, étaient convaincus que le nucléaire
était pour coûter plus bas que cela. Il y a des gens, des
brillants aussi, qui reprochaient au Québec et j'ai
regardé des journaux récemment d'avoir acheté
l'énergie de Terre-Neuve. Puis, aujourd'hui, il faut bien se rendre
compte que, si on fait les mêmes calculs auxquels vous faites allusion,
le Québec a bénéficié immensément d'un
contrat que plusieurs avaient jugé non favorable.
Moi, je pense que, pour les alumineries, on peut, dans le temps, avoir
les mêmes choses. Évidemment, j'ai évoqué les 40
personnes comme un exemple, mais je dirais que, sur nos 6200 travailleurs chez
SNC-Lava-lin, en 1993, 50 % vont travailler à l'extérieur du
Canada et l'aluminium sera un facteur, l'énergie sera un facteur, la
pétrochimie sera un facteur. C'est donc l'expertise gagnée ici
qui nous permet de maintenir ces emplois-là.
M. Chevrette: Je reprends ma question, parce que vous avez
déjà été politicien et vous esquivez des bouts.
M. Saint-Pierre: Je pensais que j'étais rouillé un
peu pour ça.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: Ça revient vite!
M. Chevrette: Si je vous disais que... D'abord, dans les
alumineries, il y a des cycles; c'est des cycles, ordinairement, de cinq ans.
Si on se base sur les études et ceux qui font des projections dans le
temps, c'est des cycles de cinq ans. J'ai hâte de voir comment
HydroQuébec, elle, fait ses projections. Je vais leur demander, ils vont
revenir. Mais j'ai besoin de savoir comment ils ont fait leurs projections pour
en arriver, à la fin de la date des présents contrats, à
un bénéfice net par rapport au tarif L, le tarif grande
puissance. À mon point de vue, en tout cas, d'après les
projections qu'on nous montre présentement, la perte sera de plusieurs
milliards et les bénéfices... c'est-à-dire le manque
à gagner, sera de je ne sais pas combien, je le saurai plus
précisément, j'ai des informations là-dessus. Je sais
également que, par rapport à ce qui était escompté,
c'est une perte nette assez d'envergure.
Je vous demandais si, véritablement, avant de signer des
contrats, au moment où on n'est pas en surplus
énergétique, avant de signer des contrats à perte,
exclusivement pour aller chercher l'expertise, si on n'aurait pas dû
précisément coupler cela avec l'obliga-
tion de transformer ici pour avoir des retombées très
positives à moyen et long terme. Là, les contrats seront finis,
ce sera une perte nette pour les contribuables.
M. Saint-Pierre: Je ne conteste pas votre point de vue, mais je
pense que, dans le secteur de l'aluminium, il y a deux industries très,
très différentes: il y a l'industrie de la production de
l'aluminium et il y a l'industrie de la transformation. On voit que, dans tous
les projets au Québec, les partenaires qui sont pour les usines
d'électrolyse ne sont pas tous dans la transformation. On aurait pu
avoir comme exigence de dire: On ne vous donne pas ces tarifs à moins
que vous transformiez au Québec. Mon jugement est que les quatre usines
ne seraient pas venues au Québec.
Maintenant, dans la transformation, le fait qu'ils soient venus dans les
usines d'électrolyse, pour les usines de transformation, il se pose les
mêmes analyses économiques. Les gens qui doivent faire des
investissements substantiels, ils n'ont aucun préjugé. Je pense
qu'à rentabilité égale ce serait très facile que
ces entreprises-là, pour mille et une raisons, investissent davantage au
Québec. Par contre, si vous leur demandez d'investir, même quand
ce n'est pas rentable, en reliant un projet d'investissement avec l'autre,
là, on risque de tout perdre, parce que la prise de décisions est
différente, les partenaires sont différents, la
rentabilité répond à... Vous savez, c'est comme dans
d'autres secteurs. Je réalise que c'est toujours le même
métal, mais c'est deux prises de décisions très
différentes par des entreprises très différentes. Il y en
a qui sont très fortes dans les usines d'électrolyse,
plutôt faibles en transformation. D'autres, vice versa; on va trouver
leur force dans la transformation, puis elles seront relativement faibles et
dépendantes d'autres dans les usines d'électrolyse.
M. Chevrette: À la page... je crois que c'est 6, de votre
mémoire, le dernier paragraphe, en bas de votre page 6, vous dites:
«II est mentionné au plan qu'il est assez courant, aux
États-Unis, d'attribuer un crédit aux économies
d'énergie». Est-ce à dire que vous suggérez à
Hydro-Québec d'implanter un tel système ici ou... C'est parce que
je me serais attendu de vous autres, Lavalin, SNC-Lavalin, que vous
préconisiez véritablement un programme d'efficacité
énergétique qui colle aux réalités du
Québec, du climat du Québec, du coin de pays dans lequel on est.
Vous n'en faites pas la critique du tout, des programmes d'Hydro. Est-ce
à dire que vous partagez l'utilisation de gadgets floridiens,
plutôt que d'arriver véritablement avec un programme?
Vous avez les ingénieurs, vous avez les cerveaux pour penser
à des programmes d'isolation qui collent aux réalités puis
qui pourraient vraiment être d'une efficacité... 1 700 000 000$,
M. Saint-Pierre, dans des programmes d'efficacité
énergétique, c'est de l'argent en bon Dieu, ça! Est-ce
qu'on ne doit pas penser à avoir quelque chose qui colle
véritablement aux besoins climatiques du Québec? (11 h 40)
M. Saint-Pierre: M. le député, je pense qu'on le
fait, parce que le montant est substantiel, et on sait qu'au fil des
années plusieurs groupes ont reproché aux compagnies
d'utilité publique de ne pas privilégier suffisamment
l'efficacité énergétique et de tenter, par des moyens, de
diminuer la consommation d'énergie. Hydro-Québec et nous y
avons participé nous-mêmes... Tant au niveau des consommateurs
qu'au niveau des industries, il y a des analyses spécifiques qui sont
faites dans le contenu réel de leurs programmes à eux, comment on
peut diminuer... Je pense, d'ailleurs vous allez voir, et je pourrais,
avec plaisir, vous le fournir qu'il y a eu une diminution
considérable de la consommation d'énergie dans à peu
près tous les secteurs énergétiques. Dans tous les
secteurs industriels, au Québec, les besoins d'énergie, pour
produire une quantité x de produits, ont eu tendance à diminuer
de beaucoup au cours des 10 dernières années, et de la même
façon que l'industrie de l'automobile a, elle aussi, tenté de
faire sa part pour diminuer la consommation d'essence dans les voitures. On le
voit aujourd'hui, même avec des voitures qui ont des moteurs relativement
puissants, 20 milles au gallon ou 10 litres aux 100 km, c'est très
facile, alors qu'avant c'était impossible à penser, à
moins de vouloir se sacrifier et d'avoir une petite voiture.
Je pense que, là où vous avez raison, c'est que ce
leitmotiv peut aller trop loin. Il y a certains groupes écologistes qui,
à mon sens, exagèrent jusqu'à quel point on peut aller. M.
Daoust, je suis parfaitement d'accord avec lui. Il faut être très
réaliste que les Québécois ne voudront pas s'allumer aux
chandelles, juste pour dire... Ils ne voudront pas avoir des coupures
d'électricité. Il y a des moyens qui touchent notre
qualité de vie et qui, souvent, touchent notre qualité de vie
industrielle, notre capacité de concurrencer les moyens
énergétiques. Alors, est-ce qu'un milliard, c'est trop? Est-ce
que 800 000 000 $ aurait été assez? Là, une question
d'équilibre et de jugement, et je ne prétends pas être
capable de trancher le débat, mais je pense que les initiatives d'Hydro
visent, justement, à avoir des programmes qui collent à la
réalité. Bon. Est-ce qu'il y a certaines choses qui sont des
gadgets, là? Les pommes pour les douches... Est-ce que, là,
ça frappe plus l'imagination des consommateurs, puis là les gens
commencent à penser...
M. Chevrette: Les lampes opaques, l'hiver. M. Saint-Pierre:
Oui. C'est ça. Non.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Gatineau.
M. Lafrenière: Merci, M. le Président. vous
indiquez, à la page 9 de votre mémoire, et je cite:
«pourquoi [...] limiter les exportations à 10 % des ventes
régulières? ce plafond de 10 % nous semble refléter
surtout la perception d'une conjoncture actuelle moins favorable aux
exportations [...] plutôt que le potentiel à long terme de ces
exportations, compte tenu
de tous les facteurs en jeu, aussi bien environnementaux que
socio-économiques.» Ma question, c'est: Pouvez-vous nous indiquer,
ou indiquer à cette commission, jusqu'à quel niveau devrait se
situer le volume des exportations?
M. Saint-Pierre: Vous savez, je pense qu'il n'y a pas de chiffre
magique. Dans la mesure où Hydro y retrouve un rendement
économique intéressant, qui fait que le coût de
l'électricité, pour les consommateurs québécois,
s'en trouve d'autant diminué, dans la mesure où les coûts
écologiques dont on doit tenir compte de ces installations
qui, finalement, sont temporaires vont être données à des
Américains, à des États ou à des provinces
limitrophes, je pense que... Vous savez, il n'y a pas de chiffre magique. Ce
n'est ni 11; ce n'est ni 12; ce n'est ni 15; ce n'est ni 20. évidemment,
ce que je reproche, c'est la grande, la très grande différence
dans la perception des consommateurs, au canada, au québec, comme aux
états-unis, quant à l'importance de l'exportation dans les
politiques d'hydro-québec. vous demandez aux québécois
moyens je l'ai fait, moi-même, à plusieurs reprises
eux ont l'impression qu'on exporte, parce qu'ils ont vu les manchettes des
journaux... sur des milliards qui sont exportés dans des contrats avec
les états de la nouvelle-angleterre, eux ont l'impression qu'on exporte
80 % de ce qu'on produit à la baie james. les gens du canada, c'est
encore pire. eux ont l'impression que, le québec, on envoie 90 % de nos
ressources hydrauliques aux américains. souvent, les américains
ont aussi cette même impression. quand vous dites aux gens que c'est
moins que 10 %, dans le moment, ils sont toujours surpris. vous dites donc que
tous ces barrages, ce n'est pas pour les américains, que c'est pour les
besoins du québec, et là il y a une surprise. alors, pour
répondre spécifiquement à votre question, à mon
sens, il n'y a pas de chiffre magique. peut-être que les 10 % d'hydro,
c'est pour mettre l'emphase que ça sera marginal, que ce n'est pas le
moteur de son plan de développement, que c'est un ajout, que c'est un
rendement économique additionnel qu'on obtient. dans cette
mesure-là, moi, je n'y vois pas d'inconvénient. vous savez, c'est
comme dire: on a ici des cerveaux qui pourraient aider des gens ailleurs dans
le monde. est-ce qu'on doit se limiter, nous je vais prendre un exemple
que nos exportations ne doivent pas dépasser 50 % de notre
chiffre d'affaires? moi, je dis non. il n'y a pas de chiffre magique. dans la
mesure où on est capable de rendre un service à moindre
coût à quelqu'un dans le monde, on doit tenter de le faire.
M. Lafrenière: Que pense votre groupe de la position des
intervenants qui indiquent qu'en exportant de l'électricité
à l'extérieur du Québec, le gouvernement exporte des
emplois?
M. Saint-Pierre: Moi, je suis en désaccord avec cela. Je
pense que, fondamentalement, c'est qu'on fait payer par d'autres des
installations dont on aura besoin à brève échéance
premier avantage. Deuxième avantage: je pense que, sur le plan
énergétique, c'est un atout de taille. Évidemment, l'eau
qui coule dans les rivières, elle ne devient un atout de taille que
lorsqu'il y a une usine qui transforme, ce qu'on appelait l'huile blanche, qui
transforme l'énergie hydroélectrique en énergie. C'est
là que l'avantage devient matériel, et, moi, je suis en
désaccord avec ceux qui disent qu'on exporte l'énergie.
M. Lafrenière: À l'exception des exportations,
votre mémoire n'aborde pas les autres orientations, à long terme,
de développement de marché proposées par
Hydro-Québec, à savoir le marché des
électrotechnologies et l'implantation des industries à forte
consommation d'électricité. Ma question: De façon
générale, est-ce que le groupe SNC-Lavalin partage ces
orientations à long terme d'Hydro-Québec?
M. Saint-Pierre: En général, oui. Encore là,
vous savez, on a, dans la vie, les choix qu'on a. Je vais reprendre encore
l'exemple d'un jeu de cartes. Si vous avez dans votre jeu des valets et des 10,
il faut tenter de les utiliser avec intérêt. Si vous avez un jeu
avec seulement 4 as, bien là vous n'avez pas besoin de 10. Alors,
reprenons l'exemple. Si, au Québec, on n'avait aucun chômage et si
on avait ici des cervaux tels que tout le monde viendrait nous voir pour avoir
nos avis, bien là, peut-être qu'on dirait: Ces secteurs-là,
on ne les veut pas. De la même façon, on remarque que l'Allemagne,
que les pays les plus développés ont tendance, un peu, à
être très sévères pour ces types d'industries, mais
les pays qui ont des... Comme nous avons ici des problèmes de
chômage, de pauvreté, des problèmes sociaux aigus, bien,
ces emplois-là, c'est des emplois compétitifs, qui vont
être là dans 50 ans.
J'ai vu Lauralco dans Portneuf. C'est nos jeunes qui sont capables de
travailler dans des régions éloignées, parce que les
alumineries et les industries que vous avez évoquées ne
s'établissent pas dans la région de Montréal. S'il y a
quelque chose qui a pu aider l'équilibre entre les régions et la
grande région de Montréal, c'est bien les alumineries. C'est la
Côte-Nord, c'est ici, c'est Bécancour qui en ont
bénéficié. Alors, je pense que... et l'on sait les sommes
importantes qu'on est prêt à dépenser pour le
développement régional, pour l'équilibre et les
possibilités d'emploi pour tous nos jeunes, dans toutes les
régions. Je pense que ces industries-là nous aident. Maintenant,
si on avait, vous savez, des industries du quatrième type, qui faisaient
de l'expertise mondiale à partir de Cap-Chat, tant mieux, mais, dans le
moment, on n'a pas été capable de trouver ça.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le
député. M. le député de Joliette.
M. Chevrette: M. Saint-Pierre, nous avons rencontré des
gens des papetières qui nous disent qu'avec
l'énergie du Québec exportée aux États-Unis
certains concurrents, avec notre propre énergie, ont une tarification
inférieure à celle du Québec dans l'industrie des
pâtes et papiers. Ce n'est pas nous qui disons ça, là;
c'est les gens des pâtes et papiers qui nous donnent des comparaisons,
des exemples. Je pense que, sans nous le dire, ils nous passent un certain
message, en disant: C'est parce que vous avez mal négocié vos
contrats de ventes à l'exportation. Effectivement, quand tu vends, ce
n'est pas pour te faire concurrence. Je suis votre raisonnement logique. Mais
est-ce que la conclusion ce serait parce qu'on a mal négocié des
contrats de vente à l'exportation? Si, le lendemain matin d'un contrat
de vente à l'exportation, on arrivait à avoir des concurrents qui
ont une tarification inférieure à celle du Québec, ce
serait quoi, ce serait dû à quoi?
M. Saint-Pierre: Moi, M. le député, je n'accepte
pas la prémisse que vous avez empruntée de groupes qui ont
prétendu cela. Moi, j'accepte...
M. Chevrette: Ils sont venus ici nous le dire.
M. Saint-Pierre: Je le sais. Mais, moi, je pense que, dans les
cas spécifiques que je connais bien, c'est le fait que la
cogénération de certains États américains a
été possible à une échelle beaucoup plus grande
qu'on ne peut l'avoir ici, ce qui a donné à des usines
très particulières un avantage, un coût
d'électricité qui peut être plus bas que ce que les usines
de pâtes et papiers peuvent avoir, au Québec, mais ce n'est pas
les contrats d'exportation qui ont donné ces choses-là, c'est
plus les usines de cogénération. Je me rappelle d'excellentes
interventions de présidents de compagnies de pâtes et papiers,
mais ils faisaient référence à des cas spécifiques
de cogénération aux États-Unis. On ajuste à le
voir. (11 h 50)
Alors, la seule façon que ceci pourrait être
expliqué et je ne connais pas de cas ce serait une
distorsion très, très grande dans la tarification de ces
États américains. Mais, dans toutes les tables que j'ai vues au
niveau des consommateurs, au niveau de l'énergie, en fait, le
Québec, le Manitoba et la Colombie-Britannique sont toujours à
peu près dans une classe à part. On sait que les États
américains... Il y a la Tennessee Valley Authority qui, à un
moment, justement, avec des centrales hydroélectriques, a pu avoir dans
une zone c'était presque une zone de développement
régional des coûts d'électricité très,
très bas, qui ont été maintenus longtemps, mais ce n'est
pas nos ventes d'électricité qui ont provoqué ça.
Moi, je mets en doute cette...
M. Chevrette: En tout cas, je leur ai demandé s'ils
pouvaient nous envoyer de la paperasse pour le démontrer, parce qu'on
m'a indiqué qu'une usine, par exemple, pouvait faire des
bénéfices nets, si on fait une comparaison par rapport à
ici, qui pouvaient aller... Quand tu es rendu que tu paies 55 000 000 $ de
tarif d'électricité dans un an, les bénéfices
mensuels, si la tarification est distincte, peuvent être très
grands. Mais vous allez jusqu'à préconiser aucune limite dans la
vente à l'exportation, si je lis bien votre page 9.
M. Saint-Pierre: On disait qu'il n'y a pas une limite
parfaite...
M. Chevrette: Bon.
M. Saint-Pierre: ...comme je l'expliquais à monsieur.
M. Chevrette: Mais il n'y a pas de danger à vouloir
produire, que les gens de l'extérieur nous voient ériger de bons
barrages et que la négociation soit très difficile pour aller
chercher les meilleurs prix possible? Est-ce que ce n'est pas mieux de voir,
d'attendre la demande avant de se garrocher dans toutes sortes de barrages,
quitte à se préparer de façon plus correcte, plus efficace
dans les analyses environnementales et tout le processus qui aboutit à
la construction éventuelle?
M. Saint-Pierre: non. le problème, c'est lorsque la
demande va se faire sentir, vous n'aurez pas le temps de faire les barrages.
là, le client va être prêt à signer, parce que, lui,
a fait comme hydro-québec, une prévision de 2 %, et tout à
coup c'est 4,5 %, parce qu'il y a eu une reprise économique dans les
états de la nouvelle-angleterre, et là il va être...
là, au contraire, lui, il va être un acheteur qui, vous savez, a
le couteau sous la gorge, parce que lui est obligé de satisfaire une
demande. là, je pense que, nous, dans la négociation, on aurait
une carte très, très forte. moi, c'est un peu...
évidemment, ça ne serait pas indiqué de dire qu'on va tout
développer notre potentiel sans se poser la question: qu'est-ce qu'on va
faire avec? les 10 % donnent sûrement une balise. moi, je dis: 11 %
aurait pu être aussi bon; 15 % aurait pu être aussi bon. c'est dans
la mesure où...
L'autre point que je rappelle, c'est que, finalement, ces
contrats-là ont quand même un terme de vie. Ce n'est pas des
contrats éternels. C'est faire payer par d'autres des besoins qu'on aura
à satisfaire nous-mêmes plus tard, donc qui vont nous revenir
à des coûts moindres. C'est un peu comme si, vous et moi, on avait
un terrain et que, finalement, on réussissait à faire financer
à 100 % par quelqu'un d'autre la construction d'une maison. On sait que
celui qui va la louer, la maison, va nous la payer au bout de 20 ans et, au
bout de 20 ans, au moment d'en avoir besoin, on va l'avoir gratuitement.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
M. Saint-Pierre, on sait que, dans la vie, vous avez une expertise qui
est mondiale de plus en plus, que le Québec et le Canada dans son
ensemble vont être sous le feu de la critique dans bien des volets, que
ce soit au niveau des pâtes et papiers... On le vit mainte-
nant au niveau de l'hydroélectricité.
En ce qui concerne, nous, ici, au Québec, au niveau de
l'hydroélectricité, ne croyez-vous pas qu'on est dans une
conjoncture de temps qu'il va falloir, en tant que Québécois, que
nous aussi on dise: Oui, c'est la filière hydroélectrique, c'est
celle-là qu'on va prévoir, et que, pour y arriver... Parce qu'il
y a un autre grand débat de dire: Est-ce qu'on harnache toutes les
rivières au Québec, ou est-ce qu'on garde des rivières
patrimoniales? Ne croyez-vous pas qu'on est dans une conjoncture où ce
serait beaucoup plus facile d'établir, en tant que gouvernement, en tant
que société, qu'on garde des rivières patrimoniales? Ces
rivières-là, on en reparlera dans 30 ans, dans 40 ans ou dans 50
ans. On se donne un grand échéancier, c'est patrimonial, et voici
maintenant les rivières qu'on va harnacher. À l'intérieur
de cette politique-là, des rivières qu'on harnacherait, pour
faire suite aux demandes qui pourraient demander rapidement des besoins
énergétiques, qu'on ait des petites et moyennes centrales, qui se
réalisent d'habitude rapidement, avec des grandes centrales. À ce
moment-là, on va être capable de dégager la banque de
projets qu'on pourrait actualiser et faire les études, quitte à
revenir à la fin avec une vérification de dernière minute
pour vérifier nos hypothèses. C'est à cette
condition-là qu'on va pouvoir continuer à développer
l'hydroélectricité ici, au Québec, et à garder une
image sur la scène internationale qui sera valable.
M. Saint-Pierre: Mais, là, je pense que c'est simplement
de s'assurer que, dans notre approche pour satisfaire des besoins
énergétiques, on tient compte des besoins de la
société et on tient compte des besoins de l'environnement.
Maintenant, je dois dire que, moi, je demeure convaincu qu'il est
possible de faire, si on y met l'approche appropriée, qu'il est possible
de trouver des plans optimums pour toutes les rivières, qui marient...
vous savez, qui font l'équilibre entre ces demandes qui, en surface,
semblent contradictoires. Exemple, prenons un cas d'espèce. Je pense,
moi, qu'il est possible, et je ne dis pas que c'est un projet qu'on
étudie, mais que c'est possible de faire le harnachement, disons, sur la
rivière Richelieu à Chambly, mais dans un contexte qui
réalise que ce n'est pas juste la production d'énergie qu'on veut
faire là, qu'on veut également minimiser l'impact sur
l'environnement, qu'on veut aider le tourisme récréatif. Vous
savez, si on insère tous ces éléments-là, je pense
qu'il n'y a pas personne au monde qui serait capable de nous donner des
leçons de comment on doit faire des projets énergétiques
dans le secteur de l'hydraulique.
Vous avez évoqué des rivières un peu de... Il me
semble qu'au Québec on n'a pas, dans nos rivières, ces richesses
sur le plan historique, culturel, qui font qu'on devrait les conserver dans
leur état pur. Maintenant, je suis prêt à prendre un peu
plus de temps pour me faire convaincre de l'inverse. Vous savez ce n'est ni la
Seine ni la Tamise, c'est des rivières un peu à l'état
naturel. Ce qui est important, c'est que la nature soit préservée
par l'ouvrage de l'homme et que l'ouvrage de l'homme serve les besoins
réels de la société.
M. St-Roch: Mais je pense qu'on arrive à choisir. Il va
falloir en garder une au moins pour nos descendants, une rivière
naturelle, qu'on soit capable de pagayer et de dire: Voici ce qu'était
une grande rivière sauvage.
M. Saint-Pierre: Mais qu'est-ce que vous avez à l'esprit?
De dire que, la Moisie, c'est tellement important pour la pêche, qu'il ne
faut pas y toucher ou... C'est dans ce type-là?
M. St-Roch: Oui, regardez une rivière comme... Vous
mentionnez la Moisie, ou l'Ashuapmushuan, de dire: Bon, bien ça, c'est
des rivières où, pour le moment, on met un moratoire de 40
à 50 ans et on laissera aussi... pour donner la chance aussi à
nos petits-enfants et arrière-petits-enfants de se casser la tête,
eux autres aussi.
Dernière question, si vous me permettez, M. le Président,
c'est au niveau de la recherche et du développement. Moi, je suis un des
partisans qui pensent que 2 % pour horizon 2000, ce n'est pas suffisant, qu'on
devrait faire un effort supplémentaire pour avoir au moins 3 %, parce
que hydro-québec est définitivement le véhicule du
québec au niveau de la recherche et du développement. si on
ôte ça, on arrive avec des poussières. alors, quand on
regarde dans tous les domaines, que ce soit au niveau de l'efficacité
énergétique, que ce soit au niveau des
électrotechnologies, on devrait aller de l'avant et, quitte à se
serrer la ceinture un petit peu, miser sur le futur avec la recherche et le
développement. on devrait y souscrire... est-ce que vous souscrivez
à 3 %?
M. Saint-Pierre: Là, c'est un peu comme les 10 %
tantôt, il n'y a pas de chiffre magique. À mon sens, il faut
être prudent quand on prend des exemples au Japon et qu'on dit: II
faudrait faire exactement la même chose. Si vous êtes dans le
secteur pharmaceutique, si vous êtes dans les secteurs à
très haute technologie où les besoins du marché changent
rapidement, des fois, on est obligé d'en dépenser beaucoup plus
que 3 %. moi, personnellement, je trouve d'ailleurs, je pense que les
témoignages le montrent qu'hydro-québec est une des
sociétés au monde, dans ce type d'industrie là,
c'est-à-dire un service d'utilité publique, qui dépense le
plus pour la recherche. ça a aidé beaucoup.
Je pense qu'il faut être prudent, vous savez, de ne pas pousser
des dollars à la recherche, mais, plutôt, de répondre aux
besoins d'un marché. Qu'est-ce que la technologie peut faire pour mieux
nous permettre de répondre aux besoins du marché? Et non pas de
dire aux chercheurs: Voici des milliards, et essayez de trouver des... Il y a
une vieille expression qui dit qu'en donnant des milliards à la
recherche, d'une façon inconsidérée, vous savez, on peut
trouver des solutions à des problè-
mes qui n'existent pas.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup, M.
Saint-Pierre.
Au nom des membres de la commission, encore une fois, merci de votre
présentation. Nous allons suspendre deux minutes pour permettre à
la Banque Royale du Canada de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 58)
(Reprise à 12 h 2)
Le Président (M. Audet): Nous reprenons nos travaux. Nous
recevons maintenant la Banque Royale du Canada. Alors, messieurs, au nom des
membres de la commission, on vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Je vous
explique brièvement nos règles de procédure. Vous disposez
d'une vingtaine de minutes pour nous faire part de votre exposé.
Ensuite, suivra une période d'échanges qui durera
approximativement une quarantaine de minutes.
Avant de débuter votre présentation, je vous invite
à vous présenter, vous identifier pour fins de transcription du
Journal des débats. Allez-y.
Banque Royale du Canada
M. Turcotte (Michel L.): Merci, M. le Président.
Alors, mon nom est Michel Turcotte. Je suis le premier
vice-président de la Banque au Québec. Je suis accompagné
ce matin de trois collègues: Marc-André Élie, à ma
droite immédiate, qui est le vice-président administrateur de RBC
Dominion Securities et M. Michel Duchesne, qui est également
vice-président de la même firme, et, à ma gauche,
Benoît Durocher, qui est économiste régional à la
Banque.
Notre groupe est honoré de présenter à votre
commission son analyse de la proposition du plan de développement
d'Hydro-Québec. Nous pensons que ce forum et le processus
d'évaluation triennal auquel est soumis Hydro-Québec s'inscrivent
très bien dans le contexte actuel des profonds changements
économiques.
C'est sous cet angle que nous souhaitons contribuer aux discussions
aujourd'hui. Nous désirons porter à l'attention de la commission
quelques tendances qui se dessinent et qui, selon nous, doivent être
considérées dans tout exercice de planification à long
terme. Nous limiterons notre analyse de la proposition de plan de
développement strictement à ses dimensions économiques et
financières. De la proposition de plan de développement, nous
avons retenu deux objectifs d'orientation qu'entend poursuivre
Hydro-Québec.
D'abord, Hydro entend limiter en moyenne les augmentations de tarifs au
taux d'inflation et, ensuite, Hydro entend maintenir et améliorer sa
santé financière, tout en préservant la qualité de
son service et la fiabilité de son réseau. Dans son ensemble, le
scénario économi- que présenté par
hydro-québec nous apparaît très bien conçu. la
croissance économique annuelle moyenne de 3 % sur la durée de
l'horizon de planification prévue par hydro-québec se situe dans
la moyenne des prévisions et, selon nous, ne pèche ni par
optimisme, ni par pessimisme.
La croissance économique est une variable clé qui sert
à la détermination de la demande d'énergie, donc à
la planification des équipements de production. Comme la plupart des
prévisionnistes, ceux d'Hydro-Québec entrevoient une conjoncture
de marché du travail particulièrement difficile. On peut donc
s'attendre à ce que le déséquilibre qui existe
actuellement entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre ne disparaisse pas
rapidement.
Cet aspect du scénario revêt une importance
particulière lorsque l'on discute des coûts de production. En
effet, il est difficile, dans le contexte actuel, d'imaginer une augmentation
marquée des coûts salariaux qui représentent, pour
Hydro-Québec, plus de 25 % de ses frais d'exploitation. Dans un contexte
de faible inflation, le contrôle des coûts constitue, à
notre avis, la pierre angulaire de l'exercice de planification. Les entreprises
ne pourront plus recourir à des augmentations automatiques de prix pour
masquer l'inefficacité dans un mode de production. à cet
égard, la prévision du taux d'inflation joue un rôle
prépondérant. hydro-québec entrevoit une évolution
annuelle moyenne des prix de l'ordre de 3,5 % sur l'horizon de planification.
étant donné les objectifs de politique monétaire
énoncés par la banque du canada, nous sommes portés
à croire plutôt que le taux d'inflation sera de l'ordre de 2 %
à 2,5 % durant cette période. les objectifs de la banque centrale
sont en effet d'atteindre un taux annuel d'inflation de 2,5 % en juin 1994 et
de 2 % en décembre 1995, et nous pensons qu'une fois ces objectifs
atteints la banque du canada voudra préserver cet acquis.
L'écart entre nos prévisions de taux d'inflation n'est pas
sans conséquence. En effet, dans le cadre de l'exercice de
planification, une surestimation de l'évolution des prix aurait tendance
à faire gonfler les revenus et les coûts prévisionnels. Or,
les engagements en ressources humaines, matérielles et
financières arrêtés en fonction d'une plus forte inflation
deviennent difficiles à modifier. L'ajustement des revenus nous semble,
par contre, plus rapide, compte tenu des objectifs de tarification
présentés par Hydro-Québec. La pression à la hausse
sur les coûts qui pourrait en résulter risquerait de nuire
à l'atteinte de l'objectif de rentabilité qu'Hydro-Québec
entend aussi poursuivre. Or, il n'est pas souhaitable d'affaiblir la
santé financière d'Hydro-Québec qui risquerait une
décote de son crédit et, donc, une augmentation de ses
coûts de financement.
Par ailleurs, limiter les augmentations tarifaires au taux d'inflation
préserverait, au niveau industriel, l'avantage dont jouissent les
entreprises québécoises qui utilisent l'électricité
comme facteur de production. L'avantage, selon nous, de planifier en fonction
d'une inflation plus faible est d'instaurer une discipline dans le
contrôle des coûts. Dans le nouveau contexte
économique caractérisé par une concurrence internationale
accrue et par un fardeau d'endettement élevé, aussi bien pour les
administrations publiques que pour les entreprises et même les
ménages québécois et canadiens, le contrôle des
coûts constitue, à notre avis, la clé du succès.
Qu'en est-il maintenant des retombées économiques des
activités d'Hydro-Québec telles que proposées dans le
plan? Nous estimons que chaque milliard investi par Hydro-Québec
contribuera à augmenter la croissance économique entre 0,6 % et
0,9 %. Les effets de ces investissements sont donc importants. Par ailleurs,
dans le contexte actuel, est prévu le taux de chômage
élevé, et ceci est particulièrement vrai dans le secteur
de la construction non résidentielle au Québec, pour lequel nous
prévoyons une période creuse au cours des prochaines
années. La réalisation des projets de construction
d'Hydro-Québec permettrait une utilisation productive d'un type de
main-d'oeuvre qui est présentement sous-utilisée. Et, comme j'en
suis sûr, M. Saint-Pierre a dû le mentionner, l'important secteur
du génie-conseil québécois y trouverait également
son compte.
Portons maintenant l'attention sur la prévision de la demande
d'énergie. Les projets d'investissement de la société
d'État sont arrêtés en fonction des besoins
énergétiques à satisfaire. La demande d'énergie est
fonction de plusieurs variables: de la croissance économique, du prix
des formes alternatives d'énergie et, fait relativement nouveau dans les
pays industrialisés, des efforts consacrés à la gestion de
la demande, aux économies d'énergie. Il est intéressant de
noter qu'Hydro-Québec mise sur des augmentations réelles du prix
du pétrole et du gaz naturel. Nous sommes d'accord quant aux
perspectives des prix du gaz naturel, mais nous croyons que le prix du baril de
pétrole suivra tout au plus le taux d'inflation. (12 h 10)
Étant donné ce scénario, les avantages d'une
substitution énergétique de l'électricité en faveur
du pétrole ou du gaz sont donc diminués et, pour des fins de
planification, cette position nous apparaît prudente. En effet, dans
l'hypothèse d'une appréciation du prix relatif des sources
d'énergie concurrentielles, la demande d'électricité
augmente par effet de substitution. Et cette demande accrue se traduirait donc
par la construction d'équipements permettant la satisfaction de ces
besoins additionnels.
Dans le cas contraire, c'est-à-dire dans l'hypothèse d'une
sous-estimation du prix du pétrole et du gaz, la demande
d'électricité pourrait, elle aussi, être
sous-estimée, ce qui pourrait résulter en une pénurie
d'électricité et une situation de sous-équipement. On ne
pourrait résorber cette pénurie qu'en ayant recours à des
augmentations de tarifs, à de coûteuses importations ou à
la mise en service de centrales d'appoint dont le coût de production est
plus élevé que celui des centrales hydroélectriques
traditionnelles. Donc, entre une sous-estimation et une surestimation du prix
du pétrole et du . gaz naturel, cette dernière situation nous
apparaît la moins dommageable et la plus souple dans le cadre du plan de
développement que l'on commente aujourd'hui.
Si vous me le permettez, M. le Président, à ce stade, je
demanderai à mon collègue, Marc-André Élie, de chez
RBC Dominion valeurs mobilières, de commenter le volet financier de
notre mémoire.
M. Élie (Marc-André): Merci, M. Turcotte.
Examinons maintenant le volet financier. HydroQuébec s'est
donné les objectifs suivants: un taux de couverture des
intérêts supérieur à une fois; un taux de
capitalisation d'au moins 25 %; un taux d'autofinancement d'au moins 30 %; un
rendement de l'avoir propre au moins égal au coût de la dette. Ces
objectifs sont louables et devraient permettre à la
société d'État d'écouler ses titres sur les
marchés canadien et internationaux, car ses besoins financiers, on le
sait, sont très importants. Nous estimons que les besoins financiers
d'Hydro-Québec se situeront entre 4 300 000 000 $ et 4 600 000 000 $ en
moyenne, chaque année, sur l'horizon 1993 à 2002, soit un peu
plus de 37 % du total des besoins en financement de tout le secteur public
québécois. Pour que la société d'État puisse
satisfaire à ses besoins financiers, nous sommes d'avis qu'elle devra
maintenir sa cote de crédit au moins égale à son niveau
actuel, soit AA-, selon Standard & Poor's, ou AA3, selon Moody's
Investors.
Toute amélioration de la cote de crédit serait cependant
très souhaitable. La cote de crédit actuelle
d'Hydro-Québec constitue un plancher au-dessous duquel les plus
importants gestionnaires de portefeuilles internationaux pourraient refuser
d'acheter des titres étrangers. De plus, meilleure est la cote, moindres
sont les coûts de financement que doit supporter l'émetteur.
Le Québec a une longue tradition d'innovation dans le financement
de ses organismes publics. En effet, les soubresauts qui ont souvent
agité les marchés de capitaux ont forcé les gestionnaires
financiers de l'État québécois à faire preuve
d'imagination et de perspicacité pour mener à bien leurs
programmes d'emprunt. Le Trésor du Québec et Hydro-Québec
ont d'ailleurs ouvert la voie aux autres emprunteurs canadiens dans le recours
aux marchés étrangers et ont su gagner, au fil des ans, la
confiance de nombreux grands portefeuillistes internationaux. nonobstant ces
initiatives du secteur public québécois, il faut garder à
l'esprit que l'intérêt des marchés internationaux pour les
titres québécois et canadiens puisse se tarir. il nous semble
donc approprié qu'hydro-québec et le trésor
québécois maintiennent, voire améliorent leur cote de
crédit et qu'ils structurent leurs programmes d'investissement afin de
pouvoir réagir rapidement, si l'offre de capitaux diminuait et devenait
trop onéreuse pour quelque raison que ce soit. en augmentant la marge
d'autofinancement de 5 %, hydroquébec aurait moins recours aux
marchés de capitaux et réduirait donc sa
vulnérabilité à la volatilité des marchés
financiers.
Maintenant, j'aimerais repasser la parole.
M. Turcotte: En conclusion, mesdames et messieurs, nous pensons
que le plan s'appuie sur des hypothèses réalistes qui offrent
suffisamment de souplesse en cas d'imprévus. Nous notons avec
intérêt la volonté d'Hydro-Québec d'accroître
sa productivité et de contrôler ses coûts de production.
Ceci est d'autant plus important que l'environnement économique de cette
fin de siècle sera marqué par un taux d'inflation beaucoup plus
bas que celui auquel nous nous sommes habitués au cours des
dernières années. Seules les entreprises qui contrôleront
leurs coûts de production réussiront. Une gestion plus
serrée de ses coûts conduira à une meilleure
rentabilité et probablement à une amélioration de la cote
de crédit, tenant compte des importants besoins de financement. Cela,
à notre sens, serait tout à fait souhaitable.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Audet): Merci, messieurs. Mme la ministre
de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Alors, M. Turcotte, M. Élie, messieurs,
j'aimerais vous exprimer mes remerciements de vous présenter ici,
à cette commission parlementaire, et de nous donner vos avis sur les
implications économiques et financières des orientations à
long terme qui sont proposées par Hydro-Québec.
À la page 32 de votre mémoire, vous mentionnez que la
société d'État doit aussi se garder une bonne marge de
manoeuvre pour avoir le choix du moment et le choix des moyens, par le biais de
différents instruments financiers, lorsqu'elle souhaitera faire appel
aux marchés internationaux des capitaux. Pourriez-vous élaborer
davantage sur les marges de manoeuvre financières qu'Hydro-Québec
devrait posséder pour pouvoir maintenir un accès facile aux
marchés internationaux des capitaux?
M. Turcotte: Je pense qu'il s'agit clairement d'une question qui
relève de mes deux collègues, Michel ou...
Une voix: Michel, veux-tu répondre?
M. Duchesne (Michel): Oui, O.K., parfait. Je pense que ce qu'on
essaie de mentionner par cette phrase-là, c'est essentiellement...
D'abord, Hydro-Québec fait une très, très bonne gestion
financière de ses choses. Elle a une réputation absolument sans
tache sur les marchés financiers internationaux, dans quelque capitale
financière que ce soit. Elle a la réputation de faire une gestion
très conservatrice de ses finances. Alors, si on la compare, mettons,
à Hydro-Ontario et ces choses-là, sur le plan des ratios
importants, HydroQuébec se compare très, très
avantageusement, comme on peut le voir dans notre document, de ce
côté-là.
Alors, je pense qu'on peut dire qu'Hydro a déjà une bonne
marge de manoeuvre qu'elle a accumulée, au fil des années, par sa
gestion conservatrice du point de vue financier. Mais, évidemment, on
est dans un monde en changement, et puis on est dans un monde où le
conservatisme financier est de rigueur de plus en plus et où les gens,
ayant tellement d'opportunités de placement à droite et à
gauche, évidemment, il faut qu'une histoire qu'on leur présente
soit absolument sans... je ne dirais pas sans tache, mais absolument d'une
tendance très, très saine et très, très pure.
Alors, nous, ce qu'on veut simplement mentionner là-dedans, c'est
qu'on encourage fortement Hydro à continuer dans sa tendance
conservatrice au point de vue de la gestion de ses ratios financiers, et puis,
évidemment, le gouvernement du Québec aussi, dans cette
tendance-là, parce que, dans un moment où les déficits de
tout le monde augmentent, et tout ça, c'est évidemment ceux qui
vont gérer de façon la plus serrée leurs finances qui vont
avoir accès aux marchés des capitaux, pour lesquels il y a une
grande compétition, au meilleur coût possible et aux meilleures
conditions possible,
Mme Bacon: Je vous réfère à la page 27 de
votre mémoire, et je ne citerai pas, là, je pense que vous allez
le regarder, sur les aspects financiers, toujours. Pourriez-vous
élaborer davantage sur l'élément de souplesse, en regard
des programmes d'investissement, que vous mentionnez dans votre suggestion?
Vous nous suggérez, là, de donner priorité, structurer des
programmes d'investissement de la façon la plus souple possible.
M. Élie: Je pense que ce qu'on veut soulever ici, c'est de
laisser à Hydro la facilité d'aller chercher les fonds lorsqu'ils
sont disponibles et lorsqu'on peut les générer au meilleur
coût possible. Et, pour ce faire, Hydro doit avoir un programme
d'investissement qui se prête à de tels phénomènes,
donc qui peuvent être accélérés, à certains
moments donnés, ou ralentis, à d'autres moments
donnés.
Mme Bacon: On sait que l'hydraulicité constitue,
évidemment, le principal risque financier qui est associé
à la filière hydroélectrique et, pour pallier ce
risque-là, Hydro-Québec propose la création d'un fonds de
stabilisation. Malgré que votre mémoire n'aborde pas ce
thème-là de fonds de stabilisation, moi, j'aimerais... Je vais
vous demander un avis, sans avoir à en payer les frais. J'aimerais
profiter de votre présence pour vous demander de commenter la
proposition d'Hydro-Qué-bec, qui nous propose vraiment la
création d'un fonds de stabilisation pour essayer de pallier les
années où l'hydraulicité sera très faible. (12 h
20)
M. Élie: Écoutez, notre étude n'a pas
porté sur cet élément-là. Par contre, je pense que
c'est un peu en relation avec ce qu'on vient de dire. C'est qu'Hydro veut se
donner un instrument de plus de flexibilité pour approcher ou non les
marchés financiers.
Mme Bacon: Est-ce que vous aimeriez ajouter, M. Turcotte,
là-dessus?
M. Turcotte: Pas vraiment. En fait, je pense
que... Marc-André a indiqué, dès le début,
que ce n'était pas un élément qu'on avait retenu
particulièrement. Mais l'élément de souplesse est
tellement important, tenant compte de la magnitude, de l'ampleur des besoins
qui sont considérés, non seulement par HydroQuébec, mais
par l'ensemble de l'État québécois... Et, je l'indiquais
tantôt, il est absolument important de garder toutes les portes ouvertes.
Mais, au cas où certaines portes ne seraient pas tout à fait
ouvertes, il ne m'apparaît pas illogique d'avoir un fonds qui fournirait
un peu le coussin requis pendant cette période où il faut
attendre pour que le marché soit plus favorable, peut-être.
Mme Bacon: vous estimez que chaque milliard investi par
hydro-québec majore de 0,6 % à 0,9 % le produit intérieur
brut du québec. il s'agirait d'une stimulation importante pour
l'économie québécoise. est-ce que votre évaluation
s'applique également pour les investissements en efficacité
énergétique ou si elle s'applique seulement aux investissements
en production de transport-distribution d'électricité?
M. Durocher (Benoît): je pense que l'évaluation
qu'on en a fait, à la page... je ne sais plus trop à quelle page
du mémoire, où on réfère à 0,6 % ou 0,9 % de
croissance du produit intérieur brut, c'est une évaluation qui
vise essentiellement les investissements directs, donc la construction de
l'équipement ou l'entretien des équipements existants. par
contre, il est indéniable que les investissements que la
société d'état va consentir en amélioration de
l'efficacité énergétique vont contribuer à enrichir
l'ensemble de la société québécoise, en permettant
une utilisation efficace des ressources dont la société
québécoise dispose.
Donc, c'est certain également que les investissements en
efficacité énergétique vont contribuer à
améliorer l'ensemble de la capacité concurrentielle ou de la
situation économique québécoise...
Mme Bacon: D'accord.
M. Durocher: ...mais on ne les a pas chiffrés en tant que
tel.
Mme Bacon: À la page 8, vous mentionnez: Mais si
pénibles que soient les mesures à prendre pour parvenir à
améliorer la productivité, il ne faut pas perdre de vue que ces
efforts ne porteront que sur le quart des composantes des coûts de
production, à savoir les coûts variables. Aussi pourrait-il fort
bien se révéler nécessaire d'accroître davantage la
productivité en adoptant des mesures encore plus draconiennes.
Est-ce que vous pourriez être plus explicite sur ces mesures plus
draconiennes qu'Hydro-Québec pourrait adopter pour améliorer
encore davantage sa productivité?
M. Durocher: Si je peux me permettre. Tout le mémoire,
comme vous l'avez sans doute constaté à la lecture, s'articule
autour d'une gestion efficace, la plus efficace possible de l'activité
de production d'hydroélectricité. Ça inclut, en fait, et,
en partie seulement, comme on le dit, les ressources humaines, ou, enfin, ce
qu'on appelle... ce qui est lié aux frais d'exploitation. Comme on l'a
fait dans l'analyse financière, ça touche également
à la gestion efficace du capital, donc bien doser ses besoins en
capitaux et essayer de se financer à moindre coût, encore une fois
pour maintenir le coût du capital à un niveau très,
très faible, pour pouvoir espérer dégager une marge
bénéficiaire la plus substantielle possible dans le cadre d'un
contexte de très faible inflation.
Donc, les augmentations de productivité auxquelles on fait
référence touchent non seulement la main-d'oeuvre, touchent
également le capital, touchent également la manière dont
on va vouloir construire les différents équipements de production
prévus.
Mme Bacon: II y a une question qu'on a posée à
plusieurs financiers. Est-ce qu'Hydro-Québec a les moyens de son plan de
développement?
Une voix: Oui... Une voix: Vas-y.
M. Élie: Je pense que nos conclusions sont claires
à ce niveau-là. Oui, Hydro-Québec a les moyens de son plan
de développement. Ce qui nous préoccupe le plus, nous, c'est
évidemment que l'on maintienne la cote de crédit
d'Hydro-Québec au moment où on se parle. Mais je pense que, sur
le plan économique, peut-être que mes confrères
peuvent...
M. Turcotte: Si on regarde l'horizon de planification, c'est
sûr que c'est très long, et les conditions changeant aussi
rapidement qu'elles le font, ces années-ci, c'est difficile de planifier
à long terme. Et l'exercice triennal, je pense, est une bonne
façon de venir peut-être apporter les changements requis durant la
période de 10 ans. Mais, basé sur les données que l'on
voit là, basé sur notre connaissance d'Hydro-Québec, en
partant de certaines hypothèses économiques de croissance, on
croit que, oui, Hydro est en mesure de rencontrer ce plan.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
Je constate avec beaucoup de satisfaction que votre mémoire porte
un jugement fort positif sur des stratégies financières
économiques du Québec et de son secteur public. Je vous avoue
franchement que ça tranche nettement avec le rapport qui a
été rendu public pendant la dernière campagne
référendaire, particulièrement en ce qui concerne leur
politique d'accès aux
marchés étrangers pour réaliser les programmes
d'emprunt, parce que je lisais, à la page 24, entre autres...
Je vais les lire, parce que vous ne l'avez pas fait au niveau de votre
résumé. Je trouve que ça tranche tellement que ça
vaut la peine d'être dit au public québécois, ne serait-ce
que pour vous reprendre: «Le Québec a une longue tradition
d'innovation pour le financement de ses organismes publics», dites-vous.
«En effet, les soubresauts qui ont souvent agité les
marchés de capitaux ont forcé les gestionnaires financiers de
l'État québécois à faire preuve d'imagination et de
perspicacité pour mener à bien leurs programmes d'emprunt. Le
Trésor du Québec et Hydro-Québec ont d'ailleurs ouvert la
voie aux autres emprunteurs canadiens dans le recours aux marchés
étrangers et ont su gagner au fil des ans la confiance et la
fidélité de nombreux grands portefeuillis-tes
internationaux.» Merci.
Page 25. «Le secteur public québécois se distingue
aussi par la variété des titres qu'il peut offrir aux
investisseurs individuels et institutionnels». Merci. «Grâce
à cet impressionnant effort de diversification des sources de capitaux,
le Québec et la société d'État n'ont jamais
été dans l'impossibilité de réaliser leurs
programmes d'emprunt respectifs. À notre avis, cette diversification a
permis au secteur public québécois de se financer au meilleur
coût possible.» Ça tranche, merci!
J'aurais une question, cependant. Maintenant, j'ai trois questions
à vous poser. Je voulais noter le changement, et vous disiez, dans votre
exposé... Je crois que c'est monsieur à votre droite qui disait:
On est dans un monde de changement. Je le constate. Vous insistez, à la
page 1, fortement sur la nécessité d'une rigoureuse discipline
opérationnelle et financière pour réaliser le
développement. C'est la dernier paragraphe de la page 1.
Est-ce que vous pourriez m'expliquer pourquoi cette discipline ne porte
que sur la productivité du personnel d'exploitation c'est surtout
aux pages 4 et 31 qu'on le retrouve, si vous voulez faire les liens, là
pour le succès de laquelle vous suggérez même des
mesures encore plus draconiennes que celles qui sont aujourd'hui
envisagées? Vous dites ça à la page 8, alors qu'il n'y a
pas un mot sur le prix qu'on est prêts à payer pour acheter
l'électricité au secteur privé ni sur les rabais consentis
aux alumineries. Serait-il économiquement plus rentable et socialement
plus correct de supprimer des emplois que de laisser les marchés
déterminer seuls le prix de l'électricité?
M. Turcotte: Écoutez, je vais demander à mon
collègue, Benoît, d'élaborer sur ce que je vais dire dans
un instant. Mais, si vous permettez, d'abord, quand on parle de
productivité, on ne parle pas strictement du contrôle des
coûts des ressources humaines.
M. Chevrette: Bien oui!
M. Turcotte: L'amélioration de la productivité,
là, dans notre esprit, ça couvre tous les éléments,
comme tantôt on le disait. Même la partie qui touche à la
génération de capital, si vous voulez. Tout doit être mis
en oeuvre à l'intérieur du plan qui est suggéré
là pour contrôler, si vous voulez, les coûts,
contrôler les dépenses et s'assurer que la productivité...
et ça devient de plus en plus important quand on se dit qu'on va vivre
dans une période où la croissance économique va être
moins élevée que dans le passé et où les
dépenses vont généralement être moins fortes, donc
des revenus moins élevés.
Si on s'attend à ce que la croissance des revenus soit moins
forte dans une période de temps, ça devient primordial qu'on soit
capable de contrôler ces coûts. C'est dans ce contexte-là
et on a peut-être donné des exemples ou différents
exemples dans le mémoire mais c'est dans ce contexte-là
qu'on pense que l'amélioration de la productivité est
essentielle. Et ça se fait. Il n'y a pas 12 000 manières de le
faire. Il faut ou augmenter ses revenus, ou réduire ses dépenses
relativement parlant, ou faire un petit peu des deux.
Tu veux rajouter quelque chose? (12 h 30)
M. Durocher: Pour rajouter à ce que M. Turcotte a dit,
effectivement, il y a les deux façons: augmenter les revenus... Mais on
constate que, dans un environnement ou un contexte de faible inflation, la
possibilité d'augmenter ses revenus de façon spectaculaire ou
instantanée, comme c'était le cas, par exemple, dans les
années de forte inflation, au début et au milieu des
années quatre-vingt. Cette possibilité-là semble de plus
en plus lointaine, c'est-à-dire qu'étant donné la
politique de la banque centrale de maintenir l'inflation à un taux
très bas pour l'horizon prévisible, étant donné ce
qui est annoncé, on pense que l'augmentation de revenus très
rapide et, surtout, si on veut limiter les augmentations de tarifs à
l'inflation, ce n'est pas la meilleure façon d'augmenter ses
revenus.
Donc, les gains pour préserver la marge
bénéficiaire, pour rester toujours dans le contexte de
productivité accrue, doivent se faire du côté des
coûts. On l'a dit tantôt, il n'y a pas seulement les frais
d'exploitation ou les frais de main-d'oeuvre. Il y a également les frais
de financement. Et qui dit augmenter sa rentabilité dit avoir la
possibilité de réduire, également, ses coûts de
financement.
Maintenant, Hydro-Québec n'est pas la seule entreprise,
évidemment, à évoluer dans le nouveau contexte qu'on
connaît. Il y a plusieurs entreprises, enfin à peu près
toute l'économie nord-américaine, dans son ensemble, vise
à accroître sa productivité. Ça se fait par des
investissements en machines et outillage qui rendent les entreprises plus
performantes dans leurs moyens de production. Mais ça se fait
également, malheureusement, par des déplacements de
main-d'oeuvre. Donc, c'est un ensemble de facteurs qui doit contribuer à
rendre l'économie plus efficace. Ou une autre façon de le dire,
finalement, c'est de faire en sorte que l'économie gaspille moins de
ressources, et c'est ça qu'on est en train de... Et c'est
l'environnement économique dans lequel Hydro-Québec va être
appelée à évoluer au cours des prochaines années,
selon nous.
M. Chevrette: À la page 7, vous émettez certaines
réserves sur la politique d'achats préférentiels
d'Hy-dro-Québec qui favorise des entreprises québécoises,
naturellement. Est-ce que, selon vous, le même principe de marché
libre que vous favorisez, vous émettriez les mêmes réserves
en ce qui concerne les producteurs privés, par exemple, les
alumineries?
M. Turcotte: Moi, je pense qu'il s'agit d'une question
d'équilibre. Il y a certains avantages inhérents à notre
richesse hydroélectrique et à notre développement
hydroélectrique au Québec. Il s'agit d'en prendre avantage,
j'imagine, de la façon la plus pertinente possible, au moment où
ça se produit. Et ça a servi. On dit, dans notre mémoire,
que les retombées qui découlent des investissements
d'Hydro-Québec et des agissements d'Hydro-Québec, en vertu de sa
taille, sont très importantes au Québec et, si ça inclut
certaines négociations ou certaines transactions particulières,
eh bien, qu'il en soit ainsi, en autant que ça ne crée pas de
problèmes, d'autre part, que ça ne nous cause pas des
problèmes vis-à-vis de quelques tribunaux de concurrence
internationale, par exemple. Mais, en général, je pense qu'il
faut essayer de maintenir le meilleur équilibre.
Tu veux ajouter quelque chose, rapidement?
M. Durocher: Bien, peut-être juste dire qu'à la
lecture de la proposition de plan de développement d'Hydro-Québec
on note quand même une volonté, premièrement, d'essayer de
diminuer les différences ou, enfin, de diminuer F interfinancement qui
existe entre les différentes catégories d'abonnés.
Évidemment, ça ne se fera pas du jour au lendemain, mais il y a
des plans qui veulent que cet interfinancement-là soit réduit au
cours de l'horizon de développement. Il y a également, et on y
fait allusion également dans la proposition de plan de
développement, une volonté qui semble être exprimée
de rendre le prix de l'électricité plus proche de ses coûts
de production pour, en fin de compte, envoyer un signal un peu plus clair quant
à l'utilisation de la ressource électrique.
M. Chevrette: Mais ça fait partie de la santé
financière, ça, par exemple, des engagements d'achat
d'hydroélectricité par la cogénération par exemple,
à 0,043 $ ou 0,044 $, présentement, du kilowattheure dans
l'entreprise privée. Ça fait partie d'une analyse. Je suis
surpris que ces projections-là, dans le plan de développement
d'Hydro, ne fassent pas partie de vos préoccupations comme banquiers.
Parce que vous dites que ça prend une grande productivité, mais
vous n'analysez pas la partie obligation que se crée Hydro-Québec
vis-à-vis de l'achat de l'électricité du privé et
vis-à-vis également des résultats de la signature de
contrats secrets, par exemple, qui ont une influence énorme sur la
santé financière d'Hydro-Québec, puisque la santé
financière est affectée par des pertes de 250 000 000 $, 300 000
000 $ par année, et vous ne faites pas cette analyse-là.
M. Durocher: Bien, il faut voir. Chaque contrat est particulier.
Je crois que les contrats auxquels vous faites référence ont, de
toute façon, été réouverts, si je ne m'abuse, en
particulier dans un cas, et puis ça a été modifié.
Il y a aussi le fait que... Je pense que vous faites allusion à la
cogénération, j'imagine, là. Cet aspect-là
d'Hydro-Québec, il y a quand même, dans la proposition de plan de
développement, un certain volume de cogénération. Je ne
pourrais pas le... 760 MW ou quelque chose comme ça, là. Et puis,
juste récemment, d'ailleurs, Hydro-Québec signait, avec une
pape-tière du Témiscamingue, je crois, un achat d'énergie,
la Tembec, je crois, je ne suis pas certain, là.
Donc, à ce niveau-là, Hydro-Québec étudie,
évidemment, chacun des projets cas par cas, et puis il y va de la
santé financière d'Hydro-Québec comme il y va
également de la santé de l'économie du Québec. Mais
Hydro-Québec, dans une certaine mesure, doit veiller à sa propre
santé financière. Et, si l'achat de cogénération
n'est pas motivé par, par exemple, la demande, si Hydro-Québec se
retrouve avec de l'énergie qu'elle ne pourra pas revendre à court
terme, à ce moment-là, il y a peut-être un arbitrage
à faire. Je ne dis pas que tous les projets de
cogénération sont mauvais. Je ne dis pas non plus que tous les
projets de cogénération sont nécessairement bons.
Le Président (M. Audet): M. le député...
M. Chevrette: Mais, si vous n'avez pas pu faire l'analyse de ce
volet-là...
Le Président (M. Audet): ...vous pourrez revenir, M. le
député de Joliette. Il vous restera encore une dizaine de
minutes.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Audet): M. le député des
Îles-de-la-Madeleine.
M. Farrah: Oui. Merci, M. le Président.
Bonjour, messieurs. Dans les États du nord-est des
États-Unis, les autorités réglementaires des services
d'utilité publique recourent à la gestion active de la demande et
à la cogénération pour à la fois économiser
l'énergie et limiter les émissions polluantes. Or, à la
page 17 de votre mémoire, votre mémoire mentionne que ces
programmes étaient moins efficaces que prévu. «Une
situation de pénurie pourrait se développer et faire
renaître l'intérêt pour l'électricité du
Québec d'ici quelques années.»
Alors, ma question est la suivante: Disposez-vous d'informations ou
d'indications à cet effet?
M. Turcotte: En principe, je vais vous dire non, mais je vais
vérifier avec mon ami, ici, au cas où. Mais je ne crois pas.
C'est tout simplement une conclusion à laquelle on vient. La situation
là-bas est de toute évidence très différence de ce
qu'elle est ici. Ils n'ont pas
les mêmes ressources que nous.
M. Durocher: J'écoutais, tout à l'heure, M.
Saint-Pierre dire que, dans le cas d'une reprise économique qui serait
plus vigoureuse que prévu dans les États de la
Nouvelle-Angleterre, où il y aurait possiblement pénurie
d'électricité, ça rendrait ce marché-là
attrayant pour l'énergie québécoise, par exemple.
Maintenant, est-ce qu'on a de l'information privilégiée? Non, on
n'en a pas. Seulement dire que l'économie de la Nouvelle-Angleterre a
été très durement touchée par la récession,
ce qui a, évidemment, durement touché sa demande
d'énergie. Maintenant, il n'est pas exclu qu'avec les nouvelles
conditions qui semblent émerger sur le marché
nord-américain ce coin-là des États-Unis connaisse une
croissance assez forte pour générer une demande
d'électricité ou d'énergie excédentaire.
M. Farrah: Donc, c'est seulement une perception. Vous n'avez pas
des éléments...
M. Durocher: Bien, c'est une perception générale.
On n'a pas d'information particulière ou privilégiée,
comme on dit.
M. Turcotte: C'est une hypothèse, fondamentalement. Et nos
commentaires se sont limités à ce que l'on a retrouvé dans
le plan d'Hydro-Québec, à comparer, si vous voulez, nos bases,
nos hypothèses de croissance. C'est sûr que, si la croissance
était beaucoup plus forte que ce qu'eux prévoient et ce que nous
prévoyons, effectivement, ce serait très différent. Et,
à ce moment-là, ça voudrait dire que la revue triennale
deviendrait encore plus importante, en fait, qu'elle ne l'est
présentement. Mais tout semble pointer, en autant qu'on est
concerné, vers un taux de croissance plus limité, non seulement
chez nous, mais aussi...
M. Farrah: À la page 12 de votre mémoire, vous
exprimez une réserve à propos de l'évolution du coût
du gaz naturel telle qu'anticipée par Hydro-Québec.
Pour-riez-vous expliquer l'écart entre votre prévision et celle
d'Hydro-Québec?
M. Turcotte: Bien, en ce qui a trait au gaz naturel, je pense
qu'on est à peu près sur le... On pense à peu près
de la même façon. En ce qui a trait au pétrole, au prix du
pétrole, Hydro suggère une augmentation réelle dans le
prix du pétrole au cours de la période de l'horizon de
planification. Nous, on croit que le prix du pétrole ne variera pas
beaucoup plus que le taux d'inflation durant cette même période de
temps là. Quant au gaz, on pense de la même façon.
M. Farrah: Pour revenir au niveau des exportations, j'aimerais
vous entendre sur la publicité négative qui est faite aux
États-Unis à l'égard d'Hydro-Québec et du
développement hydroélectrique du Québec. Par vos contacts
au niveau financier, j'imagine que vous avez des contacts aussi avec des
collègues américains. Est-ce que vous pourriez nous indiquer, si
vous le savez, évidemment, quelle est la perception de ces
gens-là, dans votre domaine spécifique, eu égard au
développement hydroélectrique ici, au Québec? (12 h
40)
M. Turcotte: Je pense que la partie que l'on connaît un peu
mieux, là, c'est la réputation, si vous voulez,
d'Hydro-Québec comme gestionnaire financier ou la réputation
financière d'Hydro-Québec, et, comme mes collègues vous
l'ont indiqué tantôt, elle est tout à fait de premier
ordre.
M. Elie: Je pense que ce que je pourrais rajouter à
ça, c'est évident que ces campagnes publicitaires là ne
sont pas les bienvenues de quelque façon que ce soit, surtout avec le
genre d'idées et le genre d'idées préconçues ou mal
conçues qu'elles véhiculent. Mais je pense qu'il est fondamental
de retenir que ces idées peuvent avoir un impact sur la très
«fashionable» Park Avenue à New York, mais beaucoup moins
à Wall Street, où les gens aiment mieux voir des ratios
financiers solides et où les gens connaissent Hydro. Donc, c'est
négatif, c'est évident, mais ce n'est pas fondamental quant aux
possibilités de financement d'Hydro-Québec.
M. Farrah: Une dernière question, M. le Président.
Sur le plan du financement, vous indiquez que les besoins annuels d'emprunt
prévus pour l'ensemble du secteur public québécois
s'établiront entre 10 500 000 000 $ et 12 200 000 000 $ d'ici l'an 2002.
Selon votre expertise dans le domaine, les marchés financiers sont-ils
en mesure de satisfaire les besoins de fonds prévus pour l'ensemble du
secteur public québécois dans les 10 prochaines
années?
M. Duchesne: Je pense que l'expérience a prouvé...
D'abord, ça fait plusieurs années que le secteur public
québécois, en général, pendant la période de
1987 à 1991, mettons, emprunte environ 10 000 000 000 $ par
année, et puis sans problème, avec succès. Il y a
suffisamment de fonds disponibles sur les marchés étrangers et
aussi à piger dans l'épargne canadienne pour rencontrer ces
besoins-là. On n'a pas d'inquiétude de ce
côté-là.
Mais, comme on l'indique à différentes reprises dans le
mémoire, effectivement, c'est pour ça qu'on pense que c'est
crucial que le gouvernement du Québec et les sociétés
d'État qu'il contrôle maintiennent une rigueur au point de vue de
la gestion financière qui soit absolument sans reproche, afin de
conserver cet accès privilégié qu'ils ont eu
jusqu'à présent sur les marchés financiers, à des
moments où les marchés financiers sont dans des périodes
extrêmement volatiles et où l'argent disponible pour le placement,
à un moment donné, se promène constamment d'une
catégorie d'actifs à une autre de façon à chercher
le meilleur rendement possible, compte tenu de la sécurité qui
est offerte. Alors, nous, de la façon dont on voit les
événements se dérouler, puis, évidemment, 10 ans,
c'est long, en tenant compte de la volatilité que les marchés
financiers vivent
à chaque jour, mais compte tenu de ce qu'on connaît
actuellement, puis de la façon dont on va évoluer et nos contacts
avec les gérants de portefeuilles à l'échelle
internationale, on n'a aucune crainte quant à la possibilité pour
le secteur québécois d'aller chercher cette somme d'argent sur
les marchés financiers.
M. Farrah: Dans la même foulée que le
député de Joliette, est-ce que, sur une perspective de 10 ans, le
climat politique peut déranger cela?
M. Duchesne: C'est sûr que c'est une incidence comme
plusieurs autres, à différents moments donnés.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le
député. M. le député de Joliette.
M. Chevrette: Ça ne me tente même plus de
questionner.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: J'aurais le goût d'en dire assez long que je
me retiens. À la page 10 de votre mémoire...
Une voix: ...
M. Chevrette: Pardon? Je suis aussi bien de me retenir. Mais ils
sont peut-être aussi mal à l'aise que moi. À la page 10,
vous parlez du secteur du génie civil qui traverse également une
période creuse et qui pourrait être utilisé à bon
escient, si vous me permettez l'expression, dans une conjoncture de
récession économique comme celle que nous traversons. Est-ce que
vous reliez ça à la préparation de projets
éventuels ou si... Parce que tel que donné là, c'est comme
si vous disiez: Donnez de l'ouvrage à ceux-là. Par contre, vous
leur demandez une grande rigueur de l'autre bord pour couper.
M. Turcotte: On part de l'utilisation de la main-d'oeuvre dans un
secteur que l'on considère comme étant sous-utilisé
présentement et dans un secteur où l'on ne voit pas de grande
croissance au cours des quelques prochaines années; c'est le secteur de
la construction non résidentielle. Je pense qu'il y a certainement une
sous-utilisation aussi. À quel degré? Je ne suis pas exactement
sûr, mais il y a certainement une sous-utilisation de ressources humaines
dans le secteur du génie-conseil également.
M. Durocher: Si vous me permettez. Ce à quoi on veut faire
allusion, ici, c'est à un concept économique qui fait
référence au prix relatif de différents biens ou services,
dans ce cas-ci la main-d'oeuvre de génie civil, et ce qu'on constate,
c'est qu'il y a présentement un déséquilibre important
entre l'offre de main-d'oeuvre, donc l'offre des ingénieurs, et la
demande pour ce type de main-d'oeuvre. Dans ce cas-ci, la réalisation
des projets d'Hydro-Québec n'entraînerait pas de surchauffe pour
ce type de main-d'oeuvre là, particulièrement, donc
n'augmenterait pas le prix relatif de cette main-d'oeuvre-là de la
même façon qu'elle ne l'augmenterait pas pour la main-d'oeuvre
moins spécialisée qui oeuvre dans le domaine pur de la
construction non résidentielle.
M. Chevrette: Mais, si vous aviez à faire une analyse
très critique dans le cadre d'une discipline
préférée, vous diriez à Hydro-Québec d'abord
d'utiliser son génie-conseil avant de faire appel au
génie-conseil de l'extérieur d'Hydro? En d'autres mots, est-ce
que vous conseilleriez à Hydro-Québec... Vous savez très
bien ce que je veux dire, de toute façon. Je suis aussi bien
d'arrêter.
M. Turcotte: Ça, c'est au gestionnaire
d'Hydro-Québec de décider, je crois. Ce n'est pas à nous
de décider. Mais, enfin, nous, on croit qu'il y a une certaine
sous-utilisation dans ce secteur-là, que l'utilisation causée ou
créée par une activité plus grande d'Hydro-Québec
pourrait se faire à des conditions qui seraient acceptables dans le
contexte actuel et qui seraient certainement plus favorables à la
rentabilité d'Hydro-Québec que ça pourrait l'être si
les conditions étaient différentes. C'est ça qu'on dit, en
fait.
M. Chevrette: Je vous remercie, messieurs.
Le Président (M. Audet): Merci. Terminé, M. le
député? Merci beaucoup.
M. le député de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
À la question de Mme la ministre «Est-ce
qu'Hy-dro-Québec a les moyens de son plan de
développement?» vous avez mentionné: Oui. À partir
de cette réponse, j'aimerais vous émettre ce postulat suivant:
À la lecture de votre mémoire, la première réserve,
c'est le taux d'inflation, que vous pensez que 3,5... Parce que ça peut
avoir un effet sur les revenus d'Hydro. Vous mentionnez comme réserve
aussi les cotes de crédit, qu'il faut être minutieux. Vous
mentionnez aussi l'importance de contrôler les coûts variables et
vous touchez aussi les coûts de financement.
Alors, quand je regarde juste au niveau des coûts de financement,
sur le plan qui nous est présenté, c'est là qu'on va
dépasser largement les coûts des intérêts, et les
autres variables associées au financement vont dépasser largement
les coûts d'inflation. Alors, quand je regarde ces
paramètres-là... Puis on va voir à deux niveaux de
gouvernement, maintenant, parce qu'on ne va pas s'isoler, on va avoir des
budgets, des crédits et des budgets qui vont être
déposés.
Mon collègue des Îles-de-la-Madeleine a touché celle
du Québec avec les emprunts, mais je vais rajouter d'autres variables
avec 64 000 000 000 $ que vous prévoyez, là, à peu
près, sur un contexte canadien, qu'on aura besoin aussi d'aller
chercher. Alors, si je mets tout ça en perspective, moi, j'ai le
goût de vous
demander: Est-ce que l'actionnaire d'Hydro-Québec,
c'est-à-dire nous, les citoyens et les citoyennes, on a les moyens de
tout ça, en 1993?
M. Turcotte: Écoutez, si on revient au document d'Hydro,
on pense que la planification d'Hydro est valide. On est d'accord avec à
peu près toutes les hypothèses qui sont faites dans leur plan.
À l'intérieur d'un corridor qui suggère une augmentation
limitée de la demande, une augmentation faible de l'inflation, ce qui
nous suggère la nécessité de contrôler les
coûts d'une façon très serrée, les revenus peuvent
varier plus facilement, si vous voulez, que les coûts et avoir des effets
moins sérieux sur le plan, en général. Si on avait dit que
les revenus ou si on partait de l'hypothèse que les revenus pouvaient
grossir d'une façon beaucoup plus importante que prévu, on
risquerait, on pense, dans un exercice de planification, de considérer
des coûts peut-être un peu trop élevés. (12 h 50)
Et, si, dans la réalité, durant la période en
question, ces revenus-là ne s'avéraient pas aussi
élevés que ce que l'on avait prévu dans le plan, on pense
que ça deviendrait plus difficile de poser les gestes requis pour faire
marche arrière avec les dépenses ou les coûts. C'est pour
ça qu'on croit sage et prudent de ne pas tenter de gonfler les revenus
dans l'exercice de planification de façon à ne pas gonfler les
dépenses. Comment ça se fait dans les détails, si vous
voulez, ou dans les faits? Je pense que ça reste aux gestionnaires, aux
administrateurs de la boîte de décider cela. Mais, dans un
contexte de planification, ce que l'on a vu là nous apparaissait comme
étant raisonnable et logique.
D'autre part, si on examine votre question sur l'élément
purement financier, mes collègues ont indiqué tantôt que la
province, effectivement, et Hydro n'avaient pas eu de difficultés
à lever les capitaux requis au cours des 10 dernières
années. Dans un contexte où l'ensemble des prêteurs
internationaux demeurent disponibles et ouverts, on pense que c'est encore
possible.
Une voix: Simplement pour... Excuse-moi.
M. Turcotte: Je voulais juste simplement dire... C'est là
qu'on s'attaque à la nécessité de maintenir une cote de
crédit qui soit des plus avantageuses possible parce que c'est ça
qui va attirer l'attention ou l'intérêt d'un prêteur
étranger. Et on a besoin de ces prêteurs étrangers
là pour financer nos projets, que ce soit à Hydro-Québec
ou à l'ensemble des projets de l'État
québécois.
M. Élie: Simplement pour accentuer, quand on dit qu'on a
les moyens de le faire, on ne dit pas qu'il n'y a aucun défi à
relever. Il y en a de très sérieux à relever.
Le Président (M. Audet): Merci. C'est terminé, M.
le député. Votre enveloppe de temps est terminé.
Alors, au nom des membres de la commission de l'économie et du
travail, messieurs, je vous remercie sincèrement de votre
présentation.
Nous allons suspendre deux minutes afin de permettre à
l'Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du
Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 12 h 55)
Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous recevons maintenant l'Association professionnelle des
ingénieurs du gouvernement du Québec. Alors, messieurs, au nom
des membres de la commission, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Je
vous rappelle brièvement nos règles de procédure. Vous
disposez d'une vingtaine de minutes pour nous faire part de votre
exposé. Ensuite suivra un échange qui durera une quarantaine de
minutes.
Avant de débuter votre présentation, je vous invite
toutefois à vous identifier. Vous avez la parole. Vous pouvez y aller.
Merci.
Association professionnelle des ingénieurs du
gouvernement du Québec (APIGQ)
M. Thiboutot (Jean-Pierre): Merci bien, M. le
Président.
Mon nom est Jean-Pierre Thiboutot, président de l'Association des
ingénieurs du gouvernement du Québec. Je vous présente,
à ma droite, M. Jean Hémond, ingénieur membre de notre
association et travaillant au ministère de l'Industrie et du Commerce,
et, à ma gauche, Alain Saladzius, travaillant pour le ministère,
aussi ingénieur et travaillant pour le ministère de
l'Environnement.
Nous tenons d'abord à remercier la commission de
l'économie et du travail pour nous avoir donné
l'opportunité de présenter devant elle nos positions sur le plan
de développement d'Hydro-Québec. Il est sain de voir une
société d'État manifester un tel souci de transparence et
accepter d'être questionnée. C'est un grand pas vers la
qualité totale. Toute cette démarche, bien que récente
dans nos traditions, devrait permettre à Hydro-Québec
d'améliorer son service essentiel à la population.
Nous tenons à vous rappeler que l'Association professionnelle des
ingénieurs du gouvernement du Québec représente 1100
ingénieurs oeuvrant au sein du gouvernement, et c'est à ce titre
qu'il nous fait plaisir de nous associer au présent exercice.
Nous croyons que la version du plan transmise à Mme Lise Bacon,
vice-première ministre et ministre de l'Énergie et des
Ressources, le 30 octobre 1992, a été enrichie sur plusieurs
aspects grâce, en particulier, à l'écoute manifestée
par Hydro-Québec lors des consultations préalables. Nous croyons
que ces échanges ont permis à tous et à chacun
d'évoluer. Cette bonification est en partie due à la haute
direction d'Hydro-Québec
qui a cru au bénéfice d'échanger avec les divers
groupes, et nous les en félicitons.
Étant nous-mêmes des ingénieurs professionnels, nous
sommes très sensibles au fait qu'à plusieurs occasions le
rôle et l'implication du gouvernement aient été
questionnés, tant au niveau de la politique énergétique
que du choix des politiques industrielles ou des choix de
société. Nous croyons opportun qu'il y ait un mécanisme
pour transmettre ces préoccupations aux différents
ministères.
Lors des consultations, il nous a semblé qu'Hy-dro-Québec
limitait trop souvent son rôle à celui de fournisseur
d'énergie électrique ayant le souci de répondre à
la demande au meilleur coût. Cependant, il nous semble qu'elle doive
harmoniser son action avec les principaux projets des ministères, comme,
par exemple, la nouvelle stratégie énergétique du
ministère de l'Énergie et des Ressources, de même qu'avec
celle des grappes industrielles du ministère de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie. Nous croyons qu'il existe un climat de compétition
plutôt que de concertation entre Hydro-Québec, Gaz
Métropolitain et les pétrolières. Plusieurs articles de
journaux abondent dans ce sens.
Afin de concilier les intérêts de ces organismes à
ceux de la population du Québec, nous croyons qu'un mécanisme de
concertation doit être instauré entre ces intervenants lorsqu'il
s'agit de choisir le volet énergétique de projets importants:
cogénération, Faubourg Québec, réseau urbain de
vapeur, etc. Un tel mécanisme permanent de concertation permettrait de
rallier les différents ministères à vocation
économique, tels le ministère de l'Énergie et des
Ressources et le MICT, les fabricants de produits en efficacité
énergétique, les universités, centres de recherche,
certaines municipalités, des associations, etc. Cette concertation doit
inclure un volet de coordination de façon à éviter qu'un
même client puisse être sollicité tour à tour par Gaz
Métropolitain, le Bureau de l'efficacité
énergétique, Hydro-Québec programme moteur haute
efficacité, Hydro-Québec éclairage, Hydro-Québec
programme pompe, ventilateur.
Le fait qu'Hydro-Québec occupe une position
prépondérante en efficacité énergétique
affecte des initiatives déjà en place, comme certains programmes
du Bureau de l'efficacité énergétique ou la vente de
produits en efficacité énergétique. Ces produits ont de la
difficulté à pénétrer le marché, parce
qu'ils ne sont pas subventionnés par Hydro-Québec.
Présentement, Hydro-Québec donne beaucoup d'expertise chez
les consultants pour ses projets. Bien que compréhensible, nous
constatons que cela se fait au détriment de certains autres projets
énergétiques: le réseau de vapeur urbain;
l'intégration de certains complexes industriels, où les rejets de
l'un servent comme énergie ou matière première pour
l'autre; l'environnement pouvant avoir un impact énergétique et
intéressant; l'amélioration de fenestration de certains
édifices à bureaux et l'assainissement des eaux du centre
Saint-Laurent.
Nous sommes conscients que cette approche nécessitera la mise en
place, au Québec, d'une nouvelle infrastructure que celle
créée pour les projets hydroélectriques. Ce savoir-faire
ainsi développé serait certainement exportable. Nous croyons
qu'Hydro-Québec a un grand rôle à jouer dans le
développement régional. Elle pourrait répondre aux projets
venant du milieu et devenir un outil de développement régional.
Pourquoi ne pas laisser les régions présenter leurs projets
plutôt que l'inverse? (13 heures)
Au cours des dernières années, Hydro-Québec a mis
de l'avant différentes approches en rapport avec les économies
d'énergie ou tout simplement avec l'efficacité
énergétique. Ces projets ont toujours été de grande
envergure. Or, Hydro-Québec est passée de constructeur de
mégaprojets à promoteur d'équipement, efficace en
énergie, ayant souvent une valeur en deçà de 25 $ la
pièce.
L'APIGQ croit que la société d'État doit se
définir une approche globale afin de dépasser les concepts
d'efficacité et d'économies d'énergie non
intégrés à d'autres paramètres. Une approche
globale tiendrait compte des facteurs, telles la planification
intégrée des ressources, la tarification, la
réglementation, l'implication du secteur privé, la conversion ou
le choix rationnel de la source d'énergie, l'implication au niveau de la
problématique du transfert de la facture propriétaire-locataire.
Hydro-Québec doit de plus en plus tisser des liens avec les autres
formes d'énergie pour ne fournir l'énergie électrique que
là où elle aurait un rendement optimal.
Tout au long du processus de consultation, HydroQuébec nous a
présenté différents scénarios, mais, compte tenu de
la complexité de la problématique, la majorité des groupes
consultés laisse aux experts d'Hy-dro-Québec le soin de les
élaborer en tenant compte, cependant, de leurs préoccupations.
Nous tendons vers l'option qui consiste à faire plus avec le même
potentiel, dégager des kilowattheures plutôt que d'en créer
de nouveaux. Dans cette même optique, nous pensons qu'il faut cesser de
voir le développement en fonction de l'augmentation de consommation
d'énergie, mais plutôt dans le sens de l'intensité
énergétique.
Il faut être prudent en fixant un coût pour une technologie,
car chaque technologie possède une niche où elle est rentable.
Citons, en exemples, les lubrifiants synthétiques qui peuvent avoir une
rentabilité bien différente s'ils sont utilisés dans des
conditions de grand froid, le solaire actif dans le cas du chauffage de
piscines et les éoliennes aux Iles-de-la-Madeleine.
Le fait de fournir une base de comparaison de l'intensité
énergétique entre des clients d'un même secteur a la
propriété de créer une synergie commune qui les stimule
beaucoup à agir. Pour un client, cela permet même de se donner des
objectifs d'amélioration. Hydro-Québec, qui traite les factures
de l'énergie électrique, peut réaliser un tel mandat.
Nous constatons que plusieurs industries rejettent de l'énergie
qu'un voisin pourrait utiliser. De plus, il
arrive souvent que des usines fassent fonctionner à demi-charge
des équipements qui pourraient servir les deux, comme les
chaudières. On note également que les rejets d'une industrie
peuvent servir de matière première à une voisine.
Hydro-Québec peut promouvoir la récupération perdue chez
les uns pour l'utiliser chez les autres. Cette façon de faire
permettrait d'optimiser les coûts et, dans certains cas, d'être
compétitif sur le plan international.
Nous sommes très satisfaits de constater que le nouveau plan de
développement d'Hydro-Québec préconise l'efficacité
du réseau. Les chiffres fournis signifient bien que ce n'est pas
négligeable: 9 % des nouveaux besoins seront comblés grâce
à l'amélioration du réseau existant.
L'amélioration de l'efficacité des équipements de
production, de transport et de distribution doit être
accélérée. En effet, de la puissance
hydroélectrique disponible, il y aurait moins de 70 % de
l'énergie qui traverserait, en moyenne, les compteurs des utilisateurs.
Hydro-Québec a commencé à améliorer le rendement
des turbines. Il s'agirait d'accélérer ce travail.
Ne devrait-on pas encourager les entreprises qui améliorent leur
intensité énergétique? À l'inverse, ne devrait-on
pas, par les tarifs, inciter les dinosaures énergétiques à
entreprendre des démarches afin d'améliorer leur
efficacité énergétique? Il y aurait sûrement
plusieurs emplois qui, à long terme, seraient
préservés.
Il peut être avantageux de procéder à des appels
d'offres pour favoriser l'implantation de nouveaux équipements en
efficacité énergétique. Comme exemple, après une
étude de marché, Hydro-Québec pourrait demander des
soumissions pour 20 000 détecteurs de présence pour
l'éclairage, au coût de 15 $ l'unité ou moins.
L'importance d'Hydro-Québec sur l'industrie
québécoise des richesses naturelles, y incluant l'aluminium et le
magnésium, n'est plus à démontrer. En corollaire,
l'arrêt des programmes visant les industries éner-givores et le
report des projets d'investissement d'Hydro-Québec contribuent à
créer un vide qui se répercute sur la plupart des industries du
Québec. Les récents événements médiatiques
ont mis en lumière les impacts sur l'environnement de l'ensemble des
projets hydroélectriques du Québec. Il devient impérieux
pour HydroQuébec de démontrer aux Québécois, ses
clients et ses actionnaires, que l'hydroélectricité est
l'énergie la moins polluante, la plus fiable et qui rapporte de plus en
plus en termes d'avantages industriels et d'emplois pour les gens d'ici, une
tâche à laquelle Hydro-Québec doit accorder une grande
importance au cours des prochaines années.
En rétrospective, la politique de développement
d'Hydro-Québec n'a pas permis le développement d'entreprises
manufacturières de grande taille à propriété
québécoise. Les multinationales manufacturières et de
construction ont établi des succursales dont le mandat d'exportation
est, même en Amérique du Nord, fort limité. Plusieurs de
ces mêmes industries devraient cesser leurs opérations advenant un
arrêt des projets d'Hydro-Québec. Il faudrait accorder une
attention particulière à ce que les entrepreneurs
québécois en construction ne soient pas nécessairement
obligés de s'associer à des constructeurs étrangers pour
garantir la réalisation des contrats d'Hydro-Québec. La situation
dans ce secteur se reflète notamment par la faiblesse du niveau de
propriété de la technologie du secteur électrique et par
la faiblesse des investissements en recherche et développement par le
secteur privé. Outre la réduction de la taille des contrats, nous
croyons qu'Hydro-Québec doive supporter une politique plus favorable aux
entreprises à propriété québécoise. Un ou
des projets-pilotes pourraient être mis sur pied dans le cadre du 10e
anniversaire de la Fondation de l'entrepreneurship.
Dans la réalisation de projets clé en main, les
entrepreneurs devraient respecter une politique d'achat dictée par un
mandat de développement industriel et une politique de
non-discrimination envers les manufacturiers et entrepreneurs du
Québec.
Compte tenu de tout le processus de consultation et de l'apport positif
des différents intervenants, nous croyons qu'un mécanisme
permanent de consultation serait très profitable. Étant
donné également l'aspect multidisciplinaire d'un plan d'une telle
envergure, nous suggérons la création d'un comité
spécialisé permanent en vue d'apporter une vision externe,
nouvelle et complémentaire à celle des experts et des
spécialistes d'Hydro-Québec.
Un seul groupe consulté ne peut en général cerner
tous les aspects du plan; chacun apporte généralement une vision
originale et valable. Nous croyons que les rencontres de consultation doivent
être plus étendues et aboutir à des recommandations
spécifiques. Nous réitérons aussi notre suggestion
à l'effet qu'Hydro-Québec puisse rencontrer individuellement
certains groupes de façon à approfondir complètement les
sujets abordés.
Par l'entremise d'Hydro-Québec, les Québécois se
sont dotés d'une force énergétique enviable mondialement.
Cependant, il est de l'avis de nombreux experts de constater l'émergence
d'un nouvel ordre économique dû à tous les changements que
le monde a connus récemment. Notons ici la mondialisation des
marchés, l'accès au libre-échange, la restructuration de
notre économie, la venue de la maîtrise de l'énergie comme
alternative de premier ordre, l'intensité énergétique des
produits, la préoccupation de l'environnement et du développement
durable. Dans cette perspective, nous favorisons l'approche
qu'Hydro-Québec a prise en ayant un plan de développement ouvert
lui permettant de s'harmoniser à l'évolution de la
société québécoise et surtout de prévoir des
plans garantissant son avenir. (13 h 10)
En conclusion, le plan actuel présente plusieurs approches
encourageantes et prometteuses. Nous formulons, dans ce mémoire, de
nouvelles orientations susceptibles de complementer la vision de qualité
totale privilégiée par la société d'État.
Mentionnons, à cet égard, l'amélioration du réseau,
la prise en compte des «external ités» et du
développement durable, les choix multicritères dans
l'élaboration de politiques, l'ouverture
vers la planification intégrée des ressources, la
restructuration des tarifs, l'établissement d'un
échéancier des réalisations en fonction des contraintes et
des besoins changeants.
Nous croyons essentiel qu'à titre d'ingénieurs
professionnels du gouvernement nous soyons avisés et parfois même
consultés tout au long du processus de réalisation de projets.
Une telle consultation à l'intérieur des services gouvernementaux
devrait même devenir un processus continu et comporter des
éléments de mesure pour vérifier les objectifs atteints et
corriger le tir si nécessaire. Hydro-Québec doit harmoniser son
action avec des stratégies déjà en place au sein de
différents ministères.
Un mécanisme de concertation et de coordination doit être
instauré entre Hydro-Québec et tous les intervenants lorsque,
d'une part, il s'agit de choisir le volet énergétique de projets
d'importance et, d'autre part, de desservir et de conseiller la nouvelle
clientèle. Ceci permettrait une association avec de nouveaux partenaires
ayant des intérêts complémentaires.
Nous félicitons Hydro-Québec d'avoir pris l'initiative de
faire une consultation externe sur son plan de développement. Nous
sommes persuadés que cette procédure permettra à la
société d'État d'optimiser ses projets et d'avoir une
meilleure vision des tendances économiques. En effet, le fait
d'échanger avec plusieurs intervenants peut permettre de s'ajuster plus
rapidement aux changements fondamentaux qui auront une incidence plus que
certaine sur son développement.
Nous souhaitons qu'Hydro-Québec puisse ajuster sa vision et
utiliser les partenaires nécessaires pour faire face à la
restructuration économique actuelle en se maintenant au premier plan sur
le développement technologique. Merci.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup. Mme la ministre
de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Messieurs, j'aimerais vous remercier pour votre
contribution aux travaux et vous encourager à poursuivre votre
réflexion sur toute la problématique du plan de
développement d'Hydro-Québec.
Si je me réfère à votre mémoire, à la
page 7, et je vous cite: «...Hydro-Québec n'a pas manifesté
l'intention de remettre en question plusieurs choix de société,
tels [...] le refus du choix de l'énergie atomique», est-ce que
vous pouvez nous expliquer la position de votre association quant à la
filière nucléaire?
M. Thiboutot: Nous, la filière nucléaire, disons
que ça deviendrait après plusieurs autres... ce ne serait pas
dans nos priorités comme telles. Là, c'est tout simplement que
vous avez donné un exemple, la filière nucléaire. Mais ce
qu'on voulait expliciter par ça, c'est que nous croyons
qu'Hydro-Québec devrait faire attention à ne pas suivre les
courants qui deviennent trop forts dans la population, mais plutôt
travailler sur sa mission qui est de rentabiliser son entreprise, c'est
ça, rentabiliser son entreprise pour rencontrer sa première
mission qui est de faire des profits avec l'hydroélectricité et
utiliser son potentiel.
Mme Bacon: Vous indiquez aussi dans votre mémoire, et je
vous réfère à la page 10, au sujet de l'énergie
éolienne: «...nous la considérons probablement
complémentaire à l'hydraulique». Il y a de nombreux
intervenants qui se font les avocats de la filière éolienne ici,
devant nous. Est-ce que vous trouvez que c'est une bonne filière de
production énergétique, l'éolienne?
M. Thiboutot: Une bonne filière, disons, encore là,
que ce serait une filière qu'on verrait... quand même qui n'est
pas de premier ordre, mais qui pourrait être utilisée dans
certaines situations pour des projets, comme on vous l'a souligné, plus
mineurs que des projets majeurs, avec cette filière-là.
Mme Bacon: Vous la voyez complémentaire à quelle
source d'énergie? Parce que vous la voyez complémentaire.
M. Thiboutot: C'est dans une source d'énergie qui...
Peut-être que M. Jean Hémond pourrait vous dire un petit
peu...
M. Hémond (Jean): Bien, ça peut être
complémentaire, en fait...
Mme Bacon: À l'hydroélectricité.
M. Hémond: ...à l'hydroélectricité
également, parce qu'il y a des endroits au Québec où on a
des vents d'importance, je ne sais pas, de l'ordre de 30 km à l'heure,
comme aux Îles-de-la-Madeleine et sur la Basse-Côte-Nord, et
ça peut devenir une énergie complémentaire. Si je pense,
par exemple, aux Îles-de-la-Madeleine, c'est une énergie qui peut
être disponible à plus faible coût que la centrale thermique
actuellement en place. Ça fait qu'on la voit aussi complémentaire
à l'hydroélectricité.
Mme Bacon: Au sujet de la cogénération, vous
indiquez, à la page 14 de votre mémoire, et je vous cite
toujours: «Nous continuons à insister pour que tout projet de
cogénération soit de la vraie cogénération,
où l'on fixe un minimum d'efficacité globale annuelle.»
Est-ce que vous pouvez nous indiquer la position de votre association
concernant la cogénération et peut-être préciser ce
que vous entendez par le minimum d'efficacité globale annuelle?
M. Saladzius (Alain): Oui. En fait, lors des premiers projets de
cogénération, lorsqu'il y a eu l'appel d'offres chez
Hydro-Québec et que les premiers soumissionnaires ont
présenté des offres, il y a eu une constatation à l'effet
que plusieurs de ces soumissionnaires-là proposaient... en fait,
c'était de la génération thermique d'énergie avec
un faible taux de rendement, comme un rendement mécanique, quand on fait
la transformation
du gaz naturel et qu'on le transforme en vapeur et en
électricité. Bien, il y avait un faible rendement de ces
équipements-là. C'est à ce moment-là qu'il faut
être prudent, à notre avis, et s'assurer que les
équipements qui vont être mis en place par ces
compagnies-là soient suffisamment efficaces du point de vue
mécanique, transformation mécanique des énergies.
Mme Bacon: Et c'est ça que vous appelez la vraie
cogénération, dans votre mémoire, aussi?
M. Thiboutot: On peut peut-être donner un autre exemple. Si
vous avez une nécessité de faire un incinérateur, par
exemple, parce qu'on a beaucoup de déchets d'hôpitaux, on n'a pas
le choix de faire un incinérateur, donc, en faisant
l'incinérateur, là, on peut utiliser... ça peut nous
donner de la vapeur. Ce qu'on dit, c'est de regarder les projets dans leur
ensemble. Avec la vapeur, on peut transférer ça à une
usine de pâtes et papiers; là, ça devient très
rentable. Tandis que, si, au lieu de faire de la vapeur, on fait de
l'électricité, il y a un problème de rentabilité.
Le message qu'on veut donner à HydroQuébec, c'est de toujours
revenir sur sa mission, voir à ce que ces projets soient les plus
rentables possible.
Mme Bacon: Vous indiquez, à la page 8 de votre
mémoire, que «la société d'État doit se
définir une approche globale afin de dépasser les concepts
d'efficacité et d'économies d'énergie non
intégrés à d'autres paramètres». De
façon générale, est-ce que vous pouvez nous indiquer en
quoi consiste, encore une fois, une approche globale en matière
d'efficacité énergétique?
M. Thiboutot: C'est un peu avec ce qu'on arrive après
quand on parle de... Je vais vous donner un exemple très simple.
Supposons qu'il y a une compagnie qui crée un produit. Nous, on se dit
qu'Hydro regarde l'approche globale: Est-ce que ça crée des
emplois, le produit? Pour l'économie du Québec, est-ce que c'est
intéressant, d'abord pour Hydro, puis, en même temps, globalement,
pour l'économie du Québec? Est-ce que cette industrie-là
va faire de la pollution qui va être beaucoup plus dommageable que le
produit, ou vice versa? C'est de regarder chacun des projets avec toutes ses
«externalités», ce qu'il y a à l'extérieur du
projet.
Mme Bacon: Êtes-vous d'accord à ce que, dans le plan
de développement et même si on parle de vision globale des
choses Hydro-Québec ait maintenant plusieurs scénarios en
marche?
M. Thiboutot: Oui, oui.
Mme Bacon: Au lieu de dire, ne cibler qu'un seul...
M. Thiboutot: Ça, nous sommes très d'accord avec
ça, surtout pour la raison des changements qui se passent actuellement
dans la société. Même, on a l'impression que, si Hydro ne
fait pas ça, c'est un danger pour elle. Juste quand on parle de
l'interfinancement, on ne dit pas que c'est mauvais qu'Hydro décide
présentement de ne pas faire d'interfinancement, mais on se dit que
c'est des outils qu'il faut qu'elle garde toujours à jour,
dépendamment de ce qui se passe dans la société.
Mme Bacon: Vous donneriez combien d'années? C'est parce
que, quand on fait toutes les études environnementales pour un projet,
s'il est mis sur une tablette, disons, parce qu'on a un scénario avec
plusieurs projets... Est-ce qu'à ce moment-là vous pouvez nous
donner le nombre d'années qu'on peut garder notre projet en attente?
Parce que ça change, aussi, les données environnementales.
M. Thiboutot: Je ne comprends pas très bien la
question.
Mme Bacon: Disons qu'il y a plusieurs scénarios de
développement d'Hydro-Québec. Il y a des groupes qui sont venus
nous dire: Oui, c'est bien beau, là. Et il y en a qui sont contre
plusieurs scénarios...
M. Thiboutot: Oui.
Mme Bacon: ...qui voudraient qu'on cible rapidement, et
quelques-uns seulement. Mais, si on en a plusieurs, combien d'années on
peut les garder en attente avant de les réaliser? (13 h 20)
M. Thiboutot: Veux-tu répondre à ça?
M. Saladzius: À mon avis, je pense que ça
dépend un petit peu de l'évolution de la technologie dans
certains domaines. Mais, a priori, je pense que cinq années, ce serait
un nombre...
Mme Bacon: Sans avoir à refaire toutes les
études.
M. Saladzius: Toutes les études... Mais, là, il
pourrait y avoir aussi, après cinq années, peut-être une
mise à jour. Il s'agirait de voir s'il y a de nouvelles technologies de
disponibles aux meilleurs coûts possible. En termes d'évaluation
environnementale, cinq années plus tard, à moins qu'il y ait de
nouvelles valeurs dans la société l'inventaire faunique,
ça, ça ne change pas, d'après moi il s'agit de voir
les technologies disponibles cinq ans plus tard et de les remettre à
jour.
J'aimerais apporter un complément d'information concernant
l'approche globale d'Hydro-Québec en relation avec la
cogénération. L'idée qui me vient à l'esprit, c'est
un élément d'approche globale concernant la
cogénération. On a constaté que deux autres associations
d'ingénieurs ont noté que le contenu québécois des
projets de cogénération était très faible.
Ça devrait être, à notre avis, un élément
qu'Hydro-Québec devrait considérer, si elle ne l'a pas fait.
Mme Bacon: Par rapport à l'équipement, par
rapport au savoir-faire?
M. Saladzius: Oui, exactement. Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Ça me fait plaisir, à mon tour, de vous souhaiter la
bienvenue au nom de ma formation politique. Je veux vous féliciter pour
la qualité de votre mémoire et aussi pour l'imagination qu'on
retrouve dans votre mémoire, dans le sens où vous avez
exploré toutes sortes d'avenues ou soulevé, je pense, toutes
sortes de questions qu'on retrouve parfois dans d'autres mémoires et
dans d'autres pas, et qui, je pense, le rendent particulièrement
intéressant. Entre autres, le souhait que vous émettez que les
régions identifient leurs besoins, je pense que c'est à peu
près nouveau dans le type de mémoires qui sont
présentés par des professionnels de l'intervention dans le
domaine de l'ingénierie, entre autres. Alors, ça, c'est
particulièrement intéressant.
Un certain nombre de questions maintenant. D'abord, au tout début
de votre mémoire, vous mentionnez que vous êtes inquiets, vous
soulevez, du moins, un certain questionnement quant à l'effet que le
ministère de l'Énergie et des Ressources et je vous cite
«prenne connaissance, à l'étape finale, de tous les
commentaires où il est le principal intéressé, car il lui
est plus difficile de tenir compte de toutes les préoccupations
manifestées». Ça, vous le dites, évidemment, dans le
débat qui a cours autour d'Hydro-Québec et de ses consultations.
Et beaucoup plus loin dans le mémoire, à la fin en fait, dans vos
conclusions, vous dites: «Hydro-Québec doit harmoniser son action
avec des stratégies déjà en place au sein de
différents ministères.» Et j'imagine que vous
référez, évidemment, à la même
problématique.
Moi, ce que j'aimerais entendre de votre part: Premièrement,
est-ce que vous avez l'impression qu'il y a vraiment une déconnexion
entre le travail de consultation, d'élaboration de politique fait par
Hydro-Québec versus la transmission de ce travail-là ou de cette
consultation-là avec les ministères et le gouvernement dans son
ensemble? Et, deuxièmement, si vous constatez cela, parce que ça
semble être le cas, mais j'aimerais que vous en parliez un petit peu
davantage, qu'est-ce que vous suggéreriez qui soit fait pour que
ça, ce soit possible d'une façon'un petit peu mieux
concertée?
M. Thiboutot: C'est bien. On peut parler au niveau où on
prend l'exemple de l'efficacité énergétique.
Hydro-Québec fait certaines choses du côté de
l'efficacité énergétique, puis le ministère de
l'Énergie et des Ressources fait aussi certains travaux concernant
l'efficacité énergétique, puis, entre les deux, comme vous
dites, on a l'impression qu'il y a peut-être un certain manque de
communication et de planification.
Au niveau de l'efficacité énergétique, la question
qu'on se pose, c'est: Ça revient à Hydro-Québec; est-ce
que ça ne devrait pas, plutôt, aller au ministère de
l'Énergie et des Ressources? Dans le sens que la mission
d'Hydro-Québec, c'est de fournir l'électricité et
être rentable, puis si elle travaille au niveau de l'efficacité
énergétique, ça peut être rentable si, à un
endroit, elle fournit une quantité d'énergie épouvantable
et qu'en réalité elle pourrait en fournir beaucoup moins. Elle
pourrait travailler sur quelque chose comme ça pour se rentabiliser. Par
contre, on voit plutôt l'efficacité énergétique pour
les Québécois, comme tels, de diminuer leur consommation. Pour
eux, les Québécois, pour économiser pour l'ensemble de la
société, on pense que le ministère de l'Énergie et
des Ressources pourrait en prendre plus qu'Hydro-Québec, dans le sens
qu'Hydro-Québec, elle, ça va, d'une certaine façon,
à certains endroits à rencontre de sa mission. On a l'impression
que ça peut être dangereux de travailler avec deux missions.
HydroQuébec devrait s'en tenir à sa mission, elle, d'aller
chercher de la clientèle pour se rentabiliser, mettre l'énergie
plus sur la clientèle à aller chercher plutôt que
travailler d'une façon pour l'efficacité
énergétique. Mais, comme j'ai expliqué, ça
dépend des deux cas.
Mme Marois: J'aimerais vous entendre un peu sur la façon
dont... Là, vous me dites: Oui, Hydro devrait plus s'orienter vers cela,
laisser au ministère de l'Énergie et des Ressources une vocation
qui lui est propre. Mais ce que vous nous dites ici, c'est qu'il y a plus que
cela dans le sens où... Imaginons qu'Hydro, essentiellement, assume
cette vocation dont vous parlez, mais qu'elle ne transmet pas, non plus, les
informations au ministère. Et c'est ça que vous semblez dire.
Qu'est-ce que vous proposez pour que ça se passe autrement?
M. Thiboutot: Nous, on proposerait un mécanisme de
concertation avec plusieurs intervenants, puis Hydro travaillerait avec sa
mission puis les autres intervenants avec chacun leur mission,
individuellement.
Mme Marois: Et ce mécanisme-là inclurait,
évidemment, les ministères aussi et l'ensemble de l'appareil
gouvernemental, parce que la façon dont, moi, j'ai lu votre
mémoire quant à l'institution de coordination que vous proposez,
j'avais l'impression que c'était plutôt Hydro avec un certain
nombre d'autres distributeurs d'énergie, si on veut, qui avaient
à se concerter, par exemple, par rapport à la question du gaz
naturel ou d'autres intervenants de cet ordre-là.
M. Saladzius: Oui. En fait, c'est une espèce de commission
technique. On peut prendre une image, le CRTC, qui, à la fois, se penche
sur les tarifs, se penche au point de vue technologique, sur les meilleures
technologies qui sont disponibles. En fait, une commission d'experts qui se
penchent sur tous les aspects reliés à l'énergie en
général, non seulement l'électricité, mais il faut
aussi impliquer les partenaires du secteur privé, le gaz naturel, les
pétrolières, l'industrie et le commerce
pour bien évaluer les retombées en termes de
création d'emplois et aussi les retombées en termes de produits
québécois, de produits manufacturés au Québec. Ce
sont tous des aspects qui doivent être considérés. Que
l'information, en fait, circule auprès de tous les intervenants.
Mme Marois: Je voulais poser ma question dans un autre contexte,
mais je vais la poser maintenant. Vous êtes bien conscients qu'il y a
plusieurs groupes qui ont proposé qu'il se mette en place une commission
de l'énergie.
M. Thiboutot: Oui.
Mme Marois: Et j'avais l'impression que c'était un petit
peu vers là que vous alliez, sans le dire, parce que vous ne l'affirmez
jamais que vous souhaitez la mise en place d'une commission de
l'énergie. Mais j'ai l'impression, à vous entendre, que vous
attendez même davantage que ce qu'on a l'habitude de dire ou de vouloir
confier à une commission de l'énergie. Dans le fond, quand vous
dites: La question des retombées en termes industriels, en aval, si on
veut, ou en amont, c'est-à-dire où on pourrait aller investir
dans certaines entreprises à contenu québécois pour,
ensuite, s'en resservir au niveau du développement de l'énergie
sous toutes ses formes. Mais est-ce que vous aboutissez à cette
conclusion-là aussi, qu'il serait souhaitable d'avoir une commission de
l'énergie?
M. Saladzius: En fait, c'est peut-être un petit peu plus
qu'une commission au sens où il ne s'agit pas seulement d'analyser des
choses, mais il y aurait aussi un aspect de recherche et développement
pour obtenir les connaissances qui sont véhiculées dans chacun
des domaines. Il est important de rassembler, qu'il y ait un noyau central de
connaissances, qu'on rassemble l'expertise européenne,
américaine, puis qu'on centralise cette information-là et qu'on
puisse en faire bénéficier tout le marché
québécois, tous les intervenants au Québec. Dans ce
sens-là, c'est peut-être un peu plus qu'une commission habituelle.
Ça pourrait peut-être être un département du
ministère de l'Énergie et des Ressources pour lequel il y aurait
suffisamment de fonds alloués. Mais la formation de cette entité,
ça, c'est mécanique, c'est administratif. On ne peut pas
tellement se prononcer là-dessus. (13 h 30)
M. Thiboutot: On pense qu'il faut mettre l'accent sur la
compétitivité des entreprises québécoises. Une
chose qui revient souvent, c'est qu'on dit: Partout dans le monde, ça se
passe différemment; partout dans le monde, ça se passe
différemment. Mais, d'un autre côté, partout dans le monde,
le potentiel du Québec au point de vue hydroélectrique, ils ne
l'ont pas. Quand on se compare toujours à ce qui se passe dans le monde,
pourquoi de la cogénération, dans le monde, il s'en fait plus?
C'est parce qu'ils n'ont pas nos possibilités. En efficacité
énergétique, pourquoi la technologie est-elle
développée partout dans le monde? C'est parce que, eux, ils n'ont
pas le choix, ils n'ont pas les ressources. Je peux vous donner un exemple. Je
suis allé à un symposium sur l'eau potable aux États-Unis.
Eux, pour trouver deux gallons à la minute, ils faisaient des recherches
épouvantables dans le sol, tandis que, nous autres, ici, on fait un
puits, on prend une courbe et on trouve 30 gallons. Si on veut 60 gallons, on
change de place, on regarde nos courbes, puis... Je pense qu'on a un potentiel,
réellement, qui est enviable mondialement, puis je pense qu'on est
enviés, et il faut faire attention avec ça.
Mme Marois: ...ça a développé une certaine
forme de paresse intellectuelle, le fait qu'on ait une ressource aussi
facilement accessible, dans le fond.
M. Thiboutot: Oui, puis le danger, c'est justement, il faut qu'on
l'utilise avant de... Quand on fait de la paresse intellectuelle, il y a un
danger de se faire dépasser par d'autres. Je pense qu'il faut profiter
de nos opportunités avant qu'il soit trop tard.
Le Président (M. Audet): Je vous remercie. C'est
terminé. Vous pourrez revenir.
Mme Marois: Oui, d'accord.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Prévost.
M. Forget: Merci, M. le Président.
Vous indiquez à la page 7 de votre mémoire, et je cite:
«Nous croyons qu'il existe un climat de compétition plutôt
que de concertation entre Hydro-Québec, Gaz Métropolitain et les
pétrolières. Afin de concilier les intérêts de ces
organismes à ceux de la population du Québec, nous croyons qu'un
mécanisme de concertation doit être instauré entre ces
intervenants lorsqu'il s'agit de choisir le volet énergétique de
projets importants.» Pourquoi vous indiquez à cette commission le
type de concertation que l'Association professionnelle des ingénieurs du
gouvernement du Québec voudrait voir implanter?
M. Thiboutot: La concertation, nous, c'est qu'il y ait... Sans
qu'il y ait un projet en marche, s'il y avait des rencontres avec les
différents intervenants. On a comme impression qu'à un moment
donné il pourrait se développer des champs d'action où
Hydro-Québec dirait: Bien, nous, ce secteur-là, on est moins
rentable. Là, c'est comme si chacun s'est trouvé une
façon, si vous voulez, de travailler en conciliation plutôt que...
Parce que, économiquement parlant, on est en compétition
mondialement. Ce qu'on dit, c'est que, si nos forces au Québec ne
travaillent pas ensemble, bien, il y a un danger qu'on fasse des travaux qui
nous coûtent plus cher et qui soient moins rentables. C'est un peu dans
ce sens-là. On se dit: S'il y avait un mécanisme de rencontres
régulièrement, même s'il n'y a pas de projet, mais
discuter: Pourquoi, vous autres, vous voulez faire tel
projet? on a l'impression qu'il pourrait se développer des
consensus. C'est un peu dans ce sens-là.
M. Saladzius: Peut-être pour illustrer avec un exemple
l'importance de la concertation. Dans le centre-ville de Montréal
actuellement, il y a un projet qui s'appelle Faubourg Québec, qui est de
construire plusieurs unités d'habitation d'une façon assez dense
près du fleuve. Là, il y a des questions à se poser:
Est-ce qu'on doit chauffer toutes ces habitations-là avec des plinthes
électriques? Est-ce que le gaz naturel ne serait pas plus
approprié dans ce type de construction là, neuve, d'une masse
importante d'unités de logement? Est-ce que l'utilisation d'un
réseau de vapeur... Dans le centre-ville de Montréal, il existe
un réseau de vapeur pour desservir Place Bonaventure, entre autres, la
gare du CN qui, eux, produisent de la vapeur; les édifices sont
chauffés avec de la vapeur. Mais c'est une source d'énergie qui
pourrait être intéressante. Il y a plusieurs aspects à
développer, et ça prend une concertation de tous les organismes.
C'est ça.
M. Forget: Maintenant, lorsqu'on bâtit, il n'y a pas une
étude de faite avant pour dire: On va s'orienter vers tel ou tel
domaine? Mais il doit y avoir une étude de faite?
M. Thiboutot: Ce qui arrive, c'est ça qui est difficile,
c'est que... On va donner un autre exemple concret, c'est l'incinérateur
de Québec. Lui, il envoie sa vapeur à la papetière. Mais,
comme vous dites, si c'est juste l'incinérateur qui travaille tout
seul... Supposons qu'on fait un projet d'incinérateur, puis qu'on oublie
que... C'est deux gros projets, une papetière et un incinérateur;
planifier ça, ce n'est pas facile. C'est pour ça qu'on dit que,
s'il y avait un système de concertation et de discussion, l'un dirait:
Bien, moi, au Québec, je veux faire tel type de travaux, l'autre dirait:
Je veux faire tel... Avec ça, il pourrait se développer des
consensus puis dire: On sort un mégaprojet avec plusieurs ramifications.
Mais que toutes les choses soient rentabilisées au maximum.
M. Saladzius: Dans le mémoire, il y a encore un autre
exemple, c'est l'incinérateur qui est prévu dans l'est de
Montréal, dont il est prévu qu'il y ait à la fois de
l'électricité... non, de la génération
d'électricité seulement de prévu. À
proximité, il y a un autre projet de cogénération
où, là, certaines industries ont besoin de vapeur. Est-ce qu'il
serait possible d'alimenter les industries qui ont besoin de vapeur à
partir de l'incinérateur de déchets? Ce serait, du point de vue
technologique, plus efficace, en termes d'efficacité technologique.
Là, je fais abstraction des autres éléments
économiques qui pourraient entrer en ligne de compte. C'est pour
ça que ça prend une concertation, ça prend des gens qui
vont s'assurer que tous les gens soient consultés autour d'un projet de
cette envergure-là. C'est quand même des sommes très
importantes. Puis il y va aussi de la rentabilité de toutes ces
entreprises-là. Si on réussit à amélio- rer la
rentabilité, à réduire les coûts
énergétiques des entreprises, c'est toute la
société qui en bénéficie.
On a illustré, dans une annexe, certaines interventions qui ont
été faites. À l'annexe 1, page 3, il y a des exemples
d'interventions qui ont été faites par le Bureau de
l'efficacité énergétique. Ça se traduit, dans
chacune des interventions qu'il réalise, par des améliorations
importantes de la rentabilité des entreprises. En tout cas, je vous
invite à consulter la liste des exemples.
Le Président (M. Audet): Merci. Merci, M. le
député.
Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président.
Effectivement, il y a une liste fort intéressante et
impressionnante. Je vais revenir avec une question plus globale puis,
après ça, avec une question un petit peu plus précise.
Depuis le début, depuis le début de votre
présentation et d'autres présentations ici, on parle de
l'importance de la concertation, de la coordination, qu'on fasse les bons
choix, etc. À peu près tous les groupes qui sont
préoccupés par les questions énergétiques et
environnementales ont proposé, suggéré, demandé
qu'il y ait un débat public beaucoup plus large sur la question des
choix énergétiques et en relation, entre autres, justement, avec
leur influence, évidemment, sur l'environnement, mais aussi en relation
avec leur influence sur ces choix-là, sur le progrès
économique ou l'amélioration de notre qualité de vie, etc.
Vous n'en faites pas état. Vous lancez beaucoup de questions dans ce
sens-là, mais vous ne vous prononcez pas clairement sur cela. Est-ce que
vous croyez qu'il serait pertinent que ce débat public ait lieu,
confié à une commission d'enquête qui serait,
évidemment, autonome et devant laquelle les citoyens pourraient venir
faire des représentations, des discussions qui pourraient s'engager
aussi dans différents forums, autour de différentes tables?
M. Thiboutot: Nous croyons qu'il y a des avantages et des
désavantages. L'avantage, c'est ce dont on parlait, un petit peu la
concertation. C'est qu'Hydro-Québec peut connaître un peu... Par
contre, le désavantage, c'est, si on a une vague, si vous voulez, on
appelle ça souvent le balancier, la population part puis se met... Des
fois, ce n'est pas toujours nécessairement logique. C'est pour ça
qu'on dit à Hydro-Québec: Au lieu de suivre ce qui se passe tout
le temps, regardez, vous, votre mission, puis il faut, à un moment
donné, qu'il y ait des décisions de prises.
Dans ce sens-là, est-ce que ce serait, le désavantage,
qu'il n'y a plus de marge de manoeuvre? C'est là qu'on se pose la
question. C'est peut-être pour ça qu'on ne l'a pas dit clairement,
c'est qu'il y a des désavantages et des avantages dans le sens que je
vous ai expliqué.
M. Saladzius: II nous vient à l'esprit la stragégie
québécoise de l'efficacité énergétique qui a
identifié la
réduction de la consommation des produits pétroliers, qui
doit être, d'une façon urgente, là, sans l'être,
réduite. Mais ça nous satisfait puis on pense que c'est un enjeu
qui est important. Mais il faut aussi allouer les ressources, les fonds
monétaires comparables à cet enjeu-là, qui est très
important. Je n'ai pas idée du budget qui est alloué à ce
programme, mais je sais qu'en comparaison avec le budget qui est alloué
à Hydro-Québec pour son programme d'efficacité
énergétique, si je ne me trompe pas, de 200 000 000 $ par
année, des montants comparables devraient être envisagés.
(13 h 40)
Mme Marois: Je suis consciente de ce que vous soulevez, mais il y
a beaucoup de groupes qui sont venus ici dire que, justement, les programmes
d'efficacité énergétique étaient en dessous de ce
qu'on exigeait dans d'autres sociétés ou tians d'autres pays,
auprès d'entreprises qui avaient les mêmes réalités
auxquelles nous sommes confrontés. Et, moi, j'avais le sentiment que, si
nous ouvrions un petit peu plus largement sur un débat qui concernerait
toutes ces réalités-là, dont aussi, bien sûr,
l'efficacité énergétique, ça pouvait avoir aussi
pour effet, d'une part, de sensibiliser la population, et non pas
nécessairement de lui faire prendre position d'une façon radicale
pour une avenue ou pour l'autre, mais, au contraire, de la sensibiliser
à l'ensemble de cette réalité à laquelle on est
confronté comme société et, éventuellement, de
poser des standards un petit peu plus élevés, par exemple,
à notre société, que ce soit la société
d'État qu'est Hydro-Québec ou à d'autres façons que
l'on a de se comporter, aussi, à l'égard de la consommation
énergétique au Québec.
M. Thiboutot: En réalité, c'est un peu ce que vous
avez dit tout à l'heure. C'est que, pour nous autres, ici, au
Québec, l'électricité, qu'on le veuille ou non, ça
a été facile. Quelqu'un me contait, à un moment
donné, qu'il était arrivé en Europe, dans sa chambre,
puis: J'ai passé proche de me tuer, il a dit, je me suis enfargé,
puis je suis tombé sur un balcon, puis je tombais du troisième
étage. Il a dit: En entrant, j'ai dit, je vais allumer la
lumière; la lumière était allumée, mais je ne
voyais pratiquement rien. Ça fait que c'est sûr qu'au
Québec on est choyé, puis, justement, il faut faire attention que
ça joue contre nous autres. Donc, il faut économiser. Mais est-ce
que c'est seulement à Hydro de faire ça?
Parce que Hydro, elle joue un peu contre sa mission. C'est pour
ça qu'on se dit: Là, il y a un ajustement à faire. Et
Hydro, si elle veut vendre son produit, c'est de dire: Je suis rentable pour
ces raisons, puis ces choses-là. Puis, en efficacité
énergétique, elle doit en faire aussi, quand c'est au niveau de
rentabilité. Mais, nous, la société, on doit en faire pour
être compétitif internationalement. Si on gaspille trop, bien, il
y a un problème.
Le Président (M. Audet): Merci. Voulez-vous ajouter
quelque chose, monsieur?
M. Hémond: Oui. Il y a un débat qui a
été un peu... pas couvert dans notre affaire. C'est
qu'Hy-dro-Québec est un outil économique extrêmement
puissant, 4 500 000 000 $ à peu près, que couvrent les
utilités à la contribution du PIB au Québec. Le
gouvernement, c'est 7 900 000 000 $, puis le PIB, c'est 138 000 000 000 $ au
Québec, ce qui fait qu'Hydro-Québec est un outil
économique extrêmement puissant. L'impact de ça a
été tel que, ces dernières années, par le simple
rabais de tarif aux grands utilisateurs, ça a donné une
poussée très rapide à l'économie du Québec,
entre autres aux investissements dans le secteur manufacturier. Les
années qui s'en viennent, le Québec subit le contrecoup de
ça. Il y a des diminutions des investissements manufacturiers
importantes, comparé avec l'Ontario, principalement à cause du
fait que ces projets d'utilisation de l'électricité sont
arrêtés. On se dit que si, aussi, les achats
d'Hydro-Québec, ses investissements, plutôt, correspondent
à 4 400 000 000 $ en 1993, alors c'est un outil extrêmement
puissant.
Mme Bacon parlait tout à l'heure de filière; le terme
«filière» a différentes connotations. Notre ministre,
M. Tremblay, a utilisé le terme «grappes». En France, on
utilise le mot «filière» avec un terme un peu occulte,
c'est-à-dire des ententes occultes, une espèce de connivence qui
fait que les retombées économiques des projets reviennent aux
gens et aux entreprises locales. Il semble que ce ne soit pas le cas
complètement au Québec. Il y a un bon départ, mais, si on
examine le contenu québécois des achats d'Hydro-Québec et
de ses filiales, il y a beaucoup et beaucoup d'améliorations à
faire.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond.
M. St-Roch: Oui. Ça va être très bref, M. le
Président. Règle générale, lorsque vous venez
présenter un mémoire puis qu'on indique des choses, c'est parce
qu'on détecte des lacunes. À la page 13 de votre mémoire,
vous mettez beaucoup d'emphase sur l'efficacité du parc des moyens de
production et du réseau d'Hydro-Québec. Est-ce que vous avez mis
ces recommandations, puis ces exemples parce que vous détectez
qu'Hy-dro-Québec n'a pas mis assez d'emphase dans son plan de
développement ou s'il y aurait des économies d'efficacité
qui seraient encore beaucoup plus supérieures à celles qu'ils ont
démontrées?
M. Thiboutot: Dans son plan, Hydro-Québec a mis quand
même l'amélioration du réseau, mais, nous, on leur a
suggéré d'ailleurs, ils l'ont accepté
d'augmenter, d'accélérer cet aspect-là. C'est qu'on
considérait qu'ils pouvaient faire plus rapidement leurs modifications
sur le réseau compte tenu que c'est très, très rentable au
point de vue énergétique.
M. Saladzius: Effectivement, on a eu des informations à
l'effet qu'il y a des technologies, un logiciel, entre autres, qui serait
disponible, qui permettrait à bas coût, à faible
coût, d'améliorer le rendement du réseau,
puis il s'agit que l'on s'assure que ce soit mis en place le plus
tôt possible.
M. St-Roch: Parce que les quantités que vous mentionnez
dans votre mémoire sont significatives.
M. Thiboutot: C'est très significatif. M. St-Roch:
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, messieurs, au nom
des membres de la commission, je vous remercie de votre
présentation.
Sur ce, nous allons ajourner nos travaux jusqu'à demain, 18 mars,
9 heures.
(Fin de la séance à 13 h 46)