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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 10 mars 1993 - Vol. 32 N° 36

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Québec


Journal des débats

 

(Dix heures cinq minutes)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je déclare la séance de la commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous rappelle le mandat de la commission, qui est de procéder à une consultation générale sur la proposition de plan de développement 1993 à 1995 d'Hydro-Québec.

Alors, M. le Secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bordeleau (Acadie) par M. Fradet (Vimont) et Mme Dupuis (Verchères) par Mme Marois (Taillon).

Le Président (M. Audet): Merci.

Les membres de la commission ont pris connaissance de l'ordre du jour. Est-ce que l'ordre du jour est adopté?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Audet): Adopté. Alors, ce matin...

M. Chevrette: ...de 10 heures à 14 heures?

Le Président (M. Audet): C'est ça, de 10 heures à 14 heures.

Alors, ce matin, nous commençons avec le Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec et le Syndicat professionnel des scientifiques de l'IREQ. Ensuite, suivra le Comité Baie James; à 12 heures, l'Association de la construction du Québec, et nous terminerons avec la Fédération des ACEF du Québec.

Alors, puisque les gens du Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec inc. et le Syndicat professionnel des scientifiques de l'IREQ ont pris place, messieurs, au nom des membres de la commission, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue.

Je vous rappelle brièvement le déroulement de nos travaux. Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous faire part de votre exposé. Avant de débuter la présentation de votre exposé, je vous inviterai toutefois à vous présenter, aux fins du Journal des débats. Ensuite, suivra une période d'échanges d'une quarantaine de minutes.

Vous avez la parole. Si vous voulez vous identifier, s'il vous plaît, et débuter votre présentation.

Syndicat professionnel des ingénieurs

d'Hydro-Québec inc. (SPfflQ) et Syndicat

professionnel des scientifiques de l'IREQ (SPSI)

M. Champagne (Louis): Merci, M. le Président.

Mme la vice-première ministre, MM. les députés. Louis Champagne, président du Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec.

M. Fiset (François): François Fiset, premier vice-président du Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec.

M. Tremblay (Pierre E.): Pierre E. Tremblay, deuxième vice-président, Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec.

M. Champagne (Gilles): Gilles Champagne, trésorier et porte-parole du Syndicat des scientifiques de l'IREQ.

M. Meunier (Robert): Robert Meunier, vice-président du Syndicat professionnel des scientifiques de l'IREQ.

M. Pelletier (Jean-Marc): Jean-Marc Pelletier, représentant du Syndicat des scientifiques de l'IREQ.

Le Président (M. Audet): Merci. On vous écoute.

M. Champagne (Louis): Merci, M. le Président.

Nous avons divisé notre présentation en deux. Le Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec va débuter et sera suivi par le Syndicat professionnel des scientifiques de l'IREQ.

Permettez-moi d'abord de présenter notre syndicat. Il a été fondé en 1964. Il a été un des membres fondateurs de la Fédération des professionnels et cadres du Québec. Il représente des cadres actuellement grâce à un amendement législatif. Nous représentons près de 1600 ingénieurs à l'emploi d'Hydro-Québec, en région et au siège social. Nous oeuvrons en planification des réseaux de production, de transport, de distribution et de télécommunications. Nous faisons également l'ingénierie des centrales des postes, des lignes et l'ingénierie des télécommunications. Nous faisons aussi l'exploitation des installations du réseau d'Hydro-Québec en collaboration, parfois, avec des firmes de génie-conseil et d'autres intervenants.

Le mémoire déposé par le SPIHQ et le SPSI repose sur une vision de l'entreprise conforme à sa

réalité historique et au rôle social d'Hydro-Québec. Les orientations annoncées par Hydro-Québec dans son mémoire, orientations qui ont été confirmées il y a quelques semaines par les coupures de postes et le redéploiement du personnel, ne sont pas sans inquiéter les ingénieurs et les scientifiques de l'entreprise, et nous croyons que nos préoccupations rejoignent celles de l'ensemble des Québécois. Quelques groupes se sont présentés ici en proposant des orientations encore plus inquiétantes, que ce soit la municipalisation ou même la privatisation d'Hydro-Québec, en tout ou en partie.

Pour mieux comprendre l'état d'esprit de nos membres, on pourrait se reporter... faire un petit historique, se reporter brièvement au milieu des années quatre-vingt. L'entreprise vivait alors une crise majeure. Ses projets nucléaires étaient reportés aux calendes grecques. Le développement de la Baie James était aussi reporté et une décentralisation majeure était en cours. Hydro-Québec avait alors baptisé une de ses orientations principales «l'approche clientèle», c'est-à-dire un rapprochement de l'entreprise vers ses clients.

À l'époque, notre syndicat avait contesté la réorganisation, ce qui nous avait valu des critiques de nos dirigeants. Ils disaient que l'entreprise était pour sortir grandie de sa réorganisation. Les résultats de la réorganisation ne se firent pas attendre. À la fin des années quatre-vingt, l'état lamentable de nos installations allait provoquer la pire vague de pannes de l'histoire d'Hydro-Québec. Nous avons à nouveau dénoncé la situation. L'entreprise dut finalement reconnaître que nous avions raison et entreprit de redresser la situation. En 1989, elle présenta à cette commission des orientations susceptibles d'opérer le redressement. Sa proposition d'alors reflétait ses besoins en argent et en main-d'oeuvre pour rectifier le tir. Depuis, Hydro-Québec a repris la situation en main. Les pannes ont diminué, les clients sont plus satisfaits et le moral des employés s'est amélioré.

Mais voici que le cycle commence à nouveau à Hydro-Québec, le cycle des coupures de postes et des réorganisations. Et, pendant que la direction d'Hydro-Québec vous proposait un plan de développement où elle étalait son désir de satisfaire ses clients totalement et au moindre coût, elle informait le public de substantielles réductions de personnel, de la fermeture de bureaux d'affaires et du redéploiement d'un grand nombre de ses employés. Nous ne comprenons pas comment Hydro-Québec peut tenir un semblable discours. Nous craignons de voir Hydro-Québec perdre bientôt les acquis des dernières années et revivre le cycle des coupures de postes, des pannes et de l'insatisfaction de la clientèle. Bien sûr, les ingénieurs et les chercheurs d'Hydro-Québec ont collaboré et continueront à le faire à la démarche de qualité totale de l'entreprise. (10 h 10)

Nous participons déjà par centaines aux équipes d'amélioration implantées dans le cadre de cette démarche, mais nous craignons de voir le manque de cohérence de l'entreprise faire perdre aux employés la motivation qu'ils ont eue à participer jusqu'à présent à cette démarche. Par ailleurs, les ingénieurs et les chercheurs d'Hydro-Québec sont restés sur leur appétit à la lecture du plan de développement d'Hydro-Québec. Plusieurs items importants, non seulement pour nous, mais pour la société québécoise toute entière ne sont qu'accessoirement abordés dans la proposition d'Hydro-Québec.

Tout d'abord, le leadership technologique. Si Hydro-Québec n'est pas un leader technique dans son domaine, qui le sera? Qu'il suffise de mentionner, par exemple, les réseaux de distribution. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'Hydro-Québec a expliqué d'abondance ses intentions dans ses livraisons successives des plans de développement depuis plusieurs années. Dans ce domaine, Hydro s'est engagée à produire des philosophies, des normes, des pratiques, etc. Encore cette année, Hydro-Québec nous promet de renforcer le réseau de répartition, de rendre sa gestion plus flexible.

Nous allons vous épargner la lecture des mémoires successifs à ce chapitre, et qu'il suffise de mentionner que des investissements de plus de 700 000 000 $ avaient été prévus pour couvrir nos besoins il y a quelques années. Comment un leader technologique peut-il tergiverser aussi longtemps autour d'une question aussi importante? Signalons, en passant, que ce sont ces dépenses — 700 000 000 $ — que l'Union des municipalités est venue réclamer ici plus tôt. Dans les circonstances, ce serait plutôt un cadeau de Grec qu'Hydro-Québec ferait aux maires en leur refilant une facture semblable.

Nous avons entendu les maires de nos villes protester avec véhémence, récemment, pour moins que ça. Exercer son leadership technologique permettrait également à Hydro-Québec de jouer son rôle moteur dans la stratégie de grappes industrielles. Notre gouvernement et la population du Québec n'en attendent pas moins d'Hydro-Québec. Qui, au Québec, dispose des ressources humaines et financières pour être le pivot de cette stratégie dans le domaine des équipements de production, de transport et de la distribution d'énergie électrique?

Trop souvent, d'importants projets à forte concentration technologique ont été confiés à des entreprises étrangères sans que le Québec participe substantiellement aux retombées de ces projets. Il suffit de rappeler ici l'échange multiterminal Radisson-Nicolet-des Cantons à courant continu, les contrats des compensateurs statiques, et des liens asynchrones à Châteauguay et à Madawaska.

Il faut également déplorer l'attrait exercé par la cogénération. Non seulement faut-il importer le combustible pour ces installations — combustible polluant, rappelons-le — mais, en plus, l'ingénierie et le matériel sont importés aussi de l'étranger. Privilégier une telle filière revient à se tirer dans le pied au moment où le chômage atteint des sommets inquiétants au Québec.

Hydro-Québec a contribué au développement de quelques entreprises du secteur de la haute technologie; il faut l'en féliciter. Une poignée d'entreprises dynamiques et exportatrices de haute technologie ont vu le jour grâce à Hydro-Québec. Il s'agit d'entreprises de haut savoir formées parfois d'anciens employés. Or, HydroQuébec ne propose pas de stratégie pour continuer dans

cette veine pourtant prometteuse.

Ces entreprises ont été formées après d'intenses efforts de recherche et de développement patronnés par Hydro-Québec, encouragés par tout son personnel, du simple ingénieur au président de l'entreprise. Nous croyons qu'en améliorant la planification de la recherche et du développement et en augmentant les budgets qui y sont consacrés, Hydro-Québec augmenterait son efficacité interne et multiplierait les retombées de ses efforts au profit de la collectivité québécoise.

De plus, il faut résister à la tentation de se comparer aux autres sociétés de production et de transport d'électricité comme nous l'entendons trop souvent depuis peu. Beaucoup de ces entreprises, parfois parmi les plus importantes, connaissent de sérieuses difficultés techniques et financières. Avec ses 700 000 000 $ de profits en 1992, Hydro-Québec n'a aucune raison de se comparer aux canards boiteux de son secteur. Au contraire, il faut profiter dès maintenant de notre situation privilégiée pour permettre à l'industrie québécoise d'occuper, grâce à Hydro-Québec, le terrain laissé vacant par les autres.

Pour qu'Hydro-Québec puisse jouer son rôle de partenaire essentiel, elle doit s'assurer qu'elle dispose des ressources humaines en quantité et en qualité suffisantes pour rencontrer ses objectifs. À cet égard, ses orientations en matière de ressources humaines sont pour le moins inquiétantes. Plutôt que de planifier ses ressources et de faire ses devoirs, elle préfère se baser sur des comparaisons. De plus, la formation, bien que constituant un important poste au chapitre des dépenses, des dépenses et les termes d'Hydro-Québec au bilan q Hydro-Québec, n'est pas un item particulièrement développé en termes de stratégie ou de besoins spécifiques de l'entreprise dans son plan de développement.

Force nous est de constater que, pour la population des ingénieurs et des chercheurs, il n'y a ni programme ni stratégie de formation. Nous ignorons quelles sommes en formation ont été consacrées au groupe ingénieurs et scientifiques. Les investissements en formation sont des investissements que l'on devrait faire en formation, pas des dépenses. Les investissements en formation pour nos populations ont été improvisés. Ils ne sont régis par aucune politique ou objectif d'entreprise. Nous ignorons à quelles fins ont servi les sommes de 47 000 000 $ qu'Hydro-Québec avoue candidement avoir dépensé en formation en 1992. Ce montant correspond au budget annuel d'un gros cégep au Québec, et il est surprenant que l'entreprise semble le dépenser sans planification. Tous les intervenants du monde du travail, patronal ou syndical, s'accordent à mettre l'accent sur l'importance d'une formation adaptée aux nouvelles réalités du monde du travail en 1993. Hydro-Québec ne peut se soustraire à cette obligation.

En conclusion, les ingénieurs et les chercheurs d'Hydro-Québec désirent continuer à contribuer à l'essor d'Hydro-Québec et de la société québécoise. Notre entreprise peut et doit devenir non seulement la meilleure entreprise d'électricité au Canada, mais la meilleure entreprise canadienne. Point.

Je vais passer la parole au porte-parole du SPSI.

M. Meunier: M. le Président, Mme la vice-première ministre, mesdames et messieurs les députés, le Syndicat professionnel des scientifiques de l'IREQ, le SPSI, a été formé en 1989. Le SPSI regroupe des chercheurs et ingénieurs des deux centres de recherche d'Hydro-Québec, soit l'IREQ de Varennes et le LTEE de Shawinigan. En tout, 313 chercheurs et ingénieurs de plusieurs disciplines scientifiques de pointe.

Ses membres forment l'un des groupes les plus scolarisés du Québec; 70 % des chercheurs possèdent une formation universitaire poussée de niveau maîtrise ou doctoral. Le SPSI s'étant donné comme mandat de devenir un intervenant majeur dans la recherche et le développement au Québec, c'est donc à titre de professionnels scientifiques que nous souhaitons aujourd'hui intervenir dans un débat qui nous concerne totalement, soit l'avenir de la recherche au Québec et plus particulièrement à Hydro-Québec.

M. le Président, je cède dès maintenant la parole à Gilles Champagne, qui va exposer la problématique de la RDDE à Hydro-Québec.

M. Champagne (Gilles): Merci. M. le Président, Mme la vice-première ministre, mesdames et messieurs les députés, mesdames, messieurs, nous aimerions, à titre de scientifiques, vous faire part de nos réflexions sur l'état de la recherche ou, plus précisément, en ce qui a trait à la stratégie et à la vision ou plutôt à ce que nous percevons comme un manque de vision, de stratégie. Mais nous aimerions tout d'abord, en quelques mots, redéfinir ce qui se cache exactement derrière ces deux initiales que l'on emploie si fréquemment, R et D, car, comme tous les autres secteurs d'Hydro-Québec, le secteur de la R et D a été soumis à bien des mouvements, bien de nouvelles pensées qui ont pu faire perdre de vue l'objectif premier.

Au-delà de toutes les questions de qualité totale et autres philosophies qui nous ont agités récemment, il convient en effet de rappeler que toute la problématique de la R et D à Hydro-Québec gravite autour de cet énoncé terriblement simple: Hydro-Québec est un producteur, un transporteur et un distributeur d'énergie hydroélectrique. Cette mission de l'entreprise HydroQuébec repose obligatoirement sur deux éléments de base totalement inévitables: la ressource, qui est le plus souvent nous, et la technologie qui rend cette ressource utile et utilisable. Sans l'une ou l'autre de ces composantes, la construction Hydro-Québec tombe. N'oublions pas que l'un des accès à la richesse de la société québécoise vient du fait que nous avons su utiliser cette ressource.

Le plan de développement Hydro-Québec souligne — et avec raison — qu'Hydro-Québec possède un savoir-faire unique au monde en matière de production, transport et gestion du réseau de distribution. HydroQuébec — personne ne peut le nier — a su inventer, grâce à ses efforts de recherche, les technologies nouvelles qui servent aujourd'hui à travers le monde. On

n'a qu'à penser à la mise au point du disjoncteur grand froid commercialisé par Cegelec, au développement de la pile ACEP, commercialisée au Japon, entre autres, comme exemples. Or, ce savoir-faire qui permet à Hydro-Québec de réaliser sa mission, ce n'est pas autre chose, au départ, que des scientifiques, hommes et femmes, avec leur imagination et leur expertise. C'est notamment les 350 chercheurs, chimistes, ingénieurs, mathématiciens, etc., qui créent et développent au centre de recherche d'Hydro-Québec. (10 h 20)

II y a 25 ans, Hydro-Québec, par le biais de l'IREQ, s'est créée une banque de chercheurs en électricité unique au monde, en allant tout simplement recruter les meilleurs chercheurs de chaque pays. Or, en 1993, nous avons réussi à inverser cette proportion, et c'est maintenant 75 % de l'expertise qui est issue de nos écoles. Cela signifie que nous avons réussi à instaurer une pensée de recherche typiquement québécoise en matière d'électricité. Il y a très peu d'exemples au Québec ou même au Canada où une telle tradition scientifique a pu s'établir aussi solidement. Grâce à cet acquis, nous sommes donc en mesure aujourd'hui de trouver ici même les solutions techniques aux nouveaux impératifs environnementaux ou économiques qui se complexifient sans cesse.

Le plan 1993-1995 fait référence à l'importance du rôle joué par la R et D, notamment en termes d'économie et de perspective d'avenir. Ainsi, un important parc de haute technologie de réputation mondiale est en train de s'établir autour de l'IREQ. Cette région rappelle notamment les modèles de développement qu'on retrouve à Boston ou à Silicon Valley. Vous avez notamment l'INRS, le CITEC, CANMET, BELL, ABB, IGM et l'Agence spatiale.

De plus, nous avons développé une expertise exceptionnelle dans les domaines d'avenir qui donne à l'IREQ et à ses chercheurs un rayonnement au niveau international. L'EDF, par exemple, vient voir nos scientifiques en ce qui concerne la robotique, les piles ACEP connues au Japon, aux États-Unis et même en France, à l'Université Pierre et Marie Curie, avec qui nos chercheurs collaborent au développement d'un instrument de dosage de polluants environnementaux.

Autre exemple. Grâce à l'octroi de licences, les découvertes technologiques des chercheurs génèrent une activité économique de l'ordre de 15 000 000 $, ce qui se traduit par 293 emplois créés dans des PME filiales d'Hydro-Québec, par également 1771 emplois directs et indirects reliés à la technologie. Plus encore, comme l'indique le rapport d'Hydro-Québec, ces impacts économiques sont plus importants à long terme que les chiffres d'emplois directs et indirects le laissent supposer.

À l'égard des redevances d'octrois, fruits de nos innovations, il est important de souligner que, toutes proportions gardées, les revenus de redevances sont comparables à ceux du MIT. Sans s'étendre davantage sur ces retombées économiques, il faut se rappeler que la R et D est intimement liée à la mission d'Hydro-Québec. Le domaine de la production énergétique, quel qu'il soit, en est un de technologie, de technologie en constante mutation où l'avenir n'a pas dix ans d'âge. Si cette technologie n'est pas développée ici, elle devra forcément être importée d'ailleurs.

En 1993, force nous est de constater que la R et D souffre de décisions à la pièce. Ceci s'illustre clairement par deux des conséquences les plus saugrenues de ce manque de vision et de planification. Il est impossible d'assurer une continuité dans les équipes de recherche, et les sommes allouées à l'exploration de nouvelles filières de recherche sont nettement insuffisantes. D'une part, 43 %, je devrais dire 46 % actuellement des chercheurs de l'IREQ et 61 % des chercheurs du LTEE sont des temporaires embauchés sur des contrats de six mois. Quelques exceptions atteignent le maximum de deux ans. Nous nous devons de capitaliser sur l'actif que représentent les chercheurs pour une entreprise et la société. Avez-vous une idée de ce que signifie, en recherche, constituer une équipe où les tâches de chacun des membres s'inscrivent dans un diagramme d'activités complexes? Et que tous ces membres sont engagés avec des contrats de six mois! C'est faire reposer la réussite sur l'hypothèse que tous les membres sont opérationnels et productifs immédiatement. Or, c'est faux. Peu importe la discipline scientifique, il faut intégrer et roder un chercheur dans un domaine donné. Et ceci nécessite une année de formation. D'autre part, pour ce qui est du sous-investissement alloué à l'exploration de nouvelles filières, il se manifeste de façon plus précise par une intensification de la recherche vers les besoins à court terme et un délaissement marqué de toute recherche à long terme.

Le Président (M. Audet): Pardon, Monsieur. Est-ce que vous pouvez conclure? L'enveloppe de temps est déjà malheureusement presque toute terminée. Vos 20 minutes...

M. Champagne (Gilles): J'aimerais formuler quatre recommandations plus précises.

La première est qu'il convient d'élaborer dans les plus brefs délais, en partenariat avec le personnel scientifique, une véritable stratégie de recherche et de développement qui tienne compte des objectifs d'Hydro-Québec, en termes d'efficacité et de moindre coût, mais également des contextes scientifiques, économiques et sociaux en développement.

Ma deuxième recommandation est que l'objectif budgétaire de 2 % consacré à la recherche doit être non seulement maintenu mais largement dépassé. Dans une approche de qualité totale où la qualité est intimement liée à la recherche, il y aurait lieu de joindre les niveaux d'investissement des pays les plus évolués économiquement.

Troisième conclusion et avant-dernière, réduire le niveau de temporariat du personnel scientifique. Cela permettrait de réintroduire la continuité et l'efficacité au sein des équipes de recherche, mais, plus encore, une action immédiate permettrait de préserver ces acquis indéniables qui constituent 25 ans d'investissement dans

la formation de notre élite scientifique.

Dernière conclusion, recentrer les activités d'Hydro-Québec vers les filières à long terme qui sont les sources de croissance future. Le SPSI, d'ailleurs, en cela, .çndosse la recommandation de M. Roger Miller, titulaire de la chaire d'Hydro-Québec en gestion de la technologie de l'UQAM qui, dans un rapport intitulé «Résumé des entretiens avec les clients internes d'Hy-dro-Québeo présenté à Hydro-Québec en 1992, précisait justement qu'Hydro-Québec devait absolument, et je cite: «...engager plus de personnel dans les technologies en émergence».

Je tiens à vous remercier, M. le Président, Mme la vice-première ministre ainsi que les membres de la commission. Merci.

Le Président (M. Audet): Merci beaucoup. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Alors, j'aimerais vous remercier d'être venus rencontrer les membres de la commission et de participer à cette grande consultation que nous faisons en ce moment sur le plan de développement d'Hydro-Québec, plan de développement que vous connaissez bien.

Je vais juste, peut-être, d'entrée de jeu, vous demander et surtout, suite à vos commentaires du début: Si on compare les efforts de rationalisation en cours, autant chez Hydro Ontario que dans les grandes entreprises privées — parce que ça se fait là aussi — à ceux qui sont effectués par Hydro-Québec. Est-ce que vous considérez que les efforts de Hydro-Québec sont déraisonnables?

M. Champagne (Louis): Mme la vice-première ministre...

Mme Bacon: Vous semblez inquiets.

M. Champagne (Louis): Nous sommes inquiets de deux choses: tout d'abord, de la performance d'Hydro-Québec après les coupures de la rationalisation, parce que nous avons vécu une période très difficile, à îa fin des années quatre-vingt. Nous avons connu des pannes à répétition, nous avons connu des clients très insatisfaits qui ont protesté à Hydro-Québec. Les sociétés dont vous avez parlé qui rationalisent actuellement traversent des situations techniques ou financières qui sont énormes, dont on n'a pas idée à Hydro-Québec. Hydro Ontario a des difficultés presque insurmontables avec sa filière nucléaire. Ce que nous constatons, c'est qu'à Hydro-Québec ces causes-là ne devraient pas provoquer les mêmes effets qu'en Ontario. Nous pensons que les efforts de rationalisation d'Hydro-Québec sont peut-être exagérés, d'une part; d'autre part, nous souscrivons toutefois à une certaine forme de discours à l'effet qu'il faut... il fallait améliorer nos structures. Nous avons déploré, déjà, des structures incohérentes à Hydro-Québec. On ne peut pas, je pense, protester si

Hydro-Québec veut les rationaliser, ses structures, mais l'effort est beaucoup trop considérable, d'une part; d'autre part, le plan de développement d'Hydro-Québec nous semble aller dans un sens où Hydro veut devenir presqu'uniquement une entreprise de services et plutôt que...

Nous ne voulons pas, les ingénieurs d'Hydro-Québec ne veulent pas profiter des malheurs du voisin, mais il faut se rappeler que Hydro Ontario était un des moteurs économiques de l'Ontario. Sans vouloir profiter de son effondrement pour, en quelque sorte, prendre sa place au Québec, il nous semblerait opportun qu'Hydro-Québec, plutôt que d'imiter Hydro Ontario, tente de, un peu, profiter de la situation pour attirer au Québec les nouvelles entreprises dans le secteur de la production, du transport et de la distribution d'énergie, comme votre collègue de l'Industrie et du Commerce l'a déjà suggéré. Alors, ces efforts de rationalisation là, nous craignons, outre la qualité du service qui risque de diminuer, nous craignons qu'ils fassent perdre les efforts qu'Hydro devrait consacrer à développer sa grappe industrielle, sa propre grappe industrielle, dans un contexte — et nous insistons là-dessus — les ingénieurs d'Hydro-Québec croient que le contexte est très favorable, actuellement, au développement économique de l'industrie de la production et du transport et de la distribution au Québec. (10 h 30)

Mme Bacon: Au début de votre mémoire, vous présentez la position de vos deux syndicats relativement à certains aspects de la proposition du plan de développement et vous y allez d'affirmations qui ne me semblent pas toujours étayées, là — vous me permettrez de dire ça — dans votre texte. J'aimerais ça que vous m'apportiez certaines précisions à des affirmations que vous faites. J'aimerais savoir en quoi le discours de la proposition du plan d'Hydro-Québec, et je vous cite ici, «ressemble étroitement au credo de n'importe quelle autre entreprise dont la finalité — et je reviens encore à ce que vous disiez tantôt — repose sur une argumentation essentiellement de rentabilité à courte vue». J'aimerais ça que vous m'en disiez davantage.

M. Champagne (Louis): L'argumentation qu'Hydro-Québec propose dans son plan nous semble évacuer une partie de son rôle social, de son rôle social et économique. C'est évident qu'Hydro-Québec ne doit pas faire de pertes, mais Hydro-Québec fait quand même des centaines de millions de profit.

Mme Bacon: Vous n'êtes pas contre ça, M. Champagne!

M. Champagne (Louis): Pas du tout, Mme la ministre, au contraire.

Mme Bacon: Parce qu'on est fiers, ce matin, quand on regarde ça par rapport à Hydro Ontario.

M. Champagne (Louis): Tout à fait, mais nous pensons que plutôt que d'imiter Hydro Ontario, nous

devrions profiter de la situation. Nous pensons qu'Hy-dro-Québec est dans une situation où elle devrait inciter les entreprises de son secteur à venir investir au Québec plutôt qu'en Ontario. Et on connaît la situation à Hydro Ontario parce que ce sont les voisins, mais il y a des entreprises américaines, de grandes entreprises américaines qui sont dans une situation comparable. Alors, plutôt que d'avoir une vision à courte vue, parce que c'est sûr qu'il est possible d'augmenter nos profits, à court terme, en coupant du personnel. C'est ce qu'Hy-dro-Québec a fait au milieu des années quatre-vingt. Ses profits avaient augmenté à ce moment-là, mais il nous semblerait déraisonnable d'augmenter nos profits dans un contexte où, au contraire, nous devrions être en train de travailler au développement économique du Québec. La finalité d'Hydro-Québec n'est pas uniquement le profit, c'est le développement du Québec au complet, mais on n'a rien contre le profit.

Mme Bacon: Mais c'est difficile de comparer avec les années quatre-vingt, et on ne peut pas comparer... ce n'est pas fait de la même façon, quand même.

M. Champagne (Louis): L'ampleur des coupures est supérieure à celles que nous avions connues au milieu des années quatre-vingt. Nous avions eu 700 ou 800 coupures de postes, on nous en annonce 3000 pour les prochaines années. Elles sont plus étalées dans le temps, mais il va y en avoir plus.

Mme Bacon: Est-ce qu'on va perdre le même savoir-faire qu'on avait perdu à l'époque? C'est de ça que vous avez peur?

M. Champagne (Louis): Hydro-Québec se fait rassurante à cet égard-là, mais les risques sont tout à fait là. Et si Hydro-Québec consacre uniquement son focus, ses efforts, uniquement et strictement à l'entreprise de services et uniquement à l'entreprise de services — ce qui est bien en soi, on n'a rien contre l'entreprise de services — mais si le focus est mis uniquement là-dessus, nous allons perdre tout le reste des retombées d'Hydro-Québec.

On pourrait donner des exemples de bonnes entreprises de services au Québec qui ne génèrent pas beaucoup d'activité économique alors que nous croyons qu'Hydro-Québec est dans une situation où elle devrait le faire.

Mme Bacon: À la page 6 de votre mémoire, vous faites état que le Canada se situe dans le peloton de queue des pays de l'OCDE relativement à la proportion du PIB investie en recherche et développement et qu'Hydro-Québec occupe la huitième place de l'ensemble des entreprises canadiennes quant au montant investi en recherche et développement. Et vous évoquez également qu'Hydro-Québec portera, sur l'horizon 2000, ses budgets affectés à la recherche et développement à 2 % de son chiffre d'affaires alors que ceux-ci étaient de 1,8 % en 1988. Vous ne croyez pas que l'entreprise prend déjà très au sérieux son rôle de leader technologique dans un contexte de rareté de ressources? Quand même, il faut se l'avouer, et compte tenu que sa performance dans ce domaine soit équivalente à celle des meilleures entreprises canadiennes?

M. Champagne (Louis): Effectivement, HydroQuébec consent un effort qui est considérable, mais sa situation particulière devrait l'inciter à augmenter sa participation à l'effort de recherche et de développement. C'est sûr que si on se compare aux entreprises canadiennes, nous nous comparons à des entreprises et à un pays où la recherche et développement n'est pas très substantielle par rapport aux pays industrialisés. Mais la situation d'Hydro-Québec est encore, à cet égard-là, particulière. Il n'y a pas de grandes entreprises au Québec. Si on regarde les chiffres de l'Allemagne, de la Suède, de la Suisse, ces pays-là, en plus d'avoir de grandes entreprises de transport d'électricité comme l'Électricité de France qui fait de la recherche, ont aussi des entreprises du secteur privé, de grandes entreprises du secteur privé qui en font, de la recherche. Au Québec, nous n'avons pas cette chance-là. Nous n'avons qu'Hydro-Québec pour faire de la recherche et qui peut financer cette recherche-là. C'est sûr qu'Hydro-Québec fait un effort substantiel, mais nous estimons que, compte tenu de ses ressources, compte tenu de la qualité des chercheurs qu'Hydro-Québec a à son emploi, elle devrait faire un effort supplémentaire.

Et nous insistons là-dessus, il y a eu quelques grands succès dans les entreprises qui ont émergé de nos groupes de recherche. Il suffit de penser à CYME international, à M3I, ces entreprises-là vendent beaucoup plus à l'étranger qu'au Québec actuellement, beaucoup beaucoup plus. Et c'est en poussant davantage dans ce sens-là... C'est d'ailleurs le sens, je pense, de ce que M. Tremblay a proposé. C'est en poussant dans ce sens-là que nous allons obtenir des emplois qui ont de la valeur au Québec.

Mme Bacon: Oui. Vous mentionnez, à la page 9 de votre mémoire, que le fait de subventionner le développement de l'expertise à l'extérieur de l'entreprise place l'entreprise en situation de dépendance quant à la réalisation de ses activités stratégiques et contribue aussi à ternir l'image de l'entreprise au Québec et à l'étranger.

Cette situation, est-ce qu'elle ne contribue pas plutôt à structurer davantage les activités de la grappe industrielle de la production, du transport, de la distribution d'électricité, en permettant à d'autres entreprises de se bâtir une expertise solide dans ce domaine-là?

M. Champagne (Louis): Les entreprises externes, on aurait peut-être dû le préciser, auxquelles on référait, ce sont des entreprises étrangères. Il y a beaucoup de contrats clé en main qui sont donnés. Les exemples que nous avons donnés plus tôt...

Mme Bacon: Oui.

M. Champagne (Louis): ...le multiterminal RNDC, les compensateurs statiques, les liens asynchrones, toutes ces technologies-là sont des technologies qui viennent de l'étranger et que nous achetons clé en main, avec des retombées minimes au Québec. C'est évident que, quand on parle de firmes externes, nous ne visons pas des firmes externes à Hydro-Québec, mais des firmes soit de génie-conseil québécoises ou des firmes, des manufacturiers québécois, pas du tout...

Mme Bacon: D'accord.

M. Champagne (Louis): ...notre syndicat n'a jamais refusé de collaborer avec... nos ingénieurs n'ont jamais refusé de collaborer avec des manufacturiers québécois ou des ingénieurs-conseils québécois. C'est vraiment... on aurait peut-être dû dire des entreprises étrangères au Québec.

Mme Bacon: Non, non, ça ne fait rien. Ca va.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, c'est inquiétant que les cerveaux d'Hydro-Québec, les plus hauts niveaux, ingénieurs et chercheurs, portent un jugement extrêmement sévère sur la vision, pas la vision, mais la qualité d'Hydro-Québec. C'est un jugement très sévère que vous portez. Jugement, d'autre part, il ne faut pas se faire de cachette, là, qui est porté quotidiennement quand on rencontre individuellement des gens qui y travaillent. Vous ne faites, à mon sens, qu'officialiser ce qu'on entend, en particulier sur la vision à courte vue d Hydro-Québec, en particulier sur l'emploi précaire. C'est évident que des chercheurs avec des contrats de trois, quatre, cinq ou six mois, là, je vous avoue que ce n'est pas des conditions idéales pour la recherche.

Également, sur le nombre de postes, on me dit que, souvent, il y a des ingénieurs sous-utilisés, et qu'il y a des contractuels de l'extérieur assis confortablement sur les sièges de certains d'entre vous à l'intérieur des boîtes. Ça, je trouve ça épouvantable, dégueulasse même! Il y a également des contrats de gérance de certains projets qui pourraient être confiés à des ingénieurs à l'interne, ça pourrait être un élément de motivation, ça pourrait être un élément d'émulation, alors que c'est confié, avec des contrats très lucratifs, des contrats de gérance, à l'extérieur.

Et le bout qui m'a frappé également, c'est le constat que vous faites par rapport au pétage de bretelles que se fait Hydro-Québec avec Hydro international. Si jamais ils ne développent pas l'expertise, ou si on se soucie très peu de l'expertise québécoise, je me demande comment on va pouvoir continuer à se péter les bretelles comme il y en a certains qui font à Hydro présentement, au niveau des ténors.

Ma première question, c'est: Est-ce que vous avez été impliqués dans tout le processus de consultation et est-ce que vous avez pu dire aussi franchement que vous le faites ce matin ce que vous pensiez du plan de développement?

M. Champagne (Gilles): Si vous me permettez de répondre, M. le Président.

En soi on pourrait considérer que les membres de notre syndicat, chercheurs, n'ont pas été impliqués dans une politique de recherche et développement puisqu'on déplore qu'il n'y en ait pas, de politique. Si un processus comme celui-là a eu lieu, nos membres n'ont pas été impliqués du tout là-dedans. En soi, ça fait partie de nos recommandations de dire qu'on veut élaborer quelque chose en partenariat avec Hydro-Québec pour «focusser» sur les bons points. C'est ma réponse.

M. Champagne (Louis): Pour ce qui est du Syndicat des ingénieurs, nous avons été informés des orientations d'Hydro-Québec, nous n'avons pas été consultés. Nous avons convenu, toutefois, de tenter de trouver des mécanismes de consultation, nous avons convenu avec la haute direction d'Hydro-Québec de tenter de trouver des mécanismes de consultation, parce qu'en 1993 toujours être en train de se battre avec nos patrons, là, les syndicats et les patrons, ce n'est peut-être pas la façon de gérer des entreprises et de gérer des relations de travail.

Alors, nous allons tenter de trouver des mécanismes qui vont nous permettre de vous donner une réponse positive la prochaine fois, M. Chevrette, de dire que oui, nous avons été consultés, que nous avons été informés tout au cours du processus.

M. Chevrette: À l'ouverture des audiences, je disais que... j'affirmais que le plan de développement à Hydro-Québec était un fourre-tout, un genre de document pour faire plaisir à tout le monde. Je donnais l'exemple des éoliennes, 1000 MW lancés de même, sans projet précis. Sans être ingénieur, il me semble qu'un plan de développement, ça doit déboucher sur quelque chose d'assez concret où il y a des perspectives d'avenir, et une structure comme Hydro-Québec doit au moins planifier sur 20 ans, parce qu'on me dit même que ce sont des critères indispensables quand on se présente, par exemple, sur les marchés d'emprunt financier, c'est une planification à long terme, au moins 20, 25 ans qu'on doit présenter puis...

Comment expliquez-vous qu'Hydro s'arrête à peu près à 2000, en l'an 2000, si vous regardez un peu tout cela? Parce qu'il fallait qu'ils parlent de 2004 pour faire voir qu'il y avait du développement après. Mais s'ils n'avaient pas été obligés de faire ça, on aurait dit qu'ils s'arrêtaient à 2000 à peu près dans le plan de développement avec des objectifs d'économie d'énergie, par exemple, qui varient de 1990 à 1993, de 1993 à 1994 puis en 1994-1995, ils deviennent explosifs sur le plan de l'efficacité énergétique, ils vont atteindre leur objectif d'un coup sec. Est-ce que ça vous paraît sérieux, ça, comme... les ingénieurs, dans la boîte, qui ont à travailler sur ça, qu'est-ce que vous pensez de tout ça, vous? (10 h 40)

M. Champagne (Louis): Nous croyons que les objectifs d'économie d'énergie d'Hydro-Québec sont très ambitieux et que des programmes... ça va prendre des programmes très serrés pour gérer ces programmes-là.

M. Chevrette: Est-ce qu'ils sont préparés par des ingénieurs, les programmes d'efficacité énergétique, ou si c'est par des gens de marketing?

M. Champagne (Louis): En général, plus par des gens de marketing que par des ingénieurs. Il y a des ingénieurs qui font du marketing, aussi!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Oui, je comprends, mais... C'est parce que les informations sont à l'effet que c'est surtout des gens en marketing qui pensent à l'approche d'efficacité énergétique, et vous ne seriez pas mis à contribution à l'interne. Est-ce que c'est vrai?

M. Champagne (Louis): Nous pourrions être mis beaucoup plus à contribution à l'interne, dans ces travaux-là, effectivement. Nos compétences... et l'IREQ aussi, d'ailleurs. Beaucoup de projets de recherche et développement pourraient porter sur la gestion de la charge. Actuellement, la tendance des grandes sociétés publiques...

Quand on disait, tantôt, qu'il serait intéressant qu'Hydro-Québec se positionne et, sans vouloir profiter des malheurs d'autrui, il faut se rappeler qu'à quelque chose malheur est bon et que, puisque Hydro Ontario n'a pas d'argent à consacrer à ça, que des grandes sociétés américaines n'en ont pas non plus, Hydro-Québec pourrait, d'une part, financer de la recherche dans ça et, d'autre part, susciter des entreprises qui pourraient gérer, pas gérer, mais qui pourraient vendre cette expertise-là, non seulement au Québec, mais au moins partout en Amérique du Nord.

M. Chevrette: Est-il exact que c'est surtout des emprunts? On copie, on plagie, si vous voulez, l'Ontario ou l'État de la Floride en termes de programmes d'efficacité énergétique, présentement, plutôt que de penser des programmes typiquement de chez nous, adaptés à notre climat? Quelle est l'impression que vous avez de l'intérieur de cela? Parce que j'entends ça quotidiennement, moi.

M. Champagne (Louis): II y a beaucoup de programmes de gestion d'Hydro-Québec qui ont été copiés de la Floride. Pour ce qui est des programmes de gestion de la charge, ça serait étonnant qu'on les copie de la Floride. Il y avait eu des rumeurs, à l'époque, que nous avions copié un peu bêtement les programmes d'Ontario pour ce qui est de la... non seulement les programmes, mais les objectifs ontariens sans faire beaucoup d'études là-dessus. Je ne sais pas si la commission a vu les études d'Hydro-Québec à cet égard-là.

Il y a d'autres façons, aussi, de faire de la prévision de... pas de la prévision, mais de la gestion de la charge. Une façon de faire, ça serait au niveau des tarifs. On pourrait avoir des tarifs qui dissuaderaient les gens de gaspiller l'énergie ou qui inciteraient les gens, en fait, à être des bons gestionnaires de leur énergie. Mais la proposition d'Hydro-Québec vise des tarifs à l'inflation. Nous comprenons que les clients ne veulent pas payer plus cher que ça, mais c'est une façon d'inciter les clients à diminuer leur consommation, en tout cas, d'éviter le gaspillage que de leur faire payer le gaspillage, le bout de gaspillage un peu plus cher que le reste.

M. Chevrette: Au niveau des ressources humaines, on sait qu'il y a un plan de redressement puis, au niveau des régions, il y a des réaffectations, des divisions entre le service, si vous voulez, et puis la planification; le génie-conseil sera centré à un seul endroit puis les gens de métier, de réparation seront dans d'autres endroits, etc. On en a parlé beaucoup à l'ouverture et Hydro nous dit qu'ils ne prévoient pas trop de problèmes. Je leur souhaite bien, moi.

Mais ce que je voudrais savoir de votre part, c'est: Est-ce qu'il y a eu une analyse serrée, il y a eu une consultation avec les différents syndicats à l'interne pour voir si la marge de profit ne pourrait pas augmenter en changeant certaines pratiques, par exemple d'achat, en changeant certaines pratiques de faire, sans qu'on laisse porter tout l'odieux du plan de redressement exclusivement sur les coupures de personnel?

M. Champagne (Louis): Nous n'avons pas été consultés sur d'autres façons de réduire les dépenses que celle rejoignant les coupures de personnel. Peut-être le SCFP l'a été, mais notre syndicat ne l'a pas été.

Nous avons également suggéré à Hydro-Québec de revoir certains de ses projets. Nous estimons que ses dépenses sont énormes et nous croyons qu'il y aurait peut-être place à certaines économies. Il suffit de penser au projet Lac-Robertson, au nouveau Centre de conduite du réseau, où des dépenses considérables ont été annoncées par l'entreprise. Nous estimons que des études plus serrées devraient peut-être être faites pour économiser là aussi parce qu'il n'y a pas rien que les employés qui devraient porter le fardeau des coupures, mais nous croyons que certains projets auraient intérêt peut-être à être passés à la loupe et à être dégraissés.

M. Chevrette: Certaines primes de séparation entre autres. On s'en parlera tantôt.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Saint-Maurice, vous avez cinq minutes.

M. Lemire: Merci, M. le Président.

J'aimerais peut-être passer directement à une question qui me vient à l'esprit. À la suite de l'analyse que j'ai faite du mémoire et des discussions qu'il y a ici

ce matin, j'ai comme l'impression que ce que reflète votre mémoire, vous avez l'air à ne pas être heureux à l'intérieur de... Pour venir discuter, de la façon dont vous discutez dans votre mémoire, de votre patron qui est JJydro-Québec, y a-t-il quelque chose, est-ce qu'on pourrait parler des choses qui sont plus positives?

M. Champagne (Louis): On a parlé des choses positives. On vous a dit que l'état d'esprit des employés et l'état du réseau avaient été améliorés au cours des dernières années.

Nos craintes, c'est que les décisions qui sont prises actuellement nous replongent dans les difficultés que nous avons connues plutôt que de les solutionner. Nous avons peur qu'Hydro-Québec soit en train de jeter le bébé avec l'eau du bain actuellement. Mais ça, ça va rendre non seulement les ingénieurs, mais tous les employés, tous les Québécois malheureux. Nous aurions apprécié qu'Hydro-Québec nous présente d'autres hypothèses pour couper ses dépenses s'il fallait qu'elle les coupe.

M. Lemire: Comme quoi, par exemple?

M. Champagne (Louis): Bien, le nouveau centre de conduite du réseau, des centaines de millions vont être dépensés. Le Lac-Robertson, encore là, des centaines de millions vont être dépensés. Il y a peut-être des solutions alternatives moins chères que celles-là qui auraient eu intérêt à être regardées. La seule hypothèse qu'Hydro-Québec semble avoir considérée, c'est la réduction de main-d'oeuvre.

M. Lemire: Est-ce que... Par exemple, depuis 1991, Hydro-Québec travaille activement à implanter un Défi performance, son programme de gestion de la qualité totale qui vise à satisfaire le client et à performer davantage à l'intérieur de la boîte pour arriver à des meilleurs résultats. Pouvez-vous nous faire état des mesures que comptent prendre vos organisations et le personnel qu'elles représentent pour assurer, dans leur champ professionnel de compétence, d'aider à la réussite de ce programme? Qu'est-ce que vous allez faire, vous autres, pour aider à appliquer le plus rapidement possible la qualité totale à l'intérieur de la boîte d'Hy-dro-Québec?

M. Champagne (Louis): Nos membres ont déjà collaboré, collaborent et vont continuer à le faire à des centaines d'équipes d'amélioration dans le cadre du Défi performance dont vous parlez. C'est la partie, c'est la contribution des membres que nous représentons au Défi performance.

Nos institutions, je vous l'ai dit, ont déjà été approchées par la direction d'Hydro-Québec pour tenter d'améliorer nos processus d'échanges. On va évidemment participer à ce genre de discussion avec la direction pour tenter de trouver les moyens d'être consultés vraiment sur les politiques d'Hydro-Québec, de sorte qu'éventuellement on n'aura pas besoin de venir ici pour critiquer notre employeur, mais que notre employeur pourra prétendre, avec raison, que son plan de développement rejoint les préoccupations de ses employés. Mais ça, on n'en est pas là encore. L'implantation de la qualité totale dans une entreprise, quand ça réussit, ça prend cinq ans, semble-t-il. Alors, depuis 1991 que c'est commencé, on a encore quelques années avant de jouir pleinement de la qualité totale. (10 h 50)

Nous craignons, par contre, que les mesures qu'Hydro-Québec a prises récemment aillent à l'encon-tre de la qualité totale et qu'elles empêchent ou qu'elles amenuisent à un point tel les chances de succès de Défi performance que ça revienne à les saboter. Mon collègue de l'IREQ voudrait...

M. Meunier: M. le Président, j'aimerais amener un point d'information par rapport au positif et au négatif. Les chercheurs de l'IREQ, les scientifiques, sont très fiers des réalisations qui ont été apportées et qui ont été développées depuis 25 ans. Depuis quelques années, les filières d'exploration et de recherche ont été réorientées vers du développement interne et immédiat. La majeure partie des budgets de recherche se font sur de la recherche à court terme, et nous pensons qu'à long terme cette réorientation de la recherche et du développement à l'IREQ risque de porter un coup dur sur le futur de l'approche scientifique de l'IREQ. Nous sommes... nous avons du positif, nous sommes contents de ce qui s'est fait; par contre, nous sommes inquiets du futur.

Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Moi, je ne sais pas si c'est dans la nouvelle culture d'Hydro-Québec de lancer un programme Défi performance en insécurisant son personnel d'abord. Pour avoir fait des relations de travail pendant 17 ans, ça m'apparaît pour le moins aberrant, je vous avoue, ça dépasse tout entendement. Ordinairement, tu motives du monde en les associant à ta démarche... et ce, quotidiennement. Il faut que tu leur fasses épouser les objectifs de l'organisme, de la structure, de la boîte. Moi, je vous avoue que, si c'est ça, la nouvelle culture de l'Hydro, là, elle a besoin de réalignement, en tout cas, à mon point de vue. Parce que lancer un programme aussi important que ça en même temps qu'un plan de redressement qui ne fait que porter l'odieux sur le personnel, moi, ça m'apparaît quelque chose d'aberrant sur le plan du cheminement logique d'un groupe. Comment faire adhérer du monde à un programme ambitieux et, en même temps, ne pas les associer, au contraire, en les insécurisant?

Moi, je vous avoue très honnêtement que ça, là, ça fait partie d'une opération poudre aux yeux: Ça paraît bien, le Défi performance, tu sais, c'a l'air bon, dans la bouche d'un président, ça paraît bien, c'a l'air éloquent. Parler de nouvelle culture, aussi, ça paraît

bien, surtout que tu peux t'arranger le bec comme tu veux, tu sais, en le disant. Sauf que, fondamentalement, je ne trouve pas que c'est la façon logique, sur le plan des relations humaines, des relations patronales-syndicales, de faire adhérer du monde à de tels objectifs.

Ceci dit, pour l'IREQ, j'aurais une question: On me dit qu'à Hydro-Québec il y a toutes sortes de cours qui s'organisent partout, à des coûts assez élevés, merci! Par exemple, on paie des hôtels pendant des semaines de temps, 15 jours, à des employés, etc. Vous ne pensez pas que l'IREQ pourrait devenir, même, une école de formation pour l'ensemble du personnel d'Hydro-Qué-bec?

M. Champagne (Gilles): En soi, on pourrait d'abord regarder cette question-là en parlant du maillage avec les universités. Il est cetain que l'IREQ est un centre où on développe des technologies, on développe un savoir-faire; on tend à conserver ça, et on veut également explorer, on veut également explorer pour qu'il y ait un futur possible dans la recherche. Alors, lorsqu'on «focusse» trop, lorsque les chercheurs de l'IREQ «focussent» trop, à cause du type de planification avec lequel on doit vivre, vers des objectifs trop immédiats, donc, à la pièce, on ne peut pas explorer.

Est-ce qu'on peut faire la formation, maintenant? La formation — et je pense qu'Hydro-Québec le dit — la formation, c'est plus au sein, on le verrait plus au sein d'un maillage avec les universités. Les budgets, par contre, qui sont dépensés là-dedans, c'est un départ, mais ils doivent nécessairement être augmentés, je pense. Donc, la formation, vis-à-vis des universités. Il y a également un développement d'expertise vers les industries, qu'on verrait très bien avec la grappe industrielle. Pour nous, c'est là deux débouchés. Qu'on parle de formation ou de passage d'expertise, formation avec les universités; on peut d'ailleurs explorer davantage, aller plus loin pour que, dans 10 ans d'ici, on ait encore des réalisations sur la table, qu'on puisse en apporter et qu'on n'épuise pas, simplement, notre potentiel de savoir-faire. Donc, et le dernier point, naturellement, les grappes industrielles, c'est-à-dire avec des partenaires industriels, passer notre savoir-faire.

M. Chevrette: Une petite?

Le Président (M. Audet): Brièvement.

M. Chevrette: J'ai droit à une petite, petite?

Est-ce que vous accepteriez, vous, comme groupe, là, de chercheurs et d'ingénieurs, de participer à un grand débat public sur l'énergie au Québec, qui déborderait un peu le cadre, exclusivement, de la mission d'hydroélectricité?

M. Meunier: M. le Président, évidemment, les scientifiques de l'IREQ seraient très flattés de participer à des évaluations des différentes filières d'énergie au Québec. Par contre, avec le temps, depuis les 10 dernières années, il y a 10 ans, il se faisait énormément de recherche dans les sources d'énergie renouvelables. Toutes ces politiques de recherche à long terme ont été évacuées graduellement pour ne conserver que les principales: la fusion, l'hydraulique, l'éolienne. Donc, dans les énergies renouvelables, actuellement le centre de recherche ne pourrait pas amener une grande... ne serait pas un seul intervenant.

Le Président (M. Audet): Merci. Ça va? Je vais maintenant reconnaître M. le député de Drummond.

M. St-Roch: M. le Président. J'achète, d'entrée de jeu, votre remarque de conclusion dans votre présentation quand vous affirmez qu'Hydro-Québec doit devenir la meilleure entreprise au Canada. Parce que je pense, à ce moment-là, qu'elle résume très bien tous ses rôles et ses missions, incluant la formation de son personnel, incluant la recherche et le développement.

Alors, je suis très limité dans le temps. La première question... Je souscris aussi que, au niveau de recherche et de développement, il va falloir se dépasser si on veut essayer de maintenir le diapason dans cette filière-là et dans notre philosophie, aussi, des grappes industrielles, au niveau de recherche et de développement, et ma crainte qu'à 2 % horizon 2000, on va se faire sortir complètement.

Ma question est celle-ci: Si les législateurs que nous sommes recommandions à Hydro-Québec de rapprocher à 3 % horizon 2000, est-ce que, à votre connaissance, on a les ressources humaines nécessaires pour être capables de garantir cette filière de recherche et de développement en rajoutant aussi un volet, pas juste de préoccupations à court terme, besoins, mais développement de nouveaux horizons, nouvelles filières?

M. Champagne (Gilles): ii est certain que 2 %, un but de 2 % pour l'an 2000, ce n'est pas suffisant. ce n'est nettement pas suffisant. le canada se trouve le dernier pays de l'ocde. vous nous offrez 3 % en 2000, je ne peux pas dire d'autre chose que oui. les ressources, oui, on les a. le savoir-faire, on l'a. la formation, ça existe. les gens sont là, sont prêts vraiment à s'engager là-dedans, mais il est clair que, pour du personnel scientifique, s'engager, ça réclame qu'hydro-québec s'engage également. et là, je ne parle pas, non seulement du point de vue... c'est-à-dire, humain, mais je parle en tant qu'entreprise, à élaborer une politique, et pas une politique qui est élaborée quelque part. les gens qui font la recherche, les gens qui travaillent au laboratoire, ce sont nos membres, ce sont ces gens-là, des gens qui sont au courant des problématiques de r et d, ce sont des ingénieurs, ce sont des chercheurs. qu'on s'asseoie avec l'entreprise et qu'on élabore cette politique-là.

Le but de 2 %, c'est nettement insuffisant si on veut vraiment relancer Hydro-Québec. Je pense que la société québécoise, dans le développement qui repose sur une connaissance et compte tenu de la mondialisation des marchés, il est clair, il est très clair qu'on doit

investir sur ce qu'on possède avant, d'ailleurs, que ça s'en aille dans d'autres, tout simplement, dans d'autres pays. O.K.?

M. St-Roch: Je vous remercie.

Mon autre question: À la page 3 de votre mémoire, vous mentionnez qu'Hydro-Québec doit connaître et assumer pleinement son rôle de leader socio-économique au sein de la société québécoise. Et ma question est la suivante, parce que je pense qu'elle s'adresse à nous, les parlementaires, et notre gouvernement doit lui fournir tous les moyens pour y parvenir: Qu'est-ce que vous entendez par «fournir tous les moyens pour y parvenir»?

M. Champagne (Louis): Un des moyens, c'est la tarification, l'argent qui serait requis pour faire ça, d'une part. D'autre part, s'il y a besoin de modifications législatives pour permettre à Hydro-Québec d'aller plus loin dans la création d'entreprises, pour la forcer à s'impliquer davantage dans son champ propre de grappe industrielle, il n'y a peut-être pas besoin de loi pour ça, mais les parlementaires, je pense, peuvent et, jusqu'à un certain point, doivent exercer sur Hydro-Québec des pressions pour s'assurer qu'elle est un leader dans ce domaine-là. nous vous rappelons que, dans le plan de développement, la notion de grappe industrielle est presque évacuée. c'est pour ça que nous avons mis l'accent sur ces notions-là. nous estimons que l'entreprise a les moyens financiers et humains de faire beaucoup plus et beaucoup mieux dans ce domaine-là. nous avons déjà lait des choses. nous pouvons aller beaucoup plus loin ei. faire beaucoup mieux.

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, messieurs, au nom des membres de la commission de l'économie et du travail, je vous remercie de votre présentation.

Afin de permettre au groupe suivant, soit le Comité Baie James de prendre place, nous allons suspendre nos travaux deux minutes. Merci.

(Suspension de la séance à 11 heures)

(Reprise à 11 h 6)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous recevons maintenant le Comité Baie James.

Alors, Madame, Messieurs, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue au nom des membres de la commission. Je vous rappelle brièvement nos règles de procédure. Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous faire votre exposé, et je vous demanderais, avant de débuter votre exposé, de bien vouloir vous identifier, ce qui est très important pour le Journal des débats. Ensuite, suivra une période d'échanges d'une quarantaine de minutes. Vous pouvez y aller, vous avez la parole.

Comité Baie James

M. Chénier (Marc): Mme la ministre, M. le Président, Mesdames, Messieurs les députés. Merci d'avoir l'occasion pour le Comité Baie James de présenter notre mémoire. On n'aura pas le temps de tout présenter, mais on va vous présenter quelques-uns des faits saillants. On a des copies corrigées un peu pour améliorer les fautes de frappe puis un français plus soigné, qu'on va laisser avec M. Plourde après, si vous en voulez une.

On aimerait d'abord vous indiquer que nous ne sommes pas satisfaits du plan de développement tel que proposé par Hydro-Québec et que nous vous recommandons qu'il soit retourné à Québec pour que Hydro-Québec lui apporte des améliorations majeures.

Je vais présenter mes collègues. D'abord, à ma droite, Mme Anna Breszki. Mme Breszki est profes-seure de musique à Montréal. Elle détient un baccalauréat en ressources renouvelables de l'Université McGill. Et elle se dévoue activement aux questions énergétiques depuis deux ans au sein du Comité Baie James. Elle va nous parler de l'importance d'une enquête publique sur l'énergie ainsi que d'une politique mal connue d'Hydro-Québec, la collecte d'autorisations.

À ma gauche, M. Gordon Edwards. Il est docteur en mathématiques, il est aussi physicien, il est professeur de mathématiques et de sciences au collège Vanier, il est consultant depuis 20 ans sur les questions énergétiques et en particulier en ce qui touche l'énergie nucléaire. Il va nous parler des résultats préliminaires d'une étude qu'on est en train de faire faire, ainsi que de l'importance des programmes d'économie d'énergie à base communautaire.

Moi-même, je m'appelle Marc Chénier, je suis géologue de formation. Je travaille comme consultant. J'oeuvre depuis cinq ans pour différents groupes sur la question énergétique au Québec. Je vais vous parler de la dette à long terme d'Hydro-Québec ainsi que des prévisions de la demande. d'abord la dette à long terme. dans le plus récent rapport annuel d'hydro-québec qui date du 31 décembre 1991 — parce que le nouveau doit sortir la semaine prochaine — dans ce rapport, on indique que la dette d'hydro-québec, à ce moment-là, était de 30 000 000 000 $. les intérêts pour l'année 1991 étaient de 3 000 000 000 $. dans le nouveau plan qu'ils proposent, on parle de dépenser 53 000 000 000 $ de plus. hydro-québec parle aussi de la possibilité de 25 % d'autofinancement, ce qui veut dire que ce 53 000 000 000 $ ajouté serait diminué à environ 40 000 000 000$. alors, si on ajoute ça à la dette présente d'hydro-québec, ça nous amène à une dette, au bout de dix ans, de 70 000 000 000 $. c'est donc dire que la dette plus que doublera d'ici 10 ans. si on fait le calcul par personne au québec, par habitant du québec, 70 000 000 000 $ divisés par 7 000 000 d'habitants, grosso modo, ça fait 10 000 $ par personne. or, pour une famille de trois, ça fait une dette de 30 000 $ par famille. c'est une dette énorme. c'est un énorme

endettement que nous propose Hydro-Québec et, en même temps, il nous parle de développement durable en refilant cette énorme dette aux générations futures. (11 h 10)

Nos voisins, en Ontario — la dette d'Hydro Ontario est actuellement de 34 000 000 000 $ — et ils font des pieds et des mains, ils sont préoccupés, il y a de grandes mises à pied, on veut faire de grosses coupures. On a retourné le plan de développement à Hydro Ontario suite à une longue consultation. Alors, nous vous enjoignons de faire la même chose, c'est-à-dire de demander à Hydro-Québec de refaire le plan de développement et, plutôt que d'indiquer une augmentation de la dette à long terme, ils devraient plutôt viser à réduire la dette à long terme. en ce qui concerne les nouveaux 53 000 000 000 $ de dépenses que propose hydro-québec, si on fait un petit calcul, on se rend compte que 58 % de ce montant iraient à de nouveaux équipements et des lignes de transport et que 4 % seulement, en fait, moins de 4 %, iraient à l'efficacité énergétique. si on regarde d'autres chiffres d'hydro-québec dans ce même plan proposé, on se rend compte que l'efficacité énergétique satisfera 46 % des nouveaux besoins. donc, les investissements sont très disproportionnés. on devrait mettre plus d'importance dans les investissements, dans l'efficacité énergétique. cela comporterait beaucoup de bénéfices pour la société québécoise. d'abord, ça ne coûte pas plus cher que de construire de nouveaux équipements. d'après même m. andré jean de hydroquébec, c'est à peu près le même coût d'investir dans l'efficacité énergétique que d'investir dans de nouveaux équipements. selon d'autres études, par exemple b.c. hydro, on remarque que c'est beaucoup moins cher de créer un nouveau kilowattheure à partir de l'efficacité énergétique qu'à partir de nouveaux équipements. il y a beaucoup d'études qui ressemblent à celle de b.c. hydro.

Deuxième avantage, c'est qu'avec l'efficacité énergétique on n'a pas besoin d'entretien puisqu'il n'y a pas de nouvelle centrale, il n'y a pas de nouvelle ligne; ça veut dire pas plus d'entretien. Alors que si on construit de nouveaux équipements...

L'efficacité énergétique crée au moins autant d'emplois que de nouveaux équipements et cela, partout au Québec. Ça, Hydro-Québec aussi l'admet, mais il y a d'autres études ailleurs, dans beaucoup de juridictions, aux États-Unis et au Canada, qui indiquent que l'efficacité énergétique crée plus d'emplois que la construction de nouvelles centrales hydroélectriques. Et ces emplois qui sont créés par l'efficacité énergétique, ce ne sont pas des emplois isolés dans le Grand-Nord, ce sont des emplois créés partout au Québec, des emplois créés, par exemple, surtout dans le domaine de la rénovation si on se met à isoler comme il faut les appartements, les maisons au Québec.

Autre avantage de l'efficacité énergétique, les délais sont très courts, c'est-à-dire qu'on peut mettre cela en place et très vite, c'est rentable. Ça ne bloque pas d'énormes capitaux comme le fait l'hydroélectricité.

Pour construire une nouvelle centrale, on bloque d'énormes capitaux pendant de longues années avant que l'argent revienne alors qu'avec l'efficacité énergétique, cet argent revient très vite dans l'économie, ça fait plus d'argent disponible aux consommateurs, ça stimule l'économie.

Au niveau de la répartition des investissements de 53 000 000 000 $, Hydro-Québec a très mal fait ses devoirs. Le potentiel d'efficacité énergétique est beaucoup plus grand que celui qu'ils visent. Alors, on vous enjoint de leur retourner le plan de développement et de présenter des scénarios alternatifs où l'efficacité énergétique joue un plus grand rôle. Et deuxièmement, de leur faire faire une critique par des organismes indépendants.

J'aimerais aussi vous parler maintenant de la prévision de la demande. Hydro-Québec, dans le scénario moyen, prévoit une augmentation de la demande de 2,2 % par année. C'est une augmentation exponentielle. Si on regarde dans le passé, on se rend compte qu'il y a eu beaucoup d'erreurs de prévisions, non seulement de la part d'Hydro-Québec, mais de la part de plusieurs compagnies productrices d'électricité en Amérique du Nord. Systématiquement, on a fait des erreurs quant à la prévision de l'augmentation de la demande. Elle a toujours été trop élevée et, systématiquement, on s'est trompé au niveau de l'augmentation des coûts; ils étaient toujours trop bas. Par exemple, dans le plan de développement d'Hydro-Québec, dans les années soixante-dix, on prévoyait construire la Baie James, c'est-à-dire La Grande, le projet NBR. En plus de ça, 30 centrales nucléaires sous le Saint-Laurent, sinon on allait geler dans le noir! Alors, voilà, au début des années quatre-vingt, on s'est retrouvé avec un surplus d'énergie et on n'avait pas construit les 30 centrales sous le Saint-Laurent non plus. C'était une énorme erreur de prévision.

Justement, au début des années quatre-vingt, on s'est retrouvé avec ce surplus, avec une grosse dette, et pas d'acheteur. Alors, c'est là qu'on a été obligé de mettre en place, par exemple, l'exportation des surplus et puis les ventes à perte dans des contrats secrets auprès des alumineries. Mieux vaut un peu d'argent que rien du tout.

Un autre exemple de mauvaise prévision de la demande, c'est dans le plan de développement de 1974, qui a été accepté par la commission parlementaire. On avait prévu une demande exponentielle aussi. La demande projetée, par exemple, pour 1992 a été indiquée, mais elle s'est avérée deux fois moins élevée que celle prévue. Alors, plutôt que de toujours prévoir une augmentation, il y a une autre façon d'opérer, c'est-à-dire qu'on peut gérer la demande, et un mécanisme très connu, c'est ce qu'on appelle la croissance zéro.

On fixe un objectif dans l'avenir et on prend les moyens pour l'atteindre par des programmes d'efficacité énergétique. Et puis on ne serait pas les premiers à le proposer. C'est déjà fait. Il y a beaucoup d'études qui ont été faites là-dessus. Il y a, par exemple, «2025: Soft Energy Futures for Canada». Il y a même un volet québécois qui s'appelle «La Voie énergétique douce». C'est justement ce qu'on proposait en 1983. On peut

s'arranger très bien avec moins d'énergie, simplement en l'utilisant mieux.

Si on regarde même les statistiques du ministère de l'Énergie et des Ressources, dans l'énergie au Québec, édition 1992, on voit que la consommation énergétique au Québec en 1991 est la même que celle en 1973, même niveau. Donc, on est capables de vivre avec un même niveau d'énergie. On n'a pas besoin de toujours augmenter. Alors, nous vous demandons d'exiger qu'Hydro-Québec finance une ou plusieurs évaluations par des instances indépendantes de sa prévision de la demande d'électricité. Nous vous demandons de ne pas accepter le plan de développement proposé parce qu'il est basé sur une prévision de la demande qui n'a pas été évaluée par une instance indépendante.

J'aimerais maintenant laisser la parole à Mme Anna Breszki.

Mme Breszki (Anna): M. le Président, Mmes et MM., j'aimerais commencer par souligner l'importance de la participation du public dans le processus de la planification. Depuis 1989, le Comité Baie James plaide en faveur d'une commission d'enquête qui traiterait de l'avenir énergétique du Québec. Nous avons inclus, dans l'annexe 1 de ce mémoire, les modalités proposées pour une telle enquête. Cette commission d'enquête sur l'énergie doit être indépendante, ouverte sans restriction au public et aux médias, dotée de ressources adéquates et mandatée pour identifier les politiques et priorités énergétiques qui serviront les meilleurs intérêts à long terme de la société québécoise.

Nous vous prions, vous, nos représentants élus, de vous prononcer en faveur d'une telle enquête publique. Seule une commission d'enquête indépendante serait en mesure d'évaluer de façon adéquate le bien-fondé des investissements proposés par Hydro-Québec, et jouer du même coup le rôle d'un mécanisme permettant au public de réfléchir sur les choix, en évaluer les implications et participer aux prises de décision. En dernière instance, bien entendu, c'est la population québécoise qui paierait les frais de toute planification déficiente.

Tout récemment, le 25 janvier 1993, Hydro Ontario a retiré son plan de développement proposé en 1989. Celui-ci était axé sur des mégaprojets et aurait impliqué des dépenses de milliards de dollars. Ce revirement fut le fruit d'un processus d'examen public intense, rigoureux, sérieux et doté de ressources adéquates. Il existe des indices qu'Hydro Ontario s'apprête à opter pour un ensemble adapté d'approches énergétiques qui sont moins coûteuses, plus rapides, plus souples et plus avantageuses pour la société dans son ensemble. (11 h 20)

En cela, elle ne ferait que suivre une tendance qui se développe dans de plus en plus de régions en Amérique du Nord. Il est loin d'être évident que le plan d'action proposé par Hydro-Québec serve les meilleurs intérêts à long terme de la société québécoise. Il est clair, cependant, que toute discussion fructueuse du plan passe par un examen global de la politique énergétique du Québec. Ceci est une des raisons pour lesquelles une enquête publique majeure s'impose absolument.

Le processus de consultation entrepris par HydroQuébec et auquel le Comité Baie James a participé constituerait un pas en avant si, et seulement si c'était la timide amorce de la mise sur pied d'un processus public adéquat. Dans sa forme actuelle, la consultation ne représente pas du tout un substitut satisfaisant à une enquête publique indépendante majeure, car la consultation n'était pas ouverte au public, n'était pas dotée de ressources adéquates et n'était pas indépendante. Donc, nous proposons que le gouvernement du Québec mette sur pied une importante commission d'enquête traitant de l'avenir énergétique du Québec pour que la population québécoise puisse participer directement aux prises de décision.

J'aimerais maintenant faire quelques commentaires au sujet d'une orientation nouvelle et troublante d'Hy-dro-Québec: La collecte d'autorisations, une nouvelle politique qui ne figure pas dans le plan de développement. À notre avis, la nouvelle politique la plus lourde d'enjeu associée au plan de développement proposé par Hydro-Québec est celle visant à lui donner une marge de manoeuvre. Concrètement, cela signifie l'octroi de toutes les autorisations de projet requises avant que ne soit fixée la date du début d'éventuels travaux de construction. Bien que dévoilée par M. Drouin lors de la conférence de presse où on présentait le plan de développement et évoquée par des représentants d'Hy-dro-Québec dans le cadre de la consultation, cette nouvelle politique importante ne fut même pas mentionnée dans le plan proposé, et le principal document de planification d'Hydro-Québec, pour les trois années à venir, ne souffle mot sur un virage aussi important. Voilà un état de choses que le Comité Baie James trouve à la fois incompréhensible et inacceptable. Les interventions de M. Drouin et celles faites par d'autres représentants d'Hydro-Québec lors de la consultation ont indiqué clairement que la nouvelle politique signifie qu'Hydro-Québec ne fixera plus des dates de mise en chantier d'éventuels nouveaux projets avant d'en demander l'autorisation. Cette politique s'applique déjà dans le cadre des audiences du BAPE concernant le projet Sainte-Marguerite. Les résidents de la Côte-Nord sont-ils au courant du fait qu'Hydro-Québec ne s'est jamais engagée à procéder avec ce projet? Hydro-Québec n'a fait que demander l'approbation du BAPE pour son projet de construction, qui ne sera mis en chantier qu'au moment où Hydro-Québec le décidera. Il pourra même ne jamais voir le jour!

Selon des informations présentées lors de la consultation, la nouvelle politique d'Hydro-Québec tire son inspiration de la politique de «resource optioning» de la Bonneville Power Authority dans l'État de Washington. Toutefois, nous ne pouvons accepter la décision arbitraire d'Hydro-Québec d'emprunter un seul élément de l'approche de la Bonneville en matière de planification sans tenir compte du reste. La Bonneville met en application sa politique de «resource optioning» dans un cadre de planification très différent de celui qui existe au Québec. Lorsque la Bonneville cherche une autorisa-

tion préalable pour un projet de construction, le projet en question doit satisfaire certains critères spécifiques déjà établis. En fait, ces derniers sont le fruit de larges débats publics. C'est justement ce type de débat public sur le dossier énergie que nous revendiquons sans succès depuis bientôt quatre ans.

Pour la population québécoise, si la politique de la collecte d'autorisations entre en vigueur, il y aura une conséquence d'une portée majeure. L'exigence de démontrer la nécessité des projets individuels ne fera plus partie du processus d'évaluation des impacts environnementaux de ceux-ci. En effet, comment peut-on demander à Hydro-Québec de justifier un projet si, au moment où s'en déroule l'évaluation environnementale, HydroQuébec n'est pas encore sûre d'en avoir besoin? HydroQuébec y trouverait peut-être son compte, mais seulement aux dépens des citoyens du Québec. Tant qu'il n'y aura pas de débat public sur la politique énergétique, de processus transparent basé sur un esprit de collaboration et dans lequel le public peut véritablement influer sur les orientations de développement d'Hydro-Québec et de commission indépendante veillant sur le fonctionnement d'Hydro-Québec, le processus d'évaluation des impacts environnementaux restera l'unique forum où les membres du public pourront poser des questions sur les hypothèses et les conclusions de la planification faite par Hydro-Québec.

Le Président (M. Audet): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Edwards (Gordon): Je veux vous présenter des résultats préliminaires d'une étude que nous sommes en train de poursuivre avec l'assistance de nos experts-conseils et en collaboration avec le Regroupement pour la surveillance du nucléaire. Au total, cette étude donnerait une critique détaillée de la prévision de la demande déjà faite par Hydro-Québec et du potentiel économique dans le domaine de l'économie d'énergie. En particulier, nous ne croyons pas que la question d'«implementation» des programmes d'économie d'énergie soit adressée suffisamment dans le plan de développement et nous craignons que cet aspect n'ait pas donné le degré de sérieux que... Peut-être puis-je m'exprimer en anglais? Is it O.K. if I speak English?

Le Président (M. Audet): Yes.

M. Edwards: I am sorry. I tried, but I can't quite manage. Could we just move to the transparents please? O.K.

Je suis mathématicien et je pense que c'est très nécessaire d'obtenir une idée quantitative de l'importance de l'économie d'énergie, et nous avons préparé des graphiques. Même si on accepte les prévisions d'Hydro-Québec, même si on accepte littéralement les prévisions d'Hydro-Québec, les conséquences pour les programmes de construction sont très intéressantes. Voici deux scénarios: scénario A et scénario B.

Le Président (M. Audet): ...rapidement. Malheureusement l'enveloppe de temps de 20 minutes est déjà terminée, monsieur. Si vous voulez aller très rapidement parce qu'on n'aura pas le temps de procéder à la période de questions.

M. Edwards: Le problème est que cette sorte de «scrutiny» d'un plan de développement, c'est complètement inadéquat pour approfondir les questions soulevées par le plan de développement. Supposons qu'on fait un examen dans 20 minutes, c'est très difficile. Les scénarios A et B sont basés sur les prévisions de demande d'Hydro-Québec. La ligne horizontale désigne une balance entre le «supply and demand» et, dans le premier cas, on prévoit la nécessité de six barrages, six barrages. La seule différence entre les deux scénarios est que le deuxième scénario suppose que le contrat de NEPOOL, «New England contract», n'est pas renouvelé en l'an 2000. O.K.? Dans ce cas, ce n'est pas nécessaire de construire le projet Grande-Baleine avant 2010. O.K.? Maintenant, les deux scénarios ici sont basés sur l'«assomption» d'Hydro-Québec qu'on achèvera seulement le tiers du potentiel économique pour l'efficacité énergétique.

Si on examine les scénarios C et D... Les scénarios C et D sont semblables aux scénarios A et B, sauf que la cible pour l'économie d'énergie est plus élevée, à environ 56 % du potentiel économique identifié par Hydro-Québec, 56 % seulement du potentiel économique. Dans le scénario C, on voit le renouvellement de «NEPOOL contract», le contrat de NEPOOL. Dans le scénario D, aucun renouvellement du contrat. O.K.? Et pas seulement Grande-Baleine, mais aussi Ashuapmus-huan et Sainte-Marguerite ne sont pas nécessaires dans ce scénario.

Le Président (M. Audet): Merci. Malheureusement, je dois vous arrêter. Nous devons procéder à la période de questions. Vous aurez tout le loisir d'apporter des explications additionnelles. Vous comprendrez qu'avec 88 groupes que nous devons entendre, nous ne pouvons pas passer un avant-midi avec chaque groupe. C'est malheureux, mais c'est ainsi, monsieur.

M. Edwards: O.K., mais juste le dernier scénario.

Le Président (M. Audet): On les a dans votre mémoire, d'ailleurs, les tableaux que vous nous avez mentionnés. Les membres de la commission en ont pris connaissance; alors, c'est à partir de ça qu'ils vont vous poser des questions.

Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources. (11 h 30)

Mme Bacon: Alors, je voudrais vous remercier de votre contribution à...

C'est parce qu'il aurait peut-être fallu répartir votre temps entre les 20 minutes, là, ça aurait été plus facile... de vous remercier de votre contribution à la commission, et le mémoire, en tout cas, est très élo-

quent vis-à-vis votre intérêt envers l'efficacité énergétique en particulier.

Vous me semblez inquiets de la croissance de la dette d'Hydro-Québec; il y a des experts du domaine financier qui sont venus devant cette commission et, à plusieurs reprises, il y a plusieurs groupes qui ont déclaré que la situation financière d'Hydro-Québec lui permettait de réaliser son programme d'investissement tout en maintenant, là, un ratio d'endettement qui se compare avantageusement avec ceux d'entreprises similaires.

Comment expliquez-vous le constat que vous faites, qui me semble un constat alarmant, là, au niveau d'endettement, par rapport au constat rassurant qui a été émis par des experts financiers qui sont venus devant la commission?

M. Chénier: Bon. Peut-être que dans... comment je dirais? Moi, ce qui me préoccupe, comme citoyen, c'est que je vois une dette de 70 000 000 000 $, une dette qui double, une dette qui est garantie par le gouvernement du Québec. Je suis sûr qu'Hydro-Québec, si elle n'était pas, si elle n'avait pas le «backing», là, c'est-à-dire le support, si la dette d'Hydro-Québec n'était pas garantie par le gouvernement du Québec, je ne suis pas sûr qu'elle pourrait emprunter, aller chercher sur des marchés tout ce dont elle a besoin pour aller de l'avant avec les projets qu'elle présente; et c'est ça qui me préoccupe, c'est que la dette est garantie par le gouver-Eement. Donc, elle est garantie par les citoyens, et c'est l'ampleur de cette dette-là, qui est faite sans consulter les citoyens, qui m'inquiète. Il me semble que, si on me refile une dette de 10 000 $, il me semble que j'aurais usa mot à dire, et c'est pour ça qu'on demande qu'il y ait vraiment une enquête publique sur l'énergie, sur la politique énergétique du Québec, pour qu'on puisse participer à ce genre de décisions là.

Mme Bacon: Mais, en fait, la dette actuelle est de 32 000 000 000 $, et pas 70 000 000 000 $; 70 000 000 000 $, vous parlez avec le plan de développement?

M. Chénier: Oui, oui, oui, je vous dis...

Mme Bacon: Mais même avec ça, les... c'est ça que j'essaie de vous dire; les financiers, tous ceux qui sont venus ici comme financiers, qui sont venus témoigner, je leur ai posé la question à chacun: Est-ce qu'Hydro-Québec a la santé financière d'aller dans ce plan de développement? Tous ceux qui sont venus devant nous disent que ça se compare avantageusement avec d'autres compagnies similaires, et qu'ils ont les moyens financiers d'entreprendre le plan de développement; et c'est ça que j'essaie de comprendre avec les affirmations que vous faites ce matin.

M. Chénier: Oui, bien sûr, on peut emprunter. C'est qu'on a besoin d'aller chercher l'argent quelque part. Donc, on s'endette. Mais c'est sûr que la dette est là, et elle est à long terme. Mais on a moyen de faire mieux, on a moyen de répondre à nos besoins énergétiques en ne s'endettant pas. Si on investit plutôt dans l'efficacité énergétique, cet argent revient beaucoup plus vite en circulation, on peut répondre à nos besoins énergétiques sans s'endetter. Je ne dis pas que ce n'est pas possible de le faire; c'est possible de le faire, financièrement. Mais ce n'est pas nécessaire de le faire. On peut répondre à nos besoins à coût beaucoup moindre que ce que nous présente Hydro-Québec. La majeure raison étant qu'on accorde peu de place à l'efficacité énergétique. Hydro-Québec accorde... c'est-à-dire qu'ils ont fixé 9,6 tWh comme objectif, ce qui est beaucoup en deçà du potentiel technique.

Mme Bacon: Vous savez que 46 % des besoins en énergie vont être compensés par l'efficacité énergétique.

M. Chénier: Mais c'est ce que je dis. Alors, si 46 % des besoins peuvent...

Mme Bacon: Mais ça ne peut pas être...

M. Chénier: ...être apportés par l'efficacité... Mme Bacon: ...ça ne peut pas être 100 %.

M. Chénier: ...énergétique, pourquoi ne pas en mettre beaucoup plus? pourquoi investir si peu? 4 % des nouveaux investissements, moins de 4 % sont en efficacité énergétique! si on investissait un plus grand pourcentage dans l'efficacité énergétique, on aurait encore un plus grand pourcentage de la nouvelle demande à laquelle on pourrait répondre avec l'efficacité énergétique au lieu de construire des barrages. c'est ce que montre le scénario présent, qui est à l'écran, c'est que, si on investit beaucoup plus en efficacité énergétique, eh bien, on n'a pas besoin de barrages pour bien longtemps.

Mme Bacon: Est-ce que vous croyez que la société québécoise dans son ensemble, là, soit prête à payer plus cher sa facture d'électricité, sa facture électrique...

M. Chénier: Oui.

Mme Bacon: ...en favorisant l'efficacité énergétique au-dessus du coût marginal?

M. Chénier: Je le crois, parce que moi, comme québécois, si je paie mon kilowattheure plus cher, ma facture sera plus basse si je fais de l'efficacité énergétique. Je vais avoir besoin de moins d'électricité; donc, ma facture va être plus basse. Donc, c'est à mon avantage.

M. Edwards: C'est un point très important, parce que même si le taux d'électricité s'élève, la facture totale d'énergie...

Une voix: Baisse.

M. Edwards: ...baisse. Par exemple, M. Robert Jean, dans son article d'il y a quelques années, a mentionné, a prouvé que les investissements dans l'efficacité énergétique coûtent environ la moitié d'un investissement comparable dans les nouveaux moyens de production et assurent environ le même niveau d'emplois et, de plus, donnent aux Québécois 3 000 000 000 $ additionnels dans leurs poches, pour dépenser sur autre chose, parce que les factures sont...

Une voix: ...plus basses.

M. Edwards: ...plus basses.

I would like to call your attention to the fundamental problem. The fundamental problem is: How much energy efficiency can you get? That is the basic problem. c'est le problème fondamental, le niveau de participation. hydro-québec a supposé qu'un tiers du potentiel économique, c'est satisfaisant ou c'est pratique. mais d'autres exemples donnés ici, deux exemples, juste deux exemples dans le texte donnent que c'est possible d'achever des pourcentages de participation d'environ 90 %, et la clé, l'aspect clé de ce niveau de participation, de ce niveau de réalisation du potentiel économique est d'impliquer directement les communautés.

Concernant les problèmes d'économie d'énergie à base communautaire impliquant les membres des communautés, les contracteurs principaux dans les communautés, les sous-traitants dans les communautés, il est possible d'achever des niveaux d'économie d'énergie beaucoup plus larges que ceux supposés par HydroQuébec. Et, incidemment, ce n'est pas nécessaire de subventionner totalement ces investissements. C'est possible pour Hydro-Québec d'emprunter l'argent et de recouvrer son investissement.

Par exemple, if the energy bill is here, to begin with, and then it drops to here, then Hydro-Québec can charge something in the middle. O.K., until they recover the investment that they have made, and everybody benefits. Hydro-Québec benefits, the people benefit, the jobs are created locally and people can see that HydroQuébec is doing something. It is making their life easier by reducing their bills, and because they recover the investment, it does not mean that you have to raise the rates. This idea that it has to raise the rates is erroneous, it is not true. If it is done, in an «autofinancement, un mode d'autofinancement»...

Mme Bacon: Mais comment expliquez-vous qu'en Ontario, avec un programme d'efficacité énergétique très élevé...

M. Edwards: Très?

Mme Bacon: Très élevé, they had a high target...

M. Edwards: Oui.

Mme Bacon: ...for the energy efficiency program.

M. Edwards: Oui.

Mme Bacon: They have not been so successful up to now, and they have to review the whole program, right now, and cut down the expenses at the same time? (11 h 40)

M. Edwards: Je pense qu'une partie de la difficulté est que ces très grandes corporations comme Hydro-Québec, comme Hydro Ontario, c'est un rôle nouveau, c'est une... It is completely new. They have never really had to do this before, and one of the things about energy efficiency is that it must be done... To be done well, it must be done decentralized. You cannot do it from the center. You have to do it from the community base up and there are experiences, even in Hydro Ontario, such as the Espanola project that we talk about here which are based on that approach, which are based on going into a community, setting up a liaison committee and using...

For example, one of the interesting things they found out is that word of mouth advertisement — you know, transmission of information by word of mouth — was much more effective than all of their fancy advertisements. And, unfortunately, we get the impression, here in Québec, that Hydro-Québec wants to save energy but they don't know how to do it except by spending a lot of money on advertising and trying to do it in a more centralized way. You have to make it easy for people. In the Espanola project which is discussed here and the Hood River project which is also discussed here, all people have to do is dial one phone number, just one phone number. That is the only initiative they have to take. And when they dial this one phone number, people come and they look and they give them a complete plan of action, they give them a breakdown of how much it is going to cost, and all they have to do is say yes or no. And it makes it very simple for the citizen to participate.

Mme Bacon: Mais êtes-vous en train de me dire que l'Ontario a préparé un programme qui était trop difficile à atteindre?

M. Chénier: Non, je pense que ce que...

Mme Bacon: Parce qu'ils sont en train de tout revoir. On ne peut pas dire qu'ils ont réussi leur programme d'efficacité énergétique, en Ontario.

M. Chénier: Mais, justement, il y a eu des consultations qui viennent de se terminer. Le résultat de cette consultation-là, c'est que le plan est à refaire. Justement, Hydro Ontario est très préoccupée par l'augmentation de sa dette et puis ils se rendent compte qu'il faut qu'ils investissent plus et de meilleure façon en efficacité énergétique.

Ce que M. Edwards disait, c'est qu'il y a des

programmes qui ont très bien marché en Ontario, dont le projet Hood River et puis aussi... Non. Ah! Ça, c'est en Oregon. Pardon! Mais à Espanola, en Ontario, qui a très marché... Et ceux qui marchent, c'est que c'est à base communautaire. C'est que l'approche qu'ont les grandes entreprises d'énergie est peut-être maladroite parce que les grandes compagnies productrices d'électricité n'ont pas l'habitude de vendre quelque chose qui s'appelle «efficacité énergétique». C'est quelque chose qui est à base communautaire et ce n'est pas quelque chose qu'elles ont l'habitude de faire. Donc, elles expérimentent de temps en temps, puis ça prend une volonté politique de le faire, des capitaux disponibles et des gens compétents.

Le Président (M. Audet): Merci. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président.

Ça me fait plaisir de vous entendre et de vous souhaiter la bienvenue à mon tour. D'abord, je trouve votre mémoire très intéressant parce qu'il brasse vrai-. ment la cage dans le sens de la réflexion et de l'action à accomplir suite à ça.

Je vais continuer sur la lancée des projets communautaires, puis je reviendrai, après ça, parce que j'aimerais que vous me parliez du scénario que vous n'avez pas réussi à nous présenter, tout à l'heure, faute de temps.

Juste une blague, en passant. Je me dis: II faudrait peut-être envoyer quelques organisateurs communautaires à Hydro-Québec ou demander qu'Hydro aille former queiques-uns de ses ingénieurs en organisation commu-uautaire et en développement communautaire. Ce ne serait pas inutile! C'est vrai, les CLSC en ont, justement, mais... Dans le fond, tous les grands programmes de rénovation urbaine, en Amérique du Nord, se sont bâtis justement parce qu'il y a eu de l'action communautaire dans les quartiers qui ont mis les pressions sur les gouvernements et qui ont permis de revitaliser les centres-villes, là où ça s'est fait, et qui ont permis de mettre en place des logements sociaux, etc. Et, dans le fond, on peut faire un parallèle, à mon point de vue, avec l'énergie, les économies d'énergie et l'efficacité énergétique. C'est qu'il faut avoir une approche un peu plus micro et c'est difficile de demander ça à des entreprises de la taille d'Hydro-Québec. Et ce n'est pas un blâme, c'est tout simplement une reconnaissance des faits. Après ça, on se dit: Qu'est-ce qu'on doit faire pour aller dans le sens que vous proposez?

Deux questions. D'une part, quand vous parlez de la stratégie communautaire et décentralisée et que vous parlez d'expériences précises dans certains quartiers ou en Ontario ou aux États-Unis, est-ce que vous pourriez être encore plus concrets pour nous dire — parce que je pense que ça prend une espèce de connaissance de ce type d'action là pour comprendre ce que ça peut vouloir générer ensuite — et nous expliquer précisément comment ça s'est passé?

M. Edwards: O.K. Comme décrit dans les articles...

Mme Marois: Oui, j'ai lu...

M. Edwards: ...cités ici, O.K., et que je veux rendre disponibles pour vous, par exemple, il y a des rapports concernant le projet Hood River et le projet Espanola qui juste... J'ai choisi ces exemples parce qu'ils sont très pertinents à l'expérience du Québec, parce qu'ils concernent...

Par exemple, le projet Hood River concerne 2500 bâtiments chauffés par l'électricité, O.K.? C'est la communauté en question. Et ils ont invité la communauté à former un comité d'environ 20 représentants de tous les aspects de la communauté, incluant les citoyens en chômage, etc., pour planifier un programme pour assister cette communauté à devenir efficace d'une manière énergétique et sauver... pour... So that they could save money, so that they could increase their energy efficiency and become more «autosuffisants». O.K.? So, what happenned is through this committee they got advice as to how to deal with the community; a lot of word of mouth information. Hey! This is a good opportunity. C'est une occasion très bonne. And people, all they had to do was phone and then, a team of experts would go look at the situation, tell them what had to be done and say: We can finance it for you. And you will save money and you will pay back out of your savings the cost of this. They said: Sure! And so men, they go up and down one street after another and they achieve a high level of participation — un niveau de participation très élevé, un niveau d'éducation très élevé, un niveau de contrôle de qualité très bon et un niveau d'économie d'échelle. Ces avantages sont spécifiques à ce type de programme qui est basé dans la communauté. De plus, les emplois sont aussi dans la communauté. Les sous-traitants, les...

Mme Marois: On parle... Ici, dans le document, vous dites «un taux de réussite de 90 %». Si je comprends bien, c'est ça, là, qui s'adresse, qui concerne ce quartier?

M. Edwards: Exactement. Et le chauffage à l'électricité des bâtiments, c'est un problème très important pour le Québec, parce que la contribution principale pour la demande de pointe, dans l'hiver, est causée par le chauffage à l'électricité et les coûts évités pour Hydro-Québec sont beaucoup plus larges que les moyens. Et c'est une opportunité qui n'est pas adressée directement. Par exemple, il n'existe pas de centres d'excellence ici, au Québec, sur les questions d'efficacité thermique des bâtiments. C'est une occasion pour le Québec de devenir un leader mondial dans ce type, parce que cette...

Mme Marois: Ça, c'est un modèle extrêmement intéressant à envisager, mais ce que vous suggérez, c'est, j'imagine, l'«opérationalisation» de ça. Vous

suggérez que ce soit détaché d'une société comme Hydro et que ce soit confié à une autre institution. Est-ce que vous suggérez que ce soit confié au ministère, à l'Environnement et Énergie réunis, ou c'est quoi, d'une façon précise, que vous voudriez proposer à cet égard pour le rendre possible?

M. Edwards: Je pense que c'est nécessaire pour les propriétaires de Hydro-Québec, qu'ils soient... finalement, pour que la population du Québec donne la direction nouvelle à Hydro-Québec, parce que HydroQuébec a donné... historiquement, a le mandat de produire de l'électricité, de construire des barrages et d'autres centrales pour l'approvisionnement en électricité. Je pense que c'est nécessaire de repenser le mandat d'Hy-dro-Québec, d'installer de nouvelles structures, de donner une nouvelle direction et de consulter la population de Québec sur les «désirabilités», the desirability. Well. Anyway.

Mme Marois: Le souhait ou la volonté. L'acceptabilité, oui. (11 h 50)

M. Edwards: L'acceptabilité de ces nouvelles directions, si oui ou non, O.K.? Mais je pense que si on prétend qu'il n'existe aucune alternative, on est en train de se leurrer.

Mme Marois: C'est ça. Bon. Je veux vous dire aussi que je partage le point de vue que vous défendez, de l'importance d'un débat sur la question énergétique, et je vous remercie d'ailleurs de nous proposer un modèle, parce que, hier, il est venu des groupes, et je leur posais la question sur la façon dont ils souhaitaient que ça se fasse, ce débat, et dans votre cas, je pense que c'est très précis: l'enquête publique avec des temps et tout ça. Bon, je pense qu'on peut, que ce soit ce modèle-là ou un autre, c'est souhaitable qu'il y en ait et que l'on procède le plus rapidement possible à cette évaluation-là ou à ce débat-là au Québec.

J'aimerais maintenant vous ramener sur le dernier scénario que vous n'avez pas pu nous présenter. J'aimerais vous poser la question dans le sens où: Vous imaginez quoi comme atteinte des objectifs d'efficacité énergétique dans ce scénario-là?

M. Edwards: Ce scénario-là représente environ 75 % du potentiel économique pour l'économie d'énergie identifié par Hydro-Québec...

Mme Marois: O.K. D'accord. Donc, c'est sur la base...

M. Edwards: ...avec le renouvellement du contrat de NEPOOL.

Mme Marois: C'est sur la base des chiffres fournis par Hydro-Québec.

M. Edwards: Totalement. Exactement. Il n'existe aucun chiffre dans ce graphique qui ne correspond pas au plan de développement d'hydro-québec. les prévisions de demande sont là. aussi, les estimations d'hydro-québec du potentiel économique pour la gestion de la demande sont là, et nous supposons juste une plus large cible, c'est-à-dire 75 % à la place du tiers, 33 %, supposés par hydro-québec.

Mme Marois: Oui. C'est ça.

M. Edwards: Je suis très conscient que ce n'est pas une tâche simple. C'est une tâche très difficile, très formidable, mais c'est beaucoup mieux pour la société que juste pour élargir la dette, pour construire de nouveaux barrages et pour ignorer, essentiellement, beaucoup de villes et villages au Québec qui ne réaliseront pas directement les bénéfices de ces projets de construction. Mais ce programme d'investissement dans les villes, dans les communautés, créera des emplois dans toute la province et aussi créera «a feeling of well-being», un sentiment de bien-être, un sentiment de «things are getting better».

Mme Marois: Une meilleure qualité de vie. M. Edwards: Les choses s'amélioreraient.

Mme Marois: D'accord. Merci. Est-ce qu'il me reste du temps?

Le Président (M. Audet): Merci. Il vous reste une minute.

Mme Marois: Je la prendrai tantôt.

Le Président (M. Audet): Ça va être difficile de revenir.

Mme Marois: II me reste une minute seulement?

Le Président (M. Audet): Oui, c'est ça. Vous pouvez y aller brièvement.

Mme Marois: Est-ce que vous avez fait des propositions précises à Hydro-Québec — non, sur votre mémoire, ça va, je l'ai lu d'un couvert à l'autre et je vais d'ailleurs aller chercher de l'information à laquelle vous faites référence dans votre document — mais est-ce que vous avez fait des propositions précises à HydroQuébec déjà, dans le cadre des consultations qu'elle a tenues et auxquelles vous avez participé — même si vous les critiquez — précises sur, par exemple, le développement de projets communautaires dans des milieux, dans des villages ou dans des régions?

M. Edwards: O.K. I think... Il y a quelques problèmes.

Mme Marois: Vous pouvez y aller en anglais si vous êtes plus confortable. Il n'y a pas de problèmes.

M. Edwards: O.K. There are some problems that Hydro-Québec is facing. O.K. There are difficult problems. One of these problems is that it is owned by the State, it is a state-owned operation. We were told by Hydro-Québec representatives that they would have to, maybe, pursue an expansion of the market even though it is not profitable for Hydro-Québec, because of government policy. Now, they do not have... Well, that is what we were told. And they also say it in the plan of development, they say that if they do market expansion using «énergivores», that it is going to be a loss for them, it is going to be a loss for them. But, the point is that they do not have the... I think there has to be a separation between Hydro-Québec and the government of the day.

And one of the reasons we suggest a public debate, one of the reasons we suggest a regulatory agency for Hydro-Québec and other things is so that the population of Québec can begin to participate more directly in this organization which really, ultimately, belongs to them. It is the population of Québec which is going to have to face the debt and which is going to have to face any mistakes which are made. Up till now, the government of the day, whatever that government may be, has had the direction of Hydro-Québec principally, but we feel that with these scales of investments, tens of billions of dollars, and with these scales of opportunities, in terms of what it means for Québec society, that there needs to be mechanisms of direct involvement of people. I think that, if the options are presented clearly, you know, and if the different financial possibilities are presented such as «O.K. Does Hydro-Québec just subsi-oize this or do they recover the debt by loans?» I think that, if these things are presented to the population, then at least they have a basis for deciding which direction to go in. I think the difficulty right now is that, because we lack these opportunities for discussion and reflection, therefore, we feel there is no alternative, we feel that there really are no choices, that we must do just this one thing.

Mme Marois: D'accord, merci.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

À la page 12 de votre mémoire, vous parlez de récupération et de mettre en place une commission d'enquête spéciale, mandatée d'enquêter sur le recyclage de l'aluminium. Alors, ma question aura deux volets. Dans un premier temps, j'associerais aussi magnésium parce que c'est l'autre volet qui s'en vient, énergivore. Vous ne croyez pas préférable que, plutôt que de créer une commission, ça soit donné comme mandat aux deux instituts de recherche, à l'heure actuelle, qui chapeautent chacun de ces deux grands secteurs d'activité et leur demander, à eux, de se pencher sur les alternatives de recyclage et de réutilisation de l'aluminium, et j'ajouterais magnésium? Et, dans un deuxième temps, d'une façon un peu plus globale, qu'on devrait avoir en place, au Québec, un groupe d'experts qui se pencheraient pour aider l'industrie de tout l'emballage, de planification à long terme, de toute réutilisation de nouveaux produits qui seraient mis sur le marché?

M. Edwards: O.K. Le problème, à mon avis, est que les propriétaires des corporations d'aluminium, par exemple, ne sont pas garants de la dette d'Hydro-Qué-bec. C'est le citoyen du Québec qui garantit la dette d'Hydro-Québec. O.K.? Et je pense que la difficulté pour le Québec est que, si le prix d'aluminium continue à un niveau bas ou diminue plus que maintenant, ça coûtera cher pour les citoyens du Québec.

Si, par exemple, juste hypothétiquement, quelques-unes de ces alumineries sont fermées parce que le recyclage d'aluminium prend place ailleurs, ça cause un surplus d'électricité qui, peut-être, est difficile à vendre avec profit et ça cause des difficultés pour financer la dette parce que le financement de la dette est basé sur le fait que toute l'électricité est vendue. «So», je pense que c'est un problème spécifique, pas simplement pour l'industrie de l'aluminium — c'est un problème pour eux aussi — mais c'est un problème pour la société québécoise de considérer les implications pour le Québec d'une telle éventualité.

M. St-Roch: Une autre question, un autre groupe parce que, lorsqu'on regarde la grande problématique de tous les secteurs énergétiques — et je vais m'adresser à la filière nucléaire...

M. Edwards: Ah oui!

M. St-Roch: ...ils sont venus nous dire que, dans le plan d'Hydro-Québec, on parlait de quatre réacteurs, si ma mémoire est fidèle, de 3200 MW de possibilité, mais le secteur nucléaire est venu nous dire qu'on devrait continuer d'aller de l'avant avec au moins un réacteur, qui semble alentour de 600 MW, à ce moment-ci, pour qu'on soit capables de garder la technologie et l'avance technologique qu'on a et d'encourager surtout les jeunes de chez nous à poursuivre leurs études dans cette filière qui est nucléaire. Alors, dans votre mémoire, je sais qu'à la page 13 vous mettez un peu un temps d'arrêt...

M. Edwards: Oui.

(12 heures)

M. St-Roch: ...mais est-ce que vous ne croyez pas qu'on devrait suivre cette hypothèse-là, de dire: Allons pour garder la somme de technologie accumulée?

M. Edwards: O.K. Je pense que le problème est que, si c'était possible, juste pour faire fonctionner le réacteur Gentilly-2 sans investissement additionnel, c'est une chose. Mais, maintenant, pour continuer à maintenir l'expertise nucléaire par le fonctionnement de Gentilly-2, c'est nécessaire de dépenser des centaines de millions de dollars et, peut-être, jusqu'à 1 000 000 000 $. Pour

maintenir cette expertise, c'est très cher!

Il y a d'autres opportunités. Par exemple, si on ferme Gentilly-2, il reste la question du démantèlement de la structure radioactive de Gentilly-1. Ce réacteur, Gentilly-1, est fermé et c'est la propriété du gouvernement du Canada. C'est possible pour Québec de demander au gouvernement du Canada de l'assister à démanteler, à financer, peut-être coopérativement, le démantèlement du réacteur Gentilly-1, parce que c'est une technologie qui a des marchés à l'extérieur; parce que, maintenant, il n'y a aucun exemple d'un réacteur d'un pouvoir de cette grandeur qui a été totalement démantelé. Ça nécessite des développements de robotique, des techniques de suppression de poussières radioactives, etc, etc. Ces technologies sont «marketable»...

Une voix: II y a des possibilités.

M. Edwards: ...sont exportables. C'est une opportunité de maintenir et... En même temps, on court le risque de garder ces déchets hautement radioactifs qui coûtent... Un dépotoir, juste un dépotoir pour les déchets hautement radioactifs coûte au moins 1 000 000 000 $. O.K.? Le plus longtemps le Québec garde ces déchets ici au Québec, le plus il devient probable que... «they are going to be stuck with the problem». À quel point Hydro-Québec se débarrasse, «gets rid of this waste»? Do they know where this waste is going to go? Do they know that anybody wants to accept this waste anywhere? Do they have any «assurance» that anybody is going to accept this waste? If they do, let us find out. If they don't, let's start looking into it. Let's start getting some guarantees, let's start finding out how Québec is going to actually get rid of this highly radioactive waste, because it is going to be very expensive. And, right now, we face the prospect it is very possible that, ten years from now, there will be no nuclear industry in Canada.

Le Président (M. Audet): Merci.

Malheureusement, je dois mettre fin à la discussion. Alors, je vous remercie beaucoup, mesdames et messieurs, de votre présentation.

Nous allons suspendre deux minutes afin de permettre à l'Association de la construction du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 12 h 3)

(Reprise à 12 h 7)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Je vais maintenant souhaiter, au nom des membres de la commission, la plus cordiale bienvenue à l'Association de la construction du Québec.

Messieurs, bienvenue chez nous. Je vous rappelle brièvement nos règles de procédure: vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous présenter votre exposé, et je vous inviterais, avant de débuter votre présentation, à vous présenter, ce qui est très important pour le Journal des débats. Ensuite, suivra une période d'échanges d'une quarantaine de minutes. Allez-y.

Association de la construction du Québec (ACQ)

M. Lafontaine (René): Merci, M. le Président.

Je voudrais d'abord vous présenter, à ma gauche, M. Jacques Roy, directeur de l'ingénierie chez Lambert Somec; à mon extrême droite, Me Jean Ratté, directeur des services juridiques à l'Association de la construction du Québec; M. Jean Cormier, vice-président principal Groupe de construction National State Inc.; Me Michel Paré, directeur général de l'Association; et moi-même, René Lafontaine, président de l'ACQ.

M. le Président, distingués membres de cette commission, l'Association de la construction du Québec tient d'abord à remercier les membres de cette commission de lui permettre d'exprimer son point de vue sur la propositon de plan de développement d'Hydro-Québec. Mais, avant d'aller plus loin, je laisserais Me Paré vous faire la présentation de notre mémoire. Merci.

M. Paré (Michel): M. le Président, distingués membres, vous avez reçu le mémoire au début du mois de février. Vous avez une présentation de l'Association de la construction du Québec dans les premières pages, on ne la reprendra pas. Notre mémoire se limite aux retombées économiques pour l'industrie de la construction — vous avez dû le remarquer — et on se prononce en faveur du plan de développement concernant le scénario 5 d'Hydro-Québec, parce qu'Hydro-Québec contribue au développement économique du Québec de plusieurs façons; par ses activités d'entretien de ses installations, elle soutient de nombreux emplois.

Pour nous, les retombées économiques générées par les activités d'Hydro-Québec sont importantes puisque les emplois soutenus par la filière hydroélectrique se retrouvent principalement dans notre industrie. À nos yeux, il s'agit là d'une caractéristique fondamentale de cette option. Elle est d'autant plus importante que l'industrie de la construction au Québec, en dépit de son volume d'activité économique qui dépasse 23 000 000 000 $, soit près de 15 % du PIB, demeure une industrie qui est quand même fragile, sensible à toute perturbation.

Alors, le plan de développement d'Hydro-Québec, après avoir étudié diverses combinaisons d'options en matière d'offres, propose 5 options de développement des marchés sur une période de 1996 à 2010. L'Association de la construction du Québec a retenu la dernière combinaison, la ID, qui propose le développement des électrotechnologies, 180 MWh de développement industriel, et 1500 d'exportation, qui permettrait de créer 531 000 emplois par un investissement de 50 000 000 000 $, soit 38 000 emplois de plus que la combinaison 1C et 75 000 emplois (années-personnes) de plus que la combinaison 1, sans développement de marché. Si la combinaison ID, qui nous apparaît comme

la meilleure, était retenue, la prévision d'apport à l'emploi dans les seuls secteurs de l'ingénierie et de la construction est d'environ 135 000 années-personnes, dont plus de 116 000 emplois directs. (12 h 10) pour l'industrie de la construction, cela représente environ 8000 emplois par année pour toute la période 1996-2010, soit une réduction approximative de 20 % du nombre des quelque 40 000 travailleurs de la construction qui sont sans emploi actuellement, toutes disciplines confondues. même si nous savons que les retombées économiques de ces activités dépendront de l'ampleur de l'effort consenti et du type de mesures adoptées, il n'en demeure pas moins que, mesurées en années-personnes, il s'agit là de retombées importantes pour l'industrie de la construction.

Cette injection en emplois directs et indirects aurait incontestablement un effet bénéfique sur la santé de notre industrie dont le taux de chômage pourrait ainsi connaître une diminution significative. En d'autres termes, au cours de ces 15 années, notre taux de chômage diminuerait de 10 points, soit de 55 % qu'il est en ce moment à environ 45 %. De plus, et c'est là un aspect non négligeable, les retombées fiscales de cette combinaison pourraient atteindre 535 000 000 $ de 1996 à 2010.

Rappelons que l'industrie de la construction réagit fortement aux variations de l'offre et de la demande. L'instabilité du niveau des activités se traduit inévitablement par l'instabilité du nombre d'emplois qui en découlent. En effet, l'une des causes de cette instabilité dans l'industrie est directement reliée aux effets cycliques des travaux de construction et, particulièrement, aux attitudes procycliques de la construction publique qui ne font qu'amplifier les problèmes d'instabilité.

Dans le même ordre d'idées, nous pensons que la planification des travaux aura comme résultat la stabilisation des cycles économiques de la construction. Il est donc d'intérêt social autant qu'économique de poursuivre une démarche dans ce sens, et que tenter de planifier les activités de la construction demeure une solution qu'on ne peut ignorer, dans la mesure du possible et en autant que le risque des conséquences puisse être calculable de façon réaliste.

En conséquence, toute mesure prise par HydroQuébec qui aurait pour conséquence la réduction de l'instabilité des activités dans notre industrie ne peut être que favorablement accueillie par l'ACQ. D'autre part, Hydro-Québec entend — et c'est là l'une des orientations contenues dans sa proposition — favoriser le développement économique régional. Le plan de développement proposé par Hydro précise qu'elle entend continuer de mettre à la disposition des collectivités touchées par des projets de centrales ou de lignes de transport des crédits destinés à des initiatives de mise en valeur de l'environnement et représentant entre 1 % et 2 % de ces projets.

En plus, cette somme d'argent pourrait être investie dans un projet favorisant la relance économique régionale, et, par ricochet, l'industrie de la construction, ce à quoi l'ACQ applaudit. À ce propos, l'ACQ entend être étroitement associée à la consultation qu'Hydro-Québec tiendra au cours des prochains jours. La philosophie qui sous-tend le plan de développement d'Hydro-Québec veut qu'il y ait équilibre entre l'offre et la demande et que, par une planification améliorée, tout soit mis en oeuvre pour y parvenir.

Nous souhaitons que les moyens qui seront mis en oeuvre par Hydro pour soutenir ses fournisseurs québécois iront dans le même sens. L'un des moyens d'éviter que le coût total de construction d'une centrale hydroélectrique ou d'une usine de cogénération ne grimpe en flèche consiste à s'assurer que tout le processus d'exécution des travaux soit fait dans une démarche de qualité. À titre d'exemple, lorsque les travaux prévus pour l'été sont effectués en hiver, les coûts s'en trouvent automatiquement augmentés.

Pour bon nombre d'entreprises de construction, les délais indus dans la mise en chantier compromettent leur propre plan de développement et ajoutent à l'instabilité de l'entreprise. En ce sens, nous croyons que toutes les mesures que prendra Hydro-Québec pour obtenir, au préalable, les nombreuses autorisations requises à la mise en chantier des centrales hydroélectriques ou d'autres projets de production auront un effet stabilisateur sur l'industrie.

Elles lui permettront également une meilleure planification de l'ensemble de ses activités et faciliteront ses choix stratégiques. La société d'État nous fournit donc un excellent exemple qu'on peut procéder à la planification publique et parapublique de travaux de construction en réduisant les délais d'intervention étatique, tout en constituant une importante réserve de projets de construction prêts à être lancés. Alors, on applaudit et on appuie cette initiative d'Hydro.

Tenir compte de l'évolution réelle des besoins hydroélectriques et ajuster la production en conséquence, négocier des ententes avec les populations locales et les communautés concernées et obtenir les autorisations de toutes natures nécessaires à la mise en chantier pour toutes les centrales hydroélectriques de moyenne et grande envergure — même si seulement certaines d'entre elles devaient être effectivement construites pour répondre à la demande — sont quand même des mesures auxquelles nous souscrivons d'emblée.

Même si la filière hydroélectrique semble moins avantageuse du point de vue des délais d'autorisation et de construction, la flexibilité ainsi acquise permettrait à Hydro d'arrêter des échéanciers qui n'auraient pas à être constamment révisés. Elle favoriserait, en outre, l'atteinte de l'un de nos objectifs, qui consiste à faire échec à l'instabilité qui ralentit sérieusement le développement de notre secteur d'activité.

Au sujet des négociations et consultations avec les populations locales, disons qu'à l'instar d'Hydro-Québec nous souhaitons que l'on en vienne à des règlements politiques d'ensemble qui assureraient à toutes les parties en présence la réalisation de leurs aspirations et la poursuite harmonieuse de leur développement, et cela, dans toutes les régions du Québec. De tels règlements

faciliteraient incontestablement la tâche de nos entrepreneurs qui consacrent des sommes d'argent importantes à divers travaux préalables à la présentation de leurs soumissions, et qui doivent reprendre celles-ci à la suite de problèmes à caractère politique.

Alors, l'ACQ est d'accord en ce qui concerne les programmes actuels d'efficacité énergétique, on est d'accord avec les programmes actuels, car ils favorisent une rationalisation de la consommation énergétique des Québécois et ça, c'est pour les bâtiments existants et tout nouveau bâtiment, afin qu'ils atteignent leur niveau optimal d'efficacité énergétique.

En ce qui concerne la recherche et le développement, il y a quelques-unes des orientations qui sont contenues au plan de développement proposé par Hydro qui portent sur la recherche, le développement, de même que sur le maillage avec les industries, les universités et les centres de recherche. L'industrie de la construction partage le point de vue d'Hydro-Québec sur l'augmentation à 2 % de son chiffre d'affaires annuel à la recherche et au développement. À l'instar d'Hydro-Québec, notre industrie entend augmenter son investissement dans ce domaine où nous accusons du retard. Alors, vous avez pu constater que l'on revendique à nouveau le 1 % sur les travaux de construction pour effectuer la recherche et le développement dans l'industrie de la construction.

Au chapitre de la qualité totale, nous reconnaissons les efforts d'Hydro-Québec pour l'implantation d'un programme de la qualité dans son organisation. Son programme Défi performance démontre la volonté d'Hydro-Québec d'augmenter la qualité de son organisation. L'ACQ est également engagée dans le développement d'une démarche qualité pour la construction basée sur les normes ISO 9000, en collaboration, entre autres, avec Hydro-Québec. L'implantation de cette démarche permettra à l'entreprise de construction d'être plus efficace et plus rentable, en plus de fournir aux clients un produit de meilleure qualité. L'Association a déjà consacré, donc, beaucoup d'efforts dans ce domaine, et elle entend les poursuivre.

Nous sommes donc tout à fait d'accord avec l'orientation qu'Hydro-Québec entend prendre pour atteindre la qualité totale. Cet objectif doit se traduire par la mise en place de mesures concrètes et une définition claire des procédures d'assurance de la qualité. D'ailleurs, en ce qui a trait à la démarche qualité, nous sommes en relation constante avec Hydro, comme je le mentionnais précédemment.

En conclusion, M. le Président, pour l'ACQ, cette première proposition du plan de développement triennal, en plus d'être le résultat d'un processus d'analyse et de consultation large et rigoureux, a le mérite d'être claire quant aux objectifs poursuivis et aux moyens de les atteindre. Il vient préciser une dimension qui, pour nous, est fondamentale, celle des retombées économiques des activités d'Hydro-Québec. Ce plan revêt donc une importance d'autant plus grande que notre industrie est aux prises avec un problème de taille en ce qui concerne l'instabilité. En dépit du fait que notre chiffre d'affaires est important et que plus de 200 000 personnes occupent un emploi direct ou indirect relié à notre industrie, nous sommes quand même une industrie fragile. nous en voulons pour preuve le fait que le nombre d'heures travaillées en 1992 est tombé sous la barre des 72 000 000. il y a trois ans à peine, notre bilan à ce chapitre dépassait les 117 000 000. le taux de chômage dans notre industrie est actuellement de l'ordre de 55 % ou environ. pour l'année 1993, la commission de la construction du québec estime à 68 000 000 le nombre d'heures qui pourraient être travaillées. c'est dire à quel point les effets de la récession, combinés, il faut bien le dire, à d'autres facteurs, comme la réglementation ou le travail au noir, compromettent notre développement et l'apport de notre industrie à la santé économique du québec.

Pour l'ACQ, donc, il est temps de mettre un terme aux études qui ne sont que des vérifications d'autres études et de retrouver une juste perspective qui nous permettra de s'inquiéter de l'aspect socio-économique de notre développement hydroélectrique. Nous appuyons donc la proposition de plan de développement d'Hydro-Québec, et nous enjoignons les membres de cette commission et le gouvernement d'y souscrire.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Audet): Merci beaucoup.

Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources. (12 h 20)

Mme Bacon: Alors, M. Lafontaine, MM., je voudrais vous remercier de participer aux travaux de notre commission et de nous apporter un éclairage sur des aspects qui sont des aspects très concrets de la réalisation des projets hydroélectriques d'Hydro-Québec.

Dans votre mémoire, vous affirmez que l'un des moyens d'éviter que les coûts de construction n'augmentent en flèche consisterait à s'assurer que tout le processus d'exécution des travaux soit fait dans une démarche de qualité totale. Est-ce que vous pouvez préciser en quoi consisterait cette démarche de qualité totale pour les principaux intervenants, dans la réalisation, là, d'un projet majeur, par exemple?

M. Paré (Michel): En fait, la philosophie de qualité totale et les normes que l'on a au niveau de la qualité actuellement, ça nous vient du secteur manufacturier. Les donneurs d'ouvrage publics et certains donneurs d'ouvrage privés tentent d'implanter les mêmes normes à l'industrie de la construction, des normes, donc, du secteur manufacturier. Ce sont des normes qui sont inapplicables dans le contexte de travail en chantier parce qu'il y a plusieurs intervenants. Il y a le propriétaire, les architectes, les ingénieurs, l'entrepreneur général, l'entrepreneur spécialisé, et une multitude. Il faut travailler en nouveau partenariat avec des normes qui correspondent à l'industrie.

Nous sommes, avec d'autres donneurs d'ouvrage privés et publics — dans les publics il y a, entre autres, la ville de Montréal — avec des ingénieurs, avec des

architectes et avec des constructeurs, à étudier les démarches, les normes de qualité qui pourraient être implantées dans l'industrie de la construction. Il y a différentes normes, entre autres, la Z 299, c'est technique, et la ISO 9000. C'est de les adapter à l'industrie de la construction. Les gens d'Hydro-Québec savent, à l'heure actuelle, qu'en exigeant la norme telle qu'appliquée dans le secteur manufacturier la totalité des entreprises de construction au Québec sont incapables d'y souscrire. Ça amène une nouvelle philosophie, il y a de nouvelles normes. Il faut les adapter, elles ne sont pas adaptées. Alors, nous travaillons en ce sens-là avec le Centre de recherche industriel du Québec, entre autres, et nous sommes en mission, à la fin du mois, en Europe, pour produire, au cours de l'automne, le guide de construction au Québec sur les normes de qualité et implanter une nouvelle philosophie et un nouveau partenariat avec les entreprises qui le voudront bien.

Mme Bacon: D'accord.

M. Paré (Michel): Hydro-Québec, à ce niveau-là, avec l'ACQ, fait preuve de grande ouverture et de leadership avec nous.

Mme Bacon: L'ACQ se montre favorable à la proposition d'Hydro-Québec de construire une réserve de projets, des projets autorisés là, pour faciliter la planification et la réalisation des travaux. En quoi cette constitution d'une réserve de projets autorisés par Hydro-Québec serait-elle avantageuse pour l'industrie de la construction?

M. Paré (Michel): En fait, nous avons même joint un editorial du président en annexe, des entrepreneurs qui étaient pris entre deux barrages...

Mme Bacon: Nous l'avons lu.

M. Paré (Michel): ...et également, ce qui arrive c'est qu'en période de forte croissance l'industrie de la construction va bien; en période d'investissements et généralement, il y a aussi beaucoup d'investissements qui se font dans le domaine public, de sorte que, au moment où les entreprises de construction ont beaucoup de travail sur la planche, les travailleurs de l'industrie sont occupés, il y a une pointe de demande de travaux de construction et tout tombe en même temps dans une récession. Il y aurait possibilité, croyons-nous, avec une meilleure planification... Il y a des besoins, dans le domaine des infrastructures municipales, dans le domaine de l'hydroélectricité, dans d'autres secteurs: écoles, hôpitaux... On ne dit pas de tous les construire dans la même année, mais de prévoir, avec les études, et là, de prévoir les plans et devis, d'avoir les autorisations préalables et les sortir en cas de besoin et non pas, au moment où on est en récession, de commencer à faire des études, aller chercher les autorisations et commencer le projet. Lorsqu'on commence le projet, la récession est terminée. Et cette idée-là, nous l'avions à l'ACQ, elle a été reprise à l'intérieur d'un congrès de l'Association de la construction, il y a déjà quelques années, et on ne l'avait pas mise en annexe, mais si vous me permettez de vous citer quand même, si c'est possible, de citer le chef de l'Opposition à l'époque, M. Parizeau: «En ce qui a trait aux grands projets, il est plus que temps de mettre en chantier des travaux comme les barrages hydroélectriques, même s'ils n'auront certes pas l'envergure d'une Baie James.» Mais pour atténuer encore plus les désagréments d'une récession, M. Parizeau propose une réserve de grands projets pour lesquels les plans et devis seraient prêts deux ou trois ans à l'avance. Il suffirait alors d'aller en appel d'offres pour déclencher ces travaux en très peu de temps. Le chef péquiste estime qu'il serait facile de planifier et de prévoir la construction, par exemple, de foyers d'accueil, d'équipements culturels, d'un centre scientifique de la technologie à Montréal, des projets de construction et des réparations de routes, etc.

Trop souvent la récession est passée avant que le gouvernement mette ses projets en place. Il y a trop de placotage. L'État a ses responsabilités et doit regarder un peu plus loin que son nez. Alors, nous souscrivons d'emblée aux propos du chef de l'Opposition.

Mme Bacon: Je ne pensais pas donner mon temps à M. Parizeau ce matin, mais je vais revenir avec une autre question.

Votre mémoire nous apprend que l'ACQ s'est engagée à collaborer avec Hydro-Québec pour développer une série de cours sur l'efficacité énergétique à l'intention des entrepreneurs. Moi, j'aimerais ça que vous élaboriez davantage sur le genre de collaboration que vous avez avec Hydro-Québec.

M. Paré (Michel): Hydro-Québec, dans le cadre d'autres programmes, a mis des programmes d'efficacité énergétique sur pied avec des entrepreneurs, prenant pour acquis que les entrepreneurs qui étaient détenteurs de la licence requise auprès de la Régie du bâtiment du Québec avaient toutes les qualités pour effectuer le travail conformément aux normes. Ces projets n'ont pas eu les résultats escomptés au niveau de la qualité du travail fourni — je ne parle pas au niveau de la publicité dans le public — mais, au niveau de la qualité du travail fourni, ça s'est avéré plus ou moins fiable.

Fortes de cette expérience-là, Hydro-Québec et l'Association de la construction du Québec sont en train de mettre sur pied des programmes types d'études pour les entrepreneurs de construction, les entreprises, leur personnel, de manière à savoir quelles normes doivent être respectées pour que tels travaux soient énergétique-ment efficaces. Ce sont vraiment des cours de formation. Nous avec les entrepreneurs, Hydro-Québec avec ses normes, on marie tout ça et on forme les entrepreneurs pour effectuer tels types de travaux avec lesquels on devra les qualifier par la suite et assurer la qualité de ces travaux. C'est vraiment au niveau de la qualité des travaux effectués par les entreprises.

Mme Bacon: À l'ACQ, vous êtes bien au fait des retombées économiques considérables qui sont associées, évidemment, à la réalisation des projets hydroélectriques. Et j'ai remarqué, toutefois, que vous ne traitez des retombées économiques régionales que dans le cadre des crédits qui sont consentis par Hydro-Québec à des initiatives de mise en valeur de l'environnement. Est-ce qu'Hydro-Québec devrait favoriser les entreprises régionales dans l'adjudication de certains de ses contrats de construction?

M. Paré (Michel): Les règles dans l'industrie de la construction font en sorte qu'au niveau de la main-d'oeuvre il y a d'abord le bassin régional. Au niveau de l'entreprise, tout détenteur d'une licence de construction au Québec, comme entreprise, a le droit d'oeuvrer sur tout le territoire du Québec. On voudrait maintenir encore cette règle-là. Sauf que, au niveau des travailleurs, il y a des règles que les entreprises doivent respecter et qui ont une préférence au niveau du bassin régional, une main-d'oeuvre régionale. Donc, il y a des impacts.

Mme Bacon: C'est par rapport à la main-d'oeuvre et non aux entreprises.

M. Paré (Michel): Et non aux entreprises.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Merci, M. le Président.

Tout d'abord, pour partir de la question de la ministre, il y a des gens qui sont venus nous dire qu'Hydro devrait scinder ses contrats en des sous-contrats plus petits pour permettre précisément à des entrepreneurs québécois et même régionaux... Vous savez, si on présente un contrat de 300 000 000 $ ou de 200 000 000 $, il y a peu d'entrepreneurs qui ont la possibilité de soumissionner pour Hydro-Québec. Et c'est un peu le sens de la question de madame. Vous dites que les employés peuvent se promener, eux. C'est vrai. Mais les entrepreneurs québécois peuvent être écartés de la maîtrise d'oeuvre purement et simplement parce qu'on présente toujours des contrats faramineux auxquels n'ont pas accès une très large portion de vos membres.

M. Paré (Michel): Vous avez tout à fait raison. D'ailleurs — je n'avais pas vraiment compris la question dans ce sens-là, je m'en excuse — on fait régulièrement des représentations pour que des gros travaux d'importance soient scindés pour permettre aux entreprises de la région...

M. Chevrette: Je prends, par exemple, une route.

M. Paré (Michel): Maintenant, il y a quand même des... Également, le même phénomène pour que ce soient des entreprises québécoises. Les grands pro- jets, généralement, se font souvent en «joint venture» pour permettre, le plus possible, l'utilisation de l'expertise d'ici.

M. Chevrette: Je pense que ça c'est réclamé à juste titre. D'autant plus que, entre vous et moi, les soumissions de départ ne veulent quasiment plus rien dire, quand on y pense.

M. Paré (Michel): C'est un autre débat. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Quand on regarde ça concrètement, là...

M. Paré (Michel): Par le biais... (12 h 30)

M. Chevrette: ...on arrive avec des contrats faramineux, des soumissions faramineuses, puis on est obligé d'aller en «joint venture», comme vous dites. Puis, en bout de course, là, ce n'est même pas le prix de départ. Il y a toutes sortes de... Comment on appelle ça, là? Des correctifs au contrat, mais, de toute nature, la friabilité du roc... J'ai regardé ça. C'est parce que c'est drôle. J'ai même étudié tout le règlement de Po-merleau, par exemple, à la Baie James, avec la compagnie française, là. Toutes les réclamations qu'il y a, à la suite d'un contrat, d'une soumission publique, je vous avoue que ça fait des... Juste les extras constituent un contrat! 56 000 000 $, 60 000 000 $, des réclamations de 14 000 000 $, 15 000 000 $, 20 000 000 $ par la suite.

Moi, je pense que quand on... Dans la mesure du possible, effectivement, Hydro-Québec rendrait service à l'industrie de la construction du Québec de scinder des contrats bien spécifiques, à partir des plans et devis. Je pense qu'il y aurait possibilité de faire ça, de permettre à des entrepreneurs québécois d'acquérir une expertise fort valable.

Quand on pense surtout au niveau des routes, entre vous et moi, ce n'est pas nécessaire de donner 300 kilomètres de route au même; on pourrait très bien scinder en tronçons, puis ça se réalise très bien, peut-être avec autant d'efficacité, sinon plus, et puis il y a une certaine compétitivité qui aurait lieu, je pense, qui serait bonne, et ça ne change absolument rien au niveau des travailleurs, ça. Ça n'affecte en rien. C'est le même nombre d'emplois. Et je pense qu'on pourrait peut-être, au niveau de la compétitivité, éviter la surenchère des coûts, parce qu'on règle, avec un entrepreneur, entre vous et moi, alors que dans de petits contrats, bien souvent, il y a beaucoup moins de problèmes de toutes natures, y compris des problèmes de relations de travail, en plus. Donc, moi, je suis d'avis qu'on devrait travailler dans ce sens-là.

Vous faites une allusion au travail au noir. Je regardais les chiffres que vous citez sur tous les bienfaits d'une retombée d'Hydro-Québec avec des barrages ou des travaux d'envergure et mes chiffres — à moins que je me trompe — le travail au noir équivaut à peu

près à ce qu'Hydro-Québec pourrait mettre en chantier, selon vos propres statistiques. Est-ce que vous avez des discussions encourageantes pour contrer le travail au noir, présentement?

M. Paré (Michel): Nous avons d'excellentes suggestions. Il suffit simplement de nous écouter!

Pour le travail au noir, nous avons déjà proposé, à plusieurs reprises, par le biais de la fiscalité... Le travail au noir est surtout concentré dans le secteur résidentiel; au niveau du secteur résidentiel, encore plus concentré dans le domaine de la rénovation résidentielle. Le domaine de la rénovation résidentielle a été déréglementé en partie, en 1988, avec le projet de loi 31, à l'époque où on disait que les travaux de rénovation étaient exclus du décret pour le domaine résidentiel, sauf quelques spécialités, et on a dit, à cette époque-là, que ce n'était pas un correctif. Aujourd'hui, le travail dans le secteur rénovation se fait à des taux complètement différents de celui du décret et, encore, c'est du travail illégal, non déclaré, comme on le disait à l'époque. Et le phénomène a pris plus d'ampleur. dans le domaine du secteur résidentiel neuf, il y a encore du travail au noir. nous disons, nous, qu'il ne faut pas sortir le secteur de l'habitation du domaine de l'industrie de la construction, au contraire. il faut reconnaître que tous les travaux de construction sont faits par les entreprises qualifiées et des travailleurs qualifiés. en contrepartie, pour amoindrir les coûts — il faut savoir, cependant, que tes coûts de main-d'oeuvre dans le domaine de l'habitation résidentielle, c'est environ 30 % du coût de la maison. les coûts de matériaux, le bois ont augmenté en flèche au cours des dernières semaines. ce ne sont pas les entrepreneurs qui mettent plus d'argent dans leurs poches, là. les coûts de terrain, les infrastructures, etc., vous le savez plus que moi. or, il y a la nouvelle technologie, le nombre d'heures pour construire une maison a diminué. alors, la masse sala-rïaie est à peu près 30 %. alors, on se dit: si on veut réduire un peu les... si on veut faciliter l'accès à l'habitation, si on veut récupérer les sommes d'argent qui se perdent pour toute la société au niveau du travail au noir, on se doit d'y aller par le biais de la fiscalité, un crédit d'impôt, un retour, etc. ça, ce sont des démarches qu'on a entreprises, des suggestions qu'on a eu l'occasion de faire à plusieurs reprises.

En ce qui concerne... Tout à l'heure, vous avez ouvert la porte au niveau des soumissions, les addenda, les corrections, la manière dont les contrats se donnent. C'est mal parti! Nous avons, au cours de l'année 1990, déposé un rapport au comité Bernard qui était chargé d'étudier le processus d'octroi des contrats. Il faut simplifier. Il faut alléger. Il faut avoir des documents de soumission complets. Les entreprises soumissionnent sur des soumissions incomplètes, ce qu'on appelle le «fast track». Ce sont des dessins. Les entreprises soumissionnent des millions et des millions de dollars, elles n'ont même pas d'horaire de travail, elles sont responsables d'une multitude de choses qui leur échappent complètement. Alors, il y a vraiment un nettoyage à faire et, également, on accorde actuellement les contrats sur la base du prix, le plus bas soumissionnaire, en sachant, parfois, que l'entreprise, pour les petits contrats — parce qu'il y a plusieurs entreprises qui peuvent soumissionner et n'ont pas toutes les qualifications — on donne le contrat au plus bas soumissionnaire, uniquement sur le prix, en sachant qu'il n'aura pas les aptitudes à réaliser ce contrat-là. Dans les grands projets, il y a une élimination naturelle qui se fait, il y a vraiment une spécialisation, c'est hors de portée, c'est moins grave. C'est la raison pour laquelle on travaille sur le dossier de qualité, qui est en même temps un critère de qualification pour tels types de contrats et tels types de travaux. Mais tout ce processus-là, toutes ces études-là, on a déjà, dans le cadre du comité Bernard, on a eu l'occasion de les présenter.

M. Chevrette: Quand on lit votre rapport, on a l'impression... L'impression qui s'en dégage, en tout cas, c'est que vous êtes d'accord avec du développement à Hydro-Québec, etc. Il y a des gens qui sont venus nous dire ici qu'il y aurait autant d'emplois, sinon plus, dans des programmes d'efficacité énergétique, dans le domaine de la construction, dans le domaine du travail en général, des emplois créés en général. Est-ce que vous partagez ce point de vue?

M. Paré (Michel): Nous, on a pris le plan de développement... On est impliqués avec Hydro-Québec dans des dossiers d'efficacité énergétique au niveau de la formation. On a des entreprises — le plan de développement d'Hydro-Québec réfère, entre autres, à l'efficacité énergétique — il y a des entreprises, chez nous, qui travaillent dans le domaine de la cogénération, le plan d'Hydro-Québec y réfère. Il y a des entreprises qui travaillent dans le domaine du barrage, etc., et le plan d'Hydro-Québec y réfère. Nous n'avons pas fait de choix, et ce n'était pas là l'objet de notre présence aujourd'hui. Est-ce qu'on devrait faire des barrages plus que des éoliennes? Est-ce qu'on devrait faire de la cogénération plus que de l'efficacité énergétique? Le programme, que l'on a fait un peu de tout, est basé, selon nous, sur des chiffres qui sont raisonnables, et on appuie le dernier plan qui a les retombées économiques les plus importantes pour notre secteur d'activité. Maintenant. ..

M. Chevrette: Croyez-vous...

M. Paré (Michel): ...s'il y a des travaux qui ne sont pas nécessaires, on ne demandera pas à effectuer les travaux qui ne sont pas nécessaires. On ne demande pas des programmes de subventions indirectes par des octrois ou par la mise en chantier de bâtiments ou d'ouvrages non essentiels, non nécessaires, non utiles. On a pris le programme qui affectait le plus l'ensemble de notre secteur d'activité.

M. Lafontaine: En somme, on ne dit pas de construire des barrages, mais on dit: Si on vient à avoir

besoin de barrages, d'être prêts, d'avoir une planification à long terme pour construire ce dont on a besoin.

Je voudrais peut-être rajouter une petite réponse. Lorsque vous avez parlé de fragmentation des contrats et ainsi de suite, des gros contrats, des gros extras, des grosses revendications... C'est sûr que la fragmentation des contrats va diminuer le montant des revendications prises une à une, mais sur l'ensemble, ça va rester avec les mêmes parce que le tout doit être fait dans une démarche de qualité totale. Si on a une démarche de qualité totale dans la construction, ça part de la préparation des plans, des études et tout ça. Si tout est fait dans une telle démarche, automatiquement, lorsque l'entrepreneur arrive avec son prix, pratiquement tout est prévu; alors, ça diminue le coût des extras, comme on appelle.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Gatineau.

M. Lafrenière: Quel est l'état actuel de la recherche et du développement dans les entreprises que votre organisme représente?

M. Paré (michel): très faible, catastrophique-ment faible, c'est inacceptable! il y a dans le domaine de la recherche et développement... on parle d'environ 0,2 % de recherche et développement dans l'industrie de la construction au canada, alors que la moyenne pour les autres secteurs, selon les données que nous avions, est de 1,5 %. nous réclamons, nous, depuis déjà quelques années, une politique de 1 % sur le montant total des travaux qui pourrait être accordé à un organisme qui va coordonner la recherche. nous faisons ça parce que, sur le plan recherche et développement, nos entreprises, 85 % des entreprises de construction au québec ont moins de cinq travailleurs qui ne travaillent pas toute l'année, dont la femme, l'épouse, etc., des enfants travaillent dans l'administration. alors, on est dans un secteur de très, très petites entreprises. il s'en fait, de la recherche, dans certains centres de recherche industrielle, universitaire, etc. c'est tellement fragmenté, c'est tellement diversifié que, pour la petite entreprise, ce qu'on appelle l'entrepreneur avec le marteau sur la fesse, il n'a pas le temps, il ne connaît pas, il n'a pas accès au réseau compliqué de ce qui existe. il ne peut pas faire de recherche et de développement. il ne peut pas investir dans ce secteur-là. (12 h 40)

L'entreprise bien organisée ne peut pas davantage investir parce que, si vous investissez dans le domaine de la recherche et du développement, il y a des coûts. Les contrats sont accordés, non pas sur l'aspect de la qualité de l'entreprise, la crédibilité financière de l'entreprise, l'expertise de l'entreprise, les contrats sont accordés strictement sur la base du coût. Si vous faites de la recherche, une bonne expertise, etc., vos coûts augmentent, on vous éloigne des marchés de la construction. C'est la raison pour laquelle on en arrive à la conclusion qu'il faudrait que ce soit l'ensemble de l'industrie, 1 % sur les travaux de construction au Qué- bec, comme ça se fait dans certains autres pays.

M. Lafrenière: Vous voulez dire que même les grandes entreprises dans la construction ne pourraient pas financer elles-mêmes leur propre recherche et développement?

M. Paré (Michel): Bien, vous ne leur donnez pas de contrats parce qu'ils sont un petit peu plus chers à ce moment-là et vous les sortez du marché par les politiques actuelles d'octroi des contrats.

M. Lafrenière: Votre organisme souhaite que des règlements politiques d'ensemble soient atteints au niveau local, afin que les soumissions des entrepreneurs n'aient pas à être reprises avec les coûts que cela comporte. Nous savons toutefois que nombre de dossiers locaux intéressent aussi des intervenants de partout au Québec et même de l'extérieur.

Les règlements politiques locaux dont parle votre organisme sont-ils liés à la constitution d'une réserve de projets autorisés?

M. Paré (Michel): S'ils sont liés à la constitution de la réserve de projets? Non, nous, on parlait avec Hydro-Québec, là, si on se comprend.

M. Lafontaine: Je pense, si je comprends bien votre question, c'est que le fait que les entreprises de construction demandent que des marchés soient restreints à des régions données vient beaucoup plus du fait de la situation économique. En temps de dépression, personne n'a d'ouvrage, alors chacun voudrait garder son marché, mais, lorsque vous êtes en période où tout va bien, vous ne verrez aucune entreprise de construction parler pour garder son marché parce que tant que ça va bien, qu'il y a de l'ouvrage partout, elle veut y aller aussi, à l'extérieur. Alors, il ne faudrait pas non plus trop restreindre, confiner à des régions, parce qu'il viendrait un temps où il y a un développement dans une telle autre région et l'autre région veut l'avoir, les gars d'une région seraient en dépression, tandis que les autres seraient en période florissante.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Merci, M. le Président.

Je veux revenir à l'efficacité énergétique. Est-ce que l'Association de la construction croit à un programme d'isolation des maisons?

M. Paré (Michel): Nous travaillons à la formation, en collaboration avec Hydro-Québec, vraiment, sur une formation dans le domaine de l'isolation du bâtiment non résidentiel. On s'est rendu compte que les entrepreneurs, avec leurs travailleurs, ne connaissaient pas les normes de construction à respecter, et le fait d'obtenir une licence d'entrepreneur de la Régie du bâtiment n'est pas une certitude...

Une voix: Une garantie.

M. Paré (Michel): ...une garantie que les gens savent comment effectuer ces travaux-là. Alors, il y a une série de normes, une série de points à respecter, et c'est ça qu'on est en train d'enseigner aux entreprises. Il y a eu des cours types, des rencontres faites avec un bon succès et, lorsque l'entreprise aura suivi ces cours-là avec succès, à ce moment-là, nous, par nos plans de garantie commerciale et industrielle, l'entreprise est donc qualifiée et sera certifiée en même temps par Hydro-Québec pour effectuer les travaux qui donnent droit à certains programmes de subventions et, si les travaux sont mal exécutés, alors en garantie, nous intervenons. Mais, il y a vraiment un programme de formation à faire, parce qu'aujourd'hui si vous allez dans la masse des entrepreneurs pour effectuer ça, vous allez avoir un échec comme il y a eu des échecs dans d'autres secteurs avec Hydro-Québec.

M. Chevrette: Je vais reprendre ma question. On sait qu'il n'existe pas présentement de programme d'isolation des maisons. Même à l'intérieur d'Hydro, on sent que les différents programmes mis de l'avant, que ce soient les lampes, les lumières opaques, ou encore les pommes de douche ou encore ÉCOKILO, ou encore je ne sais pas trop quoi là, on nous dit: Dans un climat comme le nôtre, par exemple, si on met la lampe opaque, ta plinthe va chauffer plus l'hiver, ça empêche la chaleur de se répandre. On dit: II y a des effets croisés. Il faudrait peut-être penser à des programmes mieux adaptés à notre climat et à notre situation géographique, etc.

C'est pour ça que je vous posais la question: Est-ce que vous avez, vous autres, mis de l'avant, poussé sur Hydro pour qu'ils aillent vers un programme d'isolation? Vous me dites que vous faites très peu de recherche. Si des ingénieurs nous disent: C'est dommage, mais on ne sait pas comment isoler une maison parce qu'on ne s'occupe pas de l'aération. On s'imagine, parce qu'on bouche tout, que c'est mieux isolé; est-ce qu'il y a, au moins, un minimum de recherche qui se fait dans ce secteur-là? Parce qu'on me dit que ça pourrait être très productif, d'abord pour votre industrie, de un; de deux, ça répondrait véritablement à un besoin, parce que quand, à l'infrarouge, on passe au-dessus d'un village ou d'une ville, on voit toute l'énergie qui se gaspille, en particulier dans l'industrie aussi, dans des commerces et même dans le parc résidentiel. Est-ce que vous avez un cheminement de fait là-dessus?

M. Paré (Michel): Non. Nous, on parlait au niveau de la construction, l'enveloppe du bâtiment.

M. Chevrette: L'enveloppe?

M. Paré (Michel): L'enveloppe du bâtiment commercial, industriel. Au niveau de la pomme de douche, de la lumière, ces choses-là, on est...

M. Chevrette: Non, non. Je comprends. Si je vous ai demandé les programmes d'isolation...

M. Paré (Michel): C'est l'enveloppe du bâtiment.

M. Chevrette: ...c'est parce qu'il y a des gens qui croient plus à ça.

M. Paré (Michel): Et est-ce qu'il se fait de la recherche présentement? Il y a des dossiers qui se font avec Hydro-Québec à ce niveau-là. Il y a certainement de la recherche, mais nous ne sommes pas impliqués, comme organisme, sur la technique de la recherche. On n'est pas impliqués au niveau de la recherche comme telle.

M. Chevrette: Ce serait intéressant que votre association accompagne cette recherche-là. Vous aurez à former vos gens en fonction de l'application de...

M. Paré (Michel): On le demande. On le demande et on est en étroite collaboration avec, entre autres, j'ai parlé d'Hydro-Québec tantôt, mais le Centre national de recherches du Canada, le Centre de recherche industrielle du Québec, les autres centres industriels qui existent dans certaines universités, etc., la domotique, ces choses-là. On a même créé une table de concertation à ce chapitre-là avec laquelle on a aussi l'appui du ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. On est impliqués dans les grappes industrielles pour, justement, ramener tout ça. Tout est divisé, tout est fragmenté dans l'industrie. C'est vraiment terrible. Alors, il se perd des énergies. Il y a des connaissances qui existent, mais on ne sait même pas qu'elles existent. Alors, on ne peut pas y référer. Parce qu'on parle de regrouper, de ramener tout ça, de rendre ça à portée de l'entrepreneur qui a moins de cinq employés, c'est évident qu'il y a beaucoup de travail, mais ce n'est pas évident que les gens connaissent ce qui existe présentement.

M. Chevrette: Est-ce qu'il me reste du temps?

Le Président (M. Audet): Deux minutes.

M. Chevrette: Merci.

L'autre volet que je voulais toucher, je vais m'y rendre, je ne pensais pas avoir le temps. Vous dites: «En ce sens, nous croyons — page 13 — que toutes les mesures que prendra Hydro-Québec pour obtenir, au préalable, de nombreuses autorisations requises à la mise en chantier des centrales hydroélectriques et d'autres projets de production auront un effet stabilisateur sur l'industrie de la construction». Ceci est partagé par beaucoup de gens. D'autre part, on se rend compte que, quand démarre un projet, il y a des gens diamétralement contre, des gens diamétralement pour, et un certain nombre dans le milieu qui demandent des prérequis ou qui exigent des fonds de développement régional, par exemple, plus gros — vous avez, sur l'Ashuapmushuan,

il est venu devant nous deux, trois groupes.

Fondamentalement là-dessus, est-ce que vous ne croyez pas qu'il devrait y avoir un débat, au Québec, plus large pour dire: Écoutez, il y a des rivières qui seront de type patrimonial, mais, sur les autres, il y a autorisation de faire des projets? Ce qui empêcherait tous ces débats, chaque fois qu'on aborde un projet. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il serait temps? Ça existe ailleurs, ça. On décide, par exemple, que telle rivière ne sera pas harnachée, par décision de l'État, en disant: Celle-là sera de type patrimonial et on la conserve intacte. À ce moment-là, les autres font l'objet de projets, il y a moins de... Le débat s'est fait globalement et là, il y a eu une décision rendue et, par la suite, ça pourra être plus efficace.

Est-ce que vous avez une idée là-dessus, parce que je trouve que... (12 h 50)

M. Paré (Michel): Nous, on sera d'accord avec toutes les suggestions intéressantes qui vont avoir pour effet de raccourcir les délais de consultation, d'alléger le processus d'autorisation, que ce soit environnemental ou autre, pour que l'on puisse arrêter, à un moment donné, de débattre des débats et de consulter la consultation. Il faut procéder. Les entrepreneurs en construction sont des gens rapides, qui veulent exécuter, qui veulent travailler. Les travailleurs, c'est la même chose. Alors, il y a des projets pour lesquels des entreprises ont soumissionné, souvent, et le projet ne se réalise pas parce qu'il y a un processus de consultation, il y a une étape de la consultation qui n'a pas été faite, qui est reprise, et ça amène des coûts énormes au niveau de l'entreprise, au niveau de la préparation de la soumission. Mais, en plus, lorsque des entreprises sérieuses préparent des soumissions, elles ont des cautionnements. Ça affecte — et elles sont choisies, vous connaissez le débat — ça affecte leur solidité financière de sorte que leur carnet de commandes est pris, est complet et elles ne peuvent plus soumissionner sur d'autres projets, et le projet vient de tomber parce qu'il y a une consultation.

Il faut faciliter ça, il faut amoindrir, il faut raccourcir, il faut agir. Alors, si vous avez des suggestions pour cesser la consultation, de consulter la consultation et de débattre des débats, on va vous applaudir.

M. Lafontaine: En fait, nous avons regardé le mémoire en fonction de l'industrie de la construction. Ce que vous mentionnez, on ne peut pas faire autrement qu'abonder dans le même sens, mais par contre, un choix de société, je ne crois pas que ça revienne à l'industrie en tant qu'industrie à dire quels choix de société on devrait avoir. Ce serait aux individus dans la société, qu'il y ait un débat, mais comme Me Paré le dit, qu'on arrête de débattre, qu'on en fasse un une fois pour toutes et qu'on ait un plan de développement après ça, dans n'importe quoi, qu'on puisse aller et fonctionner pour l'avenir.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

J'aimerais revenir sur deux points. Je pense qu'il y en a un que vous avez touché aussi, le phénomène de la plus basse soumission conforme, tant qu'à moi, qui est un nivellement par la base. Vous avez très bien élaboré pour dire qu'une grande entreprise qui voudrait faire de la recherche et développement, il n'y a aucun moyen qu'elle puisse transférer ses coûts de recherche innovative dans les coûts de fabrication. Alors, je pense que vous touchez une problématique. Il va falloir s'y adresser un jour et avoir une grille d'analyse qui va reconnaître ça, parce que, sans ça, on va se faire sortir complètement du marché au niveau technologique. j'aimerais revenir, ceci étant dit, sur le 1 % de la valeur que vous voulez adopter. est-ce que ça inclurait aussi le bâtiment d'habitation? parce qu'on pourrait dire 1 % sur l'institutionnel, le commercial, l'industriel et on laisse de côté l'habitation unifamiliale ou si ça comprendrait tout ça?

M. Lafontaine: on dit qu'au départ on pourrait commencer par les projets publics, si vous voulez, qu'il y ait une base, qu'il y ait de l'argent qui s'en aille dans un fonds pour aider à la recherche et développement. parce que si vous l'appliquez directement dès aujourd'hui sur le coût de l'unité familiale, vous allez avoir un tollé général, on trouve déjà que c'est trop cher. alors, au moins, commencer dans le public et le parapublic, qu'il y ait des fonds comme les gouvernements font pour encourager les artistes. ils ont un pourcentage, 1 % qui va aux artistes, ça aide à faire vivre les artistes, qu'il y ait au moins un pourcentage qui irait à la recherche, qui affecterait l'ensemble de l'industrie. je pense que ce serait déjà un grand pas.

M. St-Roch: Mais si on ajoutait aussi l'habitation unifamiliale. Si on disait: Bien, ce 1 % là va aider aussi à améliorer tout le fameux contenu énergétique de la maison — parce qu'on peut le regarder d'une façon globale et dire, en bout de piste, le consommateur va en bénéficier parce que sa facture énergétique va être plus basse. Alors, il y a une récupération des coûts qui se fait à longue échéance.

M. Paré (Michel): L'objectif prévu, c'est pour l'ensemble de tous les travaux de construction, parce qu'il va y avoir un impact positif pour tous les propriétaires, qu'ils soient privés ou publics, petits ou gros. Un meilleur produit, de nouvelles technologies, etc., une meilleure productivité pour l'entreprise, donc de moindres coûts en bout de ligne pour le client, qu'il soit propriétaire public ou privé ou consommateur. Nous disons, 1 % dans un premier temps, mais si vous nous dites: On le donne à tout le monde... On sort sur la place publique demain matin et on dit qu'on est d'accord avec vous. Mais on doit réagir. Il y a actuellement des lois au Québec qui disent que les pouvoirs publics, les pouvoirs parapublics sont obligés d'accorder le contrat au plus bas soumissionnaire, point à la ligne. Alors, ça a un effet d'entraînement.

d'ailleurs, les propriétaires privés, souvent, vont donner le contrat, non pas au plus bas, au deuxième ou au troisième. ils vont regarder un peu plus la qualité. alors, pour contrer la règle actuelle qui est celle du plus bas soumissionnaire, on se dit, 1 % d'abord pour les projets publics et parapublics. donnez l'exemple, il va y avoir un effet d'entraînement. en même temps, par le processus de qualification des entreprises, pas à savoir si vous avez un cautionnement de 10 000 $ en cas de fraude ou malversation comme c'est le cas actuellement, mais une qualification d'entreprise en fonction de normes de qualité, de certification d'entreprises sur la qualité.

Mais là, on parle d'une révolution, hein? Et c'est là-dessus que l'on travaille en partenariat avec d'autres groupes, d'autres centres de recherche. J'ai nommé — et je le répète — Hydro-Québec, parce qu'on n'est pas ici par hasard. On travaille ensemble sur plusieurs projets. Il y a Hydro-Québec, il y a des municipalités, il y a toutes sortes de groupes, des propriétaires privés, des sociétés de transport, etc. Alors, on travaille en partenariat pour se développer, arrêter d'avoir une industrie qui est toujours devant les tribunaux. Il va finir par y avoir plus d'avocats dans la construction qu'il va y avoir de travailleurs. Je n'ai rien contre. Je suis de formation, mais ce n'est pas normal! On est une industrie de réclamations, de revendications, parce que les documents de base, les dessins sont mal faits, les soumissions sont incomplètes. Personne ne prend ses responsabilités. On les transfère sur le dos de tout le monde pour attendre après ça qu'un juge, éventuellement, décide, quand l'entreprise sera en faillite, s'il y a une institution financière qui fera la réclamation. c'est ça qu'on a vécu. c'est ça qu'on vit présentement. on commence des contrats et on ne les paie pas; rendu à 100 % du contrat, on paie 80 % de la facture et on dit: attendez. ce n'est pas normal, ça! ce n'est pas ça qui fait qu'on va arriver avec un produit de qualité dans un partenariat, qu'on va avoir du plaisir à produire des choses de qualité. ce n'est pas ça.

Le Président (M. Audet): M. Lafontaine, vou-ïiez-vous ajouter quelque chose?

M. Lafontaine: Non, juste une petite explication à ce que Me Paré dit.

On dit que les dessins sont mal faits et tout ça. Ce n'est pas nécessairement parce que nos ingénieurs ou nos architectes sont incompétents, mais tout le monde coupe les honoraires à partir des donneurs d'ouvrage publics. Les honoraires sont coupés. Alors, ils en ont pour leur argent. Les plans arrivent incomplets. Les entrepreneurs soumissionnent sur des plans incomplets et ils arrivent à la fin, comme on le disait tantôt... Il y a des avocats dans les entreprises maintenant parce que ça prend pratiquement plus d'avocasserie que d'ingénierie. Alors, le gars, en soumissionnant, la liste des extras qui va être revendiquée à la fin, elle est déjà prête parce qu'ils ont vu tous les trous qu'il y a dans les devis et les plans. Alors, il s'ensuit un processus qui n'a plus d'allure.

Le Président (M. Audet): Merci. Ça termine.

M. St-Roch: Est-ce que j'ai le temps pour une brève question?

Le Président (M. Audet): Au niveau de l'enveloppe de temps, c'est déjà dépassé.

Alors, messieurs de l'Association de la construction et les membres de la commission, je vous remercie beaucoup.

Nous allons suspendre deux secondes afin de permettre à la Fédération des ACEF du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 13 h 1)

Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Nous recevons maintenant la Fédération des ACEF du Québec.

Alors, madame, monsieur, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue à notre commission. Je vous rappelle brièvement nos règles de procédure. Vous disposez d'une vingtaine de minutes pour nous faire part de votre exposé, et avant, vous présenter, ce qui est très important. Ensuite suivra une période d'échanges d'une quarantaine de minutes. Vous avez la parole, allez-y.

Fédération des ACEF du Québec

M. O'Narey (Ronald): Merci.

Je représente, effectivement — Roland O'Narey — la Fédération des ACEF du Québec, accompagné d'Hélène Maisonneuve, qui est de l'ACEF de Joliette et qui fait partie de la Fédération.

Alors, je commencerai en vous disant que, depuis sa fondation, la Fédération des ACEF est intervenue auprès d'Hydro-Québec quant à son rapport avec le consommateur. Elle a questionné et critiqué régulièrement l'entreprise sur ses pratiques de recouvrement des créances et ses demandes de hausse de tarifs. En mars 1990, la Fédération des ACEF a profité de la première commission parlementaire sur les perspectives d'avenir de l'électricité au Québec pour présenter un mémoire traitant de l'impact des pratiques de recouvrement d'Hydro-Québec sur les familles à faibles revenus.

La Fédération des ACEF s'est également prononcée sur la nécessité de permettre à tous les Québécois d'intervenir régulièrement sur la gestion et le développement d'Hydro-Québec, de même que sur la nécessité de tenir un débat public sur le développement énergétique au Québec. Depuis, elle a poursuivi son travail à tous ces niveaux. À sa demande, par exemple, un groupe de travail a été formé par le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu pour étudier le problème de l'appauvrissement des ménages relié à la consommation

d'énergie et proposer une stratégie globale d'intervention.

Ce groupe de travail a déposé des recommandations en juin 1992, en juin dernier. Malheureusement, personne encore n'a donné de suites aux différentes recommandations qui ont été formulées par le comité. Par ailleurs, la Fédération des ACEF a participé activement, au cours de l'année 1992, à la première consultation d'Hydro-Québec sur son plan de développement afin de représenter le point de vue des consommateurs.

La Fédération des ACEF est donc aujourd'hui heureuse de participer à nouveau aux travaux de la commission, qui devraient permettre au gouvernement de prendre des décisions éclairées quant au développement d'Hydro-Québec pour les prochaines années. En tout premier lieu, la Fédération tient à réaffirmer qu'il est essentiel de faire plus de place aux consommateurs dans le développement et la gestion des services énergétiques au Québec, afin de dégager les consensus qui permettront un développement harmonieux dans l'intérêt de toute la société.

Au cours des dernières années, la majorité des débats de fond sur l'énergie au Québec se font sur la place publique. Nous avons assisté à de véritables confrontations médiatiques parce qu'il n'y a toujours pas de mécanisme prévu permettant à la population de s'exprimer sur les choix énergétiques du Québec et sur les grands enjeux qui en découlent. Les Québécois refusent de plus en plus de laisser ces choix uniquement entre les mains des experts d'Hydro-Québec et du gouvernement. Les consommateurs devraient donc avoir voix au chapitre sur toutes les questions relatives à l'énergie, un besoin et un service essentiels pour toute la population.

En conséquence, la Fédération demande donc une révision de la politique énergétique du gouvernement et la tenue d'un débat public sur les grandes orientations et les choix énergétiques du Québec. Elle demande également la création d'une régie de l'énergie qui chapeauterait tous les producteurs et les distributeurs d'énergie. De fait, toutes les entreprises d'électricité et de gaz d'une certaine importance en Amérique du Nord sont réglementées par un organisme indépendant. Un tel organisme, en plus de voir à l'application de la politique énergétique du Québec, permettrait de contrôler et d'orienter le développement du secteur de l'énergie tout en réalisant les arbitrages nécessaires entre les intérêts parfois divergeants des entreprises, des consommateurs et des divers groupes d'intérêt dans la société.

Parmi les décisions qui concernent au plus haut point les consommateurs, il faut évidemment souligner la question du coût de l'énergie et de sa tarification. Dans le processus actuel, comme par le passé, il n'y a pas de véritable mécanisme de consultation sur les demandes tarifaires d'Hydro-Québec. Chaque année, les demandes de hausse de tarifs sont étudiées en commission parlementaire, mais les consommateurs ne peuvent s'exprimer sur ces demandes. Il faut aussi souligner que c'est le gouvernement, seul actionnaire d'Hydro-Québec, qui prend la décision finale sur les hausses de tarifs et que, pour la majorité des consommateurs, il y a là vraiment un conflit d'intérêts.

La Fédération des ACEF du Québec demande donc la création d'un organisme compétent et indépendant chargé d'étudier et de se prononcer sur les demandes de hausse de tarifs dans le secteur de l'énergie. Cet organisme devrait tenir des consultations pour permettre aux consommateurs de s'exprimer sur ces demandes. De plus, la Fédération demande que toutes les demandes de hausse de tarifs soient accompagnées d'une étude d'impact détaillée sur la situation financière des clients et, plus particulièrement, sur la situation financière des familles à faibles revenus. Parce que l'énergie est un service essentiel, des mesures doivent être prises pour que les enteprises assument leurs responsabilités sociales envers les familles en général, mais particulièrement les familles à faibles revenus. Pour ces entreprises, les coupures de services constituent sans doute le moyen de recouvrement ultime. Cependant, elles procèdent chaque année à un nombre important de coupures et ce, même durant la période d'hiver. Étant donné la nature essentielle de l'énergie et les contraintes financières des familles à faibles revenus, la Fédération des ACEF demande que des mesures soient prises pour limiter sérieusement les coupures de services énergétiques aux familles à faibles revenus, cela tout particulièrement durant la période d'hiver. Elle demande, entre autres, la création d'un mécanisme de recours doté de pleins pouvoirs, auquel seraient soumis les litiges qui opposent les entreprises d'énergie et les abonnés. Avant de couper le service à un client, les entreprises devraient avoir l'obligation de soumettre une demande, l'obligation de la justifier, et le client devrait avoir le droit d'être entendu.

L'augmentation des comptes impayés et des comptes irrécouvrables d'Hydro-Québec n'est ni l'effet du hasard ni celui de l'augmentation subite de la mauvaise volonté des clients. Au cours des dernières années, le nombre des familles à faibles revenus — aide sociale, chômage, salaire minimum, emploi précaire — a considérablement augmenté. Ces familles disposent généralement d'un revenu insuffisant pour acquitter leur compte d'électricité qui augmente sensiblement d'année en année, grugeant une part de plus en plus importante de leur budget. Plusieurs d'entre elles doivent donc fournir un effort démesuré pour payer leur facture d'électricité. Pour la Fédération des ACEF, c'est d'abord au gouvernement du Québec de prendre des mesures pour aider ces familles. Depuis 10 ans déjà maintenant, le gouvernement fédéral américain offre une telle forme d'aide. En 1993, cette année, le gouvernement américain investira 1 300 000 000 $ dans le «low income home energy assistance program», un programme qui permet d'offrir une aide moyenne de 200 $ à environ 6 000 000 de familles. La Fédération des ACEF demande donc au gouvernement de créer un programme d'aide à la consommation d'énergie pour les familles à faibles revenus. Elle demande également au gouvernement de développer, avec les associations de consommateurs qui offrent déjà ce type de service, la planification budgétaire, un programme spécifique qui permette de rendre le service accessible à toutes les familles, partout au Québec.

Pour la Fédération des ACEF, le gouvernement du Québec doit se donner un plan intégré de gestion des ressources énergétiques qui tient compte des impacts économiques, environnementaux et sociaux de la production et de l'utilisation de l'énergie. Pour élaborer ce plan de gestion des ressources dans l'intérêt de toute la collectivité, le gouvernement doit permettre un débat public sur les principaux enjeux du développement énergétique.

Dans un plan intégré de gestion des ressources, les programmes d'économie d'énergie et de gestion de la demande sont traités sur le même pied que l'ajout de nouvelles sources de production. Aux États-Unis, plusieurs organismes de réglementation ont même accordé des avantages aux programmes de gestion de la demande pour tenir compte des externalités environnementales. Au Québec, les consommateurs sont prêts à réduire leur consommation d'énergie si leurs efforts permettent de protéger ou de mieux protéger l'environnement sans augmenter indûment leur facture d'énergie. Mais ils ne sont pas prêts à ce que les fruits de leurs efforts soient exportés ou vendus à rabais à la grande industrie.

Dans une perspective de développement durable, la gestion de la demande et les programmes d'économie d'énergie sont devenus incontournables dans la plupart des pays développés. Malheureusement, Hydro-Québec ne propose pas encore de programmes soutenus d'économie d'énergie dans le secteur résidentiel dans son plan de développement, même si ses expériences dans ce domaine ont démontré que les Québécois sont bien plus sensibles aux économies d'énergie qu'elle le prévoyait. La Fédération des ACEF demande donc à Hydro-Qué-bec de prioriser les économies d'énergie en offrant des programmes soutenus visant particulièrement l'enveloppe thermique des maisons. La Fédération des ACEF est donc d'accord avec les objectifs d'économie d'énergie, ne s'oppose donc pas aux augmentations de tarifs qui pourraient s'avérer nécessaires pour atteindre ces objectifs.

En effet, il est tout à fait acceptable, socialement, d'accorder un bénéfice financier spécifique aux programmes d'économie d'énergie pour refléter les coûts directs et indirects liés à l'ajout de nouveaux équipements de production, dont celui des externalités environnementales. Cependant, pour tenir compte de la capacité de payer des familles, Hydro-Québec doit s'assurer que le coût final de l'électricité n'augmente pas avec l'implantation des programmes d'économie d'énergie. (13 h 10)

Les augmentations de tarifs qui pourraient être nécessaires pour financer les programmes d'économie d'énergie doivent être compensées, le plus possible, par lesdites économies, et les familles qui ne peuvent participer aux programmes ne doivent pas être pénalisées. La Fédération demande donc à Hydro-Québec de prendre des mesures, par exemple, pour que les propriétaires d'immeubles à logements participent aux programmes d'économie d'énergie sans que les locataires n'aient à subir des hausses de loyer exagérées. Les programmes d'économie d'énergie, de façon générale, sont avantageux pour l'ensemble de la société, à notre avis. Mais toutes les études et les expériences récentes américaines ou québécoises d'Hydro-Québec ont démontré que les familles à faibles revenus participent peu ou pas du tout à ces programmes. Ces familles risquent pourtant de voir leur facture augmenter pour financer des programmes dont les autres bénéficient. Il est donc essentiel que des mesures particulières soient prises pour aider ces familles à économiser l'énergie.

Récemment, l'État de New York a investi 10 000 000 $ dans des programmes d'économie d'énergie spécifiques pour les familles à faibles revenus. De plus, les commissions de services publics de plusieurs États, comme le Vermont ou le Colorado, sont favorables à la création de programmes d'économie d'énergie particuliers afin de venir en aide aux familles à faibles revenus. Mais ces familles consomment moins d'énergie que les autres familles, et les programmes d'économie d'énergie spécifiques pour ces familles ne paraissent pas toujours rentables du point de vue de l'entreprise. Il faut investir des sommes importantes pour économiser peu, alors que les mêmes sommes investies dans un autre secteur pourraient rapporter davantage.

Un projet expérimental de l'économie d'énergie, d'efficacité énergétique d'Hydro-Québec auprès des familles en difficulté de paiement arrive d'ailleurs à la même conclusion. Il est cependant possible d'augmenter la rentabilité de ces programmes en tenant compte des coûts de recouvrement que ces programmes permettent d'éviter et en tenant compte de l'impact, pour la société, des mesures de recouvrement et des coupures de service, de la même manière dont on tient compte des externalités environnementales. La Fédération des ACEF demande donc à Hydro-Québec d'offrir des programmes d'économie d'énergie spécifiques pour les familles à faibles revenus, en incluant, dans le coût du calcul de ces programmes, les coûts de recouvrement évités et en tenant compte du coût social des mesures de recouvrement à titre d'externalités.

Pour favoriser les économies d'énergie et une utilisation plus rationnelle de l'électricité, il est de plus en plus admis et reconnu que les entreprises d'énergie, ou d'électricité ou de gaz, doivent fournir un signal de prix plus juste aux consommateurs. Une tarification au coût marginal permet d'atteindre ces objectifs. Cependant, il est presque impossible, techniquement, sinon trop coûteux, d'implanter ce mode de tarification. De plus, son impact sur les tarifs serait catastrophique pour les consommateurs. Hydro-Québec, pour atteindre sensiblement les mêmes objectifs, propose plutôt une tarification différenciée dans le temps. D'une part, elle compte accentuer le caractère saisonnier du tarif domestique actuel et, d'autre part, offrir, sur une base optionnelle, un tarif horo-hebdo-saisonnier.

La Fédération des ACEF est d'accord avec les objectifs d'Hydro-Québec et considère qu'une forme de tarification plus progressive est nécessaire pour favoriser les économies d'énergie. Cependant, la restructuration proposée ne paraît pas adéquate. L'augmentation du

caractère saisonnier du tarif domestique ne constitue, de toute évidence, qu'une hausse de tarif pure et simple, parce qu'un grand nombre d'abonnés ont peu de prise sur le facteur saisonnier de leur facture; il leur sera difficile d'économiser en déplaçant leur consommation.

Quant au tarif horo-hebdo-saisonnier optionnel proposé, il ne laisse pas suffisamment de marge de manoeuvre pour que les abonnés puissent y adapter leurs habitudes de consommation, et des études plus approfondies sur différentes autres options seraient souhaitables. La Fédération demande donc qu'HydroQuébec modifie graduellement ses tarifs, pour favoriser la rationalisation et une réduction de la consommation d'électricité. Elle s'oppose, par contre, à la proposition d'augmenter le caractère saisonnier du tarif domestique et demande que des études d'impact plus précises soient réalisées pour plusieurs formes de tarification, à plusieurs échelons, dont certaines tiendraient compte de la quantité et de l'usage de l'énergie, de l'électricité.

La Fédération des ACEF s'oppose aussi au rééquilibrage des tarifs demandé par Hydro-Québec, sous le prétexte que les clients résidentiels sont interfinancés par les clients des autres catégories tarifaires. En 1988, dans une étude, Hydro-Québec affirmait qu'il est impossible de calculer l'interfinancement sur la base des coûts moyens imputés aux différentes catégories de clients. En fait, il y a plusieurs manières de calculer ces coûts, avec des résultats différents pour chacune. En réalité, une foule de considérations et de facteurs externes influencent la construction des tarifs: les exigences de l'actionnaire, des orientations politiques ou sociales et l'évolution du contexte énergétique global. D'ailleurs, si Hydro-Québec se préoccupe de l'interfinancement, c'est parce qu'on craint l'effritement du marché des clients commerciaux et industriels, un marché beaucoup plus sensible à la concurrence.

Il est donc clair qu'Hydro-Québec compte augmenter davantage le tarif des clients résidentiels captifs, pour favoriser sa position concurrentielle dans les secteurs commerciaux et industriels. Pour la Fédération des ACEF, F interfinancement est omniprésent dans toute la structure tarifaire d'Hydro-Québec, même s'il est difficilement calculable. Les clients résidentiels s'interfinan-cent entre eux, et il en va de même dans les autres catégories. Pour la Fédération des ACEF, donc, l'inter-financement actuel demeure souhaitable, car il reflète un sain équilibre entre la capacité de payer des clients résidentiels captifs et la position concurrentielle des tarifs pour les entreprises et les industries. pour la période 1993-2000, hydro-québec propose d'aligner ses hausses de tarifs sur l'inflation. en réalité, elle propose plutôt une augmentation supérieure à l'inflation pour les clients du secteur résidentiel. pourtant, au cours des trois dernières années, dans un contexte économique très difficile pour les familles, les augmentations de tarifs ont été bien supérieures à l'inflation. ainsi, en 1990, 1991 et 1992, les tarifs ont augmenté respectivement de 7,5 %, de 7 % et de 3,5 %, alors que l'inflation se situait à 4,8 %, 5,6 % et 1,5 %, sans compter l'introduction de la tps en 1991, qui a augmenté considérablement les tarifs également.

La Fédération demande donc de maintenir le coût de l'électricité au plus bas niveau possible, en limitant vraiment les hausses à l'inflation pour les prochaines années et en offrant, simultanément, des programmes d'économie d'énergie permettant à toutes les familles d'en réduire l'impact, en maintenant la facture finale au même prix.

Mme Maisonneuve (Hélène): Pour améliorer la qualité de son service à la clientèle, Hydro-Québec propose, dans son plan, de tenir compte de plusieurs variables, notamment des besoins particuliers des personnes en situation financière précaire. Mais on se propose d'accroître les revenus de l'entreprise, par ailleurs, en réduisant sensiblement les mauvaises créances. Et, pour y arriver, on dit qu'on compte se montrer plus ferme vis-à-vis les clients qui ont des paiements en retard et qu'on compte appliquer plus rapidement la procédure de coupure de courant, tout en évitant de couper l'hiver.

Bon. Pour la Fédération des ACEF, ces orientations sont contradictoires parce qu'Hydro ne propose aucune mesure ou action nouvelles qui permettraient de diminuer ses comptes en recouvrement en tenant compte des besoins particuliers des familles, tel qu'elle le proposait à deux endroits différents dans son plan. Au cours des dernières années, il a pourtant été clairement démontré que les comptes en recouvrement et les mauvaises créances d'Hydro-Québec sont la manifestation de l'incapacité de payer, de la précarité et de la pauvreté de milliers de familles. Pour contrer l'augmentation de ces comptes en recouvrement et ces mauvaises créances, Hydro-Québec a toutefois raison d'accélérer ses interventions auprès de ses clients en difficulté, pour éviter que les montants à payer ne deviennent trop importants, trop grosses factures beaucoup plus difficiles à réduire, à payer. Cette mesure n'est malheureusement pas suffisante.

On propose plutôt, par exemple, si on prend aux États-Unis, un pays qui n'est pas réputé pour ses programmes sociaux, peu s'en faut, plusieurs dizaines de compagnies d'électricité et de gaz offrent des programmes d'aide aux familles à faibles revenus, parce que l'ancien cadre, le cadre courant, ne donne pas les éléments, ne fournit pas les éléments pour la régler, la situation. Alors, il y a principalement deux types de programmes utilisés: des programmes d'aide financière et des programmes d'économie d'énergie dont on a déjà parlé. Il faut cependant noter que la grande majorité des entreprises ont créé ces programmes à la demande expresse de leur agence de réglementation. En effet, un nombre de plus en plus important d'agences de réglementation, de commissions de services publics pensent que les programmes d'aide aux familles à faibles revenus constituent une alternative intéressante et rentable aux méthodes de recouvrement traditionnelles pour les familles qui ont de la difficulté à payer leurs factures d'énergie. Pour ces commissions, il est dans l'intérêt du public de créer des programmes d'aide appropriés,

intégrés dans la structure tarifaire des entreprises d'énergie. Généralement, les familles qui participent à des programmes d'aide financière acceptent de payer mensuellement un montant fixe, calculé en fonction de leurs revenus et de la taille de leur famille. Ces paiements peuvent être inférieurs à la consommation courante, mais permettent d'éviter des coûts de recouvrement et des coupures de services.

Le Président (M. Audet): En conclusion, s'il vous plaît. (13 h 20)

Mme Maisonneuve: Bon. On propose au gouvernement et aux ministères concernés d'étudier en profondeur les plans qui sont déjà expérimentés aux États-Unis et en France — des programmes d'aide — parce qu'on considère, à la Fédération, que c'est une absolue nécessité au Québec actuellement.

Merci.

Le Président (M. Audet): Merci beaucoup, madame, monsieur.

Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: M. O'Narey, Mme Maisonneuve, j'aimerais vous remercier pour votre contribution au processus d'examen du plan de développement d'Hydro-Québec. Je pense que vos avis et vos commentaires sur, soit la qualité de service à la clientèle, la tarification, l'efficacité énergétique, la place à donner aux consommateurs, qui est une place importante, seront certainement pris en considération lors de l'adoption du plan de développement.

Dans le cadre de la tarification de l'électricité et de l'efficacité énergétique, là, vous référez régulièrement à la prise en compte de la capacité de payer des consommateurs d'électricité quand des gestes sont posés dans les différents domaines. Comment vous définissez la capacité de payer? Est-ce que c'est quelqu'un qui a un emploi, qui a un salaire régulier ou quelqu'un qui a au moins un petit revenu, votre définition de «capacité de payer»?

M. O'Narey: Je pense que la capacité de payer réfère beaucoup... En tout cas, d'après ce qu'on a pu voir jusqu'à maintenant, c'est la proportion, finalement, que les dépenses d'énergie représentent sur l'ensemble des revenus d'une famille, en tenant compte que ce pourcentage-là, par exemple, à l'heure actuelle, pour les familles à faibles revenus, a augmenté au cours des dernières années. Alors que, pour l'ensemble de la population, on se rend compte que le pourcentage attribué aux factures d'énergie sur leurs revenus est relativement stable. Pour les familles à faibles revenus, ce pourcentage-là est de deux à trois fois même, dans la majorité des cas, plus élevé et représente un fardeau beaucoup plus lourd pour ces familles-là. Donc, il n'est pas surprenant de voir que les comptes en recouvrement d'Hydro-Québec augmentent dans la mesure où cet effort-là qui est demandé aux familles pour payer leur énergie est de plus en plus difficile à rencontrer.

Mme Bacon: Et établissez-vous, par exemple, un pourcentage pour la facture énergétique, quand vous parlez de capacité de payer?

M. O'Narey: on n'a pas établi jusqu'à maintenant... on n'a pas l'expertise entre les mains pour permettre d'établir vraiment ça serait quoi, le pourcentage idéal. mais ce qu'on sait, c'est que, de façon générale, la majorité des familles paient environ 3 % à 4 % de leurs revenus pour payer l'énergie. alors qu'on voit très facilement les personnes seules, sous le seuil de pauvreté, payer jusqu'à 9 % à 10 %, en moyenne, leur facture d'énergie. et, dans bien des cas des familles qu'on rencontre, ces montants-là peuvent aller jusqu'à 15 %, 20 %. on se rend compte qu'aux états-unis les programmes qui ont été créés visaient à ce que les familles n'aient pas à assumer plus qu'environ, dans certains cas 7 %, dans certains cas 8 %, dans certains cas 9 %, que ça ne puisse pas dépasser ce montant-là, en termes de proportion du revenu comme tel.

Mme Bacon: J'ai été un petit peu étonnée de vous entendre proposer et recommander la création d'une régie pour fixer des tarifs. Et vous demandez, en même temps, d'inclure les externalités dans les coûts. Est-ce que vous avez évalué les incidences de ces mesures-là sur les tarifs?

M. O'Narey: Au niveau des externalités, on ne les a pas évaluées. Je pense que c'est le travail qu'il y aurait à faire, justement, de les évaluer, ces externalités-là. Et c'est dans ce sens-là aussi qu'on demande à ce qu'il y ait un débat public qui permette d'évaluer davantage, avec plus de précisions, de faire toutes les études nécessaires, et le débat qui est nécessaire pour, justement, avoir toutes les données qui vont nous permettre de faire les choix qui s'imposent à ce niveau-là. Mais, au départ, on ne s'oppose pas systématiquement à ce qu'on tienne compte des externalités, dans la mesure où c'est possible aussi. Donc...

Mme Bacon: Oui, allez, je vous en prie. M. O'Narey: Ça va.

Mme Bacon: Ça va? Qu'est-ce que vous pensez de l'orientation de long terme d'Hydro-Québec, qui veut maintenir en moyenne les hausses de tarifs, là, à l'inflation comme façon de tenir compte de la capacité de payer des consommateurs? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

M. O'Narey: Plus ou moins d'accord dans la mesure où les propositions d'Hydro-Québec, d'année en année, demandent toujours une augmentation supérieure pour la clientèle résidentielle. Et ce qu'on voit dans le plan qui est annoncé maintenant, c'est que les hausses

du secteur résidentiel vont être supérieures à l'inflation parce qu'on veut réduire l'interfinancement, d'une part, parce qu'on veut introduire une nouvelle forme de tarification qui va avoir un effet sur l'interfinancement et, donc, vont augmenter davantage le secteur résidentiel également. Et aussi parce que... J'oublie le dernier point. Mais, globalement, la hausse qui est proposée par Hydro-Québec est supérieure à l'inflation pour la clientèle résidentielle. Et ce qu'on constate aussi c'est que, au cours des trois dernières années, la hausse a été nettement supérieure à l'inflation. Et donc, on a grugé beaucoup la capacité de payer des consommateurs depuis un certain temps.

Quand on regarde ce qui s'est passé au niveau des biens et services essentiels, l'augmentation qui a été le... le bien ou le service qui a augmenté de façon la plus importante, ça a été l'énergie. Qu'on compare avec le logement, qu'on compare avec le transport, la nourriture, l'élément qui a augmenté de façon plus substantielle, au cours des dernières années, ça a été l'énergie. Donc, dans ce sens-là, nous, on souhaite que s'il n'y a pas des mesures qui sont prises pour que les augmentations de tarifs soient vraiment compensées par une réduction de la consommation, c'est inacceptable. Et c'est pour ça qu'on souligne, à ce moment-là, que les programmes d'économie d'énergie, il faut y faire attention, parce qu'ils doivent être «désignés» de façon très spécifique, parce qu'il y a une partie de la clientèle qui n'y a pas accès, généralement. Toutes les expériences le démontrent dans ce sens-là.

Mme Bacon: Est-ce pour ça que, dans votre mémoire, vous mentionnez que les Québécois sont plus sensibles aux économies d'énergie qu'on peut le croire et même qu'Hydro-Québec le croit, là. Pouvez-vous nous expliquer un petit peu comment vous en êtes venus à ça?

M. O'Narey: L'exemple est assez frappant. On parlait, M. Chevrette référait tantôt à l'expérience d'ÉCOKILO, un programme qui a été mis en place, il y a à peu près deux ans, par Hydro-Québec, et on prévoyait investir, environ, 30 000 000 $. Je n'ai pas le chiffre exact, là; 37 000 000 $, je crois. Et on prévoyait un taux de réponse d'environ 30 % de la population. Et, en cours de route, Hydro-Québec s'est rendue très rapidement compte que le taux de réponse s'approchait plus de 50 % à 60 %, et les frais également, puisqu'on doit investir jusqu'à 57 000 000 $ dans ce programme-là. Donc, le taux de réponse a été très, très important pour un programme qui était relativement exigeant. Quand on regarde...

Je ne sais pas si, autour de la table, les gens ont rempli les formulaires qui leur ont été envoyés, mais c'était un formulaire relativement long, relativement complexe, et les gens ont pris la peine de l'utiliser. Donc, il y a une sensibilité, vraiment, qui se fait, au Québec, à ce niveau-là et elle est importante.

Mme Bacon: Mais alors, vous êtes confiant qu'on peut atteindre le 9,3 tWh qui était fixé par Hydro-Québec?

M. O'Narey: Oui. Moi, je suis confiant... Mme Bacon: Vous êtes confiant de ça.

M. O'Narey: ...qu'on puisse le rejoindre. C'est une question, beaucoup, d'utiliser les bons moyens pour rejoindre les gens. Il y a un problème, effectivement, je pense, à rejoindre les gens, parce que — j'écoutais tantôt un autre des intervenants qui parlait d'interventions au niveau local — je pense que les interventions d'Hydro-Québec, jusqu'à maintenant, ont été des interventions provinciales, et il n'y a pas eu d'action vraiment locale qui a permis de faire avancer davantage ces programmes-là, et je pense que, s'il y avait une intervention vraiment concertée dans les milieux, il y aurait une sensibilisation encore plus grande et des efforts qui seraient consentis plus facilement de la population. Mais, en même temps, on doit fournir les outils nécessaires à la population pour aller les chercher, les économies d'énergie, et ce n'est pas toujours évident qu'on a les outils pour le faire, actuellement.

Mme Bacon: Mais il y a une des recommandations, dans votre mémoire, qui est d'augmenter les tarifs lorsque les programmes d'économie d'énergie permettent à toutes les familles d'en réduire l'impact. Est-ce que vous jugez que, depuis le lancement du projet d'efficacité énergétique, les familles ont été en mesure de réduire vraiment leur consommation d'électricité, suite à toutes les interventions d'Hydro-Québec?

M. O'Narey: Moi, j'ai l'impression que c'est de façon très inégale. Je n'ai pas de chiffres qui m'ont été fournis d'Hydro-Québec pour voir les résultats des interventions qui ont été données, mais je pense que c'est de manière très inégale et c'est un des...

Mme Bacon: C'est parce qu'on parlait de 42 $, à un moment donné, de possibilité.

M. O'Narey: Mais le problème, c'est que c'est toujours sur des coûts moyens, ce qui fait qu'il y a des gens qui économisent beaucoup et d'autres, très peu. Donc, l'important, c'est que ces programmes puissent avoir une diffusion tellement large, tellement importante au niveau de l'étendue et non pas au niveau du montant, pour permettre à tout le monde d'y avoir accès et de pouvoir bénéficier de ces économies-là. Et, comme je le disais, particulièrement les familles à faibles revenus n'y ont pas accès. Donc, il y a d'autres couches de la population, aussi, qui n'utilisent pas ces programmes, parce qu'ils ne sont pas rejoints adéquatement et eux ont à subir les hausses de tarifs et financent les programmes d'économie d'énergie des autres.

Mme Bacon: C'est pour ça, l'inégalité du système.

M. O'Narey: L'inégalité. Je pense qu'il faut trouver les moyens pour que tous et chacun puissent être rejoints par des programmes beaucoup plus spécifiques, beaucoup plus ciblés pour certaines catégories de clientèles/

Mme Bacon: Merci.

Le Président (M. Audet): Merci.

M. le député de Joliette. (13 h 30)

M. Chevrette: On a souvent vu l'ACEF se présenter en commission parlementaire et être quasiment seule à partager mon point de vue, ce qui n'est pas le cas devant la présente commission parlementaire. Entre autres, dès la page 4 de votre mémoire, dans votre introduction, la demande... Un débat public sur l'énergie, au Québec est réclamé par une très forte majorité des gens qui se sont présentés à date devant nous. Il y a également, je pense, mettre un terme à la promotion de la vente d'électricité par Hydro. Ça a fait l'objet de beaucoup de commentaires, à ce moment-là, pour une certaine forme de cohérence: Si tu veux de l'économie d'énergie, arrête d'en faire la promotion! L'isolation, également, je vais vous en parler de façon plus spécifique, mais c'a fait l'objet de beaucoup de discussions.

À la page 8 de votre mémoire, vous affirmez que: «Ce programme permet de payer mensuellement un montant fixe comprenant la consommation courante et les arrérages. Depuis le début de l'automne 1992, certains bureaux de recouvrement régionaux d'Hydro-Qué-bec ne permettent plus aux clients en difficulté de bénéficier de ce programme.» Est-ce que vous savez pourquoi?

M. O'Narey: Je n'ai pas eu d'explication, sinon qu'on jugeait que ce n'était plus rentable. Dans certains bureaux, on jugeait que ce n'était plus rentable, ce genre d'opération là, que les résultats n'étaient pas suffisamment intéressants pour que ça justifie qu'on les poursuive. Mais ce n'est pas une politique qui est uniforme. Un des problèmes auxquels on est confrontés, c'est que chaque bureau, finalement, établit ses propres mesures ou ses propres pratiques de recouvrement qui peuvent différer d'un bureau à l'autre. Et, dans le concret, comme les bureaux ou les secteurs d'Hydro-Québec qui sont chargés des relations avec la clientèle, et donc du recouvrement, sont de plus en plus autonomes, puisque c'est une volonté de l'entreprise de porter la responsabilité au niveau du terrain davantage, les directives qui proviennent du siège social et qui, par exemple, suggèrent de ne pas couper durant l'hiver sont prises avec plus ou moins de sérieux d'une région à l'autre, dépendamment du problème de recouvrement auquel le secteur est confronté, puisque, généralement, je pense qu'ils doivent avoir aussi des comptes à rendre au niveau des comptes impayés. Donc, il y a des changements au niveau des politiques qui peuvent varier d'un bureau à l'autre, et c'est très difficile de suivre ce qui se passe à ce niveau-là.

M. Chevrette: À la page 9, vous dites: «Après avoir étudié les programmes d'aide en vigueur dans plusieurs États américains et en France», vous dites qu'Hydro-Québec, elle, a tout abandonné son projet et n'a rien proposé de neuf. Encore là, est-ce que vous avez pu connaître les motifs de ce retrait d'Hydro-Qué-bec et pourquoi ils ont abandonné l'idée de mettre sur pied un tel programme ici?

Mme Maisonneuve: II semblerait qu'Hydro-Québec a pris une direction différente maintenant, c'est-à-dire qu'elle allait vers... la compagnie semblait tenter des approches, voulait faire un projet-pilote pour voir si un programme d'aide pourrait solutionner le problème, et il y a eu un revirement catégorique. C'est-à-dire que là, on a décidé que ce qui était payant et ce qui fonctionne, c'est la coupure et c'est la méthode dure; mais la méthode dure, la coercition peut fonctionner dans certains cas.

Effectivement, au niveau des chiffres, ça fonctionne bien en ce sens que, en moyenne, d'après une étude, une journée après la coupure, les gens ont payé et sont rebranchés. Et là, ils ont payé leur retard, le dépôt et les frais. Ils sont rebranchés, sauf que... mais à quel prix ils sont rebranchés, par exemple? Ils sont rebranchés parce qu'ils ont emprunté à quelqu'un, parce que... Où ils ont trouvé l'argent pour réussir à se faire rebrancher? Ça, c'est une autre histoire, et Hydro, carrément, n'est pas intéressée à le savoir. Elle ne se sent pas concernée à ce niveau-là. Avant, avec le programme d'aide, elle se sentait concernée. Maintenant, elle a décidé que: Non, on n'est pas concernés par ça. Bon! Sauf que nous, on dit, par exemple, lorsqu'on durcit nos pratiques et lorsqu'on pense à coupures, peut-être que ça semble rentable immédiatement, mais, comme on a déplacé le problème, comme on l'a reporté sur un plus long terme, comme on a encore miné la situation financière de l'usager en question, il vient de se faire rebrancher, mais pour combien de temps? Et combien d'actions de recouvrement aurez-vous à prendre encore? Et c'est coûteux, le recouvrement. Combien de mesures aurez-vous à prendre jusqu'à sa prochaine coupure? Il est captif, et vous devez le conserver, ce client-là. Il va vous coûter cher! Il vous coûterait beaucoup moins cher si, avant d'utiliser les moyens coerci-tifs radicaux, vous preniez en compte sa capacité de payer, mais au niveau individuel, pas au niveau d'un pourcentage. Lorsqu'on est dans le concret, sa capacité à lui de payer, et en tenir compte, quitte à ne pas voir même la consommation courante entièrement couverte, mais le peu que vous pourrez recevoir, bien vous l'aurez et vous n'aurez pas à payer autant de frais de recouvrement et de choses du genre.

M. Chevrette: Dans la même ligne d'idée...

M. O'Narey: Je voudrais juste ajouter peut-être...

M. Chevrette: Oui.

M. O'Narey: ...un petit élément pour souligner que le projet qu'Hydro-Québec avait développé et qui n'a pas été, finalement n'a pas passé toutes les étapes et tous les échelons d'approbation, était un programme qui avait été calculé de façon rentable, c'est-à-dire que ce programme-là n'augmentait pas les dépenses d'Hydro-Québec et permettait de maintenir le niveau des dépenses, c'est-à-dire qu'on allait économiser davantage au niveau du recouvrement.

C'est de plus en plus ce qui se passe, comme je le mentionnais tantôt. Les commissions de services publics américaines, dans plusieurs États, ce qu'elles commencent à reconnaître, finalement, c'est que, socialement, c'est rentable de développer des programmes, dans la mesure où on permet d'éviter des coûts de recouvrement et, également aussi, des coûts sociaux. Parce que, lorsqu'il y a une interruption du service ou parce qu'il y a des mesures de recouvrement qui sont plus sévères, il y a des coûts sociaux qui sont engendrés par ça. Il suffit de voir, par exemple, que la Fédération des CLSC a déjà appuyé qu'il y ait des programmes d'aide, la Commission des services juridiques également, parce que ces organismes-là ont souvent à défrayer, finalement, par leurs services, des coûts supplémentaires à cause des interruptions de service ou des mesures de recouvrement. Donc, il y a des coûts sociaux, aussi, rattachés à ça.

M. Chevrette: Quand on parle de plan d'isolation, par exemple, de l'enveloppe thermique — j'ai remarqué que vous insistez beaucoup là-dessus. Moi, j'ai toujours une crainte, cependant, sur le résultat final. Dans la conjoncture actuelle, vous savez que les gens les plus démunis sont ceux qui occupent ordinairement les logements les plus mai isolés, même souvent, à cause des coûts mensuels du loyer. Et, quand on offre un programme, on l'offre ordinairement au propriétaire qui, lui, isole et change le tarif du logement, après. On n'a rien réglé bien bien à l'individu.

Est-ce que vous avez pensé à des formules, à proposer des formules à Hydro-Québec pour que ça rejoigne véritablement i'objectif qu'on vise? Si on vise à améliorer le sort de ces gens-là, ce n'est pas d'améliorer le sort du propriétaire. Je pense à Joliette, nous autres là, il y en a plusieurs qui ont isolé avec les plans à l'époque, dans les années 1970, 1975 et même 1980, et qui ont vu grimper le prix du loyer de façon quasiment démesurée par la suite. Est-ce que vous avez des suggestions à faire à Hydro-Québec là-dessus?

M. O'Narey: On n'a pas fait d'études pour voir quels seraient les moyens. On sait que c'est un problème, un problème important. Mais, malgré ce problème-là, je pense que le besoin — et on mentionnait tantôt le problème des interventions au niveau des économies à cause des effets croisés — nécessite une intervention au niveau de l'enveloppe des bâtiments.

Maintenant, comment éviter que les locataires soient pénalisés? Je pense qu'il y a des moyens. Un propriétaire, par exemple, qui accepterait de participer à un programme pourrait se voir imposer des normes au niveau du transfert des augmentations de tarif au niveau de la Régie du logement, qui aurait des normes qui pourraient l'empêcher de transférer trop rapidement des montants qu'il aurait lui-même eu à investir. Cette répartition-là pourrait se faire sur un certain nombre d'années, ce qui ferait, par exemple, que le locataire, qui lui va bénéficier aussi des économies d'énergie puisque, généralement, de plus en plus, ils ont un compteur individuel, peut avoir une certaine augmentation de son loyer due à l'isolation, puisqu'il va en bénéficier par les diminutions de tarif, les diminutions de consommation, pardon, les diminutions de consommation d'énergie qu'il va faire.

Donc, il y a des façons, je pense, d'y arriver. Il s'agit de s'asseoir, de faire les calculs nécessaires et de voir aux réglementations qui s'imposent à ce niveau-là. Je pense que c'est faisable.

M. Chevrette: J'ai dû intervenir, moi, comme député, dans notre région en particulier, pour des propriétaires qui se faisaient justice eux-mêmes. Quand un type ne payait pas son loyer, ils débranchaient l'électricité. Est-ce que vous avez été mis au courant de ça, vous?

Mme Maisonneuve: Non, pas vraiment.

M. Chevrette: Remarquez bien que ça s'est rétabli vite parce que, dès qu'on a appelé Hydro-Québec, Hydro-Québec est allée parce qu'un propriétaire n'a pas le droit de se faire justice. Mais, quand il y a un prix de location avec le coût de l'électricité dedans, parce qu'il avait de la difficulté à se faire payer le loyer, un propriétaire allait débrancher. C'est arrivé à une couple de reprises depuis un an et demi.

Mme Maisonneuve: Ah oui! Si près que ça, là, maintenant? Non, on n'a pas entendu parler de ça à l'ACEF.

M. Chevrette: Vous n'avez pas été mis au courant de ça?

M. O'Narey: En tout cas, on n'a pas eu beaucoup de plaintes à ce niveau-là. Ce qui est clair, c'est que la loi est claire là-dessus. Il suffit, je pense, de prendre les bons moyens, et je pense qu'il y a des moyens possibles d'intervenir rapidement pour que ça se règle. Mais il faut peut-être en parler dans les médias, à ce moment-là, pour que les propriétaires soient avisés que ce n'est pas leur droit de faire ça.

Le Président (M. Audet): Merci. M. le député de Prévost.

M. Forget: Merci, M. le Président.

Vous mentionnez, à la page 7 de votre mémoire, que vous donnez raison à Hydro-Québec «quant à l'accélération des démarches de recouvrement de créances

auprès de ses débiteurs pour éviter que le montant de celles-ci ne devienne trop important». Toutefois, vous considérez que «l'entreprise fait peu d'efforts pour identifier de nouvelles approches visant la conciliation de ces objectifs d'accroissement de revenus et de prise en compte des besoins de base de cette clientèle».

Voici ma question: Puisque vous avez réfléchi à la question, pourriez-vous nous faire part des suggestions intéressantes sur le sujet?

(13 h 40)

M. O'Narey: Oui, comme je le mentionnais tantôt, il y a deux approches qu'on mettait sur la table.

La première approche, c'est une intervention au niveau du coût de l'énergie. Je pense qu'à la lumière d'expériences qui sont tentées actuellement aux États-Unis — et quelques expériences aussi qui ont été concluantes — il y a moyen d'offrir des programmes d'aide qui sont rentables, dans la mesure où on tient compte de tous les coûts sociaux et de tous les coûts de recouvrement que les comptes en recouvrement représentent, il est possible d'offrir des programmes qui vont être davantage une aide que ce qui est proposé, même si c'est déjà un point positif.

La deuxième chose, je pense que tous les programmes d'économie d'énergie qui pourraient être préparés pour cibler cette clientèle-là ont aussi un effet sur les coûts de recouvrement. Donc, si on permet à une famille qui a de la difficulté à payer son compte, parce que ses revenus sont bas, d'avoir accès à des programmes d'économie d'énergie qui vont lui faire économiser, mettons 20 $ par mois pour sa consommation d'énergie, c'est une capacité de paiement supplémentaire qui va faire que cette personne-là ne se retrouvera pas dans les i,& vices de recouvrement et n'entraînera pas des coûts supplémentaires. Donc, prioritairement, je pense qu'il y a deux types d'intervention qu'Hydro-Québec aurait pu implanter; une première qu'il a étudiée et qu'il a laissée tomber et une deuxième qu'il a jugée non rentable. Mais, nous, on conteste ce projet-là, dans la mesure où on pense qu'il pourrait devenir rentable, au niveau des économies d'énergie, lorsqu'on tient compte de tous les coûts évités, finalement, au niveau du recouvrement.

M. Forget: Merci.

Voici, à la page 11 de votre document, vous invoquez la responsabilité sociale du gouvernement envers les familles à faibles revenus pour motiver la création d'un programme gouvernemental d'aide financière à la consommation d'énergie en fonction du revenu et du coût du logement des familles.

Ma question: Pourriez-vous nous présenter les grandes lignes de ce que pourrait être un tel programme?

M. O'Narey: On n'a pas dessiné exactement ce que pourrait être ce programme-là. On voit qu'aux Etats-Unis ils ont un programme fédéral qui permet aux États d'avoir accès à des fonds, qui leur permettent de venir en aide à ces familles-là, mais les fonds sont gérés de façon différente d'un État à l'autre. Alors, il y a des programmes qui peuvent être très différents d'un État à l'autre. Au Québec, il y a une différence un peu substantielle, je pense, qui est aussi... les programmes sociaux qui sont très différents. Mais, par contre, le comité de travail qui s'est réuni pendant un an et qui a donné des recommandations au mois de juin dernier sur la «précarité-pauvreté» en arrivait à la conclusion qu'il devrait y avoir davantage d'études du côté du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu sur les montants qui sont accordés pour payer la facture d'énergie par ces familles-là. Et ce dont on se rendait compte, c'est que, de plus en plus, les familles sur l'aide sociale se voient saisir, voient une partie de leur chèque prise par Hydro-Québec pour payer leurs arrérages. C'est-à-dire qu'elles reçoivent seulement un paiement partiel, puisqu'il y a une autre partie qui est envoyée à HydroQuébec pour payer les difficultés au niveau de l'énergie. Ce problème-là est en augmentation.

Donc, on a demandé que soient révisées, entre autres, les allocations au niveau du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu et qu'il y ait aussi d'autres actions qui visent d'autres clientèles que les assistés sociaux pour qu'on puisse étendre davantage l'intervention à ce niveau-là. C'est un moyen qui pourrait être utilisé, mais ce n'est pas nécessairement le seul. Je pense qu'il y a encore du travail à faire pour décider ce serait quoi, l'intervention optimum. Mais il y a déjà, sur la table, des possibilités qu'on pourrait étudier plus sérieusement...

M. Forget: Merci.

M. O'Narey: ...mais on attend toujours des réponses.

M. Forget: O.K. Merci.

Et mon autre question: Compte tenu que vous avez participé activement à la première consultation publique de l'Hydro-Québec, nous sommes intéressés à savoir ce que vous avez retiré de cette expérience. Ma question: Pourriez-vous nous faire part de vos commentaires à cet égard et nous indiquer des pistes permettant, éventuellement, de bonifier les processus actuels?

M. O'Narey: Je vais y aller de façon assez rapide là-dessus. Je pense que ça a été un exercice intéressant, même très intéressant, et je pense qu'il faut que ça se poursuive de façon plus permanente. Donc, c'est un premier commentaire. Je pense que... Puis déjà, je pense qu'Hydro-Québec a entrepris les démarches pour rendre ce processus de façon, je dirais, plus permanente.

Le deuxième élément qui est difficile pour des organismes comme les nôtres qui sont relativement de petits organismes, c'est l'énergie que ça demande pour suivre tous ces dossiers-là, c'est l'expertise qui nous manquait dans bien des dossiers. On se rend compte très rapidement que l'expertise qui touche le domaine de l'énergie au Québec, elle se retrouve, très facilement, uniquement entre les mains d'Hydro-Québec et il est

très difficile d'avoir accès à des expertises différentes. On a réussi à obtenir, dans le processus, qu'Hydro-Québec accepte de payer pour certaines études complémentaires à ce qui avait été proposé, mais, dans bien des cas, pour des organismes comme les nôtres, ce n'est pas possible d'aller chercher ces expertises-là et c'est un processus très lourd, un processus essentiel, mais qui s'est avéré aussi très lourd. Alors, dans ce sens-là, c'est une difficulté, mais qui n'empêche pas, pour nous, de souhaiter que ce processus-là se poursuive. Ce sont les deux commentaires.

M. Forget: Voici une petite question naturellement qui... Concernant les producteurs agricoles, les producteurs en serre, les producteurs de maïs, naturellement, qui font... au niveau des séchages et tout ça, est-ce que vous avez regardé ce dossier-là?

M. O'Narey: Malheureusement non puisque, nous, on transige directement avec les consommateurs individuels. Tout ce qui touche le domaine des entreprises, on n'est pas concernés directement...

M. Forget: Non, non, mais quand même...

M. O'Narey: ...donc, on n'a pas de représentations qui viennent des producteurs. Les représentations qu'on reçoit viennent des consommateurs individuels.

M. Forget: Oui mais, par contre, en réalité quand même, il ne faut pas se le cacher, les producteurs, ce sont toujours des consommateurs.

M. O'Narey: Oui, mais on n'a pas les moyens, finalement...

M. Forget: O.K. D'accord.

M. O'Narey: ...de gérer toute la demande.

Une voix: Ils font pitié, hein?

M. Forget: Oui. Ha, ha, ha! Merci.

M. O'Narey: Ha, ha, ha! Oui, un problème difficile aussi également.

Le Président (M. Audet): Merci, M. le député. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Je suis convaincu, messieurs dames de l'ACEF, que les producteurs se fient et comptent énormément sur le député de Prévost pour les défendre, pour remettre en force le programme qu'il y a eu pour les serres, déjà, et qui a été éliminé, il n'y a pas tellement longtemps, et je suis persuadé que, lui-même étant un agriculteur, il va défendre cette portion de consommateurs qui crient fort précisément après le gouvernement, surtout quand ils se comparent, par exemple, à l'industrie énergivore que sont les alumineries. C'est évident qu'ils auraient voulu, bien sûr, être défendus très adéquatement par un député du pouvoir, s'il vous plaît! Donc, je suis très heureux qu'il ait ouvert la porte. Merci. Reprenez-vous, je vous donnerai le montant quand vous voudrez parler dans ce sens-là.

Ceci dit, je voudrais également vous poser une petite question sur la régie que vous proposez. Vous n'êtes pas les seuls non plus, en passant. C'est intéressant parce qu'on voit qu'il commence à se dégager des consensus au niveau du Québec. Il se dégage vraiment des consensus assez clairs et, à ce moment-là, l'avantage que vous y voyez à une régie, vous dites qu'il y aurait un débat plus neutre, plus indépendant, mais est-ce que vous voyez d'autres avantages concrets, pour le consommateur toujours, bien sûr?

M. O'Narey: II y a un avantage relativement évident, même s'il y a aussi des désavantages. Il y a un premier avantage qui est le suivant: L'expérience nous a démontré par, entre autres, une enquête d'Hydro-Qué-bec qui a été réalisée il y a peut-être un an environ, que les entreprises d'énergie qui offrent des programmes d'aide aux familles en difficulté, que ce soient des programmes d'économie d'énergie ou des programmes d'assistance financière, ont, dans la majorité des cas — une enquête sur 19 entreprises américaines, 14 d'entre elles avaient créé ces programmes-là à la demande d'une régie. Donc, il est plus facile, à notre avis, dans le cadre d'une régie, d'avoir une expertise, je dirais, plus approfondie sur un ensemble de dossiers et qui permet donc à la régie d'être plus sensibilisée, d'avoir des contacts, je dirais, plus adéquats, plus immédiats avec les problématiques des consommateurs et de réagir plus rapidement à leurs besoins à ce niveau-là.

Par contre, évidemment, c'est bien sûr qu'une implantation d'une régie risque d'avoir des impacts au niveau des coûts, à plusieurs niveaux. Je pense que, malgré ça, il y a des enjeux sociaux qui méritent certains coûts et il y a donc les avantages que je mentionnais particulièrement qui nous incitent à demander une régie.

M. Chevrette: En tout cas, vous avez un excellent mémoire. Je vous remercie personnellement de votre présentation. J'ose espérer que la façon la plus correcte de dire que c'est intéressant et que, comme Mme la ministre le disait tantôt, votre mémoire sera pris en compte, c'est d'en accepter les recommandations.

Le Président (M. Audet): Merci.

M. le député de Drummond. (13 h 50)

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

Je dois vous dire, d'entrée en jeu, que ça porte à réflexion, surtout lorsqu'on est un député de région, lorsqu'on a aussi à côtoyer nos citoyens et citoyennes qui font face à la problématique que vous avez démontrée dans votre mémoire. Mais, en tant que législateur — je vais mettre mon autre chapeau; au lieu de protecteur de mes citoyens, lorsqu'on vient s'asseoir ici,

on est législateur — il y a un principe d'équité qu'il faut, je pense, assumer au niveau — là, je fais référence au niveau du recouvrement, de la tarification.

Ne croyez-vous pas qu'avec la technologie moderne qu'on a aujourd'hui — là je vais faire référence à l'isolation et à l'enveloppe thermique d'un bâtiment — on est capables, avec Hydro-Québec, de déterminer, dans le contenu normal d'un bâtiment, en tenant compte de la fenestration et de l'isolation, de dire au propriétaire: À partir de ce moment-là, il y a x montant de dollars que le locataire pourrait épargner si c'était mieux isolé? C'est-à-dire, à partir de ce moment-là, cette partie-là va être facturée directement au propriétaire, avec une réglementation l'empêchant d'augmenter le loyer, dans un premier temps, et, dans un deuxième temps, dans un contexte plus global d'efficacité énergétique, de mettre en place un programme qui ferait en sorte, au même titre que PARCQ d'ailleurs, que sur une période de cinq ans, lorsqu'il y a des rénovations majeures, on ne pourrait pas le transférer au client, qu'on serait capables de donner et d'inciter le propriétaire. Alors, le propriétaire aurait un incitatif, à ce moment-là, et puis, le locataire qui, trop souvent hélas, est celui qui est à faibles revenus, verrait sa facture énergétique diminuer.

M. O'Narey: Nous, on est... En tout cas, ça correspond au sens de plusieurs des recommandations qu'on met sur la table. On n'allait pas aussi loin dans ies modalités d'application, mais je pense que ça mériterait d'être étudié en profondeur, ce type d'intervention !*.

M. St-Roch: Puis, à la page 22 de votre mémoire, vous faites référence au tribunal administratif neutre pour les usagers d'électricité. Bien, je pense que vous avez touché la problématique à l'heure actuelle que, même pour un député, il est assez difficile de voir ce que c'est, la politique de recouvrement d'Hydro-Qué-bec. Parce que, de plus en plus, avec la décentralisation, chacune des régions semble appliquer ses propres normes.

Avant de créer ce tribunal administratif là, ne croyez-vous pas qu'il serait temps qu'on dise: Bon, on fait face à l'an 2000, on va se donner des outils de gestion. Qu'il y ait une bonne commission parlementaire, comme celle d'aujourd'hui, qui va s'adresser à ces politiques-là qui seraient strictement la tarification et qui seraient aussi les méthodes de recouvrement où HydroQuébec serait obligée de venir s'adresser aux parlementaires, comme on le fait aujourd'hui, depuis le 23 février, pour dire: Voici ma procédure de recouvrement. Et, après ça, s'ils veulent décentraliser, on va savoir qu'elle va être uniforme et on pourrait peut-être éviter la création d'un autre outil de tribunal. Parce qu'à chaque fois qu'on crée quelque chose, tribunal administratif, on veut toujours aider notre consommateur, et je m'aperçois, moi, en regardant d'autres organismes — pour ne pas la nommer, la CSST — finalement, que le citoyen n'est plus capable de se défendre sans qu'il y ait une batterie d'avocats, et là on se ferait prendre encore dans le même cercle vicieux. On n'a plus les moyens d'aller se défendre devant ces tribunaux-là.

M. O'Narey: Moi, je pense que ce qui est essentiel, à l'heure actuelle, dans ce sens-là, c'est qu'on encadre plus sérieusement, même dans un cadre législatif, éventuellement, le type d'interventions qu'Hydro-Québec peut se permettre au niveau du recouvrement. Le règlement 411 établit la façon dont Hydro-Québec doit distribuer l'énergie et les possibilités aussi, au niveau du recouvrement. Je pense qu'il y aurait peut-être des modifications à amener au niveau de tout le processus de recouvrement dans cette loi-là, particulièrement.

Ça, c'est dans un premier temps. Et que ce soit, je dirais, en commission parlementaire, dans le cadre d'une régie ou dans le cadre d'une instance qui a autorité vis-à-vis Hydro-Québec, je pense que ça serait souhaitable de le faire, dans un premier temps, pour permettre de dégager les meilleures avenues possibles au niveau du recouvrement et la véritable problématique derrière ça. Je pense que ça, c'est essentiel de le faire.

Alors, dans ce sens-là, je ne peux qu'appuyer des initiatives qui iraient dans ce sens-là.

M. St-Roch: La dernière, M. le Président, si vous me permettez.

Le Président (M. Audet): Brièvement, M. le député.

M. St-Roch: Brièvement. Ça ne sera pas une question, ça va être une réflexion.

J'ai l'impression, moi, qu'à regarder évoluer cette grande problématique-là, de recouvrement, que lors-qu'Hydro-Québec se maintenait au niveau de 20 000 000 $, 25 000 000 $, c'était facile d'envisager quelque chose. Mais lorsqu'on dépasse les 60 000 000 $, on est peut-être apeurés devant le montant astronomique que ça pourrait impliquer. Alors, c'est peut-être une raison de plus d'obtenir l'avantage de cette commission-là.

M. O'Narey: C'est ce qui nous fait craindre qu'à la fin du mois de mars, le 1er avril, comme ils avaient une directive, à l'interne, qui demandait de ne pas couper durant l'hiver, ou de limiter — pas de ne pas couper, de limiter le plus possible durant l'hiver — le 1er avril, je vous garantis que les bureaux régionaux, ils vont sortir les couteaux.

Mme Maisonneuve: Ils nous ont avertis!

M. O'Narey: C'est fait. On sait que ça s'en vient. Donc, on va voir ce qui va se passer, aussi.

Le Président (M. Audet): Merci. Alors, madame, messieurs, on vous remercie de votre présentation. On vous souhaite une bonne fin de

journée.

Alors, ça termine nos travaux pour aujourd'hui. Nous allons reprendre demain matin à 9 heures.

(Fin de la séance à 13 h 55)

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