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(Neuf heures quatre minutes)
Le Président (M. Audet): Nous allons commencer. Je
déclare la séance de la commission de l'économie et du
travail ouverte.
Je vous rappelle brièvement le mandat de la commission, qui est
de procéder à une consultation générale sur la
proposition de plan de développement 1993-1995
d'Hydro-Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M.
Bélanger (Laval-des-Rapides) par M. Marcil (Salaberry-Soulanges); M.
Charbonneau (Saint-Jean) par M. Philibert (Trois-Rivières); M. Parent
(Sauvé) par M. Fradet (Vimont).
Le Président (M. Audet): Merci.
Alors, les membres de la commission ont pris connaissance de l'ordre du
jour. Est-ce que l'ordre du jour est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Audet): Adopté.
Alors, ce matin, nous recevons la Fondation de l'entrepreneurship.
Ensuite suivront Gaz Métropolitain, M. Réjean Lambert,
l'Association nucléaire canadienne, et nous suspendrons à 12 h
30.
Alors, je veux souhaiter la plus cordiale bienvenue, au nom des membres
de la commission, à la Fondation de l'entrepreneurship. Je vous rappelle
brièvement le déroulement de nos travaux. M. Fortin est un peu un
habitué puisque, il y a quelques semaines, il était avec nous.
Alors, vous disposez d'une vingtaine de minutes pour présenter votre
mémoire. Ensuite suivra une période d'échanges d'une
quarantaine de minutes.
Alors, avant de débuter votre présentation, M. Fortin, je
vous inviterais à vous présenter et à présenter les
gens qui vous accompagnent. Je vous donne la parole.
Fondation de l'entrepreneurship
M. Fortin (Paul-Arthur): Merci beaucoup, M. le
Président.
Je voudrais présenter, à ma gauche, M. Yvon Gasse. Il est
professeur à l'Université Laval. M. Yvon Gasse a
été un des fondateurs, un des artisans collaborateurs de la
Fondation de l'entrepreneurship. À ma droite, M. Jacques Plourde, qui
est vice-président au CRIQ mais qui est aussi, depuis le début,
à la Fondation de l'entrepreneurship.
D'abord, M. le Président, je voudrais remercier la commission de
nous permettre de venir exposer notre point de vue en matière de
développement régional, de développement de l'emploi
relié, bien sûr, à HydroQuébec. Avant de
débuter, peut-être pour situer la Fondation, ce que n'est pas la
Fondation de l'entrepreneurship.
La Fondation de l'entrepreneurship n'est pas un groupe de pression.
C'est très rare qu'on fasse des déclarations et, quand on en
fait, souvent, elles nous sont arrachées, mais on en fait très
peu. On n'est pas un organisme qui poursuit, non plus, des
intérêts corporatistes. On ne vient pas défendre les
ingénieurs, ou les médecins, ou enfin quelque autre groupe de ce
type-là. Et on n'est pas à la solde de l'un ou l'autre groupe qui
peut habiter, ou enfin, exister au Québec.
Ce qu'est la Fondation de l'entrepreneurship, c'est un organisme
philanthropique, sans but lucratif, qui existe depuis 1980 et qui se
préoccupe de deux choses: du développement de l'emploi et du
développement des régions. Dans notre réflexion, qui a
débuté en 1975 et qui s'est un peu accentuée autour des
années quatre-vingt, pour nous, la piste qui nous paraît, enfin,
de plus en plus la seule possible, c'est le développement de
l'«entrepreneurship». Alors, c'est pourquoi on s'appelle la
Fondation de l'entrepreneurship.
Dans la présentation, M. le Président, je vais prendre
quatre ou cinq minutes pour faire quelques points sur les valeurs qui nous
habitent, et mes collègues de droite et de gauche vont continuer sur
l'une ou l'autre de nos recommandations, mais toujours à
l'intérieur des 20 minutes.
Ce que nous poursuivons, la Fondation de l'entrepreneurship. D'abord,
nous, on pense que la création d'emplois passe par le
développement de P«entrepre-neurship». Pour nous, c'est
très clair, et de plus en plus. La deuxième, c'est que le
Québec compte suffisamment de futurs bons entrepreneurs pour
créer les entreprises et les emplois dont on a besoin, et je pense que
c'est important d'en prendre connaissance, d'en prendre conscience. Donc,
ça devient un projet: comment on s'organise pour reconnaître ces
personnes-là, qui ont des talents, et de quelle façon on stimule
pour que ces gens-là aient le goût de développer ce type de
talents?
La troisième proposition, qui est plus particulière
à ce mémoire, c'est qu'une partie importante des futurs bons
entrepreneurs dont il est question sont actuellement dans les grandes
organisations. Il y a un nombre important d'entrepreneurs potentiels qui
s'ignorent au gouver-
nement et il y en a aussi à Hydro-Québec. Comme il s'agit
de parler du plan de développement d'Hydro-Québec, on va essayer
de dire ce qu'on pourrait faire ou comment on pourrait faire pour
reconnaître ces gens-là et stimuler ce
développement-là.
Le point que je vais ajouter, c'est qu'Hydro-Qué-bec, dans son
mémoire et dans les propositions, fait beaucoup état du
rôle qu'elle joue au niveau de la qualité totale. Je pense que la
charte de la qualité totale est un projet important au Québec. Il
y a plusieurs entreprises qui y ont souscrit. Hydro-Québec s'est
impliquée dès le départ. Et, nous, ce qu'on voudrait
soumettre très humblement, qui n'est pas dans le mémoire, on
voudrait, si vous voulez, que dorénavant il y ait une nouvelle charte
qui s'ajoute à la qualité totale. Puis on aimerait, on
souhaiterait qu'Hydro-Québec devienne le leader ou le chef de file par
rapport à cette deuxième charte-là. On l'appelle la charte
de la créativité. Et voici un peu ce que ça voudrait dire,
la charte de la créativité.
Il y a trois paragraphes. Je m'excuse de les lire. Et là
ça pourrait s'appliquer à Hydro-Québec, comme ça
pourrait s'appliquer à Bell Canada ou ça pourrait s'appliquer au
gouvernement du Québec:
Nous avons grand besoin d'entrepreneurs pour mettre en valeur le
potentiel d'idées et de créativité, scientifique ou
technique, présent dans notre organisme. Nous réalisons qu'aucune
organisation, si importante soit-elle, ne peut prétendre
développer à l'intérieur d'elle-même tous ses
potentiels latents. En effet, les choix stratégiques imposent souvent de
concentrer les moyens sur quelques priorités seulement. Nous sommes
ainsi souvent amenés à renoncer à des projets qui seraient
viables dans d'autres structures. C'est pourquoi, à l'occasion de la
proclamation de la politique québécoise de la stimulation de la
créativité, nous acceptons de participer au concours
«Devenez entrepreneur», soutenu par le gouvernement du
Québec, la Fondation de l'en-trepreneurship et la
Fédération des cégeps, ou à toute autre
activité similaire capable de dépister et de promouvoir la
créativité.
Notre salarié devenu entrepreneur pourra, s'il développe
un produit ou un service d'intérêt pour nous, créer une
filiale qu'il dirigera à son gré et dans laquelle nous
demeurerons majoritaires. Ou bien il pourra lancer une entreprise dans laquelle
nous prendrons une participation minoritaire de façon à conserver
l'accès à la technologie développée. Il pourra
enfin prendre à son compte, et avec notre appui, l'une de nos
activités, devenant ainsi notre sous-traitant ou notre fournisseur. (9 h
10)
Si l'un de nos employés comme troisième alternative
décide de partir travailler pour son compte dans un domaine
n'ayant aucun rapport avec nos activités, nous allons quand même
l'aider à prendre la mesure des risques et à franchir le pas.
Devenir entrepreneur est une forme d'accomplissement personnel que nous
entendons aussi encourager afin de participer à l'effort de
solidarité nationale, sans pour autant nous détourner de nos
missions essentielles.
Alors, voilà, je pense, ce que pourrait être l'essentiel
d'une charte de la créativité qui pourrait s'appliquer dans
toutes les organisations. C'est sûr et certain et, nous, nous en
sommes convaincus qu'au Québec on a les talents, on a le
potentiel pour créer toutes les entreprises et les emplois dont on a
besoin. Le jour où on va y croire puis qu'on va commencer à
mettre en place des moyens pour découvrir ces talents-là puis les
épauler, ça va être surprenant ce qu'on va réaliser
en peu de temps.
Alors, peut-être pour ajouter à notre mémoire au
niveau du fonds technologique, je demanderais à Jacques Plourde et, par
la suite, Yvon Gasse parlera d'essaimage et
d'«intrapreneurship».
M. Plourde (Jacques): Évidemment, la proposition qui est
avancée par la Fondation et qu'on appelle la création d'un fonds
permanent de développement technologique vise l'orientation 28 des
propositions pour l'exportation d'électricité
d'Hydro-Québec.
Qu'est-ce qui nous a amenés à faire cette
proposition-là? C'est un constat que nous aimerions partager avec vous
ce matin à l'effet que le Québec et le Canada sont au coeur d'une
véritable tornade technologique. Et j'en veux, pour fins de
référence, que le Japon, à l'heure où on se parle,
enregistre 2000 brevets par 1 000 000 de population par année. Le
meilleur pays derrière le Japon, c'est l'Allemagne, avec 800 brevets par
1 000 000 de population par année. Les autres pays membres du G 7, sauf
le Canada, c'est environ 400. Et, au Canada, c'est 70 brevets dans les mains de
Canadiens par 1 000 000 de population et par année.
Alors, visez l'an 2000 et vous aurez la situation que la Deutsche Bank
nous a donnée récemment dans une étude sur la position
relative des pays par rapport à 36 technologies clés pour
l'industrie. En 1990, le Canada occupait une position de leader dans 5
technologies, les États-Unis dans 24 et le Japon dans 21. En l'an 2000,
la position relative du Japon et des États-Unis sera inversée. Le
Japon sera leader dans 31 technologies, les États-Unis dans 17
seulement. Quant au Canada, nous serons présents et non pas leaders dans
4 technologies largement reliées au domaine des
télécommunications et de l'aéronautique. L'univers
technologique sera donc largement dominé par le Japon.
L'automne dernier, j'avais l'opportunité de participer à
Amsterdam à une activité qui s'appelait «Global Technology
Transfer», et les gens du British Technology Group, sur la place
publique, ne se gênaient pas pour dire aux Japonais: «You are
carrying a technology mind warfare». Ça, ça veut dire que
dès qu'un domaine technologique intéresse les Japonais, dont ils
n'ont pas la propriété, ils vont breveter alentour de ce
brevet-là tout ce qu'ils peuvent faire de façon à ce que,
quand tu veux exploiter ton brevet, tu passes nécessairement par des
voies japonaises. Et le Japon, en 1960... Qu'est-ce qu'on disait des
technologies japonaises en 1960, et de leurs produits, hein? C'était de
la scrap. Essayez maintenant de battre les Japonais dans le domaine de
l'auto-
mobile et dans d'autres domaines que je n'ai pas à
énumérer ici.
Alors, quand on dit qu'il faut faire un effort pour structurer le
capital pour le développement technologique, nous, on pense
qu'Hydro-Québec, qui a été... Puis j'en ai
été, moi aussi, comme jeune ingénieur, membre de cette
équipe d'Hydro-Québec à Manicouagan; j'ai vu la force
d'une entreprise comme Hydro-Québec. J'en suis toujours fier. Et
j'aimerais qu'Hydro-Québec puisse mobiliser une partie de ses capitaux
d'exportation dans un fonds permanent de développement technologique qui
assurerait, pour les générations de jeunes ingénieurs qui
sortent de nos universités et qui ne se trouvent pas d'emploi,
dès qu'ils voudraient exploiter une technologie, dans leurs mains, de la
propriété intellectuelle de cette technologie-là
jusqu'à sa commercialisation sur le marché mondial, bien, qu'ils
aient un fonds de disponible dans toutes les régions du Québec
pour ce faire.
Merci.
M. Gasse (Yvon): Merci. M. le Président, j'aimerais
présenter trois éléments dans une perspective que
j'appellerais «entrepreneuriale», puisque c'est ça dont on
discute ce matin.
Le premier élément, c'est celui de la valeur
ajoutée. Et là on se réfère surtout à la
partie pages 10 et 11 du mémoire de la Fondation. J'aimerais cependant,
peut-être, parler un petit peu plus du concept de valeur ajoutée,
parce qu'il est beaucoup, évidemment, véhiculé
actuellement dans les différentes politiques, entre autres par le
ministère de l'Industrie et du Commerce, mais on s'aperçoit qu'il
est souvent, peut-être, mal compris. Dans le fond, la valeur
ajoutée, ça comprend plus que la stricte transformation d'un
produit. Ça comprend la recherche et le développement, donc tout
l'aspect innovation, créativité sur le produit ou le processus.
Ça comprend la conception, le design, les prototypes, les essais,
évidemment la fabrication, la transformation, mais ça comprend
aussi le marketing, la promotion, la distribution, le financement, la gestion,
la formation et même tous les aspects du transfert international qui est
fait autour de ce produit-là.
Peut-être qu'on pourrait prendre un exemple qui est relié
plus spécifiquement à un secteur où HydroQuébec
contribue le plus, le secteur de l'aluminium. C'est évident qu'il y a de
la valeur ajoutée en transformant l'aluminium en lingots, et si ces
lingots-là sont exportés aux États-Unis, en Europe ou dans
le Sud-Est asiatique, bon, je pense que, jusqu'à un certain point,
ça peut s'arrêter là. Cependant, si on fabrique des
assiettes d'aluminium au Québec, à ce moment-là, on a une
seconde transformation, et là on peut aussi parler de valeur
ajoutée. Mais si on va plus loin, si on transforme, par exemple, des
panneaux d'aluminium qui, eux, vont servir pour fabriquer des autobus à
Sainte-Claire de Dorchester, chez Prévost Car, par exemple, fabriquer
des métros à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, chez Bombardier,
mais encore plus fabriquer peut-être des alliages spécifiques pour
le Challenger, chez Canadair, alors, là, vous avez beaucoup plus de
valeur ajoutée, parce que ce n'est pas seulement une question de
transformation, c'est une question d'ajouter du savoir et, encore une fois, de
l'innovation et de la créativité au produit. Et c'est cet
aspect-là qui est le plus important, je pense, dans le concept de valeur
ajoutée, parce que, là, vous vous distinguez, vous avez un
avantage comparatif sur votre produit, et c'est là que vous pouvez
compétition-ner dans un marché mondial. Alors, dans ce
sens-là, je pense qu'Hydro-Québec peut beaucoup apporter en
termes d'essayer de favoriser le développement de processus ou de
procédés et de produits à valeur ajoutée à
partir, évidemment, de toutes les ramifications de
l'électricité.
Le deuxième élément dont je veux parler, c'est
l'«intrapreneurship». Je pense que c'est un concept que vous
connaissez un peu. Ça veut dire, dans le fond, comment favoriser la
prise en main, l'innovation, la créativité chez les membres d'une
organisation, donc à l'interne de l'organisation ou de l'entreprise. M.
Fortin faisait mention tantôt de la qualité totale à
Hydro-Québec, et je pense que l'«intrapreneurship» fait
aussi partie de cette notion-là, parce que la qualité totale
implique un style de gestion particulier qui favorise la responsabilisation des
individus, favorise leur participation. L'«intrapreneurship» a
aussi pour effet, dans des grandes organisations comme Hydro-Québec en
particulier, d'amener une certaine flexibilité, une certaine souplesse
dans la structure organisational le. L'«intrapreneurship» a des
effets d'entraînement, des effets multiplicateurs sur le reste de
l'organisation. Ça crée aussi des pressions sur la direction et
ça permet une meilleure mesure de la performance des individus.
Alors, relié au concept d'«intrapreneurship», il y a
aussi le concept d'essaimage; en anglais, on appelle ça des
«spin-off», c'est-à-dire que, si vous voulez favoriser le
développement des produits, vous pouvez le faire à
l'intérieur de l'organisation par ce qu'on appelle
l'«intrapreneurship», ce que je disais tantôt, mais vous
pouvez aussi le favoriser avec vos partenaires, vos clients, vos fournisseurs,
avec vos sous-traitants, et là on parle effectivement d'essaimage. (9 h
20)
Donc, c'est une forme, encore une fois, d'«entrepreneurship»
qui permet, à partir de produits, de procédés, à
partir, si vous voulez, des différentes activités qui tournent
autour de l'organisation, de développer des nouvelles entreprises. C'est
particulièrement vrai, probablement, dans les secteurs qu'on appelle de
technologies non principales, les activités secondaires de
l'organisation qui ne sont pas centrales à l'entreprise. Donc, encore
une fois, évidemment, l'essaimage, ça a beaucoup d'effets
multiplicateurs, et un peu partout à travers les régions.
Finalement, si on revient à ces trois concepts, d'une part, de
valeur ajoutée, d'«intrapreneurship» et d'essaimage, je
pense qu'Hydro-Québec peut être un élément moteur
important de développement à la fois économique
régional parce que, là, évidemment,
vous favorisez la création d'entreprises un peu partout dans les
régions; évidemment, le développement technologique, on en
a parlé mais aussi un développement d'expertise
particulière chez les Québécois et, par là
même, ça a des effets, évidemment, sociaux importants.
Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant
reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Alors, messieurs, je voudrais vous remercier pour
votre participation à notre commission parlementaire et pour les
intéressants commentaires que vous nous avez faits ce matin sur les
facteurs de développement économique, je pense, que constituent
l'«entrepreneurship» et la recherche et développement. Je
pense qu'on peut dire que le couplage de ces deux facteurs présente
certainement d'intéressantes perspectives d'amélioration du
dynamisme et des industries énergétiques
québécoises.
Ma première question. J'aimerais savoir quels seraient, selon
vous, les domaines peut-être les plus favorables à une
participation croisée Hydro-Québec et entreprises pour le
transfert de nouvelles technologies. Est-ce que vous avez des domaines que vous
priorisez?
M. Fortin: Bon. Je peux peut-être commencer à
répondre, et Jacques pourra compléter.
D'abord, je dois dire, Mme la ministre, qu'Hy-dro-Québec fait
déjà, je dirais, de l'«intrapreneurship» et fait
déjà de l'essaimage, mais les discussions qu'on a eues avec elle,
elle y va un peu sous réserve. Elle a toujours peur, évidemment
parce qu'on sait comment la presse est sensible de se faire
ramasser parce qu'à un moment donné elle a permis telle chose,
etc. Nous, ce qu'on souhaiterait, d'abord, ce serait de dire à
Hydro-Québec: Vous allez dans une bonne direction, et on aimerait, si
c'était possible, que le gouvernement en fasse une attente. Non
seulement c'est bien ce que vous faites, mais on espère que vous allez
en faire plus.
Évidemment, c'est les personnes, des fois, sur place, chacune
dans son champ de connaissance, qui sont peut-être les mieux
placées pour identifier les occasions. À un moment donné,
il n'y a rien de mieux que d'être dans un marché ou d'être
dans un domaine pour voir les occasions de nouvelles entreprises ou de
nouvelles alliances, entreprises existantes ou essaimage, etc. Je ne sais pas
si Jacques a des secteurs particuliers que lui peut déjà
identifier.
M. Plourde: Bien, de mon point de vue personnel, il est sûr
que des études du Conseil de la science et de la technologie ont
défini ces principaux secteurs-là. Moi, je vois, par exemple,
dans le domaine du magnésium je suis membre de l'Institut, je
suis le secrétaire de l'Institut après deux ans et demi,
on n'est plus capable de prendre de commandes parce qu'on n'a plus d'espace
pour les exécuter. Pourquoi? Parce que l'indus- trie du transport,
mondialement, doit réduire le poids de ses véhicules. Or, le
magnésium, c'est un tiers du poids de l'aluminium et, en alliage, c'est
très intéressant comme matériau. C'est curieux de voir
que, sur le conseil d'administration, je suis le seul Québécois,
et nous ne sommes que 3 Canadiens sur 12 membres. Et les Japonais, sur 33
membres dans l'ensemble de l'Institut 11 compagnies sont japonaises
ils envoient leurs ingénieurs, qui ne parlent ni français
ni anglais, se former à l'Institut, 4, 5 à la fois. Comment se
fait-il qu'une technologie développée chez nous, avec notre
argent, va prendre le chemin du Japon, des États-Unis, de l'Angleterre,
de la Nouvelle-Zélande et de l'Allemagne? Comment supporter l'effort de
développement de nos fonderies vers le magnésium? Bien, c'en est
un, domaine, qui est appelé à devenir extraordinaire.
Il y a tout le domaine de l'environnement, les technologies
reliées à l'environnement, le traitement de l'eau, de l'air, des
sols. Pour une compagnie québécoise comme Les Industries Fournier
de Black Lake, qui a développé une essoreuse, pour la faire
entrer dans le marché du Québec et c'est 95 % de nos
budgets du gouvernement du Québec qui paient les équipements
il faudrait que ce soit depuis trois ans en démonstration
permanente avant d'être acheté par la Communauté urbaine de
Montréal. Ça a été une chicane épouvantable
pour une technologie qui est hautement performante et qui s'avère, dans
les faits, la plus performante pour ce type de travail. Et c'est comme
ça continuellement. Il n'y a pas, au Québec, un climat favorable
à l'émergence de technologies dans nos mains pour être
utilisées avec nos achats publics, finalement. Alors, il y a tout le
domaine de l'environnement, et c'est très vaste.
Il y a tous les procédés industriels aussi, qui sont en
révision partout dans le monde, ou des technologies propres comme les
technologies à base d'électricité, qui sont
nécessaires. Et ce n'est que trois exemples. Mais le Conseil de la
science et de la technologie fait l'inventaire régulièrement des
types de technologies où le Québec devrait investir, et il y a de
la place.
Mme Bacon: Le gouvernement du Québec a déjà
quand même mis sur pied le Fonds de développement technologique
qu'on appelle, dans notre jargon, le FDT, avec pour but d'encourager le
regroupement d'entreprises dans des projets technologiques. Hydro-Québec
peut participer aux projets auxquels le FDT est associé.
Le fonds de développement technologique que vous proposez, est-ce
que ce ne serait pas un double emploi avec notre FDT ou si vous voyez des
avantages?
M. Plourde: Mme la ministre, le FDT a un caractère dans le
temps, défini dans le temps. C'est pour un certain nombre
d'années, tandis que celui qu'on propose là serait permanent. Et,
pour avoir accès au FDT, j'ai accompagné la compagnie
Précitech; ça a pris trois ans et ça a coûté
250 000 $. Or, on sait qu'investir dans des petites entreprises en R-D,
ça a un rendement de 24 pour 1. On l'a, la référence, dans
notre mémoire.
Alors, le FDT n'est pas fait pour les petites entreprises. Innovatech,
ça reste à être prouvé, mais ça a quand
même pris deux ans à mettre Innovatech en place et son horizon
d'existence est de cinq ans.
Quand on parle de technologie, il faut penser en termes de
génération. Les Japonais, à partir de 1960, ont
pensé en termes de génération, et ils récoltent
aujourd'hui, après une génération seulement, des fruits
extraordinaires dans le marché industriel.
Mme Bacon: À votre avis, est-ce que les entreprises
connaissent suffisamment les capacités de recherche ou les partenariats
que peut offrir le centre de recherche d'Hydro-Québec, l'IREQ, par
exemple, ou le laboratoire des technologies de l'électricité?
Est-ce que les compagnies les connaissent suffisamment?
M. Plourde: Moi, je vous donne un point de vue personnel, Mme la
ministre. Ces organisations-là ont été fermées sur
elles-mêmes. J'ai été un ingénieur à
HydroQuébec pendant six ans; j'ai des collègues qui y
travaillent. Et le but de ces institutions-là, c'était de
développer des technologies pour ses besoins propres. On commence, on
sent, dans le plan de développement que j'ai lu dernièrement, que
mes collègues d'Hydro-Québec m'ont fait parvenir, qu'on commence
à s'éveiller à cette dimension de la valorisation de la
recherche chez Hydro-Québec à l'extérieur, à
l'extérieur de ses besoins puis sur le marché international. Et
il y a là des marchés extraordinaires à capter.
M. Fortin: Je ne sais pas si je peux me permettre
d'ajouter...
Mme Bacon: Oui, allez, M. Fortin.
M. Fortin: Oui? S'il vous plaît. Merci.
Je pense que ce qui est important, c'est que dans le projet qu'on soumet
on voudrait qu'Hydro-Québec, ou enfin, ce nouveau fonds-là
devienne proactif. Quand on regarde ce qui se passe dans le domaine du sport
je m'excuse de prendre cet exemple-là comment on essaie de
dépister, par exemple, les talents à 12 ans; il y a des
dépisteurs qui vont, si vous voulez, voir jouer les juvéniles,
puis les juniors, etc. Puis on encadre, on accompagne les gens tout le long de
leur carrière pour, à un moment donné, peut-être
avoir l'un ou l'autre qui vient dans la Ligue nationale.
Mais, au fond, c'est un peu la même chose qu'il faudrait pouvoir
faire dans le domaine de la technologie. Il faudrait être capable de
savoir, par exemple, au niveau des écoles de métiers parce
que la pépinière d'entreprises technologiques est au niveau de
l'enseignement professionnel, évidemment il faudrait être
capable de dépister au niveau du secondaire, au niveau du
collégial, au niveau des sciences ou de génie, les hommes et les
femmes qui ont des talents particuliers, qui ont une créativité
particulière. Il faudrait être capable de faire de
l'accompagnement et de suivre ces gens-là.
Donc, il faut pouvoir être proactif alors que, dans les organismes
qu'on a mis sur pied, qui sont très bien, il me semble, en tout cas, vu
de l'extérieur, que les gens sont plutôt en attente.
C'est-à-dire, si tu as un projet, tu le soumets, mais il n'y a pas, si
vous voulez, de proaction pour initier, pour découvrir, pour aller, ou
pas suffisamment, me semble-t-il.
Mme Bacon: En fait, vous ne trouvez pas qu'Hydro-Québec
invite suffisamment ou encourage suffisamment les gens à utiliser ses
intallations de recherche?
M. Fortin: En fait, vous avez parfaitement raison, et c'est ce
qui est vrai pour la recherche, ce qui est vrai pour la technologie, ce qui est
vrai pour l'«entrepreneurship» en général.
C'est sûr qu'on a un potentiel énorme qui est
démontré scientifiquement. Enfin, il n'y a pas de problème
par rapport à ça. On a les savoirs pour répondre à
peu près à toutes les questions, mais c'est comme si, comme
société, en termes de culture, on était en attente, on
attendait. Et, nous, on pense que le jour, enfin très tôt
j'espère où on va commencer à y croire puis
à dire: Le peu de ressources qui nous restent, on les met pour
détecter ça, épauler ça, ça va être
extraordinaire, et en termes de développement d'entreprises en
général et particulièrement d'entreprises technologiques.
(9 h 30)
Yvon Gasse a des statistiques par rapport aux ingénieurs, qu'il
pourrait peut-être donner: les étudiants, les finissants en
génie qui sortent et qui n'ont pas de job. Et ces gens-là,
normalement, c'est une matière première en entreprise
technologique, sauf qu'ils n'ont pas entendu parler de
l'«entrepreneurship».
M. Gasse: Je peux peut-être donner un exemple. Je ne sais
pas si ça peut faire suite à votre question, mais ce n'est pas un
exemple d'Hydro-Québec; ce n'est pas le cas seulement de l'IREQ, hein.
C'est le cas du problème, je pense, des instituts de recherche
technologique. On a, au parc technologique, ici, une entente avec, enfin, un
genre de jumelage avec le parc technologique d'une ville qui s'appelle Mobile,
Alabama. Ces gens-là nous visitent de temps en temps et, la
dernière fois, ils nous ont dit: Regardez, on a amené tel
monsieur ici, qui est P.-D.G. de telle entreprise dont je ne me souviens
pas exactement du nom, mais je pourrais le sortir éventuellement
qui, maintenant, exporte sur les marchés internationaux. Il est
situé à Mobile, et c'est un très beau cas d'incubation
à partir d'un parc technologique, d'un incubateur, exactement comme on
essaie d'avoir ici dans le Parc technologique du Québec
métropolitain. Cependant, il a dit: Le concept ou le produit à
partir duquel il a bâti son entreprise a été
développé chez vous, dans votre centre d'optique et de laser. Il
y a quelques années, il a acheté le brevet et il a fondé
son entreprise là-dessus. Maintenant, il fait 15 000 000 $ de chiffre
d'affaires.
Alors, je pense qu'il y a un problème de lien entre les
découvertes, les innovations technologiques et les gens qui vont les
ramasser, c'est-à-dire les entrepreneurs, ou du moins les entreprises
existantes qui vont essayer d'en faire un succès commercial. Et,
ça, c'est évident. Moi, je suis à l'Université
Laval, et c'est un des problèmes majeurs qu'on essaie, par
différents moyens, là, je ne dirais pas de solutionner mais
essayer de voir comment on peut favoriser, hein, ce passage du produit à
l'entreprise, ou du moins au développement économique du produit
ou du procédé.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Labelle.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
Bienvenue à la Fondation de l'entrepreneur ship et à ceux
qui la représentent. Nous allons enclencher une discussion, je pense,
fort intéressante sur la recherche et développement, les liens
qu'il y a entre la petite et la moyenne entreprise, l'esprit
d'«entrepreneurship» et les fonds qu'une société veut
mettre à la disposition de toute idée nouvelle pour faire
progresser la société.
Moi, c'est une question qui me préoccupe grandement parce que
j'ai eu à toucher un peu à ce secteur et, ce qui est
préoccupant, c'est que, finalement, on n'arrive jamais à passer
de la théorie et de la recherche à la pratique. Il y a un hiatus,
il y a une liaison qui ne se fait pas. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas
d'argent parce que, à l'heure actuelle, lorsqu'on regarde le Fonds de
développement technologique que le gouvernement a lancé à
grand renfort de publicité en 1988 pour dire: Durant 5 ans, il y aura
300 000 000 $ à 350 000 000 $... J'ai questionné le ministre de
l'Industrie et du Commerce avant Noël, et il aura au plus, au 31 mars, au
bout de tout ce temps, dépensé 68 000 000 $ sur les 350 000 000
$. Il a de l'argent qui sort par les oreilles je peux le dire comme
ça mais ça ne passe pas.
Il y a des questions d'orientation, au départ, qui ont
figé des choses, c'est un fait. Et je pense que ceux qui ont
lancé la chose avaient peu de notions sur ce que c'est que la recherche
et développement parce que, au fond, c'est rare qu'un projet de
recherche va coûter 5 000 000 $. Les grands projets mobilisateurs qui
étaient à l'origine de la création du Fonds, ce n'est pas
ça, la recherche et développement. La recherche et
développement, ça se fait par une personne ou deux dans le fond
d'un laboratoire ou dans le fond d'un bureau, qui se creusent les
méninges et, à un moment donné, ils trouvent quelque
chose. Mais, après, c'est de développer. Et, moi, je me dis: II y
a de l'argent, il y en a et n'importe qui va trouver de l'argent s'il a un
projet intéressant. Mais c'est de l'élaborer et de le rendre de
façon pratique. Il y a un passage qui ne se fait pas.
Et je trouve que, quand vous parlez de la Fondation de
l'entrepreneurship, c'est quelqu'un qui a assez de «guts» pour
prendre l'idée, la lancer et pousser. Je connais en particulier le cas
d'un jeune qui, je dirais, s'est formé par lui-même, qui a
conçu un avion qui décolle dans 125 pieds et qui atterrit dans
125 pieds. Mais, à l'heure actuelle, il n'a pratiquement pas un sou.
Tout ce qu'il a mis a servi à développer sa trouvaille et,
maintenant, il n'est pas capable de la commercialiser. Les Américains
veulent en avoir et lui veut garder son brevet, mais il n'a pas d'argent pour
le commercialiser. C'est ça.
Alors, comment vous voyez ça? Disons que c'est un cas, mais il y
en a des dizaines, de cas comme ça. Est-ce que vous ne pensez pas que le
Fonds de développement technologique devrait justement faire faire le
passage d'idées comme celles-là à la commercialisation, et
donc changer en quelque sorte l'approche qui ne peut pas être une
approche administrative ou bureaucratique mais qui doit laisser beaucoup
d'initiative? Et quelles sont les... Je m'adresse à des gens
d'administration; quel est le type de contrôle administratif, de
gérance qu'on doit attacher pour que ça parte?
M. Fortin: En fait, je ne sais pas si... On a chacun un bout, je
pense, à dire. C'est une bonne question. Oui, Jacques.
M. Plourde: Je vais essayer de vous donner des pistes de
réponse.
D'abord, le Fonds de développement technologique, je pense que
c'est une bonne chose qui est arrivée en son temps, mais il reste que
ça n'a pas un caractère de permanence...
M. Léonard: C'est correct.
M. Plourde: ...et il ne regarde que l'aspect
développement. Ce qui coûte 1 $ en recherche fondamentale va en
coûter 3 $ à 4 $ en développement, et va en coûter 5
$ en commercialisation. Alors, ce fonds-là ne va pas jusqu'à la
commercialisation sur le marché mondial. De un.
Deuxièmement... Oui?
M. Léonard: Excusez, la conclusion, c'est qu'il devrait
s'en occuper?
M. Plourde: Bien sûr, bien sûr. M. Léonard:
Bon, O.K.
M. Plourde: Deuxième chose, c'est qu'un
propriétaire de petite entreprise, si on veut faire une comparaison par
rapport à une grande entreprise, c'est comme un chasseur par rapport
à un fermier. Un chasseur, ça sort dans son territoire et il faut
qu'il ramène quelque chose, sans ça il crève; tandis qu'un
fermier, lui, il a le temps de planifier les saisons. Ça, c'est la
grande entreprise. C'est sûr que faire affaire avec le Fonds de
développement technologique tel qu'il est constitué, ça
prend une organisation de grande entrepri-
se. Le gars de PME, lui, c'est beaucoup trop coûteux pour lui,
c'est beaucoup trop compliqué, et il ne pense pas à ça.
Alors, il va s'épuiser, avec tout l'argent qu'il peut récolter,
il va se réveiller avec un très bon produit, mais il n'est pas
commercialisable parce que ce qu'il a dépensé pour l'amener, pour
démontrer son... Ça va lui en coûter cinq fois plus pour le
commercialiser. C'est sûr qu'il peut toujours vendre ses brevets;
ça arrive régulièrement.
Alors, un fonds permanent aurait cette caractéristique non
seulement d'être proactif vis-à-vis des jeunes qui ont des
idées, qui sont capables de les réaliser parce qu'ils ont les
qualités «entrepreneuriales» nécessaires, mais aussi
va les accompagner jusqu'à la commercialisation, quitte à prendre
des participations dans l'entreprise. Mais, comme ça a un
caractère de permanence, dans une génération ou deux nos
fils et nos filles et nos petits-enfants nous diront qu'on avait vu juste,
parce qu'il faut penser aujourd'hui en termes de génération et
non pas seulement pour cinq ans. Il ne faut pas.
M. Fortin: Moi, peut-être parce que vous avez posé
une question en termes de contrôle, je voudrais peut-être ajouter
par rapport à ça. C'est sûr que, quand on choisit
l'approche entrepreneuriale, il faut être capable de développer
une culture à la fois de long terme et de résultat d'ensemble. Si
le processus administratif coûte plus cher que l'input, les gens
n'embarquent pas, c'est trop d'énergie, c'est tannant. En fait, il y a
toutes sortes de choses qui peuvent arriver, etc. Donc, les gens aiment mieux
s'abstenir quand c'est trop compliqué. Alors, il va falloir avoir
quelque chose de suffisamment souple, dans lequel on dira: Ecoutez,
après 5 ans, bon, il y a eu 100 projets et il y en a 40 % ou 50 % qui
ont donné de bons résultats. Et ce sera une évaluation sur
la moyenne. Mais si on veut avoir un contrôle sur le processus,
c'est-à-dire chaque dollar, les rapports, etc., j'ai l'impression que
ça va nous coûter deux fois plus cher, d'abord, et,
troisièmement, on va avoir beaucoup de difficultés à avoir
la complicité des entrepreneurs parce que, dès que ça
devient compliqué, les gens, si vous voulez, débarquent parce
qu'ils se sentent prisonniers. Bon.
M. Gasse: Moi, je voulais à peu près ajouter la
même chose. C'est qu'un fonds comme celui-là, dans le fond, il
faut qu'il ait un peu une gestion «entrepreneuriale»,
jusqu'à un certain point, et ça veut dire au moins quelque chose:
II faut quand même prendre un certain nombre de risques parce qu'on n'est
pas capable de tout prévoir. Et peu importent les pro forma que vous
faites et peu importent les prévisions et la veille technologique que
vous allez faire, il y a quand même un élément de risque.
Mais les risques, jusqu'à un certain point, ils peuvent être
calculés. Ce n'est pas vrai que les entrepreneurs c'est tous des
«gamblers». C'est des gens qui prennent des risques, oui, mais des
risques jusqu'à un certain point calculés à partir d'un
certain nombre d'informations puis un certain nombre d'intuitions qu'ils ont.
(9 h 40)
Deuxièmement, je pense qu'on contrôle peut-être un
peu trop parce que, bon, on doit fournir des résultats. Ça ne
veut pas dire qu'on ne doit pas être imputable, ça. O.K.?
Ça veut tout simplement dire qu'on est capable d'expliquer les choses,
par exemple. Et, comme Paul le disait, je pense qu'il faut avoir une vision
à plus long terme des choses, et non pas à court terme. C'est ce
qui a fait le succès des Japonais parce que, les Japonais, c'est ce
qu'ils ont comme vision. C'est une vision à plus long terme et non pas
les résultats à court terme.
Finalement, je dirais: Par rapport à la technologie, il y a un
problème, des fois, c'est que les gens développent des choses qui
peuvent être très intéressantes sur le plan technologique,
mais il n'y a pas toujours concordance avec les besoins du marché.
Alors, tout l'aspect du marché est très souvent
négligé. Et, ça, nous autres, on le voit beaucoup dans les
centres de recherche. On développe la technologie, on développe
le processus, on développe un produit qui se tient bien
technologiquement mais qui ne correspond pas, qui n'a pas un bon timing sur le
marché.
Alors, je pense qu'on a plein d'exemples de petites entreprises qui ont
développé, évidemment, des bidules, ou enfin des
innovations en fonction d'un marché, et c'est des succès. Prenons
l'exemple d'Exfo, ici, à Québec, dans le domaine de la fibre
optique, c'est extraordinaire. Ils ont fait les deux choses en même
temps. O.K.? Ils ont développé l'instrument et, en même
temps, ils l'ont fait avec les clients potentiels.
Le Président (M. Audet): M. Plourde, vous voulez ajouter
quelque chose?
M. Plourde: Je veux juste ajouter, pour un complément de
réponse: Ce qui fait le succès du monde de la technologie pour
les pays qui réussissent bien, c'est qu'ils ont réussi à
intégrer l'aspect recherche et développement, l'aspect finance et
l'aspect commercialisation. Tout ça, ça se tient. Que je sache,
il n'y a pas d'organisation au Québec qui s'est encore
positionnée comme ça. On a l'exemple d'MITI au Japon, où
on pense d'abord commercialisation. Après ça, on fait le pont
avec le financement et la recherche et le développement.
M. Léonard: je reviens à hydro-québec parce
que, au fond, hydro-québec nous dit que, comme objectif, ils veulent
atteindre 2 % de leur chiffre d'affaires. en lisant cela, je me suis dit que ce
n'était pas suffisant je dois le dire comme je le pense,
là parce que les pays qui sont préoccupés par la
recherche et développement y attribuent 2,5 %, 3 % de leur pib; le
japon, 3 %. alors, si vous prenez une entreprise du type d'hydro-québec
à la base de l'industrie on veut en faire un moteur
économique il me semble que si on compare ça au pib, dans
cette entreprise en particulier, on devrait trouver 5 % ou peut-être 10
%. c'est peut-être exagéré, mais je trouve que
là-
dedans on ne peut pas demander à quelqu'un qui a un restaurant du
matin, qui fait des toasts, de faire de la recherche et développement.
Ce n'est pas lui qui la fait, c'est des entreprises comme Hydro-Québec
et d'autres, des universités; mais Hydro-Québec a la chance
d'être dans la pratique aussi, en même temps. est-ce que vous ne
trouvez pas que ça devrait être beaucoup plus que 2 %, que
ça devrait être 5 %, 6 %, 10 %. je ne dis pas d'atteindre
ça du jour au lendemain, je sais, mais l'objectif, qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Plourde: personnellement, il m'apparaît évident
que les 2 % dont il est question dans le dossier hydro-québec, ce sera
à peine suffisant pour maintenir son niveau de connaissances dans ses
domaines d'expertise actuels. en l'an 2000 j'ai ici les données
pour le japon ce sera 3,5 %; pour les états-unis, 3,05 %,
l'allemagne, 3,25 % et le canada sera encore à 1,70 %, et le
québec probablement. pour ce qui a trait à hydro-québec,
si elle voulait jouer un rôle de leader technologique, non seulement dans
ses domaines d'expertise mais se servir de son image de marque internationale
parce que l'ireq, c'est une organisation qui est reconnue
internationalement il faudrait que ce soit beaucoup plus que ça.
mais la différentielle entre les 2 % et ce que ça devrait
être, moi, j'aimerais que ce soit constitué dans un fonds de
développement technologique à même une redevance sur les
revenus de l'exportation, et ce serait un fonds permanent. et là on
pourrait moduler au fur et à mesure des besoins quel pourcentage on
devrait investir dans les années à venir. mais c'est difficile de
dire d'avance un pourcentage de référence précis.
Le Président (M. Audet): M. Fortin.
M. Fortin: Juste sur le fonds technologique, je voudrais
peut-être ajouter deux, trois petits éléments.
D'abord, moi, je pense que si on dit que les exportations, il y en a une
partie qui va servir à créer un fonds technologique, j'ai
l'impression que ça fait une sorte de contrepoids dans la population. Il
y a des gens qui disent: Produisons pour nous autres, ce n'est pas important
d'exporter. Mais, là, je pense que les gens diraient: Oui, mais c'est un
patrimoine qu'on est en train de se bâtir quand on le fait.
Deuxièmement, si on régionalise une partie de ce
fonds-là, c'est-à-dire que les gens qui subissent des
inconvénients à des développements, ceux qui ont des
lignes qui leur passent sur la tête ou ceux qui ont des
développements pourraient voir une partie du fonds plus importante,
justement, qui va s'investir pour développer cette
région-là. Donc, il y a une sorte de contrepoids
régional.
Enfin, la troisième remarque qu'on a soulignée un peu tout
à l'heure et sur laquelle je voudrais revenir: il y a une recherche qui
est faite aux États-Unis, qui dit que l'argent investi dans la recherche
et développement dans la PME rapporte 24 fois plus que dans la grande
entreprise. comme on n'a pas beaucoup d'argent, on n'est pas très riche,
au moins, si on choisissait là où c'est le plus payant, ça
serait merveilleux, de sorte que si hydro-québec augmentait, si vous
voulez, son pourcentage en recherche et développement et, en plus,
s'organisait peut-être pour donner des contrats ou pour donner des
mandats, enfin, le faire dans des petites unités où, là,
la productivité est beaucoup plus forte en termes de résultats,
je pense qu'on pourrait aller chercher peut-être l'équivalent de
10 %, même si, au départ, c'est peut-être 4 %.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Saint-Maurice.
M. Lemire: Dans le même questionnement, moi, je voudrais
savoir quel niveau vous avez parlé de pourcentages, là
budgétaire envisageriez-vous pour un fonds permanent et, en
même temps, quelle proportion vous pourriez préconiser, de
participation financière à l'entreprise, la PME? Avez-vous une
idée? Vous n'avez pas fait...
M. Fortin: Non. Remarquez qu'actuellement, nous, on est
peut-être un peu plus au niveau du concept. Évidemment, si
l'idée était retenue, qu'on trouve intéressante cette
relation entre les exportations, une certaine redevance, un fonds permanent,
qu'Hydro-Québec y joue un rôle important, là, on pourrait
peut-être essayer d'aller un petit peu plus loin pour documenter
ça. Mais je pense que l'idée de départ, c'est de profiter
d'abord du savoir-faire d'Hydro-Québec. C'est quand même je ne
sais pas combien de milliers d'ingénieurs qui sont là, c'est la
renommée, enfin, il y a là un savoir-faire énorme, ils
sont présents un peu partout. Je pense que ça pourrait devenir la
bougie d'allumage pour faire une percée dans le domaine de
l'«entrepreneurship» technologique au Québec.
M. Lemire: Comment voyez-vous la participation de groupes de
recherche universitaires dans des projets de moyen... Quelle sorte de moyen ou
long terme... De quelle façon voyez-vous ça par rapport au fonds
de développement qui, à l'heure actuelle, encourage
déjà ces groupes universitaires là?
M. Fortin: Enfin, moi, je peux peut-être commencer, Yvon
complétera.
D'abord, Hydro-Québec fait déjà des choses dans ce
domaine-là. Je pense, par exemple, qu'il y a la chaire en technologie
à l'UQAM, qui est déjà quelque chose. Dans la proposition
d'Hydro-Québec, à un moment donné, il est question d'avoir
1 % ou 2 % des projets qui pourraient aller... Enfin, ils allaient dans des
activités culturelles; là, ils pensent aller en termes de
développement régional. On pourrait penser, par exemple, que dans
les interventions où Hydro-Québec fait des équipements il
y a un certain pourcentage, je dirais, pour bonifier sa présence dans le
milieu. On peut penser qu'il
y a une partie de ces fonds-là qui pourraient aller dans
l'université qui est régionale, qui pourraient aller,
peut-être, dans des chaires en «entrepreneurship» dans
certains cas, parce que le développement régional, pour nous en
tout cas, c'est très clair que ça va passer par le
développement de 1'«entrepreneurship». On ne voit pas
comment on va pouvoir le faire autrement. Et je pense qu'Hydro-Québec
pourrait, par sa présence et par les fonds qu'elle contrôle en
régions, jouer un rôle incitatif très fort. Surtout en
cette période où le gouvernement a peut-être moins de
fonds, je pense qu'Hydro-Québec pourrait jouer un certain rôle de
suppléance, en tout cas, sous les indications du gouvernement.
M. Gasse: Peut-être pour vous donner un exemple, on a
cité le cas tout à l'heure de Precitech, qui est une entreprise
de métallurgie de pointe qui est installée dans le parc
technologique, ici, à Québec. Ils ont passé une entente
avec l'Université Laval à l'effet que l'entreprise, bon, qui est
en train de se construire, qui est pratiquement terminée maintenant, les
laboratoires de métallurgie, des poudres métallurgiques en
particulier parce que cette entreprise-là est dans ce
domaine-là les laboratoires de l'Université Laval seront
situés dans cette entreprise-là. Alors, l'entreprise accepte, en
contrepartie d'une expertise des professeurs et des étudiants, de
développer cette technologie-là, d'abriter le laboratoire en
question.
Alors, ça, vous voyez, c'est une forme, évidemment, de
collaboration entre les universités et l'entreprise qui semble, en tout
cas jusqu'à maintenant, bien aller. Ça peut constituer un
modèle pour d'autres cas.
M. Fortin: Si vous permettez, il y a aussi des incubateurs, par
exemple. Je sais qu'Hydro-Québec est impliquée dans Inno-Centre
à Montréal, est impliquée aussi dans le CREDEQ à
Québec, et je pense qu'Hydro-Québec pourrait, par rapport
à tous les incubateurs qui sont en train de s'installer, jouer un
rôle important parce qu'il y apporte un contenu technologique et, en
même temps, c'est une façon de soutenir cet
accompagnement-là.
M. Lemire: Vis-à-vis des PME, est-ce
qu'Hydro-Québec, d'après vous, s'implique suffisamment, surtout
dans les efforts de développement, d'équipement et de mise en
oeuvre des systèmes d'efficacité énergétique? (9 h
50)
M. Plourde: Je pense qu'Hydro-Québec fait un effort
très louable et remarqué dans le marché des petites et
moyennes entreprises. Par contre, elle a aussi une politique d'achats à
administrer. Alors, on comprend, dans le cadre de nos ententes du GATT et de
l'ALENA, que les politiques d'achat préférentielles seront de
plus en plus difficiles à gérer dans les mains de
sociétés d'État et du gouvernement.
Par ailleurs, il est reconnu à peu près mondialement qu'on
pourrait avoir une politique de propositions spontanées où des
fournisseurs d'Hydro-Québec ou des entrepreneurs pourraient proposer
leurs projets, mais d'une façon simple, efficace, plutôt que des
montages financiers à la FDT, et Hydro-Québec pourrait recevoir
ces propositions-là et les accréditer et protéger, dans
les mains des proposants, pendant un certain temps, des marchés. Et,
ça, c'est reconnu, c'est une pratique mondiale.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Labelle.
M. Léonard: Oui, M. le Président.
Vous représentez la Fondation de l'entrepreneur-ship. Or, cela
signifie pratiquement la petite et la moyenne entreprise. En tout cas,
l'«entrepreneurship», il y en a aussi dans la grande entreprise,
mais, généralement, elle est capable de se débrouiller par
elle-même. Enfin, ce n'est pas toujours le cas, mais disons.
Dans le cas de la petite et la moyenne entreprise, lorsqu'on regarde le
système de tarification d'Hydro-Québec, on s'aperçoit que
ce sont elles qui paient l'électricité à plein prix.
Même à plein prix... Plus que les autres si on regarde le tarif
moyen annuel: le résidentiel, c'est 2,3, le commercial, 3,1,
l'industriel, 1,7. Mais quand on regarde cela, c'est l'industriel grande
industrie, tarif à elle pour la grande entreprise, alors que les petites
et moyennes entreprises rentrent dans le commercial.
Est-ce que vous pensez que c'est une orientation très dommageable
pour F «entrepreneurship» québécois? Et est-ce que
ça devrait être révisé? J'aimerais vous entendre
là-dessus, parce que, hier, il y a eu aussi des professeurs de
l'Université Laval qui sont venus nous dire que les rabais
d'électricité aux alumineries coûtaient 300 000 000 $ et,
pour les 1500 emplois qu'il y a là-dedans, ça fait une subvention
de 200 000 $ par année. Bon. On peut le prendre, mais il reste quand
même que le processus de calcul amène des questions, puis ce n'est
pas le type de subvention qu'on donne à la PME. J'aimerais vous entendre
là-dessus, la tarification.
M. Fortin: Bien, écoutez, enfin, je trouve que c'est une
excellente question. Vous étiez là quand on a
présenté le mémoire sur la fiscalité et où
on a préconisé le concept de convivialité. En fait, nous,
ce qu'on constate, c'est qu'il y a eu une hypothèse de base qui a
été faite au Québec il y a plusieurs années, qui
est encore présente. L'hypothèse de base, c'est que le
développement va venir des investissements étrangers. Donc, on
pense que nous on va former de la bonne main-d'oeuvre et que, si les gens
savent bien travailler, il y a quelque part des investisseurs qui vont venir et
qui vont créer des jobs.
Or, je pense que les statistiques révèlent depuis nombre
d'années que ce n'est pas ça, la réalité. Quand on
regarde le nombre de personnes aptes au travail qui sont sans emploi
actuellement au Québec, il faut bien reconnaître qu'ils ne
remplissent pas le trou, en tout cas pas complètement, c'est sûr,
puis ils ne le rempliront
probablement jamais. Or, le jour où on va prendre conscience que
le développement du Québec va se faire par
l'«entrepreneurship» endogène et qu'on va commencer à
se poser des questions sur ce qu'on pourrait faire pour que notre
société soit conviviale à cette
réalité-là... Sans doute, peut-être qu'au niveau,
par exemple, de l'énergie, il devra y avoir ou il pourrait y avoir des
réajustements, mais, à date, on est encore sous
l'hypothèse que le développement du Québec, si on a de la
main-d'oeuvre bien formée, ça va venir d'investissements
étrangers. Je pense qu'il faut changer ça. Et, d'ailleurs, c'est
ce qu'on a essayé de préconiser lorsqu'on a
présenté le mémoire à la dernière commission
parlementaire sur la fiscalité. il faut développer une
société conviviale, et la convivialité, ça va aller
au niveau des contrats, ça va aller au niveau de la recherche et
développement, ça va aller au niveau de l'accompagnement, au
niveau du parrainage, au niveau des règlements, et certainement au
niveau de la tarification. et pourquoi ne pas avoir un système
étapiste dans ce domaine-là? parce que les entreprises, elles ne
partent jamais très grosses; c'est toujours compliqué quand elles
démarrent. plus notre société est complexe, plus la marche
est élevée. et on pourrait penser, si vous voulez, à
établir des étapes par rapport à la venue d'entrepreneurs,
et peut-être que la tarification de l'électricité pourrait
être une partie de convivialité, là, à
développer. ce n'est pas la seule, mais vous avez certainement raison.
enfin, c'est comme si les petites entreprises, c'était là
temporairement et, de toute façon, c'est embarrassant. c'est bien du
monde. des fois, ils sont tannants. enfin, les gens ne fonctionnent pas
toujours selon les rythmes des grandes administrations et, d'une certaine
façon, alors que 99,4 % des entreprises au québec ont 100
employés et moins, 50 % des nouveaux emplois sont créés
par des entreprises de cinq employés et moins. donc, il y a un
phénomène tout à fait nouveau depuis 10 ans et
l'ajustement reste à faire au niveau de l'administration par rapport
à ça.
Le Président (M. Audet): Vous avez terminé? Alors,
M. le député de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
Je me réjouis, moi, de l'élément que vous apportez,
parce que je pense que vous touchez, dans le point avec vos derniers
commentaires, un des points majeurs du développement futur du
Québec. Le deuxième, vous le touchez aussi dans votre
mémoire au niveau de la continuité du développement. On ne
peut plus aller dans des formes de créneaux, former des équipes
de recherche qui demandent énormément de ressources humaines, de
temps, d'argent et faire une mode et, au bout de cinq ans, la laisser aller et
revenir de cinq ans en cinq ans avec cette chose-là.
Mais, dans cette grande perspective globale, ce sur quoi j'aimerais
échanger avec vous, c'est sur tout le domaine des appels d'offres
publics. Ça va être vrai pour Hydro-Québec; ça va
être vrai aussi pour le gou- vernement. Dans un des mémoires qui
nous ont été présentés et que j'ai trouvé
excessivement intéressant, on a essayé de développer un
concept de dire: Au lieu d'aller toujours vers la soumission la plus basse, ce
qui, à mon humble avis, amène tout le monde à niveler par
la base au lieu d'être élevé, ôter ce
concept-là et remettre une autre variable qui ferait appel au contenu
technologique au niveau de recherche et de développement, qui ferait
appel aussi au niveau de l'innovation. Alors, je pense qu'on toucherait
à ce que vous énumérez, à un moment donné,
que la nouvelle entreprise qui développe ou le nouvel entrepreneur qui
développe un produit vous y avez touché, M. Plourde, tout
à l'heure c'est utilisé. Il y a l'élément de
risque, là, qui va le baliser aussi, et c'est toujours dans l'aspect de
fonds publics, de continuité de résultats aussi.
Est-ce que ça ne serait pas un des critères qu'on pourrait
utiliser ici, en vertu du GATT, de l'ALENA et des ententes nommez-les
qui nous permettrait d'avoir ce levier-là? Puis, au lieu de miser
sur 10 % de contenu québécois qui va être fortement mis en
question dans bien des domaines, remplaçons ça par un niveau de
recherche et développement. Est-ce que ça ne serait pas une
solution, ça, d'encourager cette recherche et ce
développement-là au niveau de notre petite entreprise?
M. Plourde: Vous savez, il y a quelques années, le Conseil
de la science et de la technologie a fait un examen des achats de biens publics
pour des fins de développement technologique et de recherche et
développement. Bon. Il y a quand même un secrétariat
permanent aux achats qui s'est penché sur une politique d'achat qui
tienne compte, justement, de l'avènenent du GATT et de l'ALENA et des
ententes interprovinciales aussi. Et, à l'article 9, il est question
d'achat de biens publics à caractère technologique. Il y a des
modalités d'application de la politique d'achat où nous avons
suggéré d'accueillir des propositions spontanées pour des
biens à caractère technologique, qui pourraient être
développées à même des éventuelles commandes
par les gouvernements ou les ministères et avec une certaine protection
de marché pour quelques années de façon à ce qu'on
puisse rembourser ce coût de développement là et que
l'entreprise puisse évoluer dans le marché mondial.
On sait qu'actuellement 90 % des équipements achetés par
les hôpitaux sont des équipements importés. Il y en a
là-dedans qui pourraient être fabriqués au Québec,
et on le sait. Et l'association québécoise des industries
manufacturières médicales voit à faire accepter cette
proposition-là. C'est une voie qui est très intéressante
et qui ne coûte pas plus cher au gouvernement, finalement, parce qu'il
faut les acheter, les biens publics, et, au lieu de les acheter de
l'étranger, on les achète dans les mains de
Québécois qui ont développé une technologie plus
avancée et un savoir-faire dont ils contrôlent la
propriété intellectuelle. Dans cet esprit-là, je pense que
le marché des biens publics, tant par Hydro-Québec que par le
gouvernement dans son ensem-
ble, pourrait être une avenue très intéressante.
M. Gasse: Moi, j'irais un petit peu plus loin. Je parlerais
plutôt de valeur ajoutée que seulement de recherche et
développement, parce que ça fait beaucoup plus appel à
tout le processus, au complet, du savoir et du savoir-faire. Et n'oubliez pas
qu'il y a possibilité de mesurer ça à la valeur
ajoutée, hein, parce qu'en Europe on taxe la valeur ajoutée, donc
il y a possibilité.
Le Président (M. Audet): Brièvement. (10
heures)
M. St-Roch: Oui, brièvement.
Vous avez touché dans vos trois critères d'échelle
de créativité l'aspect de l'essaimage ou de
«spin-off». On a ouï dire aussi qu'Hydro-Québec,
souvent, lorsqu'elle fait affaire avec ses sous-traitants et qu'on
développe, là, quelque chose qui est intéressant, qu'on
garde une certaine priorité. En contrepartie, je pense qu'aux
États-Unis le gouvernement américain va laisser à ses
principaux contractants, là, que ce soit dans quelque domaine,
l'usufruit de cette recherche et développement qu'ils ont pu apporter
lorsqu'ils ont fait affaire avec le gouvernement.
Est-ce que c'est une politique qu'on devrait continuer à
encourager au niveau d'Hydro-Québec, de laisser aux petites entreprises
ce contenu-là d'utilisation, quitte à avoir une entente qu'elles
seraient le premier bénéficiaire, mais de commercialiser et
d'aller davantage... Puis ça ne serait pas une manière aussi de
favoriser cette nouvelle culture que, vous avez raison, il faut
développer au Québec?
M. Fortin: Bien, moi, je pense que, s'il y a une attente qui est
signifiée, de la part du gouvernement, qu'Hydro-Québec joue un
rôle de parrainage en termes de développement, c'est tout à
fait compatible, je dirais, de susciter l'avis par et à travers
l'expertise d'Hydro-Québec et à travers ses activités. En
fait, ce qui est important, c'est que les entreprises partent, puis qu'il y ait
une nouvelle activité qui soit générée, et je pense
que la récompense d'Hydro-Québec, ça sera d'avoir accompli
ça et de dire: Grâce à nous, il y a tant de nouveaux
emplois, maintenant, puis voici les entreprises qu'on a aidées à
partir.
Remarquez qu'ils le font déjà, et je pense que... sauf que
les fois qu'on en a discuté avec eux, en fait, ils y vont un peu sur le
bout des pieds parce qu'en fait ça n'a pas été une attente
signifiée par la société. Je pense que si, aujourd'hui, le
gouvernement décidait «Oui, c'est une attente», j'ai
l'impression que les gens pourraient multiplier par 10, peut-être, des
choses qui sont toutes là, prêtes à être faites.
Le Président (M. Audet): Merci. Malheureusement, c'est
terminé. Alors, au nom des membres de la commission, messieurs, je vous
remercie sincèrement de votre présentation.
Alors, afin de permettre à Gaz Métropolitain inc. de
prendre place et de s'avancer, nous allons suspendre nos travaux deux
minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 2)
(Reprise à 10 h 6)
Le Président (M. Audet): Alors, la commission reprend ses
travaux. Nous recevons maintenant le groupe Gaz Métropolitain. Alors, au
nom de la commission, messieurs, je vous souhaite la plus cordiale
bienvenue.
Je vous rappelle brièvement nos procédures. Vous disposez
d'une vingtaine de minutes pour exposer votre mémoire. Ensuite suivra
une période d'échanges d'une quarantaine de minutes.
Avant de débuter votre présentation, je vous inviterais
à vous présenter, s'il vous plaît. Merci.
Gaz Métropolitain inc.
M. Caillé (André): Merci, M. le
Président.
Je voudrais tout d'abord vous remercier en remerciant la commission de
nous entendre. Je remercie également Mme Bacon de l'invitation qu'elle
nous a faite de nous faire entendre.
Alors, les gens qui m'accompagnent sont M. Michel Gourdeau, à ma
gauche, ici, vice-président de Gaz Métropolitain,
approvisionnement; M. Hung Bui Quang, vice-président, ventes moyen
débit; et M. Ra-beau, économiste à l'Université du
Québec à Montréal.
Beaucoup de choses, cette année, ont déjà
été dites concernant le gaz naturel par d'autres, par des
intervenants et, également, déjà dites par
Hydro-Québec, de sorte que je serai bref dans ma présentation. On
tient quand même à se présenter devant votre commission, M.
le Président, parce que les décisions de votre commission
influencent l'ensemble, le marché global de l'énergie au
Québec et, de ce fait, le marché du gaz naturel. Parce que,
également, il y a le fait que le plan de développement
d'Hydro-Québec, cette année, fait très souvent
référence au gaz naturel et qu'il y a beaucoup de mémoires
aussi qui sont adressés à votre commission qui font
référence au gaz naturel. Gaz Métropolitain veut donc
s'assurer que votre commission dispose d'une vision complète de ce
qu'est l'industrie du gaz naturel.
La toile de fond, dans le domaine de l'énergie au Québec,
c'est que ça fait déjà 30 ans que le gouvernement du
Québec a fait le choix de l'hydroélectricité pour
supporter le développement économique québécois.
C'est encore un bon choix, mais il devrait possiblement être
réajusté à la lumière des réalités
d'aujourd'hui, des réalités de 1993. Nous vivons en effet
maintenant à l'heure de la mondialisation des marchés, et chaque
société doit tirer le maximum d'avantages de chacune des sources
d'énergie qui sont disponibles.
Comme des observateurs l'ont déjà fait remarquer, le
Québec, il fait bande à part en ce qui concerne
l'utilisation de l'électricité dans une aussi large mesure
pour le chauffage de l'eau et pour le chauffage de l'espace. fait partie aussi
de la toile de fond et c'est presque un corollaire de ce que je viens de
dire le fait que le gaz naturel occupe au québec 15,8 % du bilan
énergétique total. c'est une proportion beaucoup plus faible que
ce qu'on retrouve chez nos voisins. en ontario, par exemple, la proportion est
de 35 %, la part est de 35 %; au canada, c'est de 25 %, en moyenne. on compte
beaucoup, dans cette baisse de la proportion du bilan énergétique
total, nous, le québec, quand ça fait passer de 35 % en ontario
à 25 % au canada. aux états-unis, c'est de 24 %. en europe, on
aurait des chiffres qui oscillent, selon les pays de la communauté
économique européenne, variant à peu près dans les
mêmes proportions, là, entre 20 % et 30 %.
Le but de notre intervention, c'est donc d'indiquer dans quel secteur de
marché le gaz pourrait être plus présent, puis d'indiquer,
également, quels seraient les impacts, quelles seraient les
conséquences d'une présence plus grande du gaz naturel. (10 h
10)
Précisons d'abord que, pour ce qui est de Gaz
Métropolitain, l'arbitrage du marché tranche déjà
habituellement, dans la majorité des circonstances, entre les
différents concurrents. Quant à nous, c'est le meilleur arbitrage
possible, en autant, bien sûr, que le marché fonctionne
normalement. C'est d'ailleurs ce principe qui a permis à Gaz
Métropolitain de développer des ventes d'au-delà de 1 200
000 000 $ sur le marché québécois. C'est aussi ce principe
qui a permis à Gaz Métropolitain de contribuer à
l'économie québécoise de la façon dont nous le
décrivons, aux pages 20 à 22 de notre mémoire.
Sommairement, comme il est indiqué à ces pages, en 1992,
c'est 352 000 000 $ qui ont été des économies
réalisées par les consommateurs de gaz naturel au Québec,
parce qu'ils utilisent le gaz naturel au tarif du gaz naturel, bien entendu,
plutôt que l'électricité au tarif régulier de
l'électricité, et que cela crée dans l'économie
québécoise 5 000 000 d'emplois directs et indirects.
En effet, on pense, nous, à Gaz Métropolitain, qu'on ne se
souvient pas assez que chaque million de dollars épargné par un
client, ça crée dans l'économie de 10 à 14 emplois
permanents. Pour les 352 000 000 $, je répète, peut-être
que je me suis trompé ici, c'est 5000 emplois par année que
ça crée, les 352 000 000 $ d'économie.
Ceci étant dit, deux secteurs de marché pourraient faire
croître la part de gaz naturel au Québec: il s'agit de la
cogénération et du chauffage de l'eau et de l'espace. Quant
à la cogénération, vous le savez, ça consiste
à produire simultanément, en utilisant du gaz naturel, de
l'électricité et de la vapeur, ce qui implique, pour que la
cogénération soit possible, qu'on trouve des clients sur le site
hôte, le site qui va accueillir la cogénération, des
clients qui ont des grands besoins de vapeur.
De fait, au Québec, on tiouve des clients qui ont beaucoup besoin
de vapeur. Il s'agit, dans la plupart des cas, des usines de pâtes et
papiers. Donc, les sites futurs de la cogénération, c'est les
sites où on trouve les usines de pâtes et papiers, et il s'agit de
la région de Montréal-Est. Dans son plan de développement,
d'ailleurs, Hydro-Québec prévoit l'implantation de 760 MW de
production privée, y compris 550 MW de cogénération au gaz
naturel. Il faut dire qu'à date, au Québec, il n'y a qu'une seule
usine, c'est l'usine de Cascades, à Kingsey Falls, qui est le site
hôte d'une usine de cogénération, et que cette usine a une
puissance de 25 MW.
Si on se base sur l'expérience américaine, on constate que
le prix offert pour l'électricité est considérablement
supérieur aux États-Unis à ce qui se trouve au
Québec. Aux États-Unis, les cogénérateurs, ils
reçoivent de 0,06 $ à 0,14 $US par kilowattheure. Au
Québec, on le sait, c'est environ 0,045 $ ou 0,044 $ par kilowattheure
qui est offert. Par ailleurs, il faut dire que les cogénérateurs
québécois, ils vont être favorisés par rapport
à leurs concurrents du sud parce que les besoins de vapeur au
Québec, dans nos usines, sont généralement beaucoup plus
élevés que les besoins de vapeur aux États-Unis.
Plus les besoins de vapeur sont grands, plus la puissance
installée de cogénération sera grande et plus les
économies d'échelle seront grandes. C'est un facteur qui favorise
les sites québécois. Le deuxième facteur qui favorise les
sites québécois, c'est le coût moins cher du gaz naturel au
Québec ou au Canada qu'aux États-Unis.
En définitive, selon le calendrier qui est établi, c'est
au mois de juin seulement qu'on va savoir combien de
cogénérateurs auront réussi à mettre en place
pour que la cogénération se réalise, n'est-ce pas,
il y a une chose qu'il faut mettre en place combien de
cogénérateurs auront réussi à mettre en place les
contrats d'achat de gaz, les contrats de vente d'électricité et
de vapeur et le financement qui est requis.
Le troisième, le financement, il est évidemment
dépendant de l'établissement des deux premiers. Il faut d'abord
des contrats de gaz et il faut d'abord des contrats de vente
d'électricité et de vapeur. Il est très important que ce
programme-là ait du succès, puis pas seulement, puis pas surtout
Gaz Métropolitain ou pour Hydro-Québec. C'est important pour
éliminer le désavantage comparatif que supportent actuellement
nos industries de pâtes et papiers et nos industries de
pétrochimie. Désavantage, dans le cas des pâtes et papiers,
par rapport à leurs concurrents du sud, concurrents aux
États-Unis, qui compétitionnent sur les mêmes
marchés que nos usines de pâtes et papiers.
En effet, plusieurs concurrents américains
bénéficient déjà depuis plusieurs années de
programmes semblables au prix que j'indiquais plus tôt, pour ce qui est
du tarif de rachat d'électricité. C'est aussi important pour Gaz
Métropolitain, parce que le secteur des pâtes et papiers,
ça représente 13 % de nos ventes, et le secteur de la
pétrochimie et du raffinage, 11 % de nos ventes. C'est encore une fois
important pour l'économie du Québec parce qu'il s'agit
d'éliminer le désavantage comparatif d'industries qui emploient
des dizaines de milliers de Québécois et de
Québécoises: pâtes et pa-
piers, pétrochimie. aussi, compte tenu du retard par rapport aux
états-unis, nous avons accepté, nous, quant à nous, gaz
métropolitain, de mettre sur la table dès le départ le
maximum de concessions qu'il nous est possible de faire. nous avons
proposé à la régie du gaz, qui l'a accepté, un
tarif de développement pour l'installation de la
cogénération prévue pour tembec au témiscamingue.
notre tarif a été réduit, quant à nous, notre marge
brute, de 50 %. nous mettons ça sur la table: réduire notre marge
brute de 50 % comparativement au tarif régulier. au cours des prochaines
semaines, le cas tembec pourra se généraliser. nous allons
proposer à la régie un tarif de développement similaire
qui va s'appliquer à tous les projets de cogénération,
tous les projets de cogénération qui pourront être retenus
par hydro-québec.
Je dois dire, M. le Président, que, malgré ces efforts de
Gaz Métropolitain et les efforts des cogénéra-teurs
jusqu'ici, il y a lieu de se demander pourquoi les promoteurs mettent autant de
temps à conclure des ententes finales avec Hydro-Québec. En
d'autres mots, je pose la question: Est-ce qu'on croit possible de
réaliser, d'ici 1996, les neuf projets sélectionnés par
HydroQuébec? Toutes nos analyses concluent de façon
générale que les projets sont rentables et réalisables
dans les conditions économiques qui prévalent aujourd'hui.
Le dernier obstacle qui n'est pas encore surmonté par les
cogénérateurs, ça consiste à négocier avec
les producteurs des prix du gaz sur des bases fermes pour les 10 à 15
prochaines années. Or, tout comme le pétrole, le gaz naturel,
ça ne se négocie généralement pas sur des bases
fermes pour 10 ou 15 années; les acheteurs et les vendeurs s'engageant
généralement à vendre le gaz ou le pétrole selon le
prix du marché et tel qu'il évoluera au fil des ans.
Puisque le coût du gaz acheté des producteurs constitue un
tiers du prix total de la cogénération, nous croyons
qu'Hydro-Québec devrait accorder aux cogénérateurs une
certaine marge de manoeuvre à ce chapitre. En procédant ainsi,
Hydro-Québec accorderait aux cogénérateurs
québécois actifs dans les secteurs des pâtes et papiers et
de la pétrochimie les mêmes règles du jeu, finalement, qui
sont appliquées par les utilités électriques
américaines quand elles achètent l'électricité des
cogénérateurs américains.
J'en arrive au dossier du chauffage de l'eau et de l'espace.
L'électricité est omniprésente dans le marché de la
chauffe au Québec. Il y a des raisons historiques, bien sûr, qui
expliquent cette situation, le gaz lui-même n'étant devenu
disponible à l'ensemble du Québec qu'à partir de 1980,
alors qu'en Ontario, on le sait, le gaz est devenu disponible à
l'ensemble de leur marché en 1960. Alors, dans le contexte
énergétique des années soixante, soixante-dix et
quatre-vingt, suite à la nationalisation d'électricité,
suite aux crises pétrolières des années soixante-dix,
suite aux surplus d'électricité, il est normal de constater,
aujourd'hui, que plusieurs Québécois se sont tournés vers
l'électricité pour le chauffage. Au- jourd'hui, la situation est
différente: le gaz est disponible pour une très large proportion
de la population québécoise.
Ainsi, il est opportun d'examiner s'il n'est pas souhaitable que le gaz
naturel occupe une plus grande place sur le marché de la chauffe au
Québec. De fait, même si, dans l'état actuel de la
technologie, tout le secteur du chauffage ne peut pas être converti au
gaz naturel, il n'en demeure pas moins que là où le réseau
de gaz existe, le potentiel est estimé à 50 BCF milliards de
pieds cubes par année de gaz naturel ou soit, dans un langage plus connu
ici, 11 TWh annuellement, le chauffage qui pourrait être converti au gaz
naturel. (10 h 20)
La question qui se pose, puis que vous vous posez évidemment,
c'est: Quel avantage il y aurait à rendre possible ce changement? Puis
est-ce qu'il y en a un avantage? La réponse, quant à nous, est
oui, et ça, c'est peu importe si on regarde ça du point de vue
d'Hydro-Québec ou de Gaz Métropolitain. Je vais illustrer mon
propos.
Premièrement, si on opérait un tel changement, on
éviterait à Hydro-Québec la construction de nouveaux
équipements pour desservir la pointe et, par conséquent, des
pertes pour Hydro-Québec résultant d'un prix de vente moins
élevé que le prix... que les coûts que les mêmes
ventes engendrent. Au cours des 10 prochaines années,
Hydro-Québec prévoit de nouvelles ventes, dans son plan de
développement, pour 9,5 TWh dans le secteur du chauffage. En nous basant
sur le coût évité actuel, le coût marginal actuel de
0,092 $ par kilowattheure et sur le prix de vente actuel, selon les tarifs
publiés par Hydro-Québec dans le chauffage, de la même
électricité, 0,055 $ par kilowattheure, l'économie
annuelle ainsi réalisée pour Hydro-Québec serait de 352
000 000 $.
Deuxièmement, on éviterait, si on procédait
à ce changement, le déplacement du gaz dans le chauffage par
l'électricité, comme ce fut le cas au cours des 10
dernières années. En effet, on peut constater qu'il y a 10 BCF,
10 000 000 000 de pieds cubes, soit 2,7 TWh d'énergie qui utilisaient le
gaz naturel, qui a converti son chauffage à l'électricité
depuis 1980, avec le résultat qu'aujourd'hui, selon les chiffres
d'Hydro-Québec, Hydro produit de l'électricité avec un
coût marginal de 0,092 $ par kilowatt pour le revendre à des
clients qui étaient, jadis, au gaz à 0,055 $ par kilowattheure.
Ça constitue pour Hydro-Québec une perte annuelle, en 1992, de 73
000 000 $. Ceci a eu aussi pour conséquence de réduire le
degré d'utilisation des réseaux de distribution du gaz pour une
perte, pour Gaz Métropolitain, de 50 000 000 $. Finalement, tout le
monde a perdu. Gaz Métro a perdu, Hydro-Québec a perdu, les
clients de Gaz Métro ont perdu et les clients d'Hydro-Québec ont
perdu.
Dans la mesure où il apparaîtrait opportun de modifier
l'approche québécoise à l'utilisation de
l'électricité, il reste à savoir comment on pourrait
opérer ce changement-là. Selon nous, deux options: la
réglementa-
tion ou la pratique de la réalité des prix. Toujours selon
nous, la deuxième solution serait la meilleure parce que le
marché est encore le meilleur guide en autant qu'il reçoive un
message clair. Par ailleurs, selon HydroQuébec, le plan de
l'année dernière, je crois, il va falloir de 10 à 15 ans
avant d'éliminer l'interfinancement entre les différentes classes
de tarifs. plusieurs s'inquiètent quant à la croissance future
des prix du gaz naturel. à cet égard, rappelons que le prix du
gaz naturel, ça a trois composantes, puis je vais prendre un exemple qui
est celui d'un client de chauffage. il y a la distribution, le premier
élément du prix. c'est une fonction qui est assumée par
gaz métropolitain. ça représente 52 % des coûts,
soit plus de la moitié de la facture. à ce chapitre, chez gaz
métropolitain, on anticipe une croissance de notre coût de service
à moins de l'inflation; 52 % de la composante des coûts vont
évoluer à moins que l'inflation. le transport, c'est une fonction
assumée par tcpl, le transport interprovincial, transcontinental.
ça représente, pour un client de chauffage, 25 % des coûts.
les prévisions de tcpl sont connues, elles sont publiques devant
l'office national de l'énergie; c'est pour moins que l'inflation d'ici
l'an 2000. la troisième composante, toujours pour notre client de
chauffage, la marchandise elle-même, le produit, gaz naturel, le
méthane, qui est produit, lui, par les producteurs, ça
représente dans son facteur, notre client de chauffage, 23 % du
coût. nos prévisions, quant à nous, au cours des cinq
dernières années, quant au prix du gaz, nos spécialistes,
économistes nous ont toujours dit: c'est l'inflation plus 2 %. ils se
sont toujours trompés parce que, depuis cinq ans, le prix du gaz, il a
baissé, marchandise, de 46 %. alors, tout ça, ça
m'amène à croire, tout ça, ça m'amène
à dire que l'évolution du coût payé par un
client...
Prenons les trois composantes. Il paie les trois composantes dans sa
facture. Ça devrait évoluer, au cours des prochaines
années, pour notre client de chauffage en deçà de
l'inflation.
Maintenant, supposons, comme certains le disent ou le prévoient,
que la marchandise, quant à elle, évoluera à 5 % au-dessus
de l'inflation, puis faisons le calcul en tenant compte de la proportion du
coût de la marchandise dans le coût total, eh bien, ça,
ça donne, toujours pour notre client de chauffage, des coûts qui
devraient évoluer selon l'inflation.
Le Président (M. Audet): Si vous voulez conclure, s'il
vous plaît.
M. Caillé: Alors, j'en arrive directement à nos
recommandations, M. le Président, laissant à la commission le
soin de me questionner sur des questions relatives à
l'environnement.
Alors, Gaz Métropolitain, ce que nous recommandons, c'est
d'accélérer le développement de la
cogénéra-tion utilisant le gaz naturel de façon à
rencontrer la concurrentialité de l'industrie des pâtes et
papiers, de renforcer la concurrentialité de l'industrie des pâtes
et papiers, de la pétrochimie et du raffinage, de poursuivre la
conversion c'est une recommandation au gouvernement, toujours de
son parc immobilier au gaz naturel. Incidemment, l'édifice où
nous nous trouvons, l'hôtel du gouvernement, est chauffé d'une
façon très confortable, je trouve, en utilisant le gaz naturel.
Alors, ça ne sert à rien de poursuivre dans ce
sens-là.
Troisièmement, nous recommandons d'accentuer les efforts
déjà prévus dans la stratégie d'efficacité
énergie, l'énergétique, que le gouvernement a rendue
publique en décembre afin de sensibiliser les promoteurs et les
constructeurs à l'impact qu'ont leurs décisions sur le choix
d'une énergie plutôt que d'une autre.
Quatrièmement, de mettre en place un désincitatif pour
empêcher le recours à la plinthe électrique sur le
marché de la rénovation de même que sur le marché de
la nouvelle construction, aussi bien dans les secteurs résidentiel que
commercial et industriel.
Quant à nous, Gaz Métropolitain, on est disposé
à poursuivre nos efforts pour avoir une flexibilité tarifaire
favorable à la cogénération, de développer et
d'adapter des technologies efficaces pour le secteur de la chauffe et pour
d'autres secteurs, notamment avec l'aide du gouvernement. J'aime à
indiquer ici une contribution du ministère de l'Énergie et des
Ressources pour le développement de technologies et gazotechnologies de
800 000 $. Troisièmement, toujours quant à nous, on va poursuivre
l'intégration de l'efficacité énergétique à
l'intérieur de nos programmes commerciaux et on va poursuivre nos
efforts pour que notre tarification soit le juste reflet de nos
coûts.
Voilà, M. le Président, d'une façon succincte, ce
que je voulais présenter à votre commission. Nous sommes, moi et
mes collègues, maintenant disposés, disponibles pour
répondre à toutes les questions de votre commission.
Le Président (M. Audet): Merci, M. Caillé. Je vais
maintenant reconnaître la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: M. le Président, je voudrais remercier les
représentants de Gaz Métropolitain de nous avoir fait part des
orientations que privilégie votre entreprise. Je pense que c'est un
atout qui est considérable dans les discussions que nous avons eues
déjà à cette commission parlementaire.
Le gaz naturel, c'est quand même une source d'énergie dont
la présence stimule la concurrence entre les formes d'énergie, et
ça nous permet aussi de générer au Québec des
retombées économiques importantes. Alors, je vous remercie
beaucoup de cette participation, ce matin.
L'évolution des prix du gaz naturel, évidemment, ça
ne fait pas l'unanimité au sein même de l'industrie du gaz
naturel. Il y a des prévisions qui sont préparées par le
groupe Foster qui sont relativement supérieures à celles
auxquelles vous référez dans votre mémoire. Il y a des
consultants américains qui, comme M. Jensen, et
canadiens, comme M. Milne, qui prévoient un relèvement des
prix au cours des prochaines années.
Comment pouvez-vous réconcilier ces opinions d'experts, et qui
sont du milieu du gaz naturel, avec le fait que vous considérez toute
inquiétude relative à des hausses de prix du gaz naturel comme
étant non fondée?
M. Caillé: Alors, je vais devoir vous donner une
réponse de spécialiste. Les prix du gaz naturel, ça varie
selon le type de client, selon qu'il s'agisse d'un client résidentiel,
commercial ou industriel. Puis le prix payé par les clients, il y a
trois composantes, je le disais tantôt: le transport, la distribution et
la marchandise. La prévision de Gaz Métropolitain, pour un client
chauffage, je le disais tantôt, le transport, il va évoluer moins
rapidement que l'inflation, la distribution, moins rapidement que l'inflation
et la marchandise, selon nous, approximativement selon l'inflation.
Au total, tout ça, ça veut dire évidemment en
deçà de l'inflation, selon notre prévision, mais supposons
que les gens ont raison et que la marchandise, ce sera 5 % au-dessus de
l'inflation, ça ramène toujours le prix payé par le
client, compte tenu de l'importance relative de la marchandise dans le prix
total, à un prix qui évolue selon l'inflation. (10 h 30)
Quant au client industriel, eh bien, là, ça dépend
de la durée des contrats. C'est bien sûr que, si on prend un
contrat de 20 ans au niveau industriel par rapport à un contrat d'un an
sur la base sur laquelle nos clients négocient présentement, il y
a 25 %, au point de départ, d'écart de prix. Alors, pour les
clients industriels, moi, je vois que le tarif de transport, pareil comme pour
les autres, c'est la même chose, résidentiel ou industriel,
ça va évoluer moins rapidement que l'inflation, le tarif de
distribution, Gaz Métropolitain distribution, beaucoup moins rapidement
que l'inflation. notre objectif, c'est d'éliminer l'interfinancement qui
favorise actuellement le résidentiel aux dépens de l'industriel.
on veut progressivement, par la croissance de nos ventes, éliminer cet
interfinancement-là. donc, pour ces clients-là, en passant, pour
eux, c'est un tiers, un tiers, un tiers, approximativement, les coûts.
alors, pour la distribution, un tiers du coût, pas d'inflation. il reste
la marchandise. et là, je peux vous dire, même raisonnement que je
faisais tantôt, supposons que le prix du gaz industriel évolue
à l'inflation plus 2 %, o.k.? mais, encore là, au total,
ça va faire un prix pour le client industriel qui va évoluer en
deçà de l'inflation. maintenant, quand les gens vous disent:
l'inflation plus 5 %, ils prennent seulement une des composantes, c'est
la composante marchandise. ah bien, ça, c'est une chose.
Deuxièmement, laissez-moi vous dire une chose importante: C'est
qu'il n'y a personne qui peut prévoir le prix du gaz naturel ou le prix
de l'huile, dans le futur. S'il y a quelqu'un qui pouvait le faire,
vraisemblablement, il deviendrait très riche et très rapidement.
Mais ce qu'on peut dire, par exemple, c'est: Qu'est-ce qui est fondamental?
Quel est le mécanisme fondamental dans l'établissement de ce
prix, à cet égard-là? Puis je parle juste de la
marchandise. Il y a deux éléments qui sont déterminants
dans ce qui va arriver du prix futur du gaz: c'est les réserves de gaz,
d'une part, et ce qu'il en coûte pour explorer et produire du nouveau
gaz.
Parlons des réserves de gaz. Au Canada, les réserves
établies produisables de façon économique, etc., 20 ans de
réserve. Ça, ça veut dire quoi? Ça veut dire, on
prend les réserves totales établies et on divise par la
consommation canadienne, incluant les exportations aux États-Unis.
Ça donne 20 ans, 20 ans de réserve de gaz. Là, c'est des
réserves établies. Si je prends maintenant les réserves
potentielles, ça, c'est d'autres terrains, d'autres terres où les
géologues ont fait leur travail et ont dit: Ici, il y aura
présence de gaz. Bien, là, ça donne 115 ans. Il y en a, du
gaz. Il y en a pour longtemps. Première conclusion.
Deuxième conclusion. Mais qu'est-ce qu'il en coûtera, vous
me direz, vous, pour produire ce nouveau gaz? Hé bien, vous regarderez
l'évolution des coûts d'exploration et de production dans le
milieu des années 1980, de 1982 à 1987... je pense, je regardais,
hier, vous allez voir qu'en termes réels, ça fait juste une
chose, ça, à cause du développement technologique et de
l'amélioration des méthodes d'exploration et de production,
ça ne fait que baisser en termes réels.
Alors, comment peut-on expliquer que le prix du gaz va évoluer
à beaucoup... puis la marchandise gaz va évoluer à
beaucoup plus que l'inflation? Si jamais ça arrive, si jamais il y avait
un signal de prix qui augmentent, il va arriver une chose, c'est qu'il y a des
producteurs qui vont commencer à faire des forages pour offrir plus de
gaz parce que ça ne coûte pas cher le développer, puis la
demande est là, puis il y en a beaucoup, de gaz. Alors, ça va
augmenter l'offre et ça va stabiliser le prix. maintenant, ce que je
vous dis là, je pense que c'est beaucoup plus important de comprendre ce
mécanisme-là que d'essayer de faire la différence entre ce
que mcdaniel, l'office national de l'énergie, le ministère de
l'énergie fédéral ou tous ces gens-là font. ils ont
toutes sortes de considérations. le fondamental, c'est: combien y a-t-il
de réserves, puis combien ça coûte pour produire les
nouvelles réserves? moi, quand je regarde ça, je n'ai rien que je
peux vous expliquer pour vous dire que ça va faire l'inflation plus 5 %.
il n'y a rien dans la problématique qui pourrait expliquer
ça.
Par contre, vous avez vu, dans mon raisonnement, on se veut conservateur
et prudent. On dit: Supposons qu'ils ont raison. Qu'est-ce que ça fait,
pour illustrer à l'avantage de votre commission... quelles seraient les
conséquences sur l'économie québécoise? Et
là, ça dit quoi? Ça dit que notre client chauffage, bien,
ça va évoluer en deçà de l'inflation, puis pour
notre client industriel, supposons, 2 % à l'inflation. C'est une analyse
de risques, disons, qu'on fait pour vous.
Mme Bacon: Vous, M. le Président, M. Caillé
veut nous rassurer par sa prévision d'évolution des prix
du gaz naturel. Par ailleurs, je pense que vous nous indiquez qu'il faudrait
qu'Hydro-Québec prenne le risque, à la place des
cogénérateurs, sur l'évolution des prix du gaz naturel.
Est-ce qu'il n'y a pas là une contradiction? Pourquoi reviendrait-il
à Hydro-Québec de courir un tel risque?
M. Caillé: Oui, voyez-vous, je vois la chose de la
façon suivante. Dans la cogénération, Hydro-Québec
est assis sur le siège du conducteur. C'est Hydro-Québec qui va
décider s'il y a ou s'il n'y a pas cogénération au
Québec. À partir de ce moment-là, il revient à
HydroQuébec de faire l'engagement. Je vais vous dire ceci: Si on croit
que le prix du gaz va augmenter selon l'inflation plus 5 % je crois que
c'est la prévision dans leur plan on devrait peut-être en
acheter tout de suite beaucoup. On va faire beaucoup d'argent, ça va
être très rentable, hein, si c'est pour augmenter comme
ça.
Par contre, bien, si on parle en pratique, il y a un risque à la
hausse du prix du gaz et il y a un risque à la baisse, et c'est ce qui
fait... puis il y a une tradition. Vous savez, dans le marché du
pétrole, qui est comme le marché du gaz, du pétrole et du
gaz, ça se transige au prix du marché. Les producteurs, leur
mentalité, la façon dont ils opèrent, depuis qu'ils ont
trouvé du pétrole oléoduc, on vend ça, du gaz ou du
pétrole, au prix du marché.
Aux États-Unis, la cogénération a du succès.
Il y a le facteur prix de rachat de l'électricité, bien entendu,
qui est plus élevé qu'au Québec, mais il y a aussi le fait
que les utilités publiques électriques aux États-Unis, ils
acceptent d'acheter de l'électricité à un prix
indexé au prix du gaz parce que c'est comme ça que ça se
fait dans le monde.
Mme Bacon: Est-ce que Gaz Métropolitain a
évalué les quantités additionnelles de gaz à effet
de serre que pourrait représenter, par exemple, la conversion au gaz
naturel de 500 000 résidences au Québec à des fins de
chauffage?
M. Caillé: Oui... Un instant, je vous prie. Je cherche le
bout que je ne vous ai pas dit tantôt. Alors, l'effet de serre. L'effet
de serre, j'ai trois choses par rapport à l'effet de serre.
Premièrement, l'effet de serre, ce n'est pas quelque chose de
négatif en soi. S'il n'y avait pas d'effet de serre, la
température à la surface de la terre serait très basse. Il
ferait très froid ici et on ne serait pas là pour en parler.
Numéro un.
Numéro deux, en ce qui concerne le réchauffement de la
planète, c'est une chose scientifiquement montrée maintenant. Les
experts de la NASA, entre autres, ont démontré que oui,
effectivement, le climat se réchauffe. Par contre, ce qui n'est pas
scientifiquement démontré, c'est quelle est la cause. Il n'est
pas du tout scientifiquement démontré que la cause est naturelle
ou artificielle ou humaine; rien de tel n'est démontré, au moment
où on se parle. d'ailleurs, je peux vous dire ceci aussi: c'est qu'il
faut relativiser les choses. si on regarde le gaz naturel au québec, on
serait responsable de 2,2 % des émissions canadiennes de co2'
par les activités humaines, et de 0,1 % des émissions mondiales
de co2 en ce qui concerne nos émissions de méthane,
gaz qui contribue également à l'effet de serre, on est, gaz
métropolitain, responsable de 0,06 % des émissions canadiennes de
méthane et, à l'échelle de la planète, toujours des
émissions causées par l'homme, c'est 0,0005 %, gaz
métropolitain. il faut quand même relativiser les choses, mais
c'est normal, sage de se soucier de l'effet du co2et des
émissions de co2 on en arrive...
Hier, j'ai fait les calculs de ce que ça ferait, la
cogénération. On a fait le calcul de ce que ça ferait, la
cogénération sur l'augmentation de ces chiffres-là. De
mémoire, il me semble que c'était...
Mme Bacon: Vous me parliez des 500 000 résidences, M.
Caillé.
M. Caillé: Pour la cogénération, ça
serait...
Mme Bacon: Non, pour l'effet de serre, c'est de la
cogénération.
M. Caillé: Des résidences, dites-vous, au niveau du
chauffage?
Mme Bacon: Bien, ma question portait sur les 500 000
résidences.
M. Caillé: Ah bon! J'avais compris: Quel serait l'impact
de la cogénération sur l'effet de serre?
Mme Bacon: Non, non, les 500 000 résidences. (10 h 40)
M. Caillé: au niveau des résidences, voyez-vous, on
est... supposons qu'on parle de 10 bcf de conversion
d'électricité au gaz naturel, le 9,5 kw des années
à venir, celles qu'on retrouve dans le plan, là... parlons de 50
bcf. au moment, nous sommes, nous représentons en termes de
co2' 2,2 % des émissions canadiennes. si on convertissait 50
bcf de chauffage de l'électricité au gaz, ça augmenterait
d'un quart de ça, ça veut dire de quelque 0,5 %. alors, ce dont
on vous parle, là, 50 bcf passent de l'électricité au gaz,
croissance des émissions québécoises par rapport aux
émissions canadiennes, qui sont de 2,2 %, passeraient à 2,7 %.
quant au niveau mondial, bien, ce serait proportionnel, on est à 0,1 %;
ça veut dire que ce serait 0,02 %. c'est ce que j'appelle relativiser
les choses. je ne suis pas en train de dire qu'il n'y a pas d'effet de serre ou
que... mais je dis qu'il faut relativiser les choses et, si on veut travailler
pour réduire les émissions humaines qui découlent des
activités humaines en co2' il faut beaucoup plus travailler
au niveau du transport, au niveau du transport et de l'utilisation de la
gazoline.
Par ailleurs, je sais qu'il y a un débat, une compétition
entre les différentes sources d'énergie où l'un dit de
l'autre qu'il cause tel dommage et l'autre dit de l'un qu'il cause tel dommage.
Moi, ce que je suis prêt à volontariser, c'est la mise sur pied
d'une commission ou d'un groupe de travail, plus simplement, pour
étudier une fois pour toutes l'impact relatif de chacune des sources
d'énergie, établir une grille, dans un premier temps, et, par la
suite, procéder à l'analyse de l'impact relatif de chacune des
sources d'énergie. On prendra l'électricité, on prendra le
gaz naturel aussi, on prendra les produits pétroliers, puis on fera une
analyse, on s'établira une grille pour comparer c'est quoi, l'effet de
l'un versus l'autre.
Moi, je préférerais un débat dans un cadre comme
celui-là qu'un débat entre nous et nos compétiteurs sur la
place publique, où on se lance des tonnes de CO2. Quant
à nous, comme ça ne nous a jamais intéressé, on n'a
jamais découvert, on n'a jamais établi quelle sorte de tonne on
leur lancerait ou quelle sorte d'impact on trouverait à
l'électricité, on n'aime autant pas... Je pense que ça ne
serait pas très serein, de la part de l'industrie de l'énergie,
de s'engager comme ça dans des critiques de l'un par rapport à
l'autre. Il serait beaucoup plus serein de s'asseoir au sein d'un groupe de
travail et d'établir une grille je suis tout à fait
d'accord avec ça où on va comparer l'effet du gaz avec
l'effet de l'électricité, avec l'effet des produits
pétroliers. On aurait, quant à nous, grand plaisir à
participer à un tel groupe de travail.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
Je pense que vous faites la démonstration, M. Caillé, sans
doute sans le vouloir, mais qu'un débat plus élargi sur
l'énergie aurait été essentiel, alors qu'on nous limite,
à toutes fins pratiques, à faire un débat sur
l'hydroélectricité.
Je pense que votre exposé le prouve, comment ça aurait
été important, parce que ça fait partie intégrale
de la force énergétique québécoise, et je crois
qu'il y a de plus en plus de groupes au Québec qui ne se gênent
pas pour dire que ça prend un débat élargi sur l'ensemble
de l'énergie québécoise. Et vous donnez des chiffres en
particulier fort éloquents, par exemple, sur le chauffage. Ce sont des
économies de l'ordre de 50 %. C'est assez surprenant d'avoir une
société d'État qui fasse de la publicité pour
chauffer avec un produit plus dispendieux. Il y a un manque de cohérence
au niveau de la vision globale de l'utilisation des forces
énergétiques au Québec.
Ce n'est pas pour rien, à mon point de vue, que de plus en plus
de groupes demandent ce débat élargi qui pourrait être
accompagné, parce que vous avez suggéré, cependant,
à la fin de votre réponse à Mme la ministre, qu'en plus de
ce débat-là il pourrait y avoir un comité ou une
commission, précisément, qui se penche- rait sur les effets de
l'ensemble des types d'énergie, de sorte qu'on parlerait peut-être
le même discours au lieu de braquer les groupes les uns contre les autres
et assister à des chicanes stériles qui ne mènent nulle
part. Et ça, je pense que je vous suis très allègrement
dans votre cheminement et je reconnais l'ancien sous-ministre de
l'environnement soucieux d'être capable de comparer les sources de
pollution.
Donc, ceci dit, je voudrais vous poser quelques questions. Qu'est-ce
qu'il y a?
Mme Bacon: Je pensais que vous vouliez aller le chercher comme
candidat.
M. Chevrette: Eh bien, ça en ferait un maudit bon!
Mme Bacon: Bien meilleur que les autres que vous allez
chercher.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: Je vous avoue que, s'il veut venir, je lui tends la
main.
Le Président (M. Audet): Continuez, M. le
député de Joliette. Vous avez la parole.
Mme Bacon: ...mieux que Lazure.
M. Chevrette: Et ça devrait vous rendre inquiets.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Caillé: Je suis très bien à Gaz
Métropolitain et je suis satisfait de mon sort.
Mme Bacon: Je voulais vous l'entendre dire, M. Caillé.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Je dois vous avouer que ce n'était pas
ça que je visais du tout. Je considère que vous avez...
Une voix: ...des pensées comme ça.
M. Chevrette: Voyez-vous comment la partisane-rie peut
dévier? Ça peut mener jusqu'à une tentative de faire
dévier le débat ou de minimiser l'impact d'un mémoire que
je trouve très solide.
Le Président (M. Audet): Allez-y, M. le
député. M. Chevrette: Si on me laisse tranquille, je
vais
y aller. Et vous, vous êtes correct?
Le Président (M. Audet): Je vais m'assurer de ça.
Allez-y!
M. Chevrette: Merci bien, M. le Président, c'est votre
rôle, d'ailleurs. en ce qui regarde les économies, partons de la
page 7. quand vous parlez de 50 % des logements, 50 % également
d'économie en ce qui regarde le commercial et l'industriel, 60 %, est-ce
que ces chiffres-là sont connus passablement de l'industrie
québécoise, des commerces québécois?
M. Caillé: Dans le domaine commercial et dans le domaine
industriel, ces chiffres-là sont connus. Dans le domaine
résidentiel, je pense qu'ils sont beaucoup moins connus, plus connus
dans la partie ouest de la ville de Montréal, de l'île de
Montréal, où il y a un attachement au gaz naturel depuis un plus
grand nombre d'années, et beaucoup moins connus dans le reste du
Québec. Mais, pour ce qui est des clients commerciaux, pour les clients
industriels, des gens en affaires, donc, ces chiffres-là sont connus,
mais ça ne veut pas dire qu'il sont connus de façon 100 %
satisfaisante pour nous, là. C'est pour ça qu'on s'emploie, bien
sûr, à les faire connaître de ces
clientèles-là. Mais...
M. Chevrette: Mais est-ce qu'Hydro-Québec... D'abord,
c'est sûr qu'Hydro connaît ces chiffres. Est-ce qu'il y a eu des
discussions avec Hydro-Québec de façon très
sérieuse, là, pour dire comment on peut agencer nos
différents développements pour se complé-mentariser
à partir d'un objectif bien précis qui est de servir les
Québécois au moindre coût? Est-ce qu'il y en a, des
discussions de fond, là-dessus?
M. Caillé: II y a 10 ans, ça date donc de 1980 ou
1982, par là, le gouvernement avait mis sur pied je pense que
c'était le gouvernement ou, enfin, le ministère de
l'Énergie un comité d'harmonisation; ça s'appelait
un comité d'harmonisation. C'est au moment, ça, où il y
avait une pénétration accrue du gaz naturel suite à leur
politique énergétique des années soixante-dix. Et les
résultats concrets ne sont pas probants, je dois dire. Puis ce n'est
peut-être pas surprenant. Ce n'est surprenant parce que, que voulez-vous,
nous sommes des concurrents, nous et Hydro-Québec, nous sommes des
concurrents. alors, je pense même que ça ne serait pas acceptable
que nous nous assoyions pour décider, en lieu et place du marché,
qui devrait utiliser quelle source d'énergie. le problème que
nous avons... et il reste que le problème, on l'a aujourd'hui,
là, les clients utilisent beaucoup plus l'électricité que
le gaz pour le chauffage. le problème que nous avons, c'est qu'on
voudrait bien que les règles de marché fonctionnent, mais il y a
de y interfinancement entre les tarifs, c'est-à-dire qu'on ne dit pas,
actuellement, à la clientèle qui chauffe à l'élec-
tricité combien ça coûte pour produire cette
électricité-là sur une base marginale, la prochaine
plinthe électrique qui va s'installer, combien ça coûte
pour fournir l'énergie qui va sortir de la plinthe électrique.
Ça, ce n'est pas dit de sorte que le client, le marché n'a pas le
signal du vrai prix. Le marché croit que les tarifs d'HydroQuébec
vont évoluer, à moins que l'inflation, parce qu'il croit ce que
les gouvernements, je dois dire, ont fait depuis toujours qu'on a
l'électricité. C'est une source autochtone,
l'électricité, puis on va faire en sorte que son prix
évolue à beaucoup moins. le marché a réalisé
ça, sauf qu'à partir du moment où c'est l'entrepreneur en
construction qui installe la plinthe électrique, qui est à un
coût de 10 % moins... un chiffre, là... 10 % moins que
l'installation de l'équipement chauffage au gaz, et que lui, cet
établissement-là, c'est pour vendre ou c'est pour louer,
chauffage non inclus, eh bien lui, son meilleur choix économique, c'est
d'installer une plinthe électrique, c'est ce qui coûte le moins
cher. par contre, celui qui vient et qui l'utilise par la suite, lui, bien, il
paye la facture d'électricité, avec des prix comme vous voyez
ici, les avantages concurrentiels...
M. Chevrette: Oui.
M. Caillé: ...à l'avantage du gaz.
M. Chevrette: Je comprends, M. Caillé, que...
M. Caillé: Voyez-vous, et c'est le sens de la
correction... C'est pour ça qu'on le dit ou on recommande au
gouvernement de bannir la plinthe électrique dans la rénovation
et dans la nouvelle construction. Ça ne veut pas dire en passant que
ça sera toujours le gaz qui gagnera. Il va toujours rester une
compétition entre l'huile et le gaz naturel. (10 h 50)
M. Chevrette: Je comprends votre réponse, mais il n'en
demeure pas moins que nous, autour de cette table, ici, là, on n'est pas
obligé de prendre position ni pour l'un, ni pour l'autre. Notre
rôle, c'est précisément le consommateur, le citoyen. C'est
pour ça qu'on réclamait un débat plus large sur le plan...
que la simple électricité.
Quand vous nous arrivez avec un mémoire du genre, là...
D'ailleurs, ça sera probablement très peu rapporté dans
les journaux, parce que notre système veut que les journalistes sont
éparpillés dans 7 ou 8 commissions, mais c'est des renseignements
de base très importants pour les citoyens. Si les citoyens savaient
ça, ils nous pousseraient peut-être dans le dos, à nous,
les politiciens, pour faire le pont. Nous, c'est notre rôle de faire
faire le pont entre les différents types d'énergie et regarder...
D'abord, on a le droit de privilégier, je pense, comme politiciens, par
exemple, l'énergie la moins polluante. Je pense que ça peut
être un principe et un choix. Non seulement ça peut, mais
ça doit être un principe sur un projet de société,
ça, d'utiliser, de viser
à l'utilisation des énergies les moins polluantes. ceci
dit, on a en même temps le devoir, à mon point de vue, là,
en tout cas, de renseigner les citoyens sur les états de fait, les
situations concrètes. par exemple, si hydro se permet de projeter le
prix du gaz lui-même dans ses propres pronostics, c'est là que
j'ai pris, moi, à l'horizon de 2010, que le gaz naturel sera de
l'inflation plus 5 %. ce n'est pas de vous autres que je l'ai appris,
là. c'est de votre concurrent.
Donc, j'aurais aimé ça, moi, en parallèle, assister
à une discussion entre deux concurrents, pour voir quelles sont les
bases de calcul, qui dit vrai. On a un seul concurrent devant nous qui est seul
à avoir l'expertise dans son secteur, puis on n'a pas les moyens d'aller
chercher l'expertise ailleurs, à part qu'arriver pendant une heure
à peine pour vous poser des questions, alors qu'on pourrait en avoir
pendant quatre heures, cinq heures à vous poser des questions à
partir de l'analyse que fait PHydro.
C'est ça que je trouve de pas correct dans notre système.
C'est débalancé, puis ça ne me permet pas de faire la
lumière complète. Donc, c'est plus un commentaire que de l'ordre
des questions, mais c'est ma conviction profonde, moi. On assiste, à
toutes fins pratiques, à quelque chose qui est bidon d'avance. Tu n'as
pas le temps de fouiller. Tu n'as même pas les ressources techniques pour
aller chercher toutes ces données, les ressources financières
pour pouvoir nous faire des tableaux comparatifs, et je pense qu'on ne remplit
pas notre rôle fondamental. Ce n'est pas pour rien que quelqu'un, depuis
le début, parle de création de commission de l'énergie,
pour qu'on puisse, au moins à un niveau quelconque et neutre, avoir
l'ensemble des données et nous faire les portraits.
Vous parliez de comité conjoint, tantôt, ou de commission,
je ne le sais pas. Il y a de plus en plus de groupes aussi qui proposent ce
type de commission neutre qui pourrait nous permettre d'avoir l'ensemble des
données, y compris sur la dimension coût éventuel, y
compris sur la dimension environnementale, y compris sur l'ensemble des
dimensions reliées à chacun des types d'énergie et pour
qu'on puisse avoir l'heure juste, quand on a à se prononcer sur les
orientations futures et l'utilisation des sources énergétiques.
mais on fait le débat sur 40 % des sources énergétiques.
on parle d'économie d'énergie sur 40 %, alors qu'on oublie les 60
%. face à l'économie d'énergie, qu'est-ce que vous avez
à dire, vous autres, gaz métropolitain?
M. Caillé: Oui on a, à Gaz Métropolitain,
des programmes d'efficacité énergétique qui visent
l'économie d'énergie. C'est un programme à deux volets,
d'abord, essentiellement basé sur la technologie, l'introduction au
Québec de gazotechnologie performante. Il se fait dans le monde pour
environ 500 000 000 $US de recherche et développement dans le domaine du
gaz, parce que le gaz est très répandu à l'échelle
de la planète. Nous, on s'est fait un devoir de faire en sorte que ces
recherches-là, qui sont faites au Japon, en France, en Allemagne, aux
États-Unis, en Angleterre touchent le marché
québécois. On fait du transfert de technologie. Ça, c'est
le premier volet.
On a investi, en 1984 je pense que c'était la
première année peut-être 1 000 000 $
là-dedans. Cette année, on a, à travers la création
d'un centre de technologie gazière qui est indépendant de Gaz
Métro, mais qui a été suscité par nous... les
budgets de transfert de technologie et de recherche et de développement
vont atteindre 9 000 000 $. Il y en a un tiers que ça va être Gaz
Métropolitain, 3 000 000 $, un tiers les gouvernements, dont les 800 000
$ qui nous ont été accordés par le ministère de
l'Énergie et des Ressources pour développer quatre
gazotechnologies, et l'autre tiers, c'est les clients eux-mêmes. On dit
indépendant parce qu'on voulait que ça regroupe tous les
spécialistes québécois dans le domaine de ces
technologies, pas seulement Gaz Métropolitain. Premier volet de notre
programme d'efficacité énergétique. résultat
jusqu'ici: depuis cinq ans, on estime que, dans les secteurs de marché,
le commercial, l'institutionnel et l'industriel, l'économie
d'énergie a été de 7,5 %. ça donne quelque chose
comme une quinzaine de milliards de pieds cubes de gaz que nous ne vendons pas
parce qu'on introduit de nouvelles technologies plus performantes. voyez-vous,
le gaz, au québec, il y a 20 ans et c'est de là qu'est
venue notre image de désuétude c'étaient les
équipements qui étaient désuets. il a fallu, nous, gaz
métropolitain, intervenir pour changer cet ordre-là.
première chose que je voulais vous dire en termes d'efficacité
énergétique, donc, technologie et résultat à
date.
Deuxième chose. Nous avons des programmes d'aide, de subventions
qu'on appelle le PRRC, c'est programme de rétention par une
réduction du tarif, un rabais tarifaire. Alors, ça, c'est
disponible pour notre clientèle qui l'utilise dans ces cas-là,
qui a conduit aux économies, comme je viens de vous dire, qui utilise ce
programme-là. Ce programme-là est reconnu par la Régie du
gaz naturel. Les coûts sont inclus dans les tarifs, etc.
Donc, c'est ça que nous faisons à date, et je pense qu'on
peut, puis qu'on doit intensifier. Par exemple, c'est une chose de dire le
chauffage au résidentiel, mais il y a aussi le fait que pas tout le
chauffage, selon la technologie actuelle, peut être
transféré au gaz naturel de l'électricité. Alors,
il va falloir faire des recherches technologiques. Par exemple, il y a des
équipements qui existent, mais qui doivent être mis au point pour
notre climat, puis que ce soient des équipements qui utilisent le gaz
à l'extérieur de la maison. C'est seulement un liquide
caloporteur qui amène dans la maison, soit la chaleur, soit la
réfrigération en été. Il y a des choses comme
ça qui doivent être et qui seront faites.
M. Chevrette: À la page 10, il y a un graphique
extrêmement intéressant sur l'évolution des coûts
énergétiques. Quand on compare le gaz naturel à
l'électrici-
té, entre autres, il y a un monde entre les deux. Il y a une plus
grande stabilité des prix du gaz naturel que de
l'électricité, en tout cas, si je me fie au graphique qui est
à la page 10. Est-ce que ça a été confronté,
ça, avec d'autres données ou si vous les avez prises à
partir des données mêmes d'Hydro-Québec?
M. Caillé: Nos sources, M. le Président, sont les
suivantes: Pour le prix de l'électricité, on prend les
données du ministère de l'Énergie et des Ressources du
Québec; pour le prix du gaz naturel, Gaz Métropolitain, puis le
prix du mazout, c'est «Oil Buyers' Guide»...
M. Chevrette: O.K.
M. Caillé: ...le guide pour les achats de pétrole.
C'est facile à reconstituer, ces tableaux-là. Ce sont des tarifs
publiés, publics, approuvés par la Régie du gaz naturel,
tous ces tableaux-là.
Effectivement, depuis 1985, le prix du gaz naturel, dans ses trois
composantes, certaines augmentant, d'autres diminuant, se stabilise. C'est un
des attraits les plus importants du gaz naturel parce qu'il y a des grandes
ressources continentales qui vont faire en sorte que le prix va rester stable
par rapport à d'autres sources d'énergie.
Le Président (M. Audet): Terminé. M. le
député de Drummond.
M. Chevrette: C'est bien vite.
M. St-Roch: Aucune question, M. le Président.
Le Président (M. Audet): D'accord. Alors, M. le
député de l'Acadie.
M. Bordeleau: Merci, M. le Président.
Juste une question. À la page 28 de votre mémoire, vous
parlez des coûts marginaux du gaz naturel qui sont inférieurs
à ceux de l'électricité, étant donné la
capacité résiduelle du réseau de distribution. J'aimerais
savoir si Gaz Métropolitain a fait des études déjà
ou fait une évaluation du degré de sous-utilisation du
réseau. Dans quelle mesure cette capacité résiduelle de
réseau pourrait permettre de satisfaire un transfert important au niveau
du chauffage de l'électricité vers le gaz naturel?
M. Caillé: oui, m. le président, nous avons fait
une telle étude. le réseau actuel, le réseau existant
pourrait supporter des livraisons de 50 000 000 000 de pieds cubes
additionnels. pour vous donner une idée plus relative des choses,
là, actuellement, approximativement, nous livrons 200 000 000 000 de
pieds cubes. alors, c'est 25 % additionnel, puis 50 000 000 000 de pieds cubes,
ça correspond au potentiel de chauffage qui est actuellement
l'électricité qui pourrait être convertie au gaz naturel,
et ça correspond à 50 000 000 000 de pieds cubes à 30 000
000 000 de pieds cubes addition- nels qui pourraient être livrés
au cogénérateur, pour vous donner un ordre relatif des
choses.
Ce qui est très important dans ceci, et ça explique en
partie l'évolution future des prix, voyez-vous, notre réseau est
là, sous-util isé. Quand on augmente son utilisation, il n'en
vient pas, des coûts additionnels. Les coûts sont
déjà là. Quand vient l'utilisation additionnelle, les
coûts sont partagés par un plus grand nombre de clients. Nous,
notre taux de rendement, nos bénéfices sont
réglementés, sont limités. Il n'y aura pas un rendement
plus grand pour les actionnaires de Gaz Métropolitain si les volumes de
gaz passent de 200 000 000 000 à 225 000 000 000 de pieds cubes.
Ça va rester les mêmes taux de rendement sur la base de
tarification existante. Or, à partir du moment où il n'y a pas de
coûts additionnels, les tarifs de l'ensemble de la communauté, de
l'ensemble de la clientèle utilisant le gaz naturel vont diminuer. C'est
inévitable, carrément inévitable. On voudrait faire
autrement, puis on ne pourrait pas.
M. Bordeleau: Enfin, ça va. Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette, brièvement.
M. Chevrette: ...M. Caillé, l'avant-dernier paragraphe, si
je comprends bien ce paragraphe-là qui dit: Le coût marginal de
cette forme d'énergie est inférieur au coût moyen...
M. Caillé: C'est ça.
M. Chevrette: ...ce qui serait exactement le contraire de
l'hydroélectricité, si j'ai compris.
M. Caillé: C'est exact. Exactement le contraire, pour la
raison qui vient d'être évoquée, le réseau est
sous-utilisé.
M. Chevrette: votre coût de marge
bénéficiaire, c'est de 12 %, vous autres?
M. Caillé: Le rendement...
M. Chevrette: Le rendement?
M. Caillé: ...sur l'avoir des actionnaires, dans
l'équité, c'est 12,5 %.
M. Chevrette: 12,5 %.
M. Caillé: C'est un taux qui est approuvé par la
Régie du gaz naturel, à chaque année, sur la base de
représentations faites sur l'état en général du
coût du capital dans l'économie canadienne,
québécoise, etc., et du risque que supportent les actionnaires de
Gaz Métropolitain. C'est une décision qui est prise par un
tribunal administratif indépendant de Gaz Métropolitain. (11
heures)
M. Chevrette: Je sais. On l'a questionné, l'an
passé, sur les fameuses factures. Je vous remercie, M. Caillé,
et, personnellement, ça ne fait que renforcer ma conviction.
Le Président (M. Audet): Merci.
M. Chevrette: Et nous ferons un débat beaucoup plus large
que celui de l'électricité seulement.
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, au nom de la
commission, MM. de Gaz Métropolitain, merci sincèrement de votre
présentation.
M. Caillé: Merci beaucoup, M. le...
Le Président (M. Audet): Alors, afin de permettre à
M. Réjean Lambert de s'avancer, nous allons suspendre nos travaux deux
minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 1)
(Reprise à 11 h 4)
Le Président (M. Audet): La commission reprend ses
travaux.
Nous recevons maintenant M. Réjean Lambert. M. Lambert, au nom
des membres de la commission, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue. Je
vous rappelle brièvement nos procédures. Vous disposez d'une
dizaine de minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite,
suivront des échanges d'une vingtaine de minutes. Vous avez la
parole.
M. Réjean Lambert
M. Lambert (Réjean): Bonjour, Mme la ministre Bacon;
bonjour messieurs, messieurs les députés. Moi, c'est un cas, je
dirais, un peu à part. Je ne viens rien vendre, je viens simplement
exposer l'idée que les instances gouvernementales et Hydro-Québec
n'en ont pas suffisamment fait sur le plan économie d'énergie. Si
on est là aujourd'hui, tous ici, c'est pour élaborer ensemble une
vision de ce que devraient être les plans et développements
d'Hydro-Québec pour 1993-1995. Mais moi, cependant, il est clair que la
société d'État n'a pas tout fait ce qu'elle aurait
dû faire à travers ses programmes pour réduire la
consommation à la base d'abord, avant de prévoir dépenser
des sommes folles pour de nouvelles installations hydroélectriques.
Ainsi, le gouvernement libéral actuel, comme l'ancien d'ailleurs,
n'a pas trouvé judicieux d'inclure dans ses données ou
obligations des normes sévères concernant les fenêtres des
maisons et de tout bâtiment neuf, qu'il soit privé, commercial,
industriel et même public.
L'efficacité de certaines écoles, par exemple, peut
être citée en référence et, dans tous les coins du
Québec où il n'y a pas un ou une gestionnaire responsable par
édifice, c'est l'indifférence totale pour les immeubles qui, au
fond, n'appartiennent à personne en particulier. À ce sujet, je
vous citerai la dernière page du mémoire, si c'est dans l'ordre
chronologique, le cas de l'école André-Morissette. J'ai eu une
réponse de la présidente des commissaires d'école, que
j'aimerais vous lire: J'accuse réception de votre lettre du 16
février dernier, et je vous remercie, cher monsieur, de votre prise de
conscience. Il est évident que la surconsommation doit faire l'objet
d'une étude approfondie dans nos commissions scolaires, comme ailleurs
dans les édifices publics. Des gens comme vous nous font prendre
conscience, et croyez en notre sens, car des responsables des commissions
scolaires sont présentement en tournée afin d'évaluer tout
ce qu'il nous serait possible d'améliorer à l'intérieur
des édifices de la commission Jean-Rivard. Et c'est signé: Mme
Monique D. Glazier, présidente des commissaires d'école pour la
commission Jean-Rivard.
Moi, je pense qu'une réforme du Code du bâtiment, où
les fenêtres énergétiques, enfin, seraient aussi normales
que l'isolation des murs sur les bâtiments neufs, aurait pour effet de
réduire notre consommation énergétique de plusieurs
pourcent, dès les premières années de l'application.
En investissant, ne serait-ce que dans le remboursement des taxes de
toutes formes appliquées aux améliorations
énergétiques dans ça, il pourrait y avoir les
fenêtres énergétiques, les prises programmables
extérieures, les sentinelles à détecteurs de mouvement ou
la fameuse lumière au sodium le gouvernement, en plus de vraiment
miser sur des moyens importants d'économiser, créerait des
emplois dans le secteur résidentiel et, avec un peu de bonne
volonté, dans les édifices publics aussi, car il y en aurait
grandement besoin de ce côté-là.
Le facteur isolation pour les fenêtres dont l'efficacité
énergétique... Ça, les nouvelles fenêtres, en
passant, c'est bizarre. Il n'y a aucun gouvernement qui a passé, qu'il
soit à Ottawa ou à Québec, qui a pensé
d'élever et de mettre des normes de standard dans les fenêtres.
Pourtant, dans l'isolation, c'est fait. Ça s'est fait, il y a eu des
rajouts, des améliorations faites à 2 reprises au cours des 20
dernières années. Il se fabrique, il se vend au Québec,
depuis au moins 15 ans, des fenêtres énergétiques, mais
à cause d'un coût qui peut varier entre 15 et 20 % de plus, non,
ça, ce n'est pas des normes. Pourtant, la fenêtre peut influencer
jusqu'à 20 % la consommation totale d'électricité
annuelle. Ça, c'est important.
Ça, je pense que c'est un des points que, ni le programme Les
Éconos d'Hydro-Québec, raté avec le Waterpik...
ÉCOKILO non plus, on ne traite pas des fenêtres
énergétiques, comme telles.
Le programme ÉCOKILO, dans sa version actuelle, moi, j'ai un
petit reproche à faire. C'est qu'il ne dit pas à ceux qui y ont
accès à quel degré on doit régler son chauffe-eau,
préférant laisser croire plutôt que seul le calcul savant
d'une multitude de facteurs, doublé à un
prélèvement d'eau chaude sur une languette de papier,
peut vraiment déterminer, par fonctionnarisme, si le chauffe-eau
est oui ou non réglé correctement. (11 h 10)
Pire, les chiffres comparatifs que nous connaissons pourtant auraient
pu, comme bien d'autres conseils gratuits, au départ, être
glissés dans la facturation d'électricité de chaque
client.
Autre cas où on nous désinforme: le climatiseur de
fenêtre. Bien, ça, moi, je dis que c'est le bouquet. Je comprends
très bien qu'Hydro-Québec, quand elle évite de parler de
la fenêtre elle-même comme cause principale de la chaleur en
été, ça ne serait pas du tout rentable, pour elle, d'aller
dire qu'une fenêtre à haut rendement énergétique, en
plus de réduire considérablement la climatisation, réduit
de beaucoup le chauffage et, je le rappelle, va jusqu'à supprimer la
climatisation dans certains cas. Donc, pas de climatiseur de fenêtre.
Conversion de l'éclairage. Le programme supposé
d'Hydro-Québec, qui irait jusqu'en décembre 1995. Là, il
serait temps qu'Hydro-Québec aussi donne preuve de bonne foi parce que,
si on contourne la 116 en allant vers la Transcanadienne, en longeant
Plessisville, toutes les lumières sont encore au mercure. Il n'y en a
pas eu une de remplacée. On est déjà en 1993. Il serait
grand temps qu'ils donnent l'exemple. Puis, parmi les lumières qui ont
été changées au sodium par des équipes
d'Hydro-Québec, on a une belle petite comparaison. C'est que celles qui
ont été faites par Hydro-Québec éclairent plus
longtemps que celles qui viennent d'être faites par une compagnie
privée à Laurierville. Laurier-ville, c'est tout près de
Plessisville, à 12 km, complètement convertie au sodium dans la
dernière semaine de janvier. Ils ont complètement
réglé le problème de l'éclairage trop long, qui est
très simple, mais il faut le savoir. C'est que la cellule
photo-électrique, on la bloque partiellement pour faire éclairer
la lumière le nombre d'heures qu'on veut dans une journée. On
peut même la bloquer complètement, et elle va éclairer 24
heures par jour, comme il y en a actuellement dans toutes les villes du
Québec.
Savez-vous combien il y a de minutes entre Laurierville et...
l'éclairage, le dernier éclairage au sodium fait dans
Plessisville? Des minutes dans une journée? J'ai fait des tests
comparatifs, basés sur une douzaine de jours: 45 minutes par
lumière. Ça veut dire que ceux qui ne sont pas encore convertis,
qui n'ont pas acheté leur réseau, dépêchez-vous!
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez conclure, M.
Lambert, et pour permettre la période des questions. Vos dix minutes
sont à peu près terminées actuellement.
M. Lambert: Ah, O.K. Très rapidement, je saute à la
conclusion.
En conclusion, étant convaincu, moi, qu'aujourd'hui, je vais
à la limite de ce qu'on peut demander du bénévolat,
j'espère que ceux qui sont ici aujourd'hui prendront les travaux de
cette commission au sérieux et plaideront auprès de leurs
instances de parti afin qu'un jour, et en termes de programmes de partis
politiques, les gens que l'économie globale d'énergie
intéresse finiront par savoir avec qui loger.
Je suis aussi de ceux qui croient qu'un débat plus large sur
l'énergie s'impose, autant en moyens d'économiser à la
source qu'en diversification d'énergie.
Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez terminé, M.
Lambert?
M. Lambert: Oui, c'est terminé.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie
beaucoup.
Alors, Mme la ministre.
Mme Bacon: J'aimerais vous remercier, M. Lambert, de
l'intérêt que vous portez à l'amélioration de
l'efficacité énergétique au Québec, et vous semblez
avoir consacré, vous-même, beaucoup d'énergie à
identifier les diverses causes de consommation élevée
d'électricité. Vous avez évidemment beaucoup
réfléchi aussi à certaines solutions qui visent à
corriger la situation.
Vous prenez, vous-même, la peine de préparer un
mémoire pour la commission parlementaire et de nous faire une
série de recommandations pour améliorer l'efficacité
énergétique. Alors, je pense qu'au nom de mes collègues je
dois vous remercier de l'intérêt que vous portez à cette
question.
Si on revient à votre mémoire, vous déplorez la
faible implication des citoyens dans la réalisation des objectifs qui
visent une meilleure utilisation de l'électricité.
M. Lambert: Moi, oui. Bien oui, dans ce sens-là, j'ai
remarqué un peu partout... qu'on soit maire ou qu'on soit... ça
intéresse...
Mme Bacon: Quelles sont les causes, M. Lambert, d'après
vous, de cette situation-là?
M. Lambert: Le désintéressement
général. Ce n'est pas important, l'économie
d'énergie, moi, je pense, pour beaucoup de personnes au
Québec.
Mme Bacon: Avez-vous des suggestions spécifiques? Des
campagnes, est-ce que c'est des campagnes d'information, des campagnes de
publicité?
M. Lambert: Bien non. Il y en a, disons, qui ne font pas leur
travail, c'est clair. Quand on pense qu'on ne laissera pas... Il se passe dans
des écoles, comme celle qui est citée à la fin de votre
mémoire, des choses qu'on ne laisserait pas faire à n'importe
quel de nos enfants de quatre ou cinq ans dans une maison privée. Quand
on parle de portes doubles, qui ferment ensemble, et qu'entre les deux on peut
passer un stylo bille
presque à la longueur des coupe-froid qui se rejoignent,
ça veut dire que ça fait au moins entre trois et cinq ans que
ça aurait dû être remplacé ça, puis ça
n'avait pas été fait.
Mme Bacon: C'est un manque d'intérêt?
M. Lambert: II n'y a pas de gestionnaires, dans les
édifices publics, chargés de donner des normes à suivre.
Du moins, pas dans les écoles dans mon coin. Je ne sais pas s'il y en a
dans les écoles d'ailleurs.
Mme Bacon: Vous semblez aussi porter un jugement assez
sévère, à la fois sur les intentions
d'Hydro-Québec, puis sur la nature de ses interventions en
efficacité énergétique. Vous parlez de censure, de
favoritisme, de désinformation. Est-ce que vous pourriez nous dire sur
quelles informations ou sur quelles observations vous appuyez les affirmations
que vous faites dans votre...
M. Lambert: Moi, je m'appuie sur ce que j'ai lu dans la revue que
j'ai reçue, la petite revue publiée par Hydro-Québec,
Écolo 1992-1993, où ils reviennent constamment sur le
sujet d'un climatiseur de fenêtre. Mais là, ils disent qu'il faut
faire bien attention, qu'il faut le choisir surtout en fonction de ce dont on a
besoin, mais jamais on ne parle de la fenêtre qui est la cause de la
chaleur excessive à l'intérieur des pièces. Jamais!
Mme Bacon: Vous proposez aussi des moyens qui sont quand
même assez contraignants pour réduire la consommation
d'électricité. Est-ce que vous pensez que la population du
Québec est prête à endosser les moyens que vous nous
proposez dans votre document?
M. Lambert: Plusieurs moyens, oui. Il s'agit de les faire
connaître. Il y a, parmi les personnes qui entendent, pourvu qu'elles
entendent... Ça, c'est la première des choses. Il faut que
ça leur soit dit clairement. Il y a des personnes qui font, de leurs
propres gestes, des choses qui font épargner
l'électricité, et qui ne coûtent rien au départ.
Dans un deuxième cas, ceux qui peuvent investir, qui en font plus, et
qui économisent. Là, je parle du réglage du chauffe-eau.
Ça, on n'a pas besoin d'investir, mais si on ne le sait pas qu'un
chauffe-eau, ça s'ajuste en fonction des personnes qu'il dessert... Le
locataire qui entre pour un an... Deux personnes vont entrer dans un petit
trois et demi pour un an, elles ne demanderont pas au propriétaire: Mon
chauffe-eau, comment il est ajusté, mon chauffe-eau? Mais un chauffe-eau
de compagnie, ça sort à 140° F. Ça, c'est pour combler
les besoins d'une famille de quatre personnes, y compris un lave-vaisselle.
Mme Bacon: Vous pensez qu'il y a un manque d'information
auprès de la population. Ce n'est pas un manque de bonne
volonté.
M. Lambert: Ah! c'est doublé des deux. Du
côté de la société d'État, c'est
doublé des deux.
Mme Bacon: Mais du côté de la population du
Québec...
M. Lambert: Du côté de la population...
Mme Bacon: ...de ne pas poser des petits gestes, disons,
quotidiens?
M. Lambert: II y en a plusieurs qui embarquent. Il y en a
plusieurs qui embarquent là, comme ceux à qui j'avais
parlé, moi, pour faire des tests pour les chauffe-eau. Il y en a
plusieurs qui ont essayé ça. Ça, c'est sûr, mais
ça devrait aller plus loin que ça. Ça devrait passer par
un parti politique qui accepterait de prendre la chose en main. Là,
actuellement, il n'y en a pas. Ça n'existe pas au Québec,
ça, un parti politique qui prend ça au sérieux, pour
qui...
Mme Bacon: Mais c'est des mesures coercitives que vous
proposez.
M. Lambert: Secteur par secteur, point par point. Responsabiliser
et les villes et les commissions scolaires, tout ça.
Mme Bacon: Est-ce que vous croyez que les contribuables sont
prêts à payer les coûts supplémentaires
qu'entraînerait l'implantation de normes plus sévères sur
les portes, sur les fenêtres, par exemple, comme vous nous proposez?
M. Lambert: Bien, disons que, pour ce qui est des portes, c'est
déjà pas mal. Ce qu'il y a comme normes pour les portes, c'est
bon. Je pense que, quand on regarde l'énergie, la question qu'il
faudrait se poser, c'est: Pourquoi les citoyens n'ont pas riposté quand
on a obligé les maisons neuves à avoir de l'isolation dans les
murs? Il y a à peu près entre 15 % et 20 % de différence
entre une fenêtre standard et une très bonne fenêtre.
Ça devrait être aussi normal d'avoir une bonne fenêtre
énergétique que d'avoir un mur isolé, mais personne ne se
plaint qu'on soit obligé, par normes, d'isoler ses murs de maison.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci, Mme la ministre.
Je vais maintenant reconnaître M. le député de
Laviolette. (11 h 20)
M. Jolivet: Merci. Merci, M. Lambert, d'être présent
pour nous donner vos constatations, mais dans votre texte, vous dites
qu'Hydro-Québec évite de publi-ciser les moyens qui pourraient
être efficaces et reconnus en termes d'économie d'énergie.
Là, vous mention-
nez, vous avez fait mention pour les chauffe-eau, solaire, vous parlez
de panneaux photo voltaïques, des éolien-nes, etc. J'ai cru
comprendre d'autres qui sont venus à cette commission, et d'autres qui
vont venir, que ce n'est pas nécessairement juste Hydro-Québec
qui devrait faire ça.
Est-ce que vous croyez que c'est le rôle d'Hydro-Québec de
faire ça, ou si c'est à un autre niveau que ça doit
être fait? À qui incombe la tâche?
M. Lambert: Plusieurs niveaux. Je pense que le plan
énergétique, c'est beaucoup plus un plan de société
que le plan individuel d'une compagnie ou de... C'est tout le monde,
ça.
M. Jolivet: Oui, mais là, c'est parce que vous accusez
Hydro-Québec de ne pas publiciser. Alors, je vous pose la question: Si
vous accusez Hydro-Québec, c'est que vous considérez
qu'Hydro-Québec devrait le faire, et qu'elle ne le fait pas. Mais si
elle n'a pas...
M. Lambert: Bien, il y a beaucoup d'autres choses plus
importantes dans le rapport que le petit bout de texte que vous citez, qui
n'est pas élaboré dans le mémoire comme tel, qui est juste
cité à la fin. C'est sûr que ce n'est pas juste à
Hydro-Québec à faire ça.
M. Jolivet: Bien, c'est pour ça que je vous pose la
question. Le but de notre exercice, c'est d'essayer de trouver ce que vous
vouliez dire par ce que vous avez inscrit dans votre texte. C'est pour
ça que je vous dis: Si vous me dites... À ce moment-là,
est-ce que ça demanderait, pas juste sur la question d'énergie,
en termes d'économies, mais de l'ensemble de l'énergie au
Québec... On en faisait mention tout à l'heure avec Gaz
Métro. Est-ce que vous croyez que ce serait plus qu'une commission comme
celle-ci qui devrait examiner ça? Est-ce que vous voyez ça
autrement?
M. Lambert: Bien, moi, je pense qu'une commission semblable
à celle-ci, mais qui aurait un mandat plus élargi, pourrait
inclure, dans le domaine énergétique, des choses comme ça,
tout ce qui peut rendre une région, peu importe la région, un
pays plus autonome, plus diversifié.
M. Jolivet: Quand vous parlez de panneaux pho-tovoltaïques,
d'éoliennes, est-ce que vous, personnellement disons, je prenais
les panneaux, là vous avez utilisé ça? Est-ce que
vous avez fait les expériences? Est-ce que vous connaissez des gens qui
les ont utilisés? Est-ce que, au Québec...
M. Lambert: On n'a pas besoin d'étudier quand on a des
encyclopédies, on s'y réfère. Il y a des articles qui ont
paru dans Popular Mechanics. Il y a Science et vie. Il y a un paquet
d'articles avec preuves à l'appui, chiffres à l'appui, graphiques
à l'appui. Non, je n'ai pas étudié là-dedans. J'ai
comparé, j'ai lu, j'ai vu. J'ai vu des reportages à la
télévision aussi.
M. Jolivet: Vous affirmez, dans votre texte, que le Québec
est très énergivore, et même plus énergivore
à l'intérieur de l'ensemble du monde. Il y a d'autres
intervenants qui disent et qui soutiennent l'inverse. Est-ce que vous
êtes capable d'étayer davantage votre position?
M. Lambert: Énergivore, ce n'est pas énergivore au
sens de l'hydroélectricité. Par citoyen, oui, ça a
été dit, ça. Ça, ça a été dit,
mais je ne peux pas vous citer le texte comme tel, dans quoi c'était,
mais on est en tête de liste comme consommateurs, mais pas uniquement
à cause de notre climat. Il y a aussi le fait qu'on a beaucoup
d'électricité, ça, c'est vrai, mais on n'est pas
diversifié non plus. Il y a des choses qui sont normales en Finlande
la Finlande, ce n'est pas la Floride, ça et on n'en entend
jamais parler au Québec.
M. Jolivet: C'est parce que vous soutenez qu'elle est la plus
énergivore du globe. C'est pour ça que je vous pose la question.
Si elle est la plus énergivore, ce n'est pas nécessairement juste
en termes d'électricité. Ça peut être en termes
d'autres utilisations d'énergie.
M. Lambert: Non, en termes d'électricité.
M. Jolivet: En termes d'électricité. Vous avez fait
mention des fenêtres, des portes à haut rendement
énergétique. Vous avez dit qu'elles existent. Vous dites que les
gens n'ont pas critiqué le fait d'avoir à isoler leurs murs,
donc, ils ne devraient pas, en contrepartie, critiquer le fait d'utiliser des
fenêtres ou des portes qui protègent à l'intérieur
l'énergie, ce qui permettra, à ce moment-là, d'en
économiser l'utilisation.
À part le fait du coût, quels sont les moyens que vous
verriez pour inviter les gens à les utiliser? Parce que s'ils ne les
utilisent pas...
M. Lambert: Inviter? Ils ne peuvent pas être
invités. Premièrement, ces compagnies-là le savent. Elles
font plusieurs types de fenêtres. Donc, il y a un paquet de compagnies,
au Québec, qui font des fenêtres énergétiques, mais
elles savent très bien que, pour une simple raison de 15 % ou 20 % de
plus en coût, les gens ne les achètent pas. Ceux qui connaissent
la fenêtre, et qui veulent économiser plus, ceux-là en
achètent, mais leur pourcentage de ventes par rapport aux autres
fenêtres est faible. Tant que ce ne sera pas une norme obligatoire
à suivre...
M. Jolivet: C'est parce que j'essaie de voir la façon dont
on pourrait... Mme la ministre disait, tout à l'heure, par les pressions
qu'on peut exercer...
M. Lambert: C'est simple, ce serait une réforme du Code du
bâtiment. C'est ça, le noeud de ce rapport-là.
M. Jolivet: C'est-à-dire qu'il faudrait le...
M. Lambert: Qui responsabilise tout le monde, qui amène
des normes, enfin, sur les fenêtres, et qui dit aux villes ce qui est
cité, dont vous n'avez pas parlé, non plus, là-dedans, des
faits concrets, que, dans toutes les villes, il y a du gaspillage en plein
jour, on éclaire en plein jour. Là, je parle des
commerçants d'essence, des lumières du stationnement aux pompes
là, partout. Ça, il y en a dans toutes les villes, en plein jour.
Et qui responsabiliserait aussi bien les commissions scolaires que tous les
secteurs qui ont des édifices publics. Quand il y a une
rénovation majeure, on est obligé de mettre des fenêtres,
des fenêtres intelligentes. Toute bâtisse neuve serait
obligée d'avoir des fenêtres intelligentes.
M. Jolivet: Donc, ce que vous dites... C'est parce que je vous
donne l'exemple: on a des automobiles qui fonctionnent avec une
possibilité de 140 km/h, et la limite permise est de 100 km/h. Il y a
des entreprises qui bloquent la pédale du camion à tel niveau
pour qu'il ne dépasse pas ce niveau-là. Est-ce que vous croyez
que c'est de même qu'on devrait agir au niveau des fenêtres,
autrement dit, empêcher les gens, par coercition, d'acheter? Donc, bannir
les entreprises qui les fabriquent. D'une certaine façon, ce serait
peut-être plus logique.
M. Lambert: Ça, premièrement, ce n'est pas vrai
parce que, parmi... Les compagnies qui fabriquent, d'abord, des fenêtres
énergétiques fabriquent les deux...
M. Jolivet: O.K.
M. Lambert: ...ont des usines, des travailleurs, des
installations depuis des années, et font déjà les deux.
Mais l'autre, c'est classé encore comme un produit haut de gamme. Il ne
se vend pas, bien, il se vend moins. Il y en a plusieurs modèles, le
monde a le choix.
M. Jolivet: À la page 7, vous faites un lien entre... Je
lisais le texte, on dit: «Alors que bien des pays d'Europe sont en avance
sur le Québec, concernant les fenêtres et les thermopompes, il
importe de supporter la cogénération.» Vous faites un
lien.
Est-ce que vous faites un lien entre les deux, ou si vous dites: En plus
de ceux-là, il devrait y avoir aussi une utilisation de la
cogénération?
M. Lambert: Moi, je pense que, s'il y a un procédé
par lequel, qui fait que... C'est non seulement nécessaire parce que
ça fait épargner de l'énergie, premièrement, mais,
deuxièmement, c'est parce que nos papetières de par ici
compétitionnent déjà avec d'autres régions, dont
les États-Unis qui pratiquent déjà la
cogénération depuis des dizaines d'années, depuis
au-delà de 10 ans.
M. Jolivet: Hydro-Québec prétend, au niveau de la
cogénération elle en a fait mention dans les ren- contres
qu'on a eues avec elle que, étant donné que la compagnie
de pâtes et papiers n'est pas celle qui produit la vapeur, mais
l'achète, que ce n'est pas elle qui amène le gaz, donc elle
l'achète, la compagnie qui lui fabrique la cogénération,
qu'il sera faux de prétendre il est même déjà
faux, semblerait-il de prétendre que la
cogénération a un effet monétaire appréciable par
rapport aux autres formes d'énergie, d'autant plus qu'ils disent...
M. Lambert: Bien, ça, moi, je ne les crois pas, parce que
ceux qui veulent la faire aujourd'hui, ils disent qu'ils la font. Aux
États-Unis, ça leur crée un désavantage, parce que
leur coût de production est plus bas avec la cogénération,
là-bas. Alors, qui ne dit pas la vérité? C'est ce qu'il
faudrait savoir.
M. Jolivet: Ça va.
Le Président (M. Audet): Merci. D'autres
interventions?
M. le député de Salaberry-Soulanges.
M. Marcil: Oui. M. Lambert, vous faites quoi dans la vie,
vous?
M. Lambert: Pas grand-chose. Je suis une victime de la
récession. Après l'assurance-chômage, je crois...
M. Marcil: Oui, mais, avant ça, qu'est-ce que vous
faisiez, avant d'être sur le chômage?
M. Lambert: Ah! Moi, j'ai travaillé dans un paquet de...
J'ai travaillé 15 ans chez Roland Boulanger, portes et moulures, un peu
chez Vie Métal je ne sais pas si ça vous dit quelque chose
à Victoriaville, Aciers Vicwest, revêtement
extérieur...
M. Marcil: Qu'est-ce qui vous a amené à vous
sensibiliser, du moins, à être si comment je pourrais dire?
sensible à l'économie d'énergie comme
ça?
M. Lambert: Ah! Toutes sortes de choses. Non, moi... j'ai eu des
édifices à logements. J'ai eu des logements moi-même, j'en
ai eu 12, à un moment donné. J'ai trouvé que
c'était important, et j'avais quelqu'un que je connaissais très
bien dans ma famille qui, lui aussi, tout ce qui était... On parle aussi
bien entre nous autres de voitures électriques et de ce que va
être, dans 20 ans, tout ça. Ça fait que, moi, à un
moment donné, j'ai ramassé ça, je gardais ça.
Là, j'ai dit: Ça n'a pas d'allure, il y aurait des
améliorations à faire, dont certaines qui ne coûteraient
vraiment pas cher, et qui rapporteraient beaucoup et aux individus et à
l'État.
M. Marcil: Donc, vous, vous êtes ici comme
représentant... Vous vous représentez, vous ne représentez
pas de groupe ou d'association.
M. Lambert: Je n'ai rien à gagner à être ici,
monsieur. Si c'est ça que vous voulez dire, je n'ai rien à gagner
à être ici. (11 h 30)
M. Marcil: Non. Puis, ce que vous avez avancé, à un
moment donné, comme argumentation... Vous avez dit tantôt que vous
avez fait des observations sur une période de 12 jours. Donc, vous avez
fait certains tests pour pouvoir avancer les énoncés qu'on
retrouve dans votre... ou les affirmations qu'on retrouve dans votre
mémoire.
M. Lambert: Ah oui, ah oui. Les énoncés qui sont
chiffrés... là, j'en ai un nouveau, que je n'ai pas pu mettre
avec mon rapport. C'est le test de comparaison avec l'éclairage au
sodium, Plessisville versus Laurier-ville, le manque qu'il y avait, la
différence qu'il y avait par lumière, par jour. On parle de 45
minutes à peu près, entre 43, 47, par lumière...
M. Marcil: Mais quand vous parlez des commissions scolaires, vous
avez l'air de... Vous parlez surtout de Plessisville, des municipalités,
des commissions scolaires, des bâtiments publics. Moi, j'ai l'impression
que vous... Dans le fond, vous blâmez Hydro-Québec de ne pas
intervenir dans ces dossiers-là, mais, entre vous et moi, là,
pensez-vous que les commissions scolaires ou les municipalités n'ont pas
pleine autorité en ce qui concerne les programmes de...
M. Lambert: Bon, bien, je vais être franc avec vous, ils
s'en fouent royalement!
M. Marcil: Non, mais, admettons... Moi, je viens d'une commission
scolaire... Je viens d'une commission scolaire, la commission scolaire
régionale de Vaudreuil-Soulanges, qui, aujourd'hui, s'appelle la
commission scolaire des Trois-Lacs. J'ai été directeur des
services...
M. Lambert: Est-ce qu'il y a un gestionnaire, un responsable
dans...
M. Marcil: non, non! juste une seconde! j'ai été
directeur des services des finances et des équipements, et je vous
conseillerais d'aller visiter cette commission scolaire. vous allez voir qu'en
termes de programmes d'économie d'énergie, ce qu'on a mis sur
pied... on n'a pas attendu que le gouvernement ou hydro-québec nous
envoie des normes. les gens le savent. ils les connaissent. c'est que, lorsque
vous avez à gérer la décroissance, les gens trouvent des
moyens d'essayer de trouver des économies, et c'est souvent dans des
programmes d'économie d'énergie, lorsqu'on a des factures de 400
000 $, 500 000 $ par année. c'est à ce niveau-là. on est
arrivé avec des programmes. on a diminué de 25 % la facture en
énergie, annuellement, en implantant un système d'économie
d'énergie. donc, on n'a pas attendu après hydro-québec
pour nous dire quoi faire.
Mais je veux dire, on est arrivé avec des projets.
M. Lambert: Pourquoi je dis ça? Ce n'est pas
Hydro-Québec, c'est même pas Hydro-Québec. Ça
devrait être plutôt le gouvernement, parce que, moi, je me dis que
c'est pas tous des cas comme vous, là. Moi, je vais peut-être dans
l'école qui est peut-être la pire de ma commission scolaire.
M. Marcil: Non, mais... Sûrement, M. Lambert, je ne suis
pas le seul à avoir fait ça. Je suis convaincu que, dans
l'ensemble des commissions scolaires...
M. Lambert: Mais ce n'est pas tous des bons gestionnaires comme
ça qu'il y a à travers la province, ça, là.
M. Marcil: Bien...
Le Président (M. Audet): Merci.
M. Lambert: C'est de ça que je ne suis pas sûr, moi,
là.
M. Marcil: Bien... Ouais.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond.
M. Marcil: Je vous remercie beaucoup, M. Lambert.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
M. Lambert, merci de votre présentation, parce que vous apportez
à cette commission l'éclairage et le résultat, je dirais,
des grandes politiques, que ce soit gouvernementales ou au niveau de l'Hydro.
Un des grands principes de votre mémoire, vous dites: Vous, les
législateurs, regardez donc les normes du bâtiment. Il y a
peut-être quelque chose où vous pourrez donner un coup de pouce.
Ça, c'est un aspect, là, qui pourrait... que je
considérerais comme un moyen incitatif, coercitif. Mais il y a une autre
chose dont vous ne parlez pas dans votre mémoire, et vous l'avez
décrite dans votre présentation. Vous parlez d'un manque
d'intérêt de M. et Mme Tout-le-Monde, en général,
à aller chercher ces économies d'énergie.
Est-ce que vous pensez que si on accroissait et qu'on reflétait
réellement les coûts de distribution, au niveau du
résidentiel, par une tarification appropriée, qu'à ce
moment-là ce serait un incitatif pour que les gens s'adressent
votre chauffe-eau, là, que vous donnez suivant le nombre de
personnes, si la facture représentait les coûts... On nous dit que
ça nous coûte 0,092 $ à produire, et qu'on ne nous charge
pas ça.
M. Lambert: Je vais vous dire... Vous voulez dire monter le prix
du kilowattheure à 0,065 $, 0,07 $ pour voir si...
M. St-Roch: Pour refléter les vrais coûts, oui.
Est-ce que ça serait un incitatif pour économiser
l'énergie, d'après vous, et est-ce qu'Hydro devrait le
considérer, ou le législateur, l'autoriser?
M. Lambert: Non, sûrement pas, sûrement pas, parce
que ça aurait sans doute un effet. Mais on a découvert quelque
chose, par exemple, que, parmi ceux qui étaient les plus
intéressés à épargner de
l'électricité, ce n'est pas ceux qui gagnaient des bons salaires;
c'est ceux qui avaient de la misère déjà avec leurs
comptes. C'est ceux-là qui ne seraient pas pénalisés. Ce
serait le couperet. Preuve à l'appui, promenez-vous dans les quartiers
résidentiels neufs, et allez un peu plus bas dans les quartiers
où il y a des maisons qui valent 70 000 $ ou 90 000 $ ou moins. Comptez,
dans les quartiers riches, combien il y a de maisons où les pierres
à l'extérieur vont être éclairées avec les
entrées, et allez compter ailleurs, dans les maisons de ceux qui ont des
revenus plus faibles, combien vous allez en voir qui vont être
éclairées dehors. Vous allez voir où est l'abus.
M. St-Roch: Si je vous comprends bien, la tarification,
l'augmentation des prix ne serait pas une mesure qui va inciter les gens
à économiser l'énergie?
M. Lambert: Oui et non. Oui, ça aurait un impact, c'est
sûr. Ça aurait un impact, mais ça aurait un impact au
détriment de ceux qui avaient déjà du mal à payer
leur facture avant.
M. St-Roch: Mais qu'est-ce qu'on peut faire pour sensibiliser
davantage les gens?
M. Lambert: II y en a eu de fait. Il faut qu'il s'en fasse
encore.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup. Alors, M.
Lambert, au nom des membres de la commission, je vous remercie de votre
présentation.
Afin de permettre à l'Association...
(Suspension de la séance à 11 h 35)
(Reprise à 11 h 37)
Le Président (M. Audet): Je veux maintenant, au nom des
membres de la commission parlementaire, souhaiter la plus cordiale bienvenue
à l'Association nucléaire canadienne. Je crois que vous
êtes les premiers où on peut dire: mesdames, monsieur. Je vous
rappelle brièvement le déroulement de nos travaux. Vous disposez
d'une vingtaine de minutes pour votre exposé, ensuite suivra une
période d'échanges. Avant de débuter votre exposé,
je vous invite à vous présenter, s'il vous plaît, à
vous identifier. Merci.
Association nucléaire canadienne (ANC)
M. Reid (John): Oui, M. le Président. Je m'appelle John
Reid, je suis le président de l'Association nucléaire canadienne.
Avec moi, Mme Françoise Gue-nette. Elle est vice-présidente
d'Énergie atomique Canada ltée, et elle est aussi la
présidente du programme de notre Association, le comité sur
l'information publique. Elle est aussi membre de notre comité
d'administration et membre de notre comité exécutif. Il y a aussi
Mme Roxanne Summers, vice-présidente de l'Association. Elle est
chargée de la responsabilité de notre programme d'information.
C'est Mme Guenette qui vous donnera la présentation sur la planification
d'Hydro-Québec.
Mme Guenette.
Le Président (M. Audet): D'accord, allez-y.
Mme Guenette (Françoise): M. le Président, membres
du comité, nous sommes enfin très heureux d'être ici
aujourd'hui, et très heureux de pouvoir participer à ces
audiences, parce que l'ANC, c'est une association qui regroupe des
manufacturiers, des compagnies d'électricité, des
sociétés d'ingénierie, des compagnies de construction, des
institutions financières, des organismes à but non lucratif, tels
des établissements d'enseignement, des laboratoires de recherche, des
syndicats. Enfin, je voudrais peut-être noter que notre Association est
la première au Canada à avoir des représentants syndicaux
sur l'exécutif et le conseil d'administration. Enfin, ça
représente aussi environ 100 000 Canadiens, et ce ne sont pas des
Canadiens qui sont contre le plan d'Hydro-Québec. Je voudrais faire le
point là-dessus: on n'est pas ici pour être contre. On appuie
beaucoup plusieurs des actions d'Hydro-Québec dans son plan
énergétique, mais on déplore le fait que le
nucléaire ait été ignoré dans ce plan.
Alors, on sait aussi qu'il y a d'autres délégations
nucléaires qui vont venir vous voir plus tard cette semaine et la
semaine prochaine, et que leur point de vue sera plutôt un point de vue
technique. Alors, ce qu'on voudrait faire ici, aujourd'hui, c'est le bilan
humain du nucléaire, vous donner un genre de point de vue global du
nucléaire, de la communauté nucléaire canadienne et de la
communauté nucléaire québécoise, et aussi vous dire
un peu, vous laisser savoir ce qui se passe en ce qui a trait à ce que
les gens nous demandent, ce qui les inquiète et ce qu'ils aiment du
nucléaire. Et, quand je dis les gens, maintenant, je parle des
Québécois. (11 h 40)
Alors, je vais présenter des faits qui sont peut-être mal
connus sur le nucléaire. Ce sont ce qu'on appelle, nous, des
réalités nucléaires. Mais, avant de le faire, je voudrais
parler un peu du service d'information qui, enfin, est la base de ce que je
vais dire aujourd'hui.
L'Association a une ligne téléphonique qu'elle publie
régulièrement et à la télé et dans sa
publicité. Alors, ce numéro de téléphone est
largement diffusé et, suite à tous les appels qu'on
reçoit, on rédige des fiches
de renseignements qui répondent aux questions que le grand public
se pose le plus fréquemment sur le nucléaire. Alors,
aussitôt qu'on aura fini, Mme Summers vous remettra un exemplaire de
notre pochette d'information qui répond à ces questions. Alors,
vous pourrez juger vous-mêmes, si vous avez d'autres questions, de la
qualité des renseignements qu'elle contient. Mais ces questions
ressortent parce qu'elles sont particulièrement utiles en ce qui a trait
à la perception que les gens se font de l'énergie
nucléaire. Alors, il y a des aspects qui sont très positifs, et
ça c'est prouvé, les données sont là, parce que la
production d'électricité au moyen d'uranium naturel
n'entraîne aucune combustion, alors aucune émission de gaz
carbonique. M. Caillé, tantôt, parlait des impacts relatifs de
l'effet de l'énergie, etc., etc., et pendant qu'il parlait, j'ai
retrouvé dans mon dossier, ici, une charte qui a été faite
l'an passé ou il y a deux ans, mais basée sur les données
de l'année d'avant, par Environnement Canada, sur les émissions
de gaz carbonique dans l'atmosphère. Je vais demander à Mme
Summers de vous la passer. Ce n'est pas la bataille d'une industrie contre
l'autre, mais ce sont des faits qui ont été publiés par
Environnement Canada. Ces effets de serre dont on parle, qui sont
supposément néfastes... Les centrales nucléaires n'ont pas
de cheminée; alors, elles ne dégagent pas d'oxyde de carbone ni
d'oxyde de soufre ou d'azote. Elles ne dégagent pas de gaz carbonique,
ni de métaux lourds. Elles ne dégagent rien dans
l'atmosphère de ce genre. Elles ne produisent pas de smog. Alors, dans
le fond, dans la production d'électricité, c'est l'énergie
nucléaire qui menace le moins l'environnement.
Elle aussi, comme industrie, emploie directement 30 000 personnes, dont
un tiers de ces personnes est composé de scientifiques et
d'ingénieurs. De ça découlent plus de 60 000 autres
emplois indirects, qui découlent de l'industrie. Donc, plusieurs de ces
emplois sont de haute qualité et de haute technicité. Par
exemple, on se sert de simulateurs très perfectionnés pour former
les opérateurs. Le contrôle des réacteurs nécessite
des automatismes assez complexes. Bien, comme exemple, le «Canada
arm», le manipulateur spatial, est déjà quelque chose qui
constitue une adaptation des appareils de manutention à distance qui
existent dans l'industrie nucléaire. Alors, si on se rappelle, en
parlant du «Canada arm», on peut dire que l'industrie
nucléaire et l'industrie spatiale sont les deux seules industries
canadiennes qui exportent plus qu'elles n'importent. Dernièrement, le
Canada a vendu, EACL a vendu trois réacteurs CANDU à la
Corée du Sud, et il y en a cinq qui sont en construction en Roumanie.
Maintenant, aujourd'hui, il y a actuellement, dans le monde, de par le monde,
plus de réacteurs CANDU en construction que tout autre type de
réacteurs nucléaires.
On est le plus grand producteur et le plus grand exportateur d'uranium
au monde. Alors, ces gisements de minerai d'uranium suffiraient à
alimenter tous les réacteurs en exploitation et en construction pendant
au moins 50 ans. On sait, aujourd'hui, que ce serait peut- être plus
coûteux, mais dans 50 ans, les choses vont peut-être changer. Le
combustible du nucléaire peut être recyclé, et il pourra
reproduire encore 60 fois l'énergie qu'il a déjà produite
la première fois dans le réacteur. Alors, c'est un combustible
qui est virtuellement inépuisable. Les scientifiques, les
ingénieurs canadiens n'ont pas seulement mis au point le réacteur
CANDU, ils ont mis au point aussi toute une gamme d'appareils de traitement
la cobalthérapie, par exemple et chaque année, au
Canada, ici même, plus d'un million de patients bénéficient
de la médecine nucléaire. Ce cobalt radioactif et les autres
isotopes qui sont produits servent en radiothérapie et sont produits
dans les réacteurs nucléaires.
C'étaient quelques côtés positifs de notre
industrie. Mais on sait aussi que, quand on parle du nucléaire, il y a
des inquiétudes. Ces inquiétudes sont sur la
sécurité, la sûreté, la sûreté de
l'équipement, la sécurité des gens. Souvent, c'est
dû à la catastrophe de Tchernobyl. Il y a d'autres questions qui
nous sont toujours posées. Les questions sur les déchets
radioactifs sont les questions qui nous sont posées le plus souvent. Ce
sont les deux inquiétudes.
Le peuple a accepté le fait que, environnementale-ment, le
nucléaire, c'est une bonne chose. Alors, j'aimerais ça clarifier
un peu les points qui semblent préoccuper les gens et qui semblent
causer le plus d'inquiétudes. Quand on parle d'un réacteur comme
à Tchernobyl, ce n'est pas le même genre de réacteur que le
réacteur CANDU, parce que, contrairement à Tchernobyl, le CANDU
est muni d'un système d'arrêt d'urgence, système qui est
très rapide et qui est entièrement indépendant de
l'intervention des opérateurs. Alors, s'il y a erreur humaine, le
système est indépendant. Dès qu'il y a erreur humaine,
dès qu'il y a une panne, le système arrête. Si, par
accident, des matières radioactives étaient
libérées par le réacteur et tout accident peut
arriver ces matières seraient retenues dans une enceinte de
confinement qui entoure le réacteur. Il n'y en avait pas, d'enceinte de
confinement, à Tchernobyl. Ça n'existait pas dans ce
modèle de réacteur.
Tous les opérateurs de nos centrales poursuivent leur formation
pendant huit ans, et en classe et en centrale, avant de pouvoir se
présenter à l'examen en vue de l'obtention d'un permis
d'opérateur. À toutes les cinq semaines, ces opérateurs se
rafraîchissent et rafraîchissent leurs connaissances en travaillant
sur un simulateur identique à la salle de commandes du réacteur,
et ils sont soumis constamment à des évaluations.
Les inspecteurs de la Commission de contrôle de l'énergie
atomique sont présents dans chaque centrale pour s'assurer que les
opérateurs se conforment aux conditions qui sont très
sévères, qui viennent avec les permis d'exploitation.
L'accréditation des opérateurs nucléaires relève
aussi de ces mêmes inspecteurs. Alors, les travailleurs dans les
centrales nucléaires, dans les hôpitaux, dans les cliniques
médicales, dans les mines d'uranium, qui sont exposés aux
radiations dans le cours normal de leur travail, sont tenus de recevoir une
for-
mation approprié et de réussir des examens sur la
protection contre les radiations.
Alors, tous les travailleurs dans ce milieu radioactif font l'objet d'un
suivi rigoureux dans le but d'éviter leur exposition aux radiations et
de s'assurer que les expositions ne dépassent pas les limites
réglementaires. Ils ont aussi plein accès à leur dossier
personnel. Ces limites d'exposition sont fixées à partir
d'études et de rapports émanant d'un comité scientifique
des Nations unies. Elles sont fixées de manière à ce que
le plus grand risque d'irradiation professionnelle ne dépasse pas le
risque moyen de dommages corporels reliés aux autres accidents de
travail. (11 h 50)
Enfin, au Canada, il n'y a jamais eu un travailleur qui a manqué
son travail à cause d'irradiation. En pratique, très peu de
travailleurs atteignent la limite établie. Alors, depuis plus de 30 ans
je l'avais oublié il n'y en a pas, de travailleurs de
centrales, qui ont dû s'absenter par suite d'une exposition accidentelle
à la radiation.
Pour ce qui a trait aux déchets radioactifs, si toute
l'énergie utilisée par une famille canadienne moyenne ou une
famille québécoise moyenne était entièrement
produite au moyen d'uranium naturel, le volume total de déchets
hautement radioactifs produits pendant une vie entière ne
dépasserait pas la grosseur d'une balle de golf. Alors, ce ne sont pas
des montagnes d'affaires vertes qui coulent ou qui découlent, une balle
de golf par famille. Tous les déchets radioactifs qui sont produits au
Canada entreraient dans un seul immeuble, environ de la grandeur de la nef
d'une église moyenne. Mais s'il était entièrement
recyclé, ce combustible usé pourrait produire encore 60 fois le
montant d'énergie produite lors de sa première utilisation dans
un réacteur. C'est pourquoi plusieurs personnes et plusieurs
scientifiques considèrent ce combustible usé comme une
précieuse source d'énergie future plutôt que comme un
déchet radioactif, qui est le nom qu'on lui donne maintenant. Mais si on
veut se débarrasser finalement, complètement et
définitivement du combustible usé, on peut l'enfermer dans des
contenants scellés et les enfouir dans le grand bouclier canadien, dans
les formations granitiques du bouclier canadien. Le niveau de radiation des
matières radioactives qui sont ainsi enfouies diminuerait graduellement.
Pour rejoindre le niveau des gisements d'uranium naturel, ça prendrait
à peu près 500 ans.
Ce mode d'élimination de déchets radioactifs est
actuellement soumis à une évaluation environnementale. Alors, on
attend son approbation et, ensuite, le choix d'un site, parce que, ça
aussi, ça va prendre quelque temps, et on pourra continuer entre-temps
à emmagasiner le combustible usé, soit dans des piscines, sur le
site des centrales, ces piscines qui sont spécialement conçues
à cet effet, ou dans des récipients en béton
spéciaux, qui sont aussi conçus à cet effet. Mais il faut
se rappeler que les matières radioactives et les radiations, ce n'est
pas seulement l'industrie nucléaire qui les cause, parce que tous les
aliments qu'on consomme, l'eau qu'on boit, l'air qu'on respire contiennent
naturellement des matières radioactives. Votre cour derrière
votre maison, dans une banlieue typique, s'il y en a qui vivent dans une
banlieue typique, contient... Les 3 premiers pieds de terre dans votre cour
contiennent 1 kg d'uranium, 3 kg de thorium et presque 1 kg de potassium
radioactif. Les gens qui ont peur du mot «nucléaire»,
ça ne leur dit absolument rien. Ils ne savent même pas, et
ça ne leur fait pas peur parce qu'ils vivent là-dedans tous les
jours.
En comparaison, les radiations supplémentaires qu'un individu
reçoit un individu qui habite, disons, à proximité
d'une centrale nucléaire ne sont qu'une infime fraction de ces
radiations naturelles qu'il y aurait dans sa cour.
Alors, en terminant, je voudrais bien vous parler un peu de la
rentabilité et de la fiabilité des réacteurs
nucléaires, parce que l'énergie nucléaire demeure encore
le moyen le moins coûteux de combler la demande énergétique
de base pour plusieurs provinces qui ne disposent pas d'assez de ressources
hydrauliques économiquement exploitables. Le cas des calculs
d'Hydro-Québec sera fait plus tard par quelqu'un d'autre, parce que les
calculs, on me dit, ne sont pas tout à fait corrects. les
réacteurs nucléaires d'hydro ontario, qui fournissent
actuellement près de 60 % de la charge de l'ontario, ont fait
économiser à cette province 5 500 000 000 $ par rapport au
coût d'exploitation de centrales thermiques alimentées au charbon.
le fait de produire l'énergie à l'aide d'uranium naturel, local,
plutôt qu'au moyen de charbon importé a permis à l'ontario
de réaliser des économies de 17 000 000 000 $ en frais
d'échange sur les devises étrangères.
La France, par exemple, produit plus de 75 % de son
électricité au moyen de réacteurs nucléaires et
exporte, en plus, et à profit, une grande quantité
d'énergie nucléaire en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Italie
et en Suisse. Les autres pays qui dépendent en grande partie de
l'énergie nucléaire pour la production de
l'électricité sont la Suède, la Suisse, la Belgique, le
Japon et la Finlande. Il y a actuellement 412 réacteurs
nucléaires en exploitation dans 26 pays du monde et, parmi les 274
réacteurs de grande taille, 7 des 12 plus fiables sont des
réacteurs CANDU canadiens.
Le Président (M. Audet): Si vous voulez conclure, s'il
vous plaît.
Mme Guenette: Nous espérons que le comité
recommande qu'Hydro-Québec tienne sérieusement compte du
nucléaire dans son «mix» énergétique, et
qu'elle considère d'autres centrales nucléaires au sein des plans
énergétiques et environnementaux qu'elle propose.
Merci.
Le Président (M. Audet): Merci, madame. Je vais maintenant
reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Alors, mesdames et messieurs, je voudrais vous
remercier de nous avoir fait part de votre suggestion et d'être ici avec
nous, ce matin, pour nous permettre d'analyser, avec plus grande attention, le
document que nous avions déjà en main et que vous
présentez à la commission parlementaire.
Votre mémoire souligne la grande importance de l'industrie
nucléaire au Canada, en termes d'emplois et en termes aussi de chiffres
d'affaires; on sait l'importance que le programme ontarien a eue sur
l'émergence de cette industrie. Comment les difficultés
rencontrées par Ontario Hydro, avec la réalisation de la
dernière tranche nucléaire et le ralentissement qui a
été annoncé de son programme d'équipements
électriques, comment ça peut affecter les perspectives à
court terme de l'industrie nucléaire canadienne?
Mme Guenette: Je n'aimerais pas nécessairement
répondre de la part d'Hydro Ontario. Peut-être que John a quelque
chose à rajouter là-dessus.
Mme Bacon: Bien, au nom de... comme association.
Mme Guenette: Comme association... Mme Bacon: Oui,
oui.
Mme Guenette: ...on pourrait vous dire que les derniers
réacteurs qui ont été bâtis, les candu 6, le candu
600, en corée, sont rentrés à temps; le budget
était correct, aucune «dépasse» de budget. alors, il
y a eu des délais et même je crois que, dernièrement, m.
strong, qui est arrivé à hydro, a dit qu'il y a 50 % au moins du
prix de darlington, qui n'est pas un candu 6 pour lui, ça, c'est un
design sur lequel ils ont pas mal travaillé, et ils ont beaucoup
changé le design de base, ce qui leur causait des problèmes.
même ça, c'est 50 % des coûts de darlington, de la centrale
de darlington; à date, ce sont des coûts qui ont payé des
intérêts, à cause des délais et des délais
qui ont été causés...
M. Reid: par les gouvernements, 50 %.
Mme Guenette: .. .par le gouvernement.
Mme Bacon: Est-ce que ça ne change pas quand même un
peu vos perspectives à court terme, ou si vous pouvez quand même,
à court terme, avoir des perspectives qui sont intéressantes pour
l'industrie nucléaire, malgré les problèmes de
l'Ontario?
Mme Guenette: Les perspectives sont encore intéressantes
pour l'industrie nucléaire. Le gouvernement de la Saskatchewan vient de
signer une entente avec Énergie atomique du Canada pour
développer le nouveau CANDU, qui est le CANDU 3. Ils ont investi 20 000
000 $ dans le développement du design du
CANDU 3 parce que, enfin, c'est le modèle avancé du CANDU.
C'est un modèle plus petit, plus pratique, plus modulaire, qui
coûtera moins cher, qui sera plus facile à construire. Il prendra
moins de temps, alors ça prend moins d'argent. Mais on ne peut pas dire
que l'histoire d'Hydro Ontario ne fait pas de tort à l'industrie
nucléaire au Canada, c'est impossible. Mais, ça aussi, c'est
à cause d'une volonté politique, si on peut dire; la
volonté politique n'est pas là.
Mme Bacon: Vous estimez...
Mme Guenette: Alors, c'est facile de blâmer le
nucléaire quand on n'a pas d'autre chose à blâmer et quand
ça fait partie de notre politique.
Mme Bacon: Oui. Vous estimez que le coût du
nucléaire est inférieur aux calculs d'Hydro-Québec.
Même, vous dites: moindre que le coût évité des
futurs projets hydroélectriques. Comment réagiriez-vous à
la possibilité de soumettre un projet de centrale nucléaire aux
conditions qui sont faites aux producteurs privés
d'électricité? (12 heures)
Mme Guenette: Je pense qu'on accepterait bien le défi. Il
y a encore Pointe Lepreau aussi. Si on peut mentionner des centrales qui ne
sont pas très loin, et qui marchent très bien, parce que Pointe
Lepreau, c'est un CANDU 6, et c'est un CANDU 6 qui marche à 90 % de sa
capacitié tout le temps, à la planche, comme on dit, et qui est
un des meilleurs producteurs au monde. Vous avez Gentilly-2, qui est encore un
CANDU c'est un des premiers CANDU mais qui ne marche pas à
sa pleine capacité, mais ce n'est pas parce qu'il ne le peut pas ou ne
le veut pas. Vous avez de bons exemples canadiens, même ils ne
sont pas seulement en dehors du pays de l'efficacité du
nucléaire. Naturellement, comme avec toute technologie, plus ça
va, plus les choses sont améliorées. Mais on réagirait
très bien à ce défi, Mme la ministre.
Mme Bacon: J'aimerais savoir d'un des trois invités... Si
les autres veulent s'exprimer aussi, je pense qu'ils peuvent le faire
très bien. Quelles sont, selon vous, les perspectives de la fusion
nucléaire? Comment on peut l'évaluer, en termes de perspectives,
la fusion nucléaire? M. Reid?
Mme Summers (Roxanne): «Long term». Très long
terme. On me parle de ça depuis 20 ans. Chaque fois, on dit: C'est 20
ans dans le futur. Ça fait maintenant 20 ans qu'on me dit que ça
arrivera dans 20 ans.
Mme Bacon: Another 20 years?
M. Reid: ...50 ans. Si nous avons le bon sens.
Mme Summers: Mais on ne sait jamais. Parfois, quelque chose
arrive, quelque chose tombe du ciel et,
pof! on fait un «breakthrough» de technologie.
Mme Bacon: Est-ce ce qu'on appelle un «moving
target»?
Mme Summers: Non. Je pense que c'est plutôt qu'on a
pensé aller plus vite d'une étape à l'autre et ça a
pris plus de temps. Et ça coûte très cher. Peut-être
qu'avec beaucoup plus d'argent ça regarde plus tôt.
Mme Guenette: C'est le processus de recherche et de
développement normal. Enfin, il y a toujours des choses qui ne vont pas
comme prédit et il y a des fois, comme elle dit, ce n'est pas un miracle
mais il y a des choses qui arrivent et ils disent: Eurêka! on l'a
trouvée, la solution. Ça peut arriver. Ça peut arriver
dans cinq ans, mais...
Mme Bacon: C'est un peu plus loin que ça, là.
Mme Guenette: On croit que oui.
Mme Bacon: Est-ce que vous croyez possible et est-ce que vous
estimez raisonnable pour le Québec d'effectuer éventuellement une
transition directe de l'hydroélectrique, l'hydraulique, disons, à
la fusion nucléaire? Est-ce qu'on peut prévoir ça?
Mme Guenette: Pas dans le futur immédiat, non. Mme
Bacon: Ce serait long.
Mme Guenette: Ce serait long. Je pense qu'il n'y en a pas un
parmi nous qui sera encore là.
Mme Bacon: Vous faites aussi une affirmation qui nous semble, en
tout cas, assez étonnante, que la gestion des déchets constitue,
du point de vue environnemental, un grand avantage de l'option nucléaire
par rapport à d'autres options énergétiques. Quand
pensez-vous pouvoir en faire la démonstration? Je ne suis pas sûre
qu'elle soit déjà faite. Et, entre-temps, croyez-vous possible de
renverser l'opinion et vous en avez parlé tantôt qui
est généralement répandue, à savoir que la
disposition des déchets nucléaires constitue un peu le talon
d'Achille du nucléaire? Parce qu'on en parle encore, même si vous
êtes très convaincante.
Mme Guenette: Merci. Non, on en parle encore et on va en parler
longuement parce que le processus d'évaluation du concept
d'enfouissement ou de stockage permanent est maintenant aux premières
étapes de l'étude. On a eu la première série
d'audiences publiques. Maintenant, on est en train de faire une
évaluation de l'impact environnemental. Ça va retourner en
audiences publiques, ça va être ensuite examiné par un
panel scientifique et ça va être examiné... Bien, ça
va être un examen approfondi et, enfin, peut-être qu'il va y avoir
une décision en disant: C'est bien, ce n'est pas bien. Je vous invite
tous, d'ailleurs, si ça vous tente, à venir voir le laboratoire
de recherche qui a été développé par IACL à
Pinawa, au Manitoba. Vous pourriez peut-être aller sous terre et regarder
nos petites machines et nos ordinateurs, écouter les roches pleurer,
crier et rire, mais je ne sais pas si elles rient de nous. Quand même,
c'est assez intéressant comme laboratoire de recherche souterrain et
ça vous donne aussi une idée que, vraiment, c'est probablement
faisable, cette affaire-là.
Tout ce qui compte dans ça, c'est que l'enfouissement des
déchets, qui est peut-être une chose future mais d'un futur assez
proche, c'est bon et c'est une option, mais, jusqu'à date, l'industrie
de l'énergie nucléaire est probablement la seule industrie
canadienne qui peut dire: Nos déchets, nous, on sait où ils sont.
Ils sont ici à côté, dans la piscine et dans les canettes
de béton. On sait qu'ils sont là. On sait où ils sont et
on sait combien on en a. Il n'y a pas beaucoup d'industries canadiennes qui
peuvent dire la même chose...
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. Vous voulez ajouter
brièvement un commentaire, madame?
Mme Summers: Je veux juste de dire que, dans d'autres pays dans
le monde, on peut faire une démonstration. Peut-être que ce sera
fait parce que plusieurs pays vont dans la même voie sur ça. Ils
vont peut-être faire une démonstration plus vite que le Canada
parce que le Canada voulait faire un processus public avec une totale
participation du public. Les autres pays vont démontrer la même
méthode plus vite que le Canada, probablement.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Labelle.
M. Léonard: Merci.
Bienvenue et merci pour votre mémoire. Je sais que, quand on
parle du nucléaire, c'est toujours un sujet qui est d'un tabou ou,
enfin, d'inquiétudes plus ou moins émotives, je ne sais pas, mais
enfin... Disons que je reviendrai sur la disposition des déchets.
Je voudrais d'abord éclaircir une chose. Vous dites qu'Hydro
Ontario estime le coût d'une nouvelle centrale nucléaire à
0,043 $ le kilowattheure tandis qu'Hydro-Québec l'estime à 0,06 $
le kilowattheure. Vous, quelles sont vos estimations et comment vous expliquez
les différences entre chacun?
M. Reid: Dans le cas de Darlington, Hydro Ontario estime que le
coût d'électricité est de 0,045 $ le kilowattheure;
Hydro-Québec l'estime à 0,06 $.
Mme Guenette: «Go ahead»!
M. Léonard: C'est ça.
M. Reid: La différence est... En Ontario, on estime que
les réacteurs...
Mme Guenette: Les réacteurs ont une vie...
M. Reid: ...ont une vie de 80 %. Oui. Mais, au Québec, 60
%, le même que les usines hydroélectriques.
Une voix: Ils ne produisent pas 60 %.
Mme Guenette: II parle de facteur de charge des
réacteurs.
M. Reid: Oui, le facteur de charge.
M. Léonard: Ah! C'est à cause de
l'efficacité.
M. Reid: Oui.
Mme Guenette: L'efficacité de la performance.
M. Léonard: 80 % Hydro Ontario et 60 %
Hydro-Québec, c'est ça qui explique la différence.
M. Reid: Oui.
Mme Guenette: Et Hydro-Québec aussi assume une vie de 30
ans tandis qu'Hydro Ontario assume une vie de 40 ans.
M. Léonard: Ah bon! Bien, c'est substantiel, là.
C'est quoi, la réalité? La vérité, c'est quoi,
selon vous?
Mme Guenette: C'est exactement ce qu'on dit.
M. Reid: dans le cas de pointe lepreau, le facteur de charge est
90 % et gentilly-2, ici, à québec, c'est 60 %...
Mme Guenette: Mais c'est volontaire, ça. C'est à 60
%.
M. Reid: Oui. 60 %.
M. Léonard: Ils ne le font pas fonctionner à
plus.
Mme Summers: II y a plusieurs autres centrales au Canada qui sont
à beaucoup plus que 60 %. Ça, c'est vraiment très,
très bas, pour le Canada.
Mme Guenette: la moyenne est dans les 80 %.
M. Léonard: Entre 80 % et 90 %?
Mme Guenette: Oui.
M. Léonard: Celle du Nouveau-Brunswick, ce serait
l'optimum, le maximum.
Mme Guenette: À 90 %, à peu près. M.
Reid: C'est la meilleure au monde. Mme Guenette: C'est la meilleure
au monde.
M. Léonard: et la production, ailleurs dans le monde,
c'est aussi de l'ordre de 80 %, 90 %?
Mme Guenette: Des CANDU, oui.
M. Léonard: Des CANDU.
Mme Guenette: Pas des autres nécessairement.
M. Léonard: Les CANDU, c'est les meilleurs, c'est les
nôtres.
Mme Guenette: C'est ça. Non, mais c'est vrai. Ce n'est pas
nous qui avons dit que c'étaient les meilleurs.
Mme Summers: C'est un système qui marche.
M. Léonard: Si, lorsque vous allez en soumissions, vous
remportez le morceau, c'est un bon signe, je dirais.
Mme Guenette: Oui, c'est un bon signe. Il y a aussi une
publication John, tu en as une copie ici qui est faite à
chaque quelques mois et qui ce n'est pas celle-là ...de
tous les pays, des réacteurs, de la capacité et de la performance
de chaque réacteur et qui donne les 10 premiers et les 20 premiers
réacteurs au monde, et on est toujours dedans; 7 sur les 12
premiers.
M. Léonard: Mais quand on évalue le coût
à 0,06 $ le kilowattheure, c'est, finalement, le même prix que
l'hydroélectricité.
Mme Guenette: À peu près.
M. Léonard: C'est ça que vous dites.
Mme Guenette: Oui.
M. Léonard: Mais comment vous expliquez que, je ne sais
pas, dans tous les pays du monde, l'électricité soit quand
même deux fois plus élevée? Le coût
d'électricité, de l'énergie est deux fois plus
élevé qu'ici?
Mme Summers: «That is the pricing». C'est un choix,
tout simplement.
M. Léonard: Si vous prenez en France, le coût de
l'énergie, de l'électricité est très
élevé comparativement. ..
Mme Summers: Très souvent, ce prix est fait par le
gouvernement parce que, comme au Canada d'ailleurs, ce n'est pas un champ
libre. C'est vraiment... Ils font payer autre chose. Ils font... Par exemple,
en Grande-Bretagne, ils paient les mineurs de charbon avec... ils proposent de
payer les mineurs de charbon avec ce qu'ils gagnent sur le prix de
l'électricité. C'est un programme social, aussi. (12 h 10)
M. Léonard: II y a un phénomène de taxation,
tarification, associé à la tarification électrique.
Mme Summers: Le même que pour les automobiles. L'essence
pour les automobiles est deux ou trois fois plus élevée à
cause de la taxation.
M. Léonard: Autre question, pour un primaire, là:
Quel est exactement le problème technique associé à la
disposition des déchets radioactifs? Vous parlez de les enfouir. Bon!
Ça se creuse, un trou, dans une caverne ou je ne sais pas. Quel est le
problème qui fait que ceci a l'air d'être un obstacle? Pour vous,
il n'est pas insurmontable, mais, pour l'ensemble de la population, il
l'est.
Mme Guenette: L'ensemble de la population dit, et ils ont
peut-être raison, ce n'est pas l'argument qu'on fait... Ils ont peur de
la radioactivité, parce que les déchets sont hautement
radioactifs. Alors, ils ont peur qu'il y ait peut-être des plumes
radioactives qui se retrouvent dans le terrain, dans ce que les vaches mangent,
dans le lait qui est produit par les vaches, dans les rivières et dans
l'eau. Alors, le concept d'enfouissement ou de stockage permanent qui a
été développé chez nous prend en compte tous ces
facteurs et peut assurer que, oui, c'est possible de le faire. Maintenant,
nous, on l'a développé. On a dit... On l'a prouvé. On l'a
recherché, mais d'autres vont dire si, vraiment, c'est vrai ou non. Mais
ça a été fait, comme elle dit, ailleurs dans le monde et
ça a été prouvé ailleurs. Alors, c'est fort
possible que ce soit, encore une fois, prouvé au Canada.
M. Léonard: Alors, ce qui est vraiment le problème,
ce n'est pas tellement les déchets, parce que, ça, vous pourriez
en disposer assez facilement, que le danger d'un accident radioactif qui ferait
éclater les centrales. Bien, vous dites... vous le niez jusqu'à
un certain point...
Mme Summers: C'est-à-dire, non...
M. Léonard: ...mais, si ça arrive... Tchernobyl,
c'est ça.
Mme Guenette: Oui. Ce sont les deux points qui inquiètent
les gens, un accident type Tchernobyl ou les déchets radioactifs, parce
que les gens comme Greenpeace disent toujours aux gens: Ils ne savent pas quoi
faire avec leurs déchets. C'est toujours la chose qui revient et...
Regardez Tchernobyl. Mais on dit: Tchernobyl, ce n'est pas la même
technologie. Tchernobyl, au Canada, ce n'est jamais arrivé et ça
ne peut pas arriver non plus à cause des enceintes de confinement.
M. Léonard: Mais...
Le Président (M. Audet): Mme Summers, vous voulez ajouter
quelque chose?
Mme Summers: Je voulais juste dire que le problème des
déchets n'est pas du tout technique. Comme Mme Guenette a dit, c'est un
problème... Pour bien enfouir ces déchets, ça prend...
c'est-à-dire que l'industrie voudrait faire ça le mieux possible.
Alors, ils prennent leur temps pour développer le système qui va
durer 10 000 ans. Pensez-vous, quand même, 10 000 ans, c'est très
long. Il n'y a pas d'autres industries qui sont tenues dans la même
longueur de vie de leurs déchets, du tout, mais nous sommes sûrs,
pas seulement ici, mais partout au monde... Je viens de travailler à
Paris pendant quatre ans avec tous les pays développés dans le
secteur nucléaire. C'est un problème qui, techniquement, ne pose
pas de problème.
M. Léonard: On a déjà lu dans la
littérature spécialisée là-dessus qu'ils voulaient
envoyer les déchets sur le soleil. S'ils pensent à des solutions
comme ça, ça veut dire qu'ils ont des problèmes ici.
Mme Summers: Non, c'est parce que c'est plus sûr. Si les...
Disons, si les fusées sont plus sûres, ce serait la méthode
la plus sûre de disposer très vite des déchets. Seulement,
ce n'est pas les déchets, la méthode de disposer des
déchets qui n'est pas sûre, c'est les fusées qui l'envoient
jusqu'au soleil qui ne sont pas sûres. Le meilleur endroit...
M. Léonard: Oui, bien, ça...
Mme Summers: ...pour les mettre, au fond, c'est la mer, mais la
mer n'est pas acceptable socialement.
M. Léonard: C'est...
Mme Summers: Très profond dans la mer, très
profond, dans le «sea bed».
M. Léonard: Dans la mer... Mme Summers: Oui.
M. Léonard: ...mais là, vous allez contaminer
l'eau.
Mme Summers: Non, non, non. Justement, c'est dans le «sea
bed», mais bien profondément. Mais nous avons accepté que
le public n'acceptera jamais ça psychologiquement. Alors, on n'en parle
pas. Je n'ai pas
parlé de ça. Je n'ai rien dit, mais, techniquement, c'est
une solution qui est encore plus sûre pour protéger le monde que
même dans la terre. Mais ça prend beaucoup de temps pour
être absolument sûr que ça va durer 10 000 ans.
Mme Guenette: Quand on parle de long terme dans notre industrie,
c'est à très long terme.
Maintenant, John avait un point à faire là-dessus.
M. Reid: Oui. On nous parle de questions techniques, mais il y a
un problème parce qu'il y a une plus petite... de déchets. La
quantité est plus petite. Nous estimons que 20, 25... nous avons
accumulé de ces déchets pour trouver une place pour le
«storage» permanent.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Saint-Maurice.
M. Lemire: À moyen et à long terme, quel est le
niveau minimal de demande nucléaire canadienne qui permettrait de
maintenir l'option viable de l'énergie nucléaire et à quel
point, d'après vous, la participation du Québec vous paraît
essentielle? C'est compliqué un peu.
Mme Guenette: Est-ce que c'est un débat constitutionnel
que vous voulez?
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Guenette: On n'en veut pas, nous.
Mme Bacon: On reste chacun sur nos réserves.
Mme Guenette: Comme l'Association représente toutes les
provinces canadiennes ainsi que les manufacturiers et les gens qui travaillent
dans l'industrie dans chaque province, y compris le Québec, disons que
l'appui du nucléaire par le Canada, c'est-à-dire canadien et
ça comprend encore le Québec, est très important pour
nous. C'est aussi important... C'est important pour deux raisons: c'est
important parce que ça soutient les petites et moyennes entreprises, les
sociétés d'ingénierie, les manufacturiers qui profitent de
nos ventes, disons, nos ventes en Corée. Le Québec a
énormément profité de nos ventes en Corée, mais si
on n'a pas un programme canadien nucléaire qui peut dire que le CANDU,
disons, c'est bon, il n'y a personne d'en dehors qui va l'acheter. S'il n'est
pas assez bon pour les Canadiens, il n'est sûrement pas assez bon pour la
Turquie, la Corée, le Japon ou la Chine. Ce sont des pays qui ont de
plus en plus besoin de nucléaire pour leur survie et pour leur
développement économique.
M. Lemire: On a remarqué aussi que, dans votre
mémoire, vous avez fait beaucoup de... vous avez donné beaucoup
de place et d'importance à l'étude de Herbert
Inhaber sur les risques comparatifs associés à la
production et au transport de diverses sources d'énergie. On y conclut,
entre autres, que «la production hydroélectrique pose un risque
plus élevé pour la santé publique que le gaz naturel ou
l'énergie nucléaire.» De même, l'auteur soutient
aussi que, tout compté, «le risque posé par les sources
énergétiques non traditionnelles (technologies solaires et
éoliennes, biomasse, etc.) peut être aussi élevé ou
même plus élevé que celui qui caractérise certaines
sources traditionnelles.»
Ma question, j'aimerais d'abord savoir si l'étude à
laquelle vous vous référez fait autorité en matière
de sécurité comparative des sources d'énergie et comment
en arrive-t-on à des conclusions qui sont plus ou moins
surprenantes?
Mme Guenette: Do you have any comments on the Inhaber's study in
terms of its... You understand the question?
M. Reid: Yes, I understand the question, but the Inhaber's study
was very clear.
Mme Guenette: No, but he is saying: Is it the utmost and the
foremost authority on the matter? Je m'excuse. Avant de répondre
à votre question, je...
(Consultation)
Mme Guenette: Justement, ce que je demandais, c'est s'il y avait
eu j'avais entendu, mais je n'étais pas certaine si elle
était sortie...
M. Lemire: II peut nous répondre en anglais.
Mme Guenette: En anglais? Ça ne vous... O.K. Ah! Vas-y
donc! (12 h 20)
M. Reid: There is a new study out called «Energy to the
Year 2050», published by the Risk Assessment School at the University of
Guelph. It is an updating of the work of Mr. Inhaber and it confirms it. It
points a fact that takes it one step further and goes into a discussion on what
are the costs of not having energy and not having electricity in general. It
puts that risk as a very high risk because the results of the studies that have
been done over the last 15 years have indicated that humans live much better
when they have command of an intensity of energy and particularly electricity.
So, they have added that to the calculations. It means that the rewards of
having abundant electricity and abundant power for the human race are very
significant, and the cost of not having that is very high to the human
race.
Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant
reconnaître M. le député de Labelle.
M. Léonard: Peut-être que ça a
déjà été débattu
devant la commission, mais pourquoi l'Ontario ralentit-il son programme
d'énergie nucléaire? Est-ce que vous pouvez donner quelques
explications? Ralentir... enfin, ils ne progresseront pas dans ce
sens-là, si je comprends.
Mme Guenette: Toute décision nucléaire est une
décision politique.
M. Léonard: Oui, je comprends, mais...
Mme Guenette: C'est très connu que le parti
néodémocrate n'appuie pas le nucléaire. Alors, c'est tout
simplement une décision politique, un point c'est tout.
M. Léonard: Oui, mais ça s'appuie quand même
sur un certain nombre d'arguments. Ce n'est pas parce que c'est politique qu'il
n'y a pas d'arguments.
Mme Guenette: Pas nécessairement. M. Léonard:
Oui, bien là... Des voix: Ha, ha, ha! M. Léonard:
Non. Ça, c'est trop...
Mme Guenette: Bien, il faut satisfaire les gens qui votent pour
nous. Vous savez bien, vous connaissez ça plus que d'autres.
M. Léonard: Non.
M. Chevrette: Oui, mais on peut se faire les vendeurs d'options,
madame, de façon rationnelle, pour ou contre.
M. Léonard: Non, je n'accepte pas cette réponse.
Quand même, à ce moment-là, tout ce qui est politique,
ça veut dire qu'il n'y a pas d'argumentation derrière. Il y en a.
Les gens ont des opinions basées sur des arguments et l'un de
ceux-là, c'est... Évidemment, on revient donc à la
question de l'environnement.
Mme Guenette: Non. C'est que...
M. Léonard: Non, mais je ne prends pas non plus...
Mme Guenette: ...l'antinucléaire.
M. Léonard: ...le premier ministre de l'Ontario pour un
imbécile. C'est ça que je veux dire.
Mme Guenette: Non, il n'est pas... C'est très drôle
parce que M. Rae admet lui-même qu'il n'est pas antinucléaire,
mais que la majorité de son parti et que la plate-forme de son parti
énonçaient très clairement qu'ils déclaraient un
moratoire nucléaire. Alors, ça faisait partie de leurs promesses
et de leur plate-forme. C'est très clair. Ce n'est pas une
décision folle. Je n'ai pas appelé ça une décision
folle, s'il vous plaît, ça fait partie de la plate-forme politique
du parti néo-démocrate. C'était clair avant qu'il ne soit
élu.
M. Léonard: Je n'ai pas de réponse.
Mme Guenette: Lui, personnellement, nous a dit très
clairement qu'il n'avait aucun sentiment antinucléaire, mais qu'il avait
à satisfaire les gens qui avaient appuyé la plate-forme. Mais M.
Rae, comme vous le connaissez, a un côté homme d'affaires aussi,
alors... C'est ça.
M. Chevrette: On aurait plusieurs questions à vous
poser...
Mme Guenette: Oui?
M. Chevrette: ...concernant M. Rae, mais on va s'abstenir.
Mme Guenette: Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Guenette: C'est une observation, c'est tout.
Le Président (M. Audet): Alors, c'est terminé pour
les interventions? D'autres interventions? M. le député de
Drummond.
M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président.
Alors, un commentaire et deux questions, deux brèves questions.
Un premier commentaire, oui. Le nucléaire est parti de très loin.
Il est parti avec une image très négative. Le nucléaire,
dans ses premières armes, était associé à
destruction. Le temps lorsqu'on a essayé d'en faire une énergie
positive à l'image beaucoup plus profitable à l'humanité,
bien, on a vu... Vous parlez de Tchernobyl, mais il y a eu Three Mile Island
aussi qui est venu avant Tchernobyl. Dans une perspective un peu plus globale
parce que lorsqu'on essaie de regarder 20 ans, 30 ans, 50 ans dans une
collectivité, c'est très court où est-ce que vous
allez placer le nucléaire? Lorsqu'on regarde la prochaine vague... On a
dit que les industries fossiles étaient en déclin. Alors, quelque
part entre 2010 et 2030, on en sera sorti. On dit que la prochaine vague avant
la fusion nucléaire, ça va être l'hydrogène, qui va
devenir la prochaine source de combustible. Alors, qui dit hydrogène dit
fabrication d'hydrogène. On fait appel à
l'hydroélectricité ou on fait appel au nucléaire pour
fabriquer l'hydrogène? Alors, est-ce qu'il y a de la recherche qui se
fait dans ce sens-là et est-ce que vous estimez que le nucléaire
pourrait être une source d'appoint majeure au niveau de cette
énergie qui s'appelle l'hydrogène?
La deuxième question et ça, c'est une question
de néophyte aussi, elle est un peu plus en détail
lorsque je regarde le nucléaire, lorsque j'essaie de le positionner,
même si je reste ici à l'échelle du Québec, il
m'apparaît que la majorité des centrales sont alentour de 400 MW.
Alors, est-ce qu'il y a de la recherche qui peut se faire pour dire, bien, dans
des communautés isolées, où l'électricité
est un besoin aussi fondamental que nous, ici, dans les centres urbains, qu'une
plus petite centrale, quelque chose qu'on pourrait trouver dans les 25 MW, 30
MW, 40 MW ou 50 MW, pourrait être développée avec les
techniques du CANDU pour approvisionner à meilleur coût et dans
une perspective aussi de plus long terme où ces énergies fossiles
deviendront hors de prix?
Mme Guenette: La réponse à votre dernière
question est oui, il y a de la recherche qui se fait. Le CANDU 3,par exemple,
est un plus petit candu qu'un candu 4, ou un 450, ou un 650, ou un 900 mw parce
que le 900 aussi est en voie de développement. alors, il y a un plus
petit candu. il y en a des plus petits aussi qui sont en voie de
développement, qui s'appellent des réacteurs... on leur avait
donné un nom qu'on n'aime pas tellement, «slow poke»,
c'est-à-dire que ce sont de petits réacteurs qui peuvent fournir
assez d'électricité pour une ville, disons, une petite ville,
etc.
Alors, tout ça est en voie, oui. Du côté
hydrogène, le futur, d'après les futuristes, le nucléaire
fait beaucoup partie du futur à cause de ses capacités de
production non seulement d'électricité, mais aussi
d'hydrogène. Mais c'est très drôle, c'est que les
Québécois, qui appuient très fortement
l'hydroélectrique parce que ça fait partie de notre culture comme
Québécois, l'hydroélectrique... On ne pense même pas
à autre chose, comme Québécois. On a fait plusieurs
«focus group», des groupes de discussion sur le nucléaire.
Ils disent toujours... J'écoutais la discussion derrière un
miroir et il y avait deux femmes qui parlaient. La discussion était
vraiment intéressante. Elle a dit: Écoute, là, toi, tu ne
peux pas lâcher le nucléaire parce qu'on va en avoir besoin un
jour.
Et la majorité... Ça, c'est à 75 % et plus, des
gens disent: Le nucléaire, c'est important parce que c'est un besoin
futur. Et c'est accepté comme tel. C'est une des données les plus
fortes qu'on a, d'ailleurs. Je pourrai vous en envoyer une copie, si vous
voulez. O.K.
Le Président (M. Audet): Merci.
Alors, Mmes, MM., au nom des membres de la commission, je vous remercie
de votre présentation.
Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 27)
(Reprise à 14 h 7)
Le Président (M. Audet): La commission de
l'économie et du travail reprend ses travaux. On m'informe qu'il y a des
changements...
Le Secrétaire: Oui.
Le Président (M. Audet): ...sur les membres de la
commission. Alors, M. le secrétaire.
Le Secrétaire: Oui. M. Benoit (Orford) est remplacé
par Mme Loiselle (Saint-Henri), Mme Blackburn (Chicoutimi) est remplacée
par Mme Marois (Taillon), et M. Blais (Masson) serait remplacé par M.
Brassard (Lac-Saint-Jean).
Le Président (M. Audet): Ça va.
Alors, cet après-midi, nous recevons le groupe Lévesque
Beaubien Geoffrion; ensuite suivront l'Association québécoise du
gaz naturel, l'Union des producteurs agricoles et, enfin, la
Société d'utilisation et d'exploitation rationnelle des
ressources sylvicoles et urbaines.
J'invite maintenant les gens de Lévesque Beaubien Geoffrion
à prendre place.
Alors, messieurs, au nom des membres de la commission, je vous souhaite
la plus cordiale bienvenue. Je vous rappelle brièvement le
déroulement de nos travaux: vous disposez d'une vingtaine de minutes
pour nous présenter votre mémoire; ensuite suivra une
période d'échanges d'une quarantaine de minutes. Avant de
procéder à la présentation de votre exposé, je vous
demanderais, aux fins du Journal des débats, de vous identifier,
s'il vous plaît. Je vous donne la parole.
Lévesque Beaubien Geoffrion inc.
M. Brunet (Pierre): Mon nom est Pierre Brunet. Je suis
président et chef de la direction de Lévesque Beaubien Geoffrion.
Je suis accompagné de Jean La-brecque qui est vice-président
senior, également chez Lévesque Beaubien Geoffrion.
Le Président (M. Audet): Merci. Allez-y.
M. Brunet: Alors, je n'abuserai pas de votre temps. Je
présume qu'une fois que vous avez reçu le mémoire, vous
avez tous les résumés, mais tout simplement vous me permettrez de
faire quelques remarques d'ordre financier, au risque qu'elles soient
interprétées comme non objectives. Un financier va venir vous
parler de ratios financiers, de profitabilité, de choses et d'autres,
mais je tente, à l'intérieur de ces ratios financiers ou de
profitabilité, de situer le problème.
Une corporation telle qu'Hydro-Québec, avec des revenus annuels
qui dépassent 6 000 000 000 $ et des dépenses de 5 500 000 000 $,
dont le seul frais d'intérêt est de 2 400 000 000 $, soit 40 % des
revenus, devient en soi une opération importante au point de vue
financier. Les frais d'intérêt étant aussi importants
à l'intérieur d'une corporation, tous les plans et ratios
finan-
tiers deviennent excessivement importants dans le jugement de la
direction et du management. Donc, c'est une composante importante et il faut en
tenir compte. (14 h 10) dans les 10 années précédentes,
hydro-québec s'est comportée, en fonction des ratios financiers,
en fonction de sa réputation canadienne et internationale, d'une
façon très responsable puisque l'objectif qu'elle s'était
créé, de chercher à conserver une couverture
d'intérêt supérieure à une fois les
bénéfices avant intérêt, d'avoir un taux de
capitalisation, c'est-à-dire que son avoir propre soit au moins de 25 %,
c'est-à-dire que l'ensemble des passifs ne dépasse pas 3 fois le
capital et, enfin, que le taux d'autofinancement soit autour de 30 %, c'est une
réalisation qui a été faite assez bien dans les derniers
10 ans, ce qui a permis à hydro-québec de pouvoir se financer sur
l'ensemble du marché canadien et l'ensemble des marchés
internationaux avec brio et avec une réputation sans tache en ce qui
concerne l'intégrité financière d'hydro.
Donc, pour nous, financiers, il nous est impossible de parler de tarifs
sans tenir compte de l'ensemble de ces ratios financiers. Maintenant, je ne
veux pas non plus que vous pensiez que je veux tomber dans la solution facile
et de faire une règle de trois que le profit est de tant, les charges
sont de tant, l'intérêt est tant, donc les tarifs devraient
être de tant. Loin de moi cette idée, mais, par contre, il faut en
tenir compte dans l'évaluation. Nous venons de traverser une
période économique assez difficile. On n'est pas tout à
fait sorti du tunnel. Durant les derniers 50 ans, on a eu 12 récessions,
mais ce qui a été remarquable dans les 12 récessions
précédentes, elles n'ont jamais duré plus de 18 mois et la
reprise était excessivement importante dans les mois qui suivaient. Nous
sommes déjà près de trois ans dans une récession.
L'avenir nous annonce une reprise depuis trois trimestres, mais sans doute une
reprise beaucoup plus lente et beaucoup moins fulgurante que les reprises
précédentes. Donc, à ce moment-là, il est
excessivement important, en ce qui concerne Hydro-Québec, comme toutes
les corporations canadiennes et toutes les corporations américaines, de
voir à être le «low cost operator», donc que le
travail du côté des coûts et des charges soit fait au
maximum, de façon à s'assurer que les dépenses sont au
minimum.
Par contre, quand je regarde les tarifs, vous savez comme moi
qu'Hydro-Québec, en ce qui concerne ses tarifs, a des tarifs beaucoup
plus bas qu'à Toronto, qu'à Edmonton et que dans les principales
villes américaines. Donc, une marge de manoeuvre importante qu'il faut
conserver. On a vécu une commission parlementaire
précédente qui nous donnait l'exemple du budget du Québec
avec une marge de manoeuvre beaucoup moins importante en ce qui concerne les
revenus. Donc, l'importance de surveiller les coûts, dans le cas
d'Hydro-Québec, c'est un peu à l'inverse que cette corporation
est dans une situation face au marché international à être
jugée comme étant dans une situation financière
intègre et bonne parce que ses coûts, par rapport à ses
tarifs, sont plus bas que l'ensemble des tarifs nord-américains.
Donc, de dire que d'enligner les tarifs sur l'inflation, où
l'inflation, actuellement, est quand même assez basse, peut être
une politique appréciable et importante à court terme. À
moyen terme et à long terme, ça pourrait devenir un petit peu
plus dangereux, et j'aimerais, comme exemple, donner tout simplement
l'expérience de la dernière décennie.
Dans la dernière décennie, on a connu à peu
près tout, des hauts taux d'intérêt, des bas taux
d'intérêt; le prix des denrées a connu des fluctuations
assez importantes. On a eu des périodes d'inflation excessivement
importantes, donc il a fallu gérer l'ensemble de ces prix d'une
façon à répondre aux fluctuations des marchés de
l'époque. Donc, je crois qu'il est bon, lorsqu'on prend une
décision à moyen terme et à long terme, maintenant, de
chercher à se garder toutes les marges de manoeuvre possibles.
Donc, j'arrive rapidement à ma conclusion qui est fort simple,
c'est de dire que, si on le regarde dans notre perspective, Hydro-Québec
utilise plus à fond le mécanisme des prix, tant pour encourager
la conservation que pour établir la plus juste répartition des
charges financières de ses abonnés. Par exemple, les tarifs sont
différents pour la PME que pour le domestique et de voir, sur une
période de temps, à tenter d'équilibrer ces tarifs en
fonction des coûts réels à chacun des abonnés. Que
le désir de contenir la hausse des tarifs au niveau de l'inflation soit
beaucoup plus une intention et une réalité à court terme,
mais que ça ne devienne pas une obligation dans les années
à venir, de façon à garder la marge de manoeuvre qu'il
faut pour l'intégrité financière
d'Hydro-Québec.
Enfin, vous ne vous attendez pas à autre chose d'un financier,
que les tarifs soient établis en fonction de conserver la bonne
santé financière d'Hydro-Québec. On le ressent,
actuellement, sur les marchés, vous voyez la publicité qui se
fait sur Hydro Ontario. Ça crée des problèmes, des
«turbulations» dans les marchés, tandis
qu'Hydro-Québec a cette réputation très claire à
l'étranger qu'elle est gérée selon une bonne santé
financière. On croit que la décision des tarifs, quelle qu'elle
soit, doit s'enligner à conserver les ratios financiers que je vous
disais tantôt. C'est ce que j'avais à vous dire, en
résumé.
Le Président (M. Audet): Merci, M. Brunet. Je vais
maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: Alors, M. Brunet, M. Labrecque, je voudrais vous
remercier de l'intervention que vous faites devant la commission et qui nous
permet, je pense bien, de mieux évaluer les implications
financières de la proposition du plan de développement
d'Hydro-Québec.
Si je me réfère à la page 2 de votre
mémoire, vous mentionnez qu'une politique tarifaire dissuasive pour
amener les clients à consommer moins d'électricité
pourrait avoir beaucoup plus d'effets que des campagnes
de sensibilisation telles que menées présentement par
Hydro-Québec.
Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par «politique
tarifaire dissuasive»? Avez-vous, entre autres, des niveaux de prix
à proposer?
M. Brunet: Avez-vous fait l'analyse? Je vais demander à M.
Labrecque de répondre à ça.
M. Labrecque (Jean): Le problème pour le faire, c'est
qu'il y a peu de données sur l'élasticité au prix.
Même en essayant de fouiller dans les documents et en essayant de parler
aux gens d'Hydro, je pense que c'est une approche qui n'a pas vraiment
été regardée à fond.
Je ne peux vraiment pas répondre autre chose que ça.
C'est-à-dire que ce qu'on sait, c'est que dans tous les secteurs,
actuellement, la pression des prix force les consommateurs à s'ajuster.
On a l'impression que le même mécanisme jouerait. Il est clair
que, dans le cas d'Hydro, il y a des tendances qui ne peuvent se
réaliser qu'à moyen terme ou à long terme... de chauffage,
par exemple. Mais il est certain que, si on regarde l'évolution
passée, entre autres dans le chauffage, la raison pour laquelle Hydro a
été capable de pénétrer ce secteur-là de
façon très importante en termes de part de marché, c'est
justement parce qu'elle avait des tarifs très compétitifs.
Actuellement, ce qu'on espère, c'est que, plutôt que d'essayer de
donner des subventions ou d'attirer les gens en promettant des choses, l'aspect
pénalité pourrait jouer nettement plus à fond. Mais,
encore une fois, le problème qu'on a rencontré en faisant
l'analyse, c'est qu'il y a peu de données sur l'élasticité
au prix.
Mme Bacon: Est-ce que vous pensez que l'application d'une
politique tarifaire dissuasive devrait tenir compte normalement de la
capacité de payer des consommateurs et aussi, je pense, de la
capacité concurrentielle des grandes entreprises
québécoises? Parce qu'il faut en tenir compte.
M. Labrecque: Vous avez parfaitement raison, Mme la ministre. Je
pense que ce qu'on suggère, c'est plus une question de degré de
ce point de vue là. Je pense qu'en tant que gouvernement vous avez
à équilibrer certains des facteurs. Mais, encore une fois, c'est
plus d'émettre une remarque qui nous semble appropriée, compte
tenu de certaines expériences qu'Hydro a faites dans les secteurs
d'incitation, entre autres sur les histoires de douche et les choses comme
ça. Il est certain que ça nous apparaît comme plus
léger comme impact. Actuellement, je pense que, quand Hydro fait la
remarque qu'elle veut réajuster, qu'elle veut éviter
Pinterfïnancement, il est certain que le gouvernement doit tenir compte de
la capacité de payer des consommateurs, mais, encore une fois, pour
nous, au lieu de lancer de l'argent après le problème, ça
nous semble plutôt de doser l'attitude inverse et de vraiment essayer de
freiner plutôt que d'essayer de lancer des campagnes.
Mme Bacon: Vous trouvez aussi que l'orientation
d'Hydro-Québec d'aligner les hausses tarifaires à l'inflation est
assez contraignante. Je pense que c'est susceptible d'affecter
défavorablement sa marge de manoeuvre et aussi sa santé
financière. Est-ce que vous ne pensez pas que cette orientation
tarifaire inciterait plutôt HydroQuébec à exercer un
contrôle plus serré sur son budget d'exploitation, parce que
ça peut avoir un effet aussi sur le but de l'exploitation si elle
s'engage déjà à suivre le taux d'inflation? (14 h 20)
M. Brunet: Je disais tantôt... Je pense
qu'Hydro-Québec n'a pas le droit de vivre hors réalité par
rapport à l'ensemble du monde corporatif et à l'ensemble des PME
et des compagnies qui vivent une rationalisation assez importante. On constate
de façon quotidienne par les médias, les journaux, les
rationalisations qu'on doit faire dans une foule d'entreprises. Donc,
Hydro-Québec étant dans une situation de monopole, elle n'a pas
le droit d'être en dehors de ce contexte-là. Donc, on
présume qu'Hydro fera, en bon père de famille, si on veut, tout
en son possible pour arriver au coût le plus bas, mais ensuite on dit: Si
on vit une décennie semblable à la décennie des
années quatre-vingt et qu'il y a des changements brusques dans les prix
des denrées, dans les taux d'intérêt, peu importe, il faut
que la marge de manoeuvre soit là pour s'ajuster. Dans le contexte
d'aujourd'hui, l'inflation étant où elle est très
basse et l'ajustement des prix étant en fonction de ça, je
pense que ça correspond à la réalité d'aujourd'hui,
mais de créer une politique qui serait pour les prochains 10 ans de
cette façon-là, je pense que la décennie de 1980 nous
prouve que ce serait une erreur.
Mme Bacon: Vous parliez tantôt de l'interfinance-ment.
Est-ce qu'il serait raisonnable de postuler que les catégories
tarifaires, par exemple, qui présentent un risque plus
élevé doivent procurer à Hydro-Québec cette marge
bénéficiaire supérieure? Et, dans ce contexte-là,
est-ce que vous croyez qu'Hydro-Québec encourt les mêmes risques
lorsqu'elle fournit l'électricité aux abonnés du secteur
résidentiel comparativement à ceux des secteurs commercial et
industriel?
M. Brunet: Une façon qui est déjà
arrivée... Il y a plusieurs façons de regarder ce
problème-là. Il va arriver des périodes de pointe ou des
périodes où on est obligé de partir à gaz ou au
pétrole et, à ce moment-là, il y aurait des coûts
assez importants. On ne pense pas qu'un transfert directement de ça au
consommateur peut se faire; par contre, Hydro-Québec, par la
tarification, pourrait, au cours des années, se bâtir des
réserves qui viendraient répondre ou permettre de balancer ces
périodes de pointe et le consommateur ne serait pas touché,
à ce moment-là. En ce qui concerne l'autre sens de votre
question, c'est plutôt une question de philosophie, c'est une question de
philosophie qui est en train de se discuter au niveau des compagnies de
téléphone de la même façon. Ce qui avait
été permis pendant les derniers 20
ans était acceptable et tout à coup, à cause de
l'évolution américaine et de la compétition qui se fait,
l'ajustement revient au coût des usagers par rapport à tel
service. Donc, je pense que dans l'intégrité financière,
si vous voulez, de l'ensemble de l'Hydro, on devrait peut-être s'adresser
à ça et ça permettrait de garder une tarification et de
conserver les ratios financiers en conséquence.
Mme Bacon: Je serais tentée, comme dernière
question, de profiter de votre présence pour vous poser une question,
à titre d'experts financiers ça déborde un peu le
cadre du mémoire mais de façon générale
est-ce que vous croyez qu'Hydro-Québec a la capacité
financière et remarquez que vous n'êtes pas les seuls
à qui je le demande de réaliser les orientations qu'elle
propose en matière d'offre et de développement du marché?
Est-ce qu'elle a cette capacité financière de le faire?
M. Brunet: Vous parlez d'offre et de... en ce qui concerne la
capacité financière actuelle?
Mme Bacon: Oui, de réaliser ses orientations qu'elle nous
propose en matière d'offre et de développement de
marchés.
M. Brunet: Moi, je crois que oui, parce que l'histoire
passée d'Hydro-Québec par rapport aux autres Hydro si je
veux... on va toujours comparer au marché, donc on va aller chez le
voisin en Ontario et les autres depuis plus de 30 ans la
réputation, si on veut, hors Canada, parce que c'est important de
comprendre ça parce que la perception canadienne elle est que c'est tout
ensemble en famille, mais la perception internationale, si on veut, pour les
financements, est basée mécaniquement sur les chiffres et les
financiers internationaux vont toujours nous dire: C'est Hydro-Québec
qui a toujours respecté, pendant 30 ans, cette espèce de sens
corporatif des ratios. Alors, l'histoire est là, les faits sont
là; donc, elle a cette capacité-là de se financer à
cause du «track record» excusez l'expression anglaise
qui est là.
Donc, moi, je pense qu'il n'y a pas de problème de ce
côté-là. Du moment qu'on va affecter, disons, un peu, cette
intégrité financière, eh bien, à ce
moment-là, on se posera des questions.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant
reconnaître M. le député de Joliette.
M. Chevrette: Oui, merci, M. le Président.
J'ai quelques questions, mais je voudrais reprendre là où
la ministre a commencé, à savoir que vous seriez prêt
à augmenter les tarifs d'électricité pour constituer un
signal réel concernant l'efficacité d'énergie parce que
vous ne croyez pas qu'il y a d'autres moyens ou à peu près pas.
Dans la conjoncture actuelle je vais aller plus pointu que Mme la
ministre y est allée dans la conjoncture actuelle, pensez-vous
que ce serait réaliste, franchement?
M. Brunet: Écoutez, je vous avais bien dit que l'inflation
est très basse et qu'une augmentation de tarif en fonction de
l'inflation ou plus bas que l'inflation, c'est presque rien. Donc, dans la
conjoncture actuelle, il faut être prudent, je reconnais ça. Cette
politique de tarif peut créer un momentum pour les années
à venir ou ne pas créer un momentum en fonction de la perception
des financements. Nous traversons une période difficile, je pense que la
sagesse nous impose de prendre nos décisions d'une façon
très sécuritaire. Mon intervention était beaucoup plus en
fonction de ne pas laisser l'impression que si cette politique-là se
faisait de cette façon-là, qu'elle est là pour toutes les
années à venir.
Alors, dans la situation actuelle, il faut reconnaître que la
rentabilité d'Hydro, même si les chiffres sont là, doit
s'accentuer en fonction des réseaux financiers, en fonction des besoins
futurs, pas des besoins d'aujourd'hui. Alors, les accrocs à ça,
la décision politique vous appartient. Moi, mon rôle, c'est tout
simplement de vous faire valoir quelles sont ces perceptions, et je vous laisse
juger ce qu'il faut faire à partir de là.
M. Chevrette: À la page 4 de votre mémoire, vous
dites que la politique d'Hydro-Québec d'aligner ses tarifs sur
l'inflation lui causera davantage de problèmes que de satisfaction,
dites-vous. Comme des dépassements sont susceptibles de se produire,
Hydro-Québec devra faire face, donc, à un barrage de l'opinion
publique. À toutes fins pratiques, si on regarde votre mémoire de
1990, vous disiez à peu près la même chose, vous
réitérez à ce moment-ci ce que vous disiez en 1990
à l'effet que la santé financière de l'entreprise, le
coût moyen des fournitures et le traitement équitable des
abonnés sont des critères plus importants que le taux
d'inflation. C'est à peu près ce que vous nous disiez, si ma
mémoire est fidèle, en 1990.
Quels sont les risques encourus par Hydro-Québec avec sa nouvelle
politique tarifaire?
M. Labrecque: Le problème, c'est qu'au moment de la mise
en service Hydro-Québec va se retrouver avec des coûts de
production plus élevés, et si on essaie de tenir l'inflation et
que par exemple l'inflation est basse comme elle l'est actuellement, il est
mathématiquement certain encore une fois, je suis heureux de voir
que vous avez relu le mémoire d'il y a 3 ans c'est
mathématique que les ratios ne pourront pas être
rencontrés. Et encore une fois, ce qu'on disait en 1990, c'est une
question de dosage. Que, à un moment donné dans le temps, on
fléchisse un petit peu, c'est toujours admissible, mais, encore une
fois, ce que les marchés prennent beaucoup plus difficilement, c'est une
tendance qui se détériore continuellement, et une situation
financière qui serait modifiée trop radicalement à un
mo-
ment donné. Il est certain que, dans la conjoncture actuelle, ce
n'est pas facile de dire aux gens de faire un petit peu plus de sacrifices
qu'ils en font actuellement; ça, c'est évident. Mais, encore une
fois, le problème de la situation financière de l'entreprise est
vraiment ce qui, pour nous, va permettre à Hydro de continuer à
se développer. Et si on ne fait pas attention à ça, entre
autres, systématiquement, en s'alignant sur un barème qui va
mathématiquement affecter la situation financière de
l'entreprise, on va miner la crédibilité et, à plus ou
moins long terme, ce qui va détériorer la capacité de
l'entreprise de grandir et de répondre aux besoins
complètement.
Alors, on pense que même si c'est difficile, même si, encore
une fois, il y a des situations où ça peut se justifier qu'il
faut être un peu plus serré, je pense qu'il faut que ce soit
fait.
M. Chevrette: À la page 5 aussi, vous dites... Ça
m'amène à vous poser une question parce que vous affirmez que les
frais de garantie imposés à Hydro par le gouvernement rendent les
emprunts effectués par Hydro plus coûteux que ceux
effectués par d'autres corporations publiques. J'aimerais savoir
pourquoi.
M. Brunet: La base des coûts au Québec, c'est les
coûts d'emprunts du gouvernement lui-même. Les coûts des
municipalités, cégeps, hôpitaux, etc., tout ce qu'on
appelle octroyés et municipalités se transigent à des
rendements très proches de ceux du gouvernement. Règle
générale, ça ne va jamais plus que .05 ou 10 «basis
point», c'est quelque chose comme ça. Encore une fois, si vous
demandez à Hydro de payer 0,50 $ de plus, une demie de un pour cent de
plus que le taux du gouvernement, ou que le taux de base, automatiquement vous
passez par-dessus.
Alors, actuellement, les frais de garantie d'Hydro impliquent que les
emprunts d'Hydro sont, par rapport à l'ensemble des autres corps
publics, et disons à l'oeil trois huitièmes de un pour cent plus
élevés à cause de ça.
M. Chevrette: Comme ça, vous, c'est quoi les frais de
garantie? C'a été une manoeuvre? C'est quoi? Comment vous le
percevez, vous?
M. Brunet: L'idée, c'est que...
M. Chevrette: On va vous essayer un peu. (14 h 30)
M. Brunet: L'idée, c'est que le gouvernement, étant
un actionnaire de l'Hydro, est libre d'obtenir les fonds dont il a besoin,
qu'il veut prendre d'une entreprise de la façon dont il veut.
M. Chevrette: Oh non. Vous savez très bien que ce n'est
pas ça. Vous savez très bien qu'un actionnaire d'Hydro avait le
droit à des dividendes si le respect des ratios était fait. Vous
savez ça. Ce n'est pas à Lévesque Beaubien de m'apprendre
ça, là. Vous devez connaître la loi en détail, la
loi de l'Hydro-Québec. Vous savez très bien que les frais de
garantie, c'est justement parce que les ratios, n'étant pas en haut de
25, faisaient en sorte qu'ils ne pouvaient pas se payer de dividendes. Donc, il
fallait aller chercher de l'argent, et les frais de garantie, c'est une
façon d'aller chercher des dividendes dans une société qui
n'était pas capable de payer. Vous savez ça?
M. Brunet: Mais, encore une fois, est-ce que c'est très
différent de certaines corporations ou «holdings» qui vont
charger à une compagnie opérante un frais d'administration, ou
qui vont imputer une partie de leurs dépenses d'opération. Encore
une fois, le gouvernement est dans un rôle à la fois d'actionnaire
et de surveillant de l'entreprise. Je pense que ça ne nous appartient
pas de décider ce que le gouvernement a envie de faire. Tout ce qu'on
constate, nous, c'est que les coûts d'opération, les coûts
d'intérêts, à cause de cette formule-là, sont plus
chers.
M. Chevrette: Non, mais vous portez un jugement
allègrement à l'aise pour dire que les frais de garantie ont une
incidence négative sur le taux d'emprunt d'Hydro-Québec.
Ça, vous le dites. Moi, je pensais que si vous vous permettiez de dire
ça, je pensais que vous pouviez vous permettre de juger aussi
publiquement, dans ce cas-là, que le fait que le gouvernement, par
exemple, a augmenté sa taxe sur le capital, le fait que le gouvernement
a imposé des frais de garantie, a pour conséquence de
créer une obligation à HydroQuébec de quelque 500 000 000
$ pour l'année en cours, et qu'il sera de l'ordre de 1 000 000 000 $
quelque chose au moment où Hydro-Québec aura atteint les
objectifs d'immobilisation qu'elle s'est fixés.
Donc, ça va devenir lourd, ça. Si je comprends bien, votre
jugement, vous le réservez, mais vous le ferez dans les constats.
Lorsque vous serez rendus là, vous allez faire le constat, je suppose,
que c'est rendu trop lourd, mais là, pour le moment, vous trouvez que ce
n'est pas une manoeuvre.
M. Brunet: Écoutez, en termes financiers, l'actionnaire
principal peut décider d'abolir, d'augmenter. Ça, c'est vrai dans
toutes les corporations, c'est les règles du jeu. Le jeu du dividende,
il faut l'accepter. C'est normal qu'une corporation qui fait un rendement paie
l'actionnaire principal en fonction de dividendes qui ont été
établis en fonction de tous les critères que vous dites. Quand
les critères ont été établis, ça date de
plusieurs années, les circonstances changent, il peut y avoir des
modifications. Vous voyez les compagnies, les actionnaires, si vous voulez,
modifier les critères des dividendes des corporations sur une base
régulière.
Donc, je pense qu'il ne faut pas mélanger les deux. Quand les
ratios financiers ont été établis, ils tenaient compte
d'un dividende à l'actionnaire principal, ils tenaient compte que le
capital que le Québec a investi dans Hydro-Québec ait une
rentabilité. Ça, je pense
qu'il n'y a pas de problème avec ça. Tout le monde va
accepter ça. Quand ce jeu-là, ce mélange fait que les
ratios financiers deviennent disproportionnés, c'est là que,
nous, nous disons: Faisons attention. Donc, à ce moment-là, si
toutefois pour des raisons très graves, dans deux ans, il y a un
changement économique excessivement important et que la
rentabilité d'Hydro-Québec est affectée pour des raisons
que j'ignore, à ce moment-là, tout actionnaire a une
décision à prendre parce que ça peut changer les
règles du jeu.
M. Chevrette: Oui, mais imaginez-vous bien... C'est parce que je
me sers de votre mémoire pour passer des messages.
M. Brunet: Moi, ça?
M. Chevrette: Moi. C'est mon rôle aussi, vous comprendrez
cela.
M. Brunet: Je n'avais pas compris ça.
M. Chevrette: et j'espère que vous vous en êtes
aperçu. c'est évident que les actionnaires
d'hydro-québec... il y a un actionnaire principal qui s'appelle le
gouvernement, mais c'est les citoyens du québec qui paient la facture.
et, à chaque 50 000 000 $ d'argent qu'on va chercher dans
hydro-québec, c'est 1 % de tarification. vous savez ça aussi. on
me dit que c'est 66 000 000 $ cette année qui équivalent à
1 %. mais, l'an passé... pardon?
Le Président (M. Audet): En terminant, s'il vous
plaît.
M. Chevrette: Ça va aller plus vite si vous me laissez
aller, M. le Président. donc, à chaque 50 000 000 $ ou 66 000 000
$ que c'est 1 %, vous comprendrez que je m'intéresse aussi et je prends
toutes les brèches qu'il peut y avoir dans un mémoire qui est
devant nous pour passer le message, marteler le clou.
M. Brunet: Oui, mais permettez-moi, sans vouloir contredire ce
que vous dites, de répondre.
Si on prend notre voisin, Hydro Ontario par exemple, avec pas du tout la
même rentabilité et les problèmes qu'il traverse sans pour
autant avoir les mêmes dividendes et une tarification beaucoup plus
élevée... Donc, on est rendu au point 1993. Il y a beaucoup de
bon travail qui s'est fait depuis 20 ans, ce qui fait que les tarifs sont
beaucoup plus bas que le restant du Canada et le restant des États-Unis,
que l'actionnaire a pu avoir une rentabilité, une vraie
rentabilité en fonction des profits et qu'on a pu tenir les tarifs
à ces niveaux-là tout en conservant, comme je disais
tantôt, les ratios financiers. Si on prend un élément du
puzzle et on le change de ligne, c'est vrai, ce que vous dites. C'est le tout
qu'il faut regarder. C'est l'intégrité du tout qu'il faut
regarder. Alors, à ce moment-là, l'actionnaire doit
décider quoi faire si les règles du jeu changent. Mais si vous
prenez une ligne et la mettez en haut, c'est vrai que pour le consommateur...
Dans un monde idéal, vous admettrez avec moi que si on pouvait baisser
les tarifs, baisser les coûts et garder la même rentabilité,
tout le monde voudrait le faire. La réalité, c'est qu'on veut
penser aux prochains 20 ans.
M. Chevrette: Je vais revenir.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Vimont.
M. Fradet: Merci, M. le Président. Je vais aussi parler,
si vous voulez, de la tarification. Vous avez dit qu'il fallait continuer de
gérer Hydro-Québec pour maintenir la bonne santé
financière d'Hydro-Québec, mais vous avez aussi mentionné
que, d'après vous, il serait difficile pour Hydro-Québec de
conserver une augmentation des tarifs au coût de l'inflation à
long terme. Vous avez dit: Peut-être qu'à court terme c'est
faisable, mais à long terme, ce serait très difficile. Moi, ce
que je me demande, puis vous savez que, dans la population, on souhaite
essentiellement qu'Hydro-Qué-bec n'augmente pas ses tarifs plus hauts
que le taux de l'inflation, si Hydro-Québec prend... Parce que les
tarifs, l'augmentation, c'est des revenus qui rentrent... Je ne suis pas un
grand fiscaliste, mais je vais essayer de comprendre avec vous.
Si Hydro-Québec pouvait ailleurs se dégager une marge de
manoeuvre à long terme, est-ce qu'elle pourrait promettre d'augmenter
ses tarifs selon l'inflation? Je vais vous donner un exemple:
Hydro-Québec se comparait à 15 compagnies d'utilités
publiques semblables en Amérique du Nord en ce qui a trait, entre
autres, au nombre d'employés de la société pour desservir
le même nombre de population. Hydro-Québec se retrouve à
l'extrême droite en haut, parmi ceux qui ont le plus d'employés.
Si elle veut se ramener dans le centre, ramener l'entreprise, la
société d'État dans le centre, pour se comparer aux autres
sociétés d'État, elle devra couper tout près de
8000 employés. J'imagine que les autres sociétés
d'État avec lesquelles elle s'est comparée donnent des services
semblables à la population. Alors, je me dis, moi: Probablement qu'il y
aurait un moyen qu'Hydro-Québec puisse promettre à long terme une
augmentation des tarifs pas plus hauts que l'inflation et se dégager une
marge de manoeuvre ailleurs pour, comme vous le mentionnez, continuer à
gérer d'une façon efficace l'entreprise.
M. Brunet: Quand on fait ces comparaisons-là, il faut bien
comprendre aussi que les comparaisons doivent être faites selon les
circonstances. Si on compare avec les utilités de la Caroline qui a des
lignes peut-être de 100 milles, puis que vous avez des lignes qui
viennent de la Baie James pour l'entretien, il faut mettre toutes ces
choses-là en perspective pour arriver aux chiffres.
Premier point. Alors, il faut faire attention en comparaison pour les
mettre dans le contexte et la perspective.
Deuxième point, je l'ai bien dit tantôt, parce
qu'Hydro-Québec est un monopole, ça ne veut pas dire qu'elle a le
droit de dépenser, pas plus que l'ensemble des corporations. Donc, il
est présumé que l'instruction de l'actionnaire, entre
parenthèses, en fonction de la rentabilité, c'est de gérer
au diapason de 1993 et de la rationalisation. Ce qui n'est pas facile non plus
parce que ça suppose aussi peut-être des mises à pied,
ça suppose un paquet de choses, ce qui est politiquement difficile.
Alors, on est pris face à des réalités puis
à des décisions politiques qui sont peut-être
différentes, mais la réalité est qu'Hydro-Québec
doit gérer ses choses et se comparer favorablement à date
à tous ceux-là.
M. Fradet: Mais c'est évident qu'il va y avoir des gestes
qui vont être difficiles à prendre politiquement, puis le
gouvernement, ailleurs qu'à Hydro-Québec, devra en prendre aussi,
mais je pense qu'on est rendu à une étape très cruciale
des finances publiques et qu'il va falloir, malheureusement, prendre des
décisions politiques, y compris Hydro-Québec.
Mais ce que je peux comprendre de votre intervention, c'est que,
effectivement, Hydro-Québec est capable de le faire à long terme,
de respecter sa promesse à long terme, puis de conserver une
santé financière excellente pour Hydro-Québec. (14 h
40)
M. Brunet: Mais nous, on n'a pas parlé de promesse
à long terme, on a dit: Faisons attention aux décisions à
long terme. Elles peuvent nous amener... On ne dit pas que c'est mauvais, mais
on dit: Faisons attention! Cette année, ça peut être une
chose, mais de ne pas s'engager, de garder toutes les marges de manoeuvre.
Quand j'ai commencé à travailler dans le métier,
dans les années soixante, on pouvait faire des prévisions
économiques, c'était facile, pour deux ans, trois ans; six mois,
c'est le très long terme aujourd'hui parce que tout change rapidement.
Donc, Hydro-Québec vit cette réalité-là aussi.
Donc, c'est de se garder toutes les possibilités de marge de manoeuvre
en fonction de ça.
M. Fradet: Mais si vous, M. Brunet, aujourd'hui, vous
étiez le plus haut gestionnaire à Hydro-Québec, si, vous,
vous étiez président d'Hydro-Québec, vous ne vous
engageriez pas à ça, à l'augmentation des tarifs au taux
de l'inflation? C'est ça que je dois comprendre.
M. Brunet: Oui.
M. Fradet: O.K. Vous avez parlé aussi dans votre
mémoire d'un mécanisme de prix variant selon les
clientèles pour qu'on puisse transférer la totalité de la
charge financière aux abonnés. Est-ce que vous êtes au
courant, dans la proposition tarifaire qu'Hydro-Québec a faite, du
nouveau type de tarif expérimental DH, qui pourrait tarifer les
utilisateurs selon les heures? Ils appellent ça le type
horo-hebdo-saisonnier. Est-ce que, d'après vous, c'est une politique
d'Hydro-Québec qui répondrait à ce que vous avez
mentionné dans votre mémoire?
M. Labrecque: Nous, on trouve que ça va dans le
très bon sens. On pense que c'est un début. Mais ce qu'on dit,
encore une fois, c'est d'essayer d'adapter et les tarifs et,
éventuellement, les politiques d'Hydro-Québec à ce qui
peut se passer.
L'idée, encore une fois, c'est que l'interfinancement a deux
effets. Si vous mettez les prix trop bas, vous avez, évidemment, de la
difficulté à rencontrer vos coûts, mais, ce que vous faites
aussi, c'est que vous surconsommez le produit et ça, c'est les lois
minimums du marché. Si vous mettez quelque chose trop bon marché,
les gens vont en acheter plus que, normalement, ils devraient.
Alors, dans le cas de l'électricité, ce qu'on dit, c'est
plutôt que d'essayer de faire des incitations positives, si vous voulez
les appeler comme ça, faites-les un petit peu plus dissuasives. En
augmentant les prix, non seulement vous assainissez la situation
financière de l'entreprise, mais c'est une très bonne
façon de régler la consommation, de réglementer la
consommation. Les gens s'adaptent. La force du marché, c'est quelque
chose qui existe et pourquoi ne pas l'utiliser?
M. Fradet: En 1984, Hydro-Québec a dû verser 114 000
000$ au gouvernement pour défrayer la taxe sur le capital imposée
en 1981. Si on n'avait pas fait ça, est-ce que, aujourd'hui, on pourrait
récupérer des points sur la tarification?
M. Labrecque: Encore une fois...
M. Fradet: II y a eu une imposition. Hydro-Québec...
M. Labrecque: La ponction que le gouvernement, en tant
qu'actionnaire, peut prendre d'Hydro-Québec, ça lui appartient
comme à n'importe quel actionnaire, qu'il la fasse sous la forme qu'il
veut. Ce qu'on essaie de souligner là-dedans, c'est de dire qu'il y a
des endroits où ça fait plus mal qu'à d'autres et,
évidemment, il y a des paramètres qu'Hydro ne contrôlera
pas. Vous en mentionnez un là, ça appartient au gouvernement de
décider. Nous, on ne le dit pas en termes de montant, on dit simplement
que, quand il y a une ponction en quelque part, ça a un effet sur
l'entreprise et l'entreprise doit récupérer cet argent-là
en quelque part, de là notre suggestion de ne pas bloquer la politique
tarifaire en fonction de l'inflation.
M. Brunet: Un point que j'aimerais ajouter à ça.
J'ai de la difficulté avec cette chose-là, dans le sens que
toutes les taxes spéciales, taxe sur le capital, quand on est dans
l'entreprise, on les vit au même rythme. Ce
n'est pas arrivé juste à Hydro-Québec, ça,
et même encore plus, à certains genres d'entreprises. Les
entreprises se sont adaptées, elles aussi, à ça. Il faut
comprendre que la réalité fiscale, peu importe, existe pour tout
le monde. Si on en transfère sur les tarifs, c'est vrai pour tout
l'ensemble des entreprises aussi. Donc, tout ça, nous, on le regarde en
le comparant à l'ensemble des corporations.
M. Fradet: Et ça revient à ce que vous disiez
auparavant: Lorsque Hydro-Québec a une très bonne
réputation fiscale ou une façon de gérer qui est reconnue
internationalement, parce qu'elle gère et elle a le même fardeau
fiscal que d'autres corporations ou d'autres entreprises, même si c'est
une société d'État.
M. Brunet: C'est-à-dire que l'actionnaire, parce que c'est
une histoire de plusieurs décennies, a toujours décidé que
ces ratios financiers là seraient là, ce qui n'est pas le cas
dans d'autres provinces, et les financements sont excessivement difficiles.
Alors, ça a été une décision de plusieurs
décennies, ce n'est pas quelque chose qui est arrivé et qui a
été raffiné au cours... Donc, le management d'Hydro s'est
conformé au voeu de l'actionnaire en fonction de ça.
Le Président (M. Audet): Merci, c'est terminé.
Alors, M. le député de Joliette, vous avez 10 minutes.
M. Chevrette: Oui, je veux revenir. M. Brunet: Taxe sur
capital? M. Chevrette: Pardon? M. Brunet: Taxe sur capital?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Non, je vais plutôt aller sur les frais de
garantie.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Parce que vous semblez trouver ça normal.
C'est ça que je ne comprends pas dans votre... Vous portez un jugement:
c'est tout à fait normal que le gouvernement puisse aller chercher des
dividendes. Ça vous apparaît très, très normal. Mais
il aurait pu procéder différemment, et vous n'auriez pas à
nous mettre en garde contre l'effet des frais de garantie dans votre
mémoire, à ce moment-là. Il aurait pu, ou bien changer les
ratios pour en arriver à se faire payer des dividendes...
Je ne comprends pas que, d'un côté, vous trouvez que
l'actionnaire puisse faire ce qu'il veut, puis, de l'autre côté,
vous nous mettez en face de la réalité des effets négatifs
de cette volonté de faire ce que tu veux.
En d'autres mots, il faudrait que vous endossiez un chapeau, pas les
deux à la fois.
M. Brunet: Bon, on va essayer de reprendre ça pour
démêler ça.
D'abord, je n'ai pas dit que l'actionnaire pouvait faire ce qu'il
voulait. Je pense que la responsabilité d'un actionnaire, qu'il soit
corporatif ou gouvernemental, c'est qu'il a à agir en fonction de normes
reconnues. On pourrait se voter un dividende de 100 %. On pourrait se voter un
dividende de 150 %. Il y a des exemples qui se sont passés dans les
corporations qui ont fait qu'on connaît les difficultés
d'aujourd'hui. L'actionnaire peut agir d'une façon responsable ou pas
responsable. La réputation d'Hydro j'essaie de me reprendre et je
vais peut-être me répéter elle est excellente, parce
que et l'actionnaire et Hydro ont agi d'une façon responsable en
fonction des ratios financiers et tout ça.
Là, vous me dites, vous trouvez ça un peu spécial
que je dise de payer un dividende.
M. Chevrette: Je ne vous dis pas tout ce que je pense.
M. Brunet: Non, non. En termes purs, qu'une personne ait des
obligations du Québec avec un rendement de 8 %, elle va être
payée 8 %. Quand il y a un dividende, il y a une notion
supplémentaire qui est le risque et l'actionnaire peut décider de
passer ou d'ajouter ou de mettre les normes qu'il veut. La gestion d'Hydro,
moi, ce que j'essaie de répéter, c'est que l'actionnaire
principal peut prendre les décisions qu'il veut, mais je lui conseille
de penser, quand il prend la décision, de tenter de conserver 30 ans
d'histoire de ratios financiers qui fait la bonne réputation d'Hydro.
Et, à ce moment-là, de tenter, à l'intérieur de
ça, de prendre la meilleure décision possible tout en
reconnaissant aussi la situation économique actuelle.
M. Chevrette: Je vous suis. Jusque-là, il n'y a pas de
problème. D'ailleurs, c'était la législation qui
prévoyait même le mode de paiement de dividendes. Donc,
jusque-là, moi, je vous suis à la lettre.
C'est parce que vous tombez en disant tout de suite après: C'est
normal que l'actionnaire puisse se prendre des choses. Et là, il y a
modification parce que, dans le passé, les dividendes n'étaient
pas payés s'ils n'avaient pas atteint des ratios ou le respect des
ratios. Vous le savez très bien. Du jour au lendemain, comme on ne peut
pas percevoir de dividendes, on prend un moyen budgétaire de se faire
payer ou d'imposer une nouvelle taxe qui n'avait jamais été
imposée par le passé, mais qui est l'équivalent d'un
dividende parce que, vous-même, vous dites quasiment: L'employeur se paie
un dividende de la façon qu'il veut bien.
M. Brunet: Je n'ai pas dit ça tout à fait comme
ça. Non.
M. Chevrette: Vous, vous reconnaissez, dans le fond, à
toutes fins pratiques, que l'employeur est allé se chercher un dividende
alors que, moi, je vous dis, du même souffle, que vous reconnaissez
tellement que c'est ça que vous dites: D'autre part, s'il fait
ça, il faudrait qu'il fasse attention parce que ça peut avoir des
répercussions négatives pour la structure d'emprunt
d'Hydro-Québec. Là, je vous suis, mais je ne comprends pas que
vous mettiez des gants blancs pour une chose, puis roses pour l'autre.
M. Branet: Ça doit être parce qu'on est
financiers.
M. Chevrette: En d'autres mots, si je vous disais tout ce que je
pense, je dirais: Vous trouvez normal un geste qui, à votre point de
vue, n'aurait pas dû être posé de telle façon, puis,
en même temps, vous reprochez de l'avoir fait.
(14 h 50)
M. Labrecque: Si vous permettez, ce qu'on dit, c'est qu'il y a
des événements sur lesquels l'entreprise n'a pas de
contrôle. On parle, dans la même page, des taux
d'intérêt réels qui pourraient affecter très
sérieusement les profits. On parle également des
prélèvements gouvernementaux, peu importe la forme sous laquelle
ils sont faits et peu importe le gouvernement qui le fait. J'ai l'impression
que, que ce soit un gouvernement ou un autre, à un moment donné
dans l'histoire, un parti ou un autre, les gouvernements font face à des
contraintes et ils essaient de répondre aux contraintes auxquelles ils
ont à faire face. Ce qu'on dit, nous, c'est que ça, ça ne
nous regarde pas. L'Assemblée nationale étant souveraine, les
gouvernements ayant la majorité en Chambre pour prendre les
décisions qu'ils veulent, ce qu'on dit, nous, c'est simplement à
la fois de bloquer les tarifs à l'inflation sans qu'on ne puisse
contrôler les prélèvements gouvernementaux, qu'on ne puisse
contrôler les taux d'intérêt réels, on risque de
mettre l'entreprise dans des difficultés financières, ce qu'on
voudrait essayer d'éviter, comme M. Brunet l'a mentionné.
M. Chevrette: En d'autres termes, c'est parce
qu'Hydro-Québec n'est pas maître du rétablissement de sa
situation suite à une ponction du même actionnaire.
M. Labrecque: Encore une fois...
M. Chevrette: L'actionnaire, dans les circonstances, est le
même que celui qui décide de l'alignement des tarifs. Donc, il se
prend... Je veux savoir si j'ai bien compris. Je suis sûr que j'ai bien
compris, mais pour m'en assurer. En d'autres mots, le gouvernement
préparez-vous une réponse qui est actionnaire principal va
se chercher un dividende par un moyen x et, en même temps, force Hydro
à s'aligner, au niveau de sa tarification, sur l'inflation, d'où
le danger si cette mesure-là était le moindrement perma- nente,
parce que ça ne lui permet pas d'avoir la liberté complète
de garder une tarification correspondant à ses besoins. C'est bien
ça?
M. Brunet: Là, là, vous voulez me faire dire que
la...
M. Chevrette: Non, mais c'est ça que vous voulez dire?
M. Brunet: Je vais vous répéter ça dans mes
propres mots. Vous voulez me faire dire que la taxe de capital, c'est un
dividende détourné, contourné ou... C'est un dividende
présumé, si vous voulez, pour prendre des termes fiscaux.
Moi, là, je vis dans un monde où on est taxé. On
est taxé sur le capital, on est taxé sur les profits et on est
taxé sur les salaires, et c'est une réalité. Il faut
gérer ça en fonction de ça. Hydro-Québec est dans
la même réalité que nous autres. S'ajoute la dimension de
décider quelle ligne, comme je l'ai dit tantôt. Donc, moi,
là, je n'ai pas de problème quand un actionnaire décide
quelque chose à condition que ça respecte les normes qui sont
là. Alors, la taxe sur capital et l'impôt, en tout cas, je suis
obligé de vivre avec ça et Hydro est obligée de vivre avec
ça et puis, c'est de garder l'intégrité financière
à l'intérieur de ça. Si l'actionnaire...
La première fois que le dividende avait été
passé sous un gouvernement précédent où vous
étiez, on a eu beaucoup de difficultés à vendre
l'idée, parce que c'était nouveau et puis, à ce
moment-là, il a fallu visiter les grandes villes internationales pour
s'assurer que les obligations d'Hydro-Québec... ce n'était pas
réellement, disons, de venir piger dans le pot et que tout
disparaîtrait. Et il y a eu une promesse non écrite, si on veut,
qu'on agirait corporativement et que les ratios financiers seraient là.
Donc, c'est devenu acceptable, parce que Hydro-Québec est devenue une
corporation qui paie un dividende. Si elle paie la taxe sur le capital, la
fiscalité et le budget, ce n'est pas moi qui les fais. C'est de nous
assurer de gérer nos propres compagnies ou les compagnies d'État
en fonction des règles du jeu.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Labelle, une brève question.
M. Léonard: Oui, une brève question. le taux de
capital d'hydro-québec est de 25 %. si on le porte à 30 %,
ça a certaines implications. les ratios s'améliorent, etc., et la
cote d'hydro-québec peut monter. quel est l'effet, en termes de taux
d'intérêt, de passer d'une cote à l'autre? en passant, par
exemple, à un taux de capitalisation de 30 %, on baisse de façon
significative le taux d'intérêt de un demi point. quel est l'effet
sur le taux d'intérêt? est-ce que vous avez déjà
estimé le rendement marginal d'une opération comme
celle-là?
M. Labrecque: Le problème qu'Hydro va ren-
contrer, c'est que sa cote est soumise à celle de celui qui donne
la garantie. alors, le problème, c'est que la situation
financière d'hydro-québec à 30 % de capital, ça
serait sûrement mieux. les compagnies privées sont à 45 %,
des fois à 50 %. il est certain que nominalement, ça devrait
produire l'effet que vous mentionnez, mais pratiquement, le problème
pour hydro, c'est que, étant une corporation gouvernementale garantie
par le gouvernement du québec, la règle non écrite c'est
qu'hydro ne peut pas avoir une cote de crédit meilleure que celle que
l'entité qui le garantit.
M. Léonard: Ça répond à ma
question.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
Vous y allez avec des gants blancs, M. Brunet, avec deux
paramètres, à la page 5, en disant qu'il y avait deux
paramètres, finalement, qui n'étaient pas dans les limites de
contrôle d'Hydro-Québec, soit les prélèvements et
les dépenses d'intérêts. Mais il y a une autre variable
aussi à travers les années, les 10 dernières années
qu'on a connues. Il y a eu une faible hydraulicité aussi qui est apparue
dans l'image. Il y a deux de ces variables-là qui sont hors
contrôle d'Hydro-Québec. Ne croyez-vous pas qu'avec les
circuits... D'année en année l'hydraulicité s'étant
rétablie, HydroQuébec prévoit avoir des surplus en 1992,
1993 et 1994.
Ne croyez-vous pas que si un bon actionnaire disait: Je vais prendre une
partie de ces surplus-là que je n'avais pas prévus et je vais me
bâtir un fonds de stabilisation qui me permettra, dans les années
ultérieures, soit parce que l'actionnaire prendra des
prélèvements de dividendes pour ses propres raisons et que les
taux d'intérêt fluctueront, d'équilibrer et de garder ma
santé financière... Comment est-ce que vous réagissez
à une situation de cette nature-là?
M. Brunet: Un fonds de stabilisation, je serais d'accord avec
ça. Ça serait même une bonne chose. Mais, quand vous
décidez de faire un fonds de stabilisation, vous le décidez en
même temps que la tarification parce que c'est une réserve que
vous créez.
M. St-Roch: II y a deux manières qu'on peut le faire. On
peut le faire à partir d'une tarification et on peut le faire aussi...
Hydro-Québec nous a dit qu'il prévoit vendre 14 TWh pour 1992,
1993, 1994; 2 en 1992, 3 en 1993 et 9 en 1994. Alors, cet argent-là, qui
est un surplus, serait une autre manière aussi, sans toucher à la
tarification, à ce moment-là, de le bâtir.
M. Brunet: Je ne suis pas assez versé dans
l'ingénierie pour comprendre tout le jeu des réserves d'eau et
savoir quand c'est le temps et que ce n'est pas le temps, parce qu'on m'a
toujours expliqué que, quand on le regarde sur 25 ans, c'est des cycles
qui reviennent régulièrement. À partir de là,
ça prendrait un expert qui vous donne...
M. St-Roch: C'est ce qu'ils nous ont dit. On va voir
ça...
M. Brunet: S'ils vous ont dit ça... Par contre, j'accepte
votre suggestion. Je trouve que d'avoir un fonds de réserve, c'est une
bonne idée. Mais comment le créer, là...
M. St-Roch: Alors, l'idée serait bonne. deuxième
question. si hydro-québec décidait d'accroître sa recherche
et développement dans un but d'être un levier de
développement futur des petites et moyennes entreprises et que ça
affectait légèrement, pour une période d'un an ou deux, en
accentuant cette recherche et développement un exemple, on
prévoit 2 % d'ici l'horizon 2000... elle dirait: on va
accélérer notre procédé, de l'avoir plus rapidement
en 1994-1995, on va dépasser les 2 %, on irait à 2,5% ou 2,8 %
pour se mettre au diapason des autres pays, et ça affecterait
légèrement, à court terme, les fameux trois piliers, les
trois ratios. est-ce que ce serait perçu négativement pour la
communauté financière ou de bonne guerre?
M. Labrecque: ce qui est important et on l'a
mentionné en 1990 ce n'est pas le fait en soi qu'on dise
qu'hydro-québec va maintenir 25 % de capital. que vous descendiez
à 24,5 % pendant une année, deux années, trois
années, je pense que ça ne pose pas en soi un problème. le
problème, c'est qu'il y ait une tendance négative pendant trop
longtemps. à ce moment-là, il est certain que si
hydro-québec veut faire un effort conjoncturel à un moment
donné, oui, je pense que vous avez raison en disant que ça peut
être quelque chose d'intéressant. pourquoi pas? mais, encore une
fois, ce qui est important, c'est de préserver la santé
financière de l'entreprise à moyen terme et à long terme.
les fluctuations saisonnières, les fluctuations occasionnelles, je pense
que tout le monde va les admettre, mais c'est le fondamental qui compte pour
les gens de finance.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Audet): Merci.
Alors, messieurs, on vous remercie sincèrement de votre
présentation. On vous souhaite un bon retour chez vous; l'avion vous
attend à 16 heures, je crois. Alors, bon retour. Merci.
Afin de permettre aux représentants de l'Association
québécoise du gaz naturel de prendre place, nous allons suspendre
deux minutes.
(Suspension de la séance à 14 h 59)
(Reprise à 15 h 2)
Le Président (M. Audet): La commission reprend ses
travaux. Nous recevons maintenant l'Association québécoise du gaz
naturel.
Alors, madame, messieurs, on vous souhaite la plus cordiale bienvenue.
Je vous rappelle brièvement le déroulement de nos travaux: vous
disposez d'une vingtaine de minutes pour faire votre présentation et
vous présenter, ce qui est très important pour le Journal des
débats, ensuite suivra une période d'échanges d'une
quarantaine de minutes. Je vous invite à vous présenter et
à nous faire part de votre exposé.
Association québécoise du gaz naturel
(AQGN)
M. Rivest (Michel): Merci, M. le Président.
Au nom de l'Association québécoise du gaz naturel, je
remercie M. le président de la commission de nous entendre. Je remercie
également Mme la ministre de l'Énergie pour avoir invité
l'AQGN à être présente.
Mesdames et messieurs, je me présente, mon nom est Michel Rivest.
C'est avec plaisir que j'ai accepté de représenter l'Association
québécoise du gaz naturel pour commenter le plan de
développement 1993 d'HydroQuébec. Je suis le dirigeant d'une PME
dont l'activité principale est la conception et l'installation de
systèmes de chauffage. Mon entreprise emploie, sur une base permanente,
environ 50 personnes. L'Association québécoise du gaz naturel,
l'AQGN, dont je suis le vice-président, regroupe l'ensemble des
entreprises oeuvrant dans le marché du gaz naturel au Québec.
L'Association implique des manufacturiers et des distributeurs
d'équipement, des ingénieurs-conseils, des installateurs ainsi
que des distributeurs de gaz naturel.
L'Association québécoise du gaz naturel a pour mission
d'organiser des rencontres et des discussions de façon à
promouvoir et mettre en valeur l'industrie du gaz naturel et ses industries
connexes au Québec. Elle vise à assurer le développement
mutuel de ses membres, en valorisant les échanges d'informations et
d'idées. Porte-parole de ses membres, l'AQGN cherche à faire
valoir leur point de vue auprès des autorités gouvernementales et
toute autre organisation impliquée dans le marché. C'est pour
cette raison que l'AQGN est ici aujourd'hui.
Je vous présente Louise Courtemanche, ingénieure en
électricité chez le Groupe Centco, entrepreneur en plomberie et
chauffage, membre de l'Association. Mme Courtemanche vous fera un
résumé du mémoire de notre Association.
Mme Courtemanche (Louise): Mesdames, messieurs, en qualité
de praticiens traitant de choses concrètes avec la clientèle, les
membres de l'Association québécoise du gaz naturel en sont venus
à reconnaître que la chaîne des innovations en ce qui
regarde l'optimisation de l'énergie se brise souvent bien avant que les
limites de la technologie s'atteignent. Trop souvent, les contraintes
institutionnelles, les codes et les réglementations, les taxes et les
subsides ainsi que les structures tarifaires périmées contribuent
ensemble à ralentir le rythme des innovations. L'Association
désire féliciter le gouvernement du Québec d'avoir fait
preuve de vision lors de la préparation de la stratégie
québécoise d'efficacité énergétique
récemment présentée. Nous croyons que dans ce document
résident des solutions aux problèmes d'optimisation du bilan
énergétique du Québec. Par ailleurs, pour
Hydro-Québec, l'efficacité énergétique veut dire
une utilisation efficace de l'électricité. Or, la
clientèle considère la réduction des coûts
d'électricité comme purement accessoire à la minimisation
des coûts totaux d'énergie. L'équation
énergétique des clients implique trois variables:
l'intensité de l'énergie, le niveau d'activité, mais aussi
la source d'énergie.
Parce que Hydro-Québec est un instrument privilégié
du gouvernement du Québec dans l'application de notre stratégie
d'efficacité énergétique, il est important
qu'Hydro-Québec élargisse sa définition de ce qu'est la
véritable efficacité énergétique. Pour l'AQGN et
pour ses clients, l'efficacité énergétique veut dire des
technologies performantes, des comportements d'utilisation responsables, mais
surtout la source d'énergie la moins chère pour
l'application.
En définitive, Hydro-Québec devrait orienter les
consommateurs vers une source d'énergie plus appropriée lorsque
celle-ci s'avère plus avantageuse. L'instrument utilisé pour
l'évaluation de la rentabilité des options en matière
d'économie d'énergie, soit le coût évité,
donne une appréciation assez exacte du coût marginal de fourniture
pour un type donné de charges électriques à raccorder. En
effet, le coût de production d'électricité est intimement
relié à la période de fourniture. Dans ce contexte, il
n'est pas surprenant de constater que ce coût pour la production de
chauffage soit très élevé.
La pointe annuelle de la demande d'électricité se produit
toujours par un très grand froid. Les infrastructures permanentes
d'Hydro-Québec se doivent d'être construites de façon
à répondre à cet appel maximal bien que cet appel puisse
ne persister que durant quelques heures. L'approche du coût
évité permet de calculer la rentabilité de la fourniture
d'électricité servant à des applications de chauffage.
Cette approche présume un horizon où il faudra développer
de nouvelles ressources pour combler la demande.
Dans cet exemple hypothétique à l'égard du seul
segment résidentiel, Hydro-Québec subventionne le chauffage pour
une somme annuelle de 884 800 000 $. En outre, pour chaque nouvelle
construction ou réfection au tout électrique, Hydro-Québec
engage ses clients à une hausse tarifaire, laquelle devra combler un
manque à gagner de 442 $ par année. La grande popularité
de l'électricité porte à croire que cette forme
d'énergie est la moins dispendieuse à l'utilisation. Pourtant, au
contraire, le gaz naturel est plus économique que son rival.
durant la dernière décennie, le québec s'est rendu
captif à l'utilisation de l'électricité pour le chauffage.
en effet, au cours de cette période, la part du marché du
chauffage électrique progressa de plus de 50 % pour le secteur
résidentiel, et de plus de 100 % pour le secteur commercial et
institutionnel. et pourtant, hydro-québec ne fait pas ses frais dans le
marché du chauffage. (15 h 10)
Autre réalité troublante, Hydro-Québec
prévoit une croissance constante du chauffage électrique dans les
années à venir. Il est anticipé un taux de diffusion de
l'électricité de près de 90 % dans la nouvelle
construction du marché résidentiel et de 66 % pour le
marché commercial. L'augmentation de la demande jumelée aux
coûts marginaux croissants exerceront une pression à la hausse sur
le coût moyen de production de l'électricité. L'entreprise
qui souhaite fixer l'augmentation du coût moyen de
l'électricité suivant le taux d'inflation devra tôt ou tard
prendre en compte ses coûts marginaux dans la tarification. D'ailleurs,
la société d'État reconnaît la
nécessité de procéder à une plus grande
différenciation du signal tarifaire.
Afin de mieux refléter ses coûts marginaux,
Hydro-Québec étudie ses options en matière de tarification
différenciée dans le temps, tels le tarif saisonnier et le tarif
en fonction de la température. Inévitablement, dans l'avenir,
l'électricité utilisée pour le chauffage coûtera
beaucoup plus cher pour l'utilisateur. L'Association québécoise
du gaz naturel estime que le chauffage des locaux par de
l'électricité consomme souvent de façon
démesurée et représente une responsabilité, voire
un fardeau inutile, pour Hydro-Québec ainsi que pour tous les
Québécois.
En dépit de l'avantage des coûts du gaz naturel sur
l'électricité pour le chauffage, les propriétaires
continuent à chauffer avec l'électricité. Pourquoi?
Premièrement, la tarification électrique ne reflète pas
les coûts réels de fourniture. Il en résulte une subvention
déguisée pour les clients «chauffage»
défrayée par l'ensemble des consommateurs
d'électricité. Autre problème, les coûts d'achat et
d'installation des équipements électriques sont inférieurs
à ceux des équipements au gaz. Malheureusement, les
décideurs de l'approvisionnement des équipements de chauffe ne
considèrent pas toujours les frais d'exploitation à long terme
dans leur décision. Ces décideurs ne sont pas habituellement ceux
qui défraient les coûts d'énergie. Les factures
énergétiques se transmettent continuellement du promoteur
immobilier au propriétaire, et de ce dernier au locataire.
L'information n'est pas suffisamment diffusée. Les renseignements
fournis aux décideurs ne contiennent pas tous les éléments
qui permettraient de procéder à des décisions
éclairées en matière d'économie d'énergie.
Souvent, les mécanismes de financement sont inadéquats. Le
coût initial plus élevé des équipements au gaz
naturel est largement compensé par les coûts d'opération
moindres de ces appareils. Malheureusement, les institutions financières
ne considèrent pas assez cette variable.
Finalement, si nous devons exprimer en deux mots la faible diffusion du
gaz naturel, ces mots seraient «plinthe électrique».
L'utilisation sans réserve de la plinthe chauffante a rendu captive de
l'électricité une grande proportion du parc immobilier. L'absence
de canalisation air et eau fait en sorte que les coûts de conversion vers
d'autres sources d'énergie sont prohibitifs. Le client dépourvu
d'un système de chauffage central sera bientôt la victime des
tarifs élevés et sera, pour notre société, un
fardeau énorme.
Quelques recommandations. Considérant qu'il serait à
l'avantage de tous les Québécois que le gaz naturel soit
utilisé dans les domaines du chauffage des locaux et de l'eau sanitaire,
l'Association québécoise du gaz naturel recommande les mesures
suivantes:
Réviser la grille tarifaire d'Hydro-Québec en fonction des
coûts marginaux de fourniture. La vérité des prix incitera
les utilisateurs d'énergie à rationaliser leur consommation.
Cette mesure stimulera l'innovation.
Incorporer au programme d'efficacité énergétique la
substitution de l'électricité par le gaz naturel. Ceci aura pour
effet de réduire les coûts en énergie dans les secteurs
résidentiel, commercial et institutionnel. De plus, la clientèle
d'Hydro-Québec bénéficiera d'un coût moyen de
l'électricité moins élevé.
Faciliter les mécanismes de financement pour les projets en
efficacité énergétique. Cette mesure palliera aux
problèmes de liquidité souvent à l'origine de mauvais
choix technologiques.
Sensibiliser les consommateurs aux avantages de l'utilisation du gaz
naturel. Le gouvernement possède la responsabilité de guider vers
la source d'énergie la plus appropriée.
Favoriser la coopération entre les firmes d'utilité
Hydro-Québec et Gaz Métropolitain. Il en résultera une
harmonisation des programmes commerciaux au bénéfice des
Québécois.
En conclusion, la dernière décennie fut témoin
d'une transformation significative de l'industrie de l'énergie. Les
politiques gouvernementales et les diverses commissions d'étude
conduisirent à des changements appréciables, tels que la gestion
de la demande de l'électricité, ainsi que la
déréglementation de l'approvisionnement et du transport du gaz
naturel. L'année dernière, le Québec s'est doté
d'une stratégie d'efficacité énergétique qui vise
à encadrer et à coordonner l'effort collectif entrepris par le
Québec pour mieux utiliser l'énergie. Le Québec dispose de
plusieurs atouts énergétiques. Il possède des ressources
hydroélectriques abondantes qui représentent une formidable
richesse collective.
L'AQGN souhaite le développement soutenu de
l'hydroélectricité et veut amplifier l'effet de levier sur
l'économie du Québec. Le gaz naturel est disponible en abondance
et à un coût plus que concurrentiel. Dans l'optique de l'AQGN,
utiliser l'électricité pour la chauffe occasionne une
réduction de l'avantage compétitif que possède le
Québec grâce à son immense potentiel
hydroélectrique. À notre avis, il importe de conserver cette
électricité dite noble à l'endroit d'utilisation
à
haute valeur ajoutée si essentielle au développement
social et économique de la province. Dans l'esprit conceptuel, le
coût énergétique le plus bas possible par unité de
valeur ajoutée, il est nécessaire qu'Hydro-Qué-bec,
conjointement avec Gaz Métropolitain, procède à la
création de programmes de substitution. En définitive, ces
programmes s'avéreront des activités qui feront la promotion du
gaz naturel lorsque l'utilisation de cette forme d'énergie procurera des
bénéfices à long terme à tous les clients.
Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup, madame.
Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie
et des Ressources.
Mme Bacon: Alors, madame, messieurs, je voudrais vous souhaiter
la bienvenue. Vous êtes des représentants d'une nouvelle
association, et je voudrais vous féliciter aussi pour cet esprit
d'initiative et de leadership dans le domaine du gaz naturel. Malgré une
courte histoire, je pense que vous êtes en mesure de nous
présenter vos vues sur la proposition du plan de développement
d'Hydro-Québec et je suis certaine que Gaz Métropolitain ne sera
pas fâché de telles vues.
Votre mémoire vise à démontrer qu'il serait de
l'intérêt des Québécois qu'Hydro-Québec fasse
la promotion de l'utilisation du gaz naturel dans le marché de la
chauffe. À ce sujet-là, vous faites référence aux
orientations qui sont prises par Ontario Hydro, la New England Electric,
lesquelles intègrent la substitution dans leurs activités de
conservation de l'énergie. Mais Ontario Hydro a récemment revu en
profondeur son plan de développement et ses interventions en
matière d'efficacité énergétique.
Donc, à la suite de récentes coupures de 1 000 000 000 $
dans les économies d'énergie, est-ce que vous pouvez nous dire si
cet aspect de son programme est toujours en vigueur? (15 h 20)
M. Rivest: Malheureusement, je ne suis pas en mesure de vous
donner le développement le plus récent au niveau du projet de loi
qui avait été déposé en juin, je crois. C'est vrai
que les circonstances et les conditions qui existent présentement en
Ontario ne sont pas les mêmes qu'ici. Les finances d'Hydro-Québec
sont beaucoup plus saines, et j'en remercie tout le monde à
Hydro-Québec. Par contre, je crois que le principe de substitution, tel
que nous le proposons, est à l'avantage de tous les
Québécois. Les coûts marginaux étant ce qu'ils sont
pour Hydro-Québec, je crois qu'il serait tout à fait à
l'avantage de tous qu'on libère une bonne proportion du potentiel
hydroélectrique pour des utilisations de base et que la croissance
future de notre demande d'électricité soit comblée non pas
par de nouveaux barrages à des coûts très
élevés, mais peut-être partiellement par du gaz naturel
utilisé de façon très efficace dans nos résidences
ou pour des applications de chauffe dans le domaine commercial.
Mme Bacon: Êtes-vous en mesure de nous informer aussi sur
d'autres différences qui existent entre les entreprises, comme celles
que je viens de mentionner, et Hydro-Québec, plus spécifiquement
au niveau de leur parc de production? Est-ce que votre proposition irait
jusqu'à transposer intégralement ces orientations-là au
Québec?
M. Rivest: Absolument pas, pas du tout. La production aux
États-Unis, comme on le sait, elle est beaucoup plus axée sur le
thermique. On utilise encore énormément le charbon. C'est
beaucoup plus polluant que notre...
Mme Bacon: Oui.
M. Rivest: ...hydroélectricité. Nous sommes
conscients, à l'Association, que l'hydroélectricité est
une électricité très noble, très propre. Par
contre, ça n'empêche pas que le gaz naturel, au prix qu'il est, a
des avantages dans le domaine de la chauffe. Ce qu'on dit à
l'Association, c'est: Pourquoi pas profiter de notre
hydroélectricité à bon marché et conserver ses
tarifs le plus bas possible pour que nos entreprises puissent
bénéficier de ces tarifs-là, à bas prix? Parce que,
chaque fois que l'on rajoute des charges type chauffage, finalement, on doit
augmenter le coût moyen. Et c'est tous les abonnés
d'Hydro-Québec qui vont écoper de ces charges-là, qui
n'ont pas un coefficient d'utilisation très intéressant.
Mme Bacon: À la page 21 de votre mémoire, vous
mentionnez que la tarification électrique, dans la mesure où elle
ne reflète pas les coûts réels de fourniture, constitue une
subvention déguisée pour les clients «chauffage». Ces
situations d'interfinancement, est-ce que ça ne se retrouve pas aussi
dans les marchés du gaz naturel?
M. Rivest: Ça existe également dans le
marché du gaz naturel entre le commercial et le résidentiel. Je
ne fais pas la morale à Hydro-Québec en termes
d'interfinancement. Je réalise qu'il y a des enjeux politiques qui sont
bien au-delà de ma compréhension ou même de mon intention.
Par contre, ce que je dis, c'est que l'in-terfinancement, au niveau du
chauffage, est beaucoup plus évident du côté de
l'hydroélectricité à cause de la forme et du type de
production hydroélectrique qui nécessitent des investissements de
capitaux beaucoup plus élevés. Alors, une charge à
coefficient d'utilisation très faible pénalise plus
Hydro-Québec qu'il pénalise, par exemple, Gaz
Métropolitain.
Mme Bacon: C'est parce que vous dites... Je ne veux pas revenir
à la politique, je n'en fais pas une question politique, j'en fais une
question de sous et de dollars.
M. Rivest: D'accord.
Mme Bacon: Parce que l'interfinancement, ça se retrouve
aussi sur les marchés du gaz naturel.
M. Rivest: Ça se retrouve en ce qui a trait au
résidentiel et au commercial. Je ne suis pas en mesure de
répondre à la question, si ça se retrouve en termes de
charge chauffage versus charge de base. Je crois que la nature
«stockable» du gaz naturel fait en sorte qu'il y a moins de
préjudice du type de charge. La charge chauffage versus une charge de
base crée moins de préjugés. Alors, l'interfinancement
entre le chauffage et d'autres types de charges serait moins important.
Mme Bacon: Ça peut représenter combien comme
subvention? Parce que vous parlez de subvention déguisée.
M. Rivest: Écoutez, quand j'utilise...
Mme Bacon: Mais au niveau du gaz naturel, ça
représente pas mal d'argent aussi.
M. Rivest: Lorsque je parle de subvention, je parle d'une
situation hypothétique.
Mme Bacon: J'ai bien dit «déguisée»,
j'ai utilisé les mêmes mots.
M. Rivest: Lorsque j'utilise le mot «subvention», je
parle d'une situation hypothétique où les coûts de
livraison d'électricité correspondraient aux coûts
marginaux de construction de nouveaux barrages. C'est bien clair ici
qu'Hydro-Québec doit, au niveau de sa rentabilité, tenir compte
de son coût moyen. Alors, le mot «subvention» présume
un horizon où il y aurait futurs développements
hydroélectriques.
Mme Bacon: Mais quand vous chargez, au gaz naturel, au coût
marginal, il y a une subvention là aussi.
M. Rivest: Chaque nouvelle charge au gaz naturel implique un
coût marginal décroissant. À ce moment-là, le
coût marginal décroissant, c'est à l'avantage de tout le
monde à ce qu'il y ait plus de charges raccordées au gaz naturel.
Le phénomène est inverse avec l'électricité, plus
il y a de charges, plus le coût moyen augmente.
Mme Bacon: Je vais revenir à autre chose parce qu'on ne
s'entendra pas là-dessus. Je n'ai pas ma réponse. À la
page 17...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Bacon: Non, il y a quand même aussi des subventions
déguisées. Ça ne sera pas 700 $ par ménage, c'est
ça qu'il faut regarder.
M. Chevrette: C'est sûr. Non, c'est parce qu'on peut pas
toujours avoir les réponses qu'on veut. J'ai essayé tout à
l'heure, moi, et je ne les ai pas eues.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Bacon: Non, mais c'est parce que j'ai 700 $ dans ma
tête que je veux vous faire dire et que vous ne dites pas.
À la page 17 de votre mémoire, vous proposez que le
Québec exporte l'électricité vers les réseaux
thermiques voisins et convertir au Québec le chauffage électrique
à l'aide de technologies gazières.
Si on cerne bien votre perspective, les orientations que vous nous
proposez feraient en sorte d'assainir la qualité de l'air chez nos
voisins au détriment de la nôtre. C'est un peu ça.
M. Rivest: Non, à l'avantage de la nôtre.
Mme Bacon: Ce n'est pas fini. Vous n'êtes pas sans ignorer
que le Canada a quand même pris des engagements dans le cadre de
conventions internationales sur la réduction de la pollution
atmosphérique. Le gouvernement du Québec, on a souscrit à
ça, c'est évident.
Comment les entreprises du secteur gazier peuvent-elles aider le
gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec à respecter
leurs engagements en matière de changements climatiques et est-ce que la
substitution de l'électricité par le gaz naturel constitue la
voie à suivre pour y parvenir?
M. Rivest: Je ne connais pas quels engagements ont
été pris au niveau de la pollution atmosphérique. Ce que
j'aimerais dire, au niveau de la substitution, par exemple, et de la pollution
en général, des effets environnementaux en général,
c'est que, malgré tout ce que j'ai fait comme recherche, je n'ai pas pu
trouver une étude qui quantifiait en dollars les effets
environnementaux. On parle en termes de tonnage de polluants ou d'acres
carrés inondés, mais je n'ai pas trouvé de quantification
en dollars. Alors, si on élimine la substitution parce qu'on dit que
c'est polluant, à ce moment-là, on le fait sans aucun appui
financier.
Mme Bacon: Les ententes ne sont pas faites en dollars. Les
ententes internationales ne sont pas faites en dollars.
M. Rivest: Mais mon mémoire ne traite pas, disons,
d'ententes internationales. Malheureusement, je...
Mme Bacon: Je suggérerais d'aller chercher... Je vais vous
envoyer notre entente.
M. Rivest: Ça me ferait plaisir.
Mme Bacon: Vous remettez en cause, aussi, les orientations
d'Hydro-Québec sur la substitution. Vous attaquez deux arguments, soit
l'existence d'un potentiel hydroélectrique économique, les effets
environnementaux de l'utilisation des combustibles fossiles. Concernant votre
premier argument, vous basez votre démonstration sur le coût de
fourniture pour le chauffage électrique sans prendre en compte le
coût de fourniture du gaz naturel en période de pointe.
La demande de pointe, ça occasionne des coûts additionnels
autant pour la production d'électricité que pour la distribution
du gaz. Et vous dénoncez aussi le fait qu'Hydro-Québec s'en soit
remise à la consultation publique pour rejeter la substitution à
cause de ses effets environnementaux. Et vous admettez aussi vos lacunes pour
débattre des coûts relatifs à la pollution de l'air.
Qu'est-ce qui, selon vous, pourrait légitimer Hydro-Québec
de passer outre aux avis formulés lors de cette consultation que nous
tenons en ce moment?
M. Rivest: C'est que c'est très qualitatif. Lorsqu'on
parle de consultation publique, c'est très facile, dans une consultation
publique, je crois, de trouver des opinions favorables et défavorables
à n'importe quel sujet. Alors, prendre une option d'approvisionnement
qui est la substitution et dire qu'on l'écarté parce que certains
s'y sont opposés, je crois que ce n'est pas la rigueur
nécessaire. Ce n'est pas avoir la rigueur nécessaire de faire la
démonstration qu'effectivement il y aurait des coûts
environnementaux tels que c'est une option qui n'est pas intéressante.
On est allé, par exemple, plus loin dans l'évaluation du
potentiel de cogénéra-tion. Pourtant, les mêmes
émanations existent, j'imagine, dans ces unités de production
là.
Alors, ce que je demande, finalement, à HydroQuébec, c'est
d'approfondir le dossier de la substitution. S'ils le peuvent, qu'ils me
démontrent ou qu'ils nous démontrent qu'effectivement il y a un
coût social associé à cette pollution, qui fait en sorte
que l'option est à éliminer.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vais
réfléchir tout haut.
Si Hydro-Québec avait eu le contrôle du gaz naturel, Gaz
Métropolitain, gaz naturel au Québec, est-ce
qu'Hydro-Québec nous aurait présenté le même plan de
développement ou si elle n'aurait pas tenu compte,
précisément, des substitutions, par exemple, dans le chauffage...
(15 h 30)
M. Rivest: Là, j'ai l'impression d'aller en politique.
M. Chevrette: Pardon?
M. Rivest: J'ai l'impression d'aller en politique.
M. Chevrette: II n'est jamais trop tard pour bien faire.
M. Rivest: Non. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Choisissez bien votre parti. Demandez des
débats globaux.
M. Rivest: Je crois qu'il y a quand même suffisamment de
consultation pour que les différentes opinions soient
exprimées.
M. Chevrette: Bon, d'accord. M. Rivest: Je crois
qu'on...
M. Chevrette: Non, mais si je réfléchis tout haut,
c'est sérieux quand même, parce qu'il y a de plus en plus de
groupes au Québec qui demandent un débat global face aux
différentes sources d'énergie, et, effectivement, je suis
convaincu qu'on n'aurait pas le même type de plan de développement
si Hydro-Québec avait été à la fois
propriétaire du réseau hydroélectrique et
propriétaire de Gaz Métropolitain, d'où l'importance pour
nous, les hommes et les femmes politiques, d'essayer de voir clair, par
exemple. Puisque Hydro ne nous le présente pas, nous, notre
responsabilité, c'est de voir s'il y a quelque chose là. Suite au
mémoire que vous nous présentez et suite au mémoire
présenté par Gaz Métropolitain ce matin, il y a quelque
chose là, quelque chose là qui nous incite à avoir des
réponses très concrètes. Gaz Métropolitain, par
exemple, affirme qu'il y a 50 % d'économie d'énergie si on
substitue le chauffage à l'électricité par le gaz
naturel.
M. Rivest: Monsieur, c'est sur ce que je gagne ma vie. Je
convertis des gens qui sont à l'électricité, qui sont
malheureux parce que les factures sont trop chères, puis j'installe de
nouveaux équipements au gaz dans leurs installations, puis avec de
faibles incitatifs le seul incitatif qu'on a, c'est des économies
on vient à bout de rentabiliser des projets quand même
très dispendieux.
On mentionne dans notre mémoire que la plinthe électrique,
c'est un réel problème. S'il y a une chose que j'aimerais qu'on
dégage de notre mémoire, c'est justement au sujet de la plinthe
électrique; c'est peut-être bien beau pour l'électricien
qui l'installe ou le promoteur qui l'installe, parce que ça fait une
installation pas chère au début. Le problème, c'est que,
déjà et, dans cinq ans, ça va être encore
pire chauffer avec les plinthes chauffantes, ça va coûter
une fortune, puis ce n'est pas facile, ce n'est pas simple, après, de
dire à ces gens-là: On va te mettre à la
biéner-gie, ou on va te mettre au gaz, ou on va te mettre à
l'huile. On n'a plus aucune flexibilité. C'est un carcan. Alors, si je
ne peux pas vous convaincre qu'on devrait
tous chauffer au gaz, j'aimerais au moins vous convaincre d'une chose:
on devrait tous, dans nos maisons et dans nos commerces, avoir des
systèmes qui permettent une installation centrale d'une seule source
d'énergie et qui nous permettraient de substituer à la
biénergie, à la triénergie s'il faut. Mais soyons
flexibles.
Un jour, peut-être qu'il va y en avoir, des opportunités
d'exportation, ou peut-être tout simplement que notre potentiel
hydroélectrique va avoir atteint son maximum. À ce
moment-là, on sera heureux d'avoir eu la prévoyance d'avoir des
systèmes souples, des systèmes qui nous permettent, à
moindre coût, de passer d'une source d'énergie à
l'autre.
M. Chevrette: Oui. Moi, j'espère que votre
«complainte» sera entendue pour éliminer certaines
«plinthes».
Ceci dit, moi, je pense que ce qui manque présentement, c'est un
débat où il pourrait y avoir, à l'intérieur du
débat, une confrontation. Prenons, par exemple...
M. Ri vest: Je sais ce que vous venez...
M. Chevrette: Vous m'avez suivi, mais je vais finir ma
phrase.
Prenons un exemple concret où on pourrait questionner...
où une structure neutre pourrait questionner, par exemple, les effets
sur l'environnement. Vous auriez le devoir de faire vos devoirs, vous autres,
et de nous démontrer jusqu'à quel point ou pas ça pollue,
parce que je pense que les citoyens en général, d'autre part, et
ça, je pense qu'il n'y a pas une formation politique qui n'y
adhère pas spontanément au Québec, c'est qu'on recherche
la source énergétique la moins polluante possible.
M. Rivest: II y a quand même un coût.
M. Chevrette: Oui, je sais qu'il y a quand même un
coût. Mais tout ça peut être mis en comparaison aux yeux et
au su de tout le monde. Ce qui manque on a un portrait et une expertise
on n'a pas le pendant...
M. Rivest: Je suis d'accord.
M. Chevrette: ...parce que vous êtes des concurrents et non
pas des gens qui vous présentez devant nous pour dire: Voici, nous, on
pourrait, on a... Bien sûr, vous venez vanter l'alternative, et
ça, c'est normal. Si vous ne le faisiez pas, je vous trouverais assez
«bebêtes» que je ne vous questionnerais pas. C'est normal ce
que vous faites. Sauf que, si on avait une structure neutre, un genre de
commission de l'énergie, à laquelle commission adhèrent de
plus en plus de groupes si on regarde le nombre de mémoires qui ont
été présentés jusqu'à date, un genre de
structure neutre qui soupèserait les arguments, autant les vôtres
que ceux d'Hydro, là on aurait un portrait objectif. Mais, que
voulez-vous, quand tu as la vérité, tu as la science, tu as tout
ce qu'il faut, tu ne te trompes jamais, tu as l'expertise, et que toi, tu ne
l'as pas, essaie donc de prouver le contraire à quelqu'un qui a tout
ça. Tu dis: Jase tout seul et, quand tu auras fini, il faudra faire ce
que tu nous dis.
Je n'ai pas cette tendance à être docile de même,
moi. J'ai plutôt tendance à remettre en question certaines
attitudes et certains contenus. Et je pense que c'est la seule façon
d'avancer et de progresser, c'est de mettre en confrontation certaines
données. Je n'arrive pas à croire, par exemple,
qu'Hydro-Québec puisse faire la promotion du chauffage à
l'électricité à la tonne puis à la mort. C'est
à se demander si, dans certaines périodes, en plus,
dépendant du pouvoir politique en place, on ne cherche même pas
à provoquer une rareté pour venir à bout de
développer, tu sais; par exemple, signer un paquet de contrats secrets
avec des entreprises énergivo-res à la tonne, puis, la
rareté étant là, là tu développes, il faut
que tu développes et il faut que tu développes, sans tenir compte
nécessairement des formes d'énergie qui sont utilisables.
Un individu a le droit de penser de même quand il voit faire des
choses, n'est-ce pas?
M. Rivest: C'est quoi, la question?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: La question est fort simple.
Mme Bacon: ...
M. Chevrette: Pardon?
Mme Bacon: ...la question.
M. Chevrette: Pas du tout. Si vous pensez que je suis le seul,
Mme la ministre, à réfléchir de cette façon, vous
vous trompez royalement. Ils ont le goût de dire qu'ils sont d'accord
avec moi, mais ils ne le diront pas parce qu'ils sont devant vous. Mais ils
seraient tentés de le faire.
Accepteriez-vous, vous autres, de vous soumettre à une commission
neutre?
M. Rivest: On accepterait de participer. Par contre, je ne
connais pas assez bien les mécanismes déjà en place,
puisque l'organisation est toute nouvelle. On n'a même pas encore fait le
cycle complet des forums. Je ne suis pas en mesure de vous dire si ce que vous
proposez est supérieur à ce qui existe déjà, mais
je peux vous dire que, si ça existait, on participerait.
M. Chevrette: Avez-vous participé à la consultation
d'Hydro-Québec?
M. Rivest: Autre qu'aujourd'hui?
M. Chevrette: Non. Québec subventionnait...
Hydro subventionnait des groupes pour préparer...
M. Rivest: Malheureusement, notre naissance était un petit
peu après ça.
M. Chevrette: Elle est trop récente. M. Rivest:
Elle est trop récente.
M. Chevrette: Vous auriez même pu être
subventionné par Hydro, imaginez-vous, si vous aviez vu le jour
avant.
M. Rivest: On va se reprendre.
M. Chevrette: Pardon?
M. Rivest: On va se reprendre.
M. Chevrette: Vous allez vous reprendre? Puis sans
subvention?
M. Fradet: Non, pour la subvention. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Chevrette: Je ne crois pas. En ce qui regarde le marché
du chauffage, vous dites qu'Hydro-Québec ne fait pas ses frais et vous
vous basez en particulier sur l'étude de Jean-Thomas Bernard. Vous
n'êtes pas sans vous surprendre qu'Hydro-Québec ne croit pas
ça et ne prétend pas cela, mais qu'est-ce qui vous fait affirmer
ça? C'est seulement l'étude de Jean Bernard ou si vous avez
d'autres données intéressantes?
M. Rivest: Je n'ai pas d'autres données concrètes.
Par contre, j'ai fait l'étude très approfondie des orientations
tarifaires à long terme, tel que démontré dans une des
annexes d'Hydro-Québec, puis on voit qu'Hydro a une ferme intention de
différencier son signal tarifaire. Alors, déjà, on se
propose d'augmenter de 5 %, ou de différencier de 20 % à... de
passer de 20 % à 25 % la différence sur le tarif
résidentiel, par exemple, entre le premier et le deuxième palier.
On regarde d'autres alternatives qu'ils étudient, comme le tarif DH, je
crois, que vous mentionniez tantôt, horaire-température. On voit
que tout ça, c'est fait pour une bonne raison, hein? C'est fait parce
que, éventuellement, on aimerait que la tarification reflète les
coûts réels. Il y a quand même assez de renseignements dans
ce plan-là pour qu'on se rende compte que la fourniture de pointe, qui
peut aller jusqu'à 0,42 $, fait en sorte que oui, effectivement, les
clients chauffage seraient des clients à perte. Évidemment, seule
Hydro-Québec le sait, et je n'ai pas accès à ces
données-là. Au résidentiel, c'est très facile de
faire l'analyse parce qu'il y a deux paliers, il n'y a pas de coefficient
d'utilisation. C'est beaucoup plus complexe dans le commercial. Puis
Jean-Thomas Bernard, j'imagine, avait accès à certaines
données d'Hydro-Québec que moi, je n'ai pas vues, je n'ai pas
consultées. M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Audet): Ça va?
M. le député de Vimont. (15 h 40)
M. Fradet: Je vais revenir à une question sur le
coût. Mais, pour continuer dans la même veine, vous venez de
mentionner et, effectivement je l'ai dit tout à l'heure aux gens
qui vous ont précédés les tarifs...
c'est-à-dire charger à la population les vrais coûts, les
coûts réels. Mais c'est la même chose pour le gaz; plus il
fait froid, plus on va consommer du gaz.
M. Rivest: Oui, mais la problématique n'est pas la
même, parce que le gaz est «stockable». Le gaz, il est
dans...
M. Fradet: Mais vous n'avez pas de problème de
stockage?
M. Rivest: Écoutez. Il y a un problème sur une
demande de quelques jours.
M. Fradet: Puis les périodes de pointe?
M. Rivest: II n'y a pas les mêmes périodes de
pointe.
M. Fradet: Non?
M. Rivest: II n'y a pas des périodes de pointe
instantanées. L'électricité, il faut qu'elle soit
livrée au moment même, là. O.K. Si on regarde même
dans la tarification, si on parle d'une période de 15 à 30
minutes, le calcul de la pointe... Lorsqu'on parle d'un tarif de Gaz
Métropolitain, pour le calcul de la pointe, on parle sur une
période de jours.
M. Fradet: Mais ça existe quand même. M. Rivest:
Ça existe, mais de façon moindre.
M. Fradet: Dans le cas du résidentiel, juste pour
m'informer, là...
M. Rivest: Oui.
M. Fradet: ...est-ce que c'est des réservoirs ou si c'est
un réseau? Peut-il y avoir des réservoirs pour chauffer une
maison? Non, hein? Ça prend absolument le réseau souterrain.
M. Rivest: II y a des réservoirs au propane, par exemple
les restaurants qui nécessitent ça pour la cuisson, là
où le réseau gazier n'est pas disponible.
M. Fradet: Mais pour le chauffage?
M. Rivest: Pour le chauffage, c'est des conduites souterraines,
au même titre que les entrées électriques.
M. Fradet: Absolument. Qu'est-ce qui vous empêche de
développer un réseau? Vous venez ici et vous attaquez aujourd'hui
Hydro-Québec principalement sur le chauffage, entre autres, et je ne dis
pas attaquer méchamment, non plus. Mais, ce matin, Gaz
Métropolitain nous disait que le principal concurrent du gaz naturel,
c'était le mazout. En termes de chauffage, il y a
l'électricité et il y a le mazout aussi.
Qu'est-ce qui vous empêche de développer votre
réseau davantage, de cogner aux portes et de dire: Écoutez, moi,
je vous prouve que c'est moins cher, le gaz naturel; enlevez vos plinthes
chauffantes, on va vous installer le système? Il n'y a rien qui vous
empêche de faire ça.
M. Rivest: Oui, il y a certaines choses qui nous empêchent
de faire ça. Il y a la tarification. Si on regarde dans mon
mémoire, on voit définitivement que l'électricité
aux résidences est vendue moins cher qu'elle est vendue dans les
commerces. Pour ce qui est du chauffage, par exemple, on voit que
l'écart entre les prix est de beaucoup inférieur. Mais le
problème principal qu'a le gaz, c'est que, lorsqu'il se fait un
développement de maisons, par exemple, sur une nouvelle artère,
sur une nouvelle rue, ce n'est pas tout le monde qui veut aller au gaz, c'est
peut-être 25 %, 30 %. Alors, là, ça ne rentabilise pas les
coûts d'investissements. Pourquoi les autres 70 % décident-ils de
ne pas utiliser le gaz? C'est souvent une considération de coût
initial. On préfère la plinthe chauffante, parce que ça
coûte moins cher.
M. Fradet: C'est peut-être plus sécuritaire
aussi.
M. Rivest: Écoutez...
M. Fradet: On voit de plus en plus dans les journaux, à la
télévision, des explosions, des bâtisses qui ont pris feu
parce qu'il y avait une fuite dans la canalisation du gaz, puis tout
ça.
M. Rivest: Moi, je suis ingénieur en
électricité, comme Mme Courtemanche ici, ça fait 10 ans
que je fais...
M. Fradet: En électricité et vous travaillez pour
le gaz?
M. Rivest: ...et de l'électricité et du gaz, et
beaucoup de biénergie, je ne m'en cache pas. J'ai été
témoin de deux accidents dans mon entreprise. Lors d'un ajustement de
brûleur au gaz, j'ai un technicien de service qui s'est... effectivement,
il y a eu une explosion dans la chaudière. Il a eu la peur de sa vie et
les cheveux un peu...
M. Fradet: Un peu brûlés.
M. Rivest: ...un peu brûlés.
Le deuxième accident, qui était beaucoup plus
sérieux, ça a été une explosion. Un de mes
électriciens qui allait faire un appel de service a fermé un
interrupteur électrique en présence de poussières dans un
atelier, et là il y a eu une explosion; il a subi des brûlures au
troisième degré.
Alors, cibler le gaz pour les explosions, je crois que c'est injuste;
c'est peut-être plus spectaculaire à cause de la flamme. Mais
l'électricité, le phénomène de
«l'arcage» électrique, c'est beaucoup plus dangereux.
M. Fradet: Je ne dis pas que je cible le gaz, mais je vous dis
que, lorsque les gens ont à choisir entre le chauffage au gaz, le
poêle au gaz, par exemple, et le chauffage à
l'électricité, ils ont sûrement à l'esprit les
dangers éventuels du gaz.
Mme Courtemanche: C'est un fait que les gens ont peur. Il y a
bien des gens qui ont peur du gaz, mais c'est souvent les gens qui ne
connaissent pas le gaz. La plupart des gens qui connaissent le gaz, qui ont
déjà eu l'expérience d'avoir une cuisinière au gaz
ou un frigidaire au gaz n'ont plus peur.
M. Fradet: Je suis d'accord, mais c'est à vous à
donner cette perception-là. Même si la grand-mère du
député d'en face est morte à 94 ans et a toujours eu les
installations au gaz, moi, je peux vous dire que, dans mon entourage, il y en a
qui n'ont pas eu d'installation au gaz et qui ont une certaine crainte face au
gaz.
Pour revenir, je pense, à la question la plus importante, vous
avez mentionné tout au long de votre présentation tout à
l'heure que la principale caractéristique du gaz naturel, c'est
d'être moins cher, moins cher que l'électricité pour le
chauffage, entre autres.
Une question que je vous poserais: Est-ce que vous analysez tous les
coûts pour dire que c'est moins cher que l'électricité,
entre autres les coûts environnementaux? Tout à l'heure, le
député de l'Opposition vous en a parlé. Je pense qu'il va
falloir, éventuellement, que vous reveniez avec des chiffres à
l'appui.
Deuxièmement, est-ce que le gaz va toujours être aussi
disponible? Est-ce qu'à un moment donné il n'y aura pas une
augmentation? S'il y a une augmentation de la demande, car plus de gens
chauffent au gaz, est-ce qu'il n'y aurait pas une diminution de la
disponibilité du gaz qui ferait en sorte qu'on pourrait augmenter les
tarifs? Est-ce qu'il n'y a rien de plus sûr?
M. Rivest: Est-ce que je peux répondre à votre
question par une autre question? Hydro-Québec n'a pas fait les
coûts environnementaux de ses propres alternatives qu'ils ont choisies en
matière d'approvisionnement. Je suis d'accord que je ne vous arrive pas,
aujourd'hui, avec des coûts environnementaux associés au
«field switching», à la substitution de
l'électricité au gaz. Par
contre, ce que M. Caillé mentionnait ce matin, par exemple, une
participation de tous les intervenants pour l'évaluation des coûts
environnementaux des diverses solutions, ça me semble une très
bonne idée, puis mon Association serait très heureuse de
participer à ça.
M. Fradet: Merci. Juste pour revenir là-dessus, sur
l'environnement. Ce matin, il y a le groupe sur l'énergie
nucléaire qui est venu nous rencontrer. Je ne sais pas si vous
étiez présent.
M. Rivest: Non, malheureusement.
M. Fradet: II nous a transmis un tableau et nous a dit: Bon, bien
entendu, l'énergie nucléaire n'a pas de source... de dioxyde de
carbone, ça va dans les airs, et on sait qu'on vient de signer les
ententes sur la diminution de la pollution de l'air. Le gaz naturel arrive le
plus élevé avec près de 140 000 000 de tonnes de
CO2 émis dans l'atmosphère. Je trouve que c'est quand
même énorme. Je sais que ce n'est peut-être pas
comptabilisa-ble aujourd'hui, mais il y a 50 ans, lorsqu'on envoyait les
égouts directement à la rivière, on ne calculait pas
qu'éventuellement ça coûterait moins cher d'avoir un
réseau d'égout et de traitement des eaux et, aujourd'hui, on est
obligés de dépolluer nos berges et nos rivières et de
rénover nos réseaux de traitement.
C'est une question que je me pose, en tout cas lorsque j'analyserai la
situation: Est-ce qu'il ne vaut pas mieux tout de suite prévoir? Et vous
parliez d'Hydro-Québec qui n'investit pas... Hydro-Québec
investit des millions de dollars sur les externalités environnementales,
mais je pense qu'il va falloir, si vous développez davantage le
réseau, que vous aussi, vous fassiez votre part en cette
matière.
M. Rivest: S'ils ont dépensé beaucoup d'argent,
certainement que dans le plan de développement, dans la sélection
des alternatives retenues, il n'y a pas eu de quantification. On n'a pas dit:
Bon, voici; on va mettre une taxe de 0,01 $ le kilowattheure sur le gaz
naturel, dollar équivalent, puis on va pénaliser le
nucléaire de 0,02 $, parce que, bon...
Est-ce que vous habiteriez, vous, à côté d'une
centrale nucléaire? Mais il faudrait en arriver à ça.
Jusqu'à quel point est-ce qu'on va payer plus cher
l'électricité parce qu'elle est produite par de l'eau?
Jusqu'où ça va? Il y a sûrement un montant où
ça fait que c'est trop cher, parce que ce même argent-là
qu'on met sur l'hydroélectricité, on pourrait le mettre à
d'autres endroits dans l'environnement, comme dépolluer des cours d'eau.
Il y a peut-être beaucoup d'autres solutions possibles.
M. Fradet: D'accord. Je suis d'accord avec vous et je pense
que...
Le Président (M. Audet): C'est terminé, M. le
député. Malheureusement, c'est terminé. Vous avez
même dépassé l'enveloppe.
M. Fradet: Alors, vous voyez comment on est traités ici,
à l'Assemblée nationale.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Audet): On a des règles à
respecter. C'est dans l'intérêt de tous les membres.
Alors, je vais reconnaître M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
Je voudrais faire une réflexion sur le long terme, cette fois, en
ce qui concerne l'environnement. Je me dis tout bêtement que le gaz
naturel va finir par être épuisé un de ces jours, d'ici 200
ans, 300 ans, et que, de toute façon, la somme totale de CO2
et de tous les polluants, ça va être éjecté dans
l'environnement, sauf que nous, on n'en aura pas eu les avantages, mais que les
autres vont nous envoyer les leurs plus longtemps. C'est à peu
près ça. Donc, à long terme, je me dis que c'est un faux
débat.
M. Chevrette: C'est ça.
M. Léonard: Je le dis comme ça.
Une voix: ...
M. Chevrette: Bien non, ils vont l'utiliser pareil.
M. Léonard: II va être utilisé de toute
façon, mais les autres vont en tirer les avantages et pas nous. Ceci
étant dit...
Une voix: ...
Le Président (M. Audet): M. le député de
Labelle, allez-y. À l'ordre, s'il vous plaît! J'ai reconnu M. le
député de Labelle.
M. Léonard: M. le Président...
M. Chevrette: C'est le jeune de Vimont.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Joliette, s'il vous plaît!
M. le député de Labelle, poursuivez.
M. Léonard: Je disais que je faisais une réflexion
à long terme, mais, à mon sens, tout le débat
environnemental porte sur le long terme. Donc, c'est la réflexion que
j'avais à faire. (15 h 50)
Ceci étant dit, je reviens à la remarque de mon
collègue de Joliette qui disait tout à l'heure: Si
HydroQuébec avait le contrôle de Gaz Métropolitain, est-ce
que le plan de développement aurait été le même?
Ceci étant dit, je ne poserai pas la question comme cela,
parce que, de toute façon, ça peut être très
avantageux qu'il y ait une concurrence entre deux institutions, entre le gaz
naturel et l'hydroélectricité. Au fond, la concurrence en soi, je
considère que c'est une bonne chose et, donc, qu'il y ait deux
institutions qui vendent deux formes d'énergie différentes, c'est
bon.
Mais la question vient, en ce qui vous concerne: Comment ça se
fait que ça ne va pas plus tôt? J'écoutais les
représentants de Gaz Métropolitain ce matin, je vous
écoute aussi. Si les coûts d'installation au gaz sont plus
élevés, les coûts initiaux sont plus élevés,
pourquoi ne mettez-vous pas en place un dispositif qui paie le
différentiel et qui fasse que le client lui-même prenne
l'installation, et vous, vous pourriez amortir ou lui pourrait l'amortir
mais je laisse à votre imagination le soin de bâtir un programme
qui fasse que, finalement, cette différence de coûts, au
départ, soit amortie d'une façon ou de l'autre. Est-ce que
vous...
M. Rivest: C'est une très bonne idée.
D'ailleurs...
M. Léonard: Oui, mais je...
M. Rivest: Comment le faire exactement? Je ne sais pas.
M. Léonard: C'est une bonne idée, mais,
au-delà de ça, sur le plan de l'économie, du commerce et
tout ça, pourquoi ce n'est pas en place avant ça?
M. Rivest: C'est déjà en place dans une certaine
mesure. Si on regarde mon entreprise, ce qu'on fait, c'est qu'on installe
effectivement des équipements et on se paie à même les
économies des systèmes sur une période qui peut aller de
trois à six ans. Donc, c'est quelque chose qui existe sur le
marché. Mais si ces travaux-là avaient été
prévus lors de la construction...
M. Léonard: De la construction, d'accord.
M. Rivest: ...initiale, l'écart de coûts est minime,
à ce moment-là.
M. Léonard: À ce moment-là, vous devez faire
porter vos efforts de promotion vers l'Association des constructeurs ou ceux
qui conçoivent les maisons, les architectes, et tout ça.
M. Rivest: Oui.
Mme Courtemanche: Mais, souvent, ceux qui conçoivent, qui
construisent les maisons, leur préoccupation première, c'est le
coût, et c'est beaucoup moins cher d'installer un réseau de
plinthes électriques que d'installer un réseau de distribution
d'air ou de distribution d'eau. Mais, par contre, ces gens-là ne seront
pas nécessairement ceux qui vont vivre avec ce système. Et s'il y
avait eu l'installation d'un système de réseau de distribution,
ça donne la flexibilité de choisir la source d'énergie qui
est la plus appropriée et qui est la plus économique. Si on a un
réseau de distribution d'eau, par exemple, dans une maison, on peut
choisir de chauffer à l'électricité ou au gaz, et ce n'est
pas un coût tellement exorbitant de transformer d'une source à
l'autre. Par contre, quand on est pris avec un système de plinthes
électriques, on a un problème lorsqu'on veut convertir, changer
de source.
M. Léonard: Ce matin, Gaz Métropolitain est venue
dire que ça coûtait 123 000 000 $ à Hydro-Québec, le
fait de ne pas charger le coût marginal pour la nouvelle
électricité ou les nouveaux projets, et que ça
coûtait aussi en perte de potentiel à Gaz Métropolitain 50
000 000 $. Il y a, dans le passage, 173 000 000 $ en cause. Avec des
négociations avec Hydro-Québec, est-ce que c'est pensable que les
deux réseaux puissent, sur ce plan-là, financer le chauffage en
particulier, qui est vraiment là où le bât blesse?
M. Rivest: Une solution...
M. Léonard: II y a 173 000 000 $, les deux, si je
comprends.
M. Rivest: Une avenue possible. Dans la stratégie
d'efficacité énergétique, on parle de cotation
d'immeubles, on parle de donner une cote énergétique à un
immeuble, puis je crois que la cote à laquelle on fait
référence, ce serait une cote, par exemple, qui donnerait la
consommation énergétique au mètre carré. Cette
cote-là, par contre, elle pourrait inclure dans sa pondération
une quantité qui serait pour la flexibilité du système,
par exemple.
Alors, je pense qu'on a en place certaines mesures que, avec de la
consultation, on pourrait venir qu'à...
M. Léonard: Si les chiffres qui ont été
mentionnés ce matin sont exacts, et je pense qu'il faudrait les
vérifier de toute urgence, c'est 173 000 000 $ par année.
M. Rivest: Oui.
M. Léonard: Ça finance beaucoup de choses. C'est
ça que je veux dire.
M. Chevrette: Exact.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
J'ai dit hier soir que j'étais perplexe après avoir lu le
mémoire. Après l'avoir entendu, je dois vous dire que c'est la
même chose cet après-midi. Vous demandez de mettre de
côté toutes les plinthes électriques: Bon, bien, ça,
c'est un cancer, on met ça de côté. Mais quand
je regarde, moi, ce qu'on nous a présenté jusqu'ici, et
encore ce matin avec Gaz Métropolitain, n'est-il pas un fait qu'il
semble que c'est à partir d'un quatre logements, lorsque je regarde les
chiffres fournis par le ministère de l'Énergie et des Ressources,
qu'on commence à avoir des économies substantielles?
Hier soir, des scientifiques sont venus nous dire: Attention! des
plinthes électriques, ce n'est peut-être pas si mauvais que
ça; prenez garde, ne mettez pas ça de côté du revers
de la main; faites attention. Alors, je vais être obligé d'abonder
dans le même sens que mon collègue de Joliette: peut-être
qu'à un moment donné on devrait avoir un de ces
débats-là où on pourrait avoir les deux choses en
perspective.
Je donne l'exemple d'une petite maison: à partir du 1er octobre
1992, comparé à l'électricité, une maison
unifamiliale, c'est 9 $ favorables avec l'électricité. Nos
scientifiques, ils viennent de nous dire: Attention! l'avantage de
l'électricité avec les fameuses plinthes, avec le monde de
demain, vous allez pouvoir avoir une maison intelligente, vous allez pouvoir
contrôler chacune des pièces de votre appartement, donc
contrôler votre consommation d'électricité, avoir un apport
positif, proactif devant vos mesures d'économies d'énergie, ce
qu'un système au gaz ne vous donnerait pas.
M. Ri vest: Ah! pardon.
M. St-Roch: Est-ce qu'il ne serait pas plus profitable de dire:
Dans un premier temps, essayez de faire un débat... Ce que les chiffres
semblent démontrer, c'est à partir de quatre logements en
montant, et surtout dans le commercial et l'industriel, qu'au niveau de la
chauffe, c'est là qu'est l'avantage fondamental du gaz sur
l'électricité, au lieu de la maison unifamiliale, des quartiers
au complet qui sont bâtis là sans approvisionnement.
M. Rivest: Là, vous parlez de l'avantage pour
l'utilisateur. Effectivement, il n'y a pas un énorme écart de
coût au résidentiel. Si on parle de 100 $, 150 $ par année,
ça peut ne pas sembler énorme maintenant, mais il y a aussi le
coût social, le coût d'Hydro-Québec qui, lui, ne fait pas
ses frais. Alors, si on met ces deux coûts-là ensemble, la plinthe
chauffante nous coûte très cher. Puis si vous devez vraiment
chauffer à l'électricité, ce que je vous suggère:
Allez donc à la biénergie. Au moins, lorsque le réseau
gazier sera présent ou lorsque l'électricité sera trop
chère, on aura cette flexibilité-là de revenir au
combustible.
Un commentaire concernant la plinthe chauffante, les maisons
intelligentes, puis le contrôle, toutes ces technologies existent dans un
système central. Même avec un bon vieux système à
eau chaude bien fait, je vous assure que le confort dans votre maison serait
grandement supérieur qu'avec une plinthe chauffante. Je suis
chauffagiste, c'est ce que je fais dans ma vie. Je peux vous dire, des bons
vieux radiateurs en fonte, il n'y a rien de mieux que ça.
Le Président (M. Audet): Merci. Au nom des membres de la
commission parlementaire, je vous remercie pour votre exposé.
Afin de permettre à l'Union des producteurs agricoles de prendre
place, nous allons suspendre nos travaux deux minutes. Merci beaucoup, madame,
monsieur.
(Suspension de la séance à 15 h 58)
(Reprise à 16 h 2)
Le Président (M. Audet): Messieurs, mesdames, si vous
voulez prendre place, nous allons reprendre nos travaux. Nous recevons
maintenant l'Union des producteurs agricoles.
Alors, madame, messieurs, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue au
nom des membres de la commission. Je vous rappelle brièvement nos
règles de procédure: vous disposez d'une vingtaine de minutes
pour présenter votre exposé et pour vous présenter aussi,
ce qui est très important pour la transcription de nos débats;
ensuite, suivra une période d'échanges d'une quarantaine de
minutes.
Alors, M. Proulx, vous avez la parole, si vous voulez identifier les
gens qui vous accompagnent.
Union des producteurs agricoles (UPA)
M. Proulx (Jacques): Merci, M. le Président.
Mme la ministre, messieurs, dames, les députés, je
voudrais vous présenter, dans un premier temps, Marie Anne Rainville,
qui est directrice des communications, ainsi que Patrice Dubé, qui est
à la recherche chez nous. Je voudrais vous remercier de nous donner
l'occasion de venir nous exprimer devant cette commission. Vous me permettrez
de faire un résumé, en fait, du mémoire qu'on vous a
déposé.
Depuis près de 70 ans, de l'UCC à l'UPA, la classe
agricole québécoise a patiemment construit un mouvement
vigoureux, indépendant pour promouvoir, défendre et
développer ses intérêts professionnels, économiques,
sociaux et moraux. C'est ainsi que les membres de l'UPA ont tour à tour
oeuvré au développement économique des régions en
initiant les premières coopératives financières et
agricoles au développement académique du Québec, en
travaillant, au sein du Conseil supérieur de l'éducation, au
développement de la presse québécoise en fondant, en 1929,
l'hebdomadaire La Terre de chez nous. Aujourd'hui, l'UPA
confédéré 16 fédérations régionales,
18 syndicats ou fédérations spécialisées. Elle
compte sur l'implication directe de plus de 3000 producteurs et productrices
agricoles à titre d'administrateurs. Elle multiplie ses interventions,
en Europe pour le GATT, en Afrique pour le développement d'une mise en
marché ordonnée, et aux États-Unis pour
l'élargissement de ses marchés.
Active tant sur la scène régionale, nationale qu'in-
ternationale, elle est l'organisation professionnelle des 51 000
agriculteurs et agricultrices qui ont, d'ailleurs, investi collectivement 11
600 000 000 $ en infrastructures agricoles afin de générer
annuellement près de 4 000 000 000 $ de vente à la ferme et 65
000 emplois directs. Enfin, depuis juin 1992 et pour les 15 prochaines
années, elle convie ses membres à la conquête des nouveaux
marchés, soucieuse qu'elle est de leur permettre d'accomplir la noble
tâche de nourrir le Québec.
Enfin, mentionnons qu'en 1990 la valeur des exportations agricoles
québécoises vers les États-Unis atteignait 820 000 000 $.
En guise de comparaison, signalons que les exportations
d'électricité d'Hydro-Québec vers les mêmes
destinations, en 1990, se chiffraient à 181 000 000 $.
L'UPA a participé activement au cours des dernières
années à l'ensemble des processus de consultation mis en place
par Hydro-Québec. Notre intérêt pour les questions
énergétiques et les projets d'investissement qui en
découlent s'explique, en grande partie, par l'importance accrue de
l'électricité dans la facture énergétique globale
de l'agriculture québécoise, par l'impact des lignes de transport
qui traversent les terres agricoles et forestières privées et par
le choix de société qu'ils impliquent à un moment
où la saine gestion des deniers publics n'a jamais eu autant
d'importance.
L'énergie a et continue toujours de jouer un rôle de
premier plan dans le développement de l'agriculture. Cette
énergie utilisée dans la production des denrées agricoles
a vu son coût et son utilisation croître substantiellement avec la
venue d'une mécanisation plus soutenue et d'une intensification des
cultures.
Encore aujourd'hui, la facture énergétique du secteur
agricole au Québec est dominée par les dépenses en
énergie fossile. Toutefois, l'écart entre les dépenses en
combustible fossile et électrique se rétrécit
d'année en année. Actuellement, la dépense totale directe
d'énergie à la ferme se chiffre à environ 230 000 000 $,
dont 139 000 000 $ d'origine fossile; 105 000 000 $ sont dépensés
en carburant, huile et lubrifiant pour la machinerie agricole et 34 000 000 $
en chauffage et séchage. Le reste de la facture, soit 90 000 000 $,
excluant les taxes, est d'origine électrique.
L'électricité fait partie intégrante des choix
énergétiques quotidiens au niveau de la ferme et, à ce
titre, deviendra une composante de plus en plus importante du coût de
production des denrées agricoles. Voilà pourquoi notre
mémoire présente des commentaires généraux sur
l'ensemble du plan de développement d'Hydro-Québec, traite de la
structure tarifaire et de l'efficacité énergétique
à la ferme. Enfin, la question des impacts environnementaux des lignes
de transport sera le sujet abordé à la fin de cette
présentation.
Premièrement, malgré des réserves importantes que
nous vous signalerons un peu plus loin, l'UPA endosse les orientations
proposées dans le plan au développement d'Hydro-Québec.
L'UPA croit depuis longtemps qu'Hydro-Québec doit continuer de jouer un
rôle de premier plan au sein de la société
québécoise. Afin de remplir cette mission adéquatement, la
société d'État doit fournir de l'électricité
aux meilleures conditions possible afin de permettre aux secteurs
économiques du Québec de profiter de cet avantage comparatif et
extraordinaire que constitue l'électricité à faible
coût.
Cela dit, nous croyons que, pour combler les besoins
énergétiques du Québec, la société
d'État doit «prioriser» ses interventions dans l'ordre
suivant: mise en place de mesures d'efficacité énergétique
pour l'ensemble des secteurs économiques du Québec
à ce chapitre, l'UPA est d'avis que la société
d'État doit non seulement aller aussi loin que possible dans cette voie,
mais aussi cibler son action et investir des sommes de façon à
répondre aux spécificités de chaque clientèle
incluant la clientèle agricole; amélioration du réseau
existant dans le but de rentabiliser les équipements déjà
en place; construction de nouveaux barrages ou de nouvelles centrales dans la
mesure où l'on tient compte de l'internaiisation des coûts
environnementaux et socio-économiques et des externalités.
Toutefois, et nous insistons sur ce point, toute nouvelle construction
d'envergure devrait être précédée d'un débat
public sur toute la question du développement énergétique
au Québec. Ce débat devrait se faire à la lumière
d'analyses complètes sur l'ensemble des coûts reliés aux
diverses options et types d'énergie envisageables. Cet exercice ne
pourrait que consolider la mise en place d'une véritable politique
énergétique axée sur le développement de tous les
secteurs de l'économie québécoise, incluant le secteur
agricole, tout en faisant la promotion d'emplois chez nous. deuxième
point. la part relative de la dépense d'électricité dans
la facture énergétique globale du secteur agricole n'a
cessé de croître au cours des dernières années. les
données statistiques semblent indiquer que cette augmentation des
dépenses d'électricité serait imputable, pour plus de la
moitié, aux augmentations enregistrées au niveau du tarif
domestique. en effet, alors qu'entre 1986 et 1991 les dépenses
d'électricité ont augmenté, en moyenne, de 38,8 % par
ferme, le tarif domestique applicable à près de 90 % des
producteurs agricoles a grimpé de 20,2 %. le plan de
développement 1993-1995 nous apprend qu'hydro-québec entend
augmenter à 25 %, sur une période de cinq ans, l'écart
entre les deux tranches d'énergie du tarif domestique, qui est
actuellement de 20 %. nous nous opposons fortement à ce projet, et ce,
pour deux raisons. (16 h 10)
Premièrement, le plan de développement indique que la
structure du tarif domestique comporte une redevance et deux prix croissants
pour l'énergie consommée, soit un prix plus bas pour les 30
premiers kilowattheures par jour, et un prix plus élevé pour
l'excédent. Ce genre de structure tarifaire progressive pénalise,
évidemment, les grands consommateurs. Et, comme la majorité des
producteurs agricoles sont, à cause de leur besoin élevé
d'électricité, dans l'obligation de débourser un montant
plus élevé de 20 % pour chaque kilowattheure supérieur
aux 30 kWh de base, cette structure de prix les pénalise
déjà. de plus, hydro-québec leur propose, dans son plan de
développement, d'augmenter cet écart entre les deux tranches du
tarif domestique de 3,7 % le kilowattheure plus grand que 30 kwh par jour.
cette nouvelle mesure aurait comme conséquence de gonfler encore
davantage la facture énergétique des producteurs et productrices
agricoles.
Il est pour nous difficile d'admettre qu'Hydro-Québec se
présente, d'un côté, comme un partenaire dans le
développement économique du Québec, offrant un avantage
comparatif aux industries québécoises, alors que, de l'autre
côté, elle imposerait une augmentation du coût d'un intrant
essentiel à l'agriculture québécoise qui fait face
à une concurrence de plus en plus vive dans un contexte de
mondialisation des marchés.
Nous dénonçons donc avec vigueur cette proposition du plan
de développement. Cette nouvelle hausse du tarif n'est rien d'autre
qu'une forme de taxation déguisée, et ce aux dépens de la
classe agricole du Québec. Il serait peut-être intéressant
qu'Hydro-Québec étudie, en collaboration avec l'UPA, la
possibilité d'appliquer au secteur agricole une structure tarifaire
spécifique et avantageuse.
Troisième point. L'UPA a fait de nombreuses
représentations afin que l'agriculture soit incluse dans les programmes
d'efficacité énergétique mis en place par la
société d'État ou le ministère de l'Énergie
et des Ressources.
En décembre 1992, le gouvernement du Québec
annonçait sa stratégie québécoise en matière
d'efficacité énergétique. L'UPA a été
heureuse de constater que le gouvernement entendait instaurer des mesures
auxquelles la classe agricole aurait accès, au même titre que
d'autres secteurs économiques, et ce de façon prioritaire. Par
contre, le projet d'efficacité énergétique
d'Hydro-Québec, dont les fonds alloués sont beaucoup plus
importants, demeure plus ambigu et ne semble pas se préoccuper outre
mesure des secteurs autres que ceux qu'on définit habituellement comme
étant de forts consommateurs d'électricité, que ce soient
les alumine-ries, les industries de pâtes et papiers et le reste. Bien
sûr, le fait qu'Hydro-Québec ait accordé une aide aux
serriculteurs québécois dans le but de réduire leur
consommation d'électricité est encourageant, mais cette
initiative ne constitue qu'une mince consolation en regard des besoins totaux
de ce secteur.
Autre point saillant de notre mémoire. Qui dit moyens de
production dit aussi lignes de transport. Des centres de production vers les
centres de consommation, ce sont des milliers de kilomètres de lignes
qui sont érigées sur le territoire québécois.
Inévitablement, ces lignes de transport traversent les terres agricoles
et forestières du Québec.
Comme l'UPA l'a déjà souligné à d'autres
occasions, les lignes de transport créent des impacts temporaires durant
la construction, mais aussi des impacts permanents dont, entre autres, la perte
de superficies cultivables occupées par les pylônes, l'entrave aux
activités de l'exploitant et à la gestion du lot, la perturbation
de l'aspect visuel et la circulation des champs
électromagnétiques, courant de terre résultant de mise
à la terre défectueuse.
Ces impacts et leur ampleur méritent, selon nous, qu'on leur
porte une attention particulière à l'avenir. L'UPA tient à
préciser, comme lors du dernier plan de développement, que la
signature de l'Entente Hydro-Québec/UPA sur le mode d'implantation et de
compensation lors de la construction d'une ligne de transport d'énergie
ou de répartition ne signifie pas pour autant un acquiescement à
tout projet d'implantation de lignes de transport d'énergie ou encore de
construction de postes. Malgré les bons termes de l'entente, auxquels
l'UPA souscrit toujours, le monde agricole préfère largement le
non-passage d'une ligne sur ses terres, compte tenu des inconvénients
créés, qu'une compensation monétaire pour le passage de
cette ligne.
Enfin, au chapitre environnemental, je pourrais vous parler du sort que
vous avez réservé à notre projet d'étude dans le
cadre de l'évaluation environnementale du projet Grande-Baleine. Mais
permettez que je quitte le contenu strict de notre mémoire pour
évoquer devant vous, messieurs, dames, les députés,
comment, dans le développement d'une agriculture moderne, dynamique,
apte à conquérir de nouveaux marchés, nous avons besoin
d'Hydro-Québec. En effet, lors du Sommet sur l'agriculture
québécoise de juin dernier, nous avons appelé nos gens
à la conquête des marchés par, entre autres, une
agriculture durable. Une agriculture durable en sera sûrement une qui
transfère des utilisations d'énergie fossile vers celles de
l'hydroélectricité. Parce que nous affectons par notre travail
l'environnement québécois, Hydro-Québec doit être un
allié sur qui nous compterons vraiment pour développer une
agriculture durable.
Voilà, Mme la ministre, messieurs, dames, les
députés, un résumé de notre mémoire.
Le Président (M. Audet): Merci, M. Proulx. Je vais
maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: M. Proulx, Mme Rainville, M. Dubé, je voudrais
vous remercier de votre participation à notre commission parlementaire.
On sait que l'UPA constitue une force sociale importante au Québec. Vous
représentez et vous défendez âprement les
intérêts de vos membres et vous saisissez bien les enjeux, je
pense, aussi du développement de l'électricité au
Québec. La discussion que nous aurons aujourd'hui et le texte que nous
avons devant nous sont importants pour juger ou prendre les décisions
nécessaires.
Si on devait élargir le cadre actuel de l'évaluation
environnementale pour tenir compte de toutes les éventuelles
répercussions qui ne sont pas liées à un projet de
centrale les études, les délais supplémentaires que
ça entraîne, ça représente quand même des
coûts addition-
nels qui doivent ultimement être payés par un consommateur
jusqu'à quel pourcentage de tarif l'UPA et les autres
clientèles doivent-elles accepter de payer pour ces études et ces
délais? Et je n'ai pas besoin de vous nommer les projets en cours.
M. Proulx: Écoutez, je ne vous donnerai pas quel
pourcentage. Pour pouvoir affirmer les pourcentages, il faut être en
mesure de faire une évaluation la plus complète possible. Moi, je
pense qu'il faut faire un calcul beaucoup plus global. Vaut-il mieux s'assurer
immédiatement de tous les impacts que ça peut avoir plutôt
que de se retrouver éventuellement avec des coûts qui vont
être de beaucoup supérieurs, que ce soit dans les retards, dans
les alimentations, dans l'infrastructure, et ainsi de suite? pour fixer quel
pourcentage on pourrait investir dans ça, premièrement, ça
prend des gens qui vont être capables, puis qui vont être en
mesure, puis qui vont avoir toutes les données pour le faire. je pense
qu'on ne peut pas lancer ça de même, dire: c'est 3 %, c'est 5 %,
c'est 10 %. moi, je dis que, plutôt que de toujours attendre à la
dernière minute ou bien d'essayer d'en oublier, sous prétexte
qu'on n'a pas les moyens de le faire je pense que, jusqu'ici, assez
souvent, ça a coûté beaucoup plus cher de ne pas faire
toutes les études nécessaires c'est de prendre le temps
qu'il faut ou bien de prévoir d'avance qu'il faut tenir compte de tous
les impacts et arriver avec des projets où on va être capables de
retrouver la plus grande satisfaction de l'ensemble de ceux et celles qui vont
être touchés.
Alors, moi, je ne suis pas en mesure de vous dire quel pourcentage, mais
je suis en mesure de vous dire que je pense qu'avec tous les outils qu'on
possède aujourd'hui, avec toutes les possibilités qu'on a de
faire les évaluations les plus justes et les plus strictes possible, on
devrait avoir eu une amélioration substantielle autour de ça, et,
quand on arrive avec des projets, au moment de leur réalisation, d'avoir
pensé à tout ça.
Mme Bacon: Vous soutenez dans votre mémoire
qu'Hydro-Québec doit privilégier la mise en place de mesures
d'efficacité énergétique, l'amélioration du
réseau, évidemment, pour répondre à la demande.
Vous estimez aussi que le budget alloué à l'efficacité
énergétique est trop mince comparativement aux montants qui sont
alloués à la mise en service de nouveaux équipements de
production et des équipements de transport. Hydro-Québec,
évidemment, privilégie l'efficacité
énergétique, l'amélioration du réseau
jusqu'à concurrence de coûts de nouveaux équipements.
Est-ce que vous considérez que les mesures d'efficacité
énergétique qui devraient être favorisées,
au-delà du coût de nouveaux équipements, même si
ça entraîne de fortes hausses de tarifs... Et jusqu'à quels
coûts doit-on favoriser l'efficacité énergétique?
(16 h 20)
M. Proulx: Bien encore, jusqu'à... Moi, je suis convaincu
qu'on n'a vraiment pas fait beaucoup d'ef- forts jusqu'à aujourd'hui
pour, justement, pouvoir utiliser à l'optimum nos infrastructures, ce
qu'on possède à l'heure actuelle. Tout le monde sait
qu'aujourd'hui on a la possibilité d'économiser par une multitude
de moyens, mais qu'on n'a pas valorisés, pour différentes
raisons, possiblement pour des choix politiques, économiques à
court terme, et ainsi de suite. Et moi, je pense qu'il ne faut pas toujours
regarder uniquement combien ça va coûter. Il faut regarder
véritablement, il faut avoir un plan d'ensemble de ça et regarder
où ça va créer le plus d'emplois et où, à
moyen et long terme, ça va générer le plus de
retombées, en fait. Et moi, je ne suis pas certain... en tout cas, on
doute fortement que, jusqu'ici, on l'ait évalué sous cette
forme-là. On a davantage été pressés par le temps
de créer des emplois ou d'essayer de remotiver ou de stimuler
l'économie, parce qu'on est pris dans une conjoncture énorme, et
on met beaucoup en doute, nous autres, que les choix qu'on a faits pas
tous les choix, on ne critique pas tous les choix... Mais on dit que,
possiblement, on n'a pas examiné assez attentivement, on n'a pas fait la
preuve, en tout cas, que de mettre de l'avant, avec toutes les connaissances
qu'on a aujourd'hui, les différents moyens qui existent
d'économie d'énergie, pour pouvoir, justement,
générer encore davantage de profits avec, ça aurait
été plus avantageux que de construire, de reconstruire à
nouveau des barrages, et ainsi de suite, avec tout ce que ça comporte.
On a l'impression que, quand on fait des comparaisons, bien, les choix sont
déjà pas mal dirigés. Alors, ça risque de biaiser
les comparaisons.
Et, pour nous, on doute forcément, sans être un
spécialiste des différents moyens d'économie
d'énergie, pour ce qu'on en connaît... on est de plus en plus
convaincus qu'il y aurait beaucoup plus de retombées positives pour le
Québec, globalement, si on mettait de l'avant ne serait-ce que les
formules les plus connues aujourd'hui, et particulièrement en
agriculture on est convaincus de ça. Il va falloir mettre beaucoup
d'emphase sur ce côté-là, particulièrement à
cause de la capacité concurrentielle et de plus en plus concurrentielle
qui va exister dans la mondialisation des marchés.
Mme Bacon: Est-ce que l'UPA a entrepris une sensibilisation de
ses membres à des actions particulières, par exemple? Est-ce
qu'on encourage les gens à investir dans l'efficacité
énergétique au niveau de votre organisme et du
«membership»? Parce que ça procure quand même souvent
une différence de coûts quand on sensibilise davantage.
M. Proulx: Oui, c'est sûr, on travaille de plus en plus
dans ce sens-là et on motive de plus en plus nos gens, et
particulièrement au niveau environnemental, c'est évident. Je
pense qu'on a basé, et particulièrement depuis le mois de juin
1992... quand on parle d'agriculture durable, ça veut dire qu'on parle
d'environnement et, quand on parle d'environnement, bien, on parle de plus en
plus de propreté. Alors, on va essayer d'utiliser
des énergies beaucoup plus propres, et ainsi de suite.
Moi, je vous dirai que, de ce côté-là, même si
on en parle davantage du côté environnemental, et ça touche
ça, oui, on fait beaucoup d'efforts et de plus en plus d'efforts. Parce
que nos grandes préoccupations à l'heure actuelle, c'est que pour
être capables de conquérir les marchés, pour être
capables de plus en plus de se mettre à l'abri des agressions qui nous
viennent d'autres continents ou d'autres pays, bien, il va falloir miser sur
nos forces. Et nos forces résident là. C'est une de nos grandes
forces. C'est pour ça qu'il va falloir l'utiliser à l'optimum
parce que c'est une de nos quelques portes de sortie, comme on dirait, de nos
capacités qui n'existent pas ailleurs: l'eau, dans un premier temps, et
l'eau qui fait de l'électricité, dans un deuxième temps.
Et si on n'est pas capables de développer ça à l'optimum,
bien, on va devenir dans une situation presque impossible de pouvoir atteindre
les objectifs qu'on s'est fixés, particulièrement dans le domaine
de l'agriculture. Particulièrement dans le domaine de l'agriculture.
Mme Bacon: Vous invitez Hydro-Québec à
étudier la possibilité d'appliquer au secteur agricole une
structure tarifaire spécifique encore plus avantageuse que le tarif
domestique dont vous jouissez actuellement. Est-ce que vous ne croyez pas
qu'une mesure comme celle que vous proposez pourrait être mal
perçue dans le contexte du libre-échange, par exemple, ou du
GATT, et qu'elle pourrait potentiellement peut-être nous mener à
l'imposition de droits compensateurs?
M. Proulx: Bien, moi, je ne le pense pas. Je ne le pense pas
parce que, tout à l'heure je l'ai souligné un peu, je pense que,
justement, c'est un des points qui va être très difficile à
être attaqué par des droits compensateurs, et ainsi de suite.
Chaque pays a ses avantages et a ses désavantages. C'est nos richesses
naturelles, c'est à nous autres, ça existe sur le territoire. Si
on ne peut pas profiter de ça, il ne nous restera plus rien, je veux
dire, il ne nous restera plus rien pour concurrencer.
Écoutez, souvent, je dis: II n'y a aucune raison qu'il ne se
fasse pas de l'agriculture dans le Nord-Est américain et partout au
Canada. Il n'y en a pas, de raison, si on ne profite pas des quelques
avantages. Qu'est-ce que vous voulez? on n'a pas la température, on n'a
pas ci, on n'a pas ça. On a réussi à en faire et on a
réussi à être concurrentiels parce qu'on a su utiliser un
certain nombre de moyens qu'on possédait, et l'électricité
en est un.
Moi, je suis certain, l'électricité, la recherche, il y a
des points majeurs qu'il va falloir cibler pour être à l'abri de
ces droits compensatoires là. Je ne vous dis pas que les
Américains ne l'essaieront pas; bien sûr, ils s'essaient avec
n'importe quoi. Ça, c'est évident. Mais je pense qu'on va
être en position, en très bonne position de pouvoir gagner ces
points-là, et c'est pour ça qu'il faut les utiliser à
l'optimum, sinon on est trop vulnérables dans d'autres politiques ou
d'autres programmes qu'on a développés au fil des années.
Et l'agression, on le sait, est de plus en plus présente.
Non. Moi, je vous dis que, si on n'est pas capables de profiter de cet
avantage-là, il n'y en aura pas tellement longtemps, de l'agriculture,
de l'agriculture de demain, que je veux dire.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
Moi, M. le Président, d'entrée de jeu, je voudrais dire
que ce ne serait sûrement pas plus dangereux de regarder ou
d'étudier des propositions tarifaires pour l'agriculture, sûrement
pas plus que celles des grandes entreprises industrielles énergivores.
Je ne serais même pas choqué, moi, qu'il y ait un contrat entre
l'UPA québécoise et Hydro-Québec sur une tarification,
sans clause de confidentialité, par exemple, pour qu'on puisse vraiment
connaître ici, au Québec, les tarifs que vous auriez
négociés pour une culture québécoise qui pourrait
connaître une certaine forme de prospérité.
Ceci dit, j'ai regardé vos deux tableaux. Je vais commencer par
vos deux petits tableaux de la fin. La culture en serre ne figure pas.
J'aimerais savoir pourquoi.
M. Proulx: Je vais demander à Patrice.
M. Dubé (Patrice): Ça, c'est des informations qui
nous viennent du ministère; je pense que, tout simplement, ça n'a
pas été inclus. Mais on sait que l'électricité
compte pour environ 25 % à 30 % du coût de production dans les
productions de serre.
M. Chevrette: si ma mémoire est fidèle,
c'était jusqu'à 30 %.
M. Dubé: oui.
M. Chevrette: C'est pour ça. Je trouvais que
c'était un tableau qui rendait justice à la
réalité, si ça en avait fait partie. Donc, c'est purement
parce que le ministère ne l'a pas mis. Est-ce que ce serait suite
à une décision de ne plus avoir une tarification
spécifique pour les serres?
M. Dubé: Non, il n'y a aucun lien avec ça. Je pense
que c'est justement des tableaux qui ont été faits en 1988 et
c'est des tableaux... On a renouvelé, on a appelé le
ministère pour savoir s'il les avait faits, parce qu'il y a quand
même beaucoup de calculs qui ont été faits pour arriver
à ces chiffres-là, et on l'a demandé. On les a remis tout
simplement là. C'est parce que la production de serre comme telle, on
sait à peu près à quel pourcentage du coût de
production ça joue.
M. Chevrette: Non, c'est parce qu'au Québec,
compte tenu, par exemple... Je vous donne des exemples bien concrets.
Prenez la région de Lanaudière, le bas qui produisait
traditionnellement du tabac. Compte tenu que le fédéral est en
train de racheter la majorité des quotas de tabac, on a cherché
des missions ou des vocations à cette terre sablonneuse qui ne
correspond pas nécessairement à une culture. On a essayé
des asperges, on a essayé différentes... des cacahuètes,
même. Mais ça ne donne pas nécessairement des
résultats. Donc, on s'est dit dans le milieu: II faudrait
peut-être penser à de la culture en serre, puisqu'on a des terres,
et on a déjà des séchoirs qui pourraient être
transformés, se servir un peu de ça. Mais la grande
interrogation, ça demeure toujours les coûts de l'énergie,
les coûts énergétiques. (16 h 30)
C'est pour ça que j'étais surpris que, dans votre
mémoire, tout en parlant à mots couverts... vous n'y faites pas
allusion, mais, à la conclusion, quand on lit un paragraphe, je vais
vous le lire... Dans votre conclusion, vous dites ceci... Les coûts des
impacts environnementaux, c'est ça, O.K.: Par ailleurs, nous nous
opposons fermement aux augmentations de tarif qui rendraient le secteur
agricole encore plus vulnérable face à la concurrence
étrangère. L'électricité doit demeurer un avantage
comparatif, pour compenser nos nombreux désavantages de vivre dans un
climat plus rude, avec des coûts de main-d'oeuvre plus
élevés. Je traiterai des coûts de main-d'oeuvre
après, mais, en ce qui regarde la culture en serre comme telle,
étant donné que nos saisons sont plus courtes, qu'à
l'«acrage» on ne produit pas nécessairement autant que dans
certains milieux à climat plus favorable, on pourrait peut-être
encourager, précisément, la culture en serre, et vous n'en parlez
pas.
M. Proulx: On l'a perdu, le débat des serres. On n'en
parle pas parce qu'on l'a perdu, parce que le gouvernement n'a pas voulu. Quand
même j'en reparlerais encore aujourd'hui, il a réussi à
racheter à peu près tous les contrats à l'usure. On a
racheté à peu près tous les contrats qu'on avait à
partir du programme énergétique. Quand même j'en parlerais
14 fois dans mon texte, on l'a perdu, ce débat-là.
Malheureusement, on l'a perdu. On l'a assez débattu.
Tout ce qu'on demandait, c'est d'être traité exactement
comme les alumineries, pas plus, pas moins. Hydro-Québec a
«gestionné», elle a agi en entreprise et le gouvernement n'a
pas voulu la faire plier et donner les mêmes avantages qu'ils ont
donnés aux grands complexes. Alors, aujourd'hui, il nous reste quelques
grands complexes de serres et presque uniquement ça. Le reste, elles
sont presque toutes disparues ou ont réussi à se
réaménager un peu, mais une multitude a disparu. Si on peut le
récupérer... Je veux dire, si on revient avec... C'est pour
ça qu'on parle d'avoir, de tenir compte et de regarder où on va
être capable de profiter au maximum des tarifs
préférentiels, où on va être capable de
développer. On a un potentiel extraordinaire. On a une expertise qui se
développait d'une façon incroyable autour de ça. Et,
aujourd'hui, tout est neutralisé parce que le monde qui possède
et qui a résisté à toutes les difficultés juste
pour pouvoir survivre à ce moment-ci en attendant que
peut-être...
C'est ça, il vous reste quoi comme complexes, grands complexes de
serres? Rose Drummond et un autre. Et, Rose Drummond, on sait que c'est
toujours une question qu'il ne sait pas si, la semaine d'en suite, il ne
fermera pas. Tout ça parce qu'on n'a pas été capable
d'être traité exactement comme on a traité les alumineries.
Et c'est tout ce qu'on demandait, mais on l'a perdu, ça.
M. Chevrette: Je comprends votre dépit, mais je trouvais
surprenant, moi, que ça n'existe pas.
M. Proulx: Je savais que tu étais pour le soulever,
alors...
M. Chevrette: Parce que dans certains milieux, vous comprendrez
qu'on misait là-dessus...
M. Proulx: Oui.
M. Chevrette: ...pour essayer de relancer l'occupation de
certaines étendues de terre qui peuvent servir encore et qui,
malheureusement, vont être en friche, sinon à l'état
désertique parce que, s'il n'y a pas de gazon qui se fait
là-dessus seulement, c'est le sable, ça va devenir des
sablières à perte de vue.
M. Proulx: Je suis parfaitement d'accord que c'est une
alternative, c'est une des rares alternatives qu'il y a dans ces
situations-là, les cas en particulier que vous soulevez à l'heure
actuelle, les régions ou certains secteurs de régions. C'est
évident.
M. Chevrette: Avez-vous un projet ou avez-vous commencé
à discuter avec Hydro-Québec d'une forme de partenariat visant
à discuter globalement de la situation des tarifs dans le milieu
agricole ou dans le monde agricole? Est-ce que vous avez une oreille qui vous
écoute là-dessus?
M. Proulx: Non, écoutez, je vous mentirais en disant qu'on
a des discussions. On le soulève, on le soulève d'une
façon particulière ici, on l'a déjà débattu
passablement dans toute la discussion qu'on avait faite sur les serres, sur le
tarif préférentiel qu'il y avait, mais on n'a pas de
véritable amorce, si tu veux. On veut profiter de ces
circonstances-là pour le soulever et on espère que, dans les
projets qui vont se développer au cours des prochains mois et des
prochaines années, particulièrement avec les nouveaux
défis qu'on s'est donnés, non seulement comme agriculteurs et
agricultrices, mais l'ensemble des partenaires dans l'agro-alimentaire, on va
peut-être être capable de mieux amorcer le débat... pas un
débat, mais une négociation ou un développement avec
Hydro-Québec en étant plus fort si on
est tous ensemble. Et c'est notre plus grand souhait de le faire.
M. Chevrette: Sauf qu'il n'y a rien de structuré à
date.
M. Proulx: Non, non, à l'heure actuelle, il n'y a pas rien
de particulier de défini, si vous voulez.
M. Chevrette: O.K. Vous dites croire, dans le
résumé que vous avez émis, à la mise en place des
mesures d'efficacité énergétique pour l'ensemble des
secteurs économiques du Québec en ciblant l'action et les sommes
investies de façon à répondre aux
spécificités de chaque clientèle, incluant la
clientèle agricole. Est-ce que vous avez eu la chance de suivre les
audiences pas les audiences la consultation particulère
qu'a faite Hydro-Québec auprès de groupes? Est-ce que vous avez
été un de ces groupes qui ont réussi à suivre de
près les données?
M. Dubé: Oui. L'UPA a suivi ces consultations-là
depuis les deux dernières années, oui.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez été en mesure
d'interroger Hydro-Québec sur la façon dont elle contrôle,
par exemple, ses programmes d'efficacité énergétique et
les outils qu'elle avait pour les contrôler?
M. Proulx: Très peu. M. Chevrette: Très
peu.
M. Proulx: On ne peut pas dire qu'on a été en
mesure de... Non.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez observé
qu'Hydro-Québec avait modifié, depuis 1990, quasiment chaque
année ses objectifs d'économie d'énergie? Est-ce que
ça ne vous a pas frappé, ça?
M. Dubé: Non. Il faut dire que la consultation, il n'y a
personne de nous trois ici qui l'a suivie comme telle, parce que c'était
une autre personne qui s'occupait du dossier. Mais oui, j'imagine qu'à
certains égards, c'est bien évident qu'Hydro-Québec a
changé ses objectifs au niveau de l'économie d'énergie, et
on a pris note de ça, c'est bien évident. Mais nous autres, ce
qu'on voulait demander un peu dans le sens d'avoir des programmes
d'efficacité énergétique dans le domaine agricole, c'est
que c'est des programmes qui sont déjà existants dans d'autres
provinces. Si on pense entre autres à l'Ontario ou qu'on pense aux
États-Unis, il y a des programmes qui sont ciblés
spécifiquement pour l'agriculture, alors qu'ici soit que ce soit un
secteur ou des programmes auxquels on a accès à travers d'autres
secteurs, ou, encore, qui sont inexistants. Donc, c'est un peu dans ce
sens-là. Nous autres, on faisait l'allusion par rapport au fait qu'on
aimerait avoir des programmes qui sont ciblés strictement pour notre
secteur, adaptés à notre secteur et au genre de clientèle
que la clientèle agricole représente.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Saint-Maurice.
M. Lemire: Merci, M. le Président.
De par la base même de l'agriculture, M. le président, vos
membres sont étroitement liés avec les différents enjeux
qui découlent de l'environnement, le respect de l'environnement.
Ma question: Considérant l'importance de la préservation
de l'environnement, ce qui représente les principaux points dans vos
activités, j'aimerais avoir votre point de vue sur la performance
environnementale d'Hydro-Québec aujourd'hui.
M. Proulx: Bien, écoutez, moi, je vous dirai qu'il y a une
amélioration de ce côté-là. C'est évident,
devant la pression publique, je pense qu'Hydro-Québec, comme plusieurs
autres organisations qui ont justement à être sur le territoire,
et que ce soit sous différentes formes, n'ont pas bien, bien d'autres
choix aujourd'hui que de faire un effort. C'est loin d'être parfait
encore. Ce n'est pas une performance à laquelle on va pouvoir attribuer
demain matin un prix d'excellence, mais, moi, je vous dirai que oui, il y a des
efforts qui sont faits. Il y a des efforts, et j'imagine qu'ils vont continuer
à s'améliorer, parce que la pression est là, et je pense
que de plus en plus, si on veut, justement, pouvoir valoriser ces
efforts-là, il va falloir être constant avec. Et moi, je pense que
là aussi on va avoir avantage à accélérer de ce
côté-là, parce que certains pays ont justement
profité en sachant valoriser parfaitement les efforts qu'ils faisaient.
Ça a été un stimulant très intéressant et
ça leur a permis, et je pense que toute la question environnementale est
tellement présente un peu partout dans le monde aujourd'hui que
ça nous permet justement... C'est un point qui est à l'honneur
des produits et qui rapporte un plus plutôt qu'un négatif.
M. Lemire: À la page 11 de votre mémoire, vous
spécifiez que tout processus d'évaluation environnementale
à l'intention d'un nouveau moyen de production doit inclure l'ensemble
des impacts reliés au projet.
Ma question: En ce qui concerne les lignes de transport requises pour
raccorder les nouvelles centrales au réseau d'Hydro-Québec,
croyez-vous qu'il y ait lieu d'engager des fonds importants pour en faire
l'évaluation environnementale avant même d'avoir jugé
d'accepter le projet de réaliser la centrale ou d'avoir
déterminé la variante finale d'aménagement qui soit
retenue, c'est-à-dire le passage des lignes de transmission et de faire,
finalement, l'analyse environnementale avant de débuter la centrale? (16
h 40)
M. Proulx: C'est bien sûr, je l'ai souligné un peu,
je pense, à une question de Mme la ministre, au
départ, pourquoi ne pas prendre toutes les précautions,
prendre toutes les mesures et faire toutes les études plutôt que
d'attendre et d'être obligé de reporter les projets et
d'être obligé d'investir doublement? Je pense qu'on ne peut pas
lésiner sur toutes les questions environnementales. On ne peut pas
lésiner et de moins en moins on devra lésiner sur ça,
parce que c'est un point qui va être à notre honneur et qui va
nous permettre de revaloriser le produit qu'on va livrer.
Quand on aura compris ça, ça va être dans les
meilleurs investissements qu'on va faire. Prévoyons le plus possible
d'avance. Regardez comment ça coûte parce qu'on essaie trop
souvent sous prétexte d'urgence, ou prétexte de ci ou de
ça de passer par-dessus des obligations qu'on sait qui vont
venir. Alors, moi, je dis: Oui, prenons toutes les précautions. Et ce
sont des questions fondamentales aujourd'hui, présentes partout, et qui
risquent, si on ne le fait pas, non seulement pour nos populations, mais pour
la clientèle vers laquelle on va...
M. Lemire: Dans votre mémoire, tantôt, du
côté, par exemple, de l'efficacité
énergétique, vous avez proposé qu'un comité
permanent soit créé afin d'étudier des mesures et des
programmes pouvant améliorer l'efficacité
énergétique des exploitations agricoles au Québec, et de
développer une stratégie d'éducation en cette
matière pour les besoins de toute votre clientèle.
Je voudrais savoir, à votre avis, si vos membres sont
suffisamment informés dans le moment et conscients des mesures
d'économie et d'efficacité énergétique qui peuvent
être mises en place à l'heure actuelle?
M. Proulx: Je demanderais à Marie Anne de
répondre.
Mme Rainville (Marie Anne): Merci, M. le Président.
Je suis loin d'être une spécialiste de toutes ces
questions-là. Par contre, j'ai l'impression que je pourrais vous ramener
le sentiment de nos membres, et vous me permettrez de revenir un peu sur une
question en arrière par rapport à celle que vous posez. Il me
semble que quand on pose la question et ce que j'entends dans les discussions
de cuisine, ou encore dans les assemblées générales, par
rapport à l'environnement et Hydro-Québec, on peut poser la
question de deux façons: Qu'est-ce qu'Hydro-Québec a fait ou fait
sur l'environnement au Québec? Ou, encore, qu'est-ce
qu'Hydro-Québec peut faire pour l'environnement? En agriculture, la
deuxième question nous va beaucoup mieux que la première parce
qu'on est des grands utilisateurs d'énergie fossile, entre autres, de
par ce qu'on fait. Et la question est beaucoup plus de se poser dans une
perspective d'avenir à savoir ce qu'Hydro-Québec peut faire pour
que nous cessions d'être des pollueurs et, quelque part, on va, de toute
façon, sauver l'environnement.
Donc, la question de l'environnement, d'ailleurs, en agriculture, elle
se pose comme ça. En environnement en général, elle se
pose comme ça. Ce n'est pas tant d'évaluer ce qui a
été fait ou ce qu'on peut ne pas faire sur l'environnement.
Ça, c'est une première question que votre propre question
m'amenait... C'est une propre réflexion que je voulais vous transmettre,
qui est discutée largement et abondamment par nos producteurs.
Et l'autre question, c'est toute la question de l'efficacité
énergétique. Et vous me permettrez de reprendre, de pasticher des
propos que tenait l'évêque d'Amos, Mgr Drainville, où on
discutait de ces questions-là, et vous savez que Mgr Drainville a des
grandes préoccupations à la fois pour l'agriculture et à
la fois pour tout l'ensemble des questions environnementales.
Il disait: La question n'est pas de savoir s'il fallait bâtir des
barrages; la question est de savoir combien ça nous a coûté
en énergie de bâtir les barrages. Et, en plus, il posait cette
question-là dans le cadre de «Solidarité rurale» en
disant, et aussi on a fermé toutes les petites unités dans toutes
les régions qui procuraient du travail qui permettait à nos
régions... Et là, il ne disait pas ça dans un contexte
folklorique. Il ne voulait pas retourner nécessairement en
arrière, mais il posait la question, et c'est une question à
laquelle, nous semble-t-il, on n'a pas toujours eu toutes les
réponses.
Combien c'a coûté, développer Hydro-Québec au
plan de l'environnement, sur le modèle qu'on l'a
développé? Et c'est une question qui s'est discutée dans
une de nos réunions que je voulais vous rapporter. Ça aussi c'est
une question d'efficacité énergétique qui se pose de plus
en plus à nous. Les grands projets, ils coûtent de
l'énergie fossile ou autre, mais ils coûtent de l'énergie.
Et ça aussi il faudrait le mesurer.
Évidemment, on discute ça à l'intérieur de
nos rangs pour une simple et bonne raison: on est des grands utilisateurs
d'énergie et on est des pollueurs. Alors, on est obligés de se
poser ces questions-là.
M. Proulx: Vous me permettrez, c'en est une fondamentale,
celle-là, et qu'on évite le plus possible de discuter pour toutes
sortes de raisons.
On regarde, à l'heure actuelle, comment on peut créer...
Par nos productions de maïs, par exemple, on fait de l'éthanol, et
ainsi de suite. À un moment donné, au fur et à mesure que
les marchés rétrécissent, qu'ils se
détériorent et que notre capacité de production augmente,
l'efficacité augmente, on essaie de trouver des nouveaux
débouchés. Il en existe, mais, avant d'aller... Et je pense que
ça va répondre à une partie... Vous dites: Où
ça commence, où ça arrête, c'est quel pourcentage?
Il va falloir commencer beaucoup plus loin que ça. Et Mme Rainville l'a
soulevé, est-ce qu'on a déjà fait le calcul à
savoir combien ça a coûté d'énergie pour
créer cette énergie-là? Nous autres, les questions qu'il
faut se poser avec d'autres possibilités de créer de
l'énergie: Ça va en coûter combien et on va polluer combien
pour créer une nouvelle énergie? C'est là qu'il faut
partir. Ensuite, les autres réponses vont toutes se tenir, elles vont
venir ensemble.
M. Lemire: Je termine en disant que je viens d'une région
où... Peut-être que vous vous souvenez de la Shawinigan Water and
Power. C'est une partie de notre histoire au Québec.
M. Proulx: Oui.
M. Lemire: II faut penser qu'à l'époque, au
début du siècle, quand on a commencé les premiers
barrages, c'est ce qu'on connaissait, et à l'époque, il y a
beaucoup de familles qui ont vécu de ça. Aujourd'hui, avec
l'évolution que nous avons connue, les évolutions
environnementales, là, ça nous permet d'arriver à des
discussions. Et je pense qu'aujourd'hui c'est une des raisons pour lesquelles
nous avons 89 mémoires à la commission et nous écoutons
attentivement ce que vous avez à dire pour nous permettre de mieux
comprendre la démarche d'Hydro-Québec. Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Je veux juste revenir sur un sujet sur lequel je
vous questionnais, et vous disiez qu'il y avait d'autres programmes dans
d'autres provinces. J'aimerais ça que vous me donniez une couple
d'exemples, s'il vous plaît, et, après ça, je laisserai
à ma collègue de Taillon le soin de finir mon temps de
questionnement.
M. Proulx: Patrice.
M. Dubé: Vous voulez avoir des exemples de types de
programmes dans ces provinces...
M. Chevrette: Oui.
M. Dubé: ...comme en Ontario? Bon, j'ai une feuille ici.
Si vous voulez, je peux faire une traduction, c'est en anglais. Entre autres,
il y a le «milk heat reclaimers» qu'on pourrait traduire par un
récupérateur d'énergie utilisé dans le
réchauffement du lait, et aussi un programme lié aux ampoules
électriques fluorescentes compactes, entre autres. Il y a un autre
programme où on parle de fixations résistant aux
intempéries pour lumière avec tube de type fluorescent, etc. Il y
a toutes sortes de types de programmes qui sont ciblés strictement
à l'agriculture et qui sont accessibles strictement pour la
clientèle agricole.
M. Chevrette: Est-ce que c'est répandu dans plusieurs
provinces canadiennes?
M. Dubé: On est au courant de l'Ontario et de certains
États des États-Unis. Par contre, les autres provinces, je ne
pourrais pas vous dire. Mais ça, on s'intéresse surtout à
ces deux régions-là parce qu'on entre quand même en
compétition directement avec ces gens-là sur plusieurs
productions. Donc, pour nous, c'est important qu'on puisse
compétitionner au même niveau. M. Chevrette: Merci.
M. Proulx: Et ce qui est important de retenir dans ça,
c'est que ce n'est pas nécessairement des grands projets, c'est une
multitude... C'est de profiter de toutes les opportunités qu'on a, et
c'est là qu'il y a des économies énormes à
faire.
Le Président (M. Audet): Mme la députée de
Taillon.
Mme Marois: Oui, merci, M. le Président.
Ça me fait plaisir de vous saluer à mon tour. Je veux
revenir sur cette question, évidemment, de l'environnement et de vos
préoccupations à cet égard, et je pense que vous
n'êtes pas les seuls à l'avoir, mais, en plus, vous êtes
confrontés au fait que vous êtes aussi pollueurs tout en ayant une
préoccupation d'une meilleure préservation de l'environnement
parce que c'est aussi votre gagne-pain et c'est notre avenir à tous.
Bon.
Si on reprend ce que vous dites sur l'importance d'avoir un débat
public sur toute la question du développement énergétique,
dans votre mémoire, vous le situez dans le cadre où il y aurait
une nouvelle construction. Or, il y a un bon nombre de groupes qui sont
venus... Je n'ai pas pu les entendre tous, mais j'ai lu quelques
mémoires et hier, entre autres, il y avait un de ces groupes-là
qui demandait que l'on tienne au Québec un débat qui toucherait
beaucoup plus largement l'ensemble des questions énergétiques et
qui permettrait en même temps de conscientiser la population
québécoise, d'une part, et de tracer des lignes auxquelles on
pourrait se rattacher pour les décisions lorsqu'il y en a à
prendre, que ce soit dans le cadre de construction de grands ouvrages ou dans
le cadre de choix entre... Et vous parliez tout à l'heure du maïs
qui pourrait être utilisé comme un carburant, finalement, si je
comprends bien, comme une source d'énergie. Bien, qu'on les discute, ces
débats-là. Mais est-ce que vous l'envisagez aussi, ce
débat-là plus global, ou vous le réduisez quand même
seulement à cette question de tout nouvel investissement?
M. Proulx: Écoutez, ça fait très longtemps
qu'on demande qu'il y ait un grand débat sur toute cette
question-là. Pour réussir dans ce domaine-là comme dans
n'importe quel domaine, il ne faut pas avoir peur de donner de l'espace aux
idées. Il faut brasser des idées. Il ne faut pas avoir peur de
remettre en question, soit pour être en mesure justement de mieux les
défendre par après, être mieux argumentes, avoir plus de
crédibilité, ou être mieux éclairés pour les
futurs choix qu'on va avoir à faire.
Alors, pour nous, il est essentiel qu'il se fasse un grand débat.
Il ne faut pas avoir peur parce qu'il faut rendre la population complice des
actions qu'on va faire, sinon, ça va être des adversaires, sans
trop, trop
savoir pourquoi dans certains cas. Ça a peu d'importance, et je
perds un temps énorme à justifier. Pourquoi ne pas le faire?
Pourquoi avoir peur de le faire si on considère la justesse de notre
revendication? Et c'est dans ce sens-là qu'il faut qu'il y ait un
débat. Par la suite, ce sera beaucoup plus facile de pouvoir être
mieux éclairés sur des points particuliers, sur des constructions
nouvelles, sur des développements nouveaux et peut-être qu'on
trouvera, en faisant ce grand débat-là, que les grands complexes
sont suffisants, à l'heure actuelle, pour nous sécuriser et
peut-être que, pour compléter, c'est justement le
développement de petites unités un peu partout qui vont
créer des emplois sur place, qui vont
régénérer.
C'est ça pour nous autres, le débat. Et c'est tellement
dur de tenir ce discours-là parce que, immédiatement, on est
taxés d'être rétrogrades, passéistes, folkloriques.
Alors, si on le mettait dans un grand débat et ainsi de suite, je pense
que ça permettrait d'amorcer par la suite et d'ouvrir la voie à
toutes ces possibilités-là qui existent. (16 h 50)
Mme Marois: Je trouve ça intéressant, dans le fond,
la façon dont vous l'abordez, aussi dans le sens que l'impression que
ça laisse, c'est comme si les gens qui demandent un débat avaient
déjà porté un jugement. ..
M. Proulx: Exact.
Mme Marois: ...alors que ce n'est pas ça, c'est l'inverse,
c'est de pouvoir porter éventuellement un jugement qui va être
éclairé. Mais avez-vous l'impression qu'il y a une
réception positive ou favorable de la part des décideurs
politiques actuellement ou qu'on veut effectivement tasser un peu cet
aspect-là? Je ne veux pas vous embêter avec la question, sauf
que...
M. Proulx: Non, non.
Mme Marois: Parce qu'il faut savoir si on a un quelconque espoir
et, à ce moment-là, quelle mobilisation on peut imaginer autour
de cette attente-là.
M. Proulx: Je pense que la pression devient de plus en plus forte
et que le pouvoir politique va être obligé de se conformer. Et,
comme je suis toujours optimiste et que je considère que les gens sont
avant tout intelligents, ils vont comprendre.
Mme Marois: Je suis d'accord avec vous. S'il me reste encore une
question, M. le Président...
À la page 10 de votre mémoire, c'est un petit peu plus
pointu évidemment, mais, en même temps, ça a une importance
grande, c'est la question des champs électromagnétiques. Vous
concluez le paragraphe et même le chapitre qui concerne cela en disant...
D'abord, un, vous dites: On est satisfait de voir que, si on réduit le
nombre de lignes, ça peut avoir un impact positif dans le sens qu'on
risque de moins en implanter et donc de moins avoir à vivre avec des
champs électromagnétiques. Mais vous dites en même temps
qu'Hydro-Québec semblerait s'appuyer sur des travaux qui, selon elle,
lui démontrent qu'il n'y a pas de lien, et vous dites bien... le lien de
cause à effet entre les champs et les problèmes de santé,
et vous dites: Attendons, parce que ce n'est pas si évident que
ça.
Qu'est-ce qui vous fait affirmer cela? C'est que vous doutez des
études qui ont été faites sur ces questions ou vous croyez
qu'elles n'ont pas été faites assez en profondeur ou qu'il y a
des expertises et des contre-expertises qui existent et qui n'ont pas
été regardées?
M. Proulx: C'est sûr qu'on doute. Peut-être que
Patrice pourra répondre un peu plus que moi parce qu'il a
travaillé dessus.
M. Dubé: Je pense que c'est évident qu'on ne peut
pas vraiment parler de l'éthique scientifique, mais il y a quand
même un petit peu cette question qui est abordée par ce
sujet-là, parce qu'il y a quand même des études qui sont
faites qui vont arriver à des conclusions totalement différentes
des études qui ont été prises en considération par
Hydro-Québec. Ça existe dans d'autres pays. Je pense qu'on en a
vu qui ont été faites en Suède et dans d'autres pays comme
ça. Donc, c'est quand même de prendre un risque très
appréciable que de ne pas attendre que les autres études qui sont
en voie présentement ou sur le point de se finaliser ne soient pas
rendues publiques avant de prendre une décision sur le tracé de
ces lignes de transport là ou sur même la raison d'être de
ces tracés-là.
Donc, c'est cette question-là qui devrait être
abordée parce que c'est quand même de prendre un risque. On joue
avec la vie des gens, là. C'est quand même un risque
appréciable.
M. Proulx: J'ajouterai qu'on sait très bien que si on ne
trouve pas des moyens pour faire des comparaisons ou confronter... Un paysan ne
gagnera jamais contre Hydro-Québec. Donc, il faut se donner les moyens.
Nous autres, on sait ce qu'on subit, on sait ce que nos animaux subissent; dans
certains cas, c'est des catastrophes. Si Hydro est si certaine que ce n'est pas
ça, qu'elle n'ait pas peur, justement, qu'il y ait des contre-expertises
et ainsi de suite. C'est ça qu'on demande.
Mme Marois: C'est ça, qui soient faites... M. Proulx:
Oui.
Mme Marois: ...et qu'il y ait des démonstrations un petit
peu plus claires...
M. Proulx: Oui.
Mme Marois: ...qui soient apportées.
M. Proulx: Écoutez, on est à même de
constater qu'il y a des pertes de plusieurs millions de dollars dans
l'industrie, à l'heure actuelle, dans certains secteurs. Ce n'est pas
généralisé, mais disons que... Tout nous permet de croire,
en tout cas le doute est assez grand...
Mme Marois: Qu'il pourrait y avoir un lien. M. Proulx:
Bien sûr.
Mme Marois: D'ailleurs, on a un collègue chez nous aussi
qui est très loquace sur ces questions-là. Je pense à
Jacques Baril...
M. Proulx: Oui.
Mme Marois: ...le député d'Arthabaska, qui a
soulevé cette question-là à quelques reprises.
M. Proulx: Exact.
Mme Marois: Je vous remercie.
Le Président (M. Audet): Merci, Mme la
députée.
Alors, M. le député de Drummond, est-ce que vous souhaitez
intervenir?
M. St-Roch: Oui, M. le Président. Le Président
(M. Audet): Allez-y.
M. St-Roch: Merci, M. le Président.
On en est, maintenant, à la cinquième journée de
nos audiences. S'il y avait un trait que j'aurais à dégager
jusqu'ici, une réflexion à écouter les différents
intervenants, et dont votre mémoire, c'est qu'on a peut-être un
virage à prendre, et le premier virage qu'il faudrait peut-être
prendre à partir d'aujourd'hui, c'est qu'au lieu de miser sur des
capitaux étrangers pour assurer notre développement, de mettre le
même nombre d'énergie qu'on a eu à attirer ces
capitaux-là et miser sur l'«entrepreneurship» local et on
pourrait peut-être faire énormément de bouts de chemin.
Dans la foulée de cette réflexion-là, M. Proulx,
à la lecture des documents d'Hydro-Québec, lorsqu'on a
regardé un autre grand secteur d'analyse au niveau d'Hydro sur le
secteur des pâtes et papiers, on a décidé de faire une
espèce de table, de discuter avec le milieu des pâtes et papiers
pour essayer de trouver une problématique. À vous écouter,
à écouter, à partir de l'efficacité
énergétique, à partir de la tarification, est-ce qu'il ne
serait pas le temps de recommander dans nos recommandations finales, le 25,
qu'il y ait une table qui s'ouvre, au même titre que pour les pâtes
et papiers, avec le milieu agricole pour s'adresser sur toute cette
probléma-tique-là?
M. Proulx: D'ailleurs, on l'a demandé dans notre
mémoire. Il est très clair pour nous qu'il faut absolument en
arriver là. On a réglé le problème des lignes de
transport... Problèmes! On n'a pas réglé tous les
problèmes, mais on a quand même commencé à pouvoir
fonctionner à partir du matin qu'on s'est assis ensemble et qu'on a
travaillé ensemble pour trouver, dans les circonstances, les meilleures
solutions.
La seule façon de trouver des solutions, c'est quand on se parle,
que ce n'est pas un qui essaie d'écraser l'autre, mais que chacun
considère qu'il a un apport dans ça, qu'il est touché,
qu'il va apporter... C'est évident, on le demande très clairement
dans notre mémoire, qu'il y ait une table spéciale, une table qui
soit là, justement, pour qu'on en arrive ensemble à trouver les
meilleurs compromis, parce qu'il va falloir en arriver à des compromis.
Nous autres, autant on est conscients qu'il faut qu'il y ait de la place en
quelque part pour transporter l'électricité, mais ce quelque
part, c'est nous autres qui est là. On est conscients qu'il faut que
ça passe là, sauf qu'il faut trouver les meilleurs moyens, les
moyens les plus efficaces, qui vont causer le moins de problèmes
possible, qui vont avoir l'impact minimal pour répondre aux besoins du
transport d'électricité et sur d'autres éléments
aussi.
M. St-Roch: Comme les moyens d'efficacité
énergétique à l'intérieur de ces 2 000 000 000 $
adressés spécifiquement à l'agriculture.
M. Proulx: Sur cette question-là, on le souligne aussi, il
y a deux programmes. Il y en a un d'Hydro-Québec, il y en a un du
gouvernement. On l'a dit au gouvernement, sauf qu'on va avoir accès
à celui d'Hydro-Québec parce que c'est avec eux... Il y a des
moyens Patrice en a souligné quelques-uns il y en a trois
ou quatre pages; on a juste examiné un peu l'Ontario et quelques
États américains. Mais pour ceux et celles qui connaissent un peu
les différents équipements qu'il y a sur la ferme et ainsi de
suite, c'est incroyable, les possibilités qu'il y a. Mais il faut avoir
des moyens à notre disposition pour arriver à trouver ces
moyens-là qu'on va mettre en place ou ces outils-là qu'on va
mettre en place. Et c'est incroyable, tout ce qu'il pourrait... Parce qu'il y a
une utilisation énorme d'énergie sur les entreprises et elle va
être de plus en plus énorme devant les nouvelles productions, le
développement de nouvelles productions et ainsi de suite. Quand on parle
de développement, c'est des créatrices d'emplois incroyables. On
a parlé des serres tout à l'heure, mais c'est incroyable.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le...
M. St-Roch: Juste un commentaire, si vous me permettez,
très brièvement, M. le Président.
Le Président (M. Audet): Brièvement, M. le
député.
M. St-Roch: Oui, et j'espère que dans cette
table-là vous allez remettre sur la table toute la problématique
de la serriculture et le développement des serres au Québec.
M. Proulx: Nous autres aussi.
Mme Marois: Oui.
M. Jolivet: Un gars de Drummond!
Le Président (M. Audet): Alors, madame et messieurs, je
vous remercie sincèrement au nom des membres de la commission.
J'invite maintenant les représentants de la Société
d'utilisation et d'exploitation rationnelle des ressources sylvicoles et
urbaines à s'avancer.
Nous allons suspendre deux minutes pour leur permettre de prendre place.
Suspendu.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 4)
Le Président (M. Audet): S'il vous plaît, alors,
nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant la Société
d'utilisation et d'exploitation rationnelle des ressources sylvicoles et
urbaines.
Messieurs, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue au nom des
membres de la commission.
Je vous rappelle brièvement nos règles de
procédure; vous disposez d'une vingtaine de minutes pour
présenter votre mémoire; ensuite, suivra une période
d'échanges d'une quarantaine de minutes.
Avant de débuter, je vous inviterais à vous
présenter. Alors, vous avez la parole, allez-y.
Société d'utilisation et
d'exploitation
rationnelle des ressources sylvicoles et urbaines
(SUERRSU)
M. Paquette (Gilles): Bonjour. Mon nom est Gilles Paquette. Je
suis le fondateur de SUERRSU, pour Société d'utilisation et
d'exploitation rationnelle des ressources sylvicoles et urbaines. Je suis aussi
président-directeur général de Bio Végétal
enr., une petite entreprise en paysagement et de Restauration Lazare, une
entreprise spécialisée dans la rénovation de
bâtiments.
À mes côtés, nous avons M. Richard Laporte, qui est
le fondateur et président-directeur général de Granule
2000 inc., grossiste en distribution de poêles et fournaises et de
granules de biomasse combustibles.
Permettez-nous de rendre hommage à notre tour au bicentenaire du
parlementarisme québécois. Croyez-nous honorés, nous qui
ne sommes avant tout que de simples citoyens et qui pouvons accéder
à une si noble assemblée. Je salue humblement la
démocratie québécoise.
M. le Président, avant de commencer, avant de procéder
à la lecture d'un additif à un mémoire que vous avez
déjà lu, je demanderais l'autorisation pour distribuer, un peu
plus tard, lors de la lecture, des échantillons de biomasse et de
photos.
Je vous avise tout de suite que ce n'est pas une publicité, mais
un type de combustion. Alors, avec votre autorisation, Richard pourrait les
distribuer tantôt. Merci.
Il y a 20 ans, l'industrie du chlore battait son plein. Qui avait besoin
de croire, au lendemain de la crise d'Octobre, au Québec, que
bientôt le papier de toilette serait à 100 % composé de
fibres recyclées facilement biodégradables et fabriquées
avec une pâte non blanchie au chlore? Et que pensez-vous du bassin
d'assainissement de l'eau de plage de l'île Notre-Dame à
Montréal? Encore une fois, le blanchiment de l'eau a cédé
la place à une technique de recyclage globalement plus efficace autant
qu'économe qui reproduit, toutes proportions gardées, un
écosystème en évolution.
Aujourd'hui, les vedettes sont les quenouilles, les jacinthes d'eau, le
nénuphar et les grenouilles qui mangent les maringouins et les
menés qui, eux, dévorent, dès qu'elles se
développent, les larves de mouches noires. Il semble même que la
crise environnementale est en train de relancer l'industrie pharmaceutique sur
une voie naturellement lucrative. Elle parle désormais d'aillicine,
référence de La Presse du 24 février dernier. Parce
que, oui, on peut faire de l'argent avec la nature sans l'épuiser, et
j'y crois.
Ce n'est pas d'être devin, M. le Président, que de
prévoir que, d'ici deux décennies, les automobiles fonctionneront
à l'hydrogène, que les pylônes en milieux
résidentiels seront moins nécessaires puisque les maisons
solaires multiénergétiques seraient pratiquement autonomes en
énergie ou encore que l'étalement urbain encouragerait
l'électrification du transport en commun par voie ferrée, en
attendant l'entrée en service du TGV peut-être. Puis, tant
qu'à y être, pourquoi ne transporterions-nous pas, comme en
Europe, par locomotive électrique, les 70 % du cargo fret qui
défoncent l'asphalte de nos autoroutes? Je suis sûr que G.E. et
Bombardier sont prêts en technologie et en main-d'oeuvre pour convertir
à l'énergie propre nos locomotives à mazout. Hydro y
trouverait son compte et nous, une qualité de vie recherchée.
M. le Président, mesdames, messieurs les commissaires, j'ai
voulu, comme introduction, attirer votre attention sur quelques exemples de
gestion qui contrent ou qui pourraient contrer le gaspillage de
l'énergie tout en soignant notre environnement. Mais, si vous le voulez
bien, poursuivons la réflexion et prenons donc un exemple naturel qui a
fait ses preuves. Dans un enrichissant documentaire que nous transmettait
récemment Radio-Québec, probablement sur sa série
«National Geographic», on faisait état du rapport direct qui
existe entre stocker et dépenser l'énergie en calories que
doivent absorber les animaux pour survivre en milieu naturel. Selon ce
documentaire sur la logique naturelle, qu'il
s'agisse d'herbivores ou de carnivores, la biomasse mangée
détermine, en somme, dans un équilibre acquis, l'énergie
dont disposent les animaux sauvages qui, au besoin, l'utilisent tantôt
pour survivre en s'enfuyant, tantôt pour frapper et tuer lorsqu'il s'agit
d'un carnivore, chacun cherchant à stocker des réserves en
graisse, en énergie, donc, pour d'ultérieurs moments
difficiles.
C'est un peu mon problème présentement, moi qui dois,
à chaque printemps, me résoudre à perdre des kilos
d'énergie stockés en trop bien malgré moi, mais dont ma
femme a bien remarqué les rondeurs. Mais qu'en est-il des
réserves d'Hydro-Québec? C'est ce que nous lui reprochons en
thème III, page 3 de notre mémoire du 26 janvier. La
société d'État Hydro-Québec n'a pas fait la preuve
de prévenir la sécheresse par une gestion appropriée de la
forêt. Pourtant, c'est bien elle, la forêt, qui lui fournit son
humidité pour garder un niveau d'eau fiable dans ses réservoirs,
principe «rain forest» ou avez-vous imaginé un Québec
désertique. On ne l'a pas vue aux audiences de la commission sur la
protection des forêts tenue par le BAPE en 1991. Sur les phytocides, elle
ne semble pas concernée. Sur la cogénération avec la
biomasse, elle émet des doutes sur sa capacité
énergétique et sur sa disponibilité. Pour l'énergie
éolienne, c'est du pareil au même. Ses yeux sont fixés sur
l'hydraulicité, refusant toute autre expertise. C'est pourquoi,
malgré tout le respect que j'entretiens pour son oeuvre et pour sa
main-d'oeuvre, je la blâme pour ce manque de raisonnement. Toutefois,
victime à plaindre de son propre monopole, on ne saurait tenir
Hydro-Québec pour seule responsable de ce manque de vision, son premier
mandat étant apparemment de produire et non de voir. (17 h 10)
M. le Président, à l'instar d'autres groupes qui ont et
qui vont en parler devant cette commission, le débat
énergétique ne fait que commencer, et seule une commission
permanente impartiale sur l'énergie et les ressources peut nous orienter
sur les bonnes solutions. Par exemple, la façon dont Grande-Baleine a
été présentée a attiré tous les yeux sur
nous. Notre énergie peut devenir invendable à l'étranger
si cette commission ne recommande pas au gouvernement de redresser la
situation.
Au thème II, page 2 de notre mémoire, malgré que
nous reconnaissions l'importance du rôle de la société
d'État, j'aimerais prévenir la commission sur les limites de
l'efficacité énergétique aux maisons
résidentielles. Étant lié de près à la
restauration de bâtiment, j'aimerais signaler qu'amener la perfection aux
fenêtres, aux portes, aux plafonds et aux planchers en isolant trop
hermétiquement une parenthèse ici la
réduction maximale en économie d'énergie et de chauffage
n'est que de 20 %. Alors, en isolant trop hermétiquement on peut
créer, d'un autre côté, des problèmes d'air
vicié parce que insuffisamment recyclé, donc, des
problèmes de santé pour faire suite à un article de
La Presse du 25 février. Évidemment, les fuites d'air chaud sont
à contrôler raisonnablement. Malgré des apparences
confortables, l'air vicié chaud ou même froid peut être
nocif. Ce que je crains, c'est qu'au nom d'une capitalisante course à
l'efficacité énergétique l'opinion publique se
méprenne et néglige des enjeux beaucoup plus importants.
En page 4 de notre mémoire traitant des moyens de production, je
souligne qu'Hydro-Québec pollue elle aussi lorsqu'elle inonde sans
récupérer la biomasse végétale ou dans sa
façon de contrôler la végétation aux phytocites.
«Pointillante» à propos de la filière thermique
qu'elle dit polluante jusqu'à un certain degré,
Hydro-Québec ne semble pas bien connaître le potentiel de la
biomasse combustible propre lorsqu'elle dit annexe 3, article 4.1
de la biomasse qu'elle n'est disponible que localement et en quantité
assez faible ou encore lorsqu'elle juge qu'il faut augmenter la valeur
calorifique de la biomasse en l'utilisant conjointement avec du mazout
lourd.
Si nous sommes ici aujourd'hui, Mmes, MM. les commissaires, c'est pour
vous présenter un produit transformé à partir de la
biomasse, qui n'est pas nouveau en Amérique et que l'on retrouve partout
autour de nous. Que l'on soit en forêt ou dans un dépotoir
municipal, ce produit-ci, à première vue, n'a rien
d'électrisant, sauf qu'il ressemble à s'y méprendre
à de la moulée servant à nourrir les chevreuils dans nos
parcs zoologiques. Mais ce même produit, lorsque utilisé dans
Pâtre d'une fournaise perfectionnée, devient un combustible hors
pair pour chauffer nos bâtiments. Sécuritaire même en
entrepôt, ce produit tout à fait écologique nous
serons à même de fournir des données émises par
l'institut de technologie agricole sur des tests effectués sur deux de
nos types de combustion, et M. Laporte vous en parlera un peu plus tard
s'il reçoit l'intérêt qu'il mérite, réglera
une bonne partie de nos problèmes environnementaux.
Pensons aussi au gaspillage sylvicole alors que seulement 50 % du volume
total de la biomasse de l'arbre est utilisé lorsqu'il est abattu.
Pensons aux boiseries urbaines de démolition, de manufacturage, aux
palettes de bois du transport, à tous ces copeaux d'arboriculture qui
pourrissent en créant de la pollution dans nos dépotoirs
municipaux. Toute cette biomasse peut désormais être
utilisée après avoir été émiettée,
puis moulée par simple procédé d'humidification et,
finalement, ensachée.
L'utilisation de la biomasse combustible date de 40 ans aux
États-Unis. Plusieurs types de fournaises à haute technologie
destinées exclusivement à sa combustion se trouvent disponibles
sur les marchés étatsunien et canadien tandis que les normes
environnementales UL, CSA et ULC sont respectées. Par ailleurs, des gens
d'affaires viennent déjà s'approvisionner chez nous à
même nos dépotoirs en biomasse pour produire chez eux, dans des
centrales thermiques, de l'électricité pour la ville de New York.
Comme référence, on peut appeler Rebuts Canada.
La biomasse combustible ne peut plus être écartée du
monde énergétique. Quoique ce produit demande de
considérer de nouvelles habitudes énergétiques, il
n'enlève rien du marché établi
d'hydroélectricité, sinon son altération
bénéfique. Il requiert a priori de développer un
réseau national de cueillette en milieu sylvicole et urbain. Produite
à partir d'une biomasse omniprésente, elle-même
gérée pour se renouveler, cette ressource peut altérer
Hydro-Québec en chauffage d'appoint de tout bâtiment, lui
permettant ainsi de développer ses projets de vente
d'électricité ainsi dégagée pour exportation. La
recherche devrait être soutenue sur ce combustible propre
nécessitant un type de combustion spécifique pour produire
éventuellement de l'électricité. Malgré que nous
soyons conscients des coûts relativement bas de l'énergie
hydroélectrique, il serait intéressant de comparer les
coûts globaux et les deux coefficients d'emplois créés
après une dizaine d'années de production. Les emplois
reliés à la récupération, au transport et au
manufacturage de la biomasse vont transformer le Québec en chantier.
Plus tôt, je vous ai parlé des animaux qui doivent leur
survie aux réserves de graisse accumulée. Comment pourrions-nous,
nous Québécois et Québécoises qui sommes
environnés de hautes forêts, rester impassibles devant le drame de
la désertification mondiale qui est la première cause de la mort
de milliers d'enfants et d'adultes qui tombent comme des mouches? Justement, ce
ne sont pas des mouches. Ces humains pensent et sont capables de gérer
leur environnement, mais une suite séculaire de mauvaises habitudes
nomades, de cupidité par certains privilégiés ou de
mégalomanes au pouvoir a fini par épuiser la richesse naturelle.
Peut-on reprocher à la mère somalienne de dénuder
année après année le moindre buisson pour cuire ses
galettes de manioc? Elle a besoin de combustible et elle prend celui qu'elle
trouve le plus facilement. Envoyer des contributions à ces enfants ne
peut soulager que certains d'entre eux. Seule une gestion rationnelle des
ressources sylvicoles et urbaines pourrait lancer ces pays sur le
développement durable. Le drame humain résulte d'un manque de
vision et de gestion à long terme de la richesse collective. Je crois
que si nous réussissons à rendre accessible à tous un
combustible facilement utilisable avec un minimum d'équipement pour
chauffer et pour cuire les aliments, un frein peut rapidement être mis
à la désertification.
Quant à nous, qui nous croyons à l'abri de la
sécheresse désertique, je vous suggère une mise à
jour précise de nos réserves forestières et aquatiques et
d'analyser sérieusement les causes de la sécheresse nordique que
nous subissons depuis huit ans au Québec voir une disquette du
ministère de l'Environnement à cet effet-là, que je
possède. Des photos satellites dépeignent déjà un
certain jaunissement en Abitibi et en Gaspésie. Résultat de la
longue décomposition organique de la biomasse, l'énergie fossile
a bien servi notre train de vie moderne un peu trop, même. Elle
nous a rendus aveugle? Peut-être. Le cartel mondial de la
pétrochimie est confronté à l'inévitable cause
environnementale. Les monopoles de marché vont forcément se
diversifier au profit d'une meilleure exploitation de la richesse naturelle
qui, après tout, appartient à la collectivité.
Aujourd'hui, un nouveau type de combustion à haute efficacité
rend utilisable la biomasse bien avant qu'elle rejoigne les profondes nappes
phréatiques pour devenir hydrocarbure. À indice de carbone non
concentré, donc non polluante, la biomasse combustible propre est
susceptible de combler nos besoins en énergie calorifique pour
commencer, puis son développement pourrait chauffer les mêmes
chaudières à charbon ou à gaz naturel du type TAG
turbine à gaz pour produire de l'électricité
à l'échelle locale. Aussi, la construction de nouveaux barrages
est à reconsidérer si on peut en arriver à mieux exploiter
et à évaluer ce qu'une forêt vaut debout, comparativement
à ce qu'elle vaut une fois noyée ou disparue. (17 h 20)
En résumé, M. le Président, Hydro-Québec
prend en aversion toute cette mobilisation nationale et internationale contre
ses barrages et elle a tort. Autant le changement est grand pour l'industrie
des pâtes et papiers ou pour le traitement par blanchiment des eaux
usées, autant il le sera pour Fhydraulicité par barrage. La
valorisation de la biomasse forestière et urbaine resitue le dialogue
dans un rapport de priorité et de choix de qualité de vie. Si
l'énergie thermique produite par la biomasse locale et forestière
peut remettre en question les projets Sainte-Marguerite et Grande-Baleine,
entre autres, eh bien, tant mieux. - Hydro-Québec
«focusserait» peut-être davantage sur l'amélioration
urbaine en transport par electrification du réseau, en production
d'hydrogène qui requiert beaucoup d'électricité pour sa
liquéfaction, par exemple. Ou, peut-être, notre
société d'État entrera-t-elle directement dans
l'âtre de nos foyers familiaux en se faisant le chien de garde du
chauffage d'appoint et de l'efficacité
multié-nergétique.
M. le Président, Mmes et MM. les commissaires, la flore ou la
faune nous enseignent comment capter et emmagasiner l'énergie. Et
malgré que le Québec en soit très riche, son utilisation
ou son exploitation doit devenir un modèle de gestion pour ce monde en
souffrance. Merci.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup. Alors, je vais
maintenant reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: Merci, M. le Président.
Messieurs, je voudrais vous remercier de nous avoir fait part de vos
suggestions quant à certains moyens pour accroître la contribution
de la biomasse dans le bilan énergétique du Québec. Et
vous n'êtes pas sans savoir qu'au début des années
quatre-vingt il y a une compagnie qui s'appelait Bioshell qui a construit au
Québec des usines pour la fabrication de briquettes de bois.
Est-ce que vous voudriez me dire en quoi votre projet se distingue de
leur projet, de ce qu'ils avaient à
ce moment-là?
M. Laporte (Richard): Je crois que la compagnie Bioshell est
toujours là depuis plusieurs années. Elle fabrique toujours cette
biomasse. Mais elle s'est axée vers une biomasse industrielle qui est
légèrement différente de la biomasse domestique, car les
matières premières utilisées sont plutôt faites
d'écorces et le fait de la matière première fait qu'elle
ne peut pas être utilisée dans les fournaises conventionnelles
résidentielles. Ils sont au lac Mégantic. Je les connais
très, très bien. Je connais bien leur «plant». Ils
ont un «plant» d'une très haute capacité de
fabrication ainsi que quelques autres «plants» qu'il y a ici au
Québec, mais le produit qu'ils fabriquent actuellement n'est pas
axé vers la consommation résidentielle, mais plutôt
industrielle.
Mme Bacon: Mais d'où vous vient cet intérêt
pour la biomasse en général, mais aussi, en même temps,
pour la valorisation énergétique?
M. Paquette: C'est qu'on est actuellement en sérieuses
difficultés par rapport à nos rebuts. Comme je participais, j'ai
accompagné le document avec le mémoire déposé au
Bureau de consultation de Montréal sur la gestion des déchets, et
on retourne aussi maintenant au BAPE, puisque le ministre de l'Environnement a
dégagé une future audience à cet effet-là.
D'un premier point, il faut absolument régler le problème
de la biomasse qu'on enfouit. Cette biomasse-là représente entre
200 000 et 300 000 tonnes annuelles seulement à la ville de
Montréal. C'est un produit énergétique qu'on ne peut plus
se permettre d'enfouir. C'est regrettable, mais ce produit peut chauffer tout
bâtiment. Imaginez, déjà là, c'est un point
important.
Le deuxième point, c'est qu'étant de formation
forestière j'ai participé à plusieurs études. J'en
ai mené. J'ai fait le tour des forêts. J'ai étudié
les écosystèmes, j'en ai provoqué. J'ai détruit.
J'ai reconstruit comme tout le monde un peu. J'ai même arrosé
à l'insecticide. Après avoir pris livraison d'une recherche en
entomologie, je m'en suis un peu converti et j'ai remarqué que la
forêt était affreusement mutilée à certains
endroits.
Tantôt, je vous mentionnais qu'il y a des photos satellites qui
montrent qu'un certain jaunissement est évident maintenant au-dessus de
la Gaspésie et de l'Abi-tibi. Ce n'est pas une blague. Si on pense
être différents des Somaliens, dans quelques centaines
d'années, si on n'est pas musulman, on va probablement devenir
désertique.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paquette: Vous riez, mais je pense que la façon
d'exploiter actuelle n'a rien prouvé encore.
Mme Bacon: Est-ce que vous avez fait des démarches? Est-ce
que vous avez entrepris des démarches pour développer, exploiter
votre concept que vous venez de nous expliquer et, si oui, qu'est-ce que c'est,
l'accueil que vous recevez?
M. Paquette: Je vais vous donner seulement un exemple. Par
exemple, au CRIQ, au Centre de recherche industrielle du Québec, on ne
retourne plus les appels maintenant. L'accueil que j'ai, je ne le
décrirai pas, on va peut-être mal souper avec tout ça.
Mme Bacon: Vous avez fait des démarches.
M. Paquette: Bien, j'ai fait le tour de tout le monde, Mme Bacon.
J'ai fait le tour de mon député de comté, j'ai
été reçu par son bras droit. J'ai fait le tour au
fédéral. J'ai posté mes écrits depuis... Plusieurs
doivent connaître mes écrits, ça fait une dizaine
d'années que j'en fais. Mais sur la biomasse... Au début, je
travaillais sur le compost, mais je m'aperçois qu'on va stocker des
milliers de tonnes de compost pour rien. L'agriculture n'est pas prête.
On a entendu M. Proulx tantôt, ils ne sont pas tout à fait
prêts à prendre le virage. Alors, pour l'instant... Finalement, le
compost, c'est de la biomasse utilitaire aussi qui peut devenir un combustible.
Alors, ça a été présenté aux journaux.
Tranquillement on en parle.
Mais il faut avouer tout de suite un obstacle de taille, c'est la
gazotechnologie. Ah! La gazotechnologie s'est installée en force il y a
plusieurs années. On peut parler de 70 ans. Il y avait bien des gens
reliés au gaz avant Gaz Métropolitain. Il y a beaucoup
d'intérêts là-dedans. Vous nous posez une question directe.
On respecte ces intérêts-là. On demande à
l'industrie de se préparer au changement. On n'est pas venu jeter tout
le monde à terre, on est venu présenter un produit qui propose
une solution viable à long terme, intéressante, qui règle
d'un coup nos problèmes environnementaux, qui peut, localement, diminuer
l'utilisation de pylônes. Ça peut aussi permettre à Hydro
d'exporter davantage aux États parce que les États polluent
beaucoup plus que nous par rapport à la production de centrales
thermiques. Ce qu'on propose de brûler auprès de la
frontière Québec-New Hampshire... Sur Châteauguay-New York
plutôt, excusez, on parle de construire des centrales thermiques qui vont
utiliser notre biomasse à nous. Pourquoi pensez-vous qu'ils s'installent
si près de la ligne? C'est parce qu'ils savent qu'on est riches en
biomasse. Eux, ils l'ont «catchée», l'histoire. Ils s'en
viennent. Alors, il faut le faire. On est dus. Et je suis un homme d'affaires,
alors, intéressé en tant qu'homme d'affaires, avec un vocable
humanitaire peut-être. Si ça vient ensemble, c'est parfait! J'ai
des hommes d'affaires autour de moi qui sont prêts à foncer.
Alors, vous me demandez s'il y a un intérêt, quel
intérêt? L'approche a été faite ça fait
longtemps. Ces gens-là travaillent depuis 15, 20 ans dans le dossier.
Moi, je suis un petit nouveau.
Mme Bacon: Vous reprenez, dans votre dossier, une affirmation
à l'effet que l'électricité serait trop
noble pour être utilisée pour le simple chauffage de
bâtiments. Moi, j'aimerais savoir ce qui vous amène à
penser que cette conclusion-là s'applique ici, au Québec.
M. Paquette: Dans un régime d'abondance, peut-être
moins. Mais maintenant qu'on a bien analysé le coût politique des
barrages et des inondations, avec les Cris et tout ça, on
s'aperçoit que le coût est trop élevé par rapport
à une énergie qui peut facilement être comblée par
des substituts. La biomasse en est un. Et si le gaz naturel finit par
être développé pour moins polluer et moins atteindre la
couche d'ozone, tant mieux! Mais, moi, mon fer de lance, c'est la biomasse, et
j'y crois parce qu'il n'y en a pas, de pollution, avec la biomasse.
Alors, pour répondre précisément à votre
question, si réellement on peut se permettre de continuer à
chauffer aux cailles électriques comme on le fait, je pense que c'est
assez décrié actuellement. Hydro a besoin de rehausser son image.
Ça serait un bon pas en avant, en tout cas, de chercher à
reconvertir au biéner-gie, utilisant d'autres sources
multiénergétiques.
Mme Bacon: Ils vont être trop populaires. Ils sont
déjà à 86 %.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paquette: oui, à 96 %.
Mme Bacon: Est-ce que le soutien du chauffage au bois comme vous
le proposez, aux granules de biomasse, peut être assimilé à
des mesures d'efficacité énergétique devant être
supportées par le gouvernement ou Hydro-Québec?
M. Paquette: Je vais laisser M. Laporte, qui est un expert dans
le domaine.
M. Laporte: II est sûr qu'un support gouvernemental dans
une telle aventure, qui est quand même un marché totalement
différent, serait grandement accepté. La chose qui en est, c'est
que je pense qu'il n'y a pas beaucoup de gens ici au Québec qui sont au
courant de cette fameuse capacité énergétique de biomasse.
Je vous ai fait passer tout à l'heure quelques photos pour vous
démontrer ça a l'air de quoi, une fournaise biomasse. Les gens ne
sont pas conscients de ça. Il y a des systèmes qui sont
installés, et ça vous frapperait de voir que c'est similaire
à un système de chauffage à l'huile. La seule chose qui en
est c'est que le combustible est un bois, un bois qu'on a
récupéré, qui était complètement une perte,
qu'on a compressé et qu'on réutilise. Alors, c'est là
qu'est le but de la biomasse. (17 h 30)
Tout à l'heure, j'entendais M. Proulx qui nous parlait ici... Je
pense que quelqu'un avait mentionné le blé d'Inde. Les fournaises
que vous voyez peuvent consommer le blé d'Inde ou la granule de bois.
Vous avez des options de le faire parce que ce sont deux biomasses valables
comme chauffage. C'est sûr que, disons, le bois a peut-être
quelques avantages sur le blé d'Inde ou maïs, à cause des
entretiens plus fréquents ou quoi que ce soit, mais les deux sont des
combustibles vraiment valables.
J'entendais aussi les gens qui étaient avant M. Proulx, qui
parlaient de gaz, qui parlaient de lignes de gaz, d'implantation de
réseaux, d'infrastructures quelconques. Ce dont on parle ici, quand on
parle de biomasse, on n'a aucun besoin d'autres... On a déjà des
moulins qui fabriquent de la biomasse ici, au Québec. Il y en a trois,
ici, au Québec, il y en a un quatrième qui est en train de se
monter; alors, la biomasse n'est pas en manque, elle est là. Il s'agit
simplement de faire évoluer la connaissance au niveau des consommateurs
québécois, au niveau des citoyens qu'il y a une alternative qui
s'appelle la biomasse de bois ou de maïs, dépendamment des
régions ou des accès au combustible en question.
Mme Bacon: Compte tenu de la biomasse, de la provenance de la
biomasse que vous comptez utiliser, quelles sont les incidences
environnementales de votre concept? Est-ce que vous l'avez
étudié, ça, les incidences environnementales?
M. Paquette: Les incidences environnementales.
Mme Bacon: Les incidences environnementales. Parce que la
biomasse vient de quelque part.
M. Paquette: Actuellement, l'approvisionnement vient surtout des
moulins à scie, du bois d'oeuvre, de la pulpe à papier. La
pâte à papier rejette beaucoup.
M. Laporte: C'est des rejets.
M. Paquette: Les rejets de tous ces gens-là qui ne servent
pratiquement pas. Alors, la première source d'approvisionnement est
là; la deuxième est que finalement la forêt, avec un
meilleur service de cueillette... je parlais de cueillette nationale
tantôt. la dimension... vous savez bien qu'il y a de la forêt
partout où hydro passe, il y a des sciures de pâtes et papiers
partout où les infrastructures le permettent. partout, finalement,
où il y a de la forêt, avec une meilleure pratique sylvicole, on
va aller chercher une boiserie supérieure. ces résidus, les
branches, on ne s'en occupe pas: 50 % de l'arbre est rejeté
actuellement, est pourri dans le bois. même que ça nuit à
la forêt parce que cette biomasse-là en décomposition est
un foyer d'infestation d'insectes.
Le Président (M. Audet): Merci. Oui? vouliez-vous ajouter
quelque chose?
M. Laporte: Oui. Peut-être pour ajouter à cette
source première, c'est que vous avez aussi le recyclage des bois
usés propres dans nos cités et villes. Partout où des gens
ont ce qu'on appelle communément des palettes
de bois ou des «crates», dans nos termes
québécois, ils peuvent tous être recyclés. Et
là je dis bien une source de bois propre, on ne parle pas de bois peint
ou quoi que ce soit. Vous en avez des milliers de tonnes qui sont là,
qui sont enfouies dans le sol, qui coûtent énormément cher.
Vous avez des firmes américaines qui ne fabriquent des granules de bois
que strictement avec les résidus de palettes ou de «crates»
de bois ou de bois usé déjà.
Alors, déjà, c'est un autre côté
environnemental qui est valable parce que, actuellement, on les enfouit
à vraiment des coûts exorbitants. Plus ça va, plus les
sites ne sont pas autorisés à faire de l'enfouissement de bois
usé.
Le Président (M. Audet): D'accord, merci. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Je ne sais pas trop par quel bout commencer.
À prime abord, effectivement, quand on lit votre texte puis qu'on ne
vous écoute pas, on est portés à faire ce que les trois
quarts du monde pensent, ce que vous avez dit vous-mêmes: Voilà
deux illuminés qui s'en viennent cogiter devant nous autres; ils
rêvent en couleur, etc. Effectivement. Mais dans les faits, quand on
regarde comment nos forêts sont exploitées, en particulier, et les
résidus d'arbres qui demeurent en forêt, parce qu'on les prend
jusqu'à un diamètre x, il y a une perte épouvantable. On
n'a seulement qu'à aller dans la région de
Saint-Michel-des-Saints, qu'ils sont en train de pleumer, comme on dit en bon
québécois, c'est épouvantable, et c'est même
inquiétant, effectivement. Puis si ce n'est pas pensé par de
grosses multinationales ou de grosses sociétés d'État,
ça n'a pas de maudit bon sens. Les trois quarts du temps, c'est vrai que
c'est le réflexe qu'on a, et je suis content que vous nous rameniez un
petit peu à une réalité. Je vous remercie surtout pour
ça. Ça nous fait réfléchir, en tout cas, c'est
clair.
Il y a même des compagnies comme Ciment St-Laurent, par exemple,
qui ont déjà présenté des projets pour pouvoir
chauffer les immenses fourneaux avec des déchets domestiques. Et
ça, c'était pris au sérieux parce que c'était une
compagnie qui... Mais on est confrontés en même temps à une
dimension environnementale, et c'est un peu ça qu'il est difficile de
concilier. Les gens ont la trouille de leur vie quand tu leur dis ça.
Est-ce qu'il va y avoir un dépotoir à ciel ouvert près
d'une cimenterie, par exemple, qui va brûler des boulettes de
déchets domestiques? Et là, c'est: Pas dans ma cour! Eh, maudit,
c'est un problème majeur, ça. Tu as 500 personnes qui se
promènent dans la rue et qui disent: Aïe, je ne veux pas. Les rats
vont se mettre dans ça et tout le kit.
M. Paquette: À ce point précis, M. Chevrette,
justement, notre biomasse, à ne pas confondre avec
l'incinération.
M. Chevrette: Non, non, je sais.
M. Paquette: O.K.
M. Chevrette: Non, non.
M. Paquette: Merci.
M. Chevrette: Mais j'essaie de donner des exemples de gens...
M. Paquette: O.K.
M. Chevrette: ...qui ont des idées par rapport à la
réalité, à la réaction du monde. Moi, je pense que
vous avez raison. Il y en a un, projet; je pense que c'est à Chapais
qu'on veut faire de la cogénération avec de la biomasse.
M. Paquette: Oui, mais on le coupe avec le gaz naturel.
M. Chevrette: Non? Mme Bacon: Pas tous.
M. Chevrette: Pas tous? En tout cas, peu importe, je ne ferai pas
le détail de tout, mais je peux vous dire une chose, il y a quelque
chose là, c'est vrai. C'est peut-être le temps... Moi, ça
m'indique que plus il va y avoir de groupes différents qui vont venir
nous parler de biomasse, qui vont venir nous parler de possibilités de
convertir en énergie d'autres formes... l'utilisation d'autres
résidus, il va falloir qu'on réfléchisse à un
débat global sur l'énergie. C'est dans ce sens-là, moi,
que je suis de plus en plus attentif à la multitude de groupes qui nous
demandent un débat en profondeur, et peut-être de regarder
concrètement où est-ce qu'on s'en va dans l'utilisation, par
exemple, de la biomasse, effectivement.
On a une réflexion très sérieuse à faire sur
l'utilisation des résidus de bois. Quand on regarde nos scieries, par
exemple, qui ne sont même pas capables de vendre leurs copeaux au moment
où on se parle; c'est quasiment une catastrophe pour elles, parce
qu'elles misaient là-dessus comme revenu de base, ou d'appoint en tout
cas, qui leur permettait de vivre.
Moi, je suis sensible à ça. C'est présenté
de façon assez poétique. Quand vous parlez de vos rondeurs...
M. Paquette: Merci.
M. Chevrette: J'ai arrêté de fumer, et ce n'est pas
une réserve de graisse, c'est parce que je ne peux pas faire autrement,
je grignotte entre les repas pour arrêter de fumer.
M. Paquette: Ha, ha, ha! Ma femme ne voulait pas que je le mette,
ça.
Une voix: Je pensais que tu voulais passer l'hiver.
M. Chevrette: Ce n'était pas pour passer l'hiver! Non,
blague à part, au-delà de tout l'aspect qui peut sembler un peu
rêve...
M. Paquette: Oui.
M. Chevrette: ...il y a un fondement extrêmement important,
et je voudrais vous remercier de l'apport ou du moment de réflexion que
vous nous imposez. Tôt ou tard, il va falloir qu'on s'y arrête
sérieusement, que ce soit par une structure où on fera un
débat plus global qu'au moment où on a à traiter du plan
de développement de l'hydroélectricité, mais, à mon
point de vue, le débat va s'imposer tantôt.
J'arrive d'un pays qui est «déforesté» au
bout, qui est Madagascar. Tu arrives en avion, il n'y a plus d'arbres. Ils
chauffent pour semer leur riz. Il n'y a plus d'arbres, ça change
complètement le climat. J'ai eu la chance aussi d'aller au
Sénégal où le désert empiète chaque
année; je ne me souviens plus à quel rythme. C'est effarant! Le
Québec a payé des projets de reboisement là. Quand on
regarde ce qu'on laisse faire à des compagnies forestières, ici,
et qu'on se paie le luxe de payer tous les gouvernements n'y ont pas
échappé, le nôtre comme l'actuel, on paie pour des
reboisements ailleurs et on fait plus ou moins attention à notre propre
forêt, ici même. On a de maudites questions à se poser,
effectivement. Et on est surpris que les climats changent, que les
écosystèmes changent, etc.
Moi, je vous remercie.
M. Paquette: Merci infiniment. Je ne voulais pas
nécessairement l'imposer, M. Chevrette, mais ça part de loin, le
débat environnemental. C'est peut-être une attitude que je
corrigerai au fur et à mesure que nos dirigeants me témoigneront
un petit peu de compréhension, comme vous le faites, et comme vous le
faites. Merci.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Moi, je voudrais vous poser des questions sur
vos coûts de production, parce que, à mon sens... Je suis
très ouvert, je trouve que c'est une des formes de biénergie
qu'on peut utiliser dans les périodes de pointe à
Hydro-Québec. Mais, au fond, là où je pense qu'il est
important de se poser la question, pour le citoyen ordinaire qui paie une
facture d'électricité, est-ce que ça va lui coûter
plus cher ou moins cher? Là, on peut faire intervenir le court, le moyen
et le long terme. Bon!
Disons que quelqu'un paie en électricité 1500 $ pour
chauffer sa maison, actuellement. Vous, ça coûte combien pour la
chauffer, la maison?
M. Laporte: Vous allez avoir quand même une
économie, qui a été basée ici, au Québec,
depuis les trois dernières années, d'entre 30 % et 35 % de votre
facture énergétique de chauffage.
M. Léonard: Donc, ça va coûter 1150 $. M.
Laporte: Environ.
M. Léonard: 30 % et 40 %, c'est même plus que
ça, donc 1000 $. (17 h 40)
M. Laporte: Autour. Maintenant, peut-être en langage mieux
connu, le coût de la biomasse, la granule de bois, équivaut
à la combustion d'un poêle à combustion lente conventionnel
à bouts de bois de 16 pouces. Alors, si vous chauffez votre maison avec
un poêle à bois conventionnel de 16 pouces, vous allez acheter
pour 400 $, 450 $, 500 $ ou 600 $ de bois, et on met une étiquette
à peu près entre 40 $ et 50 $ la corde le cordon,
plutôt de 16 pouces, 4 par 4 par 8, c'est 16 pouces. Et puis, si
on balance nos énergies là-dessus et qu'on calcule le coût
énergétique de chauffer une maison et ça, c'est des
choses qui sont, je pense, vraiment connues actuellement ça ne
coûte pas plus cher de chauffer avec une biomasse de granules de bois que
de chauffer avec des bouts de bois.
La seule et unique différence qu'on voit de tout ça, c'est
que c'est un système qui a été développé,
qui est autonome. Vous y placez le combustible et mécaniquement... Et
là, je ne mentionne pas de produits, parce que vous avez à peu
près 40 produits différents, de manufacturiers différents
qui fabriquent des appareils à combustion de biomasse de granules de
bois. L'avantage, c'est que le consommateur, lui, il place une quantité
de combustible et J'oublie pour des heures, ce que le poêle à bois
conventionnel ne peut pas donner.
Sur les photos que je vous ai démontrées tout à
l'heure, vous voyez une fournaise d'une capacité de 130 000 BTU qui est
attachée avec ce qu'on appelle une unité d'urgence qui s'appelle
Hydro-Québec, c'est une je ne suis pas tellement ferré
là-dedans mais une 20 K qu'il y a sur le dessus de l'appareil,
qui embarque dessus automatiquement si jamais le propriétaire se serait
éloigné de sa résidence pour une trop longue
période. Vous avez un filtre électronique; vous avez un
humidificateur d'air et, en plus, ce que vous n'avez peut-être pas vu,
c'est que vous avez un système de serpentins pour l'eau chaude. C'est
que la même fournaise chauffe votre maison et vous donne de l'eau chaude
à 60 gallons sans frais.
Si on regarde les coûts d'un réservoir à eau chaude
par électricité, les gens à qui on en a installé se
paient le luxe, l'hiver, de laver leur voiture à l'eau chaude parce que
ça ne coûte rien, l'eau chaude, avec un système de
biénergie semblable au nôtre. Alors, je pense que pour votre
question d'économie, il est facile, c'est vraiment simple de faire une
économie si on prend de la granule de bois ou une biomasse avec les
nouveaux systèmes.
M. Léonard: Les coûts d'installation,
maintenant,
est-ce que c'est comparable? À l'origine, par exemple, avec le
gaz naturel, on sait que ça coûte plus cher, l'installation d'un
système au gaz naturel plutôt que l'électricité, que
les plinthes électriques. Vous, c'est quoi comparativement?
M. Laporte: II est sûr que lorsque vous allez en biomasse,
on parle d'air forcé. Alors, à ce moment-là, quelqu'un qui
a déjà un système de plinthes chauffantes,
communément connues, il faut qu'il y ait un système de conduits
qui nous apportent l'air chaud dans chacune des pièces. C'est un
supplément, on est conscients de ça, c'est un frais
supplémentaire. Mais le jeu de l'économie en vaut la
chandelle.
M. Léonard: O.K., merci beaucoup. Je reviendrai
peut-être.
Le Président (M. Audet): Merci. Mme la
députée de Taillon, il reste 1 minute sur ce 10 minutes.
Mme Marois: Dans la lignée des questions de mon
collègue, essentiellement, vous, pour produire cela, évidemment,
c'est des déchiqueteuses et des presseuses, c'est essentiellement
ça que ça...
M. Laporte: C'est ça. Remarquez bien, je ne suis pas un
fabricant de granules de bois. Il y a ici, au Québec, Énergex ou,
bien connue aussi, Bioshell. Vous en avez un autre, aussi, dans la même
région de l'Estrie, qui s'appelle Bio Chat. Vous en avez un dans les
Basses-Laurentides qui s'appelle Bio Flamme. Vous en avez un autre qui se
travaille ici, dans la région, et il y en a un autre qui est
après se monter dans le coin d'Amqui, parce que la demande est
là.
Cette année, vous avez trois manufacturiers qui ont produit leur
capacité maximale et qui ne fournissent pas le marché
actuellement, c'est pourquoi il y a tant de moulins, de fabricants de granules
de bois qui montent comme des champignons, parce que la biomasse est en
demande. On est obligés d'en faire venir de l'Ontario et, il y a deux
ans, je la faisais venir des États-Unis, du Montana, pour pouvoir
combler nos besoins. Mais depuis deux ans, l'évolution au Québec,
on est peut-être la province la plus productrice de biomasse.
Mme Marois: C'est toujours relié aussi aux coûts de
fabrication. C'est quoi, le coût d'une usine?
M. Laporte: De bâtir une usine? Mme Marois: Oui, de
ce type-là. M. Laporte: Dépendamment...
Mme Marois: ...et des équipements qui vont avec,
évidemment, pour produire la granule.
M. Léonard: L'investissement, c'est quoi? Mme Marois:
C'est ça!
M. Laporte: L'investissement, dépendamment de votre
matière première. Je vais quand même être rapide,
mais précis.
M. Léonard: Le bois, par exemple.
M. Laporte: Si vous utilisez le brin de scie d'un moulin, vous
avez une matière première qui est entre 50 % et 55 %
d'humidité. Alors, il y a un coût qui est relié au
séchage de la matière première pour la cuber, qui est la
fonction de la tasser en petits granules. À ce moment-là, le plan
peut vous coûter entre 700 000 $ et 800 000 $. Là, je parle d'un
plan de fabrication de a à z, un ensemble complet. Si vous avez une
matière...
Mme Marois: Pour produire combien de tonnes ou de...
M. Laporte: À ce moment-là, vous allez pouvoir
fabriquer entre 10 000 et 15 000 tonnes de granules annuellement dans votre
année fiscale, dépendamment des appareils, encore. Si vous avez
une matière première qui est dérivée de
matières qui sont déjà présé-chées,
à savoir des écopeaux ou de la sciure de bois de gens qui font
des moulures de bois franc, alors, votre matériel est déjà
séché. Vous pouvez couper à cette facture un 250 000 $
à 300 000 $, qui sont les frais d'appareils pour le sécher.
Ça veut dire qu'on va parler d'un demi-million de dollars pour monter un
moulin de fabrication de granules.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de l'Acadie.
M. Bordeleau: Merci, M. le Président.
Est-ce que vous avez une idée de ce que ça peut
représenter comme potentiel énergétique, disons, la
récupération comme telle et l'utilisation de biomasse? On
pourrait combler jusqu'à quels besoins, vous pensez, au niveau de la
province en utilisant une technique comme celle-là?
M. Laporte: De ma connaissance, les résidus sont
déjà sur place, les montagnes de bran de scie que vous voyez
à tous nos moulins du Québec; et Dieu sait qu'on en a. Qu'on
aille en Abitibi, on les voit comme des montagnes, comme on a ici notre
Sainte-Anne. Partout où vous allez, dans le Bas-du-Fleuve, dans la
région de l'Estrie, il y a de la matière première à
profusion. La seule chose qu'ils attendent, c'est la consommation, le
développement du concept de biomasse. En ce qui me concerne, le
problème de matière n'est vraiment pas, à ce stade-ci, un
problème qu'on peut se casser la tête avec. Actuellement, on
produit et on livre aux États-Unis, parce qu'il y a des marchés
américains très gran-
dement ouverts pour les fabricants.
M. Bordeleau: Vous parlez aussi de la biomasse urbaine.
M. Laporte: Oui.
M. Bordeleau: Et comment est-ce que vous voyez
l'intégration de votre concept dans les politiques de
récupération? Dans les milieux urbains, on sait que, bon, on
essaie de faire de la récupération de différents produits,
et il y a quand même des coûts assez élevés de
récupération. Comment vous pensez que la fabrication de biomasse
dans un milieu urbain pourrait s'effectuer, quand on pense aux problèmes
de la récupération surtout?
M. Paquette: Déjà, actuellement, on a un frais
d'enfouissement qui se situe entre 50 $ et 60 $ la tonne.
L'incinération; la RIGDIM, la Régie intermunicipale de gestion
des déchets parle d'un coût d'incinération entre 100 $ et
200 $ la tonne. Ces mêmes montants peuvent être appliqués
pour démarrer un réseau de récupération à
l'échelle du Québec, en commençant par les principales
agglomérations urbaines.
M. Bordeleau: Parce que dans les milieux urbains, on n'arrive pas
à rentabiliser, par exemple, la récupération du verre ou
des choses comme ça à cause des coûts de transport,
notamment.
M. Paquette: Combien de surcroît si nous, nous sommes
prêts à payer pour la sciure de bois, à un moment
donné?
M. Laporte: II y a eu des démarches qui ont
été faites depuis à peu près un an avec des
récupérateurs tels que Laidlaw, bien connu ici, au Québec,
dans les régions pour faire la cueillette des déchets. Je les ai
rencontrés. Ces gens-là sont prêts à livrer la
matière propre et je dis bien propre... On ne parle pas de
déchets domestiques, on parle de récupération propre de
bois usé. Les gens seraient prêts à payer la source qui
prendrait en main le déchiquetage de ce bois déjà
usé pour en fabriquer une biomasse de bois telle que vous en avez eu des
échantillons.
Les gens de GM, à Sainte-Thérèse, ont
communiqué avec nous. Énormément de grands manufacturiers
ne savent quoi faire avec ce bois usé, parce qu'il ne peut pas
être utilisé à autre chose. C'est l'article idéal
à être récupéré et en faire une biomasse
valable. On l'appelle, nous, la valeur négative. C'est qu'au lieu de
payer pour acheter une matière première pour fabriquer une
biomasse, on nous paie pour la déchiqueter et l'utiliser.
M. Paquette: Énergétiquement, ça permettrait
de développer une certaine autonomie énergétique de
surcroît.
Le Président (M. Audet): Ça va? M. Bordeleau:
Parfait. Oui, merci.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Bien. Si je comprends, les usines que vous
connaissez à l'heure actuelle coûtent environ, disons, trois
quarts de millions et pour fabriquer quelque 15 000 tonnes l'unité,
c'est ça?
M. Laporte: Approximativement, oui, c'est peut-être une
image assez bonne.
M. Léonard: O.K. Ce ne sont pas des investissements...
Donc, ça pourrait être imbriqué à des scieries, un
peu partout là où il y a de la biomasse. (17 h 50)
M. Laporte: Oui. C'est ça.
M. Léonard: Maintenant, je reviens à la maison
privée. Vous installez un tel système, quelle est l'autonomie de
chauffage? Est-ce que ça dure 12 heures, 36 heures, 72 heures ou
quoi?
M. Laporte: Je ne sais pas si vous avez pris connaissance du
dossier. Vous avez deux styles d'appareils: vous en avez un qu'on appelle
«la fournaise», et l'autre, c'est un «poêle», qui
est peut-être plus décoratif. Je ne sais pas si vous avez eu un
document qui vous a été déposé et qui est semblable
à celui-ci.
M. Léonard: Non.
M. Laporte: S'il comprend le poêle, qu'on appelle un
système d'appoint, vous pouvez avoir une autonomie moyenne et je
dis moyenne de 18 à 24 heures, dépendamment de la saison,
du froid, de l'ouverture des portes, de l'étanchéité de la
maison. Si vous parlez d'une fournaise, vous pouvez être trois ou quatre
jours en totale autonomie sans vous préoccuper du remplissage ou du
dégagement des cendres. Et puis le tout fonctionne avec un thermostat
mural, de la même bonne vieille façon qu'une fournaise à
l'huile; vous l'ajustez à 20° ou 22° et le tout fonctionne.
M. Léonard: II y a eu, je suppose, une croissance, un
développement des installations, de la demande, à l'heure
actuelle. On a l'impression de découvrir un peu, tout à coup, la
pierre philosophale, ce soir. Ou bien vous êtes bon vendeur, enfin, je ne
sais pas. Ceci étant dit, il y a un marché en grande
expansion...
M. Laporte: Actuellement, notre entreprise...
M. Léonard: Vous allez décoter Hydro-Québec
avec ça?
M. Laporte: Non, mais je peux vous dire qu'en deux ans notre
entreprise a ouvert 93 points de vente de produits de biomasse de fournaise et
de poêle à granules de bois dans tout l'Est du Canada. Nous
couvrons l'Ontario, le Québec, la Nouvelle-Ecosse, le Nouveau-Bruns-wick
et les îles. Alors, il y a quand même un marché, et
ça fait 25 ans que la biomasse comme telle, en combustible
énergétique résidentiel, existe aux États-Unis,
fonctionne.
M. Chevrette: Je suppose que l'un des problèmes majeurs,
c'est qu'on est une société passablement gâtée. Je
disais tantôt à Mme la ministre: On imagine, avec l'entassement du
résidentiel présentement, il y a toujours l'endroit, le stockage
et les résidus ensuite, les cendres.
M. Laporte: Qui sont, en passant, bénéfiques pour
les jardins. C'est un engrais naturel efficace.
M. Chevrette: Je n'en doute pas, mais je vous dis que ce n'est
pas la perception du peuple, ça.
M. Laporte: Ha, ha, ha! Je suis d'accord avec vous.
M. Chevrette: J'essaie plutôt de donner tout de suite
l'interrogation du peuple quand on arrive...
Mme Marois: C'est quoi, le volume?
M. Chevrette: C'est bien évident que quand j'arrive avec
un «combustion lente» dans mon sous-sol, j'ai le même
problème, il faut que je rentre du bois deux fois plus que votre
affaire. Et c'est pesant, des fois, des quartiers de 16 pouces. Et la cendre,
je suis pris avec aussi, sauf que les gens ne réfléchissent pas
en fonction de ça, parce que le «combustion lente», c'est
quelque chose que tu peux te payer une soirée ou deux par semaine, si tu
as le goût de t'étendre devant ton feu et de regarder ta
télé, alors que sur une source d'approvisionnement permanente, il
y a un système... Les gens recherchent le confort absolu et c'est une
question de...
Moi, je pense que ça se prépare, tout ça. D'abord,
une sensibilisation à l'utilisation de la ressource, démontrer un
peu l'alignement dans lequel on s'en va, et puis regarder les
possibilités qui s'offrent à nous, mais de façon globale.
Je pense que c'est la seule façon d'arriver à cela parce que, du
jour au lendemain, c'est difficile de convaincre une population de changer ses
habitudes de confort. Quand on était dans l'abondance de
l'hydroélectricité, c'était facile, mais le harnachement
devient de plus en plus difficile. Nos rêves fondent tranquillement.
M. Laporte: C'est un peu pourquoi, aussi, de nos jours, il y a
des milliers de gens qui se sont convertis à ce chauffage de biomasse,
parce qu'on en est à une croissance inconcevable de ces produits. Je
vous parle de milliers de ces appareils-là qui, depuis deux ans, ont
été vendus et installés dans le territoire que je vous ai
mentionné. Et nous ne sommes pas les seuls. Nous sommes maintenant
rendus cinq maisons distributrices de produits consommant de la biomasse de
bois. Je suis un de ces cinq. Alors, le chemin est ouvert, 1'ebullition se fait
actuellement; c'est vraiment une tendance économique, vraiment
économique. Les gens achètent cette biomasse, cette façon
de se chauffer par économie.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci. Ça met fin à
nos délibérations. Alors, messieurs, au nom des membres de la
commission, je veux vous remercier.
M. Laporte: Merci beaucoup.
Le Président (M. Audet): Nous allons suspendre nos travaux
jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 55)
(Reprise à 20 h 2)
Le Président (M. Audet): La commission reprend ses
travaux.
À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous rappelle
brièvement nos travaux de ce soir. Nous recevons, dans un premier temps,
le Regroupement pour la protection de l'Ashuapmushuan; ensuite suivra le
Mouvement pour l'instauration de la réglementation de
l'électricité au Québec.
Je veux d'abord, dans un premier temps, souhaiter la plus cordiale
bienvenue au Regroupement pour la protection de l'Ashuapmushuan et, messieurs,
vous rappeler brièvement aussi nos règles de procédure:
vous disposez d'une vingtaine de minutes pour la présentation de votre
mémoire; ensuite, suivra une période d'échanges d'une
quarantaine de minutes.
Avant de procéder à votre présentation, je vous
inviterais à vous présenter, s'il vous plaît, pour les fins
du Journal des débats. Allez-y.
Regroupement pour la protection de l'Ashuapmushuan
(RPA)
M. Paradis (Jean): Merci beaucoup. On aimerait
premièrement vous saluer, les membres de la commission parlementaire. Je
me présente, Jean Paradis, président du regroupement pour la
protection de la rivière Ashuapmushuan. J'ai, à ma droite, Marc
Archer, qui est biologiste, et, à ma gauche, M. Gérald Scullion,
recher-chiste.
Le regroupement pour la protection de la rivière Ashuapmushuan
est un regroupement qui compte actuellement au-delà de 12 800 membres
cotisants; donc, c'est des gens qui ont payé 5 $ pour devenir membres.
Le Regroupement s'oppose, depuis maintenant quatre ans,
au nouveau projet qu'Hydro-Québec a déposé dans la
région du SaguenayLac-Saint-Jean. Hydro-Québec a
déposé un nouveau projet en 1989. Malheureusement, on a
constaté que, dans la proposition du plan de développement 1993,
Hydro-Québec a maintenu le projet Ashuapmushuan dans ses projets.
Ce qu'on aimerait faire, en première partie, c'est de
peut-être essayer ensemble de visualiser... On a un petit vidéo de
3 ou 4 minutes. Je pense qu'on ne peut pas parler d'une rivière si on ne
l'a pas vue avant et si on ne sait pas de quoi on parle. Donc, on vous
proposerait de regarder quelques images de la rivière Ashuapmushuan. Il
y a aussi quelques images de certaines activités qu'on peut faire sur la
rivière, et il y a aussi un peu d'images d'une manifestation, d'une
démonstration d'opposition qui a eu lieu il y a presque un an au
SaguenayLac-Saint-Jean. Donc, je vous propose de visualiser ce
vidéo et, par après, on pourra commencer notre
présentation.
Le Président (M. Audet): Est-ce qu'il y a
consentement?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Audet): Tout le monde est d'accord pour
le cinéma? Alors, allons-y.
(Projection d'un vidéo)
Le Président (M. Audet): Allez-y.
M. Paradis (Jean): Comme vous le voyez, c'est une majestueuse
rivière, c'est une des grandes rivières sauvages du
Québec. Construire des barrages sur cette rivière-là,
c'est un projet insensé. C'est un projet insensé,
premièrement, parce qu'on créerait un réservoir de 773
km2, l'équivalent des trois quarts du lac Saint-Jean, parce
que ça ferait disparaître 15 rivières, 206 lacs, 445
petites rivières, 785 marais, 164 chutes et rapides.
C'est un projet insensé parce qu'on ferait disparaître
aussi un parterre forestier très productif qui équivaut à
peu près à au moins 135 emplois permanents. On ferait aussi
disparaître la ouananiche dans la rivière Ashuapmushuan
elle-même. En fait, la rivière Ashuapmushuan, c'est la
pouponnière de la ouananiche, c'est là que la ouananiche va se
reproduire. C'est l'emblème animalier aussi, la ouananiche, du
SaguenayLac-Saint-Jean, qui a été
décrété par l'Assemblée nationale. Donc, on ferait
disparaître ce poisson, ce saumon d'eau douce de la rivière
Ashuapmushuan.
C'est un projet insensé aussi parce qu'on contaminerait non
seulement les réservoirs qui seraient créés, mais aussi le
lac Saint-Jean avec du mercure. (20 h 10)
C'est un projet insensé parce qu'on affecterait la saison de
culture dans la plaine agricole du Lac-Saint-Jean à cause, possiblement,
d'un retard appréhendé du départ des glaces sur le lac
Saint-Jean lui-même.
C'est un projet insensé parce que ça ferait
disparaître de nombreux territoires de chasse et de pêche.
Ça ferait disparaître un énorme potentiel
récréotouristique.
Mais, surtout, c'est un projet insensé à cause du contexte
dans lequel il se ferait, dans une zone périur-baine où il y a
300 000 habitants qui y vivent le SaguenayLac-Saint-Jean
parce que toute la vocation du territoire convoité par
Hydro-Québec est une vocation nature, parce que beaucoup d'organismes du
haut du Lac-Saint-Jean sont orientés vers cette vocation nature; qu'on
pense au cégep de Saint-Félicien, avec l'option de milieu
naturel; qu'on pense au Centre écologique, qu'on pense aussi au zoo de
Saint-Félicien. C'est une vocation à orientation nature et
ça ferait disparaître cette vocation.
C'est aussi un projet insensé parce qu'en aval des barrages, en
bas des barrages, il y a un lac, le lac Saint-Jean, qui est actuellement
très fréquenté et très utilisé par la
population.
En fait, c'est le projet le plus destructeur, c'est le projet le plus
insensé de tous les projets d'Hydro-Qué-bec au Québec.
C'est d'ailleurs pour ça que ce projet est le projet le plus
contesté au Québec.
Le regroupement contre 12 800 membres, ce n'est pas un accident, ce
n'est pas arrivé de même, par hasard. Vous savez, 12 800 membres,
c'est l'équivalent d'un regroupement de 50 000 membres à
Québec, toutes proportions gardées. Ça fait quatre ans
qu'Hydro-Québec est en phase I d'avant-projet. Hydro-Québec, au
début de l'avant-projet, phase I, s'est engagée envers la
population du SaguenayLac-Saint-Jean à respecter la population,
à respecter sa décision et s'est engagée, à
plusieurs reprises par après, à respecter la population: si la
population ne voulait pas du projet, il n'y en aurait pas.
Hydro-Québec a fait plusieurs sondages. Dans ces sondages, dont
le dernier, 60 % de la population s'opposent au projet. Et plus Hydro informe,
plus Hydro fait de la publicité, donne des explications sur son projet,
plus les gens sont contre dans le temps. Plus de 30 000 000 $ ont
été dépensés, à date, en études et en
information, et les «contre» sont encore plus nombreux que jamais:
50 organismes et municipalités se sont prononcés contre le
projet, vous avez la liste dans notre mémoire, en page 19.
En fait, c'est un projet insensé et la population de la
région en est bien consciente. On pourrait penser que c'est le
réflexe «pas dans ma cour», encore une fois, mais ce n'est
pas vrai. Si jamais, par un débat public sur l'énergie, on pense
que ça prend encore de l'hydroélectricité, la
région SaguenayLac-Saint-Jean, par le biais de six organismes
majeurs, dont le regroupement pour la protection de la rivière
Ashuapmushuan, a proposé une alternative, une alternative qui s'appelle
l'option Péribonka. Vous avez, dans le mémoire, à
l'arrière du mémoire, un document qui explique très bien
l'option Péribonka. Donc, «pas dans ma cour», au
SaguenayLac-Saint-Jean, c'est non coupable. On dit: Oui, peut-être
dans notre cour, si le besoin se fait sentir, s'il
faut encore participer à l'effort du Québec, mais pas
n'importe où dans notre cour, sur une rivière qui est
déjà harnachée, qui a déjà des barrages
dessus et qui est déjà vouée à
l'hydroélectricité. C'est un projet, l'option Péribonka,
acceptable, réalisable. C'est un projet qui pourrait se faire à
très court terme puisqu'il n'y aurait pas d'opposition. La
Péribonka, oui; l'Ashuapmushuan, jamais!
En plus, le projet d'Hydro, ce qu'il fait dans notre région,
c'est qu'il hypothèque le territoire convoité par les
réservoirs. Ce territoire-là est, par le fait même,
gelé depuis 20 ans; depuis qu'Hydro, en 1970, a pensé faire un
projet sur cette rivière-là, il n'y a plus rien qui se
développe dans d'autres domaines. La preuve, c'est qu'au niveau de la
forêt, par exemple, depuis 1982, Énergie et Ressources a
arrêté tout reboisement dans le secteur. On ne plante plus, on ne
développe plus la ressource forestière dans les secteurs des
réservoirs prévus. C'est grave, ça hypothèque le
territoire; ça hypothèque depuis 20 ans.
On ne développe plus le récréotouristique parce que
peut-être qu'un jour Hydro fera des barrages. Le territoire est
gelé depuis 20 ans. C'est assez, c'a assez duré; il faut
libérer l'Ashuapmushuan, la libérer, l'affranchir de
l'hypothèque qui pèse sur elle déjà depuis 20 ans.
Ça fait déjà trop longtemps. Vous savez, on en a
parlé souvent avec Hydro-Québec, depuis quatre ans, on a
demandé l'abandon du projet à plusieurs reprises. Dans le cadre
de la consultation qu 'Hydro-Québec a poursuivie au printemps dernier,
on a demandé l'abandon. Hydro-Québec ne nous a pas compris
puisqu'elle a encore mis dans sa proposition de plan de développement la
rivière Ashuapmushuan.
Donc, ce qu'on fait ce soir, c'est qu'on demande officiellement, par le
biais de notre mémoire, au gouvernement du Québec de prendre ses
responsabilités et d'ordonner à Hydro-Québec d'affranchir
le territoire de façon à ce qu'on puisse développer ce
secteur-là dans le sens de son orientation: vocation nature. Vous savez,
juste comme exemple, quand on affranchit une rivière, des fois,
ça se développe très vite après. La preuve, la
rivière Jacques-Cartier que vous connaissez bien. Tant
qu'Hydro-Québec a eu une hypothèque sur cette
rivière-là, il n'y a rien qui s'est passé vraiment de
sérieux. Depuis que c'est libéré, le potentiel se
développe. C'est vraiment très intéressant.
C'est la demande qu'on fait au gouvernement du Québec, c'est la
principale demande de notre mémoire, mais, en plus, ce qu'on sent, nous
autres, parce qu'on est un organisme qui est impliqué beaucoup dans la
protection du territoire, ce qu'on sent, c'est qu'avant même de penser
à faire un plan de développement parce que, nous, on
travaille sur un dossier précis si le gouvernement, comme il le
dit si bien, veut s'inscrire dans le concept de développement durable,
si Hydro-Québec elle-même le dit et se pète les bretelles
excusez l'expression de faire du développement durable ou
de s'inscrire, la première chose à faire avant même de
faire un plan de développement, c'est, premiè- rement, de faire
un inventaire des grandes rivières qui restent au Québec, des
grandes rivières sauvages accessibles, d'en faire l'inventaire, d'en
faire le classement.
Nous, on dit que c'est primordial que le Québec prenne la
responsabilité, parmi toutes ces grandes rivières qui nous
restent, d'en garder, de décider d'en garder pour les
générations futures, de décider d'en garder quelques-unes
grandes, naturelles et accessibles. Si ça avait été fait
il y a 15 ou 20 ans, on n'aurait pas besoin de protéger l'Ashuapmushuan
actuellement parce qu'elle aurait sûrement été dans celles
qui auraient été classées comme étant
protégées.
Donc, le processus du plan de développement d'Hydro-Québec
devrait toujours, pensons-nous, être précédé d'une
prémisse qui serait le classement de rivières; sinon, imaginez
dans 15 ou 20 ans. Si on s'en va comme ça, dans 15 ou 20 ans, si vous
prenez le plan de développement actuel, il n'y en aura plus de grandes
rivières au Québec. Ce n'est pas compliqué, on va avoir
passé, en 50 ans, d'un pays où le bassin hydrographique
était envié par le monde entier à un pays où on
n'aura plus de grandes rivières sauvages accessibles, et on aura
vraiment le record des réservoirs. On pense qu'il faut s'inscrire dans
le concept du développement durable et la seule façon de le
faire, c'est de réserver certaines rivières pour fins de
conservation.
Vous avez aussi, dans notre mémoire, quelques commentaires, parce
qu'on a participé à la consultation d'Hydro-Québec, et
vous avez quelques commentaires sur le plan de développement
lui-même, des aspects plus particuliers et plus généraux;
entre autres, au niveau de l'économie de l'énergie. Nous, on
pense que les projets d'économie d'énergie, c'est les projets les
plus intéressants; les plus intéressants pour le Québec,
mais aussi pour les régions parce que les retombées
économiques de ces projets d'économie d'énergie se situent
localement, dans les localités. On pense que c'est vers ça qu'on
devrait s'orienter le plus possible. En plus, il n'y a pas d'effet
négatif.
Ce qu'on a constaté, nous, en consultation, c'est que le
problème d'Hydro-Québec, actuellement, c'est que toute la section
économie d'énergie est en conflit d'intérêts par
rapport aux projets concrets comme le projet de l'Ashuapmushuan. On pense qu'il
faudrait absolument, et c'est ce qu'on recommande au gouvernement, que la
section économie d'énergie soit donnée à une
corporation indépendante, à un organisme indépendant qui
aurait des objectifs indépendants des promoteurs de barrages parce qu'on
ne peut pas, en même temps, faire la promotion des barrages et, en
même temps, dire aux gens: II faut économiser l'énergie. On
peut le faire, sauf qu'on s'enlève des outils de promotion et des outils
pour convaincre les gens, entre autres, parce qu'on ne veut pas dire... parce
qu'Hydro-Québec veut jamais dire qu'il y a des conséquences
à ses projets. (20 h 20)
Nous, on a constaté de façon très claire dans notre
consultation avec Hydro-Québec que ce n'était possible,
par exemple, de passer des messages télévisés
à Montréal pour montrer les rivières qui
disparaîtraient si on n'économise pas l'énergie.
C'était impossible, chez Hydro, d'imaginer utiliser comme on le
fait pour l'alcool au volant, on montre les accidents les
désastres que créent les réservoirs pour essayer de
travailler sur le pourquoi des choses et non pas sur le comment. Ce serait
très important.
Une autre dimension du plan de développement qui,
celui-là, nous scandalise un peu, c'est toute la notion de
flexibilité qui était déjà là dans le plan,
d'ailleurs, dans le plan de 1990 d'Hydro-Québec, mais qui a
été mis beaucoup plus en aval dans le plan 1993, la
flexibilité des projets, c'est-à-dire essayer de mener à
terme le plus possible les autorisations sur le plus de projets possible, faire
une banque de projets et, dans 10, 15 ans, quand le besoin sera là, on
aura la banque de projets déjà faite. Ça va à
rencontre de tout l'esprit même de l'évaluation environnementale
où on doit évaluer les projets au moment où ils vont se
faire, parce que le contexte change en 10 ou 15 ou en 7 ou 8 ans. Les contextes
changent et l'esprit de la loi va dans le sens inverse, comprenez-vous?
Le Président (M. Audet): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Paradis (Jean): Oui. C'est un peu une honte
qu'Hydro-Québec veuille installer cette flexibilité-là, et
on demande au gouvernement de ne jamais accepter cette
résolution-là.
Je vous remercie de votre attention. Je suis prêt à
répondre à vos questions.
Le Président (M. Audet): Merci.
Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Messieurs, je vous remercie pour votre contribution
à cet exercice de réflexion que nous faisons ici ensemble, et
nous allons tenter de mener cet exercice quant aux orientations à long
terme qu'Hydro-Québec doit prendre pour assumer un développement
énergétique harmonieux avec le milieu et aussi avec la
population.
Vous demandez au gouvernement d'identifier quelques grandes
rivières qui sont représentatives de l'histoire, de la culture,
de l'économie du Québec et de mettre en valeur leur potentiel
récréotouristique. Vous demandez aussi d'en faire la promotion
nationale et internationale. Votre idée est intéressante, mais,
concrètement, là, est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt se
tourner vers la recherche de polyvalence d'un territoire pour que l'ensemble
des besoins des intervenants concernés soit satisfait? On entend
beaucoup parler de polyvalence de territoire.
M. Paradis (Jean): Écoutez, je pense qu'il y a moyen
d'utiliser les territoires de façon polyvalente, sauf qu'il faut en
garder intacts, comprenez-vous? Il y a de la polyvalence qui ne peut pas
s'exercer et qui est en concurrence avec d'autres vocations. Entre autres, je
vous en ai fait la liste et vous avez, dans le document, la liste des impacts
du projet comme le projet d'Hydro-Québec sur l'Ashuapmushuan. C'est
absolument incompatible, voyez-vous, avec tous les autres objectifs qu'on
pourrait définir pour ce territoire-là. Si jamais le projet se
réalise, ça vient mettre un arrêt total à tout autre
développement dans le sens de sa vocation, qui est la vocation nature.
Et je vous rappelle que tout le secteur du haut du lac est défini par la
vocation nature sur ce territoire-là; donc, c'est un territoire vierge,
c'est une rivière sauvage, c'est une rivière non polluée,
c'est une rivière où on peut boire l'eau, c'est donc une
rivière avec une caractéristique naturelle très
importante.
L'autre volet, c'est que, effectivement, on pense que le patrimoine et
l'histoire, c'est important. Et l'histoire du Québec, ça passe un
peu par nos grandes rivières, il ne faut pas se le cacher. Dans le temps
de la colonisation, les rivières, c'était le développement
des chemins d'accès. Notre histoire passe par les grandes
rivières et, entre autres, la rivière Ashuapmushuan fait partie
d'un tronçon très important au Québec, un tronçon
majeur qui était la route des fourrures, qui était la route du
Saguenay vers la baie James. Il y a une histoire à cette
rivière-là, c'est un chemin important. C'est une dimension
historique qui pourrait être mise en valeur énormément.
Alors, je pense qu'il y a de la polyvalence possible, mais il y a des
fois où il n'y en a pas de possible, de polyvalence.
Mme Bacon: Dans ce cas-là, vous n'en voyez pas.
M. Paradis (Jean): On n'en voit aucune, possibilité de
polyvalence, avec le développement hydroélectrique. Il y a de la
polyvalence avec d'autres sortes de développement, entre autres le
développement forestier. Je pense que planter des arbres et
développer cette belle vallée, qui est très productive et
d'ailleurs qui est très bien classée dans les potentiels
forestiers, ça peut être très bien compatible avec le
récréotouristique et le faunique. Je pense que ça, ce sont
des potentiels qu'il faut développer et mettre en conjonction, mais on
est convaincus...
Mme Bacon: C'est le sens que vous donnez à la polyvalence,
M. Lajoie?
M. Paradis (Jean): Pardon?
Mme Bacon: C'est le sens que vous donnez à la
polyvalence?
M. Paradis (Jean): C'est le sens qu'on donne à la
polyvalence, bien sûr, quand l'un ne va pas à rencontre de
l'autre, sinon ce n'est pas de la polyvalence, c'est de la concurrence, et
ça, ça ne marche pas.
Mme Bacon: II y a des intervenants qui sont venus et qui
viendront aussi se présenter devant la commission et nous dire leur
préoccupation vis-à-vis du développement économique
régional. Il y en a certains qui explorent différents moyens pour
y faire face et voient dans le développement des projets
hydroélectriques je pense qu'il faut le dire une solution
parmi d'autres. Dans le cas de l'Ashuapmushuan, ils y voient un investissement
de 2 300 000 000 $, des emplois directs et indirects, 8000 emplois pendant la
construction.
Avec des investissements aussi importants, la création d'emplois,
et dans la situation économique actuelle, comment on peut concilier leur
position, votre position? Et votre position ne me semble pas une position de
refus de développer, je ne pense pas. Sachant que tous les volets
environnementaux seront couverts au maximum, comment on peut réconcilier
tout ça?
M. Paradis (Jean): C'est assez facile, Mme Bacon. Chez nous,
actuellement, il y aurait une alternative. Nous, on ne pense pas que le
développement hydroélectrique, à long terme et à
moyen terme, c'est quelque chose qui va être bon pour notre
région; ça va reconfirmer le sous-développement. Ce qu'il
faut, c'est organiser les régions de façon différente,
mais si jamais on en venait à la conclusion que ça prend du
développement hydroélectrique, ce qu'on pense, c'est que dans le
sens du développement durable, on devrait optimiser ce qui est
actuellement consacré à l'hydroélectricité, dont la
rivière Péribonka. La première chose à penser,
à se mettre dans la tête, c'est d'aller voir où il y a
déjà des barrages, et Hydro-Québec a un potentiel de 392
MW sur cette rivière-là. C'est une rivière qui serait
aménageable demain matin. Ils arriveraient et les gens diraient: O.K.
Ça va. Il y aurait des emplois, 3800 emplois en construction
associés au projet de Péribonka.
Ça fait que, mettons dans un horizon de 10 à 15 ans pour
le SaguenayLac-Saint-Jean, si c'est ça que ça nous prend
pour se développer, on a au moins celui-là, et ça n'a pas
de conséquences négatives, comprenez-vous? Je pense que le
développement de la région passe par d'autres choses que le
développement hydroélectrique. On en sait quelque chose, on est
des producteurs d'énergie depuis très longtemps et on est en
désintégration régionale comme toutes les autres
régions du Québec. On n'est pas mieux ni pire que les autres
régions, mais on n'est pas mieux. Donc, à long terme, ce n'est
pas une voie intéressante, mais si ça le devenait ou si on
voulait nous imposer ça, bien je pense que la seule place, ce serait sur
la Péribonka, parce qu'il y a un potentiel de développement
là qui est encore exploitable, et ce serait dans le sens du
développement durable, c'est-à-dire optimisons ce qui est
optimisable sur l'hydroélectrique et développons sur l'autre
rivière, qui est encore naturelle, son potentiel naturel.
Je pense que c'est ça qu'il faut qu'on fasse; et ça, c'est
pour les générations futures. C'est des décisions de
responsabilité qu'il faut prendre.
Mme Bacon: Vous souhaiteriez aussi qu'un organisme
indépendant soit responsable des programmes d'économie
d'énergie, vous l'avez mentionné tout à l'heure. Vous
mentionnez que le gouvernement doit être lui-même convaincu que
l'économie d'énergie est une voie privilégiée pour
assumer au moindre coût là, j'essaie de vous citer
la satisfaction des nouveaux besoins des Québécois et
Québécoises.
Moi, j'aimerais vous rappeler que le gouvernement a quand même
rendu publique sa stratégie d'efficacité
énergétique en décembre, qui vise l'ensemble des secteurs
économiques et les différentes formes d'énergie, pas
seulement l'hydroélectricité, mais aussi les autres formes
d'énergie. Donc, je pense que le gouvernement est convaincu que
l'efficacité énergétique est une priorité d'action,
il l'a démontré.
Est-ce que vous pourriez élaborer sur le rôle, et
peut-être aussi le mode de financement de cet organisme
indépendant que vous voudriez voir prendre vie?
M. Paradis (Jean): Écoutez, on n'est pas les seuls qui
avons demandé ça. Je pense, entre autres, que la CSN a
demandé un organisme indépendant pour les économies
d'énergie. Écoutez, nous, on pense que chez Hydro-Québec,
les gens de l'économie d'énergie sont un petit peu en conflit
d'intérêts dans le sens qu'ils ne peuvent pas utiliser les
problèmes reliés à l'hydroélectricité comme
étant des moyens de promotion pour essayer...
Vous savez, moi, je suis en éducation, je suis un enseignant; ce
que je sais, c'est que quand on veut changer l'attitude et le comportement, il
faut d'abord expliquer pourquoi on pose un geste. Actuellement, on parle
beaucoup du comment économiser l'énergie, mais pas beaucoup du
pourquoi. Nous autres, on le sait, pourquoi il faut économiser
l'énergie; c'est parce que notre rivière, on va la perdre, c'est
clair. Mais les gens de Montréal qui n'en ont pas, de barrages, qui
n'ont pas de culture de barrages, je ne leur en veux pas, ils ne savent pas ce
que c'est, ils ne savent pas les conséquences.
Mme Bacon: Vous pensez qu'on n'a pas de culture
d'efficacité énergétique et d'économie
d'énergie?
M. Paradis (Jean): Ah oui, mais il faut développer le
pourquoi pour augmenter la culture de l'économie d'énergie. Parce
qu'on est tous comme ça, si on ne sait pas pourquoi le faire, on le fait
le plus qu'on peut de façon très honnête, mais on n'est pas
motivé plus que ça à faire ce qu'on a à faire parce
qu'on ne sait pas pourquoi on le fait. Si on convainc les gens pourquoi ils
doivent le faire, je pense qu'on pourrait doubler ou tripler les objectifs
d'économie d'énergie. On a été surpris, dans le
recyclage, comment les gens ont répondu, parce qu'on leur a
expliqué pourquoi. Nous autres, c'est ça qu'on demande, et on
pense que ça demande un organisme indépendant.
La structure, écoutez, je pense que... En tout cas,
c'est rentable, l'économie d'énergie. Je pense qui si on
laissait les cordeaux libres à ces gens-là, à un organisme
indépendant pour rentabiliser l'économie d'énergie et en
faire une évaluation financière, je suis convaincu qu'il y a
facilement possibilité que cet organisme-là puisse devenir
rentable, dans le sens que toutes ses actions auraient des conséquences
économiques qui pourraient être tout au moins balancées,
sinon même profitables, et en plus ça profiterait à tous
les coins du Québec.
Mme Bacon: Est-ce que j'ai encore du temps?
Le Président (M. Audet): Oui, une minute. (20 h 30)
Mme Bacon: Vous relevez dans le plan de développement la
proposition de constituer une banque de projets, je pense, à des fins de
flexibilité dans la planification d'Hydro-Québec. Il n'est pas
clairement mentionné que les projets seraient autorisés d'avance,
mais que les avant-projets, l'évaluation environnementale serait
réalisée. Je vous réfère aux pages 64 et 66 du
plan. Il est vrai que les valeurs d'Hydro-Québec peuvent changer,
certaines données socio-économiques évidemment
également, et le gouvernement ne pourrait autoriser des projets sans
qu'il y ait eu auparavant une mise à jour des études. Je pense
que ça, c'est important.
Est-ce que vous ne trouvez pas intéressant quand même
qu'Hydro-Québec ait le temps d'approfondir les études sans savoir
l'obligation de sortir rapidement les projets pour répondre à la
demande?
M. Paradis (Jean): Écoutez, Mme Bacon, vous savez, les
valeurs sociales changent, ce n'est pas juste les études techniques, les
études environnementales physiques; il y a toute la dimension morale et
sociale des valeurs qui change. On reculerait de 15 ans, on n'en reviendrait
pas que des décisions qui ont été prises il y a 15 ans ne
soient plus prises maintenant. Toute l'essence même de
l'évaluation environnementale lisez la loi, vous allez voir
c'est fait pour les populations, c'est une consultation. Le BAPE existe
pour aller voir les gens, pour leur demander, au moment où
l'événement se produit: Qu'est-ce que vous en pensez, vos
sensibilités face à ça, vos réactions sociales? Et,
ça, on pense que ça ne peut pas se faire 15 ans d'avance ou 8 ans
d'avance. C'est impossible.
Je vous réfère à un discours de M. Couture.
J'étais présent lors de la présentation du plan à
Montréal, et M. Couture, en réponse à une question que
j'ai posée, nous a clairement dit qu'Hydro-Québec voulait aller
aux autorisations sur le plus de projets possible, de façon à ce
que... On veut avoir la paix avec ça. Parlons-nous des vraies affaires.
On est tannés d'attendre après des gens qui s'opposent, et
là le monde ne veut pas. On va essayer d'avoir le plus d'autorisations
possible, puis là on va faire la banque puis, après ça, on
sortira les projets du sac et on les fera quand on en aura besoin.
Nous autres, on pense que ça va à l'envers de l'esprit de
l'évaluation environnementale. C'est presque honteux de reculer dans ce
sens-là, parce qu'on avait fait quand même un pas important,
déjà, au Québec.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: Bon, voici. On est toujours coincés, les
politiciens, quand arrive ce genre de projet-là, et surtout en
récession, vous le savez très, très bien. Il y en a qui
pourraient être pour n'importe quoi, à n'importe quelle condition.
Il n'y a pas de cachette. La récession fait en sorte que les gens
cherchent des jobs, et tout projet pour s'accrocher une job dans une
région fait en sorte que tu arrêtes de réfléchir sur
le fond même des projets parce que, fondamentalement, tu veux des jobs.
Ça, c'est clair. Et c'est ce qui m'emmerde toujours, moi,
personnellement, quand on a à discuter de projets comme le vôtre,
parce que, de bonne foi, je pense qu'il y en a qui peuvent être pour sans
trop, trop savoir pourquoi, mais ils savent que le résultat, c'est des
jobs. Et, de bonne foi également, il y en a qui peuvent être
contre parce qu'ils ont des valeurs à défendre.
Moi, je pense qu'on a du retard de pris au Québec, et en
particulier sur le harnachement de certaines rivières parce que,
à mon point de vue, elles ont des valeurs patrimoniales extraordinaires.
Je pense à la Moisie, où j'ai osé dire que j'étais
contre le détournement de la Carheil et de la Pécan, et ils m'ont
dit: Tu es contre un projet. Ils ont menti. Je ne suis pas contre un projet, je
suis contre le fait qu'on puisse affecter à court terme une ressource
qui rapporte 25 000 000 $ par année de retombées
économiques directes dans le milieu, tout en étant pour un projet
plus réduit de 820 MW à environ 500 MW. Mais, dans le milieu et
de façon partisane, on dit que je suis contre.
Quand j'aborde le projet de l'Ashuapmushuan, effectivement, je suis
porté à croire, moi aussi, qu'avant de penser à
FAshuapmushuan on devrait peut-être finir de harnacher celle qu'on a
«déviergée», qui est la Péri-bonka. Ça
m'apparaîtrait plus logique, pour une société
d'État, de finir une job qu'elle a commencée sans vouloir en
recommencer une autre. Ça, moi, ça m'apparaît logique dans
le contexte actuel des choses. Et ça se défend sur la logique, en
plus, et ça se défend de façon rationnelle et de
façon correcte, surtout si c'est vrai qu'on rêve de sauver les 9,3
TWh; je ne vois pas pourquoi on s'empresserait de vouloir avoir toutes les
autorisations possibles pour élargir le nombre de propositions et de
projets sans penser à avoir une réserve, en particulier sur des
sites dits patrimoniaux. Ça, moi, je suis sensible à ce genre
d'argument, tout en étant bien conscient que, lorsque je dis ça,
il va y avoir du charriage demain matin en disant que je me dédis. Mais
ils ont menti, je ne me dédis pas. Je pense qu'il faut établir
une hiérarchie dans les valeurs que l'on a et dans la progression des
travaux qu'on a à faire.
Donc, moi, je n'ai pas de question à vous poser. Je vais donner
la parole à celui qui vient de votre milieu, mais je voulais donner mon
opinion pour ne pas
qu'on dise que je ne voulais pas me mouiller à partir de valeurs
fondamentales, je pense, qu'il faut avoir quand on croit à quelque
chose.
Le Président (M. Fradet): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Merci, M. le Président.
J'aurais un certain nombre de questions à vous poser, d'abord
concernant les impacts. Je pense que vous les énumérez aux pages
14, 15 et 16 de votre mémoire, «Impacts et implications», de
nombreux impacts, de toutes natures, de toutes formes. Il serait
peut-être important pour les membres de la commission de dire que ces
impacts-là ne sont pas issus d'études que le RPA a faites. Il
serait peut-être important de dire que tout ça est issu des
propres études d'Hydro-Québec. Exact?
M. Paradis (Jean): Absolument! Vous savez, actuellement, il faut
bien se rendre compte qu'on va avoir, au printemps, 30 000 000 $ de
dépensés en études. Effectivement, on a tout ce qu'il faut
dans les études d'Hydro-Québec pour faire la liste que vous avez
là, et on a tout ce qu'il faut pour se convaincre que c'est un projet
insensé. C'est bien évident! On ne comprend pas comment ça
se fait qu'Hydro n'a pas déjà abandonné ce
projet-là. On ne comprend rien dans ça.
Mais vous avez raison, c'est des chiffres qui viennent des études
d'Hydro. Ça n'a jamais été contesté, et ils le
savent.
M. Brassard: De toute façon, je ne pense pas que le RPA
ait suffisamment de fonds pour financer vos propres études. Alors,
ça vient des études d'Hydro-Québec qui ont
été réalisées au cours de la phase I.
M. Paradis (Jean): C'est David contre Goliath, vous savez.
M. Brassard: Maintenant, Hydro-Québec, à la demande
de beaucoup d'intervenants, d'ailleurs, y compris le caucus des
députés du Parti québécois de la région, n'a
pas, comme vous le savez, autorisé la phase II. Elle a plutôt
commandé de nouvelles études pour approfondir un certain nombre
de sujets, en particulier toute la question de la ouananiche et de la survie de
la ouananiche.
D'après vous, M. Archer, qui êtes biologiste, est-ce que
ces nouvelles études vont vraiment apaiser, faire disparaître
toute inquiétude relativement à ces sujets-là? Est-ce que
vous pensez vraiment qu'ils vont pouvoir répondre aux questions? La
survie de la ouananiche, par exemple, ou toute la question des embâcles,
pensez-vous vraiment que ces nouvelles études vont vraiment
répondre aux questions et aux interrogations et aux appréhensions
qui existent dans le milieu?
M. Paradis (Jean): Écoutez, nous, on est convaincus que
non. On est convaincus qu'au niveau, entre autres, de la ouananiche, c'est
impossible, surtout à cause de la façon dont vont être
gérées les installations en pointe horaire, donc en débit
horaire.
Vous savez que les opérations vont être utilisées en
pointe le matin et le soir. Donc, la rivière va varier de débit
de 10 pieds à toutes les 5 heures. Imaginez l'affaire! 10 pieds en aval
des barrages! C'est impossible que la ouananiche, dans ce contexte-là,
surtout qu'il y a déjà presque 80 % des frayères et des
habitats qui vont être détruits par les réservoirs
eux-mêmes... En aval des barrages, on se demande s'il ne faudra pas
qu'ils mettent des clôtures, en aval, parce que ça va être
comme dangereux. Sur les 70 km qu'il reste de rivière, ça va
être géré de façon pointe horaire. Donc, c'est
très dangereux au niveau des débits. Ça fait qu'on pense
que la ouananiche va disparaître et qu'Hydro-Québec ne trouvera
pas de solution pour ça.
Pour ce qui est des embâcles, on n'est pas assez des experts pour
savoir s'ils vont trouver des solutions, mais il y a de très gros
problèmes. Et s'ils sont en études complémentaires, c'est
parce qu'il y en a. Mais, ce qu'on sait, par exemple ce qui est
sûr c'est que 773 km de territoire, ça, ils ne
régleront pas ça. Un réservoir des trois quarts du lac
Saint-Jean, ce n'est pas réglable. Le mercure dans le lac Saint-Jean, ce
n'est pas réglable. Comprenez-vous? La perte de tout le potentiel
récréotouristique, ce n'est pas réglable. Prenez la
grille, M. Brassard, et vous allez voir que, même avec les études
complémentaires, comprenez-vous, il y a trois quarts, sept
huitièmes des sujets qui ne sont pas l'objet d'études
complémentaires parce que c'est déjà concluant: il y a des
problèmes, il y a des drames.
M. Brassard: II n'y a pas besoin d'approfondir la question du
mercure, par exemple.
M. Paradis (Jean): On sait ce que ça fait, le mercure.
M. Brassard: C'est évident qu'à partir du moment
où vous en noyez une grande superficie...
M. Paradis (Jean): Écoutez...
M. Brassard: ...il y a du mercure qui... (20 h 40)
M. Paradis (Jean): C'est une des choses qu'Hydro-Québec
nous garantit, ça, le mercure. Ça, c'est sûr. Mais, le
problème, c'est que c'est nouveau. HydroQuébec n'a jamais eu
d'installation avec un lac en bas. Voyez-vous? Tous les barrages, ailleurs, il
y a le fleuve, il y a la baie James. Là, il y a un lac. Oups! Donc,
ça accumule le mercure dans le lac, en plus. Normalement, c'est juste
dans les réservoirs, le mercure, le problème; là, c'est
dans le lac Saint-Jean. La forêt, on ne pourra pas replanter des arbres
dans les réservoirs noyés. Ça, il n'y a pas d'étude
complémentaire qui va nous donner...
Puis, c'est un parterre forestier. Mme Bacon le
sait, ses fonctionnaires pourraient nous le dire, c'est un des parterres
forestiers les plus productifs du SaguenayLac-Saint-Jean. La zone de la
vallée... Vous savez comment ça marche, les arbres. Ça
pousse mieux dans les vallées que ça ne pousse sur les roches.
C'est que c'est tout un parterre forestier majeur.
M. Brassard: Mais, actuellement, on ne fait aucun reboisement,
là, parce qu'on est en attente.
M. Paradis (Jean): Depuis 1982, on est en attente parce qu'Hydro
a fait un dessin sur une carte, quelque part, qu'il y aurait... On a des gens
qui ont travaillé cet été, qui sont à 12 ou 20 km
de la rivière, et ils se font dire: Vous êtes dans l'eau, ne
plantez pas là. Où, l'eau? L'eau quand Hydro va faire les
barrages. Ah! Ils sont à 20 km de la rivière. Ça n'a pas
de bon sens. C'est une hypothèque intenable. Et, dans les études
complémentaires, il y a tout ce qu'il faut actuellement pour prendre des
décisions sur ce projet-là. Surtout qu'il y a l'alternative
Péribonka.
Comme M. Chevrette le disait, si c'est vrai qu'on est en
période... Vous savez, c'est une attitude un peu de
sous-développement: quand on a soif, c'est sûr que chaque goutte
d'eau nous rassasie, sauf qu'on en a, là... En tout cas, pour les 10 ou
15 prochaines années, chez nous, le projet Péribonka, il pourrait
régler notre problème. S'il y en a un majeur, ça peut le
régler au niveau des emplois puis, dans 15 ans, on verra. Dans 15 ans,
peut-être que ça va très bien aller chez nous si on se
prend en main comme on pense le faire. On a des projets de prise en main
régionale. Toutes les régions veulent se prendre en main. Je
pense que dans 15 ans on ne parlera plus des mêmes choses. Donc, faisons
donc l'autre. Puis libérez, affranchissez l'Ashuapmushuan parce que,
là, on ne peut rien faire avec.
M. Brassard: Je voudrais... Déjà
terminé?
Le Président (M. Audet): Oui. C'est des blocs de 10
minutes. Vous pourrez revenir, il vous restera quelques minutes.
M. Brassard: Ah, bon! Vous avez des blocs de 10 minutes.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Saint-Maurice. Environ 7 minutes.
M. Lemire: Dans votre mémoire, vous soulevez la question
de la satisfaction des besoins de puissance en l'an 2010, qui aurait pour effet
d'exploiter le potentiel hydroélectrique total du Québec, de
toutes les rivières et que, par conséquent, il ne resterait plus
aucune rivière sauvage au Québec.
Ma question: Est-ce que cela signifie pour vous que les besoins en
électricité doivent être exclusivement satisfaits par la
construction de nouvelles centrales?
M. Paradis (Jean): Écoutez, nous, on se fie au plan de
développement d'Hydro-Québec. Prenez la liste des projets qui
sont dans le plan de développement d'Hydro-Québec, mettez-les sur
une carte, et vous allez voir. Je vous mentionne qu'on parle de l'accessible,
pas des grandes rivières sauvages non accessibles. On sait que la
rivière Georges, qui coule, qui a son embouchure dans la baie d'Ungava,
c'est une maudite belle rivière, sauf que c'est un voyage pour s'y
rendre, comprenez-vous? On parle des rivières accessibles. Chez nous, la
route d'asphalte est à 15 km de la rivière, n'oubliez pas
ça; c'est une rivière accessible, dans un milieu
périur-bain. Ça fait que, non, on pense qu'Hydro-Québec a,
dans ses plans, tous ces projets-là. C'est ce qu'ils nous disent. Si ce
n'est pas ça, bien, qu'ils nous le disent.
Au niveau de ce qu'Hydro dit, c'est que c'est avec 9,3 TWh
d'économie d'énergie, plus la cogénéra-tion, plus
tous ces projets-là qu'on va suffire à la demande. Bien,
là, nous autres, on dit: Ça ne marche pas, il y a un
problème. Puis, si c'est vrai que c'est ça, la
réalité, bien, là, on dit que si on veut s'inscrire...
Parce que c'est la première ligne du plan de développement,
«s'inscrire dans le concept du développement durable».
Première ligne! Si on veut faire ça, on ne peut tout de
même pas dire que dans 10 ans il n'y aura plus de rivières
sauvages accessibles au Québec. Ça n'a pas de sens! Excusez
l'expression, mais on va faire rire de nous autres par nos jeunes dans nos
écoles. Ils vont dire: Aïe! Qu'est-ce que vous avez fait?
Développement durable? Plus de rivières. Comprenez ça.
C'est même une responsabilité internationale. Quand on parle avec
les autres pays, il n'y en a plus beaucoup, de grandes rivières sauvages
accessibles, même dans le monde. Ça fait que, cette
rivière-là, c'est un patrimoine presque international. Surtout
qu'il y a la Péribonka, voyez-vous? Ça fait que, qu'est-ce qu'on
fait avec ça?
M. Lemire: Seriez-vous prêt à ce que le
Québec ait recours au thermique et au nucléaire pour sauvegarder
certaines rivières de l'exploitation hydroélectrique?
M. Paradis (Jean): Écoutez, je pense qu'il faut regarder
dans un avenir à 10 ou 15 ans. D'ailleurs, Hydro-Québec l'a dit
dans son plan de développement: Si avec ces projets-là on a des
problèmes, si on a des retards sur tel autre projet, on a des
alternatives dans les petites et moyennes puissances; on a des alternatives au
niveau je pense, personnellement, mais le Regroupement le pense aussi
des économies d'énergie; on a juste à mettre plus
d'investissements dans ce domaine-là. On a la cogénération
qui pourrait être développée encore plus. Je pense que,
pour les 15 prochaines années, on n'en est pas rendu à poser ces
questions-là. Mais, dans 15 ans, par contre, si jamais on applique le
plan de développement d'Hydro-Québec, on va en être rendu
à se demander comment on va faire parce que les rivières,
voyez-vous, monsieur, c'est épuisable. L'eau qui coule dans un barrage,
c'est renouvelable, mais les rivières, il y a une limite à
ça. Et c'est ça. On a comme l'impres-
sion qu'il y en a infiniment, des grandes rivières disponibles.
Il n'y en a pas infiniment, il y a un nombre fini de ces
rivières-là. Et, dans 15 ans, de toute façon, il va
falloir se poser la question.
Je vais vous citer, là, sur la Sainte-Marguerite c'est
intéressant il n'y a pas très longtemps, il y a eu des
audiences. Et savez-vous ce que les gens disaient? Le commissaire disait:
Écoutez... Je vais vous lire ça, vous allez voir. Le commissaire
Béland disait: II me semble que, pour la perspective de
développement durable vous me corrigerez si je me trompe
le jour où on s'apercevra qu'il n'y aura plus de rivières pas
cher à développer, qu'est-ce qu'on va faire?
Savez-vous ce que dit M. Arnaud, d'Hydro-Qué-bec? Je vais vous
lire ça. Ça vaut la peine d'être lu. Alors, il dit
dans 15 ans, là: Alors Arnaud, c'est le porte-parole
d'Hydro-Québec j'ai bon espoir, et je le souhaite pour la
société québécoise, qu'en l'an 2010 ce n'est
pas loin, ça ou dans ces années-là on soit à
l'approche de la fusion nucléaire et qu'avec la fusion nucléaire
on n'ait plus besoin de harnacher de rivières. Bien, si la question doit
se poser dans 15 ans, pourquoi on ne se la pose pas tout de suite et on ne
garde pas nos rivières? C'est une logique de responsabilité
sociale, comprenez-vous, ça. C'est une logique qui va dans le sens du
concept de développement durable que tout le monde met en avant de son
discours.
C'est fini, le discours. Il faut que ça se concrétise. Et,
pour ça, il faut qu'il nous en reste. Moi, j'ai une fille de 14 ans; je
viens d'en avoir une récemment, 2 mois, imaginez. J'aimerais bien
ça pouvoir l'amener sur le bord d'une grande rivière un jour,
dans 10 ou 15 ans. Je ne serai pas capable si le plan de développement
s'applique.
M. Lemire: Vous, est-ce que vous êtes pour ça,
l'option nucléaire?
M. Paradis (Jean): Moi, je pense que des questions comme
celle-là doivent être posées en temps et lieu. Et on verra
dans 15 ans, parce que ce que M. Arnaud semble dire, c'est que la fusion
nucléaire... Ce qu'il dit, c'est qu'on aura chacun notre petit
réacteur chez nous.
M. Lemire: J'aimerais peut-être revenir sur...
M. Paradis (Jean): Ça change en 15 ans, hein,
voyez-vous?
M. Lemire: J'aimerais peut-être revenir sur la notion de
flexibilité...
M. Paradis (Jean): Oui, monsieur.
M. Lemire: ...que vous considérez aux antipodes du
défi de performance et du concept de développement durable.
Pouvez-vous nous expliquer en quoi la volonté d'Hydro-Québec
d'avoir une marge de manoeuvre est incompatible avec le concept de
développement durable et le défi performant?
M. Paradis (Jean): Oui, monsieur, je vais vous expliquer
ça, et c'est assez simple.
Le concept de développement durable implique l'implication et la
participation des citoyens. C'est fondamental. Le développement durable,
ça implique la participation et l'implication des citoyens. On ne peut
pas demander, voyez-vous, à des citoyens de s'impliquer 10 ans d'avance
ou 7 ans à l'avance dans un processus de consultation. On ne peut pas
demander à des gens leur opinion sur des sujets souvent très
complexes, qui sont les évaluations environnementales, en fonction des
données qu'on a, à ce moment-là, qui pourront changer. Que
va valoir une frayère à ouananiche dans 15 ans? Il n'y a pas un
biologiste qui va pouvoir vous le dire.
Peut-être qu'il y a une mine d'or en dessous du réservoir
de l'Ashuapmushuan, et qu'on ne le sait pas, et que, dans cinq ans, on va le
savoir. Qu'est-ce qui arrive? Ça va à rencontre. Relisez votre
loi sur l'évaluation environnementale. L'objectif, c'est de faire
l'évaluation au moment où le projet est requis. C'est pour
ça que ça va à rencontre du concept de
développement durable, parce que le développement durable
sous-tend la participation des citoyens. Comprenez-vous ça?
Le Président (M. Audet): Merci. C'est terminé.
Malheureusement, c'est terminé. On dépasse déjà le
temps.
M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Chevrette: Non, j'y vais une minute, s'il vous plaît. Je
pense que ce n'est pas correct d'essayer de faire croire que quelqu'un peut
être pour le nucléaire parce qu'il est contre un projet
spécifique.
Je m'excuse, là, avec tout le respect que j'ai pour ces dignes
députés...
Une voix: ...
M. Chevrette: Non, non, mais il ne faut pas l'insinuer non
plus.
M. Lemire: Est-ce qu'on peut poser la question?
M. Chevrette: II ne faut pas l'insinuer non plus de façon
tendancieuse. Je peux être très bien, par exemple, pour
l'utilisation des énergies en place. Je prends Gaz Métropolitain,
qui arrive ici ce matin et qui dit qu'il pourrait améliorer de 50 % les
économies d'énergie si on utilisait le gaz naturel; et le groupe
du gaz naturel, cet après-midi, vient nous dire la même maudite
affaire, et puis on n'ose pas faire le débat parce qu'on est
monolithique dans notre vision. On ne voit que le développement
hydroélectrique.
Et, ça, je pense que c'est avoir une courte vue quand tous les
groupes sociaux nous demandent un
débat sur les énergies, globalement, au Québec. Et,
ça, je pense qu'on n'invente rien, là. C'est la majorité
des groupes qui sont venus nous dire ça ici. Ils veulent un débat
sur l'ensemble des énergies, qu'on puisse confronter Hydro-Québec
qui a une expertise et qui est la seule à l'avoir, de toute
façon, et qui ne nous donne même pas les moyens d'avoir de
contre-expertise. Donc, c'est difficile pour n'importe quel groupe dans notre
société. Il ne faut tout de même pas les acculer à
nous dire qu'ils ont le choix entre le nucléaire et
l'hydroélectrique. Ce n'est pas vrai, ça. (20 h 50)
Deuxièmement, je reviens sur un seul petit point, et je donne la
parole à mon collègue de Lac-Saint-Jean. Le deuxième
point, c'est: Pourquoi aller chercher les autorisations immédiatement
pour une série de projets plutôt que de faire un débat, par
exemple, de société et de dire la question fondamentale:
Avons-nous le droit, comme société, sur un territoire
défini, d'avoir des rivières patrimoniales? J'ai essayé,
avec le fédéral, d'avoir le Saguenay, moi, quand on a
créé le fjord du Saguenay, de rivière patrimoniale... Le
fédéral, parce que je l'ai demandé, nous l'a
refusé. À cette heure qu'ils nous l'a refusé, avec le
gouvernement actuel, il refuse de le donner.
Ça, c'en était un, plan, qu'on aurait pu présenter.
Si on est capable, comme gouvernement, de présenter un projet de 150
réserves écologiques, de territoires non touchables pour la
forêt, pour les mines, pour n'importe quoi, on doit être capable de
se définir un petit plan pour avoir certaines rivières
patrimoniales au Québec. C'est ça que je veux dire.
M. Brassard: Moi, je reviens, M. le Président, sur les
sondages, parce que je disais l'autre jour, devant les deux MRC Le
Domaine-du-Roy et Maria-Chapde-laine avant-hier, que le projet de
harnachement de l'Ashuapmushuan est un projet controversé c'est
le moins qu'on puisse dire dans la région. Les sondages
mêmes d'Hydro le démontrent. Si je me souviens bien,
Hydro-Québec n'a pas voulu d'elle-même rendre publics ces
sondages. Il a fallu avoir recours à la loi d'accès à
l'information pour qu'elle consente finalement à les rendre publics.
M. Paradis (Jean): Voyez-vous, le Regroupement a participé
à la consultation d'Hydro-Québec où la prémisse de
la consultation, c'était l'ouverture, la transparence. M. Drouin est
venu nous faire un beau discours. Voyez combien on est dans une situation
très difficile dans des projets concrets. C'est que, nous autres, on
participait de façon générale à la consultation et,
concrètement, chez nous, on nous refusait l'accès à un
sondage que ça a pris un an à avoir. Et même, Hydro avait
nié avoir fait ce sondage-là, en plus.
Vous voyez comment la culture, des fois, des grandes entreprises est
bizarre. Ils pensaient pouvoir faire un sondage secret au
SaguenayLac-Saint-Jean. Vous savez, M. Brassard, que ce n'est pas facile,
sur- tout quand on a 12 800 membres dans la communauté. À un
moment donné, il y a quelqu'un qui nous appelle et dit: Oups! un
sondage. Ah! Ils ont nié pendant deux semaines avoir fait un sondage
pour après nous refuser l'accès, pour gagner, en fait, en
Commission d'accès à l'information. On a finalement eu le
résultat qui était, naturellement, à 60 % contre le
projet. Ça allait mal, on le voit bien. Après 30 000 000 $ de
dépenses d'Hydro-Québec, plusieurs millions en information, vous
avez raison qu'il y a un problème de transparence. David contre Goliath,
on le voit, là. On le voit très bien.
Puis il y a un problème de transparence, mais il y a aussi un
problème de représentativité. C'est qu'Hydro-Québec
est sur le terrain avec son équipe de projets et fait ce qu'elle veut,
et gère les échéanciers, et gère les étapes,
gère tout de la façon dont elle veut. Donc, effectivement, il y a
un problème au niveau des sondages et, nous, ce qui nous
réconforte, par contre, c'est que plus Hydro informe...
M. Brassard: Toujours au niveau des sondages, je fais
référence encore une fois aux deux MRC qui sont venues devant
nous il y a deux jours, qui laissaient plus ou moins entendre que les leaders
du RPA venaient d'un certain secteur de la région, en l'occurrence Aima,
et qu'il n'y en avait pas qui se retrouvaient dans les territoires vraiment
touchés par le projet. D'autre part, la question c'est vrai que
vous venez d'Alma, mais vos 12 000 membres, est-ce qu'il y en a
également qui se retrouvent dans les deux MRC concernées? Et les
sondages que vous avez obtenus, est-ce que la ventilation peut se faire? Est-ce
que, dans les territoires des deux MRC, Le Domaine-du-Roy et
Maria-Chapde-laine, l'opposition est moins grande, moins forte qu'ailleurs, ou
plus? C'est quoi, l'état de l'opinion?
M. Paradis (Jean): En tout cas, M. Brassard, venir d'Alma, ce
n'est pas un défaut, en principe.
M. Brassard: Non, je ne crois pas, non.
M. Paradis (Jean): Je ne pense pas, sauf que, voyez-vous, le
Regroupement lui-même, on a au-delà, à
Saint-Félicien, de 1600 membres, à Mistassini, 1400 membres,
à Roberval, 1100 membres. On est assez représentatifs de la
région. Seulement au Lac-Saint-Jean, il y a 9000 de nos membres qui
viennent du Lac-Saint-Jean; le reste vient du Saguenay. Donc, on est
majoritairement impliqués au Lac-Saint-Jean. Et pour ce qui est des
sondages, effectivement, si on a en main la stratification des sondages, on
s'aperçoit que plus on se rapproche, même il n'y a pas
d'énormes différences des régions comme les deux
MRC, plus les gens sont contre. Et ça se comprend, parce que c'est les
utilisateurs du territoire. Les gens, eux autres, ils sont contre sur le
terrain, parce que c'est eux autres qui vont à la chasse, c'est eux
autres qui vont dans le territoire. C'est compréhensible. Les MRC, vous
savez...
J'ai peut-être une anecdote. M. Vallée, qui
était
là, peut-être, devant vous hier, c'est le maire de
Cham-bord. C'est le préfet du Domaine-du-Roy, mais son conseil a
voté six conseillers à zéro contre le projet. N'oublions
pas ça. Six contre le projet.
M. Chevrette: Une chance qu'on ne savait pas ça hier.
M. Paradis (Jean): Pardon? Une chance que vous ne saviez pas
ça. C'est important. Au niveau des tables d'analyse qu'ils ont mises en
place, comprenez-vous, le résultat de ces tables-là, il y avait
trois tables qui rejetaient le projet inconditionnellement: la table
environnement et agriculture dont M. Vallée était
président; il y avait la table récréo-touristique dont M.
Gendron était le président; la recommandation, c'était:
rejet unanime. L'autre table, qui était sur la forêt, rejetait
aussi le projet.
Donc, il y a lieu de s'interroger, là, en tout cas, au moins sur
le pouls de ces élus-là face à l'évaluation qu'ils
font de la volonté populaire. D'ailleurs, il n'y a pas eu de
consultation faite par les MRC auprès des populations. Il n'y a eu que
des décisions.
M. Brassard: Moi, j'aurais une dernière question, parce
que...
Le Président (M. Audet): Terminé. C'est
terminé. Terminé malheureusement. L'enveloppe de temps est
déjà dépassée. C'est malheureux, mais j'ai des
règles à respecter.
Je dois reconnaître M. le député de Drummond.
M. St-Roch: Alors, ça va être très bref. Vous
pourrez laisser le résiduel du temps à mon collègue. Ce ne
sera pas une...
Le Président (M. Audet): Vous n'êtes pas
obligé, M. le député. Si vous voulez céder votre
temps de parole au député de Lac-Saint-Jean, il n'y a pas de
problème.
M. St-Roch: Non. Après que j'aurai fait, tout de
même, un bref commentaire, M. le Président.
Ça va être dans la foulée aussi de l'intervention
que j'avais faite en 1990, lorsqu'on avait regardé toute la
Sainte-Marguerite avec la Moisie.
Moi, je pense que vous posez un problème de fond qu'on a ici,
même si on n'est pas de votre région. Je proviens du coeur du
Québec, mais je pense qu'on a le devoir, avec le peu de rivières
naturelles qui restent, de laisser, comme je le dis, moi, à mes
petits-fils, de se casser la tête, de voir ce qu'ils feront
à vos petits-fils et à nos petits-fils et nos petites-filles
aussi, en somme.
Moi, je pense que j'ai énormément apprécié
votre mémoire. Je vais refaire la même recommandation que j'avais
faite en 1990 concernant la Moisie. Il reste 730 MW moins 392 à
Péribonka. Je ne pense pas que la société
québécoise soit à 338 MW et, si c'est le cas, comme je
l'avais demandé, d'ailleurs, au début, lorsqu'on a regardé
avec Hydro-Québec de devancer les barrages de moyenne puissance, et il y
en a... On en a dans notre région, nous, où on réglerait
des problèmes sur les rivières déjà
harnachées, où la population le verrait. Je pense qu'il y a moyen
de sauver 338 MW quelque part pour garder quelque chose de merveilleux chez
nous.
Je vous remercie.
Le Président (M. Audet): M. Paradis, voulez-vous ajouter
quelque chose?
M. Paradis (Jean): Je vous remercie d'avoir été
aussi attentifs et attentives, et on espère qu'on aura...
Le Président (M. Audet): Est-ce qu'il y a consentement
pour que M. le député de Lac-Saint-Jean puisse intervenir encore
une couple de minutes?
M. Brassard: Juste une question portant sur la solution de
rechange, la Péribonka, sur la Péribonka.
Est-ce qu'Hydro-Québec, à des demandes venant de divers
milieux dans la région, a remis, comment dire, réactivé le
dossier de la Péribonka? Est-ce qu'à votre connaissance ce
dossier-là est réactivé, parce que je sais... Est-ce que
je me trompe en disant qu'Hydro-Québec a quand même fait un
certain nombre d'études concernant le harnachement du potentiel qui
reste de la Péribonka, qui est déjà, soit dit en passant,
comme disait mon collègue de Joliette, une rivière
«scrappée», si vous me permettez l'expression. On parlait de
l'As-huapmushuan comme étant la pouponnière de la ouana-niche.
Avant 1950, la pouponnière de la ouananiche n'était pas
FAshuapmushuan, c'était la Péribonka. Ce n'est plus le cas
maintenant, parce qu'on a construit des barrages sans se préoccuper,
d'aucune façon, du sort de la ouananiche. Est-ce qu'Hydro-Québec
a poursuivi ou réactivé ce dossier-là, à votre
connaissance?
M. Paradis (Jean): Écoutez, le document «Option
Péribonka», les données qui sont sur le cas de
Péribonka datent d'une étude qui était de novembre 1992.
C'est assez récent. Ils ont une étude, pas un avant-projet mais
une étude sectorielle sur ce projet-là. Ils sont quand même
assez avancés. Ce qu'on a constaté dans cette étude...
M. Brassard: Ce que vous souhaitez, au fond, là, c'est que
dans le plan de développement d'Hydro, ils enlèvent
l'Ashuapmushuan et ils mettent à la place Péribonka. (21
heures)
M. Paradis (Jean): Si on en a besoin, oui, et vous savez, Hydro a
prévu dans l'étude des études complémentaires pour
réaliser le projet Péribonka. Savez-vous combien d'argent ils ont
prévu? 700 000 $. Ça prouve bien qu'il n'y a pas de
problème. C'est 30 000 000 $, sur l'Ashuapmushuan, qu'ils ont
dépen-
ses. Mais, pour se rendre à l'autorisation, c'est 700 000 $ de
budget qu'ils ont prévu dans l'étude Péribonka. Imaginez
comment les problèmes environnementaux sont faibles! Ça veut dire
que, dans six mois, ils pourraient commencer s'ils le voulaient. Ce n'est pas
compliqué, et je suis presque certain qu'il n'y aurait même pas de
demande d'audiences publiques, ce qui ne serait pas farfelu dans ce
projet-là. Comprenez-vous?
Mme Bacon: Le développement durable.
Le Président (M. Audet): Merci. Merci beaucoup. Alors, au
nom des membres de la commission, je vous remercie de votre exposé. Je
vous souhaite un bon retour chez vous.
Et, afin de permettre au Mouvement pour l'instauration de la
réglementation de l'électricité au Québec de
s'installer, nous allons suspendre deux minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 1)
(Reprise à 21 h 3)
Le Président (M. Audet): S'il vous plaît, la
commission reprend ses travaux. Nous recevons maintenant le Mouvement pour
l'instauration de la réglementation de l'électricité au
Québec.
Alors, messieurs, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue au nom des
membres de la commission. Je vous rappelle brièvement le
déroulement de nos travaux: vous avez 20 minutes pour nous
présenter votre exposé et vous présenter, ce qui est
très important, et ensuite suivra une période d'échanges
qui durera une quarantaine de minutes. Vous avez la parole; je vous invite
à vous présenter.
Mouvement pour l'instauration
de la réglementation de
l'électricité au Québec (MIREQ)
M. Cao (Michel H.): Mme la ministre, MM. les
députés, il me fait plaisir de vous présenter, à ma
droite, M. Jacques Bellemare, membre du conseil d'administration, et
moi-même, Michel Cao, membre fondateur et directeur exécutif du
Mouvement pour l'instauration de la réglementation de
l'électricité au Québec.
M. Bellemare est ingénieur, physicien et M.B.A. Son expertise
approfondie du domaine de la réglementation des services publics est
fondée sur plus de 25 ans d'expérience dans les entreprises
réglementées telles que Bell Canada, Vidéotron,
Téléglobe Canada. Il a été régisseur
à la Régie des services publics du Québec, maintenant
Régie des télécommunications, de 1982 à 1988. Il
est présentement consultant en réglementation et son expertise
sera certainement très utile à cette commission en tout ce qui
touche aux questions de réglementation de
l'électricité.
Personnellement, je suis diplômé des HEC en finance, et
j'ai une maîtrise et un doctorat en économie. Je possède
à peu près 20 ans d'expérience dans le domaine des
ressources naturelles et de l'énergie, en particulier des
télécommunications. J'ai occupé divers postes de direction
au sein du gouvernement, dans des organismes de réglementation des
sociétés publiques et privées. Je suis ici pour
répondre à toutes les questions en ce qui touche le plan de
développement d'Hydro-Québec et les questions connexes concernant
la tarification et l'engagement de performance de l'entreprise.
Avant de commencer, j'aimerais remercier les membres de cette commission
de nous recevoir ce soir. Nous espérons que les idées ainsi que
les représentations que nous allons formuler et qui sont
formulées dans notre mémoire, et d'autres que nous formulerons
verbalement ce soir, seront reçues favorablement.
MIREQ est un organisme à but non lucratif qui regroupe
principalement des bénévoles et des groupes sociaux
intéressés au domaine de la réglementation
socio-économique, à l'étude des activités
liées à la génération et à la distribution
de l'électricité au Québec. Nous sommes, comme on peut le
dire, un groupe de pression à caractère social et éducatif
dont le principal objectif est de sensibiliser toutes les catégories de
consommateurs d'électricité à leurs droits et obligations
et à la nécessité d'exercer une régulation
socio-économique rigoureuse et objective dans ce domaine
d'activité, en dehors des pressions politiques, par un tribunal
administratif indépendant.
En 1990, lorsque nous nous présentions devant cette même
commission, nous étions les premiers à demander qu'un organisme
de contrôle indépendant soit créé afin de superviser
toutes les activités dans le domaine de l'énergie au
Québec. À la présente commission, nous constatons qu'un
nombre plus important d'intervenants réclament la constitution d'un tel
organisme. Nous sommes plus que jamais persuadés que la création
d'un tel organisme permettrait d'améliorer sensiblement le processus de
consultation sur les grands enjeux énergétiques. La population a
déjà exprimé clairement son désir d'être
associée à un tel débat.
Notre mémoire aborde tous les angles importants du plan de
développement d'Hydro-Québec, autant dans une perspective
à court terme que dans une perspective à plus long terme. Les
quatre thèmes principaux qui sont abordés couvrent certains
aspects fondamentaux du développement de l'électricité
dans la prochaine décennie. Ces thèmes sont: le rôle de
l'électricité et d'Hydro-Québec dans le
développement économique du Québec; la tarification de
l'électricité; l'organisation de l'entreprise en vue d'une plus
grande efficacité; la réglementation de
l'électricité et le rôle du gouvernement.
En ce qui concerne le rôle de l'électricité et
d'Hydro-Québec dans le développement économique du
Québec, nous sommes d'avis que le gouvernement se doit de réviser
sa politique énoncée en 1988, d'utiliser l'abondance de ses
ressources comme facteur de développement. Comme bilan de cette
politique, c'est une utilisation peu efficace des ressources naturelles et
finan-
cières dont le Québec dispose. Incidemment, le rôle
de l'électricité et d'Hydro-Québec doit lui aussi
être révisé, compte tenu des nouvelles
réalités économiques et sociales du Québec. Si nous
recommandons de restreindre le rôle d'Hydro-Québec à celui
d'une entreprise de service public et dont la mission est d'assurer l'avenir
des Québécois en électricité au moindre coût,
c'est dans un souci de permettre à l'entreprise de concentrer ses
efforts dans un domaine qu'elle connaît le mieux l'énergie
plutôt que de disperser ses efforts dans des objectifs parfois
contradictoires.
Nous avons également abordé dans le mémoire le type
d'organisation qui permettrait à Hydro-Québec d'être plus
efficace. Sans sombrer dans un discours idéologique sur la
nécessité de privatiser Hydro-Québec, qui toucherait des
cordes hypersensibles, le débat, croyons-nous, devrait être
élevé à un niveau plus pragmatique, celui de
l'organisation qui permettrait d'atteindre les objectifs d'efficacité et
d'imputabilité qu'on peut attendre d'une société
d'État. Poser cette question, c'est aussi mettre en évidence des
avenues alternatives de restructuration. Parmi celles-ci, une solution
envisageable est une forme de séparation structurelle entre les deux
fonctions essentielles de l'entreprise, soit la fonction production et la
fonction distribution.
Nous avons également abordé la question de la
privatisation partielle du réseau de distribution local
d'Hydro-Québec. Nous y trouvons un certain intérêt, mais,
avant d'y aller plus à fond dans cette voie, nous croyons qu'il faudrait
faire des études plus poussées sur les avantages et
inconvénients d'une telle approche.
Sur la question tarifaire, notre choix est fixé. Nous croyons
qu'une tarification basée sur les coûts marginaux est la meilleure
façon, non seulement de mettre en pratique les prix de
l'électricité au Québec mais également pour les
autres formes d'énergie. Aussi supporterons-nous entièrement les
orientations tarifaires d'Hydro-Québec, avec une seule réserve:
celle qu'Hy-dro-Québec devrait étudier la possibilité
d'élargir la gamme des choix tarifaires en offrant, dès que
possible, des tarifs différenciés dans le temps, optionnels.
Monopole si l'on considère que c'est la seule firme qui offre
l'électricité au Québec, oligopole si l'on
considère qu'elle doit composer avec des entreprises concurrentes dans
les domaines du gaz naturel et du mazout, il reste que l'entreprise dispose
d'une exclusivité totale dans les domaines de la
génération et de la distribution de l'électricité
au Québec. Et, en conséquence, elle doit être
réglementée. La forme de réglementation
socio-économique appliquée partout ailleurs en Amérique du
Nord correspond, à notre avis, aux besoins d'équité et
d'efficacité lorsque la gestion d'une entreprise
catégorisée de service public est en jeu. Certes, la mise en
place d'un organisme de contrôle indépendant et objectif
réduit le pouvoir direct de l'État sur la gestion quotidienne de
l'entreprise, mais, en fait, tout le monde y gagne puisque les
bénéfices sociaux et économiques d'une telle
réglementation profiteraient à l'ensemble de la population. La
forme de réglementation que nous croyons adaptée à
Hydro-Québec sera élaborée de façon plus
détaillée par M. Bellemare tout à l'heure.
Finalement, dans notre mémoire, nous touchons également
aux questions plus directes du plan de développement, soit la question
des moyens de production à mettre en oeuvre pour répondre
à la demande d'électricité des Québécois,
les économies d'énergie, les exportations
d'électricité, les processus d'approbation de projets de
développement et les fonds de stabilisation. Ce sont des questions
très pointues, et dont l'analyse nous amène aux recommandations
suivantes. (21 h 10)
En ce qui concerne les moyens de production, une révision des
objectifs de l'entreprise en ce qui concerne la production privée,
petites centrales et cogénération, à la lumière
d'une nouvelle approche de planification intégrée des
ressources.
En deuxième lieu, efficacité énergétique.
Nous croyons qu'une réaffectation des efforts de l'entreprise en ce qui
concerne les programmes d'économie d'énergie et la mise en place
de normes plus sévères en efficacité
énergétique seraient préférables.
En matière d'exportation, nous croyons qu'une politique
commerciale plus agressive et novatrice en ce qui concerne l'exploitation des
marchés d'exportation d'électricité saisonnière et
une orientation plus «entrepreneuriale» en ce qui concerne les
exportations d'énergie fermes visant le profit pour la
société et la population, ce n'est qu'à ce prix-là
que l'on devrait approuver les devancements d'équipements dans le plan
de développement. Nous croyons également que le gouvernement
devrait rejeter la proposition d'Hydro-Québec de se constituer une
banque de projets préapprouvés, geste inacceptable, selon nous,
qui a pour but d'escamoter le processus normal d'approbation et
d'évaluation environnementale.
Finalement, nous croyons que le gouvernement pourrait approuver, sous
certaines réserves précises que nous exposons dans le
mémoire, la mise en place d'un compte de stabilisation des tarifs afin
de niveler les effets de fluctuation de l'hydraulicité sur le rendement
financier de l'entreprise et, ultimement, sur les tarifs des
abonnés.
Nous avons également reçu deux documents
dernièrement, qui s'intitulent «Propositions tarifaires» et
«L'Engagement de performance». Nous n'avons pas encore fait
d'analyse détaillée, sauf que nous pourrions seulement vous
lancer, peut-être, nos commentaires préliminaires dans ce
sens-là.
En ce qui concerne «L'Engagement de performance», nous
croyons que, des 27 critères de performance dont il est fait mention,
certains de ces critères ne sont pas, à proprement parler, des
critères de performance, alors que d'autres critères importants
de performance ne sont pas inclus. À titre d'exemple, HydroQuébec
soumettait, dans son plan de développement, que le critère de
temps moyen d'interruption par client par année est un critère
important. On ne retrouve pas ce critère-là dans le plan de
performance. Par ailleurs,
on peut également constater qu'Hydro-Québec ne fait aucune
mention des critères financiers, qui sont les plus importants
d'après nous, et de certains critères importants de
fiabilité du réseau. en ce qui concerne la tarification, je ne
sais pas si on vous a distribué les quelques pages que j'avais.
malheureusement, je n'en ai pas gardé de copie pour moi-même, donc
je m'y réfère seulement de mémoire. l'idée de
ça, c'est que la première page regroupe les tableaux soumis par
hydro-québec dans sa proposition tarifaire qui mentionne,
premièrement, au tableau 2.3, que, pour en arriver à recouvrer
ses frais, il faut atteindre le prix cible qui est indiqué à la
ligne 2, soit une augmentation de 2,8 % en 1993 et de 3,5 % en 1994, par
rapport à des taux d'inflation de 2,3 % et 2,7 % qu'on retrouve à
la ligne 3. d'ailleurs, c'est les hausses tarifaires que propose
hydro-québec. donc, pour atteindre ces hausses tarifaires
proposées par hydro-québec, hydro-québec ne pourra pas
atteindre certains ratios financiers, et son rendement financier, comme on le
retrouve au tableau suivant 3,5 % sera en train de se
détériorer dans l'avenir. nous trouvons que ce problème
pourrait être grave pour l'entreprise dans les années futures si
le financement de l'entreprise devient un problème important, si les
coûts de financement sont augmentés. un deuxième
problème que nous relevons de cette politique-là, c'est le fait
que nous trouvons différents taux d'inflation projetés par
différents organismes. à la page suivante, vous trouvez la caisse
de dépôt et placement. elle prévoit plutôt un taux
d'inflation pour 1993, qui se trouve à la ligne 14, de 2 %, de 1,7 % en
1994 et de 1,7 % en 1995. si on se réfère, finalement, à
la troisième feuille, qui est le bulletin économique des caisses
desjardins, nous trouvons que les caisses desjardins prévoient
plutôt une inflation de 2,5 % en 1993. alors, ceci pour vous dire que, si
l'on s'en tient à la position d'hydro-québec, nous nous trouvons
à accepter d'emblée la prévision d'hydro-québec de
2,3 % et de 2,7 %, alors que la réalité pourrait être tout
à fait différente. nous croyons que cette façon de
procéder n'est pas la plus efficace pour une entreprise telle
qu'hydro-québec et qu'elle devrait plutôt s'engager à
évaluer plutôt son engagement vis-à-vis de sa performance
financière.
Je passe maintenant la parole à M. Bellemare.
Le Président (M. Audet): M. Bellemare, allez-y.
M. Bellemare (Jacques CP.): Merci, M. le Président.
Mme la ministre, MM. les députés, j'aimerais souligner que
mon collègue et moi-même, au nom de notre Mouvement, avons
participé au cours de la dernière année au processus de
consultation publique qui avait été menée par
Hydro-Québec. C'est un peu à la lumière de notre
expérience dans ce processus que nous devons revenir un peu aux
positions que nous avons établies lorsque nous avons comparu devant la
même commission en 1990, en ce qui a trait à l'instauration d'une
forme de réglementation de style tribunal administratif pour
Hydro-Québec. J'aimerais réitérer, pour les fins du
résumé, présentement, un peu quelles sont ces positions
que notre Mouvement préconise.
Historiquement, les compagnies de services publics dont fait
partie Hydro-Québec qui oeuvrent dans le domaine de
l'énergie, soit des télécommunications ou du transport,
sont réglementées par un organisme indépendant du pouvoir
législatif, ce qui veut dire un tribunal administratif d'utilité
publique. Cette réglementation découle du principe
inhérent à la protection de l'intérêt public lorsque
l'entreprise réglementée détient une puissance commerciale
qui lui permet d'influencer de manière importante ses coûts de
production et ses prix.
Nous croyons fermement qu'un processus réglementaire de nature
socio-économique, accessible à l'ensemble des utilisateurs de
l'électricité et de la population en général et
appliqué par un tribunal administratif quasi judiciaire, est
significativement plus efficace et socialement plus acceptable que le processus
d'examen par une commission parlementaire et de décision par le Conseil
des ministres, et même si ça se situe après l'exercice d'un
processus de consultation publique, tel qu'il a été mené
au cours de la dernière année. En plus de ces avantages, la
réglementation socio-économique d'Hydro-Québec
entraînerait fort probablement des gains de productivité
grâce à un contrôle plus serré des coûts de
fourniture du service et des modes de gestion de l'entreprise, parce qu'un
organisme de cette nature va beaucoup plus dans le détail que les
groupes ou les interventions de groupes devant des commissions parlementaires,
ou que même une commission elle-même peut aller. Au surplus, le
coût de la réglementation elle-même demeure faible devant
les enjeux économiques énormes visés par le processus
réglementaire. Il faut qu'on pense que, lorsqu'on parle du chiffre
d'affaires, des immobilisations d'Hydro-Québec, on est dans les
milliards de dollars, les dizaines de milliards de dollars, et un processus de
réglementation, lui, se situe, au niveau de son exercice, plutôt
dans les millions de dollars annuellement.
Au niveau des formes de réglementation qui pourraient s'appliquer
à une organisation comme HydroQuébec, on pense à des
formes incitatives. Nous pouvons affirmer que, des points de vue
économique et social, il existe des avantages tangibles à une
réglementation plus rigoureuse d'Hydro-Québec. Il nous faut
également souligner les dangers qui pourraient exister si la forme de
réglementation n'est pas adéquate pour assurer la pleine
protection des consommateurs.
En premier lieu, du point de vue du gouvernement, il est évident
qu'une société d'État réglementée pourrait,
dans une certaine mesure, échapper au contrôle direct de
l'État, c'est-à-dire du gouvernement. Dans cette situation, le
gouvernement pourrait être tenté de renverser des décisions
d'un organisme de réglementation et de contrôler ses
décisions en dictant des directi-
ves auxquelles devrait se conformer l'organisme lui-même. Mais
cette façon de procéder ne semble pas être justifiable
socialement et ne devrait être utilisée qu'en dernier recours.
Sans toutefois exclure un certain droit de regard du gouvernement sur les
grandes orientations stratégiques de l'entreprise, nous croyons que le
pouvoir de directive pourrait demeurer une mesure exceptionnelle à
être utilisée seulement en cas de nécessité
absolue.
En second lieu, il faut souligner également le risque de
fractionnement des ressources vitales à la réglementation dans
des secteurs différents de réglementation comme l'énergie,
les télécommunications, le gaz naturel, ces choses-là
parce que, au Québec, on est quand même assez
confiné, comme population; 6 000 000 en Amérique du Nord, c'est
dans les tailles relativement faibles si on compare ça à la
taille de certains États américains, par exemple alors que
les mécanismes et les principes sous-jacents à l'exercice de la
réglementation sont essentiellement les mêmes pour toutes les
formes d'utilités publiques. Il y aurait donc avantage, peut-être,
à considérer le fait qu'il existe déjà des
organismes qui sont créés, comme la Régie du gaz ou la
Régie des télécommunications, pour servir de noyau
possible pour une réglementation éventuelle
d'Hydro-Québec. (21 h 20)
Enfin, du point de vue d'Hydro-Québec, les risques sont
essentiellement liés à la lourdeur administrative qui accompagne
le processus réglementaire, ce qu'on appelle en anglais le
«regulatory burden», le fardeau réglementaire. Toutefois, ce
risque peut être minimisé dans la mesure où l'entreprise
saura adapter son organisation et son mode de fonctionnement pour tenir compte
de tout délai réglementaire.
Hydro-Québec pourrait également bénéficier
d'un cadre réglementaire qui lui permettrait d'alléger de
façon sensible les besoins de représentation devant d'autres
organismes. Il pourrait y avoir des avantages...
Le Président (M. Audet): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Bellemare: Oui, je termine. Je peux avoir une minute?
Le Président (M. Audet): Oui, oui, allez-y. Une
minute.
M. Bellemare: Le rôle du gouvernement, dans un contexte
où les formes d'énergie sont réglementées par un
organisme indépendant, est de s'assurer que la politique
énergétique est adéquatement suivie et respectée
par les divers intervenants. Alors, nous croyons que le rôle du
gouvernement, c'est plutôt au niveau de la politique et d'édicter
l'encadrement à l'intérieur duquel des directives pourraient
être émises, à la fois pour la société
productrice d'électricité et distributrice et pour son organisme
de réglementation qui se verrait donner un mandat.
Enfin, le gouvernement pourrait également exiger que l'organisme
de réglementation lui soumette des rapports périodiques sur le
contexte énergétique québécois, la gestion des
entreprises réglementées et l'atteinte des objectifs globaux
énoncés dans les politiques gouvernementales.
Alors, on est ouverts à vos questions.
Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant
reconnaître Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.
Mme Bacon: Alors, je voudrais vous exprimer, à vous aussi,
mes remerciements pour votre contribution à ce grand processus de
consultation, puisque nous entendrons 87 mémoires au cours de cette
période importante pour l'énergie au Québec, et je vous
invite à continuer à contribuer à ce genre de
réflexion. Je pense que c'est comme ça qu'on peut trouver les
meilleures solutions possibles.
À la page 1 de votre résumé, vous déclarez
que le gouvernement doit procéder à la révision de sa
politique énergétique, notamment parce qu'elle conduit à
une utilisation peu efficace des ressources naturelles et financières du
Québec. Comment faites-vous pour arriver à une telle conclusion,
alors qu'Hydro-Québec s'est quand même taillé une place
enviable au plan mondial et que le Québec a
bénéficié des retombées de cette situation?
M. Cao: Bon. Je vais essayer de répondre à cette
question-là, qui est pertinente.
C'est que nous avons fait dans notre mémoire un survol du bilan
des cinq dernières années concernant la politique du gouvernement
du Québec concernant l'utilisation de l'électricité pour
l'implantation des industries à forte consommation
d'électricité au Québec. Le bilan, d'après nous,
est plutôt négatif. Les informations dont nous disposons nous
permettent d'affirmer que même Hydro-Québec confirme que le manque
à gagner de la population québécoise est d'environ 160 000
000 $ en 1991 et que, tant et aussi longtemps que le prix des matières
premières n'augmente pas, ce manque à gagner va continuer
d'année en année.
D'un autre point de vue, en tant qu'économiste, je crois que je
ne vois pas la fin de ce processus où les prix des matières
premières dans le monde en général ne vont pas augmenter.
À ce propos, je crois que les prévisions qu'avait faites
Hydro-Québec lorsqu'elle avait signé les contrats étaient
trop optimistes en termes de prévision des prix des matières
premières, et donc de la rentabilité de ces entreprises. Et c'est
pour ça que je crois notre confirmation ici, que l'utilisation de
l'énergie en tant que telle comme...
Mme Bacon: Mesure incitative.
M. Cao: ...mesure pour implanter des industries au Québec
n'est pas une bonne politique.
Par contre, nous soulignons également dans notre mémoire
qu'il y a une autre manière de procéder, et cette autre
manière de procéder est via un processus beaucoup plus
d'implantation d'industries à valeur ajoutée. Et c'est là
où nous croyons que le Québec a un avantage certain sur d'autres
pays.
Mme Bacon: À la page 19 de votre mémoire, vous
élaborez sur la tarification au coût marginal au sens strict. Vous
semblez quand même favorables à ce genre de tarification et vous
indiquez toutefois la nécessité de l'acceptabilité de ces
tarifs par la clientèle.
Dans le contexte québécois où la tarification au
coût marginal implique quand même d'importantes hausses tarifaires,
est-ce que vous croyez que c'est réaliste, ce genre de
tarification-là que vous proposez?
M. Cao: Mme la ministre, je crois que dans notre mémoire
nous mentionnons aussi que la tarification au coût marginal pur n'est
pratiquée dans aucun pays actuellement. Et nous avons dit, toujours dans
notre mémoire, que c'est la tarification basée sur les
coûts marginaux, c'est-à-dire fondée sur la structure des
coûts marginaux, qui est importante et non pas l'application stricte des
coûts marginaux. Il faut faire la distinction claire et nette
là-dessus.
Donc, l'impact final sur la clientèle sera pour certains plus,
d'autres moins. Donc, en moyenne, nous croyons que, compte tenu, par exemple,
d'un revenu requis donné, on peut toujours structurer les tarifs de
telle façon que les utilisateurs d'électricité verront le
coût réel d'une utilisation, par exemple, du chauffage en hiver,
ou l'utilisation du chauffe-eau durant les heures de pointe, etc. Alors, c'est
sur ça que nous croyons que la tarification doit s'orienter.
Mme Bacon: À la page 2 de votre résumé, vous
discutez aussi des avantages, des inconvénients de l'implantation d'un
organisme indépendant et objectif chargé de contrôler les
activités d'Hydro-Québec.
Est-ce que vous pouvez nous préciser les bénéfices
socio-économiques auxquels le consommateur est en droit de s'attendre
avec l'implantation d'un organisme comme ça?
M. Bellemare: En fait, les avantages pour la population prennent
la forme de, peut-être, une meilleure garantie que les
intérêts de toutes les parties seront considérés de
façon objective. C'est l'objectivité qui rentre en ligne de
compte, là. Quand on parle d'organisme indépendant, c'est ce
qu'on veut dire. C'est indépendant du pouvoir législatif, du
pouvoir exécutif, du gouvernement qui, de toute façon, devant ces
genres d'organimes, peut venir intervenir et faire état de ses propres
préoccupations au niveau de l'explication de sa politique. Des gens du
ministère peuvent venir expliquer dans le détail certains aspects
ou les confronter sur une base de témoignage ou de confrontation
d'idées ou d'idéologies avec d'autres parties.
Alors, le fonctionnement d'un tribunal administratif, c'est d'entendre
de façon objective toutes les parties, de pouvoir même permettre
l'interrogatoire ou la confrontation, disons, des témoins par
exemple d'Hydro-Québec dans le cas qui nous concerne par les
témoins experts des autres parties qui interviendraient, qui pourraient
être des groupements comme le nôtre ou comme ceux qui sont
passés tantôt, qui ont des préoccupations plus
écologiques, par exemple, et tout ça. Alors, c'est un moyen de
faire un meilleur équilibre dans tout ça. C'est une police
d'assurance. C'est une meilleure garantie pour répondre à
votre question pour le public.
Présentement, je pense qu'avec le mécanisme actuel et
l'expérience que j'ai pu en vivre, personnellement, c'est qu'on n'a pas
cette assurance d'objectivité globale. Ce n'est pas parce que la
commission n'essaye pas d'être objective ici, c'est que, simplement, elle
influence les décisions.
Mme Bacon: On s'est fait dire qu'on n'était pas
compétents, alors on peut prendre ça aussi. Ha, ha, ha!
Objectifs, vous êtes gentil et généreux.
À la page 8 de votre mémoire, vous alléguez que le
processus d'examen et de décision d'une régie est plus efficace
et socialement plus acceptable que celui d'une commission parlementaire et du
gouvernement. Sur quelles prémisses vous basez-vous?
M. Bellemare: En fait, c'est que c'est un travail à plein
temps. Moi, j'ai croisé, dans ma carrière, autant du
côté de ma participation dans l'industrie, dans des processus de
réglementation que du côté de l'organisme lui-même...
Parce que j'ai été régisseur, j'ai participé
à ces processus, et je peux dire que c'est simplement la façon
dont c'est exercé, c'est dans le détail. C'est qu'une commission
comme la vôtre, qui, par exemple, dépend de contributions de
groupes qui viennent, comme nous, qui ne sont pas nécessairement des
experts... On n'a pas la possibilité, on ne voit pas... Vous dites que
vous allez, par exemple, recevoir 87 mémoires et entendre des
représentations de 87 groupes. Mais, nous, on n'est pas là. On
n'est pas dans une instance qui nous permet de partager tout ça.
Même à l'intérieur du processus d'Hydro-Québec, de
consultation publique, on s'est retrouvé un peu dans ce vice de
procédure. C'était intéressant. Hydro nous a donné
peut-être plus d'informations qu'on n'en a jamais eu auparavant, mais
ça reste que c'était informatif, ce n'était pas un
débat. Ça ne permettait pas la confrontation.
Mme Bacon: Ce n'était pas consultatif.
M. Bellemare: C'était consultatif. Même, je ne pense
pas qu'on puisse penser qu'on a dégagé des consensus parce que,
moi, j'ai participé. Je peux vous assurer que ça tirait à
gauche, à droite, dans le centre puis partout, alors...
Mme Bacon: Un peu comme ici.
Le Président (M. Audet): Merci.
M. le député de Joliette. (21 h 30)
M. Chevrette: Merci, messieurs. Tout d'abord, moi, je vais y
aller sur trois points.
D'abord, le premier: vous semblez, à la page 13, remettre en
question la mission d'Hydro-Québec, entre autres le fait qu'elle ne doit
plus participer au développement industriel du Québec, sans doute
à cause des contrats secrets ou dits secrets, ou à partage de
risques, comme dit Hydro-Québec, plutôt que de dire
«secrets»... En tout cas, peu importe, là. Les industries
énergivores ne semblent pas avoir été quelque chose de
très fantastique sur le plan de la gestion, et ça semble
être la clef qui vous dicte de changer la mission.
Est-ce que je me trompe ou si je vise juste? Dites-moi-le parce que je
vais avoir une deuxième question à vous poser.
M. Cao: Non. Je pense qu'en général, une
société, elle a une mission. Si on veut donner à une
société une multiple mission, vous êtes sûr que cette
société-là va payer dans toutes ces missions. Je pense que
dans un cas ou dans le cas d'une société de services publics
telle que Hydro-Québec, ou dans toute société
d'État, chaque société d'État a une mission
donnée. Est-ce que vous donneriez à une caisse de
dépôt et placement une mission, par exemple, d'aller sauver les...
et, en même temps, de déposer...
M. Chevrette: Ha, ha, ha! Elle l'a peut-être fait avec
Provigo. Faites attention! Je comprends que toute comparaison cloche, mais je
comprends que c'est une question de principe et non pas une question sur le
plan pratique.
M. Cao: C'est en partie une question de principe, mais aussi une
question pratique, parce que, si vous donnez beaucoup trop de missions à
une société telle qu'Hydro-Québec allez faire ceci,
allez faire cela, allez faire ceci à chaque jour, ce sera une
mission différente, et ce sera le fouillis complet.
M. Chevrette: Avez-vous l'impression ou la conviction que c'est
Hydro-Québec qui s'attribue cette mission-là?
M. Cao: Certainement pas. M. Chevrette: Pardon?
M. Cao: Je crois que la mission d'Hydro-Québec est
dictée par sa loi ainsi que des missions qui, au fur et à mesure
du temps, sont dictées par le...
M. Chevrette: Je vais reprendre ma question. Je ne suis pas
sûr que vous l'ayez comprise. Croyez- vous...
Une voix: II a compris.
M. Chevrette: Ah! il l'a peut-être très bien
comprise, mais il ne veut pas répondre, mais je vais la reprendre
pareil.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Ma question est très claire: Avez-vous la
conviction que c'est Hydro-Québec qui a décidé de se
donner une mission sur le plan industriel...
M. Cao: Non.
M. Chevrette: ...ou si ce n'est pas une décision
politique?
M. Cao: C'est clairement une décision politique. M.
Chevrette: C'est plus précis, là, hein?
M. Cao: Je dis, M. le député, que c'est clairement
une décision politique, parce que c'est écrit dans la politique
de 1988 que le gouvernement favorisait la politique de l'utilisation de
l'électricité à des fins de développement
industriel.
M. Chevrette: Merci de votre franchise.
Deuxième question. À la page 20, si ma mémoire est
fidèle, vous dénoncez le style de tarification ou le type de
tarification ou l'alignement des tarifs sur l'inflation. Mais, dans le contexte
économique actuel parce que c'est un peu la même question
qu'on a posée toute la journée, parce qu'il y en a plusieurs qui
ont fait allusion au fait que vous n'acceptiez pas l'enlignement de la
tarification sur l'inflation dans la conjoncture actuelle, qu'est-ce que
vous feriez avec du monde qui a de la misère à payer, à
boucler, qui tire le diable par la queue, du débranchage en plein hiver,
qui paie des taxes, des frais de garantie, l'augmentation de taxes sur le
capital...
M. Cao: D'abord, la tarification est un domaine, d'abord, je
crois, assez spécialisé. Si on veut dire que la tarification sert
comme outil de distribution de revenus à l'intérieur d'une
société, oui, on peut utiliser l'électricité pour
que le gouvernement redistribue au lieu de prendre un certain rendement sur son
article qu'il investit, le redistribuer à droite et à gauche.
Est-ce que c'est la question que nous nous posons c'est surtout
l'utilisation de l'électricité à cette fin-là,
justement? Est-ce que l'électricité ne doit pas être
utilisée à bon escient, c'est-à-dire dans des contextes
où elle doit optimiser vraiment l'utilisation de
l'électricité qui est quand même une ressource rare, et
dont, je pense, les mémoires que vous avez reçus en ont fait
amplement la démonstration?
D'autre part, sur la question sociale, les hausses
tarifaires, etc., il est toujours possible à travers la
tarification d'avoir les tarifs que nous avons mentionnés dans le
mémoire même, des tarifs de soutien. Alors, ces tarifs de soutien
sont, dans certaines juridictions, aux États-Unis comme au Canada, sont,
dans certains cas, présents et se justifient par la volonté
claire du gouvernement de dire: Bon, c'est ce tarif-là qui va
s'appliquer à certains groupes de la population, mais que les autres
paient exactement ce qu'ils ont contribué au coût.
M. Chevrette: Vous vous attardez également beaucoup
à une nécessaire restructuration d'Hydro-Québec. Tout
d'abord, vous savez qu'il y a eu des annonces dernièrement, on a
annoncé des coupures assez substantielles dans les effectifs.
Est-ce que vous avez étudié suffisamment la structure
d'Hydro-Québec pour me dire si la seule recette miracle, c'est de couper
dans les effectifs, surtout en bas?
M. Cao: ma première version, m. le député,
c'est que les annonces, dans les journaux, de 1500 postes coupés sur une
période de trois ans, basé sur un effectif total de 27 000,
ça représente moins que 5 % sur deux ans. c'est beaucoup moins
que dans l'autre société dans laquelle, moi, je travaille
actuellement; on a coupé 10 % par année. alors, ce genre de
déclaration, nous trouvons que ça fait plus consonance politique
que réelle volonté de restructurer l'entreprise.
Dans notre approche que nous avons proposée, c'est que nous avons
vu que l'organisation d'Hydro-Québec est vraiment trop grosse, trop
inefficace pour le genre de mission dont elle s'est dotée, avec les deux
présidents, avec l'organisation régionale, avec des achoppements
de fonctions. Je pense que le président d'Hydro-Québec a fait un
gros effort, à travers «Le Défi performance», pour
améliorer ça. Mais je doute que «Le Défi
performance» permettrait de résoudre la lourdeur administrative,
qui est vraiment une question de poids. Et c'est pour ça que nous avons
proposé plutôt une restructuration en fonction des fonctions
essentielles de l'entreprise. Premièrement, une fonction production et
transport qui est vraiment une fonction séparée de la fonction
distribution. La distribution, c'est la fonction qui est la plus reliée
aux contacts avec les clients et la fonction transport-production, c'est la
fonction de prévision.
M. Chevrette: C'est ce qui vous amène, si j'ai bien
compris, à préconiser la privatisation ou autre, privatisation
ou, je ne sais pas... de la distribution. C'est ça?
M. Cao: Nous préconisons en premier lieu... M. Chevrette:
À la page 27, là.
M. Cao: C'est ça. Nous proposons à cette commission
d'étudier la possibilité de séparer de façon
structurelle l'entreprise en deux; premièrement, par la fonction
transport-distribution qui reste principalement sous contrôle de
l'État, et l'autre qui est la fonction distribution. Là, la
fonction distribution, certaines régions se prêtent à une
privatisation, d'autres ne s'y prêtent pas. Alors, c'est pour ça
que nous vous proposons d'analyser plus en détail la possibilité
de privatiser partiellement le réseau de distribution.
M. Chevrette: Mais je vous arrête. Vous ne croyez pas que,
sur le plan théorique, ça paraît bien de proposer ce que
vous faites, mais que ce n'est pas là que s'engloutissent le plus de
millions, de dizaines et de centaines de millions? Que c'est beaucoup plus au
niveau de contrats faramineux, de droits de gérance, par exemple, de
projets; de confier à des firmes privées un paquet de travaux qui
pourraient être faits par des ingénieurs tablettes à
l'interne; de contrats à l'extérieur avec des gens qui viennent
s'asseoir à la place d'employés qui ne font rien
présentement et qui pourraient être motivés à
travailler si on leur en donnait la chance; d'achats, par exemple, folie
furieuse, de millions de dollars de «rods» de métal pour
réparer un pont qui ne sera jamais réparé, et on ne sait
même pas où sont rendues les «rods», plutôt que
de penser à faire des ponctions dans les régions, par exemple,
chez des employés, etc.? Vous ne pensez pas qu'il y a un malaise plus
profond que le simple réseau de distribution, par rapport à la
gestion de l'entreprise? Ça, ça va se rendre à
Hydro-Québec, ce que je viens de dire, j'espère. (21 h 40)
M. Cao: Le malaise que vous mentionnez est un malaise qui est,
d'après moi, assez inhérent à toute grande organisation
et, je reviens à mon idée essentielle, c'est que c'est le poids
d'Hydro-Québec. Une entreprise de 27 000 employés est une
entreprise qui ne peut pas être bien gérée, question de
nombre. Est-ce que vous n'avez jamais vu une université qui est
déjà de l'ordre de 5000, 6000... le corps professoral, c'est
déjà lourd à gérer. Une entreprise telle
qu'Hydro-Québec, 27 000 employés, ça ne peut pas
être géré de façon efficace.
M. Chevrette: Mais il n'y a pas de société
d'État qui existe qui soit tout aussi nombreuse, ou plus nombreuse
même, et ce n'est pas nécessairement une adéquation
mathématique, le nombre d'employés et l'efficacité de
gestion. Il y a eu, je ne sais pas, c'est 40 et quelques
vice-présidents; on serait rendu à 36, si ma mémoire est
fidèle...
Une voix: 38.
M. Chevrette: 38. 36 ou 38, en tout cas, peu importe. Ils
étaient au-dessus de 40, et chacun, ça lui prenait un adjoint, et
chaque adjoint, ça lui prenait un associé. Je comprends que
c'est, à un moment donné, la structure qui veut qu'ils se
créent des besoins à eux autres mêmes. Ça, je
comprends ça. Mais ce n'est pas
nécessairement le nombre d'employés qui fait qu'une
structure est lourde ou mal gérée. Moi, je vois beaucoup plus
ça par des petites chasses gardées qui se développent, et
chacun y va de son «power trip» dans chacune de leur section.
Je ne sais pas comment vous voyez ça, mais moi, je ne fais pas
l'adéquation mathématique comme vous la faites.
M. Bellemare: Est-ce que je peux intervenir là-dessus?
J'ai travaillé dans plusieurs industries de
télécommunications. J'ai travaillé chez Bell Canada qui
est une grosse entreprise et qui, en taille, se compare facilement à
Hydro-Québec, mais j'ai aussi travaillé dans des plus petites
entreprises. J'ai travaillé dans la câblodistribution pour Groupe
Vidéotron, qui est plus petit, et j'ai travaillé chez
Téléglobe Canada pendant quatre ans, c'est une entreprise de 1000
employés. Je peux vous assurer que j'ai développé des
convictions. Si vous parlez de convictions, j'ai développé des
convictions quant à la taille optimale ou la taille idéale dans
le domaine des utilités publiques. Je ne parle pas d'autres secteurs,
mais d'une entreprise du type d'Hydro-Québec, et HydroQuébec est
un peu grosse avec sa taille actuelle.
À mon avis, le nombre d'échelons intermédiaires et
surtout à cause de ses deux vocations qui sont très
différentes l'une de l'autre, que l'on essaie de chapeauter de
façon commune avec des groupes, que j'appellerais des groupes
«staff» et des groupes très centralisés, et,
là-dedans, c'est très difficile d'avoir une organisation efficace
qui va faire face à la musique j'appellerais de la
période d'aujourd'hui, où la technologie permet la
déconcentration des organisations sur une grande échelle. Toutes
les grandes entreprises de cette nature-là sont en train de passer au
peigne fin, de réduire le nombre de vice-présidents. Regardez-les
toutes, regardez l'évolution des entreprises, comme Bell Canada, dans
les années récentes, même dans les plus petites
entreprises, comme Téléglobe où j'ai été
associé pendant quelques années, vous allez voir que le nombre de
vice-présidents dans la grosse entreprise, ça a diminué de
30 à 20, mais, dans la plus petite, ça a diminué de 12
à 6. C'est un patron commun, et il y a des raisons à ça.
C'est que l'efficacité moderne, dans l'ère d'aujourd'hui, elle
dépend d'un tas d'outils qui favorisent la déconcentration. Et
là où il y a une espèce d'«incongruance» dans
les décisions récentes d'Hydro-Québec dans ses coupures,
c'est qu'on coupe en région, on coupe dans les relations, et on veut
améliorer les relations avec la clientèle, et quand on veut faire
ça, habituellement on se rapproche de notre clientèle, on ne s'en
éloigne pas. Présentement, ça se traduit par des
fermetures en région de postes qui sont, justement, des postes qui sont
liés à la clientèle. Et on veut les faire
téléphoner, dans le fond; on pense que tout se règle par
téléphone. Mais je peux vous assurer, moi, que ce n'est pas
ça qui crée la meilleure image ou qui est nécessairement
le plus efficace en fin de ligne.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Taschereau.
M. Leclerc: Merci, M. le Président.
Messieurs, je voudrais d'abord vous poser une question sur la
façon dont vous proposez de procéder à la décision
des tarifs. Vous semblez prétendre que les politiciens qui prennent ces
décisions-là depuis fort longtemps ne sont pas assez objectifs
pour faire cela, et vous proposez que des gens soient ultimement
sélectionnés et nommés par l'Assemblée nationale.
Vous ne croyez pas que ceux qui sont élus, bien que vous mettiez en
doute leur objectivité, n'en sont pas, néanmoins,
légitimes, puisque, Hydro-Québec appartenant aux
Québécois, il n'est pas illogique de penser que les gens
qu'élisent les Québécois à tous les quatre ans, et
chez qui ils ont minimalement une certaine emprise à tous les quatre
ans, bien, que ce soient ces gens-là qui, ultimement, prennent les
décisions? Il me semble que ce serait, en quelque sorte, une certaine
démission de nos devoirs que, devant un sujet qui n'est pas facile, qui
est celui d'augmenter les tarifs il n'y a aucun gouvernement qui aime
ça... En tout cas, moi, je trouve que ce serait un peu
démissionner de nos responsabilités que de remettre ça
à des tiers en disant: Bien, écoutez, à partir de
maintenant, prenez-les, les décisions, et nous, on s'en lave un peu les
mains.
M. Bellemare: J'aimerais simplement vous souligner
qu'Hydro-Québec est la seule entreprise de sa nature. Bien,
c'est-à-dire, il y en a deux, il y en a une autre en Saskatchewan, mais
je fais exception de cette petite-là. En Amérique du Nord, c'est
la seule entreprise, et il y a des élus partout.
Vous savez, le Québec n'est pas le seul endroit où les
gens, à tous les quatre ans, vont élire des
députés, et c'est en toute déférence pour la
compétence et l'intégrité. Même vous avez dit qu'on
mettait en doute votre objectivité. On ne la met pas en doute. Ce qu'on
met en doute, c'est la capacité, finalement, d'un groupe de personnes
qui sont des législateurs, qui ont certainement, dans l'ère qu'on
vit, d'autres chats à fouetter ou des chats peut-être plus
importants pour l'avenir, que j'appellerais l'avenir politique et l'avenir
d'encadrement socio-économique du Québec dans son ensemble,
à passer les lois dans tous les domaines, et tout ça, qu'à
faire une tâche qui est une tâche spécialisée.
Partout ailleurs, cette tâche-là, elle est faite par des gens qui
sont des spécialistes. Je vous garantis que, si vous alliez voir dans
une régie américaine qui traite de tarification de
l'électricité, à New York, à Philadelphie ou
à Los Angeles, je vous assure que ce n'est pas une tâche
rudimentaire. Ce n'est pas une sinécure. C'est quelque chose qui est
très, très élaboré. Quand on parle d'implanter des
concepts de coût marginal, mais où on n'est pas capable de
l'appliquer de façon pure, il y a tout un je ne sais pas trop
exercice de spécialisation, j'appellerais, de gens qui
développent un peu de capacité, mais pas parce qu'ils sont
meilleurs ou plus intelli-
gents que les autres, mais parce qu'on leur confie ce mandat-là.
Ce n'est pas parce que les députés ne sont pas, ha, ha, ha!,
objectifs ou compétents...
M. Leclerc: Je comprends votre point.
M. Bellemare: ...c'est que des tribunaux administratifs,
ça existe dans ce secteur-là parce que c'est des tâches
complexes qui demandent une attention et un travail continuel, et qui demandent
aussi...
Vous avez fait état que le gouvernement, c'est un peu comme un
propriétaire. Mais, dans son rôle de propriétaire
d'entreprise, le gouvernement pourrait intervenir devant ce même tribunal
administratif, comme les gouvernements interviennent ou les
représentants des gouvernements interviennent dans les endroits
où c'est réglementé par des régies.
M. Leclerc: Je comprends votre point, mais vous comprendrez qu'il
n'y a pas seulement la tarification électrique qui est compliquée
au Québec, et les élus, par tradition, s'entourent de
spécialistes et, ultimement, prennent les dernières
décisions. Je pense qu'il peut continuer d'en être de même
dans la tarification électrique comme dans d'autres choses. Mais je
comprends votre point de vue et je le respecte.
Une question également sur la mission. Vous voulez que la mission
d'Hydro-Québec devienne un peu exclusivement celle de fournir
l'électricité au Québec alors que, historiquement
c'est le cas de le dire Hydro-Québec a toujours voulu non
seulement fournir l'électricité aux Québécois, mais
également favoriser le développement économique, non
seulement par les alumineries, mais on sait qu'Hydro-Québec a
historiquement encouragé la recherche et le développement en
hydroélectricité, a encouragé l'engineering
québécois en hydroélectricité, a encouragé
les sous-traitants québécois, les fournisseurs
québécois.
Je voudrais que vous essayiez un petit peu de préciser ce que
vous entendez comme mission. Et, au-delà des alumineries vous
nous avez dit votre point de vue tout à l'heure qu'en est-il de
l'expertise québécoise qu'Hydro-Québec a permis de
développer au cours des années? (21 h 50)
M. Cao: Actuellement, je crois que le vent tourne vers,
actuellement on le dit, la sous-traitance, et, de plus en plus, les
organisations s'orientent non pas vers faire, tout faire, mais faire faire. Je
crois que cette tendance est irréversible dans le contexte de
compétition internationale dans lequel on est.
Maintenant, est-ce qu'Hydro-Québec a un rôle à jouer
au point de vue du développement social? C'est là où est
la question principale. Est-ce que le gouvernement doit lui donner ce
rôle-là, de développement économique, ou est-ce
qu'il ne devrait pas lui dire: Écoutez, votre mission est
l'énergie; en ce qui concerne le développement économique,
nous avons d'autres organisations, d'autres organismes qui pourraient le faire,
à partir même de la rente qu'on pourrait en retirer dans le
domaine de l'électricité. Ce n'est pas à
Hydro-Québec de prendre cette rente-là et de la donner aux
industries à forte consommation ou à d'autres industries qui
viendront s'installer au Québec. C'est vraiment de déterminer la
politique industrielle de développement économique et d'y
canaliser les ressources financières et humaines dans ce
secteur-là. Et je crois qu'Hydro-Québec aussi a un rôle
à jouer là-dedans, c'est de fournir les ressources
financières et humaines nécessaires pour réaliser la
politique industrielle du gouvernement.
Et c'est pour ça que nous croyons qu'Hydro-Québec ne
devrait pas s'aventurer dans le domaine du développement
économique parce que ce n'est pas vraiment son... Et on le voit bien que
c'est une forme, finalement, déguisée de transfert de rente d'un
secteur à un autre.
M. Leclerc: Merci.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le
député. M. le député de Labelle.
M. Léonard: Merci. Bonsoir, messieurs.
Je voudrais vous interroger sur le fonds de stabilisation. Le fonds de
stabilisation, c'est la deuxième fois que je vois cette recommandation
ici, autour de la table, discutée, parce que Hydro-Québec l'a
demandé. Je veux simplement rappeler que, dans les manuels de base
comptables, c'est une chose non recommandée, pour ne pas dire plus,
parce qu'on expose que, finalement, si l'on veut occulter des résultats
d'une gestion, c'est justement de créer des fonds de stabilisation de
toutes sortes d'espèces, sauf dans le domaine de l'assurance. Alors, je
vois que vous êtes au courant parce que, dans l'avant-dernier paragraphe,
vous dites ceci: «Dans la mesure où l'application d'un CST est
approuvée par le gouvernement, la conformité avec les principes
comptables devient un aspect secondaire.» Vous voyez très bien que
vous prenez une précaution d'envergure en disant ça. Parce que,
si on était en arithmétique, deux et deux font quatre, mais, dans
la mesure où le gouvernement l'autoriserait, on pourrait dire que
ça pourrait faire cinq. C'est un peu le raisonnement qu'on tient
vis-à-vis le fonds de stabilisation.
Je le souligne parce qu'on a tendance, parfois, à se moquer de
règles comme ça, mais il y a des conséquences très
concrètes et très pratiques à créer des fonds de
stabilisation qui font qu'en bout de ligne on détermine mal le revenu
net d'une année par rapport à l'autre, puis, ensuite, l'autre, au
fil des ans, c'est qu'il y a plein de choses qui rentrent là-dedans puis
on perd, finalement, la véritable finalité. Puis, de toute
façon, cela vient, ce qu'on appelle, tripoter dans des chiffres.
Ça aboutit à cela.
Alors, j'aimerais savoir pourquoi vous le recommandez quand même,
même si vous savez que l'Ordre des comptables agréés du
Canada s'oppose à de telles pratiques?
M. Cao: Merci. Je pense qu'effectivement, en tant que comptable
maintenant, je peux dire que le manuel de l'Ordre...
Une voix: ...
M. Cao: ...de l'Institut, ne sont que des recommandations,
premièrement. Bien qu'Hydro-Québec soit une entreprise
réglementée et, par la commission, soit une entreprise publique
comme d'autres, elle devrait fournir des états financiers qui sont
conformes aux recommandations de l'Institut. Il est de pratique normale, dans
les services publics, d'instituer des comptes de stabilisation, et je peux en
citer plusieurs.
D'ailleurs, au Québec même, à la Régie du
gaz, lorsque j'étais, à ce moment-là, en fonction à
la Régie, on a institué des comptes de stabilisation, de la
température, de développement, etc., des comptes qui
permettraient de stabiliser, en fin de compte, pour le client final, des
fluctuations de tarif d'année en année: une année en
hausse, une année en baisse, etc. Et donc, ces comptes-là
favorisent la stabilisation des tarifs.
L'Institut des comptables agréés... Les cartes comptables
ont toujours été, du fait que... Lorsqu'on mentionne, dans les
états financiers, qu'une régie ou un autre gouvernement a
ordonné ou a approuvé une modification quelconque à la
recommandation, c'est reconnu par l'Institut que ça rentre dans les
cartes comptables.
Le Président (M. Audet): Merci.
M. Léonard: Non. Est-ce qu'il me reste encore...
Le Président (M. Audet): Très brièvement, 30
secondes.
M. Léonard: Bien, c'est parce que je veux reprendre
là-dessus. L'Ordre des comptables agréés fait une
obligation de divulguer tout écart par rapport aux principes comptables
recommandés. Mais cela ne veut pas dire que c'est une bonne pratique
pour autant. C'est que la comptabilité générale fait qu'on
ne doit pas créer de tels comptes de stabilisation, de tels fonds de
stabilisation, je le maintiens, et c'est très dangereux de s'engager
dans cette voie. C'est ça que je veux dire.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le
député.
M. Bellemare: J'aimerais intervenir sur ce point-là...
M. Léonard: Franchement...
M. Bellemare: ...si on me le permet, parce que c'est un
débat intéressant. C'est là qu'on commence à faire
la distinction peut-être entre une entreprise d'utilité publique
qui est avide en capital, dont les immobilisations génératrices
des besoins de revenus, dans le fond, sont des immobilisations de long terme,
de longue durée, les barrages, les poteaux, les réseaux de
distribution. Les infrastructures d'Hydro-Québec sont des
immobilisations qui vivent longtemps. Le phénomène et le
processus des... est accepté, même par l'Institut des comptables
agréés. Dans ses recommandations, justement, seulement dans le
cas des entreprises d'utilité publique, où un organisme de
réglementation autorise spécifiquement la nature du compte, sa
gestion et son contrôle.
Alors, c'est dans des cas comme ça. Ce n'est pas d'application
générale pour l'ensemble des entreprises ou le commerce.
Le Président (M. Audet): Merci. Brièvement.
M. Cao: Ce n'est pas tellement l'aspect comptable qui est
important dans le fonds de stabilisation qui est proposé, mais nos
recommandations. Nous croyons fermement que nos recommandations doivent
vraiment tenir compte de l'équité envers la clientèle, et
non pas créer seulement un compte positif, à l'avantage
d'Hydro-Québec.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Drummond.
M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président.
Dans la même veine. En admettant qu'on autorise ce fonds de
consolidation, vous balisez, dans votre mémoire, à l'annexe 5,
pages 45 et 46, vous parlez d'une durée, une méthode
d'amortissement de ce fonds. Mais ce fonds-là, si on en croit la
proposition d'Hydro-Québec, viendrait à même les revenus de
l'électricité qu'elle vendrait, de son surplus en période
de haute hydraulicité. Quand je regarde leurs prévisions, ce
qu'ils nous ont dit ici, lorsque j'ai interrogé sur ce sujet, on nous a
fait une prévision de 14 TWh, pour 1992-1993, 1995.
Quand vous parlez de période d'amortissement, il peut y avoir
dans le temps, mais, au niveau de la hauteur du fonds, est-ce que vous mettriez
une limite aussi? Parce qu'on peut avoir 8 ans ou 9 ans de faible
hydraulicité. Alors, si on regarde ce qui est prévu à 9
TWh, à partir de 1994, ça peut faire des montants qui vont
être substantiels à un moment donné.
M. Cao: Merci, M. le député, pour cette question
très intéressante, parce que, justement, nous avons pensé
aussi à la question de plafond, ou de montant maximum qu'on devrait
permettre pour ce fonds-là. Sauf que les deux, le maximum ainsi que la
durée, jouent, les deux ensemble. Plus la durée d'amortissement
est raccourcie, plus vous n'avez pas besoin d'avoir un fonds
élevé. À ce moment-là, je pense que les deux ne
sont pas des variables indépendantes, mais deux variables qu'on doit
prendre en même temps.
La question est de savoir quelle est la période d'amortissement
que nous trouverions raisonnable. Nous croyons que ça doit être
fondé, non pas sur un simple
chiffre qu'on évalue, mais basé sur l'hydraulicité
historique d'Hydro-Québec. C'est sur cette base qu'on devrait approuver
l'amortissement d'Hydro-Québec. Si on utilisait cette question
historique comment évolue l'hydraulicité au Québec
pour Hydro-Québec? nous croyons qu'il n'est pas nécessaire
d'établir un maximum pour ce fonds-là, parce que, sur une
période de plus et de moins, on va s'égaler. (22 heures)
M. St-Roch: II me reste très peu de temps. On a
parlé tout à l'heure de privatisation du réseau de
distribution. Vous avez parlé, M. Bellemare, de la taille
d'Hydro-Québec. Alors, il y aurait peut-être une alternative,
dire: Tout en restant une entreprise d'État, nous scindons
définitivement en deux entités, avec un chapeau commun qui fait
le lien sous forme, je vais prendre l'expression anglaise, sous forme de
«holding», et, à l'intérieur de chacun de ces blocs,
établir une culture d'entrepreneuriat, en écrasant encore
davantage les structures pour amener la direction le plus près possible
du niveau de la première ligne.
Est-ce que ce ne serait pas ça, dans le cas
d'Hydro-Québec, qui serait la meilleure formule à regarder, au
lieu d'un démantèlement, de privatisation de certaines parties de
réseau vers le municipal? Parce que le municipal nous a demandé
ça. Si vous allez plus vers le privé, ce que je crains en
privatisant le réseau de distribution, c'est que les meilleures parties
vont s'envoler facilement et, lorsqu'on arrivera dans les régions
éloignées ou dans le milieu rural, à ce moment-là,
personne ne voudra. Alors, on mettra davantage un fardeau au niveau des
résultats financiers d'Hydro-Québec.
M. Bellemare: Oui. Disons que ça, c'est quelque chose sur
lequel on a réfléchi. En tout cas, moi, j'ai
réfléchi personnellement assez longtemps là-dessus. Je
pense qu'on ne fait pas de recommandation finale, et ce qu'on dit, c'est que
c'est quelque chose qui doit être regardé. Hydro a besoin
d'être, certainement, segmentée, pour des raisons d'ordre
pratique. Je pense que c'est inévitable. Et je pense que le premier
niveau de scission, c'est au niveau de ses fonctions, ses deux grandes
fonctions. Quand on tombe dans la distribution, je pense qu'il y a plusieurs
formules qui gagneraient à être étudiées. Mais
ça, ça devrait être étudié avant de prendre
des décisions. On ne peut pas vous recommander de faire ça comme
ça.
Mais il ne faut pas exclure, dans les options, la municipalisation, mais
pas au niveau de la petite municipalité, au niveau, soit des
communautés urbaines ou des MRC, ou quelque chose comme ça. Parce
que la distribution, c'est quelque chose qui est très, très
local, au niveau de l'exercice du rôle même de ces fonctions; c'est
des fonctions d'ingénierie, c'est localisé, là,
très, très près des préoccupations locales. En
même temps, on parle d'usage conjoint, j'appelle ça l'ameublement
urbain, dans le fond. Le réseau d'Hydro-Québec, quand on est dans
la zone de desserte, c'est quelque chose qui se fait de concert avec les
travaux publics, des compa- gnies de téléphone, des
câblodistributeurs, les municipalités elles-mêmes,
là, pour les aqueducs.
Alors, c'est pour ces raisons-là qu'on dit: Peut-être que
le niveau le plus efficace c'est pour des raisons d'efficacité,
là pour gérer cette entité-là, c'est
peut-être le niveau local, municipal. Mais ça peut être
privé ou municipalise, encore étatisé.
Le Président (M. Audet): Merci. Brièvement,
monsieur.
M. Cao: Oui, je voudrais juste ajouter, M. le
député, que, de toute façon, c'est Hydro-Québec ou
le gouvernement qui décide le tarif. Donc, que ce soit privatisé
ou non privatisé, le consommateur final paie le même prix,
où qu'il se situe.
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, au nom des membres
de la commission, je vous remercie beaucoup de votre présentation.
Alors, pour ceux qui nous écoutent, la suite demain matin, 5
mars, à 9 heures. Nous ajournons nos travaux.
(Fin de la séance à 22 h 2)