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(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à
chacun de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît!
Organisation des travaux
Alors, en remarques préliminaires, je voudrais juste
préciser quelques petits points du règlement. Ce n'est pas qu'on
ait des inquiétudes, bien au contraire, je pense qu'on a une tradition
de travailler ensemble, les gens de l'industrie de la construction en
général et cette commission parlementaire. Je sais qu'il n'y a
jamais de problème. Je veux juste vous rappeler quand même
qu'aucune forme de manifestation, que ce soient des rires, des applaudissements
ou quoi que ce soit, ne peut être acceptée; que ce soit d'un bord
ou de l'autre, quel que soit le contexte, d'aucune façon. On vous
demanderait, s'il vous plaît, de vous abstenir; même si, des fois,
c'est tentant, il ne faut pas. O. K. ? Ça fait partie des règles
ici et ça nous aide aussi à faire un travail plus efficace et
plus en profondeur. Donc, dans ce sens-là, je rappelle ces
règles-là. Je vais essayer de les rappeler au cours de la
journée, mais je sais que, pour la majorité, on les comprend et
on les respecte.
On a accepté aussi, exceptionnellement, qu'il y ait des gens de
chaque côté parce qu'on manquait de place. Je sais qu'à
quelques moments dans la journée on aura encore plus de monde, c'est ce
qu'on m'a dit. Alors, vous êtes tous les bienvenus. Vous êtes chez
vous. C'est votre Parlement, ce n'est pas juste celui des
députés. C'est notre maison, c'est la maison de la
démocratie. Dans ce sens-là, nous sommes très heureux de
vous voir aussi nombreux à participer à nos travaux.
Dans un premier temps, avant de passer aux remarques
préliminaires, M. le ministre, j'aimerais déposer un
mémoire de l'Institut québécois des revêtements de
sol inc., qui ne sera pas entendu aujourd'hui, mais qui est
déposé à titre d'information pour le ministre. Alors, je
ferai circuler copie de ce mémoire-là au ministre et à Mme
la critique de l'Opposition.
Sur ce, règle générale, nous allons fonctionner
ainsi: à peu près 20 minutes pour la présentation des
mémoires, mais on peut être élastiques et aller
jusqu'à 30 minutes, mais on comprend que c'est à
l'intérieur d'une enveloppe d'une heure et qu'on ne peut pas
dépasser cette heure-là puisque nous sommes cédulés
jusqu'à minuit ce soir. Donc, si on veut finir ce soir, on ne peut pas
dépasser minuit. On va essayer de faire une gestion du temps qui sera
serrée. C'est donc 20 minutes pour la présentation du
mémoire. Il y aura 20 minutes pour le parti au pouvoir et 20 minutes
pour l'Opposition pour poser des questions. Or, il se peut qu'on ne prenne pas
les 20 minutes au complet, mais il se peut aussi qu'on les prenne. Donc, on
s'entend là-dessus.
Lorsque les deux partis, comme c'est la tradition, remercieront ou
salueront les groupes à la fin de leur présentation, je
demanderais au groupe qui est déjà à la table de se
retirer pour permettre à l'autre groupe de s'installer pour qu'on ait le
moins de perte de temps possible, s'il vous plaît, et que ça se
fasse le plus efficacement possible. Donc, ça termine mes remarques.
Nous aurions à peu près 10 minutes pour des remarques
préliminaires. Alors, M. le ministre, et Mme la députée de
l'Opposition par la suite. Juste un instant auparavant, est-ce qu'il y a des
remplacements ce matin?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Claveau
(Ungava) remplacera M. Chevrette (Joliette).
Le Président (M. Bélanger): Bien, je vous remercie.
Pas d'autres remplacements? C'est bien. M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Normand
Cherry
M. Cherry: M. le Président, chers collègues,
membres présents. Il me fait plaisir de me trouver ici aujourd'hui dans
le cadre de cette consultation particulière sur les projets de loi 185
et 186. Je profiterai de cet exercice pour écouter avec attention les
représentations des neuf groupes qui se présenteront tour
à tour pour faire entendre leur voix sur ces projets de loi.
Je rappelle que le projet de loi 185, qui vise à apporter des
modifications à la Loi sur les relations du travail, la formation
professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la
construction, est complémentaire au projet de loi 186 modifiant la Loi
sur le bâtiment et d'autres dispositions législatives. Ces deux
projets de loi se veulent des premières réponses au rapport
Picard-Sexton et des éléments inscrits au plan d'action
annoncé le 20 juin dernier par le biais d'une déclaration
ministérielle. Dans les faits, ces deux projets de loi marquent le
début de la réforme de l'industrie de la construction.
À mon arrivée au ministère du Travail il y a un peu
plus d'un an, le rapport Picard-Sexton se trouvait sur ma table de travail.
J'en ai pris
connaissance et demandé aux gens de mon ministère de se
mettre à l'oeuvre. Je rappelle qu'au même moment de nombreux
échanges ont eu lieu entre les parties contractantes et ont conduit
à la mise en place d'un plan de formation pour le perfectionnement et le
recyclage.
L'intention du législateur en proposant ces changements inscrits
au projet de loi 185, M. le Président, est de rétablir la notion
d'entrepreneur autonome, lutter contre le travail au noir, permettre la mise en
place... un fonds de formation pour le perfectionnement et le recyclage et
préciser les pouvoirs corporatifs de la Commission de la construction du
Québec. Il vise également à majorer certaines amendes et
à créer de nouvelles infractions et ce, pour mieux contrer le
travail au noir. De plus, ce projet de loi étend à tout
entrepreneur de la construction la responsabilité solidaire avec ses
sous-traitants du paiement des salaires dus par ces derniers à leurs
salariés et, de plus, il supprime l'obligation de publier dans les
journaux la convention collective conclue par les parties et la requête
demandant son extension juridique, et permet au gouvernement de
déterminer les cas prévus par la loi où des frais, droits
ou honoraires peuvent être exigés.
De son côté, le projet de loi 186 qui est, et je le
répète, complémentaire au précédent a pour
objet de rendre opérationnelle la Loi sur le bâtiment
adoptée en 1985, restée toutefois sans effet, et ce, tout en lui
apportant des modifications. Les changements proposés ont pour but
d'améliorer la qualité des travaux de construction,
responsabiliser davantage les intervenants, mieux protéger le
consommateur et, enfin, mieux contrer le travail au noir. De nature hautement
technique, je me limiterai à énumérer les grandes lignes
du projet de loi qui sont: formation d'une régie du bâtiment et
d'un comité consultatif, réconciliant ainsi le souci
d'efficacité et le maintien d'une présence des partenaires dans
le processus décisionnel; précisions à apporter au champ
d'application dans les secteurs non mentionnés, comme la qualification
des entrepreneurs, par exemple; systématisation des attestations;
suppression des échappatoires et raccourcissement des délais pour
accroître la responsabilisation; extension de l'attestation de
conformité aux fabricants et réparateurs d'appareils sous
pression, à l'entrepreneur de construction ainsi qu'à la personne
exécutant des travaux sur des installations de gaz; apparition de
nouveaux éléments lors du renouvellement de la licence
d'entrepreneur: continuer à se mériter la confiance des parties,
les infractions aux lois connexes et au code de déontologie ainsi que
son dossier de points d'inaptitude; détermination des critères de
reconnaissance d'un plan de garantie.
Je suis confiant, M. le Président, que les mesures
énumérées précédemment combinées
à une hausse significative des amendes devraient produire leurs effets
sur le travail au noir. Je le répète, le travail au noir est un
fléau qu'il faut à tout prix enrayer. En terminant, je tiens
à assurer à tous les organismes qui se présenteront tout
au long de la journée que leurs représentations feront l'objet
d'une écoute attentive et les mémoires déposés,
d'une lecture minutieuse. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre.
Mme la députée.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le ministre,
mesdames, messieurs, bonjour. J'ai pris connaissance d'un certain nombre de
mémoires et je cite le mémoire de la FTQ qui dit. dans son tout
permier paragraphe: Pour la nième fois, nous sommes convoqués
devant votre commission afin d'exposer nos opinions sur des changements
à être apportés sur toute la question concernant
l'industrie de la construction.
Je comprends la lassitude du milieu, mais, en même temps, je dis
que, peut-être ne serions-nous pas là si la loi 53 avait
été mise en vigueur et opérationalisée, pour
utiliser les termes du ministre, et si le gouvernement avait mieux fait son
travail avec la loi 31. La loi 53, en fait, il faut se le rappeler,
c'était le fruit d'un large consensus dans le milieu et partagé
par la très très grande majorité des intervenants, bien
que, pour quelques-uns, il y avait peut-être lieu de revoir un peu la
composition de la commission. Ce projet de loi devait assurer une meilleure
qualification des entrepreneurs, une meilleure protection du consommateur, un
contrôle plus efficace du travail au noir et, si on l'avait
appliqué, peut-être qu'on ne serait pas ici aujourd'hui. Nous y
sommes et j'ai l'intention d'écouter avec beaucoup d'attention chacun
des mémoires qui vont être présentés, de
manière à voir si, ensemble, nous pouvons améliorer les
deux projets de loi sur lesquels nous échangerons aujourd'hui,
c'est-à-dire 185 et 186.
Le ministre, à notre invitation, a accepté de tenir cette
commission parlementaire. J'estime et je regrette qu'elle soit trop
brève. Nous avions demandé deux jours; ça nous aurait
permis, à tout le moins, de rencontrer tous les organismes qui en
faisaient la demande. Malheureusement, nous devons nous contenter d'une
journée. Il faudrait comprendre que, lorsque nous avons fait cette
proposition au ministre, c'était dans un esprit de collaboration parce
que je connaissais sa volonté de vouloir faire adopter la loi avant la
fin de la présente session. Mais le ministre a refusé. Nous nous
trouvons donc avec une journée pour disposer des mémoires et des
avis sur ces deux projets de loi.
Le projet de loi 53 avait fait l'objet d'une large consultation et
l'Opposition d'alors, l'Opposition libérale, s'y était
opposée parce qu'elle n'avait pas été consultée,
nous disait-on, et le
projet de loi 53 a quand même été adopté.
Mais aujourd'hui, on est devant deux projets de loi qui, à quelques
exceptions près, n'ont pas fait l'objet de consultations avant
d'être déposés. Certains groupes ont manifesté leur
inquiétude et sont, pour ainsi dire, estomaqués par ce qu'ils
retrouvent dans les projets de loi, surtout quand ils les comparent à la
déclaration ministérielle du ministre du Travail
déposée le 20 juin dernier en Chambre.
La consultation est trop brève, je le disais; elle ne nous
permettra pas de rencontrer de nombreux organismes, et je pense en particulier
aux associations de consommateurs qui sont concernés. Je pense aux
ingénieurs et aux architectes. Je pense à l'Union internationale
des journaliers de la construction, qui ont formellement fait la demande et, je
dois dire, j'avais pressé le ministre de les entendre parce que
j'estimais qu'ils avaient un des mémoires les plus fouillés sur
les effets du travail au noir sur les caisses, sur les revenus de
l'État. C'est un des mémoires les plus fouillés à
cet égard et je pense que nous aurions tous eu intérêt
à les entendre. Alors, c'est pourquoi je demanderais au président
qu'on puisse déposer leur mémoire.
Alors, ces organismes, comme les organismes de consommateurs, auraient
eu intérêt à venir se faire entendre ici, et nous aurions
eu intérêt aussi à les entendre, parce qu'il y a plusieurs
dispositions dans la loi qui prévoient des tarifications, qui
prévoient les plans de garantie, qui prévoient les fonds
d'indemnisation, différentes mesures susceptibles, tantôt, de se
répercuter sur les coûts de la construction.
M. le Président, je vais rappeler brièvement les
principaux éléments de fa déclaration ministérielle
déposée le 20 juin dernier, c'était: améliorer la
qualité des travaux, responsabiliser les intervenants, contrer le
travail au noir et protéger le consommateur.
Responsabiliser les intervenants. Comme moyen de responsabiliser les
intervenants, le ministre propose la création de la régie du
bâtiment composée de cinq membres nommés pas le
gouvernement. Ça va être l'équivalent d'une espèce
de monstre bureaucratique qui risque de s'enliser rapidement dans un
dédale infernal de directives, de règlements, de tarifications,
et tout cela par-dessus la tête des entrepreneurs qui, et c'est quasiment
normal, ne se sentiront pas liés par les décisions de la
régie. Ils vont tout faire en leur pouvoir, probablement, pour tenter
d'y échapper. Je dis qu'il y a une espèce de hiatus entre sa
déclaration et celle du ministre Tremblay, le ministre de l'Industrie et
du Commerce, qui propose la concertation, la collaboration et ce qu'il appelle
ses grappes, et j'ai l'impression que, de sa grappe, il y a comme des raisins
qui ont été laissés-pour-compte ou qui sont tombés
et qui s'appellent les entrepreneurs. À cet égard, je pense qu'il
faudra revenir sur cette question de la composition de la régie du
bâtiment.
Contrer le travail au noir. Nous aurions pu apprécier les effets
de la loi 53 si elle avait été appliquée. Mais, à
l'heure actuelle - je reviens sur la composition de la régie et la
participation des entrepreneurs en construction - à l'heure de la
concertation si bien définie dans le projet de son homologue, le
ministre Tremblay, et auquel le ministre s'est engagé à souscrire
lundi dernier, il aurait été souhaitable, si on avait
été logiques, dans l'esprit de ce projet, de favoriser le
regroupement des entreprises qui compétitionnent entre elles, et
pourquoi pas en même temps le regroupement avec les travailleurs de la
construction? Il serait préférable de créer une synergie
dans cette industrie plutôt que de bâillonner les entrepreneurs. Et
le ministre va me dire: J'ai le comité, là. Mais vous savez, un
comité consultatif à une régie, moi, participer à
ça, j'aurais de grosses hésitations, j'estimerais que j'y perds
mon temps. Alors, les gens ne sont pas dupes, la régie du bâtiment
va remplacer la commission qui avait au moins le mérite de
réunir, faut-il le dire, au niveau décisionnel, pas tous les
intervenants mais plusieurs intervenants. Alors, cette régie obligera
l'entrepreneur à adhérer à un plan de garantie, ce qui
n'est certainement pas mauvais, et à débourser ce qu'elle lui
demandera de débourser. Et qui paiera en bout de ligne, M. le
Président? C'est probablement le consommateur.
Mon inquiétude par rapport à la régie - j'aimerais
entendre les intervenants là-dessus - il y a dans cette disposition du
projet de loi tout ce qu'il faut pour un gouvernement pour aller chercher des
taxes déguisées, comme on l'a fait pour la Régie de
l'assurance automobile. Tandis qu'une commission qui a à assurer son
fonctionnement, à s'autofinancer, et qui est gérée par des
entrepreneurs est moins encline à céder à cette tentation,
parce que chacun y perdrait, ou y gagnerait selon le cas, alors que, pour une
régie, ça a toujours un côté inquiétant.
J'espère entendre, là-dessus, des intervenants.
Il y a des intervenants qu'on a refusé d'entendre, mais je me
demande comment et pourquoi - j'aimerais que le ministre nous l'explique aussi
- la décision de substituer la régie au Bureau des examinateurs
pour les électriciens et tuyauteurs. Il semble que c'était
là deux corporations qui fonctionnaient relativement bien, qui ne
coûtaient rien à l'État. On peut être d'accord avec
l'idée de contrer le travail au noir, de mieux cerner la
définition de l'entrepreneur autonome, mais fallait-il faire
disparaître ces deux corporations? Je pense que la question se pose,
parce que dans la population, de façon générale, ces
corporations ont beaucoup de crédibilité, et il semble qu'elles
aient bien assumé leurs tâches. Alors, c'est une question qui va
certainement être abordée au cours des audiences.
M. le Président, il faudrait peut-être
rappeler que la loi 53, qui aurait pu contrer le travail au noir et dont
on aurait pu connaître la capacité de le faire, n'a pas
été mise en application alors qu'elle est adoptée depuis
déjà six ans et demi. Mais il faut se rappeler que, si elle n'a
pas été mise en vigueur, c'est qu'à l'époque, en
1985, quand le gouvernement libéral a pris le pouvoir, il faisait une
espèce de "trip" de déréglementation, de
libéralisation. Et, sans le dire ouvertement, les pratiques de travail
au noir étaient perçues comme une bonne chose parce qu'elles
réduisaient les coûts de la construction. Mais c'était de
courte vue, puisque le travail au noir a des effets infiniment pernicieux sur
les coffres de l'État, parce que le travail au noir, ça
crée des problèmes de caisses à la CSST, à la RAMQ,
à la Régie des rentes du Québec, mais, de façon
générale, des problèmes de caisses lorsqu'il s'agit de
payer l'éducation, les transports, tous les services publics, puisque
ces personnes ne paient pas d'impôt et échappent à leurs
obligations. C'était de courte vue que de penser que favoriser le
travail au noir, c'était favoriser l'économie. Je pense que nos
caisses et, actuellement, les finances de l'État s'en ressentent.
Les audiences devraient nous permettre de mesurer l'atteinte des
objectifs sur le travail au noir et de mesurer ses effets, selon que vous
êtes entrepreneur ou employeur. Là aussi, j'ai quelques
inquiétudes, parce qu'il me semble que certaines dispositions
s'avèrent extrêmement sévères à l'endroit des
travailleurs - à l'endroit des travailleurs, nous aurons l'occasion d'y
revenir - parce qu'à trop en mettre on risque non pas de
décourager le travail au noir, mais de le rendre peut-être un peu
plus invisible. Quelqu'un qui perd sa carte de compétence pour trois
mois, il va falloir qu'il gagne sa vie - ne me demandez pas comment, je veux
dire, il va se faire enfermer, aller en prison, je ne le sais pas. Mais il y a
là des dispositions qu'il faudrait voir, s'il n'y a pas moyen, un peu,
d'en atténuer la portée, selon certaines conditions.
Par ailleurs, ce qui me semble être la plus grande fraude, c'est
celle des entreprises à numéro qui naissent et qui meurent comme
les éphémères et qui laissent à la Commission la
responsabilité de payer les ouvriers, qui échappent à
toute obligation. C'est un vol manifeste et il me semble que, dans ce projet de
loi, on a peu ou pas de disposition qui permettra de contrer cette pratique.
Les compagnies à numéro qui obtiennent des contrats des
sociétés de la couronne avec un dossier lourd d'infractions,
compagnies que l'on embauche sans tenir compte de leur passé, du
passé des propriétaires, qui ont des pratiques frauduleuses
reconnues, pratiques qui s'apparentent au banditisme - et les
sociétés d'État continuent d'embaucher ces entreprises
parce qu'elles présentent les plus basses soumissions - ça
constitue une compétition tout à fait illégale, anormale
et inacceptable pour tous les entrepreneurs qui, eux, veulent respecter et se
conformer aux lois, codes et règlements de la construction.
Les amendes sont majorées sans qu'on n'ait jamais
vérifié leur effet réel, faute d'avoir appliqué, je
le rappelle, la loi 53. Mais que vaut l'organisme qui a la
responsabilité de faire les constats d'infraction si, en même
temps, il n'a pas le pouvoir de faire la perception des amen des? Et ça,
c'est un problème majeur parce que, entre le constat de l'infraction
fait par la Commission, et le jugement et le paiement de l'amende, il peut
s'écouler deux ans.
Alors, il y a des questions qui vont se poser tout à l'heure. Que
fait-on du droit d'être entendu dans des délais raisonnables? Vous
allez voir des causes qui vont sauter, parce qu'on sait qu'au criminel
ça a été jugé inacceptable, passé un certain
délai. J'imagine qu'au civil on aura tantôt ce problème.
Alors, on aura beau majorer les amendes, si on ne se donne pas les moyens de
les percevoir rapidement et si ce n'est pas le même organisme qui le
fait, à mon avis, on sombre dans le ridicule et ce n'est pas
sérieux. Qu'est-ce qu'on dirait si le Code de la route était
confié à des organismes qui n'auraient pas le pouvoir de
percevoir les amendes?
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi, je vous inviterais à conclure, s'il
vous plaît.
Mme Blackburn: Bien, M. le Président, je termine. Quelques
mots sur la formation, brièvement. Bravo! il y a eu la signature d'une
entente entre les syndicats, les entrepreneurs et le gouvernement, je m'en
réjouis; cependant, il faudra savoir s'il n'y a pas là des
chevauchements inutiles, il faudra voir comment on pourra harmoniser ça,
par exemple avec les autres programmes existants et avec le ministère de
la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu.
La protection du consommateur, je dis: Bravo! La qualité des
travaux, les certificats de conformité, les plans de garantie et les
tarifications qui sont nombreuses, tant pour avoir un plan de garantie, tant
pour qualifier les entrepreneurs, pour les surveiller, mais je rappelle: Quels
seront les effets sur le consommateur? Il sera bien protégé, je
dis oui, mais à quel prix? Nous ne le savons toujours pas.
Ce projet de loi est le fruit de la réflexion d'un ministre et je
déplore une chose, c'est qu'il aurait dû s'associer, faire sa
grappe avec le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du
revenu, le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre de la Justice et
le ministre des Finances. Alors, j'espère qu'au cours des audiences qui
vont suivre nous aurons l'occasion, mesdames et messieurs, d'échanger
sur ces différents points et je sais, évidemment, que vous ne
manquerez pas de nous apporter. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions,
Mme la députée de Chicoutimi. Nous recevons un premier groupe ce
matin, la Centrale des syndicats...
Mme Blackburn: M. le Président, le dépôt du
mémoire de l'Union... Vous m'avez donné l'autorisation. J'ai
demande...
Le Président (M. Bélanger): Oui, il n'y a pas de
problème...
Mme Blackburn: Oui? Pas de problème?
Le Président (M. Bélanger): ...si j'ai le document.
Si vous permettez un petit instant.
Mme Blackburn: J'avais aussi des copies pour l'autre, pour les
carreleurs. Les aviez-vous?
Le Président (M. Bélanger): Oui.
Mme Blackburn: C'est parce que j'en avais fait faire. (10 h
30)
Auditions
Le Président (M. Bélanger): C'est donc le
dépôt d'un mémoire de l'Union internationale des
journaliers d'Amérique du Nord, local 62, qui est déposé
à la commission. Donc, le document officiel maintenant de la commission
sera distribué aux membres dans quelques minutes.
Nous recevons donc ce matin, dans un premier temps, le premier groupe,
la Centrale des syndicats démocratiques, la CSD, c'est-à-dire le
Syndicat des travailleurs de la construction du Québec, STCQ-CSD,
représenté par M. Claude Gingras. Écoutez, je vais vous
laisser le soin de vous présenter parce que ça nous prend les
noms aussi pour les ordres d'intervention. Je vous demanderais aussi à
chaque fois que vous avez à intervenir, s'il vous plaît, de bien
vouloir donner votre nom. Ceci aide beaucoup les gens qui travaillent à
la transcription des débats qui sont dans une autre pièce en bas
et qui ne vous voient pas. Alors, si on pouvait aussi, à chaque fois,
donner son nom. Par exemple, dire: "Claude Gingras", ce qui permet une
meilleure transcription, c'est beaucoup plus facile pour les petites dames ou
les petits messieurs qui travaillent en bas dans l'ombre. Alors, sans plus
tarder, j'inviterais M. le président Gingras à nous
présenter son équipe et à procéder à la
présentation de son mémoire.
Centrale des syndicats démocratiques
M. Gingras (Claude): Merci, M. le Président. Je voudrais,
comme vous l'avez indiqué, vous présenter ceux qui m'accompagnent
pour la présentation des commentaires, analyses et recommandations de la
CSD. À ma gauche immédiate, Michel Fournier, qui est le
président du syndicat; suivant, Martin Ouellet, qui est le
secrétaire du Syndicat des travailleurs de la construction du
Québec-CSD, et, à mon extrême gauche, M. Lawrence Laroche,
qui en est le trésorier; à ma droite, Pierre-Yvon Ouellet, qui
est directeur professionnel du secteur construction à la CSD, et
François Vaudreuil, à l'extrême droite, qui est le
vice-président de la CSD.
M. le Président, M. le ministre, Mme Blackburn, critique du
travail, membres de la commission permanente de l'économie et du
travail. La CSD et le Syndicat des travailleurs de la construction du
Québec qui regroupent plus de 17 000 travailleurs inscrits à
l'Office de la contruction, dont 15 000 sûrement actifs dans l'industrie
de la construction, cet important secteur de l'économie, nous, à
la CSD. en tant que représentants de ces 15 000 travailleurs, accordons
beaucoup d'importance aux travaux que vous entreprenez quant à
l'étude des projets de loi 185 et 186. Les membres que nous
représentons fièrement, d'ailleurs, sont très soucieux
quant aux intentions du législateur de préserver leurs droits les
plus fondamentaux.
Pour faire la présentation de nos commentaires, bien sûr,
je suis assisté des membres du syndicat, mais je suis également,
et vous pouvez le constater, en présence de plusieurs conseillers
syndicaux de la CSD et également de membres de la CSD qui ont tenu
à être présents aujourd'hui pour témoigner de leur
intérêt à ce que ces travaux se traduisent effectivement
par une reconnaissance pleine et entière de leurs droits
démocratiques.
On ne peut sûrement pas aborder l'analyse du projet de loi 185
amendant la loi de la construction sans prendre un recul pour évaluer
dans sa globalité l'état de cette industrie déterminante
dans le développement du Québec. Depuis l'adoption de la loi de
la construction survenue en 1986, l'État s'est attribué un
rôle de partenaire de plein droit dans l'industrie. La loi de la
construction a remplacé le modèle du "paritarisme
contrôlé" pratiqué au sein de l'Office de la construction
du Québec par un partenariat, effectivement, à trois. C'est
ainsi, par exemple, que les associations syndicales représentatives,
l'association patronale et l'État occupent d'égal à
égal le même nombre de sièges au conseil d'administration
de la Commission de la construction du Québec, quatre sièges par
partenaire. En accentuant son rôle dans les lieux décisionnels de
l'industrie de la construction et en adoptant un modèle de partenariat
tripartite, l'État s'est attribué, en fait, davantage de droits
et de pouvoirs. Mais, en même temps, il accroît ses obligations et
ses responsabilités et ça, c'est notre prétention.
C'est sous cet angle que la Centrale des syndicats démocratiques
veut aborder le projet de loi 185. Par le biais de son syndicat affilié,
le
Syndicat des travailleurs de la construction du Québec, la
Centrale est un intervenant actif et reconnu dans l'industrie. Nous avons ainsi
la légitimité requise pour interpeller l'État et lui
demander de nous rendre des comptes. Et je pense que sur ça, M. le
Président, vous admettrez que l'entente privée qui a donné
lieu quand même à ce qui se passe aujourd'hui, nous n'avons pas
été associés très étroitement à son
élaboration.
Y a-t-il un contrat social dans la construction? Comment s'organisent le
partenariat et la concertation? Dans quelle mesure l'industrie de la
construction reflète-t-elle les valeurs démocratiques de la
société québécoise? Pour la CSD, il est
pénible de répondre à ces questions. En effet, nous
croyons que l'anachronisme, la contradiction et le ridicule se partagent les
réponses. Vous allez peut-être trouver ça dur, mais c'est
un peu notre vision de ce qui se passe.
Sur le plan des libertés démocratiques et du pluralisme
syndical, par exemple, l'industrie de la construction dégage des reflets
honteux et dégradants des valeurs démocratiques du Québec
moderne: le dialogue et la concertation sont étouffés par le
juridisme et l'affrontement; sur l'échiquier syndical, le respect des
minorités numériques cède le pas à la loi du plus
fort et à la discrimination; la transparence et la non-violence ne
résistent pas à l'intimidation réelle et à
l'apparence de corruption; les chantiers de moyenne et de grande envergure,
très souvent financés massivement par des investissements et des
gratifications monétaires publics, s'apparentent à des films de
cow-boy où la loi de la jungle règne: Baie James, alumineries,
papetières, etc.
En définitive, l'industrie de la construction appartient trop
souvent aux nostalgiques de l'ère des "gros bras", de la dictature et du
totalitarisme. Et le ministre du Travail se fait rassurant...
Or, le gouvernement du Québec est pourtant pleinement responsable
de cette situation. En parrainant la loi de la construction de 1986, le
gouvernement du Québec s'est attribué la responsabilité
d'intégrer, de véhiculer, de représenter et de
défendre les valeurs de société du Québec moderne
dans l'industrie de la construction. Depuis cinq ans, le gouvernement du
Québec n'a pas cessé de céder devant les
intérêts privés et partisans. On peut dire que c'est un
échec assez lamentable. Il n'a pas compris son nouveau rôle de
partenaire de plein droit; il a plutôt continué à arbitrer
en catimini des intérêts divergents issus d'un paritarisme
conflictuel, contrôlé et dirigé. De même, le
piétinement relatif au financement des mandats publics qui sont
assumés actuellement par la CCQ fait preuve d'une
malhonnêteté consommée de la part de l'État qui se
veut un partenaire de plein droit.
Nous voulons vous soumettre une première position qui, pour nous,
est essentielle. La CSD affirme que le projet de loi 185 amendant la loi de la
construction doit prioritairement jeter les bases d'un vrai contrat social,
moderne et démocratique dans cette industrie.
Le 4 octobre 1991, des représentants de la CSD et de son syndicat
de la constrution rencontraient le ministre du Travail. Nous avons alors
déposé à M. Cherry un document qui résume notre
orientation quant aux mesures à prendre pour remettre l'industrie de la
construction sur les rails de la démocratie, du respect des droits et
libertés de la personne et du développement économique et
industriel. Ce document est annexé au présent mémoire et
nous n'avons pas l'intention de le reprendre ici dans les moindres
détails.
Soulignons toutefois que, sur le plan du pluralisme syndical, nous
affirmons haut et fort que, malgré la reconnaissance formelle de cinq
associations représentatives dans la loi de la construction, le
fonctionnement concret du pluralisme syndical est un véritable
fouillis.
Depuis 1987, les travailleurs de la construction n'ont plus le droit de
voter pour l'association syndicale de leur choix. Il y a uniquement les
nouveaux travailleurs qui doivent adhérer à une association
syndicale pour entrer dans l'industrie; depuis 1987, le choix
d'allégeance est sans retour.
Les associations syndicales reconnues n'ont aucune garantie de
siéger au conseil d'administration de la CCQ ni d'être
associées au processus de négociation pour le renouvellement des
conditions de travail.
Au sein des comités de la CCQ inscrits dans la loi de la
construction, la représentativité des associations syndicales et
les modes de décision sont disparates et arbitraires.
Il arrive continuellement à des travailleuses et travailleurs de
la construction d'être victimes de discrimination à l'embauche et
lors de mises à pied à cause de leur choix syndical. Comme on
entend dire dans les milieux hypocrites, "ils n'ont pas choisi la bonne
centrale"; les monopoles de placement vivent grassement. Dans ces cas, les
recours prévus, plaintes au ministre notamment, sont inefficaces parce
qu'ils sont désaxés par les acrobaties juridico-technocratiques
et écrasés par une bureaucratie assommante. Il en résulte
que lorsque, par miracle, une décision ou une action est prise par le
ministre du Travail, c'est toujours avec une lenteur désarmante.
Face à ces constats, nous avons demandé au ministre du
Travail d'apporter des amendements prioritaires à la loi pour consacrer
la pleine reconnaissance du pluralisme syndical.
La CSD recommande, en fait, d'amender en priorité la loi de la
construction pour, premièrement, instaurer un vote d'allégeance
syndicale aux trois ans ou moins, par un scrutin obligatoire et postal;
garantir la présence de toutes les associations syndicales au conseil
d'administration
de la CCQ et au processus de négociation, pas dans le sens que
certaines associations le préconisent, c'est-à-dire en
éliminant tous ceux qui ne requièrent pas 25 % des travailleurs
dans l'industrie de la construction - je trouve que c'est de l'aberration et si
quelqu'un osait, un jour, embarquer dans de telles recommandations, je pense
que ce serait la négation des droits fondamentaux des travailleurs
à la liberté syndicale; uniformiser la
représentativité et les modes de décision au sein des
comités de la CCQ inscrits dans la loi: la CSD considère que sur
des sujets comme la formation professionnelle et les avantages sociaux, le
paritarisme patronal-syndical doit être privilégié.
Alors, la CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le
règlement de placement pour centraliser le placement au sein d'un seul
organisme qui appliquerait le principe de l'ancienneté de
disponibilité. Qu'on mette fin, en fait, à la jungle qu'on
connaît.
Le projet de loi 185 contient deux articles, en apparence anodins, sur
la formation et les mesures relatives à la main-d'oeuvre. L'article 3,
entre autres, précise que la CCQ peut administrer tout fonds que les
parties jugent nécessaire aux fins de formation. L'article 10 indique
que le décret peut contenir des dispositions touchant des mesures
relatives à la main-d'oeuvre. Le projet de loi 185 contient aussi des
dispositions transitoires et finales, en particulier l'article 26 qui permet au
gouvernement d'édicter un règlement en matière de
formation, perfectionnement et recyclage sans être obligé de
publier préalablement un projet de règlement dans la Gazette
officielle du Québec.
Ces amendements à la loi de la construction constituent un coup
de force, à notre avis, qui relève un peu de l'hypocrisie et de
la lâcheté, et on s'explique. Il vise essentiellement à
frapper la CSD et les associations d'entrepreneurs, c'est-à-dire
à les écarter d'un volet important du perfectionnement et du
recyclage des travailleuses et des travailleurs de la construction.
Pour bien comprendre ces propositions d'amendements, il faut savoir
qu'il y a quelques semaines, l'AECQ et l'alliance CSN-FTQ-INTER signaient une
entente pour créer un fonds financé par les employeurs afin de
favoriser le perfectionnement et le recyclage. La gestion de ce fonds, et des
programmes en découlant, est confiée à des comités
administrés par les signataires. Comme l'affirmait le ministre Cherry
à la délégation de la CSD le 4 octobre dernier, il s'agit
d'une entente privée.
Le projet de loi 185 vient officialiser cette entente privée; il
permet à la CCQ de percevoir des sommes en formation et il permet au
décret de traiter de formation. Ainsi, avec l'adoption du projet de loi,
le Conseil des ministres pourrait, par règlement, modifier le
décret pour officialiser l'entente. Pour s'assurer que le décret
soit modifié en douce, bien sûr, le gouvernement se donne le droit
d'adopter le règlement sans être obligé de publier un
projet de règlement dans la Gazette officielle du Québec.
On ne doit pas nécessairement, quand on veut couvrir des tiers,
essayer de faire en catimini des choses qui vont assujettir d'autres personnes
que celles qui ont été mises dans le coup. On élimine
ainsi toute forme de contestation ou d'opposition au règlement; on
enlève aux dissidents le droit démocratique d'exprimer leur
opposition. Pour faire passer le tout, on prétexte qu'il y a urgence,
l'entente privée devant entrer en vigueur en janvier 1992. Le
gouvernement du Québec ne peut pas se permettre de respecter les
délais de la démocratie... L'entente privée est
prioritaire! Or, nous le déplorons amèrement.
Pour plusieurs raisons, la CSD n'accepte pas, bien sûr, la
manoeuvre pilotée par le ministre du Travail. En particulier, on
créerait une double structure de gestion de la formation
professionnelle, provoquant ainsi un fouillis, de la confusion et des conflits
de juridictions. De même, on écarte de la structure
proposée des associations formellement reconnues comme partenaires dans
l'industrie.
Pour bien saisir la portée du projet de loi 185 en matière
de formation professionnelle, il faut rappeler brièvement l'historique
du dossier. La loi de la construction de 1986 accordait aux partenaires de
l'industrie des responsabilités déterminantes en matière
de formation professionnelle. La loi créait un comité de
formation professionnelle, l'article 18.1 de la loi et suivants, agissant dans
le cadre des structures de la CCQ. Il s'agit du CFPIC. Depuis 1987, le CFPIC a
tenu environ 40 réunions. Pour appuyer son travail, le CFPIC a mis sur
pied des sous-comités régionaux, une dizaine, soit un par
région, et des sous-comités professionnels, 26, soit un par
métier, occupation, spécialité. Depuis 1987, les
sous-comités ont tenu des dizaines et même des centaines de
réunions. (10 h 45)
Pour simplifier la présentation des mandats, nous vous
énumérons, en gros, les mandats qui relèvent du CFPIC,
mais qui, actuellement, semblent assez clairs par rapport, justement, à
la mission qui leur est réservée. Il y a des questions majeures
qui se posent aussi, il y en a une en formation continue qui concerne les
modalités de formation. Plusieurs options sont possibles: cours du soir
à temps partiel en dehors des heures normales de travail; cours de jour
à plein temps sans compensation financière; cours de jour
à plein temps avec prestations d'assurance-chômage et compensation
de frais; et d'autres formes de gestion de ces cours.
Il y a d'autres questions cruciales dans le domaine de la formation
continue, entre autres, l'éloignement des travailleurs, la production de
matériel de cours adapté, les prérequis exigés,
l'accueil et l'orientation des candidats et candidates, la reconnaissance des
acquis scolaires et
extrascolaires, l'attribution d'équivalences et le respect de la
culture ouvrière.
Dans le cadre des travaux de ce CFPIC, les partenaires ont entrepris de
multiples démarches pour répondre aux attentes en matière
de formation continue. Par exemple, la CCQ est en discussion avec la Commission
de l'emploi et de l'immigration du Canada pour mettre sur pied un fonds en
fiducie de formation et un projet concret fut déposé pour
étude. D'autres discussions ont lieu à la CCQ, entre autres, avec
la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada.
L'entente privée AECQ-Alliance vient mettre en place une
structure parallèle au CFPIC qui serait dotée de deux
comités de gestion, l'un pour la caisse créée et l'autre
pour les programmes. C'est, à notre avis, inacceptable; cette double
structure ne provoquera que de la confusion, du tiraillage et des conflits de
juridictions, de reconnaissance et de représentativité. Avec qui
travaillera le MEQ? le ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle? la
Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada? et les commissions
scolaires?
Par ailleurs, l'entente privée AECQ-Alliance confine le dossier
du financement et de la gestion des programmes de perfectionnement et de
recyclage au domaine des relations du travail, ce qui veut dire qu'on met de
côté les associations non engagées dans la dernière
négociation. Sont exclus, entre autres, la CSD, le Syndicat de la
Côte-nord et les associations d'entrepreneurs, et l'entente privée
banalise, en outre, le rôle de la CCQ. Sur ce point...
Le Président (M. Bélanger): M. le président,
je m'excuse de vous interrompre, nous avions convenu de 20 minutes pour la
présentation de votre mémoire. Visiblement, vous avez besoin de
plus de 20 minutes. Combien de temps encore vous sera-t-il
nécessaire?
M. Gingras: J'aimerais que vous m'accordiez encore 5 minutes. Je
pense qu'on pourrait s'en tirer.
Le Président (M. Bélanger): Alors, on a
consentement, je présume? Oui? On est quand même ici pour les
écouter. Alors, M. le président, allez-y.
M. Gingras: Alors, M. le Président, la CSD n'a pas fait
porter son analyse prioritaire sur l'exclusion des associations d'entrepreneurs
qui composent l'AECQ, mais nous estimons, toutefois, que ce geste d'exclusion
est inquiétant et malheureux. Dans le cas de la CSD, par exemple, des
dossiers honteux s'accumulent actuellement: les débrayages
illégaux du printemps de 1990, les événements entourant la
construction de l'hôtel Delta de Trois-Rivières, l'arbitrage de
griefs relatifs au congédiement injuste d'honnêtes travailleurs
sur les chantiers de la Baie James; et on peut vous donner des dossiers
précis, d'ailleurs, qu'on a remis. Au train où vont les choses
avec l'AECQ dans le décor, H faut craindre que le dossier du
perfectionnement et du recyclage se traitera bientôt à coup de
mises en demeure et d'Injonctions.
Cela dit, la CSD n'accepte pas que le projet de loi veuille officialiser
l'entente privée et dénonce le gouvernement du Québec qui
semble vouloir se prêter à cette manoeuvre. C'est un affront pour
nous. La CSD n'a rien à se reprocher en matière de formation
professionnelle.
Alors, nous recommandons, en fait, au gouvernement du Québec de
modifier l'article 3 du projet de loi 185 en remplaçant les mots "les
parties jugent" par les mots "le comité constitué en vertu de
l'article 18.1 juge", et ce, pour remettre dans les mains du CFPIC le soin
d'administrer, justement, les fonds de formation professionnelle.
La CSD recommande également au gouvernement du Québec
d'insérer un article 10.1 du projet de loi 185 qui suivrait l'article 10
et qui se lirait comme suit: "L'article 61 de cette loi est suM de l'article
61.1 qui se lirait comme suit:
Toute disposition du décret traitant des mesures relatives
à la main-d'oeuvre et faisant référence à la
Commission sous quelque forme que ce soit, telle que la perception de
cotisations, de contribution ou d'argent sous toute autre forme, la gestion de
fonds, le versement de prestations, la gestion de programmes, doit être
administrée exclusivement par le comité constitué en vertu
de l'article 18.1 de la loi, dans le cadre des pouvoirs,
responsabilités, droits et obligations dévolus audit
comité."
Nous recommandons également au gouvernement du Québec de
biffer l'article 26 du projet de loi 185.
Quant à l'élimination du travail au noir, bien, vous
comprendrez qu'on partage les objectifs qui sont dans le projet de loi 185 pour
éliminer le travail au noir. Nous demandons, bien sûr, que ces
mesures pour éliminer le travail au noir soient l'accroissement des
pouvoirs d'inspection, l'augmentation des amendes, la restriction de
l'utilisation du statut d'entrepreneur autonome, la perte de certificat de
compétence lors d'une deuxième infraction, etc. Il faut aussi
souligner la promulgation de la Loi sur le bâtiment, rendue possible par
le projet de loi 186. Elle va dans le même sens. Pour la CSD, l'adoption
du projet de loi 186 est essentielle pour compléter les mesures
contenues dans le projet de loi 185. Or, le gouvernement ne peut pas, en toute
équité, adopter les mesures de lutte au travail au noir contenues
dans le projet de loi 185 sans adopter simultanément le projet de loi
186.
Or, certaines mesures, cependant, visant à
combattre le travail au noir ont des effets pervers, de sorte que ces
mesures déclenchent du travail au noir sous d'autres formes. Alors, il
faudrait quand même être prudent. Par exemple, un salarié
qui verrait son certificat suspendu en vertu de l'article 18 du projet de loi
ne cessera pas nécessairement de vivre pour autant; il y a des risques
pour que ce salarié continue de travailler au noir sans certificat. Dans
cet exemple, le projet de loi 185 pourrait être perçu comme
étant plus sévère pour les salariés
détenteurs de certificats que pour ceux qui n'en détiennent
pas.
Les salariés qui détiennent des certificats et qui se
livrent, en fait, à du travail au noir le font souvent pour
répondre à des directives, des ordres de leurs employeurs en
particulier; ça devient une condition d'emploi non écrite, mais
obligatoire. C'est le cas, par exemple, de ceux qui acceptent des tâches
qui ne sont pas de leur juridiction ou qui renoncent à des frais de
déplacement, qui transforment leurs heures supplémentaires en
banque d'heures. Dans ce cas, les salariés sont à la merci de la
"loi des employeurs" que le projet de loi 186 vise à corriger, du moins
partiellement.
Pour ces raisons, la CSD considère que les mesures contenues dans
le projet de loi concernant la lutte au travail au noir doivent être
encadrées pour offrir un filet de sécurité aux
salariés.
Alors, la CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le
décret de la construction pour renverser le fardeau de la preuve et
donner un préjugé favorable au plaignant dans le cadre de
l'application de la section 14, discrimination, entre autres.
Aussi, la CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le
décret de la construction pour introduire l'ancienneté
régionale par employeur lors des embauches et des mises à pied
dans le cadre de l'application de la section 16, préavis de mise
à pied.
En conclusion, M. le Président, dans l'industrie de la
construction, le temps des "réformettes" très partielles,
partisanes et discriminatoires devrait être révolu. Je pense qu'il
est grand temps d'intégrer l'industrie de la construction aux valeurs de
société du Québec moderne.
Je vous remercie et on est à votre disposition pour
répondre aux questions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
président. M. le ministre, si vous voulez commencer.
M. Cherry: Merci. À cause de certains aspects de votre
mémoire que vous n'avez pas eu le temps d'aborder, je voudrais vous
suggérer quelques questions qui vous permettraient peut-être de
toucher à ça.
J'aimerais savoir, parce que vous ne l'avez pas dit, quelle sorte de
commentaire vous souhaiteriez nous faire sur le travailleur autonome qui est
exclu du champ de la construction neuve, par exemple. J'aimerais vous entendre
là-dessus. Vous ne l'avez pas fait à date, mais je présume
que c'est parce que le temps vous a manqué. Donc, dans ce
sens-là, j'aimerais, dans un premier temps, vous entendre.
M. Gingras: Bon. Concernant le travailleur autonome qui est
exclu, en fait, c'est qu'on est d'accord actuellement avec le projet de loi
dans la forme actuelle, telle qu'il le préconise, de traiter le
travailleur autonome. Et il en va de même, bien sûr, pour
l'entrepreneur autonome. Nous avons analysé les différentes
facettes et, sur ça, la CSD est entièrement d'accord avec les
recommandations ou les prescriptions qui apparaissent dans le projet de
loi.
M. Cherry: O. K. Sur le projet de loi 186, avez-vous des
représentations à faire, autres que les commentaires des pages 19
et 21, par exemple?
M. Gingras: Non, nous n'avons pas d'autres recommandations. Nous
considérons que, de façon générale, 186 est un
corollaire, et je pense qu'un dans l'autre, 185 et 186 sont deux projets de loi
qui se complètent. Je pense qu'il y en a un qui touche surtout les
travailleurs, mais il y en a un autre qui touche surtout les employeurs, le
comportement des employeurs. Alors, dans ce sens-là, je pense que ces
deux projets de règlement doivent être mis de l'avant. Ils se
complètent très bien par rapport aux objectifs recherchés,
quand on parle du travail au noir, entre autres, et de tout ce qui se
développe dans l'industrie de la construction, pour continuer de laisser
évoluer ce genre de fonctionnement là qui s'est
développé au cours des années et qui prend, bien
sûr, de plus en plus d'ampleur, comme vous le savez.
M. Cherry: Vous avez parlé fréquemment dans votre
mémoire de l'aspect représentativité, l'expression de la
démocratie syndicale, le vote, et tout ça. Souhaiteriez-vous
être plus explicite ou est-ce que vous croyez que la partie du
mémoire que vous avez couverte vous suffit? Ou est-ce que vous voulez
profiter de l'occasion que je vous offre pour faire des commentaires
additionnels?
M. Gingras: M. le ministre, je pense que quand on vous a
rencontré à ce sujet-là, concernant la liberté
syndicale et le droit démocratique des travailleurs de pouvoir exercer
leur liberté de choix d'allégeance syndicale, nous avons
été très clairs quant aux objectifs que la CSD
poursuit.
Bien sûr, vous savez fort bien que le syndicalisme dans
l'industrie de la construction
est obligatoire. Au départ, tout le monde doit être
syndiqué pour travailler dans cette industrie. En fait, c'est une
industrie fermée syndicalement: n'entre pas qui veut et,
deuxièmement, ceux qui y sont doivent être syndiqués et
choisir leur allégeance syndicale, et c'est en vertu de ces choix
qu'éventuellement des associations les représentent dans leurs
intérêts, soit la négociation ou l'application de leurs
conditions de travail.
Nous avons, depuis quatre ans, assisté à toutes sortes
d'exercices, d'études, et tout ça, qui ont traité de la
liberté syndicale des travailleurs de l'industrie de la construction.
Mais depuis quatre ans, ces travailleurs de la construction n'ont pas eu ou
n'ont pas pu exercer leur liberté de choix d'allégeance
syndicale. Vous savez qu'au début, quand on avait consacré le
syndicalisme obligatoire dans l'industrie de la construction, on avait
accepté des règles de démocratie dans cette industrie. On
avait accepté qu'il y ait un vote obligatoire de façon constante
et régulière pour permettre aux travailleurs de l'industrie de la
construction d'assumer leur liberté de choix d'allégeance
syndicale dans cette industrie. Il est impossible de penser qu'on va consacrer
à une centrale syndicale ou à une organisation syndicale le soin
exclusif de représenter les travailleurs. Je pense que, quand on
décide d'un syndicalisme obligatoire dans une industrie aussi importante
et aussi large que celle de l'industrie de la construction, on doit y associer
le pluralisme syndical. Le pluralisme syndical, ça veut dire la
possibilité d'être représenté par plus d'une
association syndicale et une liberté de choix de ces associations
syndicales.
Alors, c'est un peu autour de ça qu'a tourné, en fait,
l'élaboration de la syndicalisation dans l'industrie de la construction,
mais, avec le temps, ce qu'on a fait de cette industrie, vous le savez, il y a
eu des fractionnements qui sont survenus. Entre autres, il y a eu une scission
à l'intérieur de la CSN; il y a eu la création de la CSD;
il y a eu une scission à l'intérieur de la FTQ où on a
assisté à la création de plusieurs organisations
syndicales qui représentent des travailleurs de la construction. Et
ça, je pense que c'est sain. Les travailleurs de l'industrie de la
construction ont une liberté de choix. Ils peuvent assumer cette
liberté de choix, à un moment donné d'être
représentés par l'association de leur choix. S'ils avaient voulu,
au cours des années, donner ou choisir majoritairement des associations
syndicales, ils les auraient choisies au moment où ils avaient
l'occasion de le faire par des votes au scrutin secret.
Or, ce que nous disons là-dessus, c'est qu'il est important de
redonner aux travailleurs cette possibilité de choix démocratique
de leur allégeance syndicale. Ça fait quatre ans qu'ils n'ont pas
pu l'exercer dans l'industrie de la construction et si on ne procède pas
de façon rapi- de - quand on sait la façon dont les conditions
sont renouvelées depuis quelque temps dans l'industrie de la
construction, par prolongation - on se demande quand sera le prochain exercice
de la liberté syndicale dans l'industrie de la construction. Pour nous,
il est essentiel qu'on passe à l'action et que, prioritairement, le
ministre consacre un vote syndical obligatoire dans l'industrie de la
construction, et régulièrement, aux trois ans. Nous avons aussi
comme position que, quelle que soit la représentativité d'une
association, elle doit être associée à tout le processus de
représentation de ses membres, c'est-à-dire négocier les
conditions de travail, les appliquer et être présents à la
CCQ qui a le rôle de gérer, en fait, les cotisations dans
lesquelles eux sont impliqués, ou cotisent, aussi, et que leurs
employeurs cotisent en leur nom. (11 heures)
Alors, dans ce sens-là, M. le ministre, je pense qu'un
véritable exercice de liberté syndicale dans l'industrie de la
construction repose sur la liberté de choisir périodiquement son
allégeance; deuxièmement, il repose aussi sur le pluralisme
syndical; troisièmement, I repose sur la reconnaissance pleine et
entière des associations que les travailleurs ont choisies pour les
représenter et aussi donner suite à leurs revendications quand
ils veulent se faire représenter par ces associations. Je pense que
ça, ce sont des conditions essentielles.
Alors, vous devez ordonner que ça, ce vote-là, ne soit pas
obligatoire. Pas des votes bidon comme ceux qu'on a connus dans les
dernières années, où seulement les travailleurs qui
voulaient changer d'allégeance syndicale pouvaient aller se prononcer
dans les bureaux. Ça, ça équivaut à dire: Bon!
Bien, écoute, si tu vas te présenter pour voter ou choisir une
allégeance syndicale, c'est parce que tu t'identifies
immédiatement comme une personne qui veut changer d'allégeance
syndicale, avec tout ce que ça comporte. Je n'ai pas besoin de vous
faire de dessin là-dessus. Alors, quant à nous autres, c'est une
formule bidon qui méprise la liberté de choix des travailleurs
dans l'industrie de la construction; on vous demande de la changer, et ce,
rapidement.
M. Cherry: Toujours sur le même sujet, M. Gingras, dans vos
déclarations, vous avez dit: II est inconcevable qu'un organisme
syndical puisse représenter l'ensemble des travailleurs. Vous avez
soutenu cette logique-là par la fragmentation. Si on recule des
années en arrière, c'était CSN-FTQ; il y a eu, comme vous
l'avez expliqué, fragmentation de la CSN qui a fait la création
de la CSD. Et il y a eu, comme vous l'avez également souligné,
division au sein de la FTQ-Construction qui a créé le Conseil
provincial. Donc, ça, c'est la situation de fait aujourd'hui.
Là, vous dites: II est impossible de penser qu'un organisme
syndical puisse représenter
l'ensemble ou la majorité. Lors d'une expression de vote, si un
fort pourcentage des travailleurs décidait de le faire ou s'il y avait
regroupement qui ramenait cette même chose-là, est-ce que vous me
dites que vous... J'aimerais vous entendre là-dessus. Je ne veux pas
vous prêter de propos, mais il est important pour moi de saisir. Si un
regroupement d'organismes créait une forte majorité, ce serait
quoi votre position là-dedans? Vous en seriez exclus ou vous en ferie2
partie? J'aimerais vous entendre.
M. Gingras: On ne vous dit pas que c'est impossible que les
travailleurs, un jour, choisissent majoritairement de confier leur
adhésion à une association syndicale. Je ne pense pas que ce soit
ce que j'ai voulu dire et je ne pense pas que ce soit ça que je vous ai
dit. Ce que je vous ai dit, par exemple, c'est que, si les travailleurs avaient
voulu, au cours des années, confier leur destinée à une
association nettement majoritaire pour les représenter, ils l'auraient
fait. Il y a certains moments où ils ont pu se prononcer à cet
effet-là.
Ce que je veux dire, c'est que, dans une industrie comme l'industrie de
la construction, ce serait tout à fait inconcevable qu'on décide
de modalités qui feraient en sorte d'éliminer la liberté
de choix et que, quand des travailleurs se prononceraient pour choisir une
association syndicale, on les force, dans un deuxième temps, à en
choisir une autre parce qu'elle n'est pas suffisamment représentative.
Ça, ce serait de l'aberration; ce serait de la négation de droits
fondamentaux de choix d'allégeance syndicale.
Or, pour nous, il est essentiel que cette liberté de choix puisse
exister et que, quand les travailleurs ont choisi leur allégeance
syndicale, ils puissent conserver la possibilité de laisser leur
destinée dans les mains de ces associations qu'ils ont choisies, quitte
à réévaluer leur choix dans un autre temps. Mais c'est
ça l'importance parce que, essayer d'éliminer carrément,
comme certains le préconisent, des associations syndicales de la
possibilité de continuer de représenter leurs membres dans un
secteur comme l'industrie de la construction, ce serait accepter un
régime totalitaire dans lequel on évacue les minoritaires. Et on
ne leur laissera jamais la chance de revenir, à un moment donné,
comme les représentants des travailleurs dans ce secteur-là.
Comment pensez-vous, si on suivait les recommandations que certains
préconisent, qu'une organisation syndicale qui représente des
travailleurs et qui se verrait privée, pendant deux, trois, quatre ou
cinq ans de représenter ses membres parce que, supposément, pas
assez représentative - même si elle représente 15 000 ou 20
000 travailleurs, ce n'est pas assez représentatif - elle serait
écartée de la représentation de ses membres... Comment
pensez-vous que cette organisation syndicale là pourrait garder une
certaine crédibilité pour, éventuellement, peut-être
recueillir l'allégeance des travailleurs? Ce serait consacrer aux
associations majoritaires des monopoles. Ce serait ça, le
résultat de la décision.
Alors, je pense que la commission Cliche a suffisamment
inventorié toute cette question et fait des recommandations très
substantielles. Je pense que les parlementaires devraient s'en inspirer pour
l'avenir et ne pas tomber dans le même panneau que celui qui était
préconisé à l'époque et qui nous a amenés
dans les incidents qu'on connaît.
M. Cherry: Vous venez de parler de groupes de 15 000 à 20
000; je pense que vous vous référez à l'organisation qui
est la vôtre.
M. Gingras: C'est ça.
M. Cherry: Dans votre mémoire vous avez parlé de 18
000, dont 15 000 actifs. Est-ce que je vous cite bien? Je pense que c'est
ça. Par rapport à l'ensemble des travailleurs dans l'industrie de
la construction, en pourcentage, ça représente quoi?
M. Gingras: Vous savez comme moi qu'il y a 130 000 travailleurs
dans l'industrie de la construction, plus ou moins, et ça
équivaut autour de 10 % à 11 %, à peu près, des
travailleurs de l'industrie de la construction. Mais quand on parle d'une
représentation de 10 % à 11 % des travailleurs de la
construction, il faut penser que c'est quand même une masse importante de
travailleurs. Quand on parle d'une industrie qui emploie environ 130 000
travailleurs, on ne parle pas d'une petite usine de 5000 travailleurs,
même si on met 5000 travailleurs. On parle d'une industrie. On ne parle
pas d'une entreprise, là, parce que c'est une somme importante
d'entreprises et, comme il n'y a pas d'accréditation par entreprise dans
l'industrie de la construction, c'est une forme de reconnaissance syndicale. Et
vous connaissez la transférabilité des travailleurs de cette
industrie-là. Ce n'est pas des travailleurs qui sont
nécessairement toujours attachés au même employeur. Il y a
beaucoup de transférabilité. Or, dans ce sens-là,
l'industrie de la construction a un modèle unique parce que, justement,
elle a une situation qui est un peu unique par rapport à l'ensemble du
secteur des entreprises.
Or, le pluralisme doit être quelque chose d'important dans cette
industrie-là. La liberté de choix d'allégeance syndicale
doit être préservée à tout prix, et ceux qui ont des
mandats de représenter des membres là-dedans doivent être
respectés et non pas discriminés. Lorsque le ministre a à
prendre des décisions concernant les conditions de travail ou quelque
forme de bénéfice que ce soit qui se rattache aux travailleurs de
ces industries-là, il doit absolument
donner droit de cité aux associations qui ont le mandat de
représenter leurs membres à l'intérieur de ces
décisions-là.
M. Cherry: Une dernière question sur le même sujet
et, ensuite, notre temps sera écoulé. Vous parlez de la
représentativité de votre organisme sur l'ensemble de ce qu'est
la structure pour le fonctionnement de la formation, et tout ça. On
vient d'établir ensemble que vous représentez 10 % ou 11 %. Par
rapport à la représentativité de votre organisme par
rapport aux autres qui, eux, pourraient peut-être en représenter
deux, trois ou quatre fois plus, vous verriez ça comment, cette forme de
représentativité là par rapport au langage que vous me
tenez? Pour ma compréhension, s'il vous plaît.
M. Gingras: Le nombre de sièges et de représentants
qui pourraient quand même participer aux décisions et être
représentés, ça peut-être quelque chose qui peut
s'ajuster en proportion de la représentativité, mais il ne
faudrait jamais écarter qui que ce soit. Je pense qu'au départ la
justice élémentaire exige que si tu as un mandat de
représenter, tu dois être là. Si tu n'es pas là,
c'est qu'on te discrimine, en fait. On ouvre la porte à dire: Bon, bien,
qu'est-ce que ça peut te donner de continuer d'oeuvrer à
l'intérieur d'une organisation syndicale? On va te nier ton droit
d'assumer pleinement tes obligations. Ça, je pense que c'est de
l'aberration; c'est à ça qu'il faut mettre fin dans l'industrie
de la construction, comme situation.
Ce qui est tout à fait acceptable, c'est que, quand on participe
et qu'on prend des décisions, on les prenne dans la proportion de notre
représentativité. Je pense que ça, on serait capable de
vivre avec ça, mais ça oblige quand même les gens à
travailler ensemble et puis, collectivement, à partager certaines
décisions qui deviendraient des décisions majoritaires de
l'industrie de la construction. Il ne faut pas tout simplement essayer
d'écarter des gens et, après ça, refaire de nouvelles
majorités sur la base de données qui sont fausses, qui
écartent au départ une portion importante des travailleurs. C'est
ça que je vous dis.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Gingras,
messieurs, bonjour. Je vais passer tout de suite aux questions parce que
l'intérêt, c'est de vous entendre. Vous parlez d'allégeance
syndicale et j'ai cru comprendre tout à l'heure dans votre
présentation que vous parliez de deux ans ou trois ans. Ce qui
était prévu, c'était trois ans et c'était mal
explicité, ce qui fait que les décrets le prolongent jusqu'aux
négociations. Mais, deux ans, ça ne vous apparaîtrait pas
un peu court?
M. Gingras: Écoutez, sur les deux ans, j'ai dit deux ans
parce qu'on a comme cadre de référence un peu ce qui se passe
dans le Code du travail. Le Code du travail prévoit que vous pouvez
quand même exercer cette liberté de choix en vertu de conventions
qui peuvent avoir une durée entre un an et trois ans. Or, quand j'ai
mentionné ce cadre, c'est que c'est un cadre, à mon avis, et dans
une période de trois ans il y a beaucoup de temps qui passe. La
convention collective peut être une période de
référence, d'ailleurs, tout à fait acceptable. Si la
convention est de trois ans dans l'industrie de la construction, ça
pourrait être trois ans aussi, le délai.
Je n'ai pas de limite fixe, mais si la convention dans l'industrie de la
construction - parce que c'est permis - avait une durée de deux ans,
est-ce qu'on va, à ce moment-là, négliger de permettre au
travailleur de se prononcer à l'intérieur de deux ans pour voir
s'il n'a pas changé d'idée quant à son choix
d'allégeance syndicale? Pour nous, on dit qu'à chaque
échéance de convention collective il devrait y avoir une
période où les travailleurs sont appelés à exercer
leur droit de choix démocratique. Le maximum serait de trois ans,
toutefois, parce que je pense qu'un régime qui a plus de trois ans et
qui t'empêche de modifier ton choix d'allégeance syndicale, c'est
un régime qui, à mon avis, est discriminatoire.
Mme Blackburn: Je pense que ça fait l'unanimité. En
tout cas, dans les mémoires que j'ai lus, je pense que tous les groupes
réclament une disposition, une modification qui permettrait que
ça soit tenu aux trois ans. Vous réclamez, au nom de la
reconnaissance pleine et entière des organisations syndicales, la
centralisation des comités de placement. C'est en page 8 de votre
mémoire. J'ai fait un rapport entre les deux parce qu'il m'a
semblé qu'il y en avait un. Alors, vous dites à la position 3:
"La CSD recommande au Conseil des ministres de modifier le règlement de
placement pour centraliser le placement au sein d'un seul organisme". De qui
relèverait cet organisme?
M. Gingras: Écoutez, moi, j'ai été de ceux
qui ont participé à l'étude de Gold, dans le temps. On se
reporte très loin dans le temps parce que, à l'origine, je suis
un travailleur de l'industrie de la construction - président de la CSD
aujourd'hui mais, à l'origine, travailleur de l'industrie de la
construction. Et quand on a regardé le problème des travailleurs
de la construction avec le juge Gold, il nous a dit, à cette
époque - et vous vous rappelez le rapport Gold - II n'y a pas de
possibilité d'appliquer un véritable régime de placement
respectueux des droits fondamentaux des travailleurs en vertu de leurs
qualifications professionnelles sans avoir un mécanisme, à cause,
justement, de la trans-
férabilité, et tout ça, dans l'industrie de la
construction, regroupé de placement. Et il l'était, à
l'époque, si vous vous en souvenez; c'est lui qui est à la source
du mécanisme de sécurité d'emploi pour les
débardeurs. Et le rapport avait fait ses recommandations dans le
même sens que le régime qui avait été
instauré pour les débardeurs, pour les travailleurs de
l'industrie de la construction.
Nous avons, à la CSD, toujours préconisé que les
recommandations ou le sens des recommandations du rapport Gold, c'est à
cette seule condition qu'on arrivera à la fois à respecter le
choix d'allégeance syndicale des travailleurs, leur statut professionnel
de travailleurs de l'industrie de la construction et à empêcher
qu'on discrimine leurs droits; qu'on les place plutôt en fonction de
critères publics connus et qui soient la règle pour tout le
monde. C'est la seule façon.
Actuellement, dans l'industrie de la construction, si vous viviez dans
cette industrie vous sauriez de quelle façon on peut être
écarté d'un emploi parce qu'on n'est pas dans la bonne centrale,
comment on peut être écarté d'un emploi parce qu'il se fait
des pressions pour faire embaucher telle personne ou telle personne, et qu'on
dit à des travailleurs: Bien, écoute, tu vas travailler à
des conditions différentes, toi, demain matin, parce que si tu ne
travailles pas à des conditions différentes pour moi, employeur,
bien, c'est bien de valeur, j'ai le choix d'aller ailleurs, d'en choisir
d'autres. Et ça, c'est le travail au noir qu'on appelle, O. K. ?
Ça, c'est le véritable travail au noir. Pas de mécanisme
de placement centralisé dans l'industrie de la construction, ça
veut dire feu vert aux employeurs qui vont choisir les bons travailleurs qui
sont prêts à faire des dérogations constantes aux
conditions de travail et qui font en sorte de polluer l'atmosphère par
le travail au noir. Alors, c'est le feu vert.
Alors, c'est pour ça que, pour nous, il est essentiel qu'on
centralise le placement dans l'industrie de la construction, qu'on place les
travailleurs en vertu de règles écrites, connues, publiques, qui
pourraient être contestées si, éventuellement, le
mécanisme ne s'appliquait pas selon les règles; il permettrait
des recours pour les travailleurs qui seraient discriminés. Et
l'organisme, à l'époque, on avait même accepté, sur
votre question précise, que ce soit la CCQ qui le fasse, comme mandat,
qu'elle accomplisse ce mandat. Dans le temps, à un moment donné,
il y avait eu un règlement sur le placement. Au départ, ce
règlement était beaucoup plus précis sur la
responsabilité de la CCQ mais il a tellement été
dilué qu'il ne signifie plus rien aujourd'hui. Quand on regarde ces
aspects de discrimination il n'a plus aucun rôle à jouer sur la
discrimination. (11 h 15)
C'est pour ça qu'on demande de réinstaurer des
règles précises. Et l'ancienneté, bien sûr,
viendrait jouer un rôle important pour permettre justement aux
travailleurs de ne pas toujours avoir à souscrire à des demandes
de dérogation des entreprises. Deuxièmement, il faut faire en
sorte aussi qu'on ne les écarte pas d'emplois auxquels ils ont droit -
parce qu'ils ont un statut professionnel de travailleurs, qu'ils sont
qualifiés pour accomplir le travail et qu'ils ont la capacité de
le faire - parce qu'on ne leur aime pas la face ou bien qu'ils ne sont pas dans
la bonne centrale.
Mme Blackburn: Vous traitez longuement dans votre mémoire
de la formation professionnelle et de ce nouveau fonds et vous dénoncez
la double structure qui est susceptible d'administrer ce fonds et les
chevauchements que ça peut créer. Mais qu'est-ce qui vous fait
craindre que de distinguer la gestion de la caisse ou du fonds de la gestion
des programmes, ça puisse créer un hiatus trop important qui
risque d'entraîner des effets négatifs?
M. Gingras: Écoutez, je pense que quand on veut avoir de
la cohésion, la formation professionnelle, c'est la clé, quand
même. C'est la clé des prochaines années. Ça va
être un peu le modus vivendi autour duquel beaucoup de secteurs
industriels, incluant la construction, vont avoir à développer
une performance quand même assez importante pour faire en sorte d'assurer
le succès de ces industries-là. La formation professionnelle
revet de plus en plus d'importance et va devenir la première
responsabilité des parties.
Pour nous, actuellement, quand la loi a été
modifiée dans l'industrie de la construction pour confier à la
CCQ le soin de rétablir un système de formation professionnelle
crédible dans l'industrie de la construction et de redonner aux parties
un rôle important à jouer dans l'élaboration de la
formation professionnelle, quand la loi a voulu faire ça
dernièrement, on a dit: Bon, bien, saluons ça avec enthousiasme.
Il faut embarquer là-dedans puis il faut faire en sorte de
rétablir dans l'industrie de la construction un régime de
qualification qui soit compatible avec les besoins de l'industrie dans laquelle
on s'associe, les employeurs et les travailleurs, pour développer nos
besoins et répondre à nos besoins de formation professionnelle,
et ça, en misant particulièrement sur la clientèle et sur
les travailleurs actuellement en emploi - pas nécessairement uniquement
sur les travailleurs potentiels de l'industrie de la construction mais surtout
en donnant la possibilité aux travailleurs déjà en emploi
de se qualifier dans cette industrie-là.
Ça, on l'avait salué avec beaucoup d'enthousiasme, cette
législation qui venait confier aux parties, ou reconfier aux parties un
rôle important et significatif à jouer. Et là on est en
train d'essayer de morceler toute l'approche de
la formation professionnelle dans l'industrie de la construction. Le
grand danger de créer deux ou trois organismes qui vont travailler mais
qui ne seront pas coordonnés et qui n'auront pas nécessairement
de cohésion dans le fonctionnement, le grand danger, c'est que ça
va créer toutes sortes de dislocations qui risquent d'être
néfastes à l'industrie de la construction.
Pour nous, il y a cette raison: la cohésion nécessaire
pour atteindre les objectifs. Deuxièmement, déjà, sur les
comités, les CFP, on reconnaît l'ensemble des parties qui
composent les parties représentatives de la construction. Le fait de
confier à ces CFP le rôle d'administrer les caisses, ce seraient
des règlements d'ordre public qui auraient la même signification.
Ce ne serait pas une entente privée. Ce serait administré par un
organisme qui est le CFP, qui est déjà, quand même,
consacré par la loi et qui existe pour s'occuper de toutes les questions
en matière de formation professionnelle. Alors, ce serait de regrouper
tout ça sous un même chapeau et avec des critères qui
seraient universellement reconnus et publics pour l'ensemble des travailleurs
qui ne souffriraient pas, bien sûr, de la discrimination de certains
groupes ou d'autres.
Ce qu'il est important de préserver dans tout ça, c'est
qu'on ne vienne pas, par des ententes privées, favoriser certains
travailleurs au détriment d'autres. O. K. ? Ce qui est important, c'est
que, quand on va mettre en place des dispositions pour disposer de ces
fonds-là à l'endroit de travailleurs, ça respecte les
travailleurs dans leurs besoins. Deuxièmement, que ça respecte
leur choix d'allégeance syndicale. Et, troisièmement, que
ça puisse permettre aussi à toutes les associations qui
représentent les travailleurs d'être présentes dans
l'établissement de ces règles-là et de ces
conditions-là.
Vous comprendrez que l'entente privée de laquelle on est exclu...
Vous savez que la masse salariale de nos membres va être cotisée
là-dedans. O. K. ? Il y a des revenus qui sont basés sur les
revenus de nos membres, qui vont entrer dans ces caisses-là. Si, demain
matin, on fait des règles d'utilisation qui discriminent nos membres on
va avoir cotisé sur nos masses salariales, mais on ne
bénéficiera pas des avantages. Ça, je pense que c'est tout
à fait aberrant et inacceptable.
Si on veut créer - et Dieu soit loué, on est d'accord avec
ça - un fonds d'investissement pour la formation des travailleurs dans
l'industrie de la construction, je pense que les associations doivent
être associées à ça - les associations
représentatives - et tous les travailleurs doivent en
bénéficier sans aucune forme de discrimination.
Mme Blackburn: Bien. Vous avez fait état de vos craintes
et vous avez présenté ces demandes-là au ministre. Quelle
réponse avez-vous reçue à ce jour?
M. Gingras: Bien, écoutez, le ministre ne nous a pas
donné de réponse formelle au moment où on l'a
rencontré. Je pense qu'on a exploré avec lui ces
questions-là et, quand il nous a rencontrés, il nous a dit: Je
suis en présence d'une entente privée et j'ai accepté de
lui donner suite. Alors, ce qui est inquiétant pour nous, et nous le lui
avons dit à l'époque, on a dit: On ne peut pas accepter et on va
contester avec toute l'énergie qu'on a qu'on fasse en sorte de
créer deux sortes de travailleurs dans l'industrie de la construction,
qu'on essaie de créer deux classes de travailleurs et deux classes de
représentants des travailleurs dans l'industrie de la construction.
Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, en commission, nous
dénonçons de façon aussi importante le projet de loi parce
qu'il ne reconnaît pas... il consacre aux parties qui sont signataires
d'une entente privée un rôle qui, à notre avis, devrait
être consenti aux parties reconnues en vertu de la loi. Et ça, je
pense que c'est tout à fait inacceptable. On l'a dit au ministre quand
on l'a rencontré et on revient à la charge parce que le ministre,
en prenant connaissance du projet de loi... À l'époque, quand on
l'a rencontré, il ne nous a pas dit ce qu'il avait l'intention de mettre
dans son projet de loi, mais quand on a vu le projet de loi, on s'est bien
rendu compte qu'on n'avait pas influencé nécessairement la
décision du ministre.
Mme Blackburn: Très bien. Très brièvement,
parce que mon collègue veut intervenir, il y a deux questions sur
lesquelles j'aurais aimé que vous nous pariiez un peu.
À deux endroits, à la page 3 et à la page 15, vous
rappelez des événements qui auraient été
malheureux: à l'hôtel Delta de Trois-Rivières et à
la Baie James. Vous dites qu'à la Baie James, ça s'apparente
à des films de cowboys et c'est un peu la loi de la jungle qui
règne là-bas. De quoi voulez-vous parier?
M. Gingras: Je vais demander à Michel Fournier, qui est le
président du syndicat, quand même, d'élaborer un petit peu
et je pourrai peut-être compléter par rapport à ces
dossiers-là.
M. Fournier (Michel): C'est que, sur des chantiers comme
ça, on assiste beaucoup à des monopoles de placement; des
associations représentatives placent des personnes influentes, genre
contremaîtres ou surintendants, qui font monter à la Baie James ou
sur des grands chantiers des travailleurs de leur association, en masse. Et
nous, ce qu'on peut appeler les minorités, on en souffre beaucoup, de
ça. C'est ça qu'on invoque.
M. Gingras: On a également fait part, je pense, au
ministre - et d'ailleurs, il a été saisi de certaines plaintes -
que depuis quelques mois, à certains endroits, il y a des
travailleurs
qui se font carrément fermer la porte et les employeurs nous
disent carrément: Bien, il y a des associations syndicales qui viennent
ici et qui nous disent que si on engage un membre de la CSD, à ce
moment-là, on aura des comptes à leur rendre. Alors, on a
déposé des plaintes, et je pense que le ministre est saisi de
certaines plaintes dans ce sens-là. Il y a même des
représentants syndicaux qui, actuellement, sont visés par des
plaintes qu'on a formulées.
Alors, quand on parle de ces cas-là, entre autres, on parle de la
FIPOE qui a exercé sur un de ses représentants, M.
Grégoire, de l'intimidation. Je pense que c'est notre membre, M.
Grégoire, qui a été discriminé. Et ça, je
pense qu'on a une preuve très claire, dans ce cas-là, d'une
personne qui n'a pas pu obtenir un emploi parce que, justement, on lui a dit
qu'il n'était pas dans la bonne centrale et qu'on embauchait uniquement
des gens d'une centrale particulière.
Alors, ça, c'est une pratique - si on soulevait tous les cas
d'exemples qu'on peut retrouver - qui est quand même assez connue
actuellement dans le secteur de la construction et qui ne pourrait changer que
si on faisait en sorte de mettre en place les mécanismes voulus pour que
les travailleurs obtiennent un emploi dans cette industrie-là en
fonction de leurs qualités professionnelles, de leur statut de
travailleurs de l'industrie de la construction et de leur capacité de
remplir les exigences de la tâche pour laquelle on cherche un
travailleur. Actuellement, ce n'est pas les critères d'emploi qui
prévalent dans l'industrie de la construction, malheureusement.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Notre rôle,
comme député, en premier, c'est d'être législateur
et de bien comprendre pour bien faire une loi, et la faire le mieux possible.
D'un autre côté, on est aussi un député d'un
comté et on a des gens qui ont des plaintes et qui ont des craintes
aussi. Alors, ma question va être surtout dans le contexte de gens qui
sont venus à nos bureaux, qui posent des questions et qui disent:
Pourquoi, nous aussi, on est discriminés individuellement? Vous parlez
de pluralisme, vous parlez de monopole, vous parlez de liberté de choix,
vous parlez de régime, dans certains cas, dictatorial, vous parlez de
discrimination.
Il y a des gens qui sont en vertu de la loi et des gens ont obtenu des
avis de la cour disant qu'ils faisaient affaire, pour leur propre compte,
qu'ils exécutaient pour autrui et sans l'aide de salariés des
travaux de construction -la Loi sur les relations du travail, la formation
professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la
construction, articles 19 et 120. Vous savez de quoi je veux parler.
Alors, vous dites que vous voulez, comme association, être reconnu
et être partie prenante à l'ensemble des décisions. Il y a
des gens qui disent: Écoute, moi, la seule chose que je fais,
Jean-Pierre - quand ils viennent me voir à mon bureau - je fais des
escaliers et c'est la seule chose que je fais à l'intérieur des
maisons. L'autre dit: Moi, ça fait des années que je m'occupe de
l'électricité, et là je n'ai plus le droit de travailler
individuellement, même si je suis un entrepreneur enregistré, puis
on m'oblige par de drôles de formules à m'incorporer - ce qu'il ne
veut pas faire, d'ailleurs. D'autres vont dire: Moi, je suis un tireur de
joints et, comme tireur de joints, j'ai des problèmes. C'est la seule
chose que je fais; je ne veux pas faire autre chose. On a la même chose
dans d'autres secteurs, dans l'entreprise lourde en particulier, où le
gars dit: Moi, la seule chose que je fais, c'est de l'excavation avec une
petite pépine, et c'est juste ça que je fais. Je ne veux pas
savoir si la grosse machine qui va monter dans les airs me donne... Ça,
je ne veux pas le faire, je ne veux jamais le faire. Je veux juste creuser des
petits trous. Et là il dit: Moi, je suis coupé.
Alors moi, ma question, même si je ne veux pas vous dire que je
suis d'accord ou en désaccord avec lui, je veux juste vous poser la
question à vous autres, qui êtes dans le milieu: Qu'est-ce qu'on
doit répondre à des gens comme ceux-là qui se sentent
à leur tour discriminés individuellement dans leur choix et dans
la liberté du choix qu'ils ont fait? Et moi, je veux savoir pourquoi
vous dites - j'ai compris ça et c'est pour ça que je pose la
question - ces travailleurs autonomes, on ne veut plus les voir dans le
circuit? Pourquoi eux? Pourquoi eux autres, individuellement, n'auraient pas le
droit que vous, comme petite association en termes de nombre, vous voulez
avoir? Pourquoi?
M. Gingras: Écoutez, M. Jolivet, sur ce dossier-là,
vous savez que ce n'est pas facile. L'industrie de la construction est quand
même composée d'une série de personnes qui voudraient bien
y oeuvrer, et y oeuvrer à leurs conditions et selon ce qu'elles
conçoivent que doit être l'industrie de la construction. Sauf que,
la façon dont ça oeuvre dans l'industrie de la construction, s'il
n'y a pas un minimum de cadre et de réglementation et si on ne respecte
pas les règles du jeu, à ce moment-là on vient
complètement chambarder tout ce qui se passe dans cette
industrie-là puis on en perd pratiquement le contrôle. Et quand on
dit actuellement que le travail au noir pollue l'atmosphère de
l'industrie de la construction, il faudrait que vous soyez sur le terrain,
là, pour voir ce que ça signifie. C'est incroyable, la situation
qu'on vit.
Alors, comment peut-on assainir les milieux de travail et l'industrie de
la construction si on n'a pas un minimum de règles, connues toutefois?
Alors, moi, je dis à ces entrepreneurs et à ces personnes ou ces
travailleurs qui veulent tra-
vailler qu'habituellement les règles qui sont là - s'ils
sont d'authentiques travailleurs comme ceux que vous me mentionnez - permettent
à certains pour qui ce n'est pas automatique, quand même, d'aller
faire reconnaître leur statut et leur compétence, d'aller les
faire reconnaître par un mécanisme. Et ça, si à un
moment donné ils veulent le faire, ils peuvent venir nous voir et,
à ce moment-là, on va essayer de voir comment on est capables de
les représenter vis-à-vis de ces mécanismes-là. Et,
d'ailleurs, on le fait actuellement pour des travailleurs qui ont perdu leurs
droits, ou des choses de même, puis on est capable de faire
établir leurs droits. On est capable de le faire. Il y a des
mécanismes. (11 h 30)
Je pense qu'on ne doit pas écarter des travailleurs qui ont
vraiment un statut de travailleurs de la construction par une mécanique
et ne pas s'en soucier après. Ça, je pense que là-dessus
on doit avoir un minimum de souplesse pour faire en sorte qu'on reconnaisse
leurs droits. Mais, en même temps, l'industrie a besoin d'être
épurée aussi. On ne peut pas accueillir n'importe quand,
n'importe qui dans l'industrie de la construction, qui va venir
"compétitionner".
M. Jolivet: Le problème que j'ai, M. Gin-gras, il va
être rapide, là. C'est parce que, moi, je me fais l'avocat du
diable, vous le comprendrez très bien.
M. Gingras: Bien oui.
M. Jolivet: Pour bien comprendre les choses, il faut des fois le
faire. Je vous dirai que l'individu dit: Moi, je suis un entrepreneur,
j'entreprends la bâtisse au complet, mettons, mais je n'ai même pas
le droit de travailler dedans parce que c'est une maison neuve. Tandis que si
je fais de la réparation, j'ai le droit. Quand je fais de la
construction, je ne peux pas être entrepreneur enregistré, il faut
que je sois entrepreneur incorporé. Puis je ne veux pas l'être,
entrepreneur incorporé, ce n'est pas ça que je veux. Je veux
m'assurer de faire le petit travail dont j'ai besoin. Puis il ne pourrait
même pas construire sa propre maison.
Le Président (M. Bélanger): Oui, alors, M. Gingras,
une réponse très rapide.
M. Gingras: Mais sur ça, écoutez, moi, je pense que
votre entrepreneur qui veut bâtir sa propre maison, je pense qu'il n'y a
rien qui l'empêche de la bâtir.
M. Jolivet: Non, non, je comprends, je comprends. Ce que je veux
dire... Je veux m'amuser. Mais ce que je veux dire, c'est quand il fait une
maison pour d'autres.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de
Laviolette, malheureusement, le temps est écoulé. Alors,
si M. le ministre voulait bien, là...
M. Cherry: D'abord, M. le Président, je voudrais remercier
M. Gingras et ses collègues de s'être déplacés
aujourd'hui et puis d'avoir présenté le mémoire qu'ils ont
fait. Soyez assurés que vos représentations, je leur ai
accordé de l'attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui,
évidemment, va nous apporter beaucoup de travail, puis on va continuer
à tenter de cheminer ensemble. Donc, encore une fois, merci de vous
être déplacés et merci pour votre présentation de ce
matin.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi, si vous voulez remercier nos
invités.
Mme Blackburn: Oui, je voudrais vous remercier de votre
présence ici. Le ton était viril, comme on dit dans notre milieu.
Je dois dire que j'ai apprécié la franchise et les
recommandations. Nous aurons l'occasion d'en parler plus longuement au moment
où on examinera le projet article par article. Je vous remercie de votre
présence ici aujourd'hui, en dépit du peu de temps que vous avez
eu pour préparer votre mémoire.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
remercie la Centrale des syndicats démocratiques pour sa
présentation. J'inviterais à la table maintenant la
Confédération des syndicats nationaux, section construction.
Alors, j'inviterais donc la Confédération des syndicats
nationaux-Construction à prendre place à la table, s'il vous
plaît. C'est M. Lemieux. Alors, bonjour M. Lemieux.
Confédération des syndicats nationaux,
section construction
M. Lemieux (Olivier): Bonjour, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): II nous fait plaisir de
vous accueillir à la commission. J'aimerais, dans un premier temps, si
la chose est possible, que vous nous présentiez les gens qui vous
accompagnent et, à chaque fois aussi qu'un membre de votre équipe
aura à intervenir, qu'il veuille bien s'indentifier. Ceci aide
grandement les gens qui sont à la dactylographie des débats
là, qui sont dans une autre pièce et qui ne vous voient pas.
Alors, s'il vous plaît, sans plus tarder, on vous écoute.
M. Lemieux (Olivier): Très bien, à ma droite,
Edouard Duchesne, premier vice-président de la fédération,
à sa droite, Robert Le-vesque, trésorier de la
fédération, à ma gauche, Jean-Noël Bilodeau,
coordonnateur de la CSN-
Construction, et à sa gauche, Roger Trépanier, conseiller
à la fédération.
Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire sur
l'économie et le travail, nous remercions le ministre du Travail, M.
Normand Cherry, et la critique de l'Opposition, Mme Jeanne Blackburn, pour le
privilège qui nous est accordé de venir témoigner sur les
projets de loi 185 et 186 que le gouvernement a déposés le 14
novembre dernier à l'Assemblée nationale.
La CSN-Construction représente au Québec plus de 32 000
salariés de l'industrie de la construction. Elle compte dans ses rangs
des travailleuses et travailleurs de tous les métiers, des compagnons et
des apprentis ainsi que des travailleuses et travailleurs d'occupations
diverses, et ce, dans toutes les régions du Québec.
Ces deux projets de loi revêtent une telle importance pour nos
membres que nous avons demandé au ministre, lors de leur
dépôt, de nous entendre en commission parlementaire. Nous avons
demandé à être entendus parce qu'à l'issue d'une
première lecture, certains éléments de ces projets de loi
nous sont apparus inquiétants et nous ne voudrions pas, comme
organisation syndicale représentative, rester sur l'impression que nous
sommes sur le point d'assister à une opération de camouflage des
vrais problèmes de l'industrie, celui des chantiers noirs et celui des
entreprises clandestines.
Aussi, l'obtention de cette rencontre avec votre commission nous rassure
car elle nous permettra, sans nul doute, de mieux comprendre le
législateur quant aux motifs qui l'ont vraisemblablement inspiré
dans la rédaction des projets de loi concernés. Au besoin, nous
tenterons modestement de l'éclairer sur certaines de nos
appréhensions et nous nous permettrons quelques suggestions ou ajouts
que nous estimons nécessaires à la bonne compréhension de
ces textes de loi.
Le projet de loi 185: Le ministre nous a promis, à la suite du
dépôt du rapport Picard-Sexton en juin 1990, de mettre tout en
oeuvre pour faire en sorte que la recommandation de ce rapport soit
entérinée par le gouvernement. Pour l'industrie de la
construction, ce rapport était la somme de plusieurs années de
travail, de recherche et de négociations.
Bien avant le dépôt de ce rapport les parties syndicale et
patronale avaient proclamé l'urgence de trouver des solutions aux
problèmes épineux de l'industrie, notamment ceux ayant trait aux
entreprises clandestines effectuant du travail au noir. Déjà, en
1983, la CSN-Construction publiait un dossier majeur sur un
phénomène qui grandissait alors à une vitesse
stupéfiante, alimenté qu'il pouvait l'être alors par une
récession économique. Dans ce dossier la CSN-Construction faisait
ressortir, au moyen de données économiques indéniables,
que les chances d'emploi des vrais travailleurs de l'industrie de la
construction étaient devenues inversement proportionnelles à la
croissance en valeur des travaux. Plus de 30 % des travaux, affirmions-nous
alors, étaient entrepris par des "jobineux", des artisans, des
entrepreneurs clandestins qui embauchaient à cette fin des travailleurs
qui n'étaient munis d'aucune carte de qualification. À un point
tel que plus de 22 000 vrais travailleurs de cette industrie étaient
menacés, cette année-là, de perdre leurs cartes parce
qu'ils n'avaient pas accumulé le nombre d'heures nécessaires
à leur renouvellement.
Il aura fallu attendre quelque huit ans avant que le gouvernement ne
bouge. Une loi poreuse, des entreprises enclines à tromper aussi bien la
loi que les décrets à cause du laxisme gouvernemental, des
travailleurs dont les conditions étaient soumises quotidiennement au
chantage de l'exploitation nous ont enfoncés graduellement dans le
marasme que nous connaissons aujourd'hui. Au cours du mois de novembre, la
CSN-Construction, à elle seule, a déposé plus de 215
plaintes relatives à des chantiers noirs et ce, dans la seule
agglomération montréalaise. Le phénomène est loin
de se résorber, il s'amplifie. Nous en avons les preuves: nos militants
ont identifié, lors de visites surprise sur des chantiers, plus de 500
travailleurs sans carte dans la même période.
Le projet de loi 185 se veut, au dire du gouvernement et de son
ministre, une réponse aux inquiétudes de l'industrie. Il
concrétiserait les recommandations du rapport Picard-Sexton et
traduirait la volonté du gouvernement de mettre fin aux chantiers noirs
au Québec. La CSN-Construction voudrait bien y croire mais elle a de la
difficulté, à la lecture du projet de foi, à comprendre le
lien qui peut exister entre ce projet de loi et les recommandations du rapport
des commissaires Laurent Picard et Jean Sexton. Les commissaires Picard et
Sexton recommandaient, à la page 132 de leur rapport, que le statut
d'entrepreneur autonome soit abrogé, à l'exception des
entrepreneurs de machinerie lourde et des entrepreneurs en excavation et
terrassement, et que la loi ne reconnaisse que les statuts d'entrepreneur et de
salarié; que les entrepreneurs autonomes existants choisissent entre
l'un ou l'autre des statuts d'entrepreneur ou de salarié.
Ce n'est certainement pas ce que le ministre a retenu, puisque le projet
de loi 185 confirme leur existence et reconfère à ce statut
d'entrepreneur une légalité que notre organisation dénonce
depuis 1979, soit depuis la loi 110 consacrée à la notion
d'entrepreneur artisan. Les commissaires ont pu, lors de leurs travaux,
vérifier les assertions de notre dossier de 1983 sur les chantiers noirs
et ils notent, à la page 131 de leur rapport, qu'il y a eu
prolifération nette d'artisans d'abord et d'entrepreneurs autonomes
ensuite - quelque 10 000 en 1989 - qui non seulement érodaient le nombre
d'heures
habituellement effectuées par les entrepreneurs et par les
travailleurs de la construction mais qui ont vite débordé du
secteur résidentiel. En effet, note-t-il, on a retrouvé, certes
de façon illégale mais quand même réelle, les
artisans et les entrepreneurs autonomes dans d'autres secteurs de la
construction, notamment dans les secteurs résidentiel et commercial.
L'effet d'effritement était alors accentué d'autant.
Lorsque le gouvernement a adopté, en 1988, le projet de loi 31 en
vue d'exclure du champ d'application les travaux de réparation,
d'entretien, de modification et de rénovation dans le secteur
résidentiel, il venait d'ouvrir la porte toute grande à la
déréglementation du secteur résidentiel. Cette fois, nous
craignons que, sous le couvert du projet de loi 185 qui resserre la notion
d'entrepreneur autonome, il ne fasse que garder ouverte la porte que nous
voulions fermer à la déréglementation et à la
désyndicalisation des autres secteurs de l'industrie, une porte ouverte
aux excès.
Ces efforts pour modifier la définition de l'entrepreneur
autonome sont louables. Les trous de cette définition auront permis,
notamment depuis la loi 31, d'accentuer le phénomène que nous
dénoncions. Les avocats et les responsables de l'application du
Décret à la Commission de la construction du Québec
n'arrivaient pas à circonscrire cette notion de manière à
rendre possibles les poursuites prévues par la loi contre les
illégaux.
Le ministre, en précisant que l'entrepreneur autonome sera soit
une personne physique, une corporation ou une société, devra
cependant, s'il veut éviter de nouvelles ambiguïtés,
préciser du même souffle quelques notions exprimées dans
son projet de loi. Ainsi, à l'article 1. k.1) ii. de la loi, il est dit
que l'entrepreneur autonome est celui qui, pour autrui et sans l'aide de
salariés à son emploi, exécute lui-même "des travaux
d'entretien, de réparation et de rénovation mineure visés
à la présente loi". Pourquoi ne pas préciser cette notion
par une formule que la plupart des intervenants de l'industrie ont pourtant
suggérée lors de consultations en 1988, soit celle des "travaux
d'entretien, de réparation et de rénovation mineure d'une valeur
inférieure à 10 000 $"? Voilà qui ferait en sorte de
soustraire à l'appétit des entrepreneurs autonomes un champ
d'application que le législateur n'entend certainement pas lui donner
dans le cadre de cette loi.
Nous pourrions lire ainsi l'article: "des travaux d'entretien, de
réparation et de rénovation mineure d'une valeur
inférieure à 10 000 $ visés à la présente
loi, si cette licence est relative à toute autre
sous-catégorie".
Il serait également important que le législateur
précise le rôle de l'entrepreneur autonome. L'entrepreneur
autonome pourrait-il encore être à la fois un employeur et un
salarié et s'octroyer, par exemple, les privilèges du
salarié relativement aux avantages sociaux et, par extension, d'autres
privilèges tels que l'accès aux programmes de recyclage et de
perfectionnement pour lesquels le ministre a permis récemment la
création d'un fonds.
Que le ministre ajoute, l'article 19.2 à la loi R-20. Est-ce
qu'il est prêt à convenir que cette ambiguïté demeure
lorsqu'on peut lire: "un employeur ou un représentant
désigné en vertu de l'article 19.1 ne peut exécuter des
travaux de construction qu'avec l'aide d'au moins un salarié de
l'entreprise, sauf s'il s'agit d'un entrepreneur autonome ou du
représentant désigné d'un entrepreneur autonome"?
Tel que rédigé, cet article pourrait permettre à un
employeur de travailler sur un chantier avec l'aide d'un entrepreneur autonome,
à moins que celui dont il s'agit dans l'article se réfère
bien à l'employeur et non au salarié. Tel que
rédigé, cet article pourrait également vouloir dire que
l'employeur ne peut pas travailler s'il embauche un entrepreneur autonome.
Quelque part dans ce texte nous donnons certainement à
l'entrepreneur autonome le droit de travailler à des travaux de
construction autres que ceux pour lesquels la loi a créé son
existence. Dans les dispositions transitoires, le législateur
élimine la notion d'entrepreneur spécialisé au profit de
celle d'entrepreneur autonome. Veut-il par là conférer à
l'entrepreneur autonome le privilège accordé à
l'entrepreneur spécialisé de travailler seul pour un employeur
professionnel? Ce n'est sûrement pas l'intention du ministre.
Nous suggérons d'écrire l'article de la façon
suivante: "19.2 Un employeur ou un représentant désigné en
vertu de l'article 19.1 ne peut exécuter des travaux de construction
qu'avec l'aide d'au moins un salarié de l'entreprise."
Dans le dossier des chantiers noirs, la CSN-Construction demandait que
l'on attribue aux représentants syndicaux le pouvoir de vérifier
les permis de travail et la licence d'entrepreneur, ainsi que celui de faire
arrêter les travaux de tout chantier susceptible d'abriter une
main-d'oeuvre clandestine ou la présence d'entrepreneurs sans permis, et
ce, sans perte de salaire pour les vrais travailleurs de la construction
oeuvrant sur le chantier.
Ces recommandations ont été soumises par la
CSN-Construction à la commission Picard-Sexton. La CSN-Construction est
persuadée que le phénomène des chantiers clandestins ne
s'arrêtera jamais tant et aussi longtemps que la loi n'aura pas les dents
suffisamment longues pour faire cesser de telles activités. Aussi, la
CSN-Construction vous suggère d'amender l'article 7.1 de la loi R-20 en
ajoutant un troisième paragraphe qui se lirait comme suit: (11 h 45)
"3° ordonner à toute personne qui exécute elle-même des
travaux de construction sans être titulaire, soit d'un certificat de
compétence compagnon, soit d'un certificat de compétence
occupation, soit d'un certificat de compétence apprenti, ou soit
d'une exemption délivrée par la Commission, ou sans avoir en sa
possession ce certificat ou une preuve d'exemption de quitter
immédiatement le chantier de construction et de ne le
réintégrer qu'au moment où elle démontre qu'elle
est détentrice d'un tel certificat ou d'une telle exemption."
Visa le noir. Lorsque le projet de loi 185 veut montrer les dents, il
nous réfère aux articles nouveaux 119.2, 119.3, 119.4 et 119.5.
Entre vous et nous, quand vous avez terminé leur lecture, qui,
croyez-vous, sera le plus pénalisé? Celui qui paie une amende ou
celui qui perd son certificat de compétence? S'il s'agissait d'une
automobile, on dirait que celui qui conduit perd son permis mais que le
propriétaire peut toujours continuer d'opérer ou de faire
opérer le véhicule moyennant une amende à verser. Pourquoi
la responsabilité n'est-elle pas équivalente? Pourquoi le
détenteur de la licence d'entrepreneur ne verrait-il pas sa licence
suspendue en même temps que le certificat de compétence de celui
qu'il a embauché et qu'il a fait travailler à des fins
illégales? Lorsque nous tentons d'obtenir des explications sur cette
disparité des sanctions qui touche distinctement le travailleur et
l'employeur, on nous répond qu'il faut lire pour cela le projet de loi
186, ce que nous avons fait.
Nous reconnaissons que la Régie pourrait se doter de tels
pouvoirs, mais on nous explique également dans les articles 83 et 84 que
les sanctions prévues à l'égard des employeurs
s'établiront selon un système de points d'inaptitude! Sans doute
que le modèle du Code de la route a été retenu ici mais
n'a pas été retenu là par le même
législateur. La faute commise par un travailleur sera durement
sanctionnée en lui supprimant son droit au travail, alors que celle
commise par celui qui l'embauche sera évaluée selon son
degré d'inaptitude qui ne touchera que son portefeuille.
Les commissaires Laurent Picard et Jean Sexton avaient pourtant
recommandé des sanctions équivalentes pour ceux qui pratiquaient
le travail au noir. Les voici: "que tout employeur qui fait effectuer des
travaux au noir ou qui tente d'en faire effectuer soit passible d'une amende
sévère pour toute récidive, que sa licence d'entrepreneur
soit révoquée par la Régie des entreprises de la
construction pour une période de trois ans et qu'il soit tenu, en plus,
de verser une nouvelle amende; "que tout travailleur qui effectue du travail au
noir soit passible dune amende sévère pour toute récidive
et que son certificat de compétence soit suspendu pour un an et qu'il
soit de plus tenu de verser une nouvelle amende."
Nous avions critiqué les commissaires pour cette attaque du droit
au travail, estimant que la suspension d'un certificat de compétence
était de nature beaucoup plus grave que la suspension d'une licence,
estimant également que, dans la plupart des cas, les travailleurs
étaient placés dans l'obligation d'exécuter du travail au
noir pour des entrepreneurs sans scrupule, utilisant leur condition
systémique d'insécurité pour les forcer à
exécuter de telles tâches prohibées.
Pourquoi le législateur s'en prend-il aux travailleurs
plutôt qu'aux entrepreneurs, à ceux qui sont embauchés
plutôt qu'à ceux qui embauchent? Pourquoi menacer et sanctionner
ceux qui n'ont qu'une part secondaire et incidente de responsabilités?
Ces nouveaux articles sont tout simplement inacceptables dans leur forme
actuelle et risquent d'augmenter l'injustice sociale et
l'insécurité dont sont victimes les travailleurs de l'industrie
de la construction qui, à la différence des autres personnes
syndiquées du Québec, n'ont aucune forme d'ancienneté ou
de sécurité d'emploi et de revenu. Nous vous suggérons
plutôt d'introduire cette notion de responsabilité des
entrepreneurs quant au travail au noir: "119.2 Tout employeur qui est
déclaré coupable d'une infraction prévue à
l'article 83.1 ou à l'un ou l'autre des paragraphes 1, 3, 4, 9, 11 et 12
de l'article 119.1 de cette loi, en outre de la peine prévue pour cette
infraction, sa licence ou le renouvellement de sa licence est suspendu pour une
période de 1 à 3 mois."
La période de suspension prévue au premier alinéa
est de trois à six mois si la licence de cet entrepreneur ou son droit
d'obtenir la délivrance ou le renouvellement d'une licence a
été suspendu dans les deux ans.
Au cours des dernières années, nous avons
accompagné et soutenu une coalition syndicale représentant plus
de 60 % des salariés de l'industrie de la construction dans la seule
perspective d'obtenir, pour l'ensemble des travailleuses et travailleurs de
notre industrie, une forme de sécurité d'emploi et de revenus. Ce
que nous obtenons aujourd'hui est bien mince. Nous réalisons qu'une fois
les textes de loi écrits nos principales revendications demeurent et que
la lutte contre le braconnage de nos emplois doit continuer. Il n'est pas dit
que les travailleurs de l'industrie laisseront leurs emplois et céderont
leurs droits au travail au profit d'entrepreneurs autonomes dont la seule
existence n'est due qu'à l'intérêt de certains de vouloir
à tout prix déréglementer et désyndiquer
l'industrie.
Le projet de loi 185, il est triste de le constater, nous apparaît
comme une déviation du projet initial qui a amené la
création de la commission Picard-Sexton. Nous sommes forcés de
reconnaître qu'à moins de modifications majeures certains effets
de ce projet de loi, s'ils ne sont pas corrigés, iront à
l'encontre des intérêts des travailleuses et travailleurs de
l'industrie de la construction.
Le projet de loi 186. Le projet de loi 186, pour sa part, est un
élément essentiel d'une véritable politique de
qualité de l'habitation au Québec et le législateur ne se
trompe pas en
élaborant attentivement tous les éléments
nécessaires à la mise en place de cette qualité qui fait
défaut principalement dans le secteur de la construction
résidentielle.
Tout en demeurant critiques de la structure mise en place par cette loi,
nous considérons certaines des notions nouvelles qui y sont introduites
comme particulièrement importantes dans le contexte actuel. La
CSN-Construction apprécie particulièrement l'introduction de
cadres d'ententes avec les municipalités, l'obligation d'adhésion
à un plan de garantie ainsi que la création d'un fonds
d'indemnisation.
La comparaison avec la Loi sur le bâtiment introduite par le
gouvernement péquiste et sanctionnée le 20 juin 1985, mais dont
peu d'articles avaient été promulgués, nous a permis de
constater que le nouveau projet de loi élargissait de façon
significative les pouvoirs de la nouvelle Régie. À cet effet,
nous croyons que l'industrie de la construction devrait alors être plus
présente, mieux représentée que le texte du projet de loi
ne le suggère, afin d'éviter de créer là un monstre
bureaucratique dont nous pourrions regretter un jour la création.
Du pareil au même? Dans le dossier des chantiers noirs, la
CSN-Construction avait dénoncé et réclamé
l'abolition de la Régie des entreprises de la construction du
Québec qui s'est avérée une véritable passoire
d'artisans et d'entrepreneurs spécialisés. Ceux-ci pouvaient y
obtenir sans véritable vérification, moyennant seulement un
montant d'argent minime, leurs licences d'entrepreneurs. Nous la
dénoncions car elle nous apparaissait comme l'outil de la
réglementation des chantiers ainsi que le tiroir-caisse du gouvernement
pour empocher les contributions des entrepreneurs sans exercer sur ces derniers
un véritable contrôle de leurs qualifications.
Le Président (M. Bélanger): M. Lemieux, en principe
le temps de la présentation serait écoulé. Vous avez
besoin encore de combien de temps?
M. Lemieux (Olivier): Environ 7 à 8 minutes, là,
peut-être moins.
Le Président (M. Bélanger): De 7 à 6
minutes? Parfait, alors il n'y a pas de problème. Bien, alors, si vous
voulez continuer; je m'excuse.
M. Lemieux (Olivier): Merci. Ces assertions ont été
confirmées seulement l'an dernier. Plus de 2 000 000 $ ont
été versés par la RECQ au fonds consolidé du revenu
dans la province alors que la CCQ est incapable, faute de ressources
financières suffisantes, d'assumer le dossier de formation
professionnelle de la main-d'oeuvre de l'industrie que le même
législateur lui confiait par la loi 119.
Quant au nombre d'entrepreneurs spécialisés, il y en
aurait, selon les derniers chiffres, plus de 10 000 qui occupent, ne le cachons
pas, les emplois des vrais travailleurs de l'industrie, tant dans le secteur
industriel que dans les secteurs commerciaux.
Le projet de loi abroge cette Régie. Nous applaudissons. Il
fallait la sortir du décor. Cependant, la nouvelle Régie, qui se
dotera éventuellement de la réglementation nécessaire pour
effectuer les contrôles de qualification des entrepreneurs et des
entreprises inscrites dans son nouveau fichier, agira-t-elle
différemment de l'ancienne? Nous voulons être rassurés par
le ministre du Travail.
Dans le texte du projet de loi il est prévu de doter la
Régie du bâtiment de cinq régisseurs nommés par le
gouvernement. Y en aura-t-il qui seront nommément choisis dans le cadre
de consultations avec l'industrie? Y en aura-t-il un qui sera choisi parmi les
noms qui auront été suggérés par les associations
syndicales représentatives et un autre par les associations patronales
représentatives? L'avenir démocratique de cette régie en
dépend.
En élargissant le cadre de ses responsabilités, en lui
attribuant des pouvoirs de réglementation, en la dotant d'un
véritable service d'inspection, nous sommes persuadés qu'il lui
faudra s'adjoindre au plus haut niveau les compétences partagées
de l'industrie. Le projet de loi, à l'opposé du projet de loi 53,
retient l'idée d'un comité consultatif composé de 16
membres. À l'idée de composer un comité consultatif avec
autant de personnes, nous ne comprenons la si petite place que le
législateur réserve aux associations syndicales
représentatives de l'industrie de la construction, alors qu'il en
attribue cinq aux associations patronales. Nommez-en trois de plus dans le camp
synndical, M. le ministre. Nous vous assurons qu'il n'y aura pas de jaloux, et
tous les travailleurs de l'industrie seront alors
représentés.
Actuellement, dans les divers comités mis récemment sur
pied par le gouvernement, ou qu'il s'apprête à mettre sur pied,
les associations syndicales représentatives sont toujours
présentes. Pourquoi ne pas y appliquer la même règle du
pluralisme? La démocratie saura sûrement mieux s'en porter.
Dès le début du projet de loi, nous constatons à
l'article 13 que la nouvelle Régie aura comme mandat d'adopter un code
de la construction. N'y aurait-il pas lieu, comme d'autres lois le font, d'y
inscrire un processus de prépublication faisant en sorte que les parties
puissent faire des représentations? Une telle consultation était
prévue a l'article 190 dans le projet de loi 53, mais le projet de loi
186 vient l'abroger.
La CSN-Construction estime que cette consultation qui oblige la
Régie à travailler à découvert est une étape
essentielle de tout processus de réglementation. Il serait
extrêmement dommage de soustraire du processus cette consultation
essentielle. Aussi demandons-nous au
ministre du Travail de biffer l'article 87 de son projet de loi.
La CSN-Construction, qui a longtemps dénoncé l'absence de
qualification des entrepreneurs dont les travaux exécutés font
l'objet de dizaines de milliers de plaintes de consommateurs chaque
année à l'Office de la protection du consommateur du
Québec, tient à souligner la nécessité d'encadrer,
comme le projet de loi le propose, la qualification des entrepreneurs. Les
solutions proposées devraient donner les résulats
souhaités en autant, bien sûr, que les articles de ce projet de
loi, une fois en vigueur, soient respectés par les entrepreneurs de
l'industrie.
La loi 119 sur la formation et la qualification de la main-d'oeuvre de
l'industrie de la construction a occasionné la préparation de
vastes programmes de formation pour les travailleuses et travailleurs de
l'industrie. Malheureusement, cette mise en place connaît les
ratés que vous savez à cause de l'insuffisance de fonds et de
l'absence de transferts financiers qui auraient normalement été
effectués en même temps que de tels mandats publics. Nous
comprenons que de tels problèmes n'existeront pas à la nouvelle
Régie puisque ses opérations seront entièrement
financées à même les crédits votés à
cette fin par l'Assemblée nationale, article 64.
Les municipalités. Lors des travaux de la commission
Picard-Sexton, la CSN-Construction avait déposé des
recommandations pour faire en sorte que les municipalités du
Québec soient tenues de transmettre à la CCQ les informations
relatives au lieu du chantier et à la valeur de la construction pour
chaque permis de construction délivré. La Commission avait retenu
nos suggestions. Nous remarquons, à l'article 18 du projet de loi, que
le législateur retient à son tour nos suggestions. Nous croyons
toujours que cette démarche des municipalités est
nécessaire pour faire en sorte que puisse s'exercer un contrôle de
la qualification. La CCQ pourrra, dès lors, en consultant le fichier de
la Régie, améliorer sensiblement son service d'inspection et de
contrôle.
Toutefois, lorsque nous lisons à 28.2 qu'un tel article ne
s'appliquera que dans la mesure où une entente écrite est conclue
entre la Régie et la municipalité, nous estimons qu'il s'agit
là d'un geste timide qui risque d'être inefficace. Il serait
préférable alors de biffer l'article 28.2 et de modifier
l'article 28.3 de la façon suivante: "Une municipalité doit
conclure avec la Régie une entente visée à la
présente section."
En conclusion, M. le Président, dans l'ensemble, le projet de loi
186 nous apparaît plus conforme aux recommandations du rapport
Picard-Sexton que le projet de loi 185. Si le même esprit avait
prévalu dans les deux projets de loi, la CSN-Construction serait venue
vous dire sa satisfaction vis-à-vis de l'intérêt
nouvellement porté par le gouvernement pour contrer le problème
du travail au noir et des entreprises clandestines et non qualifiées.
Malheureusement, nous croyons que dans sa rédaction actuelle le projet
de loi 185 risque de frapper à côté de la cible. Au lieu de
"viser le noir", nous craignons qu'il risque d'affecter sérieusement le
droit au travail déjà menacé des vrais travailleuses et
travailleurs de la construction.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Cherry: Merci. Je vais, par des questions, tenter de vous
permettre d'élaborer sur certaines choses qui sont dans votre
mémoire. Vous avez parlé, à un moment donné, d'une
enquête rapide que vous avez faite dans un quartier de Montréal,
qui vous a permis de découvrir un nombre... si ma mémoire est
bonne, c'est 217 que vous nommez là-dedans?
M. Lemieux (Olivier): C'est ça, 215.
M. Cherry: Pardon?
M. Lemieux (Olivier): 217 plaintes.
M. Cherry: Est-ce que je me réfère au bon endroit
quand je dis que c'est une opération qui avait été
conduite dans les quartiers de Rose-mont, qui avait obtenu une certaine
publicité dans les médias?
M. Lemieux (Olivier): C'est dans un des quartiers, oui.
M. Cherry: Donc, par rapport à celui-là, est-ce que
vous pouvez préciser s'il s'agissait là de constructions neuves?
Est-ce qu'il s'agissait de rénovations? Vous, vous l'avez faite. Est-ce
qu'il s'agissait, dans un premier temps, de bien savoir? Parce que j'aimerais,
quand vous aurez répondu à ça, immédiatement
après, enchaîner. Est-ce que c'étaient tous des
contracteurs différents? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Lemieux (Olivier): En fait, là-dessus, il y a eu
environ 700 visites dans tout l'ensemble. Il y a eu les plaintes. Mais, dans
l'ensemble, c'était surtout des travaux de réparation
commerciale. Et, en fait, c'est écrit dans le mémoire. On a vu
environ 500 travailleurs qui ne possédaient pas les permis requis pour
travailler dans l'industrie de la construction. Et on a aussi des photos qui
ont été prises lors de ces visites aussi pour confirmer, avec les
adresses des chantiers à l'endos des photos. Disons que c'est une
opération qui a été organisée par le syndicat de la
construction de Montréal, où on retrouve présentement,
surtout à Montréal, beaucoup de chômage dans l'industrie de
la construction. Et ce sont nos chômeurs qui s'organisent ensemble pour
essayer de se trouver de l'emploi et effectuer des visites sur certains
chantiers de la région de
Montréal. (12 heures)
M. Cherry: O.K. Toujours sur le même... Vous venez de
préciser qu'H s'agit de chantiers de nature commerciale. Je vous
demanderais, dans votre esprit, de nous faire la distinction, dans un premier
temps, et dans un deuxième temps, par rapport à une des
recommandations qui se trouvent dans votre mémoire, par rapport à
un montant maximum de 10 000 $, voulez-vous tenter de me joindre les deux et de
me l'expliciter, s'il vous plaît?
M. Lemieux (Olivier): En fait, lorsque la loi 31 a
été promulguée en juin 1988, nous, on s'était dit,
au niveau de la CSN-Construction, qu'il devrait y avoir un maximum de travaux
de réparation pour une personne physique qui est non assujetti au
décret, avec un maximum qu'on pourrait évaluer, par exemple,
à 10 000 $.
Par contre, dans le cadre de travaux commerciaux, ce qui a
été bien clair avec les équipes qui font les patrouilles -
appelons-les comme ça - c'est important qu'ils fassent seulement que du
commercial pour ne pas que notre enquête - appelons ça
"enquête" - soit valable. Dans la première semaine, disons qu'il y
avait un peu de confusion entre ce qui est assujetti et ce qui n'est pas
assujetti à l'industrie. On a clarifié et on a dit: Non. Quand
c'est un propriétaire, une réparation mineure, selon la loi 31,
c'est non assujetti. On a dit: Allez dans le commercial pour être
sûr que notre enquête et notre rapport soient valides lorsqu'on les
sortira. Ça a été bien clair avec les équipes qui
font la tournée des chantiers.
M. Cherry: O.K. Juste pour bien saisir la distinction que vous
faites entre "rénovation mineure" et "commerciale", si je saisie bien,
c'est quand le propriétaire les fait lui-même même dans une
résidence. C'est pour ça que je vous demande de préciser.
C'est important qu'on... Un des problèmes qu'on a souvent c'est que,
quand on connaît bien notre matière, on pense que tous les gens la
connaissent très bien. Donc, c'est vous offrir l'occasion de
l'expliciter, s'il vous plaît.
M. Lemieux (Olivier): En fait, lors de nos visites, aussi, plus
de 90 % de nos plaintes ont été fondées. Mettons que vous,
M. Cherry, réparez votre maison. Vous avez le droit d'embaucher des
travailleurs qui ne sont pas assujettis au décret de la construction. Si
c'est quelqu'un qui possède un commerce... Si j'ai mon salon de coiffure
et que j'entreprends des travaux mineurs, eh bien, j'ai le droit d'embaucher un
entrepreneur autonome. C'est ça la notion.
En fait, les recommandations qu'on fait c'est pour clarifier ça,
parce qu'on pense que déjà, pour beaucoup de gens, c'est la
confusion.
C'est pour ça qu'on dit que dans le rapport Picard-Sexton il y
avait deux notions: II y avait l'entrepreneur et il y avait le salarié.
Alors, comme ça il n'y aura plus d'ambiguïté, il n'y aura
plus de confusion. Les inspecteurs pourront faire leur travail et nos
conseillers pourront faire leur travail sur les chantiers de construction.
M. Cherry: O.K. Dans un autre aspect de votre mémoire,
vous parlez de la perception que vous avez de la sévérité
par rapport aux travailleurs et, pas suffisamment, selon vos propos,
vis-à-vis de l'entrepreneur. J'aimerais que vous explicitiez votre
perception, juste pour fins de discussion entre nous.
Vous suggérez que l'on puisse suspendre la licence de
l'entrepreneur immédiatement, s'il était trouvé coupable.
Supposons qu'il embauche - pour fins de discussion - sur le chantier. 25 ou 50
travailleurs légaux. Ils travaillent pour un patron qui lui, ne l'est
pas et qui viendrait d'être pris. On l'évincé, on
l'évacué. Est-ce que, automatiquement, là... Qu'est-ce qui
arrive avec les 50 travailleurs sur le chantier? Parce que celui qui avait
obtenu le contrat et qui vient de le perdre, parce qu'il était
illégal et qu'H a été évincé, est-ce qu'on
doit revenir en appel de soumissions? Qu'est-ce qui arrive à ces
travailleurs-là en attendant? Qu'est-ce qui arrive s'il y a une date de
livraison pour le produit indiquée? Est-ce que vous avez estimé
les impacts des coûts de ça et pour les travailleurs, et pour les
consommateurs, par rapport à une situation telle que je la
décrit, dans l'hypothèse où je retiendrais la
présentation que vous faites?
M. Lemieux (Olivier): En tout cas, moi, M. le ministre, je
pense... Dans le cas que vous me citez, une entreprise qui emploie,
règle générale, au-delà de 10 ou 15 salariés
dans l'industrie, très rarement, ces compagnies embauchent des
travailleurs illégaux. On sait que la moyenne des entrepreneurs dans
l'industrie de la construction embauche moins de 5 salariés. C'est
surtout à ce niveau-là qu'on retrouve l'épidémie.
Règle générale, les gros entrepreneurs qui embauchent plus
de 20 ou 25 travailleurs se conforment aux règles de l'industrie.
Nous autres, on pense aussi que dans le projet de loi il pourrait y
avoir peut-être, je ne sais pas mol, dépendamment de la grosseur
de l'entreprise, une façon de mettre en place un système qui
ferait que l'entreprise puisse continuer, mais - parce qu'on insiste nous
autres aussi là-dessus - qu'au moins les illégaux sortent
immédiatement du chantier.
Présentement, une plainte à la CCQ, ça prend des
mois, voire des années avant que ça se rende au pénal. On
pense que minimalement, ce que vous devriez faire, M. le ministre, c'est sortir
les illégaux immédiatement des chantiers. Déjà ce
serait un gros point pour contrer le
travail au noir.
M. Cherry: Toujours pour vous permettre de préciser ce que
vous venez de me dire, si on l'évincé, le contracteur, on
l'évincé, vous dites que le chantier devrait pouvoir se
poursuivre quand même. À ce moment-là, qui aurait la
responsabilité de l'exécution des travaux, et une fois que le
consommateur en prendrait charge, s'il découvrait des défauts,
des vices de construction, à qui pourrait-il les réclamer si les
travaux s'étaient poursuivis pendant qu'il n'y avait pas un contracteur
responsable en charge de la poursuite des travaux? J'aimerais vous entendre
là-dedans, s'il vous plaît.
M. Lemieux (Olivier): M. le ministre, je ne dis pas qu'on
évince l'entrepreneur. Moi, je pense qu'il pourrait y avoir dans le
projet de loi une façon de procéder. Ça peut être le
propriétaire. Mais l'entreprise qui est poignée, comme votre
exemple de tantôt, qui a 50 travailleurs de l'industrie et qui en a 4 ou
5 qui sont illégaux, moi, je pense qu'on évince les
illégaux, pas nécessairement l'entrepreneur. Déjà
ce serait une mesure qui, je pense, si elle était appliquée
demain matin, ferait disparaître une grande partie du travail au
noir.
Si, lors de nos visites... Même les gens de Montréal me
l'ont demandé: Veux-tu, Olivier, qu'on les sorte? J'ai dit: Non,
constatez... J'ai dit: On ne peut pas faire ça immédiatement, la
loi ne nous le permet pas. Sans ça, ça va être le chiard et
le chaos sur les chantiers. Mais si la loi le permettait... Par exemple, sur
votre chantier de tout à l'heure où vous avez 50 travailleurs et
qu'il y en a 2 ou 3 qui n'ont pas les qualifications requises, lorsque vous
constateriez par l'inspecteur de la CCQ ou l'inspecteur du bâtiment ou le
conseiller de la CSN qui va chez vous pour vous donner le droit qu'on peut les
sortir immédiatement du chantier, moi, je pense qu'il y aurait un bon
pas de fait dans la bonne direction.
M. Cherry: O.K. Encore une fois, vous n'avez pas répondu
au sens de ma question. Là, vous parlez des travailleurs qui serait
trouvés illégaux. Moi, je prend pour acquis que les travailleurs,
qu'ils soient 5, 10, 15 ou 50 sont tous correctement avec carte de
compétence dans leur métier. Mais - je reprend une expression qui
est favorite à ma collègue de Chicouti-mi - ils travaillent pour
une compagnie à numéro qui, elle, ne l'est pas. Là, quand
on trouve l'entrepreneur qui, lui, est en défaut, et si on
l'évincé du chantier, qu'est-ce qui arrive avec les travailleurs
qui sont là pour la poursuite des travaux, pour la responsabilité
de la poursuite des travaux, les dates de livraison et la situation dans
laquelle on place le consommateur par rapport à ça? C'est
là-dessus... Deux fois vous m'avez dit: On devrait pouvoir
prévoir. Bien, c'est ça que j'essaie de vous demander, vous qui
êtes une des autorités dans ce milieu-là. Ce serait quoi le
mécanisme à prévoir pour protéger les travailleurs
et protéger le consommateur?
M. Lemieux (Olivier): Entre autres, M. le ministre, moi, je
pense, disons que la première pénalité ça pourrait
être une amende sévère et, en cas de récidive, bien,
trouver une façon d'accélérer le processus, en fait.
Ça pourrait être ça, d'un à trois mois, la
deuxième. Moi, je pense qu'il y a moyen de trouver une façon. Le
premier cas, c'est une grosse amende forte. Là, disons qu'il est
avisé et il sait que s'il se fait pincer une autre fois, bien là,
il perd sa licence pour d'un à trois mois. On pourrait y aller
graduellement comme ça. Je n'ai aucun problème avec une
espèce de mise en place d'un programme de cet ordre-là.
M. Cherry: O.K. Une dernière concernant le projet de loi
186, sur cette partie-là de votre mémoire. C'est plus un
commentaire que des questions. Je constate que dans l'ensemble ce projet de loi
vous apparaît plus conforme aux recommandations de Picard-Sexton et que
la CSN-Construction, tout étant relatif, se déclare satisfaite.
Est-ce que je décode bien cette partie-là de votre
mémoire?
M. Lemieux (Olivier): Oui, en autant qu'on soit associés,
à un moment donné, au processus, qu'il y ait au moins une
organisation syndicale dans les 5 membres du comité, et qu'on se
retrouve aussi dans les 16 personnes qui vont former le deuxième
comité consultatif. Je pense qu'à l'heure actuelle l'industrie
comme telle avec deux représentants syndicaux et deux
représentants patronaux, c'est très peu sur les 16. En tout cas
je pense, M. le ministre, qu'il y a moyen de trouver une façon pour que
les organisations syndicales soient toutes représentées dans le
comité de 16 qui va être formé.
M. Cherry: Merci. Ça termine ma période.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Lemieux,
bonjour, messieurs. Je vais passer rapidement aux questions. Je vais
peut-être essayer de creuser un peu la question qui a été
amenée sur la table par le ministre, parce que je sens tout à
coup comme une espèce de glissement. Vous dites que c'est trop
sévère pour l'ouvrier, le travailleur, puis en même temps
que c'est plus sévère que ça ne l'est pour l'entreprise.
Mais le moyen de rendre ça applicable, une mesure de
sévérité égale à l'entreprise, ça ne
me semble pas tout à fait évident.
Moi, j'essayais de m'imaginer que je suis en train de me faire
construire une maison - je ne
le sais pas - l'entrepreneur embauche des illégaux, puis je mets
la clé sur le chantier. Ça me complique un peu la vie. En
même temps, je suis soucieuse - parce que je pense que c'est là
qu'il faut frapper - de voir comment on pourrait appliquer des mesures aussi
rigoureuses a l'endroit de l'employeur fautif que de l'ouvrier. Je me demandais
si vous aviez envisagé la possibilité - je pense à
ça parce qu'on voit ça dans d'autres occasions, pas en
contruction, je l'admets là - pour la Commission, par exemple, de nommer
un autre entrepreneur d'office qui conserverait le même personnel pour
terminer les travaux, étant entendu qu'il y a un plan de garantie, et
que la qualité des travaux, leur confirmité est de toute
façon garantie. Est-ce que vous avez fouillé un peu de ce
côté-là?
M. Lemieux (Olivier): En fait, si j'ai bien compris, vous parlez
d'un entrepreneur qui n'a aucune licence, qui construit votre maison. Moi, je
pense que dans ce cas-là, il n'y a pas de questions à se poser.
Il n'est pas supposé être là, puis je pense qu'en
téléphonant à l'AECQ, ils vont vous soumettre quelqu'un.
En plus, il pourrait y avoir peut-être certaines mesures qui pourraient
être inscrites, comme vous avez mentionné, au niveau des
garanties, mais ça pourrait être aussi dans le code de
déontologie, qui va être monté par la Régie,
où il pourrait y avoir peut-être un processus disant qu'un
propriétaire peut faire appel à une banque d'entrepreneurs
légaux, entre guillemets, qui pourraient effectuer les travaux.
Mme Blackburn: Bien là, je ne partais pas d'un
entrepreneur qui n'a pas sa licence. J'espère qu'il ne travaille pas,
là. Ça, c'est une autre affaire. C'est celui qui est fautif et
qui engage des employés qui ne sont pas couverts. Là, vous dites
qu'on pénalise les ouvriers, puis souvent l'entrepreneur a des pratiques
telles que c'est quasiment des obligations pour l'ouvrier de se soumettre aux
conditions qui sont posées par l'employeur.
Je connais des cas, à travers le Québec - on en a
portés à mon attention - où l'ouvrier n'a comme pas le
choix, où on lui dit: II y en a d'autres si tu n'es pas content. Le
travail en temps supplémentaire, en fin de semaine, si tu n'es pas
content là, hein, comme ça, il y en a en masse du monde qui
attende. Alors, finalement, ces gens-là travaillent dans
l'illégalité.
Vous dites qu'il faudrait - et c'était dans cette perspective -
que la pénalité soit au moins équivalente pour le
travailleur qui perd sa carte de compétence pour un à trois mois,
mais en même temps, qu'est-ce qu'on fait de l'employeur qui, lui,
sciemment, ne respecte pas les lois et le décret? À ce
moment-là, je disais: On ne peut pas mettre la clé sur un
chantier. Ça serait difficilement acceptable dans une
société. Est-ce qu'on peut envisager une alternative? Par
exemple, à la deuxième ou à la troisième infraction
de cette nature, c'est que l'entrepreneur pourrait, pas seulement avoir des
points de démérite qui feraient augmenter ses cotisations, mais
pourrait, effectivement, être pénalisé et retiré du
chantier. Est-ce qu'on peut envisager ça?
M. Lemieux (Olivier): O.K. M. Bilodeau va répondre.
C'est lui qui a écrit le livre sur le chantier au noir, c'est un
expert.
M. Bilodeau (Jean-Noël): Jean-Noël Bilodeau,
coordonnâtes. Effectivement, les problèmes que vous soulevez sont
des problèmes qui sont soulevés depuis plusieurs années
et, dans le document qu'on avait déposé en 1983, on disait,
notamment, qu'effectivement tout chantier noir devrait être susceptible
d'être arrêté au moment où on constate des
infractions, mais certainement pas en pénalisant, entre autres, les
travailleurs. On disait, à ce moment-là, que les travailleurs,
sur un chantier, qui seraient arrêtés ne subiraient pas de perte
de salaire.
Naturellement, ce que Picard-Sexton a retenu, ce n'est pas
nécessairement la même approche. Mais dans leur approche, par
contre, ils disent que les deux doivent être touchés, parce que
les deux - si on prend l'approche de Picard-Sexton - s'estimeraient
responsables de l'activité clandestine. (12 h 15)
Actuellement, dans ce que vous proposez, le travailleur, lui, perd son
certificat de compétence, mais l'employeur, lui, ne perd pas sa licence.
On dit qu'Hs commettent une infraction suffisamment grave pour pouvoir la
perdre dans le cas du travailleur et pas dans le cas de l'entrepreneur. Moi, je
vous dis que ce qu'il faut, c'est que les deux soient pénalisés,
si vous pensez qu'ils doivent l'être, mais de façon égale.
Le chantier doit arrêter et les travailleurs qui seront là, avec
leur carte de compétence, pourront à ce moment-là, s'ils
sont pénalisés dans le fait qu'on arrête le chantier, s'ils
ont leur carte de compétence, qu'ils continuent à travailler sans
perte de salaire ou qu'ils arrêtent de travailler mais sans perte de
salaire. C'est à peu près ça qu'était le sens de
notre volonté.
Mme Blackburn: Vous voyez toute la difficulté
d'arrêter des chantiers...
M. Bilodeau: Je dois vous dire que la difficulté
d'arrêter les chantiers, si on en avait le pouvoir, ce serait
peut-être plus facile que ce que les Inspecteurs de la CCQ font
actuellement légalement.
Mme Blackburn: ...pas les difficultés, mais les
conséquences pour le propriétaire, n'importe quel immeuble, pour
le consommateur, la maison
résidentielle. Je pense à un immeuble à logements.
Ils ont commencé à le louer alors qu'il est encore sur la table
à dessin. Je pense à ces choses-là. C'est tout ça
que j'essayais d'explorer avec vous, mais je ne voudrais pas qu'on perde une
partie de notre temps. J'avais plusieurs autres questions.
J'aimerais que vous m'expliquiez la modification que vous proposez, en
page 5, pour définir les travaux mineurs que vous fixez à 10 000
$ et si cette licence est relative à toute autre sous-catégorie.
Je dois dire que je n'ai pas compris. C'est à la page 5 de votre
mémoire, la modification que vous proposez: "ii. des travaux
d'entretien, de réparation". Vous dites que ça devrait se lire
ainsi.
M. Bilodeau: C'est tout simplement la façon dont est
écrit actuellement l'article 1.k.1.ii. Quand on se réfère
aux autres sous-catégories, c'est dans l'alinéa qui
précède et qui se réfère aux entrepreneurs en
machinerie lourde pour excavation et terrassement.
Mme Blackburn: D'accord, ça va. Vous dites que la loi est
trop sévère et vous dites: il faudrait qu'on ait une
interprétation pour l'article 19.2: "Un employeur ou un
représentant désigné en vertu de l'article 19.1 ne peut
exécuter des travaux de construction qu'avec l'aide d'au moins un
salarié de l'entreprise". C'est votre proposition? Sur cet
article-là, on m'a fait un commentaire, également, qui nous
laisse penser que l'article... Pardon, ce n'est pas le même, j'y
reviendrai. Pourriez-vous nous dire ce que vous appréhendez par rapport
au libellé actuel?
M. Lemieux (Olivier): En fait, on pense qu'avec le libellé
actuel, si ce n'est pas clarifié, ce que vise le projet de loi 185, il
n'y aura pas de changements majeurs dans l'industrie comme tels. Les
entrepreneurs à l'heure actuelle... En fait, on pense que ça va
être pire, même. Si notre interprétation est bonne, on pense
que ça va être pire. Avant ça, il fallait qu'ils aillent
dans un champ de juridiction. Maintenant, ils vont pouvoir aller n'importe
où en autant qu'un entrepreneur les embauche. Ça, c'est notre
interprétation. Si on n'a pas la bonne...
Mme Blackburn: Ça ne mettra pas fin à la pratique
qui est la suivante, où on retrouve une trentaine d'entrepreneurs
autonomes sur un chantier de construction.
M. Lemieux (Olivier): C'est ça.
Mme Blackburn: Bien. Vous abordez, tout à fait avec
beaucoup de pertinence, la publication dans la Gazette officielle du
Québec. Moi, je pense que ce serait déroger à une
pratique reconnue et admise que tout règlement est publié dans la
Gazette officielle du Québec. Je trouverais tout à fait
inacceptable qu'on déroge à cette pratique.
Par rapport à l'obligation faite aux municipalités, bien
que je sois d'accord, il faudrait en évaluer les coûts. Ça
m'étonnerait que les municipalités, si on leur faisait
obligation, ne nous demandent pas de leur envoyer les moyens pour gérer
cette activité-là ou cette obligation, parce qu'elles viennent de
s'en faire passer pas mal épais sur le dos. En même temps, je sais
que c'est une des seules façons pour donner accès à des
documents qui permettraient un véritable contrôle. Mais il
faudrait voir comment elles pourraient financer ce genre d'activités.
Vous allez me dire que ce n'est peut-être pas si important que ça,
la publication des permis de construction avec le détail qui vous permet
de savoir l'importance, mais je reste un peu sceptique là-dessus. Il
faudrait trouver les moyens.
Vous n'avez pas abordé la perception des amendes ou les
poursuites à la CCQ. J'ai un mémoire, qui m'a été
apporté, qui démontre, sur des cas très, très
précis, que, par exemple, l'infraction contre un travailleur a
été constatée au mois d'août et il risque de faire
face aux tribunaux quelque part 26 mois plus tard. Vous n'avez pas
abordé ce qui a été abordé, je pense, dans beaucoup
de mémoires: On devrait redonner à la Commission la
possibilité d'intenter des poursuites, pas seulement de constater des
infractions.
M. Lemieux (Olivier): En fait, lors d'une rencontre
récente avec le ministre, on a dit que la CCQ devrait recevoir les
amendes. Nous autres, ce qu'on a essayé de faire dans les projets 185 et
186, c'était surtout de cerner la notion versus les entrepreneurs
autonomes, parce qu'on pense que c'est là qu'est le gros du
problème dans l'industrie de la construction. Déjà, on a
fait nos présentations au ministre sur le point que vous venez de
soulever.
Mme Blackburn: 10 000 $ comme étant les travaux minimaux,
est-ce que ce sont les travaux pour l'ensemble de la rénovation ou si
c'est pour - je ne sais pas, moi - l'électricité? Est-ce que
c'est 10 000 $ par spécialité ou c'est pour...
M. Lemieux (Olivier): Non, c'est pour l'ensemble.
Mme Blackburn: C'est pour l'ensemble. M. Lemieux (Olivier):
Par contrat, en fait.
Mme Blackburn: Ça ne m'apparaît pas très
élevé, mais, ça, c'est mon commentaire personnel.
Ça limiterait énormément le... Alors, vous dites qu'il
faut adopter... Vous êtes assez d'accord avec la loi 186 et vous
êtes le deuxième. On a entendu la CSD tantôt. Vous dites: II
faudrait
que les deux soient adoptés en même temps. Moi, je vous
pose la question: 185 modifié et 53 actuel, est-ce qu'on pourrait vivre
avec ça? 53 actuel, c'est le...
Vous réclamez plus de sièges au comité consultatif
de la Régie. Moi, je dois vous dire que le comité consultatif de
la Régie, ça ressemble terriblement à de l'occupationnel,
à peu près ce qu'on est en train de faire à la commission
sur les offres d'Ottawa. C'est-à-dire on parle, parle, parle, mais je
vous jure que ça ne mène pas loin. Un comité consultatif
à un ministre, ce n'est pas très, très efficace et
percutant. Alors, un comité consultatif à une régie, vous
avez un problème.
Une deuxième chose. Vous abordez dans votre mémoire le
fait que la Régie ait transféré aux fonds publics 2 000
000 $ alors qu'on avait des besoins en formation et là on est en train
de créer une régie qui va pouvoir lever, faire des transferts aux
fonds généraux à tour de bras, chaque fois qu'il va y
avoir un ministre des Finances assez futé pour dire: Écoute,
augmente-moi donc ça, j'ai besoin de tant dans ma caisse tantôt,
organise-toi. Mors, la Régie, c'est ça mon inquiétude.
Vous le constatez pour la Régie des entreprises. Il n'y a rien qui
empêchera la Régie de la construction de subir les mêmes
pressions de la part d'un gouvernement.
Alors, moi, je dis: Est-ce qu'on ne serait pas mieux avec 53? Ce n'est
pas parce que je nie la valeur de toutes les recommandations et des
modifications qui sont à l'article 186, mais est-ce qu'on pourrait, pour
un moment, vivre avec 53 et en même temps obliger, permettre à la
Commission de la construction de faire les poursuites? Donc, resserrer les
poursuites... 53 et 85 resserrent un peu sur le travailleur autonome.
M. Lemieux (Olivier): À votre question, c'est oui, en
resserrant un peu la 53. Je pense qu'avec la 53 telle qu'elle est
présentement ça ne pourrait pas fonctionner, mais avec de
légères modifications, ça pourrait fonctionner, oui. La
53, on n'a pas de problème avec ça.
Mme Blackburn: Elle n'a pas fonctionné parce qu'il n'y
avait pas eu de volonté gouvernementale de le faire. On n'avait
même pas vérifié si elle était bonne ou pas,
là. Elle n'a pas été...
M. Lemieux (Olivier): Elle n'a jamais été
promulguée, dans le fond là.
Mme Blackburn: C'est ça, elle n'a jamais été
promulguée. Dans ce sens-là on aurait...
M. Lemieux (Olivier): Sur l'autre sujet que vous mentionniez tout
à l'heure, moi, je pense que si la loi 53 ou la Régie ou la
186... On pense que si réellement les 300 inspecteurs font une job
efficace dans leur travail et que, réellement, les efforts sont mis pour
contrer le travail au noir, ça va apporter des revenus aussi à la
Commission. Si on pense qu'il y a environ entre 10 000 000 et 20 000 000
d'heures faites au noir par année, c'est de l'argent perdu par
l'État et aussi pour les organismes qui gèrent les lois qui
régissent la construction, là. On pense que ça va
être un apport important pour l'industrie, tant au niveau de la
Commission que de la Régie.
Une voix: Pour continuer.
Le Président (M. Bélanger): M. Bilodeau.
M. Bilodeau: Vous avez mentionné dans votre question un
autre élément aussi qui est important. C'est qu'on ne pense pas
non plus avoir, je dirais, identifié clairement, sur le plan juridique,
tous les aspects du projet de loi. Notamment, à l'article 19.2,
ça nous a posé tellement d'ambiguïtés, tellement de
questionnements, qu'on se demande sérieusement si le gouvernement ne
devrait pas au moins, avant la troisième lecture, déposer une
opinion juridique sur cet article-là précisément.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Lavlolette.
M. Jolivet: Ce n'est pas pour continuer ma conversation de tout
à l'heure avec un autre groupe, mais simplement pour pousser plus loin.
Quand je parlais de la propre maison, je ne parlais pas de la maison de
l'individu, la maison qu'il avait décidé de construire avec
d'autres entrepreneurs autonomes. Lui faisait l'électricité,
l'autre faisait la menuiserie, l'autre, une autre chose. Je vous pose la
question suivante: Dans le contexte... Je comprendais très bien sur des
chantiers à Montréal, à Trois-Rivières, à
Québec, dans des gros chantiers, Baie-James, peu importe, mais quand je
suis dans des petits milieux ruraux, ma question est surtout là. Il y a
des gens qui veulent, comme travailleurs...
C'est pour ça que je la pose. C'est pour avoir des
réponses pour eux autres puis si ça ne marche pas, ça ne
marchera pas, mais je veux au moins savoir: Pourquoi une personne qui a la
possibilité parce qu'elle a les capacités, elle connaît le
métier, elle a tout fait ça, bon, elle a appris ça dans le
temps avec son père - vous savez comment c'a fonctionné - en
électricité ou bien le gars fait juste des escaliers... La seule
chose, lui, ce sont des escaliers. Quand il va le faire en rénovation
dans un contrat de moins de 10 000 $, il n'y a pas de problème, mais le
jour où il va aller faire ça dans la maison neuve, il n'a pas
plus le droit. Lui, il ne comprend pas ça parce que lui, dans le petit
village chez nous, il fait juste son travail puis il vit avec ça, puis
il en a assez.
Alors, à partir de ça, je me pose la question: Qu'est-ce
qui empêcherait, quels seraient
les moyens de surveillance en même temps qu'on devrait se donner
pour éviter que ces gens-là ne se retrouvent sur un chantier de
construction de haute envergure et, à ce moment-là, nuire,
effectivement, aux travailleurs de la construction? Je me demande: Qu'est-ce
qui empêcherait cette possibilité-là?
M. Lemieux (Olivier): Bien, en fait, je pense que... Votre
travailleur, premièrement, est-ce qu'il possède des permis?
M. Jolivet: Oui.
M. Lemieux (Olivier): Est-ce qu'il a appris ça de son
père. Moi, je pense...
M. Jolivet: II a ses cartes de compétence.
M. Lemieux (Olivier): Ah! O. K. S'il a ses cartes de
compétence, c'est un choix qu'il a fait d'être salarié ou
d'être entrepreneur. Moi, je pense que c'est un choix personnel qu'il a
effectué.
M. Jolivet: Oui, je le sais, mais la loi dit: Si, sur un contrat,
tu fais en bas de 10 000 $ dans la rénovation, il n'y a pas de
problème. Vous comprendrez très bien qu'il y a des cycles aussi
dans la construction comme partout ailleurs. À un moment donné,
c'est peut-être le boom de la construction domiciliaire dans tel coin,
mais... Le fameux escalier qu'il a fait dans la bâtisse une telle en bas
de 10 000 $ - il a fractionné son contrat; il n'est pas fou, il l'a fait
en trois ans au lieu de le faire en un an puis il l'a fait en bas de 10 000 $ -
eh bien là, il dit: Moi, je pourrais le faire dans des maisons à
côté qui sont en construction neuve, mais je n'ai pas le droit.
Alors, je vous pose la question: Pourquoi?
M. Lemieux (Olivier): Mais s'il a ses qualifications, pourquoi
n'a-t-il pas le droit? Vous m'avez dit qu'il avait ses cartes. Donc, s'il a ses
cartes, il peut aller dans la construction neuve puis dans l'autre.
M. Jolivet: Écoutez, faisant des affaires pour son propre
compte à exécuter pour autrui et sans l'aide d'un salarié
des travaux de construction...
M. Lemieux (Olivier): Bien, il y a une place où il n'est
pas assujetti puis l'autre place, il va l'être. Tu sais, il a le choix
de...
M. Jolivet: Bien, je le sais qu'il a le choix, mais c'est
ça que je dis...
M. Lemieux (Olivier): S'il a ses cartes, il n'en a pas de
problème. S'il a ses cartes, il va aller à côté puis
il va être rentré dans les livres. La seule différence,
quand il fait l'escalier...
M. Jolivet: Oui, mais lui, là...
M. Lemieux (Olivier):... il n'est pas régi par
l'industrie.
M. Jolivet:... le problème, c'est qu'il veut travailler
à son propre compte comme entrepreneur sans être le salarié
d'un autre. C'est pour ça que je vous dis que je comprends qu'il a fait
un choix entre être salarié... Je vais vous donner l'exemple de
chez moi dans le temps où je m'occupais du syndicat. Le gars travaille
à côté dans une école privé, puis de l'autre
bord, il travaille dans l'école publique. Il n'ont pas les mêmes
conditions. Je comprends ça. Mais lui, il ne comprend pas. Il se demande
pourquoi il n'aurait pas le droit de le faire. Alors, vous êtes en train
de me dire ce que j'ai essayé de lui faire comprendre, c'est que la loi
lui a donné un choix, lequel choix il a pris, mais il faut qu'il vive
avec son choix. C'est ce que vous me dites?
M. Lemieux (Olivier): Bien, en fait, c'est ça. Mais, s'il
veut travailler dans la construction neuve, il devient salarié comme
l'ensemble des travailleurs de l'industrie. S'il veut rester à
travailler dans le petit village, je ne sais pas trop où, bien, en fait,
il reste comme il est. On sait tous comment ça se passe en campagne.
Moi, je pense que ça prend un minimum de lois pour régir
l'industrie. Déjà, il y en a beaucoup et on a encore de la
misère. Disons que, surtout pour la question que vous posez, je pense
qu'il y a une zone grise qui est très dure à couper, surtout dans
les milieux ruraux.
M. Jolivet: O. K.
Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, si vous
voulez remercier nos invités.
M. Cherry: D'abord, M. le président, vos collègues,
merci de vous être déplacés et de nous avoir fait la
présentation de ce matin. Soyez assurés que vos
représentations font partie de nos attentions pour l'exercice que nous
faisons aujourd'hui pour tenter d'apporter... Encore une fois, merci de vous
être déplacés et merci de votre présentation.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Oui. Je voudrais vous remercier. J'ai
apprécié le fait que vous vous en teniez aux lois. On pourrait
toucher aux règlements, on pourrait toucher à beaucoup de choses,
mais on sait, effectivement, que par la loi on ne peut pas modifier les
règlements par rapport aux placements et un certain nombre de
dispositions
dont on a discuté, quoique ce fût intéressant d'en
entendre parler. Mais vous vous êtes limités à la loi et
avec un certain nombre de propositions intéressantes, pertinentes. Si
vous aviez, après réflexion, des solutions au problème que
pose ce que j'appelle l'iniquité apparente, à tout le moins,
entre le traitement qui est fait aux travailleurs et à l'entreprise
fautive, vous pourriez peut-être, dans les prochains jours, nous en faire
part. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
remercie les travailleurs de la CSN-Construction, les représentants du
syndicat de la CSN-Construction, et suspend ses travaux jusqu'à 15 h 30.
Je vous remercie.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise à 15 h 29)
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
messieurs, s'il vous plaît. Je ne voudrais pas déranger votre
réunion, mais ne dérangez pas la nôtre, s'il vous
plaît. S'il vous plaît, j'apprécie. Alors, nous recevons cet
après-midi le Conseil provincial des métiers de la construction
(International). Alors, M. Pouliot, je vous laisserai donc présenter
l'équipe qui vous entoure et procéder à la
présentation de votre mémoire. Vous connaissez nos règles.
Vous avez 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes. Quand je dis 20 minutes, si
ça prend quelques secondes de plus, on pourrait être prêt,
on va s'entendre. D'accord? Alors, on vous laisse la place.
Conseil provincial du Québec des métiers
de la construction
M. Pouliot (Maurice): M. le Président, M. le ministre du
Travail, mesdames, messieurs et membres de la commission parlementaire, pour
débuter, j'aimerais présenter les gens du Conseil provincial qui
m'accompagnent. À mon extrême gauche, M. Yvan Bertrand, qui est
gérant d'affaires du local 1929 des tireurs de joints, fixeurs de
ciment; M. Gérard Cyr, gérant d'affaires du local 144 des
plombiers; Mme Francine Legault, qui est mon agente d'information; le procureur
du Conseil provincial, Me Robert Toupin, de même que l'adjoint au
président-directeur général, M. Pierre Labelle, et moi, je
suis président-directeur général du Conseil
provincial.
J'aimerais simplement tenter de résumer le mémoire du
Conseil provincial et je vais essayer d'apporter certains
éclaircissements. Je pense qu'il serait peut-être important de
faire connaître aux membres de la commission parlementaire le
degré de représentativité de chacune des centrales
syndicales dans la construction en débutant par la FTQ - Construction,
qui représente 40,91 % de travailleurs de la construction, le Conseil
provincial, notre degré de représen tativité est de 31,3
%, la CSN - Construction, 16,86 %, la CSD, 9,63 % et le Syndicat de la
construction de la Côte-Nord, 1,28 %. C'est les degrés de
représentativité officiels qui existent encore aujourd'hui.
Je voudrais aussi vous donner un peu notre structure du Conseil
provincial. Avec les 45 000 travailleurs qui ont adhéré au
Conseil provincial international, on représente 29 locaux qui lui sont
affiliés. On est effectivement Chartres des unions internationales, dont
le siège social est à Washington. Il y en a qui se plaisent
à dire: Les Américains... Ça ne me déplaît
d'aucune façon que ça soit dit.
Je pense qu'il faudrait aussi regarder le fait qu'il y a 140 000
travailleurs de l'industrie de la construction qui détiennent une carte
de compétence, soit compagnon, occupation ou apprenti, de la Commission
de la construction du Québec. On a l'impression que ces gens-là,
les travailleurs et les travailleuses, devraient aussi avoir le droit,
effectivement, de travailler dans leur industrie qui est celle de l'industrie
de la construction. Les "dreamers" et les "outsiders", on pense qu'ils
devraient aller travailler à l'extérieur.
L'industrie de la construction ne devrait pas, à un moment
donné, être une "dompe" où tout le monde peut rentrer
là-dedans, rentrer et sortir comme ça se fait. Je comprends qu'on
essaie de corriger certaines lacunes qui existent avec les projets de loi 185
et 186 qui visent, à notre avis, à diminuer le travail au noir
dans l'industrie de la construction et la protection du public. Et ça,
c'est extrêmement important, et, quant à nous, les deux projets de
loi font un tout.
On veut sûrement profiter de l'occasion que l'ex-minlstre du
Travail avait pris un engagement en mai 1990 à l'effet de tenir une
commission parlementaire et d'avoir une refonte totale de la loi dans
l'industrie de la construction. Ce n'est pas nécessairement le cas avec
les deux projets de loi qu'on a à commenter - et je parie du
régime de négociation, du maraudage dans l'industrie de la
construction - et on va sûrement revenir là-dessus. Chaque
année, ce qu'on tente de faire, c'est de récupérer non pas
ce qui ne nous appartient pas. On veut essayer d'éliminer ce qui
s'appelle les illégaux dans l'industrie de la construction et on pense
que le projet de loi réussit à toutes fins pratiques à
faire ça.
Il faut se rappeler - je vais peut-être retourner en peu en
arrière - que lors de l'adoption de la loi 290, le 18 décembre
1968, tout ce qui était à pied d'oeuvre sur un chantier de
construction était effectivement fait par des travailleurs et des
employeurs de l'industrie de la construction. On n'avait pas le problème
qui existe actuellement, qui est survenu par la suite relativement au champ
d'application. Il y a une autre loi qui a été adoptée, qui
est la loi 68,
avec des exclusions qu'on retrouve aujourd'hui à l'article 19 de
la loi. Et ça, le ministre, à l'exception de l'entrepreneur
autonome, il ne parle pas tellement du champ d'application de la loi, et on ne
se le cache pas, quant à nous, c'est une de nos priorités.
Concernant les entrepreneurs autonomes, ce qui fait à un moment
donné beaucoup de discussions actuellement, c'est probablement une des
raisons pour lesquelles on est en commission parlementaire. Je ne pense pas
qu'on veuille prendre la place des entrepreneurs autonomes. Par contre, il
faudrait se rappeler que les travailleurs ont aussi un droit d'oeuvrer sur les
chantiers de construction. On peut se rappeler ce qui avait été
discuté lors de l'adoption du projet de loi 110 par l'ex-ministre du
Travail en 1979, M. Pierre Marc Johnson. Il a dit: On va créer une belle
place au soleil aux artisans. Il leur a donné une belle place au soleil.
Il leur permettait de participer au régime d'avantages sociaux des
travailleurs de l'industrie de la construction de même qu'au
régime de retraite et c'était la place qu'on donnait.
On se retrouve avec 7000 à 10 000 aujourd'hui... on n'appelle
plus ça des artisans; on appelle ça des entrepreneurs autonomes,
mais quant à nous, ça n'a pas tellement changé, mais on va
revenir, effectivement, là-dessus. Je pense que le problème est
encore plus grave lorsqu'on est en période de récession. Selon
les chiffres qu'on a obtenus de la Commission de la construction du
Québec, je pense que vous savez que les heures diminuent et diminuent de
plus en plus dans l'industrie de la construction. Les prévisions pour
l'année 1992 sont quelque chose de l'ordre de 96 000 000 d'heures qui
devraient être enregistrées et, quant à moi, ce sont des
chiffres qui sont peut-être un peu trop optimistes.
Actuellement, dans la région de Montréal, il y a 106
chantiers de 5 000 000 $ et plus et ça va baisser, en janvier 1992,
à 42 chantiers de construction dans le Grand Montréal qui
dépassent les 5 000 000 $. Il est peut-être bon de rappeler que
lorsqu'un travailleur de l'industrie de la construction travaille
légalement, il en fait travailler trois autres indirectement. Donc, je
pense que le moteur créateur d'emplois, dans tous les secteurs
d'activité, est de loin l'industrie de la construction. Quant à
nous, il est plus qu'urgent que la loi soit effectivement adoptée et de
récupérer les millions d'heures, à un moment donné,
qui nous échappent. On croit qu'il devrait y avoir, effectivement, une
sécurité d'emploi et de revenu dans l'industrie de la
construction.
On peut se rappeler qu'il y a eu un rapport, le comité
présidé par M. Sexton et, par la suite, il y a eu effectivement
le rapport Picard-Sexton. Aujourd'hui, on se retrouve avec certains engagements
et je pense qu'il est bon de clarifier la situation. La modification au
décret qu'ont faite certaines centrales syndicales et l'AECQ, ce n'est
pas une modification au décret qui a été faite en
catimini, c'est une modification au décret qui est conforme à
l'article 51 de la loi, qui a été acceptée par les membres
que représentent les centrales syndicales et sûrement l'AECQ.
Évidemment, la loi 110 visait, au début, j'en parlais un
plus tôt... il y avait toujours le fameux problème que nous
expliquaient les attachés politiques, le problème de Mme
Tartem-pion qui avait un problème avec son bras de galerie puis qu'elle
ne pouvait pas payer 25 $ l'heure un menuisier pour faire réparer son
bras de galerie. C'était donc effrayant que d'être obligé
d'assujettir tous ces gens-là à l'industrie de la construction.
Ils étaient effectivement assujettis au décret de la
construction, mais on a eu une exception. En mai 1988, la loi 31, qui a
été adoptée, visait effectivement à dire: Bon,
O.K., pour la protection du consommateur à des fins personnelles, on va
exclure certains travaux de réparation mineurs ou d'entretien pour la
protection du consommateur.
Évidemment, on n'est pas sûr que ce sont des choses qui
sont avantageuses pour le consommateur. Au contraire, des fois, on peut
effectivement penser sauver 2 $ ou 3 $ l'heure, mais au bout de la ligne on
s'aperçoit que le travail est mal fait. On reçoit des centaines
de plaintes chaque année chez nous à nos bureaux pour savoir,
à un moment donné, si on devrait référer le
consommateur qui s'est fait avoir par des travaux mal exécutés
à différentes associations patronales ou à l'Office de la
protection du consommateur, et ainsi de suite. On pense qu'avec les garanties
qu'il y a actuellement et qu'il va y avoir dans le projet de loi 185, ça
bouche certains trous. Mais lors de l'adoption du projet de loi 31, il faut se
rappeler la position du Conseil provincial (International). On a dit oui, en
principe. On est d'accord que la loi soit adoptée puis pour la
protection, si on veut, du consommateur.
Mais les travailleurs vont avoir un choix à faire. Ils vont
devenir soit des entrepreneurs autonomes, soit des travailleurs de la
construction, soit des employeurs. On ne pourra pas jouer sur trois tableaux.
Ils vont être limités à trois champs d'activité qui
sont l'entretien, les réparations et les modifications mineures.
Là-dessus, on vous demande de retirer les mots "réparations
mineures" parce que, pour certains, les mots "réparations mineures"
peuvent être un montant de 10 000 $. Je vais vous mentionner qu'à
la Commission de la construction du Québec, l'interprétation
qu'on fait de travaux mineurs, c'est de l'ordre de 5000 $. On a parlé ce
matin de 10 000 $. Mais c'est plutôt 5000 $. Mais il n'y a pas de
chiffres de définis comme tels. Mais on parle plutôt de 5000
$.
Ça allait tout de même assez bien jusqu'à temps
qu'il y ait certaines associations tradition-
nelles patronales qui convoquent des assemblées pour donner des
trucs à leurs membres ou aux artisans devenus entrepreneurs autonomes.
Comment effectivement aller à l'encontre de la loi 31? On leur donnait
comme truc: Ce n'est pas tellement compliqué. Vous avez simplement
qu'à aller vous incorporer, vous devenez une personne morale et le
décret ne s'applique plus à vous, la loi non plus, et bingo! Tout
est fait.
On se retrouve, finalement, qu'on a perdu dans le secteur de la
construction des millions d'heures qui étaient déjà
assujetties, qui ne le sont plus par rapport à la notion d'entrepreneur
autonome. Puis, d'un autre côté, on nous donnait en compensation
que l'industrie de la construction doit être faite par les travailleurs
et les employeurs de l'industrie de la construction. C'était ça,
le "deal", M. le ministre, qu'on avait en 1988.
Mais certaines associations, encore une fois, dont on retrouve, dans le
mémoire du Conseil provincial, des copies qui venaient aux
assemblées... On va vous dire comment ça marche, les trucs, puis
vous allez voir, vous allez passer à côté de la loi. Il y
en a 7000 ou 10 000 de même et ce n'est pas notre intention de
pénaliser personne. Puis que ces gens-là arrêtent de jouer
au martyr. Ce sont les profiteurs du système de l'industrie de la
construction. C'est de même qu'on les qualifie. Ils font une concurrence
déloyale.
Souvent, les rapports sont falsifiés concernant la CCQ. Ils
vident le fonds d'assurance-santé, salaire, maladie de la construction.
C'est tout de même une assurance de l'ordre de 70 000 000 $. Ils peuvent
profiter du régime de retraite des travailleurs de la construction. Ils
font exactement la même chose à la Commission de la santé
et de la sécurité du travail. Évidemment, c'est eux qui
amplifient de loin le travail au noir dans l'industrie de la construction.
Donc, évidemment on n'hésite pas à dire: II y a 28 272
entrepreneurs inscrits à la Régie; il y en 18 698 qui
déclarent des heures à la CCQ. Donc, il y en a environ une
dizaine de milliers de "fly-by-night" quelque part, avec des incorporations et
des licences dans les poches, puis ainsi de suite. Et ça, je pense qu'on
se doit de dénoncer ça et on pense que la loi, effectivement,
corrige ces choses-là.
Le champ d'application de la loi. Le ministre semble effectivement muet.
Il dit: Bon, les exclusions, il y en a peut-être assez, il y en a
peut-être trop. On va avoir un comité qui va être
formé pour regarder tout le champ d'application de la loi. On se permet
de vous faire une suggestion concernant une modification de l'article 1,
paragraphe k de la loi concernant l'employeur professionnel, un employeur dont
l'activité principale est d'effectuer des travaux visés par l'un
ou l'autre des alinéas du paragraphe f.
En gros, effectivement, ce que ça veut dire, c'est la machinerie
de production. Il y a les employeurs qui sont effectivement spécialistes
dans l'installation de machinerie de production. Il y a plusieurs
décisions du commissaire de ia construction qui mentionnent que ces
travaux-la ne sont pas assujettis à la loi dans l'industrie de la
construction. Ça, ce n'est pas nécessairement pour la protection
du consommateur.
La Commission de la construction du Québec n'a pas d'autre force
que de dire: Effectivement, c'est ce qui s'applique et ces travaux-là ne
sont pas assujettis. On sait qu'on a déjà suggéré,
dans différentes commissions parlementaires, l'élargissement plus
grand du champ d'application de la loi, mais si au moins le ministre pouvait
insérer un article semblable, ça réglerait une partie du
problème. L'autre partie du problème, évidemment, quant
à nous, pourrait être réglée par voie de
règlement. (15 h 45)
Évidemment, le travail au noir, quant à nous,
l'évaluation qu'on en fait - et c'est basé sur le rapport
Picard-Sexton - c'est une perte entre 24 000 000 et 40 000 000 d'heures. Il y a
entre 480 000 000 $ et 800 000 000 $ qui échappent au fisc tant
fédéral que provincial et qui privent les travailleurs et les
employeurs du travail de ce qui leur revient. Encore une fois, le
problème des consommateurs qui sont pris avec ça et, souvent, Hs
ne le savent pas... Ce qu'on demande, c'est qu'il y ait une campagne de
sensibilisation pour informer le public en général, à un
moment donné, des dangers qui peuvent être occasionnés
lorsque le travail est effectivement mal fait. On demande aussi,
évidemment d'avoir des pouvoirs plus grands qui seraient donnés
aux inspecteurs de la CCQ, de même qu'aux représentants syndicaux.
Les représentants syndicaux des centrales syndicales devraient avoir un
rôle important pour veiller au respect de la convention collective ou du
décret de l'industrie de la construction.
On voudrait aussi que toutes les amendes et les cautions, je pense, qui
sont mentionnées à l'intérieur du projet de loi... C'est
bien beau, ça, mais on sait fort bien que lorsqu'on a enlevé, de
par la loi 119, les pouvoirs à la Commission de la construction du
Québec de poursuivre les travailleurs ou les employeurs qui violaient le
décret ou la loi dans l'industrie de la construction, on a enlevé
ce pouvoir-là à la CCQ pour le donner au ministère de la
Justice. Effectivement, il y a eu 54 000 visites de chantiers en 1990. On a
constaté 55 539 infractions. Quand je dis "on", c'est la CCQ. Il y a
7000 plaintes dont, à un moment donné, on essaie de savoir ce qui
se produit avec celles-ci. La CCQ nous dit: Ça dépend du
ministère de la Justice, du Procureur, de son département. Avec
différents districts judiciaires, on s'entend et avec d'autres, on ne
s'entend pas. Vous comprendrez que le substitut du Procureur
général qui a à défendre les causes - je m'excuse
pour le procureur du
Conseil provincial - il va avoir souvent des causes à
défendre, disons, un chasseur qui n'a pas de permis. Il peut avoir,
à un moment donné, une poursuite en vertu d'un pêcheur qui
a péché de la truite et qui n'avait pas le droit. Il peut se
glisser aussi là-dedans un dossier de l'industrie de la construction. On
peut parler aussi du problème des oiseaux migrateurs qui font tous
partie... Et là, le procureur de la couronne, il est là et il ne
sait pas de ce qu'il parle et le juge, lui, va être
éclairé. Et là, j'aimerais ça comprendre, mais le
procureur ne comprend même pas de quoi il parle.
Donc, comment vous voulez que le juge rende un bon jugement
là-dedans? C'est normal, ce n'est pas de dire qu'on a les meilleurs
procureurs, mais lorsqu'on a des procureurs qui sont spécialisés
dans l'industrie de la construction... On a toujours dénoncé...
Et ça, ça fait aussi un échappatoire du champ
d'application de la loi. On redemande deux choses: que ça revienne pour
le champ d'application de la loi et aussi, évidemment, qu'on puisse
conserver les amendes qui doivent être la propriété de la
Commission de la construction du Québec. Vous avez en annexe de notre
mémoire tout un chapitre à l'intérieur, à savoir
pourquoi on pense que les amendes devraient revenir à la CCQ.
Évidemment, on a mentionné le problème des
avantages sociaux. Je sais qu'il faut aller assez rapidement. Si jamais le
gouvernement décide l'allégeance syndicale dans l'industrie de la
construction, il est évident qu'on veut avoir un vote obligatoire et
avec une modification de la structure de négociation. On demande au
ministre du Travail d'enlever le pouvoir à l'article 51 de prolonger ou
de modifier le décret. Depuis l'adoption de la loi, à chaque
négociation, on a toujours une épée en haut de la
tête puis on est mieux de s'entendre ou le gouvernement nous passe une
loi spéciale ou va nous imposer un décret. Je pense qu'on a eu
assez de décrets imposés. On aimerait que le rapport de force
puisse s'exercer de part et d'autre une fois de temps en temps. Sans mettre le
désordre dans la province de Québec, on pense que ça
devrait effectivement arriver.
Pour terminer, M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît.
M. Pouliot: ...en conclusion sur la loi 186, évidemment,
on ne compare pas, quant à nous, la loi 53 avec la loi 186. La loi 186
est beaucoup plus un pas en avant, en ce qui nous concerne, que la loi 53. On
va passer des 10 inspecteurs qu'il y a actuellement à la régie
des entrepreneurs à environ 280 inspecteurs qui vont avoir à
policer toutes les lois et tous les règlements de la nouvelle
Régie du bâtiment. Je pense qu'on sait que l'un des
problèmes majeurs, c'est qu'il y a un fonds d'indemnisation dans
l'industrie de la construction qui est pratiquement à sec. Il reste dans
ce fonds-là 1 400 000 $. Donc, il est très malade. S'il y a
effectivement une grosse compagnie qui fait faillite demain, on vient de vider
le fonds puis les travailleurs de l'industrie de la construction vont
effectivement perdre leur paie de vacances et leur régime de retraite,
aussi leur droit de participer à l'assurance.
Donc, on pense qu'il est grandement temps que le ministre agisse en
vertu de la loi 186 et 185. Quant à nous, c'est deux lois indissociables
et qui doivent être améliorées, on en convient, qui doivent
être bonifiées. On n'est pas prêt à donner un accord
inconditionnel, mais je pense qu'il est urgent qu'on agisse.
Je pense que ce n'est pas tout à fait correct que certains
entrepreneurs partent sous un nom et aillent chercher une autre charte sous un
autre nom. C'est rendu, je pense... c'est pire que ce que madame de
l'Opposition officielle, Mme Blackburn, mentionnait, à l'effet que c'est
rendu des compagnies à numéro. On les voit passer au conseil
d'administration de la CCQ et, souvent, c'est les mêmes personnes. Il est
grandement temps, effectivement, que ce soit corrigé.
On aurait aimé qu'il y ait une entente avec les
municipalités concernant les ordinateurs, afin qu'ils soient
"connectés" et qu'il y ait des permis; que la CCQ et que la nouvelle
Régie soient informées pour éliminer, effectivement, le
travail au noir. Je sais qu'actuellement il y a peut-être des
municipalités, avec une réforme qui s'appelle la réforme
Ryan, ce n'est pas tellement populaire. Mais je pense qu'on aurait dû
aller de l'avant et imposer une autorité comme quoi les
municipalités donnent l'information.
Je peux vous dire qu'en 1982 il y avait eu un comité formé
et c'était une des recommandations du comité qui avait
été formé par l'AECQ et son président... et le
Conseil provincial avait participé avec d'autres, et c'était une
des recommandations. Il va s'être écoulé 10 ans entre notre
recommandation et la journée que ça va se faire. Mais mieux vaut
tard peut-être que jamais.
Donc, on pense que... Je vais terminer et je vais céder la parole
au procureur du Conseil provincial pour deux minutes, si vous me le permettez.
On pense que l'engagement qu'avait pris le gouvernement du Québec lors
de l'adoption, en 1986, de la loi 119 concernant le financement des mandats
publics que vous imposez à la CCQ, on n'a jamais vu le chèque. On
a vu des ministres qui nous ont dit que le chèque s'en venait la semaine
prochaine. Mais les ministres ne sont plus là et on n'a jamais eu
l'argent. Actuellement, c'est les parties dans la construction, les employeurs
et encore plus les travailleurs qui financent les mandats publics que le
gouvernement du Québec impose à la Commission. Je pense que le
gouvernement devrait respecter ses engagements.
Je sais que j'ai dépassé un peu mon temps,
mais je vais tout de même, si vous le permettez, céder la
parole à mon procureur et on est prêt à répondre
à vos questions par la suite. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Monsieur le
procureur.
M. Toupin (Robert): On m'a dit deux minutes. Ça va
être deux minutes. Après une analyse des textes relativement
à l'entrepreneur autonome, on s'en déclare juridiquement
satisfait, sauf qu'on voudrait soumettre aux personnes de la commission deux
petits changements qu'il nous apparaît important de faire.
D'abord, la modification à l'article 1k. 1, à
"entrepreneurs autonomes", vous avez les mots "sans, l'aide d'un salarié
à son emploi". Le projet de loi 185 suggère les mots "sans l'aide
d'un salarié à son emploi". En comparaison avec la loi actuelle,
c'est "sans l'aide d'un salarié", sans avoir les mots "à son
emploi". Nous recommandons légalement d'enlever les mots "à son
emploi". La perception qu'on en a de l'entrepreneur autonome, que vous
permettez qu'il continue à agir, mais cette fois-ci en couvrant ceux qui
vont être incorporés, les illégaux actuels, donc, c'est
qu'ils n'aient pas l'aide d'un salarié de l'industrie de la
construction, quel qu'il soit, pas seulement ceux qui seraient à leur
emploi Donc, il faut qu'ils travaillent seuls, c'est le but de la loi, qu'ils
n'aient l'aide d'aucun salarié de l'industrie de la construction.
D'autre part, à la modification que vous introduisez à
l'article 19. 2, vous dites que l'employeur ou le représentant
désigné de l'employeur ne peut exécuter des travaux de
construction qu'avec l'aide d'au moins un salarié, et vous ajoutez: de
l'entreprise.
Lorsqu'on lit juste "à l'aide d'au moins un salarié", on
sait que "salarié", ça correspond à la définition
de la loi et un salarié, au sens de la loi, c'est les travailleurs de
l'industrie de la construction. Mais la notion de salarié de
l'entreprise est très large, ce qui permettrait peut-être à
une cour de dire que l'employeur ou son représentant
désigné peut agir avec l'aide d'au moins un salarié de
l'entreprise, mais pas nécessairement un traditionnel travailleur de la
construction. Je comprends que ça lui prend sa carte, mais cette
expression-là est source de confusion, donc, source d'acquittement. Or,
nous, nous vous suggérons d'enlever les mots "de l'entreprise" et les
buts seraient atteints.
Il me reste sans doute cinq secondes. C'est pour dire - et on en a
discuté, les membres du Conseil - je vous signale que,
législativement et juridiquement, qu'il y ait présentement des
gens, des personnes physiques incorporées qui oeuvrent sur tes chantiers
de construction sans répondre en aucune façon de la
réglementation et de la loi de l'industrie de la construction, il y a
là une violation manifeste de la règle de droit dans une
situation de société démocratique.
D'autre part, lorsque M. Pouliot vous a parlé qu'il est anormal
que les plaintes pénales d'un milieu aussi spécialisé que
l'industrie de la construction soient plaidées par les
débordés procureurs, les substituts du Procureur
général, je peux vous dire, par expérience, qu'ils ne
peuvent pas livrer la marchandise, d'où le grand nombre d'acquittements.
Ils ont trop de travail dans l'application de toutes les lois dans la province.
Alors, il est impérieux, urgent que la Commission de l'industrie de la
construction reprenne tes plaintes pénales et qu'on ait des
condamnations autant des syndicats que des travailleurs et des illégaux
qui violent la loi. Cest important que vos lois soient respectées devant
les tribunaux, ce qui n'est pas le cas présentement.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Alors, M. le ministre.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Si mes informations
sont exactes, on m'a souligné que c'est aujourd'hui l'anniversaire de
naissance du président du Conseil provincial. SI c'est le cas, mes
meilleurs voeux, M. Pouliot.
M. Pouliot: C'est exactement ma fête, dans les deux
sens.
Une voix: On va fêter ça. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Cherry: O. K. J'ai pris des notes pour quelques questions. Je
sais bien que votre mémoire est plus volumineux que le temps qui vous
était alloué. Donc, vous avez passé rapidement.
J'aimerais, pour le bénéfice de ma compréhension, que vous
m'expliquiez de quelle façon, de la façon dont ça
fonctionne actuellement, on peut abuser? Vous avez dit: On abuse de
l'assurance-groupe, on abuse de la retraite, on abuse du fonds d'indemnisation.
J'aimerais vous entendre là-dessus, là. C'est quoi le mode de
fonctionnement qui vous permet de mettre ça dans un mémoire, que
de la façon dont ça fonctionne, ça permet le type d'abus
que vous décriez?
M. Pouliot: Bon, écoutez, H y a effectivement, comme vous
le savez, dans le décret de la construction et le règlement no
14, ce qui dit qu'H peut y avoir des cotisations volontaires pour le
régime d'assurance-santé, salaire, maladie et aussi,
effectivement, le régime de retraite. On a une opinion de la Commission
de la construction du Québec, le 25 juin 1991, qui nous dit clairement
qu'on ne peut pas refuser l'argent qui nous arrive sur des bases
volontaires.
Donc, la passoire est là, et les entrepreneurs autonomes et
même les employeurs peuvent enregistrer le nombre d'heures qu'ils
désirent.
Donc, ce qu'ils font, ils enregistrent juste pour être
éligibles à l'assurance. Si ça prend 600 heures, ils
enregistrent 600 heures. Donc ils payent 1 $ au régime et, d'un autre
côté, ils en collectent 3 $. On pense que ça devrait cesser
immédiatement et surtout qu'ils devraient arrêter de jouer aux
misérables, les pauvres entrepreneurs autonomes, des fraudeurs
légalisés qu'on appelle, nous.
C'est le régime des travailleurs de l'industrie de la
construction, et c'est notre régime à nous autres. Il y en a 350
000 qui sont dans le régime de retraite et environ 80 000 qui ont le
droit de participer, mais il y a une passoire qui est là, et on veut
essayer de corriger le trou qu'il y a. Il y a peut-être d'autres trous
qui vont exister à la suite du projet de loi, et ce qu'on espère,
c'est que tous les trous vont être bouchés et qu'on va atteindre
l'objectif. Mais la passoire est là, et elle existe, et c'est un
document qu'on a qui émane du contentieux de la CCQ qui nous dit: On ne
peut rien faire. C'est de même qu'il faut que ça marche. (16
heures)
Donc, il faudrait changer des choses à l'intérieur de
ça pour les cesser de participer. Parce qu'il faut bien comprendre,
l'objectif qu'on avait, c'est que si un travailleur de la construction devient
un employeur et veut continuer de participer au régime, il a ce qui
s'appelle un droit acquis. Il peut le faire. Ou quelqu'un est travailleur de la
construction et devient par la suite représentant syndical. Il peut
continuer à bénéficier du régime d'avantages
sociaux de la CCQ, mais ça devrait se limiter à ça. Mais
encore là, il y a eu des trous, il y a des trucs qui sont donnés,
et les rapports entrent, la CCQ encaisse les chèques, et ces
gens-là deviennent, à un moment donné, éligibles au
régime d'assurance. Encore une fois, c'est eux autres qui sont les
"boss". Ils ont de l'argent, ils mettent ça dans une poche et ils
sortent ça de l'autre poche. C'est le même bonhomme, c'est le
même entrepreneur autonome. Les chiffres qu'on nous a donnés -
vous pouvez sûrement vérifier auprès de la CCQ; les gens de
la CCQ sont ici - ils versent 1 $ dans le régime puis ils en collectent
3 $.
M. Cherry: Juste pour être bien certain que j'ai compris
votre explication, vous me dites qu'un travailleur autonome pourrait
déclarer 600 heures par année et, le fait qu'il fasse ça,
ça le rend eligible...
M. Pouliot: Oui.
M. Cherry: ...à des réclamations
d'assurance-groupe, et ça lui permettra de retirer des
bénéfices de la caisse de retraite quand il sera rendu à
l'âge de la retraite. Ça veut dire que...
M. Pouliot: II ne peut pas jouer, M. le ministre, avec les
montants. Les montants ont été négociés ou
imposés par le gouvernement. Donc, le montant pour
l'assurance-santé et salaire coûte 0,70 $ l'heure et le
régime de retraite, de fonds de pension, ça peut être
différent entre un électricien, un plombier ou une occupation.
Les montants sont écrits dans le décret. La marge de manoeuvre
qu'ils ont, que n'ont pas les travailleurs de la construction, c'est qu'eux
rapportent les heures qu'ils veulent. Donc, si ça leur prend 600 heures
pour être assurés pour l'année, ils enregistrent 600
heures, contrairement à un travailleur de la construction dont la
moyenne d'heures, disons, est d'environ 1000 heures. Lui, il paye pour 1000
heures les 0,70 $ l'heure pour l'assurance et aussi pour le régime de
retraite, ils ont toujours la même carte, qui est la carte
Médic-construction, et avec ça, on va à la pharmacie, puis
on donne cette carte-là, puis on paye 1 $ et 10 % des prescriptions.
Mais la différence, c'est que nous, on a payé réellement
ce que ça coûtait, et les entrepreneurs autonomes, et même
des employeurs, il faut le dire, eux aussi embarquent dans le régime et
contribuent sur une base volontaire. Il y a une différence entre
volontaire et l'obligation qui nous est créée comme travailleurs
de la construction de participer au régime d'avantages sociaux. C'est
quelque chose de gros parce que dans le régime de retraite, l'actif
atteint actuellement 3 300 000 000 $ qui sont administrés par la Caisse
de dépôt et placement, et notre assurance dans la construction,
qui est administrée par la CCQ, est une assurance d'environ 170 000 000
$. Donc, c'est quelque chose tout de même assez volumineux, les deux
régimes.
M. Cherry: Donc, contrairement à un travailleur qui, lui,
doit contribuer pour le nombre d'heures exact qu'il fait dans une année,
votre description, si j'ai bien saisi, c'est que le travailleur autonome, lui,
après 600 heures, ça lui a permis de se qualifier, même si,
selon vos prétentions, il pourrait faire plus d'heures que ça
dans la même année, mais aurait droit aux mêmes
réclamations et aux mêmes bénéfices. Est-ce que j'ai
bien saisi ça?
M. Pouliot: Oui, oui. Au niveau de l'assurance-santé,
salaire, maladie, c'est exactement... Vous avez saisi et je peux vous dire que
les travailleurs qui travaillent encore à la Baie James - les projets
qui sont là - eux, ils travaillent 60 ou 70 heures par semaine, ils
paient 70 heures par semaine dans le régime d'assurance. Donc, s'ils
travaillent, disons, 40 semaines, ils peuvent faire 2500 heures dans
l'année, pour certains travailleurs qui sont très limités,
au Québec. Mais eux autres, ils sont obligés de payer sur le
rapport mensuel, contrairement aux autres entrepreneurs, aux entrepreneurs
autonomes.
M. Cherry: O.K. Vous avez insisté, dans votre rapport, et
votre procureur également, vous avez parlé, par exemple, dans
votre mémoire... les recommandations 8 et 9 touchent les poursuites
pénales et les amendes. Pouvez-vous nous donner plus d'explications?
Pourquoi ces poursuites-là sont intentées par la CCQ? Est-ce
qu'elles l'ont déjà été? Pourquoi elles sont comme
ça? Il faut profiter de ces occasions-là et j'aimerais vous
entendre là-dessus. On en a parlé en privé, mais en
privé, ça n'a pas le même mérite que ce qu'on
pourrait faire aujourd'hui en commission parlementaire.
M. Pouliot: Je pense, M. le ministre, que j'avais expliqué
ça dans mon bref exposé, mais on peut y aller plus
tranquillement. Evidemment, c'est l'adoption de la loi 119 qui a enlevé
ce pouvoir-là à la Commission de la construction du
Québec. Avant, on avait tout de même un système qui allait
assez bien. Tout le travail est fait par les inspecteurs de la CCQ qui nous
coûtent des millions de dollars et là, je parle pour les
employeurs, pour les travailleurs de la construction. Il faut tout
préparer les dossiers. Au bout de la ligne, les procureurs,
effectivement, ne savent pas exactement ce dont ils parlent. Lorsqu'ils
arrivent pour défendre les causes de l'industrie de la construction -
j'ai donné les permis de chasse puis ainsi de suite en exemple - mais le
procureur, lui, il donne une pile de dossiers...
Récemment, j'ai été en cour en Abitibi et les
causes qu'il y avait, c'étaient des causes de la construction
mêlées à des chasseurs qui n'avaient pas de permis et ainsi
de suite. Donc, on avait des procureurs qui étaient
spécialisés, qui allaient défendre les dossiers de la
construction. Le gouvernement a enlevé ce pouvoir-là et aussi les
sommes d'argent à la Commission. Par contre, il a dit: Continue à
faire le job que tu fais, les plaintes et ces affaires-là. Et nous, on
demande à la Commission de la construction, comme centrale syndicale:
Où sont rendues les plaintes qu'on a logées à la CCQ?
Bon, il y a eu une visite de chantier. Un inspecteur a été
sur le chantier. Il a constaté une infraction. Ils nous écrivent
et nous disent: plainte fondée. Ça va bien. Là, on attend.
Là, on appelle à la CCQ. Des fois, on dérange le
président. On lui demande: M. le président, où est-ce
qu'on est rendu avec ma plainte qui est là? Une minute, je "checke"
ça. Là, ils essaient de faire des contacts puis ils attendent
encore des nouvelles, dans plusieurs districts judiciaires. Donc, le fait n'est
pas nécessairement juste de dire reprendre les sommes d'argent, c'est de
reprendre le pouvoir et faire le travail comme il faut.
On a des décisions qui sont rendues relativement aux preuves
réunies, à savoir si, oui ou non, ça devrait être
assujetti à la loi dans l'industrie de la construction. Il y a des
déci- sions qui disent oui, des décisions qui disent non. Les
procureurs, là-dedans, sont un peu mêlés et, souvent, les
juges rejettent. Pourtant, la CCQ, quant à elle, c'est clair.
Effectivement, ça devrait être assujetti au décret et
à la loi de la construction. Donc, tout ça nous amène
à revenir comme c'était avant. Il est faux de prétendre
que c'est la politique gouvernementale... Je pense que dans le mémoire
qu'on vous a remis, il y a des organismes qui gardent les amendes et qui
prennent les poursuites. On peut parler du ministère du Revenu. On peut
parler des municipalités quant au code de la route. On peut parler de la
CSST. Il y a plusieurs exemples qui sont donnés. Donc, c'est un
organisme qui allait tout de même assez bien. Il y avait toujours place
à amélioration, mais par une décision gouvernementale, on
dit: On vous enlève cette responsabilité-là puis on confie
ça à ce qui s'appelle le ministère de la Justice.
Je dois vous dire qu'on est totalement en désaccord et je vais me
permettre de vous souligner que la loi 119, ce n'est pas nous autres qui
l'avons écrite puis on n'était pas d'accora dans l'ensemble, au
complet. Il y a certains paragraphes qu'on aurait voulu enlever de la loi 119.
Mais la loi a été adoptée puis on a été
obligés de vivre avec. Je pense que le gouvernement devrait
reconnaître qu'il s'est trompé concernant cet article-là et
redonner à la Commission de la construction du Québec les
pouvoirs qu'elle avait avant l'adoption de la loi 119.
M. Cherry: Vous avez rapidement parlé de l'expression de
la liberté syndicale, donc, un vote. Est-ce que je peux vous entendre
plus là-dessus. Quel est le mode que vous privilégiez comme
organisme?
M. Pouliot: Évidemment, M. le Président, dans
l'industrie de la construction, il n'y a pas eu de vote d'allégeance
syndicale depuis 1987. Mais il faut comprendre que depuis de nombreuses
années il y a toujours des nouveaux travailleurs qui adhèrent
à l'industrie de la construction. Bon, Us votent. Peut-être qu'il
peut y en avoir 25 000 ou 30 000 nouveaux qui sont entrés en vertu d'un
règlement sur le certificat de délivrance et du règlement
sur les cartes d'occupation, le cours de connaissances générales
et ainsi de suite. Le degré de représentativité, si on
embarque ceux-là qui ont voté par la suite, ça n'a
pratiquement pas changé. C'est à peu près les mêmes
pourcentages. Le Conseil, peut-être qu'on représente aujourd'hui
30 % ou 32 %, mais c'est à peu près le même pourcentage, de
même que les autres.
Nous, on dit que si le gouvernement veut décréter un vote
- c'est d'ailleurs ce qu'on demande, un vote obligatoire dans l'industrie de la
construction; II y a un paragraphe dans notre mémoire - ça
devrait être relié à une négocia-
tion par métier et occupation de a à z et aussi enlever le
pouvoir au ministre de pouvoir nous imposer, encore une fois, un
décret.
On pense que le régime est malade. Le régime de relations
du travail dans l'industrie de la construction est grandement malade. Il
faudrait peut-être le soigner un peu. Et là, je parle au niveau...
Évidemment, vous savez qu'il y a un monopole patronal dans la
construction puis un pluralisme syndical. Il n'y a pas deux centrales
syndicales, il n'y en a pas trois; il y en a cinq. Je les ai nommées au
début, avec leur représentativité.
Donc, quant à nous, si le gouvernement... On pense qu'un vote
obligatoire avec une modification aux méthodes de négociation,
évidemment, de laisser quelque part, en avril ou mai 1993, le rapport
des forces s'exercer, si jamais il n'y a pas d'entente pour une convention
collective... Parce que, dans le système actuel, il est évident
que pour avoir du maraudage, il faut qu'il y ait une convention collective qui
soit signée. Le ministre intervient toujours pour nous imposer un
décret ou une loi. Donc, il n'y a pas de convention collective qui est
négociée ou il est très difficile d'avoir une entente dans
le système actuel.
M. Cherry: Ça termine ma période de questions.
Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la
députée.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour M. Pouliot,
madame, messieurs. Ça me fait plaisir de vous avoir là. Je dois
dire que j'ai lu avec vous, mais rapidement, votre mémoire. Il est assez
élaboré et intéressant. Je partage avec vous l'idée
qu'il faut un peu mieux encadrer l'entrepreneur autonome parce que c'est
allé largement au-delà de ce qui était prévu dans
la loi 31. Il y a eu une espèce de détournement d'intention
législative là-dessus. Je pense qu'il faut le dire. Des questions
rapides, ensuite j'en viendrai à une qui sera peut-être un peu
plus longue.
Certains syndicats ont avancé l'idée qu'on devrait
procéder à l'éviction simplement d'un travailleur qui est
sur un chantier sans les cartes de compétence. Qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Pouliot: Bien, sûrement. Si un travailleur n'a pas de
carte de compétence, ça devient un illégal et on ne
devrait pas avoir deux poids, deux mesures. On devrait avoir la même
politique pour les travailleurs, pour les employeurs. S'il travaille pas de
cartes, ça devient un illégal. Je vous l'ai expliqué au
début de mon exposé. Il y en 140 000 qui ont des cartes puis qui
ont droit d'oeuvrer sur les chantiers de construction légalement. Mais
il n'y en a jamais plus qu'en- viron 75 000 qui travaillent légalement,
qui sont rapportés à la CCQ. Donc, il y en a beaucoup trop
à l'heure où on se parle. Donc, on commence à donner un
genre de sécurité d'emploi et de revenu à ceux qui ont
déjà des cartes pour travailler dans l'industrie de la
construction.
Mme Blackburn: Parce que, actuellement, ce n'est pas permis.
C'était juste une question. À la page 4 de votre mémoire,
vous citez un certain nombre de données comparatives avec l'an
passé. Au même trimestre, vous dites que les heures
travaillées chutaient dramatiquement: 37 % au Saguenay-Lac-Saint-Jean,
34 % en Mauricie-Bois-Francs, 20 % dans le Grand Montréal, 39 % en
Abitibi, 22 % en Estrie, 13 % dans l'Outaouais et 21 % en Gaspésie.
Quand on parle de travail au noir, moi, ce qu'on me dit très
souvent, ce sont des syndiqués avec la carte de compétence qui
travaillent au noir actuellement.
M. Pouliot: Bon, écoutez, il y a sûrement une partie
de ça, oui, les travailleurs qui travaillent au noir qui ont des cartes
de compétence, et ça existe. Mais il faut comprendre que,
souvent, ils sont obligés de travailler sous la menace des employeurs
qui leur ont dit: Moi, je vais te payer là, disons... Le travailleur
doit gagner 20 $ l'heure. On ne parlera pas d'avantages sociaux pour l'instant.
Je vais te payer 15 $ l'heure. Sans ça, si tu ne veux pas 15 $, je ne te
prends pas. Je vais prendre mon ami Toupin à côté. Lui, il
va les prendre, les 15 $ l'heure ou un autre. Mais ils sont obligés de
travailler ou bien non ils sont forcés de demeurer sur
l'as-surance-chômage, s'ils ont les timbres d'assurance-chômage, ou
d'embarquer sur ce qui s'appelle le BS, le bien-être social.
Mme Blackburn: Je suis d'accord avec vous. On m'a parlé
longuement de la pratique. Deuxième question: Croyez-vous que le projet
de loi actuel permettra vraiment de mettre fin à cette pratique de
forçage du côté des employeurs à l'endroit des
travailleurs qui... Par exemple, les heures travaillées normalement
payées en temps supplémentaire sont tout simplement
comptabilisées. Elles sont données à un autre moment ou
même, dans certains cas, me dit-on, elles sont données en effets.
Ça veut dire vous avez des matériaux de construction pour
construire votre chalet, par exemple, en échange d'un certain nombre
d'heures travaillées. Bon, c'est payant pour l'entrepreneur qui...
L'employé ne dit pas toujours... ne conteste pas toujours. Est-ce que
vous pensez que ça va mettre fin sérieusement à cette
pratique-là, les projets de loi qu'on a là?
M. Pouliot: Bon, je dois vous dire oui, partiellement. Je ne
pense pas que le projet de loi ou les projets de loi 185 ou 186 vont
effectivement faire des miracles. Mais ce n'est
sûrement pas des incitatifs à travailler au noir. Ce que
visent les deux projets de loi, c'est d'éliminer le travail au noir dans
l'industrie de la construction. Est-ce que vous me dites que certaines
associations d'employeurs vont encore donner des trucs? Elles vont leur donner
des idées comment faire des banques d'heures pour contourner la CSST et
aussi contourner le régime de retraite? C'est possible. Je ne pense pas
que... Il n'y a pas de loi parfaite. Mais c'est pour ça, je pense, que
le ministre a accepté de convoquer une commission parlementaire pour
qu'on essaie d'aider le gouvernement à dire: II peut survenir tel et
tel problème. Je pense que si on peut régler 80 % des
problèmes du travail au noir, de l'artisan ou de l'entrepreneur
autonome, ou le champ d'application, mais ça va être pour moi un
grand pas en avant par rapport à ce qui existe présentement.
Mme Blackburn: Bien. On me dit qu'une partie de-Une voix:
Juste un instant... Robert Toupin.
Mme Blackburn: Oui. (16 h 15)
M. Toupin: Ça, c'est la même chose lorsqu'on compare
un moyen pour faire respecter votre loi à l'égard, par exemple,
des gens qui violent la loi, les gens en boisson avec leur automobile. Vous
avez une loi où vous dites: Bon, tu n'as pas le droit de prendre ton
automobile si tu es en boisson. Si tu te fais prendre une première fois,
il y a une amende. Ça va aller jusqu'à la révocation du
permis. C'est la raison pour laquelle beaucoup de centrales, y compris le
Conseil provincial, vont vous demander: Prenez les mesures ultimes, expresses,
y compris l'exclusion d'un chantier de quelqu'un qui est en
illégalité sur le chantier. Au même titre, par exemple,
vous expulseriez de l'Assemblée nationale quelqu'un qui parlerait sans
être un élu du peuple. C'est la même chose là-dedans.
Ou dans une cour de justice, un gars qui se déclarerait avocat et qui
plaiderait devant le juge, on le prendrait et on lui dirait: Sors de la salle.
Tu n'as pas d'affaire là! C'est la même chose sur un chantier.
Mme Blackburn: Ce n'était pas vraiment là ma
question, mais quand même, j'apprécie la réponse. Vider les
caisses... Tout à l'heure, vous parliez de ceux qui, finalement... que
le fonds d'indemnisation... vous en parlez dans votre mémoire... qu'il
risquait de se retrouver à zéro. Ceux qui travaillent un peu
à vider les caisses, ce sont beaucoup ces entreprises qui amorcent des
travaux, qui envoient les premiers versements, tel que prévu, à
la CCQ et qui, finalement... Les travaux durent un mois et demi, deux mois. Ils
terminent les travaux, font faillite et ça tombe sur les bras de la
CCQ.
Dans ce sens-là, je me dis, ce genre de... Et les compagnies
à numéro, j'y reviens parce qu'à mon avis, c'est un
scandale. Ça me scandalise surtout quand ce sont les
sociétés d'État qui acceptent de confier des contrats
à ces entreprises-là. Je ne vois rien dans ce projet de loi qui
va permettre de corriger cette situation Je suis toujours un peu mal à
l'aise parce que je vois - et je sais que vous n'avez pas tort - comme une
espèce d'offensive massive à l'endroit du travailleur autonome,
alors que les grands propriétaires... Pour ne pas le nommer, Canadian
Asbestos a simplement ouvert une compagnie à numéro puis obtient
un contrat de plusieurs millions de dollars d'Hydro-Québec, alors qu'il
ne respecte pas le code de la construction. Je me dis: On ne mettra pas fin
à ça. Je suis toujours un peu mal à l'aise. Il y a comme
une démesure dans la taxe, sinon dans les moyens. Je vous dis que dans
ce projet de loi, il n'y a pas cette espèce d'équilibre.
Deuxième chose, c'est qu'on a des mesures importantes pour
ramener les employeurs à la raison, pour les obliger à respecter
les lois de la construction et le code, mais en même temps H y a,
à quelques endroits, il m'a semblé, une démesure à
l'endroit du travailleur.
J'ai un exemple. À l'article 18 qui vient modifier l'article
119.2 dans le projet de loi 185, il semble que, dans le paragraphe 2°, on
pourrait suspendre la carte de compétence pour un à trois mois
même pour quelqu'un qui, par exemple, porterait un madrier, alors qu'il
n'est pas manoeuvre, là, vous savez. Alors, je me demandais si ça
n'allait pas trop loin.
M. Pouliot: Bon. Deux choses. Je pense que les deux projets de
loi 185 et 186 vont couvrir, disons, le problème du fonds
d'indemnisation qui est actuellement dans le décret de la construction,
dont le passif est de 1 400 000 $, ce que je vous ai expliqué. Les
cautions que va exiger la Régie du bâtiment et aussi la Commission
pour donner, à un moment donné, un numéro d'employeur,
devraient boucher ce trou-là concernant les faillites des compagnies
à numéro et ainsi de suite. Donc, ils vont avoir à payer
une caution que la Commission de la construction décidera et aussi la
Régie du bâtiment pour éliminer, justement, ce genre de
fraude là que l'on voit passer à tous les mois au conseil
d'administration de la CCQ. Puis, des fois, c'est les mêmes noms. Des
fois, c'est la femme ou le chum ou... en tout cas. C'est tout un réseau
puis H y a des spécialistes là-dedans. On pourrait vous donner
les noms.
On pense que les deux projets de loi ensemble règlent ce
problème-là, à savoir si, effectivement, l'article 119.2,
vous nous demandez de le retirer. Nous, on pense qu'il devrait être
là...
Mme Blackburn: Non, je n'ai pas dit...
M. Pouliot: ...et demeurer là. Et il ne va pas trop loin.
S'il y a des coupables, qu'on punisse les coupables. Il n'y a pas juste des
employeurs qui sont coupables. Il y a aussi des travailleurs, et c'est justice
pour tous, en ce qui nous concerne.
Mme Blackburn: Je n'ai pas parlé de l'article complet
119.2. J'ai parlé de l'article 119.2 qui vient modifier l'article 83.1,
paragraphes 1, 2, 7 à 12. C'était le deuxième paragraphe
seulement. C'est une partie.
M. Pouliot: J'avais bien compris que vous vouliez enlever
l'article 2 et, en ce qui nous concerne, on n'est pas d'accord.
Mme Blackburn: Bien, ça va. Alors, je suis d'accord. Vous
dites: Tapez dedans. Ça va. O.K.
Crédits d'impôt. J'ai plus tendance à croire aux
mesures incitatrices et, en même temps, je partage avec vous
l'idée qu'il va falloir... Donc, quand vous abordez les crédits
d'impôt, je suis d'accord, bien que je sache que les amendes - j'ai
déjà eu l'occasion de l'exprimer - il faudrait qu'il y ait moins
de délais entre le constat de l'infraction et l'amende, sinon ça
n'a aucune portée. Je suis tout à fait d'accord avec vous. La
campagne de sensibilisation, je trouve l'idée intéressante,
également.
À la page 23, vous parlez des amendes de la CCQ et vous dites: II
faudrait que l'on puisse percevoir ces amendes, ce avec quoi je suis d'accord,
mais vous constatez que, depuis 1986, avec la loi 119, le gouvernement a fait
verser ça dans ses fonds. On est d'accord avec ça?
Une voix: Oui.
Mme Blackburn: Alors que vous faites toute confiance au
gouvernement par rapport à une régie. Vous savez ce que le
gouvernement fait avec sa régie de la construction? Il est en train de
nationaliser les entreprises de construction. On est en train d'étatiser
les plans de garantie. On est en train de mettre la main là-dessus.
Ça m'apparaît beaucoup. Et le gouvernement pourra, à ce
moment-là, à n'importe quel moment, comme il l'a fait, là,
avec la loi 119, venir piger allègrement dans la caisse de la
Régie, alors que la loi 53, contre laquelle vous semblez en avoir,
prévoyait une commission du bâtiment qui avait la
responsabilité de contrôler, de percevoir auprès des
entrepreneurs les sommes susceptibles d'établir des plans de garantie
qui assuraient la qualification. Et c'était fait aussi... il y avait un
certain nombre de syndiqués qui siégeaient sur le conseil.
Moi, à la question que je pose, vous me dites: On est d'accord.
Les deux sont liées à la vie, à la mort. L'une n'est pas
bonne sans l'autre. Qu'est-ce qu'il y a dans le projet de loi 186 qui ne
pourrait pas être appliqué avec le projet de loi 53
intégral? Vous dites: II y a des choses. Il faudrait qu'on puisse
augmenter les inspecteurs. C'est bon, c'est dans 186. Est-ce que ça nous
empêche d'augmenter les inspecteurs avec 53? Je ne pense pas. Est-ce que
ça nous empêche de revoir le fonds d'indemnisation à la
Commission de la construction? Je ne pense pas.
Alors, les principaux éléments que vous invoquez pour dire
qu'il faut absolument 186, ils sont jumelés puis inséparables. Si
on avait appliqué 53 intégralement, est-ce qu'on serait en train,
aujourd'hui, de tenir ce genre de débat là? Peut-être, mais
il y a moins de chances, parce que vous vous rappelez que le projet de loi
instituait les premières amendes assez élevées et un
contrôle important, et il responsabilisait le milieu de la
construction.
En somme, je dis: Autant je pense qu'il faut resserrer l'histoire des
entrepreneurs autonomes, autant je pense qu'on fait une erreur collective en
donnant à l'État, quel qu'il soit - je ne fais pas de politique
partisane... C'est toujours tentant lorsque vous avez la possibilité
d'aller piger dans une caisse.
Vous n'avez qu'à regarder ce qu'on fait avec
l'assurance-automobile. Vous savez que dans votre assurance-automobile, il y a
des taxes déguisées; ça va dans le fonds consolidé
du gouvernement. Alors, avec la Régie, on va pouvoir le faire
également, et ça, je trouve ça inquiétant.
M. Pouliot: Évidemment, M. le Président, sans faire
de politique, si on avait mis en application le projet de loi 53, il y aurait
sûrement moins de problèmes que ceux qu'on a aujourd'hui.
Ça, je le concède à Mme la députée. Mais de
là, je pense qu'il faut faire une grosse différence entre une
régie et une commission. Vous savez, je pense qu'une régie, c'est
pas mal plus fort qu'une commission et si on parle qu'on veut donner une suite
logique au projet de loi 186, la Régie est bien placée pour ce
qui est des ententes avec les municipalités, pour savoir lorsqu'elles
émettent un permis de construction. Je pense que ça se fait dans
un contexte global et, aussi, on demande - et c'est une de nos recommandations
- que les parties, dans l'industrie de la construction, siègent au
conseil d'administration de la nouvelle Régie du bâtiment. Donc,
on n'est pas d'accord avec la composition actuelle, avec un comité
consultatif, et c'est une de nos recommandations. Donc, il y a une grosse
différence entre les deux. Commission et régie, je pense que ce
n'est pas la même chose.
Mme Blackburn: La commission du bâtiment dans la loi 53 -
si ma mémoire est fidèle, il faudrait que j'aille la refouiller,
je l'ai lue assez récemment - permettait de conclure des ententes avec
les municipalités. Le projet de loi 186 prévoit
déjà un certain nombre de frais: les frais
d'inscription, les frais d'examen, les frais d'évaluation
découlant de la délivrance, de la modification, du renouvellement
d'une licence, une somme fixée par la Régie pour la
délivrance d'un permis aux entrepreneurs, les frais qu'elle exige pour
l'approbation, l'autorisation, la révision, l'inspection, la formation,
la consultation, la délivrance d'attestations de conformité,
l'accréditation des personnes qu'elle reconnaît pour fins de
vérification, et l'article 66 dit: L'article vient modifier l'article
152 qui est remplacé par le suivant: "152. Les sommes perçues et
les montants recouvrés par la Régie, en application de la
présente loi, sont versés au fonds consolidé du revenu.
"
C'est le pot, hein? Alors, moi... et ça va finir, parce que le
problème...
Le Président (M. Bélanger): Pour conclure, Mme la
députée.
Mme Blackburn:... le problème... On a jusqu'à 16 h
30?
Le Président (M. Bélanger): Vous aviez 16
minutes.
Mme Blackburn: Le problème, c'est que plus on va avoir de
tarifications sur lesquelles le gouvernement va pouvoir imposer à la
Régie un relèvement de la tarification, une augmentation de la
tarification, ça va finir par se répercuter au moins sur le
consommateur. Tandis qu'avec la commission telle que pensée et
conçue dans le projet de loi 53, sur laquelle il y avait
unanimité, en tout cas, un large consensus sur 53 en 1985 - et vous y
étiez de ce consensus - on responsabilisait les entrepreneurs en disant:
Écoutez, dorénavant, si ça va mal chez les entrepreneurs,
on va savoir qui est responsable, tandis qu'une régie, vous ne vous
sentez pas responsables d'une régie. Vous sentez-vous responsable de la
Régie du logement? Ça n'a pas de nom, pas d'identité,
tandis qu'une commission...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, madame,
s'il vous plaît.
Mme Blackburn:... gérée et administrée par
les entrepreneurs, ça nous semblait être la meilleure solution et
l'hypothèse qu'on avance, c'est que le projet de loi 185... de petites
modifications, et on les regardera, il y en a quelques-unes sûrement,
mais pourquoi ne pas conserver 53 et voir ensuite à l'application?
M. Pouliot: Moi j'ai l'impression que c'est ce qu'on fait, avec
la loi 186: on modifie la loi 53 et on lui donne des dents pour pouvoir mordre
ceux qui vont à l'encontre de la loi, et on lui donne plus de pouvoirs
en l'appelant la Régie. Évidemment, notre intention, encore une
fois, je le répète, c'est qu'on pense que sur le conseil
d'administration, ça devrait être les parties dans l'industrie de
la construction, et ça ne regarde pas simplement les employeurs, en ce
qui nous concerne. Parce que lorsqu'il n'y a plus d'argent dans le fonds
d'indemnisation, c'est ies travailleurs qui vont perdre des sommes d'argent de
plusieurs millions de dollars. Donc, c'est pour ça qu'on veut avoir un
oeil là-dessus. C'est aussi important, quant à nous, la
Régie que la CCQ.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous
remercie. M. le ministre, si vous voulez remercier nos invités.
M. Cherry. Alors, M. le Président, vous me permettrez de
remercier M. Pouliot et les gens qui l'accompagnent, de vous être
déplacés aujourd'hui et de nous avoir présenté vos
propositions. Soyez assurés que vos représentations occupent mon
attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous apportera
beaucoup de travail. C'est pourquoi j'ai demandé à
l'équipe du ministère de se mettre à l'oeuvre dans le
suivi des dossiers. Alors, encore une fois, merci de votre présence
aujourd'hui.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Oui, merci M. le Président. Je voudrais
vous remercier, madame et messieurs, de la qualité, d'ailleurs, de votre
mémoire, vous dire que ça nous a appris beaucoup de choses. Mais
une toute petite information: la loi 53 na jamais été
promulguée. Ce n'est pas du pareil au même, là.
Le Président (M. Bélanger): Madame, on remercie nos
invités. On ne fera pas la discussion, là.
Mme Blackburn: Je vous en prie! Laissez-moi terminer et les
saluer à ma façon.
Le Président (M. Bélanger): Oui, mais il ne faut
pas reprendre le débat.
Mme Blackburn: Je vous remercie infiniment et on va
certainement...
Le Président (M. Bélanger): II est fini le
débat, là.
Mme Blackburn: Si ça ne vous fait rien, je remercie comme
ça me convient puis ça, c'est convenu généralement
dans toutes les commissions.
Le Président (M. Bélanger): Je veux bien, madame,
mais je vous dis juste de ne pas reprendre le débat, s'il vous
plaît. Respectez au
moins les règles de la commission. Je vous remercie.
Mme Blackburn: Je vous remercie, et ça m'a fait plaisir.
Je vais lire de façon plus attentive et complète votre
mémoire, probablement en fin de semaine, parce que j'imagine que,
dès le début de la semaine prochaine, on va commencer
l'étude article par article. Je vous remercie.
M. Pouliot: On vous remercie, M. le Président, et on va
être disponibles, même si la commission parlementaire se termine
à minuit ce soir, on va être encore dans les alentours et on
pourra rencontrer des gens des deux côtés de la Chambre.
Le Président (M. Bélanger): Alors, vous venez
veiller avec nous.
M. Pouliot: Sûrement. Ça nous fait plaisir.
Le Président (M. Bélanger): On vous remercie
beaucoup de votre participation et nous invitons à la table la
Fédération des travailleurs du Québec, section
construction. (16 h 30)
Bien. Alors, je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa
place, s'il vous plaît, pour que nous recevions nos prochains
invités qui sont la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec, section construction, qui est
représentée entre autres par le président, M.
Lavallée, que j'inviterais à présenter les autres membres
de son équipe. S'il vous plaît, dans la salle, s'il vous
plaît. Si chacun veut bien reprendre sa place. Nous avons
recommencé et nous écoutons présentement M.
Lavallée. Alors, M. Lavallée, la parole est à vous.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec, section construction
M. Lavallée (Jean): M. le Président, M. le
ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, ça me fait plaisir
de vous présenter le groupe de la FTQ-Construction qui, aujourd'hui,
fait la présentation. Je suis accompagné de Hervé Morin,
local 99 des peintres, à mon extrême gauche. À mon
extrême droite, Jean-Marc Thouin, du local 791 des opérateurs de
machinerie lourde; à ma droite, Yves Paré, directeur
général de la FTQ-Construction. C'est avec plaisir qu'on...
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez un
instant, M. Lavallée, juste avant, on aura peut-être un petit
dérangement en cours de route. Il est possible qu'il y ait un vote
autour de 17 h 30 à l'Assemblée nationale. Donc, nous serons
obligés, tout le monde, nous, d'aller pour ce vote. Alors, je vous
préviens, si la cloche se met à sonner, je devrai vous
interrompre. Il se peut qu'on ait le temps de finir votre intervention, mais il
se peut que... Alors, je m'en excuse à l'avance.
M. Lavallée (Jean): O.K. La présentation du
document va être faite par mon confrère Paré ainsi que par
moi-même. Pour une nième fois, nous sommes convoqués devant
votre commission parlementaire afin d'exposer notre opinion sur des changements
à être apportés à la Loi sur les relations du
travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans
l'industrie de \a construction, ainsi que sur les modifications à la Loi
sur le bâtiment. M. le Président, nous allons profiter de
l'occasion qui nous est donnée afin de réitérer devant
votre commission parlementaire ce que la FTQ-Construction demande depuis une
quinzaine d'années en ce qui a trait à la Loi sur les relations
du travail dans l'industrie de la construction.
Nous croyons qu'il est essentiel, d'abord, de faire un historique des
principales lois qui ont été adoptées depuis quelques
années et qui ont sensiblement modifié la Loi des relations du
travail dans l'industrie de la construction. Depuis la commission Cliche qui
remonte à 1975, M. le Président, il y a eu pas moins d'une
douzaine de commissions parlementaires, soit pour des modifications à la
loi, soit pour des impositions de conditions de travail des travailleurs de
l'industrie de la construction. Je demanderai à mon confrère
Paré de continuer.
M. Paré (Yves): Alors, pour sauver la grippe de mon
président, sans remonter aussi loin que la commission Cliche, il est
important de souligner qu'il y a exactement 5 ans, soit le 5 décembre
1986, plus de 5000 travailleurs de l'industrie de la construction
étaient devant ce parlement afin de manifester leur opposition au projet
de loi 119, que le ministre du Travail d'alors, M. Pierre Paradis,
s'apprêtait à faire adopter. Cette loi devait redonner aux parties
de l'industrie la responsabilité de la formation professionnelle dans
l'industrie de la construction.
En tant que FTQ-Construction, nous nous sommes vigoureusement
opposés à ce projet de loi parce qu'il ne donnait pas
véritablement aux parties l'entière responsabilité de la
formation ainsi que du contrôle de son administration de la nouvelle
commission de la construction. Le gouvernement se débarrassait d'un
dossier très chaud et forçait les parties à assumer une
responsabilité financière qui n'était pas la nôtre.
Le ministre Paradis s'était engagé à financer les mandats
que le gouvernement nous demandait de remplir en son lieu et place. Nous devons
vous rappeler, M. le ministre, que nous attendons toujours que le ministre du
Travail apporte à l'industrie de la construction le support financier
tant promis.
Quelque 15 mois plus tard, vers le mois de
mai 1988, M. Paradis, toujours ministre du Travail, déposait un
nouveau projet de loi, soit le projet de loi 31. Ce projet de loi était
destiné à exclure du champ d'application de la loi les travaux
d'entretien, réparation, rénovation et modification d'un logement
pour une personne physique agissant pour son compte et à ses fins
personnelles et exclusivement non lucratives. Par ce projet de loi, le ministre
espérait régler le travail au noir de l'industrie de la
construction. À peu près tous les intervenants en commission
parlementaire pensaient le contraire. Tout ce que le ministre a fait, c'est
d'avoir légalisé une importante partie des travaux qui se
faisaient illégalement.
L'ultime but visé était de n'avoir, dans l'industrie de la
construction, que des entrepreneurs et des salariés pour effectuer des
travaux de construction. Dorénavant, il n'y aura plus d'artisan dans la
construction nouvelle, c'était le leitmotiv du ministre Paradis.
C'était mal connaître certaines associations patronales qui se
sont immédiatement mises à la recherche d'une erreur ou d'un trou
dans la loi qui leur permettrait de contourner cette loi et qui les
empêchait de continuer à frauder le système. Ils l'ont
effectivement trouvé et immédiatement, des cours s'organisaient
pour informer ces artisans ou nouveaux entrepreneurs autonomes comment
échapper à la loi tout en demeurant actifs dans l'industrie de la
construction.
Les braconniers de la construction, ceux qu'on appelle les "brokers" et
qui n'embauchent aucun salarié de la construction, n'ont aucun
intérêt à ce que la situation dans l'industrie se stabilise
ou se civilise, car ils se servent de ces artisans ou entrepreneurs autonomes
pour effectuer des travaux de construction à leur place. Ces artisans ou
entrepreneurs autonomes sont à la merci de ces égorgeurs
d'êtres humains et ils n'ont d'autres choix que de travailler
illégalement, c'est-à-dire sous la couverte.
Plusieurs tentatives ont été faites auprès des
différents ministres du Travail depuis l'adoption de la loi 31 afin de
corriger la situation sans grand succès. Même si les parties
étaient unanimes à dire qu'il fallait corriger la situation,
jamais les correctifs n'ont été apportés. Les
entrepreneurs autonomes ont alors envahi l'industrie de la construction par
milliers, évitant ainsi toute poursuite de la part de la Commission de
la construction. Tout le travail fait depuis des années pour
régulariser une situation devenue incontrôlable était
à refaire. Le manque de volonté politique faisait en sorte que le
dossier traînait sur les bureaux et personne n'osait reprendre le
bâton du pèlerin.
Plusieurs rencontres eurent lieu avec le successeur du ministre Pierre
Paradis, soit M. Yves Séguin, sans aucun résultat même si
unanimement nous demandions des correctifs. Des ententes signées par les
trois plus importantes associations syndicales de la construction qui
représentent 90 % et l'Association des entrepreneurs, l'AECQ, ont
été déposées au bureau du ministre Séguin
sans que rien n'y fit. Encore aujourd'hui, les entrepreneurs autonomes
demeurent les serviteurs et les victimes des mêmes "brokers"
insatiables.
Ainsi, il aura fallu plus d'une dizaine d'années de
récriminations de la part de la FTQ-Construction concernant le travail
au noir, le champ d'application de la loi ainsi que le régime de
sécurité du revenu des travailleurs de la construction pour que
le gouvernement accepte, dans un ultime et dernier effort, de mettre sur pied
une commission royale d'enquête dans l'industrie de la construction.
Effectivement, lors de l'entente de prolongation du décret d'une
année entre la FTQ-Construction, la CSN-Construction et l'AECQ en 1989,
le ministre du Travail, Yves Séguin, mettait en marche une commission
sur la stabilisation du revenu et de l'emploi des travailleurs de la
construction. Cette commission, communément appelée la commission
Picard-Sexton, avait pour mandat d'établir les modalités d'un
système de stabilisation du revenu et de l'emploi dans l'industrie de la
construction et de formuler ies propositions législatives ou
réglementaires requises à l'implantation d'un tel système.
Dans le cadre de son mandat, la commission devait tenir compte, entre autres,
du champ d'application de l'industrie de la construction, de l'incitation pour
les entrepreneurs à embaucher des travailleurs réguliers de
l'industrie, de l'incitation à déclarer les heures
travaillées afin d'éliminer le travail au noir et de la
stabilisation des activités dans l'industrie de la construction afin de
permettre la réalisation des buts visés par la commission.
Il nous semble que le mandat était très clair. On nous
apprend, dans les tribunaux qui ont à trancher des litiges, que le
législateur n'emploie pas de mots inutilement, que le législateur
écrit ce qui est nécessaire à l'application d'une loi ou
des règlements. Or, la commission avait pour mandat d'établir les
modalités d'un système de stabilisation du revenu et de l'emploi
dans l'industrie de la construction en tenant compte du champ d'application, de
l'incitation pour les entrepreneurs a embaucher des travailleurs
réguliers de la construction et de l'incitation à déclarer
les heures travaillées afin d'éliminer le travail au noir.
Chacune des associations présentes ici aujourd'hui tant
patronales que syndicales a, au cours de l'année qu'a duré
l'enquête, eu toute l'opportunité d'être entendue par les
commissaires et parfois à plus d'une reprise. Chacun des
représentants de ces associations a pu exprimer son accord comme ses
différends. Le ministre du Travail avait aussi ses entrées
à la commission Bref, tout le monde a eu droit au chapitre. De tous ces
mémoires présentés, de toutes ces consultations, de toutes
ces audiences, les commissaires Laurent Picard et Jean Sexton ont
produit le 28 juin 1990 un rapport synthèse de 200 pages. Ils ont
produit au ministre du Travail 62 recommandations. Ils ont fourni une dizaine
de modifications aux différentes lois et règlements. Ils ont, M.
le Président, rempli le mandat que le gouvernement du Québec leur
avait confié. Nous ne comprenons pas qu'un an et demi après le
dépôt du rapport Picard-Sexton nous nous retrouvions devant une
commission parlementaire qui a pour objet de modifier la loi des relations de
travail dans l'industrie de la construction. Nous ne comprenons pas qu'il y ait
encore des associations ou des regroupements de personnes qui tentent de
converser le statu quo dans l'industrie de la construction.
M. le ministre, depuis le dépôt dudit rapport
Picard-Sexton, vous avez entendu tour à tour les associations patronales
crier parfois même avec hargne contre les recommandations 52 à 63
du rapport. Vous avez entendu les associations déclarer qu'à
cause de ces recommandations le rapport était à jeter aux
poubelles. Vous avez aussi entendu que, pour les autres recommandations ainsi
que pour l'analyse faite, le rapport était très acceptable et
très vivable. Or, M. le ministre, la partie la plus contestée du
rapport Picard-Sexton a fait l'objet d'une entente signée entre la
FTQ-Construction, le Conseil provincial, la CSN-Construction et l'Association
des entrepreneurs en construction du Québec, l'AECQ.
En ce qui a trait au régime de sécurité du revenu
ou au supplément à l'assurance-chômage, la FTQ-Construction
a accepté de changer son vin en eau. Nous aurions aimé que les
recommandations 53 à 62 soient mises en application
intégralement. Malheureusement, il doit y avoir un début à
quelque part et nous avons accepté de débuter modestement. Nous
avons accepté que l'argent versé par les employeurs serve aussi
à recycler et à perfectionner les travailleurs de la
construction. Nous avons accepté parce que nous savons que,
bientôt, les vrais employeurs de la construction vont vouloir aller plus
loin dans ce modeste plan de stabilisation du revenu de l'emploi des
travailleurs de la construction.
Pourquoi alors, M. le ministre, sommes-nous en commission parlementaire?
N'y aurait-il plus de travail au noir? Les vrais entrepreneurs de la
construction sont-ils heureux de la loyale compétition? Le champ
d'application serait-il par miracle élargi? Ou y aurait-il encore
quelques braconniers, "brokers" ou entrepreneurs qui voudraient
libéraliser davantage l'industrie, pouvoir étouffer davantage la
main-d'oeuvre actuelle de l'industrie de la construction et profiter encore
plus du système sans avoir à y payer leur dû?
Malheureusement, il s'en trouve encore de ces associations qui
enseignent comment frauder le système, comment passer à
côté des lois et des règlements. Il s'en trouve encore qui,
par des manigances ou des subterfuges, retirent deux fois plus d'avantages du
système qu'ils n'y contribuent. Il est clair que, pour ces associations,
les artisans, les autonomes, les fraudeurs, les parasites doivent demeurer dans
l'industrie de la construction afin de mieux s'en servir pour contourner le
système, pour permettre à ces braconniers, qui n'embauchent aucun
salarié de la construction, de saper davantage dans les conditions de
travail et les normes de construction. Ils ont besoin de ces gens pour
compéti-tionner les vrais entrepreneurs qui désirent demeurer
respectueux des lois, des règlements et des normes minimales de
construction.
M. le ministre, ces mêmes associations, qui critiquent ouvertement
toutes les lois et règlements de la construction ou qui veulent à
tout prix sortir du champ d'application du décret de la construction
pour pouvoir plus facilement fourrer le consommateur, n'ont pas
hésité et, malheureusement, avec la complicité du
gouvernement, à s'accaparer les 12 000 000 $ des surplus qu'avait
générés Corvée-habitation. Pourtant, cet argent,
qui avait été accumulé à même le fonds de
pension de tous les travailleurs de la construction, n'aura servi qu'à
aider un groupe restreint d'entrepreneurs qui cherchent encore le moyen de
sortir du champ d'application de la construction.
Il n'est plus question de ressasser les vieilles discussions ni de
reprendre un nouveau processus de consultations, à savoir s'il y a des
problèmes dans l'industrie de la construction. Nous en avons
suffisamment parlé. Il y a eu suffisamment d'enquêtes sur
l'industrie. Il y a eu amplement de consultations. Il y a eu suffisamment de
commissions parlementaires pour que le ministre sache la direction qu'il doit
prendre afin de régler le sort des quelque 100 000 travailleurs et
travailleuses de la construction. Le ministre connaît la position des 20
000 entrepreneurs de la construction. Le ministre connaît aussi les
problèmes de l'industrie.
C'est pourquoi la FTQ-Construction, qui représente 60 000
travailleurs et travailleuses de l'industrie, a accepté de participer
à cette commission parlementaire. Nous sommes venus dire au ministre et
aux membres de cette commission que l'industrie de la construction ne peut plus
continuer d'être le dépotoir des autres industries. Nous ne
pouvons plus nous permettre d'être le champ de patronage de tout le
monde. Nous voulons dire à cette commission que nous n'accepterons plus
de jouer des rôles passifs et de second ordre dans cette industrie. Nous
voulons vous informer que les travailleurs que nous représentons en ont
assez de vivre dans une industrie anarchique et de se voir enlever leur emploi
par des travailleurs qui viennent de partout, sauf de l'industrie de la
construction.
Nous voulons vous dire qu'il ne manque pas grand-chose pour que
l'industrie bascule majoritairement dans l'illégalité. La
FTQ-Construction constate que les projets de loi 185 et 186 sont
déjà un pas dans la bonne direction. Toutefois, il manque,
dans ces deux projets de loi, des éléments majeurs au bon
fonctionnement de l'industrie de la construction. Force nous est de constater
que plusieurs recommandations importantes du rapport Picard-Sexton
n'apparaissent ni dans le projet de loi 185, ni dans le projet de loi 186. Nous
réclamons donc du ministre d'apporter aux projets de loi 185 et 186 les
modifications suivantes.
Premièrement, le champ d'application. Le champ d'application,
c'est le coeur de notre industrie. C'est ce qui détermine ce qui est de
la construction et ce qui ne l'est pas. Par conséquent, le champ de
juridiction, c'est beaucoup d'emplois créés ou perdus. Le
ministre avait annoncé la création d'un groupe de travail
paritaire afin de procéder à l'analyse et évaluer les
impacts des recommandations concernant la formulation de l'article 19 et,
deuxièmement, le retrait de la loi et des règlements de la
référence à machinerie de bâtiment et de
production.
Ce comité devait faire rapport le 31 décembre. Il est
certain qu'il n'est pas possible de rencontrer cet échéancier.
C'est pourquoi nous demandons au ministre d'incorporer à la Loi sur les
relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la
main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction la définition du champ
d'application apparaissant à notre mémoire. C'est une demande
renouvelée qu'on n'a pas à lire. Le ministre pourra consulter
notre mémoire là-dessus. (16 h 45)
Un autre point qui n'apparaît pas dans les modifications aux lois,
c'est le vote d'allégeance syndicale. M. le ministre, l'article 32 de la
loi actuelle prévoit un vote d'allégeance syndicale dans le
onzième mois qui précède la date originale d'expiration du
décret prévue à l'article 47. Or, l'article 47 de la loi
parle d'une convention collective de travail signée entre une ou des
associations représentatives et l'association d'employeurs qui peut
être extensionnée en décret. Le décret actuellement
en vigueur n'est pas le fruit d'une convention collective et, par
conséquent, selon les interprétations, il n'y aurait pas de
période prévue pour permettre à un travailleur qui le
désire de changer d'allégeance syndicale. La dernière
période ouverte qui permettait aux travailleurs qui le désiraient
de changer d'allégeance syndicale remonte au mois de novembre 1987.
Depuis, il y a eu entente en décembre 1987 pour prolonger le
décret d'une année sans vote d'allégeance syndicale.
À l'expiration du décret en avril 1989, il y a de nouveau eu
entente pour la prolongation du décret d'une année sans vote
d'allégeance. En avril 1990, le ministre du Travail imposait un
décret de trois ans qui expirera en avril 1993.
S'il y a prolongation ou s'il y a négociation de convention
collective, il pourrait arriver que les travailleurs de la construction soient
une dizaine d'années sans pouvoir changer d'allégeance syndicale.
Cela est inacceptable et nous demandons au ministre d'apporter les correctifs
nécessaires afin qu'un vote d'allégeance syndicale soit pris de
la façon suivante: que la loi soit amendée de façon
à éliminer les associations représentatives qui
n'obtiendraient pas 25 % d'adhésion; que des votes soient tenus parmi
les personnes qui auront voté pour les associations et obtenu moins de
25 % afin qu'elles puissent choisir parmi celles ayant obtenu 25 %
d'adhésion et, troisièmement, si au cas où aucune des
associations majoritaires n'émergeait en vertu de a et de b, que des
votes soient tenus parmi les personnes ayant voté pour la ou les
associations ayant plus de 25 %, mais qui est ou qui sont le moins
représentatives.
Troisième point: l'entrepreneur autonome. Deux points importants
sont à noter en ce qui concerne l'entrepreneur autonome.
Premièrement, dans la définition d'"entre-preneur
autonome", lorsqu'on parle de travaux d'entretien, de réparation, de
rénovation mineurs visés à la présente loi, le mot
"mineurs* demeure imprécis et peut facilement porter à
Interprétation, alors que nous n'avons aucun processus d'arbitrage ou de
décision afin de clarifier l'évaluation des travaux mineurs.
C'est pourquoi nous demandons au ministre d'être plus précis dans
la définition du mot "mineurs", soit en établissant un montant ou
une proportion des travaux versus l'évaluation de la bâtisse ou
encore en donnant à Commission de la construction du Québec le
pouvoir de trancher en cas de litige.
Deuxièmement, l'entrepreneur de machinerie lourde et
l'entrepreneur en excavation et terrassement. Lors de l'adoption de la loi 31,
en juin 1988, il y avait eu entente et consensus entre l'AECQ, la
FTQ-Construction, le Conseil provincial et la CSN afin qu'il n'y ait pas plus
d'un entrepreneur de chacune de ces catégories en même temps sur
un chantier de construction Nous demandons au ministre, puisqu'il y avait
entente unanime, de respecter la volonté des parties et d'inclure dans
la loi cette définition que nous pourrons remettre au ministre.
Quatrièmement, la perte du certificat de compétence.
L'article 119.2 du projet de loi se lit comme suit: "Lorsqu'une personne est
déclarée coupable d'une infraction prévue à
l'article 83.1 ou à l'un ou l'autre des paragraphes 1°, 2°,
7° à 12° de l'article 119.1, en outre de la peine prévue
pour cette infraction, son certificat de compétence est suspendu pour
une période de 1 à 3 mois".
Or, partout ailleurs dans le texte de loi, le mot "quiconque" est
employé au lieu de "lorsqu'une personne", et nous prétendons que
l'entrepreneur autonome ou le représentant désigné d'une
corporation ou d'une société ne serait pas visé par cet
article, ce qui serait injuste et déraisonnable envers les
travailleurs
parce qu'ils ne perdraient pas leur carte de compétence. Nous
vous demandons donc de corriger cet oubli.
Cinquièmement, dans la déclaration ministérielle
faite en juin dernier, le ministre du Travail énumérait une
série de mesures qu'il entendait mettre de l'avant afin de corriger la
situation dans l'industrie de la construction et, plus particulièrement,
et je cite: "de la mise en vigueur après un certain nombre de
modifications de la Loi sur le bâtiment. Par la même occasion, le
gouvernement disposera des recommandations concernant la régie des
entreprises en construction du Québec, dont celle portant sur
l'imposition d'amendes sévères et la révocation de la
licence d'entrepreneur dans le cas où ce dernier fait effectuer du
travail au noir ou tente de le faire."
À aucun endroit dans les projets de loi 185 et 186, il n'est fait
mention de cet aspect incitatif à ne plus effectuer ou faire effectuer
du travail au noir. Pour les travailleurs, cette notion existe et même
très précisément. En contrepartie, pour les entrepreneurs,
il n'y a rien de moins clair. Nous demandons au ministre de rétablir la
situation d'une façon aussi précise pour les entrepreneurs que
pour les travailleurs.
Sixièmement, recommandations 34 et 35 du rapport Picard-Sexton.
Afin de contrer davantage le travail au noir, la commission Picard-Sexton
recommandait que chaque employeur de la construction soit tenu de
déclarer à la Commission de la construction du Québec,
dans les dix jours suivant le début des travaux pour un chantier
donné, le nombre d'heures de travail prévues pour le
parachèvement de ce chantier. Par cette mesure, il est clair que la
Commission de la construction du Québec aurait un meilleur
contrôle sur le travail au noir. De plus, l'application de cette
recommandation est un autre incitatif à ne pas faire effectuer de
travail au noir.
Septièmement, perception des amendes. Nous demandons au ministre
de retourner à la Commission de la construction du Québec le
pouvoir de poursuites pénales actuellement entre les mains du
ministère de la Justice. La Commission de la construction est le seul
organisme capable d'assurer un suivi permanent des dossiers et, de plus, la
Commission est la mieux placée pour représenter les
intérêts des parties.
Huitièmement, un point, M. le Président, qu'on
réclame depuis très longtemps, c'est le
délégué syndical. À nouveau nous réclamons
du ministre du Travail la liberté de nommer sur les chantiers de
construction des délégués pour représenter les
travailleurs oeuvrant sur ces chantiers et voir à l'application de la
convention collective ou du décret. Le secteur de la construction est le
seul secteur où il est interdit de négocier une clause de
délégué syndical. Nous ne pouvons plus, en 1991,
être aussi archaïques dans nos relations de travail. Nous pensons
que les deux projets de loi 185 et 186 forment un tout indissociable. Nous
pensons que le projet de loi 186 manque de fermeté en ce qui a trait
à rémission et à la perte de licence d'entrepreneur, mais
aussi parce que la loi réfère souvent à des
règlements à être adoptés par la Régie, et
nous pensons que cette forme de procéder peut apporter des délais
très longs avant de réagir.
Pour terminer, M. le ministre, il est arrivé le temps de mettre
de l'ordre dans l'industrie de la construction et nous vous incitons à
ne pas céder aux pressions de ceux qui croient qu'ils pourront encore
profiter du système. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Alors, M. le
ministre, vous avez 18 minutes.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans votre
mémoire, au sujet de l'entrepreneur de machinerie lourde et de
l'entrepreneur en excavation et terrassement, vous demandez qu'une seule de ces
deux catégories soit en même temps sur un chantier. Sur quelle
argumentation vous basez-vous? Vous avez passé rapidement. Vous avez
parlé d'une entente, mais j'aimerais que vous explicitiez, là,
pour la bonne compréhension, c'est quoi, comment ça se passe dans
le vrai quotidien. C'est quoi les objectifs que vous visez et pourquoi c'est si
important que ça pour vous autres?
M. Paré (Yves): Bon, on était venus à la
conclusion, en 1988, par les discussions qu'on avait eues avec le ministre du
Travail et certaines associations, à l'effet que ceux qui
détenaient, qui possédaient une machine, bon, une pépine
et ainsi de suite, on ne pouvait pas demain matin dire: C'est fini. Alors,
puisque dans l'industrie de la construction, tous les autres artisans et
entrepreneurs autonomes dans la construction neuve n'avaient plus le droit de
fonctionner, ils ont dit: On ne peut pas enlever ces gens-là. Alors, on
avait eu des rencontres, des discussions avec les associations, et on en
était arrivés à la conclusion qu'il me semble que sur un
chantier de construction deux entrepreneurs autonomes, parce que ça en
fait deux, un qui détient une licence en machinerie lourde et un autre
qui peut détenir une licence en terrassement, parce que, la plupart du
temps, ils détiennent les deux, pouvaient oeuvrer en même temps
sur un même chantier.
Bon, on dit: Sur une construction de route, un entrepreneur qui prend un
contrat pourrait avoir un gars avec une pépine et un gars avec un "bull"
qu'il voudrait embaucher ou des gens, pour prendre l'expression qu'on emploie
souvent dans les petits villages, pourraient oeuvrer sur ces
chantiers-là. On permettrait par une entente qu'il y en ait deux au
maximum par chantier de construction et par employeur. On pense que
c'était raisonnable, logique et, à ce moment-là,
on n'éliminait pas tous les entrepreneurs autonomes qui
détenaient déjà et qui possédaient
déjà ces machineries-là.
M. Cherry: Pour enchaîner, vu que vous reconnaissez, et
c'est l'argument que vous venez de me fournir, là, à cause de
l'importance de l'investissement, si j'ai bien compris... vous parlez de
pépine, vous parlez de "bull", de bélier mécanique. Est-ce
que vous vous limitez à ça, le type de reconnaissance
d'investissements pour la reconnaissance d'un travailleur autonome? Est-ce
qu'il n'y a pas - je vous pose la question - d'exercice d'autres genres de
métiers que vous qualifieriez de travailleurs autonomes, mais qui
pourraient eux aussi faire des investissements importants tout en étant
les seuls à l'exercer? Je le demande, là. Vous êtes des
gens dont c'est le quotidien de faire ça.
M. Paré (Yves): Non, je pense que dans le cas des autres
travailleurs de l'industrie de la construction ils n'ont pas à investir
autant dans ces choses comme de la machinerie lourde. Bon, une pépine,
c'est quoi? C'est 60 000 $ ou 70 000 $. Il y en a qui ont une grue. Ils peuvent
payer 250 000 $ ou 300 000 $. Lors de l'adoption de la loi, parce que
ça, c'est arrivé comme un cheveu sur la soupe, le fait de dire:
On sort le bungalow mais les entrepreneurs autonomes dans la nouvelle
construction ou des artisans, il ne devrait plus y en avoir. Et là,
c'est venu, le sujet de la machinerie lourde. Il était clair qu'il en
existait. On ne peut pas dire: Demain, ça n'existe plus et tout le monde
vend sa machine. Donc, je pense qu'il était raisonnable, à cause
justement de ces investissements-là, du prix que ces gens-là
avaient payé, de dire: Parfait, on va en tolérer un certain
nombre par chantier par employeur, et c'est strictement dû à un
investissement. L'entrepreneur autonome qui est charpentier-menuisier peut
très bien être salarié demain matin. Il n'a pas investi sa
chemise, lui, pour devenir autonome. Il n'a rien investi. Alors, on pense que
dans la machinerie lourde, c'est important à cause de l'investissement,
mais quant au reste des autres corps de métier, il n'y a pas ces
investissements-là.
M. Cherry: Dans votre mémoire également, vous
insistez sur une possibilité d'expression d'un vote d'allégeance
syndicale, et là, vous faites l'historique, à savoir la
dernière fois... O.K. Mais à moins que je n'aie pas lu
suffisamment en détail, parce qu'il a peut-être fallu passer
rapidement, est-ce qu'il y a un mode particulier de scrutin que vous
préconisez, que vous favorisez? Vous avez sûrement
été au courant, vous étiez présent, de
mémoires de gens qui vous ont précédés... Est-ce
que vous soutenez la même formule, en avez-vous une modifiée ou,
en tout cas, une nouvelle? Qu'est-ce que, vous autres, vous soutenez?
M. Paré (Yves): C'est la formule du vote, bien sûr,
pour déterminer une association représentative dans l'industrie
de la construction. On a beau parler de travail au noir, on a beau parler de
braconniers, on a beau parler de tout ce qu'on voudra, il reste, dans
l'industrie de la construction, que ça fait à peu près une
douzaine d'années qu'il n'y a pas eu de convention collective de
travail.
On a beau avoir cinq centrales syndicales; on fait affaire avec une
association d'entrepreneurs ou d'employeurs, dans l'industrie de la
construction, qui est une association unique. On est divisés dans
l'industrie de la construction. À ma connaissance, on a toujours
prêché à la FTQ et, dans le temps qu'on était au
Conseil provincial, ensemble, le Conseil provincial était d'accord aussi
à ce moment-là qu'il devrait n'y avoir qu'une seule association
dans l'industrie de la construction.
Comment y parvenir? C'est par une façon démocratique, en
forçant un vote. Alors, il y aura un vote qui se tiendra et celui qui
obtiendra la majorité représentera les travailleurs de
l'industrie de la construction. Ceux qui n'ont pas 25 % ne seront plus
là. Ils seront là dans trois ans, lorsqu'il y aura un nouveau
vote; leur nom sera là, mais pour les trois prochaines années,
pour la négociation de la convention collective de travail, il y aura
des associations qui ont plus de 25 % qui demeureront dans l'industrie de la
construction.
On aurait aimé, M. le ministre, aller encore plus loin que
ça et je comprends mal que des associations syndicales disent: Dans la
construction, ce n'est pas bon qu'il y ait juste une association, mais dans les
"shops", c'est bon Parce qu'on arrive avec un vote, qu'il y ait 3000, 2000
travailleurs, si l'association n'a pas 50 %, c'est bien de valeur, elle ne sera
pas là pantoute. Ça ne veut pas dire qu'elle va pouvoir
être là dans trois ans. On dit, nous autres: Oui, mais donnons une
majorité syndicale pour pouvoir avoir une relation de travail normale
dans l'industrie de la construction comme partout ailleurs. Au bout de trois
ans, à l'expiration de la convention, comme n'importe quelle autre
industrie, il y aura un nouveau vote, il y aura une période d'ouverture.
Les gens qui ont obtenu, mettons, plus de 15 % auraient le droit de
réinscrire leur nom sur le bulletin de vote, faire une campagne et
essayer d'aller chercher l'adhésion des travailleurs de l'industrie de
la construction en nombre suffisant pour les représenter.
À l'heure actuelle, toutes les associations syndicales, M. le
ministre, crèvent à peu près de faim. On ne peut pas
donner les services qu'on voudrait. On est tous divisés. C'est
peut-être très important de savoir combien les travailleurs
investissent dans des paiements de cotisations syndicales annuellement pour ne
pas pouvoir obtenir les vrais services auxquels ils ont droit
Pourquoi? Une association représente 1 %; l'autre
représente 10 %; l'autre, 16 %; l'autre, 30 % et l'autre, 42 %. On est
là et lorsque arrive le temps de négocier les conditions des
travailleurs, même si on se regroupe ensemble, on n'a pas les mêmes
visées. Ce n'est pas vrai qu'on représente tous les mêmes
intérêts. Alors, les travailleurs en souffrent et on dit: Pourquoi
pas l'industrie de la construction, comme n'importe quelle autre industrie au
Québec?
M. Lavallée (Jean): En complément de
réponse...
M. Cherry: Quand vous dites que vous ne...
Le Président (M. Bélanger): M. Lavallée,
s'il vous plaît.
M. Lavallée (Jean): En complément de
réponse, M. le ministre, ça permettrait aussi peut-être
d'éviter certains problèmes qui existent sur les chantiers de
construction, j'en suis convaincu. J'écoutais, ce matin, mes amis de la
CSD aller accuser la FIPOE de les empêcher de travailler. C'est clair
qu'un organisme qui représente 90 % des électriciens par rapport
à un autre qui en a à peine 2 %, c'est peut-être normal
qu'ils ne puissent pas entrer aussi facilement sur un chantier industriel que
le groupe qui en représente 90 %.
Le fait qu'il y aurait une centrale syndicale, tous les problèmes
de placement qui peuvent exister à l'occasion seraient
définitivement réglés et ça permettrait une
meilleure cohérence vis-à-vis de la partie partronale qui, elle,
est une association patronale unique. Comme Yves le mentionnait aussi, on n'a
pas voulu être pour la vie l'association syndicale unique. On a dit,
après une période de temps, si c'est deux ans ou trois ans, le
groupe qui aurait recruté un certain nombre, un certain pourcentage de
15 % serait automatiquement inscrit sur le bulletin de vote, ce qui permettrait
une bien meilleure cohérence dans l'industrie de la construction.
M. Cherry: Vous me dites que si tout le monde était
représenté, puis là, je reprends vos propos... Vous dites:
Si tout le monde était représenté par une centrale
syndicale, ça éviterait beaucoup de problèmes. Pourtant,
aussi récemment que la semaine dernière, je rencontrais des gens
d'un corps de métier qui sont représentés dans
différents groupes et qui me disaient que les différents autres
corps de métier ont l'intention, pour la fin de l'année, de
déposer des descriptions de métiers qui auraient comme
résultat de gruger dans l'ensemble de ce qui est le leur. Pourtant, ils
sont à l'intérieur des mêmes centrales. (17 heures)
Donc, dans un premier temps, là, je suis loin d'être
convaincu - et peut-être que vous pourrez ajouter là-dessus - que
le fait que vous soyez tous à l'intérieur d'une même
centrale, même divisés comme vous l'êtes là en quatre
ou cinq, ça assure une homogénéité de
fonctionnement puis le respect des champs de juridiction. Vous êtes
là-dedans. De la même façon - et ça, c'est une
révélation pour moi depuis que j'ai cette
responsabilité-là - que l'on peut créer la perception que,
parce que la loi a créé un seul porte-parole au nom des
entrepreneurs pour ce qui a trait à la négociation pour relations
de travail... Je vous assure que ce n'est pas ça qui garantit
l'unanimité de pensée et de fonctionnement des entrepreneurs dans
le secteur de la construction parce qu'ils représentent, eux aussi,
comme chez vous, des intérêts bien différents. Ceux qui
vont vous suivre d'ici la fin de la journée vont sûrement profiter
de l'occasion pour nous l'exprimer.
M. Lavallée (Jean): C'est clair, M. le ministre. Je vous
ai dit, moi, que ça éviterait beaucoup de problèmes en ce
qui a trait au placement. C'est clair. En étant tous dans une même
centrale syndicale, personne ne se met la tête dans le sable pour dire
qu'il n'y a pas certains problèmes qui existent. Au niveau des
juridictions de métier, c'est clair qu'on est né de traditions de
métiers, comme il existe aussi dans d'autres domaines professionnels.
Les avocats ont leur propre juridiction, les notaires ont leur propre
juridiction. Dans nos structures, on a chacun des juridictions de
métiers. Étant donné les changements technologiques, c'est
clair qu'on a certains problèmes à s'ajuster.
Encore une fois, étant sous un même toit, ce serait plus
facile d'essayer de coordonner nos tirs dans la même direction et de
mieux nous parler pour pouvoir en arriver à des ententes dans les
juridictions de métiers. Je ne dis pas qu'on réglerait à
100 % du jour au lendemain, mais soyez assuré que je suis convaincu
qu'on réglerait beaucoup plus facilement plusieurs situations.
M. Cherry: O.K. Je veux revenir sur la question du vote
d'allégeance syndicale. Est-ce que vous préférez... Vous
avez décrit un processus de représentativité, vous avez
utilisé le chiffre de 25 %. Est-ce que vous préconisez le
même type de vote que d'autres qui vous ont précédés
ce matin, à savoir un vote obligatoire, ou si vous voyez... En tout cas,
je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais je vous demande de me
dire quel est votre raisonnement là-dedans, peut-être basé
sur des expériences passées ou...
M. Paré (Yves): Dans le cas d'une ouverture à
l'élimination de centrales syndicales qui ne représentent pas 25
%, il est clair qu'il faudrait un vote obligatoire qui amènerait tous
les travailleurs de l'industrie de la construction à se
prononcer et, une fois pour toutes, à décider. Ce qu'on
disait ce matin, c'est vrai, c'est de remise en remise. Depuis 1972 où
il y avait plus... il y a eu une troisième centrale qui a
été reconnue et qui a été la CSD, elle a
été reconnue en 1972, il n'y a pas eu, ou à peu
près, de modifications dans tout ce qui a trait au pourcentage.
Il y a eu des séparations. Le Conseil provincial et la FTQ,
à un moment donné, ont dit: Bon, on se dissocie. Mais prenez
aujourd'hui, presque 20 ans plus tard, mettez le Conseil provincial et la FTQ
ensemble, on vous donnera encore 73 %, c'est ce qu'on représentait en
1972. Il y a des sommes d'argent énormes qui se dépensent chaque
deux ans et trois ans pour montrer qui est le plus beau et le plus fin et,
pendant la durée de la convention, c'est de se battre, qui va placer qui
sur les chantiers de construction, pour en arriver toujours, après
chaque période de maraudage, aux mêmes résultats.
Alors, s'il y a des parasites, des braconniers qu'on appelle dans
l'industrie de la construction, on a l'impression qu'il y a aussi du braconnage
syndical, qu'il y a des associations qui existent, qui ne font que percevoir
des cotisations syndicales et qui sont dans l'impossibilité de donner
des services aux travailleurs qui paient des cotisations syndicales. Comme M se
paie à peu près 30 000 000 $ de cotisations syndicales par
année dans l'industrie de la construction, ça commence à
être du stock. Alors, il faut qu'à un moment donné les
travailleurs en aient pour leur dû. Ce n'est pas vrai qu'on peut
tolérer la perception de cet argent-là alors que les travailleurs
ne peuvent avoir les services auxquels ils sont en droit de s'attendre.
On dit: Régions donc ça une fois pour toutes, mettons une
association syndicale qui va pouvoir donner de vrais services, qui va pouvoir
faire de vraies relations de travail comme n'importe quelle autre industrie, et
on verra. Il restera les problèmes de juridiction qu'on espère,
comme Jean le disait, dans la même maison pouvoir se comprendre.
M. Cherry: O. K. Je dois poursuivre dans ce domaine-là.
Supposons qu'il y ait un vote, comme vous le décriviez, mais que
ça ne décrète pas une majorité. Vous proposez un
deuxième tour de scrutin. Dans le climat dans lequel vous
décrivez. Là, c'est bien certain qu'on se connaît depuis
fort longtemps, mais j'ai décidé d'être législateur
et il y a des questions qu'il faut que je pose. Un type d'activité comme
celle-là, qui s'étendrait sur une période de x temps parce
qu'il y a un premier et un deuxième tour sans qu'on n'ait pour ça
la conviction et l'assurance que ça va dégager une
majorité... Quels seraient les effets de ça, vous pensez, sur la
qualité et sur la productivité des chantiers de construction?
M. Paré (Yves): M. le Président et M. le ministre,
il y a eu énormément de votes d'allégeance syndicale
depuis que la loi de 1990 existe et il n'y a pas eu, à ma connaissance,
de baisse de productivité sur les chantiers de construction. D'abord,
les votes, ce n'est pas une journée d'élection. C'est des votes
qui s'échelonnent sur cinq, six, sept jours. C'est le soir et les fins
de semaine. Alors, les travailleurs ont amplement le temps et la
possibilité d'aller voter.
On pense qu'il y aurait une décision à prendre, à
un moment donné. La première fois qu'on ferait exprimer la vraie
démocratie, peut-être y aurait-il deux tours de scrutin. On pense
que ça en prendrait peut-être deux et, après ça, ce
serait fini. Il y aurait, au cours des années subséquentes ou des
fins de conventions subséquentes, un vote qui se prendrait normalement.
On ne pense pas que ça va perturber à ce point les chantiers de
l'industrie de la construction et les entrepreneurs. On pense qu'un vote va se
tenir comme il s'en est tenu depuis 1972, sans plus de problèmes que
ça.
M. Cherry: La formule qui a été retenue les
dernières fois, avec présomption... En d'autres mots, ceux qui ne
se présentent pas, c'est comme s'Hs se déclaraient satisfaits de
leur allégeance syndicale présente. Bon. Quelques-uns vont
reconfirmer ce qu'ils ont. Mais vous avez raison de dire que... Je pense que
ça n'a pas créé beaucoup de difficultés ou de
ralentissement à cause d'une activité normale d'expression
d'allégeance. Si on prenait votre formule avec un vote obligatoire, je
pense que... en tout cas. Je vous questionne là-dessus.
M. Paré (Yves): M. le ministre, en 1981 il y a eu un vote
obligatoire dans l'industrie de la construction. En 1981, il y a eu un vote
obligatoire et, contrairement à ce qu'on disait ce matin, que les
gens... qu'il n'y a que ceux qui veulent changer qui vont voter, c'est faux.
À la lecture des résultats, plus de 50 % de ceux qui vont voter,
c'est pour reconfirmer leur même association. Les gens disent: Si je ne
vais pas voter, un autre pourrait voter à ma place. Alors, ça,
c'est faux. En 1981, il y a eu un vote obligatoire dans l'industrie de la
construction et je n'ai pas entendu dire qu'il y a eu des chantiers de
fermés. Il y a eu six jours de votation, les fins de semaine et le soir,
et ça s'est très bien déroulé. Ce n'est pas comme
une journée, M. le ministre, où le "deadline" est entre 9 heures
et 16 heures et là, c'est les bras qui ramassent tout et les chars se
remplissent. Non. Je pense que le vote se fait de façon normale et il se
déroule partout à travers la province de Québec
simultanément. Et il n'y a pas de problème. La Commission de la
construction fait bien ça. On pourrait lui confier encore le même
mandat et ça ne serait pas pire qu'en 1981.
M. Cherry: Merci. En ce qui me concerne.
ça termine ma question.
Le Président (M. Bélanger): II y avait M.
Lavallée qui avait un complément de réponse, je pense.
M. Lavallée (Jean): Je voulais dire au ministre, qui
connaît bien le secteur industriel, qu'on vit, à l'occasion, une
double votation pour une accréditation dans l'industrie. J'en ai
vécu une à Sorel à la Q.I.T., les métallos et la
CSN. On n'a pas perturbé pour autant les opérations de la Q.I.T.
Je suis convaincu que, dans un vote comme ça, tous les gens sont assez
matures et qu'il n'y aurait pas de perturbation dans l'industrie de la
construction.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, j'ai lu avec attention votre mémoire que
j'avais reçu un peu plus tôt. J'y ai trouvé un certain
nombre de remarques pertinentes. Je suis toujours étonnée, quand
les gens viennent en commission, de réaliser comment des petites choses
nous échappent. Je pense à la page 19 lorsque vous rappelez qu'il
ne faudrait peut-être pas confondre quiconque et personne, et je trouvais
que c'était particulièrement intéressant et pertinent.
Dans cet article, précisément... J'y reviens parce que
l'interprétation qui m'a été faite de la modification,
particulièrement le paragraphe deuxième, pourrait aller
très loin en ce qui concerne les travailleurs. Alors, peut-être
pas me donner la réponse tout de suite, mais peut-être que si vous
y regardez d'un petit peu plus près et que vous pensez qu'il y a quelque
chose là, j'aimerais que vous me le disiez.
M. Paré (Yves): Je m'excuse. Vous parlez de 119.2?
Mme Blackburn: C'est 119.2 qui vient modifier 83.1 à l'un
ou l'autre des paragraphes 1°, 2°, 7° à 12°. Le 2°,
on me dit que ça pourrait aller aussi loin que, par exemple, quelqu'un
perdrait sa carte de compétence seulement parce qu'il aurait
porté un madrier. On se demandait si ce n'était pas un peu
beaucoup.
M. Paré (Yves): Bien, est-ce que c'est un peu beaucoup
d'enlever le pain de la bouche de quelqu'un? Est-ce que c'est un peu beaucoup?
Il y a, dans l'industrie de la construction, un paquet de travailleurs
reconnus, qui ont leur licence, qui ont le droit d'oeuvrer sur les chantiers de
construction. Lorsqu'il y a un employeur illégal, c'est parce qu'il y a
un risque de fraude quelque part. Il y a quelqu'un qui, pour avoir cette
job-là, accepte des conditions différentes, accepte bien souvent
de ne pas payer ses dûs ni à la Commission de la construction ni
au gouvernement du Québec par ses impôts, accepte des choses.
Est-ce que c'est dur de dire au gars: Tu t'en viens travailler, tu vas perdre
ta carte de compétence? S'il va travailler illégalement, il va
perdre sa carte de compétence. Est-ce que c'est trop
sévère? Non, ce n'est pas trop sévère.
Mme Blackburn: Ce n'est pas de ça que je parle. Si vous
avez un électricien qui porte quelque chose qu'il ne serait pas
supposé porter, le travail devrait être fait par un manoeuvre,
est-ce qu'on devrait lui faire perdre sa carte de compétence de un
à trois mois parce que. semble-t-il...
M. Paré (Yves): C'est une question de juridiction de
métier, ce que vous me donnez là comme exemple.
Mme Blackburn: Non, ça va. Si vous me dites oui, ça
va. Je...
M. Paré (Yves): Non, mais est-ce que le gars
possède la carte de compétence pour faire le travail? S'il ne la
possède pas, il ne le fait pas. Il ne le fait pas.
Mme Blackburn: Ça va. Dans le projet de loi 186, il y a
deux modifications apportées. Il y en a un certain nombre qui viennent
resserrer, augmenter, mais, à mon avis, la plus importante, c'est la
modification radicale quant au fond, à la perspective et c'est le fait
qu'on change la Commission du bâtiment pour en faire une Régie du
bâtiment. Auriez-vous des objections fondamentales si on conservait la
Commission de la construction sur laquelle était prévu
siéger 15 personnes dont 3 ou 4 représentants des syndicats qui
géreraient les activités qu'on est en train de confier à
une régie, pour les raisons que j'ai expliquées tout à
l'heure et que vous avez certainement entendues?
M. Paré (Yves): Ce qu'on pense, c'est que la loi 186 va
plus loin que la Loi sur le bâtiment qui n'a pas été
adoptée. Elle va beaucoup plus loin. Si vous me demandez: Est-ce que,
pour cet item-là, vous préféreriez être sur le
conseil d'administration plutôt que sur le comité consultatif? La
réponse, c'est oui. On préférerait être sur le
conseil d'administration que sur le comité consultatif. Mais est-ce que
la loi 53 sur le bâtiment, qui est demeurée sur les tablettes, est
mieux que 186? Je préfère 186. Elle va plus loin.
Mme Blackburn: Ce n'était pas tout à fait ma
question. Je me dis 186, admettons là, préalable, on l'accepte,
mais à condition qu'on revienne à l'idée d'une commission
du bâtiment et non pas d'une régie. Je me permets de le rappeler
parce que l'article 52... Attendez un peu!
C'est l'article 67 qui vient modifier le 153, à la page 29 du
projet de loi, qui vous donne toute une série - d'abord, à la
page précédente - de nouvelles tarifications, ensuite qui Indique
que ces fonds sont versés au fonds consolidé et, ensuite,
ça prévoit que tout ça va être indexé.
M. Paré (Yves): Oui.
Mme Blackburn: Indexé, ça veut dire que ça
va dépendre un peu des besoins. Ce genre de disposition
m'inquiète, je l'ai exprimé tout à l'heure. Auriez-vous
des objections fondamentales à l'effet que, oui, le projet de loi 186,
mais qu'on biffe là-dedans toutes les références à
la Régie pour revenir aux dispositions de 53 qui prévoient la
Commission?
M. Paré (Yves): Je vais vous avouer très
candidement, madame, que je ne connais pas la différence entre
l'interprétation d'une régie et celle d'une commission.
Mm» Blackburn: D'accord.
M. Paré (Yves): Je pense que ce qui est important pour le
secteur de la construction chez nous, c'est qu'il y ait définitivement
un contrôle sévère. Que ça s'appelle régie au
lieu de s'appeler commission... Dans l'industrie de la construction, la loi des
relations de travail, c'est une commission de la construction. On y est partie.
Tantôt, je vous écoutais dialoguer avec d'autres avant nous
autres. Ça serait peut-être préférable que ce soit
géré par des entrepreneurs. J'aurais un genre de crainte
là-dessus. Je ne suis pas sûr qu'il y en aurait beaucoup qui
accepteraient, par exemple, d'enlever la licence. Entre eux autres, est-ce
qu'ils accepteraient, par exemple, qu'un entrepreneur qui ne serait pas
conforme perde sa licence, ces choses-là? Moi, je pense que.... Le terme
"régie" ou "commission", est-ce que ça va faire une grosse
différence? Nous, la loi qui est là, les modifications qui sont
apportées font notre affaire. On avait beaucoup travaillé sur la
loi 53, la FTQ-Construction en particulier, énormément. On
était d'accord avec ça. Il y a des modifications qui sont
apportées. On est entièrement d'accord avec les modifications qui
sont apportées aussi.
Mme Blackburn: Mais ça...
M. Lavallée (Jean): Moi, je pense...
Mme Blackburn: Oui.
M. Lavallée (Jean): ...Mme Blackburn, que, pour nous,
c'est clair, la Commission du bâtiment ayant été non pas
promulguée, mais au moins la législation était
là... Ça a pris cinq ans avant que le ministre la ramène
et la modernise. Moi, prendre le risque sur une régie puis une commis-
sion, ça ne m'énerve pas trop. Ce que je veux avoir, c'est
quelque chose en place qui va nous permettre d'aller de l'avant pour contrer le
travail au noir. Puis, pour moi, 186 le couvre, mais pas aussi clairement qu'on
aimerait. On se pose la question. On dit au ministre: Pour nous, la perte de la
licence par rapport au travail au noir n'est pas assez définie. Puis on
dit qu'on va nous expliquer où on va mettre ça. On nous dit que
c'est par un système de points de démérite qui va
être adopte par règlement. Bien moi, j'aimerais voir le
système de démérite adopté avant. Qu'on nous
explique c'est quoi et qu'on ait les règles du jeu. J'ai crainte que, si
on tarde trop à adopter la réglementation, on se réveille
un peu comme ça existe dans certaines lois qui sont mises en application
à un moment donné sur un conseil d'administration où je
siège et que le ministre connaît bien, le représentant
à la prévention à la CSST. La loi est en vigueur depuis
dix ans et on a de la misère à s'attendre.
Donc, Yves vous disait tout à l'heure qu'on est conscients - et
je pense que tout le monde dans cette salle ici en est conscient - de l'ampleur
du travail au noir qu'on vit présentement. On a été
sévères avec nos membres en disant: Eux... Il fallait être
constants dans nos revendications. On ne pouvait pas dire: L'employeur, vous
allez lui trancher la tête, et le salarié, lui, vous n'allez rien
faire. Mais on veut - on sait que le salarié, il a la perte de sa
licence, c'est son gagne-pain, temporairement - on veut aussi que le même
pendant soit du côté de l'employeur pour justement éviter
qu'on continue le travail au noir. C'est clair qu'on ne pense pas
réussir à régler 100 % du travail au noir. C'est une
éducation qu'on devra faire à nos membres et, aussi, avec toutes
les incitations et les pénalités dans la loi, ça va nous
permettre de récupérer. Si on récupère 30 %, c'est
mieux que rien du tout. Moi, je n'avais pas peur de m'en venir à
Québec et de rouler à 100 milles à l'heure. L'amende,
ça ne me dérangeait pas. Mais depuis que je perds mes licences,
soyez assurée que je ne roule pas et que je m'arrange pour ne pas perdre
ma licence. Donc, si on veut réussir à réduire le travail
au noir dans l'industrie de la construction, H faut mettre l'épée
de Damoclès au-dessus des deux têtes. (17 h 15)
Mme Blackburn: Bien. Je rappelle, juste pour fin d'information,
que la loi 53 prévoyait une commission du bâtiment
administrée...
M. Lavallée (Jean): Oui, oui.
Mme Blackburn: ...par les employeurs. Ce n'était pas juste
les employeurs, je veux dire, c'étaient les employeurs et les
syndicats.
M. Lavallée (Jean): Non, non. On était dessus
aussi.
Mme Blackburn: C'est pourquoi je pense que ce n'est pas tant, je
veux dire, par rapport à votre participation, je préfère
ça au comité consultatif. Moi, le comité consultatif, je
vous le dis pour avoir siégé sur un comité,
présidé un comité, un conseil consultatif, c'est de
l'oc-cupationnel, un comité consultatif, à une régie. Je
m'excuse de vous dire ça aussi brutalement, c'est un bonbon pour amuser
le monde. Je n'y crois pas bien gros. Alors, moi, je préférerais
que vous soyez assis à la commission et que vous assuriez la gestion de
ça. C'était vraiment la question.
Deuxième question: Est-ce que vous avez des objections
fondamentales à maintenir les droits des deux corporations:
électriciens et tuyauteurs? Les droits de contrôle sur la
qualification? Je sais qu'on leur reconnaît déjà dans la
loi.
M. Lavallée (Jean): Moi, je ne sais pas ce que les
corporations sont allées vous siffler dans l'oreille, il faudrait qu'on
sache ce qu'ils ont demandé. Je pense qu'ils ont été
plutôt vous voir pour essayer de vous convaincre de défendre les
entrepreneurs autonomes - c'est peut-être la place où il y en a le
moins - je comprends mal les corporations qui vont aller pleurer pour dire:
C'est effrayant, nos pauvres entrepreneurs autonomes vont arrêter de
vivre. Il y en a un, hier, qui laissait croire au public que ça lui
prendrait deux hommes pour aller faire son entretien et sa réparation
dans sa résidence, quand c'est complètement faux. N'importe qui
peut le faire.
Mme Blackburn: Mais ce n'est pas ça ma question, M.
Lavallée.
M. Lavallée (Jean): Je la comprends, votre question, mais
je ne sais pas ce qu'ils vous ont demandé.
Mme Blackburn: M. Lavallée, je ne vous demande pas ce
qu'ils m'ont demandé. Ils ont demandé à peu près...
Chacun est venu défendre ses intérêts, n'en doutez pas.
Alors, ce que je veux juste savoir, c'est dans la...
Une voix: Mesdames, messieurs.
M. Paré (Yves): Juste une question, madame.
Est-ce que, dans le projet de loi, la corporation perd des droits? Les
deux projets de loi, 185 et 186.
Mme Blackburn: Dans 186, oui. M. Paré (Yves): Par
la régie de...
Mme Blackburn: Ça fait disparaître les
privilèges qu'ils avaient, eux, de contrôler, avec la commission
et la régie des entreprises, comme tout le monde, la qualification, un
certain nombre de choses. À ce qu'on m'a dit, ils avaient sensiblement
des fonctions qui s'apparentaient un peu aux corporations professionnelles, des
technologies physiques.
M. Lavallée (Jean): C'est très clair à
répondre.
Mme Blackburn: Je ne parle pas de l'entrepreneur autonome, je
parle juste de la corporation.
M. Lavallée (Jean): Non, non. Moi, la corporation
habituellement, quand elle veut nous passer des messages, elle nous le laisse
savoir. Je n'ai aucune idée de ce qu'ils veulent. Donc, s'ils ont des
dossiers à défendre, qu'ils aillent voir les personnes aux bonnes
places.
Mme Blackburn: Non, je voulais juste savoir si vous aviez
réfléchi à la question.
M. Paré (Yves): Non.
Mme Blackburn: Comme vous avez lu les projets de loi,
j'imagine...
M. Paré (Yves): On n'a pas pris conscience qu'ils
perdaient.
Mme Blackburn: ...que vous avez passé là-dessus.
J'y reviens donc. Les travaux assujettis, en page 14, vous proposez que la
définition du champ d'application inclue les travaux d'entretien, de
rénovation, de réparation et vous revenez, à la page 18,
si je ne m'abuse, et là, vous avez... Il m'a semblé qu'il y avait
deux approches par rapport à la rénovation construction. Je n'ai
pas vraiment la bonne page pour la première référence; la
deuxième, ça va, pour la page 14. Ce que vous nous dites, c'est
que la rénovation, entretien, réparation, il faudrait les
définir pour établir un pourcentage qui ne sera pas de 10 000 $,
qui serait de 5000 $, je pense que c'est vous qui nous avez dit ça.
M. Paré (Yves): C'est le mot "mineur".
Mme Blackburn: En même temps, lorsque vous parlez des
champs d'application, vous dites: Tout ça devrait être
considéré comme des travaux assujettis.
M. Lavallée (Jean): C'est deux choses différentes.
L'entretien, réparation mineure, c'est une chose, et le champ
d'application, c'est ce qu'on demande qui soit couvert dans la loi.
Mme Blackburn: D'accord. Ce qui n'empêcherait pas pour les
travaux de rénovation, réparation.
M. Lavallée (Jean): Absolument pas.
Mme Blackburn: D'accord, ça va.
M. Paré (Yves): Définir le mot "mineur". C'est
quoi, "mineur"? Vous savez, vous faites - on pariait de 10 000 $ - pour 10 000
$ de réparation dans un dépanneur du coin, dans le village,
est-ce que c'est énorme? Si vous faites 10 000 $ de réparation
à la compagnie Kruger, c'est presque pas, ce n'est rien. C'est ça
que je veux dire, est-ce qu'on peut déterminer le mot "mineur"? Comment
est-ce qu'on peut faire pour arriver à une vraie définition du
mot "mineur"?
Mme Blackburn: II y avait quelques organismes qui
prétendaient que ça pouvait être par rapport au pourcentage
de la valeur, par exemple, de la résidence.
M. Paré (Yves): La résidence, c'est exclu. C'est
exclu, ies résidences, parce que entretien, réparation,
rénovation mineure, c'est dans le cas commercial, industriel,
institutionnel et...
Mme Blackburn: Ah oui! C'est vrai. Vous avez raison. Vous avez
tout à fait raison. Vous avez parlé des pratiques des "brokers"
qui, finalement, ont entraîné l'abus. On a dépassé
largement ce qui devait être entendu, ce qui devait, dans l'esprit,
guider les entrepreneurs autonomes dans la nature des travaux qu'Ss devaient
entreprendre et on s'est retrouvé, selon ce qu'on me dit, sur des grands
travaux - je me suis dit: Ils ont exagéré, mais, quand
même, j'aimerais vous entendre - avec une trentaine d'entrepreneurs
autonomes sur un même chantier. On fabule ou quoi?
M. Paré (Yves): Pardon, est-ce que...
Mme Blackburn: Est-ce que c'est sérieux, ces
avancés?
M. Paré (Yves): C'est très sérieux, madame,
c'est très sérieux. Il y a des centres d'achats qui se
bâtissent, qui se construisent avec, en majorité, des
entrepreneurs autonomes. Quand on parie des "brokers", l'expression "broker",
c'est quelqu'un qui n'emploie personne, qui a, je ne sais pas, 175 000 pieds
carrés de terrain à vendre, qui construit 250 maisons et qui n'a
jamais engagé un gars. L'excavation des caves a été faite
par un entrepreneur autonome qu'il a payé en dessous de la table, le
coulage du béton, c'est la même chose et le montage des murs...
Nommez-en.
Je veux dire, à un moment donné, il faut que ça
arrête quelque part et je pense qu'il était clair que, dans
l'entretien, réparation domiciliaire, la marche d'escalier qu'on a
attendue pendant 15 ans de temps, ça n'avait pas de sens. C'est sorti de
l'industrie. Hier, Johnny en parlait, M. Brown, pour se plaindre: Les pauvres
consommateurs, il va falloir qu'ils soient avertis, ça va nous prendre
deux hommes pour aller réparer leur... C'est du charroyage. Alors, on
dit: Parfait, le consommateur ne sera pas pénalisé, au contraire.
Je pense que le consommateur va avoir une meilleure construction parce que ce
ne sera pas n'importe quel - pour employer l'expression de Maurice -
"fly-by-night" qui va aller faire la construction de sa maison.
Mme Blackburn: Vous demandez le retour... Pour ça, ce
gouvemement-là m'inquiète lorsqu'on parie de régie parce
que vous demandez te retour à la situation qui prévalait au
moment où la Commission de la construction pouvait percevoir des
amendes, ce qui m'apparaît normal. On m'a fourni ici des cas concrets,
les noms ne sont pas au bout, pour lesquels la date d'infraction, le 2
août 1990, l'avis préalable est arrivé le 1er
février 1991, la sommation, le 8 juillet 1991 et la comparution, le 21
octobre 1991. Là, on fait juste fixer la date. Alors, vous comprendrez
qu'avec un système comme ça, ça n'a aucun sens.
Une voix: Exact.
Mme Blackburn: J'essaie d'imaginer qu'est-ce que ça
donnerait à vous et à moi, si on faisait du 100 sur l'autoroute
20, - évidemment, pas du 100 km mais du 100 milles - on se faisait
arrêter, comme ça arrive, et si on voyait seulement l'amende
arriver, et les points de démérite, deux ans après. Il me
semble qu'il y a quelque chose de pas très incitatif. Là-dessus,
je dois reconnaître avec vous que s'il y avait des possibilités
d'aller dans ce sens-là, je pense que... il ne s'agit pas juste
d'augmenter les pénalités. Moi, je continue de maintenir que si
on avait appliqué la 53 et qu'on avait conservé la
possibilité que les pénalités soient perçues par la
Commission, on ne serait pas ici en train de parler de ça et on n'aurait
pas eu droit à cette remarque fort pertinente, en début de
mémoire. où vous dites: Encore une fois, on est encore là.
Je comprends la lassitude.
M. Paré (Yves): Probablement que vos arguments n'ont pas
réussi à convaincre le ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
ministre, si vous voulez remercier nos invités.
M. Cherry: Bien, je vais d'abord vous dire merci de vous
être déplacés aujourd'hui et d'avoir présenté
votre mémoire. Je vous assure que vos représentations occupent
une partie de mon attention et que l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous
apporte beaucoup de travail. C'est pourquoi j'ai demandé à des
équipes du ministère de se mettre à l'oeuvre et de
donner
un suivi aussitôt que la journée se termine. Donc, encore
une fois, merci de votre présence et de votre collaboration.
M. Paré (Yves): Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, ça m'a fait plaisir de vous rencontrer.
Comme il s'agit d'une grande association syndicale, mais on le fait pour tous
les groupes qui se présentent ici, il y a des commentaires et des
propositions qui sont fort pertinents et que, sans doute, on va tenter -
évidemment, ça dépend du ministre, on est toujours
à l'opposition et on est toujours minoritaire - de faire
améliorer les projets de loi qui sont sur la table. Je vous
remercie.
M. Lavallée (Jean): Merci, madame. M. Paré
(Yves): Merci, madame.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission
remercie la Fédération des travailleurs et travailleuses du
Québec, section de la construction, et appelle à la table des
témoins l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec.
Alors, je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa
place, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Nous recevons
présentement l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec. C'est M. Jean Perron qui est le président. J'inciterais
M. Perron à nous présenter les gens qui sont avec lui et à
passer à la présentation de son mémoire. Je vous
remercie.
Association des entrepreneurs en construction du
Québec
M. Perron (Jean): Alors, M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs les membres de la commission, je voudrais d'abord,
effectivement, vous présenter les gens qui sont avec moi: à ma
droite, M. Reynald Couillard, premier vice-président; à mon
extrême gauche, M. Robert Brown, directeur général adjoint,
et quelqu'un que probablement la plupart des gens ne connaissent pas, M. Michel
Dion, directeur général de l'Association.
Au début de cette intervention, vous me permettrez de vous
introduire notre intervention tout bonnement, en vous relatant
l'expérience et le vécu d'un employeur de l'industrie de la
construction en 1991. Depuis 20 ans, j'oeuvre dans cette industrie et je suis
fier d'y oeuvrer. Cependant, ce que je peux constater facilement, au moment
où on se parle, c'est que le champ d'application de l'industrie n'est
plus ce qu'il était et le travail au noir fait des ravages, en
particulier dans une période comme celle qu'on connaît maintenant,
une période de récession, une période de ralentissement
important dans nos travaux. Moi, comme employeur, j'en souffre
énormément. J'en souffre parce que je travaille désormais,
en particulier à cause de la présence du travail au noir, dans un
milieu où la compétition n'est plus égale. Il ne faudrait
surtout pas penser que le travail au noir est quelque chose qui se fait
strictement dans un domaine comme le résidentiel ou dans des domaines de
plus petite ampleur. On connaît le travail au noir partout à
travers l'industrie et dans tous les secteurs d'activité - Reynald
pourrait vous en témoigner dans son secteur - et nombre d'employeurs,
effectivement, sont confrontés à ce problème. (17 h
30)
Dans un plan d'action que, M. le ministre, vous avez proposé au
milieu de l'été, vous nous avez indiqué une volonté
qui se concrétise, croyons-nous, effectivement dans le projet de loi
185, lorsque vous parlez des travailleurs autonomes. Nous pensons que votre
approche à ce niveau-là constitue un départ
intéressant et important au fait d'assainir notre milieu et de faire en
sorte que l'industrie de la construction soit quelque chose de viable et
d'intéressant et pour les entrepreneurs et pour les employés. La
détérioration de notre milieu a fait en sorte qu'au cours des
années la partie syndicale en est venue à penser qu'elle devait
essayer d'obtenir un revenu garanti. Nous sommes convaincus, et nous l'avons
dit à maintes reprises depuis la mise en place de Picard-Sexton, que ce
n'est pas par un revenu garanti que nous allons régler le
problème et permettre à nos employés qui, malheureusement,
dans une année comme celle-ci, sont trop souvent sur le chômage
à cause en particulier du travail au noir dans mes sphères
d'activité à moi, nous sommes convaincus qu'effectivement, en
revisant notre champ d'application, en redonnant à l'industrie de la
construction ce qui est ses travaux, en travaillant à réduire le
travail au noir qui est devenu un cancer dans notre industrie, en voyant
à étaler les travaux d'ordre public d'une façon plus
adéquate, nous pourrons permettre à nos employés et
à nos entrepreneurs d'atteindre à des revenus raisonnables pour
vivre et qu'on n'aura pas besoin, à ce moment-là, de revenu
garanti.
Évidemment, lorsque vous nous avez déposé, M. le
ministre, un plan d'action, je pense que, du côté des
entrepreneurs, des employeurs, nous avons répondu avec un enthousiasme
certain. Nous avons répondu avec un enthousiasme certain, entre autres
en acceptant de mettre sur pied un programme de formation et de recyclage, de
recyclage et de perfectionnement, pour permettre une meilleure
employabilité à nos employés et, donc, par ricochet,
inévitablement de meilleurs revenus. C'est ce qui a motivé notre
action à ce moment-là. Évidemment, dans le
cadre d'un projet de loi comme celui que vous nous présentez, qui
devient essentiel pour nous, mais qui est un minimum, parce que nous comprenons
malheureusement que vous n'ayez pas pu aller dans un premier temps
peut-être plus loin avec le champ d'application, mais nous comprenons
qu'il y a des engagements qui ont été pris dans votre plan
d'action et que, éventuellement, ça débouchera sur des
choses qui amélioreront.
Peut-être un dernier point sur lequel je voudrais revenir avant de
laisser la parole à Michel. Nous avons accepté un plan de
recyclage et de perfectionnement. Nous croyons qu'il est important de recycler
notre main-d'oeuvre pour être plus efficaces, plus productifs. Nous
pensons par là que le consommateur, quel qu'il sort, gros ou petit, sera
davantage protégé, et nous sommes convaincus, à ce
moment-là, que nos employés atteindront à de meilleurs
revenus. Cependant, d'aucune façon pour nous il n'est question de verser
des sommes à des gens à ne rien faire. Et je veux que ça,
ça reste très clair. Sur ce, en fait, ce que je voulais vous
livrer, moi, personnellement, comme président de l'association
d'employeurs, c'était un message: Faites quelque chose, c'est un
début, c'est intéressant, mais tenez votre bout et, s'il vous
plaît, dans le cadre en particulier du travailleur autonome, le projet de
loi 185 constitue pour nous un minimum. Je laisserai à Michel, à
ce moment-ci, de continuer.
M. Dion (Michel): Alors, M. le Président, M. le ministre,
madame, messieurs, je n'ai pas l'intention de lire le mémoire. Je pense
que vous l'avez tous en main. Il est quand même assez volumineux. Je vais
le passer en biais pour attirer votre attention sur les principaux points. Je
sais que vous aurez sûrement une belle fin de semaine a passer à
lire tous ces documents-là. Il y a aussi, effectivement, le fait que la
position de l'AECQ sans surprise se rapproche d'une façon assez
intense... en tout cas, une façon assez précise de la position
des parties syndicales. C'est assez étrange, effectivement, que
l'industrie de la construction patronale et syndicale, aujourd'hui, on a
presque une voix unanime pour venir vous dire: Voici, on est devant un projet
de loi qui va régler un problème majeur dans l'industrie de la
construction. On est presque unanimes, aussi, à vous dire: On
souhaiterait ardemment que vous puissez apporter à ce projet de loi
là un certain nombre de modifications touchant spécialement leur
champ d'application et en modifiant ou en améliorant certaines
conditions.
Alors, c'est quand même assez important, je pense, que vous
constatiez que tout le monde de l'industrie de la construction, qui est
reconnu, en vertu de la Loi sur les relations du travail, pour être actif
dans les relations patronales et ouvrières, je pense qu'on est presque
tous d'accord pour vous dire: C'est un projet de loi qui est important pour
notre industrie. Il n'y a aucune cachette dans notre esprit face au
régime de l'entrepreneur autonome. L'entrepreneur autonome, on peut
peut-être être surpris de retrouver ça dans le projet 185.
Pour nous, il n'y a aucune surprise, c'est une décision légale,
législative qui a déjà été prise. Ça
fait déjà au-dessus de trois ans - je n'ai pas tellement de
mémoire des dates - ça fait déjà au-dessus de trois
ans que le statut d'entrepreneur autonome a été accepté
comme une norme pour l'industrie de la construction.
Le problème qui s'est présenté, c'est qu'il s'est
créé un trou ou un "loophole11 dans ie projet de loi
et, effectivement, on a pu utiliser ce trou, cette absence de couverture pour
pouvoir passer à côté d'une législation dûment
adoptée par un gouvernement. Alors qu'aujourd'hui, vous ne nous
présentiez absolument rien de nouveau... Dans le fond, vous ne nous
présentez rien de nouveau par le projet de loi. vous venez boucher un
trou. Alors, pour nous autres, c'est intéressant, c'est essentiel, il
n'y a rien de nouveau là-dedans. On ne peut pas comprendre qu'il y en
ait qui se scandalisent de retrouver la notion d'entrepreneur autonome.
Elle est essentielle à notre industrie, je pense, et elle n'est
préjudiciable à personne. On est une association d'employeurs, on
n'est pas une association d'entrepreneurs, à l'Association,
malgré notre nom, ça a l'air étrange. Notre job, la job
des employeurs en construction, c'est de faire un commerce avec l'aide de
salariés et on pense que l'industrie de la construction ou n'importe
quelle autre industrie a ce droit d'un champ d'application et de faire des
travaux à l'aide de salariés. Pour nous, toute personne qui peut
entrer dans ce système-là d'une façon illégale et
venir faire à notre place les travaux, c'est de la concurrence
déloyale.
Il faut comprendre qu'on parle pour des employeurs en construction.
Alors, la notion d'entrepreneur autonome, à ce moment-là, si elle
est galvaudée et utilisée afin de faire une concurrence
déloyale envers nos employeurs, c'est évident, à ce
moment-là, qu'on est d'accord avec la modification. Par contre, il y en
a qui prétendent qu'on sort des gens de l'industrie de la construction.
Je dois vous dire qu'à moins qu'on ne comprenne très mal la
législation, à l'heure actuelle, il y a un échange qui a
été fait. On a légué, on a cédé une
partie des activités de notre industrie. En considération du
consommateur et en considération de ces gens-là qui avaient quand
même un acquis dans l'industrie, on a cédé la
réparation, l'entretien et la rénovation dans certaines limites.
C'est dans ce système-là que les entrepreneurs autonomes ont une
activité. Je pense qu'à toutes fins pratiques, la
législation ne fait que confirmer une décision antérieure
du gouvernement. Alors, il n'y a rien de tellement aberrant, je pense, dans le
projet
de loi, face à cette partie-là du travailleur
autonome.
La notion du cautionnement... Vous allez dire que je fais un
chevauchement, mais j'y vais surtout sur les principaux points. Excusez-moi,
non pas la notion du cautionnement... La notion du représentant
désigné nous apparaît, à toutes fins pratiques,
quelque chose de presque automatique. Il faut - et ce n'est pas quelque chose
de nouveau pour nous autres, à l'AECQ, on l'avait déjà
fait dans nos propres statuts - il faut, dans le cas d'une corporation ou d'une
société, être capable d'identifier une personne, de
désigner une personne qui est une personne théoriquement morale,
la corporation ou la société, il faut identifier une personne
physique.
Alors, la notion du représentant désigné, qui
devient l'identification de la corporation dans une personne physique, c'est
une notion qui nous apparaît tout à fait normale et on la trouve
justifiée dans le projet de loi. Par contre, il y aura peut-être,
un peu plus loin, quelques ajustements. On pense qu'effectivement, en
introduisant cette notion-là, on a peut-être oublié de
faire une certaine concordance, entre autres avec le régime des
avantages sociaux. Or, les conditions d'exercice des représentants
désignés, c'est un exercice comme tout l'ensemble de l'industrie
à ce moment-là, c'est avec l'aide de salariés qu'ils vont
pouvoir être actifs dans l'industrie de la construction. Ça, c'est
simplement une clause que nous croyons logique. Nous croyons que la
disposition, par contre, devrait être modifiée afin de permettre
à l'employeur de travailler occasionnellement seul sur ses propres
chantiers. On a mis ça dans notre mémoire. Ça peut
apparaître surprenant comme position.
Le problème qu'on rencontre est le suivant et on doit vous avouer
honnêtement qu'on n'a pas une solution miracle devant cette
situation-là. C'est que l'employeur, avec ses salariés,
débute un chantier; au fur et à mesure de l'avancement du
chantier, il y a une réduction des travaux qui se fait. Il pourrait
arriver, à l'occasion, que l'employeur, ayant une diminution assez
importante des travaux, n'ait pas assez d'ouvrage, à ce
moment-là, pour donner de l'ouvrage à des salariés. Nous,
on pense qu'il y a une certaine logique - je vous répète qu'on
n'a pas encore la solution miracle pour ça - pour que l'employeur
pourrait, à ce moment-là, dans une certaine mesure, être
habile à finir ses travaux. On parle d'occasionnels, on parle de
finition de travaux déjà commencés à l'aide de
salariés. On vous le dit honnêtement, on n'a pas réellement
trouvé la façon de le dire.
Par contre, on peut vous dire ceci. C'est que, si l'inclusion d'une
clause semblable dans un texte de loi avait comme conséquence de rouvrir
la porte à du travail illégal, à du travail qui serait
fait de la même façon que ce qu'on pouvait vivre avant, en dessous
de la couverte, à ce moment-là, il vaudrait mieux, effectivement,
maintenir la position actuelle que d'avancer dans cette avenue-là.
Les nouveaux statuts pour exécuter les travaux.
Évidemment, on est d'accord avec la . création du statut de
représentant désigné, je vous l'ai dit, parce que
ça devient la personne physique représentant et, dans le cas du
représentant désigné d'une corporation ou d'une
société d'employeurs, le représentant est dit être
un employeur au sens des articles 85.5 et 85.6. La précision de cet
article nous amène à nous poser une question. En précisant
qu'il n'est employeur qu'à l'égard des articles 85 et 86, nous
avons une inquiétude à l'effet qu'il ne serait pas employeur a
l'égard des autres articles de la loi. C'est probablement quelque chose
qui, je pense, devrait être regardé dans le texte du projet de loi
parce que ça pourrait créer un statut ambigu pour le
représentant, la personne désignée de l'employeur, ce qui
n'est pas le cas pour le représentant désigné pour
l'entrepreneur autonome parce que ce cas-là est carrément
réglé. La présomption étant très limitative
à l'égard des articles 85.5 et 85.6, on a un doute à
l'égard de l'ambiguïté que ça pourrait créer
à l'égard des autres articles qui touchent la personne
désignée de l'employeur.
On recommande effectivement qu'il y ait un ajustement qui soit
apporté à l'égard de cette clause de façon à
le traiter au même titre que le représentant désigné
d'un entrepreneur autonome. De plus, nous croyons que le représentant
désigné d'une corporation ou d'une société
employeur devrait avoir le choix d'adhérer ou non au régime
complémentaire d'avantages sociaux. Pourquoi on demande ça? C'est
qu'il existe actuellement, dans la loi, un droit pour l'entrepreneur autonome,
effectivement, de ne pas adhérer au régime des avantages sociaux.
On n'est pas sûr si la concordance actuellement est suffisante pour
permettre au représentant désigné de l'entrepreneur
autonome, à ce moment-là, d'avoir le même droit que
l'entrepreneur autonome, c'est-à-dire de ne pas être obligé
de souscrire au régime complémentaire des avantages sociaux.
C'est possiblement une question de concordance qu'il faudrait regarder dans le
projet de loi.
La responsabilité des donneurs d'ouvrage. Je dois vous dire qu'on
est loin d'être à rencontre de cette décision. Nous, le
titulaire, l'engagement de personnes qui sont titulaires de licence, on est
absolument favorables à ça. On a vécu, maintes fois, des
donneurs d'ouvrage qui ne se sont absolument pas soucié de la
réglementation de l'industrie de la construction et qui ont
accordé des travaux à des entrepreneurs qui étaient soit
pas titulaires des bonnes licences ou même pas titulaires de licence. Je
ne voudrais pas me faire poser: Soulignez-nous donc le cas, mais je peux vous
dire qu'on a vécu, dans le passé, des cas où
c'était la partie gouvememen-
tale qui était comme donneur d'ouvrage et qui a confié des
travaux à des entreprises qui n'étaient même pas
licenciées. Pour nous, cette exigence que le donneur d'ouvrage doit
travailler, et des entrepreneurs licenciés, nous apparaît
justifiée.
Le cautionnement qui apparaît également dans le projet de
loi, nous sommes d'accord et nous sommes d'accord sur deux points. Il y a eu
beaucoup d'argumentation ce matin sur ce point-là et nous sommes
d'accord. Le fonds d'Indemnisation qui apparaît dans notre industrie,
nous le considérons un peu comme un cautionnement collectif. Mais le
problème d'un cautionnement collectif, c'est que les bons paient pour
les méchants. Notre fonds d'indemnisation nous coûte actuellement
2 cents l'heure et si, effectivement, on continuait de s'en aller vers des
paiements aussi importants qu'on fait actuellement, il pourrait s'avérer
absolument insuffisant, ce fonds d'indemnisation-là. On avait
déjà, dans le passé, regardé la question et on en
était venu à une conclusion qu'un cautionnement, mais un
cautionnement individuel...
Le Président (M. Bélanger): M. Dion, je me vois
dans l'obligation de vous arrêter, il y a un appel pour un vote en
Chambre. Alors, nous reviendrons dans probablement 10 ou 15 minutes. On
reprendra à la fin.
M. Dion: C'est excellent, on va pouvoir...
Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous
remercie.
(Suspension de la séance à 17 h 46)
(Reprise à 18 heures)
Le Président (M. Bélanger): Je demande à
tout de monde de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît. Bien.
Il y a plus ou moins 12 minutes qui ont été perdues à
cause du vote. Alors, est-ce qu'on a consentement pour prolonger nos travaux de
10 à 12 minutes pour finir l'audition du groupe de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec?
M. Cherry: Vous avez ma collaboration, M. le Président,
pour prolonger...
Le Président (M. Bélanger): Consentement? On
prolongerait de 10 minutes.
Mme Blackburn: Oui, oui, tout à fait.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Douze minutes, en
réalité. Alors, ceci étant dit, M. Dion, nous vous
invitons à continuer votre mémoire. On s'excuse, mais ce sont les
aléas du métier. Ici, on s'expose à ça.
M. Dion: Pour autant que vous ayez bien voté, pas de
problème.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix:...
M. Dion: Excusez, madame, je ne vous ai pas entendue.
Une voix: On a tous bien voté.
M. Dion: Parfait. Alors, je pense qu'au moment où on s'est
laissés j'étais en train de finir sur le cautionnement pour vous
dire que le cautionnement, pour nous autres, ça devenait une mesure qui
était très très souhaitée parce qu'on regarde aller
le fonds d'indemnisation, on regarde aller l'industrie de la construction et on
est excessivement inquiets sur l'envergure que pourraient prendre les
cotisations au fonds d'indemnisation si on ne trouve pas un moyen. Et le
danger, actuellement, c'est que le fonds d'indemnisation nous apparaît
comme une espèce de cautionnement collectif où les bons
employeurs sont susceptibles de payer pour les moins bons employeurs.
Alors, c'est sûr, pour nous autres, qu'un système de
cautionnement... Et j'insiste sur le mot "individuel" et non pas une
espèce de système de cautionnement qui pourrait être
collectif. Un système de cautionnement qui serait individuel. Les gens
prendraient chacun leurs responsabilités. Je pense qu'il peut y avoir
des responsabilités au niveau de certaines entreprises, à ce
moment-là, et ce serait intéressant qu'à ce
moment-là eHes soient obligées de fournir un cautionnement pour
se remettre dans le droit chemin.
Alors, le mot: "individuel", pour nous autres, signifie ceci: c'est
qu'il faudrait peut-être penser, au projet de loi, à faire un
amendement ou à apporter, en tout cas, une précision pour
s'assurer que les gens vont le faire. Il ne faudrait pas se retrouver
éventuellement avec un système ou un groupement où quelque
organisation se permettrait de fournir le cautionnement au nom d'un groupe, au
nom des membres. Sans ça, à ce moment-là, on n'atteindrait
pas du tout le but visé. Le but visé du cautionnement et du
cautionnement individuel, c'est de responsabiliser celui qui est en faute.
Alors, je pense que ça devrait réellement être un
cautionnement individuel.
Suite au cautionnement, je vais maintenant vous parier de la
responsabilité des employeurs dans l'omission du paiement du
prélèvement des cotisations. On n'a pas objection - et je pense
qu'on l'a démontré avec le fonds d'indemnisation - à
être responsables, à titre les mandataires des sommes qu'on
retient pour les fins de la Commission, mais nous considérons que la
mesure est abusive à l'égard des cotisations. Des
cotisations, à ce moment-là, nous apparaissent d'autant
plus difficiles à être responsables parce que les syndicats
modifient régulièrement leur taux de cotisation.
Nous croyons que ce serait une mesure qui pourrait être
envisageable si, à un moment donné, on se retrouvait avec la
solution qu'on avait déjà proposée: une modification
possible par année des cotisations et un taux de cotisation uniforme.
Mais je dois vous dire qu'actuellement, là, il y a autant de cotisations
qu'il y a de syndicats, multiplié par 23 métiers. Alors, c'est
réellement quelque chose qui nous apparaît aberrant que de nous
tenir responsables des cotisations au même niveau qu'on nous tiendrait
responsables du prélèvement de la Commission. Alors on requiert,
à ce moment-là, afin d'amender le texte du projet de loi, que
l'employeur soit tenu, d'accord, au paiement des prélèvements
mais, quant aux cotisations, d'éliminer ça du texte.
L'augmentation des amendes. Je vais passer très vite sur
l'augmentation des amendes. Je dois vous dire que des amendes avec un minimum
et un maximum, évidemment, ça peut paraître désuet,
à l'heure actuelle. Cependant, il y a ceci, dans le projet de loi. C'est
qu'il y a des amendes...
Le Président (M. Bordeleau): M. Dion... M. Dion:
Oui.
Le Président (M. Bordeleau): ...le temps qui est
alloué est maintenant terminé. Il vous faut combien de temps,
à peu près, pour terminer votre...
M. Dion: Je pensais que vous m'accordiez les 12 minutes de
tantôt.
Le Président (M. Bordeleau): Non, on retarde de 12
minutes...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bordeleau): ...la fin de la session.
M. Dion: M. le Président, j'imagine qu'en dedans de 5
minutes, là, je devrais être bon pour passer à travers.
Le Président (M. Bordeleau): Consentement? Une voix:
Oui, consentement.
Le Président (M. Bordeleau): Parfait! Vous pouvez
continuer pour 5 minutes.
M. Dion: Or, sur l'augmentation des amendes... On n'a pas de
difficulté à accepter une certaine augmentation des amendes mais
on trouve quand même que, dans certains cas, les amendes sont
exagérées, en tout cas, elles sont énormes. Et je vous
donne le cas d'un bonhomme qui est "poigne" sur un chantier de construction -
excusez l'expression "poigne". Il a une carte de compétence dans sa
poche, le bonhomme, mais il est en train de faire des travaux qui ne sont pas
nécessairement relatifs à cette carte de compétence. Je
comprends que la personne est peut-être en infraction, mais c'est loin
d'être le même cas qu'une personne qui se retrouve sur un chantier
sans aucune carte de compétence.
Je pense que le projet de loi devra tenir compte de ça. Et
ça va revenir aussi, à un autre niveau, un peu plus loin,
là, un peu la même philosophie. C'est qu'il y a celui qui est
réellement en marge totalement illégalement dans l'industrie et
il y a celui qui est, d'une certaine façon, illégal, mais ce
n'est pas le même style ou la même envergure
d'illégalité. Je pense qu'on devrait tenir compte de ça.
Alors, quand on arrive à des amendes pour ne pas avoir le bon
certificat, je pense qu'on devrait y aller avec une pédale un peu plus
douce.
Dans le cas du pénal, M. le Président, je me sens
excessivement à l'aise de vous dire: Ça fait longtemps qu'on
pense que ça n'aurait jamais dû nous être enlevé, le
pénal. Je pense que toutes les parties se sont accordées pour
venir vous dire: C'est aberrant qu'une organisation qui doit discipliner son
monde n'ait pas le droit de faire ses poursuites puis avoir le fruit de ses
amendes. Ça existe à peu près partout. N'importe quelle
corporation professionnelle discipline ses membres et elle a droit à ses
amendes. Or, je ne comprends pas que nous, dans l'industrie de la construction,
on constate des infractions, on fait des gros rapports, on fait des
enquêtes, on envoie ça... Puis j'écoutais... Je pense que
c'est Mme Blackburn qui donnait toute une espèce d'historique d'un
dossier, comment ça peut cheminer. C'est une réalité, il y
a des choses comme ça qui se passent. Or, je pense que ce
pénal-là - les poursuites pénales - ça doit revenir
à l'industrie de la construction, ça doit revenir à la
Commission, d'autant plus que c'était une source importante de
financement pour les activités de l'industrie.
Je poserai - et je pose - la question au ministre, s'il a une seconde
pour m'écouter. Comme on a tous dit qu'on est d'accord, M. le ministre,
on aimerait savoir, je pense, séance tenante, ce que vous avez envie de
faire avec ça. Je ne vois pas comment vous pourriez refuser a
l'industrie de pouvoir récupérer son pénal ou ses amendes.
Je suppose que vous prendrez le temps de me répondre tantôt.
Infraction concernant les certificats de compétence. Je vous ai
dit... Il y a une jonction, dans deux circonstances, où les amendes
d'une illégalité plus grande que l'autre devraient être
prises en compte.
Je passe également à la suspension du certificat de
compétence. C'est le même cas un peu que les amendes. On suspend
le certificat à quelqu'un qui a fait quelque chose qui est
réellement illégal. Mais quand c'est une personne qui exerce un
métier sans détenir le bon certificat, je trouve que c'est
peut-être exagéré de lui enlever son certificat, à
ce moment-là, en tout cas, de la même manière que celui qui
ferait une infraction plus grave.
La communication des renseignements. Je dois vous dire qu'on n'a aucun
commentaire, on est absolument d'accord. On pense même que, par
l'entremise de la loi 186, vous devriez faire la jonction avec la Régie
des entrepreneurs en construction ou quel que soit l'organisme qui la
remplacera.
Quant à la partie des choses qu'on aurait voulu voir dans le
projet, je vais vous souligner... Il y a au moins un point très majeur
qu'on trouve aberrant de ne pas retrouver dans le projet de loi. N'oubliez pas
la déclaration, au départ, de notre président qui dit: On
est dans une industrie où on a perdu notre champ d'application,
où on a des heures de travail qui sont perdues. Les travailleurs sont en
situation difficile parce qu'ils ont moins de sécurité d'emploi.
Ils se plaignent de ne pas avoir suffisamment de revenus. La solution pour nous
autres, effectivement, c'est quoi, le bobo? Donc, il y a un remède. Le
remède, c'est d'éliminer le travail au noir, mais c'est aussi de
récupérer nos heures dans l'industrie de la construction. C'est
absolument aberrant, à tous les amendements qu'on a pu voir dans le
passé au projet de loi, on perdait un bout de notre champ d'application.
Par l'entremise des décisions qui peuvent se rendre au nh/eau du
commissaire, on perd une partie de nos juridictions. On perd notre
activité comme employeur, puis on perd l'activité,
c'est-à-dire le gain ou la sécurité d'emploi que nos
travailleurs pourraient gagner avec cette activité-là.
Je pense, M. le ministre, MM. du gouvernement, que c'est encore un point
où toute l'industrie de la construction est absolument d'accord sur la
récupération de notre champ d'application. Je pense que ça
aurait dû faire partie du projet de loi et, si c'est encore possible de
l'inclure, je pense que vous devriez y donner suite. Je pense que c'est
essentiel si on veut ramener, dans l'industrie de la construction, une
sécurité d'emploi aux travailleurs et aux employeurs de
l'industrie.
Évidemment, on aurait pu parler de la planification, de la
politique gouvernementale afin d'établir des stratégies de
planification. On aurait pu parler de stimulation des investissements dans
l'industrie, toutes des choses dont a parlé le rapport Picard et je
pense qu'on aurait pu souhaiter que ça se retrouve effectivement dans ce
projet de loi. Mais, M. le ministre, il y a un point...
Le Président (M. Bordeleau): Je vous demanderais de
conclure, M. Dion, s'il vous plaît.
M. Dion: Je vais dire comme vous dites en Chambre: Je conclus.
Alors, le crédit d'impôt. Je pense que le crédit
d'impôt, pour nous autres, est essentiel, M. le ministre. C'est une
mesure qui faisait partie, je pense, des choses qu'on discutait dans le plan
d'action et on devrait effectivement s'attarder à essayer de
régler le problème de l'industrie de la construction en
réglant la possibilité d'obtenir les crédits d'impôt
face à l'effort énorme que fait l'industrie de la construction
pour la formation professionnelle de nos travailleurs en recyclage et en
perfectionnement.
J'aurais eu tellement d'autres choses à vous dire, on ne vous
voit pas assez souvent, mats je vais attendre. Peut-être que par les
questions je vais réussir à passer le restant.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Dion.
Nous allons aller maintenant pour deux périodes de 15 minutes au
gouvernement et à l'Opposition. Alors, M. le ministre.
M. Cherry: M. le Président, merci beaucoup. Dans un
premier temps, avant que je dirige mes questions à M. Dion, dans
l'introduction qu'a faite le président, évidemment, il est le
président de l'AECQ, mais j'ai senti - c'est la perception que j'ai eue
- qu'il parlait, lui, de son entreprise, de ses difficultés par rapport
à ta situation de travailleurs autonomes qui se font gruger tout le
temps. Alors, dans un premier temps, M. le président, je m'adresserais
à vous. Il me semble que ça ferait du bien à cette
commission de vous entendre vous, comme entrepreneur, dans votre industrie
propre, ce que vous vivez par rapport à la situation à l'heure
actuelle.
M. Perron (Jean): M. le ministre, ce que je vis essentiellement,
et ce que nombre de mes confrères vivent, c'est le fait qu'on se
retrouve dans un milieu où le travail au noir fait qu'on se retrouve
vis-à-vis d'une compétition déloyale, qui a pour effet de
faire que moi, comme entrepreneur, je suis obligé de laisser de la
main-d'?uvre qui travaille exclusivement pour moi. Et, au moment où
je vous parie, je parie de 50 employés au moins qui ont dû
être sur le chômage une grande partie de l'année 1991 parce
que ce sont des gens qui, en travaillant au noir sous quelque forme -
permettez-moi de ne pas vous définir les formes - en tricotant à
travers la réglementation, ont pu s'approprier de contrats qu'autrement
les véritables entrepreneurs auraient pu faire.
Deux choses à ce moment-là. Le véritable
entrepreneur, ça lui permet de construire effectivement son entreprise
sur des bases solides et de passer à travers une récession et
ça permet aux véritables employés de l'industrie de la
construction, mes employés, dans mon cas, 50 au moment où
je vous parle, de gagner leur pain. Le travail au noir, la catastrophe du
travail au noir, M. le ministre, c'est ça.
M. Cherry: Merci. Ma première question, pour M. Dion.
Cautionnement pour garantir le paiement des salaires. Pouvez-vous, pour le
bénéfice de cette commission, nous faire la différence
entre le cautionnement individuel et le cautionnement collectif, les avantages
et les inconvénients, s'il vous plaît?
M. Dion: Dans un système comme celui qui existe à
l'heure actuelle, le fonds d'indemnisation, tous les employeurs paient 2 cents
l'heure; l'argent s'en va dans un fonds global et, effectivement, lorsqu'il y a
des pertes, des faillites ou des chèques non payés, etc., on pige
dans ce fonds-là et on paie effectivement un certain ensemble de choses
qui sont dues aux salariés et qui n'ont pas été
payées.
C'est l'ensemble des employeurs qui fournit de l'argent dans ce
fonds-là et, au fur et à mesure des négociations et des
années, le fonds a été augmenté en
responsabilités et il a été augmenté aussi en
dollars, en cents perceptibles. Mais on se rend compte que si on continue,
effectivement, dans le système actuel, il est possible que ce
fonds-là devienne déficitaire, incapable de remplir ses
obligations et qu'on soit obligés de mettre de l'argent dedans.
La raison, c'est assez simple. C'est que, malheureusement ou
heureusement, - je dirai surtout malheureusement - à l'heure actuelle,
on est dans une période où les perceptions, dans le fond, sont
plus grandes que les entrées. Je dirais heureusement, entre
parenthèses, ça nous permet d'identifier le problème et
ça nous permet d'être d'accord avec votre système de
cautionnement. Ce système de cautionnement ferait responsabiliser les
gens qui sont ceux qui vont chercher ou qui obligent à aller chercher de
l'argent dans le fonds de cautionnement.
Et le problème, c'est que le fonds étant collectif,
à l'heure actuelle, il y a des bons employeurs qui passent leur temps
à mettre 2 cents dedans puis il y a des mauvais employeurs ou il y a des
mauvaises créances qui sont perçues de ce fonds-là avec
les sommes d'argent des bons employeurs. On dit, nous autres: S'il y a un
cautionnement et il est individuel et non pas fourni d'une façon
collective par un groupement au nom de ses membres ou bien quelque chose comme
ça, si c'est un cautionnement individuel, chacun va devenir responsable
de ses choses et on va pouvoir, à ce moment-là, réellement
bâtir des professionnels de l'industrie de la construction.
M. Cherry: O. K. L'encadrement législatif que nous
prévoyons pour l'entrepreneur autonome, est-ce que, d'après vous,
ça causerait un préju- dice au consommateur en ce qui a trait au
coût de la construction?
M. Dion: Non, pas du tout. M. le ministre, il faut comprendre
ceci. C'est que sur la partie... Ce n'est rien de nouveau, je vous l'ai dit
tantôt, c'est simplement boucher un trou qui existait. Le consommateur,
à l'heure actuelle, pour les fins de ces services de réparation,
rénovation, entretien, a le droit... il peut aller chercher les services
de ce qu'on appelle un entrepreneur autonome, un artisan, n'importe quoi. Ce
n'est pas couvert à l'heure actuelle. Donc, on ne touche pas à
cette partie-là, on ne change aucun des droits et je pense que le
consommateur y trouve son bénéfice. C'est pour ça qu'on a
consenti à sortir ce champ d'activité là de notre
industrie. (18 h 15)
Au niveau de l'entrepreneur industrie de la construction neuve, que ce
soit un entrepreneur autonome qui aille faire les travaux en respectant la
réglementation, c'est-à-dire en payant le taux de salaire du
décret, ou que ce soit un salarié de la construction qui s'en
aille faire les travaux en recevant les conditions du décret, ça
va coûter le même prix. Il n'y a pas quelqu'un qui va me dire que
ça va coûter moins cher parce que c'est un entrepreneur autonome,
ce n'est pas vrai. L'entrepreneur autonome, s'il respecte les conditions de la
législation, va charger effectivement les taux de salaire qui
apparaissent au décret. Il n'y a aucun préjudice au consommateur,
c'est strictement faux.
M. Cherry: Concernant la formation, M. Dion, j'ai eu des
représentations qui m'indiquent certaines inquiétudes sur
l'arrimage de la formation, entente avec les parties avec le mandat de la
formation qu'on vit à la CCQ. Pouvez-vous l'aborder, s'il vous
plaît, comme sujet?
M. Dion: Écoutez, vous ne voulez pas que je vous parle de
subventions, M. le ministre, ce n'est sûrement pas de ça que vous
voulez que je vous parle. Je pense que le mandat de la formation qu'on a, au
niveau de la Commission - et on en parle, plus loin dans notre mémoire,
je n'ai pas eu le temps de m'y attarder - je pense que l'objectif de remettre
entre les mains des parties leur dossier de formation puis assurer la formation
de leur main-d'oeuvre... Excellent! On est absolument d'accord. On n'a pas
l'argent pour le faire et on n'a pas les moyens pour le faire, à l'heure
actuelle. Je parle des moyens d'écoles et de professeurs. C'est
sûr que la collaboration par subventions... Vous nous avez envoyé
un mandat public; envoyez-nous l'argent et, à ce moment-là, on
sera en mesure de remplir ce mandat-là. C'est sûr que ce n'est pas
un mandat qui est facile. C'est sûr que quand on va arriver dans
l'établissement des ratios compagnons-apprentis et les juridictions de
métiers, les
parties vont avoir de la misère. Mais je pense qu'on est capables
de faire nos armes et on est capables d'y arriver. Il faut avoir les moyens
pour y arriver. Je pense que vous devez renforcer nos moyens et si vous les
trouvez, les façons de renforcer nos moyens, dans votre projet de loi,
vous devez le faire. Peut-être qu'on va avoir un peu de difficulté
à passer à travers un établissement de ratios
compagnons-apprentis qui sera basé sur de la formation et non pas sur du
contingentement. Peut-être qu'on va avoir de la misère à
passer à travers ça. Mais je pense que, finalement, on y arrivera
et il faut avoir les armes pour le faire. Moi, j'ai confiance qu'on va y
arriver, au bout. Envoyez-nous l'argent, par exemple, M. le ministre.
M. Cherry: Et une dernière question... M. Dion:
Oui.
M. Cherry: ...concernant le pénal. Dans votre
mémoire, vous nous indiquez que l'on retourne à la CCQ la gestion
des poursuites pénales. Puis je comprends les fondements qui vous
animent.
Au deuxième paragraphe de la page 30, ça me laisse un
petit peu perplexe lorsque l'on indique: "La latitude sur la poursuite ou non,
en cas d'infraction". Je vous demanderais d'élaborer sur ce
sujet-là.
M. Dion: II faut comprendre ceci, M. le ministre. Il faut
comprendre qu'il semble qu'une des raisons qui a pu justifier d'enlever
ça, c'est l'espèce de latitude qu'on avait de jouer avec les
causes. Moi, je pense qu'effectivement, dans l'application journalière
de poursuites pénales, il doit s'exercer une espèce de jugement.
Je vais vous donner un exemple. Un employeur est pris pour des travaux
où son sous-traitant n'a pas fini de payer les salaires. Il fait payer
par le fonds d'indemnisation. Il est responsable. Il paie 300 000 $. Pour finir
ses travaux, il engage la main-d'oeuvre du sous-traitant qui a fait faillite et
là, il les met au travail. Il ne prend pas le temps de "checker" s'il y
a un gars qui a sa carte. Puis, dans les cinq gars qu'il avait engagés
après avoir payé 300 000 $, il y a un gars qui n'a pas sa carte.
Il reçoit une poursuite pour 575 $ - ou je ne sais pas trop, quelque
chose de ce genre-là - pour non-détention d'un certificat de
compétence. Je peux vous dire, là, à mon goût
à moi, qu'il y avait une question de jugement, à savoir...
Écoute, il vient déjà d'assumer la dette du sous-traitant
pour 300 000 $, on a toutes les preuves ou les raisons de croire qu'il
était de bonne foi et qu'il n'a pas essayé de fourrer le
système. Il y a peut-être des cas de même où le
jugement de la Commission, qui est très proche de notre industrie, qui
est très présente, là... Moi, je pense que des cas de
même, où on peut juger des situations, des circonstances, on peut
s'apercevoir, peut-être, qu'il y a eu quatre infractions pour la
même affaire, ce n'est peut-être pas justifié ou quelque
chose comme ça.
Je pense qu'il n'y a jamais eu d'abus. Puis, je ne veux pas me porter
garant de la Commission de la construction mais je suis convaincu
qu'actuellement on peut dire facilement qu'il n'y a jamais eu d'abus dans notre
industrie vis-à-vis de notre autodiscipline. Jamais!
M. Cherry: Merci, ça termine ma période, M. le
Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Chicoutimi, vous avez 15 minutes.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, M. Perron, messieurs, vous avez, je pense, assez clairement
exprimé votre opinion quant au travail au noir. Vous avez quand
même fait une déclaration - ensuite, je vous poserai une
série de questions - qui m'a un peu surprise. Vous avez dit: Même
si l'entrepreneur ne détient pas le certificat d'entrepreneur conforme
aux travaux qu'il va réaliser, c'est moins grave un peu. Mais je pense
au cas - parce qu'il est récent - de Canadian Asbestos qui n'avait pas
le bon permis parce qu'il est sur le verre plat alors qu'il fait, encore
actuellement, de l'enlèvement d'amiante et ça fait partie des
travaux assujettis selon le jugement qui a été rendu, il me
semble que, là, il y a un cas précis où ça peut
pénaliser lourdement toute l'entreprise parce que, lui, ça lui a
permis, parce qu'il fonctionne sous licence du verre plat, d'embaucher des gens
qui lui coûtent un peu moins cher que s'il avait embauché selon le
code de la construction par rapport à des travaux de rénovation
majeurs. Alors, j'ai été surprise un peu quand vous avez dit
ça tout à l'heure.
M. Dion: Je pense que si vous l'avez évalué en
fonction de l'exemple que vous donnez là, vous avez raison d'être
surprise. Je pense que ce n'est pas ça qu'on voulait soulever. Je
voulais soulever, exemple, ceci. Il peut arriver qu'un bonhomme est en train de
faire de la finition de ciment, de mettre du ciment pour faire un perron de
porte; il a une barre de fer à poser là-dedans. Effectivement, il
va être arrêté parce qu'il est en train de poser une barre
de fer, infraction. Il a un certificat, il travaille légalement,
normalement, mais là, occasionnellement... Ce qu'on voulait dire, c'est
qu'il y a une question de jugement et de faire une règle aussi
étanche que ça, c'est dangereux.
On est contre le "cheap labour". Le but de ma représentation
là-dessus, ce n'était pas d'essayer de permettre de faire du
"cheap labor" - excusez l'expression - du travail à bon
marché.
Mme Blackburn: II y a 19 000 employeurs et vous nous dites que 85
% d'entre eux - ça doit donner 16 500 à peu près - ont 5
salariés et moins. Donc, en période creuse, il peut arriver qu'il
y ait 16 500 entrepreneurs qui veuillent terminer seuls un travail sur les
chantiers de la construction. C'est à peu près ça. Parce
que vous dites: Selon la circonstance, l'économie et tout
ça...
M. Dion: Le cheminement est bien, oui.
Mme Blackburn: Mais comment est-ce qu'on peut contrôler
ça pour éviter les abus qu'on a connus? Je sais que vous n'avez
pas trouvé la formule, mais...
M. Dion: Écoutez, on avait envie de suggérer au
législateur de mettre les mots "que l'employeur qui travaille sur son
chantier avec ses salariés", ce qui est permis en vertu du
décret, en vertu de... On avait envie de suggérer qu'il pourrait
terminer des travaux qu'il a commencés avec ses salariés.
Là, on s'est dit: II peut quand même aussi là y avoir des
abus. Je vais vous dire honnêtement, on pense que ça pourrait
être une solution: terminer des travaux débutés ou
compléter des travaux. Mais on ne peut pas vous dire qu'on a une formule
étanche. On est prêts à toute suggestion, c'est sûr.
Mais je peux vous dire qu'il y a un petit problème. Quand je dis... ce
n'est pas parce qu'il n'est pas important, mais il ne faut pas extensionner
ça ad vitam aeternam. Par exemple, je peux prendre mon président,
il peut être en train de finir, sur son chantier - s'il est un employeur
il travaille avec ses hommes - tout seul, alors qu'il a encore des
salariés actifs sur un autre chantier. Le problème ne se
présenterait même pas à ce moment-là.
Mme Blackburn: Vous avez abondamment parlé des effets
négatifs et nocifs du recours au travail au noir. On estime que c'est 96
000 000 d'heures qui seraient travaillées au noir...
M. Dion: Non. Il y a 96 000 000 d'heures travaillées dans
la construction, et on pense qu'il y en a à peu près, au-dessus
de ça, 25 000 000 à 30 000 000 qui sont travaillées au
noir.
Mme Blackburn: En 1989, c'était 110 000 000 d'heures.
M. Dion: 110 000 000 d'heures travaillées dans
l'industrie, déclarées...
Mme Blackburn: Et entre 25 % et 40 %... Vous dites 30 %,
vous.
M. Dion: Oui, mais j'avais envie de vous dire que vous alliez
lire dans le texte un peu comme de la contrebande, il faut la "poigner" pour
savoir ce que c'est.
Mme Blackburn: D'accord. Alors 30 000 000 d'heures, ça
veut 1000 heures par personne, ça nous donnerait 30 000 travailleurs de
plus. Ça diminuerait le chômage de 30 000.
M. Dion: En tout cas, je ne veux pas dire que je ne suis pas
d'accord avec vous parce que j'aime beaucoup ia façon dont vous
travaillez l'exemple, sauf de vous dire que, nous, on n'est pas
nécessairement d'accord que les travailleurs de la construction font
tous 1000 heures dans l'année. C'est une moyenne mathématique
travaillée dans l'industrie. Est-ce que ça créerait 15 000
nouveaux emplois, 20 000 nouveaux emplois? Chose qui est sûre, madame,
c'est que ça créerait énormément d'emplois et que
ça éviterait bien du chômage à bien du monde et,
ici, on peut présumer au-dessus de 15 000.
Mme Blackburn: Je pense que ça ne créerait pas
d'emploi, ça diminuerait le nombre de chômeurs. Vous comprenez,
là, je veux dire...
M. Dion: Bon, O.K. Je vous le donne.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Blackburn: Les emplois, ils sont exclus.
M. Dion: Mais est-ce que je peux vous conseiller en vous disant
que ça vous donnerait aussi de l'argent, au gouvernement, parce que vous
récupéreriez les impôts?
Mme Blackburn: C'est ça. Alors, je me permets de le dire
parce que j'ai un tableau ici qui est particulièrement
intéressant à cet égard. Il est fondé sur 25 %
d'heures qui seraient travaillées au noir. Ça
représenterait, juste pour la Régie de l'assurance-maladie du
Québec, 27 000 000 $ de plus qui entreraient dans les coffres de la
Régie. Ça représenterait, à l'administration de la
CCQ, 12 000 000 $ de plus; les fonds d'indemnisation de faillite, ça va
ressembler à 700 000 $; les avantages sociaux, là, vous allez
à peu près à 75 000 000 $. La Régie des rentes du
Québec, 8 000 000 $; la CSST, 63 000 000 $. Il faudrait que je dise
ça à la CSST, ça leur ferait plaisir, sûrement. Et
ça, ça ne tient pas compte des impôts qui ne sont pas
payés. On a des problèmes de caisse parce que ce gouvernement n'a
pas pris ses responsabilités en 1986 et qu'il n'a pas appliqué la
loi 53 qui aurait permis de contrôler un peu le travail au noir. Mais
sans que ça soit dit, c'était comme implicite. Le travail au
noir, ça permettait de faire construire à meilleur coût,
c'était ce qu'on disait, sans réaliser les pertes énormes
qui coûtent beaucoup plus cher que les économies
réalisées. Et moi, je trouve que c'est une catastrophe,
ça, parce que les gens qui travail-
lent au noir, on devra payer leur rente, tantôt, on devra
continuer à les payer s'ils sont malades, on devra... Et ça,
c'est inacceptable. Alors, là-dessus, je vous suis tout à fait.
Oui.
M. Dion: Là-dessus, Mme Blackburn, j'ajouterais ceci.
C'est que si, éventuellement, les gens qui font des heures de travail
dans l'industrie de la construction versaient des sommes d'argent aux avantages
sociaux, entre autres aux bénéfices d'assurances, l'argent qui
s'accumulerait là éviterait peut-être d'augmenter, à
chaque négociation, les sommes d'argent qu'on doit verser là pour
accorder les bénéfices que les gens demandent et aussi,
peut-être, par profit, à ce moment-là, permettraient
à des gens d'aller acquérir de meilleures rentes, etc.
Par contre, il y a une chose que je dois vous dire, c'est qu'il y a une
partie de ce travail au noir, qu'on a noté, nous, dans le temps, qui est
comme, je dirais, historique. Il y en a peut-être une partie qu'on aura,
effectivement, en difficulté. Mais il ne faut pas penser, non plus, que
le fait de permettre ou de laisser aller le travail au noir a fait que, par
exemple, dans la construction résidentielle, ça a
coûté moins cher. Je n'ai pas d'exemple - et je ne suis pas un
spécialiste dans la finance des maisons - que les maisons se vendent
moins cher parce qu'elles sont faites au noir; elles se vendent le même
prix.
Mme Blackburn: Ce que j'ai demandé et je ne l'ai pas
obtenu - peut-être l'aviez-vous, vous - c'est la proportion du coût
d'une maison qui est représentée par les salaires. Parce que,
avant, on disait quasiment que c'était 50 %-50 % mais là, on sait
qu'avec la mécanisation, tout ça, c'est quoi? 15 % des
coûts d'une construction d'une résidence?
M. Oion: Écoutez, on varie, nous, dans les explications
qu'on nous donne, entre 30 % et 50 % de coût de main-d'oeuvre.
Mme Blackburn: ...de main-d'oeuvre.
M. Dion: Et c'est environ 1000 heures. Ça varie entre 800
et 1000 heures. Probablement que ça dépend de l'utilisation des
techniques, etc., mais ça peut varier. J'espère que je ne suis
pas en train de me fourvoyer mais je pense que c'est... Nous, on travaille
habituellement, quand on fait des recherches économiques, entre 800 et
1000 heures.
Mme Blackburn: 800 et 1000 heures pour construire une
résidence.
M. Dion: C'est ça, c'est le tiers, dans le fond.
Mme Blackburn: ...d'une valeur moyenne...
C'est le tiers, 33 %.
M. Dion: C'est à peu près le tiers.
Mme Blackburn: Le travail au noir, par rapport à une
hypothèse très conservatrice, on estime que ça
représenterait une masse salariale de 800 000 000 $. Il faudrait dire
ça au ministre des Finances. Lui aussi, il serait content.
J'ai une dernière question. Je dois vous dire que votre
mémoire m'a étonnée par ce que je n'y al pas
trouvé, c'est-à-dire ce qu'on retrouvait dans la loi 53 et toute
la philosophie qui guidait le projet de loi 53 quant à la
responsabilisation des entrepreneurs. Et cette responsabilisation était
assumée par le biais de la Commission du bâtiment où
étaient largement représentés les entrepreneurs. Et cette
Commission gérait entièrement les activités ou presque
toutes les activités, à l'exception de quelques-unes qui ont
été ajoutées ici, qu'on retrouve actuellement dans la
Régie. À la différence que la Régie, c'est cinq
personnes nommées par le gouvernement et les entrepreneurs et les
syndicats se retrouvent relégués à un petit comité
- un petit! H est grand parce qu'il y a plusieurs personnes, là, mais -
a un comité consultatif à une régie.
Alors, je dois vous dire que ça, moi, ça m'a
étonnée et je me demandais si c'est parce que ça ne vous
intéressait pas, vous aimez mieux laisser la job au ministre, vous aimez
mieux leur laisser une caisse dans laquelle ils puissent puiser tant qu'ils
voudront et ils vont fixer toutes les tarifications, les taux de cotisation.
Ils ne le feront pas tout de suite comme ça, mais en cas de besoin,
ça va leur faire la caisse pour aller puiser, comme ils l'ont fait pour
la Régie de I assurance-automobile. Et ça m'étonne, vous,
hommes d'affaires, que vous ne soyez pas revenus avec cette question.
M. Dion: Mme Blackburn, ce sont mes cheveux blancs qui nous ont
amenés à faire ça de cette façon-là. C'est
que l'AECQ a un mandat de relations de travail et il y a quand même, dans
notre mémoire, certains commentaires. Dans notre esprit à nous,
notre responsabilité devant la commission, ce qu'on voulait remplir et
on veut le faire adéquatement, c'était de venir vous parler des
problèmes de relations de travail, de champs d'application, de travail
au noir, etc.
La loi 186 est une loi qui touche plutôt la responsabilité
des autres associations patronales. Ça ne veut pas dire qu'on n'a pas
une vue d'ensemble des choses qui devraient être faites.
Je dois vous dire qu'on est, en bonne partie, réellement d'accord
à ce que les gens puissent eux autres mêmes s'autodiscipliner. Et
ce que je veux dire par là, c'est qu'une régie gouvernementale
où on ne saurait pas qui la composerait, cette régie-là,
ça nous apparaît difficile pour l'industrie de la construction.
Nous, on favoriserait peut-être que le gouvernement
révise le 186, à ce moment-là, puis au moins assure
les parties d'une représentation d'employeurs sur la régie qui
seraient recommandés par les parties de l'industrie. S'il y a cinq
représentants, au moins avoir trois bonshommes de l'industrie de la
construction, employeurs, pour aller mener leur corporation parce que c'est,
dans le fond, une corporation qu'on essaie de mettre de l'avant.
On aurait peut-être, si j'avais eu plus de temps,
élaboré sur certains points qui sont dans le projet de loi 186 et
qui vont favoriser une saine industrie, des bons employeurs qui vont nous
permettre, à ce moment-là, de créer des bons emplois pour
les bons travailleurs, et tout le jeu du travail au noir, les
municipalités. Je pense que c'est déjà un petit peu dit,
là, dans notre mémoire. On s'est - avec beaucoup de prudence,
vous l'admettrez - contenté de parler de notre mandat.
Mme Blackburn: Oui, je comprends que vous vous soyez
limités, comme étant le porte-parole, à la table de
négociation, des employeurs, mais j'aimerais, si vous avez un moment ou
si vous souhaitez le faire, que vous examiniez ce que pourraient
représenter les modifications qui sont introduites dans les articles 65,
66 et 67 quant aux possibilités pour un État d'aller chercher des
revenus en période difficile. Parce que - je veux essayer de me
réexpliquer - la Commission, essentiellement, donnait la
responsabilité aux entrepreneurs et aux syndicats de gérer toute
cette activité, y compris les plans de garantie. Alors, l'avantage d'une
telle disposition, c'est que les entrepreneurs eux-mêmes n'avaient pas
intérêt à faire de la surenchère dans la
tarification, les frais d'inscription, la cotisation, toutes mesures qui,
finalement, finissent par se répercuter sur les coûts
généraux de la construction et, évidemment, sur vos
entreprises également. Alors, je trouvais que l'avantage de la
Commission du bâtiment, à comparer avec la Régie,
était remarquable et l'était davantage dans la philosophie que
défend, avec beaucoup de vigueur et beaucoup de brio, je dois dire, le
ministre de l'Industrie et du Commerce, à savoir qu'il faut
responsabiliser, il faut assurer une meilleure coordination, une meilleure
concertation, une meilleure synergie entre les différents
éléments d'un même secteur. Et il parle des grappes. Moi,
je dis, en lisant ce projet de loi: II y a un raisin qui est tombé et ce
sont les entrepreneurs, parce qu'on ne sent pas une volonté de vous
responsabiliser.
Mais je prends bonne note du fait que vous êtes ici non pas
à titre d'association d'employeurs mais bien à titre
d'association siégeant pour les négociations. Alors, je
comprends.
M. Dion: De par ma profession, je suis avocat et j'ai de la
misère à me taire. Quand on me pose une question, j'ai toujours
envie de répondre. Je dois vous dire que nous, on ne prête pas des
mauvaises intentions à quelque gouvernement que ce soit. On pense que,
normalement, un gouvernement qui fait une législation tente de faire une
législation pour régler des problèmes, rendre service aux
parties. C'est sûr que les gens pourraient, à ce moment-là,
à la limite, et dans bien d'autres endroits à part ça et
dans d'autres législations qui ont été faites
antérieurement, exploiter des situations. C'est sûr qu'on peut
déterminer, demain, que la licence, ce n'est plus 200 $, c'est 500 $.
Ça tombe dans les coffres de l'État, c'est intéressant. Je
ne pense pas et on n'y voit absolument pas des intentions de ce genre-là
du gouvernement. On pense, actuellement, que le gouvernement tente, à
l'intérieur d'un plan global - et je pense que ça a
été un peu l'objectif avec lequel on était d'accord -
d'assainir notre industrie. Et je pense qu'il y a une possibilité. Je
veux vous rappeler qu'au moment où on commençait à parler
du 186 je vous ai dit: J'ai la conviction que les gens, chez nous, si on leur
posait la question, seraient favorables à recommander au ministre que la
Régie devienne une régie avec une représentation
majoritaire décisionnelle et, à ce moment-là, on pourrait
faire notre travail de police, comme on le peut, à toutes fins
pratiques, quand on siège à la Commission de la construction,
à l'heure actuelle, au conseil d'administration, on a de la
représentation gouvernementale. On sait quand même un peu
l'emprise, en tout cas, l'envergure que le gouvernement peut avoir sur la
Commission de la construction, mais on pense être quand même
capables de jouer notre rôle si on est présents. Possiblement que
les associations qui sont impliquées par le projet de loi 186, si elles
avaient un droit de parole majoritaire à cette Régie, pourraient
prendre soin de leurs bébés.
Mme Blackburn: M. Dion, je voudrais vous dire que je ne fais pas
de politique partisane lorsque je soupçonne qu'on pourrait utiliser,
à des fins autres que prévues, les fonds et les différents
fruits de tarification de cotisations. Je dis qu'il ne faut jamais...
M. Dion:... vous répondre, dans ce sens-là, je peux
vous dire jamais... Je m'excuse...
Mme Blackburn:... tenter un gouvernement, il ne faut jamais
tenter un gouvernement quel qu'il soit. L'histoire m'a appris à
être prudente là-dessus. Des lois pleines de bonnes intentions,
tout à coup, on voit... Tantôt, je disais la Société
de l'assurance automobile, mais, là, je regarde les inspecteurs de la
CSST et là, on remonterait... Probablement que, dans mon temps, je ne
suis pas sûre qu'on n'ait pas fait l'équivalent, si je me rappelle
un peu, avec HydroQuébec. Autrement dit, ce que je dis, lorsque je
travaille une législation, je ne la fais jamais
pour viser le ministre qui la présente parce qu'il est de bonne
foi, j'en ai la conviction, mais je pense à ceux qui vont lui
succéder. C'est toujours dans cette perspective que je me dis qu'il faut
être extrêmement prudent quand on légifère parce
qu'on ne légifère pas pour un ministre. Il va être
là six mois, un an, on ne sait pas. Mais tout ça pour dire que,
quel qu'il soit, le législateur doit toujours être
extrêmement prudent et imaginer que ça peut être le pire des
ministres comme le pire des gouvernements lorsqu'il légifère.
C'est dans ce sens-là que je faisais mon intervention.
M. Dion: En tout cas, Mme Blackburn, je ne voudrais pas...
Le Président (M. Bordeleau): Dernier commentaire, M. Dion,
s'il vous plaît.
M. Dion: Le dernier. Je ne voudrais pas que vous pensiez que je
voulais viser cette partie-là de votre discours, pas du tout. Ce que je
voulais tout simplement illustrer, c'est que nous, on pense qu'en étant
présents, si ces choses-là pouvaient arriver... Ça
pourrait ne pas arriver, mais si on est présents, je pense qu'à
ce moment-là vous devez sûrement être d'accord avec moi
qu'on devrait avoir une majorité de représentation.
Mme Blackburn: Ça pourrait être moins pire.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. le ministre, le mot
de la fin.
M. Cherry: D'abord, je veux vous remercier pour vous être
déplacés aujourd'hui et avoir présenté vos
propositions. Je veux vous assurer que vos représentations ont
occupé toute mon attention et que l'exercice que nous faisons
aujourd'hui nous apporte beaucoup de travail et c'est pourquoi j'ai
demandé à une équipe du ministère de se mettre
à l'oeuvre. On va être disponible, même en fin de semaine,
si c'est nécessaire, je l'ai dit aux autres parties, je vais le faire
encore à vous autres. Merci pour le temps que vous avez pris et la
qualité du mémoire que vous nous présentez.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Messieurs, merci. Ça m'a fait plaisir de
vous rencontrer et de mieux vous connaître, à la fois par votre
mémoire et votre présentation. Je suis nouvelle dans le dossier,
mais je trouve que c'est un dossier passionnant. Votre mémoire nous aura
permis de nous éclairer sur un certain nombre de points. Vous l'avez
fait avec beaucoup de modération et, je pense aussi, de sagesse, et je
vous en remercie.
M. Dion: M. le Président, notre seul objectif,
c'était de collaborer avec vous pour faire une loi meilleure et
j'espère qu'on a réussi.
Le Président (M. Bordeleau): La commission vous remercie
de votre présentation, messieurs.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 39)
(Reprise à 20 h 5)
Le Président (M. Bélanger): Alors, je demanderais
à chacun de bien vouloir prendre sa place, s'il vous plaît, pour
que nous puissions recommencer nos travaux.
Nous recevons la Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec qui sera représentée par M. Fernand
Lavallée, qui est le président, et à qui nous laisserons
le soin de nous présenter les gens qui l'accompagnent. Par la suite, il
procédera à la présentation de son mémoire. Je ne
sais pas si je dois vous le rappeler, on a 20 minutes pour la
présentation du mémoire, 20 minutes d'un côté et 20
minutes de l'autre pour les questions. Et si, d'aventure, vous aviez besoin
d'un peu plus de temps, comme on est là d'abord pour vous
écouter, on vous laissera le temps et on posera moins de questions. Mais
l'objectif, c'est qu'il faut terminer pour 21 heures, pour rencontrer l'autre
groupe à 21 heures. D'accord? Alors, on y va.
Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec
M. Lavallée (Fernand): Bonsoir, mesdames, messieurs.
Merci, M. le ministre, merci, M. le Président, de nous recevoir en
commission pour pouvoir nous exprimer sur les projets de loi 185 et 186.
Permettez-moi, M. le Président, de vous présenter les membres qui
m'accompagnent présentement. Il s'agit de M. Jean Brière,
à ma droite, qui est un entrepreneur en plomberie; M. Jean Morin, notre
aviseur légal; M. Michel Favre, le directeur général de la
Corporation, et moi-même.
Vous avez en main présentement deux mémoires concernant
les projets de loi 185 et 186, et je n'ai pas l'intention de vous en faire la
lecture, puisque vous l'avez sans doute déjà faite, M. le
Président. J'aimerais, au contraire, en faire ressortir les points
saillants qui viennent affecter notre métier de plombier. J'aimerais
aussi faire une mise en situation de la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec.
La Corporation est un partenaire avec le gouvernement depuis plus de 40
ans. Notre tâche, c'est de faire en sorte que les entrepreneurs qui
oeuvrent en mécanique du bâtiment - soit en
plomberie, chauffage, ventilation, climatisation et en tuyauterie -
soient les plus compétents possible. Notre Corporation répond aux
demandes du public, tente de satisfaire tous les plaignants, discipline ses
membres, fait des représentations auprès des autorités
gouvernementales et a des contacts avec les autres associations de
construction.
La réglementation de la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec doit être
approuvée par le gouvernement, y compris même la cotisation
qu'elle charge à ses membres. De même, les examens d'admission
qu'elle fait passer doivent être approuvés et peuvent même
être dictés par le gouvernement, s'il le juge à propos. Les
activités de la Corporation des maîtres mécaniciens ne
coûtent rien à l'État, même quant à la partie
qui a trait à la protection du public.
En ce qui a trait au projet de loi 185, M. le Président, on
semble déceler que le gouvernement, par cette loi, veut contrer le
travail au noir. J'ai également assisté, cet après-midi,
au débat sur le sujet. J'en ai eu des frissons, M. le Président,
lorsqu'on a qualifié les travailleurs autonomes d'artisans du travail au
noir. Je ne peux pas comprendre l'interprétation que l'on en fait.
Alors, chez nous, chez les maîtres mécaniciens en tuyauterie, nous
avons, actuellement, 800 membres qui sont des entrepreneurs autonomes. Ces
entrepreneurs se sont qualifiés au même titre que tous les 2300
membres; ils ont passé des examens et ils se comportent selon un code
d'éthique, un code de déontologie et aussi un code de plomberie.
Ces entrepreneurs ont la responsabilité d'effectuer leurs travaux de
plomberie en conformité avec les codes de plomberie; ils doivent prendre
des permis, faire inspecter leurs travaux et ils doivent également - et
ils le font - déclarer leurs revenus et payer leur impôt. Ces
membres, au même titre que les autres, paient leur cotisation à la
Corporation; ils se comportent en professionnels.
J'ai entendu dire, aujourd'hui, que nos travailleurs autonomes sont des
charlatans. Je ne peux comprendre comment ces travailleurs, que je viens de
vous décrire, contribuent au travail au noir; je ne peux pas le
comprendre.
En plus de ces 800 membres chez nous, il y a également de petites
entreprises qui ont des salariés, de deux à cinq salariés;
on en décompte pas moins de 1000. Je dois vous dire que ces petites
entreprises sont des générateurs de l'industrie et,
dépendamment de la saison et de l'achalandage au niveau de leur
commerce, le nombre d'employés peut augmenter et peut même
être réduit à ce que le patron soit le seul qui oeuvre dans
l'entreprise. Alors, en plus de ces 800 à qui on veut retirer le droit
de travailler, de faire des travaux de construction et des travaux de
rénovation, nous avons également un bon groupe de nos membres qui
vont se situer quelque part dans une même situation.
J'aimerais vous dire également que ma propre entreprise, qui a
présentement 20 salariés qui oeuvrent dans la mécanique du
bâtiment, cette entreprise, je l'ai acquise de mon père en 1964,
qui lui était un travailleur autonome. J'ai acheté cette
entreprise et c'est avec les années et avec l'achalandage qui a
augmenté que je suis devenu un entrepreneur avec des
salariés.
Du même fait, j'aimerais aussi vous faire remarquer, M. le
Président, que le mémoire que nous avons déposé a
été étudié en profondeur et, hier, nous avons eu un
conseil provincial. Notre conseil provincial est constitué de 32
délégués qui couvrent tout le territoire de la province de
Québec. Et de ces membres qui forment notre conseil exécutif,
beaucoup de ces membres travaillent en région - la Gaspésie, les
Îles-de-la-Madeleine, peu importe - et la majorité d'entre eux,
à l'occasion, pendant la période estivale, si on se rapporte
à la Gaspésie, peuvent avoir trois ou quatre ou cinq
salariés. Mais pendant la période d'hiver, ces gens-là
sont seuls dans leur entreprise. Alors comment pouvons-nous aujourd'hui dire
à ces gens-là que demain ils ne pourront plus servir leur
clientèle?
Soyez assurés, M. le Président, que ces 800 entrepreneurs
chez nous, lorsqu'on leur retirera le droit d'entreprendre leurs travaux et de
servir leur clientèle, nous allons les inciter à devenir des
clandestins. Ils ne renonceront pas à leur clientèle, ils vont
continuer à répondre à leur clientèle et ils vont
exécuter ces travaux-là sans être
enrégimentés ou contrôlés par les rouages de
l'industrie de la construction.
J'aimerais demander à M. Brière, qui m'accompagne
présentement, de donner un petit peu son expérience, comment il
est devenu entrepreneur.
M. Brière (Jean): M. le Président, M. le ministre,
j'ai parti mon entreprise en 1974 comme entrepreneur autonome. J'ai
travaillé seul sur un camion à faire des réparations, des
modifications, etc., pendant une période de temps, assez longtemps pour
me permettre de ramasser les fonds suffisants pour soumissionner sur des
projets un petit peu plus gros. Vous savez que, lorsqu'on soumissionne sur des
projets, il y a toujours 10 % de dépôt que vous devez donner.
Lorsque vous êtes plus gros, vous pouvez émettre des bons, quand
vous êtes tout petits, des bons, c'est plus difficile à avoir. Il
ne faut pas se fier sur le banquier pour vous aider trop trop au départ.
Ni à la fin, d'ailleurs. Ni d'un bord, ni de l'autre.
Alors, ça fait, nous avons, aujourd'hui... Comme je vous le
disais tantôt, j'ai commencé autonome. On a monté
graduellement. Aujourd'hui, nous employons environ une soixantaine
d'employés. Nous avons un chiffre d'affaires cette année,
présentement, d'environ 6 000 000 $, et si nous sommes le moindrement
chanceux dans les semaines qui viendront, nous finirons l'année
avec des ventes de presque 10 000 000 $. Alors, c'est comme ça
que j'ai parti. Je ne peux pas voir où on peut prendre
l'expérience. À moins d'hériter, je ne le sais pas.
Peut-être que si j'étais parent avec ce monsieur britannique qui
est décédé récemment, je ne serais pas...
malgré qu'à lire les journaux dernièrement ce
n'était pas meilleur. Ha, ha, ha! On va laisser faire
celle-là.
Mais il faudrait comprendre que, quand on part en affaires, il faut
aussi faire une période, un rodage. Il faut apprendre comment ça
fonctionne. Il y a la question de permis, inspections, soumissions. Il y a un
paquet de facteurs, l'industrie est très complexe. Je ne pense pas que,
demain matin... à moins d'être quelqu'un qui avait des postes de
commande chez un autre entrepreneur. Mais, même là, les fonds vous
manqueraient. Même au niveau des bons et de la garantie que vous devez
émettre sur certains projets, l'expérience n'y serait pas.
Malheureusement, on vous demande souvent... Vous venez pour
soumissionner sur un projet de 5 000 000 $, on vous dit: Quelle est votre
expérience sur des chantiers de 5 000 000 $? Je ne le sais pas. J'ai
soumissionné pour 1 000 000 $ hier et, là, c'est la
première fois. Je veux dire, il faut que tu montes comme ça,
graduellement; il faut que tu démontres de l'expérience. Tu ne
peux pas devenir demain matin l'expert total, il faut que tu commences quelque
part. De là à dire que nos entrepreneurs, comme je l'ai entendu
cet après-midi, sont tous des charlatans... Je ne vous dis pas qu'il n'y
en a pas un, à un moment donné, qui s'égare, ça,
c'est normal. Je pense que c'est comme ça.
M. le Président, moi, quand je regarde la situation et tout
ça, j'ai de la misère à renier d'où je viens, c'est
de là que je suis venu. Je ne pourrais pas accepter aujourd'hui qu'on
nie un droit à un contracteur futur qui s'ignore présentement,
qui est un syndiqué, par exemple, aujourd'hui. C'est un syndiqué
ce gars-là. Je l'étais, moi. J'étais membre du Local 144.
J'ai des confrères - Gilles Neveu, de Neveu & Neveu - qui sont
exactement dans la même situation.
M. le Président, je pense qu'il faudrait y penser
sérieusement avant d'adopter une chose semblable. C'est tout, M. le
Président.
M. Lavallée (Fernand): M. le Président, j'aimerais
continuer, toujours sur le projet de loi 185, avec le volet de la caution. On
demande à nos entrepreneurs de fournir une caution pour garantir le
paiement des salariés. J'ai le goût de vous demander, M. le
Président, si le gouvernement va également, pour la contrepartie,
nous garantir, nous, nos comptes recevables. J'ai le goût de vous
demander ça puisque la réforme du Code civil présentement
nous enlève notre privilège d'exercer justement un
privilège sur la construction d'immeubles. On voit présentement
transférer notre pouvoir de privilège par une hypothèque
qui peut tomber au quatrième ou au cinquième rang. Alors, d'un
côté, on nous enlève un outil que l'on avait pour se
garantir auprès du consommateur et, de l'autre côté, on
veut que l'on garantisse par une caution.
J'aimerais aussi vous demander, M. le Président: est-ce qu'on a
procédé, est-ce qu'on a fait des évaluations sur
l'incidence des coûts pour fournir une telle caution? Je me demande
comment on peut mettre en application ce volet caution. Aujourd'hui, j'ai 20
salariés: demain, je peux en avoir 30 et, dans six mois, je peux en
avoir 5. La caution, est-ce qu'elle va être comme un élastique? On
va l'étirer au besoin toutes les semaines. Comment va-t-on se servir de
cet outil-là? J'en vois très mal la mise en application.
J'ai aussi le goût de vous demander si Provigo doit fournir
également une caution pour garantir le paiement de ses salariés?
Alors, c'est un peu ça, M. le Président, et j'aimerais qu'on
réfléchisse là-dessus avant d'exiger que l'on fournisse
une telle caution. C'est les deux points sur lesquels on aimerait attirer votre
attention dans notre mémoire sur la loi 185.
J'aimerais passer maintenant à la loi 186. Si vous me permettez,
M. le Président, nous avons un résumé de notre
mémoire, que vous n'avez pas en main. J'apprécierais qu'on me
laisse le lire pour ensuite procéder à une période de
questions.
Les rédacteurs du projet de loi 186 ont été mal
inspirés. Ils n'ont pas compris lorsqu'ils ont rédigé la
partie de la loi 186 qui touche à la Loi sur les maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec qui est
contrôlée dans toutes ses activités par l'État. Il
nous semble évident qu'ils n'ont pas vu que des dispositions sont
prévues, permettant d'obtenir toute uniformité et coordination
qui pourraient être souhaitables. Il est étonnant qu'on n'ait pas
compris qu'il y a lieu de ne point détruire ce qui fonctionne bien et
cela sans coût pour l'État. La qualification, la discipline par
des corporations professionnelles sous la surveillance et même la
dictée de l'État, n'est-ce pas l'idéal, surtout en ces
temps où l'État doit prendre des mesures pour diminuer de
façon draconienne ses dépenses?
Dans notre mémoire, nous avons cité des extraits de propos
tenus par des hommes politiques au cours des dernières années qui
vantaient le travail des corporations professionnelles, et
particulièrement celui de la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec. Ceux-ci se
félicitaient de voir l'État exercer son rôle à si
peu de coûts. On ne parle pas d'un guichet unique pour la qualification.
Pense-ton à un guichet unique pour les comptables, les avocats, les
ingénieurs, les architectes? Pourquoi un guichet unique? Il n'y en a
jamais eu. Pour uniformiser peut-être? Cela n'est pas nécessaire
puisque la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du
Québec doit suivre les normes
fixées par l'État quant aux prérequis pour obtenir
une licence, etc.
Dans notre mémoire, nous faisons état de nombreuses
gratuités contenues dans le projet de loi 186. Les motifs de plusieurs
des propositions d'amendements contenus dans le projet de loi 186 sont
impossibles à trouver. Le projet de loi 186, quant à la CMMTQ,
est une erreur. Les principes qui le sous-tendent, s'il en est, sont en sens
contraire des orientations des autorités gouvernementales au cours des
dernières années. L'Assemblée nationale vient de
créer une nouvelle corporation quant au courtage immobilier parce
qu'elle s'est aperçue que c'était la façon la plus
adéquate et la moins coûteuse pour s'assurer de réglementer
ce secteur. Parallèlement, quelques semaines plus tard, on fait le
contraire avec la CMMTQ et la CMEQ.
Il nous est dit que l'appartenance obligatoire demeure, que le pouvoir
de discipliner demeure. Quelle est cette signification? Vous êtes
obligé d'être membre d'une corporation, mais cette même
corporation ne peut fixer les conditions d'admission, ne peut vous faire passer
d'examen, n'a rien à voir avec la certification de votre
compétence. Elle reçoit tout simplement un avis du gouvernement
d'accepter telle personne comme membre. Elle n'a rien à dire. Est-ce
intelligent?
Pourtant, l'État s'est gardé tous les pouvoirs qu'il doit
avoir. Si la CMMTQ faisait du contingentement, si elle abusait d'une
manière quelconque de ses pouvoirs, l'État a tous les outils
nécessaires pour intervenir, la législation actuelle lui donnant
tous ces pouvoirs. Il n'y a rien à comprendre du projet de loi 186 quant
aux modifications qu'il suggère. Par ailleurs, les autres dispositions
du projet de loi 186 auraient avantage a être repensées pour
être plus conformes à la volonté exprimée par le
ministre du Travail et par ses prédécesseurs et collègues,
et particulièrement en 1985, de responsabiliser les intervenants dans
l'industrie de la construction.
Alors, que l'État garde tous les pouvoirs d'intervention, mais
qu'il délègue au milieu l'exécution des tâches qu'il
souhaite accomplir. Le projet de loi 186 fait disparaître plusieurs des
dispositions de la Loi sur le bâtiment qui était dans ce sens, et
cela est regrettable.
Ça termine mon exposé, M. le Président. Nous sommes
prêts à répondre à vos questions s'il y en a.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
monsieur. M. le ministre.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans un premier temps,
je vais prendre la première partie de votre intervention qui s'adressait
à la situation. Vous avez décrit votre participation cet
après-midi avec des frissons, vous avez entendu des commentaires des
gens qui vous ont précédés. Donc, c'est ce sujet-là
que je vais aborder en premier pour vous permettre un peu plus de temps dans ce
sens-là.
Les chiffres. Si j'ai bien compris, vous dites qu'il y a 800 des membres
de votre Corporation qui ne pourraient plus exercer leur profession ou leur
métier.
M. Lavallée (Fernand): C'est ça.
M. Cherry: Voulez-vous, pour la compréhension de la
commission, me décrire de quelle façon vous en arrivez à
cette conclusion, que ces gens-là ne pourraient plus continuer à
faire ce qu'ils font dans le moment? Et vous nous dites "surtout en
région". Je ne veux pas vous pousser par là, mais il me semble
que vous avez dit: "Par exemple, en région, on a des membres..."
Qu'est-ce qu'ils seraient obligés de faire différemment, à
partir de maintenant, d'après la perception que vous en avez par rapport
à ceux dans les régions pour débuter?
M. Lavallée (Fernand): L'entrepreneur qui est seul
présentement, qu'on qualifie ou qu'on nomme autonome, c'est un
entrepreneur qui fait une multitude de tâches. Il peut faire des travaux
de réparation et d'entretien, il peut répondre à sa
clientèle qui veut ajouter à sa maison une nouvelle salle de bain
au sous-sol ou qui veut faire une rallonge et qui doit extension-ner le
système de drainage pour un drain de toit. Ce même entrepreneur,
en région, puisque c'est celui qui va être le plus affecté,
contracte actuellement de la plomberie dans les nouvelles constructions
résidentielles, et on parle de petites régions, là,
où il peut y avoir trois, quatre, cinq chantiers de construction
résidentielle pendant la période d'été. Alors, cet
entrepreneur seul, dorénavant, ne pourra plus faire ces travaux de
plomberie que je viens de vous décrire, soit au niveau d'une
construction d'une résidence neuve ou soit de travaux de modification ou
de rénovation, puisque le texte de la loi dit qu'il devra, à
l'avenir, avoir des salariés pour les exécuter.
M. Cherry: O.K. Juste pour être bien certain qu'on parle de
la même chose, vous dites que, évidemment, durant l'hiver, il va
continuer à desservir sa clientèle et, là, vous ajoutez
l'aspect où, durant l'été, il est possible qu'il ait,
à ce moment-là, durant cette période-là, deux,
trois, quatre constructions neuves.
M. Lavallée (Fernand): Oui.
M. Cherry: Est-ce que, d'après le mode de fonctionnement
que vous décrivez, durant cette période d'été, il
pourra continuer à donner le service à sa clientèle
régulière durant les autres saisons de l'année? Et est-ce
qu'il va, en même temps, être capable de faire tous ces
travaux-là dans le neuf, seul - également les deux - ou
est-ce que, sans vous l'avoir entendu dire, durant cette période
de l'été, ça ne serait pas la seule période de
l'année où il engagerait peut-être une ou deux personnes
pour lui permettre, lui, de satisfaire sa clientèle
régulière et, en même temps, pouvoir solliciter et
exécuter les travaux durant l'été pour la neuve? Je veux
vous entendre là-dessus.
M. Lavallée (Fernand): Je comprends votre question, M.
Cherry. J'ai également le goût de vous dire que cet
entrepreneur-là, oui, va continuer à faire les travaux
d'entretien même pendant l'été. Mais qu'adviendra-t-il du
consommateur dans une région éloignée comme
Rivière-au-Renard qui veut bâtir sa propre maison? Qu'est-ce qu'il
va répondre à son client? Puisque, aujourd'hui, je peux
détenir une maison et avoir le projet de déménager dans
une nouvelle maison. Donc, si j'appelle mon entrepreneur en plomberie, qui me
sert depuis toujours, que je lui soumets un plan de construction et que je lui
dis: Bon, j'ai besoin de tes services pour ma nouvelle résidence. Cet
entrepreneur, qu'est-ce qu'il va dire? Il va dire: Je ne peux pas faire ton
contrat parce que, moi, je n'ai pas de salariés et je n'ai pas les
qualifications pour le faire. C'est à cette situation-là que je
veux vous faire réfléchir, M. le Président.
Alors, non seulement notre membre qui oeuvre seul présentement ne
peut pas uniquement gagner sa vie juste à faire de l'entretien mais,
écoutez, M. le Président, notre entrepreneur autonome ne pourra
plus se rendre chez vous pour installer un lave-vaisselle puisqu'il s'agit
d'installer de l'équipement neuf, de la tuyauterie additionnelle. Le
projet de loi lui défend de faire ça. Alors, qu'est-ce qu'il va
faire le gars? Le consommateur, qu'est-ce qu'il va faire face à
ça?
M. Cherry: Je vous avoue que sur celui-là, j'ai de la
misère à vous suivre, sur le fait qu'installer une laveuse ou une
sécheuse à l'intérieur d'une maison, ça serait
construire du neuf. L'appareil est neuf, mais la maison n'est pas neuve.
M. Lavallée (Fernand): M. le Président, on dit que
l'entrepreneur autonome ne pourra plus installer de la tuyauterie, de faire des
travaux de modification, de faire des travaux de rénovation. Il va
être confiné à faire des travaux d'entretien. Alors, dans
mon livre, le texte est tellement vague qu'installer, ajouter un
lave-vaisselle...
M. Cherry: Ce n'est pas ça qu'on dit du tout.
M. Lavallée (Fernand): II s'agit d'ajouter des choses.
Vous n'aimez pas mon exemple, M. Cherry? Que faites-vous avec l'exemple que je
vous ai apporté d'ajouter un cabinet de toilette au sous-sol?
M. Cherry: II n'y a pas de problème. C'est de la
rénovation, ça. C'est de la rénovation et c'est
déjà exclu du champ de l'application. Il peut le faire maintenant
et il pourra continuer à le faire après.
M. Lavallée (Femand): A condition qu'il ait un
salarié.
M. Cherry: Non, non. Dans ce sens-là, il n'y a pas de
changement. La rénovation est déjà exclue du champ
d'application dans ce sens-là. Ce n'est pas nouveau là. Il n'y a
rien qui ait affaire avec ça. Ça existe déjà dans
le moment. On me dit - évidemment, c'est avant moi, mais j'en suis
responsable - que c'est quelque chose qui a fait partie de l'entente de 1988.
Et ça, ça ne changera pas par rapport à ça.
Là, je comprends votre réticence, si c'est ça
l'interprétation que vous en faites. Mais je me dois de vous rassurer,
de vous dire que ce n'est pas ça l'intention. Et si vous le lisez comme
ça...
M. Lavallée (Femand): Qu'arrive-t-il avec l'exemple que je
vous donne, M. Cherry, de l'entrepreneur autonome qui est seul, qui se voit
invité à soumissionner pour exécuter des travaux de
plomberie, pour des constructions de trois, quatre, cinq maisons...
M. Cherry: Oui.
M. Lavallée (Fernand):... et qui se voit astreint à
ne pas le faire?
M. Cherry: II n'y a rien qui l'empêche de soumissionner.
S'il l'obtient, au moment où il fera l'exécution des contrats,
à quatre, cinq nouvelles constructions, il retiendra sûrement les
services au moins d'un employé qualifié avec lui.
M. Lavallée (Fernand): Ce n'est pas sûr, M. Cherry.
Si je suis invité à soumissionner sur un projet de construction
pendant l'hiver...
M. Cherry: Oui.
M. Lavallée (Femand):... pour un projet qui va être
fait au printemps...
M. Cherry: Bien sûr.
M. Lavallée (Fernand):... alors, je présume qu'au
printemps j'aurai des salariés pour l'exécuter. Qu'arrive-t-il
si, au printemps, je n'ai pas d'autres choses à faire que de la
plomberie dans deux nouvelles résidences? Est-ce que je vais être
obligé d'engager un salarié pour deux semaines, trois semaines,
et me priver, moi, de la possibilité de l'exécuter
moi-même? Je vais engager un salarié pour faire deux maisons
pendant trois semaines? Lorsqu'on construit une nouvelle maison, M.
Cherry, notre travail est à plusieurs phases. Il y a une phase
souterraine, qui peut durer une journée, ou une demi-journée. On
est appelés, trois jours après, pour faire la partie
élévation. On est appelés, une autre semaine plus tard,
pour faire la tuyauterie d'eau. On est appelés, par la suite, pour faire
la finition des appareils. Donc, si on ajoute tout ça ensemble,
ça peut faire un contrat assez volumineux. Mais c'est fait sur une
période peut-être de deux ou trois mois. Alors, notre travailleur
autonome qui l'a toujours fait, qui a toujours eu les capacités et les
compétences pour le faire, demain matin, il ne pourra plus le faire.
M. Cherry: C'est ça, sa compréhension. (20 h
30)
M. Lavallée (Fernand): Qu'arrive-t-il avec l'entrepreneur,
M. Cherry, qui a... Il y en a au-dessus de 900 qui ont de 3 à 5
employés? Ça peut également monter à 10, et
descendre à un homme seul. Avec la récession qu'on a
présentement, je vous dis 800 sous toutes réserves.
Peut-être qu'il y en a plus de nos entrepreneurs qui n'ont pas de
salariés présentement. Et lorsqu'ils n'ont plus de
salariés, ce ne sont plus des entrepreneurs? Ils ne sont plus vrais? Si
j'ai eu des frissons cet après-midi, c'est qu'on a dit que mon membre,
chez moi, qui est un entrepreneur autonome, c'est un travailleur au noir. C'est
ça que je ne comprends pas. Il paie ses impôts, il déclare
ses revenus, il est contingenté, il est réglementé, il
passe des examens, il prend des permis. Comment pouvons-nous décrire cet
entrepreneur-là comme un travailleur au noir? C'est aberrant!
M. Cherrry: C'est intéressant de voir le cheminement des
mémoires et l'importance de la représentation quand on change de
clientèle, et c'est ça l'avantage de faire une... C'est bon que
vous y ayez été cet après-midi, vous pouvez commenter les
mémoires que vous avez entendus.
M. Lavallée (Fernand): Oui, oui. J'aurais eu le
goût, à un moment donné, de me lever et de demander la
parole, mais c'était impossible.
M. Cherry: Probablement que ceux qui vous écoutent, qui
pariaient cet après-midi, auraient le goût de faire la même
chose.
Mme Blackburn: Vous vous imaginez ce que le ministre aurait
manqué si on n'avait pas demandé une commission
parlementaire?
M. Cherry: Imaginez ce qu'on aurait manqué si on ne
s'était pas entendus sur la qualité des intervenants!
Mme Blackburn: C'est juger de ceux qui ne sont pas là.
Le Président (M. Bélanger): Une autre question, M.
le ministre?
M. Cherry: Je vois qu'il vient de recevoir une note.
Peut-être qu'il souhaiterait dire quelque chose.
M. Lavallée (Fernand): Oui, on aimerait
renchérir.
M. Cherry: Parce qu'on est surtout là pour vous
écouter, ça fait que, profitez-en!
M. Lavallée (Fernand): On aimerait renchérir, M. le
Président. Rénover une résidence. Si vous avez une
résidence d'un certain âge et que vous voulez la rénover,
vous voulez déplacer la salle de bain, en faire une nouvelle, vous
voulez ajouter... Ce n'est plus un travail mineur. Ce sont des travaux qui sont
généralement confinés à des entrepreneurs,
peut-être un travailleur autonome ou un petit entrepreneur qui a de trois
à cinq employés. Alors, si ce n'est pas une salle de bain,
ça peut être la rénovation d'une maison, vous savez. Alors,
c'est ça, notre travailleur autonome ne pourra plus le faire.
M. Cherry: Encore là, vous me permettrez de
différer d'opinion sur l'interprétation qui en est faite.
M. Lavallée (Fernand): J'inviterais, s'il y a des gens
avec moi qui auraient d'autres exemples à apporter afin de mieux
comprendre...
M. Morin (Jean): M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): C'est M. Morin.
M. Morin (Jean): Oui. Rénover, ce n'est pas construire. Je
vais vous prendre comme exemple, M. le Président. Vous n'avez pas de
salle de bain au sous-sol. Vous en faites faire une. Vous ne rénovez
pas, il n'y en a pas; vous construisez une salle de bain. Quand vos
conseillers, M. le ministre, semblent vous dire qu'installer une nouvelle salle
de bain, ce n'est pas construire, mais c'est rénover, moi, je diverge
d'opinion. Vous savez, rénover, c'est remplacer, faire du neuf avec du
vieux. Mais une nouvelle installation, une rallonge, un nouveau cabinet au
sous-sol, vous ne rénovez pas, vous installez, vous construisez.
M. Cherry: Allez-y, continuez.
M. Morin (Jean): J'avais fini.
M. Cherry: Ah! vous aviez fini!
M. Morin (Jean): J'avais fini.
M. Cherry: Je vous avoue que si c'est ça,
votre interprétation, je peux comprendre les difficultés
que vous avez. Mais je vous avoue que, dans l'esprit, on n'a pas fait de
distinction entre construire une nouvelle salle de bain qui n'existe pas au
sous-sol ou la rénover comme telle. Dans la conception, c'est que, tant
que vous n'agrandissez pas les fondations, tout le reste qui existe
déjà à l'intérieur d'une maison unifamiliale
existante, c'est perçu, dans le langage - mais, là, je
réalise que ce n'est pas l'interprétation que vous en avez faite
- comme étant et faisant partie de rénovations. Alors, tant mieux
si ça permet, entre autres, de clarifier ça.
M. Morin (Jean): Ce serait bon que vous le clarifiiez. Vous dites
que, du moment que c'est sur le même terrain ou dans la même
maison, on peut faire n'importe quoi. Écoutez, vous finissez votre
sous-sol complètement, vous faites des installations. Vous êtes en
train de rénover, vous? Vous construisez, là, M. le ministre,
vous ne rénovez pas. En tout cas.
M. Cherry: O.K. Le concept qui a dirigé ça, c'est
qu'à l'intérieur d'une maison unifamiliale déjà
existante, que vous ajoutiez un service ou que vous en changiez quelque chose,
la perception que l'on a, c'est que ça demeure toujours de la
rénovation dans le sens que nous, on le comprend. Mais, là, je
perçois que ce n'est pas l'interprétation que vous en faites.
Ça, j'en tiens compte.
Le Président (M. Bélanger): M. Brière, vous
aviez un commentaire, oui.
M. Brière: Ce que je disais, M. le Président,
c'était... Je comprends que si les quatre murs sont existants, tout ce
qui se fait a l'intérieur, c'est de la rénovation.
M. Cherry: Si ça peut aider les gens qui sont en
arrière, qu'ils consultent "Un champ d'application", chapitre III,
article 9: "...aux travaux suivants exécutés par une personne
physique agissant pour son propre compte et à ses fins personnelles,
exclusives, non lucratives, d'entretien, de réparation, de
rénovation, de modification d'un logement qu'elle habite." En tout cas,
si ce n'est pas assez clair, tant mieux que ça ait permis de clarifier
ça. O.K. Merci.
Le Président (M. Bélanger): D'autres questions?
Alors, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Oui, je vous remercie, M. le Président. Il
me fait plaisir d'accueillir les membres de la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie, les tuyauteurs du Québec.
Je vais essayer de faire un peu rapidement le tour de la question. La
première question: Est-ce qu'il y a une adhésion obligatoire
à la
Corporation?
M. Lavallée (Fernand): Oui, il y en a une.
Mme Blackburn: Tous les entrepreneurs doivent être...
M. Lavallée (Fernand): Membres.
Mme Blackburn: ...obligatoirement membres de la Corporation.
M. Lavallée (Fernand): C'est ça.
Mme Blackburn: Bien. Vous invoquez le fait que ça
fonctionne bien, que vous avez bien contrôlé la Corporation et que
ça ne coûte rien. Alors, moi, je pense que c'est peut-être
pour ça, finalement: comme ça ne coûte rien, vous ne
rapportez rien non plus, dans le sens pécuniaire du terme. Alors, j'y
reviendrai un peu.
Les questions que vous posez, dans le fond, moi, j'aurais comme le
goût de les poser au ministre. Mais, quand même, je vais faire un
petit bout de chemin avec vous. Ensuite, j'aimerais peut-être que le
ministre soit un peu plus clair, parce que je dois dire que je n'ai pas
vraiment compris les raisons fondamentales qui amènent le ministre
à modifier une situation qui allait relativement bien: je parie des
électriciens et des tuyauteurs. Alors ça, je dois dire que
ça m'étonne et ça a étonné beaucoup de
monde. Je comprends un peu l'impression qu'ont pu vous laisser les propos de
certains porte-parole cet après-midi, mais, je pense, sans vouloir
prendre leur défense, qu'ils font état de situations ou, dans la
grande région de Montréal en particulier, on se retrouve avec de
grands travaux de construction, où celui - ils l'appellent un "broker"
-qui engage des entrepreneurs autonomes, il peut en avoir 30. Là, eux,
ils ne sont absolument pas soumis au décret. Il y a eu un abus.
Ça, c'est clair et net, H y a eu un abus...
M. Lavallée (Fernand): On est contre ça.
Mme Blackburn: ...qu'il faut essayer de contrôler, c'est
ça.
M. Lavallée (Fernand): On est contre ça.
Mme Blackburn: Je suis certaine que vous êtes contre
ça. On a dit aussi, cet après-midi, un syndicat - pour ne pas le
nommer, la FTQ - a dit: écoutez, avec eux autres, on n'a jamais eu de
problème.
M. Lavallée (Fernand): Avec nous autres?
Mme Blackburn: Avec vous autres, avec les deux
corporations...
M. Lavallée (Fernand): Ah!
Mme Blackburn: ...en réponse à une question que
j'avais posée. Alors, je pensais que le ministre avait bien... que ce
n'était pas tombé dans l'oreille d'un sourd. J'espère
qu'il écoutait à ce moment-là. Les corporations ne
semblent pas poser le même problème, de toute façon,
à la FTQ, en tout cas, parce que c'est la seule que j'aie
interrogée là-dessus, la seule organisation syndicale.
À présent, vous allez me dire quelque chose, parce qu'il y
a effectivement un trou dans la loi, il faut le reconnaître, qui a
donné lieu à des pratiques abusives. Le travail au noir nous
coûte des sommes astronomiques au Québec; je ne recommencerai pas
mon petit laïus là-dessus. Je ne sais pas si vous étiez
là, mais je pense que c'est important qu'on trouve des moyens parce que
ça nous coûte tous cher, à vous, à moi et à
tous ceux qui paient des impôts.
Comment ça fonctionnait avant 1988, vous, dans votre
Corporation?
M. Lavallée (Fernand): À quel niveau?
Mme Blackburn: Parce que 1988 a reconnu le statut de travailleur
autonome. Vous aviez un statut de travailleur artisan, avant? Comment ça
fonctionnait?
M. Lavallée (Fernand): Oui.
Mme Blackburn: Pouviez-vous travailler seul sur une construction
neuve?
M. Lavallée (Fernand): Michel.
M. Favre (Michel): II n'y avait aucune limitation quant au champ
d'activité.
Mme Blackburn: Avant 1988. M. Favre: Avant 1988.
Le Président (M. Bélanger): Ça, c'est M.
Favre.
M. Favre: Oui. C'était la différence. Depuis 1988,
les gens sont restreints. On les déclare incompétents. Des gens
qui investissent des montants de 30 000 $ à 40 000 $ pour acheter un
camion, s'outiller, qui ont pignon sur rue, qui oeuvrent depuis des
années, se voient maintenant dire qu'ils sont dorénavant
incompétents. Ça ne se prend pas.
Mme Blackburn: Bien, là, vous comprenez, d'abord une
première chose. Je pense qu'il y a deux choses très claires. La
première, c'est: rénovation, entretien et réparations,
ça vous est ouvert. Ça, c'est la loi qui le prévoyait en
1988 et qui demeure la même. Sauf que sur la construction, là, il
faudrait y avoir un salarié. Et c'est ce qui vous pose problème.
Le ministre n'a pas vraiment semblé comprendre tantôt. C'est ce
qui leur pose problème en cas de pénurie, s'il n'y a pas beaucoup
de travail. À ce moment-là, ça veut dire que tout ce qui
est maison neuve, ils n'y ont pas accès. Il va falloir qu'au village,
à Cap-Chat, ils aillent chercher quelque part, peut-être à
Rivière-au-Renard ou à Gaspé, avant de trouver le prochain
plombier. Je connais un peu la région.
Mais ce qui a été dit et avancé cet
après-midi, c'est qu'il faudrait essayer de voir comment on peut,
à la fois, éviter les abus qu'a entraînés une
interprétation excessive, pour ne pas dire abusive, de la loi 31 et, en
même temps, ne pas complètement mener à la faillite un
certain nombre d'entrepreneurs autonomes. Et, là, je vous dis que ce
n'est pas facile. Je suis d'accord là-dessus avec le ministre, mais il
me semble qu'il faudrait peut-être examiner si les deux corporations qui,
à ce jour, n'ont pas semblé abuser du système avec un
minimum d'encadrement, voir s'il n'y aurait pas lieu d'éviter les abus
qu'on a connus, par ailleurs, un peu partout dans la construction. Mais est-ce
que vous avez réfléchi dans ce sens-là?
M. Lavallée (Fernand): Si je comprends bien, ce qui semble
ennuyer certains, c'est les charges sociales que les entrepreneurs ont à
payer. Vous faites allusion à l'association de plusieurs travailleurs
autonomes qui se réunissent pour exécuter des contrats d'une plus
grande envergure. Alors, l'encadrement est là, Mme Blackburn. Que l'on
bouche ce trou-là et qu'on fasse payer à ces gens-là les
charges sociales qu'ils doivent payer. Alors, on n'est pas pour tout foutre en
l'air à cause de ça. On peut modifier ces "joint venture" pour
que les entrepreneurs qui s'unissent pour faire des contrats de plus grande
envergure paient les charges sociales. Mais on n'a pas à leur enlever le
privilège ou le droit qu'ils ont présentement de gagner leur vie.
Alors, que trois ou quatre entrepreneurs s'unissent ensemble pour
exécuter un contrat de plus grande envergure, que trois d'entre eux se
déclarent comme salariés et qu'ils paient les charges sociales
auxquelles on faisait allusion cet après-midi, on n'a rien contre
ça.
Mme Blackburn: Mais, ça, c'est déjà
prévu dans la loi. Vous avez un représentant et les trois autres
pourraient travailler comme salariés. Je sais que ça a
provoqué des réactions.
M. Lavallée (Fernand): Mais, là, moi, je vous
ramène toujours à l'entrepreneur de Rivière-au-Renard qui
est invité à faire de la plomberie dans une maison. Vous, vous me
parlez de trois ou quatre entrepreneurs autonomes qui se regroupent ensemble
pour faire un contrat de plus grande envergure. On est d'accord avec vous, on
s'objecte à ça.
Mme Blackburn: O.K. Mais ce n'est pas trois ou quatre
entrepreneurs qui se réunissent, c'est-à-dire qu'ils sont
invités par quelqu'un qui boucle l'affaire. Puis, finalement, il donne
le contrat à plusieurs entrepreneurs; ça s'est vu dans la
région de Montréal. Dans le fond, ce que j'essaie de faire avec
vous, c'est de voir comment, compte tenu de la qualité de votre travail,
du professionnalisme de votre Corporation, on pourrait tenir compte de ce
passé pour essayer d'infléchir la décision du ministre
quant aux modifications à apporter au projet de loi.
M. Lavallée (Fernand): Mais ces quatre
entrepreneurs-là qui se regroupent ensemble ou les dix qui se regroupent
ensemble pour exécuter un contrat de plus grande envergure, ce ne sont
pas des travailleurs au noir, ce sont des gens qui déclarent leurs
revenus, qui paient des impôts et qui se comportent selon les lois de la
plomberie et qui font... (20 h 45)
Mme Blackburn: Oui, mais, là, attendez un peu. Ceux qui
font ça, c'est-à-dire qu'ils échappent... D'abord, un, ils
ne sont pas syndiqués et ils sont comme... Par rapport à la loi
actuelle, il n'y a pas de définition qui les touche quant aux cartes de
compétence et à toutes sortes de... parce qu'ils échappent
à la définition de "salarié".
M. Lavallée (Fernand): O.K. Et en s'échap- pant de
la définition de "salarié", ils s'échappent
également des charges sociales qu'un entrepreneur avec des
salariés a à payer.
Mme Blackburn: À l'occasion.
M. Lavallée (Fernand): Je vous dis que l'encadrement est
là. Le système est déjà conçu. On n'a
qu'à imposer à ces gens-là de payer des charges sociales
s'il y a lieu.
Mme Blackburn: Mais, là, ça prendrait des
inspecteurs, vous comprendrez.
M. Lavallée (Fernand): Bien écoutez... Mme
Blackburn: D'accord.
M. Lavallée (Fernand): ...je ne vous dis pas quoi faire,
Mme Blackburn.
Mme Blackburn: Non, non, écoutez, moi, je n'ai rien contre
vous, là.
M. Lavallée (Fernand): Non, non, je le sais. Je comprends
votre intervention. J'essaie de vous répondre du mieux que je peux. M.
Brière aurait peut-être quelque chose à vous dire
là-dessus.
M. Brière: L'entrepreneur, que vous qualifiiez de "broker"
tantôt, c'est un entrepreneur général qui donnerait un
contrat à, disiez-vous, 15, 20, 30 petits entrepreneurs pour
exécuter un contrat d'envergure. Pour chacun des contrats, on doit
obtenir un permis. Un entrepreneur doit aller chercher son permis, il doit
signer pour. L'entrepreneur qui n'aurait pas d'employés et qui n'en
engage pas non plus... Il doit certainement exister une façon, je ne
sais pas... Je ne peux pas en estimer le coût. Mais en allant chercher un
permis, ça pourrait être un numéro, ça pourrait
être une lettre en avant du numéro, je ne le sais pas, mais qui
pourrait faire, avant l'émission du permis de construction, qu'on puisse
voir que cet entrepreneur-là n'a pas d'employés, qu'il ne peut
pas exécuter un travail... C'est bien sûr qu'il n'est pas question
qu'un entrepreneur autonome aille faire place Ville-Marie; ça n'aurait
pas d'allure, ça durerait longtemps.
Mme Blackburn: Non, sans que ça soit Ville-Marie, H y a
des immeubles importants...
M. Brière: Même un huit étages.
Mme Blackburn: ...et qui ont été construits de
cette manière-là. Ça veut dire que vous pouvez avoir 30
ouvriers sur un chantier sans qu'aucun de ces ouvriers-là n'aient besoin
de détenir des cartes de compétence parce qu'ils arrivent
là comme travailleurs ou entrepreneurs autonomes. Ils peuvent avoir des
cartes de compétence, mais ils ne sont pas soumis au Code de la
construction, au décret de la construction, j'allais dire.
M. Brière: On est d'accord et on est prêts à
trouver une façon pour essayer de contrer ça.
Mme Blackburn: O.K.
M. Brière: Parce qu'on est contre ça nous autres
aussi.
Mme Blackburn: C'est ça ma question. Avez-vous
essayé d'imaginer ce que pourrait être la nature des
contrôles qu'on pourrait exercer, pas sur tout le Québec, par
rapport à votre Corporation?
M. Lavallée (Fernand): J'inviterais Jean Morin à
vous parler là-dessus.
Mme Blackburn: Oui, bien.
M. Morin (Jean): Peut-être, M. le Président, Mme
Blackburn, que vous pourriez dire dans une loi que sur un même chantier,
pas plus d'un travailleur autonome par spécialité.
Mme Blackburn: Oui, j'avais pensé à ça.
M. Morin (Jean): Ce n'est pas si compliqué
et, en faisant cela, vous n'empêcherez pas le travailleur autonome
de Rivière-au-Renard de gagner sa vie. Vous savez, vous n'avez seulement
qu'à dire: Sur un même chantier, pas plus d'un, de deux ou de
trois entrepreneurs autonomes par spécialité. Et le tour est
joué. Vous n'en aurez pas 40 en plomberie, à ce moment-là,
ça en prend un. Et la meilleure police, ce sera les travailleurs
syndiqués qui sont déjà là, sur le chantier, qui
vont dénoncer la présence de plus d'un entrepreneur autonome. Je
vous fais une suggestion. Pas besoin d'aller interdire aux entrepreneurs
autonomes de gagner leur vie partout dans les régions, etc. pour
régler ce problème de gros chantiers. Est-ce que ce
problème est si fréquent aussi? Oui?
Mme Blackburn: Écoutez, le travail au noir, ça
représente... Je peux vous ressortir les chiffres. Peut-être
étiez-vous ici cet après-midi lorsque j'ai cité les
chiffres qui nous viennent de la Commission de la construction du
Québec, c'est extrêmement important et ça constitue un
manque à gagner majeur pour les caisses de l'État, les programmes
sociaux, la Régie des rentes du Québec, la CSST, mettez-les tous,
et y compris évidemment les impôts. On estime que la masse
salariale...
M. Lavallée (Fernand): Je comprends mal. Mme
Blackburn:... le manque à gagner...
M. Lavallée (Fernand): Comment faites-vous intervenir les
impôts là-dedans?
Mme Blackburn: Ça représente une masse salariale
de... Le travail au noir.
M. Lavallée (Fernand): Oui, mais l'entrepreneur...
Mme Blackburn: Là, je ne parle pas des entrepreneurs
autonomes, je parle du travail au noir.
M. Lavallée (Fernand): Ah! C'est différent.
Mme Blackburn: S'ils en font au noir, Ils sont dans la même
situation que n'importe quel travailleur au noir. C'est 800 000 000 $, la masse
salariale qu'on estime en 1990. Alors, 800 000 000 $ de travail au noir,
ça veut dire que c'est autant d'impôts qui ne sont pas
payés, autant de contributions qui ne sont pas faites à la RAAQ,
à la RAMQ, à la CSST, partout. C'est un problème. Moi, je
pense que vous avez raison de dire que...
M. Lavallée (Fernand):... que l'on impose des charges
sociales.
Mme Blackburn:... vous ne vous sentez pas beaucoup
concernés par ça. C'est l'avis d'ailleurs, je le rappelle, de la
FTQ. En même temps, est-ce qu'on peut conserver - et c'est la question
qu'il faut poser au ministre - les privilèges des deux corporations,
parce qu'on va entendre la seconde, par rapport à: premièrement,
le statut et les pouvoirs qui sont les leurs actuellement et,
éventuellement, prévoir des modalités un peu plus souples.
Parce que, effectivement, lorsqu'on s'en va dans les régions... Pour
venir d'une région, bien que le voisin plombier que j'ai a toute une
équipe, mais, je sais que, dans les campagnes, c'est déjà
beaucoup moins facile. Quand vous allez en Gaspésie, en Abitibi, que
vous allez dans les villages ou dans les campagnes, il est évident que
vous n'avez pas beaucoup de gros entrepreneurs en plomberie; c'est
généralement un qui travaille de temps en temps avec un apprenti.
Ça, on est conscient de ça. La seule façon, je vous le
dis, moi, si je veux convaincre le ministre, il faut que vous me convainquiez
et que vous le convainquiez en même temps.
M. Favre: La Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec, ce qu'elle vous dit ou ce qu'elle veut dire au
ministre, c'est que ses membres ne sont pas responsables des problèmes
rencontrés, des problèmes évoqués.
Mme Blackburn: C'est ça le problème.
M. Favre: Ils ne devraient donc pas faire l'objet des contraintes
qui sont prévues dans votre projet de loi.
Le Président (M. Bélanger): Si je comprends bien,
vous n'êtes pas la cause du problème.
M. Favre: Effectivement.
Le Président (M. Bélanger): Vous subissez ses
effets?
M. Favre: On les subit.
Le Président (M. Bélanger): Vous n'êtes pas
la cause mais vous êtes obligés de prendre la pilule, par
exemple.
M. Favre: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Ce n'est pas
drôle ça!
M. Cherry: Juste pour compléter. Merci, M. le
Président. Encore aujourd'hui, avec des gens avec qui j'avais à
discuter et étant sensible aux représentations que vous m'avez
faites précédemment, les gens en régions
éloignées, je soulevais aux fins de la discussion, je voulais
faire sortir en disant là: Comment est-ce que je fais, comme vous le
disiez, pour faire la police? Comment est-ce qu'on va faire à
Rivière-au-Renard, qui
est l'exemple classique que tout le monde soulève, là? Il
me semble que c'est un endroit très populaire. Là, ce qu'on me
dit, quand c'est du neuf, on me dit: M. le ministre, la vérité -
et, là, je vous demande de répondre à ça - c'est
que c'est vrai que l'entrepreneur autonome reste tout seul, mais, ce qu'il
fait, c'est qu'il engage un gars au noir. Il engage un gars pour se faire aider
pareil, mais au lieu de prendre un vrai travailleur de la construction, il va
prendre quelqu'un qui est sur le bien-être social, il va prendre
quelqu'un qui est ailleurs, qui est sur le chômage, et il va lui payer 6
$, 7 $, 8 $ de l'heure en-dessous de la table. Il va se faire aider pareil
plutôt que de prendre pour se faire aider un vrai travailleur de la
construction, un apprenti.
Jusqu'où ça c'est vrai? J'ai tenté de faire le
point que vous faites aujourd'hui et voici la réplique qu'on m'a
donnée. Je vous la repasse pour que vous réagissiez.
M. Lavallée (Fernand): On ne vous demande pas d'accepter
ça. On vous dit juste de l'arrêter. C'est interdit de faire ce que
vous venez de décrire.
M. Cherry: Est-ce vrai ça?
M. Lavallée (Fernand): Si ça se fait?
M. Cherry: Oui.
M. Lavallée (Fernand): Peut-être. Je ne peux pas
vous dire, je n'habite pas à Rivière-au-Renard!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lavallée (Fernand): M. le Président, les codes
en vigueur présentement ne permettent pas ça. Si ça se
fait, mettons-les à l'amende, condamnons-les, mais n'empêchons pas
notre travailleur autonome de travailler.
Le Président (M. Bélanger): La police, vous feriez
ça?
M. Lavallée (Fernand): Si la CCQ n'a pas les moyens,
qu'elle n'a pas assez d'inspecteurs pour "policer", en fait, c'est d'elle que
relève le droit et la responsabilité de s'assurer que les
ouvriers qui travaillent dans l'entreprise, dans l'industrie de la
construction, aient les cartes de compétence pour le faire. Ce n'est pas
nous qui avons cette responsabilité-là. Mais, moi, je vous dis
que si l'entrepreneur de Rivière-au-Renard, demain, n'est plus
entrepreneur, il va être encore entreprenant et il va le faire dans le
noir. Il va travailler de quatre heures à minuit et puis, le jour, il va
dormir, il va aller à la pêche. Il va faire sa plomberie pareil,
par exemple, mais, là, il ne paiera pas ses impôts; il ne sera
plus membre nulle part et il ne se comportera plus selon un code
d'éthique. Vous savez, de la plomberie, c'est de l'hygiène, c'est
important. Il faut que ce soit fait selon des codes. Puis, ça, on
s'occupe de ça, nous autres. La qualification, ça relève
de nous autres. Nos membres, on les forme et on les performe, puis ils se
comportent en conséquence. Lorsqu'ils ne le font pas, on est là
pour les "policer", pour les mettre au pas. Les 800 membres artisans ne sont
pas moins bons que les autres, au contraire. L'artisan qui travaille
aujourd'hui ou l'autonome, appelez-le comme vous voudrez, c'est bien souvent le
meilleur homme que j'ai qui, lui, décide demain d'être
entrepreneur. Et peut-être que lui, dans cinq ans, va en avoir 5 ou 10,
des salariés à son emploi. Mais s'il ne peut pas commencer
quelque part, on n'en aura plus de relève, il n'y en aura plus
d'entrepreneurs.
Mme Blackburn: Mon collègue, allez-y! Une voix:
Non, allez-y.
Mme Blackburn: Je voyais la députée de
Kamouraska-Témiscouata. J'imagine qu'elle a un comté là
qui illustre parfaitement comment ça se passe, et ses collègues
aussi. Vous avez, surtout madame, sûrement, monsieur, vous avez des
villages. Dans ce sens-là, je me dis qu'ils sont plus en mesure de mieux
comprendre la situation qui est la vôtre. Je m'attendais à ce
qu'ils posent des questions. Mais, ce qu'on peut envisager, c'est qu'ils
puissent convaincre le ministre, à tout le moins. Et moi, c'est ma
position, je pense que les corporations ont fait un excellent travail de
protection et d'éthique auprès de leurs membres: formation, code
de déontologie...
M. Lavallée (Fernand): L'environnement.
Mme Blackburn: ...environnement. Bon. Vous avez,
là-dessus, fait vos classes et vos preuves. À cet égard,
en ce qui concerne le rôle et le mandat de la corporation, je
souhaiterais, et je le dis, que le ministre, par rapport à la loi 186,
revienne sur sa décision. Il est vrai qu'ils ne pourront pas en tirer
beaucoup de revenus mais, à tout le moins, ça ne leur
coûtera rien parce que, actuellement, ça ne leur coûte rien.
Je pense qu'il y aurait lieu de revoir la décision. Moi, j'aurais
terminé là-dessus.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Si vous me permettez, M. le Président, moi, je
dirais autre chose de complètement différent. Vous avez
parlé, lors de votre présentation, de la caution pour le paiement
des salaires, en disant que c'était comme si on obligeait Provigo
à payer une caution. Le
problème, disons, c'est que les travailleurs de Provigo sont
directement liés par une convention de travail à leur entreprise.
Et aussi, j'imagine qu'il y a peut-être moins de mouvance dans le milieu
de travail quand il s'agit des gens de Provigo ou de n'importe quel autre genre
d'entreprise, sauf que dans le domaine de la construction, ce n'est pas
évident.
J'aimerais savoir comment vous pouvez faire en sorte... Peut-être
que le problème ne se pose pas chez vous, comme ça peut se poser
dans d'autres groupes de travail, d'autres corps de métier. On a vent
assez souvent dans nos bureaux de comté d'entreprises qui sont disparues
dans le décor en laissant des travailleurs non payés, souvent
même après avoir passé des contrats avec des camionneurs
artisans et toutes sortes de gens dans le milieu et puis, tout à coup,
pouf! tout le monde est disparu! Il n'y a personne de payé et on court
après. Je pense que c'est à partir de ce genre de problème
que le ministre dit: Bon, bien, écoutez, peut-être qu'il faudrait
payer une caution pour assurer une espèce de base de revenus pour tout
ce beau monde-là.
Comment vous réagissez, dans le fond, très pratiquement,
au fait qu'il y a - du moins, nous, on en entend parler - des travailleurs de
la construction qui ont souvent beaucoup de difficulté à se faire
payer par des entrepreneurs qui sont plus ou moins solvables? C'est quoi, votre
façon de répondre à ça?
M. Lavallée (Fernand): Je veux vous faire remarquer que
l'entrepreneur que je suis et comme mes 2300 membres sont, on a la
responsabilité présentement d'endosser personnellement leur marge
de crédit et de supporter leurs comptes à recevoir. Et lorsque
l'entrepreneur fait faillite, si c'est le cas, il perd sa chemise, ce
gars-là. Et non seulement il perd sa chemise, il endosse personnellement
par ses biens les responsabilités des engagements bancaires.
Vous parlez d'une caution. Pour avoir une caution, il faut que la
compagnie qui cautionne ait également des endossements personnels.
Alors, l'entrepreneur qui oeuvre présentement dans le domaine de la
construction a un potentiel d'emprunt. On ne peut pas signer
indéfiniment à la banque et avec les compagnies de caution. On
fournit des cautions de réalisation de nos contrats. On fournit des
cautions au propriétaire pour lui garantir qu'on va terminer et
accomplir nos travaux. On garantit personnellement aux banques les marges de
crédit. On garantit personnellement par nos inventaires. On supporte des
retenues qui sont imposées par les devis sur les projets de
construction, des retenues qui durent un an. Là, vous nous demandez une
autre caution additionnelle à ça.
M. Claveau: Je ne vous le demande pas, là.
M. Lavallée (Fernand): Mais c'est ce qu'on nous
demande.
Le Président (M. Bélanger): Malheureusement, je
vais vous demander d'en rester là puisque le temps est
écoulé. Vous voyez comme ça passe vite une heure!
M. Lavallée (Fernand): Mais on n'a pas répondu
à ce monsieur-là.
M. Claveau: Est-ce qu'on peut avoir un consentement? J'aimerais
avoir, si le ministre...
Le Président (M. Bélanger): Non. On s'est entendus
qu'on ne faisait pas ça puisqu'on en a jusqu'à minuit et
ça va amener le dernier groupe à passer beaucoup trop tard cette
nuit. Ça fait que si on veut s'en tenir à notre horaire, on est
mieux d'être très stricts. Je suis un "casseux" de party, mais je
maintiens ça. Alors, M. le ministre, si vous voulez dire un mot de
remerciement à ce groupe.
M. Cherry: D'abord, je veux vous remercier de vous être
déplacés aujourd'hui et de nous avoir fait partager votre
proposition et votre mémoire. Je veux vous assurer que vos
représentations sont importantes dans l'exercice qu'on a à faire
aujourd'hui. Je vous dis à vous autres, comme je l'ai dit aux groupes
qui vous ont précédés, que suite à l'exercice
d'aujourd'hui, j'ai demandé à l'équipe du ministère
de... On va travailler en fin de semaine et on va regarder ce qu'on peut faire
ensemble.
M. Lavallée (Fernand): Si vous avez besoin d'aide, on va
vous assister. (21 heures)
M. Cherry: C'est pour ça que je le fais publiquement, pour
que si vous n'y étiez pas, je pourrais vous dire que quand on a
tenté de vous rejoindre vous n'étiez pas là.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Alors, vous avez
déjà la réponse si vous avez des problèmes.
M. Lavallée (Fernand): On vous remercie infiniment,
monsieur.
M. Cherry: O. K.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: M. le Président, M. Lavallée,
messieurs, ça m'a fait plaisir de vous entendre. Juste une petite
remarque sur la caution. Dans le fond, c'est pour payer le salaire. Comme vous
avez peu d'employés - à l'exception de vous qui êtes
à la table, généralement, les
entrepreneurs autonomes n'en ont pas ou peu -ça ne pourra pas
coûter très cher comme caution pour couvrir le coût des
salaires.
M. Lavallée (Fernand): Est-ce qu'il y a un minimum?
Mme Blackburn: Oui.
M. Lavallée (Fernand): La caution devra couvrir combien?
Aujourd'hui, j'en ai trois, demain...
Mme Blackburn: Ça, ça n'a pas été
établi. Vous avez raison sur un...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
S'il vous plaît! J'aimerais qu'on s'en tienne à remercier
nos invités, qu'on ne reparte pas ie débat...
Mme Blackburn: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): ...le temps est
écoulé.
Mme Blackburn: Mais vous savez, M. le Président, comme on
leur a un peu volé quelques minutes, je me suis dit qu'on pouvait leur
en consacrer un petit peu plus.
Le Président (M. Bélanger): C'était
généreux de votre part, mais... Alors, la commission remercie la
Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec
et appelle à la table des témoins l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec, autrement dit, l'APCHQ.
Messieurs, si vous voulez vous approcher.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec
Si vous me permettez, je vais demander à chacun de bien vouloir
reprendre sa place, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Merci de
votre collaboration. Je comprends que c'est long de rester, là, en
silence, docilement à écouter, ce que vous faites très
bien d'ailleurs. J'apprécie l'appui que vous nous donnez en maintenant
ce silence-là.
Nous recevons maintenant l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec, l'APCHQ, dont le président est M.
Reynald Jacques. J'inviterais M. Jacques à nous présenter les
gens qui l'accompagnent et à nous présenter son mémoire.
Pour s'entendre, vous avez plus ou moins 20 minutes pour la présentation
de votre texte et l'échange avec les parlementaires est de 40 minutes.
Alors, c'est à vous, allez-y.
M. Jacques (Reynald): Merci. M. le Président, M. le
ministre, membres de la commission, j'aimerais vous présenter mes
permanents: M. Orner Rousseau, vice-président à l'APCHQ, et M
Serge Crochetière, conseiller.
Nous devons, encore une fois, venir défendre les
intérêts de nos membres devant vous, face à l'intervention
du gouvernement, cette fois. Cependant, c'est également
l'intérêt de l'ensemble des citoyens qui est menacé ainsi
que celui de nos associations d'entrepreneurs. Le gouvernement semble avoir
adopté l'attitude d'imposer des mesures discutables au nom d'une
supposée paix sociale sans tenir compte de leurs impacts sur
l'habitation. On agit comme si la capacité de payer des gens
était inaltérable en imposant des mesures coûteuses comme
exclure les entrepreneurs autonomes, interdire aux entrepreneurs de travailler
seuls, exiger deux cautionnements pour garantir les mêmes risques et le
reste. Nous osons croire que le présent exercice aura pour effet de
ramener un juste sens des valeurs dans les lois que vous vous proposez
d'adopter. Je cède la parole maintenant à M. Rousseau.
M. Rousseau (Omer): M. le Président, M. le ministre,
évidemment, avant de procéder d'une façon directe,
c'est-à-dire article par article, j'aimerais simplement vous faire
quelques commentaires sur l'organisation au cas où quelques membres de
cette commission ne connaissent pas l'organisation.
En fait, l'Association provinciale représente plus de 10 000
entreprises à travers le Québec, dont près de 7000 sont
réparties à travers 14 associations affiliées et les
autres, évidemment, dans d'autres associations affiliées qui ont
une certaine parenté avec l'organisation.
Il est très important que vous notiez que l'organisation, par
l'entremise de ses entreprises, représente plus de 80 % de tous les
travaux qui se font dans le secteur résidentiel, constructions neuves et
rénovation. À ce titre, je peux, simplement vous faire remarquer
que dans le cadre de Corvée-habitation, le programme qui existait en
1982 et deux ou trois années après, de même que dans le
cadre du programme Mon taux, mon toit, les dernières statistiques sont
sorties. Dans un cas, nous représentions plus de 90 % de toutes les
unités résidentielles de même que dans ce cas-ci, aux
environs de 85 %.
C'est donc dire que je pense qu'on représente facilement... On
peut parler facilement au nom de l'industrie de la construction
résidentielle. Par ailleurs, je veux simplement vous dire que
l'organisation existe depuis 1961. Néanmoins, je pense qu'on a
été capable d'assumer notre responsabilité. D'ailleurs,
puisqu'on parle de responsabilisation, je pense qu'on peut en faire
état. Depuis 1976, nous avons été le premier programme de
garantie au Québec. Les autres sont venus nous copier par après.
D'ailleurs, c'est le programme de garantie qui a la plus grande étendue,
c'est-à-dire en termes de
garantie, en termes de protection au niveau des consommateurs à
travers tout le Canada.
Aussi, nous avons été les premiers à instaurer un
programme de garantie dans le domaine de la rénovation. À toutes
fins pratiques, nous sommes le seul programme qui est offert dans ce
domaine-même au Québec. Par ailleurs, je pense qu'il y a lieu que
vous sachiez que nous offrons différents services. Nous sommes
présents surtout, c'est-à-dire en termes de présence au
niveau du consommateur, tant au niveau des expositions... Aussi, nous sommes
très présents en termes techniques: formation et transferts
technologiques.
Bref, c'est une organisation qui représente, je pense,
l'industrie de la construction. Pour vous montrer jusqu'à quel point
l'industrie de la construction est extrêmement importante, je voudrais
simplement vous référer à deux tableaux de statistiques
qui sont tirés de Statistique Canada de même que de la Commission
de la construction du Québec. Vous remarquerez que l'industrie de la
construction résidentielle représente aux environs de 41 % de
tout le PNB dans l'industrie de la construction.
C'est un tableau, évidemment, à partir des permis de
construction qui émanent depuis 1991. On prend l'autre tableau de la CCQ
et on arrive au même pourcentage bien que la répartition entre la
construction neuve et les autres secteurs de rénovation ne sont pas les
mêmes chiffres. Évidemment, on ne parie pas nécessairement
des mêmes années et on ne part pas nécessairement sur la
même base. On en arrive toujours quand même à la même
proportion, c'est-à-dire 40 %, aux environs de 40 % 42 % dans le secteur
de la construction résidentielle par rapport aux autres secteurs.
Donc, il est extrêmement important que cette commission comprenne
que quand elle va jouer au niveau des relations de travail, quand elle va jouer
dans l'industrie, elle joue à 40 % dans le secteur de la construction
résidentielle, et elle joue directement sur le consommateur. Alors, sur
ce, je veux simplement vous dire, M. le ministre, que je pense que les deux
lois qui font l'objet d'une étude présentement nécessitent
des modifications.
Si on prend le projet de loi 185, nous avons, je pense, des commentaires
sur deux points. Evidemment, vous en avez entendu parier toute la
journée, mais nous avons encore des commentaires qui ne seront
peut-être pas nouveaux. En tout cas, on va tenter d'y ajouter des
éléments d'information, notamment sur l'entrepreneur autonome et
le cautionnement.
Quant au projet de loi 186, nous avons des commentaires à faire
sur la structure de la nouvelle Régie du bâtiment, notamment sur
la présence du monde patronal sur cette nouvelle régie. Nous
voulons aussi attirer votre attention sur la question de l'attestation de
conformité - je pense qu'elle est extrêmement importan- te - de
même que sur l'autre point, le cautionnement par rapport au fonds
d'indemnisation, mais également par rapport à nos garanties
financières.
Bref, je vais laisser à Serge Crochetière le soin d'y
aller, c'est-à-dire point par point. Après ça, on pourra,
à deux, répondre aux questions.
Le Président (M. Bélanger): M.
Crochetière.
M. Crochetière (Serge): Merci, M. le Président. M.
le ministre, mesdames, messieurs. Quant au projet de loi 185, le premier sujet
dont on doit vous entretenir, c'est la question de l'entrepreneur autonome.
Nous n'avons jamais nié, au cours des 10 dernières années
où j'ai participé à des commissions parlementaires, que,
chez nous, l'entrepreneur autonome - dans le temps, on pouvait appeler
l'artisan - constituait la soupape de sûreté qui permettait
à l'industrie du secteur résidentiel de continuer à
oeuvrer alors que toute la négociation se fait sans tenir compte
véritablement de ses besoins et de la demande du marché. Alors,
pour nous, c'est quand même un élément qui est
essentiel.
Cependant, il faut, je pense, ramener les choses à leur vraie
dimension. On en parie toujours en pariant du travail au noir. En vertu de quoi
traite-t-on ces gens-là de travailleurs au noir? Les tableaux qu'on
vient de vous montrer établissent qu'on effectue plus de 9 000 000 000 $
d'affaires par année; et ça, ce sont les statistiques
officielles, ce n'est pas du noir. Ce sont les contrats, ce sont les permis de
construction, tels qu'ils sont émis par les municipalités. Quand
on vous dit - comme j'ai entendu cet après-midi - que l'enrepreneur
général paie comptant le gars avec sa pépine... D'abord,
je vous ferai remarquer que c'est à peu près le seul travailleur
autonome que vous allez continuer à autoriser à oeuvrer. Mais,
indépendamment de ça, il n'est pas payé comptant. C'est
faux. Il est payé en argent, généralement inscrit par
chèque, avec la TPS et peut-être - j'espère que non - avec
la TVQ. Tous ces chiffres-là sont des chiffres officiels.
De plus, ces gens-là sont qualifiés. Ils ont une carte de
compétence pour faire les travaux qu'ils exécutent. En plus, ils
ont une licence émise par la Régie des entreprises de
construction du Québec. Alors, quand on parie de travailler au noir et
qu'on vise essentiellement les travailleurs autonomes, c'est tout à fait
inexact. Le travail au noir, il existe, mais il n'est pas le propre des
travailleurs autonomes. Il peut être fait aussi bien par les
salariés de la construction. Je pense que tout le monde ici, dans la
salle, si on faisait, peut-être pas un examen de conscience, mais si on
se demandait si on connaît des gens qui font exécuter du travail
au noir, qu'on se demande si c'est toujours par des travailleurs autonomes ou
si ce n'est pas parfois par un cousin qui est lui-même un salarié
de la
construction qui vient le samedi. Alors, ce n'est pas le propre des
travailleurs autonomes. Ce n'est même pas la grande partie du travail au
noir qui se fait de cette façon-là. Ce n'est pas illégal,
non plus, les gestes qu'ils posent. On veut rendre ça illégal,
mais ça ne l'est pas. Je comprends qu'il y aurait eu une entente.
Certaines personnes ont même parlé de "dear, il y a trois ans. On
n'y était pas partie. On maintient que le travailleur autonome est un
travailleur légal dont on a besoin, nous, sur nos chantiers.
D'autre part, les travailleurs ou les employeurs - ça a
été reconnu, entre autres, par l'AECQ - n'ont pas
nécessairement des salariés de façon permanente pendant
toute l'année. Il s'agit d'une embauche qui est cyclique. Il est
important aussi que ces gens-là puissent continuer à travailler
s'ils veulent pouvoir continuer à donner de l'emploi aux
salariés.
Maintenant, la notion de travailler à l'aide d'un salarié
sur un chantier. Dans le résidentiel, on n'a même encore
été capable de définir ce qu'était vraiment un
chantier. Sur un projet étendu, où il y a des maisons en
rangée, des maisons unrfamiliales et des maisons en hauteur, est-ce
qu'on a un chantier par lot? Si c'est discontinu, parce que le promoteur fait
affaire avec cinq constructeurs, à ce moment-là, est-ce qu'il va
être obligé d'avoir un salarié qui va le tenir par la main
toutes les fois qu'il va faire un travail dans une pièce, même,
disons, dans une série de maisons? Personne n'a jamais été
capable, même la CSST actuellement, de nous donner une définition
exacte de ce qu'est un chantier. Comment va-t-on faire pour vivre avec
ça?
Alors, sur la question du travailleur autonome - parce que je ne veux
pas passer tout le temps qui nous est alloué là-dessus - c'est,
en gros, ce qu'on avait à vous dire. On veut que le travailleur autonome
continue à travailler. On dit que l'application que la loi en fait est
impossible à vivre pour les entrepreneurs, dans le secteur
résidentiel, même s'ils avaient un salarié, parce que c'est
impossible de prétendre qu'ils vont toujours être en compagnie de
ce salarié, sur un chantier, tel qu'on pourrait le définir. (21 h
15)
La question des cautionnements, maintenant. Pour nous, il s'agit d'un
dédoublement des exigences posées aux entreprises de
construction. Si vous parlez de cautionnement... Quel type de cautionnement
allez-vous exiger? Est-ce que ça va être un cautionnement comme
celui qui est demandé par la Régie des entreprises de
construction, c'est-à-dire pour les fraudes, malversations,
détournements de fonds? C'est facile, ça. Est-ce que ça va
être comme l'Office de la protection du consommateur, en fonction du
chiffre d'affaires ou si ça va être vraiment pour protéger
la masse salariale? Or, vous voulez avoir une caution pour un chiffre
d'affaires qui n'est pas encore déterminé. Tantôt, des
intervenants, aussi, ont bien illustré la difficulté. Est-ce
qu'on a été voir les compagnies de caution, actuellement, qui
agissent dans l'industrie pour voir ce que sont leurs exigences? On exige...
C'est vrai que c'est pour du cautionnement d'exécution, matériaux
et main-d'oeuvre, mais on va exiger souvent au moins une liquidité de 50
000 $ à 75 000 $ dans les coffres de l'entreprise, plus des actifs ou
des immobilisations pour 100 000 $ à 200 000 $. Est-ce qu'on a
vérifié auprès de la Régie des entreprises combien
d'entreprises pourraient continuer a se qualifier? Actuellement, juste avec le
projet de loi, tel qu'il est proposé, vous auriez à l'oeil 10 000
entreprises qui disparaîtraient parce que sur 28 000, 18 000 ont
rapporté des heures ouvrables. C'est à la page 7 du
mémoire. Si, en plus, on exigeait des cautionnements, tel qu'on les
trouve actuellement, cautionnement d'exécution, matériaux et
main-d'oeuvre, sur la même base, pour les masses salariales - ça,
c'est un chiffre que je lance en l'air, je n'ai aucune compétence -
à mon avis, vous allez avoir un autre 50 % des entreprises qui ne
pourront plus se qualifier. Ça prend de ces gens-là pour les
faire travailler, vos salariés, M. le ministre. Alors, ce sont, en gros,
les représentations qu'on voulait faire sur le projet de loi 185.
Je vais maintenant passer au projet de loi 186, si vous voulez bien.
L'ordre de mes commentaires n'est pas nécessairement celui qui va avec
l'importance des sujets, mais c'est parce qu'il suit l'ordre chronologique du
texte de loi.
Dans un premier temps, ce qui nous a concernés à la
lecture de ce projet de loi là, c'est la question des attestations de
conformité. La Loi sur le bâtiment actuelle parlait d'attestation
de conformité, mais le Code, tel qu'il était défini,
était établi par le gouvernement et mis en application par une
régie. Les attestations de conformité devaient porter sur des
éléments tels que la solidité, la salubrité, la
sécurité, l'accès aux bâtiments pour les
handicapés. On est d'accord avec ça, on a toujours
été d'accord avec ça. Mais ce qu'on nous propose ici,
c'est que la Régie, désormais, établit des normes et c'est
elle qui choisit, parmi les normes qu'elle aura établies, celles qui
sont assez importantes pour qu'on émette une attestation de
conformité.
Or, une attestation de conformité qui ne toucherait pas à
la solidité, à la stabilité, qui ne créerait aucun
préjudice, qui ne créerait aucune perte de valeur, ça va
plus loin même que le Code actuel et ça va plus loin que le Code,
le projet de Code civil puisqu'on va pouvoir accepter sans réserve des
défauts apparents. Le texte, en plus, crée une
responsabilité spécifique, c'est-à-dire au qualificateur
technique qui dort personnellement répondre de ça. Pour un
entrepreneur de construction résidentielle, qui construit 200 ou 300
unités, je ne dirais pas aux quatre coins de la province parce que
ça, il n'y en a pas beau-
coup, mais aux quatre coins de la ville de Montréal, par exemple,
comment va-t-il faire? C'est lui qu'on personnalise, c'est-à-dire qu'on
responsabilise directement et personnellement. En plus de ça, cette
attestation-là doit porter sur tous les éléments qu'on va
bien vouloir établir sans justifier si ça crée un
préjudice quelconque. En plus, c'est la Régie qui a fait le Code
qui doit juger de la conformité des attestations; c'est elle qui a le
pouvoir de nier la validité de ces attestations-là. C'est cette
même Régie qui a le pouvoir de poursuivre ces gens-là qui
ont signé personnellement. Ils ont aussi, après avoir
établi un code de déontologie, le pouvoir de les faire parader
devant eux. Ce n'est qu'à ce moment-là que la Régie,
suivant le texte de la loi, a l'obligation de les convoquer pour se
défendre, à savoir si on va suspendre ou révoquer leur
licence. Mais quand la Régie va avoir fait tout l'autre processus,
quelle chance l'entreprise va-t-elle avoir de se faire entendre validement?
Elle est déjà condamnée. Il n'y a plus aucune chance
d'avoir une possibilité d'audition qui va être bien fondée
là-dessus. Alors, c'étaient nos remarques concernant les
attestations de conformité.
On a parlé aussi, très sommairement, de boucher un gros
trou quant au travail au noir, en faisant des ententes avec les
municipalités. Premièrement, il faut avoir l'entente. Avec
l'ancienne Régie, ils n'ont même pas été capables de
régler le cas avec toutes les municipalités du Québec pour
qu'elles leur dénoncent les numéros de licence qui avaient
déjà été enregistrés parce que les
municipalités ont toujours dit au gouvernement: Si vous voulez nous
attribuer des fonctions, donnez-nous un dédommagement. Dans le contexte
actuel - là, encore une fois, c'est une réflexion tout à
fait personnelle - je ne sais pas si les municipalités sont prêtes
à collaborer beaucoup et à travailler gratuitement pour le
gouvernement provincial ou pour un organisme de l'État.
Deuxièment, la loi, telle qu'elle est établie, exclut les
constructeurs propriétaires et les personnes qui construisent des
bâtiments personnels de l'obligation de détenir même une
licence de constructeur propriétaire. La municipalité va
enregistrer quoi? C'est dans ce domaine-là qu'on risque d'avoir le plus
de travail au noir. Or, il y a un trou gros comme ça. Il va se
présenter, il va dire: Moi, je veux un permis. Je vais dire: Donne-moi
ton numéro de licence. Je n'en ai pas besoin, c'est pour moi. La
Régie ne le saura pas plus. C'est l'article 49.2 de la loi.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à faire rapidement puisque...
M. Crochetière: O.K., dans ce cas-là, je vais aller
peut-être à des choses qui, pour nous, sont plus importantes. Il y
a la question des plans de garantie. Quant aux plans de garantie, que la
Régie puisse les encadrer, en exiger dans le domaine résidentiel,
77, 78, et les encadrer, on peut - non seulement on peut mais on comprend -
être d'accord avec ça. Là où on n'est pas d'accord,
par exemple, c'est quand, en plus, la Régie prétend avoir le
droit de fixer les primes, fixer les réserves, fixer les placements et
fixer les indemnités à payer tout en exigeant qu'on ait des
cautions. Nous, on a une caution, c'est connu. On a une compagnie d'assurances
très solvable qui garantit toutes nos obligations. Or, pourquoi la
Régie, en plus, viendrait-elle nous dire quelles doivent être nos
réserves quand c'est déjà établi, et que notre
assureur fournit tous les chiffres au Surintendant des assurances du
Québec?
En plus, après avoir imposé cet encadrement-là aux
plans de garantie, la Régie se réserverait, suivant le texte de
l'article 84, le droit d'exiger un autre type de cautionnement
supplétif. Pourquoi faire si elle a déjà
déterminé la nature, la portée et l'étendue de la
garantie? Qu'on restreigne 84, à ce moment-là, à d'autres
secteurs - institutionnel, commercial, ça va -mais pas
résidentiel puisque le résidentiel est déjà couvert
par les articles 77 et 78, tant dans le neuf que dans la rénovation. Si
jamais nous ne pouvions pas satisfaire aux exigences établies par la
réglementation de la Régie, elle a le pouvoir d'imposer un
cautionnement et de créer un fonds d'indemnisation supplétif.
Cependant, la loi ne nous garantit pas qu'elle aurait le droit d'exiger de ces
cautions-là la même couverture que celle qu'elle doit, qu'elle
peut exiger des plans. Or, M. le ministre, les représentations qu'on
nous avait faites, c'est que si jamais on n'était pas capables d'y
arriver et qu'on nous remplaçait par des cautions, c'était tout
naturellement parce que ces cautions-là pourraient satisfaire aux
exigences qu'on nous imposerait. Or, ce n'est pas ça que le texte de loi
dit à l'article 86. C'est autre chose.
Alors, ça veut donc dire que, techniquement, elle pourrait nous
demander des exigences très élevées, sachant pertinemment
qu'on ne pourrait pas les rencontrer pour substituer une caution a nos plans de
garantie. C'est parce qu'on s'appelle plan de garantie mais, dans les faits, ce
que l'on pratique, c'est du cautionnement. Est-ce qu'on va pouvoir aller se
qualifier quand même dans une réglementation moins forte et moins
grande sous notre titre de caution? Ça ne se tient pas. Il y a quelque
chose là-dedans qui est paradoxal, qui ne résiste pas à
l'analyse.
Reste la composition de la Régie elle-même. La
Régie, telle qu'elle est proposée, aurait un conseil
d'administration composé de cinq membres où on a aucune garantie
que l'industrie serait représentée. Le comité consultatif,
disons que c'est un comité à peu près consultatif. La
Régie peut lui donner des mandats et les quelques mandats que la loi lui
donne d'office, la Régie n'est pas obligée de tenir compte de ses
avis.
Alors, pour ce qui est de la composition de la Régie, on voudrait
qu'au conseil d'administration, la majorité des sièges soient
détenus par des gens désignés par l'industrie de la
construction, les associations d'entrepreneurs. Quant au comité
consultatif, on voudrait aussi y avoir une place
prépondérante.
Or, en résumé, si vous voulez bien, ce que nous
préconisons, c'est: maintenir le statut actuel de l'entrepreneur
autonome; garantir, pour tout entrepreneur, le droit d'exécuter
lui-même des travaux de construction sans la présence d'un
salarié à ses côtés; abroger les dispositions de
l'article 82.1 du projet de loi 185; maintenir l'universalité de
l'application de la Loi sur le bâtiment - dans le projet de loi 186, le
législateur s'est absous de l'application automatique de la loi,
c'est-à-dire qu'autrefois on disait: La présente loi lie le
gouvernement, ses ministères et ses organismes mandataires. Là,
on a ajouté: dans la mesure où le gouvernement adopte un
règlement à cet effet. On vient de changer complètement la
portée de la loi; restreindre les attestations de conformité aux
dispositions concernant la sécurité, la stabilité et la
salubrité et responsabiliser l'entreprise tout en dégageant le
qualificateur personnellement; repenser la pertinence d'un système de
points d'inaptitude - je n'ai pas eu le temps d'élaborer, si on a le
temps tantôt, je vous en parlerai; s'abstenir de s'ingérer dans
les plans de garantie après avoir défini les critères de
solvabilité auxquels ils doivent s'assujettir; restreindre l'application
des dispositions du nouveau article 84 aux seuls secteurs de la construction
commerciale, industrielle et institutionnelle; assujettir la mise en
application des dispositions des articles 85 et 86 aux mêmes
critères et conditions que ceux édictés pour les plans de
garantie en vertu des articles 77 et 78; assurer la présence
prépondérante des représentants de l'industrie au sein du
conseil d'administration de la Régie du bâtiment; désigner
nommément les associations d'entrepreneurs visés par cette loi;
assurer un pouvoir réel au comité consultatif et, à la
demande de certains intervenants, nous vous soulignons que nous sommes aussi
d'accord pour que les amendes payées aillent dans les coffres de l'ACQ.
D'accord. Ce sont les représentations qu'on avait à vous faire.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
ministre.
M. Cherry: O.K.
Le Président (M. Bélanger): ...les amendes
relatives à la loi 186 aillent à la Régie du
bâtiment!
M. Cherry: O.K. Merci. D'abord, c'est la troisième fois
dans les dernières semaines qu'on a l'occasion de se rencontrer; le
président, c'est la deuxième fois cette semaine. Je m'adresse
à vous parce que lors de notre première rencontre, en
début de semaine, vous m'avez fart l'historique de votre entreprise. Vu
que vous êtes un homme à qui on peut facilement dire que vous avez
personnellement beaucoup d'expérience dans la construction domiciliaire
- je pense que c'est là-dedans - j'aimerais ça que vous
décriviez, pour les besoins de la commission, basé sur votre
expérience, les types de travaux qui peuvent être
exécutés facilement par - ce que vous avez l'habitude de
décrire dans votre jargon - les "travailleurs autonomes" sur une
construction résidentielle, une unrfamiliale. Vous en avez fait
plusieurs, donc...
M. Jacques: Vous avez le goudronneur de solage, le polisseur de
ciment, pour les planchers de cave...
M. Cherry: Oui.
M. Jacques: ...le poseur de déclin extérieur, le
tireur de joints, le poseur d'armoires. Il y en a plusieurs autres... le
plombier, l'électricien. Toujours en disant qu'on parle de la petite
maison, ce que je vous parlais cette semaine, une petite maison de 70 000 $. On
ne peut pas se permettre dans des maisons de ce prix-là d'avoir des
entrepreneurs avec des employés ou plusieurs employés. Comme
exemple, faire une entrée d'eau. Un plombier... si ils viennent, deux
hommes, pour faire un travail qui dure une demi-heure, trois quart d'heure,
c'est inacceptable du côté des coûts. Vous connaissez les
salaires des employés de la construction. Pour réussir à
faire une maison de même, il faut réduire les coûts au
minimum. C'est facile... Si on est obligé d'avoir deux employés
partout où on va faire ces travaux-là, cette petite maison
là de 70 000 $ va monter à 80 000 $ facilement. Par exemple, le
poseur de tapis. S'H faut qu'ils soient deux pour faire ce travail-là,
c'est inacceptable. Le poseur de céramique, le menuisier de finition...
Dans une petite maison comme ça, il y a 12 portes, les moulures, les
plinthes de bas de mur, les cadrages de fenêtres et les tablettes de
garde-robe, c'est fini. Un homme tout seul fait ça dans une
journée. Si on met deux hommes, les frais de déplacement de ces
hommes-là durant la journée pour s'en aller sur un autre
chantier... Moi, je viens d'une petite ville comme Victoriaville, alors le
volume de construction n'est quand même pas énorme dans des
périodes de récession comme on vit là. (21 h 30)
M. Cherry: C'est ce que vous m'aviez décrit cette semaine
et c'est ce que je voulais, pour les bénéfices de la commission,
que vous refassiez ici. Maintenant, je dirigerai mes questions à
n'importe quel membre du distingué panel. Concernant le travailleur
autonome, dans votre mémoire, sur ce point, à la page 11,
vous
demandez au gouvernement d'adopter des critères qui
reflètent le besoin d'embauché cyclique.
Voulez-vous essayer d'être un peu plus explicite sur ce point,
s'il vous plaît?
M. Crochetière: En fait, c'est clair. On veut avoir une
concordance aux livres au moins plutôt qu'aux chantiers.
M. Cherry: Une concordance aux livres?
M. Crochetière: Plutôt qu'aux chantiers,
c'est-à-dire... En fait, quand l'entrepreneur n'a pas besoin d'avoir un
salarié, on considère qu'il est inutile d'exiger de lui qu'il
engage un salarié pour faire le type de travail qu'on vous
décrivait tantôt. Quand il y a assez de travail pour l'engager, le
salarié, qu'il l'embauche. Mais, entre-temps, s'il peut justifier d'un
nombre d'heures qu'il a fait travailler des salariés, au moins, il aura
un minimum. Il pourrait, lui, profiter de cette espèce de
minimum-là qu'il vous aurait fourni pour justifier de sa présence
sur les chantiers quand il n'y a pas assez de travail pour deux.
M. Cherry: O.K. Comme vous y étiez cet après-midi,
vous avez été présents au moment des mémoires qui
ont été entendus, certains d'entre vous...
M. Crochetière: Certains.
M. Cherry: ...concernant le cautionnement, et vous l'avez
soulevé tantôt. Il m'apparaît que ce que vous
désirez, c'est que le cautionnement soit couvert par le fonds
d'indemnisation. Donc, une augmentation possible de la cotisation si, ce qui
nous a été décrit aujourd'hui - on disait que le fonds est
rendu à 1 400 000 $ parce qu'il est utilisé fréquemment.
D'autres intervenants préfèrent un cautionnement individuel
plutôt qu'un collectif. Quel est votre point de vue? Pouvez-vous donner
les raisons qui supportent votre point de vue, s'il vous plaît?
M. Crochetière: À notre point de vue, on est mieux,
effectivement, avec une majoration de la cotisation. D'abord, c'est tout
lié à l'exercice véritable de chacune des entreprises
puisque c'est basé sur les heures travaillées effectivement par
chacune des entreprises. Ça n'amène pas l'obligation du
coût et du gel des liquidités des entreprises comme une caution.
D'abord, dans notre mémoire, ce qu'on redoutait, c'est qu'on impose les
deux systèmes. La dualité des deux exigences, ça c'est
catastrophique! Si on nous demandait le choix entre les deux, notre
préférence irait vers le fonds d'indemnisation. C'est sûr
que plutôt que d'en avoir deux, on préfère la caution.
Mais, si on a à choisir entre les deux, on va préférer
nettement le fonds d'indemnisation.
M. Cherry: Que ce soit bien clair. Quand il est question du fonds
collectif d'indemnisation, c'est toujours pour les salaires.
M. Crochetière: C'est ça, pour les cas
d'insolvabilité des entreprises... pour les salaires.
M. Cherry: Donc, si on parle d'un cautionnement, c'est toujours
pour prendre soin de la même situation au lieu d'aller dans le collectif
et de l'augmenter...
M. Crochetière: C'est ça, exactement.
M. Cherry: ...de le faire parce que vous avez entendu, cet
après-midi, des intervenants dire que ce sont toujours les mêmes
bons qui payent pour les méchants et dire que c'est toujours à
peu près les mêmes qui font faillite. C'est presque cyclique. Il
faut toujours - ce que vous avez entendu cet après-midi, on revoit
passer les mêmes noms - piger dans le fonds de ceux qui ont
respecté, eux, qui ont mis l'argent. C'est 0,02 $ de l'heure, vous allez
me dire, mais c'est de l'argent quand même pour toujours dépanner
ceux qui ont pris un risque. Rendus à l'automne, ça n'a pas
marché. Ils font faillite, ils n'ont pas payé leurs gens. Il faut
encore revider ça. Donc, s'il y avait celui-là, le double,
à ce moment-là, là, si celui qui le prend en est un
mauvais utilisateur, ça s'appliquera à lui plutôt que de
faire passer sa facture à l'ensemble de la collectivité. C'est
dans ce sens-là que je voulais vous clarifier ce point de vue et vous
entendre.
M. Crochetière: D'une part, est-ce qu'il n'y aurait pas
moyen, même au niveau du fonds, d'établir une codification
distincte justement pour ceux qui auraient déjà fait faillite?
Deuxièmement, la Loi sur les compagnies existe encore, même pour
l'industrie de la construction. Les administrateurs sont personnellement
responsables pour les salaires, traitements impayés pour les six mois
qui précèdent la faillite. C'est parce qu'on ne va pas les
chercher dans certains cas. Enfin, même si on impose une caution, c'est
le principe de l'étendue du risque. Ceux qui vont avoir fait faillite,
quand la caution va avoir été payée, à qui elle va
demander les plus grandes exigences, et à qui elle va demander les plus
grosses primes? Aux bons qui vont rester, M. le ministre. Ils vont repayer
pareil.
M. Cherry: Toujours sur le cautionnement supplétif au plan
de garantie, l'article 84.
M. Crochetière: Pardon? Je m'excuse.
M. Cherry: Je vais recommencer. La 186... le cautionnement
supplétif au plan de garantie, l'article 84. Vous nous demandez de
restreindre le cautionnement à la construction commerciale, industrielle
ou institutionnelle. Est-ce qu'on doit
comprendre que, dans le résidentiel, vous êtes d'accord que
les critères pour les plans de garantie vont couvrir le risque que
visait l'article 84?
M. Crochetière: Effectivement, puisqu'on était...
Dans le résidentiel, nous avons et la construction neuve et la
rénovation, 77 et 78, et nous couvrons déjà les
éléments qui constituent, disons, toute la protection des
acomptes. Il y aura des discussions avec la Régie. Je présume que
la Régie voudra peut-être parler de privilèges ou de choses
comme ça. On va être disposés à en discuter dans la
mesure où il va en rester, des privilèges. L'Office de
révision du Code civil propose de les abroger.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Kamouraska-Témiscouata.
Mme Dionne: Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais
intervenir à ce moment-ci parce que, tout à l'heure, je n'ai pas
pu le faire. Notre temps était écoulé et Mme la
députée de Chicou-timi a soulevé certains points sur
l'importance que les députés ministériels attachaient au
dossier et aux deux projets de loi. J'aimerais quand même, avant
d'aborder ça, parler peut-être de votre mémoire parce que
vous parlez des grappes industrielles. En tant qu'ajointe parlementaire au
ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, effectivement, c'est
nouveau cette semaine de parler de grappe, de parler d'habitat. Quand on parle
de cette grappe-là, ça implique un tas de monde, que ce soient
les entrepreneurs, que ce soient les travailleurs, que ce soient les scieurs
qui font des deux par quatre, aux gens qui font faire de la décoration.
À un moment donné, on va en arriver à la maison
intelligente de demain. Ça s'en vient quand même assez rapidement.
Il va falloir que tout le monde se parle et que tout le monde se concerte pour
en arriver à la faire la plus intelligente possible.
Quand Mme la députée de Chicoutimi a parlé de nos
préoccupations, c'est que... J'aimerais vous dire et dire à ceux
qui sont passés avant vous que, effectivement, les députés
ministériels ont travaillé. Cette semaine, on a rencontré
à deux reprises le ministre - dont une fois ce matin - sur plusieurs
préoccupations qu'on a. Bien sûr, on parle du travail au noir,
c'est sûr, mais, de façon particulière, sur la notion
d'entrepreneur autonome. Je pense qu'on va continuer d'attacher une importance
à ce point-là en particulier puisque ce n'est pas facile à
déterminer. Le fait que vous ayez, durant la fin de semaine, le temps de
discuter avec le ministre et ses fonctionnaires, je pense que c'est très
intéressant puisque, lundi, nous aurons une autre réunion sur le
même sujet. Donc, je pense qu'il y aura peut-être beaucoup de
travail de fait durant la fin de semaine, qui permettra d'essayer
d'éclaircir ce point-là, et que l'entrepreneur autonome soit
peut-être une notion qui soit juste et équitable pour tout le
monde à travers le Québec, qu'on soit en région ou en
ville.
J'aimerais aussi ajouter que l'autre préoccupation, c'est le
travail au noir. Une des recommandations qu'a faites le Conseil du patronat,
c'est une forme de crédit d'impôt qui serait fait pour les gens
qui font faire des réparations, des rénovations. J'aimerais vous
entendre sur vos idées. Comment enrayer le travail au noir qui... Je
pense qu'au Québec, dans le moment, tout le monde en parle et tout le
monde a des idées là-dessus. Vous avez sûrement des
recommandations à nous faire, que ce soit à cette commission-ci
ou au comité Poulin qui a déposé ses recommandations au
gouvernement, ce matin. On en parie et on essaie de trouver des solutions pour
s'assurer que les revenus qui doivent venir à l'État viennent et,
je pense qu'on travaille au blanc dans l'avenir. J'aimerais vous écouter
là-dessus.
M. Crochetière: Dans un premier temps, si les travaux
exigent des plans de garantie, je peux vous dire que les plans de garantie
exigent des entrepreneurs qu'ils aient des licences. Ça va
peut-être régler une partie du problème dans ce
contexte-là.
D'autre part, on a déjà suggéré une
solution: que le donneur d'ouvrage, dans les cas où il s'agissait de
travail au noir, c'est-à-dire de gens qui n'avaient aucune licence,
aucune carte de compétence, soit dégagé du paiement de
toute autre somme que du coût des matériaux et des heures
travaillées dont on pourrait justifier auprès de l'ACQ. Les gens
sachant qu'ils ne sont pas obligés de payer et les autres, sachant
qu'ils risquent de ne pas être payés, vous en élimineriez
peut-être plusieurs. Ça aussi, c'est une mesure qu'on n'a jamais
voulu mettre de l'avant.
La question d'exemption d'impôt. Je présume que ça
peut être important. Cependant, si on disait qu'on va exempter du
paiement de l'impôt, il faudrait être certain que dans les cas du
travail au noir, même le paiement d'impôt équivaut à
une somme au moins équivalente à ce qu'ils sauvent en payant en
dessous de la table, en bon français. Si l'incitation n'est pas plus
forte, ils vont continuer à faire travailler des gens en dessous de la
table. La justification du travail au noir, c'est d'abord de sauver de
l'argent. Peut-être qu'il en reste une deuxième,
c'est-à-dire qu'ils connaissent bien les gens en qui ils ont confiance
même s'ils n'ont pas un certificat de qualification. Mais dans la mesure
où ce serait un incitatif palpable, je crois qu'effectivement ce serait
une bonne mesure.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous avez
d'autres questions? Pas de question? Non. Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, bonsoir. J'ai suivi avec attention votre
exposé. Vous nous dites: Le travail au noir, ce n'est pas le fait des
entrepreneurs autonomes ou ce n'est pas surtout le fait des entrepreneurs
autonomes. Je pense bien avoir bien entendu ça tout à l'heure.
C'est le fait de qui, et est-ce que ça existe?
M. Crochetière: J'ai dit que ça n'était pas
uniquement ciblé chez les entrepreneurs autonomes, comme je l'ai entendu
depuis le début de l'après-midi. En plus de ça, les
représentations qu'on vous a faites, c'était que,
automatiquement, quand c'était un entrepreneur autonome, il s'agissait
de travail au noir. C'est ça que je voulais nier. Comme vous le voyez,
il y a 9 000 000 000 $ de travaux donnés par des entrepreneurs en
construction qui sont souvent ce que les gens appellent ici, de façon un
peu dérisoire, des "brokers" - ce que partout ailleurs, au monde, on
appelle des promoteurs, d'accord? - qui n'ont pas nécessairement des
salariés, et qui ne sont pas nécessairement des gens qui fraudent
l'impôt. Ce sont des gens qui paient leurs travailleurs et leurs
entrepreneurs autonomes qui, eux, ont pignon sur rue. Ce sont des gens qui ont
une licence, qui ont une place d'affaires, qui ont souvent, désormais,
une corporation et qui paient, qui font des rapports d'impôt, qui ont des
marges de crédit. Ce n'est pas du travail au noir. Jusqu'à
aujourd'hui, ce n'est pas, non plus, illégal ce qu'ils font. Ils ont
aussi les certificats de compétence pour exécuter les travaux
qu'ils exécutent sur les chantiers. Alors, ce n'est pas le propre de ces
gens-là d'avoir, si vous voulez, l'intention de faire du travail au noir
comme on semble l'avancer depuis aujourd'hui.
Mme Blackburn: Là-dessus, je pense que vous n'avez pas
tort et la mise au point est pertinente parce qu'on semble confondre deux
choses: travail au noir et organisation qui permet de faire faire des travaux
complets par des entrepreneurs autonomes qui sont embauchés - vous dites
que ça se fait partout dans le monde - et qui, finalement, peuvent
exécuter des travaux sans être soumis au décret de la
construction. Ça, je pense, que c'est deux choses et vous avez raison.
Mais, selon vous, est-ce que ça existe le travail au noir ou si ce n'est
pas exclusivement le fait des entrepreneurs autonomes? À quelle place
qu'on le retrouve particulièrement?
M. Crochetière: Vous voulez que je vous réponde
vraiment?
Mme Blackburn: Bien oui, j'imagine, si je pose la question.
M. Crochetière: Je pense que tout le monde ici, dans la
salle, connaît des contrats et plusieurs dans la salle ont donné
des contrats au noir. Je pense que la plupart des gens, quand on arrive en
commission parlementaire, font comme si ça n'existait pas. Ça
vient de disparaître le travail au noir, alors que tout le monde ici
connaît un voisin, un cousin, un ami qui le fait faire. Je ne vois pas
pourquoi, quand on arrive ici, que ça vient de disparaître. C'est
faux.
Mme Blackburn: Non, c'est parce que...
M. Crochetière: C'est chacun des citoyens qui le fait
faire, le travail au noir. Si chacun des citoyens le fait faire, c'est que les
conditions auxquelles on assujettit l'industrie de la construction
résidentielle, ce n'est pas adéquat. C'est tout simplement
ça. C'est une loi du marché.
Mme Blackburn: Dans votre mémoire, vous dites
effectivement que si on a autant de travail au noir, c'est parce que c'est trop
réglementé. J'essaie de retrouver la page parce que j'ai dû
le lire un peu rapidement, comme vous ne l'avez pas fait... Bon, vous dites:
Ça s'explique parce qu'il y a trop de règlements. Comme c'est
trop réglementé, ça finit par coûter trop cher.
Donc, on le fait faire en dessous de la table. Je ne le sais plus, je vais
retrouver la page.
M. Crochetière: Je m'excuse, j'avais deux
commentaires.
Mme Blackburn: Je vous la retrouverai d'ici la fin de la
présentation. Mais, est-ce que ce n'est pas le fait de la plupart des
pays? Comme on a ici des lois, des règlements, un décret de la
construction, un code de la construction, est-ce que ce n'est pas normal?
M. Crochetière: C'est en page 9 qu'on me dit. Mais, ce que
je peux vous répondre, cependant, c'est que je ne sais pas pour les
autres secteurs. Mais je sais qu'on est le seul endroit dans le monde
industrialisé et dans le monde occidental à avoir un
régime de syndicalisation obligatoire, par métier, universel,
sans tenir compte du secteur et dans un cloisonnement de tâches qui est
défini à partir des chantiers traditionnels de plus grande
importance. Ça, ça n'existe nulle part au monde. (21 h 45)
Mme Blackburn: Vous reconnaissiez tout à l'heure, avec moi
et avec tout le monde, je pense bien, que le travail au noir ça se fait
et que c'est courant. J'ai fait faire des travaux, puis les gens
demandaient...
M. Crochetière: Je veux que tout le monde le
reconnaisse.
Mme Blackburn:... comme si c'était normal. Est-ce que vous
voulez faire - ça se demande
comme ça - affaires avec un entrepreneur? Puis, j'ai
été assez étonnée, je veux dire, bon. Je me disais,
au moins une députée, peut-être pas là. Mais
ça se pose. Ç'a a l'air que c'est assez courant. Donc, ça
existe. Donc c'est une plaie, à mon avis, parce qu'il y a des gens qui
ne paient pas leur dû à la société. Comment est-ce
qu'on contrôle ça?
M. Crochetière: Tantôt, on a parlé de moyens
de le faire, en disant... Si vous me demandez la recette miracle...
Mme Blackburn: Oui.
M. Crochetière:... j'aimerais ça la
connaître, madame. Je pense qu'il y a plusieurs États qui
aimeraient la connaître. Mais je vous ai dit que si on essayait de couper
l'incitation des gens qui travaillent au noir, en ce sens que le donneur
d'ouvrage, il ne faut pas le déposséder des sommes qu'il a
payées pour des matériaux... Pour ce qui est des heures
travaillées, dans la mesure où il doit rapporter des heures,
seules les heures qui seraient rapportées - quand on en demanderait des
comptes - seraient payées.
Ce serait peut-être une façon, en tout cas, d'assurer un
certain contrôle ou de le diminuer.
Mme Blackburn: Bien. En ce qui a trait à la loi 186, je
dois dire que j'ai retrouvé là une partie des
préoccupations qui étaient aussi les miennes. J'écoutais
la députée de Kamouraska-Témiscouata, tout à
l'heure, qui parlait - vous en parlez d'ailleurs dans votre mémoire -
des grappes industrielles. L'industrie de la construction en constitue une,
mais il semble... Je dis toujours à la blague qu'il me semble qu'il y a
un raisin qui est tombé de la grappe parce que les entrepreneurs ne sont
pas très responsabilisés dans la nouvelle structure qui est
proposée, c'est-à-dire la Régie de la construction.
À tout prendre, est-ce que vous préférez la
Commission de la construction, telle que prévue dans la loi 53, ou la
régie telle que proposée dans le projet de loi, qui vient amender
d'ailleurs la loi 53?
M. Crochetière: Dans la mesure où l'industrie y a
droit de parole, je ne crois pas qu'on accorde une importance aussi grande au
fait que ce soit une commission ou une régie. Bien sûr, ce sont
deux institutions juridiques distinctes. Mais si l'industrie peut mieux
s'exprimer dans une structure, quelle qu'elle soit, c'est celle-là qui
est notre choix.
Mme Blackburn: La commission - peut-être vous le
rappelez-vous, peut-être pas - prévue responsabilisait totalement
et entièrement les entrepreneurs...
M. Crochetière: Vous parlez de la respon-
sabilisation.
Mme Blackburn:... en concertation avec les syndiqués, ce
que ne peut pas faire une régie.
M. Crochetière: Évidemment, on
préfère avoir le plus de responsabilisation et le moins
d'interventions dans l'encadrement des entreprises. Encore une fois, que
ça s'appelle régie ou commission, c'est beaucoup plus la
philosophie derrière ça qui va lui apporter une modification.
Mme Blackburn: Vous rappelez avec justice les nombreux pouvoirs
que se laisse le gouvernement de réglementer. À la page 18, vous
rappelez un article qui permettrait... Moi, j'ai hâte d'entendre le
ministre là-dessus. On va l'entendre quand on va faire l'étude
article par article. "Le gouvernement peut, par règlement, soustraire de
l'application totale ou partielle de la présente loi des
catégories de personnes, d'entrepreneurs, de
constructeurs-propriétaires, de fabricants d'appareil sous pression, de
propriétaires de bâtiment, d'équipement destiné
à l'usage du public ou d'installation non rattachée à un
bâtiment de même que des catégories de bâtiments,
d'appareils sous pression, d'équipements, d'installations ou de travaux
de construction. "
Si ma mémoire est fidèle, cependant, c'est qu'ont
été ajoutées quelques petites modifications parce que
l'essentiel de l'article se retrouvait dans le projet de loi 53. Oui.
M. Crochetière: C'est-à-dire que vous aviez
l'article 4, dans l'ancienne commission, qui disait que le gouvernement pouvait
soustraire certains territoires alors que là ce ne sont plus des
territoires. Notamment, il y avait la Baie-James, il y avait tout ça
pour des raisons de chantiers. Mais là, ce n'est plus une question de
territoire qui est distraite de l'application de la loi, c'est un pouvoir
donné au gouvernement de distraire du champ d'application défini
par la régie, des entreprises, des bâtiments, des
catégories et des sous-catégories. C'est ça qu'on
questionne dans le projet, tout simplement. Pourquoi?
Mme Blackburn: À la page 19, vous dites: "Ainsi, par
exemple, le gouvernement se réserve désormais le droit de
décider s'il sera lui-même, ainsi que ses ministres et les
organismes qui en sont mandataires, assujettis au code de construction
qu'adoptera la Régie. " Comment pouvez-vous faire cette
interprétation? À partir de quelle base?
M. Crochetière: C'est parce que...
Mme Blackburn: C'est le deuxième paragraphe de la page
19.
M. Crochetière:... on a rajouté la disposition,
comme je l'ai dit tantôt. La Loi sur le
bâtiment disait: La présente loi s'applique au
gouvernement, ses ministères et les organismes qui en sont mandataires.
Là, on a rajouté le petit bout de phrase qui dit: dans la mesure
où le gouvernement adopte des règlements à cet effet.
Donc, ça veut dire que s'il n'y a pas de règlement, il ne l'est
pas, assujetti.
Mme Blackburn: S'il n'y a pas de règlement, donc, il n'y a
pas d'obligation.
M. Crochetière: C'est ça. On vient donc d'inverser
la vapeur.
Mme Blackburn: Ça va être ma dernière
question, mon collègue voulait aussi intervenir. En ce qui a trait aux
attestations de conformité, vous semblez être assez
réfractaires aux dispositions, finalement, qui me semblent pertinentes
parce que la réputation des entrepreneurs en construction réside
beaucoup sur la qualité des travaux. Vous êtes les mieux
placés pour le savoir, comment ça démolit quand vous avez
quelqu'un - passez-moi l'expression - qui botche son travail. A un moment
donné, ça revient et ça rebondit de partout. Alors,
j'avais pensé que vous devriez être d'accord avec ça.
M. Crochetière: S'il botche, oui. Mais s'il y a une erreur
humaine qui ne cause aucun préjudice, qui n'affecte pas... Je vais vous
donner un exemple. Dans le code, on dit que la contremarche doit avoir six
pouces. Si le charpentier la coupe à six pouces et quart, toute votre
course jusqu'en haut a la même chose, ça ne créera aucun
problème. À un moment donné, s'il y a un litige, le
deuxième acheteur - parce que le deuxième peut demander une
attestation de conformité - va demander l'émission d'une nouvelle
attestation de conformité. Si on lui donne le droit, au deuxième
acheteur, d'avoir une attestation de conformité, je présume que
c'est parce qu'il va y avoir une sanction si on ne le respecte pas. Alors, on
dit: Si ça va vers des choses qui ne créent aucun
préjudice, qui n'affectent pas la valeur, qui n'affectent pas la
solidité, la stabilité, la conservation d'énergie,
pourquoi responsabiliser les gens?
Mme Blackburn: L'esthétique? Bien, je vous remercie, je
vais laisser le temps de... quelques questions... à mon
collègue.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava, oui.
M. Claveau: II me reste un peu de temps. J'aimerais bien revenir
sur la question du travail au noir. J'ai bien aimé, tout à
l'heure, votre intervention, quand vous disiez: Écoutez un peu, quand on
parle du travail au noir, on ne parle pas du sexe des anges, on parle de
quelque chose qui se vit dans le quotidien et auquel tout le monde, d'une
façon ou d'une autre, un jour ou l'autre, doit faire face. Vous avez,
à toutes fins pratiques, raison. Il y a un problème qui se pose.
Moi, j'aimerais bien savoir comment vous interprétez ça, comment
vous pouvez faire pour contourner ça.
Le problème est le suivant. On l'a tous vécu, et j'ai
l'impression que tout le monde est au courant d'exemples à peu
près semblables. Le genre, par exemple: Tu as une petite job à
faire faire dans ta maison. Tu vas voir un contracteur et il te dit: Oui, je
vais te faire ça. Combien tu charges? Si tu ne veux pas de facture,
ça va être 300 $ et si tu veux une facture, ça va
être 400 $. Là, tu dis: Bien, moi, je voudrais avoir une facture.
Ah bien! tu n'es pas assez niaiseux pour payer 100 $ rien que pour avoir une
facture. C'est comme si ça faisait un peu l'affaire de tout le monde. Si
tu acceptes, tu as avantage à te fermer la boîte, à ne pas
le dénoncer, tu es aussi coupable que celui qui te le propose.
M. Crochetière: On est d'accord.
M. Claveau: Si tu n'acceptes pas, comment peux-tu faire la preuve
comme quoi il te l'a proposé? Si tu t'ouvres la trappe, tu vas passer
pour un chialeux, et il n'y a personne qui ne peux prouver rien. Alors, comment
est-ce qu'on va arriver à dénoncer ça?
M. Crochetière: Ce que vous décriez, c'est la
conscience sociale des gens. Je ne crois pas que ce soit avec un projet de loi
dans l'industrie de la construction qu'on va arriver à l'instaurer dans
toute la société. Vous avez raison sur le fond.
M. Claveau: Mais il va falloir un jour ou l'autre trouver des
mécanismes - je ne le sais pas - ou des moyens de faire en sorte que la
personne qui se sent frustrée parce qu'on lui fait une proposition
semblable puisse le faire savoir d'une façon ou d'une autre.
M. Crochetière: Tout à fait d'accord.
M. Claveau: Cet après-midi, l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec disait: Nous aimerions pouvoir
récupérer les sommes des amendes qui sont versées, comme
ça se fait dans d'autres corporations professionnelles. Ils donnaient,
à titre d'exemple, les médecins, les avocats, etc. Sauf que dans
ces corporations professionnelles là, il y a une espèce de code
d'éthique, il y a des codes de déontologie. Il y a des mesures
disciplinaires qui sont prévues à l'intérieur même
des corporations pour les contrevenants, pour les malfaisants, pour ceux qui
vont nuire à l'image de la corporation, ce qui fait qu'ils ont des
espèces de tribunaux à l'interne; ils jugent leurs individus.
S'ils chargent
des amendes ou, enfin, obligent des sanctions, ils peuvent en
bénéficier, ils peuvent même suspendre des licences ou
radier des membres de leur corporation.
J'imagine que l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec avait aussi à l'esprit ce genre d'approche là
à l'interne, en ce qui les concerne, s'ils veulent pouvoir
prétendre à la récupération des amendes. Est-ce
que, de votre côté, vous seriez d'accord - là, je suis
peut-être un peu au-delà du projet de loi -pour...
M. Crochetière: On a dit oui.
M. Claveau: ...que s'établisse une espèce de
structure déontologique à l'intérieur de l'industrie qui
fasse en sorte que chacun ait à voir, à l'intérieur de son
champ d'intervention, à ce que l'on puisse respecter des choses et que
les gens de l'industrie, eux-mêmes, aient à suspendre, à
radier, à éliminer, à écarter des individus
malfaisants qui nuisent à leur profession?
M. Crochetière: Écoutez, tantôt, on a dit
qu'on était d'accord pour que les amendes qui étaient payables,
aux termes de la loi 186, aillent à la régie. Or, dans le projet
de loi, il y a un pouvoir réglementaire de créer un code de
déontologie, de créer des points d'inaptitude. On a des
réserves sur la façon dont la loi prévoit que ça va
être appliqué parce qu'on ne croit pas que c'est au même
organisme qui pose des jugements préalables à entendre, ensuite,
au niveau de la déontologie, ceux qu'ils ont déjà
condamnés. Mais on est d'accord sur le principe qu'il y ait une
déontologie et que les dérogations à cette
déontologie-là soient sanctionnées, soit par des
augmentations de paiement, soit par des paiements d'amendes. Nous sommes aussi
d'accord pour que les amendes ainsi payées aillent à l'organisme,
c'est-à-dire à la régie, dans ces cas-là.
M. Claveau: Mais, j'allais plus loin que ça...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le
député.
M. Claveau: ...dans mon questionnement, à savoir si vous
autres, par exemple, comme association d'entrepreneurs ou de constructeurs
d'habitations, comme d'autres qui étaient là avant vous au niveau
des maîtres plombiers, enfin les maîtres mécaniciens en
tuyauterie, est-ce qu'à l'intérieur même de votre
corporation, sans attendre qu'il y ait un grand chapeau, qu'il y ait un
parapluie au-dessus de tout ça, vous seriez prêts à vous
discipliner vous autres mêmes, à vous charger des amendes et
à demander des radiations de licences, même de vos membres qui
vous (ont honte, finalement, sur le plan de l'éthique
professionnelle?
M. Crochetière: On fait plus que ça. lorsqu'ils
font des dommages, on paie leurs dommages avec nos plans de garantie et on les
expulse. Maintenant, si vous voulez qu'on ait un pouvoir, il faudrait qu'on
soit constitué en corporation et que ces gens-là soient tenus
d'être chez nous. S'ils sont chez nous volontairement, comment
voulez-vous qu'on leur impose des amendes? Ils vont sortir.
M. Claveau: Comme c'est le cas pour la corporation
professionnelle.
M. Crochetière: Mais on n'est pas une corporation, nous.
C'est une association volontaire.
Le Président (M. Bélanger): Ça termine le
temps qu'on avait à notre disposition. M. le ministre, si vous voulez
remercier nos invités.
M. Cherry: À vous, M. le président et à vos
compagnons, je veux vous remercier de vous être déplacés
aujourd'hui et de nous avoir présenté vos propositions. Je veux
vous assurer que vos représentations occupent mon attention et que
l'exercice que nous faisons aujourd'hui nous apporte beaucoup de travail. Comme
je l'ai dit aux autres groupes, et je tiens à vous le redire, c'est
pourquoi j'ai demandé à une équipe du ministère
d'être en disponibilité pour qu'en fin de semaine on puisse
être en contact ensemble, et voir de quelle façon on peut
améliorer ce qui est l'objet de notre rencontre d'aujourd'hui. Encore
une fois, merci beaucoup.
M. Jacques: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi. (22 heures)
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, je vous remercie de votre contribution aux travaux
de cette commission et je dois dire qu'à travers les différentes
présentations j'apprends beaucoup. Je souhaiterais
qu'éventuellement, et je le rappelle, dans le prolongement de ce que
disait mon collègue d'Ungava, c'est que les entrepreneurs, tel qu'il
était prévu à 53, finissent par véritablement se
prendre en main et puissent adopter, effectivement, des codes d'éthique
et de déontologie qui leur soient propres et qu'ils
s'autoréglementent davantage quant aux pratiques. J'aurais
souhaité que ce soit plus 53 à cet égard que la
régie - 53, c'est-à-dire avec la Commission - mais
peut-être qu'on amènera le ministre à la raison
là-dessus. Je vous remercie de votre participation aux travaux.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du
Québec, c'est-à-dire l'APCHQ, pour sa présentation,
sa participation à nos travaux. J'invite sans plus tarder la Corporation
des maîtres électriciens du Québec à s'approcher
à la table des témoins, s'il vous plaît. Merci.
Si vous permettez, je demanderais à tout le monde de bien vouloir
reprendre sa place, s'il vous plaît. Je vous remercie. Nous recevons
présentement la Corporation des maîtres électriciens du
Québec, dont le président est M. Jean-Guy Brown. M. Brown, si
vous voulez présenter votre équipe et nous procéderons.
Vous avez plus ou moins 20 minutes pour la présentation de votre
mémoire plus, enfin... Je pense que vous avez assisté à
tous nos travaux jusqu'à maintenant.
Je demanderais aux gens aussi... S'il vous plaît, pour des raisons
de sécurité, on voudrait que tout le monde soit assis. Je
comprends qu'on est fatigués. On a le même problème
à ce bout-ci. C'est notre partie qui est la plus tenue à
contribution après 15 heures de... M. Brown, s'il vous plaît, vous
pouvez procéder. On y va.
Corporation des maîtres électriciens du
Québec
M. Brown (Jean-Guy): Merci, M. le Président. Je vais vous
présenter les personnes qui sont: à mon extrême droite, M.
Jean-Louis Auger; à ma droite, M. Roger Gosselin; à mon
extrême gauche, le directeur général de la Corporation, M.
Yvon Guilbault, et à ma gauche, M. Richard Lavergne. Ce sont tous
d'anciens présidents de la Corporation des maîtres
électriciens du Québec. Je tiens aussi à remercier tous
les entrepreneurs électriciens de la province de Québec qui se
sont déplacés pour venir écouter notre mémoire et
nous approuver dans la démarche que nous faisons.
Nous sommes heureux de pouvoir faire valoir notre point de vue, mais les
circonstances ayant entouré le dépôt des deux projets de
loi et la teneur de ceux-ci nous déçoivent. Nous ne croyons pas
qu'une journée de consultations, par le biais d'une commission
parlementaire, soit suffisante, pas plus que les délais de
procéder à cette consultation. Malgré tout, l'exercice
auquel s'est livrée la commission depuis le début de la
journée est important.
Notre mémoire rappelle les raisons de la création de la
Corporation. Organisation dynamique, soucieuse de la sécurité du
public, gardienne de l'éthique et de discipline, la CMEQ fait fa
fierté de ses membres depuis plus de 40 ans qu'elle oeuvre au service du
public.
Je vous parlerai d'abord du projet de loi 185. Contrairement à
d'autres associations, la Corporation regroupe un nombre important
d'entrepreneurs autonomes. L'appartenance à la Corporation des
maîtres électriciens du Québec est obligatoire. La
Corporation qui regroupe environ 3000 membres estime qu'environ 1400 de ceux-ci
sont des entrepreneurs autonomes, c'est-à-dire des personnes faisant
affaire seules sans l'aide de salarie et ce, la plupart du temps.
L'entrepreneur autonome de 1991. Que fait le projet de loi 185 quant
à cet entrepreneur autonome? Il va encore plus loin. Une compagnie
pourra être entrepreneur autonome. Que penser de l'interdiction de faire
certains travaux? Ces entrepreneurs sont qualifiés et compétents.
Avant d'obtenir une licence d'entrepreneur à la Régie des
entreprises de construction du Québec et avant d'être membre de la
Corporation des maîtres électriciens, un entrepreneur
électricien se doit de respecter de nombreuses conditions. Qui plus est,
pour être capable de travailler sur un chantier de construction, il doit
détenir absolument une carte de compétence et ce, comme n'importe
quel salarié ou comme n'importe quelle autre personne agissant pour le
compte d'un employeur.
Nous ne croyons pas que si l'on fait disparaître de tels
entrepreneurs, il y aura plus de travail pour les salariés. C'est faire
abstraction de la réalité et c'est faire preuve
d'an-gélisme. Ce qui risque d'arriver c'est que les entrepreneurs en
question cesseront de se faire qualifier et ce, malgré toutes les
amendes qui peuvent exister. Ils feront du travail au noir et ils feront encore
une plus vive concurrence aux salariés de l'industrie de la
construction.
En agissant comme on se propose de faire, on tue l'esprit d'initiative
des Québécois et des Québécoises. On oublie
injustement les régions où, déjà, il est
extrêmement difficile pour un entrepreneur seul d'obtenir des contrats vu
la situation économique qui y règne. Comment feront les
entrepreneurs en région qui y sont installés pour faire quelques
constructions neuves vu qu'ils n'ont pas de salariés? Ce sera seulement
les entrepreneurs des grands centres et les salariés qui pourront faire
ces travaux.
L'entrepreneur électricien, une profession de services. Un
électricien est un professionnel qualifié qui ne fait pas que des
travaux de construction. Il doit d'abord se créer une clientèle
lorsqu'il part en affaires grâce à une gamme étendue de
services qu'il peut rendre. On élimine cette possibilité. On a
l'impression que la solution retenue ne fait que favoriser l'émergence
soit d'un plus grand nombre de salariés ou l'émergence d'un plus
grand nombre d'employeurs mais qu'elle ne tient nullement compte des besoins de
la population, de la liberté de l'entreprise, de sa croissance, de son
évolution et de la capacité de payer de la clientèle.
Des dispositions semblables à celles qui existent
déjà et que vous vous proposez d'ajouter heurtent le sens commun
des Québécois. Dans tout autre domaine que celui de la
construction, on trouverait absurdes de telles propositions. Pourquoi
n'aurait-on pas le droit de faire affaire sans l'aide de salariés si
l'on est compétent pour le faire et qu'on peut le faire?
Nous sommes cependant conscients que l'existence de la notion
d'entrepreneur autonome peut créer des problèmes. Mais au lieu de
l'empêcher de travailler dans des domaines où il est
compétent pour le faire, nous suggérons la mise en place de
mécanismes de contrôle.
L'entrepreneur autonome doit être lui aussi connu de la Commission
de la construction du Québec, il doit s'y inscrire, il doit produire un
rapport mensuel qu'il embauche ou non des salariés. Il devrait
être soumis aux mêmes amendes, aux mêmes
prélèvements et aux mêmes obligations que
l'entrepreneur-employeur. Nous sommes d'accord pour que l'entrepreneur autonome
soit plus encadré et que la différence qui existe dans le
coût en faisant affaire avec une organisation plus petite plutôt
qu'avec une organisation plus grande, soit limitée, mais nous ne sommes
pas d'accord pour que vous empêchiez l'entrepreneur autonome ou l'artisan
de travailler, quand et où bon lui semble en autant qu'il
détienne les compétences et les qualifications requises pour le
faire.
Il est anormal que l'on doive, pour débuter une entreprise,
être obligé d'embaucher des salariés. Il est anormal que si
l'on décide de se retirer en partie des affaires on ne puisse plus
continuer à faire le travail que l'on a toujours fait alors qu'on est
compétent et qualifié pour le faire seulement parce qu'on n'a pas
de salarié. Il est inacceptable que dans une société libre
et démocratique comme la nôtre on limite d'une telle façon
notre droit à la liberté. On a encore le droit de décider
si on a besoin de salariés ou non.
Ces entrepreneurs ne sont pas des ennemis des salariés. La
plupart d'entre eux sont d'anciens salariés syndiqués. Eux aussi
sont contre le travail au noir et ils subissent, eux aussi, les méfaits
de cette pratique. Ces entrepreneurs ne sont pas non plus des ennemis des
employeurs. Plusieurs de ces employeurs ont commencé avec une petite
organisation et sans l'aide de salariés. Ils ont réussi à
force de travail et d'initiative à faire agrandir et prospérer
leur entreprise.
Le cautionnement pour le paiement des salaires. Le projet de loi
introduit également la possibilité d'adopter un règlement
pour exiger qu'un cautionnement sort fourni pour assurer le paiement des
salaires. Assurer le paiement des salaires est un principe louable. Dans les
faits, cependant, qu'est-ce que cela représente? Les
entrepreneurs-employeurs devront s'acheter une protection d'assurance, ils
devront la payer et ils la chargeront en surplus aux clients. Mais ce qu'il y a
de plus incroyable, c'est que les entrepreneurs, eux, n'ont pas de garantie de
paiement pour les travaux qu'ils exécutent. Les modifications qui seront
apportées au Code cMI laissent présager le pire.
L'hypothèque légale de construction risque, d'après les
informations que nous avons obtenues, de n'avoir aucun poids vis-à-vis
de l'hypothèque d'un financier. C'est bien beau d'exiger qu'un
entrepreneur fournisse un cautionnement pour garantir le paiement des salaires,
mais encore faudrait-il qu'en contrepartie on donne à l'entrepreneur la
garantie d'être payé.
Les amendes. Le nombre des amendes sera augmenté de façon
considérable. Voilà ce qu'on a trouvé pour contrer le
travail au noir, l'épouvan-tail des amendes. C'est sûr, il peut y
avoir un effet dissuastf avec de telles mesures, mais une personne qui
considère qu'elle a besoin de travailler ne s'inquiétera pas des
amendes et elle travaillera. Elle prendra une chance. Il n'y a pas de solution
miracle pour contrer le travail au noir. L'imposition d'amendes plus
sévères peut aider, mais nous suggérons que d'autres
mesures soient envisagées et ces mesures devraient être
envisagées avec le ministre des Finances et le ministre du Revenu. Il
doit exister des mesures fiscales pour encourager le consommateur à
faire affaires avec un entrepreneur dûment qualifié. Ces mesures
devraient favoriser la déduction du revenu du consommateur, de toutes
dépenses de rénovation, construction, d'entretien et de
réparation à la condition qu'un entrepreneur de construction
dûment licencié y soit impliqué.
Je commenterai maintenant le projet de loi 186 à la page 18, pour
ceux-là qui ont le mémoire. Ce projet de loi a été
déposé sans consultation. La Corporation des maîtres
électriciens du Québec, qui voit sa loi constitutive
modifiée par ce projet de loi, n'a pas été
consultée. Elle n'a jamais été mise au courant des
orientations ministérielles. Elle n'avait fait qu'entendre des rumeurs.
Vous comprendrez donc notre surprise, dans un premier temps, et, dans un
deuxième temps, notre amère déception face à ce
projet de loi qui, selon nous, ne tient pas compte de l'historique du milieu,
de sa prise en charge par lui-même et des coûts véritables
de cette réforme. (22 h 15)
Pourtant, nous étions déjà encouragés par la
déclaration ministérielle du 20 juin 1985 et par le
communiqué de presse qui avait alors été émis et
qui faisait suite au dépôt du rapport Picard-Sexton. Le ministre
disait alors qu'il entendait mettre en application la Loi sur le bâtiment
après y avoir apporté les amendements jugés
nécessaires pour rencontrer les objectifs premiers de cette loi, entre
autres améliorer la qualité des travaux de construction,
responsabiliser davantage les intervenants, mieux protéger le
consommateur et mieux contrer le travail au noir. Cette volonté
exprimée par le ministre nous semblait aller dans la bonne voie.
De Picard-Sexton au projet de loi 186 Quelle ne fut pas notre surprise
en prenant connaissance du projet de loi 186. Ce projet de loi renie les
principes de la Loi sur le bâtiment de 1985. Il est malheureux que le
projet de loi qui, normalement, devait responsabiliser les
intervenants n'atteigne nullement cette fin. Il est malheureux que ce
projet de loi qui modifie une loi qui a fait l'objet d'une consultation
extensive le fasse sans qu'il y ait de consultation préalable du milieu.
Il est malheureux qu'on ait déposé un projet de loi qui ne tient
pas compte de ce que le critique de l'Opposition officielle, en juin 1985,
disait de la création de la Commission du bâtiment et de son
financement.
Une régie aux pouvoirs énormes. Que fait pour les
entrepreneurs de construction le projet de loi 186? On crée une
régie plus importante, plus tatillonne et surtout plus coûteuse.
On donne à la régie du bâtiment l'ensemble des pouvoirs
réglementaires que le gouvernement s'était conservé. La
régie du bâtiment du Québec pourra intervenir à tous
les stades, à tous les niveaux. Ce n'est certainement pas ce que voulait
l'Opposition officielle en juin 1985. Ce n'est certainement pas ce que voulait
non plus le parti au pouvoir en 1985.
Une régie génératrice de coûts
élevés. En 1985, l'Opposition officielle s'interrogeait sur les
coûts de la réforme. La question est toujours d'actualité.
La Commission devait s'autofinancer au bout de cinq ans. Aujourd'hui, les fonds
amassés iront au fonds consolidé du revenu. L'argent pourra
servir à d'autres fins. On peut aussi s'interroger sur les
méthodes de financement. Celles-ci peuvent être basées sur
un facteur d'importance des activités ou de la performance d'une
entreprise. On pourra aussi instaurer un système de points d'inaptitude
qui aura une influence sur les frais que devront payer les entrepreneurs.
L'industrie de la construction devient ainsi un réservoir
inépuisable de ressources financières. Ces frais seront
transférés aux clients et les coûts de construction seront
augmentés en conséquence.
La Corporation offre à ses membres le cautionnement et le fonds
d'indemnisation. Or, la loi nous enlève cette possibilité. Le
fonds d'indemnisation sera administré par la régie. On ne laisse
plus rien à l'initiative privée. Quant aux plans de garantie, la
Corporation, suite à l'adoption de la Loi sur le bâtiment et avant
même l'adoption de cette loi, avait entamé des démarches
pour doter ses membres d'un tel plan et elle recherchait des façons
simples et peu coûteuses, tant pour elle-même et ses membres que
pour le public en général, pour traiter les dossiers. Or, la loi
nous enlève même le pouvoir de créer un tel plan de
garantie et de le rendre obligatoire pour nos membres.
On se retrouve donc avec une régie toute puissance qui n'est pas
représentative du milieu. En effet, rien n'oblige dans la loi que les
membres de la régie du bâtiment soient nommés après
consultation d'organismes représentatifs. On n'a pas non plus mis dans
le coup les entrepreneurs, les autres personnes impliquées comme on
l'avait fait avec la Commission du bâtiment.
La Loi sur le bâtiment donnait à la Corporation des
maîtres électriciens du Québec et à la Corporation
des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec la pleine
qualification de leurs membres. Pour les autres associations d'entrepreneurs,
la loi prévoyait la possibilité de faire des ententes pour leur
permettre de qualifier leurs membres. On enlève cette
possibilité. On ne tient pas compte que la Corporation des maîtres
électriciens du Québec a plus de 40 ans d'histoire sans
tache.
Pourquoi fait-on cela? Pourquoi crée-t-on une superstructure
administrative qui régente tout alors qu'il existe déjà
des organismes dans le milieu qui peuvent, sous l'autorité
gouvernementale, en respectant des normes et conditions émises par le
gouvernement, très bien exercer de tels pouvoirs et ce, sans qu'il en
coûte trop à l'État. Aussi, on enlève à la
Corporation ses pouvoirs et l'exclusivité du titre d'entrepreneur
électricien.
En conclusion, M. le Président, nous vous demandons de ne pas
adopter ces deux projets de loi. Ces deux projets de loi, dans leur forme
actuelle, ne sont pas de bons projets de loi et ne règlent pas les
problèmes. Ils en créeront une multitude. Nous croyons qu'il
serait plus sage d'avoir une consultation plus large sur l'ensemble des
problèmes de l'industrie et ce, dans un avenir rapproché pour que
nous puissions, tous ensemble, trouver des solutions aux problèmes de
l'industrie. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M.
Brown. M. le ministre.
M. Cherry: Merci. Nous aussi, c'est la deuxième fois dans
la même semaine que nous nous voyons. Comme introduction, j'ai le
goût de vous demander moi, je la connais, mais pour le
bénéfice, encore une fois, de la commission votre
expérience personnelle et votre cheminement. Vous êtes aujourd'hui
un maître électricien. Comment êtes-vous arrivé
à ça? Comment avez-vous commencé? On se connaît
depuis longtemps, mais j'aimerais ça que vous le disiez.
M. Brown: Moi, personnellement, j'ai commencé suite
à ma formation technique à l'Institut de technologie de
Trois-Rivières. J'ai commencé comme salarié de la
construction, syndiqué, sur des gros chantiers de construction. J'ai
oeuvré là-dedans de 1972 jusqu'à 1976, jusqu'à ce
que je devienne entrepreneur électricien. Durant ce temps, j'ai
milité au niveau du syndicat. J'ai été
délégué de chantier et j'ai été directeur du
comité d'administration de la FIPOE, à ce moment-là. J'ai
travaillé lorsqu'ils ont changé du 568 à la FIPOE. Suite
à ça, j'ai été à la Corporation des
maîtres électriciens du Québec. J'ai passé mes
examens d'admission et je suis devenu entrepreneur autonome, si on veut. Un
entrepreneur qui était seul.
Après une première année de dur labeur,
créer une clientèle... Je suis natif de Drummondville, alors en
débutant à Granby, je ne connaissais pas du tout le milieu - je
suis arrivé là par hasard... Alors, j'ai réussi à
me faire une clientèle. Ça m'a pris une année. La
deuxième année, j'ai eu un employé. Troisième et
quatrième années... Ensuite, est venue la récession de
1982. J'ai eu moins d'employés. Après ça, j'ai
structuré mon entreprise différemment et j'ai réussi
à avoir trois, quatre et cinq employés.
Là, le problème c'est peut-être un problème
personnel, mais je ne suis pas capable de supporter ça, avoir des
employés. Il y en a qui peuvent avoir 80 ou 100 employés, mais,
personnellement, quand je dépasse cinq, je n'aime pas ça. Alors,
à ce moment-là, j'ai décidé de revenir en
arrière. On est en récession et là je redeviens
travailleur autonome, je tombe tout seul. Le projet de loi que vous voulez
adopter me confinerait quasiment, comme je l'ai dit hier, au bien-être
social.
M. Cherry: Merci. C'est parce qu'on s'était vus cette
semaine et vous m'aviez raconté votre cheminement.
M. Brown: Oui, on avait fait abstraction des lois et
règlements de la Corporation et on s'était parlés en tant
que ministre et entrepreneur électricien.
M. Cherry: C'est ça. Alors, je voulais l'entendre parce
que vous m'aviez dit que vous aviez choisi d'être autonome.
M. Brown: Exactement.
M. Cherry: Vous ne l'avez pas dit dans ces mots-là ce
soir, mais c'est ce que vous m'aviez dit quand on s'est vus cette semaine,
entre autres.
M. Brown: C'est pour ça que j'ai ajouté que je
n'aimais pas ça quand j'avais trop d'employés.
M. Cherry: Vous avez choisi un auditoire pour le dire.
M. Brown: Ah!
M. Cherry: Quelques-unes des questions, toujours concernant le
travailleur autonome... Je ne sais pas si vous avez passé une partie de
la journée avec nous. Je ne sais pas si vous avez entendu la
présentation de mémoires qui a précédé.
Sinon, je vais dire... Aujourd'hui, en rencontre avec des gens sur le
même sujet, fort des expériences qui m'avaient été
présentées cette semaine, pour les besoins de discussion, je
faisais valoir des arguments qui m'ont été
présentés, à savoir celui qui travaille en région
éloignée. On ne parle pas toujours des grands centres:
Rivière-au-Renard, c'est ça l'exemple classique? Toute la
journée on a parié... J'espère qu'il y en a un qui est
là, à Rivière-au-Renard.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a
quelqu'un de Rivière-au-Renard dans la salle pour nous dire où
c'est et comment gros c'est?
M. Cherry: C'est l'exemple qui nous a été fourni
toute la journée. Alors moi, durant la journée, en pariant avec
des gens, j'ai dit: Écoutez, là, comment un gars qui oeuvre... Je
le vois physiquement avec son camion: II essaie de se débrouiller, il
fait du service, il s'est bâti une clientèle, il fait de la
réparation, de l'entretien. À un moment donné, il se
bâtit un chalet neuf dans le coin où il se bâtit deux
maisons neuves. Comment peut-on lui dire qu'il faut absolument qu'il engage
quelqu'un là-dedans?
Ils me disent qu'aujourd'hui avec les nouveaux matériaux de
construction, c'est plus léger qu'avant, qu'avec les nouveaux
équipements, ça peut se faire tout seul. La réponse qui
m'a été donnée, c'était celle-là que je
voudrais que vous commentiez. Ils ont dit: C'est ça qu'ils vous disent,
qu'ils le font tous seuls, mais dans les faits, M. le ministre, ils s'engagent
un gars sur la "sly", qui est sur le bien-être social. Ils le paient en
dessous de la table à 5 $, 6 $ de l'heure, et ils en ont quelqu'un
pareil plutôt que de donner cet ouvrage-là à un vrai
apprenti ou à un vrai travailleur de la construction.
Donc, j'aimerais vous entendre commenter sur la description qui m'a
été faite en réponse à ce que je viens de vous
dire.
Le Président (M. Bélanger): Alors, pour vous
taquiner un peu, je vous inviterais à la prudence. Le ministre du Revenu
est juste derrière vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brown: Alors, pour votre bénéfice, M. le
Président, on ne travaille pas en dessous de la table. Pour ce
travailleur-là, moi, je vais répondre nécessairement -
vous allez bien vous attendre à ça - au nom des entrepreneurs
électriciens. Les autres corps de métiers, chacun a
débattu sa cause, chacun est venu plaider sa cause. Moi, je vais
m'occuper en ce qui concerne les entrepreneurs électriciens.
Un entrepreneur électricien - on va changer de place, on va le
prendre en Abitibi, ce n'est pas péjoratif, là - est dans un
village et il se bâtit trois maisons durant l'année. Selon la loi
qui existe à l'heure actuelle, cet entrepreneur électricien doit
avoir ce qu'on appelle un permis de raccordement. Suite aux installations qu'il
fait, il y a nécessairement une inspection au niveau du Bureau des
entrepreneurs électriciens. Alors, ces permis-là, ce sont des
permis qui sont gouvernementaux. Suite à ça, l'entrepreneur
électricien émet une facture au client et il la
rentre dans ses livres. Alors, l'entrepreneur, en tant que tel... Les
lois qui sont là déjà à l'heure actuelle dans le
marché, on a des formulaires à remplir et c'est pour ça
que ça nous contrôle plus qu'au niveau des autres corps de
métiers, si on veut.
M. Lavergne (Richard): Si vous me permettez, si je pouvais juste
renchérir et ajouter. Il est évident que si des choses telles
qu'on vous a dites cet après-midi passent, je ne pense pas que c'est
à nous, finalement... Quand je dis à nous là, ce n'est pas
le projet de loi comme tel qui va empêcher ça, mais par contre, un
peu comme on a dit plus tôt ce soir, c'est la conscience sociale des
gens. Alors, si les gens vous ont dit cet après-midi que ce sont des
choses qui se passaient, que ça se payait en dessous de la table,
ça doit être parce qu'ils sont au courant qu'il y a certains gens
qui le font.
Alors, sûrement leur conscience sociale devrait être capable
de les laisser venir les déclarer aux personnes et de dire: Je sais que
cette personne-là le fait, et sur tel projet et tel projet, etc.,
ça se fait comme tel. De l'autre côté, comme mon
président vous a dit tantôt, c'est qu'on est
réglementé. On a des permis. Alors, si une personne qui se dit un
travailleur autonome sort pour x nombre de permis, pour toutes les
installations, je pense qu'il y a une concordance qui peut être faite
avec tous ces permis-là et dire: Écoute, est-ce que c'est
possible que tu aies fait tout ces travaux-là seul?
De l'autre côté, si les gens disent que ça se fait,
eh bien, qu'on les déclare et qu'on dise: Oui, ça se fait et
c'est à telle ou telle location et qu'on les pince. On n'est pas
d'accord que ça se fasse. La Corporation des maîtres
électriciens n'est pas d'accord que le travail se fasse d'une
façon clandestine, et qu'elle soit payée en dessous de la
table.
Le Président (M. Bélanger): C'était M.
Lavergne, pour les fins de la transcription.
M. Lavergne: Excusez-moi, j'aurais dû m'identifier.
M. Brown: II y aurait M. Roger Gosselin qui aurait quelque chose
à ajouter sur cette particularité.
M. Gosselin (Roger): Je suis chanceux, je n'aurai pas besoin de
me nommer. Mon président m'a nommé. Je renverserais
peut-être la question. Est-ce qu'on doit pénaliser les 80 % qui
sont corrects pour les 20 % qui ne sont pas corrects? S'il y a 1400
entrepreneurs électriciens au Québec qui sont
déclarés ou, semble-t-il, sont autonomes, et s'il y en a 20 % qui
sont à côté de la "track", doit-on abolir le droit au
travail du travailleur autonome?
Je pourrais vous poser une autre question. Est-ce qu'on va
empêcher les pharmaciens de travailler dans leur pharmacie? Est-ce qu'on
va empêcher les épiciers de travailler dans leur épicerie?
Ce que vous voulez faire avec la loi que vous voulez mettre en vigueur, c'est
d'empêcher des gens qualifiés de travailler dans leur entreprise.
C'est là, je pense, qu'il y a certainement moyen de trouver une autre
façon de contrer le travail au noir autrement que d'abolir le droit au
travail des entrepreneurs autonomes. C'est tout ce que j'ai à dire
là-dessus. (22 h 30)
M. Cherry: Concernant le travailleur autonome - on va le
décrire comme ça - vous nous indiquez dans votre mémoire
que vous avez 1400 autonomes sur 3000 membres, ça vient d'être
relevé. Vous nous dites qu'il faut encadrer l'autonome, vous
écrivez ça en page 10.
M. Gosselin: Oui.
M. Cherry: Vous utilisez le mot "encadrer". Je voudrais vous
demander, M. le président, ou quelqu'un qui vous accompagne: Pouvez-vous
être un peu plus explicite et nous dire ce que vous entendez par
l'encadrement qui pourrait être offert?
M. Brown: Je vais laisser mon directeur général
répondre à cette question-là puisqu'on en a
discuté...
M. Guilbault (Yvon): Mon nom est Guilbault. M. Brown:
Yvon.
M. Guilbault: Yvon, oui. Oui, "boss". Quelle est la question,
là?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brown: C'est parce qu'il a dit le mot "boss", à ce
moment-là, et ça...
M. Guilbault: Concernant l'encadrement, c'est parce que... La
question qu'on se pose tout le temps sur le travail au noir, on rapporte
toujours ça comme si l'entrepreneur qui fait des travaux, c'est lui qui
fait du travail au noir. Mais l'entrepreneur qui travaille lui-même ne
fait pas de travail au noir. Il a ses licences, il a ses permis, il est
inspecté par à peu près cinq, six inspecteurs, la masse
salariale, la CCQ et ainsi de suite. Là, on présume que cet
entrepreneur-là va embaucher des gens illégalement et qu'il va
les payer en dessous de la table. C'est ça qu'on dit. Donc, ça
fait du travail au noir.
La plupart du temps, pour les entrepreneurs qui sont ici dans les
galeries, le travail au noir est fait par un salarié qui n'est à
l'emploi de personne et qui va travailler en dessous de la table. Depuis qu'on
est ici aujourd'hui, tout ce
qu'on entend, c'est le travailleur autonome, c'est-à-dire celui
qui est qualifié, qui a des licences, qui a des permis qui, lui, serait
accusé de tous les péchés du monde. Le travail au noir,
ça se fait par des gens qui peuvent être qualifiés, donc,
qui ont des certificats de compétence mais qui ne sont pas
nécessairement entrepreneurs. Des fois ce sont des pompiers aux
multiples talents...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Guilbault: Eux n'iront pas voir le ministère du
Revenu.
Le Président (M. Bélanger): Non, non, non, je
regrette, je regrette. Malheureusement, c'est strictement et formellement
interdit dans ce milieu-ci. Aucune manifestation de quelque sorte qu'elle soit
n'est permise. Je regrette infiniment et je vous demanderais, s'il vous
plaît, votre collaboration.
M. Guilbault: Je ne l'ai pas fait exprès, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Je n'ai aucun doute,
mais ne recommencez pas. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Guilbault: Quand on parle d'encadrement, ce qui fatigue les
employeurs qui vous parlent à la journée longue - et nous autres,
les entrepreneurs, non pas les travailleurs, les entrepreneurs autonomes - ce
qui les fatiguent, c'est quand ils embauchent, comme ils disent, un
salarié "on the side" et qu'ils ne le déclarent pas. Et ils ont
raison. Ce qu'on défend ici, ce soir, c'est l'entrepreneur autonome qui
travaille seul sans l'aide de salariés. À partir du moment
où il embauche un salarié, il devient employeur, donc il n'y a
pas de problème. Ce qu'on dit, nous autres - pour répondre
à votre question parce que je m'en souviens - c'est: II faut encadrer
cette personne-là de telle façon qu'il travaille seul tout le
temps. Quand il ne travaille pas seul, il faut que la personne qui l'embauche
déclare ses heures travaillées à la CCQ comme n'importe
quel employeur.
C'est ça, le noeud du problème. Le noeud du
problème, ce n'est pas, comme on l'a déjà entendu de
certaines bouches: Ces chaudrons-là, il faut s'en débarrasser. Ce
sont des entrepreneurs futurs qui peuvent devenir gros ou, de temps en temps,
petits, mais la solution, ce n'est pas de les éliminer, surtout dans
notre métier où les entrepreneurs sont tellement encadrés
par le Bureau d'inspection - il n'y a pas ça nulle part ailleurs. Les
entrepreneurs électriciens paient 15 000 000 $ par année. Il y a
le livre bleu d'Hydro-Québec, il y a des normes d'installations. S'ils
ne les font pas bien, ils se font taper sur les doigts. Il y a la CCQ, il y a
la Corporation des maîtres électriciens - espérons qu'il va
en rester plus quand on va s'être parlé après. Il y a un
paquet de monde qui surveille les entrepreneurs électriciens et ils sont
encadrés régulièrement. Ils ne comprennent pas ce qui leur
arrive, c'est pour ça qu'ils sont là.
M. Lavergne: Je pourrais, si vous me permettez, ajouter juste une
chose, et je pense que c'est important de la soulever. Le fait que
l'entrepreneur autonome, comme on l'appelle, l'entrepreneur qui a des
employés a eu un début quelque part, eh bien, l'entrepreneur qui
a des employés aujourd'hui va aussi avoir une fin quelque part. Alors,
il y a des fins de carrière et il y a des débuts de
carrière. Le fait que l'individu va avoir un début de
carrière et une fin de carrière avec des qualifications,
finalement, comme tout le monde - c'est entrepreneur électricien, c'est
maître électricien - pourquoi l'y circonscrire puis lui dire: Tu
n'as plus le droit de faire ça?
Sur le travail au noir, il faut dire une chose, à part ça,
c'est que les gens qui sont travailleurs autonomes, si on leur enlève le
droit de travailler le 1er janvier 1992, on va faire une chose parce que ces
gens-là ne sont peut-être pas nécessairement prêts
à aller travailler pour quelqu'un d'autre. Ils vont peut-être
continuer à gagner leur vie puis peut-être que, là, on va
en créer du travail au noir. Alors, les 10 000 dont on parle ou les 1400
chez nous, on va peut-être créer plus de travail au noir parce que
ces entrepreneurs, et on l'a dit tantôt, vont continuer à
entreprendre. Alors, il faut penser un peu en réglementation au
début d'une carrière, à la fin d'une carrière et
aussi ce qui peut arriver à ces gens-là.
Une autre chose que je voudrais juste renoter, c'est que, parmi les gens
qui sont ici, on a les entrepreneurs autonomes et on a aussi les entrepreneurs
qui font des 9 000 000 $ et 10 000 000 $ comme chiffre d'affaires et qui
regrettent ce projet de loi parce qu'ils ne sont pas d'accord d'enlever la
raison d'être d'un travailleur autonome.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. Lavergne.
M. Auger (Jean-Louis): Je m'excuse, M. le Président.
Est-ce que je pourrais faire juste une intervention?
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, M.
Auger.
M. Auger: II ne faut jamais oublier aussi que la Corporation est
une corporation fermée, a titre obligatoire, et lorsque de nos membres
font, à un moment donné, peut-être des accrocs à la
loi, eh bien, on a un comité de discipline et ces
gens-là sont disciplinés. Aussi, lorsque des entrepreneurs
- si, malheureusement, il y en a - se permettent, par exemple, d'engager de la
main-d'oeuvre non régulière, eh bien, à ce
moment-là, c'est la discipline qui les attend et ils sont accusés
de compétition déloyale, par exemple. Donc, effectivement, on a
une Corporation qui est très bien suivie et ses membres sont
évidemment sujets à la discipline. Donc, effectivement, il y a
moins de danger, je pense, chez les membres de la Corporation que dans toute
autre association.
M. Gosselin: Juste, peut-être, pour terminer sur le
travailleur autonome. Tantôt, quand je suis intervenu, j'aurais
peut-être dû vous dire que ça fait 17 ans que je suis en
entreprise. Je n'ai jamais été autonome, moi, pour un, et ce
n'est pas les autonomes qui me maganent. C'est juste ce que je voulais dire. Je
suis une entreprise qui a toujours eu des employés et je n'ai jamais
été autonome. Notre problème, dans l'industrie de la
construction, il n'est pas là. Il est sur le travail au noir, mais ce
n'est pas les entrepreneurs autonomes qui font la majorité du travail au
noir.
M. Brown: Toujours en respectant que nous défendons les
droits des entrepreneurs électriciens.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Cherry: O. K. Je le sais, mais toujours pour le
bénéfice de la commission, les membres chez vous et un
ex-président, M. Auger, viennent de dire que, chez vous, la
participation est obligatoire. C'est une corporation et, au Québec,
quiconque veut exercer cette profession-là doit être membre chez
vous. Vos membres font également partie d'autres associations qui
oeuvrent à l'intérieur. Ils peuvent être membres
d'organismes qui ont déjà témoigné ou qui vont
témoigner.
M. Auger: Évidemment.
M. Cherry: Évidemment, c'est la nature même de
l'industrie qui veut ça. Tu participes à, tu échanges tes
cartes d'affaires, tu fais des contacts, ce qui fait que ta "business" peut
progresser. Ça ne surprendra pas ceux que j'ai rencontrés cette
semaine, mais je voudrais entendre vos commentaires là-dessus. Les gens
qui sont membres de votre Corporation, qui sont venus nous rencontrer et qui
étaient en participation de délégation d'autres organismes
ont tenu un langage qui disait: M. le ministre, dans le fond, nous autres, une
corporation, on n'a pas besoin de ça. Vous auriez dû l'abolir. Ce
n'est rien qu'une affaire qui nous envoie des calendriers une fois par
année et qui nous oblige à vendre ça et à acheter
ça.
Je sais que ça a choqué le président cette semaine
quand je lui ai dit et là, je veux lui permettre l'occasion de
renchérir. Évidemment, ils m'ont dit: Ceux qui disent ça,
c'est ceux qui ne s'impliquent pas nécessairement dans la Corporation,
mais c'est les mêmes qui, quand ils font des soumissions, sont bien
contents d'utiliser les taux qui sont établis par la Corporation. Je
voudrais vous permettre aussi d'enchaîner sur la sorte de services que
vous offrez à vos membres, sur une base bénévole...
Pardon, pas sur des bases obligatoires, celles-là, mais qui vous
permettent, qui permettent à ceux qui s'en servent... et faire la liste
des services que vous offrez. J'aimerais ça l'entendre aussi.
M. Brown: O. K. M. le Président, tout comme lorsque vous
m'avez posé la même question, je vais laisser répondre mon
directeur général.
M. Guilbault: La Corporation, il ne faut pas oublier d'abord que
c'est une corporation professionnelle, donc on a des obligations en vertu de la
Loi sur les maîtres électriciens dont vous êtes responsable.
On a un comité de discipline, on a un service des enquêtes, on a
un service des plaintes, on a un code d'éthique, un code de
déontologie dont on parie tant ici: On veut le faire. Nous, on l'a.
Donc, on administre d'abord la loi.
Mais, dans la loi, comme il est mentionné dans le mémoire,
il faut aussi offrir un paquet de services aux membres de la Corporation et ces
services sont surtout de nature administrative. Vous allez comprendre que, le
calendrier, c'est une caricature, parce que si on vendait juste des
calendriers, ce serait bien le bout, les membres ne seraient pas contents.
Alors, c'est sûr qu'on offre des services d'informatique, de gestion, des
services de marketing. Le calendrier, c'est une infime partie du plan de
marketing. On offre des services de communication, des services d'assurances,
tout ce qui fait qu'un entrepreneur peut profiter collectivement d'un meilleur
prix d'une chose qu'il ne pourrait pas avoir individuellement. Alors,
là, définir toute la liste, ce serait peut-être un peu
fastidieux, mais ce sont des services que, comme organisation, on rend aux
membres.
Il y a certains membres qui, pour des raisons d'affaires, font partie
d'autres associations, ce qui est tout à fait normal. Mais je vous
rappelle que, pour une corporation fermée - étant donné
que vous faites allusion aux rencontres que nous avons eues - à
adhésion obligatoire, selon un sondage qui a été fait par
une firme indépendante, Léger et Léger, sur laquelle nous
n'avions pas de contrôle, une association qui a un taux de satisfaction
de 90 %, c'est assez rare. Le Parti libéral aimerait ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Tous les partis,
monsieur.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
M. Brown: M. le Président, pour en revenir à cette
particularité des calendriers ou des services informatiques, il faut
aussi préciser que ces services commerciaux, comme on les appelle
à l'intérieur de notre corporation, s'autofinancent. Alors, si
cette personne-là n'en veut pas, de calendrier, ça n'affecte pas
la cotisation du membre. Ça, c'est très important. Tous les
services commerciaux qu'on offre à la Corporation des maîtres
électriciens du Québec s'autofinancent.
Le Président (M. Bélanger): J'aurais une courte
question pour vous, quasiment dans le privé. Vos calendriers, est-ce que
ce sont ceux qu'on met dans la "shop", en arrière, ou est-ce qu'ils sont
mettables dans la maison, où il y a les enfants?
M. Brown: On les met partout.
Le Président (M. Bélanger): Ne répondez pas
à ça.
M. Brown: Ils sont très... Ils sont fantastiques.
Le Président (M. Bélanger): II y a les calendriers
pour la "shop" et il y a les autres.
M. Brown: Non. Ils sont caricaturés. Ce ne sont pas les
calendriers auxquels vous fartes allusion.
Des voix: Ha, ha, ha! Mme la députée de Chicoutimi.
Excusez-moi.
M. Brown: On va vous en faire parvenir un. Des voix: Ha,
ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Moi, je suis
célibataire.
M. Brown: Vous aussi?
Mme Blackburn: Ce n'était peut-être pas
ceux-là qu'il voulait.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: On peut lui en trouver un.
Le Président (M. Bélanger): Qui vous a dit
ça, Mme Blackburn? Alors, c'est à vous, Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, M. le directeur général, messieurs, bonsoir.
Vous avez défendu, vous défendez votre position avec brio.
À entendre le ministre, j'ai comme l'impression qu'on n'aura
peut-être pas a poursuivre. S'il se fait aussi accueillant à vos
propositions qu'il semble se faire attentif à vos remarques, je pense
que la chose serait, comme on dit, dans le sac, en ce qui vous concerne. Mais
je ne suis jamais vraiment certaine. Alors, je vais poursuivre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Blackburn: La Corporation des maîtres
électriciens n'est pas régie par le Code des professions. Bien.
Vous avez présenté, M. Guil-bault, tout à l'heure, de
façon assez intéressante, mais, pour mol, peut-être pas
tout à fart complète, toutes les règles qui
régissent l'accès à la Corporation, l'accès au
titre de maître électricien. J'aimerais que vous m'en parliez un
petit peu plus longuement, en nous rappelant quelles sont les exigences de
formation de base pour avoir accès à ce titre, la nature des
examens, sanctionnés par qui, le code de déontologie, les
sanctions. Autrement dit, j'aimerais que vous nous traciez un tableau un peu
plus précis de ce qui se pratique chez vous. On pourrait peut-être
ensuite se demander: Est-ce que c'est applicable à d'autres secteurs
d'activité dans la construction?
M. Guilbault: Vous me posez une question dont la réponse
peut être un peu longue. Je vais essayer de résumer. La
Régie aimerait bien faire ce qu'on fait, dans le sens que ce que la
Régie du bâtiment veut faire pour les autres métiers ou les
autres professions, on le fait, à la Corporation des maîtres
électriciens.
Actuellement, la Corporation, qui est une corporation qui existe en
vertu de la Loi sur les maîtres électriciens, donc, qui ne tombe
pas sous le code de la profession, fait passer des examens aux aspirants
maîtres électriciens ou entrepreneurs électriciens.
Ça se fait de concert, depuis 1980, avec la Régie des entreprises
dans une harmonisation qui est assez complète, assez totale. (22 h
45)
Depuis 1980, quelqu'un qui veut devenir maître électricien
fait d'abord une demande à la Régie des entreprises de
construction qui a ses propres exigences concernant la solvabilité,
entre autres, et certaines autres exigences aussi prévues par la Loi sur
la qualification professionnelle. La Régie des entreprises lui fart
passer un examen spécifiquement sur le Code de
l'électricité et ces gens-là spécifiquement, de
façon générale, sont des hommes de métier,
c'est-à-dire des hommes qui sont d'abord électriciens, c'est-
à-dire compagnons électriciens, qui ont acquis une
certaine expérience comme électricien.
Comme c'est normal, en termes d'aspiration professionnelle, les gens,
quand ils veulent partir à leur compte, comme on dit, ou partir en
affaires, après une certaine expérience comme salarié, ce
qui est une ambition tout à fait légitime, vont à la
Régie des entreprises - je voulais vous parler de la qualité des
gens qui vont passer l'examen - passent l'examen sur le Code de
l'électricité, se font vérifier concernant leur
solvabilité de point de départ et, par la suite, c'est la
Régie des entreprises de construction qui nous avise si tel candidat
doit passer un examen d'ordre technique et un examen d'ordre administratif. Ce
n'est pas la Corporation qui décide quel examen va être
passé à tel ou tel candidat. Nous n'avons pas cette
décision-là à prendre.
Or, la Régie nous fournit une directive concernant un candidat en
particulier pour dire: Vous allez lui administrer les examens, par exemple,
d'administration et technique, qui sont les deux examens qui sont
administrés par la Corporation et préparés par la
Corporation selon les normes d'élaboration fixées par la
Régie. Nous passons les examens au candidat après une courte
journée de familiarisation et de cours de formation - ça qui dure
une journée et demie... Enfin, ce n'est pas tellement long, mais c'est
toujours très apprécié par les futurs entrepreneurs qui,
inutile de le dire, dans beaucoup de cas sont très nerveux parce que
leur avenir en dépend. Une fois que l'examen est réussi avec
succès, si c'est le cas, nous, on avise la Régie des entreprises
du résultat des examens. La Régie des entreprises, si toutes les
conditions sont remplies, après que le candidat a aussi rempli les
conditions de la Corporation qui exigent que cet entrepreneur-là ait une
place d'affaires, soit identifié publiquement, à ce
moment-là, la Régie des entreprises de construction lui
émet sa licence d'entrepreneur électricien.
Donc, la licence est émise par la Régie des entreprises
mais à travers un processus où tous les entrepreneurs
électriciens sont regroupés au sein d'une même
corporation.
Mme Blackburn: Est-ce qu'il y a des exigences quant à la
formation de base? Est-ce qu'on exige une formation de niveau collégial,
de niveau secondaire?
M. Guilbault: Non. Il n'y a pas d'exigence... Mme Blackburn:
Non.
M. Guilbault:... précise concernant cette
question-là. Il y a tout simplement un examen.
Mme Blackburn: D'accord.
M. Guilbault: Dans le milieu de la construc- tion, il est permis
d'avoir trois personnes habilitantes: une personne habilitante en
sécurité, en administration et en technique. Mais ces trois
personnes-là, ou qui peuvent être à la fois une seule
personne, ça se produit dans le cas d'une très grosse entreprise,
ce qui fait que dans bien des cas un entrepreneur électricien qui a une
grosse entreprise va être qualificateur technique, mais il va être
secondé en administration par une autre personne habilitante. Je peux
vous dire que dans 90 % des cas, au moins 90 % des cas, c'est une seule et
même personne qui qualifie en technique, en sécurité et en
administration et, dans bien des cas, l'entrepreneur qui part en affaires est
secondé par son épouse - dans bien des cas - qui fait
l'administration. Je vous rappelle que l'entrepreneur est d'abord un homme
manuel. Il travaille avec ses' mains, à tel point que quand
l'entrepreneur ne travaille pas avec ses mains, il a l'impression de ne rien
faire. C'est comme ça la mentalité d'un entrepreneur.
Mme Blackburn: Ça nous arrive aussi.
M. Guilbault: Moi, ce n'est pas mon cas. Quand je travaille avec
mes mains, c'est le désastre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Blackburn: Bien. C'est une profession, à ce que vous
nous dites, qui est très réglementée et vous étiez
presque en train de nous dire que c'est un peu la profession de laquelle s'est
inspiré, finalement, le projet de loi qui forme la Régie et qui
lui donne un certain nombre de mandats. Dans le fond, ce que vous nous dites,
c'est: On n'a pas attendu le gouvernement pour le faire, on s'est bien
organisés, on est soumis à un certain nombre de règles
extrêmement strictes parce que, évidemment, quand on parle
d'électricité, il y a des obligations, des exigences quant
à la sécurité, quant à la qualité des
travaux et à leur fiabilité, et je sais que c'est régi
très rigoureusement d'ailleurs. Il faut savoir ce que ça prend le
moindrement quand vous voulez faire faire des changements à
l'intérieur d'une résidence.
Sur un autre sujet... J'aimerais vous dire, pendant que j'y pense, en ce
qui concerne le Code civil, que je sais que ma collègue et
députée de Hochelaga-Maisonneuve travaille le ministre de la
Justice pour s'assurer que ce qui était déjà existant dans
le Code actuel soit reconduit dans le prochain Code civil quant aux garanties.
Ce qui amène une autre question... Vous dites deux choses et je vais y
revenir parce qu'il reste trop peu de temps. Vous dites à la page 20
que, finalement, la Régie telle que composée est
génératrice de coûts élevés mais qu'en
même temps ça va devenir un réservoir inépuisable de
ressources financières. Pourriez-vous nous illustrer ça?
M. Guilbault: Écoutez, quand on lit tous les pouvoirs
carrément de taxation de la Régie, c'est facile d'imaginer tous
les revenus qui peuvent rentrer à la Régie. Qui pensez-vous va
payer ça? Évidemment, c'est le client, mais, entre-temps, il y en
a une couple qui vont peut-être être placés dans
l'impossibilité de survivre. C'est une régie tout à fait
contraire à l'esprit de 1985, la loi 53 qui avait été
adoptée à l'Assemblée nationale après au moins deux
ans et demi de consultations. À ce moment-là, tout le monde
était d'accord pour dire qu'il y avait un consensus dans l'industrie et
ce n'est pas nécessairement facile à obtenir.
Aujourd'hui on se retrouve avec une loi, comme il a été
dit par le président tout à l'heure, centralisatrice où
les intervenants n'ont plus aucun mot à dire, ce qui est tout à
fait inacceptable. Vous essaierez d'appliquer les choses quand les parties ne
sont pas d'accord, diamétralement opposées. Les gens vont
réagir avec leurs tripes et ça ne fonctionnera pas, même
avec des amendes de 1600 $ pour dire qu'ils n'ont pas fait correctement. Les
gens vont tricher, parce qu'ils ont des familles à nourrir. Ce qui est
incroyable dans ces choses-là, c'est qu'on est excessivement
sévère vis-à-vis des entrepreneurs, que ce soit du
côté des entrepreneurs autonomes ou avec la Régie en termes
de qualifications et on oublie complètement tous les salariés qui
travaillent "on the side", qui ne travaillent pas pour un entrepreneur.
Alors, vous voyez l'injustice qui s'empare, qui est
dénoncé par un peu tout le monde qui est ici ce soir. Ça
prend quelque chose de scandaleux pour déplacer autant d'entrepreneurs
comme on a pu le faire ici ce soir. Et on me dit qu'il y en a 200 dehors qui
gèlent.
Mme Blackburn: Vous nous dites en page 15 de votre mémoire
que c'est un projet qui va à l'opposé de la déclaration
ministérielle qui indiquait une volonté du gouvernement de
responsabiliser davantage les intervenants. C'est un peu ce que je comprends
dans votre intervention quand vous dites finalement: On va totalement les
déresponsabiliser parce qu'ils ne se sentiront pas engagés ou
tenus par des décisions sur lesquelles ils n'ont aucune prise, les
décisions de la Régie, si j'ai bien compris.
Dans l'hypothèse que le ministre l'accepte - ce projet de loi
était modifié en vue d'abolir, de ramener le projet de loi
initial quant à la Commission du bâtiment qui remplacerait la
Régie du bâtiment et qui était, elle, cette Commission,
administrée en très grande partie par les entrepreneurs qui
avaient la responsabilité de s'autodiscipliner, d'assurer la formation,
la qualification des entrepreneurs - est-ce que vous seriez enclins à
penser qu'on pourrait adopter avec ce type de modification, en même temps
en ramenant, en consacrant les acquis qui sont les vôtres
évidemment? C'est peut-être dans cette perspective-là que
j'y pensais. Est-ce que ça deviendrait un projet acceptable?
M. Lavergne: Si vous me permettez, moi, je dis oui, dans un sens.
Je veux dire un peu comme on avait dit tantôt à l'APCHQ, que ce
soit une régie ou une commission. Mais ce qui avait été
adopté en 1985 était sûrement acceptable à
l'industrie parce qu'on l'avait accepté. Un des points dans tout le
préambule que vous avez dit tantôt, je pense que vous ne l'avez
peut-être pas mentionné, puis c'est une des choses qu'on
décrit dans le mémoire ici, à la commission, c'est le fait
qu'en 1985 on parlait qu'on avait cinq ans pour s'autofinancer. Alors, on avait
le milieu, l'industrie de la construction était impliquée. On
nous avait donné cinq ans à l'intérieur de ça, cinq
ans pour faire un autofinancement, tandis que dans le projet de loi actuel,
ça n'existe pas. On ne parle pas d'autofinancement, finalement. En tout
cas, ça va chercher des fonds, ramener des fonds et ce qu'on va faire
avec, je ne le sais pas.
Alors, en réponse, on dit oui, qu'on l'appelle comme on le
veuille, mais dans le sens que ça avait été fait en 1985,
on l'avait accepté et on pense que c'est carrément mieux que ce
qu'on voit ici.
Mme Blackburn: D'accord. Ce que vous dites c'est que vous
rappelez ce que j'avais peut-être oublié, à savoir que la
Commission de la construction avait la responsabilité non seulement de
s'autoréglementer mais de s'autofinancer. Le gouvernement ne pouvait pas
faire de ponction dans la caisse de la Commission, mais, en même temps,
la Commission avait la responsabilité d'assurer entièrement son
financement.
M. Lavergne: Dans un temps donné, oui.
Mme Blackburn: Méchamment, des fois. Je pense que c'est
pour ça qu'ils l'ont transformée en régie.
Une voix: Pas de commentaires.
M. Brown: C'est ça que je voulais ajouter. C'est que dans
cinq ans, elle devait s'autofinancer et s'il y avait des surplus, ça
restait à l'intérieur.
Mme Blackburn: Oui, c'est juste.
M. Gosselin: Si vous me permettez, M. le Président.
À l'époque, je me rappelle, j'étais dans le groupe qui
avait travaillé là-dessus au niveau de la consultation
provinciale qu'on avait faite. Je peux vous dire que le milieu avait
accepté, non pas facilement, mais il avait accepté, parce qu'il y
avait un genre d'équilibre entre les responsabilités et le
paiement des choses à l'intérieur alors que, là, dans le
projet de loi
actuel, tout ce qu'on fait, c'est qu'on paie. On charge.
Ça va faire, si vous voulez mon point de vue, comme ça a
fait au niveau de la Direction générale de l'inspection, à
un moment donné, où on a mis des amendes à tour de bras
sur des gens qui essayaient de suivre le droit chemin. À un moment
donné, on faisait le tour des régions et les gars ont dit: On ne
lèvera plus de permis en électricité parce
qu'aussitôt qu'on lève un permis, on se fait taper dessus. On va
lever des permis quand on va être obligés. Il y avait des gens qui
avaient réalisé, à l'époque, que peut-être de
mettre une amende, ça réglerait les problèmes, mais il n'y
avait pas d'équilibre. Et quand tu n'as pas d'équilibre,
ça ne peut pas marcher.
Ça va faire que les gens vont choisir la voie la moins
dangeureuse. Si la voie la moins dangereuse est de ne pas respecter les lois en
vigueur, les lois ne seront pas respectées. En 1985, lors de la loi 53
sur la Commission du bâtiment, je me rappelle très bien, il y
avait un certain équilibre. On avait un droit de parole, on avait un
droit de gérance à l'intérieur, chose qu'on ne retrouve
absolument pas dans la nouvelle Régie. Une régie, moi, ça
me fait peur de toute façon. Des grosses CSST, on en a assez d'une.
M. Brown: Alors, c'est ce que mon confrère vient aussi de
répéter. Les amendes qu'on a vécues il y a deux ou trois
ans, c'est l'attitude, à un moment donné, que les entreprises en
électricité de la province de Québec ont adoptée.
On va s'organiser pour en lever le moins possible et, comme ça, on ne se
fera pas poigner. Alors, les amendes qu'on a à l'heure actuelle dans le
projet de loi en tant que tel, qui sont là, plus on va en mettre, plus
il va y avoir des hors-la-loi.
M. Gosselin: Le but à viser par des projets de loi
semblables, c'est de contrôler ceux qui font mal, non pas d'achaler ceux
qui font bien, non pas de taper sur ceux qui font bien, parce que ceux qui font
bien, ils vont venir à faire mal si on tape dessus tout le temps. C'est
ça qui va se passer, je pense, dans l'alignement qu'on prend
actuellement. C'est qu'on amène tout le monde sur le même pied: la
politique et l'égalité des têtes. Quand on coupe la
tête aux genoux, il ne reste plus grand-chose pour
réfléchir.
Le Président (M. Bélanger): Alors, merci, M.
Gosselin. Sur ces paroles pleines de sagesse, M. le ministre, si vous voulez
remercier nos invités.
M. Cherry: D'abord, je voudrais vous remercier de vous être
déplacés aujourd'hui et de m'avoir présenté ce
mémoire. Je veux vous assurer que vos représentations occupent
une partie importante de mon attention et que dans l'exercice que nous faisons
aujourd'hui, nous apportons beaucoup de travail. C'est pourquoi - je vous ai
déjà informé, mais je le fais à votre organisme
comme aux autres - j'ai demandé à une équipe du
ministère de rester disponible. On va travailler en fin de semaine, en
collaboration, pour tenter de trouver, ensemble, les pistes de solutions qui
nous conviendront, je l'espère, respectivement. Alors, encore une fois,
merci de vous être déplacés, non seulement vous, les
officiers, mais les membres qui vous accompagnent.
M. Brown: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi. (23 heures)
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, messieurs, je vous remercie de votre participation aux
travaux de cette commission. Je dois dire que le niveau de réflexion
était particulièrement intéressant et enrichissant
également, mais ce que j'apprécie le plus, finalement, des deux
corporations, je dois le dire, c'est que vous ayez démontré la
capacité de vous prendre en main et de réglementer votre
façon de faire et de vous autodiscipliner. Il faudrait juste qu'on
puisse le retrouver davantage dans d'autres secteurs d'activité,
d'autres métiers de la construction. Je ne sais pas si c'est possible,
mais il me semble qu'il y a là un modèle de fonctionnement qui
devrait nous inspirer. Il serait regrettable, pour ne pas dire infiniment
déplorable, qu'on traite cette expérience et ce modèle de
développement comme si ça n'avait pas existé et qu'on
démolisse comme ça, du revers de la main, une expérience
qui a été enrichissante, mais qui a été efficace et
qui a donné des résultats.
Je me serais attendue à ce que le ministre prenne des engagements
un peu plus fermes. Je vous disais tout à l'heure, au moment où
j'ai commencé l'interpellation, pas l'interpellation mais les questions,
que je pensais que le ministre se montrait un peu plus ouvert. J'aurais cru
qu'il aurait, au terme de votre intervention, pris des engagements un peu plus
fermes.
M. Brown: On est prêts à l'écouter. Des
voix: Ha, ha, ha!
Mme Blackburn: Je suis prête à lui laisser quelques
minutes. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie la Corporation des maîtres
électriciens du Québec et, avant d'inviter l'autre groupe,
n'oubliez pas mon calendrier.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Bonsoir et merci
beaucoup.
Nous entendrons maintenant l'Association de la construction du
Québec. S'il vous plaît! Je demanderais à chacun de bien
vouloir reprendre sa place. Nous avons un dernier groupe a recevoir qui est
l'Association de la construction du Québec. Comme on dit en bon
français "the last, but not the least". Compte tenu de l'heure, je
demanderais votre collaboration, s'il vous plaît! Je pense que tout le
monde est un petit peu fatigué, mais nos derniers invités ont
droit à autant de considération que les premiers. Quelque part,
c'est écrit que les derniers seront les premiers... En tout cas,
ça devrait s'appliquer ici, je présume.
Sans plus tarder, M. René Lafontaine, qui est le président
de l'Association de la construction du Québec. M. Lafontaine, je vous
demanderais de bien vouloir présenter les gens qui vous accompagnent et
de commencer la présentation de votre mémoire. On est tout
ouïe. Je vous remercie.
Association de la construction du
Québec
M. Lafontaine (René): Merci, M. le Président.
Permettez-moi de vous présenter d'abord, à mon extrême
gauche, M. Denis Linteau, entrepreneur en électricité et en
mécanique, secteurs industriel et commercial; à ma gauche, M.
Robert Linteau, président-fondateur de l'ACQ et membre du conseil
d'administration de la SHQ; à mon extrême droite, M. Claude
Bernier, entrepreneur, secteur résidentiel; ensuite, Me Jean
Ratté, avocat, directeur des services juridiques à l'ACQ; M.
Richard Di Muro, vice-président de l'ACQ et membre du CFPIC; Me Michel
Paré, secrétaire exécutif de l'ACQ, et je suis René
Lafontaine, président. Merci.
Je demanderais à Me Paré de faire la présentation,
s'il vous plaît!
Le Président (M. Bélanger): Vous connaissez nos
règles du jeu: 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes. Oui? O.K. On y va
maintenant.
M. Paré (Michel): On va commencer un vendredi et on va
finir un samedi.
Le Président (M. Bélanger): II y a des chances,
oui.
M. Paré (Michel): M. le Président, en cette 23e
heure de ce magnifique vendredi de décembre, l'ACQ vous remercie de lui
donner l'opportunité de se faire entendre sur les projets de loi 185 et
186. Nous avons été convoqués à cette commission
parlementaire il y a six jours à peine pour vous produire le petit
mémoire qu'on vous a remis, mais qui est de grande importance et qui est
axé sur l'avenir et sur l'industrie. Vous avez cependant battu le record
de huit jours accordés par votre prédécesseur, M. Pierre
Paradis, en mai 1988, lors des auditions sur le projet de loi 31, avec les
résultats que nous connaissons aujourd'hui. Espérons que ce
record ne camouflera pas un échec encore pire que le projet de loi
31.
La composition du mémoire - on s'excuse si on vient à
peine de vous le remettre - comporte plusieurs éléments. Il y a
d'abord une présentation de l'ACQ, quelques énoncés
politiques de base que l'on y retrouve, une critique sur l'orientation
législative du projet, etc., et plusieurs annexes qui sont des
documents, des mémoires ou des discours et des énoncés
politiques pour références futures. En espérant que vos
fonctionnaires liront l'ensemble du document avec le même enthousiasme et
la même ferveur que l'ACQ lorsqu'elle prend connaissance de vos projets
de loi.
La présentation de notre mémoire, évidemment, ne
sera pas une lecture de l'ensemble du document. On va se limiter à
quelques éléments de présentation de l'ACQ parce que,
aujourd'hui, c'est quand même la première commission parlementaire
que l'ACQ fait en tant que nouvel organisme. Nous allons également
discuter surtout de l'orientation législative, nous vous
présenterons nos revendications particulières et nous conclurons
en souhaitant que vous aurez eu le temps de partager nos 10
énoncés politiques de base que l'on retrouve au chapitre II du
mémoire.
Au niveau de la présentation de l'ACQ, laissez-moi vous rappeler
que l'Association de ia construction du Québec, de façon libre et
volontaire, représente quelque 6500 entreprises de construction qui
réalisent plus de 80 % du volume des travaux de construction au
Québec. Ces entreprises que l'on retrouve à l'intérieur de
notre réseau composé de 15 associations de construction
affiliées opèrent comme entreprises générales ou
comme entreprises spécialisées. L'ACQ représente des
entreprises générales du secteur résidentiel, du secteur
commercial, du secteur industriel, institutionnel et de génie civil.
Elle regroupe des entreprises spécialisées dans toutes les
catégories de spécialisation que l'on retrouve dans la
construction: électricité, peinture, plomberie, excavation,
toiture, etc.
De plus, l'ACQ représente la Corporation des maîtres
entrepreneurs en réfrigération du Québec, l'Association
d'isolation du Québec, l'Association des entrepreneurs en ventilation et
climatisation du Québec, l'Association des maîtres peintres du
Québec, l'Association des entrepreneurs en intercommunication et
l'Institut d'acier d'armature. L'on représente également 400
entreprises qui sont assujetties aux décrets de menuiserie
métallique, produits de béton, décret sur la tuile, marbre
et terrazzo, et production de cadres et portes d'acier. Et c'est l'ACQ qui est
le négociateur patronal.
Dans le domaine de l'électricité industrielle, l'ACQ
représente différentes entreprises et nous avons soumis quelques
noms. Dans le domaine de la mécanique industrielle, vous y retrouvez
également des entreprises qui sont membres de l'ACQ.
En termes d'heures déclarées à la Commission de la
construction, des 50 plus gros employeurs identifiés par la CCQ en 1990,
84 % sont membres de l'ACQ et représentent à eux seuls un nombre
d'heures déclarées de plus de 17 000 000. En termes de chiffres
d'affaires, selon une compilation faite par le journal Québec
Construction, 80 % des plus grandes entreprises sont membres de l'ACQ, pour
un chiffre d'affaires de plus de 3 000 000 000 $. Si on y ajoute certaines
entreprises que l'on connaît et qui, normalement, devraient se retrouver
dans ce palmarès, c'est plus de 4 000 000 000 $ faits par environ 75
entreprises, et vous avez des noms en référence.
L'ACQ est donc le seul véritable porte-parole de l'entreprise qui
oeuvre dans l'industrie de la construction pour toutes les questions affectant
l'entreprise autres que la négociation des relations du travail relative
au décret de la construction. C'est pourquoi l'ACQ est
représentée au sein de conseils d'administration et de
différents comités. À titre d'exemple, on vous en a mis
quelques-uns à la page 8; ça va du conseil d'administration de la
CCQ à la Société d'habitation du Québec, au Conseil
d'arbitrage commercial national et international, etc.
L'ACQ est aussi la seule association industrielle du secteur de la
construction qui est reconnue par le ministère québécois
de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. Nous espérons que
cette brève description saura démontrer aux membres de
l'Assemblée nationale l'importance et le rôle de l'ACQ dans
l'industrie de la construction. L'adhésion de notre "membership" se
faisant sur une base libre et volontaire, cela nous fait partager des
préoccupations d'industrie et non des intérêts
corporatistes.
Les 10 énoncés politiques de l'ACQ, vous les avez, et ils
pourraient se résumer dans un slogan que plusieurs ont partagé
dans le passé et que nous avons adapté à l'industrie, "Les
travaux de construction aux entrepreneurs de construction".
Malheureusement, l'orientation législative du projet de loi
s'inscrit dans une démarche interventionniste traditionnelle alors que
notre société est à franchir une étape historique
où la mondialisation des marchés devient une composante
importante de notre économie et particulièrement de l'industrie
de la construction. Le défi actuel de notre industrie, c'est de
faciliter la métamorphose de l'entrepreneur traditionnel en
développeur industriel compétent, ce qui est l'unique moyen pour
contrer la compétition internationale et faire face à la
globalisation des marchés et assurer le maintien des emplois et
l'utilisation des produits et du savoir québécois.
Ce défi est pourtant connu des autorités gouvernementales.
Le président-directeur général de la Société
d'habitation du Québec, dans un discours prononcé en avril 1990
à l'intention des entrepreneurs du secteur résidentiel sur "Les
innovations technologiques: une menace pour votre industrie", disait, et je
cite: "Vous devez chercher à améliorer votre part du
marché. Cette recherche de nouvelles méthodes de construction,
l'utilisation de nouveaux matériaux et le transfert de certaines
technologies pour obtenir des coûts de production des unités plus
abordables...." Il poursuivait: "Un retard dans ce domaine favorisera la
concurrence extérieure au Québec [...] on ne parlera pas
d'améliorer votre part du marché, mais plutôt de ne pas la
voir trop diminuer ou même disparaître." Et on vous a mis, dans le
mémoire, à la page 14, quelques exemples qui vous
démontrent jusqu'à quel point l'industrie de la construction au
Québec est en péril. (23 h 15)
Car il faut savoir que le bâtisseur d'aujourd'hui doit faire appel
à de nouvelles technologies s'il veut être capable de concurrencer
l'arrivée d'entreprises étrangères et aussi d'exporter son
savoir-faire. À l'heure actuelle, les techniques de construction
utilisées au Québec perpétuent à 85 % les
méthodes traditionnelles de construction sur le chantier. Le niveau
d'implantation de nouvelles façons de bâtir demeure très
faible, l'environnement réglementaire et les pratiques commerciales
étant les principales embûches à l'implantation des
nouvelles techniques.
L'ACQ, au mois d'août, était heureuse de constater, et nous
l'avons fait savoir au ministre, que le gouvernement rejetait l'idée
d'un régime de revenu garanti pour retenir le concept d'instauration de
la qualité totale dans l'industrie. Nous lui avons même
souligné que l'ACQ travaille sur un projet d'implantation d'un programme
de qualité totale qui est une pièce maîtresse pour le
développement d'une stratégie industrielle globale dans
l'industrie de la construction.
L'ACQ a tendu la main au ministre du Travail pour élargir
à son ministère le partenariat ACQ-MICT. Malheureusement,
certains ont préféré proposer un rapiéçage
en vase clos de vieilles lois d'où on ne peut dégager aucune
stratégie industrielle pour répondre aux nouvelles
réalités et aux réels besoins des entrepreneurs.
Bien plus, le projet de loi apparaît comme une pièce
détachée de son origine Picard-Sexton sans même en
respecter l'ordre chronologique établi. Une fois le spectre du
régime de revenu garanti passé, on pouvait toujours retrouver
dans ce rapport Picard-Sexton quelques éléments moteurs pouvant
s'apparenter à la mise sur pied d'une stratégie construction:
politique de construction publique, commission de stabilisation, etc. Mais
voilà, on vient de sauter le tiers des
recommandations.
Or, le ministre est en train de rater une belle occasion de faire sa
marque comme artisan d'une réforme de l'industrie axée sur
l'avenir par l'implantation d'une stratégie industrielle globale pour la
construction. Cette absence de visée industrielle résulte
probablement du mandat même du ministre dont la Loi sur le
ministère du Travail impose comme fonction première à son
titulaire d'élaborer et de proposer des politiques visant à
favoriser des relations du travail harmonieuses entre employeurs et
salariés. À la base même, pour l'ACQ, le processus est
vicié. Il est temps, même urgent, que l'industrie de la
construction soit perçue sous un angle autre que les seules relations du
travail.
D'autre part, plusieurs tentent de ramener l'industrie au seul secteur
habitation ou à un seul métier. Ces trois orientations, relations
du travail, habitation, un seul métier, ont conduit l'industrie
là où nous sommes aujourd'hui, dans un cul-de-sac, simplement
parce qu'elles reposent sur des sous-ensembles de l'industrie. Pour s'en
convaincre, regardez les problèmes reliés à la tuyauterie
industrielle, à la réfrigération, à
l'électricité industrielle, etc.
Avant de devenir un employeur dans la construction, il faut d'abord
avoir l'âme, le goût et les qualités d'entreprendre, de
devenir entrepreneur, de fonder une entreprise, de construire. Il faut une
qualification professionnelle et l'ACQ partage le même objectif, mais
dans une démarche différente. Mais il faut d'abord avoir
accès à un marché et, au rythme où vont les choses,
quand ce n'est pas la compétition étrangère qui
étouffe l'industrie, ce sont les pouvoirs publics par le
rétrécissement du champ d'application de la loi.
Il faut reconnaître et décréter de façon
urgente que tous les travaux de construction doivent être
effectués par des entreprises de construction, sinon nous allons
carrément vers une disparition du marché de l'industrie de la
construction, puisque la part de production occupée par les
entrepreneurs engagés principalement dans l'industrie de la construction
était passée de 80 % en 1975 à seulement 64 % en 1985,
tandis que la part occupée par les entreprises non principalement
engagées dans la construction, dont les pouvoirs publics et les
organismes publics, passait, elle, de 20 % à 36 % au cours de la
même période. Un exemple précis, Hydro-Québec est
détenteur d'une licence d'entrepreneur de construction dans 8
catégories d'entrepreneur général et 18 catégories
d'entrepreneur spécialisé, et, en 1990, Hydro-Québec
était le 6e employeur professionnel en importance au Québec dans
le domaine de la construction, avec un nombre d'heures rapportées
à la CCQ de 668 000. Lorsqu'on a rencontré le ministre la semaine
passée, Hydro-Québec était au 15e rang, mais on avait les
chiffres de 1989. Ils sont rendus au 6e.
Il y a deux projets de loi sur la table et aucune volonté
politique d'accorder les travaux de construction aux entreprises de
construction. C'est inacceptable. Il faut bouger, parce que c'est vous autres,
les parlementaires, par les lois que vous adoptez, qui avez réduit le
champ d'activité de la construction. Aujourd'hui, il faut corriger les
erreurs du passé, et le projet de loi 185, dans son champ d'application,
est une belle occasion de le faire.
Au chapitre des plans de garantie résidentiels de l'ACQ, il faut
avoir l'honnêteté de reconnaître que ces plans s'inscrivent
dans un processus de qualification professionnelle supérieur aux normes
gouvernementales actuelles, et cela, depuis une bonne dizaine d'années.
Au lieu de vouloir s'en prendre aux plans de garantie, le gouvernement devrait,
dans un premier temps, obliger les deux tiers des entrepreneurs errants
à se faire accréditer à un plan de garantie
résidentiel. Au moment où l'on se parie, une proportion de 20 %
à 25 % des demandeurs, détenteurs d'une licence de la
Régie, ne passent pas au tamis des exigences des critères de
sélection de l'ACQ. Il existe donc déjà, sans alourdir la
réglementation actuelle, les outils nécessaires pour
autodiscipliner l'industrie, par une prise en main de sa propre destinée
plutôt que par la création d'un organisme de tutelle qui
décide de tout, sans avoir à consulter qui que ce soit.
Le gouvernement n'a pas à être gêné des pians
de garantie de l'ACQ, puisque le texte de nos garanties et de nos protections a
été imposé par nul autre que le ministre de l'Habitation
et de la Protection du consommateur. Nous ne pouvons aujourd'hui accepter que
le gouvernement nous reproche d'avoir respecté les textes qu'il nous a
imposés en 1982 et, par surcroît, qu'il se base sur notre respect
de ses propres directives pour nous imposer une camisole de force
tricotée dans des isoloirs.
À la lumière de notre expérience, nous constatons
aussi que les demandes irréalistes vis-à-vis le plan de garantie
actuel concernant la couverture de toutes les réclamations envisageables
d'un propriétaire mécontent obligeront la Régie à
établir ses propres critères qui s'avéreront
substantiellement plus dispendieux pour les consommateurs que ceux
déjà offerts par les organismes privés. L'ACQ
réitère sa position à l'effet que les plans de garantie
doivent devenir obligatoires, en autant que le pouvoir d'accréditation
des entrepreneurs demeure aux organismes privés reconnus par le
gouvernement. Nous soutenons également que l'ensemble des notions
relatives à la Loi sur la protection du consommateur doit être
enlevé de la Loi sur le bâtiment afin d'éviter toute
confusion, et ce, au même titre que le gouvernement l'a fait lors de la
révision du Code civil il y a quelques semaines.
En termes de protection du consommateur, l'ACQ a fait plus en 10 ans que
n'importe quelle Régie des entreprises de construction du
Québec,
et vous devez nous respecter. Et nous respecter, ça signifie de
ne pas déléguer les pouvoirs du gouvernement à une
régie exclusivement administrée par des fonctionnaires. Nous
respecter, ça signifie que les entrepreneurs de construction doivent
absolument siéger de façon majoritaire au conseil
d'administration de la future régie du bâtiment si l'intention
gouvernementale est toujours de procéder à toute vitesse à
l'adoption de cette loi, ce à quoi nous vous donnons une fin de
non-recevoir. Nous respecter, ça signifie de ne pas reléguer les
entrepreneurs dans une instance de deuxième zone sans aucun pouvoir
effectif et placés sur le même pied qu'un consommateur ou un
travailleur, alors que l'essentiel même du projet de loi porte sur la
qualification professionnelle des entreprises. Parce que, actuellement, la
mécanique de fonctionnement de la future Régie exclut les
entrepreneurs de tout pouvoir décisionnel, cette démarche est
étrangère à la notion de responsabilisation du milieu.
Soyons au fait de la réalité. L'orientation du projet de
loi 186 ou, devrait-on dire, l'engouffrement par un tel projet de loi, se
compose à plus de 70 % de pouvoirs discrétionnaires. En somme,
c'est un chèque en blanc à l'ordre d'une poignée de
fonctionnaires. Un peu plus de 25 % des articles regroupent plus de 150
pouvoirs discrétionnaires. Traduction: une mise en tutelle de
l'industrie de la construction.
Bref, le projet de loi sur le bâtiment écarte les
entrepreneurs des pouvoirs décisionnels concernant leur industrie,
accorde aux fonctionnaires un pouvoir discrétionnaire de vie ou de mort
sur l'entrepreneur, soustrait le gouvernement de toute mesure pouvant favoriser
l'industrie de la construction et n'accorde aux entrepreneurs qu'un simple
pouvoir de consultation au même titre que les travailleurs,
consommateurs, municipalités, etc.
Nous ne sommes plus à l'ère de la prise en otage. Nous
sommes à l'ère de la libération des otages, de la
concertation, du partenariat. Il est temps que le ministère du Travail
se mette à la page s'il veut maintenir un minimum de
crédibilité à l'intérieur du patronat de la
construction. Alors que ce projet de loi s'inscrit dans un discours politique
qui déclare rechercher l'atteinte de la qualité totale dans
l'industrie, sait-on seulement, comme le disait le député de
Sherbrooke dans un discours du mois d'avril 1990, que dans le domaine du
bâtiment la non-qualité représente entre 10 % et 20 % du
chiffre d'affaires? Des progrès importants ne pourront être
accomplis dans ce domaine que par le développement des plans de
qualité dans toutes les firmes et par un réel partenariat sur le
chantier.
Alors, force est de constater qu'il n'y a aucune mesure dans le projet
de loi 186 visant à développer une stratégie
d'implantation générale de démarche qualité au sein
de l'entreprise. Il n'y a aucune mesure visant à augmenter la
compétitivité de nos entreprises. Il n'y a aucune mesure visant
à favoriser une plus grande efficacité et une meilleure
productivité. Il n'y a aucune mesure visant à conserver nos
marchés actuels et surtout en développer de nouveaux tant dans le
marché intérieur qu'extérieur. Il n'y a aucune mesure
visant à aider nos entreprises à gérer le
développement et il n'y a aucune mesure visant à aider nos
entreprises à instaurer un PDRH.
Donc, cette nouvelle régie semble être l'opposée de
la réalité et du défi actuel de l'industrie; elle conjugue
au présent les incertitudes et le gouffre de notre futur. Le
véritable défi de notre industrie tient en des enjeux de
recherche, de développement, de formation, de gestion de qualité,
d'économie de marchés, de pratiques commerciales, d'utilisation
et d'accès aux nouvelles technologies, d'impact de la
réglementation sur la productivité et la
compétitivité, de maillage
propriétaire-concepteur-manufacturier. Le défi de notre industrie
doit aussi faciliter la métamorphose de l'entrepreneur traditionnel en
développeur industriel compétent et reconnu. Il doit aussi
corriger le système d'octroi des contrats publics
développé exclusivement sur les plus bas prix pour accorder des
contrats sur la base de critères de compétence,
d'expérience, de performance et de qualité. Le défi de
notre industrie doit aussi récupérer la part de marché
évaluée à plus de 36 % actuellement qui est détenue
par des entreprises non principalement engagées dans l'industrie, ce qui
n'inclut même pas le travail au noir.
À l'heure ou les discours de notre société
s'articulent autour des prémisses de prise en charge par le milieu, de
qualité totale, de partenariat et de grappes industrielles, où
l'habitat est considéré comme une grappe dite stratégique,
mais non concurrentielle, on devrait ajuster les futurs organismes gravitant
autour du ministère du Travail au diapason de la réalité
économique et organisationnelle de l'industrie avant d'adopter une loi
de tutelle. (23 h 30)
L'ACQ vous propose l'option ACQ, comme orientation, ce qui veut dire
reconnaître l'industrie de la construction comme un secteur industriel et
développer une stratégie globale d'intervention pour permettre
aux entreprises d'affronter le libre-échange et la concurrence
internationale par le développement technologique de leur structure
d'opération pour en arriver à un produit final
québécois compétitif et rentable par la qualité
dans le domaine du bâtiment et du génie civil.
L'option ACQ, c'est de reconnaître que tous les travaux de
construction doivent être effectués par des entreprises de
construction et mettre en application les mesures fiscales appropriées
pour combattre le travail au noir. L'option ACQ, c'est de cesser de confondre
l'administration des régimes de relations du
travail avec la mise en place d'une stratégie industrielle de
développement de l'entreprise du secteur construction. L'option ACQ,
c'est de développer un vrai partenariat entre le gouvernement et ses
principaux ministères concernés par la construction et l'ACQ.
Quant aux revendications de l'ACQ sur le projet de loi, vous les avez
à la page 43: c'est le report du projet de loi 186 parce que l'organisme
proposé ne répond pas aux attentes actuelles de l'industrie - je
vous laisse un temps pour avoir une réponse positive - et, à
défaut de reporter l'adoption du projet de loi 186, les entrepreneurs
doivent être membres du conseil d'administration et être
majoritaires au conseil d'administration de la régie; c'est
reconnaître l'ACQ comme le seul représentant de l'ensemble de
l'industrie de la construction pour toute question autre que le domaine des
relations du travail dévolues à l'AECQ; c'est la mise sur pied
d'un comité interministériel des principaux ministères
concernés par la construction et l'ACQ; c'est la mise sur pied d'un
comité gouvernemental avec l'ACQ pour déterminer les
paramètres des plans de garantie; c'est reconnaître et mettre en
application les énoncés politiques de l'ACQ qui doivent guider
toute action de support de l'État québécois dans le
secteur de l'industrie de la construction, tel qu'énoncé au
chapitre II du présent mémoire.
En conclusion, M. le Président, l'ACQ appuie les divers objectifs
véhiculés dans le discours du ministre du Travail de juin
dernier, intitulé "Vers la qualité totale dans l'industrie de la
construction, les suites gouvernementales au rapport Picard-Sexton", et qui
visent à améliorer la qualité des travaux de construction,
à responsabiliser davantage les intervenants, à mieux contrer le
travail au noir et à mieux protéger le consommateur.
Nous sommes d'accord avec l'instauration d'amendes plus
sévères, d'un guichet unique de qualification, du retrait ou de
la suspension de la licence ou d'un code de déontologie. Cependant, nous
sommes définitivement contre la façon de faire pour l'atteinte de
ces objectifs. L'encadrement doit se faire à la lumière d'une
vision globale de l'industrie. Une telle démarche doit s'inscrire dans
un processus de partenariat avec l'ACQ, ce qui n'est malheureusement pas le cas
du projet de loi 186. On a plus l'impression que c'est une réforme
partielle et incomplète d'une réglementation
désuète et sans perspective d'avenir, faussée par
l'insertion d'un nouvel organisme à l'intérieur du mauvais
ministère. De prime abord, l'ACQ possède peut-être plus
d'affinités avec la vision d'ensemble prônée par le
ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie plutôt
qu'avec la vision artificielle centrée sur les fonctions
premières du ministère du Travail.
Les projets de loi sous étude maintiennent une partie importante
des travaux de construc- tion en dehors de l'industrie, démontrent une
absence totale de stratégie industrielle du secteur de la construction,
ne prévoient aucune disposition favorisant une plus grande
efficacité et une meilleure productivité, ne proposent aucune
mesure efficace pour conserver nos marchés actuels et surtout en
développer de nouveaux, ne relèvent aucun des vrais défis
de l'industrie et ne répondent pas aux réels besoins des vrais
entrepreneurs.
Le projet de loi 186 mérite plus que d'être voté,
mérite plus que d'être bafoué à la hâte; il
doit faire l'objet d'une étude plus approfondie par l'effort de
concertation des vrais intervenants de l'industrie. À ce titre, l'ACQ
tend la main à tous les parlementaires et au ministre pour travailler
ensemble au développement d'une véritable stratégie
industrielle de notre industrie qui est et qui continuera, avec le projet de
loi, d'être l'industrie la plus réglementée des industries
québécoises. L'industrie de la construction au Québec est
en péril et les projets de loi déposés n'apaisent
aucunement les menaces qui nous guettent. Merci de votre attention.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
ministre.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Vous avez
commencé votre intervention en disant que vous n'aviez eu que six jours
d'avis et que c'est pour ça que vous nous aviez préparé un
petit mémoire comme celui-là. Je regrette quasiment de vous avoir
donné six jours.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laforrtaine: M. le Président, ça fait plusieurs
années qu'on prêche dans le désert, par exemple.
M. Cherry:...
Une voix: Ça fait plusieurs années que vous
écriviez. Vous attendiez l'occasion.
M. Paré (Michel): M. le Président, si vous me le
permettez, la brique que l'on vous a remise constitue la première pierre
de l'édification d'une nouvelle industrie de la construction au
Québec.
M. Cherry: O.K.
M. Paré (Michel): À vous de la prendre.
Le Président (M. Bélanger): La pierre angulaire. M.
le ministre.
M. Cherry: Merci. Je voudrais vous entendre. À la page 43,
au point 3, vous dites. "Reconnaître l'ACQ comme le seul
représentant de l'ensemble de l'industrie de la construction
pour toute question autre que le domaine des relations du travail
dévolues à l'AECQ". Voulez-vous nous dire pourquoi votre
organisme seul plutôt que d'autres organismes que nous avons entendus ce
soir, que ce soit l'APCHQ, que ce soient les corporations? Quelles sont les
qualités que vous croyez être les seuls à posséder
qui vous qualifient pour être les seuls représentants de
l'ensemble de l'industrie, sans faire de place aux organismes que je viens de
nommer?
M. Paré (Michel): Vous avez, dans le domaine des relations
du travail, la négociation du décret, un organisme qui est
l'AECQ, qui négocie les relations du travail. Il y a beaucoup plus dans
la vie d'une entreprise de construction que la négociation du
décret: les autres aspects de l'industrie, il y a différents
corps de métiers, différentes spécialisations. Vous avez,
au Québec, quelques corporations à adhésion obligatoire
unimétier. La réalité de l'industrie n'est pas
unimétier. Il y a plusieurs intervenants d'autres secteurs de
spécialisation. Il y a dans la construction une multitude d'entreprises
qui n'oeuvrent pas uniquement dans le secteur résidentiel, mais qui font
également des travaux commerciaux, institutionnels, etc. Il y avait des
statistiques que je n'ai pas ici, qu'on a présentées dans le
rapport Picard-Sexton et qu'il va nous faire plaisir de vous transmettre
dès lundi matin. Vous devez avoir une perspective plus large où
on parle de marché, où on parle de technique, de technologie,
où on parle d'exportation, où on parle de formation. C'est un
secteur industriel et, au Québec, il faut qu'il y ait un seul organisme
qui travaille sur ces aspects.
Vous avez, en annexe, un document qui explique que les petites
entreprises sont perdues dans toutes les interventions gouvernementales. Il y a
énormément de recherche et de développement un peu partout
à gauche et à droite. Les petites entreprises sont perdues et ne
sont pas capables de s'y rendre. Nous vous disons qu'il doit y avoir un
organisme qui oeuvre et qui représente les entreprises dans leur vie
d'entreprise. Nous avons actuellement des conflits de spécialisations
entre organismes qui ont pour effet de tuer des entreprises, et ça,
c'est inacceptable. Ce résultat découle strictement d'une vision
corporatiste et je fais référence au dossier
d'Hydro-Québec, dans son programme Bi-Énergie, où les
entrepreneurs détenteurs d'une licence de la Régie ne peuvent pas
devenir maîtres d'oeuvre. Les entreprises en réfrigération
thermopompe... Il y a des entreprises qui sont en train de crever
présentement, qui disparaissent, et ça, c'est le résultat
d'une bataille corporative. Nous disons qu'il faut que les entreprises soient
qualifiées et, si elles détiennent les licences
spécifiques qui leur permettent de réaliser les travaux, qu'on
leur donne la possibilité d'effectuer ces travaux. Qu'on ne les oblige
pas, pour avoir le droit d'effectuer ces travaux, d'être membres, depuis
trois ans, d'autres organismes. Peut-être que monsieur...
Voilà.
M. Cherry: Merci. Vous avez mentionné dans votre
mémoire, vous avez parlé, vous avez fait référence
à votre souci de maintenir les plans de garantie, et vous en
possédez, votre organisme. Lors de nos rencontres
précédentes, vous m'avez indiqué que, dans ce
domaine-là, vous cheminiez en étroite collaboration avec l'Office
de la protection du consommateur pour assurer l'arrimage des exigences de cet
organisme-là avec vos plans. Et toujours en référence avec
ma première question à laquelle vous venez de dire, dans des
termes qui sont les vôtres, les justifications que vous croyez pour que
vous soyez les seuls, au niveau des plans de garantie, vous en avez et d'autres
en ont, comment distribuez-vous la part du marché qu'est la vôtre
par rapport aux autres?
M. Paré (Michel): II y a deux plans de garantie. Les deux
plans continuent d'opérer et il y a une saine compétition entre
les deux plans. C'est différent de l'adhésion obligatoire
à un organisme. Il n'y a pas deux corporations des maîtres
électriciens du Québec; il y en a seulement une. Il n'y a pas
deux corporations des maîtres mécaniciens en tuyauterie; il y en a
seulement une. Si les corporations perdent leur pouvoir de qualification, et
nous sommes d'accord avec le guichet unique de qualification, ils n'ont plus de
raison d'être. Si les entreprises du secteur électricité ou
du secteur plomberie veulent se regrouper, nous applaudissons à cette
volonté d'entrepreneur, mais qu'elles le fassent au même titre que
les autres entreprises, les autres spécialités, qu'elles le
fassent sur une base volontaire. Qu'on cesse de maintenir artificiellement des
organismes. Et les plans de garantie sont, évidemment, une
activité strictement commerciale. Il y a une saine compétition et
elle est féroce.
M. Cherry: Ça termine mes questions, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
président, M. le directeur général, messieurs, bonsoir. Je
pense qu'il valait la peine de rester aussi tard pour vous entendre. C'est un
des mémoires qui nous a replacé toute la situation dans une
perspective beaucoup plus intégrée et dans la perspective qui est
celle, j'allais dire du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie. Mais je pense qu'il n'a pas parlé à son
collègue ou son collègue ne lui a pas parlé, parce que
ça semble être deux voies parallèles, mais on n'a pas
l'impression qu'ils vont se rencontrer tantôt.
En fait, la régie du bâtiment, c'est l'équivalent de
l'étatisation de l'industrie de la construction. On a nationalisé
l'industrie de la construction et je trouve ça regrettable, parce que,
autant le projet de loi 53, j'y reviens, avait fait consensus dans le milieu,
autant celui-ci divise. Ces deux projets de loi vont diviser. Je ne comprends
pas que le ministre soit arrivé à ces conclusions compte tenu de
ce qu'il avait annoncé dans son énoncé, pas d'orientation,
mais dans sa déclaration ministérielle de juin dernier.
Vous avez raison de dire - évidemment, II faut le comprendre
également, le ministre est ministre du Travail - que la perspective dans
laquelle est placé ce projet de loi en est une exclusivement de travail.
Donc, elle n'a pas pris en compte l'aspect plus global et plus dynamique de la
synergie qui devait exister entre travail, exécution,
développement, recherche, tous les aspects, finalement, qui composent
l'industrie de la construction, dans une perspective de grappes dont on parle
tant ces jours-ci, mais il semble que, dans votre cas, les vendanges vont
être loin. " (23 h 45)
On parle de grappes industrielles. Ce projet de loi pèche de la
façon suivante. On aurait dû retrouver autour de la même
table, pour élaborer ce projet de loi, le ministre des Finances, ie
ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu. On aurait dû pouvoir voir
l'influence de ces ministres au sein de ces projets de loi. Le deuxième
défaut de ce projet de loi qui, à mon avis, est important, compte
tenu de la réaction qu'il a suscitée chez les autres
intervenants, on a attaqué violemment les entrepreneurs autonomes comme
s'ils étaient les seuls responsables et coupables du travail au noir. Il
y a du travail au noir, mais le travail au noir, c'est aussi le fait de grands
entrepreneurs, je veux aussi vous le dire, qui embauchent sous la table et qui
ne respectent pas le décret de la construction. Et c'est facile par les
temps qui courent parce qu'il y a le chômage, puis on exerce des
pressions sur le travailleur, s'il veut garder son emploi: Tu travailles, tu te
tais, tu ne fais pas de rapport, sinon regarde-moi venir, tu sais, il y en a
d'autres qui attendent. Il y a également les employés
syndiqués qui détiennent des cartes de compétence et qui
travaillent sous la table. Mais ce dont on a le plus entendu parler,
finalement, ce sont les entrepreneurs autonomes et ça m'a semblé
prendre plus de place que leur part relative du travail au noir. Mais
ça, c'est difficile à évaluer.
Je veux faire cette intervention parce que les travaux vont se terminer
tout à l'heure, parce que je pense que le ministre aura à
réfléchir d'ici la fin de semaine, d'ici lundi finalement, sur ce
qu'il fait de ces projets de loi. Ou il affronte, prend de front la majeure
partie des entreprises de la construction et une partie des syndicats, ou
encore il révise sa situation et se donne le temps de la
réflexion. Je souhaite très sincèrement qu'il se donne le
temps de la réflexion. On n'est pas dans une situation,
économiquement parlant, qui nous permet de créer des divisions au
sein de l'industrie de la construction. Ce n'est pas propice, à ce
moment-ci, ce genre de division alors que, de l'autre côté, on
prêche la concertation, on prêche le partenariat, on prêche
la synergie, alors que ces projets de loi ne faisant pas l'unanimité
vont créer le mécontentement. Mon appréhension, c'est que
les entrepreneurs, les syndiqués et les entrepreneurs autonomes, mais
beaucoup de personnes, ne se sentiront pas liés par les décisions
de la régie. Ils vont tout faire pour contrer ses orientations ou ses
décisions.
Le projet de loi qui crée une régie plutôt qu'une
commission, j'y reviens - et là, je ne voudrais pas faire offense aux
fonctionnaires - mais on a l'impression que ce projet de loi veut garder une
mainmise forte, une emprise complète, totale et entière du
gouvernement sur l'industrie de la construction. Messieurs, j'aimerais vous
entendre. Ensuite, mon collègue va prendre la parole. Vous nous dites
que vous accepteriez une modification qui vous donnerait plus de sièges
ou des sièges garantis à la régie de la construction. Mais
vous ne croyez pas que cette régie de la construction, même si
vous y êtes majoritaires, devra, un jour ou l'autre, pourrait, un jour ou
l'autre, céder aux pressions d'un gouvernement qui voudrait en faire un
réservoir de ressources financières pour garnir les coffres de
l'État, indépendamment du gouvernement, je le dis, il ne faut
jamais tenter un gouvernement et il faut adopter les lois, non pas pour un
ministre, mais il faut légiférer en se disant que les lois
pourraient être gérées par le pire des ministres dans le
pire des gouvernements?
M. Di Muro (Richard): Ce qu'on dit, madame, ce n'est pas d'avoir
des sièges absolument. Ce qu'on dit, nous, c'est tout simplement
inacceptable, cette formation comme telle. Mais, le moindre mal, si jamais il y
avait cette régie, on voudrait quand même être
représentés, si vous voulez, majoritaires au niveau de cette
régie pour en avoir le contrôle. Mais notre demande, ce n'est pas
ça, c'est qu'elle n'existe tout simplement pas.
M. Unteau (Robert): Vous avez parlé de 1985, de la loi 53,
je peux vous en parler légèrement parce que j'ai participé
au cours des dernières années à trois ou quatre
commissions parlementaires. D'après les entrepreneurs qui ont
paradé encore ici aujourd'hui, je me rends compte que c'est encore du
parei au même. Et là, quand on arrive avec la régie qui est
proposée, c'est même complètement à l'inverse de
tout ce qui s'est dit ici en 1985 et en 1988 quand on
parlait de la Loi sur le bâtiment, de la Commission du
bâtiment, on disait: II ne faut pas créer une régie, un
éléphant blanc; il faut faire attention pour ne pas créer
une deuxième CSST. Je pense que c'est clair. On a les résultats
d'une grande CSST, ça donne quoi? Les entrepreneurs payent assez
généreusement merci. Je suis convaincu qu'avec la régie
que vous voulez créer là on va se retrouver dans trois ans, les
mêmes entrepreneurs vont encore parader une journée de temps et
ils vont avoir seulement cinq jours, six jours pour prendre connaissance du
projet de loi et, cette fois-là, ça va être un projet de
loi pour tenter de diminuer le déficit de cette fameuse régie.
Ça va être ça. Vous allez prendre l'argent où? En
1988, lors de la loi 31, M. Paradis a dit textuellement: On n'est pas capables
de réglementer, c'est-à-dire de mettre des inspecteurs pour
arrêter le travail au noir; donc, légalisons-le. Mais pensez-vous
que c'est la solution? Tous les entrepreneurs qui ont paradé ici
aujourd'hui ont des solutions. Puis je dis que l'industrie de la construction a
des solutions à vous proposer. Mais je pense que ça va prendre
plus que six jours ou deux jours, une fin de semaine pour essayer de passer un
projet de loi à la hâte, dont tous les intervenants du milieu ne
veulent rien savoir, et je pense que la réponse est assez claire. On est
tous prêts, on travaille tous bénévolement et on va en
travailler des jours, des nuits et des fins de semaine encore si vous voulez
nous écouter et au moins prendre ce qu'on va vous amener de l'industrie
de la construction. C'est nous autres qui le vivons. Je pense, en tout cas, moi
en particulier, j'ai 25 ans d'expérience, on n'est pas tout seuls, il y
a tellement de gars qui sont prêts à y travailler et à vous
dire c'est quoi l'industrie de la construction et c'est quoi les
problèmes et quelles solutions vous pourriez apporter. Nommez-moi le
meilleur gars qui peut vous dire comment réglementer, qualifier son
compétiteur? C'est sûrement un entrepreneur. Il a sûrement
les moyens et la "pogne" nécessaire pour vous dire: C'est de même
que vous devriez qualifier les entrepreneurs ou faire respecter tel projet. Je
pense que c'est un gros manque et c'est malheureux. C'est très
malheureux d'autant plus que, imaginez-vous, on vous a présenté
ça à six jours d'avis. Donnez-nous en donc seulement 15,
imaginez-vous tout ce qu'on va vous apporter.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Paré (Michel): M. le Président, si vous me
permettez, pour enchaîner sur la question. À la page 11 de notre
mémoire, l'on fait référence, aux points 8 et 9, à
deux énoncés politiques de l'ACQ: redéfinir,
alléger et simplifier l'encadrement législatif et
réglementaire de l'industrie de la construction; réorganiser et
rationaliser les interventions gouvernementales et paragouver- nementales dans
l'industrie. On a présenté ailleurs, dans d'autres commissions
parlementaires, à d'autres tables de concertation, des études qui
ont été faites par d'autres et nous en avons produit une au
niveau de la Table de concertation sur l'habitation et que vous avez en annexe.
Mais vous avez également une annexe qu'on avait présentée
à une commission parlementaire sur la réforme du Code civil
où vous avez, en termes de réglementation, d'organismes qui
interviennent dans la construction, une étude de 1986 et, depuis ce
temps-là, ça n'a fait qu'augmenter: il y a environ 16 organismes
gouvernementaux et 28 lois différentes qui encadrent l'industrie de la
construction; en matière de normalisation, vous avez 13 organismes, 24
lois différentes; en matière d'autorisation, 10 organismes, 18
lois; en matière de certification, 5 organismes, 6 lois; en
matière d'accréditation, 10 organismes, 12 lois; en
matière de surveillance et de régularisation, 15 organismes, 25
lois; 16 des 21 lois qui régissent le bâtiment font appel à
la même activité qui consiste à faire des
vérifications, des inspections ou des enquêtes. Le jour où
vous nous direz en quoi les pouvoirs réglementaires dévolus
à cette régie vont venir simplifier cette vie des entreprises, on
sera heureux. C'est la raison pour laquelle on parle de
déréglementation. Donnez-nous du souffle! On devient des
fonctionnaires de la construction. C'est inacceptable pour l'entreprise
privée.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Oui. Je voudrais juste vous poser une question sur le
guichet unique. Tout à l'heure, vous avez fini votre intervention en
parlant, entre autres, des maîtres électriciens et des
maîtres mécaniciens en tuyauterie, en disant que, finalement, ils
devraient, dans le cadre d'une approche unique, plus ou moins se dissocier puis
revenir à des organisations sur une base volontaire comme ça se
fait dans d'autres domaines. Je vous pose la question sans aucune
arrière-pensée, mais j'imagine qu'on pourrait avoir le
problème à l'inverse aussi. C'est-à-dire qu'à
partir de l'exemple qui a été conçu ou monté
historiquement par les maîtres électriciens et les maîtres
mécaniciens en tuyauterie, on pourrait imaginer, plutôt que
d'aller à travers un guichet unique où tout le monde se perd,
où on ne sait plus trop à qui on se réfère et
comment on se situe à l'intérieur de tout ça, on pourrait
stimuler le fait que les autres corps de métier, les entrepreneurs en
réfrigération, les ferblantiers, les peintres, les couvreurs,
etc., s'organisent chacun dans leur secteur à l'image de ce qui s'est
fait au niveau des électriciens et des mécaniciens en tuyauterie.
À ce moment-là, j'imagine qu'il serait beaucoup plus simple,
beaucoup plus facile de responsabiliser tout le
monde et de faire en sorte que chacun, dans son métier respectif,
développe un code d'éthique, développe des normes de
déontologie et que Ion puisse beaucoup plus facilement identifier les
fauteurs de trouble dans chacun des domaines, dans chacun des corps de
métier. J'imagine, en tout cas, à première vue, que
ça pourrait être tout aussi intéressant que de parler
à travers un guichet unique où personne, finalement, ne se
reconnaît et où on met toujours la faute sur le dos de
l'autre.
M. Paré (Michel): Si vous me permettez, et je vais laisser
la parole à d'autres par la suite. Il y a 23 métiers dans la
construction. Il y a - vous avez le président de la Régie ici -
au moins une cinquantaine de spécialités, de licences
émises par la Régie. Allez-vous faire 50 organismes pour
délivrer 50 types de licences différentes? Lorsqu'on parle de
guichet unique, c'est pour simplifier, c'est pour rationaliser, c'est pour
frapper à une porte. On ne peut pas fonctionner avec 23 guichets pour
des métiers, 50 guichets pour les spécialisations, actuellement,
qu'on a à la Régie. Il y a des limites à un moment
donné. Et ça ne vient, d'aucune façon, la philosophie que
vous exprimez, réduire la réglementation. Je vais laisser la
parole à d'autres.
M. Di Muro: Je voudrais juste renchérir dans ce
sens-là. Au niveau de l'Association, chez nous, les mêmes corps de
métier qui se trouvent à l'intérieur des corporations ont
formé des groupes de travail qui représentent des métiers
en électricité industrielle. Ils se sont regroupés pour
refaire des codes d'éthique et des choses de même. Mais quand
même, ils se rattachent à une association et il y a des groupes
qui se refont à l'intérieur de chacun des métiers, mais,
quand même, qui s'associent à une association maîtresse pour
toute la partie contractuelle de l'industrie. Mais en ce qui regarde leur
métier propre, ils sont capables de se réunir à
l'intérieur d'une association, ça ne prend pas 23 corporations
pour réussir une chose semblable. On demande l'unification à
l'intérieur de notre marché. Ce n'est certainement pas en le
fragmentant encore plus, en le séparant, chacun avec son petit
problème, qu'on va amener l'uniformité et la bonne
coopération dans l'industrie de la construction. Si on veut vraiment
faire le bordel total, on n'a qu'à agir de la sorte et on va
réussir, je peux vous garantir ça, c'est 100 % de réussite
ce que vous proposez.
M. Lafontaine: Lorsqu'on parle de guichet unique, c'est
uniquement pour la qualification des entreprises. Pourquoi 18 000, 20 000
entreprises dans la construction doivent-elles passer à telle place pour
la qualification et d'autres ailleurs? Je veux bien croire que peut-être
au point de vue politique, dans un grand terme, plus il y aura d'associations,
plus il y aura de parties et il y aura beaucoup plus de facilité
à les faire battre l'un contre l'autre. C'est peut-être dans cet
esprit-là. Mais un guichet unique donnerait l'heure juste dans la
construction, tout le monde serait qualifié à la même
place. C'est dans ce sens-là qu'on parle de guichet unique.
M. Paré (Michel): Si vous me permettez, M. le
Président - c'est une façon polie de prendre la parole. Qu'ont
fait les corporations devant les entrepreneurs en électricité
industrielle, les entrepreneurs en mécanique industrielle qui
étaient en train de crever sur des chantiers avec des contrats à
clauses abusives, à partage de responsabilités
exagérées? Ce ne sont pas des organismes obligatoires qui ont
défendu ces entreprises-là. Elles se sont regroupées de
façon volontaire à l'intérieur de l'ACQ. Nous avons permis
à ces entreprises, avec les propriétaires, les donneurs
d'ouvrage, d'en arriver avec des contrats plus équitables entre les
entrepreneurs et les propriétaires.
Je vous invite, je sais que vous n'avez pas eu le temps, ce n'est pas un
reproche, mais j'espère que d'autres ou que les personnes qui vous
entourent auront la possibilité et le plaisir de lire le document
jusqu'à la fin, dans les annexes. Dans le mémoire qu'on avait
déposé au comité Bernard sur l'octroi des contrats par le
biais du système de soumissions, il y a des recommandations. Qui
entendez-vous parler de ce genre de dossier là, à part l'ACQ?
Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions.
Malheureusement, le temps est écoulé. M. le ministre, si vous
voulez remercier nos invités.
M. Cherry: D'abord, ce n'est pas parce que vous êtes les
derniers que vous avez été les moindres. Je pense que, ensemble,
on a apprécié votre présentation. Je tiens à vous
remercier de vous être déplacés aujourd'hui, même
à une heure aussi tardive. Ça valait la peine. Je veux que vous
soyez assurés que vos représentations vont occuper une place
importante dans l'attention et dans la réflexion que j'ai à
faire. Évidemment, ça décode beaucoup de travail. Il y a
des gens du ministère, chez nous - je l'ai dit à d'autres et je
vous le répète - qui seront au travail en fin de semaine et on
tentera de trouver ensemble des pistes de solutions qui seront acceptables.
Encore une fois, merci beaucoup pour votre présentation.
M. Lafontaine: M. le Président, M. le ministre, MM. les
membres de la commission, nous vous remercions beaucoup, d'autant plus que
c'était facile, les chantiers étant fermés le vendredi
soir.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Alors, messieurs, je vous remercie. Tout à
l'heure, je pense avoir fait un peu les notes de conclusion. Puisqu'il n'y a
pas de conclusion à ce genre de commission, je me suis permis de le
faire parce que j'estimais que votre mémoire parlait de lui-même.
Il n'avait pas besoin de beaucoup d'explications. Il était clair et
limpide. Je l'ai apprécié pour sa rigueur et sa qualité
intellectuelle, mais également pour les orientations que vous
entrevoyez, et j'espère que le ministre le soumettra à ses autres
collègues qui partagent sensiblement votre vision du
développement et de l'avenir de l'industrie de la construction. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie l'Association de la construction du
Québec pour sa participation à ses travaux aujourd'hui. Je
voudrais aussi remercier le personnel de la sécurité et tout le
personnel de soutien qui ne nous ont pas lâchés jusqu'à la
dernière minute et qui ont fait un travail aussi très important.
À mes collègues et à tout le monde, merci et bonsoir. La
commission, ayant acquitté son mandat, ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 0 h 4)