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(Douze heures vingt-trois minutes)
Le Président (M. Bélanger): Bonjour. La commission
de l'économie et du travail se réunit pour procéder
à l'étude du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours
d'admission dans les établissements commerciaux. M. le
secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a deux
remplacements. Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata) est remplacée
par M. MacMillan (Papineau) et M. Leclerc (Taschereau) est remplacé par
M. Nicolet... non, M. Richard (Nicolet-Yamaska), excusez.
Le Président (M. Bélanger): M. Nicolet de
Richard-Yamaska. Ha, ha, ha! Bien. Pas d'autre remplacement?
Le Secrétaire: Non.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, sans plus
tarder, j'inviterais le ministre à faire les déclarations
préliminaires. M. le ministre, vous avez 30 minutes et chaque autre
intervenant de votre formation pourrait avoir 10...
Une voix: Pas 30 minutes, 20 minutes.
Le Président (M. Bélanger): Pardon. 20 minutes, et
chaque membre de votre formation pourrait aussi avoir 20 minutes. M. le
ministre.
Remarques préliminaires M. Gérald
Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, M. le Président.
Je pense avoir fait toutes les déclarations préliminaires que
j'avais à faire lorsqu'on a adopté le principe du projet de loi.
Le seul commentaire que je voudrais ajouter, c'est que j'espère que
l'Opposition va prendre le temps de passer à travers tous les articles
du projet de loi pour analyser ce projet de loi sérieusement. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président. En fait,
j'ai essayé de réfléchir depuis un moment - enfin, je
réfléchis tout le temps, là, mais particulièrement
sur la question qui nous préoccupe - en me demandant ce que je pourrais
bien apporter aux membres de la commission parlementaire, au ministre, pour
essayer qu'ils comprennent bien le point de vue qui est défendu, pas par
une minorité, pas par des gens qui défendent leur
intérêt personnel, pas par des gens qui sont à courte vue,
pas par des gens qui n'ont pas de vision, mais qui ont un point de vue qui est
légitime, un point de vue qui est porté par des milliers de
travailleurs et de travailleuses, des gens d'affaires qui possèdent leur
commerce, et pas seulement eux, leur regroupement aussi. On va y revenir
pendant la commission et pendant nos travaux.
Qu'est-ce que je pourrais imaginer de plus que ce qu'on a
déjà fait pour arriver à convaincre le ministre, les
membres de son gouvernement, les membres de son caucus? Je ne suis d'ailleurs
pas certaine qu'ils soient tous convaincus du bien-fondé de la loi qui
est devant nous. On pourra sûrement aussi en débattre, questionner
leur point de vue à cet égard-là. Alors je me suis dit que
l'attitude la plus positive que je puisse avoir, la plus sereine, celle qui va,
tout compte fait, nous permettre de faire avancer le dossier, c'est de
travailler en collaboration avec le ministre pour essayer d'améliorer le
projet de loi, essayer d'avoir tous les éclairages qui vont nous
permettre de faire un travail en profondeur sur le projet de loi qui est devant
nous, qui vont nous permettre de le bonifier, de l'améliorer, de nous
assurer que toutes les personnes qui sont concernées par ce projet de
loi et qui essaient désespérément, je vous dirais, M. le
Président - et vous en savez quelque chose, particulièrement vous
- de se faire entendre... La conjoncture ne facilite pas le fait que leur point
de vue puisse être entendu. C'est bien évident. Mais ce n'est pas
parce que la conjoncture politique ne fait pas de grands titres dans les
journaux, n'amène pas à faire de grands titres dans les journaux
sur le problème soulevé par la présentation du projet de
loi par le ministre aux membres de l'Assemblée nationale que ça
ne rend pas le problème présent pour autant, que ça ne
rend pas le problème complet et entier pour autant. Il y a des gens qui,
effectivement, se sentent floues par le projet de loi qui est devant nous,
malgré qu'ils aient, avec honnêteté, de la façon la
plus complète possible, essayé d'apporter des points de vue aux
membres de la commission, d'être entendus.
Alors, dans un premier temps, je rassure les membres de cette
commission, je rassure le ministre: je vais travailler avec acharnement,
pendant tous nos travaux, autour de l'adoption du projet de loi qui est devant
nous, de telle sorte que l'on puisse bonifier ce projet de loi, qu'on puisse
l'améliorer. Tout à l'heure, le
ministre nous disait, à la fin de son intervention à
l'Assemblée nationale: C'est un délicat équilibre; on a
pris notre courage. Je me demande de quel courage il s'agit et à qui on
finit par répondre avec le projet de loi qui est devant nous. Moi,
j'assure d'entrée de jeu que je vais collaborer avec les membres de la
commission, que ma formation politique va travailler avec les membres de la
commission, avec les représentants du gouvernement qui sont assis autour
de cette table pour qu'on puisse effectivement améliorer le projet de
loi qui est devant nous. Puis on aura l'occasion, à différents
moments, d'aborder les questions les unes après les autres, soit sur des
projets d'amendement que nous apporterons, soit sur des demandes
d'éclairage que l'on pourra présenter aux membres de la
commission.
Pour être bien sûre que le ministre pense lui aussi aux
personnes pour lesquelles il adopte le projet de loi, j'ai pensé que je
pourrais déposer tous les jours sur notre table de travail, pour que je
sois très claire pour tout le monde, la liste des pétitions non
conformes. Je n'ai pas pu les déposer, je le répète. Je
n'ai pas pu les déposer à l'Assemblée nationale. Je
n'expliquerai pas trop longuement aux membres de cette commission, qui
connaissent déjà nos règlements, pourquoi je n'ai pas pu
les déposer. C'est parce que ces pétitions ne s'adressaient pas
directement à l'Assemblée nationale. Ce n'était pas dans
le libellé de l'en-tête de la pétition. Donc,
évidemment, comme ça ne s'adressait pas à
l'Assemblée nationale, ça rend ces pétitions non
conformes, et je n'ai pas pu les déposer. Le ministre
s'inquiétait ce matin encore en disant: Est-ce que l'Opposition s'est
préoccupée de la question des consommateurs et des
consommatrices? On nous parte toujours des travailleurs et des travailleuses,
on nous parle toujours des commerçants. Mais est-ce qu'on s'est
préoccupé des consommateurs et des consommatrices? En
voilà, M. le Président. Ils les ont signées, ces
pétitions-là, dans leur communauté respective, un peu
partout. Ce sont des pétitions qui viennent de toutes les régions
du Québec. On en dépose depuis trois jours, M. le
Président. Elles ne sont pas là. Elles sont
déposées à l'Assemblée nationale. On lit une petite
feuille. Ç'a l'air de ne pas être beaucoup, mais, ce matin, sur la
petite feuille que je lisais, il y avait en annexe 3150 noms de personnes qui
ont dûment signé pour dire qu'elles se sentaient leurrées
par le projet de loi que le ministre a déposé. Parce que c'est
faux, le ministre ne protège pas une des demandes de base de la
coalition des représentants des consommateurs et des consommatrices,
parce qu'à mon point de vue, oui, les ACEF, la fédération
nationale, ce sont des gens qui représentent légitimement
l'intérêt des consommateurs et des consommatrices. Ces
gens-là nous disent, vous disent, disent aux membres du gouvernement que
c'est un leurre, que ce que nous allons étudier, ce que nous nous
apprêtons à regarder ensemble, c'est, à toutes fins
pratiques, la libéralisation, un pas vers la libéralisation
complète et totale du dimanche. Alors, quand on nous met en grand titre
"Le ministre protège le dimanche", je m'excuse, ça n'a
leurré que quelques-uns qui ne sont justement pas allés lire la
loi et qui n'ont pas pris la peine de scruter à fond ce que cela
signifiait. Et quand, en plus, j'ai entendu à l'Assemblée
nationale le ministre nous annoncer les amendements pour rajouter une personne
de plus le dimanche, comme si le patron ou son mandataire ne pouvait pas
être dans les quatre déjà prévus dans la loi, je me
suis dit: C'est encore plus clair pour tout le monde qu'il veut ouvrir le
dimanche le plus largement possible. En fait, l'intention réelle du
ministre, c'est de libéraliser complètement les heures
d'affaires; il le fait en semaine. Il a eu l'air de nous faire une fleur, de
nous dire: Ah oui! ç'a du bon sens; peut-être que j'avais
exagéré, peut-être que c'était un peu tard le soir,
22 heures. Alors là, il a ramené ça à 21 heures,
mais tout le monde peut ouvrir n'importe quand, n'importe où, dans
n'importe quel milieu de 8 heures à 21 heures, maintenant. Ce sera un
amendement, semble-t-il. On ne peut pas présumer de son adoption, mais
ce sera un des amendements. Et pour le dimanche, quatre personnes. Il a
essayé de nous faire comprendre ce matin que la fabrication, ça
s'entendait, ça se comprenait, qu'on allait le préciser. On ne va
pas se raconter d'histoire: quatre personnes le dimanche, plus le
propriétaire de l'entreprise ou son mandataire. Si au moins il avait
dit, à la limite: le propriétaire responsable de l'entreprise...
Il nous dit: son mandataire. C'est assez évident, M. le
Président, que c'est pour se donner une marge de plus.
Il reconnaît la fabrication, et on ne parlera pas des
superpharmacies, où il y a assez de particularités dans la loi
qui font que n'importe quelle grande surface va pouvoir ouvrir et ça, on
va en convenir ensemble. Alors, dans ce sens-là, elle est bien claire,
l'intention réelle du ministre. Il nous fait travailler pour absolument
rien et c'est ça qui est choquant. J'ai l'impression de perdre mon
temps, de perdre mes énergies. Il nous fait travailler pour rien, parce
qu'il a décidé qu'il voulait libéraliser, puis là,
il enveloppe ça, puis pendant des heures, on va essayer de le convaincre
qu'on tient à d'autres types de valeurs, qu'on souhaiterait qu'il
continue à y avoir un encadrement des heures d'ouverture des commerces.
Je pense qu'on n'est pas tout seuls à être de ce point de vue
là. Il y a ces milliers de signatures que nous déposons depuis
quelques jours et que nous déposerons encore pendant les jours qui
viennent pour que le ministre soit bien conscient que quand il
légifère - et c'est sa première responsabilité -
ça ne devrait pas être pour la minorité, mais bien pour la
majorité.
Ce matin, mon collègue, le député de Laviolette, le
lui rappelait et lui disait. Vous
savez, je ne fais pas de politicaillerie, mais je fais de la politique,
par exemple. Et faire de la politique, c'est être capable de
représenter les gens qui nous ont élus, de défendre leurs
points de vue, de les défendre avec honnêteté, en
étant conscients et conscientes que c'est ça notre premier et
principal rôle comme députés, ici devant cette
Assemblée nationale. Or, j'ai l'impression, M. le ministre, quand je
regarde ça, quand je lis: les SIDAC, la ville de Montréal,
Canadian Tire... Et là, on va y revenir, on va en parler, des gens de la
Coalition Toutes les associations qui sont membres de la Coalition et qui
forment la majorité, eh bien, leurs représentants nous disent:
Non seulement ça ne répond pas à nos besoins, mais vous
êtes en train de saccager l'organisation du commerce tel qu'on le
connaît au Québec, et vous êtes en train de saccager une
partie de la qualité de notre vie, pas toute la qualité de notre
vie, bien sûr. Et vous allez dans la bonne direction pour faire en sorte
que dans six mois, dans un an, votre loi durable, eh bien il va y avoir
tellement de pressions que vous allez devoir revenir devant les membres de
cette Assemblée pour faire en sorte que nous la modifiions
Pendant six jours - le député de Laviolette, mon
collègue, le rappelait ce matin - avec des représentants de votre
formation politique, dont certains sont ici: le député de
Laval-des-Rapides, le député de Saint-Maurice, le
député de Nicolet-Yamaska qui nous ont accompagnés...
D'ailleurs, je dois dire qu'ils n'étaient pas dans une situation
très confortable, mais j'ai aidé à faire en sorte que la
situation soit plus confortable pour un certain nombre d'entre eux. Je suis
quasiment en train de le regretter, M. le Président. Je suis quasiment
en train de le regretter quand je vois qu'ils n'ont pas été
capables d'entendre les points de vue qui ont été défendus
par des milliers de personnes qui sont venues nous dire qu'elles étaient
en désaccord avec le projet de loi.
Ce n'est pas impressionnant, évidemment, 2500 personnes de la
région de Montréal. Et vous savez, j'ai déjà, entre
guillemets, paqueté ça, des assemblées. Je connais
ça, O.K.? Bien, elle n'était pas paquetée,
celle-là, juste pour rassurer le ministre. Parce que, vous savez, quand
on veut organiser une assemblée, on peut ramasser des gens qui sont
d'autres secteurs, les faire venir et leur dire: Vous allez être des
partenaires un peu silencieux, et on va vous faire applaudir quand ce sera le
temps. Après ça, il va y avoir quelques leaders qui vont parler
et ça va faire belle figure.
Si vous étiez allé là... Vos collègues y
sont allés, ils vous l'ont sûrement dit. Ce n'était pas le
cas, M. le Président. C'étaient des gens qui venaient du secteur
alimentaire, qui venaient du secteur du commerce de détail.
C'étaient des détaillants qui étaient là.
C'étaient des représentants des SIDAC. C'étaient des
représentants de marchés d'alimentation indépendants.
C'étaient des propriétaires de dépanneurs qui
étaient là. Et ça a été comme ça d'un
bout à l'autre de la tournée que nous avons faite.
Quand je suis revenue, le ministre s'est un peu moqué en disant:
Écoutez, vous l'avez organisée. C'étaient des gens de la
coalition contre l'ouverture du dimanche. S'ils étaient capables d'en
organiser une pour, ce serait peut-être intéressant. J'irais, moi
aussi, défendre mon point de vue devant autant de personnes. Ça
me ferait tout à fait plaisir de pouvoir le faire.
Alors, en peu de temps, donc, des gens qui se sentent effectivement
concernés par le projet qui est devant nous sont venus nous dire qu'ils
étaient en désaccord avec les orientations
privilégiées par le ministre. Et, M. le Président, je
crois que le temps passe un peu vite...
Une voix:... Encore combien de temps?
Mme Marois: Combien ai-je de temps encore?
Le Président (M. Bélanger): À peu
près huit minutes.
Une voix: Sept et demie.
Mme Marois: Sept et demie, bon. J'aimerais, si les membres de la
commission me le permettent, surtout si le président est d'accord,
pouvoir présenter un petit vidéo - je ne l'ai pas vu
moi-même, puisque j'étais présente - qui est un exemple de
la rencontre que nous avons eue dans la région de Montréal,
où on a retrouvé ces centaines de personnes qui venaient dire
qu'elles étaient en désaccord avec le projet du ministre.
Vous remarquerez, M. le Président, que je ne sors pas tellement
des règles que l'on connaît habituellement dans nos commissions,
puisque le ministre lui-même, au moment de la défense des
crédits - et je crois que c'est vous qui siégiez à ce
moment-la - nous a présenté un vidéo portant sur son
ministère. C'est d'ailleurs très intéressant et
particulièrement bien fait. Je dois dire que le ministère de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie travaille particulièrement
bien. Je le répète encore, le document était bien.
Or, j'aimerais, à l'intérieur du temps qui m'est imparti,
M. le Président, que l'on prenne quelques minutes. Je crois qu'il dure
à peine cinq minutes, ce vidéo.
Le Président (M. Bélanger): II nous reste cinq
minutes...
Mme Marois: Alors, on pourrait les prendre...
Le Président (M. Bélanger): ...et en vertu du
précédent que vous mentionnez, je pense que
c'est acceptable, effectivement.
Mme Marois: ...d'accord, pour voir un peu comment ça s'est
passé. Et j'aurai autant la surprise que les membres de la commission,
soil dit en passant, parce que moi-même je n'ai pas vu le vidéo.
On l'a visionné, mais comme c'est un extrait de réunions qui se
sont tenues à Montréal, il devra, j'imagine traduire ce qui s'est
passé là.
Le Président (M. Bélanger): Alors,
momentanément, pour les fins du Journal des débats, on va
suspendre les travaux, puisque ce ne sera pas possible d'enregistrer cette
partie-là. Alors les travaux sont suspendus, le temps du
vidéo.
(Suspension de la séance à 12 h 41) (Reprise à 12 h
47)
Le Président (M. Bélanger): Alors, je m'excuse. On
pourrait arrêter l'appareil, s'il vous plaît, le temps est
écoulé.
Mme Marois: Est-ce que je peux dire une chose?
Le Président (M. Bélanger): Rapidement, parce qu'on
dépasse.
Mme Marois: Une phrase. Je n'avais pas vu le vidéo avant
qu'on le voie, mais je pense que ça atteint l'objectif que je voulais
que l'on atteigne: que le ministre soit bien conscient que ce n'étaient
pas que quelques personnes et que c'étaient vraiment les gens
impliqués dans le dossier des heures d'affaires qui étaient
présents à ces rencontres.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
Alors, en vertu de la règle de l'alternance, est-ce que la formation
ministérielle a une intervention? M. le député de
Beauce-Nord?
M. Jean Audet
M. Audet: Quelques secondes, M. le Président, simplement
pour corriger certaines choses qui ont été dites hier ou
même ce matin. Je voudrais juste corriger. On laisse croire que les
députés ministériels, ou le ministre, auraient tenu des
propos à l'égard de ceux qui sont contre le projet de loi, ou
ceux qui sont contre la libéralisation des heures d'affaires, dans le
sens qu'on aurait dit que ces gens-là n'avaient pas de vision, que ce
seraient des gens de courte vue, rétrogrades. Je veux
immédiatement rassurer les gens qui nous écoutent, et les
gens de la commission aussi. C'est qu'il n'y a personne, ici, de la commission,
qui ait tenu ces propos-là. Alors, les propos que la
députée de Taillon rapporte, il faut faire attention, parce que
ça peut laisser croire que c'est le ministre ou des membres de la
commission qui les ont formulés.
Deuxièmement, je ne vois pas en quoi le projet de loi actuel
vient flouer les gens. Écoutez cet exercice-là, c'est un exercice
qui a quand même été pénible, parce qu'on ne peut
pas avoir de consensus. C'est deux groupes. M. Biron, l'ancien ministre de
l'Industrie et du Commerce, a repris ce dossier en 1963, et ils ont
adopté une loi en 1985. Nous, ici, nous avons longuement discuté
du dossier. On en a discuté en commission parlementaire, en
comité de travail, entre les députés. Il a fallu parler
entre nous, d'ailleurs, pour obtenir un certain consensus, parce qu'on
n'était pas tous de la même opinion. Ça reflète
exactement le discours qui se tient aujourd'hui et qui s'est tenu depuis des
mois et des années concernant ce débat-là. On a deux camps
qui s'opposent. On ne pourra jamais en arriver à un consensus. C'est
impossible, parce qu'il y a des intérêts particuliers, et toutes
sortes de choses rattachées à ça. On ne pourra jamais
arriver à un consensus dans ce dossier-là.
Alors, dans des contextes comme ceux-là, qu'est-ce que le
gouvernement doit faire? Il doit essayer de trancher, je ne dis pas en tentant
d'atteindre l'objectif idéal, c'est impossible, mais en minimisant les
effets négatifs. Quand on dit que les commerces vont être ouverts
le dimanche, vous savez très bien, M. le Président, que c'est
faux, que ce n'est pas vrai Le ministre l'a dit hier, et on laisse croire aux
gens qu'ils vont travailler le dimanche, partout dans tous les commerces, qu'on
va même vendre des chaussures le dimanche. C'est faux, M. le
Président. Ce n'est pas vrai. Et quand la critique de l'Opposition dit
que le ministre, depuis le début, n'a pas fait preuve de bonne foi,
qu'il tend vers la libéralisation et tout ça... Hier soir, en
Chambre, il y a eu le dépôt de deux amendements par le ministre,
dont un qui concerne la réduction des heures qu'on avait prévues
au projet de loi initialement. On a réduit de quelques heures, hier,
pour restreindre la plage horaire parce que peut-être, oui, que les
lundi, mardi et mercredi, ouvrir aux heures qu'on proposait, c'était
trop.
Alors, quand on souhaite, du côté de l'Opposition, que les
ministériels comprennent bien, je pense qu'on a compris. On a compris,
M. le Président, exactement ce que souhaitait la députée
de Taillon. Il faut être prudent quand on a des pétitions comme
celles qu'on nous rapporte parce que, en tant qu'élus, assez souvent, on
vient nous déposer des pétitions II faut faire attention,
d'abord, à l'interprétation qu'on fait du contenu parce que ce
qui a été déposé en Chambre, hier, rapportait
strictement que ces gens-là étaient opposés à
l'ouverture des commerces le dimanche. Le projet de loi que (e ministre
dépose respecte ça dans son ensemble. Les commerces vont
être fermés le dimanche, sauf, évidemment, ceux qui sont
dans le secteur alimentaire.
Je termine là-dessus. Au niveau des pharmacies, je
référerais la députée à la loi 59, la loi de
son collègue de l'Industrie et du Commerce, M. Biron, à l'article
5 qui se réfère au paragraphe 7 où le bordel, où le
chiard a été créé dans la Loi sur les heures
d'affaires par son collègue, M. Biron. Pourquoi? Ce n'était pas
de mauvaise foi et je ne l'accuse pas non plus, mais je dis que le chiard a
été fait parce qu'il y avait un groupe qui a fait preuve de
leadership dans le marché, qui a exploité un certain
marché qui atteint, aujourd'hui, des millions de chiffre d'affaires,
tout ça. Là, il est allé voir le gouvernement de
l'époque, il a dit: Écoutez, moi, je fais de la business et tout
ça. On a permis 209 pharmacies, en 1985, avant l'élection du 2
décembre. Ce n'était pas nous qui étions là,
c'étaient eux. Pourquoi? Parce qu'il y avait une volonté dans le
milieu d'apporter...
Mme Marois: M. le Président, je voudrais que le
décret...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, madame.
Est-ce que c'est un point de règlement?
Mme Marois: Oui, c'est un point de règlement, M. le
Président. Je veux savoir à quelle date... C'est-à-dire
que c'est un point d'information. Je veux savoir à quelle date,
exactement, le ministre Biron a déposé les décrets sur les
pharmacies.
M. Audet: Mars 1985, la loi 59. Vérifiez dans la loi.
Mme Marois: Non, non, il y a eu des décrets qui ont
été signés.
M. Audet: Non, je ne vous réfère pas à des
décrets, Mme la députée...
Mme Marois: Oui, mais les décrets?
M. Audet: ...je vous réfère tout simplement
à la foi 59.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
Mme Marois: Je m'excuse, mais il fallait que la loi soit suivie
de décrets...
Une voix: C'est ça.
Mme Marois: ...pour que l'on puisse permettre l'ouverture des
pharmacies. Or, que je sache, les décrets ont été
déposés par M. Johnson, ministre du gouvernement
libéral.
M. Audet: M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de
Beauce-Nord.
M. Audet: ...je me référais simplement à la
loi 59, à l'article 5. C'est écrit textuellement. Ce n'est pas un
décret, je ne parle pas d'un décret, je parie de la loi 59 et je
réfère la députée à cette loi. Oui,
lisez-la. Est-ce que je peux en avoir une... Je ne l'ai pas ici, mais j'aurais
aimé en faire la lecture. Enfin, on aura l'occasion d'en faire la
lecture.
Alors, M. le Président, je pense que j'ai dit ce que j'avais
à dire, mais je réfère tout simplement la
députée à l'article 5 de la loi 59 où c'est
écrit textuellement que les pharmacies qui vendent des denrées
alimentaires sont autorisées, sans restreindre d'aucune façon le
nombre d'employés. Ce sont les modifications qu'on apporte avec le
projet de loi, je pense, qui vont peut-être sécuriser les gens
à cet égard-là. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous rappelle qu'on
va suspendre les travaux à 13 heures.
Mme Blackburn: D'accord. Alors, je continuerai mon intervention
à la reprise.
Le Président (M. Bélanger): Vous continuerez
après, oui.
Mme Jeanne L Blackburn
Mme Blackburn: Le député de Beauce-Nord a dit un
certain nombre de choses qu'il m'appa-raît important de relever pour un
peu, peut-être, essayer de corriger l'impression générale
que ça peut laisser. Il a dit: il est faux de prétendre qu'on a
pu avoir des propos disgracieux à l'endroit de ceux qui
s'élèvent contre le projet. Je pense que, sans avoir des propos
disgracieux à leur endroit, l'attitude cavalière avec laquelle on
les traite équivaut à du mépris. C'est ça. Vous
savez, il ne s'agit pas de dire à quelqu'un: T'es un pas bon.
Le Président (M. Bélanger): Madame, je vous
rappellerais juste l'article de notre règlement qui nous interdit, en
cette Chambre, de prêter des intentions, des motifs ou toute autre
chose.
Mme Blackburn: Ce n'est pas des intentions, M. le
Président. C'est clair, je dis: Le fait qu'on refuse de
reconnaître...
Le Président (M. Bélanger): Vous
l'interprétez comme étant du mépris, mais je pense qu'on
ne peut pas faire ça. Nos règlements ne
nous le permettent pas. S'il vous plaît!
Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Le fait de
reconnaître l'avis des personnes qui s'opposent au projet de loi comme
étant non valable, trouvez-moi un qualificatif pour exprimer ça.
Alors, ce sont des non-personnes, ce sont des gens dont l'avis n'a pas de
valeur, je veux dire des gens de seconde zone. C'est ça que ça
veut dire. Alors, utilisez l'expression que vous voudrez. Pour être
méprisant, il ne s'agit pas de dire à quelqu'un: T'es un pas bon.
Il s'agit tout simplement de ne pas l'écouter, pour lui dire: Ta parole
n'a pas de valeur. C'est ce dont on parle, d'une attitude qui est
déplorable.
Le député dit, à juste titre: C'est une question
sur laquelle on n'a jamais réussi à faire consensus. En l'absence
de consensus, dans une société, généralement, le
sens commun invite à l'extrême prudence. Le projet de loi qui est
là, j'aimerais bien que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie en informe ses collègues parce que je ne suis pas certaine
qu'ils aient bien compris l'enjeu de ce projet de loi qui est la
libéralisation des heures de commerce le dimanche. Je pense qu'il y en a
qui n'ont pas vraiment compris. C'était, d'abord, la première de
ses volontés et il essaie de faire indirectement ce qu'il n'a pas
osé avouer directement. Ça, ça pose un problème.
C'est de prendre les gens pour des Imbéciles et c'est toujours
frustrant.
M. Audel: M. le Président...
Mme Blackburn: À présent, en l'absence...
M. Audet: Question de règlement.
Le Président (M. Bélanger): Question de
règlement.
M. Audet: En vertu de l'article 35. La députée
prête des intentions au gouvernement et au ministre. Elle n'a pas le
droit de faire ça et elle le sait. Ça fait trois fois qu'elle
fait des affaires comme ça. Elle n'a pas d'affaire à faire
ça.
M. Jolivet: II n'a pas compris.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Beauce-Nord, je m'excuse, c'est non recevable. Mme la
députée de Chicoutimi, s'il vous plaît.
Mme Blackburn: Je vous remercie.
M. Jolivet: Ce n'est pas la seule chose qu'il n'aura pas
comprise.
Mme Blackburn: Je rappelle qu'en l'absence de consensus,
généralement, la sagesse veut qu'on reste prudents dans nos
décisions de manière à ne pas inutilement
déstabiliser. Moi, je souhaiterais très sincèrement, et je
le dis, avec ma collègue de Taillon, qu'au terme de cette commission
parlementaire nous ayons réussi, l'Opposition et le gouvernement,
à nous entendre. Je vous dis que je ne souhaite pas autre chose,
très sincèrement, parce que je suis trop consciente des effets
négatifs de la loi telle que libellée sur l'organisation et la
qualité de vie des travailleurs, des familles de ces travailleurs et sur
les possibilités de réussite de certaines petites entreprises qui
vont, selon de nombreux avis, être acculées à la
faillite.
Je suis trop consciente de l'importance des effets que cette
loi-là pourrait avoir sur la qualité de vie de ces personnes,
pour les raisons que j'ai évoquées, pour ne pas souhaiter
très sincèrement qu'on y apporte les modifications qui vont dans
le sens que nous avons souhaité, qui seraient un enrichissement, qui
préserveraient un peu le statu quo, mais qui, en même temps, ne
déstabiliseraient pas ce que nous avons acquis comme
Québécois. L'idée qu'il faut absolument se calquer sur les
modèles ontarien ou américain, je n'en vois pas la raison. On n'a
pas le même éparpillement de population - on sait qu'ici la
population est très éparpillée - on n'a pas les
mêmes traditions, on n'a pas les mêmes cultures, on n'a pas le
même bassin de population. Autrement dit, on a tellement de
différences que je ne vois pas pourquoi il faudrait, sous
prétexte qu'un certain nombre de personnes le demandent, imiter les
modèles extérieurs.
J'aimerais que le ministre reconnaisse qu'il erre quand il parle de ses
quatre personnes et autres parce que...
M. Jolivet: Excusez-moi. M. le Président, vous pourrez
régler votre problème à un autre moment, c'est
agaçant, on est en train de parler et vous êtes en train
d'écouter l'autre...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député, votre intervention est...
M. Jolivet: Ce n'est pas de vous que je parle, c'est du
député de Beauce-Nord. Il réglera ses problèmes
ailleurs.
Le Président (M. Bélanger): Je pense qu'un
député peut s'informer des règles de procédure en
tout temps à la présidence, c'est de pratique courante ici.
M. Jolivet: Vous avez juste à me demander d'aller
présider et aller à l'extérieur en attendant.
Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à
Mme la députée de Chicoutimi de bien vouloir continuer son
intervention.
Mme Blackburn: M. le Président, je souhaiterais
très sincèrement que le ministre recon-
naisse son erreur en ce qui a trait à l'ouverture des commerces
le dimanche parce que commettre une erreur, c'est humain, et les personnes
capables d'admettre: Bon, écoutez, je me suis trompé, je manquais
d'informations, j'avais mal tâté le pouls, je me suis
trompé, ces personnes sont dignes de respect et d'estime de la part de
leur entourage. Ça s'est toujours passé comme ça, à
ma connaissance. Sauf que persévérer dans l'erreur, c'est
coupable. N'importe qui le sait, lorsque vous réalisez que vous vous
êtes trompé et que vous voulez persévérer dans
l'erreur, je pense que vous ne rendez pas de bons services, ni à la
personne qui persévère dans l'erreur, ni à la
société ou aux personnes visées par le projet de loi en
question.
Le projet de loi, en fait, fait l'unanimité contre lui. Ce n'est
pas rien. Et là, je vais citer un certain nombre d'organismes, un
certain nombre de personnes propriétaires, consommateurs, travailleurs.
Ce n'est pas l'Opposition. C'est toujours ce que je trouve frustrant dans notre
rôle. Le gouvernement - c'est de bonne guerre, probablement - et les
députés ministériels nous disent: Écoutez, vous
êtes là pour vous opposer, opposez-vous. Ce n'est pas ça,
la réalité, et c'est terriblement frustrant. Dans ce dossier, on
essaie juste de rendre bien compte, de vous faire valoir les opinions qui sont
exprimées un peu partout dans la rue et ça, c'est notre
responsabilité. C'est pour ça que chaque fois que je vais en
commission parlementaire, j'essaie de ne pas faire cette espèce de
petite politique partisane. Je me dis que ce projet de loi là est trop
important pour qu'on essaie de faire de la petite politique là-dessus.
Ce qu'on veut essayer de faire, c'est de bien faire comprendre au ministre
qu'il y a lieu d'apporter des modifications importantes. Je pourrai...
Le Président (M. Bélanger): Compte tenu de l'heure,
madame, on continuera à 15 heures. Alors, je demanderais à tout
le monde d'être ici à 15 heures. On peut laisser les documents
ici, oui, la salle va être surveillée. Je vous remercie.
(Suspension de la séance à 13 h 1) (Reprise à 15 h
2)
Le Président (M. Bélanger): Alors, je demanderais
à chacun de bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît, afin
que la commission de l'économie et du travail puisse reprendre ses
travaux. Nous en étions... S'il vous plaît, nous en étions
aux déclarations préliminaires et la parole était à
Mme la députée de Chicoutimi, à laquelle il reste treize
minutes trente-cinq. Je vous en prie, madame.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Au moment où
je terminais, juste avant la suspension, je rappelais que s'il y a quelque
chose qu'on doit reconnaître à ce projet de loi, c'est qu'il fait
l'unanimité, mais une unanimité contre le projet de loi. C'est
assez exceptionnel, assez surprenant. Mais il me semble, aussi, que ça
doit être assez révélateur de l'insatisfaction que
crée ce projet de loi. En fait, je le rappelle, le ministre, ni plus ni
moins, sans le dire, libéralise les heures d'affaires et ouvre...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
je vous demanderais, dans la salle, de respecter le droit de parole de Mme la
députée de Chicoutimi. Alors, Mme la députée.
Mme Blackburn: Je vous remercie. C'est l'ouverture des commerces
le dimanche. Je vais me permettre, M. le Président, parce qu'on a
toujours l'impression, quand on parie comme Opposition, qu'on ne parle qu'en
notre nom, députée de Chicoutimi, député de
Laviolette et députée de Taillon, mais je vais citer, ici, la
liste des organismes qui sont contre. Vous allez voir que ça
représente un nombre impressionnant de Québécois et de
Québécoises.
L'Association des dépanneurs du Québec, Alimentation
Couche-tard, Distribution Bonisoir, Laiterie Perrette Itée, Mac's,
dépanneur/La Maisonnée, ProviSoir, ACEF du centre de
Montréal, l'Archevêché de Montréal, l'Association
des détaillants de l'Est du Québec, l'Association des
détaillants de matériaux de construction du Québec,
l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, le Cercle
des fermières du Québec, Colabor Canada Itée, le Conseil
provincial des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation, le Conseil
québécois du commerce de détail, Au coin des petits,
Astral photo, Boutiques Alain Canto, Boutiques Dans un jardin, Boutiques
Marie-Claire, Centre du rasoir, Chaussures J.B. Lefebvre, Chaussures Panda,
Chaussures Trans-Canada, Fournitures de bureau Pilon, le Grenier/Modaprix, le
groupe Aldo, le groupe Bovet, le groupe Cotonnier, le groupe Dalmys, le groupe
Pantorama, le groupe San Francisco, le groupe Sélection, les magasins
J.L Taylor, Lindor, Ogilvy, Sears, Tristan & Iseut.
Ça, évidemment, il ne s'agit pas d'une boutique, c'est le
groupe comprenant toutes les boutiques, dans tout le Québec. Et, comme
on sait qu'il y en a dans tous les centres d'achats, c'est autant de boutiques
qu'il y a de centres d'achats.
La Corporation des bijoutiers du Québec, la Corporation des
marchands de meubles du Québec, la Fédération nationale
des associations de consommateurs du Québec, la Fédération
des travailleurs et travailleuses du Québec, la Fédération
du commerce (CSN), la Fédération du détail et services,
Hudon et Deaudelin Itée, IGA Boniprix, Les marchands associés
Canadian Tire - ça aussi, il y en a dans toutes les régions - les
Maîtres fourreurs associés, le Mouvement des travailleurs
chrétiens, le Regrou-
pement des SIDAC de Montréal, le Regroupement des SIDAC du
Québec, Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du
commerce, l'Union des producteurs agricoles - ça aussi, c'est un
syndicat important.
Quelques autres intervenants contre l'ouverture des commerces le
dimanche: L'Assemblée des évêques du Québec,
l'Association canadienne des détaillants en quincaillerie, la
Confédération des syndicats démocratiques, la Centrale de
l'enseignement du Québec, la Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante, le Groupe Ro-Na Dismat, le Regroupement des
marchands Métro-Richelieu, l'Union des municipalités du
Québec et la ville de Montréal.
Alors, M. le Président, en lisant cette liste qui peut vous
paraître un peu fastidieuse, je voulais juste illustrer que ce n'est pas
que l'Opposition qui dit que le projet n'a pas de bon sens, c'est tout ce
monde-là et ça doit représenter au bas mot, quoi, 2 000
000 à 3 000 000 de personnes au Québec, à peu près
tous ceux qui ont la possibilité de s'exprimer par le biais d'un
organisme. Je pense que c'est important.
Il y a eu différents communiqués de presse,
c'est-à-dire des articles de presse qui touchent, qui reflètent
à peu près la même situation, comme un arrêt de mort:
"Le projet de loi - jeudi, 17 mai, Le Journal de Québec - sur les
heures d'ouverture signifie l'arrêt de mort des petits commerces de vente
au détail, ont dénoncé hier plusieurs propriétaires
et employés de magasins. " Et ça, ça revient
régulièrement: "Les commerçants disent non à
l'ouverture le dimanche. La Loi sur les heures d'ouverture sème le
mécontentement général. Surtout des mécontents sur
le projet de loi des heures d'ouverture. " Les gens n'aiment pas ce projet de
loi.
Je me permets de citer quelques entrevues qui ont été
données comme ça sur la rue, soit par des consommateurs,
consommatrices, soit par des propriétaires ou des employés. Une
dame qui est interrogée, Mme Cécile Morissette-Poitras, dit que
le seul élément positif qu'elle perçoit dans cette loi,
dans une pareille libéralisation des heures d'ouverture des
établissements commerciaux, est que bien des gens qui ne vont dans les
centres commerciaux que pour se distraire ou faire du social disposeraient
ainsi de beaucoup plus de temps parce qu'on sait qu'il y a des personnes
âgées qui vont s'asseoir et regardent circuler le monde. Elle dit
que s'il y a un avantage, c'est le seul, c'est le seul. Mais, dit-elle, ils
n'achèteront pas plus qu'ils ne le font actuellement, ils n'ont pas plus
de budget pour ce faire.
Roxanne Lapointe est esthéticienne au service de la pharmacie
Maxi-Santé aux Galeries du Lac-Saint-Jean à Alma et est tout
à fait opposée à ce projet et pour cause, dit-elle. Elle a
déjà vécu l'expérience de l'ouverture de cette
pharmacie jusqu'à 21 heures tous les soirs. Mais lorsque le nouveau
propriétaire, Michel Lahaye, est arrivé l'an dernier, dit-elle,
il a mis fin à cette pratique. Et, en conclusion, Roxanne a pu constater
qu'au cours de cette période intensive, tous les employés
étaient fatigués. Ça ne donnait rien d'ouvrir ainsi
puisque - ils sont en mesure de l'évaluer après coup - la
clientèle n'était pas plus importante qu'actuellement. Donc, pour
la même clientèle, on va ouvrir un plus grand nombre d'heures.
Johanne Girard, propriétaire de l'Anneau des sportifs - qui est
une boutique d'équipements de sport - dit qu'elle n'ouvrirait
certainement pas davantage sa petite boutique si les heures étaient
prolongées à moins d'y être forcée par la direction
des galeries. Convaincue que le consommateur n'aurait pas plus d'argent
à dépenser qu'actuellement et que ses ventes n'augmenteraient
pas, Mme Girard ne voit pas comment elle pourrait justifier l'embauche d'un
employé de plus.
Et ça se poursuit: Exerçant le métier de
mécanicien à Hébertville, M. Émond dit qu'il n'a
rien contre la loi. Il dit: Dans le fond, moi, ça ne me dérange
pas. Cependant, il s'empresse d'ajouter que même s'il disposait de plus
de temps pour magasiner, ça ne le ferait pas dépenser davantage.
Évidemment, vous avez un... Diane Belley, qui a une formation
d'infirmière et qui est à temps partiel chez Hallmark, dit que
comme consommatrice le projet de loi ne lui plaît pas davantage.
Ça ne lui permettrait pas de dépenser plus non plus. Et vous
allez... Une dame qui dit ici... Une dame Blackburn comme par hasard, pas de
lien de parenté, là...
M. Jolivet: Peut-être avec le ministre.
Mme Blackburn: Quoiqu'il doit bien y en avoir une un peu, parce
que c'est la nièce du maire de Chicoutimi.
M. Jolivet: Avec le ministre.
Mme Blackburn: Alors, c'est une petite cousine, sans doute. Une
nièce du maire de Chicoutimi n'est pas du tout d'accord avec le projet
de loi, car elle trouve que les gens travaillent déjà
suffisamment comme ça. C'est toute la qualité de vie de la
famille. Et là, vous pourriez continuer comme ça. Ces
témoignages-là, ce n'est pas l'Opposition. Les journaux en sont
pleins. Tout ce que je souhaite, c'est que le ministre et l'équipe
ministérielle prennent en compte cette réalité et
modifient le projet de loi de manière à répondre aux
attentes de ces gens-là. Une seule façon de répondre aux
attentes de ces gens-là, c'est peut-être aussi de les entendre ou,
à tout le moins, de prendre en compte les recommandations qu'ils nous
ont fait valoir. Nous avons reçu un certain nombre de mémoires
qui font état des difficultés que ça pose, des
hypothèses de solution et des hypothèses d'amendement qui
pourraient y être apportées. Je pense
que c'est dans cette direction-là qu'il faudrait aller.
Dans les effets négatifs, vous allez me permettre de rappeler,
parce qu'on l'oublie trop souvent... Moi, que les commerces ouvrent le
dimanche, le samedi Jusqu'à 22 heures ou n'importe quoi, ça ne me
dérange pas beaucoup, parce que je n'ai pas à travailler dans ces
commerces-là. Ça ne me dérange pas, ça. Ça
ne me dérangera pas. Je ne dépenserai pas plus. Vous tous,
probablement comme moi, on a moins de temps, là, ce qui fait que c'est
plus par manque de temps, finalement, que... Mais ceux que ça va
déranger, ce sont les jeunes femmes et les travailleurs dans ces
commerces-là, et ça, c'est inacceptable! Ce sont des gens qui
travaillent déjà au salaire minimum. Dans ma région, ce
sont des gens qui ne demeurent pas nécessairement à
côté du commerce et on n'a pas de service de transport en commun.
Ce n'est pas compliqué, on n'en a pas! Ils n'auront pas ça
qu'à 10 heures le soir tous les jours...
M. Jolivet: II n'y en a pas à Shawinigan...
Mme Blackburn: ...c'est... On a vraiment un
problème...
Une voix: ...de transport en commun le dimanche.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
je vous prierais de...
Mme Blackburn: Oui.
Le Président (M. Bélanger): ...laisser le droit de
parole à Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Alors, on n'a pas de transport en commun, c'est
toute la qualité de vie de ces personnes qui travaillent au salaire
minimum, qu'on oblige à aller travailler en vertu de la Loi sur l'aide
sociale. Il n'y a pas de garderie. Vous savez, c'est toute la qualité de
vie de ces personnes qui vont être obligées, parce que ça
fait plaisir à quelques-uns, d'aller passer des journées, le
dimanche et des soirs, jusqu'à 22 heures - 21 heures, nous dit le
ministre, dans les modifications qu'ils vont apporter - simplement pour
satisfaire ceux et celles qui ont de l'argent à dépenser.
Ça, c'est pour la qualité de vie des travailleurs et des
travailleuses, mais ça affecte toute la qualité de vie des
membres de la famille. Si ces femmes ont un ou deux enfants en bas âge,
il n'y a pas de garderie. Si ces femmes ont un conjoint, comme 80 % des femmes
en ont, même s'il y a des séparations et des divorces, c'est quand
même une situation, ça veut dire que leur qualité de vie
est aussi affectée et, là, ça n'affectera pas votre
qualité de vie puis la mienne, parce que, de toute façon, si on
va magasiner une, deux, ou trois fois par année, ce n'est pas ça
qui va nous déranger, mais ça va affecter la qualité de
vie de toUs ceux qui ont déjà une qualité de vie
difficile, en raison de revenus trop bas, parce que si vous avez de bons
revenus, vous ne vous en allez pas travailler là, c'est bien
évident. Ça va aussi encourager le travail des jeunes
étudiants.
Ah! il y en a qui disent: C'est bon. C'est bon, ça va leur
permettre de travailler le dimanche. Allez poser la question au ministre, allez
voir le taux de décrochage dans les écoles, pour savoir qu'ils
seraient peut-être mieux de travailler un peu moins puis d'étudier
un peu plus. Ce n'est pas compliqué non plus, ça! Ce n'est pas
compliqué, parce qu'on a un taux d'échecs, là, tout
à fait catastrophique au niveau secondaire: on est rendu à 38 %,
pardon, 32 %, je ne veux pas... Nous étions à 24 % et nous sommes
rendus à 32 % d'échecs au niveau de jeunes qui ne terminent pas
leur secondaire V, au Québec, au moment où l'on se parte,
là. Au moment où l'on se parle, c'est catastrophique. D'ailleurs,
le ministre le reconnaît, ça n'a pas de bon sens.
Alors, ce n'est pas en leur ouvrant les commerces, en leur permettant
d'aller gagner leur petit 5 $, 5,50 $ l'heure, que ça va arranger la
situation. Donc, ça détériore la qualité de vie des
travailleurs, de leur famille. Le Québec, ce n'est pas New York,
ça, là, puis ce n'est pas Toronto, puis les villages du
Québec ne sont pas redistribués comme ils le sont en Ontario
où la densité de la population est quand même plus grande.
Nous, nous sommes étalés dans un Québec qui est immense,
où l'on n'a pas de services pour les personnes qui travaillent: vous
n'avez pas de transport en commun, je le rappelle, puis vous n'avez pas, non
plus, de garderie, et c'est un problème. On n'a pas à adopter ce
genre de modèle là. Et pour les petits propriétaires, et
ça, ça fait l'unanimité, il ne rentrera pas plus de sous
dans les caisses, parce qu'on a une capacité de dépenser qui est
de X. Et ils vont être obligés d'ouvrir plus longtemps et d'avoir
plus d'employés. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va amener en
faillite des petits propriétaires. Et là, je le rappelle, parce
que c'est peut-être utile de le rappeler, les petits
propriétaires, actuellement, ce sont surtout les femmes qui sont
particulièrement performantes dans ce genre de petites boutiques, je
pense particulièrement aux commerces. Et c'est elles qui vont être
affectées, ou encore ce qu'elles vont faire, c'est qu'elles vont
travailler trois fois plus. Et le résultat va être le même,
c'est qu'elles vont réussir à tenir un bout de temps, mais c'est
toute la qualité de vie de ces personnes qui est diminuée, pour
servir qui, je vous le demande? Et là, je rappelle au ministre que si
vous bougez dans la bonne direction, dans la direction qui est
réclamée par de plus en plus de personnes, je pense pouvoir le
dire au nom de ma collègue et en notre nom à tous, vous aurez
notre appui total et entier, avec nos compliments par-dessus.
(15 h 15)
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie Mme la
députée de Chicoutimi. M. le député de
l'Acadie.
M. Yvan Bordeleau
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Disons qu'au niveau
des remarques préliminaires à l'analyse du projet de loi 75,
j'aimerais peut-être revenir, quand même, sur certaines
données qui ont été mentionnées. D'abord, on a
affaire à un problème, on l'a mentionné à plusieurs
reprises, qui est très complexe, qui, en apparence, paraît simple,
mais qui a une complexité, disons surprenante. Au fond, on fait face
aussi à une société qui a évolué grandement
au cours des dernières décennies, et ça demande
peut-être aujourd'hui un ajustement. Il y a certaines
réalités qui n'existaient pas avant et auxquelles on fait face
aujourd'hui. Je pense, par exemple, aux diverses modalités de vie
familiale qui sont très différentes de ce que c'était
avant, la vie familiale; la vie professionnelle, avec l'éclatement des
horaires de travail, ça n'existait pas avant; aujourd'hui, ça
existe de plus en plus; la présence des femmes sur le marché du
travail; le caractère moins monolithique, si on veut, de la
société québécoise; l'augmentation du nombre de
familles monoparentales. Alors, ce sont toutes là, M. le
Président, des réalités qui ont une incidence sur le
fonctionnement de notre société. Et dans la problématique
des heures d'ouverture, c'est des éléments que le gouvernement
doit prendre en considération. Alors, ce n'est pas un problème
simple, et le gouvernement, au fond, a essayé de tenir compte de
l'ensemble des intervenants dans le dossier, et de l'ensemble des
intérêts.
Il y a un certain nombre de choses qui ont été
mentionnées par la députée de Chicoutimi, entre autres,
qui sont absolument fausses, et je pense qu'on doit les rétablir. Tout
d'abord, quand on entend les représentants de l'Opposition, on a
l'impression qu'il n'y a qu'un seul groupe de gens qui se sont fait entendre en
commission parlementaire, les gens qui étaient contre, alors que ce
n'est pas la réalité. Il y a une autre réalité
aussi, et c'est justement ce qui apporte à la complexité du
problème, il y a à peu près un nombre équivalent de
personnes qui ont fait entendre un son de cloche différent,
opposé, et ça, l'Opposition n'en parle pas. Je pense à des
consommateurs, à des petits commerçants aussi, pas seulement...
On caricature en parlant des gros et on veut en faire un débat des gros
contre les petits. Ce n'est absolument pas... Je pense que ce n'est pas de
cette façon-là que le gouvernement a voulu aborder cette
problématique-là. Alors quand on parle de la
libéralisation totale, c'est absolument faux, ce n'est pas ça que
le gouvernement demande. On ne demande pas de libéraliser les commerces
sept jours par semaine et tout le commerce au détail. C'est faux, et
ça, je pense que l'Opposition devrait le dire.
Je rappelle, encore là, que dans les interventions faites en
commission parlementaire, les gens de la Coalition contre ont fait valoir leur
point de vue. ils ont tout à fait le droit de le faire et ils l'ont
très bien fait. Il y a eu d'autres groupes aussi qui ont
présenté un point de vue opposé, qui l'ont
présenté avec autant de vigueur et autant de conviction que les
gens de la Coalition contre et le gouvernement doit essayer do prendre tout
ça en considération au moment où iI arrive. Alors, la
solution n'est pas aussi simple que colle qu'on semble nous laisser croire
où, tout simplement, l'Opposition a déjà, depuis le
début, établi sa position. Depuis le début, elle l'a
énoncée clairement et la députée de Taillon le
disait au début: On va vous dire exactement où on loge. On nous
dit aujourd'hui, la députée de Chicoutimi mentionnait qu'elle
souhaiterait qu'on s'entende. Pour s'entendre avec l'Opposition, il faudrait
qu'on adopte la position qu'eux autres avaient adoptée au départ
et ça veut dire que tous les mémoires qui ont été
présentés, ça n'a aucune importance, ça ne devrait
pas être pris en considération et le gouvernement n'aurait pas
dû écouter la population et tous les intervenants qui ont voulu se
faire entendre. Pour qu'on s'entende, il faudrait qu'on prenne la position
représentée par l'Opposition et c'est une position qui est tout
à fait valable, mais qui représente essentiellement la position
de la moitié des intervenants.
Dans ce sens là, je pense qu'il faut corriger un certain nombre
d'éléments. Je reviens encore à ce que la
députée de Chicoutimi mentionnait, elle faisait
référence au fait que le projet de loi avait fait
l'unanimité contre. C'est absolument faux, M. le Président. Je ne
qualifierai pas ce genre d'affirmation là parce que je pense que les
qualificatifs ne seraient peut-être pas très appropriés. Je
vais juste signaler quelques éléments. Dans La Presse du
16 mai, je cite: "Robert Perreault, vice-président du comité
exécutif de la ville de Montréal, approuve de son
côté la décision d'élargir les heures d'ouverture de
la semaine plutôt que le dimanche. Celle-ci correspond à
l'orientation prise par la ville en collaboration avec sept
sociétés d'initiative et de développement des
artères commerciales, SIDAC, de Montréal. L'unamité
contre, M. le Président.
Mme Marois: M. le Président, s'il vous plaît!
Question de fait.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la
députée...
Mme Marois: Même sur des questions de fait?
Le Président (M. Bélanger): Non. Lorsque
j'aurai...
Mme Marois: Je ne veux pas du tout ennuyer le
député, c'est qu'il lit un communiqué qui est juste...
Le Président (M. Bélanger): Je ne voudrais pas
qu'on fasse le débat.
Mme Marois:... mais qui a été recorrigé par
la ville.
Le Président (M. Bélanger): Non. Je m'excuse,
madame. Je ne voudrais pas qu'on commence des débats de part et d'autre,
on aura amplement le temps.
Mme Marois: D'accord. On reprendra ça tantôt.
Le Président (M. Bélanger): C'est bien ça.
M. le député de l'Acadie.
Mme Marois: Je ne voulais pas qu'il s'en aille dans des
chemins...
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie,
madame. Je vous en prie.
M. Bordeleau: Je cite également, dans Le Soleil du
16 mai dernier, le président de l'Union des municipalités du
Québec. Il y en a partout, ici, comme le disait tout à l'heure la
députée de Chicoutimi. Il y en partout des municipalités
à travers la province. Elle faisait référence à ce
moment-là à ses consommateurs. Ici, on parle des
municipalités. Alors je cite, M. le Président. "L'assouplissement
des heures d'ouverture des commerces en semaine et une plus grande restriction
le dimanche sont autant d'éléments qui répondent aux
exigences de l'UMQ. " Alors unanimité contre, où est-ce qu'elle
est, l'unanimité contre?
M. le Président, je voudrais aussi faire référence
à un document qu'on a reçu récemment de l'Association
provinciale des fruiteries du Québec et qui faisait état d'un
sondage en date de mai 1990. Si on regarde le sondage, il y avait une section
qui portait sur l'ouverture des commerces au détail. Répartition
des répondants selon qu'ils sont favorables ou défavorables
à l'ouverture des commerces le dimanche, les soirs de semaine, les
dimanches et soirs de semaine. Au niveau du dimanche, 48 % sont favorables.
Évidemment, 46 % sont défavorables. Je pense que c'est ça
la réalité. Il faut bien voir ici qu'il y en a à peu
près autant qui sont pour qu'il y en a qui sont contre. Je veux signaler
que 48 % sont favorables à l'ouverture le dimanche. Et ça, c'est
le commerce au détail, en général. Les soirs de la
semaine: 51, 7 %. Favorables à l'ouverture des supermarchés le
dimanche: 44 %. Les soirs de semaine: 57 %. À l'ouverture des fruiteries
le dimanche: 75 %; les soirs de semaines: 61 %. Je me souviens, M. le
Président, qu'à l'ouverture de la commission parlementaire, ici,
le député de Bertrand était venu nous dire qu'il
était lui-même favorable à l'ouverture des fruiteries le
dimanche.
Alors, quand on nous présente, du côté de
l'Opposition, la problématique d'une façon très simple,
c'est-à-dire qu'on prend un élément et on dit que c'est
ça la position de la population du Québec et que c'est
unanimement contre le projet de loi, je pense qu'il faut se questionner, M. le
Président, sur ce genre d'affirmation là et sur l'attitude que
prend l'Opposition dans le débat. Ce n'est pas du tout ça, la
réalité.
Un autre élément aussi, je pense, qui mérite
d'être corrigé, c'est qu'on laisse entendre que le gouvernement,
au fond, a pris partie pour les grands comme on le mentionne, les grands contre
les petits. On affirme des choses, encore là, qui sont absolument
fausses. Il y a eu, hier, une conférence de presse qui a
été donnée par la Coalition contre l'ouverture et je
voudrais ici rapporter ce qui est signalé aujourd'hui dans le journal
Le Devoir. Je cite, selon ce que rapporte le journaliste, ce que M.
Marcel Tremblay, vice-président de la FTQ, aurait mentionné, M.
le Président: "II s'agit d'un débat de société, de
tradition et de culture. C'est un peuple qu'on veut bouleverser en
commercialisant sept jours par semaine. Les gens devraient savoir que ce que le
gouvernement s'apprête à voter, c'est la position de Jean Coutu ou
de Provigo. Ce n'est pas la position de la population puisque 85
mémoires ont été présentés en commission
parlementaire et pas un ne demandait ces heures d'ouverture là. Il
s'agit plutôt d'une loi qui a été faite pour Jean Coutu et
ses lobbyistes téteux de ministres, a lancé M. Tremblay. "
Je pense que ça demande des rectifications, M. le
Président. Les membres de la commission parlementaire du parti
gouvernemental ont abordé la problématique avec ouverture
d'esprit et ont voulu tenir compte de l'ensemble des points de vue
présentés en commission parlementaire. Et comme je l'ai
mentionné tout à l'heure, la Coalition contre a
présenté avec vigueur et a très bien
présenté son point de vue, mais quand on vient nous dire que la
position que le gouvernement présente, c'est la position de Jean Coutu
ou la position de Provigo, j'aimerais qu'on retourne peut-être au
mémoire, aux recommandations, M. le Président.
Alors, concernant les libéralisations, je vais vous citer
quelques éléments du mémoire de Jean Coutu. "C'est
pourquoi les pharmacies Jean Coutu demandent devant cette commission une
libéralisation totale des heures d'affaires en semaine. " Ce n'est pas
une libéralisation totale qu'on a. On a de 8 heures le matin à 21
heures. "Concernant la libéralisation le dimanche, les raisons qui nous
amènent à proposer la libérali-
sation en semaine restent tout aussi valables pour le dimanche." Est-ce
que le gouvernement suggère ici la libéralisation des heures
d'ouverture le dimanche? C'est faux. Il n'y a pas de libéralisation des
heures d'ouverture des commerces le dimanche.
Au niveau de la position de Provigo, je vais citer encore la
recommandation du mémoire de Provigo: "Les marchands des
supermarchés Provigo souhaitent la fin d'une concurrence déloyale
supportée par une loi injuste et inéquitable. En
conséquence, nous recommandons l'ouverture des marchés
d'alimentation le dimanche, le libre choix des marchands de décider de
leurs heures d'ouverture en semaine, le maintien de la règle des trois
employés pour les commerces d'alimentation qui opéreront en
dehors des heures fixées, des amendes sévères pour les
contrevenants". Est-ce que l'ouverture des commerces d'alimentation, M. ie
Président, est permise le dimanche? Ce n'est pas vrai. Il y a des
contraintes très précises qui encadrent ces
possibilités-là. Est-ce que les marchands ont le libre choix de
décider de leurs heures d'ouverture en semaine? C'est faux. Il y a une
plage qui est fixée et c'est à l'intérieur de ça
qu'il y a une certaine flexibilité, comme je l'ai mentionné tout
à l'heure, pour répondre aux nouveaux besoins de la
société et s'adapter aux nouvelles réalités.
Alors, M. le Président, je pense que ce sont là des
éléments qui méritent d'être soulignés. Comme
c'a été mentionné cet avant-midi par le
député de Beauce-Nord, on fait face à un problème
complexe et la réalité complète, ce n'est pas celle que
nous présente l'Opposition. C'est une position qui est tout à
fait valable et qu'on doit respecter, qu'on doit écouter, et c'est ce
qu'on a fait. Mais il y a également une autre position, qui était
représentée - tout à l'heure, j'ai donné des
chiffres dans un sondage - par environ la moitié de la population,
aussi, qui demande l'inverse. Le gouvernement doit également tenir
compte de ces positions-là, de l'expression de ces opinions. Alors on a
essayé, au niveau du parti gouvernemental, de faire une synthèse,
la plus équitable possible, qui tienne compte à la fois des
intérêts des consommateurs, des commerçants et des
travailleurs. Dans ce sens-là, je crois, personnellement, que le projet
de loi est un effort tout à fait louable dans ce sens-là et que
ça représente quelque chose qui va sûrement
répondre, de façon passablement ajustée, si on veut, aux
besoins de la société actuelle. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la députée de Verchères.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: Merci, M. ie Président. Je pense qu'un projet
de loi aussi important que celui concernant les heures d'affaires, qui touche,
finalement, toute la population, doit être abordé dans un esprit
non partisan. Ce n'est pas que je veuille reprendre et porter des commentaires
sur le plaidoyer de notre collègue, le député de l'Acadie,
mais je ne peux pas accepter un plaidoyer qui va simplement en sortant toutes
les faussetés qui peuvent être sorties d'un bord ou de l'autre.
Quant à moi, ce n'est vraiment pas dans cet esprit-là qu'on peut
aborder un projet de loi aussi important que celui de l'ouverture des commerces
le dimanche. Si on élimine ce côté-là, qu'on cherche
vraiment à répondre aux besoins et qu'on envisage les
réalités, avec les pétitions et tout ça, ce n'est
pas d'essayer de chercher un consensus. Les collègues d'en face l'ont
dit, ils ont cherché à avoir un consensus. Et ça nous
amène, souvent, à peut-être oublier un des facteurs, un
groupe, qui était peut-être des travailleurs qui n'étaient
peut-être pas représentés en commission, puis ça
nous amène, finalement, des fois, à oublier le gros bon sens. (15
h 30)
Moi, je vais simplement parler du gros bon sens au sujet des
travailleurs par rapport à cette loi-là. Mais avant, je voudrais
simplement, et tout ça, encore, dans un esprit non partisan, faire une
petite correction au sujet de ce qu'a avancé le député de
Beauce-Nord, cet avant-midi, au sujet de la loi 59, article 5, en mars 1985,
amenée par M. Biron, il semblerait.
Cette loi-là n'était pas pour permettre aux plus grandes
surfaces et aux pharmacies de vendre, c'était justement pour permettre
aux pharmacies d'être ouvertes plus longtemps et le dimanche. Là,
on est arrivé avec tout ça, et ce projet de loi là, en
fait, c'était justement pour permettre uniquement aux pharmacies, donc,
de cloisonner; tout le monde se rappelle comment on avait cloisonné les
pharmacies versus une partie, dans le même local, ou qui était le
côté pharmacie versus le côté bazar, si vous voulez,
ou magasin général. Ça va, on s'entend là-dessus?
Donc, ce n'était pas du tout l'esprit, et ce qu'a apporté le
député de Beauce-Nord, ce n'est pas un reproche, c'est simplement
une correction.
Et je reviens aux travailleurs. On me parle de qualité de vie. Je
ne mets pas en doute M. le ministre - c'est son projet de loi - et les gens
d'en face. Ce n'est pas ça l'idée. Regardons ça
froidement. À 8 heures le matin, un travailleur doit être au
travail et il finit à 21 heures, et ça, 5 soirs par semaine, et
le samedi de 8 heures à 20 heures. Imaginez une mère de famille,
même un père de famille. Les garderies ouvrent à 8 heures.
À quelle heure faut-il qu'ils se lèvent? Un être humain, ce
n'est pas tous... Des consommateurs, c'est quoi ça, des consommateurs,
si ce ne sont pas des individus, des parents, des étudiants, du monde
ordinaire? Un consommateur, ça n'existe pas comme ça. On
n'achète pas pour le plaisir d'acheter. On achète pour satisfaire
des besoins humains Donc, le consommateur là-
dedans, c'est d'abord des parents, c'est d'abord du monde.
À 8 heures le matin, M. le Président, il faut qu'il soit
au travail. Puis il te file ça jusqu'à 21 heures le soir, 5 soirs
par semaine. Ça veut dire qu'à 21 heures, sa caisse n'est pas
faite. Moi, je vais être bien concrète. Sa caisse n'est pas faite
puis il faut qu'il tolère le client jusqu'à une demi-heure
après. Il n'est pas rendu chez lui après. Quel temps lui
reste-t-il pour avoir une vie de famille, pour avoir des contacts avec son
conjoint? Que ce soit un homme ou une femme. Ce n'est pas une question de
prendre parti pour les femmes, quoiqu'elles soient majoritaires
là-dedans, qui vont être pénalisées pour voir
à l'entretien de la maison, parce que ce sont souvent des petits
salariés qui n'ont pas les moyens de se payer une aide à la
maison. Parce que s'ils se paient une aide à la maison, ils n'auront
plus de salaire. Ils sont aussi bien de rester chez eux. S'ils vont travailler,
c'est parce qu'ils ont besoin de leur argent. Ce n'est pas pour tout donner
à une aide à la maison. Quel temps leur reste-t-il pour la
maison, les enfants, le conjoint? Parce que, le lendemain matin, ils
retournent. Ça va amener quoi? Dans la réalité, ce n'est
pas possible de vivre sur un train d'enfer comme ça toute l'année
et avoir 15 jours de vacances à la fin de l'année. Ce n'est pas
possible.
Ça va amener quoi, M. le Président? Du temps partiel qui
est déjà majoritaire chez les femmes. Et le temps partiel, on le
sait très bien, ce sont des situations de compromis. C'est parce qu'ils
ne peuvent pas avoir de plein temps qu'ils sont obligés d'accepter. Et
le temps partiel, ça veut dire quoi, comme conditions de travail? La
personne qui travaille à temps partiel, elle est en "standby", entre
guillemets. Donc, tous les jours, elle devra être disponible de 6 heures
le matin - si ça ferme à 22 heures - jusqu'à 20 heures le
soir au cas où elle se ferait appeler par un patron pour aller
travailler. Après ça, on me parle de qualité de vie.
Ça n'a pas de bon sens. J'ai comme l'impression que d'avoir
peut-être trop voulu faire de consensus, on a peut-être
oublié le facteur le plus important là-dedans, qui est
l'être humain, l'humain, point, le travailleur, point.
Un autre petit point que je voudrais aborder. Il semblerait,
d'après les documents, qu'on calque notre modèle sur le
modèle américain. Là, encore... Moi, je vais me
référer au modèle des polyvalentes - c'était mon
secteur pour avoir été longtemps dans l'enseignement - où
on avait copié sur le modèle américain pour s'apercevoir
après quelques années qu'on avait pris, nous, un modèle
qu'eux voulaient délaisser et des polyvalentes tellement grosses que les
étudiants étaient traités comme des numéros et
où le côté humain n'y était plus du tout. Donc, on
essayait, comme compromis, de faire de petites écoles à
l'intérieur de la grosse, mais où le côté humain
était complètement ignoré. On est en train de faire, je
pense, en allant chercher encore le même modèle chez les
Américains, la même erreur qu'on â faite avec notre copie de
nos modèles des polyvalentes. Et là, je ne peux pas. Ce n'est pas
dans un esprit partisan, comme je vous dis, M. le Président, encore. Je
pense qu'il faut absolument regarder la réalité et donner - c'est
notre devoir,, je pense - à la population un projet de loi durable - M.
le ministre disait que c'était parmi ses objectifs - qui réponde
aux besoins de l'an 2000, mais il disait "du futur". La tendance ne va pas, M.
le Président, à traiter les gens comme des robots, la tendance va
vers l'humanisation.
Le Président (M. Bélanger): Je faisais signe
à votre collègue qu'il vous restait douze minutes, parce qu'il me
le demandait.
Mme Oupuis: Qu'il me reste deux minutes? Le Président
(M. Bélanger): Douze minutes.
Mme Dupuis: Douze minutes. Ah! peut-être que je ne les
prendrai pas toutes, parce que tout a été dit, je pense. Tout a
été... J'étais à dire que la tendance va vers
l'humanisation. C'est certain que je pourrais vous sortir tous les cas de
comté qui m'ont été apportés à mon bureau,
je pourrais vous dire ce que le petit commerçant m'a dit. Je vais me
limiter simplement à quelques-uns. J'entre cette semaine pour aller
m'acheter un petit article dans une quincaillerie. Le propriétaire me
dit quoi? Il me dit: Mme Dupuis, ça n'a pas de bon sens. Vous allez
faire quelque chose avec ça. Ils ne sont pas pour nous passer une loi
pareille. Bien, j'ai dit: Vous allez être obligé de vous engager
un employé de plus. Il dit: Non, je n'en engagerai pas parce que mes
revenus sont assez bas que, si j'en engage un de plus, je suis aussi bien de
fermer mes portes. C'est le consommateur... Je vais remonter mes prix. Je vais
être obligé de m'en engager un de plus, mais je vais remonter mes
prix, parce que je ne peux pas assumer le salaire d'un autre employé,
j'arrive trop serré. L'autre dit: Bien, moi, je vais essayer. Ma femme
va venir travailler un petit peu plus. C'est du rafistolage, finalement,
où les gens sont mal pris. C'est ça que j'ai eu dans mon
comté. Ça a été ça, les
réactions.
Je ne peux pas, à ce moment-là, être d'accord avec
un projet comme celui-là quand tous les sons de cloche que j'ai eus
allaient tous dans le même sens, sauf un. Je ne peux pas être plus
honnête, M. le Président. Une personne m'a écrit. Elle ne
s'est pas identifiée - elle s'est identifiée dans le sens qu'elle
s'est nommée, mais elle ne m'a pas dit ce qu'elle faisait. Je ne suis
pas pour dire que c'était une lettre anonyme. C'est faux. Elle s'est
nommée et tout ça. Mais je ne sais pas si c'était une
travailleuse. Je n'avais
pas assez d'information pour savoir dans quelle catégorie je
pouvais la placer. Elle m'a dit que ça lui donnerait plus de temps pour
magasiner. Je suis honnête. Je le dis, une. Mais toutes les autres, les
téléphones... Une femme qui venait de s'acheter un petit commerce
me disait: Écoutez, moi, Mme Dupuis, ça n'a pas de bon sens. Ma
mère vient m'aider parce que je n'ai pas les moyens. Je pars en
business. Ma mère vient m'aider pour que je boucle les fins de mois,
parce que la compétition est trop grande. Puis après, je vois
qu'on me dit, un petit peu plus loin, ou dans l'argumentaire de je ne sais pas
si c'est M. le ministre ou un des collègues, qui nous dit: Bien, oui,
mais il n'est pas obligé d'ouvrir. Voyons donc! Bien sûr qu'il
peut ouvrir à 10 heures ou à 11 heures. Soyons donc
réalistes. Tu as un petit magasin de robes ou tu as un petit magasin, un
petit quelque chose, une petite "binerie", et l'autre en face, ouvre à 8
heures et toi, tu ouvres à 11 heures, tu vas crever en dedans de trois
mois. Qu'est-ce que ça donne de dire: Vous pouvez, vous avez la
liberté d'ouvrir quand vous voulez. Ce n'est pas de même dans la
réalité. Il faut n'avoir aucune notion de marketing pour savoir
que ce n'est pas applicable, ça.
C'est ce son de cloche là du monde ordinaire que je veux donner,
que je veux apporter ici, et qu'on n'ignore pas, et que je pense que ma
collègue de Taillon, dans toutes ses pétitions non recevables -
qu'on dit non recevables, parce qu'il manque le côté technique -
c'est ce son de cloche là qui, je pense...
Là n'est pas mon intention de faire un procès d'intention
à qui que ce soit, mais je pense tout simplement qu'on n'a pas
porté une oreille attentive à cette voie-là. Encore
là, honnêtement, l'idée, ce n'est pas de prendre tout le
temps, si on n'a pas besoin de ça. C'était ce son de cloche
là que je voulais vous donner. Il est très important je pense que
je vous l'ai donné. Même si je prends dix minutes de plus, je
pense que je n'arriverai pas à vous convaincre plus, si vous ne
l'êtes pas déjà, mais je vous prie de prendre en
considération ces travailleurs-là qui vont être
obligés de tomber à temps partiel. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous
remercie, Mme la députée de Verchères. Est-ce qu'il y a
des intervenants du côté ministériel? Bien. Alors, M. le
député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. Eh bien! il me fait
plaisir, bien malgré moi, d'ailleurs - j'aurais
préféré que le ministre comprenne tout de suite ce que les
gens sont venus lui dire devant cette commission parlementaire, au moment de la
consultation publique, mais il semble que le ministre n'ait rien compris.
Alors, il faut lui répéter, il faut essayer de lui faire
comprendre quelque chose.
Moi, j'ai l'impression que le ministre est nouveau en Chambre - il a
été élu aux dernières élections - et puis
qu'il regarde ce qui se passe autour de lui et il remarque... Juste quelques
exemples comme ça qu'on va prendre: le ministre
délégué aux Mines a réussi, en abandonnant le
programme d'actions accréditives, à faire crever tout ce qu'il y
avait de petites compagnies minières, au Québec, hein, les
petites compagnies junior. Il y en avait au-dessus d'une quarantaine, entre 40
et 50, et aujourd'hui, il en reste 2 ou 3 qui vivotent. Il a tout fait crever
ce qu'il y avait de petit dans le domaine de l'industrie minière.
Le ministre déléguée aux Forêts, lui, il
s'est dit: On va changer la Loi sur les forêts. Il a fait crever tous les
indépendants, puis les quelques-uns qui restent sont pris avec des
copeaux qu'ils ne sont pas capables de vendre parce que c'est la grande
entreprise qui comptait.
Le ministre des Transports, lui - regardez ce qui se passe autour du
parlement ces jours-ci - est en train de faire crever, avec ses politiques,
tous les camionneurs artisans du Québec parce qu'ils s'organisent. Le
laxisme dans les lois fait en sorte que les gros, les contrac-teurs
achètent leurs camions et opèrent eux-mêmes sans avoir
à passer par les artisans. Il est en train de tous les faire crever.
Hein! les camions qui sont là, là, autour du parlement,
là, ça fait des mois et des mois qu'ils n'ont pas
travaillé dans bien des cas, O. K. Moi, sur 18 artisans qu'il y a dans
la seule ville de Chibou-gamau et à Chapais, les deux petites villes de
Chibougamau et Chapais...
Le Président (M. Bélanger): Excusez...
M. Claveau:... sur 18 artisans, il y en a 15...
Le Président (M. Bélanger):... excusez, M. le
député.
M. Claveau:... qui sont ici.
Le Président (M. Bélanger): Excusez, M. le
député...
Une voix: Est-ce qu'elle est membre, elle? Êtes-vous
membre?
Le Président (M. Bélanger):... s'il vous
plaît, s'il vous plaît!
Une voix: J'ai le droit de parler.
M. Jolivet: Madame, M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît!
M. Jolivet: Oui, juste un instant, juste un Instant.
Le Président (M. Bélanger): Oui, question de
règlement?
M. Jolivet: Oui, oui, question de règlement. La personne
qui vous a fait signe est-elle membre de la commission?
Le Président (M. Bélanger): Tous les
députés peuvent participer aux travaux d'une commission.
Mme Marois: Ah oui?
Le Président (M. Bélanger): La seule chose...
Mme Marois: C'est pour tout le monde que la règle
s'applique?
Le Président (M. Bélanger):... ils ne peuvent pas
voter, ils n'ont pas le droit de vote, mais ils peuvent participer.
Mme Marois: Ah! je croyais qu'on devait se faire remplacer, M. le
Président, en début de séance.
M. Jolivet: Est-ce qu'ils ont droit de parole?
Le Président (M. Bélanger): Oui, ils ont droit de
parole.
Mme Marois: Parfait. M. Jolivet: Ah! merci. Mme Marois:
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Et surtout vous, vous
le savez très bien, mais ils n'ont pas droit de vote, ils n'ont le droit
de participer à aucun vote.
M. Jolivet: Je m'excuse, M. le Président, parce que je
voudrais bien qu'on clarifie, là, parce que là, vous venez
d'ouvrir une porte.
Le Président (M. Bélanger): Allez-y donc, oui,
allez-y donc!
M. Jolivet: Oui, oui, je pense que c'est important, là.
C'est parce que, moi, j'ai cru comprendre que les membres de la commission
avaient droit de parole et de vote, mais c'est la première fois que
j'entends parler de droit de parole sans vote. Mais ceux qui sont membres de la
commission ont droit de parole et de vote? Ce que vous venez de m'ouvrir comme
porte, là, c'est important que vous me le disiez, parce que, là,
je vais emmener d'autre monde, moi, là. Ce que vous êtes en train
de me dire, c'est que tout le monde peut défiler à cette
commission? Je n'aipas eu de motion comme ça au début de
là commission. Si vous me dites que c'est ça, là,
attendez-vous à veiller tard ce soir.
Le Président (M. Bélanger): Oui? Non, vous
faites... S'il vous plaît! Vous faites référence à
l'article 132 et, effectivement, l'article 132 dit très bien, et vous
avez tout à fait raison, et je vous remercie de me le rappeler: "Le
député qui n'est pas membre d'une commission peut, avec la
permission de cette dernière, participer à ses
délibérations, mais ne peut y voter ni présenter de
motion. Cette permission n'est pas requise lorsqu'une commission étudie
les crédits. "
On vient de sortir de la période des crédits, c'est
là que j'ai fait la confusion.
M. Jolivet: Mais là, je peux permettre à madame et,
en conséquence, si je lui permets, elle permettra l'inverse aussi.
Le Président (M. Bélanger): Non. Écoutez!
Mme Marois: Ah! M. Jolivet: Ah bon! Une voix: Ha, ha,
ha!
Le Président (M. Bélanger): Si on s'entend bien, je
voudrais juste dire à Mme la députée de...
Une voix: Groulx.
Le Président (M. Bélanger):... Groulx que la
règle de pertinence s'applique mais, en l'occurrence, actuellement, le
député d'Ungava donne des exemples et on ne peut pas
l'empêcher de donner des exemples et, dans ce sens-là, je pense
que la règle de pertinence ne s'applique pas.
Alors, je demanderais donc au député d'Ungava de continuer
son intervention, s'il vous plaît. (15 h 45)
M. Claveau: Alors, merci, M. le Président. Effectivement,
j'étais en train de donner un certain nombre d'exemples qui permettent
de comprendre le cheminement que le ministre a pris pour se trouver quelqu'un
à égorger lui aussi. Il voit ses collègues, tout autour,
qui égorgent les petits, partout, alors il dit: Qui est-ce que je
pourrais bien attaquer pour montrer que j'ai du muscle, moi aussi. Et
finalement, il s'attaque aux petits, dans le domaine de l'alimentation, qui
sont ceux qui vont perdre le plus dans son projet de loi. Et quoi qu'en dise le
ministre, il n'y a personne qui peut nier le fait qu'il ouvre la concurrence
"at large", à tout le monde dans le domaine de l'alimentation,
quelle
que soit la grosseur de l'entreprise, pour venir égorger les
petits qui ont investi là-dedans, et comme je le disais au ministre pas
plus tard qu'hier soir, qui avaient investi en fonction d'un créneau
dans lequel ils pouvaient prétendre faire fructifier leur avoir, en se
basant sur une loi qui protégeait cette activité-là, ou ce
"bracket" du commerce de détail et d'alimentation.
Pour le reste, bon, qu'on ne vende pas de meubles le dimanche, moi je
vais vous dire que ça ne me dérange pas beaucoup. Un "set" de
salon, tu n'en achètes pas toutes les semaines, un frigidaire, c'est
à peu près la même chose Quand tu en en acheté un
aux 10 ou aux 15 ans, c'est pas mal le maximum, et encore là, il faut
être un petit peu capricieux. Alors, le problème est dans la
consommation que l'on renouvelle à toutes les semaines et
essentiellement, donc, dans ce sens-là, dans l'alimentaire. Pour le
reste, il y a des exceptions qui sont là, et qui, de toute façon,
sont maintenues pour l'essentiel, dans le domaine de la restauration, de
l'essence, enfin certains produits qui sont liés à nos
activités d'une société peut-être un petit peu plus
moderne et peut-être un petit peu moins fixe que la société
qui nous a précédés. On a maintenu, aussi, un certain
nombre d'exceptions pour tout le monde dans les zones touristiques, en autant
que ce soit accepté par le ministre, bon. Pour l'essentiel, là,
il n'y a pas de problème.
Là où le problème se pose et continue à se
poser, et là où le ministre a carrément fermé les
yeux, c'est dans le domaine de l'alimentation. Qu'on le veuille ou non, M. le
Président, on a beau regarder le projet de loi sous tous ses angles,
quand le ministre dit: En dehors des heures normales d'affaires...
Déjà que les heures normales d'affaires, il les a passablement
étirées, là, pour faire en sorte que ce ne sera à
peu près plus vivable pour personne dans l'industrie du commerce en
générai. Là, il dit: Tous peuvent rester ouverts dans les
domaines de l'alimentation, des produits pharmaceutiques, des boissons
alcoolisées, des journaux, périodiques, livres, tabac et objets
requis pour l'usage du tabac - ça comprend les pipes - des
pâtisseries-confiseries, etc. Il dit: Peu importe la grosseur de votre
commerce, vous avez beau avoir, à la semaine longue, durant les heures
normales d'affaires, 10 caisses - et souvent n'en ouvrir que 5 comme c'est
souvent le cas - et avoir 25 ou 30 employés sur le parquet, dès
que la cloche sonne à 21 heures - au début il avait mis 22
heures, mais finalement il a compris que peut-être que lui-même,
à 22 heures, ça ne l'intéresse plus d'aller magasiner, il
a dit: pour moi, c'est 21 heures, donc ça va être 21 heures pour
tout le monde, donc il a ramené ça à 21 heures - à
compter de 21 heures, on n'a pas à barrer les portes. Il n'y a pas une
de ces entreprises là qui est obligée de barrer ses portes avec
ce qu'on a dans le projet de loi et on y reviendra à l'étude
article par article. Le ministre essaiera de nous prouver le contraire,
à moins qu'il ne change d'idée d'ici là. Tout ce qu'il y a
a faire, c'est de fermer quelques caisses et de s'organiser pour qu'il n'y ait
pas plus de cinq personnes sur le plancher, y compris le propriétaire ou
son représentant. Allez donc! Ça en fait quand même cinq
qui travaillent, ça. Il s'agit juste qu'il y ait cinq personnes.
N'importe laquelle de ces entreprises-là, de ces grandes surfaces, de
ces supermarchés, va pouvoir rester ouverte, vingt-quatre heures par
jour, si le coeur lui en dit. C'est ça que le ministre dit. En dehors
des heures normales d'affaires, en autant que tu n'aies pas plus de cinq
employés sur le plancher, y compris le propriétaire ou son
représentant, tu peux rester ouvert tant que tu veux, quand tu es dans
le domaine de l'alimentation, des pâtisseries-confiseries, boissons
alcooliques, journaux, périodiques, tabac, etc., et pharmacies.
Ça, ça veut dire, M. le Président, que là,
on vient de refaçonner, oui, la façon de consommer des
Québécois, mais on la refaçonne à partir d'une loi
qui sous-tend ou qui est sous-tendue par quelques principes,
c'est-à-dire, M. le Président, qu'on va faire en sorte d'ajuster
les besoins de consommation des Québécois aux besoins des grandes
corporations dans le domaine de la distribution des produits alimentaires et
d'autres produits par le fait même, parce que vous savez très bien
que des 23 000 travailleurs qui actuellement travaillent dans la PME du
commerce, si vous voulez, dans les dépanneurs, dans les petits postes
d'essence auxquels on jumelle un dépanneur ou dans les petites
pharmacies où on a éventuellement un peu de quincaillerie de
toutes sortes, eh bien, ces gens-là réussissent à vivre,
d'abord, parce qu'ils sont proches de leur quartier.
Généralement, ces entreprises-là sont proches des
quartiers. Il y en a quelques-unes sur les grandes routes passantes pour des
services aux gens qui voyagent de nuit, qui veulent se rafraîchir tout en
faisant le plein d'essence et prendre un café à l'occasion
plutôt que de s'endormir au volant, mais ça correspond donc
à un besoin établi qu'on a modelé à travers des
besoins de société et une législation en
conséquence.
Là, le ministre ouvre la porte, par exemple, pour qu'en allant
faire votre épicerie dans un supermarché, dans une grande
surface, vous puissiez en même temps faire votre plein d'essence, parce
qu'à partir du moment où ces entreprises-là vont
être capables et dans la mesure où elles sont situées dans
un endroit qui est suffisamment accessible par les routiers, par les gens qui
voyagent sur les grandes artères à travers le Québec,
à ce moment-là, il n'y a plus rien qui va empêcher, par
exemple, un Provigo avec 12 caisses d'ouvrir vingt-quatre heures par jour en
laissant juste une caisse et, éventuellement, en aménageant un
petit peu un coin, un rayon du genre 2 ou 3 réfrigérateurs pour
la liqueur, la crème glacée et le pop-corn, d'un
côté vendre des cigarettes, un petit peu tout ce qu'on peut
retrouver dans les dépanneurs qui sont jumelés à des
postes d'essence. À ce moment-là, en plus de faire crever le
dépanneur du coin de rue qui ne pourra pas, lui, vendre son pain, son
beurre, son lait, etc., à un prix aussi bas que la grande surface, parce
qu'il n'est pas capable d'amortir ses coûts sur des périodes de
plus grande intensité ou de plus grande activité commerciale,
vous allez faire crever une bonne partie aussi des postes d'essence, des autres
entreprises qui sont jumelées à des postes d'essence en vertu de
la loi existante et, la respectant en tout point, qui donnent des services
connexes aux gens qui voyagent en dehors des heures normales d'affaires.
Là, vous faites crever tout ce monde-là, d'autant plus que vous
allez habituer les gens à faire leur plein d'essence en même temps
que leur épicerie, à faire vérifier l'huile de leur
voiture en même temps que leur épicerie et, éventuellement,
aussi vous faites en sorte qu'on va retrouver des pneus et de l'huile dans des
sections spéciales dans les épiceries, parce que c'est ça
qui va arriver en bout de piste. C'est ce genre de démarche-là
que le ministre est en train de mettre en place.
Je l'entends dire depuis des semaines, des mois: Je fais confiance aux
commerçants, je fais confiance à la bonne volonté de tous
ceux qui vont appliquer la loi. Allez donc, M. le Président! Allez donc!
Là où il y a une piastre à faire, ne craignez pas que les
grandes corporations vont essayer de la faire au plus vite. On a vu, même
dans cette commission parlementaire, dans l'enceinte du Parlement, au moment de
la consultation publique, une entreprise dont les concessionnaires de grande
surface sont venus dire: Nous, on est pour l'ouverture le dimanche, la
corporation elle-même est venue nous dire: Nous autres, on est pour
l'ouverture le dimanche, mais son réseau des dépanneurs est venu
dire: Nous, on est contre l'ouverture le dimanche. Et pourtant, c'est les
mêmes fournisseurs là-dedans. C'était la même
entreprise sauf qu'on change un peu le pavillon dépendamment du genre de
produit qu'on offre et dépendamment qu'on le fasse comme corporation ou
qu'on le fasse par le biais d'un concessionnaire, d'un franchisé. Tout
ça pour vous dire que, dans le fond, l'intérêt de cette
compagnie-là, en bout de piste, c'est d'aller ramasser le maximum du
marché qu'elle peut et si, finalement, les gens avec qui elle a pris les
ententes actuellement pour travailler sur la base du dépannage ne sont
plus capables de vivre, elle trouvera bien un moyen de les compenser, de faire
en sorte d'annuler ces contrats-là et puis, quant à elle, elle
prendra comme corporation une part du marché supérieur. Il n'y
aura pas plus de consommation. Il n'y a pas plus de beurre, de lait et de pain
qui vont se vendre au Québec parce qu'à ce moment-là il
aurait fallu prévenir le ministre de l'Agriculture pour qu'il change ses
lois dans le domaine agricole pour en faire produire plus et, que je sache, le
ministre n'a pas contacté le ministre de l'Agriculture pour savoir s'il
y aurait plus de carottes, de choux de Siam, de navets, de patates sur le
marché, à moins qu'il n'ait envie de les prendre au
Nouveau-Brunswick; ça fait peut-être partie du "deal" de la
semaine dernière, je ne le sais pas.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Claveau: Mais, à ma connaissance, il n'y a rien de
prévu au ministère de l'Agriculture pour produire plus
d'alimentation au Québec à partir de demain matin, si les
commerces en alimentation sont ouverts plus longtemps sur semaine, ce qui me
permet de croire que le volume global des ventes ne sera relativement pas
modifié, sera à peu près le même que celui qu'on
connaît actuellement.
Dans ce sens, quand il y a des gens qui viennent nous dire en commission
parlementaire: Nous, ce qui nous intéresse, c'est de prendre la part du
marché; oui, tout de suite, tout le monde a compris, et je suis certain
que le ministre et ses collègues ont tous compris aussi. Prendre une
part de marché dans le marché de l'alimentation, aujourd'hui,
ça veut dire être plus fort que son voisin pour le faire crever
puis vendre à sa place. C'est essentiellement ce que ça veut
dire. Quand le ministre met en place des lois qui vont permettre ça, eh
bien, ça veut dire qu'il vient de faire crever tous ceux qui ne seront
pas capables de concurrencer les plus forts. C'est ça que le ministre
nous dit, actuellement; son message est très clair.
Et lorsque l'on voit les réseaux de distributeurs ou de
détaillants indépendants, des petits dépanneurs commencent
à s'arracher les cheveux en disant: Nous, on avait pensé que le
gouvernement allait nous respecter; on a investi des sommes importantes en
vertu d'une loi qui nous protégeait un certain créneau sur le
marché, et là, on se retrouve Gros-Jean comme devant, le bec
à l'eau, avec la loi qui a été changée et qui fait
en sorte que ce créneau-là n'est plus respecté. Mais ceux,
par exemple, qui sont venus brailler pour dire: M. le ministre, nous, on a
investi en fonction de la loi dans des grandes surfaces pour vendre le jour,
là, on se rend compte que ça vend pas mal le soir, quand
même, dans les dépanneurs, puis nous autres aussi on voudrait
vendre à la place des dépanneurs, le soir. Au lieu que le
ministre leur dise tout simplement: Vous avez fait un choix en fonction de la
loi actuelle; vous avez décidé d'investir là où
vous pouviez vendre durant les heures normales d'affaires, sans exception,
ça a été votre choix, maintenant, organisez-vous pour
rentabiliser votre business à partir de ça, le ministre a dit:
Non, vous avez probablement raison, dans le fond, on pourrait peut-être,
sous
le prétexte de l'équité dans le domaine commercial,
permettre à tout le monde de vendre. O.K., on va changer la loi pour
vous favoriser.
On change la loi, donc, pour favoriser ces gens-là et faire en
sorte que ceux qui ont investi en fonction d'une entreprise qui devait vendre
uniquement durant les heures normales d'affaires, on puisse leur permettre
d'aller grignoter la part de marché chez ceux qui, de bonne foi, ont
investi, eux, pour travailler le soir, les fins de semaine, puis en pleine
nuit, parce que ça ne les dérangeait pas de faire ça, puis
ils pensaient que la loi les protégeait suffisamment par rapport aux
investissements qu'ils avaient à faire là-dedans. Et le ministre
vient nous dire aujourd'hui: Bien non, mais on a protégé
l'ouverture le dimanche, vous savez, on ne veut surtout pas ouvrir le dimanche.
Il nous a fait un sacré bel enrobage, parce qu'à partir de
maintenant tout le monde va pouvoir ouvrir le dimanche. Tout le monde, sans
exception, en autant qu'on n'ait pas plus que cinq personnes sur le
parquet.
J'ai posé la question au ministre et je n'ai pas eu de
réponse. En ce qui me concerne en tout cas, dans une région comme
la mienne puis dans l'ensemble des régions du Québec, je vous
assure que des pharmacies, des pharmescomptes, des dépanneurs, des
petites entreprises commerciales qui ouvrent les fins de semaine, il n'y en a
pas beaucoup qui ont cinq employés sur le plancher. La plupart, c'est
un, deux, des fois trois, quand il y a un petit service un peu
spécialisé. Donc, ça ne s'adresse pas à eux, cette
loi-là. Au contraire, ça leur nuit passablement, parce que, eux,
demain matin, ils ne seront pas capables de grossir pour en avoir cinq, de
toute façon. Ils ne sont pas capables de faire face à la musique,
et le ministre le sait très bien. C'est ça qui est le pire, c'est
qu'il le sait puis il veut faire semblant qu'il n'en a pas connaissance.
Quels sont les intérêts que le ministre protège,
ici, aujourd'hui? C'est ce qu'on continue à se demander. C'est ce que,
fondamentalement, moi, je me demande. Comment le ministre peut-il essayer de
nous faire croire qu'il n'a pas compris que, par son projet de loi, il faisait
en sorte d'acculer au pied du mur l'ensemble des petites entreprises qui
emploient tout près de 23 000 travailleurs au Québec et qui,
elles, travaillent continuellement avec moins de travailleurs, et en dehors des
heures normales d'affaires? Il vient nous dire maintenant, sous prétexte
qu'on va rendre la part du gâteau équitable pour tout le monde: On
va permettre à tout le monde d'aller sur ce créneau-là
qu'on vous avait réservé de par la loi. Et il essaie de nous
faire accroire qu'il ne comprend pas ça. (16 heures)
Quand arrive le temps, à un moment donné, de parler des
travailleurs, imaginez-vous la belle situation pour les travailleurs. Encore
là. j'ai hâte de voir, j'ai posé la question au ministre
hier soir et je vais la lui reposer tant et aussi longtemps qu'on ne sortira
pas d'ici: Quelles sont les vraies mesures que le ministre entend mettre en
place? S'il n'est pas capable lui-même, qu'il en parle à son
collègue du Travail ou de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu: Quelles sont les vraies mesures qu'il entend
mettre en place ou qu'il entend s'assurer que son gouvernement mette en place
pour faire en sorte que l'une des catégories les moins
privilégiées parmi tous tes travailleurs du Québec, une
des catégories les moins syndiquées, les moins
protégées à tous les points de vue, ne sera pas l'objet
d'une surenchère à partir de l'application de cette
loi-là? Quelles sont les vraies mesures qui vont faire en sorte qu'on
n'arrivera pas à obliger, par exemple, dans certains cas, des
travailleurs à aller jusqu'à 60 ou 65 heures par semaine, dans
des heures pas possibles? Ma collègue de Verchères, tout à
l'heure, avait tout a fait raison en parlant des femmes qui sont sur le
marché du travail et qui sont, pour l'essentiel, des travailleuses dans
le domaine de la distribution alimentaire. Quelles sont les mesures que le
ministre va mettre en place pour s'assurer que les garderies vont être
ouvertes jusqu'à 21 heures le soir? Est-ce qu'il a parlé de
ça à sa collègue, responsable des garderies? Il aurait
peut-être été intéressant qu'il lui en glisse un
mot.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, je peux conclure tout de
suite. Vous voyez que le débat est bien lancé et qu'on est loin
d'avoir fini d'argumenter pour essayer de faire comprendre au ministre que sa
loi, dans le fond, va carrément à l'encontre des
intérêts des travailleurs et, pour l'essentiel, des
intérêts des consommateurs aussi. Elle protège une
catégorie d'individus qui opèrent dans le domaine de
l'alimentation, pour l'essentiel, et on finira bien par lui faire dire qui il
protège.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Alors, est-ce qu'il y a des intervenants du côté
ministériel? Non, alors, je cède la parole à M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, le ministre a donné
des amendements, hier, qu'il entend apporter à son projet de loi. Je
voudrais, dès le départ, les résumer brièvement. Le
projet de loi prévoyait l'ouverture de 8 heures le matin à 22
heures le soir, du lundi au samedi. Le ministre a introduit l'idée d'un
amendement qui ferait que ce serait 21 heures au lieu de ?2 heures, du lundi au
vendredi, et que ça fermerait à 18 heures le samedi au lieu de 17
heures. A la
rigueur, il y avait là un petit pas, pas assez, mais il y avait
un petit pas dans la bonne direction, mais l'autre contenu d'amendement sur
l'objet tout aussi fondamental de la loi, l'ouverture le dimanche, nous donne
une idée qu'on s'éloigne de ce qu'il serait raisonnable d'avoir,
puisque le ministre nous parle de cinq employés au lieu de quatre et
toujours en ne mettant pas dans son projet de loi que, puisqu'on parle d'un
nombre d'employés requis pour ouvrir le dimanche, c'est le nombre
d'employés que ce commerce-là devrait avoir à son emploi
tout le temps quand il est ouvert.
À cet égard, M. le Président, je pense qu'il faut
dénoncer cette affirmation qu'on ne touche pas, qu'on ne change pas la
situation pour ce qui est des heures d'ouverture dans l'alimentation le
dimanche, alors qu'en réalité on est en train de la modifier
d'une façon considérable. On parle de cinq personnes au lieu de
trois en tout temps qu'il y avait auparavant, donc, il y en a deux de plus, et
on ne spécifie pas qu'il faut que ça soit l'effectif habituel de
l'établissement, ce qui veut dire qu'on vient de changer l'ordre de
grandeur pour permettre à des moyennes surfaces d'ouvrir le dimanche.
Et, le signe, M. le Président, qu'on ne pense plus à des
commerces de petite taille comme c'était le cas auparavant, c'est qu'on
exclut du calcul les préposés à la sécurité.
Alors, chacun sait que les préposés à la
sécurité, ce sont dans les grandes surfaces qu'on rencontre
ça, ce n'est pas le magasin de fruits du coin ou le dépanneur qui
a à son emploi une personne chargée de s'occuper de la
sécurité. Donc, on est en train de changer la règle du jeu
tout en protestant hautement qu'on ne change pas la règle du jeu. Et il
est évident, à cet égard, qu'on vient d'étendre
à d'autres catégories les régimes d'exception qui
faisaient que les Pharmescomptes Jean Coutu, par exemple, vendaient à
peu près de tout sauf ce qui touche la pharmacie le dimanche. Donc,
d'autres nouveaux joueurs dans l'industrie, comme le Club Price, qui ouvraient
en violation de la loi le dimanche eux-autres aussi.
Alors, cette loi qui est devant nous, M. le Président, elle a
pour but d'ouvrir le commerce de l'alimentation le dimanche d'une façon
très ouverte. On dit: En dehors des heures ceux qui... Puis il n'y a
plus d'heure, là. Ça sera vingt-quatre heures le dimanche s'il y
en a qui le veulent. Et on exclut du calcul la fabrication, on exclut du calcul
les préposés à la sécurité, et je
répète que ça a comme implication, si on parle de
préposés à la sécurité, une assez grande
surface. Et on ajoute un cinquième joueur, d'une façon
très hypocrite, M. le Président, puisqu'on dit: Le
propriétaire ou son mandataire, alors ça veut dire cinq, parce
que ce n'est même pas obligé que ce soit le propriétaire,
ça peut être son mandataire. Qui est le mandataire? Celui qu'on
désigne comme étant son mandataire. C'est là, je pense,
les aspects mauvais de cette loi-là.
D'abord, la règle du dimanche qui est changée.
Quant à celle sur semaine, M. le Président, il y a quelque
chose d'assez exorbitant du fait que non seulement on prolonge les heures
d'ouverture jusqu'à 21 heures tous les soirs pour ce qui est des
commerces d'alimentation, mais on l'applique à l'ensemble des
établissements de commerce du Québec. En commission
parlementaire, c'est une chose qui n'avait même pas été
demandée. On avait des représentations au sujet du commerce
alimentaire, il n'y en avait à peu près pas pour ce qui est des
autres types de commerce, mais on décrète dans cette loi qu'ils
pourront tous être ouverts jusqu'à 21 heures le soir. Et ce
faisant, on touche deux réalités: d'abord, le régime de
conditions de travail des personnes employées ou propriétaires
qui oeuvrent dans le commerce de détail, dont on va perturber les
loisirs, dont on va perturber les horaires et à qui on va rendre la vie
plus pénible. Je dis bien employés comme employeurs, puisque dans
les petits commerces, c'est bien connu, et chez ceux qu'on côtoie, on le
sait, le propriétaire ou le couple qui est propriétaire va
être appelé, pour pouvoir soutenir la concurrence, dans bien des
cas, à consacrer encore plus d'heures à son commerce. Et
ça, je pense que c'est une réalité que cette loi-là
vient prévoir.
Or, en commission parlementaire, M. le Président, qui y avait-il
dans les pour et les contre? Pour l'ouverture le dimanche, il y avait les
grandes corporations qui arrivaient avec leur armée de
spécialistes pour dire que c'est ça que la population voulait et,
de l'autre côté, il y avait des associations de consommateurs, des
groupes impliqués au plan social, les travailleurs en cause, les
propriétaires en cause, qui ne sont pas tous petits, parce qu'on a vu,
notamment, que pour ceux qui sont sous des bannières au plan de
l'alimentation, on avait des propriétaires d'entreprises sous
bannière qui venaient dire que, d'une part, l'ouverture le dimanche et
l'ouverture à gogo la semaine n'auraient pas comme conséquence
d'augmenter la valeur des biens que les gens achètent, mais ça
augmenterait les dépenses des entreprises ou ça étalerait
les heures de travail effectuées. Donc, l'immense majorité de
ceux qui se sont déplacés pour déposer des mémoires
était contre les changements que le gouvernement a maintenant mis sur la
table. Et il y avait pour, les grandes corporations, qui se disputent avec
beaucoup, beaucoup de vigueur le marché alimentaire, entre autres, qui
ne progresse pas, et il y a un nombre de joueurs relativement
élevé qui se le dispute. Donc, on veut exploiter les nouveaux
marchés et ça implique, M. le Président, de tasser les
plus petits. Dans ce sens-là, c'est une loi qui va dans le sens
d'intérêts particuliers, et c'est une loi qui ne préserve
pas l'intérêt général.
On a parlé un peu plus tôt, un collègue
député ministériel a parlé de la position de la
ville de Montréal, M. le Président. Je voudrais, à
cet égard, faire part à la commission d'une lettre que le
vice-président du comité exécutif, M. Robert Perreault,
faisait parvenir au ministre récemment, le 30 mai dernier. Dans la
lettre, M. Perreault dit ce qui suit: M. le ministre, nous avons pris
connaissance avec beaucoup d'intérêt du projet de loi 75 sur les
heures d'affaires. Nous sommes satisfaits que votre gouvernement respecte l'un
de ses engagements qui était de mettre fin, d'ici à
l'été 1990, à l'anarchie qui règne en ce domaine.
À la lecture du document, nous devons reconnaître que votre
gouvernement fait un pas dans la bonne direction. Cependant, nous sommes
vivement préoccupés des impacts négatifs de certains
aspects de votre projet de loi. Nous craignons en effet qu'ils ne viennent
contrecarrer les objectifs que vous poursuivez.
Premièrement, l'extension de la plage horaire sur une
période de 84 heures par semaine - on parle maintenant de 75, mais au 30
mai, c'était le premier projet de loi, et on parlait de 84 heures par
semaine. Pour les commerçants, l'ouverture des commerces sur une
période de 84 heures plutôt que 62 heures n'entraînera pas
une augmentation des revenus, mais plutôt des dépenses. Il est
à craindre que les commerces de petite ou moyenne taille ne soient pas
à même d'ouvrir pendant toutes les heures permises par la loi. La
situation ferait en sorte que certains commerces seraient ouverts pendant que
d'autres seraient fermés. Nous savons pertinemment que la force d'une
artère commerciale réside dans la complémentarité
dans l'offre des biens et des services. Je me permets de vous rappeler la
solution proposée à la commission parlementaire par la ville de
Montréal, en parfait accord avec les SIDAC. Nous croyons qu'il serait
préférable, afin de répondre aux besoins nouveaux des
consommateurs et de conserver une certaine qualité de vie aux
commerçants, de réaménager la plage horaire actuelle
plutôt que de l'étendre.
Deuxièmement - et c'est toujours M. Robert Perreault,
vice-président du comité exécutif de la ville de
Montréal qui parle - l'ouverture des commerces jusqu'à 22 heures
le samedi soir. On est en droit de s'interroger sur la pertinence pour
l'ensemble des commerces d'ouvrir si tard le samedi soir. Est-il vraiment
nécessaire de mettre en compétition les magasins de chaussures
avec les cinémas ou le théâtre?
Là-dessus, M. le Président, le ministre a entendu cette
partie-là du message et nous limite ça maintenant à 18
heures le samedi, ce qui est quand même une heure plus tard que dans la
loi qu'il amende.
Troisièmement, l'ouverture des commerces le dimanche avec un
maximum de quatre employés. Vous démontrez ici votre
volonté de ne permettre, le dimanche, que l'ouverture du
véritable commerce de dépannage. Toutefois, ni les cadres, ni le
personnel de sécurité, ni les préposés à
l'emballage ne sont inclus dans ce plafond de quatre employés. Nous
craignons que cette permissivité ne vienne pervertir votre
volonté de limiter le commerce aux véritables dépannages.
Il y aurait lieu ici d'être beaucoup plus restrictif.
Or, M. le Président, on sait qu'à cet égard le
ministre a décidé d'être beaucoup moins restrictif,
puisqu'il a ajouté une cinquième personne à l'effectif du
dimanche.
Quatrièmement, l'application de la loi par les
municipalités. Nous croyons que le projet de loi devrait contenir tous
les éléments assurant une application uniforme de la loi par les
municipalités qui auront accepté cette responsabilité.
Alors, je finis ici la lecture de la lettre du vice-président du
comité exécutif de la ville de Montréal. Mais je voudrais
dire, M. le Président, qu'à cet égard aussi la loi est
pernicieuse, lorsqu'elle prévoit qu'elle pourra être
appliquée en partie par le ministère lui-même et en partie
par les municipalités, et je m'explique. S'il y a deux organismes qui
sont chargés d'appliquer une loi, selon la logique qu'on peut
connaître du gouvernement actuel et de son président du Conseil du
trésor, il y aurait une excuse en or pour ne pas mettre les effectifs
qu'il faut pour faire respecter la loi. Du côté des
municipalités, M. le Président, qui se voient déjà
pelleter beaucoup d'obligations du gouvernement de Québec et qui, on le
sait, sont très mécontentes des changements de fiscalité
que le gouvernement a imposés, il n'est pas dit qu'elles vont le faire.
Et quand on parle de l'appareil du gouvernement, M. le Président, on
sait que quand il y a une excuse pour que les bureaucraties ne jouent pas leur
rôle, bien, elles sautent dessus. Alors, je craindrais que ni le
ministère ni les municipalités ne fassent leur travail. (16 h
15)
À cet égard, je sais que le ministre, dans sa loi, va
moins loin que l'Ontario, qui a carrément laissé les heures
d'ouverture aux municipalités. Mais il reste qu'on embarque sur un
terrain glissant. Glissant parce que les municipalités se retrouvent
souvent en concurrence les unes avec les autres à l'égard des
heures d'ouverture des magasins, un peu de la même façon que les
commerçants n'auront pas le choix d'ouvrir. Ils vont ouvrir parce que le
concurrent ouvre. Alors, au plan des municipalités, il est certain que
ce nest pas très populaire de faire observer cette loi et il est
certain, aussi, que s'il y a laxisme, s'il y a une municipalité qui
ferme les yeux, ça va mettre de la pression sur la municipalité
d'à côté pour qu'elle ferme les yeux elle aussi.
Alors, on peut donc penser que le régime actuel, que le
gouvernement libéral a laissé graduellement les exceptions
devenir la règle, qu'elles vont de plus en plus s'installer et,
après ça, il y aura un autre amendement législatif pour
entériner ce qui sera la pratique dans les faits. Alors, en
réalité, ce qu'il s'agit de dire. M. le Président, c'est
que les heures d'ouverture des commerces, c'est une responsabilité
publique. II
faut que le gouvernement s'en acquitte et qu'il ne se fende pas
aux pressions des grands intérêts pour accommoder les choses au
détriment de dizaines de milliers de commerçants qui, eux, ont
toujours respecté la loi et fonctionné dans le cadre imparti.
Le danger qu'il y a, M. le Président, d'accorder des amendements
législatifs à ceux qui étaient assez gros et assez
effrontés pour passer carrément à côté de la
loi, c'est d'encourager des comportements illégaux. Et, à cet
égard, je trouve qu'introduire les municipalités dans ça
ne garantit pas que la loi va s'appliquer d'une façon égale,
où qu'on soit au Québec. Je craindrais beaucoup, moi, que les
municipalités attendent après le ministère et que le
ministère attende après les municipalités. On sait qu'en
matière d'application des lois, M. le Président, quand tout le
monde s'occupe de quelque chose, personne ne s'en occupe. Ça, je pense
que c'est une crainte qu'on peut entretenir.
J'ai une autre lettre dont je voudrais lire quelques passages, M. le
Président, parce qu'elle m'apparaît fort intéressante.
C'est celle que le ministre recevait le 11 mai de la Corporation des marchands
de meubles du Québec. La Corporation dit notamment dans cette lettre, et
je cite: "Nous avons été informés que le gouvernement du
Québec s'apprêterait à recommander l'ouverture des
établissements commerciaux tous les jours de la semaine, de 8 heures
à 22 heures inclusivement - on sait maintenant que c'est 21 heures.
La lettre continue: "Les marchands de meubles du Québec ne
pourront accepter une telle proposition si elle était recommandée
Vous conviendrez comme nous, M. le ministre, que les dépenses de
consommation ont été érodées depuis quelques
années par le ralentissement démographique de la population, le
phénomène significatif de vieillissement de la population, le
phénomène d'urbanisation de plus en plus poussée, les
importantes modifications apportées à la structure même de
la famille, associées bien sûr à la baisse du nombre de
personnes par ménage et à la participation accrue des femmes en
milieu de travail. "Tous ces facteurs sociodémographiques,
associés à la faible croissance du revenu disponible qui
s'accroît à un rythme plus faible que le taux de l'inflation,
compressent les dépenses de consommation. Les perspectives de croissance
des dépenses de consommation de chacun clos Québécois nous
apparaissent anémiques au cours des cinq prochaines années.
Toutes les études économiques consultées laissent
présager un taux d'inflation de 4,5 % pour 1991, auquel s'ajoutera 1,5
%, pour la TPS. "Dans de telles conditions, il est prévisible que les
taux d'intérêt resteront assez élevés et, par
conséquent, d'énormes pressions seront exercées sur les
dépenses de consommation."
En conclusion, M. le Président, c'est une loi qui n'est
populaire, à peu près, que chez les membres du gouvernement. Elle
a soulevé Une levée de boucliers chez des dizaines de milliers
de personnes qui vont avoir à la subir. Et, dans ce
temps-là, il n'y a pas de honte à ce que le gouvernement
l'amende, l'améliore, pour faire en sorte qu'elle ne crée pas le
désordre et qu'elle donne plutôt des règles qui seraient
convenables, qui soient justes et qui soient appliquées.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Du
côté ministériel, M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Maurice Richard
M. Richard: J'aurais simplement un commentaire
d'éclaircissement ou de complémentarité, en fonction de ce
qu'a dit notre collègue qui vient de terminer. En ce qui a trait
à l'application de la loi, lorsqu'on aura terminé l'étude
article par article par le monde municipal... On a fait une
référence à ce qui s'est passé en Ontario. C'est
assez différent. C'est qu'en Ontario on a laissé le loisir de
choisir la plage horaire, ce qui n'est pas le cas au Québec. Au
Québec, c'est une loi qui va définir l'espace dans le temps au
niveau des heures d'ouverture et des heures de fermeture. On dit au monde
municipal non pas de faire la loi, parce que là, il peut arriver
l'inquiétude que M. le député avait, tout à
l'heure, c'est-à-dire que deux municipalités voisines
déterminent qu'une municipalité ferme à 20 heures et
l'autre municipalité, à 21 heures. Là, c'est bien
évident qu'il peut y avoir une différence assez flagrante d'une
municipalité à l'autre. Mais ce n'est pas le cas ici. Ça
ne peut pas être le cas, parce que la loi serait gouvernementale, et
c'est l'application qu'on demande au monde municipal de faire et/ou par le
ministère. C'est seulement une question de clarification.
On ne peut pas, je pense, actuellement, faire vraiment une comparaison
entre ce qui a pu être vécu et ce qui se vit en Ontario et ici au
Québec. Parce qu'il y a une volonté, et je pense que tout le
monde est d'accord avec ça: s'il y a eu une unanimité lors de
toutes les auditions qu'on a eues, c'est sur le fait qu'il fallait que ce soit
le gouvernement qui fasse la loi. L'ouverture d'application, ce sera à
savoir si, éventuellement, le monde municipal pourrait avoir un
intérêt - c'est carrément "intérêt" -
financier à aller chercher ce type de revenus, parce qu'il y aurait des
amendes et il y aurait peut-être une certaine facilité à le
faire dans certaines municipalités, en tout cas. Je ne parle pas dans
les petites municipalités, c'est évident, car elles n'ont pas de
corps policier comme tel; mais dans certaines grandes municipalités, il
y aurait un avantage, particulièrement financier, à le faire.
C'est seulement pour clarifier ça, qu'on ne peut pas, fondamentalement,
je pense, faire la corn-
paraison avec l'Ontario.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Est-ce que je pourrais poser une question au
député de Nicolet-Yamaska, en vertu de notre
règlement?
Le Président (M. Bélanger): Si le
député de Nicolet-Yamaska est d'accord. Oui.
M. Jolivet: Est-ce que vous ne croyez pas justement que ce que
l'on craint - c'est la question que je vous pose - c'est le laxisme avec lequel
une municipalité pourrait appliquer ou non la règle que vous
déterminez? Est-ce que ça ne serait pas l'inquiétude
normale?
M. Richard: Fondamentalement, je pense, en toute
honnêteté, que, oui, on peut avoir ce type d'interrogation
là. Et c'est d'ailleurs pourquoi, dans l'article de loi, s'il n'est pas
modifié comme tel, l'on dit bien qu'on ne transfère pas
l'en-tièreté de la surveillance de l'application de la loi au
monde municipal. C'est effectivement dans ce sens-là que le
ministère se garde - c'est 'et/ou" - la possibilité d'aller faire
appliquer la loi, parce que la loi ne peut pas être appliquée...
Je pense que c'est un peu l'inquiétude que vous avez, M. le
député de Laviolette, et votre collègue de tout à
l'heure: on ne voudrait pas se retrouver avec une loi qui est appliquée,
pour parler de notre région, au Cap-de-la-Madeleine d'une façon
et à La Tuque ou à Trois-Rivières ou à
Bécancour d'une autre façon. Il faut qu'elle soit uniforme.
Ça, ce sera le travail du ministère en tout temps sauf que, dans
certains endroits, le ministère aura à faire la surveillance et
l'application et, à d'autres endroits, il pourra avoir à faire
uniquement la vérification, de manière que la loi soit bel et
bien appliquée d'une façon uniforme à travers le
Québec. En tout cas, c'est ma vision de cet article de la loi.
Le Président (M. Bélanger): Vous me permettez une
intervention comme député de Laval-des-Rapides. Je voudrais nous
mettre en garde pour ne pas laisser supposer - j'ai entendu l'argumentation -
que la loi serait soumise, en ce qui concerne l'application par les
municipalités, au bon vouloir des élus municipaux qui pourraient
favoriser quelqu'un ou faire preuve de laxisme. J'ai entendu cette
argumentation-là et je tiendrais à corriger cette
affaire-là. Je pense que les élus municipaux sont des gens
très responsables et qu'on ne peut pas leur prêter des Intentions
comme ça. Ça ne venait pas d'un côté ni de l'autre.
J'ai entendu ça "at large", si on peut dire. Je trouve ça
dommage, parce que ce sont des gens élus, imputables et responsables.
Dans ce sens-là, on ne peut pas dire qu'un conseil favoriserait
l'application dans un sens ou dans un autre. Je trouverais ça
très dommageable pour cette institution que représentent les
élus municipaux. Or, c'était la correction que je voulais amener.
M. le député de Laviolette, c'est à vous.
M. Jolivet: M. le Président, avant d'intervenir, est-ce
que je pourrais vous poser une question, parce que je voudrais savoir,
étant donné que je suis le dernier à parler pour ma
formation politique...
Le Président (M. Bélanger): Oui.
M. Jolivet: Est-ce que vous pourriez demander aux membres du
côté ministériel s'il y a une autre personne, parce que je
lui laisserais d'abord... C'était l'alternance jusqu'à
maintenant, et je lui laisserais le choix.
Le Président (M. Bélanger): Oui, je le leur ai
demandé. Effectivement, on m'a dit qu'il n'y avait personne.
M. Jolivet: Donc, je crois comprendre qu'après mon
intervention, ce serait terminé, on passerait à une autre
étape.
Le Président (M. Bélanger): On appellerait
l'article 1, oui.
M. Jolivet: Non, nous autres, on avait une autre étape
à vous proposer, cependant.
Le Président (M. Bélanger): Je n'en doute pas. Ha,
ha, ha!
Une voix: D'accord.
M. Jolivet: Alors, je vous ai posé cette question, M. le
Président, parce que dimanche, dans le moment gris de la journée
qui a été pas mal grise au complet...
Le Président (M. Bélanger): M. le
député, une précision.
M. Jolivet: Oui.
Le Président (M. Bélanger): En vertu de l'article
246, le ministre pourrait intervenir.
M. Jolivet: Oui, oui, j'ai compris, j'ai compris.
Le Président (M. Bélanger): On est d'accord avec
ça.
M. Jolivet: C'est dans ce sens-là, oui.
Le Président (M. Bélanger): Dans ce sens là.
d'accord. Alors, allez-y.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Tout simplement, M. le Président, c'est que
dans la journée grise de dimanche passé, j'ai eu l'occasion de
rencontrer la Coalition et j'ai eu l'occasion, pour une rare fois dans
l'ensemble des activités dont je faisais mention ce matin à
l'Assemblée nationale, à partir du 3 juin, d'avoir deux de mes
collègues ministériels à mes côtés, le
député de Saint-Maurice et le député de
Trois-Rivières. Le député de Trois-Rivières
n'étant pas membre de la commission aujourd'hui, il y avait le
député de Saint-Maurice. Alors, comme le député de
Saint-Maurice s'était engagé - il s'est même fait applaudir
à la fin de la réunion - d'intervenir en faveur des demandes
faites par les gens de la Coalition, je m'attendais qu'il le fasse
publiquement. Il pourra me dire qu'il l'a fait au niveau de son caucus. Bon,
écoutez, je ne mettrai pas en doute sa parole, mais vous me permettrez
de poser un point d'interrogation. Et, comme c'était l'occasion voulue,
aujourd'hui, de le dire publiquement, je m'attendais qu'il parle. Mais, en tout
cas, c'est sa décision à lui. On peut bien lui laisser sa simple
décision. Mais il faudrait quand même remarquer qu'il avait
été applaudi parce qu'il avait dit: Je défendrai
auprès du ministre certains de vos points auxquels je crois.
M. le Président, j'ai compris un peu ce qui s'est passé
dans la tête de plusieurs députés ministériels quand
ils nous ont dit: Les commerces ne seront pas ouverts le dimanche. Je me suis
dis: Coudon, est-ce moi qui suis dans le tort? Peut-être que j'ai
erré dans la lecture du projet de loi, peut-être que ma
collègue, la députée de Taillon, qui ordinairement nous
donne toujours les bons renseignements, n'a pas vu. Mais il y a une chose
certaine, il faut se la poser, la question. On nous a dit: II n'est pas
question d'ouvrir les commerces le dimanche. Bon! Alors, j'ai lu les notes
explicatives. On va les lire ensemble. On dit: "Ce projet de loi, qui remplace
l'actuelle Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux,
établit que, généralement, le public pourra être
admis dans un établissement commercial de 8 heures à 22 heures du
lundi au samedi et, par conséquent, qu'il ne pourra l'être le
dimanche." C'est là que j'ai découvert qu'ils n'ont lu que cela.
Ils n'ont pas lu la suite. Ils ont dit: Écoute, c'est marqué dans
le projet de loi, aux notes explicatives. Il ne sera pas ouvert le dimanche, le
commerce. Le public ne pourra pas être admis le dimanche. Donc, j'ai dit:
Ça doit être là qu'ils ont pris la source de leurs
renseignements, en disant à tout le monde, en nous regardant nous autres
et en nous disant: Vous errez, les commerces ne seront pas ouverts le dimanche.
Bon! J'ai dit. Coudon, peut-être que je me trompe. En tout cas, je lis
ça, là. Ah! On dit: "Le projet de loi prévoit toutefois
certaines exceptions. Ainsi, il maintient l'interdiction d'admission du public
à des dates spécifiques comme, par exemple, les 25
décembre et 1er janvier. Par contre, il permet que le public soit admis
dans un établissement commercial, de 8 heures à 17 heures, les
dimanches de décembre précédant le 25 décembre. Il
prévoit en outre que le public pourra en tout temps être admis
dans certains établissements commerciaux, pourvu que ceux-ci
satisfassent à certaines conditions notamment quant aux produits qu'ils
offrent en vente." C'est là qu'ils ont oublié d'aller lire.
Quand nous disons que le projet de loi, tel qu'il est
présenté, nous pose inquiétude, c'est là qu'on
commence à se les poser, ces questions-là. Qu'est-ce qui se passe
en dehors des heures normales prévues par la loi? C'est que dans un
secteur qui est déterminé par les exceptions - prenons le secteur
alimentaire, prenons le secteur pharmaceutique - le commerce peut être
ouvert en tout temps. Ça veut dire que nous pouvons, à la limite,
si je vais au bout de ce raisonnement-là, ouvrir tous les commerces
alimentaires, tous les commerces pharmaceutiques. Je peux les ouvrir 24 heures
par jour. Là, je ne pourrai pas dire 365 jours par année, parce
qu'il y a des moments donnés où c'est impossible de l'ouvrir.
Mais mettons 350 journées par année. Donc, ces commerces auxquels
on met des limites pourraient, hypothétiquement, ouvrir 24 heures par
jour, 350 jours par année, admettons. Si je me trompe, qu'on me le dise.
Mais mol, je fais une lecture attentive, et comme j'étais dans le
secteur syndical, je suis habitué à des conventions collectives.
Donc, les lois, j'y suis habitué, même si je ne suis ni notaire ni
avocat. Je les ai assez lues dans ma vie pour savoir qu'on ne dit pas, comme
législateur, on n'écrit pas quelque chose avec l'intention de ne
pas l'utiliser. Donc, si on a écrit quelque chose, c'est parce que
ça veut dire quelque chose, selon le principe que le législateur
ne parie pas pour ne rien dire. Tout comme j'emploie toujours mon terme, en
commission parlementaire, en disant que "trop fort casse pas". Ça, ce
sont des expressions que j'ai connues dans le temps du syndicalisme. Et depuis
que je suis ici à l'Assemblée nationale, maintenant presque 14
ans, j'ai entendu cela à satiété. (16 h 30)
Donc, le législateur, il écrit quelque chose pour qu'il y
ait un effet en quelque part dans le temps, dans des centres commerciaux ou
autres. Et c'est là qu'arrive le problème majeur. Il y à
des gens qui vont dire: En permettant quatre employés plus le
propriétaire, plus le surveillant, plus l'emballeur, plus la personne
qui prépare, peu importe si le ministre m'a dit que c'était pour
protéger les gens qui font de la pâtisserie... Aïe! il y a du
monde qui va utiliser ces passe-droits là! Ils vont commencer à
faire des pressions sur le ministre, que vous le vouliez ou pas, dans d'autres
choses. Ils vont l'utiliser. Alors, ça veut donc dire qu'on a
commencé à mettre dans
l'esprit des gens qu'un commerce peut être ouvert 24 heures par
jour. Vous allez me dire: II y en a déjà qui le font. Mais est-ce
que c'est nécessaire d'obliger tout le monde à le faire?
Là, le ministre dit: Bien, non, ils ne sont pas obligés de le
faire. Vous savez très bien qu'ils peuvent s'entendre, ils peuvent
décider, c'est une question d'affaires. Je le sens tellement
sérieux, le ministre, je le sais tellement sérieux que je ne peux
pas m'imaginer qu'il ne croit pas que ça aura des effets de pression
morale et financière chez les gens qui devront ouvrir, dans les
exceptions prévues, 24 heures par jour, 350 jours par année.
Donc, quand je regarde le projet de loi comme ça, et on aura
l'occasion d'y aller article par article, je vous dis: Ça
m'inquiète. Et là, vous dites: Oui, mais l'employé n'est
pas obligé. Bien voyons donc! Un étudiant, une étudiante,
une femme, un homme qui n'a pas d'autre choix... Parce que là, il ne
faut pas oublier que si on a besoin d'employés, à qui les
commerces vont-ils aller s'adresser, M. le Président? Vous le savez
comme moi. Ils vont aller au bureau d'aide sociale, lis vont dire:
Voilà, la personne qui est sur l'aide sociale pourrait faire un bon
vendeur, une bonne vendeuse, une personne qui place bien les produits sur mes
étagères, une personne qui répond très bien comme
pompiste. On va donc aller dire à l'aide sociale: J'aurais de l'offre.
J'ai besoin de telle ou telle sorte de personnel. Qu'est-ce qui va arriver?
Là, on va dire: Bien, écoutez, je vais vous envoyer une personne.
La personne refuse, parce qu'elle est incapable. Elle a une famille avec un
enfant, une femme de famille monoparentale. Elle refuse. Ah! qu'est-ce qui
arrive? Bien, on lui coupe son aide sociale. Vous le savez très
bien.
Donc, qu'on ne vienne pas me dire qu'on ne fera pas des pressions sur
des gens pour combler les demandes des employeurs. Le député de
Saint-Maurice était là dimanche, M. le Président. Il
conviendra très bien avec moi qu'une personne qui vend de la bijouterie,
avec ses trois employés... Elle est venue nous dire que ça
n'avait pas de bon sens. Vous la connaissez comme moi, cette personne, M. le
député de Saint-Maurice, et vous savez qu'elle disait la
vérité. Elle est venue le dire à la suite de pressions de
personne. Mais elle l'a dit parce qu'elle le croit profondément, parce
qu'elle, elle est dans le commerce. Le député de Saint-Maurice,
qui est un contracteur, sait très bien que si demain matin on permettait
l'ouvrage sur les chantiers de construction 24 heures par jour, 365 jours par
année, il serait le premier à dire que ça n'a pas de bon
sens et que ça va favoriser les grandes entreprises de construction.
Mais quand on arrive dans le marché alimentaire, le marché du
meuble ou le marché pharmaceutique, il dit: Ça, c'est parfait,
c'est correct, il n'y a pas de problème.
M. le ministre nous avait dit: Ça sera de 8 heures à 22
heures. Même, j'étais tellement habitué à 21 heures
que dimanche, quand j'ai fait mon intervention, j'ai commencé par dire
22 heures, je me suis réajusté à 21 heures, pour corriger
ensuite que c'était bien 22 heures. J'étais tellement sûr
que c'était 21 heures, moi, dans ma tête. Là, ils viennent
de nous dire: Là, ça va être 21 heures. Peut-être que
j'avais une prémonition de son amendement. Mais il y a une chose
certaine, c'est que je me suis posé une petite question pour m'amuser un
peu. Des fois, il faut s'amuser dans le métier qu'on fait. J'ai dit:
Pour moi, ça doit être Radio-Canada qui l'a appelé, parce
que si on ferme à 22 heures, elle va être obligée de mettre
son Téléjournal à 23 heures, et les gens du
Nouveau-Brunswick vont être obligés de l'entendre à minuit.
Donc, je me suis dit: II y a certainement eu des pressions de Radio-Canada dans
ce sens-là, parce que ça n'a pas de bon sens. Le ministre, il ne
peut pas partir de 22 heures à 21 heures pour simplement faire plaisir
à quelqu'un dans les airs. Là, je badine un peu. Je badine si
peu, pourtant, parce que je me suis dit: II y a certainement eu des pressions
quelque part.
Là, le ministre dit: Ah! Mais ce n'est pas la Coalition,
ça ne m'a pas inquiété, ça, la Coalition, ne vous
inquiétez pas, ce n'est pas eux autres qui vont me dire ce que j'ai
à faire, là. C'est à peu près ça que j'ai
compris. Peut-être qu'ils vont me dire que je me trompe, mais j'aime
autant l'imaginer comme ça. Sauf que, qui d'autres qu'eux demande de
baisser le nombre d'heures par rapport à ce qu'était le projet de
loi? Il n'y en a pas d'autres. Au contraire, les autres voudraient avoir 24
heures sur 24! Donc, j'imagine qu'il a entendu ça, ce son-là,
quelque part. Il a certainement entendu les consommateurs et les consommatrices
qui lui ont dit quelque chose quelque part, il a certainement fait un petit
sondage quelque part, je ne le sais pas, mais il y a certainement des gens qui
ne veulent pas la plage horaire actuelle et qui lui ont fait savoir.
Là, le député de l'Acadie est venu nous dire
quelque chose de très intéressant. Il est venu nous dire que nous
représentions une partie... C'est à 48-52, qu'il disait, à
peu près, que se divise la population qui est pour ou contre. Bon,
ça, prenons ses chiffres. Bien, est-ce que je peux lui dire, à
l'inverse, que lui est venu justement parier pour l'autre partie? De qui a-t-il
cité les demandes? Jean Coutu, Prbvigo!
Que représentent, justement, les gens qui sont pour par rapport
à ceux qui sont contre? Parce que c'est ça qu'on dit, nous. Nous
disons qu'il y a des gens contre, que ces gens-là se sont
élevés contre la loi, qu'ils ont fait des rencontres à
travers le Québec, à partir du 3 juin, auxquelles le
député de Nicolet-Yamaska, le président de la commission
et député de Laval-des-Rapides et le député de
Saint-Maurice ont assisté - je n'en connais pas d'autres, là,
mais,
pour le moment, c'est ceux que je connais et qui ont assisté
à ces réunions pour la partie ministérielle. Ils se sont
fait dire que ça n'avait pas de bon sens. S'ils ont voulu le dire, et
puisque nous sommes - comme je le leur ai dit - leurs haut-parleurs ici,
à cette Assemblée, c'est parce que ça représente
une partie de la population qui est contre. Et si les autres ne viennent pas le
dire, c'est parce qu'ils savent qu'ils sont très bien
représentés par le parti ministériel. C'est ça que
je peux comprendre.
Pendant toute la commission, vous aviez, dans la salle, un
démarcheur, ce qu'on appelle un "lobbyist", en anglais, Dominique
Boivin, que tout le monde connaît. Où est-il, aujourd'hui?
Pourquoi n'est-il pas ici? Pourquoi ce sont les gens de la Coalition qui sont
ici? Parce que, eux autres, ils sont venus exprimer par leur présence
l'action que nous menons en leur nom, tandis que les autres n'ont pas à
se préoccuper, car ils savent très bien qu'ils sont bien
représentés par le parti ministériel. Donc, ils n'ont pas
à se déranger. C'est ça que je peux comprendre. C'est
ça, le fondement même de ce que j'imagine. J'imagine qu'il y a
certainement quelque part des gens qui sont "secures", qui sont en pleine
sécurité, parce qu'ils ont le nombre - pas nécessairement
la qualité, mais le nombre - de personnes qui pourront, comme ils l'ont
fait ce matin, à l'Assemblée, d'abord passer le principe,
deuxièmement, sans le dire? Parce que nous avons eu le courage de le
dire, par ma collègue, la députée de Taillon, que nous
avions une position. On nous le reproche mais eux, sans le dire, le font! Ils
en ont une, position, et c'est celle de représenter les grandes
chaînes, les grandes corporations, qui sont moins nombreuses, pensez-y
bien, par rapport à ceux qui sont venus à la commission, que tous
les autres qui représentent, par les pétitions et par les
commentaires qu'ils nous ont fait, l'ensemble de la population.
Je le dis comme je le pense, et c'est pour ça que nous prenons
les moyens que nous donne le règlement pour essayer de vous en
convaincre. Quand on regarde le projet de loi puis qu'on essaie de s'imaginer
comment il pourrait être corrigé... On a encore du temps, nous
allons prendre tout le temps qu'il faut, amener tous les amendements qu'il
faut, demander même au ministre, comme on l'a fait hier - parce qu'on
n'aura pas le droit de le faire ici en cette commission - une motion de report,
pas parce qu'on dit qu'on veut que ça tarde trop longtemps, mais parce
qu'on pense qu'il faudrait avoir un peu plus de temps que le temps qu'on a en
vertu de nos règlements. Ça n'a pas de bon sens, M. le ministre!
On dépose le 15 mai, on l'étudié aujourd'hui puis il va
être adopté le 22 au plus tard, sans avoir la chance de
revérifier.
Et ce que j'aurais voulu dire, justement, sur la motion de report, hier,
je vais le dire ici. Nos règlements sont clairs, il y a des
façons de présenter des documents à la population. Il y a
ce qu'on appelle le livre vert. Ça ne s'appelle plus de même
aujourd'hui, mais c'est selon le principe britannique, là, parce qu'on
est dans un Parlement britannique. C'est le livre vert, c'est-à-dire le
livre de consultation. On émet plusieurs hypothèses, puis on
teste pour voir ce que ça donne. Ça, c'est le livre de
consultation. Et là, le ministre peut prendre différentes
façons pour être capable de consulter. Il peut prendre son livre,
partir à travers le Québec, rencontrer des groupes qu'il
désire rencontrer, le faire lui-même avec son équipe.
Parfait! Il veut le faire autrement, il fait une commission parlementaire et il
dit aux gens: Je vous donne un délai sur ce livre-là, venez me
donner vos opinions. Une fois qu'on a les opinions, on amène ça.
Le ministre peut déterminer deux autres choses: ou bien il
présente un projet de loi parce qu'il sait ce qu'il veut, ou bien, avant
de présenter son projet de loi, il fait un livre blanc. Le livre blanc,
c'est ce qu'on appelle le "lit" du ministre. Là, le ministre a fait son
lit, parmi les hypothèses de consultation, il a choisi, et il dit: Voici
ce qui en est. Et là, il peut agir autrement. Il peut dire: Je retourne
dans la population, je vais retester ce que je pense, ou bien il peut dire: Je
fais une commission parlementaire et je teste. Ou bien encore, après
avoir déposé le projet de loi, pas le projet de loi mais le livre
blanc, sa façon de penser, il dépose un projet de loi et,
là, il peut reconsulter sur le projet de loi.
Vous savez, on a du temps devant nous qui est prévu par nos
règlements, qui nous le permet. Mais là, ce n'est pas ce que le
ministre a choisi. Le ministre a choisi, avec ses collègues... Mme la
députée, qui n'est pas membre de notre commission, vient de faire
un commentaire; je vais me permettre d'y répondre, parce que c'est
exactement ce que nous avons sur la loi de la santé, actuellement, au
Québec. La loi que Mme la ministre de l'époque a
présentée, les consultations que nous avons laites, aussi bien
sur le rapport Rochon que sur le rapport Har-nois, j'étais
présent à toutes ces commissions-là. Donc, je ne parle pas
à travers mon chapeau, et ce n'est pas parce que ça a pris plus
de temps que ce n'est pas moins bon. Il y a une chose, par exemple, c'est que
le ministre et ses collègues ont pris une chose importante. C'est qu'ils
ont dit: Tout ça, c'est la faute à Biron. Bien là, je vais
vous dire une affaire, ça, je ne l'accepte plus. Ça fait depuis
1985 que vous êtes au pouvoir. Nous, si on a été battus
parce qu'on était avec cette façon de voir les choses, bien,
laissez-nous la paix. Demain matin, c'est sur votre administration que vous
devez prendre vos responsabilités. Et comme vous avez des
décisions qui sont prises, fichez-moi la paix avec le passé.
Passons donc au futur. Ne vivez donc pas dans le passé. Et ce n'est pas
parce qu'on a fait des erreurs que vous êtes obligés de les
commettre. Est-ce clair, ça? Mais une fois que j'aurai dit ça,
là, prenons le projet de loi et voyons s'il est
le meilleur. Moi, mon rôle, mon travail, comme
député, c'est de vous aider à le rendre le meilleur
possible. Et si je suis capable de le rendre le meilleur possible, j'en serai
fier. Si je n'en suis pas capable, je vous blâmerai.
Merci, M. le Président, et en conséquence je vous
demanderais, compte tenu que nous avons épuisé nos droits de
parole, de laisser la parole à M. le ministre, s'il le désire,
pour y répondre. Il a son droit et après ça nous aurons,
par ma collègue, la députée de Taillon, fort probablement,
M. le Président, comme vous vous y attendez, des motions
préliminaires.
Le Président (M. St-Roch): Est-ce que M. le ministre a des
interventions? Le ministre n'a pas d'Intervention.
Mme Marois: S'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. St-Roch): Mme la députée de
Taillon.
Motion proposant la tenue de consultations
particulières avec les Travailleurs et
travailleuses unis de l'alimentation
et du commerce
Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai en effet
l'intention, et je vais le faire maintenant, de déposer une motion, que
je vais lire et que je vais par la suite expliquer - '('imagine que c'est comme
ça que je peux procéder - et que nous allons aussi distribuer,
bien certainement, à l'ensemble des collègues. Alors je vais lire
la motion: II est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos
règles de procédure la commission permanente de l'économie
et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours
d'admission dans les établissements commerciaux, des consultations
particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et
qu'à cette fin elle entende les Travailleurs et travailleuses unis de
l'alimentation et du commerce, groupe affilié à la FTQ.
Le Président (M. St-Roch): Mme la députée de
Taillon, votre motion est recevable, vous avez maintenant trente minutes
à votre disposition pour la faire valoir.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président. Si je fais,
aujourd'hui et à ce moment-ci de nos travaux, cette motion, ça
va, bien sûr, dans le sens de tous les propos qui ont été
tenus par mes collègues auparavant, et particulièrement les
propos tenus par mon collègue le député de Laviolette. Le
15 mai, c'est la date limite pour que nous déposions, devant les membres
de l'Assemblée nationale, un projet de loi qui peut - je dis bien "qui
peut" - être adopté avant la fin de nos travaux parlementaires,
date qui est le 22 juin. Cette règle a été adoptée
après toutes espèces de problèmes qu'on a eus par le
passé. (16 h 45)
Nous avons modifié nos règlements parce que,
évidemment, on déposait en catastrophe, quelques jours à
peine avant la fin de la session, des projets de loi que nous n'avions pas le
temps d'étudier, sur lesquels nous n'avions pas le temps de nous pencher
et, donc, en se disant: Au moins, donnons-nous quelques semaines, ça va
nous permettre de bien recevoir le projet de loi, de voir s'il y a des avis
contraires, si le projet do loi no soulève pas des problèmes
avant que nous passions à son étude.
Or, M. le Président, c'est le 15 mai qu'on a déposé
le projet de loi qui est devant nous, après une consultation longue et
fort intéressante d'ailleurs, à laquelle j'ai participé
avec beaucoup de plaisir parce qu'il y a des intervenants de tous les milieux
du commerce de détail, tant marchandises sèches qu'alimentation,
qui sont venus nous présenter leur point de vue, qui sont venus
débattre leur situation économique, leur mode d'organisation et
ça a été une véritable école pour les
membres de cette commission. Alors, on est venus en toute bonne foi nous
présenter son point de vue. Je comprends que le ministre puisse avoir
voulu regarder en profondeur ces points de vue là et qu'il ait pris tout
le temps voulu pour préparer son projet de loi. Évidemment, j'ai
compris qu'il n'a pas retenu ce que la majorité lui avait dit mais, cela
étant dit, il a déposé son projet de loi le 15 mai. Ce
qu'on constate, parce qu'il n'a pas entendu le point de vue de la
majorité et je vais expliquer cela un peu plus avant dans mon
argumentation autour de la motion, on se rend compte que le projet de loi
suscite des désaccords majeurs, des désaccords significatifs,
importants et ce, sur tout le territoire québécois. D'ailleurs,
ce serait intéressant que le ministre se tourne peut-être vers ses
collègues ministériels. Il y en a qui sont peu loquaces.
J'aimerais ça, moi, les entendre sur le projet de loi. Le ministre
lui-même est peu loquace puisqu'il ne répond ni à nos
questions, ni à nos préoccupations, ni à nos
interrogations. On a été 4 ou 5 collègues à
intervenir. Il y a le député de l'Acadie et de Nicolet-Yamaska
qui sont intervenus un peu, mais rien de la part du ministre. J'imagine
qu'à la motion qui est devant nous il répondra. Il
répondra qu'il est de l'avis de ma formation politique; à cause
de cette objection majeure qu'ont un bon nombre pour ne pas dire la
majorité des travailleuses et des travailleurs impliqués dans ce
dossier, il leur répondra s'il veut, effectivement, les entendre,
entendre leur désaccord sur le projet de loi qui est devant nous.
Ce n'est pas une habitude que l'on a, M. le Président. Si un
ministre, un gouvernement respecte les règles qu'on s'est données
à l'Assemblée nationale et dépose dans les délais
qui nous sont impartis les projets de loi à être
étudiés, particulièrement dans une perspective où
ces projets de loi semblent répondre aux besoins des personnes que cela
concerne, aux objectifs que l'on veut atteindre par les institutions qu'on veut
mettre en place... Je rappellerai à la mémoire du ministre
qu'avant Noël, malgré une fin de session difficile, il a obtenu mon
entière collaboration sur le projet de loi qui concernait les
sociétés de placement dans l'entreprise québécoise.
Il a même proposé des amendements au moment où on faisait
la commission, ators qu'on sait qu'à la fin de session, à
Noël, c'est encore pire qu'en juin, je pense, parce que,
évidemment, ça se bouscule un peu. Il y a les vacances de
Noël qu'on prépare, etc. Ça se bouscule davantage que
maintenant, et le ministre peut témoigner de la grande collaboration
qu'il a eue de la part de notre formation politique et de ma part.
Or, là, on est devant une situation un peu différente. Non
seulement il n'y a pas consensus, mais il y a désaccord complet pour une
large majorité des intervenants. Quand les députés
ministériels d'en face disaient: Écoutez, M. le Président,
ce n'est pas aussi facile que ça. La moitié des intervenants
étaient d'accord pour qu'on libéralise davantage les heures de
commerce, l'autre moitié voulait un maintien de ce que l'on a maintenant
ou un léger élargissement des plages horaires. Moi, c'est
drôle, j'ai de la misère à accepter cette analyse-là
qui se fait quand je me penche sur les chiffres dont je dispose.
Écoutez, moi, j'ai devant moi, là... On me dit: 4354
détaillants contre l'ouverture le dimanche et quand les gens de Provigo,
de Métro, de Steinberg, sont venus, on nous a parlé de 200
marchands qui avaient appuyé leur position, parce que les membres de la
commission auront remarqué que j'ai fait venir les mémoires, de
telle sorte que je puisse les consulter au même rythme où ils les
consultent, puis je les connais pas mal bien. Alors, il y a quelque part une
analyse des données qu'on ne fait pas de la même façon.
Donc, il y a un groupe, entre autres, parmi ceux qui sont venus
déposer des mémoires, qui est absolument et profondément
déçu du projet de loi qui a été
déposé devant l'Assemblée nationale, ce sont les
Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce.
Évidemment, j'imagine qu'ils ne connaissent pas ça, eux autres,
hein! Ils ne travaillent pas dans ce secteur-là. Ils ne savent pas de
quoi ils parlent.
Ce que je demande aux membres de la commission, c'est qu'on les entende,
ces gens-là. Ils représentent... J'ai revérifié
auprès des personnes qui sont ici aujourd'hui et qui suivent avec
attention nos travaux combien de membres les Travailleurs et travailleuses unis
de l'alimentation et du commerce représentaient. 45 000 personnes, M. le
Président. Leurs représentants, et pas seulement leurs
représentants - le député de Nicolet-Yamaska pourra en
témoigner - mais les membres eux-mêmes sont venus nous le dire en
assemblée publique. Et il n'y a personne qui leur a tordu les bras, puis
il n'y a personne qui les a attachés avec une corde pour les amener aux
assemblées publiques. À Sherbrooke, il y avait 500 personnes
assises; c'est le nombre de sièges qu'il y avait dans la salle, puis
j'en ai vu circuler au moins 100, 150 autres derrière, puis je pense que
je n'exagère pas. Le député de Nicolet-Yamaska est
là pour en témoigner. Personne n'avait été
obligé de venir là. À personne on n'avait mis les mots
dans la bouche. Sûrement pas, parce que, dans certains cas, disons que
c'était assez colore merci.
Alors, ces personnes-là sont venues dire aux représentants
de la Coalition contre et aux membres du gouvernement et aux membres de
l'Opposition, à la personne de l'Opposition qui était là:
Nous, on n'en veut non seulement pas de votre loi mais, en plus, notre
Coalition puis nos représentants dans la Coalition, on trouve même
qu'ils sont allés trop loin en ouvrant la plage horaire du mercredi
soir. Et c'était ça, à l'évidence, le point de vue
très majoritaire qui se dégageait des personnes qui
émettaient un point de vue au sujet du projet de loi qui était
devant nous. Alors, non seulement ils trouvaient que ça n'avait pas de
bon sens, mais ils trouvaient déjà que leurs représentants
au sein de la Coalition avaient fait un compromis qu'ils n'aimaient pas. Bon.
Bien sûr, ça n'a pas fait dire à leurs
représentants. Écoutez, nous, on remet en question notre parole,
mais on a bien compris, par exemple, que ce qu'ils faisaient valoir
était un vécu quotidien dont le ministre n'a pas tenu compte dans
sa loi.
Alors, quand je regarde le mémoire - entre autres, tout à
l'heure, le député de l'Acadie, je pense, citait un article de
journal qui était un compte rendu d'une conférence de presse et
parlait du vice-président de la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec - j'imagine qu'il serait aussi
intéressé, lui que moi, à entendre ce même
vice-président qui pourrait venir avec les travailleurs et les
travailleuses, avec leurs représentants, nous dire le point de vue qu'il
a défendu pas seulement lors d'une conférence de presse, mais
qu'il a défendu sur les tribunes, un peu partout, avec fermeté et
en sachant très bien pourquoi il le faisait, à qui il
répondait, se faisant ainsi le porte-parole des gens qui l'ont choisi
pour les représenter. Alors, ce serait intéressant qu'on puisse
l'entendre ici pour qu'il puisse nous dire qu'est-ce qu'il y a dans cette loi
qui lui déplaît, qui lui semble bousculer la vie de milliers de
ces travailleurs et ces travailleuses. Et si, là, le ministre bse me
dire: Écoutez, ça va être juste quatre, le diman-
che. Quatre multiplié par deux fois - j'imagine qu'il va y avoir
deux quarts de travail, on peut imaginer. Je ne fais même pas
l'affirmation, on peut imaginer qu'il va y avoir deux quarts de travail. Qu'on
multiplie ça par le nombre de magasins concernés. Alors,
là, qu'on ne me dise pas que ça touche seulement quelques
centaines de personnes; ça en touchera des milliers. Et si,
évidemment, on utilise les plages horaires que le ministre veut ouvrir,
ça ne fera pas quelques centaines, mais quelques dizaines de milliers de
travailleurs, qui risquent de voir leur horaire, la qualité de vie de
leur environnement bousculée, leur emploi morcelé.
Vous allez voir. Je vais citer quelques éléments du
mémoire, déjà, des Travailleurs unis de l'alimentation et
du commerce, qui nous disent comment ce n'est pas facile, les conditions de
travail de ces gens-là, dans les secteurs alimentaires. Là, je
vais prévenir aussi immédiatement les membres de la commission,
pour qu'on soit bien conscients que je sais très bien de quoi on discute
et que je ne veux pas exagérer quand je dis: La possibilité
qu'offre le ministre d'ouvrir jusqu'à 21 heures, je suis consciente
aussi, avec les membres de la commission, que ce ne sera pas
nécessairement utilisé par tous les commerçants tout le
temps. Mais le pas dans la porte que met le ministre à l'égard de
l'alimentaire et du non-alimentaire et à l'égard du dimanche fait
en sorte que, dans un an, dans un an et demi, dans deux ans, ce sera cette
situation d'ouverture complète où, effectivement, un certain
nombre de grandes chaînes qui font une bataille féroce de part de
marché... Vous le savez comment ça marche dans l'alimentation,
les marges de profit sont minces dans les secteurs du commerce de détail
et dans certains secteurs aussi. Donc, c'est évident que cette
augmentation des horaires viendra bousculer l'ensemble des habitudes
d'organisation de vie et même les modèles de
propriété dans le secteur du commerce de détail et de
l'alimentation.
Mais revenons maintenant à la demande que je fais à la
commission, à la motion que j'ai déposée, pour essayer de
voir un peu ce que nous disait le mémoire de ces travailleurs et de ces
travailleuses qui, ne l'oublions pas - ce n'est pas inutile dans nos
débats, parce que c'est pour eux qu'on débat -
représentent 45 000 personnes. Alors, on nous disait - et ils doivent
être bien déçus aujourd'hui - que TUAC Québec
apprécie le fait que, dans le cadre de la préparation
éventuelle du projet de loi, le gouvernement ait décidé de
privilégier non seulement l'équité de traitement et les
besoins réels des consommateurs, mais également la qualité
de vie au Québec. En effet, s'il y a un aspect sur lequel marchands,
consommateurs et syndiqués forment un large consensus, c'est, bien
sûr, la qualité de vie des citoyens et des citoyennes du
Québec. Je vais vous dire que les quelques milliers que j'ai
rencontrés jusqu'à maintenant sont comme un peu
déçus du résultat qu'ils ont obtenu en demandant que soit
respecte ce qui leur apparaît le minimum vital dans leur cas.
Je continue de citer le mémoire: C'est donc avec beaucoup
d'intérêt et de confiance et ce, malgré qu'il s'agisse d'un
exercice souvent répété au cours des dernières
années, que TUAC Québec soumet son mémoire. Nous
répondons directement au thème amené par le gouvernement
dans son document de consultation et nous soulevons d'autres aspects de la
question qui, selon nous, méritent l'attention du
législateur.
Ce ne sont pas des gens partis, ce ne sont pas des gens
réactionnaires, M. le Président, ils tentent simplement de dire,
de faire entendre le point de vue des gens qu'ils veulent représenter
correctement. Alors, dans le document qui est ici, qui est un document de gens
responsables, on nous dit: Nous proposons, qu'effectivement on révise
les exceptions prévues à la loi actuelle. Et quand on regarde ce
que ces personnes nous proposaient, on dit: Une loi s'appliquant à tous
et n'ayant qu'un nombre très limité d'exceptions, abrogation de
tout décret privilège, possibilité pour les commerces du
secteur alimentaire d'ouvrir leurs portes en dehors des heures prescrites par
la loi, dans la mesure où trois personnes ou moins y travaillent en
même temps et ce, durant chaque jour de la semaine. Le ministre a
ajouté des exceptions. Quand il nous dit qu'il en a enlevé, il a
ajouté des exceptions. Il a rendu ça juste un peu plus complexe
à gérer, puis à administrer. Trois personnes en tout
temps, on a bien vu qu'on n'en est pas là. Puis même les
représentants et les représentantes de la Coalition sont
prêts à parler de quatre personnes en tout temps. Mais on n'en est
pas là. Quatre personnes le dimanche, plus le patron ou son mandataire,
comme si le patron ne pouvait pas être dans les quatre... Fabrication,
surveillance... Avez-vous déjà vu ça, une fruiterie
où il y avait de la sécurité le dimanche
après-midi? Voyons! (17 heures)
Je continue dans ce que le mémoire demandait pour bien faire
valoir aux membres de la commission comment il y a une différence
majeure entre ce qui était demandé et ce qui a été
proposé par le ministre. Je vais revenir, d'ailleurs, dans le
mémoire, sur cette fameuse règle des trois ou des quatre
personnes.
Exemption limitée. On nous proposait qu'effectivement on conserve
des exemptions: pharmacies pour la vente de produits pharmaceutiques,
sanitaires et hygiéniques. Bien sûr, ce sont des gens de gros bon
sens qui savent très bien qu'il y a des besoins qui peuvent se
présenter pendant les fins de semaine, qu'il y a des besoins le
dimanche, et donc aussi en dehors des heures normales de la semaine, et qu'on
doit pouvoir permettre l'accès à ce type de services.
Conservation des exemptions pour les librairies, les tabagios, lo commerce
d'artisanat où c'est
l'artisan lui-même qui produit ses oeuvres, les
établissements dont l'activité principale est la restauration ou
la vente de produits pétroliers. Ce ne sont pas des gens
décrochés. Ils proposaient que l'on maintienne un certain nombre
d'exemptions, qu'on les limite, cependant. Donc, évidemment, cela
signifiait et encore là je les cite: "La fermeture dé ceux qui
ont vécu dans l'illégalité ou dans la concurrence
déloyale". Alors non seulement le ministre, avec le projet de loi qui
est devant nous, ne pénalise-t-il pas, ne sanctionne-t-il pas
l'illégalité dans le sens de sanctions à appliquer, mais
il la reconnaît. Il fait en sorte que tous les commerces qui ont
déloya-lement concurrencé dans leur champ d'activité vont
pouvoir continuer à le faire et en toute immunité, puisque la loi
maintenant leur permettra de le faire. C'est un peu...
Le projet de loi qui est devant nous, évidemment, va
légèrement, on va en convenir ensemble, pour ne pas dire
complètement et totalement à rencontre de ce que
défendaient devant nous les représentants et les
représentantes de 45 000 travailleurs et travailleuses. On proposait le
réaménagement des heures d'ouverture en semaine pour tous les
établissements commerciaux. Et là, il y a une très belle
démonstration qui est faite ici pour expliquer le nombre de plages
horaires qui sont déjà disponibles pour permettre aux
consommateurs et aux consommatrices d'avoir accès à des services.
Là on expliquait, en départageant les avant-midi, les
après-midi, les soirées, que la semaine contenait 21 blocs de
temps où pendant 14 blocs on permettait l'ouverture des commerces.
Ça, évidemment, en semaine, on s'entend, du lundi au samedi.
Seulement 14, donc, permettent l'ouverture des commerces sur 21. Il y avait
donc seulement 7 blocs de temps, M. le Président, où on
interdisait, et là où on interdisait, dans ces 7 blocs, on
permettait cependant, en respectant la règle des trois en tout temps,
que les personnes puissent avoir accès à du dépannage.
À partir de cette analyse que l'on faisait dans le
mémoire, on proposait qu'effectivement il y ait un
réaménagement de certains horaires. Là encore, je
rappellerai aux membres de la commission qu'évidemment ils ont
travaillé avec les gens qu'ils représentent parce que ceux-ci
n'étaient pas nécessairement très à l'aise avec une
augmentation même de trois heures en semaine le mercredi, jusqu'à
21 heures. Mais, conscients des besoins des consommateurs et des
consommatrices, ils proposaient qu'il y ait, effectivement, ce
réaménagement. C'est intéressant, parce que dans le
mémoire les TUAC nous disent: "Dans une société
civilisée comme la nôtre, quand on arrive à ce que 75 % du
temps disponible soit alloué au commerce, peut-on réellement
prétendre que cette société ne répond pas aux
besoins réels des consommateurs et que cette société vient
nuire injustement à la liberté de commerce? La réponse
s'impose d'elle-même, c'est non. Il y a une limite à la
libéralisation du commerce, limite au-delà de laquelle cette
libéralisation se transforme en une atteinte vicieuse à la
qualité de vie des citoyens et des citoyennes du Québec. Aller
plus loin que ce que nous proposons, c'est vicier
délibérément notre qualité de vie. Nous y
reviendrons.
Alors voilà, pour ce qui était du nombre de blocs horaires
disponibles, l'augmentation de la plage horaire, pour permettre aux
consommateurs et aux consommatrices d'avoir accès à un plus grand
nombre de services. Maintenant, le maximum d'employés. Là, on va
s'y arrêter un peu parce qu'il a fait une analyse assez serrée, le
groupe des TUAC, à ce sujet-là, en partant du projet de loi 75.
Et c'est la raison fondamentale, d'ailleurs, pour laquelle j'aimerais ça
que la commission puisse les entendre et qu'on puisse entendre leur point de
vue, qu'on puisse entendre leur argumentation. Alors, il est évident
qu'ils reprennent, entre autres, cette notion des personnes affectées
à la surveillance, des personnes affectées à la
fabrication ou des personnes affectées à la boulangerie.
Je m'amusais beaucoup, ce matin, M. le Président, quand
j'entendais le ministre nous dire, dans sa dernière intervention portant
sur l'adoption de la position de principe, qu'il fallait protéger le
petit commerçant artisan, le petit boulanger, le petit lié
à la fabrication de confiseries. Puis, je trouvais ça
sympathique. Quand je dis ça, là, je ne le dis pas d'une
façon non sympathique; au contraire, je trouvais ça sympathique.
Mais, dans le fond, je me disais: Est-ce qu'il a pensé à la
petite famille qui est en train de gérer son dépanneur? Est-ce
qu'il a pensé au néo-Québécois, qui arrive et,
souvent, pour s'acclimater un peu à ce qu'on vit au Québec va
s'acheter une franchise, Perrette ou autre? Est-ce qu'il a pensé
à ces petits-là? Là, il est prêt à en
protéger quelques-uns, juste quelques-uns des petits, mais pas tous les
petits. C'est un peu ce qu'il nous disait ce matin.
Alors, je trouve qu'il faut avoir un peu de cohérence dans les
propos qu'on tient. Et c'est justement, les représentants des
travailleurs et des travailleuses en ont de la cohérence. Alors, ce
serait peut-être intéressant de les entendre nous parler de
ça. Je voyais un titre de journal, ce matin - ah! c'est samedi -
où on disait, Mme Gagnon, Lysiane Gagnon, qu'on connaît bien comme
chroniqueuse, faisait une analyse de ce qui se passe, évidemment, autour
de notre avenir collectif. Je n'en parlerai pas, ne vous inquiétez pas,
M. le Président, elle parlait de la tyrannie des minorités. Alors
là, ça m'inquiète un peu. J'ai peur que le ministre soit
aussi, se sente un peu prisonnier de la tyrannie des minorités. Alors,
j'aimerais ça qu'il entende une majorité, des gens qui
représentent une majorité de travailleurs et de travailleuses qui
sont dans le commerce de l'alimentation et dans le commerce de
détail.
On a fait aussi une analyse sur le nombre
de quatre employés, et maintenant cinq, et oublions les gens de
la fabrication, les gens de la surveillance. On a fait une analyse en se disant
que tous les magasins de moyenne surface et la plupart des magasins à
grande surface - et là on parte, ici, selon nos anciennes mesures, de 15
000 pieds carrés et plus - on croit qu'ils pourraient opérer
jusqu'à vingt-quatre heures par jour, sept jours par semaine.
Et ça va un peu dans le sens de ce que - enfin, pas un peu,
beaucoup - soulignait mon collègue, le député de
Laviolette, lorsqu'il disait: Vous savez, on parle d'une fermeture à 21
heures, le soir - c'est une proposition que va nous faire le ministre,
j'imagine, au cours de nos débats - mais dans les faits, passé 21
heures, une fois que le stock est dans la tablette, c'est évident
qu'avec les règles que dicte le ministre par sa nouvelle loi on pourra
ouvrir toute la nuit, si on veut. Regardez les supermarchés
américains, ils ouvrent. Ils mettent quelqu'un à la caisse,
quelqu'un qui surveille un peu les comptoirs, ils ferment les comptoirs
spécialisés et puis, les gens peuvent y aller.
Alors, c'est une possibilité. Est-ce que ça se produira?
Je ne le souhaite pas, parce que ce n'est pas à notre avantage, que
ça se produise, mais absolument pas. Mais c'est là, c'est
là comme possibilité. Et c'est ça, ce que nous dit...
C'est à ce sujet-là qu'on nous parle, qu'on nous fait des
représentations concernant cette fameuse règle de quatre, qui
s'appliquera en dehors des heures d'ouverture normales et habituelles de
travail.
On a évalué, par exemple - c'est toujours les
représentants et les représentantes des Travailleurs unis de
l'alimentation et du commerce - que sur une base rotative de quatre heures
consécutives, ce dont je partais tout à l'heure, ce n'est pas 8
employés mais c'est jusqu'à 24 employés qui pourraient
être concernés par les modifications apportées par le
projet de loi. Est-ce que le ministre n'est pas assez conscient du fait qu'il y
a déjà, dans le secteur de l'alimentation et du commerce de
détail en générai, une parcellisation du travail, un
morcellement des horaires de travail, une précarisation du travail qui
s'y effectue? Ma collègue de Chicoutimi le rappelait ce matin, souvent,
avec des salaires horaires qui sont des salaires horaires bas parce que c'est
la capacité qu'on a de payer dans ce type de commerces, si, en plus, on
ajoute à ça que c'est des heures brisées qu'on va vivre,
morcelées, plus encore que celles que l'on vit maintenant, on va
demander à des gens de travailler en dehors des heures habituelles alors
que leur famille, alors que les conjoints vont être, eux, à
s'occuper qui des enfants, qui des amis, qui d'autres activités. C'est
ça, M. le Président, l'enjeu du projet de loi qui est devant
nous. J'aimerais bien que les membres de la commission prennent un peu de temps
pour entendre un regroupement de travailleurs et de travailleuses qui ont fait
honnêtement, sérieusement l'analyse du projet de loi et, surtout,
qui vivent quotidiennement sur le terrain ce que cela signifie
déjà, des horaires brisés.
Dans le mémoire, d'ailleurs, de ce même groupe, on nous
mentionnait un ratio de 60 % de temps partiel, actuellement, dans les grandes
surfaces et 40 % de temps régulier. Donc, sur 10 emplois dans le secteur
de l'alimentation, 6 sont à temps partiel. Si, évidemment, on
allonge les heures, est-ce qu'on peut imaginer que le ratio va empirer encore,
en termes de proportionnalité? Est-ce que c'est ça qu'on veut
comme société? Des "jobines"?
Il aurait été intéressant que le ministre soit
là quand certaines personnes sont venues témoigner dans les
soirées d'information que l'on a eues. Une personne, entre autres, est
venue nous dire: Vous savez, non seulement ça veut dire une job à
temps partiel, mais ça veut dire que, du lundi au vendredi, je dois
rester quelque part, pas très loin de mon téléphone, pour
m'assurer que, lorsqu'ils vont m'appeler, je vais être disponible pour
pouvoir aller faire des heures et aller me chercher un peu de travail...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion.
Mme Marois: ...et un peu de salaire. Ça, c'étaient
les témoignages de personnes qui sont venues nous rencontrer dans les
assemblées publiques. M. le Président, la motion qui est devant
nous mérite qu'on la prenne en considération puisqu'elle concerne
le groupe touché au premier degré par la loi que nous
étudions aujourd'hui, et je souhaiterais évidemment qu'elle
reçoive l'assentiment de la majorité des membres de cette
commission. Merci, M. le Président.
M. Jolivet: Bravo!
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, du
côté du parti ministériel, je veux juste rappeler les
règles de procédure. Un intervenant, soit M. le ministre ou
n'importe quel député de la formation ministérielle, peut
intervenir pendant 30 minutes, les autres, autant de l'Opposition que du parti
au pouvoir, ont droit à 10 minutes d'intervention. M. le ministre.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): M. le Président, j'ai beaucoup de
respect pour la position des TUAC. Je peux écouter plusieurs fois la
même chose comme je le fais depuis plusieurs jours, mais je pense que je
n'ai pas à répéter - personnellement, on ne peut pas
m'imposer ça - trois, quatre, cinq, six et sept fois la même
chose. J'ai rencontré des représentants de la Coalition avant la
commission parlementaire. Je les ai entendus en commission parlementaire
à plusieurs reprises. Ils étaient présents pendant la
commission parlementaire et c'est encore principalement le groupe qui
est encore présent ici aujourd'hui. Je les ai reçus par la suite
en tant que membres de la Coalition contre les heures d'ouverture. Je les ai
même reçus encore parce qu'ils voulaient me voir individuellement
et non plus en tant que membres de la Coalition contre. Je les ai
rencontrés. J'ai eu des discussions téléphoniques par la
suite. Tous les députés, sans exception. qui ont assisté
aux rencontres de la Coalition contre m'ont fait par des rencontres et m'ont
fait valoir les positions des TUAC. Depuis trois jours, ces mêmes
personnes, par des représentations verbales, rencontrent tous les
députés et ces députés me font part des
représentations des TUAC. (17 h 15)
Dans cette optique, M. le Président, je considère
personnellement avoir eu une oreille attentive, depuis au moins trois à
quatre mois, aux représentations des TUAC et je ne peux pas accepter la
motion de la députée de Taillon.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Écoutez, M. le Président, je suis
plutôt surpris de l'intervention du ministre dans la mesure où,
d'abord, s'il les a entendus, il ne les a probablement pas
écoutés, d'une part, et il aurait peut-être avantage
à les entendre encore une fois. D'autre part, il reste que c'est une
demande qui est adressée...
Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, M.
le député, je demanderais aux gens de la salle... S'il vous
plaît, aucune forme de manifestation, d'aucune façon. Je ne peux
vraiment pas l'accepter en vertu de nos règlements. Je sais que c'est
parfois difficile de s'en abstenir. Je sais que des fois ça nous prend
au ventre puis que ça part tout seul. Mais je vous demande un
très grand effort, s'il vous plaît. M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Donc, M. le Président, ça d'une part
et, d'autre part, moi, j'aimerais bien entendre les autres membres de la
commission là-dessus parce que, en réalité, c'est beau que
le ministre ait eu l'occasion d'échanger quelques points de vue avec ces
gens-là, mais les membres de la commission, quant à eux, ont le
droit aussi d'être au courant des discussions et des points de vue qui
ont été amenés ou qui ont été
défendus par les TUAC devant le ministre, tout fin seul derrière
ses portes capitonnées. En ce qui me concerne, en tout cas, en tant que
membre de la commission qui aura sûrement à voter sur des articles
de cette loi-là, je n'ai pas eu l'opportunité qu'a eue le
ministre de pouvoir entendre régulièrement, sinon
quotidiennement, les revendications des TUAC, comme beaucoup d'autres groupes,
d'ailleurs, qui sont dans le domaine et qu'il me fasse un point de vue final et
officiel.
C'est important aussi d'avoir un point de vue officiel de ces
groupes-là sur le projet de loi que l'on a actuellement parce que, M. le
Président, il y a toute une différence entre les débats de
corridors et, finalement, les points de vuo qui peuvent être
amenés officiellement, transcrits dans les débats d'une
commission parlementaire. Alors, je suis certain, moi, en ce qui me concerne,
en tout cas... Je regarde mes collègues de l'aile ministérielle
qui semblaient tout ahuris en écoutant les paroles du ministre et qui
n'ont sûrement pas eu l'opportunité, comme lui a pu l'avoir, de
rencontrer ces gens-là tout aussi souvent qu'il le prétend. Dans
ce sens-là, je pense que l'on aurait tout avantage, pour le moins...
Si le ministre nous dit qu'il a bien compris, qu'il a bien
écouté et que le projet de loi traduit, pour l'essentiel, les
préoccupations de ces gens-là, bien, moi, j'aimerais bien qu'ils
viennent nous le confirmer eux-mêmes devant la commission parlementaire,
dans un texte écrit qui passera à l'histoire, qui pourra
être consulté année après année par quiconque
voudra bien le consulter pour être bien certain que le ministre de
l'industrie et du Commerce a eu l'oreille attentive et a traduit dans son
projet de loi les préoccupations qui lui avaient été
amenées par les travailleurs de l'industrie de l'alimentation au
Québec, représentés par un groupe non négligeable,
un syndicat très important dans le domaine, qui s'appelle TUAC: le
syndicat des Travailleurs unis de l'alimentation. Alors, moi, je pense
qu'à ce moment-là si le ministre veut vraiment être
clair...
À l'exemple de son chef, probablement qu'il aime bien les petits
"racoins" pour discuter. En tout cas, je pense que si ça se vaut dans
certaines ententes qui sont de nature nationale, la position de son chef, il ne
devrait peut-être pas la refléter ici, en cette commission
parlementaire, où on est en train de discuter de choses tout aussi
importantes et qui méritent d'être étalées au plein
jour. Parce que là, ce qu'on discute ici, ça risque d'influencer
dans le quotidien à peu près toute la population du
Québec, au cours d'un nombre d'années non négligeable.
Quand on fait une loi dans le secteur de l'alimentation ou dans le secteur du
commerce en général et que l'on modifie les règles du jeu,
généralement, ce n'est pas pour les rechanger après six
mois. On laisse au moins le temps aux gens de s'adapter pendant un certain
nombre d'années. Puis ce n'est qu'à partir de l'expérience
que l'on peut revenir et réamender ou modifier certaines choses. Alors,
là, on s'embarque dans un processus qui va faire en sorte que
probablement au cours des 10 prochaines années, pour ne pas dire
jusqu'au
tournant du millénaire, on va être poignés dans la
démarche que le ministre nous impose là aujourd'hui. Si le projet
de loi que le ministre nous amène est conforme au voeu de la population,
au voeu des travailleurs, au voeu des propriétaires d'entreprise, au
voeu des consommateurs, eh bien, on aurait tout avantage à les entendre
s'exprimer une dernière fois sur le projet de loi.
On les a entendus s'exprimer sur une hypothèse de solution. Bon.
L'hypothèse qu'on a sur la table, à notre avis, ne correspond pas
à ce que ces gens-là sont venus exprimer devant le ministre et
sont venus exposer comme point de vue. Au moment où on se parle, donc,
avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi qui va
faire en sorte de couler dans le béton pour un certain nombre
d'années la façon de faire, de modeler la vie des consommateurs
québécois et d'une façon non réversible, eh bien,
il serait probablement excellent, voire nécessaire, que l'on puisse
réentendre une dernière fois ces gens-là. Si le ministre
nous dit que, dans les coulisses, derrière ses portes
capitonnées, au téléphone, il a eu la chance
d'échanger avec les TUAC, les représentants des Travailleurs unis
de l'alimentation, et que. finalement, somme toute, d'après ce qu'on
peut ressentir de ces propos, ça reflète les
préoccupations de ces gens-là, eh bien, moi, j'aimerais bien le
leur entendre dire eux-mêmes ici dans cette chambre.
Si le ministre n'a rien à cacher, il devrait être content,
au contraire, de leur dire. Venez nous exposer ce que vous m'avez dit. Vous
allez voir, moi, comme ministre, je vous ai écouté et je prends
le parti des travailleurs du Québec et des travailleurs de
l'alimentation en particulier dans ce secteur-là. Alors, il devrait
être fier de les inviter à venir exprimer leur point de vue, le
même point de vue qu'il a sûrement eu l'occasion d'entendre
derrière ses portes de bureau, et de faire en sorte de donner la
lumière à tous les membres de la commission qui pourront à
ce moment-là voter en pleine connaissance de cause sur les
différents articles de la loi qu'on a sur la table, et non pas à
partir de perceptions.
Parce que le ministre nous accuse d'avoir des perceptions, de comprendre
le monde du commerce à travers nos propres lunettes à nous
autres, sans avoir pris le temps de voir c'est quoi la vraie
réalité du monde de la consommation. Ses réflexions, sa
façon de percevoir nos interventions est à l'effet que nous
n'avons pas toute l'information, que nous reflétons une position qui
n'est pas celle souhaitée par l'ensemble des Québécois.
Alors, nous, nous lui disons: M. le ministre, vous avez probablement raison.
Mais, si tel est le cas, pourquoi avez-vous honte d'inviter des gens à
venir nous dire ici, devant cette table, devant tous les membres de la
commission qui auront à voter sur le projet de loi et à
l'étudier article par article, que ce que vous avez mis là-dedans
reflète les véritables intentions de la population du
Québec et les véritables intérêts des travailleurs
de l'alimentation au Québec? Vous ne devriez pas avoir honte de le
faire, si vous les avez écoutés vraiment et si vous avez traduit
par des articles de loi ce que sont leurs préoccupations. Moi, à
votre place, je serais content de les recevoir, qu'ils viennent nous appuyer et
qu'ils viennent enfin sortir l'Opposition de ses erreurs et de sa propre
perception qui serait peut-être fausse, selon ce que l'on peut percevoir
de vos propos.
Moi, je serais content, à votre place, d'avoir des appuis par
milliers de gens dans la population du Québec qui viennent dire: M. le
ministre, on est d'accord avec le projet de loi que vous nous avez donné
là et vous pouvez être certain qu'on va vous appuyer jusqu'au bout
pour que vous le fassiez passer, votre projet de loi. Parce que c'est
ça, ce qu'on a discuté avec vous au téléphone.
C'est ça, ce qu'on vous a dit dans les corridors. C'est ça, ce
dont on vous a parié derrière vos portes capitonnées. A ce
moment-là, bien, nous devrions rester bouche bée et dire: M. le
ministre, on doit vous féliciter, parce que vous avez
reflété la véritable intention, les véritables
préoccupations des travailleurs québécois de
l'alimentation.
Votre projet de loi prend en considération les vrais
problèmes de la société québécoise et ne
défend pas certains intérêts que l'on se refuse à
mettre d'une façon évidente sur la table. Dans ce sens-là,
M. le ministre, moi, je ne peux comprendre votre point de vue à l'effet
que nous n'avons pas à les recevoir et à les écouter,
étant donné qu'en ce qui vous concerne vous avez eu l'occasion
d'échanger avec eux. Vous devriez avoir, au contraire, beaucoup
d'intérêt à ce qu'ils viennent nous répéter
ici, devant la commission, tout ce qu'ils ont pu vous dire et que vous avez
sûrement traduit dans votre projet de loi, à vous entendre! Si tel
n'est pas le cas, bien, à ce moment-là, on avisera en
conséquence. Dans ce sens-là, M. le Président,
j'espère que les membres de la commission auront suffisamment de courage
pour se lever et dire: Oui à la double majorité, nous voulons
recevoir devant cette commission les Travailleurs unis de l'alimentation pour
être convaincus que ce que l'on retrouve dans le projet de loi du
ministre est bien ce qu'eux ont demandé au ministre. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député d'Ungava. M. le député de Saint-Maurice,
vous voulez intervenir?
M. Lemire: M. le Président...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, allez...
M. Jolivet: Je sais que vous aviez un petit
commentaire; ça ne me dérangerait pas, comme membre de
l'Opposition, que vous fassiez votre petit commentaire avant de donner la
parole au député de Saint-Maurice ou après, comme vous le
voudrez, M. le Président.
Une voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Richard): Remarquez, le commentaire que
je voulais dire, c'est que, tout à l'heure, le député
d'Ungava disait que ça se faisait dans les corridors et dans les petits
recoins. Je dois vous dire qu'à mon avis, ça ne s'est pas
entièrement fait dans des corridors, du moins, il y avait des corridors
relativement larges, parce que, à Sherbrooke, il y avait 600 personnes
et à Laval, il y en avait au-dessus de 2500. Mais il faut se dire que
les TUAC ont quand même eu l'opportunité d'émettre le
message et de donner l'opinion pas seulement d'eux, pas que des
représentants, mais des gens directement sur le terrain, le travailleur
et la travailleuse, lors de ces assemblées-là, et j'ai eu
l'avantage d'assister à deux des plus grosses assemblées qu'il y
a eu au Québec à ce sujet-là. Je pense qu'ils l'ont fait,
qu'ils l'ont fait poliment et qu'ils l'ont bien fait. Alors, je voulais
seulement corriger ça, M. le député d'Ungava, sans
déprécier ce que vous aviez fait comme message, et dire que
ça ne s'est pas fait uniquement dans de petits corridors.
M. Claveau: Si vous permettez, M. le Président, moi, je
parlais du projet de loi dans sa version telle qu'on l'a actuellement, de leur
appréciation quant au projet de loi qu'on a sur la table et non pas
quant aux points de vue qui ont été défendus pour amener
à cette version-là de la loi, finalement.
Le Président (M. Richard): M le député de
Saint-Maurice.
M. Yvon Lemire
M. Lemire: Moi, M. le Président, je voudrais
peut-être préciser davantage ,les propos que vous avez tenus
à l'endroit du député d'Ungava. Je pense que M. le
ministre a raison de ne pas pouvoir accepter cette motion, puis je tiens aussi
à souligner à Mme la députée de Taillon que, depuis
quatre ans, il y a eu énormément de consultations qui ont
été faites, tout d'abord par le comité Richard qui a
rencontré tous ces gens-là pendant plusieurs, plusieurs semaines.
Mais, écoutez, là! Il ne faut pas oublier que ça,
ça nous a emmenés à une commission parlemen taire qui a
tout de même fait en sorte qu'on a écouté tous les gens qui
ont déposé des mémoires et qui a fait en sorte que cette
consultation a été enregistrée et que les propos de chacun
ont été entendus.
Les gens des TUAC ont très bien représenté les
travailleurs. Ils sont venus dire, en commission parlementaire - ça a
été enregistré, puis je pense que M. le ministre et M. le
Président soht d'accord avec moi - ils ont dit ce que les travailleurs
attendaient de nous, et je pense, à première vue et depuis toutes
les discussions que nous avons eues, que je ne verrais pas pourquoi on aurait
encore une autre discussion là-dessus. Il y a un dépôt de
projet de loi qui est devant la commission et ce que j'espère, c'est
qu'on le ratifie dans le plus bref des délais.
Le Président (M. Richard): D'autres intervenants?
Mme Dupuis: M. le Président, nous avons, d'une part, une
motion de la députée de Taillon...
Le Président (M. Richard): Mme la députée de
Verchères, vous avez la parole.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: ...afin d'entendre les Travailleurs et les
travailleuses unis de l'alimentation et du commerce. M. le ministre nous a dit
tantôt qu'il les a entendus et il a fait une enumeration assez
élaborée des fois et du nombre de fois qu'il les a entendus,
à travers les députés et tout. Bien, moi, M. le ministre
et M. le Président, je suis une députée puis je ne les ai
pas entendus. Puis, la demande qui est faite - ils ont peut-être
parlé au ministre - elle est faite à la commission et ce n'est
pas dit... À aucun moment, moi, on ne m'a dit qu'ils avaient
été entendus en commission.
Le Président (M. Richard): Excusez, mesdames et messieurs,
on annonce un vote en Chambre. Alors, nous suspendons les travaux. Normalement,
un vote prend de 15 à 20 minutes. On revient, si c'est possible, avant
18 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 30)
(Reprise à 17 h 51)
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place. S'il vous
plaît! Si chacun voulait bien reprendre sa place, pour que nous puissions
continuer nos travaux. S'il vous plaît! M. le ministre. Il ne faudrait
pas que ça compte dans les autres rencontres. S'il vous plaît, je
demanderais à chacun de bien vouloir prendre sa place pour que la
commission de l'économie et du travail reprenne ses travaux. Nous
étions à entendre Mme la députée de
Verchères. Mme ta députée, je vous en prie.
Mme Dupuis: J'étais à faire remarquer, M. le
Président, que la demande est faite à la
commission et que moi, je n'ai pas eu le loisir de les entendre. Je suis
députée et ils ne m'ont pas, moi, appelée pour je fasse
des pressions auprès du ministre. Cependant, j'ai constaté aussi
que le ministre donnait quelques signes d'impatience. Je ne dis pas que je ne
le comprends pas, si effectivement il les a entendus à plusieurs
reprises, mais de deux choses l'une: s'il les a entendus autant de fois, ou il
n'a pas compris, ou il ne veut pas comprendre. Parce que si, après
autant d'interventions de la part de ce groupe, il est encore là, c'est
qu'il n'a pas eu de réponse positive ou il ne voit pas, dans le projet
de loi, que te ministre lui a porté une oreille attentive. Les signes
d'impatience de M. le ministre, je peux peut-être les comprendre, mais je
suis plus portée à comprendre les gens qui sont ici afin
d'être entendus.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, madame. Si
vous voulez bien continuer votre intervention. Je pense qu'il est de coutume
ici que du personnel de soutien ou d'autres députés, à
l'arrière et très discrètement - et là-dessus, je
les invite à être discrets - puissent avoir des conversations. Je
vous invite à continuer votre intervention, Mme la
députée.
Mme Dupuis: J'en étais aux signes d'impatience, mais je
serais plus sympathique aux gens qui sont là pour se faire entendre.
C'est vrai que c'est long. Mais nous, on est dans des fauteuils
capitonnés. Ce n'est pas le cas des gens qui sont venus. Ou ils sont
venus en autobus, ou ils sont assis sur des petites chaises droites. J'en
voyais debout tantôt. C'est peut-être plus pénible pour eux
autres. Ils ont sûrement plus d'énergie à déployer
pour se faire entendre, pour arriver à se faire entendre du ministre que
nous, on n'en a, je pense, à l'écouter.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
en arrière! S'il vous plaît! Mme la députée de
Verchères.
Mme Dupuis: il y a des gens qui se veulent dérangeants. M.
le Président, je pense que le ministre pourrait démontrer de
l'ouverture d'esprit face à ce groupe. On m'a remis, moi, tantôt,
un mémoire que j'ai lu en diagonale; en écoutant d'une oreille la
commission, les intervenants, j'ai pu lire quelques passages de ce
mémoire. Les quelques passages que j'ai pu lire m'ont donné le
goût d'entendre ces gens. Je lis, par exemple. "45 000 travailleurs et
travailleuses syndiqués." Bien, si 45 000 travailleurs et travailleuses
syndiqués n'ont pas le droit de parole et ne méritent pas qu'on
les entende, je ne sais pas qui va l'avoir. Première réaction
face à cette première ligne. "En effet - un peu plus loin, je lis
- il y a un aspect sur lequel marchands, consommateurs et syndiqués
forment un large consensus, c'est, bien sûr, la qualité de vie des
citoyens et des citoyennes du Québec." Chaque intervention que j'ai
faite, moi, portait justement sur la qualité de vie des citoyens et des
citoyennes. J'aurais envie d'entendre ce qu'ils ont à dire
là-dessus!
Je continue, j'arrive à la page 3. Le titre, c'est: La
révision des exemptions prévues à la loi actuelle.
"Permettre 19 exceptions à une loi qui n'a essentiellement, comme
portée, que de déterminer les heures d'ouverture des
établissements commerciaux, c'est, en soi, poser le premier jalon devant
mener inéluctablement à des contestations et à des
conflits." J'aimerais ça, moi, qu'ils me disent à quels conflits
ça va mener et à quelles contestations ça va mener! Ils me
donnent le goût de les entendre. "Nous acceptons un pouvoir de
réglementation particulier pour les commerces situés en zones
touristiques, près des limites territoriales du Québec, ou encore
à l'origine d'événements temporaires particuliers, comme
des expositions." Je les trouve ouverts! Moi qui suis critique officiel en
matière de tourisme, je les trouve ouverts! Ils ne veulent pas tout
fermer n'importe comment puis ils semblent être disposés, face aux
zones touristiques. Ils semblent comprendre ça, que les touristes ont
peut-être besoin de plus d'heures; j'aimerais ça, les entendre
là-dessus.
Je continue. Ma collègue, la députée de Taillon, a
parlé tantôt des blocs de temps, si vous voulez; je pense que je
ne répéterai pas, elle a très bien fait la chose. J'arrive
à la page 8, après les blocs. "De plus, si nous
considérons que, de toute façon, même dans le cadre d'une
libéralisation généralisée, il ne se ferait pas de
consommation les samedis et dimanches soirs, force nous est de constater que
commerçants et consommateurs ont toute latitude possible soit, d'une
part, pour consommer, soit, d'autre part, pour vendre." Je trouve ça
intéressant. C'est le point de vue que je défendais, et
j'aimerais ça entendre des représentants de 45 000 travailleurs
et travailleuses me dire leur point de vue à ce sujet.
Tout autre réaménagement n'aurait, comme
conséquence pratico-pratique, que de pénaliser les travailleurs
et travailleuses, sans répondre à un besoin réel des
consommateurs." Je ne suis pas ce genre de travailleur et de travailleuse
là, moi, mais, d'instinct, je trouve qu'ils ont raison. J'aimerais
ça les entendre, eux autres mêmes, me dire leur point de vue puis
comment ils voient les besoins réels des consommateurs. Ils sont tous
les jours en contact avec les consommateurs. J'aimerais ça, avoir le
point de vue de gens éclairés sur la question. Dans une
société civilisée comme la nôtre, quand on arrive
à ce que 75 % du temps disponible soit alloué au commerce,
peut-on raisonnablement prétendre que cette société ne
répond pas aux besoins réels des consommateurs? Je trouve
ça intelligent, moi, cette question-là, de s'interroger. "Que
cette société vienne nuire injustement à la liberté
du
commerce", ça aussi, j'aimerais entendre!
Je continue. "La réponse s'impose d'elle-même, C'est non!
Il y a une limite à la libéralisation du commerce, limite
au-delà de laquelle cette libéralisation se transforme en une
atteinte vicieuse à la qualité de vie des citoyens et des
citoyennes du Québec. Aller plus loin que ce que nous proposons, c'est
vicier délibérément notre qualité de vie. "
J'aimerais ça, les entendre s'expliquer sur ce point de vue.
J'arrive à la page 11. Comme je vous le dis, ce sont de petits
passages que j'ai lus en diagonale et qui m'ont frappée.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la
députée de Verchères, avant que vous n'entrepreniez un
autre chapitre, compte tenu de l'heure, nous allons suspendre nos travaux
jusqu'à 18 heures et il vous restera...
Mme Marois: Jusqu'à 20 heures.
Le Président (M. Bélanger): Jusqu'à 20
heures, pardon, et il vous restera 4 minutes pour votre intervention. Alors, je
vous remercie, et bon appétit à tout le monde.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 13)
Le Président (M. Bélanger): Alors, je demanderais
à chacun de reprendre sa place pour que la commission de
l'économie et du travail reprenne ses travaux. Nous étions
à entendre Mme la députée de Verchères. Il vous
restait deux minutes.
Mme Dupuis: Je vais tout de suite passer à la page 15,
à un point que je trouve important aussi, qui apparaît dans le
mémoire présenté. Ça se lit comme suit: "Ça
ne touche pas les réguliers parce que seuls les étudiants et les
temps partiel vont travailler le dimanche, a-ton également dit. En
effet, peut-être certains partiels auront-ils quelques heures de plus,
mais ils obtiendront ces heures parce qu'un employé régulier aura
vu sa semaine de travail réduite d'autant. C'est la création
d'emplois par la multiplication des emplois à temps partiel "
C'est évident, comme je l'ai dit précédemment, que
ça ouvre la porte à beaucoup plus de temps partiel. À
l'intérieur de ces temps partiel, je pense que ceux qui sont encore le
moins favorisés, ce sont les étudiants. À cause de leurs
cours, évidemment, ça amène les étudiants, si ce
n'est pas à avoir toujours les emplois les moins
rémunérés, à être les bouche-trous du
système et même du système à temps partiel. Comment
voulez-vous qu'un étudiant, avec des heures pareilles, de 8 heures le
matin à 21 heures, puisse continuer ses études, soit capable de
faire les deux en même temps? Parce qu'il y a beaucoup
d'étudiants, un grand nombre d'étudiants qui sont obligés
de travailler en même temps qu'ils font leurs études. C'est encore
la minorité pour qui les parents payent et qui peuvent se consacrer
à leurs études à plein temps. Là, je pense que le
mémoire m'a fait réfléchir à ça. Un point
que j'avais peut-être oublié, c'était la situation des
étudiants.
Pour terminer, si je vais à la page 17, il y a une autre phrase
qui correspond très bien à mon système de valeurs et
c'est: "Le respect de cette qualité de vie passe obligatoirement par une
loi juste qui élimine la concurrence déloyale et qui
réitère le droit à une journée consacrée
à la qualité de vie, à la famille, aux loisirs, à
la culture. " Là, je pense que c'est peut-être le point le plus
important qui est soulevé ici, sur la qualité de vie des
travailleurs, sur la qualité de vie des familles.
Est-ce que c'est terminé, M. le Président?
Le Président (M. Bélanger): Je vous invite à
conclure, s'il vous plaît, oui.
Mme Dupuis: Je pense que la phrase que j'ai lue ici conclut bien.
La phrase qu'on retrouve dans le mémoire conclut bien les
préoccupations pour lesquelles on s'attaque, si vous voulez, à ce
projet de loi, afin d'amener M. le ministre à réviser ces heures
d'ouverture. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie,
madame. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée
de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais appuyer
la motion qui a été déposée en vertu de l'article
244 de nos règles de procédure, à l'effet que la
commission permanente de l'économie et du travail tienne, avant
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 75, Loi
sur les heures et les jours d'admission dans les établissements
commerciaux, des consultations particulières quant à tous les
articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende les TUAC
M. le Président, une première lecture du projet de loi...
Jo dois dire, à ma courte honte, comme dirait un de mes amis, comme il y
a plusieurs projets de loi qui sont tombés sur la table, que je l'avais
lu, mais de façon un peu distraite. Mais, quand je l'ai relu, ce matin,
alors que je suis arrivée tôt pour voir un peu de quoi il
retournait et sur quelle base reposaient les principales oppositions à
ce projet de loi, tout de suite m'a sauté aux yeux l'article touchant
les quatre personnes, parce que, rapidement, j'ai réalisé,
à la lecture de cet article, qu'il ne s'agissait plus de quatre
personnes à temps
complet permanent, de façon continue, en tout temps, mais
s'ajoutaient à cela les agents de sécurité et celles qui
étaient affectées à la fabrication ou à la
production.
En lisant ça à sa face même, j'ai essayé de
m'imaginer ce que ça donnait dans un grand marché d'alimentation.
Effectivement, si les étalages sont montés la veille, vous pouvez
parfaitement tenir avec deux agents de sécurité, peut-être
un troisième à la porte, deux caissières et quelques
personnes, deux autres pour répondre aux usagers, aux clients, vous
pouvez facilement tenir toute une journée sans aucune difficulté
et à moindre coût. Ça, ça a été
à mon grand étonnement, parce que, au cours des échanges
qu'on avait eus, ça m'avait échappé, le fait qu'on pouvait
y ajouter à la fois ceux qui fabriquaient les biens de consommation,
c'est-à-dire les bouchers, ceux qui préparent les sandwiches, les
prêts-à-emporter et, en même temps, les personnes
attachées à la sécurité. Ça veut dire que,
dans une épicerie à grande surface, vous pourriez avoir
facilement, par rapport à ces règles-là, une dizaine de
personnes.
Alors, la conclusion est simple, c'est l'ouverture des commerces, c'est
la libéralisation du commerce le dimanche pour les marchés de
l'alimentation, parce que, si on n'indique pas, si on ne limite pas le nombre
des personnes affectées à la surveillance de même
qu'à la fabrication et, à l'occasion, à la boulangerie -
vous pensez à tous ceux qui font les petits pains le matin et les
croissants, puis on en a beaucoup dans nos marchés d'alimentation, de
plus en plus - on pourrait facilement, sous prétexte d'avoir trois
boulangers à la cuisine, à l'arrière, qui font les
gâteaux de fête du dimanche, ainsi de suite, et deux autres
à la boucherie, plus deux autres à la surveillance... Alors, vous
êtes rendu à trois, six ou sept, et les quatre qui sont
affectés à la vente, plus le patron. Vous êtes vraiment
rendu avec une équipe qui fonctionne généralement sur une
base régulière en pleine semaine. Je pense que c'est comme
ça qu'il faut comprendre ça. À mon grand
étonnement, à ma courte surprise également, c'est que je
n'avais pas lu le projet de loi dans cette perspective et, quand je m'y suis
arrêtée, ça m'a frappée.
Ce projet de loi, je le rappelle, va consacrer la
détérioration de la qualité de vie des travailleurs et des
travailleuses. C'est probable ment ce que je trouve le plus dérangeant,
parce que dans le fond, entre nous, qu'on ait accès à un peu plus
d'heures d'ouverture des marchés d'alimentation, comme je suis sur le
marché du travail depuis de très nombreuses années,
ça m'a souvent affectée, le fait qu'à 17 h 30 ça
fermait, puis qu'à 17 heures je sortais du bureau et, le temps de me
rendre, si j'avais quelqu'un qui m'accrochait, c'était fait, il fallait
que je passe chez le dépanneur plutôt qu'à
l'épicerie Alors, qu'on pense allonger l'ouverture des commerces d'une
demi-heure, une heure, je pense que personne là-dessus n'avait
d'objection. Parce que de plus en plus de femmes sont sur le marché du
travail, ça suppose une certaine souplesse. Mais que, tout à
coup, pour faciliter la vie de celles qui travaillent, on rende la vie des
travailleuses dans ces commerces là tout à fait intenable, je
pense que là-dessus il faut faire preuve de beaucoup de jugement et
être extrêmement prudent quant on s'attaque à ces questions,
d'autant plus qu'il n'y a rien, et je le rappelle au ministre, qui nous
démontre que ça va être plus rentable.
Parce qu'en fait il faut replacer cette question-là dans une
perspective de rentabilité pour le Québec. Une telle
modification, c'est payant pour qui? Moi, j'ai beau me le demander... Les
intérêts de qui sert-on avec un tel projet de loi? Certainement
pas l'intérêt des travailleurs à temps partiel ni
l'intérêt des familles, ça m'appa-raît
évident. Ni l'intérêt des petits dépanneurs, des
petits commerces, des petites boutiques dont je parlais cet après-midi.
D'évidence, non. Moi, la seule question qui se pose, étant
donné qu'on s'adresse au ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est:
Est-il capable de nous dire qui ça paie et à quel point ça
pourrait faire augmenter l'économie du Québec? Est-ce que c'est
en encourageant la consommation de biens périssables qu'on va rendre le
Québec plus compétitif? Je pense que ce sont des questions qui se
posent très sérieusement.
Je le rappelle, en dehors de toute question partisane, est-ce qu'on a,
collectivement comme Québec, un intérêt économique
à promouvoir un tel projet? Est-ce que ça va nous permettre
d'être plus productifs? Est-ce que ça va nous assurer une
croissance de l'économie à ce point valable qu'on remette en
question les valeurs traditionnelles du Québec? Est-ce que ça a
une valeur telle qu'on puisse compromettre la qualité de vie des
travailleurs et des travailleuses? Parce que, dans la perspective où le
ministre se place - et ça, là-dessus, je suis capable de le
comprendre - s'il est capable de nous dire: Écoutez, on a fait tous les
calculs puis, effectivement, il serait plus rentable pour le
développement économique du Québec qu'on encourage la
consommation à court terme et, à cet égard, la
prolongation des heures d'ouverture des commerces, ça va faciliter cette
consommation, donc ça va être, à long terme, plus rentable
pour le Québec, on pourrait peut-être, à la limite, se
rendre à ses arguments, mais j'aurais peine à le croire, je ne
vous le cache pas. Il faudrait bien qu'on me fasse la démonstration que
c'est payant et que c'est économiquement rentable pour le Québec,
les Québécois et les Québécoises.
Alors, je voudrais, à cet égard, appuyer la motion qui a
été présentée par mon collègue, parce que
les gens qui nous parlent des situations qui sont énoncées dans
leur mémoire, les
travailleurs des marchés d'alimentation, savent un peu beaucoup
de quoi ils parient. Ils savent, par exemple, qu'une pratique qui n'est pas une
pratique qui est due au présent gouvernement, qui s'est instaurée
progressivement au cours des 10 dernières années, fait que de
plus en plus de commerces n'embauchent plus leur personnel pour plus de 24
heures, parce que les règles changent selon qu'ils travaillent, 24
heures ou moins. Ils ont plus ou moins de sécurité. Alors,
l'intérêt - puis c'est normal, je ne porte pas un jugement sur la
valeur des personnes qui ont ce genre de pratiques administratives - mais
l'intérêt des propriétaires de petits commerces, c'est
vraiment d'essayer d'embaucher leur personnel pour moins de 24 heures, donc ils
ont moins d'obligations.
Ça s'est répandu comme une traînée de poudre,
et ce n'est pas votre faute, c'est à la faveur de la crise
économique qu'on a connue, parce que là, on avait vraiment un
surplus de main-d'oeuvre. Vous savez, le problème, c'est tout le
problème de l'offre et de la demande. Plus vous avez de chômeurs,
plus les propriétaires peuvent imposer à peu près
n'importe quelles conditions de travail. Moins vous avez de chômeurs,
plus ils sont obligés d'avoir des égards à l'endroit des
travailleurs. Alors, à la faveur de la crise économique, on a
vraiment eu cette pratique qui s'est instaurée un peu partout dans nos
commerces. Et le résultat, en prolongeant les heures d'ouverture, on va
soumettre à ce type de pression et de conditions de travail totalement
inacceptables, dans une société qui se veut un peu
démocratique, qui veut un peu égaliser les chances entre les
individus... On va étendre cette pratique de temps partiel
permanent.
Vous savez, le temps partiel permanent, il y a quelque chose qui fait
mal quand on dit ça, et là, une chose que je ne fais à peu
près jamais, mais je vais le faire: j'ai une de mes filles qui vient
d'être engagée, embauchée dans une banque, temps partiel
permanent, entre 20 et 24 heures. Elle termine ses études. Y a-t-il
quelque chose de plus déstabilisant et de plus frustrant que de ne pas
partir comme tout le monde le matin à 8 h 30, 9 heures, 8 heures, selon
l'horaire, pour aller faire ses huit heures, rentrer le soir et faire sa
semaine un peu comme tout le monde? Ils peuvent l'appeler à n'importe
quelle heure et particulièrement les fins de semaine où c'est un
peu serré.
Alors, je pense que ce sont des conditions de vie et de travail qu'on ne
souhaite à personne, à moins qu'il n'y ait un impératif
tel, M. le Président, que la situation actuelle au Québec
commande qu'on passe à une telle situation. Moi, j'inviterais à
nouveau le ministre de l'Industrie et du Commerce à beaucoup de prudence
dans ce dossier. Une façon de nous permettre d'avoir un éclairage
plus intéressant, plus pertinent sur ce type de question, ce serait
évidemment d'entendre les premiers concernés, ceux qui sont
vraiment au bas de l'échelle, qui n'ont aucun pouvoir de pression, ni
sur les heures d'ouverture, ni non plus sur les conditions de travail et
généralement non plus sur les conditions minimums de travail.
Alors, M. le Président, c'est pourquoi je voulais accorder mon appui au
proposeur de cette motion. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la députée. M. le député Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, je suis favorable à la
proposition de la députée de Taillon. Comme on a soupé
depuis le début de cette discussion, il serait peut-être utile que
je relise la motion qui dit: "II est proposé qu'en vertu de l'article
244 de nos règles de procédure la commission permanente de
l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours
d'admission dans les établissements commerciaux, des consultations
particulières quant à tous les articles du projet de loi et
qu'à cette fin elle entende les Travailleurs et travailleuses unis de
l'alimentation et du commerce.
M. le Président, il s'agit d'une organisation qui
représente 45 000 membres et qui est donc au coeur des
conséquences que le projet de loi qu'on a devant nous va avoir. On sait
que l'ensemble du commerce de détail au Québec regroupe 400 000
personnes, ce qui en fait un bloc très considérable, et que 15 %
des travailleuses et des travailleurs du secteur sont syndiqués. Alors,
je ne vois pas pourquoi on refuserait d'entendre en commission parlementaire
les TUAC qui représentent les 45 000 personnes dont les conditions de
travail vont être modifiées d'une façon importante par la
loi qui est devant nous.
Bien sûr, M. le Président, pendant les auditions qui ont
déjà eu lieu, les grandes corporations qui poussent en faveur
d'une libéralisation des heures d'ouverture disaient que personne ne
serait tenu de travailler le dimanche. Mais c'est illusoire, cette
liberté-là qui serait reconnue même par convention
collective, parce qu'il y a peut-être un certain nombre de temps partiel
qui feraient des heures le dimanche, mais, pour ceux qui ont déjà
un horaire à peu près régulier, ça veut dire qu'on
leur ferait faire moins d'heures les six autres jours, parce qu'on mettrait
plus d'heures le dimanche. Donc, la liberté de choix est très
relative. Je pense que les TUAC devraient revenir expliquer au ministre les
conséquences pratiques du projet de loi qui maintenant est devant nous.
On dit que, dans le commerce de l'alimentation, 6 personnes sur 10 sont
à temps partiel et d'après les TUAC on serait susceptible, avec
la loi qui est devant nous, de porter ce nombre à 8 personnes sur 10
au lieu de 6 personnes sur 10. (20 h 30)
M. le Président, quand on prend le mémoire que les TUAC
avaient soumis à la commission parlementaire avant que le projet de loi
soit devant nous, j'attire l'attention de la commission sur la page 10
où on parlait de l'augmentation du maximum d'employée. Le
syndicat disait: "En dehors des heures civilisées de commerce, seul le
véritable commerce de dépannage devrait être permis, outre
les exemptions et les services essentiels. L'expérience passée
nous indique clairement que seules une règle claire et des amendes
vraiment dissuasives permettent le respect de la loi par les citoyens
corporatifs délinquants. L'application simple de la règle de
trois personnes travaillant en même temps dans un établissement
commercial règle tous les problèmes. Premièrement, parce
que ça facilite l'inspection et la vérification et,
deuxièmement, parce que seuls les véritables dépanneurs
peuvent opérer avec ce personnel réduit à trois personnes.
" Bien sûr, les TUAC parlaient de trois personnes tout le temps et non
pas d'une grande surface où, pour une période donnée, on
passerait à cinq personnes, parle-ton maintenant, alors que d'autres
jours, la veille même, on aurait fait travailler des gens plus tard que
de coutume pour garnir les tablettes afin d'avoir, le lendemain, le minimum de
cinq, maintenant, que le ministre suggère dans la loi, et les cinq
n'incluant pas - il faut toujours le rappeler - les gens qui s'occupent de
fabrication ou qui sont préposés à la
sécurité.
Il y a un autre aspect, M. le Président, qui rend
nécessaire d'entendre les TUAC qui représentent 45 000 personnes.
C'est le fait qu'au moment où cette organisation-là s'est fait
entendre devant la commission parlementaire il n'y avait pas de projet de loi
déposé. On ne connaissait pas encore les intentions
précises du gouvernement. Or, à cet égard, M. le
Président, quand on fait un peu un retour en arrière, le
gouvernement est passé par toutes les formules et toutes les approches,
à peu près, sur la question de l'ouverture, le dimanche en
particulier. Rappelons-nous, M. le Président, en septembre 1908, le
dépôt du rapport du député de Nicolet-Yamaska dans
lequel il recommandait de garder les commerces au détail fermés
le dimanche, à l'exception des magasins d'alimentation, pharmacies,
tabagies, stations-service et autres qui s'adonnent en partie au commerce des
aliments. Le comité présidé par le député de
Nicolet-Yamaska ajoutait que, pour ouvrir le dimanche, il faudrait avoir une
surface de moins de 3000 pieds carrés, indépendamment du nombre
de personnes y travaillant.
L'augmentation des heures d'affaires, d'après le comité
présidé par le député de Nicolet-Yamaska, aurait
dû se faire le mercredi soir, entre 18 heures et 21 heures, ce qui est
précisément ce que les organisations syndicales ont
préconisé, cette dernière partie où on parlait
d'ajouter aux soirs de semaine déjà prévus,
c'est-à-dire jeudi soir et vendredi soir, le mercredi soir. Mais
ça, le gouvernement n'a pas retenu, finalement, ce travail
sérieux qui avait été fait par un de ses
députés.
En octobre 1988, le ministre de l'Industrie et du Commerce de
l'époque présentait, de son côté, un projet de loi
qui permettait aux magasins d'alimentation d'ouvrir, sans aucune restriction,
le dimanche, de 11 heures à 17 heures. Là, on a devant nous un
projet de loi qui n'est pas le même, qui est la troisième version
de ce qu'on peut attendre du gouvernement et qui, lui, dit que le dimanche on
passerait de trois à cinq personnes, mais en excluant la fabrication et
en excluant la surveillance. Donc, on arrive à un troisième
projet. Alors, si ce gouvernement a eu la souplesse et l'imagination d'inventer
trois formules, pourquoi ne se force-t-il pas pour en trouver une
quatrième? Une quatrième qui pourrait être plus juste pour
les travailleurs et plus juste pour les plus petites entreprises de ce secteur
qui vont être littéralement mangées par les grandes si ce
projet de loi là est adopté tel quel. Parce que - on l'a
souligné déjà - je pense qu'on ne le
répétera jamais assez, quand on parle d'entreprises qui, en plus
des cinq qui seraient au travail, auraient droit à une surveillance
à plein temps, on ne parlé plus de dépanneurs, M. le
Président, on parle d'entreprises ayant une taille
appréciable.
Ce qui est incroyable de ce projet de loi, c'est qu'au surplus, quand
c'est en dehors des heures définies, il n'y en a plus, de limite aucune,
à ce qui pourrait être fait. Autrement dit, on dit: De 8 heures
à 21 heures, du lundi au vendredi; de 8 heures à 18 heures le
samedi, puis, en dehors de ces heures-là, avec les astuces à 5
qui permettraient, avec 3 équipes de 8 heures, d'avoir jusqu'à 20
ou 22 personnes au travail dans un magasin, ça pourrait être 24
heures par jour, donc on ouvrirait 7 jours par semaine, à ce
rythme-là, avec les conséquences que ça occasionnera pour
les employés. Alors que celui des ministres de l'Industrie et du
Commerce les plus réputés, les plus privatisateurs pariait de 11
heures à 17 heures le dimanche, là, un ministre notoirement plus
progressiste nous arrive avec une déréglementation totale et
complète à l'intérieur du schème de 5, et
là, ça pourrait être ouvert 24 heures le dimanche, comme
aux États-Unis.
J'attire aussi l'attention de la commission sur la conclusion du
mémoire des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du
commerce où on disait: "En limitant le nombre d'exceptions et en
obligeant les délinquants, les illégaux, les déloyaux
à respecter une loi juste pour tous et possédant les outils
dissuasifs nécessaires, le gouvernement rétablira
l'équité et éliminora la pulsion mercantile dos
commerçants vers l'illégalité. Un premier principe...
"
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, M. le député.
M. Bourdon: Alors, M. le Président, je pense qu'il faut
entendre ceux qui vont vivre avec la décision. Le gouvernement a
imposé un décret de trois ans aux travailleurs de la
construction, mais, au moins, avant de l'imposer, on les a rencontrés.
Alors, je pense, M. le Président, que la motion qu'on a devant nous
devrait être adoptée.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député. Du côté ministériel, est-ce qu'il y a
des interventions? Non? M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: M. le Président, je vous remercie beaucoup.
J'étais un peu surpris d'entendre le ministre nous dire, tout à
l'heure, qu'après le dépôt du projet de loi il a
rencontré des gens. Il n'y a rien qui, dans le fond, l'empêchait
de le faire, mais qu'il veuille nous empêcher de les entendre, c'est
là qu'est mon problème. Vous comprendrez très bien que je
ne peux pas... Je n'empêcherai jamais un ministre de trouver une solution
à un problème et, pour ce faire, de rencontrer les gens. Qu'il
les rencontre dans le corridor, dans la maison chez lui, dans le sous-sol,
autour d'un verre s'il le faut, mais qu'il règle le problème.
Ça, ça ne me dérangerait pas. Mon problème, c'est
que, comme perdure le problème, j'aurais bien aimé que les gens
viennent me le dire à moi; je suis membre d'une commission
parlementaire.
Le ministre a l'impression... Il est nouveau, je le sais,
peut-être qu'on va lui faire faire un peu ses leçons, mais la
réglementation de nos moyens d'action comme députés de
l'Opposition, c'est de tenir ouvertement la discussion. Pour tenir ouvertement
la discussion, il faut avoir une rencontre avec du monde. La meilleure
façon de le faire, c'est une rencontre particulière qu'on pourra
déterminer ensemble. À ce moment-là, il pourrait venir
nous dire comment il n'accepte pas et quelles sont les raisons pour lesquelles
il n'accepte pas le projet tel que déposé. Mais le ministre dit:
Non, non, écoutez, je les ai écoutés, je sais ce que j'ai
à faire, puis je fais ce que j'ai à faire; à ce
moment-là, vous n'avez pas d'affaire à me déranger.
Là, je m'excuse, mais on va le déranger. On va le
déranger, parce que ça touche la vie de tous les jours de toutes
ces personnes-là.
Je vais vous donner juste un exemple. D'ailleurs, quand on prend le
temps d'arrêter quelques instants pour le souper ou pour aller voter de
l'autre côté, on a la chance de rencontrer des gens. Quelqu'un me
disait tout à l'heure: Peut-être que ça vaudrait la peine
de le redire encore une fois, si ça n'a pas été dit dans
d'autres discours, mais au moins le redire. Le ministre dit: Écoutez,
j'ai des zones périphériques par rapport à l'Ontario, aux
États-Unis; vous savez, des gens vont acheter aux États-Unis le
dimanche, bon, ils vont acheter à telle place qui est ouverte en
Ontario, dans les zones périphériques, etc. Mais il oublie une
chose, il y a du monde ici, au Québec - la personne qui me parlait
venait de la Gaspésie - qui se trouve à peu près à
120, 150, 200 kilomètres de Québec et il y a des gens qui
décident - parce que vous avez des grands magasins, ici, qui sont
ouverts, Carnaval et autres - de prendre une journée de congé,
dans le fond, pour venir magasiner à Québec.
Il n'y a rien d'anormal, vous savez, il y a du monde qui fait ça.
Moi, j'ai des gens à La Tuque qui sont à 85 milles de Roberval,
comme je le disais ce matin, puis à 85 milles de Grand-Mère ou de
Shawinigan; en conséquence, leur hobby à eux-autres, parce que
c'est l'habitude qu'ils avaient à l'époque, c'était de
prendre le train, dans le temps qu'il fonctionnait comme il faut, entre La
Tuque et Québec. Ils venaient magasiner à Québec puis ils
retournaient chez eux le lendemain, et ils couchaient une soirée
à Québec ou à Montréal. Souvent, on allait dans les
gares, à Montréal, quand je m'occupais de syndicat, puis je
rencontrais des gens de La Tuque. Pourquoi? Parce que c'était une
façon à eux de s'extérioriser. Là, dans le contexte
actuel, avec l'ouverture qui pourrait arriver, il pourrait donc arriver que les
gens décident de venir à des Super Carnaval, de venir ici
à Québec et à ce moment-là, arriver à
dépeupler puis à faire en sorte que des gens qui ont des
commerces dans les lieux comme ceux-là en viennent à crever. Et
vous savez ce qu'ils nous ont dit en fin de semaine, à Rimouski, ces
gens-là? Ils nous ont dit: Vous êtes en train de nous tuer. Est-ce
que vous voulez, par l'intermédiaire d'une loi comme celle-là,
encore davantage accélérer notre mort?
Il y a des gens qui ont été tout surpris d'entendre le
député de Beauce-Nord dire ce matin que tous les marchands
étaient de son côté, que tous les gens qui ont des
commerces étaient de son côté. Il y en a dans cette salle
ici ce soir qui seraient capables de lui dire que ce n'est pas vrai. Ils
seraient capables d'appuyer les employés de l'organisation des
travailleurs et travailleuses de l'union de l'alimentation et du commerce. Ils
viendraient dire que c'est vrai que ça peut avoir des effets sur eux. Je
suis sûr qu'ils viendraient contredire le député de
Beauce-Nord. Ils viendraient le dire ici que ce n'est pas vrai, ce qu'il a dit
ce matin. Il y a des gens dans son coin, comme partout ailleurs au
Québec, qui sont en désaccord avec ce projet de loi. Alors, faire
venir les gens ici pour venir nous l'expliquer, eu égard à la loi
telle quelle, ce n'est pas exagéré que de le demander. Je faisais
mention de différentes étapes qui peuvent être
suivies pour en arriver à faire le meilleur projet de loi
possible. Bien ça, c'en est une. Une fois que le projet de loi est
déposé, il n'y a rien qui aurait empêché le
ministre, avant d'adopter le principe, de tester son principe puis de voir s'il
n'y avait pas moyen de faire de nouveaux amen-déments. Parce que vous le
savez, nous, comme membres de l'Opposition, le seul moyen que nous avons
d'ajouter quelque chose qui coûterait de l'argent au gouvernement dans le
projet de loi, c'est par l'intermédiaire d'une décision du
ministre. Nous, comme membres de l'Opposition, maintenant, on ne peut plus en
vertu de nos règlements proposer quelque chose qui aurait pour but
d'augmenter le coût du projet de loi. Seul le ministre a ce
pouvoir-là, qui lui est donné par ses fonctions et par la
représentation au Conseil des ministres. Donc, dans ce
contexte-là, si on veut convaincre le ministre, II faut qu'il retourne
à son Conseil des ministres pour prendre cette
décision-là. Il lui aurait été plus facile, avant
d'adopter le principe du projet de loi, de le faire en commission
parlementaire, en entendant des gens comme les Travailleurs unis de
l'alimentation et du commerce. Il me semble que ce n'est pas difficile à
comprendre. 81 le ministre, qui a écouté ces gens-là,
dit-il, qui les a rencontrés, dit-il, avait bien saisi leurs
problèmes... Leurs problèmes, c'est quoi? Ça se
résume en un mot. C'est d'ajouter quatre employés en tout temps.
Si le ministre, ce soir, qui a, j'en suis assuré, entendu ce que
demandaient ces gens-là, pouvait peut-être répondre en
disant: Oui, je suis prêt à l'ajouter, M. le député
de Laviolette, on vous adopterait votre projet de loi rapidement avec les
amendements mineurs, etc., que vous pourriez proposer. Mais ça, c'est un
engagement majeur. Vous désirez, à ce moment-là,
répondre plutôt à une demande de Provigo. Je ne sais pas
d'où vous vient le devoir de protéger Provigo, mais je pense que
c'est ce que vous faites.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, M. le
député. Il y a l'appel pour un vote. Alors, on doit suspendre les
travaux jusqu'après le vote.
(Suspension de la séance à 20 h 44)
(Reprise à 21 h 2)
Le Président (M. Bélanger): J'inviterais tout le
monde à bien vouloir reprendre sa place, s'il vous plaît, pour que
nous puissions reprendre nos travaux et permettre à M. le
député de Laviolette de terminer son intervention. Vous en
étiez rendu aux gens de La Tuque que vous rencontriez dans la gare
à Montréal quand vous faisiez du syndicalisme. Ils allaient faire
du magasinage.
Des voix: Ha,ha, ha!
Mme Marois: On a un peu aidé le président à
s'en souvenir, mais ça va.
M. Jolivet: M. le Président, c'est parce que là,
vous m'enlevez les mots de la bouche. Mais il reste une chose, c'est que ces
gens-là nous disent: Écoutez, par le projet de loi tel qu'il est
libellé actuellement, vous risquez de faire disparaître des petits
dépanneurs, des petits commerces dans des milieux qui sont proches des
grands centres, dans la mesure où vous allez permettre - puis il n'y a
rien qui l'empêche à ce moment-là - de faire une certaine
forme de libéralisation des heures d'affaires. Ce qui est important,
c'est d'entendre ces patrons - et je parlais de ceux de Beauce-Nord en
particulier, qui étaient présents - qui viendraient nous dire
qu'eux aussi appuient les travailleurs. Parce que pour eux il est
évident que, s'ils ont des travailleurs malheureux, s'ils ont des
travailleurs qui sont ce qu'on appelle dans notre langage de négociateur
des TPO, temps partiel occasionnel, au bout du fil, en train d'attendre pour
voir s'ils n'auront pas un horaire brisé, lequel horaire pourra
être déterminé selon la bonne volonté de l'employeur
parce qu'il n'a pas le choix de dire à la personne: Écoute, je
peux t'engager, mais je ne peux pas t'engager plus de temps que ça...
Alors, il devra lui donner, compte tenu de la plage additionnelle d'heures, un
horaire qui, malheureusement, ne serait pas continu. Dans ce sens, il serait
important d'entendre les travailleurs et même les employeurs qui sont
actuellement des commerçants, des petits commerçants, et qui font
partie de regroupements qu'on connaît, comme la Coalition. Ces
gens-là, je suis sûr qu'ils seraient prêts à venir
appuyer les travailleurs et travailleuses de façon que le ministre
comprenne. Et c'est là que j'étais rendu en disant. Ce fameux
"quatre employés en tout temps"... C'est là que j'étais
rendu tout à l'heure, si vous vous en souvenez, à la fin de tout.
Quatre employés en tout temps. Si le ministre acceptait de faire cet
amendement, il est évident qu'on réglerait rapidement le sujet ce
soir.
C'est - et je terminais par cette phrase - Provigo qui a demandé
au ministre. Par qui, par quel moyen, quelle forme, a-t-elle demandé au
ministre de mettre "quatre employés" sans mettre les mots "en tout
temps"? C'est ça qu'on a, comme impression qui nous reste. Je peux me
tromper. Le ministre peut me dire que j'ai tort, mais je dois vous dire que
c'est une impression qui nous reste. Quand on regarde les heures d'ouverture
entre 8 heures et 22 heures, comme il était proposé, et qui
arrivera à 21 heures avec l'amendement que le ministre nous apportera,
c'est pour répondre à une autre clientèle, comme je le
disais ce matin dans mon discours, c'est-à-dire les pharmacies Jean
Coutu.
Finalement, on s'aperçoit qu'il n'a pas tenu compte de ce que les
travailleurs lui ont dit
derrière les portes closes. Je suis sûr que le ministre ne
pourrait pas contredire ce que les gens lui ont dit. Ils nous l'ont dit
à nous ici que si c'était quatre employés en tout temps,
ça réglerait le problème. Alors, pourquoi le ministre
veut-il encore s'entêter? Pourquoi n'accepte-t-il pas de nous dire:
Écoutez, avec toute l'argumentation que vous avez apportée
jusqu'à maintenant, messieurs, mesdames de l'Opposition, nous acceptons
de faire cet amendement-là? S'il nous disait ça, on passerait
immédiatement - vous le savez, M. le Président - à
l'étude du premier article du projet de loi. Mais s'il ne nous dit pas
ça, il y a certainement d'autres motions que nous aurons l'occasion de
vous présenter, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je n'en ai aucun doute.
Alors, je vous remercie. M. le député de Beauce-Nord.
M. Audet: Je voulais soulever une question de règlement,
en vertu de l'article 212, à propos de la dernière intervention
du député de Lavio-lette.
M. Jolivet: II nous demande la permission de poser une question.
C'est ça?
M. Audet: Pas du tout.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député, estimant que ses propos ont été mal compris
ou déformés, peut donner une très brève explication
sur le discours qu'il a prononcé. Donc, une très brève
explication, M. le député de Beauce-Nord.
M. Audet: Le député de Laviolette a
mentionné tantôt que j'aurais dit ce matin en commission...
M. Jolivet: Pas en commission, en Chambre. M. Audet:
Même en Chambre. M.Jolivet: C'était hier,
ça.
M. Audet: Ce que vous avez dit tantôt, vous avez dit
ça ce matin, c'est que j'aurais dit que les marchands de Beauce-Nord
étaient d'accord avec ça. D'abord, je demanderais au
député de s'excuser, parce que c'est complètement faux, je
n'ai pas dit ça, première des choses. Deuxièmement, le
député colporte des faussetés à tout bout de champ,
sur le projet de loi d'abord et sur le ministre, depuis le début de la
commission.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, on ne peut
pas, en invoquant l'article de règlement, violer un autre article qui
nous interdit de prêter des propos ou des intentions à un autre
député. Alors, M. le député de Beauce-Nord, s'il
vous plaît!
M. Audet: M. le Président, je reviens alors sur le premier
point de règlement que je vous ai soulevé. Je demande au
député de corriger, s'il vous plaît!
M. Jolivet: Comment voulez-vous que je corrige, M. le
Président, quand j'ai entendu le député dire que les
marchands dans son coin étaient d'accord?
M. Audet: C'est faux, M. le Président.
M. Jolivet: Eh bien, si c'est faux, vous prendrez le temps de le
dire à un autre moment donné.
M. Audet: C'est complètement faux. J'ai fait sortir les
galées ici, M. le Président, et je vous défie de trouver
où j'ai dit ça. C'est complètement faux! Il devait avoir
les yeux fermés, comme il les a eus depuis l'après-midi. Il
dort!
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! Gardons... Non, non. Gardons un niveau de débat
civilisé et agréable. Ça va être aussi long, mais
ça va être plus le "fun". Alors, s'il vous plaît!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): Excusez. M. le
député de Laviolette, je pense qu'on a une question qui nous est
posée.
M. Jolivet: M. le Président, je vais simplement vous dire
ceci: si le député croit que j'ai tort, il a fait sa
rectification. Je peux me tromper, ce n'est pas grave, je suis capable
d'accepter que je me sois trompé. Mais il y a juste une chose, c'est que
moi j'ai cru comprendre de sa part qu'il disait qu'il avait l'accord des
marchands de son coin, puis ça, ce n'est pas la première fois que
je l'entends dire de sa part.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, la
situation est réglée. Alors, M. le député
d'Un-gava.
M. Claveau: En contrepartie, on peut comprendre qu'il n'a pas
l'accord des marchands de son coin.
M. Jolivet: C'est ça.
Le Président (M. Bélanger): Si c'est dans le
même contexte que M. le député de Laviolette citait ce
matin, oui, c'est ça.
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Président (M. Bélanger): M.le
député d'Ungava.
M. Claveau: Si vous le permettez, M. le Président,
j'aimerais déposer une motion devant la commission.
Le Président (M. Bélanger): Non. M. le
député d'Ungava avait demandé la parole?
M. Claveau: Oui. J'ai demandé la parole pour
déposer une motion en vertu de l'article 244.
Le Président (M. Bélanger): Un instant. On en a
déjà une sur la table. On pourrait disposer de celle-là
d'abord.
M. Claveau: Ah oui! Oui, pardon. Vous êtes
déjà averti.
Le Président (M. Bélanger): Une à la fois,
tranquillement pas vite. Alors, j'appelle donc la motion de la
députée de Taillon qui se lisait comme ceci: "II est
proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de
procédure la commission permanente de l'économie et du travail
tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet
de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les
établissements commerciaux, des consultations particulières quant
à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle
entende les Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du
commerce. " Cette motion est-elle adoptée?
M. Jolivet: M.le Président, le vote nominal.
Le Président (M. Bélanger): Ah! vous demandez le
vote nominal? Bien. Tel que je me suis entendu avec le vice-président,
qui est le représentant de l'Opposition, en conséquence, on sait
que nos règles de procédure établissent que le parti de
l'Opposition a quatre votes et que le parti au pouvoir a droit à neuf
votes. La façon dont nous allons procéder... Je sais que la
situation ne se posera pas mais, si jamais elle se pose quand ce sera bien
compliqué, on saura clairement ce qui en est. Je vais enregistrer tous
les votes, mais je n'en compilerai que quatre. Advenant le cas où
quelqu'un s'abstiendrait de votre côté, je diminuerais d'un vote
ceux auxquels vous avez droit. Si quelqu'un votait différemment des
membres de son parti, je compterais ce vote avec les autres et je diminuerais
d'autant de l'autre côté, de façon qu'on s'entende bien.
Cette règle étant établie, j'appelle donc le vote. M.
Bourdon (Pointe-aux-Trembles)?
M. Bourdon: Pour.
Le Président (M. Bélanger): Pour. M. Claveau
(Ungava)?
M. Claveau: Pour
Le Président (M. Bélanger): Mme Dupuis
(Verchères)?
Mme Dupuis: Pour.
Le Président (M. Bélanger): M. Jolivet
(Laviolette)?
M. Jolivet: Pour.
Le Président (M. Bélanger): Mme Marois
(Taillon)?
Mme Marois: Pour, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Pour. M. Audet
(Beauce-Nord)?
M. Audet: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Bélanger
(Laval-des-Rapides), contre. M. Bordeleau (Acadie)?
M. Bordeleau: Contre.
Le Président (M. Bélanger): M.Lafrenière (Gatineau)?
M. Lafrenière: Contre.
Le Président (M. Bélanger): M. Richard
(Nicolet-Yamaska)?
M. Richard: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Et M.le
ministre Tremblay (Outremont)?
M. Tremblay (Outremont): Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Donc, la motion est
rejetée. M. le député d'Ungava.
Motion proposant la tenue de consultations
particulières avec la Fédération
nationale
des associations de consommateurs du
Québec
M. Claveau: Oui, M. le Président, si vous permettez, en
vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, j'aimerais
déposer la motion suivante: "II est proposé, en vertu de
l'article 244 de nos règles de procédure, que la commission
parlementaire de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre
l'étude détaillée du projet de loi 75, Loi sur les heures
et les jours d'admission dans les établissements commerciaux, des
consultations particulières quant à tous les articles dudit
projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Fédération
nationale des associations de consommateurs du Québec. "
Le Président (M. Bélanger): Bien Alors
est-ce qu'il y a des commentaires sur la recevabilité? Non. Donc,
la motion est conforme puisque l'article 244 dit: "La commission saisie
étudie chaque article du projet de loi et les débats portent sur
les détails du projet de loi. Les amendements doivent se rapporter
à son objet et être conformes à son esprit et à la
fin qu'elle vise." En ce sens, la motion est recevable. Sur la motion, vous
voulez défendre votre motion, M. le député?
M. Claveau: Sûrement.
Le Président (M. Bélanger): Vous avez 30
minutes.
M. Claveau: À moins que le ministre ne nous dise tout de
suite qu'il est disposé à voter.
Le Président (M. Bélanger): C'est d'abord à
vous à défendre votre motion. Peut-être que
vous-même, vous allez la retirer, on ne sait jamais.
M. Christian Claveau
M. Claveau: On pourrait sauver du temps si le ministre nous
disait tout de suite qu'il veut les entendre, notre intention n'étant
pas de gagner du temps mais bel et bien de permettre aux gens de s'exprimer
devant cette commission parlementaire afin de nous dire ce qu'ils pensent
réellement du projet de loi qu'on a sur la table et non pas des
différents exposés antérieurs puisque, comme l'a dit mon
collègue de Pointe-aux-Trembles tout à l'heure, on en est rendu
à la troisième version, la troisième hypothèse de
travail. Alors, pourquoi pas une quatrième et suivantes?
Toujours est-il, M. le Président, que, devant la commission
parlementaire, la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec aurait avantage à être entendue.
D'abord, M. le Président, pour se référer à la
pertinence de cette demande, je relèverai les trois colonnes du temple,
comme je les ai appelées hier soir en Chambre, que nous a livrées
le député de Richelieu au cours de son intervention lors du
débat en deuxième lecture du projet de loi. Le
député de Richelieu disait: Le projet de loi dont il est question
se base sur trois grandes hypothèses ou trois grands principes
fondamentaux. Là, au risque de mal le citer, j'ai bien écrit mot
pour mot ce qu'il a dit à ce moment-là. Il a dit d'abord que le
premier jalon était l'équité entre les commerces, que le
deuxième était la qualité de vie des travailleurs et que
le troisième était de répondre aux besoins des
consommateurs. (21 h 15)
Alors, nous avons eu l'occasion de parler de la qualité de vie
des travailleurs et nous allons sûrement en reparler lors de cette
commission parlementaire. Maintenant, nous allons nous pencher un peu plus
précisément sur la troisième colonne du temple du
député de Richelieu: les besoins des consommateurs.
M. le Président, j'aimerais bien savoir en quoi le projet de loi
en question répond aux besoins des consommateurs, si ce n'est
peut-être qu'à quelques exceptions, des consommateurs, une
certaine quantité de consommateurs ou un certain groupe de consommateurs
bien spécifiques peuvent avoir un certain nombre de besoins
différents de la masse de la population en général. Il est
bien évident, M. le Président, que lorsqu'on s'adresse à
une catégorie de consommateurs de classe un peu supérieure dans
la société, qui ont quelques moyens et qui peuvent, finalement,
diversifier un tant soit peu leurs achats et leurs besoins quant à leur
qualité de vie, on peut comprendre le principe de la consommation
à outrance, j'oserais dire, de la consommation sur les 24 heures et 7
jours par semaine.
Ça, ça s'adresse à une catégorie de
consommateurs bien spécifiques et il faut, d'abord, au départ,
avoir un minimum de revenus, ne pas faire partie des quelque 700 000
assistés sociaux du Québec. Il ne faut pas, non plus, être
dans la catégorie des 10 % et plus de chômeurs qu'on a au
Québec. Il faut avoir suffisamment de revenus pour que, lorsque l'on a
satisfait nos besoins primaires en termes de logement, d'alimentation, de
loisir de base, de vêtements et de services d'éducation aux
enfants, tout ça, il nous reste de l'argent pour consommer. C'est dans
ce sens-là, par exemple, que je me souviens très bien, il y a
déjà au-delà d'un an, peut-être même un an et
demi, lors d'une émission Droit de parole, il y a eu un débat sur
les heures d'affaires, ça date d'avant l'élection du ministre en
cette Chambre. À ce moment-là, j'avais été
très surpris et même choqué par quelqu'un qui avait dit:
Écoutez, moi, si je veux aller faire du ski le samedi à la place
du dimanche ou le dimanche au lieu du samedi, à ce moment-là,
j'ai le droit de pouvoir magasiner l'autre journée de la semaine
où je n'irai pas faire de ski. Si je pense qu'il va faire tempête
le dimanche et que je ne pourrai pas faire de ski, à ce
moment-là, je vais aller magasiner le samedi, mais, par contre, si le
samedi il ne fait pas beau ou le contraire, s'il fait suffisamment beau le
samedi pour que je puisse aller faire du ski, à ce moment-là, je
me réserverai le dimanche pour magasiner.
C'est dans ces termes-là qu'une certaine catégorie de
consommateurs abordent le problème. Comme je le disais, M. le
Président, ce n'est sûrement pas la grande masse des consommateurs
québécois qui peuvent ne serait-ce que se permettre de penser
ainsi. Je vois parmi nous la députée de Saint-Henri qui sera
sûrement d'accord avec mes propos, connaissant bien la
problématique d'un certain nombre de gens qui
n'ont pas nécessairement les moyens d'aller faire du ski toutes
les fins de semaine et qui, d'autre part, ne peuvent pas se payer beaucoup plus
que les besoins primaires et qui, dans ce sens-là, n'iront
sûrement pas augmenter la masse globale de consommation au Québec
parce qu'on a élargi le cadre des heures d'affaires.
Dans ce sens-là, je dois me référer à ce que
nous disait dans son mémoire fa Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec, le mémoire numéro
32 qui a été déposé lors de la consultation qui a
été menée à cette fin. À ce
moment-là, si le ministre avait bien écouté, probablement
qu'on ne retrouverait pas certaines dispositions que l'on retrouve dans le
projet de loi que l'on a actuellement sur la table.
Je vais me permettre de lire intégralement quelques paragraphes
de ce qui nous a été dit, déposé par écrit
par la Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec pour démontrer jusqu'à quel point on aurait
beaucoup intérêt, en tant que membres de cette commission qui
auront à voter sur l'ensemble de cette loi, à les écouter
avant daller plus loin dans nos débats pour s'assurer, entre autres, que
les propos du député de Richelieu, qui sont sûrement ceux
du ministre, vont aussi vraiment dans le sens des besoins des
consommateurs.
La Fédération nous dit ceci: "Pour la FNACQ - la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec - l'ouverture ou la fermeture des commerces le dimanche est une
décision politique qui s'intègre dans un choix de
société." C'est très clair, on a beau essayer de dire
qu'on ne fait pas de politique avec ça, de toute évidence,
ça fait partie d'un choix de société qu'on se donne,
ça fait partie d'une façon de voir en termes de qualité de
vie, en termes de coûts-bénéfices, pour une certaine
catégorie d'individus qui opèrent dans le d ornai ne, etc. Et la
Fédération continue en disant "Nous refusons d'instituer une
course à la consommation plutôt que d'accorder aux consommateurs
et consommatrices une journée dans la semaine pour se reposer, s'adonner
à des loisirs, des activités culturelles ou sportives, ou des
rencontres amicales ou familiales." C'est important, ce qu'ils disent, parce
que ces gens-là représentent quelques individus au Québec,
là Ils ne parlent pas uniquement pour eux-mêmes Et d'ailleurs, on
va voir, tout à l'heure, dans l'autre partie de leur mémoire, de
quelle façon ils en sont arrivés à cette
conclusion-là.
Un peu plus loin, la même Fédération dit: "Pour la
FNACQ, il s'avère évident que cette campagne en faveur de
l'ouverture des magasins le dimanche a été brillamment
orchestrée par les grandes entreprises au détriment des petits
commerçants, des travailleurs et travailleuses et des consommateurs et
consommatrices, et ceci, dans le but d'augmenter leur part de marché et
leurs bénéfices." Alors, il n'y a pas uniquement nous qui avons
vu le problème sous cet angle-là. Il y a au-delà de 120
000 consommateurs québécois représentés par cette
association-là qui ont vu, aussi, le problème sous le même
angle. Et encore un peu plus loin, la même association dit que:
"Malgré son opposition ferme à l'ouverture des magasins le
dimanche, la FNACQ considère qu'il est important de tenir compte des
nouveaux besoins des consommateurs et consommatrices et propose, à cette
fin, un réaménagement des heures d'ouverture des commerces, soit,
par exemple, ouvrir le mercredi soir et aménager les heures d'ouverture
de façon à ce que la totalité des heures reste la
même." C'est ça qu'ils nous disaient Ils n'ont jamais dit au
ministre qu'ils voulaient que ce soit ouvert mur à mur, tous les jours
de la semaine ou, du moins, cinq jours, de 8 heures le matin à 21
heures, c'est-à-dire 13 heures, plus une sixième journée,
soit le samedi jusqu'à 17 heures ou 18 heures, ça ne fait pas une
grosse différence. Ce n'est pas ça qu'ils nous ont dit. Ils nous
ont dit: D'abord, partons du principe que c'est déjà ouvert assez
longtemps, que déjà, sur la base des deux tiers du temps, en
gros, ouverts, c'est suffisant pour répondre aux besoins des
consommateurs québécois.
Maintenant, tout en considérant cette même base là,
eh bien là, on peut éventuellement regarder un certain nombre de
nouveaux aménagements qui pourraient faire en sorte que ce soit plus
disponible, enfin, ou plus accessible pour certains qui vivent des
réalités nouvelles dans notre société On n'a pas
parlé des gens qui vivent des réalités pour s'amuser, les
fins de semaine. On n'a pas parlé des gens qui vivent des
réalités en fonction de caprices personnels et qui voudraient que
les lois s'adaptent à leurs caprices personnels, ce qui est le lot ou
l'apanage d'une minorité dans des sociétés comme les
nôtres C'est une minorité, ceux qui peuvent se permettre de
vouloir faire adapter les lois à leurs caprices Ce n'est pas tout le
monde qui peut se permettre ça et ce n'est pas tout le monde qui va en
tirer avantage s'il fallait que l'on fasse toutes les lois en fonction des
caprices de quelques individus. Ils disent: O.K. Globalement, il y a des
besoins nouveaux. Par contre, on considère, nous, comme association de
consommateurs - c'est ce que dit la FNACQ - qu'on peut réaménager
les heures d'affaires en fonction de ces nouveaux besoins-là, mais sans
élargir la base, sans élargir la totalité des heures qui
sont actuellement disponibles pour le consommateur. Comment cette
association-là en est-elle venue à ces conclusions-là? Eh
bien, ça n'a pas été une émanation qui est apparue
d'un rêve de quelqu'un, en pleine nuit, ou qui a été
discutée derrière une porte close. Ça n'a pas
été l'exemple des premiers ministres qui passent huit jours
à la cachette pour trouver une solution. Non. Ils l'ont fait devant tous
leurs membres, en plein public, et Ils nous expliquent comment, en page 2 de
leur mémoire, ils sont arrivés à ça Et ils
nous disent d'abord qu'ils représentent 5000 membres individuels,
plus neuf organismes de consommateurs qui regroupent, à eux seuls, 120
000 membres corporatifs. Et ils nous disent que cette
décision-là, il y sont arrivés par le biais d'une
assemblée générale. Et je lis textuellement ce qu'ils nous
disent: "Les délégués-e-s ayant droit de vote à
cette assemblée - comme ça, on ne dira pas que je n'ai pas
cité au complet la phrase - ont réaffirmé leur position
sur les heures d'affaires des établissements commerciaux. La
consultation et le vote nous amènent à conclure à un
constat d'unanimité" - s'il faut répéter, je vais le faire
- ...constat d'unanimité, et là, on a en majuscules: "CONTRE
L'OUVERTURE DES COMMERCES LE DIMANCHE ET POUR UN RÉAMÉNAGEMENT
DES HEURES ACTUELLES D'AFFAIRES." Rien de plus. C'est ça qu'ils nous
demandaient. C'est là-dessus qu'ils ont demandé au ministre de
travailler, les consommateurs.
Quand je vois le député de Richelieu qui dit: Le projet de
loi qu'on a entre les mains, on l'a fait à partir de trois grands
principes et un des ces grands principes là, c'est de se conformer aux
nouveaux besoins des consommateurs. Ce n'est pas ça que nous disent les
consommateurs. Ce n'est pas ça que nous disent les associations qui
représentent les consommateurs. Elles n'en veulent pas de cette
version-là. Et dans ce sens-là - à moins qu'elles n'aient
changé d'idée subitement depuis que le ministre a
déposé son projet de loi parce que, peut-être qu'elles
n'ont pas vu non plus la trappe dans laquelle le ministre essaie de nous faire
plonger tout le monde, en enrobant son principe de ne pas ouvrir le dimanche
d'une clause à l'effet que tout le monde peut ouvrir sans le dire, en
autant qu'il n'y ait pas plus de cinq personnes. Peut-être que les
associations n'ont pas vu ça. Et peut-être qu'elles l'ont vu aussi
et qu'elles ont changé d'idée.
Je ne sais pas, mais j'aimerais bien avoir l'opportunité de leur
poser la question devant cette commission parlementaire, par exemple. Et si
jamais le ministre a eu l'opportunité de les rencontrer ou de leur
téléphoner, dans le courant des derniers jours, eh bien,
j'aimerais bien qu'il vienne nous confirmer lui-même, devant cette
commission que, oui, les associations de consommateurs ont changé
d'idée, que, oui, les associations de consommateurs sont d'accord pour
que toutes les surfaces commerciales dans le domaine de l'alimentation, de la
pâtisserie et confiserie, tabac, dans tout le domaine pharmaceutique,
etc., peuvent être ouvertes le dimanche, en autant qu'il n'y ait pas plus
que tant de vendeurs sur le plancher et tant de caissières. Je veux bien
qu'elles aient changé d'idée, ces associations-là, au
cours des dernières heures, mais qu'elles viennent nous l'exprimer. Et
si le ministre est capable de nous dire que c'est bel et bien le cas, que
maintenant, comme l'affirmait le député de
Richelieu de sa propre formation politique, l'on répond, par
cette loi-là, aux besoins que les consommateurs nous avaient
exprimés, eh bien, qu'il les invite lui-même à venir
s'asseoir là devant nous et à nous l'expliquer, très
rapidement. On ne demandera pas une intervention de deux heures, trois heures,
quatre heures, si c'est juste pour nous dire: Oui, c'est vrai. On est d'accord
avec le projet de loi parce qu'on a compris et le ministre, par son projet de
loi, a répondu exactement aux attentes de l'ensemble des consommateurs
du Québec. On ne parle pas, là, d'une classe de
privilégiés qui veulent ajuster les lois à leurs caprices.
On parle de l'ensemble des consommateurs québécois, de tous ceux
qui vivent, par exemple, à Montréal, en dessous du seuil de
pauvreté, de tous ceux qui vivent dans les régions dans des
conditions difficiles. Ce n'est pas pour rien qu'il y a des consommateurs qui
se sont réunis à Rimouski durant la fin de semaine
dernière, pour dire au gouvernement: "Écoutez, qu'est-ce que vous
attendez, là? Vous êtes en train de nous laisser crever sur place.
Vous n'avez pas vu qu'on a des problèmes?" Pensez-vous que ces
consommateurs-là vont aller dépenser plus parce que le ministre a
changé sa loi? Ou pensez-vous que ça va les aider que le ministre
ait changé sa loi? Pensez-vous que ça va leur faire baisser les
prix? On aimerait bien que les associations de consommateurs viennent nous dire
ça.
Et, je reviendrais aussi sur quelque chose qu'a dit tout à
l'heure mon collègue de Laviolet-te, qui est tout à fait vrai.
C'est toute la dynamique du transfert des activités commerciales d'une
région à une autre. C'est une dynamique non négligeable et
qui commence déjà à se faire sentir dans certaines
régions et qui va s'accentuer très rapidement si on peut
permettre à tout le monde, entre autres dans le domaine de
l'alimentation et de certaines activités commerciales, d'être
ouvert le dimanche. Et puis le ministre sait très bien aussi que si on
ouvre la porte, pour l'ensemble des grandes surfaces, à la
commercialisation du dimanche par le biais d'une clause camouflée, eh
bien, ça ne sera pas long que tous les autres utilisateurs de plancher
dans les centres d'achat, centres commerciaux - appelez-les comme vous voudrez
- vont venir cogner à la porte du ministre, un en arrière de
l'autre, pour faire la même chose. Parce que ça va être
intéressant pour toutes les petites boutiques de centres d'achat. (21 h
30)
Dans le fond, le ministre, en prenant cette décision-là,
à mon humble avis ne fait que retarder l'échéance
où il se sentira coincé au point où il devra
réouvrir sa loi pour faire en sorte que tout le monde puisse ouvrir le
dimanche C'est vers ça qu'il va être obligé de s'en aller
même s'il ne le veut pas, ou même s'il prétend ne pas le
vouloir au moment où on se parle. Parce que les pressions vont
continuer,
parce que, comme j'ai eu l'occasion de le dire tout à l'heure, il
est fort probable que l'on retrouve des marchés d'alimentation qui se
diversifient un tant soit peu. On retrouve déjà un certain nombre
d'articles de cuisine, articles ménagers, toutes sortes de choses dans
l'alimentation actuellement au Québec. Tous les magasins d'alimentation
ont tout un tas d'articles ménagers et, à l'occasion, les
articles ménagers, ça va jusqu'aux poignées de portes et
puis aux marteaux à clous. Eh bien, il ne sera pas surprenant, dans le
même cadre, que les magasins d'alimentation fassent ce qu'ont
déjà fait certaines pharmacies, d'ouvrir des rayons
carrément sur d'autres choses. Le ministre dit: On va contrôler
ça. j'ai hâte de le voir. Si ça ressemble à la
nouvelle loi sur le contrôle du transport routier où il devait y
avoir plus de 400 inspecteurs puis, au moment où oh se parle, il y en a
à peine une dizaine au Québec, ce qui fait que tous les camions
sont en ville, actuellement, parce qu'il n'y a plus personne qui contrôle
la nouvelle loi. Eh bien, j'ai hâte de voir comment le ministre va
contrôler le fait pour empêcher les magasins d'alimentation de
diversifier leurs activités, pour pouvoir vendre à peu
près toutes sortes de bricoles le dimanche, en dehors de l'alimentation,
sur la base de trois, quatre ou cinq employés. Surtout qu'avec cinq
employés sur une grande surface, vous pouvez vous permettre de vendre
autre chose que du pain, puis des cannes de jus de tomates. C'est ça qui
va se passer, le ministre le sait très bien. Il ne fait que reculer
l'échéance et il procède par étapes, pour arriver,
finalement, à la conclusion qu'il voulait au début, et c'est
là-dessus que j'aimerais bien entendre des organismes de consommation,
telle que la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec, qu'elle vienne nous exprimer son point de vue
là-dessus, parce que c'est vers là que ça s'en va. Et tout
ça pour revenir sur la dynamique régionale, parce que le jour
où ces choses se passeront en ville, eh bien, les gens des
régions vont venir magasiner en ville, c'est aussi simple que
ça.
Le député de Laviolette donnait des exemples quant
à la mobilité, là facilité de mobilité des
gens en région. Je peux vous en donner des exemples, moi aussi. Des gens
qui partent de Chibougamau pour venir voir une "game" de hockey au Forum de
Montréal, puis qui retournent après la veillée, ça
leur fait seize heures de rdUtë aller-retour pour aller voir une partie de
hockey. Eh bien, savez-vous qu'il y en a pas mal plus que vous ne pensez qui le
font?
Une voix: C'est vrai.
M. Claveau: On n'a jamais eu peur de la routé, ça
ne nous dérange pas pantoute. Moi, personnellement, je conduis à
peu près 80 000 kilomètres par année en dehors du temps
d'avion que je fais. Et je le fais en dehors de mes heures normales de travail,
de soir, de nuit et sur fin de semaine presque exclusivement. Mais je fais 80
000 kilomètres par année avec ma voiture. Pensez-vous que je suis
une exception? Allez donc! Il y a plein de gens qui sont capables de le faire.
Ce n'est pas un problème, vous savez, de partir du Lac-Saint-Jean pour
venir magasiner à Québec un beau dimanche après-midi. Il
n'y a rien là pour quelqu'un qui est habitué de vivre en
région. Ce n'est pas un problème de partir de Rimouski ou d'Amqui
pour venir faire ses achats à Québec tout en profitant d'une fin
de semaine de récréation, puis d'en profiter, peut-être,
pour aller se promener un peu sur les Plaines ou aller prendre une bière
dans le Vieux-Québec. C'est juste une activité
récréative. C'est clair que dans ce sens-là, si on ouvre
là-dessus, c'est ça qui va se passer. Et moi, j'aimerais bien
entendre les associations de consommateurs venir nous parler là-dessus.
Parce que c'est ta dynamique que le ministre est en train de mettre en place
et, s'il n'en est pas conscient, c'est parce qu'il n'a pas voulu s'ouvrir les
yeux jusqu'à maintenant pour le comprendre.
Je vais vous donner juste un petit exemple: Au Saguenay-Lac-Saint-Jean -
région que je connais bien pour y être né - il y a eu tout
un débat autour d'une autoroute, puis au moment où on se parle,
elle est la plus courte autoroute au Québec sûrement, et
peut-être même bien plus grand que le Québec. Il y a
à peu près deux kilomètres d'autoroute de construits,
parce qu'une fois qu'on a réussi à s'entendre sur les
modalités le gouvernement n'avait plus d'argent pour aller de l'avant.
Ça, ça ressemble à certaines promesses qui nous ont
été faites. En tout cas... Toujours est-il que l'autoroute
n'avance pas. Mais pour arriver à s'entendre, l'autoroute Alma-La Baie,
pour arriver à une entente régionale, savez-vous qu'il a fallu un
peu d'interventions musclées? Au niveau régional, on est
habitués de se parier dans le pif, les gens l'ont fait et puis,
finalement, ils sont arrivés à une entente régionale. Mais
quel était un des principaux arguments contre la construction de
l'autoroute Alma-La Baie? C'est que les commerçants du haut du lac,
qu'on appelle, les gens du secteur Saint-Félicien, Dolbeau, Roberval,
disaient: II n'est absolument pas question d'avoir une autoroute pour aller
à Chicoutimi, on ne sera plus capables de rien vendre chez nous.
Ça va prendre a peine une heure pour aller à Chicoutimi s'il y a
une autoroute à partir d'Alma. Alors, il y a eu une levée de
boucliers de tous les commerçants de ce secteur-là, qu'on appelle
le secteur du haut du lac, communément, contre l'autoroute parce qu'on
voyait se vider les activités commerciales, se drainer
littéralement toute activité commerciale vers le Haut-Saguenay,
vers Chicoutimi, Jonquière, ville de La Baie. Et même la ville
d'Alma, qui est, au niveau régional, relativement importante - ce n'est
peut-être pas la ville de Québec, mais ça repré-
sente un pôle important au niveau régional au
Lac-Saint-Jean - avait beaucoup de craintes au début de voir se
développer une autoroute pour aller à Chicoutimi parce que les
commerçants d'Alma disaient: Sacrebleu! toutes les activités
commerciales vont se déplacer vers Chicoutimi! C'est ça, la
dynamique. Imaginez-vous maintenant... Bon, là-dessus, on a
réussi à s'entendre, comme je le disais. Finalement, lorsque tout
le monde a bien compris l'importance de l'autoroute, là, c'est le
gouvernement qui ne voulait plus y aller parce que, comme par hasard, il n'y
avait plus d'argent au Conseil du trésor, alors qu'on I avait promis,
pourtant, avec emphase, avec tambour et trompette.
Toujours est-il que c'est une dynamique que l'on connaît bien en
région. C'est une dynamique que les consommateurs régionaux
connaissent bien, et c'est une dynamique que les commerçants en
région connaissent bien aussi. Si on permet aux centres urbains de
pouvoir donner des activités commerciales en fin de semaine, en dehors
des heures normales d'affaires, c'est vers ça qu'on s'enligne. C'est le
genre de développement régional que le ministre est en train de
mettre en place. Est-ce qu'il a consulté sa collègue du
Développement régional là-dessus? J'en doute. Parce que
probablement qu'elle lui aurait fait comprendre, probablement qu'elle serait
intervenue en disant: Écoutez, cher collègue, vous ne pouvez
toujours pas me faire ça! Mais il a probablement oublié de la
consulter. Ce qui fait que, de toute évidence, un projet de loi comme
celui-là n'a aucun intérêt, ni pour les commerçants,
ni pour les consommateurs des régions du Québec. Les seuls
endroits où il peut avoir un certain intérêt, c'est dans
les agglomérations urbaines de Québec et de Montréal,
là où il y a des commerçants, là où il y a
des entreprises qui voient la possibilité d'utiliser certaines clauses
de cette loi-là pour drainer le commerce des régions vers leur
pôle d'attraction qu'ils créeront. À partir d'une
activité, je dirais, centrifuge, autour du commerce d'alimentation, on
va finir par générer une nouvelle activité
économique pour les centres urbains qui va s'appeler la vente au
détail dans tout en dehors des heures normales d'affaires, aux
dépens de toutes les régions du Québec.
Moi, je peux vous affirmer qu'il n'y a pas un seul commerçant de
ma région qui est intéressé par ça. Parce que, de
toute façon, la façon dont ça va actuellement, tout le
monde s'entend, tout le monde fait son affaire, et même si on ouvrait 25
heures de plus par semaine, on ne vendra pas un rond de plus, et on n'ira pas
chercher un client de plus. C'est clair. Ça va simplement leur
coûter plus cher. Mais, par contre, si la loi existe et puis qu'il y a un
beau fin-fin qui décide d'essayer de couper le cou des autres, lui, en
ouvrant le dimanche ou en ouvrant en dehors des heures normales des affaires en
se prévalant de certaines clauses de la loi, eh bien là, les
autres vont être obligés de suivre tant bien que mal, puis tout le
monde Va finir par crever, ou du moins il y en a un qUl va passer au travers,
ça va être celui qui a les reins les plus forts. Et il va
sûrement le faire au détriment des consommateurs. Le ministre
lui-même nous disait, lors de la consultation publique -
j'écoutais son collègue de Richelieu qui nous disait qu'on le
faisait - qu'on avait déposé ce projet de loi là en
fonction de l'équité entre les commerces. Eh bien,
l'équité entre les commerces, ça va se résumer en
bout de piste par une situation de monopole de certains commerces en
région qui vont réussir, en utilisant certaines clauses de la
loi, à casser les reins de tout le monde. Lorsqu'ils seront tout seuls,
eh bien, les consommateurs iront se faire voir, tout simplement, parce qu'ils
devront payer ce qu'on leur imposera comme prix. Ils n'auront plus le choix. Et
le ministre le sait très bien.
Vous savez, les activités de "dumping", dans le domaine du
commerce, ça existe. Et quand les entreprises commerciales, des grandes
surfaces, décident d'entrer dans un secteur, ça ne les gêne
pas, généralement, de mettre les prix assez bas pour faire en
sorte que les petits concurrents établis depuis longtemps dans le milieu
ne puissent arriver. Parce que n'importe quelle chaîne de grandes
surfaces peut se permettre d'avoir un magasin ou deux déficitaire
pendant quelques mois, pour, après ça, le jour où ils
seront tout seuls dans le milieu, se renflouer relativement aisément.
Ça s'est déjà vu. Il n'y a rien de secret
là-dedans, et ça va se voir encore. Le ministre est en train de
leur ouvrir les portes pour que ça se fasse, à toutes fins
pratiques, en pleine lumière du jour, sous le soleil du samedi et du
dimanche. C'est ça que le ministre est en train de faire. Et il
prétend qu'il le fait au nom des besoins du consommateur.
Je veux bien croire les prétentions du ministre, à la
limite, s'il est capable de défaire les arguments qu'on lui donne, mais
j'aimerais mieux me fier aux associations de consommateurs pour avoir leur
point de vue final sur le projet de loi en question, pas un point de vue qui a
été exprimé il y a trois mois ou il y a six mois en
fonction d'un rapport qui avait été produit et dont on ne
retrouve nulle trace dans le projet de loi qu'on a sur la table, mais en
fonction de ce que le ministre nous dépose actuellement, la
troisième version qui, espérons-le, ne sera pas la finale,
d'ailleurs. C'est ça que j'aimerais entendre, et je suis certain que
tous les membres de la commission sont anxieux, ont intérêt
à entendre vite les associations de consommateurs, et surtout la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec puisqu'elle a déjà fait une excellente
présentation devant la commission parlementaire et qu'elle
représente suffisamment de consommateurs au Québec pour
être capable d'exprimer un point de vue clair sur les
intérêts de l'ensemble des consommateurs du
Québec. Je ne parte pas, encore une fois, d'une élite
sociale, d'une catégorie marginale de consommateurs qui aimeraient bien
voir leurs activités de luxe être jumelées à des
lois qui leur permettent de les faire de la façon qui soit la plus
agréable pour eux. Je ne suis pas convaincu, et je suis certain que les
associations qui représentent l'ensemble des consommateurs du
Québec ne sont pas convaincues elles non plus que l'on doive faire des
lois en utilisant les consommateurs, mais sur la base uniquement d'une
consommation de luxe. Ce n'est pas non plus, je pense, dans
l'intérêt du ministre d'agir de cette façon-là.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député d'Ungava. M. le député de
Nicolet-Yamaska
M. Maurice Richard
M. Richard: M. le Président, on fait une motion pour
demander à la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec de venir s'exprimer en commission. Ce que
j'aimerais faire par le biais de cette motion-là à la suite de
l'intervention du député d'Ungava et comme information, surtout,
outre les membres de la commission, pour les gens, monsieur et madame qui sont
ici, qui ont assisté à cette commission...
En fait, il y a deux méthodes qui peuvent être
appliquées. Je ne pense pas déroger; je l'espère, M. le
Président, vous me le direz. Il y a deux méthodes. Là,
vous voyez l'application de la méthode des motions, c'est-à-dire
une foule de motions qui vont possiblement s'échelonner, que je
respecte, c'est une méthode qui est tout à fait permise, il n'y a
aucun problème à ce niveau-là, c'est prévu dans le
règlement, et on pourrait en présenter 7, 8, 10, 15, autant qu'on
veut. La personne qui présente la motion parte une demi-heure et chaque
personne peut intervenir pendant dix minutes, incluant la partie
ministérielle. Quand c'est terminé, on vote et,
inéluctablement - et ça, ça fait partie, aussi, du
système démocratique dans lequel nous vivons - la motion est
battue, elle est défaite et on présente une autre motion. Il y a
cette façon-là, et c'est la façon qu'on adopte et qui est
en marche actuellement ce soir. Je me mets dans la peau des personnes qui sont
là, elles doivent dire: Qu'est-ce que c'est que cette emmanchure de
motion là, et là, vous ne touchez jamais l'article 1. C'est
toujours ça.
La deuxième méthode qui peut être aussi lente, c'est
d'arriver à l'article 1 et commencer à y aller paragraphe par
paragraphe, avec la môme méthode. Cette fois-là: amendement
au premier paragraphe de l'article 1 avec, encore là, une période
de présentation de l'amendement, chacun intervient sur l'amendement, il
y a un vote, c'est défait. C'est la même mécanique, sauf
que la deuxième méthode a au moins un avantage, c'est que vous
entendez parler de ce qu'est directement la loi, article par article.
Le but de cette commission ici - je termine avec ça, M. le
Président - c'est de regarder la loi article par article parce que c'est
là qu'on va savoir de quelle façon on va avoir à vivre
avec après. Je tenais à faire ce commentaire-là parce que
je me mettais dans la peau des gens qui sont là, peut-être qu'ils
pourraient dire, et je respecte ça: Qu'est-ce que c'est que cette
emmanchure de motion là? Où est-ce qu'on s'en va avec ça?
C'est ça. C'est une méthode qui étire le temps, on a le
droit de faire ça. Le parti ministériel, qui était dans
l'Opposition auparavant, faisait ce truc-là et, apparemment, il
était très habile à faire le même truc.
Il n'en demeure pas moins que le mandat de notre commission est
d'étudier le projet de loi article par article et, par la suite, de
l'amener à la phase finale. Je tenais à le spécifier parce
que vous n'êtes pas des gens qui viennent continuellement et
régulièrement ici à l'Assemblée - je ne vous le
souhaite pas, remarquez bien - pour voir notre méthode de
"procédurite". Mais je pense qu'il était correct de ma part d'au
moins vous dire ce qu'on est en train de vivre actuellement,
indépendamment du fond de la loi qu'on a devant nous, la loi 75. (21 h
45)
M. Jolivet: M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Vous comprendrez très bien que je vais
simplement faire la contrepartie normale en cette commission de ce que le
député de Nicolet-Yamaska vient de dire. Ça ne prendra pas
de mon temps parce qu'il n'a pas parlé de la motion en cours.
Simplement pour dire qu'il y a une autre façon qu'il a
oubliée. Je pense que le député de Nicolet a vraiment
oublié ça. C'est que le ministre se range du côté de
ceux qui disent qu'on devrait faire un seul amendement, c'est de dire: Quatre
personnes en tout temps. Là, non seulement on passerait de l'article 1
en montant, mais il y a une forte chance qu'on ait le projet de loi dès
demain matin tout obtenu, s'il nous donnait ça. Je pense que ça,
c'est important aussi, M. le Président, de bien l'indiquer.
Notre travail, comme membres de l'Opposition, c'est d'essayer de faire
comprendre au ministre. Je pense que les gens qui sont ici dans cette salle ont
été mis au courant de ces moyens que nous utilisons. Ce sont les
seuls moyens que nous ayons à notre disposition. Nous l'étudions
comme nous avons le droit de le faire. Nous allons continuer à le faire.
Nous aurons d'ailleurs d'autres formes de motions que celle-là. Et
après ça, on passera à l'article 1 quand on aura
déterminé que c'est suffisant. Mais une chose est
certaine, c'est qu'on aura l'occasion d'y arriver, à l'article 1.
Et là, on verra vraiment où couche le gouvernement, à
savoir: Prend-il pour les petits ou pour les gros?
Le Président (M. Bélanger): Ces explications
étant données, écoutez, on n'a pas à justifier nos
procédures. Le parlementarisme a ses raisons que les non-initiés
peuvent trouver bizarres mais elles sont comme ça. Je pense qu'on doit
vivre avec. Je pense que c'est jouer dans des règles de "gentlemanship",
de "gentlewomanship too". Ha, ha, ha!
Alors, compte tenu de cela, Mme la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Effectivement, je
pense que l'objectif et l'intérêt des gens de l'Opposition sont
très clairs. Cet objectif et cet intérêt ne sont pas
d'embêter le gouvernement et ne sont pas de faire traîner le
travail que nous faisons ici en commission, mais c'est de nous assurer que
l'éclairage a été complètement fait sur le projet
de loi qui est devant nous - et je le rappelle, M. le Président -
à peine depuis trois semaines, mettons quatre semaines. Il va à
l'encontre d'une majorité des représentants et des
représentantes des groupes qui sont venus en commission parlementaire.
Donc, à la suite de sa présentation et avant sa discussion, nous
souhaitons entendre les personnes qui sont venues une première fois, qui
ont pris la peine de nous présenter des mémoires fouilles, de
consulter leurs membres, qui ne se sont pas fait entendre puisque les
résultats que nous obtenons avec le projet de loi qui est devant nous ne
correspondent pas à ce qu'elles demandaient.
Une voix: Je comprends.
Mme Marois: Donc, l'objectif que nous avons, c'est de nous
assurer que les personnes qui se sont fait entendre ont bien fait valoir leurs
arguments et peuvent peut-être nous apporter des éclairages
nouveaux. Et là, M. le Président, je pense que le ministre va
devoir nous répondre sur la motion qui est devant nous actuellement
parce qu'il a été le premier, à l'Assemblée
nationale comme devant cette commission, à blâmer l'Opposition de
ne pas être sensible aux besoins des consommateurs et des consommatrices.
Parce que nous autres, on regardait juste du côté des travailleurs
et des travailleuses et des marchands, petits dépanneurs,
indépendants, propriétaires de leur entreprise. On était
un peu obtus. On regardait juste de ce côté-là. On ne se
préoccupait pas - et le ministre ne peut pas me contredire - tellement,
nous disait-il... Il disait ça avec élégance, d'allleurs.
C'était très bien dit. On ne se préoc- cupait pas, nous
disait-il, des besoins des consommateurs et des consommatrices et on ne les
entendait pas. C'était un point de vue qu'on défendait mal devant
les membres de la commission. Alors là, M. le Président, on va
s'entendre pour qu'il y ait un peu de cohérence de la part du ministre
responsable du projet de loi.
La deuxième motion que nous présentons ce soir, c'est
d'entendre la Fédération nationale des associations de
consommateurs et de consommatrices du Québec. Le ministre soulève
une question, fait à peine un blâme déguisé, et
à cela, immédiatement, on répond. On dit: Oui, vous pensez
qu'on ne s'est pas assez préoccupés de leur point de vue, qu'on
l'a mal défendu? Alors, on va les entendre.
Une voix: C'est ça.
Mme Marois: Ils vont le défendre eux-mêmes. On va se
donner la chance qu'ils nous présentent leur point de vue. Parce que,
vous savez, ça a été comme un peu alambiqué, tout
au long de la commission, les associations de consommateurs et de
consommatrices. On s'est rendu compte qu'il y en avait un groupe qui
était avec la Coalition pour l'ouverture le dimanche. Et puis, il y en
avait un autre groupe qui était avec la Coalition contre l'ouverture des
commerces le dimanche. Et ça, évidemment, c'est venu un peu
rendre ambiguës les positions des uns et des autres. Vous savez, il y a
une vieille maxime qui dit: "Diviser pour régner. " Ça devait
plaire, à ce moment-là, de dire: "Ah! Mais il y en a un groupe
qui nous dit qu'il est d'accord pour l'ouverture, alors qu'il y en a un autre
groupe qui est pourtant venu nous dire très clairement que eux
partageaient un point de vue différent. Et dans le fond, ce qu'on veut
entendre, les personnes qu'on veut entendre, ce sont des représentants
et des représentantes des consommateurs et des consommatrices.
Et pour rassurer le ministre, là, la Fédération
nationale des associations de consommateurs du Québec, ce n'est pas
rien, ce n'est pas un ou deux petits organismes, là. C'est les ACEF. Le
ministre doit savoir c'est quoi, les ACEF. C'est les associations
coopératives d'économie familiale, qui s'occupent de
défense, de protection du consommateur, qui aident le consommateur
à se sortir du merdier dans lequel il se retrouve parfois parce qu'il a
de la difficulté à accrocher les deux bouts, qui font des
représentations auprès du gouvernement, auprès des
institutions pour qu'on tienne compte des besoins des consommateurs et des
consommatrices. Donc, on a l'ACEF de Québec, l'ACEF de Granby, l'ACEF de
l'Estrie, l'ACEF de la rive-sud de Montréal, l'Association pour la
protection des intérêts des consommateurs de la Côte-Nord,
Auto-Psy, CRIC de Port-Cartier, CRIC de Sept-lles - et ce n'est pas le Centre
de recherche industrielle - Mouve-ment pour l'agriculture biologique et
Service
d'aide aux consommateurs de Sorel. Comme si ce n'était pas
suffisant, M. le Président.
Alors, nous, ce qu'on demande, ce que les membres de la commission
demandent, ce que mon collègue d'Ungava a déposé comme
motion, c'est une motion essentiellement en réponse à la crainte
du ministre. On était des mauvais défenseurs, de ce
côté-ci, des besoins des consommateurs et des consommatrices. On
les oubliait, dans notre point de vue. Bon! Alors, vous me permettrez, M. le
Président... Parce que le ministre ne semble pas empressé de
répondre très rapidement positivement à une demande que
lui-même nous a faite. On va regarder ce qu'elles ont dit, les
associations de consommateurs, les ACEF. On a dit: Vous savez, dans tout ce
débat sur l'ouverture des commerces le dimanche - et je vais citer au
texte - on vient de prendre tout un raccourci; on semble. oublier que le
consommateur est un être humain, avec des besoins, et vivant en
société. Alors ça, c'est ce que les ACEF nous ont dit en
ce qui concerne les consommateurs. Et elles nous ont dit un certain nombre
d'autres choses qu'on rapporte ici, d'ailleurs, de façon absolument
aberrante, quand on y pense, parce qu'on trafique les points de vue qu'on a
défendus devant la commission, on les manipule, on joue avec les
opinions.
On nous a dit... Tous les intervenants, à peu près, du
côté gouvernemental sont venus nous dire: Écoutez, les
femmes sont sur le marché du travail, les femmes ont besoin, donc, de
plus d'heures pour avoir accès aux commerces, au magasinage. Il manque
du temps, il y a des chefs de famille monoparentale en nombre beaucoup plus
élevé, M. le Président. Ces personnes-là se
retrouvent seules avec des responsablités familiales. Elles doivent
pouvoir avoir accès à un plus grand nombre d'heures de
consommation. Alors là, on va essayer d'enlever les illusions puis les
analyses un peu tout de travers qu'on fait. Toujours les ACEF... On ne peut pas
prétendre qu'elles ne représentent pas les consommateurs et les
consommatrices: 22, 8 % de toute la main-d'?uvre féminine, en 1988,
travaillait à temps partiel et le taux de chômage féminin
est généralement supérieur au taux de chômage
masculin. Alors, ce qu'elles nous disent, là, c'est qu'elles ont
déjà - malheureusement, là, dans certains cas - plus de
temps pour aller consommer, pour aller acheter les biens nécessaires
pour répondre à leurs besoins. Puis là, la
monoparentaiité, j'ai servi cet argument-là sans arrêt aux
membres de la commission lorsqu'on a eu le débat. Puis, ils me
reviennent encore avec ça comme s'ils n'avaient pas entendu. Je commence
à avoir des problèmes. Je me dis: On va faire venir la
Fédération, elle va peut-être leur expliquer un peu mieux
que moi la monoparentalité. Bon! Effectivement, il y a 252 805
familles monoparentales au Québec, 95 000 d'entre elles étaient
actives. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire que 62, 4 %
des femmes chefs de famille monoparentale étaient inactives,
c'est-à-dire qu'elles pouvaient fort bien être très
occupées, même occupées à plein temps, à
prendre soin de leurs enfants, à organiser leur maison, mais elles
n'étaient pas sur le marché du travail. Alors, le problème
réel des chefs de famille monoparentale - et j'espère qu'on va
cesser de me rabattre les oreilles en disant n'importe quoi - le
problème, réel des femmes chefs de famille monoparentale, c'est
qu'elles sont trop pauvres pour aller s'acheter ce dont elles ont besoin pour
vivre. C'est pas mal plus ça leur problème que d'avoir plus de
temps pour consommer.
Cela étant dit, le président m'indique que mon temps est
terminé. J'imagine que devant l'empressement que nous mettons à
répondre au voeu du ministre, d'entendre des associations de
consommateurs et de consommatrices, il sera, bien sûr, très
favorable à notre motion, et il votera avec nous pour que nous invitions
ces gens à venir témoigner non pas sur un document qui
était une analyse de situation, mais sur un projet de loi qui aura des
conséquences sur les consommateurs et les consommatrices, M. le
Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie Mme la
députée de Taillon. Du côté ministériel, pas
d'intervenant? Bien. M. le député de Pointe aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, je souscris
entièrement à la proposition que la députée de
Taillon a faite d'entendre la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec. Il est évident, M. le
Président, que tout au long des audiences qui ont eu lieu, on a entendu
les grandes corporations, la main sur le coeur, dire que les consommateurs
voulaient une libéralisation des heures d'ouverture des commerces. Mais,
dans le fond, il s'agit de voir si on perçoit les consommateurs comme un
concept, un outil de marketing ou des personnes qui pensent, qui ont des
intérêts et qui se mandatent des organisations pour parler en leur
nom. De notre côté, l'Opposition officielle, on pense qu'il existe
des organisations de consommateurs qui font entendre la voix de ces
personnes-là et, en général ces organisations-là
étaient hostiles à ce qui était proposé. Autrement
dit, M. le Président, le problème n'est pas tellement que les
consommateurs voudraient consommer davantage à certaines heures, c'est
plutôt que les lois de la concurrence amènent certaines grandes
corporations à vouloir élargir leur marché en
piétinant des entreprises plus petites qui ont eu pour
caractéristique de toujours respecter la loi telle qu'elle
était.
Donc, ce n'est pas tellement qu'on veut permettre en soi aux autres de
consommer autrement, de consommer davantage, de pouvoir
s'approvisionner à telle ou telle heure, mais c'est qu'on Veuille
s'approprier des marchés et se servir de sa force pour ouvrir plus, pour
pouvoir davantage se disputer cette partie du marché. Autrement dit, M.
le Président, il s'agit de savoir: les consommateurs existent-ils avec
leurs besoins et leurs Intérêts ou constituent-ils des machines
à consommer, constituent-ils des marchés? Et je pense qu'à
cet égard-là, c'est très fondamental d'entendre la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec. Comme on se prépare à chambarder tout un domaine
où l'État doit jouer un rôle régulateur, où
l'État doit intervenir dans l'intérêt public, je pense
qu'il ne faut pas entendre juste les commerçants, mais entendre ceux
pour lesquels le commerce, théoriquement, existe. Et ça, je
pense, M. le Président, que c'est en entendant cette
Fédération-là, notamment, que nous pourrons faire un peu
la lumière sur ce qui est requis par la situation, faire la
lumière, à savoir quels intérêts le projet de loi
qui est devant nous défend. (22 heures)
De fait, c'est un projet qui vise à favoriser certaines
entreprises, à favoriser certains intérêts particuliers,
plutôt que de favoriser l'intérêt général. Et
il ne faut pas oublier non plus, puisqu'on parie de la commodité pour
les consommateurs, que les travailleuses et travailleurs du secteur du commerce
sont aussi des consommateurs et que si on les oblige à travailler le
dimanche, c'est un temps qu'ils ne pourront pas consacrer à leurs
loisirs. Et eux autres aussi, on doit tenir compte de leurs
intérêts. Dans ce sens-là, je pense que le ministre doit
bouger un peu, doit indiquer qu'il est prêt à entendre et à
retenir des suggestions. C'est une occasion, je pense, qu'on lui fournit de
préconiser d'entendre la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec.
Mon collègue de Laviolette l'a souligné, il ne manquerait
pas énormément de choses pour que le climat se détende. Il
ne manquerait pas énormément de choses pour que les personnes qui
sont ici dans les salles, qui sont très inquiètes de l'avenir de
leur secteur d'activité, advenant l'adoption de la loi, voient le projet
de loi d'un meilleur oeil. Il faudrait notamment, et le député de
Laviolette a insisté là-dessus, introduire la notion de quatre au
lieu de cinq, et que ce soit en tout temps, pour se rapprocher de
l'équilibre qui existait en vertu de l'ancienne loi. Et ça, je
pense qu'une suggestion de cette nature-là, on pourrait la tester, on
pourrait la sonder auprès de la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec. Parce que, en fait, il y a un
nombre restreint de personnes qui ont demandé au gouvernement de changer
la loi dans le sens de leurs intérêts, et il y a un nombre
important de personnes et d'organisations qui s'élèvent contre
ces changements-là à la loi. Donc, il faut entendre le plus grand
nombre, et si le ministre les a entendus, on n'est pas sûr qu'il les ait
compris. Non pas que le ministre n'a pas une très grande
capacité de comprendre, mais on n'est pas sûr, nous de
l'Opposition officielle, que le ministre a senti quels intérêts
ces gens-là défendaient et on n'est pas sûr qu'il a bien
compris les chambardements que son projet de loi, tel qu'il est fait, risque
d'apporter dans la vie des gens.
Dans ce sens-là, nous, on dit: Avant d'imposer, avant de
contraindre, avant de dicter, écoutez donc les intéressés
et cherchez donc avec eux un compromis, des manières que cette
loi-là soit un facteur d'accord plutôt qu'un sujet de dissension.
Ce gouvernement qui a passé six jours à Ottawa à danser
sur les tables pour que le Canada anglais accepte de dire que le Québec
est une société distincte, Dieu qu'il n'est pas patient! Dieu
qu'il n'est pas à l'écoute quand il s'agit des
Québécois eux-mêmes! Tant de mansuétude, tant de
précautions lorsqu'il s'agit du Canada anglais et si peu de
considération pour les gens du Québec. Pourquoi avoir tant
rampé pour pouvoir chanter "ô Canada" à la
télévision, et là ne pas être prêt à
faire un petit effort de conciliation...
Le Président (M. Bélanger): Juste pour se rappeler
que la Saint-Jean-Baptiste, c'est le 24 juin.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Marois: On va s'y rendre, lentement mais sûrement.
M. Bourdon: ...envers les Québécois. Donc, M. le
Président, je pense que, quand ils ont la patience de refuser même
de faire des demandes pour s'entendre avec le Canada anglais, qu'ils essaient
donc d'entendre la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec. Parlons-nous donc entre nous autres au lieu de
perdre notre temps ailleurs.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Le prochain intervenant
sera Mme la députée de Verchères.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Je viens de faire une
découverte que je trouve des plus rafraîchissantes. Je vous dirai
honnêtement que lorsque M. le ministre a dit en Chambre qu'une de ses
priorités, c'était le besoin réel des consommateurs,
j'étais convaincue que les consommateurs, les associations de
consommateurs favorisaient - et là, je ne peux pas être plus
sincère - l'ouverture le dimanche. Je viens de lire le rapport et je
dois les en féliciter, les valeurs véhiculées dans ce
document sont des
valeurs basées sur l'être humain. Môme s'il est tard,
c'est d'une fraîcheur à lire. Je ne peux pas ne pas les
féliciter, j'en suis renversée.
J'ai aussi un document de la Fédération des associations
coopératives économiques. C'est tellement beau que ça va
vous reposer. C'est tellement humain, c'est tellement basé sur des
valeurs fondamentales que je vais vous le lire. Je pense que ça
résume tellement bien ce qu'on défend avec autant d'acharnement
depuis des heures, pour ne pas dire depuis des jours. Et là, vous
comprendrez mon étonnement lorsque, au lieu de répondre à
leurs demandes, le ministre s'entête, entre guillemets, à
maintenir son projet de loi tel qu'il est. Vous allez peut-être trouver
ça long, mais c'est tellement rafraîchissant que j'ai l'impression
que le temps va passer vite.
Le consommateur, citoyen, a besoin d'un minimum de conformité
sociale pour se maintenir en interrelation avec les autres. Le consommateur, en
dehors de son travail et de son sommeil, est un être social dont les
occasions d'entretenir des liens avec les autres individus et avec la nature
doivent être préservées pour assurer son minimum vital
d'où se dégage le minimum social pour une vie harmonieuse et
sociale. Les liens familiaux pris dans un sens large se nouent en fin de
semaine - 85 % pour les Montréalais - et principalement le dimanche. Ils
se manifestent par le temps libre consacré aux enfants, par la visite
aux parents, aux grands-parents, par le réconfort apporté aux
personnes sur un lit d'hôpital et dans un centre d'accueil et le reste.
Quel est le moment privilégié pour tisser des liens
d'amitié autour d'une partie de cartes, d'un pique-nique, de bonnes
discussions et le reste? À quel moment s'exercent les activités
de décompression psychologique, activités de plein air,
assistance à des spectacles ou expositions, activités
culturelles, de loisir suite à une semaine de labeur? Quand nous
arrêtons-nous, surtout, pour faire le plein de ressourcement spirituel?
La réponse va de soi, c'est le dimanche que notre culture et notre
tradition ont choisi pour exercer ces activités.
Quand je parle de spirituel, ça ne veut pas dire que l'on
retourne à des manières de faire ou à des habitudes
rétrogrades. Spirituel, c'est dans le sens large. Ça en a fait
sourire quelques-uns, ils auraient peut-être intérêt
à aller voir dans le dictionnaire le sens de "spirituel".
Une voix: II passe son temps à rire, de toute
façon.
Mme Dupuis: Le minimum de conformité sociale pour une vie
sociale équilibrée exige...
Je pense que le silence serait profitable pour tout le monde.
Peut-être qu'on a perdu, dans notre société, le sens de
l'humain. C'est rafraîchissant, prenez donc le temps de
l'écouter.
Le Président (M. Richard): Pardon, madame, est-ce que
c'est dans votre texte ou... Mme Dupuis: Non. Des voix: Ha, ha,
ha! Mme Dupuis: Je sors du texte.
Mme Marois: Écoutez, M. le Président qui
n'écoutez pas notre collègue.
Le Président (M. Richard): C'était pour être
certain que c'était dans ce sens-là.
Mme Dupuis: Je suis sortie du texte.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole,
madame.
Mme Dupuis: Je pense que tout le monde s'était rendu
compte que j'étais sortie du texte.
Le Président (M. Richard): Vous voyez, je vous
écoutais vraiment.
M. Lemire: C'est rafraîchissant.
Mme Dupuis: Oui? Bon, bien, écoute-le!
Le minimum de conformité sociale, pour une vie sociale
équilibrée, exige le maintien d'une journée par semaine
exempte d'activités de travail et de commerce pour le plus grand nombre
possible de Québécois. Le véritable enjeu d'une bataille
pour la conquête des marchés...
C'est un peu moins beau mais c'est très réaliste, ce
bout-là: Puisque le pouvoir d'achat des consommateurs a diminué
depuis 10 ans, autant sous l'angle des revenus personnels que des revenus
familiaux, que leur pouvoir d'emprunt approche la cote d'alerte - 30 % du
revenu net au-delà duquel les banques refusent de prêter -et que
le taux d'épargne a atteint le creux inquiétant de 6 %, il est
totalement erroné de prétendre à une augmentation de
volume des ventes, donc des profits, suite à une libéralisation
des heures d'ouverture.
Il ne faut pas penser que ça va être plus payant, en bout
de ligne. Les gens n'achèteront pas plus.
Cette situation nous amène à conclure à une
augmentation Inévitable des prix des produits, à une concurrence
acharnée entre les grandes chaînes et les détaillants
indépendants. Enfin, les détaillants indépendants, au nom
d'une concurrence loyale - j'ai sauté un petit bout, les sondages, si
vous voulez - les travailleurs en général, au nom du maintien de
leurs conditions de travail et de vie et les associations de consommateurs, 31
sur 36, devant l'accentualisa-tion de la commercialisation de la vie s'opposent
à l'ouverture des magasins le dimanche. Et c'est sans parler des impacts
sur les autres secteurs d'activité et de leurs coûts sociaux. Il
semble
bien que les seuls, parmi les acteurs précités, qui ont un
intérêt à la libéralisation des heures d'ouverture
soient les grandes chaînes, les magasins corporatifs qui auront les reins
assez solides pour remporter la bataille de l'accaparement des marchés.
Les conséquences à moyen et à long terme sur les individus
et la vie en société: La technique de marketing, appelée
apprentissage passif, est à la base de l'amalgame magasinage -
activités culturelles et de loisir. Amener les gens à se divertir
en magasinant, c'est le gage du succès de la vente le dimanche, les
études américaines le prouvent.
Je vois que des collègues sont un petit peu moins... Auraient-ils
peur de se faire convaincre, par hasard?
Une voix:...
Mme Dupuis: Son application, par contre - ça, ce
n'était pas dans le texte, M. le Président.
Une voix: Ha, ha, ha!
Mme Dupuis: Son application, par contre, entraînerait une
plus grande commercialisation de la vie et serait à l'opposé du
développement d'une consommation rationnelle et réfléchie
de la part des consommateurs. Elle viendrait saper une bonne partie du travail
d'éducation, consultations budgétaires, cours sur le budget,
prévention et le reste, des associations de consommateurs au
Québec. Le magasinage le dimanche, avec son flot de publicité, de
rabais et autres techniques de marketing, accentuerait le message incessant de
notre société de consommation que le bonheur vient de la
consommation des objets. Il n'y aurait pas de contrepartie pour nous rappeler
que les personnes s'épanouissent davantage dans leurs relations avec les
autres (parents-enfants-amis), dans leurs contacts avec la nature, à
travers des loisirs et des activités culturelles.
Le commerce dominical ferait compétition aux visiteurs dans les
hôpitaux, dans les centres d'accueil et le reste, aggravant ainsi
l'isolement de ces personnes. Il servirait aussi de masque à une
véritable politique du loisir et d'activités culturelles
enrichissantes souhaitées par les citoyens. À long terme, les
débridements des heures d'ouverture des magasins laissent
présager un appauvrissement du tissu social au Québec, une
aggravation des problèmes sociaux et non pas une vie plus harmonieuse en
société. Si cela devait arriver, nous aurions à en payer
le prix.
M. le Président, ces quelques passages, je pense, sont assez
éloquents et devraient nous convaincre qu'il serait peut-être
intéressant de les écouter. (22 h 15)
Le Président (M. Richard): Merci, madame...
Mme Dupuis: Alors, inutile de vous dire que j'appuie cette motion
et j'espère que M. le ministre acceptera.
Le Président (M. Richard): Merci, Mme la
députée de Verchères, Mme Dupuis. Maintenant est-ce qu'il
y a une intervention de la partie ministérielle? Non? Mme la
députée de Chicou-timi, Mme Blackburn, vous avez la parole.
Mme Jeanne L Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Je voudrais appuyer
la motion qui est sur la table, à l'effet que nous entendions
l'Association des consommateurs du Québec, c'est-à-dire la
Fédération nationale des associations de consommateurs. La
Fédération des ACEF du Québec nous présente un
mémoire très, très dense, très articulé et,
je dirais, un des plus complets que j'aie vus sur la question, parce qu'il ne
situe pas, contrairement à ce que j'attendais, la question exclusivement
sous l'angle du relèvement des coûts du produit dû à
un prolongement des heures d'affaires, mais il prend la peine de bien situer
d'abord le consommateur citoyen, ce que . peu de mémoires font,
finalement. Et il rappelle un certain nombre de données - j'allais dire,
en même temps - des règles qui nous semblent
élémentaires mais qui sont importantes à se rappeler
collectivement, parce que notre responsabilité, c'est d'examiner les
effets de cette loi sous divers aspects. Et, à lire et à annoter
le mémoire, je suis à même de constater qu'autant pour
nous, de l'Opposition, que pour les membres du gouvernement il serait important
qu'on puisse prendre connaissance de cet avis et les entendre nous expliquer
comment un tel projet de loi -qui peut avoir sa place, je le rappelle - doit
prendre sa place en même temps qu'il tient compte de la
réalité de ce que j'appelle, moi, le Québec profond,
c'est-à-dire le Québec des familles, le Québec des petites
collectivités, le Québec des grands-parents qu'on va visiter le
dimanche, ce Québec qu'on est en train d'occulter, parce qu'on dit qu'il
faut avoir la possibilité de magasiner le dimanche.
La Fédération des ACEF aborde cette question et, je dois
dire - je le croyais et je le rappelle - qu'elle me surprend et rrie ravit,
parce que je pensais qu'elle limiterait son analyse à la question du
relèvement des coûts des services et des produits. Ils nous
rappellent un certain nombre de choses. D'abord une première, le rapport
est bien divisé, je me permets de le dire parce que je crains que,
malheureusement, le ministre ne veuille pas les entendre, et il serait
intéressant qu'une partie, au moins la structure, de leur mémoire
et quelques éléments se retrouvent dans le Journal des
débats de cette commission. Alors ils partagent leur mémoire
en un certain nombre de chapitres. Il y en a un qui porte sur les
micro-systèmes, les meso-systèmes, l'exo-système et les
macro-systèmes; et ça vous
explique progressivement, partant de l'individu à l'organisation
de la société, aux grandes entreprises, la place que le citoyen
consommateur prend dans chacun de ces systèmes. C'est un des
mémoires, à mon avis, les mieux structurés, par rapport
à cette vision un peu plus intégrée du consommateur dans
toute cette question des modifications des heures d'affaires.
Alors, dans les micro-systèmes, on dit: "Le consommateur et
l'accessibilité aux biens de consommation." Et on poursuit: "Le
consommateur, un être social, un être familial, un être
d'amitié, un être de loisir et de culture, un être spirituel
et un être global. Et le tenant de la libération des heures
d'ouverture, l'argumentation des commerçants qui tireraient un avantage
économique d'une telle mesure". Et ils expliquent pourquoi: "Un
changement de statut économique versus le pouvoir d'achat accru et le
prix des produits, les sondages faits auprès des consommateurs, le prix
des produits, le service aux consommateurs, la création d'emplois. Les
tenants d'une déréglementation; les tenants d'une
réglementation afin de respecter la qualité de vie des
travailleurs; les tenants d'une réglementation afin de tenir compte des
consommateurs; les impacts sur d'autres secteurs d'activité et les
coûts en résultant. L'enjeu fondamental, par un des
macro-systèmes, une bataille pour la conquête des marchés."
Parce que, essentiellement, ce qu'il y a en dessous de ça, n'allez
surtout pas croire que c'est pour nous permettre, à nous, les femmes,
qui cumulons des fois deux ou trois fonctions, c'est-à-dire le travail,
l'entretien ménager... Les femmes qui sont sur le marché du
travail, c'est leur loi. Ce n'est pas pour leur permettre d'avoir accès
plus facilement à des services, c'est essentiellement, mais
essentiellement une question de bataille pour la conquête des
marchés. Et ils continuent: "Les conséquences à moyen et
long terme sur les individus et la vie en société", la conclusion
et un certain nombre de recommandations.
Ce mémoire est l'un des mémoires les plus complets que
j'aie vus, et il serait peut-être Intéressant de rappeler quelques
données. Évidemment, je ne pourrais pas vous le citer au complet,
mais, des fois, des chiffres parlent plus que ne pourraient le faire des pages
complètes de texte parce qu'ils frappent un peu mieux l'imagination.
D'abord, parlant de l'accès aux marchés d'alimentation, on
justifie beaucoup cette demande en raison du fait que les femmes sont de plus
en plus sur le marché du travail, ce qui est vrai. En 1971, il y en
avait 37 %, en 1981, il y en avait 50 % et, en 1987, 54,3 % des femmes
étaient sur le marché du travail.
Que doit-on conclure de ces données? P'abord qu'il y a 22,8 % de
toute la main-d'oeuvre féminine qui travaille à temps partiel,
donc, qui, normalement, a le loisir d'aller faire son marché, mais
celles qui travaillent à plein temps ont finalement beaucoup moins de
temps pour aller magasiner ou aller faire leur marché, et ce n'est pas
elles qui s'en plaignent, curieusement. Est-ce que la demande est venue des
consommateurs? Est-ce que les gens sont descendus dans la rue pour demander
l'ouverture de ces grands marchés d'alimentation, des grandes surfaces?
Non, M. le Président. La pression est venue exclusivement des grands
propriétaires. Répondre à cette demande-là de la
façon qu'on est en train de répondre, c'est avoir une oreille
plus attentive pour quelques-uns qui veulent conquérir des
marchés, pas pour le bien-être de la collectivité
québécoise.
Je le rappelle, il me semble que nos projets de loi, nos projets de
société... Je siège à une commission qui parle de
la taxation scolaire actuellement, on a celui sur la RAAQ, mais dans beaucoup
d'autres projets de loi, on semble avoir complètement abandonné
l'idée de préparer nos projets de loi en fonction du
Québec qui est le nôtre, en fonction de ce que j'appelle le
Québec profond, le Québec des régions, le Québec
des petites collectivités, le Québec des familles, parce que
ça existe encore, ça.
On apprend, toujours dans ce même document, qu'encore
actuellement, bien qu'on n'ait pas cette impression, il est assez
éloquent de constater que seulement 15 % des Montréalais ne se
retrouvent pas avec tous les membres de leur famille Immédiate la fin de
semaine. Pourquoi, tout à coup, faudrait-il leur trouver une occupation
qui s'appellerait: aller faire son marché le dimanche? 15 %. Est-ce
qu'on est en train de faire une loi pour 15 % de ces personnes-là? 45,8
% s'y retrouvent le dimanche, 14,2 % le samedi, et je passe le reste.
Il est encore plus percutant de se rendre compte que lorsque les
Montréalais manifestent - parce qu'on parie souvent de cette loi en
fonction de Montréal - leur préférence pour la
journée consacrée à diverses activités le
magasinage le dimanche reçoit - tenez-vous bien - quel pourcentage
d'adhérents? 2 %. Toutes les autres activités sont
préférées à l'idée du magasinage. Le
dimanche, ils préfèrent aller au cinéma, prendre un bon
repas au restaurant ou rencontrer la famille dans 47 % des cas. C'est
ça, la réalité. Voulez-vous me dire ce qui justifierait
qu'on vienne bouleverser tout un système exclusivement parce que
quelques gros marchands ont décidé qu'ils voulaient avoir la
libéralisation parce que la libéralisation amènerait la
disparition de toute la concurrence qui s'est créée
particulièrement chez les dépanneurs?
Ce mémoire, également, nous rappelle - et j'y reviens -
que l'effet net de ce projet de loi, en prolongeant les heures d'affaires,
surtout dans les petites surfaces qui n'iront pas chercher plus de
bénéfices, mais le même bénéfice
étalé sur un plus grand nombre d'heures, donc une diminution
nette des profits... Là-dessus, il y a des études qui illustrent
de façon on ne peut plus claire les effets chez les petits
propriétai-
res. Mais plus grave encore, s'il m'est permis de l'exprimer, mettons de
côté les petits propriétaires, disons-nous entre nous, un
peu comme semble le faire le ministre, que ce n'est pas important, les petits
propriétaires. De toute façon, on va manger pareil. Ils vont
disparaître. On a déjà eu une guerre entre les grands
marchés d'alimentation, tels Steinberg et Provigo, qui a
entraîné la fermeture de plusieurs petits marchés
d'alimentation, et on s'en est relevés. Je connais le discours
là-dessus.
Mais en admettant que ça ne sera pas grave qu'il y en ait
plusieurs qui meurent, qui fassent faillite là-dedans, l'effet le plus
important, c'est d'accroître le coût des biens de consommation.
Parce qu'il n'est pas vrai qu'on va prolonger indûment les heures
d'affaires pour un même revenu sans que ça n'ait comme
conséquence d'augmenter le prix des produits pour les consommateurs.
M. le Président, je souhaiterais très sincèrement
que le ministre se fasse un peu plus attentif à l'avis de personnes qui
ont sur ces questions, sur les questions que nous discutons comme
législateurs, une connaissance beaucoup plus fine, beaucoup plus
articulée, une réflexion que nous n'avons pas tous eu le temps de
faire mais que nous pourrions faire collectivement, à la lumière
des interventions que pourrait faire en commission parlementaire la
Fédération des ACEF. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi, Mme Blackburn. Maintenant, est-ce qu'il y
a des interventions? Je passerais donc la parole à M. le
député de Laviolette. M. Jolivet, vous avez la parole.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que
je m'attendais que notre cher ami, le député du comté de
Saint-Maurice, intervienne sur un dossier qui concerne les associations de
consommateurs, d'autant plus qu'il serait bon de rappeler à M. le
ministre - je suis sûr qu'il en est bien conscient, et le
député de Saint-Maurice, j'en suis sûr, devrait le savoir
aussi - que le berceau des associations de consommateurs, c'est Shawinigan.
Alors, justement, il me semblait que le député aurait pu prendre
la parole et nous dire que Madeleine Plamondon, qui est responsable dans notre
région avec sa jeune fille et toute l'équipe qu'elle a mise en
place, serait intéressée a nous dire l'impact d'une telle loi,
maintenant qu'elle est déposée, sur ce que les consommateurs
auront à vivre dans le futur.
D'autant plus qu'il y a un nouveau système, le système
Alex, qui est un système qui ne touchera pas seulement le Québec,
la région de Shawinigan-Grand-Mère. Ça va toucher
l'ensemble du Canada, même les États Unis. C'est un système
qui permet justement aux gens de se mettre au courant - au parfum, comme on dit
- de l'ensemble de ce qui se passe dans la consommation et qui permet surtout
d'essayer dedéfendre les consommateurs.
Il me semble que ça aurait été normal qu'elle
puisse avoir la chance - et que le député de Saint-Maurice nous
appuie dans ce sens - de venir ici en commission parlementaire nous expliquer
les raisons pour lesquelles elle juge, avec la Fédération
nationale des associations de consommateurs du Québec, que le projet de
loi tel qu'il est présenté ne répond en aucune
façon aux demandes que la Fédération avait
exprimées.
Mais je dois aussi vous dire que je suis un peu plus choqué que
ça. Je vais juste essayer de me contenir en disant au ministre: M. le
ministre, vous nous avez dit que nous appuyions seulement les travailleurs, ies
commerces, les commerçants et que nous laissions tomber les associations
de consommateurs. Mes collègues ont essayé de prouver l'inverse,
mais le ministre avait quand même dit ça. Ce pourquoi je suis
choqué, c'est parce que les gens qu'il dit qu'on protège, il a
pris la peine, une fois le projet de loi déposé, de les
rencontrer à nouveau. Il les a rencontrés dans son bureau. Il a
fait des téléphones. Il a eu des rencontres, fortuites
même. Quand il s'agit de ceux qu'il nous accuse de ne pas
protéger, il n'a même pas... En tout cas, je ne sais pas s'il l'a
fait ou pas, mais je suppose que ne l'ayant pas dit, il ne les a pas
rencontrés. Ça, je dois vous dire que ça me choque,
d'autant plus qu'il porte des accusations contre des personnes en n'acceptant
pas notre proposition de les rencontrer. Ici, en cette Assemblée, en
cette commission, tous et chacun, on pourrait les questionner, savoir ce qu'ils
pensent du projet de loi tel que déposé.
Je regardais le va-et-vient qu'il y a à la commission. Je
comprends que, dans notre cas, étant moins nombreux, nous sommes
obligés d'aller faire des discours de l'autre côté, parce
qu'il y a la Régie de l'assurance automobile du Québec qui est en
train de se faire siphonner 623 000 000 $, qui sont des taxes directes et
indirectes, d'une certaine façon, parce qu'au lieu de diminuer nos
permis de conduire, au lieu de diminuer nos plaques d'immatriculation, au lieu
de diminuer les coûts d'assurance et de donner de meilleures protections
avec l'argent qu'on a, on vient nous chercher 623 000 000 $, dont on ne sait
même pas ce qu'on va en faire ensuite.
À côté de ça, en dessous, dans une autre
salle, M. le Président, on a un commission parlementaire qui
étudie le projet de loi des municipalités, qui se font encore
flouer, pour permettre aux commissions scolaires d'aller chercher de l'argent
additionnel, des taxes directes et indirectes.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Beauce-Nord.
M. Audet: S'il vous plaît, pourriez-vous rappeler le
député de Laviolette à l'ordre, en vertu de la
pertinence.
M. Jolivet: M. le Président.
M. Audet: Ce qui se passe ailleurs, ça ne nous
préoccupe pas beaucoup pour l'instant. On est ici pour parler des heures
d'affaires.
M. Jolivet: M. le Président, je pourrais aller sur la
question du point d'ordre. Je vais rappeler au député de
Beauce-Nord, qui nous a quittés un bon laps de temps tout à
l'heure et qui n'écoutait pas les gens qui parlaient, que vous nous avez
expliqué justement quelles étaient les procédures que nous
avions prises, et vous nous avez dit qu'on avait totalement raison de le faire.
Alors, il ne peut pas m'empêcher de donner, comme exemple, ce qui se
passe ailleurs. C'est mes affaires de prendre l'argumentation que je veux. Si
le député de Beauce-Nord avait été ici tout
à l'heure, il aurait compris la mise au point qu'on a faite ensemble,
vous et moi, en cette commission. Donc, qu'il ne vienne pas me faire la
leçon.
J'étais en train de dire qu'il y a au niveau de
l'Assemblée nationale d'autres projets de loi où on refuse
d'entendre des gens, de telle sorte que je ne suis pas surpris, mais
choqué, de voir qu'on refuse d'entendre des gens qui ont présente
un mémoire à la commission parlementaire mais qui pourraient
venir en dire davantage, compte tenu que maintenant ils ont devant eux le
projet de loi, tel que proposé par le ministre. Ça, il me semble
que c'est la logique même.
Vous avez, M. le Président, déposé un rapport. Vous
avez rencontré, lors de vos consultations, l'Association des
consommateurs. Vous avez rencontré des consommateurs. Vous avez
rencontré différents groupes qui représentaient les
consommateurs. Vous n'avez pas eu peur de les rencontrer, vous les avez
rencontrés. Vous avez fait un rapport, et je dois vous dire que ce n'est
pas le seul rapport qui va rester sur les tablettes. Il y a le rapport du
député de Beauce-Nord, dit le rapport Audet, qui lui aussi est
encore sur les tablettes, qu'on n'utilise même pas; le ministre
délégué aux Forêts ne fait même pas un iota
des propositions importantes qu'il avait faites.
Alors, à partir de ça, M. le Président, il est donc
important de bien faire comprendre aux gens d'en face que les moyens que nous
avons de les convaincre ne sont pourtant pas des moyens qui sont difficiles
à accepter. Il ne s'agirait pas, M. le Président... Je le
répète pour ceux qui n'étaient pas là tout à
l'heure, pour qu'on évite toute cette discussion-là. On pourrait
dire: On ne les fait pas venir parce qu'on a rejeté le problème.
Mais si les gens étaient dans des rassemblements, c'est parce qu'ils
avaient des choses à dire. Dimanche, la personne qui représentait
les consommateurs nous l'a dit: II est faux de prétendre que nous sommes
pour; nous sommes contre l'ouverture des magasins et des commerces le dimanche.
Le député de Saint-Maurice, qui était présent avec
le député de Trois-Rivières, le sait très bien que
celle qui représentait les consommateurs... Je vais essayer de trouver
son nom, Josée... Un instant, je vais vous donner ça tout de
suite, parce que cette personne l'a dit devant tout le monde que c'était
faux de prétendre qu'il y avait de la part de l'Association des
consommateurs une acceptation du projet... Josée Bédard. Le
député de Saint-Maurice ne me contredira pas. Il ne peut pas,
c'est la réalité. Si ce n'est pas inscrit dans sa mémoire,
ça l'est dans celle de cette femme qui était présente
à cette assemblée, puis on n'aura pas la chance de l'entendre ici
ce soir ou demain nous le dire. Si on répondait à ce qu'elle nous
disait avec tous les autres de la Coalition - mettez "quatre personnes en tout
temps" - nous sommes sûrs que nous arrêterions tout le débat
que nous avons fait jusqu'à maintenant. Nous l'arrêterions
là. Nous l'arrêterions, parce que nous dirions à tout le
monde: Le ministre a enfin compris. Ces gens-là pourraient poser au
ministre les mêmes questions que je lui pose. Pourquoi a-t-il mis cette
clause? Qui lui a demandé une telle clause, qui vient faire en sorte
finalement que les consommateurs vont se sentir de plus en plus attirés
par le commerce le dimanche et ce, dans un contexte tout à fait normal?
La tentation existant, le lèche-vitrines dépasse souvent le
lèche-vitrines pour devenir un achat, et quand on n'a pas les moyens de
se le payer, on va se l'acheter à crédit. Puis ça,
là, Mme Plamondon aurait pu nous expliquer les dangers, justement,
d'acheter à crédit. Le travail immense qu'elle a fait à
travers l'ensemble du Québec pour dire aux gens que, dans un dossier
comme celui-là, il fallait faire attention. Toutes les lois de
protection du consommateur où elle a fait valoir son point de vue, et
où elle nous indiquait qu'il fallait protéger le consommateur,
des fois contre lui-même, compte tenu des circonstances dans lesquelles
il était placé...
Un des dictons qu'on a souvent, M. le Président, dans nos villes
à nous autres, chez nous: Les gens voudraient quasiment avoir l'occasion
de stationner leur auto à côté du comptoir où se
trouve la caisse enregistreuse. Le plus drôle de tout, c'est quand ils
s'en vont dans un centre d'achat, où ils sont attirés par les
publicités: ça ne les dérange pas d'attendre, de se mettre
un mille plus loin pour rentrer dans un centre d'achat où, là,
ils vont être attirés par l'achat qui leur est proposé.
Peut-être qu'ils seraient venus nous dire, ici, à cette
commission, qu'il faudrait peut-être à ce moment-là
éviter d'en arriver à dire aux consommateurs qu'ils sont souvent
soumis a des pressions extérieures a leur bon vouloir.
Dans ce contexte-là, M. le Président, je ne peux pas faire
autrement qu'appuyer la proposition du député d'Ungava qui
demande que les associations des consommateurs soient convoquées
à cette commission pour nous donner leur opinion du projet de loi qui
est devant nous. Et j'espère que les responsables ministériels,
le ministre en tête, pourront nous dire: Écoutez, vous n'avez
même pas besoin de ça, M. le député, on vient de
changer d'idée. Et peut-être que le temps qu'on aille voter de
l'autre côté sur la motion de report ou je ne sais pas quelle
motion il y a de l'autre bord, mais il y en a une quelque part, la motion de
report ou bien celle qui va permettre au ministre Elkas d'aller négocier
à l'extérieur, donc une motion d'ajournement... On va aller voter
ça, là. Pendant ce temps-là, que le ministre
réfléchisse et qu'il nous donne la réponse après.
Et que ce soit: Oui, on vient de changer d'idée, c'est quatre personnes
en tout temps.
Le Président (M. Richard): Merci, M le
député de Laviolette. Maintenant, seulement avec un peu
d'humour... Vous avez souligné, tout à l'heure, que vous
étiez étonné de voir le va-et-vient qui se passait dans la
partie ministérielle. Sachez que le va-et-vient a souvent donné
naissance à beaucoup de choses. Alors, on suspend pour quelques
instants.
(Suspension de la séance à 22 h 38)
(Reprise à 22 h 59)
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, je
demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place, pour que nous
puissions continuer nos travaux. S'il vous plaît, messieurs! S'il vous
plaît!
Nous en étions rendus...
M. Jolivet: Au vote.
Le Président (M. Bélanger): ...au vote. Donc, sur
la motion, la deuxième motion...
M. Jolivet: Vote nominal.
Le Président (M. Bélanger): ...proposée par
M. le député de...
M. Jolivet: Ungava.
Le Président (M. Bélanger): ...d'Ungava. "Il est
proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de
procédure la commission permanente de l'économie et du travail
tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet
de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les
établissements commerciaux, des consultations particulières quant
à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle
entende la Fédération nationale des associations de consommateurs
du Québec." Est-ce que cette motion est adoptée?
M. Jolivet: Vote nominal.
Le Président (M. Bélanger): Vote nominal, bien.
Alors...
M. Jolivet: À moins que le député de
Portneuf et leader du gouvernement ne nous indique qu'il a eu une discussion
avec le ministre et que ce dernier a changé d'idée. Alors,
ça pourrait nous...
Le Président (M. Bélanger): Non. Alors, j'appelle
donc le vote. M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles)?
M. Bourdon: Contre. Pour!
Le Président (M. Bélanger): Pour. M. Claveau
(Ungava)?
M. Jolivet: M. le Président, il avait une rencontre avec
les camionneurs.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme Dupuis
(Verchères)?
Mme Dupuis: Pour.
Le Président (M. Bélanger): M. Jolivet
(Laviolette)?
M. Jolivet: Pour.
Le Président (M. Bélanger): Mme Marois
(Taillon)?
Mme Marois: Pour.
Le Président (M. Bélanger): M. Audet
(Beauce-Nord)?
M. Audet: Pour l'instant, M. le Président, je suis
obligé d'être contre.
Le Président (M. Bélanger): Bélanger
(Laval-des-Rapides), contre. M. Bordeleau (Acadie)?
M. Bordeleau: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. Richard
(Nicolet)?
M. Richard: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): M. Lafrenière
(Gatineau)?
M. Lafrenière: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): On a passé tout
le monde? Bien. Ah! M. Tremblay, excusez-moi. M. le ministre,...
M. Tremblay (Outremont): Ha,ha, ha!
Le Président (M. Bélanger):... on ne voulait pas
vous compromettre. Ha, ha. ha! Alors, M. le ministre.
M. Jolivet: M.le Président, je sais que le
député de Saint-Maurice est pris de l'autre côté,
mais on pourrait lui demander de voter contre pareil, s'il doit voter comme les
autres.
Le Président (M. Bélanger): On ne peut pas voter
par...
M. Jolivet: Ah bon!
Le Président (M. Bélanger):... procuration, il
faudrait qu'il soit sur place.
M. Jolivet: Non, mais, au moins, ça serait inscrit.
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
ministre?
M. Tremblay (Outremont): Contre, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Donc, la motion est
rejetée. M. le député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Alors, M. le Président, je voudrais introduire
une motion...
Le Président (M. Bélanger): Ah oui? Ha, ha, ha!
Motion proposant la tenue de
consultations particulières avec
la Fédération du commerce de la
CSN
M. Bourdon:... qui dit: "II est proposé qu'en vertu de
l'article 244 de nos règles de procédure la commission permanente
de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours
d'admission dans les établissements commerciaux, des consultations
particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et
qu'à cette fin elle entende la Fédération du commerce de
la Confédération dos syndicats nationaux. "
Le Président (M. Bélanger): Alors, vous qui
étiez un syndicaliste, on peut négocier pour le même
vote? Ha, ha. ha! Alors, vous avez 30 minutes pour défendre votre
motion. M. le député de Pointeaux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, on a tenté, en vain,
de convaincre nos collègues ministériels d'entendre le grand
syndicat affilié à la FTQ, qui représente 45 000
travailleurs du secteur visé par la loi qui est devant nous. On tente
encore une fois d'amener les ministériels à entendre les parties
en cause, et c'est pourquoi on propose d'entendre la Fédération
du commerce (CSN), qui représente aussi un nombre substantiel de membres
dans l'industrie du commerce de détail qui va être visée
par la loi qui est devant nous.
M. le Président, c'est important d'entendre les
intéressés parce qu'ils ne se comptent plus, les organisations
commerciales et les organismes qui se sont prononcés contre la loi qui
est devant nous. Mentionnons juste les membres de la Coalition contre
l'ouverture le dimanche, c'ost-à-dire l'Association des
dépanneurs du Québec, qui représente Alimentation
Couche-Tard, Distribution Bonisoir, Laiterie Perrette Itée, Mac's
dépanneur La Maisonnée, Provi-Soir. S'ajoutent l'ACEF du centre
de Montréal, l'Archevêché de Montréal, l'Association
des détaillants de l'Est du Québec, l'Association des
détaillants de matériaux de construction du Québec,
l'Association féminine d'éducation et d'action sociale, le Cercle
des fermières du Québec, Colabor Canada Itée, le Conseil
provincial des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du
commerce, le Conseil québécois du commerce de détail pour
et au nom des firmes suivantes: Au coin des petits, Astral Photo, Boutiques
Alain Canto, Boutiques Dans un jardin, Boutiques Marie-Claire, Centre du
rasoir, Chaussures J. B. Lefebvre, Chaussures Panda, Chaussures Trans Canada.
Fournitures de bureau Pilon, le Grenier/Modaprix, le groupe Aldo, le groupe
Bovet, le groupe Cotonnier, le groupe Dalmys, le groupe Pantorama, le groupe
San Francisco, le groupe Sélection, les magasins J. L. Taylor, Lindor,
Ogilvy, Sears, Tristan et Iseut.
Il y a également, M. le Président, la Corporation des
bijoutiers du Québec, la Corporation des marchands de meuble du
Québec, la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec que les ministériels n'ont pas voulu
entendre, la Fédération des travailleurs et travailleuses du
Québec dont le syndicat affilié n'a pas pu se faire entendre, la
Fédération du commerce (CSN) que l'on préconise
d'entendre, la Fédération du détail et services, Hudon et
Deaudelin Itée, IGA Boniprix, les marchands associés Canadian
Tire (Québec), les Maîtres fourreurs associés, le Mouvement
des travailleurs chrétiens, le Regroupement des SIDAC de
Montréal, le Regroupement des SIDAC du Québec, les Travailleurs
et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, que la majorité
à la commission n'a pas voulu entendre, l'Union des producteurs
agricoles, l'UPA.
Il y a d'autres intervenants qui ne font pas
partie de la Coalition, mais qui étaient contre l'ouverture des
commerces le dimanche. Je pense à l'Assemblée des
évêques du Québec, l'Association canadienne des
détaillants en quincaillerie, la Centrale des syndicats
démocratiques, la Centrale de l'enseignement du Québec, la
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, le
groupe Ro-Na Dismat inc., le Regroupement des marchands Métro-Richelieu
contre l'ouverture le dimanche, l'Union des municipalités du
Québec et la ville de Montréal.
M. le Président, on peut voir que l'opposition à la loi
est très considérable et regroupe beaucoup d'organisations, tant
des intéressés directs que d'autres organisations
impliquées dans le développement social et économique du
Québec. Ils faut donc, pensons-nous, entendre la
Fédération du commerce de la CSN qui a présenté un
mémoire sur les difficultés réelles que l'ancienne loi
causait et que je vais essayer d'expliquer quelque peu.
Dans le mémoire, on dit: La CSN et la Fédération du
commerce sont favorables à une révision de la loi actuelle sur
les heures d'affaires des établissements commerciaux. Il faut d'abord
corriger un certain nombre de graves faiblesses qui sont à l'origine du
mécontentement de plusieurs, parce qu'elles créent d'importantes
injustices entre les diverses catégories de commerce. Pour cela, il est
nécessaire de réduire le nombre de commerces qui
bénéficient d'exemptions et de renforcer les
pénalités pour ceux qui persistent à enfreindre la loi. il
faut aussi que la loi s'adapte aux transformations de la société
québécoise. Les besoins des consommatrices et consommateurs se
sont modifiés sous l'influence de nombreux facteurs et, en particulier,
la participation des femmes au marché du travail. L'accès au
commerce doit donc être élargi, et c'est pourquoi la
Fédération du commerce est favorable à l'ouverture le
mercredi soir jusqu'à 21 heures.
Sur l'épineuse question de l'ouverture le dimanche, la
Fédération dit être en profond désaccord, et cela,
pour plusieurs raisons. Le travail le dimanche signifierait pour 400 000
travailleuses et travailleurs oeuvrant dans le commerce une
détérioration de leurs conditions de travail et de vie. Le
dimanche reste, pour ces personnes, la seule journée pour se consacrer
à la famille, être vraiment disponibles au conjoint, aux enfants,
entretenir des relations sociales, participer à des activités
culturelles et à des activités de loisir.
Le travail le dimanche ne serait pas un facteur de création
d'emplois. Il favoriserait, tout au plus, la généralisation
d'horaires de travail brisés pour répondre aux nouvelles
périodes d'achalandage. D'autre part, le travail le dimanche dans le
secteur du commerce aurait des effets d'entraînement sur d'autres
secteurs et, en particulier, dans le secteur agro-alimentaire. Les besoins
d'approvisionnement en denrées péris- sables, les besoins de
liquidité pour les commerces, les services de transport, les services de
garderie, les services policiers... Donc, un ensemble de services
représentant des coûts économiques et sociaux seraient
aussi nécessaires.
Ajoutons à cela que l'ouverture des magasins à grande
surface rendrait encore beaucoup plus précaire la situation de beaucoup
de petits commerces et, pour plusieurs, ce serait le coup de grâce.
L'amélioration de la qualité de la vie, les besoins des familles
ne peuvent être satisfaits par la fréquentation des commerces le
dimanche. La commercialisation de la vie n'est pas une réponse
satisfaisante aux défis qui nous confrontent.
Finalement, dit la Fédération du commerce, le
problème est trop important pour que le gouvernement s'en
décharge et le délègue aux municipalités. Ce serait
revenir à la situation qu'a connue le Québec avant 1969.
Après deux ans de débat, l'actuel gouvernement doit assumer
lui-même ses responsabilités. C'est ce que dit la
Fédération du commerce, et sur ce dernier point, l'idée
dans la loi de confier au moins en partie la responsabilité de la
surveillance aux municipalités, je voudrais lire, M. le
Président, quelques extraits d'une lettre envoyée au ministre par
l'Union des municipalités régionales de comté qui, elle
aussi, se dit contre le transfert, en partie, aux municipalités de la
responsabilité de l'application de la loi sur les heures d'ouverture des
commerces.
Alors, sous la signature du président de l'UMRCQ, M. Roger
Nicolet, il est dit ceci, et je cite: "Les articles 13 et 24 du projet de loi
prévoient une juridiction concurrente du ministre et des
municipalités concernant l'inspection et la poursuite subséquente
des contrevenants. Plus particulièrement, la lecture de l'article 13
nous permet de constater qu'à l'instar du ministre les
municipalités se voient, d'une part, accorder le pouvoir de nommer un
inspecteur et que, d'autre part, tout policier municipal est désormais,
de facto, habilité à agir à ce titre. L'UMRCQ ajoute: Nous
sommes d'avis que ce pouvoir, ainsi que l'habilitation donnée aux agents
de la paix, pourrait servir de prétexte au ministre pour se retirer de
toute implication active en vue de faire respecter la loi en plaidant
l'insuffisance des effectifs provinciaux. Il lui sera loisible également
de diriger les plaignants vers leur conseil municipal local en arguant que
celui-ci possède la compétence nécessaire et qu'il ne lui
en tient que de l'exercer effectivement. "L'introduction de ces dispositions
n'offre aucune garantie de la volonté du ministre de continuer à
assumer les responsabilités qui lui incombent en premier lieu. À
défaut, par une municipalité, de se prévaloir du pouvoir
de nomination d'un inspecteur et dans les municipalités disposant d'un
service de police local, mais qui ne souhaite pas se charger de l'application
de la loi, aucune obligation résiduaire n'est
farte au ministre de prendre les mesures qui s'imposent pour le respect
de ce texte législatif. Cette absence de clarté quant au partage
de responsabilités créera de la confusion chez les citoyens qui
ne sauront à quel palier de gouvernement s'adresser pour loger les
plaintes où y faire les représentations appropriées. Il y
a fort à parier que les élus locaux seront les premiers
visés par cette démarche. Sous le couvert d'accorder un pouvoir
supplémentaire aux municipalités, nous avons donc tout lieu de
croire que, dans les faits, nous assisterons à un désengagement
progressif de l'État et, conséquemment, à un
véritable transfert de responsabilités. "Les autorités
provinciales n'en sont-elles pas venues, d'ailleurs, à un constat
d'échec quant à leurs capacités d'assurer le respect de la
loi actuelle? En effet, tous s'entendent pour constater que les nombreuses
exceptions, les imprécisions législatives ainsi que le laxisme
face aux contrevenants ont contribué à créer une situation
inéquitable et ont forcé le ministère à revoir
l'ensemble de la question. Certes, de continuer l'UMRCQ, les modifications
projetées réduisent le nombre d'exceptions à la
règle générale de fermeture le dimanche et après 22
heures sur semaine. Cependant, de nombreuses imprécisions subsistent et
rendront d'autant moins attrayante pour les municipalités la prise en
charge de la surveillance et de la sanction de la loi. À titre
d'exemple, le terme "principalement" est utilisé pour quantifier
certains produits que devront offrir les établissements pour jouir d'une
exception. (23 h 15) "Certains commerçants seront visés,
même s'ils offrent également en vente de menus articles. De
même, ne seront pas comptabilisées dans le nombre maximum de
quatre personnes celles affectées exclusivement à la fabrication
des denrées. Autant de difficultés auxquelles seront
confrontés les inspecteurs et les policiers ainsi que ceux qui auront
à plaider une contravention devant les tribunaux. Les
municipalités ne disposeront donc pas de meilleurs outils pour
empêcher la concurrence déloyale entre commerçants, mais
seront susceptibles désormais de subir les pressions de citoyens et
contribuables aux intérêts aussi contradictoires que ceux mis en
lumière lors de la vaste consultation effectuée par le ministre
dans le cadre de la révision de la loi actuelle. Dans ce contexte, la
possibilité de conserver les amendes est une bien piètre
compensation."
Et l'UMRCQ de conclure. "Nous sommes donc d'avis que la loi est
imprécise à plusieurs égards et qu'il y aurait lieu plus
particulièrement d'y spécifier que le ministre conserve la
responsabilité première de s'assurer du respect de ces
dispositions ainsi que de la poursuite des contrevenants. Nous ne nous opposons
pas à la possibilité pour une municipalité, suite à
une entente avec le ministre, de prendre en charge la surveillance ou la
sanction judiciaire des mesures qui seront prévues dans la loi, ou les
deux à la fois. Toute autre formulation ne pourra que créer une
ambiguïté non souhaitable et laisser présumer des intentions
du ministre de se délester de ses responsabilités face à
des mesures impopulaires pour bon nombre et difficiles d'application."
D'ailleurs, dans un editorial du journal Le Devoir du 17 mai 1990, M.
Gilles Lesage parlait de cette partie de la loi qui touche les
municipalités et il disait: "Le gouvernement veut confier aux
municipalités l'application de ia loi leur faisant miroiter qu'elles
récolteront le fruit des fortes amendes désonnais prévues.
Outre qu'il y a là un aspect odieux à cette
vénalité, la manoeuvre est grossière." Autrement dit, M.
le Président, la loi, en faisant des municipalités
l'équivalent des chasseurs de primes des films de cow-boy, va mettre un
élément d'incohérence dans l'application équitable
de la loi qui, à notre avis, devra, en tout état de cause,
être appliquée d'une façon uniforme pour l'ensemble du
Québec.
Je reviens, M. le Président, au mémoire de la
Fédération du commerce (CSN). La Fédération dit:
"D'entrée de jeu, nous convenons que nous sommes dans un monde en
changement et que nous devons nous adapter pour répondre à de
nouveaux besoins. Comme instrument majeur dans le développement du
Québec, nous sommes aussi particulièrement soucieux de maintenir
dans la société l'équilibre et l'équité
entre les divers agents économiques, entre les diverses
catégories d'entreprises qui sont souvent des forces économiques
et politiques inégales. La qualité de notre démocratie en
dépend aussi."
Finalement, la Fédération du commerce dit croire que cette
question soulève aussi des dimensions culturelles qui nous interrogent
sur les finalités du développement. Et elle ajoute: "Le fait que
ce débat ait lieu dans plusieurs pays montre bien qu'il s'agit d'un
débat de société." Pour la révision de la loi
actuelle, la Fédération du commerce (CSN) parle de la
nécessité de corriger des inéquités, et elle dit ce
qui suit: "Un certain nombre de facteurs sont à la base de la
nécessaire révision de la loi actuelle. L'élément
déclencheur a été évidemment les grandes faiblesses
de cette loi, le fait qu'elle a entraîné plusieurs injustices. Il
y avait d'abord la multiplication des exceptions prévues. Bien qu'il est
évident qu'un certain nombre de produits peuvent ou doivent demeurer
accessibles en dehors des heures générales d'ouverture des
commerces, nous disions alors que la multiplication des types de commerces
exemptés détournerait la loi de son objectif et créerait
de nouvelles iniquités. Or, c'est bien cela qui s'est passé, en
particulier, mais non exclusivement, dans le secteur de l'alimentation. Nous
sommes donc aujourd'hui dans une situation de fouillis où d'importantes
injustices existent, où plusieurs sont à la recherche de toutes
sortes de moyens pour affronter
ou contourner la loi. "De plus en plus de commerces exemptés par
la loi offrent des products qui ne correspondent pas à leur vocation
première: pharmacies dans le secteur de l'alimentation; marchés
aux puces qui vendent des produits neufs à des valeurs
supérieures à 20 $;. marchands de piscines qui vendent des
accessoires de jardin; marchés publics qui permettent que des commerces
non exemptés le deviennent; exemptions pour les régions dites
touristiques, etc. La possibilité prévue dans la loi ou par
décret que le ministre introduise de nouvelles exceptions a aussi
entraîné d'autres injustices entre établissements d'un
même secteur d'activité. Nous voulons parler de la
possibilité pour les pharmacies de vendre des denrées
alimentaires à toute heure de la semaine, sans être tenues de
restreindre leur personnel à trois personnes et sans cloisonner la
partie où s'effectue la vente des denrées alimentaires, pourvu
que la surface utilisée n'ait pas été augmentée
depuis le 20 juin 1984. 209 pharmacies ont ainsi été
exemptées. Les commerces des marchés publics qui étaient
en opération le 12 juillet 1985 ont aussi été exclus de la
loi. La généralisation d'exceptions sur une base qui
apparaît le plus souvent arbitraire a créé une
réaction en chaîne de mécontentement et a fait en sorte que
la loi a perdu son sens. De plus, la règle de trois salariés a
été contournée par plusieurs établissements, en
particulier dans le secteur de l'alimentation, en érigeant des cloisons
fictives entre départements et en multipliant les raisons sociales pour
un même établissement. "La deuxième faiblesse majeure de la
loi était à l'effet qu'elle ne prévoyait pas des peines
suffisamment sévères pour dissuader les commerçants, et en
particulier les plus gros, à ne pas l'appliquer. Effectivement, depuis
quelques années, on a assisté à un nombre croissant de
poursuites et, très souvent, pour des cas de récidive. Ainsi, un
même marchand aurait contrevenu 76 fois à la loi, sur une
période de trois ans. Il est donc évident que les
bénéfices entraînés par la violation de la loi
dépassent souvent largement les peines encourues. "Et qu'en est-il des
violations qui ne donnent pas lieu à des poursuites, à cause d'un
nombre trop restreint d'inspecteurs pour surveiller son application? Nous ne
sommes pas les seuls, évidemment, à faire ces constats et
à déplorer cette situation. C'est le cas de la plupart des
intervenants dans ce débat. La commission Richard ainsi que le document
d'information publié par le ministre ont aussi fait les mêmes
observations. Il est donc d'importance majeure de corriger ces graves
faiblesses, et pour cela, il sera nécessaire de limiter strictement les
exceptions et de renforcer les moyens pour que la loi soit
observée."
Alors, comment, précisément, M. le Président,
limiter strictement les exceptions et renforcer les moyens pour que la loi soit
obser- vée, si la majorité ministérielle abandonne son
intransigeance et vote la résolution? La Fédéra-tion du
commerce (CSN) pourra venir nous l'expliquer. La Fédération du
commerce poursuit en disant dans son mémoire: "Nous vivons des
changements importants dans la société qui modifient les
attitudes et les besoins des consommatrices et consommateurs. À cause
des modifications de toutes sortes, ces derniers forment un ensemble
hétérogène, vivant des conditions de vie
diversifiées. Le principal est sans doute la participation croissante
des femmes au marché du travail. Mais il faut ajouter aussi,
l'augmentation du nombre de familles où les deux conjoints sont au
travail, l'augmentation du nombre de familles monoparentales, les
transformations dans les horaires de travail et le vieillissement de la
population. À des degrés divers, dit la Fédération
du commerce, ces transformations favorisent de nouveaux aménagements
dans les horaires et l'organisation dés activités quotidiennes.
Le document d'information du ministère de l'industrie et du Commerce et
de la Technologie note aussi, avec raison, les transformations dans les
habitudes de dépenses et de consommation de la population. La
répartition des dépenses de consommation doit d'abord se
comprendre dans un contexte de diminution du revenu personnel par ménage
en dollars constants depuis 1976, de 27 261 $ en 1976 à 25 809 $ en
1986. Pour nous, il s'agit là actuellement du principal problème
des consommatrices et consommateurs, et qui est vécu très
durement dans les catégories les plus défavorisées de la
population." Et la Fédération du commerce dit comme bien d'autres
groupes: "Plus d'heures d'ouverture des commerces n'augmenteront pas les
capacités financières des familles. Lorsque l'on sait que la
majorité des familles monoparentales vivent d'aide sociale et se situent
en bas du seuil de pauvreté, le besoin premier n'est pas la
possibilité d'aller faire ses achats le dimanche. On note aussi que,
dans le budget alimentaire, une part moins grande est consacrée à
l'achat de viandes, d'oeufs, de beurre et de sucre et que des parts plus
grandes sont consacrées aux fruits et légumes frais, boissons non
alcoolisées, céréales et produits de boulangerie,
préparations à base de viande et viandes cuites, poissons,
fromages, yogourt, etc. Finalement, la part des restaurants dans le budget
alimentaire a été augmentée de façon
appréciable ces dernières années. Tout cela est important
et, pour les auteurs du document, le fait que le taux annuel de croissance des
ventes des supermarchés ait été plus faible que pour les
dépanneurs, petites épiceries et magasins
spécialisés ne s'explique pas seulement par les heures
d'ouverture, mais aussi largement par les changements dans les habitudes
alimentaires. Compte tenu de l'ensemble des transformations que nous vivons,
mais dont il est important de comprendre la nature et les exigences de chacune,
nous croyons, dit la
Fédération du commerce, qu'il est nécessaire de
réviser les heures actuelles d'ouverture des établissements, en
particulier dans le secteur de l'alimentation, et de permettre plus de
possibilités aux consommatrices et consommateurs. Et c'est pour
ça que la Fédération recommande l'ouverture des
établissements commerciaux jusqu'à 21 heures le mercredi
soir."
La Fédération du commerce poursuit sur la
préservation de la qualité de la vie. Elle dit ce qui suit: "Si
nous sommes d'accord avec une certaine libéralisation des heures
d'ouverture, nous savons aussi que le présent débat porte
largement sur l'opportunité d'ouvrir le dimanche. Chez ceux qui
défendent l'idée d'ouvrir le dimanche, on retrouve surtout des
supermarchés d'alimentation et des superpharmacies qui ont beaucoup de
moyens financiers pour intervenir sur la scène publique et
défendre leur thèse. Cette dernière est aussi
endossée par un certain nombre d'éditorialistes de nos journaux
pour qui le libre marché devrait déterminer
l'intérêt et la décision de chacun d'ouvrir ou non le
dimanche. Dans le mouvement syndical, nous connaissons bien ce genre de
discours qui prêche, depuis quelques années, le recul du
rôle de l'État et la déréglementation à tout
prix." La Fédération dit: "Nous ne partageons pas ce discours qui
ne tient pas compte de certaines leçons de l'histoire et qui se situe
dans une perspective strictement économiste et à court
terme."
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: En conclusion, M. le Président,
j'espère que les ministériels vont se décider d'entendre
les voix qui trouvent leur loi mal faite et qu'ils vont accepter qu'on entende
la Fédération du commerce de la Confédération des
syndicats nationaux. (23 h 30)
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Du côté
ministériel.
Alors, bien, s'il vous plaît, Mme la députée de
Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. On va continuer
à nous décevoir un peu, de l'autre côté. On leur
offre la possibilité de vérifier auprès des gens qui vont
avoir à vivre avec la loi, et d'entendre ces gens-là. Non
seulement ils votent contre nos motions, mais en plus ils n'interviennent
même pas, tellement ils sont en possession tranquille de la
vérité.
Une voix: C'est ça
Mme Marois: II y a un prix à payer, M. le
Président, quand on est en possession tranquille de la
vérité. Et il peut être très lourd. Je vais appuyer,
c'est évident, la motion de mon collègue de Pointe-aux-Trembles
qui propose que l'on reçoive la Fédération du commerce de
la CSN. Et là, je vais revenir au document de base, qui a servi aux
membres de la commission pour nous permettre de faire l'analyse, un peu, de la
situation, en ce qui concerne les heures d'affaires.
Dans ce document, toujours ce document d'information qui porte sur la
loi sur les heures d'affaires, on nous parle des travailleurs et des
travailleuses. Ce qu'on nous dit - et c'est un groupe, là, de
travailleurs et de travailleuses qu'on voudrait entendre. Ils sont venus se
faire entendre en assemblée publique, à travers la tournée
que nous avons menée d'un bout à l'autre du Québec.
Malheureusement, le ministre n'a pu être là. Évidemment,
certains de ses députes, j'en conviens, y étaient.
J'espère qu'ils lui ont rapporté, au texte, les remarques qui se
sont faites sur les planchers. J'espère que ça n'a pas trop
choqué les oreilles du ministre, parce que ce n'était pas
toujours très agréable à entendre. Mais ça nous
apportait au moins un éclairage qui était appuyé sur du
vécu, sur du quotidien, pas sur des analyse ésotériques,
là. Et pas sur la réponse à ces besoins particuliers d'un
certain nombre d'institutions, d'organisations et de corporations, qui font des
pressions pour qu'on modifie, à leur profit, la loi sur les heures
d'affaires.
Alors, dans le document que le ministre a déposé pour nous
permettre d'engager le débat et de procéder à la
consultation, on nous dit: "Les travailleurs et travailleuses du secteur de
l'alimentation représentent, après les consommateurs, le
deuxième groupe touché par les amendements possibles à la
loi sur les heures d'ouverture des commerces. Les enjeux qui les concernent
sont relativement importants." C'est le document publié par le
ministère, signé par les gens du ministère et, je le
répète, il est très bien fait. Pour appuyer notre motion,
pour faire en sorte que nous entendions ces travailleurs et ces travailleuses,
on nous dit, dans le document: "Le nombre de personnes travaillant dans le
secteur du commerce de détail au Québec était
estimé, en 1988, à 391 300 personnes. Ces travailleurs et ces
travailleuses représentaient environ 13 % des personnes ayant un emploi
au Québec."
C'est énorme, M. le Président; 13 % des personnes ayant un
emploi au Québec sont dans le secteur du commerce de détail. Et
comme on ne parle pas que de la loi du dimanche, mais on parle d'ouvrir en
semaine, dans le projet qui est devant nous, là, parce qu'il n'est pas
encore amendé, on dit: Jusqu'à 22 heures tous les soirs, et le
samedi y compris. Alors, ça, ça touche 13 % des personnes qui ont
un emploi au. Québec. Ramassons ça un peu, puisque le dimanche,
ça s'adressera surtout au domaine de l'alimentation, si on exclut les
exceptions que le ministre
maintient dans la loi, lui qui s'était tant et tant
objecté aux exceptions. Alors, là, on va constater que 78 280
personnes travaillent dans le secteur de l'alimentation. Ce n'est pas rien non
plus: 2,6 % de la population active du Québec. Statistiquement, c'est
énorme dans un ensemble de travailleurs et travailleuses. 24 % des
personnes qui oeuvrent dans le commerce de détail travaillent à
temps partiel. Par rapport à l'ensemble de l'économie, c'est 13,1
%. Alors, ça veut dire que les personnes qui travaillent dans le
commerce de détail sont en nombre beaucoup plus important, relativement,
à travailler à temps partiel dans ce secteur que ce n'est le cas
dans les autres secteurs du travail, au Québec, que ce soit les secteurs
secondaires ou primaire, plus communément appelés secteur
manufacturier et secteur des ressources.
Continuons, M. le Président, c'est intéressant, c'est
instructif, on veut améliorer les conditions de vie des travailleurs et
des travailleuses du Québec, qui sont aussi des consommateurs et des
consommatrices: 70 % - et j'aimerais bien que le ministre m'écoute, bien
sûr - des personnes qui travaillent les jeudi et vendredi soirs, de
même que le samedi, sont des employés à temps partiel,
souvent des gens - et là, je sors du document qui est devant nous - qui
ont des conditions de travail précaires, des "jobines", entre
guillemets. Et ils sont venus nous le dire sur le plancher, là, quand on
les a consultés depuis une semaine, puis ils sont venus nous le dire en
commission parlementaire, mais là, moi, j'aimerais bien ça les
entendre à nouveau, les représentants de ces travailleurs et de
ces travailleuses qui, quotidiennement, ont cette expérience-là.
70 % d'entre eux travaillent à temps partiel le jeudi soir, le vendredi
soir de même que le samedi. Si on ajoute une plage, le dimanche, si on
allonge les plages du lundi, du mardi et du mercredi, est-ce que vous ne pensez
pas qu'on risque de multiplier encore le travail à temps partiel, de
"précariser" encore les conditions de travail de gens qui sont dans des
secteurs déjà peu rémunérés, tenant compte
des conditions économiques de ces secteurs de commerce?
On va aller plus loin, M. le Président, puis on va défaire
un autre mythe, parce qu'on a toujours l'impression, vous savez, quand on
travaille dans les grandes surfaces, qu'on a de meilleures conditions de
travail, qu'on est plus souvent syndiqués. C'est vrai, qu'on est plus
souvent syndiqués, le document le dit, mais ce qu'on constate, c'est que
la proportion de gens qui travaillent à temps partiel dans les grandes
surfaces est plus élevée que dans les moyennes surfaces, chez les
propriétaires indépendants de même que chez les
dépanneurs, et c'est encore une enquête réalisée par
le ministère - puis je vais passer par-dessus les chiffres, et je
pourrais les donner: ils sont au chapitre 4, à la page 50 du document -
qui affirme que c'est la situation.
Or, on va permettre à un plus grand nombre de grandes surfaces
d'ouvrir le dimanche, avec les nouveaux critères du ministre, et, bien
sûr, en semaine, puisque les plages sont allongées. On va donc
intensifier la "précarisation" du travail, on va augmenter le nombre de
personnes qui vont se retrouver avec des demi-revenus, des quarts de revenus.
Est-ce que vous avez déjà essayé, vous, M. le
Président, de vivre avec un quart de revenu, hein, puis d'attendre toute
une semaine qu'on vous appelle pour que vous alliez travailler, vous ne savez
pas quel jour, vous ne savez pas à quelle heure et de vous rendre
disponible? Alors, moi, j'aimerais bien, M. le Président, que ces
personnes, qui seront le deuxième groupe en importance concerné
par le projet de loi que nous a déposé le ministre, il y a
à peine quelques semaines - je me répète, M. le
Président, et j'espère que le ministre m'entend bien - j'aimerais
bien, M. le Président, que l'on rencontre des représentants qui
ont pris la peine de présenter un mémoire et de venir le
défendre devant nous, qui ont pris la peine de participer à une
coalition, qui ont pris la peine d'envoyer des membres dans chacune des
rencontres, à Sherbrooke, à Rimouski, à Jonquière,
à Québec, à Laval, à Trois-Rivières...
J'aimerais bien qu'on entende leur réaction, M. le Président, au
projet de loi qui est devant nous. Il me semble que c'est le minimum de respect
que l'on devrait avoir vis-à-vis de ces gens qui vont avoir à
vivre avec la loi que le ministre nous présente devant cette commission,
M. le Président.
J'appuierai donc la motion de mon collègue de
Pointe-aux-Trembles.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme
la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la
motion? Mme la députée de Verchères.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: Notre collègue de Pointe-aux-Trembles a
présenté une motion pour entendre la Fédération du
commerce de la Confédération des syndicats nationaux. J'ai un
autre document, moi, ici, qui est de la Centrale des syndicats
démocratiques et qui donne un aperçu intéressant aussi de
leur point de vue. Je pense que c'est mon devoir de vous en lire quelques
passages pour peut-être vous rafraîchir la mémoire. Mais,
à la lecture de tous ces documents, on s'aperçoit que les trois
principes de base sur lesquels s'est appuyé le ministre pour
rédiger son projet de loi sont, dans chaque document,
complètement mis en pièces: équité dans les
commerces, besoins réels des consommateurs, puis qualité de vie
des travailleurs et des travailleuses. Je n'arrive pas à m'expliquer
comment il a pu baser son projet de loi sur ces trois principes et, de
façon magistrale, passer à côté, mais
royalement.
À cet effet - ce ne sont pas mes paro-
les - je vais vous lire le texte qui va vous donner le point de vue d'un
autre syndicat, d'une autre centrale. Il commence par le contexte
général: "Les élections étant chose du
passé, voici venu le temps de faire ressortir des oubliettes les
dossiers chauds qu'on avait prudemment mis de côté à
l'automne. Les heures d'affaires, un dossier en mal d'orientation
gouvernementale. Que le gouvernement veuille à tout prix éviter
les vagues, ça peut se comprendre. Par contre, ce n'est pas en demeurant
vague et imprécis sur ses intentions qu'il va faciliter les
débats. Que le ministre responsable nous livre en pâture un
document d'information est tout à fait louable, sauf qu'il oublie une
information cruciale, la position du gouvernement. On aurait pu présumer
qu'avec le rapport Richard et la polémique qui s'en est suivie à
l'automne dernier le gouvernement aurait pu formuler sa proposition sur les
heures d'affaires des établissements commerciaux. Tout ce qu'on peut
conclure des trois grands principes que le ministre nous indique vouloir
privilégier dans le document qu'il a rendu public, c'est qu'il est pour
la vertu et veut ménager tout le monde, consommatrices, consommateurs,
commerces, travailleurs, travailleuses. Ceci étant posé,
où en sommes-nous dans ce dossier? Nous devons réitérer ce
que nous avons déjà soumis l'automne dernier avec l'espoir que
cette fois-ci le gouvernement prendra ses responsabilités avant la
prochaine échéance électorale."
Il nous parle du fouillis actuel: "Sans faire un historique exhaustif de
ce dossier, il est fort important de connaître les origines du fouillis
actuel dans l'application de la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux. Le gouvernement a laissé la loi de la
jungle s'installer, d'abord en accordant à certains
établissements des exemptions, puis en laissant beau jeu aux autres de
ne pas se conformer à la loi. Une telle attitude de laisser-aller a
convaincu les commerçants que le champ était libre, qu'ils
pouvaient impunément se comporter comme s'il n'y avait pas de
législation dans ce domaine. Pour corriger son laxisme, le gouvernement
s'apprête à commettre une erreur beaucoup plus grave. En
libéralisant les heures d'affaires au nom d'un supposé principe
d'équité, il tombe dans le piège que lui tendent les
commerçants. Le rôle de l'État n'est pas de cautionner les
lois du marché en effaçant toute contrainte pouvant nuire au
sacro-saint profit, mais plutôt d'encadrer et de réglementer la
vie économique, sociale et culturelle d'une société."
Je passe certaines pages, pour ne pas être trop longue. Je vais
aller aux recommandations: "La CSD recommande que la notion d'activité
exclusive prévue dans la loi demeure pour régir les exceptions,
mais qu'elle soit appliquée vigoureusement par le ministre." Une autre
recommandation: "La CSD recommande que, pour ce qui est de la vente de
denrées alimentaires, la limitation du nombre de salariés
présents en même temps pour assurer le fonctionnement d'un
établissement en dehors des heures régulières demeure
fixé à trois". Nous, M. le ministre, nous vous demandons quatre
en tout temps. On est donc moins exigeants que la CSD. "La CSD recommande le
statu quo pour ce qui est des heures d'affaires, sur semaine, des
établissements." (23 h 45)
Là, j'arrive à une autre page que je vais vous lire.
"L'ouverture le dimanche des établissements commerciaux du secteur de
l'alimentation. Le fait de libéraliser les heures d'affaires des
établissements commerciaux a de multiples impacts sur la vie des
travailleurs et des travailleuses oeuvrant dans ce secteur d'activité
ainsi que dans les industries connexes. Les conditions de travail des
salariés occupant des postes dans la production, l'entreposage et la
distribution de produits alimentaires périssables - boulangerie,
laiterie et le reste - ainsi que dans les services financiers vont
également être affectées. Les conventions collectives
actuellement en vigueur prévoient l'existence de deux jours de
congé consécutifs puisqu'il n'y a pas de distribution le lundi.
Par contre, à partir du moment où les grands de l'alimentation
ouvrent leurs portes sept jours sur sept, la pression qu'ils vont exercer sur
les fournisseurs de denrées périssables obligera des
modifications d'horaire de travail importantes et la reconsidération des
congés existants pour les salariés de ces industries. Au nom de
la libre concurrence, de la sacro-sainte loi du marché, l'ouverture le
dimanche se trouvera donc à chambarder les conditions de travail d'un
nombre beaucoup plus important de salariés que les chiffres officiels le
laissent croire. Quant à l'argument concernant l'existence de lettres
d'entente et de clauses types dans les conventions collectives prévoyant
d'éventuels changements de la législation, il faut être
bien conscients qu'elles n'ont pas fait l'objet de débat sur le fond. Au
moment des négociations dans ce secteur, les priorités des
travailleurs et des travailleuses étaient tout autres et les discussions
sur les modifications aux heures d'ouverture étaient hautement
hypothétiques. Ce qui est clair aujourd'hui, c'est que les batailles
vont se faire au moment de la réouverture des conventions et que les
membres de nos syndicats affiliés dans les industries connexes ne sont
pas prêts à sacrifier leurs conditions de travail pour revenir 30
ans en arrière."
Une autre recommandation. "La CSD recommande que les
établissements commerciaux du secteur de l'alimentation demeurent
fermés le dimanche sauf ceux concernés par l'exception à
la loi prévoyant la limitation à trois employés en
même temps pour en assurer le fonctionnement." Je répète
donc à M. le ministre que, nous, nous demandons quatre en tout temps.
"La CSD recommande que le pouvoir déci-
sionnel concernant l'ouverture le dimanche des établissements
commerciaux du secteur de l'alimentation demeure au niveau provincial et
qu'à ce chapitre le gouvernement prenne ses responsabilités et
veille à la pleine application de la loi."
Je vais aller, finalement, à la conclusion. "La CSD
considère que le débat actuel sur l'élargissement des
heures d'affaires des établissements commerciaux en semaine et sur leur
ouverture le dimanche doit tenir compte de facteurs qui dépassent la
simple concurrence comme commerçant. Permettre l'ouverture des magasins
d'alimentation le dimanche, c'est, d'une part, affirmer la primauté des
lois du marché sur tout autre principe et, d'autre part, c'est faire fi
du devoir de l'État d'encadrer et de réglementer la vie
économique et commerciale de la société.
Le Président (M. Bélanger): Je vous invi tarais
à conclure, Mme la députée.
Mme Dupuis: En conclusion, j'appuie la. motion de mon
collègue de Pointe-aux-Trembles et demande que la
Fédération du commerce de la Confédération des
syndicats nationaux soit entendue à cette commission.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Alors
le prochain intervenant, M. le député de Beauce-Nord.
M. Audet: Merci, M. le Président. J'entends des "ah
non!"
Le Président (M. Bélanger): Parce qu'il veut que sa
femme sache qu'il était ici ce soir.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: M. le Président, quand même! Il y a des
gens qui nous écoutent.
Le Président (M. Bélanger): Excusez. S'il vous
plaît! Je vous en prie.
M. Jean Audet
M. Audet: M. le Président, je vais devoir voter contre la
motion. Je vais vous dire très rapidement pourquoi. Je vois le
député de Pointe-aux-Trembles qui soupire. D'abord, la
députée de Taillon nous dit dans son intervention en faveur de la
motion: On parle du projet de loi qui est déposé actuellement. Il
n'y a même pas d'amendement. Le ministre ne les a pas
déposés en commission. Il en a parlé en Chambre hier, mais
la procédure veut qu'habituellement, lorsque le ministre amende le
projet de loi, ce soit lorsqu'on procède à l'étude de la
loi article par article. Étant donné qu'on n'a pas
commencé à étudier le projet de loi, on ne peut pas
l'amen- der, on n'a pas commencé à l'étudier. L'Opposition
retarde le projet de loi délibérément.
Tantôt, le député de Pointe-aux-Trembles, dans la
présentation de sa motion, a peut-être échappé une
petite chose qui, je ne sais pas, inconsciemment - il parlait dans le cadre...
je pense qu'il lisait un document se référant à un
document ou à un mémoire. Je ne veux pas me tromper, mais il
semblait lire un certain document où il soulignait que, si le dossier en
est rendu où il en est aujourd'hui, c'est dû, en grande partie -
parce que la loi n'a pas été appliquée - au laxisme des
gouvernements. C'est ce qu'il a dit.
Je veux en venir là-dessus, M. le Président, au projet de
loi 59, parce que ça me chicote. Le projet de loi 59, projet de loi qui
a été adopté le 1er mars 1985, à l'article 5.2
où on parle de l'autorisation du ministre...
Le Président (M. Bélanger): La parole est au
député de Beauce-Nord. S'il vous plaît! M. le
député de Beauce-Nord.
M. Audet: Merci, M. le Président. On dit à
l'article 5.2 qu'un "établissement commercial opérant avec plus
de trois personnes, qui vend des produits visés au paragraphe 7 de
l'article 5 - des produits pharmaceutiques, hygiéniques et sanitaires -
ainsi que des denrées alimentaires et des menus articles - vous voyez
tout de suite à qui on peut se référer - à la date
de la sanction de la présente loi, n'est pas tenu de restreindre son
personnel à trois personnes ou de cloisonner la partie où
s'effectue la vente des denrées alimentaires, à la condition
qu'il obtienne une autorisation du ministre et que l'espace total
réservé à la vente des denrées alimentaires de cet
établissement commercial ne soit pas augmenté."
M. le Président, on a ouvert une brèche qui a
été importante à cette époque-là. On a vu
naître des établissements - appelons-les dépanneurs - qui
sont entrés directement en concurrence avec les gens qui ont des grandes
surfaces en alimentation, des gens qui vendent des produits sanitaires - du
Cornet, c'est des produits sanitaires - du papier de toilette, des choses comme
ça. La brèche a été ouverte ici, M. le
Président. Ce n'est pas nous qui l'avons ouverte, la brèche. Tout
ce temps-là, ça a traîné. Au niveau de l'application
de la loi, les mécanismes d'application n'étaient pas forts,
parce qu'il y en avait un paquet de gens qui se plaignaient. C'est pour
ça qu'on s'est retrouvés en commission parlementaire avec un
nouveau projet de loi; on n'avait pas le choix de le faire.
Si on va plus loin maintenant, M. le Président, la
députée de Taillon a dit: Oui, mais il y a eu des décrets
d'adoptés après, puis c'est vous autres qui les avez
adoptés. Oui, j'en conviens que la brèche a fait en sorte qu'en
1986 on a été obligés d'adopter un décret, mais
le 12 janvier 1985... Oui, oui, en 1986, c'est nous, mais le 12 janvier
1985, M. le Président, dans la Gazette officielle du Québec,
je n'étais pas ici, l'Industrie et Commerce, M le Président,
quand on a décidé de permettre aux Fruits grand prix, aux
Tournedos Super Boucherie...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, on laisse
le député de Beauce-Nord finir son intervention. Vous pourrez
intervenir après. S'il vous plaît!
M. Audet: ...à la venue du potager, à la
différence Super Boucherie, au magasin Le Quartier, la Boucherie des
Flandres, la Boulangerie Mon Village, à la Charcuterie du Marché,
Charcuterie Fantastica, Jardins des Halles, l'Épicerie des Halles,
Boucherie des Halles, Boucherie fine, La Volaillerie, et j'en passe. Je peux
vous en nommer, M. le Président, il y en a une liste comme
ça.
Quand on a fait ça, M. le Président, à qui a-t-on
porté atteinte? À qui en est-on venus à nuire dans le
marché? À qui en est-on venus à enlever de l'emploi, M. le
Président? À qui en est-on venus à donner de l'emploi
qu'on appelle "cheap labour", comme on dit souvent en commission, depuis qu'on
écoute les gens de l'Opposition? Qu'est-ce qui s'est passé dans
ce temps-là, M. le Président? Hier, dans mon intervention, j'ai
souligné un article du journal Le Devoir de 1984 où le
ministre de l'Industrie et du Commerce faisait part des problèmes qu'une
loi comme celle-là - ce qu'on appelait autrefois la loi du dimanche -
créait et qu'il fallait tendre vers d'autre chose, vers une
libéralisation graduelle. C'est pourquoi il avait fait, à ce
moment-là, la loi 59 où on parle des trois employés, mais
avec des exceptions et un pouvoir d'arbitrage du ministre, pouvoir d'arbitrage
qu'on vient d'enlever avec cette loi-là.
Quand cette loi-là va être adoptée, M. le
Président, les gens vont savoir à quoi s'en tenir, parce que
ça va être fini. Le ministre ne pourra arriver demain matin et
dire: Bon, bien, il y a une autre affaire. O.K., en vertu de la loi, je
l'autorise à le faire, ce que la loi 59 permettait. Mais ça n'a
pas de bon sens, M. le Président, des affaires comme ça.
Ça n'a pas de bon sens.
Et on peut en parler aussi de la libéralisation de certains
secteurs d'activité. La députée de Taillon va certainement
se rappeler la libéralisation de la coiffure. Qu'est-ce qui s'est
passé dans la coiffure, M. le Président?
Mme Marois: ...la coiffure.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
on laisse...
Mme Marois: ...la question de fait.
Le Président (M. Bélanger): Question de
règlement
Mme Marois: Question de règlement. Est-ce quo lu
député, M le Président, est ce que le député
pourrait lire le paragraphe jusqu'au bout?
Le Président (M. Bélanger): Ce n'est pas une...
Mme Marois: Parce que. sans ça, il fausse les
éléments.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, M. le
député de Taillon.
Mme Marois: Le ministre a...
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Taillon, s'il vous plaît! Vous pourrez rectifier
après, si vous le désirez, mais on va laisser le
député finir son intervention. Chacun son tour.
Mme Marois: Le ministre Johnson a signé...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
madame! Je vous en prie, M. le député de Beauce-Nord.
Une voix: II a fini votre job.
M. Audet: M. le Président, je vous remercie d'avoir
rappelé à l'ordre la députée de Taillon, parce
qu'en vertu de notre règlement, à l'article 212, elle doit le
faire immédiatement après mon intervention et non pas pendant. Si
vous voulez me laisser continuer, je vais terminer.
Une voix: Ha, ha, ha! C'est bon!
M. Audet: On va revenir au paragraphe 5.2. Une demande
d'autorisation doit être faite au ministre avant le 1er septembre 1984.
L'autorisation du ministre est publiée à la Gazette officielle
du Québec. Bon, O.K. On a fini le paragraphe. Maintenant, on va
aller au décret du 12 janvier 1985 qui a été signé
par le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Rodrigue Biron. Moi, c'est ce
que je lis ici. à moins que je ne me trompe, mais c'est ce que je lis
ici. Et, en haut, c'est marqué Gazette officielle du Québec,
le 6 avril 1985 où on a ouvert le bordel dans les heures
d'affaires.
Une voix: Oh non!
M. Audet: Bien, voyons donc! Les halles, les marchés
publics...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
M. Audet: C'est le bébé de qui, ça?
Le Président (M. Bélanger): M le
député de Beauce-Nord, adressez-vous à la
présidence, s'il vous plaît, pour éviter de susciter des
débats.
Des voix:...
Une voix: M. le Président, qu'il vienne donc au
présent, c'est du passé.
Le Président (M. Bélanger): Messieurs, s'il vous
plaît! Je vous en prie! Il nous reste trois minutes. Ne les gâchons
pas.
Une voix: Demandez à la CSN.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
il nous reste trois minutes, ne les gâchons pas. M. le
député de Beauce-Nord.
M. Audet: M. le Président, je trouve ça dommage,
parce que, vous savez, j'ai fait attention pour ne pas parler souvent, parce
que je sais que, des fois, je suis porté...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Audet: ...à m'emporter, M. le Président, vous le
savez, étant Beauceron. On est des gens de sang chaud et on est des gens
qui... Mais quand je parle, par exemple, j'aime ça être capable de
dire ce que je veux dire. Si les gens de l'Opposition avaient la décence
au moins, je ne dis pas d'écouter ce que je dis, mais de me laisser
parler, toujours!
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Audet: Alors, si on revient, M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
M. Audet: Si on. M le Président...
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez vous
adresser à la présidence, on va continuer. Je vous en prie.
Une voix: N'écoutez pas, mais laissez-le parler.
M. Audet: M. le Président, on vient aux halles... Je vous
l'ai dit tantôt, les marchés publics. Les marchés publics,
M. le Président, ça s'en vient à ça. Ça,
là, c'est dans le décret. Si la députée de Taillon
veut le lire, c'est dans le décret du Î2 janvier 1985, la
date...
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît!
Alors, on s'abstient de commentaire et on écoute M. le
député de Beauce-Nord.
M. Audet: Je sais que j'ai peut être un accent ou un parler
qui est différent des autres. Mais, vous savez, la Beauce, c'est une
société distincte en elle-même.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Audet: Alors, je continue là-dessus.
Le Président (M. Bélanger): Compte tenu de l'heure,
la commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à minuit)