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(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Bonjour. La commission de l'économie et du travail se
réunit ce matin afin de procéder à une consultation
générale et à des auditions publiques sur la situation et
les perspectives de l'énergie électrique au Québec.
Ce matin, nous recevons l'Association des constructeurs de routes et
grands travaux du Québec, dans un premier temps. Alors, je les
inviterais à s'approcher de la table des témoins.
Bonjour madame, messieurs. Il me fait plaisir de vous recevoir ce matin
et, dans un premier temps, vous expliquer un petit peu nos règles de
fonctionnement. Vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de votre
mémoire et, par la suite, il y aura une période d'échange
avec les parlementaires.
Dans un premier temps, je prierais votre porte-parole de s'identifier,
d'identifier les gens qui l'accompagnent et de bien vouloir procéder
à la présentation de votre mémoire. Je vous remercie.
Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec
M. Mailhot (Yves): Mme la ministre, MM. et Mmes de la commission,
il me fait plaisir de vous présenter, à ma droite, M. Pierre
Roux, président du conseil d'administration de Thiro Itée et
responsable du comité de la sous-traitance à l'ACRGTQ; à
mon extrême gauche, Me Gisèle Bourque, directrice des services
juridiques à l'Association; à ma gauche, M. Gabriel Richard,
directeur général de l'Association, et je suis Yves Mailhot,
président du conseil d'administration.
L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec, incorporée en 1944, regroupe sur une base volontaire
quelque 600 entrepreneurs oeuvrant dans le domaine des travaux de génie
civil, de voirie et de transport d'énergie dont ils exécutent
environ 90 % du volume total octroyé au secteur privé.
Parmi les donneurs d'ouvrage importants, notons Hydro-Québec, la
SEBJ, le ministère des Transports, le ministère de
l'Environnement, celui de l'Agriculture, la Société
québécoise d'assainissement des eaux, les communautés
urbaines, les municipalités, etc. La grande majorité des contrats
obtenus par les entrepreneurs le sont par le biais de soumissions publiques et
sont exécutés, dans la totalité des cas, selon des plans
et devis approuvés par des ingénieurs et des architectes.
Plusieurs des membres de l'ACRGTQ oeuvrent pour le compte de la
Société d'énergie de la Baie James et réaliseront
la plupart des travaux de construction du plan de développement.
À l'ACRGTQ, existe un comité des entrepreneurs de la Baie James
qui agit en leur nom pour effectuer des représentations auprès de
la SEBJ visant à ce que soient réglés des problèmes
d'intérêt commun.
Plusieurs d'entre eux ont acquis une solide expérience relative
à ces travaux lors de la réalisation de la phase I de la Baie
James. S'ajoutent à ceux-ci une vingtaine d'entreprises, formant
l'Association des entrepreneurs en transport d'énergie, qui se sont
spécialisées exclusivement dans le domaine de la construction de
lignes de transport d'énergie, de postes de transformation, de la
construction et de l'entretien de réseaux de distribution, de
l'installation de poteaux et d'ancrages, d'émondage et d'installation de
conduites souterraines et qui agissent comme sous-traitants pour le compte
d'Hydro-Québec, et à sa satisfaction, depuis de très
nombreuses années.
Les activités et les orientations d'Hydro-Québec, quant
à la mise en valeur de l'électricité au Québec,
intéressent grandement nos entrepreneurs qui exécutent des
travaux pour le compte d'Hydro-Québec et de la SEBJ et c'est pourquoi
l'Association des constructeurs de routes et grands travaux tient à se
faire entendre dans le cadre de la présente consultation publique sur le
plan de développement d'Hydro-Québec 1990-1992, Horizon 1999.
Le projet de plan de développement d'Hydro-Québec comporte
un grand nombre de considérations et de propositions visant à
doter le Québec d'un réseau de production
d'électricité, de transport et de distribution qui doit
être fiable et suffisant pour répondre adéquatement aux
besoins grandissants de ses citoyens. Les remarques de notre mémoire
portent essentiellement sur deux volets du plan, soit, premièrement,
l'amélioration de la qualité du service et, deuxièmement,
la réalisation des nouvelles installations. Nous ajoutons quelques
remarques sur l'environnement et les exportations. Nous traitons des
investissements proposés et de leurs conséquences dans
l'industrie de la construction et dans l'économie
québécoise. Et, avant de conclure, nous formulons deux
recommandations afin que l'exécution du plan de développement se
réalise dans l'intérêt des intervenants et des
Québécois.
Programme d'amélioration de la qualité du service.
L'abondance des données qui sont énumérées dans le
plan de développement nous
signifie qu'Hydro-Québec connaît bien son réseau,
ses défaillances et les améliorations nécessaires pour la
satisfaction de sa clientèle qu'elle connaît aussi très
bien. Hydro-Québec propose un programme d'engagements financiers
directement associé à l'amélioration de la qualité
du produit de l'ordre de 4 200 000 000 $, pour la période 1989-1996. Ce
programme coûtera à Hydro-Québec 200 $ par année par
abonné moyen ou 90 $ par année par consommateur domestique qui,
en moyenne, lui verse 775 $ par année. Comme les clients
d'Hydro-Québec lui paient tellement plus, ils méritent
incontestablement ce programme d'amélioration de la qualité du
service.
Réalisation des nouvelles installations. Depuis 1982,
Hydro-Québec a pu répondre à une croissance de 52,7 % de
ses ventes régulières d'électricité au
Québec, soit 6,6 % par année. Aujourd'hui, Hydro-Québec
prévoit une croissance annuelle moyenne de 2,6 %, 2 % et 1,1 % selon,
respectivement, des scénarios forts, moyens et faibles. D'ici à
l'an 2000 et selon les mêmes scénarios, la croissance totale
prévue est donc respectivement de 26 %, 20 % et 11 %. D'ici à
l'an 2000, et même selon le scénario fort, la croissance totale
serait deux fois moins importante que celle expérimentée au cours
des huit dernières années. Pour croire en cette croissance si
réduite, II faut souscrire à trop d'hypothèses et c'est
pourquoi nous ne croyons pas aux scénarios de croissance tant
réduits. Môme le scénario fort nous apparaît
faible.
Que les scénarios soient moyens ou forts, il nous semble bien
évident que tous les projets futurs devront être entrepris
progressivement d'ici à l'an 2000 et mis en service au fur et à
mesure entre 1995 et 2007.
Les complexes Grande Baleine et NBR sont les plus critiques et les plus
importants. Le complexe Grande Baleine devra être mis en service durant
les années 1998, 1999 et 2000; cela signifie que les travaux de
construction des infrastructures routières devront débuter
dès cet automne. Il faudra que les travaux de construction au chantier
débutent en 1992 et que toutes les autorisations gouvernementales soient
préalablement obtenues; autrement, les Québécois
manqueront d'électricité à la fin de cette
décennie. L'émission des autorisations gouvernementales en 1992
représente un défi qu'Hydro-Québec et le gouvernement du
Québec devront relever en prenant, dès maintenant, toutes les
mesures appropriées. Le complexe NBR sera également requis
dès l'an 2000, progressivement, si Hydro-Québec conclut les
contrats d'exportation prévus de 3500 mégawatts. Sans les
exportations, il sera quand même requis pour les besoins des
Québécois, mais à partir des années 2003 et
2004.
L'environnement. Dans le cas des installa tions hydroélectriques,
les modifications écologiques sont énormes, à cause de
l'envergure des installations et des réservoirs. À la Baie James,
elles touchent cependant un petit nombre de personnes, soit quelque 10 800
autochtones. Les conditions de vie de la population, des poissons, des animaux
et des oiseaux sont changées, mais les modifications arrêtent avec
la fin des travaux. Le problème du mercure demeure l'un des enjeux
environnementaux importants et, dans son plan, Hydro-Québec l'aborde de
façon globale, de sorte que des solutions adéquates sont
envisageables. Dans le cas des installations nucléaires ou de turbines
à gaz, les modifications écologiques sont beaucoup moindres,
puisque les barrages et les réservoirs ne sont pas requis. Blés
touchent cependant un grand nombre de personnes lorsque les installations
doivent être faites près des grands centres urbains. Les
conditions de vie de la population, de la faune et de la flore ne sont pas
appréciablement modifiées durant la mise en oeuvre, mais sont
susceptibles de subir des bouleversements durant l'exploitation, à cause
d'accidents catastrophiques et du déclassement final.
La pollution atmosphérique. Il est reconnu qu'une exploitation
correcte de centrales hydroélectriques n'occasionne pas de pollution
atmosphérique. C'est toutefois incertain dans le cas de centrales
nucléaires et à turbines à gaz. Nos considérations
sur l'environnement nous portent à conclure que le Québec n'a pas
d'autre choix que d'accepter la proposition de plan de développement
d'Hydro-Québec avec des centrales hydroélectriques.
Dans son plan, Hydro-Québec nous démontre qu'elle se
soucie de l'environnement et qu'elle a un programme fort élaboré
pour réduire au minimum l'impact sur l'écologie et sur les
conditions de vie, suite à l'expérience acquise dans le cadre de
la réalisation de la phase I de la Baie James. Et, constatant que le
coût des installations nucléaires et à gaz est prohibitif,
deux à trois fois plus élevé que celui des centrales
hydroélectriques, et que le contenu québécois est
peut-être deux fois moindre, le Québec n'a pas les moyens
d'entreprendre maintenant le virage vers ces centrales alternatives. Cependant,
elles seront probablement les seules réalisables lors du prochain
siècle, et nous devrons être prêts, techniquement et
financièrement. HydroQuébec devra alors être suffisamment
avancée pour proposer des centrales nucléaires, à turbines
à gaz ou autres non polluantes qui pourront être
démantelées économiquement et rapidement après leur
vie utile, sans laisser un héritage empoisonné qui couvre des
siècles.
Investissements et retombées. Hydro-Québec propose, selon
le scénario moyen, des investissements de 62 000 000 000 $ courants
durant la période 1990-1999. En moyenne, pendant les neuf prochaines
années, 1 860 000 000 $ seront injectés dans le secteur du
génie civil, soit autant que 90 % des autres immobilisations dans ce
secteur. Dans l'hypothèse qu'à la Baie James,
les ouvriers travailleront neuf mois par an, 24 000 d'entre eux seront
requis, soit environ 21 % des travailleurs de la construction au Québec.
Les emplois créés dans le domaine de la construction
nécessiteront une masse annuelle salariale probable de 960 000 000 $,
soit environ 50 % de l'investissement annuel projeté.
Bien sommairement, l'industrie de la construction remettra à nos
instances gouvernementales, chaque année, en impôts et en taxes,
la somme approximative de 417 000 000 $, ou 22 % de l'investissement. Nous
sommes persuadés que des études économiques
sérieuses démontreraient que ces 22 % sont au moins 33 %. Nous
sommes également persuadés que 33 % s'appliquent aux autres
parties de l'investissement qui génèrent des activités
économiques au Québec.
L'analyse sommaire que nous avons réalisée nous porte
à prétendre que, compte tenu des intérêts
payés ailleurs et du contenu québécois moyen de 75 % pour
les centrales hydroélectriques, l'investissement de 62 000 000 000 $
contribuera pour 40 000 000 000 $ aux activités économiques du
Québec. Et, à 33 %, ces retombées dans les assiettes
fiscales de nos gouvernements totaliseront 13 300 000 000 $ en neuf ans, ou 1
480 000 000 $ en moyenne par année. Pouvons-nous nous passer des
retombées de l'investissement proposé par
Hydro-Québec?
Nos recommandations. Nous sommes convaincus que le plan de
développement proposé par Hydro-Québec doit être
exécuté. Nous sommes également convaincus qu'il doit aussi
être réalisé dans l'intérêt des intervenants
et des Québécois et, pour cela, nous désirons vous faire
part de deux recommandations portant sur la sous-traitance et le
règlement des différends.
La sous-traitanoe. L'Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec a déployé, depuis quelques
années, beaucoup d'énergie afin de sauvegarder le recours
à la sous-traitance, tant au niveau d'Hydro-Québec qu'aux autres
différents paliers gouvernementaux. En effet, comme nous l'avons
démontré dans notre présentation, une vingtaine
d'entreprises formant l'Association des entrepreneurs en transport
d'énergie se sont spécialisées principalement dans le
domaine de la construction de lignes de transport d'énergie, de postes
de transformation, de la construction et de l'entretien de réseaux de
distribution, de l'installation de poteaux et d'ancrages, d'émondage et
d'installation de conduites souterraines. Chacune de ces entreprises s'est vu
confier, au fil des années, depuis et même avant la formation
d'Hydro-Québec, des contrats de sous-traitance à un rythme
constant. En fait, plusieurs de ces entreprises n'existent que grâce
à l'octroi de ces contrats. (10 h 15)
Le 29 juin 1984, Hydro-Québec et le syndicat de ses
employés de métiers ont signé une entente dans le cadre
d'un programme d'amélioration de la qualité du service, entente
qui s'intégrait à la convention collective en vigueur pour la
période 1986-1988. Cette entente imposait des limites quant aux
effectifs du secteur privé qu'Hydro-Québec peut utiliser en
matière de construction et d'entretien de lignes de distribution et
prévoyait qu'à compter de 1988 Hydro-Québec
réduirait les effectifs d'entrepreneurs privés d'un maximum de
1000 personnes-année à un maximum de 500 personnes-année
pour exécuter les travaux sur les lignes de distribution, diminution qui
a été atteinte à ce jour.
Depuis quatre ans, à plusieurs reprises, notre Association a
rencontré à ce sujet les dirigeants d'Hydro-Québec, ainsi
que les différents ministres et députés, afin de les
sensibiliser à cette situation déplorable qui prévaut et
leur demander de faire en sorte qu'une telle politique de la part
d'Hydro-Québec soit contrée, tant dans l'immédiat que pour
le futur.
Lors d'une rencontre, intervenue le 2 juillet 1987, avec l'honorable
Robert Bourassa ainsi qu'en présence des représentants de notre
association, celui-ci a décrété la tenue d'une commission
parlementaire afin de faire la lumière sur ce sujet d'importance
capitale qui met en jeu l'économie du Québec et
l'intérêt des consommateurs. Les conclusions de cette commission
étaient claires: votre prédécesseur, Mme la ministre,
demandait à Hydro-Québec de maintenir l'équilibre entre le
faire et le faire faire.
Au moment où nous avons déposé notre mémoire
auprès de la présente commission, la loi assurant la
continuité des services d'électricité
d'Hydro-Québec n'était pas encore présentée. Nous
avons alors cru qu'il était fort à propos de traiter du sujet de
la sous-traitance dans le cadre des consultations publiques concernant le
développement d'Hydro-Québec, car dans le contexte d'un
investissement de 4 200 000 000 $, force nous est de conclure qu'une partie
importante des travaux s'y rattachant seront exécutés par les
effectifs des entrepreneurs du domaine de l'entreprise privée.
Pour le bien-être de la population et du gouvernement, il est
impératif que les coûts d'exécution de ces travaux soient
réalisés à un montant le plus bas possible, tout en
combinant une technicité et une efficacité sous l'égide de
l'excellence. Par ailleurs, la proposition d'un plan de développement
implique un volume de travail tellement élevé que la
participation des entrepreneurs à ces travaux ne nuira en rien au
personnel syndiqué d'Hydro-Québec. Au contraire, dans une
perspective de relève et de croissance modérée de son
effectif, Hydro-Québec doit renforcer la qualité de son
recrutement, tant externe qu'interne, et maintenir à la fine pointe du
progrès la compétence technique, commerciale ou de gestion de
l'ensemble de la main-d'oeuvre.
Si l'on considère la performance relative des monteurs de ligne
d'Hydro-Québec à celle des
monteurs privés, on constatera qu'il existe un écart
significatif en faveur des entrepreneurs privés, ce qui, par le fait
môme, met en doute tout le bien-fondé de la politique
antérieure de la sous-traitance d'Hydro-Québec. Selon une
enquête effectuée à la demande de l'ACRGTQ, les coûts
des travaux inhérents au montage des lignes de distribution sont
outrageusement plus élevés lorsqu'ils sont exécutés
par le personnel permanent d1 Hydro-Québec que lorsqu'ils
sont confiés en sous-traitance aux entrepreneurs. Le travail
effectué par les entrepreneurs privés est de 65 % plus efficace
que celui réalisé à l'interne. Si Hydro-Québec
continuait d'appliquer la politique de limitation à la sous-traitance,
elle irait à rencontre de la philosophie de gouvernement actuel, qui
préconise un recours soutenu au secteur privé, en majeure partie,
parce que les entreprises privées peuvent offrir un service d'aussi
haute qualité à un meilleur coût.
Le gouvernement se doit d'être vigilant, tant à titre de
représentant de la population québécoise qu'à celui
d'actionnaire unique de la société d'État, afin que
l'équilibre demeure entre les travaux qu'Hydro-Québec
réalise avec ses effectifs et ceux qu'elle confie à l'entreprise
privée. En adoptant la Loi assurant la continuité des services
d'électricité d'Hydro-Québec, le gouvernement a
adopté une position démontrant incontestablement sa grande
préoccupation relativement à l'intérêt des
Québécois, et nous en sommes grandement satisfaits.
En effet, Hydro-Québec a, grâce à cette loi,
récupéré son droit de gérance. Il est primordial
que le gouvernement s'assure que cette situation se poursuive, même
après la date d'expiration de ladite loi, soit le 13 décembre
1992.
Le règlement des différends dans le domaine de la
construction. La pratique courante Implique que le contrat soit accordé
au plus bas soumissionnaire conforme. C'est celui qui a le moins d'argent pour
réaliser le projet et c'est à lui qu'il est confié.
Voilà pourquoi le plus bas soumissionnaire conforme est tellement
vulnérable aux dépassements du coût de sa soumission.
Lorsque des augmentations imprévues à la soumission
surviennent, l'entrepreneur doit poursuivre l'exécution du projet et
défrayer immédiatement, à même ses fonds, les
factures des matériaux, les salaires et les charges sociales. Par la
suite, il doit, à toutes fins pratiques, harceler le donneur d'ouvrage
afin d'obtenir de façon légitime le remboursement de ces
coûts additionnels.
Nous prétendons que lorsque les dépassements
imprévus de coûts par rapport à ceux établis dans la
soumission sont substantiels, il est Important que des modalités de
règlement de différends soient établies. À
défaut d'entente entre les parties à la suite de l'utilisation de
la procédure ayant pu permettre d'arriver à un règlement
du différend, nous favorisons l'arbitrage.
Le Président (M. Bélanger): Alors, s'il vous
plaît, je vous inviterais à conclure. Il reste une minute. Je vous
en prie.
M. Mailhot: J'ai terminé. Depuis sa création en
janvier 1987, le Centre d'arbitrage commercial national et international
devient de plus en plus une institution crédible, etc.
Alors, simplement pour conclure, à la suite de ces
considérations, il apparaît essentiel de suppléer à
notre système judiciaire actuel, en utilisant un mécanisme
alternatif permettant de favoriser un règlement rapide des
différends. Nous recommandons donc l'instauration d'un service des
réclamations bien structuré, suivi d'un recours à
l'arbitrage, si les parties n'arrivent à aucune entente.
Nous vous remercions.
Le Président (M. Bélanger): Bien, je vous remercie
beaucoup. Alors, Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, M. Mailhot, mesdames et messieurs, je voudrais
vous remercier de votre présence à cette commission et de la
présentation de votre mémoire, mémoire que je
considère comme fort pertinent, par rapport au mandat de cette
commission parlementaire.
C'est un mémoire qui aborde tous les éléments du
plan de développement d'Hydro-Québec, autant dans une perspective
de court terme que dans une perspective de long terme. Votre argumentation sur
la sous-traitance et le règlement des différends m'est
également apparue fort étoffée et constructive.
Vous suggérez que d'ici au début du prochain siècle
le Québec devra possiblement se tourner vers le nucléaire,
même si cette forme d'énergie a des retombées
économiques moindres pour le Québec. Et dans la perspective
où l'on devrait éventuellement recourir à une
énergie nucléaire, quels moyens pourraient être mis en
oeuvre pour maximiser, selon vous, les retombées économiques
positives, au Québec? Est-ce que vous pouvez nous en dire davantage?
M. Mailhot: Je ne sais pas si notre directeur
général ne pourrait pas avancer là-dessus...
M. Richard (Gabriel): Mme la ministre, comme vous savez, les
centrales nucléaires sont fabriquées à l'extérieur
du Québec. Alors, le moyen, c'est d'établir des facilités
pour les fabricants québécois de s'implanter dans ce domaine de
fabrication des centrales nucléaires. Je pense qu'il faudrait
peut-être commencer par des centrales plus petites, pour
développer la technologie et permettre aux Québécois de la
maîtriser et de produire ces centrales-là.
Mme Bacon: Est-ce que vous pensez qu'on a suffisamment les
connaissances et ce qu'on
appelle le "know-how" pour y arriver, ici, en ce moment, à court
terme, moyen terme ou long terme? Comment vous l'envisagez, en termes de
temps?
M. Richard (Gabriel): Je pense que comme ces centrales
nucléaires existent ailleurs qu'au Canada il y a possibilité
d'aller chercher la technologie nécessaire. Le grand problème que
je peux voir, c'est comment faire pour disposer des déchets radioactifs
une fois que les centrales ont terminé leur vie utile. C'est le grand
problème de l'heure. Vous avez vu ce matin encore, dans Le Soleil,
qu'il y avait une commission qui relève de l'Énergie atomique
du Canada et qui cherche à déterminer la possibilité
d'enterrer ces déchets-là en grande profondeur, et ils
connaîtront la réponse dans trois, quatre ans.
Mme Bacon: À la page 33 de votre mémoire, vous
indiquez que lors de pannes d'électricité la souplesse, la
mobilité, la disponibilité des entrepreneurs privés
constituent un réel coussin de sécurité pour
Hydro-Québec. Quelle est la pratique courante d'Hydro-Québec, par
rapport au recours aux services d'entrepreneurs dans des situations de panne de
courant? Est-ce qu'ils ont souvent recours à vous?
M. Roux (Pierre): Pas tellement, Mme la ministre. La convention
collective dit actuellement que, quand il y a des pannes, les premiers à
se rendre sur les lieux, ce sont les employés d'Hydro-Québec du
secteur. Après ça, on va dans le secteur environnant. Presque
jamais, depuis trois ans, je dirais, que les entrepreneurs sont demandés
pour aller effectuer la réparation des pannes.
Mme Bacon: À la page 26 de votre mémoire, vous vous
référez à une enquête effectuée pour le
compte de votre association et qui démontre un écart
considérable dans les coûts de travaux inhérents au montage
des lignes de distribution, selon vous, selon qu'ils sont
réalisés par le personnel d'Hydro-Québec ou par des
sous-traitants. Un des facteurs explicatifs serait au niveau du temps du
travail quotidien. Quels sont les autres facteurs? Il doit y en avoir d'autres
qui contribuent à cet écart-là.
M. Roux: D'après moi, ce n'est pas tellement sorcier. Aux
appels d'offres que les con-tracteurs ont à faire, c'est qu'il est
demandé que le contracteur ou celui qui a le contrat soit au pied du
poteau à 8 heures le matin, de 8 heures à midi et de 13 heures
à 17 heures. Ça, c'est dans l'appel d'offres. La comparaison
qu'on peut faire avec les syndiqués d'Hydro-Québec, c'est qu'eux
devraient normalement partir du garage d'Hydro-Québec à 8 heures
pour se rendre au poteau. Je pense qu'on sait tous qu'ils ne partent pas
effectivement à 8 heures juste le matin. Il y a aussi, dans la
convention collective, des périodes de temps pour que ces gens-là
aillent manger. On a prouvé, je crois, lors de la dernière
commission parlementaire, que le rendement des entrepreneurs en transport de
distribution était de 65 % supérieur à celui des
employés d'Hydro-Québec. Ça, c'est à
l'intérieur même des contrats que les contracteurs signent avec
Hydro-Québec.
Mme Bacon: M. Roux, est-ce qu'il y a eu des études qui ont
été faites, pour prouver les chiffres que vous avancez?
M. Roux: Les chiffres qu'on avance ont été
demandés par Hydro-Québec. C'est des études
qu'Hydro-Québec a demandées. Ce sont des copies que nous avons
eues, que nous avons déposées en commission parlementaire, il y a
deux ou trois ans.
Mme Bacon: D'accord. Vous abordez aussi dans votre mémoire
l'aspect du règlement des différends entre les entrepreneurs et
HydroQuébec, suite à la tenue de soumissions publiques. Est-ce
qu'il vous serait possible de nous renseigner aujourd'hui sur la
fréquence des litiges sur le remboursement adéquat additionnel,
par rapport à ce qui est convenu suite à un appel d'offres
d'Hydro-Québec? Il y a des gens qui sont venus ici qui se sont plaints
des périodes de temps que ça prend pour les remboursements par
Hydro-Québec des frais encourus. Est-ce que les différends
surviennent dans tous les genres de contrats ou surtout, par exemple, dans le
cas des plus grands contrats et peut-être-Une voix: Mme la
ministre...
Mme Bacon: Juste une seconde. Est-ce que les écarts de
coûts par rapport à la soumission initiale sont
généralement d'une ampleur relativement grande ou
raisonnable?
M. Roux: Bien, cela dépend si on parle d'un contrat
spécifique, de la construction d'une ligne de transport
d'énergie; il y a beaucoup de facteurs qui viennent en ligne de compte:
la disponibilité des matériaux, l'horaire de travail qu'on a
proposé. On a connu dernièrement - et ça, je pense que ce
n'était pas habituel, en tout cas - le conflit de travail qui existait
à HydroQuébec. Je crois que toutes les demandes qui
étaient dirigées vers les représentants
d'Hydro-Québec, ceux qui avaient à faire le travail journalier,
étaient au ralenti. Alors, quand on parle de paiement, je peux vous
assurer que, dans tous les départements, que ce soit dans le "plantage"
de poteaux, dans l'entretien de lignes et de transport d'énergie, dans
les postes de sous-stations, dans les lignes de transmission, je crois que
toutes les compagnies... D'ailleurs
l'Association, l'AETE, s'est plainte à plusieurs reprises et est
allée à Hydro-Québec dire: Bien, écoutez, les
paiements n'entrent pas, on a à faire face à nos clients, nos
fournisseurs, il faut les payer, nous autres aussi. Alors, nous autres, la
réponse qu'on est obligés de faire à ce moment-là,
c'est: Bien, écoutez, on va vous payer quand Hydro va nous payer.
Alors, ça, c'est un problème qui, on nous l'assure,
devrait être réglé sous peu. Mais, quand on arrive au point
de vue de réclamations avec Hydro-Québec, le gros
problème, d'abord, c'est de monter cette réclamation-là.
C'est souvent à cause d'un manque de matériel, d'un changement de
design au cours de la construction, d'additions, de changements de
quantités dans les excavations, puis, quand on a fait notre
réclamation, c'est de la déposer et, après ça,
d'aller la discuter. Et là, on a un sérieux problème: on
ne voit pas la journée où on va avoir un règlement.
Déjà, depuis plusieurs années, on se plaint, on dit:
Écoutez, quand une réclamation est déposée, est-ce
qu'il y a moyen d'avoir un horaire pour faire face à l'étude de
la réclamation et, après ça, en venir à une
conclusion? On attend encore des rencontres avec les préposés
d'Hydro-Québec pour établir les règles du jeu concernant
une réclamation. (10 h 30)
Mme Bacon: On nous a parlé de délai jusqu'à
120 jours, par exemple, pour des paiements de factures. On nous dit
qu'Hydro-Québec, habituellement, prend une période, utilise 45
jours. Chez vous, c'est combien de temps?
M. Roux: Moi, je vous dirais, Mme la ministre, que,
présentement, parlons d'un cas bien spécifique, la distribution,
il n'y a aucun paiement qui se fait en dedans de 120 à 150 jours.
Mme Bacon: La raison principale du faible degré du recours
à l'arbitrage au plan national serait, selon votre mémoire, le
peu de confiance des donneurs d'ouvrage dans la conduite, le déroulement
de l'arbitrage qui surviendra quelques années après la signature
du contrat.
À votre avis, est-ce qu'il existe d'autres facteurs qui
pourraient expliquer cette situation-là? Est-ce que vous pourriez nous
en indiquer d'autres s'il y en avait?
M. Roux: Au point de vue de l'arbitrage? Mme Bacon:
Oui.
M. Richard (Gabriel): Mme la ministre, je pense réellement
que les donneurs d'ouvrage hésitaient à recourir à
l'arbitrage parce qu'ils n'avaient pas confiance dans un organisme
crédible pour gérer cet arbitrage. Je ne pense pas qu'il y ait
d'autres raisons. Cet organisme, que vous connaissez, qui est le Centre d'ar-
bitrage commercial national et international du Québec, existe depuis
trois ans. il a géré plusieurs arbitrages. Actuellement, il y a
12 arbitrages en cours et 2 sont extrêmement importants: un est un litige
de 21 000 000 $ et un autre de 44 000 000 $. Ces deux arbitrages-là se
font par le biais d'un tribunal de trois arbitres d'experts reconnus et nous
nous attendons que les décisions soient rendues dans six mois.
Mme Bacon: Mais vous recommandez aussi qu'Hydro-Québec
instaure un service spécifique de règlement des différends
avec ses partenaires. Est-ce que vous pourriez quand même nous
décrire le déroulement typique du règlement d'un
différend avec Hydro-Québec dans le contexte actuel?
M. Richard (Gabriel): Dans le contexte actuel,
Hydro-Québec n'a pas de service spécifique de
réclamations. C'est ce que nous demandons autant à
Hydro-Québec qu'à la SEBJ, d'Instituer un service impartial,
séparé des chantiers, pour faire l'étude des
réclamations et proposer des règlements aux entrepreneurs. Nous
ajoutons et nous pensons que c'est extrêmement essentiel
qu'Hydre-Québec et la SEBJ procèdent de cette
façon-là. Nous ne voulons pas que tous les litiges soient
réglés par arbitrage. Cela n'aurait pas de bon sens. Nous
prétendons que, si l'arbitrage existait, la possibilité de
recourir à l'arbitrage existait et qu'un tel service de
réclamations existait, ce service de réclamations serait beaucoup
plus efficace parce qu'il verrait que, s'il ne réussit pas à
régler le différend, l'arbitrage pourrait être retenu.
Mme Bacon: D'accord, merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Orford.
M. Benoit: M. Mailhot, j'aimerais revenir un peu sur les
avantages de la sous-traitance dans votre mémoire, aux pages 33, 34 et
35. Trois petites questions. D'abord, à la page 33, vous mentionnez:
"Les entrepreneurs, disparaissant progressivement à la suite de la chute
brutale du nombre de contrats octroyés par la société
d'État... " Est-ce qu'on a des chiffres là-dessus? Est-ce que
vous êtes capables de nous fournir des chiffres à l'effet
qu'effectivement il y a une disparition de la sous-traitance à
Hydro-Québec et que vous en êtes pénalisés?
M. Roux: Avant la dernière convention collective, il y
avait eu le fameux programme PAQS où - on parle toujours d'un sujet bien
spécifique - il y avait 1000 hommes par année qui travaillaient
dans ce domaine. Et, à la fin de cette convention collective, les
entrepreneurs ont diminué de 50 %. Ce qui veut dire que 50 % des
effectifs qui faisaient le travail ne sont plus
là aujourd'hui. Ça, c'en est un cas.
M. Benoit: Toujours dans la sous-traitance, à la page 34,
vous dites: "Elle doit prendre - Hydro-Québec - les dispositions qui
s'imposent pour réduire la durée des interruptions de service."
Vous y avez répondu légèrement tantôt. Est-ce que
vos compagnies sont dans tout le Québec? Est-ce qu'elles peuvent
répondre aussi rapidement qu'Hydro-Québec en cas d'urgence?
Est-ce que vos gens sont aussi bien formés en cas d'urgence que les gens
d'Hydro? Pouvez-vous m'expliquer ça un peu?
M. Roux: Pour vous donner un exemple, il y a deux ans, dans la
période des fêtes, dans le bout de Hull, il y a eu une
interruption de sept ou huit jours où les employés
d'Hydro-Québec se sont présentés pour réparer les
pannes et, dans la môme région, il y avait un entrepreneur qui
avait, à la disponibilité d'Hydro-Québec, une vingtaine
d'équipes. Il aurait pu se rendre sur les lieux immédiatement.
Mais, durant tout le conflit, ils n'ont jamais utilisé l'entrepreneur en
question parce que l'entente ou la fameuse clause 34 qui existait disait que le
surtemps devait être fait par des employés d'Hydro-Québec,
et, quand le territoire ou le secteur était vidé par les
employés d'Hydro-Québec, ils allaient en chercher ailleurs.
Alors, ils sont allés jusque dans la région du Richelieu pour les
déménager là-bas, pour aller faire la réparation
des pannes.
M. Benoit: Alors que, si on vous avait fait entrer, ce qui a
duré six jours aurait duré quoi, une journée ou deux?
M. Roux: Écoutez, le nombre d'heures ou de temps,
là... Mais je sais que c'aurait été peut-être
beaucoup plus vite.
M. Benoit: Troisième et dernière question. À
la page 35, vous dites: "...la société d'État se dirige
à coup sûr vers l'abandon de la sous-traitance qui la placera en
situation d'otage..." Encore là, est-ce qu'on a des chiffres ou si ce
sont seulement des impressions que vous avez, que vous êtes en train de
disparaître de la sous-traitance?
M. Roux: En tout cas, à mon humble avis - si vous
mé permettez, M. le Président - c'était avant la
dernière convention qui a été imposée à
Hydro-Québec. On se voyait aller. C'était la demande
première du syndicat d'Hydro-Québec d'abolir complètement
la sous-traitance à Hydro-Québec. Maintenant, je pense qu'on se
sent un peu plus rassurés, pour les trois prochaines années, en
tout cas.
M. Benoit: Est-ce que qu'on peut être convaincu que, quand
on donne en sous-traitance, vos gens ont les mêmes critères
d'environnement, les mémos critères de sécurité?
Sûrement qu'Hydro-Québec, à cet égard-là, a
les plus hauts standards. Est-ce qu'on peut être assurés que
l'entreprise privée a ce même genre de standards là,
à tous égards, que, quand vous faites brûler de la
"branchaille" sur le bord de la route, un feu de forêt ne prendra pas,
etc.? Est-ce qu'on a ces mêmes standards là dans l'entreprise
privée que ceux qu'Hydro-Québec a?
M. Roux: On est assujettis à toutes les lois existantes du
Québec, à tous les décrets, nommez-les. Je crois que la
qualité du travail doit accompagner ça aussi et les
spécialistes, les représentants d'Hydro-Québec sont
là pour nous le rappeler. Si vous avez déjà vu un appel
d'offres d'Hydro-Québec, tout est inclus dedans.
M. Benoit: Merci.
M. Mailhot: En plus, il y a, évidemment, tous les
programmes de sécurité qui s'appliquent à ces
travaux-là comme aux autres travaux. L'entrepreneur est toujours
obligé, dans des travaux d'une certaine importance, de soumettre un
programme de sécurité dans lequel il va expliquer ses
procédures de travail et les moyens qu'il prend pour protéger
l'environnement, la santé, la sécurité. Alors, quand le
programme est accepté, normalement, les garanties devraient être
là.
M. Benoit: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la
ministre.
Mme Bacon: Dans votre mémoire, vous traitez de la
réalisation des programmes d'amélioration de la qualité du
service d'Hydro-Québec - je reviens encore là-dessus - et vous
évaluez aussi le coût de ces programmes à 90 $ par
abonné résidentiel, pendant sept ans. Compte tenu
qu'Hydro-Québec peut amortir le coût des investissements sur une
période plus longue, l'impact sur les consommateurs nous semble plus
faible, au cours des prochaines années. Les sommes consacrées par
Hydro-Québec, par exemple, à l'émondage, est-ce que
ça vous semble adéquat?
M. Richard (Gabriel): Malheureusement, Mme la ministre, nous
n'avons pas étudié dans ce détail-là... Tout ce que
nous avons voulu vous démontrer, c'est que le coût du programme
PAQS correspond à un peu plus de 10 % de la facture que les
abonnés paient à Hydro-Québec, chaque mois. Et, comme ils
paient 10 fois plus, nous prétendons qu'ils ont bien le droit d'avoir un
tel programme d'amélioration de la qualité du service.
Mme Bacon: Je reviendrai peut-être tantôt.
Le Président (M. Bélanger): Bien. M le
député de Drummond, vous avez une question?
M. St-Roch: Oui, M. le Président, merci. La semaine
dernière, un groupe est venu nous dire que peut-être qu'il
faudrait regarder au niveau des réseaux de distribution. Or, parmi les
missions d'Hydro-Québec, à l'heure actuelle, en plus de la
construction des barrages et du transport, il y a la distribution au
consommateur, qu'il soit du milieu résidentiel, commercial ou
industriel. À votre avis, est-ce que c'est une voie qui pourrait
être poursuivie, une certaine forme de privatisation, soit vers les
municipalités, les MRC ou les entreprises privées du
réseau de distribution, en tant que tel?
M. Mailhot: C'est une grande question, ça. Je ne peux pas
dire qu'on a étudié cette question-là.
M. Roux: Moi, je peux vous dire qu'on est en train de
l'étudier à la ville d'Arthabaska, dont je suis maire depuis
plusieurs années. On est en train d'étudier la possibilité
de racheter d'Hydro-Québec le système d'éclairage. Mais,
encore là, ce seront des coûts auxquels on aura à faire
face. À la suite de l'étude de ce document-là, on va
être capables de se prononcer, mais, présentement, je ne le sais
pas.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Bacon: Oui, M. le Président. Peut-être pour
revenir au plan de développement d'Hydro-Québec, on dit, à
la page 15 de votre mémoire, que ça pourrait injecter près
de 2 000 000 000 $ par année dans le secteur du génie civil, ce
qui est 90 % des autres immobilisations dans ce secteur. De quelle
façon, pensez-vous, l'industrie de la construction peut-elle s'adapter
à cette demande, parce que ça peut être très
exigeant? Est-ce que vous croyez qu'il faudra créer de toutes
pièces de nouvelles entreprises, à cause de cette demande? On
nous a parié beaucoup ici de, peut-être, une rareté de
main-d'oeuvre, à cause du plan de développement
d'Hydro-Québec, au cours des prochaines années. Est-ce que vous
avez la même inquiétude?
M. Richard (Gabriel): Mme la ministre, comme vous le savez, il y
a quelque 120 000 travailleurs de l'industrie de la construction, actuellement,
au Québec. Avec la nouvelle façon de former de nouveaux
travailleurs par le biais du Comité de formation professionnelle dans
l'industrie de la construction et avec l'appui que nous attendons impatiemment
du ministère de l'Éducation pour avoir les sommes
nécessaires pour donner ces cours-là, nous ne voyons
réellement pas beaucoup de problèmes à satisfaire la
demande en main-d'oeuvre pour réaliser ces travaux-là. Il ne faut
pas oublier que les ouvriers de la construction sont polyvalents. Ils peuvent
aussi bien travailler dans un édifice commercial que sur un chantier de
construction de génie civil, etc. Si on pense aux opérateurs
d'équipement lourd, opérer une grue pour un édifice, c'est
comme l'opérer pour la construction d'un barrage.
Comme l'augmentation de l'activité ne se fait pas à tous
les niveaux en même temps, soit dans le résidentiel, dans le
commercial, dans l'institutionnel ou dans les travaux de génie civil,
nous pensons que 20 % à 25 % de travaux de plus dans le domaine du
génie civil, c'est réalisable au Québec, surtout, comme je
le disais tout à l'heure, compte tenu de la possibilité,
maintenant, de former de nouveaux travailleurs et de les incorporer dans la
grande famille des travailleurs de l'industrie de la construction.
Mme Bacon: Vous ne craignez pas de pénurie de travailleurs
de la construction, par exemple.
M. Richard (Gabriel): En autant que tous les gens
concernés poussent dans la même direction, que les syndicats ne
mettent pas de bois dans les roues pour empêcher la formation de nouveaux
travailleurs, je ne crois réellement pas qu'il y ait de problèmes
majeurs pour la formation des ouvriers de la construction.
Mme Bacon: On sait qu'au Québec on compte beaucoup sur la
petite et la moyenne entreprise. Est-ce que vous croyez que ces grands travaux
là vont voir se créer plusieurs nouvelles petites entreprises,
par exemple, dans les régions?
M. Richard (Gabriel): C'est certain que, dans tous ces grands
contrats là, l'apport de la petite entreprise est essentiel. Ces petites
entreprises là vont pouvoir se développer et grandir. C'est pour
ça, d'ailleurs, que nous vous parlions d'un mécanisme de
règlement des différends. C'est justement pour permettre à
ces entreprises-là, lorsqu'elles ont un problème avec
Hydro-Québec ou la SEBJ, de le régler rapidement, de façon
à être capable de continuer et de prospérer. Le potentiel
est là. Si on se souvient de la phase I de la Baie James, on avait les
mêmes inquiétudes et, pourtant, la phase I s'est
réalisée avec le concours de tous les
Québécois.
Mme Bacon: D'accord. Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Alors, un mot pour vous
souhaiter la bienvenue devant cette commission parlementaire et pour vous
dire
que, malheureusement, je ne partage pas tellement l'analyse ou la
satisfaction de la ministre quant au contenu de votre mémoire. Je me
dois de vous dire, en toute conscience, que je ne trouve pas de très
bonne guerre de profiter d'une commission parlementaire, où on essaie
d'élucider ou d'éclaircir les opinions générales
quant à l'avenir de l'énergie au Québec, pour "blaster",
littéralement, les travailleurs syndiqués d'Hydro-Québec.
Si vous aviez à "blaster" le syndicat d'Hydro-Québec, il fallait
le faire ailleurs. Je trouve que c'est vraiment de très mauvaise guerre
de profiter d'un événement aussi important que la
réorganisation ou la reconsidération de l'énergie par le
biais d'une commission parlementaire sur toute la situation
énergétique au Québec.
J'aimerais resituer certaines choses dans leur contexte. Vous parlez des
monteurs de lignes. Vous parlez des coûts du montage de lignes, etc.,
dans votre mémoire. Je me dois d'en parler parce que vous l'abordez
d'une façon très précise et, je dirais, entre guillemets,
insultante pour les travailleurs syndiqués d'Hydro-Québec. Vous
ne les traitez pas de vaches et de lâches, mais c'est tout juste. (10 h
45)
Sur l'ensemble du territoire de la Baie-James, à partir du
kilomètre 257 sur la route, c'est-à-dire au niveau de la
rivière Rupert jusqu'à Kuujjuarapik, sur la baie d'Hudson, et
à partir de Chisasibi, Wiminchi, Eastmain et Rupert, les villages cris
de la côte de la Baie-James, jusqu'à la Caniapiscau, ce qui
représente quelque chose, est-ouest, de l'ordre de 600 kilomètres
en ligne droite et, nord-sud, d'à peu près 500 kilomètres
en ligne droite, il y a deux monteurs de lignes de transport et il y a trois
monteurs de lignes de distribution ensemble, en même temps, sur le
"shift" de 8 heures à 18 heures. Comment voulez-vous qu'en mettant des
travailleurs dans des conditions semblables, sur un territoire aussi vaste, en
mettant deux monteurs pour le transport à temps plein et trois monteurs
pour la distribution à temps plein, l'on réussisse à
être efficace? Ces travailleurs-là doivent se promener dans
n'importe quelle circonstance, été comme hiver, peu importe la
température, avec leur camion-nacelle parce qu'Hydro-Québec n'a
pas de camion-nacelle d'une place à l'autre. Il faut qu'ils se
transportent avec leur camion-nacelle pendant des heures et des heures, sinon
des jours et des jours, eux-mêmes, parce qu'Hydro-Québec n'a pas
été capable de prévoir des camions-nacelles dans chacune
des places. S'il y a une panne à LG 4 et, en même temps, une
à Caniapiscau, 500 kilomètres de route plus au sud, eh bien, pour
aller d'une panne à l'autre, il faut que ces mêmes travailleurs se
promènent avec leur camion-nacelle et ce sont les mêmes qui le
font parce qu'il n'y en a pas d'autres pour le faire. Ils sont trois monteurs
pour la distribution sur l'ensemble du territoire de la Baie-James. Et c'est
comme ça.
On a l'impression d'assister à une vaste manigance pour
dénigrer, pour désorganiser la structure interne
d'Hydro-Québec, pour faire en sorte de prouver qu'on ne peut pas faire
mieux que par la sous-traitance. Et je me dois de le préciser parce
qu'en ce qui me concerne je dois vous dire que la façon dont on aborde
le dossier de la sous-traitance par le biais d'une commission parlementaire sur
l'avenir de l'énergie au Québec, je trouve ça... Il y a un
minimum de manque de "fair-play" dans cette histoire-là.
J'ai le droit d'utiliser mon temps de parole à ma guise, M. le
député.
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît.
M. Mailhot: M. le député, notre intention
n'était pas, comme vous le dites, de "blaster" les travailleurs
d'Hydro-Québec. On croyait, cependant, qu'il était pertinent de
poser le problème de la sous-traitance dans toute cette
question-là parce que, quand on parle de la sous-traitance, à
notre avis, on parle tout simplement de la question des coûts qui sont
reliés aux opérations d'Hydro-Québec. Ce que vous dites au
sujet de la Baie-James, on est sensible à cette question-là.
Remarquez bien que les données que l'on avait à l'association ne
portaient pas sur les travaux qui étaient exécutés
à la Baie-James, mais plutôt sur les travaux de distribution qui
étaient exécutés. Et puis ce sont des données,
c'est une situation qui date d'il y a au moins trois ans. Alors, si la
situation s'est améliorée dans les régions en bas, je veux
dire, par rapport à Hydro-Québec, tant mieux et on espère
que, justement, effectivement, peut-être l'action qu'on a menée
sur le phénomène de la sous-traitance a peut-être
réveillé un peu, peut-être, un certain laisser-aller qui
pouvait être remarqué chez les travailleurs. Et on est très
heureux si, aujourd'hui, à votre avis, la situation s'est
améliorée, tant mieux.
M. Claveau: Je voulais tout simplement dire qu'il y a des tables
pour discuter de ça qui me semblaient plus pertinentes que celle qu'on a
aujourd'hui. C'est mon point de vue et je le maintiens.
En ce qui concerne fa sous-traitance, plus précisément la
sous-traitance - laissons les travailleurs tranquilles - vous dites, d'abord,
au début de votre mémoire, en page 23: "II convient tout d'abord
de préciser que le débat de la sous-traitance ne repose
aucunement sur un critère idéologique. " J'en conviens. Sauf que,
je continue un peu plus loin, j'arrive à la page 34 et vous dites: "Au
niveau de la société d'État, la politique
d'élimination de la sous-traitance imposée par le syndicat
interne s'inscrit clairement à l'encontre du cadre philosophique et
politique du gouvernement actuel... " Donc, vous dites, d'une part, en ce qui
vous concerne, que ce n'est pas
une question idéologique, mais, par contre, vous vous appuyez sur
une philosophie et une façon de voir, une politique gouvernementale qui
relève aussi d'une vision un peu idéologique de la
société, pour le moins, pour justifier le fait que le
gouvernement devrait aller à rencontre du syndicat d'Hydro-Québec
qui, lui, impose la sous-traitance à l'interne. Moi, je trouve, en tout
cas, qu'encore là il y a comme un petit problème
d'interprétation. Les syndicats d'Hydro-Québec n'ont jamais
parié de sous-traitance sur les grands travaux; tout ce qu'ils
demandent, c'est la réorganisation de la sous-traitance à
l'interne sur les contrats d'entretien et de réparation normale des
équipements existants. Là-dessus, il y a une entente de 1984 qui
existe, qui est là et les syndicats d'Hydro-Québec étaient
prêts, aux dernières négociations, à aller à
la demande d'Hydro-Québec pour respecter l'entente de 1984.
Alors, je me demande, pour une question d'à peu près 400
à 500 hommes par année sur l'ensemble de l'industrie de la
construction, vous êtes en train de monter un bateau pour dénigrer
fondamentalement tous les syndicats d'Hydro-Québec. Est-ce que c'est
bien ça tout le problème de la sous-traitance, 300 à 400,
peut-être 500 hommes par année sur l'ensemble de l'industrie de la
sous-traitance et de la construction au Québec?
M. Mailhot: À l'époque, M. le député,
quand la question est arrivée, pour l'ACRGTQ et les entreprises membres,
c'était plus qu'une question de 300 ou 400, c'était, à
notre point de vue en tout cas, la survie, je dis bien, d'un nombre important
d'entreprises qui, depuis plusieurs années, se spécialisaient et
gagnaient leur vie à effectuer des travaux pour Hydro-Québec.
Alors, avec le programme de diminution qui était proposé,
c'était bien clair qu'il y avait la moitié au moins des
entreprises du secteur qui disparaissaient tout simplement. Alors, c'est
sûr que vous ne devez pas être surpris si on a réagi un peu
durement, peut-être, à cette situation de fart. Tout ce qu'on a
demandé, c'est le rétablissement de la situation qui existait
avant. Alors, on était sur la défensive complètement sur
cette question-là. On a l'impression, maintenant, que les faits sont
rétablis. Alors, pour notre part, on est prêts à clore le
débat. Mais notre mémoire a été écrit dans
le contexte, justement, des négociations difficiles
d'Hydro-Québec avant, justement, la loi qui, à notre avis, a
probablement réglé le problème.
M. Claveau: Qu'est-ce que vous avez gagné,
essentiellement, avec la loi, par rapport à la situation
antérieure?
M. Roux: Choso cortaino, M le député, d'abord, dans
un premier temps, |e voudrais vous dire qu'on n'est pas venu ici pour "blaster"
le syndicat d'Hydro-Québec comme vous l'avez dit au tout début.
Mais qu'est-ce qu'on a gagné? C'est qu'on a possiblement
arrêté l'hémorragie: où on avait, en distribution,
1000 hommes par année avant, on s'est réveillé avec une
convention collective où les contracteurs sont tombés de 500.
Quand vous dites que c'était uniquement dans le contexte de la
distribution, moi, je peux vous dire que vous êtes réellement mal
informé, parce que, déjà, au point de vue de la
transmission, la clause 34 a déjà donné un contrat
à Hydro-Québec sur lequel un contracteur avait déjà
soumissionné et c'est les employés d'Hydro-Québec qui
l'ont fait, ce contrat-là.
M. Claveau: ..sur la...
M. Roux: Alors, c'était une porte qui était ouverte
et je suis sûr qu'au bout de quelques années on n'aurait plus
été là.
M. Claveau: Mais, dans le fond, le problème, c'est entre
1000 et 500, c'est l'entente de 1984. On parle de... Et là, les 1000, ce
n'est pas une obligation, c'est un maximum de personnes par année.
M. Roux: Ce n'est même pas 1000, c'est 500. Mais si vous
vous rappelez bien, par exemple, la demande du syndicat d'Hydro-Québec
concernant la sous-traitance, c'était l'abolition totale.
M. Claveau: Sauf que le syndicat d'Hydro-Québec n'aurait
pas eu besoin de la loi spéciale pour arriver au niveau de 500 et
s'entendre avec Hydro-Québec là-dessus.
M. Roux: Non, mais moi, je ne vous ai jamais dit que le syndicat
avatt besoin de la loi. C'est votre...
M. Claveau: Parlons de la question des règlements des
différends. Est-ce que vous trouvez normal qu'au moment où on se
parle, au moment où on ouvre des soumissions pour les contrats de la
deuxième phase de la Baie-James, 1989-1990, le prix de revient,
globalement, toutes choses étant égales par elles-mêmes,
avec les contrats de 1975, soit à peu près le même? Est-ce
que vous trouvez que, 15 ans plus tard, il est normal qu'on réussisse
à faire à peu près les mêmes travaux à peu
près au même prix? C'est le cas actuellement, entre autres, sur
les chantiers de LG 2A et de LG 1, qui sont des chantiers où on a
déjà ouvert des soumissions et qui sont quand même
relativement avancés au moment où on se parle.
M. Mailhot: Ce n'est pas normal, c'est sûr, et les
entreprises aimeraient bien mieux travaH-lor avoc des prix ajustés en
fonction des années qui passent. C'est la même situation qu'on
rencontre dans bien d'autres secteurs de l'in-
dustrie, où il faut se rendre bien compte que les prix n'ont pas
évolué au même niveau que le rythme de l'inflation et le
rythme des coûts. C'est lamême situation qu'on
connaît dans le domaine de l'assainissement des eaux en particulier,
où on travaille aujourd'hui à des prix d'il y a cinq ou six ans.
Alors, c'est juste pour vous dire que les entrepreneurs, contrairement
peut-être à ce qu'on pense, qu'ils travaillent toujours dans une
situation de paradis terrestre, c'est tout à fait le contraire. Les
entreprises du Québec travaillent dans des contextes extrêmement
difficiles où elles doivent faire des prodiges
d'ingéniosité et de productivité, etc., pour venir
à bout de rencontrer... D'ailleurs, la situation que vous mentionnez,
vous avez tout à fait raison de le dire, vous savez comme moi qu'il y a
au moins une entreprise qu'on connaît bien, Komo Construction, qui a
laissé sa peau dans un contrat de la Baie-James. Alors, ça en est
une. C'est un fleuron de l'industrie québécoise, Komo
Construction. Ce n'était pas une petite compagnie de rien.
C'était une compagnie importante et puis, dans un contexte donné
de coûts très bas et de soumissions très serrées,
Komo a dû baisser pavillon.
M. Claveau: Justement, puisque vous la nommez, j'y serais venu
probablement mais peut-être sans la nommer. Le cas de Komo est un bel
exemple. Comment voulez-vous ou par quel mécanisme au-delà d'un
mécanisme de négociation a posteriori serait-il possible
d'arriver à faire que lorsque Hydro-Québec ou la
Société d'énergie de la Baie James constate, à
l'ouverture d'une soumission, qu'un contracteur n'est pas dans les prix et que,
quels que soient les ajouts et les imprévus, etc. qu'il pourra
réclamer en cours de route et qui font, en tout cas, peut-être
partie de la dynamique globale, il ne rentrera pas dans les prix pareil...
Quelle serait la méthode de faire en sorte qu'on ne lui octroie pas le
contrat? Sacré diable!
M. Mailhot: Écoutez, on serait tout à fait d'accord
avec une méthode qui irait dans ce sens-là. Ça veut dire,
par ailleurs, que le donneur d'ouvrage accepterait, des fois, de payer pas mal
plus cher pour ses travaux. C'est sûr que, comme on l'a dit dans notre
mémoire, à un moment donné, le plus bas soumissionnaire,
il faut s'en rendre compte, c'est celui qui a le moins d'argent pour faire la
"job". C'est bien clair, ça. C'est sûr que quelqu'un qui n'a pas
d'argent, bien, il ne peut pas en donner plus. Il a de la misère
à en donner plus que l'argent qu'il a. C'est la situation qu'on
rencontre sur tous nos chantiers un peu partout. Il n'est pas sûr qu'il
ne faudra pas se pencher, finalement, sur cette question-là et se
demander si le régime du plus bas soumissionnaire, du mieux disant,
comme disent les Français, ne sera pas à réviser. Il y a
certains pays où ils ont des formules. Ils vont éliminer le plus
bas, ils vont éliminer le plus haut, ils vont prendre la moyenne et ils
vont aller mathématiquement comme ça. Il y a probablement
d'autres formules sur lesquelles il faudrait se pencher, mais c'est sûr
que le régime du plus bas soumissionnaire, ce n'est pas le meilleur
régime.
M. Claveau: Vous prêchez pour l'entreprise privée,
j'en conviens, chacun prêche pour son clocher, je n'ai pas de
problème à vivre avec ça du tout là. Sauf que, pour
reprendre le cas de Komo, dans le fond, le système veut, au
départ, que ce soient effectivement les contracteurs qui fassent le
contrat de la Baie-Jame. Mais étant donné ce qu'on a connu dans
ce contrat-là d'excavation et de coulage de béton souterrain
à LG 2A, on a été obligé, à toutes fins
pratiques - quand je dis "on", c'est la Société d'énergie
de la Baie James - pour réussir à prendre le devant sur les
retards des travaux et finalement à tout ramener à jour, de le
reprendre en régie interne et d'opérer avec son propre personnel.
Dans le fond, a ce moment-là, contrairement à l'opinion
générale qui veut que l'entreprise privée vienne à
la rescousse du public, dans ce cas-là, c'est plutôt le public qui
est venu drôlement vite à la rescousse du privé. J'aimerais
savoir dans le fond - et je pense qu'il y a des gens peut-être qui se
posent des questions dans toute la machine à partir de l'exemple de Komo
Construction - si on ne devrait pas repenser un modèle semblable
à celui de la première phase de la Baie-James où la SEBJ
était maître d'oeuvre de l'ensemble des chantiers. (11 heures)
M. Richard (Gabriel): Écoutez, M. Claveau,
premièrement, la SEBJ n'était pas obligée de continuer les
travaux avec ses effectifs. Dans cette histoire-là, il ne faut pas
oublier qu'il y avait une caution qui garantissait la performance de Komo et
c'est la caution qui a fait des appels d'offres pour la continuation des
travaux. La SEBJ a cru, dans un souci de sauvegarder la cédule du
projet, qu'il était préférable qu'elle réalise les
travaux avec ses propres effectifs, d'autant plus qu'il y avait à sa
disposition une équipe de gens qui étaient des experts dans la
construction de centrales souterraines. Elle aurait aussi bien pu
décider d'accorder le contrat aux autres soumissionnaires qui avaient
présenté des prix pour terminer les travaux. C'est fort possible
que le contrat aurait été terminé par l'entreprise
privée.
M. Claveau: Oui, sauf que...
M. Richard (Gabriel): C'est un choix de la SEBJ.
M. Claveau: Là, on a affaire à un contrat qui est
vraiment de la structure de base. On aurait pu, évidemment, probablement
s'embarquer
dans des dédales juridiques, etc., toutes sortes de choses qui
auraient fait qu'on aurait retardé les travaux encore plus que les
quelques mois de retard qui étaient pris. Mais, dans
l'échéancier total des opérations de LG 2A, la SEBJ ne
pouvait pas se permettre non plus, à mon avis, de prendre la chance de
retarder encore de six mois les travaux pour toutes sortes de choses.
M. Richard (Gabriel): La SEBJ n'avait pas à prendre de
chance. Elle avait demandé des soumissions aux entrepreneurs et elle a
décidé, après l'analyse des soumissions, de continuer
à exécuter les travaux elle-même. Il n'y avait pas de
retard impliqué dans cette histoire.
M. Claveau: Est-ce que vous ne trouvez pas, globalement, que les
contracteurs qui actuellement prennent des contrats sur les chantiers de la
Baie-James vont en bas du prix? Ils vont en bas du prix et ils sont tous... au
risque d'y laisser leur culotte, si vous me passez l'expression. Est-ce qu'il
n'y a pas là une espèce de... Quand on dit, dans votre
mémoire: II y a des choses qu'il faudrait calculer, les retards, les
intérêts, les choses qui ne sont payées, etc. Pourquoi
ça ne fait pas partie du prix de la soumission? Si tous entrepreneurs
considéraient ça dans leurs modalités de soumission, il
n'y aurait peut-être pas de problèmes en bout de piste. On ne
serait pas toujours en train de se battre en cour pour des ajouts, des extras,
des imprévus.
M. Richard (Gabriel): Le problème que vous mentionnez
là, en fait, c'est que les entrepreneurs qui étaient
spécialisés dans ce domaine de centrale hydroélectrique
n'avaient pas eu de centrale hydroélectrique depuis 1980. Il est
arrivé récemment de beaux contrats de centrale
hydroélectrique pour ces grands entrepreneurs et chacun essaie de
prendre un premier contrat pour enfin occuper leur personnel et leurs
équipements. Ce n'est pas vrai non plus de dire que tous les contrats
ont été soumissionnés à des prix bas. Il y en a
quelques-uns. Il y en a d'autres où la compétition a
démontré que l'écart était mince entre les prix.
Même quand on prend des contrats où le prix est très bas...
Et il y a une discussion qui se fait entre la SEBJ et l'entrepreneur, et
l'entrepreneur doit convaincre la SEBJ qu'il a, dans son programme de
réalisation des travaux, les effectifs et les méthodes et les
équipements nécessaires pour réaliser les travaux. Si tout
se passe comme prévu, qu'il n'y a pas de changements dans les conditions
du sol, de retards qu'il ne peut pas prévoir et ainsi de suite,
l'entrepreneur pourra probablement réaliser les travaux selon son prix.
On a déjà vu ça, dans le passé, des écarts
de prix de 25 %, 30 %. Pourtant, les entrepreneurs ont réussi à
réaliser les travaux, s'ils avaient les meilleures méthodes de
construction. Ce que nous disons, c'est que, quand il survient un
problème sur un chantier qui fart en sorte que l'entrepreneur subit un
dépassement de coûts, nous voulons qu'il y ait un mécanisme
rapide pour régler ce différend. Nous avons parlé de
l'arbitrage et c'est vraiment le moyen de résoudre ces
difficultés, parce que l'arbitrage peut se faire durant les travaux. Ce
n'est pas nécessaire d'attendre la fin. Lorsque l'arbitrage se fait,
l'entrepreneur peut poursuivre les travaux, sachant que le problème sera
réglé dans les cinq ou six prochains mois.
M. Mallhot: C'est sûr que le régime du plus bas
soumissionnaire, ce n'est pas le système idéal. On pourrait
peut-être dire, comme Churchill au sujet de la démocratie, que
c'est le moins mauvais des systèmes. Faute d'en trouver un meilleur, on
est pris pour vivre avec ça. C'est sûr qu'il peut y avoir toutes
sortes d'aménagements possibles, d'autres solutions. Une à
laquelle on pense, c'est, qu'au moins, si on est serré, si on a un
travail, on ait un mécanisme qui permette de régler les
problèmes assez rapidement. D'une façon plus globale, une autre
façon peut-être d'améliorer la situation - et là,
vous rejoignez une des marottes de notre association mais ce n'est
peut-être pas l'endroit pour en discuter ici - vous le savez ou vous
allez peut-être l'apprendre, nous favorisons depuis un certain temps -
puis nous avons un dossier là-dessus - la qualification professionnelle
des entrepreneurs. On cherche à trouver un système qui
permettrait justement, non seulement pour les travaux d'Hydro-Québec
mais "at large*, au Québec, pour tous les types de travaux, de trouver
une méthode qui ferait en sorte, en toute justice pour et le donneur
d'ouvrage et l'entrepreneur, de civiliser un peu le "Far-West" qu'on
connaît actuellement du système des soumissions et faire en sorte
que les entrepreneurs se qualifient peut-être mieux que maintenant pour
des types de travaux pour lesquels ils ont les ressources financières,
les ressources techniques, les ressources humaines, l'expérience, etc.,
à faire.
C'est un dossier dont vous allez entendre parler probablement au cours
des prochains mois parce que c'est un dossier qui nous tient à coeur,
mais c'est un gros problème. Je pense bien que vos interrogations
à cet effet-là sont très pertinentes, mais je pense que
ça vaudrait vraiment la peine, surtout à la veille d'imposants
travaux comme celui dont on parle pour HydroQuébec et les travaux dans
le domaine routier dont on parte aussi au ministère des Transports et
les autres, qu'on essaie ensemble de civiliser un peu notre procédure
d'octroi de contrats.
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez
remercier nos invités, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Je vous remercie de votre présentation devant
la commission qui. je pense,
va faire évoluer la situation en ce qui concerne toute la
question de l'octroi des contrats.
Quant à la question des travailleurs d'Hy-dro-Québec
elle-même, bien, moi, je me permets de continuer à affirmer que,
pour retrouver la fierté que l'on a dans la société
d'État ou que l'on avait envers Hydro-Québec comme
société, eh bien, il va falloir, un jour ou l'autre,
arrêter de taper sur la gueule de tout ce qui s'appelle travailleur
d'Hydro-Québec. Comment voulez-vous travailler à
l'intérieur d'une boîte, avec toute la conscience que ça
demande, quand tout le monde autour ne cesse de discréditer votre
ouvrage? Toutes ces choses-là sont liées. En tout cas, je
souhaite qu'on cesse d'utiliser toutes les tribunes pour en profiter pour leur
taper dessus. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Bacon: Je maintiens, M. le Président, que le
mémoire que nous avons devant nous et que nous venons de discuter est un
mémoire fort pertinent par rapport au mandat de cette commission parce
que vous abordez les éléments majeurs du plan
d'Hydro-Québec et vous proposez aussi des orientations qui sont,
à long terme, sur l'énergie électrique du Québec,
sans avoir oublié les retombées économiques, les
investissements, les équipements requis, besoins
d'électricité, environnement et combien d'autres sujets
Importants.
Encore une fois, je pense que, malgré nos différences
d'opinions, on se doit de traiter nos invités avec respect quand ils
viennent nous rencontrer pour discuter avec nous. J'espère que les
quelques sautes d'humeur du député d'Ungava vont connaître
un adoucissement au cours de cette journée. Je vous remercie d'avoir
été avec nous et d'avoir discuté avec nous de ce dossier
fort important.
Encore une fois, c'est une contribution à la commission
parlementaire qui n'est pas négligeable. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, la
commission de l'économie et du travail remercie les représentants
de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec
de leur participation à ses travaux et invite à la table des
témoins l'Association des manufacturiers d'équipement
électronique et électrique du Canada, section Québec.
Association des manufacturiers
d'équipement électrique et
électronique
du Canada, section Québec
Bonjour, messieurs. Je vais vous expliquer rapidement la
procédure: vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de
votre mémoire et il y aura une période d'échanges avec les
parlementaires par la suite. Alors, je vous prierais, dans un premier temps,
d'identifier votre porte-parole, de présenter l'équipe qui
l'accompagne et de procéder à la présentation de votre
mémoire. Je vous remercie.
M. Marcoux (René): Merci. J'ai avec moi: à ma
droite, le vice-président du Conseil québécois de l'AMEEEC
et président-directeur général de Harris Farinon Canada
inc., M. Pierre Bernier; immédiatement à ma gauche, un membre du
Conseil d'administration du Conseil québécois de l'AMEEEC et
vice-président principal et adjoint au président de Pirelli
Cables inc., M. Robert Cloutier; le secrétaire général du
Conseil québécois de l'AMEEEC, M. Michel G. Tremblay, et
moi-même, René Marcoux, président du Conseil
québécois de l'AMEEEC et vice-président exécutif
chez ABB.
Mme la ministre, mesdames et messieurs, distingués membres de la
commission parlementaire de l'économie et du travail, permettez-moi de
vous remercier au nom du Conseil québécois de l'Association des
manufacturiers d'équipement électrique et électronique du
Canada pour cette occasion que vous nous offrez d'exposer notre point de vue
sur la situation et les perspectives de l'énergie électrique au
Québec. Avant cet exposé, je crois tout de même utile de
vous présenter brièvement cette association qui, si elfe est
méconnue de plusieurs, constitue de fait une importante association
industrielle au Canada.
L'AMEEEC regroupe plus de 200 grandes et petites entreprises canadiennes
qui fabriquent de l'équipement, des pièces et des systèmes
électriques et électroniques. Elle est reconnue comme
porte-parole du secteur électrique et électronique au Canada. Les
membres de l'AMEEEC approvisionnent un marché national dont la valeur
dépasse 19 000 000 000 $. Leurs exportations s'élèvent
à 5 000 000 000 $. Au Québec seulement, plus de 40 000 personnes
travaillent dans ce secteur qui représente une masse salariale d'environ
1 000 000 000 $ par année.
Le Conseil québécois de l'AMEEEC représente ainsi
les principaux manufacturiers d'équipement électrique et
électronique au Québec et considère qu'il lui appartient,
dans ce débat sur la situation et les perspectives de l'énergie
électrique au Québec, de représenter et de défendre
la position de ses membres, en particulier face au plan de développement
d'Hydro-Québec.
Qu'est-ce qui anime ce plan de développement? De toute
évidence, il s'agit de la volonté d'Hydro-Québec
d'améliorer la qualité du service qu'elle offre aux
Québécois. À cette fin, la société
d'État s'est fixé des objectifs précis en matière
de fiabilité, de continuité de service et de service à la
clientèle. Voilà un projet louable, mais il faut
reconnaître qu'Hydro-Québec ne fait ici rien d'autre que de
répondre aux attentes maintes fois exprimées des clients de tous
les secteurs, résidentiel, commercial et industriel.
Le Conseil québécois de l'Association des manufacturiers
d'équipement électrique et électronique du Canada croit
que les objectifs qu'Hydro-Québec s'est donnés sont à la
fols réalistes et exigeants et qu'ils pourront être atteints
à la condition toutefois qu'Hydro-Québec s'en donne les
moyens.
Dans son plus récent plan de développement, la
société d'État semble s'y engager clairement. Je cite:
"D'ici le milieu de la décennie quatre-vingt-dix, nous prévoyons
engager plus de 4 000 000 000 $ dans les différents programmes
destinés à améliorer la fiabilité de nos
installations et la qualité de notre service." Pour le Conseil
québécois de l'AMEEEC, c'est là une note encourageante. En
effet, l'actuel plan de développement d'Hydro-Québec peut
contribuer de manière significative au progrès et au
développement d'une industrie importante, celle des équipements
électriques et électroniques.
Pour qu'une telle perspective se réalise, nous croyons toutefois
qu'il y a une condition essentielle: Hydro-Québec doit recourir à
une stratégie de partenariat avec l'industrie tout au long de la
réalisation de ce plan. Entre les politiques complexes qui
découragent au lieu de stimuler et une approche pragmatique et
intégrée à tous les niveaux, il y a un choix à
faire, un choix qui pourrait faire en sorte que les projets
électrotechnologiques québécois entraîneraient enfin
des retombées plus importantes. Malgré quelques progrès,
nous croyons qu'il reste encore beaucoup à faire, mais nous croyons
également qu'il n'est pas nécessaire ici de réinventer la
roue. Nos provinces voisines, elles, sont déjà passées aux
actes en pratiquant un partenariat constructif dans le secteur de
l'électricité.
Qu'est-ce qu'un partenariat pourrait impliquer en termes concrets? Parmi
les initiatives souhaitées, le Conseil québécois de
l'AMEEEC propose, en particulier, la mise en place de programmes
d'échange de personnel entre les secteurs public et privé. Nous
pourrions ainsi assurer une meilleure formation des ressources humaines, tout
en favorisant la création de liens étroits et une meilleure
collaboration entre les secteurs sur une base permanente. Encore une fois, il
reste beaucoup à faire pour établir un véritable
partenariat durable dans le secteur de l'électricité au
Québec, mais l'ampleur du plan de développement
d'Hydro-Québec nous semble propice pour mettre en place une teiie
collaboration sur des bases solides. Ce plan peut donc être
considéré comme un défi de société. (11 h
15)
D'autres éléments du plan de développement
d'Hydro-Québec retiennent l'attention de l'Association des
manufacturiers. Ainsi, le Conseil québécois de l'AMEEEC approuve
la stratégie d'Hydro-Québec de miser sur un scénario de
demande forte, tout en planifiant les activités de construction en
fonction du scénario de demande moyenne. De plus, le Conseil recommande
à
Hydro-Québec de procéder à l'attribution de
contrats globaux plutôt que de fractionner en une multitude de
sous-contrats. Une telle approche permettra non seulement d'optimiser les
coûts, ce qui n'est déjà pas négligeable, mais
facilitera d'autant la conquête des marchés d'exportation par les
fournisseurs. Cependant, nous croyons que le scénario d'un accroissement
de la demande d'électricité de 2 % par an, au cours des 16
prochaines années, est trop faible. Si le taux de croissance devait
s'avérer plus élevé, il pourrait en effet y avoir un
risque pour notre industrie. Les délais d'ingénierie et de
production du matériel requis pour les nouvelles installations plus
puissantes que celles initialement prévues pourraient alors être
trop courts pour nous permettre d'y parvenir tout en intégrant
nous-mêmes les critères du développement durable.
Considérons un autre scénario. Si HydroQuébec
devait se tourner vers les moyens de production d'appoint comme les centrales
thermiques, nous subirions un recul au plan de la qualité de
l'environnement. Le Conseil québécois de l'AMEEEC
considère qu'un taux de croissance de la demande de 2,5 %
représente un scénario plus réaliste et nous incitons
vivement HydroQuébec à trouver des moyens afin d'écouler
ses surplus de production et, comme nous le disions la semaine passée,
de réaliser des profits et de former un fonds de développement
pour développer de nouvelles techniques environnementales et
prévoir l'après-nucléaire actuel. De plus, notre
société d'État s'évitera ainsi de devoir recourir
à des moyens plus polluants pour répondre à la
demande.
Parlons maintenant du partenariat comme approche dynamique. Pour ce
faire, nous allons considérer cinq domaines: l'amélioration de la
qualité du service, l'offre, la demande et le développement
durable, la tarification, les investissements étrangers et
l'international.
L'amélioration de la qualité du service.
Hydro-Québec s'est clairement engagée, dans son plan de
développement, à améliorer la qualité de son
service. L'industrie que j'ai l'honneur de représenter ici partage
entièrement ce souci, d'autant plus que nous sommes nous-mêmes
acheteurs d'électricité. À ce titre, les interruptions de
courant, pour des périodes aussi brèves que quelques secondes ou
même mini-secondes, peuvent entraîner chez nous des coûts
considérables. Nous sommes toutefois convaincus qu'avec la collaboration
de l'industrie HydroQuébec sera en mesure d'atteindre ses objectifs en
termes de satisfaction de sa clientèle, qu'elle soit
résidentielle, commerciale ou industrielle.
Par ailleurs, la politique de planification des approvisionnements
d'Hydro-Québec devrait faire l'objet d'une consultation avec
l'industrie. Sur ce point, le Conseil québécois de l'AMEEEC
recommande au gouvernement un processus de consultation interministériel
conjoint avec des repré-
sentants de l'industrie, dans le cadre d'un comité consultatif.
Nos membres se retrouvent en effet trop souvent avec des carnets de commandes
en dents de scie parce que Hydro-Québec passe ses commandes trop tard.
Une concertation efficace avec les fournisseurs accrédités
permettrait, à notre avis, de stabiliser la production et de maximiser
les retombées économiques.
Comme deuxième point: l'offre, la demande et le
développement durable. De toutes les formes d'énergie,
l'électricité est certainement la plus propre, pour ne pas dire
la moins polluante. Si les grands projets de production d'énergie
électrique peuvent affecter l'environnement, nous le reconnaissons comme
tout le monde. Il n'en demeure pas moins que l'électricité est la
seule forme d'énergie actuellement utilisée commercialement dont
l'impact sur l'environnement est concentré à la source, donc
contrôlable. Dans un tel contexte, les industries membres de l'AMEEEC
s'appliquent à concevoir des produits à efficacité accrue,
en tenant compte des plans auditif et visuel. Notre défi sera
d'accroître la popularité de ces produits, compte tenu de leur
efficacité environnementale. L'introduction des
électrotechnologies a ainsi déjà commencé à
avoir un impact bénéfique sur le plan énergétique.
Ces nouveaux procédés à haute performance
énergétique remplacent peu à peu les techniques
traditionnelles de fabrication, moins efficaces et alimentées par les
hydrocarbures. L'industrie peut aussi accroître encore davantage son
efficacité énergétique grâce à l'installation
de systèmes informatisés de commande et de contrôle.
Le Conseil québécois de l'AMEEEC est convaincu que
l'efficacité énergétique souhaitée passe par la
participation d'un plus grand nombre d'intervenants ainsi que par des
programmes d'information et de suivi soigneusement articulés. Le Conseil
souhaite donc qu'Hydro-Québec coordonne son action avec ces intervenants
et tient à l'assurer que l'industrie que nous représentons
s'inscrit d'emblée dans ce processus.
Troisièmement, la tarification. L'électricité
bénéficie d'une position concurrentielle favorable par rapport
aux autres formes d'énergie. Il n'y a donc pas lieu de se surprendre
qu'environ 70 % des logements au Québec soient chauffés à
l'électricité et que le taux de pénétration du
chauffage électrique dans les nouvelles constructions soit de 94 %.
Cependant, nous croyons que les hausses de tarifs proposées par
Hydro-Québec dans le secteur résidentiel risquent de ralentir la
pénétration du chauffage électrique. Actuellement, le
marché québécois représente près de 50 % de
tout l'équipement de chauffage électrique vendu au Canada. Deux
importants manufacturiers ont des usines au Québec, mais ils craignent
de devoir faire des mises à pied si Hydro-Québec tente de
décourager l'utilisation de l'électricité pour le
chauffage des résidences et des institutions.
L'industrie du chauffage électrique recon- naît la
nécessité de bien gérer la demande
d'électricité en période de pénurie avec l'aide,
notamment, des systèmes de biénergie et des thermopompes. Mais il
ne s'agit pas des seules solutions possibles. Cette industrie souhaite donc
continuer à collaborer avec Hydro-Québec, comme par le
passé, et jouer ainsi un rôle de premier plan dans la
planification de notre avenir énergétique.
L'investissement étranger. Hydro-Québec contribue au
développement économique de la province, entre autres, par le
biais des tarifs réduits à l'égard de certains grands
projets industriels. Et comme nous l'avons déjà nous-mêmes
reconnu, la pratique de vente d'électricité à des prix
compétitifs aux investisseurs étrangers a certainement fait ses
preuves au cours des dernières années.
Le Conseil québécois de l'AMEEEC croit cependant qu'il y
aurait lieu de maximiser l'impact économique de ces ententes si la
notion de faire faire au Québec en était partie
intégrante. De plus, le gouvernement pourrait intervenir auprès
des entreprises bénéficiaires afin qu'elles procèdent chez
nous à une transformation plus poussée de leurs produits.
Cinquièmement, le partenariat québécois dans le
domaine énergétique, une plaque tournante pour l'international.
Les investissements que devra consentir Hydro-Québec dans le cadre de
son plan de développement sont considérables et auront un impact
certain sur l'économie québécoise. Dans ce contexte,
permettez-moi de répéter que le partenariat entre
Hydro-Québec et l'industrie de l'équipement électrique et
électronique du Québec est non seulement désirable mais
essentiel. Cette alliance stratégique représente, à notre
avis, le plus sûr moyen d'optimiser les retombées
économiques engendrées par le développement
énergétique au Québec. En effet, les dollars consentis au
plan de développement ne retrouveront leur pleine valeur que dans la
mesure où ils seront canalisés, de façon
stratégique, à l'intérieur du réseau manufacturier
québécois. Si le développement durable fait appel à
un changement d'attitude, le partenariat proposé par le Conseil
québécois de l'AMEEEC passe, lui aussi, par cette voie.
Hydro-Québec, via sa filiale d'Hydro-Québec International,
a accès à d'importants contrats à l'étranger. C'est
par l'intermédiaire de firmes de génie-conseil agissant comme
maître d'oeuvre qu'elle peut profiter de ces occasions d'affaires. Le
Conseil québécois de l'AMEEEC croit, pour sa part, qu'il serait
avantageux que tous les manufacturiers québécois
d'équipements électriques et électroniques fassent partie
intégrante de cette démarche initiale, plutôt que
d'être simplement impliqués comme sous-traitants. En effet, ces
contrats internationaux constituent des véhicules de choix pour faire
valoir la technologie québécoise, tandis que son implication en
aval seulement du processus lui permet au plus de satis-
faire les besoins de ses clients locaux. En ce sens, le Conseil tient
à réitérer avec force sa préférence pour
l'octroi de contrats globaux dans le secteur du développement
énergétique québécois et étranger.
Mesdames et messieurs, en guise de conclusion à cette
présentation, j'aimerais rappeler à votre attention les
principaux points que les manufacturiers d'équipement électrique
et électronique du Québec défendent non seulement à
l'égard du plan de développement d'HydroQuébec, mais aussi
à l'égard de l'avenir énergétique du Québec.
J'aimerais rappeler que nous le faisons ici à titre de partenaire
à part entière du développement économique du
Québec dont la préoccupation fondamentale est d'en assurer le
plein essor.
Le Conseil québécois de l'AMEEEC croit que les objectifs
d'amélioration de la qualité du service qu'Hydro-Québec
s'est donnés dans son plus récent plan de développement
sont à la fois réalistes et exigeants et qu'ils pourront
être atteints si Hydro-Québec s'en donne les moyens, en
collaboration avec ses partenaires du secteur privé. Le Conseil
québécois de l'AMEEEC approuve la stratégie
d'Hydro-Québec de miser sur un scénario de demande forte, tout en
planifiant des activités de construction en fonction du scénario
de demande moyenne. Par contre, nous croyons que le scénario d'un
accroissement de demande d'électricité de 2 % par an, au cours
des 16 prochaines années, est trop faible et comporte des risques pour
la capacité de notre industrie à répondre au taux de
croissance élevé. Le Conseil soutient donc un scénario de
croissance de la demande basé sur un taux plus élevé, de
l'ordre de 2,5 %, et invite Hydro-Québec à trouver des moyens
afin d'écouler ses surplus de production plutôt que d'être
placée devant l'obligation d'avoir à recourir à des moyens
plus polluants pour répondre à la demande.
Le Conseil québécois de l'AMEEEC est convaincu que la mise
en application de l'efficacité énergétique
nécessite la participation d'un grand nombre d'intervenants ainsi que
des programmes d'information et de suivi soigneusement articulés. Le
Conseil souhaite donc qu'Hydro-Québec coordonne son action avec le plus
grand nombre d'intervenants possible, à condition que les
représentants de l'industrie électrique soient impliqués
dans ce processus. Pour le Conseil québécois de l'AMEEEC, le
partenariat entre Hydro-Québec et l'industrie de l'équipement
électrique et électronique du Québec est non seulement
désirable, mais essentiel. Cette alliance stratégique vise
essentiellement à l'optimisation des retombées économiques
engendrées par le développement énergétique du
Québec.
Sur le plan international, les contrats attribués constituent des
véhicules de choix pour faire valoir la technologie
québécoise, et c'est par l'intermédiaire des firmes de
génie-conseil agissant comme maîtres d'oeuvre et des manufac-
turiers impliqués dès le début que notre industrie peut
profiter de ces occasions d'affaires. En ce sens, le Conseil tient à
réitérer avec force sa préférence pour l'octroi de
contrats globaux, plutôt que fractionnés, dans le secteur du
développement énergétique québécois et
étranger.
Mesdames et messieurs, au nom des membres du Conseil
québécois de l'Association des manufacturiers d'équipement
électrique et électronique du Canada, je vous remercie de votre
aimable attention et nous sommes à votre disposition pour
répondre à vos questions. Merci.
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, M. Marcoux.
Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre.
Mme Bacon: M. Marcoux, MM. Bernier, Tremblay et Cloutier, on vous
souhaite la bienvenue à notre commission parlementaire et on vous
remercie d'être venus dialoguer avec nous aujourd'hui. La première
question, je pense, que je vais vous poser tout de suite... Si je me
réfère à la page 13 de ce que vous venez de nous lire,
vous soulignez que le scénario d'un taux de croissance de 2 % de la
demande, qui est retenu par Hydro-Québec, les 16 prochaines
années, vous semble faible. Vous soutenez aussi qu'un scénario de
croissance de la demande basé sur un taux de l'ordre de 2,5 % serait
plus adéquat. Sur quels éléments vous basez-vous pour
arriver à cette conclusion-là? Vous savez qu'à cette
commission parlementaire on a eu différents éléments qui
nous ont été soumis et aussi des gens qui, soit ne sont pas
d'accord avec les 2 % en disant que c'est trop élevé, d'autres
qui disent que c'est trop faible et, vous, vous arrivez à cette
commission parlementaire en nous disant: Le scénario de 2 % est trop
faible; nous suggérons 2,5 %.
M. Marcoux: Au départ, on part du principe que, quelque
part dans le temps, ces investissements-là, ces grands travaux devront
être réalisés un jour ou l'autre, quelque part dans le
temps. Donc, si on part du principe qu'ils devront être
réalisés et que si le scénario est trop faible et qu'Hydro
doit réajuster il est toujours plus facile de réajuster à
la baisse que de réajuster à la hausse, si on réajuste
à la hausse, soit qu'Hydro ne puisse pas suivre à cause de son
ingénierie et, si c'est le cas, ça veut dire qu'on va être
obligé de prendre d'autres moyens de production, comme les centrales
thermiques, qui sont plus polluants. Si Hydro réussit à suivre
avec son ingénierie pour accélérer les travaux, elle
risque que les manufacturiers ne puissent probablement pas suivre à
cause de la capacité de production qu'on a au Québec. C'est
sûr qu'on peut toujours acheter d'autres pays mais, si on veut maximiser
les retombées, il est possible que les manufacturiers
québécois ne puissent pas suivre.
En plus, nous, on part du principe que l'eau qui coule, c'est de
l'argent qu'Hydro-Québec perd. Donc, vaut mieux réaliser les
travaux, en tenant compte de l'environnement, le plus rapidement possible,
quitte à vendre de l'énergie en attendant et à prendre,
comme on parlait la semaine passée, la différence d'argent entre
le marché québécois et le marché étranger et
se créer un fonds de recherche et de développement et
développer ce qu'on pourrait appeler l'après-nucléaire
actuel et de nouvelles techniques environnementales.
Mais on part du principe, toujours, qu'un jour ou l'autre ce
développement-là devra être fait.
Mme Bacon: Et vous voulez qu'il soit fait maintenant.
M. Marcoux: C'est ça.
Mme Bacon: C'est ça. Votre mémoire soulève
aussi - je pense avec beaucoup de pertinence - la question du
développement hydroélectrique et vous vous interrogez sur la
capacité de l'industrie québécoise à fournir des
équipements qui sont indispensables aux aménagements dans des
délais requis. Sur quoi fondez-vous ces appréhensions-là
que vous avez et qu'est-ce qui devrait être fait, d'après vous,
pour éviter d'arriver à une pareille situation? (11 h 30)
M. Marcoux: Si on regarde en gros, Hydro, dans les grands
travaux, réalise quand même de la consultation avec les grands
manufacturiers. Pour les grands travaux, c'est plus facile à
prévoir mais, lorsqu'on commence à arriver à des travaux
intermédiaires comme les sous-stations, qui demandent
énormément d'équipement ou même au niveau de la
distribution, où c'est réellement pire à ce
niveau-là, la planification des achats est faite en fonction d'une
planification interne et non pas en fonction de la capacité de produire
des usines québécoises. Ce qu'on aimerait, c'est qu'Hydro,
lorsqu'elle planifie ses travaux, que ce soient les grands, les moyens ou les
tout petits travaux au niveau de la distribution qui impliquent quand
même des sommes de l'ordre de 500 000 000 $, le fasse dans un esprit de
collaboration avec les manufacturiers québécois afin de maximiser
les retombées, que ce soit par le biais d'un conseil consultatif ou par
le biais d'échanges, par le biais de tout autre organisme qui pourrait
apporter une meilleure collaboration.
Mme Bacon: Vous privilégiez aussi la rédaction
conjointe d'un rapport technique et scientifique, par Hydro-Québec et le
secteur manufacturier, pour accroître une crédibilité de
l'industrie électrotechnologique québécoise. Quels sont
les obstacles à cette démarche-là et quel rôle,
d'après vous, le gouvernement pourrait-il jouer pour faciliter ce
partenariat? Je pense que vous n'êtes pas les premiers à le
favoriser, il y en a plusieurs qui nous l'ont dit aussi. Est-ce que vous voyez
un rôle au gouvernement dans ce sens-là?
M. Marcoux: Au niveau de l'écriture d'un papier
technique...
Mme Bacon: Une rédaction conjointe, c'était dans
votre premier...
M. Marcoux: Oui.
Mme Bacon: ...dossier que vous nous avez fait parvenir.
M. Marcoux: Oui. O.K. Le rôle du gouvernement...
Premièrement, je pense que, dans toutes les autres utilités
électriques en Amérique du Nord, il y a toujours des rapports
techniques qui sont écrits en collaboration. Hydro-Québec est
réticente à ça à cause de ce qu'elle appelle la
fameuse cage de verre, qu'elle doit être transparente et qu'on ne doit
pas favoriser un manufacturier plus qu'un autre. Mais nous... Et d'un autre
côté, c'est peut-être lié... Ça se rattache
aussi peut-être aux politiques d'achat, si on se compare à
d'autres provinces, à ce que je pourrais appeler le syndrome du
Québécois trop fort. Le Québécois, normalement,
quand il voit que quelqu'un perce, a tendance à essayer de le retenir
plutôt que de l'aider à grandir encore plus alors que, dans les
autres provinces, il y a une philosophie inverse où, quand quelqu'un
perce, on lui aide à percer encore plus. Donc, dans cette
optique-là, si Hydro pouvait s'asseoir avec les manufacturiers - et,
nous, en tant qu'association, c'est ce qu'on préconise - même si,
dans un cas, ça peut favoriser un manufacturier plutôt qu'un
autre, à long terme, le Québec va y gagner parce qu'on pourra
exporter plus et que l'industrie québécoise va être mieux
connue.
Le rôle du gouvernement dans ça, c'est plutôt une
question de pensée. Je pense que c'est une question peut-être de
pensée du Canadien français qui est une peur inhérente de
vouloir s'attacher à quelqu'un ou je ne sais pas. Quel rôle le
gouvernement peut-il a voir là-dedans? Je ne le sais pas, c'est...
Mme Bacon: Est-ce que c'est de faire en sorte que les deux
s'assoient à la même table? Ce serait le gouvernement qui pourrait
le faire, à ce moment-là, pour accentuer ou, du moins, favoriser
le partenariat.
M. Marcoux: Peut-être. Via peut-être le
ministère de l'Industrie et du Commerce, oui, des choses comme
ça, qui favoriseraient le lien entre l'industrie et Hydro-Québec,
oui.
Mme Bacon: II y a plusieurs intervenants
qui ont démontré devant cette commission un
intérêt pour la cogénération. Est-ce que votre
association a une position devant la cogénération?
M. Marcoux: Nous, on n'a rien contre la
cogénération; d'ailleurs, on a des manufacturiers, dans notre
association, qui fabriquent les équipements pour la
cogénération. Mais, ce qu'on dit ici, c'est qu'on a une
énergie qui est moins polluante et plus propre que l'énergie
hydroélectrique. Donc, cogénération ou autre forme
d'énergie devrait être prise pour des pointes ou pour pallier, si
on ne réussit pas à rejoindre le développement par le
biais de l'hydroélectricité. Si la demande vient plus grande,
à ce moment-là, c'est sûr qu'on va être obligé
de se retourner vers d'autres sources de génération plus
polluantes et peut-être qui sont moins dans l'ordre du
développement durable.
Mme Bacon: D'accord. Vous insistez aussi, dans le premier
mémoire que vous nous avez fait parvenir, à plusieurs reprises,
sur l'optimisation des retombées économiques qui sont
engendrées par le développement énergétique du
Québec. Est-ce que les entreprises membres de votre association
disposent d'un savoir-faire suffisant pour satisfaire aux exigences du cahier
de charges des commandes matérielles, par exemple,
d'Hydro-Québec?
M. Bernier (Pierre): Je crois que beaucoup de nos industries ont
les capacités, ou peuvent acquérir les capacités en
travaillant en partenariat avec Hydro-Québec; soit par l'entremise de
l'IREQ ou par l'échange d'informations techniques, il y a
possibilité d'améliorer, possibilité d'augmenter nos
connaissances techniques pour, plus tard, pouvoir s'en servir sur le
marché international. Je crois qu'Hydro-Québec pourrait
améliorer son effet de levier. Ils l'ont déjà
réussi, dans certains cas. Certaines compagnies au Québec ont
réussi à percer avec de nouvelles technologies, mais l'effet de
levier n'est peut-être pas utilisé au maximum.
Mme Bacon: Est-ce que vos entreprises sont capables de garantir
le même degré de fiabilité à des coûts
compétitifs, par exemple, pour le matériel stratégique qui
est utilisé sur le réseau d'Hydro-Québec et qui est
acheté à des compagnies qui sont implantées à
l'extérieur du Québec?
M. Bernier: Plus souvent qu'autrement, oui, car la plupart de nos
industries, quand même, exportent beaucoup à l'extérieur du
Canada. Et pour pouvoir exporter à l'extérieur du Canada, il faut
être compétitifs au point de vue technique et économique.
Alors, je crois que la réponse est affirmative.
Mme Bacon: La semaine dernière, un intervenant de
l'industrie électro-technique, ABB, favorisait l'attribution de contrats
globaux, plutôt que fractionnés en une multitude de contrats, pour
assurer l'optimisation des coûts. Vous réitérez aussi votre
préférence pour l'octroi de contrats globaux plutôt que
fractionnés. On sent le même intérêt. Il nous semble,
quand même, que cette recommandation priverait HydroQuébec d'une
certaine marge de manoeuvre qui est nécessaire pour s'assurer une saine
compétitivité parmi ses fournisseurs.
M. Marcoux: Quand on parle de contrats globaux, ce qu'on voit
dans ça, c'est souvent qu'un manufacturier a un équipement,
enfin, qu'il a ce qu'on pourrait appeler un système qui fonctionne. Ce
qu'on voudrait qu'Hydro fasse, c'est que, quand un tel système existe
déjà chez un manufacturier, Hydro aille plutôt par
spécification au niveau du système, et non pas essayer de
décortiquer le système et de racheter la même chose sous
forme de sous-composantes. À ce moment-là, tout le monde est
perdant. Le manufacturier qui a déjà un système perd une
base locale manufacturière pour pouvoir avoir des meilleurs prix
à l'exportation et, dans un deuxième temps, il perd l'avantage de
pouvoir développer encore plus son produit. Et Hydro-Québec, dans
un autre temps, paie plus pour son produit. Il est sûr que quand un
système existe et que ce système-là est compétitif
au niveau international, si Hydro demande de rebâtir ce
système-là sous forme "custom-made", si l'on veut, c'est
sûr que du "custom-made", c'est toujours plus cher qu'un produit qui est
exporté internationalement. Donc, tout le monde serait gagnant. On ne
parle pas de contrats globaux, on ne parle pas de prendre la Baie-James d'un
coup et de la donner à contrat. C'est que, lorsque quelque chose existe
sur le marché, de ne pas s'amuser à le scinder en parties.
Mme Bacon: Je vais reposer la même question que j'ai
posée la semaine dernière. Est-ce que ça ne vous
paraît pas susceptible de nuire à nos PME
québécoises?
M. Bernier: Je vais vous répondre la même chose que
la semaine dernière. Ce qu'il est important d'avoir, pour le
Québec, c'est de la recherche et du développement et de
l'ingénierie. Plus on va amener de recherche et développement et
d'ingénierie au Québec, plus les entreprises vont donner de la
sous-traitance au Québec, plus les entreprises vont développer
leurs produits en se basant sur des PME québécoises. Donc, plus
l'économie va rouler, plus les PME vont grossir. L'Association des
manufacturiers, on représente quand même les deux: les PME et les
grandes entreprises. Et les PME sont aussi d'accord avec ce
processus-là.
Mme Bacon: Vous avez indiqué dans votre mémoire
l'intérêt de votre association à voir se concrétiser
la mise en valeur du Bas-Churchill par la construction des centrales de Gull
Island et de Muskrat Falls. Par contre, c'est un contrat qui va être
exécuté à l'extérieur du Québec. Est-ce que
vous croyez quand même, à votre association, qu'il y a
suffisamment de retombées économiques et technologiques de ce
projet-là pour le Québec?
M. Bernier: Un contrat qui est fait à l'extérieur
du Québec, mais dont Hydro-Québec va être partenaire
majoritaire ou partenaire très puissant. Donc, je pense
qu'Hydro-Québec, dans la négociation avec son partenaire,
pourrait prévoir des retombées économiques au
Québec. Ça me fait un peu penser lorsqu'on donne des prix
réduits aux alumineries, à toutes les entreprises
énergivores que l'on fait venir ici - et on est entièrement
d'accord avec ça. On fait venir énormément d'industries,
on leur donne des taux préférentiels. C'est la même chose.
Si on prévoyait, au moment de la signature de ces ententes, des
retombées économiques ou plus de faire faire au Québec,
à ce moment-là, les retombées seraient là. C'est au
moment de la signature, et non pas après, qu'on doit réagir.
Mme Bacon: Vous verriez des clauses qui seraient ajoutées
à un contrat, par exemple, au moment d'une signature, une
négociation de ces clauses-là?
M. Marcoux: Oui.
Mme Bacon: II y a certains intervenants qui sont venus nous dire,
devant cette commission, qu'il fallait abandonner le chauffage
électrique dans le secteur résidentiel. Vous semblez quand
même être en faveur, et vous soulignez aussi que la hausse de
tarifs qui est proposée par HydroQuébec dans le secteur
résidentiel risque de ralentir la pénétration même
du chauffage électrique. Est-ce que vous pouvez nous dire quels sont les
motifs qui sous-tendent votre position?
M. Marcoux: Je pars toujours du principe que
l'hydroélectrique, que l'électricité est l'énergie
la plus propre ou la moins polluante. Donc, c'est sûr qu'il faut faire
des économies d'énergie. Mais faire des économies
d'énergie, nous, on le voit... Ce n'est pas de dire: On réduit le
chauffage électrique dans les maisons et le monde va commencer à
se chauffer à l'huile. Je pense qu'on enlève un mal quelque part
et on en crée un plus grand. Donc, si on dit que le monde doit se
chauffer, il vaut mieux qu'il se chauffe avec l'énergie la moins
polluante. L'économie d'énergie, c'est bien, comme les pommeaux
de douche d'Hydro. Essayer de réduire la consommation des gens, c'est
correct, mais pas essayer d'enlever aux gens leur source d'énergie la
moins polluante et dire: Allez chercher de l'énergie qui est plus
polluante. On est pour l'économie d'énergie, mais pas pour faire
une économie d'énergie... Ça ne serait même pas une
économie d'énergie de dire: On ne chauffe plus électrique,
mais on va chauffer à l'huile ou on chauffera au gaz, qui sont deux
formes d'énergie plus polluantes, d'après nous.
Mme Bacon: Est-ce qu'il y a des créneaux en
économies d'énergie, par exemple, qui vous apparaissent plus
prometteurs pour les membres de votre association? Est-ce que vous vous
êtes penchés sur ce dossier-là?
M. Marcoux: Non. On a une section, je pense, à laquelle on
pourrait adresser ça, justement, celle des manufacturiers de petits
équipements électriques. Si vous voulez, on pourrait leur
demander qu'ils se penchent sur le cas et on pourrait arriver avec quelque
chose. Mais' présentement, non. Mais on croit qu'il y a des moyens.
Mme Bacon: Est-ce que vous pensez que des tarifs plus
élevés, par exemple, peuvent nous aider a avoir une plus grande
conservation de l'énergie?
M. Marcoux: Si Hydro-Québec augmente... Mme Bacon:
Vous favoriseriez...
M. Marcoux: Je ne crois pas. Si HydroQuébec augmente ses
tarifs... Ça dépend jusqu'où Hydro-Québec... C'est
sûr qu'Hydro-Québec doit augmenter ses tarifs, à un moment
donné, pour avoir une plus saine gestion. Mais si HydroQuébec
augmente ses tarifs pour ne plus être concurrentielle avec le gaz et le
pétrole, là, on n'est pas d'accord. Je pense que
l'hydroélectricité vu qu'elle est la moins polluante, devrait
toujours être la forme d'énergie qui attire la clientèle,
et non pas qui éloigne la clientèle.
Mme Bacon: D'accord. Merci.
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, Mme la
ministre. Je vais maintenant reconnaître M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Ça me fait
plaisir de vous souhaiter la bienvenue devant cette commission parlementaire et
de pouvoir profiter de l'apport que vous nous faites à l'avancement de
nos travaux. Je remarque qu'effectivement il y a beaucoup de similitudes entre
ce que vous avez dans votre mémoire et ce qu'un de vos membres,
probablement - je suppose que ABB est membre de votre association - est venu
nous déposer lui-même pas plus tard que la semaine
dernière. Effectivement, il y a beaucoup de ressemblances. Je vais
revenir sur
certaines des questions, certains problèmes qu'on a
soulevés à ce moment-là avec la compagnie ASEA Brown
Bovari. D'abord, au niveau du partenariat. Vous dites, en page 4 de votre
mémoire, que le partenariat est essentiel. Vous revenez aussi en page 11
sur l'importance du partenariat. Mais vous nous dites surtout, en page 4, que
d'autres provinces, parmi nos provinces voisines, ont déjà
passé aux actes en pratiquant un partenariat constructs - c'est ce que
vous dites, finalement, dans votre présentation; ce que vous nous avez
dit tout à l'heure, et non pas dans le mémoire comme tel - dans
le secteur de l'énergie. D'abord, quelles sont ces provinces-là
et pouvez-vous nous donner des exemples très précis de ce genre
de partenariat? (11 h 45)
M. Marcoux: Premièrement, le partenariat, on le voit... On
pourrait peut-être diviser le partenariat en cinq éléments.
Le partenariat, pour nous, fait partie du développement durable, dans le
sens que si Hydro investit 4 000 000 000 $ on voudrait qu'il y ait le plus
possible de retombées. Donc, c'est une forme de développement
durable. Le partenariat, pour nous, a à faire côté
recherche et développement, ingénierie. Du côté
planification de l'approvisionnement, pour Hydro-Québec, ça
touche le côté des contrats globaux, les échanges de
personnel et l'exportation. Donc, ce sont les cinq "items" où, pour
nous, le partenariat est touché.
Quand on parie d'autres provinces, c'est peut-être plus la plus
grosse qui est à côté de nous, l'Ontario. Hydro Ontario n'a
pas de politique d'achat, mais elle a des "guidelines", comme on les appelle.
Un "guideline" est un genre de réglementation... En fait, même
pas, c'est plus diffus que ça, sauf que les effets d'un "guideline"
à Hydro Ontario font que tous les gens, jusqu'à la base, sont
impliqués. C'est un genre d'implication à tous les niveaux, c'est
une philosophie de ces gens-là, une philosophie qu'on pourrait
peut-être taxer d'anglophone, je ne le sais pas. C'est que ces
gens-là, de la base à la tête, n'ont pas peur de
s'adjoindre un partenaire industriel pour travailler, n'ont pas peur d'aller en
appel d'offres privé sur certains contrats et de négocier des
contrats avec des partenaires locaux.
On a aussi l'exemple du Nouveau-Brunswick, il y a un mois, qui, en un
mois et demi, a réussi à définir un contrat et à
donner une commande pour des turbines à gaz; processus qui, à
HydroQuébec, pourrait peut-être prendre un an.
M. Claveau: Donc, vous voulez une association beaucoup plus
proche, à partir du niveau de décision. C'est ça que vous
appelez un partenariat, dans le fond. À partir du moment où
Hydro-Québec commence à planifier, elle doit faire ses demandes
d'autorisation en fonction de son scénario fort, les demandes
d'autorisation et de permis. Vous dites qu'on devrait être
associés dès ce moment-là, pour être capables de
planifier nos équipements et toute la fourniture, etc.
M. Marcoux: C'est ça. Hydro-Québec, à
travers ce processus-là, doit toujours se garder un processus qui va lui
permettre de garder des prix compétitifs. Ça, c'est sûr, on
n'est pas contre les prix compétitifs.
M. Claveau: À partir du moment où on commence
à négocier ça dès le départ, justement,
toute la mécanique d'octroi de contrats par soumission, etc., ça
devient aussi de plus en plus difficile, non? Est-ce qu'on ne joue pas
plutôt un peu avec une corde sensible, quant aux modalités
d'octroi de contrats? Si on va vous chercher comme consultant ou truc semblable
pour commencer à travailler au début d'un processus de
planification - comme entreprise privée, on vous demande de participer -
il devient plutôt difficile de vous écarter en cours de route pour
donner le contrat de fourniture à quelqu'un d'autre qui pourrait, tout
en même temps, proposer un prix meilleur.
M. Bernier: II y a un système ou un procédé
qu'Hydro-Québec a déjà mis en place, l'homologation.
Autrement dit, déjà, il y a certains fournisseurs qui sont
accrédités pour pouvoir soumissionner sur certains contrats. Ce
qui fait que, déjà, ça enlève certains autres
fournisseurs par avance, avant l'octroi de contrats, par une étude
approfondie de l'équipement qui peut être fourni par certains
fournisseurs. Ces fournitures-là deviennent de l'équipement
standard, dont Hydro-Québec a une liste réduite dont elle peut se
servir lors de soumissions.
Ce qui arrive, c'est que, sans empêcher le reste des fournisseurs,
on voudrait qu'il y ait une augmentation des communications avant l'octroi de
contrats, maximiser les communications pour pouvoir comprendre ce que le
fournisseur québécois peut fournir ou devrait modifier afin de
satisfaire les besoins d'Hydro-Québec et savoir exactement ce dont
Hydro-Québec a besoin. Ce peut être un processus d'homologation ou
toute autre forme de communication accrue.
Je crois, de même, qu'Hydro-Québec est parfois victime de
son propre carcan, en voulant toujours maximiser la soumission publique et
maximiser le nombre de soumissionnaires, pensant qu'elle va pouvoir minimiser
ses coûts de cette manière.
M. Claveau: II y a un certain nombre de dangers, quand vous
êtes victime d'un seul fournisseur, par exemple. Je vais vous donner un
petit exemple, comme ça, en passant. Peut-être que la ministre
pourrait y voir de plus près.
On me disait qu'on avait acheté, pour la centrale de LG 2, deux
petits bidules gros comme rien, deux petites bobines toutes petites, avec
des fils ça de long, à peu près six pouces, au
maximum, peut-être quatre pouces, et que la facture était de
l'ordre de 3200 $. Je ne le croyais pas. Je suis allé voir. Je les ai
vues, je les ai prises dans mes mains. Deux petites affaires grosses comme
rien, deux petites bobines pas plus grosses qu'à peu près une
petite bobine de fil pour moulin à coudre, et avec deux petits fils et
un petit terminal rond pour mettre une petite vis, quelque chose comme 3/16,
maximum, la grosseur du bout. 3200 $ pour ces deux pièces. 3200 $.
Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est là... En tout cas, si je
me trompe, ce n'est pas plus de 10 %. Et je suis en bas du prix, si je me
trompé. Je les ai prises dans mes mains, je les ai touchées, je
les ai vues, deux petites affaires comme ça. Est-ce que vous ne trouvez
pas que c'est là une certaine exagération, qui montre bien
qu'à l'occasion on n'a pas intérêt à être
victime d'un seul fournisseur et qui pourrait éventuellement remettre
aussi en question toute la notion du contrat global? Parce que moi, je me
disais que si c'est ça sur une petite bobine qui a à peu
près pour 5 $ de matériaux, imaginez-vous ce que ça
pourrait être sur un transfo de 735 000 volts? Ou enfin, un transfo d'une
capacité de...
M. Marcoux: Mais là, quand on parte de partenariat, c'est
comme un mariage. Dans un mariage, tu t'embarques avec quelqu'un et tu peux
toujours divorcer quelque part au cours du processus. Ça veut dire...
Dans un partenariat, nous, on dit: O.K., tu essaies de travailler le plus
possible ensemble. C'est sûr qu'Hydro-Québec, en tant
qu'entreprise publique, doit se doter de moyens pour aller chercher des
équivalences de prix sur le marché international, pour garder le
marché interne fort, mais aussi garder le marché interne
honnête, entre guillemets.
Mais quand tu embarques dans ce processus-là... Je ne vois aucune
entreprise québécoise qui entrerait dans un vrai processus de
partenariat, qui prendrait le risque de jouer ce jeu, alors que c'est toute sa
crédibilité qui est en cause. Et une crédibilité,
je pense que c'est plus qu'un contrat. C'est plus qu'une signature, à
mon avis.
M. Claveau: Mais quand vous nous parlez de contrat global...
O.K., laissons peut-être la question du partenariat. Vous nous dites que
le contrat global fait partie de votre approche de partenariat. Dans le fond,
le contrat global, tel que vous l'entendez... Vous, vous l'entendez, en tant
que fournisseur d'équipements d'électricité de haute
technologie, comme une espèce d'intégration verticale, tout ce
qui s'appelle poste de distribution transport, par exemple... On a une
technologie, donc, on l'applique globalement. Mais si on va à
l'extrême, aussi... On peut imaginer, comme ça se fait à
l'étranger, que...
J'en ai vu, des contrats semblables. Un contrat clé en main
où tous les éléments, les aspects du contrat pourraient
être donnés globalement à utte entreprise. Par exemple, on
dit: Là, toi, tu fais une centrale. La centrale de LG 1, tu as 12
groupes alternateurs à installer là, le transport, le
bétonnage, tout ce que tu veux, bon, c'est 2 800 000 000 $, et
arrange-toi avec les problèmes. Est-ce que ça peut aller
jusque-là, ce que vous demandez comme contrat global?
M. Marcoux: Ça sort réellement du domaine de
l'industrie des manufacturiers. Moi, tout ce que je pourrais donner comme
exemple, c'est un exemple de manufacturier. Supposons qu'il y a plusieurs pays
dans le monde, y compris les États-Unis, où les gens
achètent des sous-stations électriques. Je pense que c'est un
exemple concret, une sous-station électrique complète de
manufacturier. Si on regarde l'historique, comment Hydro-Québec a
fonctionné... Hydro-Québec, au départ, achetait
probablement des sous-stations complètes. Là, les
ingénieurs d'Hydro-Québec ont commencé à dire:
Ça, c'est intéressant. Ils ont commencé à entrer
dans le processus et ils ont commencé à définir des
critères pour chacune des composantes.
Là, tranquillement, ils ont commencé à faire
eux-mêmes le "design". Là, tranquillement, ils ont commencé
à acheter les composantes et à concevoir eux-mêmes le
système. Ce qui fait que le manufacturier qui, au départ, pouvait
offrir un système global s'est vu obligé d'offrir des composantes
de système et perd, de ce fait même, sa possibilité
d'exportation d'un système global. Ce qu'on dit, nous, c'est que, s'il
existe quelque chose sur le marché, qu'on n'essaie pas de le
décortiquer. Par des échanges techniques, qu'on essaie de
l'améliorer, ça va renforcer l'industrie, mais qu'on n'essaie pas
de démolir ce qui existe pour le défaire en petites
parcelles.
Dans un autre sens, s'il existe plusieurs composantes et qu'ensemble,
Hydro-Québec et un partenaire, nous développons un nouveau
système, à ce moment-là, on pourra le vendre à
l'exportation. Ce qu'on dit, c'est qu'Hydro n'a jamais été habile
pour vendre à l'exportation. Elle ne peut pas vendre à
l'exportation, alors que des ingénieurs-conseils et des manufacturiers
peuvent vendre à l'exportation, on l'a prouvé. Donc, laissons
ceux qui peuvent vendre faire le plus possible en se servant de la synergie
avec une des plus grosses entreprises hydroélectriques au monde, de sa
connaissance au point de vue système. Et je ne vois aucun consultant,
aucun manufacturier essayer de dire à Hydro comment gérer son
système, comment concevoir le système global
d'Hydro-Québec, mais, quand on en arrive à des
sous-systèmes, je pense qu'il y a des gens à l'extérieur
qui sont très bien placés.
M. Claveau: Est-ce que vous croyez qu'il serait sage pour
Hydro-Québec de s'encarcaner
dans un seul système de fabricant? Est-ce que vous pensez, par
exemple, qu'Hydro-Québec a fait un bon "deal" ou enfin a eu une bonne
idée en séparant en deux les fournitures des 16 turbines de LG 2
pour en donner 8 à Marine Industrie et 8 à General Electric et en
disant: Plutôt que de faire poser les 16 par la même compagnie, on
va couper ça moitié-moitié? Est-ce que vous ne pensez pas,
à ce moment-là, que c'est une façon, entre autres ou
peut-être, pour Hydro-Québec de pouvoir évaluer à sa
juste valeur la performance des deux technologies? Est-ce que ce n'est pas plus
avantageux de faire ça comme ça? Moi, si j'étais acheteur,
je me demande si je serais intéressé à m'encarcaner dans
une seule ligne de production, avec un seul fournisseur ou dans une seule
façon de voir quant à des équipements de cette
sorte-là?
M. Bernier: Je pense que dans tout système il n'y a aucun
cas qui puisse être complètement, soit à gauche, soit a
droite. Dans certains cas, cas par cas, vous pouvez peut-être
séparer le contrat de fournitures entre divers fournisseurs,
peut-être lorsque l'équipement est plus standardisé. Dans
d'autres cas où c'est une technologie de pointe un peu plus
poussée, où vous voulez vous servir d'Hydro-Quebec comme effet de
levier pour pouvoir fabriquer quelque chose au Québec qui, plus tard,
sera exportable, peut-être que là il y aura un partenariat ou une
quelconque entente technique conjointe. Je ne pense pas qu'on puisse
réellement donner une marche à suivre qui soit
complètement soit à gauche, soit à droite. Je pense que ce
sont des études de cas par cas. Je n'ai pas de cas sous la main, mais
sûrement qu'Hydro-Québec a eu, à un moment donné,
des effets de levier sur certaines industries québécoises, sur
certaines manufactures québécoises qui, après, ont pu
exporter leur expertise, qu'il y a eu un transfert technologique de l'IREQ
à une compagnie quelconque qui par la suite s'est vue grandir.
M. Claveau: Avez-vous terminé? Vous dites, dans votre
mémoire - j'ai encore du temps - si le taux de croissance de la demande
d'électricité s'avérait plus fort que ce qui a
été planifié, que ça pourrait créer ou
occasionner certains risques pour votre industrie. Je ne le sais pas. À
première vue, est-ce que ce ne serait pas plutôt le contraire? Si
vous produisez moins que ce que vous ne pensiez produire, ça pourrait
être difficile pour vous autres. Mais si vous produisez plus, je ne vois
pas. À moins que vous ne pensiez pas que votre industrie soit capable
d'absorber une demande supplémentaire9
M. Marcoux: Si on regarde bien, Hydro, dans le plan de
développement actuel, veut achotor 4 000 000 000 $ do bions nt sorvioos
Si, à la suite d'une planification, d'un scénario qui devrait
être accéléré, les manufacturiers
québé- cois ne pouvaient pas les fournir, à ce
moment-là, ces équipements-là seraient achetés
à l'extérieur du Québec ou du Canada. Donc, c'est
sûr que, si c'est une vision à court terme, on pourrait dire:
Bien, on ne devrait pas se plaindre, parce que c'est sûr que le carnet de
commandes va être plein durant ce court terme. Mais si on avait une
vision à long terme, les 2 000 000 000 $ ou 1 000 000 000 $ qui seraient
achetés à l'extérieur du Canada, c'est quelque chose qui
ne serait pas récupérable, donc quelque chose de perdu à
tout jamais. C'est dans ce sens-là qu'on dit qu'il vaut mieux planifier
plus, quitte à réduire, et il y a toujours moyen de s'entendre
pour réduire des niveaux de production, plutôt que de dire: On va
acheter moins et on verra si on doit augmenter. Augmenter, pour des
industriels, c'est toujours plus difficile que de diminuer. Il y a la
main-d'?uvre, c'est une question de production, c'est une question de
capacité de production, mais aussi une question de main-d'oeuvre
spécialisée. Même si ce sont des produits qui sont matures,
souvent, ce sont des genres de produits qui sont faits sous forme manuelle; la
main-d'oeuvre dans nos industries prend des fois jusqu'à un an ou un an
et demi à être formée. Si Hydro-Québec change son
plan de développement et qu'on doive accélérer les
travaux, c'est sûr que l'industrie québécoise ne pourra pas
suivre, parce que nous ne pourrons pas former notre personnel du jour au
lendemain. Donc, c'est de l'argent qui s'en va complètement à
l'extérieur du Québec, ça va être acheté
ailleurs. (12 heures)
M. Claveau: Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre,
est-ce qu'il y a d'autres questions?
Mme Bacon: Non.
Le Président (M. Bélanger): Non!
Mme Bacon: Ça va, merci infiniment.
Le Président (M. Bélanger): Alors, si M. le
député d'Ungava veut remercier nos invités.
M. Claveau: Alors, il me fait plaisir de vous remercier pour
votre participation. Je me dois quand même de vous dire qu'en ce qui me
concerne je suis sceptique quant à l'intérêt
qu'Hydro-Québec pourrait avoir à minimiser ou à diminuer
le nombre de fournisseurs de certains équipements. Je pense que, si on
accepte les règles du jeu de la concurrence, lorsque l'on est de plus
petits fournisseurs et qu'on veut faire sa place, il faut aussi l'accepter
lorsqu'on devient plus gros pour ne pas essayer de sortir du
marché los plus potits Merci
Le Président (M. Bélanger): Je vous remer-
cie. Mme la ministre.
Mme Bacon: Je vous remercie de votre contribution aux travaux de
la commission parlementaire, merci de votre présence à
Québec. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie l'Association des manufacturiers
d'équipement électrique et électronique du Canada, section
Québec, et invite à la table des témoins la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec.
Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec
Bonjour madame et messieurs. Je vais vous expliquer cela rapidement.
Vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de votre mémoire
et il y aura une période d'échanges avec les parlementaires par
la suite. Alors, je prierais votre porte-parole de bien vouloir s'identifier,
de présenter les gens qui l'accompagnent et de procéder à
la présentation de votre mémoire. Je vous remercie. Alors, si
vous voulez bien procéder, il n'y a pas de problème, on vous
écoute.
Mme Pilon (Lise): Alors, mon nom est Lise Pilon, je suis
présidente de la Fédération nationale des associations de
consommateurs du Québec et j'agirai aujourd'hui comme porte-parole de
notre organisme. À ma gauche, j'ai Richard Dagenais, recherchiste
à la Fédération, qui a fait partie, entre autres, du
comité pour les services publics et qui a rédigé une
partie du présent mémoire. À ma droite, j'ai Denis
Chainé qui est un permanent de l'ACEF de Québec, qui est un
important groupe membre de la Fédération nationale des
associations de consommateurs du Québec.
Nous avons distribué un texte qui est en fait un ajout et un
complément au texte que nous avions déjà
déposé à la commission parlementaire. Alors, Mme la
ministre, mesdames et messieurs, MM. les députés, MM. les membres
de la commission parlementaire, nous intervenons aujourd'hui à titre
d'association de consommateurs.
Notre Fédération est une fédération
d'organismes voués à la défense et à la promotion
des intérêts des consommateurs et consommatrices et,
particulièrement, de ceux qui sont à faible revenu. La FNACQ agit
en tant que lien avec d'autres organisations de consommateurs du Québec
et de l'extérieur et comme porte-parole de ses organismes membres sur
différents sujets d'importance, tels l'agroaiimentaire, la
téléphonie, l'électricité, le crédit et
l'endettement, la santé et les services professionnels.
Actuellement, les neuf groupes membres de la FNACQ représentent
presque 125 000 person- nes via un "membership" individuel et un "membership"
de groupe. Ce sont les ACEF de l'Estrie et de Granby, de Québec et de
Longueuil, le groupe Auto-Psy de la région de Québec, les Centres
de recherche et d'information en consommation de Port-Cartier et de
Sept-îles, l'Association pour la protection des intérêts des
consommateurs et consommatrices de la Côte-Nord et le Mouvement pour
l'agriculture biologique.
La FNACQ est impliquée dans le dossier électrique depuis
quelques années. Dans le cadre de leurs activités de consultation
budgétaire, les groupes membres se sont intéressés au
problème des coupures de courant liée à la
difficulté de payer des ménages à faible revenu. La FNACQ
s'est ainsi impliquée dans le processus de consultation avec
Hydro-Québec concernant la politique de gestion des comptes-clients et
des coupures de courant. La FNACQ s'est aussi intéressée aux
problèmes des pannes de courant, de la détérioration de la
qualité du service chez Hydro-Québec. La FNACQ se prononce aussi
sur les propositions de hausse de tarifs d'Hydro et sur les décisions
finales de tarif prises par le gouvernement du Québec.
Dans le domaine des services publics, la FNACQ tient à ce que
soit garanti à l'ensemble des usagers un service de qualité
à prix abordable, universellement accessible à tous les
consommateurs, quels que soient leur lieu de résidence et leur niveau de
revenu. Nous présentons ainsi un ensemble de réflexions, de
remarques et de recommandations concernant l'évolution possible du
secteur énergétique au Québec et, plus
spécifiquement, sur l'évolution du secteur de
l'électricité et du plan de développement
d'Hydro-Québec. Nous voulons, par cela, faire valoir un ensemble de
points d'intérêt pour les consommateurs qui, autrement ou
possiblement, n'auraient pas été discutés par d'autres
intervenants. Nous formulerons donc ici un ensemble de recommandations et de
positions de principe, laissant les détails pour un travail
ultérieur.
Un développement énergétique au service des
consommateurs et des consommatrices d'abord. Hydro-Québec
présente son plan de développement sous l'apparence d'un choix
technique dont les consommateurs et les consommatrices ne pourront que
bénéficier. Ce plan répondrait à une demande
croissante de consommation électrique et créerait des emplois en
attirant au Québec des industries comme les alumineries fortes
consommatrices d'énergie électrique. La FNACQ dénonce le
fait qu'Hydro-Québec impose aux consommateurs et consommatrices son
choix énergétique sous la forme d'un programme rassurant,
conçu par les dirigeants politiques et patronaux, qui vise à
cacher les conséquences et les implications de ce plan de
développement et empêche les gens de se mêler de ce qui les
regarde. C'est pourquoi la FNACQ a adhéré à la coalition
pour un débat
public large sur l'énergie.
Le plan d'Hydro-Québec impose un choix politique de
développement énergétique qui exclut toute autre
alternative et aura des conséquences dramatiques sur la qualité
de vie des consommateurs et consommatrices québécois, en
particulier ceux à faible revenu que la FNACQ représente.
Pour la FNACQ, un consommateur est avant tout un être humain qui
consomme. Il se préoccupe de santé, de qualité de vie et
d'environnement et n'est pas une machine à consommer une quantité
toujours croissante de biens de plus en plus éphémères.
L'énergie électrique est un service essentiel pour tous dans le
contexte social où nous vivons. La mission première
d'Hydro-Québec est d'être un service d'utilité publique qui
fournit à la population un service fiable, stable, ininterrompu,
accessible à tous, au prix le plus juste et le plus bas possible. La
FNACQ est d'avis que, par son plan de développement, Hydro-Québec
se détourne de sa mission première pour servir des
intérêts autres que ceux des consommateurs et des consommatrices
du Québec. La FNACQ remet en question les conceptions à la base
de l'argumentation d'Hydro-Québec et qu'endossent presque
intégralement le Conseil du patronat du Québec et beaucoup
d'industriels québécois.
Nous allons faire valoir ici quatre arguments. Premier argument: On a
besoin des mégaprojets d'Hydro-Québec pour assurer le
développement économique et prévenir la récession.
À cela, la FNACQ répond qu'Hydro-Québec ne doit pas faire
le travail du gouvernement du Québec en matière de
développement régional et économique, de réduction
du déficit gouvernemental ou de la balance commerciale. L'exemple de la
ville de Matagami montre que les mégaprojets d'Hydro-Québec
apportent non seulement une activité économique ponctuelle et
temporaire dans le Nord, mais génèrent des coûts indirects
lourds à supporter. Surtout, ils empêchent un choix de
développement régional durable avec un environnement
économique et social stable. Ainsi, le plan de développement
d'Hydro-Québec impose un choix politique, celui du développement
hydroélectrique sans limites au profit d'industries énergivores
et au détriment du développement durable.
Deuxièmement, Hydro-Québec doit avoir une politique
tarifaire qui attire les investissements importants créateurs d'emplois.
À cela, la FNACQ répond que les consommateurs et des
consommatrices du Québec ne veulent pas subventionner les profits de
compagnies fortement énergivores comme les alumineries. Le Conseil du
patronat du Québec fonde ses arguments sur l'hypothèse
qu'Hydro-Québec doit réallouer les ressources du
résidentiel vers l'industriel. Hydro-Québec ne fait pas assez de
profit avec le secteur résidentiel et devrait faire plus pour attirer
des entreprises fortement capitalisées en publicisant le fait que
l'électricité est bon marché au Québec. C'est
inacceptable pour les consommateurs et consommatrices du Québec. Pour le
Conseil du patronat du Québec, le plan de développement
d'Hydro-Québec est un investissement rentable à condition que le
taux de capitalisation et le rendement soit supérieur au coût de
la dette de celle-ci. Il faudra augmenter les tarifs
d'électricité des consommateurs pour y arriver. La FNACQ
dénonce le fait que le secteur industriel s'approprie ainsi
l'énergie électrique à son profit exclusif. Une chose est
certaine, les consommateurs et consommatrices le paieront par une politique
tarifaire qui augmentera les tarifs sous prétexte d'améliorer la
qualité du service offert.
Troisièmement, il faut faire face à une demande croissante
d'électricité. Hydro-Québec est un monopole non
réglementé dont l'intérêt économique va dans
le sens de stimuler la demande de consommation électrique, car ses
revenus proviennent du volume de ses ventes. C'est pourquoi son plan de
développement ne va pas dans le sens d'une politique d'efficacité
énergétique et d'économies d'énergie. Il favorise
au contraire une consommation accrue d'électricité par les
industries au moyen d'une politique tarifaire préférentielle,
alors qu'on demande aux consommateurs de faire des économies
d'énergie. Par exemple, on nous demande de poser sur nos douches des
dispositifs qui nous feraient consommer moins d'électricité. Dans
le contexte du pian de développement d'Hydro-Québec, cela
signifie que les consommateurs et les consommatrices feront des
économies d'énergie dont ils ne tireront aucun avantage, parce
que le secteur industriel pourra consommer encore plus
d'électricité à bon marché. Cela est inacceptable
pour les consommateurs et les consommatrices québécois. En fait
cela encourage le gaspillage de l'énergie.
Quatrièmement, Hydro-Québec prévoit des
études d'impact environnemental. On peut limiter les dégâts
environnementaux causés par le harnachement des rivières de la
Baie-James au moyen de programmes d'évaluation d'impact. Le plan de
développement d'Hydro-Québec prévoit harnacher presque
toutes les rivières du Nord du Québec d'ici à l'an 2000.
Il entraînera des effets environnementaux cumulatifs d'une ampleur sans
précédent en inondant une superficie totale estimée
à plusieurs milliers de kilomètres carrés. Il faut se
poser de sérieuses questions sur la rationalité de
détruire de façon irrémédiable un territoire que la
nature a mis des millions d'années à façonner. Toute
entreprise quelle qu'elle soit, qui détruit autant la vie que les
mégaprojets d'Hydro-Québec vont le faire, est à notre avis
profondément irrationnelle. De quel droit Hydro-Québec peut-elle
détruire à ce point la nature?
Le plan de développement d'Hydro-Québec est la
matérialisation d'une idée fausse et pernicieuse selon laquelle
la nature serait
étrangère à l'être humain et selon laquelle
on peut, en toute impunité, user de celle-ci et en abuser selon son bon
vouloir, peu importent les destructions que cela causera, de toute
façon, on est capable de réparer les dégâts. Cela
conduit droit à la catastrophe. En ce sens, le rôle que Ton veut
faire jouer à Hydro-Québec ne rassure pas du tout les
consommateurs et les consommatrices sur la bonne foi d'Hydro-Québec de
préserver l'environnement naturel et d'arrêter la course folle
vers l'avant qui consiste à refuser de voir que nous sommes en train de
tout détruire. Cela aura un effet certain de déséquilibre
sur les climats à l'échelle de la planète.
Étant donné le retard considérable du Québec
en matière d'économies d'énergie et d'efficacité
énergétique, étant donné que les consommateurs et
consommatrices québécois constituent un marché captif en
matière de consommation électrique, étant donné que
les intérêts économiques d'Hydro-Québec semblent
incompatibles avec la mise en place d'une authentique politique
d'économies d'énergie et d'efficacité
énergétique, la FNACQ demande: 1° que le mandat
d'Hydro-Québec soit redéfini pour qu'elle agisse comme une
entreprise de services publics, desservant la population du Québec
d'abord, ayant pour objectif premier la satisfaction des besoins en
électricité de toute la population du Québec au meilleur
prix possible; 2° qu'Hydro-Québec, étant donné son
statut de monopole non réglementé, soit soumise à des
mécanismes d'évaluation et de prise de décision
impartiaux, détachés de tout programme politique partisan, afin
de mettre en place une véritable politique d'efficacité
énergétique et d'économies d'énergie. Il devra
s'agir d'un organisme indépendant doté de pouvoirs importants
afin de définir une politique énergétique globale au
Québec; (12 h 15) 3° qu'un moratoire soit
décrété sur l'actuel plan de développement
d'Hydro-Québec et que tout nouvel harnachement de rivière soit
arrêté tant qu'on n'aura pas fait toutes les études
nécessaires pour prouver, hors de tout doute, que les
dégâts environnementaux seront facilement réparables;
4° que la mise en place d'une politique d'efficacité
énergétique et d'économies d'énergie soit
décrétée priorité nationale numéro un pour
les années qui viennent et que soient étudiées toutes les
alternatives possibles aux mégaprojets hydroélectriques et aux
centrales nucléaires en valorisant la recherche et l'implantation
d'énergies renouvelables; 5° que soit organisée une large
consultation du milieu sur les alternatives à développer et que
les consommateurs puissent y participer activement afin de trouver des
solutions créatives à nos problèmes d'approvisionnement
énergétique.
Je remercie tous les membres de la commission de leur attention et nous
sommes disponibles, Richard, Denis et moi-même, pour vos questions.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la
ministre.
Mme Bacon: Alors, Mme Pilon, MM. Dage-nais et
Chaîné, nous vous remercions pour votre mémoire et l'ajout
que vous venez d'y apporter aujourd'hui. C'est quand même une
contribution importante à notre commission parlementaire. Il me semble
qu'il faudra toujours penser à faire des ventes
d'électricité aux industries. Et je voudrais peut-être dire
ici que les ventes d'Hydro-Québec aux alumineries par rapport à
l'ensemble de ce qu'elle vend au Québec, c'est 5 % de ses ventes
d'électricité. Est-ce que vous vous êtes penchés sur
les règles à suivre par rapport aux ventes
d'électricité aux industries? Est-ce qu'il y a une règle
spécifique que vous privilégiez par rapport à la fixation
des prix de l'électricité pour les industries?
M. Dagenais (Richard): Personnellement, je pense que la
tarification doit être basée sur les coûts et aussi sur une
juste répartition de la charge énergétique entre les
différents consommateurs. Je ne pense pas que ce soit le rôle
d'Hydro-Québec d'attirer des industries en leur donnant des programmes
spéciaux, si on veut, au niveau de la tarification. Par exemple, dans le
cas des alumineries, on nous indique que c'est un programme qui vise à
baisser les tarifs lorsque le prix de l'aluminium est bas dans le monde. Pour
nous, ça équivaut à donner un tarif
privilégié à un type d'industrie, par exemple lorsqu'il y
a récession, alors que ce sont les autres consommateurs qui vont devoir
supporter par des hausses de tarif les besoins en revenus
d'Hydro-Québec. Pour nous, ce privilège qu'on accorde à
une industrie, c'est allouer de façon privilégiée nos
ressources, alors que, pour les consommateurs, je ne pense pas que ce soit une
priorité. Idéalement donc, si les industries ont à venir
ici, si on a une ressource qui est peu coûteuse, qu'on en fasse
bénéficier l'ensemble des industries de façon
équitable.
Mme Bacon: Vous feriez une règle uniforme pour l'ensemble
des industries quant à la fixation du taux de la tarification?
M. Dagenais: Idéalement, oui, effectivement. Mme Bacon:
Une règle uniforme? M. Dagenais: Oui.
Mme Bacon: Dans votre mémoire, vous soulignez, à
plusieurs reprises et de différentes façons, le cas des
industries énergivores. Vous y voyez aussi une spécialisation
possiblement trop poussée de notre économie, des problèmes
liés à l'environnement avec les entreprises de transfor-
mation de métaux, un impact à la hausse sur les tarifs
d'Hydro-Québec un accroissement de l'instabilité des revenus
d'Hydro-Québec, et aussi un potentiel effet négatif sur le
succès des programmes d'économies d'énergie. Je comprends
que la Fédération des consommateurs s'intéresse, et avec
raison, à l'évolution des tarifs d'électricité.
Comme les coûts marginaux pour produire de l'électricité
additionnelle sont supérieurs aux coûts moyens, que la
tarification d'Hydro-Québec est établie en fonction du coût
moyen, je pense qu'il est inévitable que tout nouveau client, que ce
soit une entreprise, que ce soit le propriétaire d'une maison neuve, ait
un effet à la hausse sur le coût moyen pour produire
l'électricité à un tarif moyen.
Votre organisme soutient-il le principe d'un tarif établi en
fonction du coût moyen et donc identique - encore une fois, vous l'avez
dit tantôt - pour tous les abonnés d'une même
catégorie, quelle que soit leur région? Je reviens
là-dessus, parce qu'il y a des gens ici avec qui on a
échangé sur peut-être une uniformisation des tarifs, celle
qui existe en ce moment par catégories, et on a posé aussi des
questions sur des différences de tarif selon les régions. Vous
nous avez dit tantôt que vous vouliez que ce soit un coût identique
pour des abonnés d'une même catégorie. Est-ce que vous
croyez qu'Hydro-Québec devrait limiter son nombre de nouveaux clients,
que ce soient les clients domestiques, que ce soient les clients industriels,
pour réduire la pression sur les coûts moyens de production
d'électricité? Est-ce que vous allez jusque-là?
M. Dagenais: Je pense qu'il faut d'abord privilégier
l'utilisation rationnelle et efficace des ressources. Ce qui me surprend, dans
le plan de développement d'Hydro-Québec, c'est qu'on
prévoit, d'ici à 2006, une augmentation de l'ordre de 40 %. Alors
qu'on nous a dit, par exemple, dans des économies comme la Suède,
qu'on prévoit même une réduction de l'ordre d'un tiers. Ce
que je dis, c'est qu'on a un plan de développement dans lequel est
sous-jacent un plan de croissance économique. Pour moi, je pense qu'il
faut quand même élargir notre vision des choses et remettre en
question ce plan de développement économique là. Il
faudrait voir, je pense, s'il y a lieu d'utiliser de meilleure façon les
ressources, même si on en a de disponibles. Notre modèle, celui
qu'on a ici, c'est qu'on a des rivières qui coulent à flot pour
rien. Ma perception, c'est que ça fait, somme toute, partie d'un
patrimoine naturel et que ça a une valeur en soi. Il faut quand
même utiliser d'abord de façon rationnelle et efficace les
ressources, ne pas viser le développement d'industries éner
givore8, utiliser idéalement au mieux les ressources. Je pense que, dans
ce sens-là, il faudrait voir à maximiser, si on veut, les
économies d'énergie d'une part et voir après cela ce qui
devrait être fait. Ne pas dire: On a un plan de développement
économique qu'il va falloir satisfaire et, après cela,
finalement, devoir nécessairement dégager les ressources qu'il
faut pour le satisfaire. Il faudrait voir d'abord de façon globale le
modèle de société que l'on veut pour demain, pour nos
enfants, pour nos petits-enfants, etc. Après cela, demander s'il y a
lieu, effectivement, d'économiser des énergies. La commission
Brundtland, par exemple, nous disait qu'au Canada nous dépensons de
façon exagérée, finalement, nos ressources
énergétiques par rapport aux économies du Tiers monde. De
quel droit, nous, en tant qu'êtres humains, pouvons-nous nous donner ce
droit-là d'utiliser ces ressources-là à notre profit
personnel exclusif?
Mme Bacon: Vous parlez d'industries énergivores. Est-ce
que vous placez dans ce même type d'industries nos mines ou nos
forêts qui se traduisent par des industries de pâtes et papiers qui
sont aussi énergivores? Est-ce que vous mettez tout ça dans le
même groupe? Ici au Québec, il nous faut, on a des gisements
miniers qu'il faut explorer. Je pense qu'il faut y aller. Il faut quand
même les mettre en valeur. Il faut mettre en valeur aussi, je pense, les
forêts que nous avons; je ne dis pas de tout couper dans nos
forêts, mais je pense qu'on peut les utiliser. Ce sont quand même
des richesses. On cultive aussi nos forêts, on remplace à mesure
les arbres qui sont coupés.
Mais est-ce qu'on doit cesser de faire de l'exploration minière,
est-ce qu'on doit cesser de travailler dans les pâtes et papiers, parce
que c'est énergivore de la même façon que les alumineries?
Allez-vous jusque-là dans votre cheminement?
Mme Pilon: Je pourrais peut-être répondre à
ça. Finalement, ce qui arrive, c'est que, par exemple, les alumineries
utilisent un procédé, I'electrolyse, qui est très fort
consommateur d'énergie électrique. On le sait et, justement, dans
le plan de développement d'Hydro-Québec, on prévoit que ce
sont les industries qui utilisent le plus la force motrice et
l'électrolyse qui vont être les industries responsables de toute
la croissance de la demande électrique au Québec, alors qu'on
prévolt que pour le résidentiel il va y avoir des
économies d'énergie. Oisons que ce qu'on peut voir, c'est qu'il
faut d'une certaine manière faire comprendre à ces
industries-là... d'une certaine manière discipliner les
industries et leur faire comprendre qu'elles doivent s'orienter
elles-mêmes vers l'économie de l'énergie et
l'efficacité énergétique. À ce moment-là, je
pense que la politique tarifaire préférentielle encourage au
contraire les Industries à être encore plus consommatrices
d'énergie.
Par exemple, une aluminerie qui va agrandir, disons, sa capacité
de production va être encore plus consommatrice
d'électricité. À ce moment-là, elle va gruger,
finalement, sur le
potentiel électrique une part de plus en plus grande.
M. Dagenais: Une autre façon de voir la chose, c'est de
dire qu'on n'est pas en soi contre le fait qu'il y ait des industries de
transformation, de production de métaux primaires, par exemple, mais il
faudrait voir si la transformation secondaire ne serait pas plus à
l'avantage du Québec, dans l'aluminium par exemple. On dit qu'elle est
plus créatrice d'emplois, entre autres. Pourquoi n'a-t-on pas
réussi, nous, à attirer ces industries-là, à
transformer des biens à valeur ajoutée plus grande et à en
bénéficier pour notre économie, des industries qui
utilisent entre autres moins d'énergie?
Nous allons ceinturer le Québec d'alumine-ries fort utilisatrices
d'électricité. Est-ce que c'est notre avantage premier de le
faire? Au niveau de l'emploi, par exemple, est-ce que c'est ce qui est
important? Je pense que le Québec, ce n'est pas juste de
l'énergie électrique, c'est aussi des êtres humains qui
sont capables de créativité et d'efforts lorsqu'ils en
reconnaissent le besoin.
Mme Bacon: Je pense qu'il faut reconnaître qu'Alcan, par
exemple, on en parle, a fait de gros efforts pour améliorer son
équipement sans augmenter sa production. Elle a dépensé
des millions de dollars pour faire en sorte d'être moins
énergivore. Il faut reconnaître aussi que nous sommes quand
même loin des marchés et, si on veut être
compétitifs, il faut être quand même assez près des
marchés pour pouvoir vendre nos produits. Ce sont quand même des
éléments importants qu'il faut considérer.
Si je reviens à votre mémoire, vous nous dites que les
programmes d'économies d'énergie devraient s'adresser d'abord
à des ménages à bas revenu. Quelle forme pourrait prendre
l'aide que vous suggérez pour défrayer les dépenses qui
sont exigées pour l'amélioration énergétique des
résidences, par exemple? Quelle est cette forme que ça pourrait
prendre?
M. Dagenais: Le problème, comme je le disais, au niveau
des ménages à bas revenu, c'est qu'ils n'ont pas normalement
d'épargne pour pouvoir fournir une part des dépenses
nécessaires aux économies d'énergie
Mme Bacon: Souvent, ce sont des locataires, ce ne sont pas des
propriétaires de maison.
M. Oagenais: Effectivement, ça pose un problème et
Hydro l'indiquait d'ailleurs, lorsqu'on a eu une réunion à ce
sujet-là. Il faudra peut-être penser à certaines
règles coercitives pour exiger, par exemple, des propriétaires
qu'ils effectuent des améliorations et pour faire
bénéficier aussi les locataires de ça. Par exemple, la
Régie du loyer ici devra effectivement vérifier que les
augmentations de loyer sont raisonnables et que le propriétaire n'en
bénéficie pas. Si les locataires se sont informés, par
exemple, qu'Hy-dro subventionne certaines dépenses, à ce
moment-là, déjà, le locataire saura que son
propriétaire n'a pas à l'augmenter pour ce type de
dépenses. Si l'information va au locataire par exemple, qu'on peut
améliorer son logement, peut-être qu'il pourra inciter son
propriétaire à le faire.
Mme Bacon: Comme des logements mieux isolés, par
exemple.
M. Dagenais: Je pense que c'est la première... Il faudrait
voir à ça, parce que les gens qui sont à bas revenu se
logent habituellement dans des zones plus vétustés, donc moins
efficaces...
Mme Bacon: Moins protégées.
M. Dagenais: ...du point de vue énergétique.
Mme Bacon: Vous proposez qu'Hydro-Québec n'a pas à
faire le travail du gouvernement en matière de réduction du
déficit gouvernemental. Vous affirmez qu'Hydro-Québec appartient
aux citoyens et aux citoyennes qui peuvent tirer des dividendes directement par
le biais de tarifs raisonnables. Comme vous le savez, au cours des trois
prochaines années, il n'y aura pas de dividendes qui seront
versés au gouvernement ou déclarés au gouvernement par
Hydro-Québec. Est-ce que vous considérez comme adéquate la
politique budgétaire gouvernementale relative à
Hydro-Québec dans ces circonstances, ou, selon votre organisme, y
aurait-il des ajustements encore à apporter? Quels seraient ces
ajustements-là? (12 h 30)
M. Chaîné (Denis): Si je peux me permettre... Ce
qu'on trouve quand même un petit peu plus difficile à admettre,
c'est qu'il semble que, pendant un certain nombre d'années, on aurait
déjà dû commencer à planifier le réajustement
qu'on est en train de faire en ce moment. On doit absorber tout d'un coup une
hausse de tarif qui nous semble quand même assez importante. Ce ne sera
pas seulement cette année, ce sera encore pour un an ou deux.
Ce que ça veut dire pour les consommateurs, donc, c'est qu'on
sent que, là, en un seul coup, on veut réajuster un
deséquilibre qui s'est produit au cours d'un certain nombre
d'années. Le métier que je fais, c'est de la consultation
budgétaire, en général auprès des personnes
démunies. Pour elles, une augmentation comme elles vont avoir cette
année, c'est la différence entre manger adéquatement et
manger de façon non adéquate, c'est-à-dire qu'elles vont
diminuer là où elles peuvent couper. Dans certains cas, sur la
nourriture. C'est ce que ça veut dire. Ces gens-là n'ont aucun
contrôle sur leur taux de
chauffage, sur l'isolation de leur maison et, même si on met sur
pied un programme d'économies d'énergie ou un programme
d'isolation des maisons, si ça prend deux ou trois ans à se
réaliser, je me dis à ce moment-là: Qu'est-ce qui arrive
des gens qui, pendant deux ou trois ans, ont à subir cette
hausse-là, qui est quand même comme un réajustement tout
d'un coup d'un déséquilibre qui existait quand même
auparavant et dont on était conscients?
Je n'ai pas toutes les réponses à apporter aux questions
qu'Hydro-Québec se pose, évidemment. Je pense qu'on posait
même la question des économies d'énergie tout à
l'heure. Évidemment, on n'a pas de solution miracle, parce que rentre en
ligne de compte un intermédiaire qui s'appelle un propriétaire.
Il entre en ligne de compte aussi tous les programmes de subvention pour
l'isolation des maisons. Donc, on voit qu'il y a des coûts additionnels,
mais, pour le moment, il y a une gamme de consommateurs qui nous
intéressent en particulier et ce sont les gens à bas revenu ou
à revenu moyen qui sont locataires de maison et qui, eux, ont à
subir une hausse qui est quand même très importante, si on
considère la nouvelle taxe fédérale qu'on va subir en
même temps ou à peu près.
Mme Bacon: Si vous me permettez, il y a peut-être juste un
élément. On a beaucoup parlé de faible
hydraulicité. Vous dites que la hausse s'est faite rapidement, mais
l'effet de sécheresse aussi a perduré, ce qui fait
qu'Hydro-Québec a dû acheter de l'électricité de nos
voisins américains ou de notre voisin, le Nouveau-Brunswick. Cela
n'avait pas été prévu, je pense. C'est en dehors du
contrôle d'Hydro-Québec, la faible hydraulicité. Ce sont
des éléments qu'on ne peut pas prévoir. Je ne veux pas
excuser, mais j'explique tout simplement. Oui, monsieur.
M. Dagenais: Concernant la faible hydraulicité, ce qu'on
observe en 1989, c'est qu'Hydro continue d'exporter de l'énergie vers
les Etats américains et les autres provinces canadiennes, alors qu'elle
importe aussi malgré qu'on ait des problèmes. de faible
hydraulicité. Relativement à ces programmes d'exportation
là, je pense qu'il faudrait que ça puisse être
effectivement ajusté à l'hydraulicité; sans ça, la
rentabilité de ces exportations pour nous est très faible, sinon
nulle dans certains cas.
Mme Bacon: Peut-être que le fait d'avoir exporté
nous a permis d'importer, d'acheter. Si on n'avait pas eu ces lignes de
communication ouverte avec les Américains, on aurait manqué
d'électricité en décembre, par exemple, où il a
fait beaucoup plus froid qu'habituellement. Il fallait acheter pour fournir
l'électricité aux citoyens.
Dans votre analyse de la tarification d'Hydro-Québec, vous faites
souvent référence à un concept de valeur différente
des services. Est-ce que vous pourriez nous expliquer davantage cette approche
que vous avez, à l'aide peut-être d'un exemple?
M. Dagenais: Pour nous, l'électricité, c'est pour
fournir des besoins essentiels aux consommateurs et aux consommatrices. Ce
qu'on observe à travers la lecture par exemple des gens d'affaires,
c'est qu'on devrait privilégier les emplois. Pour moi, c'est
reléguer au second plan la consommation. Dans mon modèle
personnel, l'utilisation finale, si on veut, de tout le système de
production dans une économie, c'est pour assurer le bien-être de
la société, alors que, dans notre économie, on a
l'impression qu'il faut privilégier la production: Si tu as le temps, tu
consommeras et, si on a les ressources nécessaires, tu consommeras.
Certains disent: L'électricité pour le chauffage domestique, ce
n'est pas une bonne utilisation. Il faut utiliser ça pour l'industrie.
C'est, à mon sens, un débat de valeurs et un débat de
société qui est derrière tout ça.
Au niveau de la tarification, je donnais comme exemple le fait que les
entreprises peuvent déduire comme dépenses leurs frais
d'électricité, alors que les consommateurs ne peuvent pas le
faire. On va nous dire que les consommateurs ne paient pas assez, mais, en
termes d'équité fiscale par contre, les consommateurs sont
désavantagés par rapport aux entreprises. Hydro n'en tient pas
compte, mais le gouvernement, lui, peut en tenir compte. Par exemple, lorsqu'on
touche une taxe de 9 % sur les dépenses électriques, c'est pour
moi une rentabilité sociale de plus pour l'électricité.
Hydro n'en tient pas compte, mais le gouvernement peut en tenir compte aussi,
je pense.
Mme Bacon: Je pense qu'on a tenu un peu compte de ça aussi
par rapport à l'interfinancement cette année, alors qu'Hydro
demandait davantage pour le résidentiel que ce qui lui a
été accordé, au niveau du domestique. Là, on n'a
pas fait d'interfinancement à ce moment-là.
À la page 24, vous recommandez, encore une fois, qu'étant
donné que beaucoup de ménages à faible et à moyen
revenus ne peuvent substituer à un coût raisonnable un autre mode
de chauffage à celui du tout électrique et que
l'électricité reste quand même une source première
de fonctionnement des appareils ménagers courants, le gouvernement
devrait protéger - c'est ce que vous nous dites - les consommateurs et
les consommatrices qui sont captifs des abus possibles du monopole qu'est
Hydro-Québec.
Comment envisagez-vous ce rôle pour le gouvernement dans le cadre
de votre recommandation de créer une régie indépendante
qui permettrait de garantir des décisions que vous dites objectives en
matière de tarification?
M. Dagenals: Le premier rôle du gouvernement, ce serait
effectivement d'établir des critères socio-économiques
à partir desquels la régie, par exemple, prendrait ses
décisions. Et si on reconnaissait à ce moment-là la valeur
de l'électricité comme bien de consommation essentiel, par
exemple, je pense que la régie en tiendrait compte dans ses ajustements
de tarif annuels et aussi dans ses décisions sur les plans de
développement qui auraient un impact nécessaire sur le prix
moyen.
Mme Bacon: Basée sur le CRTC, par exemple. C'est ce genre
de régie que vous proposez?
M. Dagenais: Le modèle qu'on a présentement, c'est
ça et on le trouve intéressant et valable pour les consommateurs.
Il est clair que certains vont dire qu'une régie, ça peut causer
certains problèmes. Il n'y a pas de modèle parfait dans notre
société, je pense. Pour nous, c'est une question d'analyse
coûts-bénéfices et on pense que les consommateurs seraient
mieux protégés de cette façon-là.
Mme Bacon: Ce serait une régie strictement pour
l'électricité?
M. Dagenais: Selon notre modèle, oui. Remarquez qu'on
pourrait peut-être l'élargir à la problématique de
la consommation énergétique globale. Je pense que ça
pourrait se faire assez bien de cette façon-là aussi.
Mme Bacon: Et vous n'avez pas peur qu'une régie ne
garantisse des taux de rendement plus élevés à
Hydro-Québec qu'on ne les lui garantit, nous, quand on fixe la
tarification?
M. Dagenais: Je pense que c'est un critère que le
gouvernement aurait à établir: quelle est la rentabilité
que devrait...
Mme Bacon: Pourquoi aurait-on une régie si le gouvernement
ne peut pas garantir un rendement à Hydro-Québec, s'il y a une
régie qui fixe la tarification?
M. Dagenais: Dans le fond, le problème ici, c'est
qu'Hydro-Québec est une société d'État. Elle
n'appartient pas à des actionnaires privés. Alors, à ce
moment-là, c'est le gouvernement qui aurait à dire quelles sont
ses attentes face à la rentabilité d'Hydro-Québec. Et, si
cette rentabilité-là doit aussi profiter aux consommateurs, je
pense que ce serait un critère clairement établi.
Mme Bacon: Ne trouvez-vous pas qu'on compliquerait la vie aux
régisseurs de fixer une tarification si le gouvernement,
déjà, donnait une directive à Hydro-Québec quant au
pourcentage de son rendement, quant au rendement qu'elle devrait avoir?
M. Dagenais: Je pense qu'ils seraient payés pour qu'on
leur complique la vie et pour simplifier celle des autres aussi. Pour moi,
ça pourrait être un critère. Il ne faut pas dépasser
cette borne, somme toute.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. St-Roch): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Merci. M. le Président. D'abord, un mot pour
vous souhaiter la bienvenue et pour vous dire qu'il est agréable de
voir, à l'occasion, des gens qui prêchent pour la défense
du consommateur qui, en bout de piste, est celui pour qui on produit de
l'électricité. On ne produit pas de l'électricité
pour le plaisir d'en produire. On ne produit pas nécessairement de
l'électricité uniquement pour permettre le développement
d'équipements qui vont eux-mêmes produire de
l'électricité, mais on en produit. On produit de
l'énergie. On en a besoin pour des gens en chair et en os qui en
consomment et qui sont, du moins on le présuppose, capables de se la
payer. S'ils ne sont pas capables de la payer, on se demande pourquoi en
produire, finalement.
Dans votre exposé, vous avez soulevé quelque chose qui n'a
jamais encore été dit, à ma connaissance, qui n'a jamais
été exprimé d'une façon aussi concise et qui est
très intéressant comme point de vue quand on parle de
l'interfinancement. On nous a chauffé les oreilles, à plusieurs
reprises, avec toute la question de l'interfinancement et du fait que c'est
l'entreprise qui subventionne le résidentiel et tout ça. Mais le
fait que l'entreprise peut déduire sa facture
d'électricité de ses coûts de production fait en sorte
qu'en bout de piste il serait intéressant de voir combien ça lui
coûte vraiment, l'électricité. Dans le fond, il serait
peut-être intéressant de voir si les dividendes que le
gouvernement ne peut demander à Hydro-Québec ne s'en vont pas,
finalement, dans ce remboursement d'impôts qui est fait aux entreprises
sur leur facture d'électricité. Il serait vraiment
intéressant d'avoir les chiffres et je pense qu'Hydro-Québec ou
le ministère du Revenu devrait être en mesure de nous
étudier ça pour savoir combien ça coûte,
effectivement, à l'entreprise sa livraison d'électricité
chez elle comparée à la part que l'électricité a
dans les dépenses d'un particulier à faible ou à moyen
revenu.
Puisqu'on est là-dedans, à la page 15 de votre
mémoire, vous faites référence à toute la question
de la composition des dépenses globales d'un ménage moyen. Vous
parlez de l'électricité en disant, entre autres: "Les
dépenses en mazout croissent moins vite avec le revenu que les
dépenses d'électricité. Pour
l'électricité, on observe que les ménages à bas
revenu sont désavantagés par rapport aux ménages plus
riches en termes de pourcentage du revenu dépensé et de la
dépense moyenne, par personne dans le ménage". Est-ce que vous
pourriez être plus explicite là-dessus et nous donner, entre
autres, des chiffres précis? C'est combien, la part de
l'électricité dans le revenu d'un salarié moyen?
M. Dagenais: Vous vous référez au tableau à
la page 14A, la page juste avant la page 15. Vous avez dans le tableau du haut
la dépense d'électricité moyenne. En moyenne, c'est 703 $
pour les différents ménages de notre enquête. Pour les bas
revenus, de 0 $ à 10 000 $, c'est 312 $ en moyenne et il faut tenir
compte ici du fait qu'on ne connaît pas exactement la part des gens qui
ne déclarent pas de dépenses parce qu'ils sont locataires. Par
exemple, c'est leur propriétaire... Alors, c'est vraiment la
dépense qui est directement effectuée par le locataire ou le
propriétaire. D'accord? En termes de pourcentage, la moyenne par
répondant est de 472,73 $ pour les bas revenus et la moyenne par
personne est de 358 $. Pour les plus hauts revenus, 50 000 $ et plus, on a une
dépense de 1058 $, la dépense moyenne en
électricité. Ça va? Est-ce que vous me suivez?
M. Claveau: Oui, ça va.
M. Dagenais: O.K. Alors, la dépense moyenne par
répondant est de 1070 $. On voit que le taux de répondants est de
98,8 %; c'est très élevé finalement. La majorité
des gens à haut revenu dépense directement, paie sa facture
d'électricité de façon directe. Par personne par contre,
c'est 295 $ pour les hauts revenus, alors que c'était 358 $ pour le plus
bas des revenus.
Ce que ça nous indique ici, c'est que les plus hauts revenus ont
en moyenne une famille plus grande, parce qu'il y a entre autres un second
revenu. Ce sont des moyennes ça, ici. En termes de dépense, la
moyenne per capita dans un ménage est relativement stable,
c'est-à-dire que, si on a cinq enfants, par exemple, on va augmenter
notre dépense à peu près proportionnellement au nombre
d'enfants. Alors, si on augmente la dépense en
électricité, somme toute, cela équivaut finalement
à taxer la famille, ici. Plus vous allez avoir d'enfants, plus votre
charge, en termes nominaux, va être importante.
Un autre aspect, c'est qu'en termes relatifs, pour les bas revenus,
c'est 6,4 % du revenu qui est dépensé pour
l'électricité, alors que pour les plus riches, c'est 1,6 %. Il y
a un facteur de quatre, si on veut, en termes de pourcentage et la façon
de l'expliquer, c'est que les ménages à bas revenu ont
habituellement moins de personnes dans le ménage, en moyenne. Ils ont
donc un coût de base d'électricité qui est plus
élevé, parce qu'il y a un tarif fixe et aussi parce qu'il y a une
utilisation moins efficace, si on veut. Par exemple, si vous êtes moins
pour faire le lavage, etc. Donc, les ménages à bas revenu sont
désavantagés par le coût fixe que demande
Hydro-Québec, le tarif de chaque jour, et aussi par le fait qu'ils sont
moins nombreux habituellement, en moyenne.
Par contre, les ménages à bas revenu qui ont plus
d'enfants vont être, dans ce cas-là, très
désavantagés, si on veut, parce qu'ils vont avoir un
pourcentage... En termes de pourcentage de revenu, ça va être
très élevé et, aussi, il faut qu'ils assument une
dépense par personne dans le ménage qui est à peu
près constante, si on veut, qui se maintient à peu près.
Je ne sais pas si je suis clair dans ma façon de m'expliquer. (12 h
45)
M. Claveau: Assez, oui. Dans ce contexte-là, où se
situe, à peu près, le point de rupture qui va faire en sorte
qu'à un moment donné les gens ne seront plus capables d'acheter
de l'électricité? Dans toute démarche économique,
on regarde toujours le moment où, finalement, le produit devient
inaccessible pour le client qu'on veut rejoindre. Est-ce qu'actuellement, au
moment où on se parte, les gens avec qui vous faites affaire dans les
ACEF et qui, finalement, vont vous consulter pour toutes sortes de
problèmes sont encore capables de payer l'électricité et
d'absorber les tarifs qui vont être donnés ou qui vont
apparaître d'ici à l'année prochaine? Si oui,
jusqu'à quel point pensez-vous qu'ils vont pouvoir en absorber encore?
Un jour ou l'autre, il va falloir tout payer ça, ces
infrastructures-là.
M. Chainé: Je pense que la réponse qu'on peut
donner, au départ, il y a peut-être des questions de moyenne, mais
il y a une question individuelle. Évidemment, les personnes qui nous
consultent sont des personnes qui, au niveau budgétaire, sont
déjà très à l'étroit. Dans tous les cas,
ça veut dire, si on ajoute un montant x, par exemple, si quelqu'un se
chauffe à l'électricité et qu'on ajoute un certain montant
au début de l'année, ça veut dire pour chaque personne
moins de vêtements. Si, déjà, elle a coupé au
minimum sur le vêtement, ça veut dire moins de nourriture dans ce
cas-là. Il y a des gens qui en sont là. Quand je parie d'un
revenu moyen, prenez quelqu'un au salaire minimum en montant jusqu'à un
revenu de 8 $ l'heure, pour ces gens-là, c'est dramatique toute
augmentation.
Déjà! Ils sont déjà rendus à un
niveau où l'électricité leur coûte cher. Pour eux,
toute augmentation devient un fardeau supplémentaire à payer,
même une augmentation légère. Il faudrait qu'il y ait une
augmentation équivalente de salaire, en fin de compte de leur revenu, ce
qui n'est pas le cas nécessairement. Le salaire minimum, par exemple,
n'augmente pas aussi vite que le prix de l'électricité.
M. Claveau: Donc, dans leur cas, il est évident que
l'orientation que le gouvernement devrait donner à Hydro-Québec
doit être une orientation en fonction d'une politique d'économies
d'énergie qui ferait qu'en bout de piste ces gens-là, s'il
appliquait cette politique-là, seraient amenés à
dépenser moins et, par le fait même, à avoir un peu plus de
"lousse" dans leur budget.
M. Dagenais: Des politiques qui font que les ménages
à bas revenu puissent en profiter. On a vu, par exemple, les conversions
des systèmes de chauffage à l'électricité au
début des années quatre-vingt. Habituellement, ce ne sont pas les
bas revenus qui en ont profité, parce que ça exigeait une
dépense au départ et, la plupart du temps aussi, d'être
propriétaire si on voulait bénéficier des avantages
directement.
M. Claveau: Vous parliez tout à l'heure d'une
méthode de coercition jusqu'à un certain point,
c'est-à-dire qu'il faudrait exiger des choses de la part des
propriétaires dans le cas où ils ont des locataires. Souvent,
pour les locataires, le coût de l'électricité fait de toute
façon partie du loyer, même s'ils ne le paient pas d'une
façon très directe et, dans ce sens-là, ce sont les
locataires qui chauffent le dehors, dans pas mal de cas. Si Hydro-Québec
mettait en place une véritable politique ou si le gouvernement demandait
à Hydro-Québec d'investir massivement dans le cas de ces
résidences-là tout en s'assurant que ça puisse
bénéficier aux locataires par la bande, que ce ne soit pas
uniquement le propriétaire qui puisse en bénéficier,
est-ce que vous pensez que ce serait une orientation que le gouvernement
devrait prendre? J'essaie de voir de quelle façon on pourrait
rationaliser cette démarche-là pour faire en sorte que
l'électricité soit considérée, comme vous le
demandez, comme un service essentiel et qu'on ne puisse pas, sous
prétexte qu'une personne ne peut pas payer, l'obliger à passer
l'hiver à l'huile de phoque.
M. Chaîné: Au départ, quel mécanisme
on peut choisir, je pense que nous n'avons pas les moyens de faire une
étude sérieuse là-dessus, nous autres, en tant que
fédération. Une chose sûre par contre, qu'on parle, par
exemple, de programmes qui pourraient être l'isolation des maisons, qu'on
parle de crédit d'impôts pour les gens à faible revenu,
qu'on trouve toutes sortes de moyens, si on veut, nous sommes ouverts à
beaucoup de propositions là-dessus, sauf que ce qu'on se dit, c'est
qu'on ne voudrait pas qu'en bout de piste, évidemment, il y ait
seulement le propriétaire qui en profite et que ça se traduise
par des hausses de loyers. Si on met sur pied un programme et que ça
coûte un certain montant au propriétaire, on sait très bien
à qui il va refiler la facture, ce sera au locataire encore une fois.
C'est là où il y a une étude à faire.
Nous avons posé la même question au service des relations
publiques d'Hydro-Québec et eux-mêmes n'ont pas vraiment la
réponse à ça non plus. S'ils n'ont pas la réponse,
nous, nous n'avons pas la réponse, mais on est ouvert à toute
proposition, même si on a de la difficulté, en ce moment, à
faire des suggestions sérieuses. Effectivement, il faudrait qu'il y ait
une attention particulière portée à ces
ménages-là pour qui l'augmentation de l'électricité
est quand même un facteur très important, un fardeau
financier.
M. Dagenais: Nous n'avons pas l'air de donner de réponse.
Par contre, si on voit qu'il y a un problème, je pense qu'à
partir de là on va peut-être penser à des solutions et
vérifier lesquelles sont les meilleures.
M. Claveau: L'idée, dans le fond, quand un gouvernement
consulte, c'est aussi pour essayer d'avoir des éléments de
réponse et pour ne pas avoir à prendre des décisions qui,
après ça, seraient considérées comme des
décisions prises unilatéralement. Est-ce que vous pensez, par
exemple, que d'élargir le débat en une vaste consultation
publique à travers le Québec pourrait faire en sorte que des gens
nous arrivent avec des éléments de réponse
intéressants? Est-ce que vous connaissez, dans vos milieux, des gens qui
ont déjà des éléments de réponse qui
mériteraient d'être travaillés, approfondis et d'être
présentés à une autre instance que celle-ci pour,
effectivement, éclairer le gouvernement substantiellement sur les
orientations qui devraient être privilégiées?
M. Chaîné: Vous m'enlevez les mots de la bouche.
C'est exactement ce que j'allais dire il y a quelques instants. Je pense que
c'est essentiel qu'on élargisse le débat sur ces
questions-là pour ne pas en arriver simplement à des critiques ou
à la présentation de mémoires où autrement dit on
constate... en tout cas, où on pose des questions où on a des
réticences, mais pour s'asseoir à une table où on va
échanger, justement, des propositions et où on va pouvoir
discuter de façon très ouverte. Ce que je sens d'un
côté, c'est qu'on a beau arriver avec un mémoire où,
nous, nous présentons notre point de vue, il n'y a pas vraiment de
discussions à faire sur des solutions possibles. On n'est pas à
l'étape des solutions. Je pense qu'il y aurait une grande discussion
à faire. Il y a des éléments à amener parce que,
comme on dit toujours, on manque même d'éléments pour
analyser complètement la situation. Même quand on se penche sur
à peu près tout ça, vous voyez que, dans nos
mémoires, il y a des faiblesses qui se glissent et c'est absolument
normal, puisqu'on ne peut pas avoir accès à certaines
données ou qu'on accepte des fois des données qui sont trop
complexes. On
aurait justement besoin d'échanger sur ces questions-là.
Donc demander un débat élargi, c'est pour pouvoir justement
échanger des réflexions, se faire expliquer des choses qui,
peut-être, pour nous, nous dépassent, mais aussi pour amener des
solutions et peut-être des réflexions qui pourraient faire avancer
cette situation-là. Tout le monde y trouverait son compte enfin.
M. Dagenais: Pour compléter, je pense qu'on a quand
même eu peu de temps pour préparer le mémoire et
étudier le plan de développement d'Hydro-Québec. On n'a
pas vraiment eu le temps d'aller voir quelles seraient les solutions aux
différents types de problèmes. On s'est d'abord contenté
de soulever les problèmes et de dire: II faudra qu'Hydro-Québec
nous donne peut-être de meilleures réponses que ce qu'elle nous
donne présentement. C'est pour ça qu'on verrait un débat
élargi, finalement, ne serait-ce que pour aller voir ce qui se fait
ailleurs dans le monde. On sait qu'ailleurs on propose des solutions
basées sur les économies d'énergie, alors qu'ici on
propose des solutions basées sur les dépenses d'énergie.
Nous, nous remettons ça en question. S'il y a possibilité d'avoir
une société qui est économe en termes d'énergie,
qui ne gaspille pas les ressources et non qui se dit: On a des rivières,
il faut donc les exploiter le plus possible, nous nous disons: II faut aller
voir ailleurs et regarder vraiment... Finalement, pondérer les choix
possibles et décider en fonction des priorités. Pour nous, la
priorité, c'est... Je pense qu'il y a des problèmes au niveau
environnemental. On regarde Saint-Basile, on regarde en Abitibi le
problème de l'empoisonnement à l'arsenic, on se dit: Dans quelle
société est-ce qu'on est? On a un gouvernement qui se dit
favorable à l'environnement; quels sont les moyens qu'il applique
vraiment pour ça? Nous disons qu'un plan de développement comme
le propose Hydro-Québec, ce n'est peut-être pas la meilleure
solution pour vraiment protéger notre avenir à tous. Je
pense.
M. Claveau: Et vous pensez qu'à travers un débat
plus approfondi avec des experts, des gens qui s'y connaissent et qui ont
peut-être des visions différentes de celles d'Hydro-Québec,
il y aurait à ce moment-là une possibilité de
dégager des pistes différentes et une vision à long terme
peut-être un petit peu plus respectueuse du milieu et, en même
temps, des acheteurs d'électricité, des consommateurs
finalement?
M. Dagenais: Nous en sommes convaincus, parce
qu'Hydro-Québec nous propose un modèle et nous dit qu'il n'y a
pas mieux à faire que ça, somme toute. Je pense que, si on va
voir ailleurs les autres modèles, on va peut-être avoir de
meilleures idées aussi. Ça pourrait ressortir de tout ce
débat-là.
M. Claveau: Vous parlez beaucoup d'une régie dans votre
mémoire et plusieurs nous ont parlé aussi d'une fameuse
régie qui pourrait faire les choses mieux qu'elles ne sont fartes
actuellement. Je n'irai pas jusqu'à dire que je pense que la
façon actuelle est la meilleure affaire. Je n'irai pas jusqu'à
dire non plus qu'elle ne peut pas être améliorée, au
contraire. Dans le fond, je reviendrais un peu à ce que Mme la ministre
disait tout à l'heure: Une régie serait peut-être un petit
peu coincée dans la mesure où le gouvernement, comme actionnaire
d'Hydro-Québec, aurait déjà déterminé un
certain nombre de choses. Après ça, on la renvoie à une
régie pour décider et, les régisseurs étant
nommés par le même gouvernement, il y a comme un petit
problème quelque part. En tout cas, il faudrait trouver peut-être
une mécanique.
Moi, je me demande... Vous, vous nous arrivez avec le modèle
d'une régie... Finalement, on sait qu'il y a un certain nombre de
régies qui existent, c'est un modèle qu'on peut prendre à
la volée, comme ça, dans la société et l'introduire
dans la mécanique de la fixation des intérêts des
consommateurs d'énergie au Québec, mais est-ce qu'on n'aurait pas
avantage à aller peut-être un peu plus loin et à regarder
d'autres modèles, d'autres approches que la simple approche de cette
régie-là?
M. Chaîné: Mais je pense...
M. Claveau: Simple dans le sens d'unique, pas dans le sens
de...
Mme Pilon: Nous avons proposé une régie mais,
finalement, ce que nous proposons dans le dernier texte, c'est un
mécanisme qui permettrait justement de soumettre les décisions
comme le plan de développement d'Hydro-Québec à un
débat public élargi et qui permettrait la participation des gens
qui sont impliqués, disons, à l'intérieur du processus de
décision. Actuellement, nous autres, ce que nous déplorons, c'est
le fait que le plan de développement d'Hydro-Québec risque
d'être un plan de développement qui est presque déjà
décidé d'avance. On a déjà presque engagé
des fonds, etc., pour le faire et où, à ce moment-là, on
ne pourra pas le bloquer. Ça va être une machine qui va commencer,
disons, à fonctionner et sur laquelle nous n'aurons strictement aucune
prise en tant que consommateurs d'électricité.
Il y a aussi un autre aspect. Au niveau des solutions, il faut revenir
au fait qu'un choix, disons, de consommation énergétique, c'est
aussi un choix de système de valeurs à l'intérieur d'une
société et ce système de valeurs là doit être
discuté, doit être approuvé. Actuellement, on parle, on
utilise beaucoup les mots "environnement" et "développement durable",
mais paradoxalement on peut constater une contradiction entre le discours et la
pratique. On tient un
discours environnementaliste, mais on a une pratique productiviste
à tous crins. Alors, à un moment donné, il va falloir
qu'on ajuste nos discours à nos pratiques. Il faudrait, si
HydroQuébec a vraiment l'intention de promouvoir le développement
durable, la préservation de l'environnement, qu'on puisse le voir au
niveau pratique, concret.
M. Dagenais: Effectivement, au niveau des solutions, on a
proposé une régie, mais si on nous arrive avec une meilleure
solution, nous sommes prêts à l'étudier et à la
faire avancer. Par exemple, au Massachusetts, le MIT fournit un intrant, qui
serait applicable à la régie, en ce qu'on sollicite les gens
à donner leur position, leurs valeurs et après ça, on va
faire un modèle multivarié, multicritère, et on va dire
quelle est la solution la meilleure qu'on puisse tirer en fonction des besoins
des différents individus ou des différents Intervenants dans
l'économie. Il y a différentes solutions possibles auxquelles on
peut penser. Nous, finalement, celle que nous préconisons, c'en est une,
à notre sens, pour l'instant, qui serait peut-être la meilleure,
parce que la régie, son rôle serait d'abord de faire la cuisine.
Je pense que ce n'est pas le rôle du gouvernement de faire la cuisine
chaque année, de se rabattre finalement sur l'étude de grands
dossiers et de voir du point de vue technique et financier si ce sont les
meilleures solutions. Je pense que ce sont des aspects techniques et qu'une
régie serait peut-être plus apte à faire les choses,
à juger des tarifs et des plans d'investissements.
M. Chainé: Je me permettrai, en tout cas, pour
continuer... Évidemment, lorsqu'on parle d'une régie, ça
fait toujours référence à des modèles qu'on
connaît et on a l'air très rigide là-dessus. En fin de
compte, le principe d'une régie, et je pense que je reprends un peu les
paroles de mes collègues, dans le fond, c'est qu'on veut une
participation à tout ça. Je pense qu'il y a nous, en tant
qu'intervenants, et d'autres intervenants dans le milieu économique qui
aimerions avoir une participation plus grande à tous ces processus
décisionnels là. A un moment donné, il faudrait que notre
voix ait plus de poids là-dedans. On dit: O.K. Effectivement, il y a du
développement économique à faire. Il y a des gens qui sont
des consommateurs de services au bout de tout ça et il y a des gens qui
s'occupent d'environnement, mais tout ça, ça se retrouve comment
dans ce système-là? On ne le voit pas tellement. Alors on se dit
qu'il faudrait que le mécanisme d'évaluation soit
détaché de toutes les décisions, soit Impartial et
détaché du programme politique ou en tout cas... Ça veut
dire pour nous qu'on veut avoir notre mot à dire là-dedans, parce
que ce n'est pas évident que le rôle qu'on veut faire jouer
à HydroQuébec soit complètement en accord avec le
rôle que, nous, on aimerait bien la voir jouer. Mais, je pense, si on
veut un débat public plus large, c'est pour pouvoir s'expliquer
là-dessus justement et voir ce qu'on entend faire avec
Hydro-Québec.
M. Claveau: Le temps est écoulé.
Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez
remercier nos invités.
M. Claveau: On vous remercie de votre prestation aux travaux de
cette commission et je dois vous dire que, même s'il y a certains
éléments de votre mémoire qui mériteraient, je
pense, d'être approfondis un peu pour bien voir vers où tout
ça peut tendre à la limite, il reste qu'il y a une
préoccupation fondamentale envers les consommateurs qui n'est pas
à négliger et qui devrait être essentiellement la
préoccupation de base de tout gouvernement qui est d'abord là
pour défendre les intérêts de ses commettants que sont les
consommateurs. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, madame et messieurs, j'aimerais vous remercier
de votre mémoire et de l'ajout que vous y avez apporté. Il est
intéressant à plusieurs égards et aussi différent
de ce qu'on entend d'autres sources. Vous nous avez apporté des
arguments qui méritent, de par leur force même, de nous y pencher
davantage. La différence fait que ça ajoute, je pense, au
débat, au dialogue qu'on a entrepris, il y a quelques semaines, à
cette commission parlementaire, qui n'était certes pas l'endroit
idéal, peut-être pour certaines personnes, mais qui, je pense, est
déjà un apport considérable par rapport à ce qui
existait auparavant. D'avoir fait ce débat, je pense qu'on avait encore
raison de l'avoir élargi à une commission parlementaire, tout
comme d'avoir fait en sorte qu'on puisse avoir cette discussion. C'est donc un
apport considérable que vous nous apportez aujourd'hui, ne serait-ce que
par la différence de vos arguments. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Bien, en terminant, je
voudrais peut-être ajouter un petit mot. Lorsque vous parlez de
débat public élargi, je vous ferai remarquer que le rôle de
la commission, c'est ça. Nous aurons reçu, lorsque nous aurons
terminé ces travaux d'auditions publiques, plus de 75 groupes, qui
représentent des milliers de citoyens au Québec, des groupes
comme vous, qui sont venus donner leur point de vue.
Vous êtes le deuxième groupe, et il y a une certaine
parenté entre vous, puisque je reconnais les mêmes personnes, qui
nous réclamez un débat public plus grand. Je n'ai rien contre,
c'est juste
que je tiens à préciser que le rôle des commissions
parlementaires et des auditions publiques, c'est justement de faire ça.
Si des gens avaient des choses à dire et qu'ils tenaient à les
dire, c'était de s'inscrire à la commission parlementaire. Nous
n'avons refusé aucun mémoire, absolument aucun. Nous avons
rencontré tous les groupes qui en ont fait la demande et nous avons
même incité des groupes à venir et qui ont dit: Bien, oui,
non, pas tellement. On les a incités à venir, il y a eu des
efforts importants qui ont été consentis à ce
niveau-là et je pense que c'est le système démocratique
qu'on a choisi au Québec, depuis 200 ans, et même davantage, pour
fonctionner. Alors, dans ce sens-là, je reçois mal votre critique
et il y a des gens, ici, élus, et des élections à tous les
quatre ans pour contester ces gens-là, s'ils ne vous représentent
pas bien et tout ça, et je pense que c'est l'essence même de la
démocratie.
Il y a des groupes qui nous ont dit: Bien, on n'y va pas, on veut un
débat public. Ils ont manqué une saprée belle occasion de
faire connaître leur point de vue, parce que c'était vraiment la
place ici. Et c'est dans cet objectif-là, premier, qu'est tenue la
commission. Même, c'est l'initiative de Mme la ministre, puisque c'est
elle qui nous a fait la demande pour ce débat. Dans ce sens-là,
je pense qu'on doit avouer qu'il y a là un effort extrêmement
intéressant et que, jusqu'à maintenant, des
représentations de très grande qualité, par des groupes de
toutes les appartenances et de tous les niveaux, représentant toutes les
couches de citoyens possibles, ont été faites ici. Alors,
ça me paraît être un lieu de débat très
représentatif.
Je vous en prie.
Mme Pilon: Oui. J'aimerais répondre à ça.
Nous, nous ne contestons pas du tout le caractère démocratique de
la commission parlementaire. C'est justement pourquoi on est là
aujourd'hui, sauf que ce qui arrive, c'est qu'actuellement on nous
présente un plan de développement qui est déjà tout
fait. Nous, nous donnons notre opinion sur ce plan de développement,
mais je pense qu'il faudrait poursuivre la démarche de façon
à ce qu'on puisse en arriver à des solutions créatives.
Finalement, on nous coince à accepter un plan de développement et
ensuite il n'y aura plus aucune possibilité d'intervenir parce que
ça va être une machine autonome qui va fonctionner selon sa propre
logique, alors que nous autres, ce qu'on voudrait, c'est qu'à un moment
donné on puisse être capable d'élaborer des solutions.
Le Président (M. Bélanger): Alors, si je comprends
bien, c'est qu'au fil du développement de ce plan, s'il est
accepté ou non, s'il va être modifié ou non - je ne le sais
pas, avec tout ce qui s'est dit ici - il puisse y avoir un autre suivi, soit
par la commission ou par d'autres mécanismes, mais avoir un suivi
là-dessus. C'est un peu ça que vous voulez me dire?
Mme Pilon: Oui, c'est ça.
Le Président (M. Bélanger): Bien, alors, c'est
reçu.
Alors, compte tenu de l'heure, la commission remercie la
Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec de sa participation à ses travaux et nous suspendons les
travaux jusqu'à 15 h 30. Rappelons-nous, 15 h 30. Alors, je vous
remercie beaucoup.
(Suspension de la séance à 13 h 5)
(Reprise à 15 h 34)
Le Président (M. Bélanger): Bonjour! La commission
de l'économie et du travail reprend ses travaux pour procéder aux
auditions publiques sur la situation et les perspectives de l'énergie
électrique au Québec.
Cet après-midi, nous recevons le Grand Conseil des Cris du
Québec. Bonjour, messieurs. Je vais vous expliquer rapidement nos
règles de procédure. Vous avez trente minutes pour la
présentation de votre mémoire et, par la suite, il y aura une
période d'échanges avec les parlementaires. Je vous prierais,
dans un premier temps, d'identifier vos porte-parole et les gens qui vous
accompagnent à la table et de procéder à la
présentation de votre mémoire. Je vous remercie.
Grand Conseil des Cris du Québec
M. Coon Come (Matthew): (S'exprime dans sa langue)
M. Saganash (Roméo): M. le Grand Chef n'a rien compris.
Alors, je vais procéder à la présentation des personnes
qui sont ici à la table.
À ma gauche, c'est M. Robert Mainville, ensuite, le chef de la
communauté de Chisasibi qui est Violet Pachanos, à sa gauche, M.
Robbie Dick de Whapmagoostui, le grand chef Matthew Coon Come, le chef Walter
Hughboy de la communauté de Wemindji et, à sa gauche, M. Henry
Mlanscum, chef de la communauté de Mistassini et moi-même, je suis
Roméo Saganash du Grand Conseil des Cris.
M. Coon Corne: (S'exprime dans sa langue)
M. Saganash: M. le Président, Mme la ministre, messieurs,
c'est avec beaucoup de pessimisme que nous nous présentons ici
aujourd'hui car nous considérons que la présente
commission parlementaire n'est rien d'autre qu'un exercice de relations
publiques de la part du gouvernement du Québec qui tente, par cette
commission, de créer la fausse Impression qu'il aurait
procédé à une étude et à une consultation
publique complète et approfondie sur les futurs développements
hydroélectriques au Québec.
Le cadre dans lequel les travaux de cette commission doivent
s'effectuer, son mandat, sa composition et le calendrier des interventions, des
positions publiques nourries de préjugés prises par Mme la
ministre Bacon dès avant la création de la commission
parlementaire et les positions du gouvernement Bourassa qui ont
été exposées dans les médias, tout indique
clairement que le gouvernement a d'avance décidé quelles seront
les conclusions auxquelles aboutiront les travaux de cette commission.
Il s'agit donc, pour nous, le Grand Conseil des Cris du Québec
qui représente tous les Cris, purement et simplement d'une
opération de relations publiques et nous la dénonçons
comme telle. Néanmoins, nous sommes présents ici aujourd'hui pour
vous exposer nos commentaires face à tous ces projets parce que c'est
nous, les Cris de la Baie James, qui allons être grandement
affectés par ces projets. Nous tenons à vous exprimer au moins
nos commentaires dans tout ce débat et nous dénonçons
aussi le fait qu'Hydro-Québec, le constructeur de ces projets, ait une
journée complète pour présenter son mémoire, tandis
que d'autres groupes ont seulement une heure pour présenter leur
mémoire. C'est l'essentiel des propos du Grand Chef Matthew Coon
Corne.
M. Coon Come: The Grand Council of the Crees represents the
Québec James Bay Crees. We number approximately 10 000. We are the
aboriginal population in the Québec portion of the watershed of James
Bay (commonly known as the James Bay Territory) and the watershed of the Great
Whale and nearby rivers in the Southern Hudson Bay Region in Québec.
This is an area known to my people as Eeyowaschee, it is our land.
We inhabit and use this territory. It is our traditional land which we
occupy, in which we hunt, fish and trap. Our traditional area also includes the
coasts, the islands, the waters and sea beds of Hudson Bay and James Bay.
We are the people of this land and have occupied this land since time
immemorial. We depend on this land for our substance and harvest its resources.
This is our territory and we assert full and complete jurisdiction over it,
including all the waterways and areas affected by the proposed hydroelectric
projects of HydroQuébec.
It is important to point out to the members of the parliamentary
commission that the Cree population of James Bay would be directly and
detrimentally affected by the proposed hydroelectric schemes of
Hydro-Québec. Let us be clear, most of these proposed hydroelectric
installations will be located in the traditional lands of the Crees and will
destroy the environment and the way of life of the Crees. We state here before
this commission that these proposed projects of Hydro-Québec will result
in the extinction of Cree culture. We oppose these projects fully and
forcefully. Neither Hydro-Quebec nor Québec can build these projects on
our lands. Be advised that the Cree Nations have decided to oppose these
projects and will ensure that further destruction of the environment does not
take place in our territory.
This is the reason why we are before this parliamentary commission. We
want to point out, first, that any intervention before this parliamentary
commission is without prejudice to our legal actions to stop this destruction
of our way of life and the environment which have been instituted before the
Federal Court of Canada and before the Superior Court of Québec.
We consider this parliamentary commission simply as an exercise in
public relations on the part of the Government of Québec to create the
false impression that it has proceeded with a full and complete public review
and consultation on future hydroelectric development in Québec. The
framework of this commission, its mandate, its structure and the timeframe
allowed parties to intervene before it, as well as the prejudicial public
positions taken by the concerned minister, Mme Lise Bacon, previous to the
constitution of this commission, and the positions of the Bourassa Government
which have been expounded in the media clearly indicate that the conclusions of
this commission have already been decided upon by the Government. This
commission is a pure and simple public relations exercise and we denounce ft as
such.
We are moreover convinced that this public relations exercise will not
fully reveal the facts to the public nor provide a real debate on the issues at
hand. This commission, we respectfully submit, does not have the necessary
expertise or independence which is required to consider the numerous and
complex issues on the basis of the fully revealed facts.
Moreover, you know virtually nothing about our language, our society and
way of life which you would destroy through Hydro-Quebec's megaprojects.
We fear that Hydro-Québec will once again be used as a short-term
political instrument to ensure the borrowing and spending of tens of billions
of dollars on unwarranted hydroelectric projects in the James Bay Territory.
Indeed the proposed Hydro-Québec development projects will entail an
unprecedented increase in the public debt of Québec, will mortgage
Quebec's future economic well-being on a huge hydroelectric gamble and will
entail environmental and social effects on a scale unprecedented in Canada.
We are nevertheless present at this parliamentary commission to state to
the elected representatives of the people of Québec what we
have stated in other forums both in Canada and in the United Sates
relating to the projected construction programs of Hydro-Québec. These
projects by Hydro-Québec are unacceptable from an environmental,
economic and social perspective and we will oppose them with all of the means
available to us.
It must be understood by the elected representatives of the
Québec population that the development of hydroelectric power in James
Bay will not be possible since the lands where these projects will be built are
Cree lands and the Crees have no intention of giving their consent to the
wanton destruction of their heritage.
We are here to discuss on a nation to nation basis, to inform you that
the continued intrusion into our territory for the destruction of eight more
rivers and the ecology of a vast area will not be agreed to by us. We consented
to the construction by Québec of the Complexe La Grande (1975), though
we never accepted this project. We have made substantial sacrifices to allow
Québec to complete the Complexe La Grande (1975). But enough is enough,
we will not agree to the future destruction of the Great Whale River or
Nottaway-Broadback-Rupert rivers. Let this be clear that the Crees have never
consented to these projects neither in the James Bay and Northern Québec
Agreement nor elsewhere. Québec cannot build these projects.
We, the Crees of James Bay, have decided to protect what is left of our
lands and our way of life. We want to point out to the parliamentary commission
that we are fighting for our survival. This is no matter to be taken lightly.
The aboriginal nations in Canada and in Québec, like aboriginal nations
all over the world, have been pushed aside for too long and exploited for what
has been deemed by Western society as progress. In the Amazon, the aboriginal
nations are being pushed out by hydroelectric projects, by the burning of the
forest for questionable farming purposes, by the rape of the land through
destructive logging practices and through unsound mining pratices. In the
United States and Canada, the aboriginal nations have been pushed onto reserves
so that the land can be used by the White man. Our cousins, the Inuit of
Labrador, are fighting to preserve their way of life and their lands from the
White man who would harm all of this just to play war games. Here in
Québec, we are once again being asked to sacrifice our way of life, our
culture, our language to produce electricity.
We do not accept this and we fail to see why it is to the benefit of the
White man's society to destroy eight rivers and flood the equivalent of all of
the inhabited land between Montréal and Québec City and destroy
the ecology on an area the size of France, when much of the electricity to be
generated will be sold under questionable long-term contracts to the
Americans.
Hydro-Québec says that our culture will be preserved and the
environment will be taken care of, that the projets are reasonable, etc. We do
not believe Hydro-Québec. We do not believe the Government of
Québec. Even now it is well known that the whole planet is being
destroyed by the abuse of nature. In Northern Québec, nature will be
destroyed and, with it, our way of life and our people, and this to allow
Hydro-Québec and the Québec Government the opportunity to create
just a few temporary jobs. We are not speaking about a series of discrete and
manageable impacts. The impacts are not manageable. We are speaking about the
destruction of a whole natural ecosystem in Northern Québec, a way of
life that is part of that. Reshaping the whole geography of the land, that is
blasphemy against the Creator. You will be accountable to Him.
We consented in the James Bay and Northern Québec Agreement only
to the construction, operation and maintenance of the Complexe La Grande
(1975). While we, at that time, recognized in the Agreement that there was a
possibility of future hydroelectric projects, we never consented to the
construction of these future projects, nor did we provide the Government of
Québec or Hydro-Québec with a release in relation to these
projects. It was widely understood by our people that they did not agree to
future projects in the 1975 Agreement and that, for these projects ever to be
built would require our consent. We will not give our consent.
This fact was widely discussed and understood to be the case by the Cree
people and the Cree nations before the Agreement was approved for signature by
the chiefs and the Grand Council of the Crees in November 1975. Cree consent
was later sought and obtained by Hydro-Québec for additions and
substantial modifications to the Complexe La Grande (1975) In complementary
agreements numbers 4, 5 and 7, thus providing the Cree understanding to be
generally accepted by all parties.
Furthermore, the James Bay and Northern Québec Agreement only
applies to certain parts of the mainland of Northern Québec and does not
affect in any manner our native title and aboriginal rights in the offshore and
in Hudson Bay and James Bay.
We further insist that the James Bay and Northern Québec
Agreement did not extinguish our aboriginal rights and titles over the
traditional lands of our ancestors and, in this matter, we would refer you to
the Court proceedings we have instituted before the Federal Court of Canada and
the Québec Superior Court, copies of which were attached to our brief we
have submitted to you.
The environmental protection provisions of the James Bay and Northern
Québec Agreement and particularly Section 22 of the said
Agree-
ment have been a great disappointment to the Crees. The Government of
Québec, as well as the Federal Government and Hydro-Québec, have
not respected the provisions of Section 22.
The environmental committees have never truly operated in the way
originally contemplated in Section 22. Hydro-Québec is not a publicly
regulated company and cannot adapt to the regulated environment which was
foreseen in Section 22 of James Bay and Northern Québec Agreement.
In fact, the Department of the Environment of Québec has not been
provided the manpower or the expertise required to assess these projects.
Hydro-Québec has developed a large in-house environmental public
relations department headed by a professional public relations officer. The
main purpose and function of this department is to control the environmental
review processes to the benefit of the Corporation. Furthermore, the
Québec Department of the Environment does not have a representative in
Northern Québec, nor has it any independent expertise required to
actually evaluate these projects proposed by Hydro-Québec.
May we also point out that we strongly question the independence of the
Departement of the Environment in this matter. Indeed, experience has shown
that there is a privileged relationship between the Department of the
Environment and Hydro-Québec and we denounce here the collusion between
the Department of the Environment and Hydro-Québec which was clearly
demonstrated to the Crées at the hearings before the National Energy
Board relating to the export contracts of Hydro-Québec to Vermont and
New York. This is furthermore compounded by the unacceptable decision on the
part of the Department of the Environment and the Government of Québec
to review the environmental consequences of the Great Whale River project in
two stages, that is the review of the roads and access infrastructures
independently of the environmental review of the project itself.
This decision on the part of the Government of Québec and the
Department of the Environment breaches a ten-year policy position of the
Government of Québec in relation to the future environmental impact
evaluation of the Great Whale River project. It also constitutes a clear breach
of the Section 22 provisions of the James Bay and Northern Québec
Agreement. How can we now trust this highly politically tainted process? Let us
be clear: Québec has no independence in relation to the environmental
evaluation of its subsidiary, Hydro-Québec.
To understand our position, it is useful to review a little the history
of these projects. When the Bourassa Government in the early seventies
announced the development of the James Bay Territory for hydroelectric
development, we went to Court and fought a long and arduous Court battle
against the Government of
Québec. In 1973, we won an interlocutory injunction after many
months of testimony before the Superior Court of Québec and did succeed
in stopping the construction of the Complexe La Grande (1975). However, one
week later, the Court of Appeal suspended the effects of that decision. Our
appeal to the Supreme Court of Canada of that suspension was rejected by a
three-to-two decision. We then pursued the Court case for a permanent
injunction, but by the time the case would have been heard by the Supreme Court
of Canada, the hydroelectric project would have been completed. It was only in
the face of continued destruction of the La Grande River, the Eastmain River,
and the Caniapiscau River that our people decided to try to limit the damages
being done to our land and our rights by the Complexe La Grande (1975).
We are absolutely convinced by painful experience, if we ever had a
doubt, that our traditional way of life is not compatible with
mega-hydroelectric projects. New unforeseen factors have also developed since
the Agreement which confirm our opposition.
The fish in the La Grande River system are now polluted with
methylmercury. The road system put in place for the construction of the
Complexe La Grande (1975) has contributed to a partial and in some cases a full
breakdown of the traditional trapline system of land management. Québec
is promoting the wholesale clear cutting of the whole NBR basin which is itself
contrary to existing forestry management legislation and to the environmental
provisions of the James Bay and Northern Québec Agreement.
What we find today is that we are still addressing problems of cultural
adaptation caused by the Complexe La Grande and its related structures. The
water management of HydroQuébec responds only to electricity demand in
the South and accommodates neither the need for environmental stabilisation nor
alternative uses.
Let us be clear, when the Crees negotiated the James Bay and Northern
Québec Agreement, we negotiated for one project only, the Complexe La
Grande (1975). Québec and HydroQuébec have no right to build the
Great Whale River and the Nottaway-Broadback-Rupert projects. (16 heures)
The basis of our position on this matter is clearly explained in our
Court proceedings which are submitted and attached to our breef. But let me
here just point out one aspect of these Court proceedings which we believe
should be clearly understood by the parliamentarians of Québec. The
Government of Québec and the Government of Canada have not respected the
James Bay and Northern Québec Agreement. It would be tedious to
enumerate all of the breaches of this Agreement by both Governments, but let us
point our a few of the areas in which the Agreement has
not been fulfilled: education, health, economic development,
environment, the justice system, etc. In fact, whole sections of the Agreement
have been ignored or half implemented at best. How can the Governments now ask
us to allow the construction of the Great Whale River project when they have
not even implemented the James Bay and Northern Québec Agreement?
A positive conclusion could however come out of this parliamentary
commission if the subject matters which are provided for in the mandate of the
pariiamantary commission are referred to an independent commission of inquiry
with a sufficient budget to be able to address all of these issues through a
detailed public long-term review and debate. This commission of inquiry should
be composed of totally independent experts who would hold public hearings and
allow the public to cross-examine HydroQuébec on its plans. Such a
commission of inquiry should proceed with a mandate to review these issues for
a sufficient period of time during which the Québec Government must
declare a moratorium on all future hydroelectric development in the James Bay
Territory, including access infrastructures.
However, taking into account the declared intentions of the Government
and in particular the declared intentions of the Minister of Energy and
Resources, Mme Lise Bacon, as well as the declared intentions of the Prime
Minister and Hydro-Québec, it appears that no such reasonable conclusion
will be made by this parliamentary commission.
For the public record, we must point out to you certain factors which
must be publicly stated to reveal how untenable the position of
HydroQuébec is in relation to energy policies. Indeed, all of these
hydroelectric projects in the James Bay Area are not needed and are totally
useless for Quebec's internal demand.
The construction by Hydro-Québec of the Great Whale River Complex
and the Nottaway-Broadback-Rupert Rivers Complex would not be required without
the current export contracts. An appropriate demand-side management of
electricity supply in Québec without undue export of electricity would
render these generation projects unnecessary for a long time if not forever and
would preserve Northern Québec and the Crées from their highly
detrimental social and environmental effects.
In conclusion, we will not allow our lands to be devoured by your
mega-projects which make little economic, social or environmental sense. We
would also like, at this time, to ask Robert Mainville to just go briefly
through some of the technical...
M. Mainville (Robert): Alors, les études techniques
entreprises par le Grand Conseil des Cris sont sévèrement
restreintes par l'absence d'information publique qui est disponible. Signa-
lons en particulier le refus d'Hydro-Québec de rendre disponibles ses
études de rentabilité à l'égard des contrats de
vente d'énergie aux États-Unis, dans le cadre de sa politique
d'exportation de 3500 mégawatts et le refus de cette
société de rendre disponible le contenu de ses contrats conclus
dans le cadre de son programme de partage de risques et de
bénéfices dont, entre autres, les contrats relatifs aux
alumineries. Le Grand Conseil des Cris dénonce ce contrôle de
l'information qui rend difficile, sinon impossible, un véritable
débat public quant aux enjeux du nouveau plan de développement
d'Hydro-Québec.
Signalons également que les études entreprises par
Hydro-Québec ne font pas état des alternatives au
développement hydroélectrique. Un tel comportement ne sied pas
à une société d'État qui doit être au service
de de la population et, qui devrait placer toutes les alternatives sur la place
publique. Il est important de noter que la décision
d'Hydro-Québec de procéder à la construction des complexes
Grande Baleine et NBR entraîne le Québec dans son entier dans une
voie sans retour.
Une fois que les investissements collectifs gigantesques auront
été effectués, le Québec devra payer la note et
rembourser ses emprunteurs. La décision d'Hydro-Québec de
procéder avec ses projets rendra presque impossible tout retour en
arrière et rendra irréversible la dépendance du
Québec envers une surconsommation d'électricité. Il y a
donc lieu de procéder à une réflexion collective
approfondie avant de se lancer dans une aventure hydroélectrique au
lendemain peut-être amer.
Hydro-Québec demeure mystérieusement silencieuse dans sa
proposition de plan de développement à l'égard des effets
de son programme d'investissements sur les tarifs. Pourtant, quoique
Hydro-Québec refuse de dévoiler ces effets dans sa proposition de
plan, elle n'hésite pas à les dévoiler à ses
financiers américains, dans son plus récent prospectus
américain daté du 3 avril dernier, où Hydro-Québec
déclare qu'elle souhaite demander des augmentations de tarifs
supérieures à l'inflation pour les fins de financer son plan de
développement.
À cet égard, les études préliminaires faites
à la demande du Grand Conseil des Cris indiquent que les tarifs
d'Hydro-Québec devraient, dans le scénario le plus optimiste,
plus que doubler d'ici à l'an 1999 si le plan d'investissements
proposé par Hydro-Québec était mis en vigueur, De plus, si
des dépenses additionnelles étalent encourues par suite de
dépassements de coûts de construction, de faible
hydraulicité, de charges d'intérêts plus grandes que
prévu ou par un taux de change défavorable, les tarifs
d'Hydro-Québec pourraient s'accroître de 150 % et même plus
pour la même période.
La réalisation du plan de développement
d'Hydro-Québec entraînerait un accroissement spectaculaire
de la dette garantie d'Hydro-Québec à au-delà de 60 000
000 000 $ d'ici à la fin de la décennie. La dette
d'Hydro-Québec dépassera alors largement celle du gouvernement du
Québec. La capacité d'emprunt des Québécois aura
alors essentiellement servi à Hydro-Québec plutôt qu'aux
autres projets collectifs pressants du Québec.
Hydro-Québec se vante d'avoir tiré profit des exportations
d'électricité dans le passé. Dans le cas de l'exportation
d'énergie régulière, quoique les revenus
générés par ces exportations contribuent à la
rentrée de fonds d'Hydro-Québec, ces revenus ne sont pas
suffisants pour couvrir leur juste part des coûts associés
à la production de cette électricité. De plus, il n'y a
aucun doute qu'Hydro-Québec a drainé ses réserves
hydrauliques par des ventes d'électricité excédentaire
effectuées à des prix de rabais et s'est ainsi placée dans
une situation très précaire qui a eu et continuera d'avoir des
effets négatifs importants sur sa situation financière et sur son
habilité à répondre à la demande Interne du
Québec. Hydro-Québec a spéculé avec les
réserves d'eau du Québec et a drainé de ses
réservoirs aux fins d'exporter.
Comme conséquence directe à la réduction de
réserves hydrauliques pour l'exportation et face à la faible
hydraulicité, Hydro-Québec a dû prendre des mesures
exceptionnelles, y compris la remise en service de la centrale thermique Tracy,
le rachat des contrats de biénergie et l'importation
d'électricité. Les coûts de ces mesures exceptionnelles ont
atteint 252 000 000 $ en 1989 et pourront atteindre jusqu'à 835 000 000
$ d'ici à la fin de 1990 si la faible hydraulicité perdure. Si la
faible hydraulicité continue jusqu'en 1992, le coût total de ces
mesures exceptionnelles pourrait atteindre 2 400 000 000 $. Ces coûts
dépassent de loin les profits générés par la vente
d'électricité. La principale raison des hausses de tarifs de 1990
et de 1991 n'est pas attribuable à la faible hydraulicité, comme
le prétend HydroQuébec, mais à la décision
téméraire d'Hydro-Québec de vendre ses réserves
à rabais à l'exportation par le biais de vente d'énergie
prétendument excédentaire, ce qui a eu pour effet de baisser le
niveau des réservoirs de façon dramatique. Un examen des cinq
dernières années démontre donc que les exportations, tant
d'énergie garantie que d'énergie excédentaire, n'ont pas
bénéficié aux Québécois. Au contraire, les
politiques d'Hydro-Québec à cet égard ont mis en
péril les réserves hydrauliques et ont contribué, en
grande partie, aux hausses de tarifs et aux difficultés
financières de l'entreprise.
Malgré cet historique peu reluisant, HydroQuébec s'est
lancée dans une politique d'exportation massive
d'électricité. Hydro-Québec refuse de rendre publiques ses
études de rentabilité à l'égard des deux seuls
contrats d'exportation qui ont été soumis, à ce jour,
à l'Office national de l'énergie dans le cadre de sa politique
d'exportation. Les études effectuées à la demande du Grand
Conseil des Cris, faites à partir du peu de documentation disponible,
tentent de démontrer que ces contrats ne sont pas rentables et qu'en
particulier le contrat VJO et le contrat avec New York pourront entraîner
des pertes de l'ordre de 150 000 000 $. On est donc loin des milliards de
dollars de profits que fait miroiter Hydro-Québec dans les
médias. Il est grandement temps qu'Hydro-Québec justifie sa
politique d'exportation en dévoilant ses études de
rentabilité et en leur faisant subir une contre-expertise publique et
indépendante. Il est inacceptable, quant à nous, que cette
société d'État puisse engager des Québécois
dans une aventure d'exportation des ressources naturelles du Québec de
cette envergure sans dévoiler pleinement les conséquences
financières de ses décisions.
Le programme de partage de risques et de bénéfices
d'Hydro-Québec vise à attirer des industries fortes
consommatrices d'électricité au Québec. Le principal volet
de ce programme concerne l'installation de nouvelles alumineries au
Québec. Encore une fois, Hydro-Québec garde jalousement secrets
les contrats en question. Malgré l'absence d'informations, il
apparaît très probable que ces contrats prévoient des
tarifs d'électricité préférentiels pour les
nouvelles alumineries, tarifs qui sont en-dessous, quant à nous, des
coûts de production d'Hydro-Québec. Et Hydro-Québec
reconnaît elle-même les risques inhérents à ces
contrats dans son plan de développement. L'effet du programme de partage
de risques et de bénéfices d'Hydro-Québec est d'octroyer
à un secteur particulier de l'économie qui génère
peu d'emplois des tarifs préférentiels pour la richesse naturelle
que constitue l'électricité, et ce, aux frais de l'ensemble des
contribuables.
Il existe, quant à nous, des alternatives à la proposition
d'Hydro-Québec d'investir des milliards de dollars dans le
développement de mégaprojets hydroélectriques. Nous en
proposons une, sans prétendre qu'il s'agit là de la meilleure
alternative, mais simplement pour démontrer que des alternatives viables
et rentables sont à la portée des Québécois.
L'alternative suggérée par le Grand Conseil des Cris et qui est
détailée dans nos soumissions techniques repose sur les trois
principales politiques suivantes: 1° l'annulation des contrats
d'exportation d'électricité et l'abandon de la politique
d'exportation de 3500 mégawatts; 2° l'abandon par
Hydro-Québec de tout nouvel engagement en vertu de son programme de
partage de risques et de bénéfices; 3° l'application d'un
programme restreint de gestion de la demande d'électricité ayant
pour effet de réduire de 15 %, d'ici à l'an 2020, la demande
d'électricité projetée par Hydro-Québec. Un tel
programme, quant à nous, est conservateur et facilement
réalisable. De telles politiques auraient pour effet de retarder la
construction de nouvel-
les centrales électriques pour au moins les 20 prochaines
années, sinon plus longtemps. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Bacon: Mr. Coon Come, I would like to thank you and the
members of your group for your presentation which raises numerous questions on
a variety of different topics. The wide array of statements and opinions
induced in your brief must certainly have requested a great number of hours of
research. As you may have noted, some of your statements are very detailed and
substantiated by figures, while others are very general and are not presented
with detailed facts to substantiate them.
Since you affirm on page 4 of your brief that we know virtually nothing
about your society and way of life, I would like to take this opportunity to
learn a few things. According to the 1988-1989 annual report of the Cree
Hunters and Trappers Income Security Board, of the 10 448 Crees, 7, 5 % reside
outside of the territory and 60 % do not participate in the program, which
leaves only one third of total Cree population, some 1200 families, actively
harvesting a territory bigger than France through hunting, fishing and trapping
activities. How then can the two thirds not harvesting the land be affected by
Hydro projects located, as you know, far away from their living quarters? (16 h
15)
M. Coon Come: Mrs. Bacon, if you were to ask a trapper... You
see, we are all hunters. The ones that sit here at this table just got back
from our traditional Goose Break. We all receive through our customs, through
our values: when a hunter goes out, he can bring back his game to the
community. He shares it with his children; he shares it with his grandchildren;
he shares it through feasts, through ceremonies. So when you say that only a
certain percentage of the people are not in the land, how can they be affected?
Everybody goes into the bush. Just because you are not on the income security
program does not mean that you are not continuing that way of life. Because all
of us, the chiefs, even the ones who work in the office, the administrative
arms within Cree entities, the Cree School Board or the Health Board, we all go
out into the land. We all go and fish. We all hunt and we all benefit from what
we can get from the land.
The income security program guaranteed us to continue that way of life,
and you will destroy that. What good is it if you give us a right to continue a
way of life of hunting, fishing and trapping and you take it way in the same
breath? And not only that, 60 % of the Cree population are still under 23; 50 %
of the Crees are still in school. The majority of us still live off that land.
The income security program has its own flaws. I will not go into that, but one
of the conditions why we agreed with the first project is that we would be able
to continue that way of life.
Mme Bacon: On pages 2 and 5 of your brief, you state that all
communities have been so severely impacted by the La Grande development
projects that they are now fighting for their survival. Since Crees now number
10 448, compared to 6348 in 1976-1977, a year after the signing of the James
Bay Agreement, how do you explain that such a rapid growth in Cree population
could occur while the La Grande development was being built?
M. Coon Come: There is no crime against an increase in
population, but before the Agreement was signed, yes, we had no water, and
sewage lines, we had inadequate health and education facilities and we still
have in our communities inadequate housing, still need infrastructures. But our
population, I do not think, Increased because of Hydro-Québec or because
of the monies that we received. Our average-size family is about six per
family. That is the trend. Just like in any other society, our population will
increase.
Mme Bacon: As your brief extensively dwells on the negative
impacts that development is said to have had on Cree society, could you present
the members of the commission with some of the positive changes Crees have
enjoyed since the signing of the James Bay Agreement? Is it all negative?
Nothing positive about it?
M. Coon Come: When the Agreement was signed, it was on a basis of
nation to nation. My people reasonably expected the signatories to the
Agreement to implement their obligations. And today, when I look at the
Agreement, when I look at education... We agreed, under the James Bay and
Northern Québec Agreement that the Government of Québec, that the
Government of Canada and the Crees would sit down and agree to budgetary
parameters. That is what we agreed to. And today, even Claude Ryan has not
agreed on that and hides behind the screen of budgetary constraints.
Those are normal programs, health, education, that other natives in
Canada and Que-beckers and Canadians are entitled to. We would have received
those programs anyways. Look at the Dene Nation. They received 500 000 000 $
and they did not have to flood their lands to receive that. And those are
normal programs that we would have been entitled to anyways, the educational
programs. But we reasonably expected the Government to give us above and beyond
what the other Canadians are receiving because of the impacts of the
project.
So what are we receiving now? Under
health, the normal programs that we are entitled to as Canadians, as
Quebeckers. These are the programs we receive. But we agreed to negotiate
additional budgetary parameters and those have not been met. We agreed in
education, on the budgetary parameters that we still have not agreed. We still
cannot really agree on a budget for a Cree school board. On housing,
Québec has not given a dime in housing. Meanwhile the Inuits are
receiving more per capita than the Crees. Yes, Québec gives money to
income security program...
Mme Bacon: Was housing a federal program... I am sorry. Was
housing a federal program or a provincial program?
M. Coon Come: It was a federal program. But Québec has a
Housing Corporation, and we did not receive any funds from that. Are we not
Québec citizens? Are you just going to hide behind because it is a
federal jurisdiction? It is not our problem. And yes, we received some funds on
the income security program, but that was agreed to. And yes, the program is
going well. But what else can I say? When I look at justice, we agree, our
justice system was so bad that the judges boycotted it, not to come up to the
Cree communities, at a time when there was a high increase in crime rates. Why?
Because we had lack of facilities. They did not want to come up.
When you look at the environmental regime, under Section 22, were there
adequate financial and human resources allocated to the environmental regime?
We have used our resources, we paid for our people. You took one thing, you
took our land. Once you had that, once you did what you wanted to do with it,
then you left us alone.
Mme Bacon: On page 6 of your brief, one can read that the future
projects will destroy a whole natural ecosystem, on an area the size of France.
If Hydro projects were really as destructive as you imply, how is it that
nothing of the sort has been observed in Southern Québec, in Switzerland
or in Scandinavia, for example, where people have been living alongside Hydro
works, for generations, without having witnessed the type of calamity you point
to?
M. Coon Come: We live in Cree lands. The largest hydroelectric
development project is in our own backyard and, yet, your Government has hidden
the facts from the Quebeckers as to exactly what the environmental impacts are
and the damages are. You neatly exempted phase I from any environmental impact
assessment. There is no environmental audit that was done in phase I. There is
no basis that you can use to say... And we could have learned from that. Maybe
you can do it differently, as a springboard, to make sure that, In the future,
we should look at this.
There is a mercury problem. When we look at the mercury problem, as our
main diet is fish, in a sense, we are compromising the health of our elders, of
our pregnant women, of our children. You scared us. There is a cloud of
uncertainty. But we live in the land. We tell you there is a mercury problem.
We tell you you are destroying the nesting grounds, the spawning grounds of the
fish. You destroy those animals and then you will destroy our way of life. We
gave this information, what we have, but it was suppressed because
Hydro-Québec is going on a public relations campaign to tell that all is
well, there is no environmental damage up there, and you have no basis to say
that there is not any.
You are going to conclude, in this commission, that you have carried out
a public debate, that you have carried out an assessment. It is unfair. When
Québec is the builder, they are the assessors, they are trial and jury
and you do not allow your average citizens, your Quebeckers to really tell
you... Tell them exactly what are the economic costs, if it is economically
viable, this James Bay, phase II, and what are the social and environmental
impacts. We cannot give you all that information in just the hour and a half
that you give us. And yet, the proposal of HydroQuébec, you have given
them a whole day. And what will you do with the information that we will give
you? Is it going to collect in your libraries? I do not know.
Mme Bacon: On page 13, you give a few examples of unforeseen
factors since the signing of the Agreement. One of them is methylmercury which
you relate solely to Hydro works. According to the 1988-1989 annual report of
the James Bay Mercury Committee, one can read, on page 13, that the large
predatory fish living in natural lakes, untouched and unaffected by Hydro
works, have higher average mercury levels than white-fish which is plentyfull
in reservoirs. The report points out to the degree of general exposure to
mercury in the community of Great Whale River, where, as you know, no Hydro
project has yet been built.
The Crees living off the land in this community consistently show higher
mercury levels than Crees of Wemindji who are known to fish in the distant La
Grande reservoir system. In your opinion, do unforeseen facts such as this one
not call for more responsive management between local Cree authorities,
Hydro-Québec scientists and government officials? (16 h 30)
M. Coon Come: I remember going to a Mercury Committee meeting. I
remember that, at that time, the chairman, Armand Couture, wanted to carry out
a study supported by Hydro-Québec and the Government of Québec's
representatives, to study the mercury problem. They only wanted
to carry out a study just on the river, from LG 1 to LG 2, and maybe the
reservoirs. That is not the only area where fish are. We pointed out, as part
of our obligations under the Mercury Agreement, areas which we could have
indentffied, because we live in the land, we know where the fish spawn. We
could have identified in that study where the spawning grounds are. Not just
along the river, but also above. There are lakes out there. There are little
streams. We also wanted to carry out a mercury study at the mouth of La Grande
River. That was ignored. They said: We cannot do it. We wanted to participate,
we put in our views, but they were not taken into consideration. But do we need
more mercury? Because that is what you are going to cause with Great whale and
NBR. We do not have any solution for that right now. And when you have a cloud
of incertainty of the mercury level, then it causes us grave concern. When you
are prohibited from eating fish which is your main diet, there is no grocery
stores, no McDonald or chicken stand that we can run to.
Mme Bacon: You say that we do not take into account you views,
but how do you explain that most of the dozens of mitigation measures put in
place since the La Grande Complex have been proposed by Crée trappers
themselves?
M. Coon Come: One thing I do know, when the Crée Health
Board, through the representation of Steve Bearskin, who represented the
Mercury Committee and through the CRA Grand Council representation, the
feedback that we have received is, when you make a submission, it is all ripped
apart because these are specialists. They call themselves specialists.
Hydro-Québec has its own expertise; they determine what the hell to
study. We make our submissions. They change them the way they want to. Do you
call that participation? It is not. By the time the submission is made in
there, it is totally changed when it comes out. Then, it is only a public
relations thing.
Mme Bacon: On page 14 of your brief, you state that Crée
authorities thought, in 1975, they had guaranteed means for a speedy adaptation
of Crée culture to changing circumstances. And, among these
circumstances, some of you have pointed out the impact of satellite TV and
videos on Crée values and Crée traditions. Could you point out to
some of the ways in which constructive dialogue may lead the way to better ways
of adressing change facing Crée culture?
M. Coon Come: The shortest and easiest answer is: Do not build
those projects. We will be able to preserve our culture, our language and our
way of life.
Mme Bacon: In your technical paper which was sent to the members
of this commission last week, you recommend that all Hydro constructions be
stopped until the year 2010. To do this would require, according to your
submission, that all existing export contracts, as well as the 3500 megawatts
export plan be cancelled, that HydroQuébec also repeal the existing
program of risk and benefit and that all Quebeckers embark on self-restrictions
to diminish by 15 % the internal needs of electricity. Since you have made some
extensive surveys and studies on these subjects, how do you suggest that the
Québec economy and society, as a whole, pay for the increased dependency
on imported and fossil fuels your scenario implies? And how could these fossil
fuels be cleaner in terms of acid rain emissions and still be cheaper for the
consumers?
M. Mainville: Mme la ministre, notre proposition n'entraîne
aucun accroissement de la dépendance énergétique du
Québec sur l'essence ou le pétrole ou le gaz importé de
l'Ouest canadien. Essentiellement, notre proposition en termes d'exportation,
c'est qu'évidemment, quant à nous, les contrats d'exportation ne
sont pas rentables. N'étant pas rentables pour Hydre-Québec et le
Québec, on voit mal pourquoi on aurait de la difficulté à
les canceller. Cela retarderait des projets, selon Hydro-Québec
elle-même, de plusieurs années, juste avec la politique
d'exportation.
Quant aux contrats d'aluminerie, on propose non pas la cancellation des
contrats existants, mais la cancellation des contrats nouveaux en vertu du
programme, ce qui, encore une fois, étant donné que ces
contrats-là ont peu de rentabilité ou pas de rentabilité,
n'entraîne pas de perte pour Hydro-Québec, ni pour le
Québec, quant à nous. Mais en ce qui concerne la conservation
d'énergie, le programme qu'on propose n'est pas de remplacer
l'électricité générée par le pétrole
ou le gaz, mais simplement d'introduire au Québec des programmes de
gestion de la demande d'électricité, des programmes qui sont de
plus en plus populaires à travers l'Amérique du Nord, afin de
conserver l'énergie sans diminuer en aucune façon le niveau de
vie des Québécois, ni leur qualité de vie.
Et la technologie se développe à tous les jours à
cet égard-là. Je donnerai un exemple qui est peut-être
simpliste, mais il existe des lampes, des lumières qu'on pourrait
installer à l'Assemblée nationale, qui consomment peut-être
le tiers de l'électricité, le quart de
l'électricité que celle que les lumières
régulières consomment et qui durent aussi longtemps et qui
éclairent autant. Il y a toute une série de technologies qu'on
installe de plus en plus à l'intérieur des différents
États américains et au Canada en général, pour
tenter justement de conserver l'énergie, de conserver
l'électricité sans réduire la qualité de vie des
citoyens. Et c'est un programme de cette nature qu'on propose à
Hydro-Québec d'implanter au Québec.
Et le programme en question, qui est une proposition de
réduction, non pas de la consommation actuelle du Québec de 15 %,
mais une réduction de la consommation projetée par
Hydro-Québec pour l'an 2020, de réduire cette
électricité pour demande projetée en 2020 de 15 % sur
toute la période, ce qui permettrait, effectivement, de rendre inutile
la construction des grands projets au moins jusqu'à l'an 2010. Et cette
période de 20 ans permettrait justement au Québec de
développer des technologies au niveau de la conservation
d'énergie. Les technologies que nos études démontrent sont
plus rentables en termes d'emplois et de retombées économiques
que les projets hydroélectriques qu'on propose de faire dans le Grand
Nord.
Alors, quant à nous, le Québec serait gagnant au point de
vue économique, au point de vue énergétique et au point de
vue environnemental s'il appliquait la proposition faite par le Grand Conseil
des Cris qui, nous le signalons, n'est peut-être pas la seule proposition
qui est valable. C'est pour ça qu'on demande au Québec, au
gouvernement et aux parlementaires québécois d'instaurer une
commission d'enquête indépendante qui aurait pour mandat
d'examiner toutes ces questions et de faire rapport au public.
Mme Bacon: M. Mainville, dans le scénario
d'Hydro-Québec, il y a déjà 9 % d'économies
d'énergie. Vous y ajouteriez 15 % suivant vos études, ce qui
ferait 24 %. Est-ce que vous trouvez ça réaliste, ou si ce n'est
pas une chance à prendre qu'on ne soit pas capables de l'atteindre dans
la période donnée dans le plan de développement?
M. Mainville: Alors, la proposition qu'on fait, dans un premier
temps, c'est d'appliquer le programme d'Hydro-Québec de 9 %, en enlevant
évidemment les exportations et les contrats d'aluminerie futurs et, vers
l'an 2000, d'accroître ce potentiel de 9 % à 15 %. Alors, ce n'est
pas 15 % plus 9 %.
Mme Bacon: 15 %.
M. Mainville: Oui.
Mme Bacon: Alors, on ne peut pas éviter Grande Baleine,
à ce moment-là.
M. Mainville: Quant à nous, on évite Grande
Baleine, nos études le démontrent clairement. Si vous avez eu le
temps d'analyser les documents en annexe et la soumission technique du Grand
Conseil des Cris, vous noterez qu'il y a une proposition, l'intégation
de cette proposition... C'est un document préparé par M. lan
Goodman, avec des tableaux de demandes d'électricité qui, compte
tenu de l'entrée...
Mme Bacon: Mais Grande Baleine, ce n'est pas pour l'exportation.
Il y en a 1500; le reste, c'est pour nous, c'est pour les
Québécois.
M. Mainville: Excusez-moi. Voulez-vous répéter?
Mme Bacon: II y a 1500 mégawatts pour l'exportation,
à Grande Baleine; le reste, c'est pour la consommation nécessaire
aux Québécois.
M. Mainville: Mais l'exportation, dans notre scénario, Mme
Bacon, est cancellée. Il est possible et encore légalement
possible pour le gouvernement du Québec de canceller tant les contrats
avec New York qu'avec le Vermont et nous souhaitons que, dans notre
scénario, cette possibilité juridique donnée aux
Québécois de canceller ces contrats soit exercée par le
gouvernement.
Mme Bacon: Mr. Coon Come, you state in your brief, on page 14,
that the Government of Québec has not respected nor implemented the
James Bay and Northern Québec Agreement, and that it would be tedious to
enumerate all of the breaches of the Agreement. As you know, the Agreement
provided for the implementation of numerous provisions pertaining to a wide
array of subjects. How can you pretend that the Government is not committed to
the Agreement when it has been amended ten times to adjust to an evolving
situation? And how can you explain the six other parallel Agreements signed by
Crée and Inuit authorities to deal with special matters, such as
mercury, Sakami Lake, Fort George, and so forth? How is it then that the
National Assembly adopted, in 1988, some new provisions to the income security
program for Crée hunters and trappers to provide paid maternity leaves
to spouses of trappers and to establish special committees, staffed by
Crée people, to identify those who, according to community customs,
still carry on with trapping as a way of life? How could all these Agreements
bearing Crée signatures in response to native demands have been adopted
without your full support?
M. Coon Come: Those complementary Agreements were amended to
allow Hydro-Québec to build. The Chisasibi Agreement foresaw the erosion
that was uncontrollable; they wanted to save their river, minimize the damages,
but a community with 2000 people was relocated. You had to amend the Agreement
for that, you had to compensate damages to the people. Then again, you were
talking about the Sakami Lake Agreement, another complementary agreement.
Again, Hydro-Québec could not control the dykes. So we had to negotiate
for modifications to the technical description. All the time, you had to do
with amendments to Hydro-Québec in order to allow them to build. But it
is you, Mrs.
Bacon, when we had a table for negotiations the Crées appointed a
negotiator to deal with Quebec's obligations under the present James Bay and
Northern Québec Agreement... We appointed a negotiator, we identified
the issues, we forwarded the issues to you and to John Ciaccia, the concerned
minister. What happened? You came back and you said: We cannot negotiate. Why?
Because you put a condition a condition that we would negotiate and deal with
future projects. We were ready to sit down to negotiate with you on the
implementation of the first project. But you sculled it. You wrote us a letter
and said: We cannot begin these negotiations - and you signed a letter to that
effect - unless we talk about future projects. Why all of a sudden the
Agreement is important after 15 years? It is only because you want to build
future projects, because you want once more something from the Crées.
Meanwhile 15 years have gone by. What happened to the other obligations of
Québec? We were willing to sit down. We were willing to sit down and
look at those, at a table of negotiations, but you put conditions to it. (16 h
45)
Mme Bacon: I guess we do not have the same interpretation of the
Agreement. To us, the Agreement includes the Great Whale project. That is why.
Just one last question. On page 11 of your brief, you claim that environmental
ministers have up to now refused to assume their responsibilities toward
environment, although you have requested the Federal ministers, involved to
assume their obligations in relation to the environment. If any of the
concerned ministers decide to conduct an assessment of the environmental
effects of the Great Whale River project, are you willing to participate in the
process?
M. Coon Come: Let us go back a little bit. Minister Bouchard,
Minister Paradis had a secret meeting. Exclude the Crées. We saw the
correspondence. And yet, under the James Bay and Northern Québec
Agreement, under Section 22, we have six environmental regimes set up and not
one has been implemented. But we would be willing to participate.
Mme Bacon: Ça va.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Est-ce que je peux
demander à M. Saganash de faire la traduction pour les chefs et le grand
chef? Vous pouvez le faire tout haut. Je vais laisser du temps pour la
traduction.
Il me fait plaisir de vous recevoir devant la commission parlementaire
au nom de ma formation politique et d'avoir l'opportunité de participer
à ce débat avec vous, ici, aujourd'hui. Je veux simplement dire
pour commencer que, quoi qu'on en dise, je crois que cette commission
parlementaire a de l'importance. Elle a beaucoup d'importance même si son
mandat est restreint et même si on ne peut pas aller très loin
dans l'étude de toute la dynamique. Elle a beaucoup d'importance parce
qu'elle a permis à du monde de s'ouvrir les yeux. J'espère et je
souhaite que maintenant que quelques-uns commencent à comprendre un peu
plus tout le problème d'Hy-dro-Québec, tout le problème du
développement des centrales dans le Nord du Québec, on va aller
plus loin et que, finalement, le gouvernement acceptera de mettre en place une
vraie mécanique de consultation publique pour tout le monde, pour
permettre d'approfondir les problèmes qui sont vécus par ceux
chez qui on bâtit les barrages. C'est facile de dire, quand on est dans
le Sud: Ah! Tout est beau, il n'y a pas de problème. L'eau qui coule,
c'est de l'argent perdu. On l'a entendu encore ce matin. Ça, c'est comme
la guerre, c'est toujours beau quand ce n'est pas chez vous. La guerre,
ça peut être payant quand ça ne se passe pas sur ton
terrain, chez vous. Il n'y a personne qui veut l'avoir chez lui. Alors, c'est
le problème que l'on vit actuellement.
Je comprends aussi, dans l'intervention de M. Coon Corne, que dans le
fond, ça va coûter cher à tout le monde. Nous, on veut
savoir pourquoi ça va nous coûter cher et vous voulez savoir
pourquoi vous allez perdre du territoire. On veut savoir pourquoi on va payer
et vous voulez savoir pourquoi on vous enlève du territoire. Je pense
que, dans ce sens-là, il y a pas mal de revendications qui se rejoignent
avec beaucoup d'autres choses qui nous ont été amenées
devant la commission parlementaire par d'autres qui sont venus avant et
d'autres qui vont venir après.
Quand on parte de confiance - vous avez beaucoup parlé de la
confiance avec l'application de la convention de 1975 et des engagements qui
n'ont pas été tenus par le gouvernement - je vais vous dire:
C'est difficile d'avoir confiance et j'en conviens. Je vois M. Mianscum, ici -
et il peut toujours dire le contraire ou appuyer ce que je vais dire - il n'y a
pas un an, il s'est fait promettre par un ministre bien connu de ce
gouvernement qu'on allait lui faire une route asphaltée dès cette
année pour aller sur la réserve de Mtstassini. On a mis des
arpenteurs sur la route et puis: On va vous bâtir la route. Dès
que la campagne électorale est finie, pas un sou. Rien de prévu,
cette année, pour améliorer la route de la réserve de
Mistassini, pas un sou noir! Comment voulez-vous qu'on puisse avoir confiance,
après ça? C'est comme ça que ça se passe. C'est
comme ça, les problèmes qui sont vécus.
Cela étant dit, j'aimerais, à la suite de l'étude
que vous avez démontrée qui nous a été
présentée par M. MainvHIe qui explique que si on
fait des mesures de préservation d'énergie, que si on
abandonne les contrats, etc., on peut retarder à 2010, en tout cas,
retarder beaucoup dans le temps la construction de nouveaux barrages... Mais
s'il y avait une véritable consultation qui, finalement, finirait par
déterminer un certain nombre de critères dans le respect de tout
le monde, est-ce que, à ce moment-là on peut imaginer qu'il
serait possible pour le gouvernement du Québec de reprendre la
négociation pour une éventuelle construction de nouvelles
centrales en territoire cri?
M. Coon Corne: Maybe that is why we have a misunderstanding. You
speak French and my mother tongue is Cree and I have to use a translator. I was
talking to one leader, Cree leader, and he was telling me that we never had to
sign constitutional documents or treaties among ourselves. Why? Because there
was trust and there is no trust here. We signed an agreement and we thought
that we should expect the Government to implement its obligations. I do have a
question. I do have a question in what we have suggested. We have suggested In
our brief an independent commission with all adequate financial and human
resources, and expertise, to have a public debate. I want to ask a question:
Would your Government, Mrs. Bacon, be bound by the recommendations of this
commission? Will that commission have the power to force Hydro-Québec to
make the economic and environmental impacts public? But once the facts are
properly analysed, all our concerns, we are convinced that the projects would
not go ahead. But I think it would be to Québec's embarrassment, because
of Québec's shortsightedness, if we should, within 20 years, with the
minds of our young people, find an alternative form of energy. But where has
Québec invested their monies? On alternative forms of energy?
HydroQuébec is certainly not. They are promoting energy consumption
rather than energy conservation. We once said that man could not go to the
moon; man went to the moon. But I think those dams would be an embarrassment
because of our shortsightedness, should we find alternative forms of energy.
And we would be willing to participate in a public commission. We would be
willing to put on a table, because we do not have ample time here to do so, the
information we give you. No Quebecker here, sitting behind here, will ever know
what we are submitting. Will they? It is not a public forum, it is not a public
debate, it is your people who will have it. You will read; you will take it
home. I do not know what you are going to do with it. But I do not have a
mandate to negotiate. My people oppose the project. Hydro-Québec says
that the project's design is negotiable. It is not. You look at the technical
descriptions that are under the Agreement. Those are the characteristics
limitations if the project was built. We did not agree nor we will give our
consent to those projects. But those technical descriptions in the Agreement
are already changed because now HydroQuébec wants to divert major
rivers. That was not the technical description that was agreed to, if the
project should be built. These are already changes. Québec did not
respect the Agreement, but we are ready to meet, to discuss the implementation
of the first Agreement, of the La Grande Agreement.
But I do think those future projects are unacceptable to my people. They
will destroy our way of life, destroy the environment. I think that Bourassa
and his Government are wrong to invest all their economic eggs into one basket
to try to stimulate the economy of Québec through megaprojects. I agree
with ville de Matagami that this is a one-time shot creating only temporary
jobs for the duration of the project. Meanwhile in Chapais - Mr. Claveau is
very familiar with - population is going down. Minings are closed. The forestry
operations in Val-d'Or, LaSarre and Noranda, they are closing down. You are
familiar with the Forez. Meanwhile, Québec is not investing in tourism,
in mining. We have an economic base as it is right now and we are going to
destroy that through one megaproject. Our whole economic base for
Québec, and that could be economic in terms of tourism. There are
countries in this world now, thanks to hightechnology, through TV... We can see
that small countries like Holland and Suede are doing really well in tourism.
Why cannot we? Why can the Government not put money in tourism, in mining, in
forestry? No. They are only going to put their money in one exploitation of a
national resource and limit the participation of Quebeckers. I think we have
the right to be informed who is going to pay all this. (17 heures)
M. Claveau: Ce que je demandais dans ma question, c'est que si on
fait un vrai débat public et que, finalement, après avoir
analysé tout le problème avec les intervenants, avec la
participation des Cris, avec la participation de tout le monde, tous les
intéressés, et si on met en place une vraie approche
d'économies d'énergie et qu'on se rend compte, par exemple, que
les chiffres qui nous sont donnés disent: II faudrait construire
peut-être une nouvelle centrale en 1995 ou en 1998... Mettons qu'on doive
reculer dans le temps, mais pas 20 ans, est-ce qu'à ce moment-là
il serait possible de reconsidérer une nouvelle négociation?
C'est ça que je demandais. Pour satisfaire aux besoins du Québec,
tout en respectant ce que vous nous dites par rapport aux exportations et par
rapport à de véritables politiques d'économies
d'énergie, si on se rend compte qu'il faudrait quand même
construire plus tôt, est-ce qu'il est possible, est-ce que vous envisagez
la possibilité qu'on puisse négocier?
M. Saganash: II a un peu répondu à votre question
indirectement, sauf que je vais quand même lui poser la question.
M. Coon Corne: We thought that this would be the independent
inquiry but...
M. Claveau: Est-ce que M. Saganash pourrait traduire à
mesure, pour être bien certain que je comprenne tout ce que vous dites,
M. Coon Come?
M. Coon Come: We thought this was to be the independent inquiry.
Unfortunately, it is not.
M. Saganash: Nous pensions qu'au départ ce serait cette
commission-là qui serait la commission indépendante qu'on
revendique.
M. Coon Come: And yes, in our submission we support an
independent commission.
M. Saganash: Et, dans notre mémoire, on demande au
gouvernement du Québec d'avoir une commission indépendante.
M. Coon Come: To review Quebec's policy.
M. Saganash: Et de revoir toute la politique
énergétique du Québec.
M. Coon Come: Not to review our land claim, our aboriginal rights
entitled to the land, it is separate.
M. Saganash: Et non de revoir toute la question de nos droits
autochtones ou de nos droits aborigènes sur le territoire.
M. Coon Come: But, it is too soon to say now. I think we will
wait until we see what happens.
M. Saganash: Mais il est trop tôt présentement pour
dire ce que ce serait, l'issue de la commission ou les recommandations de la
commission. On verra d'ici à 10, 15 ou 20 ans si c'est vraiment... si
ces projets sont encore nécessaires.
Le Président (M. St-Roch): Merci, M. le
député d'Ungava. Je vais maintenant reconnaître M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
dire que cette présentation des chefs cris rejoint pour l'essentiel,
dans ses critiques d'Hydro-Québec et ses critiques des gouvernements
antérieurs et surtout du gouvernement actuel, les critiques
formulées par les Inuit, il y a quelques semaines.
Je pense que le Québec a un problème majeur lorsque son
gouvernement confie à une société comme
Hydro-Québec le soin d'assumer des responsabilités qui,
normalement, doivent être assumées par le gouvernement. Et je
pense en particulier au ministère de l'Environnement. Je note, dans la
présentation du mémoire des Cris, que le ministère de
l'Environnement du Québec est accusé, et c'est une accusation
grave, je pense qu'elle est assise sur des faits réels. À toutes
fins pratiques, on accuse le ministère de l'Environnement du
Québec de ne pas jouer son rôle dans le Nord et d'essayer de faire
jouer son rôle par Hydro-Québec. Je pense que, comme gouvernement,
les autorités québécoises manquent une belle occasion de
diminuer les tensions. On peut sentir la tension très forte qui existe
actuellement entre Hydro-Québec et les populations autochtones, que ce
soient les Cris ou les Inuit. On aurait pu, je crois, par un ministère
de l'Environnement et par un ministre de l'Environnement qui jouerait bien son
rôle, désamorcer jusqu'à un certain point, réduire
jusqu'à un certain point cette tension énorme qui existe.
Moi, je retiens encore une fois que le ministre de l'Environnement, par
exemple, n'est pas ici aujourd'hui. Je ne l'ai pas vu une seule fois depuis que
les audiences sont commencées, le ministre de l'Environnement. Je pense
que c'est négligent de sa part. Vous connaissez la position de notre
parti politique. Nous appuyons la revendication d'une enquête publique,
d'une grande consultation publique. Nous pensons, nous aussi, qu'il doit y
avoir un moratoire sur les grands projets jusqu'à ce qu'il y ait eu une
consultation publique, sérieuse, neutre, objective. Je pense que les
commentaires que vous faites dans votre mémoire sur la non-application
du chapitre XXII qui touche l'environnement sont extrêmement graves et
extrêmement sérieux. Je pense, M. le Président, que le
gouvernement a un problème sérieux sur les bras, une crise de
confiance vis-à-vis d'Hydro-Québec qui se manifeste non seulement
dans le Sud, mais aussi dans le Nord, encore à plus forte raison dans le
Nord.
Il me semble qu'il est grandement temps qu'au lieu de s'acharner, comme
la ministre le fait, à poser des questions et à essayer de
démontrer qu'il y a eu des amendements à l'entente de 1975...
Bien sûr qu'il y a eu des amendements, mais c'est passer à
côté du problème que de poser toutes ces
questions-là parce que le problème fondamental, ça en est
un de crédibilité d'Hydro-Québec et, par
conséquent, un problème de crédibilité du
gouvernement qui appuie Hydro-Québec à 100 %. Le gouvernement
devrait être beaucoup plus critique à l'endroit
d'Hydro-Québec. Il n'est pas trop tard pour le faire et, l'occasion
rêvée pour le faire, ce serait de transformer cette commission
parlementaire éventuellement, à la fin des audiences, en une
commission neutre, objective, avec toutes les
ressources voulues mais aussi qui confierait aux groupes autochtones les
ressources voulues pour faire les études, non seulement aux groupes
autochtones mais à tous les groupes du Québec qui veulent
participer à une telle consultation publique, leur fournir les moyens
financiers pour préparer des présentations.
Je pense, M. le Président, que le cri du coeur qui nous vient de
nos amis du Nord aujourd'hui doit être écouté. Je pense que
l'avenir de l'énergie électrique au Québec ne serait pas
compromis par un délai d'un an, de deux ans ou de deux ans et demi qui
serait occasionné par des audiences publiques. HydroQuébec ne
peut pas faire la démonstration, et le gouvernement non plus ne peut
faire la démonstration qu'il y a urgence au point où on doive
"bulldozer" les objections des autochtones comme des gens du Sud.
M. le Président, j'espère que la ministre va comprendre ce
cri-là et qu'elle va, à la fin de ces audiences, annoncer que le
gouvernement va créer une commission d'enquête neutre pour, une
fois pour toutes, avoir l'opinion non seulement des gens du Nord, mais aussi
des gens du Sud et de l'ensemble de la société sur ces projets
qui vont coûter des sommes faramineuses pour l'avenir du Québec,
mais surtout qui vont contribuer à briser encore davantage le mode de
vie traditionnel des autochtones. Merci.
Le Président (M. St-Roch): Merci, M. le
député de La Prairie. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Si
vous voulez remercier nos invités, M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Alors, merci à vous tous pour votre
présentation. Vous avez amené un point de vue assez précis
et qui est un peu divergent de ce que l'on a entendu ce matin de groupes qui
veulent, eux, que l'on fasse la Baie-James à tout prix. Alors, je crois
que les débats, depuis déjà presque quatre semaines qu'on
a commencé, font la preuve, au moment où on se parie, qu'il est
absolument nécessaire d'aller beaucoup plus loin dans cette
recherche-là de justice et d'équité finalement pour tout
le monde et qu'on ne peut pas se contenter du plan de développement
d'Hydro-Québec comme modèle de société. C'est loin
d'être suffisant. Merci.
Le Président (M. St-Roch): Merci, M. le
député d'Ungava. Mme la ministre.
Mme Bacon: I would like to thank you for your presentation. Like
I said at the beginning of my remarks, it has certainly required a great number
of hours of research and we are quite pleased to have the details and the
various information that you have given us.
You have appeared before elected people today and I think this
committee... I have full respect for the committee and for the elected members
of the committee and I think it is very important to keep the discussions open
and the possibility to be able to sign agreements again like the one we have
signed today. I am quite pleased that you have come and appeared before us
today with the members of your community and I wish you a safe trip back home.
Thank you very much.
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, Mme la
ministre. Je tiendrais à remercier le Grand Conseil des Cris du
Québec de son apport aux travaux de cette commission.
Sur ceci, la commission va suspendre ses travaux jusqu'à 20
heures ce soir.
(Suspension de la séance à 17 h 12)
(Reprise à 20 h 7)
Le Président (M. Bélanger): Bonsoir. La commission
de l'économie et du travail se réunit pour une consultation
générale et des auditions publiques sur la situation et les
perspectives de l'énergie électrique au Québec. Ce soir,
nous recevons le Mouvement pour l'instauration de la réglementation de
l'électricité au Québec.
Bonsoir, messieurs. Je vais vous expliquer un peu nos règles de
procédure. Vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de
votre mémoire. Il y aura ensuite une période d'échanges
avec les parlementaires. Je vous prierais, dans un premier temps, de bien
vouloir identifier votre porte-parole, de présenter les gens de votre
équipe et de procéder à la présentation de votre
mémoire. Merci.
Mouvement pour l'instauration de la
réglementation de l'électricité au Québec
M. Bellemare (Jacques): Mme la ministre, MM. les
députés, le Mouvement pour l'instauration de la
réglementation de l'électricité au Québec, le
MIREQ, est heureux de participer aujourd'hui au processus de consultations
publiques que vous avez mis en place pour revoir la situation et les
perspectives de l'énergie électrique au Québec.
Nous espérons que cette consultation débouchera sur des
actions positives qui permettront aux Québécois d'assurer leur
avenir énergétique dans un climat de confiance et de
fierté collective.
Le Président (M. Bélanger): Si vous me permettez,
M. le président, est-ce que vous pouvez vous identifier et
présenter vos gens, s'il vous plaît?
M. Bellemare: J'étais pour le faire, ça venait.
Mais je peux me présenter...
Le Président (M. Bélanger): C'est parce que
ça nous aiderait beaucoup ici.
M. Bellemare: Mon nom est Jacques Bel-lemare. Mes
collègues et membres fondateurs du mouvement MIREQ sont, à ma
gauche ici, Michel Cao et, à ma droite, John Stuart.
Le Président (M. Bélanger): Merci.
M. Bellemare: Alors, au cours des prochaines minutes, nous
aimerions d'abord nous présenter personnellement puis décrire la
nature et les objectifs du MIREQ, le Mouvement que nous représentons et,
enfin, résumer dans leurs grandes lignes les arguments qui sont
avancés et les recommandations qui sont contenues dans le mémoire
du MIREQ.
Mon nom est Jacques Bellemare. Je suis ingénieur physicien,
gradué de l'École polytechnique en 1961. Je suis aussi
détenteur d'une maîtrise en administration de l'Université
Laval obtenue en 1973. Je suis accompagné de mes collègues, ce
soir, Michel Cao et John Stuart.
M. Cao et moi-même jouissons de certaines connaissances en
matière de réglementation sur les entreprises de services
d'utBité publique, tant dans te secteur des
télécommunications que dans celui de l'énergie. Nous y
avons oeuvré une bonne partie de nos carrières respectives.
Personnellement, j'ai travaillé 15 ans chez Bell Canada, dont les
5 dernières années, de 1973 à 1978, dans des
activités de réglementation. J'ai aussi travaillé quelques
années dans la câblodistribution, une industrie, elle aussi,
réglementée. Après un court stage dans la consultation
pour un grand cabinet d'experts-comptables, j'ai été
régisseur pendant 6 ans, de 1982 à 1988, à la Régie
des services publics du Québec, devenue depuis la Régie des
télécommunications. J'occupe présentement un poste de
cadre dans le service de la réglementation de Téléglobe
Canada, une entreprise de télécommunications internationales
réglementée par le CRTC depuis sa privatisation par le
gouvernement fédéral, il y a trois ans.
M. Cao, mon collègue, a aussi occupé plusieurs postes dans
le domaine de la réglementation des services d'utilité publique
et ce, des deux côtés de la clôture: dans l'industrie et
à l'intérieur d'organismes de réglementation. Ainsi, il a
agi comme conseiller spécial en matière de réglementation
auprès du président de la Régie de
l'électricité et du gaz. devenue Régie du gaz naturel. II
a aussi occupé des postes de direction dont les plus pertinents, en
relation avec le présent dossier, sont chez Lavalin comme gestionnaire
de projets, responsable pour la conduite d'études économiques et
financières dans le secteur de l'énergie, chez SOQUIP, de 1982
à 1985, comme directeur de l'analyse économique et
financière où il a eu l'occasion de se pencher sur des questions
réglementaires touchant Gaz métropolitain et Gaz
Inter-Cité, alors deux filiales de SOQUIP, et, enfin, au
ministère de l'Énergie et des Ressources de 1979 à 1982,
où dans ses fonctions M. Cao a déjà eu à
préparer et à soumettre des commentaires sur les plans de
développement d'Hydro-Québec, pour le bénéfice de
la commission parlementaire sur l'énergie du temps. Tout comme moi, M.
Cao occupe présentement un poste de gestionnaire chez
Téléglobe Canada, et M. Stuart est un analyste senior dans le
Service de la réglementation chez Téléglobe Canada. Ce
n'est pas notre attachement à notre employeur qui nous amène ici
ce soir, mais bien notre qualité de consommateurs
d'électricité, et nous avons un intérêt vital
à nous assurer de la bonne gestion d'Hydro-Québec à tous
les points de vue.
Cela nous amène à vous parier plus
précisément du MIREQ, le Mouvement que nous avons
créé, et de ses objectifs. Le Mouvement pour l'instauration de la
réglementation de l'électricité au Québec est un
organisme à but non lucratif qui vient d'être constitué
selon la partie III de la Loi sur les compagnies du Québec. Nous croyons
opportun de signaler quelques-uns des principaux objectifs du Mouvement pour le
bénéfice de la commission. C'est dans un contexte
d'éducation populaire, d'entraide et de solidarité
socio-économique que nous comptons, premièrement, regrouper en
corporation toutes les personnes et tous les organismes
intéressés, de près ou de loin, par la
réglementation socio-techno-économique de l'ensemble des
activités liées à la génération et à
la distribution d'électricité au Québec.
Deuxièmement, nous comptons sensibiliser toutes les
catégories de consommateurs d'électricité à leurs
droits, obligations et responsabilités, ainsi qu'à la
nécessité d'exercer une régulation socio-économique
rigoureuse et objective dans ce domaine d'activité.
Troisièmement, nous entendons promouvoir par tous les moyens
légaux et démocratiques disponibles l'instauration, dans les plus
brefs délais, d'une forme de réglementation plus rigoureuse et
objective de la fourniture de l'électricité au Québec en
vue d'assurer à plus long terme le développement d'un État
québécois moderne, productif et compétitif dans le nouveau
contexte d'ouverture des marchés et des relations humaines à
l'échelle planétaire.
Enfin, quatrièmement, nous entendons constituer un réseau
de bénévoles et faire appel aux ressources des communautés
locales en vue de vulgariser et de diffuser à l'échelle du
Québec les concepts inhérents à la réglementation
des entreprises de services publics en général et
d'électricité en particulier.
Ceci étant dit, quels sont les motifs qui nous ont amenés
à créer un mouvement structuré avec de tels objectifs? La
réponse est assez simple. Tous nos contacts dans notre entourage, nos
milieux de travail, nos cercles d'amis nous
révèlent un net déclin de la confiance des
Québécois dans la qualité de la gestion collective
d'Hydro-Québec au cours des dernières années. Il existe
présentement un malaise évident au Québec concernant tout
ce qui touche de près ou de loin à la gestion de la
société d'État qui fut, il n'y a encore pas si longtemps,
un des fleurons de nos institutions québécoises.
Tel que mentionné dans son mémoire, le MIREQ propose une
solution pratique, attrayante et, nous l'espérons, permanente au
problème de crédibilité publique envers
Hydro-Québec. Cette solution, d'après nous, est la
réglementation par un tribunal administratif indépendant - style
régie, style CRTC ou autre. Avant de résumer les principales
recommandations du mémoire, j'aimerais passer la parole à mon
collègue, Michel Cao, qui fera ressortir certains aspects qui
justifient, à nos yeux, l'instauration d'une réglementation
socio-économique rigoureuse des activités d'Hy dro-Québec.
Michel.
M. Cao (Michel il.): Merci. L'hydroélectricité a
constitué et continue de constituer un apport extrêmement
Important au développement économique du Québec. Le
harnachement de cette ressource a permis au Québec de se hisser parmi
les premiers pays industrialisés au monde, tout en élevant le
niveau de vie de sa population. Cette ressource limitée constitue un
atout majeur pour le Québec de demain. C'est justement pour cette raison
que les orientations de son développement futur devraient se fonder sur
un consensus social largement établi à sa base. Or, aujourd'hui,
au moment où l'on se parle, un tel consensus n'existe pas. Face à
Hydro-Québec tiraillée par une gestion vacillante, une
qualité de services qui laisse à désirer, un personnel
démotivé, la population s'est prononcée majoritairement
dans les plus récents sondages pour un meilleur contrôle de la
société d'État. Dans ce contexte d'insatisfaction, le
gouvernement doit montrer son leadership, revoir le contexte et l'entreprise et
insuffler à la société d'État des nouvelles
orientations et des buts précis.
Les deux principaux arguments militant en faveur d'un rejet du plan de
développement d'Hydro-Québec à ce stade-ci, et compte tenu
des informations disponibles, sont d'abord l'absence d'une planification
intégrée des ressources de l'entreprise permettant de s'assurer
que les ressources sont utilisées de façon optimale et au moindre
coût et ensuite le manque d'une vision claire et nette de l'entreprise en
ce qui concerne sa véritable mission.
Afin d'illustrer le premier point, permettez-moi d'aborder trois aspects
de la planification à long terme chez Hydro-Québec qui semblent
faire défaut: la prévision de la demande contenue des
économies d'énergie réalisables, l'optimisation des
sources d'approvisionnement énergétique du Québec et les
moyens de gérer l'offre. En ce qui concerne les prévisions
d'Hydro-Québec, dans le contexte actuel, pour les 10 prochaines
années, celles-ci doivent être interprétées avec un
certain scepticisme. Lorsqu'en 1978 le gouvernement du Québec
annonça sa politique énergétique globale dans le livre
blanc intitulé "Assurer l'avenir", il avait la vision d'un Québec
largement autonome au niveau de sa sécurité
énergétique, d'un développement économique
axé sur les disponibilités de l'hydroélectricité,
ainsi que d'un Québec qui fasse une large part à l'exploitation
de l'énorme gisement d'économies d'énergie alors existant.
Le livre blanc prévoyait également que le découplage entre
la croissance économique et la croissance de la consommation
énergétique entraînerait un changement majeur dans les
habitudes de consommation. Les prévisions pour 1990, le livre blanc en
fournissait: 1597 petajou-les, avec 40 % à l'électricité,
12 % à 16 % pour le gaz, 43 % pour le pétrole, 1 % pour le
charbon ot le reste pour les énergies nouvelles et renouvelables.
Derrière la scène, Hydro-Québec avait alors
taxé ces prévisions de farfelues et d'irréalisables. Elle
entretenait alors des prévisions de croissance exponentielle au rythme
et au taux de croissance historique de l'élément,
c'est-à-dire, à ce moment-là, de l'ordre de 6 % à 7
% annuellement. Aujourd'hui, soit 10 ans après, selon les
dernières informations, la consommation énergétique
devrait se situer autour de 1513 petajoules, soit seulement 5 % d'écart
avec la prévision faite en 1978. Et les parts du marché devraient
être sensiblement les mêmes que celles prévues. En somme,
les prévisions du livre blanc se sont en majeure partie
réalisées.
Par ailleurs, les prévisions d'Hydro-Québec n'ont
cessé de baisser d'année en année depuis 10 ans. Elles se
situent présentement à 2 % annuellement en moyenne sur la
période 1989-2006. Ceci suffit pour montrer que, dans la mesure
où le gouvernement prend les moyens pour atteindre des objectifs
précis et réalisables, 11 y toutes les chances que celles-ci se
réalisent. Nous croyons que la situation actuelle, sans toutefois
être identifique à celle des années quatre-vingt, se
prête à un tel exercice de vision et de choix
énergétique à long terme.
Les prévisions de la demande sont également intimement
liées aux objectifs d'économies d'énergie. À
l'instar de la Vermont Utility Service Commission, un organisme de
réglementation qui récemment, dans une décision unanime, a
ordonné aux entreprises d'utilité publique de retourner à
leur plan de travail pour mettre sur pied des programmes d'économies
d'énergie avant de penser à s'approvisionner davantage ailleurs,
le gouvernement devrait ordonner à HydroQuébec d'appliquer les
mêmes principes. Je cite, à cet effet, un paragraphe de cette
décision: 'Toute décision en matière d'énergie doit
tenir compte tant du réchauffement des températures, des pluies
acides, des déchets nucléaires et de la destruction des habitats
que des prix et de la
fiabilité des approvisionnements. À l'heure actuelle, dans
le prix de la plupart des sources énergétiques on néglige
d'inclure les véritables coûts pour la santé,
l'économie et l'environnement. L'efficacité des investissements
comporte moins de risques qu'une politique fondée sur
l'approvisionnement et réduirait d'autant l'impact environnemental."
À leur face même, en matière d'économies
d'énergie, les investissements de 1 800 000 000 $ étalés
sur 10 ans, prévus dans le plan de développement
d'Hydro-Québec pour sauver 12,9 térawattheures par an, soit
environ 2500 mégawatts, sont nettement insuffisants, en comparaison avec
les investissements de plusieurs dizaines de milliards de dollars pour les
projets Grande Baleine et NBR. Il faudra qu'Hydro-Québec
démontre, chiffres à l'appui et en termes de faisabilité
économique et sociale, que les investissements dans la production de
l'électricité sont plus rentables que les investissements dans
les économies d'énergie. De telles informations devraient
être disponibles à tous les Intervenants qui le
désirent.
À ce chapitre, on peut noter que le critère de
rentabilité des investissements en économies d'énergie
appliqué par Hydro-Québec est biaisé, à notre avis,
et a été par ailleurs critiqué par des experts dans le
domaine de l'énergie et rejeté par plusieurs commissions de
réglementation aux États-Unis. Ce critère ne tient
nullement compte des coûts sociaux ni de la dynamique de consommation. Si
des millions sont investis chaque année dans des études
d'avant-projet et dans des études d'impact environnemental, pourquoi un
effort comparable ne peut-il être voué à la recherche et
à la commercialisation des moyens techniques pour économiser de
l'énergie?
Passons maintenant au volet de la gestion de l'offre. En
rétrospective, le choix de la filière du gaz naturel a
été, pour le Québec, une excellente décision
permettant à l'industrie de diversifier ses sources d'approvisionnement,
de réduire ses coûts de production grâce à une
énergie abondante, fiable et propre. Les perspectives de consommation au
Canada et le potentiel de nouvelles découvertes de gisement de gaz
naturel dans l'Ouest canadien sont excellents et font croire que le
marché de gaz naturel au Québec a encore bien des
possibilités de pénétration dans les années
à venir, surtout dans le chauffage industriel.
D'autres moyens de gestion de l'offre sont également importants.
À titre d'exemple, les programmes de biénergie, la
cogénération, les ventes en interrupt, les contrats de
diversité sont tous des moyens qu'Hydro-Québec devrait
démontrer qu'ils sont effectivement optimisés avant qu'on donne
le feu vert à son pian de développement.
En conclusion, compte tenu des renseignements fournis par
Hydro-Québec, dans le cadre de cette commission parlementaire, il nous
apparaît évident qu'Hydro-Québec n'a pas encore fait la
preuve que la demande et l'offre d'énergie électrique sont, en
fait, optimisées dans son plan de développement.
En conséquence, nous recommandons à cette commission de
rejeter la proposition et de demander qu'un nouveau plan détaillé
lui soit soumis pour évaluation. Quant à la mission
d'Hydro-Québec, nous croyons qu'elle doit être de fournir
l'électricité aux Québécois dans les meilleures
conditions possible tant au niveau de la qualité de son service qu'au
niveau de la productivité, de l'efficacité de son organisation et
qu'au niveau des prix qui doivent être le plus bas possible tout en
étant compatibles avec une saine gestion financière. Au minimum,
la qualité des services à la clientèle et la
fiabilité du réseau doivent être équivalentes sinon
supérieures aux autres services d'utilité publique au Canada. La
productivité de la société d'État doit faire
l'objet d'une analyse suivie et approfondie. Il faut se rappeler qu'en tant que
service public détenant un monopole l'entreprise a l'obligation de
fournir des services à un niveau adéquat, même en situation
de conflit de travail.
Quant à sa politique tarifaire, elle doit être
fondée sur le principe du maintien du prix le plus bas possible
compatible avec une saine gestion financière. Elle doit aussi être
équitable, être basée sur le coût de fourniture et
permettre la pleine protection des couches les plus démunies de la
société. Or, la grille tarifaire actuelle d'Hydro-Québec
est fortement déséquilibrée. Elle permet de subventionner
non seulement, selon Hydro-Québec, les clients domestiques, mais
également - et elle ne le mentionne pas - les clients à tarif
à grande puissance au détriment des clients à petite et
moyenne puissance. Elle favorise également le gaspillage de
l'énergie en permettant une dégressivité trop
prononcée du taux moyen en fonction du volume consommé. De plus,
en raison de rabais tarifaires négociés à la pièce
avec des grandes entreprises, elle donne lieu à trop de cas
spéciaux qui réduisent l'efficacité de la tarification et
la rendent inéquitable pour plusieurs catégories de
clientèles.
En résumé, la mission d'Hydro-Québec doit donc
être avant tout de fournir un service fiable et de haute qualité
à la population, de maintenir un haut degré de
productivité de sa main-d'oeuvre et, en même temps, de maintenir
les prix le plus bas possible tout en fournissant un rendement raisonnable sur
l'avoir propre de l'entreprise.
Toute autre considération, et je cite: "Fournir des tarifs
à rabais pour favoriser le développement économique;
investir dans des programmes à partage de risque ou exporter de
l'énergie", devrait être subordonnée à ces trois
objectifs cités et que nous croyons fondamentaux.
La perte de crédibilité et la baisse de la cote d'amour de
la population québécoise pour
Hydro-Québec sont imputables, en majeure partie, à ce
fouillis d'objectifs que la politique a imposés au fil des ans à
la société d'Etat. Il nous est permis d'envisager le contexte et
la forme sous lesquels une reprise en main de la société
d'État peut se réaliser sans heurt et avec une collaboration
pleine et entière de la population. Cette solution, quant à nous,
réside dans l'encadrement réglementaire d'Hydro-Québec qui
lui permettra de remplir sa mission de façon efficace et accessible
à tous.
Je laisse de nouveau la parole à mon collègue, M. Jacques
Bellemare, qui va développer ce thème.
M. Bellemare: Merci, Michel. Plusieurs des mémoires soumis
à la commission préconisent la tenue d'un débat public
ouvert et général avant qu'Hydro-Québec soit
autorisée à mettre en oeuvre son plan de développement. La
mise sur pied d'une commission d'enquête indépendante et
itinérante est même mise de l'avant par certains intervenants.
Quant à nous, au MIREQ, nous proposons une solution plus permanente et
continue à une problématique que nous estimons nous-mêmes
être continue et permanente.
Le MIREQ propose carrément d'assujettir Hydro-Québec
à la réglementation socio-techno-économique. Les sept
recommandations du mémoire sont orientées à cette fin.
Permettez-moi de les réitérer rapidement. La première,
c'est que les lois pertinentes du Québec, y compris celle
d'Hydro-Québec, soient modifiées aux fins d'assujettir la
génération et la distribution de l'électricité au
Québec à la réglementation socio-économique.
Pour parvenir à cette fin, la réglementation n° 2,
c'est qu'un tribunal administratif indépendant et compétent soit
dûment mandaté et doté des pouvoirs requis pour
réglementer tous les aspects opérationnels d'Hydro-Québec,
y compris le programme de construction, les modifications tarifaires, la
qualité du service, la productivité et l'impact
socio-économique et environnemental des projets de construction.
Troisième recommandation: Que des ressources adéquates
soient allouées à cet organisme pour lui permettre de tenir
toutes les audiences publiques nécessaires afin de faciliter le
débat public et l'évaluation rigoureuse du programme de
construction d'Hydro-Québec et des causes tarifaires, y compris les
ressources permettant, dans certains cas, aux diverses parties
intéressées de se faire représenter
adéquatement.
La quatrième recommandation: Qu'un nombre adéquat de
membres soient nommés au sein de l'organisme pour mener toutes les
activités jugées appropriées dans l'intérêt
de la population dans le cadre d'un mandat.
La cinquième recommandation: Que, dans la mesure du possible, le
gouvernement limite ses recours à un pouvoir de directive aux grandes
questions d'orientations stratégiques de l'entre- prise
réglementée afin de permettre à l'organisme de prendre des
décisions en toute équité et impartialité.
La sixième recommandation: Que le gouvernement du Québec
considère le regroupement de l'ensemble des ressources de la
Régie du gaz et de la Régie des télécommunications
pour constituer un nouvel organisme de réglementation
socio-économique, multifonctionnel et multidis-ciplinaire, une vraie
régie des services publics qui serait aussi mandatée pour
réglementer Hydro-Québec.
La septième et dernière recommandation en attente de tout
ce processus: Qu'un moratoire soit décrété pour tous les
projets de construction majeurs d'Hydro-Québec jusqu'à ce qu'un
organisme de réglementation compétent puisse tenir des audiences
publiques sur la tarification et le programme de construction de la
société d'État et décider en conséquence.
Avant de terminer, j'aimerais attirer l'attention des membres de la commission
sur quelques points additionnels de réflexion sur la démarche qui
se déroule devant vous dans le cadre de la présente
enquête.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à le faire rapidement puisqu'il reste une minute.
M. Bellemare: II me reste une page et c'est important.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Bellemare: Hydro-Québec est une entreprise avide de
capital. En 1989, sa base d'immobilisations est de 30 000 000 000 $ avec des
revenus d'exploitation de 5 600 000 000 $. Hydro-Québec immobilise donc
plus de cinq fois sa base de revenus. La conséquence de cet état
de fait est que près de 60 % des besoins des revenus
d'Hydro-Québec sont générés par le processus de
consommation du capital, le processus de papier, à savoir le
recouvrement par le mécanisme de l'amortissement qui compte pour 10 %,
et la rémunération du capital investi dans l'entreprise qui
compte pour 50 % des besoins des revenus. D'ailleurs, le profil
microéconomique apparaissant à la page 41 du rapport annuel
d'Hydro-Québec pour 1989 est très éloquent à ce
sujet. On le donne, le profil. Quand HydroQuébec propose des
investissements de l'ordre de 60 000 000 000 $ sur une décennie, c'est
donc à une augmentation des besoins des revenus et à un risque
financier correspondant de plusieurs fois supérieur à ce chiffre
qu'elle contraint les générations futures de clients
québécois et étrangers.
Si la base actuelle de 30 000 000 000 $ d'immobilisations se traduit par
des besoins de revenus de l'ordre de 6 000 000 000 $, une base de plus du
double en l'an 2000 devrait générer des besoins de revenus de
l'ordre de
12 000 000 000 $ à 15 000 000 000 $ annuellement.
Quel est le scénario tarifaire d'Hydro-Québec pour la
prochaine décennie et après la prochaine décennie? Les
Québécois ont-ils vraiment les moyens de se permettre un tel
fardeau? C'est la vraie question, mais la sagesse collective ne nous
dicte-t-elle pas d'y aller avec prudence? Pour les Montréalais de ma
génération qui, comme moi, ont vécu l'aventure olympique
de 300 000 000 $ autofinancés, qui est devenue, en fait, un fardeau de 1
500 000 000 $ que nous continuons de payer encore 15 ans après les jeux,
la leçon a été dure et nous savons qu'il vaut mieux se
poser les vraies questions avant la fin des travaux parce que, une fois le
béton coulé, les engagements financiers commencent et leurs
effets se font sentir longtemps.
Au-delà des grandes questions, il y a aussi toute une
pléiade de petites questions de gestion quotidienne sur lesquelles une
commission parlementaire, si réglementaire soit-elle, ne peut se pencher
et que seul un organisme de réglementation permanent pourrait, à
notre avis, régler. Par exemple, toutes les questions liées
à la gestion, à la mise en place et aux modifications du
programme mis en place par HydroQuébec qui s'appelle MVE, le mode de
versements égaux. Et que dire de toutes les questions environnementales
et de l'impact sur les modes de vie des autochtones que d'autres groupes
d'intervenants ont soulignés abondamment?
Nous vous remercions de votre attention soutenue et nous sommes
disposés à répondre à vos questions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre.
Mme Bacon: M. Bellemare, M. Cao et M. Stuart, on vous remercie
d'être venus Ici rencontrer les membres de la commission parlementaire et
de contribuer à la réflexion que nous avons entreprise il y a
quelques semaines.
Dans votre étude des pratiques réglementaires dans les
autres provinces et aux États-Unis, vous en arrivez à la
conclusion que toutes les entreprises de fourniture d'électricité
d'une certaine importance en Amérique du Nord sont
réglementées par un organisme de réglementation
indépendant, a l'exception d'Hydro-Québec et de la Saskatchewan
Power Company. Les renseignements dont je dispose indiquent que les pouvoirs de
ces régies sont souvent limités. Vous dites vous-mêmes,
d'ailleurs, qu'en Ontario, malgré la présence d'une régie,
Ontario Hydro peut accepter ou refuser les propositions aux modifications de
tarifs qui lui sont faites par la régie provinciale. Les pratiques dans
les autres provinces et aux États-Unis semblent, en fait, varier d'un
endroit à l'autre. Quel est, selon vous, le profil typique de ces
régies en termes de pouvoirs qui leur sont accordés?
M. Bellemare: Dans le cadre de nos activités de
préparation, on n'a pas fait nécessairement une étude
exhaustive de tous les paramètres de ces régies. C'est un
organisme naissant. Ce n'est pas notre fonction première de transiger
avec les modalités réglementaires qui prévalent dans
l'énergie. On a simplement fait le constat et, à ce
moment-là, c'est l'expérience et le croisement de ce monde
réglementaire qui nous amènent à conclure qu'il existe un
niveau de réglementation, du moins, qui est plus extensif, plus
compréhen-sif que celui qui est exercé ici. (20 h 30)
Je suis d'accord avec vous que les pouvoirs varient d'un organisme
à l'autre, mais, dans les grandes lignes, le profil type impliquerait un
examen complet des programmes de construction avec, sinon un pouvoir
d'autorisation finale, un pouvoir de recommandation et de formulation de
recommandations pour l'autorité compétente qui peut être
gouvernementale. Aussi, ça comporte, presque la majorité du
temps, une approbation tarifaire d'une façon ou d'une autre, surtout aux
États-Unis. Dans le cas de l'Ontario que vous avez mentionné,
c'est sûr que l'Ontario Energy Board fait une analyse très
détaillée et très rigoureuse, avec implication publique,
du processus, et elle fait des recommandations. Le processus lui-même est
assez complexe; on me l'a déjà exposé en tant que
régulateur, et je dois vous avouer que c'était assez complexe a
comprendre dans l'ensemble. Mais, au moins, il y avait, à
l'intérieur de ce processus, une espèce de garantie de sauvegarde
établie à l'effet que, même si Ontario Hydro, I'Hydro
ontarienne, gardait son pouvoir final, elle avait quand même un
encadrement dont elle devait tenir compte en termes de
réglementation.
En Saskatchewan, il y a déjà eu ce cas-là, un
organisme de réglementation qui a été aboli quelques
années seulement après sa mise en place pour des raisons d'ordre
politique dans son cas. Aux États-Unis, c'est la norme. En fait, c'est
réglementé presque partout. Maintenant, je ne peux pas arriver
à égaliser ou...
Mme Bacon: II n'y a quand même pas uniformité.
M. Bellemare: ...faire ce que vos fonctionnaires font parce que
je ne dispose pas de l'ensemble des données. On n'a pas fait
d'étude et on n'est pas mandatés.
Mme Bacon: Est-ce que vous avez senti qu'il n'y a pas
uniformité, quand même, dans...
M. Bellemare: II n'y a pas nécessairement
uniformité
Mme Bacon: ...les pouvoirs?
M. Bellemare: Je pense que dans le cadre de
nos propositions on dit: II y a des organismes presque partout et,
à notre avis, si on suivait les recommandations qu'on préconise,
il faudrait qu'il y ait une analyse détaillée de l'ensemble des
pouvoirs qui pourraient être dévolus à un organisme ici en
milieu québécois, mais qui devrait comporter tous les volets pour
garantir, en fait, que la population soit satisfaite, que toutes les
sauvegardes soient présentes et qu'on arrête de critiquer et de
vivre dans le négativisme. Présentement, c'est... Moi, je parle
comme citoyen, je parie comme usager d'Hydro-Québec et non pas comme
expert-régulateur. On est dans le vide, on est dans l'absence. On sait
qu'il y a des commissions parlementaires, mais ce ne n'est pas une tribune
réglementaire dans le vrai sens du mot où toutes les parties
peuvent venir se faire entendre, exposer des points de vue différents,
être assujetties ou l'objet de contre-interrogatoires entre experts,
devant des gens qui écoutent. Ici, chaque intervenant vient exposer sa
version. Nous venons vous exposer notre point de vue, mais c'est une
communication, c'est un dialogue entre vous et nous, mais on n'a aucune
connaissance du dialogue que vous avez eu avec d'autres. C'est peut-être
la carence. Dans le système américain, même si les pouvoirs
varient, il y a au moins la présence d'un processus qui est plus
rassurant pour la population.
Mme Bacon: II y a un critère majeur, comme vous savez, qui
est retenu par les régies de services publics dans
l'établissement des tarifs, que ce soit dans l'électricité
ou dans d'autres secteurs: c'est le taux de rendement sur l'avoir des
actionnaires.
Depuis 1984, le taux moyen de rendement sur l'avoir propre a
été inférieur à 6 % dans le cas
d'Hydro-Québec. Il y a des objectifs financiers que la
société a indiqués dans son pian de développement:
c'est d'atteindre, d'ici à 1992, un taux de rendement au moins
équivalent au taux moyen du coût de sa dette, soit environ 11 %.
On constate aussi que les taux de rendement accordés par l'Office
national de l'énergie à la Régie du gaz naturel se
situaient, de façon générale, entre 13 % et 16 % au cours
des dernières années.
Quels seraient, selon vous, les principaux critères que devrait
retenir une éventuelle régie de l'électricité dans
la fixation des tarifs, parce que ça va prendre des critères pour
la fixation des tarifs? Et est-ce qu'il n'y a pas un risque que les tarifs
d'électricité au Québec soient plus élevés
qu'actuellement si le taux de rendement est l'un de ces
critères-là?
M. Cao: Lorsqu'on regarde la situation actuelle, au
Québec, en ce qui concerne les tarifs, le taux moyen est
déjà supérieur à la Colombie-Britannique, à
I'Alberta et au Manitoba. Donc, je pense que le Québec n'a pas
actuellement le plus bas tarif à travers le Canada.
La deuxième chose qu'on remarque également, c'est que la
rémunération du capital sur l'avoir des actionnaires n'est qu'un
des aspects de la tarification. Il faut également regarder le
balancement des tarifs. Il faut regarder également que du point de vue
d'une entreprise d'État le rendement sur le capital n'est pas
nécessairement lié à un taux de rendement
nécessaire parce que le gouvernement a un objectif et, donc, ce n'est
pas la même chose que si c'était une entreprise privée.
Alors, d'après nous, les orientations que le gouvernement devrait donner
à une régie en ce qui concerne le rendement sur le capital, c'est
des décisions concernant ce qu'elle aimerait avoir en termes
d'équilibre entre différents groupes de consommateurs.
Nous croyons, comme nous l'avons présenté tout à
l'heure, que la rémunération en ce qui concerne le coût de
la dette est déjà de 60 %, donc la partie qui est l'avoir propre
ne représente qu'une partie, selon nous, assez faible comparativement
à ce besoin de revenu pour couvrir le...
Mme Bacon: Mais, quand on voit l'Office national de
l'énergie, la Régie du gaz naturel, les taux de rendement qui
sont accordés par l'Office national de l'énergie et la
Régie du gaz qui se situent de façon générale entre
13 % et 16 % au cours des dernières années, est-ce que vous
n'avez pas peur qu'une régie essaie, tout au moins, de donner à
la société d'État le taux moyen du coût de sa dette
- et je reviens à ma question - qui est de 11 %? Et même, il y a
des gens qui nous disent: Ça devrait être 13 %, le taux de
rendement qu'on accorde à HydroQuébec... Et là, à
ce moment-là, pour donner 13 % de taux de rendement, il faut donner une
tarification beaucoup plus élevée que celle qui a
été donnée cette année encore.
M. Bellemare: Oui. Moi, j'aimerais, parce que vous touchez
à un point, justement, qui est encore intéressant... Le
gouvernement du Québec est l'actionnaire, en fait, d'Hydro-Québec
et je pense qu'il doit préciser de façon raisonnable ses attentes
de rendement. On doit se rappeler que c'est un gouvernement. Ce
gouvernement-là peut, en tant qu'actionnaire, décider de se
contenter de 6 % dans le cas d'Hydro-Québec, parce
qu'Hydro-Québec appartient à tous les Québécois qui
sont ses usagers et ses clients, et il peut décider que par le
mécanisme d'Hydro-Québec on fait un interfinancement par le biais
du prix de l'énergie.
Je suis d'accord avec vous que si on donne 13 % ça prend plus de
revenus, définitivement. C'est une société - je l'ai dit
tantôt - qui est avide de capital. Mais ça renforce le besoin.
Cette même considération-là, si le gouvernement a des
objectifs d'arriver à se donner un rendement sur son avoir propre de 11
% ou même de
13 %, ce qui ne serait pas nécessairement déraisonnable en
soi, si on compare ça au rendement que d'autres actionnaires prives se
voient octroyer par des régies, bien, on se dit: Une régie
pourrait décider, mais je pense que c'est une zone où le
gouvernement, dans le pouvoir de directive, pourrait émettre une
directive et dire: Mon rendement pour les prochaines années serait de
l'ordre de 11 %. Mais ça, c'est indépendant du fait qu'il y ait
une régie ou non.
Ça peut être une directive, ça. Moi, je vis à
l'intérieur d'une entreprise où un gouvernement a pris une
directive en ce qui a trait au rendement. Je peux m'en servir comme exemple.
À Téléglobe Canada, au moment de la privatisation, on a
dit: Pour cinq ans, le taux de rendement va être fixé en relation
avec des taux de rendement, disons, reliés à ce moment-là
à la compagnie B.C. Tel et Bell Canada. On a fait des moyennes. On a mis
une prime. C'est fixé pour cinq ans. C'est une décision d'un
gouvernement de donner un taux de rendement permissible.
Mme Bacon: Vous n'avez pas peur, M. Bellemare, que si le
gouvernement donne de telles directives on enlève l'indépendance
de la régie, à ce moment-là, dans la fixation des taux,
des tarifs?
M. Bellemare: Oui. Ça enlève l'indépendance
de la régie sur un aspect particulier. Mais, étant donné
qu'on s'en va. De toute façon, vous l'avez Indiqué
vous-même, c'est 6 % présentement, le gouvernement a des objectifs
de monter ça à 11 %. Il n'y a rien qui nous dit qu'un
gouvernement ultérieur ne monterait pas ça à 13 % ou
à 15 % dépendant des circonstances. Ça renforce le besoin
d'avoir un contrôle sur l'ensemble des opérations
d'Hydro-Québec parce que, si on a besoin d'augmenter les prix, il va y
avoir des effets de l'augmentation de prix sur la consommation ou sur le reste,
les autres aspects de la gestion de l'entreprise.
M. Cao: Je voudrais donner un complément de réponse
à la réponse de M. Bellemare. On a déjà vu le
rendement sur le capital, sur les fonds propres d'Hydro-Québec, de plus
de 14 %. Donc, la variation du taux fait peur à la communauté
financière, plutôt que d'avoir un taux stable. Selon moi, cet
aspect de la réglementation permettra plutôt d'avoir une
orientation plus stable du taux de rendement qui est important.
Mme Bacon: D'accord. Parmi les risques inhérents à
l'implantation d'une régie québécoise responsable de
l'électricité, vous soulignez, dans votre mémoire, les
modes de nomination des régisseurs et la lourdeur administrative. Est-ce
qu'il vous serait possible de nous indiquer ce qui en est dans les autres
provinces, ce que vous avez regardé dans les différentes
provinces du
Canada où il y a des régies? Est-ce qu'on vous dit qu'il y
a des lourdeurs? Est-ce qu'on vous a indiqué que le mode de nomination,
par exemple, n'est pas adéquat?
M. Bellemare: Écoutez, dans ma carrière de
régisseur, j'ai été très actif dans l'Association
canadienne des régisseurs et dans l'association américaine aussi,
dans NARUC, et je dois avouer qu'il y a beaucoup de variation dans ces
processus. Ça va se répartir de la nomination de
régisseurs avec des termes à vie, dans certaines régies,
à des élections de régisseurs au suffrage universel, dans
certains États américains. Ce qui est important pour nous, si on
envisage la création d'une régie pour réglementer
HydroQuébec au Québec, c'est l'indépendance de ces
régisseurs dans l'exécution de leurs tâches devant le
pouvoir politique. On ne veut pas dire que le gouvernement ne devrait pas avoir
un droit de regard sur certains aspects, notamment, peut-être, la
fixation de ses exigences de rendement ou des grandes politiques. Mais,
à l'intérieur de ce cadre-là, il y a toute une panoplie de
choses qui doivent être regardées par un organisme de
réglementation et où les régisseurs sont placés
dans la position de ne pas faire plaisir à tout le monde. Et là,
ça prend un certaine indépendance.
Le processus de nomination, disons les nominations soit par le cabinet
d'un ministre ou carrément le cabinet du premier ministre, ce qui semble
être le cas qu'on vit Ici, ça n'assure pas... Parce que le
problème auquel on tait face avec la réglementation
d'Hydro-Québec, c'est un problème de confiance publique, c'est un
problème de crédibilité. Présentement, la
population n'a pas confiance parce qu'elle n'a pas confiance que les
mécanismes en place... Malgré tout le respect qu'on doit aux
commissions parlementaires, malgré tout ça, c'est un
problème de crédibilité et de confiance.
Pour pallier à ça, si on crée une régie
bidon, on n'aura pas atteint cet objectif-là. On est mieux de ne pas en
créer, à ce moment-là, et de garder le processus qu'on a
actuellement. Si on en crée une, il faut la créer forte, il faut
la créer assez forte pour donner place à l'excellence, pour
favoriser l'excellence et non pas pour favoriser la médiocrité.
Dans ce sens-là, nous - et je pense que dans notre mémoire on le
souligne - on dit: II faudrait que ce soit, par exemple, l'objet d'un large
consensus. Peut-être que les candidats devraient passer des entrevues ou
passer devant un "board" de législateurs, de membres du gouvernement,
mais aussi peut-être d'autres constituantes de la société
québécoise pour assurer une certaine force à un organisme
comme celui-là, mais aussi son indépendance. On ne
préconise pas nécessairement des termes à vie; on ne pense
pas que ce soit nécessairement le cas. Mais si on prend tous les
autres... Même vous autres, les politiciens, qui passez par le
processus régulier de l'évaluation et du choix par vos
électeurs, vous avez des comptes à rendre à des gens.
Présentement, ce qui manque dans le processus, c'est
qu'Hydro-Québec n'a pas de compte à rendre. Elle vient ici en
commission parlementaire, mais elle ne rend pas des comptes. Elle vient
s'expliquer, elle vient exposer ses choses, mais elle ne rend pas des comptes
à la population de façon satisfaisante. Moi, je fais la
distinction, par exemple, entre une ordonnance de régie et le genre de
décision qu'on a vue récemment dans le cas de la hausse tarifaire
d'Hydro-Québec où c'est finalement Mme la ministre qui a fait
part d'une décision, disons, en conférence de presse. La
population ne perçoit pas ça de la même façon. Et
moi, le problème que j'ai et que je perçois alentour de moi et ce
qu'on me dit, ce qu'on me force à faire, en fait, c'est le reflet d'un
manque de satisfaction vis-à-vis de ce processus-là.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Beauce-Nord. (20 h 45)
M. Audet: Merci, M. le Président. Dans le même ordre
d'idées dont on discute au niveau des régisseurs, par exemple, et
d'un président de régie éventuelle, on suppose, vous avez
mentionné que les députés, entre autres, se soumettent
occasionnellement à un exercice pour se faire réévaluer,
d'une certaine façon. On le fait, par exemple, avec un programme et des
objectifs qu'on transmet à nos électeurs. Est-ce qu'un
président de régie, à ce moment-là, ou un
régisseur... S!, pour le choix des régisseurs, on avait à
rencontrer un comité de sélection qui soit à moitié
public, à moitié gouvernement... Si demain matin on arrive avec
un régisseur qui a des objectifs de développement d'Hydro,
pensez-vous que... Je ne sais pas à quel point c'est pertinent. Je pense
que ça ne règle pas grand-chose. À un moment donné,
on pourrait avoir une régie qui aurait été élue
pour développer davantage Hydro-Québec. Quand le mandat de cette
régie sera fini, l'autre pourra dire: Nous, on se fait élire en
disant qu'on va freiner le développement d'Hydro-Québec. On va
favoriser plutôt le développement... Ça devient un peu une
petite guerre, de sorte qu'Hydro-Québec se retrouverait peut-être
un peu à la merci des changements de la régie. Vous ne croyez pas
ça, non?
M. Bellemare: Non. En fait, disons que si on poussait à
l'extrême... Il y a certains États, aux États-Unis,
où les régisseurs doivent faire campagne directement
auprès de la population pour se faire élire. C'est quelque chose
qui se fait. Dans le cas que vous mentionnez, c'est le régisseur qui
passe devant un comité de sélection et qui doit plaider. Mais
c'est quand même la nomination, et on le teste... Ça se fait
couram- ment, aux États-Unis. Par exemple, avant de nommer un
président de la FCC, Federal Communications Commission, aux
États-Unis, là nomination doit être entérinée
par un comité de sénateurs et de représentants du
Congrès. Ce qu'on fait, c'est qu'on teste, on sonde la philosophie, la
crédibilité. C'est un processus qui est plus rigoureux que
simplement nommer quelqu'un pour remplir un poste parce qu'on a un poste libre
et quelqu'un à placer. Dans ce cas-là, ça devient un
processus plus rigoureux. Ce n'est pas le processus parfait. Il n'y en pas, de
processus parfait, dans ce domaine-là. On peut quand même arriver
à des mauvaises nominations, à un certain point. Mais il faut
sonder. Tout ce que vous avez mentionné comme, par exemple, la
philosophie envers le développement: Est-ce qu'elle est compatible avec
les vues gouvernementales? Parce que le gouvernement n'est pas
complètement absent du processus, même s'il y a une régie.
C'est lui-même qui doit définir les objectifs, dans le cadre de la
loi. Ce n'est pas non plus une loi bidon qu'on veut. C'est une loi où
les objectifs sont définis dans la loi même.
J'ai vécu le cas de la modification de la loi de l'ancienne
Régie des services publics, où on a créé la loi qui
établissait la Régie des télécommunications.
À l'intérieur de cette loi, le gouvernement a établi des
balises de comportement pour cette Régie-là. Quand on nomme un
président à l'intérieur d'une régie comme
celle-là, on s'assure, d'abord, qu'il comprend. On s'assure que la
personne est au moins assez compétente pour savoir de quoi elle parle et
qu'elle ait une certaine vision de la façon qu'elle va pouvoir implanter
les objectifs qui sont fixés par le gouvernement à
l'intérieur de la loi de la régie.
M. Audet: Présentement, il existe la loi sur
Hydro-Québec, qui dit entre autres que la société doit
fournir à la ministre, par exemple, tout renseignement qu'elle souhaite
ou qu'elle requiert sur ses activités ou celles de ses filiales.
Je voudrais, pour continuer dans le même ordre d'idées...
Vous indiquez à la page 15 de votre mémoire que la
création d'une régie indépendante entraînerait fort
certainement des gains de productivité, grâce à un
contrôle plus serré des coûts de fourniture du service et
des modes de gestion de l'entreprise. J'ai de la misère à
concevoir qu'une régie, au niveau d'une gestion, puisse dire a une
société d'améliorer, de gérer d'une façon
plus serrée ses coûts de fourniture de service, tout ça...
Au niveau de l'intervention de la gestion de l'entreprise pour améliorer
la productivité, ce qui est un des éléments les plus
importants au niveau de la gestion comme telle, comment une régie
peut-elle intervenir dans une société comme Hydro-Québec
pour améliorer la productivité et que ce soit efficace?
M. Bellemare: Mon cher monsieur, vous
seriez surpris. Là, je pense qu'on peut parler avec
expérience. J'ai vécu une bonne partie de ma carrière
professionnelle à l'intérieur d'industries
réglementées. Je vis couramment une situation d'une industrie qui
était une société de la couronne et qui est devenue
réglementée, à un moment donné. Vous resteriez
surpris de voir le potentiel et la capacité d'un organisme de
régulation économique qui ne se contente pas de questions d'ordre
général, mais qui va dans le détail du fonctionnement et
qui formule des questions précises sur des objets précis. En
fait, ça force la gestion de l'entreprise à s'autocriti-quer et,
dans le fond, à adapter son mode de gestion aux besoins de satisfaire
les exigences réglementaires qui sont des exigences raisonnables. Un
organisme de réglementation de cette nature juge sur le caractère
raisonnable des choses, en fait. Si les gestionnaires n'ont rien à
défendre, n'ont rien à dire à qui que ce soit, de
façon détaillée, il n'y a pas de possibilité
d'améliorer la productivité. Mais il y a une espèce de
gain inhérent, qui résulte du seul fait, comme gestionnaire d'une
entreprise de services publics monopolisés, d'avoir à expliquer
et à motiver ses décisions sur certains aspects, que ce soit sur
la tarification, que ce soit dans l'opération.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député de Beauce-Nord, je sais que vous aviez une autre question.
Malheureusement, le temps est écoulé. M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous souhaiter la bienvenue devant la commission. J'ai lu attentivement votre
mémoire, enfin, les différents exemples que vous donnez, et je
suis resté un peu sur mon appétit, disons. D'abord, vous dites,
en page 2 de votre mémoire, que votre mouvement, MIREQ - et vous dites
en mettant des virgules - "...en voie de formation, est voué à
l'objectif de promouvoir la réglementation socio-économique
d'Hydro-Québec par un tribunal administratif indépendant".
D'abord, est-ce que c'est un groupe qui est en voie de formation ou est-ce que
vous existez vraiment? Et vous dites que votre groupe est "voué à
la réglementation socio-économique d'Hydro-Québec".
Ça présuppose un mandat de quelqu'un quelque part, non?
M. Bellemare: Pour répondre à votre première
question - je pense que je l'ai mentionné dans l'introduction,
tantôt - c'est que le Mouvement, au moment où on a soumis le
mémoire, était en voie de formation. On a effectivement obtenu
des lettres patentes pour donner une consistance juridique au Mouvement. On a
des lettres patentes. Présentement, on est en train de constituer le
Mouvement, de lui donner un corps et un esprit. La philosophie du Mouvement est
énoncée ici, mais ce Mouvement- là, si on l'a
créé, c'est qu'on est... Écoutez, on vit dans une
société... C'est plein de gens qui nous entourent et avec qui on
a échangé sur ces points de vue là, y inclus même
les employés d'Hydro-Québec, à certaines occasions. Et on
est parfaitement conscients que... Et on a développé nos
convictions personnelles. Moi, ça fait des années que je suis
l'évolution... Je suis un abonné d Hydro-Presse depuis
plus de 10 ans, peut-être 15 ans. Comme tous les citoyens, je suis
révolution, je regarde ce qui se passe avec Hydro-Québec. Je vous
parle avec mon coeur et mes tripes; ce n'est pas comme technicien que je vous
parle de réglementation, c'est comme citoyen et abonné
d'Hydro-Québec.
Partout, alentour de moi... Moi, j'ai 9 personnes sur 10 qui me disent,
quand je leur explique le sens de la réglementation et ce que je fais,
quand je leur dis comment ça se passe avec Hydro-Québec... Je
n'ai rencontré personne qui ne m'ait dit: Pourquoi tu ne t'en occupes
pas? Toi, t'en connais un peu plus que les autres, dans ce domaine-là.
Pourquoi ne prends-tu pas les devants? Là, on est en train de constituer
un mouvement, parce qu'on a eu des contacts. Il y a d'autres mouvements. Il y
en a parmi ceux-là qui sont des mouvements qui ont comparu devant vous,
aussi. On a eu des contacts avec eux. Et naturellement, eux, ils ont des
objectifs plus englobants. Nous, on s'est dit qu'on était voués
à l'objectif de promouvoir la réglementation
socio-économique d'Hydro-Québec, parce qu'on est plus pointus. On
s'oriente précisément vers ça. Parce qu'il y a des groupes
qui préconisent une commission d'enquête, qui disent qu'il devrait
y avoir une commission itinérante, une affaire ponctuelle, quelque chose
qu'on fait une fois et qui fait des recommandations que, peut-être, on
oublie; une fois le processus établi, il n'y a plus rien qui survit.
Nous, on a une approche plus permanente, plus... On vise l'établissement
de quelque chose qui est plus continu et permanent, qui est un tribunal
administratif compétent. Alors, c'est pour ça qu'on dit qu'on est
voués à ça.
M. Claveau: O.K., c'est un mandat que vous vous êtes
donné comme corporation...
M. Bellemare: C'est ça, au départ. La vocation
même de cette corporation-là... Comme je l'ai dit au début,
quand j'ai précisé nos objectifs - je les ai lus, on pourra vous
les recommuniquer - on fait ça dans un contexte d'éducation
populaire et de solidarité socio-économique, en fait, pour les
abonnés d'électricité du Québec. Et la raison pour
laquelle on le fait, c'est qu'on se rend compte, dans notre entourage ou avec
les gens avec qui on a eu des contacts, que plus on explique ce qui se passe -
parce que les gens n'en sont pas conscients - et qu'on explique aussi comment
ça peut se passer ailleurs ou comment ça se passe
effectivement ailleurs, les gens disent: Pourquoi? Ils ne sont pas au
courant. Alors là, ils découvrent. Et plus les gens sont
informés, plus il y a une espèce de jugement
général à l'effet que ce n'est pas acceptable. On ne peut
pas continuer comme ça. En fait, d'après nous et d'après
les gens qui nous poussent à créer un mouvement, ça
explique peut-être ce qu'on vit avec Hydro, présentement: une
mauvaise image. Je pense qu'Hydro dit elle-même: On a peut-être un
bon plan mais on ne l'a peut-être pas vendu. Nous, on dit: II faut faire
plus que le vendre, ce plan. Il faut convaincre qu'il n'y a pas d'autre voie,
que c'est la chose à faire, en fait.
M. Claveau: En page trois de votre mémoire... D'abord,
vous savez, je pense que lorsqu'on affirme quelque chose devant une instance
publique comme une commission parlementaire, c'est parce qu'on est capable de
la défendre ou, du moins, il y a un passé, il y a quelque chose
qui nous permet de l'affirmer. Vous dites, à la fin de la page 3: "En
toute logique, et à moins qu'Hydro-Québec puisse se faire
contre-interroger par des experts dans les divers domaines d'expertise, il est
fort peu probable - une affirmation, donc - que la commission puisse arriver
à des conclusions vraiment différentes de celles de la
société d'État." J'aimerais savoir sur quoi vous pouvez
vous baser pour affirmer que, finalement, les membres de la commission ne sont
pas capables de se faire une Idée qui soit différente de celle de
la société d'État à moins de passer par toute un
kyrielle d'experts qui viendraient interroger la société
d'État. Je veux bien croire, on n'est pas tous des experts, mais on est
quand même capables de raisonner, à l'occasion. Sur quoi vous
basez-vous pour dire qu'on ne peut pas se faire une idée autre que celle
d'Hydro-Québec?
M. Cao: Je prends l'exemple de la prévision de la demande.
Sur quelle base cette commission va-t-elle juger de la raisonnabilité
des 2 %, des 2,5 % ou du 1 %? Sur quelle base cette commission va-t-elle juger
que ce plan-là est fait au moindre coût? Est-ce qu'il y a eu des
analyses des variantes que vous avez pu observer, que vous avez pu analyser? Y
a-t-il des informations quantifiées concernant la faisabilité
économique des économies d'énergie que vous avez pu voir?
Pour nous, les informations qui nous sont disponibles ne nous permettent pas de
conclure que cette commission aura un point de vue divergent de celui de la
société d'État, en ce qui concerne le fond de son plan de
développement, c'est-à-dire le développement de Grande
Baleine et NBR.
M. Claveau: Le but de la commission, justement, c'est de prendre
les informations, de permettre, finalement, d'avoir la vision de tout le monde.
À partir de là, le gouvernement fera son lit, finalement, et
j'espère qu'il donnera suite d'une façon très
compétente. Mais il reste que, sans qu'il y ait nécessairement
une contre-interrogation serrée, publique de la part d'experts, etc., il
y a une démarche derrière la commission parlementaire. Il ne faut
quand même pas croire que tout se fait dans les airs, juste avec le beau
sourire, ce qui se passe ici devant la commission. Il y a une démarche,
il y a une structure qui sous-tend ces activités-là, que ce soit
au niveau du ministère au autrement. Alors, à ce
moment-là, moi, en tout cas, je trouve que votre affirmation est
peut-être un petit peu disproportionnée, en fonction des travaux
réels ou du mandat réel de la commission, actuellement. La
commission n'est pas là pour se faire des idées
définitives ou fondamentales, elle est là justement pour prendre
connaissance des opinions de tout le monde. À partir de là,
chacun verra à prendre les moyens pour aller de l'avant. Mais ça,
ça ne veut pas dire, au départ, qu'on endosse et qu'on ne fera
qu'endosser ce qu'Hydro-Québec dit.
M. Cao: Nous, ce qu'on dit dans notre phrase, ici, c'est que le
processus réglementaire permettrait aux entrepreneurs de
contre-interroger la principale partie qui demande, c'est-à-dire
Hydro-Québec, dans les divers domaines d'expertise. Sans cette mise en
preuve, sans cette contre-expertise, la commission parlementaire n'aura qu'une
vue - c'est ce que nous disons dans cette phrase-là - et n'aura pas de
point de vue pour savoir si les réponses d'Hydro-Québec, sous
différents points, sont raisonnables ou non.
M. Claveau: Est-ce que, dans le texte, vous parlez de la
commission qui se tient actuellement, la consultation publique que l'on tient
pour avoir les opinions de tout le monde, ou si vous parlez de la commission
parlementaire sur la tarification qui, finalement, débouche sur
l'autorisation du Conseil des ministres d'aller de l'avant ou de modifier la
proposition tarifaire d'Hydro-Québec?
M. Cao: Ici, nous parlons de la commission de l'économie
et du travail.
M. Claveau: Celle-ci, là? M. Cao: Celle-ci.
M. Claveau: Au moment où on se parle? O.K. (21 heures)
M. Bellemare: Moi, j'aimerais rajouter quelque chose dans cette
veine-là, dans la veine de ce que vous amenez. À Québec,
on fait notre démarche dans le cadre le plus respecteux, d'abord, de
l'existence de cette commission, ici. On ne s'en prend pas à la
capacité des députés
de juger de certaines choses ou non. Pour moi, le problème se
situe au niveau de l'ampleur de l'outil, ou du degré de pertinence de
l'outil qu'on utilise. Alors, présentement, vous essayez d'arriver, en
tant que commission, à vous formuler une idée ou à
recommander au gouvernement de faire son lit, comme vous le dites, sur des
objets très précis qui concernent l'avenir
énergétique ou l'avenir de l'hydroélectricité au
Québec. Vous le faites à travers ce qui vient se dire ici, par
les différentes parties, à travers les différents
mémoires. On a pris connaissance de certains de ceux-là, mais
nous, on n'est pas consacrés à temps plein à la
tâche d'analyser tout ce qui s'est passé ici. On a peine et
misère, dans le cadre actuel, à se concentrer sur notre propre
mémoire et à venir ici, ce soir. On est quand même
limités, là. Mais ce que ça traduit, c'est que
présentement, d'abord, il y a de la confusion. Les gens ne savent pas
que c'est deux commissions parlementaires vraiment différentes. On sait
à peine qu'il y en a eu une autre. En fait, j'ai agi comme le public, le
public qui me côtoie. Une commission parlementaire, on ne sait pas
vraiment ce que c'est. Le public en général... Le chauffeur de
taxi à qui je parle de ça, lui, il ne sait pas ce que c'est. Il
ne sait pas qu'il y a une distinction et il ne met pas le jugement de son
député en doute, mais II dit: Si j'ai des travaux de menuiserie
à faire chez moi, et le gars qui m'arrive avec son coffre d'outils, il
m'arrive avec des outils de plomberie, est-ce que je vais avoir confiance, au
départ? C'est le choix de l'outil. On est au niveau du processus. Alors,
on ne dit pas que la commission parlementaire n'est pas correcte et
dénuée de jugement. Au contraire, on respecte le jugement des
députés, mais on dit: Est-ce qu'on a le bon outil, au bon
degré de raffinement, pour faire la "job"? Autrement dit: Est-ce qu'on a
confiance à celui qui arrive avec les outils? Nous, on dit. Une
commission parlementaire... On vit à l'intérieur d'organismes de
réglementation, on a vécu et on vit à l'intérieur
d'entreprises réglementées. On sait que ce n'est pas ça.
On sait que c'est beaucoup plus raffiné que ça. Des outils de
menuiserie raffinés. Alors, le plombier avec ses gros outils, il fait
des gros ouvrages. Et qu'est-ce qu'on dit? La commission parlementaire, en
fait, c'est un autre ordre. Même dans ce cadre-là on pourrait
ajouter: On trouve que la plus pertinente des interventions, c'est
peut-être le genre d'interventions que l'on fait, où on s'attaque
au processus, que ce soit cette commission ou la précédente. On
ne nous a pas admis à la précédente, de toute
façon. À laquelle on va aller, là? On ne nous donne pas la
permission de venir. On serait venus avant. On serait peut-être venus
avec un petit peu moins de documents, mais on serait venus quand même
dire la même chose. Nos convictions se sont développées, au
cours des dernières années. Elles ne sont pas spontanées.
On a décidé de passer à l'action maintenant. Nos
convictions, elles existaient. On serait venus dire quoi, à l'autre? On
serait venus dire la même chose. Il n'y a pas de distinction. Ce serait
peut-être des députés différents, peut-être
une présidence... Non, je pense que c'était la même
présidence, mais il reste que c'est ça, notre situation. C'est la
situation du public. Il ne le sait pas, lui, le public; nous-mêmes, on a
de la misère à se reconnaître, dans la désignation.
Mol-même, ça m'a pris du temps à savoir que c'était
l'économie et le travail qui m'entendrait, le 29 mai. Et je ne suis pas
le dernier venu, là-dedans. Je ne me pète pas les bretelles avec
ce que je suis. Je veux être assez humble là-dessus, il reste que
je ne suis pas le dernier venu, imaginez le chauffeur de taxi et le plombier
chez nous, mon laitier, mon fournisseur, mon nettoyeur et, en fait, le public
desservi, en général...
M. Claveau: C'est simplement pour vous dire que, de toute
façon, les consultations publiques, il s'en fait sur toutes sortes de
sujets à l'année longue et, finalement, il y a aussi plein de
gens, je suppose, qui doivent en avoir entendu parler antérieurement.
D'un autre côté, juste à titre de réflexion, je ne
suis pas non plus convaincu que tout le monde sait, dans le public, ce que
c'est qu'une régie et comment ça fonctionne...
M. Bellemare: Vous avez raison là-dessus, je vais vous
donner raison. Mais il y a une chose. C'est que moi, j'ai
siégé... Je fais juste rajouter sur ce point-là. C'est
qu'une régie pourrait être itinérante, ce qu'une commission
parlementaire, probablement, peut difficilement être. Je sais que vous
contrôlez vos procédures, mais c'est assez difficile et
impressionnant pour le public, en général, de venir devant une
commission parlementaire. Une régie du type de celles dans lesquelles
j'ai vécu est itinérante par nature, par vocation et par
obligation. Donc, elle peut se déplacer, et aller chercher le pouls de
la population et chercher à connaître les problèmes, soit
les problèmes de service, de productivité ou de quoi que ce soit,
auprès de la clientèle.
M. Claveau: Puisqu'on est rendus sur la régie, disons
d'abord, à moins que je ne m'abuse, qu'une régie, ce genre de
tribunal administratif, ce n'est pas nécessairement elfe qui fixe les
règles du jeu. La réglementation, la loi constituante, les
modalités de nomination des membres, etc., c'est déjà
fixé par le gouvernement, au départ.
M. B«llemare: Oui.
M. Claveau: Donc, en grande partie du moins, sa raison
d'être, c'est de s'assurer que la réglementation fixée, que
les modalités qui sont déterminées, le cadre
opérationnel déterminé par la loi, enfin, que la
réglementation gouvernemen-
tale soit respectée. Donc, jusque-là, on n'a rien
ajouté de nouveau au contrôle ou, enfin, aux normes que le
gouvernement doit appliquer envers Hydro-Québec.
En page 7 de votre mémoire, où vous nous donnez les
différents "boards", les différentes régies qui
régissent l'ensemble des opérations des entreprises semblables
à Hydro-Québec, on remarque: "Hydro-Québec, cabinet des
ministres." Moi, il y a une chose qui m'a frappé tout de suite, en
voyant ça. Quand vous nous avez parlé, tout à l'heure, de
justifier la régie ou un tribunal administratif de cet ordre-là,
vous nous avez parlé de contrôle de tarification, de
paramètres économiques à l'intérieur de la
société et d'un certain nombre de choses. Or, si je regarde
ça en comparaison avec ce qu'on a partout ailleurs... Côté
tarification, malgré certains problèmes, on a quand même la
plus basse, ou à peu près, en Amérique du Nord; donc, ce
n'est pas si mauvais comme contrôle. Côté paramètres
financiers de la société d'État, elle est aussi parmi les
meilleures des utilités publiques du même genre à travers
l'Amérique du Nord: taux de recouvrement des intérêts, taux
de capitalisation, taux de rendement, enfin, taux d'investissement, etc. On l'a
vu et on l'a discuté ici. Certains experts sont venus nous
démontrer que c'était tout à fait correct et tout à
fait acceptable. Les banques sont venues nous dire que la cote de crédit
d'Hydro-Québec est extraordinaire, sur le plan international, etc.
Lorsqu'on a dit tout ça, finalement, en quoi les
intérêts de la société d'État,
Hydro-Québec comme telle, et les intérêts du client, avec
la tarification à peu près la plus basse de toute
l'Amérique du Nord, pourraient-ils être mieux
protégés par une régie indépendante que par le
cabinet des ministres, finalement, qui ne semble pas avoir fait trop mal sa
"job", malgré tout, d'année en année?
M. Bellemare: En fait, là, on parie du passé et
peut-être un peu du présent. Je dois avouer que le
phénomène auquel nous assistons est le phénomène de
dégradation, qui se fait petit à petit, qui s'est fait petit
à petit. Vous êtes des députés; vous avez des
comtés. Je ne sais pas quelles sont vos antennes. On va certainement
aller voir ça à fond, au cours des prochaines années. En
tout cas, avec notre mouvement, on va certainement le faire.
Je ne dis pas qu'il ne s'est pas fait de régulation du tout. Ce
que je dis, c'est qu'on est orientés vers l'avenir. L'expérience
des dernières années, des deux ou trois dernières
années - je pense qu'on ne serait peut-être pas venus ici il y a
cinq ans... Ce qui nous amène ici, maintenant, c'est que le climat de
dégradation des dernières années - et ce n'est pas
causé juste par le conflit de travail à Hydro-Québec,
c'est un climat général - l'évolution, c'est ça qui
inquiète les gens, présentement. Le plan de développement
d'Hydro-Québec... Et j'ai donné les ordres de grandeur, à
la fin de mon exposé, tantôt, et ce n'est pas pour rien que je les
ai donnés. Quand Mme la ministre dit que le gouvernement pourrait
peut-être avoir des objectifs de 11 % de rendement ou peut-être
même de 13 %, éventuellement, sur l'avoir propre, ça va
causer des besoins, qui vont être des pressions à la hausse sur le
prix des...
Vous me dites que, présentement, on est les meilleurs ou que
notre cote a été... C'est la cote perçue actuellement par
les financiers. Moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'avec le système
actuel on peut laisser aller ça comme ça, avec des vues de deux
ans lorsqu'on approuve les tarifs. Mais moi, ce qui m'inquiète, c'est:
Où est-ce qu'on sera, dans cinq ans ou dans six ans, en acceptant de
procéder dans le cheminement qu'on a présentement?
Si on laisse un programme de 60 000 000 000 $... Situez les ordres de
grandeurs. J'ai dit: Les besoins de revenus vont être de 12 000 000 000 $
à 15 000 000 000 $, si on s'engage dans cette voie-là. Est-ce que
ça va donner un encadrement de prix qui va être compatible avec la
capacité des clients d'Hydro-Québec? Est-ce qu'on ne serait pas
en train de défaire la raison première pour laquelle on a
rebâti les infrastructures au coût de 60 000 000 000 $? Il y a un
phénomène d'itération, et ces ajustements se font de
façon graduelle. Et c'est ça qu'une régie peut faire de
plus, peut-être. Une régie, c'est un outil
spécialisé. C'est les petits outils raffinés de mon
menuisier de tantôt, par rapport aux gros outils du plombier. C'est
qu'une régie, par rapport à vous, n'est pas non plus
dénuée de jugement, mais elle est peut-être plus
équipée. Elle a une tâche permanente, elle se ressource en
fonction d'exiger, peut-être, dans la façon de présenter
les données de la part d'un organisme comme Hydro-Québec, un
niveau de détail qui fait qu'on n'exclura pas certaines
considérations. Moi, j'aimerais bien voir le profil d'évolution
des prix d'Hydro-Québec - ça rime avec le plan d'immobilisations
d'Hydro-Québec - pour voir si ça a un caractère
raisonnable. C'est là-dessus que j'aimerais être rassuré.
Et ça, je ne suis pas sûr que vous avez eu ça, ici... En
tout cas, pas dans ce que j'ai vu, pas dans ce que j'en ai perçu. Mais
moi, je le perçois et je le vois comme les gens qui m'entourent. Je ne
suis pas venu m'asseoir ici pour assister à toutes les
délibérations de la commission parlementaire depuis le 8 mai, ou
même de la précédente, où Hydro-Québec
était ici en train de justifier sa tarification de façon
complètement isolée, indépendante, où on
n'admettait pas les groupes.
C'est ça qui nous inquiète. Ce n'est pas le fait que... Le
financier, présentement, nous dit: C'est beau, vous avez une bonne cote
financière. Nous, ce qui nous intéresse, c'est la cote d'amour
des Québécois pour sa compagnie de
fourniture d'électricité, Hydro-Québec, dans cinq
ans. C'est ça qui nous importe. Et si on arrive l'année
prochaine, puis l'année d'après, puis l'année
d'après avec des augmentations de tarifs, morceau par morceau,
année après année, de façon cumulative, des 7 %
puis des 8 % puis des 10 % par année... Parce que pour rencontrer des
besoins de revenus de 10 000 000 000 $ à 15 000 000 000 $ dans sept
à huit ans, il va falloir que l'argent se prenne quelque part. Rien ne
se perd, rien ne se crée, dans ce domaine-là. Ça, c'est
une loi fondamentale que j'ai apprise dans ma carrière. Quand le
béton est coulé et que l'argent est dépensé, les
obligations financières suivent. Si on investit au Québec 60 000
000 000 $ dans... Et ça, c'est dans le scénario moyen. Il n'y a
rien qui nous dit que ce ne sera pas 70 000 000 000 $; ça pourrait
être 70 000 000 000 $, ou un petit peu moins.
Alors, ça, c'est le genre de préoccupation qu'on a. C'est
prospectif. Ce n'est pas comme vous le dites, que les gens sont venus vous dire
que ça va bien, présentement. Je dirais que la perception qu'on
a, nous, qui nous amène à passer à l'action, c'est que
ça ne va peut-être pas aussi bien que ça allait il y a
quelques années, de façon générale, En tout cas,
assez pour qu'on le sente. Mais on ne le sent pas au niveau des informations
techniques. On le sent de façon générale par ce qu'on se
fait dire, par ce qu'on prend à gauche, par ce qu'on prend à
droite. C'est un problème d'image et de confiance. On est venus ici sur
la base d'un problème de crédibilité. Ce qu'on propose,
c'est une solution qui est un palliatif, qui est un correctif pour une
situation de confiance.
M. Claveau: Alors, on me dit que le temps est
écoulé. Je vous remercie pour votre présentation qui est,
somme toute, très intéressante et qui nous permet de voir que
certaines articulations plus techniques, comme celles que vous nous avez
exposées... Il reste, à la limite de tout ça,
probablement, qu'un des grands problèmes qui régissent
actuellement les relations entre HydroQuébec et la société
québécoise, c'est un problème de choix de
société, d'orientation sociale et, en ce qui me concerne, je ne
suis pas convaincu que ce soit à un tribunal administratif de trancher
les choix de société. Merci de votre présentation.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le
député d'Ungava. Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, M. Bellemare, M. Cao et M. Stuart, on vous
remercie beaucoup de votre présence et d'être venus rencontrer les
membres de la commission parlementaire. Je pense que chaque prestation est un
ajout important à notre réflexion qui se poursuivra après
la commission parlementaire pour arriver avec des recommandations bien
spécifiques. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie le Mouvement pour l'instauration de la
réglementation de l'électricité au Québec et invite
à la table des témoins la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec.
Une voix: On va avoir des bons tuyaux!
Corporation des maîtres mécaniciens en
tuyauterie du Québec
Le Président (M. Bélanger): Alors, bonsoir
messieurs. Rapidement, on vous a expliqué nos règles de
procédure. Vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de
votre mémoire et, par la suite, il y aura une période
d'échanges avec les parlementaires. (21 h 15)
Si vous pouviez vous identifier et procéder à la
présentation de votre mémoire, nous vous écoutons.
M. Lavallée (Fernand): Mme la ministre, M. le
Président, MM. les membres députés, mesdames, messieurs,
mon nom est Fernand Lavallée. Je suis vice-président de la
Corporation des martres mécaniens en tuyauterie du Québec. Je
suis accompagné de M. Michel Favre, qui est directeur
général de la Corporation. J'aimerais, dans un court
préambule, présenter les membres qui forment la Corporation. Il
s'agit de 2300 entrepreneurs spécialisés, qui possèdent
une expertise depuis 40 ans dans le domaine du chauffage à eau chaude et
à air chaud, dans l'installation de la pompe à chaleur, dans
l'installation des systèmes de biénergie, dans les
systèmes de climatisation, de ventilation et de plomberie.
Dans notre court mémoire, qui se veut un mémoire de
complaisance, nous vous disons que nous sommes d'accord pour
qu'Hydro-Québec ait les moyens pour faire en sorte que son réseau
soit fiable. Les Québécois ne veulent pas de pannes, et les
pannes, de toute manière, coûtent très cher à
l'économie. Nous sommes aussi d'accord pour que la capacité de
production d'Hydro-Quebec soit augmentée pour satisfaire à la
demande existante et l'augmentation possible et prévisible de cette
demande, et aussi pour attirer de nouveaux investissements par la
présence de l'énergie électrique à des prix
compétitifs et avantageux.
Toutefois, nous avons des réserves. Nous avons deux
réserves. Alors, des mesures doivent être prises pour
éviter que l'augmentation de capacité de production ne serve
qu'à satisfaire les besoins pendant la période dite de pointe.
Ainsi, le gaspillage, à tout le moins durant cette période dite
de pointe, doit être évité. Des incitatifs sérieux
doivent amener une diminution de la demande d'électricité durant
cette période de pointe. Aussi, l'utilisation d'une source
d'énergie différente durant cette période doit
être encouragée. Les équipements de biénergie
doivent contribuer et doivent continuer d'être favorisés. À
cet effet, j'aimerais me référer à la proposition du plan
de développement qui a été déposé par
Hydro-Québec, à la page 60, qui dit ceci: "Hydro-Québec
vise ainsi le maintien du parc actuel de la biénergie, qui compte
actuellement 90 000 unités, et projette de l'augmenter jusqu'à
150 000 unités en 1992. Cette expansion se fera dans le marché
existant tout électrique et dans le nouveau marché. Les
technologies de pointe, tels la pompe à chaleur avec appoint autre
qu'électrique et le système de chauffage intégré
biénergie, aideront à réaliser cet
objectif1.
Alors, l'utilisation du gaz naturel et du pétrole devrait
être encouragée dans les secteurs qui peuvent être
facilement desservis. Dans le secteur desservi par le gaz naturel, la
concurrence entre Hydro-Québec et les distributeurs de gaz devrait
être moins importante.
La Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du
Québec est satisfaite de constater que la proposition de plan de
développement d'Hydro-Québec comporte des investissements
importants pour inciter les Québécois à des
économies d'énergie. La Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec souhaite qu'il soit
demandé à Hydro-Québec d'étudier davantage
l'opportunité de subventionner les installations et d'apporter des
tarifs très particuliers et avantageux pour des consommateurs importants
d'énergie qui accepteraient d'utiliser d'autres sources d'énergie
durant les périodes où il y a surcapacité de production et
une autre source d'énergie en période de pointe.
Il est possible pour Hydro-Québec de réaliser son plan de
développement sans augmenter son personnel, du moins, sans l'augmenter
d'une façon considérable. Hydro-Québec devrait favoriser
le plus possible l'octroi de contrats pour la réalisation de ses
travaux. En procédant ainsi, Hydro-Québec sera moins
dépendante de ses propres employés, utilisera plus
adéquatement leurs ressources et n'aura pas à rencontrer une
masse salariale trop importante en période de moindre activité.
Enfin, Hydro-Québec bénéficiera de la concurrence qui
existe entre les entrepreneurs.
Et en conclusion, Hydro-Québec doit certes avoir les moyens
financiers pour satisfaire la volonté des Québécois
d'être desservis par un réseau pratiquement à toute
épreuve. HydroQuébec doit avoir les moyens financiers pour
pouvoir continuer d'augmenter sa capacité de production, pour satisfaire
non seulement l'augmentation des besoins des consommateurs actuels, mais aussi
pour faire en sorte que le Québec continue d'être un attrait pour
les capitaux mondiaux.
Par ailleurs, des mesures incitatives à l'utilisation d'une autre
source d'énergie en période de pointe devraient être
encouragées, afin d'éviter que les investissements ne servent
qu'à augmenter la capacité de production pour satisfaire à
la demande en période de pointe. Enfin, Hydro-Québec devrait
être invitée à sous-traiter des parties importantes de ses
activités, afin que les coûts soient diminués, afin
d'éviter sa dépendance vis-à-vis de ses employés et
afin de bénéficier des bienfaits de la concurrence. Je vous
remercie et je suis prêt pour les questions.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Bacon: M. Lavallée, M. Favre, on vous remercie
d'être ici avec nous ce soir pour discuter d'un dossier important, le
dossier de l'énergie. Dans votre dossier, à la page 1, concernant
la nécessité d'avoir un réseau fiable, vous indiquez que
des moyens adéquats doivent être donnés à
Hydro-Québec pour que son réseau soit tout à fait fiable.
Quels seraient les moyens que vous considéreriez comme étant
adéquats? Et selon vous, qu'est-ce que c'est, un réseau tout
à fait fiable?
M. Lavallée: Selon moi, Mme la ministre, je crois que
l'outil indispensable pour qu'Hydro-Québec puisse maintenir son
réseau d'une façon fiable, c'est d'avoir les sommes d'argent
nécessaires pour pallier aux réseaux qui sont actuellement
surchargés. Dans des régions de la ville de Montréal, ou
soit qu'il y a des stations de transformateurs qui sont présentement
surchargées. Hydro-Québec n'a pas tout à fait les moyens
pour procéder au remplacement dans des courts délais, elle
procède par urgence. Donc, si Hydro-Québec avait une plus large
façon de financer ces projets-là, en allant par appels publics,
en encourageant des entrepreneurs, je crois que ce serait une façon de
rendre le réseau plus fiable et plus efficace.
Mme Bacon: Vous appuyez aussi la biénergie...
M. Lavallée: En effet.
Mme Bacon: ...comme mesure pour diminuer la demande de pointe.
Pourquoi privilégiez-vous la biénergie par rapport à
d'autres moyens, d'autres mesures?
M. Lavallée: Je ne vous cacherai pas que notre corporation
regroupe 2300 membres qui sont tous des entrepreneurs, des gens qui travaillent
dans ce domaine-là. Nous avons une expertise qui est là depuis 40
ans et nous avons le potentiel, la capacité d'aider Hydro-Québec
à délester sa pointe. Présentement, on sait que les
quelque 300 heures de pointe annuelles coûtent au-delà de 9 ou 10
fois plus que ce qu'Hydro-Québec vend aujourd'hui son kilowattheure.
Alors, si Hydro-Québec, avec la méthode que l'on
préconise, la biénergie, vient à bout de délester
son réseau pendant les heures de pointe, nous croyons que c'est une
façon adéquate et intelligente d'y arriver.
Mme Bacon: Est-ce que vos membres sont situés à
travers la province? Vous en avez dans toutes les régions...
M. Lavallée: Dans toutes les régions de la province
de Québec.
Mme Bacon: ...qui pourraient, justement, travailler au niveau de
la biénergie dans toutes les régions.
M. Lavallée: En effet, Mme la ministre.
Mme Bacon: Est-ce que ça se situerait davantage, la
biénergie, comme mesure, au niveau industriel qu'au niveau
résidentiel? Est-ce que vos membres trouvent plus adéquat de
l'installer dans les industries que dans les résidences, par
exemple?
M. Lavallée: La grande majorité de nos membres se
spécialise au niveau résidentiel, Mme la ministre. Il y a
peut-être 10 % de nos membres qui oeuvrent uniquement dans le domaine de
l'industrie ou qui sont également capables de répondre à
cette demande. Mais je vous dirai que la majorité de nos membres est
spécialisée dans le domaine résidentiel.
Mme Bacon: Résidentiel.
M. Lavallée: Quand on dit résidentiel, on peut
également dire les structures de 1 à 30 logements, vous
savez.
Mme Bacon: Dans votre document, vous affirmez aussi
qu'Hydro-Québec doit avoir des moyens financiers pour pouvoir continuer
d'augmenter sa capacité de production, pour satisfaire non seulement les
besoins des consommateurs actuels, mais aussi pour faire en sorte que le
Québec continue d'être un attrait pour les capitaux mondiaux.
Est-ce que vous pourriez en dire davantage là-dessus, par rapport
à la situation d'Hydro-Québec sur le plan international?
M. Lavallée: Personnellement, je n'ai pas la
documentation. Peut-être que M. Favre peut m'aider à ce
sujet-là.
M. Favre (Michel): On sait que le Québec est un attrait
important quand il s'agit des alumlneries, par exemple. Il faut continuer
à promouvoir cet important attrait économique qu'est le
Québec, sur le plan mondial. Dans ce sens-là, il ne faut pas le
négliger. C'est ce qu'on dit dans le mémoire.
Mme Bacon: D'accord. Vous dites aussi avoir eu l'occasion
d'examiner la proposition du plan de développement d'Hydro-Québec
pour les prochaines années. Vous traitez aussi, dans votre document, de
fiabilité de réseau, d'investissements dans les
équipements d'énergie. Vous avez quand même passé
sous silence certains aspects du plan, comme l'environnement, la recherche, le
développement, la tarification. J'aimerais quand même avoir votre
point de vue, même en survol, sur ces domaines, comme l'environnement,
comme recherche et développement, l'évaluation aussi que fait
Hydro-Québec de l'augmentation de la demande
d'électricité, quand on dit à 2 % par année,
pendant les prochaines années. Est-ce que vous vous êtes
penchés là-dessus, comme association?
M. Lavallée: Malheureusement, Mme la ministre, notre
organisation est plutôt axée au niveau du perfectionnement, de
l'installation, de la connaissance des nouveaux équipements, des
nouveaux systèmes qui arrivent de l'étranger et qui sont mis au
point ici même au Québec. En ce qui concerne l'environnement, nous
savons tous que l'électricité ne...
Mme Bacon: Ne pollue pas.
M. Lavallée: ...ne pollue pas, en fait, ni l'air, ni
l'environnement.
Mme Bacon: On nous a parlé, M. Lavallée,
d'économies d'énergie. On parlait de biénergie,
tantôt. Est-ce que votre association se penche sur les moyens à
utiliser pour arriver à une économie d'énergie ou une
meilleure efficacité d'énergie?
M. Lavallée: Notre corporation offre présentement
à ses membres des cours qui sont offerts par le ministère des
Mines et Ressources. C'est un cours qui s'intitule "Expert en efficacité
énergétique", et c'est un cours qui donne à nos membres
une expertise au niveau de l'enveloppe de la bâtisse. Nous
évaluons les pertes de chauffage par les fenêtres, par le manque
d'isolation, par la ventilation. Donc, nous avons une meilleure expertise dans
le but de conseiller nos clients ou le consommateur québécois non
seulement pour avoir des systèmes efficaces, mais aussi pour
éliminer des pertes, comme on se souvient qu'Hydro-Québec a mis
sur pied, il y a quelque 15 ans, le chauffe-eau Cascades dans le but
d'éviter des pertes de chaleur par le réservoir à eau
chaude. Maintenant, Hydro-Québec a cessé ce programme, puisqu'il
est déjà instauré partout. Donc, nous, avec nos membres,
nous essayons de sensibiliser les consommateurs non seulement à la
rationalisation de l'énergie, mais aussi à rendre les
bâtiments plus compacts et
plus isolés à cet effet.
Mme Bacon: Alors, il y a une grande préoccupation chez les
membres de votre associa tion.
M. Lavallée: Très grande préoccupation.
Mme Bacon: Merci. M. Lavallée: Bienvenue.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président. Il me fait plaisir de vous
souhaiter la bienvenue devant la commission et que vous ayez alimenté de
vos réflexions les travaux que nous tenons déjà depuis
presque un mois. La première phrase qui m'a vraiment frappé dans
votre exposé, on la retrouve en page 2, lorsque vous pariez du gaz
naturel et de l'électricité. Vous dites: "La concurrence entre
Hydro-Québec et les distributeurs de gaz devrait être moins
importante." Qu'est-ce que vous entendez par là, exactement?
M. Lavallée: On se souvient que dans les programmes qui
ont été mis de l'avant dans les années 1985 jusqu'à
tout récemment, HydroQuébec a mis de l'avant un programme de
biénergie avec un mode de subvention. À quelque moment, il est
survenu qu'Hydro-Québec et Gaz Métropolitain se faisaient une
rivalité, à savoir qu'Hydro-Québec offrait un programme de
biénergie avec un tarif spécial et une subvention de x dollars,
et Gaz Métropolitain arrivait chez le même consommateur, et il y
avait une surenchère. Nous considérons, comme entrepreneurs, que
ces sommes d'argent qui sont octroyées aux consommateurs, soit par Gaz
Métropolitain ou par Hydro-Québec, seraient mieux
utilisées dans le but d'"expansionner" le réseau, plutôt
que pour couvrir complètement ou presque tous les coûts de
transformation, soit à la biénergie ou au gaz naturel. C'est dans
ce sens qu'on vous apporte ça. (21 h 30)
M. Claveau: Dans le fond, ne croyez-vous pas qu'il est quand
même sain, dans une société de type semblable à la
nôtre, qu'il s'établisse une concurrence qui peut être
même très serrée entre différentes formes
d'énergie qui sont offertes sur le marché par différentes
entreprises qui ont, toutes et chacune, intérêt à vendre
leur produit, finalement?
M. Favre: Le marché du Québec est quand même
relativement limité. On n'est pas aux États-Unis. Le gaz naturel
a fait l'objet d'une infrastructure importante, et il ne faut pas la
négliger. C'est une part importante, dans le bilan
énergétique du Québec. Si on se souvient, il y a une
quinzaine d'années, il n'y avait que 110 000 unités
résidentielles qui étaient à l'électricité
seulement. Il y en a tout près de 2 000 000, aujourd'hui. C'est pour
ça qu'on prône la biénergie. Il ne faut pas mettre tous les
oeufs dans le même panier. Les problèmes de pointe
d'Hydro-Québec ne sortent pas d'une boîte de "pop-corn". Ils sont
là. Ce sont les 2 000 000 d'unités résidentielles qui ont
besoin de chauffage lorsque la demande est là. Et on a
négligé le gaz naturel depuis des années. On
néglige le pétrole, le mazout. C'est sûr que c'est une
question d'économie, mais on n'est pas dans un marché où
on doit se concurrencer de façon indue pour promouvoir un moyen plus
qu'un autre. C'est ce qu'on veut vous dire dans le mémoire qu'on vous a
soumis.
M. Claveau: II y a des gens qui sont venus expliquer devant la
commission que, dans le fond, l'hydroélectricité était un
produit beaucoup trop noble pour qu'on s'en serve pour du chauffage. C'est
exactement les termes qui nous ont été dits, qui nous ont
été donnés, qu'on pouvait avoir une source
énergétique moins noble que l'hydroélectricité pour
le chauffage, entre autres le chauffage résidentiel. On sait qu'il n'y a
pas de politique de pénétration du gaz naturel dans le
résidentiel. Je crois que le gaz naturel s'intéresse surtout au
commercial, essentiellement, même, au commercial. Alors, d'après
ce que je comprends de ce que vous avancez là, vous, vous seriez pour
qu'on développe, qu'on permette la pénétration du gaz
naturel dans les secteurs où c'est possible, où c'est facilement
réalisable, dans le résidentiel.
M. Favre: En fait, nous regrettons la décision de Gaz
Métropolitain de ne plus développer le résidentiel. Nous
croyons que c'est une erreur. Évidemment, ils le font pour une raison
économique. Mais socialement, on pense que c'est une erreur. Parce
qu'ils ont aussi un mandat social, comme Hydro-Québec. Ils ne devraient
pas être en concurrence quand ils n'ont pas besoin de l'être. Les
deux peuvent se compléter dans des situations très
particulières.
M. Claveau: En contrepartie, aussi, il y a des gens qui sont
venus nous expliquer que, finalement, il était à peu près
impensable qu'on puisse développer, que Gaz Métropolitain ou
n'importe quel autre fournisseur de gaz naturel, finalement - s'il y en avait
d'autres - puisse développer des réseaux résidentiels au
Québec, pour toutes sortes de raisons. Vous croyez, en ce qui vous
concerne, qu'on devrait insister là-dessus et que ça
allégerait énormément les obligations
d'Hydro-Québec quant à ses livraisons résidentielles.
L'impact pourrait être vraiment très important.
M. Favre: On pense que oui. D'ailleurs, la
preuve est faite en Ontario, où la pénétration du
gaz est peut-être le double de celle du Québec. Il y a une
distribution beaucoup plus équitable, entre 30 % et 40 % par produit,
entre le mazout, le gaz et l'électricité. Donc, ce n'est pas un
seul produit ou une seule source d'énergie qui est utilisée
à des fins de chauffage, d'éclairage ou de...
M. Claveau: J'aurais presque envie de vous dire, en boutade, que
ça coûterait moins cher à Hydro-Québec d'acheter une
participation dans Gaz Métropolitain que de construire des centrales
pour alimenter la pointe en électricité, finalement.
M. Favre: Si l'investissement leur était permis, ça
serait peut-être...
Une voix: Pourquoi pas?
M. Claveau: Dans votre mémoire, au paragraphe suivant,
vous parlez justement de fa gestion de la pointe. Et sans l'exprimer d'une
façon peut-être aussi claire que celle qui nous a
été exprimée par Cascades, qui est venue nous parler de
ses tentatives, enfin, de cogénération et de son idée de
développer un secteur qui s'appelerait Cascades-énergie... Elle
nous disait que la solution pour Hydro-Québec serait de faire
gérer la pointe par l'entreprise, tout simplement. De dire à
l'entreprise, moyennant certaines conditions: Vous vous occupez de votre
pointe. Comme ça, on diminuerait énormément l'augmentation
à la pointe. Alors, quand vous dites qu'Hydro-Québec devrait
étudier davantage l'opportunité de subventionner les
installations et d'adopter des tarifs très particuliers et avantageux
pour les consommateurs importants d'énergie qui accepteraient d'utiliser
d'autres sources d'énergie durant la période de pointe, dans le
fond, c'est à peu près le même principe, si je comprends
bien, que vous reprenez. Vous refilez la gestion de la pointe à
l'entreprise. Est-ce que vous croyez que ce serait là quelque chose qui
est acceptable pour l'entreprise et qui serait effectivement rentable pour
Hydro-Québec?
M. Lavallée: C'est le principe de la bléner-gie,
n'est-ce pas? Si vous dites aux entreprises, aux manufacturiers de s'occuper de
leur pointe en délestant leurs demandes à une autre source
d'énergie, ils vont bénéficier d'un tarif
préférentiel. Le consommateur est gagnant, ainsi
qu'Hydro-Québec, car ça déleste sa demande. C'est ce qu'on
rejoint.
M. Claveau: Et de ce côté-là, en fait, vous
n'avez pas de... Là, vous nous parlez de la blénergie, mais
ça pourrait être par n'importe quelle façon, finalement. Il
s'agirait que ce soit négocié globalement avec
Hydro-Québec.
Vous concluez votre mémoire en nous parlant de la sous-traitance.
On en a déjà beaucoup parlé de la sous-traitance. Vous
dites, à la fin, une petite phrase... C'est dit très
brièvement, mais ça m'a quand même frappé.
"Hydro-Québec devrait être invitée à sous-traiter
des parties importantes de ses activités afin que les coûts soient
diminués, afin d'éviter sa dépendance vis-à-vis ses
employés et afin de bénéficier des bienfaits de la
concurrence." J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus.
Comment voyez-vous ça, vous autres, la sous-traitance, puisque vous en
parlez vous-mêmes? Comment est-ce que fa sous-traitance pourrait
permettre à Hydro-Québec de bénéficier des
bienfaits de la concurrence autrement que par, évidemment, une certaine
diminution de coût, enfin, qu'on suppose?
M. Favre: Ce n'est pas juste une question de
bénéficier de la concurrence. C'est bénéficier
d'une expertise enviable qui existe dans l'industrie de la construction, dans
tout le secteur privé de la construction. Il faut maintenir cette
expertise. C'est tout à l'avantage d'Hydro-Québec de voir
à ce que cette expertise, pour laquelle elle n'a pas à soutenir
l'ensemble de la main-d'oeuvre, soit en tout temps disponible par la
concurrence des appels d'offres publics. C'est un soutien important. Je pense
qu'Hydro-Québec pourrait... D'ailleurs, le gouvernement l'a
confirmé dans le règlement de la situation avec les
employés d'Hydro-Québec.
M. Claveau: Vous dites: "...devrait être invitée
à sous-traiter des parties importantes de ses activités." Les
activités d'Hydro-Québec, c'est quand même des
activités énormes, donc, des parties importantes, ça veut
aussi dire des choses assez énormes. Est-ce que ça pourrait
aller, par exemple, jusqu'à supposer qu'Hydro-Québec aurait
avantage à faire gérer globalement des centrales carrément
par la sous-traitance et ne se charger que de la distribution de
l'électricité qui en sortirait?
M. Favre: On n'a pas pensé à ça; on a
surtout pensé à la distribution. Il y a toutes sortes
d'hypothèses qui peuvent se présenter à
Hydro-Québec, ou qui seraient accessibles à Hydro-Québec,
et qu'elle aurait avantage à exploiter.
M. Claveau: Je comprends, mais si vous le dites, c'est parce que
vous avez sûrement déjà pensé à un certain
nombre de choses. J'aimerais savoir votre point de vue vraiment global,
là-dessus. Est-ce qu'Hydro-Québec doit être une
société gérée à l'interne, qui appartient
aux Québécois et dans laquelle la majorité de ses
activités sont faites par ses travailleurs ou si, à l'inverse,
vous pensez qu'Hydro-Québec aurait plutôt avantage à faire
faire la majorité de ses travaux en sous-traitance?
M. Favre: II y a deux points importants qui touchent la
sous-traitance à Hydro-Québec: les situations d'urgence et la
construction. C'est clair que tout ce qui est construction, qui est assujetti
au décret de l'industrie de la construction, est donné en
sous-traitance. Les appels d'urgence, l'entretien d'urgence sur les lignes et
sur les transfos, ce sont des choses pour lesquelles la sous-traitance devrait
être encouragée davantage, ce qui permettrait à
Hydro-Québec, à notre avis, d'atteindre plus rapidement
l'efficacité des lignes actuelles et aussi de baisser le nombre
d'heures-année pour lequel les lignes sont surchargées ou en
défaut. La main-d'oeuvre est là, présentement. Elle est
prête à être exploitée.
M. Claveau: Ce sur quoi on devrait s'entendre, ou ce sur quoi
j'aimerais bien qu'on s'entende, c'est qu'Hydro-Québec est une
société qui existe par elle-même. Elle appartient aux
Québécois, son actionnaire est le gouvernement, mais elle existe
et elle a le droit à la gérance, finalement, comme n'importe
quelle autre entreprise. Vous dites: "II est possible pour HydroQuébec
de réaliser son plan de développement sans augmenter son
personnel, du moins sans l'augmenter d'une façon considérable.
HydroQuébec devrait favoriser le plus possible l'octroi de contrats pour
la réalisation de ses travaux." Bon, est-ce qu'il y a là un
principe qui vaut pour tout le monde, pour toutes les entreprises, ou bien si
c'est deux poids, deux mesures? Quand c'est Hydro-Québec, il ne faudrait
surtout pas augmenter le personnel et il ne faudrait surtout pas en faire trop
à l'interne, mais les entreprises qui iraient à contrat pour
Hydro-Québec elles pourraient dire: On va en engager, du personnel, on
est pas mal meilleurs! Est-ce que vous accepteriez, par exemple, dans le cas
d'une entreprise, qu'on lui dise: Non, là, arrêtez, vous n'avez
plus le droit de grossir; au lieu de grossir, donnez donc des sous-contrats
à une autre entreprise à côté de chez vous? C'est
ça que j'aimerais comprendre, comme philosophie. Est-ce que la
philosophie que vous prônez s'applique à Hydro-Québec
uniquement, comme entreprise que l'on veut isoler et du moins envers laquelle
on a presque l'impression qu'on est en train de faire un complot pour la
démanteler, ou bien si le même principe vaut pour toutes les
entreprises qui opèrent dans le secteur? À ce moment-là,
on dirait à toutes les entreprises, gros sous-contractants, contracteurs
généraux, etc.: Non, non, au lieu de grossir vous autres aussi,
allez plutôt en sous-traitance.
M. Favre: Le mandat d'Hydro-Québec, ça peut
être un très gros employeur ou un très petit, c'est une
décision administrative qui les regarde. Lorsqu'on dit qu'il y a des
problèmes qui sont identifiés par Hydro-Québec, il y a des
moyens à court terme de les régler. Entre autres, c'est de faire
appel à la sous-traitance, il y a une expertise qui est là. Du
côté construction, on n'est pas inquiets. Ce n'est même pas
l'objet de votre question, ça, la construction. Vous voulez savoir si,
parce que c'est Hydro-Québec, on encourage davantage la sous-traitance
que si c'était une autre société. La réponse, c'est
non. C'est une question de gestionnaires au sein d'Hydro-Québec. Mais
les problèmes à court terme qu'il faut régler, l'une des
solutions, c'est la sous-traitance, parce que l'expertise y est
déjà. Cette expertise-là est déjà acquise
par des entreprises qui en font la...
M. Claveau: Pour rester dans le domaine de l'énergie, Gaz
Métro est aussi une entreprise assez importante. Il y a pas mal de
monde. Est-ce que vous préconisez les mêmes principes de la
sous-traitance pour Gaz Métropolitain?
M. Favre: C'est sûr. Gaz Métropolitain a une licence
de la Régie des entreprises en construction. Ils font du service
d'entretien, de réparation des appareils. Ils le font avec leurs propres
employés. Ils ne font pas de construction.
M. Claveau: Hydro-Québec ne pourrait pas faire l'entretien
de la réparation de ses équipements à l'interne avec ses
propres employés?
M. Favre: Ils le font.
M. Claveau: Mais vous demandez qu'ils le fassent de moins en
moins?
M. Favre: Pas du tout. On dit: II y a des problèmes
à court terme qu'il faut régler. C'est ce qu'on dit, là.
Ils sont clairement identifiés. Ils sont échelonnés de
1992 à 1995, entre autres, les problèmes urgents à
régler. C'est la société québécoise qui
s'exprime, ici. Je trouve qu'il y a trop de pannes de courant. Il y a des
défauts majeurs dans certaines centrales. Il y a des défauts
majeurs dans certains centres de distribution. Ils peuvent former du monde
pendant cinq ans, ou ils peuvent avoir accès immédiatement
à de l'expertise qui est déjà en place, prête
à opérer. C'est une décision administrative. C'est tout ce
qu'on dit. C'est pour ça qu'on dit qu'elle devrait être
Invitée davantage à se pencher de ce
côté-là.
M. Claveau: Je comprends mais, si l'entreprise est capable
d'engager demain matin du monde compétent, Hydro-Québec doit
être en mesure de le faire, elle aussi.
M. Favre: Oui. Hydro-Québec s'est déjà
exprimée à cet égard-là.
M. Claveau: En tout cas, on me dit que mon temps est
écoulé. Je vous remercie de votre
présentation devant la commission et du point de vue que vous
nous amenez concernant de façon plus spécifique la question de la
gestion de la pointe, qui me semble peut-être un principe sur lequel on
aurait avantage à travailler d'une façon plus précise pour
diminuer la charge à HydroQuébec, la charge dans tous les sens du
mot.
Quant à la question de la sous-traitance, on aurait
peut-être avantage à en discuter encore un bout de temps, si on
veut en arriver à partager les mêmes opinions. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la
députée d'Ungava. Mme la ministre.
Mme Bacon: M. Lavallée et M. Favre, on vous remercie
d'être venus ici, encore une fois, rencontrer les membres de la
commission et de nous avoir fait part de vos recommandations, qui vont dans le
sens du plan de développement d'Hydro-Québec et qui sont, pour
l'essentiel, conformes aux objectifs de la politique énergétique.
On vous remercie de cet ajout à la réflexion que nous faisons
depuis quelques semaines. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie les représentants de la
Corporation des maîtres mécaniens en tuyauterie du Québec
pour leur participation à ses travaux. Compte tenu de l'heure, nous
ajournons nos travaux à demain, 10 heures, même salle. Merci.
(Fin de la séance à 21 h 47)