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(Dix heures quatre minutes)
Le Président (M. Bélanger): Si vous me permettez,
la commission de l'économie et du travail poursuit son mandat de
consultation générale et d'auditions publiques sur la situation
et les perspectives de l'énergie électrique au Québec.
J'aimerais vous rappeler les lignes directrices de cette commission.
Donc, à cette fin, nous allons examiner la place de
l'électricité dans les besoins énergétiques du
Québec, la situation et révolution de la demande
d'électricité au Québec à moyen et à long
terme, les orientations et les choix possibles afin de satisfaire
l'évolution de la demande d'électricité au Québec,
à moyen et à long terme, et les moyens en termes de ressources et
d'équipements proposés par Hydro-Québec dans le cadre de
son plan de développement pour accomplir son mandat et fournir
l'électricité nécessaire au Québec et, en dernier
lieu, les moyens de concilier la satisfaction des besoins
d'électricité au Québec, la qualité de
l'environnement et le développement économique durable.
Cela dit, si vous me permettez un instant... Alors, jusqu'à
maintenant certains groupes... Il y a une tradition dans cette commission qui
est, lorsqu'on finit l'audition ' d'un groupe, que le ministre et le
porte-parole, de l'Opposition vont le saluer à l'arrière.
Malheureusement jusqu'à maintenant je plaide un peu coupable. J'ai fait
une gestion du temps à ce point serré que ça n'a pas
été possible et nous allons malheureusement devoir continuer
ainsi à moins qu'on m'exprime un avis contraire du côté du
porte-parole et de Mme la ministre, la raison étant que le temps dont on
dispose, on voudrait en consacrer le plus possible à entendre les gens
plutôt qu'à aller faire du social à l'arrière. Or,
dans cette perspective, je continuerai cette gestion serrée, mais si je
m'aperçois qu'on veut changer ces règles en cours de route,
j'assouplirai.
Cela dit, nous recevons ce matin, un premier groupe, Enjeu et
Environnement jeunesse inc., que j'invite à la table des témoins
s'il vous plaît. Alors ce groupe est représenté par Mme
Danielle Laramé, MM. Gaétan Leduc et Claude Villeneuve. Alors,
bonjour! Je vais vous expliquer rapidement nos règles de
procédure. Vous avez 20 minutes ferme pour la présentation de
votre mémoire, c'est-à-dire qu'à la 19e minute je vais
vous faire signe de conclure. Je sais que c'est limité mais nous n'avons
pas le choix. Par la suite, il y a une période d'échanges avec
les parlementaires. Or, dans un premier temps, si vous voulez bien identifier
votre porte-parole, présenter ceux qui vous accompagnent et
procé- der à la présentation de votre mémoire, on
vous écoute. Je vous remercie.
Enjeu et Environnement Jeunesse inc.
Mme Laramé (Danielle): Mmes et MM. de la commission,
bonjour! Je vais effectivement vous présenter les gens qui sont à
ma droite et à ma gauche. Donc, à ma gauche, M. Claude
Villeneuve, biologiste et membre du conseil d'administration d'Enjeu depuis
quatre ans; il est aussi membre du programme de L'homme et la biosphère
de l'UNESCO, président du Groupe de recherche en développement
durable de l'Université du Québec à Chicoutimi et membre
du conseil d'administration de la Fédération de la faune du
Canada.
À ma droite, M. Gaétan Leduc, membre du conseil
d'administration d'Enjeu et étudiant en maîtrise en sciences de
l'environnement à l'Université du Québec. Moi-même,
Danielle Laramé, présidente du mouvement Environnement Jeunesse
et ex-membre du Conseil consultatif de l'environnement.
Pour vous présenter notre mémoire ce matin, je vais
d'abord commencer par vous introduire un peu ce qu'est Environnement Jeunesse.
Ensuite M. Villeneuve vous expliquera un peu ce qu'est l'éducation
relative à l'environnement que l'on fait, le concept du
développement durable et, par la suite, je vous présenterai les
résultats d'un référendum qu'on a tenu sur
l'énergie, dans lequel les jeunes ont exprimé leur opinion et ce
qu'ils étaient prêts à faire sur l'énergie.
Environnement Jeunesse est un mouvement provincial de jeunes qui
regroupe plus de 400 membres individuels et 300 groupes collectifs, dont une
cinquantaine en milieu collégial. C'est un mouvement qui oeuvre en
éducation relative à l'environnement pour amener la population
à être plus consciente et plus responsabilisée par rapport
à l'environnement et à son action individuelle et collective.
Pour ce faire, on produit des outils, on a un service d'animation et on
réalise aussi des projets d'envergure avec une thématique
à travers différents cégeps du Québec.
Je vais laisser la parole à M. Villeneuve pour vous
présenter ce qu'est, de façon succincte, l'éducation
relative à l'environnement et notre perception du concept du
développement durable.
M. Villeneuve (Claude): Merci, Danielle. L'éducation
relative à l'environnement est une forme d'éducation qui vise
à intégrer la dimen-
sion environnementale dans le processus de décision à tous
les niveaux. L'éducation relative à l'environnement n'est pas que
l'enseignement de l'écologie. C'est une partie de cela, mais, en fait,
II s'agit d'Introduire dans toutes les matières, au niveau scolaire
aussi bien qu'extra-scolaire, la dimension environnementale des
problèmes humains au même titre qu'on se fait une gloire
d'introduire dans à peu près toutes les prises de
décisions, la dimension économique des problèmes qu'on
étudie.
L'éducation relative à l'environnement est une condition
nécessaire pour assurer le développement durable. De nombreuses
études l'ont démontré, l'UNESCO d'ailleurs a
publié, encore récemment, des études à ce
sujet-là. Pour qu'on puisse penser à un développement
durable, il faut d'abord penser à l'alphabétisation
écologique de la population. En effet, pour prendre des décisions
en ce qui concerne l'environnement, une population doit être bien
informée du fonctionnement de son environnement, des
éléments qui le caractérise et elle doit aussi se rendre
compte que l'environnement, ce n'est pas ce qui nous entoure, mais bien ce dont
on dépend pour survivre. Toutes les ressources naturelles disponibles
à une société proviennent de son environnement à
l'échelle locale ou à une échelle plus globale.
Naturellement, on parle aussi de la nécessité de
l'éducation relative à l'environnement pour améliorer la
compétence des décideurs en ce qui concerne leur mécanisme
de prise de décisions collectif aussi bien qu'individuel, cela pour
faire des choix éclairés ex éviter des erreurs qui ont
été commises dans le passé.
Le développement durable tel qu'il nous est
présenté actuellement est un concept qui réconcilie
naturellement beaucoup de gens parce que c'est un concept qui est relativement
vague. On définit dans la commission Brundtland le développement
durable comme un développement qui vise à satisfaire les besoins
de la génération actuelle sans remettre en cause les
possibilités des générations futures de répondre
aux leurs. Cette définition réconcilie beaucoup de monde, mais,
dès le moment où on veut l'opérationaliser, on se retrouve
à opposer économie et écologie. Or, ce n'est pas
nécessairement là où on doit chercher les réponses
pour le développement durable parce que, en réalité, on
oublie que économie et écologie sont deux dimensions de la
perception qu'une société peut avoir de sa qualité de
vie.
Donc, un modèle plus cohérent nous amènerait
à donner trois pôles au développement durable qui seraient
le pôle écologique sur lequel l'économie se construit, le
pôle social ainsi que le pôle économique qui, formant un
triangle, nous permettent d'expliquer que pour qu'une ressource puisse
générer pendant un temps durable des rendements
économiques, il faut qu'on s'occupe de son rendement soutenu et que ce
rendement économique peut permettre le développement d'une
société, mais que cette société a aussi une
relation avec l'écosystème qui la supporte, que cette
relation-là nous oblige à la conservation des ressources
naturelles.
Le développement durable, donc, doit respecter les besoins des
générations futures. C'est assez difficile, lorsqu'on parle de
besoins, de ne pas référer aussi à des
préférences. Or, nos sociétés actuelles
répondent déjà assez bien à leurs besoins.
Peut-être est-ce que nos préférences ou peut-être
est-ce que nos choix de société handicapent ou handicaperont les
chances que les générations futures peuvent avoir de se
développer.
Ainsi, les décisions concernant les choix
énergétiques doivent se faire en pleine connaissance des impacts
environnementaux et économiques qui résultent de ces choix. Or,
les jeunes, pour qui nous voulons développer de façon
irréversible le territoire, ne sont actuellement ni consultés ni
informés sur ce type de développement qu'on leur offre sur le
genre de province qu'on va leur léguer. C'est pourquoi à
Environnement Jeunesse, l'année dernière, dans le cadre du
programme, l'écologie en action!-2, nous avons choisi la
thématique énergie pour faire de l'éducation relative
à l'environnement et donner aux jeunes des informations et de
l'éducation en ce qui concerne leur choix énergétique et
le développement énergétique. Nous avons aussi pris la
peine de consulter ces jeunes à travers un référendum que
Danielle va vous présenter, dont elle va vous présenter les
résultats maintenant.
Mme Laramé: Merci, Claude. Donc, on sait que les gens sont
directement concernés par les questions environnementales parce que
c'est eux qui vont avoir à vivre avec les répercussions et, pour
eux, c'est important d'être consultés et d'être participants
à ces décisions-là. Le référendum qui a
été organisé à l'automne dernier a permis d'aller
dans 22 cégeps, d'avoir une réponse de 20 % des étudiants
à temps plein, qui avaient droit de vote, pour ce
référendum. En général, ce qu'on constate, suite
aux résultats du référendum, c'est que la majorité
des jeunes qui ont répondu au référendum désirent
s'inscrire dans le sens des recommandations du rapport Brundtland.
Vous me permettrez donc de vous donner les résultats de ce
référendum. Vous remarquerez que les résultats aussi...
Les questions qui ont été amenées lors du
référendum ne portent pas nécessairement seulement sur
l'énergie hydroélectrique, mais aussi sur les autres types
d'énergie. Dans le cadre de ce projet, quand on parlait d'énergie
ou de politique énergétique, c'était d'une façon
globale.
Donc, à la première question qui avait été
posée: Appuieriez-vous un gouvernement qui favorise le transport en
commun au détriment de l'automobile personnelle? Il y a plus des deux
tiers des répondants qui appuieraient un gouver-
nement qui favoriserait le transport en commun au détriment de
l'automobile personnelle. Et, suite à ça, le mouvement Enjeu
suggère, toujours dans une optique de développement soutenable,
que les gouvernements tiennent compte réellement et "priorisent" la
question de l'impact environnemental lors des décisions politiques et
administratives concernant le secteur du transport; que les gouvernements
augmentent le coût de l'essence par une taxe spéciale qui serait
imputable à un fonds de recherche et de développement du
transport en commun; que l'on établisse et réalise un plan de
développement et de promotion d'un transport ferroviaire efficace; que
l'on instaure des voies réservées aux autobus en milieu urbain;
et que l'on favorise le covoitu-rage par des mesures incitatives.
Deuxièmement, on demandait si on appuierait un gouvernement qui
hausse les tarifs de la consommation énergétique dans une
perspective environnementale de développement durable. À cette
question, une majorité absolue des répondants appuierait une
hausse des tarifs de l'énergie, si elle vise le développement
durable. Ce que le mouvement Enjeu suggère, c'est une hausse des tarifs
de l'énergie, par une taxation spéciale, qui vise à
favoriser une baisse de la consommation, telle que le rapport Brundtland le
proclame, dans le but de rationaliser l'utilisation de nos ressources
naturelles et de diminuer les impacts environnementaux liés à la
consommation énergétique. Et les revenus seraient totalement
investis dans la mise sur pied de systèmes d'économie de
l'énergie et de programmes d'efficacité
énergétique, dans l'établissement de mécanismes de
compensation pour les personnes qui sont à faible revenu et dans la
recherche, notamment par la création et le support d'un centre de
recherche qui serait spécifiquement voué aux énergies
alternatives dans une université québécoise.
Suite à ça, la troisième question: Appuie-riez-vous
un gouvernement qui privilégie l'utilisation de l'énergie de
fission nucléaire? À cette question, une majorité simple
des répondants n'appuieraient pas l'option de l'énergie de
fission nucléaire. Ce qu'on constate, finalement, c'est que les
résultats à cette question montrent que, malgré toute la
publicité qui est investie par l'industrie nucléaire, le
nucléaire demeure quand même une question controversée. Et
il y a un besoin d'information plus objective et d'éducation relative
à l'environnement sur cette question, considérant les impacts
environnementaux, notamment au niveau des risques et de la question encore
irrésolue des déchets nucléaires.
La quatrième question. On disait: Êtes-vous prêts
à payer plus cher pour des énergies moins polluantes? À
cette question, plus des deux tiers des répondants sont prêts,
oui, à payer plus cher pour des énergies moins polluantes. Et
ça, pour nous, c'est un message clair qui nous permet de dire aux
gouvernements et aux industries d'in- vestir davantage dans la recherche sur
les énergies alternatives. On parle d'énergie moins polluante,
mais c'est axé sur les énergies alternatives.
La cinquième et dernière question: Êtes-vous
prêts à accepter des restrictions à votre consommation
d'électricité durant les périodes de pointe? À
cette question, il y a plus des deux tiers des répondants qui sont
prêts à faire leur part, à accepter des restrictions
à leur consommation d'électricité durant les heures de
pointe. Ce qu'on constate et ce qu'on suggère, en termes de mouvement,
c'est que, nous, les jeunes, finalement, on préfère changer notre
comportement de consommateur plutôt que de construire de nouveaux
barrages de centrales nucléaires. Oui, on est prêts à
accepter des restrictions à notre consommation
d'électricité pour autant que ça évite de
construire d'autres barrages. Que ce changement à nos habitudes de
consommation doit être soutenu, non pour permettre l'exportation de
l'hydroélectricité, mais pour préserver la qualité
de l'environnement dans le sens de l'utilisation de nos ressources à des
fins de développement national collectivement consenties, toujours dans
une perspective de développement durable.
Et, finalement, ce qu'on suggère, c'est que cette restriction
à la consommation d'électricité durant les heures de
pointe peut se réaliser facilement, soit en décalant l'heure du
souper, en diminuant le gaspillage et l'utilisation de gadgets
électriques non essentiels ou par l'instauration de programmes de
délestages volontaires et prévus en échange d'une
réduction des tarifs comme mesure incitative.
Ce sont donc les cinq questions qui ont été posées
dans 22 cégeps à une population de 60 000 étudiants,
auxquelles 20 % ont répondu. Donc, finalement, le mouvement Enjeu et le
conseil d'administration du mouvement Enjeu, dans une optique de
développement durable, amènent les recommandations suivantes qui
sont plus générales. Finalement, pour donner une chance aux
générations futures de bénéficier à leur
tour du patrimoine énergétique et environnemental, on demande de
mettre sur pied un processus réel permettant un véritable
débat public sur l'énergie, permettant à l'ensemble de la
population de se prononcer sur la politique énergétique au
Québec. D'ici la tenue de ce débat, ce que les jeunes demandent,
c'est d'établir un moratoire sur tout projet de développement des
ressources énergétiques, notamment hydroélectriques et
nucléaires. Et, finalement, ils demandent d'axer leurs interventions et
recherches sur la maîtrise énergétique, soit
l'efficacité énergétique, la diversification et la
conservation de l'énergie. Ça, c'était les recommandations
générales, finalement, qui sont sorties du
référendum.
Donc, ce qu'on prône, on ne prône pas le retour à la
terre ou le retour à l'utilisation de la
lampe à l'huile. Ce qu'on veut, c'est vivre décemment,
dans un environnement qui soit harmonieux et dans lequel on puisse vivre en
harmonie. Pour les jeunes, ce qui est important, c'est que la politique
énergétique ne doit pas avoir comme seul objectif de
répondre à un besoin, à une demande qui est en croissance,
mais devrait avoir comme objectif de diminuer la demande, et,
idéalement, de diminuer la croissance de la demande, et ce, en
conformité avec ce que le rapport Brundtland prône au niveau de
l'énergie. Je remercie les gens de la commission de nous avoir
écoutés ce matin.
Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions de
votre présentation. Mme la ministre.
Mme Bacon: Mme Laramé, M. Leduc, M. Villeneuve, je vous
remercie d'être ici avec nous, ce matin, pour dialoguer et faire la
présentation de votre mémoire. Je constate, avec plaisir,
l'intérêt des jeunes pour l'énergie, pour le
développement durable et je dois vous féliciter de l'initiative
du sondage que vous avez réalisé pour apprécier les
tendances qui se dessinent pour l'avenir. Pour réduire la consommation
d'énergie, vous proposez, entre autres, que le gouvernement
réhabilite le transport en commun. En posant l'hypothèse que le
gouvernement favorise la mise en place des infrastructures nécessaires,
je pense que vous n'ignorez pas non plus que le principal problème
consisterait à convaincre les gens d'effectuer leurs déplacements
de courte distance en autobus ou en covoiturage, et leurs déplacements
de plus longue distance, soit en train, soit en autobus. Est-ce que vous avez
des mesures pratiques, des mesures économiques à suggérer
qui inciteraient les gens - et je pense qu'on peut insister sans contrainte; on
sait que les gens sont toujours négatifs quand ils sentent une
contrainte - à renoncer à un usage individuel de
l'automobile?
M. Villeneuve: L'usage de l'automobile, c'est peut-être une
des plus grandes satisfactions qu'on retire de notre siècle de vitesse
actuellement parce qu'on peut se déplacer d'un point à un autre
assez rapidement. Sauf que, dès le moment où on arrive dans les
embouteillages, on se rend compte que notre plaisir est beaucoup
gâché et, en même temps, on se rend compte aussi que les
impacts environnementaux de ces choix de société là sont
extrêmement négatifs.
Parmi les mesures qui sont incitatives et qui sont
expérimentées ailleurs dans le monde, à plusieurs
endroits, pour diminuer la congestion urbaine en même temps
qu'améliorer la qualité de l'air, je peux vous citer, par
exemple, au niveau de Seattle où on a des voies sur toutes les
autoroutes qui sont réservées, à des heures
particulières, essentiellement aux véhicules où il y a
plus de deux personnes. Les véhicules qui font du covoiturage ont une
voie spécifique qui est réservée sur les autoroutes pour
entrer. Alors il y a certainement beaucoup de gens ce matin à
Montréal qui auraient été très heureux de partager
leur voiture en faisant tout simplement diminuer l'impact de la pollution pour
se rendre au travail. Parce qu'il y a 40 minutes d'attente sur les ponts ce
matin et, ces 40 minutes-là, ils auraient probablement
préféré les passer à dormir ou à rencontrer
leur famille. Ce genre de mesures-là n'est pas punitif. Les policiers
qui sont déjà sur les routes à ces heures-là pour
assurer la sécurité des gens peuvent très bien faire la
surveillance de ce type de voies.
Il y a aussi beaucoup d'autres initiatives qu'on pourra
éventuellement soumettre à l'intérieur d'un autre
mémoire à la commission si la commission le désire, mais
il y a de l'imagination dans la gestion de l'automobile qui a été
expérimentée dans plusieurs autres pays. Et les gens, à
partir du moment où on leur donne les renseignements nécessaires
et on leur donne, finalement, l'éducation nécessaire pour
comprendre ce qui se produit lorsqu'ils surutilisent leur automobile, sont
capables de prendre des décisions. Il y a naturellement aussi, bien
sûr, des incitatifs qui vont par le biais de la taxation. Nous
recommandons des augmentations de la taxation sur les carburants. C'est bien
clair que ce n'est pas quelque chose qui est accepté de gaieté de
coeur par l'automobiliste, ni même l'automobiliste que je suis, mais,
d'un autre côté, ça peut rendre compte, de façon
beaucoup plus réaliste, des impacts et des coût de
réparation des impacts écologiques qui sont causés par une
trop grande utilisation des énergies fossiles. En ce sens, en plus -
sans vouloir mêler tous les genres - c'est aussi peut-être une
excellente manière d'équilibrer les budgets de la province.
Mme Bacon: Je reviens encore une fois.. On est quand même
dans une société de gens qui sont très individualistes.
Moi, j'habite une ville qui est Laval. Il faut traverser les ponts tous les
matins et il faut passer à travers les autoroutes. S'il y a trois
personnes qui travaillent, il y a trois voitures sur l'autoroute et qui doivent
traverser les ponts. Est-ce que le seul fait de dire qu'on va leur
réserver une place sur l'autoroute, s'ils sont deux ou trois dans la
même voiture, va faire changer vraiment les mentalités? On a beau
essayer d'inciter les gens et de prendre soit un covoiturage - on en a
déjà parlé beaucoup du covoiturage - ça ne change
pas beaucoup en ce moment. On ne sent pas le changement quand on fait
l'autoroute le matin.
M. Villeneuve: Est-ce que vous avez fait l'essai de
réserver une voie au covoiturage? Et, si non, est-ce que les citoyens de
Laval sont plus individualistes que ceux de Seattle?
Mme Bacon: Je serais tentée de vous dire
oui.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Villeneuve: J'aimerais avoir les enquêtes
là-dessus.
Mme Bacon: M faudrait peut-être faire l'essai de...
M. Villeneuve: Exactement.
Mme Bacon: ...de dire on réserve des voies
spéciales parce qu'on sait le temps que ça prend pour se rendre
au centre-ville, en partant de Laval.
M. Villeneuve: C'est tout à fait exact, Mme Bacon. Ici, je
pense que nous devons, si on veut avancer vers le développement durable,
absolument prendre une approche expérimentale, une approche scientifique
pour y arriver, parce que, effectivement, ces solutions-là qui
apparaissent quelquefois dans la mentalité dominante des choses
farfelues ou des choses qui ne vont pas d'elles-mêmes, si on ne les
essaie pas, on peut difficilement en tirer des conclusions. Or, en fait, je
pense que le gouvernement du Québec serait très sage de faire des
essais et d'assurer le suivi de ces essais-là, de telle façon
qu'on puisse vraiment dire si, oui ou non, ces solutions-là sont
possibles. Lorsqu'on parle de développement durable, en fait, on ne
parle pas de s'arrêter, on ne parle pas, comme disait Danielle tout
à l'heure, de revenir à la lampe à l'huile, ce n'est pas
notre objectif, mais on parle vraiment de rationaliser en tenant compte de la
dimension environnementale dans nos mécanismes de choix sociaux, dans
nos mécanismes de prise de décision. On essaie, simplement, de
faire durer cette qualité de vie qui est la nôtre le plus
longtemps possible.
Mme Bacon: Vous parlez de taxe écologique sur les tarifs
de l'énergie. On sait que les sources d'énergie ne sont pas
toutes aussi dangereuses ou toutes aussi polluantes pour l'environnement.
Est-ce que vous préconisez une taxé uniforme ou si, au contraire,
vous préconisez une taxe qui serait modulée suivant les
énergies?
M. Villeneuve: C'est une question qui est intéressante en
ce sens qu'il y a naturellement le reflet, à l'intérieur du choix
de taxation, des volontés politiques ou des choix sociaux qui sont faits
à l'intérieur d'une population ou d'une société
comme la nôtre. En ce sens, il est certain que la taxation, en fonction
d'une taxe écolologique, soyons clairs, implique qu'on connaisse et
qu'on reconnaisse les problèmes qui sont causés par
l'exploitation d'un type ou de l'autre type d'énergie. En ce sens,
naturellement, je ne suis ni fiscaliste, ni spécialiste de la taxation,
ni parlementaire...
Mme Bacon: ...l'environnement.
M. Villeneuve: ...mais au niveau de l'environnement, je pense
qu'on peut amener beaucoup d'éclaircissements sur le genre d'impact, sur
les biens communs qui sont causés par l'utilisation des biens
privés. Dans ce sens-là, il est certain que les fiscalistes ou
que les gens qui sont spécialistes en économie auraient
probablement intérêt à intégrer ces connaissances
écologiques à l'intérieur de leur choix de taxation.
Mme Bacon: En laissant la fiscalité de côté
mais en pensant seulement aux sources d'énergie polluantes ou
dangereuses, si on fait une hiérarchie, quelle serait la plus
taxée et la moins taxée?
M. Villeneuve: Vous me posez là un piège
intéressant.
Mme Bacon: Non, non parce qu'on veut protéger
l'environnement, au fond.
M. Villeneuve: Oui, d'accord. Je vous dis simplement, par
exemple, que si on parle du gaz naturel, dépendant de la manière
dont on utilise le gaz naturel, dépendant de la gravité du
phénomène de l'effet de serre, on pourrait dire que le gaz
naturel est, d'un côté, un combustible beaucoup moins polluant et,
de l'autre côté, par contre, un risque - parce que c'est
constitué de méthane - un risque pour l'augmentation du
réchauffement global de la planète si cela s'avère exact.
Et, en ce sens-là, il y aurait probablement un choix à faire
d'une moindre taxation pour le gaz naturel, d'une taxation qui serait
probablement plus incitative vers ce type de combustible-là pour des
usages industriels et même pour des véhicules personnels. Et il y
aurait d'autres formes d'énergie qui devraient être plus
taxées en allant vers le charbon, éventuellement, quoiqu'on n'en
utilise pratiquement pas au Québec, mais essentiellement il faudrait
reconnaître ce genre d'impact-là dans le coût des
éléments qu'on fabrique avec. (10 h 30)
Mme Bacon: Si l'on considère que sur une période de
10 ans on peut avoir un vaste programme d'économie d'énergie et
que ce programme ne donne pas les résultats qu'on espère, et si
l'on considère aussi que pour construire un barrage c'est la même
période - il y a 10 ans du moment où on prend la décision
et qu'on s'y met jusqu'au moment où il est réalisé -
est-ce que vous croyez que le gouvernement doit prendre le risque d'interrompre
tout développement énergétique ou s'il doit le poursuivre
peut-être en ralentissant au fur et à mesure que la consom-
mation se réduit, ou si on doit, au contraire, imposer des
restrictions si le programme n'est pas suivi volontairement, par exemple?
M- Villeneuve: Si l'on s'engage, par exemple, à
l'intérieur d'un programme d'économie d'énergie qui est
basé sur une base de 10 ans, à ce moment-là on doit se
fixer des objectifs très clairs de rendement énergétique
et assurer un suiyi de ces objectifs-là le plus possible. En ce sens, si
l'on s'intègre dans un programme comme celui-là, c'est exactement
la même chose que si l'on bâtit un barrage, c'est-à-dire
qu'on se dote d'une marge de manoeuvre énergétique. Et, les
moyens mis en oeuvre pour faire un programme d'économie
d'énergie, c'est un mandat qu'on doit donner à la
société d'État qui gère l'énergie, au
même titre que celui de bâtir un barrage. C'est ce genre de
mandat-là que la société doit respecter. De cette
façon, si l'on décide d'économiser ce qu'un barrage
pourrait nous produire, on en disposera si les gens font bien leur travail
parce qu'il reste, à beaucoup de niveaux, non seulement au niveau
individuel mais aussi au niveau institutionnel, du travail à faire, de
l'innovation à faire. Il faut savoir que la nécessité est
souvent la mère de l'invention et, lorsqu'on est dans une
société de trop grande abondance, on devient rapidement paresseux
des neurones et le meilleur moyen de stimuler la créativité,
c'est souvent d'offrir aux gens soit des plans à rencontrer ou encore
des barrières pour en arriver à un objectif particulier. C'est
comme ça, d'ailleurs, qu'on fait produire de l'électricité
aux rivières, on leur met des barrières.
Mme Bacon: Alors, si je comprends bien, vous seriez prêts
à ce qu'on prenne le risque de ne pas préparer une construction
de barrage, par exemple, en espérant que, durant cette même
période de 10 ans, on arrive à faire suffisamment
d'économies d'énergie.
M. Villeneuve: Vous posez là..
Mme Bacon: Est-ce que j'ai bien compris?
M. Villeneuve: Vous avez très bien compris.
C'est-à-dire que c'est un risque au même titre qu'on prend le
risque, par exemple, que, dans cette même période de 10 ans, il y
ait développement d'une source d'énergie autre qui rende
l'hydroélectricité tout à fait non concurrentielle. C'est
un risque à ce niveau-là et c'est un risque, en même temps,
le choix des économies d'énergie pour produire, pour se donner
une marge de manoeuvre parce qu'en fait, c'est ça, le choix de
l'économie d'énergie est un choix qui va nous apporter une
amélioration au niveau environnemental à tout point de vue. Et,
donc, on a un profit à dépenser moins, ce qui nous laisse plus de
marge de manoeuvre pour éventuellement préparer les jeunes
à un développement qu'ils vont pouvoir faire eux-mêmes. Si
on veut caricaturer un petit peu, il faut peut-être laisser quelques
barrages à développer pour nos jeunes s'ils en ont vraiment
besoin.
Mme Bacon: Quand on regarde les conséquences d'une
décision pareille, si on fait suffisamment d'économies
d'énergie, on peut avoir un surplus. Mais si ça n'arrive pas et
qu'on manque d'énergie, qu'est-ce qu'on fait?
M. Villeneuve: D'abord il est infiniment peu probable que nous
manquions d'énergie. Les modèles qui permettent...
Mme Bacon: Vous êtes optimiste, vous.
M. Villeneuve: C'est-à-dire que je suis optimiste au
même titre que les économistes qui font la planification et qui,
eux aussi, sont optimistes. Dans les modèles de prévisions
énergétiques, on a des intrants qu'on ne remet jamais en
question. On dit que les tendances nous portent à croire que la
consommation énergétique va augmenter. Or, la consommation
énergétique, comme autre chose, ça peut se changer, ces
tendances-là. On l'a vu, d'ailleurs, avec le premier choc
pétrolier. Si on avait un choc pétrolier aujourd'hui, ça
changerait probablement beaucoup les cartes de planification
d'Hydro-Québec et il n'y aurait peut-être pas de commission
parlementaire.
Dans le modèle qu'on vous propose, c'est une volonté
politique qu'il faut mettre de l'avant, c'est-à-dire que c'est un choix
de société, ce choix étant d'essayer d'utiliser
l'énergie avec toute la valeur qu'on doit lui accorder. On est en
compétition avec des sociétés, comme l'Europe, par
exemple, qui paie son énergie deux fois plus cher que la nôtre.
Est-ce que ça veut dire qu'on est deux fois moins efficaces puisqu'on
vend au même prix qu'elles? Est-ce que ça veut dire qu'on est deux
fois moins créatifs? Est-ce que ça veut dire qu'on est deux fois
moins bons? Je pense que non. Je pense tout simplement qu'on profite d'un prix
peu élevé de l'énergie, ce qui diminue notre
créativité pour trouver des solutions qui seraient
environnementalement bien meilleures et qui nous éviteraient d'autres
problèmes par la suite.
Le Président (M. St-Roch): Merci, Mme la ministre. Je vais
maintenant reconnaître M le député de Beauce-Nord.
M. Audet: Merci, M. le Président. Bonjour. Dans le
même sens, concernant le moratoire pour le développement des
projets hydroélectriques, il y a des intervenants qui sont venus en
commission nous dire que les prévisions de demandes
énergétiques qu'Hydro a dans son plan de développement
sont bien en deçà. Ils prévoient
que la demande de consommation, la demande pour l'énergie va
être beaucoup au-delà de ce qu'Hydro prévoit dans les
prochaines années.
Mme la ministre l'a mentionné tantôt, advenant le cas, par
exemple, où un programme d'économie d'énergie n'atteint
pas ses objectifs, parce qu'on sait qu'au gouvernement, pour les grands
programmes nationaux - le gouvernement ou ses organismes - la fiche est loin
d'être parfaite. On n'a pas toujours atteint les objectifs qu'on se
fixait. Des groupes nous ont dit qu'il y aurait peut-être des
alternatives à ça ou des solutions. J'aimerais connaître
votre position là-dessus, sur des petits barrages qui existent
présentement, qui ne sont pas en opération, mais qui pourraient
être remis en opération. Quel est votre point de vue
là-dessus? Vous n'en avez pas parlé dans votre mémoire,
des petits barrages, par exemple, qui existent présentement.
M. Villeneuve: Dans notre mémoire, on a parlé de la
diversification des formes de production d'énergie. En fait, nous
croyons qu'à l'avenir on est plus susceptibles d'avoir besoin de
projets, disons, locaux ou sur une base plus diffuse que les
mégaprojets. Il y a cette production énergétique sur une
base régionale qui peut être importante. On parle, par exemple, de
la cogénération qui est une nouvelle façon de voir la
valorisation des résidus des parterres de coupe forestiers. C'est une
voie intéressante éventuellement. Il y a aussi des voies
intéressantes dans le domaine de la valorisation de la biomasse en
général qui peuvent donner, sur une base de projets locaux, des
ressources énergétiques.
Les problèmes, je pense, qui sont reliés avec les
prévisions de demandes d'Hydro-Québec viennent des choix qui sont
faits au niveau du développement industriel des alumineries, par
exemple, qui consomment énormément d'électricité et
aussi au niveau de la vente de contrats captifs aux États-Unis. Ces
éléments-là, en fait, forcent la demande à
être plus élevée que les besoins des
Québécois actuellement et peut-être même que les
besoins prévisibles des Québécois. Donc, le choix qui
s'impose est de juger si nous sommes en situation de vouloir développer
l'hydroélectricité pour un type de développement en
particulier, qui correspond à ce qu'on a fait dans le passé, ou
si on veut développer de l'hydroélectricité pour
satisfaire aux besoins réels des Québécois d'aujourd'hui
et de demain.
M. Audet: D'accord. Deuxièmement, vous avez parlé
tantôt d'une taxe écologique sur les tarifs de l'énergie.
Vous savez, bien sûr, que toutes les sources d'énergie ne sont pas
toutes aussi dangereuses ou toutes aussi polluantes. Est-ce que vous
suggérez une taxe uniforme sur tous les produits ou...?
M. Villeneuve: Mme la ministre m'a posé cette
question-là tout à l'heure.
M. Audet: Ah! je m'excuse.
M. Villeneuve: J'y réponds encore de la même
façon, c'est-à-dire qu'en fait, il faudrait savoir
reconnaître, à l'aide des connaissances que nous donne
l'écologie, les impacts réels de chacune des méthodes de
production d'énergie pour établir cette taxation.
M. Audet: Parce qu'on sait que des taxes comme celles-là
dans des régions - moi, je viens de la Beauce - un peu plus
éloignées des grands centres, ont toujours des effets plus
importants que, par exemple, les entreprises qui sont situées dans les
grands centres. Alors, ça cause des problèmes assez...
M. Villeneuve: De la même façon, je viens du
Lac-Saint-Jean, et notre tarif d'électricité, même si on en
produit des quantités assez importantes, n'est pas différent de
celui de la ville de Montréal. Et, de la même façon, les
gens qui vivent dans les villages de la Baie-James vont générer
leur électricité à partir du mazout qui leur coûte
beaucoup plus cher alors que l'énergie est produite tout à
côté.
Je pense qu'il y a beaucoup d'iniquités qui sont
générées dans notre type de taxation et de
développement. C'est peut-être une chose que le gouvernement a
reconnu lorsqu'il a fait un prix de l'essence moins élevé dans
les régions que celui qui est payé en métropole.
M. Audet: Je vous remercie.
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Beauce-Nord. Je vais maintenant reconnaître M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous souhaiter la bienvenue devant cette commission parlementaire.
J'aimerais revenir, en ce qui me concerne, pour commencer, sur la
question des analyses, des études environnementales. Hier soir, M.
Yergeau, qui est considéré, que l'on peut qualifier de
spécialiste, pour le moins, en études environnementales, nous
disait que, quant à lui, il croit que les études qui sont
réalisées par Hydro-Québec au cours des dernières
années sont faites selon une méthodologie qui est très
acceptable et que, finalement, le problème ce n'est peut-être pas
au niveau des études comme telles, mais c'est au niveau de la
capacité des instances à traiter ces études.
Il disait que sa grande crainte, finalement, c'était de voir cet
océan d'informations, comme il le disait, se perdre dans des
dédales administratifs à travers des structures qui
n'étaient pas capables de les digérer et de les traiter.
J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.
M. Villeneuve: Je pense que là-dessus, on
peut reconnaître la compétence de M. Yergeau et vous dire
que, actuellement, dans beaucoup d'éléments où on doit
prendre des mesures, où le gouvernement doit prendre des mesures, il y a
effectivement des informations qui se perdent faute de mécanismes de
traitement adéquats. Les informations qui peuvent provenir des
études environnementales sont des informations qui sont basées
sur des mécanismes de prévision, un peu comme on prévoit
la météo à partir des éléments du
passé. On voit qu'avec la météo, il faut avoir les plus
gros ordinateurs disponibles pour être capable de prévoir pour une
journée, avec une bonne probabilité, pour deux jours, avec une
moins bonne, et pour une prévision sur une semaine, eh bien, on obtient
le même rendement qu'avec un 0,25 $.
Essentiellement, lorsqu'on fait des études d'impact
environnemental, on essaie le plus sérieusement possible de
déterminer quelles seront les composantes du milieu qui seront
affectées. Et, ensuite, lorsqu'on a fait le travail, on vérifie
et ça prend un programme de suivi environnemental. Hydro-Québec,
là-dessus, s'est beaucoup améliorée au cours des ans et,
effectivement, elle dispose d'excellents biologistes et d'excellents
spécialistes qui permettent de faire des prévisions qui, je le
pense, sont raisonnables. Et Hydro-Québec se donne aussi, dans une
optique de développement viable, un programme de suivi des études
environnementales.
Maintenant, tout ça ne change pas à la base que, lorsqu'un
développement est irréversible, comme la construction d'un
barrage, par définition, il est impossible de revenir en arrière
et les mesures d'atténuation qu'on propose ou qu'on essaie de mettre sur
pied sont souvent des cataplasmes sur une jambe de bois. Alors,
essentiellement, on a découvert, à la suite de la construction
des barrages, différents phénomènes scientifiques qui
n'étaient pas connus. On travaille dans l'inconnu lorsqu'on fait un
nouveau projet. Et le genre de phénomène scientifique, par
exemple, d'accumulation de bioaccumulation du mercure à
l'intérieur des réseaux alimentaires, c'était quelque
chose qui était inconnu avant qu'on fasse les barrages comme la Manie ou
la Baie James.
Et, essentiellement, chaque fois qu'on s'engage dans un nouveau projet,
dans un nouvel environnement qu'on connaît mal, à chaque fois on
génère des données qui, effectivement, se perdent et dont
on s'aperçoit de l'importance a posteriori. C'est donc pourquoi, par
respect pour les jeunes, je pense qu'il faut être extrêmement
prudent et circonspect dans les développements irréversibles
qu'on veut faire subir à nos écosystèmes.
Je vais simplement ajouter un petit quelque chose de plus
régional. Par exemple, pour le développement de la rivière
Ashuapmushuan, il serait nécessaire que les gens soient consultés
et qu'on connaisse, aussi bien que les résultats de ce que produirait de
développement hydroélectrique, quelles seraient les autres
utilisations qu'on peut faire de la rivière et qu'on les connaisse aussi
bien avec des études aussi précises. Comme ça, les gens
auraient une façon éclairée de faire des choix pour
vraiment savoir ce qu'il faut faire avec cette rivière-là. (10 h
45)
M. Claveau: Vous n'aurez pas de difficulté, en ce qui me
concerne, à me faire endosser votre point de vue sur la rivière
Ashuapmushuan. Ceci étant dit, j'aimerais passer la parole à mon
collègue de La Prairie qui aurait quelques questions.
Le Président (M. St-Roch): Je vais maintenant
reconnaître M. le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter les porte-parole du groupe Environnement Jeunesse. C'est un
bel exemple de collaboration entre enseignants et jeunes. J'ai eu beaucoup de
plaisir à lire ce mémoire. Quant à moi, en tout cas, c'est
un petit bijou parce qu'il allie, dans le quotidien, dans des choses
très pratiques, des principes fondamentaux. J'ai un certain nombre de
questions à poser, mais avant, je voulais simplement exprimer mon accord
entier avec la conclusion générale, les recommandations
générales. Je pense que, de ce côté-d de la table,
nous partageons votre volonté d'obtenir un débat public et aussi
d'établir un moratoire durant la période où aurait lieu ce
débat public.
On a parlé tantôt de covoiturage; c'est un bel exemple, je
crois, d'un phénomène qui n'a pas été
expérimenté suffisamment au Québec. Il y a eu quelques
faibles tentatives, il y a quelques années. Vous avez cité
l'exemple de Seattle, mais il y a aussi des méthodes, des techniques qui
sont tout à fait simples et non coûteuses. Ce n'est
peut-être pas assez coûteux pour les grandes entreprises
d'État qui préfèrent des trucs très coûteux,
mais la simple installation, en région, d'une centrale de coordination,
avec un numéro de téléphone accessible... Parce que le
covoiturage, ça ne se fait pas de façon spontanée, il faut
qu'il y ait un minimum d'organisation pour coordonner ça. Et, dans la
plupart des États américains, à tout bout de champ, le
long des autoroutes, on voit des numéros de téléphone:
Covoiturage, tel numéro. Il suffirait de subventions modestes de la part
des ministères de l'Énergie, de l'Environnement et des Transports
pour qu'on puisse établir, surtout dans les ceintures des grands centres
urbains, des centrales de coordination comme ça. Et il suffirait aussi
d'obtenir la collaboration du patronat, des employeurs pour qu'il y ait des
mesures qui favorisent, de la part des employeurs... Parce que ça se
fait ailleurs, ça. Il y a des employeurs, ailleurs, qui favorisent les
employés qui utilisent le covoiturage. Bref, moi, je pense que le
gou-
vernement, ici, a une mine de suggestions intéressantes. Et
j'offre à la ministre le comté de La Prairie comme
comté... Puisque c'est dans la périphérie de
Montréal, la rive sud de Montréal et qu'il y a beaucoup de
"traversages" de ponts un peu comme à Laval, peut-être que
Chomedey et La Prairie seraient deux excellents comtés pour faire des
expériences pilotes.
Mais sérieusement, je reviens à votre groupe. Je trouve
intéressante l'orientation de votre groupe qui est axée sur
l'éducation et je voulais savoir comment ça fonctionne, de
façon un peu plus précise. Vous parlez de votre présence
dans les universités, dans les collèges. Est-ce que vous allez
aussi dans les polyvalentes, au secondaire? Comment procédez-vous pour
entrer dans les institutions d'enseignement?
Mme Laramé: O.K. Comme je le disais dans l'introduction,
quand j'ai présenté le mouvement Environnement Jeunesse, pour
faire de l'éducation relative à l'environnement, on produit
divers outils. On a des guides, on a un service d'animation. Entre autres, par
le biais de ce service d'animation, on a beaucoup de demandes des écoles
qui sont plutôt de niveaux secondaire et primaire. Et les animations
qu'on fait, c'est sur des thématiques. Entre autres, il y a toute une
série d'affiches de l'UNESCO qu'on a vulgarisées et qu'on utilise
pour aller faire de l'animation au niveau des écoles. Ça, c'est
une façon, aux niveaux secondaire et primaire.
Au niveau des milieux collégial et universitaire, on y va plus
par des projets d'action. Tantôt, on parlait du projet Écologie en
action. Alors, Écologie en action, on en est rendu à la version 3
qui va se dérouler en 1991. Il y a déjà eu 1 et 2 qui ont
porté sur des thèmes très précis et qui
étaient des semaines d'animation. Ça se déroulait
habituellement sur deux, trois mois, une semaine d'animation par Cégep.
Et, durant cette semaine d'animation, il y avait une exposition, il y avait
aussi des films, un minifestival de films qui était
présenté; donc, plein d'outils qui étaient produits pour
sensibliser, informer et surtout responsabiliser les jeunes qu'on se trouvait
à côtoyer, à ce moment-là, lors de la
tournée, sur des termes très précis. Alors, ça,
c'est le genre d'outils qu'on utilise pour faire de l'éducation relative
à l'environnement. Je ne sais pas si ça répond à
votre...
M. Lazure: Oui. Est-ce que vous avez la collaboration du
ministère de l'Éducation? Est-ce que vous avez...
Mme Laramé: En fait, le mouvement Enjeu est
subventionné par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, parce qu'on est un organisme de loisir, au niveau du loisir
scientifique. Il y a le ministère de l'Environnement aussi qui a
été un de nos principaux bailleurs de fond, et il y a le
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science et de la
technologie, au niveau des projets ponctuels qu'on a eus, c'est-à-dire
les projets écologie en action. Ce ministère-là, entre
autres, dans un cadre d'un programme qui était "Étalez votre
science", a aussi collaboré pour financer ces projets.
M. Lazure: Avez-vous une idée combien ça vous a
coûté, à peu près, le sondage que vous avez
effectué?
Mme Laramé: Mon Dieu! le projet écologie en
action-2, c'est une subvention du ministère de l'Enseignement, c'est un
projet de 30 000 $. Donc, à l'intérieur de ce projet, il y avait
le référendum qu'on a tenu, mais il y a aussi les semaines
thématiques qui ont été tenues, la production de
matériel pour ces semaines thématiques-là, la logistique,
etc.
M. Lazure: Je pense, M. le Président, que
l'expérience de Environnement Jeunesse à cet égard,
à l'égard des référendums, des consultations,
ça pourrait servir, justement, le jour où il y aura une
consultation plus vaste, et ça peut inspirer, peut-être, le
gouvernement à utiliser certaines techniques qui sont actuellement
courantes auprès des jeunes, que ce soit le référendum sur
l'énergie ou même d'autres sortes de référendums qui
se tiennent dans les cégeps actuellement.
J'ai une dernière question. Vous dites qu'une importante portion
de vos revenus provient de l'autofinancement. Est-ce que vous pourriez nous
donner un peu plus de détails là-dessus?
Mme Laramé: II y a les cotisations des membres. On est
rendus, quand même, comme je le disais tantôt, à plus de 400
membres individuels et plus de 200 membres collectifs. Donc, il y a les
cotisations. Il y a les commandites, parce que, pour ces projets ponctuels
qu'on a eus depuis trois ans, on va chercher des commandites aussi. Il y a
aussi la vente de matériel, là, etc. C'est essentiellement, en
gros.
M. Lazure: Avez-vous des cellules dans chaque région du
Québec?
Mme Laramé: Oui. M. Lazure: Oui?
Mme Laramé: Oui, à l'heure actuelle, oui. On a des
cellules un peu partout, et ce qu'on essaie, c'est de développer encore
plus, d'aller chercher encore plus de groupes écologiques au niveau des
cégeps, et là, maintenant, au niveau universitaire aussi. Il y a,
dernièrement, neuf groupes, si je ne me trompe pas, universitaires qui
se sont affiliés au mouvement Environnement Jeunesse.
M. Lazure: Excellent, merci.
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, M. le
député de La Prairie. M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Moi je veux revenir sur
la question des études environnementales, parce que ça me semble
être un des éléments qui est au coeur du problème,
actuellement, par rapport aux choix qu'on doit faire en termes de production
d'électricité et, éventuellement, d'économie
d'énergie, par dérivé. On disait, hier encore, et dans
l'intervention de M. Yer-geau, que toute la question des interrelations entre
tes différents projets pour essayer de cumuler, si vous voûtez, la
somme totale des inconvénients qui pourraient s'additionner d'un projet
à un autre, c'est quelque chose qui est plutôt embryonnaire et
puis que si on attendait - encore là, je reprendrai une de ses
expressions - si on devait attendre d'avoir ces résultats-là
avant de bouger, on risque d'être drôlement longtemps
arrêtés. Est-ce que vous partagez ce point de vue là?
M. Villeneuve: Vous savez que, actuellement, au niveau de la
recherche en ce qui concerne l'évaluation des impacts au niveau mondial,
la plupart des spécialistes se posent des questions sur la
compréhension des impacts cumulatifs. Cette compréhension des
impacts cumulatifs exige une méthode d'analyse qui est encore
inexistante. Nous avons actuellement - c'est une parenthèse - un projet
pour faire du Saguenay-Lac-Saint-Jean un laboratoire du développement
durable et c'est un des endroits où on pourrait examiner et essayer de
développer une méthode sur un bassin versant complet, de
façon à essayer de déterminer des impacts cumulatifs. En
dehors de cela, les études qui considèrent, en fait, toujours
l'impact de l'enlèvement d'un morceau d'un écosystème,
révèlent généralement des impacts qui sont
relativement faibles. Mais laissez-moi vous donner un exemple. Si on vous coupe
un doigt, ça ne vous fait pas trop mal. Si on vous coupe une main, c'est
encore tolerable. Mais, si on commence à vous enlever des gros morceaux,
à un moment donné, vous allez trouver que vous êtes
beaucoup moins fonctionnel Et c'est exactement ce qu'on fait avec les
écosystèmes actuellement. Un peu comme, actuellement, on se
réveille avec des problèmes dans le fleuve Saint-Laurent qui
étaient insoupçonnables il y a 50 ans, on peut se retrouver avec
des problèmes dans certaines régions parce que l'ensemble des
dégradations environnementales crée une synergie qui fait que des
mécanismes plus profonds s'avèrent attaqués alors qu'on ne
pouvait pas le prévoir par les études d'impact. Donc, il y a
quand même de ce côté-là beaucoup de recherche
à faire en ce qui concerne les impacts cumulatifs.
En ce qui concerne la question de dire: Est-ce qu'une forme
d'énergie a des impacts plus importants qu'une autre? Je pense
qu'à l'heure actuelle on le voit bien avec l'effet de serre, avec les
précipitations acides, avec tous ces problèmes-là qui sont
des reflets, justement, de questions où on n'avait pas prévu les
impacts cumulatifs des actions individuelles.
M. Claveau: Dans un autre ordre d'idées, vous avez
soulevé tout à l'heure un point que nous avons abordé
rapidement aussi hier. C'est la question de la conservation d'énergie
vue comme projet de société, si vous voulez, une nouvelle
façon d'envisager un mégaprojet énergétique qui
serait de développer un esprit et d'appuyer cet esprit-là par les
interventions nécessaires pour faire en sorte que l'on se donne des
objectifs globaux de société en termes de conservation
d'énergie.
Le problème qui nous a été soulevé
là-dedans, c'était la question du financement de tout ça
parce que c'est beau d'y aller massivement au niveau de l'idée, mais
l'appui financier ne semble pas être aussi évident. D'abord, vous
semblez être d'accord pour dire que ça serait probablement un des
plus beaux mégaprojets énergétiques qu'on pourrait
développer au Québec, mais est-ce que vous êtes d'accord
avec cette idée-là de la très grande difficulté de
financer une telle opération?
M. Villeneuve: Vous me permettrez de ne pas être d'accord
avec la très grande difficulté de financer un tel projet. En
réalité, les projets d'économie d'énergie se
financent par le fait qu'ils sont économiques, d'abord, mais aussi c'est
que si on voit ce projet-là d'économie d'énergie en
parallèle avec une taxation écologique de l'énergie, on se
rend compte que le financement devient immédiatement disponible. Ce
financement-là, en fait, il est proportionnel aux efforts qu'on met, en
tant que société, dans ce projet-la. Naturellement, je ne veux
pas insister sur la difficulté de gérer des projets collectifs de
cette envergure parce que le nombre d'intervenants est immense et qu'on se
heurte à de l'incompréhension et à des mécanismes
d'évitement qui sont normaux dans une société.
Cependant, je crois que, pour la société
québécoise, ce serait un excellent projet de
société. C'est quelque chose qui nous manque à l'heure
actuelle, un projet de société vers des années d'un
nouveau millénaire. Je pense que la société
québécoise est là pour rester et, en tant que telle, c'est
à travers des projets collectifs comme ceux-là qu'elle va se
développer une identité.
M. Claveau: En terminant, puisqu'on me dit qu'il me reste juste
le temps d'une question, j'aimerais vous entendre élaborer un tant
soit
peu sur la question des énergies alternatives, ou plutôt
sur les modalités ou les façons alternatives de produire de
l'électricité. On a des gens qui sont venus nous parler amplement
du solaire. D'autres sont venus nous parler de la cogénéra-tion
à partir de la biomasse. Bon, d'autres ont défendu la
thèse du gaz naturel dans le chauffage, par exemple, des trucs comme
ça. J'aimerais que vous élaboriez un peu sur ces
hypothèses. (11 heures)
M. Villeneuve: Toutes ces méthodes sont des
méthodes intéressantes pour aller chercher des souces
énergétiques qui nous sont actuellement non disponibles ou
carrément gaspillées ou qu'on ne valorise pas suffisamment. Il y
a toute une valorisation de déchets qui peut se faire. Il y a aussi
l'utilisation des énergies diffuses. On parle, par exemple, des chaleurs
résiduelles qui proviennent des eaux de refroidissement de certaines
industries. On parle de récupération d'une chaleur qui,
actuellement, n'est pas économique à récupérer et
le principe, peut-être, c'est de permettre à l'imagination
d'exercer ses capacités sur ce genre de problème-là. En
fait, il y a un Bureau des économies d'énergie qui a
déjà des ressources et des moyens, mais visiblement, il n'est pas
supporté tellement par le gouvernement à l'heure actuelle. C'est
un organisme qui devrait avoir un statut de conseil consultatif et vraiment
donner des contrats de recherche, des travaux, pour aller chercher l'expertise
où elle se trouve à l'intérieur de nos créateurs
québécois mais aussi à l'extérieur, ailleurs dans
le monde, pour pouvoir développer des expériences d'adaptation de
technologique. Le principe, c'est que, lorsqu'on est innovateur, les autres
nous copient, mais on peut toujours leur enseigner comment nous copier.
Je pense que le défi dans la question de l'efficacité
énergétique, c'est d'être à l'avant parce que - le
rapport Brundtland, nous le montre bien - ce n'est pas possible qu'on continue,
à l'échelle globale, de consommer autant de ressources
énergétiques. On est quand même un très petit
pourcentage de l'humanité et on dépense, au point de vue
énergétique, les ressources qui sont nécessaires pour les
générations futures.
Le Président (M. St-Roch): De brèves remarques de
conclusion, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Je vous remercie pour votre intervention qui est
très intéressante, enfin qui nous amène des
compléments de réflexion pour les travaux de la commission.
Peut-être que, pour les questions de covoiturage, le gouvernement
pourrait donner l'exemple, on ne sait pas; éventuellement, on pourrait
mettre deux ministres par limousine.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, M. le
député d'Ungava. Mme la ministre.
Mme Bacon: C'est rare qu'ils vont au même endroit en
même temps. Je voudrais vous remercier, Enjeu et Environnement Jeunesse,
de votre présentation aujourd'hui et, aussi, du mémoire que vous
nous aviez déjà fait parvenir et qui a été, pour
nous, fort intéressant à lire et à analyser et vous
féliciter pour le travail que vous avez fait. J'ai déjà eu
l'occasion d'être plus près de vous dans d'autres fonctions et je
dois dire que j'apprécie toujours ce qui est fait par vous. Merci
beaucoup.
Le Président (M. St-Roch): Merci, Mme la ministre. Je
tiendrais, au nom de tous les parlementaires, à remercier les
porte-parole de Enjeu et Environnement Jeunesse inc., pour leur contribution
aux travaux de cette commission. Et sur ce, je demanderais maintenant aux
représentants du Club d'électricité de Montréal
inc., de bien vouloir prendre place s'il vous plaît. Permettez-moi, dans
un premier temps, de vous souhaiter la bienvenue à la commission de
l'économie et du travail. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir
s'identifier, s'il vous plaît, ainsi que les membres qui l'accompagnent,
pour le bénéfice des parlementaires et du Journal des
débats.
Club d'électricité de Montréal
inc.
M. Séguin (Maurille): Merci, M. le Président. Mme
la ministre, distingués membres de la commission, mon nom est Maurille
Séguin, président de Douserv inc., une société
d'ingénieurs-conseils. Je suis ici à titre d'ex-président
du Club d'électricité de Montréal. Je suis
accompagné, pour l'occasion, de M. Gilles Girard, directeur du marketing
- à ma gauche - GE, General Electric du Canada, et membre du conseil
d'administration du Club. À sa gauche, M. Antoine Backhangi, conseiller
technique chez Westinghouse Canada, membre du conseil d'administration du Club;
à ma droite, M. Normand Pomerleau, vice-président de Hervé
Pomerleau inc., et membre du Club, et Mme Francine Mathieu-Séguin,
secrétaire générale du Club.
Le Président (M. St-Roch)): À partir de ce
moment-ci, M. le président, vous avez maintenant 20 minutes pour
déposer votre mémoire.
M. Séguin (Maurille): Merci. Fondé en 1916, le Club
d'électricité est un organisme à but non lucratif qui se
veut le carrefour de l'industrie électrique au Québec. Le Club a
pour mission de fournir à l'industrie électrique un forum et une
tribune pour en promouvoir les intérêts professionnels,
économiques et commerciaux.
Le Club poursuit surtout trois buts: promouvoir les interrelations entre
les organismes
intéressés à l'électricité; organiser
des événements afin de favoriser la synergie entre les
entreprises ou sociétés du Québec concernées par
l'industrie électrique; et troisièmement, contribuer de
façon générale à faire connaître dans les
différents publics intéressés les apports
économiques et points de vue du monde de
l'électricité.
Le Club d'électricité compte plus 250 membres individuels,
représentant au-delà de 120 compagnies des plus importantes dans
le domaine de l'électricité. Les manufacturiers fournisseurs de
gros équipements électriques, founisseurs d'équipements
connexes à l'indutrie électrique représentent 46 % de nos
membres, et les ingénieurs-conseils, 26 %. Il y a aussi une
représentation d'Hydro-Québec, en tant que producteur
d'électricité, à 13 % du membership; les entrepreneurs en
construction en représentent 10 % et il y a d'autres membres pour 5
%.
Depuis sa fondation en 1916, le Club d'électricité
organise des déjeuners-causeries auxquels participent des
conférenciers sélectionnés parmi les têtes
dirigeantes des services publics, des industries de pointe, des institutions
financières ou parmi les ministres provinciaux et
fédéraux. Je crois en fait que tous les ministres de
l'Énergie du Québec sont passés par notre tribune et j'ose
croire, Mme la ministre, que vous ne briserez pas cette belle tradition et que
vous serez des nôtres à la saison qui débute en
octobre.
À son assemblée annuelle, le mois dernier, le Club
d'électricité de Montréal inc. a changé son nom
pour Club d'électricité du Québec inc., pour être
plus représentatif de l'origine de ses membres et de l'étendue de
ses activités. En tant que représentant des principaux
intervenants dans le secteur de l'électricité au Québec,
le Club d'électricité du Québec tient à profiter de
l'occasion qui lui est fournie dans le cadre de cette commission parlementaire
pour formuler sa position face au plan de développement
d'Hydro-Québec et ce, sur deux points de vue. Premièrement, du
point de vue d'un grand nombre de fournisseurs de produits et services, et
deuxièmement, du point de vue d'un groupe important de consommateurs
industriels de l'électricité.
D'abord, le Club d'électricité en tant que
représentant des fournisseurs de produits et services en
électricité au Québec. Notre intervention dans ce secteur,
M. le Président, s'inscrit en sept volets.
Le premier volet, le développement de
l'hydroélectricité dans la perspective d'un développement
durable. Le Club d'électricité considère que les objectifs
énoncés dans le plan de développement
d'Hydro-Québec, visant à ce que notre société
s'oriente vers un développement durable en harmonie avec
l'environnement, sont conformes aux critères proposés et
définis dans le rapport de la Commission mondiale sur l'environnement et
le développement. Je parle bien entendu du rapport Brundtland
publié en 1987. Dans l'état actuel de la technologie et compte
tenu que les besoins continueront néanmoins de croître au cours
des dix prochaines années, c'est avec l'hydroélectricité
que notre société peut le mieux souscrire à cet objectif,
et ce, avec le moins de compromis pour le respect de l'environnement, le
développement de son économie et l'amélioration de sa
qualité de vie.
Bien sûr, nous souscrivons à la nécessité
d'effectuer des études d'impact environnemental, mais notre industrie
s'inquiète des délais que ces études requièrent,
actuellement. Elles ont trop souvent pour effet de diminuer le temps de
conception et de réalisation des projets, ce qui entraîne des
risques pour notre industrie à pouvoir répondre
adéquatement aux demandes de produits et services.
Nous endossons le plan de développement de
l'hydroélectricité au Québec, souhaitant vivement voir
cette source d'énergie continuer à s'imposer vis-à-vis des
autres sources d'énergie, afin de permettre à notre
société de s'orienter vers un développement plus
durable.
Le deuxième volet traite de la prévision de la demande
d'électricité. Le scénario d'un accroissement de la
demande d'électricité de 2 % en moyenne par année au cours
des dix prochaines années comporte certains risques et inquiète
notre industrie quant à sa capacité de répondre rapidement
et adéquatement à une accélération soudaine du taux
de croissance. D'ailleurs, la revue Au courant, dans son édition
de janvier-février 1990, mentionne que l'an passé, nos voisins,
Ontario Hydro, avaient prévu une augmentation annuelle de la demande de
3 %. La réalité: 12 %. La conséquence: Ontario Hydro devra
dépenser quelque 900 000 000 $ pour investir dans un programme
d'économie d'énergie.
Si nous manquons de capacité énergétique,
Hydro-Québec devra acheter l'énergie manquante des réseaux
voisins, contribuant ainsi à la dégradation de notre
environnement, puisque cette énergie est souvent produite à
l'aide d'anciennes centrales thermiques classiques, souvent très
polluantes. Nous supportons un scénario cible de croissance axé
sur un taux d'accroissement de la demande plus élevé, qui
tiendrait compte d'une plus grande marge de manoeuvre.
Le troisième volet traite de la fiabilité et de la
qualité du service d'Hydro-Québec. Les investissements
prévus au plan de développement pour améliorer la
fiabilité des réseaux de transport et de distribution, de
même que la qualité du service, sont essentiels pour faire de
l'électricité une source d'énergie qui réponde aux
critères de qualité de notre société d'aujourd'hui.
Il est impérieux que la fiabilité d'approvisionnement et la
qualité du service atteignent un niveau qui soit au moins comparable
sinon supérieur à celui des producteurs
d'électricité les plus performants.
Le quatrième volet traite de la recherche, du
développement et de la promotion des économies d'énergie.
Dans ce domaine, nous endossons encore une fois le programme à long
terme d'économies d'énergie d'Hydro-Québec, et nous
souhaitons que le volet sur la recherche et le développement soit
développé avec une attention particulière.
Le cinquième volet. L'électricité: moteur de
développement économique. Au Québec, l'industrie de
l'électricité emploie directement ou indirectement des dizaines.
de milliers de travailleuses et travailleurs. Le plan de développement
d'Hydro-Québec permettra de maintenir et même d'accroître
ces emplois au cours des 10 prochaines années. En poursuivant le
développement de l'hydroélectricité, notre industrie se
sent justifiée d'accroître ses efforts de recherche en vue
d'améliorer les technologies actuelles de conception, de
réalisation et d'exploitation des centrales hydroélectriques et
des réseaux de transport. Cela engendrera d'importantes retombées
économiques pour le Québec. De plus, les manufacturiers et les
fournisseurs québécois peuvent ainsi investir dans l'augmentation
de leur productivité, ce qui leur permet d'avoir des prix plus
compétitifs et, par conséquent, d'être plus concurrentiels
sur le marché international.
Le sixième volet, l'électricité et l'environnement.
L'hydroélectricité est la forme d'énergie la plus
compatible avec nos préoccupations fondamentales en matière
d'environnement, en ce qui a trait à l'émission de produits
polluants et à la limitation des risques de catastrophe
écologique.
Finalement, M. le Président, le septième et dernier volet
dans ce premier secteur d'intervention: Hydro-Québec et le partenariat.
Il est désormais essentiel qu'Hydro-Québec puisse compter sur ses
partenaires techniques autant que sur ses partenaires économiques. Le
partenariat entre tous les intervenants du milieu de l'énergie devient
désormais essentiel au développement harmonieux et viable de
l'hydroélectricité. Dans cette perspective, le Club
d'électricité fait partie des organismes auxquels
Hydro-Québec doit s'associer pour assurer le succès de son
entreprise. Le partenariat doit être promu et concrétisé,
particulièrement dans le secteur de la recherche et du
développement et celui du développement du personnel
qualifié. (11 h 15)
Le deuxième secteur d'intervention, M. le Président,
portera sur le Club d'électricité en tant que représentant
d'un groupe important de consommateurs industriels d'électricité,
et s'inscrit en trois volets.
Le premier, la tarification de l'électricité. Il est
normal qu'Hydro-Québec veuille assurer une saine gestion de son
entreprise et que, pour ce faire, elle ait recours à des augmentations
de tarifs qui lui permettent d'atteindre les seuils de rentabilité qui
lui sont nécessaires. Nous souhai- tons cependant que des efforts
additionnels soient consentis en vue de l'amélioration de sa
productivité et ce, afin de limiter les augmentations de tarifs. Les
augmentations freinent les développements de l'industrie et, de ce fait,
vont à rencontre des objectifs de développement durable.
Le deuxième volet, la promotion des économies
d'énergie. Nous endossons le programme d'économie
d'énergie d'Hydro-Québec, en autant qu'il fasse l'objet d'une
politique à long terme, et souhaitons vivement qu'il aura des
retombées positives sur notre propre industrie. Pour que ce programme
soit une réussite, dans sa forme actuelle, nous aimerions qu'il soit
amplifié et qu'Hydro-Québec engage des fonds plus substantiels
dans des programmes de recherche, de développement et de
démonstration en économies d'énergie dans le secteur
industriel. Les membres du Club d'électricité sont prêts
à s'associer à cet effort.
Le troisième volet dans ce secteur traite du service à la
clientèle. Devant l'importance qu'Hydro-Québec accorde
aujourd'hui à l'utilisation de l'électricité dans
l'industrie, il devient essentiel qu'elle assure un support direct à sa
clientèle industrielle pour s'assurer que l'objectif poursuivi soit
atteint. Hydro-Québec propose d'améliorer la qualité de
ses relations avec la clientèle. Elle se doit de rehausser sa
réputation d'entreprise avant-gardiste, efficace et soucieuse de la
qualité de ses relations avec les clients.
M. le Président, en guise de conclusion, permettez-moi de faire
le sommaire des positions du Club d'électricité du Québec.
Nous considérons que le plan de développement
d'Hydro-Québec répond adéquatement aux besoins, aux
préoccupations et aux aspirations actuelles de notre
société. Nous fondons cette affirmation principalement sur cinq
éléments. 1° Les Québécois et les
Québécoises veulent plus d'énergie pour satisfaire leurs
aspirations en matière de qualité de vie et de
développement économique et ce, dans un contexte d'un
développement durable; 2° Les Québécois et les
Québécoises souhaitent parvenir à une utilisation plus
efficace de l'énergie; 3° Les Québécois et les
Québécoises désirent que la fourniture
d'électricité soit plus fiable et comporte un service à la
clientèle, un service, même, amélioré; 4° Les
Québécois et les Québécoises veulent que
l'hydroélectricité continue d'être un moteur de
développement technologique et économique pour le Québec;
5° Les Québécois et les Québécoises aspirent
à ce que Hydro-Québec parvienne à ce degré
d'excellence que toute société exige d'un de ses plus grands
éléments de fierté nationale.
Pour atteindre cet objectif, nous souhaitons éveiller et inciter
le gouvernement du Québec et Hydro-Québec à
intégrer un certain nombre
d'améliorations et d'ajustements au plan de développement
qu'Hydro-Québec a soumis J'en mentionne quatre, en particulier, que nous
considérons importants. Il s'agit de la prévision du taux de
croissance, les hausses de tarifs, le partenariat et la promotion des
économies d'énergie.
En ce qui a trait à la prévision du taux de croissance,
à 2 % en moyenne par an pendant 10 années, ça comporte
certains risques quant à la capacité dé répondre
adéquatement à une accélération rapide de la
demande d'électricité. Nous demandons une
réévaluation du taux de croissance prévu et nous
suggérons fortement de l'augmenter sensiblement.
Pour limiter les hausses de tarifs d'électricité, nous
incitons Hydro-Québec à consentir des efforts plus importants
dans l'amélioration de sa productivité.
Troisièmement, le partenariat entre les intervenants du milieu
doit être davantage structuré et renforcé, pour une
meilleure synergie des efforts en recherche et développement et une
meilleure planification des services de conception et de réalisation des
projets.
Et quatrièmement, il faut amplifier la promotion des
économies d'énergie, pour qu'elle connaisse un succès dans
le milieu industriel, en particulier. M. le Président, Mme la ministre,
membres de la commission, parvenir à un développement durable est
un défi de taille. Nous en acceptons les objectifs et tenons à
faire partie de ceux qui fourniront à notre société les
moyens d'y parvenir.
Le Président (M. St-Roch): Je vous remercie, M.
Séguin. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre.
Mme Bacon: M. Séguin, M. Girard, M. Bachkangi, M.
Pomerleau et Mme Mathieu-Séguin, je vous remercie de votre
intérêt à cette commission parlementaire, qui revêt
une importance toute particulière, je pense, compte tenu des grandes
discussions que nous avons en ce moment au sujet du plan de
développement que nous propose Hydro-Québec. Mais en même
temps, aussi, je pense qu'on a voulu élargir à cette commission
parlementaire un mandat de grande discussion sur l'énergie
électrique. C'est avec intérêt que je constate que le Club
de l'électricité représente à la fois des
fournisseurs de produits et de services et aussi un groupe important de
consommateurs industriels d'électricité.
Vous êtes au moins les troisièmes intervenants qui
affirment, devant cette commission, que les prévisions de la demande
d'Hydro-Québec devraient être réévaluées
à la hausse. Sur quoi fondez-vous vos appréhensions d'une demande
d'électricité plus forte que prévue?
M. Séguin (Maurille): Dans un premier temps, Mme la
ministre, à la lecture du plan de développement
d'Hydro-Québec, quand on constate sur quoi ils fondent la cible de 2 %,
c'est bien entendu sur l'historique et aussi sur un plan très optimiste
de conservation de l'énergie. Nous mettons ici en doute la
réussite du plan de conservation d'énergie, où
Hydro-Québec prétend, dans les dix prochaines années,
conserver 12,9 térawattheures. Nous pensons qu'ils ne réussiront
pas à faire conserver autant d'énergie à la population
québécoise. Nous pensons que les Québécois,
certainement, sont conscients et seront sérieux dans leur
économie d'énergie, dans leurs efforts d'économie
d'énergie, mais nous doutons sérieusement qu'ils pourront
atteindre une économie d'énergie à la hauteur des attentes
d'Hydro-Québec.
Et ces 2 % nous semblent bas, aussi, si on compare avec nos voisins de
l'Ontario. Ontario Hydro est une société qui est très
parallèle à Hydro-Québec, comme vous le savez. D'ailleurs,
les profits, l'an passé, étaient à quelques milliers de
dollars près l'un de l'autre. Le nombre d'employés est à
quelques employés près. Enfin, le parallèle est
très bon entre les deux sociétés. Eux, l'an passé,
avaient prévu 3 %. La réalité, c'est que c'a
été 12 %.
Mme Bacon: On doit dire... Certains intervenants ont quand
même dit devant cette commission que les objectifs d'Hydro-Québec
étaient modestes. D'autres intervenants nous affirment qu'ils sont
ambitieux, et à la limite, qu'ils sont irréalistes. Comment
réagissez-vous devant ça?
M. Séguin (Maurilie): Bien, nous, nous pensons qu'ils ne
sont pas ambitieux, définitivement. Nous préconisons une cible
plus élevée, comme je l'ai mentionné tantôt, parce
que les effets en bout de ligne pourraient devenir très importants. Et
je m'explique là-dessus. C'est que si, par exemple, Hydro-Québec
prévoit la mise en service de certaines installations majeures pour
pallier à une croissance de 2 % par année, on risque de se
retrouver dans 10 ans avec une capacité insuffisante d'énergie.
Alors, bien entendu, la demande est là. Il faudra pallier à cette
demande-là. Comment peut-on le faire? Il s'agit, je pense, en un premier
temps, de considérer d'acheter l'énergie ailleurs. Si on est
obligés d'acheter de l'énergie ailleurs, est-ce que ces sources
d'énergie seront aussi économiques? Sûrement pas. Et nous
osons croire, aussi, qu'elles seront beaucoup plus polluantes.
Mme Bacon: En fait, ce que je mentionnais - je m'en excuse,
j'aurais dû le redire -c'est au niveau des programmes d'économies
d'énergie qui sont proposés par Hydro-Québec. Encore une
fois, il y a des intervenants, au niveau des programmes d'économies
d'énergie, qui nous disent que ces programmes d'Hydro-Québec sont
modestes. Il y en a d'autres qui nous disent
qu'ils sont ambitieux, qu'ils sont irréalistes. C'est de trouver
le juste milieu entre les deux perceptions, par exemple. J'ai l'impression que
vous nous dites qu'ils sont aussi modestes par rapport à ce que d'autres
ont perçu, en économie d'énergie.
M. Séguin (Maurille): En économie d'énergie,
toujours, bien entendu. Non, nous croyons que le plan d'Hydro-Québec, en
économie d'énergie, est ambitieux. C'est-à-dire que leurs
attentes sont très élevées. Nous ne croyons pas qu'ils
réussiront à faire économiser autant d'énergie par
les Québécois.
Mme Bacon: Vous ne croyez pas qu'ils réussiraient à
persuader les Québécois de faire vraiment des économies
d'énergie dans les années qui viennent, par exemple.
M. Séguin (Maurille): Ils vont réussir, mais pas
à l'étendue qu'ils s'attendent.
Mme Bacon: Vous faites aussi part de vos inquiétudes quant
aux délais qui sont relatifs aux études d'impact sur
l'environnement. Quels sont les éléments de solution que vous
pouvez soumettre, aujourd'hui, devant cette commission, pour peut-être
dissiper vos inquiétudes tout en nous permettant une protection
adéquate de l'environnement?
M. Séguin (Maurille): Je pense qu'en matière
d'énergie électrique, nous sommes très fortunés, au
Québec, d'avoir des ressources naturelles qui nous permettent de
produire de l'électricité, avec les richesses en eau qu'on
retrouve largement au Nord du Québec, bien entendu. Et je pense que
cette façon de produire de l'électricité est certainement
la moins polluante que l'on connaisse, en ce moment.
Mme Bacon: Vos préoccupations, encore une fois, par
rapport à la qualité de la vie apparaissent bien clairement. Je
vais vous citer. Vous nous dites: II faut veiller à ce que l'utilisation
de cette énergie, dans l'industrie en particulier, ne produise pas
à son tour des rejets qui viendraient détruire les effets
bénéfiques de l'hydroélectricité. Quels seraient
les effets bénéfiques de l'hydroélectricité, au
niveau environnemental?
M. Séguin (Maurille): Dans ce que vous avez cité,
Mme la ministre, ce qu'on tentait de démontrer par ce paragraphe en
particulier, c'est un peu un rôle connexe à Hydro-Québec,
mais un rôle qui ne lui appartient pas réellement.
C'est-à-dire qu'Hydro-Québec, en tant que fournisseur
d'électricité - c'est peut-être un voeu pieux qu'on
émet, je l'admets - permet à certaines industries
d'opérer. Si ces industries n'avaient pas d'électricité,
elles ne pourraient pas opérer, et ces industries-là pourraient
être polluantes. Alors, on suggère ici, et on le fait sous toutes
réserves, qu'Hydro-Québec aurait peut-être à ne pas
offrir de l'électricité, ou pourrait peut-être avoir
certaines restrictions quant à la fourniture d'électricité
pour une industrie qui est réellement polluante.
Mme Bacon: Concernant les objectifs de développement
durable, vous affirmez qu'en matière d'énergie, il y a des
changements fondamentaux qui sont nécessaires et que ces changements
doivent comporter une utilisation plus rationnelle de l'énergie et le
recours à des sources d'énergie propre et renouvelable. Est-ce
que vous pourriez peut-être préciser la nature des changements
fondamentaux qui pourraient être anticipés, à part
l'hydroélectricité? Est-ce qu'il y a d'autres sources
d'énergie propre et renouvelable auxquelles vous faites allusion dans
votre mémoire?
M. Séguin (Maurille): Je vais demander à M. Girard
de vous répondre, Mme la ministre.
M. Girard (Gilles): Mme la ministre, dans ce volet-là, ce
que l'on regarde, du point de vue industrie, c'est réellement une
concertation, une consultation avec Hydro-Québec, pour qu'on puisse,
ensemble, en équipe, arriver a développer des moyens de
production efficaces. Des moyens de production qui, dans un certain sens, vont
consommer moins d'énergie et, parallèlement à ça,
vont permettre aux industries, à ce moment-là, d'augmenter leur
niveau de productivité tant locale que nationale, et même
internationale. (11 h 30)
Mme Bacon: Les délais d'ingénierie, de production
du matériel requis pour réaliser des nouvelles installations,
advenant la nécessité de devancer certains projets, pourraient
devenir trop courts - écrivez-vous en page 7 de votre mémoire -
pour permettre d'y parvenir tout en intégrant les critères de
développement durable. Est-ce que vous pouvez préciser les
critères applicables aux activités que je viens de citer?
L'ingénierie, la production de matériel...
M. Séguin (Maurille): Ici, on parle d'études
d'ingénierie, et aussi d'études connexes au niveau de
l'environnement. Bien sûr, on veut être, on veut se comporter, en
tant que concepteur de ces équipements-là, en bon père de
famille, et concevoir des équipements et des installations
hydroélectriques qui sont le moins polluants possible. C'est pourquoi
nous sommes d'accord avec les études, aussi, sur l'environnement. Ce que
nous soulignons, là-dedans, c'est que si on fait
énormément d'études, bien entendu, on compresse à
la fin, en bout de ligne, le temps de fabrication et d'installation de ces
équipements-là. Et ces retards-là, encore, pourraient
avoir pour effet de nous forcer, encore une fois, à
importer de l'électricité pour combler les demandes de
consommation, électricité qui serait plus polluante que le
résultat net d'économie sur les éléments polluants
qu'on a faits, résultant des études du départ. M. Girard
avait quelque chose à ajouter.
M. Girard: Je pourrais peut-être me permettre de rajouter
un volet qui est quand même très important, ici. Dans la
conception et la fabrication des équipements pour tous ces projets
là, les manufacturiers en tant que tels font des études
détaillées en vue d'améliorer, justement, le rendement de
ces équipements-là. Et pour faire ces études-là, il
y a un temps minimum qui est quand même requis, afin qu'on puisse obtenir
des résultats positifs qui vont aller, justement, vers l'augmentation de
rendement. Des retards, justement, ou des délais trop longs dans les
fameuses études en question réduisent substantiellement le temps
alloué au fabricant pour être capable d'atteindre ses objectifs
d'augmentation de rendement de ces propres équipements-là. Ce
qui, par rebond, à ce moment-là, permet d'en arriver à des
économies d'énergie quand même.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
M. Séguin (Maurille): Je pense que M. Po-merleau voulait
ajouter quelque chose, si vous permettez, aussi.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
M. Pomerleau (Normand): II y a aussi, Mme la ministre, le
côté main-d'oeuvre qu'il faut considérer. On sait que le
Québec, présentement, souffre d'une pénurie de
main-d'oeuvre, de formation de main-d'oeuvre, une pénurie de
main-d'oeuvre spécialisée. Il faudrait essayer de,
peut-être, régulariser l'étendue des projets, de
façon à ce qu'il n'y ait pas de demande subite de main-d'oeuvre,
ce qui pourrait aussi nous causer un problème dans l'exécution
des travaux.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député de Beauce-Nord.
M. Audet: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, je
vous souhaite la bienvenue, et vous me permettrez de souhaiter d'une
façon toute particulière la bienvenue à M. Pomerleau, qui
est de ma région, de la Beauce. Puisqu'un peu de publicité n'a
jamais fait de mal à personne, je me permets de reprendre une ligne de
la page 13 du mémoire: Groupe Pomerleau est en train de parvenir
à ce degré d'excellence pour devenir un de nos
éléments de fierté beauceronne et bientôt,
probablement, national. M. Pomerleau, bonjour. Je voudrais...
Le Président (M. Bélanger): La commission est non
partisane. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Audet: Je veux reprendre un peu, dans votre conclusion, les
sommaires des positions du Club d'électricité. Vous dites,
à un moment donné: "Nous fondons cette affirmation sur les
éléments suivants". Vous dites, bon, "les
Québécois". Ces éléments que vous mentionnez
là, est-ce que c'est à partir de sondage, ou de... Vous prenez
ça où, là, pour... Vous nous dites ça comme
ça, parce que vous dites: "Les Québécois veulent plus
d'énergie pour satisfaire leurs aspirations en matière de
qualité de vie et de développement économique". Et puis,
c'est un peu, c'est contradictoire beaucoup, avec ce que certains groupes nous
ont dit, que des grands projets comme ceux qu'on a présentement, ou
qu'on prévoit ou qu'Hydro-Québec prévoit dans son plan de
développement, portent atteinte à notre qualité de vie,
à la qualité de vie des Québécois. Est-ce que vous
pourriez... D'abord, deux questions. Où vous prenez ces
éléments-là? Puis deuxièmement, comment vous
pouvez... Vous vous basez sur quoi, pour affirmer ça?
M. Séguin (Maurille): Les éléments ne sont
pas basés sur un sondage récent. C'est bien populaire, des
sondages, là Le Club d'électricité n'est pas dans le
domaine des sondages. Le Club d'électricité regroupe les
principaux intéressés du domaine électrique au
Québec et ce, depuis 1916. Alors on a, si vous voulez, un sondage
constant chez nous. On est toujours à l'écoute des besoins des
spécialistes de l'électricité. Et, quand on parle des
Québécois et Québécoises, je vous concède
qu'on ne parle peut-être pas au nom de 100 % des Québécois
et des Québécoises, mais des Québécois et
Québécoises qui sont représentatifs du domaine de
l'électricité et spécialisés dans le domaine de
l'électricité, en d'autres mots, les membres du Club
d'électricité du Québec.
M. Audet: D'accord. Deuxièmement, vous mentionnez... Je
viens de le mentionner. Enfin, vous aspirez à ce qu'Hydro-Québec
parvienne à ce degré d'excellence que toute société
exige dans un de ses plus grands éléments de fierté
nationale On a soulevé qu'il y a quelques années encore... On se
rappelera de la publicité d'Hydro-Québec où chaque
Québécois, je pense, était très fier de cette
compagnie-là. On disait qu'on était 12 012 à
Hydro-Québec. Finalement, on n'est pas 12 012 On est 3003 qui se fendent
en quatre pour vous servir tout ça. Aujourd'hui, malheureusement,
ça s'est un peu détérioré. Et je veux rattacher
ça à la productivité. Vous dites un peu plus loin: "Nous
incitons Hydro-Québec à consentir des efforts plus importants
dans l'amélioration de sa productivité." Votre incitatif,
est-ce que ce sont des recommandations que vous faites? Parce que, pour
la plupart d'entre vous, vous êtes des gens qui venez du privé
où la productivité vous préoccupe, puisqu'à la fin,
les profits sont directement rattachés à ça. Est-ce que,
comme incitatifs pour vous, ce sont des recommandations que vous faites
à Hydro? Comme club, des moyens que vous pourriez leur fournir ou leur
donner? Je ne sais pas moi.
M. Séguin (Maurille): Oui, il y a certainement des moyens,
M. le député que te club peut fournir à
Hydro-Québec et c'est pour ça qu'on suggère fortement le
partenariat avec HydroQuébec. Je pense qu'Hydro-Québec aurait
tout à gagner à s'associer avec le Club
d'électricité du Québec et ses membres, les industriels,
les ingénieurs ou les concepteurs d'équipements
électriques, pour produire des équipements et concevoir des
équipements plus productifs.
M. Audet: Une dernière question. Si HydroQuébec
améliore grandement sa productivité et qu'on reprend des
éléments de mémoires qui ont été
déposés ici à l'effet... vous vous dites pour limiter les
hausses de tarifs d'électricité, mais qu'Hydro-Québec
améliore sa productivité considérablement, mais qu'on
continue quand même à augmenter les tarifs
d'électricité, une sorte de taxe écologique, comme
ça nous a été recommandé ici, est-ce que vous ne
prévoyez pas, à ce moment-là, qu'on aura des besoins
énergétiques qui seront moins grands, d'une part? Et, est-ce
qu'à ce moment-là ces surplus-là ne pourront pas
être... Comment est-ce que je dirais ça? C'est parce qu'on dit
qu'au Québec on est des grands consommateurs
d'électricité. Alors est-ce qu'on doit, comme certains pays,
freiner cette grande consommation-là pour plutôt la laisser
excédentaire et aller la vendre sur d'autres marchés? Je ne sais
pas si vous comprenez ce que je veux...
M. Séguin (Maurille): Oui, je ne crois pas qu'on puisse
réellement freiner ce développement et cette croissance de la
demande d'électricité au Québec. La simple raison... Je
pourrais peut-être vous démontrer ici par une simple comparaison.
Si on regardait ce que l'on retrouvait dans une cuisine, il y a 10 ans, au
niveau de consommateurs d'électricité, d'équipement, du
petit équipement de comptoir de cuisine. Regardez aujourd'hui et essayez
de visualiser en l'an 2000. Je prétends, et les membres du club
prétendent, que la consommation d'électricité au
Québec va toujours aller en augmentant.
M. Audet: D'accord, je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): M le
député de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président. À la lecture de
votre mémoire à la page 10, on parle du partenariat, mais surtout
au niveau de la recherche, mais j'aimerais... Parce qu'à la lecture de
ça, ça sous-entend du moins qu'il pourrait y avoir une
participation beaucoup plus accentuée de la part d'Hydro envers les
différents intervenants au niveau de la recherche et de la conception.
Et une dernière phrase dans votre mémoire, en plus gras, dit:
"...et celui du développement du personnel qualifié." J'aimerais
vous entendre élaborer un peu plus sur cette conclusion à
laquelle vous arrivez au niveau du type de partenariat que vous souhaiteriez
d'Hydro-Québec, au niveau de la recherche, mais aussi au niveau du
développement du personnel qualifié.
M. Séguin (Maurille): La question est très bien
posée, M. le député. Si - encore une fois je me sers d'un
exemple pour démontrer ce dont on parle ici - on retourne à la
Baie James originale, le projet de la Baie James, Hydro-Québec, à
ce moment-là, a choisi l'application du partenariat avec Bechtel et
Lavalin. Tout le monde connaît le grand succès qu'une de ces
sociétés-là a connu au Québec, ce n'est plus
à refaire. On a créé ici une capacité de personnel
qualifié dans le domaine de l'hydroélectricité. On l'a
amplifié, on l'a amélioré. Pourquoi? À cause de ce
partenariat qu'Hydro-Québec a fait avec les sociétés
d'ingénieurs-conseils. Les sociétés
d'ingénieurs-conseils, à ce moment-là au Québec,
n'étaient peut-être pas aussi qualifiées que nos voisins du
sud, en l'occrurence Bechtel, mais en s'associant avec l'une de nos
sociétés ici, on a monté une connaissance en
hydroélectricité maintenant qui fait l'envie mondiale de bien des
firmes d'ingénieurs-conseils.
M. St-Roch: Alors vous souhaitez la même chose, j'imagine,
au niveau de l'économie d'énergie ou au niveau de la
construction.
M. Séguin (Maurille): Pas nécessairement avec les
mêmes partenaires, mais le même genre d'association.
M. St-Roch: Le même genre d'approche... M. Séguin
(Maurille): Exact.
M. St-Roch: ...avec les autres secteurs d'activité.
M. Séguin (Maurille): C'est bien ça. M. St-Roch:
Merci, monsieur.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député. M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
souhaiter la bienvenue devant la commission au Club d'électricité
de Montréal inc.
Vous avez dit que c'est changé de nom? Le Club
d'électricité du Québec. C'est peut-être
effectivement plus représentatif pour quelqu'un qui vient d'en dehors de
Montréal en tout cas. Ça...
Une voix: ...il n'y a pas de club
d'électricité?
M. Claveau: II n'y en a pas. Les contrac-teurs ne sont pas assez
gros. Ha, ha, ha! J'ai un petit problème, d'aucuns pourront le qualifier
d'existentialiste, je ne le sais pas, avec votre conclusion. Quand vous parlez
au nom des Québécois et vous dites: Les Québécois
veulent de l'énergie, veulent satisfaire leurs besoins, ils souhaitent,
ils désirent, ils veulent et ils aspirent. C'est la cinquième
journée qu'on a des Québécois et des
Québécoises de toute origine qui se présentent devant la
commission et qui nous expriment ce qu'ils veulent, ce qu'ils souhaitent et
leurs aspirations. Il y a une coalition qui s'est présentée
devant nous en nous disant que, en ce qui les concerne, ils représentent
un nombre important de Québécois; qui nous dit que les
constructions, il faudrait peut-être y mettre un frein, qu'on aurait
avantage à regarder plus globalement le problème, mais aussi,
qu'on aurait avantage à faire une vaste enquête publique pour
connaître les tenants et les aboutissants de toute cette
histoire-là de production d'électricité au
Québec.
On a des associations de consommateurs aussi qui représentent
quelques individus à travers le Québec, de nombreux individus qui
nous ont dit que l'électricité, ça commençait
à coûter drôlement cher et qu'on avait peut-être
intérêt à mettre la pédale douce aussi sur le
développement de nouvelles infrastructures très coûteuses
pour des besoins qui leur semblent, à bien des égards,
hypothétiques. Ils veulent qu'on considère
l'électricité comme un besoin essentiel et qu'à ce
titre-là, on devrait en revoir toute la stratégie de
développement et d'utilisation. On a des groupes
spécialisés aussi de toute sorte de nature qui se sont
présentés devant nous et qui plaident eux en faveur
d'alternatives, d'énergie alternative, d'alternatives de production de
l'électricité, qui nous ont parlé de l'économie
générale de l'électricité au Québec et qui,
pour la plupart, ne sont pas tout à fait d'accord, avec les orientations
d'Hydro-Québec. (11 h 45)
On a des experts aussi de toute nature, universitaires,
indépendants, contractuels qui, en ce qui les concerne, critiquent ou
requestionnent à bien des égards, même d'une façon
très sévère, les thèses d'Hydro-Québec,
quant à la rentabilité des constructions quant aux
possibilités d'investir autrement que dans du béton. Et tout
ça a comme trame de fond finalement, et ça a été
relevé continuellement, toute la question environnementale,
l'utilisation des territoires, le développement régional,
l'impact dans le milieu, l'intérêt des populations directement
concernées. Finalement, quand je fais rapidement un tour de tout ce qui
nous a été dit, j'ai de la difficulté à le
concilier globalement au nom des Québécois avec votre
mémoire. Et pourtant vous nous dites que c'est ça que les
Québécois veulent et vous nous donnez un certain nombre de
définitions de ce que les Québécois cherchent en termes
énergétiques. Tout ça pour vous demander finalement sur
quoi se base cette affirmation-là que vous nous faites.
M. Séguin (Maurille): Si l'on prend ces
éléments-là un à un, on dit là-dedans que
les Québécois et les Québécoises souhaitent
parvenir à une utilisation plus efficace de l'énergie. Est-ce que
celle-là est contestée? Je ne crois pas.
M. Claveau: Ça va.
M. Séguin (Maurille): Bien. Une deuxième disait que
les Québécois et Québécoises désirent que la
fourniture d'électricité soit plus fiable et comporte un service
à la clientèle. Je ne pense pas que ce soit contesté
ça non plus. Il y en a une qui serait peut-être contestée,
c'est la suivante: ils veulent que l'hydroélectricité continue
d'être un moteur de développement technologique et
économique pour le Québec. Je ne suis pas certain que ce serait
contesté ça non plus à moins que j'entende le contraire.
La dernière, peut-être, quand on dit qu'on aspire à ce que
Hydro-Québec parvienne à un degré d'excellence que toute
société exige d'un de ses plus grands éléments de
fierté nationale, je pense que tous les Québécois veulent
être fiers d'Hydro-Québec. D'ailleurs, on l'était fiers
d'Hydro-Québec jusqu'à ce que Hydro-Québec ait certains
problèmes de pannes inattendues, il y a quelques années. Je ne
crois pas réellement, M. le Président, M. le
député... Ou on cite mal les Québécois et les
Québécoises dans leurs aspirations, leurs demandes et leurs
attentes.
M. Claveau: Le problème est dans la conclusion globale de
tout ça, parce que tout ce que l'on retrouve dans votre mémoire
finalement lié à cette conclusion-là sur ce que les
Québécois veulent et aspirent ou la réponse que vous
donnez globalement à ça c'est de dire: II faut bâtir, il
faut réviser à la hausse la demande de
l'électricité, il faut bâtir des barrages, il faut que les
entreprises diverses qui sont liées à la production
d'équipements et d'expertises dans le domaine hydroélectrique
soient associées d'une façon beaucoup plus proche à
Hydro-Québec. Il faut que les études d'impact environnemental ne
soient surtout pas trop encombrantes pour ne pas nuire aux délais...
M. Séguin (Maurille): Non, ça on n'a pas
dit
ça.
M. Claveau: Tout ça finalement, il reste que l'analyse qui
sous-tend vos affirmations est tout à fait différente, à
mon avis, de l'analyse qui amène les Québécois
représentés par d'autres groupes. Arriver à des
conclusions qui sont à peu près semblables aux vôtres, j'en
conviens, mais à partir d'un certain nombre de prémisses qui sont
tout à fait différentes.
M. Séguin (Maurille): Je pense qu'on est d'accord sur le
fait qu'on a bien saisi les attentes des Québécois et
Québécoises en matière d'énergie. C'est
peut-être notre conclusion avec laquelle vous avez certaines
difficultés parce que d'autres ont d'autres conclusions à ces
demandes d'attente. Si je relève l'un de vos commentaires au niveau de
d'autres formes d'énergie, l'hydroélectricité, selon nous,
est de beaucoup la plus économique et la moins polluante, et c'est en
réalité la-dessus que ça se joue. Ce que ça
coûte et la protection de l'environnement. Si l'on régarde les
sources alternatives d'énergie, il pourrait y avoir quoi?
Nucléaire - on n'a pas à refaire le procès de Three Mile
Island et de Tchernobyl, je pense que tout le monde est au courant de ça
- les centrales thermiques, les centrales au gaz, au charbon. Toutes ces formes
d'énergie sont beaucoup plus polluantes. Il y en a une, peut-être,
qui est moins polluante c'est les éoliennes. Il y a une grosse
éolienne au Québec installée à Cap-Chat qui
génère quatre mégawatts d'électricité. C'est
un monstre, c'est la hauteur de la Place Ville-Marie. Cette
éolien-ne-là est encore à l'état d'étude.
C'est peut-être la moins polluante côté particules dans
l'atmosphère, mais, côté bruit, pour ceux qui sont
directement dans la région, le bruit est assez important.
Vous avez traité justement de l'intérêt des
populations directement concernées. Bien entendu, on ne peut pas
être contre la vertu et négliger le fait que la Baie James 2, par
exemple, déplacerait quelques centaines, voire quelques milliers de
personnes dans l'environnement immédiat. On les déplacerait, je
dis. Il n'y aurait pas plus de pollution où ils s'en vont, on les
déplacerait. L'alternative à ça, c'est quoi? Et c'est
peut-être là qu'est le choix réel entre faire et ne pas
faire Baie James 2. On a le choix de déplacer quelques centaines et
quelques milliers même de populations et de les relocaliser ailleurs.
C'est vrai que ce n'est pas facile de se relocaliser, mais c'est une
alternative.
L'autre alternative, c'est quoi? C'est de produire de
l'électricité avec d'autres sources d'énergie, c'est de
l'acheter ailleurs. Toutes ces sources-là sont plus polluantes pour les
personnes dans l'environnement immédiat de ces installations. Et, si le
projet de Baie James 2 est retardé, ça veut dire quoi en bout de
ligne? Ça veut dire qu'on sera probablement forcés d'acheter de
l'énergie d'Ontario Hydro. Qu'est-ce qu'Ontario Hydro va faire pour nous
fournir cette énergie-là? Elle va réactiver des vieilles
centrales thermiques qui sont très polluantes. Vous allez me dire:
Correct! L'environnement immédiat et la population immédiatement
concernée sont en Ontario, mais cette pollution-là s'en vient ici
dans quelques semaines, ne vous en faites pas.
Alors la solution que nous préconisons, c'est d'activer, de
maintenir le projet de développement à Hydro-Québec
d'aller de l'avant avec Baie James 2.
M. Claveau: Bon. Vous nous avez dit aussi dans votre intervention
qu'en ce qui concerne les économies d'énergie, c'était
très louable, dans le fond. Je caricature un peu, mais j'ai compris que
c'était très louable et qu'il fallait évidemment appuyer
les efforts dans ce sens-là, mais que les objectifs étaient
déjà plutôt optimistes, même si, pour d'autres, ils
sont très conservateurs et que, finalement, vous ne croyez pas qu'il
serait possible d'atteindre les objectifs et qu'il serait très difficile
d'en arriver à faire un véritable programme d'économies
d'énergie.
Par analogie, je vais me permettre de vous dire à quoi ça
me fait penser. Il n'y a pas plus qu'une dizaine d'années - mettons-en
15 en tout cas - au moment où le pétrole était quand
même très facile d'accès, on s'imaginait qu'on en aurait
jusqu'à la fin des temps et qu'on ne parlait pas de pollution. Les
compagnies d'automobiles essayaient de nous faire accroire que c'était
tout à fait normal qu'on ait des moteurs qui fassent 8 ou 10 milles au
gallon ou 15 milles au gallon dans le temps, et on en était bien
content. On se promenait en Europe et on voyait les Européens se
promener avec des voitures qui faisaient, comme ils disent, 7 ou 8 litres au
100 kilomètres, alors que, dans nos transferts, on faisait 14, 15 et 16
litres au 100 kilomètres. On nous disait: Oui, ça c'est beau pour
les Européens, mais nous, ici, on ne peut pas faire ça, les
distances et la température, etc.; on a de gros moteurs et on consomme.
Et, tout à coup, on se retrouve finalement, une quinzaine
d'années plus tard, avec des moteurs qui sont tout aussi performants que
ceux des Européens et, pourtant, on n'en est pas plus mai. On a mis au
point des moteurs à injection, des moteurs beaucoup plus performants
avec des essences beaucoup moins polluantes et on n'est pas plus mal qu'on
l'était avant. Ça ne nous empêche pas d'avoir des vitres
électriques et des pitons partout sur nos tableaux de bord et de voyager
très confortablement sur nos grands-routes à des
températures largement inférieures à zéro, alors
qu'il y a 15 ans, on nous disait que c'était impossible à cause
de notre climat.
Là, j'ai l'impression qu'on a encore à peu près le
même genre de vision par rapport aux économies d'énergie.
On dit: Ah oui! Mais ailleurs, ils font ça. Je veux bien croire que les
conditions ne sont pas pareilles, que ce n'est pas
le même climat, qu'ils n'ont pas le potentiel qu'on a, et
finalement, en bout de piste, qu'on risque de se retrouver, dans 20 ou 25 ans,
avec l'obligation de faire un virement rapide et d'en arriver à faire
à peu près les mêmes performances qu'ailleurs au monde,
mais, pour le moment, comme on en a en masse, comme on a du territoire et qu'il
n'y a pas de problème, alors pourquoi investir dans les économies
d'énergie. Continuons à dépenser et construisons des
barrages pour en produire plus, parce qu'on en dépense plus qu'ailleurs
et c'est normal, étant donné notre climat et notre
territoire.
Je pense que là-dedans on a encore une approche un peu
rétrograde quant à la possibilité de faire mieux que ce
qu'on fait là et quant à notre supposée incapacité
de faire moins bien qu'ailleurs en termes d'économie d'énergie.
Ce n'est pas une brique que je vous lance. C'est une analyse que je fais et que
je transmets en question. Est-ce que vous croyez vraiment qu'il est optimiste
de s'imaginer qu'on pourrait économiser quelques mégawatts
à partir de programmes d'économies d'énergie.
M. Séguin (Maurille): M. le Président, il faudrait
que le député comprenne bien qu'on n'est pas contre un programme
véritable d'économies d'énergie. Au contraire, on souscrit
intensément à un programme de conservation d'énergie et
d'économies d'énergie.
Là où on dispute certains chiffres, c'est sur le
quantitatif tout simplement. Bien entendu, nous allons même appuyer
Hydro-Québec dans ses démarches d'économie
d'énergie. Nous allons faire tout ce qu'on peut pour atteindre les 12, 9
térawattheures, mais on a certaines réserves là-dessus. On
pense que les Québécois vont bien réagir et, conscients
comme ils l'ont été pendant la crise ou après la crise de
l'énergie, la pénurie d'huile, et tout ce que les industriels ont
fait pour amener les voitures nord-américaines à des performances
de 7 litres aux 100 kilomètres, le même phénomène
s'appliquera à la conservation d'électricité. Mais,
ça va prendre beaucoup de temps, je pense, à convaincre la
population de fermer la lumière, par exemple, quand on n'en a pas
besoin. On n'a qu'à regarder ce qui se passe dans les centres-villes, M.
le Président. Dans les centres-villes, on voit des tours, même au
75, boulevard René-Levesque, des tours allumées toute la nuit. Et
le Club d'électricité souscrit au développement
d'édifices intelligents. L'édifice, par exemple, où sont
nos bureaux, à 19 heures, les lumières ferment progressivement
partout. Si quelqu'un est encore au bureau à 19 heures, on peut rallumer
tout simplement et l'ordinateur, à ce moment-là, mesure combien
de lumières ont été rallumées, combien de circuits
sont remis en fonction et il y a une décision déjà de
précodée par informatique, à savoir si l'air
climatisé va continuer ou non. Ça, c'est ce qu'on appelle les
édifices intelligents. Le club veut devenir par- tenaire avec
Hydro-Québec dans le développement de ces édifices
intelligents, peut-être en commençant par le 75, boulevard
René-Levesque.
Mais là où on s'inscrit avec prudence, c'est dans la
possibilité d'Hydro-Québec et du gouvernement de convaincre la
population de fermer les lumières ou, même, d'installer, comme on
retrouve en Europe, par exemple, dans les corridors où on ne passe pas
trop souvent, les lumières se ferment automatiquement, elles sont sur
une minuterie. Dans les toilettes publiques, ça se ferme
automatiquement. Ici, qu'est-ce qu'on a fait à la place de ça? On
a mis souvent des commutateurs où ça prend une clef pour fermer
la lumière. En France, ça se ferme tout seul. Alors, c'est toute
une éducation et toute une nouvelle structure manufacturière dans
les petits produits électriques de commutation.
M. Girard: Si vous me permettez, j'aimerais peut-être
toucher un autre point que vous avez abordé dans votre question. C'est
justement le rendement des équipements en tant que tel. Vous avez dit
justement que la voiture ou les constructeurs de voiture disaient: Vous
rêvez en couleur au Canada ou en Amérique du Nord ce n'est pas
requis. (12 heures)
Les équipements présentement qui sont associés
à la production et au transport et à la distribution
d'énergie électrique sont des équipements qui, à
date, sont hautement performants. Pour vous donner quelques exemples, par
exemple, on se ramasse avec des alternateurs en centrale qui ont des rendements
de l'ordre de 98, 5 % et même 99 %, dépendamment du type
d'application qu'on parle. On se ramasse avec des turbines qui ont des niveaux
de rendement de 94 %, 94, 5 %. Qu'est-ce qui nous empêche de se rendre
à 100 %? Ce sont les simples lois de la physique. À ce point de
vue, je pense qu'en tant que manufacturier d'équipements, on est
prêt à mettre au défi n'importe qui pour nous dire que:
Messieurs, vous ne faites pas d'efforts pour essayer d'améliorer ces
rendements. Dans un autre volet, également, M. le député
de Beauce, dans le mémoire qui a été
présenté avant, parlait de rénovation de centrales. Les
manufacturiers québécois sont tout à fait
définitivement en faveur de ces rénovations de centrales. On a
des équipements maintenant qui sont de beaucoup plus performants que ce
qui avait été développé dans le temps où ils
ont été mis en marche.
Le seul mot de précaution, si on veut, qu'on voit
vis-à-vis de la réfection de centrales, c'est qu'il faudrait
regarder avec beaucoup de détails, avec Hydro-Québec le "timing",
le temps que ça prend justement pour faire ces réaffectations de
centrales, ces réfections de centrales. Les énergies en tant
qu'ingénierie à faire pour la réfection de centrales sont
à peu près aussi grandes sinon même plus grandes que les
énergies à faire pour développer des
équipements
neufs.
M. Claveau: Vous comprendrez, en tout cas, dans tout ce qu'on a
entendu depuis la semaine dernière, que le problème ne se situe
pas au niveau de la performance des producteurs d'électricité. La
performance des équipements de production, c'est plutôt au niveau
de la performance des équipements de consommation, là où
on a un certain nombre de problèmes. Et moi je veux bien que,
effectivement, il y ait une économie au Québec qui se
développe autour de la production d'équipements performants, et
je veux bien que les producteurs d'alternateurs, qu'ils s'appellent
Générale électrique ou Marine industrie,
développent leurs entreprises. Je veux bien que Asca, Brown-Bovery
développent des transfos excessivement performants. Je veux bien que
l'on ait des sociétés d'ingénierie au Québec qui
puissent profiter amplement de la manne qui leur arrive à cause des
constructions de centrales hydroélectriques. Je veux bien aussi qu'au
niveau de la construction en général on puisse se servir de
ça pour développer une structure finalement où des
contracteurs d'envergure internationale, pour ne pas les nommer. Je comprends
tout ça. Mais est-ce que ces intérêts-là...
là où est mon problème, ma dernière question...
J'ai déjà dépassé mon temps, à ce qu'on me
dit. Ma question est à savoir si ça c'est plus important ou si on
doit donner la priorité à cette économie qui se
développe autour de la construction des centrales de barrages ou si on
doit regarder peut-être plus globalement l'ensemble des problèmes
du Québec et l'ensemble des aspirations des Québécois?
Quant aux dynamiques de conservation d'énergie, je veux bien que
ça demande un certain temps pour y arriver. Mais il s'agit d'un choix de
société et si le gouvernement dit: À partir de demain
matin, les constructions se font comme ça et on va vous donner les
sommes pour vous aider au besoin avec des programmes développés
avec Hydro. Et si on dit: A partir de demain matin, les équipements
c'est fait comme ça et si on met en place un certain nombre de
contraintes sociales pour amener les gens à le faire, eh bien, ça
va faire comme la ceinture de sécurité. Au début, il n'y a
personne qui voulait la porter. Je regardais ce matin, on nous disait à
la radio que quelque chose comme 86 % des Québécois la portent
maintenant et ils ont le sourire aux lèvres en conduisant.
Sauf qu'on a établi une certaine contrainte pour le faire. Comme
on a établi des contraintes aussi pour obliger les manufacturiers
d'automobiles à avoir des moteurs plus performants et à enlever
le plomb dans l'essence. Si on les avait laissés faire tout seul, ne
craignez pas qu'on en aurait encore du plomb, il y en aurait ça
d'épais dans le fond de nos réservoirs d'essence. Mais on a fait
des contraintes pour les obliger à changer. Est-ce qu'on n'aurait pas,
comme société, la possibilité de faire le choix d'investir
autrement qu'à travers une microéconomie finalement qui se
développe autour des constructions de barrages et de centrales?
M. Séguin (Maurille): La construction de centrales et de
barrages n'est pas, premièrement, un moteur de développement
économique et technologique. C'est d'abord la réponse à un
besoin en énergie. Pour nous, c'est bien entendu que des
retombées, et on en est très conscient et très fier, mais
la première considération de l'installation de la Baie James 2
c'est pour satisfaire à une demande de la façon la plus
performante, la plus économique et la moins polluante. C'est
réellement là qu'est le choix. Parce que les autres sources
d'énergie sont beaucoup plus polluantes, et de loin, moins performantes
et plus coûteuses qu'un barrage du type Baie James 2.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous
remercie. Si M. le député d'Ungava veut remercier nos
invités.
M. Claveau: Je suis bien content d'avoir eu l'opportunité
d'échanger quelques mots avec vous et de prendre connaissance de votre
mémoire qui est incontestablement, disons, favorable au plan de
développement d'Hydro-Québec, avec toutes les contraintes que
ça suppose, bien évidemment. Si tout le monde avait
été d'accord avec le plan de développement
d'Hydro-Québec, probablement qu'on n'aurait pas eu de commission
parlementaire. Merci de votre présentation.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député. Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, Mme Séguin, M. Pomer-leau, M.
Séguin, M. Girard et M. Bachkangi, je vous remercie de votre
présence à cette commission et du mémoire que vous nous
aviez déjà fait parvenir. Je pense que c'est un éclairage
différent de certains autres groupes, mais tout aussi valable. C'est
à nous, je pense, après cette période de réflexion
qui va suivre la commission parlementaire, d'essayer de tirer profit de ce que
nous entendons à cette commission, que ce soit pour l'économie
d'énergie, que ce soit par un développement plus large de nos
ressources. Je pense qu'il faudra faire le point dans tout ça. On
tiendra compte de tout ce qu'on a entendu ici. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'économie et du travail remercie le Club d'électricité de
Montréal inc., de sa participation à nos travaux et j'invite
à la table des témoins Les Ami-e-s de la terre du
Québec.
Je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place.
Pendant que Les Ami-e-s de la terre du Québec prennent place à la
table des
témoins, je vous explique nos règles de procédure.
Vous avez 20 minutes pour présenter votre point de vue et, par la suite,
il y aura une période d'échanges avec les parlementaires. Je vous
prierais donc, dans un premier temps, d'identifier votre porte-parole, de
présenter votre équipe et de nous présenter votre
mémoire que nous écouterons avec beaucoup d'attention. Je vous
remercie.
Les Ami-e-s de la terre de Québec
Mme Paquin (Ginette): Ce ne sera pas long, monsieur. C'est parce
qu'il manque quelqu'un avec nous, on attend une troisième personne.
Le Président (M. Bélanger): Malheureusement...
Mme Paquin: Bon, O.K., on va commencer tout de suite.
Le Président (M. Bélanger): ...on doit
débuter, je m'en excuse.
Mme Paquin: Alors, mon nom, c'est Ginette Paquin, des Ami-e-s de
la terre de Québec. Je dois d'abord vous dire que le mémoire a
été préparé par Les Ami-e-s de la terre de
Québec, mais qu'il a été appuyé par Les Ami-e-s de
la terre du Québec qui comprend quatre groupes: un à
Québec, un à Montréal, un dans l'Estrie et un dans
Portneuf. Il a été appuyé également par le Conseil
de l'environnement des régions de Québec et de Chaud
ière-Appalaches dont on a un des représentants ici. Moi, je suis
des Ami-e-s de la terre de Québec. Je vous présente Louis
Douville, des Ami-e-s de la terre de Portneuf. La troisième personne,
c'est Richard Legault, président du Conseil de l'environnement des
régions de Québec et de Chaudière-Appalaches.
Le Président (M. Bélanger): Et vous êtes Mme
Paquin, je présume.
Mme Paquin: Ginette Paquin, des Ami-e-s de la terre de
Québec.
Je vais commencer par lire le mémoire et peut-être
qu'à la fin de la lecture j'aimerais aussi ajouter quelques points sur
le mandat de la commission parlementaire. Est-ce que je peux faire
ça?
Le Président (M. Bélanger): Vous avez 20 minutes
pour faire tout ça.
Mme Bacon: Et peut-être sur le discours de la ministre. Je
vais passer par après la parole à M. Richard Legault qui aurait
peut-être quelques questions aussi à poser. Ensuite, on pourra
passer aux questions.
Le Président (M. Bélanger): Je vous ferais
remarquer la règle, ici: "nous" posons les questions.
Mme Paquin: Non, mais...
Le Président (M. Bélanger): Nous voulons
connaître votre point de vue. Les parlementaires ne sont pas là
pour répondre aux questions, aujourd'hui.
Mme Paquin: Non, mais ce ne sont pas...
Le Président (M. Bélanger): Ce n'est pas l'objet de
la commission.
Mme Paquin: ...des questions à répondre, mais
peut-être des questions qu'on soulève sur la
problématique.
Le Président (M. Bélanger): Vos interrogations.
Alors, il n'y a pas de problème.
Mme Paquin: Bon. Alors, bien que nous soyons membres de la
Coalition pour un débat public sur l'énergie et que nous
souscrivions entièrement à son mémoire, il nous
apparaissait important de déposer un bref texte indiquant notre
perception de la situation actuelle dans le secteur énergétique
au Québec et exprimant notre conviction que cette commission
parlementaire n'a ni le mandat ni l'envergure nécessaire pour orienter
l'avenir en matière énergétique au Québec.
Cette perception découle de trois constats: d'abord, du fait que
le gouvernement du Québec n'a pas pris conscience de l'importance des
enjeux en cause; deuxièmement, du fait qu'il n'est pas vraiment ouvert
à des alternatives en matière énergétique et
économique pour le Québec - le mandat de cette commission
parlementaire en fait foi - et, troisièmement, parce que, en
réponse aux groupes qui réclament depuis longtemps un
débat public large sur la question énergétique, le
gouvernement a répondu par une commission parlementaire dont le mandat
est limitatif, de durée insuffisante, et dont le lieu est
éloigné des populations touchées par les projets
d'Hydro-Québec.
Les enjeux en matière énergétique et
économique. Les enjeux sont importants, parce que nous sommes à
un carrefour de notre développement énergétique, mais
aussi de notre développement économique. Nous ne pouvons plus
poursuivre dans la tradition qui a été la nôtre
jusqu'à maintenant, c'est-à-dire des mégaprojets, de la
surproduction et de la surconsommation de l'énergie, la non-consultation
des populations touchées par les grands projets hydroélectriques
et industriels et par la politique énergétique, le gaspillage de
nos ressources naturelles, l'absence de vision à long terme, le
développement économique à courte vue, les impacts sur
l'environnement des projets hydro-
électriques et industriels peu ou pas
considérés.
La commission Brundtland l'a bien démontré, les pays
développés et industrialisés n'ont pas le choix: ils
doivent modifier leur façon de se développer. Le Québec,
qu'il le veuille ou non, n'y échappera pas. En cette matière, la
population en général a déjà senti la
nécessité du changement à faire, mais il semble que cette
conscientisation n'a pas rejoint nos élus. Ceux-ci ont tendance à
continuer dans la vieille tradition des mégaprojets et de la croissance
économique à tout prix, parce qu'ils ne sont pas à
l'écoute des nouvelles tendances en matière
énergétique et économique, ni à l'écoute de
l'avant-garde qui porte ces nouvelles tendances. Ils préfèrent
s'alimenter entre eux. Il en découle donc qu'ils continuent dans la voie
qui les mènera au cul-de-sac.
Il est essentiel, étant donné le contexte actuel, de
s'arrêter un bon moment pour réfléchir à notre
avenir énergétique et économique. Nous n'avons pas le
choix de réorienter notre développement autrement, de faire de
nouveaux choix adaptés à l'an 2000.
Pourquoi ces nouveaux choix? Le contexte actuel au Québec en
matière énergétique ressemble à ceci, selon nous:
exportation de notre énergie hydroélectrique aux
États-Unis et importation d'entreprises grandes consommatrices
d'électricité sans qu'il y ait eu consensus sur ces orientations
au Québec; augmentation de la consommation électrique domestique
et industrielle; augmentation des tarifs aux consommateurs résidentiels;
des équipements hydroélectriques en mauvais état et qui
ont donc besoin d'être réparés et améliorés;
accélération dans la mise en chantier de mégaprojets
appelés à bouleverser le mode de vie des autochtones et les
écosystèmes du Nord québécois; une politique
énergétique axée sur une croissance économique
à courte vue et de piètre qualité; le peu de
conscientisation des élus face à la nécessité de
prendre le virage du développement durable et équitable,
c'est-à-dire investissement massif dans les économies
d'énergie, recherche d'alternatives énergétiques mieux
adaptées à l'environnement et aux besoins de chaque
communauté, recherche d'alternatives de développement moins
pénalisantes pour l'environnement et pour notre
société.
Nous ne pouvons plus continuer dans la voie actuelle pour les raisons
mentionnées plus haut. Or, la commission parlementaire n'a pas le mandat
pour faire les nouveaux choix qui s'imposent à l'heure actuelle au
Québec. Elle nous confine, au contraire, à une approche
réductrice de la réalité énergétique et
réduit ainsi à néant la possibilité, pour la
population du Québec, de participer à la planification de son
avenir énergétique et, par extension, de son avenir
économique. Tous les types d'énergie doivent être
considérés dans le débat ainsi que les économies
d'énergie, la politique économique dans ses liens avec
l'hydroélectricité doit être discutée, les
mégaprojets requestionnés; la population doit pouvoir être
impliquée de façon beaucoup plus importante, puisque c'est elle
qui, en définitive, paiera la note. Celle-ci a besoin de connaître
les enjeux et surtout d'avoir une vision globale de la réalité
énergétique québécoise. (12 h 15)
Notre proposition va un peu dans le sens de (a Coalition pour un
débat public sur l'énergie. Qu'il y ait une enquête
publique au Québec, soit un débat public beaucoup plus large que
celui qui se déroule présentement, dont le mandat aborderait au
minimum les points suivants: la politique énergétique
québécoise, les implications d'une politique économique
axée sur les grands projets hydroélectriques, les impacts
environnementaux et sociaux de ces mégaprojets, leurs implications sur
le mode de vie des autochtones, la gestion et les prioriétés
d'Hydro-Québec, et dont les modalités du débat seraient
définies en collaboration avec les groupes préoccupés par
l'environnement et le développement durable. Et qu'un moratoire soit
imposé sur tous les grands projets hydroélectriques en cours et
à venir et sur toutes les négociations de contrats de vente
d'électricité aux Américains et à des entreprises
avant et pendant la tenue de ladite enquête.
Je voudrais revenir un peu sur le mandat de la commission parlementaire.
Je trouve qu'elle ne pose pas les bonnes questions. J'en ai déjà
parlé dans le mémoire. Elle se centre sur une seule source
d'énergie, ce qui est largement insuffisant. Elle prend pour acquis la
croissance de la demande d'énergie hydroélectrique au lieu de
chercher des moyens de gérer cette demande à l'aide de
scénarios de décroissance par secteur. Elle nous centre sur les
moyens proposés par Hydro-Québec pour fournir
l'électricité alors que, selon nous, Hydro-Québec est
liée par un mandat restreint qui la confine presque à un seul
type d'énergie et aux modèles mégaprojets
hydroélectriques, la rendant ainsi incapable de s'ajuster aux
changements sociaux et aux défis de l'an 2000.
Enfin, le dernier point du mandat: les moyens de concilier la
satisfaction des besoins d'électricité au Québec, la
qualité de l'environnement et le développement économique
durable. Il nous apparaît que vouloir satisfaire les besoins en
électricité du Québec en stimulant ces besoins et vouloir
en même temps assurer la qualité de l'environnement et un
développement durable, c'est à peu près une mission
impossible. Il faut vouloir mettre le poids d'un côté de la
balance.
Je voudrais signaler aussi qu'il y a absence autour de la table, si je
ne m'abuse, du ministre de l'Environnement et du ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche et même, peut-être, du premier ministre
qui est responsable des autochtones, je crois. Je ne suis pas sûre, mais
je penserais. Non? En tout cas, je ne sais pas s'il y a un ministre responsable
des autochtones, mais il devrait peut-être être autour de la table
aussi. Ces ministères-là sont interpellés par les
grands
projets hydroélectriques de la Baie James et par le mandat de
cette commission parlementaire, alors je suis déçue de ne pas les
voir autour de la table.
L'autre question que je voulais aborder, c'est le discours de Mme la
ministre en début de commission parlementaire. J'en ai lu des extraits
dans le journal. Nous avons été déçus par ce
discours. On avait l'impression d'entendre un vieux discours du début
des années soixante-dix, au moment où on se préparait
à enclencher la Baie James 1. Le discours ne semble pas avoir
changé depuis cette époque. Aussi, le discours démontre
une grande préoccupation pour l'économie, mais il manque
certainement une préoccupation pour l'environnement et le
développement durable et pour le côté social. Je noterai
certains points du discours. Mme la ministre notait l'importance de notre
potentiel hydroélectrique, de notre savoir-faire et de la
nécessité d'exploiter le potentiel restant. Nous, on dirait
plutôt en contrepoids à ce discours: On voudrait faire valoir
l'importance de nos rivières, de notre faune, de notre
végétation, de nos paysages, de notre territoire, de la culture
des autochtones, de la conservation de nos ressources en vue d'utilisations
futures.
Il est mentionné aussi qu'on veut exploiter tout le potentiel
restant jusqu'à tant qu'il n'en reste plus du tout. Selon nous,
ça, c'est la solution facile. Nous pensons qu'Hydro-Québec est
passée maître dans ce genre de solution, étant donné
que c'est une solution d'ingénieurs. Il nous apparaît qu'au nom du
prétendu savoir-faire d'Hydro-Québec vous nous proposez
d'exploiter toutes nos rivières, et ça, ça n'a pas de sens
pour nous. Ce savoir-faire est aussi en train de détruire notre
territoire et de tuer notre imagination dans la recherche d'autres solutions
à nos problèmes de développement.
Il y avait dans votre discours, aussi, la mention que la demande
justifiait l'aménagement et la mise en valeur des réserves
hydroélectriques. Ça c'est comme dire que la fin justifie les
moyens. Je dirais plutôt que la grande disponibilité de
l'électricité au Québec nous cantonne au gaspillage de nos
ressources, à une non-diversification de nos sources d'énergie
et, même, qu'elle limite nos possibilités en termes
économiques.
La troisième mention qu'il y avait au discours, c'était
l'importance de l'électricité dans le développement
économique du Québec, et on prenait l'exemple de l'aluminium.
Nous sommes complètement en désaccord avec cet
énoncé, également. Nous pensons que les industries de
l'aluminium rendent les régions dépendantes dune ou deux
industries polluantes qui, un jour ou l'autre, fermeront leurs portes, laissant
la région sans ressource parce qu'elle n'aura pas trouvé d'autres
moyens d'améliorer sa situation économique; elle ne se sera pas
penchée elle-même sur ce qui se passe dans sa région ou sur
la façon de se développer. Selon nous, ça tue notre
imagination face à la recherche d'autres possibilités de
développement plus diversifiées et, en plus, ça
crée peu d'emplois intéressants et ce sont des emplois qui sont
subventionnés de façon abusive, tel que le disait Jean-Thomas
Bernard hier, ici, en commission parlementaire.
Ensuite, nous étions déçus aussi que Mme la
ministre refuse de faire des remises en question fondamentales et qu'elle
affirme que les projets de la Baie James ne posent pas de problèmes
majeurs et que les impératifs économiques étaient
incontournables. Selon nous, les besoins, ça se modifie; les
priorités économiques aussi. Je pense qu'il faudrait mettre
l'accent sur les programmes d'économie d'énergie et que ceux
proposés par Hydro-Québec sont insuffisants. Nous vous proposons
à cet égard de faire faire des études à
l'extérieur d'Hydro-Québec. Amory Lovins, aux États-Unis,
qui est spécialiste de ces questions; il pourrait peut-être
être consulté là-dessus.
Ensuite, la mention de l'image de Mme la ministre, qui disait qu'on
devra s'éclairer à la bougie si on ne fait pas les projets de la
Baie James. Je répondrai à ça que, si on continue, on va
devoir se nourrir d'aluminium. Après le fer, ça a
été l'aluminium; après l'aluminium, qu'est-ce que
ça va être? L'hydrogène, peut-être, je ne le sais
pas. Un projet de société axé sur l'aluminium, ça
manque d'envergure. Je pense que les jeunes aspirent à mieux que
ça.
Pour ce qui est de la recherche du développement durable, je
pense que beaucoup de monde en parle, y compris les élus, du
développement durable, mais il semble qu'il n'y a pas grand monde qui
sache ce que ça veut dire exactement. Alors, il faudrait peut-être
se pencher sur la définition exacte qu'on veut donner au
développement durable avant de penser en faire avec
l'hydroélectricité.
Je voudrais passer la parole maintenant à Richard Legault, du
Conseil de l'environnement des régions de Québec et de
Chaudière-Appala-ches.
M. Legault (Richard): Bonjour. Je m'excuse. J'étais juste
à la porte. J'étais en train de préparer mes questions et
je ne pensais pas que c'était commencé. Je suis président
du Conseil de l'environnement des régions de Québec et de
Chaudière-Appaiaches. Le Conseil regroupe actuellement 30 organismes
environnementaux de la grande région de Québec.
J'aurais des questions à poser à la commission, au nom du
Conseil, qui sont, à mon avis, des questions fondamentales auxquelles la
commission devrait trouver des réponses qui seraient éclairantes
pour le public québécois, avant de laisser aller
Hydro-Québec dans la deuxième phase de cette Baie James. Je veux
parler d'abord des prévisions en besoins énergétiques.
Quand on sait que la marge d'erreur des prévi-
sions d'Hydro-Québec en besoins énergétiques est
très grande et, cela, au dire même du rapport du projet de
développement d'Hydro-Québec... Je vous donnerai la page, si vous
voulez la citation. Bon, par exemple: Hydro-Québec prévoit une
augmentation de 50 % de plus des besoins d'ici 2006. Alors, c'est
réparti comme ceci. Je pense que vous connaissez mieux que moi tous les
dossiers: 1,6 % par année de 1986 à 1996 et, ensuite, une
recrudescence des besoins à partir de 1996 jusqu'à 2006, une
demande de 2,4 % par année.
Vu ces faits-là, est-ce que la commission entérine ces
prévisions qui sont, de toute façon, aléatoires, ces
prévisions sur lesquelles est basée, au fond, toute la
justification des développements futurs d'Hydro-Québec? Ça
me semble la question fondamentale de départ. Si on retourne ça
à l'envers et qu'on se pose... L'arrière-plan de cette
question-là, c'est: Est-ce que ce n'est pas plutôt
qu'Hydro-Québec est considérée et a été
considérée dans les années soixante-dix - et on continue
encore de la même manière - comme un État dans
l'État, on l'a déjà dit, mais est considérée
aussi par le gouvernement comme un moteur de développement
économique, quasiment la base de notre société alors que
ça devrait plutôt être un organisme qui répond aux
besoins de la société qui peuvent être modulés en
fonction de la conservation de l'énergie et du développement
durable? N'est-ce pas cela qui justifie entre autres les gros projets
industriels d'aluminerie et qui permet de justifier des industries qui sont
énergivores à des coûts préférentiels
d'électricité, on le sait? Ils ne sont même pas
divulgués, tellement ils sont préférentiels. Ce sont des
coûts qui permettent de créer des emplois mais qui sont
subventionnés à quelque 128 000 $ par année par emploi.
Alors, ces immenses capitaux vont être investis dans la phase 2 de la
Baie James. On parle de 62 000 000 000 $ prévus. Dans les faits, en tout
cas, on sait que pour la première Baie James les coûts ont
augmenté énormément. Alors, on pourra s'approcher des 100
000 000 000 $ dans quelques années.
Est-ce que ces coûts faramineux sont censés stimuler
l'économie québécoise alors que, en fait, on n'a
même pas fait une évaluation de la stimulation qui a
été faite avec le projet Baie James 1? Regardez le taux de
chômage qu'il y a au Québec, actuellement. Est-ce qu'il y a eu un
bilan écologique, un bilan économique, socio-économique
des régions où il y a eu des projets de barrage? C'est de
l'emploi temporaire qui est créé et ensuite, bien, le barrage est
censé fonctionner s'il pleut.
Mais, dans les faits, est-ce que ces immenses capitaux ne privent pas
d'autres secteurs de notre économie? On pense au dossier culturel,
ça fait des années... Vous savez tous fort bien que - je dirais -
le secteur culturel est beaucoup plus créateur d'emplois, de même
que le secteur manufacturier et surtout le secteur de la restauration; des
économies substantielles d'énergie pourraient être faites
à ce niveau-là. Et le secteur de l'économie
d'énergie créerait pour les mêmes sommes d'argent... Jamais
on n'investira plus que 5 000 000 000 $ à 10 000 000 000 $ dans nos
économies d'énergie...
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, s'il vous plaît.
M. Legault: Pardon?
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, s'il vous plaît; votre temps est
écoulé.
M. Legault: Oui. Alors, je veux juste dire qu'on peut
créer beaucoup plus d'emplois permanents en utilisant ces sommes
d'argent là ailleurs, en économisant aussi l'énergie, que
dans la construction de barrages et de centrales. On sait qu'économiser
un kilowatt coûte 10 fois moins que produire un kilowatt et le
vendre.
Pour conclure, le Conseil de l'environnement demande un débat
public sur l'énergie car, au fond, le gouvernement a tout à
gagner à ouvrir la discussion. Le gouvernement devrait arrêter
d'avoir peur, Hydro-Québec aussi, et d'être sur la
défensive; il devrait s'ouvrir à la discussion avec la
société québécoise. À mon avis,
peut-être qu'il va y avoir des choix, effectivement, qui vont être
faits, mais ils vont être faits en connaissance de cause. Peut-être
qu'il y a des barrages qui vont être encore construits, mais ils vont
être faits en connaissance de cause. Actuellement, on ne sait pas
où on s'en va.
À mon avis, ça va aussi faire découvrir des formes
d'énergie. On parle du savoir-faire, de l'imagination créatrice
des Québécois. Je pense que ce serait le bon moment d'en profiter
pour dire: On pourrait peut-être découvrir des formules nouvelles
de conservation d'énergie et de production d'énergie douce. Les
Québécois l'ont déjà prouvé dans le
passé, ils peuvent aussi le prouver maintenant. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
Alors, Mme la ministre.
Mme Bacon: Mme Paquin, M. Oouville et M. Legault, votre
mémoire expose les positions de votre organisme et dénonce en
même temps très sévèrement l'action gouvernementale
en matière d'énergie. (12 h 30)
Quant à votre perception des quelques notes d'ouverture,
j'aimerais peut-être, Mme Paquin, vous envoyer une copie de ce texte.
J'ai l'habitude de lire tous les jours tous les journaux pour vraiment avoir la
meilleure vérité, mais vous auriez peut-être avantage, je
pense, à lire en
entier l'allocution du départ de cette commission.
Votre mémoire ne contient aucun exposé de faits, aucune
démonstration ni aucune preuve au soutien des positions que vous prenez.
Comme gouvernement, nous partageons la conviction de la commission Brundtland
qu'un avenir énergétique sûr, peu nuisible à
l'environnement, économiquement viable et capable de soutenir le
progrès humain est une nécessité absolue. Nous croyons
également que, pour définir les exigences d'un
développement énergétique durable pour le Québec,
il est nécessaire d'établir les bases d'un dialogue constructif
avec tous les intéressés. C'est précisément, je
pense, l'objet de notre consultation.
On dit dans le rapport Brundtland qu'il n'existe aucun modèle
idéal de développement soutenable, que les systèmes
sociaux, les systèmes économiques et les conditions
écologiques varient évidemment beaucoup d'un pays à
l'autre. J'aimerais peut-être vous dire aussi que, quant au rapport
Brundtland, j'ai eu l'honneur de présider la table ronde pendant mes 10
mois à titre de ministre de l'Environnement et, donc, que ma
préoccupation environnementale, je pense, n'a pas à être
prouvée à l'occasion de cette commission.
À la page 55 du rapport Brundtland, on dit: "Dans son esprit
même, le développement soutenable est un processus de
transformation dans lequel l'exploitation des ressources, la direction des
investissements, l'orientation des techniques et des changements
institutionnels se font de manière harmonieuse et renforcent le
potentiel présent et à venir permettant de mieux répondre
aux besoins, aux aspirations de l'humanité." On ajoute aussi: "Le
développement implique une transformation progressive de
l'économie et de la société", en page 51 du rapport
Brundtland. À partir de ces réflexions qui sont tirées du
rapport Brundtland, j'insiste sur la notion de transformation progressive qui
caractérise le développement durable. J'insiste aussi sur la
nécessité de définir un modèle de
développement qui est adapté à la réalité
que nous vivons ici, la réalité du Québec. Croyez-vous que
l'arrêt brutal de tous les projets énergétiques en cours
corresponde à la transition progressive et harmonieuse souhaitée
par la commission Brundtland?
Mme Paquin: Je voulais revenir aux extraits de votre discours. Je
l'ai lu dans Le Soleil, dans "Les idées du jour".
Mme Bacon: Je vais vous en donner une copie intégrale.
Mme Paquin: Dans "Les idées du jour", j'ai pensé
que c'était reflété de façon assez exacte.
Maintenant, qu'il n'y ait aucune preuve dans le mémoire ou aucune
démonstration, je pense que Richard est quand même allé un
petit peu plus loin que moi là-dessus, mais ce n'était pas le but
de notre mémoire d'apporter des preuves. Nous, ce qu'on veut d'abord,
c'est faire un débat public élargi sur la question, et nous
pensons que c'est là que pourront être apportées,
peut-être, les questions techniques du côté des
spécialistes et d'autres questions du côté de la
population. On voulait vraiment... Oups! L'eau est en train de me rejoindre. On
manque de barrages au Québec. Ha, ha, ha! Excusez-moi.
Je comprends que vous essayiez d'établir le dialogue ici, mais on
ne pense pas, comme on l'a dit dans le mémoire, que la population soit
intéressée nécessairement à venir dialoguer ici,
dans un endroit qui est un peu impressionnant pour M. Tout-le-Monde. Je pense
que chaque région du Québec est touchée par les projets
d'Hydro-Québec, étant donné qu'Hydro-Québec a une
visée sur à peu près toutes les rivières du
Québec. Alors, il serait important d'aller voir la population un peu
partout et il faudrait la préparer aussi à recevoir ces
délibérations en lui présentant la situation de
façon éclairée.
Pour ce qui est du modèle de développement viable de la
commission Brundtland, je suis d'accord avec vous que ça va devoir se
faire progressivement, mais au Québec, en tout cas dans le secteur de
l'hydroélectricité, on ne sent pas de changement de cap, si vous
voulez. On sent qu'on applique exactement le même modèle que celui
des années soixante-dix. On ne sent pas de virage important.
Peut-être qu'il y a de petites affaires.
Mme Bacon: Est-ce que 1 800 000 000 $ investis dans les
économies d'énergie par HydroQuébec vous semblent des
petites affaires?
Mme Paquin: Oui.
Mme Bacon: Ou un changement?
Mme Paquin: Ça nous semble des petites affaires,
effectivement, d'autant plus qu'Hydro-Québec, je ne pense pas qu'elle
soit préparée à faire ce genre d'étude. C'est une
compagnie qui est axée sur l'hydroélectricité depuis
longtemps. Je ne pense pas que les économies d'énergie, ce soit
vraiment son secteur de spécialisation jusqu'à maintenant. C'est
pour ça qu'étant donné... On pense qu'Hydro Québec
pourrait développer cette expertise-là, effectivement, à
la longue, mais, à court terme, on aimerait quasiment mieux que
ça se fasse à l'extérieur d'Hydro-Québec parce
qu'elle est quasiment en conflit d'intérêts en faisant ces
études-là. Entre l'hydroélectricité et les
économies d'énergie, elle va préférer
l'hydroélectricité.
Comme je l'ai mentionné dans le mémoire, je pense qu'on
est vraiment à un carrefour de notre développement à tous
points de vue. On va avoir des décisions importantes à prendre.
Si on ne les prend pas bientôt, on va être acculés
à
les prendre plus tard, mais ça va être plus difficile de
les prendre, de toute façon. On devra les prendre avec des grincements
de dents, je dirais. Alors, aussi bien s'y préparer maintenant, faire
les études qu'il faut maintenant, faire les arrêts maintenant.
Pour ce qui est de la commission Brundt-land, j'ai travaillé un
peu sur le concept de développement durable et j'ai essayé de
l'appliquer au secteur hydroélectrique. Mais, ce que j'ai retenu de son
cadre stratégique, c'est que le développement durable impliquait
une vision à long terme du développement, une modification de la
qualité de la croissance, les pays industrialisés doivent
évoluer vers des activités à moins forte intensité
de matières premières et d'énergie, vers une
amélioration du rendement de leurs ressources et vers une
répartition plus équitable de cette croissance. Il faut viser la
satisfaction des besoins essentiels de la population dans une perspective
d'équité, il faut réorienter les technologies en tenant
compte des facteurs écologiques dans la recherche de nouvelles
techniques, il faut modifier nos institutions pour que l'environnement fasse
partie de la décision, il faut une utilisation plus efficace des
ressources et la préservation de la base écologique de celles-ci,
donc une approche conservation. Il faut intégrer l'économie et
l'environnement dans la prise de décisions, il faut impliquer activement
les citoyens dans la prise de décisions, il faut réviser nos
façons de consommer et les adapter à l'écologie.
C'est ce que j'ai retenu de ma lecture de la Commission Brundtland. Je
ne pense pas qu'on soit très, très proches de cette...
Mme Bacon: Si vous permettez, Mme Paquin, dans la vie, il y a des
choix à faire.
Mme Paquin: Je vous comprends un peu là-dessus. Je ne
voudrais pas être à votre place.
Mme Bacon: Non, mais on construit maintenant des routes avec des
bulldozers. Bon. On aurait pu les construire avec une pelle et de la
main-d'oeuvre, comme on a déjà fait dans les années, je ne
sais pas, au début du siècle. On a fait des choix. On construit
avec de la machinerie.
Je pense qu'il y a une question primordiale, c'est celle de
l'information objective qui est fondée sur des faits, mais aussi sur des
observations qui sont scientifiques. Je pense que c'est une condition
essentielle pour prendre une décision éclairée.
Est-ce que vous estimez que les positions qui sont soutenues dans votre
mémoire sont fondées intégralement sur une observation
objective de la réalité? En tant que groupe de défense de
l'environnement, comment contribuez-vous, sur le plan pratique, à
informer la population des enjeux en cause en matière d'énergie
et d'environnement? J'espère que vous ne vous basez pas seulement sur
les journaux.
Mme Paquin: Pardon? Si on se base sur les journaux?
Mme Bacon: Comme vous l'avez fait pour mon texte.
Mme Paquin: Ah! J'ai perdu la première partie de votre...
en tout cas. Pour ce qui est de...
Mme Bacon: Comment contribuez-vous, sur le plan pratique...
Mme Paquin: Oui. Ça, je l'avais compris, mais c'est la
partie...
Mme Bacon: ...à informer la population? Je dis: Est-ce que
vous avez... Et je regarde votre mémoire, j'ai bien pris connaissance de
votre mémoire. Est-ce que vous estimez que les positions que vous
soutenez dans votre mémoire sont fondées sur une observation
objective de la réalité?
Mme Paquin: Je ne sais pas, exactement, ce que vous voulez dire
par votre question, mais...
Mme Bacon: Le fondement scientifique, par exemple.
Mme Paquin: Oui, mais ce n'est pas un mémoire
scientifique, vous vous en rendez bien compte. Le but du mémoire, ce
n'est pas d'apporter des preuves scientifiques...
Mme Bacon: Non, mais vous faites beaucoup d'affirmations dans
votre mémoire.
Mme Paquin: Oui. Bien, ça, j'étudie le dossier
énergétique depuis 1987. Plus j'avance dans l'étude de ce
dossier, plus je suis convaincue qu'on ne s'en va pas dans la bonne direction
et qu'il faut s'arrêter pour en discuter. C'est simplement ça. Je
suis convaincue qu'on ne s'en va pas dans la bonne direction en décidant
de harnacher toutes nos rivières et en fondant notre
développement économique complètement sur
l'hydroélectricité. Et tout ce que je dis, c'est que j'essaie de
vous le faire comprendre.
Je vous ai décrit la situation au Québec. Je pense que,
là-dessus, vous ne pouvez pas le nier. Ce que j'ai décrit
à la page 2, au premier paragraphe, on ne peut pas nier ça ce que
j'ai dit là, qu'il n'y a pas de consensus, au Québec, sur
l'exportation; qu'il n'y a pas de consensus sur l'importation d'entreprises;
que la consommation électrique augmente; que les tarifs augmentent; que
les projets augmentent; que notre politique énergétique est
axée sur une croissance économique à courte vue, _
c'est-à-dire qu'on fait
ce qu'on peut, mais qu'on ne se pose pas les grandes questions. C'est
comme si on agissait au jour le jour en disant: On fait ça parce qu'on
n'a pas pensé à faire mieux. Donc, on va faire ça.
On a l'hydroélectricité, alors on l'utilise parce qu'on
n'a pas pensé à autre chose, à d'autres
possibilités de développement que les possibilités de
développement que nous apporte l'hydroélectricité comme
les alumineries. Mais ce que je dis, c'est qu'il faut s'arrêter et faire
la discussion, faire les études nécessaires.
Mme Bacon: Vous ne pensez pas que ce qu'on fait en ce moment est
un arrêt, un cran d'arrêt...
Mme Paquin: Ce n'est pas suffisant.
Mme Bacon: ...pour vraiment discuter en profondeur de ce dossier,
écouter les gens. Nous avons reçus 70 mémoires. Il y a
quand même des gens qui croient à cet exercice de
démocratie que nous avons.
Mme Paquin: Vous savez très bien que la Coalition pour un
débat public, ça comprend 30 groupes et ces 30 groupes ont
refusé de venir présenter, pour la plupart, un mémoire,
ici, en commission parlementaire, parce que ces 30 groupés sont
convaincus que le débat ne se fera pas ici. Il devra se faire de
façon beaucoup plus importante. Il ne se fera pas en trois semaines, le
débat, parce que la population doit être préparée
à le faire. Elle doit connaître les enjeux. Elle doit
connaître la situation énergétique. Et la commission
parlementaire, je l'ai dit tantôt, elle ne porte que sur une facette de
la politique énergétique, qui est
l'hydroélectricité. C'est très limitatif comme...
Mme Bacon: Est-ce qu'avant de prendre position dans votre
mémoire - c'est ma dernière question, M. le Président -
vous avez consulté tous vos membres pour savoir s'ils sont d'accord avec
cette position de votre mémoire?
Mme Paquin: Nous fonctionnons comme n'importe quelle entreprise,
par conseil d'administration, et c'a été approuvé par les
conseils d'administration des Ami-e-s de la terre de Québec et du
conseil de l'environnement des régions de Québec.
Mme Bacon: Alors, vous fonctionnez un peu comme nous, avec des
élus qui sont ici qui viennent...
Mme Paquin: Oui, mais nous allons en assemblée
générale une ou deux fois par année et nous
discutons...
Mme Bacon: On va en élection et les gens décident.
C'est la même chose.
Mme Paquin: Non, non. il n'y a pas juste l'élection. Quand
nous faisons les assemblées générales, nous abordons tous
les sujets. Nous demandons aux membres de nous présenter des
priorités et nous choisissons, en assemblée
générale, les priorités qui seront retenues pour
l'année. Chaque priorité a ses orientations et le dossier
énergétique est une priorité depuis au moins trois ans,
accepté par les membres en ce sens.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Orford.
M. Benoit: Mme Paquin, M. Douville, M. Lecours, merci
d'être venus ici à cette commission parlementaire.
M. Legault: M. Legault, en passant. M. Benoit: Pardon?
M. Legault: M. Legault. M. Benoit: M. Legault.
M. Legault: Je ne sais pas s'il y a une erreur.
Le Président (M. Bélanger): On nous avait induit en
erreur dans la présentation.
M. Benoit: Merci d'être venus à cette commission
parlementaire et d'avoir fait valoir votre point de vue. À la lecture de
votre mémoire, j'ai ressenti quelque chose de drôle un peu: les
bons sont tous sur le même côté, c'est-à-dire que les
gens de l'environnement, ce sont les bons et il y a le reste de la
société. Je pense que, comme l'Opposition, comme le reste de la
société, nous n'avons peut-être pas l'étiquette
"environnemental istes" écrite au revers de notre doublure, mais nous
croyons au mieux-être de l'individu, au mieux-être de
l'environnement et, indéniablement, je pense qu'on est des amis de la
terre, sous une forme ou sous une autre. Vous êtes, j'en suis convaincu,
comme Green Peace l'a été il y a 10 ans, des précurseurs
d'un message. Il vous faut continuer à livrer ce message, c'est une
bonne tribune pour ie faire et je vous encourage à continuer.
D'autre part, il y a peut-être quelques questions auxquelles
j'aimerais que vous répondiez. Vous parlez d'une "recherche
d'alternatives de développement moins pénalisantes pour
l'environnement", dans votre mémoire, à la page 2. Il semble que
la société évolue à une rapidité telle que
les grands environnementalistes, en Europe, par exemple, qui décriaient
l'énergie nucléaire, il y a quelques années, les plus
grands environnementalistes reviendraient maintenant à
dire: Le nucléaire, c'est la solution de demain. Comment votre
groupe se situe-t-il dans ces recherches d'alternatives de développement
moins pénalisantes? (12 h 45)
Mme Paquin: En passant, quand vous parlez d'alternatives de
développement, vous faites allusion à des alternatives
énergétiques, si je comprends bien.
M. Benoit: Oui. Bien oui, dans votre mémoire, à la
page 2.
Mme Paquin: Parce que des alternatives de développement,
c'est un peu différent. Ce sont des alternatives dans le sens de choisir
des modes de développement différents, c'est-à-dire des
types d'entreprises ou des formes d'entreprises différentes.
M. Benoit: Pouvez-vous être plus... Mme Paquin:
Alors, vous parlez... M. Benoit: ...spécifique?
Mme Paquin: Oui. C'est parce qu'il y a alternative
énergétique et il y a alternative de développement. En ce
qui concerne le développement économique, vous pouvez choisir
d'investir dans l'aluminium, comme on le fait, ou vous pouvez choisir
d'investir dans un autre secteur comme les économies d'énergie;
ça, ce sont des alternatives de développement. Mais une
alternative énergétique... Vous parlez du nucléaire, donc
c'est une forme d'énergie alternative, si vous voulez. Nous, on ne s'est
pas vraiment penchés sur la question du nucléaire, dans notre
groupe. On en a suffisamment avec l'hydroélectricité. Et comme
c'est le problème majeur, au Québec,
l'hydroélectricité, pour le moment, c'est la question qu'on
étudie présentement. Pour ce qui est du nucléaire, on va
sûrement l'étudier à un moment donné, quand on aura
les énergies pour le faire. Pour le moment, on n'a pas de position
là-dessus. Est-ce que vous en avez, vous autres?
Des voix: Non.
M. Benoit: Pour vous, Mme Paquin, et votre groupe, est-ce que
croissance économique, ça veut absolument dire la fin d'une
société écologique équilibrée,
jusqu'à un certain point, qui fonctionne bien? Est-ce que les mots
"croissance économique", c'est, pour vous, la fin d'une
société écologique?
Mme Paquin: Les mots "croissance économique"?
M. Benoit: Oui.
Mme Paquin: Les mots "croissance économi- que", je veux
dire... Le développement économique, ça peut se faire,
à condition qu'il soit accolé à d'autres concepts. Si on
fait attention à l'environnement, au social, au développement
durable, le développement économique peut se continuer. Je ne dis
pas qu'on va arrêter le développement économique demain
matin, au contraire. Mais c'est de faire un développement
économique qui soit en accord avec un développement viable, en
accord avec le respect de l'environnement et en accord avec nos besoins
sociaux, ici, au Québec. Alors, ça demande de se poser des
questions.
Je sens que je suis très sévère, effective ment. Je
comprends les élus parce que les élus sont pris avec des
problèmes de court terme, qu'ils doivent régler au jour le jour;
je suis très consciente de ça. Nous, on n'a pas ces
problèmes-là, on travaille sur des dossiers de plus long terme.
Mais c'est pour ça que je vous suggère de faire un moment
d'arrêt parce que, quand on est pris tous les jours dans le court terme,
on ne peut pas avoir de visées à long terme. Pour avoir des
visées à long terme, il faut prendre le temps de s'arrêter
et je pense que c'est toute la société qui en
bénéficierait, et pas seulement les élus.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous souhaiter la bienvenue devant cette commission parlementaire. Je vais
quand même me permette certaines réflexions. La grande partie de
votre mémoire, finalement, porte sur la question de la pertinence de
cette commission parlementaire. Mais il n'en reste pas moins que, tout en
partageant pour l'essentiel les préoccupations que vous avez de ce
côté-là et en étant conscient de l'importance d'un
débat public - on peut l'appeler enquête, on peut l'appeler
consultation, on peut l'appeler, bon, commission - mais d'un débat
public plus large sur toutes la question énergétique, tout en
étant conscient de ça - et d'ailleurs, le mémoire qui a
été déposé devant la commission, hier, par le
comité environnement du Parti québécois était on ne
peut plus clair quant à ça aussi - il faut quand même
commencer quelque part, hein? Avant d'avoir de la braise, il faut allumer le
feu. Je pense que l'intérêt de cette commission, que l'on tient,
c'est justement d'allumer le feu. C'est de créer, de susciter
l'intérêt d'aller plus loin et de permettre à des gens qui
veulent aller plus loin de s'exprimer, dans un premier temps, pour expliquer
pourquoi le gouvernement, finalement, devrait engager des sommes
énormes, importantes du moins, pour aller plus loin dans ce vaste
débat-là. Les contributions telles que la vôtre sont
excellentes dans cette façon de faire avancer le débat vers
quelque chose de plus global, de plus systématique.
il ne faut pas oublier, quand même, lorsque l'on parle
d'Hydro-Québec, à travers tout ça, que, essentiellement,
au départ, c'est à travers les plans de développement
d'Hydro-Québec, dont l'analyse est souvent contestée dans la
population, que l'on en est arrivés à demander et à exiger
de la part du gouvernement la tenue, déjà, d'assises un peu plus
larges pour regarder globalement le problème, qui nous ont amenés
à la commission que nous avons actuellement qui, j'en conviens, doit
nécessairement déborder sur autre chose. Parce que si on se
contente d'un petit 15 minutes d'intervention de part et d'autre et
qu'après la dernière intervention on se frotte les mains et qu'on
dit: Bon, ben, c'est fini, probablement que dans 15 ans on sera encore au
même point. Hydro-Québec reviendra l'année prochaine nous
redéposer son plan de développement avec ses tableaux en couleurs
et son système vidéo et on n'aura pas avancer. On va continuer le
plan de développement de la même façon, et puis... Il faut
aller beaucoup plus loin, beaucoup plus à fond, j'en conviens avec vous.
Mais je conviens aussi de l'importance d'allumer le feu quelque part. Et c'est
ce que, je pense, nous sommes en train de faire, actuellement, sinon de mettre
le feu à la ministre, du moins d'allumer sa conscience sociale de
façon qu'elle ait envie d'aller plus loin et d'amener son gouvernement
à se requestionner plus globalement sur l'ensemble de la situation
énergétique du Québec. Si nous n'atteignons que ce
but-là, après le mois de consultation, et bien ça sera
déjà un pas énorme dans la bonne direction, qui va faire
en sorte que peut-être que des tenants un peu plus inconditionnels des
positions d'Hydro-Québec devront nuancer leur position dans
l'avenir.
Je voudrais juste vous poser une question avant de passer la parole
à mon collègue qui a quelques questions. Vous avez dit et j'ai
retenu dans votre intervention, entre autres, qu'il était difficile
d'imaginer qu'Hydro-Québec puisse gérer - parce que ça ne
faisait pas partie de sa façon d'être, finalement - des politiques
importantes de conservation d'énergie, etc. J'aurais tendance à
avoir une vision différente et c'est pour ça que j'aimerais avoir
vos explications là-dessus. Je pense qu'essentiellement
Hydro-Québec, même si elle n'a pas un visage très rassurant
depuis quelque temps, n'est quand même pas un monstre.
Hydro-Québec, essentiellement, est à l'image du Québec et
à l'image d'un mandat que les Québécois lui donnent.
Jusqu'à maintenant, on a donné à Hydro-Québec, du
moins depuis sa prise d'essor vertigineuse en 1964, un mandat de pourvoyeur
d'électricité et on revenait de loin, il faut bien se le dire.
Juste à titre d'exemple, la Coopérative régionale
d'électricité de Saint-Jean-Baptiste-de-Rouville sur la rive sud
de Montréal a eu un mandat de promotion de ('electrification rurale
jusqu'en 1988. Le mandat vient juste d'être changé, il y a deux
ans. Alors, c'est pour vous dire qu'on revenait de loin en 1964.
À ce moment-là, on disait: Hydro-Québec, on lui a
donné un mandat de pourvoyeur d'électricité. Là, on
requestionne globalement l'affaire. Mais, est-ce qu'on ne pourrait pas, comme
société, donner un nouveau mandat à HydroQuébec,
qui serait peut-être plus un mandat de gestionnaire
d'électricité et qui, à ce moment-là,
l'amènerait à concevoir autre chose que de l'endiguement de
rivières et, finalement, de la production d'alternateurs et de lignes de
transmission, lignes de transport? Est-ce qu'il ne serait pas concevable que,
comme société, on oriente autrement Hydro-Québec et,
qu'à partir de ses compétences, Hydro-Québec pourrait
être un excellent ou devenir un excellent gestionnaire
d'électricité et, par le fait même, de mesures
d'économies d'énergie ou d'énergies alternatives, etc.,
comme elle a été, depuis une vingtaine d'années - et on
doit l'avouer - un excellent gestionnaire de "pourvoyage"
d'électricité ou de fourniture d'électricité aux
Québécois?
Mme Paquin: Oui, bien, c'est ça. C'est ce que je disais
tantôt. C'est que le mandat d'Hydro-Québec est assez restreint
présentement. Ce que je voulais dire en disant de confier à
l'extérieur d'Hydro-Québec, c'est à court terme,
étant donné que c'est difficile de changer des mentalités,
de changer une gestion qui dure depuis des années, de faire les
changements institutionnels à l'intérieur de l'institution, si on
peut dire Étant donné que les économies d'énergie
ça presse, les énergies alternatives aussi, c'est pour ça
que je disais: À court terme, on pourrait peut-être faire faire
des études à l'extérieur d'Hydro-Québec, mais,
à long terme, évidemment, on pourrait envisager de changer le
mandat d'Hydro-Québec, d'élargir sa base de travail en en faisant
une compagnie qui s'orienterait dans plusieurs types d'énergie, entre
autres dans les types d'énergie qui n'ont pas encore été
tellement étudiés au Québec, les énergies
alternatives. C'est ce qu'on pense. Mais ce que je disais, c'est, à
court terme, est-ce qu'elle sera capable de faire le virage rapidement?
Ça, j'en doute.
M. Claveau: O.K.
M. Douville (Louis): II faudrait peut-être aussi
intégrer les consommateurs dans ces prises de décision aussi.
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse. Est-ce que
vous pourriez parler un petit peu plus fort? On vous entend très
mal.
M. Douville: II faudrait peut-être intégrer les
consommateurs dans les prises...
M. Legault: Dans le processus.
M. Douville: ...dans le processus, c'est ça,
pour l'aider à s'orienter. Je parle ici
d'Hydro-Québec.
Mme Paquin: Parce qu'il parlait du mandat
d'Hydro-Québec...
M. Douville: C'est ça, c'est ça,
d'intégrer... Mme Paquin: Explique-le donc un peu plus.
M. Legault: Je pense que, si Hydro-Québec
représente les Québécois, les Québécois
pourraient avoir une place à Hydro-Québec. Actuellement, c'est un
État dans l'État. Je veux dire, les décisions se prennent
même... en tout cas, antérieurement, elles se prenaient même
sans que le gouvernement soit, je ne veux pas dire d'accord, mais souvent,
Hydro-Québec poussait sur le gouvernement. Actuellement, il y a
peut-être un partenariat, je crois, mais, à long terme, si
Hydro-Québec était mieux contrôlée par les
consommateurs québécois, de façon impartiale, je pense que
ça lui permettrait de diversifier ses actions et de vraiment travailler
au bien-être des Québécois en général.
Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux remercier les
représentants du groupe Les Ami-e-s de la terre. Avant de leur poser
quelques questions, j'aurais quelques réflexions aussi. Je pense que
c'est une vue un peu trop étroite que de dire: Si vous n'arrivez pas
à des données scientifiques, vous êtes loin de la
vérité. La vérité emprunte divers chemins; souvent,
c'est le chemin de la soi-disant objectivité scientifique, mais souvent,
ça peut être aussi le chemin de l'intuition, même le chemin
du subjectivisme...
M. Claveau: Du gros bon sens.
M. Lazure: ...du sens commun. À titre d'exemple, lorsqu'on
a commencé à se servir des rayons X en médecine, en
médecine dentaire, en particulier, personne n'a pensé que les
rayons X pouvaient être dommageables et, à un moment donné,
il y a des citoyens, justement des groupes semblables aux Ami-e-s de la terre,
qui dit: Attention, il ne faut pas utiliser les rayons X trop souvent, que ce
soit pour les dents ou pour autre chose. Et, éventuellement, la preuve
scientifique a été faite que l'usage abusif de rayons X pour des
fins de diagnostic était dommageable. Alors, moi, je pense qu'il faut
écouter les messages même s'ils ne sont pas apportés
à grand renfort de données, soi-disant objectives, un peu comme
les experts d'Hydro-Québec ont tendance à le faire justement. Il
faut écouter quand même ces messages-là. Et je fais appel
à la ministre parce que la ministre, au fond... Ce groupe-ci comme
d'autres et comme la trentaine qui ne viendront pas, c'est-à-dire la
Coalition, réclament un débat public. Nous, au Parti
québécois, on pense qu'il doit y avoir un débat public
aussi. La ministre a déjà répondu de façon
très favorable lorsque l'un de ses collaborateurs, qui était
président du Bureau d'audiences publiques, le BAPE, alors qu'elle
était ministre de l'Environnement, a dit: Attention, Mme la ministre, il
ne faut pas trop révéler la vérité aux gens en
matière de déchets dangereux. Le bon Dr Goldbloom recommandait
à la ministre de cacher la vérité ou de la limiter, la
vérité. La ministre a fait ce qu'il fallait qu'elle fasse, elle a
été courageuse. Elle a mis le bon Dr Goldbloom de
côté et elle a dit, en faisant ça: II faut que le public
participe à ce débat sur les déchets dangereux. Et elle a
créé la commission Char-bonneau, son gouvernement a
créé la commission Charbonneau, qui est un pas dans la bonne
direction.
De la même façon, moi, je fais appel à la ministre,
nous faisons appel à la ministre pour qu'elle donne la chance non
seulement à ce groupe-ci, mais à l'ensemble de la population de
pouvoir débattre en public durant un an, un an et demi, deux ans, le
temps qu'il faudra, cette question fondamentale, fondamentale non seulement
pour l'envergure des sommes impliquées - 60 000 000 000 $, 65 000 000
000 $, ce sont des sommes considérables - mais surtout parce que
ça va toucher la vie quotidienne de milliers de personnes, les
autochtones en particulier, et aussi parce que ça va complètement
bouleverser les systèmes écologiques de la région. Mais la
principale raison, c'est qu'il faut qu'au Québec on cesse de tenir pour
acquis que la consommation d'électricité, étant
donné que ça ne coûte pas cher et qu'on a beaucoup de
rivières, on peut y aller a gogo. Ça prend un virage et souvent
une consultation publique, du genre de la commission Parent, de la commission
Castonguay ou d'une autre commission. Souvent, ces consultations publiques ont
le don, ont pour effet, entre autres, de sensibiliser et de permettre à
un gouvernement de faire un virage majeur. En tout cas, je pense que la
ministre a fait preuve de courage à cet égard dans le
passé et nous souhaiterions qu'elle en fasse encore preuve aujourd'hui.
Ce n'est pas le report d'un an ou même de deux ans qui serait
catastrophique, loin de là. Ce n'est pas vrai que ce serait
catastrophique. Si on nous dit ça, c'est de la démagogie. La
ministre ne l'a pas dit, de toute façon.
Je pense que l'absence de certains de ses collègues et vous
l'avez noté avec raison... Son collègue de l'Environnement, on ne
l'a pas vu ici depuis qu'on siège. On ne l'a pas vu une fois, pas une
seule fois. C'est lui qui est le chien de garde de l'environnement dans ce
gouvernement-là et on ne l'a pas vu. Le ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche, qui est le chien de garde de la faune, on ne l'a pas vu
non plus. Le ministre responsable des autochtones qui est
censé défendre les intérêts des autochtones,
des Cris et des Inuit en particulier, dans ce dossier-ci, on ne l'a pas vu non
plus. Alors, je pose la question aux représentants des Ami-e-s de la
terre, puisque c'est vous qui l'avez soulevée: Pourquoi pensez-vous que
ces trois ministres-là devraient être ici?
Mme Paquin: Je l'ai dit tantôt, nous pensons qu'ils sont
tous interpellés par les grands projets hydroélectriques
d'Hydro-Québec, chacun à sa façon, et plus
particulièrement aussi quand on prétend s'orienter vers le
développement viable et équitable. Le ministre de l'Environnement
est interpellé aussi. Quand on veut marier l'économie et
l'environnement, le ministre de l'Environnement est encore interpellé.
Évidemment, pour être plus précis, les grands projets
hydroélectriques touchent la faune de façon importante. Il y a eu
des études de faites par la société Audubon, entre autres,
sur la question. Il y a des études qui ont été faites
même par Hydro-Québec qui avoue les problèmes sur le
territoire aussi, bien qu'elle n'ait pas fait toutes les études qu'il
faut. Le ministre responsable des autochtones, bien sûr, aurait un mot
important à dire, parce que toute la culture, tout le mode de vie de ces
peuples est en cause dans ces grands projets-là. Eux, ce sont des gens
qui vivent de la nature et on leur prend leur nature. Alors, ils vont devenir
comme nous, des gens axés sur l'exploitation et sur le
développement économique a courte vue. On essaie de les rendre
comme nous, dans le fond. On leur apporte le développement dans leur
territoire.
M. Lazure: J'ajouterais peut-être une dernière
chose.
M. Legault: Je veux juste ajouter une chose. C'est
qu'Hydro-Québec se targue de penser aux effets cumulatifs, mais je peux
vous dire que j'ai quand même étudié la méthodologie
de travail d'Hydro-Québec et, enfin, c'est un jugement personnel comme
étudiant en urbanisme qui a étudié là-dessus, mais
ce n'est pas du tout à point actuellement et c'est en processus. Les
effets cumulatifs de la Baie James I n'ont même pas été
évalués. Après plusieurs années, on s'est
aperçu que le mercure... Il y a énormément d'effets
cumulatifs, et dans le rapport du plan de développement
d'Hydro-Québec, on parle surtout des effets cumulatifs au niveau
socio-économique, mais on ne fait pas de couplage avec les effets par
rapport à l'effet de serre, par rapport à l'ensemble des
composantes biophysiques du milieu, et je dirais qu'il y a même des
effets cumulatifs sur la création d'alumineries qui ont d'autres effets
sur l'environnement, locaux et régionaux.
M. Lazure: II y a une dernière question, M. le
Président, que je voudrais soulever. Vous parlez justement
d'alumineries. Si le gouvernement ne consent pas à tenir ce débat
public, on pourrait se poser la question, encore une fois: Est-ce que le refus
du gouvernement de tenir un débat public serait motivé par les
mêmes raisons qui empêchent ce gouvernement de mettre en vigueur
l'article 2n de la loi, l'article 2n qui permettrait des audiences publiques
dans le cas de grands projets, alumineries, papetières, etc.?
On sait que le ministre de l'Environnement, lui, il veut que cet article
2n devienne en vigueur pour qu'il y ait des audiences publiques de tenues
chaque fois qu'il y aura un grand projet industriel. Mais on sait aussi
qu'à l'intérieur de son Conseil des ministres, il est
neutralisé par l'ensemble du Conseil des ministres, apparemment, qui
choisit de ne pas mettre en vigueur cet article 2n, donc, de ne pas tenir des
débats publics lorsqu'il s'agit de grands projets industriels, parce que
c'est de ça qu'il s'agit.
L'article 2n dit: Si on est pour faire une grande aluminerie ou une
papetière, on va tenir des audiences, donc, un débat public
là-dessus, pour voir les répercussions, les impacts
environnementaux de ça. Alors, si le gouvernement refuse d'avoir des
audiences publiques, un débat public sur Baie James II, est-ce que c'est
pour les mêmes motifs que son refus, qu'on s'est fait expliquer il y a
quelques mois par le ministre de l'Environnement, son refus de mettre en
vigueur l'article 2n?
Le Président (M. Bélanger): Bien, alors...
Mme Paquin: En tout cas, nous, on espère que la ministre
va essayer de convaincre ses consoeurs et confrères du Conseil des
ministres sur la question du débat public, parce qu'on pense que c'est
très important. On espère l'avoir convaincue un petit peu,
même si ce n'est peut-être pas totalement, lui avoir au moins
ouvert une petite porte à la réflexion et on espère que
son discours de fermeture sera plus encourageant que son discours d'ouverture
et qu'il y aura des portes ouvertes du côté de
l'environnement.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M le
député d'Ungava, vous pouvez remercier nos invités.
M. Claveau: Je tiens à vous remercier de votre
participation qui ajoute aux travaux de la commission et je profiterais
peut-être de ce moment qui m'est donné pour inviter la ministre
à faire en sorte que ses collègues soient présents pour la
fin des débats d'ici à la fin mai. Et, comme ça, elle sera
moins seule et peut-être plus appuyée lorsqu'elle se
présentera devant son Conseil des ministres pour demander de larges
audiences publiques sur la question de l'énergie au Québec. Merci
de votre représentation.
Le Président (M. Bélanger): Mme la minis-
tre.
Mme Bacon: Vous me permettrez, M. le Président, de juste
citer Brundtland qui dit: Plus largement encore, les grands organes centraux du
gouvernement chargés de l'économie des autres secteurs devraient
désormais être rendus directement et pleinement responsables de
s'assurer que leurs politiques, leurs programmes et leurs budgets sont capables
de soutenir un développement écologiquement et
économiquement soutenables.
Je dois dire que quand on est ministre responsable d'un secteur
économique, on doit être capable d'intégrer les valeurs,
les choix et sans avoir continuellement la présence des autres
collègues avec nous. Et je pense que le ministère que je dirige,
à vocation économique, m'amène aussi, avec
l'expérience' que nous avons, à intégrer les valeurs et
à faire des choix.
Le député d'Ungava parlait tantôt d'un feu qui a
été allumé. Je pense que ça prend une
décision ministérielle pour allumer le feu, ce qui a
été fait avec mes collègues qui m'ont apporté leur
appui pour tenir cette commission parlementaire qui n'avait quand même
pas eu lieu. Et je ne voudrais pas qu'il amène la braise tout de suite.
On va alimenter ce feu et on verra par la suite. Mais je vous remercie d'avoir
alimenté aujourd'hui ce feu.
Le Président (M. Bélanger): Alors, en terminant,
une remarque qui est non partisane, qui vient de la présidence,
peut-être faire remarquer à vos groupes amis qui ont refusé
de venir à la commission, qui n'ont pas voulu venir, qui se sont
privés d'une saprée belle occasion de faire connaître leur
point de vue, que c'est peut-être eux ou la cause qu'ils défendent
qui est la plus grande perdante là-dedans. Quand on décide de ne
pas parler, on vit avec les conséquences de n'avoir rien dit et, quand
on le dit aux bonnes places - et ici, c'est la bonne place; nous avons
été élus pour ça - ça a beaucoup plus de
chance que le message passe. Alors, transmettez-leur ça de ma part, s'il
vous plaît.
Mme Paquin: Est-ce que je peux juste ajouter quelque chose? Je
comprends que vous avez été élus et que vous vous sentez
représentatifs de la population québécoise, mais je pense
qu'il y a des décisions qui ne peuvent se prendre uniquement par les
élus. Quand ce sont des décisions qui sont très
importantes pour l'avenir du Québec, les élus doivent descendre
au niveau de la population.
Le Président (M. Bélanger): Vous venez de
définir exactement pourquoi les commissions parlementaires existent. Je
vous remercie. Bon appétit! Et nous reprendrons nos travaux à 16
heures, après la période des questions. Merci.
(Suspension de la séance à 13 h 11)
(Reprisée 16 h 8)
Le Président (M. Leclerc): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission parlementaire de l'économie et du travail qui tient
une consultation générale et des auditions publiques sur la
situation et les perspectives de l'énergie électrique au
Québec reprend ses travaux.
J'invite donc le Comité consultatif pour l'environnement de la
Baie James à prendre place à la table, s'il vous plaît.
Alors, M. Marcotte, je vous invite à nous présenter les
gens qui vous accompagnent en vous rappelant que vous avez 20 minutes pour nous
faire part de votre mémoire et qu'ensuite chacun des groupes
ministériels aura 20 minutes pour vous interroger. Je vous cède
la parole.
Comité consultatif pour l'environnement de la
Baie James
M. Marcotte (Hubert): M. le Président, mesdames et
messieurs, mon nom est Hubert Marcotte et je suis le président du
Comité consultatif pour l'environnement de la Baie James. Je suis
accompagné de M. Louis-Edmond Hamelin, membre nommé par le
gouvernement du Canada; de M. Alain Soucy, qui est membre nommé par le
gouvernement du Québec; et de M. Allen Penn, qui est membre nommé
par l'Administration régionale crie.
Afin de mieux situer nos commentaires, je voudrais tout d'abord apporter
quelques précisions sur le mandat du Comité consultatif pour
l'environnement de la Baie James. Ce comité a été
créé en vertu de la Convention de la Baie James et du Nord
québécois et de l'article 134 de la Loi sur la qualité de
l'environnement. Le Comité consultatif est composé de 13 membres.
Le gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec et l'Administration
régionale crie nomment chacun quatre membres; le treizième membre
est le président ou le vice-président du comité conjoint
de chasse, de pêche et de piégeage. Ce dernier est un
comité consultatif créé également en vertu de la
Convention de la Baie James et du Nord québécois afin d'assurer
une participation active des Cris à la gestion de la faune sur le
territoire.
Le mandat du Comité tel qu'énoncé dans la
Convention et dans la loi indique que ce comité doit être
consulté à titre d'interlocuteur privilégié et
officiel dans le processus d'élaboration des lois et règlements
concernant la protection de l'environnement et du milieu social sur le
territoire de la Baie James. Le Comité a également pour fonction
de surveiller, par le libre échange de points de vue et de
renseignements, l'application du chapitre 22 de la Convention. À cette
fin, il peut étudier et formuler des recommandations relativement aux
mécanismes et
procédures d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement et le milieu social. Le Comité est aussi consulté
sur des questions d'importance majeure relativement à la mise en oeuvre
du régime de protection de l'environnement et du milieu social et des
mesures concernant l'utilisation des terres. Il peut, dans ce domaine,
conseiller les gouvernements responsables intéressés.
De plus, le Comité maintient des liens étroits avec les
personnes impliquées activement dans la prestation de services
gouvernementaux sur le territoire. Il maintient également des liens avec
les comités responsables de l'application des procédures
d'évaluation et d'examen, tel qu'énoncé dans le chapitre
22 de la Convention.
En conformité avec son mandat, le Comité consultatif
désire porter à l'attention de cette commission quelques
observations générales sur le développement
hydroélectrique du territoire par rapport au milieu biophysique et
social. Le Comité tient à préciser qu'il s'agit de
commentaires généraux et non d'une analyse
détaillée du plan de développement d'Hydro-Québec.
En ce sens, le Comité ne définit pas de position quant au
bien-fondé des projets énergétiques proposés dans
ce plan.
Dans cette présentation, mes collègues et moi traiterons
de thèmes qui ont retenu notre attention en raison de leurs implications
possibles sur l'environnement et le milieu social sur l'utilisation du
territoire par les résidents dont la majorité sont des
autochtones pratiquant un mode de vie traditionnel, soit la chasse, la
pêche ou le piégeage.
Ainsi, M. Allen Penn traitera d'abord des implications liées aux
échéanciers accélérés pour la mise en
service des projets hydroélectriques; M. Alain Soucy abordera les
aspects portant sur les impacts cumulatifs des activités de
développement, sur les critères de conception et d'optimisation
des projets, sur la pratique du détournement des rivières ainsi
que sur l'affectation de la totalité des ressources hydrauliques de
certains bassins versants à des fins de production
énergétique; M. Louis-Edmond Hamelin traitera de l'harmonisation
des procédures d'évaluation des impacts sur l'environnement et le
milieu social. À la fin, j'apporterai quelques élé ments
de conclusion à cette présentation. M. Penn.
M. Penn (Allen): Oui, M. le Président, je vais
résumer pour vous la partie de notre mémoire qui traite des
échéanciers de construction et de mise en service des
éléments du programme d'équipement et leurs implications
écologiques.
Le Comité, d'abord, a constaté que le nouveau plan de
développement d'Hydro-Québec comprend plusieurs compressions
additionnelles par rapport au plan de 1989 qui ajoutent déjà aux
pressions, aux échéanciers accélérés dans ce
plan préalable. Le Comité s'inquiète des implications que
pourraient avoir les échéanciers comprimés sur les
procédures d'évaluation et d'examen prévues pour
l'étude et l'autorisation environnementale de ces projets.
Le Comité croit qu'il y a des incidences ici sur l'optimisation
même, la conception même de ces projets et la planification des
mesures d'atténuation dont il faudrait tenir compte.
Premièrement, nous remarquons que la période disponible pour les
amants des projets serait passablement raccourcie par les
échéanciers proposés, notamment pour le complexe Grande
Baleine, mais le même commentaire s'applique pour d'autres composantes du
projet de programme d'équipement dont LA-2, EM-1 et le complexe NBR.
Je cite ici le texte du mémoire qui indique: Cette
inquiétude prévaut pour l'ensemble des projets, mais plus
particulièrement pour le projet Grande Baleine. Si les
échéanciers proposés par Hydro-Québec dans sa
dernière proposition de plan de développement sont retenus,
seulement quelques mois seront disponibles pour l'évaluation
environnementale de ces projets.
Nous notons aussi qu'il y a des liens entre les
échéanciers prévus pour les différentes composantes
du programme d'équipement et que l'accélération de Grande
Baleine et de NBR probablement va créer une situation où il sera
difficile de profiter de l'expérience fournie par LA-1, par exemple, ou
EM-1, les prochains projets retenus qui innondent ont une grande superficie du
territoire. La compression des échéanciers signifie qu'il y a peu
de temps disponible pour apprendre ce qui se passe avec les systèmes,
les écosystèmes qui sont en voie d'être
perturbés.
L'acquisition des connaissances nécessaires à
l'élaboration des études d'impact doit se faire en tenant compte
de l'ampleur prévue des modifications aux écosystèmes
résultant des projets et de la variabilité interannuelle des
écosystèmes du Nord. Il est donc important d'obtenir une banque
de données qui dépasse une année et qui va au-delà
des programmes d'inventaire classique. Les écosystèmes aquatiques
et terrestres requièrent une analyse approfondie et qui ne devrait pas
être compromise par un échéancier trop serré.
Le mémoire du comité consultatif poursuit cet argument en
nous fournissant des illustrations des conséquences d'un
échéancier comprimé d'autorisations d'études
environnementales et de construction en citant, par exemple, la
problématique de l'optimisation de la conception des projets, de la
gestion des réservoirs, de l'échéancier de remplissage des
réservoirs et de la mise en place des programmes de piégeage, de
récupération et de relocalisation de la faune, ainsi que
plusieurs activités liées au traitement des incidences sociales
et économiques de ces
projets.
Le comité a pris en considération, dans son analyse du
mandat de la commission, l'importance des délais raisonnables,
nécessaires pour l'examen des projets et la possibilité qu'il y
ait lieu de recourir au promoteur pour des données additionnelles, si
l'étude n'est pas jugée complète ou s'il y a d'autres
études nécessaires liées à la conception même
du projet. Ce sont des facteurs qui vont probablement influencer les
délais appropriés pour l'évaluation du projet. Le
comité a voulu également exprimer l'avis que les délais
spécifiques mentionnés dans la Loi sur la qualité de
l'environnement sont très restreints, sont très contraignants
pour des projets de cette envergure, notamment, et surtout pour les complexes
Grande Baleine et NBR.
Le comité commente aussi l'ambiguïté légale
qui entoure la proposition de séparer les autorisations pour
l'infrastructure routière, pour le complexe Grande Baleine, de
l'étude du reste du complexe et signale à la commission les
difficultés que ça pourrait générer au niveau de
l'examen à la fois des infrastructures de transport et pour le complexe
hydroélectrique comme tel.
Le comité attache une grande importance, dans ses
mémoires, au principe d'optimisation des projets, c'est-à-dire le
principe que ces projets ne soient pas planifiés seulement en vue de
critères techniques et économiques, mais qu'il y ait des
objectifs environnementaux incorporés même dans la
stratégie de conception des complexes dans leur ensemble. Il s'agit,
dans ce cas-là, d'un défi qui va prendre un certain temps. C'est
un consensus parmi les scientifiques et dans le public pour arriver à un
consensus sur qu'est-ce que c'est qui constitue un projet "optimisé"
dans le Nord québécois et ailleurs dans les autres régions
visées par le plan de développement. Le comité mentionne
aussi que la compression des échéanciers de construction aurait
ses propres incidences sociales. Ça se reflète, par exemple, au
niveau des programmes de formation des autochtones et des programmes
conçus pour améliorer ou augmenter les possibilités
d'intégration de la population locale, lors de la réalisation de
ces projets. Je vous passe maintenant M. Soucy.
M. Soucy (Alain): M. le Président, mesdames et messieurs,
le comité a constaté avec grand intérêt l'importance
grandissante qu'Hydro a apportée dans son plan de développement
sur la notion de développement durable et de s'intéresser, par le
fait même, à ce qu'on appelle les effets environnementaux
cumulatifs. C'est pourquoi mes propos seront, pour les prochaines minutes,
à ce sujet. Il est évident qu'avec des projets de l'envergure
dont on parle pour la Baie James, où le territoire qui est
concerné représente l'ensemble des bassins qui sont
considérés ici, représentent quand même une
superficie presque équivalente au quart du Québec, la notion
d'impact cumulatif revêt une importance considérable. On pourrait
définir ces effets cumulatifs de différentes façons, comme
des changements brusques ou progressifs d'un milieu qui résultent de
l'accumulation ou de l'interaction d'impacts qui peuvent être directs ou
indirects et qui sont générés par plusieurs interventions.
Il y a donc une notion d'accumulation, qu'elle soit dans l'espace ou dans le
temps, et une notion de synergie qui fait que les impacts sont
interreliés entre eux. La problématique ici n'est pas tant dans
la définition mais dans les méthodologies d'évaluer ces
impacts et dans la qualité des personnes pour en fixer les objectifs,
dans l'expertise pour les évaluer. L'inquiétude du comité,
ici, se situe donc à ce niveau-là. Comment allons-nous
définir ces critères pour les évaluer correctement?
Comment allons-nous les juger? Quelle est l'expertise en place, au sein de
l'appareil gouvernemental, pour ce faire, comprenant qu'Hydro, pour sa part, a
déjà commencé à faire ses devoirs de ce
côté-là en regroupant un certain nombre de
spécialistes autour de ce thème? Mais est-ce qu'il faut laisser
à l'initiative d'Hydro-Québec cette grande question des impacts
cumulatifs, impacts cumulatifs qui peuvent avoir, comme vous le savez, des
conséquences importantes? On parle ici, à titre d'exemple
d'impacts cumulatifs: les pluies acides, l'effet de serre. Ce sont des exemples
importants.
Il est donc essentiel également de définir des
critères méthodologiques reconnus, confirmés,
acceptés par tous et, également, que des discussions s'engagent
sur ces notions et sur les dimensions que cela doit prendre.
Le deuxième point de vue qu'a reconnu le comité a trait
aux objectifs environnementaux. Quand on parle de développement durable,
on doit parler d'objectifs environnementaux. Il ne suffit pas de faire des
études d'impact et d'en prédire les conséquences, encore
faut-il intégrer dans le projet des dimensions qui en deviennent une
partie importante, qui sont des objectifs environnementaux et qui s'allient,
ces objectifs-là, aux objectifs économiques et qui s'ajoutent
aussi aux contraintes qu'il faut imposer, contraintes qui sont soit techniques,
dans certains cas, mais aussi contraintes environnementales.
Il s'agit donc ici qu'on définisse aux promoteurs quels seront
les objectifs environnementaux qu'ils devront rencontrer à
l'intérieur du projet qui est soumis, que ces objectifs-là soient
bien intégrés lors de l'optimisation du projet et lors de sa
réalisation et qu'on s'assure que ces objectifs soient également
rencontrés. Nous n'avons pas l'impression, actuellement, que les
processus pour arriver à cet objectif-là soient en place. Nous
nous inquiétons donc de cette dimension.
Dans le même ordre d'idées, lorsqu'il s'agit
d'aménagement hydroélectrique dans le Grand-Nord
québécois, il semble tout à fait naturel,
compte tenu de ia nature des bassins versants, compte tenu de la
proximité des eaux - dans certains cas même, il y a des lacs qui
se déversent dans deux bassins différents, à tour de
rôle, suivant des cycles - il semble donc naturel et facile de
préconiser, à titre d'aménagement optimum sur les plans
technique et économique, le détournement des rivières.
C'est d'ailleurs ce qui s'est fait dans le cas du complexe La Grande. Mais
jusqu'où devons-nous aller en ce sens? Quels sont les critères
que nous devons définir, les critères d'acceptabilité
environnementaux que nous devons définir et qui interviendront donc dans
les décisions d'aménagement de ces projets et qui seront donc,
comme toile de fond, pour les développer et les optimiser?
C'est une question qui nous apparaît fondamentale, une question
qui n'a jamais fait l'objet de débat public, qui devrait en faire
certainement. Il est important de définir donc, au Québec, une
politique en matière de détournement de cours d'eau, sinon il
sera toujours facile, techniquement et économiquement possible de le
faire, et ça, aux dépens de la qualité des milieux et de
la protection de l'environnement.
Cette politique devrait s'appuyer sur la capacité de support et
l'équilibre du milieu, la protection d'espèces rares ou
menacées et un consensus sur les débits résiduels à
maintenir en aval des ouvrages devrait être défini.
Quoi qu'il en soit, nous savons maintenant que l'absence de limites
écologiques dans le "design" et la gestion des réservoirs a des
conséquences importantes sur l'ensemble du milieu, autant physique
qu'humain. C'est pourquoi il nous semble exister un besoin réel de mise
sur pied de ces politiques et mécanismes d'intervention dès la
conception du projet et permettre d'en assurer, dans la mesure du raisonnable,
la multiplicité et la durabilité des ouvrages. Je vous remercie
de votre attention.
Le Président (M. Leclerc): Mme la ministre
Mme Bacon: En vous remerciant, messieurs, de votre
présence à cette commission parlementaire et de votre
mémoire que nous avons déjà analysé...
Le Président (M. Leclerc): Excusez-moi, madame.
Mme Bacon: Oui
Le Président (M. Leclerc): Si j'ai bien compris, vous
n'étiez pas le dernier intervenant ou quoi?
Mme Bacon: Est-ce qu'il y en a un autre?
Une voix: ...une autre intervention, si vous...
Le Président (M. Leclerc): O.K. Votre temps...
Mme Bacon: Ah non. Bon alors, ça va.
Le Président (M. Leclerc): ...étant terminé,
je croyais que vous aviez fini, c'est une erreur de ma part. Alors,
peut-être que quelqu'un...
M. Soucy: Est-ce qu'on pourrait vous demander une petite
minute?
Le Président (M. Leclerc): Oui, il n'y a pas de
problème. Je m'excuse.
Mme Bacon: Allez, allez. M. Soucy: M. Hamelin.
Le Président (M. Leclerc): Non, ça ne se
déplace pas.
M. Hamelin (Louis-Edmond): Peut-être que le point de vue
que j'ai à ajouter n'a pas l'importance des points de vue
précédents concernant l'échéancier ou les effets
cumulatifs. Je veux simplement attirer votre attention aux pages 13 et 14 de
mon mémoire - du mémoire, en fait, du conseil plutôt -
concernant un effort qui pourrait peut-être être fait dans le but
de procéder d'une façon globale plutôt que de
procéder d'une façon singulière à l'excès.
Nous pensons que, dans l'esprit d'ailleurs de la convention de 1975, certaines
études environnementales pourraient être faites en même
temps et non pas nécessairement séparément pour des
questions d'esprit de la convention, pour diminuer le parallélisme des
efforts, pour diminuer peut-être la lenteur des
délibérations, pour diminuer le coût et pour diminuer les
contradictions, en somme, inefficaces, à la condition cependant que
l'esprit de la convention de 1975 et les autres soient respectés et
à la condition que la façon de procéder et la façon
de décider de chaque acteur, que ce soient les Cris, que ce soit
Hydro-Québec ou le gouvernement du Québec ou les autres
partenaires, que toutes ces façons de décider qui ont
été acceptées dans le passé soient dûment
respectées et qu'il n'y ait évidemment aucun préjudice
pour les groupes autochtones de sorte que, si l'on acceptait d'aller vers une
certaine convergence des efforts, il faudrait qu'il y ait un protocole
dûment signé et, en fonction de ce protocole-là, les choses
pourraient être faites. Merci.
Le Président (M. Leclerc): Merci, M. Hamelin. Je comprends
maintenant que votre allocution est terminée, je reconnais donc Mme la
ministre. (16 h 30)
Mme Bacon: Merci, M. le Président. Dans votre
mémoire, vous demandez au gouvernement
du Québec de définir une politique relative au
détournement des rivières et au développement des bassins
versants. Or, jusqu'à maintenant, le développement s'est fait cas
par cas parce qu'aucune situation n'est semblable. Quelle serait la
portée d'une telle politique, de façon pratique? Et est-ce que le
gouvernement n'aurait pas l'air d'adopter une politique pour un seul promoteur
qu'en définitive on ne reviendrait pas au cas par cas?
Le Président (M. Leclerc): M. Soucy.
M. Soucy: Oui, si vous me le permettez, M. le Président.
Il est bien évident que, lorsqu'on parle de politique de
détournement, ici, on parle également de limites à ces
détournements beaucoup plus qu'à la non-faisabilité de
détournements. L'intervenant majeur au Québec qui travaille sur
les rivières, bien sûr, c'est HydroQuébec, mais on peut
penser que d'autres intervenants, les compagnies minières, les
compagnies qui utilisent les cours d'eau peuvent faire ces détournements
à une moins grande échelle, bien sûr, mais elles peuvent
faire ces détournements. Il y a quand même des mécanismes
de régulation pour ces projets de sorte que, quand les
détournements sont de faible envergure, ce sont ces mécanismes
qui jouent. Quand on arrive dans l'aménagement de très grands
projets comme ceux-ci, on se voit obligés d'établir certaines
contraintes minimales à respecter pour ces détournements et c'est
ça qui est absent actuellement. C'est évident que ça
s'adresse surtout à Hydro-Québec, mais la politique pourrait
être plus générale et englober, bien sûr, pour des
projets d'envergure, des critères qui, eux, seraient quand même
acceptables dans le sens qu'ils permettraient des détournements, mais
pas à n'importe quelle condition.
Mme Bacon: Est-ce que vous pouvez me donner un exemple, M. Soucy,
du genre de contraintes dont vous parlez?
M. Soucy: Bon. Par exemple, il y a la question des débits
résiduels. Chaque goutte d'eau que vous laissez aller a un impact sur la
rentabilité du projet. C'est sûr que c'est de l'énergie de
moins. Et on sait bien que, par les temps qui courent, avec l'eau qui n'est pas
en grande abondance à la Baie James, ça représente pas mal
d'argent. Mais c'est peut-être le sacrifice à faire dans
l'optimisation des besoins du Québec en énergie et dans
l'optimisation de la protection du milieu et des autres utilisations de ne pas,
aux seules fins de l'énergie, consacrer toute l'eau de nos
rivières. C'est peut-être l'exemple que je donne. Il y a eu, dans
le détournement La Grande, des détournements complets de
rivières avec des conséquences importantes; il y a eu des
aménagements correc- teurs, bien sûr, qui ont compensé en
partie. Mais s'il y avait eu, à cette époque, une politique de
débits résiduels, les aménagements correcteurs auraient
été beaucoup plus faciles à faire et ils auraient
été beaucoup rentables. Dans...
Mme Bacon: Allez-y, monsieur.
M. Soucy: Dans le cas où aussi on pourrait avoir une
politique qui dirait que chaque rivière doit être
aménagée dans son lit et qu'il n'y a pas détournement, une
politique pourrait aller jusque là si c'est un choix de
société. Ça rend les projets un peu moins rentables et
ça les repousse un peu dans le temps, mais ça fait partie de la
dynamique d'ordonnancement des projets à ce moment-là, mais il y
a une volonté sociale et une volonté politique d'aménager
les rivières dans leur propre lit parce que c'est une politique sociale
et c'est une décision qui a été prise; ça implique
des coûts sur le plan énergétique, mais ça a des
bénéfices sur le plan, disons, des usages multiples des cours
d'eau. Une politique pourrait aller jusque là.
Une politique pourrait ne pas se rendre jusque-là, se limiter aux
débits résiduels, pourrait permettre dans certains cas des
détournements à condition que des objectifs environnementaux bien
précis soient rencontrés. Mais, en l'absence de politique,
qu'est-ce qu'on fait? Le problème n'est pas de choisir la politique,
c'est d'en avoir une.
Le Président (M. Leclerc): Mme la ministre.
Mme Bacon: Vous évoquez aussi le concept de
développement durable et considérez important de fixer des
objectifs environnementaux à respecter dans l'établissement d'un
plan d'aménagement des ouvrages. Pour les projets Grande Baleine et NBR,
quels seraient pour vous les principaux objectifs écologiques, objectifs
sociaux qui auraient été jusqu'à maintenant
négligés dans la conception des projets?
M. Soucy: Dans le cadre du projet Grande Baleine, je sais qu'il y
a des efforts beaucoup plus importants qui ont été faits pour
rencontrer ces objectifs-là de la part d'Hydro-Québec. Je sais
aussi qu'actuellement, dans les différents documents et tout l'appareil,
les compétences environnementales d'Hydro-Québec sont à
considérer des objectifs environnementaux pour le complexe NBR.
La question n'est peut-être pas là. C'est à savoir
qui les fixe, ces objectifs-là. Est-ce que c'est Hydro qui doit se les
fixer elle-même ou si c'est la société ou le pouvoir
gouvernemental ou l'État qui doit les fixer? Et là, on a
plutôt l'impression que ces objectifs-là sont fixés par le
promoteur d'une façon presque unilatérale et c'est ça qui
est plus notre inquiétude que le fait de savoir s'il y a des objectifs
qui ont été fixés
ou pas.
Le mémoire ici fait état, bien sûr, de l'importance
de ces objectifs environnementaux, mais aussi à savoir qui les fixe, ces
objectifs environnementaux-là. Je ne pense pas qu'il faille laisser le
promoteur seul fixer ces objectifs, tout compétent soit-il ou
armé de spécialistes soit-il. Il faut donc qu'il y ait en
contrepartie, du côté gouvernemental, des compétences aussi
qui participent à ce débat de fixer ces objectifs
environnementaux. C'est plutôt là-dessus qu'on insistait.
Mme Bacon: Hier soir, nous avions Me Michel Yergeau qui nous a
fait part de ses craintes face à la capacité de l'appareil
gouvernemental de valider le contenu des études d'impact
d'Hydro-Québec et aussi d'en garantir la qualité et d'en
contrôler aussi la teneur scientifique.
La qualité des mécanismes de contrôle dont
l'État québécois s'est doté risque d'en souffrir,
selon Me Yergeau. Est-ce que vous partagez les mêmes craintes que Me
Yergeau?
M. Soucy: Oui. Nous avons les mêmes craintes, pour les
avoir vécues à part ça. C'est évident que quand on
parle d'environnement, ce n'est pas une science qui est très vieille,
hein? En 1970, on en parlait un peu. On parle d'il y a 20 ans.
II y a, bien sûr, depuis lors, des spécialistes qui ont
été formés un peu partout dans les universités,
mais on se rend bien compte que, quand on arrive avec des notions comme celles
des impacts cumulatifs, les compétences sont encore à venir. Il y
a quelques compétences, bien sûr, qui existent. Mais, quels sont
les effors que nous faisons pour doter l'appareil gouvernemental de ces
spécialistes? C'était ça un peu notre inquiétude.
Nous avons un peu l'impression qu'on est toujours un peu en réaction et
on est toujours un peu en retard sur Hydro-Québec à ce point de
vue-là. Je pense qu'il serait temps que l'État se donne une
politique dynamique de ce côté-là pour doter son appareil
de compétences et d'expertises et je partage ce point de vue à ce
moment-ci.
Mme Bacon: Vous semblez attacher aussi une grande importance aux
effets environnementaux cumulatifs. Vous soulignez à la page 9 de votre
mémoire qu'il n'existe pas encore de méthodologie
éprouvée ni de procédure régissant les
modalités d'un tel examen. Vous souhaitez qu'Hydro-Québec
consulte les groupes et les organismes concernés pour définir la
nature, la portée et la méthodologie des études à
entreprendre.
Dans le plan de développement d'Hydro-Québec 1989-1991,
dans le document "HydroQuébec et l'environnement" aux pages 35 à
39, on expose la démarche qui a été adoptée par
l'entreprise pour l'étude des effets cumulatifs. On nous dit qu'un
rapport synthèse serait disponible sous peu. Est-ce que le comité
est au courant de la démarche d'Hydro-Québec? Est-ce que vous
souhaitez aussi l'adoption d'une méthodologie différente de celle
qui a été adoptée?
M. Soucy: Disons que mon propos ici et ma réponse vont
aller dans le même sens que les autres. Nous sommes au courant des
efforts qu'Hydro a faits de ce côté-là. Ils ont fait venir,
d'ailleurs, des spécialistes d'un peu partout. Donc, des
spécialistes externes afin de définir une méthodologie qui
nous apparaît, à première vue, correcte. La question est de
savoir si de notre côté nous avons mis en place les
compétences - je parle du côté de l'appareil toujours qui
doit juger et autoriser - qui vont de pair. Et deuxièmement, les
études qui ont été faites dans ce sens-là par
Hydro-Québec n'ont pas encore été rendues publiques. Elles
n'ont pas fait l'objet, donc, de sanctions par des pairs, je pourrais dire,
l'équivalent de ça, par d'autres spécialistes qui
pourraient dire: Ça va comme méthodologie ou ça ne va
pas.
Tant que ça reste à l'interne et que ça reste une
préoccupation interne d'Hydro, c'est sûr que c'est difficile d'en
faire un débat et d'amener une crédibilité aux
méthodologies qui sont préconisées. Je ne dis pas que les
méthodologies qu'Hydro s'apprête à appliquer ne sont pas
valables. Ce n'est pas ça que je dis. Je dis qu'elles ont besoin
d'être, disons, reconnues par d'autres compétences que celles qui
sont strictement internes à celles d'Hydro. Et également,
qu'elles fassent l'objet de débat entre spécialistes parce que
dans ce domaine, nous sommes au début de ces considérations. Il y
a quelques documentations là-dessus, c'est sûr. D'ailleurs, il y a
des références que j'ai apportées avec moi ici qui sont
publiées par un organisme canadien. Mais il n'y a pas, à
proprement parler, à ce moment-ci, eu de consensus sur ce que devait
être une méthodologie valable de ce côté-là.
Je ne sais pas si M. Hamelin a quelque chose à ajouter.
Le Président (M. Leclerc): M. Hamelin.
M. Hamelin: Oui, j'ai quelque chose à ajouter
là-dessus. En réalité, nous vivons à une certaine
époque du développement de la science environnementale. Ça
ne dépend pas de nous et c'est un mouvement mondial. J'attire votre
attention que Mme Brundtland a parlé de développement durable.
C'est un mot qui est devenu à la mode, mais j'aurais vraiment
préféré qu'elle parle d'environnement durable. Et le seul
fait d'avoir mis comme substantif le mot "développement" à la
place de "environnement" m'inquiète un peu. Ça me fait
réfléchir. Je pense qu'on est dans un mouvement de
développement environnemental et ce mouvement-là a beaucoup
de
difficulté, a eu surtout beaucoup de difficulté à
faire entrer l'aspect proprement humain et en l'occurrence ici cri, la culture
des Cris dans le mouvement.
Si vous regardez la liste des préoccupations environnementales
d'Hydro-Québec ou d'autres personnes, nous avons toujours une liste
d'une dizaine de problèmes. Il y en a à peu près huit ou
neuf en somme qui concernent l'aspect environnemental physique, naturel, qui
était celui qu'on considérait uniquement, en somme, il n'y a pas
encore longtemps, et on n'a fait qu'ajouter une ou deux préoccupations
humaines. Il faudrait donc, madame, rebrasser l'ensemble du concept
environnemental et là je dirais que le Québec pourrait
peut-être être à la fine pointe en fait des connaissances
mondiales. Nous avons fait un premier pas. Hydro-Québec, en somme, a
changé énormément depuis qu'elle avait construit des
grandes centrales sur la Côte-Nord. Il y a déjà un facteur
environnemental qui est rentré dans la machine. Mais, ce
facteur-là n'est pas un facteur complètement
équilibré entre les forces naturelles, les problèmes
naturels et les problèmes, en somme, culturels. (16 h 45)
Si vous me permettez, je termine là-dessus, je suis quand
même un peu étonné qu'on n'utilise pas davantage un terme
de langue crie ou de langue inuit pour baptiser les futures grandes centrales.
Il y a là, en fait, il me semble, un certain irrespect à
l'égard des cultures fondamentales qui nous ont bien
précédé. De sorte, pour terminer, que toute la bande
environnementale qui doit nous occuper devrait accorder beaucoup plus
d'importance aux aspects culturels et humains. Je suis toujours
étonné que la culture crie et la culture des Amérindiens
du Nord aient très peu influencé nos cultures majoritaires et
principales. On signe des contrats à tour de bras avec des
Amérindiens et on se contente, en somme, d'ignorer complètement
leur culture. Je pense qu'il y a là une espèce de vice de forme
qui tient à ce concept de l'environnement qui a de la difficulté
à devenir un environnement total. Et on est encore trop près d'un
environnement de biologie physique.
Le Président (M. Leclerc): Bien. Je vous remercie.
M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous souhaiter la bienvenue parmi nous et de constater que votre
mémoire, à bien des égards, recoupe le mémoire d'un
autre spécialiste des questions environnementales, M. Yergeau, qui est
venu nous expliquer son point de vue hier. Comme l'a souligné la
ministre tout à l'heure, il y a énormément de
rapprochement dans la façon de voir. J'écoutais M. Hamelin, dans
son intervention, et ça me faisait penser à ce qui se passe
actuellement autour du golfe d'Oka où il y a des représentants
mohawks qui disent: Mais pourquoi, lorsqu'il y a un bosquet, faut-il absolument
le développer? Pourquoi la nature n'aurait-elle pas le droit d'exister
par elle-même et d'être rentable dans la mesure où elle est
belle, agréable et où on peut s'y retrouver? Les Mohawks ont
tendance à dire, et là-dessus, on ne peut pas trop leur en
vouloir, que partout où on peut occuper un territoire, nous, les Blancs,
on est comme obnubilés par le fait qu'il y a quelque chose à
occuper et il faut absolument y aller et en profiter et, finalement,
détruire cette nature-là qui a le droit d'exister par
elle-même.
Dans la conclusion de votre mémoire, vous nous parlez de la
nécessité de faire une vaste consultation publique et vous dites
que ce débat sera nécessaire si l'on veut éviter la remise
en cause systématique des grands projets d'Hydro-Québec. En
lisant ça, j'ai eu tout de suite une image qui m'est venue à la
tête. C'est comme si ces projets-là, quand on parle
d'électricité, de construction de centrales, etc., c'est comme
s'il y avait une espèce de plaie qui traîne quelque part dans la
population du Québec et ça dérange, ça fait mal,
ça agace passablement de monde, finalement, au Québec, que l'on
parle de développement hydroélectrique et tant et aussi longtemps
qu'on n'aura pas lavé la plaie en profondeur, eh bien, il va rester du
pus; et on ne peut pas se permettre de la garder éternellement, sinon
elle va finir par contaminer l'ensemble de la société
québécoise. Et le fait que la ministre ait mis un baume, un peu
d'alcool à friction là-dessus, ça ne sera pas suffisant.
Est-ce que je comprends bien quand vous nous dites qu'effectivement les travaux
de cette commission, ce n'est vraiment pas suffisant pour laver et panser cette
plaie-là qui prend de plus en plus de place dans l'esprit des
Québécois et Québécoises?
Le Président (M. Leclerc): M Marcotte.
M. Marcotte: Le comité pense qu'il faudrait
peut-être élargir, disons, jusqu'à un certain point, le
débat, justement parce qu'il y a beaucoup de facteurs qui sont
liés à ces projets-là qui débordent, dans le fond,
le cadre du promoteur. En ce sens, lorsqu'on parle de vendre de
l'électricité à d'autres groupes, à d'autres
sociétés, que ce soient des entreprises, etc., par rapport
à donner, disons, une autoréduction de l'énergie au
Québec ou toutes ces différentes questions, je crois qu'il
faudrait élargir le débat à l'extérieur
d'Hydro-Québec parce que c'est une question de société.
C'est un choix de société à faire. C'est pourquoi le
débat devrait être élargi pour permettre à plus de
gens de pouvoir faire des commentaires.
Je prendrais peut-être, à titre d'exemple, un peu ce que
fait la commission Charbonneau, dans le sens où l'accessibilité
à cette commission est très étendue. Les travaux de la
commission,
également, s'étendent sur une plus longue période,
donc permettent à beaucoup de groupes, d'individus de pouvoir se
prononcer, de pouvoir énoncer des commentaires à ce
sujet-là. Alors, c'était dans cette dimension-là surtout,
d'élargir le débat. Parce que, sans ça, les questions de
base vont toujours revenir à la surface. Je ne sais si de mes
collègues aimeraient ajouter... M. Hamelin? Allen Penn?
M. Penn: Je voulais tout simplement ajouter que les
références à la problématique des effets cumulatifs
à la biocrémation du mercure dans les réservoirs, au
problème des populations le long de la côte de la baie James, face
aux modifications du régime hydrologique. Pour moi, il s'agit d'un
ensemble de facteurs qui justifient un débat plus large au niveau des
politiques de l'État qui sous-tendent les politiques
générales d'aménagé ment de rivières. Dans
ce sens, je pense qu'il y a lieu de promouvoir un débat plus large.
M. Claveau: J'aurais une autre question que j'aimerais adresser
d'une façon un peu plus spécifique à M. Hamelin, en tant
que géographe et que spécialiste des questions nordiques,
sommité reconnue mondialement en la matière. Et c'est vrai.
Alors, est-ce que vous croyez qu'il y aurait moyen d'établir une
espèce d'approche, ou qu'il serait même souhaitable, quand on
parle de centrale hydroélectrique, d'innondation de territoires pour
fins de production d'électricité, qu'il serait souhaitable de
travailler à partir d'une base que je qualifierais
d'inconvénients versus rendement? Il y a certains projets, par exemple,
qui peuvent permettre de produire passablement d'électricité avec
des inconvénients moindres, à cause de toutes sortes de contextes
géographique, humain, physique, alors que d'autres projets se situent
dans des milieux, où, pour une production hydroélectrique, une
production de kilowattheures assez faible, ils ont un immense impact sur le
territoire. Au-delà de l'étude environnementale comme telle et
au-delà de l'étude des mesures de correction qui peuvent toujours
venir atténuer un tant soit peu l'impact environnemental qui est fait
par le projet, est-ce qu'on ne devrait pas avoir là un genre d'approche
du type inconvénients sur rendement, par exemple, donne un facteur
x?
M. Hamelin: Pour répondre à votre question, il y a
déjà deux inconvénients. Premièrement, nous
présentons un rapport du comité consultatif et là vous me
posez une question personnelle qui déborde les questions que nous avions
voulu vous présenter. Le deuxième inconvénient, c'est que
je ne suis pas un ingénieur hydraulicien qui permettrait, en somme,
d'évaluer votre question. Cependant, si vous me permettez, je vais
prendre l'occasion de cette question, si les autres membres du comité me
le permettent, il n'y a pas de doute qu'il faudra, il faudrait, et
j'espère qu'on le fera, brasser presque tout le Québec avec cet
immense projet. Il faut constater que c'est la première fois dans son
histoire depuis des siècles que le Québec a la chance de
réaliser ou de massacrer un quart du territoire national. C'est une
affaire épouvantable et c'est une responsabilité extraordinaire.
On a une chance de penser la planification d'une partie importante du
Québec. On n'a jamais eu cette chance-là dans le passé. De
sorte que voilà un premier point qui nécessiterait un
débat public, qui nécessiterait un examen très profond des
conditions. Il y a là une dimension absolument exceptionnelle.
Évidemment, il ne faut pas faire les choses simplement n'importe
comment. Et si vous me permettez, je vais vous rappeler une phrase très
belle qui a été écrite par un philosophe-écrivain
de Toronto et je la donnerai en français: Le Canada a fait des grands
projets dans le passé, comme s'il n'aimait pas la nature. C'est une
phrase d'une grande sagesse. Quand tantôt M. Soucy parlait du
détournement des rivières, voilà: Est-ce qu'on va
détourner les rivières en aimant la nature et les cultures des
Cris ou non? De sorte que votre question déborde. Elle est
extraordinaire. Il ne faudrait pas non plus ne pas saisir cette occasion
immense de développer le quart du territoire québécois
sans s'approcher bien davantage de la compréhension des cultures
amérindiennes et des cultures cries. De sorte que vous voyez les
éléments du débat général qui peut
être fait en commission parlementaire. Un débat public le meilleur
n'est pas nécessairement un débat sur la place publique au Palais
Mon-calm. Un débat public peut remuer l'ensemble des citoyens ou une
quantité considérable de citoyens qui auraient la chance de
s'exprimer. La formule de faire passer comme une grande question et de poser
les vraies questions et de faire réfléchir chacun des citoyens
n'est pas seulement unique. Je crois que la commission parlementaire a, en
somme, un rôle très important à jouer, mais il faudrait que
la commission parlementaire puisse recevoir toutes les options, en discuter et
se souvenir des opinions émises lors de la prise finale des discussions.
De sorte qu'il me faudrait un long, un trop long temps pour répondre
à votre question. Mais seulement que je ne crois pas, en fait, que dans
l'histoire économique et politique du Québec, dans le
passé, on ait eu en face de nous une question de cette importance.
M. Claveau: Merci, on reviendra tout à l'heure.
Le Président (M. Leclerc): Alors, M.. Écoutez, on
me dit que, depuis le début de la commission, on ne tient pas compte du
principe de l'alternance. Compte tenu du fait que je l'ai fait pour le
député d'Orford, nous allons tenir compte du principe
jusqu'à la fin de ce groupe-ci, et on reviendra à nos bonnes
habitudes par après. M. le député d'Orford.
M. Benoit: Très bien. M. Hamelin, lors de votre toute
première intervention, vous avez fait part que vous seriez
intéressé à ce qu'il se crée un groupe, sous
quelque forme, où on pourrait remettre toutes les énergies
ensemble, plutôt qu'avoir différents groupes qui vont
étudier les impacts. Le Conseil du patronat, la semaine dernière,
M. Dufour, faisait une recommandation semblable. Quelles sont les nomenclatures
de gens que vous verriez là? Les organismes? Est-ce que le
fédéral... Comment tout cela se répartirait-il?
Pourriez-vous être un peu plus généreux dans vos
commentaires, sur cette formule que vous nous proposez?
M. Hamelin: Écoutez, nous émettons un principe
philosophique d'associationnisme des discussions. Nous ne sommes pas là,
en somme, pour faire le travail d'autres personnes et trouver le comment. Ce
conseil, ce comité, vous demande de considérer de rapprocher un
peu les efforts d'évaluation environnementale. On s'en tient à ce
principe-là. On n'est pas allés plus loin dans notre rapport,
mais on pourrait prendre différentes formes pour réaliser cet
objectif...
M. Benoit: Mais est-ce que...
M. Hamelin: ...en tenant compte de la position fondamentale de
chaque acteur, y compris les Cris, qui sont peut-être plus
résistants en face d'une telle démarche communautaire que
d'autres groupes majoritaires qui peuvent agir sans ne rien craindre.
M. Soucy: M. le Président...
Le Président (M. Leclerc): Oui, M. Soucy.
M. Soucy: ...sur la même question. À la page 14 de
notre mémoire, nous faisons référence à une lettre
adressée à M. Pierre Paradis, ministre de l'Environnement, qui
définit de façon très concrète ce qu'on entend, en
tout cas, pour le projet Grande Baleine et qui peut s'appliquer aux autres
projets. Vous avez là un élément de réponse, d'une
façon pratique, à ce qui pourrait être fait, en tout cas,
quant au projet de la Baie James.
M. Benoit: À la page 8 de votre mémoire, le
comité souligne que les grands projets hydroélectriques, dans
leur ensemble, impliquent - et je vous cite - "le développement de
bassins versants... équivalant à 25 % de la superficie totale du
Québec." Vous avez repris, tantôt, ces chiffres-là. Vous
laissez sous-entendre que 25 % de la superficie du Québec serait
inondée. Mes informations m'amènent plutôt à croire
que c'est bien loin des 25 %. On parle de 2 % dans les trois grands bassins, la
Baie James, Grande Baleine, et NBR. Est-ce qu'on s'entend sur les chiffres,
ici?
Le Président (M. Leclerc): M. Hamelin.
M. Hamelin: Le mot "inondé" est irrecevable. C'est 25 % de
l'ensemble du territoire du Québec qui va être influencé
par ces projets-là. Mais seulement que l'inondation n'est pas du tout
à ce niveau-là. C'est 1 %, peut-être.
M. Benoit: Parfait, merci.
Le Président (M. Leclerc): Bien. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter les représentants du Comité consultatif pour
l'environnement de la Baie James pour la grande qualité de leur
présentation. Et pour être bien sûr que je comprends la
première recommandation, à la page 15, la discussion publique
dont vous parlez, que vous proposez, c'est pas seulement sur Grande Baleine.
Vous utilisez à plusieurs reprises l'expression "choix de
société" sur la pertinence de développer, dans le sens du
projet du promoteur, cette deuxième phase. Alors, je veux d'abord
être sûr qu'on se comprend bien. Autrement dit, est-ce que vous
endossez, dans cette recommandation à la page 15, quand vous parlez de
discussion publique, ni plus ni moins la recommandation de la coalition
regroupant une trentaine d'organismes qui demandent un débat public? (17
heures)
M. Marcotte: Notre conclusion semble aller dans le même
sens que la coalition, dans le sens que le comité trouve que la question
déborde également Grande Baleine et elle rejoint effectivement,
disons, des choix de société qu'il faut faire. Et c'est dans ce
sens-là qu'on dit que le débat devrait être élargi,
devrait permettre disons beaucoup plus de gens de pouvoir présenter
leurs opinions.
M. Lazure: Merci. C'est aussi la position de l'Opposition
officielle dans ce dossier. Nous pensons qu'il doit y avoir un débat
public. Plus tôt cet après-midi, nous avons reçu un groupe
qui s'appelle Les Ami-e-s de la terre, et ce groupe recommandait la même
chose, comme plusieurs autres groupes l'ont recommandé. M. le
Président, Mme la ministre posait la question aux Ami-e-s de la terre:
Quelle objectivité scientifique avez-vous pour vouloir une telle chose?
Mais je pense que ce serait malvenu de poser la même question cet
après-midi au groupe qui est devant nous. Mais sérieusement, il
me semble que les travaux de cette commission parlementaire ci ne sont qu'un
début. Moi, je suis très content de voir qu'un groupe qui a
autant de crédibilité que votre groupe et autant de
sérieux au travail que votre groupe, que votre première
recommandation va dans le sens de la majeure partie des groupes
qui se sont adressés à la commission. Ça me
paraît de plus en plus difficile pour le gouvernement, pour la ministre,
de ne pas arriver à la conclusion de cette commission et de ne pas
accepter cette recommandation d'ouvrir sur un débat public. Quitte
à revenir ensuite en commission parlementaire et là, les
élus prendront les décisions, le gouvernement prendra ses
décisions, mais à la lumière d'une grande consultation
publique et d'un grand débat public. La deuxième question que
j'avais, c'étaient les autorisations séparées. Vous notez,
à un moment donné, qu'il serait dommage qu'Hydro-Québec
utilise la technique des autorisations séparées. Est-ce que vous
pourriez nous donner un peu plus de détails, là-dessus? Qu'est-ce
qui vous fait croire qu'Hydro-Québec irait dans cette
voie-là?
M. Penn: Oui. Le plan de développement précise
qu'Hydro-Québec va présenter une demande d'autorisation ce
printemps, au mois de juin probablement, pour les autorisations pour
l'accès routier au complexe Grande Baleine. Il s'agit d'environ 700
kilomètres de route, et peut-être avec l'infrastructure
aéroportuaire. Le même plan précise qu'une demande pour le
complexe hydroélectrique comme tel sera acheminée plus tard cette
année, vers l'automne.
Hydro-Québec cherche les autorisations pour les routes vers la
fin de cette année, en novembre, décembre et, pour le complexe
comme tel, ce serait vers la fin de 1991, au début de 1992. C'est comme
ça que c'est défini dans le plan de développement.
M. Lazure: Dernière question. Est ce que vous pensez que
les études qui sont prévues par la Convention de la Baie James...
Vous citez de façon assez claire les cinq études qui pourraient
devoir être faites pour le même projet: deux au
fédéral, deux au Québec et une autre du
fédéral avec les nouveaux pouvoirs qui ont été
consacrés aux tribunaux, au fédéral, sur l'étude de
tous les grands projets. Est-ce que le grand débat public dont vous
parlez pourrait se greffer à, ou tenir lieu de ces études ou ces
consultations, ces audiences publiques, qui doivent être faites selon les
articles de la Convention de la Baie James?
M. Penn: Je veux vous dire qu'on pense à ça. Selon
la Loi sur la qualité de l'environnement, il y a deux procédures
déjà en marche, pour les Inuit et pour les Cris. Des propositions
de directives ont été soumises au gouvernement. Le gouvernement
va agir bientôt, j'imagine, il va transmettre quelque chose à
Hydro-Québec. Pourtant, on est au mois de mai et Hydro-Québec
propose de soumettre son étude d'impact pour les routes et les
aéroports dans l'espace de quelques semaines. Alors, on se demande ce
qu'est le vrai rapport entre les directives ministérielles et les
études des répercussions fournies par HydroQuébec. C'est
particulièrement évident pour l'échéancier
proposé pour l'infrastructure routière, mais le problème
persiste aussi pour le complexe comme tel, parce qu'il s'agit toujours d'un
laps de temps de quelques mois entre la réception de la directive
ministérielle et la soumission de l'étude d'impact finale par
HydroQuébec. Ce qui soulève plusieurs questions sur la
possibilité d'effectuer des recherches sur le terrain et d'incorporer
les résultats de telles recherches dans l'étude d'impact, surtout
dans un contexte où plusieurs agences ou plusieurs personnes qui ont
examiné le dossier considèrent qu'il y a lieu d'approfondir
sérieusement les connaissances des écosystèmes aquatiques
dans ce territoire et les connaissances de processus écologiques. En ce
sens-là, il s'agit d'une situation où les
échéanciers d'Hydro-Québec sont difficiles à
concilier avec l'application même de la loi québécoise sur
la qualité de l'environnement. Mais si je peux ajouter à
ça le fait que la procédure fédérale dont nous
entendons parler n'est pas encore en application, et que pour ce qui est des
procédures fédérales prévues au chapitres 22 et 23
de la Convention, les premières démarches n'ont pas
été faites non plus. Donc, il y a beaucoup
d'ambiguïtés et de confusion qui entourent les procédures
d'autorisation applicables.
M. Lazure: Merci, ça va.
Le Président (M. Leclerc): Merci, M le
député de La Prairie. Je reconnais Mme la ministre.
Mme Bacon: J'aimerais tout d'abord dire que le
député de La Prairie disait tantôt que j'avais
demandé sur quel fondement scientifique la demande d'un débat
reposait. J'avais déclaré que la question primordiale pour une
décision éclairée était celle de l'information
objective. Je pense qu'il y a personne qui est contre ça, une
information objective qui est fondée sur des faits et une observation
scientifique. Je pense que le député de La Prairie va trouver que
c'est fort valable, j'espère. Je ne suis quand même pas rendue
à la conclusion de... On parle de conclusion de la commission, on n'est
pas rendus là, il y a encore des groupes et des personnes à
rencontrer. Je dois dire que, chaque fois que nous avons un dialogue avec les
groupes, ça nous permet d'ajouter à la réflexion qui est
déjà faite, déjà commencée chez nous, et ce
sont des ajouts fort importants que nous avons, depuis le début de cette
commission. Votre participation à la commission est aussi un ajout
important, qui fait en sorte que notre réflexion va se continuer
après la commission. Et nous allons faire le point sur tout ce que nous
avons entendu au cours de cette commission parlementaire qui... On voit une
variation de points de vue, qui sont souvent diamétralement
opposés les uns aux autres. Je pense que c'est quand même
important qu'on ait
eu cette commission parlementaire. Et je suis très heureuse que
vous ayez accepté de venir discuter avec nous et de nous avoir fait
parvenir votre document. Je vous remercie beaucoup d'avoir accepté de le
faire. Il y a malheureusement certains groupes qui ne l'ont pas fait, et je
pense qu'ils nous auraient fait bénéficier de leurs
connaissances, de leur savoir, de leur expertise. C'est important qu'on ait cet
exercice démocratique, comme on l'a cet après-midi. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Leclerc): Merci, Mme la ministre. M. le
député d'Ungava, si vous voulez à votre tour remercier nos
invités.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Avant de le faire, je
voudrais relever deux citations qui montrent jusqu'à quel point,
finalement, les travaux de la commission sont limités et qu'il va
probablement falloir aller assez loin avant d'arriver à
déterminer la véritable orientation que le gouvernement du
Québec devrait prendre, en ce sens. Quand on parle d'environnement, vous
dites, dans votre mémoire que "le comité s'inquiète du
fait que la compression des échéanciers des projets pourrait
réduire de façon significative la période disponible pour
la préparation des études d'impact", etc. Ce matin, le Club
d'électricité de Montréal, qui représente un
certain nombre de constructeurs, bâtisseurs, fabricants, etc., nous
disait, en page 5 de son mémoire: "Cependant, notre industrie
s'inquiète des délais que ces études requièrent
actuellement. Elles ont trop souvent pour effet de diminuer le temps de
conception et de réalisation des projets, ce qui entraîne des
risques pour notre industrie..."
C'est tout à fait la thèse et l'antithèse. Alors,
c'est pour démontrer jusqu'à quel point les opinions qui nous
sont émises peuvent être divergentes. Que l'on se place d'un
côté, en termes de développement durable, ou qu'on se place
du côté du profit réalisé dans l'immédiat,
toujours pour le bien autant d'un côté comme de l'autre, où
on argumente toujours pour le bien de l'ensemble du Québec et de
l'ensemble des Québécois, enfin, ça démontre bien
qu'on est loin du consensus et qu'il est tout à fait justifié
d'aller beaucoup plus en profondeur que cette présentation, d'autre part
très intéressante, en commission parlementaire de la part de ceux
qui, finalement, je le pense, sont là pour allumer le feu qui nous
permettra...
Le Président (M. Leclerc): M. le député
d'Ungava, je suis...
M. Claveau: ...d'aller plus loin et de...
Le Président (M. Leclerc): Je suis désolé,
mais votre temps étant terminé, est-ce que vous pourriez...
M. Claveau: Ah! Vous m'aviez dit que j'avais encore quelques
minutes avant de faire les remerciements.
Le Président (M. Leclerc): Non, non, non. M. Claveau:
Oui.
Le Président (M. Leclerc): Non, non. Il n'y a plus de
temps.
M. Claveau: C'est ce qu'on m'avait dit. Alors, merci de votre
présentation, dans l'espoir de vous retrouver dans une autre
consultation à un autre niveau.
Le Président (M. Leclerc): C'est bien. Alors, au nom de la
commission de l'économie et du travail, je voudrais remercier M. Penn,
M. Soucy, M. Marcotte et M. Hamelin de s'être déplacés et
d'être venus ici rencontrer la commission. Je vous souhaite un
très bon retour à maison.
Nous allons suspendre une minute, le temps de permettre à
l'École polytechnique de Montréal de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 12)
(Reprise à 17 h 15)
Le Président (M. Leclerc): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux
afin d'entendre les représentants de l'École polytechnique de
Montréal. Je reconnais donc M. Doré, en lui demandant de nous
présenter celui qui l'accompagne et en lui rappelant que vous avez 20
minutes pour nous présenter votre mémoire et qu'ensuite, chacun
des groupes ministériels aura également 20 minutes pour vous
interroger. M. Doré, je vous cède la parole.
École polytechnique
M. Doré (Roland): M. le Président, Mme la ministre,
MM. les députés, je suis accompagné par le professeur
Daniel Rozon, directeur de l'Institut de génie énergétique
de l'École polytechnique. C'est un spécialiste de
l'énergie. Je suis plutôt un généraliste sur ces
questions.
Le mémoire que nous avons envoyé à la commission
est en fait une réaction générale au plan de
développement d'Hydro-Québec. Il a été
élaboré par un ensemble d'une dizaine de personnes. Certaines de
ces personnes sont des spécialistes dans certains aspects
énergétiques, comme, par exemple, les aménagements
hydroélectriques, l'énergie nucléaire ou les aspects
gaziers. Mais par contre, cette réaction est quand même une
réaction générale. Elle a donc été
élaborée suite
à une concertation entre ces personnes-là, qui
représentaient le corps professoral, un étudiant et des
représentants de la direction de l'école.
De façon à être efficace, si vous me permettez, M.
le Président, je vais lire le mémoire et le commenter. C'est
toujours plus rapide que de dire: Plutôt que de lire le mémoire,
je vais le synthétiser. Mon expérience montre que ça prend
toujours plus de temps, dans ces conditions-là.
Le gouvernement du Québec a jugé bon de tenir une
commission parlementaire sur l'énergie électrique au
Québec. L'École polytechnique se réjouit de cette
décision. Elle encourage même le gouvernement à tenir
d'autres commissions élargies, comme celle-ci, qui ouvriraient le
débat d'une façon plus générale sur
l'énergie.
Enfin, on s'est sentis un peu limités dans nos interventions,
compte tenu du fait qu'on nous demandait de commenter un plan de
développement. Il nous semblait que, si le débat on aurait
peut-être pu le faire ou dû le faire - avait pu être
élargi sur d'autres filières énergétiques, comme,
par exemple, le gaz, nous aurions pu, à ce moment-là, donner
peut-être un commentaire plus substantiel sur la politique
générale de développement énergétique au
Québec.
Donc, de telles commissions fourniraient l'occasion d'étudier
plus en profondeur le sujet, en permettant de considérer d'autres
sources d'énergie que l'électricité.
L'École polytechnique profite, pour une troisième fois, de
l'occasion qui lui est offerte de commenter devant cette commission le projet
de développement d'Hydro-Québec. Cet intérêt soutenu
s'explique par bien des raisons. L'École polytechnique est un
établissement de formation d'ingénieurs et de spécialistes
en sciences appliquées. En fait, l'école compte actuellement 4400
étudiants. Elle est le plus grand établissement, le plus
important parmi les 32 au Canada et les 8 au Québec, pour nous
situer.
C'est d'abord par ses préoccupations scientifiques que
l'école s'intéresse aux questions de production, de transport et
de distribution de l'électricité. Mais il y a plus.
L'école fut appelée à collaborer avec Hydro-Québec
dès sa création. Cette collaboration s'est toujours accrue par la
suite. Elle prend aujourd'hui des formes très variées,
s'étendant de projets de recherche contractuels à
l'établissement de chaires industrielles, en passant par la mise sur
pied de laboratoires conjoints ou de programmes de formation.
C'est donc à titre de collaboratrice et de partenaire que
l'École polytechnique intervient dans le débat. On a
insisté pour faire savoir cela, compte tenu que nous avons, comme je
vais le mentionner tout à l'heure, certaines réserves quant
à certains aspects du plan de développement.
Ces liens privilégiés n'empêchent toutefois pas
l'École de jeter un regard critique sur la proposition de
développement soumise à la discussion. Le présent
mémoire ne constitue pas un aval inconditionnel. Il est, en effet,
plusieurs aspects de ce plan pour lesquels il importe soit de pousser la
réflexion ou la réalisation plus avant, soit d'en questionner le
bien-fondé. L'École suggère de s'arrêter d'abord sur
les propositions relatives à assurer la qualité du produit.
Plusieurs questions seront ensuite soulevées quant à la
réponse à fournir à l'offre et à la demande, de
même que sur le rôle d'Hydro-Québec quant au
développement industriel du Québec.
Avant de conclure, l'École soumettra la contribution qu'elle
envisage pour soutenir la réalisation des grands projets
d'Hydro-Québec.
En affirmant d'emblée, dès le premier mot de sa
proposition, que l'orientation fondamentale d'Hydro-Québec consiste
à fournir l'électricité au Québec aux meilleures
conditions, l'entreprise ne pouvait mieux cibler sa mission. C'est d'abord sur
des objectifs de fournir à tous les Québécois, quels que
soient leur région ou leur niveau de vie, un approvisionnement sûr
et fiable en électricité au meilleur prix, à des tarifs
uniformes et leur donner accès à une même qualité
d'énergie que s'est livré la campagne pour la nationalisation de
l'électricité. Hydro-Québec se doit de maintenir cet
objectif bien en vue. Les difficultés connues ces dernières
années, excusables en partie à cause de la complexité du
système de transport, ne devraient pas se répéter, car des
solutions techniques pour améliorer la situation existent
actuellement.
L'École accueille donc très favorablement le projet PAQS.
Ce programme d'amélioration du réseau de distribution comporte
des objectifs raisonnables visant à ramener les temps d'interruption
annuels à la moyenne des autres entreprises semblables ailleurs au
Canada. Ce programme devrait jouir d'une priorité absolue. La
fiabilité du service commence par le maintien en bon état des
équipements de production. HydroQuébec s'y attaque avec vigueur.
On doit, à cet égard, mentionner l'octroi d'une chaire à
Polytechnique pour l'étude du vieillissement des barrages en
béton, et l'établissement de programmes de restauration des
ouvrages. Cette action complète admirablement le programme
proposé dans ce plan.
La nouvelle politique d'entretien du parc de production et du
réseau de transport constitue une innovation majeure sur le plan
conceptuel. Un entretien préventif conditionnel requiert l'analyse du
comportement des équipements avec des capteurs ou encore l'utilisation
de techniques d'échantillonnage, pour n'intervenir que lorsque
nécessaire. Il y a lieu de formuler ici deux remarques:
II s'agit d'un programme de haute technologie qui demandera des efforts
accrus en recherche et développement. Il aidera l'entreprise
à garder sa place, ou de la recouvrer si elle s'en était
écartée, à titre de leader international, mondial dans le
domaine des réseaux de transport à haute tension;
Ce développement technologique devrait être supporté
par un vigoureux programme d'embauché et de formation du personnel.
À Hydro-Québec, si on regarde l'apport au niveau des personnels
techniques au cours des dix dernières années, cet apport a
été minime et nous croyons que, actuellement, Hydro-Québec
souffre de ce manque d'apport de personnes qui peuvent venir avec des
idées nouvelles pour alimenter les possibilités de solutions,
quant à cette question de la qualité du service. C'est un aspect
qu'il convient, donc, de ne pas négliger, compte tenu de l'ampleur des
projets de développement dans plusieurs autres domaines de haute
technologie qui sont annoncés.
En plus d'innover au plan de l'entretien, Hydro-Québec implante
de nouveaux critères de conception et d'exploitation du réseau de
transport. L'entreprise a opté pour la compensation en série sur
des lignes existantes et futures. Il en découle deux retombées
majeures: l'intégration avec les réseaux voisins qui permettent
l'exportation et l'importation d'énergie selon les besoins, d'une part
et d'autre part, la consolidation et la stabilisation du réseau, tout en
en facilitant la conduite. Il s'agit d'une technologie robuste et fiable. Deux
remarques s'imposent ici encore:
Son implantation - on parle de la compensation en série -
requiert des modifications majeures qui font craindre une certaine
période d'instabilité due au rodage des équipements des
erreurs humaines. On ne dit pas que c'est impossible que ça se fasse
sans heurt. Il faudra qu'on y mette les énergies et aussi qu'on y mette
les ressources humaines nécessaires;
Deuxièmement, cette nouvelle technologie doit également
être appuyée par un sérieux programme de formation des
personnels concernés.
Ceci étant dit, Polytechnique ne peut qu'appuyer les efforts
proposés et commencés en vue d'assurer la qualité du
produit livré au consommateur.
Au chapitre de l'offre et de la demande, l'École se doit de
prendre une position plus nuancée. Le programme envisagé pour
l'économie d'énergie, les choix des filières
énergétiques, l'exportation d'électricité et
l'environnement suscitent un questionnement sérieux qui ne peut
être passé sous silence. Bien qu'il soit affirmé que les
économies d'énergie soient rentables, l'École, sans mettre
en doute la bonne foi et les bonnes intentions d'Hydro-Québec,
s'interroge sur cet aspect en apparence contradictoire de la mission de
l'entreprise.
Il semble, à première vue, difficile pour une entreprise
qui tire ses revenus selon le volume des ventes d'inciter ses clients à
moins consommer. D'ailleurs, on a vu qu'au cours des temps, au cours de la
dernière décennie, Hydro-Québec est passée d'un
extrême à l'autre. Il faut admettre toutefois que, dans le
passé récent, HydroQuébec s'est passablement bien
acquittée de cette mission. Les actions suggérées dans le
plan s'avèrent des mesures efficaces. Est-ce que celles-ci vont assez
loin? On se pose des questions. Par exemple, la technologie existe actuellement
qui permet de contrôler chez l'utilisateur, à sa porte même,
la quantité d'énergie livrée. Ne pourrait-on pas implanter
et généraliser l'emploi d'instruments efficaces? Les
retombées négatives pour l'utilisateur sont minimes, presque
nulles, en fait, et assureraient un meilleur nivellement des crêtes en
demande de pointe.
On pourrait aussi introduire, comme en France, un système de
tarification à deux taux. En fait, l'idée, ici, c'est que les
Québécois soient sensibles à ce problème, qui est
celui d'un taux continu de croissance de la demande énergétique.
Polytechnique estime que de tels procédés ne priveraient en rien
les consommateurs et limiteraient les besoins d'agrandissement du parc de
production.
Hydro-Québec propose de maintenir
l'hydroélectricité comme seule source d'énergie pour les
besoins de base. Cette proposition semble s'imposer naturellement étant
donné l'importance du potentiel hydroélectrique non encore
aménagé. L'École est préoccupée, cependant,
par le fait que cette source soit indentifiée comme source exclusive, ou
presque exclusive, sans tenir compte d'autres filières dont, notamment,
l'option nucléaire. D'autres sources, telles les centrales au gaz, sont
proposées comme élément d'appoint. Cela ne semble pas
suffisant. Faire reposer le développement de nouvelles unités de
production sur le seul potentiel hydroélectrique comporte des
embûches non négligeables et on pourrait tirer profit de
l'aménagement d'autres sources.
Ainsi, il est affirmé que les installations actuelles n'occupent
qu'un pourcent du territoire québécois. Les aménagements
à venir porteraient ce taux, lorsqu'on parle d'inondation, à 2 %.
Présentée ainsi, la donnée suscite une adhésion
presque inconditionnelle au plan soumis. Traduite en termes de
kilomètres carrés, elle étonne et surprend. Si elle est
relativisée dans le contexte d'une concentration dans certaines
régions, cette concentration affecte alors très sensiblement le
territoire occupé par les autochtones. Elle provoque la contestation et
le refus.
Si on regarde ce qui s'est passé dans d'autres pays, la Hollande
a été, en fait, construite en repoussant les rives, donc il y a
eu certainement là une perturbation immense des territoires. Par contre,
ça s'est fait sur des siècles, ça s'est fait par petits
pas. Et, à ce moment-là, ce sont peut-être des solutions de
sagesse qui se font sur une période étalée. Et si on veut
brusquer les choses, il peut y avoir des conséquences qui seront
irréversibles. Il serait, par contre, souhaitable qu'Hydro-Québec
démontre autant de flexibilité relativement à ses
sources d'énergie qu'elle n'en fait preuve à
l'égard de ses réserves énergétiques et des
marchés qu'elle entend exploiter.
La cogénération s'offre comme une alternative
intéressante. Hydro-Québec utilise déjà
l'énergie produite par des centrales privées. L'instauration d'un
programme plus vaste de récupération de la vapeur, par exemple,
pour la transformer en énergie électrique, réduirait de
façon significative le besoin de nouvelles centrales
hydroélectriques. L'École considère que l'énergie
nucléaire constitue également une option fort valable et qui se
compare, tout compte fait, avec d'autres filières.
Le Congrès mondial de l'énergie, tenu à
Montréal, à l'automne 1989, récemment, concluait ses
travaux en affirmant que "l'énergie nucléaire constitue la source
d'énergie la moins polluante". Et le sens de cette affirmation
était: ...considérant aussi les effets de grands complexes
hydroélectriques sur les populations. Alors, donc, c'est le sens qui
était donné en parlant de la moins polluante. C'est la moins
perturbante, en fait, peut-être, si on tient compte des aspects non
seulement physiques et biologiques, mais aussi des aspects culturels et des
aspects perturbation sur les populations. Et c'est dans ce sens-là que
le Congrès mondial de l'énergie concluait avec cette phrase.
L'énergie nucléaire est largement utilisée en Ontario et
dans d'autres pays industrialisés.
Concernant son coût, l'énergie nucléaire devient de
plus en plus concurrentielle. L'expérience des pays qui ont
imposé des normes très sécuritaires à la
construction et au fonctionnement des centrales nucléaires montre bien
que l'énergie nucléaire est maintenant mature. De plus, l'apport
des centrales nucléaires peut stabiliser le réseau et le rendre
plus fiable.
Ce choix comporte sans doute d'importants enjeux politiques. La
population est généralement opposée à l'utilisation
de l'énergie nucléaire, mais c'est surtout par manque
d'informations justes et rigoureuses. L'École recommande la mise sur
pied d'un programme d'information soutenu afin que la population puisse porter
un jugement éclairé, le temps venu, sur des choix possibles quant
à l'option nucléaire. HydroQuébec pourrait être
investie, dès maintenant, d'une mission spécifique à cet
égard.
Car il reste, en fin de compte, qu'il faudra tout probablement venir
à l'option nucléaire un jour ou l'autre. Il serait malheureux que
le Québec n'ait peu ou pas d'expertise en ce domaine et se prive de
retombées économiques dont il a longtemps
bénéficié par la participation de son industrie
manufacturière à des projets extérieurs au Québec.
Il ne faut pas oublier que bon nombre des centrales CANDU qui ont
été construites dans d'autres pays ont été
construites en grande partie par des industries locales. Je pense à
MLW-Worthington et à MLW-Bombardier, je pense à Vickers, je pense
à Dominion Bridge et, malheureusement, le fait que le Canada et que le
Québec ne construisent plus de centrales chez nous, à ce
moment-là, ces industries en ont subi des conséquences
très graves et, dans certains cas, néfastes. L'exploitation de la
centrale de Gentilly 2, par exemple, avec plus de 500 emplois permanents,
permet d'envisager à elle seule plus de 15 000 années-personnes
en emplois directs, pour les 30 prochaines années d'exploitation de
cette centrale. (17 h 30)
Exportation. Hydro-Québec adopte la stratégie de devancer
la construction d'aménagements hydroélectriques pour vendre
à l'étranger l'énergie ainsi produite et faire
bénéficier ensuite les Québécois d'installations
dont ils auront besoin, à coût moindre, parce que les
constructions auraient été devancées. Hydro-Québec
ne peut elle-même se donner un tel mandat. Elle doit, en fait, recevoir
ce mandat de son propriétaire, le gouvernement du Québec et, par
la suite, mettre en place les infrastructures nécessaires pour livrer le
produit selon la qualité et les échéanciers prévus.
Le mandat donné à Hydro-Québec se doit donc d'être
très clair à propos de l'exportation.
L'école ne peut contester la vente d'électricité
à l'étranger, ce qui permet de trouver assez facilement des
capitaux. Néanmoins, elle s'interroge sur la nature de ces exportations
et sur leur rôle à long terme. Pensez exportation
d'électricité, c'est d'abord imaginer des lignes de transport
sillonnant le Québec et rejoignant les territoires voisins. Cependant,
l'électricité s'exporte sous une forme un peu plus
raffinée, un peu plus subtile, quand les lingots d'aluminium ou de
magnésium quittent le Québec. Le projet de liquéfaction de
l'hydrogène, par exemple, avec exportation dans les pays d'Europe, est
aussi une autre forme d'exportation d'électricité.
Maintenant, la politique industrielle du Québec semble vouloir
faire du Saint-Laurent T'aluminium valley" du monde. Attirer les industries
fortement énergivores en rendant disponible une énergie peu
chère constitue une approche probablement valable pour développer
économiquement le Québec. Par contre, ne faudrait-il pas aussi
songer qu'il y a d'autres moyens d'utiliser notre potentiel
énergétique, en développant des industries qui utilisent
des matières premières et qui les transforment sur place de
façon à pouvoir exporter des produits à valeur
ajoutée, non pas seulement à valeur ajoutée
énergétique, mais à valeur ajoutée en termes de
matière grise, donc matière ajoutée en termes de profits
accrus sur le Québec.
Il y a là matière à réflexion. On doit
convenir, toutefois, que la définition d'une politique industrielle ne
relève pas du mandat d'Hydro-Québec. L'occasion se prête
bien, cependant, pour attirer l'attention des décideurs publics sur cet
aspect de l'utilisation de l'électricité. Hydro-Québec
constitue un outil puissant
de développement économique, tant au niveau de la
construction des infrastructures qu'à celui de l'utilisation judicieuse
de l'électricité. Nous ne sommes pas convaincus que, sous ce
dernier aspect, le Québec tire tout le profit possible de son potentiel
énergétique, en particulier du potentiel
hydroélectrique.
Hydro-Québec consacre un large chapitre à traiter des
actions prises et de celles qu'elle envisage prendre pour la protection de
l'environnement. Cette préoccupation, présente depuis 20 ans, est
fort réjouissante. L'entreprise s'y intéresse de plus en plus.
Ç'a été mentionné par le groupe qui nous a
précédé. Sous cet aspect de la proposition du plan,
l'école soumet deux questions: Les coûts de la production
tiennent-ils effectivement compte des coûts des impacts sur
l'environnement? Les coûts cachés sont difficiles à
estimer, mais on est en droit de se demander si Hydro-Québec est en
mesure de les évaluer en toute objectivité. Une plus grande
transparence à ce sujet est nécessaire, de même que,
probablement, un appel à des ressources extérieures. Le calcul du
coût des impacts sur l'environnement dans l'analyse pour le choix d'une
filière ne pourrait-il pas conduire à des solutions autres que
l'hydroélectricité? Comme les études internes de la
société d'État sur les coûts comparatifs des
différentes filières ne sont publiées, il est difficile
d'évaluer de façon objective l'ensemble des solutions
imaginables. Les questions soulevées n'ont pas de réponses
faciles. Il est à espérer que la réflexion se poursuive
sur ces importants aspects de la proposition du plan de
développement.
Au terme de son document, Hydro-Québec expose les
retombées économiques engendrée par l'entreprise. Il est
vrai que la société d'État a joué un rôle
important dans l'économie du Québec, c'est d'ailleurs voulu
ainsi. Par les travaux qu'elle entreprend, les sous-contrats qu'elle accorde,
l'équipement qu'elle achète, Hydro-Québec contribue de
façon significative au dynamisme économique du Québec.
L'expertise reconnue mondialement, maintenant, par les firmes
québécoises d'ingénieurs conseil dans le domaine de
l'hydroélectricité et des lignes de transport n'est pas
étrangère à la présence d'Hydro-Québec.
Il est cependant souhaitable de voir se greffer autour
d'Hydro-Québec beaucoup plus d'entreprises de fabrication de
matériel électrique. Maintenant, ceci est en évolution
dans le bon sens. Le plan de développement laisse entrevoir avec
encouragement que les innovations technologiques dont on envisage l'utilisation
auront, elles aussi, leurs effets économiques. L'initiative
d'Hydro-Québec en matière de développement des
électrotechnologies devrait se poursuivre avec des objectifs
stratégiques à long terme.
Par ailleurs, ayant réussi à produire une énergie
disponible à bon marché, le Québec se positionne
très favorablement face à la concurrence pour attirer des
entreprises fortement énergivores. Comme il a été
mentionné précédemment, il reste à implanter des
usines qui transformeront ici la matière brute en produits de
consommation. L'École croit donc que c'est par une stratégie
globale de la mise en valeur de l'énergie électrique qu'on
permettra à HydroQuébec d'accroître l'importance de son
rôle de moteur de l'activité économique.
Je vais passer par-dessus la contribution de Polytechnique. Je voudrais
terminer en reprenant une partie du texte du plan de développement
d'Hydro-Québec lorsqu'on parle de la valorisation des ressources
humaines. Nous croyons qu'un défi majeur pour Hydro-Québec, si ce
n'est pas le défi majeur d'Hydro-Québec, dans les prochaines
années, sera sans doute de provoquer un consensus de tous ses personnels
autour des objectifs de l'entreprise. Vous vous souvenez tous, on se souvient
tous de la fierté des Québécois pour ces 12 012 personnes
qui étaient prêtes à nous servir. Et je crois
qu'Hydro-Québec devrait travailler réellement à retrouver
cet esprit de corps au sein de l'entreprise, sans lequel il sera impossible de
réussir l'ambitieux projet contenu dans ce plan de développement.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Leclerc): Je vous remercie, M.
Doré. Je reconnais Mme la ministre.
Mme Bacon: M. Doré, M. Rozon, merci beaucoup d'être
ici avec nous pour, d'abord, la présentation que vous venez de nous
faire et, ensuite, le dialogue qui va s'engager entre nous. Je pense que c'est
fort important que vous ayez accepté d'être là
aujourd'hui.
Il y a plusieurs questions, je pense, qui sont soulevées par
votre mémoire et votre exposé. Vous soulevez, dans votre
mémoire, à la page 5, une préoccupation - et vous l'avez
dit tantôt - soit qu'une seule source exclusive d'énergie,
l'hydroélectricité, soit privilégiée. Est-ce que
vous pouvez indiquer à la commission les raisons qui motivent vos
inquiétudes et peut-être en dire davantage sur ce que vous nous
avez dit tantôt? Et quelles seraient les autres sources d'énergie
qui devraient être exploitées par Hydro-Québec, par
exemple?
M. Doré: L'électricité est une forme
fantastique d'énergie parce qu'elle est transportable assez facilement.
Nous n'avions pas, il y a 10 ans, une infrastructure, par exemple, de
distribution gazière au Québec. Si je prends l'exemple du gaz.
Nous avons maintenant cette infrastructure qui n'est pas exploitée
à 100 %, qui n'est pas à ploino capacité. Et c'est pour
ça qu'au début de notre mémoire on a mentionné
qu'en fait, ce qu'on regarde ici, c'est plus qu'un plan de développement
d'Hydro-Québec. C'est un plan de développement
énergétique du Québec. Et il nous
semble, nous, que ça serait sage d'exploiter une infrastructure
existante au maximum - de façon sécuritaire, bien sûr - et
peut-être de réfléchir sur l'accélération
dans l'implantation de filières qui n'existent pas. En fait, c'est un
peu le message qu'on veut passer. Ça, c'est un aspect, donc, exploiter
les ressources existantes, les infrastructures existantes.
Un autre aspect, c'est celui de diversifier ces sources dans le sens de
ne pas mettre tous les marrons dans le même panier. L'option
nucléaire, pour le Québec, c'est une option qui présente
des intérêts à bien des points de vue. Bien sûr, il y
a le problème de cette psychose collective, mais, à un moment
donné, il faudrait faire face à ce problème-là. Et
il nous semble qu'à ce moment-là, sans dire que nous allons aller
à 50-50, par exemple, 50 % d'hydroélectricité et 50 %
d'autres filières... ce n'est pas ça qu'on dit. On dit qu'on
devrait peut-être avoir une répartition moins d'un seul
côté dans la filière choisie.
Et M. Rozon ici, qui est un spécialiste en génie
énergétique pourrait peut-être nous dire quelques mots sur
l'intérêt que pourrait présenter l'option nucléaire
pour le Québec. Si vous permettez, M. le Président.
Le Président (M. Leclerc): Je vous en prie M. Rozon.
M. Rozon (Daniel): Merci. Disons que ma préoccupation
découle surtout de la façon dont l'option nucléaire n'est
pas présentée à la population lorsqu'on présente le
plan de développement. On écarte pratiquement du revers de la
main ce qui devrait nécessairement être con sidéré
comme l'alternative, finalement, à certains projets, je ne dis pas
nécessairement à l'ensemble des projets - en disant que nos
études démontrent que c'est plus coûteux et qu'il demeure
toujours l'épineux problème des déchets nucléaires.
Donc, on continue à jouer le jeu, disons, de la psychose, on continue
à apeurer le monde avec ces questions de déchets
nucléaires sans tenir compte du fait que, chez nos voisins du sud, nos
voisins de l'ouest, en Europe, il y a des sociétés
industrialisées qui dépendent très largement de cette
option qui est maintenant démontrée, qui est mature.
Ce qui est regrettable, c'est justement qu'on n'ait pas l'information
sur laquelle se base Hydro-Québec pour faire ces affirmations. Je crois
que, effectivement, on devrait, comme il est suggéré dans notre
mémoire, confier à Hydro-Québec un mandat d'informer le
monde un peu mieux sur cette alternative pour que, quand viendra le temps de
faire des choix, on soit peut-être un peu placés pour le
faire.
Mme Bacon: Si on revenait au mandat de la commission. Je pense
qu'on parlait d'énergie électrique, mais on peut la produire avec
du gaz naturel, on peut produire l'électricité pas seulement avec
les barrages, mais avec le nucléaire, avec le mazout, il y a
différentes façons de produire l'électricité. Je
pense que c'est un peu... On dit: La place de l'électricité dans
les besoins énergétiques du Québec, mais elle peut se
faire de différentes façons cette place-là. Vous
mentionnez le nucléaire, M. Rozon et M. Doré aussi. C'est pour
ça que je demandais tantôt: Quelles sont les autres sources
d'énergie qu'on peut utiliser? Je pense qu'on a été
habitués, au Québec, avec l'énergie électrique,
mais on peut la produire de différentes façons.
M. Rozon: Oui, d'accord.
M. Doré: En fait, ce qu'Hydro-Québec propose, c'est
une seule façon de la produire. Nous, on dit. Si on veut absolument
transporter de l'énergie par des lignes de transport
d'électricité, il y a d'autres moyens à choisir, et on
parlait de la cogénération.
Maintenant, il faut bien penser qu'on produit de
l'électricité. Si on la produit par d'autres moyens, par exemple,
si on produit de l'électricité par du gaz et si on veut
transformer l'électricité, par la suite, en chaleur, on est
peut-être mieux de dire: Allons, distribuons ces lieux de
génération de chaleur près des lieux d'utilisation.
Mme Bacon: Oui. C'est pour ça que le mandat de la
commission est élargi. Il n'est pas...
M. Doré: C'est ça.
Mme Bacon: ..que le plan de développement
d'Hydro-Québec; on ne fait pas qu'étudier le plan de
développement d'Hydro-Québec, on va beaucoup plus loin.
M. Rozon: Oui. En ce qui concerne, tout de même, la
production d'électricité, qui est quand même centrale dans
vos débats, il n'en demeure pas moins que, si on regarde la situation,
par exemple, en Ontario, ça se ramène essentielle ment à
l'énergie nucléaire versus le charbon. Mais, de ce
côté-là, l'énergie nucléaire présente
un avantage non seulement au point de vue coût, mais également au
point de vue impact sur l'environnement.
On pourrait quand même transposer la question ici aussi. C'est
clair que, si on décidait de construire une centrale nucléaire,
on ne serait pas obligés de la faire aussi loin et que son impact serait
certainement moins considérable en termes de superficie, en termes de
personnes qui seraient affectées, etc. Donc, ça représente
quand même une alternative sur laquelle il faudrait se pencher.
Mon impression, à tout le moins, disons, de la proposition du
plan de développement d'Hydro-Québec, c'est qu'on nous
présente un "package",
si vous voulez, qui couvre les 20 prochaines années, qui affecte
une large partie du territoire et on n'a pratiquement pas le choix de
l'adopter. Ça s'insère plus dans une politique de
développement de territoires que de production
d'électricité à moindre coût et, puis, ce sont des
grosses tranches, on parle de tranches de 8000 mégawatts pour NBR ou de
5000 mégawatts. Il y a peut-être moyen d'y aller plus doucement
et, encore là, possiblement que l'introduction de quelques tranches
nucléaires nous permettraient de nous donner quelques années de
réflexion de plus avant d'adopter ces projets. Je ne me prononce pas sur
ces projets-là parce que c'est une question, je crois, qui devra
être traitée, comme le disaient ceux qui nous ont
précédés ici, peut-être d'une façon un peu
plus élargie, c'est un débat de société.
Mme Bacon: On a parlé beaucoup ici d'économies
d'énergie, par exemple. Est-ce qu'elles peuvent, ces économies
d'énergie, influencer, d'une façon significative, d'une
façon aussi même permanente, la consommation
d'électricité des différents secteurs d'activité de
notre économie? On sait que l'industrie est très
énergivore, par exemple, si on la compare au résidentiel. Est-ce
que vous pensez que la solution est là, vers les économies
d'énergie? Il y a des groupes qui mettent beaucoup, beaucoup l'accent
là-dessus en disant: On n'a pas besoin de barrages; faisons des
économies d'énergie, c'est suffisant. (17 h 45)
M. Doré: Mme la ministre, il y a des pays qui ont choisi
comme objectif une réduction de la consommation
d'électricité. Il y a des pays qui ont réussi à
réduire la consommation d'électricité. Nous, nous donnons
encore comme objectif un accroissement de la consommation
d'électricité, même au niveau de la population. Alors, je
crois que oui, nous croyons que oui, il peut y avoir un effet permanent sur les
besoins en production d'électricité. Maintenant, il faut que ce
soit des programmes très agressifs. On est dans une
société, on le sait, où on gaspille; au Québec, au
Canada, on est habitués à gaspiller, on gaspille partout. C'est
certainement d'un changement de culture dont on parle ici. Ça ne se fait
sûrement pas en six mois. Mais, si on a un projet de
société à savoir que, d'ici dix ans, il n'y aura pas
d'augmentation de consommation d'énergie chez les utilisateurs comme
nous, on peut atteindre ça, mais ce n'est pas ça l'objectif qu'on
poursuit comme société. On dit: On va continuer, mais à un
rythme réduit.
Mme Bacon: Dans le plan d'Hydro-Québec, on a inclus 1 800
000 000 $ sur une période de dix ans en économies
d'énergie. Est-ce que ça vous semble réaliste cette
période de dix ans...
M. Doré: Oui.
Mme Bacon: ...pour y arriver?
M. Doré: Oui, nous, en fait, la question qu'on a
posée, c'est: Est-ce qu'on est assez ambitieux? Est-ce qu'il n'y aurait
pas des moyens qui nous permettraient d'aller encore plus loin? Donc, on ne
doute pas du tout que l'objectif d'Hydro-Québec soit atteignable. On ne
doute pas de ça du tout.
Le Président (M. Leclerc): Bien merci, M. Doré. Je
reconnais M. le député de Beauce-Nord.
M. Audet: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, je
vous souhaite la bienvenue. Une première question pour faire suite aux
économies d'énergie. Vous avez mentionné tantôt
qu'Hydro-Québec, dans le cadre, par exemple, de campagnes ou de
promotion d'économies d'énergie, serait en conflit
d'intérêts. Il me semble que c'est ce que vous avez dit. Vous
verriez ça, vous confieriez ça à qui, vous, des choses
comme ça, je ne sais pas, moi, la promotion d'économies
d'énergie? Qui doit assumer ce rôle-là? Est-ce que ce n'est
pas à Hydro-Québec de faire ça? Moi, c'est une opinion que
je vous laisse là. Vous pouvez répondre. Mais, si,
Hydro-Québec, le produit qu'elle vend, d'une certaine façon, est
bien utilisé, à ce moment-là, selon moi,
HydroQuébec, il me semble, serait regagnante? Cela éviterait
peut-être des immobilisations impressionnantes à moyen terme par
exemple. J'aimerais connaître votre point de vue là-dessus.
M. Doré: En fait, Hydro-Québec n'est probablement
pas en conflit d'intérêts dans le sens qu'on entend habituellement
les termes "conflit d'intérêts". C'est pour ça qu'on a
mentionné, au début de notre mémoire, que ces
questions-là touchent l'ensemble de la politique
énergétique du Québec. Si on sauve, ce n'est pas à
Hydro-Québec de dire: On va sauver, nous, sur notre forme
d'énergie, la forme d'énergie qu'on vend, si on favorise, par
contre, que, dans la filière gazienne, on gaspille. Il faut que ce soit
un effort concerté de tous ceux qui amènent... Il y en a deux
principaux à part des pétrolières, mais disons qu'il y en
a trois: il y a le gaz, il y a l'électricité et il y a les
pétrolières, il faut que ce soit un effort de l'ensemble,
autrement, ça n'a pas de sens. Pourquoi Hydro-Québec dirait-elle:
Nous, on va faire des sacrifices comme société, parce que le
gouvernement va lui demander d'être plus rentable, donc de vendre plus et
de faire plus de profits, c'est normal. On est propriétaire
d'Hydro-Québec, alors on va lui dire: Sois rentable. Vends de
l'électricité à bon compte, mais vends-en. C'est pour
ça qu'il faut que ce soit un ordre supérieur, que ces politiques
soient poussées très fort. Il faut qu'Hydro-Québec
contribue, bien sûr, aux campagnes, mais ça doit venir d'un ordre
supérieur. C'est peut-
être un autre mandat qu'on donne au gouvernement ou à une
commission sur l'énergie ou...
M. Audet: D'accord. À la page 7 de votre mémoire,
vous parlez, entre autres, du nucléaire: "La population est
généralement opposée à l'utilisation de
l'énergie nucléaire, mais c'est surtout par manque d'informations
justes et rigoureuses." On a déjà entendu quelques groupes,
depuis quelques jours, et j'ai l'impression aussi qu'avec les
développements hydroélectriques c'est un peu la même chose
que ce que vous citez pour le nucléaire. C'est que les gens, il y a de
l'information qui ne leur a pas été transmise ou qui leur a
été mal donnée parce qu'on nous dit qu'on souhaitait un
débat public pour refaire, peut-être, les grands choix, comme
société, au point de vue développement
énergétique dans les prochaines années. Est-ce que,
premièrement, vous jugez, d'abord, qu'on a bien fait notre travail,
peut-être en tant que gouvernement ou Hydro-Québec, au point de
vue information des gens? Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose à refaire
à ce niveau-là?
Deuxièmement, en tant que choix de société au point
de vue énergétique, j'aimerais avoir vos commentaires parce que,
selon moi, le choix qu'on a fait en tant que société, on l'a fait
il y a déjà quelques années et on ne doit pas, je pense,
remettre en question toutes les immobilisations qui ont été
réalisées là, toute la technologie qui a été
développée par le biais d'Hydro-Québec et vous le
mentionnez d'ailleurs dans votre mémoire.
Je veux juste ajouter quelque chose. Est-ce que, si on devait tenir un
débat, par exemple, on ne devrait pas plutôt tenir un débat
sur la meilleure façon de faire notre développement
hydroélectrique au Québec, par exemple, tout en tenant compte des
impacts environnementaux, des impacts sociaux, tout ce qui est rattaché
à tout ça parce qu'on a déjà des connaissances
là-dessus? Enfin, je vous laisse...
M. Doré: En fait, on n'a pas dit, on ne veut pas dire que
ce qu'on a fait dans le passé a été mal fait ou que les
mauvais choix ont été faits. Non, je crois qu'on a fait de bons
choix. Maintenant, c'est qu'il y a de nouveaux paramètres qui
interviennent. Il y a l'effet de serre. L'effet de serre, c'est un nouveau
paramètre. C'est depuis deux ans, trois ans. Ça fait 10 ou 15 ans
que les gens en parlent, mais on y est sensibilisé, comme
société, depuis tout récemment. C'est un nouveau
facteur.
Un deuxième facteur, c'est que le fait de perturber par
inondation des territoires devient un critère de plus en plus important.
Donc, à ce moment-là, on est pris à prendre des
décisions avec des contraintes, des frontières ou des contraintes
qui bougent et il faut, pour trouver la solution optimale, bouger avec les
contraintes. C'est dans ce sens-là que le congrès mondial de
l'énergie a conclu que, compte tenu du fait que c'est plus acceptable
d'inonder de vastes territoires, que ce n'est plus acceptable de brûler
des combustibles fossiles parce que ça va peut-être être
notre mort tout à l'heure, qu'une des solutions, la solution en fait
qu'ils envisagent, et il y avait 5000 personnes hein, il y avait des gens au
niveau politique, des scientifiques, ils ont conclu, et c'est la seule
conclusion qu'ils ont: Le nucléaire, c'est probablement l'option
économiquement actuellement la plus valable.
C'est pour ça qu'on dit, nous, élargissons, permettons
à Hydro-Québec de nous sensibiliser parce qu'ils en ont fait, des
études. C'est bien sûr que ce ne sont pas ces deux petits
paragraphes qui constituent l'ensemble des conclusions des études
d'Hydro-Québec. M. Rozon nous dit. Étalons ça, regardons
qu'est-ce que c'est, les pour et les contre et les conséquences et
peut-être qu'à ce moment-là, si Hydro-Québec
était encouragée à peut-être dévoiler ce
potentiel-là, bien qu'Hydro-Québec le ferait, et peut-être
qu'à ce moment-là ça nous permettrait de prendre des
décisions plus éclairées.
Le Président (M. Leclerc): Je vous remercie, M.
Doré. M. le député de Beauce-Nord, votre temps est
à peu près terminé... Ah! Excusez. J'oubliais M. Rozon. Je
vous en prie.
M. Rozon: Oui, je voulais un peu poursuivre sur la question de M.
le député. D'abord, on déborde assez largement du contenu
de notre mémoire qu'on a préparé d'une façon quand
même relativement... Pardon?
Mme Bacon: On ne déborde pas du mandat de la
commission.
M. Rozon: Sans doute Sans doute que non Mais c'est que nous, on
s'aventure à ce moment-là. On s'aventure en fait à
philosopher un peu comme peut-être ceux qui nous ont
précédés à la table. Lorsqu'on commence à
parler de débat de société... Vous avez mentionné
dans votre question que le choix de société a déjà
été fait. Je suis d'accord d'une certaine façon que
lorsqu'on a décidé de nationaliser l'électricité et
qu'on s'est dotés d'Hydro-Québec on a fait un choix de
société et je suis bien content qu'on l'ait fait.
Il y a un autre choix de société, par exemple, qu'on n'a
pas encore fait et que je pense que beaucoup de gens réclament autour de
cette table. C'est celui qui concerne possiblement ce que j'anticipe être
la vision de notre premier ministre d'anticiper ou de développer, de
devancer les développements du Grand-Nord pour exporter notre
électricité et pour offrir aux générations futures
d'autres choses que des problèmes, une rente, par exemple, qui vont nous
permettre de construire l'avenir, etc. C'est une vision qui se respecte
certainement mais qui a
tellement d'implications, surtout au niveau du territoire, au niveau des
gens qui l'occupent, que ça doit être débattu. Je ne
voudrais pas vous suggérer ici qu'on devrait considérer la
question de construire une ou deux centrales nucléaires en attendant,
pour se donner un peu plus de temps pour le faire à fond, ce
débat-là, que le débat sur le nucléaire soit une
question de choix de société. Ce n'est pas une question de choix
de société. C'est purement technique. D'accord, c'a des
implications d'impact local. Il y a des procédures à suivre. Mais
disons que je ne préconise absolument pas qu'on se lance dans un
débat de société et commencer à parler du
nucléaire avec un grand N. Ce n'est pas ça du tout la
question.
Le Président (M. Leclerc): Je vous remercie, M. Rozon. Je
reconnais maintenant le député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
vous souhaiter la bienvenue. Votre mémoire est assez court et bref, mais
plutôt condensé et bien rempli. J'aurais pas mal de questions. Je
vais commencer par une question tout à fait technique. Puisque vous le
soulevez vous-même, je pense que ça doit être parce que vous
lui donnez de l'importance. C'est au niveau des questions de transport, les
compensateurs séries. Vous semblez voir là la solution à
bien des problèmes. Or, je me suis laissé dire, par des gens qui
sont sùpposément compétents dans le domaine, qui
connaissent un peu c'est quoi ces affaires-là, que, en fait, le
compensateur série, c'était effectivement quelque chose qui, en
modèle mathématique, fonctionnait très bien, mais qu'on ne
savait pas qu'est-ce que ça allait donner sur les lignes, et que de
construire ça, que d'avoir choisi ce moyen, c'était
peut-être le moyen à la fois le plus dispendieux, le plus
risqué pour Hydro-Québec afin d'assurer une meilleure
fiabilité du réseau de transport.
Je constate que vous n'avez pas tout à fait le même point
de vue. Je voudrais comparer avec l'autre.
M. Doré: En fait, on n'est pas des experts dans ce domaine
ni l'un ni l'autre, mais on a consulté des experts avant d'écrire
ce qui est écrit ici. Il y a des gens qui ont participé à
une réflexion en profondeur avec Hydro-Québec sur ces questions
aussi, indépendamment d'Hydro-Québec. Et, ce sont des gens de
l'École polytechnique, quand même des professeurs d'école.
Ils ont dit que c'est la bonne solution, que cette solution est
technologiquement accessible, que la difficulté que pourrait avoir
Hydro-Québec c'est le personnel en place. et ce personnel devrait
être introduit dans Hydro-Québec en disant: Non, les gens qui sont
capables de faire ça. Ils sont capables de gérer cette
transformation du système de transport, mais il faudrait certaine- ment
faire de la formation d'un certain nombre de personnel à l'interne et
acquérir d'autre personnel, mais que la solution est tout à fait
viable, tout à fait économique et tout à fait possible
pour Hydro-Québec.
M. Claveau: Est-ce qu'elle existe actuellement, disons,
réellement, est-ce qu'elle est utilisée sur des réseaux de
transport à travers le monde? Autrement que dans des modèles
mathématiques.
M. Doré: Écoutez, ce que j'en sais, par ce qu'on
m'a dit lors des discussions qui nous ont amenés à ceci, c'est
que je ne sais pas jusqu'à quel point... Mais ce ne sont pas seulement
des modèles mathématiques. Il y a des systèmes physiques
qui ont déjà été construits, qui ont
déjà été testés. Maintenant, à quelle
échelle ça a été testé? Là,
actuellement, je ne peux pas vous le dire.
M. Claveau: D'accord. Je ne m'éterniserai pas
là-dessus, de toute façon. La page suivante est
intéressante aussi au niveau de la gestion des pointes. On sait que
c'est un gros problème pour Hydro-Québec, la fameuse pointe
hivernale, les heures de pointes. Hydro-Québec, enfin, dans ses plans de
développement... Et aussi une vision qui est généralement
répandue dans l'entreprise, c'est que c'est le consommateur
résidentiel qui est responsable de la pointe. On voit, dans les
documents d'Hydro-Québec, plan de développement, une base
à peu près stable de niveau de consommation industrielle. Et
quand on arrive à la consommation résidentielle, ce sont des pics
au-dessus de la base constante. Alors, la réponse à ça de
la part de l'industrie, c'est de dire: II faut que ce soit le consommateur qui
paie la pointe, le résidentiel qui paie la pointe, parce que ce sont eux
qui sont responsables de la pointe en grande partie. Donc, on justifie par le
fait même aussi toute la théorie de l'interfinan-cement. Cascades
nous est arrivée avec une vision tout à fait à l'inverse
du problème où il dit: Hydro-Québec pourrait régler
son problème de pointe très facilement ou, du moins, en grande
partie, si elle donnait carrément la gestion de cette pointe-là
à l'entreprise, par le biais de certaines mesures, en disant: On
négocie avec les entreprises une utilisation de
l'électricité qui fait en sorte que l'on puisse consommer moins
dans l'entreprise aux heures de pointe, soit par une meilleure gestion du
temps, en modifiant des techniques d'entretien, réparations ou en
modifiant, par exemple, dans le cas d'entreprises où on a de
l'accumulation de biens, qu'on doit faire, à ce moment-là, en
augmentant les réservoirs, un certain nombre de choses qui permettrait
d'utiliser moins d'électricité sur la période de pointe et
on pourrait compléter ça par la cogénération ou le
solaire ou autrement. (18 heures)
Personnellement, je dois vous dire que, d'abord, la position m'a un peu
surpris au départ. Finalement, en y réfléchissant, je
trouve que c'est loin d'être bête. Je ne sais pas si la position
que vous nous amenez là irait dans ce sens, de dire: Au lieu de se
casser la tête avec ça, pourquoi on ne refile pas à
l'entreprise la responsabilité de gérer la pointe, à sa
façon?
Le Président (M. Leclerc): Oui, M. Doré.
M. Doré: En fait, quand vous parlez de l'entreprise, vous
parlez de l'entreprise consommatrice d'énergie électrique.
M. Claveau: Consommatrice d'électricité, la grande
entreprise...
M. Doré: En fait, il y a deux groupes d'utilisateurs. Il y
a le résidentiel et les entreprises, et les deux contribuent au fait
que, à un moment donné, au cours d'une année, on a besoin
de plus que ce qu'on produit. À ce moment-là, si on peut acheter
tout ce qui est le surplus, à ce moment-là on n'a pas besoin
d'avoir des infrastructures additionnelles pour produire
l'électricité. Ce qu'on propose, nous, ce n'est pas ça. On
propose que, si la pointe est due en grande partie, la pointe réellement
avec un changement de pente, est due en partie au résidentiel, c'est
qu'on pourrait probablement atténuer cette pointe-là en faisant
une gestion, par utilisateur, sans qu'il s'en rende compte même. On ne va
pas lui charger plus cher. Nous, on ne suggère pas que la pointe soit
payée par l'utilisateur. On lui dit: Enlevons à l'utilisateur la
possibilité de consommer de l'énergie pendant une certaine
période, de façon à effacer la pointe. C'est ce qu'on
dit.
M. Claveau: Ça, j'en conviens, c'est ce que vous nous
avancez dans la page suivante. Mais, ce que Cascades nous dit c'est: Au lieu de
se casser la tête avec tous ces petits utilisateurs finalement, ça
devient quand même un petit peu plus difficile, pourquoi ne pas faire
ça, mais avec la grande entreprise? Par exemple, pourquoi l'entretien,
la réparation des moteurs hautement consommateurs
d'électricité ne se ferait pas durant la période de pointe
au lieu de la faire dans la nuit, quand personne n'a besoin de courant, ou des
trucs semblables. Pourquoi, par exemple, l'entreprise ne serait pas
autoproductrice d'énergie, par le biais de diesel ou de
cogéné-ration, d'une façon ou d'une autre, pendant
quelques heures par année, pendant la pointe? À ce
moment-là ils pourraient, en contrepartie, bénéficier de
certains avantages de la part d'Hydro-Québec. Ça ne serait pas
plus simple à gérer finalement?
M. Doré: En fait, nous on dit que c'est aussi possible
ça. On le dit, la cogénération. On dit: profitons, de
façon accrue, de la cogénération. Il y a des entreprises
qui seraient intéressées à même alimenter le
réseau d'Hydro-Québec pendant certaines périodes où
eux n'ont pas besoin de l'énergie à l'intérieur de
l'usine. L'un ne va pas contre l'autre. Je crois qu'il faut exploiter ces deux
possibilités. Maintenant, il y a des choses qu'on ne peut
arrêter.
Prenez un haut fourneau, prenez une cuve d'aluminium, on ne dit pas, de
11 heures à 16 heures, on coupe l'électricité. Il y a des
choses qui sont possibles et des choses qui sont impossibles. Je crois qu'il
faut regarder toutes ces possibilités et c'est ça une utilisation
rationnelle des infrastructures. Ça va un peu dans le même sens
que la remarque que j'ai faite à propos du gaz. Regardons les
infractures. Regardons toutes les possibilités d'utiliser ces
infrastructures au maximum, en réduisant ce besoin de construire
d'autres infrastructures. Il va falloir en construire d'autres. On n'a jamais
dit, nous, qu'il faut arrêter la construction d'infrastructures.
Maintenant, il y a peut-être moyen d'aller au-delà de ce
qu'Hydro-Québec se fixe comme objectif.
Le Président (M. Leclerc): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Une autre question par rapport au nucléaire.
Moi, je vais vous dire tout de suite que je suis loin d'être vendu
à la théorie du nucléaire. Je ne suis pas
particulièrement friand de ce genre de technologie, en ce qui me
concerne, en tout cas. Le nucléaire c'est un peu comme la guerre. Tout
le monde trouve ça beau, ça peut être rentable en autant
que ça ne soit pas chez vous. Il y a plein d'entreprises qui nous
disent, à l'occasion: La guerre c'est rentable, mais il ne faut pas
qu'elle se fasse sur ton terrain, surtout pas. Le nucléaire, c'est un
peu comme ça. Moi, le jour où la grande région
montréalaise nous dira. Nous autres, on est prêts à voir
pousser des réacteurs nucléaires sur l'île de
Montréal pour préserver d'autres choses, peut-être que je
commencerai à changer mon point de vue. Mais si c'est pour venir nous
braquer des réacteurs nucléaires en région parce qu'il n'y
a personne qui veut vivre à côté d'un réacteur
nucléaire, je ne sais pas c'est quoi, l'intérêt
réel. D'autant plus que le coût du nucléaire est
supérieur à celui de l'hydroélectricité; oui,
d'après tous les chiffres qui nous sont donnés par
Hydro-Québec, en tout cas, c'est ça. Le coût de
remplacement d'un réacteur nucléaire est beaucoup plus important
que celui d'une centrale hydroélectrique. Le réacteur
nucléaire a une longueur de vie qui est passablement courte
comparée à une centrale hydroélectrique. Et
l'expérience mondiale, à toutes fins pratiques, de l'utilisation
du nucléaire, elle aussi, est particulièrement courte eu
égard à la période de temps que ça prend pour se
défaire de la radio-
activité du déchet. Des centrales hydroélectriques,
au moins, ça fait quelque chose comme une centaine d'années qu'on
en a et on commence à savoir comment ça fonctionne. Dans le cas
des centrales nucléaires, c'est quand même assez bref, assez
court, l'expérience que l'on a de ça. Alors, moi, en ce qui me
concerne, en tout cas, j'aimerais bien que vous me donniez plus de
détails sur l'approche qu'on pourrait avoir, d'abord, pour vendre aux
individus le fait qu'avoir une centrale nucléaire dans sa cour, ce n'est
pas plus dangereux qu'une cabane d'oiseaux et, en contrepartie, le fait que
c'est plus rentable que de faire de l'hydroélectricité.
Le Président (M. Leclerc): Bien. Des voix: Ha, ha,
ha!
Le Président (M. Leclerc): Ha, ha, ha! Qui va
répondre à cette question-fleuve? M. Doré.
M. Doré: En fait, c'est sûr que les centrales
nucléaires, il faut les installer près des centres d'utilisation;
autrement, ça n'a aucune espèce de bon sens. Je dis près.
On n'installera pas ça sur la rue Sainte-Catherine. D'abord, il faut que
tu sois à côté de l'eau. Maintenant, l'option, c'est entre
des inconvénients. Il y a toujours des inconvénients lorsqu'on
fait un développement de type énergétique, il y a toujours
des inconvénients pour quelqu'un. Maintenant, vous dites: Ils ne
viendront pas l'installer chez nous. Mais vous, vous êtes
député d'Ungava - je ne sais si je peux me permettre de dire des
choses comme ça - s'il y a des centrales hydroélectriques qui
vont au-delà de ce qui est acceptable par les gens d'Ungava, vous allez
avoir aussi des problèmes. Alors, donc, ce sont des compromis.
M. Claveau: Ah! C'est clair.
M. Doré: Ce sont toujours des compromis. Et maintenant que
mon collègue est prêt à répondre... Peut-être
que tu pourrais ajouter...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: II avait l'air de chauffer sur sa chaises tout
à l'heure.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Leclerc): Ne vous sentez pas
obligé, M. Rozon.
M. Claveau: II était comme sur une chaise
électrique.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rozon: Bien, disons, je suis un peu désemparé
par votre question, si elle en est une.
Peut-être que les commentaires que vous avez faits justifient
encore plus, à mes yeux, la nécessité d'informer le monde
parce que vous me semblez, malheureusement, très mal informé sur
ce qu'est le nucléaire.
D'abord, la théorie nucléaire. Je ne parle pas de la
théorie nucléaire, je parle d'un phénomène de la
nature, c'est ça qui nous éclaire. Vous êtes
déjà allé en France, peut-être. L'an dernier, il y a
eu une période, pendant l'été, où 100 % de
l'électricité, en France, ce qui représente
peut-être cinq fois l'électricité qu'on produit au
Québec, était produite dans des centrales nucléaires. Ce
n'est pas une invention de dernière minute, ça. Alors, c'est pour
ça que j'ai de la difficulté à saisir un peu la
portée de votre intervention. De toute façon, je ne suis pas ici
pour prêcher. Je ne fais que rappeler à la commission que cette
technologie, elle existe et qu'il faudrait arrêter de regarder cette
technologie de ce point de vue là, c'est-à-dire d'un point de vue
dogmatique. Il ne s'agit pas d'un dogme, il ne s'agit pas d'une théorie
nucléaire, il s'agit tout simplement d'installations qui sont
démontrées et démontrables, qui sont quanti-fiables, qu'on
peut évaluer au même titre que les autres. Et j'aimerais bien
qu'on le fasse, tout simplement, parce qu'on risque de compromettre notre
avenir en faisant des déclarations un peu du genre de celles que vous
avez faites, dans le grand public, ce qui ne fait que perpétuer,
justement, cette incompréhension. J'aimerais ça qu'on en parle
d'une façon un peu plus rationnelle. C'est tout.
Le Président (M. Leclerc): M. le député
d'Ungava. Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: Votre réponse est intéressante dans la
mesure où, effectivement, s'il y a moyen d'éclairer la population
là-dessus et s'il y a moyen de me convaincre, moi le premier, eh bien,
j'en serais satisfait. Mais je dois vous dire en toute honnêteté
qu'en ce qui me concerne, je suis peut-être un peu vieux jeu par rapport
à ça, mais j'ai de la difficulté... bien que, soit dit en
passant, j'ai visité la Centrale nucléaire de Gentilly et j'ai
été particulièrement impressionné par les
explications qu'on m'a données. Mais il reste que je continue à
craindre plus le nucléaire que l'eau courante. Alors, c'est en vous
remerciant de votre intervention. Enfin!
Le Président (M. Leclerc): Bien, sur cette
vérité de La Palice, je reconnais Mme la ministre.
Mme Bacon: Je vous remercie beaucoup. Je pense que cet
élément du nucléaire n'avait pas été
abordé depuis le début, et je ne suis pas fâchée
qu'on l'ait fait aujourd'hui. Je pense que
c'est un élément important. C'est un ajout dans toute la
discussion que nous avons, la façon dont on peut utiliser les
différentes sources d'énergie au Québec et ça
s'ajoute au mandat que nous avons à cette commission parlementaire. Si
ça peut éclairer les membres de cette commission, je pense que
c'est fort important et c'est intéressant que ce soit fait aujourd'hui.
Merci beaucoup.
Le Président (M. Leclerc): Je vous remercie, Mme la
ministre. Alors, à mon tour au nom des membres de la commission, je
voudrais remercier M. Rozon et M. Doré, de l'École polytechnique
de Montréal de s'être déplacés pour venir rencontrer
la commission. Je leur souhaite un très bon retour à la maison.
Nous ajournons les travaux de la commission de l'économie et du travail
à demain matin, dix heures. Je vous remercie.
(Fin de la séance à 18 h 12)