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(Dix heures cinq minutes)
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail reprend ses travaux de consultation
générale et d'auditions publiques sur la situation et les
perspectives de l'énergie électrique au Québec.
Ce matin, nous recevons la Fédération des ACEF qui sera
représentée par Mme Hélène Arsenault, M. Legros,
Mme Marcoux et M. O'Narey. J'inviterais donc la Fédération
à s'approcher de la table des témoins.
Pendant que vous vous installez, je vous explique nos règles de
procédure que vous connaissez, je pense. Vous avez 20 minutes ferme pour
la présentation de votre mémoire et, par la suite, il y a une
période d'échanges avec les parlementaires.
Avant de débuter la présentation de votre mémoire,
je vous prierais de bien vouloir identifier votre porte-parole,
présenter vos collègues puis procéder. Alors, on vous
écoute.
Fédération des ACEF
M. O'Narey (Ronald): Bonjour. On espère entrer dans le
délai de 20 minutes. Je commence par me présenter: Ronald
O'Narey, pour la Fédération des ACEF. J'ai avec moi aussi ceux
qui vont intervenir: Daniel Legros, Hélène Arsenault et Louise
Marcoux, de la Fédération des ACEF également.
Je commencerai en vous présentant rapidement la
Fédération des ACEF que plusieurs connaissent déjà,
je pense, pour souligner certains aspects particuliers de notre travail,
particulièrement le fait que la Fédération des ACEF existe
depuis maintenant 20 ans et qu'elle intervient particulièrement
auprès des familles les plus démunies qui ont des
problèmes financiers.
Notre objectif est toujours de permettre à ces familles de
reprendre le contrôle sur leur situation financière et de les
aider au niveau de leur budget en réaménageant leur situation
financière. C'est là le principal service qu'on offre. On
rencontre facilement, en consultation individuelle, plus de 1000 familles par
année et aussi, dans des rencontres collectives, plusieurs milliers de
familles.
Actuellement, la Fédération des ACEF regroupe 14 ACEF.
Dans notre document, on mentionnait 11 mais, depuis ce temps, on a des projets
de développement partout au Québec, dans quelques régions,
et on espère, un jour, pouvoir répondre aux besoins qui sont
croissants partout à travers le Québec.
Maintenant, le travail auprès de ces popula- tions-là nous
a amenés, avec les années, à intervenir sur certains
dossiers qui ont un caractère plus large et plus global. Pour ce faire,
la Fédération des ACEF s'est donnée des comités qui
sont intervenus dans différents secteurs. On parle, par exemple, d'une
Commission endettement de la Fédération des ACEF qui est
intervenue sur la réforme du dépôt volontaire; d'une
Commission pratiques commerciales qui est intervenue récemment sur la
question du retour de la publicité destinée aux enfants, sur les
heures d'ouverture des commerces.
La Commission services publics se penche sur le dossier
d'Hydro-Québec et de l'énergie en général, mais
elle s'est aussi penchée sur les problèmes qu'on a eus avec Bell
Canada au niveau de la tarification, au niveau de certains services comme le 9,
7, 6. On s'est préoccupé également de dossiers sociaux,
entre autres, la réforme de la loi de l'aide sociale, la réforme
des services de santé, l'accessibilité à l'aide juridique
également. On se préoccupe également de dossiers plus
économiques comme les implications du libre-échange, les
implications de la taxe sur les produits et services. Également, de plus
en plus, la Fédération des ACEF se préoccupe des questions
qui touchent l'environnement.
Cette année, même depuis deux ans, je dirais, nous nous
sommes intéressés particulièrement à toute la
question de l'irradiation des aliments et de l'accessibilité aux
produits de papier non blanchi.
C'est une de ces commissions, la Commission services publics, qui a
décidé d'intervenir pour la question que la commission va traiter
aujourd'hui, et nous avons soumis un mémoire que vous avez eu l'occasion
de regarder.
Maintenant, j'aimerais déjà souligner que nous avons fait
circuler notre mémoire et demandé à plusieurs intervenants
de réagir à notre mémoire. Nous avons aussi une liste
d'appuis d'organismes que je pourrai distribuer. Entre autres, nous avons
reçu, face aux recommandations de notre mémoire, l'appui de 54
organismes dont la Commission des services juridiques du Québec, la
Fédération des CLSC du Québec, le Conseil canadien de
développement social, la Commission des droits de la personne du
Québec, de nombreux bureaux d'aide juridique, de nombreux CLSC, de
même que certains syndicats et organismes communautaires et,
également, de certains députés. Or, je pourrai faire
circuler la liste des appuis qu'on a reçus.
La Fédération des ACEF a également pris position
sur la question d'un débat public que, actuellement, une coalition
demande face aux enjeux qui sont présentés dans le plan de
développement d'Hydro-Québec. Alors, de la même
façon, la Fédération des ACEF demande qu'une commission
itinérante, indépendante soit constituée pour qu'on fasse
véritablement le débat à travers tout le Québec sur
l'avenir du développement électrique. On pense qu'il est
nécessaire qu'un consensus se fasse au Québec sur ces grands
projets de développement. J'entendais récemment, je lisais aussi
que même M. Drouin, qui est à la tête d'Hydro-Québec,
disait qu'il faudrait, d'ici quelques années, véritablement avoir
un consensus, ce qui ne semble pas fait au niveau de la population sur le
développement électrique, et je pense que c'est une
nécessité.
Alors, je passerais la parole à Daniel Legros pour
présenter le contenu de notre mémoire.
M. Legros (Daniel): Donc, depuis la fin des années
soixante-dix, la Fédération des ACEF du Québec est
intervenue régulièrement pour sensibiliser le gouvernement et
Hydro-Québec aux difficultés qu'éprouvent des milliers de
familles à payer leurs factures d'électricité. Le nombre
relativement important de comptes en souffrance à Hydro-Québec
est une manifestation évidente de l'incapacité de payer de
plusieurs milliers de familles. On aurait tort de croire que la
négligence et la mauvaise foi en sont les causes principales.
Or, les mesures utilisées par Hydro Québec pour recouvrer
ces comptes en souffrance ne tiennent pas compte de cette
réalité. Elles sont généralement excessives et
souvent arbitraires. En 1988, Hydro-Québec a procédé
à 26 000 coupures de service, dont 4000 au cours de l'hiver. Cette
situation est inacceptable, compte tenu du fait que les victimes étaient
des familles à faible revenu qui éprouvent de sérieux
problèmes financiers.
Toutes les études et enquêtes récentes
démontrent que la majorité des familles du Québec, loin
d'augmenter leur niveau de vie, se sont appauvries ces dernières
années. Pour combattre leur déficit respectif, les
différents paliers gouvernementaux sabrent dans les programmes sociaux
qui avaient été si chèrement gagnés et accroissent
le fardeau des taxes pour les contribuables. Quant au prix des biens et
services, il continue à augmenter rapidement et grimpera davantage si le
gouvernement fédéral va de l'avant avec son projet de la TPS.
Hydro-Québec a, pour sa part, obtenu des hausses de tarif
résidentiel de beaucoup supérieures à l'inflation. On
parle de 24 % d'augmentation d'ici au 1er mai 1991 afin de répondre, et
on croit, à ses besoins de développement et de
rééquilibrer ses tarifs entre les secteurs résidentiel,
commercial et industriel. Le coût de l'électricité
constituant une partie importante des dépenses de logement pour toutes
les familles et particulièrement pour les familles à faible
revenu, toute nouvelle augmentation affecte le niveau de vie de milliers de
familles. La situation actuelle justifie l'adoption rapide par le gouvernement
du Québec et Hydro-Québec d'un ensemble de mesures visant
à garantir l'accès et la continuité du service
électrique à toutes les familles, peu importe leur situation
financière
La Fédération des ACEF n'est pas la seule ni la
première à dénoncer les méthodes de recouvrement
d'Hydro-Québec: coupures de service, ententes de paiement trop
élevées, mises en administration. Durant les 15 dernières
années, on peut citer le Conseil national du bien-être social et
le Conseil des affaires sociales et de la famille, en 1974 et 1975; la
Commission des droits de la personne; en 1977 et 1980, l'Office de la
protection du consommateur; en 1982, la Commission des services juridiques Tous
ces organismes et plusieurs autres, depuis 15 ans, se sont penchés sur
les problèmes liés aux mesures utilisées par Hydro
Québec pour recouvrer ses créances et ont conclu qu'il
était nécessaire de créer un mécanisme d'arbitrage
neutre et impartial pour que les familles menacées de coupure de service
aient un droit de recours. Un certain nombre de ces organismes ont même
proposé la création d'un programme d'aide financière
spécifique pour les familles à faible revenu qui n'arrivent pas
à payer leurs factures d'électricité
Pour tous ces intervenants, l'électricité est un service
essentiel et les dispositions de la Charte des droits de la personne doivent
être appliquées aux familles menacées d'interruption de
service. Ces dispositions consacrent légalité d'accès aux
services d'utilité publique et le droit à des mesures
d'assistance financière et à des mesures sociales susceptibles
d'assurer a une personne et à sa famille un niveau de vie
décent.
Donc, nous, les ACEF, on participe aussi, depuis quatre ans, avec
Hydro-Québec à un processus de consultation pour améliorer
leur processus de recouvrement et leur service à la clientèle. On
a présenté des recommandations à Hydro-Québec puis
il n'y a rien qui change Rien n'est mis en application. Elles sont accueillies
mais, dans certains cas, ils ne veulent pas bouger. Que conclure sinon
qu'Hydro-Québec ne renoncera jamais d'elle-même à son
statut de juge et partie, qu'elle ne renoncera jamais à son pouvoir de
couper le service et d'imposer la mise en administration d'émissaires
d'aide sociale, ces mesures constituant ses outils de recouvrement les plus
agressifs et les plus efficaces. Mais les choses doivent changer et c'est au
gouvernement de prendre ses responsabilités et d'agir pour
protéger le droit de ces citoyens les plus démunis.
Hélène Arsenault va vous présenter le restant du
mémoire.
Mme Arsenault (Hélène): Les familles qui sont aux
prises avec les services de recouvrement à Hydro-Québec sont, en
majorité, des
familles qui éprouvent de sérieuses difficultés
financières. Et ici, j'aborde un problème qui est une
épine dans le pied d'Hydro-Québec mais aussi de tous les
gouvernements, de tous les politiciens: le problème de la
pauvreté. Ça, c'est un problème qu'on voudrait
évacuer, qu'on ne voudrait même pas voir. Il est là et il
est très réel. Hydro-Québec a fait une enquête au
niveau des familles à recouvrement pour vérifier si,
effectivement, ces familles-là étaient des familles en
difficulté financière ou des familles négligeantes.
Finalement, on s'aperçoit qu'effectivement, le lien est très
clair. Les enquêtes qui ont été faites par
Hydro-Québec démontrent très clairement que c'est dans les
secteurs où il y a le plus de pauvreté qu'il y a plus de cas de
recouvrement, de problèmes de recouvrement. C'est un tableau qui
démontre très clairement le rapport entre le revenu, les
conditions de logement et les problèmes de recouvrement
d'Hydro-Québec.
En fait, les problèmes de recouvrement de l'entreprise sont
étroitement liés aux problèmes croissants de la
pauvreté au Québec, un problème qui s'explique par une
insuffisance de revenu pour de nombreuses familles mais, aussi, par le
coût élevé des biens et services, surtout reliés
à l'habitation et à l'énergie.
Qu'est-ce que c'est, un faible revenu? Quand on vient parler des faibles
revenus, on ne veut pas simplement parler des assistés sociaux qui sont
très évidemment faciles à identifier. On parle aussi de
toutes les familles qui ont un revenu qui dépasse... qui doivent
consacrer 58,5 % ou plus de leur revenu pour s'alimenter, se loger et
s'habiller, ce qui veut dire, finalement, une très grande part de la
population du Québec et, finalement, plusieurs familles qui n'ont qu'un
seul revenu pour survivre.
Finalement, le Conseil canadien de développement social constate
que même 50 % des personnes vivant sous le seuil de pauvreté sont
des travailleurs. Ce ne sont pas que des chômeurs ou des prestataires
d'aide sociale. Il y a beaucoup de travailleurs qui sont sous le seuil de
pauvreté, surtout quand on connaît à quel point maintenant
les emplois sont précaires. Il y a beaucoup de gens qui vivent à
contrat, qui ne savent aucunement combien ils vont gagner durant
l'année. On comprend plus facilement que le problème de
pauvreté touche de plus en plus de monde au Québec. Actuellement,
il y a 153 000 personnes qui travaillent au salaire minimum. Mais le salaire
minimum, aujourd'hui, ne nous permet même pas d'atteindre le seuil de
pauvreté. Le problème de chômage est devenu criant dans
toutes les régions du Québec. On parlait auparavant des
régions rurales mais, maintenant, ce sont même les grandes villes
qui déplorent le taux de chômage de plus en plus grandissant. Les
problèmes à l'aide sociale sont assez évidents. Les gens
qui vivent d'aide sociale ne peuvent pas vivre décemment. Ils ont
énor- mément de difficulté simplement à payer
leurs frais de subsistance et, pourtant, ce ne sont pas eux qui sont
les plus mauvais payeurs, on le verra plus tard, à Hydro-Québec
particulièrement. Quand on a un faible revenu, on a un premier gros
problème qui est le problème des dépenses reliées
à l'habitation, les dépenses reliées au logement. Au
niveau des coûts de logement, on s'aperçoit que la courbe des
coûts de logement a beaucoup monté depuis quelques années,
et les coûts des revenus des gens, eux, n'ont pas suivi. Alors de
ça, finalement, découle le problème que les gens louent
des logements trop petits pour leur famille et aussi le problème de
qualité de logement. Particulièrement en milieu rural, on
s'aperçoit qu'il y a de très nombreuses maisons ou logements qui
sont mal isolés, qui sont très exposés au vent, au froid,
en hiver, et qui coûtent très cher à chauffer.
On a apporté avec nous des graphiques qui illustrent d'une
façon visuelle très intéressante l'évolution des
coûts de logement et la part que les gens doivent consacrer pour se
loger. Traditionnellement, on se disait: 25 % du revenu pour se loger. Mais
quand on a un faible revenu, c'est beaucoup plus que ça, ça peut
aller facilement à 50 % ou 55 % de nos revenus pour se loger, ce qui est
effarant. Et quand on parle de coûts de logement, on inclut toujours la
facture d'électricité qui, on le sait, va beaucoup monter dans
les prochains mois.
J'aborde maintenant la question du taux d'effort, justement. Les
familles à faible revenu doivent fournir un effort
démesuré, un taux d'effort démesuré pour payer
leurs factures d'électricité et un grand nombre d'entre elles ont
des revenus insuffisants pour acquitter leurs comptes. Hydro-Québec
avait fait une étude, en 1987, sur le mode de vie et les intentions de
paiement des gens, de ses clients en recouvrement, et on s'apercevait que,
finalement, les gens avaient une perception de leur situation financière
qui était plus ou moins optimiste. Il y avait 65 % des familles qui ont
été examinées qui reçoivent un avis final et qui
considèrent que leur situation financière est difficile et
qu'elle va en se détériorant. Et quand on demande à ces
gens-là quelle est leur priorité dans leurs habitudes de
paiement, en premier lieu, les gens vont payer leur loyer et, en
deuxième lieu, tout de suite après, c'est
l'électricité qui vient. Pourtant, ces familles-là ont de
la misère à payer leurs comptes et ces familles-là sont
souvent en recouvrement. En majorité, les familles les plus
démunies financièrement, ce sont elles qui ne paient pas et qui
se retrouvent finalement avec un avis de coupure. Chaque année, entre 20
000 et 25 000 de ces familles subissent des coupures de service. Au cours des
dernières années, leur nombre a plutôt tendance à
augmenter. Quand on a demandé aux gens, dans des enquêtes
commandées par Hydro-Québec, qu'est-ce qu'ils voyaient comme
solution possible
à ce problème de manque de revenus et cette
incapacité de payer qui était évidente, les gens
proposaient deux choses: d'abord, des programmes d'aide à la gestion
financière, bien sûr, pour mieux gérer leur budget. Mais on
s'apercevait aussi que ce n'était pas suffisant parce que, quand on dit
à des personnes à faible revenu: Bien, c'est parce que vous
n'êtes pas débrouillards, vous ne savez pas gérer vos
ressources. C'est peut-être un peu une insulte pour ces gens-là.
Il y a bien des gens à revenu très élevé qui
s'administrent très mal aussi et, quand on a de très faibles
revenus, au contraire, c'est un tour de force que de réussir à
payer rien que les dépenses courantes.
Alors, un deuxième volet de programme d'aide qui était
suggéré par les gens qui ont été enquêtes, si
je peux dire, c'était également un programme d'aide
financière qui pourrait prendre plusieurs formes. Ce n'est pas
définitif mais il y a plusieurs formes d'aide financière II y a,
dans les États américains du nord-est, plusieurs programmes
d'aide qui existent pour aider justement à soulager le taux d'effort que
les gens ont pour rencontrer les coûts d'énergie Alors, l'aide
financière pourrait prendre l'allure d'un tarif
préférentiel, elle pourrait prendre l'allure d'un crédit
d'impôt mais, quelque part, il faut trouver une manière de
soulager le taux d'effort que les gens font pour se chauffer, pour se
loger.
Une autre partie du problème réside dans les ententes de
paiement que les gens font avec Hydro-Québec. Quand on est en
recouvrement avec Hydro-Québec, ça veut dire qu'on est rendu avec
des factures de 400 $, 500 $, 600 $ d'arrérages et la facture
amène aussi un avis de coupure, d'interruption de service. Les exigences
des agents de recouvrement sont très élevées. Elles sont
très difficiles à satisfaire pour les gens qui sont en
recouvrement et qui ont un faible revenu. Quand on demande aux gens à
faible revenu d'apporter le solde total, 500 $, 600 $, en deux versements d'ici
un mois, c'est à peu près infaisable. Quand on voit les chiffres
qui nous sont présentés actuellement, il me semble qu'il y a une
énorme disproportion. On regarde les chiffres d'Hydro-Québec,
actuellement. 60 000 000 000 $ pour le développement
énergétique. Ces chiffres-là n'ont à peu
près pas de raisonnance pour une personne à faible revenu parce
que, nous autres, quand on a une facture d'Hydro-Québec, on se demande
comment trouver 200 $ pour payer le compte. Alors, on joue dans des chiffres
qui n'ont aucune raisonnance de part et d'autre et probablement que cette
difficulté à comprendre les chiffres est partagée,
c'est-à-dire que les gens qui jouent avec les 60 000 000 000 $ ne
comprennent pas la difficulté qu'on a, quand on est à bas revenu,
pour payer 200 $ d'électricité. Pour eux, ça parait
risible mais, quand on est au bas de l'échelle, les 60 000 000 000 $
aussi nous paraissent gros et on comprend mal. On comprend mal qu'on trouve 60
000 000 000 $ pour financer des projets de développement qui sont
très questionnés alors qu'on est dans un contexte
économique où on dit qu'il n'y a pas d'argent. Il n'y a pas
d'argent pour des programmes sociaux, il n'y a pas d'argent pour des programmes
de plein emploi mais il y a de l'argent pour harnacher toutes les
rivières du nord du Québec. Alors, à ce moment-là,
un moment donné, la chanson de Gilles Vigneault "La lettre de M.
Identique Lachance à son premier sous-ministre" m'est venue à
l'esprit, dernièrement. La lettre de M. Tout-le-Monde qui s'adresse
à son premier ministre pour demander comment ça se fait que tant
de choses arrivent quand, supposément, il n'y a pas d'argent?
Pour revenir à Hydro-Québec, les ententes de paiement
qu'on demande aux gens, c'est un peu dans une situation où on a un
couteau sous la gorge. Quand on se fait dire: Tu nous apportes 200 $ demain
pour régler ton compte, sinon on te coupe l'électricité,
à ce moment-là, c'est évident qu'on dit: Oui, oui, oui.
Et, le lendemain, on n'a pas trouvé le 200 $, alors on se fait couper.
Ce qui arrive c'est que, finalement, les demandes sont tellement
intransigeantes, et les gens sont tellement coincés qu'ils vont dire,
oui, parfois à n'importe quoi, pour être certains de ne pas
être interrompus dans leur service. À ce niveau-là,
Hydro-Québec, dans les rencontres avec les associations de
consommateurs, fait toujours beaucoup de promesses sur la souplesse de ses
agents de recouvrement. Elle fait toujours beaucoup allusion à la
nouvelle culture qu'elle veut transmettre à ses agents de recouvrement
pour qu'il y ait plus d'humanité dans le règlement des factures.
Mais, ça se fait attendre II y a énormément de lenteur. Au
niveau des versements égaux, par exemple, on nous promettait des
campagnes de promotion, pour, entre autres, faire la promotion des versements
égaux, qui facilite la gestion du budget familial. Et ça se fait
toujours attendre. Ça fait des années qu'on en parle et pourtant,
il n'y a nen de fait en ce moment.
On demande aussi à Hydro-Québec d'avoir des interventions
plus rapides au niveau de la facturation. Au lieu d'attendre des
arrérages de 600 $, qu'on se dépêche donc d'envoyer des
factures plus rapidement, même la facture mensuelle, pour que les gens
soient plus capables de régler leur compte à temps et ne se
retrou vent pas devant des arrérages qui sont insurmontables. On demande
donc à Hydro-Québec, face à la promotion...
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure, s'il vous plaît.
Mme Arsenautt: On demande donc qu'Hydro-Québec fasse la
promotion des programmes de versements égaux, une facturation plus
régulière
et une attention plus personnalisée, plus humaine, aux
problèmes des gens à faible revenu.
Pour la conclusion, je demanderai à Ronald de terminer.
Le Président (M. Bélanger): Rapidement, il reste
une minute.
M. O'Narey: Une minute, d'accord. Il y a trois autres points
qu'on souligne dans notre document. Entre autres, la question du fait
qu'Hydro-Québec est toujours juge et partie dans le recouvrement de ses
comptes. Et on considère que la nomination, en 1986, d'un commissaire
aux usagers de l'électricité ne répond pas aux besoins,
parce que, justement, son mandat est trop limité, qu'il n'a pas les
pouvoirs pour intervenir. Les gens n'ont pas, non plus, la possibilité
de pouvoir conserver le courant, tant que l'étude de leur situation
n'est pas faite.
La deuxième chose, c'est que les sondages d'Hydro-Québec
démontrent que la population au Québec est toujours contre les
coupures durant l'hiver. Pourtant, Hydro-Québec continue, malgré
les conditions climatiques rigoureuses, d'interrompre le service à
plusieurs milliers de familles, au cours de l'hiver, sauf peut-être cet
hiver-ci, puisqu'il y a eu un conflit de travail qui a empêché,
justement, que des familles soient coupées. Mais cette situation qui
perdure est dénoncée depuis des années. Je pense qu'il est
temps qu'on y voit.
Et, une dernière chose, c'est aussi les mises en administration
des gens à l'aide sociale. On sait que le ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du Revenu voulait cesser de
servir d'agence de recouvrement pour Hydro-Québec. Et je pense que c'est
le temps que cela cesse. Actuellement, ça continue. Même si la
nouvelle loi ne le permettait pas, il y a un moratoire qui s'applique depuis
quelques mois, parce qu'Hydro-Québec menaçait de couper tous les
assistés sociaux qui ne seraient plus mis en administration. Je pense
qu'il faut trouver d'autres solutions, parce que les paiements sont trop
élevés pour ces familles-là.
Et, finalement, je pense qu'il est temps qu'au Québec, on se
donne la possibilité, pour tous les intervenants au niveau social, et
même à d'autres niveaux, de pouvoir intervenir, à tous les
ans, sur les plans de développement d'Hydro-Québec et non pas
seulement après quelques années, comme c'a été le
cas au cours des dernières années. Je pense quo la population du
Québec a quelque chose à dire sur le développement de la
société d'État et il faut lui donner la chance de le
faire. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
ministre.
Mme Bacon: Alors, mesdames et messieurs, c'est justement ce qu'on
fait avec la commission parlementaire, de permettre cet échange, ce
dialogue entre les différents groupes, et même les individus,
comme on en a vu hier, et permettre cette discussion franche, ouverte et sans
intermédiaire. Je pense que c'est important que cette commission ait
lieu, avec des gens qui ont été élus par l'ensemble de la
population. Je vous remercie d'avoir participé à cette rencontre,
ce dialogue que nous voulons le plus fructueux possible, pendant cette
période du mois de mai. Je vous félicite aussi de la
préparation sérieuse de votre mémoire, qui nous
sensibilise, probablement davantage - même si on l'était
déjà - à l'impact que certaines mesures peuvent avoir sur
des gens qui vivent au seuil de la pauvreté et même en
deçà du seuil de la pauvreté.
Votre organisme offre des services de consultation budgétaire
à des gens qui vivent des problèmes de consommation,
d'endettement. Quelle est, de façon générale,
l'importance, qui est relative, des problèmes qui sont reliés au
paiement des comptes d'électricité comme tels, dans l'ensemble
des cas que vous traitez? Est-ce qu'il y a des choses majeures que vous
relevez, là, malgré tout ce que vous venez de nous dire?
M. O'Narey: Je pense que ce qui est évident, maintenant,
c'est que les problèmes de logement, à Montréal, par
exemple, - c'est une situation qu'on connaît bien, parce que moi, je
travaille à Montréal comme tel - entre autres, entraînent,
par le fait même, pour de nombreuses familles, des coûts
très élevés d'électricité, et c'est un
problème majeur.
Et on nous a dit, à Hydro-Québec, entre autres, qu'une des
solutions qui était envisagée, face à ça, c'est
effectivement, des programmes d'économie d'énergie, qui
étaient mis sur la table. Sauf que dans les programmes
qu'Hydro-Québec envisage, qui consistent, entre autres, à aider
les propriétaires, par exemple, à mieux isoler leur
bâtiment... - je pense que c'est un des défis de l'avenir, de
pouvoir davantage économiser l'énergie au niveau du chauffage,
qui est un gros consommateur d'énergie - le problème, c'est que,
souvent, les propriétaires ne sont pas intéressés à
rénover, pour que les locataires paient moins cher, puisque ce ne sont
pas eux qui paient la facture finale. Devant ça, HydroQuébec est
un peu démunie et ne sait pas comment intervenir. Donc, pour les
familles à faible revenu, très souvent, ce qu'on constate, c'est
qu'elles paient des coûts relativement élevés pour leur
situation financière de loyer, mais très souvent, lorsqu'elles
paient peu cher, c'est la facture d'électricité qui en
écope et qui devient très, très élevée.
Mme Bacon: D'accord. À votre connaissance,. quels sont les
mécanismes de protection des consommateurs et consommatrices qui, en
défaut de paiement, pour des services autres que
l'électricité... Vous dites, par exemple, à la page
21 de votre mémoire, qu'Hydro-Québec conclut des ententes
de remboursement, sur 12 mois, pour des clients qui ont des retards de
paiement. Est-ce qu'on retrouve le même genre d'accommodement dans
d'autres secteurs où vous intervenez, comme association? (10 h 30)
M. O'Narey: Dans la majorité des secteurs où on
intervient, il est possible d'obtenir des arrangements. On négocie
fréquemment avec des entreprises privées, donc, avec l'industrie,
avec les banques, les institutions financières. Et, très
facilement, on obtient des délais. Et la plupart de ces
institutions-là ont aussi des méthodes de recouvrement qui sont
encadrées. C'est-à-dire que quelqu'un à qui on doit de
l'argent sur un prêt personnel ou même sur une voiture vendue
à tempérament, a à se conformer à certaines
règles de procédure. Il doit se présenter devant la cour
pour obtenir un jugement et il est toujours possible d'obtenir des
arrangements, même devant la cour, à ce moment-là.
Et il y a aussi des possibilités de s'inscrire, par exemple, au
dépôt volontaire pour toutes les formes de dettes que les gens
peuvent avoir accumulées. Et ce n'est pas le cas pour
HydroQuébec, parce que Hydro-Québec a le droit d'interrompre le
service et qu'à ce moment-là, c'est l'argument qui est servi
à toutes les sauces. Dans chaque cas, c'est la menace de couper le
service et les ententes de recouvrement sur 12 mois, comme on le mentionnait,
c'est très récent qu'Hydro-Québec accepte d'ouvrir sur 12
mois. Et, dans certains cas, ce n'est pas nécessairement appliqué
dans tous les bureaux régionaux non plus. Alors, c'est très
difficile.
Mme Bacon: Quand on parle d'utilité publique - je pense
que vous pourrez répondre à ça - est-ce qu'on retrouve la
même situation pour le téléphone, par exemple? Est-ce qu'on
peut comparer?
Mme Arsenautt: Je pense que c'est également difficile avec
Bell, oui. Effectivement, Hydro n'est pas la seule. C'est effectivement
difficile avec Bell. Mais, ce que je voulais amener tout à l'heure,
c'est que le gouvernement lui-même a jugé bon d'intervenir au
niveau du logement, par exemple, où on considérait que le rapport
de forces entre les locataires et les propriétaires était
démesuré Alors, le gouvernement a légiféré
et, maintenant, il y a une Régie du logement qui intervient pour les
litiges, qui est là, même si elle est mal utilisée. Il y a
très peu de locataires qui y recourent, quand même.
Mais il y a une Régie, un tribunal administratif
indépendant, qui a le dernier mot, finalement. Un propriétaire ne
peut pas évacuer un locataire comme ça, se faire juge et partie.
Hydro-Québec le fait, a des pouvoirs démesurés et n'a de
comptes à rendre à personne.
Mme Bacon: Est-ce que c'est dans ce sens-là que vous
proposez, à la page 25 de votre mémoire, que le gouvernement
nomme un arbitre impartial, doté de pleins pouvoirs, devant lequel les
clients en difficulté de paiement pourraient se présenter pour
contester un avis de coupure ou pour demander la fixation de conditions de
paiement? Est-ce que vous pourriez préciser davantage ce que vous
entendez par "pleins pouvoirs" et peut-être quel pourrait être le
critère qui permettrait de juger qu'un client a fait des efforts pour
s'acquitter de ses factures et a quand même encore des dettes?
Mme Arsenautt: Le problème, très souvent, c'est
que, des fois, le client lui-même a de la difficulté à
simplement acquitter sa facture courante, sa consommation courante. Alors, il
s'enlise de plus en plus puis, finalement, il n'y a plus de solution.
Finalement, oui, on demande qu'il y ait une instance tout à fait neutre
qui puisse vérifier, un peu à la manière de la
Régie du logement, les prétentions de chacune des parties pour
trouver un mode d'entente. Les gens ne disent pas qu'ils ne veulent pas payer.
Ils veulent quand même que le montant qui leur est demandé
mensuellement soit en respect de leur capacité de payer, pour qu'ils
puissent continuer à manger pour pouvoir payer leur...
Mme Bacon: Les gens remboursent à 95 % quand
même.
Mme Arsenautt: Ah oui, les gens remboursent, et ce sont
même souvent les plus pauvres qui remboursent en coupant sur la
nourriture et sur d'autres biens.
Mme Bacon: Oui. Dans votre mémoire, vous indiquez aussi
que 15 des 22 entreprises d'électricité du nord des
États-Unis offrent des programmes d'aide financière aux familles
sous la forme peut-être de tarifs préférentiels ou sous la
forme de subventions. Vous recommandez que le gouvernement crée un
programme d'aide financière à la consommation d'énergie
qui tiendrait compte du revenu et du coût de logement aux familles.
J'aurais trois questions à vous poser là-dessus. D'abord, est-ce
que vous pourriez nous préciser davantage les modalités des
programmes qui sont offerts dans des entreprises américaines, par
exemple, que vous citez dans votre mémoire?
M. O'Narey: Je n'ai pas beaucoup de détails sur ces
différents programmes-là. Je sais qu'il existe des programmes qui
ont des tarifs préférentiels. Je sais qu'il y a des programmes
aussi qui offrent un dédommagement pour le coût de
l'électricité ou une partie du coût de
l'électricité. Il y a des programmes qui effacent com
plètement la dette accumulée, à condition que le client
s'amende par la suite. Donc, si la personne maintient ses versements de
façon régulière pour
les trois années qui suivent, on efface totalement la dette, dans
certains cas.
Il y a toutes sortes de formules, et je pense qu'il faudrait les
étudier plus en détail. Nous, avec les moyens dont on dispose
actuellement, on n'a pas eu la chance de vérifier de très
près ce qui se passait dans tous ces États-là. À
Washington, en février dernier, il y a eu une rencontre de tous les
services au niveau de l'énergie qui offrent des programmes pour des
discussions pour savoir où ça s'en allait. Mais je pense qu'on
doit approfondir cette question-là et je pense que c'est une
étude nécessaire.
Mme Bacon: Et le programme d'aide que vous proposez, là,
considérerait le coût du logement aussi et je pense que ce n'est
pas le cas dans les programmes américains. Est ce qu'on arrête
seulement au niveau de l'électricité, par exemple, ou si on va
jusqu'au coût du logement?
M. O'Narey: II me semble que certains programmes - là, je
ne pourrais pas être affir-matif - tiennent compte du coût du
logement. Mais je voudrais aussi souligner qu'il y a certains programmes, ici,
au Québec, qui déjà tiennent compte du coût de
l'électricité dans des subventions au coût du logement. On
pense aux assistés sociaux et on pense aussi aux personnes
âgées qui ont des programmes, mais ces programmes-là ne
tiennent pas compte du coût réel de l'électricité
puisqu'on tient compte de montants forfaitaires seulement alors que,
très souvent, le coût de l'électricité va varier
beaucoup selon le type de logement qu'on va choisir.
Mme Bacon: D'accord. Vous demandez aussi au gouvernement de se
doter d'une politique juste pour encadrer les méthodes de recouvrement
des distributeurs d'électricité et vous nous dites qu'il est
inacceptable que les clients de l'entreprise qui ont des difficultés
à payer leurs factures n'aient aucun droit pour un service aussi
essentiel. Est-ce qu'il serait équitable de ne plus permettre
l'interruption de service pendant une période de l'année qui
permet peut-être à tout le monde de profiter du même
service, que les clients aient ou non payé leurs factures? Est-ce que
vous trouvez que ce serait aussi équitable de le faire de cette
façon-là?
M. O'Narey: Oui, ce serait aussi équitable dans la mesure
où Hydro-Québec a toujours le recours de poursuivre les clients
qui ont les moyens financiers de payer leurs factures au cours de l'hiver.
À ce moment-là, il s'agit simplement d'inscrire des poursuites et
il est possible de les obliger à payer. Ça ne signifie pas, pour
nous, que l'électricité devient gratuite et accessible à
tous gratuitement. Pour nous, ça signifie de protéger - et,
concrètement, ça risque de se traduire de cette
manière-là - les familles à faible revenu de coupures au
cours de l'hiver parce que cette situation est absolument intolérable.
J'ai eu, dans de nombreux cas, à négocier avec
Hydro-Québec pour des cas de coupures au cours de l'hiver et je pense
que la situation de ces familles-là était absolument
intenable.
Mme Bacon: Vous nous dites aussi que dans certains cas, il y a
des cas précis où des employés d'Hydro-Québec ont
été vraiment intransigeants envers les clients qui avaient des
difficultés. Est-ce que vous pouvez nous citer des cas
précis?
Mme Arsenault: On en a une légion, je pense. Moi, je viens
de la région de Lanaudière, on a eu des... C'est surtout dans les
cas où il y a des familles avec des enfants où, effectivement, il
y a eu des congélateurs perdus, des arrérages de 500 $ ou 600 $
qu'on demande à un travailleur qui vient de perdre son emploi, qui est
en difficulté financière. Là, c'est une coupure qui vient
vraiment dans le mauvais temps et c'est arrivé très
régulièrement qu'on nous a demandé un délai de 24
heures pour que la somme totale soit payée. À ce
moment-là, vous savez, ce sont des gens qui ont des faibles revenus, qui
sont absolument incapables d'emprunter. Souvent, dans leur entourage ou dans
leur famille, il y a aussi des difficultés financières. Alors,
très souvent, ce qu'on fait, c'est un appel
désespéré au diocèse ou au curé de la
paroisse qui, lui, est débordé de plus en plus par d'autres
demandes. Alors, finalement, il y a une coupure et ça prend du temps
avant de trouver... Ils ne remettent pas le courant tant qu'on n'a pas
apporté l'argent, et pas un chèque, c'est de l'argent cash que
ça prend.
M. O'Narey: Par ailleurs, on a demandé à
Hydro-Québec de nous donner de l'information sur la clientèle
qu'elle allait couper, quelles étaient les procédures qui
précédaient la coupure, exactement, dans chaque cas, afin d'avoir
des dossiers qui démontrent quelles interventions elle a fait et quel
était l'impact des coupures de service sur la situation familiale de ces
familles-là. Et elle n'a aucune donnée là-dessus. Elle ne
se préoccupe pas de cette question jusqu'à maintenant. Elle ne
s'en est pas préoccupée du tout. Or, de notre côté,
ce qu'on voit, ce sont des problèmes très graves au niveau de ces
interventions.
Mme Bacon: Votre dernière recommandation concerne
justement la tenue annuelle d'audiences publiques présidées par
un commissaire indépendant pour étudier l'ensemble des projets et
des pratiques d'Hydro-Québec comme les investissements, comme
l'exportation, comme des pratiques commerciales, par exemple. Est-ce que vous
pourriez préciser davantage quel serait le rôle de ce commissaire?
Quel serait, par exemple, son
pouvoir décisionnel? À quel organisme devrait-il se
rapporter?
M. O'Narey: On n'a pas évalué en profondeur quelle
pourrait être la formule la plus avantageuse, mais je pense que la
majorité des entreprises américaines dépendent de
certaines régies, entre autres, pour un ensemble de leurs pratiques. Je
pense que ce n'est pas nécessairement à une régie de
prendre toutes les décisions. Je pense que c'est au gouvernement,
puisque Hydro-Québec est une société d'État, sauf
que je pense qu'il y a certains domaines où une régie aurait
avantage - une forme de régie, avec un commissaire indépendant,
et peut-être plusieurs commissaires, même - à étudier
publiquement l'ensemble de ces projets-là de façon à ce
que les gens puissent, à chaque année, se présenter et
faire valoir leurs points de vue sur le plan de développement de
l'entreprise, les contrats d'exportation, etc., l'ensemble... Finalement, le
problème qu'on a, c'est qu'on a l'impression et on sent depuis quelques
années déjà et depuis longtemps que les consommateurs,
entre autres, n'ont pas un mot à dire vis-à-vis ce
développement-là. Cette année, je pense qu'on était
très satisfaits et c'est pourquoi on est venus à la commission
parce que pour nous, ça manifestait une ouverture intéressante,
mais on pense que ce n'est pas tous les sept ou huit ans qu'on devrait avoir le
droit de s'exprimer sur les plans de développement
d'Hydro-Québec.
Mme Bacon: Je serais tentée de vous dire, et je ne veux
pas vous avoir quand je vous dis ça, mais vous êtes venus ici,
vous vous êtes présentés. Je pense que vous aviez
sûrement confiance que votre message passerait. Et il passe, votre
message, ce matin. Vous pensiez qu'il passerait davantage si ce n'était
pas devant les élus, les gens qui vous représentent?
M. O'Narey: Je pense que dans beaucoup de domaines qui touchent
l'ensemble de la probléma tique énergétique, et surtout
l'électricité, il y a besoin d'avoir, je pense, l'opinion, un
débat plus large au niveau des experts. Parce que, même si, je
pense, on a une certaine connaisance de ce qui se passe au niveau de l'ensemble
de la problématique, nous, pour notre part et je pense aussi pour les
élus comme tels, l'expertise n'est pas nécessairement aussi
partagée que pour ce qui vient des experts. Donc, on pense qu'il y
aurait lieu d'avoir quelque chose de plus large dans ce sens-là.
Mme Bacon: Je suis tentée de vous dire encore une fois:
Est-ce que vous pensez que des experts qui ne font pas de bureau de
comté chaque semaine auraient autant de sensibilité aux
problèmes de la pauvreté, par exemple, ou des gens qui ont des
problèmes comme ceux que vous venez de nous mentionner depuis le
début de votre exposé?
M. O'Narey: Oui
Mme Bacon: Ça serait peut-être différent
comme sensibilité.
M. O'Narey: Ça serait, effectivement, différent, je
pense. Mais je pense que ce sera dans le choix des commissaires ou, en tout
cas, des gens qui seraient représentatifs qu'il faudra faire attention,
mais aussi parce qu'on ne tient pas à ce que ce soit absolument un type
de commission qui ne touche que les problématiques sociales, mais aussi
l'ensemble de la problématique du développement électrique
au Québec. Parce que je pense que ça, ça a un impact
à long terme. Quand on pense au plan de développement
d'Hydro-Québec qui a entraîné des hausses de tarif,
ça va avoir un impact sur les familles à faible revenu. Donc, je
pense qu'on mérite d'étudier davantage l'ensemble de la
problématique pour tenir compte, à l'intérieur de
ça, de la situation au niveau social, des impacts sociaux de ce
développement-là.
Mme Bacon: Je peux vous dire que vous avez bien passé
votre message ce matin quand même...
M. O'Narey: Merci.
Mme Bacon: ..même si nous ne sommes pas des experts.
Oui.
Mme Arsenault: J'aurais un petit mot à ajouter. C'est que
nous sommes très heureux d'être ici ce matin. Mais il faut voir
que, sur tous les mémoires qui vont être présentés -
il y a combien de mémoires qui sont présentés à la
commission parlementaire - il y en a combien qui vont aborder la question de la
pauvreté? S'il y avait une commission itinérante, je suis
certaine que dans toutes les régions du Québec, les gens se
prononceraient là-dessus. C'est très intimidant de
préparer un mémoire et de venir le présenter dans un
protocole comme celui-ci. Et on ne peut pas demander à tous les gens de
toutes les régions, avec des très faibles revenus, des petits
organismes qui vivent à bout de bras avec très peu de ressources
de présenter un mémoire, de le faire d'une façon
rigoureuse avec des chiffres Les chiffres qu'on amène ici, ça
nous a pris beaucoup de travail pour les amener d'une façon rigoureuse -
ils sont vérifiables - puis ensuite de se déplacer à
Québec, avec tous les frais de déplacement que ça suppose
Vous autres, vous jouez dans les 60 000 000 000 $. Nous autres, on joue avec
les 100 $, O.K., les 20 $ et les 100 $. Ça fait que les petits
organismes de la Gaspésie et de l'Abitibi ne viendront pas. Ils ne
viendront pas vous présenter leurs doléances ou leurs
recommandations. S'il y avait une commission
itinérante qui allait écouter le monde dans les
régions, il y aurait beaucoup plus le reflet des préoccupations
de la population.
Mme Bacon: Je pense qu'il faut regarder aussi l'ensemble du
mandat de la commission. C'est une partie, et vous les représentez
très bien, ces gens-là de la Gaspésie, parce que vous avez
quand même des gens un peu partout à travers le Québec qui
vous rejoignent et qui ont les mêmes problèmes que ceux que vous
nous exprimez ce matin. Je dois dire que votre message passe bien. Il est
rigoureux, bien préparé et parle par lui même. Je pense
qu'on n'a qu'à lire votre mémoire pour être
déjà sensibilisés. Imaginez en plus avec l'échange
qu'on peut avoir avec vous. Je pense que ça complète bien ce que
vous nous avez déjà envoyé. Moi, je pense que cette
commission parlementaire était nécessaire et c'est une
première. Il y a longtemps qu'on n'a pas eu ça. Et je pense qu'on
pose quand même des jalons vers peut-être autre chose suivant les
années. En 1990, c'est celle-là. Dans une autre année, ce
sera autre chose. Je vous remercie beaucoup d'être venus.
Le Président (M. Bélanger): Merci, Mme la ministre.
M. le député d'Ungava. (10 h 45)
M. Claveau: Merci, M. le Président. Ça me fait
plaisir, en effet, de vous voir ici, aujourd'hui, pour défendre des
intérêts qui, malheureusement, ne sont peut-être pas assez
mis en évidence lors de commissions parlementaires ou de consultations
publiques. C'est clair que ce n'est pas tout le monde dans notre
société qui a la chance de pouvoir s'acquitter de ses dettes, de
ses factures très facilement. Et c'est bien évident aussi qu'il y
a un certain nombre de nos citoyens qui ont besoin qu'on s'en occupe d'une
façon un peu plus précise si on veut au moins s'assurer qu'ils
puissent maintenir un minimum vital. Et ça, je dis "au moins" parce que
ce n'est pas là notre but non plus. Le but, c'est d'essayer d'avoir une
société la plus juste possible qui permette à tout le
monde de pouvoir vivre à l'aise et de bénéficier de cette
société dite des loisirs que l'on essaie de développer
mais qui, à bien des égards, est une société de
souffrances et de tourmentes pour pas mal de nos concitoyens. Quelques-uns
s'amusent sur le dos de pas mal d'autres, quand on regarde globalement comment
ça fonctionne dans notre société.
Je voudrais aller un petit peu plus loin là, peut-être pas
nécessairement m'attarder à ce qu'il y a dans votre
mémoire, mais regarder un peu plus en fonction du plan de
développement d'Hydro-Québec et de certaines autres
présentations qui nous ont été faites et avoir vos
réflexions là-dessus.
Dans un premier temps, Hydro-Québec nous a parlé, au
moment du dépôt de son projet de plan de développement et
de la commission sur la tarification, d'un fameux programme d'économie
d'énergie de 1 800 000 000 $ qui devrait faire sauver quelque chose
comme 2500 mégawatts de puissance installée. Des beaux termes et
des beaux chiffres, mais en réalité, pour vous autres, pour les
gens avec qui vous travaillez, comment ça peut se traduire? Quel impact,
quelle importance ça peut avoir d'acheter des pommeaux de douche fait en
Ontario, subventionnés par HydroQuébec ou, éventuellement,
de pouvoir avoir accès à quelques autres gadgets? J'ai
l'impression que ce n'est probablement pas les gens avec qui vous travaillez
qui vont bénéficier le plus des "timer" pour les "block heater"
comme on le disait hier, pour parler en français. Tous ces
programmes-là, ça va représenter quoi, pour les bas
revenus que vous représentez?
M. O'Narey: Comme je le mentionnais tantôt, je pense qu'on
n'est pas contre ce type d'outils, mais je ne pense pas que ce sont les
éléments majeurs qui vont venir en aide aux familles. Comme je le
mentionnais tantôt, ce qui est le plus coûteux
généralement, ce sont les coûts de chauffage. On sait que
l'implantation du chauffage électrique est rendue très
très large maintenant et le fait que le problème, puisqu'il se
trouve au niveau du chauffage pour de nombreuses familles, puisqu'il se trouve
aussi, très souvent, au niveau de locataires, on voit difficilement
comment les programmes d'économie d'énergie vont permettre de
transmettre des économies directement aux locataires qui sont souvent
des familles à plus faible revenu parce que le propriétaire n'a
pas nécessairement avantage à diminuer les coûts de
chauffage du locataire qui va rester au-dessus de lui. Donc,
l'élément majeur sur lequel on devrait s'attarder, en termes de
programmes d'économie d'énergie, pour viser ces
familles-là, c'est davantage de ce côté-là qu'il
faudrait se tourner plutôt que vers des gadgets qui,
nécessairement, vont permettre certaines économies, mais pas des
économies importantes. Ce n'est pas évident non plus que les gens
vont avoir même le petit montant qu'ils vont devoir verser quand
même pour acheter ce genre d'appareils là. Et, même s'ils
l'ont, ça va être des économies mineures, pour nous, en
tout cas.
M. Claveau: Dans le fond, ce n'est pas un programme
d'économie d'énergie pour les petits consommateurs
d'énergie qui auraient probablement avantage à restreindre, eux,
leur facture d'électricité pour pouvoir bénéficier
le mieux possible de l'énergie disponible par rapport à leur
budget. J'ai l'impression personnellement - en tout cas, c'est une impression
qui est très personnelle - que ce n'est pas la personne qui pourrait
éventuellement s'acheter le pommeau de douche en question qui va
l'acheter parce qu'Hydro-Québec lui donne 15 $. Tu sais, si
ça
ne fait pas partie de son décor de chambre de bain, il y a bien
des chances que ce n'est pas les 15 $ d'Hydro-Québec et les quelques
sous économisés par mois qui vont faire en sorte qu'elle va
gâcher l'allure générale de sa baignoire.
M. O'Narey: Comme je le disais tantôt, même si c'est
un petit montant de 15 $, souvent pour certaines familles, entre autres, quand
arrive la fin de mois, on est obligé de couper sur la nourriture, on va
préférer investir l'argent sur la nourriture que sur le fameux
pommeau de douche, alors que le problème principal de la consommation
d'énergie, c'est le chauffage très souvent. Donc, de ce
côté-là, c'est assez évident, et Hydro-Québec
l'admet, que ça va être difficile de pouvoir intervenir et c'est
là-dessus qu'on doit se pencher.
M. Claveau: O.K. pour ça. Est-ce que vous êtes
capable de déterminer la part ou la responsabilité des comptes
d'énergie, les comptes d'Hydro-Québec dans les faillites
personnelles? Est-ce qu'il y a beaucoup de faillites personnelles dans
lesquelles le compte d'Hydro-Québec est un élément
important?
Mme Arsenault: Je pense que dans plusieurs faillites
personnelles, effectivement, il y a un compte d'Hydro-Québec. Il n'est
pas nécessairement déterminant, mais la plupart... Très
souvent, il y a un compte d'Hydro-Québec. Moi, j'aimerais un peu
questionner Hydro-Québec sur son plan d'efficacité
énergétique. Je trouve qu'elle est un petit peu rapide à
pointer le consommateur domestique comme énergivore et à le
culpabiliser, alors qu'on nous a, pendant des années, incités
à consommer. "Ça vaut le coût", ça vaut le
coût. . Je me souviens des campagnes de publicité avec lesquelles
on nous a cassé les oreilles là-dessus: "Ça vaut le
coût" et consommez, consommez, c'est inépuisable. Et là,
maintenant, on vient nous culpabiliser, nous dire: Vous consommez bien trop,
vous prenez trop d'eau chaude. Mais, ce n'est pas seulement le consommateur
domestique qui consomme. C'est aussi les grandes entreprises. Est-ce qu'il y a
des programmes d'efficacité énergétique pour les
alumineries et pour les grosses entreprises énergivores? Est-ce qu'il y
a des programmes pour inciter ces compagnies-là à être
moins Parce que je n'ai rien vu de ça dans les projets. Oui, il y en a
Parce que ce n'est pas seulement le petit consommateur domestique qui s'est
fait inciter, depuis plusieurs années, à consommer. Tout le monde
au Québec, finalement, a eu l'impression que c'était
inépuisable, que c'était une richesse naturelle qu'on pouvait
prendre sans se questionner. Maintenant, on commence - il est temps d'ailleurs
- à se questionner là-dessus. Mais ce n'est pas celui qui prend
sa douche à l'eau chaude qui fait qu'Hydro-Québec doit
répondre à une demande tout à fait insurmontable.
M. Claveau: Faramineuse Juste une dernière question,
peut-être, avant de passer à l'alternance. En page 14 de votre
mémoire, vous parlez de pertes. On ne parle même pas de comptes en
retard, là. Vous dites: Les consommateurs domestiques ne sont
responsables que de 12 700 000 $ de pertes, contre 8 000 000 $ qui viennent des
secteurs général et industriel, entre autres. Ces
pertes-là, ce sont définitivement des comptes qui ne seront
jamais recouvrés par Hydro-Québec, à la suite de
faillites. Je suppose que c'est la première raison.
M. O'Narey: Ce n'est pas nécessairement la première
raison. La première raison, c'est aussi des comptes finaux qui ne sont
jamais recouvrés, qui ne sont pas nécessairement envoyés
en faillite. C'est-à-dire que les gens ne vont pas nécessairement
en faillite, mais deviennent impossibles à retrouver. On perd leur
trace. Donc, ça devient, après un certain temps, des comptes qui
sont passés en perte.
M. Claveau: Vous me dites quelque chose, vous, là. On m'a
déjà dit, à Hydro Québec, qu'une des raisons
pourquoi, entre autres, on devait interrompre l'électricité pour
ne pas prendre de risques, c'est parce que les gens déménagent
assez rapidement. En ville, le 1er juillet, on sait ce que c'est. Et puis,
quand les comptes ne sont pas payés, on met ça sur le... On
renouvelle, on se réenregistre à HydroQuébec au nom de sa
femme, de son beau-frère, de son petit gars de neuf ans, et tout ce que
vous voulez Est-ce que c'est vrai, ça9
M. O'Narey: Je pense que, dans certains cas, ça doit
arriver, effectivement. Mais il faut se demander: Pourquoi est-ce que ça
se produit de cette manière-là9 Je pense qu'un des
sentiments généralisés, au niveau de la population du
Québec, surtout au niveau des gens à plus faible revenu, c'est
qu'Hydro-Québec est très intransigeante au niveau de la
négociation pour des ententes de paiements. Et les gens ne s'adressent
pas à Hydro-Québec pour arriver à obtenir des ententes,
parce qu'ils savent, très souvent, comment ils vont être
reçus au niveau de la négociation d'ententes. Donc, ils ont tout
avantage, devant une situation où on va leur présenter: Vous avez
une facture, vous avez deux paiements à faire d'ici deux semaines, et
d'ici un mois, pour payer votre 500 $ d'arrérages... Devant cette
situation-là, les gens savent qu'ils ne pourront pas le faire. Donc, la
seule porte de sortie, pour eux, c'est de disparaître. Alors que s'il y
avait, effectivement, des mécanismes qui permettraient de voir le bout
du tunnel, les gens seraient davantage portés à essayer de
régler leur situation. Mais je ne pense pas que ce soit la
majorité des consommateurs, des clients, qui
disparaissent dans le décor. Mais ceux qui le font, c'est parce
qu'il y a une tradition vis-à-vis Hydro Québec qui s'est
établie au niveau de la négociation, et le fait que
Hydro-Québec est toujours juge et partie, donc, ils ne réussiront
jamais à faire entendre leur point de vue.
M. Claveau: Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la
députée de Terrebonne.
Une voix: Est-ce qu'il nous reste du temps pour traiter...
Le Président (M. Bélanger): Deux minutes et
demie.
M. Claveau: Parce qu'on pourrait procéder par
alternance.
Le Président (M. Bélanger): Bien, c'est parce qu'on
s'était entendus pour marcher par blocs, là, c'est ce qu'on avait
fait depuis le début. De toute façon, deux minutes et demie,
ça laisse le temps à une question.
M. Claveau: On ne marche plus par bloc, là. Ha, ha,
ha!
Le Président (M. Bélanger): Bien, c'est ça.
Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Moi aussi, je tiens
à vous féliciter pour la qualité de votre mémoire.
Et je pense que ce que vous ressortez, qui est essentiel et qu'il ne faut pas
oublier, dans tout ce débat, c'est que, comme vous le citez en
conclusion, l'électricité est un service esssentiel. Et on ne
peut donc le traiter de la même manière qu'un autre service, que
ce soit une dette à une entreprise privée, ou même à
Bell, qui est un service utilitaire important mais non essentiel.
Lorsqu'on parle de recouvrement, il est bien évident que,
souvent, les recouvrements vont se faire l'hiver parce que, justement, on nous
dit que c'est le meilleur moyen de les obliger à payer, puisque
l'été, ça dérange beaucoup moins. Quand vous parlez
de versements égaux, j'aimerais que vous reveniez là-dessus,
parce qu'il est évident que les petits salariés et les
bénéficiaires de l'aide sociale, ou les chômeurs, ont des
montants fixes de revenu, alors que l'électricité varie. Est-ce
que vous pouvez revenir un petit peu là-dessus?
M. O'Narey: Nous, ce dont on s'est rendu compte, c'est qu'au
niveau de la planification du budget d'une famille, quelle qu'elle soit, il y a
tout avantage à devoir rencontrer des montants fixes mensuellement.
Effectivement, les revenus, lorsqu'on les calcule pour une famille, c'est sur
une base mensuelle qu'on voit entrer les sommes de revenu. Et les
dépenses, si elles sont étalées de façon
égale de mois en mois, c'est très avantageux, et tous les
consommateurs en conviennent. Alors, d'où le fait que les programmes de
versements égaux, qu'Hydro-Québec a mis en place il y a quelques
années et qui permettent d'étaler la facture à un montant
fixe mensuellement, sont très avantageux. Le problème, c'est que
ces programmes ne sont pas suffisamment connus et ne sont pas suffisamment
développés. Parce que même pour les gens qui voulaient
avoir accès à ce service, jusqu'à maintenant,
c'était très difficile de communiquer seulement avec
Hydro-Québec pour demander d'obtenir ce service. Donc, il faut le
connaître et il faut y avoir accès facilement.
Hydro-Québec a commencé à mettre en place un
programme qui vise à augmenter ce nombre-là mais nous, on trouve
qu'il est nettement insuffisant. On vise, d'ici quelques années, 30 % de
la clientèle qui bénéficierait du programme de versements
égaux, et on pense faire une promotion par clientèle restreinte,
lentement. Nous, ce qu'on dit, c'est de développer tous les moyens qu'il
faut pour que ça se fasse rapidement, que tout le monde puisse avoir
accès a ce service-là rapidement et que ce soit beaucoup mieux
connu. Ça réglerait déjà une partie de certains
problèmes.
Mme Caron: Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable, justement, que
ça soit appliqué beaucoup plus rapidement pour les familles qui
ont des difficultés?
M. O'Narey: Oui, ça devrait l'être. Ça l'est
dans certains cas, mais ça devrait l'être de façon
systématique et ça devrait permettre même actuellement...
On devrait permettre même aux gens qui ont des arrérages d'inclure
les arrérages dans le mode de versements égaux, ce qui ferait un
montant mensuel fixe de façon régulière et ça,
ça devrait être accessible partout. Ce qui n'est pas le cas
actuellement, parce que dans beaucoup de bureaux, quand on vient pour
négocier ce genre d'arrangements là, la réponse est
non.
Mme Caron: Parmi vos recommandations, si on devait retenir les
plus importantes, celles qui permettraient vraiment de réduire au
maximum ce problème vécu par les citoyens, quelles seraient les
plus importantes?
M. O'Narey: Je pense que ce qu'on mentionnait dans le document
c'est, je pense, une question d'aide financière pour certaines
catégories de famille à très faible revenu, qui ont des
coûts de loyer et des coûts d'énergie très
élevés. D'autre part, je pense qu'il doit y avoir maintenant un
arbitre impartial qui permette de juger des ententes de paiement. Que les
coupures de
service n'existent plus durant l'hiver, de façon
générale, et à ce moment-là, qu'on utilise les
recours légaux qui existent pour recouvrer les comptes au niveau des
consommateurs qui seraient simplement négligents.
Mme Caron: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Merci, madame. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. D'abord, je
voudrais féliciter les participants pour la qualité de leur
mémoire. Lorsque l'on parle des coûts reliés à
l'énergie et de ce que ça représente dans l'enveloppe des
familles pauvres, en difficulté ou bénéficiaires de l'aide
sociale, j'aimerais savoir si vous avez examiné ce que
représentait, par rapport au coût de l'énergie, le fait
qu'on n'indexe plus les allocations de bien être social à tous les
trois mois, comparativement à ce qui se faisait en 1985-1986. On ne le
fait plus qu'une fois par année, alors que les augmentations,
particulièrement de la note d'électricité... On va
être à quelque chose comme 25 %, en janvier 1991. Qu'est-ce que
ça représente pour ces familles là. le fait que
l'indexation ne va suivre seulement en janvier 1992? (11 heures)
Mme Arsenault: C'est évident que quand on est à
revenu très bas comme ça, la moindre somme de 5 $ compte.
Ça compte beaucoup. Alors, pour quelqu'un qui regarde ça sur le
papier, ça peut paraître insignifiant ces indexations-là,
ce ne sont pas des montants astronomiques. Mais pour la personne qui les
reçoit, si c'est 30 $ par mois, ça fait une très grosse
différence, 30 $ de plus ou de moins dans le mois, et au niveau de la
facturation aussi, ça fait une très grosse différence.
Quand on pense qu'il y a de très nombreux logements, admettons quatre
pièces et demie, ce n'est pas grand, qui payent 100 $ par mois
d'électricité. 100 $ par mois, sur un revenu de 700 $ par mois,
c'est énorme. Parce que le loyer n'est pas payé, encore, et on
n'a pas mangé. Alors, imaginez la proportion énorme, rien que
pour la consommation courante, 100 $ par mois, pour se chauffer dans un quatre
pièces, c'est incroyable.
M. O'Narey: Je voudrais ajouter que les données qu'on
citait tantôt, entre 1969 et aujourd'hui, les données disponibles
sur l'étalement des dépenses des familles, quand on regarde au
niveau de Statistique Canada, ce dont on se rend compte, c'est que le poste
logement a augmenté de façon très significative, passant
de 25 % à presque 50 % du total des dépenses de la famille comme
telle. Ce qu'on voit régresser, d'autre part, ce sont les
dépenses au niveau de l'alimentation. Quand on regarde, à
Montréal, le développement des banques alimentaires, on comprend
que le besoin est là, actuellement.
Parce que c'est le poste de dépense le plus compressible. Donc,
lorsqu'on a affaire à des dépenses fixes - ce que sont le loyer,
l'électricité - qui augmentent, et les revenus qui n'augmentent
pas simultanément, il ne reste qu'une solution, c'est de compresser les
dépenses où elles sont compressables. Et c'est l'alimentation qui
en écope. On se retrouve avec des problèmes de santé pour
ces familles-là, des problèmes qui se développent
davantage et qui nécessitent des investissements au niveau de la
santé pour répondre à ces besoins-là.
Mme Blackburn: Vous faites référence à une
enquête qui a été réalisée par
Hydro-Québec, un sondage d'opinion publique, à savoir, est-ce
qu'on doit ou non couper l'électricité dans les mois d'hiver, et
qui conclurait que 86 % des Québécois sont contre les coupures en
hiver. Qu'est-ce qui explique qu'on poursuive cette politique?
Mme Arsenault: Je pense que c'est simplement la mentalité
de l'entreprise qui fait ça, le pouvoir de couper, le statut de juge et
partie qui fait qu'Hydro-Québec se le permet. Peut-être avec plus
de circonspection, en certains cas. Mais quand même, il y a 4000
familles, et ce ne sont pas des négligents. Quand on est rendu à
se faire couper le courant, si vous n'êtes rien qu'un négligent,
vous les trouvez les 600 $. Si vous êtes à très faible
revenu, vous ne les trouvez pas.
Mme Blackburn: Est-ce que vous avez eu connaissance du temps que
dure la coupure? Une journée, deux jours; 24 heures, 48 heures? Est-ce
que vous avez des informations là-dessus?
M. O'Narey: On a des informations. Je ne les ai pas avec moi.
Mais ce dont on se rend compte, c'est que dans les deux ou trois premiers
jours, il y a presque 50 % des gens qui vont trouver l'argent quelque part pour
payer la facture. Donc, la raison pour laquelle HydroQuébec maintient
cette politique, c'est parce que c'est très efficace. C'est la seule
raison pour laquelle Hydro-Québec se permet de maintenir les coupures de
service. C'est le moyen le plus efficace pour recouvrer les comptes. Mais ce
qu'on ne voit pas derrière ces chiffres, c'est ce que les familles ont
dû faire pour trouver l'argent. Donc, qui a payé la facture, en
dernier lieu. Est-ce que ce sont les communautés religieuses? Est ce que
ce sont des amis de la famille? À quel prix ont-ils dû... Quel
sacrifice ont-ils dû faire pour réussir à payer? Dans
certains cas, ils se sont adressés au CLSC, ils se sont adressés
au bureau d'aide juridique, ils sont allés voir les bureaux de
comté des députés pour obtenir de l'aide, à ce
niveau-là. Donc, c'est un moyen très efficace et c'est la seule
raison - pour moi, en tout cas - qui explique qu'on
maintienne ce processus; tout comme, par exemple, quand on voyait les
escompteurs d'impôts, il y a quelques années, qui chargeaient des
taux d'intérêt de 63 %. Tant que personne ne leur a dit: C'est
trop, ça n'a pas d'allure, ils ont continué. Alors, tant qu'on ne
dira pas à HydroQuébec: Ça suffit, ce moyen, à
cause des impacts sociaux, je pense qu'ils vont continuer.
Le Président (M. Bélanger): II reste 30 secondes,
si vous voulez faire très rapidement.
M. Bourdon: Est-ce que la Fédération des ACEF ne
trouve pas, comme moi, contradictoire qu'on ait adopté, une nuit de la
semaine passée, une loi mettant fin aux grèves
d'Hydro-Québec, sous prétexte qu'on voulait s'assurer qu'il y ait
continuité du courant l'hiver prochain, alors qu'Hydro-Québec
coupe 26 000 familles chaque année, dont 4000 l'hiver? Je vous pose la
question: Est-ce que vous pensez que la ministre devrait intervenir pour
qu'Hydro-Québec n'ait pas le droit de "lock-out" vis-à-vis des
consommateurs, l'hiver, en tout cas?
M. O'Narey: Pour nous, ça a toujours été,
effectivement, une contradiction. Dans la mesure où on considère
- tous les ministres qui se sont succédé, et je pense que Mme
Bacon l'a affirmé, avec justesse - que l'électricité,
c'est un service essentiel. Dans ce sens, je pense que des actions doivent
être prises pour maintenir l'accès. Je pense que, peu importe la
situation... Nous, dans notre mémoire, on souligne qu'on ne devrait pas
tenir compte de la situation financière des familles pour leur garantir
l'accès d'un service aussi essentiel. Donc, je pense que, dans le
même sens, des mesures doivent être prises.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, Mme la
ministre, il vous reste deux minutes.
Mme Bacon: Peut-être une dernière question, M. le
Président. Il y a une période de 120 jours entre la
journée où on informe quelqu'un qui n'a pas payé ses
comptes et la coupure possible. Même si, à un moment donné,
on sait que c'est un assisté social, il y a des arrangements, souvent,
qui peuvent être pris avec le ministère. Pendant cette
période de 120 jours, est-ce que c'est là qu'on vous met à
contribution, à ce moment-là, et qui vous fait dire qu'on aurait
peut-être besoin d'un autre organisme qui devrait voir à ces
problèmes-là?
M. O'Narey: Oui, effectivement, c'est là qu'on nous met
à contribution. Nous-mêmes, ce qu'on constate, c'est que... On
demande même à Hydro-Québec d'accélérer le
processus, pour pouvoir intervenir plus rapidement et de façon plus
personnalisée, au niveau des gens qui ont des problèmes de
recouvrement.
Mme Bacon: Trouvez-vous que 120 jours, c'est trop long?
M. O'Narey: Oui, effectivement. Dans certains cas, même les
120 jours ne sont pas nécessairement toujours appliqués. On se
retrouve souvent devant des situations où les factures arrivent six mois
après l'inscription du client. Donc, il y a souvent d'énormes
délais entre le moment où on est facturé et le moment
où Hydro-Québec intervient pour trouver une solution. Et
même lorsque les clients veulent prendre des arrangements, souvent, ils
ont de la difficulté à rejoindre l'entreprise. Et souvent, comme
le compte, lorsqu'il arrive, est très élevé, et que les
possibilités d'ententes sont restreintes, les gens
préfèrent ne pas contacter HydroQuébec.
Donc, je pense que ça demande tout un changement au niveau
global, même au niveau de l'entreprise, pour accélérer ces
interventions. Mais, accélérer ces interventions, pour nous,
ça ne veut pas dire d'aller couper plus vite. Ça veut dire de
mettre les gens devant le fait accompli de leur facture plus rapidement, mais
d'avoir beaucoup plus de souplesse au niveau du recouvrement comme tel.
Mme Bacon: Est-ce que c'est pour ça que vous nous
suggérez, dans votre mémoire, un programme de consultation
budgétaire, qui devrait exister au gouvernement, par exemple, et que le
gouvernement pourrait développer? C'est dans ce sens-là que vous
voulez le dire?
M. O'Narey: Je pense qu'effectivement, dans certains cas, pour
certaines familles, il y a une nécessité d'avoir une meilleure
planification financière, ce qui permettrait de solutionner certains
cas, au niveau du recouvrement à Hydro-Québec et aussi à
d'autres niveaux, que ce soit pour récupérer des arrérages
dans d'autres domaines. Mais je pense qu'il y a une certaine catégorie
de gens qui ont besoin, dans certains cas, d'une meilleure planification
financière. Et je pense que ce n'est pas à HydroQuébec
à s'occuper de voir comment les familles gèrent leur budget,
même si ce serait intéressant pour eux de le voir pour pouvoir
accepter les ententes. Mais je ne pense que ce soit à HydroQuébec
de le faire. Je pense qu'il doit y avoir quelqu'un de neutre, quelque part, qui
puisse évaluer la situation financière de la personne et la
remettre en contact avec Hydro-Québec, ou avec le créancier en
question, pour négocier directement.
Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le
député d'Ungava, si vous voulez remercier nos invités.
M. Claveau: Ça me fait plaisir de vous remercier de votre
présentation. Je souhaite que
vous ne prêchiez pas dans le désert et qu'un jour on
entende les revendications légitimes que vous faites, au nom de
l'ensemble des moins fortunés que vous représentez. Merci de
votre présentation.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Bacon: Je voudrais dire que, même si je ne suis pas une
spécialiste, j'ai apprécié votre mémoire et j'ai
apprécié le dialogue que nous avons eu aujourd'hui. Je dois dire
que chacun des députés qui siègent ici autour de cette
table, de quelque côté qu'il soit, entend les mêmes choses
dans son bureau de comté. C'est ce qui nous ramène, justement,
à la dure réalité que doivent vivre certaines personnes au
Québec, et qui nous ramène aussi à être plus
pratiques dans les gestes que nous avons à poser. C'est pour ça
que cette commission est ici. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, la
commission de l'économie et du travail... Excusez, j'ai toujours en
tête mon ancienne commission. Alors, la commission de l'économie
et du travail remercie la Fédération des ACEF pour sa
présentation et sa participation à ses travaux et invite à
la table des témoins l'Association des manufacturiers canadiens,
division du Québec, qui sera représentée par MM. Richard
Le Hir, Richard Champagne, Bob Murray, Barkev Setrakian et Alberto Tertzi.
Excusez, mais ma maîtrise des langues étrangères... Ha, ha,
ha!
Alors, bonjour à ces messieurs les représentants de
l'Association des manufacturiers canadiens, division du Québec. Je vous
souhaite la bienvenue à la commission parlementaire et je vous explique
un peu nos règles de fonctionnement. Vous avez vingt minutes ferme pour
la présentation de votre mémoire et, par la suite, il y a une
période de discussions avec les parle mentaires. Avant de commencer, je
vous prierais d'identifier votre porte-parole, de présenter votre
équipe et de bien vouloir procéder à la
présentation de votre mémoire. Je vous écoute.
Association des manufacturiers canadiens, division du
Québec
M. Le Hir (Richard): Bonjour. Alors, je me présente:
Richard Le Hir, vice-président-directeur général de
l'Association des manufacturiers canadiens, division du Québec. Vous
avez mentionné que nous devions être accompagnés d'une
délégation. Malheureusement, certains de nos membres ont
été retenus par leurs propres affaires et n'ont pu se
libérer.
Je peux cependant compter sur la présence de M. Barkev Setrakian,
de IBM Canada, qui a été l'un des artisans du mémoire que
vous avez devant vous.
L'Association des manufacturiers canadiens existe depuis 1871. Elle a
été formée pour promouvoir et défendre les
intérêts des manufacturiers. Elle représente plus de 3000
membres et, au Québec, ceux-ci fournissent de l'emploi à 70 % des
employés du secteur manufacturier.
Alors, s'il est une chose que les historiens retiendront de la
période dans laquelle nous vivons, c'est bien la rapidité avec
laquelle les changements majeurs ont pu survenir, parfois sans prévenir,
et le phénomène d'accélération du rythme de
changements auquel on aura assisté en cette fin de XXe
siècle.
En tout temps et en toute circonstance, la gestion du changement a
représenté un défi de taille sur lequel sont venus se
briser les espoirs de collectivités entières, ou bien se sont
bâtis des succès qui résistent solidement à
l'épreuve du temps et trouvent même le moyen de prospérer
avec lui.
Le Québec n'échappe évidemment pas à ce
tourbillon de changements qui agite le monde, et il s'agit de s'assurer qu'il
sortira de cette épisode de son histoire grandi et enrichi, plutôt
que diminué et appauvri.
C'est pourquoi l'Association des manufacturiers canadiens accorde autant
d'importance au débat que vous avez ouvert sur les choix
énergétiques du Québec. Avec
l'hydroélectricité, nous disposons d'un atout majeur dont les
industriels ont largement bénéficié dans le passé
et dont toute la collectivité, également, a
bénéficié. Et dans le contexte d'ouverture des
marchés internationaux, de libre-échange et de concurrence
accrue, cet atout industriel revêt maintenant une importance
stratégique qu'il convient d'utiliser de façon à en
maximiser l'impact et les retombées.
Le Québec se doit donc d'établir une politique
énergétique qui exploitera pleinement tout son potentiel de
développement économique, en mettant à contribution tous
les avantages structurels et conjoncturels qu'il possède au chapitre de
l'énergie.
L'hydroélectricité est indéniablement la pierre
angulaire de cette poltique et le rôle, le développement et la
performance d'Hydro-Québec deviennent critiques
Historiquement, la mise en valeur du potentiel hydroélectrique
québécois a entraîné directement l'apparition et le
développement de firmes d'ingénieurs-conseils
spécialisées dans la conception et la réalisation de
grands projets de construction et d'aménagement, et également de
toute l'industrie du matériel électrique, des câbles et des
turbines
Aujourd'hui, non seulement cinq des huit plus grandes entreprises
mondiales de production d'appareillage électrique ont une filiale ou un
établissement au Québec, mais la gestion des projets
hydroélectriques a permis aux firmes Lavalin et SNC de devenir les deux
premières entreprises d'ingénieurs-conseils au Canada et elles se
retrouvent parmi les dix plus grandes entreprises de ce genre dans le
monde.
Le développement du potentiel hydroélectrique n'a pas eu
pour seul effet de créer des industries d'appareillage électrique
et des firmes d'ingénieurs-conseils. Certaines entreprises grandes
consommatrices d'énergie, notamment dans les secteurs de l'aluminerie,
de la fonte et de l'affinage, ont été attirées par la
disponibilité, la fiabilité et le coût avantageux de
l'électricité au Québec. Les manufacturiers
déjà installés dans la province ont évidemment
bénéficié des mêmes avantages.
Cependant, il y a lieu de se demander si les avantages comparatifs qui
ont amené ce développement économique sont encore
évidents aujourd'hui. Hydro-Québec éprouve de
sérieux problèmes de fiabilité de réseau, à
l'origine desquels on retrouve des choix technologiques et des politiques
d'entretien discutables. Avec comme résultat que les interrruptions de
service que nous connaissons depuis quelques années coûtent
extrêmement cher à l'industrie. De plus, la faible
productivité actuelle de la main-d'oeuvre et l'augmentation des charges
d'exploitation d'Hy-dro-Québec constituent des facteurs qui ont un
impact négatif sur les prix de l'électricité.
Le contexte économique québécois actuel et la
compétition toujours grandissante que nos entreprises doivent affronter
mettent encore plus d'emphase sur la nécessité pour
Hydro-Québec d'être une entreprise extrêmement performante.
Il ne suffit pas qu'Hydro-Québec soit relativement compétitive.
Elle doit devenir, à nouveau, le standard d'excellence du savoir-faire
québécois. La position concurrentielle du Québec en
dépend.
La situation actuelle nous place devant un certain dilemme. D'une part,
il est devenu nécessaire de devancer certains projets sans lesquels la
demande d'énergie et de puissance de la fin de la décennie
risquerait de ne pas être satisfaite. D'autre part, il faut se demander
s'il est raisonnable, compte tenu des problèmes majeurs auxquels
Hydro-Québec doit faire face, d'accepter dans sa totalité et sans
réserve un plan de développement qui fait appel à des
investissements de l'ordre de 60 000 000 000 $ en dix ans.
Une analyse du contexte énergétique
québécois, des missions distinctes et de la structure
organisationnelle d'Hydro-Québec, de la politique tarifaire actuelle, du
plan de développement proposé et du rôle que pourrait jouer
la recherche et le développement devrait contribuer à
résoudre ce dilemme.
Nous n'avons pas l'intention d'entreprendre des analyses
économiques et géopolitiques exhaustives dans le but de faire des
prévisions précises qui, comme nous le savons, sont souvent loin
de la réalité. Nous examinerons simplement les tendances
générales de prix et de demande d'énergie, de
manière à situer le contexte énergétique
québécois à court, à moyen et, dans la mesure du
possible, à long terme.
(11 h 15)
D'abord, en ce qui concerne le pétrole, plusieurs études
ont été conduites dans le but d'établir des
scénarios de prix et de demande. Toutes s'entendent pour dire que
l'instabilité est la caractéristique principale du marché
pétrolier à court terme. On s'entend également pour dire
qu'à moyen terme, le surplus de capacité installée de
production devrait diminuer graduellement, si l'augmentation tendancielle de la
demande mondiale se maintient et si les pays de i'OPEP réussissent
à garder une certaine discipline. Le prix du brut international devrait
donc augmenter graduellement à moyen terme. Cependant, nul ne peut
prétendre que les prix ne seront pas sujets à d'importantes
fluctuations.
À long terme, on semble également s'entendre pour dire
qu'au Québec, le taux d'augmentation de la consommation de
pétrole sera positif, mais inférieur au taux d'augmentation de la
consommation énergétique totale. Nous consommerons donc plus de
pétrole, mais la part du marché occupée par celui-ci
devrait diminuer au profit du gaz naturel et de
l'électricité.
Dans ce contexte, quelle pourrait être la politique
énergétique québécoise pour le pétrole?
L'approvisionnement, tout d'abord. Le Québec n'a, au mieux, qu'une
incidence très marginale sur le marché international du
pétrole. Il doit donc profiter de la présence sur ses
marchés de très grandes multinationales intégrées
qui lui garantissent l'accès au pétrole nécessaire
à l'alimentation de leurs installations de raffinage et de leurs
réseaux de distribution et de marketing, dans lesquels elles ont fait un
investissement considérable et qu'elles doivent alimenter pour
rentabiliser. Elles ont donc un intérêt direct à maintenir
notre approvisionnement et elles sont en position de le faire.
Au plan géostratégique, cette réalité ne
nous empêche pas de pouvoir profiter d'un avantage comparatif qui
pourrait être intéressant. En effet, le Québec pourrait
prendre avantage de sa position géostratégique pour recevoir du
brut importé de qualité et ensuite utiliser le système
d'oléoduc déjà en place pour le distribuer à un
prix concurrentiel dans les États du Nord-Est américain et en
Ontario. Selon le niveau d'intégration des marchés amené
par le libre-échange, cet avantage pourrait devenir significatif,
à la condition qu'on se dote d'installations portuaires
adéquates. Le gouvernement devrait donc en tenir compte dans sa
politique énergétique.
En ce qui concerne maintenant le gaz, la capacité d'offre, le
potentiel d'exportation et le transport sont les facteurs à
considérer pour situer le gaz dans le contexte énergétique
québécois.
Pour ce qui est de la capacité de l'offre, il existe des surplus
considérables de capacité de production au Canada. De plus, les
dernières analyses indiquent que les réserves de gaz au Canada
sont beaucoup plus importantes que
prévues. La capacité d'offre est donc très
considérable, et devrait se maintenir à long terme.
Le potentiel d'exportation est évidemment un facteur qu'il faut
examiner pour ses effets sur les prix et sur la sécurité
d'approvisionnement au Québec. Bien que le potentiel d'exporta tion vers
les États Unis soit important, on estime que les exportations
canadiennes augmenteront de 1 000 000 000 000 de pieds cubes au cours de la
prochaine décennie. On prévoit néanmoins que l'offre du
gaz devrait suffire à répondre aux exigences intérieures
et permettre de maintenir le prix à un niveau compétitif. En
effet, les réserves établies représentent
l'équivalent d'approximativement trente ans de produc-tion courante, en
incluant les exportations, et pourraient dépasser cinquante ans si
l'ampleur des réserves probables se confirme.
La question du transport est évidemment extrêmement
importante, comme le Québec doit, pour l'instant, compter sur le gaz de
l'Ouest canadien pour s'approvisionner. À ce chapitre, le Québec
doit s'assurer que la méthode de tarification employée par les
compagnies de transport ne le pénalise pas indûment en raison de
sa position en fin de pipeline. Nous incitons donc le gouvernement à
prendre les mesures nécessaires pour convaincre ces compagnies de baser
leur tarif en fonction de leur coût moyen, et non en fonction de leur
coût marginal.
Le gaz, en raison de sa disponibilité, de son prix, de son
efficacité calorifique, de ses avantages au plan environnemental et de
ses applications technologiques intéressantes, pourrait jouer un
rôle important dans le contexte énergétique
québécois et dans le développement économique de la
province.
En ce qui concerne maintenant l'électricité, c'est
indéniablement la source énergétique la plus importante au
Québec. Contrairement aux deux sources d'énergie
mentionnées plus tôt, l'hydroélectricité est la
seule que le Québec peut véritablement contrôler. Si la
demande en pétrole et en gaz va augmenter au Québec, c'est la
demande en électricité qui connaîtra la plus forte
augmentation et qui jouera te rôle le plus important dans le contexte
énergétique de la province. La part du marché qu'occupera
l'électricité à l'horizon 2010 est estimée a plus
de 45 %.
En effet, si l'on s'en remet aux projections d'Hydro-Québec, la
demande brute en électricité devrait croître de 2,6 %, en
moyenne, pour atteindre près de 200 térawattheures en 2006 Des
études indépendantes suggèrent que ce scénario de
croissance est peut-être trop faible. À cet égard, il est
important de noter les amplitudes qui existent entre les différents
scénarios et la conséquence qu'elles peuvent avoir sur
l'approvisionnement disponible à un moment donné.
En vertu du contexte énergétique que nous venons de
décrire, il est absolument crucial que le Québec développe
son potentiel hydroélectrique. Il doit cependant s'assurer que ce
développement se fasse le plus économique possible de
manière à en faire profiter avant tout l'ensemble des
Québécois. La question qui se pose maintenant est celle de savoir
si Hydro-Québec, dans sa forme actuelle, compte tenu de sa performance,
des problèmes internes auxquelles elle doit faire face et du plan de
développement qu'elle propose, est en mesure de relever le
défi.
Hydro-Québec doit présentement poursuivre
simultanément plusieurs missions distinctes On lui demande d'être
à la fois un gestionnaire de grands projets, un producteur, un
transporteur, un distributeur et même un chercheur. Par surcroît,
on lui demande également d'être un outil de politique sociale,
comme en témoigne le degré élevé d'interfinancement
qui fait que la PME subventionne les tarifs domestiques.
Est-il donc surprenant qu Hydro Québec soit devenue une
bureaucratie lourde et lente, qui éprouve des difficultés
à faire les arbitrages nécessaires entre les différentes
missions qui lui sont confiées?
En vue des problèmes majeurs qui se sont développés
depuis les dernières années, la mauvaise fiabilité du
réseau, la faible qualité du service, la mauvaise qualité
des relations de travail, la perte du droit de gérance au fil des
conventions collectives, la très faible productivité de la
main-d'oeuvre, l'absence de toute référence concurrentielle,
l'érosion graduelle de son leadership mondial en matière de
technologie, des équilibres financiers de plus en plus difficiles
à réaliser et de leur persistance en dépit des efforts
considérables de la haute direction pour tenir le cap et corriger la
situation, peut on encore espérer que la structure actuelle permettra
à Hydro-Québec de redevenir une société performante
capable de s'adapter rapidement au changement qui caractérise notre
époque? À cet égard, il est important de souligner qu'un
bilan comme celui-là qu'une entreprise privée aurait à
présenter à ses actionnaires serait, évidemment, fort mal
reçu et, fort probablement qu'on s'inquiéterait même des
possibilités de survie de cette entreprise. C'est pourquoi nous avons
demandé, suite au dépôt des nouveaux tarifs, que non
seulement le gouvernement demande à Hydro-Québec de lui remettre
un plan sur la correction et les mesures à prendre pour corriger la
situation, mais, également, qu'on fasse, à proprement parler, un
audit de gestion pour déterminer exactement quels sont les
problèmes et quelles sont les solutions à apporter.
Face aux défis qui se présentent, HydroQuébec doit
être redynamisée. L'AMC croit qu'une restructuration qui la
diviserait en unités stratégiques de manière à les
exposer, là où c'est possible, directement à la
compétition ou, tout au moins, de lui permettre de créer une
saine émulation entre les différentes unités, pourrait
avoir plusieurs avantages. Cette restructuration favoriserait
certainement, entre autres, l'élimination d'activités superflues
ne contribuant pas à la valeur ajoutée, l'adoption plus rapide de
principes de gestion active comparables à l'entreprise privée et
une productivité stimulée par le recours systématique a la
sous-traitance chaque fois qu'un gain pourrait être ainsi
réalisé.
Si Hydro-Québec devait être restructurée, la
nouvelle structure devrait toutefois permettre à la
société de maintenir sa capacité d'emprunt. À cet
effet, les unités stratégiques pourraient être
chapeautées par un holding financier. Une telle restructuration pourrait
également contribuer à dépolitiser le dossier. En effet,
si plusieurs problèmes sont imputables à une bureaucratie rendue
beaucoup trop lourde et à la perte de toute notion de concurrence,
plusieurs autres sont la conséquence directe de décisions
politiques passées. Le choix qui a été fait entre
déclarer des dividendes ou rajeunir le réseau, les largesses
accordées au chapitre des conventions collectives ou le degré
d'interfinancement actuel suffisent pour s'en convaincre. Si une
restructuration s'avérait viable et si le gouvernement jugeait
nécessaire de confier à Hydro-Québec des missions autres
qu'économiques, il n'aurait qu'à les subventionner directement.
Si le Québec veut relever le défi de la concurrence, des
solutions durables aux problèmes d'Hydro-Québec doivent
être trouvées rapidement. En ce sens, la restructuration
d'Hydro-Québec est une hypothèse à considérer
sérieusement.
Il faut également repenser la politique tarifaire. Le
gouvernement persiste à maintenir une politique d'interfinancement en
dépit des ajustements proposés depuis plusieurs années par
Hydro-Québec. La petite et moyenne industrie se trouve donc à
subventionner la consommation domestique. Dans un contexte de
libre-échange, la performance de nos PME est un des facteurs clés
de notre réussite économique. Nous devons donc leur donner tous
les avantages qui leur permettront d'améliorer leur position
concurrentielle. Cette politique n'a pas pour seul effet de diminuer la
position concurrentielle des PME dans la situation actuelle. Elle encourage
également la surconsommation domestique et ne permet pas à
Hydro-Québec d'ajuster ses tarifs en fonction de ses coûts de
fournitures.
Un examen des bénéfices associés à
l'élimination de l'interfinancement devrait pourtant être
concluant. Une augmentation des tarifs domestiques encouragerait une
consommation raisonnable, ce qui libérerait de la puissance et de
l'énergie et diminuerait donc la nécessité, sinon
l'urgence, d'augmenter la capacité de production. Elle augmenterait la
rentabilité d'Hydro-Québec, ce qui lui permettrait d'obtenir le
financement nécessaire pour son développement à des
conditions plus avantageuses, ce qui allégerait la dette au
bénéfice de tous les Québécois. La
rentabilité accrue d'Hydro-Québec permettrait également de
maintenir une politique tarifaire très agressive pour l'industrie de
manière à maximiser le développement économique du
Québec. De plus, le gouvernement pourrait toucher des dividendes dont il
pourrait se servir à des fins politiques populaires, comme financer les
services de santé, d'éducation, de développement du
réseau routier et même la culture.
Nous encourageons donc fortement le gouvernement à supporter
Hydro-Québec dans ses efforts pour éliminer ou, tout au moins,
diminuer graduellement mais rapidement l'interfinancement.
En ce qui concerne maintenant le plan de développement
d'Hydro-Québec. La démonstration du besoin de développer
les ressources hydroélectriques du Québec n'est plus à
faire. Cependant, l'escalade rapide des préoccupations
environnementales, les écheveaux juridictionnels et l'impasse avec les
peuples autochtones nous portent à croire que des délais
importants dans la mise en oeuvre de ce développement sont des
contingences qu'il faut tenir pour sérieuses. On peut également
s'attendre à ce que ces contingences augmentent considérablement
le coût déjà élevé du développement
proposé par HydroQuébec et viennent même, à la
limite, en compromettre la réalisation selon l'échéancier
prévu. Le gouvernement doit demander à Hydro-Québec de
démontrer qu'elle a sérieusement planifié toutes les
alternatives économiquement viables et qu'elle les utilisera
systématiquement de manière à minimiser l'impact sur
l'environnement et de manière à pouvoir réagir rapidement
aux délais s'ils se présentent.
Hydro-Québec doit démontrer qu'elle répondra
à la croissance de la demande en choisissant d'abord les solutions aux
moindres coûts. En effet, les coûts marginaux reliés
à la construction de nouvelles centrales sont de loin supérieurs
aux coûts marginaux reliés, par exemple, à
l'amélioration de l'efficacité du système en place ou de
programmes efficaces de gestion de la demande qui peuvent souvent
libérer des quantités d'énergie et de puissance
comparables à une augmentation de la capacité de production.
Dans le même ordre d'idées, il faut se demander si
l'importance accordée à la cogénéra-tion par
Hydro-Québec dans son plan de développement est à la
mesure des avantages qu'elle comporte. Le ministère
québécois de l'Énergie évalue le potentiel de la
cogénération à 740 mégawatts d'ici 1995. La
cogénération est aménageable rapidement à l'endroit
précis où l'énergie est requise et elle permet à
l'industrie qui l'utilise de réaliser des économies
réelles en termes de coûts énergétiques. De son
côté, Hydro-Québec, en encourageant plus activement le
développement du plein potentiel de la cogénération,
pourrait compter rapidement sur de l'énergie additionnelle à un
coût des plus compétitifs tout en minimisant les impacts
environnementaux.
Le plan de développement devrait également être
beaucoup plus transparent au chapitre des exportations. Si l'on veut justifier
l'ampleur du développement proposé par la rentabilité des
exportations, il faut être en mesure de le démontrer Le plan de
développement ne contient aucune information quant aux coûts
marginaux associés directement aux exportations ni de projection
à moyen et à long terme sur l'impact qu'auront les
investissements de 60 000 000 000 $ en 10 ans sur les tarifs. En effet, en
sachant qu'Hydro doit maintenir un taux de capitalisation de 25 %, il faut se
demander si les revenus qui seront dérivés des exportations
seront suffisants pour couvrir les coûts marginaux qui y sont directement
associés et s'ils permettront de maintenir les augmentations tarifaires
à un niveau qui avantagera tous les Québécois.
Le développement d'Hydro-Québec est essentiel mais ne doit
pas se faire à n'importe quel prix. Il doit se faire de manière
à maximiser la position concurrentielle du Québec. Sans les
réponses aux questions posées précédemment, il est
difficile de l'endosser tel quel même s'il semble aller dans la bonne
direction.
Le Québec se doit de prendre et d'assumer le leadership en
matière de recherche et de développement que sa position
privilégiée lui confère en matière
d'hydroélectricité. La politique énergétique doit
donc favoriser l'implantation de tous les programmes nécessaires
à l'atteinte de cet objectif. Bien que ce potentiel
hydroélectrique soit considérable, il n'est pas illimité.
Nous devons donc nous assurer que cette source d'énergie renouvelable,
une fois développée à son plein potentiel, soit
exploitée et utilisée de manière toujours plus efficace.
Pour la même raison, nous devons également développer des
nouvelles technologies énergétiques.
Il ne suffit évidemment pas seulement de développer ces
nouvelles technologies, il faut également s'assurer qu'elles soient
intégrées et implantées en industrie. À ce
chapitre, le Québec accuse un retard certain. Nous encourageons donc
fortement Hydro-Québec à poursuivre et augmenter les efforts
qu'elle déploie déjà pour corriger cette lacune. Le
gouvernement doit également se pencher sérieusement sur cette
question. En effet, bien que ce ne soit pas la seule cause, le manque de
coordination entre les différents intervenants gouvernementaux est un
obstacle important à l'implantation de nouvelles technologies en
entreprises. Ce manque de coordination se reflète dans la
difficulté qu'ont les entreprises à identifier clairement les
rôles que jouent les différents intervenants, les choix
technologiques disponibles, les programmes de formation et la main-d'oeuvre
spécialisée.
Il est donc absolument nécessaire que la politique
énergétique corrige cette situation si nous voulons faire de la
recherche et du développement un outil qui permettra de stimuler le
développement économique, de maximiser les retombées
industrielles et de s'assurer que le Québec pourra relever le
défi de la concurrence
En conclusion, l'Association des manufac turiers canadiens est heureuse
d'avoir pu participer au débat que vous avez ouvert sur les choix
énergétiques du Québec. Nous espérons que cette
démarche donnera lieu à une politique énergétique
qui assurera au Québec une position concurrentielle durable et permettra
à HydroQuébec de redevenir à nouveau la fierté de
tous les Québécois.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. Le
Hir. Je vais maintenant reconnaître Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, M Le Hir, M. Setrakian, en vous remerciant de
la démarche que vous avez entreprise d'abord, en nous faisant parvenir
votre mémoire et en étant ici ce matin pour dialoguer avec les
membres de la commission. Nous avons plusieurs questions. Je pense que ce
mémoire, soulève plusieurs questions de notre part Mais vous
semblez favorables dans votre mémoire à plusieurs volets du plan
de développement dont l'efficacité énergétique et
la gestion de la demande et aussi, évidemment, une plus grande
productivité, vous le mentionnez à plusieurs reprises. Même
s'il vous semble qu'il va dans la bonne direction, vous n'endossez quand
même pas le plan de développement comme tel d'Hydro-Québec,
ce qu'il me semble, en tout cas. Peut-être que vous me corrigerez. Est-ce
qu'il y a des raisons qui expliquent votre position de ne pas endosser
entièrement le plan de développement et est-ce qu'il vous semble
que le plan de développement d'Hydro-Québec a oublié
certaines questions importantes? Est-ce pour ça que vous n'endossez pas
le plan?
M. Le Hir: Non. Essentiellement, la réserve que nous
émettons est due non pas à la nécessité d'aller
dans le sens que la demande HydroQuébec, mais à
l'inquiétude que nous avons au sujet de ce qu'est devenue la
crédibilité industrielle d'Hydro-Québec à
gérer un plan de 62 000 000 000 $.
Mme Bacon: C'est dans ce sens-là que vous n'endossez pas
entièrement le plan?
M. Le Hir: Exactement (11 h 30)
Mme Bacon: D'accord. À la page 8 de votre mémoire,
vous proposez de restructurer HydroQuébec en la divisant dans des
unités stratégiques qui sont chapeautées par un holding
financier. Vous éliminez aussi, vous voulez voir éliminées
des activités qui ne contribuent pas à la valeur ajoutée,
en adoptant des principes de gestion active, en recourant
systématiquement à la sous-traitance. J'aurais trois questions
pour
vous là-dessus. Selon vous, quelles sont ces
activités-là qui contribueraient peu ou pas à la valeur
ajoutée d'Hydro-Québec dans la situation actuelle que l'on
vit?
M. Le Hir: Dans n'importe quelle entreprise de la taille
d'Hydro-Québec, qui est en position de monopole, et qui n'a pas à
se soucier de rencontrer la concurrence, il se développe des empires,
des pratiques, qui sont non productives. Il serait intéressant de
comparer, et nous l'avons fait d'une façon très sommaire, les
ratios d'encadrement, à Hydro-Québec, en ce qui concerne le
personnel cadre par rapport aux effectifs. Et c'est entendu que ça
dépasse les normes en vigueur dans le secteur privé. À cet
égard - c'est pourquoi nous, nous préconisons qu'à l'heure
actuelle, afin de permettre à HydroQuébec de recouvrer cette
crédibilité industrielle, qui lui permettrait de mener à
bien un tel plan de développement de 62 000 000 000 $ - il serait
important qu'une expertise soit faite de la situation qui prévaut
à Hydro-Québec. Et la suggestion que nous faisons de restructurer
Hydro-Québec est évidemment conditionnelle aux résultats
que révélerait une telle expertise.
Mme Bacon: Mais vous-même, qui parlez de restructuration,
comment voyez-vous cette restructuration? Comment l'envisageriez-vous si vous
étiez le président d'Hydro-Québec?
M. Le Hir: Malheureusement, enfin, malheureusement ou
heureusement, ça dépend des points de vue, ça n'est pas
mon rôle, et ce n'est pas non plus le rôle des manufacturiers, de
s'immiscer...
Mme Bacon: Mais vous proposez quand même, dans votre...
M. Le Hir: On fait une suggestion. Et cette suggestion, on la
rend conditionnelle à la réalisation d'une expertise qui
permettrait aux gens d'avoir une meilleure vue de la situation que celle qu'il
nous est possible d'en avoir de l'extérieur.
Mme Bacon: Est-ce que vous voyez, dans l'entreprise, un
fractionnement, par exemple, sur un plan régional?
M. Le Hir: Est-ce que, nécessairement, c'est un
fractionnement sur le plan régional qui donnerait les meilleurs
résultats? Si on regarde ce qui s'est passé dans les
dernières années, avec la régionalisation des
activités d'Hydro-Québec, on se demande si,
nécessairement, c'est la solution qui a donné les meilleurs
résultats. La proposition qu'on fait, on la fait sur la base de
l'expérience vécue par les entreprises qui sont membres de
l'Association. Et quand une enter-prise se trouve arrivée à une
situation comme celle-là, c'est clair que des mesures draconiennes sont
prises pour corriger la situation, non pas dans un délai de trois ou
quatre ans, mais d'une façon très immédiate. Et la
restructuration est une façon privilégiée, dans des
circonstances comme celles-là.
Mme Bacon: Est-ce que vous ne croyez pas, M. Le Hir, qu'une
multiplicité d'unités stratégiques pourrait introduire un
certain dédoublement dans les activités
d'Hydro-Québec?
M. Le Hir: C'est possible qu'à la marge, effectivement, il
se produise de tels dédoublements. L'expérience vécue par
les grandes entreprises qui ont dû se livrer à ce genre
d'exercice, est que la concurrence, l'émulation qui se fait entre les
différentes unités, a tout de même pour effet d'en
résorber rapidement les conséquences.
Mme Bacon: Dans un autre ordre d'idées -je pense que vous
n'y faites pas référence, implicitement, dans votre
mémoire - mais est-ce que vous appuyez, en ce moment, le programme
d'économie d'énergie qui est mis de l'avant par
Hydro-Québec? Est-ce que vous crovoz, aussi, que vos membres voudraient
y participer, à ce programme?
M. Le Hir: II faut bien comprendre que l'efficacité,
l'utilisation efficace de l'énergie, est devenue un des facteurs
critiques pour la capacité concurrentielle des entreprises. Mais sur ce
point, particulièrement, peut-être devrais-je laisser la parole
à mon collègue, M. Setrakian, qui vit cette réalité
sur une base quotidienne.
M. Setrakian (Barkev): Effectivement, je pense que dans
l'entreprise privée, il y a toujours des efforts qui sont faits pour
conserver l'énergie. Je pense que ce n'est pas nouveau. Ça existe
depuis longtemps. C'est aussi basé, c'est une décision
d'affaires. Il y a une certaine rentabilité dans des décisions
pareilles. Peut-être plus spécifiquement, pour parler d'une
industrie dans laquelle je travaille, aujourd'hui, l'industrie des composantes
électroniques, on questionne souvent les procédés. Je vais
vous donner, peut-être, un exemple bien mineur que tout le monde pourrait
comprendre: On a des contraintes au niveau des températures, au niveau
des pourcentages d'humidité parce que c'est directement en relation avec
le produit, la qualité du produit. Ce qu'on fait, c'est qu'on questionne
continuellement à ce que ces contraintes-là peuvent être
élargies parce qu'on serait surpris des bénéfices qu'on
peut aller chercher juste en changeant le degré d'humidité. Par
exemple, au lieu de contraindre cela à 35 %, d'amener ça à
40 %, tout en respectant la qualité du produit. Donc, ces
efforts-là sont déjà en place. Je peux vous donner
énormément d'exemples mais, définitive-
ment, on supporte les efforts d'Hydro-Québec dans la conservation
de l'énergie, l'efficacité de l'énergie.
Mme Bacon: Mais vous savez sans doute que dans le plan de
développement, on annonce un investissement considérable dans les
programmes d'économie d'énergie. Hier, un autre organisme qui
représente aussi des gens d'affaires, le Bureau de commerce de
Montréal, nous recommandait qu'Hydro-Québec devrait
accroître ses efforts dans la promotion des économies
d'énergie et il soutenait aussi que ses membres étaient
prêts à assumer des hausses tarifaires pour favoriser les
économies d'énergie. Est-ce que votre association partage une
telle position ou si, au contraire, vous êtes d'avis, parce que quand on
prend connaissance de votre mémoire, que les programmes
d'économie d'énergie devraient, dans la mesure du possible,
s'autofinancer, c'est-à-dire ne pas conduire à des hausses de
tarif?
M. Le Hir: Certainement. Le but des économies
d'énergie c'est justement de minimiser révolution de la
tarification, de la réduire à son niveau le plus faible possible.
En ce qui concerne la promotion des économies d'énergie, il faut
quand même réaliser que le coût de cette promotion en est
relativement minime par rapport aux économies d'énergie qui
peuvent être réalisées et je ne vois pas quelle pourrait
être l'incidence d'une campagne publicitaire, même soutenue sur
plusieurs années, pour favoriser les économies d'énergie
sur la tarification. On parle, au plus, de quelques millions de dollars sur
plusieurs années et ce n'est absolument pas comparable avec les ordres
de grandeur des chiffres qui sont nécessaires pour réduire la
consommation.
Mme Bacon: On parie de 800 000 000 $. C'est différent, le
montant qui va être investi dans l'économie d'énergie.
M. Le Hir: C'est ça. Il n'y a aucune commune mesure entre
l'importance des deux mon tants et, donc, ça n'aurait pas d'incidence
tarifaire.
Mme Bacon: Parmi les avantages de l'élimination de
l'interfinancement, vous Indiquez une augmentation de la rentabilité
d'Hydro-Québec. Dans la mesure où cette opération consiste
en une modulation tarifaire d'une hausse moyenne et non pas à des
hausses supérieures à ce qui est nécessaire, comment
justifiez-vous le gain de rentabilité?
M. Le Hir: D'une part, par la puissance libérée et,
d'autre part, par la possibilité d'exporter les surplus
libérés.
Mme Bacon: Au sujet de la cogénération, vous vous
demandez si l'importance qui est accordée à la
cogénération par Hydro-Québec est à la mesure des
avantages que la cogénération comporte. Est-ce que vous pourriez
développer davantage cène idée?
M. Le Hir: C'est qu'il faut quand même reconnaître
qu'Hydro-Québec opère à une échelle
considérable et que les projets de développement qu'elle soumet
sont en vue d'une exploitation du potentiel général, mais il
reste quand même qu'il y a des possibilités qui peuvent exister au
niveau des entreprises elles-mêmes ou même de certaines centrales
de petite taille qui pourraient être installées sur des
rivières que, autrement, HydroQuébec n'aurait pas
intérêt à harnacher, compte tenu de l'ampleur de ses
propres opérations. Ces opérations-là, à plus
petite échelle, pourraient permettre de générer une
capacité d'énergie, une énergie qui pourrait être
utile en complément à celle que fournit Hydro-Québec.
Mme Bacon: Mais si je comprends bien, M Le Hir, si on avait des
petites centrales qui étaient installées sur plusieurs
rivières au Québec, vous n'avez pas peur, à ce moment
là, qu'il y aurait un problème environnemental?
M. Le Hir: Oui. Les spécialistes de l'environnement
considèrent que l'hydroélectricité est la forme la plus
propre pour l'environnement. Alors, c'est entendu que si on avait à
trouver des alternatives qui n'utiliseraient pas
l'hydroélectricité, que ce soient des centrales thermiques ou des
centrales nucléaires, on aurait des conséquences
environnementales beaucoup plus sévères.
Mme Bacon: Dans votre mémoire aussi, vous nous
suggérez que des efforts doivent être entrepris pour assurer
l'intégration et l'implantation de nouvelles technologies en industrie
et accroître la coordination entre les différents intervenants
gouvernementaux. Est-ce que vous pourriez m'expliquer, peut-être plus
longuement, les problèmes que vous voyez et peut-être aussi les
solutions qu'on pourrait envisager?
M. Le Hir: C'est une question, souvent, de coordination de la
maîtrise d'oeuvre. HydroQuébec fart ses efforts de son
côté. Il existe d'autres ressources, au Québec, qui ont une
compétence en matière technologique, un organisme comme le CRIQ,
par exemple, comme les laboratoires de recherche privés. Il y a moyen de
coordonner tous ces efforts-là Évidemment, le problème,
pour tout ce monde-là qui transige avec Hydro-Québec, c'est celui
de la puce et de l'éléphant. Hydro-Québec est tellement
considérable, dispose, théoriquement, de tellement de moyens que
le dialogue est parfois difficile entre ces entités qui sont plus
petites et HydroQuébec. Et il se pose toujours la question du
leadership. Historiquement, ce leadership a semblé revenir
à Hydro-Québec, ce qui n'est pas nécessairement un choix
contestable, mais il faut quand même s'assurer que, lorsque cela arrive,
ça permet aux autres de s'exprimer aussi.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Je vous remercie de la
présentation que vous venez de nous faire aujourd'hui et qui
m'amène à poser un certain nombre de questions concernant, entre
autres, le comportement de l'entreprise devant la problématique
énergétique. Vous faites une affirmation, dans votre
mémoire, en page 8, que vous avez rapidement commentée tout
à l'heure, mais je voudrais savoir plus précisément ce que
vous entendez, quand vous dites "que la structure... permettra à
l'Hydro-Québec de redevenir une société performante".
Ça présuppose qu'elle l'a déjà été et
qu'à un certain moment donné, dans son histoire, elle ne
l'était plus. Alors, vous devez avoir des raisons d'affirmer qu'elle ne
l'est plus. Vous devez avoir aussi une idée de ce qu'il faudrait faire
pour qu'elle le redevienne. J'aimerais que vous soyez un peu plus explicite,
parce que c'est une affirmation qui est quand même grave envers une
société d'État qui gère des actifs d'au-delà
de 30 000 000 000 $.
M. Le Hir: Je pense que la question de la fiabilité du
réseau d'Hydro-Québec est une question qui est de
notoriété publique. La qualité du service est
également un facteur qui est de notoriété publique. La
mauvaise qualité des relations de travail chez Hydro-Québec est
également un facteur qui est de notoriété publique et
ainsi de suite. Nous, on n'a rien inventé. La situation est
là.
M. Claveau: II y a bien des entreprises privées qui ne
sont pas beaucoup plus glorieuses en termes de relations de travail etc., mais
que, dans la mesure où leurs critères ou leurs composantes
financières sont intéressantes, on considère comme des
sociétés performantes parce qu'elles ont fait tant de milliards
de bénéfice et qu'elles ont atteint un certain nombre d'objectifs
financiers, alors on les considère comme des sociétés
performantes.
M. Le Hir: Même si... Je veux dire, qu'une entreprise,
à l'occasion, ait un type de problèmes ou même deux types
de problèmes, ça arrive, ça arrive fréquemment.
Mais qu'on se retrouve devant une combinaison pareille de facteurs, quand on
mesure l'effet que les uns ont sur les autres, c'est vraiment une situation
telle qui conduirait une entreprise privée, dans une situation de
concurrence, au bord de la déconfi- ture.
M. Claveau: Mais, vous n'avez quand même pas plus
d'analyses précises que ça, autrement que ce qui se dit dans les
journaux et ce que l'opinion publique véhicule, à l'effet qu'il y
a des problèmes à Hydro-Québec et que, finalement,
ça...
M. Le Hir: Plus qu'une question simplement de ce qui se
véhicule dans les journaux. La mauvaise fiabilité du
réseau, les membres de l'Association en vivent les conséquences
et en assument les coûts. La faible qualité du service, c'est
également un facteur qui apporte des conséquences sur la
situation de nos membres et leurs coûts. La faible productivité
d'Hydro-Québec... Il faut quand même réaliser une chose,
c'est qu'Hydro-Québec a une masse salariale de 1 200 000 000 $ à
peu près et que, lorsqu'on a une productivité qui atteint
seulement 15 %, même en admettant qu'une productivité
idéale ne doit pas se situer à 100 %, mais probablement autour de
70 % ou 75 %, il y a tout de même une perte de plusieurs centaines de
millions par année pour le Québec. Qu'on puisse rester sans voix
devant un phénomène comme celui-là, c'est un petit peu
alarmant. (11 h 45)
M. Claveau: Un peu plus loin, dans votre mémoire, à
la même page d'ailleurs, vous dites qu'il serait souhaitable que
certaines unités stratégiques soient chapeautées par un
holding financier. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?
M. Le Hir: C'est-à-dire que c'est une des façons
qui se pratiquent dans le secteur privé, de structurer des
opérations, de créer des unités stratégiques.
Lorsque, pour des raisons financières, il est important que la
capacité d'emprunt de l'entreprise soit maintenue, on les chapeaute par
un holding. Mais ce n'est pas une recette qu'on estime nécessairement
devoir s'appliquer à Hydro-Québec. On a bien pris la peine de
préciser qu'une solution comme celle-là devrait faire suite
à une étude en profondeur de la situation à
Hydro-Québec, à l'heure actuelle.
M. Claveau: Donc, c'est une hypothèse de travail que vous
suggérez à Hydro-Québec.
M. Le Hir: Exactement.
M. Claveau: Et ce holding-là, dans le fond, c'est toujours
- comment je dirais... À ce moment-là, est-ce que vous
considérez, par exemple, qu'Hydro-Québec devrait faire plus
affaire ou être plus gérée par le privé, dans
le domaine de placements de capital, si vous voulez?
M. Le Hir: On pense certainement que, si Hydro-Québec
appliquait davantage des règles qui
ont cours dans le secteur privé, on n'aurait probablement pas une
situation comme celle qu'on a à décrire aujourd'hui.
M. Claveau: Je vous entendais, tout à l'heure, parler de
l'hydroélectricité comme étant une des façons de
produire de l'énergie qui était la moins dommageable à
l'environnement. J'ai eu un petit sourire parce que, dans le fond, ce n'est pas
tout le monde qui partage le même point de vue, aussi. Ça me
faisait penser à ces bonnes gens de l'industrie qui disent: II nous
faudrait bien une bonne petite guerre pour relancer l'industrie. Une guerre,
c'est toujours payant pour l'industrie, pourvu que ça ne se passe pas
chez nous.
J'ai l'impression, à bien des égards, qu'on a le
même réflexe par rapport à l'environnement et à
l'électricité, de dire: Construisons donc un beau petit barrage
quelque part et ça va relancer l'industrie et ce n'est pas dommageable.
Sauf que, quand c'est chez vous que ça inonde, quand c'est chez vous que
ça crée un certain nombre de problèmes, si c'est votre eau
qui est au mercure, ce n'est plus tout à fait pareil, là,
hein?
Alors, j'aimerais vous entendre expliciter un peu plus votre point de
vue quand vous nous dites: Ce n'est quand même pas grave. Inondons du
territoire et faisons des barrages. De toute façon, ça
n'endommage pas tellement le milieu naturel.
M. Le Hir: Écoutez, d'abord, ce n'est pas nous qui faisons
cette affirmation, c'est le professeur Dumont, le célèbre
environnemen-taliste, qui vient d'ailleurs de publier, au Québec, un
livre qui s'intitule: "La contrainte ou la mort". C'est lui qui fait ce constat
que l'hydroélectricité est la forme d'énergie la moins
dommageable pour l'environnement. En face d'une autorité comme
celle-là, nous, qu'est-ce que vous voulez, on s'incline.
M. Claveau: O.K. Alors, c'est votre position C'est un moindre
mal, disons. Mais ça vous permet, quand même, d'arriver, dans
votre mémoire, et de dire, un petit peu plus loin, qu'il faut
développer à plein le potentiel. Vous dites ça en page 11:
Développons à plein le potentiel hydroélectrique du
Québec. Donc, puisque M. Dumont, célèbre expert
français dit: Ce n'est pas dommageable, allons-y, inondons et
développons à plein tout ce que l'on peut développer en
hydroélectricité au Québec.
M. Le Hir: D'abord, je veux dire, ce n'est pas exactement
ça qu'on dit. Il faut bien réaliser que, nous, on le fait
également dans le contexte des politiques de l'Association et, entre
autres, nous souscrivons, par exemple, à la philosophie du
développement durable. Ça veut dire qu'on n'est pas pour la mise
à sac systématique du territoire, mais qu'il faut quand
même réaliser qu'on va avoir des besoins dans les années
qui viennent. Selon nous, les besoins auxquels on va devoir avoir à
faire face justifient un plan de l'ampleur de celui qu'Hydro-Québec
propose.
M. Claveau: O.K. Une dernière question, peut-être,
avant de passer la parole à ma collègue de Chicoutimi, puisque
vous parlez justement des besoins. Il y a une chose qui est évidente,
c'est qu'au cours des prochaines années la croissance de la demande
d'électricité va provenir presque essentiellement de la demande
du secteur industriel. On pourrait donc croire que l'augmentation des
coûts de la production, des coûts des nouvelles implantations devra
être absorbée par ceux qui vont l'utiliser. Dans ce
sens-là, puisque, essentiellement, c'est le secteur industriel qui devra
utiliser l'électricité qui va être produite par les quelque
50 000 000 000 $ d'investissements dans les nouveaux développements,
est-ce que vous considérez que ce serait normal que ce soient les
secteurs industriels qui absorbent ces coûts-là et de non pas
rejeter son interfinancement sur le dos du résidentiel qui, lui, de
toute évidence, n'en a pas besoin?
M. Le Hir: Mais il faut quand même réaliser que le
même résidant dont vous défendez les intérêts
est également un travailleur qui est bien content d'avoir un emploi II
faut envisager, également, sa situation sous cet angle-là. Et le
bénéfice qu'aurait à tirer l'industrie serait
partagé. Et puis l'expérience qu'on vit, à I heure
actuelle, en est le résultat le plus probant.
Lorsqu'on crée des emplois à Sept-îles, après
des années, c'est quand même localement que les gens sont
satisfaits d'avoir du travail. C'est d'autant qu'on paie en moins en
bien-être social et en chômage et ça améliore la
prospérité des gens de la Côte-Nord II ne faut pas
uniquement envisager le résidant dans son rôle de
résidence. C'est aussi un travailleur et un citoyen qui veut voir
améliorer sa situation.
M. Claveau: J'admets votre point de vue, M. Le Hir. Je
conçois que c'est vrai, mais pourquoi le même argument ne
serait-il pas vrai, à ce moment-là lorsqu'il s'agit de dire:
Actuellement, on paie trop cher? Et puis il y a un interfinancement qui se fait
du secteur industriel, les PME, vers le résidentiel. Il me semble que
l'entreprise devrait être tout aussi contente d'aider à ce que ses
propres travailleurs ne paient pas leur électricité trop cher
dans la situation actuelle, sans même penser à de nouveaux
développements.
M. Le Hir: Malheureusement, l'entreprise est en concurrence. Et,
pour survivre, il faut que la croissance de ses coûts soit
inférieure ou comparable, au pire, à celle de ses concurrents
industriels. Et quand il y a des augmentations de
tarifs et qu'également ces augmentations de tarifs se situent
dans un contexte de dollar élevé, de taux à
intérêts élevés, qu'est-ce que vous
voulez7 L'effet combiné de l'ensemble sur l'entreprise est de
l'amener à réduire ses activités. Lorsque les entreprises
réduisent leurs activités, les travailleurs, qui sont
également des résidants, qui ont une résidence à
chauffer, en subissent les conséquences.
M. Claveau: Mais pourquoi, dans le fond, mettre le
problème sur le dos de l'interfinance-ment? Dans la mesure où
chacune des opérations financières d'Hydro-Québec ou
chacune des catégories de clients sont rentables en soi... Il y en a des
plus rentables et des moins rentables, mais il n'y en a pas qui ne sont pas
rentables. Alors, moi, je prétends qu'il y aurait interfinancement s'il
y avait une catégorie de clients qui devait subventionner une autre
catégorie qui n'est définitivement pas rentable.
Mais chaque catégorie de clients est rentable, pour
Hydro-Québec, et génère des bénéfices nets
à Hydro-Québec. Donc, on ne peut pas, à mon avis, vraiment
parler d'interfinance-ment. La seule chose qu'on peut dire, c'est que, selon
ses politiques, la compagnie, qui vend différents produits qui ne sont
pas nécessairement les mêmes d'un client à l'autre, a des
tarifs différents. Comme dans n'importe quelle autre entreprise, vous
avez des spéciaux qui sont subventionnés, financés ou
interfinancés par d'autres. Puis, vous avez, à certains endroits,
des opérations qui sont moins rentables puis qui sont financées
ou interfinancées par d'autres opérations qui sont excessivement
rentables ailleurs.
Je vous donnerai juste l'exemple des lignes intercanadiennes dans le
Nord québécois où la ligne Montréal-Kuujjuaq est,
à toutes fins pratiques, la plus rentable de toutes les lignes, on le
sait bien, avec des prix exorbitants - ça coûte plus cher que
d'aller en Europe - et ça finance des opérations ailleurs qui
sont moins rentables.
C'est la même chose partout. Alors, pourquoi devrait-on
développer la formule-concept de l'interfinancement qui fait en sorte
que la pauvre entreprise subventionne le résidentiel qui, lui, devrait
tout payer? Il est déjà rentable à HydroQuébec, le
résidentiel, en soi.
M. Le Hir: II ne contribue pas aux profits. L'an dernier, sur les
quelque 560 000 000 $ de profits qui ont été
générés par Hydro-Québec, la source de ces
profits-là s'est trouvée à être les PME et non pas
le résidentiel.
M. Claveau: Mais le résidentiel a été
rentable en soi. Il n'a pas généré de déficit
à Hydro.
M. Le Hir: Mais il n'a pas généré de profit
non plus. Et le problème, c'est qu'on est allé chercher 565 000
000 $ dans la poche des PME pour faire en sorte que le résidentiel
profite de tarifs moins élevés.
M. Claveau: On va en rester là. Je vais passer la parole
à...
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. J'ai deux
questions. La première, vous parlez... D'abord, je dois vous dire que
j'ai de la difficulté à résister à cette tentation.
Vous comparez toujours les entreprises privées et publiques comme si
ça se tranchait en noir et blanc, comme s'il n'y avait pas de faillites
dans le privé. Ça, je dois vous dire que ça me
dérange toujours un peu. Il y a des mauvais administrateurs dans le
privé, comme il y en a dans le public et ce ne se tranche pas en noir et
blanc.
M. Le Hir: Vous avez raison.
Mme Blackburn: Alors, ça, c'était ma boutade.
M. Le Hir: Vous avez raison, elles font faillite et elles
disparaissent.
Mme Blackburn: Ça veut dire qu'il y a de mauvais
administrateurs là aussi. Ma question est la suivante. Vous parlez des
avantages qu'on devrait consentir aux PME, ce avec quoi, je pense bien, on
serait d'avis. Il faudrait revoir les politiques des avantages consentis aux
entreprises. Moi, ce contre quoi j'en ai, ce sont les avantages consentis aux
grandes entreprises qu'on appelle les tarifs grande puissance. Ça varie
entre 0,01 $ 0,016 $ le kilowattheure. Dans les alumineries, ça
coûterait, selon une étude réalisée par deux
chercheurs de l'Université Laval, par emploi créé, par
année, en moyenne 150 000 $, parce que les alumineries, pour ne pas les
nommer, sont peu créatrices d'emplois comparativement aux avantages qui
leur sont consentis. Est-ce que vous me permettez la question? Est-ce qu'on ne
devrait pas plutôt revoir ce type de tarif consenti aux grandes
entreprises, surtout lorsqu'elles ne font pas de transformation au
Québec? Elles envoient ailleurs un produit pour être
transformé. Est-ce que, finalement, l'interfinancement ne se fait pas
des PME vers la grande entreprise plutôt que des PME vers le
domiciliaire?
M. Le Hir: II est difficile de répondre à votre
question. D'abord, je n'ai pas vu l'étude dont vous parlez, donc
ça m'est difficile de la commenter. Cependant, je peux vous dire une
chose, c'est que, lorsqu'on regarde les tarifs accordés par
Hydro-Québec à ces entreprises-là, il y a des
mécanismes qui prévoient, sur la durée
de vie des contrats, qu'il va se faire un ajustement qui va être
en fonction des niveaux de bénéfices générés
par l'entreprise. Donc, je veux dire que c'est une forme de partenariat qui
s'établit entre Hydro-Québec et le secteur privé et qui
fait qu'Hydro-Québec va participer aux profits lorsque l'entreprise aura
atteint sa capacité optimale de production.
Mme Blackburn: Mais est-ce qu'il ne se fait pas, dans ces
entreprises, une pratique qui est tout à fait courante dans les banques,
c'est-à-dire qu'on fait des bénéfices ici et qu'on les
déclare ailleurs, ce qui fait que... Vous connaissez la pratique mieux
que moi.
M. Le Hir: Regardons, quand même, les entreprises qui sont,
effectivement, dans ce secteur-là. On ne peut pas conclure que, dans
l'histoire qu'on a connue, il y ait eu des abus de cette nature en ce qui
concerne le secteur de l'aluminium.
Mme Blackburn: Mais votre avis par rapport aux avantages
consentis aux grandes entreprises, très énergivores,
comparativement à ce qu'on consent aux PME... Un exemple récent
qui est venu sur notre table: pour 1 800 000 000 $ d'investissement, des
avantages consentis, Pechiney crée 800 emplois; pour 300 000 000 $ dans
les serres, elles en créent 4000. Alors, c'est six fois...
M. Le Hir: Oui, mais ça ne participe pas de la même
logique du tout.
Mme Blackburn: Non, mais en matière de retombées,
en matière de création d'emplois, de développement
économique, c'est beaucoup plus efficace les investissements consentis,
les avantages consentis aux PME, aux petites entreprises, qu'aux grandes
entreprises en matière de création d'emplois, surtout dans la
mesure où il ne se fait pas de transformation C'est vrai pour les
pâtes et papiers. On envoie souvent la pâte non
transformée.
M. Le Hir: Compte tenu des volumes d'énergie disponibles
et utilisés, je veux dire, ce que vous me dites équivaudrait
à couvrir le Québec de serres. Il n'y a pas de comparaison entre
les...
Mme Blackburn: M. le Président...
Le Président (M. Bélanger): Mme fa
députée de Chicoutimi, je dois vous interrompre. Le temps est
écoulé.
Mme Blackburn: ...vous allez me permettre juste de réagir
à ça.
Le Président (M. Bélanger): Très
briève- ment.
Mme Blackburn: Je n'ai jamais prétendu qu'il fallait faire
du Québec une serre Avec le climat qu'on a là, ça
coûterait cher, sauf que je pensais précisément aux PME.
À cet égard, je pense qu'on pourrait avoir une politique
énergétique qui favoriserait davantage les PME. Il faudrait
peut-être revoir, par ailleurs, la politique énergétique
qui favorise les PME qui ne font pas de transformation chez nous. Je pense que
vous le savez autant que moi et...
M. Le Hir: Tout développement du secteur manufacturier au
Québec serait le bienvenu
Le Président (M. Bélanger): Alors, je cède
la parole à Mme la ministre. Il vous reste quatre minutes. (12
heures)
Mme Bacon: Alors, M. le Président, j'aimerais juste dire
à M. Le Hir que, quand il utilise, comme chiffre de productivité
à Hydro-Québec, 15 %, je pense qu'il a pris les chiffres pendant
un ralentissement. On sait que le niveau usuel n'est pas aussi
élevé qu'on voudrait le voir. Mais de là à dire 15
%, je pense que c'est pendant les 16 mois de conflit sûrement qu'il a
pris ces chiffres-là.
Hydro-Québec indique quelle fait face à une
compétition plus importante des autres sources d'énergie pour des
clientèles de petite et moyenne puissance et que ces catégories
sont moins captives que d'autres clientèles en particulier que la
clientèle qui est le domestique. Est-ce que vous estimez que ce
marché plus concurrentiel existe? Et si oui, est-ce que vous
considérez que plusieurs de vos membres sont dans une situation
relativement avantageuse à cause deçà?
M. Le Hir: Si j'ai bien compris, ce que vous me demandez, c'est
si le fait qu'il y art d'autres formes d'énergie disponible constitue un
avantage? Effectivement, c'est le cas. C'est un avantage
Mme Bacon: Et vous le reconnaissez par rapport au domestique
aussi?
M. Le Hir: Malheureusement, je ne saisis pas la relation...
Mme Bacon: Qui n'a pas ce genre davantage que peuvent avoir les
PME.
M. Le Hir: Bien, je veux dire, le gaz est quand même
disponible sur une très forte partie du territoire. Et si les
consommateurs domestiques voulaient s'en prévaloir, il faudrait
peut-être, évidemment, modifier les politiques de Gaz
métropolitain. Mais, je veux dire, cette possibilité-là
existe aussi. Ils peuvent aussi se chauf-
fer au mazout. Les alternatives sont là.
Mme Bacon: Mais ne trouvez-vous pas qu'elles sont plus
présentes pour le secteur que vous représentez?
M. Le Hir: Elles sont plus présentes dans le sens
où l'alternative est peut-être plus alléchante compte tenu
de l'utilisation qu'on peut faire de l'énergie. À des fins de
production qu'à des fins de chauffage résidentiel,
certainement.
Mme Bacon: Elles sont aussi économiquement plus
accessibles et avantageuses.
M. Le Hir: Ça dépend comment on s'organise.
Mme Bacon: De quel côté on le regarde. Ha, ha, ha!
Merci.
Le Président (M. Bélanger): Alors, Mme la ministre.
M. le député d'Ungava, si vous voulez remercier nos
invités.
M. Claveau: Alors, je vous remercie au nom de ma formation
politique de la présentation que vous nous avez faite et de
l'intérêt de la discussion, enfin, qui permet de rajouter une
nouvelle dimension aux travaux que nous faisons sur la dimension
énergétique du Québec. Merci d'être venus.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la
ministre.
Mme Bacon: On vous remercie de votre démarche, M. Le Hir,
M. Setrakian. Et on espère que ces minutes de discussion vont aider
à faire avancer le dossier sur ce qu'on veut au cours du mandat de cette
commission.
M. Le Hir: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors la
commission de l'économie et du travail remercie les représentants
de l'Association des manufacturiers canadiens, division du Québec, et
invite à la table des témoins l'Association
québécoise des bi-énergistes inc.
Bonjour, messieurs. Je vous explique un peu nos règles de
procédure. Vous avez vingt minutes ferme pour la présentation de
votre mémoire et, par la suite, il y a une période
d'échanges avec les parlementaires. Avant de commencer, je vous prierais
d'identifier votre porte-parole, de bien identifier les gens qui vous
accompagnent et, par la suite, de procéder à la
présentation de votre mémoire. Alors, nous vous
écoutons.
Association québécoise des bi-énergistes inc. M.
Marceau (Denis): Je vous remercie, M. le Président. Je vais vous
présenter notre représentation. Alors, à ma droite, Michel
Magnant, conseiller recherchiste; M. Denis Charland, directeur et
représentant du volet entrepreneur et, à ma gauche, M. Michel
Garneau, directeur également de notre organisme et représentant
du volet manufacturier.
Le Président (M. Bélanger): Et vous êtes,
vous-même?
M. Marceau: Je suis Denis Marceau, président de
l'Association.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.
M. Marceau: Je vous remercie, M. le Président. Mme la
ministre, M. le Président, Mmes et MM. les députés.
L'Association québécoise des bi-énergistes est heureuse et
honorée de paraître devant vous aujourd'hui afin de
présenter ses vues sur l'évolution de l'énergie
électrique au Québec ainsi que sur le programme biénergie
lui-même. L'hydroélectricité étant l'un des moteurs
du Québec moderne, c'est un privilège que de pouvoir discuter
d'un programme et d'une politique aussi importants. Notre association, comme
son nom l'indique, regroupe des entrepreneurs, manufacturiers, promoteurs et
technologues du secteur privé qui collaborent depuis 1982 à l'un
des principaux programmes de gestion de la consommation d'Hydro-Québec,
soit la biénergie. La biénergie est un concept de système
de chauffage utilisant l'électricité la plupart du temps sauf en
période de pointe où il utilise un combustible. Ce fonctionnement
alternatif permet de réduire la gravité de la demande
d'électricité en pointe. Or, depuis sa fondation en octobre 1986,
l'Association a tenté de convaincre Hydro-Québec et le
ministère de l'Énergie de continuer les programmes
biénergie, de leur proposer l'établissement de prix planchers
pour le tarif biénergie lors des baisses de prix de mazout. Elle a
entretenu un dialogue avec Hydro-Québec sur le développement de
systèmes de chauffage et de thermopompes et a finalement esquissé
sa propre évaluation des retombées globales des programmes
biénergie.
Notre position. Parler de l'électricité, c'est s'exposer
à aborder plusieurs problèmes très vastes que sont la
politique énergétique, les scénarios de
développement, l'environnement, révolution de l'économie,
etc. Afin de bien vous situer dans l'ensemble de ces considérations et
de bien faire ressortir ce qui nous apparaît prioritaire, nous
résumerons notre position de la façon suivante: Nous ne remettons
pas en question le développement intégral du potentiel
hydroélectrique du Québec. Il s'agit là d'une ressource
dont bénéficie le Québec de façon
exceptionnelle dans le monde et qui, en l'absence d'avantages aussi
décisifs dans d'autres secteurs
de l'économie, se doit d'être privilégiée.
Nous nous présentons également comme un groupe affilié,
voire ami d'Hydro-Québec, puisque nous participons à
l'implantation de l'un des principaux programmes de gestion de la consommation
de cette société depuis plusieurs années. Mais ami ne veut
pas dire complice, puisque nous avons notre propre conception de ce que doit
être l'avenir d'Hydro-Québec.
Or, l'essentiel de notre mémoire comporte une vision du pourquoi,
du comment et de l'urgence de recourir à l'efficacité
énergétique, car nous croyons que la cadence de l'augmentation de
la demande d'électricité pousse HydroQuébec à la
limite de ce qu'elle peut fournir Notre mémoire regroupe quatre
arguments qui se répartissent de la façon suivante: Dans la
partie 2 du mémoire, il y a les arguments.
Un, d'abord, l'urgence de contrôler la cadence de la demande
d'électricité au Québec. En effet, nous croyons qu'il y a
non seulement surchauffe temporaire, mais bien un emballement à moyen et
long terme de la demande d'électricité. Ensuite, l'avantage de
choisir des mesures d'économie de la gestion de la consommation sur tout
autre option de réduction de la demande Troisième argument: la
nécessité de bien conceptualiser les programmes
d'efficacité énergétique de façon à ce
qu'ils atteignent leurs objectifs tout en assurant un certain nombre de
retombées positives secondaires. Finalement, la nécessité
de maximiser la portée de ces programmes.
Rappelons ici cependant que c'est davantage une discussion de principe
que nous proposons plutôt qu'une discussion technique pure. Abordons
d'abord le problème de la demande. Il peut sembler tout à fait
paradoxal de parler d'une demande trop forte d'électricité, alors
que nous avons toujours vécu avec la réalité de surplus
importants d'énergie hydroélectrique. Or, il existe pourtant un
important problème de surdemande d'électricité qui affecte
d'autant plus durement Hydro-Québec qu'elle est la seule à faire
face à ces défis. Les autres provinces et pays ont plusieurs
compagnies d'électricité, comme on le sait, et que sa principale
source d'approvisionnement est le pouvoir hydroélectrique qui
coûte particulièrement cher à développer, surtout de
façon accélérée. Or, déjà, le
programme d'immobilisation qui était de 47 000 000 000 $ dans le plan de
développement de mars 1989 est passé à 62 000 000 000 $
cette année et pourrait même passer à 73 000 000 000 $
d'ici l'an 2000 dans le cas d'un scénario encore plus fort de la
demande.
Or, comme notre mémoire l'indique, les ventes de
l'électricité au Québec, de quelque façon qu'on les
calcule, augmentent de façon très rapide, c'est-à-dire
qu'à chaque décade, depuis 1970, la demande augmente du niveau
qu'elle avait atteint en 1970, soit 45 terawattheures. Ceci signifie que la
demande de 1970 a doublé en 1980, va tripler en 1990 et quadrupler en
l'an 2000. Sans parler d'augmentation exponentielle, on peut quand même
parler d'une cadence d'augmentation supérieure à celle de
l'Ontario et des États américains limitrophes.
Quelles sont les causes de cette cadence de la demande? Pour nous, cette
augmentation n'est pas vraiment conjoncturelle. Elle ne vient pas d'une
surconsommation subite. Elle tient en fait à trois facteurs d'ordre
structurel que nous avons résumés dans trois tableaux: D'abord,
la pénétration de l'électricité en substitution
à d'autres formes d'énergie a été remarquable avec
une augmentation de près de 30 % en 15 ans. La croissance de la demande
suit la croissance des constructions résidentielles et commerciales, qui
sont très importantes. Il y a 25 % de plus dans les prochaines dix
années. Et la croissance suit la politique énergétique,
c'est-à-dire que les exportations et les industries augmenteront leur
demande de près de 53 % chacune, et ce, dans les dix prochaines
années.
Il y a un aspect capital de la croissance de la demande. Il s'agit de la
pointe, c'est à-dire la période des soirs d'hiver les plus
froids, qui dure de 100 à 600 heures et pour laquelle HydroQuébec
est obligée de se suréquiper à un coût prohibitif
pour rencontrer cette demande spéciale. Alors, la pointe
représente une sorte de crise pour une entreprise électrique
C'est un peu comme si toute une ville décidait de prendre le
métro en même temps, puis qu'il fallait construire le métro
en conséquence. Au cours des dernières années, les
périodes de pointe se sont aggravées. Elles ont été
plus longues, plus élevées et plus concentrées
qu'auparavant. La pointe, à environ 27 000 mégawatts en 1990,
passera à un peu plus de 36 000 mégawatts en l'an 2000. C'est une
augmentation de 30 %. Donc, c'est une demande énorme.
Alors, l'augmentation du volume global de la demande et de son niveau de
pointe pose un problème de suréquipement très
onéreux à HydroQuébec. Alors, pour faire face à ces
demandes, Hydro pourrait devoir doubler et même tripler sa dette actuelle
de quelque 23 000 000 000 $. Quelles sont les options de contrôle de la
demande et de son niveau? Face à ces augmentations, un certain nombre
d'options peuvent être envisagées pour réduire cette
demande. Certaines sont, à notre avis, peu acceptables ou peu efficaces.
D'autres sont parfaitement adaptées, comme les concepts
d'économie d'énergie et de gestion de consommation de pointe.
Quelles sont les options peu recommandables de la réduction de la
demande de pointe? Pour nous, l'utilisation d'autres sources d'énergie
à la place de l'électricité ne nous apparaît pas
souhaitable. Premièrement, comme exemple, le recours au gaz naturel qui
vient de l'extérieur de la province aurait comme conséquence de
faire perdre de l'argent au Québec qui bénéficie, avec
l'électricité, de 0,80 $ qui reste au Québec pour chaque
dollar dépensé.
Ce pourrait être le recours au mazout de façon massive.
Mais ça entraînerait une grave pollution. Justement, pour faire
face aux 8,3 térawattheures d'augmentation de la demande domestique, il
faudrait 14 000 000 de barils de mazout par année. L'annulation, par
exemple, des exportations d'électricité, ça nous ferait
perdre une part importante de notre commerce international ou bien
l'interruption d'électricité aux compagnies énergivores,
mais ça mettrait en danger notre politique industrielle.
Alors, pour réduire la demande en pointe, l'expérience
d'autres pays démontre qu'à elle seule, une tarification plus
élevée puis des campagnes publicitaires d'économie
d'énergie ne parvenaient à réduire la demande que de
façon marginale. Pour nous, donc, aucune des options se situant à
l'extérieur des économies d'énergie ne nous apparaît
particulièrement intéressante. D'abord, elles iraient à
rencontre de notre politique énergétique, d'une part, ou seraient
sans effets, d'autre part.
Ce sont les options acceptables de contrôle de la demande. Pour
nous, les programmes d'économie et de gestion de la consommation de
pointe mis de l'avant par Hydro-Québec correspondent bien aux besoins de
contrôle de la demande. Et quelque 30 programmes d'économie
d'énergie annoncés réduiraient de quelque 23 %
l'augmentation de la demande prévue pour les dix prochaines
années, soit 10,3 térawattheures en moins. Avec les
économies d'énergie, en tenant compte d'une baisse de la
consommation d'économie électrique unitaire dans le temps, la
consommation unitaire dans le secteur domestique baisserait de 15 % d'ici l'an
2000, celle du secteur commercial de 12,5 % et celle du secteur industriel de
16 %.
Pour ce qui est de la réduction de pointe, les programmes
biénergie et d'énergie interrup-tible pourraient effacer environ
12 % de la pointe, soit environ 4000 mégawatts, c'est-à-dire
près de la moitié de la totalité de la pointe.
Quels sont les avantages, maintenant, des économies
d'énergie? Pourquoi irait-on vers là? Pour nous, les mesures
d'économie d'énergie sont avantageuses et tout à fait
appropriées pour trois raisons. Premièrement, elles permettent de
réduire la demande sans affecter le marché de
l'électricité et sans remettre en question notre politique
énergétique. Elles sont moins onéreuses que les autres
options et aussi parce qu'elles accroissent la marge de manoeuvre et la
compétitivité d'Hydro-Québec.
Est-ce que les programmes d'économie d'énergie et de
gestion de la consommation sont bien conçus? En tant que personnes
impliquées dans un programme de gestion de la consommation, soit la
biénergie, nous sommes en mesure d'appporter un éclairage
à la lumière de notre expérience. Le problème de
ces programmes, c'est qu'ils impliquent une large participation de la part de
la clientèle d'Hydro-Québec et aussi de la part de gens
travaillant dans le milieu des économies d'énergie. (12 h 15)
Or, comment assurer une telle participation? Ici intervient toute une
problématique de marketing pour assurer une pénétration
suffisante du marché, c'est-à-dire pour rejoindre de 5 % à
25 % des abonnés de façon à obtenir la masse critique
désirée.
Pour être efficaces, les programmes, d'abord, doivent être
populaires, payants et bien encadrés. Or, sans entrer dans une analyse
détaillée des programmes d'économie d'énergie et de
gestion de consommation proposée, nous croyons, quant à nous, que
ceux qu'annonce Hydro-Québec correspondent à ces critères
ou, à tout le moins, qu'ils ont été pensés
soigneusement en fonction de ces critères et nous en voulons pour preuve
le programme Biénergie lui-même que nous connaissons mieux.
La biénergie, c'est un succès. Ce programme est populaire
et comment? Bien, un premier facteur dans le succès du programme
Biénergie, c'est l'excellente image de marque des appareils
proposés. Biénergie, des thermopompes symbolisent:
propreté, efficacité, économie, versatilité et
aussi attention à l'environnement dans la perception populaire. La
biénergie, c'est un concept particulier au Québec. Au cours des
années quatre-vingt, c'est plus de 100 000 systèmes qui ont
été installés dans le secteur domestique et chez 9000
clients commerciaux et industriels.
Pour nous, les nouveaux appareils annoncés et qui peuvent se
substituer avantageusement à n'importe quel système de chauffage
déjà installé, que ce soit au mazout, au gaz,
déjà avec la biénergie traditionnelle, de l'air chaud ou
de l'eau chaude, le système tout-électrique ou avec thermopompe,
ça peut garantir le succès de la phase II de la biénergie.
Le marché à privilégier, cependant, c'est le
tout-électrique, communément appelé le marché de
ceux qui ont des plinthes électriques, car il est le plus important,
celui qui se développe le plus et celui qui cause le plus de
problèmes pour la demande d'électricité en pointe pour
Hydro-Québec.
Or, le programme Biénergie est-il payant pour tous? Pour le
client d'abord, l'expérience a démontré, ici comme
ailleurs, que la subvention à l'installation et les tarifs
préférentiels faisaient toute la différence au monde dans
la décision de changer de système de chauffage. Sans l'aspect
financier, l'expérience démontre que le programme a tendance
à stagner.
Pour Hydro, est-ce que c'est payant? Hydro doit conserver un
intérêt commercial dans les retombées des programmes. Au
cours des années quatre-vingt-dix, la biénergie commerciale et
résidentielle fonctionnera en mode électrique, 85 % du temps,
pour une consommation moyenne de cinq térawattheures par année.
Il s'agit donc d'un marché non négligeable d'environ
200 000 000 $ de ventes par année.
Est-ce que c'est payant pour l'industrie des économies
d'énergie? Le programme Biénergie est créateur d'emplois.
En effet, la fabrication, l'installation de plus de 100 000 systèmes
dans les années quatre-vingt avaient créé, au début
de 1987, plus de 4500 personnes-années de travail avec une masse
salariale de près de 125 000 000 $ et des ventes de matériel de
plus de 30 000 000 $.
On peut estimer que la phase II de la biénergie
générera au minimum une masse salariale de 88 000 000 $ et
créera 3675 personnes-années de travail réparties au cours
de la prochaine décennie, et la plupart d'ici cinq ans selon nos
projections. Les dépenses en matériel québécois se
chiffreront à au moins 30 000 000 $, soit 20 % du coût du
programme.
Est-ce que c'est payant pour l'ensemble du Québec? Pour
l'ensemble du Québec, le programme Biénergie s'était
traduit par des entrées de près de 40 000 000 $ de taxes et une
réduction très substantielle d'émissions polluantes. On
parle de 100 000 tonnes d'anhydride sulfureux de moins par année dans
l'atmosphère du Québec. La phase II de la biénergie
entraîne des ordres de grandeur analogues.
Un petit mot sur l'encadrement des programmes. C'est au niveau de
l'encadrement des programmes de biénergie que l'expérience a
démontré que des efforts devaient être faits. En effet, au
cours des dernières années, un certain nombre de systèmes
de biénergie ont cessé de fonctionner en mode biénergie
parce que les systèmes avaient été mal installés,
ou mal entretenus, ou parce qu'ils avaient servi à financer une
conversion au tout-électrique. Ces inconvénients ne se
répéteront probablement pas dans la phase II de la
biénergie à cause de la conception des appareils, de la haute
compétition entre les entrepreneurs favorisant ainsi les meilleurs et,
finalement, à cause du code d'éthique que l'Association des
bi-énergistes est en train de concevoir.
En conclusion, pour nous, donc, le programme Biénergie a bien
fonctionné et va bien fonctionner dans la mesure où il correspond
au triple critère de la popularité, du gain économique et
de l'encadrement. À ce dernier chapitre, qu'on nous permette tout
simplement d'ajouter que nous croyons, sous toute réserve, en la
supériorité de l'approche par la vente à l'approche par la
sollicitation publique. La vente permet de tailler le programme sur mesure et
prend à sa charge la responsabilité d'une bonne installation.
Nous en arrivons à notre quatrième et dernier argument.
Peut-on et doit-on maximiser la portée des programmes d'économie
d'énergie et de gestion de la consommation? Ça entraîne un
changement de mentalité. Pour nous, il est évident que les
économies d'énergie doivent devenir plus qu'une simple mesure
à court terme visant à éponger la surchauffe temporaire de
la demande. Elles doivent faire partie intégrante de la production de
l'électricité au Québec Dans cet ordre d'idées,
nous souscrivons pleinoment à l'affirmation suivante, contenue en page
11 du mémoire d'Hydro-Québec sur la tarification proposée
pour 1990-1991, qui se lit comme suit: "Hydro-Québec mettra de l'avant
un ensemble de programmes visant à favoriser une
pénétration durable des moyens d'économies
d'énergie Ces moyens s'avèrent rentables pour la clientèle
et leur intégration dans la planification stratégique de
l'entreprise permettra de moduler le plan des installations et de mieux
l'ajuster aux besoins réels du Québec. Dans ce contexte, les
économies d'énergie apparaîtront comme un moyen de
production, au même titre qu'une centrale hydroélectrique, et
contribueront ainsi à satisfaire les besoins en
électricité des Québécois, tout en limitant la
croissance des coûts de fourniture et, par conséquent, des revenus
requis."
Le Président (M. Bélanger): M. le président,
je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.
M. Marceau: Très bien. Alors, marge de manoeuvre. Comme
technique alternative, les économies d'énergie entraînent
une marge de manoeuvre accrue pour Hydro-Québec qui va provoquer des
retombées, une baisse des coûts de production, une redistribution
de l'électricité vers des créneaux qui sont plus payants,
soit du domestique vers l'industriel ou les exportations Ça va
pondérer la cadence de construction des barrages et l'achat
d'équipements de pointe.
Trois recommandations. D'abord, concernant la politique
énergétique, et je termine là-dessus, que les
économies d'énergie fassent désormais partie de la
planification régulière d'Hydro-Québec et qu'elles soient
évaluées vis-à-vis de divers scénarios de
production d'électricité, avec des études
appropriées de coûts-bénéfices. Sur la
biénergie, notre recommandation: que la priorité du programme de
biénergie résidentielle sort de concurrencer la conversion vers
le tout-électrique et de favoriser la substitution de la
biénergie au tout-électrique. Que les subventions soient
proportionnelles à la difficulté de pénétration du
marché. Notre rôle d'association, une recommandation, c'est que
l'Association québécoise des bi-énergistes, qui oeuvre
dans le domaine depuis plusieurs années, devienne une corporation
garantissant le professionnalisme des techniciens des système de
biénergie
Et finalement, comme retombées technologiques, notre
dernière recommandation, c'est que des efforts soient faits pour
commercialiser la technologie québécoise au niveau des
utilisations domestiques d'électricité et que notre
capacité d'être compétitifs sur le marché
québécois et international, dans ce domaine, sort
encouragée. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M.
Marceau. Mme la ministre.
Mme Bacon: M. Marceau, messieurs, je vous remercie de votre
présence à cette commission parlementaire. Je pense que votre
dossier est aussi un dossier fort important. Il semble que la biénergie
rassemble un consensus en sa faveur, en ce moment. Hydro-Québec veut
développer son parc. L'industrie de l'huile à chauffage y est
intéressée. Il y a des sondages qui démontrent que les
consommateurs sont aussi satisfaits. Il y a plusieurs clientèles
particulières qui demandent la poursuite du programme. En outre, la
biénergie a souvent fait les manchettes. On en parle souvent; ce fut le
cas, entre autres, du programme Biénergie plus, c'est le cas du rachat
des contrats. Et dernièrement, on a parlé des serri-culteurs.
Avant d'aborder votre mémoire en profondeur, j'aimerais profiter
de votre présence pour vous demander: En tant qu'organisme directement
concerné par la biénergie, quel est votre diagnostic sur la
biénergie? Je pense que vous êtes bien placé pour nous
informer, aujourd'hui, de ce qui fonctionne bien, de ce qui fonctionne moins
bien.
M. Marceau: Comme je l'ai noté tout à l'heure, Mme
la ministre, au cours des années quatre-vingt, il y a eu une
première phase. C'était notre premier contact avec la
biénergie. C'était la biénergie résidentielle,
où, assez rapidement, certaines technologies ont été
utilisées pour, on peut dire, s'étendre au niveau du
Québec à peut-être au-delà de 140 000 installations.
Rapidement, c'est dans le marché du résidentiel, cette
fois-là. Par la suite, on s'est rendu compte qu'il y a eu une
détérioration de ce parc de biénergie qui était
consécutive à une installation plus ou moins adaptée,
disons, à une opération de biénergie. Ça ne
l'était peut-être pas nécessairement toujours. Alors, ce
qui s'est produit, c'est que les premiers clients, ceux qui ont malheureusement
vécu avec ces mauvaises installations-là, sont retournés,
avec l'aide, bien entendu, ou la complicité des
pétrolières... C'est normal, leur mission, c'est de vendre du
mazout, et ils avaient des contrats de service chez ces clients-là. Bon,
bien, écoute, c'est un petit problème, on revient au mazout.
Ça, ce n'était pas dramatique pour la situation
d'Hydro-Québec. À ce moment-là, ce qui primait pour
Hydro-Québec, c'était de vendre aussi de
l'électricité. C'était la phase des années
quatre-vingt où il y avait des surplus d'électricité. Il y
en avait par-dessus les barrages, pour ne pas dire par-dessus la tête.
Alors, à ce moment-là, on vendait vraiment. On allait chercher
une clientèle qui était au mazout. On l'incitait à venir
à l'électricité. On en vendait. Il y avait aussi un autre
argument: pourquoi la biénergie, à ce moment-là? Il y a la
vente, oui.
Mais c'était pour empêcher ce taux absolument effarant de
transformation de système de chauffage dans le résidentiel vers
le tout-électrique. La dame dit: Je n'en veux plus, du réservoir
qui pue en bas. Je ne veux plus de fournaise. On installe des plinthes demain
matin. Alors, ça y est. Ce sont des plinthes électriques. Comme
ça, c'est propre. Ce n'est pas encombrant. C'est silencieux. Et
ça, c'était la mode. Ça persiste encore dans le domaine de
la construction domiciliaire, actuellement.
Alors, ça, c'était une étape, à ce
moment-là. Ça s'est corrigé. Hydro-Québec s'est
rapidement rendu compte que, bon, il y avait un petit problème
là. Alors, les deux programmes qui ont été mis en marche
depuis l'automne 1987... Je dis deux programmes successifs, puisqu'il y a la
biénergie plus, phases 1 et 2. Alors, par la biénergie plus,
Hydro-Québec a assuré au moyen d'entreprises qu'elle a
qualifiées, enregistrées et surveillées pour offrir
à la clientèle un contrat de service et d'entretien sur leur
système en biénergie... Personnellement, j'ai eu à
superviser, à suivre une vérification auprès de 20 000
installations de biénergie. Les gens sont contents de la
biénergie. Ils sont heureux avec la biénergie. Les installations
vont bien. Nous sommes à la veille d'une deuxième étape et
on est tout à fait rassurés. La clientèle l'a
adoptée. C'est un nouveau mode. C'est un nouveau concept. C'est un
nouveau mot, d'abord, la "biénergie". Mais quand ce concept-là
est bien appliqué, bien suivi, c'est là au niveau de
l'encadrement et ainsi de suite, qu'on est rassurés que ça peut
fonctionner.
Vous avez mentionné le rachat également. Bien, le rachat,
ça n'a pas été un problème. Ça a
été une solution absolument formidable pour Hydro-Québec,
à un moment donné, d'avoir un petit bassin dans lequel ils
peuvent puiser une réserve pour se permettre de passer la pointe de cet
hiver. Alors, c'était de la biénergie que nous avions
transformée dans le commercial et l'industriel avec grand succès.
Il y a eu 250 % des objectifs qui ont été atteints
là-dedans. Mais, par la suite, à un moment donné, Hydro a
besoin de cette réserve. C'était possible de demander aux gens de
faire un sacrifice. On dit: Écoutez, on va vous donner... Bon,
naturellement, ça se traduit par certains gros chiffres. Mais il faut
voir aussi l'avantage que ça peut apporter à Hydro-Québec.
Alors, ça, c'est dans le résidentiel et le commercial.
Dans la phase où on va, c'est que la technologie est beaucoup
plus développée et beaucoup plus à point. Tout le monde a
fait ses classes et aujourd'hui, bien, on est prêts. Si
Hydro-Québec consent à investir massivement dans ces
créneaux avec la biénergie, c'est que maintenant, d'abord, elle a
vu à développer des équipements, développer des
chaudières, des fournaises, des équipements de chauffage, parce
que c'est là que ça se passe, dans le sous-sol de
la maison familiale. Les "blocs" d'appartements, le commercial et
l'industriel, on est passés par là. C'est fait. Ce qui reste
à faire est très minime. Voilà.
Mme Bacon: Je ne suis pas tout à fait d'accord, parce
qu'on dit qu'il y a 100 000 abonnés résidentiels
d'Hydro-Québec.
M. Marceau: Oui.
Mme Bacon: C'est à peine 3 % ou 4 % de la clientèle
domestique qui ont adopté ce mode de chauffage. Qu'est-ce qui explique
cette situation de quasi-désintéressement? Parce que 3 % ou 4 %,
ce n'est pas beaucoup...
M. Marceau: Bien...
Mme Bacon: ...envers le chauffage biénergi-que.
M. Marceau: Oui
Mme Bacon: Quel est le facteur principal qui désincite les
clients à opter pour la biéner-gie? Il doit y en avoir...
M. Marceau: Mme la ministre, c'est qu'il y a eu un premier
programme qui n'a duré que deux, trois ans, jusqu'au début 1985
C'était la première étape. Il n'y en a pas eu d'autres,
programmes pour le résidentiel. Donc, c'est ça que nous
demandons: Donnez-nous un nouveau programme. Vous en voulez 100 000 autres
d'ici cinq ans? Vous allez avoir 100 000 autres résidences unifamiliales
d'ici cinq ans qui auront adopté le chauffage biénergique, avec
tous ses avantages et avec des équipements performants. Alors, il n'y a
pas de désintéressement. Les gens en demandent. Ils en veulent.
C'est qu'on ne leur en a pas vendu. On ne leur en offre pas. Donc, il n'y a pas
de programme. Mais on s'en vient vers là. Le programme Biénergie
résidentiel s'est terminé en 1985. Suite à cela, ça
a été le commercial et l'industriel, avec très grand
succès. Vous cherchez les "blocs" d'appartements puis les commerces et
les industries qui ont eu l'occasion d'être bien informés sur les
possibilités et les avantages de la biénergie? Vous nous le
direz, on va aller les voir prochainement. (12 h 30)
Mme Bacon: Mais quand Hydro-Québec prévoit 150 000
logements qui seront chauffés à la biénergie en 1992
grâce au programme Biénergie plus, vous, vous croyez que ce
programme est réaliste. On peut y arriver.
M. Marceau: Voici, il faut faire une distinction.
Biénergie plus, c'est un programme de service et d'entretien qui vient
seulement après la vente d'un système de biénergie. Alors,
la vente de biénergie, elle...
Mme Bacon: Mais il y avait un problème d'entretien,
auparavant. Il y en avait un, problème. C'en est un, ça.
M. Marceau: Bien sûr. C'est ce que je mentionnais tout
à l'heure. Dans la première phase, c'était un peu plus
rapide C'était tout nouveau, comme je le disais tantôt.
C'était un nouveau mot, une nouvelle technologie, des nouveaux
équipements Ce n'était peut-être pas tout à fait
à point. Malgré tout cela, dans biénergie plus, on se rend
compte que c'est vraiment efficace, que les gens aiment cela. Mais là,
on arrive à la deuxième phase où on va offrir du nouveau.
Enfin, on va se mettre là, on va leur vendre à nouveau
l'idée d'un programme Biénergie avec des équipements.
Alors là, on va pouvoir passer. Et votre question à savoir si
c'est réaliste, bien sûr. Alors, sans aucune crainte, d'ici 1992,
atteindre 150 000, je pense que même cette industrie...
Mme Bacon: On va aller au-delà de ça?
M. Marceau: On va aller au-delà, justement. Il va falloir
fonctionner un peu sur les freins, même.
Mme Bacon: Ha, ha, ha! Est-ce que vous pensez que la tarification
de l'électricité, sur une base de pointe et hors-pointe, peut
constituer une voie pour le développement de la biénergie?
M. Marceau: Bien, je pense que c'est normal qu'on ait un tarif
incitatif et aussi dissuasif On veut diminuer la pointe mais, si on appliquait
une tarification dissuasive pour celui qui serait tout électrique, ce
serait inadmissible, quand on n'a pas d'alternative. Avec la biénergie,
on a l'alternative, on a le choix. On offre aux gens un choix de liberté
et de sécurité avec la biénergie. Il y a deux
systèmes. S'il y a quelque chose qui ne va pas, pas de problème.
Voici, on transfère à l'autre système. Ça leur
permet justement cette versatilité et cette sécurité.
Alors, la tarification en pointe entraîne même. . De la
façon qu'il est conçu, on parle du tarif d'été qui
est applicable dans le programme Biénergie. Alors, ce tarif
d'été à 0,10 $ en pointe et à 0,0275 $ en
période normale, on parle de point de transfert à moins 12
degrés Celsius, eh bien, sans que les gens aient toujours à avoir
les yeux fixés sur le petit voyant qui est installé à un
endroit assez visible, en laissant ça tout simplement à
consommation normale, une résidence unifamiliale normale va
déjà sauver de 200 $ à 350 $ par année en
énergie. Alors, c'est prouvé. Depuis deux ans, on s'est vraiment
appliqués à vérifier et à revérifier.
Hydro-Québec n'a pas pris ça à la légère et
on était ceux qui amenaient justement toutes ces
constatations-là. Alors là-dessus, hors de tout doute, la
tarification d'été au bas tarif, ça marche.
Mme Bacon: Dans votre mémoire, dans le cadre des
priorités du programme biénergie résidentiel, vous
recommandez que les subventions soient proportionnelles à la
difficulté de pénétration du marché.
M. Marceau: Oui.
Mme Bacon: Est-ce que vous pouvez préciser cette
recommandation que vous faites et, en même temps, est-ce que vous
considérez que les subventions constituent une condition
nécessaire à la réalisation d'un programme comme
ça?
M. Marceau: Oui. D'abord, comme première réponse,
voici. Quand on parle de pouvoir s'ajuster selon les difficultés, celui
qui a déjà un équipement de chauffage à air chaud
ou à eau chaude dans son sous-sol, il a déjà un
équipement au mazout. Si on veut installer le réservoir en
biénergie, tout ce qu'on a à lui offrir, c'est un nouvel
équipement intégré qui a été
développé en collaboration avec Hydro-Québec, nouvelle
fournaise intégrée, nouvelle chaudière
intégrée, et ce n'est pas trop compliqué. Mais
l'alimentation électrique, c'est peu complexe. Là où
ça se complique, et c'est le marché qui est le plus dommageable
pour la pointe d'Hydro-Québec, c'est le marché du
tout-électrique. 1 300 000 résidences unifamiliales au
Québec sont au tout-électrique, avec des plinthes. Imaginez-vous
quand on arrive à moins 12 degrés, moins 15 degrés.
Ça en fait, du monde qui embarque ça sur la pointe. C'est dur.
Alors, pour HydroQuébec, c'est à peu près catastrophique
chaque fois qu'une nouvelle maison se construit tout à
l'électricité avec des plinthes propres, propres, propres. Bien
là, c'est un problème majeur. On se dit: Voilà. D'abord,
les 1 300 000, on peut changer leurs habitudes mais on ne changera pas leurs
habitudes en disant: T'as été fou, à un moment
donné, de suivre une publicité. Alors il faut l'inciter, d'abord
avec une meilleure qualité de l'air, une purification de l'air, et tout
ça, ça signifie, si on veut lui offrir la biénergie, qu'il
faut absolument qu'il y ait des conduits. Quand vous avez des plinthes chez
vous, des plinthes à l'électricité, il n'y a pas de
conduit d'air. Alors, il faut installer. C'est plus difficile de changer cette
habitude des gens d'apporter à l'intérieur d'autres
équipements. Donc, il faut passer par le volet du confort et il faut
pouvoir atténuer avec l'aide des subventions, Mme la ministre, l'aide
des subventions absolument; il faut alléger cet investissement qu'ils
doivent faire. Mais, quand ils ont adhéré à la
biénergie, vous n'avez plus besoin d'y penser, ils ne partent plus; bien
entendu, si c'est bien installé, et c'est ce sur quoi on va s'appliquer
et Hydro-Québec y voit bien.
Mme Bacon: Vous recommandez que votre association soit
transformée en une corporation professionnelle. Est-ce que vous pourriez
nous expliquer les avantages qu'aurait une telle corporation?
M. Marceau: Bien, voici, la biénergie, on ne peut pas
identifier... Vous ne nous mettez pas un masque comme ça. Ce n'est pas
un électricien, ce n'est pas un plombier, ce n'est pas un frigoriste, ce
n'est pas seulement un spécialiste en brûleurs. La
biénergie, c'est un concept, c'est tout un ensemble. On a recours
à toutes ces technologies-là. On a même, pour ce qu'on
appelle les conduits d'air, la tôle. Donc, toutes ces personnes-là
doivent posséder une technologie en biénergie. Ce n'est pas celui
qui est habitué avec un concept de travailler seulement normalement,
d'installer des plinthes qui, demain matin, peut devenir un biénergiste.
Il faut d'abord y penser. Il faut d'abord adopter ce changement de
mentalité, pas seulement chez le consommateur, mais ça va aussi
auprès des entrepreneurs. Donc, nous les choisissons regroupés.
C'est déjà fait. Nous les regroupons, nous travaillons avec des
entrepreneurs manufacturiers, installateurs, promoteurs qui, justement, croient
en la biénergie. C'est une nouvelle approche. Si on est convaincus, on
peut convaincre les gens: Écoute, installe-toi avec un système de
biénergie. Tu vas économiser, tu vas avoir plus de confort et
puis, c'est simple, tu contribues également à pouvoir
peut-être, au niveau de la tarification régulière,
empêcher qu'il y ait des augmentations ou des constructions de barrages
qui auront une incidence sur la tarification par la suite.
Mme Bacon: Mais est-ce que vous pourriez éviter des
conflits, par exemple, de compétence avec la Corporation des
maîtres électriciens, la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie, la Corporation des entrepreneurs en
réfrigération? Est-ce qu'il n'y aurait pas des conflits de
compétence, à ce moment-là?
M. Marceau: Nous avons, remarquez bien, d'excellentes relations
avec toutes ces corporations-là, bien entendu, sauf que nous, notre
intérêt n'est pas dilué. Nous travaillons dans un sens.
L'électricien a toutes ces préoccupations, et là, je ne
vous énumérerai pas tout ce qu'il a de problèmes, à
partir du matin, juste pour démarrer son camion et puis, à la fin
du mois, pour le payer, et la même chose dans chacune des corporations.
Nous, nous ne pensons qu'à une seule chose: travailler à un plan
global, intéressant, avec l'aide de toutes ces personnes-là.
C'est certain qu'on a besoin de toutes ces personnes, que ce soient les
électriciens, les mécaniciens en tuyauterie, les plombiers, les
frigoristes, les gens qui installent les conduits d'air. Donc, on a besoin de
tous ces gens-là et surtout de la technologie.
Vous savez, il ne suffit pas d'installer une chaudière
électrique, une chaudière au mazout ou au gaz ou gaz au propane,
une thermopompe; il faut que tout ça soit en harmonie. Il faut que
ça opère en biénergie et ce concept de biénergie,
bien, il faut l'avoir. Écoutez, on ne peut pas demander au gars qui est
coincé du matin au soir avec tous ses problèmes de dire:
Écoute, tout d'un coup, je deviens biénergiste demain matin et
j'offre ça. Il va entrer dans une maison et il ne saura pas quoi faire,
il ne saura pas comment l'installer, il ne saura pas quoi dire et il ne saura
pas, ensuite de ça, comment le suivre et comment le surveiller. Or,
Hydro-Québec a maintenant enregistré des entreprises. Il y a
déjà 50 entreprises au Québec qui sont aussi bien membres
de ces trois corporations-là, qui sont enregistrées par
Hydro-Québec et qui assurent présentement, auprès de 90
000 qui vont rester actifs, près de 100 000 actifs en
biénergie... Il n'y avait pas de surveillance depuis 1985. On a
commencé en 1987-1988 et il en reste encore 100 000. Ils sont contents.
On ne les entend pas chiâler. Ha, ha, ha!
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président.
Je veux d'abord vous souhaiter la bienvenue devant la commission
parlementaire et vous féliciter pour votre présentation qui est
loin de manquer d'intérêt. Je pense qu'il y a beaucoup de choses
là-dedans qui, j'espère, seront prises en considération
très sérieusement par HydroQuébec.
Vous avez dit dans votre présentation, et ça m'a
frappé, que les constructions de barrages hydroélectriques,
c'étaient des coûts exorbitants, ce qui faisait
qu'Hydro-Québec avait un programme d'investissements énormes
parce que ça coûtait beaucoup plus cher de construire des
centrales hydroélectriques que de produire, au moyen d'autres
façons, de l'électricité. Est-ce que j'ai bien compris
lorsque vous avez dit ça?
M. Marceau: Oui. Si on peut éviter, par l'économie
d'énergie, par la gestion de pointe, la construction de barrages ou
pondérer - j'exagère peut-être en disant "éviter" -
disons, pondérer cette construction de barrages dans le temps, autrement
dit, éloigner, parce que ce qui coûte cher, dans les constructions
de barrages, à notre point de vue, c'est quand on doit le faire de
façon accélérée, rapidement. Tous les obstacles
sont là, donc, ça devient très onéreux.
M. Magnant (Michel): II y aurait peut-être quelque chose
à ajouter, M. le député. Vous n'êtes pas sans savoir
qu'Hydro-Québec est une compagnie d'électricité un peu
particulière parce que, premièrement, elle est la seule sur le
territoire alors que, dans les pays de l'OCDE, on a, en général,
une compagnie d'électricité par 1 500 000 habitants et que c'est
une compagnie qui se base essentiellement sur l'hydraulique. Alors, à 94
% du pouvoir sur l'hydraulique, on est à quatre fois la norme des pays
de l'OCDE qui est de 20 %. Donc, il y a une fragilisation, si vous voulez,
d'Hydro-Québec qui, pour augmenter la fourniture
d'électricité, pour suivre la cadence de la demande est
obligée de construire des barrages. Parce que c'est un choix qu'on a
fait en politique énergétique, c'est-à-dire de tabler sur
l'avantage naturel qu'on avait, c'est-à-dire d'avoir le plus gros bassin
hydroélectrique au monde, per capita, si on regarde le territoire du
Québec. Alors, ayant choisi... On entend souvent dire
qu'Hydro-Québec, c'est devenu une manufacture de barrages, c'est devenu
un sarcasme, c'est qu'Hydro-Québec n'a pas le choix. Si on applique la
politique énergétique de fournir de l'électricité
avec seulement de l'hydraulique, c'est bien entendu que vous devez suivre la
demande en construisant des barrages. C'est un peu ce qui arrive à
l'heure actuelle, c'est qu'Hydro Québec doit fournir trois grands
marchés simultanément en grande progression, c'est-à-dire
la substitution au tout électrique dans le résidentiel,
l'augmentation des industries énergivores et l'augmentation des
exportations. Alors HydroQuébec se retrouve avec trois guerres à
combattre d'un coup sec; pour ça, ça demande
énormément de constructions de barrages. Hydro-Québec est
probablement l'entreprise électrique au monde qui a le plus grand nombre
de barrages planifiés pour les dix prochaines années.
Évidemment, si vous n'êtes pas d'accord avec les barrages et qu'on
suit la politique énergétique qui est de continuer à
fournir de l'électricité à tous ces marchés - qui
sont rentables, soit dit en passant - à ce moment là, il faut
aller au nucléaire qui coûte le même prix qu'un barrage et
qui est plus rapide à construire. Mais on n'a pas choisi d'aller dans
cette direction-là, on a choisi de développer le plein potentiel
hydroélectrique. Mais, comme vous le soulignez, M le
député, les coûts augmentent. On n'ira pas dans les
détails techniques, mais les prochains barrages - et je parle de ceux
qui seront bâtis dans la deuxième phase prévue, dans la
troisième phase - excusez-moi - vont peut-être coûter 25 %
de plus à un coût actualisé. D'où
l'intérêt de prendre en considération, au niveau collectif,
les programmes d'économie d'énergie.
Je pense que les programmes autorisés par Hydro-Québec
sont proposés de façon très détaillée,
très sophistiquée. Je les ai comparés moi-même avec
des programmes similaires qui apparaissent en Europe et aux États-Unis.
Je peux donner la note A à Hydro-Québec, ce sont de très
bons programmes. La conception est très bonne. Mais ce sont de nouveaux
programmes. On ne sait pas encore jusqu'à quel point on peut les
rationaliser. Mais on peut déjà envisager que ces
programmes vont dégager une marge de manoeuvre qui va nous permettre de
ralentir, si on le veut, la construction des barrages.
M. Claveau: O.K. Je voulais juste être certain, par rapport
à ce que j'avais entendu, parce qu'il est de notoriété
publique qu'une centrale hydroélectrique, en termes de mégawatts
installés, de puissance installée, ça coûte entre 50
% et 80 % moins cher qu'une centrale nucléaire. Et ça coûte
à peu près la moitié moins cher qu'une centrale thermique,
quand on comprend les coûts de fournitures de cette centrale, parce que
ce n'est pas évident, l'eau, une fois qu'elle est installée,
qu'elle coule d'elle-même. Dans le fond, dire que c'est plus
coûteux que de bâtir des barrages, ce ne sont peut-être pas
nécessairement les chiffres avec lesquels on travaille habituellement.
En tout cas, c'était cette affirmation qui m'a fait dresser un peu
l'oreille. Quant aux économies d'énergie, j'en conviens avec
vous, c'est toujours plus facile d'économiser ou toujours moins
coûteux d'économiser que de gaspiller.
Je voudrais vous entendre un peu plus longuement sur la question des
rachats de contrats de biénergie d'Hydro-Québec. Vous avez
beaucoup parlé de Biénergie plus, etc., mais vous avez comme
effleuré, à peine, le sujet de la politique d'Hydro-Québec
qui a voulu qu'au cours des derniers mois, elle a investi quelque 160 000 000 $
ou quelque chose de semblable pour racheter des contrats de biénergie,
dans l'industriel et le commercial. C'est loin d'être, disons,
susceptible d'intéresser de nouveaux investisseurs à remettre de
l'argent là-dedans, à mon avis, en tout cas. (12 h 45)
M. Marceau: Si vous me le permettez, M. le député.
Voici. Dans cette question de rachat, d'abord, il faut dire qu'il y a eu cette
vague biénergie, première vague biénergie commerciale et
industrielle, qui a permis de constituer ce parc commercial et industriel
à grand volume. Comme je le mentionnais tout à l'heure, c'est
justement cet avantage, pour Hydro, de pouvoir, à un moment critique, un
moment où, pour aller chercher un peu de sécurité, on se
dit: Pour passer cette pointe-là, on va aller chercher un petit coussin,
là, on a un bassin qu'on peut utiliser.
Quand on parle de rachat, qu'il y a eu dans près de 160 000 000
$, à ma connaissance, c'était plus près des 100 000 000 $
qu'était ce montant. C'est un peu plus bas puis un peu plus raisonnable.
À ce moment-là, tout ce que l'on a offert aux gens... Et
ça incluait ce montant de quelque 100 000 000 $, ça incluait le
manque à gagner. Ça incluait le manque à gagner... Les
clients qui auraient consommé de l'électricité pendant
cette période-là, les quelques millions, enfin, il y en a
peut-être la moitié qui était vraiment le manque à
gagner. L'autre partie, c'est qu'on a dit aux gens: Écoute, pendant un
an, là, on aimerait ça avoir ton jus. Écoute, on va le
prendre, on va te payer, on va te donner une petite bonification, tout
simplement, pour la période. On n'a pas fait de cadeau aux clients. Les
clients étaient contents.
J'ai personnellement répondu à des dizaines et des
dizaines, je devrais dire, de clients qui recevaient cette offre-là. Ils
ne savaient pas trop comment l'interpréter. D'abord, ils lisent les
journaux, eux aussi, et les chiffres sont toujours impressionnants. Alors,
naturellement, là, ils se demandaient où est-ce qu'ils devaient
se situer. Mais, finalement, le rachat a permis de pouvoir s'assurer d'un
coussin pour Hydro, et ça, ce n'est que temporaire dans le temps. Et les
gens qui ont accepté d'être achetés pendant une
année sont très heureux. Écoutez, voilà. Ils
collaborent avec Hydro-Québec. C'est une nouvelle philosophie.
Hydro-Québec ne le leur a pas imposé, ça a
été facultatif. Et j'en connais très peu qui n'ont pas
accepté, et c'était vraiment facultatif. Voilà. Est-ce que
ça répond à votre question? Je peux encore aller plus
loin.
M. Claveau: Ça répond partiellement à ma
question, parce que...
M. Magnant: M. le député, si je peux ajouter. C'est
qu'on parle surtout de biénergie industrielle, à ce
moment-là, le rachat, n'est-ce pas?
M. Claveau: Oui. Mais le problème, dans le fond...
M. Magnant: C'est que c'est une réserve
énergétique pour Hydro-Québec.
M. Claveau: Oui, mais... Et on le voyait, tout à l'heure,
avec l'Association des manufacturiers canadiens. Le problème n'est pas
nécessairement dans le résidentiel, là où on... Par
exemple, en termes d'économie d'énergie, on a une des meilleures
cotes au monde, dans le domaine résidentiel, actuellement. On est le
deuxième ou le troisième meilleur pays au monde, en termes
d'économie d'énergie résidentielle. On a un gros
problème dans l'industriel et le commercial, là où on est
plutôt du genre: On a de l'électricité en masse, puis on
n'est pas regardants.
Moi, je veux bien qu'on développe des programmes comme
Biénergie plus, etc., qui s'adressent à une clientèle
très spécifique, d'ailleurs, dans le résidentiel, parce
que, quand on parle de résidentiel, c'est le module unifami-lial, petit
bungalow, généralement pas trop vieux, assez bien isolé,
du moins, quand on vient dans les nouveaux quartiers, les gens qui sont, entre
autres, capables de se payer cet équipement-là. Parce que ce
n'est pas évident que c'est donné,
non plus. Alors, les gens qui sont capables de se payer ces
équipements-là, généralement, ont commencé
par voir à leur fenestration, par refaire leur isolation de maison,
etc., investir un certain nombre de choses. Et on complète en diminuant
le coût de la facture, à long terme, en se dotant d'un bel
équipement biénergie qui est relativement coûteux,
même s'il peut être subventionné en partie.
Ce n'est pas évident non plus, si on ne touche pas le secteur
commercial, avec les "Woes" appartements - ce qu'on a discuté aussi, en
début de matinée, avec la Fédération des ACEF du
Québec - mal isolés dans lesquels les propriétaires ont
peu d'intérêt à investir parce qu'ils savent que, de toute
façon, ce sont des gens qui n'ont pas de gros revenus et qui cou rent
après des loyers. Au pire aller, ils baissent le loyer et la facture
d'électricité augmente et les gens sont pris avec ça. Si
on ne trouve pas des mécanismes pour faire en sorte que, au-delà
du beau petit bungalow de banlieue, on soit capables de rentrer la
biénergie d'une façon systématique - je parle de la
biénergie ou, enfin, de la préservation de l'énergie d'une
façon systématique - dans ce genre de
résidentiel-là qui loge quand même, dans nos villes
québécoises, une bonne proportion de la population. . On n'a rien
fait quant aux mesures totales d'économie d'énergie. On a
amélioré les conditions de vie d'une certaine catégorie de
la population qui, déjà, n'est pas trop
défavorisée, mais on n'a pas fait grand-chose, en termes
d'économie globale d'énergie, au Québec.
M. Marceau: Voici, M. le député. Tout à
l'heure, j'ai mentionné qu'il y avait eu 100 000 résidences
unifamiliales dans une première vague qui remonte à quelques
années. On a mentionné aussi qu'il y en avait 9000 dans les
domaines commercial et industriel. L'industriel a été
touché par la biénergie, oui, mais, disons, en moins grand nombre
puisque, déjà, dans l'industriel, écoutez, c'est pour de
la production: ils doivent performer s'ils veulent qu'il reste des
bénéfices au bout. Là où ça a eu un
énorme succès, et je peux vous dire que vous n'êtes pas
dans une maison d'appartements dans les grands centres des régions de
Montréal et Québec où il n'y a pas eu un seul "bloc"
appartement, édifice à logements multiples, appelons ça
comme ça, qui n'a pas eu l'offre et l'installation par milliers. Les
maisons d'appartements en ont bénéficié. Il est bien
entendu... Et remarquez bien que nous n'étions pas là pour aller
vérifier si, lors du renouvellement du bail, le propriétaire
immobilier à qui on apportait des économies d'opération de
chauffage, c'est vraiment sur les coûts, alors il devait normalement le
répercuter, eh bien, on n'allait pas là vérifier s'il le
répercutait sur le loyer lorsqu'il le renouvelait. On baissait les
coûts de chauffage de 25 %, 30 % et, même, 40 % dans certains cas,
et ça, dans des milliers de maisons d'appartements qui chauffaient au
gaz ou à l'huile et dans lesquels on a installé la
biénergie. C'est la vague. C'est ce qui a permis ce rachat et
même, dans le cas de rachat, je peux vous dire que ces
propriétaires immobiliers n'ont pas besoin de remonter les loyers, ils
en retrouvaient encore leur compte. Parce qu'on ne demande pas à des
gens: Faites des sacrifices, sans leur donner une certaine forme de
compensation ou de gratification quelque part, à un moment
donné.
M. Magnant: M le député, est-ce que je pourrais
seulement ajouter que, dans nos démarches envers Hydro-Québec, on
recommande la maximisation du programme Biénergie, de façon
à couper plus d'électricité. Dans notre mémoire,
nous mentionnons que le tout électrique qui va se construire et se
développer durant les années quatre-vingt-dix, c'est 2500
mégawatts. Or, le programme Biénergie va éponger une
partie des constructions et de la conversion tout électrique. Alors,
vous avez parfaitement raison de mentionner que le programme doit être
maximisé dans les industries, dans le commercial et dans le
résidentiel tout-électrique.
Une voix: C'est ça
M. Claveau: D'abord, est-ce que le programme Biénergie
plus s'applique à ces "blocs"? D'autre part, afin de me faire une
meilleure idée de la situation, vous me parlez de milliers de maisons
d'appartements mais, moi, je pourrais vous dire aussi que j'en connais au moins
quelques dizaines qui n'en ont pas. Est-ce que vous avez un pourcentage
précis du nombre de loyers ou d'édifices multifamiliaux qui se
chauffent actuellement avec la biénergie, sur l'ensemble du territoire
du Québec?
M. Marceau: Voici. Les chiffres donnés de l'ensemble de la
population, non, je ne les ai pas apportés, mais je vais vous donner
juste la distinction. D'abord, le "bloc" appartement dont on parle, s'il est
tout électrique, s'il est avec des plinthes électriques ou des
unités de climatisation individuelles dans chacun des appartements,
à cet édifice, on ne peut, dans ce cas là, adapter la
biénergie. C'est impossible, en tout cas, il n'y a pas de technologie
aujourd'hui qui le permette. Donc, on ne peut pas y toucher et, bien entendu,
il y a un grand nombre de ces habitations, de ces "blocs" appartements qui sont
tout-électriques.
Dans le programme Biénergie plus, la première question,
oui, on y touche, avec la biénergie plus, au petit "bloc" appartement de
trois, quatre, cinq logements et même jusqu'à six logements.
Ça lui est accessible, ce programme Biénergie plus, à la
condition qu'il ait la biénergie, bien entendu, auparavant, dans la
première vague d'il y a quelques années. La biénergie plus
est
également accessible. Pourquoi n'a-t-on pas la biénergie
plus au gros "bloc" appartement qui est en biénergie? Habituellement,
dans ces "blocs" appartements, quand il y a suffisamment de logements, il y a
toujours un concierge, une personne responsable. Il y a toujours quelqu'un qui,
matin et soir, va s'assurer que ça ne marche pas pour rien, cet
équipement-là, que ça ne fonctionne pas pour rien et que
ça ne coûte pas trop cher au propriétaire. Il est
payé pour ça, le concierge, aller surveiller. Donc, il n'est pas
besoin d'avoir de ces contrôles de surveillance, contrat d'entretien,
quoique de plus en plus de propriétaires préfèrent obtenir
un contrat de services annuel d'entreprises spécialisées. Ce
n'est pas la biénergie plus qui est appliquée dans ces
niveaux-là.
M. Claveau: Tout à l'heure aussi, avec l'Association des
manufacturiers canadiens, on nous disait qu'il serait souhaitable d'avoir un
programme de pénétration du gaz naturel dans le
résidentiel. Est-ce que vous croyez que, même si ça peut
devenir un concurrent, en ce qui vous concerne, il serait souhaitable que l'on
introduise le gaz naturel dans le résidentiel, comme ça se fait
beaucoup en Europe? D'ailleurs, dans les grandes villes européennes, il
y a des réseaux de gaz naturel dans à peu près toutes les
maisons. On a des chauffe-eau au gaz, on a des frigidaires au gaz, on a un
certain nombre d'équipements au gaz qui peuvent drôlement
améliorer le coefficient de rendement énergétique. Juste
en termes de chauffe-eau, par exemple, ce n'est pas nécessairement
toujours obligatoire d'avoir 60 gallons à 180° dans son sous-sol
à l'année longue.
Une voix: C'est vrai.
M. Marceau: O.K. D'abord, une chose. Je dois vous dire qu'en tant
que biénergiste, toutes les formes de combustible sont nos
alliées parce qu'on a besoin, en biénergie, d'avoir du gaz ou
d'avoir du mazout. Donc, on n'est pas contre, au contraire, sauf dans le bon
temps, que ce soit le gaz et le mazout et, dans le bon temps, que ce soit
l'électricité. Ce n'est pas, disons, nous qui pouvons
répondre pourquoi Gaz Métropolitain - pour parler puisque c'est
notre industrie, ici, au Québec - n'est pas intéressée
à étendre ses réseaux de distribution dans le
résidentiel. On sait qu'ils ne le sont pas. Pourquoi? Bien,
écoutez. Ils seront ici dans quelques jours. Ça ne les
intéresse pas.
L'autre côté. Prenons l'autre forme pour installer la
biénergie, même dans le résidentiel, nous avons besoin
d'entrer oHoctivement le gaz ou le gaz propane. Le gaz propane peut être
une très bonne alternative. Le gaz propane peut être disponible
partout. C'est une autre alternative. C'est moins compliqué que
d'installer des réseaux peut-être, moins compliqué que
d'installer des réseaux de gaz naturel, briser les rues, rentrer
ça pour des petits débits. Peut-être qu'avec le gaz
propane, c'est peut-être une solution. Mais on n'est pas en
compétition. Au contraire, c'est que partout où il y a du gaz,
partout où il y a du mazout, c'est un client potentiel pour la
biénergie. Ça permet d'empêcher que ce client ne devienne
tout électrique, à un moment donné.
Parce que là, la biénergie, il faut expliquer deux choses.
Il y a une distinction dans le temps. À un moment donné, la
biénergie, prenons le commercial, c'était pour vendre de
l'électricité. Si le client commercial - le "bloc" appartement,
par exemple - n'avait pas été incité, à l'aide de
subventions et à l'aide de spécialistes ou d'agents, de
promoteurs, de marketing comme nous, à adopter le mode biénergie,
il ne serait jamais venu. C'est à l'aide de subventions qu'il est venu
à la biénergie.
M. Magnant: M. le député, est-ce que je peux
ajouter seulement une chose, M. le Président? C'est que pour chaque
dollar investi en électricité, 0,80 $ reste au Québec.
Pour chaque dollar investi en gaz naturel, environ 0,14 $ reste au
Québec.
M. Marceau: Ça aussi, c'est une différence.
M. Magnant: C'est tout. Question d'autosuffisance
énergétique.
M. Marceau: Mais le point majeur... Pourquoi aujourd'hui
Hydro-Québec pousse tant dans le résidentiel? Voici, je termine
mon exposé. C'est qu'avant, c'était pour en vendre. Si on le
laisse tranquille, il ne vient pas. Aujourd'hui, la vague biénergie dans
laquelle on s'en va a vraiment deux types de clientèle: celui qui,
également, est déjà au mazout qui risque de venir à
l'électricité... Parce que la détérioration
même du mazout est à un rythme de 20 000 à 30 000 par
année, à part, en plus, la construction neuve.
Donc, Hydro-Québec, malgré le fait qu'elle
décourage aujourd'hui le client qui veut venir au
tout-électrique, lui conseille peut-être une autre forme. Mais
elle ne pouvait pas le faire d'une manière en étant à
l'aise, disons, parce qu'il n'y avait pas d'alternative. Aujourd'hui, on a
vraiment de l'équipement neuf biénergie, de l'équipement
intégré, performant. Là, on peut le faire. Donc,
aujourd'hui, c'est pour empêcher - la vague biénergie dans
laquelle on s'en va - que le client résidentiel, un bon jour, demain
matin, dans un an devienne un client tout-électrique, ce qui est
catastrophique. Hydro-Québec pourra vous dire ce que ça lui
coûte. Un client résidentiel, petit bungalow tout
électrique, ça peut lui coûter entre 500 $ et 800 $ de
coût. Non pas de profit, là. Indépendamment de la vente
d'électricité ou de ce que ça peut rapporter. Alors, vous
imaginez... Il faut que, coûte que coûte, Hydro-Québec
empêche ces clients-là de venir. On peut faire
des économies d'énergie, mais si, par l'autre porte, on
laisse entrer des clients dans l'électricité, ça ne marche
plus. Alors c'est pour ça. Alors c'est la clientèle qui,
aujourd'hui, est visée. Alors, la philosophie change. Avant,
c'était pour vendre de l'électricité; aujourd'hui, c'est
pour empêcher un client de venir tout électrique. Et c'est
ça, l'économie d'énergie. Écoutez, c'est la porte
à côté ou la porte d'en arrière. Pendant que tu
surveilles la porte d'en avant, une...
Le Président (M. Bélanger): Je me dois de vous
interrompre...
M. Claveau: Ça arrive ça.
Le Président (M. Bélanger): ...et de vous remercier
ici. Alors, M. le député d'Ungava, si vous voulez remercier nos
invités.
M. Claveau: Je vous remercie de votre belle présentation.
C'était très intéressant. Et il faut souhaiter qu'on ait,
avant longtemps, le gaz naturel, la biénergie disponible partout sur le
territoire du Québec, j'oserais même dire. Alors...
Le Président (M. Bélanger): Mme la minis tre.
Mme Bacon: J'ai l'impression...
M. Claveau: ...en vous souhaitant bonne chance.
Mme Bacon: ... je m'excuse, j'ai l'impression, M. Marceau,
qu'avec vos talents de promoteur, vous nous avez fait faire un véritable
"surfing" sur la vague de biénergie.
Des voix: Ha, ha, ha!.
Mme Bacon: On est presque rendus, là...
M, Marceau: On va peut-être se rendre à l'île
Paton.
Mme Bacon: ...en bout de ligne. Alors on vous remercie beaucoup
de votre présentation et du mémoire que vous nous avez fait
parvenir.
M. Marceau: Ça nous a fait plaisir. Merci.
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie l'Association québécoise
des bi-énergistes inc. et suspend ses travaux jusqu'à 16 h,
c'est-à-dire après la période de questions. Je vous
remercie. Bon appétit!
(Suspension delà séance à 13 h 2) (Reprise à
16 h 14)
Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît,
je demanderais à chacun de bien vouloir reprendre sa place pour que la
commission de l'économie et du travail puisse reprendre sa consultation
générale et ses auditions publiques sur la situation et les
perspectives de l'énergie électrique au Québec.
Nous recevons, dans un premier temps, l'Association minière du
Québec qui sera représentée par M. Jean Roberge, adjoint
au directeur général. J'inviterais M. Roberge à se
présenter à la table, s'il vous plaît. Vous avez, M.
Roberge, 20 minutes pour la présentation de votre mémoire et il y
aura une période d'échanges avec les parlementaires, par la
suite. Je vous demanderais donc de procéder à la lecture de votre
mémoire sans plus tarder. Je vous en prie.
Association minière du Québec
M. Roberge (Jean): Merci, M. le Président, bonjour.
Bonjour, Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources, MM. et Mmes
membres de l'Assemblée nationale. Il nous fait plaisir d'être ici
pour vous expliquer sommairement ce que l'Association minière du
Québec pense du développement de l'énergie
électrique au Québec.
Tout d'abord, je vais vous présenter l'Association minière
Elle regroupe la presque totalité des entreprises minières
québécoises. Parmi les membres de l'Association, certains sont de
très grands consommateurs d'électricité, d'autres sont des
consommateurs industriels En 1988, le coût relatif à
l'énergie totale consommée par les entreprises minières,
incluant le pétrole et autres sources d'énergie par les membres
de l'Association, s'est élevé à...
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que je pourrais
vous inciter à parler plus fort?
M. Roberge: Oui.
Le Président (M. Bélanger): Et je demanderais, s'il
vous plaît, dans la salle qu'on respecte M. Roberge pendant son droit de
parole. Alors, je vous en prie.
M. Roberge: Vous me le direz si c'est encore trop faible. En
1988, le coût relatif à l'énergie, incluant le
pétrole et autres sources d'énergie avec l'énergie
électrique, s'est élevé à 188 000 000 $ pour les
entreprises minières, dont 126 000 000 $ étaient consacrés
uniquement à l'énergie électrique, pour une consommation
de près de 5 000 000 000 de kilowattheures. Nous devons souligner que
les chiffres que nous venons de vous mentionner n'incluent pas l'énergie
électrique consommée par les mines d'amiante qui no sont pas dans
nos statistiques, à ce moment-ci. Los entreprises minières dont
il s'agit exploitent le fer, le cuivre, le zinc, l'or, le sel, la silice, etc.,
au Québec Le coût de l'électricité représente
environ 12 % des revenus
miniers des entreprises minières membres. Ceci dit, vous
saisissez certainement l'importance que l'énergie électrique
occupe chez nos membres. Ceux-ci sont répartis dans différentes
régions du Québec, en Abitibi-Témiscamingue, Matagami,
Joutel, Chibougamau, Chapais, Chicoutimi, Côte-Nord, Gaspésie,
Îles-de-la-Madeleine.
Les entreprises minières sont des entreprises de ressources et
permettent au Québec de se situer parmi les premiers producteurs
mondiaux pour les minéraux exploités. Les entreprises
minières sont aussi les entreprises qui ont permis le
développement de différentes régions
éloignées et Hydro-Québec a été un des
premiers partenaires de ce développement. Hydro-Québec est aussi
un partenaire de développement important pour toutes les régions,
pour les entreprises et pour la société québécoise
en général. L'importance d'Hydro-Québec,
c'est-à-dire de l'électricité, n'est plus à
démontrer. En effet, qui pourrait s'en passer dans la
société où nous vivons aujourd'hui? Une
caractéristique importante et fort intéressante pour le
Québec dans le domaine de l'électricité, c'est qu'il
s'agit d'une ressource renouvelable que nous avons en abondance. Cependant,
malgré cette abondance de la ressource, nous sommes rendus à un
carrefour où il est justifié de se demander dans quelle mesure
nous continuerons à développer l'électricité comme
source d'énergie, comme source de développement et comme source
de revenus.
À propos de la fourniture d'électricité, au cours
des dernières années, celle-ci, au Québec, a connu des
difficultés au niveau de l'approvisionnement et l'explication en a
été une faible hydraulicité, selon Hydro-Québec. En
effet, certaines années ont été pauvres en chutes d'eau et
Hydro-Québec a dû réagir en mettant sur pied des programmes
de façon à assurer une fourniture d'électricité
convenable pour la clientèle. Dans le milieu industriel, nous avons
aussi réagi. Hydro-Québec a présenté des programmes
intéressants d'interruption d'électricité ou de rachat de
contrats de biénergie de façon à pouvoir satisfaire la
demande québécoise. Dans le cas de rachat des contrats de
biénergie, on doit cependant noter que l'événement a
rapidement été suivi par une hausse de près de 80 % du
coût du propane, affecté par une forte demande soudaine. Cette
situation était assez neuve pour les Québécois
habitués à un approvisionnement d'électricité qui
ne causait aucun problème particulier antérieurement. On s'est
vite rendu compte, et Hydro-Québec le démontre dans ses tableaux,
que la fourniture d'énergie électrique n'est pas sans fin si des
aménagements nouveaux et du développement ne s'effectuent pas.
Les entreprises ont donc examiné les possibilités de rationaliser
l'usage de l'énergie électrique. Ressentant la
problématique actuelle de la fourniture de l'électricité,
l'Association a rencontré la société Hydro-Québec
pour discuter de la sécurité d'approvisionnement
électrique et les façons de mieux l'utiliser. Ce qui nous
préoccupait, c'était de s'assurer que les années à
venir ne souffrent pas d'un handicap en fourniture d'énergie
électrique. Nous souhaitons également que le nombre de pannes
réduise et que l'on puisse optimiser l'usage de
l'électricité dans nos opérations.
Au sujet de l'optimisation de l'usage de l'électricité,
nous croyons que la situation est en bonne voie, et ceci, probablement par la
force des choses. Quant à la fourniture d'électricité
à long terme et les pannes d'électricité ou les coupures
planifiées, il ne semble pas que ce problème puisse se
résorber rapidement. Pour ces deux éléments, nous croyons
qu'Hydro-Québec a un gros travail de développement pour
l'approvisionnement électrique et un gros travail également pour
l'entretien de ses lignes de transport d'électricité.
À propos du coût d'électricité pour
l'industrie minière, il correspond à près de 10 % - c'est
plutôt 12 % - de ses ventes de minéraux et de métaux. Ce
coût est très important et difficilement compressible. Aussi,
toute surchage ou augmentation a un impact négatif très difficile
à surmonter pour l'industrie minière L'augmentation actuellement
prévue impliquera une dépense supplémentaire de
près de 10 000 000 $ pour nos membres et de près de 15 000 000 $
pour tout le secteur de l'industrie minérale. En effet, les sources de
revenus pour l'industrie minière sont la vente de ses produits dont les
prix sont fixés au niveau international, selon l'offre et la demande.
Toute augmentation dans les coûts ne peut être refilée au
client comme peuvent le faire d'autres entreprises. En fait, nous sommes
à la merci de la fixation de ces prix et nous sommes sujets à la
fluctuation du dollar canadien par rapport aux monnaies
étrangères. Il s'agit là de deux contraintes faisant en
sorte que les coûts de production doivent être gérés
d'une façon très minutieuse. À propos de la fluctuation du
dollar, pour un cent de variation en faveur du dollar canadien vis-à-vis
du dollar américain, ceci signifie une perte d'environ 15 000 000 $ de
revenus, de profit pour les entreprises.
Il est normal, cependant, que le coût de la fourniture
d'électricité subisse des hausses, mais 11 est difficilement
concevable qu'une hausse du coût d'électricité
dépasse le pourcentage d'augmentation du coût de la vie.
Nous croyons aussi que les coûts assumés par le secteur
résidentiel devraient être relevés pour équilibrer
la contribution de chacun des secteurs selon leur niveau de consommation.
Lorsque l'on parle des coûts, il s'agit des revenus
réalisés par Hydro-Québec, et, sur ce point, nous
considérons qu'il ne devrait pas s'agir d'une source de revenus
généralisée pour le gouvernement du Québec.
À titre d'actionnaire unique, le gouvernement du Québec retire
des dividendes importantes de la société, mais ceci
ne doit pas l'empêcher d'investir dans son développement.
Les revenus d'Hydro-Québec devraient être principalement
utilisés pour réaliser ses objectifs de fourniture
d'électricité, plutôt que de générer des
fonds pour le gouvernement. Lorsque l'on parle de coûts et de revenus, on
doit aussi se demander si ces derniers sont utilisés le plus
efficacement possible; ce qui m'amène à vous parler de la
productivité.
Sous ce volet, nous y voyons deux aspects. Tout d'abord, avec les
écarts de température que nous vivons au Québec et avec
les périodes d'utilisation de l'électricité qui varient
grandement au cours d'une même journée, HydroQuébec doit
avoir les possibilités de production d'énergie dépassant
largement l'usage moyen de l'électricité. Lorsque l'on examine
les tableaux d'Hydro-Québec, on constate que l'équipement de
production d'énergie électrique est utilisé à
environ 56 %, de façon à satisfaire les périodes de
pointe. Il y a donc près de 45 % des équipements de production
qui ne servent pas toujours.
Hydro-Québec doit voir à la maximisation de l'usage de ses
équipements, et l'exportation de l'énergie électrique
semble contribuer à maximiser cet usage des équipements
actuellement installés.
La question qui reste à déterminer est de savoir dans
quelle mesure nous devons exporter pour maximiser le potentiel de production
installé. On peut aussi se demander comment le taux moyen d'utilisation
de l'équipement de production d'électricité
québécois se compare avec les autres producteurs canadiens ou
américains.
Le deuxième aspect que nous trouvons important, dans le domaine
de la productivité, c'est la gestion elle-même, à
l'intérieur d'Hydro-Québec, qui devrait être vue avec une
constante perspective d'amélioration de services, de la qualité
du service et la volonté de vouloir faire plus avec moins de personnel.
Ceci peut vouloir dire faire appel davantage à la sous-traitance,
là où ce sera rentable.
Dans les négociations collectives du syndicat avec
Hydro-Québec, il est régulièrement mis de l'avant la
problématique de la sous-traitance. Pour nous, nous y voyons une
solution valable que de faire effectuer des travaux à moindre coût
lorsque c'est possible, tout en répartissant la compétence dans
différentes entreprises québécoises, et en créant
ainsi un certain développement, sans nuire à HydroQuébec.
L'appel plus large à la sous-traitance et l'augmentation de la
productivité de chacun des employés d'Hydro-Québec devrait
être le défi des années à venir. Quant à
l'avenir, on décèle quelques problèmes, par exemple la
capacité de production et la demande à venir.
La puissance installée de production d'électricité
est utilisée à environ 56 % - nous en avons parlé
précédemment - sur une moyenne annuelle. À première
vue, on pourrait dire qu'il n'y a qu'à augmenter cette utilisation pour
compenser les besoins à venir d'électricité. Cependant,
à l'examen, et comme on l'a mentionné plus haut, on se rend
compte que la surcapacité de produire de l'électricité est
nécessaire pour faire face à la variation des demandes et,
particulièrement, des demandes de pointe. Aussi, dans ce contexte,
l'exportation de l'énergie électrique peut compenser cette perte
d'"efficacité". En effet, dans les périodes d'utilisation moindre
de notre capacité de production, nous pouvons vendre cette
électricité qui, de toute façon, ne serait pas
utilisée par les utilisateurs québécois.
Il faut cependant aussi se rendre à l'évidence que, au
rythme actuel de l'évolution de la demande, il y aura un manque dans
l'offre par rapport à nos besoins. Il faut donc développer de
nouvelles sources d'approvisionnement qui seront nécessaires, et cela,
à court terme, comme le démontrent les tableaux
d'Hydro-Québec. Dans le document d'Hydro-Québec, intitulé
"Proposition de plan de développement 1990-1992, Horizon 1999", le
tableau 3.16 et le graphique 3.10 montrent clairement que tout retard dans
l'échéancier des travaux nécessaires occasionnerait une
pénurie dès 1992.
Tout en faisant ce développement, la vente de
l'électricité par l'exportation peut continuer à compenser
les périodes hors pointe et générer des revenus.
Cependant, l'exportation ne doit pas devenir la justification du
développement de notre ressources naturelle. En effet, nous croyons
toujours que l'objectif primordial d'Hydro-Québec est, et devra
demeurer, de satisfaire à la demande et aux besoins des
Québécois, en favorisant le développement
économique et le développement des régions. Les besoins
anticipés sont proches et réels, et il est temps d'agir
aujourd'hui même.
À propos de l'environnement, le développement dont on
vient de parler a des conséquences importantes. Le "harnachement" des
rivières affecte l'écosystème et les résidants
concernés; les autochtones de la région de la Baie-James, par
exemple, le font vivement savoir Nous croyons, à cet égard, que
le ministre de l'Environnement, M. Pierre Paradis, a raison d'aller de l'avant
et de commencer les études d'impact nécessaires
immédiatement, de façon à ne pas être en retard sur
l'échéancier des travaux nécessaires. Malheureusement,
dans ce dossier, le gouvernement fédéral risque de causer des
retards ou des difficultés si une entente n'intervient pas sur cette
question des études d'impact et des répercussions
environnementales. Nous souhaitons ardemment que les tracasseries
juridictionnelles ne causent pas de retard dans les démarches qui sont
déjà désespérément longues. Il est bien
certain que tous les travaux d'aménagement devront être
réalisés dans une optique de minimiser l'impact sur
l'environne-
ment, de prévoir des mesures de mitigation, etc.
Dans le coût économique du développement de
nouvelles sources de production, il faudra certainement tenir compte du
coût environnemental afférent, et il faudra aussi tenir compte du
coût économique que pourrait représenter la rupture
prochaine de l'approvisionnement en électricité à laquelle
on peut faire face.
Un mot sur les chutes Churchill. En l'an 2009, le Québec se
retrouvera devant la possibilité de renouveler le contrat qui le lie
à la province de Terre-Neuve quant à l'approvisionnement en
électricité par les installations aménagées aux
chutes Churchill. Nous croyons qu'il est important dès à
présent de prévoir les conséquences éventuelles
d'une hausse importante du coût de cette électricité et
d'évaluer dans quelle mesure nous serons autonomes, à ce
moment-là. Divers scénarios devraient être envisagés
à cet égard. La production en électricité des
chutes Churchill équivaut à la puissance installée
à La Grande II, sur le territoire de la Baie James, soit 14,8 % de la
puissance totale installée. Si le contrat avec la province de Terre
Neuve est maintenu ou renouvelé en l'an 2009, à quel coût
le sera-t-il, et qui va payer la hausse de ce coût inévitable?
Subsidiairement, il faut également se demander dans quelle mesure ceci
pourrait affecter les exportations et les revenus tirés de la fourniture
d'énergie électrique. D'un autre côté, si une
rupture du contrat ou de l'approvisionnement en électricité
survenait, comment ferons-nous pour compenser cette éventualité?
Dans l'une et l'autre des alternatives, il faut dès à
présent planifier une certaine autonomie à cet égard.
Les défis que nous avons à relever. Le Québec est
très énergivore, surtout depuis qu'Hydro-Québec a
fortement incité la population à recourir de
préférence à l'énergie électrique. Si l'on
retranche les milliards de kilowattheures exportés, le Québec
produit et consomme une quantité énorme de kilowattheures,
comparativement aux autres provinces canadiennes, et il se compare à ce
que produisent au total les États-Unis, l'URSS ou le Brésil.
Le premier défi auquel nous devons répondre, comme
société, c'est la sécurisation des approvisionnements en
énergie électrique. Et pour Hydro-Québec comme pour le
Québec, il faut développer des sources d'approvisionnement
d'électricité de façon à fournir à la
demande, dans la mesure de nos moyens et dans la mesure de nos besoins. En ce
qui concerne encore la sécurité des approvisionnements, il faut
faire en sorte que les pannes d'électricité, coûteuses pour
le milieu industriel, soient minimisées par des programmes d'entretien
efficaces. De plus, nous croyons qu'avec l'aide d'Hydro-Québec, il y
aurait certainement moyen de rationaliser l'usage de
l'électricité par tous les consommateurs. Hydro-Québec
prévoit à cet égard des campagnes de promotion pour la
rationalisation et l'écono- mie de l'énergie, et nous sommes
d'accord avec cette démarche.
Le deuxième défi auquel la société
québécoise et Hydro-Québec doivent faire face, c'est
l'amélioration de la productivité. Il faut améliorer cette
productivité tant à l'interne qu'à l'externe. À
l'interne, il s'agit des travailleurs d'Hydro-Québec, qui doivent de
plus en plus être efficaces et productifs et accepter le fait qu'en
certains cas, l'appel à la sous-traitance serait
préférable. En ce qui concerne l'amélioration de la
productivité à l'externe, il faut s'assurer que les
équipements sont bien entretenus et efficaces. À cet
égard, il faudrait vérifier la durée de vie utile des
centrales actuellement en exploitation, évaluer leur coût
d'entretien, leur état et leur pourcentage d'utilisation. Est-ce que des
centrales sont maintenues en service malgré des coûts très
élevés par rapport à d'autres centrales? Est-ce que
l'usage maximum de toutes ces centrales est réalisé, et dans
quelle mesure pouvons-nous l'améliorer? Dans les années à
venir, devrons-nous envisager la production de l'énergie par le
consommateur? Serait-il efficace de penser à privatiser certains aspects
de la fourniture de l'électricité, comme, par exemple, la
production, le transport, l'entretien?
Un troisième défi, c'est l'autonomie. Le Québec est
privilégié par cette ressource qui est renouvelable et
l'électricité devrait être utilisée comme un facteur
très important d'économie, de développement,
comparativement aux autres ressources d'énergie, telles le
nucléaire ou le pétrole. Nous croyons que le développement
de l'électricité au Québec doit essentiellement viser
à satisfaire les besoins de la société
québécoise et se faire dans un esprit de rentabilité, en
vue d'un développement économique soutenu et durable et au
meilleur coût possible. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M.
Roberge. Mme la ministre. (16 h 30)
Mme Bacon: Merci, Me Roberge, pour votre mémoire. Dans un
premier temps, j'aimerais peut-être apporter deux précisions.
D'abord, la première touche le contrat de Churchill Falls. Ce contrat,
signé en 1969, couvre une période de 65 ans, à partir de
1976. Il se terminera donc en 2041 et non pas en 2009, comme vous le dites dans
votre mémoire. Aussi, la deuxième précision touche les
recettes d'Hydro-Québec comme source de revenu du gouvernement du
Québec. J'aimerais peut-être rappeler ici que les hausses
tarifaires ont toujours été accordées sous la
considération d'assurer une saine santé financière
à HydroQuébec, en particulier, pour respecter aussi les
critères financiers, soutenir les investissements et non pas pour
dégager un dividende. Alors, dans l'esprit d'assurer une saine
santé financière à Hydro-Québec, le gouvernement
n'a pas toujours demandé le dividende maximum à
HydroQuébec. Finalement, malgré les hausses tarifaires
importantes qui ont été annoncées, je pense qu'il
est à noter qu'aucun dividende n'est prévu de 1990 à 1992
dans le plan de développement d'Hydro-Québec. C'étaient
deux précisions que je voulais apporter au début de notre
dialogue.
À la lecture de votre mémoire, aussi, il y a une
préoccupation qui semble surgir régulièrement, c'est
l'assurance d'une disponibilité en électricité, dans le
futur. Est-ce que vous pourriez nous expliquer la place qu'occupe
l'électricité dans le secteur économique que vous
représentez?
M. Roberge: L'énergie électrique, si elle
n'était pas présente dans les mines, ne permettrait pas
d'exploiter nos entreprises minières actuelles. C'est la principale
source d'énergie. Il faudrait remplacer l'électricité par
du pétrole ou par du propane, ou par du charbon, ou l'énergie
nucléaire qui n'existe pas. Ce serait impossible. Ensuite, ce serait
impossible et trop coûteux, à cause de l'éloignement. Les
entreprises minières situées sur la Côte-Nord ne sont pas
tellement loin des lignes de transport de Churchill vers le centre du
Québec. Dans la région de Rouyn-Noranda ou dans la région
de la Baie-James, ils ne sont pas très loin non plus des lignes de
transport de l'énergie électrique. Alors, à moindre
coût, l'électricité est la ressource nécessaire et
utile. Et on ne pourrait pas remplacer par d'autres sources
d'énergie.
Mme Bacon: On sait que votre secteur d'activité a quand
même une place sur le marché international, est-ce que ça
peut aussi être un facteur de concurrence, une stabilité des prix,
par exemple, sur le plan international, par rapport à votre secteur
d'activité?
M. Roberge: Oui, certainement, comme, par exemple, dans le
domaine du fer. Dans le domai ne du fer, le plus gros concurrent, c'est le
Brésil, qui a une facilité d'exploitation très
différente par rapport à ici. À beaucoup moindre
coût, ils peuvent exploiter leurs mines, alors qu'ici, il faut faire des
miracles, je dirais, pour concurrencer le Brésil et d'autres pays. Et
nous réussissons à être dans les premiers producteurs,
justement, parce que l'électricité nous permet une
versatilité et un coût relativement stable par rapport à
d'autres ressources qui fluctueraient, comme le pétrole, on le voit,
souvent fluctue Et les autres entreprises aussi, dans le cuivre et le zinc,
c'est la même chose. Une stabilité dans les prix et dans la
fourniture de l'énergie qui nous permet de produire, nous permet d'avoir
des contrats à long terme. Notre principal facteur de résistance,
vis-à-vis les concurrents, c'est justement la sécurité des
approvisionnements par une sécurité économique
d'approvisionnement électrique qui permet l'exploitation et une
sécurité politique, aussi. Il y a d'autres facteurs mais, dans
notre domaine, dont on parle actuel- lement, c'est important, un facteur de
stabilité.
Mme Bacon: Dans votre mémoire, ici, pour répondre
au défi de l'autonomie, vous fartes le choix de
l'hydroélectricité, au lieu du nucléaire ou au lieu du
pétrole, par exemple. Lorsque vous parlez d'autonomie, est-ce que vous
le faites au sens strict d'autonomie énergétique ou au sens
large, qui comprend, par exemple, des retombées économiques,
technologiques et le développement régional?
M. Roberge: Oui, au sens large. Mme Bacon: Oui?
M. Roberge: C'est une autonomie qui nous permet de croître
et de s'accroître et d'exporter, aussi, mais que ce soit une autonomie
qu'on soit certains de pouvoir s'en sortir avec l'énergie
électrique que l'on a.
Mme Bacon: II y a une autre préoccupation, aussi, qui
ressort de votre mémoire, c'est la fiabilité du réseau
électrique sur les activités de l'industrie minière.
Est-ce que vous pourriez décrire, peut-être, l'impact d'une panne
d'électricité sur les opérations d'une mine?
M. Roberge: Une entreprise minière fonctionne 24 heures
sur 24 et une panne d'électricité va occasionner un arrêt
du travail. Dans les cas du cuivre et du zinc, par exemple, les "smelters" - je
m'excuse du terme anglais l'arrêt de l'électricité
causerait l'arrêt, et peut-être un refroidissement des cuves, ce
qui engage un arrêt de production pour un certain temps QIT, à
Contrecoeur, a besoin d'électricité aussi. Et puis, ça
peut correspondre à quelques jours d'arrêt de production, si une
panne d'électricité survient. Alors. c'est très important
que la fiabilité de la fourniture d'électricité y
soit.
Mme Bacon: Dans votre mémoire, aussi, vous lancez
l'idée de privatiser certains aspects de la fourniture
d'électricité. Vous savez aussi que les services
d'électricité privés, au Canada, sont l'exception, je
pense bien, ce n'est pas la règle. Est-ce que vous pourriez
peut-être approfondir cette idée-là de privatisation et
nous indiquer des avantages que vous pourriez y voir?
M. Roberge: C'est parce que quand on regarde les
développements d'Hydro-Québec sur.. L'exemple que je voyais,
c'est la rivière Sainte-Marguerite. Je ne me souviens pas des chiffres
exacts de la capacité de la rivière Sainte-Marguerite, mais je me
demandais si les besoins en électricité autour de la
rivière Sainte-Marguerite rejoignent le potentiel de la rivière
et ces besoins-là, créés par des entreprises qui sont
là, l'aluminium bientôt et le fer, est-ce qu'elles pourraient se
mettre en partenaires et développer
la Sainte-Marguerite plutôt qu'Hydro-Québec? Est-ce que
c'est un bon choix? Et je crois entendre de par mes membres qu'ils ne sont
intéressés à développer de
l'électricité mais peut-être que des entreprises seraient
intéressées à dire: au lieu que ce soit Hydro, on va le
développer, nous, ce cours d'eau et puis on va fournir de
l'électricité à certains secteurs. Je ne crois pas qu'il
faille en revenir avant l'achat par Hydro-Québec des entreprises
privées, mais il y a peut-être des circonstances dans une
région particulière où Hydro-Québec pourrait faire
une grande ligne pour aller développer un secteur où la
consommation est tout proche. Peut-être qu'il y a des secteurs qui s'y
prêteraient, en Abitibi, dans le bout de Chibougamau. Il y a
peut-être des secteurs ou des régions ou des cours d'eau qui
peuvent alimenter des municipalités ou des entreprises. Je pense qu'il y
a certains cas qui seraient viables.
Mme Bacon: Aussi, vous nous dites, dans votre mémoire, que
les membres de votre association sont fortement représentés en
région. Vous reconnaissez aussi à Hydro-Québec un
rôle important dans le développement régional. Est-ce,
selon vous, les projets hydroélectriques, contrairement à
d'autres types de génération là, ont des retombées
plus importantes en région?
M. Roberge: Si le développement d'Hydro-Québec en
région a des développements...
Mme Bacon: Est-ce que les grands projets, les projets
hydroélectriques, contrairement à d'autres types de projets, ont
des retombées plus importantes en région?
M. Roberge: Mais le développement de
l'électricité dans une région qui serait vierge à
ce moment-ci, ou pratiquement, comme dans la région de la Baie-James, va
entraîner avec lui le développement le long de la route
d'accès vers ces lieux-là, va entraîner aussi le
développement des fournisseurs de services - lorsqu'on développe,
il y a beaucoup de services qui se développent, que ce soit en
transport, en équipement ou en main-d'oeuvre - va entraîner la
mise sur pied de PME, sans doute, et d'entrepreneurs qui n'auraient
peut-être pas existé s'il n'y avait pas un grand projet qui leur
ouvrait la porte. Je pense que c'est un moteur important, initiateur, je
dirais.
Mme Bacon: Dans votre objectif aussi de sécurisation des
approvisionnements, vous nous indiquez qu'il faut développer de
nouvelles sources d'approvisionnement, il faut accroître la
fiabilité du réseau, rationaliser l'usage de
l'électricité. Est-ce que vous croyez qu'Hydro-Québec
devrait faire une priorisation de toutes ses actions ou si ces trois
mesures-là méritent autant d'effort l'une que l'autre ou si vous
priorisez, même, parmi ces trois actions-là?
M. Roberge: Pouvez-vous me les répéter, les
trois?
Mme Bacon: Parce que vous nous disiez: Développer de
nouvelles sources d'approvisionnement, accroître la fiabilité du
réseau, rationaliser l'usage de l'électricité.
M. Roberge: Je pense que la première priorité
serait la deuxième, la fiabilité du réseau. La
deuxième priorité, ce serait la rationalisation de l'usage, et la
troisième serait le développement. La deuxième serait la
première.
Mme Bacon: Oui. Vous soulevez aussi, dans votre mémoire,
la situation qui est particulièrement difficile de l'industrie
minière par rapport à l'augmentation des coûts de
l'énergie. Étant donné que le prix de vente est
fixé sur le marché international, on parlait tantôt du
rôle international que vous jouez, et sujet de plus aux fluctuations de
la monnaie, la hausse des coûts de l'énergie est directement
absorbée par les producteurs. Dans ce contexte, il apparaît
particulièrement avantageux de rechercher, d'appliquer des mesures
d'efficacité énergétique pour assurer un meilleur
contrôle de vos coûts de production. Est-ce que vous pouvez nous
dire quelles seraient les mesures - on a entendu beaucoup parler de ça
ce matin - d'économie d'énergie qui seraient les plus profitables
dans l'industrie minière et quel est, à votre avis, le potentiel
global d'économie d'énergie dans votre secteur, s'il y en a
un?
M. Roberge: D'après moi, les entreprises minières
pourraient réduire leur facture de 10 % à 15 % en gérant
l'électricité d'une façon plus, je dirais,
adéquate. Prenez, par exemple, le coût de
l'électricité pour l'énergie de pointe. Lorsque vous
dépassez, pendant un certain temps, l'énergie demandée,
vous êtes facturé au-delà de la facture habituelle et
normale. À Hydro-Québec, on me dit que c'est normal de payer plus
et ça ne devrait pas dépasser environ 15 % de la facture totale
annuelle. Alors, j'ai demandé à quelques membres: À quoi
correspond votre coût d'énergie de pointe? Quelques membres me
disent qu'il correspond à 40 %. Alors, il y a 25 % là à
récupérer, ce qui serait probablement faisable conjointement avec
Hydro-Québec. Hydro-Québec nous a dit qu'elle a un logiciel
d'efficacité de l'énergie électrique qui pourrait nous
aider à rendre plus productifs l'équipement et l'usage de
l'électricité. Ensuite, il y a des équipements
qu'Hydro-Québec recommande plutôt que d'autres dans l'utilisation
qu'on en fait dans nos exploitations qui rendraient l'électricité
moins coûteuse et en moins forte demande. Alors, on est
intéressés à ça et on a suscité des
rencontres entre les gestionnaires de l'électricité et ceux
d'Hydro-
Québec pour voir de quelle façon on pourrait
améliorer. On va en faire d'autres encore, des rencontres.
Mme Bacon: D'accord. Au cours des prochaines années, on
sait que la croissance de l'électricité sera
particulièrement attribuable au secteur industriel
québécois qui est un secteur très énergivore.
J'aimerais quand même que vous nous fassiez part de l'évolution
future des besoins en électricité de l'industrie minière
par rapport à d'autres grandes industries qui viennent s'installer au
Québec. Est-ce que vous considérez que vos besoins en
électricité vont augmenter au cours des 10 prochaines
années et est-ce qu'il y a des ordres de grandeur que vous pouvez nous
dire dès maintenant?
M. Roberge: Dans le domaine minier, c'est assez difficile de
prévoir 10 ans à l'avance s'il va y avoir plusieurs mines. Si on
se fie historiquement au développement des entreprises minières,
on a de l'espoir que dans la région de Val-d'Or il y ait un nouveau
gisement de cuivre-zinc qui se développe et ça va
nécessiter de l'électricité peut-être comparable
à ce qu'on retrouve à Selbaie. Ce serait peut-être une mine
du même genre. Alors, on pourrait se dire que d'ici 10 ans, il va y avoir
ce besoin-là. Je n'ai pas les chiffres à savoir combien de
kilowatts ça va nécessiter, mais il y aurait ça. Ensuite,
dans la zone de Casa Bérardi, il y a probablement du
développement qui pourrait se faire sur ce secteur-là qui va
ressembler à la faille de Cadillac peut-être. Mais c'est
peut-être une question d'une vingtaine d'années. Si on veut
être conservateurs, prenons 10 ans qu'il y aura peut-être 30 % ou
40 % de demandes supplémen taires dans ce secteur-là. Mais dans
la région de Chibougamau-Chapais, malheureusement, on a des
difficultés. Il y a une mine qui va fermer et il y a d'autres mines en
difficulté. Le développement ne se fera pas beaucoup. Alors,
d'ici 10 ans, je mettrais peut-être une augmentation de 20 % ou de 25 %
des besoins électriques pour les entreprises minières.
Mme Bacon: En page 3 de votre mémoire, vous mentionnez le
cas du rachat des contrats biénergie. Vous notez aussi que cet
événement a été suivi par une hausse des prix de 80
% du coût du propane. Alors, est-ce que vous pouvez nous parler de
l'impact de cette hausse sur les membres de votre association?
M. Roberge: II y a deux impacts. Le rachat du contrat de
biénergie était un achat où l'entreprise recevait un
montant d'argent en résiliant le contrat de biénergie. Alors,
elle recevait un montant d'argent qui a été absorbé
presque entièrement par la hausse du coût du propane. Alors, on
n'était pas plus avancés. La deuxième conséquence
qui est plus importante, c'est que l'entreprise se retrouvait avec une source
d'approvisionnement plutôt que deux. Alors, en cas de panne ou de
difficulté, c'était l'arrêt. Elle ne pouvait pas compenser.
Alors, ce sont les deux conséquences: ne pas avoir de
bénéfice particulier et être à la merci de la seule
source d'approvisionnement énergétique.
Mme Bacon: Merci.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: M. Roberge, ça me fait plaisir de vous
retrouver encore une fois en commission parlementaire. Je vois que
l'Association minière du Québec est fidèle à ses
habitudes et qu'elle ne manque pas les occasions qui lui sont données
pour faire valoir ses points de vue. Je vous en félicite d'ailleurs. Je
crois que c'est là un exemple qui devrait être suivi par bon
nombre d'industries et de groupes d'intérêts sociaux et
économiques partout au Québec. On trouverait peut-être de
cette façon-là plus facilement des solutions aux problèmes
qui sont vécus par tout le monde.
Mme la ministre vient de terminer en vous questionnant sur la question
de la biénergie et, si vous me le permettez, je vais continuer
immédiatement là-dessus. Ce matin, l'association biénergie
du Québec nous faisait une déclaration qui m'a, en ce qui me
concerne, un peu surpris. Elle disait qu'en ce qui concerne
Hydro-Québec, eux, ils voyaient la biénergie comme étant
un bon moyen de se garder des réserves ou, finalement, de pouvoir jouer
dans ces réserves au moment où ils en avaient besoin dans la
mesure où ils suggéraient qu'Hydro-Québec se serve des
programmes de biénergie pour se donner plus de marge de manoeuvre comme,
par exemple, dans le cas présent, avec une hydraulicité faible.
À ce moment-là, ça leur permet de reculer sur les contrats
et de... Vous êtes, à toutes fins pratiques, prêts pour
continuer à fonctionner avec une autre sorte d'énergie. Lorsqu'il
y a plus d'énergie disponible, là, on peut plus vous en livrer.
Vous voyez là un peu comme une zone tampon, une zone d'absortion
favorable aux intérêts d'Hydro-Québec. Moi, je me demande,
vu d'un point de vue strictement industriel comme c'est votre cas, comme vous
pouvez très bien nous l'exposer, est-ce qu'on a raison de croire
qu'Hydro-Québec peut se servir des programmes biénergie dans
l'industriel et le commercial de cette façon-là? Est-ce que
ça vous inerte à réinvestir là-dedans?
M. Roberge: Oui, oui. Ça permet une versatilité
aussi. Mais on comprend que c'est, comme vous dites, une façon d'avoir
un tampon entre les besoins et la demande et la fourniture à donner.
Ça permet à Hydro-Québec d'avoir une meilleure marge de
manoeuvre.
M. Claveau: Dans ces conditions-là, est-ce que vous
considérez qu'Hydro-Québec vous compense suffisamment comme dans
le cas des rachats d'énergie? Vous nous avez dit tout à l'heure
que ça avait comblé à peine l'augmentation du prix du
propane. Est-ce que, par contre, en termes de respect du contrat que vous aviez
avec Hydro-Québec, vous considérez que vous avez
été suffisamment compensés pour les dommages ou les
inconvénients que c'a pu vous occasionner?
M. Roberge: Oui.
M. Claveau: C'était satisfaisant?
M. Roberge: Oui.
(16 h 45)
M. Claveau: O.K. Il y a aussi un autre groupe qui est venu hier
nous présenter une tout autre vision des choses et qui nous parlait de
l'intérêt que le gouvernement pourrait avoir à instaurer
une taxe de nuisance, c'est-à-dire une taxe, une façon de
surtaxer l'ensemble des énergies en fonction des dommages que ça
crée et des différents inconvénients, et que cette taxe
pourrait, comment dire, permettre des entrées d'argent au gouvernement
pour travailler sur des alternatives. Moi, à ce moment-là, j'ai
exprimé l'opinion qu'il s'agissait d'une vision tout à fait
urbaine du problème, qui ne considérait que très peu la
situation des régions. Vous, qui êtes habitué à
travailler dans toutes les régions du Québec et dans des endroits
qui peuvent souvent, même, être aussi éloignés que la
fosse de l'Ungava, est-ce que vous croyez que même si le gouvernement
pouvait mettre en place des politiques compensatoires, ce pourrait être
une avenue, pour le gouvernement, d'aller vers ce genre de taxe de nuisance,
comme on l'appelait?
M. Roberge: Une taxe de nuisance parce qu'on utiliserait de
l'électricité?
M. Claveau: Enfin, toutes les formes d'énergie, en
considérant que l'énergie est, au départ, une
nuisance.
M. Roberge: Quel est le nom du groupe qui a suggéré
ça? C'est quoi, le nom du groupe qui a suggéré ça?
Ah! Ce n'est pas grave.
Mme Bacon: M. Guérard. La taxe de nuisance, c'est M.
Guérard qui est venu hier.
M. Claveau: Oui, mais c'est le nom du groupe...
Mme Bacon: C'est un groupe de recherche macro-biologie -
macro-écologie, pas biologie.
Le Président (M. Bélanger): En macro-
écologie.
M. Claveau: En macro-énergie. C'est ça. Le Groupe
de recherche appliquée en macro-écologie ou
macro-énergie.
M. Roberge: O.K. Bien, je vais vous dire que je ne serais pas
d'accord pour avoir une taxe sur l'utilisation de l'énergie, quelle
qu'elle soit, en vue de protéger l'environnement ou de restaurer des
choses. Je pense que ce qu'il faut faire, c'est admettre, d'une certaine
façon, qu'on a besoin d'énergie d'une façon ou d'une
autre. Si on en a besoin, autant, presque, qu'un besoin naturel, compte tenu du
climat puis de notre niveau de vie - je ne pense pas qu'on veuille revenir
à chauffer au bois, quoique, là, il y aurait peut-être une
taxe encore - ce qu'il faut faire, c'est de rendre rentable l'utilisation de
l'énergie. Pas rentable dans le sens économique purement, mais
dans le sens environnemental. On parle de développement durable, par
exemple, c'est beaucoup mieux de favoriser le développement, comme le
pommeau de douche qui économise l'eau chaude. Ce n'est pas une taxe,
sauf qu'on diminue, théoriquement, le coût du chauffage de l'eau
et l'usage de l'eau chaude, puis personne n'en sera privé. Pour les
automobiles ou pour les industriels ou pour toutes les énergies
utilisées consommées, je pense que c'est vers ça qu'il
faut aller. Quand on parle de développement durable, bien, il faut
développer d'une manière durable, c'est-à-dire de ne pas
saper sur la nature plus qu'il ne le faut. Il faut prendre, dans la nature,
dans le cours d'eau, l'énergie électrique dont on a besoin, mais
il ne faut pas en abuser. Il faut développer des méthodes et
peut-être une mentalité d'économie de rationnel et utiliser
au mieux possible. Développer des technologies pour améliorer.
Dans nos équipements utilisés, il semble que les
équipements à vitesse variable soient beaucoup moins
énergivore que d'autres. Alors, c'est probablement vers ces
catégories d'équipements qu'il faut aller. Dans d'autres domaines
aussi. La mise en marche des appareils doit se faire probablement en
séquences, plutôt que tous en même temps. Il y a toute une
façon d'économiser, plutôt que de faire une taxe, parce que
quand vous allez faire une taxe, que ce soit de nuisance ou autre, ce que vous
faites, vous n'améliorez pas l'environnement, vous ne diminuez pas la
ponction que vous faites sur la nature du tout, vous créez un montant
d'argent qui va essayer de réparer des torts éventuels, mais vous
ne les diminuez pas, les torts. Vous êtes bien mieux d'essayer de
réduire la ponction que vous prenez sur la nature, c'est beaucoup plus
rentable à la longue.
M. Claveau: Est-ce qu'il est juste de comprendre que
l'idée générale de votre mémoire, à l'instar
de ce que vous venez de nous expliquer, ce n'est pas nécessairement
d'appuyer une
démarche de développement à outrance
d'infrastructures ou de nouveaux équipements, mais plutôt d'abord
de mieux gérer ce que l'on a actuellement comme parc
d'équipement, comme disponibilité énergétique, et
puis au besoin - et si j'analyse bien le dernier paragraphe de votre texte,
là, de votre mémoire - en fonction des intérêts ou
des besoins des Québécois d'abord, de développer de
nouveaux équipements, mais juste après avoir fait une analyse
vraiment rationnelle de ce qui est disponible actuellement, du coût de ce
qu'on a là et, éventuellement aussi, après avoir
réévalué toute la performance et la productivité de
l'entreprise qui produit cette énergie?
M. Roberge: C'est ça, et puis ça n'empêche
pas d'exporter parce qu'il semble que ça puisse compenser pour le manque
d'usage de la production totale. Il y a un aspect que je n'ai pas approfondi et
qui serait peut-être important, c'est au sujet des anciens barrages:
Est-ce qu'ils avaient une vie utile de 60 ans, de 100 ans, ou est-ce que
coût d'entretien dépasse les bénéfices qu'on en
retire? Il s'agit peut-être de vérifier ça, mais
probablement qu'Hydro-Québec le sait, quand même.
M. Claveau: Plus précisément, on a
déjà vu, dans la première Baie-James, une confrontation
entre les intérêts d'industries minières et les
intérêts d'Hydro-Québec qui empêchait, enfin qui
avait réussi à faire en sorte qu'on ne fasse pas d'exploration
minière au nord du 50° parallèle. Je sais que, en tout cas,
pour en avoir parlé avec pas mal d'intéressés, beaucoup
croient que ça a eu un effet de ralentissement sur le
développement de l'industrie minière dans certaines
régions, particulièrement toute la zone qui est juste à la
limite sud du 50° parallèle et je dirais presque de l'Est à
l'Ouest, au Québec.
Dans le cas du projet NBR bien spécifiquement, est-ce que vous
croyez que le gouvernement du Québec aurait intérêt
à donner d'abord une certaine priorité à l'exploration
minière avant de donner priorité à la construction de
centrales hydroélectriques, dans la mesure où il est fort
probable - et ce, pour en avoir discuté avec les gens de l'industrie
minière, les gens de la Société d'énergie de la
Baie James et d'Hydro-Québec - que, si on continue à faire de
l'exploration dans le secteur pour les 10 prochaines années, on arrive
justement à ce genre de choix qui devra être fait?
M. Roberge: Bien. C'est votre comté, je pense, ça
se peut?
M. Claveau: Oui. Ha, ha, ha!
M. Roberge: II n'y a pas de mal à ça. C'est que,
comme on l'a mentionné tout à l'heure, si on développe une
mine, mais qu'on n'a pas d'électricité, c'est un peu comme avoir
un oeuf ou avoir la poule sans oeufs, peut-être qu'on va avoir le choix
de faire... Admettons qu'il y aurait un potentiel minéral
intéressant et qu'on aurait le choix de faire de
l'électricité ou le développement de la mine, j'ai
l'impression qu'on va avoir besoin d'électricité pour
créer la mine. Alors, il est peut être mieux de faire une plus
petite mine, quoique les gisements ne se déplacent pas. Le
ministère, normalement, fait les études de potentiel
géologique de ces secteurs-là, et j'imagine que c'est fait. Et,
la Société d'énergie de la Baie James aussi fait de la
prospection pour voir les possibilités ou le potentiel minéral.
Et puis, une mine, peut-être qu'on a l'impression que c'est bien grand,
mais ce n'est pas énorme, et, sur les projets de NBR, s'ils peuvent
faire les barrages à 500 mètres ou à 1000 mètres,
à droite ou à gauche, il y a peut-être possibilité
de permettre un développement qui serait, par coïncidence, juste au
même endroit. Je pense que ça pourrait être en partenaire au
même endroit Je ne pense pas qu'il y aurait une nuisance réelle.
Théoriquement, on pourrait dire qu'on aurait le choix entre
l'électricité et une mine. Mais, dans la pratique des choses,
soit que la mine se parte d'un peu plus loin ou que le barrage se tasse un
petit peu. Tant que ce n'est pas fait, c'est plus facile à
prévoir
M. Claveau: Au moment où on se parle, est-ce que vos
membres ont une certaine réticence à aller explorer dans les
secteurs qui risquent d'être inondés par le projet NBR, même
en sachant qu'il y a des indices minéralisés de surface qui
pourraient être intéressants?
M. Roberge: Oui II faudrait davantage poser la question à
l'Association des prospecteurs parce que nos membres, les exploitants miniers,
font de l'exploration en chantier et hors chantier, mais pas d'une façon
aussi intense que d'aller dans le secteur de la Baie-James. Peut-être
qu'une de leurs filiales en fait, mais ils ne m'ont pas paru ennuyés par
le fait que NBR serait développé au point de vue
hydroélectrique et noierait des territoires difficiles à explorer
par la suite. Personne ne m'a mentionné ça
M. Claveau: Dans un autre ordre d'idées, vous dites, si je
ne m'abuse, en page 4 de votre mémoire, c'est ça, que les
coûts - attendez un peu, c'est ça - d'électricité ne
devraient pas dépasser le coût de l'inflation, que les hausses ne
devraient pas dépasser le coût de l'inflation. Dans votre esprit,
est-ce que cela s'adresse à toutes les catégories d'utilisateurs
à partir du tarif de base actuel que nous connaissons? En d'autres
termes, avez-vous des réticences, en ce qui vous concerne, avec le
problème de l'inter-financement, comme certains appellent ce genre de
bénéfices différentiels qu'Hydro-Québec peut
recevoir en fonction des clients à qui elle vend
son électricité?
M. Roberge: Je pense que la hausse devrait être semblable
pour tout le monde. Et l'inter-financement, vous voulez dire que le
côté industriel finance, d'après Hydro-Québec, une
bonne part des investissements, alors que le secteur des consommateurs
résidentiels ne finance qu'un très faible pourcentage de ce qu'il
consomme? Est-ce que c'est ça?
M. Claveau: C'est ça. Dans le fond, c'est que le tarif,
par exemple, résidentiel génère des
bénéfices, mais en génère moins que le tarif grande
puissance qui, lui-même, en génère moins que les tarifs
petite et moyenne puissances.
M. Roberge: Oui. Bien, d'une manière
générale et peut-être malheureusement, je pense que le
secteur résidentiel devrait payer un peu plus, compte tenu de
l'énergie électrique qu'il consomme, pour faire un rattrapage par
rapport aux industriels qui en paient une bonne proportion. Je crois que c'est
8 % de ressources, du montant d'argent payé par le résidentiel
pour compenser les investissements nécessaires à leur
approvisionnement. Il me semble que ça devrait être
augmenté vers le niveau réel de leur consommation.
M. Claveau: Je comprends ce que vous dites. Sauf que, dans le
fond, ce n'est pas tout à fait en conformité avec le fait que
vous dites qu'il faut que ça augmente en vertu de l'augmentation...
M. Roberge: Ah, oui.
M. Claveau: ...du coût de la vie. Étant donné
que ce n'est pas évident non plus, vous nous avez parlé
qu'évidemment, dans l'industrie minière, ce n'était pas
évident que l'augmentation des bénéfices, en fonction de
la vente du produit, augmentent au même rythme que l'augmentation des
intrants ou des fournitures tels que l'électricité. Et ça
se vaut aussi dans le domaine du résidentiel. À bien des
égards, ce n'est pas évident que le coût de revenu du
particulier augmente d'une façon générale aussi rapidement
que l'augmentation du coût de la vie. On nous disait même que,
globalement... La Fédération des ACEF nous expliquait tout
à l'heure que, globalement, au Québec, le particulier assiste
où est victime d'une diminution de sa capacité d'achat ou de sa
qualité de vie d'une façon qui tend même, dans certains
cas, à s'accentuer au cours des années. Alors, dans ce
sens-là... En tout cas, je ne sais pas, mais... (17 heures)
M. Roberge: C'est pour ça que je disais "malheureusement",
mais ce serait plus réaliste.
Quand je mentionne de viser à suivre l'augmentation du coût
de la vie, bien, c'est qu'il me semble qu'il faudrait viser à ne pas
avoir de dépenses qui surpassent l'augmentation du coût de la vie,
qui surpassent les revenus non plus. Il faut essayer d'être à
l'intérieur de ce que ça peut nous coûter, si on veut avoir
des revenus qui soient plus positifs que négatifs.
M. Claveau: Une dernière question, puisqu'on a un peu de
temps. En page 11 de votre mémoire, vous dites qu'il serait
intéressant de voir les consommateurs produire leur propre
électricité. Je suppose qu'il s'agit d'entreprises,
évidemment. Votre opinion... Est-ce qu'il s'agit uniquement de
production d'électricité à partir de petits potentiels sur
les rivières, donc d'hydroélectricité, ou si vous
considérez là-dedans la cogénération comme
étant une alternative intéressante? On sait, entre autres, que
l'industrie minière côtoie très souvent l'industrie
forestière, qu'il y a des déchets assez importants dans
l'industrie forestière qui pourraient éventuellement aussi servir
à produire de l'électricité et de la vapeur à basse
pression Elle peut être utilisée par l'industrie minière.
Alors, est-ce que vous avez déjà une certaine approche, de ce
côté-là, ou une vision de possibilité de
développer des projets conjoints avec l'industrie forestière
afin, d'une certaine façon aussi, de consolider des acquis
régionaux et, enfin, de diminuer, par le fait même, les
coûts d'exploitation, tant des mines que des moulins à scies?
M. Roberge: Ces approches de la cogénération dont
vous parlez, développement de petits cours d'eau, seraient
intéressantes dans l'avenir, dans quelques années. Je sens que ce
n'est pas prêt encore. Il y a quelques années, j'ai demandé
à Hydro-Québec de me fournir sa documentation sur la
cogénération et l'usage des petits cours d'eau et le potentiel
énergie électrique des cours d'eau - ils ont toute une liste - en
vue de, quand je vais sentir que c'est mûr, en parler aux membres,
d'aller vers ça, la cogénération et l'usage des petits
cours d'eau avec l'aide technique d'Hydro, j'imagine. Mais je ne crois pas
qu'on soit prêt encore. Ça va prendre encore peut-être
quatre ans, cinq ans.
M. Claveau: Et pour la production de vapeur?
M. Roberge: Oui, aussi.
M. Claveau: C'est la même chose?
M. Roberge: Oui.
M. Claveau: Là, vous nous avez parlé des petits
cours d'eau mais, en fait, c'est la même chose. L'industrie
minière n'est pas prête en tant
que telle à s'embarquer là-dedans.
M. Roberge: Non. Elle n'est pas prête, en ce sens que les
besoins ne sont pas là. Le besoin n'est pas assez criant. Si les choses
se resserrent davantage, probablement qu'il faudra faire ça. Cette
année, à partir de l'automne probablement, je vais demander aux
entreprises minières de se fixer des objectifs pour tendre un peu vers
ça. Par exemple, en 1985, on a utilisé 92 kilowatts par tonne
traitée; en 1986, 104 kilowatts; ;n 1987, 110 kilowatts par tonne
traitée et, en 1988, 90 kilowatts par tonne. Je veux les amener à
réfléchir à avoir un objectif que les 90 kilowatts par
tonne diminuent l'année suivante à peut-être 85, 88 et
demander à Hydro-Québec comment on fait, comment on s'y prend et
avoir des objectifs d'économie et peut-être, justement, voir que
la solution cogénération ou utilisation d'un cours, ou vapeur,
etc. pourrait nous permettre d'atteindre ces objectifs qui sont d'un
côté économique mais aussi, de l'autre côté,
au point de vue environnement, ce serait valable, je pense bien. Alors, on va
s'en aller tranquillement. C'est pour ça que je mentionnais quatre, cinq
ans, peut-être plus, mais c'est mon objectif personnel, à ce
moment-ci, et je pense que ça va venir.
Le Président (M. Bélanger): Le temps étant
écoulé, le député de Duplessis voulait poser une
question, bien bien courte. On permet au député de Duplessis une
petite question?
Mme Bacon: Je ne sais pas, s'il est de bonne humeur, oui.
Le Président (M. Bélanger): S'il ne s'en fait pas
poser, il va être correct.
M. Perron: Pour autant qu'on ne me pose pas de question, je suis
correct.
M. le Président, dans votre mémoire, à la page 5,
vous mentionnez ceci: "Les revenus d'Hydro-Québec devraient être
principalement utilisés pour réaliser ses objectifs de fourniture
d'électricité plutôt que de générer des fonds
pour le gouvernement." À ce moment-là, vous faites allusion aux
dividendes. La question que je voulais poser, c'est la suivante: Est-ce que,
selon vous, les dividendes versés par Hydro-Québec au
gouvernement au cours des deux dernières années étaient
trop élevés? Et êtes-vous totalement - je dis bien
"totalement" - opposés à ce que des dividendes soient
versés au gouvernement, de la part d'Hydro-Québec?
M. Roberge: Mme la ministre en a parlé, au début,
et je ne crois pas que, au cours des dernières années, les
montants versés à titre de dividendes à l'actionnaire
aient été trop élevés. Je ne serais pas non plus
pour... Votre question, c'était à savoir si je suis opposé
totalement à...
Non, je ne suis pas totalement opposé à des dividendes
versés au gouvernement.
M. Perron: Donc, si je comprends bien, vous êtes seulement
opposé à ce qu'il y en ait autant qui soient versés.
M. Roberge: Non, je ne suis pas opposé... Non, autant, je
ne peux pas apprécier s'il y en a autant, trop. Je me suis aperçu
qu'il y en a, au cours des dernières années, et je me suis dit:
Est-ce que c'est trop? Est-ce que c'est dans les limites du raisonnable? Et Mme
Bacon, au début, m'a expliqué que. . a mis un peu
d'éclaircissement là-dessus. Mais je ne suis pas
économiste, pour pouvoir l'apprécier. Mais je conçois
qu'un actionnaire s'attende à avoir des redevances, avoir des
dividendes, mais il s'agit de voir si les dividendes n'empêchent pas
l'investissement. Mais il semble que non.
Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous
remercie. M. le député d'Ungava, si vous voulez remercier notre
invité.
M. Claveau: Au nom de ma formation politique, il me fait plaisir
de vous remercier, M Roberge, de votre participation en tant que
représentant de l'Association minière du Québec et en
souhaitant que vos objectifs personnels, enfin, vos voeux personnels deviennent
une réalité dans l'industrie minière.
Le Président (M. Bélanger): Merci, M. le
député d'Ungava. Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, merci beaucoup, Me Roberge, de votre
exposé et d'avoir participé à cette commission
parlementaire. Je pense que le mémoire que vous avez soumis, dans une
situation et une perspective de l'énergie électrique, est
important pour nous. Merci.
M. Roberge: Merci
Le Président (M. Bélanger): La commission de
l'économie et du travail remercie l'Association minière du
Québec et son représentant, M. Jean Roberge, de sa participation
à ses travaux.
Nous invitons à la table des témoins l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, qui sera
représentée par MM. Rousseau, Ward et Bemier Vous avez 20 minutes
ferme pour la présentation de votre mémoire et, par la suite, il
y a une période d'échanges avec les parlementaires. Je vous
prierais, chaque fois que vous devrez prendre la parole, de bien vouloir vous
nommer, vous identifier. Cela facilite énormément le travail des
gens qui font la transcription pour le Journal des débats. Si
vous voulez présenter votre équipe et nous présenter votre
mémoire, nous vous écoutons.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec
M. Rousseau (Omer): M. le Président, Mme la ministre, MM.
les membres de cette commission, mon nom est Omer Rousseau. Je suis
vice-président exécutif de l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec. À ma droite, les
confrères qui m'accompagnent pour la présentation: M.
François Bernier, directeur du service économique et, à ma
gauche, M. Hugh Ward, directeur du service technique. Notre présentation
va avoir un caractère à la fois économique et technique.
C'est sûrement un mémoire, aussi, qui va avoir une autre dimension
que celle que vous avez entendue jusqu'à ce jour, au niveau des
différents intervenants qui sont venus vous rencontrer.
Bref, si vous en convenez, nous allons faire la présentation de
la façon suivante. Dans un premier temps, vous me permettrez de dire
quelques mots sur l'organisation et aussi, également, les raisons qui
motivent notre présence; dans un second temps, je vais demander à
M. Hugh Ward et à M. Bernier de faire une présentation sur les
différents points qui sont soulevés dans notre
mémoire.
En fait, l'Association provinciale est un organisme qui
représente au-delà de 10 000 entreprises dans l'industrie de la
construction résidentielle, particulièrement, dans le secteur
résidentiel et, à la fois, dans la rénovation
résidentielle. Six mille membres, dans le fond, se retrouvent au niveau
de 14 associations régionales et, aussi, 4000 autres se retrouvent dans
trois autres associations: la Fédération provinciale du
bâtiment, la Société québécoise des
manufacturiers d'habitations du Québec et aussi l'Association des
puisatiers du Québec. D'ailleurs, 80 % de tous les travaux, dans
l'industrie de la construction résidentielle et rénovation, sont
exécutés par les entrepreneurs que nous représentons.
Et aussi, ce que nous avons comme vocation particulière, c'est
que nous avons une vocation professionnelle, une vocation de services et aussi,
c'est-à-dire, un volet qui est, dans une certaine mesure, de
défendre un peu les consommateurs vis-à-vis des travaux qu'ils
font exécuter. À cet égard, je tiens simplement à
rappeler aux membres de cette commission que l'Association provinciale a
été la première organisation à instituer au
Québec une garantie sur les maisons neuves, évidemment, les
condominiums, etc. D'ailleurs, dans le cadre, aussi, de
Corvée-habitation, nous avons enregistré à peu près
90 % de toute la production. Et aussi, nous avons été la
première organisation, au Canada, à instituer les garanties sur
rénovation qui, effectivement, existent au Québec, simplement par
notre présence.
Je voudrais tout simplement dire que, si nous sommes ici, en commission
parlementaire, c'est parce que l'économie de l'énergie a toujours
été une des préoccupations de notre organisation. Pour
preuve, j'ai simplement à vous faire part que, dès que le
gouvernement a travaillé à l'élaboration de la Loi sur
l'économie de l'énergie, à la réglementation, nous
avons travaillé en étroite collaboration avec lui. Et aussi,
ça s'est traduit, par la suite, dans le cadre d'organisation de sessions
d'études pour être en mesure de bien informer nos entrepreneurs un
peu partout et, aussi, ça s'est traduit par des cours de formation.
Parallèlement à l'adoption de la loi, de même
qu'à la réglementation, nous avons travaillé en
étroite collaboration avec le ministère des Mines et Ressources
Canada. En collaboration avec notre association canadienne et aussi, je pense,
la firme de consultants Scanada, dans le but d'élaborer un programme de
maisons énergétiques, super énergie, qui est la maison
R-2000. D'ailleurs, vous en avez sûrement entendu parler. Cette maison
R-2000 est une maison dont nous avons eu aussi à administrer le
programme, depuis 1982. D'ailleurs, nous avons engagé de l'argent
jusqu'à concurrence de 5 000 000 $ pour ce genre de projet. Aussi, il y
a lieu de comprendre, encore à l'heure actuelle, que nous sommes
l'organisation qui siégeons avec le gouvernement du Québec
à un comité national, qui s'occupe particulièrement des
questions touchant l'économie d'énergie et la qualité de
l'air dans l'habitation, surtout dans les bâtiments. Tout ça pour
vous dire, qu'effectivement, l'économie d'énergie, ce n'est pas
quelque chose qui nous est inconnu, c'est une chose que nous connaissons et que
nous vivons tous les jours, et c'est encore une de nos
préoccupations.
Donc, je laisserais peut-être M. Hugh Ward commencer la
présentation du mémoire. Nous allons tenter de le faire tout
simplement comme ça, ad lib, sans en faire la lecture, et, de temps en
temps aussi, M. François Bernier va intervenir, dépendant s'il
s'agit d'un aspect économique. Alors, je vous remercie. Vas-y, Hugh!
François!
M. Bernier (François): Vous me permettrez d'être le
premier. Pour faire rapidement un survol de notre mémoire, je pense que
le premier point qui est identifié dans notre mémoire, c'est le
fait que, pour nous, l'électricité comme source d'énergie
principale, ce n'est pas un choix pour la majorité des gens, c'est,
d'abord et avant tout, un choix plus théorique que réel puisque,
à la base, les options ne sont pas vraiment disponibles. Quand on pense
au gaz, le gaz n'est pas vraiment disponible à la grandeur du
Québec et, pour bien des consommateurs, la présence d'une
bonbonne, c'est quelque chose de très repoussant. Le même
problème joue également au niveau du mazout. Comme beaucoup de
gens l'ont souligné, les écarts du prix du mazout peuvent, encore
une fois, refroidir certains consommateurs
et, aussi, pour des questions esthétiques, la présence
d'un gros réservoir n'intéresse plus vraiment le public.
Donc, dans ces grands choix de marchés, quand Hydro-Québec
veut appuyer la popularité du chauffage électrique, c'est non
seulement une orientation nécessaire, c'est quelque chose qu'elle ne
pourra jamais contourner. C'est ce qui explique, donc, ces
contraintes-là d'un marché qu'on connaît. Le grand taux de
pénétration de l'électricité, au départ, qui
atteint, d'après les documents d'Hydro-Québec et d'après
nos indications aussi, évidemment quelque chose comme 94 %, 95 % dans la
plupart des foyers, au Québec.
Ceci dit, l'électricité n'est pas seulement quelque chose
qui... Ce n'est pas seulement parce qu'il n'y a pas d'options que
l'électricité est si populaire, l'électricité a de
grands avantages, au départ, du fait donc qu'elle est disponible dans
toutes les résidences au départ, du fait que
l'électricité permet de faire des choix, des choix très
intéressants, en divers systèmes de chauffage, dont les plus
populaires, si on veut être précis, sont quand même les
plinthes chauffantes et les systèmes à air puisé.
Comparé au système à air puisé, le système
de plinthes chauffantes représente... On peut obtenir des
économies substantielles de l'ordre de 3000 $ à 4000 S
facilement, lors de l'achat d'une maison. Il s'agit donc d'un facteur
très significatif pour favoriser la construction à moindre
coût, l'accession à la propriété, et c'est ça
qui fait, en bout de ligne, que facilement 85 % des maisons construites
actuellement sont faites à l'aide de plinthes électriques. On a
quelques statistiques qui sont dévoilées dans le mémoire,
à cet effet.
Donc, le mémoire, au point de vue de l'analyse des propositions
énergétiques, ça se divise quand même en trois
grands points parce que, pour nous, on réfléchit souvent à
des choses dans les grands secteurs qui nous concernent: celui de la maison
neuve, d'abord; celui de la rénovation, ensuite; et,
dernièrement, quand on regarde l'ensemble des propositions, il y a des
propositions qu'on peut classer. Les autres mesures proposées par
Hydro-Québec C'est un peu dans ces termes-là que le
mémoire est constitué. (17 h 15)
D'abord donc, pour faire l'analyse dans le secteur de la maison neuve,
il faut savoir un peu dans quelle conjoncture on est. Le secteur de la maison
neuve, comme vous le savez, est en chute libre pratiquement au point de vue de
la production. Cette année, en 1990, on va à peine faire... on va
probablement faire 40 % à 50 % moins d'unités que ce qu'on a
connu en 1987. C'est donc, définitivement, un resserrement de
marché qui pousse les gens à prendre des pratiques tout à
fait différentes. Un resserrement de marché aussi qui devrait se
continuer à cause des tendances démographiques qu'on
connaît. On n'a plus la formation de ménage qu'on avait au
Québec. Donc, les tendances démographiques sont là pour
dire qu'il va se faire de moins en moins de maisons, au Québec. Dans ce
contexte-là difficile, marqué, entre autres, par les taux
d'intérêt élevés, les entrepreneurs, quand on les
questionne, vont adopter certaines pratiques. Ils vont, entre autres, viser la
réduction des maisons ou, enfin, ils vont faire tout ce qui est en leur
pouvoir. La variable sur laquelle ils tentent de jouer au maximum, c'est le
prix; minimiser le prix des habitations. Récemment consultés
d'ailleurs, environ 65 %, sinon plus, des entrepreneurs consultés nous
disaient qu'ils tenteraient autant que possible de garder les prix modiques,
à 110 000 $ ou moins. C'est quand même une barrière
impressionnante, quand on regarde la moyenne des prix au Canada. Essayer de se
maintenir en dessous de 110 000 S, c'est quand même un grand
défi.
Nos enquêtes démontrent donc - et il y en aurait d'autres
à citer potentiellement - l'aspect critique du contrôle des
coûts, si on veut, en bout de piste, garder un contrôle sur les
prix. Donc, dans ce sens-là, il faut respecter la capacité de
payer dans ce marché-là et c'est ce que les entrepreneurs tentent
de faire. Donc, dans le contexte d'une demande très faible pour... Il
faut comprendre que, dans ce contexte-là, la demande pour des
améliorations technologiques non visibles, comme les
améliorations visant l'efficacité énergétique. ce
n'est pas quelque chose qui semble prioritaire. Il semble d'abord que les
consommateurs ne le demandent pas vraiment et il semble que les entrepreneurs
eux-mêmes visent.. Tout en ayant quand même une
considération énergétique, ils ont de grands
débats, ils ont de grandes choses à manipuler
présentement, au niveau du contrôle des coûts. C'est donc
difficile de faire accepter le principe de l'efficacité
énergétique comme ça à la clientèle. Un
exemple qu' on a de ça, c'est I acceptation du programme R-2000 dont on
va encore parler un peu plus loin. Il semble, voyez vous, que, pour mettre une
maison R 2000 sur pied, ça engage des coûts de l'ordre de 6000 $
à 9000 $ de plus qu'une maison ordinaire et, statistiquement, on s'est
rendu compte quand même du taux d'acceptation des maisons R-2000 dans le
marché. Une des conclusions qu'il a fallu porter, c'est que la
clientèle n'avait pas atteint ce degré de conscientisation envers
l'efficacité énergétique pour rendre le produit
acceptable. Il faut vivre avec ces réalités de marché et
c'est l'histoire de 6000 $ à 9000 $, la différence dont on parle
ici.
Donc, à ce niveau-là, je ne sais pas si M. Hugh Ward
pourrait élaborer sur les...
M. Ward (Hugh): Oui, sur les aspects techniques Hugh Ward. Pour
les membres de la commission, je les référerais à notre
document, à la page 11. La partie de ma présentation, ce sont les
pages 11, 12 et 13. En fait, on a parié déjà
du programme R-2000 et Hydro-Québec, dans son document qui porte
sur l'efficacité énergétique, il y a plusieurs fiches qui
touchent l'économie de l'énergie dans le domaine de la
construction neuve et dans le domaine de la rénovation. Je voudrais
juste vous apporter quelques commentaires vis-à-vis de
l'expérience de l'APCHQ dans ce contexte-là et aussi l'opinion de
l'APCHQ vis-à-vis de ces projets ou de ces projections qui sont soumis
par Hydro-Québec.
Dans un premier temps, le volet d'économie de l'énergie
dans le domaine de la construction de maisons neuves, ce n'est pas simplement
une chose qu'on considère au niveau des normes d'isolation. C'est
beaucoup plus vaste que ça. Le phénomène de
l'économie d'énergie dans le domaine résidentiel doit
toucher plusieurs facteurs. Effectivement, le domaine de l'isolation et les
maisons R-2000 le touchait abondamment en ayant une isolation mieux
distribuée à l'intérieur d'une maison et non pas seulement
une isolation accrue mais mieux distribuée totalement à
l'intérieur de l'enveloppe de la maison. On doit aussi tenir compte de
l'étanchéité de la maison, c'est-à-dire les
infiltrations ou les exfiltrations d'air à travers les parois de
l'enveloppe de la maison, et ça, ça représente 30 % de la
consommation d'énergie, en termes de chauffage, du domaine
résidentiel. C'est très important comme facture de chauffage et
il y a des méthodes assez économiques et simples de
réussir à réduire ces pertes de chaleur par l'infiltration
ou l'exfiltration d'air. Par contre, tous les moyens qu'on met en place pour
contrôler ces infiltrations d'air créent des problèmes
à l'intérieur de la maison tels qu'on en entend parler
déjà dans les immeubles à bureaux, les problèmes de
condensation, les problèmes de polluants à l'intérieur et,
évidemment, si on résume ça, par la qualité de vie
ou la qualité d'air à l'intérieur des immeubles. C'est une
préoccupation qui est très importante. Dans le contexte R-2000,
nous nous en sommes préoccupés par le biais d'installation
d'équipement de ventilation. Équipement de ventilation qui
permettait d'assurer une qualité de l'air à l'intérieur
des résidences, mais, également, qui récupéraient
la chaleur de l'air qui était évacué à
l'extérieur. On avait un système de récupération de
chaleur qui permettait d'économiser encore l'énergie qu'on aurait
autrement jetée carrément à l'extérieur de la
résidence. Ce sont les trois principaux éléments d'une
maison à haut rendement énergétique: l'isolation,
l'étanchéité à l'air et la ventilation. Mais il
faut faire attention. Ces choses-là doivent toutes être vues dans
un concept global, ne doivent pas être vues séparément. Une
maison, il faut voir ça dans un système intégré et
on ne peut pas parler strictement d'isolation sans penser à
l'étanchéité, sans penser à la ventilation.
Je vous ramène un petit peu sur l'exemple que je donnais
tantôt. On fait l'étanchéité de la maison. Un
consommateur installe un foyer à l'intérieur de cette
résidence-là, un foyer naturel. Du moment qu'on part un appareil
de filtration d'air, un simple ventilateur de cuisinière, on a un retour
de fumée à l'intérieur de la maison qui envenime la
qualité de l'air et qui peut causer des désagréments sinon
des maladies aux occupants. Donc, la maison doit être vue dans un concept
global. L'APCHQ a travaillé toujours dans ce contexte-là et en
tenant compte de ces préoccupations-là. Dans le contexte R-2000,
nous avons travaillé, d'abord et avant tout, à former des
entrepreneurs qui comprenaient l'ensemble de ces
préoccupations-là, qui comprenaient les mécaniques ou les
technologies utiles pour faire ces applications-là dans le domaine de la
construction. Et on s'est préoccupés aussi de faire un suivi chez
les consommateurs, une fois qu'ils occupaient la maison, de s'assurer que la
qualité de l'air et la satisfaction des gens étaient
rencontrées au niveau de l'achat et du vécu à
l'intérieur de la maison. Mais lorsqu'il y avait des problèmes
à corriger, évidemment, on apportait les corrections en
conséquence.
Hydro-Québec, dans son projet, nous propose différents
programmes d'économie d'énergie et des modifications à la
Loi sur l'économie d'énergie, la loi actuelle qui régit
l'isolation dans les résidences ou dans les bâtiments neufs au
Québec. L'APCHQ, à ce niveau-là, d'abord, a l'opinion que,
en termes d'isolation, de quantité de matériel isolant dans les
résidences, la loi est suffisante actuellement. On n'a pas un besoin, en
tenant compte du coût d'énergie actuelle ou en tenant compte des
coûts de construction ou d'isolation, on n'a pas besoin d'augmenter cette
isolation. Par contre, on réalise qu'il y a un besoin énorme, une
préoccupation très importante de s'occuper de la ventilation
à l'intérieur de la maison. Les problèmes de
qualité d'air, je pense à des problèmes de radon et
d'infiltration de d'autres polluants à l'intérieur des maisons,
c'est très important de s'en préoccuper. Dans le contexte des
programmes d'efficacité énergétique avec
Hydro-Québec, il faudrait se préoccuper de la ventilation. Il
faudrait aussi penser a tenir compte que les appareillages ou les
équipements ou les méthodologies, dont on va faire la promotion
dans le cadre de ces programmes ou de la nouvelle Loi sur l'économie
d'énergie, ne nuiront pas ou seront accessibles; ne nuiront pas à
l'utilisateur, ne créeront pas des situations, comme je parlais
tantôt, de retour de fumée ou vont être aussi accessibles.
Il faut que l'entrepreneur ait accès à ces
équipements-là et que l'équipement soit aussi à
point, qu'il ne soit pas en développement. On ne doit pas se servir de
l'entrepreneur comme un cobaye du développement des produits de
l'industrie. À ce niveau-là, c'est important, lorsqu'on fera ces
améliorations-là, qu'on tienne compte de ce
contexte-là.
Dans le domaine de la ventilation, on se préoccupe aussi
beaucoup, nous, actuellement, des réglementations qui sont en vigueur.
Nous avons le Code national qui vient d'être publié, la version
1990, qui contient des normes précises dans le domaine de la
ventilation. Ces normes de ventilation là sont imprécises dans
l'application. Elles semblent très précises dans la
réglementation, ce que l'entrepreneur doit rencontrer, mais elles sont
très imprécises dans l'application. Pour vous montrer
l'implication qu'on a à ce niveau-là, c'est qu'on est en train de
publier en collaboration avec la Société canadienne
d'hypothèques et de logement un manuel de techniques ou de
méthodes pour satisfaire à ces normes, que l'entrepreneur va
pouvoir utiliser pour rencontrer facilement les normes d'économie
d'énergie à ce niveau-là.
Pour résumer la présentation, dans le fond, on est
d'accord avec les préoccupations d'Hydro-Québec vis-à-vis
des problèmes d'efficacité énergétique dans le
résidentiel. On considère que l'isolation est suffisante
actuellement, qu'on doit d'abord se préoccuper de la ventilation et de
l'étanchéité. On vous soulève également que
toutes ces modifications à la réglementation ou aux normes, qui
seront en vigueur et qui affecteront l'entrepreneur ou les consommateurs,
devraient aussi être imposées ou s'appliquer à
l'autoconstructeur de façon à ne pas créer une
disparité du marché ou une compétition un peu
déloyale de la part du constructeur occupant ou de l'autoconstructeur
vis-à-vis du constructeur qui livre des maisons et qui est membre de
notre association.
Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais
à conclure rapidement, il reste une minute.
M. Ward: Je vais effectivement conclure rapidement en disant, par
contre, que, définitivement, vous avez, dans le mémoire, une
logique qui revient, au point de vue des difficultés pour les
consommateurs de bien accepter les coûts, bien comparer les coûts
aux avantages, et aussi une difficulté de fond dans l'industrie,
présentement, et pour le futur, quand même, il ne faudra jamais
négliger cet aspect de la réceptivité du consommateur, de
l'éducation et de sa protection.
En conclusion l'APCHQ formule certaines recommandations, notamment
qu'Hydro-Québec continue de répondre à la demande d'un
marché en matière de chauffage électrique et qu'elle
planifie ses installations en conséquence. C'est une
responsabilité pour Hydro-Québec de faire ça.
Qu'Hydro-Québec poursuive ses programmes d'amélioration de
services, notamment en réduisant les délais de raccordement pour
simplifier le travail des entrepreneurs, entre autres.
Que l'amélioration des normes d'isolation et
d'étanchéité des bâtiments tienne compte de leur
rentabilité à court terme, des aspirations des consommateurs et
des principes d'accession à la propriété. Encore une fois,
un poids à faire du côté des coûts que ça
implique.
Que tous les constructeurs de nouvelles habitations, y compris les
propriétaires constructeurs, soient soumis aux nouvelles normes.
Ça ne sert absolument à rien d'imposer des nouvelles normes si 40
% du marché continue à tricher.
Qu'un service de consultation soit offert aux consommateurs pour
permettre une évaluation de l'ensemble de ses besoins de
rénovation à un coût raisonnable C'est
définitivement la carence majeure dans le domaine de la
rénovation. Un point qu'on n'a pas eu de chance de couvrir: celui de
l'éducation et de la reconnaissance des besoins de l'éducation du
consommateur.
Que les programme d'efficacité énergétique
d'Hydro-Québec exigent l'accréditation de l'entrepreneur et
l'enregistrement des travaux à un programme de garantie reconnu. Il
s'agit, en bout de piste, de protéger le consommateur du meilleur moyen
qu'on a développé à date dans l'industrie, celui d'une
garantie. Tout à coup que l'entrepreneur disparaît, par malchance,
il faut quand même protéger ces travaux-là, qui sont
parfois majeurs, au niveau de l'efficacité
énergétique.
Que le gouvernement adopte une attitude plus cohérente et plus
conciliante dans l'interprétation fiscale des dépenses de
rénovation pour les propriétaires bailleurs. C'est un point
majeur qui traîne depuis trop longtemps. La dépense de
rénovation, une façon facile, simple de la stimuler, notamment en
matière énergétique, c'est de permettre la
déductibilité pure et simple de ces travaux-là pour la
capitalisation. Et il est temps qu'on donne suite au jugement Goyer qui, dans
sa lettre en tout cas, appuyait cette avenue.
Enfin, que le gouvernement s'assure, autant que faire se peut, que les
investissement d'Hydro-Québec aient un effet stabilisateur sur le
marché de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, parce
que, comme vous le savez, notre industrie, donc, est portée à de
grandes fluctuations et il faut, autant que possible, appuyer, aider
l'industrie à aplanir ces grands mouvements-là. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie
beaucoup. Mme la ministre.
Mme Bacon: MM. Rousseau, Bernier et Ward, en introduction
à votre mémoire, vous nous avez bien dit que votre participation
à cette commission parlementaire visait surtout à faire valoir
l'opinion des entrepreneurs et des autres intervenants du secteur
résidentiel sur les grandes orientations énergétiques du
Québec et sur les moyens proposés par Hydro-Québec
Là, je ne voudrais pas que vous preniez ça comme un
reproche, mais votre mémoire est
surtout un mémoire à caractère
technico-écono-mique, et je pense que vous l'avez dit vous-mêmes.
J'aimerais quand même vous demander - je vais vous forcer un peu,
là - de nous donner l'opinion des entrepreneurs sur les grandes
orientations énergétiques au Québec en ce moment - c'est
le but de la commission parlementaire - et aussi sur les moyens qui sont
proposés par Hydro-Québec dans son plan de développement.
Vous parlez de chauffage électrique, vous parlez de stabilité
pour les entrepreneurs, c'est important, mais pour avoir le chauffage
électrique, il faut avoir l'électricité, et les grandes
orientations énergétiques du Québec sont importantes.
J'aimerais vous entendre ià-dessus. (17 h 30)
M. Rousseau: Enfin, il y a une chose qui est certaine, puis je
vais y aller d'une façon très brève, c'est que, pour nous,
l'électricité est un besoin essentiel et elle se veut aussi comme
étant un bien économique et un bien que l'on peut même
exporter, comme on l'a déjà mentionné. Et je crois que
l'Hydro, la façon dont on peut la percevoir, pense effectivement
à un développement qui est dans le but d'assurer, je pense, une
bonne qualité de vie à tout le grand public, à tous ceux
qui consomment de l'électricité et on doit aussi le percevoir
comme étant un élément qui est capable d'attirer, je
pense, des investissements économiques au Québec et, en
même temps, si c'est possible, que ce bien économique soit
exportable, soit rentable pour le Québec.
Mme Bacon: Hier, au nom de la sécurité des
approvisionnements, de la disponibilité de l'électricité
pour les Québécois, l'Association des ingénieurs-conseils
du Québec qui est venue nous dire, à la commission, qu'il fallait
accélérer l'aménagement de Grande-Baleine, par exemple.
Aujourd'hui, votre association, par contre, nous recommande l'étalement
de travaux des prochains complexes. Alors, au moment où l'on se parle,
quelles sont les raisons qui militent, d'après vous, en faveur d'un
étalement?
M. Rousseau: Je ne pense pas qu'on ait... Évidemment,
peut-être qu'elle a été mal rédigée ou...
Bon!
Mme Bacon: J'ai peut-être mal compris.
M. Rousseau: Non non non, c'est parce qu'il n'est pas question,
pour nous, de réclamer un calmant au niveau des investissements
d'Hydro-Québec. Tout simplement, on dit que si HydroQuébec,
évidemment, de par l'importance des investissements qu'elle peut faire
dans le temps, est capable d'aligner ça avec une certaine stabilisation
au niveau de l'industrie de la construction, ça peut être
extrêmement valable pour l'industrie, parce que, évidemment, il
est même question de la stabilisation de la main-d'oeuvre dans
l'industrie de la construction, mais si, effectivement, Hydro-Québec est
capable de concilier, dans le fond, ses projets avec des cycles
économiques qui sont moins forts, ça ne peut qu'aider
évidemment à avoir une certaine stabilité, mais je ne
pense pas qu'on préconise un calmant dans le...
Mme Bacon: C'est un étalement que vous
préconisez.
M. Rousseau: Oui.
Mme Bacon: C'est beaucoup plus un étalement.
M. Rousseau: Effectivement.
Mme Bacon: Plus que dix ans? Vingt ans? C'est quoi, votre
étalement?
M. Rousseau: Si, effectivement, puis ça,
évidemment, ce sont des études que nous...: en tout cas, je ne
pense pas qu'on ait l'expertise pour être en mesure de vous dire que,
bon, si ça doit se baser sur une période de 10 ans, de 15 ans ou
de 20 ans, je pense que, là, ça dépasse effectivement nos
études puis on n'en a pas faits. Mais ce qu'on veut dire, quand
même...
Mme Bacon: C'est au nom de la stabilisation du marché de
votre entreprise.
M. Rousseau: Oui, parce qu'il y a aussi des gens qui disent:
Bien, l'industrie de la construction, on devrait être capables d'apporter
une certaine stabilisation. Nous, on dit: Dans le domaine résidentiel,
n'essaie pas d'apporter une certaine stabilisation, c'est impossible; mais par
contre, peut être que dans le domaine de l'investissement, notamment
comme celui de l'Hydro, qui se traduit par de gros projets de construction,
là, évidemment, le gouvernement pourrait jouer un rôle.
Bon, et ça, je pense que c'est un peu dans ce sens-là qu'il a
été mentionné, peut-être que nous l'avons mal
écrit, là, mais...
Mme Bacon: Non, ça, ça va. Dans votre
mémoire, aussi, vous avez parié, en termes de
généralité, du problème de l'environnement.
J'aimerais qu'on profite quand même de votre présence ici pour
peut-être entendre le point de vue de votre association et des membres
que vous représentez. C'est quand même un enjeu majeur, en 1990,
l'environnement. Est-ce que vous vous êtes penchés
là-dessus, par rapport à toute cette problématique qu'on a
devant nous.
Une voix: Bon...
M. Rousseau: Oui, vas-y.
M. Bernier: Oui, effectivement, on s'y penche présentement
très fort sur la question de l'environnement. Comme la plupart des
industries, on voit, si vous voulez, le train de l'environnement passer devant
nous, et il est temps, je pense, pour la plupart des membres de notre
association et des gens de l'industrie de la construction, d'embarquer dans ce
train-là. Il faut dire, par contre, que c'est une réflexion qui
commence; c'est un travail qui commence cette année, notamment, dans des
activités qu'on va organiser au cours de l'année: il va y avoir
un premier travail de sensibilisation au niveau de l'environnement, de la
gestion des déchets. Alors, si c'est ça qui..., je ne sais pas
si...
Mme Bacon: On parle beaucoup de développement durable, on
parle d'économie, d'environnement, de faire le lien entre les deux, ce
qu'on appelle un développement durable, et aussi cette Commission se
penche sur cette problématique-là. Par rapport au grand
développement des moyens qui sont proposés par
Hydro-Québec pour développer l'énergie électrique,
est-ce que vous vous êtes penchés là-dessus avec les
membres de votre association?
M. Rousseau: Non, c'est-à-dire que ça n'a pas fait
l'objet d'un débat avec les membres de chez nous.
Mme Bacon: Vous commencez au niveau de votre association et des
moyens à prendre pour protéger l'environnement?
M. Rousseau: Oui. Bien, en fait, actuellement, tout ce que nous
visons c'est, dans une certaine mesure, d'être capables de ramasser
toutes les tendances qui se manifestent et aussi d'être capables de
soupeser l'argumentation do chacun, de la mesurer. Évidemment, on n'est
pas inconscients, je pense, de l'environnement, nous tentons effectivement de
le regarder avec les mesures qu'on a évidemment.
Mme Bacon: D'accord À la page 11 de votre mémoire,
vous indiquez - et là, je vous cite -: "En matière d'isolation,
votre association considère suffisantes les exigences actuelles de la
Loi sur l'économie d'énergie dans les nouveaux bâtiments. "
Alors, compte tenu de votre expérience, n'y a-t-il pas d'autres
possibilités d'offrir des gains d'efficacité
énergétique aux consommateurs et tout ça en accroissant
leur confort? Par exemple, on regarde du côté de l'architecture
ou, du moins, de l'exploitation des possibilités d'orientation qui
seraient favorables à ça.
M. Rousseau: II y a, évidemment, un moyen qui est, je
pense, assez facile, c'est au niveau de la formation de la main-d'oeuvre,
c'est-à-dire que la main-d'oeuvre ait une plus grande
préoccupation lorsqu'elles fait l'installation des isolants et, en fait,
pour toute la question d'étanchéité. Ça,
peut-être qu'on pourrait en parler plus. Dans le fond, quand on regarde
un peu l'expérience que nous avons connue avec le programme R-2000, des
maisons à superenergie, ça demande une formation
particulière au niveau des employés. Et ce ne sont pas tous les
employés qui veulent s'astreindre à avoir autant d'attention au
produit qu'ils font Et, d'ailleurs, c'était un des problèmes
majeurs que l'on rencontrait. C'est que les employés. s'ils n'avaient
pas une très bonne surveillance, et même au niveau du
contremaître, si l'employeur n'était pas là pour le
superviser et lui dire Écoutez, là, il faut faire très
attention à ces techniques là, on passait complètement a
côté Alors, c'est une préoccupation, et je pense que c'est
une sensibilisation que nous allons être obligés de faire au
niveau tant des entrepreneurs qu'aussi des salariés. Déjà
là, dire: On va sûrement se revoir, enfin, retrouver une
efficacité énergétique ou bien sauver, évidemment,
en termes d'énergie.
Mme Bacon: Au niveau des équipements, par exemple, y
compris les équipements électriques, est ce qu on regarde d'avoir
des équipements qui sont plus performants? Est-ce qu'on regarde aussi
Est ce qu'on compare par rapport à d'autres pays, par rapport à
ce genre d équipements qui sont utilisés ici pour que ce soit
davantage performant?
M. Ward: Effectivement, on étudie toujours et on a
étudié déjà différentes alternatives, qu'on
ait d'abord au solaire actif et au solaire passif tous les équipements
de biénergie et les équipements de ventilation Effectivement, on
se penche sur ces choses la et on a des préoccupa tions dans ce sens la
II y a dos choses qui sont difficilement applicables Je pense, entre autres, au
solaire passif où on est tributaires de l'urbanisation des villes. Il y
a le solaire actif ou on est tributaires de la qualité des
équipements ou de l'ensoleillement dans nos régions, de
l'enneignement sur les panneaux solaires. Il y a aussi l'équipement
biénergie où on est tributaires des fournisseurs
d'énergie, dans le sens que le gaz n'est pas prêt et n'est pas
disponible dans les régions, dans les secteurs de construction neuve
L'huile n'a pas l'équipement à jour ou a point pour faire de la
biénergie non plus dans des résidences neuves. On peut toujours
le faire dans la résidence qui a déjà une fournaise
à l'huile. Mais, effectivement, on se penche sur ces
préoccupations-là.
Mme Bacon: O. K. Vous indiquez aussi dans votre mémoire
que le marché de la rénovation est estimé en 1988 à
4 500 000 000 $ Je pense, quand même, que c'est un marché
important pour votre association. Vous soulignez aussi que les dépenses
de rénovation sont faites par goût ou
lorsqu'elles deviennent absolument nécessaires, ce qui laisse peu
de place - souvent on parle des bains tourbillons, on parle de bien des
équipements qu'on ajoute dans des maisons - ça laisse peu de
place à l'efficacité énergétique. Comment peut-on
modifier cette situation-là? Est-ce qu'il y a un moyen de changer ces
goûts ou des décisions qui sont prises quand on fait de la
rénovation? Est-ce qu'il y a des créneaux de marché
particulier qu'on pourrait développer?
M. Bernier: Si vous me permettez. Il s'agit d'abord et avant tout
d'une question d'éducation. Parce que trop souvent, même si la
maison a des problèmes, disons, majeurs sur certains aspects qu'il
faudrait réparer, mais qui, malheureusement, n'ont rien
d'esthétique, ces considérations-là ne seront jamais
prises en compte par le consommateur moyen. Alors, c'est une question
d'éducation et de reconnaissance des besoins. Et le besoin
d'efficacité énergétique ou les avantages aussi de
l'efficacité énergétique, donc, ont avantage à
être connus par le public. L'instrument, et on va jusqu'à proposer
un instrument là-dedans, c'est celui d'un organisme de consultation pour
le public auprès duquel il pourrait avoir une consultation et une
estimation de ses besoins énergétiques et possiblement une
information quant aux aspects et quant aux avantages de l'efficacité
énergétique. Alors, on croit que c'est définitivement la
voie à adopter.
M. Rousseau: Mais c'est un aspect, évidemment, on s'en
rend compte. Je pense que toutes les fois, lorsqu'on veut amener les gens
à acheter quelque chose ou à faire un geste... Je pense que c'est
assez clair. On a bien beau parler d'éducation, ce sont des grands
principes et une grande vertu, ça, qu'on véhicule. Sauf que les
gens font le pas en autant, évidemment, qu'il y a un incitatif quelque
part. Et ça, c'est clair. Nous ne sommes pas là, dans le fond,
pour demander au gouvernement, dire: Écoutez, instaurez des programmes
et des incitatifs. On trouve ça malheureux parce que très
souvent, des programmes et des incitatifs, ça vient déranger le
marché et le libre marché, c'est-à-dire que ça va
mieux. Mais, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, c'est que je ne pense
pas, ou même que si je presse la formation demain matin, et
l'information, en tout cas, Dieu sait, c'est-à-dire n'importe quoi, que
les gens vont bouger, s'il n'y a pas un bonbon quelque part.
Mme Bacon: Je pense que ça s'enchaîne bien en vous
demandant aussi, à la page 10 de votre mémoire, vous citez "la
demande est très faible pour les améliorations technologiques non
visibles, comme celles visant l'amélioration de l'efficacité
énergétique". Vous dites aussi: "La popularité des
thermopompes constitue la seule exception." Les ménages qui acceptent
d'investir dans une thermopompe, est-ce que ces gens-là ne seraient pas
prêts à envisager des investissements d'efficacité
énergétique qui sont, des fois, deux fois plus rentables? Est-ce
que l'association ne pense pas qu'avec la promotion commerciale
appropriée, qu'il y a d'autres produits, à haute
efficacité énergétique, qui pourraient
bénéficier de la part des consommateurs, peut-être, de
mêmes attraits que les thermopompes? Parce qu'on parle de vitrage
à haute performance, par exemple. Est-ce que ce ne sont pas des choses
qui pourraient être importantes pour vos consommateurs?
M. Rousseau: C'est sûr que ce sont des choses qui
pourraient être importantes et pourraient être achetées par
le consommateur, sauf que le coût est vraiment élevé. Dans
le cas de la thermopompe, les gens la change parce que, très souvent, au
niveau du chauffage, il y a un aspect vraiment inconfortable et de toute
façon, il faut qu'ils le fassent. Il y a l'air climatisé qui
entre en ligne de compte, etc. Aussi, je pense avec la thermopompe, avec les
systèmes qu'ils ont instaurés, évidemment, ça leur
permet peut-être de sauver sur leur facture énergétique,
vis-à-vis l'électricité constante, comme on le voit dans
les fournaises ordinaires. Le consommateur est toujours rébarbatif
à mettre de l'argent sur sa propriété, si ce n'est, dans
le fond, pour son premier confort qui est, salle de bains, cuisine, etc. Sur
des éléments utiles, telle l'isolation, c'est très
très rare, sinon, au niveau des fenêtres, comme on le voit, ils le
font. Mais ils le font quand ils sont rendus à la limite aussi.
Mme Bacon: À la page 14, vous spécifiez que "les
modifications" qui pourraient être "apportées aux normes
municipales pour l'éclairage seront reflétées directement
sur le prix de vente des maisons neuves". Est-ce que vous pouvez, pour le
bénéfice de la commission, justifier peut-être cet argument
ou l'expliquer davantage?
M. Rousseau: En fait, il s'agit tout simplement que les travaux
des infrastructures, dans les nouveaux développements, sont, depuis fort
longtemps, à tout le moins depuis un certain temps, je ne sais si c'est
fort longtemps, dans certaines municipalités, oui, dans d'autres moins,
mais maintenant c'est devenu une mesure, c'est que les infrastructures sont
assumées - dans le fond, aqueducs et égouts - par les
entrepreneurs. Et en plus, dans le fond, les infrastructures comprennent
très souvent, c'est-à-dire l'éclairage de rue, etc. Donc,
dans ce cadre-là, le coût des infrastructures est
reflétée sur le coût de la propriété parce
que les municipalités exigent, enfin parce que le constructeur assume
les coûts, qu'ils le reportent évidemment dans le prix de la
propriété. Alors c'est inévitable, c'est-à-dire
que, à ce moment-là, si on pouvait réduire la partie
infrastructure éclairage, tout en étant évidem-
ment approprié aux besoins des citoyens, c'est très
évident, qu'on pourrait, dans une certaine mesure, économiser.
Actuellement, toute la facture des infrastructures passe à
l'entrepreneur. L'entrepreneur n'a pas le choix, il la renverse au niveau du
consommateur. C'est assez nouveau quand même, dans une certaine
mesure.
Mme Bacon: On connaît la position de votre association par
rapport au système de plinthes électriques, on en a parlé
tantôt. Est-ce qu'il n'y a pas d'autres options, ou des alternatives pour
les consommateurs? Qu'est-ce que fait votre association pour le
développement et peut-être la promotion d'autres systèmes
de chauffage? Est-ce que ça vous arrive de faire cette promotion?
M. Ward: Effectivement, nous, on considère que la plinthe
électrique, c'est un système qui est choisi pour son
économie et non pas pour les avantages ou le confort qu'elle procure en
termes de qualité d'air. Et on fait, entre autres, par le programme R
2000 et d'autres programmes, la promotion de meilleurs équipements, qui
font, en fait, une circulation d'air et une ventilation à
l'intérieur de la maison, qui vont assurer un meilleur confort et une
meilleure qualité du produit pour le consommateur. Mais il faut
réaliser que la plinthe électrique est achetée dans une
maison de premier acheteur et là, c'est une question d'économie,
une question de cents et de piastres, au moment de l'achat de la
première maison. On parle d'environ 4000 $ de différence de
coût pour passer d'un système électrique, qui inclut la
circulation d'air, ou à air chaud. C'est effectivement ce qu'on
préconise, ce qui est choisi, d'ailleurs, par les deuxième,
troisième acheteurs.
M. Rousseau: Mais, c'est un fait Ce qu'il dit, là,
très souvent, en tout cas, on remarque que les entrepreneurs, lorsqu'ils
construisent pour une clientèle de première maison, il n'y a pas
de thermopompe, là, sa plus simple expression, c'est tout à fait
normal. Les gens ont un premier capital et ils font le pas, c'est
déjà beaucoup. Dans le deuxième temps, là,
évidemment, ils vont y aller, évidemment, vers des produits plus
sophistiqués. ( 17 h 45)
Le Président (M. Bélanger): M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: M. le président, il me fait plaisir de vous
souhaiter la bienvenue aux travaux de notre commission parlementaire, en tant
que représentant de l'APCHQ. Je trouve votre mémoire très
intéressant, mais, en ce qui me concerne, je le trouve un petit peu
vague sur les intentions. Il y a des affirmations, là-dedans, qui sont,
je pense, très justifiables, mais très peu de chiffres pour les
démontrer. J'aimerais qu'on parle de chiffres.
Une maison R-2000, ça coûte combien et il y a combien de
citoyens, au Québec, qui peuvent se payer ça?
M. Rousseau: Je pense qu'on a fait état, tantôt,
entre 6000 $ ou 9000 $ de plus.
M. Bernier: La maison R-2000, évidemment, tout
dépend de la gamme de maisons que vous allez avoir. Je pense que la
seule variable qu'on a essayé de mettre de l'avant, c'est plutôt
la différence entre... pour une maison comparable, de prix moyen, je ne
sais pas, peut-être de 150 000 $. Alors, la maison R-2000 coûterait
160 000 $ possiblement. Ça, c'est le premier chiffre, je pense, qu'on
peut avancer. Quant à la percée, quant à la
présence du R-2000, dans l'ensemble du Québec, on parle de 5 %,
environ, à l'époque où ça a sorti, là.
à l'époque où. vraiment, on a construit du R 2000. Dans
l'ensemble, il n'y a pas beaucoup plus que 5 % des mises en chantier qui
étaient étampes R 2000, malgré tout le battage
publicitaire de l'époque.
M. Claveau: Et aujourd'hui9 M. Bernier: Bien,
aujourd'hui...
M. Rousseau: II n'y a pas de demande dans le domaine de la maison
R-2000, même si, effectivement, le produit a été
défini comme étant un bon produit et de grande qualité. Le
coût, dans le fond, est prohibitif, d'une part D'autre part, les
entrepreneurs, de même que les salariés, ne sont pas
intéressés, nécessairement, à se préoccuper
de cette nouvelle technique. Ça prend une attention très
particulière Et, pour un marché, quand tu es sur un gros
marché, tu ne t'occupes pas de faire de la maison R-2000, tu t'occupes
de faire de la maison, avec la loi d'économie de l'énergie, qui,
quand même, je veux dire, a quand même de bonnes normes et qui
répond à ce que les gens veulent, en général.
M. Claveau: Donc, jusqu'à maintenant, R-2000, ça
n'a pas été l'euphorie souhaitée.
M. Rousseau: Non, c'est sûr.
M. Claveau: Ceci étant dit, ça veut dire qu'il
reste encore beaucoup de marge à faire, il y a encore beaucoup à
faire pour que, d'une part, on soit capables de maximiser l'utilisation de
l'électricité dans les foyers québécois - et quand
je parie des foyers québécois, je ne parie uniquement de ceux qui
sont capables de se payer des maisons à 150 000 $ et d'ajouter 10 000 $
pour le R-2000, puis, probablement 7000 $ à 8000 $ pour la thermopompe
et, finalement, 3000 $ d'éclairage de rues pour être sûr de
ne pas rater son entrée. C'est pour tout le monde, quand on parle
d'habitation, en tout cas au sens d'un gouvernement qui doit voir ou
d'élus qui doivent voir à ce que tout le monde puisse
vivre avec un toit sur la tête là, c'est pour l'ensemble, pour la
totalité des citoyens du Québec, quel que soit leur niveau de
revenu. Dans ce contexte là donc, il y a beaucoup à faire d'une
part, il y a donc des alternatives qui devraient être envisagées
globalement. Est-ce que vous avez, en qui vous concerne, regardé la
situation d'une façon peut-être plus globale, autre que de
développer un produit qui, finalement, ne trouve à peu
près pas d'acheteurs là. Est-ce que vous avez des alternatives
concrètes, précises qui feraient en sorte que, par exemple, d'ici
10 ans, on pourrait imaginer que 99,9 % ou 99,8 % des citoyens du Québec
aient des résidences, qu'ils soient locataires ou propriétaires,
qui soient vraiment accessibles en termes de prix et très très
économiques en termes de consommation d'énergie? Est-ce qu'il y a
des alternatives ou si on rêve en couleur d'en parler?
M. Bernier: Je vous dirais que votre projet est très
ambitieux. Évidemment, la construction neuve, pour le rappeler,
ça ajoute à peu près 2 % à 3 % par année au
parc de logements. Alors, imaginer qu'on pourrait, avec un objectif d'ici 10
ans, s'organiser pour renverser la tendance qu'on connaît et avoir une
meilleure efficacité énergétique dans l'ensemble des
bâtiments, c'est beaucoup. Maintenant, l'approche globale, on l'a
essayée, c'était celle du R-2000. Je pense qu'on a fait l'effort
assez complet là-dessus et le marché nous a déçus.
On a appris beaucoup de la leçon. Maintenant, quant à ça,
ça nous mène peut-être à parler des mesures
proposées par Hydro-Québec, qui nous semblent quand même
une excellente avenue du point de vue de l'efficacité
énergétique. Globalement, quand on parle des propositions
d'introduction de nouveaux appareils, par exemple, c'est très
intéressant cette avenue-là au départ.
M. Ward: Effectivement, on évalue des alternatives, on
travaille, d'abord, avec le bureau de l'efficacité
énergétique et on travaille aussi avec différents
manufacturiers pour développer des produits qui permettent
d'économiser de l'énergie et de s'assurer, en même temps,
d'une qualité d'air à l'intérieur des résidences,
à faible coût. Qu'on pense, entre autres, aux manufacturiers de
plinthes électriques du Québec qui sont en train d'étudier
la possibilité d'incorporer de la ventilation à
l'intérieur de cet équipement-là, toujours dans le but
d'améliorer le confort et l'économie d'énergie et de
maintenir l'accessibilité des consommateurs.
Je veux juste revenir sur une question, au commentaire que vous faisiez.
Au niveau de R-2000, ce qui est difficile à vendre, c'est la
technologie, ce que les consommateurs ne voient pas. C'est dur d'expliquer et
de vendre des éléments techniques. Pour le même prix, ils
achètent la pompe thermique. C'est beaucoup plus facile de vendre une
pompe thermique avec de la climatisation que de vendre de la technologie. On se
confronte toujours à ce problème-là et, lorsqu'on veut
développer des moyens d'économie d'énergie, il faut
essayer de vendre tout le temps une technologie et quand vous me parlez de
nouveaux équipements, on parle encore une fois de technologie. Mais,
effectivement, on considère les nouveaux équipements ou les
nouvelles alternatives qui permettent d'économiser l'énergie
à moindre coût.
M. Rousseau: Je voudrais simplement ajouter quelque chose par
rapport au R-2000. C'est très évident qu'un entrepreneur qui a
suivi toutes les techniques du R-2000, il a fallu qu'il suive des cours de
formation, il a fallu, évidemment, que ses contremaîtres suivent
aussi les mêmes cours, que ses salariés, évidemment, qui
sont extrêmement mobiles, suivent les mêmes cours. Aussi, il faut
comprendre que, quant à son marché, à la porte, il n'y en
a pas 10 qui demandent du R-2000, il y en a peut-être seulement un ou
deux. Donc, quand il planifie, c'est-à-dire son développement,
là, il est aux prises avec une maison R-2000 et il a une équipe
d'hommes qui peuvent faire ça, c'est-à-dire, dans le fond, qui
ont accepté, évidemment, de suivre ces cours-là et de
s'entraîner et, pas longtemps après, il n'y en a pas. Alors,
l'entrepreneur n'est pas intéressé à embarquer dans un
marché où il va être obligé de répondre
à des petits besoins de particuliers de même, je veux dire. Il
n'est absolument pas intéressé.
M. Claveau: Hier, Le Bureau de commerce de Montréal nous
disait, devant la même commission, que, si on s'en donnait la peine, dans
l'ensemble du secteur résidentiel et peut-être en incluant
l'industrie, mais, globalement, on pourrait imaginer un programme ou une vision
de société qui nous amènerait à économiser
à peu près 30 % de ce que l'on consomme aujourd'hui en termes
d'électricité. Vous, en tant que spécialiste de la
construction, connaissant l'état du parc résidentiel du
Québec dans toutes ses catégories, est-ce que vous croyez que Le
Bureau de commerce de Montréal est optimiste ou réaliste en nous
affirmant une chose comme ça?
M. Rousseau: En tout cas, je ne sais pas s'il est capable de
faire des croisades, c'est-à-dire pour informer les gens dans leur
comportement, à savoir comment ils doivent se comporter pour être
capables d'économiser de l'énergie mais...
M. Claveau: Non, mais juste en termes de chiffres là.
Est-ce que c'a de l'allure?
M. Rousseau: Écoutez, je ne peux pas vous répondre
à une pareille question aussi hypothétique, non.
M. Claveau: Pour lui, ce n'était pas hypothétique.
Il nous disait que c'était quelque chose qui était faisable.
M. Rousseau: Oui, mais c'est la première fois que je
l'entends parler de construction, moi, au Québec. Ça fait que
là...
M. Claveau: Bon, O. K. On va regarder la chose sous un autre
angle, si vous me le permettez. Actuellement, Hydro-Québec, dans son
plan de développement, prévoit investir 1 800 000 000 $ pour
économiser quelque chose comme 2500 mégawatts de puissance
installée, par le biais de toutes sortes de programmes, genre pomme de
douche Waterpik "made in Ontario", et des trucs comme ça. Si on regarde
le coût de ça, ça veut dire que ça représente
quelque chose comme 700 000 $ du kilowatt de puissance que ça
coûte à Hydro-Québec pour économiser, enfin pour
rendre disponible cette électricité-là sur le
marché. Parallèlement à ça, HydroQuébec se
prépare à investir quelque chose comme 55 000 000 000 $ sur son
plan global de 62 000 000 000 $, mettons autour de 55 000 000 000 $, en
nouveaux équipements de toutes sortes, production et transport, pour
ajouter à la capacité actuelle du réseau une puissance de
l'ordre de 10 000 mégawatts, soit l'équivalent d'un coût
unitaire de 5 500 000 $ du kilowatt de puissance installée. Ça
fait une grosse différence. Croyez-vous - et, là, je m'adresse au
constructeur - que, si HydroQuébec, par exemple, mettait en place une
politique d'économie d'énergie pour l'ensemble du parc
résidentiel du Québec, avec 10 000 000 000 $ - je prends un
chiffre au hasard, ça pourrait être 15 000 000 000 $,
dépendamment de l'évaluation qu'on en ferait - que l'on
ramène au niveau de ce qu'on connaît actuellement, de ces
prévisions qui sont actuellement au plan de développement..
Ça veut dire qu'on multiplie par quatre, qu'on multiplie par cinq.
Alors, on aurait quelque chose comme 12 500 mégawatts de
réduction, en supposant que ce soit possible. Évidemment,
ça reste une hypothèse, mais elle est à travailler. Cet
argent-là pourrait permettre des diminutions de facture, de coût
d'électricité pour des résidants québécois
et Hydro-Québec pourrait, éventuellement, récupérer
ces avances en facturant la différence d'économie
d'énergie faite par le consommateur pour arriver à un coût
égal de consommation à ce que l'individu a actuellement. Est-ce
que vous pensez que ça, ce serait de dépasser l'amateurisme ou le
bonbon, comme vous le disiez tantôt, pour dire: Effectivement, c'est
quelque chose de réalisable et qui va nous amener à
rénover, dans les 10 prochaines années, l'ensemble du parc
résidentiel québécois?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bernier: Ha, ha, ha! Excusez. Vous nous avez placés
devant des chiffres un petit peu difficiles. Je pense que je peux
peut-être répondre en précisant que l'avenue qu'on a
cherchée à prendre dans le mémoire - et c'était
précisé, il me semble, à un endroit - c'est que..
M. Claveau: Bien, on cherche des solutions. M. Bernier:...
nous, quand même... M. Claveau: Non, non, c'est simple.
M. Bernier:... bien qu'on essaie d'avancer certains
chiffres...
M. Claveau: Ils comprennent ça.
M. Bernier:.. certaines données économiques, on
n'est pas venu se présenter ici pour discuter du côté
macro-économique de la politique d'Hydro Québec. On
reconnaît que, potentiellement, l'introduction de mesures précises
pour sauver de l'énergie, c'est, d'après nous, quelque chose
d'intéressant à suivre. Tant mieux si, au bout de la ligne, les
ménages en profitent. On met la contrainte qu'il faut respecter la
capacité de payer des ménages. Mais lorsque vient le temps de se
prononcer sur les montants d'argent investis par Hydro-Québec,
globalement, dans ses plans de développement et sur l'impact
macro-économique que cela pourrait représenter plus tard compte
tenu de l'ouverture des marchés que ça pourrait nous donner ou de
la capacité d'exportation, on n'est pas en position de se prononcer
là-dessus. Je regrette, mais je pense que je suis obligé de le
réaffirmer.
M. Rousseau: Ne regrette pas. Je pense que votre question n'est
pas répondable. Dans le fond, je ne sais pas, si vous aviez pose la
question au bureau de commerce dont vous avez fait allusion tantôt, mais
comment voulez vous que je réponde à une pareille question? Des
kilowatts, le nombre de piastres, ça me prend une équipe, en
arrière, pour être capable de le calculer, et quasiment
l'équipe de tout le gouvernement ou d'Hydro-Québec. Je ne suis
pas capable de faire ça.
M. Claveau: Bien non, mais, voyez-vous, le problème, c'est
que le mandat de cette commission parlementaire est justement de discuter, avec
un certain nombre d'intervenants intéressés, des alternatives
globales, en termes énergétiques, pour le Québec, versus
la proposition de plan de développement qu'on a actuellement sur la
table Alors, je me considère très légitimé de poser
des questions globales qui, je le suppose, ont, pour le moins,
été considérées par les gens qui viennent nous
présenter leur position sur ce que l'on veut comme structure
énergétique au Québec, ce que l'on pense que l'on peut
faire de mieux, si on
doit laisser aller Hydro-Québec dans sa vision actuelle ou si on
doit diversifier nos sources énergétiques, si on doit aller dans
la rénovation résidentielle pour économiser au maximum, si
on doit faire payer l'industriel qui, probablement, va le plus profiter des
nouveaux développements et des quelque 50 000 000 000 $
qu'Hydro-Québec va devoir réinvestir dans des nouveaux
équipements. Globablement, c'est ça.
Alors, moi, je m'adresse à des gens qui s'y connaissent en
résidentiel, qui connaissent probablement mieux que moi l'ensemble du
parc résidentiel québécois et je leur demande: Est-ce
qu'on peut penser qu'un investissement massif, qu'une vraie politique massive
qui dépasse le bonbon, comme vous l'avez vous-même dit, pourrait
amener l'ensemble des Québécois à rénover leur
foyer, que ce soit sur le plan personnel, comme résidence privée,
ou en termes de résidence multifamiliale à vocation commerciale
ou autre? Je crois que vous êtes, en tant que représentants de
l'ensemble des constructeurs d'habitations du Québec, probablement les
mieux placés pour me dire si oui ou non il y a un marché pour
ça au Québec et, si oui ou non, en investissant de cette
façon-là, on risque de diminuer ou, du moins, de stabiliser la
facture du consommateur québécois qui achète ces
mêmes maisons que vous bâtissez et, en même temps, si l'on
fait qu'Hydro-Québec, par ses économies d'énergie, devra
investir moins pour disposer d'un certain nombre de kilowatts additionnels sur
le marché, à revendre à d'autres consommateurs. Il me
semble, moi, qu'on est tout à fait dans le cadre de la commission et
que, finalement, c'est le genre de question qui peut se poser très bien
à des constructeurs.
M. Rousseau: Vous avez entièrement raison de poser la
question, j'imagine. Nous la poser à nous autres, vous avez encore
raison, sauf qu'on vous dit: On n'est pas capables de répondre à
votre question parce qu'elle est trop large. Je vous avoue franchement que
ça dépasse mes capacités intellectuelles de le faire.
C'est une question peut-être qui pourrait être répondue, je
ne sais pas, moi, par le Conseil économique du Canada ou un autre
organisme, notamment comme l'Hydro ou, je ne sais pas trop, même le
gouvernement. Mais, écoutez, vous me demandez quasiment une
réponse qui m'aurait nécessité peut-être six mois
d'étude avec, en tout cas, tout ce que ça peut comporter, un
train de fonctionnaires et de superexperts. Je ne suis pas capable de
répondre à votre question, monsieur, je vous l'avoue franchement.
Je m'avoue vaincu devant votre question. Je ne suis pas capable.
M. Claveau: En tout cas, la question reste ouverte...
M. Rousseau: Ah, oui! On va essayer d'y répondre un de ces
jours. Ha, ha, ha!
M. Claveau: ...puis vous aurez l'occasion d'y méditer au
cours des prochains mois. Ha, ha, ha!
M. Rousseau: II va peut-être m'arriver un éclair de
génie. Ha, ha, ha!
M. Claveau: Ha, ha, ha! M. Rousseau: En tout cas.
M. Claveau: Alors, ça va, Mme la ministre. Si vous voulez
continuer.
Mme Bacon: Alors, merci beaucoup à MM. Rousseau, Bernier
et Ward de votre présence ici, d'avoir pris la peine de vous pencher sur
le dossier, de votre intérêt aussi pour la commission
parlementaire et d'avoir accepté de répondre à toutes nos
questions même les plus compliquées, au moins d'y trouver quelque
chose à dire. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de
l'énergie et du travail, excusez, de l'économie et du travail -
je savais que je la ferais, celle-là - remercie l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations du Québec pour sa
participation à ses travaux. Et nous ajournons à demain, 10
heures, dans la même salle. Je vous remercie.
M. Rousseau: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Bonne soirée et
bon retour.
(Fin de la séance à 18 h 3)