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(Seize heures quatorze minutes)
Le Président (M. Charbonneau): La commission de
l'économie et du travail entreprend cet après-midi une
séance qui doit porter sur le libre-échange et qui fait suite aux
consultations que nous avons eues il y a quelques semaines Nous allons
siéger, pour cette discussion sur le libre-échange, ce soir
jusqu'à 22 heures, après une suspension pour l'heure du souper
Pour cette séance, le ministre du Commerce extérieur et du
Développement technologique, ainsi que le ministre des Relations
internationales et délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes sont membres de la commission
M le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M le Président M Claveau
(Ungava) est remplacé par M Joliette (Chevrette), M Gauthier
(Roberval)
Une voix: M Joliette (Chevrette)?
M. Chevrette: Cela me fait plaisir C'est un peu ce qui circule
dans mon comté
Le Secrétaire: Je m'excuse par M Chevrette (Joliette), M
Gauthier (Roberval) est remplacé par M Jolivet (Laviolette), M Gendron
(Abitibi-Ouest) par M Filion (Taillon) et M Paré (Shefford) par M Godin
(Mercier)
Remarques préliminaires
Le Président (M. Charbonneau): Selon une entente
intervenue de part et d'autre avec le leader, le temps sera réparti en
parts égales des deux côtés de la commission Sans plus
tarder, je vais céder la parole au responsable du dossier du
côté gouvernemental le ministre du Commerce extérieur et du
Développement technologique et par la suite je donnerai la parole au
responsable du côté de l'Opposition
M le ministre
M. Pierre MacDonald
M. MacDonald: Merci, M le Président Cela fait environ un
peu moins de trois ans, c'est-à-dire le 15 mars 1985, que le premier
ministre Mulroney et M Reagan présentaient aux Canadiens la perspective
d'une négociation d'un traité de libéralisation des
échanges entre les deux pays C'était pour plusieurs une nouvelle
perspective, même si dans l'histoire du Canada ce sujet avait
été abordé d'une façon assez sérieuse, mais
on n'en était pas venu à un traité formel bilatéral
Cependant, au cours des années qui ont suivi la deuxième guerre
mondiale et dans te contexte du GATT depuis 1947, les différentes rondes
de négociations avaient produit des diminutions très
significatives de ce qu'étaient les barrières tarifaires dans le
commerce international entre les deux pays, à un point tel que certains
experts disaient à toutes fins utiles, la guerre des tarifs douaniers
entre le Canada a quasiment disparu cependant, d'un même souffle, on
disait La guerre des mesures non tarifaires s'intensifie et pourrait
s'intensifier encore beaucoup plus
Lorsque nous avons assumé la responsabilité du dossier
à partir de décembre 1985, comme le député de
Bertrand alors ministre du Commerce extérieur peut sen souvenir, il y
avait eu très peu de travail de fait La ronde était encore dans
une négociation entre les provinces et ce n'était que quelques
jours auparavant que M Mulroney avait transmis aux premiers ministres du Canada
réunis à Halifax ta promesse d'une pleine participation au
processus de préparation du mandat, au processus de
négociations
Nous avons passé à travers un processus de consultations
internes et externes dans tous les organismes du gouvernement provincial qui y
avaient un intérêt direct ou indirect Nous avons également
institué le comité Warren qui a reçu les
représentations de 57 organismes ou personnes. En cours de route, nous
avons également publié la position du Québec ou si on aime
mieux, l'inventaire, la perspective des secteurs qui pourraient être
touchés par une entente finale Nous avons clairement établi les
enjeux Nous l'avons fait avec transparence comme aucune province aucun
gouvernement qu'il soit fédéral au Canada ou aux États
Unis ou aucun État américain Aucun gouvernement n'a autant
publié n'a autant déposé sa position devant tous les
intéressés son analyse à l'intérieur
nécessairement de la confidentialité qui entoure une
négociation
L'objectif premier - et il est bon de s'en souvenir - était de se
protéger d'un protectionnisme montant aux États-Unis Nous avions
effectivement un pays qui connaissait des problèmes comme jamais
auparavant face à un déficit de la balance commerciale à
des chiffres astronomiques, un déficit budgétaire, un besoin de
recourir au financement sur les marchés étrangers, une
dépendance grandissante de l'extérieur des États-Unis pour
s'approvisionner de biens stratégiques comme de biens de consommation et
une dépendance, encore une fois, des pays à l'extérieur
des États-Unis pour financer l'achat de ses biens divers
Nous avions une situation ou, à l'analyse, il y avait
unanimité chez les gens concernés pour dire que la situation
américaine, quant au protectionnisme qui résulte de cette
situation que j'ai expliquée, allait augmenter et que le Canada,
dépendant des États Unis pour 78 % de ses exportations de biens
et de services sur le
marché américain cette année - les chiffres
étaient à peu près les mêmes sur un plan national -
et la province de Québec, à peu près dans les mêmes
proportions pour ce qui. était de ses exportations internationales, ne
pouvaient pas - et je le répète - à l'analyse
sérieuse des gens concernés par le problème, rester
immobiles, ne pouvaient pas se désintéresser, *ne pouvaient pas
prendre une position d'autruche, car c'étaient des milliers, des
dizaines de milliers de jobs qui étaient en péril
vis-à-vis du protectionnisme américain.
On a vu très bien ce que voulait dire protectionnisme, on a
appris presque les mots dans plusieurs cas, lorsque est arrivée
l'affaire qu'on peut appeler du bois de sciage. Cela a été suivi
dans l'Ouest par l'affaire de la potasse et iI y a eu l'affaire des tubes de
télévision. Vous avez eu, vis-à-vis d'autres pays, des
mesures et une façon de faire qui étaient encore plus cruelles et
plus arrogantes même. Vous avez eu l'introduction au sein du
Congrès américain de centaines de demandes de mesures de
législation. Il faut nécessairement pondérer ceci par ce
qu'on connaît du système américain, mais tout de même
cela dénotait très bien cet argument qu'on avait utilisé,
à savoir que la situation empirait et qu'on ne pouvait pas voir
d'amélioration certainement pas à court terme, même pas
à moyen terme et peut-être même pas à long terme, si
on veut dire par long terme dix ans.
Donc, comme province, comme gouvernement provincial, le statu quo nous
était inacceptable. Comme il était suggéré par
certains, on aurait pu se satisfaire des mécanismes du GATT. Là
encore, on l'a démontré et cela a été clairement
démontré également ici en commission parlementaire et
autrement, c'était un mécanisme beaucoup trop lent, beaucoup trop
lourd pour faire face à des demandes de mesures en droits compensateurs
qui pouvaient toucher une industrie extrêmement importante au Canada et
au Québec et se traduire rapidement par des pertes de milliers de
jobs.
On a donc décidé de s'associer à un projet qui
parlait de négociations. Je pense qu'on peut dire qu'à
l'intérieur de tout ceci, et j'en félicite d'ailleurs encore une
fois le député de Bertrand, on a pu conduire comme gouvernement,
à l'intérieur de nos questions-réponses fréquentes
et de la commission parlementaire et de l'interpellation, on a conduit ce
dossier-là de façon non partisane. Encore aujourd'hui, je vais
prendre exactement la même attitude. Pour appuyer ce qui a
été la décision du gouvernement de négocier,
j'aimerais peut-être citer ceux qui ne sont certainement pas du
gouvernement, qui ne l'étaient pas hier et qui ne 'le sont pas. à
ma connaissance, encore aujourd'hui, pour souligner justement cette
décision qui était la nôtre.
J'ai ici, M. le Président, une prise de position qu'on retrouvait
dans le Québec et la vie internationale, un document de réflexion
de la commission nationale du programme du Parti québécois
d'octobre 1986, qui disait: La signature d'un accord de libre-échange
viendrait consacrer la situation unique des deux économies et nous
mettrait théoriquement du moins à l'abri des mesures
protectionnistes que les Américains pourraient adopter contre l'Europe
et le Japon.
Si je vais à un texte de M. Parizeau M. Parizeau disait ici, le
16 septembre 1987: "Quels sont les intérêts canadiens et
américains dans cette négociation? Je laisse ici, pour le moment,
pendant quelques minutes, les intérêts du Québec. On y
reviendra tout à l'heure. Je vous rappelle ici que, pour ce qui est de
déterminer les intérêts canadiens, ils sont finalement
très simples, ils sont permanents, ils n'ont pas changé depuis
1984. "En 1984, on assiste pour la première fois à une opposition
très nette entre le Congrès des États-Unis d'une part et
l'administration américaine, le président des États-Unis
d'autre part. C'est à partir de 1984 que le Congrès
américain part dans une voie protectionniste - le mot, je pense, n'est
pas trop fort - qui, à un moment donné, frise le délire.
Il y aura, en 1984, 200 projets de loi protectionnistes déposés
au Congrès américain. On n'imagine pas un instant que le
président des États-Unis puisse tous les jours ou tous les deux
jours mettre un veto sur tous ces projets de loi Politiquement, c'est
impensable. Remarquez qu'on est rendu bien au-delà de 200 projets de loi
maintenant. On est quelque part entre 600 et 700 projets de loi
protectionnistes. S'il fallait qu'une partie seulement de ces projets de loi
soient adoptés par le Congrès américain et que le
président des États-Unis soit forcé de les laisser adopter
ou d'en laisser adopter un bon nombre, des secteurs entiers de
l'activité économique canadienne seraient saccagés."
Un autre membre de votre gouvernement, de l'ancien gouvernement...
M. Chevrette: Une chance que vous n'êtes pas partisan.
M. MacDonald: Je ne suis pas partisan. Ce ne sont pas les
libéraux qui ont dit cela, que je sache.
Une voix: Ah bon!
M. MacDonald: Je lis ici, la même journée, le 17
septembre 1987, M. Landry qui disait: "II est Intéressant de noter que
les Québécois et les Québécoises, je crois, ont
bien compris cela d'instinct, à toutes fins utiles, puisque d'abord - ce
qui est une chose qui ne se rencontre pas si souvent - les deux grandes
formations politiques, celle qui aujourd'hui est le gouvernement et celle qui
est l'Opposition, sont essentiellement d'accord sur le fait qu'il est dans
l'intérêt du Québec de libéraliser les
échanges avec les États-Unis d'Amérique. Et aussi parce
que les sondages, que l'on prend pour ce qu'ils
sont, même s'ils sont répétitifs, vont dans le
même sens et peuvent avoir une certaine fiabilité. Les sondages,
dis-je, démontrent et en particulier le dernier Decima Research qui
était rendu public en fin de semaine dernière, le dernier mais
les deux derniers, que c'est au Québec et de loin que les populations
appuient l'idée du libre-échange. Par exemple, à la fin
d'août 1987, jusqu'à 70 % des Québécois et des
Québécoises pensent que c'est une bonne idée d'avoir un
traité de libre-échange avec les États-Unis. Cela fait
beaucoup de monde."
Je vais couper. Il y a d'autres statistiques intéressantes. Mais
je ne voudrais pas laisser de côté celui qui me fait face,
c'est-à-dire mon collègue, le député de Bertrand,
qui, devant la Chambre de commerce de Varennes, le 3 mai 1987, disait: 'Pour le
Canada et le Québec, l'enjeu commercial est de taille. Les exportations
canadiennes vers les États-Unis représentent près de 23 %
du PIB canadien. Une baisse de 10 % de nos exportations vers les
États-Unis - et je me permets de te répéter - une baisse
de 10 % vers les États-Unis signifierait en gros la perte de 250 000
emplois." Et vous continuiez en disant: "Face à la montée du
protectionnisme américain dans le cadre d'une stratégie
défensive, afin d'éviter que le commerce entre les deux pays ne
se fasse dans un climat d'incertitude, le Canada a donc intérêt
à négocier un accord commercial qui viendrait, à tout le
moins, civiliser les rapports commerciaux entre les deux pays. Il va de soi
aussi que des échanges sur un marché de 165 000 000 000 $ doivent
être plus encadrées "
Avant cela, si on peut me permettre, vous disiez à La Presse, le
16 avril 1986: "Le Québec n'a pas le choix. Il faut privilégier
la négociation d'une entente de libre-échange avec les
États-Unis si nous voulons que notre base industrielle formée
majoritairement de PME se développe - et vous connaissez cela - il faut
aller de l'avant et conclure une entente commerciale avec nos voisins du
Sud."
Finalement, les jeunes du Parti québécois disaient par la
bouche de Mme Courville, la présidente: "Aujourd'hui, le comité
national des jeunes du Parti québécois souscrit au principe d'une
libéralisation des échanges entre le Québec et les
États-Unis. Essentiellement, trois critères..." etc. Je vais vous
épargner le reste. (16 h 30)
Malgré cela, malgré toutes les paroles qui ont
été dites ou qui ont été écrites sur le
sujet, malgré ce qui semble être pour la majorité des
Québécois, d'après ce qu'on peut apprécier encore
maintenant, une entente qui n'est certes pas parfaite - on peut toujours
espérer plus - mais qui respecte les conditions posées par le
gouvernement fédéral auxquelles le Québec a
adhéré en y ajoutant sept autres conditions, cette entente,
dis-je bien, nous apparaît comme favorable aux objectifs et elle va de
pair avec ce que nous voulons être l'avenir du Québec et du
Canada.
Nous avons précisé cet après-midi, M. le premier
ministre particulièrement, la position du Québec, le fait qu'il
désirait, lors de la rencontre des premiers ministres à Ottawa
demain, explorer certains éléments. Sûrement, vous allez y
faire référence. Mon collègue, le ministre des Relations
internationales et délégué aux Affaires
intergouvemementales canadiennes et moi, nous chercherons à y
répondre le mieux possible.
Mais vous allez nous permettre, M. le Président, dans cette
rencontre, face à ce qui est une position claire, qui a toujours
été claire, qui a toujours été habillée de
conditions qu'on a cherché à faire respecter et qu'on a fait
respecter, face à cette position claire, vous nous permettrez
peut-être, M. le Président, d'essayer également d'obtenir
de nos collègues d'en face une position claire et de savoir où
ils se situent. Au-delà de cette préoccupation parfaitement
légitime qui est la leur, de poser des questions sur l'entente et de
demander des éclaircissements, je pense que, comme représentants
officiels de l'Opposition et d'un segment de la population du Québec,
ils pourraient également avoir la franchise et l'honnêteté
de nous donner clairement leur position.
J'aimerais, en terminant, dire que nous sommes ouverts à toutes
vos questions. Nous allons y donner toute l'attention possible. S'il y a des
domaines dans lesquels on ne se sent pas assez compétents, vous me
permettrez de faire appel à mes collègues, les techniciens qui
sont avec moi. si vous le voulez bien, M. le Président. Je vous garantis
immédiatement que, si on n'a pas de réponse maintenant,
peut-être de la façon que vous aimeriez l'avoir, si on ne l'a pas,
on ira la chercher et on vous la donnera dès qu'on pourra le faire.
Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M.
le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais
le dire à M. le ministre du Commerce extérieur, s'il ne le savait
pas: Ce sont eux qui forment le gouvernement depuis deux ans, ce sont eux qui
doivent administrer la province. Ils n'ont pas l'air de s'en rendre compte,
puisqu'ils demandent à l'Opposition, à toutes fins utiles, de se
substituer à eux, chose qu'on ne fera sûrement pas. On est
là pour représenter les citoyens, au moins 40 % des citoyens du
Québec qui n'ont pas fait confiance le 2 décembre 1985 à
la formation libérale, et on a le droit de questionner surtout un ou
deux ministres qui, selon leurs propres déclarations, imaginez-vous,
étaient au courant à chaque minute, à chaque seconde,
à chaque heure du pur, à chaque semaine, à chaque mois, de
tout te déroulement complet des négociations. Surtout depuis une
semaine, on se rend compte que cela s'est mis à reculer. La connaissance
du dossier
est moins grande depuis une semaine qu'elle ne l'était, vous vous
le rappellerez, dans les périodes de questions antérieures ou le
ministre du Commerce extérieur, très humble, se levait avec pompe
pour dire qu'il suivait le dossier à chaque minute, à chaque
seconde même du sprint des négociations finales
Donc, ce sera facile pour lui, sans doute, de répondre à
l'ensemble des questions de l'Opposition qui est là pour questionner
l'administration, qui est là pour questionner le gouvernement dans ses
orientations, qui est là pour voir si le gouvernement, dans un premier
temps d'abord, a obtenu le respect de ses conditions de base, de ses conditions
d'appui qu'il posait à un accord du libre-échange C'est le
gouvernement qui a fait son lit sur les conditions On lui rappellera à
ce gouvernement, M le Président, que nous avions des réserves
beaucoup plus grandes que celles-là Nous voulions, par exemple, que
l'agriculture et la culture soient complètement exclues d'une entente de
libre-échange alors que, de votre côté, vous y alliez pour
d'autres conditions Je lui rappellerai les conditions qu'il posait. II disait
que le respect intégral des compétences législatives du
Québec était indispensable à tout accord sur le
libre-échange. II disait également que le respect intégral
de ses lois, de ses programmes et de ses politiques dans les domaines de la
politique sociale, des communications, de la langue et de la culture
était une condition d'appui au libre-échange
Le maintien de sa marge de manoeuvre nécessaire pour atteindre
les objectifs de modernisation et de développement de son
économie dans toutes les régions, l'obtention de périodes
de transition et la mise sur pied de programmes d assistance pour les
entreprises et les travail leurs dans les secteurs moins compétitifs -
des programmes concrets pour les travailleurs, pour l'entreprise - la mise en
place d'un mécanisme de règlement des différends auquel
seront associées les provinces - c'était une autre condition - le
maintien d'un statut spécial pour l'agriculture et les pêcheries
et enfin le maintien de son droit d'approuver ou non l'entente en fonction de
l'évaluation ultime qu'il fera à la lumière des
intérêts fondamentaux Donc, ce sont les sept conditions que le
gouvernement du Québec a posées
Malgré notre Insistance à inclure d'autres
éléments, le gouvernement a décidé d'avoir sept
conditions Nous allons sûrement interroger, au cours des heures qui
suivront, sur ces conditions Je pense que c'est notre droit le plus fondamental
d'interroger le gouvernement D'autant plus que le gouvernement actuel s'est
prononcé en faveur du libre-échange sans réserve,
euphonquement pour Rappelez-vous le premier ministre qui disait à toutes
fins utiles au premier ministre canadien au tout début des
négociations Si vous avez de la misère à le vendre, j'irai
vous aider, il n'y a pas de problème Aucune réserve au
début. Depuis une semaine, les réserves commencent à
pointer Le premier ministre commence à dire. II faut que j'interroge. II
faut que les gens quf étaient au courant à la minute près
Interrogent à la fois sur le processus de ratification, sur les
mécanismes de règlement des différends, sur le respect
intégral des compétences Aujourd'hui, le premier ministre disait
qu'il fallait qu'il interroge aussi sur l'énergie
Les gens qui ont suivi cela à la minute et à la seconde
n'ont plus de réponse tout à coup il faut qu'ils aillent chercher
les réponses Cela nous apparaît assez drôle Je pense que
cela justifiait l'Opposition d'exiger une commission parlementaire, tout au
moins une commission parlementaire très préliminaire, sachant
très bien que c'est technique et que des experts pourront se prononcer
un peu plus tard, probablement en janvier Mais, au moins, qu'on donne, dans les
meilleurs délais, la chance aux citoyens et aux experts de se prononcer
sur cette entente de libre-échange
D'autant plus, je le rappellerai, M le Président, que ce
même gouvernement, depuis un certain temps, à la suite de son
adhésion à l'Acte constitutionnel de 1982 ou aux amendements
constitutionnels de 1982, a fait des concessions majeures dans certains
programmes On sait que présentement, on l'a vu par le ministre de
l'Industrie et du Commerce, il se fait des "deals" dans les coulisses pour
obtenir l'adhésion des provinces à l'entente du lac Meech Donc,
on est en droit de regarder si, dans cette entente qu'on a présentement
devant les yeux, ce n'est pas le même trafic ou les mêmes sortes de
"deals" qui se font dans les coulisses
Donc, on va poser des questions sur cet ensemble On va demander des
clarifications sur certains points On va également demander aux deux
ministres C'est dommage qu'on n'ait pas l'ensemble, la brochette Ce serait
intéressant d'avoir la brochette, par exemple, en agriculture, pour
regarder les différences qu'il y a entre le ministre du Commerce
extérieur et le ministre de l'Agriculture dans leurs réponses
D'ailleurs, je pense que le premier ministre a compris qu'il ne fallait pas les
lancer tous dans la même barque. II nous en a envoyé deux. On va
les Interroger du mieux qu'on le peut Le premier ministre lui-même s'est
soustrait à cette commission, M le Président
À moins que mon collègue ait quelques mots à
ajouter, je pourrais commencer à interroger les deux ministres
Le Président (M. Charbonneau): Puisque je ne voudrais
utiliser les 20 minutes en entier comme réplique, |e pense que je peux
donner l'occasion au député de Bertrand de compléter
M. Parent (Bertrand): Je n'en abuserai pas, M le
Président
Le Président (M. Charbonneau): Je n'en doute point, mon
cher collègue
M. Jean-Guy Parent
M. Parent (Bertrand): Merci, M le Président Dans les
remarques préliminaires, je tiens à faire certaines mises au
point afin de bien situer te débat Je rappellerai au ministre du
Commerce extérieur et aux membres de cette commission la position que
j'ai défendue, et je pense que j'ai toujours été le
porteur de dossier au Parti québécois depuis que je suis
là quant au libre-échange. Je n'ai tenu qu'un style de langage et
je tiens toujours le même. Je vais le répéter pour le
bénéfice de cette commission et du ministre. Nous avons toujours
été favorables à la libéralisation des
échanges. Si le ministre ne s'en souvient pas, que ce soit dans
n'importe quelle conférence ou articles de journaux qui ont pu
être publiés, le ministre en a cité quelques-uns
tantôt, j'ai toujours maintenu le même cap au même
endroit
En commission parlementaire, entre le 15 septembre et le 30 septembre
1987, M le ministre vous avez répété à je ne sais
combien de reprises au moins à 20 ou 30 reprises, que vous étiez
d'accord avec le député de Bertrand parce que nous vous disions.
Voici les préoccupations que nous avons nous demeurons totalement
d'accord pour une libéralisation des échanges, mais attention
parce qu'on pense qu'il va y avoir des endroits où le Québec
perdra de la compétence et des secteurs qui vont y passer
Vous avez passé trois semaines en commission parlementaire, au
salon rouge, à nous expliquer qu'il fallait vous faire confiance. Vous
nous avez dit pendant trois semaines M le député de Bertrand
écoutez, nos conditions sont là on va les respecter, prenez-en ma
parole Cela a été appuyé par le premier ministre à
l'ouverture et à la fermeture. Or, mes dernières paroles en
commission parlementaire, le 29 septembre dernier, ont été. Je
veux bien prendre votre parole, M le ministre, mais je vous dis que, lorsque
nous aurons l'entente de principe, le 3 octobre, on va se reparler et on va
dialoguer
Les événements ont fait qu'entre le 3 octobre et
maintenant. II s'est passé beaucoup de temps avant que nous ayons
l'entente finale. Dès que nous avons eu l'accord de principe, je vous
rappellerai qu'on a commencé à être très inquiets.
Après avoir parlé avec des gens de votre formation politique et
après avoir parlé avec vous, M le ministre, nous pensons que vous
êtes aussi très préoccupés par des questions qui
sont là-dedans, sauf qu'on a peut-être des approches
différentes, à savoir que vous partez du principe que vous dites
oui au libre-échange Le premier ministre, en tête, a tenu ses
propos. Je l'ai dit publiquement et je le répète, je n'ai jamais
été d'accord avec cette façon de négocier du
premier ministre du Québec qui dit à tous les vents qu'il est
absolument d'accord, pratiquement à n'importe quelle condition,
puisqu'il a dit qu'il était d'accord avec l'entente au lendemain de sa
publication alors qu'il n'en avait pas encore pris connaissance. Depuis une
semaine, vous en conviendrez, vous même, M le ministre et le premier
ministre, vous commencez à dire Oui, sous réserve que
On a beaucoup de réserves, on a beaucoup de questions On ne
prétend pas, de ce côté-ci, avoir le monopole de la
vérité. On a passé deux heures en "briefing" avec vos
gens, tantôt, cela m'a fait plaisir, je remercie le gouvernement de
m'avoir permis d'y assister avec certains collaborateurs, mais je suis sorti de
là et je dois dire que je ne suis pas plus éclairé.
Certaines lumières ont été apportées mais je ne
suis pas plus éclairé et j'estime que |e m'occupe de ce dossier
depuis passablement longtemps imaginez-vous comment la population le comprend?
On revient à des choses fondamentales. On ne revient même pas aux
conditions que le Parti québécois, l'Opposition avait
posées, on revient aux conditions fondamentales, c'est-à-dire aux
sept conditions. On revient juste à cela
Si vous êtes capables, à cette commission parlementaire,
aujourd'hui de nous faire la démonstration claire nette et
précise de ces points, on va peut-être tenir un langage
différent mais il faudra nous en faire la démonstration parce que
plusieurs points nous inquiètent Ce n'esst pas tenir des langages
nuancés, ce n'est pas être tout croche que de penser ainsi Moi je
parle avec conviction et j'ai la ferme conviction que, si la balle est dans
votre camp, si le gouvernement du Québec le ministre du Commerce
extérieur et le ministre des Relations internationales sont capables de
nous donner les réponses aux questions que nous posons, nous changerons
peut être d'idée. Mais il y a toute une marge parce que c'est loin
d être prouvé
On ne charrie pas, on ne fait pas de la politique pour faire de la
politique, pour dire que cela paraît bien et qu'on mène le diable
Je pense que le ministre du Commerce extérieur devra reconnaître
qu'on a tenu un langage correct en commission parlementaire le 15 septembre
dernier. La même chose s'est passée depuis ce temps et je n'ai pas
I'intention, quant à moi de changer d'idée. Vous comprendrez que
c'est tout à fait légitime que nous ayons des questions à
poser et je défie qui que ce soit, parmi les 122 députés
de l'Assemblée nationale, parmi les 99 qui forment le parti au pouvoir,
de me dire. J'ai l'assurance qu'on est totalement couverts par le couvercle de
bord en bord
Je vous rappellerai en terminant que c'est vrai que, lorsqu'on recule
deux ans en arrière, le but était de se protéger contre la
montée du protectionnisme américain. C'est vrai Mais
souvenez-vous qu'il y avait une autre condition fondamentale, M le ministre,
c'était d'avoir l'accès garanti au marché
américain. Depuis longtemps et jusqu'en juin dernier, on parlait
toujours de l'accès garanti au marché américain,
et vous savez fort bien qu'on ne l'a même pas actuellement. C'est
Important. (16 h 45)
Je vous rappellerai aussi que, s'il y a quelqu'un qui a changé
d'idée, c'est peut-être M. Bourassa, parce qu'en mai, juin et
septembre 1985 - on a des articles de journaux pour le prouver - il se disait
contre le libre-échange. Alors qu'on ne vienne pas aujourd'hui me faire
la leçon et dire: J'ai changé d'Idée. L'idée est
toujours la même. On a une "job" à faire. Vous avez une "Job"
à faire. Le gouvernement doit s'assurer que cette entente... parce que
dans cinq, dix ou vingt ans, peut-être qu'on ne sera plus là, mais
que l'on soit dans une entreprise, au Parlement ou n'importe où, et vous
aussi, M. le ministre, on voudrait être sûrs qu'on est capables de
vivre avec une entente.
On a la profonde conviction au moment où l'on se parte,
peut-être que nos recherchistes sont en mauvaise ligne, peut-être
qu'on a mal compris, mais on a la profonde conviction qu'il y a des pouvoirs
importants que l'on perdra. Si on perd ces pouvoirs, je vous garantis qu'on se
ramasse dans une pente glissante et vous en porterez... parce que l'Opposition
n'a pas la prétention qu'on va faire arrêter le traité
Quant à la procédure, vous conviendrez que c'est un peu dommage
qu'on se ramasse à 17 heures le 16 décembre, mais on a au moins
une place pour se parler franchement. Mais vous conviendrez que te 2 janvier
prochain - c'est dans deux semaines - le premier ministre du Canada va signer,
et on y reviendra tantôt. Dans probablement 24 heures, il aura
l'approbation avec une tape sur l'épaule du premier ministre du
Québec et c'est lourd de conséquences. Je ne pense pas qu'on doit
juste dire: Oui, bravo, on a gagné une victoire. Ce n'est pas une
question de victoire, c'est une question de dire: Cette entente-là,
est-ce que le gouvernement du Quéfbec est vraiment capable de
l'endosser? J'y reviendrai plus tard.
Le Président (M. Charbonneau): Avant qu'on aille plus
loin, je voudrais qu'on s'entende un peu sur la façon dont on va
procéder. Là on a eu des remarques préliminaires de part
et d'autre. À moins que vous désiriez avoir un bref temps de
réplique, on pourrait engager la discussion sur les points
particuliers.
M. Chevrette: J'aimerais que ce soit le plus informel possible
pour qu'on puisse poser le plus de questions possible. Compte tenu qu'on a
à peine trois heures et dix de questions ou à peu près au
maximum, il me semble qu'on va essayer d'avoir les questions les plus
brèves et peut-être escompter que les réponses seront les
plus brèves aussi, de sorte qu'on pourra faire...
Le Président (M. Charbonneau): Je vous dis tout de suite
que je n'ai pas de problème à fonctionner et je pense
qu'éventuellement le vice-président qui va prendre la
relève tantôt n'en aura pas non plus. La seule chose c'est que, de
part et d'autre, si on commence à faire des débats de
procédure ou à faire des débats sur des
interprétations, on n'en finira plus. Si les questions et les
réponses non seulement sont brèves, mais permettent surtout un
échange de propos, je pense qu'il n'y a pas de problème,
on peut fonctionner en permettant l'échange et si on aborde une
question, iI faudrait |uste être conscients qu'on a un temps
limité. Alors, il ne faudrait pas passer trois quarts d'heure ou une
heure sur un sujet et se rendre compte une demi-heure avant la fin qu'on n'a
pas abordé la moitié des questions qu'on voulait aborder. M. le
ministre.
M. MacDonald: Auriez-vous objection à ce que mon
collègue puisse faire une présentation d'introduction?
D'accord?
Le Président (M. Charbonneau): II n'y a pas de
problème. Donc, il y aura une brève réplique
éventuelle du côté de l'Opposition pour que l'on puisse par
la suite engager la discussion.
M. MacDonald: Comme le dit M. le chef de l'Opposition, nous
verrons.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? Alors, M. le
ministre.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, brièvement, M. le
Président, simplement pour dire que cet accord de libre-échange
entre le Canada et les États-Unis, c'est le résultat d'une
négociation serrée et bien menée entre le Canada et les
États-Unis, mais c'est aussi une expérience de relations
fédérales-provinciales tout à fait uniques dans notre
histoire, dans le sens que nous avons été associés comme
gouvernement provincial à ces discussions. Nous n'étions pas
à la table de négociation directement, mais nous étions
associés par différentes consultations à ces discussions,
à ces négociations avec le gouvernement américain. Le
résuttat que nous avons est donc à ce niveau-là
intéressant et c'est une première en matière de relations
fédérales-provinciales.
Pourquoi avons-nous été associés de si près,
M. le Président? C'est parce que, selon le droit constitutionnel
canadien, le gouvernement fédéral peut faire les traités
qu'il veut, dans les domaines qu'il veut, mais lorsqu'il s'agit de domaines de
compétence provinciale, il doit se référer aux provinces
pour appliquer le contenu de ces traités qui se réfèrent
à des compétences provinciales. Or, il est évident que,
dans ce cas-ci, dans le cas de cet accord de libre-échange
Canada-États-Unis, qu'il y a beaucoup de sujets qui peuvent se
référer d'une façon directe ou indirecte à des
domaines de compétence provin-
ciale, que ce soit la question du traitement national, que ce soit la
question de l'énergie, de l'agriculture, des services et j'en passe, ce
sont des sujets de compétence provinciale. Donc, au départ, iI
faut comprendre que cet accord ne peut être appliqué dans son
intégralité que dans la mesure où les provinces pourront
participer à la mise en oeuvre du traité. Quand je dis
"participer", M. le Président, et j'insiste sur ce terme, il ne s'agit
pas de conclure que, parce que ce traité implique des compétences
provinciales, par le fait même nous cédons des compétences
provinciales.
Absolument pas! On ne cède pas de compétence provinciale.
Ce que nous faisons, c'est utiliser nos compétences pour appliquer le
traité dans la mesure où ce traité fait notre affaire.
S'il ne faisait pas notre affaire, on dirait tout simplement: On ne l'applique
pas parce que ce n'est pas selon les intérêts du Québec.
Mais dans la mesure où nous complétons notre analyse et que nous
en arrivons à la conclusion que ce traité est une bonne affaire
pour le Québec, nous utilisons nos compétences qui sont
Impliquées dans le traité et nous les utilisons pour appliquer le
traité. Ce n'est pas une concession que nous faisons Nous ne touchons
pas à nos compétences législatives. Nous conservons
toujours la plénitude de nos compétences législatives. Ce
que nous faisons, c'est un geste de souveraineté - c'est un mot qui va
plaire à l'Opposition - et nous prenons nos compétences pour
mettre en application le traité en ce qui regarde le territoire
québécois. C'est sur ce territoire québécois que
s'appliquent nos compétences législatives. Et si, à un
moment donné, ça n'allait pas, s'il y avait des problèmes,
si les circonstances changeaient et si on voyait que ça n'allait pas, il
sera toujours possible, toujours par le principe de la souveraineté de
l'Assemblée nationale du Québec, toujours en fonction du principe
de l'intégralité des compétences législatives
québécoises, de revenir et d'agir en conséquence.
J'insiste sur ce point, M. le Président: il est possible
d'appliquer ce traité, cet accord de libre-échange
Canada-États-Unis sans modifier la constitution canadienne. C'est cela,
le principe. On peut appliquer ce traité sans modifier la constitution
canadienne. On le fait en tout respect du partage des compétences
législatives provinciales, fédérales, et on le fait en
participant avec le gouvernement fédéral pour qu'ensemble on
applique un traité qui, croyons-nous, va dans le sens des
intérêts du Québec.
Il y a différents sujets qui méritent une étude
approfondie, comme par exemple le processus de mécanisme de
règlement des litiges Avoir un traité, c'est une chose. Avoir une
entente, c'est une chose. Avoir le mécanisme pour faire respecter cette
entente, c'est quelque chose d'aussi important. Dans ce cadre, on peut
être satisfaits des mécanismes de règlement que nous avons
dans l'entente, des mécanismes de règle- ment qui permettent
l'interprétation de l'accord et qui permettent de résoudre des
points litigieux qui pourraient survenir dans l'application de l'accord.
Là encore, il s'agit de voir au respect des compétences
provinciales et il s'agit de voir aussi là encore à ce que les
intérêts du Québec soient respectés. Qu'est-ce que
cela signifie? Cela signifie que le Québec soit présent, que le
Québec puisse avoir sa place, que le Québec puisse, dans la
mesure où ses lois, ses règlements, ses mesures administratives
ou ses directives, en fait, sa situation économique puissent être
touchés par une interprétation de cet accord de
libre-échange, que le Québec puisse être impliqué
pour faire en sorte que ses intérêts soient respectés.
M. le Président, en terminant, parce que je veux, moi aussi,
qu'on puisse procéder très informellement et répondre aux
questions de l'Opposition, je voudrais insister sur un point,
c'est-à-dire qu'on peut appliquer ce traité sans modification
à la constitution canadienne. Il n'est pas question pour le
Québec de céder des compétences législatives. Il
est question strictement de participer, avec le gouvernement
fédéral, à la mise en oeuvre d'un traité que nous
considérons comme un traité intéressant pour le
Québec. Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M.
le chef de l'Opposition.
Discussion générale
M. Chevrette: M. le Président, à la suite des
propos du ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes, j'aurais une première question. Tout
d'abord, puisqu'il a parlé d'intégralité des
compétences ou de la souveraineté du Québec, pour lui, il
semble bien qu'il n'y a pas de problème Je vais lui demander comment il
concilie, dans un premier temps, ce qu'il avance avec l'article 103,
l'étendue des obligations, qui dit: "Les parties au présent
accord veilleront à ce que toutes les mesures nécessaires soient
prises pour donner effet aux dispositions de l'accord, y compris à leur
observance, sauf stipulation contraire dans les présentes, par les
gouvernements des États et des provinces et les administrations
locales". Est-ce qu'il considère que ce n'est pas un frein, une limite
ou une entrave à l'exercice des compétences du Québec?
M. Rémillard: L'article 103 se réfère
à la situation du droit constitutionnel tel que nous le vivons et tel
que je l'ai expliqué tout à l'heure, c'est-à-dire que le
fédéral ne peut pas prendre plus de responsabilités qu'il
en a selon la constitution canadienne. Or, la constitution canadienne lui dit
qu'il peut faire les traités qu'il veut, mais pour l'application du
traité dans les domaines de compétences provinciales, il doit
avoir l'assentiment des provinces Alors, ce que
l'article 103 dit, c'est que le fédérai doit certainement
essayer d'établir un consensus, de pouvoir faire en sorte que l'ensemble
de la fédération canadienne appuie cette entente de
libre-échange.
M. Chevrette: M. le ministre...
M. Rémillard: Laissez-moi terminer, si vous le permettez.
Mais il demeure une chose. D'abord, on va régler le cas du niveau
municipal. Les municipalités sont des créatures
législatives des provinces. Une Législature provinciale, le
Parlement du Québec peut décider qu'aujourd'hui la
municipalité existe et, demain, iI peut dire qu'elle n'existe plus. Une
province existe aujourd'hui, mais le gouvernement fédéral ne peut
pas dire: la province existe aujourd'hui, mais demain elle n'existe plus. Ce
n'est pas la même chose.
En ce qui regarde strictement la question des provinces, c'est que
l'article 103 va permettre au gouvernement fédéral de pouvoir
créer un consensus dans la mesure où les provinces vont vouloir y
participer.
M. Chevrette: Comme vous le dites, vous êtes d'accord avec
le traité, mais lorsque le fédéral va vous demander de
limiter vos compétences constitutionnelles, même celles qui vous
sont dévolues par la constitution, comme vous allez adhérer au
traité - si j'ai bien compris vos propos, vous voulez le ratifier - vous
allez vous prononcer de quelle façon, tout d'abord? Il serait
peut-être intéressant de voir quel sera votre processus de
ratification.
M. Rémillard: II y a deux questions dans...
M. Chevrette: Oui. Mais on pourra revenir à la
première...
M. Rémillard: À la deuxième.
M. Chevrette: ...si vous me dites le processus de
ratification.
Processus de ratification
M. Rémillard: Le processus de ratification. Il faudrait
voir, tout d'abord - c'est l'étude que nous faisons présentement
- s'il serait nécessaire de modifier des lois ou des règlements
ou toutes autres directives provinciales pour être en concordance avec le
texte de l'accord du libre-échange. Il faudrait voir cela. Si on en
arrivait à la conclusion - mais, à première vue, il ne
semble pas qu'il y ait beaucoup de cas dans ces circonstances - qu'il fallait
changer des lois, on changerait les lois. Mais attention, ce que je veux vous
dire, c'est ceci: C'est que si on change la loi parce qu'on veut être
conformes à l'accord de libre-échange, c'est un geste de notre
souveraineté, c'est-à-dire qu'on ne concède pas la
souveraineté, on l'exerce en modifiant la loi. Une loi se modifie
toujours par une autre loi. Si jamais cela ne fait pas notre affaire, on
revient avec une autre loi et on change la loi encore une fois.
Quelles seraient les conséquences, à ce moment-là,
si on revenait sur notre parole? Les conséquences seraient politiques et
économiques. On aurait à subir les conséquences de l'autre
côté.
M. Chevrette: M. le ministre, allez-vous adhérer au
traité du libre-échange par loi ou par décret,
conformément à l'article 15 de la loi constitutive de votre
ministère? (17 heures)
M. Rémillard: Pour le moment, on est en train
d'étudier les différentes implications. Ce que je viens de vous
dire, c'est que s'il fallait procéder par loi pour adapter chaque loi,
nous pourrions le faire dans la mesure où iI faudrait modifier des lois,
ce qui n'est pas absolument pas sûr pour le moment. Si nous devions
procéder par règlement, nous pourrions le faire aussi. Tout ce
que nous voyons actuellement c'est par acte exécutif, mais cela reste
encore à voir, nous sommes à étudier cette situation.
M. Chevrette: M. le ministre du Commerce extérieur a
clairement identifié au mois de septembre dernier, si ma mémoire
est fidèle, qu'il était favorable à une ratification
officielle par le Québec. À quel type de ratification
pensiez-vous à l'époque?
M. MacDonald: À ce moment-là, j'ai dit - et je vais
me rappeler l'esprit de ce que j'ai dit plutôt que les mots - qu'une
entente qui revêtait une aussi grande importance pour la population du
Québec devrait faire le sujet d'une ratification ou d'une approbation
des élus du peuple. Je pense que c'est ce que j'ai dit.
M. Chevrette: ...par la voie législative?
M. MacDonald: II peut y avoir différents véhicules.
Ce peut être une motion présentée en Chambre ou autrement.
Je ne suis pas un expert en matière de législation. J'ai dit:
Soumis aux représentants du peuple.
M. Chevrette: Bon! Je suppose que l'Assemblée nationale du
Québec, vous me permettez, ratifie ou par loi ou par motion le
traité de libre-échange et que ce traité de
libre-échange automatiquement vient heurter certaines compétences
ou limiter l'exercice de certaines compétences du Québec. Est-ce
que cela vous oblige à changer la loi du Québec?
M. MacDonald: Cela ne heurterait pas les compétences du
Québec. Si nous étions en désaccord avec une ou des
clauses qui feraient que le Québec ne voudrait pas adhérer au
traité tel qu'il est, nous exercerions, à ce
moment-là,
ce qui est notre prérogative, c'est-à-dire notre
compétence législative. Nous sommes d'accord à l'heure
actuelle, sous réserve d'une vérification finale et de
réponse à nos questions. À ce moment, nous ne faisons,
comme il a été dit, qu'exercer cette compétence d'une
façon positive en n'abdiquant absolument rien.
M. Chevrette: Donc, vous votez pour une motion ou pour une loi
qui vise non pas à vous enlever des compétences, mais à
limiter certaines compétences. Est-ce que vous êtes d'accord avec
cette affirmation?
M. Rémillard: Ce n'est pas limiter, au contraire.
M. Chevrette: Limiter l'exercice du droit.
M. Rémillard: C'est permettre l'exercice complet du droit
en fonction des intérêts du Québec. Pour nous, les
intérêts du Québec c'est d'adhérer donc à cet
accord. Ce qui signifie par conséquent que, dans certaines
circonstances, dans certaines fins, en fonction de l'accord, il pourrait y
avoir des modifications pour être en conformité avec l'accord.
M. Chevrette: Prenons un exemple concret.
M. Rémillard: Prenons un exemple concret, oui.
M. Chevrette: Prenons l'électricité. M.
Rémillard: Oui.
M. Chevrette: En vertu de la constitution signée en 1982,
à laquelle vous avez adhéré en 1987 - cela ne fait pas
tellement longtemps - vous avez un pouvoir de champ de taxation pour
l'exportation de l'hydroélectricité, formellement dans l'accord
constitutionnel de 1982. Je pourrais vous lire le passage.
M. Rémillard: Oui, oui, à 92A.
M. Chevrette: "La Législature de chaque province a
compétence pour prélever des sommes d'argent par tout mode ou
système de taxation des ressources naturelles", etc.
M. Rémillard: C'est cela. M. Chevrette: 92A. M.
Rémillard: Oui.
Étendue des obligations et respect des
compétences du Québec
M. Chevrette: Par rapport à l'article 904,1b du
traité du libre-échange qui se lit comme suif "La partie n'impose
pas, au moyen de mesures telles que des licences, des droits, des taxes et des
prescriptions de prix minimaux...' etc., est-ce que vous ne limitez pas la
compétence qui vous est dévolue en vertu de la constitution de
1982 ou vous ne suspendez pas l'effet positif d'une compétence en
signant ou en adhérant au traité de libre-échange?
M. Rémillard: Absolument pas. La compétence est
là. 92A nous donne cette compétence de taxer. Ce que nous disons
c'est que nous allons tout simplement nous conformer à cet accord et
nous ne ferons pas de taxe pour faire en sorte que la situation soit à
rencontre de l'accord. La compétence demeure toujours là. 92A ne
sera pas modifié, il sera toujours là. Si jamais cela ne fait pas
notre affaire, nous y reviendrons. Mais nous ne changeons pas la
compétence législative. On ne touche pas à 92A.
M. Chevrette: M. le ministre, je ne suis pas juriste, mais si
vous adhérez au traité du libre-échange, sans être
avocat, vous pouvez au moins reconnaître que le droit ou la
capacité que vous aviez, vous vous privez de l'exercer. Appelions cela
comme on le voudra, vous le gardez sur papier, mais vous vous privez, en y
adhérant officiellement, d'un pouvoir concret que vous aviez entre les
mains. Oui ou non?
M. Rémillard: Écoutez, nous avons la
capacité. Elle est là parce que la compétence c'est la
capacité. En fonction d'un engagement politique sur le plan
international et sur le plan fédéral-provincial, nous nous
engageons à ne pas l'exercer pour un certain temps en fonction de nos
intérêts, mais la compétence demeure toujours là. On
ne touche pas à la compétence.
M. Chevrette: D'accord. Reprenons l'article 103 dans ce
cas-là.
M. Rémillard: Oui.
M. Chevrette: Les parties, donc les États-Unis et le
Canada, doivent prendre toutes les mesures pour donner effet aux dispositions
de l'accord. Étant donné que l'accord suspend l'exercice des
compétences et des droits, est-ce que vous ne reconnaissez pas que, en
vertu de l'article 103, dès que vous adhérez officiellement
à l'entente, vous gardez théoriquement des compétences,
mais vous acceptez que l'exercice de ces compétences soit suspendu le
temps que vous appliquez le traité de libre-échange.
M. Rémillard: Écoutez bien. Ce n'est pas
exceptionnel comme mesure. On a fait cela à plusieurs reprises, tant
sous le précédent gouvernement que présentement, dans le
sens que, chaque fois qu'on applique un traité international qui a
été conclu par Ottawa dans un domaine de compétence
provinciale... Il y en a eu plusieurs; il y en a eu, par exemple, en ce qui
regarde les
droits et libertés de la personne, il y en a eu en ce qui regarde
les conditions de travail avec l'OIT, les conventions de travail. Comment cela
se passe-t-il? Cela se passe exactement de la même façon. On dit:
On a compétence sur le droit civil, on a compétence sur le droit
des personnes, mais un traité a été négocié;
on considère que c'est un bon traité et on va l'appliquer chez
nous. Qu'est-ce qu'on fait? À ce moment-là, on utilise nos
compétences législatives et, en fonction du traité, on va
exercer ces compétences, mais en conformité avec le
traité. C'est ce qu'on fait. La situation est pareille. Ce n'est pas une
situation exceptionnelle qu'on vit avec cette entente. Il ne faut pas penser
que c'est la première fois que cela nous arrive. Ce sont des
circonstances que l'on vit continuellement, chaque fois qu'il y a un
traité international qu'on doit appliquer ici. Il n'y a rien
d'exceptionnel.
M. Chevrette: M. le ministre. Supposons qu'il y a une situation
financière difficile et que vous êtes en train de négocier
une vente d'hydroélectricité et que c'est là un revenu
pour l'État - je ne sais pas, une taxe, par exemple, de 8 % sur 25 000
000 000 $ de contrat, cela commence à faire quelques piastres, c'est un
revenu pour le Québec pour X années. Dès que vous
adhérez au traité sur le libre-échange, vous vous
êtes nommément inscrits en faux dans l'exercice de ce droit que
vous avez puisque vous seriez soumis aux mesures de représailles des
Américains en vertu du traité auquel vous avez
adhéré.
M. MacDonald: Je pense qu'il faut le regarder... Je vais chercher
un exemple, je fais référence à l'article 904.1b et je
vous demande de le lire avec moi. C'est écrit: "La partie n'impose pas,
au moyen de mesures telles que des licences, des droits, des taxes et des
prescriptions de prix minimaux, un prix à l'exportation plus
élevé." L'explication s'applique ici. Les Américains ont
demandé la chose et c'était orienté principalement vers
les entreprises privées, surtout dans le secteur des énergies non
renouvelables, entreprises privées qui pouvaient passer un contrat avec
une autre entreprise privée ou une société d'État
au sud de la frontière pour la livraison de X millions de pieds cubes de
gaz, par exemple. Les États-Unis voulaient se prémunir contre la
possibilité que, au-delà de l'entente commerciale intervenue
entre les deux parties, une province puisse, à son gré, à
un moment donné, imposer une taxe additionnelle qui changerait le
contenu de l'entente commerciale et le prix final,
Vous me permettez, en vous donnant cette explication, d'aborder deux
aspects, c'est-à-dire l'aspect que le facteur déterminant,
à l'intérieur des deux tests conservés dans la
détermination de prix, pour le Québec et particulièrement
pour Hydro-Québec, pour vendre son électricité sous une
forme ou sous une autre à des clients américains, c'est le prix
que le marché peut prendre au moment où la vente se fait, selon
les conditions que la vente est faite. La présente clause dit à
toutes fins utiles... Disons que le prix est de six mills - c'est un prix exclu
de taxes, spécifiquement imposé. Ce que les Américains ne
voudraient pas voir - et on s'entend pour respecter ceci - c'est que,
après avoir établi six mills, en sus du contrat signé par
Hydro-Québec, le gouvernement du Québec dise, comme vous venez de
le dire: Cela ferait notre affaire d'imposer une taxe de 8 % de plus
là-dessus. C'est cela, le contexte et l'explication de ce...
M. Chevrette: Je comprends et je vous suis, mais en
adhérant au traité de libre-échange, vous acceptez de
limiter, dans le temps en tout cas, le temps que vous vous conformiez au
traité, vous acceptez de vous soustraire à un pouvoir, à
une compétence que vous auriez de toute façon au niveau
même de la constitution.
M. MacDonald: Oui, nous acceptons des termes, une façon de
faire le commerce de cette énergie qui est la nôtre pour la
vendre. On dit qu'on n'ira pas, en soubresaut par l'intervention d'une tierce
partie, fausser un contrat qui pourrait intervenir et ce, pour la
durée...
M. Chevrette: Donc, on accepte temporairement - c'est ce que je
croyais comprendre...
M. MacDonald: De ne pas se servir...
M. Chevrette: ...de fonctionner selon un système, donc de
se soustraire à une capacité qu'on aurait d'agir autrement en
vertu des compétences.
M. Rémiliard: Non, non, on ne se soustrait pas à
une compétence, parce qu'on la garde continuellement et on l'exerce pour
agir comme on agit. Ce que je veux dire, c'est que la situation serait la
même. Prenez l'exemple, dans le secteur privé, d'une compagnie qui
ferait un "joint venture" avec une autre compagnie. Il y a des avantages
à se joindre à une autre compagnie: un marché plus grand,
des capitaux plus importants, une nouvelle technique, toutes sortes
d'avantages, mais iI y a aussi certaines contraintes qui viennent du fait
d'être associé, ce qui veut dire souveraineté-association,
trait d'union, pas de trait d'union. En fait, c'est tout cela. C'est la
possibilité d'être associé et d'avoir les avantages de
l'association tout en ayant aussi les limites, bien sûr, mais vous
conservez toujours... À un moment donné, vous dites: Cela ne va
pas mon affaire, c'est terminé, on s'en va.
M. Chevrette: Si on suivait votre raisonnement, M. le ministre,
ce serait écrit: Les parties au présent accord veilleront
à ce que toutes les
mesures nécessaires à l'intérieur de leurs
compétences réciproques soient prises pour donner effet... Ce
serait logique, ce ne serait pas le fédéral qui viendrait
conditionner les compétences du Québec. Ce n'est pas cela qui est
écrit. Ce n'est pas à l'intérieur de leurs
compétences respectives.
M. Rémillard: Pour moi, il me semble que c'est
évident, non seulement il me semble: mais c'est évident, le
fédéral ne peut pas faire des choses, il n'a pas la
capacité, selon la constitution, de faire... Cette entente, ce
traité ne modifie pas la constitution du Canada.
M. Chevrette: Est-ce que le fédéral aurait le droit
d'exercer des représailles contre le Québec qui ne se
conformerait pas, par exemple, aux mesures...
M. Rémillard: Quelles sortes de représailles? M.
Chevrette: ...après que vous avez...
M. Rémillard: Qu'est-ce que vous voulez dire?
M. Chevrette: ...s'il mettait une taxe, par exemple, parce que
vous ne vous conformez pas, si le fédéral vous flanquait une taxe
à titre de représailles, une taxe à l'exportation, je ne
sais pas?
M. Rémillard: Non, il faut qu'à ce
moment-là, s'il y a un pouvoir de taxation du fédéral qui
est constitutionnel et s'il veut l'utiliser, il le peut, c'est certain, mais
toujours dans le cadre de la constitution. Ce qu'il est important de
comprendre, c'est que l'accord ne change pas ia constitution. Pour modifier la
constitution, il faut prendre la formule d'amendement qui existe dans la
constitution actuelle. Or, aussi longtemps qu'on n'a pas utilisé cette
formule d'amendement, on ne la modifie pas. De toute façon, pour
appliquer l'accord, on n'a pas besoin de modifier la constitution. Donc, le
Québec conserve toutes ses compétences; elles ne sont pas
touchées comme telles.
M. Chevrette: Mais, M. le ministre, vous avez la
compétence d'imposer une taxe, vous avez la compétence d'aider
les entreprises à l'aide de votre tarification hydroélectrique,
de voir que des Québécois puissent s'implanter dans une
région. Par exemple, c'est nous qui décidons par le Code des
professions ce que cela prend pour être un architecte, etc. On les a
tous, ces pouvoirs, je n'en disconviens pas. Ce que je veux dire, ce que
j'essaie de vous faire comprendre, c'est qu'à cause du traité du
libre-échange, même si on conserve tous ces pouvoirs
théoriques, on ne peut pas utiliser dans les faits ces pouvoirs si ce
n'est qu'en conformité avec le traité du libre-échange.
Vrai ou faux?
M. Rémillard: Faux.
M. Chevrette: Bien voyons!
M. Rémillard: On les conserve toujours. Vous essayez de me
faire comprendre des choses; mol aussi, j'essaie de vous faire comprendre des
choses.
M. Chevrette: Oui, mais vous ne pourriez pas les utiliser.
M. Rémillard: Ce que j'essaie de vous dire, c'est que la
compétence sera toujours là et que, si cela ne fait pas notre
affaire, on pourra toujours... Si c'est une loi qu'on a faite avant, on fera
une autre loi qui ira à l'encontre, si c'est une mesure administrative
ou exécutive, on en fera une autre. Ce que je veux vous dire c'est que
la compétence comme telle n'est pas touchée. (17 h 15)
M. Chevrette: Donc, on pourrait ratifier, avec une loi, le
traité du libre-échange, demain matin et dans six mois adopter
une autre loi pour dire le contraire
M. Rémillard: Bien sûr, vous pouvez faire cela
légalement. Politiquement, vous allez en subir les
conséquences.
M, Chevrette: Vos paroles vont se rendre au
fédéral. Ils vont voir le sérieux de vos propos.
M. Rémillard: On n'a pas l'intention...
M. MacDonald: Le gouvernement fédéral peut
révoquer lui-même l'entente au complet avec un avis de six
mois.
M. Rémillard: Légalement, il faut comprendre...
M. Chevrette: Mais vous avez signé le traité de
libre-échange.
M. Rémillard: Légalement, cela se peut.
Politiquement, cela serait difficile.
M. Chevrette: Demain matin, vous avez ratifié, par une
loi, le traité de libre-échange.
M. Rémillard: Oui. Si cela se faisait par une loi... Ce
n'est pas sûr qu'on va faire cela.
M. Chevrette: Je part de ce qu'il a dit tantôt une motion
ou une loi, mais en tout cas soumis aux élus du peuple.
M. Rémillard: On va voir cela.
M. Chevrette: Les élus du peuple, ce n'est donc pas le
ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales qui du haut de sa chaire va décréter
cela. J'ai compris que les élus du peuple, c'était un peu plus
que le ministre des Affaires intergouvemementales.
M. Rémillard: On a va étudier cela.
M. Chevrette: II a beau être ministre pancanadien, il y a
des limites.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Si vous décidiez demain matin - n'importe
lequel des deux - d'imposer une taxe pour l'exportation de
l'hydro-électricité, ou si vous décidiez demain matin de
ne pas donner le même traitement à une compagnie américaine
qui veut s'établir ici ou si vous décidiez de dire: On va foutre
en l'air les normes pour devenir un architecte au Québec, parce que
c'est notre Code de profession, vous mettriez fin unilatéralement et
vous seriez passibles de représailles. Vous ne pouvez pas adhérer
et avoir l'intention dans six mois de vous fouter du monde.
M. Rémillard: C'est cela. À un moment donné,
on va avoir les conséquences de cela. C'est là qu'il faudra
analyser les conséquences face aux bénéfices et dire:
Qu'est-ce qu'on fait?
M. Chevrette: Vous êtes donc conscient - et je vous
remercie d'avoir répondu dans ce sens - c'est bien sûr que vous ne
feriez pas cela le lendemain matin. Vous n'imposeriez pas une taxe pour
l'exportation d'hydroélectricité. Comme vous allez accorder - si
vous adhérez, comme vous le dites - le même traitement à
une compagnie américaine qu'à une compagnie
québécoise, vous suspendez, en adhérant, l'effet des
pouvoirs que vous avez, de faire différemment, oui ou non?
M. Rémillard: Chaque fois qu'on fait une association, que
ce soit dans le domaine privé ou dans le domaine public, chaque fois que
vous vous associez, par le fait même, vous acceptez certaines limites
à vos possibilités d'action.
M. Chevrette: Enfin, vous avez dit le mot "limites".
M. Rémillard: Cependant, vous ne concédez pas votre
possibilité d'action.
M. Chevrette: Je n'ai pas dit que vous le concédiez, j'ai
dit que vous le limitiez...
M. Rémillard: ...en ce sens que vous acceptez que, dans
certaines circonstances, à certaines fins et volontairement, vous
puissiez agir en fonction d'un but que vous vous êtes fixé en vous
associant. Mais vous demeurez - et c'est ce qui est important dans ce cas-ci -
vous ne mettez pas de côté, à tout jamais, vos pos-
sibilités d'action et vous pouvez y revenir à un moment
donné. Mais, dans ce cas-ci, vous avez à subir des
conséquences. S'il y avait des conséquences à subir, H
faudrait les analyser et voir ce qui se passe. Normalement lorsqu'on
adhère à un traité, c'est parce qu'on a des raisons
suffisantes de croire que cela va dans le sens de nos intérêts et
on essaie de jouer franc jeu pour que ce traité ait le maximum de
chances de s'appliquer avec tous ses bénéfices.
M. Chevrette: J'aurais...
Le Président (M. Charbonneau): Juste...
M. Chevrette: Oui.
Le Président (M. Charbonneau): J'ai une demande
d'intervention du vice-président.
M. Théorêt: Si j'ai bien compris. M. le
Président, les deux côtés avaient droit...
Le Président (M. Charbonneau): La seule chose que je
voudrais rappeler, c'est la règle de départ sur laquelle les
leaders se sont entendus, c'est le temps partagé La
réalité du fonctionnement, c'est qu'on a beau avoir le temps
partagé, quand on pose une question, cela va plus vite que quand on a du
temps pour répondre, Dans les faits, le côté
ministériel va plus rapidement qu'autrement épuiser la
moitié du temps qui va être consacré à la
commission. Dans la mesure où on tient compte de cela, je n'ai pas
d'objection à ce que des députés ministériels
utilisent aussi du temps de réponse pour poser des questions iI faut que
tout le monde soit conscient que... On peut aussi se permettre juste des
commentaires. Dans la mesure où on veut être efficaces, il est
évident qu'il va peut-être falloir être relativement
souples. Au bout du compte, on aura plus de temps de réponse que de
temps de question.
Sur ce, je vais d'abord permettre au vice-président, en
alternance, de poser ses questions. Après cela, je donne la parole au
député de Bertrand.
M. Théorêt: Merci, M. le Président. Juste une
question. Moi, j'aimerais savoir s'il y a une différence dans les
pouvoirs du Québec, dans ses compétences législatives,
avec un accord qui serait signé éventuellement entre le Canada et
les États-Unis ou les autres accords qui ont été
signés par le Canada, que ce soit le GATT ou d'autres accords
internationaux. Est-ce que cette entente Canada-États-Unis a plus
d'impact sur les compétences québécoises, les pouvoirs
québécois que les autres qui ont été signés
ou si c'est la même chose?
M. MacDonald: Le principe est toujours le même. Le principe
est toujours sur la même base constitutionnelle. C'est-à-dire
qu'il y a un traité qui est fait par le gouvernement
fédéral. Le
gouvernement fédéral nous dit Voici, il y a un
traité. Très souvent, lorsque cela implique des
compétences provinciales, ils nous associent aux traités, aux
négociations, aux discussions dans les documents préparatoires
et, quand le traité est conclu, on dit. Maintenant, vous pouvez
l'appliquer. Pour l'appliquer, il faut voir comment on l'applique. Soit par
loi, soit par règlement ou tout simplement en agissant
administrativement ou exécutivement en fonction de ce traité Mais
le principe est toujours le même C'est la même chose. C'est un
traité et puis, d'un côté, il y a les compétences
des provinces. Alors, il faut que la province puisse appliquer ses
compétences pour appliquer le traité dans les domaines qui se
réfèrent à ces compétences
Le Président (M. Charbonneau): M le député
de Bertrand
M. Parent (Bertrand): J'ai deux ou trois questions en fonction de
ce qui a été discuté précédemment et des
réponses qui ont été données. D'abord, au ministre
du Commerce extérieur. Comment le ministre explique t il alors qu'il y a
trois semaines M Simon Reisman, qui a été quand même le
négociateur canadien, disait et déclarait à la presse que,
effectivement, en ce qui concerne l'électricité au Québec,
il y avait des dangers, que nous étions vulnérables et qu'on
s'exposait à la possibilité d'avoir des représailles du
côté américain? Comment le ministre peut-il expliquer que M
Reisman lui même a déclaré cela, à moins qu'il ait
été mal rapporté? Mais on citait ses paroles
M. MacDonald: Bon! en premier lieu, je n'ai pas lu les paroles ni
le contexte dans lequel elles ont été dites, mais si je voulais
faire une extrapolation, je dirais la chose suivante. Dans l'entente qui
pourrait intervenir entre Hydro-Québec et une société qui
voudrait s'établir au Québec pour fabriquer des produits, dans le
cas théorique de produits qui seraient dirigés totalement vers
les États-Unis et qui deviendraient un élément majeur de
compétition majeur dans le marché américain, à ce
moment-là, Hydro-Québec pourrait, a le droit, est absolument,
totalement et complètement libre de négocier la tarification
qu'elle voudrait bien négocier avec ladite entreprise
Cependant, le Canada dans le contexte où nous avons voulu nous
réserver totalement et entièrement - et je fais appel, par
exemple, à cette condition qui, pour nous, était la condition
numéro 3 et, qui, pour le gouvernement fédéral,
était également la condition numéro 3 - dans le contexte
où nous voulions nous garder cette possibilité d'intervenir dans
le développement régional ou dans un développement d'un
secteur ou d'un créneau industriel particulier et que nous voulions nous
garder le droit totalement de subventionner, les Américains ne voulaient
pas et ne nous ont pas donné un chèque en blanc pour accorder ou
intervenir, d'une façon à créer ce qui serait des
pratiques déloyales de commerce
Avec ou sans entente, personne - et à l'intérieur
même du marché commun - n'a de ces chèques en blanc dans
quelque entente commerciale que ce soit. II y a une liberté
d'intervenir, mais si la liberté crée. Et ce n'est pas le cas
partout, ce n'est pas le cas dans chaque implantation qu'on pourrait faire, ce
n'est pas le cas dans chaque programme qu'on pourrait instituer en aide aux PME
ou à d'autres, mais dans le cas particulier où la tarification
préférentielle qui pourrait être donnée
créerait un privilège déloyal dans ce commerce
international, là, on pourrait s'exposer à une mesure en droit
compensateur
M. Parent (Bertrand): Deuxième question. Vous avez
toujours mentionné, M le ministre, que vous étiez en accord avec
une ratification auprès des élus, ici, à
l'Assemblée nationale. Selon vos paroles vous ne verriez pas que cela se
passe autrement Des propos que j'ai compris de votre collègue,
tantôt, iI est loin d être déterminé si I'entente va
être ratifiée ou non Est-ce que dans votre esprit à vous, M
le ministre, si l'entente est ratifiée ou non par le Québec,
est-ce qu elle aura la même portée?
M. MacDonald: Est-ce qu'elle?
M. Parent (Bertrand): Est-ce qu'elle aura la même
portée?
M. MacDonald: Là, vous tombez sur un plan juridique et je
ne suis pas en possession tranquille de la vérité, en cela comme
en bien d'autres choses
M. Parent (Bertrand): Je ne suis pas juriste non plus, M le
ministre. Mais, écoutez, est-ce que les élus du peuple
québécois qu'on représente ici. Si on ratifie cette
entente ou si on ne la ratifie pas, à mon avis, cela fait une
différence
M. MacDonald: Oui, une énorme différence
M. Parent (Bertrand): Un énorme différence Bon!
M. MacDonald: Une énorme différence
M. Parent (Bertrand): Mais, pour vous, quel sera l'effet si on
décide de ne pas la ratifier, puisque vous êtes d accord pour la
ratifier?
M. MacDonald: J'ai dit que je croyais que c'était une
entente d'une importance telle qu'elle devait être
présentée aux élus du peuple et je maintiens encore cet
avis. Et si, pour une raison ou pour une autre, il y avait une façon
différente de le faire, je ne changerais pas d'idée. Je
considère le sujet trop important pour qu'il passe ailleurs ou
différemment que devant les élus du peuple Je pense que c'est
clair.
M. Parent (Bertrand): J'ai une dernière question, toujours
concernant le respect intégral des compétences
législatives. Elle peut s'adresser à l'un ou l'autre des
ministres. Si, demain matin ou le 5 janvier, le Québec décidait
d'appliquer un des articles de la loi 109 sur le cinéma qui
prévoit, entre autres, qu'un "major* américain doit
réinvestir 10 % de ses revenus de distribution de films
réalisés au Québec dans des productions de films
québécois, ne pensez-vous pas que, d'abord, il s'expose à
des mesures de représailles de la part des Américains? SI oui,
comment va-t-on réagir? Ce sont des faits très précis. Et
particulièrement, en matière de cinéma, Mme Flora
MacDonald a renoncé tout récemment à aller de l'avant avec
son projet de loi qui était similaire au projet de loi 109 en
matière de cinéma. Et, cela, c'est important On sait ce qui se
passe dans ce domaine. Qu'est-ce qui va se passer demain matin ou au
début de janvier si on décide d'aller de l'avant avec les
articles du projet de loi 109?
M. MacDonald: En ce qui me concerne, je prends avis de votre
question. Je ne vous raconterai pas d'histoire. J'aime mieux vérifier
avec mes collègues et revenir sur le sujet. Je n'ai pas de
réponse précise ce soir sur cela.
Le Président (M. Charbonneau): Si vous me le permettez, je
vais poser une question complémentaire sur le même sujet, mais pas
sur la question du cinéma. Si je comprends bien le ministre des
Relations Internationales, le gouvernement fédéral ne peut pas
signer l'accord au nom des gouvernements provinciaux.
Une voix: Chut! S'il vous plaît!
Le Président (M. Charbonneau): Donc, la signature du
gouvernement fédéral ne peut pas engager les provinces dans leur
compétence constitutionnelle. Si j'interprète bien vos propos, si
les gouvernements provinciaux, donc si le gouvernement du Québec ne
ratifie pas formellement l'entente, d'une façon ou d'une autre, cela
veut dire, par exemple, que les Américains et le gouvernement
fédéral vont devoir vivre dans un environnement
insécurisant. Si le gouvernement du Quéfbec ou n'importe quel
gouvernement provincial ne la ratifiait pas formellement, il n'aurait jamais
l'assurance qu'il ne pourrait pas se comporter, dans ses juridictions, à
rencontre du traité. Donc, si j'ai bien compris, il n'y a qu'un
signataire, c'est-à-dire le gouvernement fédéral, mais,
dans les faits, il devrait y en avoir onze. Autrement, le traité ne
s'appliquera que dans les secteurs de juridiction fédérale. Et,
pour les secteurs de juridiction provinciale, s'il n'y a pas une ratification
formelle des gouvernements provinciaux et des Parlements provinciaux, il ne
pourra pas y avoir une sécurité. Un gouvernement provincial qui
ne ratifierait pas pourrait très bien, pendant un certain temps,
respecter l'entente dans les faits, mais n'offrirait pas la garantie à
ses partenaires économiques qu'il ne changerait pas d'idée plus
rapidement qu'il ne pourrait le faire. Il est évident qu'on peut
toujours dénoncer un traité, dans la mesure où on exerce
une forme de souveraineté quelconque, qu'elle soit provinciale,
fédérée ou fédérale. On comprend aujourd'hui
qu'il est évident que le gouvernement fédéral n'est pas en
mesure de s'engager auprès du gouvernement américain au nom de
l'ensemble du Canada. Il ne peut qu'engager sa souveraineté
constitutionnelle de l'État fédéral. Point. Et, s'il veut
donner la garantie complète que c'est l'ensemble canadien, comme
partenaire économique, qui s'engage auprès du partenaire
américain, il faudra que les États provinciaux canadiens
s'engagent formellement, eux aussi. On se comprend bien? (17 h 30)
M. Rémillard: Le gouvernement canadien peut signer
l'accord, c'est évident, mais dans des domaines de compétence
provinciale il faut qu'il puisse compter sur les provinces.
En ce qui regarde la question de la ratification, on n'est pas
obligés de ratifier. Ce que nous, en droit, - je dis en droit - nous
sommes obligés de faire, c'est exprimer notre consentement. Alors, M.
Bourassa, comme premier ministre du Québec, peut dire simplement sur la
place publique. Oui, nous sommes d'accord. C'est un geste qui, à ce
moment-là, est suffisant, mais on peut aussi ratifier formellement, on
pourrait le faire, on regarde les possibilités actuellement. Ce sont des
possibilités. On pourrait le faire. Mais une chose est certaine, c'est
que les compétences provinciales doivent être respectées et
ce n'est pas par un traité international qu'on modifie les
compétences législatives.
Le Président (M. Charbonneau): Mais le premier ministre du
Québec ou n'importe quel premier ministre provincial pourrait, à
la limite, ne pas dire très clairement qu'il adhère et se
comporter dans les faits comme s'il respectait le traité, mais tant
qu'il n'y a pas - c'est la prétention qu'on a, que, moi en tout cas,
j'ai de la compréhension du fonctionnement constitutionnel - s'il n'y a
pas ratification formelle des États provinciaux, les États
provinciaux ne sont pas formellement parties prenantes du traité et dans
leur juridiction ils peuvent, dans les faits, se comporter comme s'ils
respectaient le traité, mais tant qu'il n'y a pas un engagement formel
des États provinciaux, ces États provinciaux-là ne donnent
pas le message clair au partenaire économique américain qu'eux,
ils sont prêts à s'engager... ce qui veut dire qu'il reste un
climat d'incertitude qui. dans les faits, peut ne pas exister à cause du
comportement positif de tel ou tel gouvernement provincial, mais tant qu'il n'y
a pas une attitude d'engagement formel, il y a un climat différent.
Autrement dit, contrairement à l'impression, qu'on a, cela prend
onze
signatures et pas une seule pour que les Américains aient la
conviction que le traité de libre-échange fonctionne pendant la
période de...
M. MacDonald: Je ne suis pas totalement en accord avec vous si
vous voulez vous en tenir à la sémantique précise, cela
prend onze signatures, etc. Cela prend, de la part des Américains, une
satisfaction quant à l'Interprétation qu'ils vont vouloir donner
à l'article 103 et le terme "dans toutes les mesures
nécessaires". C'est cette interprétation des mesures
nécessaires, à savoir: sont-elles prises, ne sont-elles pas
prises, est-ce qu'elles nous sont satisfaisantes, qui détermineraient si
oui ou non ils voudraient adhérer et seraient satisfaits du respect de
l'entente par les Canadiens?
M. Chevrette: Juste une minute.
Je retiens que, quand on adhère, qu'on ratifie un traité,
qu'on a des pouvoirs, c'est clair, c'est évident qu'on accepte
volontairement, délibérément, de se limiter quant à
l'utilisation des compétences qu'on a ou à venir. Sur le plan
législatif, on a des lois qui nous permettent de faire des choses. Donc,
si j'adhère à un traité de libre-échange qui me
demande de ne pas utiliser les pouvoirs que j'ai en vertu de la constitution ou
des législations, je limite mon droit de les utiliser en adhérant
à un traité et je limite également mon pouvoir de
législation qui est entier, mais à cause de mon adhésion,
je me soustrais moi-même à la possibilité de
légiférer dans un sens ou dans l'autre.
Il me semble que c'est assez clair et je voudrais vous montrer comment
cela se prouve même à partir de votre texte. Vous me dites: "Oui,
mais on reste souverains, on reste souverains, il n'y a pas de
problème".
À la clause 1602, page 240, numéro 5: "Le Canada peut
adopter, à l'égard d'une entreprise commerciale qui, à la
date d'entrée en vigueur du présent accord, est exploitée
par le Canada ou en son nom, ou par une province ou une société
d'État, toute nouvelle mesure qui est Incompatible aux dispositions des
paragraphes..." etc. Ils ne disent pas que c'est une province. C'est le Canada
qui peut adopter des mesures de contrôle pour une société
d'État. Donc, toute société d'État, par exemple,
qui appartient au Québec, ne serait donc pas sous le contrôle
souverain du Québec, mais serait sous le contrôle souverain du
Canada qui peut adopter des mesures.
M. MacDonald: C'est une question que nos experts ont
vérifiée dans les derniers jours et l'interprétation du
bureau des négociations pour ce qu'on recherchait, c'est que le Canada
peut signifier une de ses composantes, c'est-à-dire une province dans
cette explication-là.
M. Chevrette: Pourquoi ils auraient mis une province d'abord dans
le texte?
M. Macdonald: Je n'ai pas la réponse à vous donner,
mais je vous donne...
M. Chevrette: Je comprends, mais si c'est le Canada qui peut, ce
n'est pas le Canada et une province qui peuvent...
M. MacDonald: Non, non, en prenant le terme...
M. Chevrette: C'est: Le Canada peut, pour ses
sociétés d'État ou les sociétés
d'État d'une province.
M. MacDonald: Le Canada dans son ensemble, une province, une de
ses constituantes. Mais si vous voulez plus de... En passant, vous me
permettrez...
M. Chevrette: J'aimerais qu'un expert m'explique ça. En
français, quand vous dites que c'est quelqu'un qui a le pouvoir, vous ne
dites pas deux lignes plus loin que c'est une constituante que vous subordonnez
à votre pouvoir. Voyons!
M. MacDonald: Bien, dans les définitions que vous avez au
début, il faut s'entendre, le Canada peut vouloir dire province
également.
M. Chevrette: Non, mais regardons le texte comme il faut au
paragraphe 5, M. le ministre. Sans être avocat, qui peut? C'est "le
Canada peut adopter à l'égard d'une entreprise". D'accord?
À l'égard d'une entreprise qui est sienne, mais aussi d'une
entreprise qui pourrait être la propriété d'une de ses
constituantes. Donc, c'est le gouvernement canadien qui a le pouvoir d'adopter
à l'égard d'une entreprise qui est sienne ou d'une entreprise qui
fait partie d'une de ses constituantes, toute nouvelle mesure. Où est-ce
qu'elle est la souveraineté du Québec là-dedans?
M. MacDonald: Est-ce que vous accepteriez, M. le chef de
l'Opposition, que je demande à mon collègue,...
M. Chevrette: Oui, oui.
M. MacDonald: ...M. Grenier de " vous répondre sur
ça.
M. Chevrette: Je n'ai pas d'objection, parce que ça
m'apparaît trop clair.
Le Président (M. Théorêt): Si vous voulez
bien vous Identifier et donner votre titre pour les fins de l'enregistrement,
M. Grenier.
M. Grenier (Carl): Carl Grenier, directeur de la politique
commerciale au ministère du
Commerce extérieur et du Développement technologique
On a vérifié récemment, effectivement, comme le
soulignait, M le ministre, la signification de cet article-là qui
correspond au droit qu'ont les gouvernements au Canada de privatiser une
société d'État ou une société qui appartient
à une société d'État et d'exiger que cette
société-là soit achetée par des Canadiens. Et
même dans le cas de sociétés d'État qui sont
existantes maintenant, ce droit-là pourrait s'exercer plus d'une fois.
C'est-à dire qu'on pourrait limiter l'accès à la
propriété privée de cette société
d'État
M. Chevrette: Mais qui peut?
M. Grenier: Les gouvernements de qui elle dépend
M. Chevrette: Êtes vous capable de me dire, comme expert,
si, au paragraphe 5, c'est le Canada qui peut ou si c'est le Québec?
M. Grenier: Mais, pour interpréter ça, M Chevrette,
je me suis adressé à des experts, ceux qui ont
négocié ça. Et on ma clairement signifié que I
intention, à ce moment-là, c'étaient justement les
gouvernements dont dépendent ces sociétés d'État.
Alors si c'est une société d'État
québécoise, ce sera à ce moment-là le gouvernement
du Québec qui déciderait de la privatiser et c'est donc à
lui que reviendrait le droit de limiter la propriété de cette
nouvelle société à des intérêts
québécois ou canadiens
M. Rémillard: Vraisemblablement vous avez là une
rédaction qui se réfère. Tout d'abord quand on prend le
Canada, c'est l'entité globale On se réfère au Canada
globalement. Mais ça ne touche pas le partage des compétences
législatives C'est quand même bien exprimé ensuite
clairement "exploitée par le Canada ou en son nom ou par une province".
Alors, dans l'ensemble, on dit Le Canada Vous avez deux parties dans l'acte.
Quand vous interprétez l'acte, vous devez voir à chaque article
que ce sont deux parties. II y a le Canada et les États-Unis. Alors,
là on se réfère à l'une des parties, le Canada qui
est une des parties Mais une des parties ensuite qu'on qualifie comme le Canada
fédéral et le Canada, province à l'intérieur
M. Chevrette: Me Rémillard, si le Canada dans le
paragraphe 5, le premier "Le Canada" signifie le gouvernement
fédéral
M. Rémillard: Non, non
M. Chevrette: signifie l'entité négociante
M. Rémillard: C'est ça
M. Chevrette: "Le Canada" a combien de définitions dans
cette entente-là? Vous êtes en train de me dire que le Canada
comme partie, c'est le Canada avec dix constituantes
M. Rémillard: Oui, mais regardez bien
M. Chevrette: Et dans le deuxième, le même mot
"Canada" utilisé dans le même chapitre, ce n'est plus le
gouvernement fédéral, ça
M. Rémillard: Je ne voudrais pas faire des avocasseries,
mais simplement
M. Chevrette: Bien non, mais je veux dire Écoutez,
"Canada", cela ne doit pas avoir 40 sens
M. Rémillard: Un article s'interprète toujours en
fonction des autres articles Si vous regardez I'article 5, c'est une chose Mais
si vous regardez les articles 2, 3, 4 qui précèdent, on se
réfère directement aux parties On dit "Ni l'une ni l'autre
partie" "Dans le cas ou une des parties iI faut donc interpréter le
paragraphe 5 en fonction des autres articles qui précèdent. Quand
vous voyez le sens de ces autres articles je crois qu'il est évident que
le paragraphe 5 se réfère au Canada comme partie
M. Chevrette: Mais, M le ministre, si je suivais votre logique,
le Canada, qui signifie un territoire, n'administrerait pas une entreprise
commerciale Regardez ce qui est écrit. "Le Canada peut adopter, à
l'égard d'une entreprise commerciale qui, à la date de
l'entrée en vigueur du présent accord, est exploitée par
le Canada ou en son nom, ou par une province ou une société
d'État " C est le fédéral
M. Rémillard: C'est le Canada dans la partie contractante
qui se réfère au Canada fédéral et au Canada
composé de provinces. Alors, d'une part, vous avez la
référence directe à la province, vous avez la
référence au Canada fédéral et vous avez
évidemment le Canada comme partie contractante. D'ailleurs, partout dans
l'accord, vous avez la référence à la partie contractante.
Mais j'avoue avec vous que, quelquefois, il faut faire attention. II faut
l'interpréter en fonction des autres articles parce que cela peut porter
à ambiguïté
M. Jolivet: J'ai hâte de voir un juge
M. Chevrette: Mais pourquoi n'auraient-ils pas dit La partie
canadienne, la partie négociante du Canada ne sentirait pas le besoin de
dire qu'elle a une entreprise à elle?
M. Rémillard: Je pense que, lorsque vous
interprétez en fonction des autres articles, c'est assez clair qu'on se
réfère à la partie contractante
M. Filion: Mais, si le ministre me te permet, j'écoute son
explication, et le problème avec ce qu'il nous dit, c'est que le Canada
signifie une chose différente selon qu'il se trouve à la
première ou à la deuxième ligne du même
paragraphe
M. Rémillard: Non, pas nécessairement
M. Filion: Oui, mais si j'écoute votre explication
M. Rémillard: Mais cela peut vouloir dire cela dans la
mesure où le texte se situe dans un contexte qui est différent.
C'est que vous devez toujours interpréter le sens d'un mot en
fonction
M. Filion: Oui, mais
M. Rémillard: Regardez bien Si vous prenez le mot
"Canada", cela peut se référer à deux aspects Cela peut
être le Canada, partie contractante, ou cela peut être le Canada
fédéral qui a ses compétences selon la constitution
canadienne Or, le traité, l'accord ne modifie pas la constitution
canadienne. II se réfère au partage des compétences tel
qu'il existe. C'est donc dire qu'il y a un Canada fédéral qui a
ses domaines de compétences et qui exploite à l'intérieur
de cela des entreprises, et vous avez des provinces qui, à
l'intérieur de leurs compétences, exercent aussi leurs
entreprises
M. Chevrette: Êtes-vous en train de me dire que le premier
"Canada", cela supposerait onze gouvernements qui pourraient adopter à
l'égard d'une société d'État, si je suis votre
logique Vous me dites que le premier "Canada" signifie l'entité
territoriale Si l'entité territoria le peut adopter à
l'égard d'une entreprise commerciale
M. Rémillard: Je n'ai pas dit cela
M. Chevrette: Qu'est-ce que c'est, d'abord?
M. Rémillard: Je n'ai pas dit cela. J'ai dit que "le
Canada" signifie la partie contractante Or, la partie contractante ne comprend
pas les provinces
M. Chevrette: La partie contractante, c'est donc
M. Rémillard: dans la mesure où les
compétences des provinces sont touchées par le traité
C'est ce qu'on a expliqué
M. Chevrette: Donc, le premier "Canada" est le gouvernement
fédéral
M. Rémillard: Le premier "Canada"?
M. Chevrette: On se suit?
M. Rémillard: Non, non, non C'est la partie
contractante
M. Chevrette: Donc, le Canada, partie contractante. Je vais
suivre vos propos
M. Rémillard: Oui
M. Chevrette: Le Canada, partie contractante, peut adopter toute
nouvelle mesure à l'égard des gouvernements qui sont
propriétaires de sociétés d'État
M. Rémillard: Non C'est que, d'une part, on se
réfère à la partie contractante et, d'autre part, on se
réfère au gouvernement soit fédéral, soit
provincial, chacun dans son domaine de compétence
M. Chevrette: D'accord. Mais quel Canada a le pouvoir de prendre
de nouvelles mesures? Est-ce que c'est la partie contractante ou si c'est le
gouvernement fédéral?
M. Rémillard: Chacun dans son domaine de
compétence
M. Chevrette: Écoutez, M le ministre. Il faudrait
peut-être lire "Le Canada peut adopter, "
M. Rémillard: Écoutez bien Ce n'est pas un
modèle de limpidité
Une voix: Non
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Bertrand): Merci, M le ministre
M. Chevrette: C'est le premier "Canada" qui peut adopter les
mesures Vrai ou faux?
M. MacDonald: C'est tout de même un point qui a
été relevé et qui a été
vérifié au bureau des négociations,
particulièrement par M Grenier, et il vous donne sa réponse
M. Chevrette: Oui, mais le premier "Canada", c'est lequel?
M. MacDonald: Le premier "Canada"?
M. Chevrette: Est-ce qu'on peut savoir d'un expert? C'est
lequel?
M. Rémillard: II n'y a pas deux Canada
M. MacDonald: II y a ici. Vous avez un exemple. N'étant
pas avocat, je vais peut-être m'aventurer avec vous là-dessus.
M. Chevrette: On va peut-être se comprendre mieux.
M. MacDonald: On va peut-être se comprendre mieux.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. MacDonald: Quand on se réfère à "le
Canada et les États-Unis", on parie des parties, les parties.
M. Chevrette: C'est exact.
M. MacDonald: Lorsqu'on se réfère à une ou
l'autre des entités, on va dire: les États-Unis ou le Canada.
M. Chevrette: D'accord. (17 h 45)
M. MacDonald: Dans des mesures qui pourraient affecter les
États-Unis, iI y a des États aux États-Unis, iI peut y
avoir des gestes à poser ou à être posés ou à
être respectés par les États. Dans la rédaction qui
aurait été faite ici, si cela s'appliquait, on aurait dit: Les
États-Unis, et on aurait continué en disant: Peut adopter,
à l'égard d'une entreprise commerciale qui, à la date
d'entrée en vigueur du présent accord, est exploitée par
les États-Unis ou en son nom, ou par un Etat ou une
société d'État. Ce qui veut dire qu'à la lecture de
cela, la province, pour ce qui a trait à ses
sociétés d'État, qu'elle pourrait décider de vendre
à l'entreprise privée, pourrait y inclure, sans demander au
Canada, selon sa propre décision, une clause en vertu de laquelle ladite
entreprise d'État ne pourrait être revendue à d'autres
qu'à un Québécois, pour protéger enfin la vente de
ladite entreprise à une entreprise internationale. Vous me suivez?
M. Chevrette: Oui. Donc, le Canada, par exemple, c'est lui qui a
le pouvoir d'adopter toute nouvelle mesure qui...
M. MacDonald: Non, ce n'est pas réussi, et je
m'excuse.
M. Chevrette: Le Québec peut donc adopter des mesures
particulières. Si je suis votre logique, l'Alberta peut adopter...
M. MacDonald: Exactement.
M. Chevrette: ...des mesures particulières. Est-ce que
cela vaut pour les nouvelles sociétés d'État?
M. MacDonald: Oui Pour les nouvelles sociétés
d'État, la restriction est qu'on ne peut faire respecter en quelque
sorte cette vente strictement à des nationaux que pour une
première vente et ça tombe au paragraphe 7.
Pour des nouvelles sociétés d'État qui seraient
créées après la mise en application du traité, nous
pourrions privatiser lesdites sociétés d'État et inclure
pour la première vente une obligation.
M. Chevrette: De revendre à des Québécois.
M. MacDonald: C'est cela. M. Chevrette: Pour la première
vente M. MacDonald: Oui, seulement.
Le Président (M. Charbonneau): Si vous avez
terminé, M. le chef de l'Opposition, le député de...
M. MacDonald: Est-ce que j'aurais par hasard réussi, M. le
chef de l'Opposition?
M. Chevrette: Je suis d'accord avec lu! que ce n'est pas un
modèle de clarté.
Le Président (M. Charbonneau): M le député
de Bertrand a la parole.
M. Parent (Bertrand): C'est dans le même sens. J'ai suivi
les explications du ministre et je l'ai perdu. Si on regarde le paragraphe 7,
toujours dans le même article, c'est très clair que, lorsqu'on
dit: "Acquise par le Canada ou par une province", le Canada, c'est le
gouvernement canadien et je ne peux pas comprendre qu'il y ait à
l'intérieur...
M. MacDonald: Ou une province.
M. Parent (Bertrand): Oui. Alors, si on parle du Canada et toutes
les fois qu'on parle du Canada dans cet article, et c'est très clair
à l'article 7. le Canada, c'est le gouvernement canadien.
M. MacDonald: L'article 7 est mieux rédigé.
M. Parent (Bertrand): On ne passera pas trois heures
là-dessus, mais je vous dis qu'il serait bon qu'on ait quelque chose de
très clair et de formel là-dessus dans les prochaines heures. On
peut s'imaginer tout l'impact - là on est en matière
d'investissement au chapitre 16 - que cela a si le mot "Canada" a le sens que
nous, on prétend qu'il a. Cela change totalement D'ailleurs, on devrait
avoir des avis écrits sur cette formule ou le premier ministre du
Québec devrait s'enquérir de façon très formelle
parce que cet article 1602, paragraphe 5. a des impacts Incroyables. À
toutes fins utiles, il dit au paragraphe 5 qu'on serait soumis au gouvernement
fédéral pour vendre nos sociétés d'État.
M. Rémillard: Je reviens simplement en
conclusion là-dessus. Il y a deux interprétations
possibles. La première, celle que je vous ai donnée, c'est une
partie contractante. À ce moment-là, cela se comprend très
bien, cela va exactement dans le sens de la constitution. L'autre façon
de voir les choses serait de dire que te Canada se réfère
à l'État fédéral. Cela n'aurait pas de bon sens
parce que le gouvernement fédéral pourrait prendre des mesures
à rencontre d'une société d'État provinciale. Cela
irait à l'encontre de la constitution. Donc, cet article 5 serait
inconstitutionnel. Il ne pourrait pas s'appliquer. C'est très clair.
Tout ce qu'il y a dans cela et qui va à ('encontre de la
constitution canadienne, cela devient inconstitutionnel et cela ne peut pas
s'appliquer. C'est un principe qu'il est important de bien comprendre. Le texte
qu'on a devant nous ne modifie pas la constitution canadienne. Ils n'ont pas
l'autorité pour modifier la constitution canadienne. Si
l'interprétation est que le Canada, c'est la partie
fédérale, cela voudrait dire que cela tombe. Cela ne peut pas
s'appliquer parce que cela va à ('encontre de la constitution
canadienne.
Le Président (M. Cannon): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Juste un petit commentaire qui est le suivant: Vous
savez très bien que, lorsqu'on discute des projets de loi à
l'Assemblée nationale... ce qui est important quand un juge aura
à déterminer, ce n'est pas ce qu'on a dit, c'est ce qui est
écrit.
On a beau avoir dit: Notre intention était de... Ce que j'ai pu
comprendre c'est qu'on me dit: L'intention c'est cela. Mais ce n'est pas ce qui
est écrit.
M. Rémillard: Je veux tout simplement vous dire qu'il n'y
a pas de risque. Ou bien l'interprétation est correcte et un dit: C'est
ambigu, et notre interprétation disant que c'est fa partie contractante,
c'est correct, ou bien ce n'est pas cela et ça signifie la partie
fédérale et, à ce moment-là, tout simplement, cela
ne s'applique pas, II n'y a pas de risque pour le Québec dans cela. Mais
une ambiguïté est là. vous avez parfaitement raison.
Le Président (M. Cannon): M. le député de
Taillon.
M. Filion: Oui, avec votre permission. Le ministre
reconnaît que l'accord affecte les compétences,
c'est-à-dire touche des secteurs qui relèvent des
compétences provinciales et fédérales bien sûr, et
nous dit ensuite que la constitution se situe au-dessus de la
mêlée, que la constitution, bien sûr, n'est pas
modifiée par un traité et que rien, d'ailleurs, dans un
traité ne peut modifier la constitution qui, elle, garantit les
compétences provinciales et la compétence fédérale.
À ce moment-là, je vais demander au ministre pourquoi le
gouvernement du Québec a inscrit, comme première condition de son
appui au traité du libre-échange, le respect Intégral de
ses compétences législatives puisque celles-ci ne peuvent jamais
être affectées par un traité semblable à celui qui a
été signé. Je pense qu'il faudrait être
cohérent.
Je voudrais souligner au ministre ceci: À partir du moment
où le gouvernement du Québec, comme il s'apprête à
le faire, donne son accord au traité qui est intervenu, d'une
façon ou d'une autre - on y reviendra un peu plus tard; M. le ministre
du Commerce extérieur parle de ratification; vous, vous parlez plus de
consentement du premier ministre, peu importe - mais à partir du moment
où le Québec donne son accord à un texte qui affecte des
secteurs relevant de ses compétences législatives, il s'engage,
il engage avec lut toute la partie contractante, il engage tout le train de
mesures de représailles qui sont contenues dans le traité. Je
pense qu'il faudrait être cohérent. Si le gouvernement du
Québec a inscrit comme première condition le respect
intégral de ses compétences législatives, ce n'est pas
uniquement parce qu'il voulait inscrire une condition dont il était
sûr qu'elle pourrait être respectée de toute
façon.
M. Rémillard: Voici. Tout d'abord, je ne dirais pas que
l'accord affecte les compétences législatives...
M. Filion: Oui, mais...
M. Rémillard:.. je dirais qu'elle implique...
M. Filion: Oui, c'est cela.
M. Rémillard: ...l'exercice des compétences
législatives provinciales, c'est une question, mais il peut y avoir des
conséquences importantes. D'autre part, en ce qui regarde les demandes
du Québec, lorsqu'on demandait que ces compétences soient
respectées sur le plan politique, ce que nous disions et ce que nous
disons toujours, c'est que nous voulons conserver la maîtrise d'oeuvre de
notre développement et, par conséquent, nous voulons avoir un
respect de notre possibilité de marge de manoeuvre, c'est ce que nous
avons.
M. Filion: Oui, mais c'est dans la constitution, cela!
M. Rémillard: Mais la constitution comme telle, il a
toujours été compris... parce qu'on est à deux niveaux, si
vous le voulez. Il y a le niveau politique de discussions
fédérales-provinciales et ensuite fédérales avec
les États-Unis - cela est tout l'impact politique qui est propre au
droit international - et vous avez l'aspect constitutionnel juridique qui lie
te Fédéral et les provinces en fonction du partage
des compétences législatives entre les deux niveaux de
gouvernement. Il est clair - cela, vous le savez aussi bien que moi - qu'un
traité international ne peut pas modifier les compétences, la
constitution canadienne. Sans cela, ça n'aurait pas de bon sens.
Qu'est-ce qu'une constitution fédérale voudrait dire si, à
un moment donné, le fédéral se mettait à faire des
traités internationaux en fonction des compétences des provinces?
Et si, chaque fois qu'il fait un traité, cela venait modifier le partage
des compétences, cela n'aurait pas d'allure.
M. Chevrette: Vous pourriez accepter de limiter l'exercice de vos
compétences.
Une voix: C'est cela.
M. Rémillard: Non, on accepte de participer, par
l'exercice de nos compétences, à l'application du
traité.
M. Chevrette: Là, vous jouez au grand seigneur qui aime
jouer avec du vocabulaire. Vous savez très bien que, quand vous avez des
droits, M. le ministre, dans une constitution, vous pouvez vous-même vous
empêcher de les utiliser, parce que vous jugez qu'une entente
extérieure vous favorise, et c'est votre choix politique. Ne venez pas
me dire, par exemple, que vous ne vous limitez pas dans l'utilisation de vos
droits.
M. Rémillard: À chaque droit...
M. Chevrette: Vous venez carrément de dire: Même si
la loi me permet de faire cela, j'accepte de me subordonner à cette
entente ou de fonctionner dans le cadre de cette entente, quitte
éventuellement à revenir à l'exercice de ce droit qui
m'est donné par la constitution, et vous acceptez de suspendre l'effet
pour vous conformer à.
M. Rémillard: À chaque droit correspond une
obligation, n'importe où.
M. Chevrette: Ah oui! mais cela...
M. Rémillard: Vous avez un droit, vous avez une
obligation. C'est tout à fait normal.
M. Chevrette: Cela, c'est ce qu'on dit aux jeunes. Vous avez des
droits. Vous avez des devoirs. Ce n'est pas la question qui vous est
posée.
Une voix: On devrait le rappeler aux adultes.
M. Rémillard: Des devoirs, alors...
M. Chevrette: Vous dites que vous avez un droit, mais vous ne
l'utiliserez pas. Donc...
M. Rémillard: Cela se peut.
M. Chevrette: Bon! C'est ce que vous dites.
M. Rémillard: Cela, c'est la grande distinction entre te
pouvoir et la compétence.
M. Chevrette: Vous avez le droit, demain matin, d'imposer des
taxes. Vous avez le pouvoir de ne pas l'utiliser.
M. Rémillard: Oui. M. Chevrette: Bon!
M. Rémillard: Mais, cela, c'est la distinction entre une
compétence et un pouvoir. Une compétence, c'est avoir la
capacité. Le pouvoir, c'est avoir la possibilité. Il y a des gens
qui ont la compétence et qui n'ont pas la possibilité d'exercer
leur compétence. Il y a des gens qui ont le pouvoir et qui n'ont pas la
compétence. Cela, c'est plus difficile, un petit peu. Il y a quand
même...
M. Chevrette: Vous avez l'air de savoir ce dont vous parlez,
vous
M. Rémillard: Je laisse aux soins de l'Opposition d'en
juger.
M. Chevrette: Cela fait longtemps que c'est fait. Cela fait deux
ans que c'est fait.
M. Rémillard: Je n'en doute pas. J'en suis fort aise.
Mais...
M. Chevrette: Cela aussi, c'est une affaire qu'on savait.
M. Rémillard: Vous saviez cela, aussi. Vous en savez des
choses. Je me demande pourquoi je réponds aux questions.
Réglementation des professions
M. Parent (Bertrand): II est chef de l'Opposition. Toujours dans
ce domaine-là, est-ce que le ministre ou l'un des deux ministres peut
m'expliquer, comment, en fonction de l'article 1402, au niveau des
services...
Une voix: Quelle page?
M. Parent (Bertrand): Paragraphe 8, page 204. Comment, si l'on
veut, après l'entente, être capables d'apporter quelques
modifications que ce soit au Code des professions qui relève
actuellement du gouvernement du Québec, est-on capables de dire que le
Québec va conserver toute sa marge de manoeuvre? Il va falloir s'arrimer
avec le traitement national en matière de codes des professions, en ce
qui regarde 8 ou 10 profes-
sions . On pense particulièrement aux ingénieurs, aux
architectes, aux arpenteurs-géomètres
Toute nouvelle réglementation après l'accord - et si je
suis dans l'erreur, qu'on me rectifie - dans le Code des professions, y compris
pour les comptables, tes ingénieurs, les architectes, les
arpenteurs-géomètres, devra être faite en fonction du
traitement national et va échapper à la compétence totale
du Québec. J'aimerais qu'on m'explique cela Qu'on me donne les
informations
Le Président (M. Cannon): M Grenier
M. Grenier: Je pense que votre compréhension est correcte.
Mais je ne pense pas que l'on puisse dire, effectivement, que le Code des
professions va nous échapper. L'idée que cela stipule,
effectivement, dans le cas des services, c'est que, sauf pour les trois
secteurs qu'on a mentionnés, c'est-à-dire l'architecture, les
télécommunications améliorées et le tourisme, pour
ces secteurs, effectivement, il est envisagé qu'au cours des
années qui vont suivre, c'est-à-dire, jusqu'en 1990, on
développe des accords qui vont rendre l'accès à ces
professions ou à l'exercice de ces professions compatible avec le
traitement national. Donc, on va effectivement faire ce qu'on appelle un
"rollback" Pour les autres, il n'est pas envisagé de faire cela
maintenant. Mais dans l'avenir, lorsqu'on réglementera ces professions,
si on fait des modifications à la réglementation actuelle, il
faudra que ces modifications ne soient pas plus contraignantes, en termes de
traitement national ou de discrimination, qu'elles ne le sont maintenant
Pour les nouvelles professions qui pourraient apparaître, par
exemple, la réglementation de ces professions devrait être
compatible avec le traitement national
M. Parent (Bertrand): Est-il exact
M. Grenier: Mais cela appartiendra encore au Québec de
réglementer ces professions
M. Parent (Bertrand): Est-il exact que, en matière
d'architecture, par exemple, l'obligation de la citoyenneté canadienne
ne sera plus requise?
M. Grenier: Cela va être à l'Ordre des architectes
et à l'Institut royal d'architecture du Canada, avec leurs contreparties
américaines, de déterminer ce qu'ils vont vouloir mettre dans cet
accord et c'est uniquement après cela - vous avez les modalités
détaillées de cela - que les deux gouvernements nationaux
encourageront les États et les provinces à adopter des
réglementations qui iront dans le sens qui va être
dégagé par les associations professionnelles
M. Parent (Bertrand): Oui, mais dans l'application, vous
comprendrez, M Grenier, qu'on ne pourra pas forcer les professions et les
associations à s'arrimer, et cela va causer de sérieux
problèmes. On les a en théorie, aujourd'hui, mais dans les faits
parce que c'est le premier traité, que je sache, avec lequel on a
embarqué dans le secteur des services, et lorsqu'on embarque dans les
services, on embarque dans les professions. Lorsqu'on embarque dans les
professions, on embarque dans le pouvoir qui appartient aux provinces. Dans ce
cas précis, particulièrement en matière d'architecture,
j'aimerais voir comment cela va s'appliquer et comment on est assuré que
les professions seront consultées et seront capables de
M. Rémillard: Si vous voulez vous référer
à l'annexe 1404, aux pages 212 et 213, je pense que les modalités
sont définies assez clairement Notamment, à l'article 3, "Mise en
oeuvre", on dit. "Sur réception des recommandations des associations
professionnelles, les parties termineront leur examen des recommandations dans
les 180 jours suivant leur réception et, si ces recommandations sont
compatibles avec le présent chapitre et acceptables aux parties
encourageront les gouvernements de leurs États et de leurs provinces
à adopter ou à modifier, dans les six mois suivant la fin de
l'examen, les mesures qui pourront être nécessaires pour que ",
etc. Alors, c'est cela. C'est le processus qui sera suivi
M. Parent (Bertrand): Ce sont les associa tions professionnelles
canadiennes parce qu'on s'attend toujours
Le Président (M. Cannon): M le député de
Bertrand, peut-être pourriez-vous conserver votre question pour plus
tard
M. Parent (Bertrand): La question est là
Le Président (M. Cannon): La question est là Je
suspends donc les travaux jusqu'à 20 heu res (Suspension de la
séance à 18 h 1)
(Reprise à 20 h 9)
Le Président (M. Baril): À l'ordre, s'il vous
plaît!
MM les ministres, MM les députés, mes dames et messieurs,
j'espère que vous acceptez n'importe qui comme président. Alors,
que la commission de l'économie et du travail soit saisie de l'accord du
libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Le travail se
poursuit. Est-ce qu'on était rendus à M te député
de Bertrand? C'était une question du député de Bertrand au
ministre du Commerce extérieur et du Développement
technologique?
M. Parent (Bertrand): C'est bien cela, j'attendais une
réponse particulièrement concernant l'impact au niveau du Code
des professions, question que j'avais posée à 18 h 1.
M. MacDonald: Je croyais qu'on vous avait donné une
réponse.
M. Parent (Bertrand): Non, pas une réponse
satisfaisante.
M. MacDonald: Ah! c'est un autre problème. Bon! je ne
voudrais pas abuser de votre patience, mais je vous demanderais de reformuler
votre question.
Le Président (M. Baril): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Enfin, je voulais savoir si, à
l'Intérieur de l'article 1402 qu'on retrouve à ta page 204, M. le
Président, au paragraphe 8, d'après l'interprétation ou du
moins la vision qu'on en a de ce côté-ci, les compétences
provinciales, les compétences du Québec vont être
touchées en ce qui concerne le Code des professions, dans le sens que
les différentes professions en ce qui regarde les groupes tels que les
architectes, ingénieurs, agronomes, arpenteurs-géomètres
et quelques autres se retrouveront dans une situation où, lorsqu'on
voudra dès 1990 apporter de nouvelles règles du jeu, de nouvelles
lois, de nouveaux règlements à l'intérieur de ces
ordres-là, particulièrement à l'intérieur de
l'ordre des architectes, le Québec va se retrouver à ne pas avoir
pleine compétence. C'est-à-dire qu'il devra, comme c'est
mentionné à l'article 1402, paragraphe 8, être capable de
s'harmoniser sur le plan du traitement national. Alors, on a eu quelques
explications, sauf qu'il y a des questions qui sont restées en suspens
de ce côté-là, soit de la part de M. Grenier ou de
vous-même.
M. MacDonald: M. Grenier, je crois, avait commencé
à vous donner une réponse. Je pense que je vais le laisser
continuer.
M. Grenier: Je ne pense pas, en fait, qu'on vise comme telle
l'harmonisation des réglementations en matière de professions. SI
vous prenez l'exemple de l'architecture, et je dois souligner que si on aretenu l'architecture comme premier exemple, premier secteur,
première profession, qui verrait non seulement sa réglementation
dans l'avenir être compatible avec le traitement national, mais sa
réglementation actuelle, en fait, être rendue compatible avec le
traitement national, si l'on a pris l'architecture, donc, c'est à la
suite d'une consultation préalable et qui a Impliqué aussi
l'Ordre des architectes du Québec, et ces gens-là se sont dits
prêts à tenter l'expérience.
Alors, si vous lisez bien l'article 2 de l'annexe 1404, à la page
212, on dit bien, effectivement, que les deux organismes nationaux vont tenter
d'élaborer des normes et exigences mutuellement acceptables. Alors, cela
ne veut pas dire qu'elles seraient nécessairement les mêmes, de
chaque côté de la frontière, mais des normes mutuellement
acceptables, en fait, qui touchent les questions mentionnées plus loin,
donc, l'éducation, les examens, l'expérience, le code de
déontologie et le perfectionnement professionnel. C'est seulement
après que les deux organismes nationaux se seraient mis d'accord que le
mécanisme qui traduirait ces recommandations en législation ou en
réglementation, compatibles avec l'accord, serait introduit, mais encore
là par les provinces et non pas par le fédéral.
M. Parent (Bertrand): Est-ce que le gouvernement du Québec
a la garantie que la mise en vigueur des clauses visant l'harmonisation des
normes et des exigences professionnelles et l'ouverture de nos
frontières aux architectes américains ne sauraient intervenir
sans l'accord du Québec et de sa profession des architectes? Est-ce
qu'on a...
M. Grenier: Je pense qu'avec les mots que vous retrouvez
justement à l'article 3, de l'annexe 1404b, page 213, en haut, on voit
bien que, effectivement, il s'agit d'un premier effort. C'est la
première fois qu'un accord commercial international s'adresse à
la question des services, de cette façon-là. Je pense que c'est
clair qu'on est très prudents. On dit, par exemple: "Si ces
recommandations sont compatibles avec le présent chapitre et acceptables
aux parties, encourageront les gouvernements de leurs États et de leurs
provinces - je pense qu'on a une situation un peu semblable aux
États-Unis ce sont les États qui réglementent ces
professions - à adopter ou à modifier, dans les six mois suivant
la fin de l'examen, les mesures qui pourront être nécessaires..."
Je pense que c'est clair qu'à chaque étape... D'abord, les
organismes professionnels eux-mêmes seront les premiers concernés;
ensuite, ils feront les recommandations qui pourront se traduire
éventuellement, selon la volonté des gouvernements des provinces
au Canada et du Québec, en réglementation nouvelle. Alors, je
pense que c'est assez clair: Le Québec va pouvoir exercer toute sa
compétence dans ce domaine-là.
M. MacDonald: Je puis ajouter que le ministre responsable des
professions, le ministre de l'Éducation et ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, avait fait des représentations,
justement, pour s'assurer que la province ou les provinces
nécessairement, mais on parlait surtout pour le Québec, puissent
garder cette pleine autorité à l'intérieur des
différents ordres de professions. Il avait, entre autres, si je me
rappelle bien, signalé la façon
de faire des avocats américains qui annoncent publiquement et
sous différentes formes leur profession, la disponibilité de
leurs services. Il avait démontré très bien qu'il semblait
que la profession québécoise et lui-même ne voulaient pas
voir ou qu'on s'expose à ce que de telles choses soient automatiquement
imposées, ce dont il n'en est absolument pas question.
M. Parent (Bertrand): J'aimerais passer à d'autres volets,
étant donné l'heure et comme on a peu de chemin de fait,
particulièrement en ce qui regarde le volet de la culture, la question
de la langue et tout cela. Il y aura certes, un collègue
député qui va vouloir intervenir tantôt.
M. MacDonald: Mais avant d'aller plus loin... M. Parent
(Bertrand): Oui.
M. MacDonald: ...selon notre formule de réciprocité
Le chef de l'Opposition avait signifié qu'il avait certaines
inquiétudes. Vous vouliez particulièrement faire appel à
la liste des garanties qui étaient celles du fédéral et du
provincial, faire éclaircir et recevoir des explications sur les nuances
ou les points, en fait, pour lesquels vous aviez des inquiétudes Est-ce
que je pourrais savoir, si je prends, par exemple, la liste, vous aviez
commencé avec l'aspect de la souveraineté politique, est-ce que
je pourrais savoir si vous avez encore des inquiétudes? Est-ce qu'il y a
des questions qui n'ont pas reçu une bonne réponse?
M. Parent (Bertrand): Je vous dirais, M. le ministre, que nous
avons reçu des réponses. De là à dire qu'elles nous
satisfont entièrement, ce serait quelque peu prétentieux de ma
part, parce que je pense que le ministre, vous-même et votre
collègue, le ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales avouaient cet après-midi que c'était
quelque peu complexe. Moi, je vous dis qu'on va essayer de faire l'exercice
jusqu'à 22 heures, le temps qui nous est accordé,
honnêtement de façon à essayer d'avoir le maximum
d'éclairage possible. En fonction de cela, nous aurons à juger ou
à peser tout cela à partir des informations. On a quand
même eu, en ce qui me concerne, deux heures de "briefing" avec vos gens
cet après-midi. Il y a cet exercice de quatre heures que nous faisons.
C'est bien peu pour une si grosse entente, mais je pense que c'est valable et
beaucoup plus que seulement une question ou deux qu'on peut poser en Chambre.
Je ne peux pas vous dire, à partir du moment où on a
réglé l'article 1 ou les conditions 1 et 2, que vous avez notre
bénédiction. Je pense que vous comprendrez très bien.
M. MacDonald: Non, je ne demande pas votre
bénédiction, je veux savoir si ce qui était notre
condition qui était le respect intégral de nos compétences
législatives...
M. Parent (Bertrand): La plupart des questions...
M. MacDonald: ...nous, on prétend, si vous me permettez,
nous, on prétend que l'entente respecte intégralement nos
compétences législatives. Est-ce que vous pensez le
contraire?
M. Parent (Bertrand): À partir des Informations que nous
avons et que nous avons eues, je ne peux pas vous dire qu'on est tellement
d'accord avec vous, parce qu'il y a plusieurs points où vous ne nous
avez pas convaincus. Moi, vous ne m'avez pas convaincu. Le chef de l'Opposition
sera ici dans quelques minutes et on en a discuté entre 18 heures et 20
heures. On ne peut pas dire qu'on est convaincus de tous tes points. Ce serait
vous mentir que de vous laisser accroire que nous sommes convaincus et que,
maintenant, on va passer à l'autre point. Étant donné, M.
le ministre, le peu de temps que nous avons à notre disposition et la
formule qui fait en sorte qu'on a au moins du temps mis à notre
disposition, ce que je voudrais être capable de faire, c'est d'aller
chercher le maximum d'informations pour être mieux
éclairé.
M. MacDonald: Oui. Moi, ce que...
M. Parent (Bertrand): Je l'ai toujours dit. Je ne prétends
pas... Les questions que nous posons, ce ne sont pas des questions pour jouer
à la politique et des questions pour vous embêter. Ce sont des
questions avec lesquelles, je pense, on essaie de faire notre job, qu'on a
retracées et pour lesquelles on a beaucoup beaucoup
d'appréhension, car on pense que le Québec n'est pas suffisamment
protégé. Il y a eu des réponses qui nous ont satisfaits et
d'autres qui ne nous ont pas satisfaits. Je vous dis qu'il faut finir
l'exercice. Je me suis engagé, avec le chef de l'Opposition et avec mes
collègues, à ce qu'on soit capables de se pencher sur l'ensemble
et sur le tout pour pouvoir dire à la fin: Est-ce qu'on
réévalue notre position? Est-ce qu'on ajuste notre tir ou quoi
que ce soit? On est au stade où on fait l'exercice en profondeur.
M. MacDonald: Ce dont je veux m'assurer ainsi que mon
collègue, c'est que si vous avez des doutes, des hésitations, des
points que nous n'avons pas réussi à éclairer, vous ne
ménagiez absolument rien pour nous revenir verbalement ou par
écrit pour qu'on puisse y répondre et que les doutes qui pourront
subsister dans votre esprit ne soient pas dûs au fait qu'on n'a pas
répondu à vos questions, qu'on n'a pas cherché à
vous répondre le mieux possible.
M. Parent (Bertrand): J'apprécie la collaboration que vous
offrez, sauf que vous conviendrez avec moi que, sur la base du fonctionnement
de la commission parlementaire, on
est limités par le temps.
M. MacDonald: Oui, d'accord.
M, Parent (Bertrand): On va essayer de faire le maximum dans ce
temps. Si cela doit aller au-delà, je suis prêt à continuer
ce que je peux appeler les discussions et le questionnement. On ne sera
jamais trop éclairés. Ceta dit, je ne l'ai pas
précisé jusqu'à maintenant, mais je tiens à le
préciser en tant que porte-parole du dossier, c'est qu'on n'a pas non
plus cherché à trouver juste les bebites, on pourrait en avoir
pour des semaines et des semaines. Il y a toutes sortes
d'interprétation. Ce qui sautait aux yeux pour nous, en termes de
préoccupation, c'est: Est-ce que le Québec est suffisamment bien
protégé? Est-ce que cet accord va faire en sorte qu'on va pouvoir
vivre avec. Voilà des questions qu'on doit se poser comme
parlementaires. Au-dessus des lignes partisanes, je pense qu'il faut avoir ce
minimum d'assurance. À partir du moment où nous aurons ce minimum
d'assurance, on va se sentir à l'aise. Mais nous ne l'avons pas. C'est
l'exercice que nous faisons. Je veux bien qu'on se comprenne.
M. MacDonald: Pour le moment, vous n'avez pas de questions
additionnelles sur la question des compétences législatives.
M. Parent (Bertrand): Pour le moment, non. M. MacDonald:
Parfait.
Communications
M. Parent (Bertrand): J'aimerais passer au respect
intégral des lois concernant les questions de communications, de langue
et de culture. J'aborde immédiatement l'article 2006 de l'accord
à la page 303. Les câblodistributeurs, M. le ministre, devront, au
plus tard, le 1er janvier 1990, à la suite d'une modification de la loi
canadienne sur les droits d'auteur, payer des royautés aux
Américains pour la retransmission de leurs émissions. On fait
directement référence à l'article 2006. En clair, cela
signifie qu'il y a des amendements à la loi des droits d'auteur pour
faire en sorte que nos entreprises de redistribution, nos
câblodistributeurs vont avoir à refiler une facture qui se situe,
selon notre évaluation, quelque part entre 25 000 000 $ et 100 000 000
$.
M. MacDonald: À l'échelle canadienne ou
québécoise?
M. Parent (Bertrand): Canadienne. Ce sont des pertes à
gagner de ce côté-là. D'abord, j'ai deux ou trois questions
concernant cet article en particulier. Est-ce que le Québec est d'accord
avec cet article? J'imagine que vous êtes d'accord avec l'ensemble, donc
que vous êtes d'ac- cord là-dessus. J'attire votre attention sur
l'article 2006. Vous êtes d'accord avec cela. Quels seront les
critères pour évaluer la valeur de ces droits? Est-ce que le
Québec a mesuré l'impact de cet article sur les finances des
câblodistributeurs et aussi l'impact sur les tarifs des abonnés?
Il va donc toucher à l'ensemble des consommateurs. Les chiffres nous
indiquent que 60 % ou 70 % des gens sont câblés. Il va y avoir une
répercussion importante. Je vous pose des questions et j'attends les
réponses.
M. MacDonald: La réponse à la première
partie - je demanderai à M. Grenier de poursuivre avec les deux autres -
c'est que c'est la fin de ce que les Américains ont appelé le
piratage de leurs émissions, c'est-à-dire la possibilité
de recevoir, soit par voie de satellite ou autrement, des émissions
américaines, sans aucun droit de les retransmettre. Il y avait
même des situations dans l'Ouest canadien où des localités
canadiennes situées très près de la frontière
recevaient par satellite du côté canadien les émissions
américaines et les redistribuaient sur câble à des usagers
américains qui, eux, ne recevaient pas le service des États-Unis
et faisaient payer les Américains pour recevoir le service du
câble. Donc, c'est la régularisation d'une situation qui, en
commerce normal, fait que, pour obtenir et utiliser une propriété
intellectuelle quelconque, que ce soit un signal de télévision ou
autre chose, il y a des droits à payer.
Pour ce qui a trait à votre question sur l'impact financier, la
redistribution de ceci... M. Grenier, s'il vous plaît.
M. Grenier: Oui, effectivement, M. Parent, l'évaluation
des coûts additionnels que cette mesure va entraîner est en train
de se faire au ministère des Affaires culturelles On ne peut pas vous
dire maintenant les résultats de cet examen qui n'est pas
terminé, mais il est en cours.
Industries culturelles
M. Parent (Bertrand): Je veux seulement qu'on soit conscient
qu'il y aura des impacts et qu'il y aura des coûts qui, à cause
de cela, vont se retransmettre chez les abonnés, chez les
consommateurs, les Québécois et les
Québécoises.
Je passerais à l'article 2007. Par la suite, concernant tes
affaires culturelles, mon collègue, le député de Mercier,
a quelques questions à poser. On va essayer de faire cela rapidement.
À l'article 2007, il s'agit de prescriptions concernant les impressions
au Canada. En fonction de l'article 2007 de l'accord, il ne sera plus
nécessaire qu'un journal ou un périodique soit imprimé au
Canada pour que ceux qui achètent de la publicité puissent
déduire, aux fins de l'impôt, les dépenses ainsi
engagées. J'aimerais savoir quels sont les impacts de l'article 2007 sur
le volume d'impression et de composition des
entreprises québécoises et aussi la
déductibilité, pour fins d'impôt, de la publicité
faite par les entreprises canadiennes dans des magazines canadiens qui a permis
à ces derniers de voir leurs revenus publicitaires augmenter
sensiblement, ce qui a favorisé leur maintien et leur croissance.
Plusieurs périodiques et plusieurs de ces sociétés vont se
voir pénalisés par le fait même. J'aimerais savoir si on en
est pleinement conscient, d'une part, et, d'autre part, si on a aussi
évalué ces impacts. Il y aura des impacts chez ceux qui
achètent de la publicité dans ces revues.
M. Rémillard: Comme vous le savez, en fait, il s'agissait
là d'un avantage que le gouvernement fédéral avait
concédé aux imprimeurs et à ceux qui sont dans cette
industrie. Il est clair que, comme l'article qui faisait l'objet de votre
question précédente, il s'agissait aussi et il s'est agi,
dès le départ, d'un irritant important entre les deux pays. Dans
le cadre de la négociation, le Canada a consenti à abroger cette
réglementation. Encore une fois, l'impact de cela est à
évaluer et on est en train de l'évaluer. Cependant, je pense
qu'il faut le souligner, les imprimeurs québécois font de
très bonnes affaires maintenant aux États-Unis depuis plusieurs
années. Je pense que cela ajoutait encore plus à l'irritation de
nos vis-à-vis américains du fait qu'il y avait là une
prescription qui était carrément protectionniste, sans
contrepartie aux États-Unis. Ils ont donc essayé d'obtenir
l'abrogation de cette prescription et ils l'ont obtenue. Pour l'impact
monétaire, en termes de revenus, c'est en train d'être
réévalué.
M. Parent (Bertrand): Est-ce que les entreprises
américaines qui vont venir imprimer au Canada vont avoir la notion du
traitement national?
M. Rémillard: Je pense que, sauf cette prescription, ces
entreprises jouissent déjà du traitement national. Mais
l'idée, c'est qu'on est plus compétitifs qu'eux dans ce genre de
business, Actuellement, c'est nous qui exportons beaucoup plus aux
États-Unis qu'eux n'exportent ici.
M. Parent (Bertrand): D'accord. M. le député de
Mercier, si vous avez quelques points, on va vous laisser aller. Vous posez les
questions, le ministre vous répond rapidement. C'est vite
réglé, vous allez voir cela.
M. Godin: D'accord. Merci,
Le Président (M. Théorêt): M. le
député de Mercier, comme le député de Bertrand vous
l'a dit, on vous donne la parole.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parent (Bertrand): Excusez-moi, M. le Président.
M. Godin: Messieurs les présidents, merci. M. Parent
(Bertrand): C'était informel.
M. Godin: M. le Président, je dois d'abord
reconnaître que, par rapport à l'entente du 3 octobre, il y a un
programme majeur en ce qui touche 14 % du tarif sur les bandes sonores
importées qui a été abandonné, qui permet aux
industries de pressage de disques et de vidéoclips
québécois de prendre de l'ampleur. Donc, Astral Bellevue
Pathé a été sauvé, si je comprends bien? Une
entreprise qui faisait du disque et du vidéo au Québec a
été préservée par l'entente nouvelle version.
Est-ce qu'on peut savoir combien d'emplois étaient concernés par
cette modification à l'accord?
M. MacDonald: Je n'ai pas cela avec moi, exactement. (20 h
30)
M. Godin: Deuxième point, d'abord. L'article 2005 dans
l'entente n'exclut-il pas à l'avenir toute nouvelle formule de
perception de nouveaux droits du Canada ou du Québec sur les profits
faits au Québec, sur les films américains passant dans les salles
québécoises?
M. Grenier: Non, je ne pense pas. En fait, d'abord, le premier
paragraphe, c'est justement l'exemption des industries culturelles des
dispositions de l'accord, sauf l'élimination des tarifs, comme je l'ai
noté et la cession forcée d'une acquisition indirecte. Le
paragraphe 2, j'imagine que c'est celui-là auquel vous faites allusion.
En fait, c'est que, comme vous le savez, l'exemption des industries culturelles
était une condition canadienne et une condition québécoise
à l'accord. Donc, il y a une négociation là-dessus et je
pense que cela a été assez âpre. La partie
américaine a finalement reconnu que c'était là un objectif
à peu près non négociable, sine qua non de l'accord, et a
quand même tenu à noter - et c'est ce que vous voyez ici - ceci:
Très bien, vous exemptez vos industries culturelles; cependant, si vous
prenez des mesures qui nuisent à nos intérêts commerciaux,
comme il est fort probable que cela se fasse dans l'avenir, à ce
moment-là, nous nous réservons le droit - que nous avons de toute
façon, déjà, en termes d'accords internationaux existants,
comme le GATT, par exemple - de prendre les mesures commerciales
équivalentes. C'est-à-dire préserver leurs
intérêts.
Cela, évidemment, ne nous empêche pas, nous, de prendre les
mesures qu'on voudra prendre, mais il faut être conscients que ces
mesures vont avoir un coût...
M. Godin: Tôt ou tard.
M. Grenier: en termes de représailles commerciales
américaines
M. Godin: Est-ce qu'on peut dire, donc, que la loi de Mme
MacDonatd a été retirée à la suite du paragraphe 2
de 2005? Il n'y a aucun lien, dans votre esprit, entre les deux?
M. Grenier: Non
M. Godin: Car Washington est devenu Hollywood-sur-Potomac. Ce
serait faux de dire cela Parce que les rumeurs à Ottawa circulent que
Mme MacDonald a retiré son projet de loi, précisément,
à la suite de l'inclusion du paragraphe 2 de 2005
M. Grenier: Non Je pense qu'il n'y a rien dans le paragraphe 2 de
2005, qui empêche quelque mesure que ce soit au Canada. Tout ce que cela
dit, c'est que. Si de telles mesures étaient prises et qu'elles
nuisaient aux intérêts commerciaux de l'autre partie,
cest-à-dire des États-Unis, à ce moment-là,
évidemment, les États-Unis s'autoriseraient de prendre acte de
ces mesures et de réagir
M. Godin: Leur mesure à eux. Est-ce que le retrait de la
loi de Mme MacDonald n'était pas un signe pour parvenir à une
entente, un signe de bonne volonté de la part du
fédéral?
M. MacDonald: Il faudrait que vous le demandiez à Mme
MacDonald. Moi, je ne lui ai pas demandé
M. Godin: Ce n'est pas votre cousine
M. MacDonald: Ah non! ce n'est pas ma cousine Je pense que je ne
sais même pas épeler son nom. Je pense que c'est Mc mais en tout
cas
M. Godin: Bon! d'accord Alors, cela répond à mes
questions, M le Président et mon cher collègue
Le Président (M. Théorêt): Merci. M le
député de Bertrand
M. Parent (Bertrand): Alors, toujours concernant cette dimension
de la condition numéro 2, la question des tarifs postaux
préférentiels. Dans l'entente de principe du 3 octobre dernier,
le Canada avait explicitement convenu et ce, à la page 34,
d'éliminer progressivement les tarifs postaux discriminatoires,
appliqués aux revues à grand tirage, engagement qui avait
mécontenté l'Association canadienne des éditeurs des
périodiques qui refusaient l'abrogation d'un principe vieux de 79 ans et
garantissait les tarifs postaux spéciaux
On ne retrouve pas cet engagement dans l'entente finale. Alors, voici ma
question. Est ce à dire que des tarifs postaux
préférentiels continueront d'être appliqués à
l'avantage des magazines canadiens?
M. MacDonald: C'est bien cela et nous ne retrouvons pas non plus
dans l'entente, parce que le secteur des transports a été
complètement exclu, de mention que toute nouvelle loi ou
réglement dans le domaine des transports, au lendemain de la mise en
vigueur du traité, recevrait un traitement national des deux
côtés de la frontière, la raison étant qu'on a
soustrait totalement le transport du traité. En considération de
ceci, c'était la perte d'un acquis canadien dans l'entente
préliminaire et vous avez des nouveaux acquis canadiens, si vous le
voulez. À savoir qu'on est revenus sur la question des tarifs postaux,
comme on est revenus également, dans le domaine des pêcheries,
faire respecter spécifiquement la loi adoptée en 1987 dans la
province de Québec, qui forçait, en quelque sorte, les
pêcheurs à faire traiter et transformer le poisson
pêché dans nos eaux territoriales dans les usines
québécoises avant de le réexporter vers les
États-Unis
M. Parent (Bertrand): Est ce que le traite ment national
n'empêche pas l'application d'une telle politique? Auquel cas, les tarifs
postaux des magazines canadiens seront-ils revus à la baisse ou à
la hausse?
M. MacDonald: L'important, ce seront les mesures additionnelles
qui devraient recevoir un traitement national, si on veut parler en
général, mais pour ce qui a trait aux tarifs postaux, justement
cet avantage concédé aux publications canadiennes est maintenant
dans le traité, dans sa forme finale et il reste là
M. Parent (Bertrand): Pour passer au maintien de la marge de
manoeuvre, on devait nous fournir une explication additionnelle concernant
l'article 1602 5
M. MacDonald: Vous permettez
M. Parent (Bertrand): Oui, certainement
M. MacDonald: Alors, est-ce que je tiens pour acquis que,
à cette deuxième condition d'appui, vous avez réponse
à toutes vos questions?
M. Parent (Bertrand): Vous ne tenez rien pour acquis. M le
ministre. Je suis en train de vous voir dans votre stratégie, alors que
vous dites M le député de Bertrand, on a tout vidé vos
questions. Vous savez, la nuit porte conseil, demain, on aura d'autres
questions à poser
M. MacDonald: Vous me connaissez, moi, j'aime les affaires
claires
M. Parent (Bertrand): Je le sais, jaime tes affaires claires, si
vous pouvez me répondre clairement. Alors, pour l'instant, ce sont les
questions que nous avions.
M. MacDonald: Pour l'instant. M. Parent (Bertrand): C'est
cela. M. MacDonald: Parfait!
Développement régional
M. Parent (Bertrand): En ce qui concerne le maintien de la marge
de manoeuvre pour atteindre les objectifs de modernisation et de
développement de l'économie des régions, la question de la
dimension du traitement des régions, selon l'impression et l'analyse que
nous en faisons, le développement régional tel qu'il est
conçu dans l'entente est une conception nationale, c'est-à-dire
que, lorsqu'on parle de développement régional, on parie de
développement régional sur le plan pancanadien et non pas
d'après la définition que nous, nous en avons
J'aimerais être éclairé davantage sur toute cette
dimension du développement régional et cette marge de manoeuvre
que les provinces, selon vous, que le Québec continuera d'avoir, tandis
que, d'après l'analyse que nous faisons, le développement
régional est traité ici sur le plan du développement
régional d'après la notion du gouvernement canadien. Ce n'est pas
du tout la même chose.
M. MacDonald: Moi, je ne vois même pas le traitement fait
sous la notion du gouvernement canadien. Je ne vois pas le développement
régional comme faisant partie d'un aspect négociable ou
négocié dans le texte proprement dit. C'était la condition
numéro 3 du gouvernement fédéral et c'était la
condition numéro 3 du gouvernement provincial, à savoir qu'il
fallait se garder cette latitude de pouvoir Intervenir dans le
développement régional, soit sur un plan canadien, le
gouvernement canadien jugeant un besoin d'intervention dans un domaine et dans
un endroit géographique proprement dit et pour une province, la
même chose dans un secteur industriel, dans un créneau, etc.
Nous avons, effectivement, assisté, à fa table de
négociation, à toute cette argumentation qui a été
- je pense que je peux le dire - discutée avec ardeur par l'ambassadeur
canadien, les Américains voulant, comme vous le savez très bien,
la publicité a été là, éliminer ou
considérant qu'au Canada tout est à subventionner, voulant
trouver des paramètres, une façon d'écrire, d'inscrire des
restrictions quf empêcheraient justement le gouvernement, non seulement
d'agir plus tard dans un domaine de développement régional, mais
même pensant vouloir nous Imposer des restrictions sur ce qui
étaient des véhicules utilisés au Canada et dans la
province de Québec. Or, il n'en était pas question.
C'était une condition du gouvernement canadien, c'était une de
nos conditions et, lorsque les Américains ont voulu de nouveau discuter
de ce sujet-là, la province de Québec, à la mention
même de ceci, a dit qu'elle n'avait aucune concession à
faire, et aucune concession n'a été faite. Vous ne retrouvez pas
dans le texte quoi que ce soit qui puisse restreindre cette
liberté-là.
Cependant, comme je l'ai mentionné, je crois, cet
après-midi et comme on en a déjà parlé ensemble
publiquement comme privément, nous n'avons pas de chèque en blanc
pour pouvoir introduire des mesures sous le couvert de ce qu'on pourrait
appeler développement régional pour créer ce qui serait
des pratiques déloyales au point de vue commercial dans l'investissement
d'une compagnie ou dans un secteur quelconque Mais nous avons, ici, pleine
latitude, tant pour le gouvernement canadien que pour le gouvernement du
Québec, ne créant pas ces distorsions-là, d'intervenir
régionalement et de faire, par exemple - on l'avait mentionné
ici... Pour le gouvernement du Québec, si vous voulez, je vais aller
à la quatrième condition, ce n'est pas seulement une question de
maintenir notre marge de manoeuvre nécessaire pour atteindre les
objectifs de modernisation et de développement de notre économie
dans toutes les régions, mais également de se réserver,
dans cette quatrième condition-là, l'intervention possible dans
ce qui est l'épine dorsale des affaires au Québec,
c'est-à-dire les PME.
M. Parent (Bertrand): Le gouvernement fédéral a
déjà fait connaître ses intentions en matière de
développement régional et ce, je pense, au détriment du
Québec. II y a trois agences comme telles de développement
régional qui ont été créées. On sait qu'il y
a l'agence pour les perspectives de l'Atlantique, il y a l'agence de
diversification de l'économie de l'Ouest et il y a l'agence pour le nord
de l'Ontario. Alors, dans cet esprit, est-ce qu'on n'a pas un petit peu
l'impression que le Québec, sur le plan du développement
régional selon la notion nationale, est quelque peu en dehors des
règles du jeu et des priorités de développement
régional, tel que l'entend te gouvernement fédéral.
M. MacDonald: Là, vous débordez complètement
le sujet en discussion ce soir. Reprenant vos propres paroles et regardant
l'horloge, je dirais que vous tombez dans un procédé "ongoing"
continuel de négociations entre le gouvernement provincial et le
gouvernement fédéral. Cela ne fait pas partie du texte et,
à ma connaissance, je ne pense pas qu'il y ait des nuances, ici, qui
demandent un éclairage particulier de façon à ce que vous
compreniez mieux ce qui est dans l'entente. Alors, si vous voulez m'amener sur
un terrain... Je peux continuer?
M. Parent (Bertrand): Oui, je suis tout ouïe.
M. MacDonald: Si vous voulez m'amener sur un terrain politique de
relations fédérales-provinciales hors du contexte de l'entente
proprement dite, on pourra en discuter une autre fois.
M. Parent (Bertrand): M. le ministre, je ne veux pas vous amener
sur un terrain politique hors contexte, je vous pose des questions et je vous
dis...
M. MacDonald: Oui, mais je vous ai répondu qu'il n'y a
rien dans cela et que le gouvernement fédéral ait
créé une agence de diversification de l'économie de
l'Ouest canadien n'a rien à faire avec cela, ici. Je vous suggère
fortement que cela pourrait faire une question fort intéressante si vous
la posiez en Chambre au ministre de l'Industrie et du Commerce qui a une
responsabilité vis-à-vis de tout cela.
M. Parent (Bertrand): Est-ce que dans l'entente du GATT actuel,
il y a quelque chose de spécial à propos du développement
régional?
M. Grenier: Le texte du GATT lui-même et le code sur les
subventions des droits compensateurs qu'on a conclus en 1979 au Tokyo Round
reconnaissent le droit des gouvernements de prendre des mesures pour le
développement socio-économique de leur population et,
évidemment, reconnaît aussi, presque dans le même souffle,
que certaines de ces mesures-là peuvent avoir des effets de distorsion
sur le commerce. Alors, c'est un des objets du code sur les subventions et les
droits compensateurs de 1979. Il n'y a rien dans le GATT qui interdit aux
parties contractantes de prendre de telles mesures. On définit
plutôt, en fait, les conséquences et la façon dont il faut
traiter, à ce moment-là, les distorsions au commerce qui peuvent
résulter de tels programmes.
M. Parent (Bertrand): Alors, en matière de
développement régional, ce que vous me garantissez, c'est que le
Québec garde son entière marge de manoeuvre.
M. MacDonald: Oui, son entière marge de manoeuvre, mais je
le répète et je suis sûr que vous êtes capable d'en
faire la distinction, pas de chèque en blanc pour créer des
situations de commerce déloyal.
M. Parent (Bertrand): Pour l'instant, cela répond à
ma question sur ce point-là et j'aimerais que...
M. MacDonald: Cela couvre le point 3?
M. Parent (Bertrand): C'est cela. Les fameux points 4, c'est
très Important... (20 h 45)
M. MacDonald: Oui. Programmes de transition et
d'assistance
M. Parent (Bertrand): L'obtention des périodes de
transition et particulièrement la mise sur pied des programmes
d'assistance. Les périodes de transition, on les a obtenues. Il y en a
qui ne sont pas satisfaisantes, par rapport à ce que le Québec
demandait. J'aimerais que le ministre nous le reconfirme tantôt. Pour
l'industrie du meuble, entre autres, on réclamait dix ans comme
périodes de transition et on a obtenu cinq ans. Est-ce qu'il y a
d'autres secteurs pour lesquels on n'a pas obtenu ce qu'on a demandé ou
si, dans l'ensemble, on a obtenu tout ce qu'on a demandé comme
périodes de transition? Il faudrait peut-être vider cette
première question avant d'aborder la mise sur pied des programmes.
M. MacDonald: Je vais être obligé de prendre cette
condition sous réserve de la vérification...
M. Parent (Bertrand): Je trouve que vous devenez prudent, M. le
ministre.
M. MacDonald: Vous allez comprendre pourquoi quand je vais vous
donner le reste de ma réponse... sous réserve de la
vérification des 9000 catégories qui font partie du nouveau
système harmonisé international des catégories
d'activité, sous cette réserve, à ma connaissance, c'est
le seul secteur où il semble y avoir une différence
négative, en ce qui a trait à la demande qui avait
été formulée par l'association des manufacturiers de
meubles du Québec. Il faut se rappeler, cependant, qu'il y avait un
comité consultatif, un SAGIT au niveau fédéral où
étaient représentés également des industriels du
meuble québécois. Comme il y en a d'autres qui se sont
également présentés devant le comité Warren. Alors
que officiellement - alors qu'il n'y a pas de cachette - l'association
représentant généralement les manufacturiers de meubles
avaient demandé dix ans, certains manufacturiers s'étalent dits
capables de faire face à la compétition dès
l'entrée en vigueur et d'autres, nécessairement, avaient
parié de périodes plus courtes que 10 ans. Les informations que
nous avons obtenues, demandant justement à quoi on en était
arrivé, c'est qu'il semblerait qu'on avait "moyenné" les
représentations faites par divers groupes de l'industrie du meuble, non
seulement au Québec, mais également au Canada et qu'on en est
venu à cinq ans.
Ce que cela voudrait dire pour nous, sans hésitation aucune,
c'est porter une attention toute particulière à la concertation
que nous devrons avoir avec les représentants des manufacturiers de
meubles, de façon à mettre en place les mesures
nécessaires, accélérées, c'est-à-dire
s'assurer que les entreprises qui
veulent faire l'effort avec nous et avec les gouvernements vont rester
compétitives, et seront des actifs sur la place du marché
après cinq ans.
Mise sur pied des programmes d'assistance
M. Parent (Bertrand): Sur l'autre volet, qui fait partie des
grandes préoccupations - et je dots dire que cela faisait partie de nos
préoccupations avant le 3 octobre, avant la commission parlementaire -
c'est la fameuse mise sur pied des programmes d'assistance aux entreprises, aux
travailleurs. M. le ministre, vous vous souviendrez qu'en commission
parlementaire, j'ai été très explicite, très clair
là-dessus. J'ai dit que le gouvernement du Québec doit offrir,
dans les plus brefs délais, un coffre d'outils. Vous nous avez dit: II
faut attendre l'entente préliminaire, il faut attendre de voir ce qui va
être touché et comment.
Ma préoccupation - et je vais essayer d'être très
clair à ce stade - c'est: On est à quelques semaines de 1988;
donc, dans douze mois, un an, cette entente sera mise en vigueur, le 1er
janvier 1989. Le Québec est, dans tout le Canada, la province la plus
pénalisée pour deux raisons. Premièrement, à cause
de sa structure industrielle, ce sont des petites et moyennes entreprises,
dites, par définition, beaucoup plus vulnérables. Vous le savez,
vous êtes issu de ce milieu, Deuxièmement, plusieurs des secteurs
touchés par un accord de libre-échange sont des secteurs dits
vulnérables, dont l'industrie du meuble, l'industrie du textile et les
secteurs qu'on appelait autrefois les secteurs mous.
Dans l'ensemble du Canada, le Québec est le plus
pénalisé et je pense que les analystes, dans l'ensemble
s'entendent là-dessus. Rien, à ma connaissance - et si je fais
erreur, je veux que le ministre me corrige - n'a vraiment été mis
en branle à ce jour - on est rendus au 16 décembre 1987 - pour
obtenir l'assurance du gouvernement fédéral de sa participation
à ces programmes Au contraire, les Informations que j'ai pu obtenir sont
que c'est une préoccupation... À part les programmes qui sont en
marche actuellement... Mais, là, on s'entend. Il ne faudrait pas venir
nous dire ensuite: Écoutez, on a tel et tel programmes. Je pense que
cela concerne tout le monde. Vous aussi, M. le ministre, allez avoir,
tantôt, à faire face à ces entreprises ainsi que le
ministre de l'Industrie et du Commerce. Tous les parlementaires, tous les
élus et particulièrement ceux qui s'occupent des secteurs
économiques auront à répondre à ces gens.
Quelles ont été nos représentations, jusqu'à
maintenant, pour s'assurer d'obtenir... Bien sûr que le Québec
peut agir unilatéralement et on en a eu l'assurance. Mais, que je
sache, à ce jour, on n'a pas encore, au Québec, de
stratégie de développement économique coordonnée en
fonction du libre-échange, en fonction de ces nouvelles règles du
jeu qui se présentent à nous.
Deuxièmement, que je sache, te Québec n'est pas prêt
présentement, et il ne le sera pas avant une bonne période de
temps, à moins qu'il n'y ait des choses que je ne sais pas, à
aider, par des programmes précis, les entreprises et, plus important
encore, les travailleurs et les travailleuses du Québec qui sont aux
prises avec ce que j'appelle tout le recyclage de cette main-d'oeuvre.
M. le ministre, on ne fera pas cela tout seul; ce n'est pas vrai. Le
gouvernement fédéral doit nous tranférer des sommes
d'argent Importantes pour la modernisation de nos entreprises, pour le
recyclage et la formation de la main-d'oeuvre. Je ne comprends pas pourquoi,
à la dernière conférence
fédérale-provinciale des différents ministres de la
Main-d'Oeuvre, le mois dernier, ce point avait été inscrit
à l'ordre du jour et n'a même pas été
discuté. Il a été reporté à une
séance ultérieure. Et au moment où on se parle et au
moment où le Québec, le premier ministre du Québec,
très probablement demain, donnera son accord au premier ministre
canadien, on n'aura plus de "bargaining power" parce qu'on aura dit: Oui, on
est d'accord, comptez sur nous, Cette partie va rester à
négocier. Elle va rester à négocier, M. le ministre, mais
je vous dis qu'on n'aura pas beaucoup de poignées tantôt.
Dans l'esprit du gouvernement fédéral - je me le suis fait
expliquer, j'ai parlé avec quelques personnes de ce milieu au cours des
dernières semaines - ce n'est pas compliqué et vous devez le
savoir. Dans l'ensemble, au Canada, il n'y a pas vraiment de grands perdants ni
de grands gagnants dans le libre-échange. Peut-être qu'à
moyen et à long terme il y aura des gagnants Encore là,
l'étude du Conseil économique du Canada est maintenant
très prudente. Après nous avoir dit qu'il y aurait quelque chose
entre 175 000 et 300 000 emplois, ils sont maintenant très prudents Pour
le gouvernement canadien, pour le gouvernement fédéral, il est
clair, net et précis que, si, dans l'ensemble du Canada, il n'y a pas de
gagnant ni de perdant il y aura peut-être des provinces qui perdront un
peu comme le Québec et d'autres qui gagneront. Celles qui gagneront, on
ne leur demandera pas de mettre de l'argent dans le pot. Et celles qui perdront
devront s'arranger. Dans l'esprit du gouvernement fédéral, au
moment où on se parle, dans l'esprit des gens qui auront à donner
leur accord là-dessus, le Québec devra s'organiser avec ses
problèmes en matière de main-d'oeuvre À part les
programmes existants, je pense qu'il devra y avoir une formule de programmes
très particuliers, très dynamiques et qui vont permettre...
Voici ma question. Après avoir brossé le tableau
d'ensemble de mes préoccupations et à partir des informations que
j'ai, j'aimerais savoir quelles garanties nous avons à ce jour et ce qui
a été fait concrètement à ce jour à ta
veille, c'est le cas de le dire, et juste avant que le
premier ministre du Québec et le gouvernement du Québec
donnent leur accord. Je le dis, une fois que le gouvernement canadien aura eu
le feu vert et l'accord, ce sera dans la machine, on ne pourra pas revenir.
Plus que cela, il pourrait y avoir des élections et on pourrait avoir un
autre gouvernement en piace qui dise: Écoutez, il n'y a rien de
signé. Et vous savez comment cela fonctionne. Je trouve qu'on est
vulnérables. Le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu que j'ai interrogé en Chambre a
avoué que cela n'a pas encore été vraiment discuté
et que c'est à l'ordre du jour d'une autre rencontre. À ma
connaissance, selon les informations que j'ai, cela a été
repoussé deux fois et à la dernière rencontre qui a eu
lieu, il y a un mois, c'était le temps d'en parler. Les fonctionnaires
et les gens du gouvernement fédérai ont tout fait pour repousser
ce point de l'ordre du jour, on l'a effectivement écarté et on a
dit: À une prochaine rencontre qui aura lieu en 1988. Vous savez, M. le
ministre, je trouve cela inquiétant. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
M. MacDonald: M. le député de Bertrand, vous auriez
dû, à mon avis, poser votre question et la limiter, à
savoir quelle garantie vous avez. Cela vous aurait évité, dans
votre préambule, de faire part du fait que, ou bien vous n'avez pas
écouté ce que je vous ai dit en commission parlementaire, ou bien
je me suis mal expliqué, ou bien c'est un mélange des deux ou
d'autres raisons.
Dans le dossier des périodes de transition et des mesures de
transition, dès le départ et vous le savez, c'est inscrit ici au
numéro 4, conditions d'appui, c'était une condition pour la
province de Québec.
Dès la première réunion qui a traité quasi
exclusivement de cette entente-là concernant les ministres du Commerce
extérieur, j'ai fait des représentations - je ne me rappelle pas
quelle date, mais c'était en 1986 - et sans équivoque sur le fait
que, faisant partie et répétant ce qu'étaient nos
conditions, il fallait que le gouvernement fédéral qui avait
embarqué les provinces avec elle, à juste titre dans les
conditions - et je l'ai dit à maintes reprises - mais qui nous avait
embarqués dans cette négociation-là, devait prévoir
les programmes nécessaires et non seulement pour ce qui était
l'habitude et le langage qu'on avait entendu dans la bouche de certaines
personnes politiques à Ottawa, non seulement sur le plan des mesures
nécessaires pour les employés des entreprises affectées,
mais également pour les entreprises elles-mêmes.
Nous avons insisté pour qu'aux réunions
subséquentes ou plus rapidement, si c'était possible, on nous
confirme la volonté de vouloir intervenir et de répondre à
nos demandes. J'ai assisté, comme vous, à des déclarations
qui ont été faites par le ministre des Finances ou
différentes personnes où on a fait état qu'il y avait des
programmes existants, qu'on pourrait considérer ceci ou cela. Il y a
même eu certaines contradictions.
Revenons, si vous le voulez, à des garanties plus
récentes. Au début de l'été de 1987,
vis-à-vis d'une entente verbale, mais seulement verbale qui ne me
satisfaisait pas, j'ai écrit à Mme la ministre du Commerce
extérieur en épelant en détails exactement ce
qu'étaient nos demandes et j'ai reçu comme réponse que le
gouvernement fédéral reconnaissait le besoin de mesures,
suggérait, et c'était de bonne guerre, que cela pourrait se faire
conjointement avec les provinces et que ce sujet-là devrait être
étudié dans des délais convenables.
Nous n'étions pas satisfaits de cette lettre-là et nous
avons continué à insister auprès du comité Reisman
en rappelant que cela n'avait pas affaire dans l'entente proprement dite
Canada-États-Unis, que c'était plutôt une relation
fédérale-provinciale, mais tout de même pour nous,
c'était prioritaire, c'était une condition.
Plus récemment, le premier ministre a écrit au premier
ministre Mulroney qui, soit dit en passant, a lui-même annoncé,
sans équivoque, qu'il y aurait de ces programmes-là
adressés aux deux secteurs que j'ai mentionnés. Il t'a fait, si
vous vous rappelez très bien, il y a environ trois semaines, à la
réunion des premiers ministres, à Toronto.
J'ai ici les recommandations du comité permanent des affaires
étrangères et du commerce extérieur de la Chambre des
communes qui a fait le tour du Canada pour entendre des représentations
sur l'entente et qui, à son article ou au paragraphe 3 de ses
recommandations - c'est unanime, c'est bipartisan ou multipartisan - dit au
gouvernement: Si l'accord entre le Canada et les États-Unis devait
être conclu, le comité recommande, et je répète,
à l'unanimité, qu'un programme complet d'aide à
l'adaptation soit mis en place pour soutenir les travailleurs et les
entreprises qui auront à en subir les conséquences. (21
heures)
Ce programme d'aide à l'ajustement doit être assez souple
pour permettre la prise de mesures particulières pour régler des
problèmes particuliers. Ce sont tous les partis qui faisaient partie de
ce comité parlementaire, qui, unanimement, ont dit au gouvernement
d'agir Je vais poursuivre en vous disant ce que je mentionnais cet
après-midi, en conférence de presse.
Si nous avions - et vous me le demandez, je n'ai pas vu de programmes,
ils n'ont pas été quantifiés - s'il y en avait
aujourd'hui, cela m'inquiéterait pas mal, parce que ce serait
probablement à tout refaire, parce que cela aurait été
fait en vase clos, strictement et purement par des fonctionnaires ou par des
hommes politiques qui ne sont pas dans les secteurs industriels qui vont
être affectés.
Ce que nous allons mettre en place, ce que nous avons
définitivement jeté comme bases et le
système par lequel on veut faire ceci... Nous allons faire des
consultations avec les secteurs industriels concernés, nommément
pour en prendre un, l'Industrie du meuble. Et en se rappelant qu'il va falloir
également parler à l'Industrie du meuble de bureaux, qui a des
problèmes différents de ceux du meuble meublant. Nous allons,
avec eux, regarder ce qui doit être fait pour les employés et pour
l'entreprise elle-même dans ses procédés de fabrication, et
regarder également l'évolution de ses produits pour s'assurer
qu'ils demeurent compétitifs. Là, on a peut-être une chance
- s'il y en a un qui le sait, c'est vous - de sortir avec un plan qui va avoir
du bon sens, qui va se tenir, qui va répondre aux besoins des
entreprises. Là, on pourra mettre également de l'argent. On
pourra précisément voir ce que cela prend sur 5 ans, sur 7 ans ou
sur 10 ans, pour garder la compétitivité des entreprises.
La condition que nous avons mise - on a toujours insisté - elle
est là, on l'a obtenue et on va la mettre en application d'une
façon intelligente et pratique.
Le Président (M. Baril): M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Je voudrais demander au ministre, tout d'abord, si,
actuellement, il y a des scénarios de préparés. Est-ce que
vous vous apprêtez à donner votre accord, très
prochainement, alors que votre condition numéro 4, c'est de savoir avant
s'il y a des programmes d'assistance? Je vous donne un exemple qui peut
être très pratique. Vous avez sans doute des inventaires. Est-ce
que vous avez des inventaires? Je vais vous poser la question, plutôt.
Cela va aller plus vite. Est-ce que vous avez des inventaires des âges
des personnes éventuellement touchées, par secteur?
M. MacDonald: Non, Je ne le crois pas.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez une idée du nombre de
personnes qui travaillent dans le textile au Québec, par exemple, qui
ont 55 ans et plus?
M. MacDonald: Pour cela, permettez-moi de me
référer... Je sais qu'il y a des recoupages qui ont
été faits...
M. Audet (Michel): Si vous me permettez? Le ministère de
la...
M. MacDonald: M. Michel Audet.
M. Audet (Michel): ...Main-d'Oeuvre, effectivement, a
commencé à étudier... Cela fait déjà un bon
moment que le comité ministériel étudie cette question.
Ils ont recensé, effectivement, dans certains secteurs, la main-d'oeuvre
qui pourrait être ta plus affectée et il y a eu des
négociations sur certains programmes qui existent déjà
pour le recyclage des personnes âgées, justement. C'est à
cela qu'il pourrait s'appliquer.
M. Chevrette: Mais est-ce que le gouvernement sait, au moment
où l'on se parie, à partir de scénarios qu'il a pu faire -
je suppose que le ministère de l'Industrie et du Commerce a
participé à la négociation - est-ce que le
ministère de l'Industrie et du Commerce a fait des scénarios, par
exemple, pour savoir quels types de programmes pourraient... SI l'on regarde
l'entente préliminaire du mois d'octobre par rapport à l'entente
définitive, on est quand même dans les mêmes champs. Il n'y
a pas de champs nouveaux, Est-ce qu'il y a eu des scénarios de faits
pour établir des programmes?
M. MacDonald: Non, il n'y a pas eu de scénarios multiples,
variés. Il y a eu des discussions entre nos fonctionnaires, ceux de
l'Industrie et du Commerce, dans les rencontres que nous avons eues avec les
différents secteurs industriels, soit au Comité Warren soit sur
d'autres facettes. Il a été discuté de quelle
façon, cela pourrait... Je vais vous donner un exemple, si vous voulez.
Je l'ai mentionné cet après-midi, mais je me permets de le
répéter. Dans l'industrie du meuble, une des choses qui s'en
vient de plus en plus courante, c'est la conception assistée par
ordinateur et la fabrication assistée par ordinateur. Voilà, une
mesure, une façon de faire qui va exiger à la fois
l'entraînement des personnes pour utiliser ces systèmes, comme
l'entraînement des gens à l'intérieur de l'entreprise
s'adaptant à la nouvelle machinerie, l'automatisation.
Là encore, et comme vous pouvez le réaliser
vous-mêmes, il y a au Québec des entreprises qui ont plusieurs
centaines d'employés. Il y en a d'autres qui ont, ce qu'on appellerait,
disons, du meuble un peu plus spécialisé, qui en ont très
peu. Les mesures pour les uns ne s'adaptent pas aux autres. Et c'est pourquoi
je vous dis: On a une idée, non seulement une idée, mais des
concepts qu'on sait existants. Il y en a d'autres, qui peut-être vont
nous être suggérés, qui nous permettront d'intervenir, mais
avec les industries de façon à ne pas aller dans le vide.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez une idée des emplois ou
des personnes qui peuvent être touchées par l'entente sur le
libre-échange?
M. MacDonald: Oui, et nous avons publié cela d'ailleurs.
Nous avons donné les ordres généraux. On a appelé
cela les impacts dans le document que nous avons publié au printemps de
1987. Vous vous rappellerez, nous avons couvert tous les secteurs qui
pourraient selon nous être touchés et nous avons parlé
également de l'impact que cela pouvait avoir.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez quantifié les sommes
d'argent nécessaires pour rétablir les programmes de soutien aux
individus?
M. MacDonald: Nous ne l'avons pas fait
M. Chevrette: Est-ce que vous avez quantifié l'apport du
fédéral, ou vous avez exigé du fédéral dans
l'établissement éventuel de programmes puisque vous en faisiez
une condition d'appui Est-ce que vous avez quantifié ou fixé,
dans vos lettres, dans votre correspondance, les pourcentages que le
fédéral devrait fournir pour le programme éventuel de
soutien?
M. MacDonald: Non, nous n'avons pas arrêté de
pourcentage, mais nous avons toujours tenu le discours, soit parlé, soit
écrit qu'il devrait en assumer la plus grande partie des coûts
M. Chevrette: Si vous donnez votre assentiment demain ou
après-demain à I'Assemblée nationale sur des programmes
éventuels à venir, et que le fédéral vous dit qu'il
paie 35 %, qu'arrive t-il de votre assentiment que vous avez donné
à priori?
M. MacDonald: Vous avez là une question
hypothétique C'est une question hypothétique qui ne peut pas se
prendre d'une façon isolée Cette négociation ne se fait
pas seulement d'abord du Québec vis-à-vis du gouvernement
fédéral. II y a d'autres provinces qui sont impliquées
et
M. Chevrette: Et comment pouvez-vous, sérieusement, M le
ministre, soutenir que vous en aviez fait une condition essentielle à
votre appui sans préalablement avoir quantifié la somme d'argent
nécessaire pour avoir ces programmes et sans avoir exigé, au
préalable, les montants, une quote-part en pourcentage des sommes
à être versées autant par le fédéral que par
le provincial?
M. MacDonald: Nous ne pouvions pas savoir quels seraient, entre
autres choses, les secteurs sur lesquels serait la décision finale,
quant aux périodes d'adaptation qui pourraient être de cinq ans,
de dix ans ou de l'implantation immédiate. II y a eu des
représentations différentes dans tes mêmes secteurs Alors,
nous n'avions pas les éléments nécessaires pour quantifier
et des chiffres en l'air, Je n'en garroche pas
M. Chevrette: Mais vous avez dit tantôt et je reprends vos
propres paroles, le ministère du
Revenu a commencé - ce n'est pas vous, mais un de vos adjoints -
le ministère
M. MacDonald: Le ministère de la Main-d'Oeuvre
M. Chevrette: de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu a des chiffres, vous avez quantifié vous-même et vous
avez dit qu'au printemps 1987 vous aviez évalué la main-d'oeuvre
dans chacun des secteurs qui pourrait éventuellement être
touchée Vous avez donc une bonne idée des personnes
touchées par le libre-échange
Est-ce que vous avez fait des scénarios pour dire de ces
employés-là qu'il y en a un pourcentage X en vertu des
âges qui ne sont pas recyclables, qu'il faut penser plutôt à
des mécanismes d'assurance-chômage ou de préretraite ou
quelque chose du genre, est-ce que vous avez pensé à ce genre de
formule?
M. MacDonald: On a pensé à plusieurs genres de
formules, M le chef de l'Opposition mais j'aimerais revenir, si vous me le
permettez et je n'évite pas vos questions Je vous ai dit que nous
n'avions pas quantifié finalement, je vous al dit que nous n'avions pas
reçu ni demandé d'ailleurs de pourcentage fixe, mais j'aimerais
revenir à la question de la période de transition, à cette
question des "jobs" perdues
J'aimerais vous rappeler que cette mise en oeuvre du traité ne se
fera pas du jour au lendemain et j'aimerais prendre, par exemple, l'industrie
du meuble ou les différences de tarification se situent à peu
près à 10 % au désavantage des Québécois et
des Canadiens, à peu près 10 % Ce qui veut dire que - et c'est
une des adaptations les plus difficiles - vous auriez un besoin d'accroissement
de productivité par de nouvelles mesures de l'équivalence de 2 %
par année sur une période de cinq ans pour pouvoir rester
compétitifs, toute chose étant normale
Or, vous savez comme moi que dans la dernière année, dans
les derniers douze à quatorze mois, strictement et purement les
variations sur le taux de change canadien vis-à-vis du dollar
américain ont été égales à environ 10 % Vous
vous rappellerez qu'il avait frappé un plancher d'à peu
près 0,70 $, aujourd'hui, on se retrouve à 0,765 $, ce qui veut
dire une variation d environ 10 %
Jamais l'industrie du meuble n'a tant exporté Jamais l'industrie
du meuble n'a été aussi compétitive Aujourd'hui, Alain
Dubuc disait "SI on l'avait dit à l'industrie du meuble en 1977, il y a
dix ans - prenons 1982 dans le creux de la dépression pour faire cinq
ans -qu'ils feraient te genre d'affaire qu'ils font actuellement, les gars nous
auraient envoyer promener Ce que je vous dis c'est qu'il y a
premièrement "implementation" de ce traité et mise en oeuvre de
l'abolition des tarifs au 1er janvier 1989. Nous avons plus d'une année,
de concert avec les industries, pour mettre en place les programmes, pour les
mettre en oeuvre à partir du 1er janvier 1989, cinq ans
d'évolution et nous nous sentons près et je ne suis pas un
expert, mais il faut se fier aux gens que nous
avons consultés particulièrement dans les secteurs
industriels. Ceux-ci croient pour la plupart - il y en a qui ont des craintes
et des réserves - qu'ils sont très bien capables de s'adapter,
ils l'ont déjà fait et ils peuvent le faire encore.
M. Chevrette: M. le ministre, vous faites allusion aux tarifs qui
vont disparaître sur une période de cinq ans.
M. MacDonald: La pire situation, oui.
M. Chevrette: Vous savez que la tarification
québécoise est du double de celle des États-Unis ou
à peu près.
M. MacDonald: Oui, c'est pour cela qu'il y a une
différence.
M. Chevrette: L'effort demandé au Canada dans son
entité est doublement plus fort que celui des États-Unis
déjà au départ, en termes de revenu, puis vous escomptez
sur une très large part du gouvernement canadien pour subventionner les
programmes de transition.
Ce que j'observe de vos propos c'est que vous n'avez pas une
étude d'impact précise sur la main-d'oeuvre ou les
catégories de main-d'oeuvre touchées éventuellement, que
vous n'avez aucun scénario de fait en fonction des périodes de
transition prévues. Je ne parle pas des légumes à 20 ans,
mais le meuble à cinq ans, c'est vous qui nous l'avez appris il y a un
mois et demi. Donc, le ministère de l'industrie et du Commerce savait au
moins depuis un bon bout de temps qu'il y avait un scénario de cinq ans
à faire dans le domaine du meuble. Dans le domaine du textile, c'est dix
ans. Il aurait pu y avoir des scénarios de faits à partir des
couches d'âge ou dans le secteur du textile pour qu'avant de donner votre
accord final à une entente, ou arriver à dire; Je quantifie ma
demande. Je sais d'ores et déjà que cela va me coûter 150
000 000 $ ou 200 000 000 $ ou 300 000 000 $ par année dans mes
programmes de transition et au gouvernement fédéral on en demande
70 % ou 75 %; avant d'adhérer à cela, on veut être
sûrs. Vous en faisiez une condition sine qua non de votre
adhésion. Comment allez-vous expliquer que c'est une condition sine qua
non de votre adhésion si vous n'avez même pas les chiffres pour
formuler une demande réelle?
M. MacDonald: Je ne sais pas si on pose les mêmes questions
ou si on recherche les mêmes réponses...
M. Chevrette: Mais ce sont des questions qu'on se pose
ordinairement.
M. MacDonald: ...mais je crois vous avoir répondu que oui,
nous avons une idée générale après consultation, de
ce qui pourrait être des scénarios. Je vous en ai donné des
exemples de ce qui pourrait être des scénarios de mesures et de
méthodes de transition dans des périodes de transition.
Ce que je vous dis, c'est que j'aurais refusé. Nous n'aurions
jamais préparé et quantifié ces scénarios sans
participation des Industries concernées. C'est un travail qui se fera au
cours des prochains mois. Nous avons pleinement le temps pour le faire
et...
M. Chevrette: Mais votre accord sera donné, M. le
ministre.
M. MacDonald: Pardon?
M. Chevrette: Votre accord? Votre adhésion va être
faite. Comment pouvez-vous soutenir que vous aviez dans vos conditions de
l'appui du Québec à un accord sur l'échange... Est-ce
juste le fait qu'ils vous disent qu'ils sont d'accord avec des programmes puis
qu'ils vont participer? Est-ce qu'ils vous ont écrit noir sur blanc
qu'ils participeraient plus que le Québec aux programmes de
transition?
M. MacDonald: Non.
M. Chevrette: Vous ont-ils fixé un quantum? Non. Y a-t-il
un pourcentage de leur participation connue? Non.
M. MacDonald: Non, mais vous allez le voir dans les semaines
à venir.
M. Chevrette: S'il n'y a pas de pourcentage connu, s'il n'y a pas
d'étude d'impact connue, comment pouvez-vous présumer a priori
quelle sera la participation du fédéral aux programmes de
transition, alors que vous en faites une condition préalable
vous-même? Que va-t-il arriver si jamais vous ne vous entendez pas sur ce
quantum de participation aux programmes de transition, alors que l'entente sera
signée? Vous allez vous chicaner quatre ans et entre-temps qui va venir
en aide aux victimes du libre-échange dans les secteurs non
compétitifs. M. le ministre? Qui va penser à eux? Qui va leur
bâtir des programmes parce que vous allez vous retrancher derrière
sur le fait que le gouvernement fédéral ne paie pas? (21 h
15)
Est-ce que, avant de donner votre accord au libre-échange, vous
aurez réglé au moins préalablement la question du quantum
de participation aux programmes de transition? Oui ou non? C'est une question
très sérieuse et je ne charrie pas quand je dis cela. C'est
facile de mettre le résultat sur le compte d'une chicane
fédérale-provinciale et dire: On ne s'entend pas. Entre-temps,
les "gorlots" qui n'ont plus de job - cela commence à partir du moment
où vous allez donner votre accord - qu'est-ce qui leur arrive? Dans la
région de l'Estrie, où il y a une
concentration de gens dans les secteurs du textile et de la chaussure
qui risquent, parce que ce ne sont pas des secteurs tellement
compétitifs, d'être durement touchés à court terme,
qu'est-ce que vous allez faire concrètement pour eux? Est-ce que vous
allez dire qu'il y a une chicane entre le fédéral et le
provincial ou si vous allez leur venir en aide, quelle que sort votre
mésentente avec le fédéral sur le quantum des programmes
de transition? Est ce que vous prenez l'engagement, ce soir, comme ministre du
Commerce extérieur représentant le gouvernement à cette
table, d'établir coûte que coûte, indépendamment des
ententes sur les partages des frais, que, dès que vous donnerez votre
adhésion au libre-échange, vous aurez sur pied des programmes
pour venir en aide aux victimes du libre-échange?
M. MacDonald: Je prends l'engagement, comme nous l'avons pris,
que, conditionnellement à l'adhésion du Québec à ce
traité de libre-échange doivent exister des mesures et des
périodes de transition accompagnées des mesures
nécessaires pour permettre aux entreprises qui seront le plus
touchées de passer au travers et de demeurer compétitives
M. Chevrette: Je vous comprends pour une fois. Vous êtes de
bonne foi quand vous me répondez cela.
M. MacDonald: Oui
M. Chevrette: Mais, M le ministre, le pragmatique politique, vous
en avez fait une condition préalable D'accord?
M. MacDonald: Oui
M. Chevrette: Vous dites que le premier ministre s'apprête
demain à dire oui à l'entente, ou en tout cas à une
ratification par les élus, pour respecter plus la nature de vos propos.
On ratifie comme élus. II n'y a pas encore de programmes de transition
sur pied et le libre-échange commence. II y a des victimes. Qui vient en
aide à ces victimes à court terme?
M. MacDonald: Le traité de libre-échange, d'une
part, M le chef de l'Opposition, commence, vous le savez bien, le 1er janvier
1989. Les programmes de transition commenceront, seront donc en application
dans treize mois environ ou dans douze mois et demi
M. Chevrette: Allez-y
M. MacDonald: Question de ratification, si vous voulez employer
le terme, ou question d'approbation ou d'adhésion par les
représentants du peuple de la province de Québec à ce
traité. Vous savez comme moi que nous avons également la
condition no 7 qui est au bas. La condition no 7 dit. Elle maintient son droit
d'approuver ou non l'entente en fonction de l'évaluation ultime qu'elle
fera à la lumière de ses intérêts fondamentaux.
Durant cette période d'attente, qui est celle dictée par les lois
américaines, de 90 jours de session des Chambres américaines
durant lesquels ils ont l'occasion d'étudier les textes, nous avons
également l'occasion non seulement d'étudier, mais de poursuivre
le travail d"implementation", qui est celui de la création, entre
autres, des programmes de transition et de la mise en place des
mécanismes d'administration de cette entente. Sous le premier aspect, le
deuxième ou un autre, et durant toute cette période, le
Québec, si les conditions ne sont pas respectées, a encore la
latitude - ce n'est pas un privilège unique aux Américains - le
Québec a encore la latitude
M. Chevrette: Oui
M. MacDonald: avant de ratifier - j'emploie votre terme
M. Chevrette: Ce ne sont plus les Américains, M le
ministre
M. MacDonald: Non, je parle de nous, le Québec Avant de
donner notre approbation comme gouvernement à l'adhésion
inconditionnelle à l'entente telle que présentée, vous
pouvez être certains qu'on va s'assurer que nos conditions sont
respectées. Que M le premier ministre, s'il le juge à propos,
demain ou ultérieurement, donne avis que, dans la présentation
actuelle, il n'en serait pas autrement que selon les conditions d'appui que
nous avons fixées, nous sommes prêts à adhérer.
L'adhésion finale, l'approbation par les élus du peuple sous une
forme ou une autre, n'a pas à se tenir le 3 janvier, pas plus que le 1er
janvier. Ce peut être dans le milieu de l'année. Ce peut
être à la fin de l'année 1988
M. Chevrette: Cela, je le comprends, mais je veux vous demander,
M le ministre, si avant d'entériner l'entente du libre-échange,
vous avez l'intention ferme, la volonté politique manifeste d'avoir
conclu les ententes pour les programmes de transition Oui ou non?
M. MacDonald: Je vous réponds personnellement, en vous
disant comme préambule - M Bourassa l'a encore dit cet après-midi
- que le sujet des programmes de transition serait soulevé par lui
encore demain et je crois, comme ministre, que je conseillerais à notre
gouvernement et à notre Conseil des ministres, de ne pas donner cette
approbation finale dont on parle dans la condition 7, sans avoir la garantie
que les conditions préalables qui sont là ont été
respectées
M. Chevrette: M le ministre, une dernière
question là-dessus
Est-ce que vous jugez personnellement - vous, vous êtes un homme
d'affaires, à ce qu'on m'a dit -
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: est-ce que vous concevez que vous aurez un pouvoir
de négociation avec le fédéral dans l'établissement
de votre quantum, de part et d'autre, si vous allez donner votre aval à
I entente du libre échange sans avoir défini la participation
concrète du fédéral?
M. MacDonald: Je peux vous dire, M le chef de l'Opposition, que
nous avions donné une attitude très positive à la
négociation d'un traité de libéralisation des
échanges dès l'étude préliminaire à la
consultation, à l'intérieur du gouvernement. Cela ne nous a pas
empêchés, en cours de négociation pendant presque un an et
demi, d'exiger des conditions, de négocier, de ne pas donner
d'acquiescement immédiatement, de négocier et de forcer
l'inclusion dans le traité, de clauses ou de conditions qui
étaient à l'avantage du Québec Je considère qu'il
n'y a rien qui m'indique que l'attitude du gouvernement fédéral
vis-à-vis des provinces et particulièrement vis-à-vis des
représentations qu'on a pu avoir - et on en a eu plusieurs - je
changerais, du jour au lendemain, durant cette période cruciale de la
préparation de la mise en oeuvre au cours de l'année 1988
M. Chevrette: Mais vous, comme ministre du Commerce
extérieur et responsable de la négociation,
considérez-vous que vos conditions seront mieux respectées dans
leur esprit si vous avez exactement les formes de participation du
fédéral avant de donner votre consentement ou après?
M. MacDonald: Je pense que je vous ai répondu dans
l'affirmative. Je vous ai expliqué justement que je ne recommanderais
pas au gouvernement d'entériner, c'est-à-dire de se
prévaloir de cette condition, de finaliser la condition de l'appui no 7,
tant et aussi longtemps qu'on n'a pas atteint nos objectifs qui étaient
établis dans les autres conditions au départ
M. Chevrette: Donc, mon Interprétation est que vous
recommanderez l'appui officiel lorsque vous connaîtrez le pourcentage de
participation du gouvernement fédéral dans les programmes de
transition?
M. MacDonald: Lorsque nous connaîtrons les normes et les
conditions à notre satisfaction
Le Président (M. Baril): M le député de
Bertrand
M. Parent (Bertrand): Quel est le pour- centage de participation
du gouvernement fédéral qui vous semble satisfaisant, M le
ministre?
M. MacDonald: Je ne vous répondrai pas là-dessus, M
le député, c'est une négociation qui se fait et qui se
continuera. Cela me fera plaisir de vous faire part des succès qu'on
aura eu lorsqu'on aura terminé
M. Parent (Bertrand): On ne connaîtra pas vos succès
si on ne connaît pas vos demandes Vous me permettrez
M. MacDonald: II est évident que vous serez satisfaits
M. Parent (Bertrand): Vous comprendrez, M le ministre, pour vous
avoir suivi dans ce dossier-là depuis plus d'un an, que je vais vous
dire. Ou bien vous êtes naïf ou bien vous êtes imprudent. Je
ne crois pas que vous êtes naïf, je crois que vous avez
été très imprudent en tant que gouvernement et je me
permets de le dire aujourd'hui, parce que moi, je ne marche plus Le 15
septembre, en commission parlementaire, vous nous avez dit M le
député de Bertrand - je pourrais reprendre vos paroles au texte -
ne vous inquiétez pas, on va attendre de voir ce qui arrivera le 3
octobre. L'échéancier du 3 octobre 1987, vous le connaissez
depuis longtemps, cela fait deux ans qu'on le connaît, il est inscrit
dans le "fast tract procédure" Le 2 janvier 1988, c'est une date que
tout le monde connaît depuis deux ans
Vous ne me ferez pas accroire qu'on avait besoin d'avoir cette entente
là pour commencer à mesurer les programmes d'aide. Je pense que
vous auriez dû - et je pense que vous devriez au moins le
reconnaître aujourd'hui - depuis au moins un an, être prêt et
d'avoir mesuré toutes les questions que le chef de l'Opposition vous a
posées, avoir mesuré, avoir quantifié, avoir
négocié. Et je lai rappelé en commission parlementaire
Là-dessus je suis tout à fait Intransigeant parce qu'on vous l'a
rappelé en commission parlementaire, et vous nous avez dit. Ne soyez pas
inquiets. Vous m'avez même dit Entre le 3 octobre et le 2 janvier, M le
député de Bertrand, il y a 90 jours, on va avoir le temps de
regarder et de mesurer, etc
Ce ne sont pas de nouvelles règles du jeu. Cela fait longtemps
qu'on sait que l'industrie du meuble, l'industrie du textile et tous les
secteurs mous vont être affectés. Cela fait longtemps qu'on sait.
On ne savait pas si c'était cinq ans ou dix ans mais vous aviez une
très bonne idée. La preuve c'est que 99,9 % supposément de
vos demandes, à part l'industrie du meuble, ont été
acceptées
Je trouve inacceptable que le premier ministre s'en aille à
Ottawa demain donner son accord et que vous nous dites aujourd'hui.
Écoutez, on maintient toujours notre clause no 7, on pourra se retirer
On n'a plus de marge de
manoeuvre. On ne sera plus capables de négocier avec le
gouvernement fédéral parce que le gouvernement
fédéral, lui, aura eu notre accord II se sert de l'accord du
Québec pour être capable de le faire passer dans tout le Canada.
Et nous parlons comme des gens qui sont pour une libéralisation des
échanges, nous ne sommes pas des gens qui sont contre à tout
prix, mais des gens qui sont pour. Mais on vous dit que vous du gouvernement du
Québec, vous n'avez pas fait votre job
Et si l'Industrie du meuble a été capable de se
défendre ces dernières années, vous savez, M le ministre
du Commerce extérieur, pour quelles raisons. C'est parce que lorsqu'il y
a eu des abolitions de tarifs au GATT et lorsqu'il y a eu des programmes
à la SDI pour aider l'industrie sectorielle, l'industrie du meuble,
l'industrie de ceci, l'industrie de cela, on a aidé ces
entreprises-là. Quand on a passé à travers la crise de
1981-1982, M Audet s'en souviendra, on siégeait ensemble à la
SDI, on en a étudié des cas d'entreprises, mais il y avait des
programmes spéciaux pour aider les entreprises. II n'y a plus de
programmes spéciaux aujourd'hui. Cela va être le Québec qui
va payer le prix demain matin, qui va être obligé de payer le prix
si le gouvernement fédéral ne suit pas. Le gouvernement
fédéral n'a pas la même préoccupation que vous avez
Je m'excuse de vous dire ça, j'en ai la profonde conviction. Le
gouvernement fédérai et les neuf autres provinces n'ont pas le
même problème que le Québec a, parce qu'ils n'ont pas
l'ampleur de l'impact que nous avons, à la suite du
libre-échange, à cause du style d'entreprises que nous avons,
à cause des secteurs. Nous sommes vulnérables. Ce n'est pas
nouveau Vous le savez, M le ministre
Comment se fait il que depuis un an nous ne nous sommes pas
préparés? Comment se fait-il qu'aujourd'hui on ne les a pas
quantifiés? Je vous dis. La mise sur pied Je comprendrais toutes vos
explications si l'article, la clause no 4, était l'obtention des
périodes de transition - vous l'avez obtenue - et la participation du
gouvernement fédéral à des programmes d'aide Cela, je le
comprendrais. Mais je prends à la lettre votre texte parce qu'il a
été très bien pensé, la condition de l'appui du
Québec à un accord de libre-échange, c'était la
mise sur pied de programmes d'assistance aux entreprises. Je le regrette, vous
allez donner votre appui et vous n'avez pas rempli cette mission-là
Voilà ce que j'avais à dire.
M. MacDonald: II ne faudrait pas que vous versiez dans la
démagogie et II faurait peut-être que vous reteniez, dans vos
élans, qu'il y a, à l'article 4, deux éléments. II
y a, en premier lieu, l'obtention de périodes de transition, et vous
admettrez avec moi, je pense de toute évidence, que vous avez des
périodes de transition qui varient d'un an à cinq ans ou dix ans.
Et vous parlez de mise sur pied de programmes d'assistance pour les
entreprises, une condition de notre appui. Cette condition de notre appui je
viens de vous lire ce qu'était la recommandation unanime du
comité permanent d'Ottawa réunissant des membres des trois
parties pour l'établissement de ces programmes. Vous savez
également, et je me permets de le répéter, l'engagement du
premier ministre Mulroney
Et finalement je fais appel à vous, M le député de
Bertrand qui êtes un industriel aguerri. Vous devriez être d'accord
avec moi, ayant déjà été dans ce monde-là,
que le pire des plans qui aurait pu être formulé serait celui qui
aurait été sans le concours de l'industrie, sachant exacte ment
où il se situe en 1988 pour commencer à mettre ça en
pratique en 1989. Nous avons amplement de temps pour développer les
programmes avec les industries et amplement de temps pour exiger d'Ottawa de
respecter les engagements oraux ou écrits de sa ministre du Commerce
extérieur ou les engagements du premier ministre du Canada
lui-même ou les recommandations qui sont presque des engagements du
comité permanent que je vous ai lus tantôt. Alors que vous vous
inquiétiez, nous nous sommes également inquiétés.
C'était nécessaire, c'est encore nécessaire et ce sera mis
en place (21 h 30)
M. Parent (Bertrand): Étant donné qu'il reste
trente minutes, j'aimerais permettre à mon collègue, M le
député de Taillon, cinq minutes sur la question de la langue
parce qu'il était pris en Chambre tantôt. J'aimerais que mon
collègue député de Laviolette, ait la chance de
s'entretenir quinze ou vingt minutes sur la question de l'agriculture. II nous
restera que très peu de temps pour au moins finir de couvrir le point 5
ou la clause 5 Alors, on va être obligés
d'accélérer
M le Président, J'aimerais qu'on intervienne dans cet ordre
là, si c'est possible, pour essayer d'aller chercher le maximum
Le Président (M. Baril): M le député de
Taillon
Spécificité linguistique du
Québec
M. Filion: Merci, M le Président
Au su|et de la question linguistique, le ministre du Commerce
extérieur et moi avions eu l'occasion d'amorcer le débat en
Chambre. Le ministre avait reconnu, le 25 novembre, que rien dans l'accord
préliminaire ne protégeait la spécificité
linguistique du Québec, rien dans l'accord préliminaire du 3
octobre n'offrait de garantie de respect des droits linguistiques et de la loi
101. Je dois lui dire que, comme son collègue de l'Industrie et du
Commerce, j'ai pris connaissance de l'accord hier seulement, mais après
l'avoir parcouru et également discuté avec les recherchistes de
l'Opposition - et vous me corrigerez - rien, dans I'accord final, ne
protè-
ge de façon spécifique, les droits linguistiques des
Québécois
À partir de ce moment-là, je demanderais, au ministre du
Commerce extérieur, d'abord, pourquoi rien, pourquoi pas une clause dans
l'accord final Cela aurait été si simple de l'écrire - je
vous le dis tout de suite, parce que je sens venir votre réponse - parce
que. Je l'ai entendu circuler dans les couloirs Cela aurait été
si simple. Ce n'est pas nécessaire d'être avocat ni juriste. Quand
on veut quelque chose on l'écrit. Cela aurait pris un paragraphe pour
dire que rien, dans le présent accord, ne devra limiter la portée
des droits linguistiques du Québec, parce qu'évidemment je n'ai
pas besoin de vous rappeler tout le contexte, vous le savez, on est 2 % etc. II
ne faut pas s'imaginer que, lorsque les Américains signent un accord,
ils sont très préoccupés par le facteur linguistique du
Québec Alors, bref, M le ministre, comment se fait-il qu'il n'y ait rien
dans l'accord qui protège, de façon spécifique et
expresse, les droits linguistiques du Québec?
M. MacDonald: Eh bien! je suis sûr que vous reconnaissez
que je ne peux pas discuter avec vous comme juriste des raffinements de tout
ceci mais vous allez également comprendre qu il n'était
absolument pas question d'assujettir la capacité de
légiférer ou encore mieux si vous voulez restons-en à
maintenant, nous ne voulions en aucune façon mettre la loi 101, pour
prendre un exemple, ou la spécificité linguistique du
Québec sur le tapis pouvant recevoir la revue du tribunal supranational
ou d'une instance quelconque et d en discuter.
Conséquemment ce n'était pas négociable. Cela avait
été précisé dès le départ. Ce
n'était pas un sujet sur lequel, sous quelque forme que ce soit, nous
voulions que qui que ce soit ait un droit de regard et encore moins un autre
pays
Cela dit n'étant pas inclus sous quelque forme que ce soit ici,
il n'est absolument pas question que ce soit discutable. Deuxièmement je
vous réfère à la notion du traitement national et je vous
réfère également à la notion de ce que je pourrais
peut-être appeler les pratiques courantes
Les États-Unis, pour ne prendre que ce pays-là qui est le
sujet de cette entente bilatérale, transigent commercialement avec le
Canada et avec le Québec depuis des décennies. Et je vous
ramène à ma deuxième notion En tout premier lieu, le
simple bon sens de la mise en marché les a amenés ou a
amené ceux qui étaient plus intelligents et qui voulaient mieux
pénétrer nos marchés à utiliser l'étiquetage
bilingue, la production de brochures, de dépliants explicatifs
bilingues, etc
Les États-Unis, également, font affaire avec bien d'autres
pays, particulièrement vers le Sud et font exactement la même
chose dans le respect de la langue espagnole ou de la langue portugaise, en
allant au Brésil sans que pour cela il y ait des lois qui l'exigent. La
pratique intelligente commerciale a amené les Américains à
utiliser ce genre de choses et respecter la langue du pays
La notion, maintenant, de traitement national Nous n'exigerons pas
M. Filion: deuxième facteur?
M. MacDonald: Nous n'exigerons pas et nous ne demanderons pas
plus, mais certainement pas moins, aux Américains que nous ne demandons
aux autres provinces en matière linguistique. Et aucun Américain
ne pourra plaider "commerce déloyal" ou "pratique d'obstruction" ou
"méthode non tarifaire" en plaidant la question linguistique. Nous
n'exigerons ni plus mais ni moins des Américains avec lesquels on traite
et on traitera que nous n'exigeons des autres commerçants ou entreprises
du reste du Canada
M. Filion: M le Président, c'est une attitude
extrêmement inquiétante et préoccupante que celle du
ministre du Commerce extérieur sur la question linguistique et je vais
répondre rapidement à ses trois arguments
Premièrement il dit On ne voulait pas que la loi 101 soit un
sujet de négociation. Mais le libre commerce M le ministre - et vous le
savez fort bien - implique beaucoup plus que I'étiquetage des produits,
qui en est un facteur, mais implique beaucoup plus que cela II implique le
libre échange des services
M. MacDonald: À l'heure actuelle c'est limité
à un code
M Filion: Non mais
M. MacDonald: II n'y a pas de non, c'est ça .Je veux dire
C'est embryonnaire quant au traitement des services. Mais je vous laisse
continuer
M. Filion: Mais je prends l'accord tel qu'il est. II implique le
libre-échange des services selon des contraintes, des modalités,
et j en suis Bref, le ministre, comme le gouvernement libéral, a dit
dans les couloirs mais pas en Chambre. On ne protège pas la lof 101,
c'est à-dire on ne discute pas de la loi 101 ou de la question
linguistique parce qu'on ne veut pas que cela soit négociable. À
cela il y a une réponse bien simple. Je vous l'ai dit tantôt et je
le répète. C'est écrire dans l'accord que rien dans le
présent accord n'affectera les lois linguistiques en vigueur ou à
venir.
Là-dessus, je dois vous dire qu il y a un sérieux
problème notamment à l'égard de l'article 1402-8. J'attire
immédiatement votre attention là-dessus. On n'aura pas I'occasion
de finir, mais j'attire l'attention de vos conseillers là-dessus
Deuxièmement, vous me dites Écoutez, les
pratiques commerciales quand on vend du riz aux Chinois, on essaie de
mettre la boîte en chinois. Quand les Chinois vont vendre du riz aux
Québécois, on va essayer de mettre la boîte en
français Mais cela, M le ministre cela donne actuellement, malgré
la loi 101, le fait qu'encore aujourd'hui à Montréal on a
révélé que plusieurs des articles qu'on achète, les
manuels d'instructions, les garanties, ne sont étiquetés qu'en
anglais, parce que c'est là le marché. Quand on vit en
Amérique du Nord avec 98 % d'anglais, on ne peut pas s'imaginer que les
Américains vont arriver à modifier leur ligne de production pour
faire en sorte d'inclure du français dans leurs manuels d'instructions
juste pour dire. Écoutez, on doit pénétrer le
marché francophone du Québec, vous savez, on va mettre cela en
français. Non. C'est illusoire de croire que les producteurs de biens
notamment vont se plier à la loi 101 à cause du simple principe
qu'on essaie de faire du commerce intelligemment
Déjà au Québec, et vous le savez, il existe
énormément de problèmes, de situations
irrégulières, de plaintes, etc. Vous le savez, vous vivez dans le
milieu commercial et industriel. Vous visitez des entreprises J'en visite dans
mon comté. Vous le savez, la force des choses au Québec, c'est si
on fait juste se contenter de rester assis, les vagues colossales qui viennent
de la culture américaine, les forces de production américaines
vont nous envahir Lentement j'en suis. Ce n'est pas vrai qu'à
l'île d Orléans, trois mois après la signature du
traité du libre-échan ge, on va parler anglais .Je vous le
concède
Lentement, mats sûrement, à partir du moment ou il n'y a
pas une digue un barrage intelligent qui protège les droits
linguistiques du Québec, on se livre pieds et poings liés aux
forces vives du marché qui ne vont pas dans ce sens-là. Cela,
c'est votre deuxième argument Votre troisième argument, le
traitement national, me préoccupe Je vais développer cette
préoc cupation, soyez-en assurés. J'apprécierais que de
votre côté, on puisse le développer aussi Parce que
traitement national veut dire - si je l'ai bien compris - que nous allons
offrir, dans le libre-échange des biens et des services que nous allons
offrir aux Américains, le traitement des Canadiens au Québec
Mais le traitement des Canadiens au Québec implique la charte
canadienne des droits, qui, elle, a démoli à peu près le
tiers de la loi 101. Est-ce que le traitement national - je vais vous poser une
question - tel qu il est défini dans l'accord sur le
libre-échange, implique que les Américains voulant venir faire
affaire ici, notamment au sujet du libre-échange, encore une fois des
services, pourront se prévaloir de ce que les Canadiens se
prévalent, à savoir la charte canadienne des droits, pour
décider de leur statut linguistique au Québec?
M. MacDonald: Je crois que le sérieux de votre question
fait appel aux plus grandes compétences, sur lequel I'ancien
gouvernement s'est penché régulièrement pour avoir ses
meilleurs avis Je demanderais à M Samson, s'il aurait l'obligeance de
répondre et de vous réconforter quant à vos
préoccupations
M Filion: Pas me réconforter me répondre Mes
états d'âme, je m'en occupe moi-même
Le Président (M. Baril): Monsieur, j'aimerais que vous
vous identifiez
M. Samson (Jean K): Jean K Samson, sous-ministre associé
au ministère de la Justice
Le Président (M. Baril): Vous avez la parole
M. Samson: Si je comprends bien votre question, M Filion, est-ce
qu'un citoyen américain, de par l'entente va pouvoir se prévaloir
des droits de la charte? C'est cela?
M. Filion: C'est-à-dire utiliser les arguments contenus
dans la charte canadienne des droits pour faire valoir ses droits, notamment
devant le tribunal qui est issu du traité du libre-échange
M. Samson: II me semble que, pour répondre à votre
question, il faudrait analyser l'accord sur un plan horizontal et regarder dans
chaque cas là ou des droits sont consentis à des entreprises dans
des cas de services. II faut prendre chacun des secteurs de l'accord et
vérifier en quoi cet accord peut donner un droit, qu'il n'aurait pas
aujourdhui Je vous avoue ne pas avoir fait I'exercice et me sentir un peu dans
l'incapacité de faire cet exercice-là, ce
soir,immédiatement Je ne vois pas a priori
M. Filion: Bien, disons le libre établisse ment
M Samson: en quoi votre question pourrait recevoir une
réponse positive, mais c'est un apriorisme Je n'ai pas fait la
vérification
M. Filion: Disons I article 6 de la charte sur ie libre
établissement qui donne le droit - mais qui n'a pas encore
été véritablement testé par les tribunaux -
à un citoyen de Vancouver
M. Samson: L'article 6 est réservé M.
Filion: Pardon?
M Samson: Je m'excuse, l'article 6 est réservé aux
citoyens résidents permanents
M. Filion: Bon, Justement C'est là ma question L'article
s'applique uniquement aux citoyens canadiens Mais le libre-échange donne
le traitement national Je ne parle pas d'une
cause devant la Cour supérieure, mais je me place devant le
tribunal qui est issu de l'accord, je ne sais pas comment vous l'appelez
exactement. À ce moment-là, on peut invoquer le traitement
national, comme les Canadiens, eux, bénéficient de la protection
de la charte canadienne des droits, notamment de l'article 6, qui est le libre
établissement. Est-ce qu'un Américain ne pourrait pas utiliser
Justement la même argumentation - il faut se comprendre - pour faire
valoir un traitement national comparable? {21 h 45)
M. Samson: Je comprends mieux là un des impacts que vous
pouvez voir. J'expliquerai cela de la manière suivante. L'article 6 fait
partie de la constitution canadienne. Par le fait même, il annulerait
automatiquement une disposition législative qui irait à rencontre
du droit d'établissement de l'article 6. Donc, a priori, avant
même l'entrée en vigueur de l'accord, ici, ces lois n'existent
pas. Il n'y a donc pas de lois au Canada qui vont à l'encontre de
l'article 6. Ce faisant, lorsqu'un citoyen américain va vouloir invoquer
le traitement national - prenons les services que vous souleviez tout à
l'heure - il va invoquer le traitement national accordé par une loi en
vigueur au moment où il va l'invoquer. Or, cette loi en vigueur, de
toute façon, va être conforme à l'article 6. D'une certaine
façon, en théorie - on est à un niveau d'abstraction
élevé - d'une certaine façon, le citoyen américain
va bénéficier indirectement de l'article 6 dans la mesure
où toutes les lois vont avoir dû, avant qu'il puisse en
bénéficier, se conformer à l'article 6, mais d'une autre
manière. La réponse est un peu.. C'est très
théorique parce qu'il n'aura pas à invoquer l'article 6. Il n'a
pas besoin de le faire. Les lois sont déjà conformes à
l'article 6. Donc, le traitement national dont il va s'agir va être le
traitement national accordé par une toi provinciale aux citoyens
canadiens résidents et on va devoir étendre aux citoyens
américains le même traitement qu'aux citoyens canadiens qui est
déjà prévu dans une loi québécoise.
C'est un peu la façon dont je le vois.
M. Filion: En quelques minutes, parce que je ne veux pas prendre
plus de deux minutes. En ce qui concerne la situation existante, il y a 1402.5,
mais il y a 1402.8 également qui concerne la situation future.
M. Samson: Oui, 1402.8 est une application en fait de
1402.5...
M. Filion: Exemple...
M. Samson: ...et de 1402.2.
M. Filion: ...si une loi future du Parlement du Québec
devait être considérée comme une discrimination arbitraire
ou injustifiée, elle ne bénéficie pas de la protection de
1405a.
M.Samson: C'est exact.
M. Filion: On se rend compte de l'impact...
M. Samson: Pourvu que la loi constitue une discrimination
arbitraire ou injustifiée.
M. Filion: Oui, oui, comme je l'ai lu. M. Samson: C'est
cela.
M. Filion: Mais ça, ça va être le tribunal
qui va l'apprécier.
M. Samson: Exact.
M. Filion: Quand je dis le tribunal, je veux dire le tribunal
issu de l'accord.
M. Samson: Non, pas nécessairement.
M. Filion: Pas nécessairement, mais entre autres. Je veux
dire qu'il y aura juste les tribunaux ordinaires et le tribunal issu de
l'accord.
M. Samson: II faudrait que ce soit issu... Vous vous rendez
compte que le tribunal dont il s'agit Ici, le tribunal obligatoire en vertu de
cet accord, ne peut traiter que des domaines des droits compensateurs et de
droits antidumping Dans le domaine des services, je vois mal comment ça
peut s'appliquer.
M. Filion: C'est le comité ministériel, je
m'excuse.
M. Samson: Ce serait le comité ministériel... M.
Filion: Ce serait le comité ministériel. M. Samson:
...au niveau politique. M. Filion: ...au niveau politique.
M. Samson: C'est un niveau politique de décision.
M. Jolivet: II y a deux Américains, deux Canadiens...
M. Filion: II n'y a pas de Québécois qui
siège là.
M. Samson: C'est parce qu'il y a deux systèmes.
M. Filion: Bon! Une dernière question en une minute.
Dites-moi en quoi... Tenez-moi le raisonnement que pourrait tenir... Disons
qu'il y a des produits qui arrivent du Texas sur le marché
québécois, qui sont étiquetés en anglais seulement.
J'aimerais entendre - et comme j'ai déjà réfléchi
au problème, je vais le comprendre
rapidement - le raisonnement du représentant du ministre sur la
protection que lui accorde l'accord.
M. Samson: II n'y a rien dans cet accord qui interdit d'imposer
l'obligation de l'étiquetage bilingue.
M. Filion: D'accord. Donc, si effectivement des produits arrivent
sur le marché québécois étiquetés de
façon non conforme à la loi 101, le comité
ministériel et le tribunal de commerce...
M. Samson: La commission dans ce cas-là, la commission
ministérielle.
M. Filion: ...la commission qui aura à juger un cas pourra
rendre le même type de décisions qui ont été rendues
notamment par le tribunal de la Communauté économique
européenne et qui a permis, pour les fins du tribunal de la
Communauté économique européenne, le type de
décisions qui ont été rendues dans l'affaire que j'ai
citée à un journaliste et que vous connaissez sûrement,
l'affaire Isnuinite et l'affaire France Quick où, en Europe, des pays
ont envoyé - en l'occurrence en France et en Italie - des produits qui
n'étaient pas conformes aux lois linguistiques de ces pays-là.
Donc, la même chose peut se produire chez nous.
M. MacDonald: II y a une différence marquée entre
la réalité d'un pays bilingue, d'un pays avec des
législations qui couvrent justement ce caractère bilingue et
l'existence d'une seule langue officielle en France ou en Italie. Vous vous
référez à une cause qui a opposé une partie
italienne à une partie française et qui a été
jugée, si je ne me trompe pas, à la Cour de Luxembourg. On a dit
là que l'utilisation de la langue comme argument prétextant une
barrière non tarifaire n'était pas acceptable. Mais ici ce n'est
pas la même chose Ce n'est pas du tout la même situation au
Canada.
M. Filion: Non, mais ce qui a été jugé - il
faut se comprendre - c'était une entrave au libre commerce. C'est cela
qui a été décidé par le tribunal de la
Communauté économique européenne.
M. MacDonald: Oui, mais dans un contexte totalement
différent. Partez avec les prémisses de base, si vous revenez
à cette cause. Au Canada, c'est un pays qui a de la législation
et de la réglementation tant au niveau fédéral qu'au
niveau provincial soulignant le caractère bilingue et posant certaines
exigences. Ce n'était pas le cas en France. Il n'y avait personne en
France qui, par la loi, se voyait protéger pour utiliser l'italien comme
langue sous une forme ou sous une autre. Ici, au Canada et
particulièrement au
Québec, c'est cela.
M. Filion: À ce moment-là, c'est la foi qui peut
être considérée comme une entrave au fibre commerce.
M. MacDonald: Mais non. C'est le traitement national à
l'intérieur du pays des Canadiens dont la langue première ou dont
la langue de travail est l'anglais. Lorsqu'ils viennent faire affaires au
Québec, ils sont assujettis, comme vous le savez probablement mieux que
n'importe qui du côté de l'Opposition, à la loi 101.
M. Filion: Nous n'avons pas la même loi linguistique dans
tout le pays, M. le ministre. Je ne vous l'apprends pas tout de même.
M. MacDonald: Non, non. Écoutez, M. Samson peut le
reprendre... Nous sommes un pays fédéral où l'application
du bilinguisme, si vous voulez, ne se fait pas seulement dans la province de
Québec. Le bilinguisme existe également au Nouveau-Brunswick par
exemple officiellement, mais au Québec nous avons des lois
particulières. Cela n'existait pas en France par référence
à la cause dont vous parlez.
M. Filion: Je suis obligé d'arrêter là. Je
dois tout simplement conclure que, quant à moi, je garde ma
préoccupation. J'ai un bon état d'âme, mais Je garde ma
préoccupation relativement à la protection des droits
linguistiques du Québec. D'autant plus que je n'ai entendu aucun bon
argument qui aurait empêché véritablement, si cela avait
été la volonté du gouvernement, d'inscrire une clause de
sauvegarde expresse comme l'a recommandé le Conseil de ta langue
française.
M. MacDonald: Je prends note de vos préoccupations. Je ne
peux que vous répondre en vous disant que nous avons pris avis de nos
conseillers. Comme vous pouvez le réaliser, ils ont été
pendant longtemps vos conseillers respectés. Il y en a d'autres que Me
Samson C'est dans ce contexte que nous avons établi la position du
Québec pour ce qui avait trait à l'Inclusion ou à la
non-inclusion ou à la protection que te Québec voulait avoir
relativement à sa capacité de légiférer et de faire
respecter ses lois existantes.
M. Filion: Je m'excuse auprès de mes collègues
d'avoir pris 20 minutes.
Le Président (M. Baril): M. le député de
Bertrand.
Agriculture
M. Parent (Bertrand): Je voudrais seulement m'assurer, à
ce stade, qu'on aura l'accord du
ministre et des collègues pour prolonger quelque peu la
séance, sans en abuser, mais étant donné l'importance du
dossier, de 15 ou 20 minutes. Il y a un point qui n'a pas été
touché, celui de l'agriculture.
M. MacDonald: Vous m'avez demandé dix à quinze
minutes, M. le député et j'ai acquiescé à vos dix
ou quinze minutes.
M. Parent (Bertrand): Je vais juste le faire de façon
formelle. Alors...
Le Président (M. Baril): J'ai le consensus qu'à 10
h 15 nous allons terminer. Je vous remercie. M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Si on demeure dans le même genre de consensus
depuis le début, cela peut aller à 10 h 20. M. le ministre, nous
connaissons votre position quant à l'inclusion dans le traité de
l'article 11 du GATT. Nous connaissons aussi la position du ministre de
l'Agriculture. Si nous nous sommes centrés davantage ces derniers jours
sur la question de l'article 11 du GATT, je dois maintenir cependant que le
ministre de l'Agriculture, lorsqu'il a rencontré les agriculteurs avait
fait mention aussi d'autres conditions telles que le contrôle de
l'augmentation des quotas d'importation de la volaille transformée, de
la crème glacée et du yaourt. Et on peut regarder que pour la
crème glacée et le yaourt il y a une partie de l'entente. Je
reviendrai sur la question tout à l'heure de la volaille
transformée. En troisième lieu de permettre à chaque
province de pouvoir réglementer l'importation des
succédanés de produits laitiers. En quatrième lieu, de
prévoir la définition du concept de subvention directe à
l'exportation.
Une des choses que le ministre disait dans l'un des documents qui lui a
servi de discussion avec des sous-ministres et des ministres le 2
décembre dernier, était ceci: "Je crois que la position
canadienne concernant l'agriculture est à la fois imprudente et
utopique". Il ajoutait:" Elle est imprudente entre autres lorsqu'elle
énonce formellement qu'il faut éliminer toutes les subventions
qui faussent les échanges et tous les obstacles à l'accès
au marché." Quand je regarde l'entente du libre-échange et que je
m'y réfère, il y a une place où l'on dit, a l'article 701:
"Les parties sont convenues que leur principal objectif en matière de
subventions à l'agriculture est d'arriver, d'une façon
générale, à éliminer toutes les subventions qui
créent des distorsions dans le commerce agricole."
Comme le ministre de l'Agriculture en a fait mention lors du
congrès de l'UPA, on se souvient que les gens de l'UPA ont dit qu'ils
étaient heureux d'abord de voir que le ministre avait changé
d'idée et qu'il voulait l'inclusion de l'article 11 du GATT, mais l'UPA
trouvait que ce n'était pas satisfaisant ni suffisant. Dans les textes
qu'ils nous ont fait parvenir, ils repre- naient presque textuellement, en
succinct, l'ensemble de ce que je viens de dire et qui concerne le
détail même prononcé par le ministre dans ce discours qu'il
a fait devant l'UPA et dans lequel il mettait d'autres conditions. Vous vous
êtes arrêtés sur l'article 11 parce que c'est la question
qu'on a posée, mais il y avait d'autres conditions qui s'y ajoutaient et
pour lesquelles l'UPA a dit: II faut absolument y tenir.
Je vous demande si vous ne trouvez pas un peu drôle ce langage que
vous avez d'une part et celui que le ministre a tenu devant les agriculteurs,
ce qui donne un peu, d'une certaine façon, au ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation un langage double dans les
circonstances actuelles. Vous ne trouvez pas que vous, vous avez une position
et que lui en a une aussi; il les agrémente d'autres conditions et
là vous vous dites: D'accord, on a obtenu l'inclusion de l'article 11,
mais on a oublié tout le reste. Alors, je vous pose la question suivante
à ce sujet: Pensez-vous que l'accord sur le libre-échange, tel
que présenté actuellement, par la disparition de l'ensemble des
tarifs sur les produits agricoles, vous satisfait? Est-ce que c'est cela que
vous appelez le statut spécial pour l'agriculture au Québec?
M. MacDonald: Pour être certain que nous nous ne
retrouvions pas, comme vous le prétendez, dans une situation de conflit,
et il n'y avait pas une situation de conflit, il y avait la situation suivante,
permettez-moi de le dire. Justement du fait que l'entente pour ce qui est de sa
gestion générale est assujettie aux conditions du GATT et que,
dans les conditions du GATT, on retrouvait l'article 11, on nous avait
donné le conseil que pour ce qui est de la capacité pour le
Canada d'imposer des quotas vis-à-vis du dumping ou vis-à-vis
d'une situation critique pour les producteurs, le Canada aurait toujours le
droit de recourir aux avantages conférés par l'article 11.
M. Pagé: à la suite des représentations qui
lui ont été faites, a demandé et a insisté pour que
l'article 11 soit inclus. M. Page, moi-même et le premier ministre avons
fait les démarches nécessaires avec les résultats que vous
connaissez et qui semblent justement avoir grandement satisfait une des
demandes de l'UPA.
M. Jolivet: Effectivement, c'est une de leurs demandes, mais ce
n'est pas la seule. Vous êtes bien conscient de cela?
M. MacDonald: Ce n'est pas fa seule demande. Alors, si vous
voulez, je peux reprendre. Cet après-midi, en conférence de
presse, le ministre de l'Agriculture s'est dit non seulement satisfait de la
teneur du texte final en ce qui a trait à l'agriculture. Il y voyait
là effectivement des améliorations qui avaient été
apportées par rapport au texte préliminaire et il y avait
certaines questions, et vous en conviendrez avec
moi, en regardant particulièrement les formules d'algèbre
que nous retrouvons dans les appendices de ce chapitre VII, il y avait encore
certains points qu'il voulait éclaircir et sur lesquels il posait des
questions. Mais de façon générale II se disait
lui-même satisfait. Je n'ai pas les textes, mais je crois ne pas fausser
sa présentation. Si vous voulez reprendre, M. le député de
Laviolette, des conditions qu'il aurait posées. Je pense que vous avez
fait allusion, par exemple, au poulet de transformation...
M. Jolivet:: Oui, je vais...
M. MacDonald: ...et des choses comme cela. Si vous nous les
donnez une à une...
M. Jolivet:: Oui.
M. MacDonald: ...on cherchera à répondre à
vos questions.
M. Jolivet: Au départ, vous êtes bien conscient que
l'UPA disait, après le discours du ministre, qu'elle était
satisfaite de voir qu'il avait changé d'idée, mais vous avez
aussi les textes qui ont été donnés... Elle disait
cependant qu'elle le surveillerait parce que, effectivement, ce n'était
pas seulement l'article 11 du GATT qui était demandé, elle
demandait au départ l'exclusion, et cela aurait été la
meilleure des choses à faire pour eux à ce sujet.
M. MacDonald: Pour eux, pour certains membres de i'UPA,
c'était l'objectif politique.
M. Jolivet: Ils représentent quand même l'ensemble
des agriculteurs au Québec. La question de...
M. MacDonald: Ce n'était pas l'attitude de la
Coopérative fédérée qui en représente
également 35 000 et qui, en commission parlementaire, a
présenté une position très différente, mais je
conviens que certaines personnes de I'UPA ont cette attitude.
M. Jolivet: Prenons la question du poulet transformé. Vous
êtes actuellement conscient que les ententes qui existent font que 6,3 %
du poulet, que ce soit du poulet vivant ou du poulet désossé, sur
le marché québécois vient des États-Unis. Tous les
ans, il y a des demandes de permis spéciaux pour 1,2 % de poulet
supplémentaire, ce qui fait en moyenne 7,5 %. Mais le 1,2 % et
considéré comme la marge permettant Justement le poulet
transformé actuellement. De façon majoritaire, c'est surtout pour
cette demande qu'ils le font. On sait qu'actuellement le marché
québécois du poulet transformé est d'environ 35 % à
40 % et on prévoit atteindre 55 % dans les prochaines années. La
question qu'il faut poser, c'est: Les 7,5 %" présentés
actuellement, c'est "at large"...
M. MacDonald: C'est... (22 heures)
M. Jolivet: C'est "at large". Cela veut dire qu'il n'est plus
question, comme c'est le cas actuellement... Ce peut être du poulet
désossé, ce peut être du poulet transformé,
surgelé ou autre, de telle sorte qu'actuellement on n'a aucune garantie
quant aux quotas d'importation du poulet transformé. Où
sont-ils?
M. MacDonald: Non. Je crois qu'il y a certaines affirmations que
vous avez faites, par exemple à propos des pourcentages... Je vous
rappellerai que 6,3 %, c'était le chiffre total de l'année 1986,
je crois, et que le pourcentage de 7,5 % représente l'ensemble des
importations, y compris les permis spéciaux sur les cinq ans qui avaient
précédé...
M. Jolivet:: La moyenne, c'est cela.
M. MacDonald: ...et on s'arrête sur ce quota, cette moyenne
de 7,5 %. Pour ce qui a trait au traitement futur de ce qu'on pourrait appeler
le poulet préparé ou la surtransformation, M. Grenier pourrait
peut-être vous apporter des précisions additionnelles.
M. Grenier: Je pense que le souci, si on a bien compris, de I'UPA
à ce chapitre, c'est surtout le poulet qui entrerait au Canada sous
forme de plats préparés, les "TV dinners", ce genre de
produits.
M. Jolivet: Des McCroquettes.
M. Grenier: C'est cela, des aliments prêts à
être consommés. Actuellement, ces produits, selon nos
informations, ne sont pas couverts par le quota dont il a été
convenu dans les années soixante-dix, au moment où on a mis en
place l'Office de commercialisation du poulet. À ce moment-là, on
a gelé les niveaux d'importation et plusieurs de ces produits
n'existaient même pas. Cependant, ce dont il a été convenu
au moment de la négociation et que l'on retrouve maintenant dans
l'accord, c'est que les niveaux de ces quotas, notamment du poulet, du dindon
et des oeufs, ont été légèrement augmentés.
Ce qu'on a fait, c'est qu'on a transformé les taux réels en taux
nominaux, parce qu'il y a toujours possibilité, pour le transformateur
qui en fait la demande, s'il peut prouver que le produit dont il a besoin n'est
pas disponible sur le marché canadien, de faire une demande au
ministère des Affaires extérieures pour obtenir un permis
spécial d'importation.
Donc, comme le ministre l'a mentionné tantôt, la moyenne
des dernières années faisait qu'on dépassait le taux
nominal du quota. Cependant, effectivement, ces nouveaux taux comme les anciens
ne comprennent pas le poulet qui entre sous forme de plats
préparés, les plats qui sont prêts pour la consommation.
Les statis-
tiques là-dessus ne sont pas faciles à trouver, de l'avis
de tout le monde, mais on sait que c'est une petite fraction. La question,
c'est: Est-ce qu'on peut vraiment se protéger contre des importations
beaucoup plus grandes dans l'avenir? Actuellement, ces produits ne sont pas
couverts par le quota. La capacité du Canada d'agir pour protéger
cette production, c'est-à-dire l'inclure dans le quota, est maintenue en
vertu de l'article 11 du GATT puisqu'on contrôle notre production. Donc,
on peut effectivement les inclure si on veut les inclure. Si on veut faire
cela, il faudra augmenter le quota.
M. Jolivet: Oui.
M. Grenier: C'est cela.
M. Jolivet: Est-ce qu'on peut prévoir justement que la
hausse des quotas de la volaille va surtout être absorbée par le
poulet transformé? Le gouvernement, à ce moment-là, est-il
prêt à reconnaître que, si tel est le cas, l'accroissement,
sur le marché canadien, des poulets transformés venant des
États-Unis aurait un impact tout à fait négatif sur
l'ensemble de toutes les entreprises québécoises, en particulier
pour les producteurs de volaille?
M. Grenier: Ce n'est pas du tout ce qu'on anticipe. En fait, les
importations sont contingentées depuis longtemps et elles vont le
demeurer. La hausse de ce quota, s'il y a hausse effectivement, parce que le
nouveau taux nominal correspond au taux réel des cinq dernières
années, est attribuée aux surtransformateurs canadiens qui en
font la demande, qui en ont besoin, donc pour leur permettre de rester
compétitifs, vu la baisse des tarifs sur les produits
transformés. Mais si on constatait qu'il y a une forte hausse des
produits transformés qui contiennent du poulet, par exemple, le
gouvernement fédéral pourrait agir pour contingenter
l'importation de ces produits et les limiter dans l'avenir. S'il voulait le
faire, il faudrait qu'il l'augmente le quota, c'est-à-dire que ce
dernier ne pourrait pas rester à 7,5 %. Il faudrait qu'il augmente
à 7,6 % ou 7,7 %. À ce moment-là, il resterait à ce
taux et, pour l'avenir, II n'y aurait pas de hausse catastrophique de
l'importation de ces produits transformés.
M. Jolivet: On verra cela à la longue, parce que,
lorsqu'on regarde les 7,5 % et qu'on parle de moyenne plus
élevée, d'année en année dans certains cas, on va
se poser la question à l'avenir. Vous dites: En vertu de l'article qui
est là, l'ensemble - et c'est ce que l'on prétend - de
l'augmentation du 1,2 % aura pour effet d'aller dans le poulet
transformé.
M. Grenier: Je m'excuse. Il n'y aura pas d'augmentation de 6,3 %
à 7,5 %. Cette augmen- tation a eu lieu dans le passé. Tout ce
que l'on fait maintenant, c'est reconnaître dans les faits que le vrai
quota, la vraie dimension, en fait, des quantités de poulet
importé des États-Unis sous le quota de 6,3 % et sous les permis
spéciaux, c'est 7,5 % depuis cinq ans. C'est un fait, ce sont les taux
réels. Alors, il n'y aura pas d'augmentation. Il n'y a pas
d'augmentation réelle des importations à cause du fait que l'on
passe d'un quota de 6,3 % à 7,5 %. On reconnaît simplement que
dans tes faits ce fut la situation.
M. Jolivet: Mais êtes-vous conscient que ce sera le poulet
transformé qui absorbera la majeure partie de ce 1,2 %?
M. Grenier: Non, on ne peut pas convenir de cela, M. le
député, parce qu'il n'y en aura pas de hausse attribuable
à ce changement de chiffre de 6,3 % à 7,5 %, puisque c'est une
hausse qui est intervenue dans le passé.
M. Jolivet: Je le sais, mais je veux dire qu'actuellement il y a
différents poulets: poulets vivants, poulets désossés,
poulets transformés. Ce qu'on vient d'accorder pour se rendre à
7,5 % a pour effet de "transposer" le poulet vivant et le poulet
désossé vers le poulet transformé. De quelle façon
allez-vous le vérifier?
M. Grenier: Actuellement, le quota ne couvre pas ces
produits-là. Les produits importés sous le quota ne sont pas des
produits transformés. Ce ne sont pas des "TV dinners", lis sont à
l'extérieur du quota.
M. Jolivet: Le 1,2 %, quand ils demandent les permis
spéciaux d'année en année, c'est en dehors de cela?
M. Grenier: Normalement, c'est parce que ce sont des produits qui
ne sont pas disponibles sur te marché en des quantités ou
à des qualités désirées. Par exemple, si quelqu'un
veut 10 000 poulettes grises dans deux semaines et qu'elles ne sont pas
disponibles sur le marché canadien, effectivement il peut demander un
permis et, après vérification au ministère de
l'Agriculture canadien. II l'obtient.
M. Jolivet: Compte tenu du temps qu'il nous reste, j'ai une autre
question à poser, mais cela ne terminera pas l'ensemble, mais au moins
on aura fait un premier tour. Le premier ministre de l'Agriculture indique dans
son document que l'absence, dans l'accord préliminaire, d'une
définition précise de ce qu'est une subvention directe à
l'exportation a créé des inquiétudes quant à
l'avenir des programmes de soutien des revenus agricoles, et qu'il doit
être clair que ces subventions ne comprennent que celles
versées dans le seul but d'inciter les producteurs à
exporter ou celles versées sur les produits exportés seulement.
C'est le texte du ministre de l'Agriculture présenté à
Ottawa.
Ma première question: Est-ce que vous êtes satisfait de la
définition, prévue dans l'entente de la subvention à
l'exportation, par rapport à l'inquiétude qu'avait le ministre et
qu'il a exprimée aux agriculteurs?
M. MacDonald: Je ne vois aucune définition de subvention.
Pouvez-vous m'indiquer où?
M. Grenier: Page 92, effectivement. M. MacDonald: Page 92,
d'accord. M. Jolivet: Êtes-vous satisfait? M. MacDonald:
Cela va.
M. Grenier: En fait, on reprend la définition du GATT.
M. Jolivet: Pouvez-vous nous donner l'assurance que le concept
très large de la subvention liée à l'exportation ne
permettra pas aux Américains de considérer les paiements
d'assurance-stabilisation ou d'assurance-récolte, les subventions de
mise en valeur d'exploitation agricole comme étant des subventions
à l'exportation? De quelle façon?
M. Grenier: Tout à fait, mais cela ne veut pas dire que
cela nous met à l'abri. On n'a pas besoin d'avoir des subventions
à l'exportation pour être vulnérables à une
enquête en droits compensateurs aux États-Unis. On l'a vu, par
exemple, dans le cas de l'enquête sur le porc où il y avait un
programme de stabilisation dont effectivement une composante a
été jugée compensable. Il ne faut pas qu'une subvention
ait l'étiquette à l'exportation pour qu'elle soit
vulnérable, mais les subventions à l'exportation comme telles
sont carrément prohibées.
M. Jolivet: Cela, c'est clair.
M. Grenier: C'est cela. Mais quand on a une subvention qu'on
appelle une subvention domestique qui a un effet de distorsion sur le commerce
telle que définie soit dans le GATT, soit dans les lois nationales qui
sont conformes à l'accord général du GATT, à ce
moment-là, on est vulnérables aussi à l'imposition d'un
droit compensateur si on cause un préjudice.
M. Jolivet: Est-ce que cela veut dire que, dans ce
contexte-là, il n'y a rien qui nous met à l'abri que les
Américains ne feront pas une demande de droits compensateurs?
M. Grenier: Si dans un cas comme celui-là, comme cela
s'est passé par exemple pour le porc, effectivement cette menace ne
disparaît pas, ce qu'on a cependant gagné avec l'obtention du
mécanisme de règlement de différends qui s'appliquera
justement au cas de droits compensateurs et de droits "antidumping", c'est
l'examen impartial par un tribunal binational de l'application de ce droit
national.
M. Jolivet: Donc, on n'a aucune garantie. Les garanties seront
données plus tard, par une décision qui sera prise ailleurs.
M. Grenier: Non. Qui va être prise, entre autres, par un
tribunal où les Canadiens vont siéger.
M. Jolivet: Oui, c'est cela. Ailleurs qu'au Québec.
M. Grenier: Cela, c'est une amélioration
considérable sur la situation actuelle.
M. Jolivet: Dans quel sens?
M. Grenier: Dans le sens où, actuellement, l'examen du
bien-fondé d'une décision américaine est effectué
uniquement dans le système judiciaire américain. On a
remplacé cet examen par la procédure de règlement des
différends qui est exposée dans l'accord. Cela, c'était un
des objectifs majeurs du Canada et cela correspondait aussi à l'une des
conditions du Québec. Je pense qu'à l'examen, en tout cas, a
priori, cela nous paraît effectivement très intéressant. Il
va falloir voir à l'expérience ce que cela donne.
M. Jolivet: En fait, il s'agit de se poser la question: Est-ce
que, par cet accord - avec ce que vous venez de nous dire - que les offices de
commercialisation et les systèmes d'assurances ne seront pas
touchés par cela? Il n'y a aucune garantie.
M. Grenier: Ces offices sont complètement maintenus et la
capacité du Canada d'en établir de nouveaux est aussi
maintenue.
M. Jolivet: Malgré ce que vous venez de me dire.
M. Grenier: Non, mais c'est sûr que l'on peut faire ce
qu'on veut. En fait, le GATT nous en donne le pouvoir. Maintenant, si en
faisant cela et en exportant une partie de la production, on cause un
préjudice matériel aux producteurs américains ou à
d'autres producteurs ailleurs, on peut s'exposer à des poursuites.
M. Parent (Bertrand): Alors, sur la question de l'agriculture, en
terminant, j'aimerais juste soulever, sur ce point-là, les
déclarations du ministre Pagé, qu'il a faites en commission
parlementaire, le 16 septembre dernier. Le ministre de l'Agriculture avait
déclaré que toute augmentation des quotas d'importation devrait
passer par un consensus et particulièrerment une analyse très
rigoureuse des impacts qu'elle aura sur notre économie, sur nos
industries, sur nos entreprises et dans nos régions du
Québec.
Alors, je dis juste, en terminant, que cette déclaration du
ministre, en commission parlementaire, a fait en sorte qu'on avait l'assurance
que les quotas ne seraient pas touchés, sans qu'il y ait
définitivement consensus et aussi qu'il y ait une analyse très
rigoureuse. Ce qui, à mon avis, n'a pas été
respecté.
M. MacDonald: C'est votre interprétation, mais vous
admettrez avec moi - si vous voulez regarder les faits - que les quotas n'ont
pas été augmentés. Nous avons pris la moyenne des 5 ans,
en nous rappelant, par exemple, ce à quoi le député de
Laviolette se référait, les pourcentages s'appliquant au poulet
et que le tarif - si vous voulez utiliser les chiffres réels - le quota
a été établi à 7,5 % et c'est 9,5 % de
pénétration que les Américains ont faite dans le
marché, en 1984. Alors, cela n'a été que témoigner
des 5 années passées prendre la moyenne et non pas augmenter les
tarifs.
M. Parent (Bertrand): Je vous répondrais là-dessus,
M le ministre. Les quotas comme tels ont été modifiés et
vous-même, vous le dites dans votre document. Dans une perspective
québécoise, les quotas à l'importation de la volaille ont
été modifiés marginalement et vous dites que ces
modifications ou ces quotas additionnels à l'importation seront
octroyés, et ainsi de suite. On n'a pas le temps d'argumenter
là-dessus, mais effectivement, on a une divergence là-dessus
Je terminerai mes propos, en vous disant qu'on n'a pas touché le
point 5, qui est la mise en place d un mécanisme de règlement des
différends, avec lequel les provinces seront associés. C'est un
engagement. Moi, je vous dis que, jusqu'à preuve du contraire, y compris
dans les derniers propos du premier ministre, le Québec n'est
associé à aucun mécanisme, jusqu'à maintenant. Je
voudrais, bien sûr, dans votre allocution de la fin - si l'on peut
appeler cela ainsi - que vous puissiez nous donner l'assurance que cette
condition no 5 sera remplie, c'est-à-dire que le Québec sera
associé aux mécanismes de règlement des
différends.
Quant à l'ensemble du dossier, les quatre heures qu'on a
passées, M le ministre, nous ont apporté des
éclaircissements additionnels, certes, mais que ce soit sur ta question
de la langue, par notre collègue le député de Taillon, que
ce soit sur la question de l'agriculture et j'ai quatre ou cinq autres
collègues qui auraient voulu venir aujourd'hui et j'ai dû limiter
cela vous conviendrez que nous avons beaucoup de préoccupations et de
questions. Vous comprendrez aussi, M le ministre, que ce n'était pas non
plus un exercice futile et que même le temps fait en sorte qu'on est
obligés de se limiter, mais que, effectivemment, les questions que nous
nous posons, sont des questions de fond. Ce ne sont pas des questions pour dire
seulement de façon superficielle qu'on va jouer une "game" pour montrer
qu'on n'est pas tout à fait d'accord. II y a des convictions profondes
chez nous. Je dois vous dire qu'on y travaille jusqu'à des heures
tardives dans la nuit pour essayer de comprendre, non pas pour faire de
l'extrapolation pour de l'extrapolation, mais pour bien saisir. Si la part de
l'Opposition peut être la plus positive possible pour faire en sorte
d'éviter des erreurs ou d'essayer de bonifier sans avoir aucune
prétention, je pense qu'on aura fait notre job.
Le point 4, la condition 4, concernant la mise sur pied des programmes,
on en a parlé assez longuement. Je vous dis que je maintiens mes propos
et même si vous dites oui, on aura le temps, je vous dis, M le ministre,
il faudra s'assurer que le gouvernement, avant de donner son accord final, ait
réellement obtenu du gouvernement fédéral ce qu'il entend
obtenir, que ce sort en termes de participation financière ou autre
chose, toute la mise sur pied des programmes. Au fond, ce qui nous
préoccupe énormément ce sont les gens, les travailleurs de
petites et moyennes entreprises, qui sont les perdants dans toute cette affaire
du libre-échange. Je ne suis pas inquiet pour les grandes entreprises,
je sais qu'elles seront capables de se débrouiller. On sait que 80 % des
entreprises québécoises sont des petites et moyennes entreprises
et on sait qu'il y a beaucoup de travailleurs qui vont être, dans la
conjoncture des deux, trois, cinq, dix prochaines années, mis sur la
voie d'évite ment au niveau du marché du travail pour toutes
sortes de raisons. Dans certains cas cela se serait produit de toute
façon à cause de ce qui se passe, mais bien sûr qu'il y a
un virage qui se prend, et je trouve que c'est une excellente occasion.
Je termine en vous disant qu'il y a dans cette entente beaucoup de
mesures et d'impacts qu'on ne verra que dans deux, trois, cinq ou dix ans
À cause de tous ces impacts indirects, il faut prendre le maximum de
précautions J'espère que les quatre heures qu'on a pu passer
ensemble vous ont montré à quel point on était
préoccupés, M le ministre Je vous remercie de même que mes
collègues pour la lumière que vous avez pu nous apporter. Ce que
je trouve dommage, c'est que cela ait été vraiment trop court Je
vous remercie, M le Président.
M. Jolivet: Pour tant de...
Le Président (M. Baril): M. le ministre.
M. MacDonald: M le député de Bertrand, vous avez
été fidèle à votre façon de faire dans ce
dossier depuis le tout début. Effectivement, le sérieux de vos
questions et des questions de vos collègues a effectivement, je crois,
amené pour vous une certaine lumière et, chez nous,
explicité certains domaines qu'on avait fouillés et qu'on va
probablement fouiller encore.
J'ai vu dans vos explications préalables que c'était pour
vous un exercice que vous recherchiez avec vos collègues, effectivement,
d'éclair-cir vos préoccupations. J'ai vu l'insistance avec
laquelle vous avez souligné la question des programmes de transition. Je
suis totalement d'accord avec vous non seulement sur le besoin de programmes,
mais que ces besoins et programmes soient également très
adéquats, compte tenu des circonstances, dans chacun des créneaux
d'activité.
J'espère que, à la réalisation de cette
appréciation que nous avons de l'entente et des améliorations
qu'on veut y apporter ou des confirmations qu'on veut avoir, vous pourrez
partager avec l'ancien chef du Parti québécois, M. René
Lévesque, cette déclaration qu'il faisait le 15 octobre, en
réponse à une question de Mme Desjardins: "It is basically one
hell of a good thing." Ou si vous voulez me permettre de citer une personne que
vous avez consultée tout dernièrement, et je présume
qu'elle n'avait pas changé d'idée, M. Parizeau, quand il dit: "Le
Québec peut tirer grand profit de l'entente conclue avec les
Américains." Il continue: "Sur le plan des avantages, je suis plus
d'accord avec le gouvernement actuel qu'avec le parti auquel j'ai
déjà appartenu." Il disait aussi que, selon lui, il n'y a pas de
catastrophe nationale à ce qu'une entreprise québécoise
passe aux mains des Américains. Mais même là, tout
particulièrement - il ne le savait pas à ce moment-là -
pour ce qui avait trait aux entreprises d'État qui pourraient être
privatisées, nous avons ajouté des protections additionnelles.
Finalement, M. le député de Laviolette, M. Parizeau disait, et je
présume que vous devriez en prendre note: Au plan agricole,
l'ex-ministre estime que le milieu agricole exagère les
conséquences de l'accord qui abolit tes tarifs agricoles. Se disant de
l'avis de M. Bourassa à cet égard, il souligne que tous les
programmes d'appui à ce secteur demeurent. Je finirais en me permettant
de partager avec vous cet en-tête de journal qui dit tout sur le
libre-échange: "Les jeunes du PO donnent leur appui à Bourassa."
Alors, on attend votre participation active, après la réflexion
à laquelle vous avez droit et cela nous fait plaisir de partager votre
réflexion.
M. Jolivet: Je suis très heureux de voir que vous avez de
bonnes lectures.
M. Parent (Bertrand): M. le ministre, nous animons vos lectures
nocturnes.
M. Jolivet: II n'y a aucun libéral qui parle comme
cela.
Le Président (M. Baril): La commission ajourne ses travaux
sine die, après avoir accompli son mandat. Je vous remercie beaucoup et
bonne nuit.
(Fin de la séance à 22 h 21)