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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mardi 27 octobre 1987 - Vol. 29 N° 80

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières sur le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec


Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'économie et du travail entreprend, ce matin, deux jours de consultations particulières sur le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec.

D'abord, je voudrais demander au secrétaire de la commission s'il y a des remplacements.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a deux remplacements. M. Claveau (Ungava) est remplacé par M. Chevrette (Joliette) et M. Cusano (Viau) est remplacé par M. Gardner (Arthabaska).

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que le député de Vanter...

M. Lemieux: Le député de Vanier n'effectue pas de remplacement ce matin, mais il demandera le consentement de l'Opposition s'il désire intervenir. Je pense qu'il est permis par le règlement que, sur consentement, je puisse intervenir...

Le Président (M. Charbonneau): Oui, oui.

M. Lemieux: ...sans avoir droit de vote.

Le Président (M. Charbonneau): Sur le temps de votre équipe.

M. Lemieux: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): L'ordre du jour pour les deux jours, tel que convenu entre les deux formations politiques, est le suivant. D'abord, des remarques préliminaires seront faites par le ministre et par le porte-parole de l'Opposition. Ensuite, nous recevrons, ce matin, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec; cet après-midi, à 15 heures, nous recevrons le Syndicat des employés de métiers d'Hydro-Québec, le Syndicat des employés de bureau d'Hydro-Québec et le Syndicat des techniciens d'Hydro-Québec; à 16 h 30, le Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec; en soirée, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Demain matin, à 10 heures, nous recevrons la Fédération des travailleurs du Québec, FTQ-Construction, la

Fraternité provinciale des ouvriers en électricité, Montréal et Québec et, par la suite, l'Association des ingénieurs-conseils du Québec; en après-midi, Hydro-Québec, d'abord, et on terminera avec les remarques finales du porte-parole de l'Opposition, le député de Roberval, et avec celles du ministre.

S'il n'y a pas de problème particulier, on va considérer le procès-verbal comme adopté.

Nous allons immédiatement passer aux remarques préliminaires. M. le ministre.

Remarques préliminaires M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Permettez-moi, premièrement, d'attirer votre attention sur le fait que, aujourd'hui, c'est une journée que je considère historique, parce que c'est le 27 octobre 1979 qu'a eu lieu l'inauguration de LG 2. Je dois vous dire que le choix de faire siéger aujourd'hui la commission parlementaire, c'est simplement une pure coïncidence. On vient de porter à mon attention, ce matin, que c'est le 27 octobre 1979 que le premier ministre de l'époque, M. René Lévesque, a inauguré LG 2.

Le Président (M. Charbonneau): C'est comme tes messages au début des projections cinématographiques.

M. Ciaccia: Cela inaugure bien nos travaux.

Mmes et MM. les membres de la commission, la commission de l'économie et du travail a été convoquée pour examiner au cours des prochains jours la gestion de la sous-traitance à Hydro-Québec. La chute des investissements d'Hydro-Québec au cours des dernières années a posé avec beaucoup d'acuité la question de l'impartition. La sous-traitance fut l'un des points importants des dernières négociations des conditions de travail à Hydro-Québec. Il en est résulté un nouveau libellé de l'article 34 dans les conventions collectives signées avec les techniciens, les employés de bureau et les employés de métiers. Cet article qui pose les règles de recours à la sous-traitance a été introduit pour la première fois dans la convention collective des ingénieurs.

Les parties se sont entendues par

rapport au travail à forfait en inscrivant dans les conventions toute une liste d'activités qui ne seront confiées qu'aux employés d'Hydro-Québec. Seules les situations exceptionnelles pourront justifier le recours aux services des entrepreneurs privés. C'est la première fois qu'Hydro-Québee énonce de telle façon sa position face à la sous-traitance et la traduit dans les textes des conventions collectives, incluant celle du Syndicat professionnel des ingénieurs.

Cette position a causé de nombreux remous chez les partenaires privés d'Hydro-Québec. C'est avec beaucoup d'appréhension qu'on a vu inscrite noir sur blanc cette précision de la position d'Hydro-Québec. Certains craignent que l'équilibre qui prévalait précédemment ne soit ainsi rompu allant même jusqu'à remettre en cause la viabilité de certaines entreprises.

C'est donc avec beaucoup d'intérêt que mes collègues et moi-même étudierons les points de vue des différents intervenants sur ces changements. Mais, auparavant, j'aimerais que noue ayons à l'esprit toute l'importance d'Hydro-Québec pour notre économie. De plus, il vaut la peine de rappeler l'environnement dans lequel se situe la gestion de la sous-traitance.

Depuis plus de 40 ans, Hydro-Québec travaille à fournir de l'électricité à la population du Québec et ce, dans toutes les régions. Hydro-Québec est une société d'envergure qui se classe parmi les grandes entreprises nord-américaines. Son actif total a été multiplié par douze depuis 1964, pour atteindre près de 31 000 000 000 $ en 1986. Ses services rejoignent plus de 2 800 000 abonnés à travers un réseau de distribution qui dépasse les 100 000 kilomètres. En 1986, Hydro-Québec a vendu 144 000 000 000 de kilowattheures, dont 27 000 000 000 à l'exportation. Ceci la positionne comme la plus importante compagnie de services publics au Canada.

C'est grâce au développement du potentiel hydroélectrique de notre territoire qu'Hydro-Québec a pu atteindre une taille aussi considérable. Ainsi, la puissance installée est passée d'environ 11 000 mégawatts au début des années soixante-dix à près de 24 500 mégawatts en 1986. Le développement de la Baie James a permis l'addition de plus de 10 000 mégawatts, suscité des investissements d'environ 15 000 000 000 $ et entraîné la création de milliers d'emplois. Ces travaux se réalisaient dans un contexte d'augmentation de la demande de 6 % en moyenne par année de 1975 à 1981. En 1982, un affaissement de la demande s'est fait sentir. Il en est résulté un ralentissement du rythme d'investissement. Ce n'est qu'en 1987 que l'on peut observer une reprise significative des investissements d'Hydro-Québec.

Par-delà les investissements, Hydro-

Québec représente un moteur de développement économique important pour le Québec. En effet, de nos jours, l'énergie est présente dans toutes nos filières de production. Une société qui réussit à obtenir un avantage comparatif à ce chapitre influencera favorablement toute l'économie. Avec la crise pétrolière des années quatre-vingt-dix, le Québec a fait un très grand effort pour faire pénétrer l'électricité. Cette politique avait pour objectif d'assurer nos approvisionnements, tout en fournissant à tous une source d'énergie à prix compétitif.

Dans le seul secteur industriel, Hydro-Québec fournit de l'électricité à plus de 12 000 entreprises de toute nature et de toute taille réparties dans toutes les régions du Québec. Ces entreprises comptent sur une électricité disponible, fiable et compétitive pour assurer leurs activités. Elles ont, d'ailleurs, utilisé 48 000 000 000 de kilowattheures en 1986., L'industrie des pâtes et papiers accapare à elle seule 42 % de ce total.

Le rayonnement d'Hydro-Québec se concrétise, entre autres, par les emplois que ses activités génèrent. Chez Hydro-Québec, il y a plus de 18 000 travailleurs permanents. D'ailleurs, cette entreprise est le deuxième plus gros employeur du secteur industriel québécois. On peut ajouter à cela plus de 40 000 emplois associés de différentes façons aux activités d'Hydro-Québec, dont 4000 emplois directement associés à la sous-traitance. Hydro-Québec fait affaire avec des sous-traitants sur tout le territoire; ils se partagent annuellement plus de 6000 contrats qui totalisent quelque 500 000 000 $.

Au-delà de son importance économique, il ne faut pas oublier qu'Hydro-Québec produit un service dont aucun ménage, aucune entreprise ne peut se passer. C'est sans doute à cause du caractère essentiel de l'électricité qu'Hydro n'est pas une entreprise comme les autres, mais plutôt une société d'État. C'est ce qui nous permet d'assurer à tous et à chacun sur le territoire du Québec un accès facile et économique à cette forme d'énergie. Aussi, peu importent les différents objectifs que nous souhaitons qu'Hydro-Québec poursuive, il ne faudrait pas oublier qu'avant tout, particulièrement sans notre climat, le rôle premier d'Hydro-Québec est de livrer aux Québécois l'électricité qui leur est nécessaire et cela, de façon économique.

Autant il est important qu'Hydro-Québec fasse appel à la sous-traitance de façon à insuffler un dynamisme multiplicateur d'activités dans le secteur privé, autant il est nécessaire que cela ne remette pas en cause le fonctionnement efficace de l'organisme.

Hydro-Québec est reconnue comme une entreprise ouverte et coopérante avec le secteur privé. Que l'on pense au développement du génie-conseil québécois et à son

rayonnement dans le monde qui n'aurait pas été possible sans les travaux confiés par Hydro-Québec dans le secteur du génie-conseil.

Cette .position a, d'ailleurs, été citée en exemple. Le ministère du Trésor et de l'Économie de l'Ontario, dans un rapport en octobre 1986, mentionnait: "Dans certains cas, la politique d'approvisionnement du gouvernement peut jouer un rôle important en mettant à la disposition des entreprises ontariennes un marché domestique considérable. L'expérience du Québec est intéressante en cette matière. L'émergence dans cette province de trois grandes firmes de génie-conseil actives sur le marché international, Lavalin, SNC, Monenco, est largement attribuable au fait que les travaux d'Hydro-Québec découlant de ses grands projets hydroélectriques étaient confiés au secteur privé."

Il s'agit là d'une constatation importante, puisque 16 000 emplois directs sont reliés au génie-conseil au Québec. Bien que tous ces emplois ne soient pas attribuables qu'aux activités d'Hydro-Québec, celles-ci ont fourni une base de développement indispensable. En effet, les plus grandes firmes d'ingénieurs-conseils canadiennes se retrouvent au Québec. Si, aujourd'hui, elles peuvent soumissionner sur des travaux à l'extérieur, en Chine, en Afrique, c'est grâce aux politiques antérieures de sous-traitance. Il faut s'assurer qu'une telle formule, gagnante par le passé, demeure. D'ailleurs, des représentants d'Hydro-Ontario nous ont fait part de leur intention de l'adopter.

La sous-traitance est également importante dans d'autres secteurs. Par exemple, le réseau de transport de la Baie James a occupé plusieurs entrepreneurs. Sur une période d'une dizaine d'années, ils se sont partagé 950 000 000 $ en contrats correspondant à plus de 7000 personnes/années. Plusieurs entreprises ont été créées pour répondre aux différents besoins d'Hydro-Québec. On y retrouve aujourd'hui une expertise de grande valeur, tout aussi profitable à Hydro-Québec qu'à l'ensemble de la société.

La stimulation de l'activité économique par le recours à la sous-traitance ne doit pas, pour autant, négliger l'importance d'une gestion saine de l'organisation. Ceci se reflète, entre autres, par le maintien du savoir-faire à l'interne et par une gestion efficace de l'organisation du travail. Les réalisations des employés d'Hydro-Québec, depuis des années, ne sont plus à démontrer, elles non plus. Les efforts déployés en vue d'acquérir un haut niveau de compétence technique ont permis à Hydro-Québec d'établir sa réputation au plan international comme un leader du développement technologique. Il est donc important qu'Hydro-Québec maintienne le savoir-faire nécessaire à la réalisation de sa mission et ce, tant au niveau des services de génie qu'au niveau technique. Le maintien d'un service de qualité à la clientèle en dépend.

Par ailleurs, les décisions sur la sous-traitance affectent l'organisation du travail. Normalement, une entreprise cherche à utiliser sa main-d'oeuvre de la façon la plus productive, tout en se donnant de la flexibilité dans l'utilisation de celle-ci.

M. le Président, nous venons de voir que la sous-traitance à Hydro-Québec représente une activité importante dont la gestion porte à conséquence non seulement sur son fonctionnement, mais aussi sur notre environnement économique. La sous-traitance se trouve donc à la jonction de deux milieux. La signature des dernières conventions collectives semble avoir modifié l'équilibre qui existait entre les deux. Il apparaît donc qu'il faille actuellement s'assurer que la nouvelle situation corresponde à une position d'équilibre entre, d'une part, les intérêts d'Hydro-Québec et de ses employés et, d'autre part, les intérêts de tous les Québécois, qu'ils soient travailleurs ou consommateurs d'électricité.

Voilà donc dans quel esprit nous allons aborder les interventions des prochains jours. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Roberval.

M. Michel Gauthier

M. Gauthier: Oui, M. le Président. Nous attendions tous du ministre, ce matin, au moins des orientations quant à la position qu'il entendait prendre au cours de cette commission parlementaire. II s'est contenté de faire l'éloge d'Hydro-Québec, de nous expliquer ce qu'était Hydro-Québec, ce que la plupart des gens réunis dans cette salle savent déjà très bien, et de nous faire l'éloge du génie-conseil québécois, autre chose qui est partagée par beaucoup de gens dans cette salie.

Nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation conflictuelle pour la simple raison que chaque fois qu'il m'a été donné de demander au ministre de l'Énergie et des Ressources quelle est la politique du gouvernement dans le domaine énergétique, quelle est la politique du gouvernement dans tel secteur, les réponses, principalement celles du ministre de l'Énergie et des Ressources, sont toujours que ce gouvernement n'est pas un gouvernement de livres blancs et de livres verts, ce gouvernement prend des décisions quotidiennement et c'est ce qui fait notre politique en fonction de ce qui se passe chaque jour. J'appelle cela un gouvernement qui gère sans politique ou qui n'a de politique que celle des ballons d'essai.

Voilà pourquoi nous nous retrouvons

aujourd'hui en commission parlementaire dans une situation qu'il sera certainement très difficile de départager. D'abord, le gouvernement en place, après nous avoir promis et après avoir promis à tous les intervenants dans cette salle, c'est-à-dire aux gens d'Hydro-Québec, aux gens de l'entreprise privée, aux entrepreneurs, après avoir fait pendant quelques années les beaux jours électoraux du Québec avec une promesse d'aménager 25 000 mégawatts dans le nord du Québec, nous arrive aujourd'hui et nous présente une réalité tellement décevante, M. le Président, qu'à peine le quart des contrats prévus par l'ancienne administration gouvernementale pour l'enclenchement de travaux dans le nord du Québec - je vous rappelle qu'au lieu de 25 000 la position de l'ancien gouvernement était de 3500 à 4500 mégawatts - sont maintenant signés après deux ans d'activité de ce gouvernement. C'est vous dire combien le niveau d'attente a été poussé au maximum chez l'ensemble des Québécoises et des Québécois, chez les travailleurs d'Hydro-Québec, chez les entrepreneurs, les ingénieurs-conseils, bref chez tous les intervenants qui pouvaient être intéressés par 1b question., La réalité est bien décevante.

Ce gouvernement s'est également fait élire et a fait ses premiers beaux jours à la tête de l'État en parlant de privatiser, en voulant éliminer du champ de l'activité gouvernementale le plus d'emplois possible. Par contre, dans d'autres circonstances, dans des situations conflictuelles, ce gouvernement va poser des gestes à l'encontre de sa philosophie de base et j'oserais dire que, dans un cas comme dans l'autre, les gestes vont d'une extrémité à l'autre du balancier parce qu'il n'y a pas de politique, parce que ces gens-là ne savent pas où ils s'en vont.

Le problème, aujourd'hui, est de savoir si, dans l'activité d'Hydro-Québec, il y a place pour la protection de l'ensemble des travailleurs d'Hydro-Québec et s'il y a, en même temps, dans le champ d'activité, au-delà de vaines promesses de travaux extraordinaires qui ne se réaliseront peut-être jamais, place pour les entrepreneurs, les ingénieurs du Québec et, surtout, pour ceux et celles qui gagnent leur vie quotidiennement au service de ces entrepreneurs, c'est-à-dire les travailleurs de l'industrie de la construction.

Durant cette commission parlementaire, l'Opposition fera en sorte de faire la lumière sur la question qui nous est soumise et essaiera d'évaluer très justement si la protection nécessaire de l'emploi des travailleurs d'Hydro-Québec est conciliable avec l'activité économique qui doit appartenir et qui fournit du travail et de la protection de travail à ceux et celles qui sont encore plus vulnérables, c'est-à-dire les travailleurs de l'industrie de la construction.

Il est difficile d'intervenir en pleine situation conflictuelle, mais toujours est-il que, le manque de lignes directrices, le manque de prévoyance du gouvernement nous situant maintenant en plein coeur de ce conflit, nous ferons en sorte, par nos questions, de mettre en lumière tous les éléments de la problématique. Nous interrogerons avec un pareil intérêt et sans préjugé défavorable l'ensemble des groupes qui se présenteront devant nous et qui voudront bien éclairer notre lanterne de leur expertise. Nous ferons en sorte que le gouvernement se branche pour une fois, qu'on sache où il s'en va dans le domaine de l'hydroélectricité, qu'on sache également quelles sont les perspectives d'avenir pour l'ensemble des travailleurs et des travailleuses du Québec et quelles sont aussi les actions qu'il entend prendre comme gouvernement pour assumer ses responsabilités face à la situation difficile dans laquelle on se trouve aujourd'hui. Je vous remercie. (10 h 30)

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député. Sur ces remarques préliminaires, j'invite maintenant l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec à prendre place à la table des invités.

Auditions

Mesdames, messieurs, bonjour et bienvenue à la commission de l'économie et du travail. On m'a indiqué que le porte-parole était M. Forget. Alors, M. Forget, je pense que, pour vous, ce n'est pas un retour aux sources, mais un retour, je l'espère, à des anciennes amours. Je vous demanderais, puisque vous connaissez un peu les règles de fonctionnement de notre commission, d'abord de présenter les personnes qui vous accompagnent. Je vous indique que vous avez 20 minutes pour votre présentation, initialement, et, par la suite, le reste du temps, c'est-à-dire 70 minutes, est répartis également de part et d'autre de la commission pour des discussions, des échanges avec vous. Je vous indique, également, parce que plusieurs membres de la commission me l'ont signalé, que ce sujet, autant de ce côté-là de la salle que de ce côté-ci, intéresse beaucoup de gens et qu'il y a beaucoup de députés qui voudraient intervenir.

La seule façon dont on puisse le faire, c'est qu'on ait, dans la mesure du possible, des réponses les plus précises possible et les plus concises possible, ce qui permettra à plus de personnes d'intervenir. Sur ce, je vous cède la parole.

Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec

M. Forget (Claude): Merci, M. le Président. Conformément à votre invitation,

j'aimerais présenter ceux qui sont ici devant vous. En commençant par mon extrême droite, M, Gérald Désourdy, président de l'Association canadienne de la construction; M. Gabriel Richard, directeur général de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, que je désignerai maintenant comme l'"association". À mon extrême gauche, Me Gisèle Bourque, avocate pour l'association; M. Pierre Roux, président du conseil d'administration de l'association, Mme Marie Bourbonnière, conseillère chez SECOR. Je vous remercie, M. le Président, de vos mots de bienvenue. Je m'empresse de mettre à exécution votre invitation à être concis et rapide.

M. le Président, M. le ministre, MM. et Mme les membres de la commission, la convocation de cette commission parlementaire aujourd'hui, je pense que tout le monde en convient, s'est faite à la suite de représentations largement formulées par notre association. J'aimerais, très brièvement, indiquer quel sens nous attachons à cette séance et quels sont, à notre avis, les enjeux qui sont soumis à votre attention et à vos délibérations.

Il y a une tradition bien Connue à l'Assemblée nationale de séances où l'on entend, tous les ans, Hydro-Québec pour faire un examen général de sa situation et porter - ordinairement, à l'occasion d'une demande de majoration des tarifs - un diagnostic général, un diagnostic global sur la situation de l'ensemble de l'entreprise. C'est toujours une tâche difficile pour les membres de l'Assemblée nationale, même, peut-on dire, très souvent une source de frustration, étant donné l'immense complexité du sujet, la grosseur de l'entreprise et la difficulté de porter rapidement des jugements sur une situation aussi compliquée.

Aujourd'hui, cependant, le propos que nous soumettons à votre attention est extrêmement différent. Pourquoi? J'essaierai de l'expliquer très brièvement. Il semble qu'il y ait deux aspects qui méritent notre attention.

Le problème qui vous est soumis aujourd'hui, contrairement à celui qui fait l'objet des comparutions annuelles d'Hydro-Québec, constitue un objet précis et simple. La commission, que vous constituez aujourd'hui, est confrontée à une impasse au sujet du rôle des monteurs de lignes à contrat, essentiellement les membres représentés par notre association.

Nous voulons, à ce sujet précis, poser des questions et obtenir des réponses quant au rôle de ces monteurs de lignes privés ou à contrat, à leur utilité pour Hydro-Québec, au coût relatif qu'entraîne leur utilisation par opposition aux ressources internes d'Hydro-Québec et à la nature générale des relations qui doivent exister entre un organisme d'État de l'importance d'Hydro-

Québec et des entreprises comme celle que nous représentons.

C'est un sujet qui n'est pas compliqué, c'est un sujet qui est à la portée de tous. Pour caricaturer un peu, on peut dire qu'il s'agit essentiellement de planter des poteaux et d'y accrocher des fils; c'est, avec un peu d'exagération, essentiellement le travail dont il est question. Il n'est pas besoin d'être des ingénieurs, des scientifiques ou des experts en administration pour comprendre, de quoi il s'agit. Il devrait donc être possible d'obtenir sur un sujet comme celui-là des explications compréhensibles, des explications précises et qui permettent de faire le point sur un aspect relativement modeste de l'ensemble des problèmes de gestion d'Hydro-Québec.

La commission parlementaire, nous nous permettons de le souligner, est la seule instance pour évaluer la manière dont HydroQuébec prend des décisions, quels critères elle utilise dans ses choix, quelle est la nature du processus décisionnel qu'elle utilise, bref, pour faire une évaluation sur un cas d'espèce simple, à la portée de tous, de la qualité de la gestion d'Hydro-Québec.

Il n'existe pas, comme vous le savez, au Québec, de régie ou de tribunal administratif qui aurait le pouvoir de poser des questions détaillées sur tous les aspects de la gestion et de faire une expertise. C'est une situation avec laquelle il faut compter et, qui, bien sûr, rend difficile la tâche impartie à l'Assemblée nationale quand il s'agit de poser des jugements sur la façon dont est gérée Hydro-Québec. Donc, cette commission est un lieu privilégié. Il n'y a pas, non plus, traditionnellement de souhait, ni du côté gouvernemental, ni du côté d'Hydro-Québec, pour qu'il y ait des interventions ad hoc, à la pièce, dans l'administration interne d'Hydro-Québec.

Comme on le sait, il est important pour préserver la réputation de professionnalisme d'Hydro-Québec, qu'il y ait une certaine distance entre le gouvernement et Hydro-Québec, qu'il y ait une certaine autonomie de gestion. C'est important, entre parenthèses, pour préserver auprès des institutions financières la réputation de professionnalisme et d'autonomie de l'entreprise.

Donc, cette commission parlementaire est la seule instance devant laquelle il est possible à une partie comme notre association, qui a un grief à soulever sur le plan de la gestion d'Hydro-Québec, de se présenter. C'est une évaluation a posteriori. On n'essaie pas d'influencer nécessairement ou d'intervenir dans des pratiques actuelles ou futures, mais il s'agit, d'abord et avant tout, de juger ce qui s'est passé dans le passé récent et de porter un jugement sur cela. C'est une occasion par excellence en

commission parlementaire d'exiger en d'autres termes une reddition de comptes devant l'Assemblée nationale de la part d'Hydro-Québec, encore une fois, sur un sujet précis et bien circonscrit.

C'est donc un défi pour Hydro-Québec de démontrer dans ce cas précis la rationalité des motifs ayant inspiré ses décisions. Il ne s'agit pas d'un exercice de relations publiques. II ne s'agit pas d'invoquer tout simplement les succès passés de l'entreprise qui sont indéniables. Il ne s'agit pas pour Hydro-Québec, nous semble-t-il, d'invoquer de notre part, de votre part, une espèce de confiance aveugle, mais de fournir des réponses précises à une question précise. Nous allons, très simplement, vous dire que, selon nous, et à la lecture, par exemple, du mémoire qui a été déposé devant vous par Hydro-Québec, ce défi, Hydro-Québec ne l'a pas relevé.

Un deuxième élément que nous voulons porter à votre attention, c'est que ce problème précis, comme, d'ailleurs, l'a indiqué le ministre dans ses remarques préliminaires, a des implications de très grande portée. L'association que nous représentons ici est une association assez modeste. Effectivement, le nombre d'entreprises qui sont directement impliquées dans les travaux sur les lignes de distribution ne se chiffre guère à plus d'une douzaine. Ce sont toutes, ou à peu près, des PME dont Hydro-Québec est, dans la plupart des cas, l'unique client.

Ce phénomène doit, à mon avis, retenir votre attention parce qu'il est évident, il tombe sous le sens commun que la dernière chose qu'une entreprise qui dépend d'un seul client veut faire, c'est compliquer ses relations avec ce client. Elle veut certainement éviter de troubler cette relation, éviter de se placer dans une situation de conflit. Il a donc dû y avoir quelque chose d'extrêmement sérieux pour que des entreprises qui dépendent aussi exclusivement et aussi lourdement d'un seul client aillent jusqu'au point de demander une commission parlementaire. Dans la tenue même de cette commission parlementaire, il y a là un symbole, un symptôme d'un malaise profond, d'un malaise dont il faut absolument connaître la cause.

Les griefs que nos membres avaient vis-à-vis d'Hydro-Québec, d'ailleurs dans une disproportion écrasante avec Hydro-Québec, ont même atteint un tel niveau qu'ils ont cherché, avant même d'avoir la promesse qu'une commission parlementaire soit tenue, à invoquer l'intervention des tribunaux.

Je dois vous dire, puisque ceci peut être utile pour permettre un débat libre et ouvert, que l'association s'est désistée de cette action, sous réserve, bien sûr, de ses droits, de manière que personne ne puisse invoquer l'existence d'un litige devant les tribunaux pour limiter de quelque façon que ce soit la nature des réponses à fournir devant vous.

Question pertinente pour l'Assemblée nationale: l'aspect particulier de la politique d'achat d'Hydro-Québec. Encore là, le ministre y a fait allusion dans ses remarques préliminaires, depuis 1964 au moins, Hydro-Québec a appliqué une telle politique d'achat et en a même fait à certaines périodes un élément important du rôle qu'elle s'attribuait et que, d'ailleurs, tout le monde lui reconnaissait comme un agent important du développement économique» De ce côté, un bilan serait certainement intéressant. Il est clair que, du côté de l'achat de biens, par l'octroi d'une marge préférentielle, HydroQuébec n'a probablement pas obtenu des résultats autres que douteux. Cependant, comme le ministre l'a souligné, du côté de l'achat de services, il y a eu des résultats intéressants.

Cependant, les exemples que l'on cite, les exemples que le ministre lui-même a cités, sont des résultats dans le domaine de la grande entreprise et il semble qu'effectivement Hydro-Québec ait eu beaucoup de succès et qu'elle en ait encore dans ses relations avec de grandes entreprises d'une taille qui, d'une façon ou d'une autre, est comparable à la sienne. Cependant - et c'est la question que nous voulons soulever aujourd'hui - comment se comporte Hydro-Québec dans ses relations avec la petite et la moyenne entreprises?

On peut tirer beaucoup de leçons de l'expérience passée. II est beaucoup plus important, pour le succès d'une politique d'achat de services et la création d'entreprises reliées à Hydro-Québec, de maintenir un environnement stable, un environnement prévisible, selon des règles du jeu qui sont connues, d'avoir des relations qui sont harmonieuses et qui ne créent pas, plus qu'il n'est absolument inévitable, des incertitudes, des frictions. (10 h 45)

Or, on se rend compte que, pour ce qui est des monteurs de lignes à contrat, ces conditions de stabilité, de prévisibilité, de confiance mutuelle sont désormais absentes. Encore une fois, la tenue même de cette commission parlementaire le montre. Donc, il s'agit déjà d'un échec qui est indéniable.

Il y a eu des décennies de services fidèles et apparemment satisfaisants et appréciés de la part des entrepreneurs privés dans le domaine de la distribution. Cependant, sont apparues des règles arbitraires décidées par Hydro-Québec sous la pression de tierces parties, donc, des règles subjectives et appliquées - du moins, c'est notre conviction - de manière passablement vexatoire.

Dans ce dossier, en résumé, HydroQuébec ne s'est pas comportée comme une entreprise publique de grande taille,

consciente de ses responsabilités, entre autres, celle de vivre dans un état de symbiose et de collaboration avec les PME qui sont complémentaires à son rôle.

Les monteurs de lignes à contrat - je le dis avec autant de force que j'en suis capable - ne demandent pas de préférence, ne demandent pas d'être traités de manière privilégiée. Ils sont prêts à donner un service de qualité au meilleur coût et à vivre ou à périr en fonction de ce critère-là.

J'aimerais utiliser, M. le Président, avec votre permission, les quelques minutes qui nous restent pour examiner avec vous à vol d'oiseau la position d'Hydro-Québec telle qu'elle est reflétée dans son mémoire.

Cette position se résume à quatre propositions qui manifestement sont bien en deçà des exigences minimales d'une réponse articulée aux griefs qui sont présentés par l'association. En premier lieu, Hydro-Québec, dans son mémoire, nous dit que la sous-traitance a été importante historiquement dans l'ensemble des activités d'Hydro-Québec. Personne ne le nie, mais ce n'est pas une réponse adéquate au grief particulier qui est soumis par notre association.

On semble, dans ce mémoire d'Hydro-Québec, presque faire reproche aux entrepreneurs privés de leur cupidité. On semble suggérer qu'avec 700 000 000 $ consacrés aux lignes de transport, avec 200 000 000 $ de travaux pour les postes, avec les 7400 personnes-année que tous ces travaux ont impliquées relativement aux grands travaux de la Baie James, ils devraient être satisfaits, ils devraient être contents et ils ne devraient pas avoir l'audace de s'en plaindre.

Malheureusement, ceux qui ont bénéficié de ces travaux ne sont pas principalement les membres de notre association. Ce n'est donc pas une réponse adéquate à leur faire que de leur opposer l'importance de ces travaux.

Les décisions, de toute manière, qui ont été prises de ce côté-là, il faut présumer qu'elles ont été prises dans les meilleurs intérêts d'Hydro-Québec. Donc, il ne s'agissait pas d'une faveur; il s'agissait d'une politique qui était adoptée pour des raisons qui n'ont rien à voir avec leur grief actuel. Ce n'est pas pertinent au litige actuel vis-à-vis de la distribution. On observe dans les chiffres mêmes d'Hydro-Québec qu'un pourcentage extrêmement faible - de 5 % à 35 % au maximum - des travaux a été confié à l'externe. Pourquoi un si faible pourcentage? Le mémoire d'Hydro-Québec est silencieux là-dessus.

Deuxièmement, Hydro-Québec dit essentiellement que la réduction dans les travaux de sous-traitance est attribuable à la baisse des besoins. C'est le résultat, en quelque sorte, mécanique de l'évolution des circonstances. Cela ne reflète pas une décision de la part des autorités d'Hydro-Québec.

Eh bien, encore une fois, cette affirmation peut être vraie, en général, pour l'ensemble des travaux d'Hydro-Québec. Tout le monde est conscient qu'on ne construit pas la Baie James à tous les ans. Il reste que ce n'est pas du tout évident, du côté des travaux de distribution. Il y a, dans le mémoire d'Hydro-Québec, une invitation aux membres de notre association à se diversifier. C'est une affirmation qui peut être valable lorsqu'on transige avec de grandes entreprises, mais, lorsque l'on transige avec des PME, comme c'est essentiellement le cas ici, c'est une suggestion qui est presque insultante. Il n'y a pas de pertinence, là non plus, entre les arguments invoqués par Hydro-Québec et le grief particulier et précis soulevé par l'association.

En troisième lieu, Hydro-Québec prétend ne pas avoir modifié sa politique de sous-traitance, qu'elle a toujours eu la même attitude et que notre association se plaint donc sans justification. Pourtant, dans le mémoire même d'Hydro-Québec, on trouve une affirmation factuelle dans le sens que, depuis 1978, du côté des activités de production, il y a effectivement eu des changements de politique. Il y a une politique différente relativement à la distribution et aux autres secteurs d'activités d'Hydro-Québec. Pourquoi cette différence"? Nulle part dans le mémoire ne trouve-t-on une explication raisonnée de la différence entre le pourcentage de 100 % des travaux dans certains secteurs et le pourcentage extrêmement faible, que j'ai cité tout à l'heure, applicable aux activités de distribution. S'il y a des raisons et si ces raisons sont rationnelles, si elles sont reliées aux objectifs de l'entreprise, pourquoi ne pas en avoir fait état et les soumettre à votre attention?

De toute façon, si l'on accepte l'hypothèse d'Hydro-Québec à savoir qu'il n'y a pas eu effectivement de changements de politiques, pourquoi alors convenir avec le syndicat d'insérer des dispositions nouvelles et sans précédent dans les conventions collectives? C'est donc qu'il y a eu modifications des politiques.

Un quatrième et dernier point, M. le Président, va dans le sens qu'Hydro-Québec allègue qu'elle est préoccupée par la productivité, par l'amélioration générale de cette productivité. C'est un fait que sa productivité s'est améliorée, mais, encore une fois et quels que soient les progrès qui restent encore à faire au plan général, du côté de la distribution, on semble exclure les préoccupations de productivité. Pourtant, notre association a fourni non pas une démonstration car ce n'était pas à notre portée, mais des indications sérieuses qu'il y

avait un écart important de productivité et que, si Hydro-Québec se préoccupe de productivité, elle aurait dû répondre spécifiquement aux arguments, aux débuts de preuve, aux indications sérieuses qu'il y a là un problème important et, plus important, que son non-recours à la sous-traitance constitue une dérogation par rapport au principe qu'elle proclame de rechercher une meilleure productivité.

On allègue, pour écarter les éléments que nous avons évoqués, que la nature des travaux est différente. C'est une affirmation gratuite qui n'est en aucun cas justifiée. Je crois qu'il y a un fardeau de la preuve de ce côté-là qui n'a pas été relevé par HydroQuébec. On semble contredire le principe général énoncé dans l'introduction du rapport d'Hydro-Québec que l'on veut rechercher de toutes les façons possibles une amélioration de la productivité. Quand on voit un cas précis où une telle possibilité est soulevée, on semble du côté d'Hydro-Québec s'en désintéresser.

Encore une fois, nous n'avons pas de réponse à nos questions. Vous n'avez pas non plus, comme membres de la commission parlementaire, à notre avis, une réponse satisfaisante au grief présenté et à la question que nous avons posée.

M. le Président, je crois que vous m'avez fait signe et je dois donc m'arrêter ici. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Forget. M. le ministre, en vous rappelant, ainsi qu'à tous les membres de la commission parlementaire et à nos invités, qu'il nous reste encore une heure et dix minutes de séance et que plus les questions et les réponses seront concises, plus de députés et de membres de la commission pourront participer à l'exercice. M. le ministre.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je veux remercier les représentants de l'association pour leur exposé. Si vous le voulez, j'aimerais reprendre brièvement les principaux points de votre mémoire, car vous nous citez certains chiffres. Je veux m'assurer que nous comprenons bien la position de votre association vis-à-vis de la sous-traitance.

La raison fondamentale de votre insatisfaction envers Hydro-Québec dans ce dossier est le refus de cette dernière de revoir son intention de réduire son recours à l'externe pour exécuter des travaux sur les lignes de distribution. Vous dites: Tel que spécifié dans la dernière convention collective de travail entre Hydro-Québec et le Syndicat des employés de métiers d'Hydro-Québec, le nombre maximal de personnes-année, pour les contrats concernant Ies monteurs de lignes, passera de 1000 personnes-année à 500 personnes-année en 1988. Cette clause découle d'une modification de l'attitude d'Hydro-Québec au sujet de la sous-traitance. Hydro-Québec rapatrie à l'interne des travaux que vous effectuiez auparavant.

Cette décision vous incommode à deux points de vue: D'une part, plusieurs de vos travailleurs se retrouveront au chômage; d'autre part, les entrepreneurs ont investi dans de l'équipement qui sera mis au rancart. Une telle situation vous est d'autant plus difficile à accepter qu'Hydro-Québec, de son côté, s'est mise à acheter des équipements semblables aux vôtres et engage de nouveaux monteurs de lignes, d'après les représentations incluses dans votre mémoire.

En conséquence, pour vous, la décision d'Hydro-Québec n'est pas la résultante d'une diminution des travaux sur les lignes de distribution. Vous craignez même qu'Hydro-Québec n'en arrive à cesser totalement son recours à l'externe pour ce genre de travaux. Pour vous, le comportement d'Hydro-Québec dans ce dossier est dicté par les syndicats internes et non pas par des principes de saine gestion. En effet, Hydro-Québec a besoin des sous-traitants pour l'aider en cas d'urgence. Or, d'après vous, vous ne pouvez être présents en cas d'urgence si vous n'avez pas un minimum de travail régulier pour assurer cette présence, et la majorité de vos contrats sont octroyés par Hydro-Québec.

D'autre part, selon votre mémoire, sur la question des coûts, vous êtes très concurrentiels. En conséquence, l'utilisation de vos services sur une base permanente signifierait des économies de coûts significatives pour l'entreprise; consommateurs et contribuables en bénéficieraient.

Êtes-vous d'accord avec ce petit résumé, cette description d'une partie de votre position?

M. Forget (Claude): Tout à fait, M. le ministre. Il y a deux dimensions; la première est la qualité du service. Nous prétendons que les membres de notre association sont plus en mesure que les employés internes d'Hydro-Québec de contribuer, par exemple, à la solution rapide de pannes dans les cas de force majeure où un événement fortuit intervient, comme on en a fait l'expérience presque tous les hivers et même l'été dernier. La disponibilité des équipes des entrepreneurs privés est un élément important des avantages qu'ils font valoir. Us ont, dans le passé, été en mesure d'intervenir rapidement et, si on continue d'avoir recours à leurs services, ils permettront à Hydro-Québec de maintenir, sur le plan de la réparation des pannes, un délai de réponse extrêmement court. Cela suppose, bien sûr, qu'on ne fait pas appel à eux seulement dans les cas de pannes puisqu'il est difficile de maintenir une

entreprise seulement lorsqu'il y a du verglas en janvier ou une inondation en juillet. Cela suppose un niveau minimum de services réguliers et une disponibilité constante.

Le deuxième élément auquel vous avez fait allusion, ce sont, bien sûr, les études et les affirmations d'Hydro-Québec, dans bien des cas, selon lesquelles il y a une différence de coûts significative. Plusieurs pourcentages ont été cités; ils sont repris dans notre mémoire. Les données que nous avons colligées, si elles n'indiquent pas une différence importante d'efficacité entre l'interne et l'externe, du moins, créent un doute sérieux que nous ne sommes pas en mesure de résoudre puisque nous n'avons pas accès aux données détaillées d'Hdro-Québec, bien évidemment. Mais, nous estimons qu'il y a là, pour Hydro-Québec, un fardeau de la preuve à relever qui devrait démontrer à la commission parlementaire et à l'opinion publique que ce doute sérieux, après étude, ne doit pas être retenu.

Au contraire, ils disent: On compare des pommes et des oranges, mais ils n'en fournissent aucunement la preuve. La différence est de l'ordre de 65 %, selon nous. Peut-être arriverait-on, avec une étude détaillée, à un autre pourcentage. Le point principal n'est pas là; il y a un fardeau de la preuve, il y a une présomption qu'il y a là un problème et on aimerait que quelqu'un l'examine de façon objective et approfondie.

M. Ciaccia: Lors de la commission parlementaire du 4 mars dernier, Hydro-Québec a effectivement affirmé que sa politique de sous-traitance est basée sur la répartition suivante des travaux. Règle générale, les contrats de construction sont octroyés aux entrepreneurs du secteur privé et l'entretien aux travailleurs internes. Dans le cas des travaux sur les lignes de distribution, vos propos indiquent que cette répartition des tâches ne s'applique pas de façon aussi tranchée. (11 heures)

J'aimerais que vous expliquiez davantage aux membres de cette commission le type de travaux qu'Hydro-Québec avait l'habitude de vous confier. Êtes-vous capable de nous dire quel pourcentage des travaux s'associait à la construction et lequel à l'entretien? Y a-t-il eu évolution dans cette répartition des tâches et est-ce que l'attitude d'Hydro-Québec a été constante dans le temps?

M. Forget (Claude): D'abord, M- le ministre, un signe extérieur qu'à l'intérieur même d'Hydro-Québec ces règles font l'objet d'un certain flottement et d'un flottement qui est progressivement interprété au désavantage des gens de l'extérieur, des entrepreneurs, c'est qu'il y a eu au cours des derniers mois, en 1986 et en 1987 - notre mémoire en fait état et je n'entrerai pas dans les détails - des contrats sans préciser si c'était de la construction ou de l'entretien, puisque, justement, il y a une zone grise, des contrats que la direction d'Hydro-Québec semblait considérer comme des contrats admissibles pour des entrepreneurs privés et, apparemment, à la suite de pressions du syndicat interne, ayant accordé ces contrats les a retirés, les a annulés ou abrégés; on a un certain nombre de données dans le mémoire qui l'indiquent. Donc, il y a un flottement à l'intérieur d'Hydro-Québec quant à la façon dont on applique cette distinction et c'est un flottement qu'on interprète de plus en plus de manière à exclure les entrepreneurs privés. Quant à vous dire comment on pourrait définir cela, il y a dans le mémoire d'Hydro-Québec, relativement à une autre catégorie de travaux, une énumération de différentes Glasses d'activité qui peuvent être rangées dans une catégorie ou une autre et on se rend compte à la lecture de cette énumération qu'il y a certains travaux, même avec cette définition, qui demeurent extrêmement difficiles à catégoriser. Par exemple, le remplacement d'un équipement ancien et endommagé par un équipement moderne reflétant une nouvelle technologie, dans quelle mesure est-ce de la construction ou de l'entretien? On se rend compte tout de suite qu'il y a place pour énormément d'interprétations subjectives et on pourrait, bien sûr, si on avait l'occasion ou si on y était invité, arriver avec notre propre définitition, ce qu'on n'a pas fait jusqu'à maintenant. Mais il est clair qu'il est probablement possible d'en arriver à une définition, pourvu qu'on ait l'assurance que cette définition sera appliquée de bonne foi, sans pressions indues pour faire pencher la balance d'un seul côté.

M. Ciaccia: Prenons un exemple spécifique dont vous pourriez peut-être nous parler un peu, nous donner plus de détails, le remplacement des disjoncteurs; c'est un élément de votre mémoire... Est-ce un travail d'entretien et est-ce un exemple type du travail que vous faisiez et qui sera dorénavant fait par les employés d'Hydro-Québec?

M. Forget (Claude): Pour ne pas dépasser mon seuil d'incompétence, M. le ministre, je vais demander à mes collègues à la table, peut-être à M. Richard, de répondre.

M. Richard (Gabriel): Oui. Le remplacement de disjoncteurs...

M. Ciaccia: Je suis heureux de voir que vous appliquez le "Peter Principle".

M. Forget (Claude): Exactement! M. Ciaccia: Ha! Ha! Ha!

M. Richard (Gabriel): Le remplacement de disjoncteurs pour fournir le même service est un travail d'entretien.

M. Ciaccia: Excusez-moi.

M. Richard (Gabriel): Le remplacement de disjoncteurs par des disjoncteurs semblables pour fournir le même service est un travail qu'on peut qualifier de travail d'entretien.

M. Ciaccia: Est-ce que c'est un travail qui n'est plus considéré comme de l'entretien? Est-ce que cela a été changé?

M. Richard (Gabriel): Non, le travail n'a pas été changé comme tel.

M. Roux (Pierre): ...du travail comme tel a été changé.

M. Ciaccia: C'est cela que je veux dire. Je ne parle pas du travail comme tel, mais est-ce que dans la qualification, d'Hydro-Québec vous faisiez ce travail auparavant et maintenant, avec la nouvelle convention, vous ne le faites plus? Est-ce que c'est un exemple?

M. Roux: Je peux vous dire que, présentement, on n'en fait presque plus sinon pas du tout et qu'auparavant on les faisait tous, tous les travaux de disjoncteurs.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre?

M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Oui, M. le Président. En partant de l'idée, on s'entend bien avec le ministre, on fait chacun le bout qu'on a envie de faire et on revient par alternance dans la mesure où il reste du temps...

M. Ciaccia: C'est cela.

M. Gauthier: D'accord. M. le Président, j'aimerais d'abord remercier nos invités d'avoir présenté leur mémoire et j'aimerais leur demander de brosser un tableau bien clair de la situation. Il y a beaucoup de gens qui s'intéressent à cela et qui ne sont pas tous des experts. Je voudrais savoir quelle est la situation actuelle relativement au nombre d'entrepreneurs qui sont touchés par le sujet dont on discute aujourd'hui et quel est l'impact actuel sur l'emploi des travailleurs. Combien y a-t-il de travailleurs à votre emploi ou qui étaient à votre emploi il y a deux ans et qui ne sont plus à votre emploi vu les nouvelles dispositions de la convention collective et la nouvelle façon, surtout, qu'a Hydro-Québec d'interpréter ces choses? Pourriez-vous nous dire ça bien clairement?

M. Forget (Claude): Le nombre d'emplois en jeu, strictement des emplois des entrepreneurs sans toucher aux emplois qui, indirectement, peuvent être affectés par ça -donc, c'est une estimation minimaie - le nombre d'emplois en jeu est de 500. Depuis l'application du programme PAQS jusqu'en 1988, il était prévu que les entrepreneurs privés fonctionnaient, quoique ce ne soit pas nécessairement le cas en réalité, à un plafond maximum de 1000 hommes-années. Avec l'application des dispositions prévues à la convention collective, à compter de 1988, ce total serait réduit de moitié- Donc, de 1000 à 500. C'est ce dont on parle. Ce sont 500 emplois.

Comme nous attirons l'attention dans notre mémoire, il s'agit de 500 employés des entrepreneurs privés dont une bonne partie sont des travailleurs qui sont à l'emploi de ces entreprises depuis un bon nombre d'années. Ce que l'on observe à cause de l'application de cette règle ou ce qu'on risque d'observer à cause de l'application de cette règle, c'est la mise à pied par les entrepreneurs privés, si ça va aussi loin que cela, et si certaines d'entre elles, à plus forte raison, sont forcées de fermer parce qu'elles n'atteignent plus de seuil de rentabilité, on est devant la perspective du renvoi de travailleurs de plus de 40 ans avec plusieurs années d'expérience alors qu'au, même moment Hydro-Québec engage de jeunes employés qui, normalement, n'est-ce pas, ne devraient pas avoir la préférence.

Si cette politique de substitution, à supposer même qu'on en accepte le mérite, s'appliquait normalement, le moins qu'on aurait pu espérer, et je parle là dans la perspective des employés eux-mêmes, c'est qu'Hydro-Québec engage, dans le fond, les employés mis à pied par les entrepreneurs privés. Ce n'est pas du tout ce à quoi on peut s'attendre dans les circonstances et le renvoi de travailleurs expérimentés et parfois âgés de plus de 40 ou 45 ans et leur remplacement par de jeunes travailleurs qui sont nouveaux venus dans l'industrie, il me semble que simplement sur ce plan, cette politique a un aspect social assez peu acceptable.

M. Gauthier: Oui, je vous remercie. Vous portez un jugement assez sévère quant à l'efficacité des employés, des services internes d'Hydro-Québec par rapport à vos propres services, par rapport aux gens qui travaillent pour vos entreprises. Vous dites avoir fait une étude qui révélait une différence dans l'efficacité assez impressionnante que je n'ose mentionner.

Pourriez-vous nous indiquer à partir de quelle méthode, avec quelle méthodologie avez-vous pu établir un taux aussi énorme dans l'efficacité de vos employés par rapport à ceux d'Hydro-Québec?

M. Forget (Claude): Nous pourrions faire circuler auprès des membres de la commission qui s'y intéressent la source, l'étude de base qui a servi à faire ces affirmations. C'est un travail qui est paradoxal dans un certain sens puisque l'on parle d'une entreprise publique. Malheureusement, la transparence du fonctionnement d'Hydro-Québec relativement à l'utilisation de son personnel n'est pas parfaite. Donc, il n'y avait aucun moyen direct de connaître, de la part d'Hydro-Québec elle-même, comment elle utilisait son personnel. Les membres de l'association ont donc résolu de faire faire une enquête à leurs frais pour examiner le comportement des équipes de travail d'Hydro-Québec et de les comparer au comportement d'équipes de travail des entrepreneurs privés.

Encore une fois, nous pourrons faire circuler cette étude. C'est un travail simplement d'observation fait par une entreprise professionnelle en la matière et où l'on a calculé essentiellement les heures passées au travail, d'une part, et les heures passées en dehors du travail. Je souligne ici que les heures définies comme étant passées au travail incluent les périodes de déplacement vers le travail ou au retour du travail. Donc, tout ce qui était des heures travaillées par opposition à des heures non travaillées, utilisées pour les périodes de repas, les périodes de repos, etc. L'observation qui a été faite par cette enquête, c'est qu'il y avait une différence marquée; environ un peu plus de sept heures étaient effectivement travaillées, c'est-à-dire soit au travail ou en transport par les équipes privées et environ quatre heures seulement par les équipes d'Hydro-Québec. C'est donc là une différence très marquée.

Dans la production du pourcentage de 65 %, comme c'est indiqué en annexe au mémoire, ont été ignorées les observations relatives à une équipe d'Hydro-Québec qui n'a pas travaillé du tout pendant une journée, c'était considéré comme un cas extrême qui a été exclu; également, ont été éliminées toutes les observations portant sur une partie seulement de la journée plutôt que sur l'ensemble de la journée. C'est à partir de la comparaison des moyennes d'Hydro-Québec et de celles de l'entreprise privée que l'on obtient la différence de 65 %.

Remarquez, M. le député, que nous ne faisons aucune affirmation basée sur le caractère scientifique de cette observation. Tout ce que nous disons, c'est qu'à supposer qu'il s'agisse là d'un échantillon qui ne soit pas trop biaisé - cela n'a pas été fait, il n'y avait aucune intention de choisir les pires équipes, etc., cela a été fait au hasard, mais, malgré tout, ce n'est pas un échantillon scientifique - il y a au moins une indication sérieuse qu'il y a un écart de l'ordre de 65 %.

Il est bien sûr qu'une entreprise spécialisée dans l'étude du travail, qui pourrait avoir accès, chronomètre en main, aux équipes de travail des deux côtés et observer ce travail, pourrait arriver à un total différent. Nous croyons que, puisque c'est la meilleure preuve que nous pouvons avancer, qu'il existe effectivement une différence de productivité, nous avions le devoir de la présenter pour au moins dire: II y a un doute sérieux, il y a un doute documenté. Si on a des hésitations quant à son caractère scientifique ou sa fiabilité, libre à Hydro-Québec de commander une étude et d'en faire part à la commission parlementaire. Mais, ce n'est pas suffisant de nous dire: Ces chiffres, ce n'est pas une étude scientifique, c'est tout ce que l'on pouvait faire avec les ressources limitées. N'oublions pas, nous avons douze PME face à un géant. Comment est-ce que l'on peut comparer nos capacités de produire des preuves à la capacité d'Hydro-Québec d'y répondre? Malgré tout, à notre grand désarroi, Hydro-Québec n'y répond même pas.

M. Gauthier: Est-ce que cela va, M. le Président? À la page 15 de votre mémoire, on dit et je cite: "Si on considère le cas de sociétés hydroélectriques des autres provinces du Canada, il nous est dit qu'il n'y a aucune hausse dans l'utilisation d'équipes internes en matière de construction et d'entretien de réseaux de distribution électrique." Puisque vous avez très certainement fouillé un peu plus la question, surtout sur ce qui se faisait ailleurs, est-ce que vous avez des chiffres quant à une proportion de travaux qui pourrait exister ailleurs, principalement en Ontario, par rapport à ce qui se fait au Québec? Est-ce qu'Hydro-Québec concède davantage de contrats à des entreprises privées que d'autres sociétés moins importantes, soit, mais du même type ailleurs? Avez-vous des données là-dessus?

M. Forget (Claude): Nous avons des données où certainement nous avons effectué des sondages auprès d'autres entreprises dans le domaine des utilités publiques au Québec, au Canada et aux États-Unis et les observations que nous avons faites à ce sujet sont consignées dans notre rapport. Il y a, effectivement, des indications dans le sens qu'il n'y a pas, dans la plupart des autres sociétés d'utilités publiques, un mouvement pour réduire la sous-traitance. Au contraire, dans la plupart, il y a une tendance inverse puisqu'on en réalise graduellement les

avantages.

Malheureusement, M. Le député, nous ne pouvons pas citer des chiffres précis étant donné la nature de ce travail. Nous ne sommes pas un tribunal, nous ne pouvons pas citer, par subpoena, des témoins d'autres entreprises et ils considèrent qu'il s'agit là de questions d'administration interne; ils ne sont pas prêts, évidemment, à déposer leurs chiffres sur la table. Les affirmations sont concordantes de la part de plusieurs sociétés d'utilités publiques aux Etats-Unis, dans d'autres provinces et au Québec. (11 h 15)

M. Gauthier: Pour avoir échangé avec certains membres de votre groupe, il est bien évident que vous soutenez que, si Hydro-Québec continue de mettre en application sa politique d'élimination de la sous-traitance, cela a déjà un impact sérieux quant à la qualité du service et que cela aura davantage un impact très négatif pour le consommateur maintenant et dans les années à venir, parce qu'il faut l'avoir présent en tête lorsqu'on discute de ces questions. Est-ce que vous avez des données sur cela? Pouvez-vous nous expliquer cette...

M. Forget (Claude): II y a eu, à Montréal, la célèbre tempête et inondation du 14 juillet. Il y avait en disponibilité, dans la région de Montréal, auprès des entrepreneurs privés, des équipes qui auraient pu se mettre immédiatement au travail. On a fait appel, je pense, à l'une ou deux d'entre elles, alors qu'on aurait pu faire appel à un plus grand nombre et donc, rétablir les services plus rapidement. Dans d'autres cas, je crois que c'est arrivé dans la région de Hull où il y a eu une interruption de courant, on a fait appel à des entrepreneurs privés, mais en attendant qu'arrivent des équipes d'Hydro-Québec qu'on a fait venir, je pense, de la région de Trois-Rivières. Quand ces équipes sont arrivées, on a dit tout simplement aux entrepreneurs privés: Bien, allez-vous-en chez vous, on n'a plus besoin de vous.

II est clair que, si l'on utilise les entrepreneurs privés seulement comme bouche-trous, de cette façon, il n'y a pas de justification économique pour maintenir des équipes en disponibilité pour des périodes de travail qui peuvent ne jamais se matérialiser ou, si elles se matérialisent, sont d'une durée telle que, finalement, il n'y a rien à y gagner. Je passe sous silence le fait qu'en appelant des équipes d'Hydro-Québec en dehors d'une région cela engendre évidemment des coûts additionnels de déplacements et de séjours pour ces équipes, alors que des équipes locales fournies par les entrepreneurs n'entraînent pas des coûts additionnels. Cela s'ajoute aux différences de productivité que nous alléguons et cela contribue encore plus à charger le dossier, si vous voulez, sur le plan strictement du coût et, bien sûr, sur le plan de la qualité, tous ces retards et tous ces délais. Éventuellement, la non disponibilité d'équipes privées, si on leur donne plus de travail à faire, va menacer la capacité d'Hydro-Québec de restaurer le service rapidement dans les cas de pannes.

II y a, d'ailleurs, des références précises dans notre mémoire, à la page 25 et à la page 28, relativement aux événements que je viens de relater. Dans certaines régions, vous avez une fréquence de pannes. Vous avez un document, en annexe au mémoire, qui indique que la fréquence des pannes - les données sont d'Hydro-Québec elle-même - n'a pas montré une amélioration spectaculaire, c'est le moins qu'on puisse dire, ou a même montré une aggravation au cours des dernières années. Ce n'est pas un problème qui est en train d'être résolu. C'est un problème qui, s'il y a quelque chose, s'aggrave. Il y a une augmentation de la fréquence des pannes de l'ordre de 26 % depuis quelques années. Ce n'est pas quelque chose qui est en train d'être réglé très gentiment par le recours exclusif aux équipes internes.

M. Gauthier: J'ai encore quelques questions à poser.

Le Président (M. Charbonneau): Allez-y!

M. Gauthier: Cela fait une douzaine de minutes, je pense.

Dans votre mémoire, voua énoncez le fait que des entrepreneurs ont dû faire l'acquisition d'équipements pour répondre à la demande consécutive au programme d'amélioration de la qualité du service. Le printemps dernier, quand des représentants d'Hydro-Québec se sont présentés en commission parlementaire, j'ai abordé le problème de la sous-traitance. J'ai demandé à Hydro-Québec: Écoutez, pourquoi les entrepreneurs privés commencent-ils à brasser la cage aussi fort? Qu'est-ce qui se produit? Ils m'ont dit que le programme d'amélioration de la qualité du service avait été mis en place pour maintenir un certain taux d'activités dans ce domaine, puisque la construction était au ralenti. Bref, que les grands projets ne fonctionnaient pas tellement fort, par les temps qui couraient, et que, ils ont offert aux entrepreneurs des travaux à faire dans différents coins du Québec, à partir de ce programme d'amélioration de la qualité du service, mais que des entrepreneurs se sont acheté de l'équipement - de ce que j'ai pu comprendre - de leur propre chef. Ils se sont très bien équipés pour répondre à la demande sans être très prévoyants et, maintenant, ils réclament de faire travailler ces équipements, ce personnel régulièrement. Quelle est

votre réaction à cela?

M. Forget (Claude): Je crois qu'il est normal que les entrepreneurs à qui on confie les contrats s'assurent qu'ils ont un équipement adéquat. S'ils n'avaient pas acheté d'équipement, on leur ferait le reproche d'avoir un équipement vétuste ou insuffisant. Ils ont donc acheté l'équipement nécessaire pour exécuter les travaux qu'Hydro-Québec leur demandait.

Le reste de l'argument laisse songer qu'on leur impute une espèce d'ingratitude. On dit que ces gens-là ont bénéficié des bonnes années et, maintenant qu'ils savent qu'il y a de mauvaises années, ils viennent se plaindre. Entre les lignes, on semble les taxer un peu d'enfantillage ou de se plaindre et d'être des enfanta gâtés. C'est plus sérieux que cela.

Il reste que, bien sûr, il y a une accélération. Il y a eu une accélération des travaux par le programme PAQS, mais songeons aux raisons qu'Hydro-Québec invoque elle-même pour justifier le programme PAQS. Elle nous dit que, de 1973 à 1984, il y avait 720 personnes-années du côté des entrepreneurs pour s'occuper des activités dans le domaine de la distribution. Malgré 720 personnes-années, on a accumulé un retard et on a voulu, à partir de 1983, combler le retard. Fort bien! On a donc comblé le retard de 1983 à 1988 - c'est un motif admirable - et, bien sûr, les membres de notre association ont, si vous voulez, profité, sur le plan des chiffres d'affaires, d'un accroissement d'activités.

Comment justifier qu'après avoir voulu combler un retard on veuille les retourner à un niveau inférieur au niveau d'emploi qui a permis justement d'accumuler un retard? Avec 720 personnes, de 1973 à 1984, on n'avait pas assez de gens pour faire le travail, on a voulu se rattraper pendant cinq ans pour combler cette erreur, et après, on leur dit: Vous allez retourner à un niveau qui est de 30 % inférieur à celui qui a généré un retard. Alors, de deux choses l'une: ou Hydro-Québec planifie un autre retard et, en 1992, elle va arriver en disant qu'il faut un programme PAQS numéro 2 ou alors, elle change les règles du jeu et dit: On n'a plus besoin de vous et utilise le prétexte du rattrapage de 1983 à 1988 pour changer les règles du jeu et, comble d'ironie, blâmer les entrepreneurs en disant que c'est leur faute. Il nous semble que c'est, comme on dit en anglais: "Add insult to injury".

M. Gauthier: Merci, M. le Président. C'est tout pour l'instant.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. Il y a une chose qui nous frappe drôlement dans votre mémoire lorsque vous nous dites que, à la suite d'une enquête, même si elle n'est pas vraiment scientifique, comme vous l'avez dit, on démontre un taux d'inefficacité de 65 %. Si on se base là-dessus, on pourrait dire que les monteurs d'Hydro-Québec sont efficaces à 35 % et que cela coûte finalement aux Québécois, 39 200 000 $ sur leur facture d'électricité. Votre argumentation est-elle assez solide pour démontrer que c'est une tendance générale ou si ce sont simplement des cas particuliers donnés par votre maison d'enquête? Le public québécois est-il en mesure de prendre cela au sérieux, oui ou non?

M. Forget (Claude): J'ai indiqué, M. le député, toutes les précautions qu'il fallait prendre vis-à-vis de ces chiffres. Nous n'avons pas accès aux données d'Hydro-Québec et nous ne sommes pas en mesure de suivre, chronomètre en main, les activités d'Hydro-Québec, nous ne pouvons nous baser que sur ce qui nous est accessible. Sur cette base, nous avons posé cette question et il y a un doute sérieux, je pense, qu'il n'est pas possible d'écarter du revers de la main, à moins de fournir une réponse sérieuse justement.

D'autre part, la deuxième réserve, notre objectif n'est évidemment pas de faire le procès de l'ensemble d'Hydro-Québec. Nous reconnaissons qu'il y a eu des efforts pour une amélioration de la productivité de façon générale. Ce qui semble s'être passé, c'est que cette question de la distribution n'était pas assez importante pour mériter la même qualité d'attention, de la part des dirigeants d'Hydro-Québec, que d'autres grands problèmes. C'est peut-être trop secondaire dans leur vision des choses pour qu'ils aient accordé la même attention que dans d'autres secteurs à l'amélioration de la productivité dans ce secteur. De toute façon, il ne nous appartient pas de poser un jugement sur l'ensemble d'Hydro-Québec. On n'a pas la compétence ni les ressources pour le faire. Dans le secteur qui nous intéresse, on s'est bornés à poser une question d'après les seuls chiffres qu'on avait. Il y a un grand point d'interrogation. Je pense qu'il ne nous appartient pas de trouver la réponse. Encore une fois, nous n'en avons pas les ressources. Il me semble que le fardeau de cette preuve revient à Hydro-Québec, sur ce point précis.

Même si ces gens ont amélioré leur efficacité de façon générale, je crois qu'ils n'ont pas démontré qu'ils l'avaient améliorée dans tous les cas et dans ce cas-là, en particulier.

M. Maltais: Mais vous conviendrez avec moi que le montant de 39 000 000 $ impressionne un peu, surtout sur la facture d'électricité des contribuables. Est-ce que les

sous-traitants ont la même feuille de route de travail que les employés d'Hydro-Québec?

M. Forget (Claude): Je m'excuse, mais pourriez-vous répéter la question?

M. Maltais: Est-ce que les employés des sous-traitants ont la même feuille de travail horaire que les autres, dans une journée? Est-ce que c'est selon le même principe ou si ce sont les contremaîtres des sous-traitants qui suivent pendant toute la journée les employés des sous-traitants?

M. Forget (Claude): Si je fais erreur dans ma réponse, je pense qu'on pourra compléter, mais je pense que ce sont les contremaîtres et Hydro-Québec qui surveillent les employés des sous-traitants. Ils ont essentiellement la même période de travail, mais pas tout à fait les mêmes conditions de travail. Comme vous le savez, les employés des sous-traitants sont soumis au régime du décret des travailleurs de la construction, alors que les employés d'Hydro-Québec ont leur propre convention collective et sont spécifiquement exemptés de l'application du décret de la construction. D'une façon générale, les régimes salariais et de travail des employés des entrepreneurs privés sont certainement comparables et même supérieurs, à certains égards, à ceux des employés d'Hydro-Québec. Mais ils sont sous la surveillance, à moins que je ne fasse erreur, des contremaîtres d'Hydro-Québec

M. Roux: Pour compléter, je pense que je pourrais ajouter que nos hommes sont payés temps fait, temps payé. Par exemple, si le contremaître d'Hydro-Québec voit, une journée, que nos gars n'ont travaillé que six heures, il signe une feuille de temps de six heures, nous payons nos gars pour six heures et nous faisons une facture de six heures à Hydro-Québec. C'est la même chose que pour les périodes de pluie: nos gars sont payés pour une heure de présentation au travail et pour trois heures, mais non pas pour la journée. Nous faisons une facture de quatre heures à Hydro-Québec, tel que spécifié dans l'entente.

Par contre, j'aimerais vous ramener à la page 6, afin d'apporter une petite précision sur ce qui a été dit tantôt. HydroQuébec porte la mention suivante quand elle fait des appels d'offres: "Services d'équipes de construction, d'entretien, de modifications du réseau". Je pense qu'on en viendra tantôt à une discussion sur la fameuse clause 34.03 qui définit ce que sont la distribution, l'entretien et la construction.

M. Maltais: Je vous remercie.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Je voudrais me permettre d'abord un commentaire, M. le Président, et finir par une question. Je ne crois pas qu'elle s'adressera aux porte-paroles de l'association, mais plutôt au ministre.

D'abord, vous me permettrez de vous dire qu'après 17 ans de syndicalisme j'ai toujours été malheureux de constater qu'une centrale syndicale maraudait l'autre. Donc, vous comprendrez que je suis encore plus malheureux de constater que deux syndicats affiliés à une même centrale cherchent à se manger l'un et l'autre. Je le dis en toute candeur. J'accepte plus ou moins cela. Je suis d'accord qu'un syndicat protège ses membres à tout prix, mais je ne suis pas d'accord qu'un syndicat tente d'aller chercher le gagne-pain d'un autre syndicat. Ceci dit, j'aurai des questions très précises à poser aux syndicats qui se présenteront devant nous. J'en aurai pour Hydro-Québec également, parce que le fruit de cette chicane est le résultat d'une convention collective, si j'ai bien compris le dossier, en vertu de l'article 34 de la convention d'Hydro-Québec.

Ce qui m'étonne, c'est le déroulement des négociations. Normalement, Hydro-Québec obtient ses mandats du Conseil du trésor. En tout cas, pour avoir été au gouvernement, Hydro-Québec devait présenter ses mandats au Conseil du trésor avant de présenter ses offres à ses employés, et le conseil était responsable de la négociation.

Ma question ne s'adressera pas à M. Forget ni à l'équipe qui est là, mais au ministre de l'Énergie et des Ressources. Est-ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources était au courant des offres qu'Hydro-Québec devait faire à ses syndicats? Si oui, a-t-il suivi le déroulement de ces négociations? Est-il intervenu auprès d'Hydro-Québec afin que les conventions collectives reflètent un peu l'esprit du gouvernement en ce qui concerne la privatisation et l'efficacité des travailleurs? (11 h 30)

Le Président (M. Charbonneau): L'objet de la commission étant une consultation particulière, M. le député de Joliette, je pense que le ministre est libre de répondre ou non. S'il le fait, il le fait sur votre temps.

M. Chevrette: Oui, d'accord.

Le Président (M. Charbonneau): Sauf qu'il n'est pas obligé de le faire à ce moment-ci.

M. Ciaccia: Je voudrais simplement porter à l'attention du député de Joliette le fait que la modification à la convention collective a été faite en 1984.

M. Chevrette: La dernière? D'accord.

M. Ciaccia: L'article 34 a été inclus en 1984 et c'est sur la base de cet article 34 qu'on...

M. Chevrette: M. le ministre, M. le Président, je pense que vous avez des coaches qui ne sont pas tout à fait à l'heure juste, parce que la dernière convention, telle que signée pour descendre à 500, c'est dans une fin de négociation qui n'en finissait plus. C'est votre gouvernement qui a signé la dernière entente, oui ou non?

M. Ciaccia: Écoutez, le programme PAQS a été fait en 1984. Quand cela a monté de 720 à 1000, c'était en 1984. Alors, je pense que vous devriez poser votre question au ministre de l'Énergie de 1984.

M. Chevrette: Mais celui de 1986-1987?

M. Ciaccia: Alors, si vous voulez, je pense qu'on va continuer avec nos invités.

M. Chevrette: M. le Président, dans ce cas-là, je m'en tiendrai au commentaire que ce sont bel et bien les députés du gouvernement actuel. Je comprends qu'ils ont hâte de commencer à gouverner; cela fait deux ans qu'ils sont là, mais ce sont eux qui ont signé la dernière convention, malgré les revendications, précisément, des groupes. Hydro-Québec était consciente des problèmes que cela apportait. Elle avait été alertée du fait que les jobs diminuaient pour les sous-traitants qui, soit dit en passant, donnent de l'ouvrage à la main-d'oeuvre régionale et, cela, j'y crois fondamentalement.

Il y a des gens qui m'ont écrit dans mon milieu, tous ceux qui travaillent pour Tucker, anciennement. Je ne me souviens pas de la nouvelle appellation. Ce sont des gens qui travaillent en régions, près de chez nous, et qui répondaient vite aux demandes, en plus de cela. Vous vous informerez du cas de Hull et vous verrez si on a répondu vite à la demande de réfection d'une panne qui a duré jusqu'à huit jours dans certains coins de la région de Hull.

Ceci dit, le gouvernement a sans doute une part de responsabilité, parce que c'est lui qui, en dernier ressort, accorde les mandats de négociation ultime. En cas de conflit, on sait ce qui se passe. Hydro est branchée directement sur le Trésor. Elle dit: Voici les trois points en litige. Qu'est-ce que le Conseil du trésor fait? Le ministre du Conseil du trésor convoque les responsables de la négociation, ses comités ministériels et il décide d'émettre des mandats. Donc, qu'on ne vienne pas me dire que seule Hydro-Québec... Je ne veux pas avoir à défendre Hydro-Québec; je lui poserai la question quand elle viendra. Mais j'aurais aimé que le ministre nous dise s'il était conscient, s'il était au courant du processus de négociations, de la façon que cela se déroulait, s'il a vu venir cela, s'il avait senti venir cela...

M. Ciaccia: M. le Président.

M. Chevrette: S'il ne veut pas répondre, je ne vois pas pourquoi il me couperait.

M. Ciaccia: Mais vous venez de poser une autre question et vous venez de faire d'autres affirmations que vous n'aviez pas faites avant.

Vous étiez membre du gouvernement. Vous savez comment le Conseil du trésor donne ses mandats. Les mandats du Conseil du trésor ne vont pas dans tous les détails, les moindres petits détails. Quand on se fait assurer par Hydro-Québec qu'il n'y a pas de changements dans ses politiques et que l'article 34 est là, le mandat a été respecté, le mandat, en général, a été respecté.

Pour Hydro-Québec, c'était une question de gestion interne, de la façon qu'ils négociaient sur l'article 34. Ils n'ont pas dérogé au mandat général et ce n'était pas inclus dans le mandat général qu'Hydro-Québec leur a donné. Vous devez savoir cela; vous étiez au Conseil du trésor. Vous devez savoir comment ces mandats sont donnés et comment les négociations se déroulent. Voyons!

M. Chevrette: Je suis assez au courant de la façon dont cela marchait pour vous dire que, quand une convention collective arrivait à échéance et qu'il y avait deux ou trois points d'accrochage, souvent, cela faisait même l'objet de discussions au Conseil des ministres, donc, non pas seulement au Conseil du trésor.

Qu'on ne vienne pas me dire que cela ne suivait pas un processus normal. Cela va même jusqu'au Conseil des ministres, quand il y a une grève appréhendée sur les contenus des mandats et c'est le Conseil du trésor, bien sûr, qui décide. Mais, souvent, c'est après avoir fait un tour de table au Conseil des ministres. Donc, le ministre peut bien se défiler devant la question. De toute façon, il refusait de répondre tantôt.

Ceci dit, M. le Président, j'aurais une seule question pour le groupe. Est-ce qu'Hydro-Québec vous a consulté comme groupe avant de signer la convention collective?

M. Forget (Claude): Non, il n'y a pas eu de consultation.

M. Chevrette: Est-ce qu'elle vous a mis au courant que c'était un point d'accrochage et qu'elle s'apprêtait à signer?

M. Roux: Non, sauf qu'on pourrait

ajouter à votre question, M. le député, que la fameuse clause 34.03 met des barrières un peu partout. On parle de distribution présentement, mais on peut dire que, dans les postes de transformation, on a beaucoup de problèmes; non seulement là, mais dans les lignes de transmission. Hydro-Québec dit qu'elle ne touche pas aux lignes de transmission, mais on a connu des exemples tout dernièrement où Hydro-Québec a fait le raccordement de sections de fil à la Baie James, dans le nord de Chibougamau et même à Trois-Rivières, sur un petit projet que notre compagnie avait, il y a quelques semaines.,

M. Chevrette: Est-ce que vous avez eu la chance de faire des représentations?

M. Roux: Pardon?

M. Chevrette: Est-ce que vous avez eu la chance de faire des représentations? Et cela remonte à quand?

M. Roux: Disons que ce dossier, on le brasse - si on peut appeler cela brasser -depuis un peu plus de deux ans. Pour en venir à cette commission parlementaire, je dois vous avouer en toute sincérité que c'est vrai qu'il a fallu brasser plusieurs personnes, poser plusieurs questions. Encore là, on attend après les résultats.

M. Chevrette: Est-ce que vous avez demandé à Hydro-Québec - ce sera ma dernière question - d'essayer de clarifier ce qu'était la construction, l'entretien et tout pour essayer de définir des champs d'action propres à chaque groupe?

M. Roux: Je suis certain que la question a été posée à Hydro-Québec. Je l'ai moi-même posée à M. Coulombe, il n'y a pas tellement longtemps, il y a peut-être deux ou trois semaines. Je pense qu'à l'intérieur même d'Hydro-Québec, entre les administrateurs d'Hydro-Québec et les représentants du syndicat, il y a un drôle de conflit à savoir, ce que veut dire construction, ce que veut dire entretien.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Vimont.

M. Théorêt: Merci, M. le Président. En fait, j'aurais deux questions à vous poser. Vous avez soulevé, dans votre mémoire, le problème de l'embauche des monteurs de lignes. Est-ce que vous considérez que le libellé actuel de l'article 34 constitue un changement d'attitude d'Hydro-Québec dans la sous-traitance? Les précisions apportées dans ce libellé, qu'est-ce que cela signifie pour vous?

M. Forget (Claude): Cela signifie, en clair, sans entrer dans les détails du libellé, un changement d'orientation au désavantage de la sous-traitance.

M. Théorêt: À la page 18 de votre mémoire, M. Forget9 vous faites état ques "...le coût de cette inefficacité relative des monteurs de lignes internes représente 13 % du bénéfice net de 1986" et qu'Hydro-Québec "a obtenu du gouvernement une augmentation générale des tarifs d'électricité de 4,6 % au 1er mai 1987..." Est-ce que, à votre avis, Hydro-Québec aurait pu éviter cette augmentation? Comment aurait-elle pu l'éviter?

M. Forget (Claude): M. le député, l'effort qui a été fait en citant ce pourcentage visait à le mettre en relation avec quelque chose d'autre. Quand on parle d'Hydro-Québec, on parle toujours de milliards de dollars; 39 000 000 $, c'est certainement important pour vous et moi, mais est-ce que c'est important pour HydroQuébec? Pour donner un ordre de grandeur de la signification ou de l'importance d'une dépense additionnelle de 39 000 000 $, nous faisons le rapprochement avec l'ensemble du surplus d'Hydro-Québec et aussi, bien sûr, de la majoration des tarifs.

Maintenant, je vais plaider un peu la même chose que tout à l'heure. Nous ne sommes vraiment pas en mesure de dire quelle aurait dû être la tarification d'Hydro-Québec si cette économie avait été réalisée. Il est certain que soit Hydro-Québec elle-même, soit l'actionnaire principal qui est l'ensemble de la population, soit les utilisateurs d'électricité, par le biais de la tarification, en auraient bénéficié. Ce montant ne se serait pas évanoui, il y a certainement quelqu'un qui en aurait bénéficié et cela aurait ouvert un certain nombre d'options: diminuer la majoration de tarifs, augmenter l'autofinancement, verser des dividendes additionnels au gouvernement, mais ce n'est pas un montant insignifiant, c'est une proportion significative du surplus.

M. Théorêt: Si je comprends bien, est-ce que vous nous dites que ces 39 000 000 $ auraient pu être appliqués à une réduction ou à l'élimination de l'augmentation des tarifs.

M. Forget (Claude): Cela aurait pu être utilisé ainsi.

M. Théorêt: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): M. le Président,

je tiens d'abord à apporter certains commentaires. Je trouve le mémoire très bien étoffé, mais je trouve un peu dommage qu'on se retrouve, le 27 octobre 1987, en commission parlementaire parce qu'une telle situation qui prévaut actuellement est due particulièrement au fait que le gouvernement n'a pas été clair jusqu'à maintenant et a laissé aller les choses. Vous avez vous-même mentionné, M. Forget, qu'il n'y a pas eu de changement de politique officiel, de la façon que je l'ai compris. Dans les autres mémoires dont on peut prendre connaissance, ceux qui viendront devant nous, il n'y a pas eu, effectivement, de changement de politique.

D'une part, Hydro-Québec s'en lave un peu les mains; d'autre part, de votre côté, vous avez un constat d'un changement important qui est en train de se faire et qui se traduit par des pertes d'emplois et par une douzaine de PME qui sont en danger. D'un autre côté, on a un gouvernement qui a une politique très claire, que vous mentionnez dans votre mémoire. Je cite particulièrement la page 13, concernant les grandes orientations sur la privatisation: "Le gouvernement reconnaît à l'entreprise privée le rôle prioritaire de la production commerciale de biens et services..." Le ministre nous a dit, ce matin, quelle était l'importance pour lui de la sous-traitance, pour autant qu'elle ne se faisait pas au prix de l'inefficacité. Du même souffle, vous nous démontrez que l'entreprise privée, par l'expérience passée, n'a pas été inefficace; au contraire, elle a été plus efficace.

À cet effet, votre annexe 5, si j'ai bien compris, est un document interne d'Hydro-Québec qui démontre très clairement, sur un dossier en particulier, l'écart important entre ce qu'on peut appeler "fait à l'interne" et "fait à l'externe" concernant le remplacement des disjoncteurs. Je pense que ce document interne d'Hydro-Québec, l'annexe 5, est une pièce à conviction fort importante tout comme l'annexe 6, le fameux montant de 39 000 000 $ qui aurait pu être économisé.

Face à cette situation, tout le monde semble tirer la couverture de son bord, mais je comprends très bien que vous ayez à vous défendre contre cette position. Dans un premier temps, depuis que vous avez porté cela à l'attention du gouvernement, particulièrement depuis la dernière année, j'aimerais savoir si les démarches que vous avez faites auprès d'Hydro-Québec ont été vaines. L'actionnaire principal d'Hydro-Québec étant le gouvernement du Québec et le ministre responsable, est-ce que vous avez porté vos revendications et votre démonstration, avant aujourd'hui, devant le ministre de l'Énergie et des Ressources, responsable d'Hydro-Québec, et quelle a été son attitude face à cette situation qui prévaut actuellement, qui s'aggrave et qui fait en sorte que, là aussi, ce n'est pas un statut particulier que vous réclamez, si j'ai bien compris? Vous réclamez tout simplement une espèce de droits acquis ou, on pourrait dire, une situation qui prévalait auparavant et qui, aujourd'hui, semble, par le cours des choses, vous glisser entre les mains. Est-ce que le ministre lui-même s'est mouillé? Est-ce que le ministre lui-même a donné des indications quant à ce qu'il avait l'intention de faire? D'après vous, est-ce que le gouvernement ne devrait pas, aujourd'hui, en commission parlementaire indiquer très clairement où il s'en va afin que celte situation qui est en train de devenir intenable pour vous autres se rétablisse et que vous puissiez savoir exactement où vous vous en allez?

M. Forget (Claude): M. le député, je crois que la tenue même aujourd'hui de cette commission parlementaire représente le fruit de démarches entreprises par l'association auprès du gouvernement et pour l'instant sa réponse est de confier à vous-même comme commission parlementaire l'étude des différents points de vue en présence, et nous souhaitons ardemment qu'il va se dégager de cela un consensus de la part de la commission qui va nous permettre d'espérer que le problème qu'on soumet à votre attention va recevoir une solution. Mais cette commission parlementaire représente une première réponse seulement, espérons-nous, au grief formulé par l'association auprès du gouvernement. (11 h 45)

M. Parent (Bertrand): Y a-t-il eu des rencontres antérieures avec le ministre ou avec d'autres ministres du gouvernement pour les sensibiliser à cette situation?

M. Forget (Claude): Comme je suis intervenu dans ce dossier seulement au moment où la décision de tenir la commission parlementaire a été prise, je pense que je référerais votre question à M. Roux, président de l'association.

M. Roux: Comme M. Forget le dit, si on en est rendu aujourd'hui à une commission parlementaire, c'est parce qu'il y a eu plusieurs rencontres, plusieurs demandes pour qu'une solution soit trouvée. Vous nous avez reportés à l'annexe 5, dans une lettre de correspondance interne, c'est certain qu'on l'avait remise à qui de droit. Vous parlez de l'annexe 6 également. Mais si on se reporte au mois de mars dernier, quand M. Coulombe a déposé en commission parlementaire ici ses budgets pour les faire accepter, il a dit à cette commission qu'il acceptait au départ qu'en distribution cela coûtait entre 15 % et 20 % plus cher quand c'était Hydro-Québec qui le faisait. Si on revient au mémoire

qu'Hydro-Québec a déposé la semaine passée ici et qui va être lu demain, M. Coulombe ne parle plus de 15 % à 20 %, mais de 10 %.

Nous autres, on croit que c'est beaucoup plus que cela. D'ailleurs, on vous l'a présenté dans notre mémoire ici aujourd'hui. Pour répondre à votre question comme telle, M. le député, on a fait beaucoup de pressions et on espère avoir les résultats espérés.,

M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le président.

Le Président (M. Charbonneau): Ça va? M. le député d'Iberville.

M. Tremblay (Iberville): M. le Président, j'ai une question qui s'adresse à l'association, évidemment. Ici, on fait référence - j'y reviens encore - au 14 juillet dernier à Montréal, alors que vous dites que de nombreux entrepreneurs de la région se sont déclarés prêts à mettre leur équipe à la disposition d'Hydro-Québec. En fait, seulement quelques-unes d'entre elles furent appelées. Finalement, après plusieurs heures, Hydro-Québec décide de faire appel aux entrepreneurs. Qu'est-ce qui fait qu'elle a attendu si longtemps? N'y avait-il pas de personnel? Que s'est-il passé pour qu'Hydro-Québec n'ait pas réagi plus vite que ça?

M. Forget (Claude): II faudrait d'abord poser la question à ces gens. Ils seraient mieux en mesure de répondre.

M. Tremblay (Iberville): Vous remettez toujours en question l'efficacité d'Hydro-Québec, alors, je vous pose la question. Vous dites que la situation est arrivée et qu'il s'est passé beaucoup d'heures. En dernier, on fait appel à l'entrepreneur. D'après vous, qu'est-ce qui pourrait être fait pour que cela aille plus vite à l'avenir?

M. Roux: Si vous allez à la page 26, à 4.2, c'est: La convention collective stipule que: "...dans le cas de pannes majeures, la direction pourra recourir à des effectifs à forfait lorsque les employés monteurs de distribution ne sont pas disponibles dans le secteur affecté ou dans les secteurs avoisinants." Cela veut dire qu'avant de faire appel à un entrepreneur il faut que les employés d'Hydro-Québec aient été appelés.

M. Tremblay (Iberville): Donc, actuellement, vous insinuez, vous pensez que la procédure qui fait qu'il faut faire appel au personnel a été tellement longue qu'il y a des heures qui s'écoulent avant de s'apercevoir qu'il n'y a pas le personnel nécessaire. Ensuite, ils font appel aux gens du secteur privé.

M. Roux: Je n'insinue rien, je dis que c'est cela qui est en application. On n'a qu'à retourner dans le secteur de Hull où, l'an passé, un entrepreneur avait 22 équipes de disponibles à faire feu en tout temps. Avant qu'on fasse appel à l'entrepreneur, cela a pris quelques jours parce qu'ils ont fait appel à tout le secteur des Laurentides pour trouver du monde d'Hydro-Québec pour aller réparer la panne-, Ils ont même débordé du secteur des Laurentides, ils sont allés dans le secteur de Montréal et peut-être un peu plus loin.

M. Tremblay (Iberville): Ah bon! Aussi, vous pariez du secteur de Trois-Rivières où il y a de 20 à 30 plaintes par année concernant des interruptions d'électricité. Qu'est-ce que vous suggérez pour améliorer cette situation? Est-ce que l'entreprise privée peut vraiment être plus efficace?

M. Roux: Possiblement la même formule qui existait avant 1984. Lorsqu'il y avait des pannes, les employés d'Hydro-Québec et les entrepreneurs étaient appelés en même temps afin que ce soit réparé le plus vite possible.

M. Tremblay (Iberville): Donc, vous dites qu'avant 1984, assurément...

M. Roux: En 1984 ou en 1982, le temps passe assez vite. Mais je sais que depuis que cette fameuse clause a été incluse dans le contrat, on ne fait plus appel aux entrepreneurs à moins d'extrême urgence et en dernier lieu.

M. Tremblay (Iberville): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: M. le Président, il me reste à peine une minute. D'une façon !a plus concise possible, vous nous avez établi une situation: de 1000 à 500, c'est ce que la convention collective ainsi que les politiques d'Hydro-Québec nous amènent à envisager pour les prochaines années, 720 personnes-années étant une phase où Hydro-Québec a pris du retard dans son réseau. Ce sont des chiffres intéressants qu'il faut mettre en perspective et sur lesquels on interrogera très certainement les autres groupes.

J'aimerais savoir, à court terme, compte tenu de ce qui existe actuellement, si vous avez des recommandations à nous faire avant qu'on se quitte afin qu'on puisse stabiliser la situation ou que l'on puisse s'assurer que les citoyens du Québec aient une bonne qualité de service, que les travailleurs d'Hydro-Québec soient protégés dans leur emploi, mais aussi que vos

membres, vos travailleurs puissent avoir droit à cette activité qui est la leur. Est-ce que vous ave2 des suggestions à nous faire en terminant?

M. Forget (Claude): M. le Président, M. le député, il y a plusieurs suggestions qu'il est possible de faire. Il est possible de faire des suggestions à très court terme. Je suggérerais, par exemple, des interprétations plus strictes de la clause 34.03, des directives en ce sens, revenir à la situation antérieure où les règles nouvelles n'étaient pas en vigueur, n'existaient pas; arrêter, par exemple, du côté d'Hydro-Québec, de s'équiper, d'acheter des camions, etc., alors que ces équipements existent déjà du côté des entrepreneurs privés; éliminer, s'il y en a - mais je crois qu'il y en a - des employés temporaires à Hydro-Québec dans le domaine de la distribution. Ce sont des solutions à très court terme.

À plus long terme, il faut se poser la question: Comment définir des règles du jeu plus équitables pour les entrepreneurs dans des domaines complémentaires aux activités d'Hydro-Québec? Pourquoi devrait-il y avoir des contingentements? Pourquoi devrait-il y avoir des règles arbitraires? Pourquoi la décision ne serait-elle pas prise en fonction des principes invoqués par Hydro-Québec elle-même? La qualité du service; des standards rigoureusement définis de qualité, de promptitude dans le service, de coût, etc.

Encore une fois, les membres de notre association ne demandent pas un tarif préférentiel. Ils ne demandent pas d'être avantagés. Ils demandent d'avoir une chance égale de participer aux activités d'Hydro-Québec. Ils ont prouvé dans le passé qu'ils étaient capables de le faire et de donner un service de qualité. On demande tout simplement d'être traités sur un pied d'égalité avec les employés internes d'Hydro-Québec et d'être soumis aux mêmes règles et exigences. Us sont confiants que, dans un contexte qui n'est pas biaisé au départ, leur avenir est plus qu'assuré.

Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le député de Vanier.

M. Lemieux: Merci, M. le Président. Est-ce qu'il y a consentement?

Le Président (M. Charbonneau): Je pense qu'il y a consentement, M. le député.

M. Lemieux: J'aimerais tout simplement revenir sur un aspect particulier dont M. le ministre a parlé tout à l'heure. Je pense que l'on s'entend tous sur la même chose. Lorsqu'il a parlé d'une gestion saine de l'organisation du travail chez Hydro-Québec, vous avez repris, M. Forget, en disant: Ce qui est important pour nous, c'est la qualité de gestion. On ne demande pas de préférence. On veut donner un service de qualité à meilleur coût. Dans un premier temps, j'aimerais aussi en arriver à ce que soulignait le député de Joliette lorsqu'il a fait état des problèmes syndicaux comme tels. À mon avis, ils sont précisément la clé de ce qui fait que nous sommes ici devant cette commission parlementaire.

Je veux simplement lui rappeler qu'à la page 1 du mémoire on lit, au deuxième paragraphe: "Le 29 juin 1984, Hydro-Québec et le syndicat de ses employés (section locale 1500) ont signé une entente dans le cadre d'un Programme d'amélioration de la qualité du service (PAQS), entente qui fut intégrée à la convention collective... 1986-1989."

J'aimerais vous ramener maintenant à la page 5 de votre mémoire. Je pose ma question, parce que vous savez que nous sommes limités dans le temps, et elle rejoint aussi celle du député d'Arthabaska qui n'aura peut-être pas le temps d'intervenir sur ce sujet. Au dernier paragraphe de la page 5, vous nous dites, à la quatrième ligne: "...à Hydro-Québec est le reflet d'un conflit d'intérêts flagrant, où l'égoïsme d'un syndicat et ses intérêts corporatifs l'emportent sur les principes généralement reconnus de l'ensemble du mouvement syndical auquel il appartient." Si vous allez à la page suivante, au bas, vous dites que pour "...les dirigeants d'Hydro-Québec, lors de la commission parlementaire de l'économie et du travail des 4 et 5 mars 1987, la philosophie est très claire (...) que les travaux de construction sont réservés à l'externe, les travaux d'entretien sont réservés à l'interne." Il semble que cela soit contraire à l'habitude. À la page 7, vous nous dites, au troisième paragraphe: "En fait, Hydro-Québec n'a pas de philosophie dans ce domaine. C'est le syndicat interne qui en a une: son objectif est clair; il réclame la disparition pure et simple de la sous-traitance." Dans un premier temps, ce que j'aimerais vous demander, c'est de donner des précisions sur ces aspects et, dans un deuxième temps, quelles sont les conséquences pour l'emploi en régions.

M. Forget (Claude): M. le député, je pense que nous avons fait abondamment dans le mémoire la démonstration que les conditions de travail des employés des entrepreneurs ne sont en rien inférieures aux conditions de travail des employés d'Hydro-Québec, avec une réserve, bien sûr, c'est que l'emploi des employés des entrepreneurs est soumis beaucoup plus que l'emploi des employés internes d'Hydro-Québec aux aléas des demandes qui viennent ou qui ne viennent pas de la part d'Hydro-Québec. Sous cette réserve, les conditions de travail, la qualité du travail sur le plan de la santé et

de Sa sécurité, l'ensemble des conditions de travail et des avantages sociaux sont tout à fait comparables. Il ne s'agit pas d'un conflit entre des employés syndiqués, d'une part, et du "cheap labor" non syndiqué, d'autre part; il ne s'agit pas de cela du tout.

Donc, l'élément de lutte syndicale classique où un syndicat essaie de préserver les acquis face à une concurrence qu'il peut juger déloyale n'est pas présent? loin de là-Ce devant quoi on est en présence, c'est une opposition d'intérêts entre deux syndicats, affiliés d'ailleurs à la même centrale et qui, dans l'application de leurs objectifs propres, se trouvent à produire une situation qui a été jugée - je pourrais citer la déclaration, mais je crois que vous l'avez probablement déjà observée - par la déclaration d'un chef syndical lui-même de politique antisociale. Pour la raison à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure, si jamais l'objectif syndical avait été de faire disparaître la sous-traitance et d'intégrer ces travailleurs, c'est justement par une intégration qu'on aurait procédé en fonction de l'ordre d'ancienneté relatif. Or, l'ancienneté se retrouve du côté des travailleurs privés, des travailleurs à contrat.

Donc, simplement sur le plan de la philosophie syndicale, l'application de cette règle aboutit à un non-sens. Ce n'est pas relié à l'amélioration des conditions de travail, ce n'est pas relié au respect des règles d'ancienneté; au contraire, cela contredit les deux principes. Il s'agit d'une pure querelle entre deux syndicats. Malheureusement, on a donné quasiment force de loi à la convention collective signée avec Hydro-Québec. C'est ce à quoi on fait allusion dans ce paragraphe. Il ne s'agit pas d'un débat idéologique, d'un débat social, d'un débat mettant en présence la question de savoir s'il faut être syndiqué ou non. Ce n'est pas cela du tout. La question est: Deux groupes en présence qui sont bien rémunérés n'ont-ils pas droit à des règles équitables, à des règles qui ne débalancent pas et ne préjugent pas de leurs capacités respectives à donner un bon service à la population? (12 heures)

M. Lemieux: Peut-on vous entendre sur l'emploi en régions, sur les conséquences de l'emploi en régions?

M. Forget (Claude): Certains députés ont déjà fait allusion à l'emploi en régions. Bien sûr, ces entreprises et les entreprises qui sont membres de l'association sont dispersées sur tout le territoire du Québec. Le fait de mettre en jeu non seulement leur volume de travail mais même leur existence peut avoir des conséquences déplorables, beaucoup plus déplorables que le nombre absolu d'emplois en jeu ne pourrait l'indiquer. C'est une dimension sur laquelle on n'a pas beaucoup insisté dans le mémoire, mais elle est très certainement présente. C'est une préoccupation des membres individuels qui représentent justement des entreprises dans des régions où, relativement parlant, elles jouent un rôle significatif comme employeurs.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, il vous reste cinq minutes.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Le député de Joliette a mentionné tantôt qu'il n'aimait pas les chicanes entre syndicats et que, nécessairement, pour éviter de prendre une position sur le fond de ce dont nous parlons, il lance la balle au ministre et il dit: C'est la faute du ministre parce qu'il savait, lui, qu'il y avait des mandats et il les a approuvés. Si la situation se trouve aujourd'hui telle qu'elle est, c'est la faute du gouvernement. C'est de bonne guerre d'essayer de faire ce genre de débat et d'essayer de se disculper des positions sur le fond. Originellement, dans mes remarques préliminaires, j'ai essayé de donner un peu l'orientation de notre gouvernement en ce qui concerne l'équilibre.

Pour répondre à la question du député de Joliette et pour rétablir les faits - pour ne pas se demander à chaque mémoire, si c'est la faute du gouvernement et qu'on ne discute pas du fond du problème - je voudrais seulement apporter les clarifications suivantes au député de Joliette et aux membres de la commission. Il y a eu une convention collective signée en 1984. Il y a eu une lettre d'entente, à ce moment, en ce sens que l'effectif pour la sous-traitance qui était de 720 monterait à 1000 pour le programme PAQS et serait réduit à 500. Cela s'est produit en 1984. C'est clair que les mandats qui ont été donnés en 1986 ou en 1987 devaient respecter la convention collective de 1984 et les ententes qui ont été prises. Alors, le gouvernement, en 1986, ne pouvait pas aller à l'encontre des ententes qui avaient déjà été prises. Je voudrais porter à l'attention de la commission parlementaire et du député de Joliette que, si nous nous trouvons, aujourd'hui, avec un maximum de 500 pour la sous-traitance et les problèmes que cela peut engendrer, c'est à la suite d'une entente qui a été prise en 1984 et entérinée par un mandat du gouvernement précédent, et par hasard, c'était à la veille de la dernière élection.

Je crois que, si on comprend cette situation, on va pouvoir aller sur le fond du problème qui existe. Pourquoi tenons-nous cette commission parlementaire? Quelles sont les recommandations, les orientations et les décisions qu'Hydro-Québec doit prendre avec le milieu et avec ses travailleurs tout en respectant l'équilibre qui existait auparavant et qui semblait être une formule non seulement pour les entrepreneurs, mais aussi pour

les ingénieurs-conseils?

En terminant, je voudrais vous poser une dernière question. Dans votre mémoire, vous nous indiquez votre crainte que la situation actuelle n'amène la disparition de la sous-traitance. Pourriez-vous nous expliquer sur quelle base s'appuient vos craintes?

M. Forget (Claude): Nous faisons peut-être un procès d'intention, mais je crois que l'histoire récente peut nous donner au moins un début de justification de le faire. Nous croyons qu'on a le bras pris dans l'engrenage, en quelque sorte, et qu'une réduction de 1000 à 500 de l'effectif des entrepreneurs ne fait que présager un objectif encore plus ambitieux de réduction peut-être 250, lors de la prochaine ronde et ayant un niveau... Malheureusement, on ne peut pas vous dire lequel puisqu'il faudrait une analyse détaillée de la structure financière des opérations de chaque entreprise. Nous n'avons pas eu le temps ni l'occasion de la faire. Il y a un moment où le volume devient tellement minime qu'il est évidemment impossible de continuer les activités. Est-ce que ce sera 500 dans certains cas, dans certaines régions? Il se peut que, dès que le niveau de 500 sera atteint, certaines entreprises ' devront fermer leurs portes. Certainement, si le niveau devait continuer à être réduit, très rapidement l'ensemble des sous-traitants devraient fermer leurs portes ou au moins cesser leurs activités dans ce domaine. Dans la plupart des cas, les activités qu'ils ont dans le domaine de la distribution électrique sont les seules.

M. Ciaccia: Seulement une dernière brève question, si j'ai le temps, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Oui, une dernière.

M. Ciaccia: Vous avez parlé du nouvel équipement que des entrepreneurs ont acheté. Je crois que vous aviez acheté ce nouvel équipement avec la mise en place du programme PAQS. Depuis le début de ce programme, était-ce clair que ce n'était qu'un programme temporaire?

M. Forget (Claude): Le caractère temporaire- du programme n'a jamais été mis en doute. Ce qui intervient comme un élément nouveau et plus perturbant, c'est qu'au lieu de retourner au statu quo ante on diminue de 720 à 500. C'est une diminution de 35 % par rapport au niveau normal maintenu pendant les dix années antérieures. Encore une fois, c'est un niveau qui a été jugé par Hydro-Québec elle-même comme insuffisant pour maintenir une qualité de service, d'où la nécessité du rattrapage.

C'est cet élément de réduction plus fort qu'il ne serait nécessaire pour simplement revenir à la normale qui est l'élément perturbant.

Comme conséquence de cela, par exemple, si on réduit à 500, il y a environ 200 camions qui ne sont pas complètement dépréciés et qui vont devoir être mis au rancart. Ils ont donc entraîné des pertes considérables à ces entreprises et, dans une certaine mesure, à l'ensemble de la société parce qu'au même moment Hydro-Québec fait l'acquisition d'un équipement comparable.

M. Ciaccia: Mais c'est bon pour tes vendeurs de camions.

M. Forget (Claude): Oui.

M. Ciaccia: Est-ce que vous nous dites qu'au moment où le programme PAQS a été mis en vigueur vous saviez qu'il était temporaire, mais vous ne saviez pas que vos effectifs devaient être réduits à 500? Est-ce bien ce que vous nous dites? *

M. Forget (Claude): C'est cela. M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Sur cette réponse, je voudrais vous remercier, M. Forget, mesdames et messieurs, d'avoir participé à cette consultation particulière. Â ce stade-ci, je ne crois pas que l'on puisse être en mesure de vous indiquer quelle sera l'orientation que prendra la commission et si la commission fera d'une certaine façon des recommandations précises, mais une chose est certaine, je pense que votre présence a ouvert le débat d'une façon importante. Les travaux sont suspendus à cet après-midi, après la période de questions.

(Suspension de la séance à 12 h 7)

(Reprise à 15 h 31)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons, cet après-midi, la consultation particulière sur le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec. Nous allons d'abord accueillir les syndicats des employés d'Hydro-Québec, c'est-à-dire le Syndicat des employés de métiers d'Hydro-Québec, le Syndicat des employés de bureau d'Hydro-Québec et le Syndicat des techniciens d'Hydro-Québec. Si les représentants de ces syndicats veulent se présenter à la table.

Messieurs, bonjour. Bienvenue à la commission de l'économie et du travail. Je pense que vous étiez ici ce matin. Donc, vous connaissez un peu les règles du jeu. On a vingt minutes, d'abord, de présentation de

vos points de vue. Par la suite, le temps est divisé de part et d'autre pour la discussion avec les membres de la commission., Comme on l'a vu ce matin, dans la mesure où il y a beaucoup de députés qui veulent intervenir, alors, autant les membres de la commission que vous, les invités, si vous pouvez faire en sorte que les réponses et les questions permettent à un maximum de personnes d'intervenir, ce sera idéal.

Je ne sais pas lequel d'entre vous agit comme représentant de la délégation. C'est monsieur...

M. Chabot (Luc): Luc Chabot.

Le Président (M. Charbonneau): Luc Chabot. Alors, M. Chabot, bienvenue. Avant de commencer la présentation, je vous demanderais de présenter les personnes qui vous accompagnent.

Syndicat des employés de métiers

d'Hydro-Québec, Syndicat des employés

de bureau d'Hydro-Québec et Syndicat des

techniciens d'Hydro-Québec

M. Chabot: C'est parfait. Je voudrais vous identifier les gens autour de la table: À ma gauche, M. André Charbonneau, président de la section locale 2000 du SCFP, le Syndicat des employés de bureau d'Hydro-Québec; à ma droite, M. Charles Cuerrier, président du Syndicat des employés de métiers d'Hydro-Québec, section locale 1500; à l'extrémité droite, M, Pacelli Desrosiers, président du Syndicat des techniciens d'Hydro-Québec, section locale 957. Si vous me le permettez, j'aimerais en même temps souligner la présence dans la salle des exécutifs respectifs de chacun des trois syndicats du SCFP à Hydro-Québec.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, M. le Président, c'est avec étonnement que nous avons appris que cette commission permanente de l'économie et du travail devait examiner le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec. Nous essayons encore de comprendre l'objectif de la tenue d'un tel débat, puisqu'il nous semble évident que l'ampleur de ce mandat dépasse largement le problème soulevé par l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec.

Il est de notoriété publique que cette association exerce depuis plusieurs mois un lobby constant auprès de certains ministères. La tenue de cette commission est tout simplement l'aboutissement de ce lobbying pernicieux. Peut-être devrions-nous aussi profiter de l'occasion pour étudier le dossier de la sous-traitance chez Bell Canada! Ou Québec Téléphone! Ils seraient sans doute peu nombreux ceux qui oseraient reprocher à ces compagnies d'exécuter des travaux en régie. Pourtant, ces travaux sont du même genre que ceux d'Hydro-Québec!

Que s'est-il donc passé pour que nous soyons rendus à discuter de la rentabilité de l'entreprise privée sous le couvert de la sous-traitance à Hydro-Québec?

Il nous apparaît de plus en plus évident que les gens d'affaires ont mal planifié ou ont oublié de diversifier leurs activités commerciales. Pourtant, il s'est passé 24 ans depuis la nationalisation d'Hydro-Québec et cinq ans depuis qu'elle a inclus certaines de ces entreprises dans un programme temporaire d'amélioration du réseau de distribution. Là-dessus, si vous me le permettez, il s'agit effectivement d'un programme temporaire. C'est ce qu'on a connu sous l'appellation de programme PAQS. 11 s'agit d'un programme qui n'avait pas pour objectif de reprendre les retards de travaux, d'aucune sorte. Il s'agit d'un programme qui a été devancé. Il était prévu que ce programme s'échelonnerait sur une période de sept ou huit ans. Il a été devancé par Hydro-Québec au cours de l'année 1984. Par ce programme, qui vise l'amélioration du réseau, l'amélioration de la qualité du service, Hydro-Québec, dans les années où le Québec était dans une période économique difficile, a injecté dans l'économie du Québec un montant de 400 000 000 $. Il l'a concentré sur une période de trois ans. Cela ne pouvait se faire tout seul. Cela nécessitait, pour l'accomplissement de ce programme, l'accord des trois syndicats d'Hydro-Québec, particulièrement celui du Syndicat des employés de métiers, parce qu'il existait, depuis 1976, dans la convention collective, une disposition qui limitait l'utilisation d'un certain nombre de monteurs d'entrepreneurs. Le Syndicat des employés de métiers a compris à ce moment les raisons de l'injection de ces 400 000 000 $ et a aussi fait sa part pour permettre qu'il y ait plus de monteurs d'entrepreneurs qui travaillent à une période où, à l'intérieur de la société, le niveau de l'emploi dans la construction était difficile. Ce sont ces raisons qui ont fait en sorte que les syndicats d'Hydro-Québec ont accepté de hausser les quotas initialement prévus et en ont fait part à leurs membres. L'ensemble des membres du syndicat des employés de métiers a compris la situation.

Je poursuis. Il s'agit d'un programme... Il s'est passé cinq ans depuis qu'elle a inclus certaines de ces entreprises dans un programme temporaire d'amélioration du réseau de distribution. Malgré leur manque de prévoyance, il nous semble que les effets présents font partie des risques inhérents à la philosophie de la libre entreprise. Drôle de pratique que de recourir au gouvernement pour corriger ses propres erreurs de juge-mentî

Pourtant, l'État a déjà fait largement sa part pour aider l'ensemble des entreprises

privées. Il l'a fait de deux façons: premièrement, par des subventions offertes par chacun des ministères du gouvernement du Québec et, deuxièmement, par sa permissivité face aux nombreux abris fiscaux.

Ces avantages aux entreprises coûtent une fortune aux citoyens et aux citoyennes du Québec. Nous croyons qu'il s'agit là de toute autre chose que de la sous-traitance. Il semble que certains groupes voudraient procéder à la privatisation d'Hydro-Québec sous le couvert de la sous-traitance! Plusieurs indices nous laissent soupçonner cette éventualité. Sinon, comment expliquer la création de la société de la Baie James qui permettait à des consortiums privés de devenir maître d'oeuvre d'un si grand chantier? Comment expliquer le démantèlement de la vice-présidence, division équipement, qui regroupait un énorme potentiel de compétences humaines? Comment expliquer la récente décision d'Hydro-Québec d'acheter l'électricité de petites centrales construites, entretenues et exploitées par des producteurs autonomes au lieu de fabriquer elle-même toute l'électricité?

Si tel est le cas, nous vous mettons en garde contre cette tentative de privatisation fort malicieuse. Il nous semble que le gouvernement n'a alors pas le choix de poser la question fondamentale et de consulter la population du Québec, comme il l'avait fait en 1962. Mais si nous nous étions trompés sur les véritables objectifs de cette commission! Et s'il n'avait jamais été question de privatiser Hydro-Québec! Alors, nous serions quand même surpris de voir des parlementaires se pencher sur des règles de gestion. À quand une ocmmission parlementaire sur le système de gestion par objectifs, ou encore sur le budget à base zéro? À moins que la raison ne soit tout autre, que les gestionnaires que vous avez choisis aient perdu votre confiance. Même dans ce cas, il y aurait eu moyen de faire les choses autrement. S'il est impossible de saisir les véritables motifs de ces audiences, les trois syndicats du SCFP à Hydro-Québec sont tout de même prêts à vous présenter leur vision de la sous-traitance dans l'entreprise.

Nous croyons utile, au départ, de vous rappeler certains faits. Hydro-Québec est un citoyen corporatif pour qui s'appliquent toutes les lois du Québec, incluant celles du travail et celles du régime de négociations dans la fonction parapublique. Dans le cadre de ces lois il est normal qu'Hydro-Québec, comme tout autre employeur, fasse l'objet de demandes syndicales visant à limiter le droit de la direction de recourir à la sous-traitance. Ce genre de demande est chose courante et a toujours fait l'objet de négociations à Hydro-Québec depuis 1966. Les réponses plus ou moins favorables d'Hydro-Québec dépendent de ses politiques de gestion. Nous comprendrions difficilement que l'Assemblée nationale vienne s'immiscer dans la gestion de l'entreprise ou, pire encore, veuille empêcher le jeu de la libre négociation.

Dans le cas présent, l'actionnaire ne doit pas limiter la latitude que possèdent les gestionnaires qu'il a mis en place pour satisfaire à ses objectifs. Le principal objectif - tout le monde en conviendra - est le respect de la loi créant Hydro-Québec ainsi que sa modification de 1983. Cette loi - permettez-nous de vous le rappeler - ne confie pas à Hydro-Québec le soin de régler le sort de la libre entreprise au Québec, ni de soutenir l'entreprise privée, ni de la sauver en cas de mauvaise gestion. Il nous apparaît de plus en plus clair que certains groupes dans la société confondent Hydro-Québec et le ministère de l'Industrie et du Commerce. Ils souhaitent peut-être que l'administration leur fasse des paiements de transfert.

Pour nous, le mandat d'Hydro-Québec a toujours été évident: c'est de produire et de distribuer de l'électricité selon des tarifs et des conditions basés sur une saine gestion financière. À notre avis, cela implique donc qu'il appartient aux gestionnaires d'Hydro-Québec de choisir leurs propres règles de gestion. La sous-traitance en est une. La sous-traitance se définit comme une forme de contrat permettant à un tiers d'effectuer une partie des travaux ou certaines tâches habituellement faites par les salariés de l'employeur. Donc, si cela s'avérait rentable et efficace, Hydro-Québec pourrait décider une fois pour toutes de ne plus faire appel à la sous-traitance et de tout faire en régie. Ce geste serait alors qualifié et évalué comme en étant un de saine gestion financière.

D'ailleurs, le gouvernement du Québec, à une plus grande échelle, a déjà posé ce genre de jugement. C'est ainsi qu'est née Hydro-Québec, en 1944, pour la région de Montréal et en 1963, pour l'ensemble du Québec. Même si on a tendance à oublier facilement l'histoire, nous sommes assurés que des gens de ce gouvernement se souviennent du "Maître chez nous" de Jean Lesage.

Qu'ils se souviennent que les Québécois et les Québécoises ont dû payer le gros prix pour le rapatriement de notre pouvoir électrique auparavant exploité par le secteur privé. (15 h 45)

Mais ce n'est pas tout. Qu'on se souvienne aussi des années quarante et cinquante, alors que les entreprises privées n'avaient pas jugé bon d'assumer les risques inhérents à la libre entreprise. Qu'on se souvienne qu'elles avaient négligé de développer le potentiel électrique du Québec. Qu'on se souvienne de la discrimination

tarifaire élevée en système et imposée aux gens les plus démunis. Qu'on se souvienne de la piètre qualité de service que subissait la population demeurant dans les régions éloignées. Mal gérées, peu rentables et profondément conservatrices, les attitudes de ces entreprises furent néfastes et retardèrent le développement du Québec.

C'est à la nationalisation d'Hydro-Québec que l'on doit en bonne partie le développement du Québec. Et c'est è la concentration en régie du savoir-faire, du développement technologique et de la formation des travailleurs et travailleuses que l'on doit la réalisation d'une infrastructure d'entreprise forte. Une infrastructure qui a permis aux hydro-québécois de réaliser Manic 5.

Quelques années plus tard, les syndicats du SCFP à Hydro-Québec ont pu évaluer les bénéfices que représentaient l'uniformisation des méthodes et des conditions de travail, l'uniformisation de l'application des nouvelles technologies, des méthodes de gestion et des règles de sécurité sur tout le territoire du Québec. Tous ont convenu qu'il s'agissait de réelles économies pour toute la société québécoise. Tout ça, grâce à une gestion en régie étatique.

Par contre, nous nous sommes toujours inquiétés du fait que la nationalisation ne soit jamais complétée. Pensons aux villes qui continuent de distribuer l'électricité aux abonnés de Westmount, Joliette, Sherbrooke. Pensons à toutes ces entreprises privées qui continuent d'oeuvrer sur les travaux de production, de transport et de distribution de l'électricité.

Les syndiqués d'Hydro-Québec sont fiers de leurs réalisations et ils ont toujours été conscients des effets bénéfiques d'une gestion en régie. C'est pourquoi ils nous mandatèrent, à plusieurs reprises, pour sonner l'alarme à la suite de pressions souvent occultes qui poussaient Hydro-Québec à se départir de son savoir-faire. Ce n'est pas la première fois que les lobbies privés viennent quémander le droit de démanteler une partie de cette société d'État pourtant essentielle à la stabilité économique du Québec. C'est ainsi que, publiquement, nous avions souligné les dangers de créer la société de la Baie James et que nous nous étions apposés au démantèlement de la vice-présidence, division équipement, qui a constitué un véritable gaspillage de ressources humaines. Et, plus récemment encore, nous dénoncions le danger de laisser produire l'électricité par des compagnies privées.

Mais les gouvernements font la sourde oreille et la sous-traitance continue d'augmenter toujours sans qu'on en évalue les impacts économiques et sociaux. C'est pourquoi, à chacune des négociations, depuis des années, nous nous sommes efforcés de convaincre Hydro-Québec de restreindre l'utilisation de la sous-traitance et de revenir à son mandat initial. Bien que les clauses des trois conventions collectives semblent théoriquement restreindre l'usage de ce mode de gestion, c'est une tout autre histoire dans la pratique.

Regardons de plus près comment HydroQuébec a cédé peu à peu du terrain à l'entreprise privée de même que l'évolution de la sous-traitance dans le genre de services et de travaux où des travailleurs et des travailleuses syndiqués du SCFP sont impliqués. On constate une augmentation, de 1972 à 1985s de 79 000 000 $ qu'elle était en 1972, elle passe au-delà de 261 000 000 $ en 1985, donc, une hausse de 230 % correspondant à une augmentation annuelle de 16,4 %. Chacun se souviendra que c'est vers 1980 qu'Hydro-Québec a mis fin à ses grands travaux. Malgré cela, il n'y a pas eu de diminution de la croissance de la sous-traitance. L'ensemble des contrats passés à l'extérieur représente une augmentation de 35,7 %. De 137 000 000 $ en 1980, ce* chiffre est passé à 186 000 000 $ en 1985.

En analysant ces résultats par type de contrats,, on constate les augmentations suivantes. Construction de lignes de distribution: 118,4 %°; sous la rubrique entretien et réparation de lignes et de réseaux: 580,3 %; de ponts, de routes et de barrages: 342,6 %; de postes et de centrales; 1143,6 %; de véhicules? 287,2 %; de publicité et de photographie; 190,5 %; de services professionnels: 132,5 %. Il est à noter que nous n'avons' pas retenu le déboisement et l'excavation, car ce sont des travaux mineurs qui fluctuent énormément d'une année à l'autre.

En résumé, les contrats du secteur de l'entretien et de la réparation qui représentent les principales fonctions des trois groupes syndiqués du SCFP sont passés de 24 714 000 $ en 1972 à 135 641 000 $ en 1985, ce qui correspond à une hausse de 476,2 %. Ces chiffres, bien qu'incomplets, nous démontrent qu'Hydro-Québec a une nette tendance à revenir sur ses orientations de départ. Des questions doivent se poser. Nos gestionnaires seraient-ils atteints de "rationalité" aiguë? Nous ne le croyons pas.

Nous sommes même en mesure d'affirmer qu'à l'heure actuelle Hydro-Québec ne possède pas les capacités statistiques d'évaluer les coûts comparatifs du travail réalisé à l'interne et de celui réalisé à l'externe.

Le Président (M. Théûrêt): M. Chabot, je m'excuse. Je veux vous rappeler qu'il reste environ deux minutes et je vois qu'il vous reste neuf pages de texte. Est-ce qu'il vous serait possible d'essayer de résumer ces neuf pages à tout le moins, puisqu'on a déjà accumulé du retard qui n'est évidemment pas

occasionné par votre présentation?

M. Chabot: Je vais tenter de conclure en essayant de n'esquiver aucun des éléments importants de notre mémoire.

Le Président (M. Théorêt): Parfait.

M. Chabot: II n'est pas question pour nous de prêter foi à certains calculs de coûts effectués sur une base ad hoc en ne tenant pas compte de l'ensemble de ce qu'on appelle les coûts cachés. Si on veut faire des comparaisons, on doit considérer les frais d'administration pour préparer le cahier de charges (plans, devis, descriptions), les frais de vérification des textes contractuels, les frais découlant des poursuites et bris de contrats, les frais découlant des clauses de contrats pour travaux non prévus, les frais reliés au processus de soumissions publiques, les frais de surveillance des travaux, les frais d'écriture reliés à la gestion des sous-contrats, le coût du personnel qualifié sous-utilisé.

Une personne a déjà publié des ouvrages relativement à la sous-traitance et a identifié les avantages et les désavantages de confier en sous-traitance, c'est M. Pierre-Yves Barreyre qui a... Dans notre mémoire, on reprend les différents avantages qui ont été confiés... Quand on analyse la nécessité de confier en sous-traitance, certains avantages sauf un ne s'appliquent pas à Hydro-Québec, celle-ci étant une société d'État. On dit, à l'énoncé que l'on retrouve à la page 22 de notre mémoire, que la sous-traitance représente un moyen d'économiser du temps afin de répondre aux stimulis de l'environnement. On dit que cela peut toujours trouver application à Hydro-Québec, mais que les syndicats du SCFP, à cet égard, ont toujours reconnu que, dans certaines conditions comme les cas d'urgence, l'employeur pouvait recourir à la sous-traitance. Le même auteur identifie également plusieurs inconvénients relatifs à la décision de sous-traiter ou de confier en régie. On fait également mention dans notre mémoire de la limite des contrôles. Vous savez que, lorsqu'on confie des contrats en sous-traitance, on doit nécessairement associer à l'adjudication de ces contrats certains contrôles. Mais qui dit contrôle dit nécessairement limite de ces contrôles.

Évidemment, on veut vous rappeler également l'impact sur l'emploi du fait de confier en régie, compte tenu de la situation précaire de l'emploi au Québec, situation par laquelle on parvient, par des emplois permanents à Hydro-Québec, à donner plus d'importance à l'emploi permanent qu'à l'emploi précaire.

Donc, en conclusion, qu'il nous soit permis d'avoir des aspirations. Dans cet esprit, nous croyons qu'Hydro-Québec devrait amorcer un vrai programme de rapatriement du savoir-faire et, entre autres, rétablir la vice-présidence, division équipement. Hydro-Québec, prévoyant maintenir 22 000 employés permanents et temporaires, devrait reconnaître l'expérience des travailleurs et des travailleuses qui ont oeuvré pour des sous-traitants et accorder à ses personnes une priorité d'emploi avant de procéder à de nouveaux embauchages. J'aimerais, avant de conclure définitivement, peut-être rappeler le début de notre présentation, de notre mémoire, à savoir que si les intentions sont d'envisager la privatisation d'Hydro-Québec, on souhaiterait qu'on s'adresse directement à la population comme on l'a fait pour nationaliser les sociétés d'État.

Nous vous remercions d'avoir accordé votre attention à notre présentation.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Chabot. M. le ministre.

M. Ciaccia: Je vous remercie d'avoir accepté d'exposer vos vues, concernant la gestion de la sous-traitance chez Hydro-Québec, devant cette commission.

Avant d'aborder le fond de la question, il m'apparaît que votre mémoire nécessite, de ma part, des mises au point immédiates.

Premièrement, je tiens à vous dire que les représentants élus, et, plus particulièrement, le ministre de l'Énergie sont directement concernés par le problème de la sous-traitance, qui représente, non seulement un problème de gestion interne, mais aussi un problème d'équilibre entre différents partenaires économiques. Quand vous dites, dans votre mémoire, que ce problème n'appartient aucunement au Parlement, je voudrais porter à votre attention qu'Hydro-Québec est une société d'État. J'admets que, en conséquence, contrairement au reste de l'appareil gouvernemental, nous avons voulu lui accorder une grande autonomie, mais elle n'est pas pour autant une entreprise privée et le gouvernement, en tant qu'actionnaire unique, en demeure responsable devant l'opinion publique. C'est pour assurer cette responsabilité qu'en tant que ministre de l'Énergie et des Ressources je suis le ministre tuteur d'Hydro-Québec. S'il y a des mesures prises par Hydro-Québec qui peuvent avoir des incidences sur les dépenses et sur les tarifs, c'est le Conseil des ministres qui doit approuver ces tarifs et c'est le gouvernement qui doit répondre à la population de ces augmentations de tarif. Dire que ce n'est pas du tout de notre ressort d'examiner certains gestes d'Hydro-Québec, je crois que cela va un peu loin, étant donné le fait que le gouvernement est l'unique actionnaire d'Hydro-Québec.

Deuxièmement, vous affirmez que, sous le couvert d'une discussion sur la sous-traitance, c'est de la privatisation d'Hydro-

Québec que nous voulons discuter. Non seulement ce n'est pas le cas, mais c'est totalement faux et je ne voudrais pas voir le débat dévier sur un autre sujet. Je voudrais qu'on examine le fond du problème. Je voudrais vous référer au rapport du comité sur la privatisation des sociétés d'État de juin 1986 où il y avait trois catégories de sociétés. La deuxième catégorie, le second groupe, comportait sept sociétés qui constituent le monopole public, telle HydroQuébec.

II y avait un troisième groupe qui représentait les dix sociétés d'État que l'on peut qualifier d'entreprises stratégiques. On ne parlait que de privatisation et de revoir possiblement les orientations de ce troisième groupe. Il était clairement spécifié dans le rapport qu'il n'était aucunement question de la privatisation d'Hydro-Québec. La privatisation ne s'appliquait pas à HydroQuébec et ne s'y applique pas aujourd'hui. Ce n'est pas du tout la question ni les enjeux que nous discutons devant cette commission parlementaire. (16 heures)

Enfin, j'aimerais revenir à vos remarques sur le soutien aux entreprises, aux pages 7 et 8, quand vous dites: "Pourtant, l'État a déjà fait sa large part pour aider l'ensemble des entreprises privées." Puis, vous citez un chiffre de 1 383 000 000 $ pour l'année 1986. "Et il l'a fait par sa permissivité face aux nombreux abris fiscaux. Ces avantages aux entreprises coûtent une fortune aux citoyens et citoyennes du Québecl"

Permettez-moi de vous rappeler que 1 600 000 personnes au Québec travaillent dans des entreprises. Lorsque nous appuyons les entreprises, nous appuyons toute la base économique de notre société. C'est grâce à cette base que nous pouvons offrir à l'ensemble de nos citoyens les services publics reconnus essentiels pour leur bien-être. Le soutien à l'emploi passe par le soutien aux entreprises. Si celles-ci sont viables, les emplois demeureront, sinon ils disparaîtront. Avec 330 000 chômeurs au Québec, 260 000 ménages dont le chef est apte au travail bénéficiant de l'aide sociale, non seulement devons-nous assurer aux Québécois notre appui aux emplois actuels, mais encore devons-nous voir à la présence d'outils stimulateurs d'emplois et un de ces outils stimulateurs est le développement d'une expertise réputée et en demande.

C'est ce qu'Hydro-Québec a fourni par le passé et nous vouions que cela continue. Hydro-Québec est un monopole, protégé par la volonté de l'État. Vous bénéficiez, en ce sens, d'un statut privilégié et sécurisant que ne partage pas la grande majorité des travailleurs. Ce statut se justifie par l'impact de l'entreprise sur l'économie québécoise. Je ne voudrais pas que ce statut de monopole ne profite' qu'à Hydro-Québec et à ses employés. J'ai la responsabilité d'en tirer le maximum d'effets d'entraînement sur les emplois au Québec.

Ceci étant posé, comme je vous l'ai mentionné et si vous voulez connaître le but de la commission, je suis à la recherche d'un équilibre. Je suis conscient de toute l'importance du bon fonctionnement d'Hydro-Québec pour rendre un service de qualité à la population. En conséquence, je voudrais vous poser quelques questions.

À la page 12 de votre mémoire, vous dites: "Pour nous, le mandat d'Hydro-Québec a toujours été évident: c'est de produire et de distribuer de l'électricité selon des tarifs et des conditions basés sur une saine gestion financière."

Est-ce que vous pourriez me dire en quoi les modifications apportées à la clause 34 et à la réduction des effectifs de sous-traitances de 720 è 500 personnes-années, apporteront des avantages à l'ensemble des citoyens du Québec?

M. Chabot: M. le ministre, si vous me le permettez, nous avons peut-être, d'une part, été mal compris. Si votre compréhension de notre mémoire est à savoir qu'on dit au gouvernements Vous n'avez pas d'affaire à vous mêler de la gestion d'Hydro-Québec, ce n'est pas ce qu'on dit. Le gouvernement doit se mêler de la gestion d'Hydro-Québec, mais ce qu'on dit, c'est que le gouvernement n'a pas à se mêler de règles de gestion. C'est pour cela qu'on dit, dans notre mémoire: Â quand une commission parlementaire sur une gestion par objectifs, etc.?

Pour répondre directement à votre question relativement à la lettre d'entente qui est communément appelée; Programme d'amélioration de la qualité du service, quant à savoir comment cette lettre d'entente a pu bénéficier à l'ensemble de la population du Québec, cette lettre d'entente-là a permis d'utiliser un nombre supérieur de monteurs d'entrepreneurs que ceux qui étaient initialement prévus de façon à améliorer le réseau de distribution, qui se rend directement chez la totalité de la population du Québec, et à rendre le réseau, de cette façon-là, beaucoup plus fiable, beaucoup plus à l'abri de pannes ou de choses qui peuvent arriver dans ce sens-là.

M. Ciaccia: Je n'ai pas mal interprété vos propos, vous allez m'excuser. Je lis, dans votre résumé du mémoire: "Les problèmes de gestion interne ne font pas partie des prérogatives du gouvernement" et à la page 26: "En conclusion, le choix de sous-traîter ou d'exécuter en régie est un choix de gestion. Ce choix relève des gestionnaires d'Hydro-Québec et n'appartient aucunement au Parlement." Vous allez m'excuser si j'ai interprété ces paroles en disant qu'on n'avait

pas d'affaire, au Parlement, à discuter de gestion interne, spécifiquement de la question de la sous-traitance.

Si vous voulez amender votre mémoire, libre à vous de le faire. Je vous en serai très reconnaissant et je changerai les propos que j'ai clarifiés, à la suite du contenu de votre mémoire.

Une deuxième question, M. le Président, parce qu'on parle d'emplois et de création d'emplois et qu'on ne veut pas mettre en jeu les emplois. Comment l'ancien libellé de l'article 34 affectait-il les emplois chez Hydro-Québec? Y avait-il réduction d'emplois?

M. Chabot: L'ancien libellé de l'article 34, l'article qui traitait de la sous-traitance, datait de 1976. Ce libellé indiquait que le nombre de monteurs d'entrepreneurs ne pouvait augmenter plus que le taux de l'indice des prix à la consommation, ce qui aurait fait en sorte, de toute façon, à la fin de la mise en application de ladite lettre d'entente qu'on a connue en 1984, ce qui représentait à toutes fins utiles l'accomplissement du libellé de 1976... Les emplois augmentaient à Hydro-Québec à un rythme différent d'une année à l'autre. Les emplois de monteurs d'entrepreneurs pouvaient également augmenter. L'année de référence était l'année 1975, qui a été une très grosse année dans l'utilisation de monteurs d'entrepreneurs. La clause qui existait à l'époque a fait en sorte que, tranquillement, de par l'application d'un système mathématique, le nombre a diminué graduellement. Lorsque cette clause est apparue en 1976, on n'a vu personne venir nous dire qu'on venait de créer du chômage. Personne n'est venu nous dire cela. Pourtant, aujourd'hui à la fin de 1987, si on avait gardé le même texte de convention collective, on se retrouverait à toutes fins utiles devant la même éventualité.

Ce qu'on a fait, M. le ministre, c'est qu'on a accepté de surseoir à l'application de la convention collective pour une période temporaire de trois ans, permettant ainsi à des entreprises privées d'avoir plus de contrats pour Hydro-Québec, d'utiliser plus de monteurs entrepreneurs que les quotas qui étaient initialement prévus. Hydro-Québec a injecté, des montants comme je l'ai dit tantôt, dans le but de relancer une certaine économie. On a également fait notre part, toujours dans cet esprit. On se retrouve en bout de piste avec la conséquence de la fin d'un programme temporaire, mais de toute façon - je dis bien, de toute façon -l'application d'une clause de 1976 nous aurait menés au même endroit.

M. Ciaccia: Mais, si je vous comprends bien, vous avez dit qu'il n'y avait pas de réduction d'emplois. Vous avez mentionné, j'ai pris des notes, corrigez-moi si je n'ai pas pris les bonnes notes, que l'emploi à l'interne à Hydro-Québec augmentait avec l'ancienne clause 34. Là est arrivé un programme PAQS et on a augmenté les effectifs ou les contrats de sous-traitance. Est-ce que, en augmentant les contrats de sous-traitance, on a diminué l'emploi à l'interne?

M. Chabot: En augmentant par le programme PAQS les contrats de sous-traitance, on a augmenté l'emploi à l'interne.

M. Ciaccia: L'emploi à l'interne a augmenté avec PAQS.

M. Chabot: Oui, et cela s'explique.

M. Ciaccia: Avec la fin du programme PAQS, on ne retourne pas au statu quo de 720, on retourne à un nouveau chiffre qui a été négocié en 1984, à 500.

M. Chabot: Qui était de 500.

M. Ciaccia: Alors, il y a baisse des effectifs dans la sous-traitance, mais il y a toujours augmentation des effectifs à l'interne.

M. Chabot: Et cela s'explique. La baisse des effectifs en sous-traitance au chiffre de 500 à la fin du programme temporaire et la hausse des effectifs à l'interne sont directement reliées au Programme d'amélioration de la qualité du service. Le réseau étant adéquat, le réseau étant renouvelé et capable de faire face à plus d'intempéries nécessite moins de nouvelles constructions, et peut-être plus de personnes à l'interne pour faire l'entretien de ce réseau. C'est comme cela que ça s'explique.

M. Ciaccia: On reviendra plus tard avec mes collègues pour poser des questions sur l'entretien, mais je voulais juste savoir une chose: Il y a eu une augmentation à l'interne avec l'ancien 34, mais est-ce que l'ancien 34 empêchait l'augmentation de l'emploi à l'interne? Maintenant, on se retrouve face à une situation où on met un maximum pour la sous-traitance à 500, qui était à 220 avant 1983. Alors, si on empêche l'augmentation à l'externe, est-ce qu'il y a des clauses qui empêchent l'augmentation à l'interne?

M. Chabot: Vous avez l'ancien 34, vous me dites.

M. Ciaccia: Oui, est-ce qu'il y avait des clauses qui empêchaient l'augmentation à l'interne?

M. Chabot: Évidemment que non. Il n'y

a pas de clause dans les conventions collectives qui empêchait l'employeur de faire de l'embauche. Il n'y a pas un syndicat, à ma connaissance, qui empêcherait un employeur de faire de l'embauche.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Roberval.

M. Gauthier: Oui; merci, M. le Président. Ma question s'adresse évidemment aux représentants des syndicats d'Hydro-Québec que je remercie de nous avoir présenté ce texte aujourd'hui et de bien vouloir répondre à nos questions.

Il y a un certain nombre de choses qui nous préoccupent à cette étape-ci, dont une - je ne sais pas à quelle page du mémoire, dans le résumé du mémoire, à la deuxième page au début, vous dites... Je me permets de vous citer le texte: "Nous sommes convaincus que la sous-traitance à HydroQuébec n'a que des effets pervers pour les raisons suivantes: Hydro-Québec n'a jamais voulu mesurer l'impact réel de la sous-traitance. Les calculs actuels ne tiennent pas compte des coûts réels de la sous-traitance." Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, monsieur, m'expliquer ce que cet énoncé veut dire? Est-ce que vous l'avez retrouvé? Je m'excuse, là'

M. Chabot: Oui, évidemment la page du résumé fait référence à la page du mémoire où l'on dit, à la page 19, particulièrement, que pour mesurer l'impact des coûts dans le but de faire des comparaisons entre un travail en régie et un travail confié en sous-traitance, on doit, si on veut vraiment faire des coûts comparatifs, inclure dans ces coûts toutes les données.

Or, ce qu'on dit dans notre résumé, c'est que Hydro-Québec n'avait pas de statistiques disponibles pour effectuer ces coûts et que les calculs actuels ne tiennent pas compte des coûts réels.

Dans les coûts réels, on dit: II y a des coûts qu'il faut comptabiliser pour être en mesure d'effectuer des études comparatives: les frais d'administration pour préparation du cahier de charges (plans, devis, descriptions); les frais de vérification de textes contractuels; les frais découlant de bris de contrats; les frais découlant des clauses de contrats pour travaux non prévus ou une modification des travaux; les frais reliés au processus de soumissions publiques ou de soumissions sur invitation; les frais de surveillance des travaux; les frais d'écriture reliés à la gestion des sous-contrats, le coût du personnel qualifié sous-utilisé. Ce sont tous des frais qui doivent entrer en ligne de compte lorsqu'on veut faire une étude comparative de coûts entre un travail en régie et un travail en sous-traitance. Ce sont ces coûts réels qu'il faut vraiment utiliser pour être en mesure de faire une comparaison qui soit dans l'ordre. (16 h 15)

M. Gauthier: D'accord. À la page 22, vous parlez des inconvénients et vous dites que le donneur d'ouvrage - à peu près au milieu de la page - n'a pas de contrôle sur la sécurité des approvisionnements, sur la quantité, sur les délais et sur les coûts. Vous faites référence à quoi, exactement? Pourriez-vous m'expliquer cet énoncé?

M. Chabot: Oui. Lé donneur d'ouvrage, cela veut dire que l'entreprise qui soustraite, l'entreprise qui donne des contrats en sous-traitance n'est pas en mesure d'avoir de contrôle sur les approvisionnements du sous-traitant, ne connaît pas ses prix... Elle connaît ses prix, mais elle n'a pas de contrâle sur les fluctuations de ses prix. Le sous-traitant peut négocier avec ses employés des conditions de travail, des conditions de salaire. L'entreprise, si on l'applique à notre exemple, Hydro-Québec, n'a pas de contrôle sur une négociation qui se passe avec une entreprise privée et son syndicat. Le sous-traitant pourrait emprunter sur des marchés, à des banques et Hydro-Québec n'aurait pas de contrôle sur les taux d'intérêt. Alors, c'est l'ensemble de la situation, de la sécurité des approvisionnements, des délais et des coûts associés au sous-traitant en rapport avec ce contrat, sur lesquels le donneur d'ouvrage n'a pas de contrôle.

M. Gauthier: Merci. Dans le problème qui nous préoccupe aujourd'hui de façon beaucoup plus grande que ces quelques précisions, on nous présentait ce matin -vous étiez, je crois, présents dans cette salle - un point de vue, évidemment, qui va à l'extrême opposé de ce que vous nous demandez. Les entrepreneurs nous expliquaient que, si on remonte à quelques années - vous avez échangé tout à l'heure avec le ministre sur cela - il y avait, je pense, 720 postes assurés aux sous-traitants. Les choses ont changé avec le programme spécial, cela a augmenté sensiblement. Maintenant, on se dirige vers le chiffre de 500. Vous avez indiqué au ministre tout à l'heure également que, évidemment, à l'interne, le programme d'amélioration des équipements n'avait pas eu pour effet de diminuer le nombre de syndiqués puisqu'il y avait des travaux d'entretien, si j'ai bien compris, qui devaient être faits pour entretenir ce réseau amélioré. Donc, votre groupe de syndiqués avaient conservé leur emploi. Évidemment, on ne peut dire la même chose de l'autre groupe de syndiqués qui est du côté des entrepreneurs où la baisse est significative. Est-ce que vous pouvez nous dire... L'application de la clause de la convention collective, telle que prévue maintenant, vous donne comme nombre de

personnes... Vous avez aussi des employés à temps partiel en assez grande quantité qui sont touchés par l'application de cette clause. Pourriez-vous nous indiquer, toute proportion gardée, quel était le nombre de personnes à l'interne regroupées dans votre syndicat voilà, je ne sais pas, deux ans et maintenant, avec les employés permanents à temps partiel? J'ai l'impression qu'il y a une augmentation sensible des employés temporaires depuis quelque temps. Est-ce exact?

M. Chabot: Bon. Effectivement, le nombre de membres qu'on représente à Hydro-Québec dans l'ensemble des trois sections locales est grosso modo d'environ 14 000. En effet, vous avez raison quand vous dites qu'il vous semble que le nombre d'emplois temporaires a augmenté à Hydro-Québec ces dernières années. Oui, cela a augmenté. Donc, le nombre d'emplois permanents n'a pas augmenté. Le phénomène qu'on retrouve depuis plusieurs années est un phénomène d'emplois temporaires qui n'a pas permis d'augmenter, dans les mêmes proportions, le nombre d'emplois permanents.

Si l'on regarde les chiffres et les données que nous avons, en 1989, le nombre de syndiqués à Hydro-Québec va être le même que celui qui existait en 1980. Pourtant, il se sera passé neuf ans. Il faut aussi se rappeler qu'avant juin 1984, au moment de la signature de la lettre d'entente en question, la lettre d'entente PAQS, l'embauche à Hydro-Québec était gelée. Pendant ces années qu'on a traversées, il n'y avait pas d'embauche qui se faisait. Alors, la lettre d'entente PAQS est arrivée au moment même où il ne se faisait plus d'embauche à Hydro-Québec depuis un certain nombre d'années. Ce qui a eu pour effet, évidemment, de favoriser le vieillissement de la population d'Hydro. On assurait moins une relève que par le passé. Je ne sais pas si cela répond à votre question, M. le député.

M. Gauthier: Est-ce que vous avez... Là, on a le nombre de personnes syndiquées. Est-ce que vous avez, de façon plus précise, l'évolution du nombre d'occasionnels? Je n'ai pas saisi, si vous nous l'avez donné.

M. Chabot: On n'a pas une évolution plus précise qu'il ne le faut, mais je dois, afin de répondre à votre question, me référer aux années 1979, 1982 où le taux d'utilisation d'employés temporaires était très limité. C'est depuis 1982 qu'il y a eu vraiment une remontée impartante, assez importante pour justifier des négociations, des conditions de travail particulières pour ces groupes-là. Vous n'êtes pas sans savoir que les conventions collectives comportent des dispositions maintenant, concernant les groupes d'employés temporaires. Ce qu'elles ne comportaient pas auparavant. C'est la première convention collective où l'on retrouve des dispositions, concernant les employés temporaires. Les conventions précédentes n'en contenaient pas. Non pas que le besoin n'était pas là, mais la demande n'était pas là. Il n'y avait pas nécessairement suffisamment de demandes pour justifier l'ampleur d'un article comme celui-là.

M. Gauthier: Vous savez, une commission parlementaire comme celle-là, c'est souvent l'occasion pour des groupes d'échanger de gros mots par personne interposée, la personne importante étant la commission parlementaire. Ce matin, les entrepreneurs nous ont dit que certaines de vos équipes souffraient d'un degré d'inefficacité allant jusqu'à 65 %. Chiffre qui, évidemment, m'a fait un peu sursauter, mais on a essayé de démontrer, du côté des entrepreneurs, que c'était exact quand on prenait pour fins de comparaison la rentabilité des équipes sur le terrain par rapport à vos équipes, semble-t-il, tout en nous précisant que la méthodologie - les entrepreneurs l'on fait ce matin, cependant -de l'étude n'était pas tellement scientifique, mais qu'il s'agissait d'observations faites le plus sérieusement du monde.

Par contre, vous n'êtes pas non plus très très gentils pour les entrepreneurs et je vous comprends. Vous dites à la page 7 qu'on n'a pas à discuter de la rentabilité de l'entreprise privée, sous le couvert de la sous-traitance à Hydro-Québec, et que les gens d'affaires ont mal planifié, ont oublié de diversifier leurs activités commerciales. Bon, il s'est passé 24 ans depuis la nationalisation d'Hydro. Bref, ces gens-là ont été imprévoyants et c'est pour cela qu'aujourd'hui, de vos dires, ils viennent se lamenter en commission parlementaire. Bon procédé pour bon procédé, moi, je voudrais vous questionner sur celui-ci. Si vous voulez, évidemment, commenter l'autre, vous pourrez le faire aussi. Vous avez toute latitude.

Mais expliquez-moi sérieusement, parce que j'avoue que j'ai de la misère à prendre cela au sérieux, comment un sous-entrepreneur en installations électriques peut-il être prévoyant, se recycler dans quelque chose alors qu'il y a un programme d'amélioration du réseau à Hydro-Québec qui assure du travail et qui demande même des ajouts d'équipements, des achats d'équipements, etc, pour faire face à la demande. Pouvez-vous m'expliquer en quoi les entrepreneurs ont été si terriblement imprévoyants que cela, et leurs employés, victimes de cette imprévoyance dans le contexte?

M. Chabot: Ce qu'on dit, c'est qu'il

s'agissait au départ d'un programme temporaire. Les entreprises concernées en étaient informées. On a eu besoin d'acheter de nouveaux équipements, soit, mais cela devait, en termes de gestion, j'imagine, se rentabiliser à l'intérieur d'une période déjà préalablement identifiée, dite temporaire. En ce sens, à l'expiration de ce programme temporaire, on fait des démarches pour obtenir une commission parlementaire pour venir dires Écoutez, le programme prend fin. On a investi et acheté de l'équipement et on n'aura plus de contrat tantôt. C'était connu. Il aurait peut-être fallu qu'on s'organise pour rentabiliser ces équipements à l'intérieur de la durée du programme ou, à tout le moins, ne pas s'équiper en tenant pour acquis que le programme serait prolongé.

Vous savez, lorsqu'on regarde les chiffres, c'est intéressant. N'eût été de la lettre d'entente en question, l'utilisation de monteurs d'entrepreneurs aurait été bon an mal an 300 à 350 monteurs-années* La lettre d'entente est arrivée et elle permettait 1000 personnes-années. En 1984, il y a eu, pour les monteurs d'entrepreneurs, 771 personnes-années, en 1985, ce sont 965 personnes-années, en 1986, 946 personnes-années et en 1987, à ce jour, 950 personnes-années. Ces chiffres que je viens de vous donner sont des chiffres qui regardent les monteurs d'entrepreneurs et les employés de soutien de ces entreprises. Quand on les transpose et qu'on regarde l'utilisation de monteurs d'entrepreneurs purs, on se rend compte que, pour l'année 1984, on a utilisé 684 personnes-annéesj en 1985, 825 personnes-années; en 1986, 816 personnes-années et en 1987, 820 personnes-années, au moment où on se parle. Pourtant, la possibilité qu'on avait négociée était d'atteindre 1000 personnes-années alors que cette nouvelle disposition, cette lettre d'entente PAQS devant faire face au programme temporaire dans le but d'améliorer la qualité du réseau, la qualité du service à la population, qui avait une durée limitée, a permis, au moment où elle est arrivée, dans le temps, d'utiliser plus de monteurs que ce qui était initialement prévu dans une clause négociée et signée en 1976 et qui était en application, bon an mal an. (16 h 30)

Qu'on vienne nous dire aujourd'hui que nous sommes corporatifs, qu'on vienne nous dire aujourd'hui que nous sommes des syndicats égoïstes et qu'on vienne nous dire aujourd'hui qu'on a mis des familles au chômage ou au bien-être social, je dois vous dire, M. le député, que ce n'est pas cette opinion qu'on a de nous-mêmes. L'opinion qu'on a de nous-mêmes, c'est qu'également on a fait notre part dans la relance de l'économie dans les années les plus difficiles au Québec, comme nos confrères de la construction l'ont fait, avec leur régime de retraite, pour Corvée-habitation. On a fait chacun notre part. Pourtant, ce ne sont sûrement pas nos confrères de la construction qui ont empêché les entrepreneurs d'utiliser le maximum de monteurs prévus, ce n'est sûrement pas eux. Là-dessus, on vous dit que la lettre d'entente a permis l'utilisation de plus que les quotas initialement prévus. Cette lettre d'entente a été conclue avec Hydro-Québec dans un esprit bien particulier, alors qu'Hydro-Québec relançait l'économie, injectait de nouveaux capitaux dans l'économie. Il m'apparaît important de ramener cela à cette dimension et de dire qu'Hydro-Québec a fait sa part, que les syndicats de la construction ont fait leur part dans la relance de cette économie, que les syndicats d'Hydro-Québec ont aussi fait leur part dans la relance de cette économie. Les monteurs entrepreneurs ont participé à l'amélioration de la qualité du réseau de distribution. Cela fait en sorte qu'on va être rendus à la fin du programme avec un réseau hydroélectrique de distribution avec une qualité de beaucoup supérieure à ce qu'elle était de façon à priver le moins possible la population du service de l'électricité à cause de pannes ou de toutes sortes d'événements.

Je pense, M. le député, que l'intention était, au départ, très louable et c'est la conséquence du fait qu'on a amélioré un réseau, qu'on n'a plus nécessairement besoin d'autant de personnes pour en construire, mais qu'on va avoir besoin de monde pour les entretenir. Ce sont ces éléments qui nous ont amenés à vous faire, dans notre mémoire, une des deux recommandations.

M. Gauthier: Je vous remercie pour l'instant.

Le Président (M. Charbonneau): M, le député de Vimont.

M. Théorêt: Merci, M. le Président. Je vous demanderais si vous voulez bien essayer, dans les questions qui vont suivre, étant donné que plusieurs députés veulent intervenir du côté ministériel, de raccourcir les réponses.

J'aimerais, dans un premier temps, relever deux réponses que vous avez faites à la suite des questions posées par le député de Roberval. Si j'ai bien compris, vous avez mentionné que le nombre d'emplois était gelé avant le programme PAQS.

M. Chabot: Je m'excuse, M. le député, c'est l'embauche qui était gelée.

M. Théorêt: L'embauche. D'accord! Alors, dans le rapport déposé dont HydroQuébec va nous parler demain, de 1978 à 1986 inclusivement, si on prend les corps de métiers, les chiffres passent de 5039 à 5489,

en connaissant des croissances annuelles. J'aimerais que vous m'expliquiez les données d'Hydro-Québec concernant votre déclaration que l'embauche était gelée avant le programme PAQS. D'autre part, également, si je ne me suis pas trompé - vous me corrigerez si j'ai mal compris - vous avez mentionné, en réponse au député de Roberval, que les emplois temporaires avaient effectivement augmenté ces dernières années. Or, toujours dans le même mémoire d'Hydro-Québec à la page 9, la direction d'Hydro-Québec déclare qu'au cours des dernières années le nombre d'employés temporaires à l'exploitation n'a pas augmenté globalement. En fait, il passait à 2326 années-personnes, comparativement à 2520 années-personnes en 1982. Or, dans un premier temps, est-ce que vous pouvez m'expliquer ces contradictions, à tout le moins?

M. Chabot: La réponse à votre première question sur l'augmentation de l'emploi parmi des emplois-métiers, je pense que c'est ce que vous m'avez mentionné: Vous faites effectivement référence à l'ensemble des emplois-métiers, la lettre d'entente PAQS, elle, est exclusive, parce que c'est cela qui nous préoccupe particulièrement, à ce qu'on sent, à des monteurs. Je vous dis que, à ce moment-là, dans ces années-là, l'embauche était gelée parmi les monteurs. Il y a probablement eu des ouvriers d'entretien d'embauchés, il y a probablement eu des électriciens d'appareillage, des mécaniciens de véhicules ou des opérateurs de réseaux, ce sont tous des emplois à l'intérieur de ce même syndicat. Ce que je vous disais, c'est que, globalement, l'embauche concernant les monteurs dans les années en question était gelée. Si vous me dites qu'il y a eu, à toutes fins utiles, 400 emplois additionnels à l'intérieur d'une période de huit ans dans la même section locale, ce qui représente 50 emplois par année sur une période de huit ans, à l'intérieur d'un syndicat qui regroupe l'ensemble des emplois de métiers, il est alors probable qu'il y a eu une augmentation parmi les monteurs, dans une proportion minime. Ce qui, à toutes fins utiles, correspond à de l'embauche gelée dans ces emplois-là.

À votre deuxième question je vais répondre par un exemple, pour essayer d'illustrer ce que je veux dire. Chez les employés temporaires parmi les techniciens d'Hydro-Québec, on retrouvait en 1985, bon an, mal an, plus ou moins 5 techniciens temporaires, sur une possibilité de 1800. En 1987, on est rendu à 212 techniciens temporaires, sur une possibilité de 1900. C'est une proportion évidente et c'est ce même phénomène, à une autre échelle, qu'on a retrouvé dans chaque section locale dans les dernières années, concernant l'emploi temporaire.

M. Théorêt: Mais vous ne contestez pas les chiffres de décroissance de 1982 à 1986 que je viens de vous citer. En fait, c'est Hydro-Québec que je cite.

M. Chabot: Il y a eu décroissance des effectifs. Il y a eu des programmes d'incitation au départ volontaire et il y a eu, si ma mémoire est fidèle, entre 1000 et 1500 départs volontaires. Ces gens-là ont quitté Hydro-Québec et ils n'ont pas été remplacés.

M. Théorêt: Pouvez-vous me confirmer ou m'infirmer, en ce qui concerne les monteurs de lignes, que de 1983 à aujourd'hui le nombre est passé de 1673 à 1778? A-t-on effectivement connu une augmentation depuis 1983 en ce qui concerne les monteurs de lignes internes?

M. Chabot: Depuis 1983, c'est bien cela?

M. Théorêt: Depuis 1983, effectivement.

M. Chabot: Cela peut représenter effectivement une augmentation de 100 monteurs de lignes de 1983 à 1987. Il est possible que cela corresponde au gel de l'embauche des années difficiles, puisque ces personnes ont été embauchées dernièrement, plutôt vers l'année 1987 que vers l'année 1983.

M. Théorêt: D'accord. Alors, il y a eu effectivement augmentation. Dans un deuxième ordre d'idées, j'aimerais vous demander ceci: Dans l'article 34, il est spécifié qu'Hydro-Québec pourra recourir aux services à forfait en cas de panne si des employés ne sont pas disponibles dans un endroit donné. Comment interprétez-vous cet article? Comment devons-nous interpréter cet article, dans un premier temps?

M. Chabot: Cet article signifie que, dans l'éventualité d'une panne, Hydro-Québec fait appel - cela a toujours été ainsi - à son personnel régulier. Si l'envergure de la panne dépasse le nombre d'employés disponibles, à ce moment-là, l'article de la convention collective vient dire: Utilisons les services du personnel régulier d'Hydro-Québec, dont la compétence a été prouvée, dont l'efficacité a également été prouvée, pour réparer ces pannes dans les secteurs avoisinants. Le secteur avoisinant Hull n'est pas le secteur de Trois-Rivières. Par exemple, le secteur avoisinant Montréal pourrait aussi bien être Laval que Saint-Maxime, c'est-à-dire la rive sud. Il y a un pont entre les deux.

M. Théorêt: Vous savez que, quand il y a une panne, surtout une panne majeure, la population est inquiète. Elle veut absolument que ces pannes soient réparées le plus rapidement possible. Je pense donc que la population devrait être en droit de connaître les priorités des syndicats dans ces cas-là. Qu'est-ce qui est prioritaire pour vous? Est-ce une réparation rapide des pannes pour le mieux-être de la population? Est-ce le fait de faire travailler à tout prix vos membres qui viennent d'autres régions plus éloignées, ce qui peut occasionner par le fait même -et cela l'a fait, je pense, dans le passé, des délais aux réparations ou est-ce encore le fait de garder les sommes associées à l'accumulation de temps supplémentaire? Quels quels sont les critères qui dirigent les priorités de vos syndicats?

M. Chabot: C'est très simple, M. le député, les critères qui dirigent nos priorités sont le rétablissement du service à la population. C'est trop facile de prétendre que nous souhaitons beaucoup plus faire venir des gens de Trois-Rivières pour aller réparer une panne à Hull alors qu'on ne va pas fouiller vraiment ce qui s'est passé.

Il y a des limites dans l'addition de personnel à cause de la réparation d'une panne. Si on fait référence à ce qui s'est passé au mois de juillet à Montréal, ce qui n'a pas été mentionné, c'est qu'on n'avait plus à Hydro-Québec d'équipements et de matériel pour faire les réparations. Il y avait du personnel pour travailler autant chez les employés d'Hydro-Québec que chez les entrepreneurs, quoique les entrepreneurs étaient en vacances. Il y avait du personnel, mais on manquait de transformateurs. HydroQuébec l'a publié dans sa revue interne Hydro-Presse. Ces gens ont été obligés de faire ouvrir une compagnie qui fabrique des transformateurs, pour des livraisons spéciales. Ce sont des délais complètement en dehors du contrôle des gens qu'on représente.

Il y a cela qu'il faut considérer dans les délais associés à une panne et il y a aussi d'autres choses importantes à considérer, comme la limite à la supervision de tous les travailleurs qui sont en train de réparer les pannes. Or, Hydro-Québec atteint, à un moment donné, la saturation en termes de supervision et on ne peut plus dépasser cela, il faut embaucher d'autres gens. Ces équipes doivent être coordonnées.

M. Théorêt: Je connais et, évidemment, nous connaissons tous votre préoccupation pour la sauvegarde des emplois de vos membres et ce sera ma dernière question. Quelle est la différence pour vous entre un travailleur membre d'un syndicat affilié à la FTQ, père d'une famille de deux enfants, et un père d'une famille de deux enfants membre de la FTQ qui, lui, travaille pour un entrepreneur privé. Quelle est la différence?

M. Chabot: Écoutez, ce sont deux pères de famille avec des responsabilités qui ont un emploi et qui ont un syndicat pour défendre leurs intérêts respectifs.

Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: M. Chabot, ma première question est la suivantes Le temps que le programme a existé, est-ce que cela a occasionné des mises à pied chez vous? Le fait de baisser le quota d'hommes, des scus-contractants, est-ce que cela a occasionné de l'embauche chez vous?

M. Chabot: C'est prévu dans la lettre d'entente.

M. Chevrette: II y aura donc plus d'embauche chez vous.

M. Chabot: Ce n'est pas qu'il y aura plus d'embauche, le fait de passer à 1000 pour une période temporaire et de revenir à la fin de la période temporaire en question à 500, cela baisse l'utilisation de sous-traitants. Les effectifs permanents, dans la même lettre d'entente, on prévoit qu'ils vont augmenter, évidemment, pour faire l'entretien d'un tout nouveau réseau.

M. Chevrette: Donc, les salariés risquent d'être embauchés à la suite de l'application intégrale de l'article 34, ou de la lettre d'entente telle que...

M. Chabot: C'est déjà commencé.

M. Chevrette: Bon. Il risque d'y avoir -je ne sais pas, moi - 200 à 300 embauches. Si c'était 720, par exemple, ce serait 220.

M. Chabot: Écoutez, le chiffre qu'on connaît à ce jour, qui est prévu dans la lettre d'entente, est de 200.

M. Chevrette: Si on était dans l'entreprise privée et non pas dans le secteur public et parapublic, si on achetait l'entreprise privée, il y aurait l'article 45 du Code du travail qui dirait: L'embauche va automatiquement à ceux qui ont été achetés, c'est-à-dire qu'ils ont eux aussi un syndicat et ils sont représentés. Je veux faire un parallèle pour bien vous le démontrer parce que vous avez fait une ouverture dans votre mémoire qui m'avait échappé, c'était l'embauche prioritaire selon l'ancienneté des travailleurs chez les sous-traitants. (16 h 45)

M. Chabot: Il y a des nuances.

M. Chevrette: J'ai cru comprendre cela dans votre conclusion tantôt.

M. Chabot: C'est cela.

M. Chevrette: Qu'est-ce qui nous certifie à ce moment-ci... Il y a 200 ou 300 travailleurs qui sont sur le carreau et, en vertu de la loi ou du cadre de négocation de la fonction publique, qui n'est pas celui du Code du travail, soit dit en passant, l'article 45 du Code du travail ne s'applique pas pour ces travailleurs... Il n'y a aucune clause... Vous n'avez pas signé une clause, vous, disant que les effectifs additionnels qui vont venir gonfler nos rangs devront venir des sous-traitants. À ce que je sache, ce n'est pas la lettre d'entente.

M. Chabot: Non.

M. Chevrette: La lettre d'entente spécifie qu'Hydro doit augmenter son nombre proportionnellement à la diminution des sous-traitants, ou à peu près; comme esprit, non pas comme libellé, mais comme esprit. Vous êtes deux syndicats d'une même centrale. Vous n'avez pas cru bon d'introduire dans votre convention la protection des salariés qui, entre vous et moi, s'inscrivent à l'inverse de la fonction publique et sur cela, je vais m'expliquer.

Quand on parie de sous-traitance dans les hôpitaux, cela n'existait pas, c'est du nouveau et les gens se battent pour qu'il n'y ait pas de sous-traitance dans les hôpitaux. Avant qu'existe Hydro-Québec, il existait des entreprises qui faisaient affaire avec des travailleurs. Il y a des travailleurs qui ont plus d'ancienneté que chez vous. C'est un peu à l'inverse, c'est un phénomène inverse qui s'est produit. C'est une étatisation qui s'est produite avec Hydro-Québec. Puis, vous nous demandez comme parlementaire...

Moi, j'ai un passé syndical, je me dis que le gars qui a travaillé pour la Shawinigan Water and Power ou bien comme sous-traitant pour la Shawinigan Water and Power - il serait vieux pas mal, mais quand même, il y en a qui ont beaucoup d'ancienneté chez les sous-traitants - il n'a plus aucune protection. lis n'ont plus aucune sécurité d'embauche contrairement à l'ouverture que vous faites, par rapport au fait, je parle, par rapport à la lettre d'entente. Il n'y a aucune priorité d'embauche au moment où on se parle. Je disais ce matin, et je le répète: II me semble que votre objectif ne doit pas être et doit être loin d'être celui de priver des individus d'un emploi qu'ils exercent depuis des années. Cela ne doit pas être l'objectif de votre entente puisque vous ouvrez la porte, à la fin de votre mémoire, disant que ces gens devraient être engagés selon leur ancienneté. Au moment où on se parle, comme il n'y a pas entente entre les syndicats, pour avoir convoqué une commission parlementaire, le ministre doit constater qu'il y a quelque chose qui se brasse. Qu'est-ce que je réponds au gars de chez nous qui vient me voir et me dit: Moi, je travaillais pour Tucker et je travaille maintenant pour - je ne me rappelle pas plus le nom que ce matin - cela fait 20 ans que je travaille là. Et il voit des gars embauchés à Hydro-Québec comme monteurs de lignes, plus jeunes que lui, avec moins d'expérience que lui at lui, il est sur le carreau chez lui. Que répondriez-vous à ce gars si vous étiez à ma place?

M. Chabot: Vous n'êtes pas sans savoir, M. Chevrette, la difficulté que peut représenter la négociation de conventions collectives. Vous n'êtes pas sans savoir non plus ce que cela peut représenter comme difficulté que de restreindre des droits de gérance d'un employeur. Vous n'êtes surtout pas sans savoir la difficulté que cela peut représenter que de négocier avec l'employeur l'embauche de nouveau personnel. C'est une chose. Pour répondre à votre deuxième question, s'il y a des personnes qui sont refusées, des monteurs de lignes qui sont refusés à Hydro-Québec en raison de leur âge, l'article 9 de la charte prévoit qu'on ne doit pas exercer de discrimination en fonction de l'âge. C'est ma réponse, à partir du moment où les conventions collectives ne contiennent pas de telles dispositions permettant l'embauche, où la difficulté de négociation de telles dispositions est énorme. C'est ma réponse. La journée où il y aura de telles dispositions, je suis convaincu qu'une personne qui serait refusée en raison de son âge va venir nous voir et qu'on va la représenter là où on devra la représenter.

M. Chevrette: M. Chabot, puisque vous savez qu'il y a des gens assez âgés dans cela et compte tenu du fait que cela ne prive pas d'emploi ou que cela n'insécurise pas vos employés ou ceux que vous représentez, c'est-à-dire vos syndiqués, à partir du moment où cela ne met en péril aucun emploi d'aucun de vos membres, quel est votre acharnement, parce que vous semblez être déterminés, ou votre volonté ferme de priver potentiellement de travail un groupe assez important, qui a de l'expérience? Quel est votre objectif?

M. Chabot: Vous nous mettez tous les péchés du monde...

M. Chevrette: Non, ce ne sont pas des péchés, on discute là.

M. Chabot: II y a des choses qui ne sont pas comprises. C'est trop facile, justement, on a l'impression qu'on nous met tous

les péchés du monde sur les épaules. La lettre d'entente PAQS a justement permis l'embauche supplémentaire de ce qui existait. N'eût été de PAQS, 350 personnes-années de moins auraient été utilisées. Est-ce qu'on aurait attaqué Hydro-Québec pour lui dire: Cela n'a pas de bon sens, ce n'est pas social; il y a du monde qui est en chômage? Il y a toutes sortes de personnes qui sont malheureusement en chômage.

Il y a eu de l'injection de faite. II y a des gens qui sont venus travailler. Maintenant, le travail diminue. II y a moins d'ouvrage. Ii y a moins de nécessités d'utilisation. On va, par contre, prévoir plus d'emplois permanents. Il y a, actuellement, cela se passe ces jours-ci dans un secteur de la région de Montréal, douze monteurs d'entrepreneurs qui vont entrer à HydroQuébec. C'est actuel, cela. Or, se faire dire: Écoutez, qu'est-ce que vous faites? Vous mettez des familles dans la rue. Je pense qu'on n'a pas mis des familles dans la rue. Ce n'est pas l'objectif qu'on poursuit.

L'objectif qu'on poursuit, c'est de défendre, évidemment, l'intérêt des membres qu'on représente, l'intérêt social et économique et, dans toute cette dimension, je pense qu'on a fait nos preuves, à cet égard-là.

M. Chevrette: Mais, M. Chabot, je veux bien comprendre. Il n'est pas question de vous lancer des péchés. C'est une question de fait où l'on se retrouve avec deux syndicats affiliés à une même centrale syndicale, quand même. Ce que je vous dis, moi, c'est ceci: vous êtes deux syndicats affiliés à une même centrale et vous avez la chance de protéger, tous les deux, l'ensemble de vos membres syndiqués. Mais, en vertu d'une clause obtenue en 1976, en catastrophe, avant l'élection du 15 novembre 1976 - je me le rappelle, c'est Jean Cournoyer qui l'a signée avec vous - ...

M. Chabot: Exactement.

M. Chevrette: Bon. Je me le rappelle très bien. Donc, à partir de cette entente signée en catastrophe en 1976, on risque et c'est cela, le risque... Moi, c'est simplement ce que je veux vous faire évaluer. J'aimerais vous dire: Comment réagissez-vous devant le risque? Deux syndicats affiliés à une même centrale, vous avez l'opportunité de rendre sécuritaire l'ensemble du gâteau. Vous venez d'avoir l'assurance qu'il n'y avait pas privatisation. S'il était allé sur cette piste-là, on vous suivait à mort. Donc, au moins, cela a l'air acquis. C'est la première chose concrète - puis bang! - qu'on a eue, et catégorique, du ministre.

À partir de ce fait-là, vous ne pensez pas qu'on aurait avantage à trouver une solution syndicale à votre problème, que les deux syndicats, en l'occurrence, s'assoient avec beaucoup de maturité pour ne pas laisser le gouvernement trancher? II n'y a pas un proverbe qui dit qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même?

M. Chabot: M. le député, on n'a jamais prétendu que les deux syndicats à l'intérieur de la FTQ n'étaient pas à la recherche de pistes de solutions. On n'a jamais prétendu cela. Si l'on est confrontés à se présenter devant vous, c'est à la demande d'associations non pas syndicales, mais patronales, qui voient malheureusement, par la fin du programme PAQS, évidemment, les travaux se terminer.

On ne prétendra pas qu'il y a une chicane syndicale, parce que la chicane syndicale, ce n'est pas ce dont il est question. On a une centrale syndicale et cela nous permet de se parler. Alors, à partir de là, la commission parlementaire, devant laquelle on se présente, a été obtenue par des pressions de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. C'est devant cette même commission parlementaire-là qu'on vient vous présenter notre point de vue. Et ce point de vue efface le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec, on vous l'a présenté. On n'est pas, ici, en train de vous indiquer qu'il y a une chicane entre deux syndicats de la FTQ. Ce n'est pas le cas.

On vient vous présenter notre position; ils viennent vous présenter la leur. On a une centrale syndicale qui permet à des syndicats de se parler. On n'a jamais prétendu qu'il n'y avait pas, à l'intérieur de la FTQ, des discussions pour essayer d'envisager des pistes de solutions.

M. Chevrette: J'ai l'habitude de passer directement à la pratique. Pour moi, des discours théoriques, je ne suis pas sûr que cela fasse avancer quelque chose. Je voudrais vous poser une seule petite question. S'il n'y avait pas d'article 34 ou de lettre d'entente, est-ce qu'il y aurait un membre syndiqué, chez vous, qui serait congédié?

M. Chabot: C'est possible parce qu'à l'intérieur de l'article 34 il est prévu que le fait de donner un contrat en sous-traitance ne peut avoir pour effet de causer une mise à pied. Si on l'enlève cela pourrait arriver.

M. Chevrette: Ne peut avoir pour effet... Répétez donc.

M. Chabot: Dans l'article 34.1, les conventions collectives prévoient que le fait de donner un contrat ne peut causer de mise à pied. Alors, si on enlève l'article 34, pour répondre à votre question, oui, cela peut arriver.

Le Président (M. Charbonneau): Cela termine le temps qui était octroyé à l'Opposition.

M. le député de Saguenay, il reste quelques minutes.

M. Maltais: Merci, M. le Président. À la page 24 de votre mémoire, vous indiquez, pour ce qui est du contrôle de la qualité qu'Hydro-Québec n'a pas les moyens statistiques pour s'assurer le contrôle de la qualité des travaux effectués par les sous-traitants. Que voulez-vous dire par là, exactement? Est-ce que les travaux faits par les sous-traitants peuvent être dangereux? Est-ce que les travaux sont mal faits ou je ne sais quoi? Que voulez-vous dire exactement par cela?

M. Chabot: Ce qu'on dit, c'est que tout gestionnaire ou tout fonctionnaire expérimenté pourrait expliquer comment on atteint rapidement des limites lorsqu'il s'agit de contrôler la qualité des travaux effectués par des sous-traitants. On ne peut tout contrôler. C'est ce qu'on veut dire. Lorsqu'on se retrouve dans une situation où une entreprise obtient un contrat d'Hydro-Québec et qu'on confie à une filiale de cette même entreprise un contrat d'inspection des travaux, nous disons que le contrôle a ses limites.

M. Ciaccia: M. le Président, il reste quelques minutes.

Le Président (M. Charbonneau): Quelques minutes. Si vous en prenez moins, il en restera quelques-unes ou peut-être une pour un de vos collègues.

M. Ciaccia: Très brièvement. Vous avez mentionné que, sans l'article 34, il est possible d'avoir des congédiements. Avant la lettre d'entente qui baisse les effectifs de sous-traitance de 720 à 500 personnes-années, effectivement, est-ce qu'il n'y a jamais eu des congédiements à Hydro-Québec dus à la sous-traitance?

M. Chabot: Non. Cette supposition de convention était déjà existante.

M. Ciaccia: Alors, il n'y a jamais eu de congédiements parce qu'ils ont donné de la sous-traitance?

M. Chabot: Non, on avait prévu cela dans les textes de conventions.

M. Ciaccia: Une des grandes préoccupations que nous avons, ce n'est pas de dire qu'il faut que des entrepreneurs fassent des profits, ce n'est pas la préoccupation qu'on a. On parle d'une expertise des ingénieurs-conseils et on va examiner cela tantôt. Mais on parle aussi de la main-d'oeuvre. C'est une de nos préoccupations. On est particulièrement préoccupés par ceux qui vont se trouver sans emploi. Je veux vous demander, parce que vous avez mentionné qu'il n'y a pas eu de congédiements à Hydro-Québec qui étaient dus à la sous-traitance, si vous êtes prêts à collaborer pour trouver une solution pour ceux qui vont se trouver sans emploi parce qu'on baisse de 720 à 500 personnes-années, des pères de famille, des gens qui font ce métier qui existe seulement à Hydro-Québec. C'est un monopole, il n'y a pas d'autres monteurs de lignes. Est-ce que vous seriez prêts à collaborer pour trouver une solution à ce problème? (17 heures)

M. Chabot: Dans une de nos recommandations, M. le ministre, soit la deuxième, on dit qu'Hydro-Québec prévoit, par son plan de développement, maintenir 22 000 emplois permanents. Dans le plan de développement d'Hydro-Québec, présenté au mois de mars dernier, on indique un pourcentage de croissance de l'emploi, permanent comme temporaire. À ce moment-là, je pense qu'on a là une piste permettant d'accorder aux monteurs d'entrepreneurs un emploi à Hydro-Québec.

M. Ciaccia: Est-ce que vous nous dites qu'on devrait leur trouver d'autres choix? C'est une recommandation un peu vague, ce n'est pas assez spécifique pour ceux qui vont se trouver sans emploi dans les mois qui suivent.

M. Chabot: Les indications qu'on a, si Hydro-Québec a du travail à faire effectuer et qu'elle a besoin de personnel chez les monteurs d'entrepreneurs, si elle a du personnel parmi ces sous-traitants, des gens qui sont formés, pourquoi ne pas les embaucher? Mais la question que vous me posez, c'est: Est-ce qu'on peut imaginer des pistes ou est-ce qu'on est prêts à faire quelque chose? Parce que l'employeur, de son côté, nous dit qu'il n'y aura plus de demande ou de nécessité d'emplois comme dans les années passées. S'il y a une nécessité d'emplois, comme les années passées, et que cela nécessite des embauches de plus, je pense que la recommandation qu'on fait à Hydro-Québec pourrait s'insérer à l'intérieur de ce que j'appellerais une solution.

M. Ciaccia: Bon, je pense que votre position est claire.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Bertrand, avec consentement, on pourrait peut-être... Je sais qu'il y avait une question. Cela va. Alors, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Oui, brièvement parce que le temps est déjà écoulé. Puisqu'on a devant nous les présidents des employés de métiers, des employés de bureau et des techniciens, j'aurais aimé, pour des fins de compréhension et pour les travaux de cette commission? qu'on puisse avoir quelques chiffres très précis. D'abord, M. Cuerrier, qui est président des employés de métiers. Dans le groupe des employés de métiers, on retrouvait, dans les dernières statistiques de 1985, les employés permanents, en 1985, au nombre de 5403 et en 1986, au nombre de 5484. J'aurais aimé avoir, pour 1987, le nombre d'employés permanents et aussi, si vous l'avez, le nombre d'employés temporaires pour les deux dernières années. Est-ce que ces chiffres sont disponibles maintenant ou pourraient nous être fournis?

M. Cuerrier (Charles): Disons que ces chiffres pourraient vous être fournis. Pour donner des chiffres précis, il faudrait quand même les trouver, ils sont faciles à trouver, remarquez bien. On pourrait vous les fournir assez rapidement.

M. Parent (Bertrand): Est-ce qu'il serait possible de les avoir, M. le Président, pour demain matin, pour la continuation des travaux? Je demanderais la même chose M. André Charbonneau, en ce qui concerne les employés de bureau, et à M. Desrosiers, en ce qui concerne les techniciens, à partir du tableau, entre autres, qui se retrouve dans le mémoire d'Hydro-Québec, à la page 9. Alors, on a les chiffres jusqu'à 1986. J'aimerais avoir, en ce qui concerne les employés permanents, les chiffres pour 1987, autrement dit, pour maintenant: Qu'est-ce qu'on a comme employés permanents par groupe, à partir des données que vous avez, et aussi, comme employés temporaires, on n'a pas cette référence-là. Vous avez apporté quelques chiffres tantôt en ce qui concerne les techniciens: 5 par rapport à 200. Ce serait intéressant d'avoir ces comparaisons 1986-1987 pour les temporaires aussi. Si c'était possible de nous remettre cela demain matin, pour la continuation des travaux, cela risque de nous être très utile. Cela va, M. le Président? Les réponses devraient venir incessamment.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Une dernière question et une dernière réponse brève à la question du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Baril: Je suis chanceux, le dernier!

M. Chabot, j'aimerais aborder un petit détail, à la page 25 de votre mémoire. Vous faites référence aux "conditions de travail souvent moins stables constatées chez les sous-traitants".

Or, précédemment, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec nous a précisé, ce matin, que les monteurs de lignes embauchés dans le secteur privé ne souffraient pas d'une rémunération inférieure à celle des monteurs de lignes d'Hydro-Québec. De plus, l'association affirme que l'on accorde beaucoup de soin à la santé et à la sécurité au travail des travailleurs du secteur privé. Qu'est-ce que vous entendez par la précarité des emplois dans la firme de sous-traitance?

M. Chabot: Ce qu'on dit, c'est qu'on fait référence à la situation de l'emploi précaire au Québec. Il y a eu des études qui ont démontré qu'il y avait une forte proportion, entre autres, de fonctionnaires, autour de 50 %, qui occupent un emploi précaire par leur statut, qui est autre que permanent. Ces études révèlent également qu'un tiers des professionnels, au gouvernement, sont des contractuels. Elles révèlent également que 53 % des employés d'hôpitaux sont des employés sur appel, des employés temporaires, des employés à temps partiel. C'est ce à quoi on veut faire référence quand on vous parle de la situation de l'emploi précaire au Québec. On ne veut pas que vous associiez la précarité de l'emploi à des conditions de travail, ce n'est pas en ce sens.

M. Baril: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Je voudrais vous remercier, M. Chabot, ainsi que vos collègues, d'avoir participé a cette consultation particulière. Pour le reste, on verra la suite qui sera donnée à ces travaux. Je vous remercie et bon retour.

J'invite maintenant le Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec à prendre place à la table des invités.

Nous poursuivons cette consultation particulière. M. Potvin, je crois que vous êtes le responsable de la délégation. Vous avez vu un peu comment on fonctionne. Vous avez 20 minutes pour votre présentation et le reste du temps est réparti de part et d'autre entre les membres de la commission. Je vous invite à débuter sans plus tarder et à présenter, auparavant, les personnes qui vous accompagnent. Je vous indique que le vice-président de la commission, le député de Vimont, va prendre la barre jusqu'à la fin de la séance. Merci.

Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec inc.

M. Potvin (André): Merci, M. le Président. Il y a, à ma gauche, M. Michel Touchette, secrétaire du syndicat, et, à ma droite, M. Michel Hudon, premier vice-président du syndicat.

M. le Président, M. le ministre,

mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs, au nom des membres du Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec inc., le SPIHQ, je tiens à vous remercier de votre invitation à participer à cette importante consultation. Cet exposé portera principalement sur les principes de base que défend le SPIHQ pour le recours à l'externe par Hydro-Québec.

Mais auparavant, il importe de présenter notre organisme et nos membres. Le SPIHQ a été fondé en 1964. Il représente aujourd'hui plus de 1100 ingénieurs répartis partout en province, ce qui en fait l'un des plus importants syndicats de professionnels au Québec et certainement le plus important syndicat d'ingénieurs.

La compétence des ingénieurs d'Hydro-Québec n'est plus à démontrer. Certaines de leurs réalisations techniques sont mondialement connues et leur ont valu une renommée internationale. Il suffit de penser au réseau de transport à 735 kV considéré comme une des grandes réalisations du génie canadien.

De plus, l'attribution à Hydro-Québec de nombreux contrats internationaux illustre bien la qualité de ses ingénieurs. La compétence de tous les employés d'Hydro-Québec et le résultat de leur travail se manifeste, par ailleurs, en ce moment même, par le fait qu'on puisse tenir une réunion dans cette salle alors que l'énergie servant à l'éclairage est générée à des centaines de kilomètres d'ici.

Bien que la compétence et l'efficacité des employés d'Hydro-Québec soient généralement reconnues, certains travaux de l'entreprise sont confiés à des firmes externes. Deux raisons principales expliquent cela, les pointes imprévues de travail et le manque d'expertise ou de personnel disponible dans certains domaines. Ce recours à l'externe est régi par différentes politiques de l'entreprise dont l'une s'applique aux ingénieurs.

Il existe une politique de recours aux ingénieurs-conseils à Hydro-Québec depuis 1980. À ce moment-là, le SPIHQ avait été consulté pour l'élaboration de cette politique. Il existait alors à Hydro-Québec une volonté de gérer les ressources humaines en réduisant les pointes et les creux d'activités tout en conservant et en développant un savoir-faire suffisant pour préserver la spécificité de l'entreprise et en faire un "propriétaire averti".

Bref, l'évolution de l'entreprise était planifiée. Les années quatre-vingt ont fait place à des changements importants dans l'entreprise: réorganisations, décroissance, décentralisation, mises à la retraite et mises en disponibilité massives. Préoccupés par une gestion à courte vue de la décroissance, les dirigeants d'Hydro-Québec ont négligé les principes directeurs de la politique originale de recours è l'externe.

L'adhésion à des principes de base est essentielle à une utilisation rationnelle des ressources dans l'exécution des travaux d'Hydro-Québec. La discussion et l'évolution de cette politique doivent respecter les intérêts de la communauté, les besoins d'Hydro-Québec et les aspirations de ses ingénieurs.

Pour le SPIHQ, la politique de recours aux ingénieurs-conseils doit poursuivre trois objectifs: premièrement, faire en sorte qu'Hydro-Québec réalise elle-même les activités dont dépendent ses décisions stratégiques; deuxièmement, avoir un savoir-faire suffisant pour qu'Hydro-Québec demeure un "propriétaire averti"; troisièmement, permettre à Hydro-Québec d'exercer un leadership technologique.

Le premier objectif préconisé pour le SPIHQ par la politique est de faire en sorte qu'Hydro-Québec réalise elle-même les activités dont dépendent ses décisions stratégiques. En effet, une part importante des activités réalisées par les ingénieurs d'Hydro-Québec est consacrée à des études, des analyses et des recommandations qui guident, par la suite, la haute direction dans ses prises de décision sur les orientations stratégiques de l'entreprise. Ces recommandations nécessitent la prise en considération par les ingénieurs d'Hydro-Québec d'une foule d'éléments techniques, économiques, sociaux et environnementaux qui doivent être pondérés les uns par rapport aux autres. Cette pondération découle, d'ailleurs, des volontés de la société québécoise traduites dans les orientations gouvernementales.

En pratique, à Hydro-Québec, ces études et analyses de caractère stratégique concernent principalement les activités de planification du réseau, les orientations relatives à l'ingénierie et à la conception des équipements, la recherche et le développement, la normalisation et la gestion du réseau.

Les grandes orientations de l'entreprise quant au développement et à l'affectation de ses ressources découlent de ces études et analyses. Celles-ci constituent le devenir de la collectivité québécoise en matière de développement énergétique. Il est donc inconcevable qu'elles puissent être réalisées ailleurs qu'à Hydro-Québec.

Le caractère stratégique de ces activités et leur importance ne laissent place à aucun compromis. Hydro-Québec doit réserver en tout temps ces études et analyses à son propre personnel.

Récemment, certains signaux ont suscité des inquiétudes parmi les ingénieurs quant à la volonté de l'entreprise de conserver ces travaux stratégiques à l'interne. Ainsi, l'attribution d'un contrat à une firme externe concernant une étude préliminaire aux centrales Chelsea et

Farmers a constitué, pour les ingénieurs d'Hydro-Québec, un dangereux précédent à cet égard.

Le deuxième objectif est d'assurer un savoir-faire suffisant pour qu'Hydro-Québec demeure un "propriétaire averti". Cette notion, intimement liée à la conservation du savoir-faire, fait appel au jugement de l'entreprise dans l'attribution des travaux non stratégiques. En effets Hydro-Québec a le choix de confier ces travaux soit à ses ingénieurs, soit à des firmes externes. (17 h 15)

Cependant, le partage des travaux entre ingénieurs d'Hydro-Québec et ingénieurs-conseils doit respecter les normes qualitatives et quantitatives afin d'assurer à l'entreprise la capacité d'évaluer et de critiquer le travail effectué à l'externe, afin que celui-ci ne soit pas accepté aveuglément. Autrement, il deviendrait trop facile pour une firme de favoriser une solution restrictive mettant en valeur le champ de compétence où elle excelle. Hydro-Québec doit, en somme, demeurer, pour ses travaux confiés à l'externe, un propriétaire averti.

Ce rôle de "propriétaire averti" devient une obligation pour l'entreprise si elle veut répondre le plus adéquatement possible aux besoins et aux attentes de la collectivité québécoise. En effet, Hydro-Québec doit continuellement s'assurer de la sécurité de ses ouvrages, de la fiabilité de son alimentation et de la rentabilité de ses choix. Le traitement inadéquat effectué par l'entreprise pour solutionner des problèmes de fissures encourus au barrage Daniel-Johnson illustre bien cette nécessité de demeurer un "propriétaire averti".

Le troisième objectif préconisé par le SPIHQ pour la politique de recours à l'externe est qu'elle puisse permettre à Hydro-Québec d'exercer un leadership technologique. À cause de sa taille, de sa situation de monopole, des moyens mis à sa disposition et de la configuration particulière de son réseau, Hydro-Québec a, en effet, la responsabilité de développer l'expertise québécoise et d'exercer un leadership en matière d'énergie électrique. Elle doit aussi favoriser l'intégration des technologies nouvelles dans les outils utilisés par son personnel technique. Toutefois, la direction, dans sa planification des ressources humaines, néglige cet aspect.

Depuis quelques années, on constate une tendance de l'entreprise à faire appel à des firmes externes pour la fourniture de biens et de services dans des domaines aussi importants que la conception de nouveaux pylônes, l'utilisation du courant continu, la conception de la sixième ligne de transport ou la traversée sous-fluviale de cette ligne. Les besoins dans ces domaines sont connus depuis longtemps et, pourtant, on doit encore recourir à des tiers faute d'expertise ou de personnel.

Cette situation peut s'expliquer dans le cas de la fourniture de biens. Il faut nécessairement aller chercher ces biens là où ils se trouvent. Mais, le fait pour HydroQuébec de ne pas développer son expertise dans ces nouvelles technologies l'oblige soit à rejeter des solutions innovatrices, soit à consentir des contrats clés en main. Ces contrats entraînent, par la suite, une dépendance d'Hydro-Québec face aux problèmes techniques associés à la mise en service et à l'exploitation de ces équipements.

Ce fut le cas, notamment, au poste Châteauguay où, résultat de l'attribution d'un contrat clés en main, Hydro-Québec a subi, en 1985, une perte de revenus de 140 000 000 $, pertes qui ont continué de s'accumuler en 1986.

Lorsqu'il s'agit de nouvelles technologies, la négligence d'Hydro-Québec de développer sa propre expertise permet aux firmes externes auxquelles les contrats sont octroyés de développer la leur aux frais de l'entreprise.

Cette planification à courte vue entraîne une gestion de panique et vient ainsi entacher la réputation internationale d'Hydro-Québec. Les gestionnaires de l'entreprise se sont déjà inquiétés de cette situation, mais rien ne semble avoir été fait pour y remédier.

Le SPIHQ juge inacceptable le fait que des experts n'aient pas été formés dans des domaines de première importance pour l'avenir de l'entreprise. Le SPIHQ s'inquiète également de l'effet futur de telles pratiques et de l'absence de volonté d'Hydro-Québec de remédier à cette situation. L'entreprise pourrait, par exemple, inclure, dans les contrats alloués à l'externe, des clauses de transfert de technologie. Hydro-Québec doit maintenir sa compétence à un niveau suffisamment élevé pour ne pas être à la merci de quelques firmes, si compétentes soient-elles.

L'adhésion aux objectifs préconisés, la poursuite de ces objectifs, l'application adéquate de la politique ont pour corollaire immédiat et direct une planification structurée des ressources humaines. Cette planification doit, en tout temps, assurer l'entreprise qu'elle dispose du personnel requis pour la réalisation des activités stratégiques, qu'elle développe son savoir-faire et qu'elle reste un chef de file en matière technologique.

Afin de réussir cela, il est indispensable pour la direction de planifier adéquatement la gestion de ses pointes de travail. Le SPIHQ reconnaît et a toujours reconnu qu'il y a des pointes de travail imprévisibles et des cas où l'entreprise ne dispose pas des délais nécessaires pour développer sa propre expertise. En ce sens, le recours à des

firmes d'ingénieurs-conseils est justifié à certaines occasions et le SPIHQ ne s'y oppose pas. Toutefois, le SPIHQ s'oppose vivement à ce que le recours aux ingénieurs-conseils devienne une obligation économique ou politique ou encore une solution de dépannage résultant de l'absence d'une planification de la main-d'oeuvre. Un tel recours institutionnalisé ne peut que conduire à des excès dans l'attribution de contrats à l'externe. Il est primordial d'éviter qu'Hydro-Québec ne devienne une entreprise vouée à ce que l'on peut appeler le "bien-être social corporatif". Si des firmes d'ingénieurs-conseils ont pu se développer grâce à HydroQuébec, c'est tant mieux, mais il n'appartient pas à Hydro-Québec et à ses clients de subventionner ces entreprises.

Le recours à l'externe représente annuellement un minimum de 20 % des travaux de génie effectués pour HydroQuébec et ce, même pendant les années du plus fort ralentissement des grands travaux. Ce recours étant continuel, on ne peut plus l'expliquer par les pointes imprévues de travail, mais par une volonté avouée de la direction à cet effet. Pourtant, la direction n'a pas hésité à procéder à des mises en disponibilité massives sous prétexte d'un manque de travail, en 1983, pour ensuite confier des projets à l'externe, alléguant, alors le manque de ressources disponibles.

En plus de gérer efficacement ses pointes de travail, il est essentiel pour Hydro-Québec de renouveler son personnel par l'embauche de nouveaux diplômés. Le SPIHQ est préoccupé par le développement professionnel harmonieux des ingénieurs et de l'entreprise. Toutefois, le SPIHQ a constaté que le manque de planification d'Hydro-Québec en matière de ressources humaines conduisait à des dérogations dans l'application de la politique. En conséquence, le SPIHQ a obtenu de l'entreprise, lors des dernières négociations, l'inclusion de cette politique dans la convention collective et l'établissement d'un mécanisme de consultation concernant l'application de cette politique.

En guise de conclusion, les ingénieurs d'Hydro-Québec sont fiers de leurs réalisations et de l'entreprise qui les emploie. Ils ont, depuis toujours, combattu pour la reconnaissance de leur compétence, que ce soit par l'élaboration d'un plan de carrière permettant la progression dans des domaines techniques ou encore par la promotion basée sur la compétence. Ils désirent également assurer leur expertise dans tous les domaines où ils ont à intervenir.

Pour ce faire, il exigent d'Hydro-Québec un engagement clair sur son soutien à la politique de recours aux ingénieurs-conseils et sur son adhésion aux principes de base de cette politique. Ils réclament aussi une planification efficace des ressources humaines, permettant l'acquisition et le développement du savoir-faire par l'entreprise, tant dans les domaines traditionnels que dans les domaines faisant appel aux nouvelles technologies.

Les ingénieurs d'Hydro-Québec ne s'opposent pas au recours à des firmes d'ingénieurs-conseils lorsque le besoin s'en fait réellement sentir. La cohabitation est passible et même souhaitable, mais elle doit être soumise à certaines règles afin de respecter les intérêts de la communauté, les besoins d'Hydro-Québec et les aspirations de ses ingénieurs.

Les mécanismes actuels de discussion de la politique de recours aux ingénieurs-conseils sont en mesure de permettre l'atteinte d'un équilibre entre l'interne et l'externe dans l'attribution du travail. L'inclusion de la politique dans la convention collective permet d'espérer une gestion juste et efficace de celle-ci. Les ingénieurs d'Hydro-Québec considèrent que des améliorations pourraient être apportées à la politique et à sa gestion par l'entreprise. Ils se montrent toutefois satisfaits des mécanismes actuels de discussion de cette politique et considèrent que le gouvernement ne peut que se montrer, lui aussi, satisfait du travail accompli dans ce sens. La discussion sur cette politique n'est cependant pas terminée. Le SPIHQ demeure disponible, en tout temps, pour des échanges plus soutenus avec les autorités gouvernementales.

Je vous remercie de votre attention et nous sommes prêts à répondre à toutes vos questions.

Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie, M. Potvin. Je cède donc immédiatement la parole au ministre. M. le ministre.

M. Ciaccia: Merci! Je vous remercie de l'exposé, que vous venez de nous faire, M. Potvin. Il me semble établir clairement le point de vue de votre syndicat sur la question du faire-faire quant aux travaux touchant les ingénieurs d'Hydro-Québec.

Si je comprends bien, vous êtes les interlocuteurs privilégiés des ingénieurs-conseils dans le cadre de l'exécution des mandats confiés par Hydro-Québec. Cette relation prend, cependant, des formes multiples et varie selon le type de contrat. Vous nous faites remarquer l'importance des réalisations des ingénieurs d'Hydro-Québec. Ceux-ci, au cours des années, ont développé une expertise qui leur a valu une renommée internationale.

Au sein d'une politique de recours aux ingénieurs-conseils, vous établissez trois objectifs à poursuivre. Le premier concerne la nécessité pour Hydro-Québec de réaliser

les activités dont dépendent ses décisions stratégiques. En effet, ces activités sont à la base des décisions sur le devenir énergétique du Québec. Le deuxième objectif concerne le maintien d'un savoir-faire suffisant au plan des études non stratégiques. Il s'agit, en fait, de ne pas être à la merci de l'externe pour la fourniture de services et de conserver, en même temps, une capacité de juger de la qualité et de la pertinence des travaux qui sont réalisés pour le compte d'Hydro-Québec. Votre dernier objectif concerne la responsabilité qu'a Hydro-Québec d'exercer un leadership technologique. Et, afin de rencontrer ces objectifs, vous estimez nécessaire qu'il y ait une politique structurée de gestion des ressources humaines. Vous avez constaté un manque de planification en cette matière par la direction d'Hydro-Québec. Ceci aurait conduit à des dérogations dans l'application de la politique de recours aux ingénieurs-conseils qui existe à Hydro-Québec depuis 1980. Et, devant cette situation, votre syndicat a demandé et obtenu, lors des dernières négociations, l'inclusion à votre convention collective de cette politique. Donc, si j'ai bien compris, le nouvel article 34 de votre convention devrait éviter les dérogations que vous avez connues. Pouvez-vous me dire en quoi ces dérogations étaient si importantes que vous avez jugé nécessaire de demander l'introduction de dispositions sur le travail à forfait dans votre convention? Est-ce que ces dérogations étaient nombreuses? Quel genre de travaux touchaient-elles? Et est-ce que je pourrais comprendre, finalement, qu'avec l'article 34 il n'y aura plus de dérogations du type de celles que vous avez connues dans le passé?

M. Potvin: Pour répondre à votre question, il faut être bien conscient du climat qui existait chez les employés d'Hydro-Québec en 1982. L'entreprise, après les travaux de la Baie James, se retrouvait dans une phase de réorganisation et plusieurs employés - environ 1200 employés de l'entreprise, dont environ une centaine d'ingénieurs, particulièrement au groupe équipement - se retrouvaient du jour au lendemain mis en disponibilité et relocalisés à l'intérieur de l'entreprise, un peu partout dans la province, dans des domaines de travail dans lesquels ils n'avaient pas été initialement formés. On notait une forte diminution du groupe équipement, groupe qui avait été historiquement celui qui construisait et qui s'occupait des grands travaux. Donc, chez les ingénieurs, il y avait une crainte massive de voir que cette tendance était une volonté d'Hydro-Québec de limiter au minimum les ressources internes pour pouvoir faire appel à peu près uniquement à l'externe en utilisant tout simplement ses ingénieurs comme des gestionnaires de projets.

Dans ce contexte, les signes qu'on a découverts, c'est-à-dire, les signes de dérogation par rapport à la politique, sans être très nombreux, portent sur deux domaines particuliers: le domaine des études stratégiques, qui doivent rester à l'intérieur, et le domaine de la notion de propriétaire averti. Dans ces deux domaines, les exemples que l'on peut trouver de dérogations sont minimes, mais ont été perçus par les ingénieurs comme très inquiétants quant è la volonté de l'entreprise de maintenir une notion de savoir-faire suffisante à l'intérieur de l'entreprise. Où la différence est particulièrement notable, cependant, ou plus inquiétante, c'est dans le domaine des nouvelles technologies et, en particulier, dans le domaine du courant continu et des convertisseurs.

Hydro-Québec, depuis quelques années, a tendance à se diriger fortement vers ces technologies. Cependant, la formation du personnel technique pour faire face à ces nouveaux "challenges" technologiques à l'intérieur de l'entreprise laisse à désirer, c'est-à-dire que, lorsque, par exemple, on a décidé de fonctionner à courant continu, il n'y a pas eu de programmes de formation ou de planification stratégique de l'entreprise pour créer une connaissance chez les ingénieurs d'Hydro-Québec dans ce domaine spécifique. Et c'est le domaine qui nous inquiète le plus. Lorsqu'on implante des nouvelles technologies dans une entreprise comme Hydro-Québec, on croit que le personnel technique devrait être formé pour pouvoir faire face à ceci. Ce sont particulièrement ces dérogations à cette troisième facette de notre politique qui causent de plus grandes inquiétudes.

C'est pourquoi nous avons demandé à Hydro-Québec, puisque c'était une politique qui était acceptée par l'entreprise depuis 1979 et par le conseil d'administration et que c'était tout simplement un genre de photographie de ce qui avait été historiquement le partage entre l'interne et l'externe, de statuer et d'inclure ceci dans la clause de la convention collective, clause que vous retrouverez, d'ailleurs, en annexe A de notre convention. Vous remarquerez que le texte utilise beaucoup de termes qui en font plus un objectif qu'une obligation strictement légale, point qu'il est quand même important de se rappeler. Donc, on espère que les dérogations de l'entreprise seront minimes et que l'article 34 sera suffisant pour éviter de telles choses.

Le Président (M. Théorêt): M. Potvin, je m'excuse d'intervenir à ce moment-ci. Je sais qu'il est toujours difficile de raccourcir les réponses, mais il y a tellement de députés qui veulent intervenir et nous avons un mandat d'aller seulement jusqu'à 18

heures. Je vous demanderais, si possible, de raccourcir vos réponses.

M. Potvin: Je vais faire mon possible.

M. Ciaccia: De notre côté, on va essayer d'être plus bref, M. le Président.

À la page 14 de votre exposé, vous mentionnez qu'"Hydro-Québec a la responsabilité de développer l'expertise québécoise et d'exercer un leadership en matière d'énergie électrique". L'expertise québécoise se mesure, d'une part, par le savoir-faire présent à Hydro-Québec et, d'autre part, par l'expertise développée à l'externe, notamment par la sous-traitance. (17 h 30)

Je vais essayer de vous le dire aussi brièvement que possible parce que ce peut être assez long. Selon vous, y a-t-il une solution qui permettrait de procurer un savoir-faire suffisant à l'interne, tout en assurant à l'entreprise privée le développement d'une expertise lui permettant de continuer, elle aussi, de développer ses marchés domestiques et internationaux? Y a-t-il une ligne?

M. Potvin: La ligne est effectivement assez floue et peut-être difficile à tracer. Cependant, on croit que, pour que les firmes de génie-conseil puissent utiliser adéquatement les travaux qui pourraient leur être confiés dans des domaines de nouvelles technologies, un prérequis à cela doit exister, c'est-à-dire qu'à l'intérieur de l'entreprise Hydro-Québec doit être suffisamment autonome pour pouvoir réaliser elle-même ces travaux. Autrement dit, on ne devrait pas confier à des firmes de génie-conseil des travaux que nous, on ne sait pas faire à l'intérieur de la boîte, autant que possible.

M. Ciaccia: Selon vous, les études qui permettent aux décideurs de faire des choix stratégiques devraient être gardées à l'interne plutôt que confiées à l'externe. Vous avez mentionné cela. Les études, par exemple, concernant la traversée sous-fluviale entrent-elles dans cette catégorie?

M. Potvin: La traversée sous-fluviale est un cas très intéressant parce que toutes sortes de choses s'y sont passées. Les ingénieurs d'Hydro-Québec ont eu, entre autres, à travailler - c'est l'ensemble de la problématique de la sixième ligne - dans un projet d'envergure avec des délais fixés à l'intérieur desquels ils ne pouvaient à peu près pas bouger. Dans ces cas, on a tendance a prendre et utiliser les moyens dans lesquels on a une expertise et une connaissance qui sont assurées, c'est-à-dire qu'on utilise des moyens techniques reconnus et historiquement utilisés. La traversée sous-fluviale est un domaine de nouvelle pointe technologique. Ce n'est, cependant, pas la première fois qu'Hydro-Québec a à envisager la possibilité de faire des liens à courant continu de manière sous-marine. On a eu à le faire, entre autres, pour les Îles-de-la-Madeleine et des projets d'envergure ont déjà été planifiés par Hydro-Québec pour relier les deux rives du fleuve Saint-Laurent à l'est de Québec.

Dans ce sens, il est important qu'Hydro-Québec se crée elle-même une expertise à l'intérieur pour pouvoir répondre à des questions aussi importantes que la traversée sous-fluviale, parce qu'on risque de se ramasser avec des rapports d'experts divergents où plus personne n'est capable de trancher. Ce sont 'des rapports qui se promènent d'un côté à l'autre du public et personne n'est capable de faire une analyse adéquate de l'ensemble des risques et des solutions optimales.

M. Ciaccia: Je vous remercie. M. le Président. Je suis prêt à céder mon droit de parole, mais pourrait-on avoir avant une entente sur le partage du temps jusqu'à six heures? Combien de temps ai-je pris?

Le Président (M. Théorêt): Cela va être séparé en parts égales, M. le ministre, il n'y a aucun problème là-dessus. M. le député de Roberval, vous avez la parole.

M. Gauthier: Je suis entièrement d'accord, d'autant plus que je la réclame depuis tantôt. Je voudrais simplement demander: Combien de temps cela veut-il dire?

Le Président (M. Théorêt): On va vous donner cela. Étant donné qu'il vient à peine de terminer, il y a deux secondes, je vais vous le dire exactement. Si vous voulez débuter, M. le député de Roberval, on va vous donner les chiffres immédiatement.

M. Gauthier: D'accord. J'aimerais, d'abord, monsieur, vous remercier de votre présentation. J'aimerais savoir si vous avez en main - si vous ne les avez pas, j'aimerais que vous puissiez nous les fournir dès demain l'évolution des chiffres concernant le "membership" au syndicat des ingénieurs à Hydro-Québec au cours, disons, des quatre dernières années. Disposez-vous de cette information maintenant?

M. Potvin: Le "membership" des membres du SPIHQ... Entendons-nous, il va falloir faire une petite distinction par rapport au mémoire d'Hydro-Québec, où on fait référence à l'ensemble des groupes d'employés d'Hydro-Québec. Si vous regardez le nombre d'ingénieurs, vous allez remarquer une certaine tendance à l'accroissement. Cependant, quand on regarde les membres du SPIHQ en tant que tels, depuis environ

quatre ans, on est actuellement stables à 1120 ingénieurs syndiqués dans l'entreprise. La différence entre les 1120 et le chiffre utilisé par l'entreprise vient de deux facteurs. Il vient, entre autres, des ingénieurs de l'IREQ, qui ne sont pas syndiqués. Il vient aussi du fait que, si vous regardez le nombre de cadres de l'entreprise, vous allez remarquer qu'il y a eu une baisse notable du nombre de cadres. Plusieurs de ces cadres étaient des ingénieurs. Selon notre juridiction, à partir du moment où l'ingénieur à l'emploi d'Hydro-Québec cesse d'occuper des fonctions de gestionnaire de deuxième niveau ou supérieur, il devient syndicable. Le syndicat défend, à l'heure actuelle, sa cause devant le ministère du Travail pour obtenir environ 80 de ses membres, ce qui fait la différence, grosso modo, entre les 1120 plus 80 ingénieurs dont on revendique la juridiction et ceux de l'IREQ. Cela donnerait à peu près le chiffre qu'Hydro-Québec donne.

M. Gauthier: Existe-t-il, chez les ingénieurs, des ingénieurs occasionnels pour Hydro-Québec, comme dans les autres corps d'emploi?

M. Potvin: II en existe quelques-uns, mais c'est minime. C'est moins que dix.

M. Gauthier: Alors, c'est très marginal?

M. Potvin: C'est très rare, très marginal.

M. Gauthier: D'accord. À la lecture de votre mémoire et à vous entendre, je trouve que vous avez une préoccupation fort intéressante qui est celle de conserver à Hydro-Québec une expertise à l'interne. Vous donnez comme raison la possibilité, d'abord, d'être un propriétaire averti ou quelque chose comme ça - je ne me souviens pas de l'expression exacte - et cela est louable en soi, sauf que cette commission parlementaire se penche sur un problème délicat qui est celui, dans un souci de justice et d'équité, d'établir une juste proportion de travail à confier à l'interne et à l'externe et cela, pour les différents niveaux d'emploi à Hydro-Québec dans un but bien évident qui est celui, en quelque sorte, de préserver les emplois d'une certaine quantité de personnes et cela touche aussi les ingénieurs. Demain ou ce soir - je ne sais trop - les ingénieurs-conseils vont venir nous rencontrer et nous dire que les travaux diminuent, qu'ils ont moins de chances de conserver des divisions intéressantes au sein de leurs firmes.

À partir de l'objectif de préserver une expertise à Hydro-Québec, dans une commission parlementaire comme celle-ci, quelles suggestions pourriez-vous nous faire pour nous aider à partager véritablement? J'ai cru comprendre que les critères que vous ncus proposez sont des critères quant è l'entreprise: les choix stratégiques, les développements technologiques nouveaux, etc. C'est très intéressant, mais vous traitez peu ou pas, à moins que je n'aie mal compris, de l'aspect économique des choses, celui de partager équitablement et de maintenir autant sur le plan externe qu'interne - mais surtout à l'externe pour l'instant - des firmes qui ont de l'expertise, qui ont la capacité d'exporter des technologies, qui ont la capacité d'intervenir ailleurs aussi qu'au Québec parce que ce n'est pas le moindre des avantages, vous l'admettrez. Est-ce que vous avez un point de vue à nous exprimer là-dessus?

M. Potvin: Écoutez, la politique qu'on préconise n'est pas nouvelle en soi; au contraire, c'est la politique qui a permis de faire en sorte que le génie-conseil au Québec se développe et devienne ce qu'il est aujourd'hui, c'est-à-dire que la politique, dans ce qu'on préconise, est celle qui existe depuis la création de Hydro-Québec. C'est ce qui a permis, entre autres, par exemple, que le barrage Daniel-Johnson soit, dans ses détails, conçu par des firmes hors d'Hydro-Québec. Or, dans ce sens-là, la politique qu'on continue de préconiser est la même. Il n'y a pas de changement par rapport à cela.

Là où la difficulté surgit, c'est que cette politique ne suscite pas de problème et crée une croissance lorsque l'ensemble des besoins d'ingénierie dans la province sont croissants. Malheureusement, depuis quelques années, on constate non seulement une stagnation, mais une diminution de ces besoins d'ingénierie là.

Je crois qu'en tant que parlementaires la question importante est de savoir où il est le plus important de maintenir une certaine masse critique de compétence. Est-ce que, pour la communauté québécoise, la masse critique de compétence doit être prioritairement maintenue à Hydro-Québec ou si elle doit être prioritairement maintenue dans le génie-conseil?

Selon nous, évidemment, elle doit être maintenue à l'intérieur d'Hydro-Québec à cause, justement, de la notion de propriétaire averti. Si on ne crée pas et qu'on ne maintient pas une masse critique de compétence à l'intérieur d'Hydro-Québec, lorsqu'on aura besoin de retourner à l'externe et de refaire de grands ouvrages, on ne trouvera plus, à l'intérieur d'Hydro-Québec, le personnel nécessaire pour être capable de porter des jugements adéquats sur les solutions techniques d'envergure que le Québec aura à prendre à ce moment-là.

M. Gauthier: M. le Président, il me semble que, dans l'état actuel des choses et selon ce que vous nous avez décrit, le nombre d'ingénieurs est en augmentation

constante, même si ce n'est pas une augmentation faramineuse. On comprend que ce sont des domaines un peu plus spécialisés; il ne faut pas s'attendre à augmenter de 300 ingénieurs par année, je n'ai pas compris que c'était votre objectif. Est-ce que la situation actuelle ne garantit pas largement que cette expertise à l'interne se maintiendra, se perpétuera, se développera compte tenu du fait que le "staff" - permettez-moi l'expression - augmente constamment de façon assez impressionnante pour des professionnels?

M. Potvin: Soit dit en passant pour l'augmentation, je vous mets en garde, il faut toujours se rappeler le nombre de cadres qui ont été réintégrés dans nos rangs. Pour répondre à votre question, il faut se rappeler que, depuis 1980, le mandat d'Hydro-Québec n'est plus uniquement de réaliser des grands travaux. Depuis les années quatre-vingt, les grands travaux sont arrêtés à Hydro-Québec et il ne s'en fait plus. On a, cependant, demandé aux ingénieurs d'Hydro-Québec de se spécialiser dans un paquet d'autres domaines, qui sont des domaines d'importance pour l'entreprise. Par exemple au niveau de la distribution, on a amplement fait état aujourd'hui du fameux PAQS. Le PAQS découle de décisions qui ont été prises par des ingénieurs, a savoir: Où doit-on investir l'argent pour le PAQS? Donc, il y a des ingénieurs qui ont dû travailler dans les électrotechnologies pour vendre, entre autres, l'énergie excédentaire qui était disponible à ce moment. Il y a eu des nouveaux besoins en distribution et on est rendu avec un réseau électrique de plus en plus complexe. Non seulement on confie maintenant à Hydro-Québec la tâche de fournir les clients d'Hydro-Québec, mais aussi d'aller sur les marchés américains. Elle doit prévoir un paquet d'études de planification et d'analyses sur l'intégration avec un réseau différent du nôtre et qui nécessite, somme toute, avec les nouvelles technologies utilisées, un accroissement minime - parce que 100 ingénieurs en cinq ans, on ne peut pas considérer que c'est un accroissement énorme - des compétences d'Hydro-Québec dans ces domaines. On utilise de plus en plus les compétences techniques de ces ingénieurs dans différentes études et on en fait de plus en plus.

Mais, dans le domaine où les ingénieurs-conseils traditionnellement faisaient affaire avec Hydro-Québec, c'est-à-dire le groupe équipement, il y a eu une baisse notable des effectifs d'ingénieurs. Donc, l'augmentation minime d'ingénieurs ne devrait pas toucher le génie-conseil parce que ce ne sont pas les domaines traditionnels où le génie-conseil a eu à faire affaire avec Hydro-Québec, c'est-à-dire les grands travaux.

M. Gauthier: À la page 10 de votre mémoire, vous nous expliquez qu'il y a, selon votre syndicat, trois objectifs qu'une politique de recours aux ingénieurs-conseils devrait poursuivre et vous les mentionnez. Dites-moi: Est-ce que la politique de 1980 d'Hydro, dont vous faites mention dans la page précédente, était basée sur ces trois éléments?

M. Potvin: C'est plutôt l'inverse, c'est-à-dire que cela était basé sur la politique de 1980, mais ce sont les trois mêmes objectifs qu'on retrouve dans les deux politiques.

M. Gauthier: C'est-à-dire, je voudrais bien qu'on se comprenne, qu'en 1980 Hydro s'est donné une politique, elle vous a consulté, le syndicat des ingénieurs.

M. Potvin: Oui.

M. Gauthier: Et puis, vous me dites que les trois points mentionnés sont inclus dans la politique ou découlent de la politique.

M. Potvin: De 1980, c'est cela.

M. Gauthier: Bref, on les retrouve dans les deux.

M. Potvin: Ces objectifs sont la représentation fidèle de la résolution du conseil d'administration de 1980 sur le partage entre l'externe et l'interne.

M. Gauthier: Est-ce que vous avez des exemples à nous donner de cas précis dans lesquels Hydro-Québec aurait dérogé à ces principes? J'aimerais connaître les effets de ces dérogations sur le travail des ingénieurs d'Hydro-Québec. S'il y a eu des dérogations, il y a certainement eu une conséquence néfaste.

M. Potvin: On a cité, comme je vous le disais, deux exemples pour le premier et le deuxième point. On a eu un exemple particulier dans le premier cas, c'est-à-dire les activités stratégiques. Prenons le cas des centrales Chelsea et Farmers; on a confié les études préliminaires de ces centrales à une firme de génie-conseil, ce qui était une nouveauté à Hydro-Québec. Dans les études préliminaires, on a demandé de définir une façon de résoudre un problème de façon qu'après, de manière générale, on puisse confier à quelqu'un la réalisation pratique de la solution.

Dans le deuxième cas, on croit qu'Hydro-Québec n'a pas démontré une notion suffisante de propriétaire averti dans le cas des fissures du barrage Daniel-Johnson. Rappelons que ces fissures ont été détectées au début des années quatre-vingt - en 1982 environ - et qu'à l'heure actuelle, en 1987,

on n'a pas encore de décision ultime de l'entreprise à savoir dans quel sens on va aller. Tout cela découle du fait qu'initialement la conception même détaillée du barrage Daniel-Johnson n'a jamais été suivie de très très près à l'interne et que les ingénieurs d'Hydro-Québec, aussi bizarre que cela puisse paraître, n'ont jamais réalisé dans le détail une centrale complète. C'est-à-dire qu'on n'a pas créé, à l'intérieur de l'entreprise des expertises dans des domaines de génie civil où on utilise, par exemple, ce qu'on appelle les méthodes de calcul aux éléments finis qui sont des nouvelles méthodes; on n'a pas créé d'expertise dans ces domaines. Résultat: quand on découvre des fissures, on va à l'externe. L'externe fait une étude, trouve une solution et dit: II faut faire un confortement, le coût: environ 300 000 000 $. Les ingénieurs d'Hydro-Québec, qui analysent le rapport de la firme d'ingénieurs-conseils, se mettent à douter des résultats, parce que ce que la firme d'ingénieurs-conseils prévoyait comme évolution des fissures n'est pas corroboré par ce qu'on découvre dans les faits. Et eux, les ingénieurs d'Hydro-Québec, prétendent que le problème des fissures du barrage Daniel-Johnson, c'est plus une question de chaud et de froid, de choc thermique et, donc, que la solution à cela, c'est d'isoler thermiquement le barrage Daniel-Johnson à un coût d'environ 50 000 000 $. (17 h 45)

Donc, là, on a deux études, et on ne sait pas trop comment s'y prendre pour savoir laquelle des deux a raison. Ce qu'on fait, c'est qu'on fait appel à une firme, pas à une firme, mais plutôt à des experts internationaux. On forme un comité d'experts et on leur renvoie la balle. Entre-temps, Hydro-Québec n'a pas de solution. Ça, on trouve que c'est grave. C'est grave dans le sens qu'Hydro-Québec n'est plus en état de juger elle-même de ses ouvrages quitte, après cela, à le faire corroborer, elle n'est pas en état, elle-même, de porter un jugement sur des ouvrages qui sont, quand même, importants.

M. Gauthier: Oui, mais ce que vous me dites là, ce sont des exemples intéressants et cela nous aide à comprendre. Est-ce que le problème ne relève pas plutôt d'une répartition du travail à l'intérieur même des cadres d'Hydro-Québec plutôt que de la quantité de sous-traitance à donner ou pas? Moi, j'ai l'impression - vous me corrigerez, c'est peut-être erroné, ce que je vais dire - que ce que vous réclamez à partir d'énoncés ou d'exemples comme ceux-là, c'est que, parmi ses - je ne sais pas combien - 1273 ingénieurs, Hydro-Québec devrait en affecter quelques-uns à des travaux un peu plus spécialisés plutôt qu'à des travaux routiniers, quitte à confier de ces travaux routiniers à des sous-traitants. Est-ce que ce n'est pas plus ça le problème que le fait de donner moins de sous-traitance à l'extérieur?

M. Potvin: II n'y a pas seulement un problème de quantité de sous-traitance, il y a un problème de qualité de sous-traitance, aussi. C'est-à-dire que, si on donne toujours à l'extérieur d'Hydro-Québec des domaines... Par exemple, prenons le cas du barrage Daniel-Johnson, puisqu'on parle de lui. C'est un barrage à voûtes multiples qui est à peu près unique au monde» C'est le plus gros au monde et le seul qui existe appartient à Hydro-Québec.

Ce barrage-là a été totalement conçu par une firme de génie-conseil et il n'y a pas eu d'ingénieurs d'Hydro-Québec qui ont suivi la conception détaillée de A à Z. Il n'y a pas encore aujourd'hui à Hydro-Québec de spécialistes en barrage à voûtes multiples, alors qu'Hydro-Québec possède le plus gros barrage à voûtes multiples au monde. Ce qu'on veut dire par savoir-faire, c'est qu'en tant que propriétaire de ce barrage-là, lorsque quelque chose s'y passe, la seule façon dont Hydro-Québec peut juger si, oui ou non, il y a quelque chose de grave, c'est de se tourner vers la firme de génie-conseil qui l'a initialement conçu et de dires Est-ce que c'est grave?

Là, on se trouve dans une situation un peu difficile. C'est-à-dire que tu as une situation de juge et partie. La personne qui a elle-même conçu le barrage va te dire si elle s'est trompée ou pas. C'est pour le moins délicat. Ce qu'on veut dire, c'est qu'il y a une certaine quantité de travail qui doit demeurer à l'interne pour maintenir un noyau critique. Et il doit y avoir une certaine qualité de travail qui doit demeurer à l'interne. On ne doit pas confier à l'externe quelque chose qu'on ne sait pas faire parce qu'après Hydro-Québec va avoir à travailler et va avoir à vivre avec cet équipement-là. Et, si elle ne connaît pas cet équipement, un jour ou l'autre, il va y avoir un problème et elle ne sera pas capable d'y faire face. Ça, c'est grave.

M. Gauthier: Dans la pratique des choses, est-ce qu'il arrive parfois qu'Hydro-Québec demande à certains de ses ingénieurs de l'interne de collaborer, de travailler conjointement avec des firmes d'ingénieurs de l'externe à la préparation, à des études, etc., à différents travaux de génie un peu plus complexes? Est-ce que ça ne serait pas là la solution? J'ai bien hâte qu'Hydro-Québec vienne comparaître ici. Mais moi, j'ai l'impression qu'elle va nous dire que, dans tous les cas, quelque catégorie de personnel que ce soit, même les ingénieurs, elle ne veut pas se ramasser avec un "staff" trop gros. Bon, il est important pour elle de garder des liens avec l'extérieur et une certaine mobilité. Ça, cela peut arriver qu'on

comprenne cet argument-là. À ce moment-là, c'est drôle, moi, j'ai l'impression, de toute l'argumentation que vous nous avez tenue, qu'il s'agit plus, au niveau de l'organisation des travaux, de permettre à des ingénieurs de collaborer conjointement avec le secteur privé et que la quantité de sous-traitance, en quelque sorte, n'est pas vraiment en cause dans le domaine très technique qui est le vôtre.

M. Potvin: On est, en effet, d'accord avec ce que vous dites. La preuve de cela, c'est que vous remarquerez que, dans notre mémoire, on attache beaucoup d'importance à ce qu'on appelle la planification stratégique de la main-d'oeuvre. Hydro-Québec remet son mémoire à toutes les années sur l'évolution de la main-d'oeuvre et on dit qu'on va avoir besoin de tant de milliers de personnes dans tes X années à venir. Sauf que cette planification des besoins n'est pas redistribuée au niveau de la gestion quotidienne. Il n'y aura personne dans l'entreprise qui va, tout d'un coup, s'asseoir et dire: L'entreprise est en train de faire un virage technologique vers le courant continu, par exemple; on doit immédiatement se créer des équipes techniques sur, par exemple, le courant continu pour pouvoir, adéquatement, être capable de répondre aux questions et aux problèmes techniques qui vont découler de l'approche de cette nouvelle technique. C'est-à-dire qu'on l'a construit et qu'ensuite on vit avec. C'est ce qui est arrivé à Chateauguay, par exemple. On a construit un convertisseur tout à fait nouveau et, à un moment donné, il y a eu des problèmes. Là, on a donné le manuel d'entretien aux ingénieurs qui avaient à résoudre le problème. On leur a dit: Prenez le manuel d'entretien, commencez à fouiller, découvrez, étudiez et trouvez la solution plutôt que de planifier et de structurer une approche qui aurait permis de dire: Écoutez, on s'en va vers une nouvelle technologie là-dedans et on va envoyer des ingénieurs d'Hydro-Québec, par exemple, se former ailleurs si cela est nécessaire, soit en Suède parce qu'ils en ont déjà fait ou ailleurs en Europe parce que cela a déjà été fait. En Afrique, ils ont eu des expériences de courant continu comme cela a été fait quand Hydro-Québec a créé la centrale Gentilly 2. Hydro-Québec a envoyé de ses ingénieurs en formation à l'Énergie atomique du Canada parce que c'est une nouvelle approche, c'est une nouvelle technique. Le résultat, c'est que ces ingénieurs d'Hydro-Québec ont acquis une expérience importance dans le domaine nucléaire, tellement importante qu'ils ont pu aller vendre leur expertise en Argentine.

Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le député de Roberval. Je vais essayer, M. Potvin, de formuler mes questions de façon que vous me donniez une réponse la plus courte possible.

Depuis le début des travaux, ce matin, j'ai essayé de bien comprendre toute la portée de l'article 34. J'aimerais donc savoir de votre part si les firmes de génie-conseil qui se sont développées pendant les années soixante-dix, par exemple, auraient connu le même rythme de développement si cet article 34 avait existé à ce moment-là.

M. Potvin: Dans le cas de l'article 34 de la convention collective des ingénieurs, la réponse est oui...

Le Président (M. Théorêt): Oui.

M. Potvin: ...puisque c'est un reflet fidèle de ce qui existait dans le cas de la convention collective des ingénieurs.

Le Président (M. Théorêt): C'est oui. Merci.

Ma deuxième question. Je voudrais savoir si je lis bien votre mémoire et si je vous comprends bien surtout quand vous dites que le recours futur aux firmes d'ingénieurs-conseils devrait se limiter aux pointes de travail imprévisibles et aux domaines où l'entreprise - Hydro-Québec donc - ne possède pas l'expertise nécessaire pour réaliser ses mandats. Est-ce que je vous comprends bien quand je lis cette position dans votre mémoire?

M. Potvin: Ce qu'on dit comme toujours, c'est que, si l'entreprise a de gros travaux à réaliser qui nécessitent un impact massif d'ingénierie, une embauche forte de personnel pour des durées ponctuelles, on considère que ces travaux peuvent continuer à être confiés à des firmes de génie-conseil. La même chose lorsque le temps ne le permet pas et qu'on ne peut pas créer une expertise particulière dans un domaine donné. Prenons un exemple. Un problème de bruit apparaît dans un des postes d'Hydro-Québec. On n'a pas le temps de commencer à créer un spécialiste dans ce domaine. On peut faire appel dans les domaines de cette nature à une firme spécialisée, mais cela devrait être de manière ponctuelle et ne devrait pas devenir répétitif. Si HydroQuébec a toujours des problèmes de bruit, elle devrait être capable de les résoudre elle-même.

Le Président (M. Théorêt): Merci. L'article 34.04...

M. Potvin: Oui.

Le Président (M. Théorêt): ...de votre convention prévoit la formation d'un comité conjoint qui devra identifier les domaines d'activités qui pourraient être réalisées par

le personnel d'Hydro-Québec à la condition que vous ayez, évidemment, les compétences requises à l'interne. Est-ce que cela veut dire, M. Potvin, que vous proposerez lors d'une prochaine négociation de restreindre davantage le recours aux ingénieurs-conseils en rapatriant à l'interne les travaux actuellement confiés à l'externe?

M. Potvin: Ce qu'on dit par cela, c'est qu'à l'heure actuelle on a défini une politique avec l'entreprise dans laquelle il va falloir qu'on vive. On considère que cette politique basée sur les objectifs est une politique importante pour l'ensemble de la communauté québécoise. Dans ce sens, on est prêt à discuter avec Hydro-Québec. Si on constate, comme je vous le disais tout à l'heure, que répétitivement, de manière régulière, Hydro-Québec utilise des firmes externes dans un domaine d'importance parce qu'elle ne se crée pas la compétence, on va dire à l'entreprise: Écoutez, vous devriez au moins vous créer un minimum de compétence à l'interne pour pouvoir être un propriétaire averti dans ce domaine et, ensuite, confier à des firmes d'ingénieurs-conseils, si nécessaire, les pointes de travail associées à ce travail de telle façon qu'Hydro-Québec sache la qualité des travaux qui lui sont fournis et s'ils sont adéquats ou non. C'est ce qu'on veut dire par cela. Donc, c'est une chose qui est vivante et c'est une chose qui évolue dans le temps dans le domaine technique et technologique., Ce qui est aujourd'hui une technologie de pointe va être dans dix ans une technologie standard et normalement utilisée et qui ne nécessitera plus les mêmes efforts de participation de la part de l'entreprise et des syndiqués.

Le Président (M. Théorêt): Entre vous et nous, c'est bien l'objectif de l'article 34.04, de rapatrier à l'interne des travaux qui se font dans le moment à l'externe?

M. Potvin: Non.

Le Président (M. Théorêt): Non. Une dernière question. Je ne sais pas, mais je pense que le député de Roberval l'a peut-être mentionné. Si oui, est-ce qu'on vous a demandé de déposer le nombre de membres pour l'année 1987 parce qu'on a, évidemment, pour l'année 1986 le chiffre de 1273? Est-ce qu'on vous a demandé de déposer le chiffre de 1987?

M. Potvin: J'ai répondu à la question. À l'heure actuelle, on a 1120 ingénieurs cotisants au Syndicat professionnel des ingénieurs d'Hydro-Québec sur le dernier chèque de paie.

Le Président (M. Théorêt): Je vous remercie.

Vu que les députés de l'Opposition ont demandé des données là-dessus, je voudrais juste rappeler à ces gens-là que les données doivent être déposées au secrétariat pour que tous les membres puissent bénéficier, finalement, de cette information. Alors, je vous remercie et je cède maintenant la parole au ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais juste avoir une clarification. Tantôt, à la suite d'une question que je vous avais posée, je crois, sur l'article 34, vous avez mentionné - je voudrais que vous me corrigiez si j'ai mal compris - que ce sont des objectifs plutôt que des obligations légales. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu là-dessus?

M. Potvin: Ce qu'on veut dire, c'est qu'à l'heure actuelle la politique qu'on a incluse dans la convention collective représente ce qu'Hydro-Québec elle-même avait accepté comme politique. Donc, dans ce sens-là, on croit qu'Hydro-Québec a tout avantage de continuer à fonctionner selon cette politique puisqu'elle a permis un partage que l'on considère équitable avec les firmes de génie-conseil, historiquement.

Je tiens simplement à vous faire remarquer certains termes qui apparaissent régulièrement dans la phraséologie de notre article 34 qui va vous faire comprendre pourquoi c'est plus un objectif moral, l'inclusion dans la convention collective, que quelque chose de strictement légal. Entre autres, d'accord, à l'article 34.02, on dit que "la direction confie ordinairement à son personnel technique les activités suivantes". Vous conviendrez avec moi que, lorsqu'on utilise "ordinairement", c'est plus une question de souhait qu'une question strictement légale. On considère, cependant, qu'Hydro-Québec ne devrait pas déroger à ce principe-là puisque c'est un principe important pour elle et c'est un principe qu'historiquement elle a utilisé. Et c'est pour ça qu'on dît que c'est une politique ou un objectif plus qu'un texte légal.

M. Ciaccia: C'est intéressant, votre interprétation. Pour comparaison, prenons, par exemple, l'entente avec la sous-traitance. Cela va tomber de 720 à 500. Cela, c'est clair. Ce n'est pas un objectif, c'est une obligation qu'Hydro-Québec s'est imposée ou elle s'est entendue avec les syndicats. Maintenant vous me dites, vous, que dans l'article 34, c'est un objectif. Est-ce que ça veut dire, par exemple - parce qu'on a reçu des plaintes où les ingénieurs-conseils se plaignent des avant-projets - qu'Hydro-Québec pourrait confier des avant-projets à une firme d'ingénieurs-conseils parce que, dans l'article 34.02, vous parlez d'études préliminaires et d'avant-projets?

M. Potvin: Si vous regardez le mémoire d'Hydro-Québec, entre autres dans les centrales, vous allez constater que, historiquement, Hydro-Québec a déjà confié des travaux d'avant-projet à des firmes. Cependant, dans d'autres domaines, à un certain moment dans l'évolution d'un projet, l'avant-projet, c'est lorsqu'on définit ce que sera le projet, ce que seront les coûts, ce que sera l'échéancier, ce qu'il va y avoir dans cet avant-projet-là. Cela, d'après nous, c'est une décision stratégique de l'entreprise, dans certains domaines.

M. Ciaccia: Mais vous dites que c'est un objectif qu'Hydro-Québec a et que légalement Hydro-Québec pourrait le confier à un autre.

M. Potvin: Écoutez, quand on dit qu'Hydro-Québec a utilisé ordinairement ça, d'accord, on en comprend qu'effectivement Hydro-Québec ne devrait pas, à moins de raisons très graves, y déroger. Parce que, historiquement, c'est toujours comme ça que cela a fonctionné. Évidemment, il ne faudra pas se cacher. On croit que c'est une politique juste et honnête parce que c'est une politique qui reflète ce qui a toujours existé, historiquement, à Hydro-Québec. Cependant - et il faudrait être clair là-dessus - si les ingénieurs d'Hydro-Québec se rendent compte qu'on passe à côté de cette politique-là régulièrement, un jour ou l'autre ils vont vouloir avoir quelque chose de plus solide que ça*

M. Ciaccia: Est-ce que vous dites que, historiquement, les avant-projets avaient toujours été confiés par Hydro-Québec à des ingénieurs-conseils internes et qu'ils n'étaient pas confiés aux ingénieurs-conseils externes?

M. Potvin: Dans le cas des avant-projets, c'est un peu plus difficile à expliquer. Certains types de projets étaient confiés à l'externe et il y avait d'autres types d'avant-projets qui ne l'étaient pas.

M. Ciaccia: Est-ce que cela a changé... M. Potvin: Non.

M. Ciaccia: ...avec 34.02? C'est la même chose.

M. Potvin: Et ça ne devrait pas changer dans le futur, d'après nous.

M. Ciaccia: Cela ne devrait pas changer.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre. M. Potvin et vos collègues, au nom des membres de la commission, je vous remercie de votre excellente collaboration et d'avoir rapidement répondu à nos questions; cela a permis à plus de députés d'intervenir. Alors, je vous remercie. Je vous souhaite un bon voyage de retour chez vous.

M. Potvin: Merci.

Le Président (M. Théorêt): Les travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 3)

Le Président (M. Charbonneau): La commission de l'économie et du travail reprend sa consultation particulière sur le dossier de la sous-traitance à Hydro-Québec.

Nous recevons ce soir l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. C'est M. Daoust, je crois, qui est président de l'association. Je ne sais pas si c'est vous, M. Daoust, qui allez diriger la délégation ou monsieur...

Une voix: Dion.

Association des entrepreneurs en construction du Québec

Le Président (M. Charbonneau): Alors, M. Dion, je vous demanderais de présenter les personnes qui vous accompagnent avant de commencer votre exposé qui doit durer au maximum 20 minutes. Le reste du temps, réparti équitablement, sera consacré aux membres de la commission pour l'étude de la question. Alors, sans plus tarder, M. Dion.

M. Dion (Michel): Bonsoir, M. le Président. Bonsoir, madame, bonsoir, messieurs. La représentation de l'AECQ: le président, M. Claude Daoust, va faire la première partie de l'exposé, qui est en deux parties. M. le président Claude Daoust, d'Erecto Steel, ou, si vous voulez, Les érections d'acier, va faire une première partie sur le champ d'application. Pour la deuxième partie, qui traite de la question de la productivité, de la main-d'oeuvre, des différences de coût entre l'entreprise privée et l'entreprise publique, ce sera M. Franco Fava, ex-président de l'AECQ. Sont également assis à la table, ce soir, deux membres du personnel: Me Joëlle L'Heureux, à l'extrémité de la table, à droite, et M. Robert Brown, du bureau de l'AECQ. Alors, sans plus tarder, on vous expose notre mémoire, notre résumé - parce qu'on a résumé nos documents depuis.

M. Daoust (Claude): M. le Président, la partie que je vais vous présenter est quand même assez courte. J'imagine que M. Fava

va prendre un peu plus de temps que moi. J'aimerais me pencher un peu plus sur ce qui nous concerne directement, nous, à l'AECQ, les effets des politiques semblables à celles d'Hydro-Québec, l'arrêt ou la diminution de la sous-traitance, les effets que cela a sur le champ d'application de la construction.

La loi de la construction, qui a été sanctionnée en 1968, a pris bien garde de ne pas identifier clairement ce qu'était le champ d'application. Ce qui arrive, c'est qu'avec les années on s'aperçoit que les différents gouvernements qui se sont succédé pour des raisons politiques ont sorti du champ d'application de la construction différents travaux qui se faisaient. On pense, par exemple, au verre plat qui faisait partie de la construction, qui a été enlevé à un moment donné. On pense aux travaux d'entretien, et ainsi de suite, qui sont faits par les hôpitaux, les organismes para-gouvernementaux. On pense à l'installation, au montage, à la réparation, à l'entretien de la machinerie de production qui appartenaient, à un moment donné, au domaine de la construction. Et, naturellement, on pense aux travaux d'Hydro-Québec qui sont exempts du champ d'application. Chaque fois que la partie qui est exempte du champ d'application augmente, c'est bien apparent que notre partie diminue. II faut réaliser que les organismes créés par les différents gouvernements sont constants, eux, qu'ils ont des coûts assez constants, telle la Commission de la construction, telle la CSST, qui établit ses taux en fonction de la quantité de travailleurs; des fois, on a l'impression qu'elle établit ses taux en fonction d'une note globale et, après ça, si la quantité de travaux est réduite, on a la même note totale. On a plusieurs organismes comme ça qui sont là, permanents, indépendamment du volume de construction qui se fait. Alors, si les différents organismes gouvernementaux ou para-gouvernementaux commencent à réduire leur champ d'application de la construction en minimisant les sous-contrats qui sont donnés, vous pouvez imaginer les effets que cela va avoir.

Un autre effet qui me vient à l'idée, c'est la loi 119 qui a été adoptée l'an dernier, qui traite de la formation dans la construction. Là encore, si on réduit la quantité de sous-traitance qui est donnée à l'extérieur, c'est bien apparent qu'il va y avoir moins de travailleurs de la construction qualifiés pour faire les travaux. Donc, éventuellement, si on fait un demande en cas d'urgence ou si on change la politique pour revenir à un système de sous-traitance comme il y avait auparavant, il va certainement manquer de main-d'oeuvre qualifiée. On sait très bien que, pour créer une main-d'oeuvre qualifiée, selon les métiers, ça peut aller jusqu'à 10 000 heures dans le moment. Alors, penser simplement à réduire arbitrairement la quantité de travaux de construction, ça pourrait naturellement amener des dangers, si jamais on les retourne. On s'aperçoit que différents organismes, quand ils entendent dire qu'un organisme pose un geste, ils y prennent goût. Drôle de coïncidence, en fin de semaine, samedi, je voyais dans le journal The Gazette un avis officiel de la ville de Montréal qui se propose de déposer un projet de loi privé, à la prochaine session du Parlement, pour demander le droit, justement, de faire de la construction neuve avec ses employés sans que ce soit couvert par le décret de la construction. On a vu dans le passé des demandes des municipalités qui voulaient faire tous leurs travaux sans que ce soit couvert par le décret de la construction. On ne peut pas avoir un mélange de règlements qui déterminent les règles de la construction et en même temps permettre à tout le monde de s'y soustraire à volonté, quand cela fait leur affaire. On va même plus loin que cela. Nous, on dit que l'exemption qui existe pour Hydro-Québec dans le moment, de faire ces travaux hors construction, ne devrait pas exister. Nous recommandons donc que cette exemption soit éliminée complètement et que tous les travaux qui sont faits par HydroQuébec pour l'entretien ou pour l'installation de lignes soient considérés comme de la construction, parce qu'effectivement c'est de la construction.

Je vous disais tantôt que, si HydroQuébec continue à réduire ses travaux de sous-traitance, cela pourrait avoir des effets. On s'explique très mal la nécessité d'avoir un changement de politique de sous-traitance, à part le fait, naturellement, qu'il y a eu un contrat de travail. Pendant des années, le système a fonctionné pour Hydro-Québec. Donc, s'il a si bien fonctionné pendant tant d'années, c'est bien apparent que la seule raison pour laquelle on a proposé de le changer, c'était pour régler un problème de relations du travail interne plutôt que pour des questions d'efficacité. J'essaie de me limiter à 20 minutes, alors, je passe à travers mon texte assez rapidement.

Donc, le fait immédiat de la réduction des contrats octroyés en sous-traitance se traduira par une réduction substantielle des heures de travail des monteurs de lignes. Elle conduira plusieurs au chômage, faute de pouvoir exercer leur emploi. D'autres salariés seront contraints de quitter l'industrie de la construction, parce qu'il y a quand même beaucoup de travaux connexes aux travaux de construction de lignes. Je vous ai parlé de l'apprentissage qui, naturellement, en souffrira. Il faut même penser que les nouveaux règlements régissant la délivrance des certificats de compétence, les règlements

écrits en fonction de la loi 119 sur la formation, pourraient justement, vu que les heures sont réduites par les travailleurs de la construction, bloquer l'entrée dans l'industrie de nouveaux travailleurs monteurs de lignes, De fait, l'accès à la construction est en fonction des heures travaillées dans la construction - je vous le dis, j'essaie de passer le plus rapidement possible, parce que je sais que M. Fava a besoin de plus de temps que moi. Je vais conclure très vite. La position adoptée par Hydro-Québec constitue finalement une abnégation des services compétents que lui ont rendus l'entreprise privée et sa main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

Avant de céder la parole à M. Fava, je voudrais vous lire le texte d'une lettre qui sera adressée au ministère provenant des autres associations patronales et qu'on m'a demandé de vous lire. C'est très court, une page. Elle se lit comme suit: "Vu l'importance économique des investissements publics et privés effectués chaque année au Québec au titre de la construction; vu la vaste expertise développée par les entreprises de construction et de fabrication pour cette industrie au Québec et la compétence de la main-d'oeuvre qui y trouve de l'emploi, qui permettent la réalisation compétente et experte de tout type de travaux généraux ou spécialisés à titre concurrentiel par des entreprises; vu l'opportunité de maintenir l'existence au Québec de telles compétences et de telles capacités et des nombreux emplois afférents, et de préserver en conséquence les marchés qui s'offrent à l'industrie québécoise de la construction; vu l'érosion de ces marchés qu'a entraînée et que risque d'aggraver l'exécution des travaux de construction par des entreprises non engagées principalement dans cette industrie, à la faveur d'exclusions ou d'exceptions créées par des lois ou des règlements favorisant de telles entreprises; les associations soussignées et leurs membres ici représentés par leurs présidents respectifs prient unanimement le gouvernement du Québec d'affirmer et d'appliquer une politique générale voulant que le gouvernement lui-même et ses ministères, les organismes para et péripublics et toute autre instance agissant aux fins de servir le public, qu'ils soient provinciaux ou municipaux et sans exception, soient tenus quant à tous travaux de construction, de lancer des appels d'offres publics générateurs de concurrence entre le plus grand nombre possible de soumissionnaires qualifiés provenant de l'entreprise privée."

C'est signé par les six associations patronales, l'Association de construction de Montréal et du Québec, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, la

Corporation des maîtres électriciens, la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie et la Fédération de la construction du Québec, et, naturellement, l'AECQ endosse cette position.

Alors, je vois passer à M. Fava pour le reste de l'exposé. Je m'excuse si ma voix n'était pas trop claire, je suis encore au dernier stade d'une grippe, malheureusement. (20 h 15)

Le Président (M. Charbonneau): Cela va.

Une voix: Gardez-la pour vous.

Le Président (M. Charbonneau): II y en a aussi qui en terminent une et qui ne voudraient pas en attraper une autre. Allez-y, M. Fava!

M. Fava (Franco): En fait, M. Daoust vous a parlé surtout du champ d'application de la loi depuis un certain nombre d'années. Je me souviens d'avoir discuté essentiellement des mêmes problèmes en ce qui a trait au champ d'application de la loi au mois d'août 1984 et, malheureusement, on attend toujours le projet de loi qui devait remédier, à l'époque, à tous ces problèmes. Effectivement, je pense que ce n'est pas nécessaire de revenir sur le fait que les entrepreneurs en construction dans ce domaine ont développé une expertise, que ce soit en matière de transport d'énergie dans la construction de postes de transformation ou dans l'entretien du réseau comme tel.

Il y a évidemment toute la question de la diminution constante des travaux qui sont confiés par Hydro-Québec qui conduira, d'après nous, inévitablement à l'élimination complète de la capacité du secteur privé à assurer l'entretien du réseau, puisque, effectivement, d'après nous, pour pouvoir maintenir des services comme ceux qui ont été offerts à Hydro-Québec dans le passé, cela prend nécessairement un minimum de capital investi. On parlait, tout à l'heure ou ce matin, d'une unité qui peut coûter jusqu'à 150 000 $, en plus des coûts rattachés à l'outillage. On a suffisamment parlé aussi, je pense, de l'entente conclue le 29 juin 1984 entre Hydro-Québec et le syndicat, qui impose les restrictions qu'on mentionnait cet après-midi encore en ce qui concerne l'effectif en nombre d'heures-homme travaillées par année. On a parlé aussi largement de la clause 34.03 et je me souviens d'une question qui a été posée par un des députés, à savoir que, si on éliminait cette clause, est-ce que, à ce moment-là, cela ouvrirait les portes grandes et larges à Hydro-Québec pour qu'elle réduise ses effectifs? La réponse, évidemment, des représentants syndicaux était que, si on éliminait cette clause, le syndicat s'exposait à des mises à pied. Je pense qu'on oublie

trop souvent l'article 32 de la convention collective qui prévoit justement qu'à partir du moment où un employé atteint 12 mots de permanence au sein d'Hydro-Québec, à ce moment, il a sa garantie d'emploi. Quant à moi, l'élimination de l'article 34 ne présuppose pas nécessairement qu'on ouvrirait ainsi le champ à Hydro-Québec pour qu'elle procède à des mises à pied.

À toutes fins utiles, l'entente comme telle signifie carrément l'abandon par HydroQuébec du recours à la sous-traitance pour l'entretien du réseau. Encore là, je reviens sur des remarques que faisait le représentant du syndicat, qui nous disait: Écoutez, à la suite du programme PAQS, on a étendu le réseau, on a mis le réseau au point et, maintenant, il ne nous reste que l'entretien. Donc, on sort de l'entretien du réseau les entrepreneurs du secteur privé, ce qui explique le fait qu'on veuille réduire, à toutes fins utiles, la sous-traitance parce que ce qui reste, finalement, c'est de l'entretien et on veut le faire à l'interne. Je pense qu'il y a des dangers à une politique semblable et un des dangers au sujet duquel il faut être constamment vigilant, c'est qu'à toutes fins utiles, on voit bien que le syndicat d'Hydro-Québec tente de se constituer un monopole pour l'entretien du réseau d'Hydro-Québec. On sait ce que cela veut dire. À partir du moment où on donne un monopole absolu à un groupe quelconque pour effectuer, à l'exclusion de tout autre groupe, un certain nombre de travaux, vous savez aussi bien que moi ce que cela implique en période de négociations et tout le reste.

Il y a aussi une autre chose à laquelle il faut songer. Si on élimine la sous-traitance, tel qu'on semble vouloir le faire, à ce moment-là, il faut tenir compte des pertes d'investissement, il faut tenir compte de la perte de l'expertise que ces entrepreneurs ont pu développer au cours des années, où ils ont oeuvré à l'entretien du réseau. Il faut aussi penser au recyclage de la main-d'oeuvre. Je pense que je n'aurai pas un long exposé à vous faire pour vous dire que, dans le domaine la construction, à cause de toutes sortes de contraintes qu'on a également en ce qui concerne l'embauche, nous aussi, nous nous sommes retrouvés avec une main-d'oeuvre vieillissante. Alors, c'est bien clair qu'à partir du moment où on élimine la sous-traitance, on est pris avec le problème du recyclage de toute cette main-d'oeuvre. À la période des questions, il y a certains députés qui ont soulevé justement, tout à l'heure, la problématique. Que fait-on avec ces employés, ces travailleurs qui sont rendus à un certain âge et qui ne sont peut-être pas aussi recyclables que d'autres, si je puis utiliser cette expression?

Quant aux effets de la politique d'Hydro-Québec sur les contribuables, je pense que les contribuables sont trop souvent négligés là-dedans. On parle souvent d'intérêts corporatistes, de syndicats, d'employeurs et ainsi de suite. Il faut aussi tenir compte des conséquences d'une politique semblable sur le public qui, finalement, endosse les coûts de ce service. On peut parler des conséquences que cela peut avoir sur la qualité ou le coût du service. On peut aussi parler, ce que je mentionnais tout à l'heure, des conséquences que cela peut avoir en ce qui concerne la sécurité du service par rapport au public, quand on parle de concentrer l'entretien de tout ce réseau entre les mains d'un groupe qui monopolise, à toutes fins utiles, tous ces travaux.

On peut s'imaginer facilement la situation suivante: Que fera Hydro-Québec au moment où on se retrouvera face à une situation d'urgence qui requerra une main-d'oeuvre supplémentaire de façon bien ponctuelle? On mentionnait l'exemple de la région de Montréal dernièrement! Que fait-on à Hydro-Québec lorsqu'on fait face à une situation semblable? On sait qu'on a dépanné certains États de la Nouvelle-Angleterre lors de problèmes assez sérieux qu'ils ont eus dans le réseau et qu'on y a dépêché des équipes de l'Hydro-Québec pour donner un coup de main. Qui viendra aider nos équipes d'Hydro-Québec au moment où on aura éliminé toute cette expertise qu'on a accumulée depuis un certain nombre d'années avec les travaux qu'on a exécutés pour Hydro-Québec?

Il y a aussi toute la question de la continuité du service et toute la question de la disponibilité, de la rapidité d'intervention, je pense qu'il faut en tenir compte. Quand le syndicat mentionnait lors de la présentation de son mémoire, qu'il n'y avait aucune étude au sein d'Hydro-Québec qui pouvait l'amener à établir un écart de coût possible entre les coûts que représentent la sous-traitance et les coûts que cela représente à HydroQuébec, j'ai le plaisir de vous informer que, d'après un document interne d'Hydro-Québec, on reconnaît d'ores et déjà dans ce document qu'il y a un écart de coût de 15 à 20 % supérieur pour les travaux qui sont exécutés par Hydro-Québec. Si vous me le permettez, je vous lirais un extrait de ce document. On dit ceci: Hydro-Québec reconnaît, à cause de sa fonction de distributeur, que toutes les comparaisons de coûts établies selon les règles de l'art entre les coûts de la main-d'oeuvre interne et de la main-d'oeuvre externe affectées à des travaux similaires dans les domaines des lignes et des postes font apparaître un écart entre 15 et 20 % par rapport aux entrepreneurs. Voyez la suite: Hydro-Québec est prête à assumer cet écart pour plusieurs raisons qui tiennent tant à la qualité du service à la clientèle qu'à la philosophie de gestion qui explique ce choix de gestion".

Quand le représentant des syndicats me

dit qu'il n'y a pas de document interne, qu'il n'y a pas d'étude interne à Hydro-Québec qui puisse établir des écarts de coûts, je regrette. Je pense qu'on a un exemple frappant d'un document de régie interne d'Hydro dans lequel on semble dire que, bon, on est prêt à assumer un écart de 20 % dans les coûts d'entretien de ces réseaux. Encore là, je fais le lien avec le public payeur à l'autre bout. Si on est prêt à faire assumer 20% de plus au public en général pour le plaisir de donner le monopole de ces travaux à un syndicat qui relève d'Hydro-Québec, c'est un choix à faire, mais il faut le faire en connaissance de cause et en sachant les conséquences. Je pense aussi qu'au niveau de la productivité... Je sais que le mémoire de l'ACRGTQ a fait grand état de cette situation. Je ne reviendrai pas là-dessus. II est clair que la politique, sans vouloir mettre en marche ou sans vouloir impliquer le syndicat là-dedans, vise graduellement à éliminer la concurrence et du même coup, évidemment, la compétitivité, ainsi qu'une baisse de productivité concernant ces travaux-là. Je pense que la réduction de la sous-traitance va carrément dans ce sens-là et qu'il faut être très vigilant quand on sait ce que cela peut impliquer comme coûts. On le dit et on le répète souvent, Hydro-Québec doit se présenter ici pour obtenir des augmentations de tarifs et il est bien évident qu'à partir du moment où on laisse Hydro aller vers une politique qui implique des coûts supérieurs de l'ordre de 20 % pour faire exécuter des travaux à l'interne ou à l'externe, il est bien évident qu'à partir de ce moment-là on peut arriver ici et demander les augmentations de tarifs qu'on voudra, cela va de soi, l'un entraîne l'autre. Si on permet à Hydro-Québec de ne pas s'administrer de la façon la plus efficace possible et qu'on permet à Hydro-Québec d'accepter de payer 20% de plus pour le plaisir de faire exécuter ses propres travaux à l'interne, je pense que tout à l'heure vous aurez à répondre là-dessus aussi en ce qui concerne les augmentations de tarifs d'Hydro-Québec. Finalement, c'est le public qui va payer.

Alors, si vous me permettez, il y a deux conclusions à notre mémoire. Il est clair que, d'après nous, on devrait tout simplement et carrément extraire la clause 34.03 de la convention d'Hydro-Québec et amender la loi d'Hydro-Québec pour qu'il soit clairement établi dans la loi qu'elle doit favoriser la sous-traitance au maximum de ce qui est possible et faisable. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le ministre.

M. Ciaccia: Merci, messieurs, de nous avoir transmis l'opinion de votre association. Votre mémoire particulièrement étoffé ouvre un large éventail de questions et de perspectives possibles.

Dans un premier temps, vous nous avez fait une description du champ d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Vous nous indiquez, en substance, qu'il est grand temps de procéder à une revue complète du champ d'application de la loi. Pour ce faire, vous proposez une nouvelle définition du mot "construction" dans la loi afin d'en élargir la portée. De la même façon, vous souhaitez que les exceptions prévues à la loi soient éliminées ou restreintes. En ce qui concerne la sous-traitance à Hydro-Québec, vous indiquez que le contexte actuel nous amènerait à l'élimination de la sous-traitance. Il y aurait des pertes pour les entrepreneurs et des mises à pied. Vous en concluez donc qu'il faut retirer de la convention collective des employés de métier d'Hydro-Québec l'article 34.03.

Votre exposé est aussi particulièrement intéressant quant aux solutions qu'il propose, soit pour Hydro-Québec, soit pour le gouvernement de façon plus large. Vous nous faites, part de l'expérience américaine en matière de "faire-faire" et des avantages qu'on pourrait retirer de l'application d'une politique analogue au Québec. Je crois que mes collègues et moi-même serons très intéressés à vous entendre donner des précisions à ce sujet. Mais, avant, j'aimerais vous poser quelques questions. D'abord, en rapport avec la première partie de votre mémoire, pourriez-vous expliquer brièvement la portée des modifications que vous proposez à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction? Quel serait l'impact sur une société comme Hydro-Québec?

M. Daoust: En ce qui concerne HydroQuébec, ce serait que, comme on vous le disait, nous, on n'a jamais accepté ou compris que les travaux de construction qui sont effectués par Hydro-Québec soient effectués hors décret. Les règles du jeu devraient être les mêmes pour tous. D'ailleurs, cela a amené de drôles de situations. J'ai effectué beaucoup de travaux à la Baie James. On voyait la société d'énergie, qui est quand même assez parallèle à Hydro-Québec, et on voyait aussi les employés d'Hydro-Québec qui étaient là, avec des conditions de travail, je peux vous l'assurer, que le secteur privé n'a pas les moyens de se payer. Les voyages pour revenir à Montréal ont été beaucoup plus fréquents que ce que le décret de la construction prévoyait. Cela a amené, naturellement, des conditions assez difficiles en ce qui concerne les relations du travail avec le secteur privé. Notre position, non seulement avec Hydro-Québec mais aussi avec les municipalités et ainsi de suite, c'est

que tout ce qui est construction devrait être sous le décret de la construction et effectué par des entrepreneurs. C'est la seule façon de pouvoir garder une main-d'oeuvre qualifiée et assurer une industrie saine. (20 h 30)

On a des structures, comme je le disais tantôt, qui sont volumineuses, qui coûtent des fortunes. Je siège au conseil d'administration de la construction du Québec. On a un budget de 34 000 000 $ ou 35 000 000 $ cette année. On va monter à 40 000 000 $ ou 45 000 000 $ d'ici è deux ans, avec la formation. Ce sont tous des organismes qui sont fixes, qui sont permanents. II ne faut pas prendre des mesures pour couper les heures dans la construction mais plutôt pour augmenter le bassin de la main-d'oeuvre dans la construction.

M. Ciaccia: Concernant la sous-traitance à Hydro-Québec, vous indiquez que la politique de sous-traitance poursuivie entraînerait, je pense - vous le dites dans votre mémoire - environ 2000 mises à pied. Pourriez-vous expliquer comment vous êtes arrivés à ce constat?

M. Daoust: Je pense qu'on se basait, si je me rappelle bien, sur le fait qu'en réduisant la sous-traitance, premièrement, à un niveau de 500, on parlait tout de suite de 500 emplois à donner. Ensuite, nous, on est persuadés que c'est la première étape parce qu'aux prochaines négociations..,, Je pense que vous avez tous été impliqués à un moment donné dans des négociations à un niveau ou à un autre. C'est rare que le patronat reprend quelque chose. Ordinairement, il donne quelque chose, il concède quelque chose. Une fois qu'Hydro a commencé à concéder au niveau de la sous-traitance, au volume de la sous-traitance, éventuellement, je pense que l'objet, à l'intérieur du syndicat, c'est d'éliminer la sous-traitance au complet. Alors, à ce moment-là, la coupure ne serait pas de 500, mais de 1000; ensuite, il y a toutes les fonctions connexes aux travaux de construction dans les autres industries, comme le camionnage, etc. On donne un paquet: le génie civil, le bâtiment, le transport, les finances. Il y a toutes sortes d'industries connexes à la construction qui sont touchées par à peu près autant d'emplois que ceux qui sont éliminés.

M. Ciaccia: Vous indiquez dans votre mémoire, et je crois que c'est là un de vos griefs principaux, qu'Hydro-Québec vous a incités, lors du démarrage du programme PAQS, à acquérir de nouveaux équipements en vue de remplir les contrats découlant du programme. J'aimerais que vous nous précisiez plus clairement comment se sont faites ces communications. Est-ce qu'il y a eu incompréhension entre Hydro-Québec et vous? Est-ce que ce n'était pas clair que le programme PAQS était un programme de nature temporaire?

M. Daoust: Ce que j'ai cru comprendre à ce moment-là, lors des réunions, c'est que, pour pouvoir remplir la fonction du programme adéquatement, il était nécessaire d'acheter, d'obtenir un nouvel équipement. L'idée, ce n'était pas de se servir de cet équipement durant une période de trois ou quatre ans, parce qu'à ce moment-là il n'était pas question de couper la sous-traitance après la fin du programme» L'idée, c'était de s'équiper pour le programme et, naturellement, l'équipement aurait été disponible après.

M. Ciaccia: Vous avez dit quelque chose. Vous avez dit qu'à ce moment-là il n'était pas question que le programme soit coupé après. Autrement dit, est-ce que vous nous dites que vous aviez 720, que le seuil d'emploi de la sous-traitance était de 720? Quand le programme a été mis en vigueur, est-ce que vous saviez que c'était pour être réduit à 500?

M. Daoust: Pas à ma connaissance. Non. Il y avait peut-être eu certaines discussions, mais, à ma connaissance, il n'y avait pas eu d'élaboration dans ce sens-là.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): M, le député de Roberval.

M. Gauthier: Oui, merci, M. le Président. Je vous remercie d'avoir déposé votre mémoire et d'avoir accepté de répondre à nos questions. Un certain nombre de choses me préoccupent cependant, et la première de ces questions est la suivante: Vous semblez vous soucier beaucoup - et nous partageons ce souci, d'ailleurs - des travailleurs de la construction, de ceux qui travaillent pour les entrepreneurs et qui sont mis à pied ou qui se cherchent du travail. Mais un peu plus loin dans votre mémoire, quand on lit, quand on vous écoute, vous proposez, à toutes fins utiles, de confier toute la construction à des entreprises de construction, de confier la moitié de l'entretien à peu près - en tout cas, j'ai vu des pourcentages qui s'établissent à 50 % -aux sous-traitants. Les employés qui sont actuellement à Hydro-Québec, eux, on parle de 2000 qui risquent d'être condamnés au chômage et au bien-être social, pour employer vos termes. Mais, si je suis votre logique et qu'on vous suit dans ce que vous demandez, les personnes qui travaillent actuellement comme monteurs de lignes,

comme ouvriers, à Hydro-Québec, elles vont faire quoi, sinon être condamnées au chômage et à l'aide sociale? Est-ce que vous n'avez pas l'impression que c'est un peu trop à l'autre bout de la balance, votre position? Je veux bien croire qu'on se soucie des uns, mais je pense que la commission parlementaire doit se soucier des uns et des autres. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Daoust: J'essaie de comprendre vos 2000 travailleurs.

M. Gauthier: Oui, bien, je vais vous l'expliquer plus clairement. D'une part, vous dites: Si on élimine la sous-traitance à Hydro-Québec, il y a 2000 travailleurs qui vont perdre leur emploi et qui vont être au chômage ou à l'aide sociale. C'est écrit dans le mémoire. Vous dites, évidemment, qu'il ne faut pas qu'il en soit ainsi, qu'il faut préserver cette main-d'oeuvre, qu'il faut permettre à ces gens d'un certain âge de travailler. On est d'accord avec cela. Mais là où je ne vous suis pas, c'est que, si on pousse votre raisonnement à la limite, vous réclamez toute la construction et la moitié de l'entretien; il y a quelques milliers de travailleurs à Hydro-Québec aussi qui gagnent leur vie avec cela. Vous ne semblez pas avoir la même préoccupation pour ces gens-là.

M. Fava: Si vous me permettez, je vais répondre à la question. Je pense que si vous regardez bien dans notre mémoire les conclusions, ce qu'on propose, ce n'est pas l'application du jour au lendemain d'une politique semblable. Je pense qu'il faut être très réaliste. Si vous lisez notre recommandation 3 dans notre mémoire, on préconise que cette politique soit implantée progressivement à raison de 5 % par année, de sorte que cela puisse permettre l'ajustement du flot de main-d'oeuvre qui peut se faire ou le déplacement de la main-d'oeuvre qui peut se faire d'Hydro-Québec vers la construction. C'est un peu le même souci que vous aviez tout à l'heure quand vous posiez la question au syndicat d'Hydro: Pourquoi ne vous entendez-vous pas avec vos confrères de la FTQ pour les engager, ces travailleurs qui seraient mis en disponibilité? Je pense qu'il faut regarder un programme comme celui-là échelonné sur une certaine période de temps, de sorte qu'une politique semblable soit appliquée sur une certaine période de temps et que ces frictions soient quand même réduites au minimum.

M. Dion: M. le Président, si vous me le permettez, il y aurait une précision à apporter. Je pense que nulle part dans notre mémoire il n'a été mentionné, à ma connaissance, que le fait que l'industrie de la construction veuille conserver ta sous- traitance provoquerait 2000 pertes de jobs à Hydro-Québec. Nulle part il n'est mentionné cela. Nous, on dit qu'il se perdrait 2000 jobs dans l'industrie de la construction si les contrats étaient transférés à Hydro. Cela est une partie de la question, mais je pense qu'il faut aussi se préoccuper - et c'est aussi le devoir du gouvernement de s'en préoccuper -des travailleurs qui perdraient leur job, dans le sens qu'ils seraient obligés d'aller travailler ailleurs. Il pourraient partir de l'industrie pour aller travailler à Hydro. Mais il faut aussi que vous compreniez qu'il y a des entrepreneurs, qu'il y a des employeurs dans l'industrie de la construction qui sont des "metteurs" de fonds, qui investissent de l'argent dans l'industrie de la construction pour faire travailler du monde. En forçant cette main-d'oeuvre à aller travailler pour Hydro, parce qu'on ne donnera plus de sous-traitance, on prive quand même des individus qui ont des entreprises de construction de gagner leur vie tout simplement en faisant un transfert de main-d'oeuvre de l'entreprise privée vers l'entreprise publique. Dans le fond, c'est cela le problème. On ne prétend pas qu'il y a des gens qui vont se retrouver au chômage. Il y a 2000 personnes qui vont être recyclées à Hydro. Mais il y a x entrepreneurs en construction qui, eux, n'auront plus de travail dans l'industrie. Ils vont être obligés de se recycler eux aussi.

M. Gauthier: D'accord, M. le Président, je pense qu'on se comprend à se parler, sauf que j'avais lu le texte intégral et on parlait de 2000 travailleurs au bien-être social ou au chômage.

M. Dion: ...qui allait changer.

M. Gauthier: Une autre question qui me préoccupe tous les gens qui sont passés ici, et les parlementaires également, ce matin, ont exprimé leurs points de vue - c'est que tout le monde recherche une solution qui se situe à peu près dans le juste milieu. D'une part, on veut bien préserver aux employés d'Hydro - et c'est leur droit - leurs emplois, conserver à Hydro un certain nombre d'emplois pour ces personnes-là, mais on veut aussi sauver les emplois qui sont actuellement menacés, sauf que cette opération, tout le monde la veut plus ou moins. Le syndicat des employés d'Hydro, que je sache, à moins que je n'aie bien mal compris son intervention, n'a pas exigé la totalité des travaux, peut-être dans la perspective d'une autre négociation de convention collective. Je pense que monsieur tout à l'heure l'a expliqué. On pourrait penser cela, mais, de fait, il n'a pas réclamé à ce stade-ci autant de choses et, d'autre part, il y a eu des représentants patronaux qui sont venus ce matin et qui ont déposé un mémoire extrêmement intéressant, qui va beaucoup

faire réfléchir la commission, et qui réclament une part des travaux d'Hydro, une juste part. Le problème qui se pose et la question qu'on essaie de poser à tout le monde, c'est: Quelle est cette juste part? Ce que je comprends de votre mémoire -corrigez-moi si je me trompe - c'est qu'il y a, au-delà de cela, une intention manifeste d'accaparer d'abord la totalité du champ de la construction et au moins la moitié du champ de l'entretien. Or, cette position va un peu plus loin que ce qu!on a vu jusqu'à maintenant, mais tout le monde a été unanime à reconnaître qu'Hydro devait garder en son sein des équipes qui ont une expertise. D'ailleurs, avant de souper, les ingénieurs nous ont démontré - en tout cas, en ce qui me concerne, sans l'ombre d'un doute - qu'il fallait conserver à Hydro une expertise technique. Les travailleurs nous ont démontré qu'il fallait conserver à Hydro une expertise d'entretien et même les patrons qui sont passés ce matin ont démontré et accepté l'idée qu'Hydro conserve un minimum de "staff" d'entretien et une équipe viable qui puisse pallier les problèmes qui se posent. Comment réagissez-vous à cette demande? J'ai l'impression que vous ne voyez pas cette expertise nécessaire à Hydro puisque le rôle que vous voyez pour Hydro est un rôle d'encadrement, de gérance et de contrôle des travaux faits par les entrepreneurs.

M. Daoust: J'ai avancé l'idée que les travaux de la construction devraient demeurer à l'intérieur du champ d'application de la construction, indépendamment de qui les fait. Si, pour garder une expertise - et je comprends très bien le point qui a été mentionné par tout le monde - Hydro-Québec doit continuer à exécuter une certaine partie des travaux, mais que cette partie-là constitue des travaux de construction assujettis au décret de la construction, avec les mêmes conditions de travail, les mêmes conditions salariales, etc., plutôt qu'être exempte de la construction, comme elle l'est actuellement... C'est une entrée, une porte ouverte et on s'aperçoit actuellement que d'autres organismes, dans le passé - et cela continue de s'aggraver - se sont servis de cela comme exemple et ont essayé de justifier que c'était tout aussi nécessaire pour eux que pour Hydro-Québec d'être exempts de la construction. C'est cela notre problème.

M. Fava: Si vous le permettez...

M. Gauthier: Je m'excuse, je voudrais poser une sous-question. Je veux bien comprendre ce que vous avez indiqué à la page 53: "On peut comprendre qu'Hydro-Québec se garde la responsabilité de l'entretien du réseau et se dote, à cet effet, d'équipes et d'outillages en conséquence. Pour assurer une telle responsabilité - celle de l'entretien - cependant, Hydro-Québec n'a pas à assurer la totalité des activités d'entretien mais seulement la gérance et le contrôle, quitte à disposer de ressources d'appoint pour les crises..."

Si je comprends bien, votre position, c'ests la construction dans un bloc aux entrepreneurs et l'entretien aux entrepreneurs, avec Hydro qui se charge de la gérance, de l'encadrement et du contrôle. Est-ce bien cela?

M. Daoust: Vous devez comprendre qu'il y a certainement... Je suis sûr qu'il y a une formule de compromis quelque part. Le document que vous regardez est basé sur un document qu'on avait commandé de l'institut national d'administration publique. Il a été basé sur un document rédigé à la demande du gouvernement pour voir ce que pouvait donner la privatisation dans différents domaines. C'étaient peut-être des objectifs théoriques, rêveurs, à ce moment-là, de l'institut national d'administration. On s'est bien gardé de dire que c'étaient des documents sur lesquels notre mémoire était basé, que ce n'était pas effectivement notre mémoire comme tel. C'est un document qui provenait de l'institut national d'administration publique, comme je vous l'ai dit, qui partait peut-être en disant: Si on avait à recommencer à zéro, comment cela devrait-il être? Mais, dans la pratique, il est bien évident qu'il faut une formule de compromis quelque part.

M. Fava: Je pense qu'en réponse à votre question, vous vous référez à la page 53, mais, si vous vous référez à la page 82 du même document, vous allez trouver la réponse à cette question. On y dit: "D'autre part, le gouvernement prétend qu'il poursuit une politique de privatisation des services non essentiels de l'administration publique, alors qu'Hydro-Québec, pour sa part, retire progressivement l'entretien du réseau de ses activités imparties. Dans ces conditions, il semblerait normal que le gouvernement oblige Hydro-Québec à impartir systématiquement ses tâches d'entretien du réseau (dans une proportion minimale de 50 %) étant bien entendu qu'il est tout à fait admissible qu'elle conserve une capacité de production dans ce domaine en vue de perpétuer son expertise à gérer cette politique managérielle, à garantir la sécurité du service et à faire face à l'imprévisible." (20 h 45)

Alors, dans ce contexte, nous, on dit: C'est tout à fait normal, pour qu'Hydro-Québec ne soit pas placée dans une situation où elle perd cette expertise après l'avoir totalement confiée à l'entreprise privée, il est normal qu'elle se garde une partie des

travaux pour assurer la continuité de ce "know-how" et qu'elle ne se retrouve pas, demain matin, à la merci totale de l'entreprise privée, comme on ne veut pas qu'Hydro se retrouve à la merci totale du syndicat, qui veut monopoliser ces travaux. Alors, je pense que c'est une norme qu'on peut impartir au maximum tout en gardant à Hydro-Québec cette expertise qu'on prétend qu'elle pourra conserver facilement et aisément en se gardant Une proportion d'à peu près 50 % de ces travaux.

M. Gauthier: Oui. Est-ce que, en termes de chiffres... Ce matin, on a situé le débat à peu près comme ceci: on a parlé d'une hypothèse de 1000 hommes-années; les constructeurs s'étaient tenus, semble-t-il, aux environs de 800 ou 900 hommes-années dans des sous-contrats pour Hydro. Les clauses prévoient une baisse de ce nombre-là à 500; du moins, c'est la position syndicale qui a négocié cette clause. Alors, on avait l'impression de travailler entre 500 et 1000, 1000 étant ce qui est souhaitable pour les entreprises et les travailleurs qui cherchent de l'emploi actuellement dans ce domaine, et 500 étant une position, semble-t-il, acceptable pour le syndicat puisque cela a été négocié et signé. Un nombre aux environs de 720 personnes, c'est une situation qui a existé pendant de nombreuses années et qui avait satisfait plus ou moins l'une des parties. Est-ce que votre position par rapport à 500, 720 et 1000 hommes-années est quantifiable chez vous? Est-ce 1000, 2000 ou 1500?

M. Fava: Je pense qu'à partir du moment où on veut cerner le problème avec des chiffres de 500, 1000 ou 2000, c'est complètement fausser le débat. Ce qu'on essaie d'identifier, c'est une tendance vers laquelle on devrait aller tout en posant la question suivante: Â quel degré faut-il arrêter pour préserver cette expertise à Hydro-Québec? Si on juge que 30 % ou 40 %, c'est suffisant pour préserver cette expertise à Hydro-Québec, tout en ne la mettant pas uniquement à la merci de l'entreprise privée, en assurant la continuité et en s1 assurant qu'en période de catastrophe ou de crise il y ait quand même des ressources auxquelles on pourrait faire appel pour l'entretien du réseau, je pense que c'est là la vraie question. C'est sûr que tout cela est une question de degré. Moi, de l'entreprise privée, je vous dirai que 30 %, c'est suffisant pour qu'Hydro-Québec conserve son expertise dans ce domaine. Hydro vous dira que cela lui prend la totalité de l'entretien du réseau. D'après nous, il faudra que cela se situe entre 30 % et 50 %, qui serait le maximum qu'on devrait préserver à Hydro, à ce niveau.

M. Gauthier: Une dernière question. Je comprends le dégagement que vous manifestez à l'endroit de cette question en disant que c'est fausser le débat, sauf que cela fait des années que ça marche. C'est un débat tout de travers dans ce cas-là puisqu'on parle de 500, 720 et 1000 et quelque chose entre cela, mais, sur le plan théorique, je suis d'accord avec vous qu'on pourrait parler théoriquement de 30 %, 35 % ou 40 %, s'asseoir avec Hydro et essayer de chiffrer cela. C'est bien gentil tout cela, mais notre préoccupation est aussi sociale. Ce n'est pas qu'une préoccupation économique, froidement et bêtement, c'est une préoccupation sociale qu'on a. Il y a, d'un côté, un bloc d'employés a Hydro, pour notre part, à qui il n'est pas question de faire perdre du travail; là, on se comprend. Il y a, de l'autre côté, un autre bloc de personnes qui elles-mêmes - ce n'est pas nous qui avons inventé cela - quantifient le travail à faire pour préserver des emplois dans ce secteur par des chiffres qui se situent entre 500 et 1000, et il semble qu'aux alentours de 750 à 800 tout le monde est heureux. Ce ne sont pas des chiffres que j'ai inventés, on nous les a donnés aujourd'hui. Alors, vous m'excuserez de les ramener. Puisque le débat s'est enclenché là-dessus, tout en comprenant qu'économiquement on pourrait regarder cela bien différemment, avec une perspective un peu sociale et en pensant au monde qui est derrière ces chiffres, votre position et le "faire-faire" poussé à 100 % pour la construction et à 50 % pour l'entretien, qu'est-ce que cela représenterait comme chiffres? J'aimerais avoir un ordre de grandeur par rapport aux ordres de grandeur que les autres nous ont donnés.

M. Fava: En fait, ce que nous avons proposé dans notre document, c'est que toute politique qui sera décidée par rapport à cette sous-traitance, on devra la mettre en application de façon échelonnée à raison de 5 % par année pour justement répondre au problème de déplacement de la main-d'oeuvre. Comme vous le dites, tout en préservant les emplois actuels à HydroQuébec concernant l'entretien du réseau, si on décide, à partir du moment où ces emplois sont garantis, qu'on doit aller vers une politique d'impartition, nous disons, à ce moment-là, qu'en y allant à raison de 5 % par annnée, on est en mesure de le faire sans le moindre heurt pour un bloc de travailleurs ou l'autre. Que ce soit Hydro-Québec ou l'entreprise privée, on est en mesure d'absorber 5 % par année sans que cela ne crée de déplacements qui fassent mal aux travailleurs à la base. Je dois m'arrêter là parce que cette question de chiffres, entre 500, 1000 ou 720, comme vous le disiez tout à l'heure, il y a de quoi

se perdre là-dedans. Pourquoi parle-t-on de 700 ou de 500? Tout simplement parce qu'on s'y réfère dans une entente signée entre Hydro-Québec . et le syndicat. C'est un chiffre complètement arbitraire selon moi qui est sorti d'un chapeau comme cela. On a convenu de 500 et personne n'a pu expliquer devant cette commission d'où venait ce chiffre de 500. C'est strictement un point de référence qu'on a trouvé à un moment donné et tous semblent partir les discussions à partir de ce chiffre.

M. Gauthier: Je vous remercie.

M. Daoust: Si vous me le permettez, M. le député...

M. Gauthier: Oui.

M. Daoust: ...j'entendais dire ce matin que 720, si je rappelle bien le chiffre exact, c'est ce qui existait précédemment, mais que l'ouvrage ne se faisait pas adéquatement. On nous a dit aussi que le réseau n'était pas maintenu de la bonne façon. Alors, comment peut-on arriver aujourd'hui avec des chiffres basés sur quelque chose qui n'était pas adéquat? Qu'on commence par établir la quantité nécessaire pour avoir un système qui marche et, après cela, on établira les chiffres dont on a besoin pour faire marcher le système. C'est pour cela qu'on s'en tient à des principes, à des pourcentages pour le moment.

M. Gauthier: M. le Président, il faut faire attention à l'argumentation. On nous a dit très justement que 720 hommes-années réservés à l'entreprise privée dans l'entretien du réseau n'étaient pas suffisants. Il faut l'augmenter si on veut garder le réseau bien entretenu. La question est de savoir à quelle place on l'augmente. Est-ce qu'on l'augmente chez les syndiqués d'Hydro-Québec ou si on l'augmente en permettant aux entrepreneurs de faire travailler davantage leur monde? C'est la question. C'est pour cela qu'il faut faire attention. Comme vous le dites, quand on manipule tous ces chiffres, on finit par s'y perdre. On va faire attention pour garder les idées claires. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci. Alors, M. le député de Mégantic... Je m'excuse, Mme la députée de Mégantic.

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Vous nous dites dans votre mémoire que l'entretien du réseau coûte plus cher à Hydro-Québec parce qu'il se fait à l'interne. Vous avancez même que le coût additionnel serait de l'ordre de 100 000 000 $ par année. Pourriez-vous nous expliquer d'une façon plus détaillée sur quelle approche vous basez cette conclusion?

M. Fava: En fait, ce n'est pas moi qui le dis. L'affirmation selon laquelle cela coûte 20 % de plus lorsque les travaux sont exécutés par Hydro-Québec, c'est Hydro-Québec elle-même qui le dit dans un document interne qu'elle a préparé et qui est une étude comparative des coûts par rapport à ce qu'elle peut obtenir en sous-traitance., À la question qu'on a posée tout à l'heure, il s'agit de savoir, si on décide d'augmenter, si on va dans la direction où cela nous coûte 20 % de moins ou si on augmente dans la direction où cela nous coûte 20 % de plus. Essentiellement, je pense que la décision qu'on a à prendre porte là-dessus. Le chiffre que vous avez mentionné tout à l'heure, je pense que vous allez le retrouver dans le mémoire de l'ACRGTQ où on parle d'un maximum de 100 000 000 $ et d'un minimum de 30 000 000 $ environ, si ma mémoire est bonne. Mais il est clair que, dans le document soumis par l'ACRGTQ, on situait le problème à l'intérieur de ces deux chiffres» Maintenant, vous allez me dire qu'entre 30 000 000 $ et 100 000 000 $, il y a quand même un écart important, sauf que ce qu'on a pris, c'est la meilleure des hypothèses: on l'a comparée à la pire des hypothèses et on s'est dit que c'était quelque part entre ces deux chiffres. C'est sûrement au minimum environ 30 000 000 $ et au maximum 100 000 000 $.

Mme Bélanger: J'aimerais que vous me précisiez davantage comment vous en êtes arrivés à ces chiffres.

M. Fava: Bon. Si je peux vous référer au mémoire - est-ce le mémoire de l'ACRGTQ - au document qui est notre mémoire, à l'annexe G. C'est ce document-là, en fait.

Une voix: Je ne l'ai pas.

M. Fava: C'est l'avant-dernière page, le document de référence. À l'annexe G de notre mémoire, au paragraphe 5, on parle des coûts supplémentaires résultant des 1000 employés supplémentaires. On parle des salaires annuels qui nous amènent à un écart de... On parle de 1000 travailleurs à 30 000 $ par année, donc de 30 000 000 $ par année. On parle d'avantages sociaux de 9 000 000 $, de frais d'administration de 39 000 000 $ à 10 %, ce qui nous donne un autre 3 900 000 $, donc 42 900 000 $. Si on ajoute là-dessus le coût des équipements et des outillages pour un autre 42 900 000 $ et celui des contingences de 15 %, pour un autre 12 900 000 $, cela nous mène à un coût de 98 700 000 $. D'après nous, ce sont les coûts d'Hydro-Québec par rapport aux coûts des entrepreneurs pour l'entretien du réseau. On a alors évidemment un chiffre de 98 000 000 $, qui est la pire hypothèse, et

on vous dit que dans les meilleures circonstances, on pourrait limiter les dégâts à 30 000 000 $ et quelque. La vérité est sûrement quelque part entre ces deux chiffres.

Mme Bélanger: Mais quand vous parlez de 20 % de plus, quand c'est fait à l'interne, sur quelle opération est-ce basé? Est-ce sur la construction ou sur l'entretien?

M. Fava: Je vais vous lire le document d'Hydro-Québec, puisque c'est un document d'Hydro-Québec. On dit ici: Hydro-Québec reconnaît, à cause de sa fonction de distributeur, que toutes les comparaisons de coûts établies selon les règles de l'art entre les coûts de la main-d'oeuvre interne et externe et effectuées à des travaux similaires dans le domaine des lignes et des postes font apparaître un écart entre 15 et 20 % par rapport aux entrepreneurs. HydroQuébec est prête à assumer cet écart. Plusieurs raisons qui tiennent compte tant de la qualité du service, du service à la clientèle que de sa philosophie de gestion expliquent ce choix.

En fait, c'est tout simplement un choix qu'Hydro-Québec fait. Elle dit: On reconnaît qu'en exécutant les travaux nous-mêmes, cela nous coûte 20 % de plus. Mais pour des raisons philosophiques - et encore là ce n'est pas moi qui le dis, c'est Hydro-Québec - on est prêt à payer ces 20 % de plus pour exécuter nos travaux à l'interne.

Je pense que c'est une question que vous devriez poser aux représentants d'Hydro-Québec: D'où vient ce chiffre? Nous, on l'a retracé dans un document interne d'Hydro-Québec. Malheureusement, je ne peux pas vous l'expliquer davantage, parce qu'on nous dit qu'il y a eu des études de faites pour comparer les coûts, selon toutes les règles de l'art reconnues en matière de comparaison de coûts, et on arrive à un écart de 20 %.

Mme Bélanger: Alors, vous voulez dire que sur un contrat de 500 000 000 $, il y a 20 % qui est...

M. Fava: Si je me fie au document d'Hydro-Québec, oui. D'après nous, c'est probablement supérieur à ce chiffre.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, Mme la députée?

Mme Bélanger: ...et encore.

M. Daoust: Si vous me le permettez, nous, on n'a pas de façon de vérifier les 15 à 20 %. Alors, si quelqu'un à l'interne admet candidement comme cela que c'est 15 ou 20 %, on a de bonnes raisons de se douter que cela doit être beaucoup plus substantiel.

On peut vous donner un exemple qui est très frappant. Un entrepreneur fait des travaux sur une base horaire. S'il travaille deux heures, il est payé deux heures. Tandis qu'Hydro-Québec paie son homme huit heures. Cela saute aux yeux tout de suite. On peut certainement vous donner un paquet d'autres exemples comme cela.

M. Fava: Peut-être que les 20 % représentent uniquement les raisons philosophiques.

Mme Bélanger: D'accord. Vous mentionnez que l'entente du 29 juin 1984 sur le programme d'amélioration de la qualité du service a pour effet de réduire progressivement le recours à la sous-traitance, soit de 1000 à 500. Cet article a été inclus dans la convention collective du Syndicat des employés de métiers d'Hydro-Québec. De plus, vous soulignez que l'article 34.03 vient limiter encore davantage le recours à la sous-traitance. Pourriez-vous nous préciser en quoi le contenu de cet article a affecté ou affectera les pratiques et les usages précédents d'Hydro-Québec? (21 heures)

M. Daoust: Voici. J'entendais le représentant des constructeurs de routes expliquer ce matin que, maintenant, il y a non seulement une quantité maximum d'heures-hommes par année, mais qu'avant de pouvoir donner un sous-contrat, il faut maintenant faire l'épuration des employés d'Hydro-Québec, voir s'ils sont disponibles ou non dans la région et dans la sous-région. On nous expliquait aussi que cela cause des délais énormes. Cela peut prendre une journée, deux jours, trois jours. J'ai vécu une panne d'électricité dans ma région, durant l'été, comme tout le monde, qui a duré trois jours et je trouvais cela incroyable que des employés d'Hydro-Québec travaillent huit heures et s'en aillent chez eux. Je peux vous assurer que, s'il y avait eu un entrepreneur privé là, cela n'aurait pas été un poste de huit heures, cela aurait été un poste de douze heures, ou deux postes de huit heures et même trois postes de huit heures. Quand cela fait deux, trois ou quatre jours qu'on n'a pas d'électricité, qu'on demeure dans un secteur où il n'y a pas d'aqueduc et donc, pour avoir de l'eau, que cela prend une pompe, de l'électricité, je pense que c'est critique. Il ne faut pas se limiter à huit heures par jour et s'en aller chez soi. Je comprends très bien que les travailleurs d'Hydro-Québec étaient fatigués. Je sympathise, je ne veux pas insinuer que ce sont des paresseux, rien de cela, mais ce que je dis, c'est que avec la sous-traitance, il y aurait eu l'option certainement de travailler deux ou trois postes, chose qui n'existait pas.

M. Fava: II faut dire aussi que l'article

34 nous dit qu'on a le droit de se rendre jusqu'à un maximum de 500 heures, mais c'est uniquement en cas d'urgence qu'on va puiser dans cette banque de 500 heures-là. Il est clair que cela va être 500 heures et moins, d'après nous, et uniquement dans les cas d'urgence. Alors, maintenir des équipes en place uniquement pour les cas d'urgence d'Hydro-Québec quand on a des immobilisations à assumer comme celles qu'on vous a mentionnées au courant de toute la journée, c'est très aléatoire merci. Je pense qu'il n'y a pas beaucoup d'entreprises qui peuvent rentabiliser leurs équipes en les maintenant au bon vouloir d'Hydro-Québec uniquement pour satisfaire à ses cas d'urgence et dans la mesure où on veut bien faire appel à nous. Il est là, le problème.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? Alors, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, j'écoute cela... J'ai eu la chance de lire les mémoires et je vous avoue que ce n'est pas de nature a se rapprocher. Je faisais quasiment une crise au syndicat d'Hydro-Québec parce qu'il ne donnait pas de chance et là, vous êtes en train de lui enlever ce qu'il a. J'avoue qu'on passe d'un extrême à un autre. Le champ d'application de l'industrie de la construction, si vous leur enlever cela, que je sache, c'est à peu près - vous me corrigerez - entre 25 % et 30 % de la construction qui est occupée par des gars d'Hydro-Québec comme tels. Et nous autres, on leur demande de nous en donner, dans notre réaction à ce problème qui est sur la table. Je ne pense pas que la solution soit dans l'exclusivité des champs parce que, autant vous pourriez réclamer l'exclusivité du champ d'application du décret de la construction, autant eux vont réclamer le respect de la convention collective signée. C'est à Hydro-Québec à s'expliquer bientôt, elle va témoigner demain. Moi, c'est drôle, je vois la situation... C'est une solution mitoyenne entre vos aspirations et vos désirs, puis les aspirations du syndicat d'Hydro-Québec. La question fondamentale qu'on doit se poser, ce n'est pas sur le plan légal. Si on veut trouver une situation au point de vue légal, on n'a pas à se réunir ici parce qu'on a seulement à respecter les contrats signés. C'est comme ça que je le vois. Si c'était une situation légale, on n'en parlerait pas. C'est une situation de gros bon sens et d'équité, c'est une question humaine que je vois dans ce problème-là. Y a-t-il une place dans les deux secteurs pour satisfaire la sécurité d'emploi de l'ensemble de ces travailleurs? Si vous commencez à finasser -et ce n'est pas cela que vous faites là - si on commence à finasser tout le monde, pensez-vous qu'on va trouver une solution?

Pour entrer "moppologiste" à Hydro-Québec, cela prend un secondaire V. Il n'y a pas un "maudit" monteur de lignes chez vous qui va pouvoir entrer. Donc, les critères de sélection, on sait comment ils sont faits. Pour entrer dans un hôpital comme "moppologiste", cela prend un secondaire V maintenant. Vous essaierez de placer un gars de 48 ans dans un hôpital pour essayer de récupérer, vous ne serez pas capable. Donc, il y a une question humaine, concrète, qui se pose.

Je ne suis pas sûr, moi, qu'il y a des gars d'Hydro-Québec qui pourraient entrer chez vous dans le secteur de la construction avec la loi 119 et puis vos nouveaux codes sur le nombre d'heures. Est-ce que vous reconnaissez les heures faites ailleurs. Non, vous ne les reconnaissez pas en industrie, vous ne les reconnaissez pas en usine. Vous ne les reconnaissez pas, vous le savez. J'ai essayé de plaider cela devant vous autres, la loi 119, et vous étiez pour. Ne venez pas me dire que la loi 119 règle le problème des gars d'Hydro-Québec qui entreraient chez vous. Arrêtons d'argumenter sur ce terrain-là. Pas un secteur ne peut répondre à l'autre. Moi, la question fondamentale que je vous pose, c'est: Y a-t-il moyen, sans vouloir accroître les champs d'action délibérément de part et d'autre, de sauver les emplois de tous ceux qui travaillent présentement à Hydro-Québec et de sauver les emplois de ceux qui travaillent chez les sous-traitants? C'est ça, la situation. Moi, je pense qu'on n'aurait pas à élaborer longuement et à finasser sur les méthodes, c'est 5 % par année. Je vous voyais aller à 5 % par année. Selon quels critères allez-vous entrer chez-vous? Supposons que vous récupérez 50 % de la maintenance, comme vous le disiez tantôt, à raison de 5 %, qui va aller chez-vous? Ce n'est pas vous autres qui allez négocier les critères de la sortie d'Hydro. Supposons qu'on s'en aille vers une formule semblable, ce serait au syndicat d'Hydro à négocier sa sortie. Allez-vous prendre un syndicat qui va négocier sa sortie, alors qu'il veut l'élargir? Cela n'a pas d'allure. On n'arrivera à rien.

Moi, il me semble que l'ensemble de ceux qui oeuvrent dans ces secteurs-là... C'est un commentaire, ce n'est pas une question. Je m'excuse, mais c'est un commentaire qui me vient à l'idée, parce que j'ai lu les mémoires: Est-ce qu'il y a place pour garder les emplois de ce monde-là dans les deux secteurs? C'est ça la seule et simple question. Je vous garantis qu'on n'aura pas à finasser sur la technique, si on dit: Est-ce qu'il y a de la place pour cela? Il y a du monde qui s'identifie, il y a des feuilles de paie qui relatent exactement combien ont travaillé, année après année. Des moyennes se dégagent. La sécurité d'emploi est-elle absolue et totale pour les travailleurs d'Hydro qui y oeuvrent? Il faut

le déterminer. Tu ne demanderas pas à un syndicat de négocier ses mises à pied, ce n'est pas vrai. Je le sais comment cela marche.

Il me semble que c'est dans ce sens-là, les solutions. Si les employeurs, d'une part, sont pointilleux au point de dire: Moi, cela me prend tout le champ d'application de la construction et cela me prend 50 % du champ de la maintenance, vous allez durcir davantage la position des syndicats d'Hydro, probablement avec raison, à part cela, car ils vont dire: Là, vous empiétez. Il me semble que la réaction normale devant un tel problème, qui est un problème fondamentalement humain, c'est plutôt de chercher à regarder le portrait exact, puis à le 'geler dans le temps et à dire que toute évolution, à partir de ce moment-ci, se fera comme cela.

M. Fava: Je pense qu'en posant la question, vous y répondez. Écoutez, sur le champ d'application de la loi, nous n'avons pas eu un mot à dire, c'est une loi qui nous a été imposée. Vous vous référiez au règlement de placement dans l'industrie de la construction. On n'a pas eu le choix, c'est une loi qui nous a été imposée. Alors, aujourd'hui, vous venez me dire que le champ est bloqué au niveau de la construction, qu'il n'y a pas moyen d'en entrer, bien, je regrette, cela fait des années qu'on se bat pour faire éliminer ce règlement de placement et on est encore pris avec.

Revenons à l'essentiel de la question que vous posez. Je pense que les représentants du syndicat d'Hydro-Québec vous ont mentionné cet après-midi qu'effectivement ils procédaient à l'embauche à raison de x nombre de travailleurs par année. Je pense qu'on pourrait d'ores et déjà arrêter cette embauche-là, c'est un minimun. Là, on ne parle pas de perte d'emplois. On a dit à Hydro, comme vous mentionniez cet après-midi: Gardez les emplois que vous avez. D'ailleurs, la clause 32 de la convention vous protège au maximum. Vous avez douze mois d'engagement à Hydro, pas moyen de mettre à pied personne. Vous gardez votre monde. Je pense que c'est une question de direction, dans quelle direction on s'en va. Est-ce qu'on permet à Hydro de continuer à embaucher et d'assurer de plus en plus, l'entretien du réseau aux dépens de l'entreprise privée ou est-ce qu'on laisse cette croissance possible au niveau des travaux additionnels à effectuer à l'entreprise privée ou est-ce qu'on en donne à Hydro? Moi, je vous dis que, dans le fond, ce n'est pas une question d'emploi. S'il faut engager du monde pour exécuter ces travaux-là, que ce soit Hydro qui engage ou que ce soit l'entreprise privée, c'est le même nombre d'emplois, à 20 % moins cher, mais avec la différence que si on laisse Hydro engager, vous allez vous retrouver demain matin avec des entrepreneurs qui auront effectué des investissements substantiels et qui vont se retrouver avec des équipements sur les bras. Ce sont ces gens-là, finalement, qui vont se retrouver au chômage, parce que les travailleurs, si on laisse Hydro comme cela, ça va être Hydro qui va les engager, ou l'inverse si on décide d'aller vers une politique à l'inverse, à la différence près, comme je le mentionnais tout à l'heure, que, si c'est Hydro qui continue à croître et qui continue à exécuter de plus en plus l'entretien de son réseau, on va se retrouver avec des équipements dans le privé qui vont devenir tout à fait désuets et qui ne serviront pas. Il est là le problème. Ce sont finalement ces équipements-là qu'on va mettre en chômage. Nous, ce qu'on vous dit, c'est d'arrêter l'embauche à ce niveau-là et d'aller plutôt dans le sens inverse pour ces embauches-là, pour préserver ces équipements de l'entreprise privée. Il n'y aura pas de perte d'emploi nulle part, parce que, si Hydro engage, moi, je ne vois pas pourquoi des emplois se perdraient entre les deux. Alors, je ne vois vraiment pas le problème en termes de perte d'emplois. Je pense qu'on est en train de décider qu'on va prendre un paquet de capital et un paquet d'équipement et que c'est cet équipement-là qu'on va mettre en chômage.

M. Chevrette: Vous avez dit tantôt -vous ou M. Daoust, je ne sais pas - vous avez dit tantôt que, lorsqu'on a négocié le programme à 1000, à 750 et à 500, vous n'aviez pas été prévenus au départ?

M. Fava: Le chiffre de 500, M. Chevrette, on l'a appris quelques mois après que l'entente a été signée. On nous a parlé d'augmentation d'équipements. On nous a demandé de nous préparer parce qu'effectivement le programme entrerait en vigueur et qu'on ferait appel à nos services davantage qu'avant que cette entente-là soit signée. Mais le chiffre de 500, qui allait faire en sorte que la période de décroissance, au bout de la troisième année, arriverait, c'est un chiffre qui a été appris quelques mois après que l'entente a été signée.

M. Chevrette: J'aurais une dernière question. À partir de votre mémoire, vous semblez exposer une situation idéale. Si j'avais à vous poser une question concrète, ce serait. Qu'est-ce qu'il y a de possible dans les circonstances?

M. Fava: Je pense qu'on vient d'y répondre. Moi, ce que je vous dis, c'est qu'à l'heure actuelle Hydro-Québec procède à de l'embauche pour mettre en application cette

disposition de la convention collective. Moi, ce que je vous dis, c'est que cette embauche devrait se faire dans le domaine privé pour maintenir les emplois et maintenir à l'ouvrage les équipements qui sont là. Moi, je pense qu'on devrait plutôt geler à l'inverse. Je pense que ce n'est pas une question de perte d'emplois. On devrait limiter l'embauche en ce qui concerne l'Hydro-Québec et aller plutôt dans le sens opposé. Moi, je pense que là-dessus, quant à la direction qu'on doit prendre, pour moi, c'est très clair. Est-ce que la situation actuelle est la situation idéale? Cela, c'est une autre question. Mais vous me dites; Vers où, qu'est-ce qu'on devrait faire demain matin pour tenter... On devrait au moins stopper l'hémorragie. Je pense que cela s'impose avant que le problème ne s'aggrave, et après ça je pense qu'on devrait tenter de trouver des solutions pour voir si, déjà, au moment où l'hémorragie a été stoppée, la situation est adéquate ou pas. Après ça, on s'attaquera aux problèmes existants. Mais on devra, au moins pour l'avenir, arrêter d'aller dans ce sens-là.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Rosemont.

M. Rivard: Vous devez soupçonner que, lorsque nous cessons d'être membres d'une commission parlementaire et que nous redevenons des députés chacun dans nos comtés, nous sommes en relation beaucoup plus fréquente avec le public payeur, comme vous l'avez appelé tout à l'heure, qu'avec les hauts dirigeants d'Hydro-Québec. Je voudrais vous entendre parler sur la productivité ou la différence de productivité entre HydroQuébec et les entreprises qui pourraient agir en sous-traitance. Je ne pense pas qu'à la fin de cette commission parlementaire on en arrive à la conclusion qu'il n'y a pas de différence de productivité. Je pense qu'on retrouve dans chacun des mémoires, et même dans le mémoire d'Hydro-Québec, des chiffres qui sont mentionnés. Est-ce que ce sera 10 %, 15 %, 17,5 % ou 20 %, je ne le sais pas, mais on arrivera à une différence de productivité.

L'an passé, lors de la commission parlementaire, c'est-à-dire cette année, au printemps dernier, les représentants d'Hydro-Québec avaient émis une hypothèse, une interprétation quant à cet écart de productivité qui existerait entre les monteurs du secteur privé et les monteurs d'Hydro-Québec. Ils nous ont dit alors: C'est essentiellement dû à la nature des travaux. Par exemple, dans le cas de la sous-traitance, il s'agit de travaux de longue durée, alors que dans le cas d'Hydro-Québec il s'agit davantage de travaux faits d'urgence ou de plus courte de durée. Est-ce que vous, messieurs, vous acceptez cette interprétation d'Hydro-Québec?

M. Fava: Je pense que c'est une interprétation qui est réfutée par les documents d'Hydro-Québec même. Hydro nous dit: Écoutez, quand on compare les chiffres, en utilisant les règles de l'art qui existent en matière de comparaison de chiffres, de notre propre aveu, on arrive à un écart de 20 %. Comme je vous le dis, ce sont des documents internes d'Hydro. Elle nous dit qu'elle a procédé là-dessus à une comparaison des chiffres selon les règles de l'art et qu'effectivement, en matière de lignes et de postes, elle arrive à ce chiffre-là. On nous dit carrément que ce chiffre-là peut s'expliquer pour des raisons philosophiques. (21 h 15)

Maintenant, moi, je vous avoue honnêtement que je ne voudrais pas me retrouver à votre place, pris à siéger pour décider si je dois permettre à Hydro-Québec d'augmenter ses tarifs ou pas d'expliquer au public payeur que j'ai accepté d'augmenter ses tarifs parce que, pour des raisons philosophiques, on doit permettre à Hydro de faire des travaux de 20 % plus cher qu'elle pourrait obtenir en faisant appel à l'entreprise privée. Je pense que c'est là la question qu'on doit se poser.

M. Rivard: L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, ce matin, a semblé dire qu'elle n'était pas en mesure, elle, de faire des études à ce point de vue. Elle a fait une démonstration - qui vaut ce qu'elle vaut -qui allume, n'est-ce-pas, qui attire notre attention quant à la possibilité d'une productivité différente. Est-ce que, vous, de votre côté, en vous sortant de ces documents d'Hydro-Québec auxquels vous faites référence et qu'Hydro-Québec pourrait peut-être réfuter demain, est-ce que vous êtes en mesure de confirmer cette différence de productivité et de l'interpréter?

M. Daoust: Comme il vous a été expliqué ce matin justement, c'est qu'on n'a pas accès aux différents documents d'Hydro, mais on a toujours soupçonné que la comparaison qui avait été faite à la Baie James, parce qu'on parlait d'un même genre d'organisation - ce n'étaient peut-être pas les mêmes individus, ce n'étaient pas des monteurs de lignes, mais on parlait quand même d'opérations qui provenaient de la même organisation - à ce moment, on avait pu observer facilement des différences de 35 % à 40 %. Alors, moi, je serais très curieux d'avoir une étude impartiale faite par quelqu'un de l'extérieur de la boîte et qui arriverait à 20 %. J'ai l'impression que 20 %, c'était gênant de dire moins que cela. J'ai l'impression que c'est substantiellement

plus que cela.

M. Rivard: D'accord. Toujours en restant très près de ce public payeur et de ce qu'on pourrait appeler la qualité du service à la clientèle, je reviendrais un peu sur une question qui a été posée tout à l'heure, je pense, par le député de Roberval au sujet de cette recommandation que vous faites, eu égard aux tâches d'entretien, de confier 50 % de l'entretien du réseau de transport au secteur privé. Je comprends que vous basez cette recommandation sur votre définition qui veut que l'entretien soit une partie, un secteur de la construction, et que vous recherchez - comme nous, d'ailleurs -une solution équilibrée dans ce dossier qui est très complexe.

Comment fonctionnerait une politique, une recommandation comme celle que vous faites en termes de service à la clientèle, parce que je pense toujours aux payeurs du service d'électricité oui viennent à mon bureau de comté? Est-ce que ces 50 % d'entretien confiés au secteur privé sous la gérance d'Hydro-Québec pourraient se traduire par un service amélioré à la clientèle québécoise?

M. Fava: Écoutez, vous pouvez prendre l'exemple d'autres organismes publics. Comme entrepreneur en construction, on travaille continuellement avec la Société d'assainissement des eaux du Québec et la société n'exécute aucuns travaux, elle donne tout à contrat à l'entreprise privée. Elle fait confectionner des plans, des cahiers de charges et devis, et elle va en appels d'offres, et c'est à partir des appels d'offres que les entrepreneurs sont choisis.

Je vous dis honnêtement qu'outre le fait, comme on le mentionnait tout à l'heure, qu'il s'agit d'un service quand même essentiel d'une société d'État, on doit retenir les critères qu'on mentionnait tout à l'heure, soit de préserver quand même un certain volume de travail à Hydro pour qu'elle maintienne cette expertise-là, qu'elle l'améliore même, et qu'il y ait quand même une certaine sécurité en ce qui concerne l'approvisionnement, qu'on ne se lie pas carrément, complètement. Évidemment, la Société d'assainissement des eaux, en principe, peut faire appel à 300, 400 ou 500 entrepreneurs dans la province de Québec pour faire exécuter ses travaux, alors qu'à Hydro-Québec on parle quand même d'un nombre d'entrepreneurs suffisamment limité. Alors, c'est sûr qu'il y a des différences à ce niveau-là. Je pense que le critère, c'est ce qu'il faut préserver à Hydro pour qu'elle maintienne son expertise. D'après nous, par la suite, Hydro n'aurait plus affaire là-dedans. Ces travaux devraient être carrément confiés à l'entreprise privée.

M. Rivard: Je vous remercie, M. Fava.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Taschereau.

M. Leclerc: Vous avez souligné dans votre mémoire que, de 1983 à 1988, les effectifs d'Hydro-Québec - évidemment, on parle toujours des monteurs - ont crû de 8 % et qu'inversement les effectifs des entrepreneurs ont décru d'autant. Avez-vous regardé à quoi on peut attribuer la baisse des effectifs chez les entrepreneurs? Est-elle essentiellement attribuable à la baisse du niveau des investissements ou l'attribuez-vous, en tout ou en partie, à l'effet de l'article 34.03 de la lettre d'entente?

M. Fava: Écoutez, en 1983, on parlait d'un certain nombre de monteurs» Le syndicat d'Hydro nous disait cet après-midi qu'on était dans une période de décroissance de la demande et qu'on était arrivé avec un programme qui s'appelle PAQS justement pour tenter de préserver un certain degré d'emplois dans ce domaine-là. Ce qu'on a vécu - je compare un peu cela à notre petite Corvée-habitation dans l'industrie de la construction - finalement, on est arrivé avec un programme qui a fait accélérer la demande normale qu'on aurait eue dans un secteur, on a pris cette demande, on l'a concentrée sur une période de trois ans et on a dit: Tous ceux qui se bâtiront durant ces trois années bénéficieront d'un certain nombre de subventions. Ce qu'on a fait là-dedans, c'est un peu la même chose. Voyant l'emploi décroître dans ce domaine-là, Hydro est arrivée avec son programme PAQS et a dit: Écoutez, on va accélérer nos investissements dans ce domaine, on va améliorer le réseau. On est arrivé avec cette entente et on a dit aux entrepreneurs: Équipez-vous. Vous aurez, dans le cadre de ce programme-là, davantage de travaux à exécuter. Sauf qu'on a omis de dire qu'à la fin du programme non seulement on va être limités, mais qu'à toutes fins utiles on va être éliminés, parce que, de la façon dont la clause est rédigée, on dit qu'Hydro peut recourir à la sous-traitance ou à l'impartition dans les cas d'urgence, mais dans une situation qui ne doit dans aucun cas dépasser 500 heures-hommes-années. Alors, il est clair qu'à partir de ce moment, on voit les tendances que vous voyez là. Alors, à partir du moment où le programme entre en vigueur, vous voyez le renversement des chiffres. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Iberville.

M. Tremblay (Iberville): Oui, M. le Président, j'aurais une question. Dans le mémoire, on dit, que le Syndicat des

employés de métiers d'Hydro-Québec cherche à élargir la zone grise pour aller vers des activités susceptibles d'être incluses parmi celles qui sont réservées aux employés d'Hydro-Québec. En quoi consiste la zone grise? J'aimerais que vous expliquiez de quelle façon on profite de la zone grise.

M. Fava: En fait, je pense que l'ACRGTQ aurait été mieux placée que moi pour répondre à cette question-là, sauf qu'on parle essentiellement de la construction par rapport à l'entretien. Ce qu'on a dit, finalement, dans le programme PAQS, c'est qu'on va améliorer le réseau et qu'on va le mettre à la fine pointe. À partir du moment où on aura mis le réseau à la fine pointe, sortez de là, nous, on s'occupe de l'entretien. Alors, c'est clair que c'est la carte qu'on a jouée. On a amené les entrepreneurs à croire que l'augmentation des heures seraient presque constantes. Pendant ces trois années-là on était bien heureux d'avoir ces heures additionnelles, mais, le lendemain, on se retrouve avec rien. Lorsqu'on dit qu'on veut élargir la zone grise, c'est toujours le jeu qui se fait entre la construction et l'entretien du réseau. De plus en plus, on accapare ces deux champs. Alors, on gruge dans la nouvelle construction, on gruge dans l'entretien du réseau de sorte que, tranquillement, on se voit placé dans une situation où, à toutes fins utiles, la construction neuve, on n'en a plus, et l'entretien du réseau, on en a uniquement au moment où il y a des urgences et uniquement à la demande d'Hydro, et encore là avec le critère des 500 qu'on ne peut pas dépasser.

M. Tremblay (Iberville): Oui, mais d'après vous où devrait se situer exactement la démarcation entre l'entretien et la construction? Est-ce clair? Est-ce flou? Exactement, comment cela peut se...

M. Fava: D'après moi, si on se réfère...

M. Tremblay (Iberville): Parce que, si ce n'est pas clair, c'est sujet à litige. Si on peut le clarifier, j'imagine qu'on va donner...

M. Fava: En fait, la ligne de démarcation traditionnelle, si vous voulez, c'est que les travaux de construction étaient confiés à des entrepreneurs de l'extérieur et l'entretien du réseau se faisait à l'interne. Alors, on voit de plus en plus de zones grises qui apparaissent entre ces deux secteurs. En fait, avec le programme PAQS, on a assimilé tout cela et on a dit: Écoutez, on améliore le réseau. Mais, finalement, est-ce que c'est de l'amélioration du réseau ou si c'est de l'entretien du réseau qu'on fait? À partir du moment où on remet ce réseau en état, on vous dit: Pour l'entretien, allez- vous-en, c'est nous qui allons le faire. Finalement, il y a une espèce de confusion entre l'entretien du réseau et la construction du réseau. C'est cela qu'on veut dire finalement. Dans trop souvent de cas, on mêle la construction et l'entretien du réseau; qu'on fait une espèce de mélange des deux pour s'arroger de plus en plus ces travaux.

M. Tremblay (Iberville): Mais vous n'avez pas répondu à ma question., Où cela finit-il exactement et où cela commence-t-il? Est-ce que l'entretien va...

M. Fava: Bien...

M. Tremblay (Iberville): Est-ce que la construction peut être interprétée comme des modifications majeures à la ligne lorsque vous faites de l'entretien, par exemple, ou si, l'entretien, il s'agit de remplacer un transformateur par un autre?

M. Fava: C'est un peu ce que je vous disais. Finalement, la ligne de démarcation se situe entre ce qu'est la construction et ce qu'est l'entretien. Dans trop souvent de cas, ces deux notions sont tellement mélangées qu'on ne réussit pas à discerner ce qui est de la construction et ce qui est de l'entretien.

M. Tremblay (Iberville): D'accord. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): M. le Président, l'essentiel du message que vous avez livré tantôt, c'est de dire: On voudrait voir arrêter le mouvement d'embauche à HydroQuébec, on voudrait voir arrêter le mouvement de désengagement qui se produit actuellement par rapport à l'entreprise privée. Si on pouvait, de façon théorique, prendre le portrait de la situation actuelle, le 27 octobre 1987, et dire: On est dans une situation où il y a de moins en moins de contrats de donnés au secteur privé et de plus en plus de travaux faits à l'interne, si on arrêtait le pendule de l'horloge qui est reparti sur l'autre bord - vous, vous réclamez non seulement que le pendule arrête, mais qu'il reparte dans le sens que vous demandez - et si on pouvait trouver une formule à partir de la situation actuelle, est-il pensable, non pas de repartir le pendule en faveur d'un bord ou de l'autre, mais, à partir de ce qu'on a actuellement, d'avoir une situation où, face à l'avenir, les emplois créés devront se partager dans une formule de 50-50 où chacun tirera sa part? Est-ce que cela est envisageable, pensable, ou si vous tenez absolument à repartir le pendule de sorte que vous puissiez regagner

le terrain perdu?

M. Daoust: Je ne sais pas. J'ai l'impression qu'on mélange le problème. Vous avez l'air de dire que la situation qui existe doit continuer d'exister, qu'elle peut être améliorée, qu'il y a peut-être une formule pour l'améliorer, mais qu'elle doit continuer d'exister. Nous, on déplore une situation qui permet que des travaux coûtent trop cher, à comparer à ce qu'ils pourraient coûter. Je comprends mal comment on peut envisager de dire: D'accord, c'est parfait, cela coûte trop cher, ce n'est peut-être pas efficace, mais peut-on aller à moitié chemin? Je comprends mal comment on peut envisager cela de cette façon. Je comprends très bien le problème de ne pas faire perdre d'emploi à ceux qui en ont déjà. C'est d'ailleurs pour cela qu'on prévoyait une formule de récupération au rythme de 5 % par année. On se disait: C'est probablement le taux d'employés qui quittent, qui meurent ou qui prennent leur retraite, et ainsi de suite. Plutôt que de les remplacer, c'est simplement cette portion-là qui sera redonnée à la construction, jusqu'à temps qu'on arrive au niveau mentionné dans notre mémoire. Cela se fait sans faire de mal à personne. Je pense que c'est plus abordable que de dire: Indépendamment du fait que cela coûte trop cher, on va aller à moitié chemin et arrêter là.

M. Parent (Bertrand): C'est-à-dire que je ne cherche pas à vous dire que c'est la solution idéale. Je veux savoir de votre part ce qui est acceptable. Il ne s'agit pas juste de trancher la poire en deux. D'un autre côté, on ne s'entend même pas sur ce qui va être entretien et ce qui va être construction. (21 h 30)

C'est actuellement la confusion la plus totale parce qu'il y a de la construction qui est maintenant comprise dans l'entretien, et ainsi de suite. On ne s'entend plus non plus quant à l'interprétation de la clause 34. Il n'y a pas seulement la question des emplois qui sont en jeu. Je pense que cela a été déterminé au cours de la journée, le nombre d'emplois créés d'un bord et recréés de l'autre. Je pense qu'il y a un principe très important de la masse critique qui doit être minimale, acceptable pour Hydro-Québec pour qu'elle soit capable de garder une expertise à l'interne. Une fois qu'on l'a établi ou une fois qu'on s'est entendu là-dessus, les problèmes fondamentaux étant réglés, quant à l'avenir, ce qui va se passer ou de quelle façon le pendule va repartir... D'une part, les gens du syndicat à Hydro-Québec sont préoccupés de savoir si le pendule repart de l'autre bord, et si, finalement, on retourne à la situation que vous réclamez, qui est une situation de droits acquis que je peux comprendre, ou du passé, ou une formule selon laquelle c'est plus rentable. Mais, là, on s'embarque dans une formule dont je ne suis pas sûr qu'on soit capable de se sortir, à moins que le gouvernement ne fasse son lit, et qu'il le fasse dans les prochaines heures, dans les prochains jours. Sinon, on va être en commission parlementaire dans un an, dans deux ans et ce ne sera pas résolu. De votre réaction, moi, je comprends que vous ne voulez pas de demi-mesure, trancher en deux pour essayer de satisfaire tout le monde. Vous dites: Si c'est carrément prouvé que c'est plus rentable d'aller vers cette formule-là - c'est cela que je veux comprendre - c'est carrément plus rentable de choisir cette formule, c'est-à-dire la formule que vous préconisez, il faut repartir le pendule de l'autre bord. On se comprend?

M. Daoust: Je comprendrais très bien une formule transitoire, à court terme, que j'appellerais politique pour régler un problème politique à court terme. Je pense que ce serait se cacher la tête dans le sable que de dire: Cette formule à court terme on va l'appliquer à vie. Il faut regarder le problème dans toute sa profondeur, puis déterminer une fois pour toutes si c'est 15 %, 20 % ou 35 % ou 40 % pour ce qui est de l'efficacité. Â partir de là, peut-être que la solution à court terme ne sera pas du tout envisageable à long terme.

M. Parent (Bertrand): II ne s'agit pas juste d'une... En tout cas, un dernier point parce qu'on me dit que je n'ai plus de temps. Il ne s'agit pas juste d'avoir une solution dite politique il faut avoir aussi une solution économique.

M. Daoust: Moi, quand un organisme admet candidement un taux d'inefficacité de 20 %, je me poserais des "maudites" questions.

M. Fava: Je pense que ce qu'on a fait, c'est de façon ponctuelle. On a réglé une convention collective sur le dos de tierces parties. Je pense que ce n'est pas quelque chose qu'il faut encourager, d'autant plus que le représentant syndical qui présentait le mémoire vous donnait l'exemple des problèmes qu'il y a eu dans la région de Montréal. Il a dit: Écoutez, on n'a pas pu répondre à la demande, pas parce qu'on n'avait pas d'hommes, on a manqué d'équipement. Vous en avez en masse des hommes à Hydro-Québec. Je me demande ce qu'ils "foutent" si on a des hommes et qu'ils n'ont pas d'équipement pour travailler. Cela m'a surpris que personne n'ait soulevé cette question-là. On nous dit: Écoutez, quand on eu a des problèmes à Montréal, ce n'est pas les hommes qui ont manqué, on n'avait pas d'équipement pour les sortir dans le champ, pour aller réparer les dégâts qui avaient été

causés par la tempête. Alors, qu'est-ce qu'ils "foutent" ces hommes-là si on n'a pas d'équipement à leur donner pour aller travailler? C'est cela la question qu'il faut se poser. Quand on parle de 20 % d'inefficacité, cela peut peut-être en expliquer une partie.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir aux événements du 14 juillet. Ce n'est pas encore évident dans mon esprit ce qui est arrivé. Est-ce que vous aviez des équipes et est-ce qu'Hydro-Québec a utilisé toutes les équipes que vous aviez organisées durant les inondations du 14 juillet? Premièrement, aviez-vous des équipes? Je ne sais pas si c'était la période des vacances. Deuxièmement, si vous aviez des équipes, est-ce qu'elles ont toutes été utilisées par Hydro-Québec?

M. Fava: Écoutez, pour la première partie de la question, il n'y a pas de vacances au niveau des lignes. Alors, je pense que c'est clair, s'il y avait des équipes...

M. Ciaccia: Beaucoup de gens pensent qu'il y a une période de vacances.

M. Fava: S'il n'y avait pas d'équipes, ce n'était pas à cause des vacances.

M. Ciaccia: Alors, ce n'est pas ia question des vacances. Maintenant, aviez-vous des équipes et, si oui, est-ce que les équipes que vous aviez ont toutes été utilisées par Hydro-Québec?

M. Daoust: Si je me rappelle bien les commentaires de l'association des constructeurs de routes ce matin, il y avait eu une ou deux demandes. Ce sont les commentaires que j'ai entendus ce matin. Moi, je ne pourrais pas vous répondre en connaissance de cause. Je me base sur les commentaires que j'ai entendus ce matin. Il me semble que c'est ça la remarque, qu'il y avait eu une ou deux demandes, après qu'Hydro eut fait le tour de toute la région et de la sous-région.

M. Ciaccia: II y a eu seulement une ou deux demandes face aux...

M. Daoust: C'est ce que j'ai saisi ce matin.

M. Ciaccia: ...et qu'il restait d'autres équipes disponibles pour aller faire les travaux.

M. Daoust: Effectivement.

M. Ciaccia: Dans votre mémoire, ne croyez-vous pas, honnêtement... Je sais qu'il faut toujours demander plus pour en avoir moins, on fait tous cela. C'est de bonne guerre et tout le monde le reconnaît. Mais aujourd'hui, la raison pour laquelle on a une commission parlementaire, c'est qu'il y a un problème. Ne croyez-vous pas que vous exagérez un peu dans votre demande, en disants Vous voulez vous accaparer le travail? Même à 5 % par année, vous voulez 100 % de la construction et 50 % de l'entretien. Ne trouvez-vous pas, honnêtement - on est à la veille d'ajourner nos travaux jusqu'à demain, c'est la fin de votre mémoire - ne croyez-vous pas que vous exagérez un peu et seriez-vous prêts à vous rallier à l'objectif que, moi, je vise, qui est d'arriver à un juste équilibre?

M. Fava: Je pense que, M. le ministre, si vous permettez, indépendemment de la question philosophique, moi, je suis d'avis que, de toute façon, à partir du moment où on a assuré un volume suffisant à Hydro pour qu'elle préserve ses expertises, ses connaissances et tout cela, je pense qu'à partir de là, Hydro-Québec n'a plus d'affaire dans le système. En tout cas, c'est une opinion, une question philosophique.

M. Ciaccia: Mais vous reconnaissez qu'il faut avoir des travaux à l'interne et des équipes à Hydro, qu'il faut une partie...

M. Fava: À ma connaissance, il n'y a eu aucun mémoire ou aucun intervenant devant la commission qui ait préconisé le contraire. Je pense qu'on dit clairement dans notre mémoire aussi qu'il faut préserver un nombre minimal d'heures de travail à Hydro pour qu'elle préserve cette expertise-là.

On a également dit tout à l'heure, en réponse à une question qui venait, je pense, de M. Chevrette, qu'il faut tout au moins pour l'instant, stopper l'hémorragie. Je pense qu'il faut qu'Hydro arrête sa politique d'embauche à ce niveau-là, on a déjà assez de dégâts comme c'est là.

M. Ciaccia: Êtes-vous prêts à vous rallier à l'objectif que je vise, c'est-à-dire un juste équilibre? Seriez-vous prêts à vous rallier à cet objectif?

M. Fava: Je vous demanderais de définir ce qu'est un juste équilibre pour vous. Ce sont des définitions. C'est quoi un juste équilibre? Finalement, c'est ça la question qu'on se pose.

M. Ciaccia: Je vais vous dire ce que ça n'est pas. Ce n'est pas 100 % des travaux de construction et 5 % par année jusqu'à... Je ne pense pas, dans le contexte actuel, que ce soit un juste équilibre.

M. Fava: Si je comprends bien, M. le ministre, dans votre esprit, ce n'est pas de zéro à 500 non plus?

M. Ciaccia: Non, parce que - je l'ai dit dans mes remarques préliminaires - il semble que l'équilibre ait été changé entre la sous-traitance et les travaux internes. C'est pour ça qu'on est ici.

M. Fava: Exact.

M. Ciaccia: Cela, je l'ai dit dès le début et je pense que cela devient de plus en plus évident.

M. Daoust: C'est bien apparent que, s'il n'y avait pas eu de changements, on ne serait pas ici. Les chiffres qu'on avance dans le mémoire, je vous ai mentionné tantôt que c'était basé... D'ailleurs, c'est une reproduction partielle d'une étude commandée par le gouvernement à l'institut national d'administration publique. Alors, c'était leur recommandation d'aller à 100 % pour la construction et 50 % pour l'entretien.

M. Fava: À ma connaissance, avant qu'on ne modifie cet équilibre-là, il n'y avait pas de problème dans ce secteur-là. Le problème provient de cette fameuse entente qui est devenue partie intégrante de la convention collective.

M. Ciaccia: C'est pour ça que nous avons convoqué une commission parlementaire, pour entendre toutes les parties. Merci.

M. Daoust: M. le ministre, est-ce que je pourrais vous faire un dernier commentaire, s'il vous plaît? J'étais présent à une table ronde du Conference Board of Canada la semaine dernière où étaient présents des représentants syndicaux et on regardait ce qui nous attendait en 1988 dans les négociations à la fonction publique ou dans le secteur privé. Tous les représentants syndicaux présents mettaient beaucoup d'emphase sur les clauses de sous-traitance, disant que c'était probablement cela qui serait le gros champ de bataille des négociations dans les différents secteurs l'an prochain. Alors, vous comprendrez, je pense, notre préoccupation d'essayer d'établir des règles du jeu parce qu'il y a quelqu'un qui va les regarder étroitement et qui va s'assurer d'avoir quelque chose de semblable. On ne voudrait pas que l'hémorragie qui a commencé continue, c'est simple.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Alors, sur cette dernière intervention, je vous remercie, messieurs, d'avoir participé à cette consultation particulière. Je vous souhaite bon retour et à la prochaine.

Les travaux de la commission sont ajournés à demain matin, 10 heures, alors que nous reprendrons la consultation particulière.

(Fin de la séance à 21 h 41)

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