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(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît! La séance de la commission est ouverte. Je rappelle le
mandat qui nous a été confié par l'Assemblée
nationale, qui est d'étudier la proposition tarifaire
d'Hydro-Ouébec pour l'année 1987 et d'entendre, à cette
fin, les membres du conseil de direction d'Hydro-Québec.
Organisation des travaux
Je vous rappelle que, selon l'avis de la Chambre, le ministre est membre
d'office de cette commission. Ce dernier et le député de Roberval
se sont entendus sur l'ordre du jour qui serait le suivant: ce matin, nous
allons d'abord entendre l'exposé du ministre de l'Énergie et des
Ressources; par la suite, nous entendrons le porte-parole de l'Opposition;
viendra ensuite l'exposé des représentants d'Hydro-Ouébec
et, finalement, des questions d'ordre général.
Cet après-midi, la séance sera consacrée à
l'étude de deux questions: le marché interne
québécois et les exportations d'électricité. La
séance se terminera à 18 heures ce soir.
Demain matin, nous aborderons le plan d'équipement proprement dit
et, par la suite, les questions reliées à l'environnement. Demain
après-midi, nous étudierons la situation financière ainsi
que la question des tarifs proprement dits. Nous avons indiqué un
"varia" pour un certain nombre d'autres questions dans la mesure où il
resterait du temps. Il faudrait également se réserver du temps
pour les commentaires de clôture, à la fois du ministre et du
critique de l'Opposition.
Est-ce que le secrétaire de la commission pourrait nous dire s'il
y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a un
remplacement. M. Lefebvre (Frontenac) est remplacé par M. Doyon
(Louis-Hébert).
M. Cannon: Je m'excuse, M. le Président, ce remplacement
ne fonctionne pas.
Une voix: M. Doyon ne fonctionne pas?
M. Cannon: Le remplacement, M. le député. On va
voir, tantôt, si vous, vous fonctionnez.
Le Président (M. Charbormeau): Tout le monde est
branché? Nous allons commencer. M. le ministre.
Déclarations d'ouverture M. John
Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, chers collègues
membres de cette commission, messieurs les dirigeants et représentants
d'Hydro-Québec, mesdames et messieurs, la commission de
l'économie et du travail entame, aujourd'hui, l'étude du plan de
développement d'Hydro-Ouébec pour la période 1987-1989
ainsi que l'analyse de la proposition tarifaire présentée par la
société d'État pour l'année 1987-1988.
Par ses implications sur notre situation énergétique ou,
plus globalement, par son impact sur l'activité et la croissance, le
plan de développement d'Hydro-Québec comporte des orientations et
des interventions qui influeront directement sur l'économie
québécoise. Il est donc essentiel que l'analyse que nous allons
effectuer aujourd'hui et demain du plan de développement corresponde aux
enjeux en cause. Pour bien comprendre ces enjeux, il m'apparaît
nécessaire tout d'abord de situer l'importance de
l'électricité dans l'économie québécoise et
le progrès de ses citoyens, ensuite de rappeler les grandes orientations
du gouvernement en matière d'électricité et, finalement,
de décrire les principaux changements qui ont eu lieu dans le contexte
énergétique depuis les derniers travaux de cette commission. Je
terminerai mon intervention par quelques remarques sur le nouveau plan de
développement en tenant compte du contexte énergétique qui
s'est dessiné depuis un an.
En ce qui concerne l'importance de l'électricité dans
l'économie québécoise, permettez-moi de souligner que le
développement du potentiel hydroélectrique
québécois, et ce grâce à la réalisation de la
phase I de la Baie James, a permis de renforcer grandement la
sécurité énergétique du Québec. Une plus
grande sécurité énergétique pour le Québec
signifie non seulement un meilleur contrôle de la facture
énerqétique que doivent payer nos consommateurs
résidentiels et industriels, mais également la mise en
valeur d'une ressource naturelle propre au Québec. De plus, une plus
grande sécurité énergétique signifie
également !e développement chez nous et par des gens de chez nous
d'une expertise mondiale en matière de génération, de
transport et de distribution d'électricité. Enfin, elle signifie
la création d'emplois ici même au Québec.
Pour illustrer l'importance de l'électricité dans
l'économie québécoise, mentionnons que le degré
d'autonomie énergétique du Québec a atteint 76 % en 1985,
alors qu'il n'était que de 50 % en 1974, soit dix ans auparavant. Ce
niveau est nettement plus élevé que celui de l'Ontario qui se
situe à environ 29 % seulement et se compare avantageusement au
degré d'autonomie énergétique des pays de la
Communauté économique européenne. Cette
amélioration du degré d'autonomie énergétique est
d'autant plus importante que plusieurs milliers d'emplois proviennent du
secteur primaire et de l'industrie de première transformation dont les
procédés sont énergivores.
Pour mieux refléter l'importance de l'électricité
dans l'économie québécoise, il serait peut-être
opportun d'envisager quelle serait la position concurrentielle de nos
industries si on appliquait à nos usagers industriels les tarifs
d'électricité payés aujourd'hui par l'Ontario, le
Nouveau-Brunswick et les États américains voisins. Si on prenait
ceux de l'Ontario, nos entreprises paieraient en moyenne 21 % plus cher, avec
ceux du Nouveau-Brunswick, 31 % et, avec les tarifs de New York, ce serait 76 %
plus cher. Les avantages comparatifs dont bénéficie le
Québec en matière d'électricité contribuent
à la croissance économique du Québec qui, d'ailleurs,
dépassait en 1986 celle du Canada.
Voilà donc l'importance de l'électricité dans
l'économie québécoise, importance que le gouvernement du
Québec désire reconnaître et promouvoir par les quatre
orientations et moyens suivants: premièrement, le développement
de notre potentiel hydroélectrique et une pénétration
accrue de la part de l'électricité dans le bilan
énergétique québécois. Deuxièmement, la
poursuite d'une politique visant à privilégier le
développement économique du Québec au moyen de tarifs
d'électricité avantageux. Troisièmement, le maintien des
meilleurs tarifs possible aux usagers québécois et
quatrièmement, le renforcement de nos ventes sur les marchés
d'exportation.
Ce sera donc à la lumière de ces quatre
éléments que nous allons faire l'examen du plan de
développement. Mais permettez-moi d'abord de décrire les
principaux changements qui se sont produits dans le contexte
énergétique depuis un an, à la suite desquels
Hydro-Québec propose plusieurs actions à entreprendre.
Le premier changement sur lequel je désire attirer l'attention
est la chute du prix du pétrole. Au moment où la commission se
réunissait l'an dernier, on venait d'assister à la chute du prix
du pétrole brut qui a fini par s'établir à 15 $ US en
moyenne. Aussi, la baisse du prix du pétrole a provoqué une
baisse du bénéfice net d'Hydro-Québec d'environ 225 000
000 $. Ceci confirme la présence d'un contexte énergétique
incertain dans lequel doit évoluer Hydro-Québec.
Un deuxième changement sur lequel j'attire votre attention est
l'accroissement des ventes d'électricité régulière
au Québec, qui se situent à un niveau supérieur aux
prévisions faites par Hydro-Québec l'an dernier. Ce dernier
changement coïncide avec la forte reprise économique du
Québec au cours de l'année 1986.
Un troisième changement qui est apparu depuis l'an dernier est
l'ouverture de plus en plus grande des marchés d'exportation pour la
vente d'électricité québécoise et la percée
qu'est en train de réaliser Hydro-Québec sur ces marchés,
notamment par la signature d'une lettre d'entente en vue de la conclusion d'un
contrat de 900 mégawatts avec la Central Maine Power. En somme, le
développement de nos ressources hydroélectriques comporte un
grand nombre de considérations financières et
économiques.
Dans son nouveau plan de développement, Hydro-Québec
propose une stratégie globale qui incorpore l'ensemble de ces
considérations. La commission parlementaire se penchera aujourd'hui et
demain sur les propositions d'Hydro-Québec et plus
particulièrement sur la nature de ce qu'Hydro-Québec a
appelé les principaux arbitrages du plan. J'aimerais auparavant vous
livrer quelques commentaires sur le contenu du nouveau plan de
développement lesquels, je l'espère, contribueront à
replacer dans leur contexte les éléments qui seront
discutés durant les travaux de cette commission. Mes commentaires quant
au plan de développement porteront sur la situation financière
d'Hydro-Québec, les exportations d'électricité, la
position concurrentielle de nos industries et, finalement, sur le
développement des équipements.
En ce qui concerne la situation financière d'Hydro-Québec,
j'ai déjà indiqué qu'un facteur principal était
venu affecter la société d'État à ce chapitre, soit
la baisse du prix du pétrole en 1986. Au cours des dernières
années, Hydro-Québec subissait d'autres pertes financières
dues à la baisse du taux de change du dollar canadien et à la
hausse des taux d'intérêt. Quand on parle des augmentations du
dollar canadien vis-à-vis de la devise américaine, il faut
cependant reconnaître que, même s'il y a eu une
légère augmentation vis-à-vis de la devise
américaine, le dollar canadien est à la baisse
vis-à-vis des autres devises étrangères. Cela
affecte la performance d'Hydro-Québec: les remboursements
qu'Hydro-Québec doit faire en raison de son endettement.
Aussi, il m1 apparaît souhaitable
qu'Hydro-Québec soit encouragée à maintenir ses
critères financiers minimums. Pour ce faire, Hydro-Québec propose
une croissance tarifaire modérée au cours des trois prochaines
années. La hausse de tarifs demandée pour 1987
s'élève à une moyenne de 4,6 %. Cette demande se situe
dans l'échelle du taux d'inflation de 4,9 % au Québec. Cette
hausse tarifaire peut être considérée comme raisonnable,
compte tenu des impératifs financiers auxquels Hydro-Québec doit
faire face. J'ai certaines interrogations toutefois sur l'opportunité de
différencier les hausses selon les secteurs de consommation. Je demande
donc à HydroQuébec de nous expliquer l'impact d'une telle
proposition.
La proposition de la politique tarifaire devra être
étudiée non seulement à la lumière des
impératifs financiers de l'entreprise, mais aussi en tenant compte des
mesures mises de l'avant par Hydro-Québec pour réduire la facture
énergétique de ses clients. Par exemple, depuis 1982, environ 150
000 unités de logement ont adopté le système de chauffage
bi-énergie et HydroQuébec prévoit offrir une nouvelle
option de tarifs à ses clients, ce qui leur permettra de réaliser
une économie annuelle de 140 $ à 180 $. Il m'apparaît
important aussi de rappeler que les usagers québécois des
secteurs résidentiels bénéficient des tarifs
d'électricité parmi les plus bas en Amérique du Nord. Les
Canadiens paient leur facture énergétique en moyenne 33 % plus
cher que les Québécois.
Mon deuxième commentaire aura trait à la question des
exportations. J'ai déjà indiqué auparavant que depuis un
an, nous assistons à une ouverture de plus en plus grande des
marchés d'exportation pour l'électricité
québécoise. Il faut mentionner à ce sujet la publication
aux États-Unis d'importants rapports sur la demande
d'électricité, notamment en Nouvelle-Angleterre où on
aurait établi qu'il existe pour l'ensemble de la région une
demande d'énergie additionnelle de plus de 6000 mégawatts d'ici
à l'an 2000. Plus récemment, un rapport effectué à
la demande des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre pour leur rencontre de
décembre 1986 indiquait un déficit à combler variant de
2800 mégawatts à 11 200 mégawatts en l'an 2000. D'autres
rapports ont également été publiés sur la demande
d'électricité pour l'État de New York et ils
démontrent la présence de nouvelles possibilités de vente
d'électricité québécoise sur ce marché.
Une plus grande ouverture des marchés d'exportation a conduit
tout récemment Hydro-Québec à la signature d'une lettre
d'entente avec la Central Maine Power. Elle comporte plusieurs
caractéristiques qui méritent d'être soulignées. Il
s'agit de la vente de puissance et d'énergie ferme à long terme,
pendant 29 ans, de 122 000 000 000 de kilowattheures, ce qui représente
15 000 000 000 $ de revenus pour HydroQuébec. Ces revenus auront pour
effet à long terme de contribuer au maintien de tarifs
d'électricité avantageux pour l'ensemble de nos usagers.
Ce contrat prévoit une formule de prix indexé au taux de
l'inflation - une première en son genre - plutôt qu'en fonction de
l'évolution du prix du pétrole. Il est important de rappeler
qu'une baisse du prix du pétrole diminue les revenus
d'Hydro-Québec en raison de l'indexation des ventes d'énergie
excédentaire sur les prix du mazout et touche ainsi directement la
situation financière de la société d'État. Cette
nouvelle formule de prix présente une meilleure garantie de
stabilité qu'une formule liée aux fluctuations des prix
pétroliers.
L'entente avec la Central Maine Power prévoit
l'établissement d'une nouvelle entreprise en sol américain pour
la construction de lignes de transport. HydroQuébec sera un partenaire
dans cette nouvelle entreprise, ce qui lui assurera une percée durable
sur les marchés de la Nouvelle-Angleterre.
Mon troisième commentaire porte sur le développement de
nos industries à l'aide de tarifs d'électricité
avantageux. En effet, les ventes d'électricité
régulières au Québec ont dû être
révisées à la hausse dans le nouveau plan de
développement par rapport aux prévisions qui nous ont
été présentées l'an dernier. Au lieu d'une
augmentation de 4,4 %, les ventes d'électricité
régulières au Québec se sont accrues de 8,9 % à
cause d'une forte reprise économique au Québec. Le gouvernement
du Québec entend encourager le développement industriel du
Québec à l'aide de divers programmes. Mentionnons, à titre
d'exemple, le programme de partage de risques et de bénéfices. Ce
dernier fait partie d'une nouvelle génération de programmes
à HydroQuébec et déjà les résultats sont
encourageants. C'est d'ailleurs dans le cadre de ce proqramme qu'une entente
avec Norsk Hydro a été convenue pour la livraison de 175
mégawatts.
Mon dernier commentaire a trait à la question du
développement des équipements. Le nouveau plan de
développement prévoit le devancement de la construction de
nouveaux équipements tels que les centrales LG 1, Laforge, Brisay et
Sainte-Marguerite. En ce qui a trait aux investissements, HydroQuébec
procédera en 1987 à des dépenses d'investissements de 1
900 000 000 $ équivalant à environ 10 % du total des
investissements privés prévus dans l'ensemble
de l'économie québécoise. Ces dépenses ont
des effets importants. À titre d'exemple, en 1985, avec des
investissements de 1 500 000 000 $, Hydro-Québec a versé 917 000
000 $ en salaires et a, de plus, acheté des biens et services pour plus
de 1 300 000 000 $. Ces achats ont été en majeure partie
effectués au Québec. Elle a, par ailleurs, versé 246 000
000 $ en impôt et taxes. Au cours des dix prochaines années,
Hydro-Québec compte investir 37 000 000 000 $ dans les projets
hydroélectriques. Pour la période 1987-1989, l'entreprise
prévoit des investissements de 7 600 000 000 $, ce qui représente
un apport majeur à notre activité économique, dont 600 000
000 $ pour accroître la fiabilité des réseaux qui
contribueront à améliorer la qualité du service
auprès des utilisateurs québécois.
En termes d'emplois, les résultats sont tout aussi
impressionnants. Les activités d'Hydro-Québec, au cours des trois
prochaines années, assureront, sur une base annuelle, 27 600 emplois
directs, soit 3600 de plus qu'en 1986, 17 400 emplois indirects, soit 4500 de
plus qu'en 1986, et 14 000 emplois liés aux activités de
commercialisation, soit au total 59 000 emplois.
Par ailleurs, il faut être conscient que tout ce
développement de notre potentiel hydroélectrique implique que
l'énergie doit être transportée. L'ajout de nouvelles
lignes de transport est une facette importante du plan d'équipement.
Quand le Québec a choisi l'hydroélectricité plutôt
que l'aventure nucléaire, il a aussi choisi d'amener l'énergie
produite dans le nord aux résidences et aux entreprises situées
au sud.
À cet égard, il m'apparaît important d'impliquer
davantage les Québécois dans les orientations du Québec en
matière de transport d'électricité. C'est pourquoi nous
élargirons les mécanismes qui permettent aux
Québécois d'exprimer leurs attentes face à cette question.
En effet, avec l'ampleur des projets envisagés, il faut en arriver
à ce que la population dispose d'une occasion de s'exprimer suffisamment
tôt dans le processus de décision pour que l'on puisse, s'il y a
lieu, ajuster ces projets sans compromettre les échéanciers de
mise en service.
À la lumière de ce qui précède, il
m'apparaît évident; que le plan de développement que
présenteront dans quelques instants les représentants
d'Hydro-Québec se situe au coeur de certains enjeux majeurs pour le
développement du Québec. La santé financière
d'Hydro-Québec, le maintien au Québec de tarifs très
concurrentiels par rapport à nos voisins, les occasions qu'offrent les
marchés d'exportation ou encore l'attrait, en sol
québécois, de projets d'investissements majeurs sont autant
d'éléments à la lumière desquels doit être
évalué le plan de développement qui nous est
proposé aujourd'hui. Merci, M. le Président. (10 h 30)
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M.
le député de Roberval.
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Distingués
membres de la commission, messieurs les dirigeants d'Hydro-Québec,
permettez-moi tout d'abord de souligner, encore une fois cette année, la
très grande qualité des documents qui nous sont
présentés par Hydro-Québec. Bien que les ayant
reçus que trop récemment, hélas, nous constatons que
beaucoup de soin a été apporté à la
présentation clarifiée de l'ensemble des données encore
plus complètes ainsi qu'à l'élaboration
détaillée des énoncés. Le plan de
développement 1987-1989 Horizon 1996 s'inscrit directement dans la
continuité du bilan et de l'ensemble des prévisions du plan
1986-1988, présenté l'an dernier. Permettez-moi donc
brièvement de faire un tour d'horizon sur l'évolution des
principaux éléments.
La construction de la première phase du complexe La Grande a
nécessité des déboursés énormes. En 1979, le
niveau des investissements a atteint 2 800 000 000 $ comparativement à
des investissements de 1 500 000 000 % en 1986. On se souviendra que la
période des travaux intenses de la phase I du complexe La Grande a
été précédée par une forte
réévaluation à la hausse des coûts prévus, de
telle sorte que malgré son grand pouvoir d'emprunt, HydroQuébec a
dû augmenter ses tarifs pour investir et couvrir les
intérêts de sa dette; de là les augmentations de tarifs de
17 % en 1978, de 13,8 % en 1979 et de 13 % en 1982, soit plus que l'inflation,
et de manière significative.
Au début des années quatre-vingt, alors que les
installations du complexe La Grande phase I commençaient à entrer
en production, la croissance de la demande d'électricité diminua
rapidement. De plus, les investissements à la Baie James
n'étaient pas terminés et les taux d'intérêt
montèrent en flèche. Hydro-Québec dut donc augmenter
encore ses tarifs de façon significative, soit de 16,7 % en 1982. Dans
les années qui suivirent, avec la baisse de l'inflation, la baisse des
investissements, la concurrence accrue des autres formes d'énergie, les
surplus d'énergie et la nécessité de laisser souffler un
peu le consommateur québécois ont donné lieu à des
hausses de tarifs moins importantes.
Bref, la situation financière d'Hydro-Québec qui s'est
dégradée jusqu'en 1985 a commencé à
s'améliorer à partir de 3986, à la suite d'une
amélioration de la demande.
On ne peut pas imputer la situation financière actuelle
d'Hydro-Québec aux faibles hausses de tarifs, c'est le moins qu'on
puisse dire. C'est plutôt à la crise économique liée
à une baisse générale de la demande non prévue et
à l'obligation de vendre à rabais les surplus d'énergie
qu'il faut l'imputer.
La situation a été amplifiée par la baisse des prix
du pétrole et du gaz au cours des trois dernières années,
ce qui a affecté les entrées de fonds et accru la concurrence sur
le marché de l'énergie. L'entreprise est aujourd'hui servie par
une reprise de la demande et un environnement économique beaucoup plus
stable.
Ainsi, les ventes d'énergie régulières au
Québec, qui avaient augmenté de 1,3 %, 2,7 % et 1,9 % en 1981,
1982 et 1983, ont augmenté de 6,9 %, 7,3 % et 6 % en 1984, 1985 et 1986.
Les hausses prévues pour 1987 sont de l'ordre de 6,2 %. Aussi, les
ventes de surplus, sous forme de livraison garantie, assureront sans aucun
doute des hausses de revenus.
Les prix du pétrole devraient également se maintenir et
même s'accroître légèrement. Les taux
d'intérêt devraient demeurer assez bas et le dollar canadien
devrait se raffermir. De même, on ne prévoit pas de baisse
marquée dans la croissance économique. Hydro-Québec a
connu ses périodes difficiles, mais les perspectives d'avenir,
pensons-nous, sont bonnes.
La situation financière d'Hydro-Québec a de bonnes chances
de se rétablir en période de niveau raisonnable
d'investissements, ceci sans hausses trop marquées des tarifs.
En 1986, les revenus de ventes d'électricité à
l'exportation perçus par Hydro-Québec s'élevaient à
650 000 000 $, soit 14 % de ses revenus. En 1978, c'est 129 000 000 $ qu'elle
retirait des exportations, soit 8 % de ses revenus. Du côté de
l'énergie, en 1986, ce sont 27 térawattheures que
Hydro-Québec a exportés, soit 18 % de ses ventes comparativement
à 13 térawattheures en 1978, soit 12 % de ses ventes. Cette
hausse des ventes est étroitement reliée à la
pénétration du marché américain et ce, en
particulier au cours des dernières années, aux ventes
d'énergie excédentaire qui prendront fin au milieu des
années quatre-vingt-dix.
Progressivement, les ventes d'énergie garanties prendront le
relais. Ce type d'énergie rapporte beaucoup plus, de telle sorte que,
malgré une certaine stagnation de l'énergie exportée, les
revenus des ventes des exportations devraient tout de même
s'accroître de façon significative.
Hydro-Québec prévoit qu'au cours des années
à venir, c'est-à-dire jusqu'en l'an 2000, les déficits de
puissance de base qui nécessiteraient la construction de nouvelles
centrales chez nos voisins sont de l'ordre de 5900 mégawatts.
Hydro-Québec prévoit pouvoir accaparer de 3500 à 4500
mégawatts de ce marché potentiel, ce qui nous est toujours apparu
et nous apparaît toujours comme fort réaliste.
Nous savons également que le Québec doit faire face
à une concurrence sévère sur les marchés externes.
Il faudra donc que le gouvernement et Hydro-Québec adoptent une attitude
agressive pour s'assurer de cette part des marchés extérieurs.
Dans le contexte où l'on parle d'exportation de puissance garantie sur
des périodes de 15 à 30 ans, tant que l'on s'en tient à
des contrats totalisant environ 3500 mégawatts, il s'agit du devancement
de construction de centrales qui, de toute façon, auraient dû,
à un moment ou à un autre, être construites pour nos
besoins. Ainsi, la négociation de prix de vente garantit un certain
profit, puisque celui-ci est calculé à partir du coût de
devancement plutôt qu'à partir du coût total de
construction. De plus, les risques sont moins élevés et
l'approvisionnement futur du Québec en électricité
à meilleur marché possible n'est pas compromis. Finalement, des
exportations de cet ordre n'exiqent pas la construction de plusieurs nouvelles
interconnexions, mais plutôt, pour l'essentiel, l'utilisation des
interconnexions existantes.
Il demeure néanmoins que, pour des contrats sur 30 ans, il existe
certains risques sur lesquels nous aimerions avoir des éclaircissements
de la part d'Hydro-Québec, d'autant plus que l'exportation de puissance
et d'énergie ferme nécessitera des investissements
énormes, notamment pour la fiabilité du réseau. Je trouve
donc très important dans ce contexte de ne pas refiler ces
dépenses aux consommateurs québécois, notamment par des
hausses tarifaires.
Au lendemain de la phase I du complexe La Grande, à cause des
surplus, les investissements d'Hydro-Québec ont diminué, et cette
baisse des investissements, liée à d'autres facteurs, permettra
à Hydro-Québec de retrouver sa marge de manoeuvre
financière. Pour les dix prochaines années, en l'absence de
nouveaux développements, Hydro-Québec évalue à 30
000 000 000 $ les investissements nécessaires pour satisfaire les
besoins d'électricité au Québec, lesquels devraient
augmenter en moyenne de 2,7 % par an jusqu'en l'an 2006.
Ces prévisions sont, bien entendu, discutables. On sait que, l'an
dernier, HydroQuébec a sous-évalué de quatre points de
pourcentage la croissance de la demande. Étant donné l'impact que
peuvent avoir ces erreurs de prévision à long terme sur les
investissements, nous aimerions avoir plus de précision sur la
fiabilité des données et sur la souplesse dont
Hydro-Québec bénéficie pour s'ajuster à des erreurs
potentielles.
D'autre part, selon les prévisions
d'Hydro-Québec, nous devrions pouvoir siqner des contrats afin
d'exporter 3500 mégawatts de puissance garantie. Ces exportations
nécessiteront des devancements de travaux et des investissements accrus
de l'ordre de 6 000 000 000 $ à partir de 1990 et pour les dix
prochaines années. Cette hausse des investissements
générera plus d'emplois, mais combien? Également, comment
faire pour maximiser les retombées économigues au Québec?
D'autre part, ces investissements plus élevés nécessitent
des besoins financiers plus importants. Comment seront-ils comblés?Par des emprunts ou par des hausses tarifaires?
Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'aménagement de ressources
hydroélectriques de même que le transport
d'électricité sont des développements très visibles
qui ont un impact indéniable sur l'environnement. Bien que
l'électricité soit aujourd'hui un bien essentiel utilisé
chaque jour par l'ensemble des Québécois, il importe dès
maintenant, je pense, d'établir dans quelle mesure nous sommes
prêts à en assumer les impacts souvent permanents et
irrémédiables qui peuvent affecter notre environnement.
Dans cette perspective, il importe d'accorder
prépondérance aux études d'impact dans le processus de
décisions relié aux choix de développements, mais surtout
d'étudier sérieusement les moyens de les diminuer. Les premiers
jalons datent de 1978-1979, sous le gouvernement du Parti
québécois, avec des réalisations comme la Loi sur la
qualité de l'environnement, la mise sur pied du BAPE et de la Commission
de protection du territoire agricole, mais nous sommes inquiets du silence du
gouvernement actuel en matière d'environnement relié au
développement hydroélectrique et des agissements du ministre,
notamment dans le cas de la sixième ligne, qui en est un bon
exemple.
Les emplois générés par la construction de barrages
sont importants, mais ces investissements génèrent relativement
peu d'emplois permanents. Plusieurs études démontrent que le
problème de l'aménagement de nos ressources
hydroélectriques vient du peu de retombées de la construction de
barrages et de lignes de transport dans le secteur manufacturier
québécois. Par exemple, le contrat accordé
récemment à ASEA, une firme suédoise, de 315 000 000 $
n'assure au Québec que des retombées minimales de 31 %.
En fait, au-delà de l'ingénierie, avons-nous
développé une véritable industrie dans le secteur
hydroélectrique au Québec? Allons-nous devenir au Québec
de gros exportateurs d'électricité et demeurer des importateurs
d'équipements? À la lumière de ce que fait le gouvernement
avec Cégelec, cela risque malheureusement de perdurer. (10 h 45)
Pour ma part, je juge nécessaire que l'État
québécois et Hydro-Québec s'engaqent à
développer une véritable industrie manufacturière
reliée à nos ressources hydroélectriques, même si,
pour cela, HydroQuébec ou une autre société, comme la SGF,
doivent devenir des partenaires financiers de sociétés
privées.
De plus, la considération des impacts environnementaux devrait
découler non seulement d'une politique interne d'Hydro-Québec,
mais elle devrait s'insérer directement dans le cadre d'une politique
énergétique québécoise. Il en coûte toujours
moins cher d'économiser l'énergie que de construire des barrages.
À cet égard, les propositions d'Hydro-Québec concernant la
réduction de la demande de pointe sont intéressantes, mais que
fera le gouvernement de cette proposition puisque le ministre m'a
répété à plusieurs occasions ne pas avoir de
politique d'énergie écrite et connue des Québécois,
exception faite des quelques principes énoncés tout à
l'heure et dans lesquels la question des économies d'énergie
était absente.
Il nous apparaît clair que tant que ce gouvernement
n'énoncera pas de politique énergétique, il demeurera
inapte à établir les enjeux que comportent les choix collectifs
en matière de développement énergétique.
Je terminerai en parlant de la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec, qui est tout de même l'enjeu principal de cette
commission parlementaire. Cette année, HydroQuébec demande une
hausse tarifaire générale de 4,6 %. La société nous
indique que cette hausse est basée sur la nécessité de
rétablir sa marge de manoeuvre financière, considérant les
prévisions d'investissements accrus au cours des prochaines
années, ce qui signifie: avoir plus de profits, auqmenter son niveau de
capitalisation, augmenter le niveau de rendement sur les investissements et
verser des dividendes au gouvernement.
Nous nous interrogeons sur l'opportunité d'avoir une hausse
tarifaire aussi importante, compte tenu du fait que la hausse de la demande,
plus de 6 % par année au cours des trois dernières années,
devrait permettre à Hydro-Québec de rétablir sa situation
financière à moyen terme. De plus, l'environnement
économique que l'on prévoit relativement stable au cours des
prochaines années contribue, à notre avis, à diminuer
considérablement les risques de l'entreprise.
Finalement, lorsque nous constatons que la politique tarifaire conduira
au versement de 292 000 000 $ de dividendes en 1989, il y a lieu de se demander
si la hausse des tarifs vise à améliorer la situation
financière d'Hydro-Québec ou à accroître la marge de
manoeuvre du gouvernement. Hydro-Québec propose de hausser plus
fortement les tarifs des consommateurs domestiques, soit l'ensemble des
contribuables québécois.
L'argumentation développée dans la proposition tarifaire
me semble inappropriée, car il s'agit là du marché le plus
captif, qui compte plus de 2 500 000 d'usagers.
On dit que le secteur domestique n'est pas rentable, mais doit-on
véritablement mettre en parallèle le niveau de rendement des
différents marchés? L'électricité n'est-elle pas un
bien essentiel pour l'ensemble des Québécois?
De plus, l'interfinancement entre les produits vendus par des
entreprises d'utilité publique n'est pas un phénomène
unique à Hydro-Québec. Ne devrait-on pas, dans la
continuité de la mission d'Hydro-Québec, veiller à ce que
les Québécois reçoivent, sous forme de tarifs
réduits, une partie de la rente associée à la
présence au Québec d'une ressource naturelle abondante? Dans le
contexte actuel, il nous apparaît raisonnable que la hausse de tarifs ne
dépasse pas le niveau d'inflation prévu et soit uniforme pour
l'ensemble des usagers. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le
député de Roberval. Je présume que c'est M. Coulombe qui,
au nom d'Hydro-Québec... Ah bon! D'accord. Alors, c'est M.
Hébert, président du conseil d'administration, qui prendra
d'abord la parole. Je crois qu'on m'indique que ce sera M. Coulombe par la
suite.
M. Hébert, avant d'aborder votre présentation, est-ce que
vous pourriez présenter les collègues qui vous accompagnent
à la table?
Exposé d'Hydro-Québec M. Hervé
Hébert
M. Hébert: M. le Président, je pourrais laisser M.
Coulombe faire cela tantôt. C'est son équipe. J'aimerais qu'il les
présente lui-même.
Le Président (M. Charbonneau):
D'accord.
M. Hébert: Cela va. M. le Président, M. le
ministre, Mme, MM. les membres de la commission de l'économie et du
travail. Il me fait plaisir, comme président du conseil d'administration
d'Hydro-Québec, de me présenter devant cette commission pour
discuter du plan de développement d'Hydro-Québec 1987-1989,
Horizon 1996, rendu public il y a environ une semaine.
Comme vous l'aurez sans doute remarqué dans cette édition
du plan, HydroQuébec a cherché à mieux expliciter les
liens existant entre sa mission et les objectifs proposés, lesquels
visent à satisfaire les attentes de ses clients, de son actionnaire et
de ses prêteurs. De ces objectifs découla sa stratégie qui
se situe dans le cadre du double rôle d'Hydro-Québec, soit celui
de service public et celui de moteur de développement
économique.
Encore cette année, le conseil d'administration a pu participer
étroitement à la préparation de ce document fondamental.
À chaque étape des travaux, prévision de la demande
d'électricité, équipement requis, échéance
de réalisation, cadre financier, le conseil d'administration a
été consulté et a pu faire connaître ses opinions.
Le plan de développement faisant l'objet de nos discussions à la
présente rencontre a donc reçu l'assentiment du conseil
d'administration d'Hydro-Québec, qui l'appuie sans réserve.
Comme il se doit, c'est le président-directeur
général d'Hydro-Québec, M. Guy Coulombe, et les cadres
supérieurs qui l'accompagnent qui se chargeront de répondre
à vos questions et, avec votre permission, je céderai la parole
à M. Guy Coulombe. Je vous remercie.
Le Président (M. Charbonneau): M.
Coulombe.
M. Guy Coulombe
M. Coulombe: M. le Président, je voudrais d'abord
présenter mes collègues qui sont immédiatement à
cette table et réservant pour d'autres interventions lors d'autres
sujets le soin de présenter les autres collègues qui
m'accompagnent. Vous avez à ma gauche M. Jean Bernier, secrétaire
général d'Hydro-Québec. M. Jacques Guevremont,
vice-président exécutif des marchés externes. M.
Hébert, président du conseil. M. Pierre Godin,
vice-président exécutif à l'exploitation. M. Claude
Boivin, vice-président exécutif au marché interne. Je
présenterai les autres au fur et à mesure des sujets qu'on
traitera.
Je voudrais aussi souligner la présence ici des présidents
de nos syndicats à HydroQuébec: M. Charles Cuerrier, qui est
président du Syndicat des métiers, le 1500, affilié au
Syndicat canadien de la fonction publique; M. Charbonneau et de M. Montoudis,
qui sont respectivement président et secrétaire-trésorier
du Syndicat des bureaux, local 2000; M. Pacelli Desrosiers, président du
Syndicat des techniciens du local 957; ainsi que de M. Luc Chabot, qui est le
permanent, conseiller technique à ces syndicats.
Ce matin, nous voudrions, en quelques minutes, vous donner
peut-être un résumé du plan de développement. Je
pense que ce serait peut-être plus vivant si on procédait par
diapositives et, à cette fin, je demanderais à M. Neveu, qui est
directeur général de la planification et M. Claude Boivin, qui
est vice-président exécutif, le soin de présenter en un
quart d'heure les
principales facettes du plan de développement. Avant, j'aimerais
souligner le travail immense que représente ce plan de
développement et qui est un travail annuel et, évidemment, on ne
peut pas s'attendre à chaque année à avoir un plan
complètement nouveau. D'ailleurs, ce serait un peu étrange que
chaque année la situation change aussi radicalement. Au nom de
l'équipe, je voudrais les féliciter du travail qui a
été fait cette année. Je pense que le plan de
développement d'Hydro-Québec a atteint un niveau de
maturité dans ses principales caractéristiques et je pense qu'on
peut le comparer avantageusement avec n'importe quel plan de
développement des compagnies, soit privées ou d'État au
Québec, au Canada ou ailleurs.
Évidemment, c'est rempli de risques. Plus le plan est
précis ou se veut précis, plus il faut de la précision
dans les prévisions, et là-dessus on voudrait vous rassurer: on
n'a nullement l'intention de se prendre pour d'autres, et nous savons tes
risques qui sont impliqués dans toute forme de prévision. Nous
savons les marges d'erreurs qui peuvent exister dans un plan de
développement où toutes les facettes de l'entreprise et
passablement d'autres facettes économiques du Québec sont
étudiées. C'est dans cet esprit qu'on voudrait vous
présenter ces travaux. Je demanderais encore à MM. Neveu et
Boivin de présenter les principales caractéristiques du plan qui
vont peut-être éclairer les discussions des deux prochains
jours.
M. Gilbert Neveu
M. Neveu: La présentation va être assez
brève. Néanmoins, vu qu'on couvre la plupart des aspects du plan
de développement, cela va prendre quand même un certain temps. Je
vais d'abord commencer par les paramètres d'encadrement du plan de
développement: d'abord la population, l'hypothèse de croissance
de 0,4 % entre 1986 et 2006; pour les ménages, une croissance de 1,3 %
d'ici à 2006; pour le PIB, une croissance de 2,7 % d'ici à
l'horizon 2006. J'insiste sur l'horizon 2006, parce que, l'année
précédente, l'horizon était limité à 2001,
mais étant donné que cela nous prend un horizon d'une vingtaine
d'années pour planifier le plan d'équipement, alors l'horizon a
été allongé cette année de cinq ans.
En ce qui concerne le prix du pétrole, les hypothèses sur
lesquelles est basé le plan de développement, c'est une
hypothèse de 16 $ en 1987, qui rejoint un prix de 20 $ en 1991 et,
ensuite, on a une hypothèse générale de 2 % de plus que
l'inflation.
Un mot sur le prix de 16 $ en 1987. Ce prix représente une
moyenne pour l'année et il suppose une fluctuation saisonnière.
Actuellement, notre prévision est à peu près conforme
à la réalité, qui est de 17 $ à 18 $ le baril, mais
qui devrait retomber selon nos prévisions à 34 % durant
l'été. Les prévisions financières ont
été faites avec ce genre de prévision.
Ce qui résulte de cet environnement économique et
énergétique, c'est, pour la demande, une croissance moyenne de
2,7 % entre 1986 et 2006. Pour les fins de comparaison, par rapport a l'an
dernier où le réseau était limité à 2001, le
taux de croissance était, de 1985 à 2001, à 3 %; cette
année, cela donne un taux de croissance de 3,2 % sur la même base,
donc, une légère croissance par rapport à l'année
dernière. Cette fourchette de 2,7 % s'inscrit à
l'intérieur d'une fourchette haute de 3,5 % et d'une fourchette basse de
1,5 % par année.
Comme je viens de le dire, la demande cette année a
été rehaussée légèrement à l'horizon
1996 et 2001, une hausse de 4,7 térawattheures en 1996 et 4,9
téra-wattheures en 2001 pour ce qui est de l'énergie. En ce qui
concerne les besoins prioritaires en puissance, donc la puissance de pointe
appelée, cela représente à peu près une hausse de
1500 mégawatts.
Les données que je viens de mentionner à l'instant
correspondent au scénario de référence. Donc, cela suppose
que les tarifs suivent l'inflation en moyenne, qu'il n'y a pas de tarif
spécial dans la biénergie et que la puissance interruptible est
maintenue au potentiel actuel de 500 mégawatts. Mais, cette
année, le plan d'équipement a été
présenté selon un scénario cible qui suppose une
intervention sur la demande et, en particulier pour les tarifs, cela suppose un
rattrapage graduel des prix de revient comptables, c'est-à-dire qu'on va
faire en sorte que les tarifs rejoignent à long terme les coûts de
fourniture, ce qui implique, au niveau résidentiel, une hausse un peu
plus élevée que la moyenne et, au niveau général,
une hausse un peu plus faible que la moyenne. Cela suppose également
l'introduction d'un tarif spécial - j'imagine qu'on aura l'occasion d'y
revenir - pointe, hors pointe qui serait introduit à l'automne. Cela
permettrait de maintenir le parc biénergie et même de
l'augmenter.
Actuellement, ce parc se situe autour de 140 000 unités et, selon
nos prévisions, nous avons inclus une provision pour 171 000
unités au parc biénergie, compte tenu du tarif incitatif et du
programme d'entretien qu'Hydro-Québec entend promouvoir pour inciter les
clients à adopter la biénergie. Il en résulterait qu'en
pointe, avec ces tarifs incitatifs, la biénergie fonctionnerait à
85 %, c'est-à-dire qu'on pourrait compter à 85 % sur la
fiabilité de cette biénergie qui pourrait s'interrompre plus
tôt qu'actuellement, où, étant donné qu'il n'y a pas
d'incitation pour les clients de le faire, on
compte actuellement sur à peu près 50 %. En ce qui a trait
à la puissance interruptible, le potentiel actuel de 500
mégawatts pourrait être étendu à 2000
mégawatts, le potentiel étant surtout dans le secteur des
pâtes et papiers.
L'effet de ce scénario cible par rapport au scénario de
référence, ce n'est pas de réduire la consommation, comme
on le voit en ce qui concerne les térawattheures; l'impact est
absolument négligeable. Donc, pour les térawattheures,
c'est-à-dire ce qui correspond à
l'hydroélectricité, c'est-à-dire là où
Hydro-Québec a un avantage concurrentiel comparatif par rapport aux
autres pays. Mais, l'impact est surtout en ce qui a trait à la pointe,
donc, à la très fine pointe. Cela veut dire des économies
d'équipements de pointe du genre des turbines à gaz. Cela
représente des économies de l'ordre de 1000 mégawatts
à l'horizon 2000, 2006, qui se décomposent à environ 700
mégawatts à cause du maintien de la biénergie, donc le
programme incitatif dont j'ai parlé tout à l'heure, et
finalement, l'impact de la politique tarifaire, qui pourrait être de 300
à 400 mégawatts selon nos estimations.
Cela termine ce que je voulais dire sur les marchés internes. On
a défini la croissance de la demande cible sur les marchés
internes. Maintenant, je vais parler du développement des marchés
externes, avec un rappel de la stratégie de l'an dernier qui,
fondamentalement, n'est pas changée. La première étape
concerne, comme l'année dernière, l'écoulement des surplus
existants qui devrait se terminer vers 1995. Le deuxième volet de la
stratégie est la vente de puissance et d'énergie garanties.
Contrairement, à la première étape où on parle
alors de vente d'énergie excédentaire pour écouler ces
surplus, vente d'énergie excédentaire, c'est-à-dire de
vente où ni l'acheteur, ni le vendeur n'ont d'engagement mutuellement.
(11 heures)
Dans le cas de la vente de puissance et d'énergie garanties, dont
le Maine est un exemple, l'acheteur s'engage à acheter, sinon il a des
pénalités et inversement le vendeur s'engage à vendre
cette puissance et énergie garanties; donc, c'est un produit de bien
meilleure qualité et, dans une deuxième étape de
développement dont l'objectif est de vendre 3500 mégawatts d'ici
à la fin du siècle, basés sur une formule de prix qui
correspond au coût évité de l'acheteur, donc selon le genre
de formule du Maine et, finalement, la troisième étape de
développement, qui concerne des ventes au-delà des 3500
mégawatts, mais qui comporte également l'installation
vraisemblablement d'interconnexions beaucoup plus longues; à ce
moment-là, cela nécessitera vraisemblablement une formule de prix
vraiment différente qui pourrait être basée sur nos
coûts et, naturellement, ce qu'on va vendre à cette
troisième étape va dépendre de l'évolution du
marché.
L'année dernière, on avait un volet de vente
d'énergie garantie; en remplacement de mazout, on avait une provision
pour 40 térawattheures, à raison de cinq térawattheures
échelonnés sur les années de 1995 à 2000. Cette
année, compte tenu de l'évolution des prix du pétrole,
cette stratégie est en suspens.
J'ai effleuré le potentiel. Le potentiel dans les réseaux
voisins, selon les hypothèses de leur plan de développement, le
potentiel de déficit de puissance à l'horizon de 2001 est de 5900
mégawatts; c'est-à-dire qu'Hydro-Québec veut vendre de la
puissance d'énergie garantie, c'est essentiellement pour remplacer ou
pour éviter à nos réseaux voisins de construire des
centrales de base; ce potentiel est donc évalué à 5900,
selon ces mêmes réseaux voisins. Ainsi, en Nouvelle-Angleterre,
ils estiment à 5200 mégawatts leur déficit de puissance,
basé sur une hypothèse de croissance de la demande de 2,3 % d'ici
à la fin du siècle. Supposons que la demande ne serait que de 0,5
% de plus que ces 2,3 %, donc de 2,3 % à 2,8 %, à ce
moment-là, le potentiel monterait à 7500 mégawatts.
Donc, on peut voir qu'il y a une très grande sensibilité
de ce potentiel à l'évolution de la demande dans ces
réseaux voisins, et notamment sur le marché de New York,
où selon l'hypothèse actuelle des réseaux voisins d'une
croissance de 1,4 % par année d'ici à la fin du siècle, si
on ajoute 0,5 %, donc de 1,4 % à 1,9 %, cela porterait le potentiel
à 2800 mégawatts; le potentiel total passerait donc de 5900
à 13 900 mégawatts, simplement en augmentant de 0,5 % la
croissance de la demande.
Seulement pour donner une perspective: vous retrouvez ici le chiffre de
5900 qui correspond à l'hypothèse moyenne et de 13 900 qui
correspond à l'hypothèse élevée, mais c'est un
potentiel qui va se développer graduellement. Le chiffre que je vais
donner est pour 2001, mais étant donné qu'actuellement les
réseaux sont en surplus, ce surplus va se résorber graduellement,
et les déficits vont apparaître vers le milieu des années
quatre-vingt-dix.
Je vais passer au développement des installations, qui correspond
au scénario de demandes internes et externes dont on vient de parler.
Vous retrouvez ici la croissance de la demande cible sur les marchés
internes, donc la croissance de 2,7 % dont j'ai parlé initialement.
Au-delà de eette demande interne, Hydro-Québec a
déjà des engagements contractuels à l'exportation que vous
trouvez sur la ligne bleue ici; ces engagements contractuels, à court
terme, correspondent aux exportations du Vermont
ou vers NYPA et, à partir du début des années
quatre-vingt-dix, cela correspond essentiellement au contrat de NEPOOL de 7
térawattheures par année d'ici à l'an 2000. C'est
l'engagement contractuel; donc, s'il n'y avait pas d'objectif d'exportation
au-delà de ces engagements contractuels existants, la demande à
satisfaire serait celle-ci. Mais compte tenu de l'objectif de vendre 3500
mégawatts ou de pénétrer le marché d'exportations
de 3500 mégawatts de puissance d'énergie ferme, à ce
moment-là, la croissance de la demande totale à satisfaire
correspond à cette courbe verte ici.
Vous retrouvez ici la même courbe que je viens de
représenter, la courbe "demandes internes" plus "demandes externes", et
ici, la courbe que l'on aurait si l'on avait que les marchés internes
plus les engagements contractuels existants à l'exportation. Et, par
ailleurs, vous avez l'offre existante du parc, c'est-à-dire
qu'actuellement, on a un parc capable de fournir 170 térawattheures,
alors que la demande régulière est de l'ordre de 145; cette
demande régulière plus les exportations vont augmenter
graduellement et, à un moment donné, cela va finir par croiser
l'offre et, dès que la demande et l'offre se croisent, cela veut dire
qu'il faut de nouveaux équipements pour satisfaire cette augmentation de
la demande. Les premiers équipements dans le programme
d'équipements sont la phase II du complexe La Grande, avec la mise en
service de LG 1 qui entrera en production en 1995 et 1996, suivie de Brisay et
Laforge, ensuite, Sainte-Marguerite qui intervient en 1998, suivie de Grande
Baleine en 1999, Ashuapmuchuan qui intervient en 2002, et NBR après l'an
2000.
On peut voir sur ce graphique l'impact des ventes à l'exportation
des 3500 mégawatts par rapport à une situation où on
n'aurait que les engagements contractuels existants. Dans ce cas, si on n'avait
pas l'objectif des 3500 mégawatts d'exportation, on peut voir que les
premiers équipements pourraient apparaître en 1999 seulement.
Je viens de vous parler des dates de mise en service,
c'est-à-dire le moment où les équipements doivent entrer
en production. On retrouve, pour LG 1, 1995 et 1996; alors en faisant un compte
à rebours, la construction devrait débuter en 1989, ce qui
implique une décision au début de 1989. D'ici là, il
s'agit de faire les études, les permis et la préparation de la
décision. C'est la même chose pour Brisay; mise en service en
1996, ce qui implique un début de construction et une décision au
début de 1991, et les travaux de préparation de ces études
et des permis devront débuter dès maintenant. Il en va de
même pour Laforge et Sainte-Marguerite, même si les dates de mise
en service sont plus éloignées.
Au niveau des équipements de pointe, il y a la phase II de LG 2;
la phase I est prévue pour 1992 et la phase II, dans le scénario
cible actuel, serait pour ]993. Comme autre équipement de pointe, nous
avons les suréquipements de Manic 3, de Manic 2 et de Manic 1, qui
devraient entrer en service en 1995. Pour mettre en service ces
suréquipements à Manic, il faudrait d'abord une ligne sur la
Côte-Nord qui entrerait en service à peu près au même
moment, ce qui implique un début de construction vers les années
1991 et la préparation des études et des permis dès
maintenant. Par ailleurs, vous avez la sixième ligne à courant
alternatif de la Baie James - ce n'est pas la ligne à courant continu
dont on parle actuellement - qui devrait entrer en service en 1995, ce qui
implique un début de construction en 1991.
Par rapport à l'année dernière, vous trouverez la
liste des équipements de pointe, des équipements de base, avec
les puissances installées correspondantes, et vous avez ici les dates de
mise en service qui étaient prévues dans le plan de
l'année dernière, dans le plan 1986-1988, et elles sont
comparées avec celles du plan 1987-1989. En ce qui touche les principaux
équipements de base, pour LG 1, la première date de mise en
service se trouve devancée d'une année, donc de 1996 à
1995. Pour les deux autres aménagements de Laforge et Brisay, qui
complètent la deuxième phase du complexe La Grande, les
devancements sont de trois ans et un an respectivement. Ensuite,
Sainte-Marguerite, c'est devancé d'un an. Pour ce qui de Ashuapmuchuan,
le devancement est de six ans parce qu'il y a eu un réarrangement dans
l'ordre économique; par exemple, La Romaine s'est trouvée
reportée, alors que Ashuapmuchuan s'est trouvée
devancée.
Quant aux investissements pour les dix prochaines années
correspondant à ces programmes d'équipements, investissements en
production, en transport et en distribution, les investissements prévus
sont de 36 700 000 000 %' dont 1 900 000 000 % en 1987. Cela, c'est le
scénario cible, à 2,7 % sur les marchés internes, et qui
comporte un objectif de 3500 mégawatts à l'exportation. On a
également, pour fins d'analyse et de sensibilité,
présenté un scénario faible, fort et un scénario de
référence, donc sans gestion de la demande et sans exportation de
3500 méqawatts. À ce moment-là, les investissements
seraient respectivement de 21 000 000 000 $, 43 000 000 000 $ et 30 000 000 000
"$.
Cela termine la présentation. Je vais céder la parole
à Claude Boivin, qui parlera des tarifs et de la situation
financière.
M. Claude Boivin
M. Boivin: Au niveau des tarifs, un bref rappel de l'an dernier.
Nous avions déposé
les paramètres d'une politique tarifaire ainsi que les
résultats des études de coûts de fourniture
qu'Hydro-Québec a effectuées et mises à jour au cours des
dernières années. Un bref rappel de la position de nos prix de
vente actuels par rapport à nos coûts de fourniture. Nous avons
ici, sur le graphique, les prix moyens auxquels nous vendons
présentement notre énergie régulière au
Québec. Pour se souvenir: le D signifie notre tarif domestique; le G est
l'usage général petite puissance, c'est-à-dire le tarif ou
les prix auxquels nous vendons à nos clients commerciaux et industriels
pour des puissances jusqu'à 100 kw; le M. tarif d'usage
général, encore là, de 100 à 5000 kw pour nos
clients commerciaux et industriels; et le tarif L, la grande puissance,
au-delà de 5000 kw.
Donc, nous faisons présentement des ventes
régulières à un prix moyen de 0,037 $ le kw/h, qui se
répartit à 4,2, 5,5, 4,4 et 2,8 pour les différentes
catégories. Si on compare maintenant ce prix moyen de vente au prix de
revient comptable, le prix de revient comptable signifie - en fait, le prix de
revient en tenant compte de toutes nos installations présentement en
exploitation, donc, leur valeur aux livres, comprenant également les
frais d'exploitation et d'amortissement, et une provision pour un retour sur
l'avoir propre de l'ordre de 13 %, c'est-à-dire une marge de profit de
l'ordre de 13 %.
À ce moment-là, on s'aperçoit que, chez nos clients
résidentiels, présentement, nous vendons à 0,042 $; notre
prix de revient comptable est de 0,049 $, c'est-à-dire qu'il y a un
écart: le prix de revient comptable est supérieur de 16,7 %
à notre prix de vente. Pour les autres catégories, l'usage
général, petite et moyenne puissance, en général,
c'est l'inverse; nous vendons plus cher que nos prix de revient comptables, par
environ un écart de 16 % à 17 %. Pour nos clients grande
puissance, nous sommes à peu près en position d'équilibre,
avec un écart de 3,6 %. Ce qui nous donne finalement un résultat
global d'un prix moyen de 3,7 %, par rapport à un prix de revient
comptable de 4 %, pour un écart de 8,1 %.
Une autre façon de voir les résultats globaux
entraînés par ces écarts de prix par rapport au coût
de revient est de voir dans chaque catégorie, en fait, le rendement
découlant de chacune de nos catégories de vente
régulière au Québec. Nous voyons ici, dans le haut du
graphique, que les clients résidentiels produisent un rendement de 1,9
%, soit au total une somme de 43 000 000 $. Nos clients au tarif G et au tarif
M produisent un rendement de près de 30 %, pour des montants respectifs
de 158 000 000 $ et 220 000 000 $, alors que les clients au tarif L produisent
un rendement de 10,5 %, pour un montant de 90 000 000 $.
Donc, au global, nos ventes régulières au Québec
produisent un taux de rendement de notre avoir propre de 11,4 %, pour un
montant de 511 000 000 $. Si nous voulions éliminer cet interfinancement
et, chez chacune de nos catégories de clients, un rendement uniforme de
11,4 %, à ce moment-là, chez nos clients domestiques, il faudrait
aller chercher 263 000 000 $ plutôt que 43 000 000 $, soit un montant
additionnel de 220 000 000 $. Par contre, chez nos clients commerciaux et
industriels, petite et moyenne puissance, ces clients devraient produire
respectivement 61 000 000 $ et 90 000 000 $; donc, il faudrait leur remettre en
pratique 97 000 000 $ et 130 000 000 $, alors que pour les clients au tarif L,
nous sommes à peu près en équilibre, avec un écart
de 7 000 000 $; d'où la proposition tarifaire 1987 parce qu'un des
principes de la politique tarifaire était de refléter
graduellement et autant que possible les coûts de fourniture dans notre
tarification.
Donc, pour 1987, nous proposons une hausse moyenne de 4,6 %. Je vous
rappelle que l'indication que nous avions donnée dans le plan de
développement l'an dernier, pour l'année 1987, se situait
à 4,9 %. Nous proposons une légère différenciation,
c'est-à-dire une augmentation légèrement plus rapide chez
nos clients domestiques à 4,9 %, tandis que l'augmentation se situe en
moyenne à 4,4 %, soit 4,3 %, 4,4 % et 4,5 % chez nos autres
catégories de clients.
Voyons maintenant la gestion financière. Un bref rappel de
l'évolution de la situation des principaux paramètres financiers
de l'entreprise pour la période 1980-1986, quant à la couverture
des intérêts. On se souviendra que la couverture des
intérêts est l'un des critères financiers dans la Loi sur
Hydro-Québec, qui doit être maintenu à 1. À ce
moment-là, on voit que, de 1980 jusqu'à aujourd'hui, nous avons
maintenu ce critère financier. (11 h 15)
Le deuxième critère financier fixé dans la Loi sur
l'Hydro-Québec doit se situer au moins à 25 %. Au cours des
années 1980 à 1984, il s'est maintenu effectivement à
au-delà de 25 %. En 1985 et en 1986, compte tenu de l'évolution
de la conjoncture, nous avons perdu ou échappé ce critère
financier; il est descendu à 24,1 % en 1985 et s'est de nouveau
détérioré légèrement en 1986, pour passer
à 24 %.
Le rendement sur l'avoir propre, qui se maintenait au-delà de 10
% jusqu'en 1983, a chuté de façon draconienne en 1984-1985 pour
s'établir à 3,2 %, et un léger redressement à 4,4 %
en 1986. Au niveau du bénéfice net, même
phénomène. Avec la fin des travaux de la phase I de la Baie James
et la capitalisation, la mise en service des
ouvrages, notre bénéfice net a chuté de
façon radicale au cours des années 1984, 1985 et 1986. Pour ce
qui est du rapport entre le bénéfice net et les ventes,
même phénomène que pour le bénéfice net
lui-même, donc une baisse â 4,7 % et 6,5 % en 1985 et 1986
respectivement.
Les conséquences de la détérioration de ces
critères financiers, c'est qu'aujourd'hui Hydro-Québec se
retrouve dans une situation où elle n'a plus de ligne de défense
contre des aléas. Si nous devions faire face à des conjonctures
difficiles dans l'avenir, il faudrait, à ce moment-là, avoir
recours soit à des hausses brutales de tarif ou encore accepter une
détérioration chronique et plus marquée encore des
principaux ratios financiers au-dessous du niveau minimum que nous avons vu
tantôt. D'où la nécessité pour Hydro-Québec
de reconstituer cette marge de manoeuvre, essentiellement constituée du
rendement sur notre avoir propre.
Nous pensons que, dans les années qui viennent, le risque global
de l'entreprise est important, notamment du côté du
développement des marchés, par exemple, avec les formules de
partage de risques que nous préconisons maintenant pour nos grands
clients industriels. À long terme, ces formules devraient
s'avérer bénéfiques tant pour Hydro-Québec que pour
l'économie de la province, mais, dans des périodes difficiles,
lors de récessions économiques, comme la plupart de ces
entreprises oeuvrent dans des domaines cycliques, il pourrait y avoir des
années où nous aurions une chute importante ou une
réduction importante de nos revenus découlant de ces contrats. De
même, les prix à l'exportation pour les ventes d'énergie
ferme sont basés sur les coûts évités de l'acheteur.
Donc, cela implique nécessairement un risque additionnel par rapport au
passé.
Nous avons également des stratégies de réduction
des coûts dans notre plan de développement, stratégies qui,
à long terme, devraient s'avérer très
bénéfiques pour l'ensemble des consommateurs
québécois, mais qui impliquent pour certaines années des
risques potentiels, par exemple, la gestion plus serrée de nos
réservoirs, ce qui veut dire qu'à certaines années il
pourrait se produire que, lors de cycles d'hydraulicité très
faibles, nous devrions avoir recours à de la génération
à partir de notre centrale de Tracy qui fonctionne au mazout, donc qui
est plus dispendieuse, ou même pour des périodes courtes, à
des achats de soutien de la part des réseaux voisins.
Nous avons également une stratégie d'augmenter le
pourcentage de notre dette à taux variable. Dans des périodes de
baisse d'intérêt, c'est très favorable mais, si nous
devions être frappés par des hausses brutales
d'intérêt, à ce moment-là pour certaines
périodes il y a des risques addi- tionnels par rapport à ce que
nous avions dans le passé.
Ce que nous demandons ou ce que nous visons maintenant comme taux de
rendement... Une autre façon de le considérer, c'est le rapport
entre le bénéfice net et nos revenus de vente. Nous visons en
fait, à l'horizon 1993, à rétablir un rapport de 18 %, ce
qui n'est pas exorbitant si on compare avec le passé. On voit ici en
fait que la moyenne de ce rapport, pour les années 1963 à 1983 se
situait à 23,7 %.
La reconstruction de la marge de manoeuvre financière dans les
années qui viennent va se faire de deux façons: la
première méthode sera nécessairement par les tarifs, comme
nous l'avons indiqué, soit des hausses tarifaires qui seront voisines de
l'inflation, mais également par une résorption du
déséquilibre offre et demande. On voit ici qu'en 1986, la partie
en bleu, qui représente nos ventes d'énergie
régulière, produisait un taux de rendement de 11,4 %. Par contre,
l'énergie excédentaire que nous avons vendue à nos clients
québécois, principalement les industriels dans le programme des
chaudières, nous vendions à perte par rapport à nos
coûts de fourniture, donc un rendement négatif de moins 31 % et
nos ventes intéqrées de l'excédentaire à
l'exportation et dans d'autres secteurs, avec un rendement négatif de
moins 2,3 %.
À l'horizon 1993, particulièrement les ventes
d'excédentaire ici au Québec auront disparu, et nous visons en
fait un taux de rendement sur nos ventes internes réqulières de
13 %. II y a une partie de la marge de manoeuvre financière qui sera
rétablie par le passage de ces ventes à perte dans le secteur de
l'excédentaire à des ventes d'énergie
régulières qui, elles, sont faites avec une marge de profit,
ainsi que sur les marchés de l'exportation où nous visons, pour
la vente d'énergie ferme, de puissance et d'énergie fermes, des
taux de rendement de l'ordre de 13,4 %. Le rendement global sur l'avoir propre
devrait passer de 4,4 % à environ 13 % en 1993.
Pour ce qui est du cadre financier, tout d'abord un bref rappel de
l'année 1986. Nous avons ici les prévisions que nous vous avions
fournies l'automne dernier dans le plan de développement et les
réalisations à la fin de 1986. Nous voyons effectivement que le
bénéfice net s'est amélioré par rapport à la
prévision que nous avions faite, qui était de 133 000 000 $. Il
s'est effectivement situé à 303 000 000 $, soit une
amélioration de 170 000 000 $.
D'où vient cet écart? II vient principalement des revenus
d'exploitation, soit nos ventes d'électricité. Le ministre
soulignait tantôt que les ventes d'électricité
régulières se sont accrues plus rapidement que nous l'avions
anticipé au Québec, pour une augmentation de 132 000 000 $,
malgré
que les revenus des ventes à l'exportation aient chuté de
29 000 000 $ par rapport à nos prévisions, principalement
à cause de la chute des prix du pétrole. Nos dépenses
d'exploitation ont été de 59 000 000 $ inférieures
à ce que nous avions prévu, principalement pour des raisons dans
la façon de comptabiliser les fonds de retraite. Concernant les charges
d'intérêt, nous avons eu des dépenses supérieures de
43 000 000 $ par rapport à ce que nous avions anticipé et, au
chapitre de la perte de change, une réduction de 22 000 000 $.
Voyons maintenant rapidement pour 1987, 1988 et 1989,
particulièrement pour l'année 1987. Nous anticipons des revenus
de 5 003 000 000 $, dont 641 000 000 $ proviendraient de l'exportation. Au
chapitre des dépenses d'exploitation, des dépenses de 2 107 000
000 $, des dépenses d'intérêt de 2 282 000 000 $ et des
pertes de change de 277 000 000 $, pour un bénéfice net
anticipé de 337 000 000 $. Je vous ferai remarquer qu'il n'y a pas de
prévision de versement de dividendes à l'actionnaire en 1987 et
1988, parce que nous n'anticipons pas avoir retrouvé le critère
financier minimal du taux de capitalisation à 25 avant l'année
1989.
M. Coulombe: Je voudrais simplement souligner aux membres de la
commission que ce cadre financier est différent de celui que vous avez
dans le plan, parce que celui du plan était basé sur une moyenne
de 4,9 % et ça, c'est basé sur 4,6 %.
M. Boivin: Cela change les chiffres ici: dans le plan,
c'était 5 900 000 000 $ pour les revenus, et c'est passé à
5 300 000 000 $.
Les différents paramètres qui sous-tendent ce cadre
financier. Les ventes totales réalisées, 7,6 %; nous anticipons
un taux de croissance de 5,7 % pour 1987, une augmentation de tarif effective
de 4,6 %, comme nous l'avons vu tantôt, alors que les chiffres que vous
avez dans le plan de développement étaient basés sur une
hypothèse de 4,9 %. Nous voyons que nous anticipons, pour les
années 1988 et 1989, des hausses moyennes de 5,2 %. Ces hausses de tarif
se comparent à l'augmentation de l'inflation ou de l'indice des prix
à la consommation anticipée de 4,4 % en 1987, 4,7 % en 1988 et
5,2 % en 1989. Les hypothèses d'évolution du prix du mazout: 16 $
le baril pour 1987, 17 $ pour 1988 et 18 $ US le baril pour 1989.
Au chapitre des taux d'intérêt, 10,2 % et 9,2 %
respectivement pour l'argent canadien et l'intérêt sur l'argent
américain; un taux de change de 71,5 % du dollar canadien par rapport au
dollar US. Je vous ferai remarquer que, déjà, au moment où
on se parle, par rapport à l'hypothèse qui a été
envisagée lors de la préparation en décembre, le taux de
change du dollar canadien se situe présentement à environ 0,75 $.
Si, effectivement, cela devait se maintenir à ce niveau, c'est donc dire
que nous aurions déjà une marge de manoeuvre par rapport au cadre
financier qui vous est présenté.
L'analyse ou la grille de sensibilité, qui permet
d'évaluer la sensibilité des différents paramètres
du plan de développement. Nous voyons que, pour une variation de 1 % par
rapport à ce que nous avons anticipé au chapitre des ventes
d'énergie régulières, il en résulterait une
variation de 42 000 000 $ du bénéfice net. Au chapitre des ventes
d'électricité excédentaires au Québec, une
augmentation de ces ventes de 1 % rapporte 1 000 000 $ additionnels. Pour ce
qui est des ventes à l'exportation, une augmentation de 1 % produit un
bénéfice net additionnel de 6 000 000 $.
Pour ce qui est des tarifs, une augmentation de tarif de 1 % pour nos
ventes régulières au Québec à compter du 1er mai
produit en 1987, donc du 1er mai au 31 décembre, des revenus
additionnels de 23 000 000 $. Une variation du prix du pétrole de 1 $ US
par baril amènerait une fluctuation de 19 000 000 $ dans notre
bénéfice net. Une augmentation de nos frais d'exploitation de 1 %
par rapport à ce que nous avons anticipé amènerait une
réduction du bénéfice net de 12 000 000 $. Une variation
de 1 % des taux d'intérêt amènerait une diminution de 24
000 000 $ du bénéfice net.
Pour ce qui est du taux de change, et nous avons vu à la
diapositive suivante qu'il y a déjà des variations par rapport
à ce que nous avions anticipé, une variation moyenne de 0,01 $
dans le taux de change du dollar canadien par rapport au dollar
américain, variation moyenne qui se maintiendrait toute l'année
représenterait en fait une augmentation du bénéfice net de
26 000 000 $.
Pour ce qui est des autres devises, parce qu'il y a 10 % de notre dette
qui est constituée de devises autres que canadiennes et
américaines, une variation de 1 % du taux de change amène une
variation de 10 000 000 $. Cela termine un survol très rapide et
nécessairement très condensé des grandes orientations du
plan de développement.
Période de questions
Le Président (M. Théorêt): Merci. Nous allons
maintenant passer à la période de questions d'ordre
général et, si je ne m'abuse, nous allons commencer par le
côté ministériel. M. le ministre.
Plan de développement
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je veux vous remercier
pour votre présentation. Elle a été assez complète
et assez détaillée. Vous êtes allés pas mal dans le
détail sur les conséquences du plan de développement.
Certains peuvent parler d'une continuité du plan de
développement; j'en suis. Toutefois, on dénote une certaine
évolution par rapport au plan que vous nous présentiez l'an
dernier.
M. Coulombe, sans revenir sur tous les détails qui ont
été présentés dans le plan de développement,
est-ce qu'il serait possible de nous indiquer les changements qui ont
été apportés sur certains grands paramètres du
plan? Je pense ici à l'évaluation de la demande interne, aux
marchés d'exportation, au développement des installations et aux
investissements prévus. En général, quels sont les
changements et les conséquences?
M. Coulombe: Évidemment, comme vous l'avez indiqué,
il y a certainement une continuité. Dans la problématique
générale, je pense que les grands encadrements sont restés
passablement les mêmes. Toutefois, il y a des changements assez
importants. Le premier touche à la demande. Je demanderais
peut-être à M. Neveu d'expliquer ce qui s'est passé dans le
domaine de la demande. Cela peut paraître curieux à un moment
donné de changer un chiffre de même sur une si courte
période. Je pense qu'il y a une raison très technique, vous allez
comprendre facilement, qui explique un peu le changement dans la demande.
M. Neveu: Comme vous l'avez vu tout à l'heure, la demande
a été augmentée d'à peu près quatre à
cinq térawattheures à l'horizon 2001. Cette hausse est due
essentiellement à deux raisons.
La première, c'est que, dans le secteur résidentiel, on a
rehaussé la demande à cause d'une révision de la
prévision du nombre de ménages d'ici à la fin du
siècle. En fait, on avait une prévision qui était
inférieure d'à peu près 138 000 ménages à la
prévision du BSQ l'année dernière. On a eu des rencontres
avec le Bureau de la statistique. Après discussion, on s'est
rallié à la position, d'autant plus que nos estimations pour
l'année en cours, pour l'année 1986, passaient un peu en bas de
la réalité. Cela nous a donc amenés à rehausser
cette prévision et, de cette façon, on était aligné
sur la position du BSQ. Donc, cela explique à peu près la
moitié de la hausse de cinq térawattheures.
L'autre moitié provient essentiellement du secteur industriel.
Dans le secteur industriel, on a fait certaines modifications. Par exemple, on
a enlevé une aluminerie dans la prévision de la demande. Par
ailleurs, on a augmenté la consommation d'électricité dans
le secteur du maqnésium. Naturellement, il y a l'usine de Norsk Hydro
qui va entrer en service en ]989. Cela contribue donc à l'augmentation
de la demande. On a également, dans le secteur industriel, une
révision à la hausse de la pénétration des
pâtes thermomécaniques dans les pâtes et papiers,
c'est-à-dire que le secteur des pâtes et papiers est en voie de
transformation. Il se transforme vers des procédés qui consomment
beaucoup plus d'électricité, et on a révisé
à la hausse à la suite d'études auprès de nos
clients et auprès de consultants, on a révisé le taux de
pénétration de ces pâtes thermomécaniques dans le
secteur des pâtes et papiers. (11 h 30)
M. Coulombe: Un deuxième changement est intervenu, mais ce
n'est pas tellement un changement qu'une beaucoup plus grande précision
dans notre notion de plan cible, c'est-à-dire que là on a, je
pense, beaucoup mieux intégré les variables et en distinguant un
plan de référence et un plan cible. On espère que cela va
être l'encadrement des prochains plans des autres années pour
toujours bien distinguer l'approche un peu volontariste qu'on peut avoir dans
le développement de l'hydroélectricité. Le plan de
référence est un peu basé sur le fait qu'on laisse jouer
les forces comme elles doivent jouer ou comme elles pourraient jouer et le plan
cible est un plan beaucoup plus interventionniste.
On est interventionniste dans le cadre des exportations. On
définit un objectif qui est à atteindre, qui n'est pas atteint
encore, de 3500 et on se dit: Cette année, on a atteint 25 %, mais il
nous en reste quand même 75 % à réaliser: cela, c'est
à faire. Les 2000 mégawatts d'interruptibles, tel que M. Boivin
vous l'a présenté tantôt, relèvent aussi d'une
approche volontariste. Ces 2000 mégawatts d'interruptibles ne sont pas
réalisés. Alors en distinguant bien ces deux notions, on voit la
différence entre une approche beaucoup plus active et une approche plus
réactive.
Dans le cadre financier aussi, une troisième précision
plus grande est apportée. Je pense qu'on a amélioré notre
concept de marge de manoeuvre. L'année dernière, il y avait une
grande ambiguïté. On peut interpréter les marges de
manoeuvre. Hydro-Québec veut faire des profits. Cela veut dire quoi au
juste? En précisant que la notion de profit doit faire
référence à une notion de marge de manoeuvre avec comme
postulat de base - cela est très clair dans le plan et ce l'est beaucoup
plus cette année que l'an passé - que notre objectif fondamental,
c'est d'éviter des chocs tarifaires, on pense que le grand avantage de
l'hydroélectricité, c'est une prévision des coûts
qui est beaucoup plus facile à faire, facile entre guillemets, que dans
le cas du pétrole ou dans le cas du gaz
qui sont soumis à des aléas passablement différents
de ceux de l'électricité.
Si on veut profiter de cet avantage comparatif qu'a le Québec, on
pense qu'il faut absolument avoir une stratégie qui élimine le
plus possible la possibilité de choc tarifaire. Pour éliminer les
chocs tarifaires, il est absolument essentiel que l'entreprise ait une marge de
manoeuvre et cette marge de manoeuvre, on en a précisé les
modalités de reconstitution. Je pense que ce sont les trois
éléments clés qui sont, soit modifiés, soit un peu
plus raffinés, je pense, que l'an dernier.
M. Ciaccia: Je trouve intéressante, M. Coulombe, et je
dois vous en féliciter, votre idée de l'approche volontariste,
parce que vous vous mettez en position d'action plutôt qu'en
réaction au développement économique du Québec. Au
niveau des exportations, est-ce que la lecture que je fais du plan est exacte,
si je vous dis que les 3300 mégawatts sont maintenant
considérés comme partie intégrante de votre planification
corporative?
M. Coulombe: Oui, cela fait partie intégrante de notre
plan cible, c'est-à-dire ce que j'appelle l'approche plus volontariste.
Nous sommes relativement optimistes pour pouvoir dire que d'ici à deux
ou trois ans, cela devrait être dans le sac. Maintenant, vous l'avez vu
aussi, dans le cadre du plan d'équipement, c'est-à-dire du plan
des installations, ces 3500 mégawatts sont aussi intégrés
dans le cadre des devancements d'équipement.
J'insiste aussi sur l'autre dimension qui est la souplesse qu'on veut
garder dans ce plan de développement, qui est une autre
caractéristique de base. On est prêts à faire face aux
éventualités, c'est-à-dire que les devancements n'auront
pas lieu si les marchés externes, pour une raison qu'on ignore à
l'heure actuelle, ne se concrétisaient pas en termes de contrat. On a la
souplesse nécessaire dans le plan des installations pour faire face
à cette donnée. Vous avez raison de dire que c'est
carrément intégré dans notre planification corporative
à l'heure actuelle.
Augmentation des tarifs
M. Ciaccia: Nous aurons l'occasion de revenir plus tard dans nos
travaux sur les demandes tarifaires. Pour le moment, j'aimerais vous demander
quelques précisions sur une question purement technique. Au plan de
développement, vous faites référence à une hausse
tarifaire moyenne de 4,9 % et d'autre part, vous nous présentez votre
demande tarifaire moyenne de 4,6 %. Vous l'avez soulevée tout à
l'heure dans la présentation des tableaux. Évidemment, nous ne
pouvons que nous réjouir de cette modification pour les contribuables,
pour le consommateur. Est-ce que vous pourriez nous indiquer les
éléments qui vous ont amenés à faire cette
révision à la baisse? Quels pourraient être les impacts de
votre décision sur le cadre financier de l'entreprise?
M. Coulombe: Quant au cadre financier, vous avez vu tantôt
que sur les revenus de l'année 1987, cela a très peu d'impact. On
parle d'à peu près 6 000 000 $ ou 7 000 000 $ pour l'année
1987. Évidemment, si vous projetez cela sur l'horizon du plan, en 1989,
vous vous apercevrez que ce 0,3 % donne à peu près 30 000 000 $
de moins de revenus. Ce qui absorbe ces 30 000 000 $, ce sont carrément
les dividendes moins élevés que vous avez vus tantôt. Les
dividendes seront moins élevés de 30 000 000 $, toutes les autres
variables étant équivalentes en termes de comportement. C'est un
impact financier, en 1987, de 6 000 000 $ ou environ 7 000 000 $. Cela,
reporté sur trois ans, représente 30 000 000 $ de moins en 1989.
Ces 30 000 000 $ ne sont pas absorbés par le consommateur, mais par le
gouvernement qui aura 30 000 000 $ de moins en dividendes.
Pourquoi cela a-t-il été changé? II y a deux
raisons: la première, c'est qu'il y a une question
d'échéancier. Lorsque le plan de développement est
présenté au conseil d'administration, on essaie de régler
le plan au conseil d'administration aux mois de novembre, décembre et
janvier. Lors de ces trois réunions du conseil d'administration, on
regarde le plan en profondeur. On voulait terminer ce plan vers la fin de
janvier. Pour donner une signification à l'ensemble du plan, il fallait
se fixer sur un tarif; sans cela, il n'y a pas moyen de faire les cadres
financiers. On avait mis 4,9 % qui représentait à peu
près, je pense, l'équivalent de ce qu'il y avait dans le plan de
l'an passé. On a pris le montant prévu pour l'an passé et
on a fait nos cadres financiers là-dessus.
Depuis ce temps est intervenue une remontée du dollar canadien
qui nous a rendus un peu plus optimistes face à l'évolution
financière de l'année quoique, depuis les cinq dernières
années, on se soit toujours trompé sur l'évolution du
dollar. Il a toujours été plus bas que ce qu'on a prévu.
On s'est dit que, peut-être cette année, la loi de la statistique
jouera pour nous autres et que ce sera le contraire. Il y a eu un peu plus
d'optimisme sur l'évolution de cette variable financière.
Il y a une troisième raison - je vais être très
franc avec vous - c'est que nous tenons, comme entreprise, au concept de la
différenciation des tarifs. J'ai écouté le critique de
l'Opposition et vous-mêmes, vous avez des questions. Je sais que ce n'est
pas
la notion la plus populaire, mais nous y tenons et nous en faisons une
recommandation très ferme. Pour vous donner clairement cette
troisième raison, on pensait avoir plus de chances de passer cela entre
4,6 % et 4,9 % qu'entre 4,9 % et 5,2 %, pour être très franc avec
vous. Ce sont les trois raisons pour lesquelles il y s eu une modification de
ces tarifs.
Politique de la sous-traitance
M. Ciaccia: Je sais que Pan dernier vous avez tenté de
faire cette différence et vous essayez encore de le faire. Nous allons y
revenir quand nous discuterons des tarifs. Pour le moment, on va discuter
seulement des questions d'ordre général. On aura des questions
à vous poser sur cette approche et sur votre philosophie quant aux
petits consommateurs.
Je voudrais toucher en général un autre sujet. Nous avons
tous pu constater, ce matin, qu'il existe un mécontentement - je
pourrais utiliser ce mot - relativement à la sous-traitance à
Hydro-Québec. Des gens sont venus nous le signaler assez clairement.
Je comprends que des recours ont été exercés devant
les tribunaux et qu'une certaine prudence est de rigueur. Seulement, j'ai
devant moi une copie d'une procédure où le ministre de
l'Énergie, moi-même, est mis en cause. Tout en étant bien
conscient de cette situation devant les tribunaux, vous serait-il possible de
faire un exposé factuel sur ce dossier? Pourriez-vous expliquer
brièvement votre politique de sous-traitance?
M. Coulombe: Je vais être le plus clair possible et je vais
demander au secrétaire général, vu que nous avons une
action, nous aussi, dans ce domaine, de me surveiller étroitement et, si
je m'écarte trop des principes juridiques, il m'arrêtera. Tout le
monde sait que le fond du problème à Hydro-Québec existe
depuis 40 ans et surtout depuis les 20 dernières années. Il y a
toujours eu une tension entre ce qu'on fait faire à l'externe et ce
qu'on fait à l'interne; c'est un problème de base à
Hydro-Québec qui a toujours existé et qui a été
résolu par d'autres services publics de façon différente
aussi. Par exemple, Hydro-Ontario a beaucoup plus d'ingénieurs
nucléaires à cause de sa filière énergétique
et donne moins de choses à l'externe qu'Hydro-Québec.
L'une des philosophies de base d'Hydro-Québec a toujours
été d'en donner le plus possible à l'externe, compte tenu
des exigences de qualité de service qu'on doit avoir. Cela a
donné historiquement, vous le savez, la constitution au Québec
probablement des plus grandes firmes d'ingénieurs du Canada et, en
très grande partie, c'est à cause de la politique
d'Hydro-Québec, qui était de donner ces choses à
l'externe. Je vous prie de croire que ce n'est pas très populaire comme
politique chez nos 1100 ingénieurs à Hydro, avec lesquels on a
actuellement des difficultés de négociations; c'est une tension
qui a toujours existé. Dans le cas de la construction et de l'entretien,
cela a toujours été la même chose aussi, il y a toujours eu
des tensions entre les travaux faits à l'interne et ceux faits à
l'externe.
La politique d'Hydro-Québec dans le conflit actuel - je l'ai dit
aux entrepreneurs qu'on a rencontrés cinq ou six fois, notamment jeudi
dernier lorsqu'on a présenté toute notre position en
détail - la position fondamentale d'Hydro-Québec n'a pas
changé, c'est-à-dire que pour tous les travaux de construction
dans les centrales, dans les postes, dans la répartition et sur les
lignes et, pour la plus grande partie, dans le domaine de la distribution, les
éléments de construction sont donnés à l'externe.
Cette philosophie n'a pas changé. Hydro-Québec se réserve
les problèmes d'entretien. On peut remettre en cause cette philosophie,
mais on pense qu'elle a fait ses preuves, car on est persuadé que, dans
l'entretien, cela demande des caractéristiques assez spéciales de
disponibilité, de matériel, de crises qui arrivent, de
raccordements soudains à faire pour des clients et ainsi de suite.
Le type de travaux faits à HydroQuébec exige, a
exigé dans le passé et va continuer d'exiger que les travaux
d'entretien et une petite partie des travaux - parce qu'il y a toujours une
zone délicate entre l'entretien et la construction - dans le domaine de
la distribution soient faits à l'interne. On n'a pas changé cela.
Ce qui a bouleversé la situation et ce qu'on a de la difficulté
à faire comprendre aux entrepreneurs, et je suppose a fortiori aussi aux
syndicats de ces entrepreneurs, c'est que l'ensemble du gâteau que tout
le monde se partageait a rapetissé. Les proportions sont restées
presque les mêmes; chaque morceau de gâteau est resté
à peu près le même, mais comme le gâteau a
rapetissé, le problème est devenu encore plus
considérable. Il est évident que, dans les années de la
Baie James, les entrepreneurs ne se plaignaient pas de la construction. Quand
on a construit cinq lignes à la Baie James, pour 3 000 000 000 $, 4 000
000 000 $ ou 5 000 000 000 $, les entrepreneurs ne se plaignaient pas. Mais -
vous l'avez vu dans le plan de développement - en ce qui concerne
l'ensemble des immobilisations, la tarte s'est rétrécie; donc,
chaque morceau a eu plus de valeur; on s'arrachait chaque morceau de
gâteau et on se l'arrache encore.
Il y a des représentants des syndicats d'Hydro-Québec dans
la salle et ils savent fort bien toutes les discussions épiques qu'on a
eues sur ia nécessité de conserver un équilibre entre les
travaux externes et les
travaux internes. Je sais qu'ils ne sont pas tout à fait d'accord
avec notre position là-dessus, ils en voudraient plus pour l'interne, et
je sais que les entrepreneurs et leurs syndicats en voudraient plus pour
l'externe. On vit dans cette tension de façon continuelle, à
partir de la philosophie très claire que j'ai exprimée,
c'est-à-dire que les travaux de construction sont réservés
à l'externe et les travaux d'entretien à l'interne. Tout en
admettant qu'il y a une zone grise qui n'est pas facile à
définir, à savoir ce qui en est de l'entretien. Un gros entretien
devient-il une petite construction ou ainsi de suite? Il y a là une zone
qui n'est pas facile.
De façon plus explicite encore, ce qui est arrivé aussi,
c'est que, en 1982 et 1983, lorsqu'on a décidé, avec
l'approbation du gouvernement, de diminuer très considérablement
les immobilisations parce qu'on n'avait pas le choix - je pense que tout le
phénomème a été bien expliqué dans le
discours du critique de l'Opposition - on s'est dit quand même qu'il
s'était établi un retard quant à la distribution dans
l'entreprise à cause de la priorité donnée à la
construction. Il s'était établi un retard dans l'ensemble de
notre réseau de distribution. Il y avait des raccordements, des
câbles qui dataient de 40 ou 50 ans, des poteaux pourris, etc. On a voulu
profiter de la baisse dans la construction pour donner un coup dans la
distribution. D'abord, cela aura comme effet de faire travailler davantage les
entrepreneurs, de créer plus d'emplois, et cela modernisera notre
réseau. Comme on construit moins, on va investir plus d'argent
là-dedans. D'où le programme que vous connaissez, le programme
PAQS, c'est-à-dire le programme d'amélioration de la
qualité du service. On y a injecté 1 000 000 000 $, dont à
peu près 300 000 000 $ dans la distribution. Les chiffres ne sont
peut-être pas exacts, mais c'est de cet ordre de grandeur. (11 h 45)
On s'est dit: C'est un programme spécial qui va durer trois ou
quatre ans. On a dit à nos syndicats internes: Écoutez, c'est
pour trois ou quatre ans, on n'est pas pour engager des gens permanents qui
vont rester à Hydro-Québec pendant trente ans. On a
négocié avec eux la possibilité de donner aux
entrepreneurs ce surcroît de travail apporté par une augmentation
de 300 000 000 $ de travaux. Cela a été accepté, et
l'augmentation des travaux - c'est un peu ironique dans tout le dossier,
à l'heure actuelle - a été donnée aux
entrepreneurs. On les a avertis - c'est peut-être un point de litige qui
existe entre eux et nous - par les voies normales de communication que
c'était un programme temporaire, qu'il y aurait beaucoup plus de travail
qu'avant, qu'il fallait être assez prudents dans les investissements
à faire pour des camions, etc. On leur a exposé le dossier tel
qu'on le percevait à ce moment-là.
Cela impliquait qu'il y aurait moins d'activités lorsque le
programme serait fini. Quand on a repris Je retard et qu'on a injecté
300 000 000 $, on n'est pas pour injecter 300 000 000 $ tous les trois ans sans
justification. Le programme va s'arrêter à la fin de 1987 ou 1988,
et on reviendra à la normale. Comme la qualité de notre
réseau a augmenté, cela veut dire qu'il y aura moins de travail
pour l'ensemble des gens, puisqu'on aura rattrapé les retards. Je vous
donnerai juste deux chiffres. On nous dit: Vous avez fait cela sur le dos des
entrepreneurs et des syndicats des entrepreneurs. Nous répondons que la
majeure partie des travaux supplémentaires faits dans les
dernières années ont été faits par les
entrepreneurs, donc par les employés des entrepreneurs.
Je vais vous donner deux chiffres. En 1981, nous avions 2405 monteurs
internes et monteurs externes; par externes, j'entends les monteurs
d'entrepreneurs qui, entre parenthèses, font partie de la même
centrale syndicale. Ce chiffre de 2400 est monté à 2700 pendant
deux ans, et cette augmentation, ce sont les entrepreneurs qui en ont
bénéficié. Mais on va redescendre à 2278 lorsque le
travail sera terminé, alors qu'il y en avait 2405 dix ans avant.
Je pense que c'est tout a fait logique. Après avoir donné
un coup pour remodeler notre système de distribution, c'est
terminé, on passe à de l'entretien beaucoup plus régulier.
C'est ce qui implique qu'il y aura moins de monteurs d'entrepreneurs que dans
le gros des travaux, moins aussi qu'au cours des années normales, entre
1976 et 1985. Ceci a été négocié avec le syndicat,
on n'a nullement l'intention de changer d'idée là-dessus. La
convention se termine à la fin de 1988, on va la respecter. Que se
passera-t-il en 1989, 1990, 1991? Je ne le sais pas. Nos objectifs de
négociations pour la prochaine ronde ne sont pas arrêtés.
On a l'année 1987 et une partie de l'année 1988 pour y penser. Je
suis persuadé que le problème de sous-traitance continuera
d'être un problème. Je suis persuadé que nos syndicats
demanderont d'arrêter la sous-traitance, et je suis persuadé que
les entrepreneurs diront: Cela n'a pas de bon sens d'arrêter, et on va
recommencer le cycle des ajustements nécessaires, à partir, on
l'espère, de la philosophie de base que je vous ai expliquée: les
grands travaux de construction devraient rester à l'externe, et les
travaux d'entretien devraient rester à l'interne. C'est un peu le
résumé de la situation.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le ministre? M.
le député de Roberval.
M. Gauthier: Merci, M. le Président. M. Coulombe, une
société comme Hydro-Québec, lorsqu'elle se prépare
à produire un plan de développement aussi substantiel que celui
que vous nous proposez, doit forcément s'appuyer, puisque c'est une
société d'État, sur des orientations gouvernementales.
C'est propre à notre système et à la manière dont
la loi constitutive d'Hydro-Québec est faite. Qu'on se
réfère à l'article 22: "La société
prévoit notamment les besoins du Québec en énergie et les
moyens de les satisfaire dans le cadre des politiques
énergétiques" que le gouvernement peut se donner. J'aimerais
savoir, M. Coulombe, lorsque vous avez bâti ce plan de
développement, sur quelle politique énergétique du
gouvernement vous vous êtes basés. Est-ce que vous avez en main
cette politique? Est-ce que vous pouvez nous donner des éclaircissements
là-dessus?
M. Coulombe: Le cadre de référence sur lequel on se
base en relation avec le gouvernement, je pense que c'est un cadre de
référence qui, au moment où l'on se parle, est implicite.
Il y a eu un changement de gouvernement. Le nouveau gouvernement avait des
objectifs précis dans le domaine de l'exportation et avait aussi
l'exigence, qui nous a été maintes fois
répétée, d'être une entreprise rentable et efficace.
Dans toutes les discussions de planification avec le gouvernement, et plus
particulièrement avec le ministère de l'Énergie et des
Ressources, qui est le ministère responsable d'Hydro-Québec, qui
est en fait le responsable gouvernemental d'Hydro-Québec, nous avons une
multitude de contacts, de réunions, de rencontres. Les données de
base d'Hydro-Québec, c'est-à-dire les plans qui existaient, qui
ont été faits au fil des années, ont été
expliqués, triturés, questionnés. Il y avait un
encadrement global, qui était la volonté très explicite
d'exporter, et il y avait aussi la volonté d'avoir une entreprise saine,
rentable et efficace. Cela a demandé énormément de
contacts avec le ministère, avec le ministre et ses collègues que
l'on a rencontrés dans le cadre du Comité de développement
économique et ainsi de suite. Ce sont des ajustements dans ce sens.
Si vous me demandez s'il y a un texte de la page 1 à la page 32,
je vous réponds non, moi, je ne le connais pas. Je pense que les
orientations, l'encadrement implicite, sont explicités de façon
très claire dans la multitude de rencontres dont je vous parle. Dans ces
rencontres, nous étions très clairs dans nos objectifs,
très clairs dans nos raisonnements, etc. Lorsqu'ils n'étaient pas
d'accord, ils nous le disaient et on a eu des échanges très
nombreux là-dessus et c'est comme cela que cela s'est fait.
Quand je parle de l'objectif fondamental de l'exportation, ce
n'était pas un objectif qui, pour Hydro-Québec, était
étranger. Puisque la première phase des exportations était
déjà à toutes fins utiles réglée et que la
phase d'exportation de puissance et d'énergie est en marche à
l'heure actuelle. C'est comme cela que je résumerais, c'est tout
à fait simple. C'est très complexe quand on commence à
travailler ensemble avec une nouvelle équipe, c'est normal, mais c'est
très simple dans le quotidien, puisque ce sont des multitudes de
réunions où chaque point est interrogé, discuté. Il
y a eu des fois où cela a été tendu et d'autres fois
où cela l'a été moins. On s'entend sur un ensemble de
concepts.
Effets du plan de redressement
M. Gauthier: D'accord, je vous remercie. Ce sont
évidemment des questions d'ordre très général
à ce stade-ci. À la page 3 du plan de développement, on
dit au début de la deuxième colonne que, depuis le début
des années quatre-vingt, le profond déséquilibre apparu
entre l'offre et la demande d'électricité, exacerbé par la
récession, la pire depuis 50 ans, a détérioré
significativement la situation financière de l'entreprise. Un peu plus
loin dans le paragraphe, on dit qu'Hydro-Québec a agi avec
célérité, c'est-à-dire rapidement,
énergiquement sur ses engagements financiers, sur ses dépenses et
sur ses revenus tout en minimisant les effets de cette adaptation sur sa
clientèle, son personnel, son actionnaire et l'économie du
Québec.
L'année dernière, vous nous avez présenté un
plan de redressement énergique au point de vue de la gestion de
l'entreprise et on a dû forcer le plus possible les exportations. Il y a
un autre aspect, celui de la clientèle. J'aimerais savoir, M. Coulombe,
dans un premier temps, en termes clairs, si ce bout de paragraphe veut dire
qu'à partir du moment où on a fait des mises en service
importantes d'équipement à la Baie James, cela a placé,
à cause du contexte défavorable, disons-le, Hydro-Québec
dans une situation financière difficile qui l'a obligée à
faire absorber ce problème de - je n'emploierai pas le mot
"suréquipement" -mais celui d'une quantité d'équipement
trop grande par des hausses de tarif aux contribuables. C'est bien ce que cette
expression veut dire?
M. Coulombe: Non, c'est à peu près exactement le
contraire.
M. Gauthier: Bon, allez-y!
M. Coulombe: Lorsqu'en 1982, on s'est rendu compte de la
situation, les gestes assez brutaux qui ont été posés
à ce moment-là ont été de plusieurs ordres. Le
premier était de dire à l'ensemble - on
revient au problème de tantôt, les entrepreneurs, etc. -
des entreprises privées du Québec - je vous ai parlé de
grands gâteaux tantôt - qui contemplaient le gâteau qui s'en
venait: Le gâteau ne sera plus de 55 000 000 000 $, mais de 18 000 000
000 $. C'est un geste qui a été absorbé par une multitude
d'entreprises qui ont dû rajuster leurs prévisions. Mais
Hydro-Québec s'est rajustée aussi. Des mesures internes ont
été prises où le personnel syndiqué et les cadres
ont eu à subir des transformations extrêmement
considérables qui étaient l'équivalent de ce qui s'est
passé dans n'importe quelle entreprise privée et, dans certains
cas, même plus directement compte tenu du contexte historique
d'Hydro-Québec. Lorsque 2000 personnes sont parties, lorsqu'il y a eu
une décroissance dans l'augmentation salariale de façon
très considérable, lorsque 2000 personnes ont changé de
fonctions à l'intérieur d'Hydro-Québec, lorsqu'on a dit
à des ingénieurs qui étaient là depuis 25 ans qu'il
n'y avait plus de travail et qu'ils devaient se recycler pour faire d'autres
choses, ce furent des traumatismes internes considérables vécus
par l'ensemble du personnel et par l'entreprise.
Par contre, le consommateur a eu, à ce moment-là, des
augmentations de tarifs inférieures à l'inflation. Cela
était dû à l'ensemble des mesures d'économie qu'on
avait prises de façon interne et aussi à une
détérioration volontaire de certains des critères
financiers, une détérioration volontaire de la part de
l'entreprise qui s'est dit: Le gaz s'en vient, la situation économique
n'est pas favorable au Québec de façon générale
parce qu'on est en récession assez intense. On était
persuadés que tôt ou tard ces critères allaient se relever
tout simplement parce que si on ne construisait plus, les surplus se
résorbant, vous l'avez expliqué tantôt, la marge de
manoeuvre se reconstituerait. Donc, on s'est dit: ce n'est pas le temps de le
faire payer aux consommateurs. C'est exactement ce qu'on a fait; les
augmentations de tarifs ont été parmi les plus basses depuis les
années 1972-1973. C'est donc ce qui s'est passé dans cette
période-là et c'est ce qui est expliqué. Vous avez le
tableau à la page 6 qui vous montre exactement les deux grands
équilibres, l'ancien et le nouveau, avec des chiffres précis qui
représentent toutes les conséquences de cette
phase-là.
Actuellement, nous pensons - évidemment, après avoir dit
cela, il peut y avoir une crise économique, il peut se passer beaucoup
de choses - que cette phase-là se termine a l'heure actuelle, en 1986 et
1987. À mon avis, toutes ces mesures vont porter leurs fruits, la marge
de manoeuvre va se reconstituer, l'activité va reprendre et on aura
passé à travers une crise majeure sans affecter les consommateurs
d'électricité.
Diversification des activités
M. Gauthier: D'accord. Une autre question: Dans les orientations
fondamentales, à la page 4 du plan de développement,
sous-titrées Orientation à long terme, Orientation fondamentale,
je me permets de lire les trois ou quatre lignes qui sont écrites:
"Fournir l'électricité au Québec aux meilleures
conditions, optimiser l'avantage comparatif que constitue
l'hydroélectricité pour le Québec et diversifier ses
activités dans des domaines connexes ou reliés à
l'énergie." M. Coulombe, pourriez-vous me dire si des actions ont
été entreprises par Hydro-Québec pour atteindre cette
orientation fondamentale, cet objectif de diversifier ses activités dans
les domaines connexes ou reliés à l'énergie?
M. Coulombe: Oui. C'est cela. Évidemment, c'est la
première partie qui accapare la quasi-totalité des
énerqies humaines à Hydro-Québec, c'est-à-dire
fournir l'électricité aux meilleures conditions et optimiser
l'avantage comparatif que constitue l'hydroélectricité pour le
Québec. C'est la tension fondamentale de l'entreprise. On est
persuadés qu'à long terme - c'est bien indiqué
"Orientation à long terme" -lorsque les marchés internes auront
un certain degré de saturation, lorsque les marchés de la grande
entreprise des exportations auront aussi atteint un degré de saturation
- on ne peut pas indéfiniment mettre au service des Américains
jusqu'en l'an 2100 toutes nos centrales, il faudra les récupérer
pour la demande interne - lorsque ce processus sera bien engagé, nous
pensons qu'Hydro-Québec peut avoir un rôle extrêmement
valable à moyen et à long terme pour diversifier une partie de
ses activités dans des activités reliées au domaine
énergétique. (12 heures)
Lorsqu'on parle de diversification, c'est un processus à long
terme. C'est se servir du "know-how" qui existe à Hydro-Québec,
de la capacité financière, de la capacité humaine et des
développements technologiques. On est quand même - peut-être
pas lorsqu'on parle des barrages, mais dans tous les autres domaines - dans une
industrie qui est très sophistiquée au point de vue de
l'électricité. Donc, il y a moyen de faire servir cela à
l'économie du Québec, soit pour développer de nouveaux
produits - c'est une orientation qu'on donne à l'IREQ à l'heure
actuelle; j'espère qu'on aura l'occasion dans les deux prochains jours
de revenir là-dessus; on transforme un peu les règles pour
développer des choses technologiques; on pense que c'est un rôle
qui peut être extrêmement important - soit pour susciter, si
possible, à long terme, de l'entrepreneurship qui va permettre à
ces produits de se développer.
Il y a aussi une autre forme de diversification, qu'on ne devrait pas
appeler
diversification, mais c'est un élément nouveau. C'est ce
qu'on pourrait appeler nos investissements à l'extérieur dans le
domaine de l'électricité. Par exemple, le contrat de Central
Maine suppose un "joint venture" avec des Américains pour
développer une ligne de transport d'électricité. On pense
que c'est un développement intéressant pour Hydro-Québec.
D'abord, cela nous rend citoyens corporatifs américains et cela
élimine un peu l'angoisse que certains groupes de pression
américains ont d'être à la merci de X, Y, Z.
Deuxièmement, je pense que si c'est un succès, cela va permettre
aussi - il ne faut pas le dire trop fort - à capacité
égale, à compétence égale et à coûts
égaux, à des entreprises du Québec d'élargir leur
marché à l'extérieur.
C'est un peu l'idée de base en ce qui concerne la
diversification. On pense que c'est un projet de base qui n'est pas prioritaire
au moment où l'on se parle, car il y a d'autres chats à fouetter,
mais c'est la tension qu'il faut mettre dans l'entreprise pour essayer de voir,
à un moment donné, surtout au développement technologique
de produits. Le ministre, ou c'est vous qui, je pense, avez posé la
question: Qu'est-ce que fait Hydro-Québec au point de vue industriel au
Québec? La réponse, c'est que parmi beaucoup d'industries,
l'industrie électrique au Québec s'est développée
en très grande partie, évidemment, à cause
d'Hydro-Québec, et on fabrique actuellement - c'est la seule place au
Canada - des turbines et ainsi de suite.
Je pense qu'on pourrait aller plus loin. Je pense qu'on pourra
développer des produits technologiques plus sophistiqués, soit
dans nos laboratoires de l'IREQ, soit lors d'ententes avec des compagnies... On
a un exemple de choses qu'on a faites avec la compagnie française Air
Liquide, Claude Boivin pourra en parler; sur le développement de la
filière de l'hydrogène, on a fait des investissements et cela va
profiter en termes d'emplois et de nouvelles technologies au Québec.
C'est une activité qui sera lente à partir. Cela demande des
qualités et cela demande des fonctions d'entrepreneurship qui ne sont
pas toujours présentes à Hydro-Québec. Cela va demander un
changement de culture. C'est un projet à long terme et on pense que du
point de vue technologique, cela peut Être extrêmement important
pour le Québec.
M. Gauthier: Parmi les efforts qui sont faits par
Hydro-Québec, même si je comprends bien votre explication,
à savoir que c'est une orientation à plus long terme et que ce
n'est pas là vraiment pour l'instant votre grande priorité,
j'aimerais avoir un renseignement particulier. Étant donné
qu'Hydro-Québec - c'est ce qui amène ma question - investit dans
une ligne de transport d'énergie dans une nouvelle société
aux États-Unis, avec ses partenaires américains - je sais
qu'Hydro-Québec n'a pas fermé complètement cette
porte-là, et votre explication est excellente - est-ce qu'elle a fait
une offre ou s'est intéressée à Cégelec au moment
où le gouvernement s'est défait de ses parts dans cette
entreprise?
M. Coulombe: Non, absolument pas. Je dois vous avouer clairement
que cela n'a jamais été discuté à
Hydro-Québec pour une raison très simple: Cégelec fait
quand même des produits très bien connus à
Hydro-Québec, homologués. C'est une filiale d'une compagnie
française extrêmement puissante et très
équipée en ce qui concerne la technologie. Je ne pense pas que
cela aurait été le rôle d'Hydro-Québec de
s'impliquer dans cela, puisqu'il s'agit de produits relativement connus. Les
procédés de fabrication sont connus aussi, sont
contrôlés. Je ne pense pas qu'Hydro-Québec aurait
apporté quoi que ce soit à une firme comme Alsthom ou
Cégelec au Québec en y mettant des fonds ou en s'impliquant. Je
vous donne un avis personnel. Cela n'a jamais été discuté
à Hydro-Québec. Pour ma part, je ne verrais pas l'utilité
de s'impliquer dans des entreprises qui sont "matures" elles-mêmes, qui
ont leurs technologies et leurs recherches. Ce qui n'empêche pas - et
c'est exactement ce qui est arrivé avec Cégelec -d'avoir des
accords de fabrication avec elles.
Actuellement, avec Cégelec, peu importe qui possède
Cégelec, on a un accord actuellement entre l'IREQ et Cégelec pour
une recherche précise sur des types de disjoncteurs spécifiques.
Donc, cela n'empêche pas ce genre d'entente, mais je ne verrais pas
l'utilité pour Hydro-Québec en tant que telle d'investir
là-dedans. Maintenant, c'est un débat qui n'a jamais
été discuté à Hydro-Québec.
Prévisions de la demande
M. Gauthier: D'accord. Une dernière question d'ordre
général. Dans mon texte, au début de la commission, j'ai
fait allusion à la grande différence qui existait entre les
prévisions de l'an dernier et la réalité des choses
concernant la demande d'électricité. J'aimerais savoir comment on
peut expliquer cela. Je comprends que dans le domaine des prévisions,
c'est difficile. Il y a différentes techniques qui sont utilisées
pour faire des prévisions, mais il m'apparaît pour le moins que
l'écart est fort important. J'aimerais que vous nous parliez quelque peu
de la technique utilisée et de l'explication de cet écart.
M. Coulombe: Vous faites référence à la
demande d'électricité prévue pour 1986 et la
réalité 1986. Bon. Je vais donner un
premier type d'explication et je demanderai à Claude Boivin de la
compléter. Vous vous rappelez que l'an passé, on a
été très explicite sur un point. C'est dans le Journal
des débats. On a dit qu'on s'était pris une réserve
d'un écart type de température. Vous vous souviendrez, on a dit:
On n'a pas pris la température moyenne, on a pris un écart type
en bas de la moyenne de température, ce qui donnait environ 50 000 000
$. On vous a dit qu'on avait une marge de 50 000 000 $ là-dedans.
Pourquoi? Je pense que, dans des grands ensembles comme ceux-là, surtout
devant notre impossibilité de contrôler le dollar canadien, les
taux d'intérêt et le prix du pétrole, on n'a aucune
espèce de pouvoir sur ces trois aspects, il faut se garder ce genre de
réserve au cas où il arriverait un coup dur, toujours au nom de
la même philosophie, pour éviter qu'à un moment
donné, on calcule tellement serré qu'il faut augmenter les tarifs
un peu plus parce que cela n'arrive pas. On veut éviter cela à
tout prix.
Donc, on avait carrément une marge de 50 000 000 $ et on vous l'a
dit l'an passé. On a 150 000 000 $ de plus de ventes. Cela vous
l'explique. Pour les premiers 50 000 000 $, on l'avait dit clairement: c'est
une marge de manoeuvre qu'on se donne. La température a
été non seulement moyenne, elle a été plus
élevée. En plus, l'activité économique a
été plus forte. C'est ce qui explique les autres 100 000 000 $.
Maintenant, Claude Boivin peut peut-être...
M. Boivin: M. Neveu a tous les détails. On les a
reconstitués en entier.
M. Neveu: Tout à l'heure, vous avez fait allusion à
une hausse de 4 % des ventes en 1986. M. Coulombe vient de le dire, la
provision de température explique entre 1 % et 1,5 % de cet
écart.
L'autre élément, c'est que l'Aluminerie de
Bécancour a été mise en service plus rapidement. Enfin,
cela a bien été pour les rodages. Sa consommation a
été plus élevée que ce qui avait été
anticipé. Vous savez que lorsqu'on joue avec de très gros blocs
d'énergie comme cela, il suffit que cela démarre deux mois plus
tôt et cela fait beaucoup d'énergie vendue en plus. Cela explique
à peu près également 0,5 % de l'écart.
Puis, il y a l'activité économique et les mises en
chantier. Comme vous le savez, les mises en chantier ont été
très élevées. En 1985 et 1986, les mises en chantier ont
été de 48 000 et 58 000 respectivement alors que les
prévisions étaient de 40 000 et 32 000, ce qui est un niveau
moyen d'activité. Cela explique un peu plus qu'un autre 0,5 %.
Finalement, pour le reste, l'activité économique a
été plus élevée.
Donc, tous ces éléments s'expliquent bien. Il faut
être bien conscient que les prévisions à court terme, comme
le disait M. Coulombe, peuvent varier énormément selon la
température. On parlait d'un écart de 1,5 % à la baisse
s'il avait fait plus chaud. S'il avait fait plus froid, cela aurait
été un autre 1,5 % de plus. Donc, au total, cela fait 3 % qui
auraient pu varier seulement à cause de la température. Quand on
met en service des gros blocs d'énergie, on joue facilement avec des 0,5
% et 1 %. Donc, ce sont essentiellement des éléments
conjoncturels.
M. Coulombe: Je vais vous donner un exemple précis. Je
viens juste de recevoir les résultats de janvier. Au domestique,
même s'il a fait très froid pendant les quinze derniers jours,
comme vous le savez, on a oublié qu'il n'a pas fait froid pendant les
quinze premiers jours. On remarque que dans nos statistiques de janvier, il y a
une baisse au domestique de 5 % de consommation d'électricité au
mois de janvier. Alors qu'apparemment, avec le froid et ainsi de suite,
c'aurait dû être... Évidemment, on ne peut pas se fier
à ce mois-là, mais cela vous montre la volatilité de ce
genre de choses.
Il ne faut pas oublier non plus que l'année passée, je
vous le répète, on vous avait dit qu'on avait une réserve
de 50 000 000 $ là-dedans et c'était une réserve. Mais
cette année, je vous dis qu'en 1987, il n'y a pas de réserve. On
a pris la température moyenne. Si on se trompe, on n'aura pas cette
raison.
M. Gauthier: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le
député de Roberval. M. le député de Vimont.
M. Théorêt: Oui, merci. M. Coulombe, quant à
discuter d'écart, j'aimerais me faire éclairer sur un
écart en particulier, qui est apparu dans la présentation de ce
matin et qui me semble assez important, c'est sur le taux d'échange. On
parlait de 1986. Vos prévisions étaient basées sur 0,71 $,
sur 211 000 000 $, pour le dollar canadien. La réalité a
été une perte de 189 000 000 $ ou 0,72 $ pour la valeur
canadienne. Pour les prévisions de 1987 on fait un bond assez important;
277 000 000 $. Ma compréhension est que même si depuis quelques
semaines, le dollar canadien se maintient à 0,75 $, vous prévoyez
un dollar canadien à 0,69 $ près. Cela fait une grosse
différence entre la réalité et la prévision.
M. Coulombe: Oui.
M. Théorêt: C'est énorme. C'est 75 000 000 $
à peu près.
M. Coulombe: Ce qu'on prévoit en termes de dollar
canadien, ce qu'on a dit plutôt, parce que, comme je vous l'ai dit, on ne
fait pas de prévision sur le dollar. Ce qui est dans le plan, c'est
qu'on présume que le 31 décembre 1987, le dollar va être
à 0,715 $. Nos prévisions sur le dollar se font par trimestre.
Par exemple, pour le premier trimestre 1987, on a supposé que le dollar
allait être à 0,724 $ au 31 mars 1987, et qu'il allait y avoir une
petite détérioration jusqu'à 0,715 $. Au moment où
l'on se parle, on n'est pas à la fin de mars, mais presque, c'est de
0,75 $. Donc, entre 0,724 $ qui est notre prévision au 31 mars et 0,75
$, on a donc pour un trimestre 0,03 $ et là il y a une marge de
manoeuvre.
Sur l'aspect global des pertes de change, je vais demander à
André Dubuc, qui est vice-président aux finances. Je pense qu'il
faudrait vous expliquer certains changements comptables qu'il y a eu l'an
passé et qu'on a expliqués dans notre rapport public du mois de
septembre, qu'on appelle tout le problème de la règle comptable,
de la comptabilisation des taux de change à la fin de l'année et
des réserves qu'il faut prendre et la technique qu'on a prise
parfaitement compatible avec la vérification externe d'Hydro et l'Ordre
des comptables, tout le problème du revenu "edging" et ainsi de suite.
Je pense qu'il faut comprendre cela même si c'est très
technique.
M. Dubuc (André): Effectivement, la hausse de la perte de
change peut sembler surprenante. Elle est due, en fait, à deux facteurs.
C'est la perte de change sur les devises autres que le dollar américain
qui, naturellement, est cause de l'évolution de ces devises et qui
explique donc une partie de la perte. Il y a aussi le cas, comme le mentionne
M. Coulombe, de la perte de change sur la dette en dollars américains.
La méthode de comptabilisation de la perte a été
modifiée en 1986. Cela correspond donc à une méthode
où nos pertes de change sont couvertes par nos entrées de devises
venant de nos ventes d'électricité. C'est une méthode qui
a été acceptée par les comptables et nos
vérificateurs.
En 1987, ce qui se produit en particulier, c'est qu'il y a beaucoup
d'échéances en dollars américains sur lesquelles des
pertes de change doivent être reconnues. Cela explique en bonne partie le
bond qui se produit. Ce volume élevé d'échéance est
un facteur spécifique à 1987.
Politique de la sous-traitance (suite)
M. Théorêt: Je vous remercie. J'aimerais me faire
éclairer sur un deuxième point et revenir, si vous le permettez,
M. Coulombe, sur les problèmes de la sous-traitance. Le Syndicat des
employés et des entrepreneurs - et je voudrais que vous
m'éclairiez là-dessus - laisse entendre que les montants de
contrats vont diminuer d'environ 90 000 000 $ à 45 000 000 $ dans une
année. Ils disent qu'à la suite d'une entente que vous avez eue
et que vous avez signée lors de votre dernière convention, vous
réduisez d'à peu près 50 % le montant alloué pour
le travail fait en sous-traitance et que deuxièmement, si ces travaux
retournaient à l'interne ils coûteraient plus cher au niveau de la
production. J'aimerais bien que vous m'éclairiez sur ces deux
données en particulier qui sont publiques, comme vous le savez.
Premièrement, sont-elles exactes. J'aimerais connaître vos
commentaires, également.
M. Coulombe: Camille Gaudreault qui est directeur de la
distribution va vous donner les chiffres de nos immobilisations. Rappelez-vous
l'explication que je vous ai donnée. Je vous ai dit qu'on avait investi
300 000 000 % supplémentaires pendant quelques années. C'est
évident qu'on va être bientôt rendu à la fin de ce
rattrapage qu'on a fait. Maintenant, pouvez-vous fournir des chiffres?(12 h 15)
M. Gaudreault (Camille): Oui. En ce qui concerne les coûts
de la main-d'oeuvre des équipes, pour nous, à
Hydro-Québec, si on prend le coût d'une équipe
comparé au coût d'une équipe d'entrepreneurs, c'est
identique. C'est à peu près identique à peut-être 1
% ou 2 % en plus ou en moins selon les années. Maintenant, la
différence provient de l'utilisation, de la façon dont on utilise
les équipes. On demande aux équipes d'entrepreneurs d'être
sur les lieux du travail à 8 heures le matin, étant donné
qu'on leur donne des travaux de plus longue durée, tandis que les
équipes d'Hydro-Québec, pour les raisons qui ont
été mentionnées tout à l'heure par M. Coulombe,
sont à leur centre de ralliement le matin. Pourquoi? C'est parce
qu'à ce moment-là, elles peuvent être appelées pour
des urgences ou pour faire certains travaux qui sont de plus courte
durée. La différence de coût réside essentiellement
dans la façon d'utiliser les équipes. Mais si on regarde les
chiffres sur une période de 5 ans, le taux horaire d'une équipe
d'entrepreneurs comparé au taux horaire d'une équipe
d'Hydro-Québec, en comptabilisant tous nos coûts,
c'est-à-dire la formation, les avantages sociaux, etc.,. c'est à
peu près l'équivalent. Je ne sais pas si cela répond
à votre interrogation.
M. Théorêt: Pas tout à fait. J'ai bien
compris qu'au taux horaire, c'était à peu près la
même chose. Je ne pense pas que c'est l'accusation que lançaient,
je pense, les syndicats des employés des entrepreneurs. Ce qu'ils
disent, eux, et c'est là que j'aimerais
bien avoir des éclaircissements, c'est qu'au niveau de la
production - et peut-être que vous venez d'en confirmer une partie
puisque les gens chez vous à l'interne s'en vont dans un centre, alors
qu'eux s'en vont directement sur le chantier - ils prennent moins d'heures pour
un même travail. Est-ce parce qu'ils s'en vont à l'interne dans un
centre ou que l'équipe des entrepreneurs, elle, s'en va directement au
chantier? C'est là qu'on cherche la réponse plus précise
et non pas sur le taux horaire parce que je pense que cela n'a jamais
été...
M. Gaudreault: C'est-à-dire que sur les lieux de travail,
à pied d'oeuvre, l'efficacité est la même. La
différence, comme je viens de le mentionner, réside dans le fait
que nos équipes à Hydro-Québec voyagent plus que les
équipes d'entrepreneurs. La différence de 15 % à 20 % est
due à cette façon différente d'utiliser les
équipes,
M. Théorêt: Vous me confirmez que cela fait un
coût plus élevé.
M. Coulombe: Mais pour un travail différent.
M. Gaudreault: Si on utilisait les équipes d'entrepreneurs
de la même façon, on aurait les mêmes coûts,
c'est-à-dire qu'on aurait une production moindre pour les entrepreneurs,
étant donné qu'ils seraient appelés à voyager
davantage.
M. Coulombe: Je pense que cela vaudrait la peine de donner plus
d'exemples pour mieux faire comprendre cela aux membres. Quand on dit qu'ils
s'en vont dans un centre de ralliement, ce n'est pas pour jouer aux cartes ou
pour perdre leur temps. Et les voyagements, ce n'est pas parce qu'ils aiment
voyager particulièrement, non plus. Pourquoi ne donnez-vous pas des
exemples précis?
M. Gaudreault: Toutes les manoeuvres sur notre réseau sont
faites par nos employés. Lorsque des manoeuvres sont requises pour
dégager une ligne ou pour permettre des travaux, on utilise nos
employés. Cela veut dire que pour effectuer des manoeuvres, si on prend
cet exemple, ils sont appelés à voyager le long de la ligne pour
aller ouvrir les interrupteurs ou sectionneurs aux différents endroits
et pour faire les transferts ou fermer l'appareillage afin de pouvoir
dégager la ligne. Il y a ce type-là. Il y a également des
raccordements, par exemple, qu'il faut faire à la journée
à la suite d'une demande d'un client. À ce moment-là, la
demande arrive la veille ou quelques jours avant et nos équipes sont
appelées à aller faire ce raccordement. Cela ne veut pas dire
qu'on ne donne pas ce type d'ouvrage aux entrepreneurs, cela veut dire que,
lorsqu'on en donne aux entrepreneurs, dans notre planification, on reqroupe ce
type de travaux dans un même environnement, ce qui minimise leur temps de
voyagement. Il y a la pose de compteurs et toute une série de petits
travaux pour lesquels nos équipes vont aller sur les lieux de travail,
vont revenir à leur centre de ralliement et vont retourner. C'est
fondamentalement dans la façon d'utiliser les équipes.
M. Théorêt: Est-il exact, M. Coulombe, que, selon
leur déclaration, ils vont voir leur contrat réduit de 50 % - non
pas basé sur leur surplus, le gros boum de 300 000 000 $, mais
basé sur...
M. Coulombe: Historiquement, ils étaient environ 720, et
on en prévoit 500 pour 1988 et 1989; c'est donc exact.
M. Théorêt: C'est exact.
M- Coulombe: C'est exact, mais ils sont montés à
1000 dans le "peak", enfin dans la...
M. Théorêt: ...pointe...
M. Coulombe: ...pointe des travaux. Ils étaient 700, ils
sont montés à 1000; avant cela, ils étaient 700 et ils
vont redescendre à 500. C'est ce qu'on prévoit à l'heure
actuelle.
M. Théorêt: D'accord. Ma dernière question
porte sur l'entretien. Si j'ai bien compris, le syndicat des travailleurs des
entrepreneurs faisait de l'entretien auparavant, et ce n'était pas
à l'interne, mais seulement à l'externe. Maintenant, tout
l'entretien sera rapatrié à l'interne, ou peut-être que
j'ai mal compris.
M. Coulombe: II n'y a pas de changement de philosophie.
M. Théorêt: D'accord.
M. Coulombe: De façon qénérale, tous les
travaux de construction, sauf une partie des travaux de distribution. Mais,
pour tous les autres travaux de construction, c'est l'externe; pour les travaux
d'entretien, c'est l'interne. Je vous ai dit aussi qu'il y avait une zone
grise, à savoir ce qu'est un gros entretien. On peut se chicaner
là-dessus; d'ailleurs, il y a eu des chicanes là-dessus, à
savoir qu'un gros entretien devient une petite construction et une petite
construction devient un gros entretien. Là il y a de la place et,
effectivement, tout le monde prend cette place-là pour se chicaner sur
les concepts. Mais c'est cela, la philosophie de base. Maintenant, il n'y a pas
eu de change-
merits fondamentaux là-dessus.
M. Théorêt: C'était déjà
à l'interne qu'ils s'occupaient de cela auparavant...
M. Coulombe: C'est cela.
M. Théorêt: ...il n'y a pas eu de changement de
politique là-dessus. Merci.
M. Coulombe: Dans le domaine de la construction par rapport au
dossier dont on discute actuellement, il n'y a pas eu de changement.
M. Théorêt: Merci.
M. Coulombe: Mais sur un autre élément de la
convention collective, par exemple dans les centres régionaux où
on avait des garages, on a envoyé des mécaniciens dans ces
garages tout simplement parce que les équipements étaient en
place depuis des années. Alors, c'était une question de logique
administrative; on peut avoir des équipements et ne pas s'en servir.
Mais dans nos autres centres administratifs, il n'y en aura pas.
Le Président (M. Charbonneau); M. le député
de Bertrand. M. le député de Trois-Rivières.
M. Philibert: Je ne sais pas si le député de
Bertrand va poser des questions sur le même sujet que le
député de Vimont, mais j'aurais une question additionnelle.
Alors, pour plus de cohérence, si lui devait changer de sujet et si on
avait le consentement, je pourrais demander une précision.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va, consentement;
allez-y.
M. Philibert: M. Coulombe, le député de Vimont vous
a posé des questions sur la réaction des entrepreneurs et la
diminution de 1000 à 500 du nombre d'intervenants. Dans ma
région, on fait beaucoup de sous-traitance; dans la grande région
de La Mauricie, beaucoup de gens se sont spécialisés.
Évidemment, j'ai eu la visite d'entrepreneurs qui sont venus discuter
avec moi, et ils me disent, comme le disait le député de Vimont,
que les contrats diminuent de façon très substantielle pour les
raisons qui ont été évoquées. Ils trouvent
difficile que, dans un même temps, même si les contrats diminuent -
donc, les emplois de sous-traitance sont moins nombreux l'effectif
d'Hydro-Québec pour ces emplois a augmenté, à la suite de
la convention collective qui a été signée, de 250 et cela
risque d'augmenter jusqu'à 500. Cela me peinerait beaucoup si
c'étaient les résultantes d'une convention collective
d'employés qui font le même travail, pour des employeurs
différents, mais représentés par le même
syndicat.
M. Coulombe: Prenons cela globalernent. Après avoir
donné le coup de rattraper la qualité de notre service de
distribution, il est normal qu'on fasse moins de travaux de reconstruction,
etc. Par contre, il faut bien penser aussi que la clientèle continue
d'augmenter à Hydro-Québec; en termes de clientèle, vous
avez un nombre de clients, vous avez une augmentation annuelle de 2,8 %; cela
ne semble pas beaucoup, mais cela veut dire que, entre 1982 et 1986, on a eu
300 000 clients de plus.
Si on ne veut pas prendre un autre retard dans l'ensemble du
réseau et injecter encore 300 000 000 $ à 400 000 000 $ dans
quelques années d'une façon subite, l'entretien doit être
à la hauteur de la qualité du service qu'on veut donner, ce qui
va exiger une augmentation de personnel pour l'entretien. C'est tout à
fait normal. Il y a de nouvelles industries, il y a 300 000 nouveaux clients,
la clientèle augmente à peu près de 50 000 par
année. On pense avoir remis le réseau en place en termes de
qualité, il faut continuer à l'entretenir. Je vous ai dit
tantôt que la philosophie de base était que l'entretien
était fait à l'interne. Donc, il est normal qu'il y ait une
augmentation des effectifs reliée à l'entretien. Il est normal
aussi qu'il y ait moins de construction puisqu'on a terminé le
rattrapage. On ne va pas recommencer cela tous les deux ans.
Les effectifs permanents d'Hydro-Québec, du groupe exploitation,
ont toute la responsabilité non seulement de la distribution dans ce
cas, mais de l'ensemble de l'exploitation. Il y a eu une augmentation de 300
000 clients, comme je viens de vous le dire, donc 2,8 % par année. Les
réseaux de distribution augmentent de 1 % par année. Le
réseau de transport, qui fait partie du même concept
général, a augmenté de 3,6 %. On est passé de 138
000 kilomètres à 165 000 kilomètres. Donc, cela demande
encore des équipes d'entretien. On a 30 000 kilomètres de plus de
transport au Québec entre 1982 et 1986.
Les effectifs permanents du groupe exploitation ont augmenté de 0
%, malgré l'augmentation de clientèle de 2,8 % et l'augmentation
des réseaux de 1 % et de 3,6 % au transport. Les effectifs permanents
à Hydro-Québec dans le groupe exploitation ont augmenté de
0 % dans la même période. Donc, c'est carrément une
augmentation de la productivité. Mais notre objectif n'est pas de ne pas
augmenter le personnel d'Hydro-Québec, notre objectif demeure celui de
donner un service de qualité. Au niveau de l'entretien, s'il faut des
gens, on va en engager, c'est tout à fait normal, dans les
limites de l'efficacité et de la rationalité. C'est normal
dans le cadre de l'entretion, étant donné que la phase de
construction est plus derrière nous dans ce domaine.
M. Philibert: Si je comprends bien ce que vous nous dites, c'est
que la philosophie de base d'Hydro-Québec à ce sujet n'a pas
été changée par la convention collective et que la zone
grise que vous évoquez n'est pas du tout mise en cause par cet aspect
des changements vers l'entretien plutôt que vers la construction.
M. Coulombe: Non, ce n'est pas cela. La philosophie de base n'a
pas changé, mais je n'ai pas dit que la zone grise n'était mise
en cause par personne. La zone grise restera zone grise, et je suis convaincu
que nos syndicats nous diront que la zone grise devrait être large comme
ça, et je suis convaincu que les entrepreneurs nous diront que la zone
grise devrait être comme ça. Je n'y peux rien, c'est une tension
qui ne changera pas à Hydro-Québec, cela va toujours rester
ainsi. C'est un rapport de forces, et c'est tout à fait normal, dans
n'importe quel rapport de forces, qu'il y ait des négociations, qu'il y
ait des compromis. Il s'en est fait avec les entrepreneurs et on a dit:
À un moment donné, on va profiter de ce moment-là pour
rétablir la qualité de notre réseau; en
conséquence, on va donner aux entrepreneurs, pendant trois ans, 300
années-personnes de plus et beaucoup plus de contrats qu'avant.
Quand nos syndicats ont vu cela, ils ont dit: Comment se fait-il que
ça s'en va chez les entrepreneurs? On a dit: Écoutez, on
n'engagera pas des gens à temps plein pendant trente ans pour faire un
travail de trois ans. Ces discussions n'ont pas été faciles. Ils
ne se sont pas promenés en camion, mais ça n'a pas
été facile. Cette zone grise va rester et elle fera l'objet de
compromis et de discussions acharnées. Elle va durer des années,
ce ne sera jamais réglé. On espère la contenir dans des
limites raisonnables en termes d'efficacité et productivité, et
un peu d'équité générale, du moins dans la
meilleure mesure possible.
Mais il y a un autre point que je n'ai pas mentionné et qu'il
faudrait bien comprendre, c'est qu'il y a eu une transformation de certains
types de travaux à Hydro-Québec. Vous savez que le travail
souterrain dans les centres-villes prend de plus en plus d'importance et
prendra, à notre avis, de plus en plus d'importance d'ici à la
fin du siècle. C'est une spécialisation qui n'était pas
aussi disponible il y a quelques années, parce qu'on faisait moins de
travaux souterrains. Je n'ai pas le chiffre ou la courbe à portée
de la main, mais on démontre justement que l'ouverture du marché
du souterrain est une occasion très intéressante pour ces
entrepreneurs. Tous les travaux civils, par exemple, qui sont faits dans les
travaux souterrains sont donnés à des entrepreneurs. Je peux vous
montrer la courbe qui démontre que l'augmentation prévisible des
travaux souterrains au Québec est très considérable et
c'est une occasion pour les entrepreneurs.
J'admets que ce n'est pas facile de modifier des comportements, j'admets
que ce n'est pas facile de transformer des monteurs en "jointeurs", si je peux
employer l'expression. Ce n'est pas facile au point de vue personnel pour un
syndiqué. Je suis totalement d'accord avec cela. Les conditions
économiques changent et voici un nouveau marché qui s'ouvre.
Encore là, notre philosophie est claire. La construction, ce sont les
entrepreneurs qui la feront; les travaux électriques à
l'intérieur du souterrain seront faits par du personnel
d'Hydro-Québec. (12 h 30)
Cela se rattache un peu à un autre débat qui existe
à Hydro-Québec qui concerne la santé et la
sécurité. Avec les nouvelles lois du travail,
l'élimination du danger à la source, on est dans un secteur, le
domaine de l'électricité, où il y a un minimum de danger.
Vous le savez aussi bien que moi. Donc, cela se relie aussi à
l'utilisation de nos équipes en fonction des travaux électriques.
M. Gaudreault vous mentionnait tantôt toute une série de
manoeuvres qui doivent être faites par nos employés au point de
vue de la santé et de la sécurité, au point de vue de la
cohérence de l'organisation; sans cela, on s'aventure dans des
problèmes quasiment insolubles en termes de santé et de
sécurité.
Donc, on vit là-dedans et, graduellement, les entrepreneurs vont
vivre là-dedans aussi en tenant compte des problèmes de
santé et de sécurité. Notre code des travaux va être
ajusté de telle sorte qu'on ne pourra pas avoir deux classes de
monteurs, monteurs privés ou monteurs d'Hydro. Il va donc y avoir un
ajustement. Encore là, de nouveaux marchés s'ouvrent, je parle du
souterrain, qui est un marché immense pour les dix prochaines
années. C'est aux entrepreneurs à s'organiser pour saisir ce
marché, comme nous nous sommes organisés, nous, à
HydroQuébec, pour contrôler nos coûts. Quand je vous ai dit
que nous avions 0 % d'auqmentation de main-d'oeuvre, c'est un chiffre clair et
précis par rapport à des augmentations du réseau; donc,
c'est une augmentation réelle de productivité. D'ailleurs, on va
avoir moins de monteurs internes et externes en 1989 qu'on en avait en
1980.
M. Philibert: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le
député de Bertrand.
Dépenses d'exploitation
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. J'aurais
cinq points qui touchent l'ensemble de la présentation. D'abord,
concernant les dépenses d'exploitation. Au cours des deux
dernières années 1985-1986, on a une moyenne d'environ 2 %
d'augmentation des dépenses d'exploitation. Vous nous avez
expliqué, l'année dernière, toute cette compression et ce
travail qui a été fait et qui a été bien fait. Par
contre, quand on regarde les trois prochaines années 1987-1988-1989, au
poste des dépenses d'exploitation, on s'aperçoit qu'il y a un peu
plus de 26 % d'augmentation prévue pour trois ans par rapport aux deux
dernières années. Est-ce qu'on peut me donner quelques
explications?
M. Coulombe: Vous allez sans doute dire qu'on était
fatigué de notre effort et qu'on se relâche pour les prochaines
années...
M. Parent (Bertrand): Je n'ai pas dit cela.
M. Coulombe: Mais cela y ressemble, effectivement.
M. Parent (Bertrand): Cela y ressemble.
M. Coulombe: II y a des explications assez précises
là-dessus. D'abord, vous remarquerez qu'en 1986, il y a une baisse des
dépenses d'exploitation de moins 2,9 %. Là-dessus, je ne voudrais
pas qu'on se fasse des illusions, il ne s'agit pas uniquement d'efforts de
gestion. On a parlé tantôt d'une nouvelle règle comptable
préparée par l'Institut des comptables et qui demande de
redéfinir la façon dont on calcule les sorties du fonds de
retraite. Je voyais le rapport financier des banques, au mois de janvier et au
mois de février, elles ont toutes pris cette nouvelle méthode.
Dans le cas d'Hydro-Québec, cela a signifié 75 000 000 $ de moins
de dépenses d'exploitation. Je ne dis pas de déboursés,
parce qu'on a déboursé quand même, les 75 000 000 $, mais
on les a mis dans un autre poste comptable. Si vous voulez qu'on vous
l'explique, il n'y a pas de problème. Le moins 2,9 % est dû en
partie à ces 75 000 000 $ de moins de dépenses sur les fonds* de
retraite. Donc, notre base est tombée en 1986, il y a eu une
décroissance des dépenses d'exploitation, mais, en
réalité, ce n'est pas vrai. En réalité, cela a
été à peu près égal, au point de vue des
dépenses d'exploitation.
En 1987, les deux chiffres les plus frappants sont 9,9 % et 10,6 %. Ce
que je voudrais vous expliquer, c'est que dans notre effort de rationalisation,
on continue de travailler sur deux domaines dont on ne parle pas dans le plan.
Je voudrais vous expliquer brièvement qu'il va y avoir un impact sur les
dépenses d'exploitation. Ces deux problèmes sont tout notre
système de comptabilité quant aux imputations. Vous savez qu'on a
beaucoup de travaux d'immobilisation et on a des dépenses
d'exploitation. La technique d'imputer aux dépenses d'immobilisation des
frais d'exploitation, on est en train de la revoir de fond en comble, parce
qu'on pense qu'il y a des incohérences dans l'interprétation, qui
ne donnent pas la vraie vérité des coûts à
Hydro-Québec.
Cet effort qui est commencé va durer peut-être un an ou
deux, mais nous sommes certains que la conséquence sera une augmentation
de nos frais d'exploitation par la clarification de ce qui est une
immobilisation et de ce qui est un frais d'exploitation. C'est en marche
à l'heure actuelle et on a une provision - j'ai employé le mot
"provision" tantôt - pour 1988 et 1989 parce qu'on espère
qu'à la fin de 1987, il y aura des décisions à ce sujet.
On a donc une provision d'augmentation des frais d'exploitation due à
cette clarification dans nos méthodes comptables des frais
d'imputation.
Il y a un deuxième point aussi. Dans les années 1988 et
1989, on s'est gardé une marge de manoeuvre. Je vous ai dit que l'an
passé on avait une marge de manoeuvre au niveau de la
température. Je vous dis cette année qu'en 1988 et 1989, on a une
marge de manoeuvre au niveau de nos frais d'exploitation. On a mis des montants
en réserve. Au lieu de les mettre dans la température, on les a
mis là cette année, parce que la température nous amenait
des problèmes au point de vue de croissance de la demande et que cela
pouvait fausser les chiffres. On en a mis dans les dépenses
d'exploitation de 1988 et 1989. Donc, il y a cet encadrement financier de nos
dépenses d'exploitation, ce changement de la méthode d'imputation
qui surviendra et une réserve financière qu'on s'est mise
là en vue de coups durs qui pourraient nous arriver. Donc, il y a une
marqe de réserve. Je peux vous dire tout de suite que cela est peu
probable. Cela ne devrait pas, dans la réalité concrète,
être à ces niveaux-là. Ce sera plus bas que cela.
M. Parent (Bertrand): Ce que je voulais entendre, en fait, c'est
qu'il y avait là-dedans aussi une marge de manoeuvre nouvelle ou un
coussin nouveau.
M. Coulombe: Exactement. C'est exactement l'expression, c'est un
coussin. Il ne faut pas oublier qu'on a un plan de développement de
trois ans. Vous l'avez dans les tarifs. D'ailleurs, vous voyez ce qui vient
d'arriver dans les tarifs. Notre encadrement de l'an dernier était de
4,9 %. On a travaillé, on a présenté 4,9 % au conseil
d'administration au mois de janvier, Ensuite, on s'est rajusté
à 4,6 %. L'année prochaine, on présentera 5,2 % - vous
l'avez en haut de la page - pour 1988. À la même date, si on a une
commission parlementaire l'an prochain, je ne peux pas vous garantir
aujourd'hui qu'on présentera 5,2 % mais c'est l'encadrement financier
qu'on a là. Donc, l'année 1987 est ferme, mais pour 1988 et 1989,
on se place dans un encadrement plus général. Je ne sais pas si
ce sera 5,2 % qu'on recommandera l'an prochain, mais comme il faut avoir un
cadre cohérent, il faut placer des hypothèses.
Évidemment, plus on s'éloigne dans le temps, plus cela
devient des hypothèses et plus il faut, si on veut être rationnel,
se placer des coussins pour permettre une cohérence financière
là-dedans. Chaque année, soit qu'il arrive quelque chose et que
ces coussins disparaissent ou qu'on en profite comme on l'a vu avec la
température l'an dernier. C'est notre technique de travail au point de
vue de la planification. J'admets que le mettre au niveau des frais
d'exploitation, cela peut faire sursauter un peu parce que c'est anormal que
nos revenus montent de 5 % et que nos dépenses d'exploitation montent de
10 %. Je le concède.
Concurrence gaz-électricité
M. Parent (Bertrand): Merci beaucoup. Un deuxième point,
la compétitivité. L'année dernière, vous avez
traité de ce point-là en long et en large. On y reviendra
probablement demain, sauf que, de façon générale, je suis
un peu inquiet quant à la concurrence. On parle des différents
concurrents dans le gaz naturel. Ma question serait la suivante: comme l'a
mentionné mon collègue de Roberval, en l'absence d'une politique
réelle énergétique au Québec, comment voyez-vous
cela? Est-ce que vous voyez avec autant d'inquiétudes que l'année
dernière cette concurrence entre autres au niveau du gaz face au fait
que vous soyez obligés de monter les tarifs d'à peu près 5
%? Finalement, vous avez une clientèle commerciale et industrielle qui
vous échappe. Est-ce que c'est relié aussi à votre
nouvelle structure d'augmentation de tarification?
M. Coulombe: Claude Boivin pourra donner des chiffres plus
précis sur la question de la concurrence, mais d'une façon
générale on reste persuadé... D'abord, il y a eu la phase
d'implantation du gaz qui nous a inquiétés. Il y a eu une
inquiétude générale parce qu'Hydro-Québec
n'était pas trop habituée à avoir de la concurrence. Donc,
cela a été sain comme inquiétude, cela a donné
d'excellents résultats parce que beaucoup de gens se sont
réveillés et des programmes extrêmement dynamiques ont
été faits. Donc, cela a été l'aspect positif. Il y
avait aussi le fait qu'on perdait des clients. Là-dessus, on s'est battu
- dans le même cadre que je vous ai expliqué tantôt - au
niveau des tarifs et on les a gardés bas pour la période de
pénétration du gaz, surtout que, paradoxalement, cela arrivait au
moment où on avait des surplus giqantesques. Cela ne pouvait pas plus
mal tomber en ce qui nous concernait.
Cette phase que j'appellerais de pénétration qui a
été subventionnée par les deux niveaux de gouvernement,
500 000 000 $ pour faire le pipeline et enlever la taxe sur le gaz, donc une
pénétration subventionnée, nous a inquiétés
à cette époque et on a réagi. Cette étape que
j'appellerais la période de pénétration nous semble
terminée. Leurs prévisions coïncident avec les nôtres
et même avec celles du gouvernement. Ils auront une stabilisation dans
leur croissance, je ne sais pas, de l'ordre de 18 % ou 19 % du marché;
ils sont actuellement à 16 %...
Une voix: 14 %.
M. Coulombe: 14 %, 15 %. Cela va se stabiliser, selon leurs
prévisions, celles du gouvernement et les nôtres, autour de 18 %,
19 %. Cette phase étant terminée, on entre dans une phase plus
à long terme. À long terme, on considère qu'au point de
vue de l'hydroélectricité, on a un avantage que ni le gaz ni le
pétrole n'ont. C'est comme je vous l'ai dit tantôt, qu'on est
capable de calculer nos coûts à Iong terme dans une fourchette que
ni le gaz ni le pétrole ne peuvent se permettre. Donc, la pression de la
pénétration étant terminée, on entre dans la phase
que j'appellerais plus de stabilisation. Dans cette phase, que, pendant un ou
deux ans, on ait des tarifs plus élevés que le qaz, à
condition que ce ne soit pas exagéré, c'est plus ou moins
important tout simplement parce qu'à long terme, on est convaincu que
notre stabilité tarifaire sera plus qrande que la leur. C'est un peu la
stratégie. Maintenant, de façon plus spécifique, sur
certains chiffres, peut-être que Claude Boivin pourra...
M. Boivin: Nous avons, à la paqe 21 du plan de
développement, un tableau qui résume la position concurrentielle
de l'électricité au secteur domestique par rapport au gaz et au
mazout. Je vous ferai remarquer, comme l'a dit M. Coulombe, que la
stabilité tarifaire d'Hydro-Québec est certainement plus grande.
À titre d'exemple, les chiffres indiqués pour le mazout sont des
chiffres établis sur la position ou le prix du mazout au secteur
domestique, qui prévalaient au mois de décembre. C'était,
à ce moment-là, de l'ordre de 0,225 $ le litre. Au moment
où on se parle, aujourd'hui, le
mazout au secteur résidentiel se vend 0,255 $ le litre.
Déjà, la position concurrentielle que vous avez là s'est
améliorée en faveur de l'électricité depuis
décembre. Est-ce qu'elle va se détériorer le mois
prochain? Je ne le sais pas. C'est très difficile de prévoir
l'évolution des prix du mazout au secteur domestique.
Dans les autres secteurs, pour les applications thermiques, il est
évident - on l'avait indiqué l'an dernier - que, règle
générale, sauf lorsqu'on vend de l'excédentaire, notre
position concurrentielle est défavorable. Du côté de
l'excédentaire, avec la fin des contrats de bouilloires en 1988, on
prévoit qu'une partie de ce marché va retourner au gaz et au
mazout, principalement au gaz. La plupart des clients industriels qui
bénéficient présentement du programme de bouilloires sont
des clients triénergie, c'est-à-dire qu'ils ont de disponible
chez eux, selon leur installation, la possibilité d'utiliser de
l'électricité, du gaz ou du mazout. Les options vont être
ouvertes.
II est évident que la concurrence est vive, et
Hydro-Québec, sur ce plan, a développé et va continuer
à se battre dans ces marchés, notamment par les programmes
biénergie. On a mis sur pied des programmes biénergie, tant dans
le secteur résidentiel que dans le secteur commercial et industriel,
où on est capable d'offrir des tarifs hors pointe qui sont hautement
concurrentiels. Ils sont même favorables par rapport au gaz ou au mazout,
pourvu que le client ne soit pas là aux heures de pointe et qu'en
période de pointe, il utilise le mazout.
M. Coulombe: II y a également la position concurrentielle
du gaz. Il y a eu des augmentations du prix du gaz récemment. Cela n'a
peut-être pas eu l'impact des tarifs d'électricité dans les
journaux, mais il y a eu effectivement des augmentations. Peut-être que
Claude Boivin pourrait les donner. Deuxièmement, je vous inciterais
à regarder ces augmentations de près parce que vous allez y
retrouver un concept avec lequel on est bien d'accord, qui est la
différenciation. Les tarifs du gaz sont différenciés entre
le domestique et les autres catégories de clients. Je ne dis pas que
c'est un exemple à suivre nécessairement, mais je vous mentionne
le cas.
Fiabilité du réseau
M. Parent (Bertrand): Merci. J'ai une autre question qui touche
la fiabilité du réseau. On sait qu'une de vos
préoccupations, et c'est dans vos orientations d'améliorer toute
cette question de fiabilité... Au cours des cinq prochaines
années, je pense qu'on verra quelque 600 000 000 $ mis dans ce qu'on
appelle la fiabilité du réseau.
J'aimerais savoir, M. le Président, si cette somme impartante
pour l'amélioration du réseau va servir principalement aux
Québécois ou si cette fiabilité est aussi en fonction de
la préoccupation première des clients américains qui
concerne cette fiabilité qui nous a été confirmée
lors de la rencontre avec les goupes d'Américains à quelques
reprises. (12 h 45)
M. Coulombe: Je vais laisser André Mercier répondre
sur les caractéristiques techniques de la fiabilité. Qu'est-ce
qu'on entend par la fiabilité? Tout ce que je voudrais faire, c'est une
brève introduction à ce problème qui est effectivement
extrêmement important.
Vous avez au Québec, depuis l'instauration des grandes lignes de
transport dans les années 1963, les grandes lignes qui partent de Manic,
de Churchill et celles qui ont été ajoutées à la
Raie James, les grandes lignes de transport, c'est 135. Vous avez eu une
occurrence de pannes générales qui, au début, était
très forte: une presque tous les ans ou tous les deux ans ou tous les
trois ans.
Évidemment, le nombre de lignes s'ajoutant graduellement a
stabilisé notre réseau et les pannes sont moins fréquentes
aujourd'hui: une à peu près tous les quatre ou cinq ans. En fait,
on va se croiser les doigts, mais il n'y a pas eu de panne
générale depuis novembre 1982. Donc, il y a déjà
une stabilisation qui s'instaure.
Pour le marché québécois et strictement pour le
marché québécois, nous, on pense que cette
stabilité devrait être augmentée parce que les industries
s'en viennent de plus en plus sophistiquées, de plus en plus exigeantes
dans leur système de production, surtout celles qui emploient
l'électricité, et on veut augmenter cette stabilité. Ce
qu'on a prévu, c'est d'augmenter, de faire des investissements pour le
marché québécois pendant les quinze prochaines
années. Ces 600 000 000 % pour le marché québécois,
et uniquement pour le marché québécois, il s'aqit de les
étaler sur une quinzaine d'années.
Dans ce contexte arrivent tes exportations et la nécessité
- j'aimerais que M. Mercier insiste là-dessus tantôt - d'avoir une
plus grande stabilité par rapport au réseau américain. Ce
qu'on fait, c'est qu'au lieu de l'étaler sur quinze ans, on
l'étale sur cinq ans. Cela va donc coûter plus cher. Le coût
de devancement - et c'est exactement le même raisonnement que dans les
centrales - va être chargé aux contrats d'exportation.
Donc, l'ensemble de l'opération est fait à long terme pour
la clientèle du Québec; son accélération est due
aux exportations. Le coût de devancement de ces 600 000 000 $ sera
intégré dans les contrats de vente à l'exportation. Pour
être plus clair, le contrat
de Central Maine contient une somme dans notre prix de vente de ces 600
000 000 $, même si on n'a pas dépensé un cent encore parce
qu'on ne commencera pas cela avant l'année prochaine.
Donc, intégré dans le contrat de Maine, il y a un
coût de devancement des 600 000 000 $ qui est intégré dans
le prix de vente aux Américains. Mais cela sert essentiellement,
à long terme, pour le marché québécois et pour
résoudre un problème d'interconnexion avec les États-Unis
dans notre phase d'exportation.
C'est l'allure générale maintenant. Je pense que pour bien
se comprendre sur les termes, l'aspect de la stabilité interne, je pense
que tout le monde va le comprendre. Mais il y a surtout nos relations avec les
marchés externes, c'est-à-dire en quoi consiste exactement la
fiabilité entre les deux réseaux. M. Mercier qui est
vice-président à la planification des équipements.
M. Mercier (André): Effectivement, comme l'a dit M.
Coulombe, les 600 000 000 $ représentent un montant prévu pour
augmenter la fiabilité du réseau d'Hydro-Québec. C'est un
problème d'interconnexion entre les réseaux comme tels.
Finalement, il faut comprendre que le réseau
d'Hydro-Québec est un réseau qui a des caractéristiques
différentes du réseau américain. C'est d'abord un
réseau qui est hydroélectrique presque à 98 %. C'est un
réseau qui, à cause de cette nature de génération
hydroélectrique, demande de très longues lignes. Quand on le
compare, finalement, au réseau américain, au réseau
ontarien, au réseau du Nouveau-Brunswick, ce sont des réseaux qui
sont beaucoup plus à caractère thermique - donc, une
génération thermique - où la génération est
beaucoup plus concentrée près des centres de charge.
Dans ce cas, les caractéristiques du réseau, la structure
du réseau américain, de ceux du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario
est totalement différente de celui du Québec. Lorsqu'on parle
d'interconnexions, il faut comprendre aussi que le réseau
américain est interconnecté directement avec le réseau du
Nouveau-Brunswick, avec le réseau de l'Ontario. Cela forme un tout, cela
forme un bloc. Le réseau du Québec comme tel ne fait pas partie
de ce réseau. Lorsqu'on veut s'interconnecter pour augmenter nos
exportations vers les Américains, finalement, il faut que ces
réseaux puissent s'interconnecter correctement. Dans le passé,
comme M. Coulombe le présentait, on a eu beaucoup plus de pannes
générales. C'est un choix d'investissement qu'on avait fait sur
le réseau d'Hydro-Québec, de choisir - parce que tous les
critères de conception qu'on peut se donner pour construire un
réseau sont un choix - entre les investissements qu'on veut placer sur
le réseau, soit les équipements qu'on veut installer, et la
qualité de service qu'on veut en obtenir.
Lorsqu'on fait cet équilibre, on obtient un certain partage entre
les investissements qu'on veut avoir et la qualité de service. Lorsqu'on
a un réseau hydroélectrique, la remise en service du
réseau se fait beaucoup plus rapidement qu'avec un réseau
thermique. Les réseaux, comme ceux de New York ou ceux de la
Nouvelle-Angleterre, sont des réseaux thermiques qui, lorsqu'ils ont une
panne générale, mettent au moins de 24 à 48 heures
à se remettre en service. Le nôtre peut se remettre en service
à l'intérieur de deux à quatre heures. Dans le
passé, ce qu'on a fait comme choix, c'est de dire: Les investissements
qu'on est prêt à faire sur notre réseau sont en fonction de
la qualité des services qu'on veut obtenir. Maintenant, les pannes
générales sont moins dommageables sur notre réseau que,
par exemple, sur le réseau américain.
Pour cette raison, on s'est dit dans le passé: Ce serait
acceptable sans doute parce que les investissements qu'on devait faire
étaient extrêmement importants en raison des très longues
lignes qu'on avait. À ce moment, on a fait un choix en se disant: On
accepte peut-être d'avoir une qualité de service moins importante,
moins bonne, si on veut, et d'avoir des investissements moins
élevés. On s'est aperçu, ces dernières
années que le nombre de pannes était beaucoup plus
élevé que prévu. À cause de cela, on
prévoyait pour l'avenir améliorer l'ensemble du réseau
pour les besoins du Québec. Comme l'a dit M. Coulombe, on
prévoyait peut-être faire cet investissement à
l'intérieur des dix, quinze prochaines années.
Tout le problème des interconnexions a
accéléré la prise de conscience qu'on avait de la
fiabilité du réseau et il fallait se ramener avec un
réseau qui était beaucoup plus conforme au réseau
américain. À l'heure actuelle, on est limité aux environs
de 2200 mégawatts comme interconnexion directe avec le réseau
américain. Ce que cela veut dire en termes clairs, c'est que s'il y
avait la perte du réseau d'Hydro-Québec, il ne faudrait pas qu'on
ait un impact supérieur à 2200 mégawatts sur le
réseau américain. Si c'est supérieur à cela,
finalement, il y a un risque qu'on entraîne avec nous une perte
générale du réseau américain. C'est ça
évidemment qui est une grande préoccupation du côté
américain.
Pour contrer cela, ce qu'on propose, nous, c'est de dire: On va ramener
la fiabilité du réseau québécois selon les
mêmes standards et il va falloir qu'ils soient acceptés par
l'ensemble des réseaux américains et ceux de l'Ontario et du
Nouveau-Brunswick, comme étant équivalents en termes de
fiabilité de sorte qu'ils vont
considérer la perte du réseau d'Hydro-Québec comme
étant un événement aussi peu probable que la perte totale
de leur réseau. C'est dans ce sens qu'on propose, dans le plan de
développement, d'avoir un montant de 600 000 000 $ et de devancer
maintenant cet investissement qu'on aurait fait, peut-être, dans dix ans,
quinze ans, pour être capable d'augmenter nos exportations vers
l'extérieur.
M. Coulombe: J'insiste sur le fait que le coût de ce
devancement va être imputé au contrat d'exportation. Cela va
être compris dans nos prix de vente.
M. Parent (Bertrand): M. Coulombe, quel est le pourcentage du
coût de devancement par rapport aux 600 000 000 $?
M. Coulombe: Je ne peux pas vous répondre en disant:
Écoutez, si on dépensait 600 000 000 $ en 15 ans par rapport aux
exportations, parce qu'il faudrait que je vous dise exactement quand, pour les
2000 autres 600 mégawatts, on va les signer. Tout ce que je peux vous
dire, c'est que dans le contrat de la Central Maine Power, on a une somme de 50
000 000 $ impliquée dans notre structure de prix de vente pour
répondre à ce besoin.
M. Parent (Bertrand): Ce qui représente à peu
près 10 %.
Dans un autre domaine...
M. Coulombe: Je voudrais souliqner aussi - cela fait
référence à une autre question qui a été
posée - que quand on parle de dépenses d'exploitation à
HydroQuébec, on dit: Comme nos centrales ne requièrent pas
beaucoup de monde, les tarifs ne devraient pas augmenter ou ainsi de suite.
Regardez les sommes dont on parle comme dépenses d'exploitation
éventuelles, on parle de 600 000 000 $, cela ne génère pas
d'électricité. On parlait tantôt avec les entrepreneurs de
300 000 000 $ qu'on a mis dans la distribution. En fait, c'est 1 000 000 000 $
qu'on a mis pour améliorer le réseau. C'est 1 000 000 000 $ qui
entre éventuellement dans les dépenses d'exploitation et qui ne
génère pas en soi de revenus. Évidemment, cela diminue
à la longue nos dépenses; on l'a vu d'ailleurs dans les chiffres
que je vous ai donnés. Mais ce ne sont pas des investissements
générateurs de revenus immédiats. Il faut que cela soit
compris parce que ce sont des sommes énormes pour la qualité du
service qui sont mises là-dedans et qu'il faut payer d'une certaine
façon.
IREQ M. Parent (Bertrand): Merci. Dans un autre domaine, celui de
la recherche et du développement relié au développement
d'Hydro-Québec, vous avez touché très brièvement
à l'IREQ et cela me préoccupe d'autant que cela se trouve dans
mon comté. Personnellement, j'ai toujours trouvé que beaucoup de
choses sont faites en recherche à Hydro-Québec, mais finalement
peu de choses sont mises en application. Ce que je veux dire, c'est
qu'essentiellement, il y a beaucoup de projets de recherche sur les tablettes
qui ont été mis au point, mais qui n'ont jamais été
vraiment transformés pour en permettre la mise sur pied. Je pense qu'il
y a un projet ou deux qui semblent vouloir accoucher. Pour les dirigeants
d'Hydro-Québec, il semble y avoir un changement de philosophie ou
d'approche qui s'en vient de ce côté, à savoir que vous
allez favoriser l'émerqence même de certains cadres avec
l'entreprise privée en "partnership", de façon que des projets
concrets par rapport à cette recherche puissent voir le jour.
Voici ma question. Cela va-t-il prendre forme sous une nouvelle
politique qui sera autorisée par Hydro-Québec, concernant
l'application comme telle et le rôle que devra jouer l'IREQ dans le futur
et les retombées économiques? Parce que je pense qu'on peut
parler aussi dans ce domaine de la création d'emplois. Pouvez-vous
brosser un tableau pour savoir vers quoi s'oriente cette recherche et le
développement?
M. Coulombe: Je vais demander à M. Benoît Michel,
vice-président du secteur de la recherche à l'IREQ et de l'aspect
international à Hydro-Québec, de vous donner un peu plus de
détails. Mais juste pour vous situer, il faut bien penser que le
laboratoire de l'IREQ qui emploie environ 500 personnes et qui coûte
environ 60 000 000 % par année a été conçu comme un
laboratoire de recherche relié à l'électricité. Les
problèmes majeurs à ce moment-là étaient surtout
des problèmes reliés au transport d'électricité. Ce
laboratoire a également une fonction d'essai au service des compagnies
pour les essais de matériaux et ainsi de suite. Donc, ce n'est pas de la
recherche qui devait nécessairement conduire à des applications
pratiques. Il y a eu l'aspect de recherche fondamentale. Tous nos appareils de
simulation de réseau, de simulateur de réseau, c'est
extrêmement important. On vend des services, mais on ne met pas de
produit au point nécessairement dans ce vaste secteur.
Depuis quelques années, c'est un virage fondamental qu'on veut
prendre à Hydro-Québec - parce que l'IREQ c'est
Hydro-Québec, ce n'est pas une coquille en dehors - celui de s'orienter
de plus en plus, tout en gardant l'aspect de recherche de base dans les
secteurs que je vous ai mentionnés, vers le développement de
technologies. Cela est
relié aussi à ce que je vous ai dit en ce qui concerne
l'aspect diversification à moyen terme. On a fait des
expériences. Vous parliez tantôt d'émergence. Deux ou trois
chercheurs de l'IREQ se sont formés une compagnie avec notre aide afin
de commercialiser un produit dont j'ignore exactement la nature - M. Michel
pourra en parler - mais qui concerne les logiciels. Donc, on l'a fait. On
commence. Je voudrais simplement dire, avant de laisser la parole à M.
Benoît Michel, qu'il s'agit d'un changement de culture assez
important.
Deuxièmement, on a quand même un groupe de chercheurs qui
ont été orientés vers une perspective de travail et qu'il
faut modifier. C'est un changement de cap difficile au point de vue humain et
au point de vue de la structure. On est en plein dedans actuellement. Des
équipes nouvelles sont mises en place, de même que du personnel
nouveau est recruté. Il y a eu un renouvellement de la structure
supérieure dans ce domaine, et on a bon espoir que ça va
s'accélérer. Mais c'est un tournant qui n'est pas facile,
même si beaucoup de gestes ont été posés.
M. Michel (Benoît): C'est en ce sens que la
réorganisation du groupe s'articule présentement. Certaines
valeurs fondamentales sont véhiculées. Vous l'avez vu dans le
plan de développement. Les défis technologiques auxquels
l'entreprise fait face sont nombreux, et si on veut réussir... Les
répercussions financières d'un échec dans certains de ces
développements sont majeurs. Vous avez vu tantôt 2000
mégawatts en pointe; à titre d'exemple: turbine à gaz.
Bref, il y a une réorganisation de l'IREQ en cours qui vise justement
à faciliter l'identification par un débat d'entreprise sur les
priorités technologiques afin que nos investissements dans ce domaine
soient consentis aux heures réelles où on veut investir.
De plus, on veut rentabiliser la recherche, comme M. Coulombe l'a
mentionné, dans le sens qu'on veut la diriger vers nos besoins
précis. D'autre part, on veut accentuer notre marketing des services.
Les laboratoires qu'on a à l'IREQ, qui représentent des
investissements de l'ordre de 90 000 000 $, ont bénéficié
d'un contrat externe, que ce soit de l'Association canadienne
d'électricité, EPRI ou un autre organisme, on veut identifier
notre marketing au niveau de l'IREQ pour aller chercher des fonds
additionnels.
Troisièmement, la structure qu'on est en train de mettre sur pied
vise à séparer de façon plus formelle les diverses phases.
La recherche à long terme demeurera, bien sûr, un segment de notre
activité. Par ailleurs, on veut appliquer cette recherche davantage aux
besoins qui auront été identifiés au préalable. On
veut aussi, par une gestion par projet, développer les produits dont
l'entreprise a besoin, les développer avec une mentalité pratique
et mercantile de façon que ces produits, une fois
développés pour l'Hydro, puissent être
commercialisés ailleurs par d'autres firmes. Présentement, on a
Nouveler qui est le bras d'Hydro-Québec au niveau de la diversification.
Nouveler oeuvre dans des segments de marché où il n'y a pas
d'offre au Québec, dans des produits qui ne sont pas fabriqués au
Québec, Nouveler pourra à ce moment-là décider de
former un "joint venture" avec une autre entreprise et développer un
produit pour viser des marchés autres qu'Hydro-Québec seulement,
pour éviter cette captivité de marché.
M. Coulombe: II faudrait peut-être mentionner aussi qu'il y
a une certaine pesanteur du passé dont on ne peut pas se
débarrasser. Les époques changent et les priorités de la
fin des années soixante-dix étaient pour les nouvelles
énergies. L'Hydro s'est orientée vers ces nouvelles technologies
et c'est évident qu'aujourd'hui, la question des éoles est moins
prioritaire qu'il y a sept ou huit ans. Par contre, on est embarqué
aussi dans un programme de développement avec le fédéral,
le programme de fusion nucléaire Tokamak, qui, dans les meilleures
hypothèses possible, ne verra pas le jour de façon
concrète avant vingt-cinq ou trente ans. Cela fait quinze ans qu'on dit
que cela va prendre vingt ans. C'est un programme extrêmement lourd et
chargé. On est maintenant partenaire au niveau canadien. Le
fédéral en paie donc la moitié et ainsi de suite. C'est ce
que j'appelle des lourdeurs qu'on ne peut pas changer dans 24 heures. Je pense
qu'il reste quand même un intérêt fondamental dans ce genre
de recherche. Il s'aqira de savoir si ce secteur ne devrait pas être plus
limité. On devrait mettre l'accent sur ce que M. Benoît Michel
vient d'expliquer. C'est l'orientation qu'on a prise finalement.
Le Président (M. Charbonneau): Sur cette réponse,
M. Coulombe, madame et messieurs, nous allons suspendre les travaux de la
commission jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 3) (Reprise à 15 h
11)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre!
La commission de l'économie et du travail reprend cet
après-midi l'étude de la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour l'année 1987. Nous avions convenu que, cet
après-midi, nous parlerions d'abord du marché interne et des
exportations. Il semble qu'il y
ait quelques questions sur des sujets d'ordre générai qui
soient restées en suspens ce matin. Je pourrais peut-être
permettre quelques questions afin qu'on puisse, par la suite, respecter l'ordre
du jour. Cela va? M. Perron, je crois, le député de Duplessis,
remplace...
M. Gauthier: M. Paré (Shefford) serait remplacé par
M. Perron (Duplessis).
Le Président (M. Charbormeau):
Consentement? Cela va. Le remplacement est fait. Je crois que le
député de Rosemont voulait poser une question.
Qualité du service
M. Rivard: M. Coulombe, j'aimerais qu'on regarde un peu les 2 500
000 clients d'Hydro-Québec qui sont en même temps nos commettants.
Ce sont des gens que l'on retrouve dans nos bureaux et qui nous font des
représentations quant à l'augmentation du tarif. Quelle que soit
cette augmentation du tarif - l'an passé, elle était
peut-être à première vue un peu plus difficile à
accepter puisqu'elle était supérieure à l'inflation, mais
quand même - déjà, cette année, nous avons tous
reçu des représentations.
L'une des choses que nous essayons de vendre, c'est la qualité du
service offert par Hydro-Québec. On a déjà entamé
ce chapitre ce matin en parlant de la fiabilité; c'est important, c'est
une question de "all or none", on a de l'électricité ou on n'en a
pas. Une fois que j'ai exposé cette question de fiabilité,
personnellement, je manque un peu d'arguments pour expliquer au citoyen qui
vient me voir la qualité des services rendus par Hydro-Québec. En
particulier, quand je vois dans votre document que vous parlez de la
qualité des pratiques d'affaires, j'aimerais que, d'une façon
résumée, vous nous disiez ce que vous entendez par qualité
du service chez Hydro-Québec.
M. Coulombe: Je vais demander à Claude Boivin,
vice-président exécutif, marchés internes, de vous
répondre.
M. Boivin: Vous avez parfaitement raison de parler de
qualité du service parce que, à notre point de vue, quand on
parle de la qualité du service, il y a un premier volet qui est la
qualité du service électrique lui-même, c'est-à-dire
sa continuité, sa stabilité, etc. Le deuxième volet est
tout aussi important, c'est la qualité des pratiques d'affaires, des
relations que nous avons avec notre clientèle. De ce côté,
vous n'êtes pas sans savoir que, fondamentalement, à
Hydro-Québec, il y a environ 2000 personnes qui s'occupent de la
clientèle, de ce qu'on appelle l'aspect commercial de la
clientèle. Elles doivent recevoir les appels, effectuer les transactions
commerciales avec nos clients, s'occuper de la relève des compteurs, de
la facturation, des encaissements et, hélasl occasionnellement, des
recouvrements.
Sur ce plan, nous avons, au cours de la dernière année,
amorcé ce que je peux appeler une vaste offensive de révision de
nos pratiques commerciales. Les conclusions de ces travaux ne font pas partie
du plan de développement, cette année, parce que ce n'est pas
terminé. J'espère qu'on pourra annoncer, l'an prochain, des
révisions de nos pratiques commerciales. Une des choses très
importantes qu'il faut mentionner, c'est que dans le cadre de la
révision de ces pratiques commerciales, nous avons amorcé un
dialogue très soutenu depuis un an avec les différentes
associations de consommateurs à travers la province de Québec.
Nous sommes dans un processus de consultation sur nos différentes
pratiques d'affaires, sur les orientations, les choses qui sont des irritants
dans nos pratiques d'affaires, sur nos politiques d'interruption de services
hélasl dans les cas où les clients ne nous paient pas, sur nos
pratiques de facturation. Cette amorce a déjà conduit à
l'implantation -encore là, ce n'est pas quelque chose qui est
réalisé présentement mais qui le sera vers la fin de
l'année 1987 - d'une nouvelle facture d'électricité. En
effet, la facture que nous avons présentement, en vigueur depuis de
nombreuses années, est souvent assez difficile à comprendre pour
nos clients. Nous avons donc un nouveau format de facture qui devrait
être implanté à la fin de l'année 1987. Il devrait
permettre à nos clients, premièrement, de mieux comprendre la
structure de coûts, de tarifs que nous avons; deuxièmement, de
connaître l'historique de leur consommation, pourquoi leur consommation
peut varier occasionnellement, etc. Nous avons non seulement un projet, mais un
nouveau format de facture qui a fait l'objet de consultations auprès des
associations de consommateurs et qui sera implanté à la fin de
l'année ]987.
Ce sont toutes ces différentes pratiques qui, comme je le dis,
depuis un an, ont fait l'objet d'une réflexion profonde à
l'intérieur de l'entreprise, sont en voie d'être
révisées, également à travers un processus de
consultation. Sur cet aspect-là, cette année, le plan de
développement est muet parce que le processus n'est pas terminé.
Il y a un tas de choses qui sont en marche de façon très
sommaire.
Je devrais peut-être également mentionner que, depuis un
an, nous avons fait un effort important pour normaliser nos pratiques de
fourniture d'énergie. Cela a fait l'objet d'un projet de
règlement, le règlement 411, qui régirait à
l'avenir les pratiques de fourniture d'énergie à travers la
province. D'ailleurs, ce règlement avait été
déposé au gouvernement l'été dernier. Il a
fait l'objet de publication à la Gazette officielle, de
consultation à la suite de mémoires qui ont été
soumis par les différentes associations de consommateurs, dont l'Union
des producteurs agricoles et certains intervenants au niveau de corporations
d'installateurs, de sorte que nous avons apporté des modifications
récemment lors du dernier conseil d'administration d'Hydro-Québec
de février. Nous avons proposé des modifications, et ce
règlement est présentement dans sa phase finale d'approbation. Ce
sera une amélioration. Aussi, nous aurons un règlement qui
régira de façon uniforme, pour l'ensemble des consommateurs, les
différentes conditions de fourniture d'énergie.
M. Rivard: Merci, M. Boivin.
Le Président (M. Charbormeau): M. le député
d'Ungava, vous n'avez pas d'autres questions d'ordre général. On
va commencer immédiatement l'étude des marchés internes.
M. le ministre.
Marché interne
M. Ciaccia: M. le Président, on est très conscient
que, sur le marché interne, c'est le marché industriel qui offre
le plus grand potentiel d'expansion. Vous en faites d'ailleurs mention dans
votre plan de développement. Il existe actuellement des programmes pour
pénétrer ce marché. Nous en avons parlé au
début des travaux de la commission. M. Boivin a parlé de certains
de ces programmes, ce matin. J'aimerais, M. Coulombe, que vous nous fassiez
part plus globalement de votre stratégie de pénétration de
ce marché.
M. Coulombe: Je vais demander à Claude de préciser
davantage. Je pense qu'il faut mettre l'accent sur l'ensemble de nos programmes
et sur le virage qu'on a pris l'an dernier surtout avec le programme de partage
de risques avec l'industrie. Je demanderais à M. Boivin de
préciser un peu plus là-dessus sans oublier la question des
électrotechnologies qui est extrêmement importante au point de vue
industriel au Québec.
Partage des risques
M. Boivin: Concernant le grand virage que nous avons
amorcé, l'an dernier, du côté commercial, nous avons eu, au
cours des dernières années, un certain nombre de programmes qui
visaient à éliminer le plus rapidement possible les surplus.
Donc, on avait des programmes de vente à rabais, le programme des
bouilloires où nous avons vendu beaucoup d'énergie
excédentaire. Cette phase étant, à toutes fins utiles,
terminée, nous avons orienté notre stratégie vers le
développement d'un marché rentable où l'avantage
comparatif de l'hydroélectricité peut être un facteur
important. Quand on regarde la situation des différents marchés,
dans le marché domiciliaire, il est évident que
l'électricité, présentement, a atteint ce qu'on peut
qualifier je pense de maturité. Le marché de
l'électricité, dans le secteur domestique, représente
au-delà de 60 % du chauffage d'espaces et tout près de 80 % des
applications de chauffage de l'eau. Les autres applications peuvent être
qualifiées de captives, telles que la réfrigération, la
cuisson, l'éclairage, les appareils audio. Dans le marché
domiciliaire, nous avons atteint la maturité. Il reste, comme
possibilité de croissance, particulièrement, le marché
industriel où l'avantage comparatif de l'hydroélectricité
est important pour le Québec et assez unique par rapport au reste de
l'Amérique du Nord. Du côté du marché commercial,
là également, c'est un marché où nous avons atteint
une certaine maturité même si elle n'est pas aussi avancée
que dans le secteur domestique.
Nous avons développé deux grands axes ou deux grandes
stratégies. L'un touche tout d'abord la gestion de la consommation,
c'est-à-dire, notamment, dans le marché commercial où, -
pour les applications thermiques - notre position concurrentielle est
défavorable. Par contre, nous pouvons offrir une tarification hors
pointe qui, à ce moment, est très avantageuse pour la
clientèle. Donc, dans ce marché, nous travaillons avec les
programmes biénerqie qui comportent déjà des tarifications
particulières. Quand je dis particulières, cela ne veut pas dire
que ce sont des tarifications ou des tarifs à rabais. Cela comporte des
tarifs hors pointe hautement concurrentiels avec les autres sources
d'énergie pourvu qu'en période de pointe, dans les très
qrands froids en hiver, une autre source d'énergie prenne la
relève.
D'ailleurs, ces programmes ont eu un très qrand succès.
Les programmes historiques se sont terminés. Nous avons proposé,
en fait, pour l'année 1987 un nouveau programme pour continuer dans ce
secteur. Pour parler de façon plus précise du
développement du marché industriel, nous avons deux
stratégies ou deux façons d'aborder les choses pour faire
bénéficier les industriels du Québec de l'avantage de
l'hydroélectricité. La première stratégie va aux
entreprises énerqivores, c'est-à-dire les entreprises pour
lesquelles les coûts de l'électricité représentent
une part importante, substantielle des coûts de production. À ce
moment, nous avons remplacé le programme de rabais tarifaire, qui nous a
permis d'écouler des surplus, par une stratégie de partage de
risques et des
bénéfices. Partage de risques, présentement, je
dirais que c'est plus un concept. Cela peut se traduire par de nombreuses
formules, mais des formules conçues et adaptées sur mesure pour
tenir compte de la situation particulière du client. Des exemples de
cela, nous en avons. Il y en a un qui a été mentionné ce
matin, le contrat avec la norvégienne Norsk Hydro en vue de
l'implantation d'une usine de magnésium à Bécancour. Nous
avions eu un contrat semblable avec la compagnie QIT-Fer et Titane de Sorel
dont nous avions parlé Pan dernier. Nous avons présentement six
contrats de ce genre, soit auprès de nouvelles entreprises ou
auprès d'entreprises existantes qui veulent prendre de l'expansion ou
qui étaient en difficulté. Nous sommes présentement en
négociation avec six ou sept autres clients industriels suivant la
même approche. Cette approche signifie fondamentalement
qu'Hydro-Québec est prête à absorber une partie des
aléas ou une partie des risques de la conjoncture sur un horizon de 10
ans, 15 ans ou 20 ans avec le client. Ainsi, les tarifs
d'électricité pourront, à l'intérieur de certaines
balises, être modulés soit selon la rentabilité même
de l'entreprise ou selon l'évolution des prix des produits de ces
entreprises, la plupart d'entre elles vendant ces produits sur le marché
international. Ces formules de partage de risques sont également
assorties ou comportent également des formules de stabilisation
tarifaire ipso facto, donc certaines garanties sur l'évolution des
tarifs d'électricité, de sorte que pour l'entreprise qui doit
investir des montants importants pour une nouvelle usine ou pour une expansion,
Hydro-Québec est prête à partager avec elle le risque
qu'elle prend sur sa rentabilité future. À venir jusqu'à
maintenant, je pense que nous sommes la seule compagnie
d'électricité en Amérique du Nord à offrir ce genre
de formule. C'est une approche qui a un potentiel très
intéressant tant pour Hydro-Québec que pour sa
clientèle.
Le deuxième volet de notre action s'adresse surtout à nos
entreprises existantes au Québec et veut remplacer dans les
différents procédés industriels des sources
d'énergie conventionnelle de type fossile par des technologies
électriques plus performantes. En général, ce genre
d'initiative implique pour la compagnie ou pour le client des investissements
assez importants qui sont souvent un obstacle à la modernisation.
À ce moment, Hydro-Québec a développé et a, depuis
deux ans maintenant, un programme d'implantation des électrotechnologies
qui fait qu'on est prêt à offrir des subventions qui,
fondamentalement, sont équivalentes à un an et demi de la facture
d'électricité en vue de remplacer des procédés
énergivores par des procédés électriques beaucoup
plus efficaces.
On pourrait donner plusieurs exemples de- cela, mais comme ordre de
grandeur, à ce jour, nous avons engagé un montant de 22 000 000 $
dans des subventions pour la réalisation de 185 ou 186 implantations
d'électrotechnologies de toutes sortes dans l'industrie
québécoise.
M. Ciaccia: Vous mentionnez, M. Boivin, que le programme de
partage des risques s'applique aux nouvelles entreprises. Je pense que vous
l'avez mentionné, mais je voulais juste que vous l'expliquiez un peu
parce que les représentations qu'on nous fait, parfois, sont en ce sens
que vous avez des programmes spéciaux pour attirer de nouvelles
industries. Avez-vous des programmes pour encourager l'expansion des industries
existantes? Votre programme de partage de risques peut s'appliquer aussi aux
industries qui existent au Québec mais qui veulent prendre une expansion
importante.
M. Boivin: Vous avez parfaitement raison, M. le ministre.
Effectivement, notre programme de partage des risques s'adresse à de
nouvelles entreprises, mais également à des entreprises
existantes qui veulent prendre de l'expansion et même à des
entreprises existantes qui sont en période difficile. Un exemple de cela
est la compagnie QIT que je mentionnais tantôt. En fait, au moment
où nous avons négocié avec elle un contrat de partage de
risques, elle était en difficulté. Effectivement, le contrat que
nous avons néqocié avec Gette entreprise existant depuis de
nombreuses années au Québec lui a permis non seulement de prendre
des risques additionnels, mais de faire de nouvelles percées sur le
marché, d'investir dans une mini-aciérie pour valoriser la fonte
en gueuse qui était un sous-produit avec lequel elle était aux
prises, de sorte qu'aujourd'hui, en fait, c'est une entreprise qui va
très bien. Je pourrais en mentionner d'autres, parce qu'il y a certaines
autres entreprises au Québec avec lesquelles nous sommes en discussion,
ou avec lesquelles nous avons conclu des contrats de ce type.
Attrait de nouvelles industries
M. Ciaccia: Étudiez-vous ou envisagez-vous d'autres
possibilités de nouveaux programmes ou des programmes additionnels pour
encourager de nouvelles industries soit à venir au Québec, soit
à faire de nouveaux investissements, ou même pour augmenter la
possibilité que des industries qui existent déjà au
Québec puissent transformer leur produit au Québec plutôt
que de l'exporter et de le transformer ailleurs?
M. Coulombe: L'une des dimensions importantes est la
transformation de produits
finis au Québec de ces grands utilisateurs
d'électricité. Quant aux grands utilisateurs d'aluminium ou de
magnésium, il est extrêmement intéressant pour
l'économie du Québec d'avoir ces grands producteurs. Mais, si
cela sort continuellement du Québec en lingots, on perd peut-être
des occasions. On ne se fait pas d'illusion sur la possibilité avec le
marché interne du Québec d'avoir une transformation
complète parce qu'on ne voit pas comment le marché pourrait
supporter ce genre de choses-là, mais il reste néanmoins qu'il
pourrait y avoir des programmes spécifiques pour l'aspect de la
transformation ultérieure de ces produits. On est en train de
réfléchir là-dessus. En toute honnêteté, on
n'a pas de programme de ce genre encore arrêté, mais on
réfléchit là-dessus. De plus, je sais que notre programme
de partage de risques est un programme intéressant pour un grand
utilisateur, mais ce n'est pas un programme de rabais tarifaire. Comment
attirer de nouvelles industries indépendamment du problème de la
transformation au Québec? II y a un comité qui existe
actuellement entre le gouvernement et nous. Il a commencé à se
réunir pour creuser cela. (15 h 30)
Tout ce que nous pouvons dire là-dessus, c'est qu'on serait
extrêmement réticent à revenir à des périodes
de rabais purs et simples des tarifs d'électricité parce qu'on
est convaincu que des rabais purs, indépendamment des coûts
à l'Hydro, strictement en termes de développement industriel, ce
n'est pas une bonne méthode pour attirer l'industrie. Non seulement des
rabais tarifaires coûtent énormément cher mais de plus,
cela n'incite pas l'industrie à se moderniser lorsque la conjoncture est
changeante. C'est l'expérience des 25 dernières années
à l'Hydro où il y a eu plusieurs centaines de millions de rabais
tarifaires, plusieurs centaines de millions de dollars dans des secteurs
industriels qui se sont trouvés en difficulté à un moment
donné. On travaille surtout pour essayer de trouver des idées
innovatrices quant à la transformation. On n'en a pas encore
d'arrêtées, mais on travaille là-dessus.
M. Boivin: Un des problèmes qu'on a avec l'approche de la
transformation comme le dit M. Coulombe, on a plusieurs études en cours
à ce sujet - c'est que dans la transformation, en règle
générale, l'électricité est un facteur marginal ou
faible dans les coûts de production. L'avantage comparatif, à ce
moment-là, de l'hydroélectricité se fait moins sentir. Il
faut donc essayer de se creuser la tête pour inventer de nouvelles
formules, de nouvelles façons de voir les choses.
M. Ciaccia: Sur un autre sujet, le plan de développement
prévoit un taux de croissance moyen de la demande interne de 2,7 %.
Est-ce que vous pourriez nous dire comment cela peut se traduire, ce que cela
peut représenter annuellement en mégawatts, et pourriez-vous nous
illustrer ce que cela peut représenter en termes d'installation?
M. Neveu: Est-ce qu'on pourrait avoir la diapositive no 21?
Ce matin, je vous ai présenté un graphique qui
représente la demande totale, donc qui inclut également les
exportations. Je vous ai présenté le graphique en
térawattheures, c'est-à-dire qui représente les
installations d'équipement de base. Quant aux mégawatts, vous
avez le même graphique ici avec la demande totale, incluant les 3500
mégawatts d'exportation. Là, on retrouve non seulement les
installations dont je vous ai parlé ce matin, mais également les
installations de pointe. Ainsi, pour satisfaire à la croissance de la
demande, actuellement, on a un parc qui dispose de 28 000 à 29 000
mégawatts, avec une mise en service de Manic 5 en 1989 - on devrait
alors satisfaire les besoins jusqu'en 1992 - suivie du LG 2 A qui nous
mène jusqu'en 1995. C'est là que LG 1 et la pointe additionnelle
entrent en service pour satisfaire les besoins par la suite, suivi de LA 1 et
de Brisay, Sainte-Marguerite en 1998 et Grande Baleine en 1999.
M. Ciaccia: Est-ce qu'on pourrait dire que les 2,7 % de
croissance annuelle peuvent représenter 800 ou 900 mégawatts par
année? Est-ce qu'on pourrait traduire cela en ces termes?
M. Neveu: Je pourrai vous donner la réponse
détaillée.
M. Ciaccia: Pour clarifier, non seulement en termes de
devancements ou de projets, mais tous les ans, si c'est 2,7 %, qu'est-ce que
cela représente? 800 ou 900 mégawatts?
M. Boivin: Vous avez raison. Par exemple, à l'horizon
1989, environ 30 000 mégawatts, la demande de pointe, si on ajoute
à cela un taux de croissance de l'ordre de 2,7 %, prenons 3 %, 3 % de 30
000, cela veut dire 900 mégawatts par année, plus ou moins.
M. Ciaccia: Quel barraqe produit à peu près 900
mégawatts? LG 1, c'est à peu près 1300. Cela
représente vraiment un nouveau barraqe tous les ans. Naturellement,
Grande Baleine, c'est 2900 mégawatts; alors quand vous construisez
à Grande Baleine, c'est à une étape où vous avez
besoin de 2900 mégawatts. Juste pour essayer de comprendre, la demande
interne du Québec
peut représenter un nouveau barrage par année de 900
mégawatts.
M. Coulombe: En fait, cette expression peut être
utilisée. Il faut distinguer entre la puissance de pointe et la
puissance de base. Évidemment, quand on parle de barrage, on se
réfère surtout à des équipements de puissance de
base. Prenez, par exemple, LG 2 A. Ce sont des machines de plus qui sont
installées, ce sont des turbines de plus. Cela n'ajoute pas à
l'énergie totale produite, cela intensifie la production de
l'énergie dans une période de l'année quand on parle de
pointe. Des centrales de base... Évidemment, c'est très difficile
aussi de découper les projets en blocs de 900 mégawatts. Il y a
des projets qui ne sont pas économiques à décomposer en
900 mégawatts; donc, cela fonctionne un peu comme des marches
d'escalier. À un moment donné, cela va se stabiliser, il va y
avoir des surplus temporaires; les autres projets vont rentrer...
Prenez le NBR qui a 7000 ou 8000 mégawatts; c'est très
difficile de le décomposer en blocs de 900 mégawatts. Vous avez
raison, comme stratégie générale ou comme investissement
global, c'est l'équivalent, si les prévisions de la demande sont
correctes. Maintenant, dans la réalité, cela ne se produira pas
ainsi, mais c'est l'équivalent.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Théorêt): M. le
député de Roberval et critique officiel, je vous cède la
parole.
Coût en période de pointe
M. Gauthier: Merci, M. le Président. Je m'excuse d'avoir
troublé vos savantes discussions avec le ministre. Une question me
préoccupe concernant la demande à l'interne. C'est la suivante.
On sait que dans un contexte de surplus d'énergie - c'est le cas
actuellement et encore pour quelques années - la préoccupation
d'Hydro-Québec... Avant toute chose, je vais expliquer le contexte.
J'essaie de me situer comme le font l'ensemble des citoyens qui nous
écoutent, qui suivent une commission parlementaire comme celle-là
et qui se demandent un peu pourquoi Hydro-Québec, d'une part, parle de
programmes pour stimuler, disons-le, la consommation
d'électricité à l'interne et, d'autre part, parle de
réduire la consommation par des programmes de biénergie, par
exemple, ou d'autres du genre.
Il faut comprendre que dans un contexte de surplus, le défi qui
s'offre, qui se présente plutôt à une entreprise comme
Hydro-Québec, c'est d'augmenter, évidemment, la consommation,
l'utilisation de l'électricité dans les périodes plus
tranquilles de l'année et de diminuer en quelque sorte l'utilisation de
l'électricité en période de pointe. Il y a, lors de la
période de pointe, sauf erreur - vous me corrigerez si je me trompe - un
coût extrêmement élevé pour fournir de
l'électricité. II s'agit d'installations qui coûtent cher,
il faut bien le dire, et qui, de façon générale, vont
servir pendant quinze jours, une semaine, quelques jours ou même pas du
tout.
On m'a dit - d'ailleurs, on en a déjà causé, on a
déjà échangé des avis sur ce sujet -
qu'Hydro-Québec possédait des équipements de pointe et que
ces équipements n'étaient que peu ou pas du tout utilisés.
J'aimerais que le président-directeur général ou quelqu'un
d'autre, peu importe, nous fasse un portrait de ce que sont ces
équipements de pointe et nous donne une idée de l'impact que cela
peut avoir sur le coût du kilowatt en période de pointe. Cela nous
aiderait à comprendre pourquoi il faut absolument essayer de
réduire cette pointe.
M. Coulombe: Vous avez parfaitement raison de dire que pour la
population, c'est complexe. Les citoyens disent: Ces gens ont des programmes
pour réduire la construction et ils vendent pour devancer les
équipements; cela a l'air contradictoire, mais ça ne l'est pas.
Les équipements qu'on ne veut pas construire sont des équipements
de pointe, comme vous l'avez dit, qui ne servent que quelques heures ou
quelques dizaines d'heures par année, un certain type
d'équipements. On n'est pas intéressé à immobiliser
des centaines de millions de dollars dans des équipements qui ne servent
que quelques heures. Évidemment, l'hiver, notre organisation
étant telle, on ne pourra jamais éviter qu'il y ait de grosses
journées dans l'année où il faudra des équipements.
Si on peut avoir des programmes... C'est l'aspect commercial,
c'est-à-dire qu'on va faire des programmes qui vont augmenter la
consommation dans les périodes où on utilise moins nos
équipements et on va diminuer la pointe.
Il y a plusieurs types de pointe: la pointe de quelques heures par
année. Habituellement, ce qui est bâti dans ce temps-là, ce
sont des centrales, des turbines à gaz. Ce n'est pas une technologie
qu'on contrôle, ce n'est pas une technologie dans laquelle on a des
choses particulièrement brillantes à dire ou à faire parce
que c'est reconnu partout, etc. Donc, on n'a pas d'intérêt
particulier ni pour cette technologie-là, ni pour les retombées
économiques de ça ou les investissements nécessaires.
Là-dessus, je demanderais à Jean-Claude Roy de nous dire, quant
aux deux centrales de turbines à gaz qu'on a à Cadillac et dans
le sud de Montréal, quelle a été leur utilisation dans les
cinq dernières années.
Vous avez une pointe un peu plus longue pendant plusieurs dizaines
d'heures. Là, on peut aller dans les centrales thermiques comme Tracy.
Encore là, M. Roy pourra en parler un peu plus.
Vous avez aussi une pointe un peu plus longue de quelques centaines
d'heures. Là, on tombe dans du suréquipement comme on le fait
à LG 2 A et comme on a l'intention de faire - vous l'avez vu ce matin -
à Manic 1, Manic 2, Manic 3, et comme on fait à Manic 5 aussi.
C'est donc du suréquipement hydraulique. On ajoute des turbines. Cela ne
change pas l'énergie totale, mais cela concentre la fabrication
d'énergie. On ajoute donc des groupes.
Ce sont les trois types de projets de pointe. Le premier n'est
carrément pas intéressant pour nous autres. Le deuxième,
Jean-Claude Roy expliquera comment on se sert de la centrale de Tracy. Quant au
troisième, le suréquipement hydraulique, il peut être un
peu plus intéressant. D'abord, la période est beaucoup plus
longue et, encore là, on tombe dans des technologies qui sont connues et
dans des sites connus, ce qui rentabilise l'ensemble de l'équipement en
place. C'est le cas de la rivière La Grande, par exemple, où LG
3, LG 4 et LG 2 vont être suréquipés. Quand on construira
LG 1, on le construira suréquipé. Jean-Claude.
M. Roy (Jean-Claude): Nous avons actuellement, dans le
réseau, la centrale Cadillac en Abitibi qui fait à peu
près 160 mégawatts. C'est une centrale de turbines à gaz.
On s'en sert très très peu parce que les coûts de
production, seulement les coûts d'huile qu'il faut brûler pour la
centrale, sont de l'ordre de 0,07 $ à 0,08 $ du kilowattheure. Quand on
le vend à 0,03 $ ou 0,04 $, évidemment, il n'y a aucun
intérêt. C'est donc une centrale dont on se sert uniquement pour
se dépanner et, principalement dans la région de l'Abitibi. Si on
a des problèmes de transport entre le réseau de l'Abitibi et le
réseau principal, on démarre la centrale Cadillac. C'est
arrivé à quelques reprises au cours des dernières
années qu'on s'en est servi. On peut s'en servir également comme
la centrale la Citière qui est tout près de Montréal, au
sud de Montréal. C'est également une centrale de turbines
à gaz dont les coûts de production sont à peu près
similaires. On s'en sert uniquement en pointe lorsqu'on a de la
difficulté à faire face à notre demande interne. Cela
arrive quelques heures par année. On s'en est servi quelquefois cette
année, quelques jours durant quelques heures seulement. C'est simplement
que les coûts sont trop élevés.
M. Coulombe: Ce sont des investissements de combien pour les deux
centrales?
M. Roy: C'était de l'ordre de 200 $ du kilowatt lorsque
cela a été construit. Cela a été construit
très rapidement. Maintenant, c'est près de 800 $ du kilowatt, les
coûts de construction.
M. Gauthier: Vous voulez dire que dans les équipements
comparables, cela coûterait 800 $...
M. Roy: Pour construire une nouvelle centrale de turbines
à qaz dont on se sert seulement en pointe pour se dépanner, le
coût d'investissement est de l'ordre de 500 $ du kilowatt et les
coûts de fonctionnement sont de l'ordre de 0,06.5 $, donc de 0,06 $
à 0,07 $ du kilowattheure, les coûts d'utilisation.
Il y a aussi la centrale de Tracy, une centrale thermique où on
brûle de l'huile. Ce n'est pas une centrale de turbines à gaz,
c'est une centrale où on peut avoir un facteur d'utilisation plus
élevé. Les coûts de cette centrale sont de l'ordre de 0,03
$ à 0,04 $ du kilowattheure. (15 h 45)
Encore là, c'est déjà au-dessus de nos coûts
normaux d'hydraulique pour le fonctionnement. D'elle aussi, on s'en est servi
cet hiver à quelques reprises. Évidemment, c'est une centrale
thermique de base; donc, il faut la réchauffer longtemps à
l'avance. Alors, il y a des coûts pour la réchauffer et, quand on
la produit, cela aussi coûte très cher.
M. Gauthier: Quand vous parlez de coût d'utilisation, si je
comprends bien, dans les 0,03 $ à 0,04 $, vous n'incluez pas du tout la
question de l'investissement.
M. Roy: Non, c'est uniquement le coût de l'huile.
M. Gauthier: C'est strictement pour la faire fonctionner.
M. Roy: Le coût de l'huile, les coûts d'entretien. Ce
sont uniquement les coûts de fonctionnement.
M. Gauthier: D'accord. J'imagine qu'au moment où ces
équipements ont été construits, c'était
l'utilisation qui était prévue, c'est-à-dire que
c'était au cas où, point à la ligne; ou encore, est-ce que
le fait que vous vous en serviez si peu, c'est un élément nouveau
pour Hydro-Québec?
M. Roy: Non. La centrale de Tracy, qui est une centrale thermique
conventionnelle, avait été construite dans le temps par
Shawinigan Water and Power, avant la nationalisation.
M. Gauthier: C'est très vieux.
M. Roy: C'était un moyen d'aller vers sa nouvelle
production. C'était le secteur thermique à ce moment-là.
Quand cela a été nationalisé, cela a fait partie du parc
de production et, évidemment, vu que nous avons beaucoup d'hydraulique,
on ne s'en sert pas...
M. Coulombe: II faut mentionner que la centrale de Tracy datait
d'il y a si longtemps qu'il a fallu, il y a trois ou quatre ans, y investir 50
000 000 $ pour des questions d'environnement.
M. Gauthier: D'accord.
M. Boivin: Je voudrais revenir sur ce que vous mentionniez pour
la clientèle, ce qui semble une incohérence: En période de
surplus on veut vendre et, après, on dit qu'on veut ménager. Si
on regarde la période de surplus, on a vendu de l'excédentaire
dans les bouilloires industrielles, dans un marché limité dans le
temps, et on disait: À la fin, quand on n'en aura plus, on
débranchera ces installations-là. Par contre, le secteur
domestique, au début des années quatre-vingt, de toute
façon, était en train de se convertir massivement au chauffage
électrique. Plutôt que de le laisser faire de façon
anarchique, c'est-à-dire la conversion à
l'électricité, vu que c'étaient des marchés avec
lesquels on devait composer à long terme, c'est là qu'on a
développé le programme biénergie, dans le secteur
domestique, et on a dit à nos clients du secteur domestique: On est
prêt à vous subventionner pour vous convertir à
l'électricité - donc, cela nous aidait à écouler
les surplus - mais pas pour vous convertir n'importe comment. Vous allez vous
convertir en gardant votre système au mazout et en installant un
système électrique; donc, vous aurez un système
biénergie qui va permettre d'utiliser de l'énergie hors pointe,
donc de maximiser l'utilisation des installations que nous avons et qui ne
taxera pas nos installations en pointe. Aujourd'hui, ces installations,
à toutes fins utiles, avec 140 000 logements biénergie,
éliminent à peu près 700 mégawatts aux heures de
pointe au réseau pendant 200 à 300 heures par an. La politique
que nous avions était cohérente non seulement en vue
d'écouler les surplus, mais en vue d'assurer des marchés qui
étaient rentables pour Hydro-Québec et pour le consommateur
à long terme.
Biénergie et télécommande
M. Gauthier: D'accord. Une brève question
supplémentaire, puisqu'on prend bien conscience de l'importance pour
Hydro-Québec, justement, de diminuer la consommation à la pointe,
surtout celle de quelques heures, non seulement qui risque, mais qui
coûte extrêmement cher aux contribuables. Vous avez parlé de
la biénergie et, l'an dernier, vous aviez le fameux programme de
commande à distance, à partir d'Hydro-Québec, pour la
gestion du chauffage dans des résidences privées sur la rive sud.
Vous l'avez peut-être fait tout à l'heure et j'ai pu perdre un
instant de l'échange avec le ministre. Si c'est le cas, vous m'en
excuserez, mais si ce n'est pas le cas, j'aimerais que vous nous en fassiez un
bilan très bref. Où cela en est-il? Quelle est la quantité
de foyers qu'on veut atteindre dans les prochaines années? Est-ce qu'on
peut s'attendre que d'ici à quelques années, dans une perspective
de quelques années, vous mettiez là-dessus un accent tout
à fait particulier?
M. Boivin: Nous avons indiqué l'an dernier que nous avions
un programme expérimental pour valider deux choses au sujet de la
télécommande. Premièrement, faire une expérience
pilote pour faire un choix éclairé, après
expérience, de la technologie la mieux adaptée à la
télécommande. Deuxièmement - volet également
très important - vérifier l'acceptabilité de l'apport
à la clientèle d'avoir des charqes dans leurs installations qui
sont télécommandées par Hydro-Québec. Ce programme
est présentement appliqué à peu près tel que nous
vous l'avions expliqué l'an dernier avec, cependant, un retard sur
l'échéancier d'environ quatre mois. Nous vous avions
indiqué l'an dernier, si ma mémoire est bonne, que nous
envisagions avoir une centaine de clients qui seraient
télécommandés dans la région de Brassard pour
l'hiver 1986-1987. Présentement, il y en a seulement cinq ou six. Dans
les mois qui viennent 400 autres vont être installés, et vraiment,
on aura les résultats de cette expérience après la
prochaine saison de chauffage.
Parallèlement à cela, nous introduisons cette année
un tarif biénergie et un programme de maintien du parc biénergie
qui va s'adresser à toute notre clientèle domestique qui a
présentement un système biénergie, donc, un tarif
préférentiel au sens que ce n'est pas un rabais qu'on lui donne.
Comme ces clients coûtent moins cher à servir - parce qu'en
période de pointe ils effacent leurs charqes, ils évitent des
coûts d'investissement dans des centrales à qaz -on va les
facturer au coût réel, en fait ce que cela nous coûte, en
tenant compte de l'économie que nous faisons. C'est là une
économie pour ces clients d'environ 140 $ à 180 $ par
année sur leurs factures énergétiques totales.
M. Gauthier: Là-dessus, pour être sûr que j'ai
bien compris, l'économie de 140 $ à
180 $ estimée pour ces clients se traduit, si j'ai bien saisi,
par l'économie qu'Hydro estime faire sur le fait que ces gens ne
demandent pas de puissance à ce moment.
M. Boivin: C'est exact. C'est-à-dire que nous transmettons
directement au consommateur une partie de l'économie que nous faisons.
Ce programme de tarifs particuliers va être assorti d'un programme
d'entretien ou d'un programme d'assurance-entretien de l'installation qui va
prendre une autre partie des économies. Le reste des économies,
finalement, est réparti chez l'ensemble de notre clientèle, dans
le sens que cela va avoir comme résultat net de maintenir nos
coûts de fourniture plus bas qu'ils auraient été s'il avait
fallu immobiliser dans les turbines à gaz.
Le Président (M. Théorêt): Merci. Juste une
question. Est-ce que ce programme connaît une croissance importante?
Est-ce qu'il est populaire? Est-ce que vous l'annoncez beaucoup ou si vous avez
l'intention de le faire?
M. Boivin: C'est-à-dire que le programme d'implantation de
la biénergie au secteur résidentiel est terminé depuis un
an. Donc, nous n'avons plus de subvention pour la conversion de systèmes
de chauffage vers la biénergie dans le secteur résidentiel. Nous
avons eu, à peu près, 148 000 installations, comme on a
indiqué ce matin. Hydro-Québec doit prendre action maintenant.
Présentement, le client qui a un système de biénergie paie
le même tarif d'électricité que le client qui a un
système tout à l'électricité, et il doit maintenir
deux systèmes de chauffage en bon état de fonctionnement. Il doit
également acheter du mazout pour faire fonctionner son système en
période de pointe. Donc, le coût de fonctionnement d'un
système biénergie sans tarif adapté serait
théoriquement plus cher que le coût d'un système tout
à l'électricité.
C'est cette situation que nous voulons corriger par le tarif que nous
proposons présentement dans le règlement tarifaire qui est devant
vous.
Le Président (M. Théorêt): Merci. On parle
toujours du marché interne. Je cède la parole au ministre. Est-ce
qu'il y a d'autres collègues qui ont des questions à poser au
sujet du marché interne? M. le député de Roberval.
M. Gauthier: Une question qu'il serait intéressant de
poser rapidement. Concernant les programmes généraux de
conservation de l'énergie à l'interne, sauf ces programmes
particuliers qui visent des clientèles bien spéciales et à
des moments bien précis, est-ce qu'il existe encore de ces programmes
d'économie d'énerqie qui permettaient globalement et de
façon générale de réduire la pression qui pourrait
être trop grande sur la demande?
M. Boivin: Concernant le secteur résidentiel, les
différents programmes d'amélioration énergétique
sont terminés parce qu'ils ont atteint les résultats
visés. Au secteur résidentiel, je pense qu'on peut dire
aujourd'hui que la majorité des résidences du Québec a
amélioré son enveloppe thermique grâce à ces
différents programmes. Je pense, entre autres, au programme
Énergain Québec qui était administré par
Hydro-Québec. Le potentiel de l'économie d'énergie au
secteur domestique est maintenant beaucoup plus faible qu'il l'était. Le
gros de l'effort a été fait. Un endroit où il reste
énormément de possibilité d'amélioration
énergétique, c'est dans le secteur industriel. Dans le secteur
industriel, notre programme d'implantation des électrotechnologies vise
exactement à remplacer des technologies à faible performance avec
des combustibles fossiles par des technoloqies électriques à
haute performance. On travaille présentement au niveau de la
conservation d'énergie ou de l'efficacité
énergétique dans le secteur où le potentiel est le plus
important, soit dans celui des procédés industriels.
M. Coulombe: Je voudrais rajouter un point. Dans le cas des
économies d'énergie, c'est très important parce qu'on a vu
des groupes, le groupe SVP, ainsi de suite, reprocher à
Hydro-Québec de ne pas tenir compte de l'aspect conservation
d'énergie. Là-dessus, on a un dossier qui est extrêmement
clair parce que, comme M. Boivin vient de le dire, on s'est rendu au bout dans
le domaine résidentiel. On a une preuve extrêmement
concrète: c'est qu'à la fin, les subventions qu'on donnait et
l'argent que cela nous coûtait pour faire les inspections, ainsi de
suite, étaient supérieurs aux dépenses que les individus
faisaient pour faire de la conservation. On a atteint la limite. Au
début, lorsque cela nous coûtait 100 $, il y avait pour 500 $, 600
$ ou 700 $ de réparations dans la maison, les fenêtres, ainsi de
suite, mais à la fin du programme - c'était logique de
l'arrêter -cela nous coûtait plus cher de l'administrer que les
investissements qui étaient faits pour conserver l'énergie.
À moins de chanqer radicalement toute la conception des maisons et des
habitudes de vie des gens, on s'est rendu à la limite de ce programme de
subventions pour la conservation d'énergie compte tenu de notre climat
et des possibilités offertes aux gens. La preuve est extrêmement
simple: cela nous coûtait plus cher à administrer que les sommes
dépensées pour conserver l'énergie.
Le Président (M. Théorèt): Merci. S'il n'y a
pas d'autres interventions sur le marché interne, nous allons passer au
marché de l'exportation. M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Exportations
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Dans vos documents, on
constate une baisse des revenus d'exportation entre 1985 et 1986. Ceci est sans
doute imputable en bonne partie au prix du pétrole, qui a forcé
HydroQuébec à réduire le prix de l'énergie
excédentaire vendue au réseau américain. Pouvez-vous nous
dire de quelle façon un contrat de type énergie-puissance tel que
celui de Central Maine Power protège Hydro-Québec d'obtenir un
prix au kilowattheure largement supérieur à celui que la
société obtient, actuellement, dans ces contrats à
l'exportation? Peut-on conclure que le type de contrat
d'énergie-puissance contribuera à donner aux
Québécois, dans l'avenir, des tarifs plus stables et qui
pourraient même être réduits?
Une voix: Vas-y, Jacques. M. Guevremont est vice-président
exécutif pour les marchés externes.
M. Guevremont (Jacques): La plupart de nos ventes actuelles,
disons environ 75 %, sont faites comme vous le savez dans le marché
interruptible. C'est un marché qui est là pour remplacer de
l'électricité qui proviendrait d'usines existantes. En
général, le prix qu'on vend est environ 80 % du prix que cela
coûterait pour générer cette électricité
à partir de sources existantes. Or, le contrat de Central Maine Power
n'est pas bâti du tout de cette façon. Il n'a aucune relation
directe avec le combustible fossile, qui est généralement ce
qu'on remplace. En Ontario, c'est le charbon et aux Etats-Unis et au
Nouveau-Brunswick, c'est généralement le pétrole. Le
contrat de Central Maine Power n'a pas de relation établie avec les
combustibles fossiles. Le contrat de Central Maine Power est basé sur
une indexation répartie grosso modo en deux parties, dont une
représente la partie investissements indexée à un index
qu'on appelle Whitman, qui est un indice représentant le coût de
construction de centrales thermiques au nord-est des États-Unis. L'autre
partie de ce contrat est basée sur GNP Implicit Price Deflator, qui est
un indice très large aux États-Unis. On n'aura pas dans ce genre
de contrat ferme de relation d'établie avec les combustibles
fossiles.
Une voix: En relation avec les tarifs. (16 heures)
M. Guevremont: En relation avec les tarifs. C'est que les
rendements sur les devancements pour alimenter un tel contrat font qu'on
s'assure, dans la négociation d'un tel contrat, qu'on a un rendement
supérieur à ce qu'on obtiendrait dans nos investissements au
Québec, donc une marge de profit suffisante. De ce profit additionnel
qu'Hydro-Québec obtiendra par ce genre de contrat résultera un
impact négatif sur les tarifs, c'est-à-dire que cela aura pour
effet de maintenir ou de diminuer les tarifs à long terme, et, à
court terme, les investissements. De la façon dont ce contrat sera
alimenté, on ne voit aucune influence sur les tarifs du
Québec.
M. Ciaccia: Vous dites que vous ne voyez aucune influence.
Autrement dit, l'augmentation des tarifs que vous demandez aujourd'hui, les 4,6
%, cela n'a rien à faire du tout avec le contrat de Central Maine. Vous
ne demandez pas une augmentation de tarifs pour donner suite au contrat de
Central Maine.
M. Guevremont: II n'y a aucune relation, M. le ministre. D'autant
plus que, comme vous le savez, nous avons signé une lettre d'entente. Le
contrat lui-même n'est pas signé et, de toute façon,
même s'il était signé, il n'y a aucune relation, le contrat
doit être lui-même payant; il ne doit pas -ce sont des
critères assez bien établis aller chercher des revenus
d'Hydro-Québec qui sont obtenus d'autre part par sa clientèle
interne. Il n'est pas question de négocier ou dépasser un contrat
avec des entreprises où on aurait une charge additionnelle pour
Hydro-Québec.
M. Ciaccia: Autrement dît, le contrat lui-même va
fournir des revenus additionnels...
M. Guevremont: C'est cela. M. Ciaccia: ...à
Hydro-Québec.
M. Guevremont: C'est cela, absolument, il fournira des revenus.
On a donné le chiffre de 13,5 % sur l'investissement global, non pas sur
l'équité d'Hydro-Québec, mais sur l'investissement global;
13,5 % est un revenu adéquat, croyons-nous, pour ce genre
d'investissement.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Théorêt): Si vous me le
permettez, j'ai une question toujours dans la même veine. À moins
que je n'aie mal compris, ce matin, dans l'exposé qu'on faisait
concernant le portrait financier, on disait qu'à l'avenir, la vente
d'électricité pour l'exportation, basée en fonction des
coûts évités, devenait un risque additionnel. Ce que vous
venez de dire me semble être le
contraire, c'est-à-dire que c'est beaucoup plus
sécuritaire et qu'on ne sera pas à la merci du prix du baril de
pétrole ou du charbon, etc. Pourriez-vous m'éclairer
là-dessus?
M. Coulombe: La notion de risque associée à ceci a
donné lieu à beaucoup de débats. On dit là-dessus
qu'il est bien évident qu'un contrat de 20 ou de 25 ans qui... Si on
prend le contrat de Central Maine, on est persuadé d'avoir mis
là-dedans toutes les possibilités de limites de risques, soit les
facteurs d'utilisation, les bris d'équipements, etc. On a toute une
série de clauses dans le contrat éventuel à être
signé qui limite nos risques. Mais il reste quand même que c'est
un contrat à long terme. Par rapport au tarif interne au Québec,
l'actionnaire, le gouvernement, peut toujours agir rapidement, s'il arrive une
catastrophe ou ainsi de suite. On est dans un contexte contractuel, de long
terme; donc, en soi, c'est un élément différent du
marché interne. C'est dans ce sens-là qu'on parle d'un risque un
peu plus élevé: tout simplement parce qu'on est dans une relation
contractuelle. En d'autres mots, s'il arrive quelque chose qu'on n'a pas
prévu, même si on pense avoir tout prévu, il va falloir
vivre avec le contrat qu'on a signé; c'est dans ce sens-là qu'on
parle de risque. Mais associé à ce risque-là, il y a un
rendement supérieur. C'est pour cela que pour tous nos contrats, notre
objectif, dans la mesure où le risque est supérieur, c'est que le
rendement soit supérieur. C'est pour cela qu'on parle de 13,5 % sur
l'investissement total et d'un rendement sur l'équité qui est
beaucoup plus élevé que 13,5 %. C'est supérieur à
tout ce qu'on fait dans le marché interne, à tout ce que les
Québécois paient, tout simplement parce qu'on est persuadé
que c'est un investissement qui, ayant des risques plus grands, doit être
rémunéré de façon plus grande, donc les prix sont
en conséquence. C'est cela la notion de risque.
Le Président (M. Théorêt): Donc, sur le plan
financier, les revenus sont beaucoup plus prévisibles et stables que
s'ils sont basés sur le prix du baril de pétrole à 80
%.
M. Coulombe: Ah! Par rapport au pétrole, il est
évident que le risque est beaucoup plus grand. Remarquez que si, pendant
deux ou trois ans, le baril de pétrole est à 100 $, cela peut
être très payant, mais si cinq ans après, il retombe
à 10 $, c'est la catastrophe. Le contrat de Central Maine élimine
ces risques-là. La marge de risque est plus étroite. Dans ce
sens, c'est plus avantageux.
Le Président (M. Théorêt): Merci. M. le
député de Roberval.
Besoins financiers
M. Gauthier: M. le Président, j'aimerais qu'on m'explique
quelque chose. Dans le plan de développement, on fait état
à quelques endroits, principalement à la page 77 entre autres, du
fait que le développement des marchés externes amène un
risque accru et des éléments d'incertitude supplémentaires
pour Hydro-Québec. Je pense que cela se conçoit;
évidemment, quand on doit se lancer dans des constructions, quand on
doit immobiliser et qu'on est, comme vous le dites, lié par un contrat,
il y a des éléments d'incertitude. Hydro-Québec, sauf
erreur, demande une marge de manoeuvre un peu plus grande,
financièrement parlant, pour faire face à ces risques-là
et à d'autres risques aussi qui coûtent cher. Il y a des questions
de taux du change, des questions de taux d'intérêt, il y a bien
des éléments qui entrent là-dedans. Est-ce que je me
trompe en disant qu'un des éléments - en tout cas, je l'ai
compris comme cela - que vous semblez indiquer comme un facteur de risque pour
Hydro, justifiant une partie non quantifiée de la marge de manoeuvre
nécessaire, c'est la vigueur des marchés externes?
M. Coulombe: Là-dessus, je pense qu'il faut être
extrêmement clair. Lorsqu'on parle de risques accrus pour l'entreprise,
on entend des risques internes. Il faut très bien séparer les
deux aspects. Je vous ai dit tantôt que l'élément de risque
dans le marché externe est assumé par une
rémunération plus grande sur le capital investi. Le marché
externe tient compte de ses propres risques. On demande des prix plus
élevés à cause de cela. Donc, l'élément de
risque des marchés externes est l'élément de prix. Ce
qu'on peut vous dire dans le contrat de Central Maine, sans avoir une boule de
cristal pour prédire l'avenir, c'est qu'on est parfaitement satisfait et
le risque est rémunéré à sa juste valeur. Je ne
vous donne pas de garantie pour les 5000 et 8000 autres mégawatts. Je
n'en sais rien et je ne sais pas comment cela va finir comme négociation
de prix. Quand on aura un deuxième contrat on pourra faire ou ne pas
faire ces affirmations; mais, pour le contrat de Central Maine, on est
convaincu.
Pour les risques internes, quand on parle de marge de manoeuvre de
l'entreprise, c'est pour des risques internes. On a parlé ce matin d'une
approche un peu plus volontariste. Plutôt que de s'asseoir et d'attendre
de voir ce qui se passe, à partir de l'hypothèse que
l'hydroélectricité est un avantage comparatif énorme pour
le Québec, on se dit que cela vaut peut-être la peine de prendre
des risques, mais des risques internes. On en a mentionné quelques-uns.
On a dit, par exemple, qu'on va gérer nos
réservoirs de façon plus serrée. Plutôt que
d'avoir des réservoirs où on a de l'eau à perte de vue, on
va essayer d'augmenter la productivité. Mais il y a un risque
là-dedans. Nous sommes convaincus que ce risque va être payant
à long terme parce que, sans immobiliser, on va se servir de plus d'eau;
donc, cela va être plus payant. Mais il se peut que - prenons une
période où, pendant quatre ou cinq ans, il y a 15 % ou 20 % de
moins d'hydraulicité, il y a moins d'eau, carrément - pendant un
an ou deux ans, on soit obligé de faire démarrer la centrale de
Tracy pendant 200 ou 500 heures au lieu de 25 heures par année. Cela va
donc coûter plus cher cette année-là. C'est un
élément de risque. On a donc un immense avantage à
augmenter la productivité de notre parc de production. Par contre on
augmente les risques, et c'est alors qu'on parle de marge de manoeuvre. Cela
n'a rien à voir avec les marchés externes.
C'est un exemple que je vous souligne. Il y en a d'autres que je
pourrais vous souligner. On a parlé, dans le cas des entrepreneurs, ce
matin, du risque à moyen terme des travaux souterrains. Je pense que
l'enfouissement des lignes dans les centres-villes va devenir une valeur un peu
plus universellement reconnue. Les gens vont être de moins en moins
satisfaits d'avoir des poteaux avec des lignes pour la distribution. Mais, il
va falloir investir. Le souterrain coûte beaucoup plus cher. Ce sont des
aléas que nous avons devant nous. Cela concerne les marchés
internes. Et c'est pour cela que la marge de manoeuvre existe. Chaque fois
qu'il surviendra quelque chose, on ne veut pas être obligé de dire
à la clientèle: Écoutez, on a une immobilisation
importante à faire dans le souterrain, on va augmenter les tarifs de
deux fois l'inflation cette année parce qu'on a un problème.
Notre grande force, c'est d'avoir une stabilisation des hausses tarifaires au
point de vue industriel, et même au point de vue domestique. C'est une
très grande force, c'est celle que l'hydroélectricité
possède. Les autres formes d'énergie sont soumises à des
aléas totalement différents, en plus, on ne les contrôle
pas, et les aléas internationaux les affectent beaucoup plus
considérablement que hydroélectricité.
Si on veut conserver cet avantage comparatif, la stabilisation de
l'augmentation des prix, on dit: Cela prend une marge de manoeuvre pour faire
face aux aléas qui s'en viennent.
M. Gauthier: Vous avez déjà mentionné que
3500 mégawatts qu'on réussirait à vendre sur les
marchés externes amèneraient - c'est mentionné dans le
plan - des investissements supplémentaires importants pour
Hydro-Québec de l'ordre de 6 000 000 000 $, si ma mémoire est
fidèle, en plus des coûts - je ne sais pas si c'est inclus ou pas
- sur la fiabilité du réseau.
J'aimerais savoir quel est l'effet de ces investissements
devancés sur les besoins financiers nets d'Hydro-Québec.
Finalement, lorsqu'on se prépare à investir des sommes
importantes comme celles-là, plutôt que de le faire pour les
besoins internes, il y a un impact. Hydro-Québec a des besoins
financiers plus importants et elle doit les couvrir parce qu'elle a des
paramètres à respecter. J'aimerais que vous fassiez le tour de la
question.
M. Coulombe: Je pense que dans le cas des perspectives
financières, dans la mesure où la politique
générale de rétablissement financier qu'on propose peut se
tenir, je pense qu'on est dans une ère de risques parfaitement
supportables par Hydro-Québec. Vous voyez les investissements de 37 000
000 000 $ mentionnés dans le plan, dont 28 000 000 000 $ ou 29 000 000
000 $ spécifiquement pour production-transport, on pense que c'est une
marge de manoeuvre qu'Hydro-Québec peut parfaitement se permettre
étant donné l'ampleur de l'entreprise et les besoins financiers
stricts. On est certain d'en financer 25 % par l'équité, par les
bénéfices accumulés, ainsi de suite. On voit qu'en 1989,
on retrouve notre niveau de 25 %. Donc, la qénération interne
d'équité ou de marge de manoeuvre propre à l'entreprise en
finance 25 %. Les autres 75 % sur les marchés financiers, c'est dans des
ordres de grandeur parfaitement compatibles avec une entreprise qui aura 8 000
000 000 $, 10 000 000 000 $, 12 000 000 000 $ de revenus par année au
milieu des années quatre-vingt-dix.
Un autre aspect qu'on a mentionné l'an dernier et qu'on retrouve
dans le plan, c'est lorsqu'on parle de la troisième phase des
exportations, c'est-à-dire des blocs peut-être plus
considérables qui vont nécessiter de grandes interconnexions
nouvelles. Là, le problème du financement est à
l'étude; on vous l'a dit l'an dernier et on a continué de le
faire. On pense qu'il y aurait peut-être des méthodes
différentes de financement qui pourraient intervenir au niveau de ces
grands contrats. Mais on n'a pas de proposition à faire aujourd'hui, on
continue d'y penser, soit du "project financing", soit des financements de type
différent, partagés, ainsi de suite. C'est à
l'étude à l'heure actuelle. Dans l'horizon des 3500
mégawatts, on ne voit pas de problèmes fondamentaux de
financement pour Hydro-Québec.
M. Gauthier: Si les besoins financiers nets d'Hydro-Québec
sont plus importants, et de façon pas mal significative, est-ce que cela
ne risque pas, à un moment donné, d'avoir un impact quelconque
sur les tarifs à
l'interne ou s'il y a un autre moyen de couvrir cela pour
Hydro-Québec? (16 h 15)
M. Coulombe: C'est évident que si vous faites
l'hypothèse que la demande interne au Québec, au lieu de
croître à 2,7 %, croît à 4 %, soit qu'il y ait un
boom économique ou une immigration massive, ou je ne sais pas trop pour
quelle raison, mais cela croît deux fois plus vite, cela a un impact
immédiat sur les besoins de construction pour les marchés
internes, C'est évident que cela peut avoir un impact sur les
marchés d'exportation aussi parce qu'on a toujours dit qu'on avait un
parc de 17 000 mégawatts pouvant être développé de
façon rentable. C'est un peu l'exemple des entrepreneurs ce matin, le
parc a 17 000 mégawatts. Nous pensons qu'il y a moyen d'en prendre un
morceau de cette tarte et le vendre plus cher aux Américains et que,
finalement, cela va nous revenir sous forme des centrales. On fait cette
hypothèse. Mais si la demande croît deux fois plus vite, c'est
évident que les marchés d'exportation seront diminués,
c'est tout à fait logique et normal. Parce que, à moins d'un
changement technologique fondamental, on a plus que cela en termes de
rivières et de possibilités de développement. Lorsqu'on
parle des mégawatts économiquement développables, on en a
de l'ordre de 17 000. On prévoit une croissance de 2,7 % d'ici à
l'an 2006. Si ce n'est pas 2,7 %, c'est 4 %. C'est évident qu'on va
avoir besoin de ces mégawatts pour le Québec et que des contrats
d'exportation ne pourront pas être signés. Cela, c'est très
clair.
Donc, ce n'est pas tellement un problème de financement, il
s'agit de prévoir, le plus exactement possible, les besoins internes. On
pense être sur une bonne piste avec l'ordre de 2,7 %. Vous avez vu nos
fourchettes ce matin, je pense que c'est 3,5 % et 1,5 %. Dans cette
perspective, on pense que, au point de vue du financement, on n'a pas de
problème. Les 17 000 mégawatts seront développés
pour le Québec, tôt ou tard. Le seul élément qu'on
ajoute, c'est qu'on dit: Plutôt que de les développer au rythme
uniquement de la demande québécoise, on peut les
développer en les devançant, en ayant des prix plus
élevés pour les marchés externes et en
récupérant ces centrales. Mais tôt ou tard, ils seront
développés. Le problème d'exportation n'intervient
là-dedans que sur le rythme de développement. Si le rythme est
plus fort à l'interne, vous allez en avoir moins pour l'exportation,
à moins d'une révolution technologique. Mais toutes choses
étant égales, les 17 000 mégawatts seront
développés pour le Québec et, avec l'exportation, si
possible, parce que cela va en payer une partie. Si la demande est trop forte
au Québec, cela servira pour le Québec, comme prévu.
Contrat de Central Maine Power
M. Gauthier: D'une autre façon, si Hydro-Québec
investit, par exemple, 30 000 000 000 $, elle a des besoins, elle doit couvrir
des intérêts, elle doit fournir une certaine capitalisation de ces
projets, j'imagine, non seulement j'imagine, mais il ne s'agit pas des
mêmes chiffres. Si HydroQuébec investit, dans la même
période, disons 36 000 000 000 $ au lieu de 30 000 000 000 $ ou 40 000
000 000 $ j'imagine que les sommes que doit fournir Hydro-Québec pour
couvrir intérêt et capital, remboursement de cet investissement,
ne sont pas les mêmes. Je sais, bien sûr, qu'un jour il va y avoir
des rentrées d'argent des ventes à l'exportation; est-ce qu'il ne
risque pas, à un moment donné, d'y avoir une différence
sur les tarifs à l'interne ou si les contrats signés, tel que le
dernier qui a été signé, se supportent entièrement,
est-ce que les profits générés en tout temps
réussissent à couvrir les frais, même ceux
enclenchés maintenant? Étant donné que l'argent va rentrer
plus tard - il y a quand même une période - j'aimerais que vous
nous clarifiiez cela.
M. Coulombe: C'est évident que, pendant que les
équipements se construisent, votre question, c'est: Qui va payer pendant
ce temps, pendant que les revenus n'entrent pas? Je pense qu'il faut distinquer
deux points; il y a le contrat de Central Maine Power et les autres qui vont
venir. Le contrat de Central Maine Power a ceci de particulier, comme on l'a
dit publiquement, que, durant les trois premières années, ce sont
des surplus qui vont fournir l'électricité des trois
premières années de ce contrat. Donc, c'est ce qui nous permet de
dire... Vous vous rappelez, dans le plan, on dit: Nos surplus finissent en
1995. Si on réalise notre objectif de 3500 mégawatts, le
début des travaux sera pour 1989 afin d'être prêts en
1995-1996. Donc, le contrat de Central Maine, c'est ce qui nous permet
d'affirmer catégoriquement que cela n'a pas d'impact sur les tarifs au
Québec.
Je ne peux pas vous faire la même réponse pour tous tes
autres contrats qui seront signés, je ne peux pas vous la donner parce
que, d'abord, je ne connais pas les prix qui vont signifier la fin de la
négociation. Je ne peux pas affirmer, aujourd'hui, que cela n'aura
jamais d'impact sur les tarifs durant la petite période où il va
falloir construire avant d'avoir des revenus. Je l'affirme pour le Central
Maine, et je viens de vous démontrer pourquoi; pour les autres contrats
à venir, je ne peux pas vous répondre aujourd'hui. Il se peut que
les prix ou d'autres choses puissent avoir un impact infime sur les tarifs. Je
vous répondrai en toute honnêteté quand on aura le
deuxième
contrat, quand on aura fait l'économique et la rentabilité
du deuxième contrat. Mais dans le contrat de Central Maine, on peut
l'affirmer catégoriquement, cela n'a pas d'impact sur les tarifs.
M. Gauthier: Ce contrat, et surtout cette formule de prix, c'est
l'élément intéressant dans le contrat avec Central Maine,
qui, éventuellement, risque d'être fort intéressant dans
les prochains contrats. La formule de prix garantit un bon profit, un profit
honnête à Hydro-Québec dans la mesure où au
départ, il faut bien le comprendre, on disposait tout de même de
surplus d'énergie qu'on vend à 0,063 $ au lieu de 0,01 $, sauf
erreur. C'est donc dire, M. Coulombe - je pense que vous l'avez dit et
j'aimerais le vérifier à nouveau - qu'au-delà du contrat
de Central Maine par rapport à la situation des surplus, on serait dans
une situation fragile de négocier un autre contrat de 900
mégawatts - gardons la même grosseur - avec la même formule
de prix.
M. Coulombe: Je serai extrêmement clair. Avec la même
formule de prix, il n'y aurait pas de problème. Ce que j'ai dit et ce
que je veux dire, c'est que, dans les autres contrats, je ne peux pas vous
affirmer catégoriquement, cet après-midi, qu'il n'y aura pas
d'impact sur les tarifs à court terme. Ce que je peux affirmer
catégoriquement, c'est que si cette formule de prix est retenue dans le
deuxième contrat, cela aura certainement une influence à long
terme sur les tarifs pour les Québécois, pour les baisser ou en
baisser la croissance. On peut être catégorique là-dessus,
à moins de se tromper radicalement en pleine négociation.
Le seul point où je veux être très clair et ne pas
m'engager au-delà de ce que je peux dire, parce que je ne le sais pas,
c'est la période dans les autres contrats qui s'écoulera entre le
moment de la signature et le moment où les travaux de devancement seront
nécessités par ce contrat-là et le début des
rentrées de fonds du contrat, qui peut être de trois, quatre ou
cinq ans, je n'en sais rien, je ne peux pas affirmer catégoriquement que
cela n'aura pas d'impact sur les tarifs. Il faudra que la population comprenne
que s'il y a un bénéfice énorme à moyen terme,
à court terme il peut y avoir des coûts. Ce n'est pas le cas dans
le contrat de Central Maine. Quant aux autres contrats, je ne le sais pas, je
n'ai pas de réponse. Quand on aura le deuxième contrat, on
répondra très clairement.
M. Gauthier: D'accord.
M. Coulombe: S'il y a une influence sur les tarifs, on le dira
clairement.
M. Gauthier: D'accord. Dans le cas de
Central Maine et probablement de quelques prochains contrats
Hydro-Québec part, pour sa négociation, sauf erreur, d'un prix de
devancement de construction de barrages. Est-ce exact que c'est un coût
de devancement?
M. Coulombe: L'encadrement de la négociation - je vais
céder la parole à Jacques Guevremont qui a été
là-dedans à temps plein - est exactement celui dont on vous a
parlé l'an passé lors de la commission parlementaire. On est
parti de ce qu'était notre vision de leur coût. On a dit: Vous
avez besoin d'électricité en 1992 ou 1995. On sait à peu
près combien cela vous coûtera pour construire une centrale. Ce
n'était pas de l'intuition, c'était basé sur des
études très précises. M. Guevremont a fait
référence à un indice Handy-Whitman qui suit toutes les
constructions de centrales au charbon. Donc, on a dit: On sait combien cela
vous coûtera. Cette seule phase-là a duré six mois de
négociation parce qu'ils nous ont dit: Ce n'est pas sûr que ce
soit ce que cela coûtera, ce sera peut-être moins cher. Là,
il y a eu de la négociation pour s'entendre sur ce que cela
coûterait. Nous connaissons nos coûts de devancement. C'est l'autre
partie de l'équation. On a dit: Pour devancer LG 1 de 1999 à
1997, ça nous coûte tant. Pour devancer LA Brisay de l'an 2000
à l'an 1999, ça nous coûte tant, etc. On avait cela d'une
partie de l'équation et on avait l'autre. Il y avait évidemment
une différence entre les deux, parce que nos coûts sont moins
élevés que les leurs pour construire une centrale. Entre les
deux, il y avait une marge. Les six autres mois de négociation ont
été pour dire que nous voulions aller au maximum de la marge et
qu'ils voulaient aller au minimum. Cela a fini comme n'importe quelle
négociation, pas mathématiquement dans le milieu, mais un peu
plus que le milieu en ce qui nous concerne. C'est donc ça l'encadrement
de la négociation.
Dans le contrat qui sera signé, il n'y a pas de
référence à nos coûts, il n'y a pas de
référence à leurs coûts, ce sont des prix qui seront
indiqués. C'est là la problématique de la
négociation.
M. Gauthier: D'accord. Vous faites également allusion,
dans le plan d'équipement, à la possibilité que la
déficience... D'abord, vous dites que la déficience des
réseaux américains, selon l'ensemble des probabilités,
serait aux environs de 5200 mégawatts, si ma mémoire est exacte,
et que sur ces 5200, Hydro-Québec peut penser raisonnablement aller
vendre et signer des contrats pour environ 3500 mégawatts. Ces chiffres
sont sensiblement les mêmes que l'an dernier. L'an dernier,
c'était exactement de cet ordre. On parlait de 3500 à 4500
mégawatts. Cette année, on parle de 3500 mégawatts
comme étant très probables, j'imagine, tout en pensant que 4500
mégawatts, ce n'est pas disparu pour autant. Je ne le sais pas.
M. Coulombe: D'abord, il faut dire que, dans le plan, c'est
5900.
M. Gauthier: 5900. D'accord.
M. Coulombe: Disons 6000. Ce qu'on a dit et ce qu'on maintient,
c'est 3500 et ce n'est pas invraisemblable 4500. Je vous ai mentionné,
ce matin, qu'on avait un scénario cible. On ne pouvait pas, dans cette
cible, commencer à trop jouer de 3500 à 4500, ainsi de suite. On
a pris 3500. Ce n'est pas la déduction mathématique. Des
probabilités de signer, est-ce que c'est plus fort 3500 ou 3700? Non. On
a pris 3500 parce qu'il fallait, à un moment donné, se brancher
sur un chiffre. Cela nous semble raisonnable d'après notre connaissance
du marché et cela nous semble une cible raisonnable. L'année
dernière, quand on vous disait cela, quelqu'un aurait pu, avec raison,
nous dire: Oui, 3500, et ainsi de suite. Ce qu'on peut vous dire cette
année, c'est: On a réalisé 900. Ce n'est pas 3500, mais
c'est 900, donc à peu près 25 %. J'espère, à la
prochaine commission parlementaire, ne pas être dans la position de vous
expliquer pourquoi il n'y a pas un autre 900 qui a été
manqué. J'espère pouvoir vous dire qu'il va y en avoir un autre
et qu'on sera rendu à 50 % et à 60 %. Mais il ne faut pas voir
là-dedans des chiffres absolus. II ne faut pas voir des
déductions mathématiques et dire que c'est 3500 et non pas 3700.
C'est une cible qu'on s'est fixée, compte tenu de notre connaissance des
marchés.
M. Gauthier: D'accord. Vous faites également
référence à un chiffre nouveau -c'est la première
fois que je le vois - avec un taux de variation de 0,5 % sur la demande aux
États-Unis, de 13 000 et quelques centaines de mégawatts.
J'aimerais savoir, M. Coulombe, si tel était le cas, si la demande
était significativement plus forte aux États-Unis et que, si on
allait chercher 13 000 et que le déficit était de 13 000 et
quelques centaines de mégawatts pour nos voisins, d'abord cela fait
référence, je pense, à un contexte économique
particulièrement intéressant et à un secteur de
l'énergie en croissance de façon significative... Est-ce que
c'est exact"?
M. Coulombe: Écoutez. Vous savez qu'on a un comité
consultatif américain composé d'ex-membres d'Utilité
publique américaine, de professeurs à l'Université
Harvard, du MIT, et ainsi de suite. À la dernière réunion,
il y a eu une longue discussion là-dessus et cela s'est
séparé en deux camps, les universitaires étant d'avis que
le taux de croissance de l'énergie dans le Nord-Est américain
était beaucoup trop élevé, alors que les praticiens et
ceux d'autres tendances disaient que ce n'était pas assez
élevé. Je pense qu'ils prévoient 1,4 dans l'État de
New York. Actuellement, en Nouvelle-Angleterre, tout le monde admet qu'il y a
un boom économique. C'était la thèse d'un des professeurs
du MIT, je crois, de dire que ce boom ne durera pas. C'était la
thèse d'un économiste du MIT. Est-ce qu'il a raison? Est-ce qu'il
a tort? Je serais incapable de vous le dire. Le chiffre de 13 500 était
dans le plan de l'an dernier; c'était 11 000...
M. Gauthier: 11 000.
M. Coulombe: 11 000, mais la variation, je pense...
M. Gauthier: C'était l'an 2000, l'an passé.
Là c'est l'an 2001.
M. Coulombe: Bon. Mais indépendamment de cela, c'est le
même raisonnement. On dit: On prend leur plan de développement. On
est très mal placé, comme on ne sera pas d'accord tout a fait que
quelqu'un de la Nouvelle-Angleterre vienne nous dire que notre plan de
développement est mal fait, on ne veut pas leur dire non plus. Donc, on
prend leurs chiffres et cela donne ces résultats-là. Ce n'est pas
une prévision. On émet simplement l'hypothèse de 0,5 de
plus de croissance. On ne le prévoit pas. Pas nécessairement. Ce
n'est pas une prévision. C'est une hypothèse de travail pour
montrer la sensibilité. Mais, en toute honnêteté, l'Hydro
n'a pas les moyens de faire une étude en profondeur dans
l'économie nord-américaine, du Nord-Est américain, comme
on le fait pour le Québec. Donc, on prend le chiffre de leur plan de
développement et on fait simplement l'hypothèse d'une croissance
plus grande. C'est une hypothèse, ce n'est pas une prévision. (16
h 30)
M. Gauthier: M. Coulombe, parce que les économies sont
quand même très reliées, surtout lorsqu'on parle du
Nord-Est des États-Unis, partant de l'hypothèse que cet optimisme
devient la réalité des choses et que la croissance de la demande
d'énergie est très importante et très significative, comme
on peut le voir, au Québec, j'imagine, puisque les économies sont
très reliées - je l'ai dit tout à l'heure - qu'il doit y
avoir aussi un impact. On peut penser qu'il y aurait, au Québec, une
demande beaucoup plus qrande, beaucoup plus significative. Cette demande serait
de quel ordre - pour bien se comprendre - dans le scénario
moyen? Vous avez travaillé là-dessus ici au Québec.
Aux États-Unis, le scénario moyen ou raisonnable, c'est environ
5900 ou quelque chose comme ça, mettons 6000 comme vous avez dit tout
à l'heure. Le scénario optimiste amène aux
États-Unis un chiffre de quelque 13 000. Au Québec, le
scénario optimiste - parce que si l'un se réalise, j'imagine que
l'autre devrait se réaliser également - ce serait quoi? Cela
représenterait quoi comme défi pour HydroQuébec à
l'interne, à ce moment?
M. Coulombe: Prenez la fourchette supérieure de nos
hypothèses qui est de 3,5 et cela vous donne à peu près le
même degré d'optimisme. Personnellement, je ne me prononcerais pas
pour dire qu'il y a une corrélation parfaite entre un boom
économique dans le Nord-Est et un boom économique au
Québec. Il se peut qu'ils ne viennent pas dans les mêmes
années. Il se peut qu'il y ait des causes différentes. Le boom
économique du Nord-Est et la reconversion industrielle vers la haute
technologie, dans le cas de la Nouvelle-Angleterre, cela ne s'est pas produit
au Québec. Entre les phénomènes économiques, je
serais bien embêté de dire s'il y a une corrélation
parfaite, mais ce serait plausible de penser que, s'il y a un boom
économique aux États-Unis, il va y en avoir un au Québec
avec quelques années de retard, comme d'habitude.
Donc, notre fourchette supérieure prévoit cette
hypothèse qui est d'environ 3,5 % au lieu de 2,7 %.
Énergie et environnement
M. Gauthier: Un des problèmes extrêmement importants
quand on parte d'exportation d'énergie aux États-Unis, c'est le
problème environnemental. M. Coulombe, j'aimerais savoir - non pas dans
le contrat puisqu'il n'est pas encore signé; sauf erreur, il y a une
lettre d'entente - si, dans l'entente avec Central Maine Power, des conditions
sont prévues au cas où vous ne pourriez pas livrer ou au cas
où eux autres ne pourraient pas acheter, cela est prévu.
Maintenant, il y a une entreprise dans laquelle vous êtes partie
conjointe, c'est-à-dire la fameuse ligne de transport sur le territoire
des États-Unis. J'aimerais savoir, M. Coulombe, s'il arrivait, par
exemple, qu'Hydro-Québec enclenche ici tout le processus des travaux
nécessaires pour faire face à ce contrat, tout le devancement
nécessaire, et que le lobby environnemental américain fasse en
sorte que vous ayez dans votre filiale, avec les Américains de
façon conjointe, des problèmes pour passer les lignes en temps et
lieu... On sait que le coût de devancement est extrêmement
élevé. Si le Québec bâtissait, par exemple, pour une
année trop rapidement un barraqe important, cela aurait des
répercussions extraordinaires. Comment, dans la lettre d'entente, se
départage la responsabilité qui ferait qu'Hydro-Québec
aurait commencé à faire des choses ici et qu'elle se verrait
bloquée comme partenaire dans la construction de la ligne aux
États-?nis par le lobby d'environnementalistes?
M. Coulombe: Est-ce qu'on peut avoir les fiches 14 et 15.
J'aimerais qu'on se rappelle que la lettre d'entente...
Une voix: Le dossier à l'exportation.
M. Coulombe: Les fiches 14 et 15. Ce n'est pas cela?
Une voix: Non.
Une voix: Le carrousel des exportations, s'il vous
plaît.
M. Coulombe: Pendant qu'il s'organise, la lettre d'entente
prévoit toute une série d'approbations très
précises qu'il faut absolument avoir en main avant de commencer les
travaux en question. Vous en avez un exemple. Ce sont les listes d'approbation
par lesquelles il faut passer. II faut que Central Maine Power passe par cela
avant que le contrat soit effectif. Évidemment, s'il y a quelque chose
là-dedans qui ne marche pas, il n'y a pas de contrat. Rappelez-vous que
- je vous l'ai dit tantôt -pour Central Maine Power, même si on
n'avait pas d'autre contrat que Central Maine Power, les devancements
d'équipements - on peut vous montrer la fiche après pour comparer
avec le plan cible - devancent LG 1 de 99 à 97. Si on n'avait pas
d'autre contrat que Central Maine Power, on a deux, trois, quatre ans devant
nous avant de faire quelque investissement que ce soit dans ce cas. Vous avez
la liste là...
M. Guevremont: C'est la deuxième page.
M. Coulombe: C'est la deuxième paqe de la liste des
approbations que Central Maine Power doit avoir en main avant que le contrat ne
devienne effectif. On peut regarder l'autre fiche qui est la liste des
approbations canadiennes.
M. Guevremont: C'est 13 et 14.
M. Coulombe: Ce sont les États-Unis.
M. Guevremont: C'est 13 et 14.
M. Coulombe: L'autre avant.
M. Guevremont: 12 et 13, je m'excuse.
12 et 13.
M. Coulombe: En tout cas, vous en avez une liste aussi
longue.
M. Guevremont: Cela l'est.
M. Coulombe: Voilà, vous l'avez. C'est correct.
Une voix: 12 et 13.
Une voix: 15?
Une voix: On ne veut pas 15, on veut 12 et 13. Cela c'est 14. On
veut 12 et 13.
M. Coulombe: Alors, toutes ces étapes devront être
franchies pour que le contrat entre en vigueur.
M. Gauthier: C'est donc dire que toutes ces étapes sont
nécessaires. Hydro-Québec n'engagera pas de dépenses
ou...
M. Coulombe: N'engagera pas de dépenses majeures.
M. Gauthier: Majeures. D'accord.
M. Coulombe: C'est évident qu'il va falloir
préparer l'ingénierie de certaines choses, ainsi de suite, mais
je parle de dépenses majeures, de grands investissements impliquant des
centaines de millions, tant que ces approbations ne seront pas données.
Mais en attendant, il va falloir faire des travaux, dépenser de l'argent
pour terminer les études, ainsi de suite.
Maintenant, cela a l'air épouvantable de montrer cela de cette
façon parce que c'est un peu affolant de voir toutes les étapes
à franchir. Mais, il ne faut pas non plus dramatiser parce que dans tous
les autres contrats, même d'énergie excédentaire, on a
passé à peu près à travers les mêmes
étapes, de façon cahoteuse certaines fois et de façon
harmonieuse d'autres fois. Quand c'est harmonieux, on n'en entend pas parler
nulle part. Toutes ces étapes ont été franchies pour tous
les contrats qu'on a signés avec les États-Unis depuis cinq ans.
On parle beaucoup de la sixième ligne, mais il faut bien penser que,
depuis cinq ans, on en a vendu pour l'équivalent de 5 000 000 000 $.
Dans des contrats d'envergure, toutes ces étapes ont été
franchies. Il y en a même actuellement, comme celui de NEPOOL où
les trois quarts des étapes sont terminées et il reste l'autre
quart à compléter tranquillement, pas vite.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval, comme vous avez utilisé votre temps en ce qui a trait aux
questions, on va passer de l'autre côté et on reviendra à
vous par la suite.
M. le député de La Peltrie.
M. Ciaccia: Si j'avais une question, est-ce que je pourrais la
poser et céder la parole ensuite?
Le Président (M. Charbonneau): Oui, c'est dans les dix
minutes qui vous sont imparties.
M. Ciaccia: J'ai seulement une question. Pour revenir aux
augmentations tarifaires, on vous a posé la question à savoir si
le contrat de Central Maine exigeait des augmentations tarifaires. Vous avez
dit catégoriquement, non. L'Opposition vous a posé d'autres
questions concernant les futurs contrats. Vous avez dit que l'une des raisons
pour lesquelles le contrat de Central Maine ne nécessitait pas
d'augmentation tarifaire était qu'il y avait des surplus au
début. L'Opposition vous a posé d'autres questions et vous avez
affirmé que vous ne pouviez pas, à ce stade-ci, affirmer
catégoriquement que les futurs contrats ne nécessitaient pas,
à court terme au début, des hausses tarifaires. C'est clair qu'il
y a ceux qui voudraient absolument établir le point que les exportations
vont nécessiter des augmentations tarifaires. Ce n'est pas ce que vous
avez dit, mais c'est la conclusion que certains vont tirer de vos propos.
Je vaudrais vous poser une question. Est-ce que c'est possible de
trouver d'autres formules dans les négociations? Est-ce que d'autres
formules pourraient être envisagées qui auraient pour effet de ne
pas augmenter les tarifs, même à court terme?
M. Coulombe: La réponse est extrêmement difficile
à donner, mais j'aurais tendance à dire oui.
M. Ciaccia: Je vais vous en donner seulement un exemple pour vos
commentaires. Supposons qu'une formule aurait un préfinancement,
supposons qu'un réseau, ce que je vous dis est très
théorique, peut-être que cela ne se produira pas comme cela, mais
on est dans le domaine de la théorie parce que les autres contrats ne
sont pas ici... Par un préfinancement ou par une participation dans le
financement ou selon une autre formule, pourrait-on trouver une formule par
laquelle, pour ce petit court terme de deux ou trois ans, il n'y aurait pas
nécessité d'auqmenter les tarifs?
M. Coulombe: Oui, les formules que vous mentionnez sont
envisageables, mais il y en a peut-être d'autres aussi qui sont moins
compliquées que celles-là qui pourraient être
envisagées. Une vente de puissance et d'énergie ferme pourrait
s'accompagner, pendant une certaine période, de ventes
excédentaires; cela ferait partie du même contexte global
de contrat. Je ne dis pas que c'est ce qu'on va suggérer. Je dis que
c'est une hypothèse qui, justement, si elle s'accompagne par un certain
segment d'énergie excédentaire dans une période de
l'année où nos coûts sont très bas, cela peut
bonifier ce contrat pendant deux ou trois ans. Encore une fois, je ne dis pas
que c'est ce qu'on va faire...
M. Ciaccia: Non.
M. Coulombe: ...je dis que c'est une hypothèse...
M. Ciaccia: Oui.
M. Coulombe: ...que, dans tel cas, cela serait
l'équivalent du contrat de Central Maine, c'est-à-dire que les
deux ou trois premières années, on éliminerait cette
hypothèse d'augmentation de tarifs.
M. Ciaccia: Exactement. Alors on ne pourrait pas déduire
aujourd'hui que, parce qu'il n'y a pas de surplus après le contrat de
Central Maine, nécessairement les tarifs doivent être
augmentés; ce n'est pas la conclusion à laquelle on peut en venir
aujourd'hui.
M. Coulombe: C'est rigoureusement ce que je n'ai pas dit. Je n'ai
pas dit que c'était cela, tout ce que j'ai dit, c'est que je
n'étais pas en mesure de démontrer clairement avec un contrat
à l'appui qu'il n'y a pas d'impact sur les tarifs ou qu'il y en a
un.
M. Ciaccia: Oui, mais ce n'est pas...
M. Coulombe: Ce que j'ai dit, c'est simplement que, lorsque le
prochain contrat arrivera, tout ce que je peux garantir à la commission,
c'est que s'il y a un impact sur les tarifs, on va le dire.
M. Ciaccia: Oui, et ce n'est pas...
M. Coulombe: Et s'il n'y en a pas, on va le démontrer.
M. Ciaccia: C'est possible d'envisager des formules...
M. Coulombe: ...des hypothèses qu'on peut envisager.
M. Ciaccia: ...des hypothèses où il n'y en aura
pas.
M. Coulombe: De toute façon, il ne faut pas se faire
d'illusion. Après avoir dit tout ce que j'ai dit, je peux aussi affirmer
que si les prix sont valables, l'impact potentiel - je ne dis pas obligatoire -
sera d'un ordre très restreint et on le démontrera en temps et
lieu. Comme on a dit, on peut envisager des hypothèses où on
pourrait éliminer l'impact. On le verra lors du deuxième contrat
et je ne veux pas m'engaqer aujourd'hui à dire qu'il y en a ou non. Je
veux tout simplement dire que, lorsqu'on aura le contrat, si on n'a pas
été capable de trouver de formule pour limiter l'impact pendant
deux ou trois ans, on va le dire clairement.
M. Ciaccia: Alors s'il n'y avait pas, et qu'on a
été capable de trouver les formules, vous allez le dire et vous
allez aussi évaluer à long terme que même si...
M. Coulombe: Exact, mais le long terme...
M. Ciaccia: ...une augmentation à court terme, les
bénéfices à long terme qui vont...
M. Coulombe: Mais le long terme, je pense qu'on...
M. Ciaccia: II est évident que, même pour
nous-mêmes, le gouvernement ne voudra pas signer un contrat qui va avoir
comme résultat d'être négatif pour augmenter les tarifs.
C'est le bon sens même.
M. Coulombe: Mais sur le long terme, on n'a aucune
inquiétude, il est évident que cela aura un impact
bénéfique sur les tarifs.
M. Ciaccia: Merci.
Lobby et libre-échange
M. Cannon: M. Coulombe, j'ai deux questions. On sait actuellement
que le Québec exporte tout près de 15 000 000 000 $ de
marchandises vers les États-Unis; près de la moitié va
à la Nouvelle-Angleterre et à New York. Parmi la gamme des
produits que nous exportons aux Etats-Unis, évidemment celle qui figure
comme élément le plus prépondérant, c'est, bien
sûr, l'électricité. Je pense que, en 1990, on estime
à tout près de 1 000 000 000 $ les ventes qui seront en
provenance des États-Unis. Une chose me tracasse un peu; j'imagine que
chez vous aussi, cela doit vous tracasser un peu lorsqu'on voit le fait que,
aux États-Unis, il y a une vague de plus en plus protectionniste. Bien
sûr, il n'y a pas de mesures législatives devant le Congrès
américain qui viseraient à restreindre l'accès de
l'hydroélectricité québécoise vers les
marchés américains, mais il y a la création d'une
coalition entre International Electric Power Trade, qui a été
formée il n'y a pas longtemps. Connaissant, la situation qu'on a connue
sur les bois d'oeuvre et des
phénomènes comme cela, j'aimerais que vous puissiez
commenter un peu et dire aux membres de la commission ce qu'Hydro-Québec
entend faire pour dire aux gens que, non, le gouvernement ne subventionne pas
nécessairement l'hydroénergie ici, au Québec. (16 h
45)
M. Coulombe: C'est la relation entre nos exportations et le
problème du libre-échange. Juste avant d'introduire ce sujet, il
y a un autre aspect que j'ai oublié dans l'autre réponse. Il ne
faut pas oublier que, avec les contrats d'exportation, on diversifie nos
risques financiers. Vous savez quel est l'impact de la baisse du dollar
canadien par rapport au dollar américain. Vous savez qu'on a une dizaine
de milliards d'emprunt en dollars américains. Vous savez quel coût
cela représente lorsqu'il y a des fluctuations. Avec les contrats
d'exportation, on diversifie un peu notre risque. En d'autres mots, cela a un
impact contraire et cela va stabiliser aussi l'aspect financier
d'Hydro-Québec. Cela va atténuer le risque de perte de change en
augmentant nos revenus en dollars américains. Cette forme de
diversification de nos risques est extrêmement intéressante pour
Hydro-Québec et va avoir un impact sur la situation financière
d'Hydro-Québec. L'impact sur les tarifs est extrêmement difficile
à calculer en détail, mais il va être incontestable parce
qu'on va stabiliser nos risques des deux côtés. C'est très
important au point de vue de la situation financière surtout lorsqu'on
va parler de revenus de 1 000 000 000 $, 1 500 000 000 $ ou 2 000 000 000 $ en
dollars américains. L'impact va être énorme sur la
situation financière d'Hydro. Strictement pour ce qui est du dollar.
Quant aux relations entre les exportations et le libre-échange,
c'est évident qu'il y a des lobbies américains contre
l'importation d'électricité canadienne ou
québécoise aux États-Unis, ne serait-ce que les lobbies du
charbon et les lobbies syndicaux. S'il y a moins de construction,
là-bas, c'est évident que cela les affecte au point de vue
syndical et il y a moins d'activités économiques au sens le plus
direct; donc, il y a des lobbies. Est-ce qu'ils vont se servir du contexte
protectionniste ou de libre-échance? C'est bien évident que
toutes les armes seront bonnes pour eux. Là-dessus, notre
stratégie, pour être très honnêtes, est qu'on n'y
fait pas face directement. On y fait face en travaillant concrètement
avec des compagnies et des États pour essayer de placer nos contrats et
c'est exactement ce qui est arrivé dans le cas de Central Maine,
à travers tout ce brouhaha. Il y a eu une négociation très
explicite et très claire et elle s'est terminée par une lettre
d'entente. On favorise, plutôt qu'un affrontement au point de vue des
lobbies qui, à notre avis, est un peu stérile.
Concernant le libre-échange, Hydro-Québec est très
bien placée, à notre avis, parmi les utilités canadiennes.
Tout simplement parce que, en toute objectivité, on est capables de
démontrer que le gouvernement du Québec ne subventionne en aucune
façon Hydro-Québec. De plus, la stratéqie
financière de Hydro-Québec nous oriente vers une entreprise qui a
une marge financière suffisante pour avoir un rendement sur
l'équité et un rendement sur son capital investi qui se compare
avantageusement à n'importe quelle utilité américaine,
dont plusieurs sont subventionnées de différentes façons.
Aussi, la structure de nos relations avec l'industrie, quand on a mis de
côté les rabais tarifaires purs pour aller dans le partage de
risques, c'est encore un avantage dans notre cas, parce qu'on peut affirmer
avec raison que ce ne sont pas des subventions à l'industrie qu'on
donne. C'est un partage de risques, c'est une relation d'affaires tout à
fait normale. On est donc très avantagé à
Hydro-Québec parmi les utilités canadiennes en ce qui concerne
nos structures financières et nos objectifs très explicites de
rentabilité, de rationalité de l'entreprise et de rendement sur
l'équité, qui sont les critères les plus
précis.
Dans cette perspective, nous pensons que la question du
libre-échange aura peu d'impact sur la stratégie d'exportation.
Je m'aventure beaucoup parce que je ne sais rigoureusement rien de la
façon dont va finir le libre-échange. Mais, compte tenu des
documents qu'on a en main, compte tenu des critères dont ils se servent
pour critiquer tel aspect du commerce entre les deux pays, nous pensons
être dans une excellente situation et de beaucoup supérieure aux
autres utilités canadiennes dans le contexte de l'exportation de
l'électricité.
M. Cannon: Une sous-question là-dessus. Le comité
dont je vous parlais, le Ad Hoc Coalition on International Electric Power
Trade, qui a été formé et qui est dans une phase
d'organisation, a effectivement comme objectif d'aller chercher de quinze
à vinqt "utilities", donc des entreprises ou des compagnies qui,
évidemment, vendent de l'hydroélectricité et ils en ont
cinq jusqu'à présent. Ma question spécifique est:
Etiez-vous au courant de ces agissements et est-ce que, déjà, la
stratégie dont vous avez parlé globalement... Est-ce qu'aux
États-Unis on a quelqu'un qui travaille au Congrès
américain, est-ce qu'on a un organisme? Qu'est-ce qu'on fait
concrètement?
M. Coulombe: Ce qu'on fait concrètement, fondamentalement,
c'est agir, négocier, signer des contrats. Cela, c'est notre
priorité absolue dans le minimum de... Comment dirais-je? Pas de silence
mais de...
Une voix: D'intervention à...
M. Coulombe: C'est cela. En d'autres mots, on multiplie nos
interrelations avec nos interlocuteurs. La position dans le Nord-Est
américain n'est pas celle du Colorado ou des États en bas de
l'Ontario, ainsi de suite, où vous avez un lobby de charbon et où
ils peuvent produire sur place, la question des pluies acides, ainsi de suite.
Ce n'est pas le réseau d'intervention qui est majeur en ce qui nous
concerne. On sait que ces entreprises, dans un marché qui nous favorise
de plus en plus, qui ne nous favorisait pas il y a quelques années parce
qu'on avait trop de surplus, mais qui nous favorise de plus en plus à
mesure que les années passent, comme elles retardent leur construction,
elles seront à un moment donné assises à la table de
négociation, comme cela commence à se produire. C'est cela, notre
stratégie de base, finalement.
Donc, toute la question des lobbies, on suit cela, et on a quelqu'un sur
place. D'abord, vous savez qu'on a un bureau à New York qui est en
communication avec tous ces mouvements, ces interventions. On n'a personne
à Washington et on n'a pas l'intention d'avoir quelqu'un. On a
d'excellents contacts là-dessus. On a notre comité consultatif
qui nous tient au courant régulièrement de ce qui se passe dans
son réseau personnel. Donc, nous sommes très informés.
Nous ne voulons pas intervenir d'une façon directe, en tant
qu'Hydro-Québec, parce qu'on est persuadé que notre
stratégie est la meilleure, c'est-à-dire de s'asseoir avec ceux
qui décident de signer un contrat ou de ne pas signer un contrat, et de
travailler au maximum.
Évidemment, je peux le dire avec un peu plus de certitude que je
le pouvais l'année dernière, quoique c'est exactement ce qu'on
disait l'an dernier aussi, parce qu'au moins, on en a fait un. J'espère
que l'année prochaine, on pourra dire: La stratégie s'est
avérée pas pire parce qu'on en a un deuxième, mais cela
reste à voir. C'est notre stratégie, à l'heure
actuelle.
M. Cannon: En changeant de sujet, M. Coulombe - peut-être
que M. Guevremont pourra répondre, ou M. Boivin - le département
de l'Énergie, aux États-Unis, vient de rendre public un rapport
qui s'intitule "Electric Power Supply and Demand for the Contiguous United
States 1986-1995", dans lequel on indique qu'il y aura une croissance de 22,9 %
durant cette période en termes de demande. On fait aussi l'analyse du
rapport qui avait été déposé par la North-East
Power Coordinating Council. Je pense que le rapport qui a été
déposé pour les gouverneurs vous est familier.
Évidemment, la conversion n'est pas faite parce qu'on parle de
gigawatts. On dit notamment qu'à New York, on prévoit durant
cette période une augmentation de 127 500 gigawatts à 145 752,
soit une augmentation de 14,3 %. Sous toutes réserves des tables de
comparaisons de gigawatts à mégawatts -je n'ai pas fait la
conversion - il y a quand même une augmentation. Aujourd'hui, dans vos
tableaux, j'ai noté que nous ne prévoyions pas, pour cette
période, une augmentation de vente d'énergie ou une augmentation
de la demande aux États-Unis, dans l'État de New York.
M. Coulombe: Vous faites référence à New
York précisément.
M. Cannon: Oui.
M. Coulombe: Notre conviction, c'est que New York n'a pas besoin
de puissance de base avant l'an 2000, d'après les chiffres de leurs
plans de développement à eux. C'est cela qu'on a indiqué
là-dedans.
M. Cannon: Cela, c'est 1,4 %.
M. Coulombe: Avec une croissance de 1,4 %, ces gens n'ont pas
besoin de puissance avant l'an 2000. Maintenant, ce sont leurs chiffres. Est-ce
qu'ils ont des stratégies, comme plusieurs soupçonnent, de
baisser volontairement la demande parce qu'ils sont coincés dans leurs
centrales nucléaires, au point de vue de la construction? Toutes les
hypothèses sont permises. Ce que nous disons dans des plans officiels -
notre plan est public, il est rendu chez les financiers de New York, ainsi de
suite - c'est qu'on ne peut se permettre de mettre en doute la parole des
autorités de NYPAL, des autorités de ces États. C'est pour
cela qu'on se donne une fourchette. Dans le cas de cinq dixièmes de plus
à New York, il y aurait un déficit de 2800 mégawatts. Si
au lieu d'être à 1,4 %, c'est à 1,9 %,
immédiatement, ils ont besoin de 2800 mégawatts.
La présentation de nos chiffres, il faut toujours se le rappeler,
ce ne sont pas des prévisions d'Hydro-Ouébec. On n'est pas
placé pour faire des prévisions dans ces pays.
M. Cannon: Je comprends.
M. Coulombe: On prend leurs chiffres et on donne une analyse de
sensibilité. D'ailleurs, dans le rapport des gouverneurs...
Prévision de la demande (suite)
M. Cannon: Voici ce que je voulais savoir. Le rapport dont je
vous parle, "Electric Power Supply and Demand for the Contiguous United States,
1986-1995", est-ce que vous en avez tenu compte lorsque vous avez fait la
prévision ou la planification qui
semble tout au moins...
M. Coulombe: On a tenu compte du rapport des gouverneurs, mais
sur ce rapport spécifique, je vais laisser parler Jacques.
M. Guevremont: On est familier avec ces prévisions de
demande, ce sont ces interlocuteurs qui ont fourni leur plan de
développement qu'on voit à la page 42 de notre plan de
développement. Or, les gens qui veulent acheter de
l'électricité ne se baseront pas sur un plan de
développement ou une demande qui n'est pas la leur, c'est-à-dire
qu'on peut avoir différentes opinions, les gens qui veulent acheter de
l'électricité ne vont pas construire au cas où ce soit
quelque chose de différent de leur plan de développement. C'est
bien hypothétique, dans le fond, qu'il en sorte une prévision par
un comité quelconque ou celui qui a même été soumis
aux gouverneurs parce que, en fin de compte, quand NEPOOL, les gens du Vermont
ou les autres nous disent: Notre demande, c'est cela. Ils ne vont pas acheter
quelque chose qui ne représente pas leurs prévisions à
eux. Comme nous, on ne construirait pas sur une prévision qui ne serait
pas la nôtre; c'est la même dynamique. On ne peut pas vendre de
l'électricité à quelqu'un sur la base du fait qu'on a,
nous, une croyance différente de leur demande.
M. Cannon: Pourriez-vous me dire, M. Guevremont, la croissance
actuelle...
M. Guevremont: De?
M. Cannon: ...d'énergie à New York?
M. Guevremont: 1,4 %.
M. Cannon: De prévision. À l'heure actuelle, c'est
plus élevé que cela.
M. Guevremont: De prévision.
M. Cannon: Comme en Nouvelle-Angleterre, c'est plus
élevé.
M. Guevremont: À court terme et comme la nôtre,
d'ailleurs. Si vous regardez notre prévision de demande, d'année
en année, cela se modifie. Par cette prévision de demande, ils
n'ont pas besoin de puissance avant l'an 2000.
M. Cannon: C'est le taux de croissance réel. Je ne veux
pas la prévision de 1,4 %.
M. Coulombe: Dans les deux cas, Nouvelle-Angleterre et New York,
c'est plus élevé que le 1,4 %, exactement, comme nous
prévoyons 2,7 % et on fonctionne à 5,6 % cette année et
l'année prochaine et peut-être encore... selon nos
prévisions.
M. Cannon: Donc, ce que je veux dire...
M. Coulombe: Mais la construction est en fonction d'une demande
à moyen et à long terme.
M. Cannon: D'accord, sauf qu'au moment où on se parle,
c'est plus fort que 1,4 %.
M. Coulombe: C'est juste.
M. Cannon: Je les ai ici. En Nouvelle-Angleterre, de janvier
à novembre 1986, 5,2 % alors qu'ils ont dans leur plan 2,6 % jusqu'en
2001. Selon les dates que je vous ai données, de janvier à
novembre 1986, 5,2 %. New York prévoit 1,5 % à long terme; ils
ont 2,5 % pendant la même période. L'Ontario prévoit 2,6 %
à long terme; ils ont eu durant cette période 4,4 %.
Nouveau-Brunswick, 2,7 %, 8,2 %.
M. Guevremont: Pour ajouter à cela, il faudrait dire que
le parc de New York, par exemple, en 1985, est de 30 800 mégawatts alors
que leur demande de pointe est de 22 500 mégawatts. Regardez la marge
entre leur parc actuel et leur demande de pointe. Tout de suite, vous avez la
réponse.
M. Cannon: Sauf...
M. Guevremont: Enfin...
M. Cannon: ... qu'on sait, M.
Guevremont, que leur parc, oui, représente cela, mais c'est un
parc qui est de plus en plus désuet.
M. Guevremont: Oui, mais il peut être
amélioré et cela coûterait peut-être moins cher que
d'acheter de nous.
M. Coulombe: D'ailleurs, si vous lisez le rapport des gouverneurs
de la Nouvelle-Angleterre, vous pouvez faire deux lectures du même
rapport. Vous pouvez en faire une lecture optimiste et une lecture pessimiste;
c'est énorme, la différence entre les deux. Ils vont vous dire:
On a besoin de tant de milliers de mégawatts, mais on peut faire de la
cogénération. Quelqu'un peut répondre: On ne croit pas
cela; ils n'en feront pas. On va faire de la conservation; quelqu'un peut
répondre: Ils ne réussiront pas à en faire. Ils vont
investir dans des vieilles centrales pour les rénover; quelqu'un peut
bien dire:. Non, ils ne le feront pas. Toute une série
d'hypothèses qui vont faire, que vous les acceptiez ou non, cela peut
varier de façon incroyable.
M. Cannon: En terminant, je voudrais juste vous faire lecture du
rapport qui a été déposé au département de
l'énergie, de ce
qu'il a dit relativement à cet élément: Beginning
with Summer 1993, it would appear that additional capacity would be desirable
either as new generating units or as additional purchases. In order to improve
the adjusted reserves from 1993 on, it may be useful to consider the
availability of Canadian capacity beyond the level now contemplated. C'est en
discutant des besoins du NPCC. (17 heures)
M. Guevremont: En ce qui concerne les besoins du NPCC, il faut
bien se comprendre. Le NPCC n'a pas de besoins. Il y a une
incompréhension. Le North-East Power Coordinating Council n'a pas de
besoins comme tels. C'est une organisation libre qui discute des
critères de fiabilité des réseaux...
M. Cannon: Non, j'en suis, M. Guevremont. Je vous livrais
l'essentiel des commentaires du rapport qui a été
déposé au département américain de
l'Énergie, sur ce qui avait été fait par le NPCC.
M. Coulombe: Au fait, il faut bien se comprendre. On n'est pas en
désaccord du tout avec ces rapports-là. Tout ce qu'on vous dit,
c'est que ce sont des rapports qui s'empilent les uns par-dessus les autres et
qu'il faut interpréter. Il y a une série d'hypothèses
là-dedans. On serait très heureux si cela se passait comme cela
parce que le marché serait encore plus grand que prévu. Donc, la
négociation serait plus intéressante pour nous autres et on
aurait de meilleurs prix. Tout ce qu'on veut dire, c'est qu'il faut attacher de
l'importance à la grande fresque, mais il ne faut pas trop attacher
d'importance aux petits morceaux parce qu'ils sont tellement contradictoires.
Ce qu'on veut, c'est de s'asseoir avec ceux qui décident d'acheter ou
non de l'électricité. C'est vers eux autres qu'on va.
M. Cannon: C'est bien sûr, vous avez raison
là-dessus. On pourrait parler aussi de Seabrook.
M. Coulombe: Exact.
M. Cannon: Par exemple, est-ce que, dans votre
réévaluation, cela va fonctionner ou non...
M. Coulombe: Exact.
M. Cannon: Ce que je retiens, c'est qu'on a des chiffres - sans
que ce soit trop conservateur - qui sont un peu en bas des conservateurs. Ce
devrait être un peu plus haut que ce qui est prévu.
M. Coulombe: C'est ce que je m'évertue à dire
à Jacques Guevremont quand il négocie.
M. Cannon: D'accord.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval.
M. Gauthier: Justement, M. Coulombe, je veux continuer dans le
même sens que mon collègue de La Peltrie. En prenant le chiffre de
13 900 mégawatts, qui m'intéresse particulièrement, et
considérant les autres façons dont les Américains peuvent
faire pour combler ce déficit, si, sur 5900, on peut penser aller en
chercher raisonnablement 3500 à 4000, est-ce que vous avez une
idée de la proportion que cela pourrait représenter sur 13 900
qu'on pourrait aller chercher advenant que ce scénario très
optimiste...
M. Coulombe: La seule réponse valable que je puisse donner
à cela, c'est que, si vous me garantissez que la demande
intérieure aura telle courbe dans les 20 prochaines années, on
pourra vous donner une réponse. Si on tient cela pour acquis...
N'oubliez pas que, dans l'état actuel de notre technologie, on vous dit
qu'il y a 17 000 mégawatts à développer au Québec
de façon économique. Peut-être que la technologie changera
dans dix ou quinze ans, je n'en sais rien, mais avec ce qu'on connaît
actuellement, il y a 17 000 mégawatts. Ils sont dans le plan, ils sont
nommés projet par projet. J'ai dit tantôt que c'était et
pour les marchés internes et pour les marchés externes. Cela me
surprendrait énormément qu'on construise des centrales
nucléaires pour exporter. Donc, l'avantaqe comparatif de
l'électricité est bloqué à 17 000 mégawatts.
Si la demande interne est de 10 000, il nous en reste X comme potentiel
d'exportation. Si la demande est de 12 000, il y a un potentiel X. Si la
demande est moindre... C'est une interrelation entre les deux parce qu'on parle
toujours d'équipements qui, tôt ou tard, serviront au
Québec. On ne parle pas d'équipements qu'on bâtit, avec
lesquels on va exporter et qu'on va démanteler ensuite. On parle
d'équipements qui, fondamentalement, sont prévus pour le
marché québécois. On estime ces équipements
à environ 17 000 mégawatts. On dit: On va en prendre un bloc. On
en a environ 27 000 ou 28 000 actuellement en production dans notre parc. On va
en ajouter 17 000. Est-ce qu'on va les ajouter dans 20 ans, dans 25 ans, dans
30 ans? Cela dépend de la demande interne. Actuellement, il y a
possibilité d'exportation. On se dit: Allons chercher au plus tôt
cette possibilité parce que cela valorise l'ensemble de notre parc,
ça baisse notre coût moyen comptable, ça baisse les tarifs
et ça donne de l'activité économique au Québec.
C'est le raisonnement
qu'on fait.
Je suis toutefois incapable de vous dire, si la demande augmentait plus
vite aux États-Unis et qu'il y avait un marché de 13 000, comment
on irait en chercher. Je pense que je ferais de la futurologie. On peut avoir
des objectifs, des souhaits, mais si vous me posez carrément la
question, je me dis que, lorsque les 3500 seront dans le sac avec de bons prix,
il se peut qu'il y en ait d'autres... Par exemple, l'Ontario est un
marché dont on parle peu à l'heure actuelle. Je vous l'ai
expliqué l'an passé, la situation est la même cette
année. On ne pense pas que l'Ontario puisse se développer avant
un an ou deux. Il faudra qu'ils règlent leur problème
nucléaire. Lorsqu'ils auront pris la décision de continuer ou non
dans le nucléaire, c'est évident qu'on aura un marché
extrêmement intéressant avec les Ontariens. Aujourd'hui, on n'est
pas capable de le compter nécessairement, la décision n'est pas
prise au gouvernement de l'Ontario et à Hydro-Ontario.
Donc, toute spéculation sur le... Ce sont des vases communicants.
Tout ce que je sais, c'est qu'on en a 17 000 à développer, que la
demande interne au Québec aura telle courbe, que cela va demander tant
de mégawatts, qu'on a l'occasion de profiter actuellement, pour les dix
prochaines années, de l'occasion d'exporter, devancer, baisser nos
coûts, et que cela profite au Québec. En dehors de cela, je ne
suis pas capable de vous répondre.
Vente à l'Ontario
M. Gauthier: Vous avez mentionné l'Ontario. J'en
étais rendu à vous parler des gens avec qui vous êtes
actuellement en négociation, sans vous faire dévoiler
évidemment des choses que vous ne voudriez pas dévoiler pour des
raisons de stratégie d'affaires. L'Ontario, c'est un marché
potentiel intéressant. Vous avez cité quelques chiffres
concernant la possibilité qu'on puisse vendre de
l'électricité à l'Ontario. J'aimerais que vous nous disiez
d'une façon plus claire, si vous pouvez le faire, dans l'ordre actuel
des choses, soit avec les prévisions de l'Ontario ou celles que nous
faisons pour cette province, à quel moment, à peu près, on
pourrait penser signer un contrat de vente d'électricité avec
l'Ontario et de quel ordre il pourrait être, dans un avenir
prévisible. Je ne vous parle pas de l'an 2025.
M. Coulombe: Dans le cas de l'Ontario, la première
hypothèse, la première question qu'il faut se poser, c'est:
Qu'est-ce que ces gens vont faire avec le nucléaire? On n'a pas la
réponse à Hydro-Québec; je pense qu'Hydro-Ontario ne l'a
même pas. Je ne sais pas si le gouvernement de l'Ontario est en train
d'en discuter. Des échéances gouvernementales en Ontario s'en
viennent et cela va préciser leur stratégie. À un moment
donné, ils vont être obligés de décider si la fin de
la construction de Darlinqton signifie la fin du nucléaire en Ontario ou
si ce n'est que le recommencement par d'autres centrales nucléaires.
S'ils décident de poursuivre la centrale nucléaire pour des
raisons qui leur appartiennent, notre marché se rétrécira
considérablement. S'ils décident d'abandonner la filière
nucléaire, et on ne le sait pas au moment où l'on se parle, il
est évident qu'il leur reste le charbon, il leur reste le Manitoba et il
leur reste le Québec. On pense qu'on est très bien placé
dans ce marché. Si toutes ces conditions étaient remplies, on
pense que ce ne serait pas déraisonnable d'aller avec 1500 ou 2000
mégawatts avec l'Ontario pour la fin des années quatre-vingt-dix.
En 1998 ou 1999, début de la livraison pour une période de 15 ou
20 ans, ce ne serait pas déraisonnable de faire cette hypothèse
aujourd'hui. Mais il ne faut pas oublier les préalahles. Il faut qu'il y
ait une décision politique, une décision administrative sur le
nucléaire, sur le charbon, sur leurs choix, et on n'a même pas
encore commencé à parler du prix.
M. Gauthier: Évidemment. M. Coulombe, à cet
égard, à la page 42 du plan de développement, mon
collègue me souligne qu'il y a justement une très petite pointe
de prévue pour l'Ontario à compter de l'an 2000. Il y a une
très petite pointe de couleur pourpre dans votre graphique qui, en tout
cas, semble nous dire...
M. Coulombe: C'est tout simplement parce qu'on n'a pas osé
se prononcer sur les décisions qui leur appartiennent,
c'est-à-dire le nucléaire. On indique, dans l'autre tableau qu'on
vous a montré ce matin, qu'à l'horizon 2000, en Ontario, la
fourchette varie entre 400 et 3100 mégawatts. Évidemment, 3100
mégawatts, cela suppose qu'ils vont prendre une décision entre
les sources d'énergie, mais ils auront besoin, selon cette fourchette,
d'entre 400 et 3100 mégawatts. La décision sur le
nucléaire, c'est strictement une décision qui leur
appartient.
M. Gauthier: M. Coulombe, j'y reviens encore et je le fais un peu
à saute-mouton, mais vous me le pardonnerez, étant donné
que vous aviez ouvert le front de l'Ontario, j'en ai parlé. J'aimerais
revenir à l'exportation avec nos voisins du Sud, là où les
perspectives sont nettement plus encourageantes. On entend tellement parler de
problèmes avec les fameuses lignes de transport d'énergie. On en
a une qui fait parler d'elle d'une façon remarquable depuis quelques
mois. Si on signe pour 3500 mégawatts - vous me pardonnerez mon
ignorance; peut-être avez-vous déjà inclus la
réponse quelque part dans vos documents; je ne l'ai pas vue;
j'aimerais donc que vous m'éclairiez là-dessus - avec les
États-Unis, en termes de lignes de transport d'énergie, qu'est-ce
que cela veut dire? Est-ce que la sixième ligne est suffisante pour
faire cela ou si cela prend une autre ligne, deux autres lignes? C'est quoi
l'équipement qui sera nécessaire dans le transport de
l'énergie pour combler ces 3500 mégawatts pour lesquels on
pourrait éventuellement signer?
M. Coulombe: Dans le plan de développement, vous avez,
à la page 60, deux lignes qui sont prévues, et sans rapport
nécessaire avec les exportations. Je reviendrai aux exportations
après.
M. Gauthier: D'accord.
M. Coulombe: Deux lignes sont prévues. C'est malheureux
là, on a un problème de vocabulaire, nous autres, parce que ce
qu'on appelle ici la Baie-James, la sixième ligne, j'espère ne
pas ajouter à la confusion générale, mais c'est la vraie
sixième ligne de courant alternatif. On va la rebaptiser. Il y a cette
ligne de prévue évidemment pour prévoir la construction de
LG 1 et vous avez sur la Côte-Nord, le suréquipement des centrales
de Manic qui vont nécessiter une autre ligne. C'est dans le plan. C'est
selon le scénario cible.
Pour revenir aux exportations, 3500 mégawatts, rappelez-vous
qu'il existe déjà des interconnexions. Je vais demander à
M. Jacques Guevremont de les mentionner de façon précise. Il
existe des interconnexions actuellement. Il existe des lignes aux
États-Unis actuellement qui sont interconnectées. Notre
stratégie, c'est de se servir de ces lignes. On a actuellement une
possibilité d'exportation au moment où on se parle, d'ici 1990,
je crois de 5000...
M. Guevremont: On a 6265 mégawatts de lignes
d'interconnexion avec l'ensemble de nos voisins.
M. Coulombe: Là on transite de l'énergie
excédentaire. Notre stratégie de la deuxième phase, c'est
de remplir ces lignes d'énergie de puissance et d'énergie ferme.
Le problème du transport dans les 3500 mégawatts - je dis bien de
transport global, des grandes lignes - ne devrait pas se poser. Je dis bien ne
devrait pas, parce qu'encore là, les contrats, je ne les ai pas en main.
Cela se peut que ce soit modifié. Dans notre stratégie actuelle,
on se sert des lignes, des interconnexions qui existent ou qui vont exister
d'ici 1990, on l'espère, pour transiter les futurs contrats de puissance
et d'énergie ferme.
Quant à la troisième phase, j'inclus là-dedans
l'hypothèse de l'Ontario, New York, etc., on a dit que sa
caractéristique nécessiterait des lignes de nouvelles
interconnexions. Là, il se peut qu'on se dirige vers des
problèmes de lignes de transport dans ces contrats. C'est cela.
Maintenant, c'est évident que quand on parle des interconnexions
actuelles, je parle bien de lignes de transport. Je ne nie pas le fait
qu'à un moment donné cela puisse prendre un petit bout de ligne
quelque part pour interconnecter. C'est un problème différent
sauf pour les terrains de ceux sur lesquels elle passe. Globalement, c'est un
problème différent.
Si vous voulez parler du problème du transport, c'est
évident que cet élément manque dans le plan. On a dit, la
semaine passée, que d'ici deux mois on rendrait public le plan de
développement du transport. Mais indépendamment des aspects qu'on
va mettre dedans, il faut toujours se rappeler que l'équation n'est pas
si compliquée que cela. Je fais encore référence aux 17
000 mégawatts. Je fais encore référence aux sources
d'énergie que vous connaissez. Elles sont toutes nommées dans le
plan. Vous savez où sont les centrales, vous savez où sont les
bassins hydrauliques, vous savez où est la population. À moins
qu'il y ait un changement technologique majeur, 17 000 mégawatts, cela
veut dire sept, huit lignes de plus au Québec.
Je pense que ce n'est pas mystérieux. C'est l'histoire des 20
dernières années. Cela va être peut-être l'histoire
des 20 prochaines années, à moins que survienne un changement
technologique qu'on ne prévoit pas à l'heure actuelle. Bon.
Maintenant, ces huit lignes ou ces sept, huit lignes dont on va parler plus
abondamment dans deux mois, ne se construiront pas dans une journée, ni
dans un an. L'une va se construire en telle année, l'autre quatre ans
après, huit ans après. Le rythme d'implantation de ces lignes va
être différent selon la discussion qu'on a, le rythme de
développement de la croissance interne et le rythme de
développement des exportations. Mais tôt ou tard, encore une fois,
sous réserve de changements technologiques, on espère que le
Québec va profiter à fond du développement de ces 17 000
mégawatts à des coûts concurrentiels à n'importe
quelle forme d'énergie. Et, à moins que quelqu'un nous renseiqne
ou à moins que quelqu'un nous informe que la technologie existe, cela va
prendre des lignes de transport. Québec va devoir y
réfléchir, en examiner l'impact sur l'ensemble du territoire et
les divers problèmes que cela pose. Nous, de toute façon, c'est
un débat qui ne nous répugne pas. On souhaite et on est
prêt à mettre notre partie sur la table. Les gens
réfléchiront à cela. Le problème de l'exportation
n'intervient pas tellement là-dedans parce que tôt ou tard il va
falloir les avoir les lignes pour le Québec.
Le problème de l'exportation vient devancer ou en modifier le
parcours dans certains cas. Mais fondamentalement, cela ne change pas le
problème réel du Québec qui a 17 000 mégawatts
à développer et huit lignes à construire. (17 h 15)
M. Gauthier: M. Coulombe, revenons à l'hypothèse de
votre plan de développement, qui fait état des 13 900
mégawatts et qui a fait sursauter certaines personnes positivement, dans
certains cas, et plutôt de façon inquiétante, dans d'autres
cas. Si l'hypothèse de 13 900 mégawatts se réalisait,
comme déficience de capacité chez nos voisins et si - encore
là, on fait de la futurologie comme vous avez dit tantôt, mais
puisque c'est mentionné dans le plan d'Hydro, j'imagine qu'il y a un
minimum de sérieux là-dedans et cela a d'ailleurs
été repris, par M. Hébert, à certaines occasions -
Hydro-Québec réussit de façon agressive à
accaparer, sur 13 900 mégawatts, 8000 mégawatts, cela peut
représenter... Parce qu'il faudrait livrer... Cela serait enthousiasmant
de construire 8000 mégawatts pour vendre aux États-Unis, en
supposant qu'on ait une formule de prix acceptable et qu'on puisse
récupérer les barrages au moment où on en a besoin pour
notre consommation interne. Advenant que tous ces éléments sont
réglés, cela peut représenter quoi 8000 mégawatts -
vous excuserez mon ignorance, mais il y a beaucoup de gens qui ne connaissent
pas la réponse - si on signait, d'ici dix ans ou d'ici sept ou huit ans,
avec les États-Unis un 8000 mégawatts dans l'hypothèse des
13 900 mégawatts soulevés dans le plan? Cela veut dire qu'on peut
s'attendre à voir passer combien de lignes au-dessus de nos têtes
pour livrer cette énergie aux États-Unis?
M. Coulombe: Vous parlez des grandes lignes de transport?
M. Gauthier: Les grandes lignes.
M. Coulombe: L'équation ne sera pas changée. C'est
exactement celle que je viens de vous donner, peu importe le scénario
que vous prenez. La seule chose qui va changer, c'est
l'échéancier. Vous allez avoir encore vos 17 000 mégawatts
à développer et vous allez avoir encore, éventuellement,
les mêmes bassins de population au Québec et aux frontières
américaines, à moins qu'il y ait un gros bouleversement, mais je
ne pense pas qu'on trouve beaucoup de clients dans le Nord. On sait à
peu près la configuration et on revient toujours à la même
équation. Pour transporter 17 000 mégawatts, cela prend sept ou
huit lignes. C'est seulement l'échéancier qui peut être
accéléré, si on a beaucoup de succès dans les
exportations, ou retardé, si la demande interne est plus lente que
prévue, ou ainsi de suite. L'équation est toujours la même.
Je parle des lignes de transport.
M. Gauthier: Oui, d'accord.
M. Coulombe: Je ne parle pas des bouts de ligne aux
frontières pour raccorder des choses. Je parle des grandes lignes de
transport.
M. Gauthier: J'aimerais savoir, M. Coulombe, puisqu'on a
parlé un peu, tout à l'heure, du contrat avec CMP, cette petite
entreprise dont la taille est très modeste en comparaison avec
Hydro-Québec. Je sais que vous avez, je pense, une diapositive qui peut
nous donner une bonne idée de la grosseur de CMP par rapport à
Hydro-Québec. Après cela, j'aurai une question à vous
poser quand on aura constaté les choses.
M. Coulombe: Est-ce qu'on peut trouver rapidement le
numéro?
M. Guevremont: Je ne crois pas que nous l'ayons.
M. Coulombe: Malheureusement, on ne l'a pas dans notre...
M. Guevremont: Ce qu'on peut vous dire, c'est que c'est la plus
importante compagnie d'électricité au Maine. Il y en a trois: II
y a Bangor Electric, Maine Public Services et Central Main Power, la compagnie
avec laquelle on traite. Cette compagnie a eu, en 1985, une pointe de 1400
mégawatts et le total de l'État du Maine est d'à peu
près 1700 ou 1800 mégawatts.
M. Coulombe: Pour vous la décrire dans d'autres
dimensions, c'est une compagnie qui fait à peu près un chiffre
d'affaires de 500 000 000 % par année. Elle a à peu près
500 000 clients. Actuellement, ils ont fait beaucoup de rationalisation
financière et se sont dégagés de l'hypothèque en
énergie nucléaire, etc. C'est une compagnie qui, d'après
Moody's, Standard & Pour, est bien cotée. Il y a une relation de
dette-équité de l'ordre de 45-55. Donc, c'est une compagnie saine
et qui s'est assainie encore plus en se débarrassant de ses
hypothèques en énerqie nucléaire. C'est la situation.
Maintenant, si votre question est: Comme c'est dix fois plus petit
qu'Hydro en ordre de grandeur et en revenus, si cette compagnie va mal,
qu'est-ce qui se passe? D'abord, on pense qu'il n'y a aucune raison qu'elle
aille mal parce qu'elle est un peu dans la même situation d'un
marché qui existe, qui croît, etc. Deuxièmement, on pense
que, dans la situation d'énergie dans ce coin, ni l'État du Maine
ni aucune autorité ne pourra permettre qu'une mauvaise situation
financière... Cela pourrait peut-être
découler dans une faillite pour les actionnaires parce que c'est
une compagnie privée, mais le besoin d'électricité ne
changerait pas. Les mécanismes d'approvisionnement, avec les
investissements qui seraient faits, ne changeraient pas. C'est une
hypothèse qui, pour nous, n'est pas un risque réel. Il y aurait
peut-être une période un peu bousculée pour négocier
certaines choses, mais on y a pensé, on y a réfléchi, on
l'a examinée et ce n'est pas une hypothèse qui nous
inquiète.
M. Gauthier: Ma question ne se dirigeait pas véritablement
dans ce sens-là, quoique j'apprécie l'explication. On en serait
venu à en parler à un de ces moments donnés, un peu plus
tard pendant la commission possiblement. Là où cela me
préoccupe un peu, j'aimerais comprendre les choses d'une façon
convenable. Il s'agit finalement d'une compagnie dont le potentiel est de
1300...
M. Guevremont: La pointe en 1985 était de 1300
mégawatts.
M. Gauthier: Bon, 1300 mégawatts. Ce qui m'étonne
un peu, c'est qu'une compagnie qui produit l'équivalent de 1300
mégawatts signe un contrat de 900. J'imagine que cela ne doit pas
être pour ses propres besoins qu'elle signe un contrat aussi
énorme, qui permet presque de doubler, à peu de chose
près, sa capacité. Peut-on comprendre que Central Maine Power va
revendre de notre électricité à des endroits autres que
sur son territoire et pourrait-on savoir dans quel ordre et où?
M. Guevremont: D'abord, les livraisons commencent en 1992. Elle
achète actuellement 200 mégawatts au Nouveau-Brunswick. Vous avez
raison de penser qu'elle en revendra une partie - d'ailleurs, une
référence a été faite à cela dans la lettre
d'entente - pour un certain temps. Mais, en 1992, les livraisons commencent
à 400 mégawatts et, en 1995, elles seront à 600. Ce n'est
qu'en l'an 2000 qu'on atteindra les 900 mégawatts. Or, vu la
façon dont le contrat est structuré, une certaine quantité
sera revendue par Central Maine Power, mais une bonne quantité sera
absorbée aussi par le Maine parce que, comme vous le voyez, le contrat
s'échelonne et il atteint 900 mégawatts uniquement en l'an
2000.
M. Gauthier: Pourrais-je savoir, M. Coulombe, la raison - c'est
très certainement une excellente raison, je n'en doute pas, mais
j'aimerais que vous nous la fassiez connaître - qui a motivé
Hydro-Québec à investir, je dirais en compagnie de Central Maine
Power, dans la ligne de transport d'énergie aux États-Unis?
D'abord, je pense que c'est nouveau qu'Hydro aille investir à
l'extérieur. Quel est l'intérêt pour HydroQuébec
d'agir de cette façon?
M. Coulombe: II y a deux raisons fondamentales et une
troisième qui est très importante. La première, c'est que,
dans le cadre des négociations, la compagnie nous a fait cette
offre-là. Il est évident que, pour la compagnie, cela bonifie un
peu l'ensemble du contrat que d'avoir Hydro-Québec comme partenaire dans
son territoire. On a très bien compris cela. J'en arrive à la
deuxième raison fondamentale. On a dit oui à cette proposition
dans le cadre suivant. L'une des inquiétudes des marchés
américains est l'aspect de la fiabilité, de savoir si les
contrats seront respectés et beaucoup de questions qui se posent.
L'intention qui a été soulevée plusieurs fois par notre
comité consultatif et d'autres personnes, c'est d'essayer d'être
de plus en plus perçu comme un citoyen corporatif américain.
Donc, cette deuxième raison nous a semblé importante, compte tenu
du fait qu'il n'y a pas de risque ou très peu de risque,
là-dedans parce que la législation qui régit les questions
du transport d'électricité est un peu comme nos réqies
ici: la Régie de l'électricité et du gaz et ainsi de
suite. La compagnie se présente et a un rendement sur ses
investissements qui est accepté par la régie, et cela coûte
tant pour transporter l'électricité.
Notre participation là-dedans sera très limitée en
termes de comptant, si on veut, d'investissements très précis; on
l'évalue, les négociations ne sont pas terminées, à
une quizaine de millions. Là-dessus il y a un rendement assuré,
comme je vous ai dit tantôt, par le mécanisme des réqies,
qui accepte chaque année les frais de... Donc, cela ne sera pas une
comptabilité ou ce n'est pas une compagnie qui va influer sur le
résultat d'Hydro, sinon en ajoutant un dividende ou un profit à
Hydro. Mais ce ne sera pas mêlé à Hydro et ainsi de suite,
ce sera une compagnie "at arm's length" qui aura sa propre comptabilité,
sa propre organisation, dans laquelle on sera partenaire à 30 %; c'est
cela en termes d'équité. Maintenant, on va partager aussi les
responsabilités du financement. Mais c'est un financement qui va reposer
sur un actif de l'ordre de - je dis bien, les négociations ne sont pas
terminées - 200 000 000 $ en termes d'investissement total. Mais l'actif
va être là, une partie de l'équité, il y a un
rendement sur l'équité et c'est une compagnie en soi.
Il y a une troisième raison avec laquelle je voudrais être
prudent, compte tenu de la discussion qu'on a eue sur le libre-échange
et ainsi de suite. Je pense, moi aussi, que cela pourrait avoir un impact sur
la pénétration de Québécois dans ces milieux,
à capacité, à compétence et à prix
égaux.
Je ne veux pas provoquer d'autres débats, mais je pense que cela
ouvre un marché pour nos entrepreneurs. Je ne dis pas que cela sera
demain matin, mais c'est un potentiel. Lorsqu'on devient un citoyen corporatif
avec un minimum de risques cela peut être intéressant. Mais c'est
la troisième raison.
M. Gauthier: D'accord. M. le Président, je ne sais pas
où j'en suis dans le temps.
Le Président (M. Charbonneau): II vous reste trois minutes
sur le bloc de dix minutes de questions que vous posez actuellement. Par la
suite, ce sera le député de Vimont et le député de
Bertrand. Il nous reste à peu près une demi-heure d'ici 18
heures. Je vous indique que les réponses ne comptent pas dans le temps
d'un député.
M. Gauthier: Cela dit, M. le Président, vous me causez des
problèmes, mais j'accepte cela volontiers, je sais que mes
collègues ont des questions importantes à poser. Je vais juste
revenir, c'est pour cela que cela paraît un peu mêlé,
j'aurais aimé pouvoir revenir dans un autre bloc un peu
séparé. De toute façon, je vais poser ma dernière
question puisqu'il me reste trois minutes. Vous comprendrez que je vais essayer
de ramasser cela.
M. Coulombe, je voudrais revenir encore une fois sur la question de la
base de prix sur laquelle on va négocier dans nos ventes
éventuelles avec nos voisins. Quand on va excéder la
quantité de 3500 mégawatts, si on réussit
éventuellement à le faire, j'ai vu dans le plan de
développement - à tout le moins c'était dans le plan de
développement de l'an dernier et je pense que c'est repris cette
année - qu'il y a trois phases à l'exportation. Vous en avez
parlé ce matin lors de la présentation, et quand on excède
les 3500 mégawatts de vente potentielle à l'extérieur, on
tombe dans cette partie qu'on appelle la troisième phase. La question
des prix me préoccupe toujours dans cette phase. Cela ne semble pas
défini. J'aimerais savoir si vous pouvez nous donner le plus de
précisions possible. À partir de quel coût l'Hydro pense
être en mesure de négocier au-delà des 3500? Je pose la
question. Elle a son sens parce qu'il y a toujours un scénario possible
optimiste auquel Hydro va peut-être devoir faire face incidemment.
M. Coulombe: Pour la question des formules de prix, pour que cela
soit très clair, pour la phase 1, formule de prix en fonction des
énergies de substitution, donc 80 % du prix de l'énergie que cela
prend pour produire de l'électricité dans le coin. Phase I, c'est
la formule de prix, cette phase est terminée même si la livraison
n'est pas terminée. Pour la phase II, ce qu'on essaie et qu'on a
réussi dans le cas de
Central Maine - est-ce qu'on va réussir pour les 2600 autres qui
restent? Je n'en sais rien - notre cible est de fixer des prix en fonction des
coûts évités par l'acheteur. C'est ce qu'on a
réalisé pleinement dans le contrat de Central Maine et on
espère continuer sur cette hase pour la deuxième phase. Quant
à la troisième phase, pour la question des prix, on émet
l'hypothèse à l'heure actuelle que cela va être surtout en
fonction de nos coûts. Cela va être un "mark up" sur nos
coûts. Cela va être une marge bénéficiaire. Remarquez
que quand vous signez le contrat à la fin de tout, ces deux formules se
ressemblent beaucoup. Quand on regarde le prix final, si on veut. Je vous ai
dit tantôt que le coût évité était là,
nos coûts étaient là et c'est entre les deux qu'on a
négocié. Quand on signe, le prix précis est
l'équivalent d'avoir une partie de nos coûts et d'avoir mis un
"mark up" de X. Mais notre position de négociation, à notre avis,
est beaucoup plus intéressante à partir des coûts
évités. C'est pour cela que certains de nos clients ne veulent
pas en entendre parler. Ils veulent partir du coût de LG 1. Nous disons
non. Je ne sais pas si les trois formules de prix sont claires.
M. Gauthier: Vous avez dit que la formule de prix, à
partir des coûts évités, est extrêmement
intéressante actuellement. J'en conviens, bien sûr, mais elle
devient de moins en moins intéressante au fur et à mesure que la
quantité augmente.
M. Coulombe: C'est exact. C'est pour cela qu'on va probablement
revenir à nos coûts dans la troisième phase. À moins
qu'il y ait de nouvelles inventions. On va probablement revenir à nos
coûts réels.
M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup, bien à regret,
j'avais bien d'autres choses... (17 h 30)
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Vimont.
Programme de marketing
M. Théorêt: Tantôt, mon collègue de La
Peltrie a fait état du lobbying par les producteurs de charbon. On sait
qu'il y a un autre groupe de lobbyistes fort importants, ce sont les groupes
écologiques, préoccupés par la question environnementale.
Lors de notre dernière rencontre de deux jours avec les parlementaires
américains à Montréal, plusieurs nous ont dit clairement:
Nous, on est vendus à l'idée d'acheter de
l'électricité, on en connaît les avantages. On
connaît l'expertise d'Hydro-Québec, et c'est pour cela qu'on
négocie avec elle parce que c'est elle qu'on aimerait bien avoir chez
nous. Mais on aimerait que vous veniez dire à
notre population quels sont les avantages d'acheter
l'hydroélectricité.
Ma question est la suivante: Existe-t-il, dans le moment, un programme
de marketing, ou est-ce qu'il y en a un de prévu, qui s'adresse
directement à la population de la Nouvelle-Angleterre ou de New York:
Voici les avantages de l'hydroélectricité par rapport à
d'autres sources d'énergie. Existe-t-il un moyen pour contrer ce lobby
qui me semble important, selon les représentants américains?
M. Coulombe: Vous me demandez si Hydro-Québec a un
programme de marketing s'adressant à la population américaine? La
réponse est non, on n'a pas de programme. Si vous me demandez: Est-ce
qu'on devrait en avoir un? Je suis presque tenté de dire qu'on ne
devrait pas non plus en avoir. Je sais que ce n'est peut-être pas
partagé par tout le monde. Nous pensons que des interventions directes
auprès de la population américaine nous causeraient plus de
problèmes, car elles réveilleraient les lobbies plus qu'autre
chose. On peut se tromper là-dessus, remarquez que plusieurs
stratégies sont possibles. Je parle d'Hydro-Québec, je ne parle
pas du gouvernement du Québec, qui peut faire cette vente auprès
des hommes politiques de là-bas; cela est un autre débat. Je
parle d'Hydro-Québec en tant qu'entreprise. On tient
énormément à être considérés comme une
entreprise par nos partenaires avec lesquels on va signer, je pense que ce ne
serait pas tout à fait de mise d'aller carrément dans leurs
plates-bandes et vanter une chose avec laquelle ils sont obligés de se
tailler une place à travers tous les organismes de
réglementation, leurs propres députés, leur propre
législature, etc. On pense que ce ne serait pas stratégiquement
bon. Maintenant, on ne dit pas qu'on a la vérité
là-dessus, mais c'est notre hypothèse de travail, à
l'heure actuelle.
Deuxièmement, on voulait absolument démontrer par un
contrat que c'était possible d'en avoir. Jusqu'à il y a un an,
nos contrats avec les États-Unis concernaient
l'électricité excédentaire et beaucoup de gens disaient:
Hydro-Québec va peut-être construire de toute façon et, si
elle construit, il y aura encore des surplus et on sera capable d'avoir de
l'énergie au prix de l'électricité excédentaire.
Là, on vient de démontrer que ce n'est pas vrai et s'ils veulent
avoir de l'électricité, il faudra qu'ils paient pour. Je pense
que le contrat avec Central Maine vient de déclencher un processus qui
peut être intéressant vis-à-vis de nos autres clients.
Enfin, il y en a un!
II y a aussi une autre raison. On vous a parlé de la question de
fiabilité du réseau, André Mercier vous l'a
expliqué ce matin. Cette question, on veut la régler
définitivement d'ici un an, avant de trop déborder les sujets. On
se donne un an non seulement pour négocier un autre contrat, mais pour
régler le problème de fiabilité. Tant qu'il ne sera pas
réglé, les lobbies auront des arguments. Si on règle cela,
on pourra peut-être entrer dans une autre ère de communication,
mais, à l'heure actuelle, c'est à peu près cela, notre
stratégie.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Dans le cas de la nouvelle filiale,
à la suite du contrat qui vient d'être signé, est-ce qu'il
y a une politique bien arrêtée au niveau de l'achat des services
et des retombées que le Québec aura par rapport à ce qui
se passera aux Etats-Unis?
M. Coulombe: Dans la lettre d'entente, il y a une annexe qui
décrit la structure globale. Vous savez qu'on veut signer le contrat
vers l'été, si certaines approbations ont été
obtenues avant. Durant cette période, on va négocier un autre
document que le contrat d'électricité et qui s'appelle "Entente
entre actionnaires". Les négociations réelles, paragraphe par
paragraphe de cette entente vont commencer dans les jours qui suivent.
Là-dedans, on va examiner notre rôle, on va examiner notre
situation dans la compagnie même, on va examiner notre rôle au
conseil d'administration, les pouvoirs qu'on veut se réserver sur
certaines choses tout en agissant comme un actionnaire minoritaire, parce qu'on
n'est pas majoritaire dans cette compagnie, et on va aborder dans l'entente les
problèmes auxquels vous faites allusion. Ils seront abordés dans
l'entente entre actionnaires, dont la négociation va commencer dans
quelques jours.
Devancement des travaux -
pénalités
M. Parent (Bertrand): Merci. L'autre question concerne le
devancement des travaux tels que planifiés actuellement dans le plan,
dans le but de fournir de l'électricité aux Américains
à la suite du contrat qui a été signé. Je sais
qu'il y a des clauses de pénalités prévues par rapport au
fait que lorsque viendra le moment de se brancher comme tel, on peut
décider, pour une raison ou pour une autre, de ne pas l'utiliser. Ma
question est la suivante. L'enclenchement de ces coûts, ce qu'on a
appelé le coût de devancement de ces travaux, même
l'ensemble des coûts, puisque ces travaux ne sont pas nécessaires
aux besoins du marché intérieur, est-ce que les mesures
prévues - parce qu'il pourrait arriver toutes sortes de choses quant aux
clauses de pénalité - sont suffisantes pour
qu'Hydro-Québec soit capable de supporter les frais encourus?
M. Coulombe: II y a plusieurs éléments dans votre
question. Il y a la question des pénalités, et je voudrais que
Jacques Guevremont explique au moins la structure même des vraies
pénalités qu'on va avoir, ou qu'ils auront, selon tel
scénario. Mais il y a l'autre dimension aussi qui est plus globale,
c'est-à-dire l'ensemble des investissements. Vous vous rappellerez que
notre cible de 3500, il va falloir l'atteindre d'ici deux ans ou deux ans et
demi. Cela déclenche le programme de devancement qui vous a
été expliqué dans le programme cible, qui se situe vers
l'année 1989. Il est évident que s'il n'y en a pas 3500
exactement, il va falloir avoir des hypothèses. Si on en a 2500 dans le
sac ou 2800 et qu'il en manque 300, est-ce qu'on le fait quand même?
Est-ce qu'on devance tout de suite ou non? Là, cela va dépendre
aussi de la demande intérieure.
Notre scénario cible, c'est que les investissements majeurs de
devancement commencent à ce moment-là. Donc, c'est dans les deux
prochaines années et demie qu'il va falloir réévaluer la
situation, demander: Est-ce réaliste, les 3500, ou non? Là, il y
aura des décisions à prendre. Si on a atteint notre cible, les
travaux commencent; si on ne l'a pas atteinte, il va falloir examiner la
situation. Donc, pour les grands investissements - je parle des grands
investissements, je ne parle pas de l'ingénierie préliminaire,
etc., qui représente quand même des sommes importantes, selon
certaines comparaisons, mais qui sont minimes par rapport aux milliards de
dollars investis sur 10 ou 15 ans - on a deux ans ou deux ans et demi pour voir
la souplesse devant nous pour s'adapter là-dedans.
Si d'ici deux ans et demi ou trois ans, par exemple, dans le cas de
Central Maine, on n'a pas réussi à passer à travers la
majeure partie des permis, là, il faudra se poser de sérieuses
questions. Donc, c'est tout ce scénario qu'il faut examiner, mais c'est
prévu. Vous comprenez la séquence des événements.
On ne s'embarquera pas là-dedans si la cible n'est pas atteinte, ou
n'est pas atteinte en grande partie.
Parce que si on ne parle que du contrat, rappelez-vous que le
devancement nécessité par le Central Maine, ce n'est pas LG 1 en
1989, c'est LG 1 en 1991-1992, seulement le contrat de Central Maine. Il faut
se le rappeler; ce sont les 3500 qui déclenchent le processus. Si on
regarde les pénalités du contrat lui-même, je pense que
Jacques peut en expliquer certains éléments et je pense que c'est
assez important de comprendre cela parce que là, on a vraiment des
barrières qui nous protègent énormément.
M. Guevremont: Des pénalités, évidemment, on
pourrait en parler pendant une heure, je n'ai pas l'intention de prendre autant
de votre temps. Les pénalités comme celles de ne pas livrer, par
exemple, sont assez importantes dans un tel contrat et celles de ne pas
prendre, de leur côté, sont très importantes. Si on fait
l'hypothèse qu'en 1993, en dollars US, il leur en coûterait 64 $
le mégawattheure, dans le cas où ils ne prendraient pas
l'électricité, il faudrait quand même qu'ils paient 59 $ le
mégawattheure, et on garderait l'énergie. En d'autres mots, cela
devient une pénalité énorme puisque, si notre
électricité vaut ce prix à ce moment-là, non
seulement ils seront obligés de payer 59 $ le mégawattheure,
s'ils n'acceptent pas la livraison, mais nous resterons avec
l'électricité, qui pourrait valoir à peu près 64 $.
Dans le cas où Hydro-Québec ne livrerait pas, on aurait à
payer 20 $ le mégawattheure, mais on garderait
l'électricité qu'on n'a pas livrée. C'est un type de
pénalité pour non-livraison à partir de problèmes
dans notre réseau de production et transport et chez eux de la
même nature. C'est ce genre de pénalité qu'il y a.
Au sujet de la date, pour que le contrat soit valable, il faudrait que
les livraisons commencent en 1992 et pas plus tard qu'un an et demi plus tard,
autrement les parties ont le droit de se retirer si, pour une raison
quelconque, on ne peut pas s'en sortir. Il faudra alors réajuster nos
programmes de construction en conséquence, comme l'a expliqué M.
Coulombe.
M. Parent (Bertrand): Une dernière question qui touche la
libéralisation des échanges à 3.3.1. Vous mentionnez dans
votre exposé que, bien sûr, tous les ratios sont fort importants
pour ne pas être interprétés du côté
américain comme étant une entreprise subventionnée et
particulièrement les ratios qui, par rapport au rendement sur l'avoir
propre... Dans votre redressement ou dans votre proposition où vous
demandez de la marge de manoeuvre, il est essentiel de rétablir
différents ratios actuellement. Ma question est à savoir si, au
niveau du libre-échange, si, pour une raison ou pour une autre, cela
débloquait de ce côté-là et qu'on se ramassait dans
une situation relativement à court terme où des ententes seraient
signées, Hydro-Québec ne pourrait pas, à court terme, je
parle d'ici un an ou deux, se trouver dans une situation et être
pénalisée.
M. Coulombe: Je ne crois pas tout simplement parce que...
À moins que le gouvernement n'oblige Hydro-Québec à
changer radicalement de stratégie, je pense que c'est très clair
dans le plan de développement. L'interprétation des financiers ou
des analystes financiers ne se trompe pas là-dessus. C'est tellement
clair comme objectif que d'ici un an ou deux, il ne peut rien se produire.
À moins qu'il y ait changement de stratégie complète, je
ne pense pas que cela ait de l'impact d'ici un an ou deux.
Par contre, si, de façon systématique, ces analystes se
rendaient compte que c'est impossible d'atteindre ce rendement-là, le
problème global dont vous parliez tantôt se poserait, mais je ne
pense pas qu'à court terme cela ait de l'impact, même si on
reste... Actuellement, on est aux alentours de 4\ %, même si
l'année prochaine on ne monte qu'à 5 % ou 6 %, cela aurait peu
d'impact et on est capable de démontrer que, toutes choses étant
égales, on reconstitue notre marge de manoeuvre avec des tarifs autour
ou en bas de l'inflation, tout simplement par le jeu des surplus qui deviennent
de l'électricité régulière à deux fois et
à trois fois le prix. Actuellement, on vend dans les chaudières
à deux fois moins cher que l'électricité
régulière. Aussitôt que cela embarquera dans le
régulier, nos ratios vont se replacer. Là-dessus, je ne vois
aucun problème d'interprétation à court terme à
moins d'un changement radical de stratégie.
Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre. M. le
député d'Ungava avait aussi des questions mais si vous
voulez...
M. Ciaccia: J'aurais deux petites questions.
Le Président (M. Charbonneau): Allez-y!
M. Ciaccia: Si on prend comme référence le cas de
Central Maine, pourriez-vous nous indiquer le prix moyen ou le prix du
kilowattheure de l'électricité qui sera vendue aux
Américains et le comparer avec le tarif L grande puissance? Pouvez-vous
faire la même chose, sur la même question en ce qui a trait au taux
de rendement?
M. Guevremont: La diapositive no 6 de l'exportation, s'il vous
plaît.
Cette diapositive vous montre l'évolution prévue du prix
du contrat en rapport avec le tarif L. Vous vous apercevez qu'il y a une marge
considérable entre le tarif L et les prix prévus pour le contrat.
Si on va en...
M. Coulombe: C'est un tarif L qui croît à peu
près au même rythme que l'inflation, avec un facteur d'utilisation
comparable à celui du contrat. On compare ces deux choses-là tout
simplement parce que ce sont deux produits comparables. On ne peut pas comparer
le contrat de Central Maine au prix de distribution au Québec, parce que
tous les coûts de distribution ne sont pas dans ce contrat. C'est Central
Maine qui s'organise avec cela.
M. Guevremont: Ce sont des livraisons en gros ici. Le prix, en
1985, est d'à peu près 0,06 $ comparativement au tarif L qui est
de combien?
Une voix: 0,026 $. (17 h 45)
M. Guevremont: 0,026 $. C'est à partir de 1985 que
commencent les indexations, M. le ministre, pour ce contrat.
M. Ciaccia: Si je comprends bien, ce genre de contrat
élimine vraiment les possibilités que notre
électricité soit vendue à de meilleures conditions aux
entreprises américaines et qu'on vienne ainsi diminuer l'avantage
concurrentiel de nos entreprises. Il y a là assez de marge.
M. Coulombe: C'est exact, parce que, pour qu'une entreprise
puisse s'installer, qui a besoin de beaucoup d'électricité...
Pour une entreprise dont le facteur d'utilisation d'électricité
est très faible, cela n'a pas d'importance; mais pour une entreprise
dont les coûts de production sont fortement influencés par le
coût d'électricité, cela prendrait quelqu'un de masochiste
pour aller payer deux fois et demie plus cher ailleurs.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Cela va.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va.
M. le député de Roberval, est-ce que vous avez d'autres
questions? Vous nous avez indiqué, tantôt, que vous auriez
souhaité avoir plus de temps.
M. Gauthier: Vous me faites faire, M. le Président, des
efforts de synthèse et, après, vous me demandez de les
défaire. Une seule question en terminant; de toute façon, il est
17 h 50. Effectivement, le type de contrat avec le produit de haute gamme
d'Hydro-Québec est beaucoup plus intéressant que les contrats
précédents, car ceux-ci ne servaient, finalement, qu'à
écouler des surplus d'énergie. Dans le même sens de ce que
le ministre vient de demander, quand on parle de taux de rendement d'un
contrat, on se croit obligé, ne serait-ce que par curiosité, de
regarder quel est, proportionnellement à l'électricité
vendue à l'interne, le taux de rendement des contrats de surplus. C'est
très faible; je sais que le prix est dérisoire, compte tenu du
prix réel, mais on n'a pas le choix. C'est préférable que
de laisser couler l'eau dans la rivière. J'aimerais connaître un
peu...
M. Coulombe: En fait, ce que vous voulez comparer, ce sont les
prix auxquels on vend notre énergie excédentaire par rapport au
prix que les Québécois paient.
M. Gauthier: Oui.
M. Guevremont: L'excédentaire à l'extérieur
du Québec, en 1987, c'est autour de 20 $ à 25 $ le
mégawattheure. Le prix de référence du contrat ici,
où commencent les indexations, c'est un peu plus de 0,06 $,
c'est-à-dire 60 $ le mégawattheure. Il y a un multiple
important.
M. Gauthier: Je m'excuse. J'ai l'impression qu'on ne s'est pas
bien compris. On a vu qu'à l'interne, par exemple, le consommateur
domestique québécois paie un prix X le kilowattheure. Le contrat
de Central Maine Power est beaucoup plus intéressant. Il est aux
alentours de quelque 0,06 $. Des contrats existent actuellement qui sont des
ventes de surplus qu'on n'avait pas le choix de vendre à rabais. Cela
représente quoi comme prix?
M. Guevremont: Parlez-vous au Québec ou à
l'externe?
M. Gauthier: À l'extérieur.
M. Guevremont: On n'a aucune obligation. Quant aux contrats que
nous avons actuellement, que nous alimentons, il n'y a aucune obligation de la
part d'Hydro-Québec. Au moment où on est capable d'écouler
ces surplus sur le marché québécois ou ailleurs à
un meilleur prix, on abandonne ces marchés. Des conventions
d'interconnexions que nous avons nous laissent complètement libres
d'interrompre ces livraisons. On ne le fait que pour se départir. Je
peux vous donner le prix qu'on retire de cela.
M. Gauthier: Si vous permettez, par rapport au prix de revient
comptable, cela représente quoi les sommes qu'on retire de cela? Je sais
que le prix n'est pas ce qu'on voudrait avoir évidemment. J'aimerais
avoir une idée de ce que cela représente en moyenne.
M. Guevremont: À l'Ontario, par exemple, l'interruptible
qu'on a vendu l'an passé se situait à peu près à
0,017 $. Maintenant, quel est le revenu comptable, je ne sais pas.
M. Boivin: Pour répondre à votre question, on a vu
ce matin que les ventes régulières au Québec, donc, les
ventes qu'on fait à nos clients québécois selon les tarifs
normalisés, nous apportent un taux moyen de rendement de 11,4 %. Les
ventes qu'on fait d'énergie excédentaire au Québec, soit
l'énergie qu'on vend pour les bouilloires, nous apportent un rendement
négatif de moins 31 %. Les ventes d'énergie ferme qu'on fait aux
États-Unis présentement - parce qu'on a quelques petits contrats
avec le Vermont -nous rapportent un rendement de 51 %. Les ventes
d'énergie excédentaire qu'on fait au Canada, aux provinces
voisines, nous apportent un rendement négatif de moins 12,5 %. Les
ventes d'énergie excédentaire qu'on fait aux États-Unis
nous rapportent un rendement de 2,5 %. Ce sont les données pour 1986. Je
ne sais pas si cela répond à votre question. Cela fait beaucoup
de chiffres.
M. Gauthier: Oui, cela répond très bien. C'est
exactement le parallèle que je voulais avoir. On comprend,
évidemment, l'intérêt de remplacer au plus vite
l'énergie excédentaire par le produit de haut de gamme qui est
beaucoup plus rentable. Je vous remercie beaucoup, compte tenu de l'heure, M.
le Président.
Le Président (M. Charbonneau):
Écoutez, je pense qu'aucun autre membre de la commission a
manifesté l'intention d'intervenir à nouveau. À l'heure
qu'il est, je vais ajourner les travaux de la commission à demain, 10
heures, alors que nous reprendrons jusqu'à 12 h 30 sur le plan
d'équipement et les questions d'environnement. Par la suite, demain
après-midi, nous aborderons la situation financière et les
tarifs. Mesdames, messieurs, bonsoir.
(Fin de la séance à 17 h 52)