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(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission parlementaire de l'économie et du travail
reprend ses travaux ce matin dans l'exécution de son mandat qui est
d'analyser et d'étudier la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec.
Lorsque nous nous sommes quittés hier, le député de
Roberval venait de terminer une intervention. Je devrais donner la parole au
député de Rosemont, mais...
Une voix: ...l'organisation...
Le Président (M. Charbonneau): ...sur l'organisation des
travaux, je pense que je vais céder, pour quelques instants, la parole
au député de Roberval.
M. Ciaccia: On est tous de bonne humeur ce matin?
M. Gauthier: Ah! M. le ministre, même si on a
terminé le travail à trois heures et trente ce matin, on est en
excellente forme.
M. le Président, hier on a eu des discussions avec le ministre
concernant le temps qui nous est imparti ce matin. On a fait un effort de
compression, nous aussi, et voici l'ordre du jour que je suggère pour la
fin de nos travaux. Toute la question de la tarification et de la gestion
financière d'Hydro a été regroupée et on la
terminera -c'est mon collègue de Bertrand qui abordera cette section -
on devrait normalement être capable, en une trentaine de minutes, d'en
couvrir les principaux éléments.
J'aurais des questions à poser quant aux efforts de gestion
d'Hydro-Québec, les efforts de rationalisation des dépenses, etc.
Je vais demander au président, par une simple question, de prendre au
moins une bonne dizaine de minutes pour nous expliquer un peu ce qui s'est
passé sous cet aspect au cours des dernières années.
Enfin, il restera un petit bloc où une couple de points divers seront
abordés. Cela veut dire, en gros, qu'aux environs de midi on devrait
avoir terminé nos travaux, je pense bien.
M. Ciaccia: Très bien, M. le Président.
M. Gauthier: Si cela convient au ministre.
Le Président (M. Charbonneau);
D'accord. Dans ce cas, je vais néanmoins céder la parole
au député de Rosemont.
La tarification (suite)
M. Rivard: M. le Président, nous sommes tous ici des
députés qui représentons la population. Dans mon cas,
c'est le comté de Rosemont. Dans le comté de Rosemont, il y a 21
000 portes, c'est-à-dire que, derrière chacune de ces portes,
vous avez un client et moi j'ai des électeurs. Vous demandez une hausse
de tarif qui a quand même deux caractéristiques susceptibles -
même si elle est raisonnable, à votre point de vue - de choquer la
population.
D'abord, cette hausse est supérieure à celle des deux
dernières années, vous l'avez démontré hier, et
vous concédez aussi qu'elle est supérieure au taux d'inflation.
Ce que je cherche ce matin avec mes collègues, c'est, dans le sens
où le précisait le député de Roberval hier, une
sorte de vulgarisation du discours pour que nous soyons en mesure,
auprès de nos électeurs, de bien traduire les objectifs que vous
poursuivez lorsque vous leur demandez cet effort additionnel.
Première question. Vous nous présentez, dans votre
mémoire sur la tarification proposée pour 1986, en page 10, un
tableau qui, pour des consommations mensuelles types, indique une facture
mensuelle et une augmentation en sous. Voilà une façon de
présenter les chiffres qui frappe l'imagination populaire.
Je vous réfère maintenant à la page 96 de votre
document principal où vous présentez, au tableau 30, les
avantages tarifaires procurés par Hydro-Québec à
l'ensemble de ses clients réguliers. Je comprends que, par clients
réguliers, vous entendez non seulement le secteur domestique, mais
également tous les autres secteurs auxquels vous fournissez de
l'électricité.
Voulez-vous, M. le président, traduire dans un langage aussi
simple que celui de la page 10 de votre mémoire, par exemple, pour une
consommation mensuelle du type de 1200 kilowattheures, nous indiquer combien
mon électeur ou mon électrice paierait à Toronto, à
Moncton, à Boston et à New York?
M. Coulombe (Guy): Avant de donner la parole à M. Boivin,
je voudrais simplement, à
titre d'introduction, dire qu'il est évident qu'une augmentation
de 5,4 % est une augmentation qui, dans le contexte actuel... Les arguments
fondamentaux pour convaincre tous les consommateurs
d'électricité, il faut en donner plusieurs parce qu'il est
évident que ce n'est pas facile dans le contexte où l'inflation
est ce qu'elle est et où la pression sur les salaires et tout ce qui
s'ensuit, se font sentir partout. Je pense qu'on ne se fait pas d'illusions sur
la capacité réelle de le faire comprendre intégralement.
C'est quelque chose qui va toujours rester.
Par contre, en examinant froidement la situation, nous pensons -
là, on peut se tromper parce qu'on n'est pas dans ce domaine - vraiment
que l'ensemble des consommateurs d'électricité perçoivent
que la pression du dollar et la pression du prix du baril de pétrole
sont énormes. Les consommateurs pourraient dire: Pourquoi
Hydro-Québec, l'an dernier, n'a-t-elle pas prévu la baisse
radicale du baril de pétrole?Autrement dit, l'an dernier, au
lieu d'être de 2,5 %, on aurait pu arriver avec un pourcentage de 3,5 %
ou 4 % et, cette année, au lieu de 5,4 %, on aurait pu arriver avec 4,8
% ou 5 %, etc. C'est rigoureusement exact sauf que, ce qui s'est passé
entre décembre et février concernant le prix du baril de
pétrole, on avoue ne pas l'avoir prévu. Dans ce domaine, on est
parfaitement à l'aise parce que nous sommes comme toutes les compagnies,
y compris les compagnies de pétrole, qui n'avaient pas vu venir le coup
non plus. C'est donc un phénomène qui nous a frappés et
qui, par conséquent, aura des répercussions sur les tarifs,
évidemment.
Évidemment, la chute du dollar canadien, on l'avait
prévue. La preuve, c'est que dans le plan, notre hypothèse de
0,715 $ pour notre dollar se maintient parce que cela se promène
là-dedans au moment où on se parte. Mais après avoir dit
cela, je pense qu'il faut effectivement faire un effort maximal de
vulgarisation et peut-être que M. Claude Boivin peut donner plus de
renseignements là-dessus.
M. Boivin (Claude): Oui. Au point de vue des comparaisons, en
fait, comme vous le mentionniez dans le plan de développement, on donne
des comparaisons qui sont globalisées. Si on voulait regarder les
comparaisons de factures types d'un client résidentiel domestique pour
les villes que vous avez mentionnées, je pourrais vous citer plusieurs
chiffres de plusieurs factures types. Pour simplifier, peut-être qu'on
peut prendre une facture type de 1000 kilowattheures par mois. Pour une facture
type de 1000 kilowattheures par mois, le client d'Hydro-Québec, à
compter du 1er mai, à la suite d'une hausse de 5,4 %, paierait 41,10 $.
Le même client facturé à
Moncton, au Nouveau-Brunswick, paierait 60,88 $. Dans la ville de
Toronto, ce même client serait facturé pour un montant de 50,90
$.
Maintenant, si on veut faire également des comparaisons avec des
villes américaines à Boston, ce même client, en dollars
canadiens, paierait 135,86 $ et, dans la ville de New York, 198,97 $.
M. Rivard: Voilà le genre de langage...
M. Ciaccia: C'est en dollars américains qu'ils
paieraient...
M. Boivin: Non, les chiffres que je vous mentionne pour Boston et
New York sont convertis en dollars canadiens.
M. Ciaccia: Ils sont en dollars canadiens...
M. Rivard: Voilà le genre de message qui est susceptible
de frapper l'imagination populaire. Cependant, je voudrais, encore une fois au
nom de cette population que je représente, souligner à vous tous
que, dans un comté comme le mien, le revenu moyen de la population se
situe à 20 % en bas de la moyenne du revenu des gens de l'île de
Montréal et que, dans une paroisse en particulier, j'ai 40 % de cette
population qui vivent sous le seuil de pauvreté. Encore une fois, toute
augmentation est une augmentation qui est très mal vécue.
Deuxième question, M. le Président. Dans le discours que
je dois forcément utiliser auprès des électeurs pour
traduire vos problèmes et vos objectifs financiers, j'amerais bien
pouvoir utiliser le chapitre que vous nous donnez en page 37 et suivantes sur
la qualité du service. Je suis particulièrement
préoccupé par le dossier de la continuité du service. M.
le Président, en termes de pannes du réseau, où se
situe-t-on en 1986 par rapport à il y a deux, trois, quatre ou cinq ans?
Quel est l'avenir immédiat? Qu'envisagez-vous comme mesures?
M. Coulombe: Sur la question de l'amélioration du service,
il est évident que toute notre stratégie depuis quelques
années est d'investir dans ce domaine. Je ne peux pas vous donner ce
matin... Je n'ai pas avec moi les chiffres, et je ne sais pas si mes
collègues en ont, mais ce sont des statistiques qui existent à
Hydro quant au nombre de pannes, ainsi de suite. Seulement pour situer le
problème, pendant les années d'intense construction à
Hydro, il est évident que l'utilisation du capital était surtout
orientée vers ce domaine de la construction. En 1983-1984, devant la
modification au plan des équipements, la baisse des investissements, on
a décidé de reprendre du
retard qu'on avait pu accumuler dans ce domaine. On a affecté,
seulement dans le réseau de la distribution, un budget
supplémentaire de 500 000 000 $, qui va se dépenser de 1984
à 1987-1988, pour rétablir dans plusieurs zones de la province la
qualité du service qui s'était un peu
détériorée, dû au problème de l'entretien et
ainsi de suite.
Donc, ce programme est en marche. C'est un programme qu'on anégocié avec les syndicats, parce que cela impliquait
énormément les syndicats et on a fait des ententes
précises pour multiplier les travaux faits dans ce domaine.
Dans le domaine des pannes à HydroQuébec, il faut bien
penser qu'on a deux types. Il y a les pannes qui sont dues à des
accidents: verglas, et ainsi de suite, que vous connaissez bien et il y a aussi
ce qu'on appelle des pannes planifiées, c'est-à-dire des
arrêts de livrer de l'énergie parce qu'il faut faire des
réparations ou changer des appareils. Quand on parle de planifier, on
avertit autant que possible les clients que, de telle heure à telle
heure, il va y avoir des travaux. C'est un problème qui est devant
Hydro-Québec pour les cinq, dix, quinze prochaines années et qui
sera assez complexe parce qu'il touche au secteur de la santé et de la
sécurité. À Hydro-Québec, les syndicats sont de
plus en plus préoccupés, comme nous d'ailleurs, du
problème de la santé et de la sécurité. C'est tout
le problème des travaux sous tension. Vous savez qu'historiquement
beaucoup de travaux se faisaient lorsque l'électricité passait
dans les fils. Il sera de moins en moins possible de faire cela et cela va
exiger de la part d'Hydro-Québec une adaptation à ces nouvelles
valeurs de !a santé et de la sécurité qui va impliquer des
investissements au point de vue technologique et qui va impliquer des rapports
différents avec les employés. C'est un problème qui est
réel et qui va toucher la continuité du service. Nous y attachons
une très grande importance de même qu'avec les syndicats. On a 160
comités sur la santé et sécurité, et c'est un
problème qui est en haut de l'agenda, les travaux sous tension. Cela
affecte énormément le dossier de la continuité.
Il faut donc séparer les causes des... Je pense qu'on
n'évitera jamais le verglas dans notre milieu, les accidents et ainsi de
suite, mais notre hypothèse est que l'argent qu'on a mis dans le
réseau de distribution va certainement améliorer d'environ 15 %
la continuité du service lorsque cette étape sera
terminée.
On a mis 500 000 000 $ supplémentaires dans les réseaux de
transport et répartition pour aussi en assurer la qualité du
service. Ces 500 000 000 $ sont en train d'être dépensés
soit dans le réseau de transport soit dans le réseau de la
distribution au niveau des lignes et des postes. Cela aussi va améliorer
la qualité du service. On estime qu'en 1987 tout notre système de
"monitoring", si je peux prendre ce terme, des pannes, des causes et des
effets... On a fait un immense inventaire de tous les équipements de
base pour les transformateurs, les poteaux et ainsi de suite pour en savoir
plus long là-dessus parce qu'on avait aussi pris du retard
là-dessus. On pense qu'en 1987 notre système va être
complet.
Ce sont donc des efforts très précis. On a profité
d'une baisse dans la construction pour investir dans la distribution, le
transport et la répartition.
M. Rivard: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Sur la
question tarifaire, afin de bien comprendre finalement ce qui entoure la
proposition d'Hydro-Québec de 5,4 %, j'aimerais avoir quelques
explications sur l'analyse du cadre financier ou des prévisions
budgétaires pour l'année 1986. Je vais essayer de ne m'en tenir
qu'à l'année 1986 puisque c'est l'année qui nous
préoccupe; les autres, étant des prévisions triennales,
pourront être révisées l'année prochaine.
Dans le tableau de la page 83, j'aimerais que vous nous expliquiez
rapidement comment il se fait qu'on se retrouve avec une très faible
augmentation des prévisions budgétaires au niveau des revenus;
les ventes à l'exportation subiront une baisse d'environ 12 % par
rapport à l'année passée. Les revenus escomptés
à ce chapitre seraient de 591 000 000 $, ce qui vient affecter de
façon importante les revenus dans un premier temps.
M. Coulombe: Est-ce qu'on pourrait avoir la fiche 26?
M. Caron (Michel): M. le Président, pour expliquer la
baisse des revenus à l'exportation, il importe de dire un mot sur une
modification que l'on prévoit faire à nos pratiques comptables
touchant le traitement des pertes de change sur remboursement de capital de nos
emprunts en devises étrangères.
Depuis 1984, selon les règles de l'Institut des comptables
agréés du Canada, on doit provisionner la perte de change
éventuelle qu'Hydro-Québec subirait advenant le cas où
elle aurait à rembourser le 31 décembre de l'année
courante la totalité de sa dette étrangère. Sur une dette
totale de 21 000 000 000 $, près de 60 % ne sont pas en dollars
canadiens: 50 % en dollars américains, 10 % en d'autres devises. Au 31
décembre 1985, si nous avions eu à
rembourser la totalité de cette dette de 14 000 000 000 $, 60 %
de 21 000 000 000 $, le coût de la dette aurait été
augmentée de 1 900 000 000 $. Les règles de l'institut exigent ou
exigeaient à compter de 1984, que ces 1 900 000 000 $ soient amortis sur
la vie restante de la dette qui est en moyenne de dix ans. Donc c'est une perte
de 190 000 000 $ par année, perte que l'on qualifie de théorique,
advenant le cas où on arriverait à rembourser notre dette.
Depuis la mise en application de cette règle de l'institut,
certaines entreprises et certaines firmes comptables, à la suite de
discussions, je présume, avec l'Institut des comptables
agréés, ont modifié l'interprétation de la
règle comptable de la façon suivante: Dans la mesure où
l'entreprise s'attend d'avoir dans l'avenir des revenus en devises
étrangères avec une assurance assez probable, un degré de
certitude satisfaisant, elle peut convenir que ses revenus
présumés en devises étrangères, si c'est le cas,
sont suffisants pour couvrir les remboursements de capitaux en devises
étrangères et ainsi éviter de provisionner cette perte de
change, (10 h 30)
Pour Hydro-Québec, c'est bien sûr que si l'on parle de
notre dette en deutsche mark, en yen, en franc suisse, on n'a pas de revenu
dans ces devises. Mais en dollar américain, nous avons des revenus
provenant de nos ventes à l'exportation.
Si on prend le cadre financier du plan de développement et qu'on
regarde l'horizon 1986 l'an 2000 nos prévisions de vente à
l'exportation, on estime globalement et en chiffres ronds que sur cette
période, nous aurions quelque chose comme 6 000 000 000 $ è 7 000
000 000 $ de revenus en provenance des États-Unis.
Si on regarde la même période, 1986 l'an 2000, nos
échéances de dette en dollar américain, juste la portion
de capital, représentent environ 5 000 000 000 $. Donc, la couverture
est suffisante; et à la suite des dernières
interprétations, nous n'avons pas à provisionner pour cette perte
en dollars US.
J'en arrive à l'explication à savoir pourquoi les revenus
à l'exportation baissent. Effectivement, entre 1985 et 1986, cela nous
amène è comptabiliser nos revenus à l'exportation non pas
au taux de change de l'année courante, mais au taux de change historique
de notre dette. Donc, c'est de faire l'appariement entre notre dette en devise
étrangère qu'on a contractée par exemple à 100 $ au
pair, en dollar canadien, qu'on doit rembourser aujourd'hui à 140 $.
À ce moment-là, je dois comptabiliser mes revenus à
l'exportation de la même façon, non pas à 140 $, qui est le
taux d'aujourd'hui, mais à 100 $. Au bas du tableau de la page 83, vous
avez les revenus à l'exportation pour 1986 de 591 000 000 $ qui se
composent d'un revenu de 678 000 000 $ au taux de change d'aujourd'hui, soit
1,40 $ ou 0,715 $ si on prend l'inverse, duquel chiffre on déduit 87 000
000 $ que l'on utilisera pour se protéger au niveau de la perte de
change.
C'est strictement la façon de comptabiliser nos revenus à
l'exportation qui est modifiée en 1986.
M. Coulombe: Je voudrais mentionner aussi que les revenus
à l'exportation jusqu'à l'an 2000, dont M. Caron vient de parler,
qui se chiffreraient par 7 000 000 000 $ ne comprennent pas les exportations
dont on a discuté hier du 3500 à 4500 mégawatts. Ces 7 000
000 000 $ représentent la totalité des entrées d'argent
à partir des contrats actuels.
Donc, évidemment, si on ajoute un 3500 à 4500, la somme de
7 000 000 000 $ devient beaucoup plus considérable. On y est allé
avec les chiffres minimaux pour la comparer au remboursement du capital...
M. Ciaccia: Pour l'année 1985, est-ce que les revenus
à l'exportation pour l'avenir ont été inclus comme
bénéfice, de la même façon que vous avez inclus les
dépenses pour les prochaines années?
M. Coulombe: Ce dont M. Caron vient de parler, l'hypothèse
qu'on a, c'est de mettre cela en force en 1986.
M. Ciaccia: Alors, vous ne l'avez pas fait en 1985.
M. Coulombe: On ne l'a pas fait encore. Dans le bilan de 1985, on
n'a pas cette stratégie.
M. Ciaccia: Si je comprends bien, en 1985, vous avez un chiffre
dans vos états financiers qui réduit le bénéfice
net et qui représente les montants qui devraient être payés
sur un nombre d'années pour la devise américaine pour vos
obligations?
M. Coulombe: Ce serait exact.
M. Ciaccia: En contrepartie, pour 1985, vous n'avez pas les
revenus que vous allez recevoir dans les mêmes années pour les
exportations, les montants que vous devriez payer en argent américain.
Vous allez commencer cet exercice en 1986?
M. Coulombe: La stratégie qu'on vient d'expliquer, c'est
l'hypothèse de travail pour 1986. Il n'y a pas de décision de
prise encore, mais c'est l'hypothèse de notre bilan financier qui sera
publié en février ou mars 1987.
Antérieurement, depuis que l'Institut des comptables à
émis sa règle, on l'a suivie à la lettre.
M. Ciaccia: C'est là un chiffre comptable, ce ne sont pas
des déboursés d'argent?
M. Coulombe: Non, c'est comptable.
M. Ciaccia: C'est comptable, qui réduit le
bénéfice net.
M. Coulombe: C'est exact.
M. Ciaccia: Juste en exercice de comptabilité, mais non
pas en...
M. Coulombe: Si vous regardez le tableau...
M. Ciaccia: Cela ne change pas votre "cash-flow"?
M. Coulombe: Non. Si vous regardez le tableau de la page 83, vous
avez à la ligne "perte de change": 258 000 000 $ de perte de change en
1985. Ce montant de 258 000 000 $, avec l'hypothèse qu'on vient
d'expliquer, baisserait à 124 000 000 $, selon l'hypothèse qui,
d'ailleurs, a été, non seulement acceptée, mais
appliquée par certaines grandes corporations canadiennes qui ont des
revenus américains.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. L'explication
que vous nous donnez répond aussi à une autre de mes questions
concernant ces techniques comptables qui viennent changer quelque peu les
chiffres et qui, à toutes fins utiles, sont importantes, mais qui sont
quand même des détails techniques. C'est une question
complémentaire pendant qu'on est sur le sujet. Est-ce ce qui explique
finalement qu'il y aura une augmentation substantielle concernant le
pourcentage à l'autofinancement? Est-ce que cela vient jouer
là-dedans par rapport au "cash-flow"? Au tableau 84 où
l'on retrouve que la prévision budgétaire à
l'autofinancement passe de 35 % à 43 %, est-ce que cela vient toucher ou
si cela ne touche pas du tout à cela?
M. Caron: Non, les modifications aux pratiques comptables ne
touchent pas le "cash-flow" et l'autofinancement; l'amélioration de
l'autofinancement en 1986 vient du fait que nos remboursements de dettes en
1986 sont plus faibles qu'ils ne l'étaient en 1985.
M. Ciaccia: Le pourcentage d'autofinancement pour 1985 est de
combien*? 37 %?
M. Caron: Il était de 35,7 %. M. Ciaccia: 35,7
%.
M. Caron: La raison pour laquelle il augmente en 1986 est que nos
remboursements de dettes en 1986 sont relativement faibles.
M. Parent (Bertrand): L'explication que vous nous avez
donnée, M. le vice-président, concernant cette technique
comptable et cette couverture qu'on retrouve dans le tableau au bas de la page
83 me satisfait. Cependant, toujours concernant ces baisses de ventes à
l'exportation dans les prévisions budgétaires de cette
année, je me réfère au tableau de la page 86 où,
dans le plan triennal de l'année dernière, on prévoyait,
toujours à ce même chapitre, 973 000 000 $ par rapport aux 591 000
000 $ de cette année. Les 382 000 000 $ de différence du plan de
l'année dernière par rapport au plan de cette année,
surtout qu'il y a eu de nouveaux contrats de signés, j'aimerais en avoir
l'explication parce que je ne comprends pas.
M. Coulombe: En fait, si vous regardez justement dans cette page,
on avait prévu l'an dernier 813 000 000 $ de revenus à
l'exportation, en 1985. La réalité a été 673 000
000 $, donc une différence de 140 000 000 $. D'où vient cette
différence de 140 000 000 $? Une partie vient de la baisse du prix du
pétrole, c'est-à-dire le revenu unitaire abaissé du
kilowatt et, deuxièmement, vous êtes au courant des
difficultés qu'on a eus au poste de Châteauguay l'an dernier, qui
ont fait baisser nos ventes à l'exportation parce que ce poste qui
était censé fonctionner autour de 1600 à 1800
mégawatts - les ventes totales sont de 2300 mégawatts - a
fonctionné probablement en moyenne de l'ordre de 1300 ou 1000
mégawatts, à cause des difficultés techniques de mise en
place de cette technologie nouvelle. Donc, ce sont les deux raisons qui
expliquent la baisse de 140 000 000 $. Si vous reportez cette baisse de 140 000
000 $ en 1986, on part avec un plancher beaucoup plus bas. On prévoit
aussi cette année une baisse du revenu unitaire par kilowatt à
cause de la baisse du prix du pétrole. C'est ce qui explique la
différence entre l'objectif ou les prévisions de 1985, la baisse
de 140 000 00 $ et celle en 1986. Mais il faut que vous ajoutiez à ces
591 000 000 $, la somme qui est en bas du tableau de la page 83,
c'est-à-dire 87 000 000 $ à cause de notre technique de perte de
change. C'est 140 000 000 $ qui se répercutent sur les
deux ans, plus les 87 000 000 $ de perte de change.
M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le président.
Dans le cas du tableau de la page 82, d'abord, on a eu hier des explications
très brèves et j'aimerais qu'on puisse donner davantage
d'informations concernant le pourcentage de 1,9 % d'augmentation des ventes
d'électricité cette année. Si j'ai bien compris,
c'était la fin de l'année 1985. Mais cela me semble quelque peu,
en tout cas, le bas de la fourchette, si on veut. C'est très
conservateur, ce niveau, avec le pourcentage de 1,9 %.
M. Coulombe: C'est exact. Sur une base comparable, on l'a
expliqué hier et M. Grîgnon pourra reprendre l'explication, cela
donnait un chiffre de...
M. Grignon (Michel): De 4,5 %.
M. Coulombe: ...de 4,5 % sur une base comparable aux autres
années. Maintenant, vous pouvez reprendre l'explication, M. Grignon.
M. Grignon: En fait, peut-être que la façon de le
faire, c'est avec les niveaux absolus parce que les pourcentages, d'une
année à l'autre, c'est un peu difficile. En 1985, on a
effectivement eu des ventes régulières de 97 600 000 000 de
kilowattheures. L'ajustement qu'il faut faire à ce chiffre pour
régulariser un peu, c'est que ces 97 600 000 000 comprennent 800 800 000
de kilowattheures d'ajustement dans notre méthode d'évaluation
des ventes livrées au 31 décembre. C'est un ajustement qui ne se
répétera pas.
Donc, si on veut normaliser, il faudrait ajuster le chiffre de 97 600
000 000, c'est-à-dire le réduire de 0,8 % pour être sur une
base comparable avec ce qui se passe en 1986. Comme on l'a dît hier, en
1986, on prévoit des ventes régulières de 99 500 000 000,
auxquelles il faudrait ajouter 1,4 térawattheures, parce qu'on
s'était donné une réserve de 1,4 térawattheures. Ce
qui nous donne, une fois ajustées, des ventes normalisées, si on
veut, en 1985, de 96 600 000 000; en 1986, de 100 900 000 000. D'où le
taux de croissance normalisé de 4,5 %.
M. Parent (Bertrand): D'accord.
M. Grignon: Une autre raison pour laquelle c'est un peu plus
faible en 1986, c'est la mise en service des alumineries comme celle de
Reynolds et celle de Pechiney. Elles viennent en service graduellement, au fur
et à mesure, avec une période de rodage. Notre évaluation
de la situation fait que cela contribue moins, en 1986, à l'augmentation
des ventes que cela ne l'a fait en 1985 ou que cela ne le fera en 1987.
M. Parent (Bertrand): Est-ce que le pourcentage de 4,5 que vous
mentionnez, lorsqu'on ramène les chiffres sur cette même base,
représente pour vous tout ce que vous expliquiez hier, soit le bas, le
milieu ou le haut de la fourchette, toute proportion gardée? Parce qu'il
me semble, à ce chapitre en tout cas, qu'on travaille beaucoup plus au
niveau des revenus, ce qui est peut-être normal, question de se donner
une marge de manoeuvre, mais on travaille beaucoup plus avec le bas de la
fourchette.
M. Coulombe: C'est exact.
M. Grignon: Je pense que oui. Les deux premier mois de
l'année ont été légèrement supérieurs
à ce qui était prévu pour ces deux premiers mois. Par
ailleurs, il faudrait peut-être mentionner que, compte tenu de
l'affaissement des prix du pétrole, on avait prévu, dans le 1,9
%, un certain nombre de conversions du pétrole à
l'électricité. Je pense qu'il va y en avoir quand même,
mais peut-être moins qu'on ne l'avait prévu. Ce serait un facteur
défavorable qui pourrait nous affecter.
M. Parent (Bertrand): Hier, M. le président, vous nous
mentionniez que les résultats de janvier et de février 1986
étaient drôlement intéressants et favorables. De quel
écart parle-t-on pour les résultats concrets des deux premiers
mois par rapport aux prévisions budgétaires?
M. Coulombe: En termes de revenus des deux premiers mois par
rapport aux prévisions, on a à peu près 35 000 000 $ de
plus.
M. Parent (Bertrand): Pour les deux premiers mois?
M. Coulombe: Pour les deux premiers mois.
M. Parent (Bertrand): Est-ce qu'on peut penser que ceci pourrait
s'étendre au prorata sur les dix autres mois?
M. Coulombe: Pour vous répondre franchement, on le
souhaiterait ardemment mais l'expérience nous prouve qu'il serait
dangereux de faire cette extrapolation à partir des deux premiers
mois.
Il reste aussi le prix du pétrole, parce qu'on n'a pas encore eu
l'effet de base de la baisse du prix du pétrole. On ne l'a pas encore eu
de plein fouet. Les deux premiers mois ont été la période
de transition dans les prix du pétrole. - Ils ont baissé
brutale-
ment mais l'effet réel du prix du baril à 13 $, par
exemple, n'est pas intégralement impliqué dans ces chiffres. On
s'en rendra probablement compte au cours des mois d'avril, mai, juin et
juillet. Je pense donc qu'il serait dangereux d'extrapoler sur toute
l'année ce montant de 36 000 000 $ supplémentaires par rapport
à nos prévisions.
M. Parent (Bertrand): À quoi attribuez-vous principalement
cette augmentation de 35 000 000 $ ou de 36 000 000 $ additionnels?
M. Grignon: II faut comprendre que, pour Hydro-Québec, les
mois de janvier et de février sont un petit peu comme la période
des fêtes pour un détaillant. On ne peut sûrement pas
extrapoler les 36 000 000 $ au prorata des mois parce que, pour
HydroQuébec, les mois de janvier et de février sont des gros mois
de vente, d'abord parce que la température a été
plutôt normale alors qu'on avait fait l'hypothèse que le mois
serait plus chaud. D'autre part, parce que cela a vraiment bien
été. Il est toujours difficile avec... (10 h 45)
Une voix: Le Canada est sur le dos.
Une voix: Est-ce une attaque contre le Canada"?
M. Coulombe: II faudrait préciser aussi que, sur les 36
000 000 $ dont je parle, 20 000 000 $ dépendent des exportations. Ces 20
000 000 $ d'exportations proviennent surtout d'une demande supérieure de
la part du Nouveau-Brunswick. Donc, il y a 16 000 000 $ de plus qui sont
favorables par rapport aux ventes internes, 20 000 000 $ à
l'exportation, mais, comme je vous l'ai dit tantôt, à
l'exportation, on n'a pas encore été frappé par le baril
de pétrole.
M. Parent (Bertrand): Je passerais au tableau 85, rapidement,
concernant les effets, donc toute la grille de sensibilité par rapport
au pourcentage. Le volume de vente d'électricité
régulière, au Québec dès qu'on joue de 1%... On a
convenu tantôt qu'on travaillait avec le bas de la fourchette, on peut
penser qu'on a peut-être une marge de 1,5%, donc qu'il y a des effets sur
les bénéfices de 37 000 000 $ en raison du 1%. Est-ce exact?
Dans le cas du tableau des ventes d'électricité
excédentaire, cela a peu d'effet, comme on peut le remarquer, puisque le
1% vient tout simplement réduire ou hausser les bénéfices
de 2 000 000 $. J'aimerais juste avoir une brève explication concernant
cette baisse à ce chapitre qu'on retrouve par rapport à
l'année dernière ou par rapport au plan de l'année
dernière, c'est-à-dire que les ventes d'électricité
excédentaire prévues étaient de 270 000 000 $ dans le plan
triennal de l'an passé et, là, on parle de 165 000 000 $. Quelle
est la brève explication concernant ces ventes excédentaires
à la baisse?
M. Grignon: La principale explication, je pense que vous pouvez
trouver une illustration graphique à la page 15. Vous avez un graphique
qui montre, en bas à droite, l'évolution des prix du
pétrole. Ce qu'on remplace dans le programme des chaudières,
c'est du mazout lourd. Évidemment, ce qui est indiqué ici, c'est
le prix du mazout lourd sur la côte est et vous voyez que, au printemps
dernier, les prix du mazout lourd, même si le prix du pétrole brut
était à peu près stable, ont baissé de 27 %. C'est
directement relié. On vend de l'énergie excédentaire
à 90 % du mazout lourd remplacé et, dans ce sens, cela a eu un
effet direct sur les prix unitaires des ventes excédentaires.
De plus, nos clients n'en ont pas pris autant qu'on on en avait
prévu en termes de quantité, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas
utilisé les chaudières pour le nombre d'heures qui avait
été prévu.
M. Parent (Bertrand): Je vous remercie. Cela répond
à ma question. Dans le cadre des dépenses, en fait, j'ai peu de
questions si ce n'est de mentionner qu'on réussit à maintenir
l'augmentation à 4,7 %, ce qui était similaire à
l'année passée - on aura l'occasion de le souligner tantôt
- par les efforts qui sont déployés au niveau administratif, car
là aussi cela reflète une saine gestion.
Une question concernant la référence que vous utilisez
pour la hausse de l'indice des prix à la consommation de 3,9 % pour
1986. Pendant que le gouvernement utilise un chiffre de 3,4 %, d'après
le dépôt des crédits des derniers jours, comment
expliquez-vous cette référence de 3,9 % que vous utilisez et qui
est un barème de référence, puisqu'on parlera tantôt
d'une différence de 1,5 % de votre augmentation relativement à
l'augmentation prévue, l'augmentation du coût de la vie, des prix
à la consommation. Le schème de référence de 3,9 %
diffère déjà de 0,5 % plus élevé que celui
utilisé par le gouvernement.
M. Grignon: Je ne connais pas les hypothèses
détaillées de la prévision du gouvernement, mais, si on
regarde la plupart des prévisionnistes au Québec - et là
cela évolue presque de semaine en semaine depuis les deux derniers mois,
à cause du prix du pétrole - nos 3,9 % ont été
calculés avec notre hypothèse dans le plan d'un prix du
pétrole de 20 $. Comme il est déjà à 13 $ et que
cela se poursuit, si on refaisait cet exercice aujourd'hui et qu'on faisait
une
hypothèse que le prix du pétrole se maintienne à 13
$ ou 14 $ cette année, effectivement, on se rapprocherait
drôlement du 3,4 % qui a été mentionné. Alors, je
pense que si on regarde les principaux "prévisionnistes", selon que les
gens ont fait leur prévision d'inflation au mois de décembre ou
au mois de janvier avec des prix du pétrole à 24 $, à 20
$, ou d'autres plus récemment à 15 $, vous allez retrouver une
fourchette de prévision d'inflation qui varie entre 3,2 % et 4,2 %.
M. Parent (Bertrand): Cependant, je tiens à souligner
è l'endroit du ministre que le schème de référence
est quand même différent. Lorsqu'on parle d'une augmentation de
5,4 % qui est demandée par Hydro, qui est déjà à
1,5 % en haut de l'indice des prix à la consommation que ce qui est
prévu, c'est en réalité 2 % par rapport au schème
de référence du gouvernement. Je veux seulement qu'on note bien
cela, parce que si vraiment on utilisait les prévisions
budgétaires gouvernementales, ce qui certainement a été
calculé par le Conseil du trésor, le 3,4 %, on se rend compte que
l'augmentation réelle demandée par Hydro-Québec est 2 % en
haut des hausses de l'indice des prix à la consommation.
Dernière question ou dernier commentaire concernant cette
tarification. J'ai pris connaissance mot à mot des déclarations
du président, M. Coulombe, le 26 mars 1985, en commission parlementaire,
ici même, mais je dois vous dire, M. le président, que vous
êtes en tout point conforme, vous avez tenu cette année les
mêmes propos que vous teniez l'année passée. Le seul point,
c'est que vous mentionniez à ce moment-là... Je pense que je dois
le citer pour être le plus exact possible vous disiez: On va sacrifier
temporairement notre rendement sur l'équité, ce que n'importe
quelle compagnie fait de temps à autre, compte tenu de
l'évolution de l'environnement externe. Il y a même certaines
grandes corporations où parfois les rendements sont négatifs
parce qu'elles traversent des périodes difficiles.
Alors, délibérément, l'an passé - vous
parliez de 1984 - on a proposé dans notre plan de développement
de mettre de côté temporairement, l'espace de quelques
années, les critères de rendement sur l'équité, de
diminuer nos profits et d'augmenter notre position concurrentielle.
Voilà quand même les propos que vous tenez cette année.
Toujours dans ces mêmes affirmations du 26 mars 1985, vous mentionniez et
je cite: On a expliqué pourquoi on avait des avantages de le faire. Et
là, on parle de ces sacrifices particuliers. Dans notre esprit, c'est un
investissement qui est fait en 1984, en 1985 et en 1986. Évidemment, la
conséquence pour Hydro-Québec, ce sont des profits moindres, un
rendement sur l'équité moins intéressant que par les
années passées et aussi un dividende moins considérable
pour le gouvernement. Donc, nous pensons que cette stratégie
financière est encore la meilleure pour Hydro-Québec pour
traverser les années consécutives à la récession,
d'une part, et aussi pour faire face au "challenge" posé par les
nouvelles sources d'énergie, principalement le gaz, où il fallait
que des décisions se prennent. Alors, ce que vous dites essentiellement,
il nous faut... Vous disiez l'année passée et vous nous dites
aussi cette année: II nous faut faire un effort particulier pour rester
compétitifs et continuer à augmenter notre clientèle et
à augmenter nos ventes. D'ailleurs, la preuve, c'est que les ventes
avaient augmenté en 1984 de l'ordre de 15 %.
Le seul point où j'accroche un peu et qui me fait dire qu'il y
aurait peut-être lieu d'envisager un chiffre autre que le 5,4 % -je dis
bien: peut-être lieu de l'envisager -c'est que ces propos ou cette
position d'Hydro-Québec faisait en sorte que l'année
passée, on a donné 2,5 % d'augmentation par rapport à une
inflation de 4 %. Alors, cette année, non seulement, on n'est pas en
bas, non seulement on n'est pas égal, on est 1,5 % au-dessus des
chiffres déjà prévus. Si je regarde les années
subséquentes, même si on devra les réviser l'an prochain en
1987, en 1988, vous travaillez quand même avec une marge de manoeuvre qui
serait d'environ 5,5 % en haut de l'augmentation des prix à la
consommation. Je fais référence au tableau qu'on avait en fin de
soirée hier qui démontrait que, pour 1993, il faudrait maintenir
un rythme d'environ 4,7 % pour faire face à nos coûts. Je trouve
que les prévisions budgétaires envisagées en 1987-1988
semblent se tenir et se raccrocher à la preuve que vous avez
montrée dans votre étude très exhaustive que madame nous a
démontrée, sauf que, pour cette année, je trouve cela un
peu difficile à expliquer à la population et aussi difficile
à comprendre qu'on doive manoeuvrer avec 1,5 % en haut ou, comme dans
mon livre, comme je l'expliquais tantôt, beaucoup plus 2 % en haut de
l'indice des prix à la consommation.
M. Coulombe: Je dois dire que l'essentiel de l'analyse qui a
été faite l'an dernier tient toujours, comme vous l'avez
mentionné. Fondamentalement, c'est la même analyse.
L'élément supplémentaire qui s'est ajouté est
vraiment le phénomène qui est arrivé depuis
décembre et qui ne vient pas fondamentalement changer notre position,
mais qui explique essentiellement la prudence qu'on voudrait avoir en ayant des
tarifs de cet ordre. L'effondrement beaucoup plus spectaculaire que tout ce qui
avait été prévu par qui que ce soit depuis décembre
vient expliquer la nuance qu'il faut mettre aux
propos qu'on a tenus l'an dernier. C'est fondamentalement et
essentiellement la même stratégie. Après avoir dit cela, il
est évident... Vous voyez la sensibilité. On dit: 1 % de plus ou
de moins, c'est 20 000 000 $ de revenus. Si vous regardez la volatilité
du prix du pétrole et du dollar canadien, vous voyez qu'on a des indices
de sensibilité: un sou de moins, c'est 21 000 000 $. On a fait nos
prévisions sur 0,715 $, je ne sais pas à combien était le
dollar hier, mais depuis quelque temps il se tient autour de 0,713 $, 0,715 $,
0,718 $. Est-ce qu'on va être à 0,705 $ ou à 0,695 $
à la fin de l'année? On ne le souhaite pas, mais par les temps
qui courent ce n'est pas impensable. Le baril de pétrole... Les membres
de l'OPEP ont passé à deux cheveux de s'entendre sur une nouvelle
orientation en haut de 20 $. Ils se réunissent dans cinq ou six
semaines, vont-ils réussir, cette fois, ce qu'ils n'ont pas
réussi la dernière fois, c'est-à-dire de convaincre
certains producteurs de baisser leur production pour augmenter graduellement
jusqu'à 20 $ ou 25 $? On voit immédiatement que là-dessus
on est incapable de se prononcer. Quelqu'un pourrait dire: Si vous êtes
incapables de vous prononcer, 20 000 000 $ de plus ou de moins, cela n'a pas
tellement d'importance. Nous sommes du côté où on voudrait
être prudent tout simplement pour le raisonnement de base qu'on a fait
hier: Pour conserver une certaine marge de manoeuvre. Si on n'avait pas eu
cette marge de manoeuvre à Hydro dans les dernières
années, on n'aurait pas été capable de faire face à
la concurrence et il aurait fallu augmenter beaucoup plus les tarifs;
deuxièmement, on ne serait pas capable aujourd'hui de prendre un
ensemble de moyens, même en dépit d'un rendement sur
l'équité qui va être à 2 %, c'est-à-dire
très bas, selon n'importe quel critère.
On pense qu'au fil des années, devant l'incertitude, il faut non
pas reconstruire toute la marge de manoeuvre, parce que je viens de vous dire
que, même avec 5,4 %, on a encore 2 % de rendement sur
l'équité; donc, on le met de côté temporairement. Il
ne s'agit pas de remonter les taux rapidement et de faire payer les
consommateurs là-dessus.
Il nous faut donc absolument garder une certaine marge de manoeuvre au
cas où la situation empirerait pour le dollar canadien ou pour le baril
de pétrole. Ce n'est pas reconstituer la marge de manoeuvre, c'est
simplement l'empêcher de se détériorer encore plus. C'est
cela, en fait, notre position. Ce qui a été dit à la
commission parlementaire l'an dernier reste, à mon avis,
intégralement exact cette année. Les derniers
événements du pétrole ne viennent que renforcer, en fait,
la prudence qu'on voudrait avoir.
M. Parent (Bertrand): Cela va pour moi, M. le Président,
pour l'instant. Merci, monsieur.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va. M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Théorêt: M. le Président.
Le Président (M. Charbonneau): Ah! Le
vice-président avait demandé... (11 heures)
M. Théorêt: Si vous permettez, M. le
Président, juste une question de clarification pour la bonne
compréhension des chiffres dans le cadre financier. Vous intitulez dans
la colonne 1985: estimations 1985. Pourtant, ce sont les mêmes chiffres
que l'on retrouve dans les résultats financiers de 1985. Dois-je
comprendre qu'effectivement ce n'est pas une estimation mais bien des
résultats financiers?
M. Coulombe: Oui. Au moment où ces tableaux ont
été faits, les vérifications externes n'avaient pas
signé.
M. Théorêt: Ah! bon.
M. Coulombe: Par respect pour leur... Pour respecter leur
éventuelle signature, on a appelé cela estimations, mais on
était à peu près certain de ne pas se tromper puisque
l'année était finie.
M. Théorêt: Donc, en fait, ce sont les
résultats financiers.
M. Coulombe: C'est exact.
M. Théorêt: Je vous remercie. D'autre part, dans la
colonne dépenses. Un point de clarification sur l'amortissement des
radiations, qui en 1984 était de l'ordre de 79 000 000 $, 90 000 000 $
en 1985, pour retomber à 79 000 000 $ en 1986 dans les
prévisions. Est-ce que l'on pourrait avoir une explication sur cette
montée de 11 000 000 $ pour une année seulement?
M. Caron: C'est la radiation des études de l'Archipel: 11
000 000 $.
M. Coulombe: C'est cela. Les 79 000 000 $ pendant trois ans, ce
sont les 236 000 000 $ des sommes accumulées dans le projet NBR qu'on a
radiées sur une période de trois ans; donc, 79 000 000 $ par
année. Ce sont ajoutés l'an passé les travaux
exécutés dans le cadre du projet Archipel qui, à toutes
fins utiles, en termes d'investissement à court terme est mis de
côté; donc, une radiation supplémentaire de 11 000 000 $.
Et cela fait partie des efforts qu'on a faits pour assainir la situation
financière d'Hydro, c'est-à-dire qu'on a fait depuis
quelques années des radiations considérables, tout simplement
dans le but que le prix de notre kilowattheure, quand la construction va
commencer, ne soit pas gonflé démesurément par des
intérêts.
M. Théorêt: Une dernière question, M. le
Président. Dans "autres dépenses d'exploitation" qui sont de
l'ordre de 787 000 000 $ en 1985 et 841 000 000 $ prévues en 1986,
est-ce que vous pouvez nous dire, strictement dans les grandes lignes, quelles
sont les autres dépenses d'exploitation qui frisent quand même
près de 1 840 000 000 $?
M. Caron: M. le Président, il s'agit essentiellement des
amortissements de nos immobilisations pour environ 400 000 000 $ par
année, impôts et taxes de l'ordre de 200 000 000 $, achat
d'électricité: Churchill Falls principalement. Ce sont les trois
composantes.
M. Théorêt: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Inquiétude de la compagnie Noranda
M. Baril: M. le Président, c'est un télex que je
reçois de M. Fowler, vice-président des opérations
minières de la mine Noranda qui exploite, comme vous le savez, un moulin
de smeltage. Il m'avait envoyé quelques notes au sujet des
inquiétudes concernant l'augmentation que peut-être nous leur
demandions cette année, en 1986. Ils me disaient un petit peu dans leurs
notes que 35 % de leurs coûts c'est le coût de
l'électricité pour faire fonctionner leur usine de smeltage, et
leur inquiétude est qu'ils subissent une concurrence très
féroce des Japonais et des pays européens, qui eux, profitent de
la baisse de 50 % du prix du pétrole et ainsi de suite. Ils trouvent
cela très malheureux pour eux, vu qu'ils ont fait des investissements
pour changer leur système et passer du mazout à
l'électricité. Ils ont dépensé l'an dernier tout
près de 33 mégawatts, c'est-à-dire tout près de 5
000 000 $ d'électricité et ils disent qu'un coût
additionnel de 300 000 $, qu'ils prévoient l'an prochain, c'est
très, très, très dangereux pour eux; ils seraient
même menacés de fermer à un moment donné. Je ne sais
pas si c'est vrai qu'ils ne font pas assez de profits, mais...
M. Coulombe: Avant de donner la parole à Claude Boivin,
qui pourrait donner plus d'explications... Évidemment, lorsqu'une
compagnie de la taille de Noranda, pour une facture de 300 000 $, menace de
fermer, j'ai des points d'interrogation. D'une façon
générale dans le secteur industriel, il faut bien penser que la
conjoncture finalement, dans la majorité des grandes entreprises
exportatrices du Québec, il faut bien penser que le climat actuel,
surtout du dollar canadien... Pour nous, c'est catastrophique le dollar
canadien, mais il faut bien penser que pour l'industrie des pâtes et
papiers et beaucoup d'industries exportatrices, la conjoncture est
extrêmement favorable. Ce qui est un désastre pour nous est une
bénédiction pour elles. Surtout dans les pâtes et papiers,
un dollar à 0,71 $ ou à 0,70 $ est une véritable manne.
Donc, conjoncturellement, c'est évident qu'on souhaiterait avoir
zéro d'augmentation ou même une diminution de tarif, si cela
pouvait aider ces grandes industries, mais notre situation financière,
à notre avis, ne nous le permet pas.
D'un autre côté, il ne faudrait pas dramatiser parce que
pour les grandes sociétés exportatrices, le dollar canadien est
une vraie bénédiction. En ce sens-là, il y a des profits
considérables qu'elles ont faits dans les dernières années
et qu'elles vont faire cette année avec le dollar canadien et qui
contrebalancent, à notre avis, largement les 1 % ou 1,5 % de plus cette
année alors que dans les deux ou trois dernières années,
non seulement il y a avait le dollar canadien qui les aidait, mais en plus les
tarifs étaient en bas de l'inflation.
Donc, combiner ces deux facteurs, nous pensons que, pour l'industrie,
l'un balance beaucoup plus largement l'autre phénomène qui est
l'augmentation de 5,4 %. Maintenant, pour Noranda, de façon
précise...
M. Boivin: Pour Mines Noranda, il faut peut-être apporter
les précisions suivantes: Les chiffres qu'ils vous ont cités sont
leur consommation totale, mais il faut séparer cette consommation dans
la consommation de base, c'est-à-dire l'énergie
régulière qui est vendue pour la force motrice, etc., le
fonctionnement de base du moulin qui est de l'ordre de 10 mégawatts. Les
30 mégawatts cités comprennent une chaudière de 20
mégawatts et, à ce moment-là, la hausse de tarif ne
s'applique que sur la charge de base parce que, on l'a mentionné
précédemment, l'énergie excédentaire qui sert
à alimenter la bouilloire est vendue à 90 % du prix du mazout qui
est remplacé. Effectivement, dans un cas comme celui-là, en
partie, la baisse du prix du mazout, donc la baisse du prix de
l'excédentaire, va compenser la hausse du prix de l'énergie
régulière. Je n'ai pas fait le calcul parce que je n'ai pas eu le
temps, mais je pourrais le faire. J'ai l'impression que la baisse du prix de
l'excédentaire qui va suivre la baisse du prix du mazout va faire plus
que compenser dans la facture énergétique totale de la mine,
la
hausse de 5,4 % sur la facture de base, parce qu'en fait la facture de
base est de 1 900 000 $.
M. Coulombe: N'oubliez pas que dans les chaudières
industrielles - et encore là je reviens aux grandes industries des
pâtes et papiers du Québec qui sont nos principaux clients en
termes de consommation d'électricité - il y a des kilowattheures
qui leur étaient livrés à 0,017 $ et qui vont probablement
baisser à 0,015 $ et à 0,014 $ et même à 0,012 $ si
le prix du baril de pétrole continue à baisser.
Cela nous ouvre une perspective, je pense qu'il faudrait absolument
faire toute cette opération clairement. On se demande si cette marge de
manoeuvre ne compensera pas largement parce que ce sont des immenses
consommations en termes de chaudières industrielles, on en a pour 2300
mégawatts. Alors baisser les prix de 20 % sur la consommation
excédentaire, cela va compenser largement pour une augmentation de cette
façon-là.
M. Baril: M. Boivin, j'aimerais que vous puissiez me faire
parvenir ces informations.
M. Boivin: On va les calculer et vous les donner avant la fin de
l'avant-midi.
M. Baril: J'aimerais cela, s'il vous plaît!
M. Boivin: Dans le cas de Noranda, on peut peut-être
ajouter que leurs principaux concurrents, comme ils le mentionnent, sont les
Japonais. Le yen japonais suit une trajectoire inverse au dollar canadien,
c'est-à-dire qu'il s'apprécie. Cela aussi, en fait, dans leur
position concurrentielle, joue énormément.
M. Baril: Merci.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va? Alors M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Merci, M. le Président. Dans un premier temps,
je voudrais me permettre un commentaire pour appuyer la revendication de mon
collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue et je l'extrapolerais en
tout ce qui concerne l'industrie minérale reliée à
l'exploitation du cuivre qui vit actuellement une phase très difficile.
Dans ce sens, la faiblesse du dollar canadien sur le marché mondial est
plus qu'une manne, je dirais que c'est pratiquement la cigarette du
condamné, car ne serait-ce cette situation-là, probablement qu'il
n'y aurait plus aucune mine de cuivre en exploitation actuellement au
Québec.
Dans un deuxième temps, je voulais dire que l'industrie du
cuivre, règle générale, est très sensible à
tout ce qui peut correspondre à une hausse, si minime soit-elle, et
l'électricité est, entre autres, une part importante dans les
coûts de production de l'industrie minière.
On vient de m'annoncer que j'allais avoir une coupure de mon temps
d'antenne, malheureusement, je crois que nous n'aurons pas l'opportunité
d'aborder aujourd'hui la problématique reliée à la
Convention de la Baie James et du Nord québécois en ce qui
concerne, entre autres, les aménagements de NBR qui ont des
répercussions très importantes au chapitre 22 de ladite
convention. J'espère qu'on aura l'occasion de s'en parler à un
autre moment.
Coûts de fourniture
Dans un troisième temps - je veux en venir à ma question -
j'aimerais qu'on revienne sur le tableau des coûts de fourniture qui nous
a été présenté hier. Il y a un
élément là-dedans qui me chicote un peu quant à
l'explication des tarifs à long terme.
M. Boivin: Le tableau 15, s'il vous plaît!
M. Claveau: Hier, à une question qui a été
posée par rapport aux coûts pour 1993, on peut lire sur le tableau
que le coût de la consommation en énergie domestique se situerait
autour de 6,7 % en 1993. Une question a été posée, par
laquelle on demandait de justifier l'augmentation du coût du
kilowattheure jusqu'en 1993. Dans la réponse, on mentionnait la part qui
touche à l'implantation de nouvelles installations ou de nouveaux
complexes, entre autres.
Cela m'a fait sursauter un peu. Parce que je regarde l'ensemble des
tableaux et des chiffres qui sont donnés dans la présentation que
vous nous faites depuis hier et je constate, à toutes fins utiles en
tout cas, et surtout en référence au graphique 18, que nous
n'aurons pas besoin pour notre consommation interne du Québec de
nouvelles infrastructures avant l'an 2001. D'après le graphique 18, la
ligne des exportations en ce qui regarde le complexe La Grande, phase II,
commence à décroître en 2001 pour se terminer autour de
2006, où on l'aurait absorbée complètement dans notreconsommation interne.
Parallèlement à cela, on dit au chapitre 4, à
l'article 4.1 concernant le bilan énergétique: "Alors que la
consommation totale d'électricité au Québec, incluant
l'électricité produite par des producteurs privés,
augmente entre 1984 et 2001 de 2,1 % par année". Je présume,
à partir de cela, qu'on n'a pas besoin pour notre propre consommation de
prévoir ou de penser tout de suite à de nouvelles
infrastructures.
Si je fais le lien entre cela et l'argument qui nous a été
servi hier, concernant le coût de l'électricité par
kilowattheure qui se situerait à environ 6,7 % en 1993, j'en
déduis automatiquement qu'on finance, finalement, ou que le contribuable
ou le consommateur d'électricité moyen québécois
finance, par sa facture d'électricité, des infrastructures qui
devraient, au contraire, lui rapporter. En fait, on vante l'exportation comme
si cela devait faire baisser le coût énergétique de notre
consommation interne en rapportant des revenus supplémentaires, mais si
je me fie à l'argumentation qui nous a été donnée
hier, è court terme en tout cas, cela représente une augmentation
du coût de l'électricité pour le consommateur. Est-ce que
j'ai raison de penser cela?
M. Boivin: Je pense qu'il faut distinguer plusieurs choses. D'ici
à 1993 ou 1995 - ici, on parle de 1993 - les deux grands projets
d'équipements qui seront prêts seront Manic 5 et LG 2 PA. On
reviendra tantôt là-dessus à savoir pourquoi ces projets
sont nécessaires.
Deuxièmement, en dehors de ces deux projets, il y a
évidemment la sixième ligne, que j'oublie et qui va être
prête en 1990. On a donc 3 500 000 000 $ d'investissements dans la
production et le transport. Mais, parallèlement à cela, on a
plusieurs autres milliards de dollars qui vont être investis. J'ai
parlé tantôt des dépenses normales d'immobilisations dans
le réseau de distribution, l'effort supplémentaire de 1 000 000
000 $ qu'on fait pour la continuité du service et toutes les
immobilisations, en dehors de la production et du transport, qui vont
être faites; les nouveaux postes de distribution, les nouvelles lignes de
distribution. Enfin, ce sont des immobilisations qui vont être faites par
Hydro-Québec, au cours des huit ou dix prochaines années selon
l'horizon qu'on prend. Donc, il ne faut pas penser que les immobilisations
à Hydro-Québec sont strictement des barrages. Il y a une foule
d'autres immobilisations qu'il faut intégrer dans la structure des
coûts qui ont été expliqués hier. (11 h 15)
C'est la première explication de base. On a 3 500 000 000 $ dans
les projets nouveaux annoncés ou, enfin, en construction: Manic 5, LG 2
PA et la sixième ligne. Parallèlement, il y a des milliards
d'investissement qui vont se faire dans les autres catégories de projets
d'immobilisations d'Hydro-Québec. Or, il faut absolument les
intégrer dans la structure de coût qu'on va avoir à assumer
d'ici à 1993. On parle dans le plan d'un investissement minimum, selon
qu'on a l'hypothèse-scénario de gestion de la demande ou non,
d'au-delà de 25 000 000 000 $, pour prendre le chiffre minimum dans les
dix prochaines années. Enlevez 1993 à 1995, il vous reste au
minimum une vingtaine de milliards qui vont être investis jusqu'en 1993.
Il faut absolument que cela se reflète. Ce ne sont pas strictement les
barrages. On a vu que ces projets représentent 3 500 000 000 $. Donc, si
on fait le calcul, il y a de 15 000 000 000 $ à 17 000 000 000 $ qui
vont être investis dans les huit ou neuf prochaines années qui ne
concernent pas l'appareil de production et la sixième ligne. C'est la
première explication de coût qu'il faut intégrer
là-dedans.
Deuxièmement, par rapport au tableau auquel vous vous
référez, on n'aurait pas besoin de projets de base avant l'an
2001 si on faisait la gestion de l'offre et de la demande sans exportation. On
a vu que si on réalise nos objectifs d'exportation, ces projets sont
ramenés de six ans. On parle de 1996 et c'est pour l'énergie de
base. Pour l'énergie de pointe, parce que Manic 5 et LG 2 PA sont de
l'énergie de pointe, il faut absolument que ces projets soient là
avant. Je ne sais pas si M. Mercier pourrait expliquer pourquoi effectivement
Manic 5. La première explication - je vais laisser M. Mercier continuer
- c'est que Manic 5 est un projet qui a été arrêté
en 1983. On l'a arrêté sur la base de la rentabilité de
l'arrêt du projet. Si on ne le continue pas à l'heure actuelle,
les coûts économiques de ce projet vont devenir exorbitants, tout
simplement parce que pour les ententes avec les fabricants de turbines et ainsi
de suite, notre date limite arrive dans peu de temps. Si on retarde encore ce
projet, le coût du projet va être complètement
modifié. Donc, il faut absolument le terminer pour 1989. Quant à
LG 2 PA, il y a une question de régulation et une question
d'efficacité du réseau que M. Mercier pourra vous expliquer.
M. Mercier (André): Enfin, pour la deuxième partie,
pour le suréquipement de LG 2, il est nécessaire d'avoir la
centrale vers 1992. Vous avez un graphique à l'intérieur du plan
qui est à la page 54. Effectivement, comme M. Coulombe l'indiquait pour
le suréquipement de Manie 5, la centrale n'est pas requise en 1989. Elle
serait plutôt requise vers 1991. Mais pour le suréquipement de LG
2, la première phase de cette centrale est requise en 1992.
Effectivement, c'est pour les besoins du Québec. Il n'y a aucun besoin
d'exportation qui est inclus dans ces besoins-là. Si on se rappelle
finalement que l'ensemble des besoins de pointe sont les besoins de puissance
qui nous sont nécessaires lors de la pointe du réseau, ce sont
les besoins requis. Effectivement, vous aviez raison tout à l'heure en
disant qu'on n'a pas de besoins en énergie avant 1996, dans le cas du
scénario
de référence ou dans le cas des années 2002 si on
tient compte de la gestion de l'offre et de la demande. Si on ramène un
scénario d'exportation, cela revient vers l'année 1996. Mais
entre-temps, on a des besoins de puissance de pointe qui se manifestent dans
les années 1991 et 1992.
M. Coulombe: Alors, votre question reste valable quand même
pour la différence entre 1992 et 1990. La sixième ligne, par
exemple, doit livrer de l'énergie en 1990 d'après le contrat
qu'on a signé avec NEPOOL, il y a quelques mois. Le devancement de la
sixième ligne de 1992 à 1990 est inclus dans nos prix de vente du
contrat qu'on a signé avec NEPOOL. Exactement. En d'autres mots, si on
n'avait pas inclus dans nos prix de vente, dans nos hypothèses le
coût du devancement de deux ans de cette ligne, vous auriez raison de
parler de cette façon. Le coût du devancement de deux ans a
été inclus dans notre négociation avec les
Américains, parce que nous allons avoir besoin de la sixième
ligne en 1992. On l'a fait en 1990 et le coût de deux ans du devancement
est inclus dans le prix de vente.
M. Claveau: D'accord. En fait, une toute dernière
question. Ce que vous nous dites, c'est que vous nous garantissez actuellement
que tous les frais reliés aux investissements pour l'exportation ne se
reflètent en rien dans la facture du consommateur
québécois.
M. Coulombe: Au moment où on se parle, c'est exact.
Lorsqu'on va arriver à l'étape du 3500 à 4500
mégawatts, on a parlé hier des efforts qu'on faisait dans la
structure de financement justement pour éviter que cela ne se produise,
la discussion de fond reprendra. Mais, sur les contrats signés à
l'heure actuelle, les devancements que cela a pu comprendre, chaque fois qu'on
était laissé avec les Américains - et M. Lafond pourra
peut-être donner plus d'explications - dans les contrats, lorsqu'on
présentait le dossier de rentabilité, les coûts de
devancement étaient imputés aux contrats qu'on signait.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Labelle.
Le tarif D et le tarif biénergie
M. Hétu: M. le Président, le comté de
Labelle est un comté assez difficile. On a beaucoup de chômeurs et
d'assistés sociaux. Je voudrais vous parler du tarif D et du tarif
biénergie. Je trouve que le tarif D a quand même une marge avec le
tarif biénergie. Étant moi-même dans le domaine de
l'électricité, j'ai eu l'occasion de travailler souvent avec les
gens d'Hydro-Québec. Vu que la biénergie était normalement
subventionnée par le gouvernement fédéral et par
Hydro-Québec, je m'interroge sur la différence qu'il y a entre
les tarifs du kilowattheure.
Si je regarde les 900 premiers qui coûtent 0,0315 $ et le reste
à 0,0391 $, aussi le tarif biénergie qui, lui, est normalement
plus dispendieux pour les premiers 1200, c'est-à-dire à 0,0332 $
proposé à l'augmentation par rapport à 0,0315 $. Si je
regarde le kilowatt excédent et 0,0284 $, je trouve, même si
Hydro-Québec, peut contrôler la biénergie aux heures de
pointe par une sonde extérieure sensible au froid, la différence
de la marge assez grande entre un tarif domestique, un tarif D et un tarif
biénergie.
Je me demande s'il n'y aurait pas une possibilité au moins de ne
pas pénaliser ceux qui, depuis des années, utilisent
l'électricité, peut-être depuis dix ou quinze ans, et qui
sont pénalisés pour avoir bien servi, avoir payé de
l'électricité en quantité, tandis que la personne qui a
bénéficié d'une augmentation bénéficie
encore d'une ristourne.
M. Boivin: En fait, les problème du tarif d'énergie
régulière par rapport au tarif biénergie est celui de la
livraison d'un kilowattheure qui est là en pointe par rapport à
la livraison d'un kilowattheure qui n'est pas là en pointe. Dans la
structure de coûts qu'on a expliquée hier, les centrales de pointe
que nous devons construire sont là pour satisfaire des besoins à
la pointe. Quand on calcule nos tarifs biénergie, on n'impute pas
à la pointe, les coûts des centrales de pointe pour établir
un tarif biénergie, mais les coûts de centrales de base.
La structure des deux tarifs est ainsi conçue. Vous avez raison
de dire qu'il y a un écart important entre les deux, mais cet
écart important provient de la structure de coûts et du travail de
production que nous devons mettre en place pour satisfaire les besoins de
pointe par rapport aux besoins de base.
Tout le programme de biénergie a été conçu
au départ par Hydro-Québec comme un outil pour faire
bénéficier les clients potentiels des avantages de
l'électricité à un bon prix, pourvu que ces clients ne
viennent pas se placer en pointe. Je ne sais pas si cela répond à
votre question.
M. Hétu: Je comprends peut-être la réponse,
mais je trouve que les gens du tarif domestique, du tarif D, sont quand
même pénalisés. Â mon avis, pour des gens qui ont
soutenu Hydro-Québec et qui ont payé des tarifs depuis de
nombreuses années, si on regarde l'écart, à part cela...
Je comprends que 50 kilowatts de puissance, c'est'
beaucoup. Par contre, il y a encore une pénalité de 0,75 $
du kilowatt après 50 kilowatts. Aujourd'hui, on sait que les gens,
surtout dans le nord, consomment beaucoup d'électricité. Je peux
vous en parler parce que j'en ai une maison toute à
l'électricité depuis quinze ans, et elle coûte cher. Depuis
quinze ans, elle a doublé et encore plus. On a beau dire que les tarifs
n'augmentent pas, mais je pense que l'écart aurait pu être plus
restreint pour protéger le tarif D. C'est le plus gros consommateur.
M. Boivin: Vous avez raison en fait de dire que l'écart
est grand. Il est effectivement grand entre le coût de production d'un
kilowattheure de base et le coût de production d'un kilowattheure de
pointe.
Maintenant au niveau du tarif résidentiel, si on compare nos
structures de coûts qu'on a vues hier, vous voyez que de toute
façon, malgré ce tarif que vous jugez élevé,
malgré ce fait, c'est encore un tarif qui bénéficie de
l'interfinancement qui provient de l'usage général petite et
moyenne puissances. Alors imaginez-vous s'il n'y avait pas cet
interfinancement, l'écart serait encore plus grand, parce que
présentement ce tarif-là ne reflète pas le coût
réel de production. 11 est plus bas que le coût réel de
production.
M. Hétu: Est-ce que vous êtes capable de nous donner
les deux coûts: le coût du tarif d'heures de pointe et le
coût de base? Est-ce que vous avez les coûts?
M. Boivin: Oui. Mme Bertrand va vous donner ces
chiffres-là. En fait, on en a un assez bon exemple. Si vous voulez
prendre les coûts économiques du complexe La Grande: les usages de
chauffage tout à l'électricité sont des usages en pointe
et vous avez un coût de 0,084 $ le kilowattheure alors que celui de l'eau
chaude, qui est un usage peu en pointe, est à 0,056 $. Alors vous avez
un écart de l'ordre de 25 %.
Le Président (M. Charbonneau): Cela va?
M. Hétu: Oui, cela répond à ma question mais
cela ne change pas le tarif.
M. Boivin: Ah non, cela ne change pas le tarif.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval.
Les coûts des investissements
M. Gauthier: M. le Président, j'apprécie la
remarque du député. C'est très juste. Il y a trois choses
que je voudrais aborder et qui finalement risquent d'être un peu longues.
Il y a un chiffre que j'aimerais vérifier avec vous. Dans le plan de
développement 1986-1988, à la page 63, il est prévu dans
l'avant-dernière section en bast Référence avec gestion de
l'offre et de la demande et ventes d'électricité
régulière à l'exportation de 3500 mégawatts,
horizon 2000. Vous avez des investissements prévus totaux en dix ans de
27 431 000 $. On s'entend là-dessus? J'essaie de comparer et de trouver
la correspondance dans le plan de développement de 1985-1987, horizon
1994, de l'année passée, et j'obtiens en page 81 de ce
plan-là, dans le bas également, deux chiffres. J'aimerais faire
la comparaison. Croissance de la demande à 3,4 plus 15
térawattheures d'exportation d'électricité par
année à compter de 1993 sans puissance garantie et, en bas, avec
puissance garantie... Le chiffre total des investissements en dix ans
était de 21 810 000 000 $ et sur dix ans avec puissance garantie, 26 544
000 000 $.
M. le Président, est-ce que le chiffre de 26 544 000 000 $
prévu l'année passée dans ce scénario est
l'équivalent avec un ajustement du chiffre de 27 431 000 000 $ du
scénario de cette année?
M. Grignon: Comme la demande de 3,4 de l'an dernier est la
même chose que les 3,3 de cette année, essentiellement c'est la
même demande. Donc, on a au moins cela de comparable. Maintenant, les 15
térawattheures d'exportation d'électricité
régulière, cela ne correspond pas à 3500 mégawatts;
3500 mégawatts de puissance d'énergie ferme cela correspondrait
plutôt à 23 térawattheures. Donc, c'est clair que l'exemple
qui était donné l'an dernier était un exemple de
scénario d'exportation qui est moins ambitieux que celui de cette
année.
D'autre part, l'an dernier il n'y avait pas de gestion de l'offre et de
la demande et on voit dans les chiffres de cette année que cette partie
gestion de l'offre et de la demande nous permet une réduction des
investissements sur dix ans de 4 000 000 000 $. Alors, effectivement, je n'ai
pas une conciliation détaillée des chiffres. Ce dont je peux vous
assurer c'est que, compte tenu de ces deux grandes différences, si on la
faisait on retrouverait grosso modo... (11 h 30)
M. Gauthier: En d'autres termes, si je comprends votre
réponse, le chiffre de 26 000 000 000 $ qui était donné
est modifié légèrement par deux choses essentiellement:
à la baisse par la gestion de l'offre et de la demande, qu'on a
étudiée en détail hier, et à la hausse par un
scénario d'exportations légèrement plus optimiste.
M. Grignon: Autrement dit, c'est un exemple un peu de ce que fait
la gestion de
l'offre et de la demande, en ce sens qu'avec les mêmes
investissements, on pourrait se permettre de signer des contrats de puissance
et d'énergie fermes de 23 térawattheures plutôt que de
15.
M. Gauthier: D'accord pour cela. Une autre sous-question
peut-être dans le domaine des équipements. On a bien
indiqué hier, sauf erreur, que pour ce qui est des équipements
nouveaux, on avait un certain répit dans la prise des décisions,
un répit d'environ une couple d'années, je pense, pour l'ensemble
des projets. C'est cela?
M. Coulombe: C'est exact.
Efforts de rationalisation des dépenses
M. Gauthier: Je vous remercie beaucoup. J'aurais un autre point
sur lequel j'ai prévenu déjà, tout à l'heure, au
début de nos travaux, M. le président et directeur
général d'Hydro, à savoir que j'aimerais vous entendre
peut-être pour cinq, six, sept, dix minutes, je ne sais pas le temps qui
vous sera requis, il faudrait peut-être se limiter un peu dans le temps
parce que j'ai une autre question à aborder, qui sera à
développement je pense. J'aimerais que le président-directeur
général d'Hydro-Québec nous entretienne sur les efforts de
rationalisation, très grands je pense... J'ai cru remarquer qu'il y a eu
des efforts énormes de faits concernant tout le fonctionnement de la
grosse boîte qu'est Hydro-Québec, et j'aimerais cela, M. le
président, que vous nous entreteniez quelques minutes
là-dessus.
M. Coulombe: Pour aller à l'essentiel, je pense qu'il faut
se rappeler qu'on a discuté hier du plan de développement de
1981, qui était extrêmement ambitieux et qui donnait des
références d'investissements de l'ordre de 55 000 000 000 $
à 60 000 000 000 $ pour les dix années suivantes.
Lorsque la récession économique s'est fait sentir, lorsque
la baisse dans la demande s'est fait sentir - baisse de la demande qui avait
déjà débuté aux États-Unis et en Ontario -
au Québec, ces deux phénomènes conjugués ont
obligé l'entreprise à faire un tournant qui s'est fait en 1982:
premièrement diminuer les dépenses prévisibles
d'investissement et deuxièmement, faire un effort de rationalisation des
dépenses.
Cet effort de rationalisation des dépenses s'est fait à
plusieurs niveaux. Il y a d'abord le niveau du personne! de l'entreprise. Entre
1978 et 1981-1982, les dépenses d'exploitation contrôlées
par l'entreprise - je ne parle pas de la dette, je ne parle pas de
l'amortissement, qui sont en quelque sorte un peu incontrôlables puisque
les investissements étaient déjà faits - en ce qui
concerne ces dépenses d'exploitation, notre objectif était de
passer d'un niveau d'à peu près 22 % ou 23 % de moyenne ces
années-là, de baisser cela de façon radicale. On a
réussi à baisser cela de façon radicale avec les actions
suivantes. D'abord, au niveau du personnel. On a, depuis 1982, une baisse des
effectifs de 9 %. Malgré l'augmentation des actifs de l'ordre de 8 000
000 000 $, et lorsqu'on augmente des actifs de 8 000 000 000 $ en termes
d'exploitation, cela rentre dans les dépenses d'exploitation mais cela
prend du personnel... Pour s'occuper, par exemple, de LG 2, LG 3, LG A, on a
à peu près 700 à 800 personnes, on a des postes nouveaux,
des opérateurs et ainsi de suite.
Donc, malgré cette nécessité absolue d'augmenter le
personnel - j'ai dit tantôt que nos clients augmentaient, on a eu 200 000
clients de plus - on a réussi à baisser le personnel,
principalement par un programme de départs volontaires, j'insiste sur le
mot "volontaires", qui a permis à 2300 employés d'Hydro de
quitter l'entreprise avec un programme précis de primes selon les
années de service et l'âge. Donc, c'est un programme qui a permis
de diminuer les effectifs de 2300.
Après ou pendant ces départs, on a coupé les
effectifs permanents. On a éliminé des postes.
Deuxièmement, au niveau de l'encadrement de l'entreprise, on a
diminué le nombre de postes de cadres de l'ordre de 33 %. Dans les trois
et quatre dernières années, on a éliminé beaucoup
de postes redondants. L'encadrement, la relation cadre-employés est
passé de six à neuf employés par cadre. Cela a
été un effort extrêmement intensif de rationaliser les
effectifs. Cela a été le premier travail.
Parallèlement, on a modifié l'orientation en ce qui
concerne la décentralisation de l'entreprise. Dans cet effort de
décentralisation, comme postulat de base, on a voulu rapprocher
Hydro-Québec de la clientèle et rendre les structures d'Hydro
beaucoup plus responsables et dynamiques vis-à-vis de la population. Les
clients. Cela a impliqué que 2000 postes sont passés des
régions aux secteurs. Dans l'entreprise on a 55 secteurs répartis
géographiquement et on a effectué un transfert de postes et
d'invididus, de la responsabilité des régions à la
responsabilité des secteurs qui est vraiment le coeur
opérationnel de l'entreprise. Cette opération s'est faite en
même temps et on a décentralisé aussi des pouvoirs. Cela a
de l'impact sur les économies régionales. À titre
d'exemple: auparavant, dans les régions ou dans les secteurs, ils
pouvaient faire des achats jusqu'à 25 000 $ sans faire appel au
siège social. On a monté cela à 100 000 $, c'est-
à-dire quatre fois plus de possibilités d'achats
régionaux et d'impact sur l'économie régionale. Toutes ces
choses se sont faites.
Un troisième niveau où on a agi, c'est un peu les exemples
qu'on a donnés tantôt. Devant la diminution du programme de
construction, on était aux prises avec beaucoup d'études qui
avaient été faites pour exécuter le programme de 55 000
000 000 $ dont j'ai parlé tantôt. Toutes ces études - on en
avait pour plusieurs centaines de millions de dollars, c'était
évident qu'il fallait avoir ces études puisque le plan
prévoyait 55 000 000 000 $ - on s'est dit qu'il fallait absolument avoir
un programme spécial de radiation. On a radié pour à peu
près 300 000 000 $ à 400 000 000 $ d'études,
d'avant-projets et ainsi de suite, ce qui a eu comme effet immédiat ou
à moyen terme, de baisser le prix du kilowattheure des futurs projets
dont on a parlé depuis hier. Ces 300 000 000 $ ou 400 000 000 $ sont
absorbés à même les dépenses d'exploitation. On a de
plus exigé que les intérêts sur les projets suspendus ne
soient plus capitalisés mais soient aussi dans les dépenses
d'exploitation. Ces sommes supplémentaires ont été
absorbées par l'exploitation, même si on baisse de 22 % de moyenne
jusqu'à 4 ou 5 %. Tout ce que je viens de mentionner a été
absorbé par les dépenses d'exploitation.
Cela vous résume un peu les efforts qui ont été
faits. Je pense aussi que malgré tout cela, dans nos relations avec les
syndicats d'Hydro, sans vouloir présumer du résultat de l'entente
de principe qu'on vient d'avoir avec les syndicats sur la convention collective
1986-1989, sans vouloir présumer du vote qui est en cours - la
dernière fois les conventions collectives se sont signées sans
intervention gouvernementale, ce qui était une nouveauté dans
l'histoire d'Hydro-Québec; cette année, la même chose, sous
réserve du vote qui n'est pas encore entré - nous sommes
optimistes. Donc, dans un climat où les relations du travail,
malgré ces compressions, malgré ces efforts de rationalisation,
le moins qu'on puisse dire, ne se sont pas détériorées
puisque les deux dernières conventions, sous réserve du vote,
semblent avoir été absorbées par l'entreprise sans les
drames et les problèmes qui étaient vécus de façon
régulière dans le cadre des relations du travail d'Hydro qui
était un problème extrêmement complexe et délicat
dans cette entreprise.
Je ne veux pas m'étendre plus parce qu'on pourrait donner
beaucoup plus d'exemples, mais c'est l'essentiel des efforts qui ont
été faits. Ces efforts se poursuivent. J'ai donné dans mon
introduction d'hier... On continue régulièrement à essayer
de modifier la croissance du budget et d'essayer de restreindre les
dépenses. Je pense que pour le "management" d'Hydro et pour les
employés - c'est à tous les niveaux - il y a une
compréhension de plus en plus grande de la relation entre nos
dépenses d'exploitation et le coût d'électricité aux
consommateurs. Je pense que cette prise de conscience s'accélère
et évidemment il y a une limite parce que c'est un produit qu'on vend et
dans 100 % des cas on n'a pas le choix de ne pas le produire et de ne pas le
livrer. Donc lorsqu'une entreprise a une augmentation de 30 % de son chiffre
d'affaires et 200 000 clients de plus en trois ou quatre ans, réussir
à baisser les dépenses d'exploitation, je pense que pour le
"management" d'Hydro, l'ensemble des cadres supérieurs, et aussi les
employés et les syndicats, il y a eu une collaboration qui était
absolument nécessaire, sans laquelle il n'aurait pas été
possible de l'accomplir. Cela résume un peu le climat et l'esprit au
moins dans lequel se sont faites ces actions concrètes de restrictions
des dépenses.
Motion proposant de recommander le rejet de
la proposition -tarifaire
d'Hydro-Québec
M. Michel Gauthier
M. Gauthier: Je vous remercie, M. le président. J'aurais
aimé, et j'espère que ses collègues vont le faire, que le
député de Taschereau, qui s'inquiétait hier de certains
aspects de la publicité d'Hydro puisse être ici pour constater
l'ampleur des démarches qui sont faites dans le sens de la
rationalisation des dépenses.
M. le Président, puisqu'on en est à la fin de
l'étude de la proposition tarifaire, compte tenu de ce qu'on a vu dans
le plan d'équipements, la stratégie d'investissement; compte tenu
du fait qu'on a, dans le plan d'équipements 1984-1985, prévu
d'accepter une baisse, pour quelques années, du rendement de
l'équité et des tarifs afin de permettre à
Hydro-Québec d'augmenter sa position concurrentielle; compte tenu que
les présentes années sont extrêmement importantes sur le
plan de la concurrence entre les formes d'énergie; considérant
aussi - je pense qu'on l'a soulevé hier assez bien -la concurrence de la
pénétration du gaz, le problème de la
pénétration du gaz par rapport à
l'électricité, on a également parlé de la baisse du
prix du pétrole qui pose certains problèmes à ceux qui
vendent des formes d'énergie concurrentes; si on considère
également, cela a été mis en lumière ce matin, que
le taux d'inflation prévu par Hydro, ce sont des prévisions qui
ne peuvent être d'une exactitude à tout casser, mais elles sont
quand même passablement différentes de celles prévues par
le président du Conseil du trésor, sans vouloir présumer
que l'un ou l'autre ait mal fait son travail, il y a manifestement une
divergence importante entre les deux...
Compte tenu aussi du fait que selon le plan - cela a été
mis en lumière par mon collègue ce matin - que les ventes
d'Hydro-Québec pourraient être supérieures à ce qui
est prévu, en tout cas, acceptons pour le moins que les
prévisions sont relativement modestes; considérant
également que les chiffres qui nous sont présentés
à la page 85 de notre document qui nous dit, par exemple, qu'une simple
variation des tarifs de 1 % rapporte 20 000 000 000 $ à Hydro, par
contre, si le prix du pétrole brut international subit une hausse de 1 $
US, c'est 15 000 000 000 $ en réalité pour Hydro... compte tenu
du fait que l'ensemble de tous ces chiffres, de toutes ces variables sur
lesquelles on ne peut rien et qui ont une influence considérable sur les
revenus d'Hydro, sur la position d'Hydro, j'aimerais, en terminant cette
commission - ce sera ma dernière intervention - présenter une
motion à votre attention à l'effet que la commission de
l'économie et du travail recommande au gouvernement de rejeter la
proposition tarifaire d'Hydro-Québec et d'y substituter une majoration
inférieure à celle demandée et se rapprochant davantage du
taux d'inflation prévu.
J'ai évidemment laissé une marge de manoeuvre
là-dedans parce qu'il y a tellement de paramètres à
considérer, mais l'Exécutif devra prendre une décision et,
sans plaider sur le fond immédiatement, j'explique le sens.
Le Président (M. Charbonneau): Je vous prie de
présenter votre motion.
M. Gauthier: Oui, M. le Président. J'en ai
préparé une copie, bien sûr. En sachant que
l'Exécutif devra trancher sur le fond, nous aimerions... Comme
commission nous ne pouvons, M. le Président, déposer une motion
qui engagerait comme tels des fonds publics, mais nous pouvons faire des
recommandations à l'Exécutif. C'est dans ce sens que j'aimerais
que l'on discute de cette motion et qu'on puisse la mettre aux voix
aujourd'hui, à la fin de nos travaux qui, malheureusement, ont
été trop brefs, je le rappelle. J'aurai l'occasion d'y revenir
dans les remarques finales.
Le Président (M. Charbonneau): Avant de statuer sur la
recevabilité, je vais entendre une intervention de chaque
côté. Ensuite, je vais suspendre pour 5 minutes pour ensuite
statuer sur la recevabilité. Est-ce que, du côté
gouvernemental, il y a une... (11 h 45)
M. Théorêt: M. le Président, il est bien
clair que seul un ministre peut présenter une motion visant l'engagement
des fonds publics, l'imposition d'une charge au contribuable, la remise d'une
dette envers l'État ou l'aliénation des biens appartenant
à l'État.
Donc je vous demande, M. le Président, de rejeter cette
motion.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Roberval, est-ce que vous avez un complément d'information à
nous donner sur la recevabilité?
M. Gauthier: M. le Président, j'ai vérifié
l'ensemble de notre règlement, j'ai consulté avant de
présenter cette motion. L'article 185 me donne le droit, comme membre de
cette commission, de demander à la commission de se prononcer sur une
question par le biais d'une motion. L'article 158 m'autorise à le faire
sans préavis. Je ferai remarquer que le sens de la motion que je viens
de déposer n'engage en rien les deniers publics, comme on vient de le
dire. J'ai eu connaissance dans d'autres commissions où cela s'est fait
et où des décisions ont été rendues dans le
passé qu'un membre de la commission pouvait proposer une recommandation
au gouvernement. Il ne s'agit pas d'engager quelque denier public que ce soit.
Il ne s'agit pas d'obliger le gouvernement à restreindre, à
changer quoi que ce soit dans sa politique. La commission a quand même le
droit de faire valoir ses points de vue à la suite de l'étude
d'une journée et demie des crédits d'Hydro-Québec. La
commission peut faire une recommandation à l'Exécutif, laquelle
recommandation peut être traitée selon son mérite,
évaluée par l'Exécutif. Ce qui fait que deux issues sont
possibles, c'est-à-dire qu'elle est retenue dans un premier temps et,
à ce moment-là, c'est l'Exécutif qui décide
d'engager des fonds publics en respectant le voeu de la commission, ou elle est
rejetée par l'Exécutif, ce qui permet à toutes fins utiles
de dire que cette motion n'engendre aucune dépense d'argent de quelque
nature que ce soit.
Le Président (M. Charbonneau): M. le député
de Vimont.
M. Théorêt: M. le Président, M. le
député de Roberval vient de mentionner à plusieurs
reprises que ce n'est pas une motion mais une simple recommandation. S'il veut
reformuler cette recommandation et non pas la présenter comme une
motion, il est bien sûr qu'on pourra peut-être en discuter plus
longuement.
Le Président (M. Charbonneau): Écoutez, comme je
vous l'avais expliqué...
M. Gauthier: M. le Président, le libellé,
peut-être qu'on pourrait le relire pour notre collègue. C'est
parce qu'on appelle motion tout ce qui est proposé par un
député.
M. Ciaccia: Si vous voulez nous donner
deux minutes.
Le Président (M. Charbonneau): De toute façon,
j'avais indiqué que je suspendrais les travaux pendant cinq minutes. Je
vais vous donner l'occasion d'en prendre connaissance, sauf que je voudrais
ravoir la copie afin que je puisse prendre ma décision.
(Suspension de la séance à 11 h 49)
(Reprise à 11 h 55)
Le Président (M. Charbonneau): Je suis prêt à
rendre ma décision, sauf que je vais permettre encore une fois une
intervention de chaque côté, et, par la suite, on va rendre la
décision.
M. le ministre.
M. John Ciaccîa
M. Ciaccia: La résolution qui a été
déposée par le député de Roberval, à notre
avis, est clairement irrecevable et créerait un précédent
en ce qui concerne l'adoption de résolutions de recommandation devant
une commission. Je vous réfère à l'article 176 de notre
règlement qui stipule qu'"au terme de l'examen d'une affaire qui lui a
été confiée par l'Assemblée, toute commission
dispose d'un jour franc pour déterminer en séance de travail les
observations, conclusions et recommandations qu'elle entend déposer
à l'Assemblée." Alors, le mandat de cette commission était
d'entendre Hydro-Québec sur son plan de développement et ses
propositions tarifaires. Le moins qu'on puisse dire est que la
résolution présentée par le député de
Roberval est clairement prématurée. Si le député de
Roberval veut une séance de travail pour laquelle nous devons avoir un
jour franc d'avis, nous serions disposés à fixer ce jour auquel
nous pourrions nous réunir comme groupe de travail, pour avoir une
séance de travail, mais clairement, aujourd'hui, la résolution
est prématurée et irrecevable.
Je voudrais aussi souligner au président que, d'après la
Loi d'Hydro-Québec, nous n'avons pas le pouvoir de changer la
recommandation d'Hydro-Québec. L'article 22.01 de la Loi
d'Hydro-Québec prévoit que les tarifs et les conditions auxquels
l'énergie est fournie doivent être compatibles avec une saine
administration financière. Ces tarifs et ces conditions sont
fixés par règlement de la société selon les
catégories qu'elle détermine ou par contrats spéciaux. Ces
règlements et ces contrats sont soumis à l'approbation du
gouvernement. Autrement dit, c'est le conseil d'administration qui peut prendre
une décision en ce qui concerne Hydro-Québec. Le seul pouvoir que
nous avons, c'est soit de la rejeter, de demander de présenter une autre
proposition, mais nous n'avons pas le droit de changer la proposition
d'Hydro-Québec. C'est un argument secondaire. L'argument principal, M.
le Président, repose sur l'article 176 et, dans les commissions
parlementaires, on n'a jamais le droit de présenter une telle motion
avant de prendre les dispositions de notre règlement. Si le
député veut procéder à une séance de
travail, on pourra fixer une date et tenir cette séance de travail au
cours de laquelle nous pourrons discuter des observations, conclusions et
recommandations que la commission pourra déposer à
l'Assemblée.
Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M.
le député de Roberval.
M. Gauthier: M. le Président, l'article 176 qui est
cité par le ministre nous dit essentiellement une chose. C'est que le
principe est accepté, le principe est reconnu qu'une commission
parlementaire, les membres d'une commission parlementaire, au terme de
l'étude d'une affaire, peuvent faire des recommandations. C'est le
principe qui sous-tend l'article 176. À l'inverse du ministre, je
dirais, M. le Président, que le délai d'une journée n'est
pas un délai minimum, mais bien un délai maximum en ce sens que
toute commission dispose d'un jour franc pour déterminer en
séance de travail. La commission, selon la lettre et l'esprit du
règlement, doit, à l'intérieur d'une journée, non
pas trois semaines après, non pas six mois après, M. le
Président, non pas un an après, dispose à
l'intérieur d'une journée, peut à l'intérieur d'une
journée et doit à l'intérieur d'une journée faire
des recommandations additionnelles à l'Assemblée nationale. Je
reviendrai, M. le Président, sur le fait que j'ai présenté
cette motion en vous disant ceci: Nos règlements, par un article que
j'ai cité, soit l'article 185, permettent à un
député de déposer une motion. (12 heures)
À l'article 158, on me permet de déposer une motion sans
préavis. Jusque-là, tout est concordant. À l'article 176,
on indique clairement le principe. On reconnaît le principe de pouvoir
faire une recommandation à l'Assemblée nationale et, plus encore,
on indique que c'est à l'intérieur d'une journée qu'un
comité de travail pourrait se constituer. Si on n'accepte pas que la
commission procède d'elle-même, on peut la transformer en
séance de travail. On peut, à ce moment-là, étudier
une recommandation qu'on déposera à l'Assemblée nationale,
mais le délai d'une journée n'est pas un minimum. L'article ne
dit en aucune façon qu'il faille attendre au moins une journée
avant de former un comité de travail, de faire une recommandation.
Au
contraire, et je relis l'article bien lentement pour que tout le monde
le comprenne: "Au terme de l'examen d'une affaire qui lui a été
confiée par l'Assemblée - c'est le cas aujourd'hui - toute
commission dispose d'un jour franc pour déterminer en séance de
travail les observations, conclusions et recommandations qu'elle entend
déposer à l'Assemblée."
À partir du principe qui est exprimé à l'article
176, à partir également du délai maximum qui est
fixé à l'article 176, à partir de la possibilité
que j'ai de le faire à l'article 185 et à partir des
modalités qui stipulent que cela peut être sans préavis
à l'article 158, M. le Président, je vous demande de recevoir
cette motion puisqu'elle n'engage d'aucune façon l'Exécutif mais
elle nous permet de transmettre le voeu de cette commission à
l'Exécutif. C'est le sens et je la relis: "Que la commission de
l'économie et du travail recommande au gouvernement de rejeter la
proposition tarifaire d'Hydro-Québec et d'y substituer une majoration
inférieure à celle demandée et se rapprochant davantage du
taux d'inflation prévu." Voilà, M. le Président.
M. Ciaccia: M. le Président, si vous me permettez.
Le Président (M. Charbonneau): Trente secondes.
M. Ciaccia: II faut lire l'article 176 en entier. Il ne faut pas
juste s'attarder à un jour franc. L'article dit clairement "pour
déterminer en séance de travail". C'est là que la
détermination de la recommandation est faite, en séance de
travail. La raison pour cela c'est que le député doit nous
prévenir... Il faut avoir un jour franc pour avoir une séance de
travail et, à ce moment-là, on peut discuter de la recommandation
qu'on veut soumettre à l'Assemblée nationale. Cette
décision, cette recommandation doit être faite et doit être
prise en séance de travail. On ne peut pas se réunir samedi, mais
nous sommes prêts pour avoir cette journée à la reprise des
travaux de l'Assemblée nationale, cette séance de travail. Le but
de cela c'est parce que les députés doivent être
prévenus pour avoir une discussion sur les sujets que le
député veut apporter, et c'est le but d'avoir cette séance
de travail. C'est pour cela que les mots sont très clairement
écrits dans le règlement: pour déterminer en séance
de travail les conclusions et les recommandations... On ne peut pas les
déterminer hors de cette séance de travail. S'il veut, nous
sommes prêts à nous rencontrer le plus tôt possible.
M. Gauthier: M. le Président, vous me permettrez d'ajouter
à l'argumentation.
D'abord il s'agit d'une motion sans préavis, M. le ministre, ce
qui débâtit totalement votre argumentation de préavis pour
permettre une préparation ou ainsi de suite. Cela s'appelle une motion
sans préavis, ce que je viens de présenter. C'est tout à
fait prévu dans notre règlement.
Deuxièmement, M. le Président, ce qu'on peut faire
pnvément en séance de travail, je pense qu'on peut le faire
publiquement devant la population. L'article dont il est question ne nous
oblige pas à nous transformer en séance de travail, c'est une
modalité tout simplement. Le règlement permet à la
commission - et il existe de la jurisprudence à ce sujet - de se saisir
d'une motion présentée par un membre. Cela serait tout à
fait nouveau que tout à coup nos règlements ne permettent plus
à un membre de faire une motion. Il y a une possibilité de le
faire différemment, j'imagine, selon le voeu de celui qui
présente la motion, c'est-à-dire en séance de travail. 5i
tel était le cas, rien ne nous oblige, au contraire, à faire en
séance de travail privée ce qu'on peut faire en séance de
travail publique et immédiatement au terme des travaux, alors que tous
les députés ont présent à l'esprit les chiffres qui
viennent d'être énoncés, les données sur lesquelles
on a travaillé au cours des deux jours qui se terminent et, enfin, la
présence d'Hydro-Québec qui nous a donné toutes les
informations requises.
Donc, M. le Président, je vous demande de recevoir cette motion,
puisqu'elle est légale. C'est une motion sans préavis; elle peut
être traitée par la commission ou, le cas échéant,
lors d'une séance de travail qui peut se tenir immédiatement au
terme de notre commission. Mais la question de préavis ne tient d'aucune
façon, M. le ministre.
M. Ciaccia: M. le Président, les articles 185 et 158 sont
des articles de portée générale. Si votre
résolution ne portait pas sur une recommandation que la commission
entend déposer à l'Assemblée, les articles
s'appliqueraient. Mais il y a un article très spécifique pour les
recommandations que la commission entend déposer à
l'Assemblée nationale, et il prévoit que ces recommandations
doivent être déterminées en séance de travail.
Autrement, si on prend votre interprétation, l'article 176 ne veut rien
dire. Et il y a une règle d'interprétation qui veut que le
législateur a toujours voulu donner une portée à un
article,
À l'article 159, on stipule: "Toute commission siège en
public, sauf lorsqu'il s'agit d'une séance de travail." L'article 176
est très clair: il prévoit que pour une recommandation de
déposer à l'Assemblée nationale il faut que cela soit
déterminé en séance de travail, et il faut disposer d'un
jour franc pour déterminer cette séance de
travail et faire ces recommandations.
M. Gauthier: L'article 176, quand il a été
rédigé, visait à protéger la commission. Afin
d'éviter que l'Assemblée nationale exige qu'en tout temps,
immédiatement à la fin des travaux, on soit obligé de
déposer le rapport et tout ce qui s'y rattache, on accordait à la
commission un délai supplémentaire s'il était requis.
Mais, en aucun cas, cet article n'a été inséré dans
notre livre des règlements pour limiter le droit d'un membre de la
commission de déposer une motion sans préavis.
M. le Président, ce serait du nouveau droit parlementaire qui
irait à l'encontre de tout ce qui s'est décidé
jusqu'à présent. J'ai vu, dans le livre des décisions, des
décisions qui ont été rendues par des présidents
ayant eu le même problème antérieurement; ils acceptaient
et affirmaient très clairement et hors de tout doute ce principe
profondément démocratique et rattaché aux règles en
usage en commission parlementaire.
Le Président (M. Charbonneau): Écoutez, je pense
que...
M. Ciaccia: Le député est en train de faire un
débat sur l'intention du législateur. Quand le texte est clair,
je crois...
Le Président (M. Charbonneau): On ne fera de procès
d'intention à personne, mais le président va prendre quelques
instants pour consulter les conseillers en droit parlementaire.
La séance est suspendue pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 8)
(Reprise à 12 h 22)
Le Président (M. Charbonneau): À l'ordrel Je
voudrais d'abord signaler aux membres de la commission que le problème
que j'ai à trancher aujourd'hui est de l'ordre de ce qu'on appelle les
précédents.
D'une part, je voudrais dire que le premier argument qui m'a
été présenté à l'encontre de la motion,
c'est l'argument du député de Vimont. Il a été un
peu écarté par l'argument qui a été
présenté par le ministre et, je pense qu'il en conviendra, dans
la mesure où finalement on s'est rabattu sur l'article 176 et qu'on
confirmait la possibilité pour une commission de recommander et qu'une
recommandation, c'est aussi une opinion finalement ou une idée
générale, ce qui est permis à l'article 192, on ne
pourrait certes pas invoquer cet argument pour rejeter la motion.
Par ailleurs, il n'y a pas dans la jurisprudence, semble-t-il,
d'éclairage suffisant pour interpréter l'article 176. A priori,
j'ai des doutes sur la portée de cet article. A priori, on pourrait
penser que l'intention du législateur n'était pas, en
rédigeant l'article 176, de restreindre la portée des
débats publics en commission parlementaire et qu'une application
très rigoureuse, très restrictive ou une compréhension
très restrictive de l'article 176 limiterait d'une certaine façon
les droits des parlementaires de débattre tes questions importantes
publiquement plutôt que d'être contraint de le faire en
séance de travail.
Cependant, le président a toujours une porte de sortie. Il semble
que le législateur soit sage parfois dans ses intentions et dans ses
actions. L'article 193 dit que le président peut corriger la forme d'une
motion pour la rendre acceptable. En conséquence, a ce moment-ci, afin
de ne pas inutilement trancher la question de l'article 176 et vu que, d'autre
part, si on comprend le sens de l'article 176, on doit reconnaître qu'il
était possible, soit en séance de travail, soit en séance
publique, qu'une telle recommandation se fasse, je vais plutôt choisir de
modifier la motion pour la rendre recevable et de changer le mot
"réglementer" par "souhaiter". Donc, la commission de l'économie
et du travail souhaite que le gouvernement rejette la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec et y substitue une majoration inférieure à
celle demandée. Ceci rendrait, d'une part, la motion recevable et
d'autre part, permettrait la discussion de fond sur cette motion.
Par ailleurs, je vous signale qu'il nous reste cinq minutes avant que
nous ne soyons contraints - cinq ou trois, le président me fait signe,
mais si je me fie au cadran, il en reste cinq - d'ajourner nos travaux, en
fait, et en conséquence, on n'aurait d'autre choix pour poursuivre que
d'avoir le consentement unanime de tout le monde.
Ceci étant dit, M. le ministre...
Une voix: II reste trois minutes et non cinq minutes.
M. Ciaccia: Est-ce que je peux avoir le droit de parole.
Le Président (M. Charbonneau): Oui, oui. Je vous le
donne.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Charbonneau): Le président de
l'Assemblée me fait remarquer qu'il ne nous reste que trois minutes. M.
le ministre, rapidement.
M. Ciaccia: M. le Président, si vous me le permettez,
j'accepte évidemment votre décision. Parfois, c'est très
sage pour un président, sans vouloir trancher et créer un
précédent sur un article, de trouver un autre
moyen.
Le Président (M. Charbonneau): Vous êtes un vieux
parlementaire, vieux, dans le sens noble du terme.
M. Ciaccia: Oui, on l'a dit, dans ce sens, je vous donne des
compliments sur l'esprit avec lequel vous faites l'interprétation de nos
règlements. Je vais parler sur les propos de ce que souhaite - je ne
ferais pas une distinction entre souhaiter et recommander...
Le Président (M. Charbonneau): Je veux juste vous poser
une question. Est-ce que vous allez discuter sur la décision du
président, ou allez-vous engager la discusion sur la motion?
M. Ciaccia: Je voudrais m'engager, non pas sur la
décision, absolument pas. Je ne veux pas m'engager sur le fond de votre
décision, je voudrais parler sur la motion...
Le Président (M. Charbonneau): Vous savez, en
parlementaire expérimenté, que je vais d'abord donner la parole
au parrain de la motion.
M. Ciaccia: Bien, un instant, M. le Président, si
c'était possible, est-ce que je pourrais vous demander une
directive?
Le Président (M. Charbonneau): Oui, allez-y.
M. Ciaccia: Est-ce que vous pourrez nous expliquer pourquoi, en
mettant le mot "souhaite", et je ne reviens sur votre décision, parce
que je crois que c'est une façon très judicieuse de
procéder pour un président de chercher un autre article
plutôt que de vouloir rendre une décision sur 176, créer un
précédent avec lequel nous serons obligés de vivre...
Le Président (M. Charbonneau): J'anticipe bien votre
pensée, M. le député. Ce que je peux vous dire, c'est que
si j'ai choisi le mot "souhaite", c'est que, de toute façon, je pense
qu'une recommandation ou un souhait, c'est l'émission d'une opinion. Ce
qui est permis à l'article 192, c'est, de toute façon, ce que les
membres de Ja commission pouvaient faire. Quand on regarde la jurisprudence
à cet égard, y compris la jurisprudence qui a été
établie l'an dernier, à cette même commission, il y avait
eu une motion qui avait été présentée à ce
moment par l'Opposition - en 1981 plutôt, comme me le signale le
secrétaire de la commission -qui avait été jugée
irrecevable, mais le président, à l'époque, avait par
ailleurs indiqué comment une motion semblable aurait pu être
acceptable et donc, avait même proposé une formulation à ce
moment-là. C'est sur cette base finalement que j'ai choisi, je pense que
tout le monde me comprendra, la porte de sortie que me donnait l'article 193,
plutôt que de créer un précédent en tranchant.
M. Ciaccia: Mais M. le Président, je comprends que vous
voulez remplacer "souhaite" par "recommande"...
M. Gauthier: M. le Président, question de
règlement, M. le Président.
M. Ciaccia: ...mais est-ce qu'un souhait n'est pas aussi une
observation, parce que dans 176, je voudrais savoir la différence entre
observation, recommendation et souhait.
Le Président (M. Charbonneau): Une question de
règlement, M. le ministre.
M. Gauthier: M. le Président, je regrette pour le
ministre, mais quant aux subtilités du langage, il pourra trouver toutes
les réponses qu'il veut dans le dictionnaire Larousse. Je lui indiquerai
la page, s'il en a besoin. Il reste deux minutes pour qu'on puisse se saisir de
cette motion. M. le Président, vous avez rendu une décision,
comme on n'a pas à la commenter, je propose qu'immédiatement on
procède à l'étude de la motion, sur le fond de la motion.
J'en profiterai immédiatement après que cette étape sera
commencée, pour demander consentement à la commission pour
continuer notre étude.
Le Président (M. Charbonneau): De toute façon, je
pense qu'à ce moment de nos débats, il reste à peine 15
secondes. Je pense que tout cela devient un peu théorique.
Premièrement, la motion est acceptable...
Une voix: On peut l'adopter.
Le Président (M. Charbonneau): ...par ailleurs, à
moins qu'if y ait consentement pour prolonger, d'une part, ou d'autre part,
pour faire une adoption sans débat... Je crois que je vais être
obligé d'ajourner sine die.
M. Gauthier: M. le Président, on va demander d'abord le
consentement de l'Opposition. Si l'Opposition consent à ce qu'on puisse
débattre tout le fond de cette motion importante, on le fera.
M. Ciaccia: M. le Président, il y a un ordre de la Chambre
pour terminer nos travaux à midi et demi.
Le Président (M. Charbonneau): Parce qu'il n'y a pas de
consentement, la motion
était, premièrement, recevable, deuxièmement, il
n'y a pas de débat sur la motion parce que maintenant nous sommes
obligés d'ajourner les travaux de la commission sine die.
M. Gauthier: M. le Président je comprends que le ministre
n'est pas intéressé è faire un débat public sur le
résultat des travaux de cette commission.
{Fin de la séance à 12 h 31)