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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mercredi 8 août 1984 - Vol. 27 N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation sur la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et ses règlements


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante et une minutes)

La Présidente (Mme Harel): Je déclare ouverte la séance de la commission de l'économie et du travail. Je rappelle le mandat de cette commission, à savoir de mener une consultation particulière afin d'examiner la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et ses règlements.

Je vais demander au secrétaire de la commission de nous faire part des remplacements, s'il y a lieu, parmi les membres de la commission.

Le Secrétaire: Mme la Présidente, les remplacements sont les mêmes que pour les séances précédentes, soit M. Bourbeau (Laporte) remplacé par M. Côté (Charlesbourg), M. Rocheleau (Hull) remplace Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Laplante (Bourassa) remplace M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata) et M. Middlemiss (Pontiac) remplace M. Maciocia (Viger).

La Présidente (Mme Harel): Au cours de cette séance de l'avant-midi, nous allons entendre les groupes suivants qui ont été convoqués devant la commission, à savoir la municipalité régionale de comté de Pontiac, par la suite la municipalité régionale de comté de Mékinac, ensuite l'Administration régionale Kativik, en souhaitant pouvoir entendre l'Association nationale des travailleurs en réfrigération, climatisation et protection incendie, la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération, avant de terminer la séance de ce matin. Nous reprendrons cet après-midi avec les groupes convoqués pour la séance de cet après-midi.

Je pense que la parole est au maire de Shawville, M. Allan Black.

M. Dempsey (Gérald): M. Black n'y est pas.

La Présidente (Mme Harel): Je vous invite à vous présenter, à présenter les personnes qui vous accompagnent et à présenter votre mémoire.

La MRC de Pontiac

M. Dempsey: Mme la Présidente, mon nom est Gérald Dempsey, je suis maire de la municipalité de Waltham et

Bryson et préfet de la MRC de Pontiac. Je veux d'abord vous présenter les membres du comité de notre conseil qui ont été responsables de la question à l'ordre du jour. À ma gauche, M. Robert Ladouceur, maire de Mansfield, M. Denis Larivière, maire de Campbell's Bay, M. Lucien Brousseau, maire de l'Île-du-Grand-Calumet et M. Paul Ryan, maire suppléant de Waltham.

Mme la Présidente, il n'était pas possible que les membres du conseil soient présents aux auditions depuis lundi. Les maires ont donc délégué le secrétaire-trésorier, Jacques Ledoux, pour assister aux auditions. Hier soir, il nous a fait rapport et nous avons autorisé certains ajouts qu'il vous présentera. Tous les membres sont prêts à discuter avec vous. Je cède donc la parole à notre secrétaire-trésorier, M. Jacques Ledoux.

La Présidente (Mme Harel): M. Ledoux.

M. Ledoux (Jacques): Mme la Présidente, M. le ministre du Travail, M. Middlemiss, notre député, messieurs les autres membres de la commission, Pontiac est une des régions les moins développées du Québec. Pour s'en convaincre, la commission n'a qu'à prendre connaissance du rapport "Pontiac, profil socio-économique et avenues de développement" tel que préparé par l'OPDQ avec la collaboration de la Conférence administrative régionale de l'Outaouais, la CARO, laquelle regroupe les délégués de tous les ministères en région. J'ouvre une parenthèse, Mme la Présidente; je vous invite à lire ce rapport. Ce n'est pas une lecture difficile et cela peut être très intéressant.

Le rapport de l'OPDQ déposé en avril 1984 indique, aux pages 23 et 24, que Pontiac est 74e sur 76 divisions de recensement au Québec sur la question du revenu médian des ménages, alors que ce revenu n'atteint que 74,8% de celui de l'ensemble du Québec.

Il est donc évident que Pontiac a un besoin urgent de développement économique.

Dans ce contexte, c'est l'opinion unanime des 20 maires qui siègent au conseil de la MRC de Pontiac qu'un des obstacles les plus importants à ce développement est le coût excessif et injustifiable de la construction, lequel coût est directement relié à l'application du décret et des

règlements qui découlent de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

C'est donc l'objectif du présent mémoire de démontrer le bien-fondé de nos allégations et de suggérer les avenues de solution qui faciliteraient, pour Pontiac en particulier et les autres régions rurales en général, la relance du développement économique nécessaire au mieux-être des populations impliquées.

Le conseil des maires de la MRC de Pontiac n'est pas ignorant des antécédents historiques de la présente Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Le conseil ne préconise pas un retour à la situation anarchique qui a précédé les deux commissions d'enquête qui ont abouti à la réglementation actuelle.

En fait, la MRC de Pontiac ne propose aucun changement, ni à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction ni à la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction. Les modifications proposées sont éminemment possibles à l'intérieur de ces lois telles que sanctionnées. C'est plutôt au niveau des décrets et règlements qui découlent de ces lois que des accommodations sont nécessaires pour rejoindre les réalités du milieu rural.

Il n'est sûrement pas nécessaire de faire la preuve aux membres de cette commission parlementaire que les milieux urbains et ruraux sont différents, que les salaires sont plus élevés en ville qu'en campagne et que les dépenses sont aussi plus élevées en ville qu'en campagne. Par exemple, les revenus médians dans Pontiac n'égalent que 72,14% de ceux de Hull, alors que le loyer brut moyen mensuel n'est que de 68,06% de celui de Hull. Et c'est comme cela sur toute la ligne.

Depuis toujours, les collectivités urbaines et rurales sont régies par des règles différentes: la Loi sur les cités et villes et le Code municipal, sans compter évidemment les lois spéciales des grandes municipalités. Tant qu'est maintenu l'équilibre entre les aspects crédit et débit de ces différences, le mieux-être des populations des deux milieux est possible.

Le conseil des maires de la MRC de Pontiac soutient que la parité des salaires dans toute la province dans l'industrie de la construction est à l'origine d'un déséquilibre suffisamment important pour affecter négativement le rythme de développement dans toutes les régions rurales et, sûrement, dans celle de Pontiac.

Malgré ce qui précède, le conseil n'est pas sans comprendre le bien-fondé du principe de la parité salariale dans toute la province dans certains domaines. Dans certains cas, la parité salariale est le gage essentiel du traitement juste et équitable de la clientèle desservie par les salariés en question. Le domaine de l'éducation est un exemple évident. Il ne faudrait pas que la qualité de l'éducation dans Pontiac soit moindre qu'en milieu urbain pour la seule raison que les professeurs sont moins bien payés.

Toutefois, la parité au niveau des salaires des professeurs, comme celle d'autres spécialistes dans d'autres domaines reliés au principe de justice sociale, existe toujours dans un contexte de péréquation provinciale. Tous les Québécois paient en fonction de leurs revenus alors que les jeunes sont éduqués selon des normes provinciales, par des professeurs qualifiés selon des normes provinciales, et payés selon des normes provinciales.

Dans le domaine de la construction, la parité des salaires n'est pas contrebalancée par un système de péréquation, et nous ne voyons pas la possibilité d'en instaurer un à moins de faire de tous les travailleurs des travailleurs de l'État. La régionalisation des salaires nous semble donc la seule façon d'assurer justice et équité tant pour les travailleurs de la construction que pour la clientèle rurale qu'ils pourraient desservir si cette clientèle était mieux motivée vers le développement par des coûts plus abordables.

Ce qui précède ne touche que la petite et la moyenne entreprise. Nous ne voulons pas vous faire croire que les salaires prévus par le décret élargi et les dépenses de déplacement prévues au règlement empêcheraient la compagnie Consolidated Bathurst d'agrandir son usine près de Portage-du-Fort. La grande entreprise, à cause de ses structures, administre pour elle-même une sorte de système de péréquation tantôt national, tantôt même international.

Toutefois, la PME est la clef du développement chez nous et la PME ne réussit localement que si elle s'adapte aux réalités économiques locales. La PME ne peut espérer la rentabilité économique en milieu rural si ses infrastructures sont assujetties à une réalité économique urbaine. Cette vérité est particulièrement évidente au niveau des équipements touristiques et de ceux nécessaires aux services à la collectivité locale. La PME en place végète donc au seuil de la rentabilité par peur des effets du coût trop élevé des améliorations possibles alors que l'investisseur potentiel de l'extérieur opte pour le milieu urbain où ses chances de rentabilité sont meilleures en regard d'un investissement identique ou supérieur dans les dépenses de construction.

Le slogan "Les vrais bâtisseurs" est celui qui transpire dans toute la documentation publiée par l'Office de la construction du Québec, l'OCQ, pour informer et pour défendre les lois et règlements que cet office doit administrer. Et, entre parenthèses, les vrais bâtisseurs,

les vrais entrepreneurs, les vraies toutes sortes de choses ont été mentionnés plusieurs fois depuis deux jours à cette commission.

Ce slogan illustre très bien le biais urbain de toute la réglementation relative à la construction. La cité moderne est, par définition, un rassemblement de spécialistes qui s'échangent des services. L'équilibre entre ces spécialistes est essentiel à la survie économique de la cité. Et le contrôle de la spécialité dite "construction" était et continue d'être nécessaire à cet équilibre en milieu urbain.

En milieu rural, d'autre part, c'est une philosophie essentiellement différente qui en assure la survie. Le superspécialiste est beaucoup moins évident et les attributs qui étaient ceux du colon demeurent toujours de mise. Le travailleur rural est bâtisseur... et plus, car l'influence et la réalité de son milieu l'orientent vers le plus haut degré possible d'autosuffisance, donc vers une gamme variée de compétences techniques.

Celui qui veut devenir le vrai bâtisseur au sens de l'OCQ déménage en ville et son apport possible est perdu par la collectivité locale.

Le bâtisseur, d'autre part, qui se reconnaît des racines dans sa place natale ou adoptive, ne peut être exclusivement bâtisseur; il ne lui est pas possible de trouver, année après année, 500 heures de "bâtissage" à faire!

Le rapport de l'OPDQ fait état, à la page 33 - c'est une correction au mémoire -du fait que Pontiac compte plus de travailleurs en construction que la moyenne au Québec. Ce que le rapport ne dit pas, c'est qu'une forte proportion de ces travailleurs ont leur emploi à Pembroke, Renfrew et Ottawa, en Ontario. Pour le travailleur dans l'ouest du comté, il est préférable de trouver un travail régulier à Pembroke plutôt que d'être à la merci de déplacements un peu partout à l'intérieur de la sous-région de Hull. En conséquence, les travaux à faire au coeur du Pontiac impliquent trop souvent le paiement de frais de déplacement pour des travailleurs en provenance de Hull.

Depuis la sanction de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, les conventions collectives ont toujours été étendues à l'ensemble de l'industrie au Québec, conformément aux articles 47 et suivants de la loi précitée.

Il se peut que, jusqu'à ce jour, la conjoncture économique ait été telle que ce prolongement était ou bien justifié, ou bien sans conséquences perçues par le milieu rural. Les conséquences négatives d'une extension uniforme sont maintenant ressenties, et le prochain prolongement devrait reconnaître la différence entre les facteurs économiques tels qu'ils affectent les milieux urbains et ruraux.

Deux zones sont donc proposées: la zone urbaine, laquelle inclurait les municipalités régies par la Loi sur les cités et villes, et la zone rurale, laquelle inclurait les municipalités régies par le Code municipal. Les salaires dans la zone rurale seraient moindres que ceux dans la zone urbaine dans une proportion fixée selon un système de pondération qui tient compte des réalités économiques rurales. Ce pourcentage se situerait probablement entre 70% et 80%.

Entre parenthèses ici, particulièrement pour le député de Bourassa: il n'est pas question de parler de salaire à rabais; il n'est pas question de mettre sur le dos des travailleurs le coût apporté, mais il n'est pas question non plus de payer une surprime à une catégorie de travailleurs lorsque les autres travailleurs de la région n'ont pas cette surprime.

Le conseil des maires de la MRC de Pontiac recommande donc que l'extension juridique de la prochaine convention collective ne soit pas accordée, si elle ne différencie pas les zones urbaines et rurales au niveau des salaires, et qu'au besoin, dans l'intérêt public, le gouvernement fixe unilatéralement les deux zones salariales en question, tel que le lui permet le quatrième alinéa de l'article 51 de la loi.

Ici, on ouvre une autre parenthèse, Mme la Présidente. Il convient ici de faire un commentaire sur la question soulevée au tout début par le ministre du Travail et reprise par certains autres intervenants. C'est la question de l'interventionnisme. Aucune loi que nous connaissons ne donne la compétence aux municipalités régionales de comté dans le domaine des relations du travail. Toutefois, traditionnellement, sans doute parce qu'ils sont l'instance gouvernementale la plus près du peuple, les conseils municipaux ruraux ont dû se mêler de choses qui ne relèvent pas officiellement de leurs compétences juridiques. Ils se reconnaissent toutefois une compétence morale pour répondre aux attentes de leurs commettants en qualité de consommateurs. La question à l'ordre du jour prévoit des négociations et des ententes bipartites. La question des relations du travail a toutefois suffisamment évolué dans certains domaines, dont la construction, pour que soit considérée la nécessité de négociations tripartites. La troisième partie doit évidemment être le représentant du consommateur. Nous ne croyons pas qu'il faille libeller d'interventionnisme l'apport du gouvernement provincial dans cette question. Le gouvernement ne fait que prendre ses responsabilités vis-à-vis des consommateurs. Les élus municipaux font la même chose. Nos maires sont prêts à passer du principe à l'action et à s'asseoir à la table avec les deux autres parties pour négocier un règlement qui serait équitable pour le

consommateur, qu'il soit bâtisseur ou qu'il soit autre chose. (10 heures)

Un autre élément de solution touche le règlement sur le placement des salariés. Tel qu'expliqué plus tôt, le bâtisseur rural moyen n'est pas seulement bâtisseur. C'est un travailleur versatile et compétent dans d'autres métiers que ceux reliés à la construction. Les heures requises par le règlement précité le forcent, à plus ou moins courte échéance, à quitter le métier en l'absence du droit au travail. Chez nous, certains continuent à pratiquer leur métier en Ontario, même si les revenus moyens dans cette province ne sont que de 86% de ceux du Québec. Le service doit alors être fourni par le bâtisseur urbain à coût plus élevé. De plus, le phénomène engendre un déséquilibre entre la masse des bâtisseurs urbains et celle des bâtisseurs ruraux.

Le conseil des maires de la MRC de Pontiac recommande donc: 1. que soit ajoutée une nouvelle définition à l'article 1 du règlement sur le placement des salariés qui se lirait comme suit: "milieu rural: tout le territoire dans une municipalité régie par le Code municipal"; 2. que soit modifié l'article 3 du règlement sur le placement des salariés pour prévoir un quatrième type de classification, soit le certificat AR ne pouvant être émis qu'à un bâtisseur domicilié en milieu rural et ne l'autorisant pas à travailler en milieu urbain; 3. que soit modifié le même règlement pour diminuer de moitié les heures requises aux articles 7, 8 et 9 pour être admissible au certificat de classification AR; 4. que soit modifié l'article 35 du même règlement pour prévoir les priorités d'embauche suivantes, un peu comme les autochtones: a le titulaire d'un certificat AR à l'intérieur des limites de la municipalité rurale où est situé le chantier; b le titulaire d'un certificat AR dans les limites de la MRC où est située la municipalité rurale dans laquelle est situé le chantier; c le titulaire d'un certificat À dans la région où les travaux relatifs au travail offert sont exécutés; d à la personne inscrite à l'office suivant l'article 49.

Ce qui précède est évidemment un énoncé de principe formulé de façon spécifique. Il est évident qu'il faudrait adapter l'article 38 de ce même règlement à ce même principe, la question des entrepreneurs qui amènent leurs employés, peu importe d'où ils viennent. C'est discutable parce que, dans certains cas, les employés sont spécialisés et ils doivent accompagner l'entrepreneur. Dans certains autres cas, ce n'est pas le cas.

Nulle part dans notre mémoire officiel nous ne parlons du travail au noir. Nous considérons ce phénomène comme étant un effet plutôt qu'une cause du problème, mais, vu que tout le monde en a parlé jusqu'à maintenant, nous nous devons d'ajouter nos commentaires. Le conseil des maires de la MRC de Pontiac déplore lui aussi l'incidence marquée du travail au noir. Sa seule raison pour ce faire, toutefois, est celle du principe qui veut que le développement et le maintien d'une société saine ne puissent se faire que dans un contexte de respect des lois et règlements. Toutefois, le conseil des maires ne croit pas qu'il faille s'attarder à s'attendrir sur les conséquences économiques ou autres qui frappent les pratiquants de ce marché noir. Le phénomène des fonds de retraite, par exemple, autres que ceux administrés par l'État, est un phénomène essentiellement urbain. Aucune des 20 municipalités qui, ensemble, constituent notre MRC n'administre de fonds de retraite pour ses employés et les conditions de travail pour les employés de ces municipalités reflètent fidèlement celles généralement présentes dans votre milieu.

Quant aux conséquences économiques du travail au noir pour notre société, nous croyons utile de cerner certaines hypothèses qui méritent un examen plus approfondi par votre commission. Les interventions à ce jour nous semblent suggérer que si, par des mécanismes quelconques, il avait été possible d'empêcher le travail au noir, la masse salariale impliquée aurait bénéficié aux vrais entrepreneurs, aux vrais travailleurs et a leur vrai gouvernement. Nous croyons que l'hypothèse contraire mérite d'être étudiée, car nous y souscrivons. Nous croyons que l'argent utilisé pour payer le travailleur au noir n'aurait pas été dépensé dans la construction. Il serait demeuré à l'épargne ou il aurait été dépensé pour le bénéfice d'industries moins motrices que celle de la construction.

Un autre aspect de la même question touche, justement, l'effet domino des emplois créés dans la construction. Au moins un intervenant a souligné qu'un emploi créé dans la construction en crée quatre autres ailleurs. À notre connaissance, ce phénomène n'est pas réservé aux situations qui impliquent des travailleurs syndiqués de la construction. Un emploi au noir est bel et bien un emploi créé. Les quatre autres emplois créés par le travailleur au noir peuvent fort bien bénéficier aux membres en règle d'un syndicat quelconque et ces mêmes travailleurs peuvent fort bien être des citoyens honnêtes et payer leurs impôts. Le bénéfice net du travail au noir n'est peut-être pas aussi négatif pour la société que certains veulent nous le laisser croire. Le sens commun, très répandu en milieu rural, nous dit que les bénéfices accrus des quatre

travailleurs légaux compensent généreusement les bénéfices perdus à cause d'un travailleur illégal. Nous ne suggérons pas l'encouragement du travail au noir, mais nous suggérons à tous de regarder la réalité en face.

La question du champ d'application a aussi été soulevée à maintes reprises. Nous ne voulons pas nous inscrire en faux contre les déclarations du président de l'Union des municipalités régionales de comté dont nous sommes membres, mais nous suggérons que, si nos autres recommandations sont acceptées concernant les différences entre le milieu urbain et le milieu rural, le gouvernement pourrait éliminer l'article 19 de la loi.

Notre prochaine recommandation au mémoire officiel a été écrite, comme les autres, en langage simple et très peu imagé. Avant de la répéter, il convient toutefois d'ouvrir une parenthèse vu - et je m'excuse d'avance du mot choisi - le dégobillage auquel nous avons été exposés depuis deux jours concernant cette noble profession qu'est celle d'entrepreneur artisan. Il est peut-être vrai que, pour le milieu urbain, l'artisan a été inventé en février 1979, mais à la campagne il existe depuis toujours.

Les mêmes gens qui voudraient voir l'artisan disparaître, endossent pourtant la création d'un métier de "jack-of-all-trades" et endossent un certain décloisonnement des métiers. Qu'on leur donne le nom qu'on veuille, on parle d'artisans.

Toutes les critiques à l'endroit de l'entrepreneur artisan semblent suggérer que les permis étaient donnés trop facilement. On a laissé sous-entendre qu'il existe un manque de compétence au niveau des artisans accrédités. Pourtant, c'est la même régie qui émet les permis de tous les entrepreneurs. Doit-on douter de la compétence de tous ces entrepreneurs accrédités?

La régie est administrée par des fonctionnaires tout comme ceux qui décident de la compétence des travailleurs syndiqués au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Doit-on s'interroger sur la compétence de tout le monde dans la construction? Nous suggérons que toute l'argumentation avancée jusqu'à maintenant contre l'artisan doit être rejetée. Si nous espérons continuer de progresser dans le développement de notre belle province nous devons considérer l'artisan comme étant un travailleur qui prend son devenir en main. Nous vous suggérons que le progrès significatif a toujours été fondé sur des gens de cette trempe.

Nous retournons au mémoire officiel. Le dernier élément de solution touche le règlement qui découle de la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs en construction. Le milieu rural est particulièrement propice à l'évolution de l'entrepreneur artisan si l'on tient compte des particularités de ce milieu. Dans ce contexte, les droits exigibles annuellement sont quelque peu élevés compte tenu du volume de travail disponible. Il y aurait aussi lieu de permettre à l'artisan en milieu rural d'employer un salarié apprenti afin d'assurer la relève à partir de ce même milieu rural. De plus, vu la nécessité de l'adaptation de l'artisan à la réalité salariale du milieu rural, il y aurait aussi lieu de lui permettre d'engager un manoeuvre journalier pour le libérer de certaines tâches ne nécessitant d'autres connaissances spécialisées que celles reliées à la sécurité au travail.

Le conseil des maires de la MRC de Pontiac recommande donc: 1. Que soit ajoutée une nouvelle définition à l'article 1 du règlement de la Régie des entreprises de construction du Québec, qui se lirait comme suit: "Milieu rural: Tout le territoire dans une municipalité régie par le Code municipal." 2. Que soit ajoutée une nouvelle définition à l'article 1 du même règlement qui se lirait comme suit: "Entrepreneur artisan rural: Une personne physique faisant affaires seule ou avec l'aide d'un salarié apprenti et/ou manoeuvre journalier qui exécute elle-même des travaux de construction en milieu rural, sans donner de contrat, dans la ou les sous-catégories telles que définies à l'annexe B du même règlement." 3. Que soit ajouté, à l'article 7 du même règlement, un deuxième alinéa se lisant comme suit: "Dans le cas du milieu rural, la priorité sera donnée à l'entrepreneur artisan rural". 4. Que soit modifié l'article 21 du même règlement pour prévoir un droit exigible de l'entrepreneur artisan rural d'un montant de 100 $ plutôt que de 250 $.

En conclusion, c'est l'opinion du conseil des maires de la MRC de Pontiac que la prise de conscience de la nature et de l'étendue des problèmes de développement reliés aux particularités de l'industrie de la construction est le résultat du dialogue intermunicipal rendu plus efficace par suite de la création des MRC.

Si, au moment de l'adoption des lois mises en cause dans le présent mémoire, il y avait eu, dans les milieux ruraux de la province, des organismes comme les MRC avec compétence dans le domaine du développement, le débat aurait sûrement cerné le mal-fondé de l'extension juridique de la parité salariale.

Il n'est jamais trop tard pour changer le cap. Merci, Mme la Présidente. (10 h 15)

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Ledoux. La parole est au ministre du Travail.

M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente. MM. les maires, M. le secrétaire-trésorier, je vous remercie de nous avoir livré votre mémoire et aussi de l'intérêt que vous avez manifesté à cette commission. Vous êtes, sous réserve de ce que la mémoire peut faire, un des premiers organismes qui a manifesté son intention d'être entendu dès le début et c'est au moment où vous avez manifesté cette intention que vous nous avez également fait parvenir ce document, cette étude sur le profil socio-économique de Pontiac. Je ne peux, quant à moi, que renchérir ou réitérer l'invitation que vous nous avez faite de lire avec autant d'attention que possible le document que vous nous avez fait parvenir. Cela ne fera qu'enrichir les connaissances de ceux et de celles qui trouvent votre région magnifique et qui prennent le temps d'aller la voir pour constater toutes les richesses qu'on y retrouve.

Dans votre mémoire écrit, vous faites référence essentiellement à deux points bien particuliers, l'un étant la parité salariale, l'autre étant la question de la formation professionnelle. Par ailleurs, comme vous aviez un observateur qui a suivi les travaux depuis le début, vous avez ajouté un certain nombre d'autres commentaires qui touchent d'autres aspects de l'ensemble du dossier que nous sommes à étudier.

Vous émettez l'opinion que la loi elle-même ne devrait pas être changée. Du moins, c'est ce que votre rapport écrit signale, sauf que vous avez, après avoir entendu les autres mémoires, ajouté un certain nombre de commentaires qui viennent un peu modifier cette première position. Vous nous dites, par exemple: Si nos recommandations étaient acceptées, il faudrait, à toutes fins utiles, prendre les dispositions pour que l'article 19 de la loi soit abrogé purement et simplement. Enfin, il y a une espèce de rajustement qu'il va falloir faire par rapport à ce qui a été écrit et ce que vous venez de nous dire en ajout au mémoire que vous nous avez soumis.

Vous êtes d'avis, et vous l'avez dit de façon très claire, que les problèmes que vous vivez découlent essentiellement pas tant de la loi que des décrets et règlements qui en procèdent, enfin qui sont adoptés en vertu des dispositions de cette loi. C'est à partir de cette prémisse que vous développez cette thèse en vertu de laquelle il faudrait faire disparaître la parité salariale dans tout le territoire du Québec. C'est essentiellement votre thèse de fond. Pour y arriver, votre première série de recommandations, c'est en quelque sorte - là-dessus, vous me corrigerez si j'interprétais mal la suggestion que vous nous faites - de resserrer davantage les dispositions de l'actuel règlement de placement en y ajoutant un certain nombre de restrictions. C'est comme cela que j'ai compris la suggestion et je vous signale qu'à tout moment vous pourrez m'interrompre pour me dire que j'interprète mal.

Depuis deux jours, nous avons entendu toute une série de témoignages et d'opinions sur le règlement de placement allant d'un extrême à l'autre, dans le sens que les uns suggèrent qu'il disparaisse purement et simplement, et essentiellement cette thèse est basée sur les principes suivants: le règlement de placement crée des espèces de ghettos. Le règlement de placement est ainsi balisé qu'il pose des contraintes à la liberté individuelle. Le règlement de placement est à ce point restrictif qu'il empêche des gens qui le voudraient de pouvoir gagner leur vie et travailler dans le secteur de la construction.

La question que je me pose et que, par voie de conséquence, je vous pose aussi, est la suivante: Est-ce que vous n'êtes pas d'avis que, si la suggestion que vous nous faites quant aux amendements éventuels à apporter au règlement de placement devait être retenue, nous procéderions alors à resserrer davantage la situation qui a été décrite et nous contribuerions, à l'intérieur même du territoire du Québec, à créer -entre guillemets - un "ghetto"? Entendons-nous bien: c'est expressément pour essayer d'exprimer mon opinion le plus clairement possible. Mais, est-ce que cela n'aurait pas comme conséquence immédiate de faire une démarcation très nette entre les régions qu'on est convenu d'appeler rurales et urbaines au Québec et que cela n'accentuerait pas ce phénomène dont on parle depuis deux jours? Vous avez été très clair: il faudrait faire en sorte que les travailleurs de la construction des villes du Québec ne puissent pas travailler dans la construction dans les sections rurales. C'est, essentiellement, votre argumentation. Enfin, je vous pose la question. Sans doute avez-vous une argumentation de fond pour tenter de nous convaincre de la justesse de cette position. Mais c'est une première clarification que je souhaiterais obtenir.

M. Ledoux: Mme la Présidente, M. le ministre, pour répondre à votre question, il n'est pas tout à fait exact de dire... On ne dit pas spécifiquement dans le mémoire que les travailleurs urbains ne pourraient venir travailler en région rurale. On donne simplement la priorité aux travailleurs locaux et certains des intervenants, hier et avant-hier, ont exprimé cette même approche.

Deuxièmement, la raison pour laquelle le comité et le conseil des maires n'ont pas demandé la disparition du règlement, c'est qu'ils se croient réalistes. On est en 1984; on est dans une situation où il y a un besoin de réglementation et on a rejeté l'approche de demander l'abolition du règlement; on souhaite qu'il soit adapté. Ce qu'on demande

enfin... Vous êtes, M. le ministre, le ministre du Travail. L'extension dans la province n'est pas, à ma connaissance, ailleurs que dans la construction. On a des comités paritaires régionaux dans toutes sortes d'autres métiers et ces comités paritaires régionaux fixent les salaires selon les réalités économiques régionales. C'est exactement ce qu'on vous demande, M. le ministre. Je voudrais souligner que le conseil des maires, je vous l'assure, parle de principes dans le mémoire. Si vous trouvez un autre mécanisme pour donner le même résultat, je vous assure que ses membres vont vous applaudir.

M. Fréchette: Oui, je pense qu'on est sur la bonne voie quant à la possibilité de clarifier cette situation. Vous répondez à ma question en me disant que votre objectif n'est pas d'empêcher que le travailleur du milieu urbain se retrouve dans la région rurale. Vous précisez en disant: Il faudrait, cependant, qu'il y ait une priorité d'embauche accordée aux travailleurs du milieu rural. Mais, M. Ledoux, est-ce que les dispositions qu'on retrouve actuellement dans le règlement de placement et qui parlent d'embauche par priorité régionale ne rejoignent pas très précisément l'objectif que vous poursuivez?

M. Ledoux: Malheureusement, non, parce que nous sommes dans la sous-région de Hull. Cela veut dire que les travailleurs qui ont accumulé un nombre d'heures suffisant et qui sont inscrits au bureau de placement ne seront pas des travailleurs du comté de Pontiac; ce seront des travailleurs des villes de Hull, Gatineau et Aylmer plutôt que des travailleurs du comté de Pontiac. Quand on parle de régions, le règlement prévoit de trop grandes régions. Si vous changiez simplement la définition des régions, vous pourriez peut-être arriver exactement à la même...

M. Fréchette: ...exemple. C'est intéressant ce que vous êtes en train de me dire là. Si, par exemple, en termes de délimitation géographique, de délimitation de régions, cela crée les embêtements que vous êtes en train de nous décrire, que penseriez-vous d'une formule - là, je mets cela sur la table à tout hasard - qui pourrait ressembler à la suivante: Si la priorité d'embauche se faisait par le choix des travailleurs qui demeurent le plus près, dans le rayon du chantier de construction... Au lieu de parler, par exemple, d'une région géographique bien délimitée, si l'on disait: II se construit dans l'une ou l'autre de vos municipalités une aréna, un édifice municipal ou tout autre genre de construction, la priorité d'embauche des travailleurs se fera en considération de leur lieu de résidence par rapport à l'endroit où se fait le chantier, qu'est-ce que cela dirait? Là, encore une fois, c'est strictement et uniquement une hypothèse pour pousser plus à fond notre discussion.

M. Ledoux: J'ai l'impression, Mme la Présidente, que votre suggestion est exactement ce qu'on demande.

M. Fréchette: Maintenant...

M. Ledoux: M. le ministre, avant que vous ne répondiez, je ne sais pas si vous êtes très conscient de la géographie, mais notre municipalité régionale de comté de Pontiac a 100 milles de long sur 100 milles de large.

M. Fréchette: Oui.

M. Ledoux: Lorsqu'on parle d'un travailleur de Hull - on vient de l'Outaouais, on n'est pas contre le député Rocheleau, je vous le garantis - tout de même, pour aller travailler à Campbell's Bay, on parcourt plus de 60 milles. À ce moment-là, il faut payer des frais de déplacement aux travailleurs de Hull. En plus d'un salaire qui n'est pas le même que celui payé à Campbell's Bay, on doit, en plus de cela, payer des frais de déplacement. Cela veut dire qu'on abandonne l'idée de faire de la construction, qu'on l'abandonne tout simplement. C'est pour cela qu'on parle de régionalisation des salaires et de régionalisation de la priorité d'embauche.

M. Fréchette: Cela va sur ce point. L'autre aspect du mémoire que j'apprécierais que vous puissiez expliciter un peu plus, c'est l'objectif que vous visez de faire en sorte que la parité salariale disparaisse. Disons les mots comme il faut les dire. En d'autres mots, votre opinion, c'est qu'il devrait y avoir une différence au niveau des salaires pour quelqu'un qui travaille en région, chez vous, par rapport à quelqu'un qui travaille à Québec, à Montréal ou ailleurs, en considération du principe que les moyens de payer ne sont pas essentiellement les mêmes. C'est un principe, bien sûr, mais en vertu de quel autre principe, M. Ledoux, faudrait-il qu'un électricien qui a la même formation, la même qualification, la même expérience chez vous, qui donne des services d'électricien qualifié, ne reçoive pas le même salaire que l'électricien qui travaille à bâtir un hôtel à Montréal?

M. Ledoux: Ce n'est pas un principe à ce moment-là, Mme la Présidente, M. le ministre, c'est plutôt la réalité économique. On dit au tout début de notre mémoire que les gens de notre région paient des loyers de 200 $ par mois tandis qu'à Montréal ils paient 400 $ par mois. Le même électricien aussi qualifié, mais qui demeure à Campbell's Bay, a des dépenses moindres, et il a donc

besoin d'un revenu moins élevé que celui de Montréal, point.

M. Fréchette: Je parie avec vous que, si on est capable de le convaincre de cela, on va faire un bout dans ce sens. Je ne sais comment on va réussir, vous et moi, avec M. Middlemiss et les autres, à convaincre ces gens qu'il faudrait...

M. Ledoux: L'ajout...

M. Fréchette: ...s'en aller dans cette direction.

M. Ledoux: ...concernant la question d'interventionnisme se dirigeait vers cela.

M. Fréchette: Ah!l vous voudriez que l'État...

M. Ledoux: C'est votre responsabilité d'être la troisième partie à la table. (10 h 30)

M. Fréchette: Ah bon! Je pense que, dans ces circonstances, je vais plutôt suivre les conseils qui nous ont été donnés depuis deux jours, de nous retirer complètement du champ d'intervention.

Il y a autre chose, M. Ledoux. Toujours en fonction de cette question des salaires, vous signalez dans votre mémoire que les coûts excessifs de la construction ne proviennent pas tant de la loi, dites-vous, que des décrets et règlements qui en découlent.

Je ne sais pas si c'est vraiment là votre opinion fondamentale ou si elle ne doit pas être mitigée quelque peu, mais est-ce que vous êtes en train de nous dire que l'augmentation des coûts de la construction n'est que la conséquence de l'augmentation des salaires?

J'aimerais qu'ensemble, M. Ledoux, on fasse rapidement une petite étude comparative de l'augmentation des autres coûts et du coût de la main-d'oeuvre. Nous serions surpris, l'un et l'autre, de voir dans quelle proportion l'un et l'autre ont augmenté. Si, dans votre mémoire, vous nous disiez: Prenez aussi des dispositions pour que les autres coûts soient diminués, je serais davantage convaincu de la nécessité de vous suivre. Je retiens du mémoire que vous nous soumettez que votre organisme, quant à lui, n'identifie que le coût de la main-d'oeuvre comme étant la cause de l'augmentation des coûts de la construction. Est-ce qu'il faut tempérer un certain nombre de choses ou si c'est là votre opinion?

M. Ledoux: Mme la Présidente, évidemment, j'ai assisté depuis deux jours aux débats; alors, je suis fort au courant qu'une augmentation de cinq huitièmes pour cent sur une hypothèque est équivalente à 10% d'augmentation de salaire dans la construction. Je sais que seulement 30%, je crois, des coûts dans la construction résidentielle sont pour les salaires et que 70% sont attribuables à autre chose que les salaires.

D'autre part, le conseil des maires est constitué de politiciens. Les gens, qui sont des êtres humains, perçoivent certaines choses. Qu'ils aient tort ou raison, ils les perçoivent d'une certaine façon et ils agissent selon leur perception. Je ne vous dis pas qu'il n'y aurait peut-être pas lieu de faire une campagne d'éducation pour mieux informer nos gens au sujet des coûts relatifs des matériaux, du terrain, de tout ce que vous voudrez. Malgré cela, à cause de la perception telle qu'elle existe dans le moment, les gens ne dépensent pas en construction parce qu'ils perçoivent que c'est trop élevé.

De l'autre côté, on ne parle pas nécessairement de proportions, mais on parle de voisins. N'oubliez pas qu'on n'est pas à Montréal; les voisins se connaissent à la campagne. Si Untel gagne 6 $ l'heure et qu'un autre gagne 17 $ et qu'ils font à peu près le même genre de travail, ça n'a pas de bon sens. Surtout si les 17 $, c'est le gouvernement qui dit que tu es obligé de les payer. Si c'est l'offre et la demande, on va peut-être lui dire: Tu es un chanceux. Mais si c'est le gouvernement qui le dit, on dit: Il n'y a pas de justice. C'est la perception qu'on a de ce problème.

M. Fréchette: Une dernière question, quant à moi, Mme la Présidente. Dans l'élaboration de votre argumentation quant à la parité des salaires, je crois avoir compris - j'ai pris des notes, je ne sais pas si j'ai bien écrit ce que vous nous avez dit - qu'il n'était pas question d'avoir des travailleurs à rabais. Qu'est-ce qu'on doit comprendre de cette affirmation? Voulez-vous préciser davantage le sens d'une telle affirmation quand, précisément, vous plaidez pour l'absence de parité?

M. Ledoux: La raison, c'est le fondement même de notre mémoire. On ne parle pas de travailleur à rabais dans la construction, on parle simplement d'une équité ou d'une parité régionale plutôt que provinciale. C'est essentiellement la thèse que nous mettons sur la table, à savoir que les travailleurs dans n'importe quel autre domaine que la construction sont moins payés dans le comté de Pontiac qu'ils ne le sont à Montréal. Pourquoi les travailleurs de la construction seraient-ils payés le même prix que ceux de Montréal? C'est cela, notre thèse.

M. Fréchette: Cela va. Merci.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Mme la Présidente, je dois premièrement féliciter les membres de la MRC de Pontiac d'avoir pris l'initiative et d'avoir mis le temps que cela leur a pris pour préparer un mémoire qui - je dois le dire - reflète aussi les appels que j'ai comme représentant des gens du comté de Pontiac. Un problème que le ministre n'a peut-être pas saisi, c'est que... Le problème présentement, c'est que, dans le comté de Pontiac, tous les gens ont perdu leur carte de classification. Donc, que ce soit dans n'importe quel chantier de construction, les personnes locales qui y travaillent sont des gens de l'extérieur selon le règlement de placement. Je suis convaincu que le ministre est au courant que ceci représente 185 $ par semaine de plus que le taux de rémunération des travailleurs. Et c'est chambre et pension parce que les gens sont obligés de se déplacer et on est obligé de payer pour cela. Ceci représente, sur une semaine de 40 heures à 4,50 $ l'heure de plus, peut-être 20 $ l'heure, à peu près un cinquième. C'est 20%. Donc, lorsqu'on dit que le règlement de placement occasionne aujourd'hui des problèmes économiques dans la région de Pontiac, en voici la raison.

Toutefois, ceci dit, puisque vous avez, les maires, pris l'initiative de préparer ce mémoire, pouvez-vous me dire ce qui vous a poussés, pourquoi vous avez cru bon - vous êtes certainement le gouvernement le plus près de la population - de préparer un mémoire et de le présenter ici à la commission?

M. Ryan (Paul): Mme la Présidente, j'aimerais précisément répondre à la question. Nous, maires des municipalités qui se trouvent dans le comté de Pontiac, je pense qu'il s'est développé dernièrement dans la province de Québec, pour les affaires municipales, un enthousiasme sans précédent après les nouvelles lois, telle la loi 125, tel le choix des régions sur lequel nous sommes encore en discussion, toutes sortes de commissions. Donc, à cause de cela, je pense que les maires ont commencé peut-être à se réveiller et à dire: On va revendiquer justement les besoins de nos contribuables. À un moment donné, on a la tâche ingrate peut-être de leur répondre, d'essayer de trouver des réponses pour eux et d'essayer de travailler pour eux, parce que notre politique n'est pas semblable à celle d'un gouvernement provincial. Elle est bien différente. Nos couleurs ne transparaissent pas. Elles ne sont pas perçues parce qu'on n'a pas chez nous, au point de vue politique, pour un maire d'une petite municipalité, on n'a pas de parti. Donc, on a la tâche ingrate d'essayer de trouver des réponses pour ces gens-là. C'est pour cette raison qu'à un moment donné, ensemble, la MRC et tous les maires se sont dit: C'est un problème qui est bien réel chez nous et nos petites municipalités dans le comté de Pontiac, si on veut les développer économiquement, il va falloir qu'on prenne nos responsabilités et qu'on essaie de trouver une solution au problème. Je pense que ce ne serait pas correct de demander au gouvernement et dire: On va abolir telle et telle chose. Non. Il n'est pas question qu'on abolisse quoi que ce soit, mais c'est là que cela devient intéressant, quand on peut s'asseoir et peut-être amender des choses ou les adapter à notre réalité.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Je ne sais pas s'il y a quelqu'un d'autre qui aurait...

M. Larivière (Denis): J'aimerais peut-être donner un très bon exemple de ce qui se passe dans le comté. À Campbell's Bay, depuis quatre ans, on a vu un édifice à logements qui a été bâti par le truchement de la Société d'habitation du Québec, un nouveau centre de main-d'oeuvre et une école polyvalente. Le coût était d'environ 4 000 000 $. Ces 4 000 000 $ n'ont pas produit deux emplois dans ma municipalité. Quand je parle de 4 000 000 $ dans trois ans, c'est environ 20 fois mon budget qui crée beaucoup plus d'emplois que deux. C'est ça l'exemple de ce qui se passe dans le comté.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Vous mentionnez, à la page 4, que la proximité frontalière de Pontiac crée des problèmes. Toutefois, hier, des syndicats sont venus ici pour dire qu'en réalité il n'y a pas tellement de gens qui travaillent en Ontario. Dans le document de l'OPDQ en page 33, on dit qu'il y a 610 travailleurs de la construction de Pontiac, sans spécifier combien travaillent au Québec et combien travaillent en Ontario. Pouvez-vous nous donner une idée du pourcentage de gens qui travaillent en Ontario et au Québec?

M. Ledoux: Malheureusement, Mme la Présidente, je ne pourrais pas vous donner une idée exacte, sauf que, lorsqu'on rencontre des travailleurs de la construction - on en rencontre tous les jours - ils travaillent en Ontario. C'est peut-être aussi élevé que 90%.

M. Middlemiss: En d'autres mots, ces gens-là travaillent en Ontario; toutefois, ils

ne peuvent pas intégrer les chantiers au Québec. Quant aux autres qui pourraient être des travailleurs de la construction, on dit que, depuis 1978, ils ont perdu leur carte de classification parce qu'ils n'avaient pas atteint les 1000 heures qu'on avait établies.

M. Ledoux: On a inclus la question frontalière parce qu'elle nous est spécifique, mais elle n'est pas nécessairement applicable partout dans la province. C'est une sorte de cercle vicieux. On ne blâme pas le travailleur qui veut gagner sa vie en Ontario, c'est très bien. Cependant, à un moment donné, il y a du travail au Québec, il travaille donc au Québec, il accumule des heures et, tout à coup, se produit une ouverture en Ontario et il va travailler en Ontario. 11 aurait une autre ouverture au Québec, mais il est très bien où il est dans le moment, il est assuré de quelques semaines de travail alors que ce qu'on lui offre au Québec n'est pas équivalent. Il continue donc à travailler en Ontario. Comme résultat, il n'accumule pas les heures nécessaires pour faire renouveler sa carte et, à un moment donné, il dit: Le système québécois, dehors! Je vais essayer de continuer à survivre en travaillant en Ontario. C'est évidemment une situation particulière.

En suggérant de couper de moitié les heures requises et en suggérant la catégorie AR, cela pourrait peut-être, nous l'espérons du moins, permettre au travailleur québécois de travailler au Québec quand il y a du travail et en Ontario quand il n'y en a pas au Québec. J'espère que vous ne nous trouvez pas trop gourmands.

M. Middlemiss: Vous faites deux recommandations pour le milieu rural, soit un AR et, pour l'artisan, vous demandez de changer pour lui permettre d'avoir un aide. Qui est-ce qui vous a poussé à faire des recommandations de ce genre? Est-ce qu'une des raisons, c'était le fait que les gens ont perdu leur carte de classification et qu'on voudrait les réintégrer au marché du travail dans la construction?

M. Ledoux: En partie, c'est sûrement cela, la réalité actuelle, mais l'autre raison, celle de l'artisan, c'est qu'en préparant le mémoire - parce que cela fait à peu près un an que le comité travaille ensemble - on a réalisé qu'il y a un besoin d'information dans notre comté et on a déjà pris des mesures officielles pour que le CLSC de Pontiac organise des cours pour former des travailleurs qualifiés pour qu'ils puissent passer les examens de la régie pour devenir artisans. Comme on le dit dans le mémoire, cette approche est particulièrement valable au niveau rural et un artisan pourrait se qualifier dans plus d'une spécialité, dans plus d'un métier, et gagner sa vie localement.

(10 h 45)

M. Middlemiss: D'accord. Mme la

Présidente, vu que d'autres collègues autour de la table voudraient-La Présidente (Mme Harel): Ils vont poursuivre.

M. Middlemiss: Oui.

La Présidente (Mme Harel): Je laisse la parole au député de Bourassa, qui me l'avait demandée. Par la suite, ce sera au député de Hull et au député de Chapleau.

M. Laplante: Merci, Mme la Présidente. À mon tour, je dois vous féliciter pour votre mémoire. À la page 2 de votre introduction, vous parlez du développement socio-économique de votre région. Vous dites qu'elle est 74e sur 76 divisions avec 74,8% de la masse salariale ou du revenu, si vous voulez, comparativement à l'ensemble du Québec. Pourtant, vous revenez avec d'autres suggestions qui appauvriraient encore votre région au point de vue des revenus, de la masse salariale. Je voudrais vous poser une question. Si les travailleurs vont en Ontario, avant cela, avant la classification, les cartes, etc., est-il exact que cela a toujours été le cas dans Pontiac d'aller travailler en Ontario le plus possible? Cela dure peut-être depuis 50 ans. Ce n'est pas un phénomène nouveau. Qui peut me répondre?

M. Ledoux: Mme la Présidente, évidemment, dans votre première question, vouloir continuer à appauvrir Pontiac, ce n'est pas cela qu'on a à l'idée. On parle de système de pondération pour fixer à l'avenir les salaires pour qu'ils atteignent le niveau des métiers autres que ceux dans le domaine de la construction. Évidemment, la MRC se reconnaît le devoir d'améliorer la qualité de vie de sa population par toutes les mesures dont elle dispose en vertu de la loi. On veut ramener les travailleurs de la construction au même niveau que les autres, mais, si on peut faire évoluer vers le haut l'ensemble de la population, le travailleur de la construction évoluerait parce qu'on suggère un système de pondération qui établit le niveau de la population en général. Le phénomène du travail en Ontario - vous avez absolument raison - est un phénomène réel. Ce qu'on vous suggère, c'est pour contourner le phénomène. Dans le moment, cela ne vaut pas la peine pour le travailleur en construction de se bâdrer de vouloir passer par toute la réglementation administrée par l'OCQ et c'est plus facile pour lui d'obtenir un emploi en Ontario. Si on lui facilitait les choses, il viendrait peut-être travailler au Québec. Je dis peut-être parce que, évidemment, ma boule de cristal ne peut pas

me dire si cela se produirait. Mais le bénéfice, on ne le cherche pas simplement pour le travailleur en question. On ne veut pas que ce soit le travailleur en question qui bénéficie de venir travailler au Québec. On veut que le milieu bénéficie d'un travailleur qui va faire du développement, qui va participer au développement de notre région.

M. Laplante: Ainsi, la perte de cartes d'accréditation, vous ne le dites pas clairement, mais c'est presque volontaire dans votre région de vouloir aller travailler en Ontario, de ne pas s'occuper des jobs qu'il y a au Québec, puisque cela a toujours duré depuis 50 ans, vous l'avez avoué tout à l'heure.

Vous avez parlé tout à l'heure...

Une voix: ...

M. Laplante: Je ne vous ai pas dérangé. Je vous ai laissé poser des questions. Écoutez;

Une voix: ...fais de la présomption.

M. Laplante: Vous avez parlé du coût de construction. C'est beaucoup plus élevé dans votre région que si on construisait à Montréal, à Ottawa ou à Hull. Je ne crois pas qu'on puisse trouver dans les milieux urbains tels que Montréal, Hull ou d'autres grands centres des terrains à un cent le pied carré. Dans nos régions, Montréal et les autres, c'est 2 $, 3 $, 4 $, jusqu'à 6 $ le pied carré qu'on est obligé de payer pour un terrain. Cela augmente drôlement le coût de construction qui peut être équivalent au Québec sur une masse salariale.

Ce que j'ai de la difficulté à comprendre pour les régions éloignées...

Une voix: Sur tout.

M. Laplante: ...c'est lorsque, à un moment donné... Quand il y a un besoin de professeurs, on est obligé de payer des salaires beaucoup plus élevés dans les régions éloignées. Cela a commencé avec le gouvernement Bourassa, pas seulement avec le gouvernement péquiste.

Une voix: Ce sont des primes d'éloignement.

M. Laplante: Les primes d'éloignement. Les grèves qu'on subit aujourd'hui par les médecins, les spécialistes des régions éloignées pour aller chercher 200 $ de plus par nuit... Pourquoi le travailleur de la construction serait-il encore pris dans des régions à faire du "cheap labour"? Il faut comparer, comme je le disais hier, avec les professionnels. Cela ne me rentre pas dans la tête de faire deux catégories de citoyens.

Lorsqu'une loi est votée pour le salaire des maires - je sais que ce ne sont pas les petites municipalités qui en prennent le plus, mais c'est une pratique générale quand même - beaucoup de municipalités s'empressent de prendre le "top"; la loi est votée tout de suite. On n'entend jamais dire: On va couper nos salaires, parce que...

M. Ledoux: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Harel): M. Ledoux.

M. Laplante: C'est tout cela que je ne comprends plus dans vos argumentations. Vous voulez faire une différence entre l'ouvrier - le journalier - et le professionnel.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Bourassa.

Une voix: M. le député.

La Présidente (Mme Harel): M.

Larivière ou M. Ledoux? M. Larivière.

M. Larivière: M. le député de Bourassa, j'aimerais vous dire que, dans le comté de Pontiac, on croit que travailler pour 8 $ l'heure, c'est mieux que de ne pas travailler du tout. C'est cela le prix qui est...

M. Laplante: C'est le travail au noir que vous voulez avoir? En somme, c'est cela.

M. Larivière: On n'a pas le choix, peut-être.

M. Laplante: ...

M. Ledoux: Mme la Présidente, pour répondre à votre dernière question avant de répondre à la première, le salaire des maires fixé par la loi... Les 20 maires du comté de Pontiac ne se paient pas le salaire maximum fixé par la loi; ils sont obligés, à cause d'une petite population, de se payer le salaire minimum fixé par la loi. Cette argumentation ne s'applique pas dans le comté de Pontiac. Si elle s'applique ailleurs, on n'est pas au courant.

Deuxièmement, vous avez mentionné le coût de construction en général. Vous dites qu'on a dit que cela coûtait plus cher qu'à Montréal; je ne crois pas qu'on ait dit cela. Vous avez fait référence à des terrains à un cent le pied carré alors que vous, en ville, vous payez un gros prix. Je voudrais vous faire remarquer, M. le député de Bourassa, que le terrain à un cent le pied carré est disponible à un cent le pied carré pour le travailleur de la construction comme pour tous les autres travailleurs. C'est cette thèse qui sous-tend notre mémoire. Tout le monde fait moins d'argent; tout le monde paie moins. Pourquoi sort-on le travailleur de la

construction et le met-on dans une niche spéciale pour le payer comme quelqu'un qui fait le même travail à Montréal? On dit: Cela ne s'applique pas ailleurs; cessez de l'appliquer à la campagne. C'est tout ce qu'on demande.

M. Laplante: Oui, mais ce qui est plus dur à avaler pour un bonhomme comme moi, c'est le fait de faire tout porter sur les salaires des travailleurs, parce que votre région ne se développe pas. Je comprends que les libéraux d'en face veuillent creuser le fossé pour les travailleurs du Québec. Pour les professionnels, ils sont très ouverts là-dessus...

M. Kehoe: Vous ne comprenez pas, M. le député de Bourassa.

M. Laplante: ...cela va bien, payons les professionnels; on a vu certaines conventions collectives comme cela. Mais, quand on arrive aux vrais travailleurs, à ceux qui travaillent au pic et à la pelle et au marteau, on paie toujours trop et il faut toujours les diviser.

M. Côté: On fait comme vous autres: on coupe de 20%.

M. Laplante: II faut se souvenir de ces choses-là. J'ai de la difficulté à comprendre votre mémoire: aller jusqu'à faire tomber l'article 19 pour essayer de récupérer d'autres pouvoirs. Des amendements à la loi... Je ne sais pas. Moi, en tout cas, je ne serais pas en faveur de votre mémoire, c'est certain, parce que ce serait aller contre les travailleurs.

La Présidente (Mme Harel): M.

Brousseau. Par la suite, je reviendrai au député de Hull et au député de Chapleau. M. Brousseau, vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Brousseau (Lucien): Oui. Il y a une chose qui m'a fait sursauter un peu. Mon salaire de maire: je fais 160 $ par mois; je suis un maire bénévole.

Deuxièmement, dans l'autre intervention, on dit que les terrains se vendent à tel ou tel prix. Le comté de Pontiac, c'est un comté où il y a des zones blanches et des zones agricoles. Je peux vous assurer, monsieur, que, chez nous, les zones blanches sont de plus en plus rares, parce qu'elles ne sont pas très grandes; même que, dans les municipalités, à un moment donné, les terrains sont considérés comme des morceaux d'or dans les zones blanches. Je peux vous dire une chose: aujourd'hui, les gens qui ont des terrains dans les zones blanches, ils ont plus que quadruplé le montant qu'ils ont donné. Ce n'est peut-être pas le même prix qu'à Montréal, mais j'imagine que, dans un avenir rapproché, dans cinq ans, ce sera à peu près le même prix qu'à Montréal.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Brousseau. M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, Mme la Présidente. Je ne commenterai pas les dires de mon collègue de Bourassa concernant le mémoire présenté par les maires de la municipale régionale de comté de Pontiac, mais je voudrais profiter de l'occasion pour souhaiter la bienvenue au président de la MRC de Pontiac, M. Dempsey, ainsi qu'aux maires qui l'accompagnent et à M. Ledoux qui est le secrétaire-trésorier de cette municipalité régionale de comté.

Je pense qu'il faut comprendre, Mme la Présidente, que le comté de Pontiac appartient à l'Outaouais, cela fait partie intégrante de la région de l'Outaouais, mais c'est une région ou une sous-région qui connaît des problèmes peut-être plus particuliers que l'ensemble de la région. On connaît des problème semblables dans la Haute-Gatineau. Les représentants du peuple de cette municipalité régionale de comté, étant conscients des problèmes que vivent leurs commettants et commettantes dans leurs municipalités respectives, ont présenté ce mémoire dans le but de sensibiliser le gouvernement aux problèmes que vivent ces gens et que vivent la majorité des gens du Québec situés dans des secteurs ruraux plutôt qu'urbains.

Il est bien évident, Mme la Présidente, que, dans le contexte actuel, on tente de chercher la bête noire, de trouver ce qui ne va pas. Il faudrait peut-être examiner davantage la réglementation, les règlements et les lois que le gouvernement a adoptés au cours des dernières années, tel le règlement de placement sur la construction qui a possiblement favorisé et qui favorise sûrement une grande partie du travail au noir qui se fait actuellement.

D'autre part, si on tient compte de la situation économique, un autre élément très important et, j'espère, passager, cela pourrait sûrement favoriser l'ensemble des travailleurs du Québec. Je voudrais faire une remarque ici. M. le député de Bourassa, les libéraux, nous ne sommes pas là pour creuser davantage le fossé. Au contraire, si on examine certaines lois adoptés par le gouvernement actuel, par exemple la loi 43 sur la restauration, vous exploitez actuellement les travailleurs de la restauration par une loi semblable, et je pense que vous pouvez difficilement nous attribuer cet objectif.

M. Ledoux, vous avez mentionnné tantôt - Mme la Présidente, j'ai quelques questions à poser - qu'une grande partie des

travailleurs de la construction de Pontiac travaillaient à Renfrew, Pembroke, Ottawa ou dans certaines autres villes ontariennes. Vous avez mentionné aussi que vous ne recommandiez pas de modifications particulières au règlement de placement dans la construction. Au contraire, vous vous demandiez peut-être, en tenant compte des impératifs de 1984 et de l'avenir, si on ne devrait pas concrétiser davantage l'application de certains règlements. C'est un élément important, tenant compte de la situation de l'Outaouais québécois, qui est une région frontalière au Québec, qui dépend ou qui a une certaine dépendance du côté ontarien, tenant compte de la proximité de la capitale du Canada et tenant compte du fait qu'il y a un règlement de placement qui existe actuellement et qui empêche les travailleurs de l'Ontario de venir travailler au Québec. (11 heures)

Là, j'ouvre une parenthèse en disant qu'il est bien évident qu'un travailleur de l'Ontario ne peut pas venir travailler au Québec aujourd'hui, parce qu'il n'y a pas de travail ici; mais, dans l'hypothèse où il y aurait du travail au Québec... On parle toujours de l'offre et de la demande; s'il y a de la demande, il y a de l'offre. C'est bien évident que le travailleur de l'Ontario ne peut pas venir travailler au Québec parce qu'il n'y a pas de demande. Le principe fondamental d'un règlement de placement qui oblige à avoir travaillé un certain nombre d'heures au cours des années précédentes afin de maintenir la carte de classification dans le domaine de la construction, par le fait même, élimine la présence ou la venue de travailleurs en périphérie, du côté de l'Ontario vers le Québec, ce qu'on peut appeler la mobilité de la main-d'oeuvre. Le gouvernement de l'Ontario, comme cela a été le cas en 1978 - plusieurs syndicats ontariens font actuellement des pressions auprès du gouvernement à cet effet - veut restreindre la mobilité de la main-d'oeuvre en tenant compte du fait que nous, au Québec, restreignons la mobilité du côté ontarien.

Vous dites dans votre mémoire que la majorité des travailleurs de la construction gagnent leur vie du côté de l'Ontario. Si le gouvernement ontarien adoptait une loi semblable à celle du Québec pour ouvrir les chantiers de construction uniquement aux gens de l'Ontario qui auraient travaillé les heures nécessaires en Ontario, cela ne voudrait-il pas dire que vos travailleurs de la construction qui résident actuellement dans votre municipalité régionale de comté se verraient complètement sans travail?

M. Ledoux: Mme la Présidente, votre hypothèse semble plausible, mais ce n'est qu'une hypothèse. D'abord, juste pour clarifier, vous avez dit qu'on ne propose pas de changement au règlement de placement. Ce n'est pas tout à fait exact, on propose des adaptations à notre milieu, premièrement, en diminuant de moitié les heures requises et, deuxièmement, on demande la priorité aux travailleurs qui sont dans les municipalités où le chantier est situé. Quant à la question de l'éliminer complètement, évidemment, si le ministre du Travail décidait d'éliminer le règlement, je suis certain que ça n'irait pas à rencontre de la philosophie du conseil des maires de la MRC. Je suis positif.

Quant à la question des travailleurs de l'Ontario ne pouvant pas venir au Québec, j'ai cru comprendre, par les interventions précédentes, que, effectivement, si un entrepreneur de l'Ontario a un contrat au Québec il peut, par un mécanisme quelconque, accréditer ses travailleurs. On me dit que c'est très facile, on a semblé dire qu'on avait simplement à en faire la demande.

M. Rocheleau: Je ne voudrais pas ramener le cas d'un contrat très important de plus de 40 000 000 $ qui a été effectué dans l'Outaouais concernant l'usine d'épuration, mais on se souvient qu'une compagnie ontarienne, V.K. Mason, avait soumissionné et que le gouvernement du Québec avait refusé sa soumission étant donné que c'était un entrepreneur de l'extérieur du Québec. On avait alors dû attendre une année complète avant de demander de nouvelles soumissions et la compagnie V.K. Mason avait obtenu le contrat une deuxième fois, étant donné qu'elle était encore le plus bas soumissionnaire. Par contre, cela avait coûté 6 000 000 $ de plus pour la construction de l'usine d'épuration à cause du geste qu'avait posé le gouvernement du Québec à ce moment.

Où je voudrais en venir, M. Ledoux, c'est qu'actuellement il y a peut-être un élément qui n'est pas ressorti. Actuellement - je pense que le maire de Campbell's Bay y a fait allusion tantôt - le taux de sans-emplois ou d'assistés sociaux est très important dans le comté de Pontiac. Le maire de Campbell's Bay, tantôt, mentionnait que, plutôt que de ne rien gagner, il valait peut-être mieux gagner 8 $ l'heure et avoir un salaire convenable pour au moins tenter de faire vivre sa famille. Le maire de Campbell's Bay a fait allusion à certains projets importants qui ont été réalisés dans sa municipalité au cours des dernières années au coût d'environ 7 000 000 $, ce qui n'a pas amené chez lui la création de nouveaux emplois. C'étaient des entrepreneurs de l'extérieur, des matériaux de l'extérieur, tout était importé. À ce moment-là, on en a bénéficié au niveau des équipements, mais

pas au niveau de la création d'emplois.

Nous allons sûrement examiner l'ensemble de la problématique et l'ensemble des revendications qui se font et qui ont été faites hier, entre autres, par un certain nombre de municipalités régionales de comté représentées par leur président, M. Asselin. Nous allons entendre d'autres mémoires en provenance de l'Union des municipalités du Québec et de certaines autres MRC qui revendiquent aussi certains changements à la loi ou au règlement actuel. Tenant compte du fait qu'un nombre important de municipalités régionales de comté, par leur président, ont demandé certaines modifications dans le sens de soustraire non seulement les communautés urbaines et régionales, mais aussi certaines municipalités qui relèvent de la Loi sur les cités et villes à l'application du règlement, est-ce que vous favorisez, vous aussi, cette soustraction au règlement tel qu'il est appliqué actuellement dans le but de permettre aux municipalités de votre municipalité régionale de comté qui bénéficieraient de certaines subventions d'appui des gouvernements supérieurs de faire des travaux en retenant les services, soit d'artisans, soit de bénévoles, pour effectuer certaines améliorations à certains de vos équipements à des coûts peut-être moindres, sans pour autant être sur le dos du travailleur comme semble le répéter assez souvent le député de Bourassa, mais en favorisant, par des programmes de ce gouvernement et d'autres gouvernements supérieurs, la création d'emplois?

M. Ledoux: Pour répondre à votre question, M. Rocheleau, je vous assure que le comité ici présent et le conseil des maires en entier ont passé beaucoup de temps à examiner la possibilité de demander que la loi et les règlements ne s'appliquent pas. D'autre part, on est obligé de croire que ce serait demander deux poids deux mesures. On demande un salaire différent parce qu'on est capable de le baser sur une réalité défendable, mais, quand on examine la sécurité et les biens que les municipalités doivent fournir à leurs contribuables, on a de la difficulté à ne pas être soumis à une réglementation quelconque. Évidemment, si le ministre décidait qu'il en sera ainsi, le conseil des maires se réjouirait.

Vu que vous avez abordé la question du dos des travailleurs - je ne connais pas le règlement - j'aimerais répondre de nouveau au député de Bourassa, à moins, Mme la Présidente, que je ne sois dans l'erreur, que le but de la commission est d'étudier les problèmes reliés à la construction. La raison pour laquelle la commission a été convoquée, c'est parce qu'il y a un écart de 31% dans les demandes salariales. C'est pour cette raison qu'on se limite aux demandes salariales. Si le mandat de la commission est de faire identifier les problèmes de développement de toutes sortes du comté, je vous assure qu'il y a d'autres sortes de problèmes dans le comté de Pontiac qu'on serait prêt à demander au gouvernement de régler, mais ce n'est pas la bonne place aujourd'hui. C'est tout.

M. Rocheleau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député de Hull, en terminant, parce qu'il y a aussi le député de Chapleau, je pense, qui veut prendre la parole et on a déjà dépassé le temps alloué à la municipalité régionale de Pontiac.

M. Rocheleau: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais simplement souligner à M. Ledoux qu'en ce qui me concerne les demandes qui ont été formulées par l'Union des municipalités régionales de comté sont très intéressantes à examiner. Je pense que vous entrez plus en profondeur pour expliciter davantage le problème quotidien vécu dans vos municipalités comme dans l'ensemble des municipalités rurales du Québec.

Au tout début de votre mémoire, M. Ledoux, vous faites allusion au fait que les salaires payés aujourd'hui dans la construction semblent être excessifs. J'aimerais tenir compte d'un élément très important. Je ne considère pas le salaire tellement excessif. Je critique davantage le facteur le plus important dans la construction actuellement, c'est la question de la productivité. Si l'employé produisait à 80% ou 85% pour le salaire qui lui est payé, l'entrepreneur en profiterait davantage et en ferait davantage profiter le consommateur. C'est peut-être une cause majeure du problème qui existe et qui dépend en grande partie du gouvernement et des syndicats ou des centrales syndicales qui ont davantage défendu les indésirables de la construction plutôt que de défendre le mieux-être de l'ensemble des travailleurs de la construction. On aura sûrement l'occasion de revenir là-dessus.

Dans une dernière question, j'aimerais simplement vous demander de me confirmer, s'il y a lieu, si, étant donné que vous n'êtes pas sur la liste des municipalités régionales de comté annexée au mémoire du président, M. Asselin, hier, vous endossez quand même a priori les positions que l'ensemble des municipalités régionales de comté ont prises au Québec, en tenant compte du fait que votre mémoire est complémentaire et apporte des éléments nouveaux qui sont intéressants à regarder.

M. Ledoux: Mme la Présidente, si vous le permettez, je préférerais qu'un des maires réponde à cette question parce qu'elle est

d'ordre politique.

M. Brousseau: Je pense que nous appuyons exactement les revendications qui ont été faites ici hier.

M. Rocheleau: Merci, Mme la Présidente. Cela complète les questions que j'avais à poser.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Le député de Hull a volé ma question, mais a posé la plupart des questions que j'allais poser et fait la plupart des commentaires que je voulais faire.

J'ai une question très spécifique à poser. Dans la préparation de votre mémoire, avez-vous consulté d'autres MRC et des unions de municipalités de la province de Québec? Je trouve que les suggestions et les recommandations que vous faites dans votre mémoire sont très justes et raisonnables. Quand on voit, comme le décrit le maire de Campbell's Bay, qu'il n'y a que deux personnes de la région de Pontiac qui ont travaillé dans un projet de 4 000 000 $, je trouve que c'est une injustice flagrante. Je pense que les propositions et les recommandations que vous faites dans votre mémoire devraient au moins être étudiées non seulement par la MRC de Pontiac, mais peut-être par les Unions de municipalités de la province de Québec ou d'autres MRC dans la province de Québec.

Je réitère ma question: Est-ce que vous avez fait des consultations avec d'autres MRC ou plus spécifiquement avec l'Union des MRC de la province de Québec avant de prendre position et de faire les recommandations que vous faites dans votre mémoire?

M. Ledoux: Mme la Présidente, la réponse est non. Une partie de la raison vous a été expliquée hier par le président de l'Union des municipalités régionales de comté, M. Asselin. Étant donné le peu de temps entre le moment où il a été annoncé qu'il y aurait probablement une commission parlementaire et la tenue de cette commission et le fait que c'est le temps des vacances, il n'était pas question de consulter les autres avant de savoir ce que la MRC de Pontiac voulait. Le temps que cela a pris pour décider cela a empêché la consultation avec l'Union des MRC. Comme je vous l'ai dit, le travail dure depuis plus d'un an. Nous avons déjà eu un visiteur de la MRC de Mékinac qui est venu exposer son point de vue au conseil des maires il y a quelques mois. Dans ce sens-là, on n'est pas entièrement en vase clos. On aurait espéré pouvoir demander aux 94 municipalités régionales de comté d'endosser notre mémoire ou, alternativement, le présenter à l'Union des municipalités régionales de comté pour qu'elle le fasse sien plutôt que ce soit le nôtre, parce qu'on n'est pas suffisamment nombreux au niveau rural dans le moment pour faire des représentations. On est convaincu pourtant que notre situation n'est pas unique, que la même situation est réelle partout dans les secteurs ruraux. (11 h 15)

M. Kehoe: Si je comprends bien, vous avez l'intention de pousser l'affaire plus loin. Ce n'est pas seulement de présenter un mémoire ici. C'est d'aller plus loin, de tenter d'obtenir l'appui de l'Union des MRC et que cela fasse partie de son programme, de ses recommandations.

M. Ledoux: Évidemment, Mme la Présidente, si, ce soir, M. le ministre du Travail annonce la prolongation du décret avec une région rurale, on ne poussera plus.

M. Kehoe: Ne comptez pas là-dessus. Une voix: Ce soir.

La Présidente (Mme Harel): Est-ce que c'est terminé, M. le député de Chapleau?

M. Pagé: Cela peut attendre à demain, oui.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Beauharnois, en terminant.

M. Lavigne: Mme la Présidente, je voudrais d'abord faire une correction. On a dit tout à l'heure - je ne me souviens pas si c'est M. Ledoux ou un autre maire qui est à la table - que si les employés de la construction de la région allaient travailler du côté ontarien, ils ne se faisaient pas reconnaître leurs heures quand ils voulaient revenir du côté québécois. Quand on examine le règlement de placement, à l'annexe 3, on dit: "Toutefois le salarié visé par le paragraphe 4 de l'article 18 obtient l'équivalence complète des heures de travail exécutées à l'extérieur du Québec." Qu'il aille travailler en Algérie, en Ontario, n'importe où, dans n'importe quelle autre province canadienne ou même dans n'importe quel pays du monde, on lui reconnaît, quand il revient au Québec, les heures travaillées à l'extérieur. C'est une correction que je voulais faire parce que vous sembliez tout à l'heure interpréter le règlement en ce sens que les heures n'étaient pas créditées quand le salarié était allé travailler ailleurs et qu'il revenait au Québec. Soyez rassurés là-dessus. Je pense que c'était une précision importante particulièrement dans votre cas, parce que vous nous dites que plusieurs de vos travailleurs de la construction qui vont travailler du côté ontarien se sentiraient

pénalisés quand il s'agirait de faire créditer ces heures-là par l'OCQ.

M. Ledoux: Mme la Présidente, je suis forcé de demander au ministre du Travail de préciser, pour le membre de la commission, que ce qu'on a dit était exact. Il est question de domicile. Si un individu accumule des heures de travail en Ontario pendant qu'il est domicilié en Ontario, ces heures-là sont reconnues. Mais s'il est domicilié au Québec et va travailler en dehors du Québec, ces heures-là ne sont pas reconnues. À moins que j'aie tort - je pourrais avoir tort - je voudrais...

M. Lavigne: Dans ce sens-là, je pense que c'est une précision importante à apporter. Si l'employé dont vous donnez l'exemple est domicilié en Ontario, évidemment il devient un Ontarien et n'est plus un Québécois. Il pourra toujours venir travailler au Québec, mais par le truchement d'un entrepreneur ontarien qui l'emploierait. Cela est différent. J'avais compris, selon mon interprétation de ce que vous avez dit tout à l'heure, que c'était un Québécois qui traversait du côté ontarien pour aller travailler dans la construction et que, parce qu'il travaillait dans la construction en Ontario, on ne lui reconnaissait pas ses heures de travail.

M. Ledoux: C'est cela.

M. Lavigne: Si tel était le cas, ce serait faux. Mais s'il est domicilié en

Ontario, c'est différent, bien sûr. C'est une distinction importante à faire.

J'ai quelques réflexions à faire sur votre document. J'ai de la difficulté, un peu comme mon collègue de...

Des voix: Bourassa.

M. Lavigne: ...Bourassa, à comprendre que, chez vous, les maires de la MRC incitent le gouvernement, lors de la négociation qui devrait être faite entre les parties patronales et syndicales dans le monde de la construction, à un rabais horaire. Plus souvent qu'autrement et presque toujours, les gens incitent les gouvernements, lors des négociations, à la hausse des salaires. C'est plutôt rare qu'on demande une baisse des salaires. C'est peut-être parce qu'on n'est pas habitués qu'on a de la difficulté à comprendre, mais c'est un peu étonnant. Il y aurait à ce moment-là une espèce de discrimination que j'ai de la difficulté à saisir. Pourquoi, chez vous, dans votre région, les gens qui auraient à scier du bois, à planter des clous, à construire une maison seraient-ils moins payés pour faire ce travail que ceux qui le feraient à Québec, à Montréal, ou ailleurs? L'explication fondamentale que vous développez, c'est que, chez vous, cela coûte moins cher pour tout. Est-ce que le beurre, le pain, chez vous, coûtent moins cher qu'à Montréal? Est-ce que les taxes et les impôts fédéraux et provinciaux, chez vous, sont moins chers que pour les Montréalais ou les gens de Québec? Est-ce que, par ailleurs, le policier provincial est moins payé chez vous que s'il est affecté à Drummondville, à Trois-Rivières ou à Sorel? Est-ce que, comme mon collègue le disait tout à l'heure, le professeur ou le médecin qui va aller travailler chez vous... Au contraire, bien souvent, s'il se trouve dans une région éloignée, il a même une prime d'éloignement. Non seulement il n'est pas payé selon le taux de Montréal, mais il est payé en plus du taux de Montréal. On vient d'accorder un peu la même chose aux médecins, parce qu'on savait que les médecins n'étaient pas tentés d'aller dans les régions éloignées. Il y avait une pénurie de médecins; ils se regroupaient autour des grands centres de Québec et de Montréal et on en manquait en région. On a dû, évidemment, intervenir au cours de l'année et donner des surprimes aux médecins pour qu'il y ait une répartition un peu plus équitable de médecins sur le territoire.

À partir de tous ces exemples - je ne veux pas condamner votre thèse; je veux essayer de la comprendre - j'ai de la difficulté à comprendre que, dans le monde de la construction, dans un monde bien précis, pendant que tout le monde reçoit une augmentation en allant travailler au loin, chez vous, dans le monde de la construction, les gens travailleraient à rabais. À ce moment-là, est-ce que les gens de la Gaspésie, par exemple, qui est considérée comme une région éloignée, ne pourraient pas réclamer aussi de travailler à rabais? Est-ce que, entre la Gaspésie et Québec, il y aurait un très bas taux en Gaspésie, un taux moyennement bas entre la Gaspésie et Québec et un haut taux à Québec? Il y aurait un paquet de zones susceptibles d'être inférieures ou supérieures selon qu'elles sont plus ou moins rapprochées des grands centres. Je pense que cela deviendrait, premièrement, difficile à administrer; deuxièmement, cela serait discriminatoire pour les gens qui vivraient dans ces différentes régions, parce qu'ils auraient des salaires différents pour un travail semblable.

Je pense que c'est beaucoup plus une question d'économie qu'une question de salaire. Si l'économie québécoise, par exemple, devait se redresser, je pense que le problème ne se poserait plus. Mais parce que nous vivons un problème économique depuis quelques années, c'est surtout là qu'il faut chercher la source du mal. Je ne pense pas qu'on puisse corriger ce mal en diminuant le salaire horaire des travailleurs de la construction.

C'est une opinion personnelle. Je vous la donne comme je la ressens. Mais, j'aimerais entendre votre argumentation à ce sujet.

M. Dempsey: M. le député, vous dites qu'on veut baisser leurs salaires. Ce n'est pas correct. Je suis certain que le gars qui va aller travailler en Ontario ne fera pas la "piastre" qu'il fait au Québec aujourd'hui. Il serait bien content de travailler dans le comté de Pontiac pour ce salaire au lieu de traverser en Ontario. On aimerait mieux le garder chez nous que de l'envoyer ailleurs.

M. Larivière: Le député dit que c'est rare qu'on diminue les salaires. Si je ne me trompe pas, votre gouvernement a réduit les salaires des professeurs l'an dernier?

M. Lavigne: Oui. Mais c'étaient les salaires de tout le monde. On n'a pas fait de discrimination; c'était équiable...

M. Larivière: Vous ne trouvez pas? M. Lavigne: On n'a pas coupé plus...

M. Larivière: Je pense que les professeurs trouvent que vous l'avez fait.

M. Lavigne: Non, mais on n'a pas coupé plus les salaires des professeurs de Montréal que ceux de Gatineau. On a décidé que les professeurs de Gatineau, ceux de Québec, ceux de Trois-Rivières et de la Gaspésie seraient coupés équitablement.

M. Pagé: Faites ce qu'on dit; ne faites pas ce qu'on fait.

M. Lavigne: On n'a pas fait de discrimination. Non. Si on décidait de tout couper, de réduire le taux horaire du monde de la construction partout, il y aurait de bonnes raisons pour le faire, j'imagine, mais cela serait partout. Qu'on coupe chez vous et qu'on ne coupe pas ailleurs, cela m'apparaît discriminatoire.

La Présidente (Mme Harel): M. Ledoux, je vais vous demander de conclure, parce que vous voyez qu'on a très largement dépassé le temps qui était alloué. Alors, je vais vous demander de conclure dans votre prochaine intervention.

M. Ledoux: Je serai très bref, Mme la Présidente. Il est très important de souligner qu'on ne parle pas de rabais, je le répète. On parle de ne pas payer une surprime aux travailleurs de la construction, lorsqu'on les compare aux autres catégories de travailleurs.

Quant à la question de donner des salaires différents dans diverses régions, le ministre du Travail pourrait vous assurer que les comités paritaires fonctionnent bien dans la province. Ils auraient tous des salaires différents, parce que ce seraient des négociations différentes. L'administration n'est donc pas un problème.

Finalement, la question des policiers et des autres, on l'a soulevée très nettement. S'il n'y a pas de péréquation, on demande une régionalisation des salaires; s'il y a péréquation, on n'a pas besoin de régionalisation des salaires, le salaire peut être le même dans toute la province. Le policier qui est localisé à Campbell's Bay -il y en a une douzaine - a le même salaire que celui localisé à Montréal, mais ce n'est pas nous qui payons, ce n'est pas la population locale, ce sont les gens qui font beaucoup d'argent à Montréal qui paient des impôts élevés et qui paient les policiers de Campbell's Bay. C'est cela la péréquation.

La Présidente (Mme Harel): Je veux vous remercier, M. Ledoux, ainsi que M. Larivière, M. Brousseau, vous qui l'accompagnez.

Je vais inviter immédiatement la municipalité régionale de comté de Mékinac à vous remplacer et à nous présenter son mémoire. Merci. Oui, M. le préfet, je crois.

M. Dempsey: Mme la Présidente, M. le ministre, MM. les membres de la commission, je vous remercie du temps que vous avez pris pour nous écouter.

La Présidente (Mme Harel): Très bien.

M. Paquin, je vais vous demander de présenter les gens qui vous accompagnent et de nous présenter votre mémoire.

La MRC de Mékinac

M. Paquin (Jules): Mme la Présidente, je vais céder la parole immédiatement à notre secrétaire qui va tout vous défricher cela.

La Présidente (Mme Harel): C'est Me Tessier.

M. Paquin: Oui, c'est cela, madame. Me Tessier, s'il vous plaît!

La Présidente (Mme Harel): II y a Me Lemay qui vous accompagne également.

M. Paquin: Elle va tout vous dire cela.

Mme Tessier (Josette): Mme la Présidente, M. le ministre du Travail, mesdames, messieurs, membres de la commission, il me fait plaisir de vous présenter les gens qui composent la délégation de la MRC de Mékinac aujourd'hui: le préfet, M. Jules Paquin, et

notre procureur, Me André Lemay, de la firme Tremblay, Bertrand, Morisset, Bois et Associés, et moi-même, Me Josette Tessier, secrétaire-trésorière de la MRC de Mékinac.

Dans l'assistance, je me dois de souligner la présence de différents représentants du domaine municipal, préfets, maires et autres et, en particulier, certains maires de notre municipalité régionale de comté: M. Guy Veilleux, préfet de la MRC Haut-Saint-Maurice ainsi que le président et le directeur général de la commission scolaire de Normandie.

Pour vous situer géographiquement, notre municipalité régionale de comté est localisée au nord-est de Grand-Mère-Shawinigan et au sud de La Tuque. Nous englobons des localités situées dans les comtés de Laviolette et de Portneuf. Elles sont énumérées à l'annexe A . Le chef-lieu est à Saint-Tite, dans le comté de Laviolette.

En tant que municipalité régionale de comté, nous représentons ces douze municipalités locales qui ont toutes, à un moment ou à un autre, besoin d'engager de la main-d'oeuvre pour exécuter différents travaux de construction.

Nous tenons également à vous remercier d'avoir bien voulu accepter de nous recevoir au sein de cette commission afin de nous permettre de faire valoir de vive voix notre point de vue sur la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et ses règlements.

Nous traiterons de quelques points seulement qui nous apparaissent plus pertinents pour les petites municipalités.

Ayant connu d'épineux problèmes avec cette loi, notre municipalité régionale a cru utile de s'informer auprès d'autres municipalités afin d'apprécier l'étendue réelle des dommages causés à nos contribuables. Ainsi, solidaires dans nos revendications, nous requérons une exemption de l'application de cette loi pour les travaux de construction exécutés par les municipalités de 5000 habitants et moins.

Il importe tout d'abord de souligner que l'opinion émise aujourd'hui a reçu, depuis un an, l'appui d'une quarantaine de MRC, tel qu'il appert à la liste produite en annexe B. Ce rassemblement illustre bien la vive préoccupation du monde municipal face à cette loi contraignante dont certaines clauses abusives causent un préjudice à nos contribuables. (11 h 30)

Étant le palier de gouvernement le plus près des citoyens, nous osons croire qu'il est encore de nos responsabilités d'offrir les meilleurs services à nos concitoyens et ce, à des coûts raisonnables.

En période économique difficile, alors que nos gouvernements nous incitent à la relance, comment expliquer que les projets municipaux qui comptent en partie sur le bénévolat et l'utilisation de la main-d'oeuvre locale, le plus souvent chômeurs et assistés sociaux, soient anéantis par de telles normes irréalistes? Les exemples qui illustrent le ridicule de la situation abondent. Nous en avons énuméré plusieurs à l'intérieur du mémoire. Qu'il nous suffise de mentionner les plus significatifs et d'en ajouter de nouveaux.

La municipalité de Mont-Laurier, par exemple, a dû acquitter une amende pour le simple déplacement d'un poteau. La municipalité de Saint-Georges de Champlain connaît depuis longtemps des démêlés judiciaires avec l'OCQ qui lui réclame au-delà de 33 000 $. Ce n'est toujours pas réglé. La municipalité de Haute-Mauricie fait l'objet d'une poursuite de l'ordre de 19 000 $ pour avoir démoli un entrepôt désaffecté devenu une nuisance publique. Saint-Aimé-du-Lac-des-îles a connu, quant à elle, pour la démolition d'un ancien moulin acquis au prix de 1 $ en vue de la promotion touristique, une sanction de 18 000 $, soit 26,50 $ par habitant. De nombreux autres exemples aussi scandaleux pourraient s'ajouter à cette liste qui parle d'elle-même.

Comment se fait-il que les amendements de 1979 acceptent de soustraire à la portée de la loi le gouvernement du Québec et les institutions des réseaux de l'éducation et des affaires sociales? Nos demandes justifiables dans le même sens n'ont jamais porté fruit, malgré que les municipalités constituent un véritable gouvernement élu démocratiquement.

À la lumière de ce qui vient d'être énuméré, simplement réparer, démolir, déplacer, rénover et même entretenir des constructions n'apparaît plus que comme illusion pour les petites municipalités. Comment, avec de tels exemples, pouvons-nous aider les municipalités à faire preuve d'initiative, à organiser des services adéquats, à répondre aux besoins des leurs?

Les salaires et embauches exigés par la loi rendent irréalisables des projets pourtant essentiels à nos gens. Il ne faut quand même pas se méprendre avec les arguments des syndicats et du patronat soutenant que pour eux cela occasionne des pertes de travaux appréciables. Prenons conscience que l'utilisation de leurs services est d'avance impossible en raison des coûts exorbitants auxquels devraient faire face les municipalités de population restreinte, alors qu'elles peuvent compter sur une main-d'oeuvre locale adéquate et à des coûts raisonnables.

Il ne faut pas négliger non plus les frais inhérents aux poursuites judiciaires intentées par l'Office de la construction du Québec contre les municipalités. Lorsqu'on invoque la défense au sujet d'une perte d'heures de travail importante, doit-on en

imputer la faute à de petites municipalités, alors que le véritable problème vient du fait que nous n'en sommes plus à l'époque des travaux d'envergure parrainés par le gouvernement, à savoir: polyvalentes, Manie, Baie James, Stade olympique? Il devient inacceptable de nous faire porter le fardeau d'une absence d'infrastructures gigantesques. Pourtant, chaque citoyen de Saint-Aimé-du-Lac-des-îles a dû débourser plus de 26 $ à l'Office de la construction du Québec, malgré qu'il contribue déjà comme les autres Québécois aux coûts de ces grands travaux.

Les obstacles dont nous vous entretenons aujourd'hui diffèrent dans le cas de grandes villes en raison de leur capacité financière plus importante et des subventions considérables auxquelles elles ont droit. N'oublions pas, de plus, que nos petites municipalités se voient dans l'obligation de recourir à une main-d'oeuvre extérieure pour respecter la loi. Leurs ressources humaines limitées ainsi que l'absence de cartes qui donnent droit à leurs citoyens de travailler causent des difficultés insurmontables.

Indépendamment du point de vue financier dont nous venons de parler, abordons maintenant le problème social que tous ces démêlés entraînent. Pour un conseil municipal, l'objectif principal demeure toujours l'amélioration de la qualité de vie des citoyens. L'objectif accessoire, lui, réside dans la redistribution d'une partie de la richesse au sein de la communauté. Or, ce dernier, inévitablement, ne peut être atteint avec les normes de l'OCQ. Il en ressort un préjudice certain pour une partie importante de la population. Les jeunes de 18-30 ans sont du nombre, d'ailleurs. Le bagage de connaissances qu'ils ont acquis à l'école ne peut être mis à profit. Notamment, les étudiants des cours professionnels dans nos polyvalentes reçoivent une formation adéquate qu'ils n'ont pas le droit de mettre en application. Pour travailler, il faut détenir sa carte. Pour détenir sa carte, il faut avoir travaillé. C'est un tunnel sans fin pour des individus qui assumeront demain la relève de la société. Ces gens se voient encerclés par l'oisiveté et un découragement inévitable, malgré une bonne volonté qu'ils croyaient si fermement inébranlable.

En voulant les aider à sortir de ce marasme, lorsque nous leur confions des responsabilités, comme encouragement, ils sont reçus à grands coups de: Avez-vous votre carte de compétence? Avez-vous de l'expérience? Il s'agit d'une perspective bien sombre pour une jeunesse que l'on veut audacieuse et innovatrice. On leur demande d'oser. Ils s'épuisent dans des démarches sans issue.

Soyez assurés que vous êtes face à un problème que nous connaissons bien, côtoyant quotidiennement cette jeunesse désespérée. Notre présence ici en témoigne. Nous étions impatients de vous faire part de cette situation lamentable. Le présent discours peut paraître défaitiste, mais c'est la bien triste réalité. Inutile de se fermer les yeux; les jeunes aspirent à de meilleurs jours. Ce serait irresponsable de les ignorer.

Seulement deux choix s'offrent alors aux municipalités: une taxation additionnelle aux contribuables ou encore ne pas entreprendre de travaux pourtant nécessaires à la collectivité, causant ainsi la détérioration d'équipements publics. Devant ce cul-de-sac, nos citoyens y perdent toujours.

Nous souhaitons donc que la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et ses règlements soient modifiés afin que les travaux effectués par les municipalités de 5000 habitants ou moins soient exclus de leur application.

Nous tenons à vous remercier de votre bonne attention et espérons de nombreuses questions.

La Présidente (Mme Harel): M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: Merci, Mme Tessier. Messieurs, je vous signale aussi la satisfaction que nous ressentons en constatant l'intérêt que vous portez à la commission. Votre mémoire est fort bref, mais par ailleurs très éloquent. En fait, il décrit une situation vécue, réelle, dont nous sommes tous conscients. D'ailleurs, depuis que les travaux de la commission ont commencé, cet aspect de la question a été soulevé à plusieurs reprises et particulièrement - évidemment, cela va de soi - par des représentants municipaux.

J'aurais, Mme Tessier ou MM. les maires, quelques questions d'ordre strictement factuel et je ne serais pas étonné que vous ne puissiez pas me donner les informations que je sollicite. Nous pourrions tenter de les obtenir d'une autre façon, mais cela pourrait être utile pour les fins de la conclusion qui peut se dégager de votre mémoire. Aux pages 4 et 5 de votre mémoire, vous faites allusion à certaines situations en vertu desquelles des municipalités se sont retrouvées dans l'obligation de payer des amendes, un certain quantum d'amendes. Je souhaiterais pouvoir savoir ceci, dans le cas par exemple de la municipalité de Lac-Saint-Paul, qui a déboursé une amende de 3000 $ pour des travaux d'amélioration de la salle municipale: Est-ce que quelqu'un est en mesure de nous dire quel était le montant global ou total des travaux qui ont été effectués à cette salle municipale?

M. Paquin: Mme la Présidente, je voudrais répondre à M. le ministre. Mais, étant donné le temps des vacances et le fait

que le secrétaire de la corporation était en vacances comme les autres, on n'est pas capable de vous apporter cette précision. On a reçu ce document par la poste. On ne nous a pas donné le montant global des travaux qui avaient été faits. Par contre, pour Saint-Aimé-du-Lac-des-îles, on connaît l'ordre de grandeur des travaux. Je suis en mesure de vous donner plus de précisions, ayant été moi-même antérieurement dans l'industrie du sciage, j'ai acheté la machinerie qui se trouvait dans ce moulin-là. Elle a été transportée ailleurs, ledit moulin est resté debout et ils l'ont vendu à la municipalité pour 1 $.

M. Fréchette: Les cas que vous connaissez, vous dites qu'il y a deux cas en particulier qui vous sont plus familiers et pour lesquels vous êtes en mesure de donner des chiffres quant au montant global du coût des travaux; voulez-vous nous les donner, s'il vous plaît?

M. Paquin: C'est celui de Saint-Aimé-du-Lac-des-îles. C'est clair comme de l'eau de roche, le moulin a coûté 1 $, ils l'ont démoli et cela leur a coûté 18 000 $ de prêt. En Haute-Mauricie, ils ont démoli un hangar du CN qui était à la veille de tomber sur la tête du monde, au bord du chemin. Ils ont payé ça 1 $ aussi et ça coûte 19 260 $ de prêt. On ne vient pas défendre les positions à savoir qu'on ne veut pas que la loi s'applique pour que je me fasse construire un bungalow ou qu'on fasse des maisons sur une rue, c'est régi par la loi et ce n'est pas ce qu'on voudrait faire exempter de la loi. Ce sont des choses que la municipalité elle-même peut faire pour aider ses citoyens les plus dépourvus. C'est ça qu'on vient défendre.

M. Fréchette: C'est suffisamment clair, monsieur. À cet égard-là, le message est très évident et très clair aussi. On a compris expressément, autant par ceux qui vous ont précédés que par votre argumentation, que c'est l'objectif que vous visez, cela ne fait aucun doute dans l'esprit de qui que ce soit.

Vous comprenez pourquoi je vous pose ces questions-là, c'est à partir de la conclusion à laquelle en est arrivé hier M. Asselin. Vous avez eu connaissance de la recommandation qu'il a faite. C'est à partir de cette suggestion que j'essayais d'obtenir ces renseignements.

Vous faites référence à deux cas où c'est de la démolition qui a été faite. Est-ce qu'il y a des cas que vous citez dans votre mémoire ou des cas qui, sans être cités, sont à votre connaissance pour des travaux de construction?

M. Paquin: Nous avons la municipalité de Notre-Dame-de-Montauban.

M. Fréchette: Est-ce une construction? M. Paquin: C'est une construction. M. Fréchette: Une patinoire?

M. Paquin: Oui, avec une bâtisse préfabriquée.

M. Fréchette: Bon! Quel est le coût du projet?

M. Paquin: 165 000 $. M. Fréchette: 165 000 $.

M. Paquin: C'est cela, comprenant le matériel.

M. Fréchette: D'accord. Cela a été fait à partir d'une subvention gouvernementale?

M. Paquin: Oui. Quelqu'un avec des cartes conduisait les travaux. Des assistés sociaux ont été engagés pour assembler cela. Ce n'est pas bien difficile de mettre une "bolt" dans un trou. Quand tu vois le soleil dehors, tu n'as qu'à mettre la "bolt" dans le trou. Le gars en haut, avec son "wrench" à l'air, n'a qu'à mettre la noix dessus et la visser. S'il n'est pas assez intelligent pour ça, il y a des endroits pour le placer. Ils étaient assez intelligents, ces assistés sociaux, ce ne sont pas des fous, ce sont des gens qui ont été à l'école, des fois plus longtemps que moi. On les a, ils viennent en partie des grandes villes et ils viennent s'arranger chez nous.

M. Fréchette: Je veux bien vous suivre dans votre argumentation, mais je n'ai pas besoin non plus de vous faire la liste de ce genre d'immeubles qui sont tombés sur la tête du monde, même si c'est facile de poser une "bolt".

M. Paquin: D'accord, mais, M. le ministre, je vous répondrai qu'il y a des plans d'architectes et d'ingénieurs, on a suivi les travaux et il n'y a pas de danger, cela respecte les normes de sécurité et tout. (11 h 45)

M. Fréchette: Revenons aux conclusions de votre mémoire. Il y a effectivement une conclusion et elle est simple, c'est que, dans toutes les municipalités où on retrouve une population de 5000 habitants et moins, tous les travaux de construction, de démolition, enfin les travaux qui sont actuellement décrits dans la loi, devraient être exclus du champ d'application.

Vous êtes, par ailleurs...

M. Lemay (André): Si vous me le permettez, M. le ministre. Je pense qu'il y a confusion. Tantôt, la MRC de Pontiac a fait

un exposé sur les travaux exécutés sur le territoire des municipalités alors que la position de la MRC de Mékinac - je pense que c'est aussi la position de l'Union des municipalités - c'est de dire les travaux municipaux. Il y a une distinction importante.

M. Fréchette: Oui.

M. Lemay: Ce sont uniquement les travaux faits par les municipalités.

M. Fréchette: D'accord.

M. Lemay: C'est important, je pense.

M. Fréchette: Cette distinction étant faite et revenant à votre principale conclusion, c'est que tous les travaux municipaux effectués dans des municipalités de 5QQ0 habitants ou moins soient exclus du champ d'application. C'est votre recommandation.

Par ailleurs, sous réserve d'erreur, bien sûr, vous êtes cosignataire, si je peux m'exprimer ainsi, en tout cas votre municipalité régionale de comté a souscrit à la position prise par l'Union des municipalités régionales de comté que nous avons entendue hier en audition. En tout cas, la liste en annexe du mémoire de l'Union des municipalités régionales de comté indique que la MRC de Mékinac souscrit à la suggestion qui est faite par votre municipalité régionale de comté. Dans votre mémoire, il y a aussi à l'annexe B une longue liste de municipalités régionales de comté qui souscrivent à votre position et qu'on retrouve dans le mémoire de l'Union des municipalités régionales de comté.

Pour éviter toute confusion possible et pour que l'on sache très précisément quelle est la position que vous soutenez - je ne suis pas en train de vous dire qu'il y a un dédoublement; je comprends très bien la façon dont cela peut procéder, l'appui qui a pu vous être demandé; je sais que, sur le fond, tout le monde municipal est d'accord -laquelle des deux solutions préconisez-vous? Vous savez que l'Union des municipalités régionales de comté préconise, quant à elle, dans sa conclusion, que les travaux municipaux de 250 000 $ et moins - là-dessus, j'ai compris que M. Asselin était flexible, enfin c'était négociable, pour utiliser son expression - tous les travaux municipaux de 250 000 $ et moins qui sont actuellement assujettis ne devraient pas l'être. Quelle est la solution que vous privilégiez?

M. Paquin: M. le ministre, quand on a préparé notre mémoire, on a pensé à dire à 5000 habitants et moins parce que le gouvernement lui-même, dans plusieurs domaines, sépare les municipalités de cette façon. Par exemple, la police ou n'importe quoi, c'est 5000 habitants et moins. Nous avons dit: 5000 et moins, cela devrait cadrer avec les programmes du gouvernement. C'est de cette façon qu'on a pensé. On n'est pas en désaccord avec ce que l'UMRCQ dit. Par contre, pour vous situer, ce pourquoi on dit 5000, c'est un peu pour en arriver à votre niveau.

M. Fréchette: D'ailleurs, je suis tout à fait conscient que, depuis que des représentations sont faites à cet égard, c'est toujours le critère qui a été utilisé: la municipalité de 5000 habitants et moins. Quant à moi, la suggestion faite par M. Asselin hier, c'est quelque chose de nouveau, d'original quant à la nature de la recommandation. Ce n'est peut-être pas parce que, pour moi, c'est original que d'autres ne connaissaient pas déjà cette suggestion, mais cela apparaît nouveau comme élément dans le dossier très spécifique que nous sommes en train de voir.

La conclusion que je me permets de tirer, c'est que vous avez votre conclusion à vous, mais celle de l'UMRCQ ne vous répugne pas non plus.

M. Paquin: Non, pas du tout, M. le ministre. Ils ont pris une autre tangente pour s'exprimer. Nous avions adopté cette démarcation pour qu'on soit bien compris par vous, étant donné qu'il semblait que, dans les politiques gouvernementales, les petites municipalités étaient considérées en partant de 5000 habitants et moins. On n'a pas pris le même chemin pour être explicite.

M. Fréchette: Je pense que c'est clair, quant à moi. Je vous remercie beaucoup.

M. Paquin: Merci, M. le ministre.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais remercier Me Tessier, M. Jules Paquin, le préfet de la MRC de Mékinac, et Me Lemay, de leur présence ce matin et du témoignage qu'ils viennent de nous donner. Je voudrais aussi leur indiquer qu'on apprécie les recommandations qui nous sont formulées. J'aurai un commentaire. J'aurai quelques questions ensuite.

Essentiellement, la façon dont on doit interpréter et surtout ce qu'on doit retenir de votre témoignage, c'est une demande provenant du milieu municipal. Je sais que votre MRC a consulté plusieurs des autres municipalités du Québec affectées par le même problème. Vous venez, finalement, vous faire le porte-voix de plusieurs municipalités du Québec de faible densité de population qui bien souvent ne sont pas

rapprochées des grands centres urbains où la main-d'oeuvre spécialisée est surtout localisée. Ces municipalités, comme vous le disiez un peu plus loin dans votre mémoire, ont l'obligation de donner des services à la population, mais, en contrepartie, ont des montants de disponibles qui ne sont peut-être pas aussi grands que dans les grands centres urbains. Je crois que tous les députés autour de cette table peuvent connaître et vivre avec beaucoup d'acuité la situation financière de ces municipalités qui doivent composer avec des projets communautaires, des projets particuliers qui sont là pour améliorer les services, mais aussi pour relancer l'emploi là où la situation est plus dure et plus difficile.

Ce matin, je retiens de votre mémoire que vous demandez à peu près ceci au gouvernement. J'ose croire que le gouvernement sera sensible à cette requête. Vous dites: En 1979, les lois et les règlements ont été modifiés de façon que: 1. Le gouvernement lui-même ne soit pas assujetti à ces lois, à ces règlements. 2. Les hôpitaux, les écoles. Vous demandez que, comme gouvernement municipal, comme gouvernement local, vous ayez vous autres aussi le privilège d'être administrés par un régime particulier qui serait le même que celui du gouvernement, soit dit en passant. Quand le gouvernement du Québec décide de faire des travaux de rénovation ou d'amélioration dans le parc des Laurentides, dans la réserve de Portneuf, il n'a pas à faire référence à l'OCQ. Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche n'a pas à faire référence à l'OCQ. Quand l'hôpital de Sherbrooke - je peux utiliser l'exemple parce que c'est à celui-là auquel on a fait souvent référence - décide de faire des travaux de rénovation, c'est la même chose. Chez vous, vous n'avez pas le choix en vertu de la loi et des règlements actuels. Vous devez composer avec cette situation de droit.

Voici la première question que je voudrais vous poser. Vous avez confirmé tout à l'heure que la municipalité de Notre-Dame-de-Montauban a procédé à la construction d'une patinoire recouverte préfabriquée. Vous avez confirmé que les travailleurs qui étaient responsables du chantier étaient des travailleurs qualifiés. La première question que je voudrais vous poser, c'est: Aviez-vous de disponibles dans votre municipalité ou dans votre secteur de la MRC des travailleurs qualifiés possédant les certificats de classification pour faire de tels travaux? Deuxièmement, il y a une dimension que le gouvernement ne saisit peut-être pas tout le temps, mais qu'il devrait saisir, c'est le deuxième aspect de ma question: Souventefois, les municipalités ont enclenché un chantier ou un projet quelconque en disant à la population: Nous avons un projet, supposons, de 150 000 $, nous avons une possibilité de subvention pour tel montant, tel pourcentage, cela peut aller de 50% à 60%, nous aurons une partie de ces sommes qui seront redistribuées dans la municipalité parce qu'on prévoit embaucher des gens de la municipalité à tel taux de salaire. Ce qui est en deçà du décret, j'en conviens.

Avez-vous déjà quantifié ou avez-vous déjà évalué l'impact qu'aurait eu sur un projet comme le vôtre le fait d'imputer les niveaux de rémunération du décret, auquel cas vous auriez pu voir une décision différente des citoyens, c'est-à-dire appel d'un référendum pour valider un règlement d'emprunt et peut-être un projet refusé?

M. Paquin: Pour ce qui est des travailleurs qualifiés, dans notre municipalité, il n'y en avait pas. Alors, on a été obligé d'engager quelqu'un qui a une carte, qui est reconnu par l'Office de la construction du Québec. On a engagé quelqu'un de l'extérieur qui avait les cartes, qui connaissait cela, qui avait la compétence pour conduire les travaux. Nous autres, chez nous, il ne s'en fait pas de travaux, une fois à tous les 25 ans. On ne peut pas avoir de gars avec des cartes. Chez nous, un gars qui a une carte, c'est un gars qui reste à l'extérieur, qui reste en ville. C'est là qu'il y a des travaux. Dans les petites campagnes, c'est rare qu'on vient à bout d'avoir des travaux.

Concernant votre deuxième question, c'est bien clair que, si on avait su, premièrement, qu'on était régi par l'OCQ... Vous allez me dire qu'on n'a pas le droit d'être ignorant, mais on n'a pas fait cela en cachette. On ne le savait pas. Je pensais qu'on était comme le gouvernement. Je n'ai pas lu la loi; cela ne fait pas assez longtemps que je suis maire. Je n'ai pas eu le temps de me tremper là-dedans. Mais là, je suis trempé jusqu'au cou; je suis correct. J'ai appris ce que c'était. Si c'était à recommencer, on ne ferait rien, comme on fait présentement.

On ne fait rien du tout, malgré qu'on ait des gens qui viennent nous trouver et qui pleurent pour avoir du travail; des assistés sociaux à 154 $ par mois, qu'on paie pour qu'ils se reposent dans le jour et qui viennent nous "faire" la nuit. Ils ne sont pas plus bêtes que les autres. Que voulez-vous? Il faut qu'ils vivent. On est pris avec ces problèmes. De temps en temps, c'est la maman qui vient nous trouver et qui dit: II fume "du pot en mautadit", mon gars, et il est en train d'entraîner mes jeunes. Ne pourriez-vous pas faire quelque chose, monsieur? Pauvre madame, on n'est plus capable de rien faire. Arrangez-vous avec vos problèmes. Nous, on n'est pas capable de rien faire et on ne fera rien.

On n'achète pas de matériaux, ce qui n'aide pas à la relance. Couper des branches le long des chemins, il va venir un temps où

il n'y en aura plus à couper. Cela n'avance pas grand-chose. Cela n'apporte pas beaucoup de ventes de matériaux de construction. C'est comme cela qu'on essaie de fonctionner. Si on avait voulu adopter un règlement pour construire cela, on aurait été battu. Cela n'aurait pas été fait.

M. Pagé: Vous confirmez ce matin que vous avez investi une somme d'environ 150 000 $ ou 160 000 $ et que, si vous aviez dû recourir à l'Office de la construction du Québec - malgré qu'après on vous ait réclamé 6000 $ - si, au lancement du projet, vous aviez dû établir votre rapport de coût et le présenter aux citoyens sous forme de règlement avec les prévisions d'un niveau de rémunération autre que celui que vous avez effectivement payé, le projet ne se serait jamais réalisé.

M. Paquin: Exactement. De plus, on n'aurait pas encouragé à travailler nos jeunes assistés sociaux, eux qui sont découragés. Il y en a quelques-uns dont on pensait qu'ils n'étaient pas bons. On leur a montré qu'ils étaient capables de faire quelque chose. Ils passent là et ils se pètent les bretelles. Ils se disent: "Mautadit", on est bon; on ne pensait pas qu'on était capable de faire cela, nous. Cela faisait longtemps qu'ils étaient dépréciés; ils pensaient qu'ils n'étaient plus bons pour la société. Imaginez, on les a valorisés et on se fait punir pour cela. Sans être missionnaire, vous savez, à un moment donné, tu te demandes, "batèche", ce qui se passe, comment cela tourne.

M. Pagé: Je vais revenir sur la recommandation concernant les 5000 habitants et moins. Je dois dire qu'il est explicable pour deux motifs, selon moi, que vous vous soyez référés à une exclusion pour des travaux faits par des municipalités dans les municipalités de moins de 5000 habitants, pour le motif que vous donniez tantôt auquel a fait référence le ministre, d'ailleurs. On catalogue ou on identifie souventefois les municipalités de moins de 5000 et de plus de 5000.

Un autre aspect qui est intéressant, c'est que Mme Marois, la collègue de M. le ministre Fréchette, appuyait une résolution il y a peu de temps, ici à Québec, à un congrès de leur formation politique, à savoir que le règlement de placement dans l'industrie de la construction ne s'applique pas dans les municipalités de moins de 5000 habitants. C'est probablement inspiré par cet aspect aussi, ou après avoir pris connaissance de cela, que vous formulez cette proposition aujourd'hui.

Mais pour revenir à la recommandation que vous faites par rapport à celle de l'Union des municipalités régionales de comté, si vous aviez à privilégier...

Autrement dit, seriez-vous satisfait si le gouvernement, ce soir, demain, ou peu importe quand, décidait de placer les gouvernements locaux sur le même pied que le gouvernement du Québec et les commissions scolaires, et que, pour des travaux avec un quantum, c'est-à-dire des travaux de 100 000 $ ou de 150 000 $ et moins, vous aviez le droit d'effectuer vos travaux?

M. Paquin: Oui, Mme la Présidente, je peux répondre au député de Portneuf qu'on serait satisfait et qu'on appuie l'Union des municipalités régionales de comté. (12 heures)

M. Pagé: Une dernière question concernant le cas de Saint-Aimé-du-Lac-des-îles. Vous m'avez bien dit que, pour illustrer l'application parfois discutable et même douteuse dans certains cas, de ces fameux règlements, que la municipalité avait acquis cet immeuble pour la somme de 1 $. Les 26,50 $, c'était par citoyen, par habitant. Cela fait beaucoup par famille, cela peut vouloir dire jusqu'à 60 $ par famille en moyenne. C'est en pénalités et en sanctions payées à l'OCQ.

M. Paquin: Exactement, selon le nombre de gens qu'il y a dans cette municipalité, on en arrive à ce montant.

M. Pagé: C'est 60 $ par famille. Cela est probablement aussi cher que la taxe d'eau, certainement plus cher que la taxe de loisir et probablement plus cher que la taxe d'incendie ou d'ordures ménagères.

M. Paquin: Oui.

M. Pagé: D'accord. Mme la Présidente, un dernier commentaire. À la suite du commentaire du ministre, je voudrais témoigner de mon appréciation à l'égard des différentes initiatives que vous prenez, parce qu'on sait que ce n'est pas toujours facile, dans des municipalités de faible densité de population, de fonctionner avec un pouvoir de taxation limité, compte tenu de la population et de l'évaluation. Avec un développement qui a été radicalement freiné par l'application de la Loi sur le zonage agricole et le coup de pinceau vert qui a été donné sur à peu près toutes les municipalités rurales du Québec, {'obligation que vous avez est, d'une part, de maintenir un niveau de taxation assez faible et, en même temps, de donner des services à votre population.

Je vous remercie de votre mémoire aujourd'hui et, à la suite des commentaires que le ministre faisait sur le fait que les bâtisses construites comme cela par des gens qui ne possédaient pas toujours de certificat de qualification et de classification, je tiens à vous dire que, si vous m'invitez, M. le maire, à aller faire un coup de patin dans

votre aréna, je vais y aller et je vais me sentir en sécurité certainement, parce que d'ailleurs, on a déjà vu, et pas loin de Québec ici, un immeuble qui avait supposément été construit par des travailleurs, avec des architectes, des ingénieurs, qui avait même reçu la visite des gens de la Commission de la santé et de la sécurité du travail le matin, tomber le soir à cause du manque d'un bout de bois et, paraît-il, il n'y aura pas plus d'enquête qu'il n'en faut dans ce dossier. C'est en sécurité qu'on va aller chez vous. Ne vous sentez pas inquiet des propos du ministre, M. le maire.

M. Paquin: II n'y a pas de problème, la bâtisse est bonne. Soyez assuré de cela.

M. Pagé: Merci.

La Présidente (Mme Harel): M. Paquin, Mes Tessier et Lemay, on vous remercie.

M. Rocheleau: Une minute!

La Présidente (Mme Harel): Ah! M. le député de Hull. M. le député de Hull, vous demandez d'intervenir.

M. Rocheleau: C'est cela, Mme la Présidente. Je vous remercie. M. le préfet, M. Paquin, on pourrait se poser la question si Noé avait sa carte de compétence ou s'il avait sa carte de classification, parce qu'on sait qu'il a fait un maudit grand tour de bateau et qu'il s'est rendu à bon port. Mais pour revenir à la question qui me préoccupe davantage dans votre mémoire, vous faites allusion à plusieurs municipalités qui ont été pénalisées à la suite du règlement de placement dans la construction qui, plus particulièrement, ne bénéficiaient pas d'exemptions comme certaines municipalités régionales ou certaines communautés urbaines ou régionales.

Il y a un point qui me préoccupe davantage. Je sais pertinemment que plusieurs autres municipalités ont connu le même sort que ceux dont vous faites mention dans votre mémoire aux pages 4 et 5. On sait qu'une municipalité, tant pour la démolition que pour la construction, doit émettre un permis. On sait que les inspecteurs qui font la surveillance soit des chantiers de construction, dans l'ensemble des municipalités et des régions du Québec, doivent tenir compte des permis qui sont émis par les municipalités et qu'ils sont à même de consulter fréquemment les municipalités, à savoir les permis qu'elles ont émis pour aller visiter les chantiers. Plusieurs de ces municipalités ont eu des amendes pour avoir fait, entre autres, des travaux de démolition, parce que, dans plusieurs cas, on relate des travaux de démolition à la suite de dons, car on a payé une somme de 1 $ pour certains équipements ou certains édifices qui leur ont été cédés. Ces municipalités ont-elles été avisées au début des travaux par l'Office de la construction du Québec ou ont-elles été avisées à la fin des travaux du fait qu'elles avaient enfreint le règlement de l'Office de la construction du Québec?

M. Paquin: Mme la Présidente, je vais répondre au député. C'est dommage que Noé ne soit pas dans le groupe de gens qui sont en bateau, cet été, il aurait gagné la course, vous pouvez en être sûr; il serait arrivé de l'autre côté le premier.

Pour ce qui est de votre question à savoir si les travaux ont été arrêtés au début ou à la fin, les travaux ont été arrêtés à la fin dans les cas que nous connaissons, surtout à Saint-Aimé-du-Lac-des-Iles, dans la Haute-Mauricie et chez nous, à Notre-Dame-de-Montauban, deux jours avant que les travaux soient terminés.

M. Rocheleau: II est intéressant de remarquer les commentaires que faisait mon collègue de Chapleau concernant la ville de Gatineau, hier, alors que cette municipalité a été pénalisée d'une somme de 250 000 $ par l'OCQ à la suite de la procédure prise. C'est arrivé deux jours avant la fin des travaux. On sait que pour avoir une pénalité de 250 000 $, ce devait être des travaux de l'ordre de plusieurs centaines de milliers de dollars et cela a dû prendre plus d'une semaine pour les effectuer.

Je me pose la question suivante, et je souhaiterais que le ministre, étant donné qu'on parle précisément de ces cas, puisse s'enquérir auprès de l'Office de la construction du Québec si plusieurs cas semblables se produisent à répétition dans l'ensemble des municipalités du Québec et si ça n'a pas été préjudiciable aux municipalités d'être avisées, plutôt au début des travaux qu'à la fin de ceux-ci. Je me pose une sérieuse question à savoir si ce n'est pas fait par malice. Si ces municipalités n'ont pas été avisées au début des travaux, le ministre ne devrait-il pas considérer certaines modifications à apporter, comme notre parti le souhaite, qui pourraient permettre aux municipalités de 5000 habitants ou moins d'être soustraites pour les travaux municipaux de l'ordre de 250 000 $ ou moins par année? N'y aurait-il pas lieu de faire en sorte de rembourser ces municipalités qui ont été pénalisées d'un tel montant si, dans l'examen de chacun des cas, on se rend compte qu'il n'y a pas eu une surveillance et une information pertinente à savoir que ces municipalités allaient à l'encontre du règlement?

Je tiens à préciser que le mémoire qui a été déposé par l'Union des municipalités régionales de comté, hier, qui regroupait plus

de 40 municipalités régionales de comté et qui est appuyé par l'ensemble des municipalités du Québec, concerne aussi d'autres municipalités qui viendront se faire entendre par l'entremise de l'Union des municipalités du Québec qui regroupe les municipalités régies par la Loi des cités et villes. Je tiens à préciser, pour le bénéfice du ministre, que le mémoire présenté par l'Union des municipalités régionales de comté n'a pas été déposé ici pour la première fois hier, en cette commission. Nous en avons discuté alors que plusieurs demandes ont été adressées au cours de rencontres en commission parlementaire pour traiter plus particulièrement des municipalités, lors du dépôt, par le ministre des Affaires municipales, des projets de loi omnibus pour modifier la Loi sur les cités et villes et le Code municipal.

À plusieurs reprises les municipalités nous ont fait des demandes similaires dans le but d'être soustraites à l'application de la loi. Plus particulièrement, les gouvernements favorisaient, par la mise sur pied de différents programmes, la création d'emplois pour soustraire de l'assurance-chômage ou de l'aide sociale certaines personnes qui voulaient travailler. De la main droite, le gouvernement mettait sur pied des programmes intéressants et, de la main gauche, malheureusement, il adoptait d'autres lois et d'autres règlements faisant en sorte de pénaliser ces mêmes municipalités qui voulaient faire profiter leur population de cette relance économique. Comme le préfet, M. Paquin, l'a mentionné tantôt - et j'aimerais peut-être l'entendre le confirmer -s'il n'y a aucun changement apporté à la loi ou aux règlements existants, est-ce que votre municipalité ou l'ensemble des municipalités que vous représentez ont l'intention de continuer ou d'amorcer de nouveaux travaux pour faire bénéficier vos commettants respectifs?

M. Paquin: Mme la Présidente, je répondrai à M. le député que, si la loi n'est pas changée, il va y avoir un congrès provincial de l'Union des municipalités régionales de comté et soyez assuré qu'on va être sur le plancher pour demander à chacune des municipalités de ne pas faire de travaux. On n'est pas capable d'en faire. Fermez cela. Fermez boutique. C'est tout. Et on continuera de payer nos gens les plus défavorisés à 154 $ par mois. On continuera à perdre ces gens-là. C'est une génération qu'on est en train de perdre. On les a charriés, premièrement, dans le domaine scolaire et là ils continuent dans la société de se faire garrocher d'un bord et de l'autre. C'est comme cela. C'est la réalité. Il ne faut pas se leurrer et se mettre la tête dans le sable. Il faut regarder ce qui se passe. Ces gens ne resteront peut-être pas toujours paisibles comme ils le sont maintenant. À un moment donné, il y en a qui vont se fâcher et c'est dangereux.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Une dernière question. Je pensais que mon ami, M. le député de Bourassa, poserait une question. Il l'a souvent posée et elle mérite d'être posée. D'ailleurs, je pense que, s'il avait été ici, il vous l'aurait posée. Il aurait très certainement commencé par dire: Moi, ce que je ne comprends pas, M. le maire... Et il aurait poursuivi en disant: Comment pouvez-vous être justifié de demander un régime particulier pour la municipalité qui, s'il était appliqué, ferait en sorte que le citoyen de votre municipalité paierait un niveau de rémunération prévu au décret et que vous autres, vous paieriez moins? C'est probablement la question qu'il vous aurait posée s'il avait été ici. Je sais que vous êtes capable d'y répondre.

M. Paquin: Ah oui! II n'y a pas de problème là.

La Présidente (Mme Harel): M. Paquin.

M. Paquin: Mme la Présidente, je puis vous dire que je ne sais pas... J'aimerais bien que le député et ceux qui ont la même opinion - il n'est probablement pas le seul à avoir ce point de vue - viennent dans nos petites municipalités pour essayer de vendre cette politique à nos gens qui ne gagnent pas cher l'heure, leur faire payer des salaires comme cela pour les travaux qu'il y a chez eux. À part cela, bien souvent, dans nos municipalités, il y a des gens qui ont de la difficulté à payer leurs taxes et ils nous demandent, pour payer leurs taxes, de faire des travaux en acompte sur leur compte de taxes. Si la majorité de vos gens travaille pour 8 $ ou 10 $ l'heure et que vous arrivez avec des gens de l'extérieur à 20 $ l'heure, d'après moi, il y a quelqu'un qui va manger des coups de pied dans le derrière. Je ne pense pas que cela se passe ainsi et qu'on soit exonéré par ces gens-là. Ils ne comprendront pas que c'est une loi, tout cela. Non, non. Cela ne marchera pas ainsi, surtout quand ils ont pris une bière et qu'ils ont fumé deux touches de "pot". Dans ce temps-là, ils ne veulent rien comprendre. Soyez bien assurés qu'ils nous arrangent. Vous ne vivez pas cela, vous autres. Vous êtes ici dans la grande bâtisse, mais nous, on est "poignés" avec cela tous les jours. C'est un devoir social. Vous essayez de nous le donner, mais il va falloir que vous nous aidiez. Cela n'a pas de maudit bon sens. On n'est pas pour s'arranger tout seul avec cela.

La Présidente (Mme Harel): On vous remercie, M. Paquin, Me Tessier et Me Lemay.

Je vais inviter immédiatement l'Administration régionale Kativik, à moins que M. Paquin ait quelque chose à dire en conclusion.

M. Paquin: Mme la Présidente, j'aimerais vous remercier et remercier les gens de la table, M. le ministre et MM. les députés, qui nous ont écoutés. On a travaillé pour venir se faire entendre. On vous remercie beaucoup de nous avoir écoutés. On aurait aimé que le député de Bourassa soit là. On aurait pu causer amicalement avec lui. Nous autres, on ne fait pas de grandes choses comme il se fait à Montréal. Des stades olympiques, on n'a pas les moyens de faire cela, mais on paie, par exemple, pour le stade olympique.

Des voix: Ah! Ah!

M. Paquin: II ne sait pas cela, lui. Nous autres, même si on marche chez nous avec des bottes à fourreau beurrées d'un peu de fumier de vache et que lui, il marche avec de petits souliers fins, on paie quand même, nous autres, chez nous. Je ne voulais pas passer cela sans... Cela mérite considération, je pense. On vous remercie infiniment de nous avoir écoutés. (12 h 15)

La Présidente (Mme Harel): On vous remercie, M. Paquin.

M. Paquin: Merci.

La Présidente (Mme Harel): J'appelle maintenant l'Administration régionale Kativik qui comprend et qui regroupe, je pense, l'Administration régionale Kativik, la Société Makivik de même que la Fédération des Coopératives du Nouveau-Québec. Je crois savoir que Mme Mary Simon, qui est la présidente de la société, va nous présenter et nous lire le mémoire en langue inuttituut.

L'Administration régionale Kativik

Mme Simon, peut-être pourriez-vous nous présenter les personnes qui vous accompagnent?

Mme Simon (Mary): (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp (Marielle): Mme Simon va présenter les membres de son groupe au début de sa présentation. D'abord elle voudrait dire qu'elle va faire sa présentation en inuttituut, qui est la langue des Inuits, et que j'interpréterai en français.

Pendant la période des questions il serait probablement plus pratique de répondre à vos questions en anglais et je pourrai traduire en français. Mme Simon ne fera pas lecture de notre mémoire mais plutôt une présentation un peu plus courte.

La Présidente (Mme Harel): Est-ce qu'elle compte faire toute la présentation du mémoire ou si vous allez, au fur et à mesure, nous interpréter en français?

Mme Beauchamp: Au fur et à mesure de la présentation, j'interpréterai en français.

La Présidente (Mme Harel): Très bien! Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Je m'appelle Mary Simon, je suis la présidente de la Société Makivik. On m'a demandé de présenter ce mémoire à la commission au nom de la commission scolaire Kativik, de l'Administration régionale Kativik et de la Société Makivik. Les autres représentants à la table sont: de l'Administration régionale Kativik, Willie Makiuk, gérant général; Jimmy Johannes, agent de développement; Marc Voinson, coordonnateur. De la Commission scolaire Kativik, Annie Lock, directrice générale; Jim Deslauriers, adjoint au directeur de l'éducation des adultes et Marielle Beauchamp, interprète.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: C'est au nom de ces trois organismes que je tiens à remercier la commission d'avoir accepté d'entendre nos représentations. Nous visons ici à mettre en lumière les principales difficultés auxquelles les Inuits sont confrontés lorsque nous cherchons de l'emploi dans l'industrie de la construction et nous proposons des solutions à nos problèmes.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Avant la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, les Inuits participaient, en effet, plus activement aux activités de construction qu'ils ne le font à présent. Cela s'explique du fait que l'industrie de la construction n'était pas organisée comme telle. En effet, les ministères du provincial et du fédéral exécutaient eux-mêmes la plupart des travaux et embauchaient à cette fin la main-d'oeuvre locale. Les travailleurs recevaient alors une formation dans les principaux métiers. Cependant, des changements majeurs sont survenus dans des activités de construction, après la signature de la convention. On modifia le type de maisons

construites, on introduisit des techniques modernes, on adopta le processus d'attribution des contrats selon la soumission la plus basse et on appliqua étroitement les lois et les règlements en vigueur.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Certes, tout cela contribua à améliorer les conditions de logement dans le Nord. Cependant, les Inuits qui avaient acquis une certaine expérience ne purent désormais plus travailler dans l'industrie de la construction en raison du manque de qualification professionnelle. En dépit des efforts accomplis pour former les travailleurs inuits, la réglementation actuelle ne permet pas de relier adéquatement cette formation à l'apprentissage sur le tas pour mener éventuellement à la classification.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Bien plus, l'application étroite des règlements ne tient pas compte de l'environnement nordique, de la courte saison de construction, du type de maison construite dans le Nord, ni de la distance entre les collectivités. N'est-il pas contradictoire qu'au moment même où s'accélèrent les activités de construction dans leur région, les Inuits puissent y participer de moins en moins? Nous formons pourtant la majorité de la population dans le Nord. De plus, ce sont les efforts de nos trois organismes qui ont donné lieu au programme de construction accélérée de logements et d'écoles ainsi qu'au programme d'amélioration des pistes d'atterrissage.

Nous croyons qu'il est injuste que les sociétés coopératives et travailleurs inuits ne puissent être les principaux bénéficiaires de cet accroissement des activités économiques. Enfin, non seulement l'article 29051 de la convention prévoit-il expressément l'attribution d'emplois et de contrats aux Inuits dans le domaine de la construction, mais elle leur confère priorité à cet égard.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Nos collectivités nordiques requièrent la formation d'une main-d'oeuvre locale pouvant assurer l'entretien de leurs édifices, de leurs résidences et de leur équipement. Le coût de l'entretien de la construction doit diminuer, ce qui ne risque pas de se produire si les entrepreneurs doivent s'en remettre à une main-d'oeuvre importée. Enfin, le coût social du chômage est incalculable. Il faut passer immédiatement à l'action et créer pour les Inuits des occasions d'emplois dans la construction. (12 h 30)

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Même lorsque des contrats du gouvernement du Québec obligent les entrepreneurs à donner priorité à la main-d'oeuvre locale, nous éprouvons des difficultés à obtenir ces emplois, parce que nous ne possédons pas les certificats de classification et autres documents requis. Cette question des cartes et documents de classification pose un problème tout particulier aux Services d'entretien Sanak Inc., l'une des filiales de Makivik. Lorsque cette société entreprit d'exécuter tous les travaux d'entretien du ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement, elle s'imposa comme politique de conserver la main-d'oeuvre autochtone déjà au service de ce ministère. Tant que le MTPA procédait lui-même aux travaux d'entretien, ni lui, ni ses employés n'étaient soumis aux règlements régissant l'industrie de la construction. Maintenant que le travail est exécuté par une tierce partie, l'entrepreneur doit y adhérer. Or, les employés autochtones ne possèdent pas les cartes et documents exigés, bien qu'ils remplissent, évidemment, leurs fonctions avec compétence.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Les règlements posent aux Inuits les principaux problèmes suivants. La plupart des Inuit ignorent les implications causées par l'appartenance aux syndicats et ne connaissent pas les services offerts par ces derniers. Pour l'instant, l'exigence d'appartenir à un syndicat n'est simplement qu'un obstacle de plus à l'obtention d'un emploi. Les travailleurs inuits ont besoin d'être sensibilisés à des activités syndicales, mais, également, les syndicats devront aussi être sensibilités aux besoins particuliers des Inuits et, par conséquent, adapter leurs services.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Le nombre d'heures requis pour obtenir la qualification dans un métier donné est beaucoup trop élevé dans le contexte nordique. Signalons qu'au rythme actuel des activités de construction un Inuk mettrait plus de treize ans à obtenir la qualification alors qu'un travailleur du sud n'y mettrait que huit ans.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Les règlements sur l'apprentissage et sur le renouvellement des certifications posent un autre problème en ce qu'ils exigent un trop grand nombre d'heures par année. Dans le Nord, les activités de construction sont sporadiques. Une année d'activité intense peut être suivie de plusieurs années d'inertie. Il s'ensuit que l'on doive diminuer le nombre d'heures requis

pour les apprentis et que la période pendant laquelle les heures pourront être accumulées doit être prolongée afin de garder les certificats.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Bien qu'on puisse émettre un certificat spécial en vertu du règlement sur le placement des salariés, il n'existe aucun mécanisme permettant aux détenteurs d'un tel certificat d'obtenir des certificats de classe À ou d'apprenti.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: La convention et l'article 36 du règlement sur le placement donnent tous deux priorité aux travailleurs autochtones. Cependant, l'article 38 du même règlement permet quand même à un entrepreneur d'embaucher une équipe de travailleurs provenant de l'extérieur du territoire.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Les règlements exigent que, lors de l'embauche d'un apprenti, un entrepreneur doit engager un certain nombre de travailleurs qualifiés dans le corps de métier visé sur le chantier. Dans le contexte nordique ces rapports apprenti-travailleur qualifié sont complètement ridicules. Il arrive souvent, en effet, qu'on ne puisse trouver sur un chantier donné suffisamment de travailleurs qualifiés dans un métier pour pouvoir engager même un seul apprenti. Cela est particulièrement décourageant lorsqu'on considère le besoin de programmes permettant d'accélérer la formation des Inuits.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: S'il est vrai que nous avons besoin de travailleurs spécialisés, il nous faut surtout, en particulier dans l'entretien, des généralistes compétents, c'est-à-dire des ouvriers polyvalents. Nous ne pouvons arriver à ce résultat puisque les règlements exigent des travailleurs qualifiés dans chaque métier.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue)

Mme Beauchamp: Pour les fins du placement, notre territoire fait partie de la région Côte-Nord où la saison de construction est plus longue et la population plus nombreuse. Ainsi, les travailleurs du sud de la région ont un avantage sur les nôtres en regard des règlements d'apprentissage et de placement. Nous recommandons que le territoire situé au nord du 55e parallèle soit constitué en une région distincte de façon que le placement des travailleurs se fasse sur une base régionale correspondant à la réalité géographique et sociale du nord.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue)

Mme Beauchamp: Afin de surmonter la multitude de problèmes que cause l'application des règlements et de permettre aux Inuits de participer pleinement à l'industrie de la construction, nous proposons d'imposer un moratoire quant à l'application de ces règlements aux Inuits. Ce moratoire permettrait de modifier les règlements en tenant compte de la réalité nordique et de prévoir la juste participation des Inuits à l'industrie de la construction tout en permettant au gouvernement de faire honneur à ses obligations en vertu de la convention.

Permettez-nous de vous signaler l'erreur typographique qui s'est glissée à la page 36 de notre mémoire où nous recommandons un moratoire de trois ans plutôt que de quatre ans. Cette erreur montre bien que ce n'est pas tant la durée du moratoire qui importe, mais l'imposition d'un moratoire suffisamment long pour apporter les modifications nécessaires.

Enfin, si l'on fait preuve de bonne foi, le moratoire pourrait être de courte durée. (12 h 45)

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Nous avons déjà adressé une requête semblable à Mme Pauline Marois, ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et nous avons participé à un chassé-croisé de réunions avec les représentants du ministère en vue de trouver des solutions. Ces représentants ont reconnu que les règlements ne convenaient pas du tout dans le contexte, mais ont conclu que seule une solution politique permettrait d'apporter les modifications requises. Plus récemment, ils nous ont aussi signalé qu'une procédure de modification risquerait de contrevenir à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Comme nous l'avons déjà noté, l'article 29031 de la convention nous accorde priorité d'emploi dans la région. Cependant, dans le domaine de la construction, cette priorité perd tout son sens si les règlements nous empêchent d'accéder à l'emploi. Devant la commission parlementaire tenue en novembre dernier sur les droits des peuples autochtones, Makivik signalait que les mesures positives prévues au chapitre 29 de la convention pourraient être interprétées par certains comme une contradiction de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Nous suggérions alors qu'afin d'éviter des litiges

inutiles et coûteux, il importait de préciser par voie législative que la charte du Québec ne porte en rien atteinte aux droits et aux obligations prévus à la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Mme Simon: (S'exprime dans sa langue).

Mme Beauchamp: Comme tous les Québécois nous souhaitons et avons la ferme intention de participer activement au développement économique de notre région. Nous espérons sincèrement que vous recommanderez la poursuite des démarches qu'on vous a présentées aujourd'hui, sinon notre participation dans l'industrie de la construction, dans le cadre des lois et règlements actuels, ne pourra être que marginale. Merci.

La Présidente (Mme Harel): La parole est au ministre du Travail.

M. Fréchette: Mme la Présidente, permettez que je demande ceci à Mme Beauchamp. Comment souhaitez-vous que l'on procède pour les fins de l'échange et pour les fins de la traduction également?

Mme Beauchamp: Si vous voulez juste faire une petite pause de temps à autre pour que je puisse traduire au fur et à mesure.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je voudrais, bien sûr, dans un premier temps, remercier nos invités de l'intérêt qu'ils ont manifesté aux travaux de notre commission. Je comprends que les représentations qu'ils nous font contiennent, dans un premier chapitre, tout un historique de la situation qui a prévalu chez eux mais dans le secteur très précis de la construction.

Mme Beauchamp: Madame President, I would like, first, to thank our guests for their interest in the work of our commission. 1 understand that their representations include a historical summary of everything that happened in their territory, specifically in the sector of construction.

M. Fréchette: Could we make a contract? I will try to do my best in English and, if I say something wrong, please call me to order. Is that correct?

Mme Beauchamp: With pleasure.

M. Fréchette: The second think I would like to tell to our guests is this: It is the first time, as far as I am concerned, that we have the pleasure to meet together and I hope it is not the last one. I listened to the reading of the brief and I pay attention to the problems that you specifically identify in it. At page 3, the first problem that you bring to our attention is this: "La plupart des Inuits ignorent les implications causées par l'appartenance aux syndicats et ne connaissent pas les services offerts par ces derniers. Pour l'instant, l'exigence d'appartenir à un syndicat n'est simplement qu'un obstacle de plus à l'obtention d'un emploi. Les travailleurs inuits ont besoin d'être sensibilisés à des activités syndicales mais, également, les syndicats devront aussi être sensibilisés aux besoins particuliers des membres inuits et, par conséquent, adapter à leurs services."

The only thing I would like to tell you as far as this situation is concerned is that the Government has effectively no jurisdiction on this matter. I think this should be an initiative coming from the syndicates and unions to meet you and give you all the details you need, all the information you need and would like to know. Maybe I could ask them to take such an initiative, but you will understand, I am sure, that it is impossible for me or for the Government to give any order in this sense. I know there are members of the unions here, and I hope that they have understood your invitation to them, because I understand this is an invitation.

I also understand that your whole plea is based on this article 29.0.3.1 of the Convention, and this article, as far as I am concerned, is quite clear. I am one of those who think that this article of the Convention should be applied. And, if this article of the Convention should be applied, this means that the conclusion is clearly the one you ask for.

Vous me permettrez de continuer en français maintenant. Vous avez indiqué dans votre mémoire que, jusqu'à maintenant, vous aviez entrepris des démarches pour effectivement soumettre le genre de problèmes qui, quant à moi en tout cas, doivent de toute évidence d'abord retenir notre attention et, ensuite, être résolus à la satisfaction de tout le monde. Vous avez fait des démarches dans ce sens-là. Je suis l'un de ceux qui croient que non seulement les démarches doivent être continuées, mais elles doivent arriver à une conclusion et rapidement à une conclusion.

La traduction, Mme Beauchamp.

Mme Beauchamp: You stated in your brief that up to now you have made representations to submit problems that, in my opinion, obviously require attention and solutions. I believe these problems need immediate attention and solutions.

M. Fréchette: Dans ce sens-là - c'est strictement une suggestion que je mets sur la table et que vous aurez, évidemment, toute liberté de retenir ou de rejeter - je suis tout à fait disposé à suggérer que, dans

les quelques jours qui suivront la fin de nos travaux, une équipe interministérielle ait un mandat spécifique pour que des rencontres aient lieu entre vos organismes et les représentants du gouvernement pour voir quelles sont les solutions possibles.

Je vous laisse parler, Mme Beauchamp. Je vais essayer de ne pas perdre le fil, quant à moi.

Mme Beauchamp: In this sense, this is only a suggestion that you are free to accept or reject, but I am willing to suggest that, within a few days after the conclusion of the works of this commission, a special mandate could be given to an interministerial team to set up meetings between your representatives and ministerial representatives in order to seek solutions.

M. Fréchette: Ce comité interministériel pourrait regrouper des représentants du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, du ministère du Travail, du ministère de l'Habitation, de l'Office de la construction du Québec et de tout autre groupe et/ou organisme pouvant être utile dans les travaux de ce comité. (13 heures)

Mme Beauchamp: This interministerial committee could have representatives from the Ministry of Manpower and Income Security, the Ministry of Labour, the Ministry of Housing, the Québec construction Office and any other group or organization that could serve a purpose within it.

M. Fréchette: Ce même comité aurait un mandat avec un échéancier très précis dans le temps et devrait faire rapport quant à l'état de la situation et quant aux suggestions à être faites le ou avant le 15 novembre prochain.

Mme Beauchamp: This committee would have a very specific mandate with a very specific schedule and would have to make a report which would be both an assessment of the situation and recommandations on or before November 15.

M. Fréchette: Si le comité avait un tel mandat, c'est évidemment parce que j'ai l'intention, quant à moi, de suggérer au gouvernement qu'après que ce comité aura fait rapport, des amendements aux lois et règlements soient adoptés aux fins de faire respecter l'article 29.03.1 de la convention.

Mme Beauchamp: And if this committee would have such a mandate, obviously it is because it is my intention to suggest to the Government that further to the report of this committee, laws and regulations be amended in order to comply with Section 29.03.1 of the Agreement.

M. Fréchette: Une dernière observation, une dernière remarque. Je comprends que le problème majeur, en tout cas, l'un des problèmes majeurs que vous nous soumettez est celui de la qualification et de la formation professionnelles.

Mme Beauchamp: As a last comment, I would like to say that 1 realize that one of the major problems that you are submitting is that of manpower qualification and training.

M. Fréchette: Mrs President, this is my suggestion. I do not know how it will be accepted or how they will answer to this suggestion but as far as I am concerned, I am quite ready to listen to any other kind of suggestion.

Mme Simon: I would like to just respond for a couple of minutes. Thank you very much, Minister Fréchette, Mr. Commissionner. It is a pleasure to me with you as well. I hope that we will have the opportunity to meet with you. I am very glad to hear that you support our case. I just like to go through the points that you have raised very briefly. We can discuss them further, I guess, outside of the hearing but just on No 1, on the issue of unions, we wanted to highlight the fundamental problems related to the construction industry. Therefore, we brought out the problem with the unions, but, we would certainly be very opened to have direct negotiation discussions with the unions. The other point in regard to the second point that you raised with the section of the James Bay and Northern Quebec Agreement regarding 29.03.1, that is a specific clause that states that we should be given priority in terms of employment and contracts. But, in fact, the whole section of that agreement, section 29, relates to economic development. There are other sections that relate not only to employment and contracts, but give priority to other types of economic opportunities for Inuit, as a result of the James Bay Agreement. So, 1 just wanted to point out that there are other clauses related to economic development.

The third recommendation that you have made is very welcomed. We would welcome the setting up of this special interministerial committee that would immediately start dealing with the very mature and immediate problems that we have facing us today. The only thing that I would want to point out, I guess, is that you said that it would give its assessment and recommendation on or before November 15th. What we would like to see is that, because the accelerated construction has started -

like not this year - let us say last year and the year before, we felt that if there was immediate action taken as a result of the hearings, we could benefit from this construction season as well, because our construction season is just starting in the North. I am not saying that what you are recommending is not good. I really like what you are saying, but I would also like to try and address the immediate problem.

M. Fréchette: Là-dessus, Mme Beauchamp, mon commentaire est le suivant. Il y a effectivement dans le mémoire, dans les représentations qui nous sont soumises, des problèmes qui ont un double volet: les uns ayant besoin d'une correction immédiate - et c'est la raison pour laquelle je suggère que ce comité interministériel commence dès maintenant ses travaux - alors que d'autres situations, peut-être un peu plus compliquées sont à moyen ou à plus long terme. C'est la raison pour laquelle je parlais du 15 novembre. Mais ce n'est pas, par ailleurs, un motif suffisant pour ne pas prendre dans l'immédiat des décisions qui tombent sous le sens et sur lesquelles tout le monde s'entend.

Mme Beauchamp: There are, indeed, in the representations submitted today, some problems that are two-sided or many-faceted, some which have immediate repercussion or immediate needs, and others may be more complicated, that may take a little longer and might be solved in the middle or the long term, which is why he suggested November 15th as the date. But there is no reason not to take immediate action for those issues that are obvious and on which everybody agrees.

Mme Simon: If I could make a suggestion in that regard, for the short term, maybe one of the things that the commission could recommend - aside from the fact that there will be this special committee to make changes to the law and regulations during the interim... Perhaps, one of the ways of getting around the problem would be to allow initial hiring without having to have classification cards and that the contractors would be responsible for classification cards and union cards; not to impose the fact that you have to have the card before you can be hired, but to get the card after you are hired. That may be a possible solution for the interim period.

M. Fréchette: It is, in fact, a matter that we will have to look after right now.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre du Travail. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Je vous remercie, Mme la

Présidente. Mrs. Simon and colleagues, I would like, as a member of the Liberal Party, to thank you very much for the presentation of your brief this morning. We appreciate very much our exchange with you. You gave us a good presentation of your problems and be sure that we have now a better understanding about this kind of problems. We know and we realize that you gave us the demonstration that the North of Québec has a demographic, geographic and social reality which is different from the other parts of Québec. I have to tell you my satisfaction, my own satisfaction about the answers given to you by the minister this morning about his interest for your problems and, for all of us, I would like to tell you first that we accept your recommendation that the territory north of the 55th parallel be constituted as a distinct region. Be sure that, if the Government decide to act in this sense, we will not critic him about that and that we accept this recommendation.

We are also glad that we heard the minister about the interministerial committee which will have to seat to have a meeting with you as soon as possible which will have to make a report. I hope that this kind of report will be presented here at the commission and I hope that we will have the opportunity to discuss, all of us if necessary, about the result of this committee and his conclusions.

We know and we understand that you have few problems and few special problems, first, about the apprenticeship of the Inuits. We understand very well all the problems you have with the possibility for you to obtain a certificate of qualification and also of classification.

I will have one question to ask. We would appreciate to hear about the formation you have at school, about what is done by the Federal Government on this matter, what is done by the Québec Government on this matter, first, about the problems you have with the apprenticeship actually and about what is done actually and, in your own opinion, about what we might do for you about this fact.

Mme Simon: Mr. Deslauriers will respond to that question.

M. Deslauriers (Jim): The Kativik School Board in its adult education services organizes training programs in the construction trades.

M. Pagé: Who organizes it?

M. Deslauriers: The Kativik School Board...

M. Pagé: O.K. Thank you.

M. Deslauriers. ...in the three principal trades: carpentry, electricity and plumbing. The provincial curriculum has been completed for all groups of workers seeking training except in electricity, and that will be completed this winter. The problem is, once having followed a completed training program, of course the second part of training which is apprenticeship on the work side, and that is where there is a severe fault. People do not have access to apprenticehip on the job.

M. Pagé: O.K. I understand that you will have the opportunity to discuss about this matter with the interministerial committee which was announced by the Minister this morning. Thank you very much and, as I said, be sure that we are really sensitized about the request you made this morning, first. We accept your proposition and we hope that, as soon as possible, all of us will have the opportunity to exchange again about your problems - at this time, I hope it will be about the solution of your problems - and we accept a special regulation for you. We recommend also to the Minister to accept it, and we understand that, following the demographic and social realities in the North, you need some special regulation for you. We will support you about that, be sure.

Une voix: Thank you.

M. Pagé: You're welcome.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Vimont.

M. Rodrigue: Mme la Présidente, la question que je veux poser est un peu du type de l'interrogation que le député de Portneuf vient de soulever. J'ai compris qu'il y avait des cours de formation dans les métiers donnés par la Commission scolaire Makivik, je crois. Par ailleurs - ça rejoint un peu les éléments du mémoire aux pages 3 et 4, à l'article 2, en particulier - il semblerait que pour ce qui est de la période d'apprentissage et les heures requises pour obtenir les certificats de qualification, cela pose un problème, en plus de l'obtention de la classification auprès de l'OCQ, c'est-à-dire des permis de travail, à toutes fins utiles.

Déjà, pour l'obtention de la qualification première, du moins pour les stages pratiques requis pour cela, il semble qu'il y a un problème, et c'est ce que j'aimerais préciser avec les représentants. Je vais traduire ce que j'ai dit.

On page 3 of your document, you are talking about the certificate of classification and, on page 4, article 2, you are talking about the certificate of qualification. From the answer that Mr Deslauriers has just given, should I understand that, after the theorical courses at the school, the required apprentice period to get the certificate of qualification is difficult to make because the construction period is not long enough and it takes many years to acquire the number of hours required to get this qualification? Is that the problem that you want to explain at articles 2 and 3 of your document? We have a two steps problem here: first, qualification; second, classification. Is it so?

M. Bussières (Paul): Peut-être que je pourrais répondre pour faciliter la compréhension et parler en français. Il y a toute une multitude de problèmes interreliés. Premièrement, donner de la formation pour aider les gens à mieux comprendre leur métier...

M. Rodrigue: Cela, c'est déjà fait, il y a des gens qui ont déjà une formation théorique.

M. Bussières: Exactement, des efforts ont été faits. Il faut, après cela, que les gens puissent avoir accès au travail, obtenir des certificats.

M. Rodrigue: La période d'apprentissage.

M. Bussières: Non, avoir un permis de travail, un certificat de classification. C'est une procédure très compliquée et qui empêche des gens de travailler en règle, d'être, à proprement parler, enregistrés et d'accumuler des heures reconnues par l'OCQ. Par la suite, il y a la durée d'un apprentissage, quand on parle d'une période de construction de 400 heures, au maximum, ce qui fait que les gens vont devoir passer dix à quinze ans à travailler sporadiquement avant d'avoir la possibilité d'avoir accès à un test de qualification.

Dans ce sens, cependant, un effort a été fait du côté du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour essayer de trouver des façons d'aider ou d'accélérer un peu la formation et la qualification en donnant plus d'importance à la formation en institution. Le seul problème, c'est qu'il faut mettre en application des recommandations que des fonctionnaires du ministère de la Main-d'Oeuvre ont mises de l'avant de façon, justement, à permettre aux gens du territoire de pouvoir accélérer leur apprentissage et leur accès à la qualification.

M. Rodrigue: Pour les travaux qui seraient lancés demain matin sur le territoire, actuellement, il y a des gens qui ont une formation théorique prise à l'école dans trois métiers de base, si j'ai bien compris la réponse de M. Deslauriers. Par ailleurs, ils n'ont pas réussi à faire les

heures requises au point de vue de l'apprentissage sur le chantier pour obtenir les certificats de qualification, c'est-à-dire pour être des électriciens ou encore des plombiers. Est-ce que c'est cela ou s'il y a déjà des gens qui ont ces certificats?

M. Bussières: Il y a quelques personnes qui ont finalement réussi à obtenir leur certificat.

M. Rodrigue: Après leur apprentissage, une fois leur apprentissage complété.

M. Bussières: Ah non! M. Rodrigue: Non?

M. Bussières: Non. Actuellement, il y a des gens qui ont beaucoup d'heures accumulées dans la construction d'un autre type. On est obligé de leur donner une formation pour les mettre à jour sur les nouvelles techniques de construction. Ils vont devoir, pendant un certain temps, continuer à acquérir leur expérience dans les métiers sur le site de construction. Cela n'empêche pas cependant que ces gens-là vont se retrouver avec des problèmes techniques, des cartes qui vont être annulées, parce qu'ils ne travaillent pas assez d'heures, etc. C'est déjà un petit nombre de gens qui ont réussi à légaliser leur statut de travailleur de la construction, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs qui n'engagent pas directement les gens. Donc, ils ne peuvent pas être enregistrés sans certificat de classification. Tout est interrelié. Si vous n'avez pas le certificat de classification, vous n'avez pas le carnet d'apprenti. Vous ne pouvez pas enregistrer vos heures. Mis à part cela, il y a possibilité aussi, par la formation en institution, par... Il y a eu des suggestions du ministère, comme je le disais, d'examens modulaires où une partie du métier peut être testée à ce moment-là par des examens pratiques adaptés parce qu'il y a un problème de langue. Il y a un problème de culture où les gens, devant un test écrit de 50 questions à choix multiples, ne sont pas capables de se faire évaluer réellement sur leurs connaissances. Il y a eu des suggestions et je pense que la question maintenant est de pousser pour que ces suggestions soient mises en application, ce qui va donner une possibilité à des gens, dans un an ou deux ans d'ici, après avoir continué à acquérir un peu plus d'expérience sur les chantiers, de retourner en cours de formation et de finir par avoir accès à des tests de qualification.

La Présidente (Mme Harel): Une dernière intervention, M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Merci, Mme la

Présidente. I would like to say that I fully appreciate the problems that you brought up and I sympathize because earlier this morning, people in my riding, not necessarily for the same reasons but because of the lack of work, people are not able to get their apprenticeship done and they do not have a classification card. This all comes from the present regulations that do exist. I fully sympathize and I am glad that you have brought up this problem because although it may not be exactly the one that exists in other areas, there are other factors in your area as a shorter construction season and so on, but I can tell you that 1 fully sympathize with the situation. I do hope that we can bring changes that would give the opportunity to the people to be able to exercise whatever trade they have taken and also to feel productive and participate in the economic development of the province of Québec.

Mme Simon: Just on that point, Mr. President, I just want to point out an additional problem that we have is that due to the efforts of our organization such as Makivik, the regional government and the school board, we do have an accelerated construction program for the next four or five years. Otherwise, construction in the North is not that big but eventhough we politically have managed to get some additional houses and some schools for our communities, no employment is being created for our people. That is an additional problem that we have. So, we want that to be addressed in the immediate, right away so that in fact we can get some benefits out of the construction.

La Présidente (Mme Harel): Mme

Simon, Mme Beauchamp et les gens de la Société Makivik, merci. Excusez-moi... Makivik, c'est bien le cas. Merci pour votre présentation et la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 h 45. Il faudrait que les membres de la commission soient présents à 14 h 45 pour que nous puissions reprendre et poursuivre pour l'après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 25)

(Reprise de la séance à 14 h 56)

La Présidente (Mme Harel): La séance est ouverte. La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je vais demander à toutes les personnes qui veulent rester dans cette salle de prendre place. Cet après-midi, nous allons procéder de la façon suivante: Nous allons d'abord entendre le Grand Conseil des Cris du Québec. Par la suite, très brièvement, nous entendrons l'Association nationale des travailleurs en

réfrigération, climatisation et protection et la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération du Québec. Par la suite, nous entendrons l'Union des municipalités du Québec, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec et, finalement, l'Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec.

De façon à être équitable à l'égard de chacun des organismes qui ont a se faire entendre devant cette commission, la commission souhaite pouvoir allouer une période de temps d'au plus une heure à chacun des organismes qui a a présenter un mémoire devant la commission, étant entendu que les groupes d'entrepreneurs et de travailleurs en réfrigération pourront utiliser une période d'au plus 20 minutes.

J'invite immédiatement le Grand Conseil des Cris du Québec à nous présenter son mémoire. Je crois que c'est M. Robert Ottereys qui est porte-parole du groupe.

Le Grand Conseil des Cris du Québec

M. Ottereys (Robert): Oui, Mme la Présidente. M. le ministre, membres de la commission, permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Robert Ottereys; à ma gauche, vous avez John Hurley, conseiller juridique du Grand Conseil des Cris du Québec; à ma droite, Gaston Langlois, directeur général de la Compagnie de construction crie.

Je voudrais d'abord, au nom des particuliers et organismes cris qui, en ce moment, sont à Eastmain à leur assemblée annuelle, vous remercier de nous donner l'occasion de nous faire entendre à cette commission. Je suppose que vous avez lu le mémoire du Grand Conseil des Cris.

Je vous présente en bref les recommandations et les revendications concernant l'industrie de la construction pour les Cris.

Dans un premier temps, les Cris veulent, comme vous l'avez vu dans le mémoire, un comité spécial auquel M. Fréchette a fait référence lors de la présentation des Inuits ce matin, pour étudier les modifications à la législation québécoise sur la construction par rapport au statut particulier des Cris. Par "statut particulier", j'entends le statut juridique par lequel on peut se référer à la Convention de la Baie James et du Nord québécois, chapitre 28, aux nos 28.9 et 28.10 qui stipulent des mesures spéciales en faveur des Cris, touchant la création d'emplois, les cours de formation et le placement des candidats cris. L'autre statut, c'est le statut concret, c'est-à-dire la culture distincte, une langue différente et l'isolement géographique.

Nos revendications regroupent en général celles que vous avez déjà entendues présentées par les Inuits. On demande, en premier lieu, la modification de la législation québécoise afin de réaliser nos revendications spécifiques.

En bref, vous avez, à la page 6 du mémoire, nos revendications. Je vais vous dire comment on les interprète, comment on aimerait présenter notre situation comme telle. En premier lieu, c'est d'adapter au milieu cri les conditions de travail fixées dans le décret. À ce sujet, des changements mineurs seront considérés par les Cris. Ici, il convient de signaler que bon nombre de Cris, quoiqu'ils participent à la construction, continuent à s'adonner à leurs activités traditionnelles, tels que la chasse, la pêche et le trappage.

Deuxièmement, c'est d'exempter les Cris de l'obligation, mais l'obligation immédiate, d'appartenir à une association représentative et à un syndicat. Ce que les Inuits ont entrepris ce matin, c'était peut-être pour sensibiliser les Cris à la syndicalisation, afin de les introduire progressivement à une association représentative ou à un syndicat.

Troisièmement, c'est de modifier les conditions d'obtention du certificat de classification décerné par l'OCQ en vertu du règlement sur le placement des salariés dans l'industrie de la construction. Nous ne pouvons pas remplir les conditions, plus particulièrement le nombre d'heures travaillées au cours des deux dernières années, en raison du volume de travail et de la courte saison de travail de construction dans le Nord.

Quatrièmement, c'est de modifier pour les travailleurs cris les conditions d'inscription et de maintien sur la liste de disponibilité des salariés préparée par l'Office de la construction du Québec. Le règlement de placement requiert un nombre d'heures pour conserver l'inscription, la disponibilité d'un salarié, c'est à cause de leur activité traditionnelle crie.

Cinquièmement, c'est de modifier les conditions d'annulation de la carte et du carnet d'apprentissage pour les travailleurs cris. Une des conditions, c'est d'avoir travaillé dans les deux mois qui suivent l'obtention du carnet d'apprentissage.

Sixièmement, c'est de modifier les ratios, les proportions d'apprenti par travailleur qualifié prévues au règlement sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

Septièmement, c'est de modifier l'examen de qualification et mettre l'accent plutôt sur l'aspect pratique que sur l'aspect théorique à cause du statut particulier du Cri, c'est-à-dire le langage comme tel et la formation, surtout le langage.

Bref, c'est le mémoire du Grand Conseil des Cris du Québec.

La Présidente (Mme Harel): Est-ce que

votre présentation est terminée?

M. Ottereys: Mon confrère signale qu'aux pages 1 et 2, on mentionne aussi, par rapport à la construction, qu'on fait affaires avec une autre compagnie crie et les lois ne s'appliquent pas. Les lois québécoises ne s'appliquent pas, mais la construction, c'est la construction, je pense que c'est un bâtiment et non pas une construction commerciale.

M. Hurley (John): Je pense que l'idée ici, c'est que, lorsqu'il s'agit de travaux effectués par des Cris, pour le bénéfice des Cris, pour des fins communautaires cries, les Cris considèrent que le décret de la construction ou la loi québécoise ne s'applique pas, surtout en raison de la Convention de la Baie James qui est approuvée par une loi québécoise et aussi en raison de considérations d'ordre constitutionnel. On ne voudrait pas insister sur ce point. Ce qui importe pour nous, c'est de souligner la Convention de la Baie James qui prévoit des mesures spécifiques. Vous avez entendu ce matin la présentation des Inuits. Eux ont signalé le chapitre 29 de la convention. Il existe un pendant pour les Cris de ce chapitre, qui est le chapitre 28, qui prévoit essentiellement les mêmes dispositions quant à la formation des travailleurs cris, quant à la création d'emplois et surtout quant à la priorité d'embauche pour les Cris dans des projets de construction dans le territoire de la Baie James.

La Présidente (Mme Harel): Très bien. La parole est au ministre du Travail à moins que vous n'ayez à compléter votre présentation. M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: Aussi brièvement que possible. Je remercie nos invités d'abord d'avoir préparé ce mémoire et ensuite d'avoir consacré du temps pour venir rencontrer les membres de la commission, le leur soumettre verbalement et se déclarer disposés à répondre aux questions. Comme on vient tout juste d'en faire mention, je pense qu'il est de capitale importance de retenir les dispositions de la Convention de la Baie James, particulièrement ce chapitre 28 dont vous venez de parler. De façon encore plus précise, l'article 28.91 de ce chapitre. Je ne crois pas faire erreur en prétendant que toute votre argumentation de même que les réclamations que vous nous soumettez se basent spécifiquement là-dessus. Cela m'apparaît, quant à moi, une assise passablement confortable.

Je vous signale également, comme je l'ai dit à ceux qui vous ont précédés ce matin, que les circonstances ont fait que nous n'avons pas eu souvent l'occasion de nous rencontrer, j'espère que ces occasions, quant à moi, seront plus nombreuses à l'avenir et qu'elles pourront nous permettre d'expliciter davantage l'ensemble de la situation que vous nous soumettez.

Dans votre mémoire, à la page 6, où l'on retrouve vos revendications spécifiques, j'apprécierais un commentaire sur la deuxième recommandation que vous nous soumettez. Exempter les Cris de l'obligation d'appartenir à une association représentative et à un syndicat. Peut-être parce que j'étais distrait ou pour n'importe quel autre motif, je n'ai pas tout à fait bien saisi l'argumentation que nous a soumise M. Ottereys. Est-ce que j'ai compris, M. Ottereys, que vous êtes disposés, par ailleurs, à ce que des centrales syndicales, par exemple, au sens très large du terme, prennent les dispositions nécessaires pour vous donner des explications, des renseignements sur l'ensemble du processus d'un syndicat, ou alors si c'est le texte qu'on retrouve à la page 6 qui est votre position ferme, c'est-à-dire l'exemption totale de l'obligation d'appartenir à une association représentative ou à un syndicat?

M. Ottereys: J'ai dit l'exemption immédiate pour les Cris d'appartenir à un syndicat. Comme les Inuits, ce matin, à cause d'un statut ou de la façon dont on se situe en ce moment, la formation, on l'a, mais on ne l'a pas vraiment selon les qualifications. Ce que les Cris connaissent des unions... Peut-être qu'il nous revient d'établir un programme où les syndicats les sensibiliseraient à leurs droits proprement dits et d'introduire ces syndicats progressivement.

M. Fréchette: Je vais réitérer à cet égard ce que je disais à ceux qui vous ont précédés ce matin. Il est évident que le gouvernement, sous un chapitre comme celui-là, n'a aucune espèce de pouvoir pour réaliser les objectifs que vous visez. Mais je serais fort étonné que les représentants des centrales syndicales qui sont ici n'aient pas compris et n'aient pas été sensibilisés à la requête ou à la revendication que vous soumettez.

J'apprécierais, quant à moi, si c'est possible, une description peut-être un peu plus précise quant au chapitre de la formation et de la qualification professionnelles. Vous savez, ce n'est pas que les Inuits ce matin, ce n'est pas que vous qui vous préoccupez de la qualification et de la formation professionnelles, mais tous les organismes que nous avons entendus depuis le début de nos travaux sont très préoccupés par la question de la formation et de la qualification professionnelles. Ce que je souhaiterais, quant à moi, c'est que vous puissiez nous résumer l'état actuel de la

situation et peut-être aussi nous indiquer en termes concrets quels sont les souhaits que vous nous soumettez.

M. Ottereys: Si vous regardez tous les points de nos revendications, les derniers concernent plus ou moins la qualification, après avoir obtenu un apprentissage, après avoir obtenu la formation de la commission scolaire crie. Il y a des demandes d'adultes dont la commission scolaire crie s'occupe ainsi que la direction du Grand Conseil des Cris et l'administration régionale crie. On donne cette formation au lac Hélène, c'est-à-dire une formation pour la machinerie lourde, la menuiserie, l'électricité et la plomberie. Mais la situation dans laquelle on vit, c'est que, pour être vraiment qualifié... Même les Inuits ont dit: On l'a notre formation, on fait notre propre formation par le biais de la Catholic School Board. Pour nous, c'est la même chose. C'est au moment de l'apprentissage qu'on ne peut pas remplir les conditions après deux ans pour être qualifié comme menuisier, électricien ou plombier. La formation se fait par le service des adultes de la commission scolaire crie.

M. Fréchette: Est-ce que quelqu'un voulait ajouter quelque chose?

M. Hurley: Si M. Ottereys le permet, je pense qu'on pourrait apporter plusieurs précisions. En fait, la situation que vivent les Cris actuellement dans le Nord est essentiellement la même que celle des Inuits. Vous avez entendu les problèmes exposés par les Inuits ce matin; on a les mêmes problèmes. C'est donc dire que, pour obtenir le certificat de qualification, il faut avoir passé tant d'heures dans un programme d'apprentissage. Étant donné que la période de construction dans le Nord est assez courte et que le volume de travail de construction effectué dans le Nord, surtout dans les villages, est assez petit aussi, il est très difficile pour les Cris de satisfaire à cette exigence d'atteindre un certain nombre d'heures pour obtenir le certificat de qualification. Voilà un point. (15 h 15)

Deuxièmement, la nécessité de travailler dans les deux mois suivant l'émission de la carte d'apprentissage est souvent très difficile à envisager pour les Cris. Je reviens au point touchant le volume de travail. En supposant que les Cris obtiennent une carte d'apprentissage ou leur carnet d'apprentissage, rien ne garantit qu'ils vont obtenir un emploi dans les deux mois suivant l'émission de la carte.

Troisièmement, pour garder la carte d'apprentissage, il faut travailler chaque année; il faut être enregistré comme apprenti auprès d'un employeur tous les ans. Là encore, cela pose un problème pour les

Cris, parce que souvent les postes ne sont pas disponibles.

Quatrièmement - j'avais un quatrième point à soulever - le ratio des apprentis par travailleur qualifié, cela pose énormément de problèmes pour nous, parce qu'il n'y a pas beaucoup de travailleurs qualifiés dans les villages et on a tellement besoin de former des apprentis. Il existe un besoin si grand à ce point de vue que, même si on faisait venir énormément de travailleurs qualifiés dans la région, on ne pourrait pas satisfaire à ce besoin actuellement. Donc, je pense que c'est cela la substance de nos préoccupations quant à un minimum d'apprentissage.

La Présidente (Mme Harel): M.

Ottereys.

M. Ottereys: Si vous me permettez, ce que je viens de dire, c'est que les travailleurs, selon moi, sont qualifiés en tant que tels, mais non pas d'après les règlements de formation et de qualification professionnelles. Je pense, Mme la Présidente, que M. Langlois avait quelques mots à dire concernant la formation sur le tas.

La Présidente (Mme Harel): M.

Langlois.

M. Langlois (Gaston): Merci. Seulement un commentaire un peu terre à terre pour ajouter un peu à ce que disait M. Ottereys quant à l'aspect pratique par rapport à l'aspect théorique. Je pense qu'on est en mesure d'affirmer qu'en dépit de tous les programmes de formation théorique la formation sur le tas demeure très efficace et, une fois qu'un travailleur a atteint un certain niveau de compétence, il n'est pas nécessairement classifié classe À et, si le ratio mentionné dans vos règlements devait être observé, il s'ensuivrait que la proportion des travailleurs autochtones sur un chantier serait très mince - il y en aurait peut-être un sur cinq - et, par notre expérience, nous savons qu'un autochtone sur cinq ou sur quatre ne produit pas. Il se sent perdu pour toutes sortes de raisons, comme le langage, la communication ou autre chose et, généralement, la façon d'obtenir une bonne productivité, etc., est de l'acclimater un peu, de faire un certain travail de communication qui ne se fait pas sur un chantier normal. Or, dans ce cadre-là, nous apprécierions beaucoup que la formation sur le tas reçoive plus d'attention par rapport aux examens théoriques.

M. Fréchette: En fait, lorsque vous nous signalez que, substantiellement, la situation ressemble beaucoup à celle qui nous a été décrite ce matin, à tous égards ou à peu près, vous faites évidemment référence à

ce phénomène de la formation et aux problèmes que cela peut créer, par exemple, en parlant du ratio compagnons-apprentis. On nous disait ce matin: On n'a pas, dans certains endroits, deux menuisiers qualifiés. Comment peut-on, dans ces conditions, respecter le ratio compagnons-apprentis à cet égard? Par cet exemple, je crois savoir que c'est à peu près la même chose dans votre situation.

Ce matin, M. Ottereys, j'ai fait une suggestion aux Inuits - je pense que vous étiez là - suggestion dont vous connaissez sensiblement les grands paramètres. Il s'agit, dès la fin de nos travaux, la semaine prochaine ou dans des délais très courts, d'amorcer avec votre groupe des travaux avec des représentants gouvernementaux des différents secteurs touchés: travail, main-d'oeuvre et sécurité du revenu, pour le chapitre le plus important, celui de la formation, l'Office de la construction du Québec dont le mandat très précis, avec l'échéancier dont nous avons parlé ce matin, serait de faire rapport, le ou avant le 15 novembre, des solutions possibles et éventuelles aux problèmes que vous soulevez.

Encore une fois - il m'apparaît que c'est l'argument le plus fondamental qu'on puisse invoquer - même juridiquement, le gouvernement est presque encadré à cause de la Convention de la Baie James dont on parlait tout à l'heure. Sans parler de ce comité, ni de son mandat, ni de son échéancier puisque, je pense, vous en connaissez les grandes lignes à partir de la discussion qu'on a eue ce matin, ma seule et unique question serait la suivante. Est-ce que, quant à vous, vous êtes disposés à collaborer avec ce comité pour arriver, dans les mêmes délais, à des suggestions précises quant aux changements à être apportés?

M. Ottereys: Je pense que vous trouvez la réponse à votre question à la page 5 où nous notons que nous voulons que ce comité soit créé et que nous voulons y participer si vous le formez. Si vous recommandez de le former, les Cris sont disposés à participer à ce comité.

M. Fréchette: Cela va, quant à moi. Merci, encore une fois.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Mme la Présidente, il me fait plaisir, au nom de notre formation politique, de souhaiter la bienvenue aux Cris, à M. Ottereys ainsi qu'à ceux qui l'accompagnent. Nous avons pris connaissance de votre mémoire et on s'aperçoit effectivement que vos revendications ressemblent beaucoup à celles que faisaient ce matin les Inuits concernant des problèmes très similaires aux vôtres.

Il est bien évident que le ministre, ce matin, annonçait la formation d'un comité interministériel qui pourrait permettre d'analyser, d'étudier et de voir à trouver certaines solutions qui préoccupent davantage les régions comme la vôtre. Il y a certains points ou certaines revendications très spécifiques que vous faites. Le règlement de placement dans l'industrie de la construction, particulièrement en ce qui a trait à la classification, existe depuis 1978. Nous sommes en 1984 et le gouvernement semble se rendre compte que ce règlement vous crée particulièrement des problèmes, étant donné que le ministre annonçait ce matin la formation d'un comité.

Depuis 1979, vous avez certainement, parmi votre population, des gens qui ont été actifs dans le domaine de la construction. J'aimerais savoir de quelle façon on a procédé pour effectuer des travaux de construction depuis 1979, plus particulièrement dans votre région.

M. Ottereys: En ce qui concerne ces questions, il faut vous adresser à M. Langlois, qui est directeur général de la compagnie de construction qui est établie depuis 1978. M. Langlois.

M. Langlois: D'abord, notre existence remonte à 1977, plus particulièrement 1978. Au tout début de notre existence, pour prendre avantage des dispositions de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, nous nous en sommes tenus principalement à des travaux non assujettis au décret de la construction, par exemple le déboisement, les travaux de correction à l'environnement et ces choses-là. Par la suite, petit à petit, à l'intérieur même des communautés, notre compagnie de construction a été amenée à gérer seulement des projets de construction au nom du conseil de bande cri; autrement dit, ces gens-là avaient des coopératives de main-d'oeuvre et ainsi de suite et la compagnie de construction fournissait le personnel de gérance seulement. C'est donc dire qu'au tout début, en 1978, le problème ne se posait pas comme il se pose actuellement, parce que nous en étions à nos débuts et il fallait commencer, se donner certaines infrastructures, partir quelque part. À ce moment-là, le projet de La Grande battait son plein et il était possible de trouver de l'emploi pour les ouvriers autochtones sans nécessairement toucher au décret de la construction, par exemple les travaux de déboisement et ainsi de suite qui ne sont pas assujettis.

Maintenant, le contexte est tout autre. Ces travaux sont à la baisse. En même temps, après six ans, certains autochtones, particulièrement les opérateurs de machinerie

lourde et ainsi de suite, ont pris de l'expérience et nous devons regarder dans d'autres directions afin de continuer à faire vivre ceux qui ont vécu avec nous depuis quatre ou cinq ans.

M. Rocheleau: Mme la Présidente, parmi ceux de la bande des Cris qui ont pu bénéficier de formation au cours des dernières années, peut-on évaluer ou avoir des statistiques qui dénotent le nombre d'étudiants qui ont reçu un diplôme, soit comme menuisier, comme plombier, comme électricien ou autre métier, et qui peuvent être fournies au niveau de la formation?

M. Ottereys: Les cours de formation sont donnés par la commission scolaire crie qui peut avoir les statistiques en tant que telles. En ce qui concerne la machinerie lourde, c'est parfois un certificat et c'est plutôt par crédits que cela marche pour la machinerie lourde. En ce qui concerne la menuiserie, elle se fait au lac Hélène et au moyen de cours où il y a quelquefois des traductions. Ces formations sont reconnues par le ministère de l'Éducation et la commission scolaire crie les gère. En ce qui concerne toutes les communautés, je pense que tout le monde a son "fair share" de la formation en tant que telle pour les métiers que j'ai nommés.

M. Rocheleau: Maintenant, M. Ottereys, dans l'ensemble, le règlement existant tel qu'on le connaît aujourd'hui, si on tient compte de l'ensemble des recommandations et des revendications très spécifiques que vous faites, ne peut absolument pas s'appliquer, tel que le règlement de placement existe actuellement et tel que le décret est fait présentement.

M. Ottereys: Dans le règlement de placement, la seule affaire, c'est l'article 36 qui donne la priorité d'engagement ou d'embauche aux Cris. Cela nous donne un certificat de qualification spécial. Qu'est-ce qu'on en fait? D'après ta formation et tes cours, tu peux obtenir une carte d'apprenti même si tu ne remplis pas les fonctions ou les conditions de formation pour la classification À dans n'importe quel métier en tant que tel. Donc, on ne peut pas continuer avec le règlement sur le placement. On pense à des modifications et on pourrait peut-être, avec le comité, voir ce qu'on peut en faire.

D'après le décret de la construction, les conditions de travail pourraient s'appliquer aux Cris ou à n'importe qui, mais c'est plutôt le mode de vie des Cris... Comme je l'ai dit, à ce point, ce sont des changements mineurs en ce qui concerne le décret de la construction à cause peut-être du mode de vie ou du cas particulier des

Cris. (15 h 30)

M. Rocheleau: J'aimerais savoir de M. Ottereys combien de Cris détiennent actuellement une carte de classification.

M. Ottereys: Classification "apprentis" ou...

M. Rocheleau: Une carte de classification leur permettant de travailler, de faire des heures dans les différents métiers de la construction. Autrement dit, la carte qui suit le règlement de placement.

M. Langlois: Si vous permettez, Mme la Présidente, je vais tenter de répondre. À un moment donné, plusieurs Cris, à cause de l'intervention de l'Association des employeurs de la Baie James, ont trouvé un emploi pour un entrepreneur donné sur le chantier La Grande. On a invoqué à plusieurs reprises l'article qui concerne les conditions à remplir si un apprenti veut garder sa carte. Je crois que la plupart l'ont perdue. On en a demandé encore récemment. Un certain nombre en ont, à ma connaissance au moins une trentaine. À un moment donné, il y en a peut-être eu 100 ou 150, je ne sais pas, mais elles ne sont certainement plus en vigueur si on s'en tient à la rigueur des règlements.

Dans ce même ordre d'idées, tantôt, on mentionnait quelles sont les personnes qui travaillent, etc. Il y a des choses positives, comme l'a mentionné Robert, du côté des opérateurs de machinerie lourde. Je crois qu'on emploie à temps plein peut-être une cinquantaine d'opérateurs d'équipement lourd dans les travaux non assujettis au décret. Dans la menuiserie, il y a au moins, en date de l'automne dernier, de 15 à 25 candidats diplômés du centre de formation du lac Hélène qui ont trouvé de l'emploi pour nous, mais encore là dans des travaux non assujettis au décret, ce qui revient à dire, pour répondre à votre question d'une façon précise, qu'actuellement leur carte ou leur classification n'est plus valable.

La Présidente (Mme Harel): Excusez-moi, M. le député de Hull. Vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Hurley: Oui, Mme la Présidente, si vous me permettez. Quant à l'application du règlement sur la formation et la qualification, je pense que deux questions se posent ici. Dans un premier temps, le règlement sur la formation et, dans un deuxième temps, le règlement sur le placement. Les deux sont interreliés. Si je comprends bien, on peut obtenir un certificat de classification pour apprenti, un certificat de classification À et spécial. Il existe des mesures prioritaires. L'article 36 de ce règlement prévoit une embauche prioritaire

pour les Cris. Cela ne résout pas le problème parce qu'il faut quand même satisfaire aux exigences du règlement sur la formation et la qualification. Donc, il faut prendre conscience de tous les problèmes qu'on a notés tout à l'heure, c'est-à-dire le ratio d'apprenti par travailleur qualifié, le nombre d'heures qu'il faut travailler dans une certaine période, l'exigence de travailler dans les deux mois suivant l'émission de la carte, l'exigence de travailler à chaque année suivant l'émission de la carte sinon la carte est annulée. Ces exigences font qu'il est très difficile pour les Cris, même s'ils terminent un cours de formation théorique, de travailler comme apprentis et de conserver leur statut d'apprenti en vue d'obtenir leur certificat de qualification qui leur permettrait éventuellement de détenir le certificat de classification À . Donc, pour répondre à votre question de façon bien spécifique, je crois que, dans l'ensemble, le règlement sur la formation et la qualification en entier pose de sérieux problèmes.

M. Rocheleau: Mme la Présidente, en d'autres mots, nous avons, ce matin, pris connaissance du mémoire des Inuits qui nous présente sensiblement les mêmes problèmes -il y a plusieurs similitudes - que ceux que connaissent les Cris. Cela veut dire, à toutes fins utiles, que cela commanderait un statut particulier pour les régions nordiques qui connaissent des problèmes particuliers dans l'application du règlement tel qu'il existe. Le ministre - je le répète - ce matin, acceptait de mettre sur pied un comité interministériel dans le but d'étudier, à court terme, à moyen terme et à plus long terme, les modalités qui pourraient être apportées dans le but de solutionner la complexité de l'application de ce règlement dans votre région en particulier.

Vous demandez également, dans votre mémoire, un moratoire sur l'application du règlement. Je souhaite personnellement que le ministre, même si on s'attend, d'ici le 15 novembre, date fatidique, à un rapport quelconque sur la situation qui existe présentement, puisse accorder un certain moratoire sur l'application de certains articles du règlement tel qu'il existe aujourd'hui, dans le but de vous faire profiter ou de faire profiter aux Cris de l'essor économique actuel et qui ne persistera peut-être pas, malheureusement.

Nous allons, notre formation politique, vous apporter toute l'aide nécessaire. Nous vous offrons nos services si nous pouvons être d'une aide quelconque pour que le gouvernement puisse vous accorder une certaine forme de priorité tenant compte des problèmes très particuliers que ce règlement vous crée.

Je vous remercie pour la présentation de votre mémoire.

La Présidente (Mme Harel): Je vous remercie, M. Ottereys, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. À moins que vous n'ayez à compléter votre présentation...

M. Hurley: Mme la Présidente, j'aurais un bref commentaire concernant la suggestion qui a été faite ce matin quant à la création d'une région spéciale, pour les fins du règlement de placement, au nord du 55e parallèle. Je ne veux pas préjuger de la création d'une telle région ni parler au nom des autres parties autochtones. Je voudrais simplement signaler qu'il existe, au nord du 55e parallèle, une communauté à Poste-de-la-Baleine qui regroupe à la fois des Inuits et des Cris. La création d'une telle région, nous ne refusons pas une telle région en partant, mais je voudrais simplement souligner que le statut des Cris à Poste-de-la-Baleine devrait être étudié si une telle région était effectivement créée.

La Présidente (Mme Harel): Cela complète votre présentation.

M. Rocheleau: Seulement une question.

La Présidente (Mme Harel): Une dernière question.

M. Rocheleau: Elle s'adresse à vous et peut-être que le ministre, par le biais, pourra répondre. Étant donné que les régions nordiques présentent certains points très particuliers et que ce matin on a eu l'occasion d'entendre les Inuits et les Cris, je sais qu'il y a d'autres bandes, effectivement, qui connaissent peut-être des problèmes similaires, est-ce que le ministre se propose, dans la formation de son comité interministériel, de regrouper l'ensemble de la région nordique et de la faire bénéficier du même temps afin de trouver les solutions qui pourront être appropriées à tous et chacun?

La Présidente (Mme Harel): M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: C'est une question qui m'est adressée par un biais, comme dirait le député de Hull. C'est sûr que je suis très sympathique à une demande de la nature de celle que me fait le député de Hull. Je pense, par ailleurs, qu'il faut donner une certaine "priorité", entre guillemets, aux associations, aux regroupements qui sont liés par la Convention de la Baie James. C'est d'abord à cet égard qu'il faut tenter de régulariser des situations, mais cela ne répugne pas du tout qu'on englobe les autres situations dont vous parlez.

La Présidente (Mme Harel): J'inviterais

l'Association nationale des travailleurs en réfrigération, de même que la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération à prendre place. Je vous remercie.

Une voix: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Harel): Je vous rappelle que le temps alloué à la présentation de votre mémoire - c'est entendu, je pense, de part et d'autre - est d'au plus 20 minutes. La parole est à vous, M. Rivard. Vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent.

La Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération du Québec et l'Association

nationale des travailleurs en réfrigération, climatisation et protection

M. Rivard (Jean-Paul): Jean-Paul Rivard, directeur général de la FTQ-Construction. Je voudrais vous présenter les personnes représentant la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération du Québec. À mon extrême droite, M. Michel Rivard, aucune parenté, membre de l'exécutif de la corporation, Mme Monique Guérot, directrice administrative de la corporation. À ma gauche, M. Jules Bergeron, gérant d'affaires élu du local 3 de l'Association nationale des travailleurs en réfrigération, climatisation et protection incendie.

Je voudrais, Mme la Présidente, M. le ministre et MM. les membres de la commission, vous remercier d'avoir bien voulu accepter d'entendre ces deux associations. Je voudrais passer la parole pour quelques instants à Mme Monique Guérot.

Mme Guérot (Monique): Nous avons demandé d'être entendus aujourd'hui conjointement avec le local 3 et la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération afin de vous exposer certains problèmes survenus dans l'application du métier de la réfrigération, particulièrement en regard des travaux de service, d'entretien et de réparation qui ne sont plus assujettis au décret de la construction depuis environ 1978, à la suite d'une décision de l'Office de la construction du Québec. Étant donné le peu de temps qui nous est alloué, je vais céder directement la parole à M. Jean-Paul Rivard, que nous avons désigné d'un commun accord pour exposer la situation.

M. Rivard (Jean-Paul): Je voudrais souligner aux membres de la commission que c'est peut-être un précédent où des parties syndicale et patronale se sont entendues pour avoir un porte-parole unique qui vient de la partie syndicale. Je crois que c'est un bon exemple à suivre et l'AECQ devrait s'en inspirer. Je suis disponible.

(15 h 45)

Mesdames, messieurs, dans les secteurs de la réfrigération et de la climatisation, avant l'avènement du projet de loi 290 en 1968, ces travailleurs étaient couverts par une accréditation en vertu du Code du travail et les salariés embauchés par un employeur qui était accrédité - presque 99% des employeurs l'étaient - ces salariés, peu importe qu'ils fassent l'installation de la machinerie - ce qui est aujourd'hui régi par la loi - ou qu'ils fassent de l'entretien et de la réparation, étaient régis par la même convention collective et bénéficiaient des mêmes conditions de travail, des mêmes salaires. Or, en 1968, quand la loi a été mise en vigueur et qu'une définition du mot "construction" a été déterminée, ainsi que le règlement no 1 qui a apporté une meilleure définition - plus détaillée, sinon meilleure -toutes ces accréditations se sont envolées et ont été remplacées par la loi 290, Loi sur les relations du travail. Sont entrés dans le métier de nouveaux salariés, de nouveaux employeurs; d'autres sont partis et il n'y a plus aucune accréditation qui existe aujourd'hui.

Jusqu'à 1978, tous les salariés et les employeurs croyaient qu'ils étaient régis par le décret de la construction et toutes les conditions de travail étaient appliquées. Or, en 1978, il y a un "smart" qui a pensé à demander à l'OCQ de donner une interprétation, de donner son avis sur l'assujettissement des travaux d'entretien et de réparation et l'Office de la construction, toujours disponible, a rendu une décision à savoir que les travaux d'entretien et de réparation n'étaient pas inclus. Je ne rouspète pas contre cette interprétation, je crois qu'elle était logique et exacte; c'étaient des machineries de production et, effectivement, les travaux n'étaient pas couverts.

Depuis ce temps, certains employeurs -très peu, il faut le dire, mais la menace est constante - ont décidé de passer à côté des conditions de travail qui ont toujours été celles de leurs salariés. La corporation, comme association patronale responsable, a toujours tenté et réussi - et je pense qu'elle a eu pas mal de chances - à empêcher les employeurs de violer le décret et de généraliser les violations du décret - ce n'étaient pas des violations "illégales" - mais au moins de sortir des cadres du décret, un décret qu'ils ont toujours respecté.

Or, l'association nationale, qui était auparavant le local 796 de l'union internationale - les salariés ont quitté cette association pour joindre le local 3 de la FTQ-Construction - a toujours fait des démarches depuis ce temps pour essayer de réassujettir ces salariés et le travail.

En 1982, à la suite de démarches constantes depuis 1978, il y a eu un arrêté

en conseil concernant l'installation de cette machinerie, des systèmes de réfrigération et de climatisation de plus de 200 watts. Cela n'a pas changé grand-chose, parce que effectivement, si l'installation a été effectuée par des salariés de la construction d'un employeur professionnel, c'était couvert de toute façon. Cela n'a rien changé. Ce qu'il aurait fallu faire, c'est d'assujettir des travaux d'entretien et de réparation pour redonner aux salariés les mêmes droits: droit au fonds de pension, à une convention collective, qui existaient auparavant, avant l'avènement de la loi 290.

Parallèlement à ces activités, à ces démarches, l'association nationale des travailleurs a commencé à présenter des requêtes en accrédiation. Elle a inondé le ministère du Travail, à un moment donné, avec ces requêtes. Mais le problème auquel on faisait face, c'est que l'employeur qui prétendait ne pas être dans la construction pour se soustraire au décret, en de très rares cas - il faut le dire encore - venait plaider devant le commissaire du travail qu'il était régi par le décret de la construction. D'un côté, il l'était et de l'autre, il ne l'était pas. Le cas a été référé au commissaire de la construction qui dit, parce que la majorité des travaux de l'employeur étaient des travaux d'installation: C'est un employeur professionnel; donc, il ne peut être régi par le Code du travail. On se trouvait dans une situation où pour le travail que certains salariés faisaient, ils ne pouvaient être régis par une convention collective, parce qu'ils ne pouvaient être accrédités et ils n'étaient pas régis par le décret non plus. Il y avait une sorte de "no man's land" dans la loi qu'il aurait peut-être fallu pousser plus loin en allant à la Cour suprême pour contester, mais cela n'a pas été fait. On a plutôt décidé de mettre nos oeufs dans le panier du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.

Depuis 1978, des démarches sont faites constamment au niveau du conseil consultatif. Il y a eu plusieurs démarches, plusieurs rencontres avec des membres du conseil consultatif et avec le conseil consultatif lui-même.

En décembre 1982, j'étais également le porte-parole des deux associations devant le conseil consultatif. Nous avions présenté le cas et un document stipulant clairement quelle sorte d'amendement nous voulions. Il y a eu plusieurs recontres du conseil consultatif et de tous les membres et, finalement, en septembre 1983, il y a eu un accord dans le sens d'inclure dans la définition du mot "construction", les travaux d'installation de réparation et d'entretien des systèmes de réfrigération et de climatisation.

Un peu plus tôt, avant cette entente, un membre du conseil consultatif nous avait fait part de ses appréhensions quant à ce qui pourrait arriver au consommateur, au petit commerçant, etc. Sans prendre trop de temps, afin de vous éclairer sur ce qu'étaient nos intentions, je vais vous faire la lecture de la lettre qu'on avait écrite à M. Alexandre Beaulieau, qui était la personne du côté patronal qui avait des appréhensions. Nous lui disions ceci: "La présente lettre fait suite à notre rencontre du 1er décembre 1982 et contient des informations ainsi que notre position sur le sujet en rubrique. Nous croyons que cette position rencontre et reconnaît le bien-fondé de vos préoccupations à l'égard des petits détaillants que vous avez comme fonction de représenter et protéger. "Nos préoccupations à nous se trouvent au niveau des "grosses jobs" et non pas au niveau des appareils électro-ménagers et des petits commerçants. Depuis toujours, ces derniers ont toujours fait à leur guise et souvent font effectuer des réparations par des "bricoleurs" sans certificat de qualification et ce malgré l'article 3.01 du règlement no 2 relatif à la formation et la qualification professionnelles - le règlement secteur hors-construction - lequel article fait une obligation à ceux qui exercent le métier de frigoriste, notamment, de posséder un certificat de qualification."

Aussi la Loi sur les appareils sous pression fait une obligation à quiconque répare ou travaille sur des appareils de réfrigération d'être un salarié qualifié ou une personne qualifiée. "Nous n'avons jamais, au grand jamais, tenté de faire respecter cet article, lequel, en fait, touche une infime quantité de personnes car même les petits commerçants font appel à des maisons qualifiées et reconnues pour faire effectuer leur installation et réparation. Nous voulons continuer dans cette veine. "Quant aux appareils électro-ménagers, ils sont exclus par l'article 2.02-E) dudit règlement lequel est annoté et annexé à la présente..." "Donc, il est établi que le frigoriste doit posséder un certificat de qualification en vertu du règlement no 2. De plus, la Loi sur les appareils sous pression stipule à l'article 1, alinéa 3 du premier paragraphe, qu'un appareil frigorifique est considéré comme étant un appareil sous pression, ce qui nécessite une main-d'oeuvre qualifiée. "Vous savez que le règlement no 1 relatif au champ d'application a été amendé afin de couvrir l'installation des systèmes de réfrigération de plus de 200 watts. Afin de rencontrer encore mieux vos préoccupations, nous sommes disposés à exempter du règlement no 1, les systèmes de réfrigération et de climatisation localisés dans une bâtisse où ne sont installés plus de deux systèmes ayant une capacité maximum de 600 watts." Au lieu de 200 watts, on montait à 600

watts. "Cela exclu le système de 200, 250, 375 et 560 watts..." "Nous vous avons déjà fait connaître notre position unanime sur le sujet et nous vous répétons brièvement les raisons qui la motivent. 1. Depuis des années et aussi depuis l'adoption du bill 290 en 1968 et la publication du règlement no 1 relatif au champ d'application en 1971, tous les travaux de réfrigération et de climatisation (montage, installation, réparation et entretien) relevaient du décret de la construction." Peut-être faussement, mais ils en relevaient. "2. Les règles du jeu étaient connues et acceptées de tous (syndicats et employeurs). "3. Les travailleurs bénéficiaient des avantages du décret et se bâtissaient un fonds de pension, lequel, bien que modeste, leur accordait une certaine sécurité financière. "4. Les employeurs n'avaient pas à craindre une multitude d'accréditations et des centaines de négociations différentes à travers la province, évitant ainsi la surenchère qui existe dans d'autres secteurs. "5. Ce sont les mêmes catégories d'employeurs et de travailleurs qui sont impliqués, peu importe les conditions sous lesquelles le travail est effectué (décret ou hors construction). "Vous remarquerez que notre demande fait presque l'unanimité au CCTMO et notre proposition d'amendement devrait, à notre avis, vous satisfaire pleinement. Si jamais vous avez besoin d'explications supplémentaires, nous nous ferons un plaisir de nous rendre à votre demande. "Nous vous rappelons que, peu importe les circonstances, notre métier est toujours soumis aux mêmes obligations et à la même qualification. Tout ce qui reste à faire est de vous assurer que les travailleurs sont protégés et que les employeurs se font une concurrence loyale par le biais de la modification demandée au règlement no 1 en question. Nous ne voulons rien de nouveau, nous voulons rétablir une situation qu'une interprétation de l'OCQ a chambardée et qui n'était pas une source de problèmes pour ceux que vous défendez. "Espérant, cher monsieur, que nous avons su vous convaincre...". C'était signé par les deux associations.

Un peu plus tard en 1983, le CCTMO, le 20 septembre, s'entend unanimement pour proposer des amendements dans le sens que nous avions demandé. C'est en septembre. En décembre, M. Beaulieu demande que quelqu'un fasse une enquête afin de déterminer si ces travaux sont couverts ou non. Une enquête est faite. M. Évariste Bernier, qui devait faire l'enquête, demande à l'OCQ de la faire et l'OCQ, le 5 juin 1984, donne le résultat de l'enquête. C'est interprété comme suit: Quand c'est couvert, c'est couvert; quand ce n'est pas couvert, ce n'est pas couvert. On savait cela. On se retrouve encore au bâton. On n'a absolument rien.

Le 14 juin, une manifestation est faite par les travailleurs et les employeurs du domaine devant le ministère du Travail, à Montréal, où plus de 400 camions, dans la rue, ralentissent la circulation. À la suite de notre intervention, l'intervention des dirigeants élus du local, on s'est assuré que le blocage était de très courte durée. On voulait faire connaître au ministère notre désapprobation ainsi qu'au CCTMO, que c'était une folie furieuse de nous priver de droits acquis. C'était un précédent. Des employeurs et des travailleurs étaient, on pourrait dire, sur la même ligne de piquetage sans que la police ne les sépare.

Les problèmes que cela cause, c'est que cela crée une désyndicalisation des travailleurs qui étaient auparavant syndiqués, cela détruit les conditions de travail dans certaines circonstances et dont les salariés bénéficiaient, notamment le fonds de retraite, les vacances de la construction. Également, qu'est-ce qui arrive dans le cas de grief en vertu de la procédure de grief? Si l'employeur, même si je le représente aujourd'hui - on n'est pas assez fou parfois pour donner un grief au syndicat; ce n'est quand même pas obligé - a un grief levé contre lui et arrive devant l'arbitre, il va être fort tenté de dire: M. l'arbitre, vous n'avez pas juridiction parce que l'employé, le salarié en question n'est couvert par aucune convention collective. Et il aurait raison. Même si les employeurs respectaient le décret et les conditions de travail, s'il y avait un grief à cause d'un problème de congédiement, le salarié ne serait pas couvert.

En conclusion, devant les retards causés par le blocage au CCTMO, il nous faut aller un peu plus haut ou beaucoup plus haut, au ministre du Travail. Voici ce que nous vous demandons. Au mois de septembre 1983, un rapport a été préparé par le secrétaire du CCTMO et je cite quelques extraits de ce rapport. Il disait: "Enfin, le CCTM a complété la première étape de l'étude de la demande conjointe du 31 mars 1983 de l'Association nationale des travailleurs en réfrigération, climatisation et protection incendie, local 3, et de la Corporation des maîtres entrepreneurs en réfrigération du Québec, à l'effet de modifier le paragraphe b) de l'article 1 du règlement. Le présent avis porte sur la recommandation du CCTM à l'égard de cette demande. Il donnait un avis au ministre du Travail. C'est dans le dossier qu'on vous a remis. Un peu plus loin, le CCTMO, dans son rapport, disait ceci: "Les motifs à l'appui de l'assujettissement. Les trois motifs suivants ont amené le CCTM à conclure qu'il y aurait

effectivement lieu de modifier le règlement no 1 afin d'assujettir au champ d'application certains travaux de réfrigération - et il faudrait ajouter "climatisation". Les frigoristes peuvent invoquer des droits acquis. Ce sont les mêmes catégories d'employeurs et de travailleurs qui exécutent des travaux d'installation, de montage, d'entretien et de réparation de systèmes de réfrigération et de climatisation, que ces travaux soient assujettis ou non au règlement no 1. Les frigoristes ne demandent pas que la totalité des travaux relatifs au montage, à l'entretien et à la réparation de ces systèmes soit assujettie au règlement no 1; en fait, ils demandent le rétablissement de la situation qui prévalait avant 1978." Avant 1978 et depuis l'adoption, en 1968, de la loi sur les relations du travail, de même que depuis l'adoption du règlement no 1 en 1971, et jusqu'à ce que l'Office de la construction du Québec fournisse une interprétation contraire, tous les entrepreneurs en réfrigération et tous les salariés à leur emploi étaient convaincus que la définition de l'expression "machinerie de bâtiment" contenue au règlement englobait les systèmes de réfrigération. (16 heures)

Un peu plus loin il disait ceci: "Quand on parle d'une perte de droits acquis, on réfère aux salariés des entrepreneurs en réfrigération qui ne détiennent pas le statut d'employeur professionnel. Avant 1977, ces salariés étaient considérés comme des travailleurs de la construction et bénéficiaient des conditions de travail prévues au décret relatif à l'industrie de la construction. Il apparaîtrait normal et raisonnable de leur donner de nouveau ce statut de travailleurs de la construction." Cela était unanime. On parlait un peu d'un des inconvénients que cela pourrait causer, la multiplicité des conventions collectives. On disait ceci: "En multipliant ainsi le nombre de conventions collectives, on risquerait de se retrouver dans le secteur de la réfrigération avec des conditions de travail qui pourraient être fort différentes, selon qu'un individu travaille pour tel ou tel entrepreneur. Il semblerait que la très grande majorité des entrepreneurs en réfrigération et que la très grande majorité des travailleurs de la réfrigération ne souhaitent pas voir se développer une telle approche conflictuelle."

La Présidente (Mme Harel): En conclusion, M. Rivard.

M. Rivard (Jean-Paul): En conclusion nous demandons au ministre - il a peut-être le temps de le faire au Conseil des ministres d'aujourd'hui s'il a lieu - d'adopter la recommandation qui avait été faite par le CCTMO le 20 septembre 1983 qui donnait un projet de règlement d'un avis à être présenté dans la Gazette officielle par le ministre du Travail que vous avez d'ailleurs dans votre dossier.

Je terminé sur ce et je passe la parole à M. Michel Rivard.

La Présidente (Mme Harel): M. Michel Rivard, très rapidement, très brièvement.

M. Rivard (Michel): Mme la Présidente, M. le ministre, messieurs, j'abonde en tout point avec les énoncés de Me Rivard. La corporation dont je suis membre regroupe 250 à 300 entrepreneurs et c'est un voeu unanime. Nous voulons revenir à la situation antérieure au 30 juin 1978. Présentement, dans notre métier, c'est l'anarchie. Des compagnies respectent le décret de la construction, d'autres en profitent pour avoir des taux inférieurs. Je pense également que pour la sécurité des citoyens, on se doit d'avoir des employés qualifiés et seuls les employés qualifiés, à mon sens, sont assujettis présentement au décret de la construction et on va se ramasser avec des gens incompétents qui vont être formés pour faire une piastre, comme on dit, pour certains entrepreneurs.

Je voudrais seulement citer un exemple. S'il y a dans la salle ici un système de 10 tonnes de climatisation, il sera, bien sûr, installé par un employé qualifié. Avec la conclusion de M. Bernier, n'importe qui pourrait le réparer. Concernant la sécurité il y a donc autant de risques pour l'installation et il y a encore plus de risques pour la réparation. À partir de ce raisonnement, nous vous supplions de nous ramener à la situation antérieure au 30 juin 1978.

La Présidente (Mme Harel): M. le ministre.

M. Fréchette: Mme la Présidente, très rapidement. Comme M. Rivard, je suis heureux de constater ce précédent finalement. Je ne sais pas si cela s'est déjà présenté mais dans cette commission-ci en tout cas, c'est un précédent de voir patrons et travailleurs à la même table pour présenter des revendications. Vous savez qu'en droit britannique, M. Rivard, le précédent a presque force de loi. Dans ces conditions-là, j'espère bien que c'est le commencement d'une longue série de rencontres de même nature dans d'autres secteurs qui se produiront à partir, encore une fois, du précédent que vous venez de créer.

Quelques renseignements seulement sur le dossier que vous nous soumettez parce que, effectivement, il est là depuis tellement longtemps que son contenu, ses tenants et aboutissants sont connus. J'apprécierais obtenir la précision suivante: Comment s'est

faite l'exclusion en 1978? Est-ce une décision du commissaire, est-ce un avis d'un organisme? Enfin! comment s'est faite cette exclusion?

M. Rivard (Michel); C'est une plainte qui a été déposée par le syndicat auprès de Laval réfrigération, une compagnie qui n'existe plus aujourd'hui. Cela a été traité à l'OCQ et M. Bernier a donné raison à cette compagnie à savoir qu'elle pouvait employer n'importe qui pour l'installation. L'anarchie a donc commencé à cette date.

M. Fréchette: C'est le commissaire?

M. Rivard (Michel): Le commissaire, M. Évariste Bernier.

M. Fréchette: Bon. Juste une autre précision. Vous nous informez, M. Rivard, que le CCTM, le 29 septembre, a émis et écrit un avis quant à la position qu'il prenait dans ce dossier. Je voudrais simplement vous demander ceci: Est-ce que vous êtes certain que l'avis a été envoyé au ministre du Travail?

M. Rivard (Jean-Paul): L'avis n'a pas été envoyé au ministre du Travail parce qu'il y a eu après cela une demande d'enquête quant à l'autre réunion du CCTM, le rapport du secrétaire avait été présenté. C'est là que la demande d'enquête a été soulevée. Je crois que c'est ce qui s'est passé.

M. Fréchette: De sorte que dans l'état actuel des choses, le CCTM n'est pas encore dessaisie du dossier, si vous me passez l'expression. Enfin, je comprends très bien les inconvénients et la réaction de votre collègue. Je comprends cela. Mais, factuellement parlant, c'est un peu équipé comme cela.

M. Rivard (Jean-Paul): J'ai oublié une dimension assez importante de l'affaire. C'est que dernièrement, le 14 juin, le CCTM, quand le sujet est revenu, a décidé de mettre cela de côté parce que les patrons hors construction s'opposaient maintenant à ce qu'ils avaient accepté avant sous prétexte que cela pourrait amener d'autres secteurs à demander aussi d'assujettir l'entretien et la réparation, notamment la machinerie de production. C'est une belle excuse là pour nous refuser ce qu'ils nous avaient donné et empêcher la syndicalisation des travailleurs.

M. Fréchette: Cela peut permettre de répondre à l'autre question que je voudrais vous poser, que je pourrais savoir autrement, mais peut-être le savez-vous. Est-ce que pour autant que le conseil consultatif est concerné, il a terminé le dossier quant à lui?

M. Rivard (Jean-Paul): Je ne sais pas si le conseil consultatif pense cela, mais si les patrons s'opposent, il n'y aura pas unanimité et ils se sont opposés. Je ne vois pas pourquoi ils changeraient d'avis la semaine prochaine. Je voudrais aussi... Pour encourager M. le ministre au niveau des relations dans la construction, l'AECQ m'a autorisé à dire qu'ils étaient d'accord avec notre position d'aujourd'hui.

M. Fréchette: Écoutez, c'est évident que pour autant que le ministère du Travail est concerné, il va nous falloir savoir très précisément à quelle étape on en est au conseil consultatif. Il est également évident qu'une décision va devoir être rendue dans les meilleurs délais. Comme vous le disiez, cela ne prend pas une loi. Une décision gouvernementale est suffisante. Si votre requête est maintenue, une décision gouvernementale est suffisante. C'est le genre de problème qui a besoin d'être réglé à très court terme. Nous allons prendre les dispositions pour clarifier l'ensemble de la situation et vous donner une réponse.

M. Rivard (Jean-Paul): Exactement. Dans le mémoire de la FTQ, dans les demandes de la FTQ-Construction comme telle pour les amendements à la loi, nous prenons des extraits du règlement no 1, nous les transposons dans la loi. Si vous acceptiez de modifier le règlement, il va de soi donc que cette modification à la loi viendrait automatiquement pour l'inclure dans le champ d'application de l'article 19.

La Présidente (Mme Harel): M. Michel Rivard, une dernière intervention.

M. Rivard (Michel): C'est ma dernière intervention. Je voulais seulement faire remarquer à M. Rivard, mon collègue de gauche, que le fait historique devant lequel nous sommes aujourd'hui qu'on soit d'accord sur un sujet, cela ne veut pas dire que pour les autres clauses du décret de la construction, les frigoristes sont avec le syndicat. Nous sommes membres de l'AECQ et nous respectons les efforts faits par l'AECQ pour que nos gens reviennent au travail.

M. Fréchette: Vous comprenez, M. Rivard, qu'on a fait des blagues.

La Présidente (Mme Harel): II y a le député de Viau qui veut également vous poser une question.

M. Cusano: Merci. J'aimerais remercier nos invités de nous avoir exposé le problème. Après avoir entendu qu'il y a un certain accord chez vous, c'est assurément un bon précédent. Après avoir entendu le ministre

du Travail, on s'aperçoit qu'il se hâte lentement pour régler le problème. Une question, puisque le temps est court, qui s'adresse à M. Rivard: Vous avez quasiment la totalité, je pourrais dire, et la représentativité totale chez vous. Il a été dit que la position était unanime du côté des patrons. Est-ce que votre position est aussi unanime chez les autres syndicats qui sont minoritaires?

M. Rivard (Jean-Paul): II n'y a pas de syndicats minoritaires. Nous représentons 98% des travailleurs de ce secteur. On a le monopole syndical là-dedans. Les quelques autres travailleurs qui existent, il y en a peut-être un ou deux au conseil provincial, un à la CSN, peut-être un à la CSD, pas plus que cela. On n'a pas consulté.

M. Bergeron (Jules): On va préserver... M. Cusano: Pardon?

M. Bergeron: ...les conditions de travail que les salariés ont présentement. On va s'assurer qu'ils vont garder ce qu'ils ont toujours eu.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. Rivard, seulement une courte question. Vous avez parlé tout à l'heure des patrons qui s'opposaient à ce que ce règlement paraisse dans la Gazette officielle et soit entériné par le Conseil des ministres, en fait. Pourriez-vous nous dire si les patrons dont vous parlez sont actuellement représentés au sein du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre?

M. Rivard (Jean-Paul): C'est un M. Dufour du CPQ qui s'y oppose. Je ne sais pas d'où vient...

M. Perron: Du Conseil du patronat?

M. Rivard (Jean-Paul): Oui, oui. Je ne sais pas d'où vient son mandat de s'opposer, mais il s'oppose parce que cela pourrait donner l'exemple aux autres. Pas parce qu'il a une bonne raison, mais cela pourrait donner l'exemple aux autres.

M. Perron: D'accord. Merci.

La Présidente (Mme Harel): Merci, madame, messieurs. Je vais inviter immédiatement l'Union des municipalités du Québec à prendre place et à nous présenter son mémoire. M. Jean Corbeil, maire d'Anjou et président de l'Union des municipalités du Québec, à qui on souhaite la bienvenue. M. Corbeil, vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent?

L'Union des municipalités du Québec

M. Corbeil (Jean): Oui. À ma gauche, M. Marc Laperrière, conseiller juridique de l'Union des municipalités du Québec, et, à ma droite, M. Sylvain Gonthier, qui est chargé du dossier des relations du travail à l'Union des municipalités du Québec.

La Présidente (Mme Harel): M. Corbeil, dans une enveloppe de temps d'une heure, compte tenu de l'échange qu'on peut avoir après la présentation de votre mémoire, vous considérez que c'est réalisable?

M. Corbeil: Je vais sûrement faire l'impossible, puisque je dois être à Montréal à 19 h 30.

Mme la Présidente, M. le ministre, MM. les membres de la commission, dans ce mémoire, l'UMQ tient à réaffirmer la nécessité de maintenir les exclusions prévues à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et touchant l'exécution de certains travaux par des employés municipaux. Il s'agit de travaux de canalisation d'eau et d'égout, pavage et trottoirs et autres travaux du même genre. De plus, nous réitérons les recommandations maintes fois exprimées par les municipalités d'exclure des effets de la loi tous les travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification effectués par des employés municipaux ou par des personnes embauchées par les municipalités dans le cadre de programmes gouvernementaux de création d'emplois.

Les problèmes d'interprétation, de juridiction et d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction ne sont pas des préoccupations nouvelles pour les municipalités. Déjà, en 1970, dans un mémoire présenté à la commission du travail et de la main-d'oeuvre de l'Assemblée nationale, l'Union des municipalités du Québec recommandait d'exclure spécifiquement des effets de la loi tous les travaux de construction, réfection, réparation, démolition et autres travaux accomplis par des employés municipaux.

Au cours de la même année, le gouvernement se rendait à une partie des recommandations de notre organisme et amendait la loi de façon suivante: "La présente loi s'applique aux employeurs et aux salariés de l'industrie de la construction. Toutefois, elle ne s'applique pas aux travaux de construction, de canalisation d'eau, d'égout, de pavage et de trottoirs et à d'autres travaux du même genre exécutés par les salariés des communautés urbaines ou régionales et des corporations municipales."

En 1977 et en 1978, lors de mémoires présentés au gouvernement du Québec et au comité d'étude et de révision de la Loi sur

les relations du travail dans l'industrie de la construction, l'UMQ réitère ses recommandations de 1970.

Les amendements de 1979 acceptent de soustraire à la portée de la loi le gouvernement du Québec et les institutions des réseaux de l'éducation et des affaires sociales. Malgré des demandes identiques et tout à fait justifiables, les municipalités n'obtiennent pas le même traitement.

En 1983, les difficultés entraînées par l'application et l'interprétation de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction dans la mise sur pied de programmes gouvernementaux de création d'emplois amènent l'UMQ à faire part une fois de plus de ses recommandations dans un mémoire présenté au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre sans toutefois obtenir davantage satisfaction. (16 h 15)

La Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction donne aux municipalités un statut ambigu. D'une part, le législateur a reconnu la spécificité du monde municipal en excluant des effets de la loi l'exécution par les employés municipaux des travaux de canalisation, d'égouts, des pavages et des trottoirs et autres travaux du même genre. D'autre part, l'accomplissement de tout autre genre de travaux soumet les municipalités aux dispositions de la loi au même titre que toute personne physique ou morale.

Pourtant, les municipalités sont de véritables gouvernements. Elles offrent des services publics nécessaires à la santé et à la sécurité des citoyens. Leurs administrateurs sont élus démocratiquement et leur financement s'effectue par le biais de la taxation.

Alors que la loi soustrait déjà le gouvernement du Québec et les institutions des réseaux de l'éducation et des affaires sociales, non seulement pour les travaux d'entretien et de réparation, mais aussi pour les travaux de modification et de rénovation, nous ne pouvons comprendre en vertu de quel principe les gouvernements locaux ne bénéficient pas du même traitement. Il y a selon nous une question d'équité à respecter. Les traits distinctifs qui expliquent cette politique d'exception s'appliquent intégralement aux municipalités.

Dans les deux cas, les services rendus sont de nature publique et non privée. Ni le gouvernement du Québec, ni les municipalités ne sont des employeurs professionnels au sens de la loi. Leurs préoccupations premières sont tout à fait étrangères au monde de la construction. Les activités de construction, ou considérées comme telles, sont marginales et connexes à leur vocation. De plus, les deux niveaux de gouvernement ont une gestion à but non lucratif.

Les problèmes d'interprétation et d'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction amènent régulièrement les municipalités et l'OCQ à s'affronter devant les tribunaux. À notre avis, il n'y a aucun avantage pour la collectivité de voir s'affronter des organismes publics à propos de travaux exécutés dans l'intérêt et au profit du public.

En vertu de quel principe les contribuables municipaux devraient-ils assumer, pour des travaux à caractère public, un fardeau plus élevé alors que les mêmes travaux pourraient être menés à bien meilleur compte par les employés municipaux? Il est reconnu que les citoyens sont de plus en plus sensibles au niveau de taxation et s'attendent à obtenir les meilleurs services au meilleur coût possible. Ces attentes sont à notre avis tout à fait légitimes.

Les coûts supplémentaires que les municipalités ont à absorber ne sont pas reliés simplement aux taux horaires, mais également aux frais qu'entraînent les différends entre les municipalités et l'OCQ. Les causes commandent des déboursés substantiels pour préparer la preuve et défrayer les services de témoins et de conseillers juridiques. Les coûts supplémentaires sont forcément, en fin de compte, intégrés au compte de taxes des contribuables.

Il y va de l'intérêt de tous que ce genre de conflits ne se produise plus.

Les relations du travail dans les municipalités se caractérisent par un très fort taux de syndicalisation et une longue tradition de négociation de conventions collectives. En effet, le monde municipal embauche plus de 63 000 personnes dont plus de 90% sont couvertes par environ 600 conventions collectives.

De ces quelque 600 conventions collectives, plus de 50% régissent le groupe des employés manuels, lequel comprend des corps de métier identiques à ceux couverts par le décret de la construction. Exemple: menuisier, électricien, peintre, mécanicien, etc.

D'abord préposé à l'entretien et à la réparation, ce groupe d'employés est également appelé à effectuer un certain nombre de travaux d'aménagement tels que la construction de patinoires et d'abris, l'érection de murs mitoyens ou de cloisons à l'intérieur des bâtiments municipaux, etc.

Force nous est de constater que la législation actuelle, en essayant d'éviter un empiétement sur la juridication de l'industrie de la construction, rend problématique l'affectation de la main-d'oeuvre municipale dans l'exécution quotidienne des travaux énumérés plus haut.

En plus de priver les municipalités de main-d'oeuvre compétente, capable

d'accomplir efficacement et à moindre coût les services auxquels les contribuables ont droit, la loi rend beaucoup plus difficile la gestion des relations du travail.

Les employés municipaux sont régis par conventions collectives et bénéficient de conditions de travail fort avantageuses, tout en ayant l'assurance d'un emploi permanent par le biais de la sécurité d'emploi. Malgré un salaire plus élevé, les travailleurs de la construction sont sans cesse menacés par le chômage et ont souvent à se déplacer en quête d'un emploi. Selon les renseignements disponibles, les travailleurs de la construction ont travaillé en moyenne 27 semaines en 1982. L'application restrictive de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, en plus d'entraîner des mises à pied, amènera beaucoup de tracasseries administratives dans la gestion des conventions collectives, entre autres au niveau des clauses de sous-traitance. Plusieurs conflits de travail pourraient éclater dans les municipalités par les simples effets de la loi. De plus, les employés municipaux que les municipalités devront mettre à pied auront beaucoup de difficulté à se retrouver un emploi conforme à leurs compétences puisqu'ils ne possèdent par la carte de compétence requise par l'OCQ.

Il est tout à fait inacceptable que la loi ne prenne pas en considération le contexte particulier des relations du travail dans les municipalités. Les règlements négociés entre les municipalités et leurs associations de salariés tiennent compte de l'ensemble des facteurs qui définissent l'unité d'accréditation, tout comme le décret de la construction tient compte du contexte particulier du marché du travail dans l'industrie de la construction. Notre secteur se distingue par la garantie d'un emploi stable et la nature des services rendus aux contribuables, payeurs de taxes. Les travailleurs de la construction, quant à eux, sont soumis aux aléas des cycles économiques et saisonniers.

Nous avons donc deux réalités distinctes. Pourquoi venir imposer artificiellement aux municipalités un régime de relations du travail négocié dans un tout autre contexte?

Le gouvernement provincial a développé des politiques de sauvegarde du patrimoine, de réhabilitation d'édifices scolaires, de mise en place de centres culturels et communautaires. On se plaît à répéter, avec raison, que les municipalités ont un rôle à jouer dans ce domaine.

Afin de rendre ces édifices utilisables, en vertu de leurs nouvelles vocations, les municipalités sont souvent obligées de faire effectuer des rénovations et des modifications. Cependant, les litiges avec l'OCQ que peut entraîner l'exécution de ces travaux par les employés municipaux ou encore les coûts prohibitifs qu'entraîne l'embauche de travailleurs de la construction, amènent souvent les municipalités à retarder ou tout simplement annuler ces projets.

Il en est de même pour les programmes de création d'emplois mis sur pied par les gouvernements provincial et fédéral pour pallier le chômage. Malgré la bonne volonté des municipalités et de leurs syndicats qui s'entendent facilement sur la mise sur pied de tels programmes dans les municipalités, les commissaires de la construction ont souvent émis l'opinion que les projets sont soumis au décret de la construction. Par conséquent, les travailleurs sont soumis aux exigences et au régime de relations du travail prévus par le décret.

Cette interprétation amène les municipalités à refuser de mettre à profit des programmes qui pourraient réduire le chômage dans leur milieu, mais qui grèveraient indûment les finances de la municipalité.

En guise de conclusion, nous voulons réitérer que la demande d'exclusion qui est formulée par le monde municipal s'appuie sur le caractère public de l'institution municipale. Nous croyons que les gouvernements municipaux devraient être pleinement reconnus comme tels pour les fins de l'application de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

À cette fin, nous recommandons au ministre, premièrement, que les corporations municipales, les communautés urbaines et régionales et les municipalités régionales de comté ne soient pas assujetties à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction eu égard aux travaux exécutés par les salariés à leur emploi; deuxièmement, que les corporations municipales, les communautés urbaines et régionales et les municipalités régionales de comté ne soient pas assujetties à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction eu égard aux travaux exécutés par les personnes embauchées dans le cadre de programmes de création d'emplois mis sur pied par les gouvernements fédéral, provincial et municipaux dans le but de pallier le chômage.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Corbeil. La parole est au ministre du Travail.

M. Fréchette: Mme la Présidente, je voudrais remercier M. Corbeil, le président de l'Union des municipalités du Québec, de même que ceux qui l'accompagnent, pour la présentation de ce mémoire. Encore une fois, l'organisme fait preuve de son intérêt dans toutes les discussions qui touchent, d'une façon ou d'une autre, les populations que les maires et les conseils municipaux gouvernent.

De toute évidence, M. Corbeil, votre

mémoire est axé strictement et exclusivement aussi sur la question du champ d'application de la loi. Vous avez fait référence à votre "comparution" - entre guillemets - devant le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre où vous aviez été essentiellement soumettre la même argumentation et vous n'avez pas eu, nous dites-vous, jusqu'à maintenant, de réponse à la requête que vous aviez déposée. Est-ce qu'il serait exact de dire, M. Corbeil, qu'au moment où cette rencontre s'est faite certains renseignements factuels et précis vous avaient été demandés par les membres du conseil consultatif, par exemple, quant au volume de travaux, les travaux qui n'ont pas ou qui n'auraient pas été faits à cause du phénomène dont on parle? À remarquer que je vous donne cela sous toutes réserves, mais je pense que vous étiez là et vous êtes sans doute le mieux placé de nous tous ici pour répondre à cette question.

M. Corbeil: C'est une question fort intéressante, M. le ministre. Mais je pense que c'est comme si on demandait à un homme castré combien il aurait eu d'enfants s'il n'avait pas été castré. Nous avons fait des démarches et il est bien évident qu'il n'existe nulle part des statistiques pour dire que, si cette loi n'avait pas existé, j'aurais fait tels ou tels travaux. Alors, c'est...

M. Fréchette: Je ne suis pas en train de porter un jugement sur la nature de la question, mais est-ce que le renseignement que vous nous donnez aujourd'hui, vous l'avez transmis au conseil consultatif?

M. Corbeil: Non.

M. Fréchette: Non? Avec l'exemple qui vous plaira, remarquez.

M. Corbeil: D'accord.

M. Fréchette: II y aurait sans doute un intérêt très évident à avoir une très longue discussion sur le sujet, mais je vous signale que nous avons entendu les deux thèses avec des argumentations bien étoffées de part et d'autre. Enfin, je suis d'avis que, même si on prolongeait notre conversation et nos échanges là-dessus, on reviendrait finalement... Le problème est bien circonscrit; il est très clair. C'est à partir de toutes les représentations qui nous ont été faites que le gouvernement va devoir décider. Mais il y a une chose, cependant, quant à votre suggestion plus précise qu'on retrouve à la page 10. Vous suggérez que les corporations municipales, les communautés urbaines et régionales ne soient pas assujetties à la loi. Est-ce que je dois comprendre que votre objectif vise autant les travaux de construction de grande envergure, par exemple, que les travaux de rénovation, de réparation, de démolition ou de toute autre nature?

M. Corbeil: Cela nous satisferait davantage d'englober tout cela, mais on se contenterait très bien d'être inclus au paragraphe huitième de l'article 19 et de se retrouver exactement sur le même pied que le gouvernement lui-même et les commissions scolaires.

M. Fréchette: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, Mme la Présidente. Je veux profiter de l'occasion pour saluer d'une façon toute particulière M. Jean Corbeil, président de l'Union des municipalités, ainsi que MM. Laperrière et Gonthier qui l'accompagnent. J'ai pris connaissance du mémoire de l'Union des municipalités ainsi que de celui de l'Union des municipalités régionales de comté qui nous a été présenté hier et je dois dire, Mme la Présidente, que ce n'est pas parce que j'ai changé de chaise que mes positions antérieures ont changé. Au moment où j'étais maire de Hull et membre de l'Union des municipalités du Québec comme administrateur, nous avions recommandé des positions similaires, positions qui ont été répétées à plusieurs reprises par l'Union des municipalités du Québec face aux problèmes assez percutants que le président, M. Corbeil, a mentionnés tantôt, à savoir qu'il y a eu et qu'il y a encore des causes pendantes entre l'Office de la construction du Québec et les municipalités qui sont coûteuses pour les municipalités et pour les contribuables dans chacune des municipalités où des problèmes sont soulevés.

Les revendications des dernières années se sont fait sentir avec beaucoup plus d'acuité récemment, compte tenu de l'aspect économique, d'une part, et, d'autre part, des programmes que les gouvernements mettaient à la disposition des municipalités dans le but de favoriser la création d'emplois. Il y a un élément fort important qui a été soulevé par M. Corbeil, à savoir que le gouvernement du Québec est soustrait, à toutes fins utiles, de l'application de la loi comme telle, et que ce même gouvernement ne pense pas à donner le même privilège à d'autres gouvernements qui sont probablement plus importants que le gouvernement du Québec, c'est-à-dire aux gouvernements locaux. On sait que, lorsque cela va bien dans l'ensemble des municipalités du Québec, effectivement, le Québec va bien et que c'est l'ensemble des municipalités qui font en sorte, de par leur dynamisme, de favoriser l'essor économique, la relance et on doit leur

donner les outils nécessaires dans le but de favoriser cette relance que nous souhaitons tous. Je voudrais peut-être un commentaire de M. le président de l'Union des municipalités du Québec. (16 h 30)

Comme on le sait, hier, le président de l'Union des municipalités régionales de comté faisait les mêmes revendications, à savoir d'être soustrait aussi, pour les municipalités relevant davantage du Code municipal, de l'application de cette loi et de ces règlements. Par contre, je sais pertinemment que l'Union des municipalités régionales de comté parlait davantage pour les municipalités de moins de 5000 habitants. On sait qu'il y a encore au Québec des municipalités régies en vertu du Code municipal et qui ont un nombre supérieur à 5000 de population. On sait que l'Union des municipalités a comme membres des municipalités qui ont moins de 5000 de population. En tout cas, il y en a sûrement quelques-unes- Les recommandations faites par M. Asselin se limitaient, pour l'ensemble des travaux à être effectués par les municipalités, à des travaux de l'ordre de 250 000 $. Je pense que, tantôt, vous y avez touché un peu. L'Union des municipalités partage-t-elle ces mêmes opinions ou si elle souhaiterait davantage être sur le même pied que le gouvernement du Québec concernant l'exemption, tenant compte de l'ampleur des travaux, dans les municipalités à caractère plus urbain?

M. Corbeil: Oui. Nui doute, M. le député, que nous préférerions être assimilés, comme je le disais tantôt, au gouvernement du Québec et aux commissions scolaires en ce qui concerne le paragraphe 8 de l'article 19. Personnellement, je respecte l'opinion du président de l'UMRCQ, mais je pense que mettre un barème en signe de dollars dans une loi amène des problèmes par la suite puisqu'il y a des phénomènes d'inflation qui entrent en jeu. C'est souvent difficile de changer les lois pour suivre l'inflation. Si on met 250 000 $, est-ce que c'est parce que les travaux coûtent 251 000 $ et sont exclus? On en vient à des problèmes, je pense, par la suite, assez considérables. Je pense que le paragraphe 8 de l'article 19 exclut tout simplement l'application de la loi en ce qui concerne le gouvernement du Québec et les commissions scolaires pour tous travaux d'entretien, de réparation, de rénovation et de modification. Je pense que, si on était inclus dans ce groupe, nous serions tout à fait d'accord.

M. Rocheleau: Je pense qu'il y a un point important que j'aimerais peut-être souligner, Mme la Présidente, et peut-être que le président de l'Union des municipalités du Québec pourrait confirmer. Dans plusieurs municipalités du Québec - des municipalités importantes, entre autres - comme le faisait remarquer le président, où les employés sont couverts à l'intérieur d'une convention collective négociée entre la municipalité et le syndicat représenté, où des travaux doivent se faire, des travaux qui frisent souvent ou qui chevauchent le règlement ou l'application du règlement de l'Office de la construction du Québec, dans le cas où les municipalités font ou feront ces travaux, cela n'enlève aucunement du travail à des syndiqués de la construction, tenant compte du fait que c'est beaucoup plus en fonction de clarifier la réglementation existante actuellement que de se lancer dans de grands projets de construction, étant donné que la majeure partie des municipalités au Québec, pour des travaux d'envergure, procède par soumissions publiques et vont sur le marché du travail pour faire effectuer ces travaux.

M. Corbeil: Je pense qu'on peut faire allusion aux travaux de construction de rues, pavages, trottoirs et ainsi de suite qui sont déjà exclus de l'application de la loi en vertu du paragraphe 3 de l'article 19. Il n'y a pas de municipalités, même les plus grandes qui font elles-mêmes des travaux considérables de construction de rues. Même à la ville de Montréal, qui est la plus grande ville du Québec, quand il y a des travaux majeurs de construction de rues, ainsi de suite, cela va par soumission et est donné à l'entreprise privée. C'est le même cas dans toutes les villes du Québec. Les villes ne profitent pas du paragraphe 3 de l'article 19 pour se créer des entreprises de construction de pavage de rues et de trottoirs. Il n'y a aucun doute et ce n'est dans les intentions d'aucune municipalité du Québec de s'aventurer dans ce domaine. C'est simplement pour éviter, dans un premier temps, des querelles qu'on mentionnait tantôt avec l'OCQ parce que actuellement on peut, en interprétant la loi, intervenir contre les municipalités dans une foule de cas où les municipalités s'aventurent avec la meilleure des bonnes fois.

On parlait tantôt de la construction de patinoires d'hiver. Si quelqu'un veut interpréter strictement la loi, on peut prétendre que ce sont des travaux de construction et amener les municipalités devant les cours à ce sujet.

M. Rocheleau: Cela complète certaines questions, mais je voudrais faire allusion et je me souviens pertinemment, entre autres, que la ville de Hull, dont j'étais maire il y a à peine quelques années, terminait le paiement de certains règlements adoptés durant la grande guerre mondiale et où on avait confié aux municipalités le soin de distribuer des jetons ou des pitons afin de faire travailler les gens qui étaient dans le

besoin et qui pouvaient bénéficier de programmes tout à fait particuliers. On a souventefois répété que la crise que nous venions de traverser était pratiquement aussi grave que la crise qu'on avait traversée antérieurement, et sans les mesures sociales appropriées, les gens et plusieurs de nos citoyens auraient eu davantage de difficultés qu'ils n'en ont eues.

Je pense que, si on a confié pendant si longtemps à nos municipalités des responsabilités très particulières, le ministre devrait prendre en considération les revendications qui ont été faites à plusieurs reprises auprès du ministre des Affaires municipales en commission parlementaire où, à chaque année, on recevait la visite des municipalités qui demandaient certaines modifications à la loi et plus particulièrement à ce qui touchait le monde municipal. Quant à nous, nous offrons toute notre collaboration à l'Union des municipalités et nous sommes totalement en accord avec les revendications que l'union fait. Nous souhaitons que le gouvernement, s'il est réellement responsable et conscient de ses propres responsabilités, corrigera les ambiguïtés qui existent au niveau de la loi actuelle.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le député de Hull. M. le maire Corbeil, vous voulez ajouter quelque chose à votre présentation? Je vous remercie au nom de cette commission et je vous souhaite un bon retour à Montréal. Il y a M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Si on regarde la loi à l'article 19, au paragraphe 2: aux travaux d'entretien et de réparation exécutés par des salariés permanents embauchés directement par un employeur. Cela veut dire que, si vous avez des permanents chez vous parmi vos employés, vous êtes capables de faire des travaux d'entretien et de réparation. Vous avez ce droit actuellement. Pour autant que ce soient vos employés réguliers. L'exception, c'est un employeur autre qu'un employeur professionnel. Vous n'êtes pas des employeurs professionnels. Déjà, vous avez un article là-dessus. Vous n'avez pas l'air à vous en servir de la manière que vous présentez votre mémoire.

M. Corbeil: C'est que la notion entre entretien, réparation et modification est assez vague. La raison: on m'a toujours enseigné que le législateur ne parlait pas pour rien. S'il a jugé à propos, au paragraphe 8, de préciser davantage pour dire que le gouvernement du Québec et les commissions scolaires ne sont pas assujettis en ce qui concerne des travaux d'entretien, de rénovation, de réparation et de modification, c'est parce qu'il y avait là des problèmes spécifiques qui se posaient.

M. Laplante: Parce que vous êtes régis à peu près comme si j'avais une usine et si j'avais besoin de gens pour l'entretien; je parle d'ouvriers permanents que j'engage à l'usine à un salaire que le patron définit. Il n'a pas le droit de construire et il n'a pas le droit de faire de grandes rénovations sans aller chercher des ouvriers à l'extérieur.

M. Corbeil: Exactement, sauf qu'on dit qu'on n'est pas assimilable à des employeurs privés parce que, comme le gouvernement du Québec et comme les commissions scolaires, nous sommes des gens élus, nous représentons une administration publique qui n'a pas un motif de profit dans ses opérations, qui a habituellement une structure bien plus large qu'un employeur qui est limité à un produit quelconque. Nous sommes impliqués dans un très large volet d'activités et notre action, notre mission est plus semblable à celle du gouvernement du Québec et des commissions scolaires qu'à celle d'un employeur privé.

M. Laplante: Ce qui me fait peur là-dedans, M. Corbeil, c'est qu'à un moment donné vous alliez chercher des travailleurs à l'extérieur pour les payer au prix que la ville voudrait les payer.

M. Corbeil: C'est sûr. Comme on le disait dans le mémoire, les villes ont 600 conventions collectives. Il y a à peu près 90%, si ce n'est pas plus, des employés municipaux qui sont syndiqués et ces gens-là reçoivent actuellement en moyenne environ 30% de moins en salaire horaire que l'employé de la construction, sauf que cela est compensé par des avantages sociaux. D'abord, 2080 heures de travail garanties par année, ce qui doit compenser un peu pour l'insécurité qui existe dans le domaine de la construction, des avantages sociaux beaucoup plus avantageux et une sécurité d'emploi absolue.

M. Laplante: Je vais être très direct. Je vais prendre le cas d'Anjou. Vous avez eu l'intelligence - la bonne administration -d'acheter plusieurs millions de pieds carrés de terrain. Supposons qu'à un moment donné la ville, dans un but humanitaire, décide de former elle-même une corporation, construit des logis à prix modique pour les citoyens d'Anjou, que, par ladite corporation, vous décidez d'exécuter vos choses, comme utilité municipale, et que vous engagez des travailleurs de la construction à prix réduit pour construire les 300, 400 ou 500 logements que vous auriez à construire. Si on vous donnait cet élargissement, cela vous donnerait ce droit-là et j'ai peur de cela.

M. Corbeil: D'accord. Supposons que je

vous suis dans cette hypothèse et je dis, à ce moment-là, est-ce qu'il y a des perdants? Si je prends le même ouvrier de la construction qui, actuellement, gagne 17 $ -qui est le salaire moyen du décret de l'ouvrier de la construction - combien d'heures travaille-t-il par année? Je prends le même employé, je lui donne 30% de moins si je négocie à l'intérieur de ma convention collective actuelle - mais je lui donne 2080 heures de travail par année, sécurité d'emploi jusqu'à la fin de ses jours et des avantages sociaux à peu près trois fois ce qu'ils sont dans le domaine de la construction.

Pour le public en général il n'y a pas de perte là-dedans. Il y a au moins le même nombre d'hommes qui vont travailler, et pas à des conditions désavantageuses, et le gagnant sera le public.

M. Laplante: Comme bon administrateur que vous êtes, est-ce que vous allez prendre la chance d'engager 50 ou 75 employés permanents de plus avec une garantie à vie de sécurité d'emploi pour une construction?

M. Corbeil: Je n'aurai pas le choix. Si je les engage comme employés, je vais être tenu par ma convention collective d'accorder à tout employé municipal une sécurité d'emploi absolue.

M. Laplante: II n'y a pas des arénas à tous les ans à faire, mais des logements, oui.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Bourassa, je vais vous demander de conclure.

M. Laplante: Oui, ce ne sera pas long. Une voix: ...

M. Corbeil: C'est justement parce que je n'en aurai pas à chaque année que je ne les engagerai pas. (16 h 45)

M. Laplante: La différence avec le gouvernement, c'est que ce dernier, en vertu de la loi 50, la Loi sur la fonction publique... C'est vrai. Mais le gouvernement, à chaque construction nouvelle, est obligé également d'aller en soumissions publiques en vertu de la loi. En allant en soumissions publiques, il donne le contrat effectivement à l'entreprise privée, sauf que, pour des réparations à faire dans certains édifices, il va engager des employés. Mais il n'engagera pas des employés pour faire des réparations et leur donner un statut de permanent. C'est illogique.

M. Corbeil: Ce sont les bons principes de gestion naturelle, c'est bien certain. Je continue avec l'exemple que vous mentionniez tantôt. Je prévois que la ville va s'impliquer dans une construction de 50 maisons. C'est ce qui explique précisément que, pour les travaux de pavage, d'égout et d'aqueduc, les villes n'y sont pas engagées, parce que c'est temporaire; donc, la très grande majorité de ces travaux, elle les confie à l'entreprise privée. Je dis que les villes vont continuer à le faire dans le domaine de la construction même si elles étaient exemptées au même titre que le gouvernement du Québec et les commissions scolaires, en vertu du paragraphe 8. Ce que l'on cherche à faire, c'est que, pour les travaux normaux de réparation et de modification, on ne se retrouve pas inutilement dans des conflits avec l'OCQ.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le maire.

J'inviterais l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec à prendre place.

M. Corbeil: ...

La Présidente (Mme Harel): Vous avez peut-être une conclusion?

M. Corbeil: Je veux simplement vous remercier de nous avoir entendus.

Le Président (M. Lavigne): À l'ordre, s'il vous plaît:

J'invite donc les représentants de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec à bien vouloir se présenter pour les fins du journal des Débats et à présenter leur mémoire.

ACRGTQ

M. Houle (Fernand): M. le Président, je suis Fernand Houle. Je suis le président de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. À ma droite, M. Serge Poulin, le directeur technique de notre association; également, M. Pierre Roux, le vice-président de notre association. À ma gauche immédiate, M. Carol Wagner, le directeur général de notre association; à mon extrême gauche, Me Marie-Andrée Gauthier, notre conseillère juridique.

Le Président (M. Lavigne): Merci, M. Houle. Si vous voulez maintenant présenter votre mémoire, s'il vous plaît!

M. Houle: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de cette commission, comme nous le savons tous, cette commission se tient dans le contexte de la présente négociation. Nous avions cru au départ que seules les parties directement impliquées dans la présente convention collective seraient invitées à cette table.

Nous avons appris la semaine dernière que les associations patronales qui s'occupaient autrefois des relations du travail étaient également les bienvenues. Nous nous en sommes réjouis. Nous avons aussitôt fait une demande. M. le Président ou M. le ministre a donné son accord. Nous voulons vous en remercier. Cet accord nous a été donné mercredi. Vous comprendrez que notre mémoire sera bref, mais je pense qu'à ce stade-ci de la commission, personne ne nous en fera grief.

L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec incorporée en 1944 regroupe, sur une base volontaire, quelque 600 membres qui oeuvrent dans le domaine des travaux de génie civil dont ils exécutent environ 90% du volume total.

Ces entrepreneurs établis dans le Québec exécutent des contrats pour différents donneurs d'ouvrage publics, parapublics et privés. Notons par exemple qu'au niveau provincial, nos entrepreneurs ont, comme différents donneurs d'ouvrage, Hydro-Québec, le ministère des Transports, la Société d'énergie de la Baie James, le ministère de l'Environnement, la Société québécoise d'assainissement des eaux, la Communauté urbaine de Montréal, celle de Québec, le Bureau de transport métropolitain de Montréal et les municipalités.

Des 12 000 000 000 $ que représente le volume total de tous les travaux de construction qui se font au Québec, environ 4 000 000 000 $ sont consacrés à la réalisation de travaux de génie civil. Notre secteur d'activité représente donc en volume 20% ou 25% de l'ensemble de l'industrie de la construction au Québec. Cela implique des dizaines de milliers de travailleurs directement à l'emploi de la construction de génie civil.

Notons, par ailleurs, que les entrepreneurs de génie civil doivent posséder un parc d'équipement lourd qui peut représenter jusqu'à 20% de leur volume d'affaires annuel.

Notre association, consciente de sa représentativité importante dans l'industrie de la construction, veut porter à votre attention certains points qui la préoccupent.

À la suite des conclusions de la commission Cliche, le législateur a cru bon de reconnaître en vertu de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, un agent patronal unique qui est l'Association des entrepreneurs en construction du Québec.

L'AECQ, en vertu de sa constitution, a le mandat de s'occuper des relations du travail et de représenter les entrepreneurs auprès de différents organismes. À notre avis, la sécurité, la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, le placement des salariés sont, tout autant que les négociations des conditions de travail proprement dites, des notions qui sont incluses dans les mots "relations du travail". Voilà pourquoi l'ACRGTQ considère l'AECQ comme le seul porte-parole officiel habilité à s'occuper de ces quatre mandats.

En effet, l'AECQ est représentative de tous les entrepreneurs en construction en vertu de la loi. Elle possède les ressources humaines et financières propres à mener à bien la gestion de ces quatre dossiers. De plus, les entrepreneurs y trouvent leur compte par une économie de moyens, une absence de duplication d'énergie, une meilleure canalisation de l'information et une plus grande efficacité d'action.

Pour permettre à des associations comme la nôtre de faire connaître son point de vue sur des sujets qui la concernent plus particulièrement, il serait approprié de mettre en place un processus formel de consultation entre ces associations et l'AECQ.

Pour résumer, un seul organisme patronal habilité à parler au nom de tous les entrepreneurs dans toutes les questions relatives à la sécurité, à la formation et à la qualification de la main-d'oeuvre, au placement des salariés, tout autant que pour les négociations, sera à l'avantage de l'industrie de la construction.

Au fil des années, nos membres ont eu et ont encore à vivre des situations de fait et de droit, génératrices de diverses difficultés. Nous aimerions ici vous entretenir plus spécifiquement de ces situations problématiques.

Formation et qualification professionnelles de la main-d'oeuvre. Pour travailler sur un chantier de construction au Québec, un salarié doit détenir un certificat de qualification émis par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Ce certificat atteste du degré de qualification acquis dans un métier. En vertu du système actuel, les cours sont dispensés par un centre de formation professionnelle et les certificats sont émis sans tenir compte des besoins réels et des particularités propres à l'industrie de la construction.

Nous croyons qu'une gestion directe de la formation et de la qualification de la main-d'oeuvre servirait beaucoup mieux les intérêts de l'industrie de la construction. Cette gestion devrait relever des entrepreneurs en construction par le biais de l'AECQ, des organismes syndicaux et du gouvernement. Une telle gestion permettrait une meilleure planification et éviterait des problèmes de pénurie de main-d'oeuvre, comme cela s'est produit pour les soudeurs à haute pression lors du début de la construction du gazoduc.

Placement des salariés. L'une des particularités de l'industrie de la construction au Québec, c'est qu'en plus du certificat de

qualification, le travailleur doit détenir aussi un certificat de classification émis par l'Office de la construction du Québec. Un certificat de classification atteste de la catégorie de son détenteur pour fins d'embauche, de référence et de placement. Nous estimons que ce certificat de classification, dans le contexte actuel, n'a plus sa raison d'être. Son maintien entraîne des complications administratives pour les entrepreneurs et des coûts supplémentaires en vertu de la clause de priorité régionale.

Un travailleur détenant un certificat de classification et résident de la région où s'exécutent les travaux a priorité d'embauche. Si l'employeur épuise la banque des travailleurs classifiés d'une région, il doit engager des travailleurs classifiés d'autres régions et assumer par le fait même des coûts supplémentaires pour le gîte et le couvert, coûts imprévisibles au moment de la soumission.

L'abolition des certificats de classification permettrait à l'entrepreneur de pouvoir engager régionalement du personnel strictement sur le critère du certificat de qualification.

Champ d'application du décret. La Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, à l'article 19, exclut de son champ d'application, pour certains travaux, les salariés des communautés urbaines, des corporations municipales, d'entreprises minières, d'entreprises d'exploitation forestière, d'Hydro-Québec, etc. Comme le décret de la construction est adopté en vertu de la même loi, cela signifie que les salariés de ces donneurs d'ouvrage ne sont pas soumis aux mêmes conditions de travail que les salariés des entrepreneurs.

La situation est acceptable lorsque ces donneurs d'ouvrage exécutent en régie des travaux routiniers d'entretien ou des travaux urgents de réparations. Elle est cependant inacceptable lorsqu'il s'agit de constructions neuves, de réparations majeures, d'additions importantes, etc.

Nous croyons que cette exclusion permet à ces donneurs d'ouvrage de ne pas respecter la définition du mot "construction" apparaissant dans la loi. De plus, elle crée une situation inéquitable pour les entrepreneurs lorsque mis en compétition avec ces mêmes donneurs d'ouvrage pour l'exécution des travaux, comme cela s'est passé à quelques occasions où des municipalités soumissionnaient elles-mêmes sur les appels d'offres qu'elles lançaient aux entrepreneurs.

M. le ministre, on vous a parlé hier du Centre hospitalier de l'Université de Sherbrooke pour certains travaux de construction. Malheureusement, la ville de Sherbrooke a cette mauvaise habitude d'exécuter elle-même des travaux. La ville de Coaticook aussi n'est pas très loin, mais celle qui a le championnat dans ce domaine, c'est la ville de Hull...

M. Rocheleau: On est bon.

M. Houle: ...qui exécute, bon an mal an, une moyenne de 2 000 000 $ de travaux de construction elle-même, même après que des soumissions sont demandées.

M. Pagé: Je ne pensais pas que cela sortirait.

M. Houle: Je continue. De plus, cette exclusion restreint indûment le volume des travaux disponibles pour les entrepreneurs. Enfin, même s'il est difficile de le faire admettre par les donneurs d'ouvrage, les projets de construction confiés aux entrepreneurs privés coûtent beaucoup moins cher que ceux exécutés en régie par les donneurs d'ouvrage.

Autre exemple dans ce domaine: HydroQuébec vient de décider d'un investissement de 400 000 000 $ pour l'amélioration des réseaux de distribution. Nous ne pouvons certes pas être contre un tel investissement fait dans le cadre de la relance. Nous pouvons, cependant, déplorer le fait qu'Hydro-Québec exécutera elle-même plus de la moitié de ces travaux, privant ainsi les entrepreneurs de travaux qui leur seraient normalement dévolus.

Nous estimons que cette commission devrait se pencher d'une façon toute particulière sur les inéquités engendrées par le statut particulier accordé à certains organismes dans la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

Le camionneur artisan. En vertu de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, le camionneur artisan est un travailleur autonome et est assimilé à un entrepreneur. Il doit détenir un permis de la régie.

Cependant, en matière de santé et de sécurité du travail, le camionneur artisan est assimilé à un employé de l'entreprise. L'entrepreneur doit donc payer les cotisations à la CSST pour ce camionneur artisan et se trouve pénalisé, advenant un accident, à son dossier de mérite-démérite, même s'il n'y a aucun lien de subordination entre lui et le camionneur artisan.

Nous considérons que le statut du camionneur artisan en ce qui concerne la santé et la sécurité du travail est identique à celui prévu dans la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

Nous en sommes à la conclusion. Nous n'avons sûrement pas abusé du temps précieux de cette commission jusqu'ici. Permettez-nous, en terminant, de rappeler quelques points importants pour notre association. (17 heures)

Premièrement, les coûts de la construction sont trop élevés, de sorte que tout le monde - vous avez pu le constater -essaie de sortir de son champ d'application. En conséquence, le volume des travaux diminue. La solution, selon nous, réside donc dans une baisse et un contrôle des coûts de la main-d'oeuvre.

Deuxièmement, les certificats de classification n'ont plus leur raison d'être. Il faut les supprimer et contrôler plutôt la main-d'oeuvre par les certificats de qualification qu'on appelle aussi la carte de compétence.

Troisièmement, les bureaux de placement syndicaux doivent être supprimés et les entrepreneurs devraient fonctionner avec le bureau de référence de l'OCQ. La priorité régionale doit également disparaître et on doit favoriser plutôt la mobilité de la main-d'oeuvre.

Quatrièmement, il est primordial de réviser toute la législation et la réglementation existantes qui étouffent l'entreprise et viser à une simplification, sinon à une déréglementation.

Notre industrie en est une qui fluctue selon les saisons, les taux d'intérêt et les cycles économiques. Il faut être prudent et se garder d'avant-gardisme inconsidéré et quantifier les coûts avant de mettre en application toute nouvelle réglementation. Ainsi, par exemple, le revenu garanti nous apparaît être une utopie. Toute législation de ce genre est responsable d'une hausse abusive des coûts de l'industrie dont le contribuable fait toujours les frais en fin de compte.

De plus, il faudrait désétatiser les relations du travail dans l'industrie de la construction. Le cadre actuel donne à la partie syndicale la certitude que le législateur lui donnera davantage que le patron.

Nous souhaitons, enfin, un système basé sur la concertation et la collaboration et non sur la confrontation perpétuelle. Nous vous remercions de votre attention.

Le Président (M. Lavigne): Je vous remercie beaucoup, M. Houle, de la brièveté avec laquelle vous avez passé à travers votre mémoire. J'inviterais donc maintenant le ministre à commenter.

M. Fréchette: Oui, M. le Président. Je vais tenter de suivre l'exemple qu'on vient de nous donner et d'être très bref sans, cependant, omettre de vous signaler, M. Houle, qu'effectivement je ne pense pas que personne vous fasse grief de la brièveté de votre mémoire, d'autant plus qu'il est à ce point clair que le message ou les revendications que vous voulez nous soumettre sont vite compris. Je m'en tiendrai, quant à moi, à une ou deux questions qui touchent les conclusions de votre mémoire et qu'on retrouve à la page 12. Je vais prendre, par exemple, la première de vos recommandations ou de vos observations: "Les coûts de la construction sont trop élevés, de sorte que tout le monde essaie de sortir de son champ d'application. En conséquence, le volume des travaux diminue. La solution réside donc dans une baisse et un contrôle des coûts." C'est le texte que j'ai devant moi, mais j'ai cru comprendre que, dans votre présentation verbale, vous avez ajouté "de la main-d'oeuvre".

M. Houle: De la main-d'oeuvre, c'est évident. Nous avons peut-être procédé rapidement à la rédaction du mémoire. Moi, j'ai une copie corrigée. Malheureusement, je vois que tout le monde n'a pas la même copie.

M. Fréchette: Bon! Je ne suis pas en train, non plus, de vous faire grief de cette situation, sauf que cela m'autorise à essayer d'obtenir certains renseignements de votre part. Votre opinion à cet égard est partagée par plusieurs associations que nous avons entendues. Vous allez, par ailleurs, comprendre qu'elle est aussi sérieusement contredite par d'autres. Vous qui êtes des entrepreneurs ou des employeurs et qui travaillez, par exemple, avec de la machinerie lourde, vous est-il possible de nous donner un aperçu de l'échelle ou de la courbe de l'augmentation des coûts de la construction, en général? C'est sûr que la main-d'oeuvre a augmenté. Elle a augmenté dans une proportion que l'on connaît, dont on a parlé ici avec abondance depuis trois jours, mais, par exemple, les équipements dont vous vous servez, la machinerie lourde que vous utilisez quotidiennement dans l'exécution de vos travaux, dans quelle proportion, depuis dix ans, ont-ils augmenté quant à leur coût d'achat pour commencer, bien sûr, et d'entretien par la suite?

M. Houle: M. le ministre, j'ai restreint les coûts à la main-d'oeuvre - je pense que c'est évident, parce qu'on parle des relations du travail, c'est dans le contexte des relations du travail - mais je peux vous assurer d'une chose, c'est que les coûts de la machinerie n'ont pas augmenté. Ils diminuent. Je peux vous dire que, depuis au moins cinq ans, vous êtes en mesure de constater que les compagnies distributrices d'équipement font faillite, elles ferment régulièrement. Ce qui se vend actuellement et ce qui s'achète par nos entreprises, c'est de l'équipement usagé qu'on retrouve, disons, à bon marché. De l'équipement neuf, il y en a très peu. D'abord, parmi les gros donneurs d'ouvrage, vous aviez la Société d'énergie de la Baie James, mais on sait qu'actuellement c'est

pratiquement arrêté; les autres travaux, vous avez au provincial les travaux d'assainissement des eaux qui commencent, qui requièrent des excavatrices. Il y en a beaucoup sur le marché. Très peu ont à acheter de l'équipement neuf.

Maintenant, je suis conscient que, s'il y avait un programme considérable d'investissement dans l'équipement et qu'il fallait aller acheter de l'équipement, disons, qui vient des États-Unis ou de l'extérieur, les prix, surtout avec la déflation du dollar canadien, seraient considérables. Je pense qu'actuellement nous n'en sommes pas rendus à cette hausse qui pourrait, un jour ou l'autre, se greffer sur les coûts de construction. Dans le contexte actuel, nous procédons tous par soumissions publiques. Les coûts de la machinerie ou de l'équipement sont réduits au minimum pour essayer d'obtenir les contrats. Le seul point qui, en fin de compte, ne fait pas l'objet de soumissions, c'est celui des salaires qu'on doit prendre. On ne peut pas aller négocier un salaire, disons, avec les salariés, leur demander: Peux-tu travailler à 8 $, à 10 $? Alors, il faut prendre le taux du décret. Je pense que c'est normal, à un certain point de vue. C'est pour cela qu'on dit que les salaires sont trop élevés, parce que ce qu'il faut bien comprendre - vous l'avez vu tout à l'heure - c'est que tout le monde essaie de sortir du champ d'application, que ce soient les municipalités, que ce soient d'autres personnes. Pourquoi? Parce qu'on nous dit que les salaires sont trop élevés. Je pense que c'est le cas.

Le problème qui se pose ici au Québec, on est le seul en Amérique du Nord, c'est qu'on compare toujours un salaire qui se paie soit en Colombie britannique, en Ontario ou bien aux États-Unis avec celui qu'on a établi. Ici, on a un secteur de la construction. Les taux, ce sont des taux syndiqués pour l'ensemble des salariés, pour les 100 000 salariés. Vous allez en Colombie britannique, en Ontario ou au États-Unis, vous allez peut-être en avoir 30% ou 40% qui sont syndiqués. Supposons qu'on dise ici: 50-50 syndiqués et d'autres non syndiqués. Si le non-syndiqué travaille à 10 $ l'heure et l'autre travaille à 20 $ l'heure, cela fait 15 $ tous frais compris, alors qu'actuellement on paie dans la construction 21 $ et plus. Je pense que c'est le point fondamental et, si on ne l'accepte pas, le problème persistera. Même le syndicat doit en être conscient; autrement, il va perdre son volume de travail, il va perdre ses emplois. Tout cela est relié - on pourra en parler plus loin aussi - au placement. Il les perd, les gens s'en vont. Un type qui est qualifié, qui perd sa classification, il faut qu'il travaille.

Je pense que c'est un problème, d'abord, le salaire, qui est très important. Si on veut prendre une moyenne et établir une comparaison avec quiconque en Amérique du Nord, il faudrait prendre la même échelle de comparaison. Si on donne à 100% de nos salariés un salaire, disons, de 20 $ alors qu'ailleurs on donne à une partie, peut-être à 10% de la population, 20 $ et qu'aux autres 90% on donne la possibilité de travailler de 8 $ à 15 $, on change complètement le marché. Je ne sais pas si on a les moyens, nous au Québec, de faire cela si on est plus riches que tout le monde. Je n'ai rien contre le fait que les 100 000 salariés puissent tous gagner 20 $ l'heure; ce serait parfait si ce n'était pas rêver.

M. Fréchette: M. Houle, je prends...

M. Houle: Cela dépend du volume de construction qui est donné.

M. Fréchette: ...acte de vos informations, de vos renseignements. Je ne suis pas en train de remettre en cause ou de contester ce que vous me dites. Je vous signale que cela m'étonne un peu, le renseignement que vous me donnez quant au prix des équipements. Mais je prends votre parole, vous êtes un expert dans ce domaine.

Dans cette même foulée des coûts de la construction, est-ce que vos observations sont les mêmes...

M. Houle: M. le ministre, je m'excuse. Je voudrais apporter une précision. Je voudrais, quand même, être clair. C'est entendu que, si j'ai acheté une pièce d'équipement il y a cinq ans, qui coûtait 150 000 $, si je vais l'acheter aujourd'hui, elle en coûtera 300 000 $. Je pense que...

M. Pagé: Écoutez le reste.

M. Houle: ...c'est évident. Mais ce que je veux vous dire, c'est qu'actuellement de l'équipement neuf, il ne s'en vend pas beaucoup et il ne s'en achète pas beaucoup. Le jour où le travail reprendra, on aura besoin d'équipement neuf. Je pense que ce n'est pas pour cette année ni pour l'année prochaine.

M. Fréchette: Alors...

M. Houle: On peut s'attendre à payer une note supplémentaire pour l'achat d'équipement neuf.

M. Fréchette: Je vous remercie de cette précision.

Quelle est votre appréciation, toujours quant à l'augmentation des coûts des matériaux utilisés dans votre secteur d'activités? Je pense, par exemple, à la pierre d'asphalte, je pense au béton, enfin, à tous les autres matériaux utilisés par vos

membres.

M. Houle: Quand il y a des années de dépression, vous savez comme moi que les prix baissent. Actuellement, on n'est pas à la hausse. Alors, que ce soit la pierre, le sable, les autres matériaux, vous savez que cela baisse. Il y en a un, cependant, qui est à la hausse, c'est le bitume; tout le monde le sait. Vous savez ce que les Arabes ont fait. Le prix est à la hausse; alors, on n'a pas le choix. C'est le seul produit, à mon point de vue, qui est à la hausse, et considérablement.

Sûrement que tous les autres matériaux sont légèrement à la hausse, parce qu'il faut suivre chaque année l'augmentation des salaires. Je pense que c'est normal. On ne peut pas dire que des coûts restent stables continuellement.

M. Fréchette: Cela va pour ce chapitre. Je voudrais une dernière précision. Ce n'est pas une question. Je pense que, par un oui ou un non, je vais être définitivement fixé. J'ai très clairement compris que votre association favorise l'abolition pure et simple du règlement de placement dans sa forme actuelle.

M. Houle: M. le ministre, je pense que je n'ai peut-être pas été assez clair...

M. Fréchette: Non, non, vous avez été clair. Je voulais simplement...

M. Houle: Non. Je m'excuse si on vous a donné cette impression, mais on ne prône pas l'abolition du bureau de placement, pas du tout.

M. Fréchette: Du règlement de placement.

M. Houle: D'une partie du règlement de placement.

M. Pagé: Le contingentement.

M. Houle: Concernant le bureau de placement, c'est sûr que l'abolition du bureau de placement syndical est une recommandation de la commission Cliche. Cela ne veut pas dire que cela ne prend pas de bureau de placement. Hier, un patron a demandé pourquoi les patrons n'auraient pas leur bureau de placement; les syndicats voudraient avoir leur bureau de placement. Mais le problème a été étudié. La commission Cliche a recommandé un bureau de placement centralisé qui est à l'office, et nous vivons avec cela. Dans le texte, je pense que c'est ce que j'ai dit: Nous serions d'accord pour vivre avec ce bureau de placement qui serait un bureau de référence où les trois parties, que ce soit les patrons, les syndiqués, le gouvernement, pourraient contrôler l'organisation de l'Office de la construction du Québec, comme d'autres organismes reliés à la construction mais à condition que les pouvoirs soient réellement donnés aux composantes de cet organisme. Nous ne prônons pas l'abolition du bureau de placement. Ce que nous avons prôné, par exemple, c'est la disparition du certificat de classification.

M. Fréchette: Oui, vous réclamez l'abolition ou la disparition du certificat de classification, de même que de la priorité régionale.

M. Houle: La priorité régionale...

M. Fréchette: La priorité régionale d'embauche.

M. Houle: On trouve que la priorité régionale d'embauche, c'est superflu; cela ne rime à rien. Un employeur va en soumissions publiques; il faut que ses coûts soient les plus bas possible s'il veut obtenir le contrat. Si je vais travailler à Sept-Îles, si je soumissionne à Sept-Îles, qu'est-ce que je vais faire? Je vais chercher à employer le plus possible la main-d'oeuvre régionale. Je ne suis pas intéressé à payer le transport et la pension même au plus petit nombre de mes propres hommes où est mon bureau d'affaires. Il s'agit d'engager le plus possible dans la région. (17 h 15)

On va même plus loin; on veut cela non seulement pour celui qui a une classification À , avec 2000 heures - c'était trop, 1500 heures et 1000 heures; même aujourd'hui, s'il ne les a pas, on lui donne un certificat - mais pour le gars qui a sa qualification. On le prendrait, même s'il n'avait pas le nombre d'heures voulu. Nous autres, on veut faire disparaître la classification et miser uniquement sur la compétence. Alors, d'une façon absolue, on favorise l'emploi régional.

Personnellement, j'ai un contrat à Bécancour, Pechiney. Sur 100 personnes sur le chantier, de Québec, j'ai un ingénieur. Même j'amène habituellement le surintendant sur les chantiers; on en a trouvé un excellent sur place. On l'a engagé. Si j'avais le mien là-bas, je lui paierais du transport, une pension. Tous les entrepreneurs font cela. Je pense que c'est le bon sens. Même pour le salarié, la certification et la priorité régionale, je pense que cela joue contre lui. À mon point de vue, cela joue contre lui. Pourquoi ne pas plutôt lui faciliter la mobilité d'emploi? Pourquoi vouloir le garder dans sa région, alors qu'on sait qu'il n'y a pas un volume de travail réparti uniformément dans toute la province? Pourquoi lui mettre des obstacles à aller

chercher ses heures dans la région voisine ou dans une région plus éloignée? Nous pensons que, pour favoriser l'emploi dans la construction qui n'est pas illimité, on devrait faire disparaître la classification.

M. Fréchette: Merci, M. Houle. J'ai complété.

Le Président (M. Lavigne): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. Houle. MM. les membres et les représentants de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, je tiens à vous exprimer toute la satisfaction que notre groupe a de vous rencontrer aujourd'hui et d'avoir l'occasion d'échanger pendant quelques minutes. Votre association et ses membres est un donneur d'ouvrage important au Québec. Le premier souhait que je formulerai sera que, dans les plus brefs délais, le niveau de dépenses du gouvernement du Québec au chapitre du ministère des Transports et de l'Approvisionnement, plus particulièrement en ce qui vous touche, redevienne ce qu'il était il y a quelques années parce que vous avez eu certainement à subir une baisse sensible dans votre industrie compte tenu des montants, même des montants bruts, qui ont non seulement suivi l'inflation, mais qui sont diminués par rapport aux montants bruts il y a quelques années.

Votre mémoire est intéressant. Il est clair. Vous dites ce que vous pensez. Vous le dites franchement et ouvertement, d'une façon très brève, mais clairement exprimée. J'aurais une première question qui porte sur la formation. Vous avez évoqué toute la question de la formation de la main-d'oeuvre. Depuis que je suis en politique, j'ai été à même de constater qu'on avait, comme société, plusieurs problèmes à cet égard. Vous faites référence à la possibilité de participer - c'est tout à fait légitime - à la gestion de la formation et de la qualification de la main-d'oeuvre qui vous préoccupera éventuellement. J'aimerais que vous m'indiquiez si vous êtes d'accord avec la proposition qui a été préalablement formulée, hier je crois. Cela a été évoqué par l'AECQ; cela a été repris par le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction; cela a été repris par la FTQ-Construction aussi, cette possibilité que la formation de la main-d'oeuvre, qui est actuellement sous la juridiction du milieu scolaire, redevienne une formation professionnelle spécifique au monde de la construction sous une structure tripartite où la partie patronale, la partie syndicale et le gouvernement seraient représentés pour l'établissement des programmes de formation pour mieux adapter ces programmes et cette formation aux modifications technologiques, aux besoins de l'industrie, etc. J'aimerais savoir, dans un premier temps, si c'est cela que vous voulez dire. J'aimerais aussi avoir votre commentaire ou votre appréciation sur le genre de contrôle de la qualification.

Vous savez, il faut être député pour voir régulièrement les problèmes qu'ont les travailleurs de la construction, les apprentis, lorsqu'ils terminent leur apprentissage et qu'ils vont passer un examen de qualification au ministère, plus particulièrement dans le cas de travaux comme ceux dont vous faites. Je me rappelle très bien les travailleurs qui étaient habitués à travailler sur ce qu'on appelle des "graders", qui devaient passer des examens sur des machines à asphalte, etc. Ils avaient un paquet de problèmes: refus aux examens, requête pour attestation d'expérience. J'en suis venu à la conclusion que ces examens-là n'étaient pas toujours collés au métier vers lequel se dirigeait le travailleur en question et c'est pourquoi j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.

M. Houle: Si on commence par la dernière question, le contrôle de l'apprentissage, je pense que le problème premier, c'est la fameuse carte de classification qui bloque l'apprenti. Il aurait beau avoir son certificat d'apprentissage, s'il n'a pas les heures travaillées, il ne pourra pas entrer sur les chantiers de construction. Si on enlevait la classification - le compagnon est qualifié, il a sa carte de compétence et l'apprenti est également qualifié, il a son carnet d'apprentissage - je pense qu'à ce niveau-là le problème serait réglé.

C'est entendu que l'organisme tripartite qui serait formé concernant la formation établirait les programmes de formation, de quelle façon les cours seraient donnés et également le contrôle de cette formation-là. Si ce n'est pas adapté aux besoins de la construction, ils feront des modifications. Actuellement, c'est beaucoup plus difficile de le faire, car ce ne sont pas les parties impliquées directement au jour le jour qui ont le contrôle là-dessus.

Je pense qu'avec un organisme semblable le problème serait réglé ou, pour le moins, facilité. C'est donc dire que nous sommes d'accord avec la première partie de votre question sur l'organisme. Je n'ai pas été témoin oculaire des propositions faites, mais c'est ce que nous suggérons.

M. Pagé: Vous demandez que le règlement de placement soit non seulement modifié, mais purement et simplement retiré en ce qui regarde le contingentement de la main-d'oeuvre. J'ose espérer que le ministre en prend bonne note. Par contre, en ce qui concerne le placement, vous demandez en même temps que les syndicats n'aient plus leurs agences de placement et vous

demandez que le placement puisse, quand même, continuer à se faire par l'OCQ. Sous quels critères le placement se ferait-il à ce moment-là?

M. Houle: Quand on disait tout à l'heure qu'on enlève le contingentement, etc., je pense que le contingentement n'est pas totalement enlevé. Une carte de qualification, c'est une certaine façon de contingenter. Quand vous parliez tout à l'heure de bloquer un paquet de jeunes, c'est peut-être en vue d'un contingentement, parce qu'il n'y a pas de travail dans la région. Vous en avez une dizaine. Alors, ils n'iront pas faire croire à dix jeunes qu'il y a des possibilités pour eux, ils n'en ont pas. Qu'est-ce qu'ils font? Ils les bloquent.

Le contingentement peut se faire d'une certaine façon comme cela se fait dans les différentes professions...

M. Pagé: Par la qualification.

M. Houle: ...dans les différentes universités par la qualification. Donc, au point de vue du contingentement, je pense qu'il n'est pas totalement enlevé.

Quand on parle d'abolition des bureaux de placement syndicaux, ce n'est pas une bombe. Ce qu'on ne veut pas, ce sont les problèmes qui ont été vécus avec le 144 des plombiers qui a fait l'objet de la commission Cliche. Ce qu'on ne veut pas, ce sont les problèmes qui ont été vécus avec les mécaniciens d'ascenseur et ce qu'on ne veut pas, ce sont les problèmes qui ont été vécus dernièrement avec les soudeurs dans le gazoduc. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de discussions et pas de coopération avec les syndicats. Ce n'est pas vrai. La plupart du temps, on vit bien ensemble, on peut se parler. Ce n'est pas parce que leur bureau de placement aboutit toujours à des cas semblables. Cependant, on voudrait trouver une formule où le placement soit centralisé et sous un contrôle tripartite, mais où les pouvoirs des parties constituantes seraient réellement entre leurs mains.

La possibilité la plus facile qu'on voit actuellement, c'est le bureau de référence, qu'on considère comme tel, que l'office dirige. Une personne quitte l'emploi, s'inscrit, revient. Quand on a besoin de main-d'oeuvre, actuellement, l'employeur peut engager lui-même sur les chantiers. L'employeur peut même s'adresser à un syndicat. Je peux vous dire que plusieurs de nos membres le font. Ce n'est pas mauvais en soi. D'autres peuvent s'adresser à l'Office de la construction. Ce qu'on veut, c'est un système qui soit vivable par les parties et qui fasse disparaître les problèmes qu'on peut rencontrer.

M. Pagé: Merci, M. Houle. J'ai une dernière brève question. Je pensais que le ministre y répondrait. Cela m'a surpris. Il pourra peut-être y répondre par la suite. Vous avez évoqué, à la page 11 de votre mémoire, le fait que le camionneur artisan soit considéré comme un travailleur autonome, donc comme un entrepreneur. Vous dites: "Cependant, en matière de santé et de sécurité au travail, le camionneur artisan est assimilé à un employé de l'entreprise et l'entrepreneur doit donc payer les cotisations pour ce camionneur artisan et se trouve pénalisé, advenant un accident, à son dossier de mérite-démérite, même s'il n'y a aucun lien de subordination entre lui et le camionneur artisan." C'est donc dire que, pour certains travaux, vous avez la fameuse clause 75-25 qui vous oblige à recourir à un certain nombre d'artisans au niveau local pour assumer une partie du transport. Si un de ces camionneurs a un accident, cela implique une imputation à votre dossier de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Est-ce que c'est cela?

M. Houle: Oui, et même plus que cela. Même si ce n'est pas un contrat important d'une municipalité, j'ai besoin d'un voyage de sable et je ne peux pas aller le chercher; je fais appel à un camionneur artisan et il vient me le porter. En retournant, il a un accident, il tue une personne ou deux; cela apparaît à mon dossier de mérite-démérite.

M. Pagé: Par surcroît, vous n'avez pas...

M. Houle: C'est moi qui suis obligé de payer la CSST. C'est le moyen que la CSST a trouvé pour essayer de faire indemniser les accidentés dans ces circonstances. Pour elle, c'est un moyen facile.

M. Pagé: Si ma mémoire est fidèle, vous n'avez pas le choix de ce camionneur, parce que ce dernier peut vous être référé par les bureaux régionaux.

M. Houle: Par ce qu'on appelle les bureaux d'affectation...

M. Pagé: Les bureaux d'affectation.

M. Houle: ...dans les différentes régions. Dans certaines régions, on peut avoir le choix. Dans d'autres régions, leur choix nous est imposé. Surtout dans les régions où le choix nous est imposé, c'est encore pire, mais je pense que le problème demeure le même, même si c'est une personne qui est à son compte. C'est un genre d'entrepreneur à son compte qui dans la journée, peut avoir trois ou quatre employeurs différents. S'il a un accident sur un chantier - peut-être que son voyage est fini le matin; cela a peut-être lieu à une autre heure - il va

apparaître au dossier de l'un des entrepreneurs l'ayant appelé.

M. Pagé: C'est vous qui payez.

M. Houle: C'est nous qui payons. Nous trouvons que c'est une...

M. Pagé: Vous avez le gars tout choisi devant vous pour répondre à cela. M. le ministre, vous pourriez peut-être leur donner une réponse satisfaisante aujourd'hui. Que pensez-vous de cela?

M. Fréchette: Ils ne posent pas une question; ils mettent un problème sur la table.

M. Pagé: Si j'avais été de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, je me serais au moins attendu que vous répondiez là-dessus. C'est le moment tout choisi.

Le Président (M. Lavigne): M. le député de Portneuf, s'il vous plaît!

M. Pagé: Non? Bon! En tout cas. Je dois dire que je regrette que le ministre ne réponde pas à cette question spécifique parce que c'est un problème. Il m'apparaît non seulement surprenant, mais inéquitable d'affecter cette responsabilité à un tiers, parce que vous êtes vraiment un tiers. Vous requérez les services d'un camionneur artisan. Bien souvent, vous n'avez même pas le contrôle du camionneur en question; c'est décidé par un poste d'affectation. Il arrive un accident et c'est imputé à votre dossier. Le ministre responsable de la Commission de la santé et de la sécurité du travail est ici. C'est vrai qu'on n'a pas celui qui est responsable de la Régie de l'assurance automobile, mais il aurait été certes utile d'avoir une réponse très précise. Cela ne demande pas une étude très poussée pour répondre à une question comme celle-là.

Merci, messieurs. Bonne chance!

Le Président (M. Lavigne): Merci, M. le député de Portneuf.

M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. D'abord, je dois dire que je suis d'accord avec votre association sur un point et c'est celui qui a été soulevé par le député de Portneuf. Je pense que le gouvernement devrait se pencher sur la question pour faire en sorte que les camionneurs artisans, vu que leurs équipements sont immatriculés au ministère des Transports du Québec, relèvent de la Régie de l'assurance automobile et non pas de la CSST ou quoi que ce soit. Là-dessus, je vous donne entièrement raison.

Sur deux autres points, je ne vous donne pas raison.

M. Pagé: C'est toi qui devrais le dire.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

(17 h 30)

M. Perron: Sur deux autres points, je ne vous donne pas raison, parce qu'il y a une nette différence entre la qualification et la classification. Si on abolissait, par exemple, la carte de classification, selon moi, il n'y aurait pratiquement plus de contingentement, contrairement à ce que vous avez mentionné tout à l'heure. À ce moment-là, il n'y aurait pas seulement les gens qui sont des travailleurs de la construction qui pourraient en profiter, mais il y aurait tout le reste des personnes qui travaillent dans les usines et qui ont les qualifications au niveau des métiers. Cela pourrait être très dangereux. Pour moi, on retournerait en arrière, à ce qui se passait dans les années soixante-dix, 1975, 1976 et même 1977 dans le cadre du règlement de placement.

Il y a une chose qui est sûre et certaine - on en a discuté ici, on a entendu les entrepreneurs le mentionner, on a entendu les syndicats le mentionner aussi -pour régler le problème des travailleurs de la construction et pour faire travailler le maximum de gens, ce n'est pas d'abolir le règlement de placement, en tout cas, selon ce que je pense, ou une partie du règlement de placement; c'est plutôt de faire en sorte que des contrats soient donnés, qu'il y ait une remontée économique et qu'on puisse créer des emplois au maximum. Attention, il n'appartient pas, comme l'a dit mon collègue d'en face, seulement au gouvernement du Québec de régler ce problème. Cela appartient à l'ensemble de la collectivité de régler le problème des emplois. Cela appartient au gouvernement fédéral, cela appartient au gouvernement du Québec, cela appartient aux entrepreneurs, cela appartient aussi aux syndicats.

Cela dit, je voudrais revenir sur un des points que vous avez mentionnés dans votre document à la page 12 où vous parlez des bureaux de placement syndicaux. Dans le règlement de placement tel qu'il est conçu actuellement, il y a, en fait, trois instances qui peuvent faire du placement. Vous avez les bureaux des syndicats qui peuvent faire le placement en vertu de l'article 25; ils doivent obtenir, cependant, un permis. Vous avez, en vertu des articles 44 et 52, l'OCQ qui peut faire du placement à la demande d'un entrepreneur et même à la demande d'un syndiqué. Vous avez aussi, en vertu de l'article 45, l'employeur qui lui-même peut engager sur place un travailleur de la construction. Donc, vous avez trois instances qui peuvent engager.

Dans le comté de Duplessis, sur la Côte-Nord, et dans plusieurs régions du

Québec il y a plusieurs entrepreneurs qui s'adressent directement aux bureaux syndicaux pour le placement. J'en ai dans mon comté autant qu'ailleurs. Ces gens se trouvent très satisfaits - d'ailleurs, des gens qui sont même membres de votre association - des résultats obtenus auprès des bureaux de placement syndicaux. Maintenant, je ne parle pas à l'Opposition, je parle à d'autres personnes. La question que je voudrais vous poser: Est-ce que dans votre association il y a plusieurs entrepreneurs qui font appel régulièrement aux bureaux de placement syndicaux, par exemple, dans le cas des monteurs de lignes ou encore dans d'autres métiers?

M. Houle: Je l'ai mentionné tout à l'heure, je pense, chez nous, comme dans les autres associations, beaucoup d'employeurs engagent eux-mêmes. D'autres font appel à des bureaux de placement ou à des représentants syndicaux avec qui on travaille et qui viennent nous visiter sur le chantier. D'autres font référence à l'Office de la construction. Même chez nous on va utiliser parfois les trois. Cela va dépendre de la région où nous sommes, de la disponibilité de la main-d'oeuvre. Quand on a besoin de main-d'oeuvre, on essaie de chercher par tous les moyens la main-d'oeuvre la plus appropriée pour les travaux qu'on a à faire. Les problèmes qu'on veut éviter, c'est que, dans des périodes difficiles, lorsqu'on est coincé, un syndicat se serve de son bureau de placement pour influencer la négociation ou les opérations, comme cela s'est produit dans le passé. Tout le monde est au courant. C'est cela qu'on voudrait corriger, mais corriger tout le monde ensemble, sans brimer les droits des gens. Même le syndicat, cela n'empêche pas qu'il ait sa liste de syndiqués à lui et qu'il contrôle avec la liste de l'office. Ce n'est pas cela qu'on veut faire disparaître. C'est l'opération globale et à long terme, pas à court terme. Ce n'est pas parce qu'on en a contre les syndicats. Ce n'est pas vrai, parce que chez nous... Vous me demandez: Y en a-t-il beaucoup? Je ne sais pas combien il y en a, mais il y en a et, personnellement, on le fait nous-mêmes à l'occasion.

M. Perron: Bon! Maintenant, je vais clarifier encore plus ma question. Est-ce que vous-même ou encore d'autres personnes qui sont à la table font appel actuellement à des bureaux de placement syndicaux pour obtenir de la main-d'oeuvre?

M. Houle: Personnellement, je le fais à l'occasion.

M. Perron: Vous le faites à l'occasion et d'autres aussi.

M. Houle: Peut-être pas moi directement, mais mes employés. J'imagine qu'aujourd'hui mes hommes le font eux-mêmes sans que je leur dise, lors de la préparation d'une soumission, on vérifie la disponibilité de la main-d'oeuvre. J'ai déjà appelé moi-même, personnellement, il y a plusieurs années, un chef syndical pour savoir quelle était la disponibilité de la main-d'oeuvre. Je pense que c'est normal. Vous me demandez s'il y en a qui le font chez nous. C'est certain qu'il y en a qui le font.

On n'aimerait pas, cependant, être obligés d'appeler les quatre centrales ou les cinq pour savoir si elles en ont, oui ou non. Si c'était à un endroit centralisé, je pense que ce serait plus efficace et plus rapide.

M. Perron: La réponse qu'on vous donne à ce moment-là, lorsque vous faites une demande au bureau de placement du syndicat, est-ce que tout est dans l'ordre et tout va bien avec le syndicat lui-même?

M. Houle: Cela va bien.

M. Perron: Dans la majorité des cas.

M. Houle: Cela peut bien aller. Si on appelle, par exemple, une semaine avant les travaux et qu'on arrive sur le chantier trois semaines après, on ne s'offusque pas si le gars en a moins qu'il ne le pensait ou bien s'il en a plus. La construction, cela varie de jour en jour. Si vous allez actuellement à Bécancour, par exemple, ne vous attendez pas à trouver beaucoup de main-d'oeuvre dans le coin; il n'y en aura pas. Mais allez voir dans un an et demi, il peut y en avoir en abondance.

Le Président (M. Lavigne): Cela va, M. le député de Duplessis?

M. Perron: Merci.

Le Président (M. Lavigne): M. le député de Hull, s'il vous plaît!

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. À la suite de certains commentaires que faisait le président, M. Houle, vous me permettrez sûrement de commenter afin d'expliciter. Je veux vous assurer auparavant, après avoir pris connaissance du mémoire présenté par l'Association des constructeurs de routes, que je partage votre opinion sur plusieurs points. Je pense que notre formation politique, en tout cas, sur la question de la classification, a énoncé à plusieurs reprises que les certificats n'ont plus leur raison d'être et nous l'énonçons de nouveau.

Par contre, M. Houle, à la suite des commentaires que vous avez faits tantôt, vous avez fait allusion à la ville de Hull, à

savoir que la ville de Hull faisait elle-même plusieurs contrats, entre autres d'égout, parce que les contrats de pavage et autres sont faits par l'entreprise privée. Ils l'ont toujours été, à moins de légères réparations. Mais je tiens à l'expliquer pour le bénéfice de ceux qui ont entendu cela tantôt, parce qu'au cours des derniers jours j'ai eu quelques critiques de la part de la FTQ et de la CSN. On a interprété le fait que j'étais peut-être antisyndical. Je suis heureux aujourd'hui d'avoir un peu de critiques de la part des patrons. Cela équilibre les choses un peu. Je voudrais vous dire, entre autres, que durant les bonnes années où on avait un excellent gouvernement au Québec, c'est-à-dire entre 1970 et 1976, alors qu'il y avait plus de 150 000 travailleurs dans la construction, alors qu'il y avait énormément de travaux de voirie...

Une voix: Pertinence.

M. Rocheleau: C'est de la pertinence en maudit, je vous le dis! M. le Président, durant les années 1973, 1974 et 1975, effectivement, tenant compte de la construction de l'usine d'épuration qui commandait énormément de contrats très importants, étant donné qu'on n'avait pas tellement de firmes locales, pour les plus petits contrats, les contrats qui variaient peut-être entre 200 000 $ et 700 000 $ ou 800 000 $, la ville de Hull établissait des données, des estimations sur les contrats pour lesquels on allait en soumissions et on s'apercevait souvent que nos estimations étaient de 20% à 25% moindres que celles du plus bas soumissionnaire, et on avait peut-être trois, quatre ou cinq soumissionnaires. La ville de Hull a décidé, à un moment donné, de soumissionner elle aussi, parce que nous pouvions refuser ou accepter la plus basse soumission et, par le fait même, contrôler un peu plus le coût de nos soumissions ou ce que nous anticipions comme coûts. La ville de Hull a effectivement procédé à plusieurs soumissions pour la construction d'égouts dans la ville qui sont très bien faits. Je dois vous dire, en passant, que les employés de la ville sont sûrement parmi les meilleurs employés au Québec dans les municipalités. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous le faisions.

Mais je veux vous assurer, pour le bénéfice de votre association, que, depuis que les années de vaches maigres sont revenues au Québec, c'est-à-dire depuis la fin de 1976, nous nous sommes retirés considérablement de ces travaux et nous recourons davantage aujourd'hui à l'entreprise privée pour les faire. D'autant plus que vous avez dit qu'il y avait passablement de problèmes dans ce domaine.

Je voulais simplement clarifier cela, M. Houle, parce que je sais que ce n'était pas malicieux de votre part. Mais je tenais, pour le bénéfice de tous, à démontrer l'excellente gestion que la ville de Hull a toujours fournie et dont elle a fait profiter ses commettants et commettantes.

M. Houle: Est-ce que je pourrais ajouter un mot à ce commentaire? Je vous remercie. J'espère que vous pourrez faire jouer votre influence dans la région de l'Outaouais, à Hull même, parce que les travaux exécutés par la ville continuent, même en 1984.

M. Rocheleau: Je pourrai peut-être leur parler.

Le Président (M. Lavigne): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Dans le déroulement de nos travaux depuis trois jours maintenant, on a pu établir certaines statistiques relatives aux différents coûts des travaux, par exemple, dans la construction résidentielle. On a établi, entre autres, que le coût des salaires dans la construction résidentielle pouvait représenter environ 30%. Il y a eu des chiffres de 25% ou de 30% qui ont été mentionnés. Est-ce que vous auriez des statistiques relatives aux travaux importants, qui indiquent le pourcentage des salaires que peut représenter un contrat de 5 000 000 $, par exemple?

M. Houle: Quant aux travaux que nos entrepreneurs exécutent, si vous parlez du terrassement, de la manutention de terre, déblai, remblai, etc., cela peut représenter 25% du montant du contrat. Si vous parlez des ponts, des viaducs, cela peut ressembler au résidentiel, c'est-à-dire être aux environs de 30%. Si vous parlez du transport d'énergie, ce sont majoritairement des salaires puisque beaucoup de matériaux sont fournis par Hydro-Québec; on me dit tous les matériaux. Les salaires peuvent représenter peut-être 80% du montant du contrat. Faire une moyenne générale, je pense que cela ne rime pas à grand-chose. Cela va dépendre des secteurs où nous travaillons. Il y a même des gens chez nous qui travaillent dans le bâtiment. La moyenne des salaires va se situer aux environs de 30%.

M. Desbiens: Je pose cette question pour vous permettre de faire un commentaire, parce qu'il semble avoir été établi - même si certains mémoires ont déjà mentionné le fait qu'on attribuait aux salaires les coûts élevés dans la construction - à la suite des mémoires, des discussions et des réponses qu'on a pu obtenir que, finalement, ce n'étaient pas tellement les salaires qui posaient un problème dans le coût des travaux. Vous avancez également de

façon très claire que les salaires constituent le principal handicap dans l'augmentation du coût des travaux. (17 h 45)

M. Houle: Je ne voudrais pas qu'on dise que c'est causé uniquement par les salaires ou qu'on essaie d'évaluer la partie des salaires et la partie de l'équipement ou d'autres matériaux. Je ne vois pas où cela mènerait. Je voudrais plutôt qu'on étudie le problème en fonction des salaires payés dans le contexte nord-américain. On vit dans un contexte nord-américain. Les salaires qu'on paie chez nous pour la construction, est-ce que c'est normal ou si on va se retrouver dans une situation où on va développer un marché parallèle, parce que les gens ne paieront pas ces salaires? Pour chacun de nous, si on ne peut pas faire venir un électricien, si on ne peut pas faire venir un plombier, si on ne peut pas faire venir un gars de métier à notre résidence pour nos travaux, je pense qu'il y a un sérieux problème qui se pose. Le problème, ce n'est pas le coût global; c'est la partie des salaires. Je pense qu'on est ici surtout pour la question des salaires et la question des relations du travail. Je pense qu'on ne discute pas beaucoup d'autres choses.

C'est la partie syndiquée. C'est sûr que, lorsque le gouvernement décide de syndiquer tout le monde, on doit étudier en même temps le barème des salaires et en discuter avec le syndicat, surtout lors d'une législation semblable. Qu'est-ce que cela implique? Normalement, cela devrait impliquer des taux inférieurs à ceux qui sont payés à la partie syndiquée en Colombie britannique, en Ontario ou à Chicago. Si on dit: On syndique 100% des gens, allons totaliser les salaires qui sont payés à 100% de ces gens ailleurs. Si on payait 50 $ l'heure à 1% des syndiqués à Boston, cela n'aurait pas tellement d'importance si les 99% autres travaillaient à un taux de beaucoup inférieur. Je pense qu'il faut faire ce calcul. C'est la base, je pense, de nos représentations.

M. Desbiens: J'aimerais poser une question supplémentaire. Je regrette, je n'ai pas le tableau, mais on nous soumettait dans un mémoire, justement, un tableau comparatif entre les salaires payés ici au Québec et ceux payés dans d'autres villes comme Toronto, je crois, et Vancouver.

Une voix: Des salaires syndiqués.

M. Desbiens: Syndiqués, bon, d'accord.

Une voix: Je pense que c'est là qu'est le point.

M. Houle: Le fond du problème est là. Tant qu'on ne l'abordera pas ouvertement, je ne pense pas qu'on puisse le régler. M. Desbiens: Merci.

Le Président (M. Lavigne): Vous avez terminé, M. le député de Dubuc? Donc, M. Houle, je vous remercie, ainsi que vos collègues et votre association de nous avoir présenté votre mémoire. J'inviterais donc maintenant, pour faire suite, l'Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec. Je crois que c'est M. Édouard Deslauriers qui en est le président.

APCHQ

M. Deslauriers (Édouard): Mme la

Présidente, je vais demander à M. Rousseau de bien vouloir faire les présentations.

La Présidente (Mme Harel): Très bien. M. Deslauriers...

M. Deslauriers: Oui.

La Présidente (Mme Harel): ...une remarque peut-être avant que nous entamions nos travaux. Nous vous avons gardé pour le dessert, mais vous nous présentez un gros gâteau. C'est 67 pages, je pense, que contient votre mémoire. Je voulais vous demander si vous aviez l'intention de le lire ou de nous le résumer dans ses grandes lignes, sans omettre les aspects importants que vous vouliez transmettre à la commission.

M. Rousseau (Omer): Mon nom est

Omer Rousseau. Je suis directeur général de l'organisation. Effectivement, vous avez un mémoire de 70 pages, à part les annexes ou les tableaux. Nous avons préparé à votre intention un résumé que vous devez avoir. Ce résumé est sur des pages blanches. Est-ce que vous l'avez, parce que nous en avons d'autres copies? Évidemment, c'est un résumé qui est assez volumieux. Il a 35 pages, mais cela va aller quand même plus vite que de lire 70 pages.

La Présidente (Mme Harel): On souhaiterait que vous puissiez nous en transmettre des copies ici.

M. Rousseau: Oui. Je crois que la majorité des gens en a une copie.

Une voix: On a celui-ci. M. Rousseau: Ah bon!

M. Deslauriers: C'est le mémoire complet que vous avez; on va vous donner le résumé. Non, c'est le résumé.

Une voix: C'est le résumé.

M. Deslauriers: Celui qui est broché sans couverture est le résumé.

La Présidente (Mme Harel): Certains membres de la commission qui ont déjà en main votre mémoire me font savoir qu'ils souhaiteraient que vous résumiez votre résumé, parce que c'est encore considérable, semble-t-il.

M. Rousseau: C'est considérable, mais résumer une matière aussi importante, ce serait très difficile. Enfin, je pense qu'on perdrait peut-être les gens un peu dans nos explications. En fait, Mme la Présidente, permettez-moi de vous présenter la table des intervenants parce que ni le président, ni moi n'allons intervenir tout le temps. Il y a d'autres personnes qui vont le faire. À l'extrême gauche, il y a M. Conrad Gosselin, qui est administrateur au sein du comité exécutif de l'APCHQ. Suit M. Serge Crochetière, qui est avocat-conseil. À mon extrême droite, M. Hughes Moisan, qui est directeur du service de recherches économiques à l'association provinciale.

Si vous voulez, le président va lire une des premières parties. Après quoi, je vais suivre. Enfin, pour s'assurer qu'il n'y ait pas trop de monotonie, je demanderais au directeur du service de recherches économiques de commenter quelques tableaux et les graphiques, ce qui va peut-être apporter un assouplissement à la présentation, pour, enfin, laisser au président le mot de la fin. M. Deslauriers, si vous voulez.

M. Deslauriers: L'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, fondée en 1962, est un organisme sans but lucratif regroupant plus de 4200 entreprises (sous l'égide de douze associations régionales affiliées) qui oeuvrent principalement dans la construction domiciliaire tant unifamiliale que multifamiliale. Les travaux exécutés par les membres de l'association provinciale représentent plus de 85%, je répète plus de 85% de la production totale d'habitations du Québec.

L'APCHQ est à la fois une association professionnelle, une association de services, et un organisme voué à la protection du consommateur depuis la mise sur pied en 1976 de son programme de certification de maisons neuves. Le programme réunit quelque 1300 entrepreneurs offrant aux consommateurs un produit fiable et de qualité reconnue. De plus, au chapitre de la recherche, l'APCHQ est également le maître-d'oeuvre du programme R-2000 au Québec. À ce titre, l'APCHQ gère pour Énergie, Mines et Ressources Canada la mise en chantier de maisons à haut rendement énergétique.

Pourquoi tenir une commission parlementaire? Comme nous en effectuerons le constat dans ce mémoire, la réalité des années 1983 - 1984 nous montre que, pour soutenir le marché de la construction résidentielle, non seulement faut-il des subventions gouvernementales de toutes sortes, directes et indirectes, non seulement faut-il également que ces subventions soient conjuguées les unes avec les autres, mais encore faut-il maintenant qu'elles acquièrent un caractère de permanence.

En effet, l'expérience nous le démontrant par la phase V de Corvée-habitation, dès que le gouvernement décide de retirer non pas toutes les subventions, mais une seule d'entre elles, l'effet s'en fait sentir immédiatement et la demande chute de façon dramatique.

Dans l'intervalle, le gouvernement a convoqué la commission de l'économie et du travail pour connaître les difficultés de l'industrie de la construction. Le gouvernement veut savoir, semble-t-il, quelles sont les difficultés avec lesquelles est aux prises l'industrie de la construction, difficultés se faisant sentir, précisons-le tout de suite, d'une façon extrêmement prononcée au niveau du secteur de la construction résidentielle. Le gouvernement manifeste le désir de connaître par les intervenants de l'industrie de la construction les divers problèmes affectant leur industrie et avec lesquels ils sont confrontés quotidiennement.

Pour sa part, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec met sérieusement en doute l'à-propos de convoquer une commission parlementaire sur le sujet. En effet, le gouvernement connaissait, au 31 mai 1982 et même bien avant, toutes les difficultés affectant l'industrie de la construction et, en particulier, le secteur de la construction résidentielle.

Dans cette optique, l'on peut affirmer que le gouvernement convoque l'ensemble des intervenants de l'industrie de la construction pour se faire dire ce qu'il sait déjà. En effet, tant dans son document de travail soumis au sommet d'avril 1982 que dans toutes ses interventions antérieures, l'APCHQ a dénoncé avec vigueur et à moult reprises les effets négatifs de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, ainsi que les problèmes engendrés par le règlement sur le placement des salariés, le règlement sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, les ratios compagnons-apprentis, le cloisonnement des métiers et des tâches dans le secteur de la construction résidentielle, de même que les nombreuses interventions gouvernementales dans le processus des relations du travail.

Toutes ces règles obligatoires et ces interventions extérieures ont été dénoncées par l'APCHQ non seulement pour leur

caractère impraticable, mais également pour leur contribution à la croissance exponentielle des coûts dans l'industrie, en particulier dans le secteur de la construction résidentielle.

De fait, le document de travail soumis par l'APCHQ au sommet économique d'avril 1982 concluait en ces termes: "En effet, deux aspects majeurs empêchent l'industrie de la construction résidentielle de réaliser les 40 000 logements qui seraient nécessaires pour satisfaire le besoin annuel de la population québécoise: les coûts de financement hypothécaire et de construction."

Parfaitement mis au courant en 1982 des divers problèmes affectant l'industrie et, en particulier, le secteur de la construction résidentielle, le gouvernement décidait néanmoins de passer outre et décrétait des hausses salariales de 10% par année pour une période de deux ans. Maintenant que cette période est écoulée, maintenant que les problèmes dénoncés à l'époque se font sentir avec d'autant plus d'acuité, le gouvernement convoque les divers intervenants de l'industrie devant la commission de l'économie et du travail afin de connaître les difficultés affectant l'industrie de la construction.

Qu'y a-t-il de changé vraiment entre la situation qui existait au 31 mai 1982 et celle que nous vivons aujourd'hui? Sauf en ce qui concerne une tentative de bonification du règlement sur le placement des salariés dans l'industrie, aucun changement n'est survenu. C'est l'immobilisme parfait. Les entrepreneurs sont toujours aux prises avec le règlement sur le placement des salariés, le règlement sur la formation professionnelle, les ratios compagnons-apparentis, le problème du cloisonnement des métiers, en plus de s'être vu imposer des hausses salariales particulièrement impossibles à assumer dans le secteur de la construction résidentielle.

En 1984, le gouvernement doit connaître les difficultés affectant le secteur de la construction résidentielle puisqu'il est à mettre au point depuis bientôt deux ans sa politique sur l'habitation. On ne peut quand même pas procéder à l'élaboration d'une politique sur l'habitation en ne connaissant pas les problèmes affectant le secteur de la construction résidentielle, en ne possédant pas toutes les données et en ne sachant pas de quoi il en retourne.

Le premier ministre, M. Lévesque, déclarait récemment que les coûts étaient trop élevés, du moins dans le secteur de l'habitation et de la rénovation. "Nous ne pouvons maintenir un système avec lequel les gens ne peuvent supporter les taux officiels et doivent recourir au marché noir pour faire effectuer leurs travaux." Article du Daily Commercial News du 10 avril 1984.

Lors d'une allocution que prononçait le ministre de l'Habitation, le 13 novembre 1982, dans le cadre du congrès provincial des constructeurs d'habitations du Québec, il s'exprimait ainsi: "Par ailleurs, votre association a, à juste titre, souligné les dangers d'inefficacité de la réglementation touchant la sécurité dans les bâtiments et les lieux publics: dédoublement et chevauchement des compétences sont pour les entrepreneurs non seulement des obstacles qui ralentissent leur entreprise, mais peuvent être aussi un frein à leur évolution. Maintes fois au cours de mon mandat, il m'a été donné d'entendre des griefs en ce sens. Le premier ministre lui-même, lors du discours inaugural en 1980, avait parlé de la nécessité d'allégement et d'assainissement de la réglementation dans le secteur de la construction."

D'emblée, le ministre avalisait une position adoptée depuis longtemps par l'APCHQ concernant la réglementation affectant particulièrement le secteur de l'habitation dans l'industrie de la construction au Québec. Poursuivant dans la même voie, le ministre faisait état d'un premier geste concret posé par le gouvernement en annonçant l'adoption par le Conseil des ministres de la décision 82-303.

Plus tard, en 1984, lorsque fut rendue publique l'étude de l'économiste Danièle Tanguay-Renaud sur la situation de l'industrie de la rénovation résidentielle au Québec, le ministre Tardif s'est dit favorable à la création de nouvelles catégories de travailleurs pour le secteur spécifique de la rénovation résidentielle, "mais cela relève du domaine des relations du travail", a-t-il précisé. Le ministère de l'Habitation s'est déjà résolument engagé dans la voie d'une déréglementation. Cette commission est-elle enfin un signe de la volonté du ministre du Travail d'emboîter le pas? (18 heures)

Introduction. Dans son mémoire préparé le 31 mai 1982 à l'intention de la commission parlementaire du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu, mémoire intitulé "Le régime des relations du travail dans l'industrie de la construction et son impact sur le secteur de la construction résidentielle", l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec concluait en ces termes: "La période 1979-1981 est celle où le ménage québécois moyen a perdu ses espoirs d'accession à la propriété. En effet, au cours de cette période, qui correspond à la période du dernier décret, le prix des maisons s'est accru de 19% alors que le revenu moyen a à peine crû de 12%. Cette évolution divergente nous porte à conclure qu'une baisse importante des taux d'intérêt ne peut à elle seule ramener la vigueur de 1976 au marché de l'habitation. Elle doit se coupler d'une amélioration significative du revenu moyen du ménage québécois ou d'une baisse des

coûts de construction... La construction résidentielle ne peut plus supporter les salaires payés dans les autres secteurs de la construction... Il est temps que l'on réfléchisse et que l'on agisse, à défaut de quoi, la réalité des années 1983-1984 forcera les événements."

De fait, quelle est-elle, cette réalité des années 1983-1984? Quels sont ces événements auxquels faisait allusion l'APCHQ? Aurions-nous pu prévoir que nous serions en commission parlementaire aujourd'hui pour démontrer encore une fois les effets négatifs de la législation et de la réglementaiton de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction résidentielle? Voyons d'abord les principales préoccupations dont faisait état le mémoire de mai 1982 de l'APCHQ.

Je vais demander à M. Rousseau de continuer avec le rappel sur le mémoire.

M. Rousseau: Dans la prochaine section, il s'agit, évidemment, du rappel de certains éléments que nous avions annoncés dans notre mémoire de 1982.

Dans son mémoire de 1982, l'APCHQ expliquait que le cadre des relations du travail dans l'industrie de la construction force le secteur de la construction résidentielle à vivre avec des conditions de travail négociées en vertu des besoins et des réalités issus des secteurs du bâtiment non résidentiel et des travaux de génie et de voirie.

Malgré le fait que le gouvernement actuel ait reconnu implicitement, par la création du statut d'entrepreneur artisan, que la capacité de payer de la clientèle du secteur de la construction résidentielle était inférieure à celle de la clientèle des autres secteurs, malgré le fait aussi que la syndicalisation obligatoire pour toute l'industrie de la construction québécoise est un cas unique en Occident, on continue à ignorer le caractère singulier du secteur de la construction résidentielle en lui imposant, par le biais d'une négociation unique pour toute l'industrie, des conditions impraticables sur ses chantiers et des niveaux de coûts de main-d'oeuvre démesurés pour sa clientèle; la famille québécoise à revenu moyen. Ces niveaux de salaires élevés sont, d'ailleurs, les premiers responsables de l'éclosion du travail au noir dans la construction et la rénovation résidentielles.

On peut démontrer clairement que les coûts reliés à la main-d'oeuvre sont la principale cause de la hausse des prix des maisons neuves. Pour ce faire, on n'a qu'à comparer la hausse du coût de la main-d'oeuvre, (taux horaire auquel on additionne tous les autres frais supportés par l'employeur) avec la hausse du coût des matériaux de construction et la hausse de l'indice des prix à la consommation. Les coûts de main-d'oeuvre sont passés de l'indice 100 en 1971 à l'indice 404 en 1983, alors que l'indice des prix à la consommation, ayant sa base 100 en 1971, plafonne à 280. On ne peut être plus clair et plus précis. Ces chiffres démontrent que les coûts de main-d'oeuvre ont presque deux fois plus augmenté que l'indice sur la période étudiée. En d'autres termes, si l'inflation a été un problème grave de l'économie, imaginez ce qu'une telle inflation des coûts de main-d'oeuvre a représenté pour le secteur de la construction résidentielle. Seuls les aveugles ou, pire, seuls ceux qui ne veulent pas reconnaître l'évidence vont s'obstiner à ne pas reconnaître ces faits d'ailleurs confirmés par des documents originant du gouvernement du Québec.

Notre mémoire fait ensuite un survol historique de l'évolution des coûts de construction. Pour le secteur de la construction résidentielle, les conclusions qui ressortent sont les suivantes. D'abord, le prix de la maison type a connu une augmentation de 184% durant la dernière décennie. La source la plus importante de la hausse des coûts est l'augmentation de la valeur des terrains, 224%. Il faut toutefois souligner que celle-ci est relativement récente, c'est-à-dire depuis 1976.

En ce qui a trait à la structure proprement dite, hausse globale de 179%, on s'aperçoit que la main-d'oeuvre connaît une hausse de 230% comparativement a 136% pour les matériaux. Quant à la marge bénéficiaire brute, elle suit globalement les conditions du marché résidentiel et se maintient depuis 1979.

En définitive, le coût de la main-d'oeuvre apparaît comme le facteur principal de la hausse du prix de vente des maisons au cours des dix dernières années; suivent le terrain et, à peu près sur un pied d'égalité avec la main-d'oeuvre, les autres frais de construction et, finalement, les matériaux.

Si vous voulez, M. Hugues Moisan pourra vous donner quelques explications sur le tableau qui suit et également sur le graphique.

M. Moisan (Hugues): En fait, vous avez le tableau avec les données chiffrées. À la page suivante, le graphique indique l'indice des coûts de main-d'oeuvre dans la construction résidentielle, indice basé sur la rémunération d'un charpentier-menuisier, le métier le plus couramment exercé dans notre industrie. Il atteint 330 en 1981. L'indice du revenu annuel familial moyen jusqu'en 1981 est à 263; donc, il a été largement dépassé par l'indice des coûts de main-d'oeuvre. Vous avez aussi l'indice des prix à la consommation, 237 pour 1981.

À la page suivante, vous avez un peu le même graphique qu'on a repris pour le mettre à jour, c'est-à-dire jusqu'à l'année

1983. Vous voyez que l'indice du coût de la main-d'oeuvre était à 403.7 alors que sur ce graphique on a ajouté l'indice des coûts des matériaux qui, on le voit, suit de façon très rapprochée l'indice des prix à la consommation. On en tire la conclusion qu'entre les deux coûts, entre les deux sources de hausses de coûts pour une bâtisse, pour un bâtiment, c'est l'indice des coûts de la main-d'oeuvre qui remporte, si vous voulez, le championnat haut la main.

M. Rousseau: Nous passons les deux ou trois autres pages et nous allons au prochain chapitre, "La réalité des années 1983-1984 dans le secteur de la construction résidentielle. La nécessité des subventions." En 1982, lorsque les gouvernements ont voulu relancer l'économie par le biais de la construction résidentielle, ils ont rapidement identifié les causes du malaise dans notre industrie: les coûts de financement et les coûts de construction. De la sorte, une série de programmes de subventions et de mesures fiscales sont venus corriger les niveaux prohibitifs que les coûts de financement de la construction atteignaient à ce moment. Une véritable manne était dirigée vers les nouveaux propriétaires qui recevaient une conjugaison de subventions et d'aides diverses atteignant jusqu'à 10 000 $ en vue de compenser pour la moyenne des ménages québécois les coûts trop élevés d'accession à la propriété.

Aujourd'hui, malgré l'assurance d'un taux de 9,5% garanti pour trois ans en vertu de Corvée-habitation, des signes évidents de l'affaiblissement du rythme des mises en chantier se font sentir. La réduction importante des subventions forfaitaires (de 6500 $ en 1983 à moins de 1500 $, soit celles provenant du REEL fédéral seulement) constitue l'explication majeure de cette baisse d'activité. Ces faits font aussi ressortir hors de tout doute que les rabais d'intérêt ne suffisent pas. La chaîne des événements se résume facilement grâce au tableau suivant.

M. Moisan: Dans ce tableau-là, on a calculé le prix moyen d'une maison individuelle neuve au Québec pour les années du tableau, c'est-à-dire de 1979 à 1984, auquel on a soustrait les subventions forfaitaires qui étaient versées aux acheteurs de maisons neuves dans les années 1982, 1983 et 1984. On en tire un total de subventions forfaitaires qu'on soustrait du prix moyen d'une maison au Québec et on obtient le prix effectif payé qui est finalement la quatrième ou la cinquième ligne du tableau. Vous voyez que, pour les années 1982 et 1983, finalement, lorsqu'on avait soustrait du prix moyen les subventions qu'on obtenait à l'achat d'une maison neuve, on ramenait le prix entre le niveau de 1980 et de 1981. Donc, on avait vraiment un effet sur les coûts de construction. On les réduisait à coups de subventions et, lorsqu'en 1984, les subventions ont fortement diminué, on remonte au niveau de prix beaucoup plus élevé, de sorte qu'on a un effet sur la dernière ligne de ce tableau, c'est-à-dire sur les mises en chantier puisqu'on prévoit que les mises en chantier vont se réduire considérablement par rapport à l'année 1983.

M. Rousseau: Je continue à la page suivante. Grâce aux diverses subventions versées, les prix effectifs payés par les ménages québécois pour une maison neuve gravitent entre 1982 et 1983 autour de 52 500 $. C'est à ce moment que la reprise des mises en chantier est la plus forte. En 1984, le prix effectif d'une maison passe à 58 500 $ et le marché retrouve sa faiblesse des débuts des années quatre-vingt.

Il ne faut pas se surprendre d'un tel résultat, il était prévisible. Des documents originant du gouvernement du Québec en fournissent l'explication lorsqu'ils estiment "le nombre de ménages familiaux locataires de 25 à 54 ans pouvant assumer les mensualités de diverses valeurs de logement selon différents taux d'intérêt sans consacrer plus de 25% de leur revenu aux frais de logement en 1981." Selon ces estimations, le passage du prix des logements neufs de 50 000 $ à 55 000 $, à taux d'intérêt constant, retire du marché environ 30% à 35% d'acheteurs potentiels. Il ne faut donc pas se surprendre lorsqu'avec la phase V de Corvée-habitation, où nous avons vu que les prix effectifs moyens sont passés graduellement entre 1983 et 1984 de 52 603 $ à 58 500 $, le marché se resserre fortement et que possiblement 50% des acheteurs potentiels ne peuvent plus acheter une maison neuve.

Connaissant l'effet du retrait des subventions et l'incapacité des ménages québécois à faire face aux vrais coûts de construction, c'est-à-dire sans subvention forfaitaire, l'APCHQ voit difficilement comment les mises en chantier pourraient dépasser de beaucoup le niveau des 30 000 nouvelles unités en 1984. Ce niveau de 30 000 unités a été atteint en pleine récession, soit en 1980 et 1981.

Encore une fois, nous vous rappelons que les besoins de la population en logement sont de 40 000 nouvelles unités par année. Donc, il est inutile d'épiloguer très longtemps sur les deux dernières années. Si une aide substantielle provenant de la conjugaison de subventions (Corvée, PCEAP, municipalités) ne vient pas réduire le coût d'une unité de logement neuve, les ménages québécois ne peuvent, ni ne veulent fairel'achat d'une maison neuve et ce, malgré des conditions de financement fort avantageuses et stabilisées pour trois ans.

La logique du marché noir. Le terme "marché noir" rime dans le discours syndical avec braconniers, chaudrons, artisans, "jobineux", etc. Nous reconnaissons qu'il est dommageable pour une société qu'un tel marché puisse exister. Il faut, cependant, dédramatiser ce concept de travail au noir et étudier sa logique et sa rationalité pour à la fois le comprendre et savoir comment aborder le problème qu'il représente.

D'entrée de jeu, nous aimerions faire ressortir l'aspect suivant de la position des travailleurs de la construction au Québec en rapport avec le travail au noir. Chaque fois qu'une hausse du taux horaire prévue au décret est annoncée, tous sont gagnants sur tous les points. En effet, les travailleurs encore détenteurs d'une carte de classification - en vertu du règlement de placement, ceux ayant travaillé au moins 1000 heures dans la dernière année - peuvent travailler sur des chantiers de construction et être payés aux taux prévus au décret. Ils font ainsi partie d'une classe de travailleurs industriels privilégiés puisqu'ils reçoivent un salaire horaire près de deux fois plus élevé que le salaire horaire moyen dans l'industrie au Québec. Nous reviendrons plus loin sur cet aspect de la question. Si l'activité de construction est suffisamment prolongée, ils travaillent au moins 1000 heures, soit 25 semaines à 40 heures par semaine.

Il y a fort à parier qu'ils ne travaillent pas beaucoup plus que cela. En atteignant ce chiffre magique de 1000 heures, ils conservent leur classification et ils sont, de plus, admissibles aux prestations d'assurance-chômage pour les 52 semaines qui suivent. Bien entendu, tout en étant prestataires de l'assurance-chômage pendant la saison morte, ils acceptent volontiers d'arrondir les fins de mois en exécutant pour des particuliers des travaux de réparation, de rénovation ou de construction. Lorsque les beaux jours reviennent, ils recommencent le même manège.

Si, par malheur, ils ne réussissent pas à conserver leur carte de classification, plusieurs options s'offrent à eux. Ils peuvent devenir entrepreneurs artisans ou spécialisés. Ils peuvent aussi décider d'offrir leurs services sans autres procédures: marché noir. Chaque fois que des hausses sont consenties dans le décret, ce marché augmente sa clientèle. Bien entendu, ne déclarant jamais leurs revenus au fisc, leur valeur augmente à un niveau souvent très proche du taux horaire du décret. Donc, pour ces raisons, il faut donner très peu de crédit aux larmoyantes représentations des syndicats qui n'utilisent que les statistiques officielles de l'Office de la construction pour déterminer le salaire annuel moyen d'un travailleur de la construction. Pour eux, le travail au noir est exécuté par des travailleurs provenant d'autres industries alors qu'en réalité ce sont les vrais travailleurs de la construction, classifiés ou non en vertu du règlement sur le placement, qui occupent ce champ d'activité.

Le véritable fondement du marché au noir: la rationalité économique de l'intérêt individuel. En général, hormis l'attrait de réaliser des gains qui ne sont pas déclarés au fisc ou d'avoir des intentions malicieuses et malhonnêtes, un individu a très peu d'intérêt à rechercher des occasions de participer activement et consciemment à des échanges de services ou de marchandises sur le marché noir. Par conséquent, certaines conditions de base sont nécessaires pour que des individus rationnels cherchent activement à participer à un marché noir. Il doit être relativement facile de rassembler ou de présenter les compétences et les moyens nécessaires à l'exercice d'une activité rémunératrice. Cependant, cette condition nécessaire est insuffisante pour qu'un marché noir soit créé. En effet, si l'approvisionnement en matières premières est facile et peu coûteux et si les méthodes de travail sont connues et nécessitent des moyens techniques accessibles à tous, les coûts de production sont, toutes choses étant égales, relativement bas, les prix aussi et la quantité de biens ou de services offerts est fonction de la demande car elle peut s'ajuster rapidement à la hausse comme à la baisse.

Toutefois, si un élément extérieur au marché intervient pour restreindre artificiellement l'entrée dans ce secteur d'activité et/ou imposer des conditions autres que celles que le marché détermine librement, alors les éléments nécessaires à l'éclosion d'un marché noir sont réunis. Ces restrictions artificielles sont souvent réclamées par des intérêts corporatistes en place qui désirent restreindre l'entrée dans leur industrie pour leur permettre de tirer des avantages économiques plus grands que ceux que la libre concurrence peut permettre. Ce marché noir créé de toutes pièces n'est rien d'autre que le marché qui existait auparavant, mais devenu illégal par voie de réglementation plus souvent qu'autrement.

On ne peut échapper à cette logique économique: la demande recherche l'offre au meilleur coût possible. Alors, comme des règlements ou des facteurs externes viennent restreindre la concurrence, des prix plus élevés sont exigés sur le marché réglementé, créant automatiquement une demande pour les mêmes biens et services, mais aux prix concurrentiels n'existant que sur le marché noir. De plus, l'importance d'un marché noir est une mesure de l'écart entre les conditions normales - prix, quantités - du marché en situation de concurrence et les conditions artificielles résultant de l'introduction d'entraves réglementaires ou

autres à la concurrence. Un marché où plus de 25% des échanges sont faits à des conditions différentes de celles qui doivent exister constitue une indication certaine que les règlements ou les conditions impliqués surpassent d'une bonne mesure ce que la libre concurrence avait fixé.

Le marché noir dans l'industrie de la construction au Québec. Il est symptomatique d'observer qu'en entendant parler du marché noir dans l'industrie de la constuction au Québec on se réfère automatiquement aux services de main-d'oeuvre. En effet, entend-on parler du marché noir des matériaux? Jamais. (18 h 15)

Deux éléments de la réglementation qui régit l'utilisation de la main-d'oeuvre de la construction peuvent être la cause du marché du travail au noir dans la construction: le règlement de placement et le décret de la construction qui fixe les taux horaires et les autres éléments d'une entente entre patrons et employés. Nous avons déjà vu les effets du règlement de placement dans le contexte d'une industrie en constante baisse d'activité. Le décret, en fixant les salaires horaires des travailleurs, fournit le deuxième ingrédient nécessaire à la prospérité du marché du travail au noir. En déclarant les salaires horaires des travailleurs de la construction à des niveaux différents de ceux déterminés par un marché concurrentiel, on fournit une incitation suffisante pour l'éclosion d'un marché noir. Le règlement de placement, en raison de l'instabilité de l'activité de construction et de son déclin constant depuis 1976, vient augmenter l'offre du travail sur le marché noir en déclassifiant les ouvriers qualifiés et expérimentés. Une dernière source de travail au noir provient de la main-d'oeuvre venant de l'extérieur de la province et qui désire venir profiter des conditions salariales offertes par notre marché puisqu'elles sont meilleures que les siennes.

Au stade où nous en sommes, nous avons démontré que le travail au noir peut être une activité rationnelle si les taux du décret sont trop élevés. La première partie du chapitre sur la réalité des années 1983-1984 dans le secteur de la construction résidentielle, intitulée "La nécessité des subventions" prouve on ne peut plus clairement que les coûts de main-d'oeuvre sont pour le secteur de la construction résidentielle la cause la plus importante de la hausse du prix des maisons neuves. Cette croissance du prix des maisons neuves, on l'a vu, est beaucoup trop forte pour être suivie par le revenu familial annuel moyen au Québec. C'est la cause principale de la faiblesse actuelle de la demande de logements neufs, prévue à 30 000 unités pour 1984, par rapport aux besoins de la population, 40 000 unités selon plusieurs sources. En raison de cette inadéquation entre les revenus des ménages québécois désirant accéder à la propriété et les coûts et prix des logements neufs, on a une preuve indirecte du niveau trop élevé des salaires horaires décrétés par le secteur de la construction résidentielle à cause de la négociation unique pour toute l'industrie de la construction.

Deux preuves supplémentaires de nos prétentions peuvent être apportées. La comparaison des taux horaires prévus au décret de l'industrie de la construction avec les taux horaires payés dans d'autres industries au Québec pour des tâches équivalentes nous donne une première justification. Nous compléterons cette preuve en faisant l'analyse des conditions des travailleurs du secteur de la construction résidentielle des provinces canadiennes et des États américains voisins du Québec. En effet, les aspects majeurs du fonctionnement de l'industrie y sont semblables à ceux du Québec.

La seconde preuve nous sera fournie par les évaluations de l'activité totale de travail au noir que nous obtiendrons. Comme nous l'avons vu, plus le travail au noir est important par rapport au travail officiel, plus l'écart entre les taux du décret et les taux que la libre concurrence déterminerait est grand.

Comparaison des taux horaires décrétés pour le secteur de la construction résidentielle au Québec et des taux payés dans d'autres activités industrielles comparables.

La partie 1 des documents d'appui du mémoire présenté par l'Association des entrepreneurs en construction du Québec contient une foule de renseignements qui appuient notre argumentation.

Une première comparaison nous est donnée par le rapport de la firme Econosult sur "L'impact des coûts de main-d'oeuvre sur le volume des travaux de construction." Dans la section 1.2, ce rapport compare les salaires dans la construction avec les salaires versés dans d'autres secteurs industriels comme l'abattage et les mines. Citons-le.

Ces secteurs ont été choisis à titre comparatif à cause des facteurs "danger" et "risque d'accident" qui résident dans ces trois secteurs. L'industrie de la construction s'apparente également au facteur saisonnier qui caractérise le secteur de l'abattage et aux facteurs cycliques ou conjoncturels qui caractérisent le secteur des mines.

Comme il peut être constaté, le taux le plus élevé parmi les trois types de travailleurs est celui du journalier de la construction. Son taux est de 12,71 $ l'heure comparativement à 10,92 $ pour le journalier de l'abattage et à 12,11 $ pour le journalier des mines. Aussi, il est à noter que le taux du journalier de la construction se trouve

davantage plus élevé que les taux des autres secteurs du fait que certains avantages sociaux propres à la construction ne sont pas inclus: vacances, assurances collectives, régime supplémentaire de rentes et CSST.

Vous avez l'évolution comparative des salaires horaires construction, abattage, mines pour un journalier. Si vous voulez, nous allons passer par dessus ces chiffres pour nous rendre au prochain paragraphe.

Nous pouvons même préciser l'argumentation du second paragraphe de la citation en rappelant que, pour un journalier de la construction, le coût à l'employeur, c'est-à-dire comprenant toutes les contributions de l'employeur aux avantages sociaux, est de 16,47 $ en 1983 alors qu'il était de 9,95 $ en 1977. Avec ces chiffres, il n'est pas difficile de montrer que les journaliers de la construction supportent de façon outrancièrement avantageuse la comparaison avec d'autres activités industrielles comparables.

Un autre rappport poursuit l'argumentation dans le même sens. Il ne fait pas partie des documents d'appui de l'AECQ et a été préparé par M. Conrad Gosselin. Ce dernier est membre du conseil d'administration et président du comité du secteur résidentiel de l'AECQ. Il est aussi membre du conseil d'administration de l'APCHQ. Nous nous permettons de résumer son approche et de faire part de ses résultats.

La méthode de ce rapport consiste à diviser les secteurs industriels des biens et services en deux regroupements: les secteurs à concurrence forte et ceux à concurrence faible. On y argumente que la concurrence entre les producteurs locaux et celle provenant des producteurs étrangers contrôle les coûts de salaires à un niveau équilibré avec la capacité de payer de la clientèle. Par contre, en l'absence de concurrence, la situation du marché laisse le rapport de force prendre le consommateur en otage pour augmenter indûment les prix de ces biens et services. L'industrie de la construction est assimilée à ce secteur non concurrentiel.

Les résultats de l'analyse de M. Gosselin sont très éloquents: la moyenne des taux horaires des salariés du secteur concurrentiel est de 7,37 $ l'heure, alors que la moyenne des taux horaires des salariés du secteur non concurrentiel est de 14,36 $ l'heure. M. Gosselin poursuit en démontrant que, sans le décret et le mode de négociation actuel, le secteur de la construction résidentielle serait très concurrentiel, le travail au noir témoignant de cette possibilité puisque les taux de salaires y sont considérablement plus bas.

D'ailleurs, la preuve ultime des avancés de M. Gosselin nous est fournie par le document IV de la partie I des documents d'appui de l'AECQ, "Étude sur les conditions de travail dans le secteur non syndiqué de l'industrie de la construction hors Québec". En plus de démontrer que les taux de salaires payés dans le secteur de la construction résidentielle (non syndiqué de 90% à 100% selon le cas) de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Angleterre sont substantiellement inférieurs (de 10% à 63% selon le cas) à ceux payés dans le reste de l'industrie de la construction, il fait, de plus, ressortir que les avantages sociaux sont très limités, ce qui diminue d'autant le coût final à l'employeur.

En effet, pour les deux métiers les plus couramment embauchés dans le secteur de la construction résidentielle, le charpentier-menuisier et le manoeuvre, les Québécois doivent payer de 18% à 85% plus cher lorsque les taux du décret sont observés à la lettre. Avec de telles différences si près de nous, il n'est pas surprenant de retrouver au Québec un marché du travail au noir assez important.

Évaluation du travail au noir dans le secteur de la construction résidentielle au Québec. Depuis le début de 1984, les mesures de l'importance du marché noir foisonnent. Celles que l'AECQ a faites sont citées dans ses documents d'appui. En gros, elles se résument à ce que 30% de l'activité de la construction au Québec est réalisée avec l'aide du travail au noir. Nos propres estimations nous portent à croire que l'évaluation de l'AECQ est conservatrice, particulièrement au niveau des travaux de réparation et de rénovation. En effet, nous sommes d'avis que Statistique Canada sous-évaiue les montants impliqués par ce genre d'activité et que les travailleurs au noir y opèrent plus facilement que dans la construction neuve. De plus, d'autres secteurs que la construction résidentielle commencent à développer leur marché noir.

Quoi qu'il en soit, si un minimum de 30% des travaux sont réalisés au noir, c'est un niveau bien suffisant pour constituer un signe qu'on a dépassé la mesure par une bonne marge. Seul un rajustement à des niveaux plus réalistes de toutes les règles d'utilisation de la main-d'oeuvre dans le secteur de la construction résidentielle va permettre de faire décroître le volume de l'activité faite grâce au travail au noir. Essayer de réduire le travail au noir par une nouvelle réglementation constitue une erreur grave qui ne peut que coûter cher et pousser plus de travailleurs vers le marché noir.

La conclusion. Il n'y a rien qui a vraiment changé depuis le 31 mai 1982; la situation est simplement plus détériorée qu'elle ne l'était il y a deux ans. Nous avons démontré que les coûts de construction - les coûts de main-d'oeuvre largement en tête -ont atteint des niveaux que le ménage québécois moyen ne peut plus payer. Lors de

cette démonstration, nous avons étayé notre preuve en montrant que les subventions forfaitaires des années 1983-1984 ramenaient le prix des logements neufs à des niveaux plus compatibles avec la capacité de payer des ménages. Ces faits font, évidemment, ressortir que la disparition des subventions forfaitaires entraîne une baisse marquée des ventes de maisons neuves.

Nous avons aussi démontré que le travail au noir est une conséquence directe et logique de la réglementation actuelle. Bien plus, le travail au noir est la soupape de sécurité du système actuel, car il permet à ceux qui n'en ont pas les moyens de faire exécuter des travaux à des coûts inférieurs.

En définitive, l'APCHQ n'a pas changé d'avis sur le diagnostic et encore moins sur le remède: le dynamisme du secteur de la construction résidentielle est rongé par un cancer malin appelé la surréglementation et sa cure commande une bataille rangée contre les forces de l'inertie afin d'obtenir un jour une déréglementation de l'industrie et le retour final à la concurrence. Nous ne souhaitons pas la loi de la jungle. Cependant, nous sommes d'accord pour que des conditions minimales de protection des intérêts de tous les intervenants soient conservées.

La main-d'oeuvre. Le règlement relatif à la formation et à la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Depuis l'adoption de la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre en 1969, l'APCHQ a dénoncé le caractère à la fois inopérant et rétrograde en regard de la loi qu'elle est venue elle-même remplacer, la Loi de l'aide à l'apprentissage. Depuis toujours également, l'APCHQ a démontré l'aspect contraignant et immuable du règlement relatif à la formation et à la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, lequel régit notamment l'exercice des métiers et les ratios compagnons-apprentis.

Partie représentative aux négociations au cours des années 1970 à 1976 et conséquemment reconnue partie contractante à la convention collective (ou le décret), l'APCHQ n'a cessé de mettre en évidence l'erreur commise par le gouvernement, lors de l'adoption de la loi 49, en abolissant les centres d'apprentissage appartenant à l'industrie de la construction et en assujettissant à cette loi tous les autres secteurs de l'industrie en général.

Depuis cette époque, l'industrie de la construction est totalement privée d'un système d'apprentissage adéquat et se retrouve, en conséquence, avec une main-d'oeuvre de plus en plus vieille et de moins en moins qualifiée parce qu'on y retrouve dans les faits un système de contingentement; le règlement relatif à la formation et à la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre a toujours été, selon l'opinion de l'APCHQ, un règlement de contrôle quantitatif. L'un des aspects contraignants de ce règlement est, notamment, le rapport compagnons-apprentis. Par ailleurs, ce règlement établit l'échelle des salaires des apprentis, alors qu'il incomberait normalement aux parties concernées de l'établir dans le cadre des négociations. Mais au-delà de ces énoncés de principe, un autre problème préoccupe les entrepreneurs particulièrement: reliés à l'application des rapports compagnons-apprentis, d'une part, et au cloisonnement de l'exercice des métiers, d'autre part.

En effet, il faut savoir que le secteur de la construction résidentielle est essentiellement composé de petites entreprises employant souvent moins de cinq salariés. Soumises elles aussi à l'application du règlement sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, ces petites entreprises sont astreintes à respecter le rapport 5-1 et sont donc, en conséquence, tenues d'engager cinq travailleurs qualifiés pour un apprenti. Comme elles exécutent la majorité de leurs travaux sur des chantiers de construction réunissant cinq travailleurs ou moins, l'on peut donc affirmer que ces entreprises sont presque constamment limitées à n'avoir qu'un seul apprenti à leur emploi. On peut donc imaginer facilement toutes les économies qui résulteraient en coût de main-d'oeuvre pour ces PME si le rapport compagnons-apprentis était ramené à 1-1. Outre l'avantage énoncé ci-dessus, l'assouplissement de cette norme permettrait aux entrepreneurs de participer davantage à la formation de la main-d'oeuvre et d'éviter ainsi d'avoir à faire face à une pénurie de travailleurs qualifiés pendant les périodes de forte production ou, pis encore, de devoir agir dans l'illégalité.

Historiquement les définitions de tâches ont été préparées dans un esprit corporatiste et de protection des acquis de la part de chacun des métiers, ceux-ci étant plus soucieux d'établir des chasses gardées que de tenir compte des réalités économiques. Mais cette démarche nous a menés à un système de plus en plus complexe et artificiel dont ne s'embarrassent guère les constructeurs propriétaires, notamment en matière de rénovation, et c'est là la démonstration irréfutable de l'inutilité de ce système.

Par ailleurs, plusieurs travaux exécutés quotidiennement sur des chantiers de construction résidentielle ne requièrent pas de qualifications particulières, mais simplement de l'habileté de la part du travailleur. Ceci nous amène à affirmer que le secteur de la construction résidentielle devrait faire l'objet d'une libéralisation de la juridiction des métiers, en d'autres termes, le décloisonnement des tâches.

Enfin, la règle de l'exécution des tâches d'un apprenti sous la surveillance immédiate d'un travailleur qualifié est appliquée de façon étroite, pour ne pas dire bornée, par les inspecteurs. De cette façon, les employeurs concernés font fréquemment l'objet d'amendes imméritées et injustes.

Dans le même ordre d'idées, l'APCHQ aimerait attirer l'attention de la commission sur la situation créée par le jugement rendu le 27 octobre 1983 par la Cour d'appel dans la cause Office de la construction du Québec versus Aluminium J. Labelle Inc., lequel a décidé que les travaux de pose de déclin d'aluminium, jusqu'ici visés par le décret du verre plat, étaient désormais assujettis à la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Par l'effet de ce jugement, un grand nombre de travailleurs, autrefois qualifiés pour l'exécution de ces travaux en vertu du décret de la construction, devaient désormais s'inscrire comme apprentis dans le métier de ferblantier ou de charpentier-menuisier.

Les conséquences pratiques de ce rapatriement sont les suivantes: premièrement, tous les monteurs-mécaniciens antérieurement régis par le décret du verre plat doivent désormais se rapporter à l'Office de la construction du Québec et obtenir leur certificat de classification de ferblantier ou de charpentier-menuisier. Deuxièmement, les employeurs doivent engager des salariés qui détiennent des cartes de qualification de ferblantier ou de charpentier-menuisier, alors qu'ils payaient le monteur-mécanicien 14,20 $ l'heure pour les travaux de pose de déclin d'aluminium. Troisièmement, les monteurs-mécaniciens reçoivent une carte d'apprenti ferblantier et d'apprenti charpentier-menuisier et doivent subir les examens appropriés. Quatrièmement, pendant la période où le travailleur est apprenti ferblantier ou apprenti charpentier-menuisier, il doit évidemment travailler sous la surveillance immédiate d'un travailleur qualifié.

À cause de la norme 5-1, il en résulte que la grande majorité de ces travaux est maintenant exécutée par des charpentiers-menuisiers à des taux horaires plus élevés. Pourtant, ces travailleurs ne sont ni plus qualifiés ni plus compétents que les autres travailleurs en provenance de l'industrie du verre plat. De fait, nous oserions même affirmer que ces derniers possèdent une plus grande expérience en ce domaine et travaillent avec une plus grande rapidité. Nous nous retrouvons donc devant la situation où des travailleurs classés comme apprentis supervisent le travail d'autres travailleurs classés comme qualifiés.

Devant cet état de fait, la conclusion suivante s'impose. D'une part, les coûts de main-d'oeuvre seront beaucoup plus élevés pour l'exécution des travaux concernés.

D'autre part, les travailleurs autrefois qualifiés qui ne peuvent ou ne veulent obtenir les certificats requis prennent le chemin du travail au noir.

Le règlement sur le placement des salariés dans l'industrie de la construction. Tout le monde sait ou devrait savoir, et plus spécialement ceux qui ont à légiférer, que le secteur de la construction résidentielle a un caractère cyclique essentiellement attribuable à deux facteurs importants: le climat et la Loi sur la Régie du logement. Ces deux éléments font que, dans une grande proportion, les gens emménagent dans leur propriété ou logement entre juin et septembre et, plus particulièrement, le 1er juillet. Il va sans dire que les entreprises de construction en subissent les contrecoups et doivent produire avec une plus grande intensité dans un laps de temps relativement court, ce qui entraîne une augmentation importante dans l'embauche des salariés.

De ce seul fait, les entreprises se retrouvent très souvent face à une pénurie de main-d'oeuvre. À titre d'exemple, en avril 1983, les employeurs ont dû faire face à une pénurie de main-d'oeuvre causée par une production importante conjuguée à des conditions climatiques peu clémentes au printemps, retardant ainsi l'échéancier des travaux. Au cours de cette période, les employeurs n'ont pu trouver sur le marché des travailleurs qualifiés pour l'exécution des travaux de fondation, de pose de planches de gypse, de pose de revêtement et, notamment, la pose de briques. (18 h 30)

Ils auraient dû, en conséquence, payer leurs salariés à temps et demi ou à temps double pour être en mesure de respecter les délais de livraison de leurs unités. Toutefois, nous sommes persuadés que les heures déclarées à l'OCQ ne reflètent certainement pas cet état de fait. Pourtant, le nombre de mises en chantier pour 1983 s'est soldé par 40 318 unités. On peut alors se demander quelle aurait été la situation si les secteurs commercial et industriel avaient connu une période normale de construction.

Ceci nous amène donc à poser la question classique: Alors que l'on déplore un haut taux de chômage et que l'on a disqualifié 30 000 travailleurs en 1982, comment peut-on justifier que l'offre de la main-d'oeuvre ne soit pas suffisante pour répondre à la demande?

Il est évident que le contingentement produit par l'application du règlement sur le placement des salariés de la construction est responsable des difficultés de recrutement de la main-d'oeuvre. Le renouvellement des certificats de classification étant fondé sur le nombre d'heures effectuées par les salariés, les bassins régionaux de main-d'oeuvre sont substantiellement réduits lorsqu'il y a une diminution de l'activité

économique. En effet, le contingentement ainsi provoqué par le règlement sur le placement entraîne des pénuries de main-d'oeuvre ne permettant pas aux entrepreneurs de satisfaire à la demande durant les périodes plus actives de l'année ou dans les situations de reprise économique.

Ceux qui embauchent des salariés sont généralement des employeurs spécialisés qui doivent solliciter des contrats dans les régions limitrophes et même un peu partout dans la province. Ainsi, lorsqu'ils ont à exécuter des travaux à l'extérieur de leur région, ils doivent accorder priorité aux salariés domiciliés dans la région où sont effectués les travaux et ce, au détriment de leurs propres salariés non permanents. Par ailleurs, lorsqu'ils ont à exécuter des travaux dans leur propre région dans une situation de pénurie de main-d'oeuvre, les employeurs se doivent d'engager les salariés classifiés provenant d'une autre région, entravant ainsi la formation d'une relève compétente, sans compter que ceci . entraîne de surcroît des frais de déplacement ou d'hébergement.

M. Deslauriers: Conclusion et recommandations. L'activité économique a atteint son plus haut niveau en 1976 avec 68 748 mises en chantier et son plus bas niveau en 1982 avec 23 492 ventes, pour ensuite atteindre 40 318 en 1983. Le service de recherches économiques de l'APCHQ prévoit pour 1984 un maximum de 30 000 unités. Nous retenons aussi de notre exposé qu'au cours des années 1976 à 1983 la construction faisait l'objet, d'une façon ou d'une autre, de programmes de subventions.

D'autre part, nous avons démontré que deux éléments importants empêchaient l'industrie de la construction résidentielle de réaliser les 40 000 logements qui seraient nécessaires pour satisfaire le besoin annuel de la population québécoise: les coûts de financement hypothécaire et les coûts de construction. Le Québec a peu de contrôle sur le premier aspect bien que l'APCHQ ait proposé un régime enregistré de prêts hypothécaires, couramment le REPHY, qui adoucirait considérablement l'impact des taux d'intérêt élevés. Nous réitérons au gouvernement québécois notre invitation à poursuivre son étude du REPHY en vue de relancer les négociations avec le gouvernement fédéral, afin que cette mesure ou une mesure semblable voie son application dans les plus brefs délais possible.

Cependant, le Québec peut faire beaucoup pour réduire les coûts de construction et ainsi résoudre une crise de logement qui n'ira qu'en s'aggravant si rien n'est entrepris. Dans une approche assez générale, un train de mesures de rationalisation et une plus grande cohérence des interventions des pouvoirs publics additionnés de certaines actions concrètes du gouvernement, en plus d'une compréhension du monde syndical, seraient suffisants pour ramener notre industrie à un état concurrentiel.

Voyons les principales mesures. Le secteur de la construction résidentielle est depuis 1968 à la remorque des secteurs commercial, industriel et institutionnel. Comme on le mentionnait, il n'y a aucune rationalité qui puisse supporter cet état de fait, sinon le fait sociologique du syndicalisme et la volonté politique d'antan d'une négociation unique pour l'industrie de la construction.

Nous sommes donc d'avis que le gouvernement reconnaisse un statut particulier pour le secteur résidentiel en vue de permettre la négociation de conditions particulières, tout en décrétant un salaire minimum susceptible de concurrencer le marché noir, ainsi qu'un salaire maximum équivalant au salaire versé dans les autres secteurs de l'industrie de la construction. De cette façon, on permettra aux vraies forces du marché, l'offre et la demande en main-d'oeuvre, de se manifester dans un monde réaliste. Cette mesure permettra aussi à l'employeur de payer ses salariés selon leur compétence et leur rentabilité.

Le secteur de la construction résidentielle est essentiellement composé de petites entreprises employant souvent moins de cinq salariés. Cela a été mentionné tantôt. Soumises elles aussi à l'application du règlement sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, ces petites entreprises sont astreintes à respecter le rapport 5-1 et sont donc, en conséquence, tenues d'engager cinq travailleurs qualifiés pour un apprenti. Comme elles exécutent la majorité de leurs travaux sur des chantiers de construction réunissant cinq travailleurs ou moins, l'on peut donc affirmer que ces entreprises sont presque constamment limitées à n'avoir qu'un seul apprenti à leur emploi. On peut donc imaginer facilement toutes les économies qui résulteraient en coûts de main-d'oeuvre pour ces petites et moyennes entreprises si le ratio compagnon-apprenti était ramené à un pour un. Outre l'avantage énoncé ci-dessus, l'assouplissement de cette norme permettrait aux entrepreneurs de participer davantage à la formation de la main-d'oeuvre et d'éviter ainsi d'avoir à faire face à une pénurie de travailleurs qualifiés pendant les périodes de forte production ou, pis encore, de devoir agir dans l'illégalité.

Plusieurs travaux exécutés quotidiennement sur des chantiers de construction résidentielle ne requièrent pas de qualifications particulières, mais simplement une habileté de la part du travailleur. Cela nous conduit à affirmer que le secteur de la construction résidentielle devrait faire l'objet d'une libéralisation de la

juridiction des métiers; en d'autres termes, le décloisonnement des tâches.

Aux fins d'assurer aux employeurs une main-d'oeuvre qualifiée et en quantité suffisante pour satisfaire la demande; aux fins de respecter la liberté des entrepreneurs d'engager les travailleurs qualifiés de leur choix et de respecter le droit des salariés compétents de travailler; finalement, pour permettre une diminution des coûts de la construction, l'APCHQ recommande l'abrogation du règlement de placement.

Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Harel): M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente. Merci également à nos invités, particulièrement à ceux qui nous ont présenté le mémoire. Je ne vais pas entreprendre de le discuter longuement, ni non plus d'amorcer un dialogue qui pourrait être long, parce que j'ai essentiellement conscience qu'on reprendrait, à toutes fins utiles, les discussions qui ont été faites depuis les trois jours que nous sommes là.

Cependant, puisque la Loi sur les relations du travail dans l'indusrie de la construction est celle qui prévoit les modalités de négociation de conventions collectives, j'aurais un renseignement à vous demander à cet égard. Cette loi a de telles dispositions qu'elle a réuni, sous une même association, et strictement pour les fins de la négociation d'une convention collective, tous les représentants patronaux sous l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Est-ce que, dans l'état actuel des choses, au-delà, évidemment des difficultés tout à fait normales que n'importe quelle relation humaine peut engendrer, votre association est satisfaite du mandat exercé par l'association habilitée à vous représenter, pour les fins, encore une fois, de la négociation d'une convention collective?

M. Deslauriers: Je vais demander à M. Gosselin de répondre à votre question, M. le ministre.

M. Gosselin (Conrad): D'abord, M. le ministre, à titre d'administrateur des deux associations, je crois qu'il va de soi que la structure actuelle, la loi étant ce qu'elle est, répond exactement aux besoins des constructeurs d'habitations. Actuellement, l'AECQ et le conseil d'administration défendent très bien le dossier du secteur résidentiel. Dans le passé, les entrepreneurs du résidentiel eux-mêmes ne se sont probablement pas suffisamment occupés de participer à leur association. Il semble maintenant y avoir une prise de conscience de ce côté et tout semble être rentré dans l'ordre.

M. Fréchette: Le mémoire de quelques-unes des associations patronales qu'on a entendues plaide dans le sens qu'il faut conserver cette négociation sectorielle et qu'il faut conserver ce décret unique, tel que le prévoit actuellement la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Par ailleurs, vous prenez la position qui va à l'encontre de cette position; et il n'y a rien d'extraordinaire là-dedans et il n'y a rien de répréhensible là-dedans non plus. Pourriez-vous, pour la bonne compréhension du dossier, seulement préciser les motifs pour lesquels vous croyez, vous les membres de l'APCHQ, qu'il devrait y avoir effectivement deux décrets, si j'ai bien compris votre argumentation?

M. Rousseau: En fait, M. le ministre, pas nécessairement. Ce que nous désirons, c'est que, dans la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, il soit reconnu dans la négociation, en tout cas à tout le moins pour le secteur de la construction résidentielle, que les vrais entrepreneurs en construction résidentielle soient en mesure de statuer sur leurs propres conditions. On ne veut plus être à la remorque des autres entrepreneurs des autres secteurs. On veut dire par là qu'il est possible, dans un même décret, de négocier des conditions particulières, mais que les conditions s'adressant à tel type d'entrepreneur soit décidées par lui, surtout au niveau du secteur résidentiel.

M. Fréchette: Est-ce que vous avez complété, M. Rousseau?

M. Rousseau: Oui.

M. Fréchette: Oui. Cela clarifie la situation, parce que au lieu de parler de deux décrets ou de deux conventions collectives, on parle d'une seule, mais qui aurait cependant des chapitres distincts pour les deux secteurs concernés.

M. Rousseau: On n'est pas à cheval sur les modalités à ce chapitre.

M. Fréchette: Non, mais je pense que c'est important de clarifier cette situation pour être bien sûr qu'il n'existe aucune espèce de confusion.

M. Rousseau: Pour la simple raison, si vous me permettez d'ajouter, aussi qu'il y a certaines conditions, soit au niveau du normatif, qui s'appliquent dans les autres secteurs et qui s'appliquent également au secteur résidentiel, avec lesquelles les gens sont capables de vivre. Mais au niveau salarial, je pense que vous serez d'accord avec nous pour dire qu'à un moment donné, cette question ne fonctionne plus; on n'est

plus capable d'absorber les taux des salaires dans le domaine résidentiel, au même titre que dans les secteurs commercial et industriel, alors que les contrats émanent pour la plupart des gouvernements et que la capacité de payer n'est pas la même. Chez nous, nous faisons affaires avec des consommateurs, tandis que les autres entrepreneurs font affaires avec des gouvernements. Le donneur d'ouvrage n'est pas le même et sa capacité de payer n'est pas la même. Je pense qu'il y a peut-être quelqu'un qui voudrait ajouter quelque chose.

M. Deslauriers: Cela complète.

M. Fréchette: Cela va pour cet aspect du dossier. Quant au reste, je l'ai dit tout à l'heure, vous avez essentiellement abordé les questions que d'autres associations, autant patronales que syndicales, ont abordées. Que l'on pense, par exemple, au phénomène qu'on a convenu d'identifier comme étant le travail au noir ou l'économie souterraine ou occulte, la qualification et la formation professionnelles, le placement, le ratio. Tout cela est très clair dans votre mémoire. Cela va évidemment faire partie de tout le matériel dont nous allons disposer pour rendre les décisions. Cela va quant à moi. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: C'est M. le député de Pontiac.

La Présidente (Mme Harel): De Pontiac.

M. Middlemiss: Merci, Mme la Présidente. Je dois féliciter et remercier les gens de leur mémoire. Je pense qu'il était clair, précis et très à point. Vous avez identifié les problèmes qui existaient. Vous avez démontré par des statistiques quels étaient les facteurs qui affectaient le plus l'augmentation du coût des maisons. Vous avez aussi démontré que les subventions du gouvernement et de tous les paliers de gouvernement dans les années creuses ont certainement compensé pour l'augmentation des salaires et que cela rendait votre produit acceptable, selon la capacité de payer des gens aujourd'hui. On voit maintenant qu'avec le départ des subventions, le coût augmente de beaucoup, que la capacité de payer des gens n'est plus la même puisque leurs revenus n'ont pas augmenté en conséquence.

Je suis moi-même de l'entreprise privée. On s'aperçoit que vos marges de profits sont de l'ordre de 12%. Je ne pense pas qu'on puisse vous dire que vous retirez des profits exorbitants. Vous avez fait une analyse et je me fie sur vos statistiques. Je pense aussi que votre analyse est à point et cela démontre bien que vous cherchez une solution. Car vous avez un marché qui est là et celui-ci ne pourra pas se permettre le luxe d'acheter une maison si les prix continuent d'augmenter. (18 h 45)

Vous voulez trouver un moyen de maintenir votre marché et de vendre votre produit. La façon dont vous le voyez, c'est que si on peut maintenir le coût de la main-d'oeuvre à un taux raisonnable, on pourra satisfaire à la demande de 40 000 unités de logement, ce qui représente les besoins de la société québécoise.

Vous demandez d'enlever le règlement de placement et l'Office de la construction du Québec. De quelle façon envisageriez-vous de faire le placement si cette solution était retenue par le ministre? Avez-vous des solutions à suggérer sur la façon de faire le placement?

M. Deslauriers: M. Gosselin.

M. Gosselin: En ce qui concerne le règlement de placement, je pense qu'il a été bien discuté au sein de cette commission. La position que défend l'AECQ, bien sûr, est la position de l'habitation. Dans l'habitation, les conditions de placement sont différentes parce que les employeurs utilisent plus régulièrement les mêmes travailleurs. On a vu que la plupart des entreprises utilisent très peu de travailleurs. Normalement, ce sont les mêmes. Des inconvénients majeurs sont causés, bien sûr, par le règlement de placement; lorsqu'il y a eu diminution de la demande, les entreprises dont les travailleurs n'ont pu effectuer les 1000 heures requises se sont vues dans l'obligation d'employer des travailleurs qui provenaient, par exemple, de la Baie James parce que, bien sûr, il y avait moins de travaux là-bas. Les entreprises de construction doivent et ont dû utiliser des travailleurs habitués à travailler dans des chantiers industriels et commerciaux pour faire des travaux d'habitation. C'est un des inconvénients majeurs subis. Je pense que la position défendue par l'AECQ en regard du règlement de placement correspond exactement aux attentes de l'habitation.

La Présidente (Mme Harel): M. le ministre de l'Habitation, vous avez demandé la parole. Il nous faut le consentement de cette commission.

Des voix: Consentement.

La Présidente (Mme Harel): Consentement. La parole est au ministre de l'Habitation.

M. Tardif: Mme la Présidente, je remercie l'APCHQ de son mémoire qui va nous permettre justement d'appuyer peut-être

sur des chiffres certaines impressions que nous pouvions avoir quant à l'évolution des coûts dans la construction. C'est vrai que l'APCHQ s'est préoccupée depuis plusieurs années - en tout cas, depuis le temps qui m'a été donné d'être en contact avec elle comme ministre de l'Habitation - de maintenir un volume d'activités dans la construction. C'est spontanément que cette association s'est associée à cette activité qu'a été Corvée-habitation pour laquelle, d'ailleurs, je la félicite, tout comme les autres associations patronales qui ont fait leur bout de chemin.

Je voudrais, Mme la Présidente, essayer de concilier un certain nombre de chiffres parce que je prends cela très au sérieux. J'ai essayé de faire de petits calculs rapides. Cela va être difficile parce que le résumé qu'on nous a donné n'est pas paginé, mais si on va à la page intitulée "Introduction", on dit: "La période 1979-1981 est celle où le ménage québécois moyen a perdu ses espoirs d'accession à la propriété." Je voudrais simplement faire remarquer à ce sujet que depuis 1981, il y a maintenant une majorité de propriétaires au Québec et une minorité de locataires. La tendance est inversée depuis 1976, précisément. Donc, tous les espoirs ne sont pas entièrement perdus. Mais je constate ceci, par exemple. On dit: "En effet, au cours de cette période - je présume qu'on fait allusion à celle de 1979-1981 qu'on vient de citer - qui correspond à la période du dernier décret..." J'ai vérifié et le dernier décret couvre la période du 1er mai 1982 au 30 avril 1984. Donc, on ne parle pas de la même période, si je comprends bien. C'est cela?

Une voix: M. Gosselin.

M. Gosselin: Si vous me le permettez, M. le ministre, cette partie du mémoire reprenait les arguments qui avaient été présentés en 1982. C'est dans ce contexte qu'il faut situer ces allégations.

M. Tardif: Bon! Alors, on ne parle pas de la période du décret...

M. Gosselin: Lorsqu'on parle du dernier décret, on parle bien de 1979-1981.

M. Tardif: ...et on ne parle pas...

M. Gosselin: Parce qu'ici, on répète ce qui avait déjà été dit en 1982.

M. Tardif: D'accord. Donc, on ne parle pas du décret de 1982 qui a prévu le 10%-10% d'augmentation, parce qu'une bonne partie de l'argumentation est fondée là-dessus plus loin. On le verra. Donc, on parle de deux périodes différentes.

Il y a une deuxième chose dont je veux m'assurer. On dit: "En effet, au cours de cette période - donc, qui correspond à ce décret - le prix des maisons s'est accru de 19%. Je présume qu'on fait référence à la période 1979-1981 et non pas à celle de 1982-1983, donc pas celle du dernier décret, encore une fois. Est-ce que c'est exact?

M. Deslauriers: La période 1979-1981 est celle où le ménage québécois moyen a perdu ses espoirs d'accession à la propriété. C'est, en effet, au cours de cette période, 1979 à 1981. C'est cela?

M. Tardif: Je lis tout cela, sauf qu'évidemment, quand on parlait de la période qui correspond à celle du décret, si je fais référence, environ dix pages plus loin, à votre tableau, je constate que vous donnez le prix moyen des maisons, en 1982, à 57 000 $, et, en 1984, à 60 000 $, soit une augmentation de 3000 $. Est-ce que c'est exact?

Des voix: Oui.

M. Tardif: 3000 $, sur la base de 57 000 $, cela fait, selon moi, 5,2% d'augmentation. Est-ce que c'est cela?

M. Moisan: C'est cela. Si vous avez fait le rapport entre 60 114 $ et...

M. Tardif: 3000 $ sur 57 000 $, cela fait donc une augmentation de 5,2%. Est-ce que c'est cela?

M. Moisan: Oui.

M. Tardif: Quand on parle d'augmentation de 19% au cours de cette période et qu'on relie cela au 10%-10% du décret qu'on a évoqué un peu plus loin, je pense qu'on fait référence à deux choses distinctes. L'augmentation, en fait, n'est que de l'ordre de 5,2% au cours de ces deux années. Finalement, l'augmentation des deux derniers 10% dans le décret se traduit par une augmentation inférieure à 6% et, dans les faits, comme j'ai eu l'occasion de le dire hier à la suite du témoignage, je pense, de la FTQ, étant donné que la main-d'oeuvre représente 30% du coût d'une maison...

Une voix: ...

M. Tardif: Pardon?

M. Rousseau: ...un peu plus.

M. Tardif: 30%, enfin... Selon Statistique Canada - vous me corrigerez - on nous dit que c'est 30% pour la main-d'oeuvre, 41% pour les matériaux et 29% pour ce qu'ils appellent la marge bénéficiaire brute, mais qui, en réalité, inclut le coût du

terrain et un tas de choses. Est-ce que vous êtes d'accord?

M. Rousseau: Si je me rappelle bien, nos statistiques indiquaient environ 35%, je pense, en main-d'oeuvre, 35% à 40% pour l'habitation.

M. Moisan: En fait, dans le mémoire de 1982, on avait pris des chiffres qui provenaient du ministère de l'Industrie et du Commerce pour l'année 1974. À ce moment-là, on avait fait une tournée des chantiers de construction et on avait relevé les coûts, etc. Dans le prix de vente d'une maison, on avait 15% pour le terrain et 85% pour la structure. Ces 85% se divisaient en 39% pour la main-d'oeuvre, 34% pour les matériaux et 13% pour le reste qui comprend la marge bénéficiaire brute et tous les autres frais.

M. Tardif: Vous aviez exclu le terrain de cela...

M. Moisan: C'est cela, parce que en fait...

M. Tardif: ...alors que dans les chiffres de Statistique Canada, le 30-41-29...

M. Moisan: Non. Ce que je vous donne, c'est 39% en 1974. Je ne sais pas de quelle année sont ceux que vous citez de Statistique Canada.

M. Tardif: D'accord. En gros, vous dites: Le coût de la main-d'oeuvre à 35%, une augmentation de 10% du coût de la main-d'oeuvre, cela se traduit donc par une augmentation du coût de la maison de 3,5%. Est-ce que vous êtes d'accord?

M. Moisan: Ce seraient des mathématiques directes.

M. Tardif: D'accord. Ce sont des mathématiques élémentaires, mais qui visent à replacer, les choses, je pense. J'essayais de comprendre d'où venaient les 19% et je me rends compte qu'on ne faisait pas référence, encore une fois, à la même période.

L'autre donnée importante qui me préoccupe comme ministre de l'Habitation et que vous évoquez dans votre mémoire, c'est quand vous dites: La source la plus importante de la hausse des coûts est l'augmentation de la valeur des terrains qui est égale à 224%.

M. Moisan: Oui.

M. Tardif: C'est cela.

M. Moisan: En 1979, c'est ce qu'on avait calculé à l'aide des...

M. Tardif: Est-ce que ce phénomène est relié à la pratique qui se répand de plus en plus et que vous évoquez, mais très brièvement, de l'inclusion par les municipalités du coût des infrastructures dans le coût des terrains?

M. Moisan: Pas vraiment, pas à ce moment-là. Quand on est arrivé au chiffre de 224%, on avait fait un tableau en partant de 1974, la répartition dont je viens de faire état, et on avait indexé chaque coût pour les années jusqu'en 1981, et on voyait le résultat du terrain et de la marge bénéficiaire brute qui, finalement, étaient des résultats, parce qu'on n'a pas d'indice de croissance des coûts des terrains viabilisés et de la marge bénéficiaire brute. C'est un résultat, si vous voulez, un résidu après la répartition pour les coûts dont on connaît les marges, les parts et les croissances. Dans ce tableau, on arrête en 1981.

M. Tardif: Je constate, par ailleurs dans le tableau À , indice des coûts de la main-d'oeuvre dans la construction résidentielle au Québec, base charpentier-menuisier, 1971 à 1981, est-ce que c'est ce que vous me donnez? Là vous donnez ici, taux horaire, coût à l'employeur, indice du coût à l'employeur, on constate que sur la base 100 en 1971, l'indice du coût à l'employeur vous le situez à 330,3 en 1981. C'est cela? J'essaie de m'expliquer peut-être parce que vous n'avez pris qu'un seul métier.

M. Moisan: ...le plus important dans la construction résidentielle.

M. Tardif: Encore une fois, en faisant référence au rapport de Statistique Canada pour tous les corps de métiers dans le domaine de la construction, sur la base 100 en 1971, Statistique Canada donne 260 indice en 1981 et non pas 330.

M. Moisan: Cela est l'indice pour toute la main-d'oeuvre impliquée dans une construction résidentielle?

M. Tardif: C'est cela.

M. Rousseau: II parle pour l'ensemble des secteurs.

M. Tardif: Pour tout le Québec... M. Rousseau: Pour tout le Québec.

M. Tardif: ...Statistique Canada, le numéro de l'annuaire, je vous le donnerai. On part à la base 100 en 1971 pour arriver à la base 260 en 1981. C'est parce que cela m'apparaît une très grosse différence par rapport à 330.

M. Rousseau: Est-ce qu'ils font la distinction au niveau des secteurs? Non. Ils prennent l'ensemble...

M. Tardif: Évolution de l'indice des prix dans la construction, main-d'oeuvre, matériaux et marge bénéficiaire, Statistique Canada. Alors que pour les matériaux, incidemment, vous me donnez un indice de 236. Statistique Canada me donne 234. C'est très près. D'accord.

M. Moisan: Ce qu'on cite dans le tableau, ce n'est pas l'indice de Statistique Canada, c'est l'indice qu'on développe et faites attention aussi, c'est le coût à l'employeur. Je ne sais pas, je ne me rappelle pas exactement ce que Statistique Canada utilise pour faire son indice, mais dans le coût à l'employeur, on a tous les frais qui sont payés par l'employeur. Les 10% de vacances, la CSST qui varie, l'Office de la construction, etc.

M. Rousseau: De toute façon, ce sont les chiffres réels qu'on a pris au décret et quand on fait les calculs, ça arrive à cela. Ce que Statistique Canada a pris comme chiffres, je n'ai aucune idée. Ce sont vraiment les chiffres en vertu du décret.

M. Moisan: Quant à moi, je pense que Statistique Canada a utilisé le taux horaire plus peut-être un taux pour les vacances ou quelque chose du genre parce qu'il faut qu'ils fassent quelque chose de comparable pour les autres provinces aussi et qu'on puisse comparer sur le même pied.

M. Tardif: Écoutez, encore une fois sujet à vérification, ce qu'on utilisait au ministère et ce qu'on a, ce sont les données publiées par Statistique Canada qui nous donnait une augmentation de 260 sur dix ans et non pas de 330 alors que pour les matériaux, à 2% près, c'est assez semblable.

M. Rousseau: Comme on vous le disait, ce sont les taux payés en vertu du décret. Il n'y a qu'à faire une addition mathématique.

M. Tardif: D'accord. Maintenant, dans le mémoire, a un moment donné, il est fait état de ces conditions qui seraient beaucoup plus contreignantes au Québec. Je reprends toujours Statistique Canada pour l'Ontario parce qu'il nous donne les chiffres pour l'Ontario, où il nous donne des indices de 239, toujours sur la base 100 en 1971. Donc, de 239 en 1981 pour la main-d'oeuvre et de 238 pour les matériaux. En d'autres termes, un petit peu plus pour la main-d'oeuvre. Enfin, une augmentation moins forte pour la main-d'oeuvre et plus forte pour les matériaux.

M. Moisan: Dans la construction résidentielle, cela ne sert pratiquement à rien de comparer les indices de coût de la main-d'oeuvre pour les autres provinces parce que la main-d'oeuvre des autres provinces pour la construction résidentielle n'est pas syndiquée. Cela a été relevé au mémoire de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec à pratiquement au-delà de 90%. De sorte que Statistique Canada ne fait pas une enquête de marché. Elle fait référence aux conventions collectives. Donc, la comparaison est...

M. Tardif: C'est parce qu'à un moment donné on prend les données de Statistique Canada pour les matériaux. Prenons le coût des terrains. (19 heures)

M. Moisan: On ne l'a pas fait ressortir dans les statistiques ici parce qu'on n'a pas de départ en 1971, mais on l'a en 1976, d'accord? On a fait un deuxième tableau de 1971 à 1983 et, de 1976 à 1983, les coûts de la main-d'oeuvre pour l'employeur dans la construction résidentielle ont augmenté de 95%; et de 1976 à 1983, le coût des terrains, tel que calculé par Statistique Canada, a augmenté d'environ 79%. On retrouve donc, encore une fois...

M. Tardif: Ce qui situerait le prix moyen d'un terrain à Montréal, par exemple, à combien?

M. Moisan: Dans les chiffres de Statistique Canada, on n'a pas le coût...

M. Tardif: Le dernier chiffre de Statistique Canada de 7000 $ a-t-il du sens dans la région de Montréal?

M. Moisan: Pour quelle année? Pour 1983?

M. Tardif: Pour l'année 1981.

M. Moisan: Pour l'année 1981.

M. Tardif: Un coût de 7000 $.

M. Moisan: C'est très difficile...

M. Tardif: Le prix moyen?

M. Moisan: C'est assez difficile de...

M. Tardif: Comparativement à 35 000 $ à Toronto, cela se peut-il?

M. Moisan: C'est dans l'ordre des choses.

M. Tardif: Cela est possible. Il y a donc un avantage comparé à certains égards, du moins quant au prix des terrains?

M. Rousseau: Tout à fait d'accord.

M. Tardif: Vous êtes tout à fait d'accord? À un moment donné... Pardon?

M. Rousseau: Une chance qu'on a cet avantage.

M. Tardif: C'est cela. À un moment donné, il y a quelque chose qui doit expliquer que, pendant les six premiers mois de l'année 1984, la construction résidentielle dans l'ensemble du Canada et en Ontario a baissé de 25% alors qu'au Québec, elle a baissé un peu, mais de 2%. Il doit y avoir quelque chose qui explique qu'il se bâtit des maisons quand même.

M. Rousseau: Les programmes. Bien oui, vous voulez qu'on vous dise que c'est à cause de Corvée-habitation?

M. Tardif: Non, mais je ne voudrais pas...

M. Rousseau: Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

M. Tardif: Je pense qu'on n'a pas intérêt, ni vous, ni nous, à ce qu'on dépeigne la situation tellement noire, n'est-ce pas, que les gens disent qu'il ne faut plus bâtir, qu'il ne faut plus rien faire. J'essayais de comprendre les pourcentages qui sont cités; cela me préoccupe également. Je cite le résumé du mémoire, à la page qui suit le tableau Prix des effectifs payés après subvention et mise en chantier où vous dites: "II ne faut pas se surprendre d'un tel résultat qu'en 1984, le prix effectif d'une maison passe à 58 000 $ et que le marché retrouve sa faiblesse du début des années quatre-vingt". Vous dites: "II ne faut pas se surprendre d'un tel résultat; il était prévisible. Des documents originant du gouvernement du Québec en founissent l'explication lorsqu'ils estiment le nombre de ménages familiaux locataires de 25 à 54 ans pouvant assumer les mensualités de diverses valeurs de logements, selon différents taux d'intérêt sans consacrer plus de 25% de leurs revenus aux frais de logement en 1981. Selon ces estimations, le passage des prix de logements neufs de 50 000 $ à 55 000 $, à taux d'intérêt constant, retire du marché environ 30% à 35% d'acheteurs potentiels." Je présume que vous faites référence à un tableau que j'ai remis à l'OPCHQ il y a quelques jours seulement?

M. Rousseau: Enfin, non. Je pense que je fais simplement référence à des documents qui ont servi... Évidemment, lors de la préparation du programme Corvée-habitation, il fallait savoir exactement quel était le taux d'intérêt qui pouvait permettre...

M. Tardif: Bon. Écoutez, à partir de ces données, vous dites: "À taux d'intérêt constant, cela retire du marché - le fait d'augmenter de 5000 $ - de 30% à 35% des acheteurs." En faisant des calculs, j'arrivais à 22% des acheteurs et non pas 30% à 35%, mais il faudrait peut-être voir sur quelle base c'est calculé.

M. Moisan: À quel taux avez-vous calculé cela? À 9 1/2%?

M. Tardif: Moi, j'ai calculé au taux actuel, soit environ 14%.

M. Moisan: Pour l'année 1981?

M. Tardif: Enfin, à 50 000 $ - peu importe l'année - par rapport à 55 000 $. Mais ce à quoi je veux en venir...

M. Moisan: Oui.

M. Tardif: ...c'est qu'une augmentation de 2% du taux d'intérêt produit le même résultat. Vous êtes d'accord avec cela?

M. Moisan: C'est fort probable, oui, que cela revient au même.

M. Tardif: Si bien que le passage des taux d'intérêt de 10% à 14% récemment a eu le même effet que si le prix des maisons avait augmenté de 10 000 $.

M. Moisan: C'est fort probable. M. Tardif: C'est cela?

M. Moisan: C'est fort probable, parce que... Oui.

M. Tardif: Or, on consacre beaucoup d'énergie ici à démontrer l'impact du coût des maisons et l'impact du coût d'un facteur qui est la main-d'oeuvre, alors que le facteur de loin le plus important est celui des taux d'intérêt.

M. Moisan: Nous, on a un problème: on n'a absolument aucun contrôle sur les taux d'intérêt.

M. Tardif: Nous non plus. On voudrait en avoir un.

M. Moisan: Voulez-vous qu'on essaie d'avoir un contrôle sur ce sur quoi on peut en avoir un? D'accord?

M. Gosselin: M. le ministre. M. Tardif: Oui.

M. Gosselin: J'aimerais ajouter ceci: En plus de n'avoir aucun contrôle sur le taux d'intérêt, tout comme vous d'ailleurs... Le taux d'intérêt est variable. Il arrive qu'il monte; il arrive qu'il descend. Lorsqu'il descend, bien sûr, il permet à un bassin de population plus grand d'accéder à un logement, tandis que le taux de la main-d'oeuvre ne descend pas après avoir été négocié, et on doit vivre avec cela.

M. Tardif: Mme la Présidente, il est vrai qu'il y a des fluctuations du taux d'intérêt, à part cette année record qu'on invoque justement, 1976. C'est d'ailleurs celle qu'on connaît comme étant le sommet dans l'habitation, sauf qu'il a quelque chose, méthodologiquement parlant, d'un peu dangereux de prendre une année repère qui est une année exceptionnelle. Si on prend la décennie soixante-dix, il faudrait parler de 52 000 mises en chantier en moyenne, mais de prendre ceci justement à un moment où les taux d'intérêt réels étaient négatifs, une fois déduit le taux d'inflation... Là, c'est une situation qui influe beaucoup. Je pense que l'APCHQ, lorsqu'elle a décidé de souscrire à Corvée-habitation, s'est attaquée au problème des taux d'intérêt. À l'heure actuelle, cela reste de facteur no 1, au moment où nous nous parlons.

M. Rousseau: En partie, je pense que vous avez raison, mais regardez l'année 1976 où on fait allusion à 68 000 unités d'habitation. Il y a une chose qui est certaine: à ce moment-là, il y avait deux programmes, je pense, sur le marché. Il y avait le programme PAT et le programme PALL. D'ailleurs, je pense que le programme PALL a été sorti en 1975. Déjà, la Société canadienne d'hypothèques et de logement, cet automne précisément, avait pris des engagements et les mises en chantier se sont reflétés au cours de l'année 1976. C'est évidemment, je pense, peut-être souffler un peu la production en 1976 à cause des engagements de 1975, mais il n'en demeure pas moins que le seul temps où on a eu des grandes années de production depuis quelques années, c'est lorsqu'il y avait des programmes de subvention. Regardez encore actuellement. Vous dites: C'est le taux d'intérêt; c'est seulement le taux d'intérêt. Corvée-habitation est à 9,5% pour des maisons de 60 000 $ excluant le terrain, les infrastructures, etc. On sait, depuis la phase V, qu'à toutes fins utiles le marché est complètement tombé. Pourtant, le taux d'intérêt est alléchant; 9,5% pour trois ans, cela fait longtemps que je n'ai pas vu cela. Il n'y a pas que le taux d'intérêt; il y a d'autres éléments, et le coût de construction est vraiment important.

M. Tardif: Mme la Présidente, je pense que je vais demander aux gens de mon ministère de regarder attentivement avec l'APCHQ cette progression des coûts, parce qu'elle nous préoccupe également. Je voudrais quand même revenir sur un point où on dit: Depuis 1982, qu'y a-t-il de changé entre la situation qui existait au 31 mai 1982 et celle que nous vivons aujourd'hui? En ce qui concerne une tentative de bonification du règlement sur le placement des salariés dans l'industrie, aucun changement n'est survenu. Il ne faudrait quand même pas oublier que l'adoption récente du Code du bâtiment est venue apporter une simplification très importante dans le secteur de la construction. Évidemment, je ne parle pas de Corvée, d'Équerre et d'autres mesures semblables.

Puisque vous vous préoccupez - vous y revenez dans la conclusion - de la surréglementation, j'ai demandé à un certain nombre d'associations un projet de regroupement de la DGI, la Direction générale de l'inspection, et de la RECQ, la Régie des entreprises en construction, visant précisément à refondre dans une seule loi celles existant actuellement. C'est précisément dans le but de simplifier, de déréglementer. Là-dessus, il me fera plaisir évidemment, en dehors du cadre de cette commission, d'entendre des commentaires de votre association ainsi que toute suggestion qu'elle pourrait nous faire pour maintenir un volume d'activité, enfin de besoin en logements évalué entre 35 000 et 38 000 unités par année. Là-dessus, je suis aussi préoccupé que l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, croyez-moi, à maintenir ce rythme d'activité, parce que 38 000 logements, c'est 38 000 emplois au bas mot. C'est donc très important dans l'économie. Toutes les suggestions sont les bienvenues. Merci, Mme la Présidente.

M. Rousseau: Je m'excuse, pour autant que ces constructions soient exécutées par des entrepreneurs, cela va créer des emplois. Si c'est exécuté par des propriétaires-constructeurs ou si c'est fait au noir, la création d'emplois, c'est vrai, mais cela n'a pas la même signification.

M. Tardif: Est-ce que l'APCHQ - une question, Mme la Présidente - a... Vous évoquez cela dans votre mémoire. Vous parlez de l'autoconstruction. Est-ce que vous avez des chiffres quant au pourcentage des propriétaires québécois qui construisent eux-mêmes leur maison?

M. Rousseau: Je n'ai pas de chiffres précis, mais je n'ai qu'à prendre la rue chez nous - pourtant, je vis dans un milieu qui est relativement à l'aise - et sur 20 maisons, il y en a à peu près douze qui ont été

construites par des constructeurs- propriétaires. Le même individu en a même construit deux ou trois et ce n'est pas par des salariés. C'étaient effectivement des artisans. La seule qui a été construite, je pense, c'est peut-être la mienne, parce que j'étais peut-être trop innocent.

M. Gosselin: Mme la Présidente, je pense que dans rapport de l'AECQ, il y a des chiffres qui sont produits là-dessus et qui varient selon les régions. En région éloignée, en extrême périphérie, c'est catastrophique présentement.

M. Tardif: Qu'est-ce qui est catastrophique?

M. Gosselin: L'autoconstruction.

La Présidente (Mme Harel): C'est l'autoconstruction qui est catastrophique.

M. Tardif: Pour les constructeurs.

M. Gosselin: Pour les constructeurs. Je dis que c'est catastrophique pour les constructeurs, bien sûr.

La Présidente (Mme Harel): D'accord.

M. Tardif: Il y a des gens qui prennent le marteau...

La Présidente (Mme Harel): Le député de Bourassa a demandé la parole.

M. Laplante: Ce ne sera pas long. Je voudrais savoir, dans le domaine de la maison préfabriquée, où il n'y a pas de syndicalisation - je parle seulement de l'usine, cela ne touche pas aux métiers de la construction en sortant - combien il s'en fait?

M. Deslauriers: M. Gosselin étant un spécialiste de la préfabrication, je vais lui demander de répondre à la question.

M. Gosselin: J'aimerais demander au député de Bourassa de préciser sa question, s'il vous plaîti

M. Laplante: J'ai un voisin qui est arrivé avec une maison préfabriquée. Il a mis cela sur son terrain et apparemment, il a épargné quelque 12 000 $ sur sa maison. Je veux savoir comment cela se fait, vu que les syndiqués de la construction ne sont pas dedans, qu'il ne s'en fait pas plus que cela?

Des voix: Ah! Ah!

M. Gosselin: Pourquoi on ne construit pas plus de maisons préfabriquées qu'on ne le fait présentement en usine?

M. Laplante: Pourtant, elle est belle, celle-là.

M. Gosselin: Bien sûr. C'est parce que les coûts de préfabrication en usine - la main-d'oeuvre est meilleur marché, mais il y a des coûts de fabrication... Autrement dit, le coffre d'outils pour le travailleur d'usine ou pour l'employeur d'usine est presque le double du salaire payé dans l'usine, ce qui fait que lorsqu'on additionnel à cela le coût du transport, votre voisin n'a pas vraiment économisé 12 000 $ s'il a fait les travaux sur le chantier avec des travailleurs et des employeurs qualifiés.

M. Laplante: Le salaire moyen en usine est quoi?

M. Gosselin: Le taux horaire moyen en usine peut varier sensiblement autour du coût du décret du bois ouvré, entre 8 $ et 10 $ l'heure.

M. Laplante: D'accord. Maintenant, on va faire un petit examen de conscience, les constructeurs, entre nous. Vous êtes favorables à la protection du consommateur. C'est louable. Vous avez sorti des programmes. Si je ne suis pas satisfait de ma maison, je peux avoir des recours auprès de vous. Bravo là-dessus. Vous parliez des terrains tout à l'heure. Je sais qu'un terrain, il y a dix ans... Celui que j'ai acheté, 37 pieds et demi sur 90 pieds, m'a coûté 2100 $. Aujourd'hui, le même terrain se vend 20 000 $. À Laval, je suis allé en marchander un autour de l'hôpital. Il y a un nouveau développement qui commence là-bas. J'ai voulu en acheter un de 40 pieds sur 100 pieds. On m'a demandé 23 000 $ pour le même terrain qui est un grand champ. Cela fait beaucoup plus que les 200% dont vous parlez, depuis dix ans. Cela fait 1000% de plus seulement sur le terrain. Le salaire de l'ouvrier, je ne crois pas qu'il ait été aussi loin que cela. Il y a une part de responsabilité des entrepreneurs aussi. Il faut retourner en 1967. Dans le temps de l'abondance, de l'Expo, cela ne vous a pas gêné à ce moment-là de donner 1 $ de plus aux travailleurs de la construction.

Des voix: Oh!

M. Laplante: Non! Une minute! De là, les maisons de 1965, 1966 et 1967 ont aussi fait un bond au point de vue du coût. En 1955, j'ai acheté une maison pour 17 000 $ d'un de vos membres qui était un ancien président. En 1967, la même maison était déjà montée à 24 000 $ ou 25 000 $. Cela a monté comme ça. Il y a eu après cela un gel des prix. Il y a eu aussi un gel de la construction en 1970, 1971 et 1972 où les maisons ne se vendaient à peu près pas à ce

moment-là. Il y a eu une stabilité. (19 h 15)

Les Olympiques sont arrivées. C'est la manne qui est arrivée pour vous, si bien que quand on avait besoin d'un entrepreneur électricien, pour un job qui lui coûtait 1000 $, il nous en coûtait 3000 $. On nous disait, à ce moment-là, que l'offre et la demande, cela ne se contrôlait plus et qu'il fallait demander le gros prix. Vous vous êtes fichés du consommateur à ce moment-là et, aujourd'hui, vous êtes en difficulté. Vous faites appel au consommateur aujourd'hui. Sans faire un examen de conscience sur le passé de l'industrie de la construction, on en est arrivé aujourd'hui concernant ces prix, dans la spéculation des terrains...

M. Rocheleau: Mme la Présidente, est-ce que les micros fonctionnent?

Des voix: Ah! Ah! Ah! Une voix: Oui, c'est enregistré. M. Laplante: Oui, c'est enregistré. M. Pagé: Continuez, M. le député.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Bourassa, vous m'avez fait signe tantôt que vous aviez une toute brève question à poser.

M. Laplante: Oui, ce ne sera que cela. Je voudrais vous faire réfléchir à ceci: ce n'est pas toujours l'ouvrier qui est la cause de la hausse de la construction ici. La partie patronale a cette tendance de mettre tout sur le salaire des ouvriers pour essayer de faire bénéficier le consommateur de rabais. Le prix de la maison "usagée" a aussi augmenté. La maison de 17 000 $ s'est vendue 85 000 $, ce que je lui ai dit, une maison payée en 1955.

M. Deslauriers: Votre question, quelle est-elle précisément? À quelle question doit-on répondre?

Une voix: II demande si on se sent responsable.

M. Rousseau: Est-ce qu'on se sent responsable de tout cela? Est-ce que c'est cela que vous voulez savoir?

M. Laplante: Oui.

M. Rousseau: Je vais commencer la réponse et mon ami...

M. Laplante: Ce sera non, mais cela ne fait rien.

M. Rousseau: Non, ce ne sera pas long.

M. Laplante: D'accord.

M. Rousseau: La première chose, c'est que dans notre mémoire, on est très clair. On dit que, depuis fort longtemps, le secteur de la construction résidentielle est à la remorque du secteur commercial, industriel et institutionnel. C'est clair? Cela répond à votre question des Jeux olympiques et d'Expo 67. Lorsque le gouvernement à l'époque est arrivé avec une indexation de 0,85 $ l'heure, on est allé en commission parlementaire pour la dénoncer, mais on n'a pas eu le choix; elle nous a été imposée. À part cela, on a dénoncé le fait qu'à ce moment-là les entrepreneurs avaient même signé des contrats, avaient donné des contrats à des gens pour avoir une unité résidentielle et ne pouvaient pas revenir sur le prix pour être capables de l'ajuster. Or, ce que vous soulevez, c'est-à-dire Expo 67, les grands travaux, etc., vous pouvez peut-être faire ce reproche aux autres secteurs, mais ce n'était certainement pas nos employeurs qui étaient sur ces chantiers. Nous sommes dans la petite construction résidentielle, enfin la petite, toute la construction résidentielle, mais ce ne sont pas des employeurs qui font des grands travaux, dans le domaine industriel.

M. Laplante: Un "building" de 20 étages.

M. Deslauriers: Quant à la valeur des terrains, M. Crochetière pourrait peut-être...

M. Crochetière (Serge): Pour renchérir sur ce que M. Rousseau vient de vous exposer, c'est là précisément le sens de notre mémoire. On ne veut plus avoir à subir des taux imposés ou conditionnés par d'autres secteurs, où les donneurs d'ouvrage n'ont pas la même capacité de payer, où ils ont des clauses d'indexation plus une participation sur l'augmentation des coûts, ce qui n'existait pas pour les gars de l'habitation en 1975 et en 1976.

Quant aux terrains de Laval, ceux dont vous parlez plus particulièrement, ils se situent dans une poche qui a été exemptée du zonage agricole. Tout le pourtour a été zone agricole et, de plus, Laval, depuis l'an dernier, je crois, a commencé à introduire une politique de financement du coût des infrastructures imposé aux entrepreneurs, ce qui explique en grande partie l'augmentation des coûts dont vous venez de parler.

M. Laplante: Simplement pour rectifier.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Bourassa, en terminant.

M. Laplante: II n'y a pas de services. C'est le prix brut du terrain que j'ai

mentionné, sans services. Les services sont additionnels.

M. Pagé: C'est à cause du zonage agricole. C'est encore pire pour vous.

M. Gosselin: J'aimerais ajouter un dernier détail, si Mme la Présidente me le permet.

M. Pagé: Le zonage agricole.

M. Gosselin: J'ai entendu plusieurs fois le député de Bourassa parler des coûts des matériaux, des coûts des terrains. Je lui ferai remarquer que nous n'avons pas tellement de contrôle sur le coût des matériaux. Nous n'en avons même pas du tout. Vous pouvez faire confiance aux entrepreneurs pour magasiner adéquatement concernant le coût de l'achat de leurs matières premières et le prix des terrains. Une des composantes de nos coûts sur laquelle nous avons un certain contrôle, du moins nous l'espérerions si le décret n'était pas toujours décrété, c'est la main-d'oeuvre. C'est pour cette fin qu'on est ici et on veut défendre, bien sûr... On se demande aussi pourquoi un travailleur de la construction au Québec doit gagner le double des autres travailleurs de l'industrie. On ne voit pas la raison.

M. Laplante: Donnez-leur de l'ouvrage douze mois par année.

La Présidente (Mme Harel): Messieurs de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, je voudrais vous remercier au nom de cette commission d'être venus présenter votre mémoire. Nous allons maintenant entendre les propos du ministre du Travail et du porte-parole de l'Opposition en matière de travail. Nous vous remercions et nous vous prions de rester avec nous. La parole est au ministre du Travail. Je crois comprendre que le ministre du Travail et le critique officiel comptent prendre au plus chacun quinze minutes pour clore cette présente commission parlementaire.

Déclarations de clôture

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: Mme la Présidente, MM. les membres de l'Opposition, mesdames, messieurs, nous sommes effectivement au terme de cette commission parlementaire et je vais répondre à votre invitation de prendre quelques minutes pour émettre certains commentaires ou certaines appréciations sur ces trois jours de travaux.

Je suis l'un de ceux qui croient, et c'est évidemment fort subjectif, que nous avons, au cours des trois journées de cette commission parlementaire, participé au plus significatif débat sur l'ensemble de l'industrie de la construction à s'être déroulé au cours des dernières années. Différents intervenants de l'industrie sont venus nous exposer et nous décrire les situations problématiques qu'ils rencontrent, qu'ils ont rencontrées et, toutes choses étant ce qu'elles sont maintenant, qu'ils rencontreraient dans l'avenir. Permettez, Mme la Présidente, qu'à ce stade-ci, je remercie tous les invités qui se sont présentés, que nous avons entendus devant nous pour la qualité exceptionnelle de la recherche qui a été effectuée pour étayer les argumentations respectives qu'on nous a soumises. Cette remarque, quant à moi encore, s'applique de façon générale et à toutes les associations, à tous les groupes qui se sont fait entendre devant la commission.

Permettez également, Mme la Présidente, que je prenne dix secondes pour vous remercier vous et le député d'Outremont qui vous a précédé lors de la première journée de nos travaux pour la façon avec laquelle vous avez dirigé ces travaux. Je voudrais aussi - et vous allez le comprendre - remercier les membres de la commission des deux côtés de la table. Chacun évidemment pourra faire son appréciation, son bilan, son évaluation de nos travaux. Il me semble - en tout cas, pour autant que les parlementaires sont concernés - que tout s'est fait dans la plus grande sérénité sans pour autant empêcher l'un ou l'autre, les uns et les autres d'aller au fond des questions et c'est dans cet esprit que nous souhaitions que nos travaux se déroulent.

Je voudrais aussi, le plus rapidement possible, remercier les fonctionnaires des différents ministères qui ont été là avec une assiduité remarquable. Les fonctionnaires du ministère du Travail, du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, du ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur, de même que les fonctionnaires des différentes sociétés, ou organismes, ou offices qui sont directement concernés et intéressés par les travaux que nous avons faits au cours de ces trois derniers jours.

Un mot d'appréciation également pour les membres du Secrétariat des commissions parlementaires, à tout le personnel de soutien. Finalement, au conciliateur, M. Leboeuf, qui lui aussi a été là avec passablement d'assiduité bien qu'ilait fait quelques courses dans les corridors de temps en temps; mais ce sont des choses qui sont tout à fait normales. Sans faux-fuyant, directement, les parlementaires ont eu l'occasion d'approfondir chacun des témoignages, permettant ainsi d'identifier plus précisément les enjeux et les hypothèses de solutions possibles. En ce sens, je crois pouvoir affirmer que les représentants des

groupes témoins ont répondu au premier appel que je leur lançais, lorsque nous avons commencé nos travaux. Nous avons, il me semble, dépassé la période de l'analyse des problèmes pour entreprendre maintenant et, véritablement, la phase de la recherche de solutions crédibles et acceptables. Je crois pouvoir dire que nous avons évolué, au cours de ces travaux, et nous sommes prêts à des changements.

Par contre, la nature même des changements ne s'impose pas d'elle-même, même s'il ressort des points de convergence des différents témoignages. Que ce soit, à titre d'exemple seulement, le travail au noir ou le règlement de placement. Il existe chez les intervenants des positions fort divergentes sur les causes des problèmes et sur les correctifs à y apporter, même si une réflexion approfondie nous permettrait sans doute d'espérer pouvoir identifier des points de convergence pour la majorité.

Par contre, à titre d'exemple également, d'autres sujets, comme l'idée de la création d'un tribunal de la construction ou alors d'un organisme quasi judiciaire, peu importe le nom qu'on pourrait lui donner, mais la création d'une instance habilitée à entendre tous les litiges procédant de la loi, de la réglementation, de la convention collective ou du décret semblent non seulement recueillir, mais recueillent, de toute évidence, l'unanimité des parties que nous avons entendues.

Au terme de nos travaux, deux scénarios pouvaient être retenus par le gouvernement: ou alors nous allions conserver, garder cette approche de procéder à la pièce, ou alors nous relevions le défi de procéder avec une approche que l'on dit globale. Compte tenu de la diversité des sujets qui ont été abordés et, très souvent aussi, de leur intime interrelation, le gouvernement a décidé que le changement serait global et en profondeur.

Pour réaliser cet objectif, avec l'accord de mes collègues impliqués, j'annonce la création - là, je sais d'avance comment on va réagir - d'un comité multidisciplinaire formé de représentants des ministères de l'Habitation et de la Protection du consommateur, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ainsi, évidemment, que du Travail auxquels s'adjoindront des représentants d'organismes tels l'Office de la construction du Québec et la Régie des entreprises en construction du Québec. Le mandat premier de ce comité sera d'analyser l'ensemble des témoignages de la commission parlementaire, d'en dégager les consensus ou de préparer différentes hypothèses de solutions sur les différents points litigieux, tout en tenant compte de l'intérêt général.

Le travail devra être terminé à la mi-septembre. (19 h 30)

Par la suite, le gouvernement identifiera les options qu'il veut proposer et préparera pour dépôt à l'automne un projet de loi modifiant les différentes lois concernées et/ou les règlements concernés après avoir reçu l'avis du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre et du Comité mixte de l'industrie de la construction sur les intentions gouvernementales. À la suite de cet avis autant du conseil consultatif que du comité mixte et après dépôt du projet de loi en première lecture, une commission parlementaire avant la deuxième lecture du projet de loi sera convoquée en février et le projet de loi modifié, s'il y a lieu, reviendra à l'Assemblée nationale pour adoption. La réforme sera donc globale et, s'il n'y a pas d'accord entre les centrales, le gouvernement devra aussi statuer sur l'épineuse question de la représentativité syndicale.

À ce chapitre, au moins trois des associations syndicales que nous avons entendues ont clairement plaidé dans le sens qu'il y avait effectivement un problème qui se présentait chaque fois qu'arrivaient l'échéance d'une convention et/ou d'un décret et la nécessité d'en négocier un nouveau. Non seulement ces trois associations ont-elles identifié le problème de façon très expresse, mais chacune des trois a également proposé un mécanisme avec lequel elles seraient en mesure de vivre pour l'avenir. Il m'est apparu que dans ces circonstances - et chacune a également indiqué très clairement qu'il s'agissait de matières négociables - il fallait à nouveau qu'elles fassent tous les efforts nécessaires pour essayer de trouver un modus Vivendi par rapport à cette situation que tout le monde, finalement, soulève, mais pour laquelle - et je n'en disconviens pas - la ou les solutions ne sont pas faciles. Il est également fort clair que la dernière solution envisagée à cet égard serait une loi.

Le cheminement, donc, qui a été adopté et qui a été décrit précédemment permettra de plus une évolution constante des positions des parties impliquées et le projet de loi tiendra compte des suggestions et des avis soumis. Je sais que, pour les uns, l'échéancier est trop court; pour les autres, il est trop long mais, dans l'appréciation que j'en fais, il s'agit d'une matière qu'il est absolument impossible de bousculer. Il s'agit d'une matière qui exigera encore, après que les étapes préliminaires du conseil consultatif et du comité mixte auront été franchies, que les associations et les regroupements intéressés aient l'occasion de s'exprimer sur ce que pourrait être un éventuel projet de loi. Il me semble que cet échéancier pourrait permettre également l'élaboration de certains consensus sur des matières sur lesquelles il n'en existe pas actuellement mais sur lesquelles aussi on identifie très

expressément des problèmes importants.

En outre des étapes dont je viens de parler, au-delà du processus législatif normal en semblable matière, il est évident que l'actuelle commission à l'intérieur de laquelle nous sommes sera régulièrement et constamment informée de l'évolution des travaux.

Comme cette réforme pose la question de la place des parties dans l'industrie et de leur volonté de coopérer ensemble, je voudrais - et qu'on me le permette - dans le cadre de la négociation du décret, leur adresser une invitation pressante. J'ai toujours été convaincu depuis avril dernier -et je vais en étonner plusieurs en disant que je suis encore convaincu - qu'une entente est possible. Est-ce que je peux, sans donner d'ordres à qui que ce soit, vous dire: Entendez-vous sur le décret? J'ai besoin de cette preuve de bonne foi pour mieux identifier l'importance des nouvelles responsabilités qui peuvent être confiées aux différents intervenants. Je veux vous impliquer dans le processus décisionnel, mais il me faut une preuve que vous avez la volonté voulue pour maintenir un dialogue permanent et l'assurance que le progrès de l'industrie ne sera pas enrayé.

Nous avons, au terme des travaux de cette commission, l'opportunité de dynamiser à l'intérieur de brefs délais, compte tenu de l'importance des sujets abordés, toute l'industrie de la construction au Québec et nous avons des possibilités réelles d'entente sur le décret. Je m'engage, pour ma part, à tout mettre en oeuvre pour que la refonte du cadre législatif et réglementaire de l'industrie de la construction soit menée le plus rapidement possible dans le meilleur esprit de concertation et de consultation. Cette même concertation, cette même consultation peut et doit engendrer la conclusion d'une entente négociée sur le décret.

La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre. M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Mes premières paroles seront pour remercier, au nom de notre groupe parlementaire, au nom de mes collègues de ce côté-ci de la table, les intervenants qui ont accepté de venir participer a cette commission parlementaire pour faire part au ministre et aux députés de leur appréciation à l'égard de la situation dans le monde de la construction, qui ont contribué utilement, de bonne foi, ouvertement à nos débats et à l'échange, à l'interaction auxquels on a assisté depuis lundi matin. Messieurs, mesdames, qui avez témoigné, merci beaucoup.

Je dois cependant regretter à la fin de nos travaux - je dois le faire à ce moment-ci - l'indélicatesse - pour ne pas dire l'insulte - qu'a eue le ministre du Travail, M. Fréchette, cet après-midi. En effet, pendant que nous siégions cet après-midi, pendant qu'on délibérait ensemble jusqu'à 19 heures 15, la position du ministre était adoptée. À cet égard, je tiens à inviter toutes les dames et tous les messieurs qui sont ici à être prudents ce soir lorsqu'ils arriveront et diront à leur conjoint que les travaux se sont terminés à 20 heures. Car la position du ministre est connue; elle est véhiculée par la presse, à la suite de la rencontre qu'il a eue avec celle-ci dans le bureau du leader, à 14 h 15 cet après-midi; l'annonce a été reproduite aux nouvelles de ce soir. Tous les auditeurs étaient donc convaincus que c'était terminé depuis cet après-midi. C'est vraiment manquer de délicatesse à l'endroit de nos intervenants de cet après-midi, M. le ministre.

Hier, vous avez laissé voir - hier matin - si ma mémoire est fidèle, ou lundi en fin d'après-midi, que vous auriez des choses assez intéressantes et probablement précises à annoncer à la fin de nos travaux. Vous dites dans votre texte: "Nous avons évolué et nous sommes prêts à des changements" des changements qui seront globaux et en profondeur, mais ce que vous nous annoncez aujourd'hui, c'est bien différent de l'appétit que vous avez créé par le commentaire que vous avez fait plus tût au cours de ces travaux. Vous annoncez la création d'un comité multidisciplinaire qui sera formé des gens des ministères de l'Habitation et de la Protection du consommateur, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, du Travail, de l'Office de la construction et de la Régie des entreprises en construction ayant comme mandat d'analyser l'ensemble des témoignages, de dégager des consensus et de préparer des hypothèses, lesquelles hypothèses, du moins certaines d'entre elles, seront retenues par le gouvernement. Un avis sera demandé au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre et au comité mixte pour en arriver éventuellement à un projet de loi qui sera déposé à l'automne -cela veut dire peut-être à la mi-décembre -qui sera étudié en commission parlementaire après le dépôt en première lecture, en février 1985.

J'ai peut-être été, comme vous l'avez été parfois et comme vous le confessez, M. le ministre, un peu naïf de croire, au cours de ces jours où on a dialogué, que vous n'arriveriez peut-être pas avec toutes les solutions - ce serait trop demander et j'en conviens - mais que vous seriez arrivé ce soir à dégager au moins de votre conception à vous comme titulaire du ministère du Travail certaines solutions aux problèmes qui confrontent l'ensemble de l'industrie.

J'ai probablement été trop naïf, parce qu'il faut savoir que c'est normalement la façon dont le député de Sherbrooke et ministre du Travail fonctionne. C'est d'ailleurs dans ce sens que, lors de l'étude des crédits du ministère du Travail, au mois d'avril, je vous demandais d'être plus précis, d'être plus ferme, d'être plus décisif. Mais non, vous répétez ce soir ce que vous avez déjà fait à l'égard de la refonte du Code du travail qui était imminente au début de l'année 1984 et pour laquelle vous avez créé la commission Châtillon pour reporter tout cela à la fin de l'année 1985 ou au milieu de l'année 1985. Le problème est reporté. Pendant ce temps, on peut vaquer à d'autres occupations. Tout comme vous êtes demeuré jusqu'à maintenant absent des négociations dans les secteurs public, parapublic et des travaux préparatoires à des réformes en ce sens, tout comme vous êtes absent du comité. Comme des groupes l'ont évoqué il y a peu de temps ici, vous êtes absent du comité qui siège actuellement sur la formation de la main-d'oeuvre au Québec, comme s'il n'y avait pas seulement les politiciens fédéraux qui donnaient des tapes sur les fesses, probablement que la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu a tassé allègrement le ministre du Travail.

C'est la même chose dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail, M. le ministre. Il y a dépôt, à l'automne 1983, une commission au début de 1984, un nouveau projet de loi déposé à la fin de la session de l'été 1984 pour étude et adoption éventuellement au début 1985. C'est regrettable, parce que vous auriez pu préciser, au moins comme je vous le disais, vos intentions comme ministre sur une foule de choses. Je m'attendais à autre chose que cette déclaration. Vous confirmez ce soir... et finalement, on doit comprendre que vous n'avez pas un mot à dire sur l'implantation, la création éventuelle d'un tribunal de la construction où il y avait un consensus de tous les intervenants. Il n'y a pas un mot à dire de la part du ministre du Travail à la fin de nos travaux sur le champ d'application du décret où il y avait un consensus, sauf dans le cas des municipalités qui demandaient finalement d'être régies par les mêmes dispositions que le gouvernement est régi.

Il n'y a pas un mot de la part du ministre du Travail ce soir sur la possibilité de modifier les dispositions pour qu'à l'avenir, la prolongation du décret aille jusqu'à son renouvellement. Il n'y a pas un mot de la part du ministre du Travail, membre du gouvernement, sur la possibilité que le gouvernement donne suite à un voeu formulé par tous les intervenants - et il y avait un consensus - lui demandant de mieux planifier ses travaux à l'avenir et, ainsi, aider l'industrie. Pas un mot là-dessus. Pas un mot du ministre du Travail, ce soir, sur le statut des artisans. Tout le monde s'inquiète. Tout le monde s'interroge sur l'opportunité de maintenir les dispositions de la loi 110, adoptée lorsque M. Pierre-Marc Johnson était ministre du Travail. Consensus là aussi. Pas un mot du ministre du Travail.

Aucune volonté clairement exprimée de la part du ministre du Travail d'éliminer ou, au moins, de diminuer substantiellement le travail au noir; une simple référence comme mandat du comité. Pas un mot du ministre du Travail sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre dans le secteur de la construction, alors que tous ceux qui sont venus nous parler depuis lundi matin ont préparé des documents là-dessus, ont étudié, ont analysé cette situation qui les préoccupe et l'ont fait valoir de façon adéquate. Pas un mot sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre, alors que ces gens-là demandaient que le ministre du Travail prenne ses responsabilités et que le gouvernement modifie son approche.

Même pas un mot pour défendre les travailleurs de l'OCQ, les gens de l'OCQ et de la Régie des entreprises en construction du Québec qui ont été attaqués, à l'occasion. Même pas un mot, sauf de la part du ministre de l'Habitation, sur l'appréciation du gouvernement à l'égard des coûts dans la construction. Je pensais, lorsqu'on a fait allusion à la déclaration du premier ministre, qu'au moins le ministre du Travail pourrait en parler. Là-dessus comme sur d'autre chose, le gouvernement dit blanc à certaines occasions et noir à d'autres occasions. Cela me rappelle un peu la phrase de M. Truman qui, parlant d'un autre politicien, disait: "You lie from both sides of your mouth."

Mme la Présidente, finalement, c'est bien mince, mais les gens qui se sont fait entendre ici partent avec la conviction d'avoir participé de bonne foi et probablement avec la déception, à la suite de la déclaration du ministre, parce que le ministre du Travail, s'il l'avait voulu, aurait été capable de faire plus et de préciser davantage sa position à lui... Pas de cadeau à qui que ce soit, sauf peut-être un petit cadeau aux travailleurs. Ces travailleurs repartent avec le souvenir qu'ils auront reçu, le 21 juin dernier, dans leur chèque de paie de vacances un beau message de publicité et de propagande de la part du ministre Guy Tardif.

Mme la Présidente, je pensais au moins que, dans sa déclaration, le ministre nous dirait: J'invite la commission à m'appuyer dans ma volonté de faire en sorte que les parties se rencontrent dans les meilleurs délais et qu'elles renouvellent le décret sur une base négociée. Le ministre n'a même pas eu la déférence d'inviter les membres de la

commission à agir dans ce sens.

Motion au sujet du décret

En son absence, je vais le faire et c'est ce sur quoi je termine. Je fais motion pour que la commission parlementaire de l'économie et du travail demande à Me Raymond Leboeuf de convoquer dans les meilleurs délais les parties habilitées à négocier le renouvellement du décret tenant lieu de convention collective dans l'industrie de la construction échu le 3 avril 1984 et renouvelé jusqu'au 30 août prochain.

Voilà l'essentiel des commentaires que j'avais à formuler, Mme la Présidente, en guise de conclusion de nos travaux. Encore une fois, merci à vous tous et à vous toutes qui y avez participé loyalement et franchement, avec ouverture et de façon très contributive, aux travaux. J'ose espérer que, dans les délais qu'on espère les plus brefs, il y aura moyen de régler les problèmes de votre industrie. Si ce n'est pas eux qui le font, d'autres le feront. Merci.

La Présidente (Mme Harel): Je crois comprendre, M. le ministre du Travail, que vous demandez la parole.

M. Fréchette: Oui, très brièvement, Mme la Présidente, si le règlement me le permet, évidemment.

La Présidente (Mme Harel): Oui, il le permet.

M. Pagé: Notre gentilhommerie va vous le permettre.

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: Mme la Présidente, je n'entreprendrai pas de relever tous et chacun des points que vient de soulever le député de Portneuf. On a, évidemment, chacun nos méthodes de travail. On a chacun nos façons de voir les choses. Pour ma part, j'ai toujours pensé - et je vais continuer de penser comme cela malgré cette argumentation - qu'en des matières aussi importantes il faut, de toute évidence, éviter de bousculer les parties. Si j'avais annoncé ce soir des positions fermes à l'égard de l'un ou l'autre des sujets qu'on a étudiés, je suis convaincu qu'il s'en serait trouvé plusieurs pour indiquer qu'il s'agissait là d'une forme de "bulldozage". Le député de Portneuf peut bien vouloir tout régler d'un seul coup et d'un simple trait de plume; si c'est sa méthode de travail, tant mieux, mais il y a plein de lois auxquelles il a participé qu'on est en train de rediscuter parce qu'elles ont été mal faites, peut-être un peu trop rapidement.

Le seul autre aspect que je veux soulever, Mme la Présidente - ce sera le terme, quant à moi - c'est de référer à cette indélicatesse, cette impolitesse dont j'aurais fait preuve à l'égard des invités que nous avons entendus cet après-midi. Je suis capable de prendre des accusations de cette nature-là. Je voudrais bien, cependant, que ceux et celles envers qui une indélicatesse aurait été commise soient en mesure d'apprécier les circonstances dans lesquelles cette situation s'est produite.

Nous avons eu, tout au cours des trois jours de nos travaux, des gens de la presse écrite et parlée, des journalistes et des commentateurs spécialisés en matière de relations du travail, qui ont suivi avec beaucoup d'assiduité et d'intérêt tous les travaux de notre commission. Ce midi, la plupart d'entre eux sont venus me rencontrer pour me demander si, pour les fins de leurs publications et pour assurer le suivi de leurs publications, il était possible que je puisse, ce midi, leur donner, ne serait-ce que globalement, un aperçu des commentaires que j'allais faire ce soir. À la demande de ces personnes, parmi lesquelles on retrouve plusieurs amis du député de Portneuf, j'ai convenu que nous allions effectivement nous voir cet après-midi, mais que, pour aucune espèce de considération, aucune publication ne serait faite avant 18 heures, ce soir, alors que nous aurions commencé à entendre tous les groupes et le dernier.

Voilà, Mme la Présidente, la mise au point que je voulais faire. Une accusation vient d'être portée contre moi. Devant les tribunaux, on dirait que je plaide peut-être coupable, mais avec explications. J'ai donné ces explications, Mme la Présidente.

M. Pagé: La sentence?

M. Fréchette: Ce n'est pas le député de Portneuf qui est juge, ce sont ceux qui sont supposés avoir été offensés qui disposeront de ce litige.

La Présidente (Mme Harel): Merci à tous les membres de la commission. Je dois informer les membres de la commission, ainsi que les parties intéressées que les documents qui ont été transmis à cette commission, comme peut le permettre le règlement, seront déposés et donc rendus publics, pour ceux et celles qui sont intéressés, à la bibliothèque de l'Assemblée nationale. C'est en vertu de l'article 158 de notre règlement qu'un tel dépôt sera fait.

M. le ministre de l'Habitation, vous invoquez quel article du règlement? Il faut le consentement.

M. Tardif: J'allais, justement, vous demander une directive. Étant donné que le député de Portneuf a fait allusion à un document que j'aurais envoyé aux travailleurs

de la construction en date du 21 juin, j'aurais voulu lui demander qu'il fasse lecture de ce document pour voir en quoi il était offensant parce que, si ma mémoire est bonne - c'est toujours une question de directive - il s'agissait de remercier les travailleurs de la construction d'avoir participé à Corvée-habitation. C'est la deuxième année que je fais cela. J'ai écrit aux 1500 maires des municipalités du Québec, aux milliers d'entrepreneurs pour faire la même chose et, si on me reproche d'avoir remercié les gens, je compte récidiver à la première occasion.

La Présidente (Mme Harel): Je demanderais aux membres de rester. Une motion est faite par le député de Portneuf. Je vais lui demander d'en faire lecture.

M. Pagé: Mme la Présidente, comme je vous le disais tantôt, je fais motion pour que la commission parlementaire de l'économie et du travail demande à Me Raymond Leboeuf de convoquer, dans les meilleurs délais, les parties habilitées à négocier le renouvellement du décret tenant lieu de convention collective dans l'industrie de la construction, échu le 30 avril 1984 et renouvelé jusqu'au 31 août prochain. Essentiellement, je n'ai pas l'intention d'être long en termes de débat. Premièrement, on a...

La Présidente (Mme Harel): Si vous me le permettez, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Oui.

La Présidente (Mme Harel): Une telle motion doit être mise aux voix pour s'assurer qu'elle sera débattue.

M. Rodrigue: Mme la Présidente, question de règlement.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Vimont, à quelle disposition de notre règlement faites-vous référence?

M. Rodrigue: Mme la Présidente, je pense que cette motion est irrecevable du fait qu'elle n'entre pas dans le cadre du mandat qu'a reçu cette commission. Cette commission-ci a été réunie pour faire une consultation et entendre des mémoires afin d'examiner la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, de même que ses règlements. Elle n'a pas été réunie pour régler la question des négociations actuelles dans l'industrie de la construction.

Une voix: On n'a pas de mandat pour cela.

M. Rodrigue: On n'a pas le mandat. Cette commission-ci, en vertu du mandat qu'elle a reçu de l'Assemblée nationale, n'est pas mandatée pour examiner la question qui est soulevée par le député de Portneuf; elle n'est pas mandatée pour adopter une telle motion. Cette motion, en regard même du mandat qui est imparti à cette commission-ci par l'Assemblée nationale, m'apparaît irrecevable.

M. Pagé: Mme la Présidente, très brièvement sur la recevabilité.

La Présidente (Mme Harel): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: On sait qu'une commission parlementaire, c'est la prolongation de l'Assemblée. On sait qu'il est bien inscrit dans notre droit parlementaire - si l'honorable député avait un peu plus d'expérience, il aurait pu en convenir -qu'une commission est maîtresse de ses travaux. Il s'agit non pas de décider, mais de formuler un voeu et de demander au conciliateur de convoquer les parties qui, si elles veulent négocier, vont pouvoir le faire. Si elles veulent négocier avec lui, elles vont pouvoir le faire. Si elles veulent négocier seules, elles pourront le faire. Ce serait, finalement, ajouter purement et simplement, de façon unanime, au voeu qu'a formulé le ministre, à savoir que les parties puissent négocier dans les meilleurs délais. C'est pour renforcer l'appel chaleureusement lancé par le ministre tout à l'heure, purement et simplement. Si vous ne voulez pas, votez contre; un point, c'est tout. Ce sera réglé. Mais nous autres, on aura fait notre "job".

La Présidente (Mme Harel): Toujours sur la recevabilité, M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Mme la Présidente, je n'ai pas l'expérience du député de Portneuf, mais une commission parlementaire est maîtresse de ses travaux à l'intérieur du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée nationale.

M. Pagé: Êtes-vous pour ou contre? Une voix: C'est cela.

La Présidente (Mme Harel): Est-ce qu'il y a d'autres membres de cette commission qui veulent intervenir avant que je statue sur la recevabilité de cette motion?

Je considère cette motion comme irrecevable. Le mandat de notre commission était de mener une consultation particulière afin d'examiner la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et ses règlements.

Une voix: Cela fait longtemps qu'il est député, mais il n'a pas l'expérience.

Une voix: Cela fait jurisprudence.

La Présidente (Mme Harel): La présente commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 19 h 58)

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