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(Seize heures trente minutes)
La Présidente (Mme Harel): La commission de
l'économie et du travail commence ses travaux. Je vais demander au
secrétaire de la commission de nous annoncer les remplacements, s'il y a
lieu.
Le Secrétaire: II n'y a aucun remplacement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Cette séance de la
commission de l'économie et du travail a pour objet d'étudier les
crédits du ministère de la Science et de la Technologie,
conformément au mandat que nous avons reçu de l'Assemblée
nationale. Je crois comprendre que nos travaux vont se poursuivre ce soir
jusqu'à 18 heures, pour reprendre demain à 10 heures et se
terminer à 12 h 30.
Avant d'entreprendre l'étude du premier programme, j'aimerais
passer la parole à Mme la députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Cela concerne les heures de travail. Il y a deux
heures... On va continuer jusqu'à 18 h 30? On a deux heures aujourd'hui
et deux heures et demie... On a quatre heures et demie en tout? Est-ce qu'on va
continuer après 18 heures?
La Présidente (Mme Harel): II va falloir obtenir un
consentement. Vous savez que, pour l'étude de ces crédits, nous
recevons un ordre de l'Assemblée nationale et que cette motion du leader
qui a été adoptée par la conférence de nos leaders
est de terminer nos travaux à 18 heures. Nous pouvons poursuivre, mais
cela suppose le consentement des membres de la commission.
M. Lavigne: Mme la Présidente, je peux vous annoncer
dès maintenant qu'il y a une réunion de notre côté
dès 18 heures et que cela va être impossible pour nous de
continuer après 18 heures.
M. Fortier: Moi non plus. Je devrai...
La Présidente (Mme Harel): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ...m'absenter à partir de 18 heures.
Mme Dougherty: Alors, on pourrait peut-être commencer plus
tôt demain matin. On ne peut pas nous priver de nos quatre heures et
demie, n'est-ce pas? Il faut trouver quatre heures et demie.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier, si je comprends vos propos, vous proposez que nous commencions
nos travaux à 9 h 30 demain matin?
Mme Dougherty: Pour terminer à 12 h 30.
La Présidente (Mme Harel): Pour terminer à 12 h 30.
Est-ce qu'il y a consentement? M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Mme la Présidente, mon réflexe serait
plutôt de dire à Mme la députée de Jacques-Cartier
que nous allons faire l'effort de lui laisser le plus de temps possible pour
faire son travail de façon qu'on puisse quand même le faire dans
le temps qui nous est imparti présentement, le temps qu'il nous reste,
plutôt que d'étirer cela pour arriver à un temps
théorique de quatre heures et demie, comme elle le dit. Nous, on est
prêt à faire l'effort...
Mme Dougherty: Ce n'est pas théorique, c'est
réel.
M. Dussault: On le sait. Le temps a été fixé
théoriquement, mais, dans la pratique, on n'a pas autant de temps qu'on
en avait fixé théoriquement. Nous, on serait disposé
à laisser le plus de chances possible à Mme la
députée de Jacques-Cartier pour qu'elle puisse faire son travail
d'Opposition. Mais de là à donner notre consentement pour qu'on
commence à 9 h 30 et qu'on finisse à 12 h 30... Je suis
prêt à donner mon consentement, Mme la Présidente, pour
qu'on commence à 9 h 30 et qu'on finisse à 12 heures. Je pense
que cela pourrait arranger tout le monde.
Mme Dougherty: Non, non.
La Présidente (Mme Harel): Je vous rappelle que la
commission de l'économie et du travail est convoquée en
séance de travail à 12 h 30 demain juqu'à 13 heures. Nous
devrons donc ajourner nos travaux sine die à 12 h 30 demain. Mme la
députée de Jacques-Cartier, le problème était
similaire lors de
l'étude des crédits de chacun des ministères qui
composent notre commission. Dans la mesure où nous pouvons
immédiatement procéder, peut-être que demain, lors du
début de nos travaux à 10 heures, nous pourrons évaluer
s'il nous est nécessaire de poursuivre. La discussion nécessite
un consentement unanime pour modifier l'horaire prévu à nos
travaux; cela va nous conduire à une impasse. On est peut-être
mieux de commencer les travaux immédiatement, l'étude de chacun
des éléments des programmes. Nous pourrons examiner demain si
tant est que des membres de cette commission se considèrent
lésés dans leur droit d'intervention. Je vais donc...
M. Paquette: J'aurais une question avant de commencer, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le ministre.
M. Paquette: Je ne sais pas si les membres de la commission
souhaitent poser des questions au président des trois organismes qui
relèvent de ma responsabilité: le conseil, la fondation et
l'agence. Il faudrait qu'on le sache, je ne voudrais pas mobiliser ces gens
tout le temps, alors qu'on n'a pas besoin d'eux nécessairement pour
toute la période.
Mme Dougherty: Vous parlez du conseil, de la fondation et...
M. Paquette: Le Conseil de la science et de la technologie, la
Fondation pour le développement de la science et de la technologie et
l'Agence québécoise de la valorisation industrielle de la
recherche.
Mme Dougherty: Non, nous n'avons pas prévu cela.
M. Paquette: Vous n'avez pas besoin de leurs services,
très bien.
Mme Dougherty: Non.
M. Paquette: Ils en seront fort aise.
La Présidente (Mme Harel): Est-ce que les membres de la
commission souhaiteraient pouvoir interroger ou interpeller des
représentants du conseil, de l'agence ou de la fondation? Autrement,
cela ne nécessiterait pas leur présence à la commission
demain. Est-ce bien ce qu'on peut en conclure du consentement des membres?
M. Fortier: C'est cela.
La Présidente (Mme Harel): J'inviterais
immédiatement le ministre à faire ses remarques
préliminaires en rappelant qu'il s'agit d'une intervention d'au plus 20
minutes et qui sera suivie immédiatement par l'intervention de Mme la
députée de Jacques-Cartier. M. le ministre.
Exposés préliminaires M. Gilbert
Paquette
M. Paquette: Mme la Présidente, j'ai remis aux membres de
la commission mes remarques préliminaires. Je n'ai pas l'intention de
vous lire tout cela, mais simplement de mettre en évidence les points
saillants.
On peut maintenant affirmer avec le recul que la publication en mai 1982
de l'énoncé de politique économique "Le virage
technologique" a agi comme déclencheur important des efforts de
mobilisation que l'on connaît actuellement en matière de science
et de technologie au Québec. Cette sensibilisation aux nouveaux enjeux
du développement du Québec a pris progressivement, au cours des
dernières années, le caractère de priorité
gouvernementale. Au mont Sainte-Anne, le Conseil des ministres
prévoyait, le 13 mars dernier, qu'environ 200 000 000 $ seraient
consacrés aux mesures découlant du virage technologique en
1983-1984. Comme on pourra le constater, cette prévision s'est
révélée un peu en deçà de la
réalité. Un peu plus tard, en août 1983, à Toronto,
le premier ministre du Québec, prenant la parole lors d'une
conférence des premiers ministres des provinces, disait ceci - je pense
qu'il est important de le citer: "En matière de recherche et
développement, voilà combien d'années qu'on constate en
gémissant que nos budgets sont inférieurs à ceux qu'on
trouve dans la plupart des autres sociétés
industrialisées, et pourtant, c'est au compte-gouttes qu'on
prétend effectuer un redressement. C'est devenu ridicule. Il va falloir,
là aussi, se décider une fois pour toutes à augmenter,
rapidement et substantiellement, l'aide directe aux universités comme
aux entreprises. Et le régime fiscal, tout particulièrement,
devra sortir à ce sujet des maigres ajustements marginaux pour
refléter enfin la priorité majeure sans laquelle notre
économie croupirait fatalement dans la médiocrité."
En 1983-1984, on constatera que nous avons, au Québec,
amorcé vigoureusement la réalisation concrète de ces
engagements sur la base de la politique scientifique publiée en mai 1980
et du virage technologique. Les lois 19 et 62 ont permis une
réorganisation des activités gouvernementales en science et
technologie. Plus de 220 000 000 $ ont été consacrés par
les divers ministères aux mesures découlant du virage
technologique.
Le plan de relance de novembre 1983 permet enfin d'identifier le
développement de la recherche et de l'innovation comme priorité
en termes de ressources humaines.
Comme conséquences de ces actions, vous avez sans doute
constaté - même si parfois il est difficile de savoir à
travers les postes où sont les budgets - que le budget du nouveau
ministère de la Science et de la Technologie passe de 20 000 000 $
à 56 000 000 $ et que, dans ces 56 000 000 $, il y a au-delà de
20 000 000 $ consacrés aux diverses mesures annoncées dans le
plan de relance en novembre 1983; seulement dans les budgets du
ministère, sans compter ce qu'il y a sur le plan scientifique et
technologique dans le budget des autres ministères.
Sur la réorganisation de l'action gouvernementale, je vous
rappelle que le 23 juin dernier on a franchi, à l'unanimité de
l'Assemblée nationale, une étape décisive avec l'adoption
de la loi 19, cette loi qui visait d'abord à créer un
ministère de la Science et de la Technologie en identifiant clairement
ses responsabilités, à la fois en termes de coordination de
l'action gouvernementale et en termes d'intervention directe. Également,
ce projet de loi visait à favoriser le décloisonnement entre les
milieux scientifique et économique, et finalement à donner une
permanence, une visibilité accrue aux organismes responsables de la
politique scientifique qui, tous, étaient créés par
décret et n'avaient aucun compte à rendre auparavant,
directement, en tout cas, à l'Assemblée nationale. Cette loi
organique visait à définir un système impliquant plusieurs
intervenants gouvernementaux au-delà de la loi créant le
ministère de la Science et de la Technologie, et ces divers
mécanismes sont mainteant en place sous la responsabilité directe
que j'assume. Outre le ministère et le conseil, deux nouveaux
instruments viennent de se mettre en marche: la Fondation pour le
développement de la science et de la technologie et l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche. Quatre
autres organismes existants: les fonds subventionnaires et le Centre de
recherche industrielle du Québec, ont été
légèrement retouchés par la loi; ils demeurent sous la
responsabilité des divers ministres sectoriels, mais leurs directives
sont élaborées conjointement avec le ministre de la Science et de
la Technologie, parce qu'il s'agit d'organismes centraux au service de la
politique scientifique et technologique. Enfin, pour les autres
ministères et organismes, nous évaluons le plus
systématiquement possible les programmes, les budgets, et nous mettons
sur pied régulièrement des comités
interministériels sur diverses questions qui impliquent les autres
ministères.
En somme, notre rôle, c'est un rôle central, un rôle
moteur au service de la politique scientifique, mais en même temps on a
évité de concentrer toutes les activités au sein d'un seul
ministère puisque la recherche et le développement doivent
irriguer l'activité de chacun des ministères sectoriels. Nous
avons donc à la fois un mandat de coordination et d'intervention. Le
mandat de coordination ne se voit pas dans les crédits parce que c'est
uniquement le personnel du ministère. Je vais donc vous en parler un peu
quand même parce que cela occupe une part très importante de nos
activités; les budgets d'intervention directe, par contre, sont
prévus aux crédits de mon ministère.
Si l'on regarde l'année 1983-1984, je pense qu'on peut
très certainement parler d'une accélération du virage
technologique. Lorsque cette politique a été
déposée en mai 1982, le premier ministre et le ministre au
développement économique avaient parlé d'investissements
de 200 000 000 $ à 250 000 000 $ qui découlaient des mesures
impliquées par le document. Beaucoup étaient sceptiques. Bien,
c'est en 1983-1984 qu'on a fait la preuve, même à travers une
période de récession économique, que cela était
possible puisque nous avons dépensé environ 220 000 000 $ par le
biais des divers ministères impliqués.
Là, je vais passer un peu rapidement parce que,
évidemment, cette somme prend diverses formes. Il y a des mesures
fiscales, des subventions, des garanties de prêts, l'aide au
démarrage d'entreprises, l'appui à des centres de recherche, de
nouveaux programmes d'aide au développement technologique et à
l'emploi scientifique.
D'abord, nous avons poursuivi, sur la lancée de la politique
scientifique de 1980 et du virage technologique, une approche secteur par
secteur. Dans le domaine des communications, un rapport sur un plan d'action
sectoriel de recherche et de développement a été
publié en avril 1982, suivi d'une consultation publique, suivi d'un
sommet. Les budgets du ministère des Communications ont
été augmentés en conséquence pour 1984-1985 et le
ministère étendra ses activités de recherche et de
développement avec notre appui, notre accord. Chaque fois, ce sont des
comités qui ont travaillé pendant un an et demi avec des gens du
milieu et un ou deux fonctionnaires, pas plus. Ce sont vraiment des gens
impliqués tant dans les universités que dans les entreprises qui
préparent ces bilans et ces orientations dans tel ou tel secteur. (16 h
45)
En transport, on a rendu public, le 20 mai dernier, le rapport de
conjoncture intitulé "Les voies de l'avenir." A suivi un colloque de
consultation les 28 et 29 novembre qui a été très
productif. On a mis en route un comité pour une étude de
faisabilité sur un centre de recherche et d'essai sur le
matériel sur rail. Le ministère des Transports, le
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et notre
ministère sont en train de créer un conseil d'orientation pour
appliquer ce plan d'action et le ministère fait passer ses budgets
d'aide à la recherche de 2 000 000 $ à 5 000 000 $ l'année
prochaine, pour atteindre 25 000 000 $ dans cinq ans. C'est l'objectif du
ministère des Transports.
Dans le secteur de la forêt, un autre secteur extrêmement
important pour le développement économique du Québec, le
rapport a été publié en décembre et un
colloque-consultation aura lieu à l'automne. Comme les autres colloques,
celui-ci est organisé conjointement par le ministère de
l'Énergie et des Ressources et le ministère de la Science et de
la Technologie.
En agro-alimentaire et dans le domaine des pêcheries, les travaux
approchent de leur terme. On espère pouvoir annoncer la même
démarche bientôt. Dans le domaine de l'environnement, on a
commencé depuis quelques mois et on espère qu'à l'automne
ou au printemps prochain on pourra également aboutir avec un plan
d'action pour la recherche et le développement dans ce secteur
également très important.
Du côté régional, c'est le Conseil de la science et
de la technologie qui a entrepris la réalisation de bilans scientifiques
régionaux. Un tel bilan a été complété pour
la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et servira d'input au sommet
régional qui aura lieu bientôt et qui nous amènera un
certain nombre de priorités - je pense que le député de
Dubuc est très conscient de cela dans sa région - qui permettront
à la région de prendre le virage technologique. C'est la
première région dans laquelle on a expérimenté ce
genre de fonctionnement. On termine un bilan pour la région de
Trois-Rivières et d'autres sont amorcés dans l'Estrie, en
Abitibi-Témiscamingue et dans l'Outaouais. Chaque fois, ces bilans,
parce qu'ils sont faits par les gens du milieu là aussi, favorisent la
concertation régionale et l'émergence de projets novateurs.
Toujours secteur par secteur, en micro-électronique et
informatique, on est passé à 61 000 000 $ d'argent nouveau dans
divers projets en 1983-1984 qui découlent des mesures du virage,
indépendamment de ce que font les divers ministères. Je ne vous
rappellerai pas tout cela. Il y a le plan d'action de micro-informatique dans
l'école où on nous soupçonne encore de nous diriger vers
un mauvais contrat, mais où on compte bien signer un contrat qui aura
d'importantes retombées technologiques et économiques pour le
Québec, en plus de constituer un outil indispensable de
préparation de nos jeunes à la société
technologique dans laquelle ils vivront. Une politique de bureautique
gouvernementale, dans laquelle sont impliqués les Communications,
l'Industrie et le Commerce et nous, a été publiée et
annoncée de façon à surveiller l'implantation de la
bureautique dans les ministères et organismes gouvernementaux et
à en tirer le maximum de retombées, tant sur le plan de
l'efficacité, de l'adaptation des travailleurs que sur le plan
économique, par les contrats qui seront donnés dans les
entreprises.
On va annoncer bientôt la mise sur pied d'un centre destiné
à favoriser l'implantation de l'informatique dans les divers secteurs
industriels sous la forme d'un réseau de centres
spécialisés. Un premier centre spécialisé a
été créé à Sherbrooke dans le domaine de la
micro-électronique et a reçu une subvention de 1 400 000 $.
Nous essayons aussi de développer une politique d'achat et de
développement qui va plus loin que la politique d'achat habituelle,
laquelle consiste à insérer une approche de recherche et de
développement dans les commandes, quand celles-ci sont massives et
peuvent avoir un impact sur le développement économique et
technologique du Québec, chaque fois que c'est possible. On pense que
cet instrument est très important pour le développement de la
micro-électronique et de l'informatique au Québec.
D'autres programmes et mesures y sont mentionnés. Dans le domaine
de la formation, notamment, il y a eu un financement additionnel aux
universités qui a amené l'ouverture de plusieurs nouvelles
places-étudiants dans les universités; par exemple, à
Hull, on a accueilli de 300 à 400 étudiants additionnels;
à Sherbrooke également, à l'UQAM et un peu partout au
Québec.
Pour assurer la nécessaire concertation - je vais insister un peu
plus là-dessus, parce qu'on y place énormément d'espoirs -
une conférence sur la micro-électronique et l'informatisation
regroupant des représentants des divers agents socio-économiques
a commencé ses travaux à la fin de novembre. Elle est en
elle-même une innovation par rapport à la formule traditionnelle
des sommets économiques que nous avons commencée en 1977.
Dotée de quatre commissions, qui sont des groupes de travail
formés de spécialistes délégués par le
patronat, le mouvement syndical, les organismes scientifiques et
communautaires, qui lui préparent des projets structurés, elle va
se réunir régulièrement dans le but de dégager des
consensus sur le développement de l'industrie informatique et des
logiciels, sur l'intégration de l'informatique dans les autres secteurs
économiques, dans les autres services, sur le plan de l'impact de
l'informatique sur l'emploi et sur le travail et, finalement, concernant
l'impact de l'informatique sur la culture. Cette
conférence, pensons-nous, pourra devenir l'instrument d'une
maîtrise concertée de plus en plus cohérente du changement
technologique dans ce qui constitue actuellement le phénomène qui
a le plus de ramifications, c'est-à-dire l'informatisation de toutes les
sociétés développées.
Une deuxième priorité à laquelle on a
accordé beaucoup d'énergie est celle dans le grand secteur des
biotechnologies où les remous se feront plus sentir dans cinq ans, mais,
évidemment, nous voulons que le Québec s'y intéresse
dès maintenant. À la suite de l'adoption du document "À
l'heure des biotechnologies", il y a des groupes de travail et il y a eu un
paquet d'activités qui totalisent à peu près, en
1983-1984, environ 20 000 000 $ d'argent nouveau. On avait annoncé un
plan d'action de 20 000 000 $ sur trois ans, mais on a fait cet effort en un an
et cela se poursuit.
L'investissement le plus important qu'on a fait est par
l'intermédiaire de Bio-Méga pour relocaliser la moitié des
ex-chercheurs de l'entreprise Ayerst. Ceci permet le démarrage des
activités. C'est un investissement de 25 000 000 $ sur cinq ans, de la
part de mon ministère, pour assurer le financement d'un nouveau
laboratoire de recherche et des investissements d'environ 10 000 000 $ de la
part de la SGF dans la construction de nouveaux laboratoires et du siège
social de la société Bio-Méga. Je pense que c'est un geste
important qui dote le Québec d'une première société
de recherche bioindustrielle d'importance. Elle devient la plus importante au
Canada, puisque celle de Toronto, Allelix, a un capital important mais a encore
peu de personnel et peu de laboratoires. Au départ, on démarre
avec une équipe de 85 chercheurs aguerris qui auront, cependant, un
effort de réorientation à faire puisque plusieurs travaillaient
dans des domaines à la marge des biotechnologies.
Du côté des applications agroalimentaires, la loi sur
SOQUIA a été modifiée pour permettre la création
d'une société des biotechnologies agro-alimentaires, Bio-Agral,
dans laquelle le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation compte investir un capital de 10 000 000 $ pour les trois
prochaines années.
Ensuite, on fait un survol de divers programmes qui ont
été mis en route, mais qui relèvent principalement
d'autres ministères, surtout du ministère de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme. On parle également des mesures fiscales
prévues dans le dernier budget, notamment ce crédit d'impôt
de 10% sur la masse salariale affectée à la recherche et au
développement de toutes les entreprises du Québec, crédit
d'impôt remboursable, quels que soient le bilan de l'entreprise et le
niveau de ses profits.
Dans le domaine des emplois scientifiques et techniques, on a
réalisé très rapidement en trois mois l'objectif d'environ
1000 emplois que nous nous étions fixé au début de
l'année. Dans le domaine de la culture et de l'information scientifique
et technique, on a créé un groupe de travail sur une politique de
muséologie scientifique et un autre groupe qui a remis ses travaux sur
la maison des sciences et techniques de Montréal, ce qui nous a permis
d'inclure ce projet dans le plan de relance.
Côté information, on a lancé un troisième
concours de journalisme scientifique. On a tenu des kiosques dans plusieurs
expositions. On a augmenté le volume et la fréquence de parution
du bulletin du ministère qui est envoyé à tous les agents
dans ce secteur. On a avancé considérablement dans le dossier des
banques de données de l'information scientifique et technique. On a
également financé plusieurs projets, comme des expositions, des
salons de la science et de la technologie, Hebdo Science. On a appuyé
des projets de sensibilisation à l'informatique, notamment dans les
maisons de jeunes. On a aussi publié le recueil de l'ensemble des
activités scientifiques et techniques du gouvernement où on
constate qu'en 1982-1983 l'ensemble des organismes gouvernementaux ont
dépensé 660 000 000 $ à des activités scientifiques
et techniques, ce qui représente 2,4% du budget de l'État.
En 1984-1985, on peut dire que la priorité est aux resssources
humaines avec la parution du plan de relance, en novembre 1983, dont les effets
commenceront à se faire sentir en 1984-1985. Le ministère de la
Science et de la Technologie disposera de 24 000 000 $ sur un budget total de
56 000 000 $ prévus au livre des crédits. Nous nous sommes
fixé cinq objectifs: multiplier les projets de recherche et de
développement dans le secteur industriel; doubler, sur un certain nombre
d'années, le personnel scientifique et technique des petites et moyennes
entreprises québécoises; accroître la coopération
scientifique entre les entreprises et les institutions d'enseignement
supérieur; placer le Québec au premier rang des provinces
canadiennes pour la formation scientifique et technique, comme on a
réussi à le faire dans le domaine des sciences de
l'administration, et cela commence à donner des résultats au
Québec en termes d'entrepreneurship - on a besoin du même genre
d'éveil et d'implication dans le domaine scientifique et technique -
finalement, appuyer une diffusion maximale de la culture scientifique et de
l'information scientifique et technique pour que le plus grand nombre possible
de citoyens puissent assimiler la révolution technologique et
améliorer son implication dans la société, tant sur le
plan économique
que sur le plan culturel, autant comme travailleurs que comme
consommateurs de services.
Sur le premier objectif, multiplier les projets de recherche et de
développement industriels, on énumère un certain nombre de
dimensions: maximiser les retombées économiques des grands
projets comme Bell, Pechiney, l'informatique scolaire; assurer l'implantation
de nouveaux projets, par exemple, cette usine pilote dans le domaine de ce
qu'on appelle la laine de roche, les composés de magnésium
extraits de résidus d'amiante, l'implantation de Biosyn, à
Saint-Juste-de-Bretenières, une usine de production de
méthanol...
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre...
M. Paquette: Je termine.
La Présidente (Mme Harel): Je vais devoir vous interrompre
parce que votre temps de parole est expiré. S'il y a consentement,
cependant, on pourrait poursuivre et on allouera le même temps de parole
à Mme la députée de Jacques-Cartier.
M. Paquette: J'en ai pour 30 secondes.
M. Fortier: Je pense qu'on devrait limiter le ministre.
Mme Dougherty: Très bien.
M. Paquette: Je fais un effort pour survoler en plus...
Mme Dougherty: Consentement.
M. Fortier: Si on donne ce temps de parole au ministre, la
députée de Jacques-Cartier va prendre beaucoup de temps. J'aime
autant limiter le ministre. Vous pouvez conclure, M. le ministre.
M. Paquette: Vous retrouverez, de toute façon, dans
l'exposé d'ouverture que j'avais prévu certaines modalités
concernant les programmes d'emplois scientifiques. Les nouveaux programmes
qu'on met en route face à la coopération scientifique entre les
entreprises et les universités: un programme qui vise à
dégager des enseignants des universités qui veulent aller
travailler dans les entreprises, un programme pour soutenir des équipes
de recherche qui veulent accroître leurs liens avec l'entreprise, la
création de six centres de recherche appliquée,
coopératifs entre l'université et les industries qui sont
énumérés à la page 17; les programmes qui
relèvent du ministère de l'Éducation au niveau des
universités pour la formation scientifique et technique auxquels nous
avons travaillé sur le plan de l'élaboration et sur lesquels nous
continuons à travailler par le biais d'un comité de coordination
entre les deux ministères et, finalement, les mesures concernant la
culture et l'information scientifique et technique.
En conclusion, Mme la Présidente, cette relance par la
technologie et l'emploi donne un aperçu de l'ampleur de l'effort
consenti par le gouvernement du Québec en très peu de temps et
des orientations gouvernementales pour les trois prochaines années de
façon à aider le Québec à relever le défi de
l'excellence scientifique et technologique. Cet effort est exceptionnel pour un
gouvernement de province canadienne, comme le soulignait d'ailleurs
récemment le Conseil des sciences du Canada. Il sera accompli dans une
optique de concertation dans le développement, avec l'objectif de
hisser le Québec au tout premier rang et, enfin, avec la
préoccupation majeure de préserver nos chances d'avenir dans un
monde où la productivité, la créativité et
l'excellence constituent plus que jamais une condition de succès pour
les peuples comme pour chaque citoyen et chaque citoyenne.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre. Nous
verrons à allouer un temps égal à la députée
de Jacques-Cartier qui est le porte-parole de sa formation politique en
matière de science et de technologie. (17 heures)
Je vais réparer un oubli, M. le ministre, en vous invitant
à nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Je vais
demander au secrétaire de la commission de les prendre en note aux fins
de l'enregistrement de nos travaux, étant entendu qu'ils peuvent,
à votre discrétion, répondre à des questions qui
peuvent leur venir des membres de la commission.
M. Paquette: Très bien, Mme la Présidente. C'est ce
que j'aurais dû faire avant de m'engager dans mon exposé
d'ouverture. À ma droite, M. Camille Limoges, sous-ministre au
ministère de la Science et de la Technologie; au bout de la table, M.
Rafic Namour, qui est directeur de l'administration au ministère;
à ma gauche, M. Roch Brisson qui est à mon cabinet et qui va
prendre consciencieusement en note tous les commentaires, interventions ou
demandes de renseignement que vous voudrez bien nous adresser.
La Présidente (Mme Harel): Merci. La parole est à
Mme la députée de Jacques-Cartier.
Mme Joan Dougherty
Mme Dougherty: Merci, Mme la Présidente. Je suis heureuse
d'avoir
l'occasion de participer comme porte-parole de notre formation politique
à l'étude des crédits du ministère de la Science et
de la Technologie. On doit maintenant reconnaître que le monde est pris
dans le tourbillon d'une révolution technologique
accélérée qui marque profondément nos vies. Les
nouvelles technologies contraignent nos industries traditionnelles mettant
l'accent sur la main-d'oeuvre à se moderniser afin d'être
compétitives et nous créons, de nouvelles industries qui
nécessitent, sans délai, une main-d'oeuvre hautement
spécialisée et dont il y a présentement
pénurie.
Dans la course mondiale vers la survie économique, les gagnants
seront ceux qui auront les meilleures idées et le pouvoir d'exploiter
ces idées à des fins utiles. La nouvelle priorité portera
moins sur le travail manuel que sur la matière grise, car la force
motrice de la société postindustrielle proviendra des
ingénieurs, des physiciens et des informaticiens. Nous aurons besoin
d'un plus grand nombre de dirigeants, plus d'entrepreneurs et plus d'analystes
financiers. De plus, cela nécessitera un plus grand nombre d'avocats
qualifiés qui sauront affronter résolument les difficultés
qu'impliquent les nouvelles technologies.
Si les conditions politiques, fiscales, pédagogiques et celles du
travail s'avèrent favorables, le Québec sera capable non
seulement de retenir, mais aussi de recruter à la fois le capital et les
ressources humaines nécessaires. Il est important de reconnaître
que non seulement devons-nous développer nos propres ressources
humaines, mais encore nous devons inviter les talents d'autres parties du globe
en créant des centres d'excellence qui serviront de catalyseurs et
attireront l'argent et les meilleurs cerveaux disponibles.
Bien qu'il nous soit impossible de prédire l'avenir, nous savons
qu'une des réalités sera le changement. C'est donc dire que la
nature des emplois ainsi que leur disponibilité changeront constamment.
Les travailleurs à tous les niveaux de leur métier
nécessiteront des possibilités de progresser
périodiquement et, dans bien des cas, de se recycler en vue de nouveaux
emplois lorsque leurs compétences deviendront désuètes.
S'instruire au cours de toute une vie devra devenir plus qu'une théorie,
mais une réalité car l'habileté des individus de s'adapter
et de se développer deviendra d'une très grande importance.
De plus, nous avons la quasi-assurance qu'à l'avenir le niveau
minimal de compétence de notre main-d'oeuvre sera accru. Il sera donc de
plus en plus difficile pour ceux qui n'auront pas une éducation solide
et une bonne formation dans leur métier de se trouver de l'emploi.
Finalement, nous pouvons être assurés que les chances d'avenir
seront ouvertes à ceux qui possèdent non seulement une formation
spécialisée, mais une éducation de base solide qui saura
leur apporter à la fois profondeur et flexibilité. On ne peut
trop appuyer sur l'importance d'apprendre à lire, à
écrire, à se familiariser avec les mathématiques et les
sciences, ainsi que la capacité d'analyser et de résoudre des
problèmes et d'exploiter des idées à des fins utiles. La
facilité de s'exprimer aussi bien en français qu'en anglais
deviendra d'importance primordiale, parce que c'est un fait que l'anglais est
la plus importante langue internationale des sciences et de la technologie. Si
nous voulons réussir dans l'échange d'idées au plan
mondial, alors le bilinguisme devient essentiel. Pour toutes ces raisons, l'une
des responsabilités primordiales de notre gouvernement doit être
de donner une nouvelle priorité au développement de notre capital
humain. On se doit donc de faire cas de l'éducation, non seulement comme
une dépense, mais comme un investissement. Le capital intellectuel,
produit de l'éducation, est le plus important investissement que notre
société puisse faire, sans quoi un développement
industriel et économique d'envergure deviendra impossible.
Le défi du développement scientifique et technologique qui
s'impose à notre société dépasse,
évidemment, le mandat d'un seul ministère et je n'ai pas
l'intention de minimiser la difficulté de coordonner les initiatives de
tous les ministères impliqués. L'un des rôles du
ministère de la Science et de la Technologie est la sensibilisation de
notre société à l'importance, à la nature et
à l'ampleur du défi qui s'impose. Je crois que le ministre, par
ses déclarations et ses actions, a réussi à mettre de
l'avant ces priorités et, par conséquent, la population est plus
consciente que jamais des changements auxquels il faut faire face. Et je l'en
félicite.
Cependant, j'ai des inquiétudes. J'ai des inquiétudes
à bien des égards. Premièrement, depuis des mois, il ne se
passe presque pas un jour sans qu'un membre ou l'autre du gouvernement annonce
de nouveaux projets dans le domaine de la recherche scientifique, universitaire
et industrielle. Le premier ministre, dans son plan de relance
économique, incluait six centres de recherche qui coûteront, selon
le ministre de la Science et de la Technologie, 77 200 000 $ en trois ans, dont
32 200 000 $ en 1984-1985 que je ne vois pas dans le budget du ministère
de la Science et de la Technologie. Il n'y a que 15 000 000 $ consacrés
à cette fin dans le budget.
Les mesures à l'aide scientifique à l'entreprise
coûteront, selon les annonces du ministre, 42 805 000 $ en cinq ans: 5000
nouveaux étudiants dans les disciplines prioritaires du virage
technologique, ce qui coûtera 22 400 000 $ en 1984-1985. Cette
année, on promet 100% du coût réel, ce qui est
interprété par le gouvernement comme 70% du coût moyen des
étudiants dans ce secteur. Je devrais dire que ce montant constitue au
moins une amélioration par rapport à la situation de
l'année courante. On a promis 100% du coût et, en
réalité, les universités n'ont reçu que 30% de
leurs dépenses additionnelles pour les 4540 étudiants
additionnels acceptés. On a annoncé aussi 40 nouvelles
équipes englobant 800 chercheurs à l'aide du crédit de 27
500 000 $ en trois ans, plus un soutien de 7000 $ par an pour 500
étudiants qui travailleront comme membres de ces équipes.
Il est à noter que les coûts pour financer ce projet
n'étaient pas évidents dans le cahier des crédits du MEQ
et, lors de l'annonce du premier ministre, ni les universités, ni les
organismes subventionnaires n'étaient au courant de ce projet.
Même un porte-parole du MEQ a avoué qu'il n'avait pas
d'information sur les nouvelles structures scientifiques.
Selon les renseignements que nous avons reçus lors de
l'étude des crédits de l'Éducation, le projet est
actuellement à l'étude au Conseil des universités. Il a
aussi été envoyé à titre d'information à
tous les vice-recteurs à la recherche en leur indiquant que le programme
définitif leur sera annoncé officiellement au début de
mai.
Ce qui est encore plus étonnant, le MEQ nous a informés
que les équipes seront soutenues pour une période de cinq ans,
après quoi elles devraient être en mesure de se financer à
même les programmes réguliers, ceci, malgré les estimations
de salaires et d'équipement préparées par le MEQ qui
prévoit 27 500 000 $ d'ici 1987 et 46 400 000 $ de 1987 à 1992.
On a aussi annoncé 15 000 000 $ en trois ans pour le renouvellement des
équipements de pointe des laboratoires universitaires, dont 5 500 000 $
pour les nouvelles équipes.
À tous ces projets il faut ajouter une maison des sciences pour
environ 100 000 000 $, dont le site a été choisi avant même
les consultations publiques. C'est certainement malheureux. Le gouvernement
semble plus intéressé à venir à la rescousse de
Terre des hommes que d'assurer le succès du projet. Il y a aussi un
centre de la nature et un centre agro-alimentaire sur l'île Notre-Dame
pour un montant de 40 000 000 $. On parle aussi d'un réseau de centres
CAO-FAO, avec un budget de fonctionnement de 1 000 000 $ et 6 000 000 $ pour
l'équipement, un centre de recherche et d'essai de matériel sur
rail qui coûtera entre 20 000 000 $ et 40 000 000 $, une dizaine de
centres spécialisés dans les cégeps et, finalement, des
montants importants ajoutés au Fonds FCAC - on parle de FCAR, mais je ne
sais pas si c'est encore le Fonds FCAC - promis par le premier ministre et dont
je ne vois aucune indication dans les crédits du MEQ.
Les citoyens du Québec peuvent se demander d'où viennent
tous ces dollars, d'où viennent les ressources humaines pour peupler ces
projets. Personne n'a oublié les lois 105 et 111, les coupures, chaque
année, dans les budgets de nos hôpitaux et de nos services
sociaux, et les cris du coeur des universités qui ont subi depuis cinq
ans des coupures draconiennes dans leurs budgets de fonctionnement. De
multiples annonces, souvent prématurées, le manque évident
de planification et de consultation, le manque de cohérence dans les
actions du gouvernement, la diffusion et la confusion des mandats des
ministères qui provoquent inévitablement des chicanes
interministérielles - je pourrais citer un exemple: l'histoire pitoyable
des ordinateurs - tout cela véhicule une image d'improvisation et de
confusion, inspirée, évidemment, du désir d'être
spectaculaire sur le plan politique, au moins à court terme, et
réduit inévitablement la crédibilité du
gouvernement sur le plan du virage technologique.
Personnellement, je crois que nous aurions plus de succès, en ce
qui concerne le défi technologique, si le gouvernement avait le courage
d'agir d'une façon plus solide, et donc moins spectaculaire, en tenant
compte de nos besoins réels à long terme. Quels sont ces besoins?
Je ne mentionnerai que deux catégories de besoins: premièrement,
il est urgent que le gouvernement du Québec s'intéresse à
notre position de non-concurrence en ce qui concerne la fiscalité de nos
entreprises et des individus, surtout les hauts salariés. Le revenu
personnel après impôt constitue un élément important
dans la décision d'implanter un nouveau laboratoire de recherche ou de
venir travailler au sein de laboratoires existants. Il y a aussi la
nécessité d'augmenter les incitatifs afin d'accroître de
façon significative l'effort de recherche et de développement au
sein de l'industrie québécoise. Par exemple, le COPEM a
suggéré l'établissement de systèmes de contrats
d'investissement en recherche scientifique. Le Conseil de la science et de la
technologie estime qu'une telle mesure pourrait attirer les capitaux
considérables que nécessite l'essor de l'industrie de technologie
de pointe. (17 h 15)
II faut mentionner également le climat social, politique et
linguistique qui décourage les investisseurs et qui a contribué
à chasser quantité de gens parmi nos plus compétents vers
les régions plus stables, le refus du gouvernement du Québec de
reconnaître la "clause Canada", ainsi que les restrictions excessives
concernant la langue visant à la certification des professionnels qui
sont constamment cités par les employeurs comme étant la cause
des difficultés d'attirer le
personnel hautement qualifié venant de l'extérieur de la
province.
Deuxièmement, il est urgent que le gouvernement reconnaisse que,
dans une économie où les connaissances deviennent hautement
prioritaires, un plus haut niveau d'éducation devient une ressource
stratégique. Un plus grand financement des universités est donc
critique si nous voulons mettre fin à la sérieuse érosion
actuelle de leur capacité de formation et de recherche. Le rapport
annuel du Conseil des universités résume ainsi la situation, et
je le cite: "C'est un véritable cri d'alarme que le Conseil des
universités veut lancer à l'occasion de ce rapport annuel. La
situation des universités québécoises est devenue si
précaire que certains des acquis les plus importants de la
révolution tranquille et des années qui ont suivi sont en train
de fondre au soleil de l'austérité, de l'opportunisme et du
laisser-faire. Il ne sert à rien de se cacher la vérité.
Les compressions budgétaires des dernières années
associées au laxisme des politiques gouvernementales, à
l'égoïsme des groupes d'intérêt et aux
compétitions stériles sont en train de provoquer la
désintégration des équipes les plus solides, de diminuer
dangereusement les ressources disponibles et de démoraliser les
professeurs et les chercheurs les plus sérieux."
Je cite également un extrait d'une allocution
présentée par M. Yvan Cliche, président du fonds FCAC au
colloque organisé par l'Association des administrateurs de recherche
universitaire du Québec et le fonds FCAC, le 10 novembre 1983. Il a dit:
"Depuis sa mise sur pied, le réseau québécois de la
recherche a évolué et compte de nombreuses réussites. Il
ne faut pas sous-estimer sa capacité d'adaptation, mais plutôt le
valoriser davantage et l'aider à surmonter les difficultés qu'il
rencontre. Celles-ci sont nombreuses: formule de financement peu favorable au
développement des deuxième et troisième cycles,
vieillissement du corps professoral, vétusté des
équipements scientifiques, faible taux de diplomation aux cycles
supérieurs, absence de modulation des tâches, pénurie de
chercheurs dans certains domaines de pointe, retard des universités sur
le plan du financement de la recherche, etc."
Malgré la promesse de l'ancien ministre de l'Éducation,
dans son communiqué du 5 décembre 1983, que je cite: "La relance
universitaire marquera, en 1984-1985, la fin des compressions
budgétaires, bien qu'on exige encore des universités, en
1983-1984, un dernier effort de rationalisation et de concertation",
malgré la promesse du ministre de la Science et de la Technologie, faite
le 30 septembre 1983, dans son discours à l'ADRIQ, "Je tiens à
vous assurer qu'à partir de maintenant l'aspect financier ne devrait pas
être un obstacle à ce virage extrêmement important que notre
société doit prendre", malgré ces promesses, le
gouvernement a, évidemment, l'intention de procéder à son
programme de coupure dans le budget de fonctionnement des universités,
ainsi que dans le plan quinquennal d'investissement qu'il a ramené
à 16 500 000 $ pour 1984, de 44 000 000 $ qu'il devait être. "On
se demande, a dit M. Jacques L'Écuyer, dans le Devoir du samedi 14
avril, quel jeu joue le gouvernement. Il annonce qu'il va mettre fin aux
compressions budgétaires des universités pour sauver son virage
technologique et, au même moment, il coupe en secret dans les travaux de
construction stratégiques pour les universités de
Montréal."
Des questions sérieuses s'imposent: Pourquoi le gouvernement
a-t-il décidé de créer 40 nouvelles équipes de
recherche dans les universités au lieu de s'occuper du sort des
équipes qui sont déjà en place? Comment le gouvernement
peut-il justifier le financement de nouvelles clientèles tandis que
l'équipement et l'espace et surtout le corps professoral qualifié
dont elles ont tellement besoin n'existent pas? Qui va peupler les nouveaux
centres de recherche quand les universités sont déjà
dépourvues d'un corps professoral adéquat? Pourquoi le
gouvernement ne révise-t-il pas la formule de financement qui influence
de façon négative le développement de la main-d'oeuvre
scientifique et technique nécessaire à la révolution
technologique? Pourquoi risquer de sacrifier la mission primordiale de nos
universités, la poursuite de l'excellence, tandis qu'en même temps
on prétend les aider en créant de nouveaux programmes de
recherche orientée qui auront peu de chances de réussir, faute
d'une infrastructure adéquate afin de les appuyer? Dans son zèle
à vouloir atteindre des objectifs à court terme en supportant
à tout prix la recherche appliquée, le gouvernement ne
risque-t-il pas sérieusement à long terme de compromettre
à sa base même la force de la recherche universitaire qui est
critique pour tout développement économique et social futur?
M. le Président, c'est avec ces réserves et ces questions
sans réponse que j'aborde le programme du ministère de la Science
et de la Technologie pour l'année 1984-1985. J'avoue que j'ai
trouvé beaucoup de satisfaction en lisant les récents avis du
Conseil de la science et de la technologie. J'espère que le gouvernement
va prendre bonne note de ces recommandations afin de réorienter ses
politiques en conséquence. En ce qui concerne la documentation que j'ai
reçue sur les crédits, je la trouve nettement inadéquate.
Malgré l'arrivée lundi de renseignements supplémentaires,
j'ai passé des heures à fouiller des déclarations et des
communiqués du ministre afin de démêler et
de comprendre exactement de quoi il s'agit. Il y a aussi des carences
entre les chiffres dans les livres bleus et les chiffres qui viennent du
ministère. C'est loin d'être clair: Qui finance quoi et selon quel
programme? J'aurais voulu une explication claire et précise sur tous les
éléments de chaque programme. Il va sans dire que les
renseignements dans votre cahier vont laisser mes collègues de cette
commission dans la noirceur.
Avant d'aborder les programmes, j'aimerais discuter quelques
recommandations du Conseil de la science et de la technologie dans son avis de
mars 1984 que je trouve très pertinentes à notre étude.
J'en ai choisi quelques-unes sur lesquelles j'aimerais avoir votre
réaction, M. le ministre. On n'a évidemment pas le temps de
discuter de l'ensemble de l'avis.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier, votre temps de parole étant expiré, je vais vous
demander de conclure.
Mme Dougherty: Je termine.
La Présidente (Mme Harel): Très bien.
Mme Dougherty: D'autres sujets que j'aimerais aborder au fur et
à mesure qu'on procédera sont les volets du programme de soutien
à l'emploi scientifique, les chercheurs de la compagnie Ayerst, la
situation en ce qui concerne la Loi fédérale sur les brevets dont
il s'agissait cet après-midi, les nouveaux centres de recherche et le
réseau de centres CAO-FAO, les projets spéciaux
subventionnés en 1983-1984 par les 15 000 000 $ consacrés par les
crédits de l'an dernier, ainsi que les projets prévus pour
1984-1985 pour un montant de 6 476 200 $, et, enfin, la fondation de l'agence
de valorisation et le conseil, s'il reste du temps.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Merci, Mme la
députée de Jacques-Cartier. Nous allons procéder à
l'étude de chacun des programmes. Il n'y a pas de réplique
prévue en commission parlementaire.
M. le ministre.
M. Paquette: On m'a dit que le ministre en commission
parlementaire pouvait intervenir librement.
La Présidente (Mme Harel):
Effectivement, je crois que c'est l'article 59 qui prévoit que le
ministre peut intervenir en tout temps, mais il peut le faire en réponse
à une question d'un membre de la commission.
M. Paquette: On vient de m'en poser quinze, Mme la
Présidente. Je n'avais pas l'intention de répondre aux quinze
questions, mais seulement à deux d'entre elles parce que les autres vont
probablement revenir, je ne sais pas.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Avant d'aborder les programmes
élément par élément, comme je l'ai mentionné
dans mon discours, est-ce qu'on pourrait aborder trois questions dans l'avis du
Conseil de la science et de la technologie, qui sont très pertinentes,
je crois?
La Présidente (Mme Harel): Je pense que c'est l'initiative
de cette commission de se donner un ordre des travaux qui corresponde aux
préoccupations des membres de la commission. Nous ne sommes pas tenus de
faire l'étude élément par élément de chacun
des programmes. Si vous considérez que des questions d'ordre
général pourraient être formulées
immédiatement, avant que nous entreprenions l'étude de chacun des
éléments de programme, il serait peut-être souhaitable de
le faire immédiatement si c'est là le voeu, le consentement des
membres de la commission. M. le ministre, est-ce que cela vous irait?
Donc, la parole est à Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Avis du Conseil de la science et de la
technologie
Mme Dougherty: Le premier sujet sur lequel j'aimerais avoir la
réaction du ministre, c'est sur les incitatifs fiscaux susceptibles
d'attirer des capitaux considérables proposés dans l'avis du
conseil. Êtes-vous au courant des propositions du COPEM sur les
"investments contracts"? C'est la première fois que je voyais cette
suggestion de COPEM. J'aimerais savoir si vous avez étudié cette
suggestion, si vous avez fait des démarches auprès de vos
collègues dans ce sens, parce que j'ai parlé aux gens de COPEM
plusieurs fois à cet égard et il me semble que cela pourrait
être une initiative très prometteuse pour susciter et encourager
la recherche et le développement.
La Présidente (Mme Harel): On a maintenant le
Comité de promotion économique de Montréal. Est-ce bien le
cas, M. le ministre?
M. Paquette: Exactement, Mme la Présidente. C'est un
comité mis sur pied par les deux chambres de commerce de la
région
de Montréal. J'ai eu aussi l'occasion de les rencontrer à
plusieurs reprises. Cette proposition a été soumise à mon
attention juste avant le dernier budget. Donc, on n'avait pas le temps - j'en
avais parlé à ce moment avec le ministre des Finances - de lui
donner suite parce que le ministre des Finances avait terminé la
rédaction de son budget. Ce qu'on avait le temps de préparer,
c'était un mécanisme beaucoup plus simple qui est devenu le
crédit d'impôt de 10% sur la masse salariale affectée
à la recherche et au développement.
La proposition du COPEM est d'une nature différente. Elle vise
à favoriser, un peu à la manière de
l'épargne-actions, l'investissement d'individus, de hauts
salariés, souvent de cadres d'entreprises ou même de gens qui sont
dans les départements de recherche des grandes entreprises ou de
l'ensemble de la population; elle vise à orienter leurs fonds vers des
projets de recherche appliquée. C'est un dossier qui est né,
aussi, presque en même temps, parce qu'il y a des personnes du COPEM qui
sont également dans des comités du Conseil de la science et de la
technologie, qui a été assumé par le Conseil de la science
et de la technologie et qui nous revient sous forme d'avis. Comme il y a
à peu près un an qu'on est au courant de cette proposition, bien
sûr que celle-ci est à l'étude, bien sûr qu'on aura
à déterminer notre position. Actuellement, je ne peux pas aller
plus loin et vous dire si on va l'appuyer. C'est une idée
intéressante à première vue. Il y a beaucoup de
modalités à considérer. Je pense que c'est un travail
intéressant qu'ont fait le COPEM et le Conseil de la science et de la
technologie et nous en tenons compte dans nos travaux actuellement.
Mme Dougherty: II y a une autre bonne suggestion, sur le
même sujet. Le gouvernement du Québec doit augmenter de 10%
à 25% la masse salariale. Les 10% ne sont pas assez significatifs pour
encourager la recherche et le développement. (17 h 30)
M. Paquette: Ce n'est peut-être pas significatif, mais ce
sont 26 000 000 $ de plus d'injectés dans la recherche et le
développement industriels. C'est une mesure qui, à ma
connaissance, n'existe dans aucune autre province canadienne. Donc, cela
procure un avantage comparatif aux entreprises qui veulent innover au
Québec par rapport aux autres provinces. De plus, le fait de porter de
10 000 000 $ à 25 000 000 $ est un autre des projets en discussion.
Mme Dougherty: De 10% à 25%.
M. Paquette: Oui, oui. Il y a beaucoup de gens qui
émettent des idées et on verra au prochain budget de quelle
façon le ministre des Finances en a tenu compte.
La Présidente (Mme Harel): M. le député
d'Outremont, sur le même sujet, je crois.
M. Fortier: C'est un peu terminé. C'était sur le
premier point. Je ne suis pas familier avec la recommandation du COPEM dans les
détails. Pour être attrayante, cette recommandation qui est
considérée par le gouvernement, si je comprends bien,
devrait-elle recevoir également l'aval du gouvernement
fédéral? Autrement dit, une recommandation comme celle-là
est-elle intéressante uniquement si les deux niveaux de gouvernement y
donnent suite ou si elle peut être attrayante uniquement si le
gouvernement du Québec y donne suite? Si c'était le cas, si cela
demandait la collaboration des deux niveaux de gouvernement et si le ministre
des Finances la considérait à sa juste valeur, est-ce que ce sont
les intentions du ministre de tenter d'obtenir la collaboration du gouvernement
fédéral à ce sujet?
M. Paquette: L'attitude générale face au
gouvernement fédéral, je pense qu'on l'aura noté...
M. Fortier: Oui.
M. Paquette: ...c'est toujours de proposer des projets et une
collaboration. Évidemment, c'est arrivé très peu souvent
qu'on ait obtenu cette collaboration. On l'avait proposée pour un projet
extrêmement important pour Montréal, qui est l'Institut de
recherche en biotechnologie, mais, enfin, c'est un dossier qui avait
émané de notre ministère sur lequel s'était
établi un consensus des intervenants dans la région de
Montréal. On avait offert une participation de 10 000 000 $ au
gouvernement fédéral. On était, d'ailleurs,
disposés à discuter d'une augmentation possible de cette
intervention et on a appris la création d'un institut par les
journaux.
Récemment, on a réussi à harmoniser les nouvelles
mesures d'aide fiscale à la recherche et au développement du
gouvernement fédéral. On a harmonisé nos propres
politiques de façon à leur donner leur pleine efficacité.
On est tout à fait disposés à regarder des idées
nouvelles comme celles-là. On les regarde actuellement. C'est sûr
que c'est intéressant en soi, mais pour donner sa pleine
efficacité il faudrait qu'il y ait une harmonisation au niveau du
gouvernement fédéral aussi.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Seulement pour mon information, pour mettre en
marche les contrats d'investissement, il faut un changement de la Loi sur les
impôts du Québec et aussi de la loi fédérale. Il
faut faire deux changements pour attirer le maximum de profit de ces
mesures.
M. Paquette: Oui et les retards qu'on prend à faire cela
et à s'harmoniser nous retardent dans la voie du changement
technologique qui est très important pour toutes les
sociétés. Après cela, on ne doit pas être surpris de
voir le Canada qui glisse du deuxième rang des pays les plus riches du
monde au seizième rang et de voir que l'impact scientifique et
technologique au Canada est beaucoup plus faible et est l'un des plus faibles
de tous les pays industrialisés. Mais cela ne veut pas dire qu'il ne
faut pas essayer de s'harmoniser et d'obtenir un changement à un endroit
et en même temps à l'autre; mais ces pourparlers sont toujours
très longs.
La Présidente (Mme Harel): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Je voudrais seulement faire un commentaire en
passant. Je suis complètement d'accord avec le ministre que le Canada a
des retards à rattraper et que, s'il n'y a pas une collaboration, il va
y avoir des pépins et on va tous souffrir ensemble, d'ailleurs. Lors de
la création du ministère du Commerce extérieur, j'avais
évoqué des appréhensions qui ne se sont pas
matérialisées. Nous avions des appréhensions
vis-à-vis du ministre des Affaires intergouvernementales et le premier
ministre nous a donné raison éventuellement. Mais la lourde
appréhension que j'avais, c'était sur le fait que, si le ministre
des Affaires extérieures ne cherchait pas à créer des
systèmes ou des subventions qui étaient complémentaires de
ceux du gouvernement fédéral, ceci ne produirait pas les
résultats escomptés. De fait, le ministre s'est engagé
dans cette direction. J'avais des appréhensions même s'il nous
l'avait dit en Chambre à ce moment-là, mais ceci donne de
très bons résultats présentement. Quand on regarde les
succès dans le domaine de l'exportation - et je crois que c'est
peut-être un bon exemple d'une collaboration - c'était plus facile
parce qu'il existait déjà des programmes fédéraux
dans le domaine de l'exportation et le gouvernement du Québec est venu
par la suite tenter de créer de nouveaux types de subventions qui
étaient complémentaires. Quand même, il reste que,
lorsqu'il y a complémentarité, il est bien certain qu'on arrive
plus rapidement aux résultats escomptés.
M. Paquette: Je voudrais simplement ajouter qu'il est vital pour
le Québec - je pense que Mme la députée de Jacques-Cartier
l'a souligné dans son exposé - de se donner des orientations et
de s'assurer qu'on concentre nos ressources - on est un peuple de 6 000 000
d'habitants - dans certains secteurs prioritaires en fonction de
créneaux où l'on peut réussir sur les marchés
extérieurs comme sur les marchés locaux. En ce sens, on ne peut
pas se permettre ce à quoi, malheureusement, nous condamne le
régime fédéral actuel, c'est-à-dire, toujours dans
chaque champ de compétence et particulièrement dans le secteur
vital de la recherche et du développement, un partage des
responsabilités qui donne des choses comme celle-ci. Vous dites: On doit
essayer d'établir nos activités en complémentarité.
Je vous donne un exemple. Après l'épisode du centre canadien
à Montréal où l'on a refusé notre participation, on
s'est dit: Bien, voici, on a un rapport de notre comité sur les
technologies de fermentation, qui découle du rapport À l'heure
des biotechnologies, qui nous recommande qu'il y ait deux usines pilotes de
fermentation. Alors, on va en faire une autre à Québec et c'est
un des six centres qui ont été annoncés, un centre sur la
valorisation de la biomasse en vue d'applications dans le domaine
agroalimentaire, dans le domaine énergétique en se disant:
À Montréal, ils vont se concentrer sur le domaine de la
santé. Et là, on apprend que le centre de Montréal veut
s'occuper de tous les domaines. C'est très difficile d'établir
des actions complémentaires.
Dans l'électrochimie hydrogène, cela faisait trois ans
qu'on attendait une décision du fédéral pour créer
un centre de recherche. On décide d'en créer un à
l'automne parce qu'on avait perdu espoir; on se dit: On va le créer
nous-mêmes. Trois mois plus tard, deux ministres fédéraux
annoncent que, à leur tour, ils vont créer un centre de recherche
en électrochimie hydrogène et, là, on est en train de
travailler avec Hydro-Québec à bâtir ces deux centres
côte à côte avec une cafétéria entre les deux
pour que les chercheurs puissent se parler. On ne peut pas continuer
très longtemps comme cela au Québec si l'on veut prendre le
virage technologique.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Concernant la prochaine recommandation du Conseil
de la science et de la technologie, j'aimerais aborder la question du nombre
très très faible de diplômés en deuxième et
troisième cycles ici au Québec. Il y a un tableau qui, dans leur
avis, démontre une situation sérieuse ici au Québec; nous
sommes au-dessus de toutes les autres provinces du
Canada et l'une des façons d'améliorer la situation
pourrait être une révision de la formule de financement des
universités qui reconnaîtrait les coûts
différenciés des différents niveaux. C'est une suggestion
qui a été faite depuis longtemps par tous les intervenants du
milieu universitaire. J'aimerais avoir si vous avez discuté de cette
possibilité avec vos collègues et quel en fut le
résultat.
M. Paquette: Certainement, Mme la Présidente. D'abord, une
remarque générale concernant le rapport du Conseil de la science
et de la technologie: par exemple, ces données qu'on mentionne
proviennent du ministère. On vise à donner le maximum
d'information possible et ces données je les ai moi-même rendues
publiques pour démontrer l'effort énorme que nous avons à
faire, un effort du même ordre que celui que nous avons réussi
à faire dans les sciences de l'administration.
Une remarque générale sur le rapport du conseil des
sciences, c'est que la plupart des conclusions qui sont dans ce document se
préparent depuis environ huit mois. Il y a une formule de consultation
publique et il y a des audiences publiques du conseil, les gens peuvent
intervenir, présenter des mémoires et, ensuite, le conseil
révise ses avis au ministre en fonction de la consultation. Donc,
j'avais à ma disposition, au début de l'automne, un rapport
préliminaire du conseil et il n'y a pas eu de changements très
substantiels à la suite de la consultation. Il y a eu un raffinement et
quelques éléments nouveaux. J'ai donc pu tenir compte de ces
recommandations au moment de la préparation du plan de relance en
novembre. Par conséquent, quand le rapport est sorti, le 14 mars, il y
avait plusieurs commentaires. Cela a semblé dire: Le gouvernement doit
tenir compte maintenant de ces orientations, comme si on n'en avait pas
déjà tenu compte largement dans le plan de relance.
C'est, d'ailleurs, un des objectifs du plan de relance de combler ce
retard du Québec très rapidement quand on dit qu'on se donne
comme objectif d'atteindre le tout premier rang en termes de la formation
scientifique et technologique. On va y consacrer, au cours des trois prochaines
années, pas n'importe où, pas dans le budget
général des universités, pas à la faculté de
théologie, mais dans les secteurs prioritaires du virage technologique,
125 000 000 $ en trois ans répartis en trois blocs: le financement de
clientèles additionnelles dans les secteurs prioritaires du virage
technologique, 5000 $ par année de plus; le financement de 40 nouvelles
équipes de recherche qui vont regrouper des étudiants de
maîtrise et de doctorat. Je pense que c'est là une idée
extrêmement intéressante. Vous avez dit dans votre exposé
qu'on n'avait consulté personne, mais, précisément, via le
Conseil de la science et de la technologie, on a consulté les
intervenants et, avant la préparation du plan de relance, on a fait des
consultations informelles pour voir si le programme serait bien reçu.
Maintenant, il est devant le Conseil des universités pour les
modalités et non pour le principe. Je ne pense pas que, dans les
universités, on s'oppose au principe des 40 équipes.
Les 40 équipes peuvent être des équipes existantes
dont on étend les possibilités d'action. Ce peuvent aussi
être de nouvelles équipes. Dans ces 40 équipes, on aura un
directeur d'équipe, des assistants de recherche, puis toujours un
certain nombre d'étudiants de maîtrise et de doctorat qui y
trouveront à ce moment l'encadrement de qualité dont ils ont
besoin pour aller au bout de leurs études et donner au Québec les
compétences dont il a besoin. Ils auront aussi une aide
financière additionnelle de 7000 $ qui s'ajoutera aux bourses du
Québec et également aux bourses que le gouvernement
fédéral donne pour leur participation à l'équipe de
recherche.
Voilà donc une mesure qui, en soi, devrait nous permettre de
rattraper le temps perdu. Si on regarde au-delà de la mesure, il y a
aussi l'impact que cela va avoir, c'est-à-dire que le fait qu'on fasse
un virage sur certains secteurs prioritaires dans les équipes de
recherche dans les universités et qu'on donne les ressources suffisantes
va stimuler beaucoup de projets.
J'arrive à votre question sur le mode de financement des
universités. Au moment du remaniement ministériel, le ministre de
l'Éducation m'avait dit qu'il arrivait précisément avec
des propositions, à la fin de son processus. Je comprends le nouveau
ministre de l'Éducation de ne pas avoir eu le temps de regarder toutes
les questions parce qu'il y a beaucoup de dossiers actifs au ministère
de l'Éducation. C'est un ministère essentiel au virage
technologique et c'est pourquoi non seulement nos deux ministères se
rencontrent de temps en temps, non seulement on s'en parle entre deux portes,
mais il y a un comité de coordination au plus haut niveau auquel
participent le sous-ministre de la Science et de la Technologie et le
sous-ministre de l'Éducation avec certains de leurs collègues.
Ils se réunissent à tous les mois, régulièrement,
pour faire le point sur les dossiers de relance et, évidemment, la
formule de financement des universités nous intéresse au plus
haut point comme moyen privilégié de réalisation d'une
politique scientifique et technologique. Il est bien sûr que l'avis que
nous avons, c'est qu'on doit tenir compte d'un financement
différencié au niveau de la maîtrise et du doctorat par
rapport au financement régulier. Autrement dit, si on donne un
certain
montant par étudiant au premier cycle, on devra probablement
tenir compte des coûts plus élevés qu'engendre
l'encadrement des étudiants de maîtrise et de doctorat lorsqu'il
s'agit de la formule de financement.
Actuellement, toutes les clientèles étudiantes sont
financées sur le même niveau. C'est un régime qui est
à l'étude au ministère de l'Éducation. On me disait
que cela approchait d'une conclusion au moment du remaniement
ministériel.
La Présidente (Mme Harel): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Est-ce que ma collègue ou le ministre me
permettrait un commentaire? Je n'ai jamais fait partie d'un cabinet; donc, je
n'ai pas l'expérience du ministre. Ce qui m'intéresse beaucoup
dans les propos qu'il vient de tenir, c'est qu'à cause du changement de
ministre à certains postes il y aurait amélioration.
M. Paquette: Je n'ai pas dit qu'il y aurait amélioration.
J'ai dit qu'il y avait un certain retard. (17 h 45)
M. Fortier: Laissez-moi terminer. Dernièrement, j'avais le
plaisir et je suis sûr...
M. Paquette: J'espère qu'il va y avoir une
amélioration.
M. Fortier: D'ailleurs, le directeur de l'école
polytechnique nous avait dit qu'il avait rencontré, le ministre lorsque
ma collègue et moi avons visité l'École polytechnique
dernièrement. C'est certainement une école qui, dans le virage
technologique, en est une de génie; d'ailleurs, c'est mon alma mater et
c'est certainement une école qui doit être favorisée. Il
nous faisait part du fait que, depuis plusieurs années
déjà, le gouvernement avait réduit ou n'avait pas
donné suite aux demandes répétées pour payer les
investissements, pour acheter de l'équipement de recherche, justement.
Il y a deux ou trois mois, un avis, dont j'avais eu copie, avait
été envoyé par le ministre de l'Éducation au
Conseil du trésor, suppliant le président du Conseil du
trésor de donner suite à cette demande des écoles de
génie et des institutions de haut savoir.
La question que je voulais poser au ministre, c'est: Maintenant que le
président du Conseil du trésor est ministre de
l'Éducation, sera-t-il plus attentif aux besoins des différentes
institutions dans le domaine de l'éducation et de l'éducation
scientifique en particulier? Je ne croirais pas que le ministre changera
d'opinion aussi rapidement, mais je me demandais si le fait de changer de
ministre donnait automatiquement de nouvelles idées ou de nouvelles
perspectives sur les besoins de la société.
M. Paquette: Oh! C'est fort...
La Présidente (Mme Harel): Je vous rappelle, M. le
ministre, que vous pouvez intervenir en tout temps, mais que vous n'êtes
pas obligé de répondre à toutes les questions.
M. Paquette: Non, non.
M. Fortier: Pourquoi dites-vous cela, Mme la Présidente?
Ma question était-elle farfelue?
M. Paquette: Je vais simplement répondre qu'un changement
de point de vue est souvent salutaire, mais que le nouveau ministre de
l'Éducation, comme l'ancien ministre de l'Éducation, devra se
frotter au nouveau président du Conseil du trésor.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Le problème réside dans les moyens
que le gouvernement a choisis pour augmenter le nombre d'étudiants des
2e et 3e cycles. Le problème semble être que, demain, le
gouvernement retire l'argent et affaiblisse l'infrastructure. On ajoute des
programmes pour lesquels il n'y a pas assez d'infrastructures. C'est un
problème sérieux. Ce n'est pas parce qu'on est contre la
création de plusieurs équipes, pas du tout. Il semble que les
universités soient au bout de la ligne et on ne peut pas couper encore.
On a tout le problème d'un corps professoral...
M. Paquette: Vieillissant.
Mme Dougherty: ...vieillissant. C'est grave et c'est aussi
aggravé par la loi 15. Il y a aussi en génie, par exemple, le
problème de la concurrence des salaires des professeurs avec l'industrie
qui est très important. On perd quelques professeurs très
compétents pour l'industrie, dont on a tant besoin pour enseigner
à la nouvelle clientèle. Donc, la solution n'est pas aussi simple
que d'ajouter ou financer 5000 étudiants dans ces secteurs. C'est toute
l'infrastructure qui s'effondre. On ne peut pas donner un enseignement de
qualité à ces étudiants.
M. Paquette: Oui. Je suis évidemment d'accord avec vous
qu'il ne s'agit pas simplement d'annoncer qu'on va créer 40 nouvelles
équipes de recherche. Cependant, quand on met des budgets sur la table
pour accueillir 5000 nouveaux étudiants dans certaines secteurs bien
précis, pas dans n'importe quoi, il y a un effort de
concentrations d'orientation. Des choix ont été faits face
au développement des secteurs prioritaires du virage technologique.
D'ailleurs, le Conseil des universités nous l'avait reproché il y
a un an et demi dans un rapport très fouillé. Il trouvait qu'il
n'y avait pas assez d'orientations données par les subventions du
gouvernement. Dans le fond, on n'a privilégié aucun secteur, on
saupoudrait l'argent public dans tous les secteurs. Il y a donc un effort de
concertation et de concentration des ressources qui est très important.
Quand on dit qu'il y aura 5000 étudiants de plus dans des secteurs
prioritaires du virage technologique, cela veut dire de nouveaux professeurs au
bout, cela veut dire du nouveau personnel; cela veut donc dire une porte
d'entrée ouverte à de jeunes professeurs qui vont venir
renouveler le corps professoral vieillissant. Jusqu'à ces mesures, bien
sûr, on était dans la crise, dans la récession et il n'y
avait pratiquement pas, dans quelque secteur que ce soit, d'ailleurs, de
nouveaux postes accessibles. Maintenant, il y en a et il va y en avoir dans les
secteurs prioritaires du virage technologique.
Deuxièmement, quand, dans une des mesures dont j'ai la
responsabilité, on se fixe comme objectif, et on se donne les moyens
financiers pour le faire, de doubler en quatre ans le personnel scientifique et
technique dans les PME du Québec, on veut ajouter 1600 nouveaux postes,
voilà des débouchés nouveaux. Quand on
récupère les chercheurs d'Ayerst et qu'on dit aux gens: À
la fin de l'année, il va y avoir plus d'emplois en recherche
pharmaceutique qu'il n'y en avait au début, quand on pose des gestes
comme ceux-là, le message qui est lancé aux jeunes, c'est qu'il y
a avantage à aller dans les secteurs scientifiques et technologiques et
qu'il y a un effort global de la société où on ne vous
laissera pas tomber. On va vous donner des ouvertures et des perspectives
d'emploi. Cela incite des jeunes à s'engager d'abord dans des
carrières scientifiques et technologiques et à poursuivre leurs
études le plus loin possible. On peut dire la même chose des six
centres de recherche appliquée ou de l'aide à la recherche
industrielle qu'on fait. Chaque fois, cela veut dire des emplois scientifiques
au bout et la nécessité et l'opportunité pour des jeunes
de se former en science et en technologie le plus longtemps possible.
J'irais jusqu'à dire que, s'il y avait dans une année - je
prends un chiffre au hasard - 20 000 000 $ de plus concentrés dans les
secteurs prioritaires du virage technologique en échange de coupures de
20 000 000 $ sur les frais généraux des universités, la
société québécoise aurait fait un gain, parce
qu'elle aurait concentré ses énergies et ses ressources et
donné la possibilité à des jeunes de faire ce rattrapage
dont vous parliez et dont on est conscient. Mais je pense qu'on met plus
d'argent qu'on en enlève. Ne me demandez pas d'entrer dans toute la
stratégie de financement des universités. Cela ne relève
pas de ma compétence. Il faudrait le demander au ministre de
l'Éducation. Mais, évidemment, notre objectif est qu'il y ait le
plus de ressources possible dans les secteurs prioritaires du virage
technologique dans les universités, parce que c'est la clé de
notre développement.
M. Fortier: Est-ce que le ministre me permettrait de lui poser
une question en ce qui concerne le vieillissement des professeurs? Je n'ai pas
eu l'occasion de lire l'avis du Conseil des universités. Je sais
qu'à l'Université de Montréal en particulier une
étude a été faite par le M. Hubert Charbonneau,
démographe. Est-ce que le ministre sait ou est-ce qu'il a analysé
ces études en ce qui concerne précisément les
facultés ou les écoles de génie? Est-ce que la situation
est différente dans les facultés de génie ou dans les
facutés à vocation scientifique? Est-ce qu'on peut porter le
même jugement ou si le problème est différent de
façon générale?
M. Paquette: C'est la même situation dans tous les
secteurs. Il y a eu un essor des universités avec la révolution
tranquille dans la décennie soixante et on se retrouve, contrairement
à un "baby boom", avec un groupe de professeurs d'université qui
arrivent à la retraite presque en même temps. Les années
les plus difficiles à passer vont être... C'est dans les cinq
années qui viennent qu'il faut poser les gestes, parce qu'une fois que
l'ensemble des professeurs d'université arriveront à la retraite
il y aura de nouveaux débouchés naturels qui s'offriront aux
nouvelles compétences qu'on a formées et qui frappent à la
porte d'entrée. Cela a relevé le niveau de nos cégeps,
parce qu'il y a beaucoup de professeurs ayant des maîtrises et des
doctorats qui sont dans les cégeps. C'est le sens de toutes les mesures
qu'on a prises. Et c'est avec cette perspective en tête qu'on a
préparé le plan de relance en l'orientant vers le
développement des ressources humaines en science et en technologie,
particulièrement dans les universités. Toutes les mesures du plan
de relance sont centrées sur ce problème et, en
conséquence, la remarque que fait le Conseil de la science et de la
technologie était justifiée au début de l'automne. Elle
l'est beaucoup moins maintenant et, à mon avis, elle ne le sera plus du
tout dans un an ou deux.
M. Fortier: Toujours dans le domaine scientifique, en ce qui
concerne le vieillissement du corps professoral, est-ce
que le ministre s'est penché sur l'impact de la loi qui permet
aux professeurs de dépasser l'âge de la retraite? Si c'est le cas,
est-ce que le ministre ferait des recommandations pour changer cette loi? Tout
le monde sait que ce sont les jeunes professeurs qui produisent et que,
malheureusement, les plus vieux, surtout dans le domaine scientifique...
Einstein a fait ses découvertes quand il était très jeune.
C'est le fait, d'ailleurs, de tous les chercheurs. Je n'ai pas les statistiques
sur l'impact réel du dépassement de l'âge normal de la
retraite de 65 ans, mais, si c'était le cas, il me semble que c'est une
action que le ministère pourrait prendre pour recommander que la loi
soit modifiée dans ce sens.
M. Paquette: Ce phénomène n'a pas une grande
ampleur, il s'agit de quelques individus pour le moment. Certains craignent que
la possibilité pour un professeur d'université de rester en poste
jusqu'à 70 ans limite encore plus les chances d'accès des jeunes.
Cependant, le Conseil des universités, dans son récent rapport
où il soulignait ce problème, mentionne que, en ce qui le
concerne, ce n'est pas une crainte qu'il entretient, d'autant plus qu'il est
bon de rappeler que cette politique d'extension de l'âge de la retraite
de 65 à 70 ans n'est que le premier volet d'une réforme où
on travaille maintenant sur la retraite accélérée.
Il y a eu la réforme du régime des rentes qui est
entrée en application le 1er janvier; les professeurs
d'université ont en général des fonds de retraite assez
intéressants. Je pense que les professeurs qui prendront leur retraite
avant 65 ans compenseront fort probablement ceux qui la prendront plus
tard.
Il ne faut pas négliger, non plus, le fait que les professeurs
âgés, s'ils sont peut-être, en général, moins
efficaces sur le plan de la recherche, le sont parfois beaucoup plus sur le
plan pédagogique et sur le plan de la formation des jeunes.
Je pense qu'une certaine spécialisation sera favorisée par
l'impact qu'on met sur la création et le regroupement des professeurs
d'université en équipes de recherche, avec l'entrée
d'assistants de recherche qui seront des jeunes, ce qui leur donnera une porte
d'accès additionnelle à l'université. En
général, on peut dire que l'ensemble des professeurs
d'université ne font pas suffisamment de recherche au Québec. Je
pense que le problème n'est pas tellement attribuable à la loi
concernant l'extension de l'âge de la retraite.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: J'avais un autre sujet, une troisième
question. Pourrais-je poser une dernière question sur l'avis du
conseil...
M. Paquette: Sur les généralités, est-ce
cela?
Mme Dougherty: En ce qui concerne les six centres de recherche
que vous proposez, le conseil dit qu'il faut éviter de créer des
entités complètement indépendantes qui collaboreraient
avec d'autres organismes impliqués dans le même secteur. Ces gens
ont peur que vous ajoutiez des choses au lieu d'utiliser les ressources
actuelles. Est-ce une crainte bien fondée ou avez-vous
déjà prévu ce problème?
M. Paquette: Absolument pas, car l'une des
caractéristiques du plan de relance et des six centres est une formule
complètement innovatrice à l'opposé de la politique
fédérale du Conseil national de recherche qui, chaque fois, sent
le besoin de toujours établir une succursale totalement coupée
des équipes universitaires. On a les meilleures équipes de
recherche biomédicale dans la région de Montréal: à
l'Université de Montréal, à McGill et à l'Institut
Armand Frappier.
L'Institut canadien de biotechnologie est totalement coupé de ces
équipes et totalement coupé aussi, pour le moment en tout cas, de
l'industrie. On commence à évoluer au niveau
fédéral, pour être juste, mais pour nous, dès le
départ, ce sont des centres coopératifs qui regroupent les
énergies et les ressources humaines, tant dans les universités
que dans les entreprises, au conseil d'administration des centres.
Prenons l'exemple du Centre de valorisation de la biomasse à
Québec ou du Centre des applications pédagogiques de l'ordinateur
à Montréal; nos comités d'implantation sont au travail
actuellement et ils sont formés de gens provenant des universités
et des industries dans le secteur. Le conseil d'administration, dans le cas du
Centre de valorisation de la biomasse, sera formé de qui? Ce seront
l'Université Laval, l'INRS, le Centre de recherche industrielle du
Québec à Québec et des entreprises du domaine,
principalement de la région de Québec et d'ailleurs. Pour les
applications pédagogiques de l'ordinateur, ce sera l'Université
du Québec à Montréal, fort probablement, avec des
entreprises de logiciels et des entreprises de matériel dans le secteur
de l'informatique. C'est une formule originale qu'on a baptisée du nom
de centre coopératif, puisque diverses ressources existantes
coopèrent pour se donner davantage de moyens et d'orientations sur un
axe de recherche prioritaire pour le Québec.
La Présidente (Mme Harel): Mme la députée de
Jacques-Cartier, je dois constater
qu'il est maintenant 18 heures. Je vais vous proposer d'ajourner nos
travaux jusqu'à demain. Nous les reprendrons au salon rouge à 10
heures, demain matin.
(Fin de la séance à 18 heures)