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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le jeudi 12 avril 1984 - Vol. 27 N° 8

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Énergie et des Ressources


Journal des débats

 

(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Lafrenière): À l'ordre! La commission permanente de l'économie et du travail commence ses travaux. Je demanderais au secrétaire de la commission de nous annoncer les remplacements.

Le Secrétaire: M. le Président, M. Bordeleau (Abitibi-Est) remplace M. Desbiens (Dubuc).

Le Président (M. Lafrenière): Étant donné l'absence de la présidente et du vice-président de la commission, qui agit comme critique officiel de l'Opposition, on m'a demandé d'agir à titre de président de cette commission.

L'étude portera sur les crédits du ministère de l'Énergie et des Ressources. J'appelle l'élément 1 du programme 1. J'aimerais avoir l'avis de la commission à savoir si on discute ces crédits programme par programme ou si on discute de l'ensemble du programme et qu'on les accepte après.

M. Fortier: Élément par élément...

Le Président (M. Lafrenière): Élément par élément.

M. Fortier: ...pour l'ensemble du programme et ensuite...

Le Président (M. Lafrenière): Consentement?

On discute de l'ensemble du programme.

Connaissance de la forêt

M. Fortier: Sur le programme 1, je n'ai qu'une brève question sur la connaissance de la forêt. Au mois de mai dernier, on avait fait état d'un rapport interne du ministère sur la précision de l'évaluation des ressources forestières. Je lis ici un article du Soleil du 25 mai et je cite: "Tout le système d'évaluation des ressources forestières disponibles est faussé actuellement au Québec parce que les données disponibles ne sont pas compilées de façon à pouvoir appuyer le processus d'allocation."

Inventaire forestier

Étant donné l'importance de mesurer exactement nos ressources forestières, compte tenu du fait que, dans plusieurs régions, on se doute ou on croit qu'on arrive à un point de rupture de stock, est-ce que le ministre pourrait nous dire les mesures qui ont été prises pour qu'on ait une évaluation plus précise des ressources forestières du Québec? Combien faudrait-il de temps pour mettre en oeuvre un programme qui, dans un certain nombre d'années, pourrait nous dire exactement quelles sont nos ressources forestières? À l'heure actuelle, est-ce qu'on a une idée de la précision des chiffres que le ministère fournit de temps à autre? Entre autres questions, quelle est la précision de l'évaluation des ressources qui sont données par le ministère dans le moment et est-ce qu'on a une idée du degré d'erreurs qui peuvent être incluses dans les données du ministère et quels moyens ont été mis en oeuvre - j'imagine que cela prendrait un certain nombre d'années - pour corriger la situation et - pour qu'on ait finalement des mesures plus exactes?

Le Président (M. Lafrenière): M. le ministre.

M. Duhaime: Vous avez fait référence dans votre question à l'inventaire par rapport à l'allocation en citant un document quelconque, quel est-il? Est-ce de l'Ordre des ingénieurs forestiers?

M. Fortier: Ici, on dit: "C'est du moins ce qu'un groupe de spécialistes de la Direction de l'industrie du bois ouvré ont constaté au cours d'une recherche qui s'est étendue sur deux ans et qui est de faire rapport au ministre de l'Énergie et des Ressources." C'est un rapport de M. Jean-Paul Gilbert, je crois.

M. Duhaime: Je vais répondre de la façon suivante à votre question. D'abord, pour ce qui est de M. Gilbert, oui, effectivement, il a transmis un rapport, mais M. Gilbert ne travaille pas au ministère de l'Énergie et des Ressources, à l'allocation des bois ou sur les questions d'approvisionnement. Il y a certainement des données auxquelles il n'a pas eu accès. Son travail a consisté essentiellement à faire une évaluation des niveaux d'inventaire, de la

façon de les mettre à point, de les tenir à jour, etc. Je pense pouvoir dire honnêtement qu'il y a toujours des choses à améliorer dans un système de toute évidence. Si vous regardez les budgets que nous consacrons au programme d'inventaire forestier qui a été commencé en 1981-1982, je vous renvoie à la page 20 du livre des crédits qu'on vous a déposé, vous avez toute l'explication. Nous l'avons poursuivi sur trois années financières.

Le Président (M. Lafrenière): M. le ministre, le sous-ministre peut répondre en votre nom, avec votre permission, si vous voulez.

M. Duhaime: Pardon?

Le Président (M. Lafrenière): Le sous-ministre peut répondre.

M. Fortier: Selon nos nouvelles règles.

M. Duhaime: Non, ce n'est pas un problème... Nous avons un problème technique. Mon sous-ministre me précise que, lorsque je me réfère à une pagination, nous ne nous référons pas aux mêmes documents, alors, on ne se comprendra pas.

Ce que je voudrais dire, c'est que...

M. Fortier: À quel article? C'est au programme 1: Connaissance de la forêt, j'imagine.

M. Duhaime: Programme 1, élément 2... M. Fortier: C'est à la page 16.

M. Duhaime: ...pour un budget de 2 587 000 $. L'inventaire forestier a été amorcé en 1981-1982 et s'est poursuivi pour trois ans, 1982-1983 et 1983-1984. On a établi 5000 placettes-échantillons sur 30 000 kilomètres carrés cartographiés en 1982-1983 et par une cartographie forestière d'environ 35 000 kilomètres carrés dans les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de l'Outaouais et de l'Abitibi-Témiscamingue. L'objectif pour 1984-1985, c'est 5000 placettes échantillons sur des superficies cartographiées l'année dernière et la production d'environ 30 000 kilomètres carrés de cartographie forestière dans les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de l'Abitibi-Témiscamingue et il y a aussi un volet en forêt privée. Ce qui veut dire que sur le plan des inventaires forestiers, le programme que nous maintenons actuellement au ministère, c'est entendu qu'on pourrait doubler le budget là-dessus et aller plus vite, très probablement, mais on pense être en mesure de répondre à ce qui nous apparaît satisfaisant. Ce n'est pas tant un problème de données ou d'obtention de données que d'utilisation ultérieure de ces données. C'est pour cette raison qu'il est important de faire le pont entre ce que nos inventaires forestiers établissent et les allocations de bois, autrement dit les garanties d'approvisionnement. C'est là qu'il faut faire un lien beaucoup plus soutenu, je pense. Jusqu'à maintenant, cela n'a pas causé de problèmes sérieux, mais je craindrais, si l'arrimage n'était pas fait entre la connaissance des inventaires et l'allocation des bois, qu'on se retrouve dans de curieuses situations.

M. Fortier: Mon propos, M. le ministre, n'est pas de suggérer de lancer un programme avec des millions de dollars pour le plaisir d'avoir des données. Ma question, je pense, avait deux aspects. D'une part, comme il est dit dans votre cahier des crédits, certaines des données étaient désuètes à cause des effets néfastes de la tordeuse des bourgeons de l'épinette et, par ailleurs, j'avais l'impression, compte tenu de l'article qui avait paru, que les moyens techniques qui avaient été utilisés dans le passé étaient périmés. J'imagine que les moyens techniques que vous utilisez maintenant sont plus sophistiqués, mais ma question était reliée dans une certaine mesure au fait que, dans certaines régions -on sait qu'on arrive très près du point de rupture des stocks - et je me demandais si on était dans une situation assez concasse où les gens utilisaient des données qui, dans le fond, étaient fausses et qui pouvaient amener Je ministère à donner des droits de coupe ou des allocations de coupe dans certaines régions alors que le ministère n'est même pas sûr, scientifiquement ou sur une base très précise, des données qui existent au ministère même.

M. Duhaime: Peut-être que je me suis mal fait comprendre. Au Québec, on coupe 30 000 000 de mètres cubes de bois, régulièrement, d'une année à l'autre. Il est reconnu et entendu que les allocations des bois ou les garanties d'approvisionnement ne sont pas données en mettant des billets dans un chapeau. Ceci est basé sur des études approfondies des capacités de production de la forêt, dans des matières ligneuses bien précises et qui sont faites dans les régions et dans les sous-régions. On doit toujours travailler bien sûr sur du plus et du moins. Mais, l'expérience aidant, il n'est jamais arrivé, à ma connaissance, près de trois ans dans ce ministère, que des allocations avaient été consenties à une entreprise et qu'on se soit retrouvé avec une absence de matière ligneuse ou encore des espèces non requises ou des choses semblables.

Les problèmes se posent surtout sur des périodes à long terme. Quand on donne des allocations de bois ou une garantie d'approvisionnement à une scierie ou à une entreprise de papier journal, ces gens sont

obligés de calculer leur investissement et leur retour sur des périodes parfois de 20, 25, 30 et même 40 ans. Parfois, il y a des discussions entre spécialistes pour savoir si la matière ligneuse sera suffisante après 38 ans ou 41 ans. J'avoue que, rendu là, j'aime autant démissionner et les laisser continuer de discuter.

Fondamentalement, la technique utilisée sur la poursuite des inventaires forestiers, d'après ce qu'on m'en dit, est correcte. Elle se fait à partir d'une cartographie très poussée. On a fait des progrès dans la cartographie. J'imagine qu'on va parler un peu de la Société de cartographie, ce matin. On a introduit le système numérique à l'intérieur de cela. C'est quand même déjà intéressant. Je n'ai pas d'inquiétude là-dessus. La seule question que j'ai posée à mon administration a été celle de savoir si les renseignements ou les données des inventaires forestiers étaient mis à la disposition des équipes qui travaillent sur les allocations de bois ou sur les garanties d'approvisionnement. La réponse est affirmative là-dessus.

M. Gilbert va maintenant vous faire état d'un rapport. Il n'est pas un employé du ministère de l'Énergie et des Ressources. Il est de l'entreprise privée. Pardon. Il est du ministère, mais non affecté à l'allocation des bois. Il travaille exclusivement sur les inventaires forestiers. Je pense bien qu'on va décloisonner ces équipes pour que les renseignements puissent circuler. Il n'y a pas vraiment un problème de fond sur cette question, ce sont des problèmes qui peuvent se poser à la marge mais, comme je l'ai dit, probablement davantage sur de longues périodes.

M. Fortier: Donc, vous me dites, M. le ministre, qu'il ne s'agit pas d'un problème à court terme car, à court terme, vous pouvez envoyer des équipes sur place pour vérifier; il s'agit plutôt d'une évaluation à long terme. On pourra revenir plus tard sur le genre d'évaluation, mais, lorsqu'on parle d'un programme de reboisement - on y arrivera bientôt - j'imagine que c'est dans le cadre d'une politique à long terme. La politique à long terme de reboisement doit être fondée sur une évaluation à long terme des ressources forestières existantes à ce moment-ci. J'imagine que les deux doivent se recouper. Même si vous dites qu'on ne sera pas là dans 40 ans, ni l'un ni l'autre, c'est sûr, mais il reste...

M. Duhaime: Je vous demande pardon!

M. Fortier: ...qu'en tant qu'individus -je ne pense pas faire 40 ans de politique - si on se préoccupe de nos enfants, et même si les politiciens, normalement, se préoccupent uniquement de la prochaine élection, je crois qu'on doit s'assurer une ressource forestière dans 40 ans. Dans cette mesure, et compte tenu de l'évaluation qui a été faite par plusieurs experts, l'évaluation scientifique et précise de nos ressources forestières, non seulement en quantité mais en qualité dans les différentes régions, à mon avis, doit être notre préoccupation.

Je ne voudrais pas passer trop de temps là-dessus. Pour le programme 1, j'ai terminé.

M. Duhaime: Me permettriez-vous simplement d'inscrire une précision dans nos débats? On me dit que je peux risquer des chiffres. Un premier inventaire avait été commencé en 1970 et l'inventaire auquel j'ai fait référence tout à l'heure n'est pas le premier inventaire forestier que le ministère de l'Énergie et des Ressources conduit; je pense que tout le monde l'avait compris.

Le deuxième inventaire que nous avons repris en 1981, c'est celui-là qui va se poursuivre cette année. L'administration du ministère de l'Énergie et des Ressources établit à environ 90% le niveau de précision de ses inventaires sur l'évaluation des potentiels forestiers, mais, dans certaines régions du Québec, il faut tenir compte de la tordeuse des bourgeons de l'épinette ou encore des incendies en forêt.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Beauharnois.

Lutte à la tordeuse des bourgeons de l'épinette

M. Lavigne: Merci, M. le Président. J'aimerais poser quelques questions au ministre en ce qui concerne les arrosages. On a lu ces derniers jours dans les journaux une déclaration du ministre de l'Environnement qui semblait relativement satisfait des ententes prises entre son ministère et le vôtre, M. le ministre, sur les méthodes utilisées pour vaincre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. On sait que, depuis un certain nombre d'années, on utilisait d'abord les produits chimiques pour y arriver et que, maintenant, on tend à utiliser davantage les produits biologiques.

J'aimerais savoir, M. le ministre, dans quelle proportion on délaisse les produits chimiques par rapport aux produits biologiques. Est-ce qu'on s'en va vers un temps où on n'aura plus à utiliser les produits chimiques du tout et dans combien de temps?

J'ai toute une série de questions, je peux les poser rapidement. J'aimerais savoir quelle est la différence de rendement entre les produits chimiques et biologiques? Quelles sont les différences de coûts? J'aimerais vous entendre sur cette question qui me préoccupe au plus haut point. Si on utilise

plutôt les produits biologiques que chimiques, est-ce que les essences atteintes par la tordeuse des bourgeons de l'épinette sont plus menacées? C'est toute une série de questions qui m'intéressent.

Le Président (M. Lafrenière): M. le ministre.

M. Fortier: D'accord.

M. Lavigne: Cela rode un peu autour du sujet, parce qu'il en a été question un peu tout à l'heure.

M. Fortier: II n'y a pas de problème.

M. Duhaime: La première chose que je dois dire, M. le Président, c'est qu'entre les produits chimiques et biologiques, ce sera sûrement une guerre de 100 ans sur les niveaux d'efficacité, sur le niveau de sécurité des produits utilisés dans la lutte à la tordeuse des bourgeons de l'épinette.

Je dois dire que nous avons eu de fructueux échanges avec le ministère de l'Environnement et nous avons décidé, pour 1984, de réduire les arrosages, de réduire les superficies. En 1983, nous avions arrosé 1 200 000 hectares de forêt sur un programme qui était en majorité l'arrosage aux produits chimiques. Nous avions introduit un peu plus d'arrosage au BT. Cette année, nous allons continuer à faire une plus grande utilisation des produits BT.

Les manufacturiers et les scientifiques qui travaillent sur ce produit, sur cet insecticide qu'on appelle - je ne sais pas si mon accent va être bon - le bacillus thuringiensis, ou plus simplement le BT nous disent: Bien sûr que les produits chimiques, c'est très dangereux, hautement toxique, pas si efficace qu'on le prétend, etc. Quand vous prenez le dossier des produits chimiques, vous entendez exactement la même version, mais dans le sens inverse. Ce qu'on a fait, on a d'abord décidé de réduire les arrosages sur 800 000 hectares de forêt. Nous allons traiter, cette année, 300 000 hectares au BT et 500 000 hectares en utilisant les produits chimiques traditionnels. Dans chacun des secteurs, nous avons des équipes sur place qui vont ensuite passer et faire des nouveaux inventaires et des calculs. Nos gens ont mis au point un système absolument extraordinaire et tentent de mesurer le niveau d'intensité de l'épidémie pour l'année qui vient à partir du nombre de larves par centimètre trouvées sur les épines. Ce sont des calculs qui sont faits à partir d'analyses microscopiques, avec des coefficients. Cela devient de la chimie pure. Finalement, cela donne un résultat sur lequel nous nous basons pour établir le nombre d'hectares et les régions précises qui seront arrosés. Il ne faut pas se faire d'illusion, l'arrosage, que ce soit en utilisant les produits chimiques ou le BT, n'arrive pas à détruire l'épidémie comme telle. C'est toujours à reprendre à chaque année. Le seul effet de ces arrosages, c'est de garder en vert des carrés de forêt dont on a absolument besoin. Jusqu'à présent, l'épidémie de la tordeuse nous a coûté 100 000 000 de mètres cubes de bois, ce qui veut dire un peu plus que l'équivalent de trois années de production complète depuis le début de l'épidémie, soit depuis 50 ou 60 ans. Nous n'arrosons même pas 10% de la superficie de la forêt qui est attaquée.

Pour pouvoir arroser sur l'ensemble de la forêt commerciale qui est touchée par la tordeuse du bourgeon de l'épinette, au lieu de dépenser 14 600 000 $, il faudrait dépenser 125 000 000 $ à 150 000 000 $ par année. Il y a des parties de forêt qui sont atteintes par la tordeuse, plus particulièrement une région un peu plus au nord et même des régions dans l'est, du côté sud du Québec et qui ne sont pas visées par les arrosages. C'est un bois qui est déjà perdu. Il s'agira de voir ensuite comment on est capable de régénérer ces forêts. Nous y travaillons. (10 h 30)

M. Lavigne: M. le ministre, êtes-vous en mesure de me dire le coefficient d'efficacité entre les deux produits jusqu'à maintenant? Est-ce que les expériences ont été assez poussées pour qu'on puisse savoir si le BT est nettement supérieur ou inférieur aux produits chimiques ou l'inverse?

M. Duhaime: Au ministère, on n'est pas prêt à tirer une conclusion. C'est pour cela d'ailleurs qu'on a certaines réserves et là-dessus il y a des contradictions entre les analyses qui sont faites au ministère de l'Énergie et des Ressources et celles qui sont faites au ministère de l'Environnement, de toute évidence. Il semblerait que le ministère de l'Environnement et ses spécialistes ont pris une position assez claire sur la plus grande efficacité du BT et une plus grande sécurité. À mon ministère, les spécialistes qui suivent ce dossier depuis des années et des années sont plutôt convaincus qu'il y a un même niveau de sécurité dans l'un ou l'autre cas sur le plan de la toxicité des ingrédients utilisés. Donc, même niveau de sécurité. Certains prétendent que les produits chimiques étant au même niveau de sécurité que le BT sont cependant plus efficaces contre la tordeuses des bourgeons de l'épinette. Je ne pense pas qu'on arrive à pouvoir tirer des lignes et avoir des conclusions après une ou deux saisons d'arrosage seulement. On a commencé il y a deux ans avec très peu de BT. On en a utilisé davantage l'an passé. Cette année, on va arroser 300 000 hectares, ce qui est beaucoup.

On devrait peut, être l'an prochain ou

dans deux ans, avoir un tableau un peu plus complet et être en mesure de comparer les rendements. J'aime autant ne pas alimenter la querelle entre les deux producteurs. Nous avons, bien sûr, des données qui restent à vérifier sur le terrain. Je ne pense pas qu'il soit de notre intention de faire un choix pour l'un ou l'autre dans l'immédiat. Je pense qu'on va travailler avec l'un et l'autre dans la mesure où on aura toutes les garanties quant à la sécurité de ces ingrédients dont nous nous servons.

M. Lavigne: Est-ce que c'est comparatif au niveau des coûts, l'un et l'autre des deux produits?

M. Duhaime: Au programme 3, élément 2, on voit que le produit au BT coûte plus cher, à peu près mettons deux fois plus cher. Si vous voulez l'avoir en détail, je vais vous répondre que c'est 2,2 fois supérieur à un coût de 13,86 $ pour le BT contre 6,43 $, calculé à l'hectare.

M. Fortier: M. le ministre, pourriez-vous m'indiquer si la politique que vous venez d'énoncer sur la substitution des produits aux fins d'arrosage, est la même politique qui avait été annoncée il y a huit ou neuf mois? J'ai cru, à un moment donné, que le gouvernement avait annoncé un moratoire sur les produits chimiques qui étaient utilisés dans le passé; il y avait eu une déclaration assez fracassante à ce sujet. Maintenant, vous semblez dire que cela se fera par phases. Est-ce que c'est un changement dans les politiques du gouvernement ou si c'est la même politique qui avait été établie à ce moment-là?

M. Duhaime: Nous n'avons pas changé de politique là-dessus. Il y a peut-être méprise et vous n'êtes pas le seul à vous méprendre, M. le député d'Outremont. Je pense que cela mériterait une petite explication. Les produits chimiques et le BT sont utilisés pour lutter contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Ce que nous avons annoncé comme moratoire ne s'applique pas à la lutte contre les épidémies; le moratoire s'applique au phytocide qui était déversé par voie aérienne sur les pépinières. Nous avons décidé de cesser tout arrosage aérien sur les pépinières....

M. Lavigne: C'est un défoliant.

M. Duhaime: C'est un défoliant, oui, qui faisait mourir les petits plants, les framboisiers et d'autres espèces que celles dont nous voulions la bonne santé et la conservation, principalement dans les pépinières de résineux. C'est ce que M. Lévesque a annoncé le 13 novembre à l'intérieur du plan de relance et du programme de reboisement. Désormais, nous allons donc faire l'entretien mécanique des plantations et des pépinières, le mot "mécanique" voulant signifier l'entretien fait au sol. Si on utilise des défoliants, on va les utiliser au sol et non pas par arrosage aérien.

M. Fortier: Vous dites que vous faites la distinction entre les pépinières et la lutte contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Dans le cas de la tordeuse des bourgeons de l'épinette, est-ce que le produit chimique utilisé est le phytocide? Non, c'est un autre produit chimique; vous l'avez mentionné tout à l'heure.

M. Duhaime: Je vais le vérifier, parce que nous sommes relus et beaucoup de gens s'intéressent à ce dossier, mais je ne crois pas. Pour répondre le plus clairement possible, dans un cas nous luttons contre un insecte et, dans l'autre, nous luttons contre les herbes envahissantes. Nous utilisons donc une gamme de produits qu'on pourrait classer dans la catégorie des herbicides pour ce qui est de l'entretien des plantations et des pépinières...

M. Fortier: Dont les phytocides.

M. Duhaime: ...dont les phytocides. Il n'y a pas de phytocides utilisés contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Les produits que nous utilisons sont, bien sûr, approuvés. Nous utilisons la même formule que le Nouveau-Brunswick. Tous ces produits utilisés ont reçu les approbations tant du gouvernement de Québec que du gouvernement fédéral quant au niveau de sécurité pour ce qui est de la santé.

M. Fortier: Je n'ai malheureusement pas lu en détail tous les mémoires qui ont été soumis lors des comparutions au ministère de l'Environnement, au BAPE. Les produits chimiques que vous utilisez aux fins de lutte contre la tordeuse sont-ils également contestés?

M. Duhaime: Pour être contestés, ils le sont et ils le seront toujours, je pense.

M. Fortier: C'était surtout contre les phytocides. Je crois que les autres produits chimiques sont également contestés.

M. Duhaime: Non. Il y a un courant qui n'est pas un courant majoritaire, bien sûr, mais qui fait valoir son point de vue a chaque audience du Bureau d'audiences publiques du ministère de l'Environnement qui voudrait faire cesser et qui nous demande de cesser tout arrosage ou toute utilisation de produits chimiques. Cela ne m'étonnerait pas

que, dans quelques années, on nous demande aussi de cesser d'utiliser le BT. Cela représente une école de pensée. Par ailleurs, quand vous lisez la presse, non pas le quotidien comme tel, mais l'ensemble de la presse, et que vous parcourez les mémoires qu'on reçoit de l'industrie, que ce soit l'industrie du sciage ou l'industrie de la production des pâtes et de papier journal, on nous demande d'arroser davantage, disant, par exemple, que le ministère de l'Énergie et des Ressources fait une erreur de réduire d'un tiers les superficies arrosées. On parle de 1 200 000 à 800 000 hectares. Certains d'entre eux sont loin d'être convaincus que le BT est un produit efficace. Vous avez un peu tous les points de vue dans ce dossier.

Comme démarche, j'ai évoqué que nous n'allions plus faire d'arrosage aérien sur les pépinières et les plantations. J'ai indiqué également qu'on avait en quelque sorte retenu une formule mixte pour ce qui est de la lutte contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Pourquoi? Parce qu'on ne peut pas, du jour au lendemain, changer les formules; il y a une question de budget également qui est là-dedans. Puis la démonstration n'a jamais été faite que, malgré tous les titres en première page ou en page 3, nous sommes en train d'empoisonner qui que ce soit. Cela est complètement faux. Au fur et à mesure qu'on va utiliser davantage de BT, on pourra en évaluer les impacts sur le terrain. Peut-être que je pourrais ajouter une précision. Ce n'est pas tant l'achat du produit comme tel qui fait la différence dans le coût, c'est le genre d'appareil ou le genre d'avion qu'on doit utiliser, selon qu'on répand des produits chimiques ou du BT, qui fait que vous avez des dépassements de coûts.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député.

M. Lavigne: Je ne voudrais pas trop entrer dans les détails techniques, M. le ministre, mais j'ai écouté une émission de radio l'automne dernier dans laquelle on disait qu'en Europe, on utilisait ce qu'on appelle un produit biologique. Finalement, il s'agissait d'ensemencer une forêt d'un insecte qui se nourrissait de l'insecte dévastateur. Quand vous parlez du BT, est-ce que c'est un liquide X qui détruit la tordeuse des bourgeons de l'épinette? En quoi consiste la formule? Je ne parle pas de la formule chimique. Non, ce n'est pas une formule chimique, parce que c'est un principe biologique. Je trouvais l'idée fantastique. On présumait que, dans un assez court temps, on arrivait ainsi à détruire l'insecte en question. Je ne sais si, dans notre produit biologique, quand on parle du BT pour la tordeuse des bourgeons de l'épinette, il s'agit d'un même principe.

M. Duhaime: Entre guillemets, il s'agit d'une activité de chimiothérapie, en quelque sorte, qu'on fait subir à la tordeuse. C'est vraiment la dernière étape. Ce n'est pas un insecte qui en avale un autre, mais, si jamais on en trouvait un, il serait le bienvenu. Fondamentalement - bien grossièrement, bien sûr - ce sont des bactéries qui sont répandues et c'est la toxine de ces bactéries qui fait mourir la tordeuse. Du côté chimique, c'est une autre situation.

M. Lavigne: Je ne sais pas si c'est dans ce...

M. Duhaime: Vous avez un petit document du ministère. Je ne sais pas si c'est un livre de chevet pour quiconque, mais, à la direction de la conservation, il y a un dépliant, non pas sur le goût de la tordeuse, mais sur le coût de la tordeuse. Vous y avez des explications sommaires, mais qui donnent quand même un aperçu assez synthétique de la situation et de ce que nous faisons pour lutter contre la tordeuse.

M. Lavigne: On va y revenir au programme 2 tout à l'heure.

Le Président (M. Lafrenière): Le programme 1 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

M. de Bellefeuille: M. le Président, nous avons discuté du programme 3...

Une voix: En partie.

M. de Bellefeuille: ...en partie.

M. Fortier: Je suggère qu'on y revienne, si vous voulez. On va continuer, parce que là, le député est passé au programme 3, mais...

M. de Bellefeuille: D'accord.

M. Duhaime: ...j'avais cru comprendre qu'on le faisait en bloc, qu'on pouvait discuter de tout le programme de la forêt et, après cela, si vous le jugiez utile, qu'on pourrait techniquement appeler les programmes un après l'autre à la fin et les adopter en bloc. C'est ordinairement ce qu'on fait.

M. Fortier: En tout cas, on n'est pas tellement rigide, mais je croyais qu'en procédant programme par programme cela nous permettait de nous discipliner dans le genre de questions qu'on doit poser.

M. Lavigne: On ne peut pas être rigide.

M. Fortier: Non, non.

M. Lavigne: D'accord. On s'en va au programme 2.

Le Président (M. Lafrenière): J'appelle le programme 2.

Amélioration de la forêt

M. Fortier: Au programme 2, M. le ministre, la question a été posée hier. Essentiellement, la question est celle-ci. Votre attitude me fait un peu penser à un président de compagnie qui, en 1978, aurait lancé un plan d'action pour le reboisement ou un plan d'action pour restaurer les finances de sa compagnie, qui avait annoncé des objectifs emballants et, comme les objectifs n'étaient pas atteints, il relance en 1983 de nouveaux objectifs. Il nous dit dans quelle partie du monde ou dans quelle partie des régions du Québec ces profits vont être réalisés et tout le monde se réjouit du fait qu'en 1988, le président de la compagnie X va faire des profits mirobolants dans telle et telle région du Québec, mais, comme dans tout bon conseil d'administration, c'est assez facile de s'emballer sur une prévision de 1988 où un président de compagnie nous dit: Je vais faire des profits et cela va être extraordinaire. (10 h 45)

La question que tout le monde pose, finalement, est la suivante: Comment allez-vous vous y prendre? Qui va le faire? De quelle façon? Essentiellement, jusqu'à maintenant, on a eu beaucoup de définitions d'objectifs, mais on n'a eu aucun document de quelque densité que ce soit qui nous donnerait les moyens que vous allez prendre à cet effet? De quelle façon collaborerez-vous avec le secteur privé? Qui va faire quoi? Dans quelle mesure ceux qui investiront leur propre argent auront-ils une certaine garantie d'approvisionnement pour l'avenir? Autrement dit, la définition des moyens et la définition du programme n'y sont pas. Tout ce que nous avons présentement est une définition des objectifs. Il est très facile de définir des objectifs quantitativement mais je crois qu'il est plus difficile de définir les moyens. Essentiellement - il n'y a pas seulement moi qui le demande - tous les intervenants du milieu posent la même question: Comment le ministère va-t-il s'y prendre? A-t-il un document? Est-ce que le ministre peut déposer un document qui définirait essentiellement les moyens qui seront pris pour réaliser cet objectif de reboisement?

Tout le monde s'entend sur la nécessité du reboisement. Tout le monde espère que les objectifs qui ont été mis de l'avant vont se réaliser. Mais tout le monde se pose également des questions sur les façons qui seront prises pour réaliser ces mêmes objectifs. Bien sûr, cela peut amener des changements de politique fondamentale du ministère. On reviendra plus tard sur le fait que le ministère s'est engagé, d'ici la fin de l'année, semble-t-il, à une redéfinition de certaines politiques forestières.

Présentement, on se trouve un peu devant des objectifs définis, devant des augmentations budgétaires et, comme je l'ai dit dans mes notes liminaires, ce n'est pas nécessairement en dépensant de l'argent qu'on atteint nécessairement les objectifs. La question est de savoir quels sont les moyens. Avez-vous un document à déposer pour nous dire comment vous allez réaliser vos objectifs?

Le Président (M. Lafrenière): M. le ministre.

M. Duhaime: On va essayer de faire le point. Je dois déplorer l'absence de votre collègue, le député de Beauce-Sud, qui a soulevé cette question, hier, avec le talent qu'on lui connaît.

Je dois vous dire que les questions qui sont posées sont très pertinentes, mais il y a eu aussi beaucoup d'information qui a été donnée. Vous allez me permettre d'être peut-être un peu méchant, mais j'ai été très heureux de voir le Parti libéral du Québec, il y a deux semaines, pour la première fois depuis toujours, je pense, s'intéresser au reboisement.

M. Fortier: Si le ministre me permet. M. Duhaime: Ah! Allez-y!

M. Fortier: Si le ministre avait continué sa bonne habitude de lire le livre rouge qu'il lisait de temps en temps à l'Assemblée nationale, il aurait vu qu'il y a tout un chapitre sur le reboisement, dans le livre rouge de 1980.

M. Duhaime: Oui, je me souviens d'avoir lu cela. Mais je dois vous rappeler que votre parti a été au pouvoir de 1970 à 1976. Si vous voulez que je vous dépose les budgets affectés au reboisement à l'Assemblée nationale, pendant que M. Bourassa était premier ministre, de même que le degré de plantations, de même que les ensemencements aériens qui ont été faits - un gaspillage de crédits, si vous voulez mon avis - je le ferai et je le ferai rapidement.

Cela ne m'étonne pas que vous trouviez l'entreprise peut-être insurmontable. C'est ce qui explique peut-être que le Parti libéral n'a à peu près rien fait dans l'aménagement des forêts et, en particulier, sur le reboisement. Nous avons un retard et, lorsque mon collègue, M. Bérubé, a fixé un

objectif de 100 000 000 de plants, c'était un objectif réaliste.

Dans la réalité des faits d'aujourd'hui, nous avons mis en terre 65 000 000 de plants en 1983. Nous en serons à 84 000 000 ou 85 000 000 de plants en 1984. De mémoire, je crois que l'objectif est de 120 000 000 de plants et, ensuite, l'escalier va aller en augmentant jusqu'au seuil de 300 000 000 de plants en 1988.

Quant à y être, aussi bien vous décourager, puisqu'une pareille entreprise vous paraît insurmontable: nous allons réviser l'objectif à la fin de l'année 1984 et mon souhait personnel est de hausser à 500 000 000 de plants l'objectif visé pour 1990.

Comment va-t-on s'y prendre? Si on commence par le commencement, d'abord, il faut faire la cueillette des "cocottes", il faut ensuite les amener à Berthier, à l'usine de traitement. Si vous avez l'occasion d'y aller, cela va certainement vous rassurer et apaiser vos craintes puisque, l'an dernier, on a construit deux immenses entrepôts et un troisième sera mis en chantier ce printemps. On va y construire une usine de traitement des graines avec des laboratoires pour avoir le plus haut niveau d'efficacité. Il y a aussi tout le processus de "décocottage" des grains, de "désailage", de traitement, de classification pour s'assurer un produit de première qualité. Nous allons également construire à Berthier une des grandes serres, en plus de la pépinière qui y existe déjà.

Je n'ai pas beaucoup d'inquiétude, il n'y a qu'une seule question qui n'a pas reçu de réponse à l'heure actuelle, c'est de savoir qui va payer la note. Je vais commencer par l'aspect financier pour ensuite aller dans les détails sur le plan des instruments qu'on va utiliser, comment va se faire le partage sur l'aspect de la production de plans et l'aspect des plantations ensuite.

Sur le plan du financement, si vous allez au livre des crédits, vous trouverez qu'on a ajouté cette année quelque 30 000 000 $. Il y a des investissements en capital là-dedans, il y a aussi de l'argent prévu pour le fonctionnement. Globalement, nous allons dépenser, sur les cinq ans qui viennent, 500 000 000 $. Nous triplons l'objectif de 100 000 000 $ à 300 000 000 $ et nous pensions financer une partie de ce programme à partir de l'entente auxiliaire, expirée depuis le 31 mars, entre Québec et Ottawa.

Selon les indications que nous avons, c'est plus que des indications, la certitude que nous avons, c'est qu'à moins qu'il y ait non seulement un changement de premier ministre à Ottawa, mais un changement d'orientation, les chances sont très minces que l'entente auxiliaire sur la forêt soit reconduite, quoique nous ayons dit au gouvernement fédéral, depuis sept ou huit mois, que nous étions très intéressés à la reconduire. L'évaluation que nous en faisons, et qui a aussi été faite par les hauts fonctionnaires fédéraux, est que le comité directeur qui gère l'entente - il y a des représentants des deux gouvernements - a très bien fonctionné durant les cinq dernières années. Je dois déplorer que, du côté fédéral, à l'heure actuelle, plutôt que de reconduire l'entente, on s'amuse à mettre au point des plans d'aménagement et toute espèce de programmes dont, entre autres, le plan de l'Est ou le plan De Bané, si vous aimez mieux, qui vise l'Est du Québec, où déjà des ententes ont été signées directement entre le gouvernement fédéral et les syndicats, passant outre même à l'existence de la fédération des producteurs.

Donc, pour ce qui est du financement cette année, nous avons le budget nécessaire pour nous conformer à nos objectifs d'investissements et de fonctionnement. Nous allons, bien sûr, refiler une partie du coût à l'industrie. Est-ce que ce sera 25%, 30%, 33%, 35%? Les dernières évaluations sont en train d'être faites et la partie qu'on décidera de faire porter par l'industrie sera récupérée à partir des droits de coupe. Cela me paraît parfaitement normal qu'on utilise cette voie puisque, finalement, ce sont ceux qui s'approvisionnent en matières ligneuses qui tireront le plus grand avantage de ce programme de reboisement.

Avant de planter 300 000 000 de plants, il faut les produire. Notre objectif est de porter la capacité de production des serres et pépinières du ministère de l'Énergie d'autour de 75 000 000 plants à l'heure actuelle, à 100 000 000 plants à peu près. Quant aux 200 000 000 d'autres plants, puisque cela fait également partie de notre philosophie ou de notre approche d'ensemble, nous comptons sur l'entreprise privée avec qui nous allons travailler. Déjà, nous sommes en appel d'offres pour trois pépinières qui seront construites, gérées et administrées par l'entreprise privée.

Nous allons signer des contrats avec ces entreprises sur des périodes de temps suffisamment longues pour leur permettre d'escompter ces contrats et d'aller chercher du financement, comme dans tout autre genre d'entreprise, auprès d'institutions financières. Le seul problème que nous avons à l'heure actuelle est beaucoup plus un problème mécanique. Nous voulons, dans ce genre d'appel d'offres, aller, bien sûr, au moindre coût, donc vers le plus bas soumissionnaire, mais je tiens à souligner que nous serons très exigeants sur la qualité des produits que nous paierons. C'est pourquoi nous allons exiger des entreprises qu'elles aient à leur service, que ce soit à temps plein ou à temps partiel, des spécialistes de ces questions, soit des ingénieurs forestiers ou autres. Nous voulons que des

professionnels suivent ces activités et l'entreprise qui décrochera un contrat devra nécessairement compter sur ces ressources professionnelles.

Il serait peut-être trop facile d'improviser parce que le commun des mortels pense parfois que recevoir des plants et les faire grandir en serre est une entreprise facile. C'est loin d'être une entreprise facile, c'est un métier, c'est une profession et c'est aussi une nouvelle industrie qu'on est en train de bâtir au Québec.

Nous n'avons aucune crainte là-dessus à l'heure actuelle. Les réponses que nous avons de l'entreprise privée sont très intéressantes, sont même emballantes. Je suis convaincu que, dans chacune des régions, nous aurons un problème de triage beaucoup plus que de carence. D'ici 1986, nous aurons installé au Québec - selon les tailles retenues, mais ce que nous avons retenu à l'heure actuelle - 9 serres et 22 pépinières dans les différentes régions.

Pour ce qui est de la partie du gouvernement, je voudrais revenir là-dessus pour vous donner les détails. Nous ajoutons 31 000 000 $ à l'enveloppe de l'année dernière pour le reboisement. Les effectifs occasionnels du ministère vont augmenter de 475 personnes année et nos effectifs permanents augmentent de 45 postes. Cela veut dire qu'en 1986 les installations du ministère de l'Énergie et des Ressources vont nous fournir 100 000 000 de plants et l'entreprise privée 200 000 000 de plants.

Une fois que nous avons les plants, il s'agit ensuite de savoir à quel endroit nous allons les planter et qui va faire la plantation. Nous avons l'intention de reboiser et sur la forêt publique et sur la forêt privée. 200 000 000 de plants iront à la forêt publique et 100 000 000 de plants iront à la forêt privée. Nous discutons actuellement avec la Fédération des producteurs de bois une proposition qui nous est faite. Il serait peut-être prématuré à la journée même de nos travaux d'en donner tous les détails mais la Fédération des producteurs de bois est très intéressée à s'impliquer directement et de prendre des responsabilités très importantes dans ce dossier. J'avoue voir sa proposition d'un très bon oeil puisque ladite fédération a des syndicats dans l'ensemble du Québec. Elle est représentée partout. Elle pourrait nous donner un très solide coup de main pour ce qui est de tout le volet du reboisement de la forêt privée. Cela concerne un aspect. (11 heures)

Pour ce qui est du reboisement en forêt publique, pour répondre aux hallucinantes interrogations du député de Beauce-Sud, bien sûr, les équipes du ministère n'iront pas planter des arbres là où il y en a déjà ou dans la forêt mûre. Cela m'apparaît tellement stupide de poser une question de cette manière, les équipes du ministère savent exactement où est l'acrage de terrain disponible pour faire les plantations, et nous allons travailler avec les scénarios que nous avons. Si votre collègue de Beauce-Sud, était ici, je ne serais pas trop gêné de lui dire - je n'ai pas l'habitude d'être gêné, quand je m'adresse à lui surtout que, s'il veut venir au ministère de l'Énergie et des Ressources, on va lui faire rencontrer les fonctionnaires ou les gens en région qui pourraient lui indiquer que nous allons reboiser à tel et tel endroit sur des scénarios de quatre, cinq, six, sept, huit et dix ans.

L'implication des compagnies. Quand je parle des compagnies, je parle des compagnies qui font de la coupe en forêt et qui utilisent la matière ligneuse à des fins de sciage ou de production de pâtes et de papier journal. Je dois vous dire très clairement que l'exemple du reboisement et de la préoccupation du reboisement n'est pas venu de ce côté-là. C'est à l'initiative du ministère de l'Énergie et des Ressources que le programme de reboisement a été accepté par mes collègues du Conseil des ministres et nous allons poursuivre nos discussions avec ces compagnies. Il y a des compagnies - je n'en nommerai aucune - qui nous disent: Tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas un mode de tenure à notre satisfaction, nous ne ferons pas de reboisement. Ma réponse est très claire, et j'avoue que j'ai été inquiet il y a deux semaines lorsque je lisais dans les journaux certaines des conclusions de votre réunion en Mauricie-Bois-Francs, la réunion qui a été tenue à Shawinigan, où il a été question de reboisement. Je ne sais pas si les manchettes traduisent la pensée du Parti libéral, mais cela me donne des frissons dans le dos quand on voudrait retourner la forêt publique à l'entreprise privée. Si cela signifie qu'on va redonner aux compagnies des concessions forestières, je dis tout de suite que le Parti libéral est en train de défaire ce que M. Kevin Drummond avait admirablement bien fait durant la décennie de 1970. Pour autant que cela concerne le ministre de l'Énergie et des Ressources, en tout cas celui qui vous parle, nous n'allons pas redonner de concessions forestières à qui que ce soit. Nous allons maintenir le programme de révocation des concessions et nous le ferons au fur et à mesure que les besoins se feront sentir pour ce qui est de l'approvisionnement dans certaines régions du Québec. Là-dessus, c'est très clair.

Ce que je propose à l'industrie, c'est une collaboration, et je suis convaincu que -cela a déjà été fait et bien reçu - nous pouvons travailler de toutes les manières. S'il y a des compagnies qui décident, sur les territoires qui leur sont réservés et sur

lesquels portent les garanties d'approvisionnement, de mettre en marche des programmes de reboisement, nous allons leur en donner le crédit. Quand je dis "crédit", ce n'est pas simplement leur rendre hommage. Nous allons leur rendre un crédit en ce sens qu'on pourrait tout simplement établir un principe assez simple de vases communicants plutôt que de nous payer un droit de coupe et faire nous-mêmes le reboisement. Si elles veulent faire le reboisement, on va leur donner un crédit sur les droits de coupe, mais cela reste à être mathématiquement déterminé.

Cela peut paraître énorme, 300 000 000 de plants. Je vais terminer là-dessus. Nous avons une forêt commerciale qui s'étend sur une superficie de quelque 700 000 kilomètres carrés, mais nous avons une partie de cette forêt qui est dans la région du 49e, du 50e et du 51e, ce que j'appellerais un ruban nordique, où il faut compter beaucoup d'années pour que le bois vienne à maturité et, même lorsqu'il est à maturité, ce n'est pas un bois de grande taille. Si vous passez dans la région de Chibougamau, vous allez voir des épinettes noires de 60 et 70 ans qui font des diamètres à la souche de sept pouces, huit pouces et neuf pouces.

Si on fait une petite comparaison et qu'on enlève la partie la plus au nord de la forêt commerciale, on arrive à retenir une superficie commerciale d'à peu près 525 000 à 550 000 kilomètres carrés. Si on compare cela avec le total de la superficie commerciale de la Finlande, de la Suède et de la Norvège, ces trois pays ensemble ont une superficie commerciale de 496 000 kilomètres carrées, mettons 500 000 kilomètres carrés, donc, on peut à peu près à taille égale faire une comparaison intéressante. On va mettre des points d'interrogation parce que les conditions climatiques ne sont pas les mêmes. Les hivers sont moins rigoureux, le Gulf Stream est plus proche, etc. Il reste que, comme bilan global, en termes d'efforts de reboisement, ces trois pays reboisent 700 000 000 de plants par année à l'heure où on se parle, en 1984: la Finlande à peu près 200 000 000, la Suède 425 000 000, la Norvège 75 000 000. Au moment où nous serons, nous, à un seuil de 300 000 000, je tiens pour acquis qu'ils vont avoir alimenté... C'est important de tenir ce genre de comparaison, parce que ce sont ces trois pays qui nous concurrencent le plus fortement sur les marchés internationaux, que ce soit avec les produits du sciage ou encore avec la pâte, le papier journal, les panneaux-particules, les panneaux gaufrés, MDF, etc.

Fait aussi à souligner, quand on se donne un objectif de reboisement comme celui que nous retenons, c'est que nous avons l'intention de demander davantage à notre forêt dans les années qui viennent, un niveau de production plus élevé de 30 000 000 de mètres cubes par année. Si on disait: On retient cela pour les dix ou quinze prochaines années, c'est évident que notre part sur le marché international va être en décroissance et je pense qu'on ferait une erreur stratégique.

Les Pays Scandinaves, nos trois concurrents, ont produit en 1980 - je n'ai pas les chiffres des années plus récentes -110 000 000 de mètres cubes de bois. Nous sommes au niveau de 30 000 000. Avec une forêt commerciale d'à peu près la même étendue, ils produisent trois fois et demie ce que nous produisons. Supposons qu'on enlève la tordeuse des bourgeons de l'épinette, qu'on enlève le climat, etc., on n'arrive pas à rendre l'explication. Ces pays, avec de petites superficies de territoire, ont connu l'obligation de faire du reboisement systématique et méthodique depuis 75 ans. C'est ce genre de choses qu'il faut maintenant faire au Québec.

Le Président (M. Lafrenière): Je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît. Il vous reste une minute.

M. Duhaime: J'ai terminé.

Le Président (M. Lafrenière): Merci.

M. Fortier: Merci pour vos explications. Vos commentaires appellent d'autres commentaires. Vous parliez de l'effort de reboisement au début des années 1970. Il faut se souvenir qu'à ce moment les récoltes de la forêt étaient beaucoup moindres qu'elles le sont maintenant. On parlait de 100 000 à 135 000 hectares dans les années 1973 à 1976. C'est augmenté passablement dans les années 1979 à 1982.

M. Duhaime: C'est dans les coupes que cela a augmenté le plus. C'est ce que vous venez de dire.

M. Fortier: Dans les coupes, oui, c'est cela, mais, à ce moment, cela nécessite un effort de reboisement qui soit beaucoup plus accéléré. De fait, ce phénomène, cette nécessité de reboisement s'est fait sentir depuis trois, quatre ans surtout. C'est là où, justement, au fur et à mesure qu'on coupe davantage, parce que, comme vous le savez, M. le ministre, ce problème de la nécessité de reboisement varie beaucoup d'une région à l'autre. La tordeuse des bourgeons de l'épinette, dans certaines régions, n'existe pas. Dans d'autres régions, surtout dans les régions plus près des grands centres, elle a eu des effets très néfastes.

En ce qui concerne les concessions forestières auxquelles vous avez fait allusion,

c'est un sujet très intéressant, je crois, que ce colloque, qui était un de nos colloques régionaux. Nous en aurons dix ou douze dans tout le Québec. Éventuellement, ils serviront de base pour situer la politique de notre formation politique. Ce n'était pas un congrès plénier, c'était un colloque régional, on y a fait allusion, et j'aimerais aborder le sujet, parce que c'est un élément très important. Il est vrai que, dans le passé, les compagnies avaient des concessions forestières et tout le monde tenait pour acquis que la regénérescence de la forêt se faisait naturellement. On donnait des concessions forestières et on s'inquiétait peu. Les gouvernements passés se sont peu inquiétés du phénomène auquel on en est arrivé maintenant à savoir qu'on pourrait arriver à des ruptures de stocks.

Sous le gouvernement libéral, comme vous l'avez mentionné, Kevin Drummond et d'autres ont mis au point des politiques de rapatriement de ces concessions forestières. À ce moment-là, je crois que la politique était de dire: Nous allons vous donner des droits de coupe et, nous, du gouvernement, nous allons assurer la gestion forestière avec des résultats qui sont fort critiquables. Sans faire de comparaison avec les Pays nordiques, on peut faire des comparaisons avec le Nouveau-Brunswick, avec la Colombie britannique et même avec l'Ontario, et s'apercevoir que cette gestion que l'État voulait faire n'a pas donné les résultats auxquels on s'attendait. Je me demande si le ministère a fait des études comparatives avec ce qui se fait au Nouveau-Brunswick, où la formule qui a été retenue n'est pas de redonner des concessions forestières mais plutôt de demander à ceux qui utilisent la forêt d'assumer leurs responsabilités dans le domaine du reboisement et de la régénération de la forêt. Autrement dit, on signe des contrats types entre les compagnies forestières et le ministère responsable des terres et forêts du Nouveau-Brunswick dans lesquels on stipule qu'on leur donne des droits de coupe pendant un certain nombre d'années mais en stipulant qu'en contrepartie elles doivent assumer un effort de régénération de la forêt.

Je crois, M. le ministre, que vous vous êtes mépris beaucoup sur les sujets dont nous avons discuté lors de ce colloque régional de la Mauricie et des Bois Francs. Il ne s'agit pas de revenir sur les concessions forestières; il s'agit plutôt de ne pas revenir surtout à la politique ancestrale, qui était de croire que la forêt s'autoregénérait par elle-même sans que personne y fasse quoi que ce soit. Après cela, nous avons adopté cette politique où l'État assumait la responsabilité et qui a donné de très piètres résultats. Quand on compare nos résultats depuis les dernières années avec ceux du Nouveau-Brunswick ou de la Colombie britannique et d'autres provinces, on s'aperçoit qu'on est dans une situation extrêmement pauvre. Les résultats ont été extrêmement pénibles.

C'est donc peut-être le moment de vous poser deux questions fondamentales. Est-ce que, dans cette optique où vous envisagez de donner des responsabilités ou de faire partager les responsabilités aux compagnies privées, vous entrevoyez des concepts semblables à ceux utilisés dans d'autres provinces canadiennes comme le Nouveau-Brunswick, où on donne des droits de coupe pendant un certain nombre d'années et par lesquels on oblige ces compagnies à faire un effort de reboisement?

Comme seconde question, puisque tous les experts dans le domaine de la forêt nous le disent, la régénération de la forêt ne passe pas uniquement pas un effort de plantation. Mettre des petits plants en terre est une chose, mais il y a toute une gamme d'autres activités qui sont nécessaires pour assurer la régénération de la forêt. Dans le discours que tient le ministre et dans les discours que j'ai entendus, soit par le premier ministre ou par lui-même, on insiste beaucoup sur la plantation, mais on n'a pas dit grand-chose sur toutes les autres activités qui sont nécessaires pour assurer que les plants arrivent à terme et qu'ils progressent. J'aimerais entendre le ministre là-dessus. On parle toujours de plantation; bien sûr, c'est un phénomène important. Comme vous le savez, et si vous consultez les experts de votre ministère, ils vous diront, il y a d'autres activités requises pour assurer qu'il y ait régénération de la forêt qui n'est pas uniquement un phénomène de plantation.

J'ai d'autres questions mais j'aimerais qu'on...

M. Duhaime: Écoutez, je suis très heureux de ce que vous venez de nous dire concernant le mode de tenure. J'espère que, d'un colloque à l'autre, cela deviendra un raffermissement de la politique du Parti libéral. Je suis très heureux de vous entendre parler de cette façon-là, parce que, finalement, on tient le même discours. Ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est pourquoi, dans vos colloques, il y a une dénonciation de ce que nous faisons et qu'ensuite vous faites votre réflexion et que vous arrivez à la même conclusion que nous.

M. Fortier: Je n'ai pas entendu votre conclusion.

M. Duhaime: D'abord, faisons le point sur la question du programme de révocation. Au moment de l'adoption de la loi 27, il y avait - je vais vous donner les chiffres arrondis - environ 13 600 kilomètres carrés qui avaient été rétrocédés au moment de l'adoption de la loi. Ceci laissait environ

220 000 kilomètres carrés à révoquer. Au fil des ans, nous en avons révoqué à peu près le tiers. Ce qui veut dire que les deux tiers sont encore sous concession forestière depuis l'adoption de la loi 27. (11 h 15)

Je n'ai pas encore vu de grandes premières pages où une grande compagnie qui a une concession forestière, et qui l'a depuis très longtemps, ait annoncé de vastes programmes soit d'aménagement forestier ou de reboisement. Il y a là des points d'interrogation. La deuxième chose, c'est que - je pense qu'on se mettra d'accord vite - le Nouveau-Brunswick n'est peut-être pas le meilleur modèle. Quand on se compare, il ne faut pas non plus se sous-estimer. À l'échelle canadienne, dans le secteur de la production des pâtes et du papier journal, nous produisons tout près de la moitié de la capacité canadienne à l'heure actuelle. Dans l'industrie du sciage, depuis sept ou huit ans, cela a été un boum absolument extraordinaire, ce qui veut dire que, quand on porte un jugement - je le lis moi aussi -je reçois de la correspondance, on porte un jugement global ou on dit tout simplement et un peu bêtement d'ailleurs que la forêt du Québec est mal gérée. C'est complètement faux d'avancer une pareille problématique. Il y a des choses à parfaire, je le concède. Mais, depuis que le ministère de l'Énergie et des Ressources, et pas seulement sous notre gouvernement mais sous le vôtre également à l'époque, sur le plan de la gestion et de la qualité de la gestion, je pense que nous avons pu satisfaire les besoins de l'industrie, lui fournir les garanties d'approvisionnement, mais je dois dire qu'il y a eu un laisser-aller de la part de la grande industrie.

Sans faire plus de publicité qu'il ne faut à d'autres régions du monde, j'ai rencontré des dirigeants de l'entreprise privée de Suède et de Finlande qui m'ont expliqué que leur programme de reboisement, d'entretien des plantations, comptait jusqu'à 30% de leur coût de production. Si on voulait refiler une facture qui équivaudrait à 30% des coûts de production à notre entreprise ici, je pense qu'on ne pourrait pas le faire dans la même année, il faudrait quelques années d'ajustement.

Est-ce qu'on est en train de mettre au point de nouveaux concepts là-dessus en termes de politique forestière? La réponse est affirmative. J'ai eu l'occasion, durant les dernières semaines, de rencontrer personnellement à peu près tous les intervenants du milieu sans exception, que ce soit l'université, les syndicats de producteurs, les grandes entreprises, leurs associations, l'Association manufacturière du bois de sciage, l'Ordre des ingénieurs forestiers. Nous avons l'intention de rendre public ce que j'appellerais un document de travail ou un document de base dans les premiers jours de mai, ce qui ne serait non pas un énoncé de politique ou encore un contenu d'orientation, mais qui serait davantage un constat de la situation pour l'ensemble de tout ce qui touche aux activités de la forêt. Nous allons demander à nos partenaires de réagir face à ce document et de nous donner leur propre perspective, de nous dire comment ils voient le problème et quelles sont les solutions qu'ils sont prêts à risquer d'avancer. Cela va donner presque tout l'été, c'est-à-dire mai, juin, juillet, août et septembre. Au fur et à mesure que nous obtiendrons ces réactions, nous allons les confronter avec ce que nous sommes en train de mettre au point au ministère comme problématique, quant à l'avenir. Si nous sommes suffisamment avancés dans ces travaux, j'ai l'intention de proposer au Conseil des ministres pour l'automne une nouvelle politique forestière. On peut piger à gauche et à droite, soit en Ontario, avec le Forest Management Contract, par exemple, ou encore des éléments intéressants en Colombie britannique ou encore dans les pays Scandinaves, mais ce qu'il faudrait peut-être penser à mettre au point, c'est un modèle québécois qui serait adapté à la géographie de nos régions.

Vous disiez tantôt qu'il faut reboiser davantage dans les régions où il y a la tordeuse. C'est vrai pour l'Est du Québec, c'est vrai pour le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie. Dans nos objectifs, si on prend la région de l'Abitibi-Témiscamingue, qui n'est pas la région la plus affectée par la tordeuse des bourgeons de l'épinette, nous avons un effort de reboisement presque aussi soutenu que ce que nous allons faire dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie ou encore dans l'agglomération du Saguenay-Lac-Saint-Jean et pour une raison assez simple: c'est là qu'est la grande concentration de l'industrie du sciage au Québec, en plus des usines de papier, dont celle d'Amos. Il y a là tout un dossier qui mérite d'être mis à jour. Je suis parfaitement d'accord avec le député d'Outremont lorsqu'il me dit: Le reboisement, ce n'est pas tout. On est parfaitement d'accord. Le reboisement, ce n'est qu'un volet. Vous semblez vous inquiéter, un fois les arbres plantés, de ce qui leur arrive. Ils ne sont pas laissés à la merci de la nature et des framboisiers. On les entretient. Si vous allez au budget, vous allez voir que, cette année, par exemple, nous dépenserons à peu près 11 300 000 $, mais pour l'entretien seulement. Le reboisement est un volet. L'aménagement en plus doit venir, la question du... Si on prend la forêt privée, par exemple, qui, à mon sens, va recevoir de notre part beaucoup d'attention dans les années qui viennent, la forêt privée est proche des centres urbains. Elle est plus productive à l'acre que la forêt publique. Il y a peut-être des incitations plus grandes,

parce que les gens ressentent un sentiment d'appartenance quelconque à cette forêt qui leur appartient et elle fournit 20% des approvisionnement globaux du Québec. Nous allons, bien sûr, travailler avec les propriétaires. C'est exact qu'il y en a 125 000. Je suis d'accord avec le député de Beauce-Sud là-dessus, mais, là où nous ne sommes pas d'accord, c'est lorsqu'il a déjà dit en Chambre que le problème de la tordeuse touchait les 125 000, ce qui est faux.

Nous avons amendé l'année dernière la Loi sur le crédit forestier, qui donne une ouverture et une souplesse beaucoup plus grandes maintenant pour des investissements. Cette loi est administrée par l'Office du crédit agricole, comme vous le savez. Il y a la question de la fiscalité municipale qu'il faudra réviser ou au moins revoir. Il y a le financement des investissements au-delà de ce qui pourrait être fait par le biais de la Loi sur le crédit forestier, le drainage, par exemple. Je dois dire là-dessus que mon inclination personnelle est de mettre davantage à contribution la forêt privée et d'impliquer aussi les propriétaires des boisés privés dans les énoncés de politique que nous préparons. Je dois vous dire que j'ai été très heureux de la réaction de tous les intervenants que j'ai rencontrés qui m'ont dit: Oui, effectivement, nous sommes très intéressés. Nous allons vous transmettre ce que nous en pensons. On procède un peu à l'inverse de la tradition. Généralement, un ministre annonce un livre vert. Le livre vert devient un livre blanc. Ensuite, il y a une commission parlementaire et tout le monde se chicane autour de la table. La méthode que je retiens est de publier un document de base et les gens vont nous indiquer, à partir de leur propre analyse et de leur propre conception, comment ils voient un peu les choses. Ensuite, le gouvernement va réagir.

Un dernier mot, M. le Président, pour rappeler qu'en mai prochain, toute la question de la forêt privée va être abordée lors du premier colloque à être tenu au Québec sur cette question. Le colloque est prévu pour le début de mai à Trois-Rivières et tout ce qui a trait à la forêt privée va être débattu pendant ces journées. Je suis convaincu qu'on va échanger sur une problématique d'avenir axée vers une croissance de la capacité de production de la forêt privée.

M. Fortier; En ce qui concerne le genre de plants qui vont être produits en pépinière ou lorsqu'on parle de politique de reboisement, je n'ai pas entendu le ministre nous dire dans des déclarations publiques quels plants ou quel genre de boisés exactement il va favoriser. Est-ce que la politique de reboisement est à venir ou si vous allez déjà en soumission pour construire des serres? J'imagine que vous avez déjà défini dans une certaine mesure le type de plants qui seront plantés et à quel endroit. Autrement dit, vous dites: Plus tard, on verra où les planter et c'est là où je trouve, même si cela viendra dans deux ans, comme vous le dites, qu'il faudrait déjà que le ministère ait une assez bonne idée du genre de politique forestière qu'il veut mettre de l'avant dans deux ans, parce que, de toute évidence, pour qu'on puisse procéder dans deux ans, il faudrait savoir quel genre de forêt on veut favoriser dans deux ans et déterminer dès maintenant le genre de plants que l'on veut. C'était une première question.

L'autre question concerne les droits de coupe. Vous avez dit qu'on allait en refiler à l'entreprise privée une partie du coût par le moyen des droits de coupe. J'aimerais poser cette question au ministre. Je ne le sais pas, mais est-ce que les droits de coupe sont uniformes pour tout le monde au Québec? Est-ce que c'est au même niveau? Mon inquiétude, à ce moment-là, si les droits de coupe étaient uniformes pour tout le monde, c'est qu'on sait que certaines scieries, dans certaines régions, ont beaucoup de difficulté à joindre les deux bouts présentement. S'il fallait que les droits de coupe augmentent d'une façon appréciable, cela pourrait augmenter leur coût de production et créer des difficultés. Je me demandais si le ministre, dans sa politique de refiler à l'entreprise privée une partie des coûts en augmentant les droits de coupe, s'est préoccupé de l'impact à court terme que ceci pourrait avoir sur les coûts d'exploitation des utilisateurs de la forêt et de certaines scieries qui pourraient être pénalisées.

Autrement dit, il y a un impact forestier à long terme et je pense qu'on s'entend là-dessus pour régénérer la forêt si l'on veut arriver à des performances comme celles dont le ministre a fait état, dans les pays Scandinaves, quoique, dans ces pays, il y a également des problèmes de pluies acides. Enfin, c'est un autre sujet et je ne voudrais pas l'aborder immédiatement. Mais si on se compare aux pays Scandinaves, je crois qu'il faut investir là-dedans. Sur le plan forestier, on s'entend, mais j'imagine que les utilisateurs de la forêt vont se poser des questions sur l'impact économique qu'une augmentation des droits de coupe pourrait avoir sur leur rendement.

Ma première question avait trait au genre de plants, au genre de forêts, ou est-ce que le ministère a déjà une planification forestière qui détermine précisément les investissements que le ministre va faire cette année? Cela me semble une condition sine qua non car, si on attend un an ou un an et demi pour déterminer cela, on va mettre la charrue devant les boeufs.

D'autre part, est-ce que le ministre

peut faire des commentaires sur l'impact qu'une augmentation des droits de coupe pourrait avoir sur certains utilisateurs?

M. Duhaime: D'abord, je vais vous rassurer parce que, ayant déjà labouré moi-même, je sais dans quel sens installer le cheval par rapport à la charrue. Je suis un peu étonné de votre question parce que ce que vous me demandez ce matin a été rendu public le 28 novembre dernier, en conférence de presse. J'ai même donné deux conférences de presse. Je me souviens très bien qu'il y a des journalistes qui se demandaient pourquoi j'en donnais deux. Je pense que, d'après les questions que vous me posez, je vais en donner une troisième.

Je voudrais vous donner l'assurance que nous n'improviserons pas en cours de route. Les endroits où les plantations d'arbres seront faites sont déjà décidés. Je pourrais même vous donner les détails de tout cela. Je pense qu'il serait plus simple de vous les transmettre. Nous allons d'abord faire des plantations en récipients et avec des plants à racines nues. Tout cela est détaillé par grille et par région. J'ai tous ces documents ici. Je vais vous donner un exemple.

M. Fortier: Je dois vous admettre que, pour moi, les racines nues... ouais! D'accord!

M. Duhaime: Les racines nues ne vous intéressent pas?

M. Fortier: Non. Je vois ici les formations, mais cela ne me donnait pas l'information, pour le profane que je suis. Peut-être que je pourrais avoir l'information.

M. Duhaime: Ah bon! On va prendre ma région à titre d'exemple, soit la région 04. Récipients et racines nues en prévision de 1988: le grand total est de 38 000 000. Ensuite, vous avez une première addition mathématique qui vous donne en récipients et en racines nues - je vais vous donner les totaux, cela sera peut-être moins fastidieux -12 000 000 qui seraient produits par les installations du gouvernement, 14 000 000 qui seraient produits par les entreprises privées et 12 000 000 par les compagnies, pour un grand total de 38 000 000. (11 h 30)

Maintenant, quelles sont les espèces? Je pense que vous avez posé cette question. Ce sont, en très large majorité, des plants d'arbres résineux. Je ne ferai pas la différence entre les plants à racines nues et ou en récipient. Cela peut paraître très amusant pour des profanes, mais c'est très important pour les professionnels du métier, ce genre de distinction: épinette noire, 28,5% du programme; pin gris, 24,3%; épinette blanche, 15,6%; épinette de Norvège, 15%, sapin beaumier, 5,5%.

M. Fortier: Oui, j'ai cela ici.

M. Duhaime: Épinette rouge, 4%, etc.

M. Fortier: Oui.

M. Duhaime: Maintenant, par région, les objectifs sont déjà arrêtés, vous les avez dans les documents de presse qu'on a rendu publics au mois de novembre, vous les avez en millions de plants et en milliers d'hectares par région. Il ne faut pas croire que le ministre de l'Énergie et des Ressources s'est levé un bon matin en se disant: On va planter 300 000 000 de plants et on se démêlera avec le reste. Ce sont des gestes qui ont été rendus publics et décidés par le gouvernement; on y a réfléchi et ils ont été bien préparés. Je n'ai pas beaucoup d'inquiétude là-dessus.

Maintenant, les droits de coupe. Est-ce qu'ils sont uniformes? La réponse est oui. Le même effort est fourni sur une base de non-discrimination, mais il y a des variantes suivant les espèces, bien sûr. Je dois dire que les droits de coupe, à l'heure actuelle, représentent à peu près 3% du coût de production. Tout récemment, nous avons eu l'occasion de faire un examen exhaustif de toute la problématique des droits de coupe au Québec parce que nous avons dû défendre notre dossier devant un tribunal américain du commerce, cause que nous avons gagnée. Quand je dis "nous", je devrais peut-être nous exclure, parce que nous avons plutôt fourni un soutien d'ordre technique, un soutien d'ordre financier à l'industrie québécoise et canadienne qui avait été assignée par un tribunal américain. La prétention des plaignants était que nous subventionnions l'importation avec la mécanique de nos droits de coupe et nous avons prouvé exactement le contraire, de sorte que nous pensons avoir la sainte paix sur ce front pendant quelques années.

Il est évident que si nous augmentons les droits de coupe, d'abord, cela ne concerne pas la forêt privée, en aucune manière, - autant le dire avant que le député de Beauce-Sud ne me pose une question de ce genre - les droits de coupe s'appliquent à la forêt publique pour la pâte et pour toute la gamme des produits: pâte, papier journal ou sciage. Nous sommes absolument conscients qu'il y a une fragilité de plusieurs industries dans le sciage au Québec, mais ce sont des industries dont la santé financière varie à la moindre ride sur le marché du sciage.

À l'heure actuelle, l'industrie du sciage au Québec doit tourner à au-delà de 90% ou 95% de sa capacité; ça tourne très fort. Il y a certains moulins qui trouvent un seuil de rentabilité lorsque la demande est à ce point sur le marché. Certaines entreprises de l'industrie du sciage, qui sont dans le peloton

de la queue, si vous voulez, ne sont pas capables de supporter l'effort sur le droit de coupe qu'on leur demandera - parce que tout le monde sera mis à contribution non pas sur une base de discrimination, mais sur une base égalitaire - et elles devront compresser ailleurs, soit dans leur méthode de gestion ou dans leur façon de faire tourner leur entreprise. Il est bien certain que le ministère ou le gouvernement ne pourrait certainement pas faire une espèce de liste pour dire que les entreprises en bonne santé financière seront mises à contribution en fonction de leurs profits ou de leur chiffre d'affaires, etc.

Le seul critère que l'on puisse retenir dans l'application d'un droit de coupe, ce sont les quantités de bois qui sont consommées par chacune de ces entreprises. Autrement, je ne vois pas tellement où il pourrait y avoir une logique. Alors, on va, dans les semaines qui viennent, compléter ces chiffres. Je vous ai donné des ordres de grandeur quand même assez précis et c'est évident qu'on va augmenter les droits de coupe, c'est un secret de polichinelle, maintenant.

M. Fortier: Y a-t-il une étude succincte sur les droits de coupe qui seraient disponibles ou une analyse des droits de coupe? Est-ce que certains détails que le ministre a fournis ce matin sur le programme de reboisement, font partie d'un document qui pourrait éventuellement être disponible? Le ministre a donné certaines précisions aujourd'hui. À quel moment le ministre pourra-t-il donner plus d'information dans un document intégré sur le plan de reboisement?

M. Duhaime: II y en aura sûrement des volets importants dans le document dont j'ai fait mention tantôt, qui sera rendu public début mai, mais c'est très certainement à l'automne que cela sera beaucoup plus étoffé parce qu'on va y ajouter une problématique. Ce que je vous donne comme information a été rendu public dès le mois de novembre dernier. Il n'y a pas beaucoup d'éléments qui s'y sont ajoutés si ce ne sont des ajustements mineurs sur le plan des budgets. Par exemple, est-ce qu'on va mettre une serre avec une taille de 12 000 000 de plants de capacité de production sur une base annuelle parce qu'en serre on fait deux récoltes plutôt qu'une? Si on décide d'installer une serre avec une capacité de production de 20 000 000 de plants par récolte, cela fait 40 000 000 par année, vous venez de régler passablement le problème. Nous avons opté pour disséminer sur le territoire et les serres et les pépinières, d'abord pour faire des économies d'échelle importantes sur le transport, et, deuxièmement aussi, pour essayer de répartir l'emploi et les investissements sur des bases régionales pour qu'un peu tout le monde puisse en profiter.

Sur les droits de coupe, je pourrais peut-être déposer cet après-midi, si on peut mettre la main dessus rapidement à mon ministère, la grille actuelle que nous utilisons. Cela répondrait probablement à la question que vous avez posée. Je crois pouvoir affirmer que nous ne faisons de discrimination en aucune manière. Que ce soit dans le sciage, le papier journal ou dans la pâte, tout le monde est traité sur le même pied, c'est-à-dire en fonction des niveaux de consommation.

M. Fortier: Sur l'analyse qui a servi au commerce extérieur pour lutter aux États-Unis, est-ce qu'il y a certains documents -je ne tiens pas à avoir une brique - qui peuvent être fournis?

M. Duhaime: Oui, si vous faites le cumul des documents qui ont été produits devant le tribunal administratif américain, vous allez nourrir votre fin de semaine.

M. Fortier: Non, ce n'est pas ce que je veux dire.

M. Duhaime: On peut essayer de voir aujourd'hui si ce serait possible de vous fournir l'information.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Merci, M. le Président. M. le ministre, j'aurais quelques questions à vous poser sur les méthodes utilisées par les compagnies qui ont des concessions. Je vous dis d'abord que je suis profane en la matière. Il y a sûrement des questions de rentabilité accrochées à ces méthodes, des questions de coupe à blanc, des questions de gaspillage, d'une certaine façon, des jeunes pousses et des questions de quantité de main-d'oeuvre. Cela fait beaucoup de questions mais, à mon avis, tout cela se greffe autour des concessions qu'on donne aux différentes compagnies pour obtenir des droits de coupe.

Tout en allant à la pêche dans la région du Lac-Saint-Jean il n'y a pas si longtemps, j'ai eu l'occasion de visiter des coupes de bois faites par les grandes compagnies qu'on connaît ici au Québec, qui obtiennent des concessions du gouvernement. Bien sûr qu'on était loin du cheval et de la chaîne que nos grands-pères ont connus pour sortir les billes du bois. Je ne voudrais pas non plus, tout profane que je suis, aller suggérer, en 1984, de revenir à ces méthodes, mais il n'en reste pas moins que lorsqu'on entre dans nos forêts avec ce qu'on appelle aujourd'hui les "garrets" - presque

des bulldozers, d'énormes machines - on ne prend, ni plus ni moins, que la crème de la forêt, on choisit les plus beaux arbres, les essences qui font l'affaire et finalement, tout en ce faisant, à mon avis, on gaspille des plants qui ont peut-être cinq, huit ou dix ans, parce que ces énormes machines passent dessus, les cassent et les gaspillent.

Il serait peut-être difficile de quantifier ou d'évaluer ce que représente ce type de coupe qu'on appelle les fameuses coupes à blanc. Je pense que la question se pose. Le gouvernement pense à des programmes de main-d'oeuvre. On sait que le taux de chômage est énorme, mais si on utilisait plus de main-d'oeuvre et moins de grosses machines et si, plutôt que de faire des coupes à blanc en gaspillant les jeunes plants, on mettait ces machines de côté pour utiliser davantage des bras et des jambes, je me demande si on ne réglerait pas en même temps, d'un seul coup, une question de chômage et la conservation des jeunes plants qui, relativement à court terme, pourraient devenir aussi des arbres matures, et on sauterait peut-être des étapes. Je vous pose ces questions un peu innocemment, mais je pense qu'elles valent d'être posées. À première vue, il m'apparaît y avoir une espèce de contradiction. Si on en revenait aux exigences des compagnies quand on leur donne des droits de coupe, est-ce que cela empêcherait la rentabilité et est-ce qu'à ce moment-là, le fait d'avoir un droit de coupe avec de telles exigences, cela ferait en sorte que des compagnies ne pourraient plus couper du bois sur une base concurrentielle? À première vue, il m'apparaît que ces questions se posent. J'ai été un peu scandalisé de voir à quel point il se faisait un énorme gaspillage dans le bois qui n'était pas mûr, pas prêt à couper. On s'en fout; on passe dessus; on le gaspille; on le tasse. Cela a l'air d'un ravage épouvantable une fois que les compagnies ont passé dans les forêts. J'aimerais vous entendre là-dessus. J'aurais d'autres questions après celle-là.

M. Duhaime: C'est une vaste question que mon collègue de Beauharnois soulève. Si on décidait de cesser la mécanisation des travaux en forêt et de retourner à une main-d'oeuvre plus abondante, j'appellerais cela, en quelque sorte, le modèle chinois. C'est entendu qu'on aurait un très grand nombre d'employés en forêt, mais il est presque certain que, quant aux profits, avec la hausse faramineuse que pourrait représenter la masse salariale impliquée, le coût de production au mètre cube pour les entreprises entraînerait automatiquement, à mon point de vue, la fermeture de l'industrie du sciage et de l'industrie de la pâte et du papier journal.

C'est d'un immense secteur que nous parlons. Il y a 265 000 emplois qui sont reliés à la forêt au Québec, du début jusqu'à la fin de la chaîne. C'est 20% du total de nos exportations et c'est une industrie qui est tournée vers le marché international. Pour être en mesure de livrer, il faut d'abord et avant tout que, pour une tonne de papier journal ou le bois de sciage, que vous le comptiez aux planches par 1000 pieds ou peu importe la méthode utilisée, il faut être concurrentiel avec des produits de grande qualité.

C'est vraiment infernal, la concurrence sur le marché international à l'heure actuelle. Il y a des phénomènes qui se produisent où des pays en voie de développement ou en train de décoller sur le plan économique, qui ont une main-d'oeuvre beaucoup moins dispendieuse que la nôtre, mais qui ont maintenant nos technologies, en arrivent à nous déplacer ou encore à occuper des marchés que nous occupions. À cet égard, il n'y a pas d'amis. Je craindrais énormément que cela se produise. Je vois plutôt le phénomène dans l'autre sens. Il va y avoir davantage de mécanisation en forêt. Quelles sont les méthodes qui vont être utilisées? Certains coins du monde ont opté pour la coupe à blanc et le reboisement. Traditionnellement, on ne s'est jamais vraiment fait une idée. On a gagé, pendant toutes les décennies derrière nous, que Dieu et la nature allaient prendre soin de la relève et que la régénérescence des forêts se ferait. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites qu'avec ce genre de machinerie en forêt il y a beaucoup de gaspillage et beaucoup de pertes, mais, finalement, ce qu'il faut regarder, c'est ce que nous produisons de la forêt, si son prix est concurrentiel, si les méthodes utilisées sont valables et si on protège l'avenir. Ma problématique n'est pas de viser 30 000 000 de mètres cubes par année de la forêt québécoise et d'envisager que ce chiffre va rester à 30 000 000 de mètres cubes. Je crois l'avoir indiqué ce matin ou hier, on s'inscrivait plutôt dans une dynamique, dans un mouvement visant une augmentation. Si on augmente, c'est entendu qu'il va falloir en même temps rester concurrentiel, et cela est implacable. (11 h 45)

II faut éviter de faire des erreurs. Aujourd'hui, on fait référence au modèle suédois en quelque sorte, non seulement pour ce qui est de la forêt et des programmes de reboisement qui y sont conduits, mais il faut bien constater aussi que les Suédois, dans les années vingt, ont complètement gaspillé leurs forêts. Pendant des années, ils ont utilisé leurs matières ligneuses pour alimenter les hauts fourneaux pour produire de l'acier. Ils ont brûlé complètement leurs forêts et ils ont dû repartir à peu près à zéro, il y a une soixantaine d'années. Il faut dire qu'ils ont "fichument" bien réussi. Est-ce que cela va

être la coupe par bande? Est-ce que cela va être de la coupe à blanc de façon systématique? Je pense que ce qu'il est important de dire pour l'instant, c'est de travailler à avoir une forêt commerciale qui soit en meilleure santé possible et qu'on va aider davantage à mieux produire par les différents programmes dont nous discutons actuellement, mais le seul moment où il n'y aura plus aucun gaspillage dans la forêt, ce sera lorsque nous commencerons à couper des forêts qui auront été complètement reboisées là où les plants ayant été alignés il y a X années, seront rendus à maturité; là c'est vrai qu'il n'y a pas de perte. Maintenant, vous avez des forêts de résineux et de non-résineux. Très souvent, on y retrouve des espèces différentes. L'industrie du papier journal d'autrefois ne prenait que le résineux. Aujourd'hui, elle a commencé à utiliser d'autres espèces. Il y a aussi des développements technologiques qui sont survenus où vous avez aujourd'hui des entreprises qui produisent à partir d'espèces non utilisées par la pâte et le papier journal. Je pense entre autres aux usines de panneaux gaufrés, par exemple, de panneaux-particules et les projets comme ceux dont nous parlions pour Mont-Laurier et Maniwaki, la MDF. Ce sont ces technologies nouvelles qui vont nous permettre d'utiliser davantage la matière ligneuse. Notre objectif, pour utiliser une des expressions qui est chère à mon sous-ministre associé aux forêts, c'est l'utilisation maximale de la matière ligneuse. C'est entendu qu'avant qu'on en soit là, des situations comme celle que vous avez vue dans le Sagueny-Lac-Saint-Jean lors de votre tournée, vous allez très certainement en revoir d'autres.

M. Lavigne: Pour enchaîner un peu sur ce que vient de dire le ministre, je ne veux pas ouvrir un débat dans lequel je n'ai pas assez de données pour lui dire qu'il n'a pas raison. Mais, malgré tout, je me pose la question, est-ce qu'au ministère on prend cette décision après avoir évalué toute la question, pas uniquement celle de la rentabilité du bois à court terme, mais en impliquant ou en évaluant d'autres phénomènes, d'autres facteurs comme, par exemple, si on pouvait arriver à comptabiliser l'économie qu'on ferait avec d'abord la conservation des jeunes plants qui sont brisés, si on pouvait utiliser cela, je ne sais pas si c'est possible, s'il y a des techniques modernes qui pourraient nous permettre cela, si on pouvait aussi mettre dans la comptabilité en question les 1 800 000 000 $ d'aide sociale qu'on a payés cette année, je ne veux pas dire qu'on récupérerait évidemment tout le paquet parce que tous les bénéficiaires de l'aide sociale ne pourraient pas s'en aller dans la forêt avec une "chain saw", mais qu'on tienne compte aussi de ce facteur. Si on faisait entrer aussi dans nos calculs les retours d'impôt de ces travailleurs et d'autres points que je n'énumère pas parce qu'ils ne me viennent pas à l'idée, si on faisait une analyse vraiment exhaustive et complète de toute cette question, socialement, peut-être pas seulement pour le coupeur de bois, mais la société du Québec, en général, sur le plan d'une économie de main-d'oeuvre, de retour d'impôt, de gains sauvés, d'aide sociale, etc., d'économie de jeunes plants qui ne seraient pas massacrés, si on faisait, dis-je, une analyse de toute la problématique, est-ce que, d'après vous, vous arriveriez encore à la même conclusion qui est celle de continuer à mécaniser et de pousser de l'avant cette théorie?

Un autre élément important, c'est que, accidentellement, le terrain ne se prête pas toujours avantageusement à la grosse machine. Si, au moins, on pouvait procéder plus à la mitaine, si vous me permettez l'expression, parce qu'elle est comprise des Québécois - les terrains où la plantation est alignée comme des rangs de blé d'Inde qu'on coupera mécaniquement et très facilement éventuellement. Cela ne se prête pas toujours à cette façon de procéder. On sait qu'il y a des terrains plus rocheux, il y a des terrains plus montagneux, des terrains à pente plus abrupte. Si on pouvait tenir compte de cet élément-là pour faire en sorte que, dans les terrains plus plats, on aille avec une coupe à blanc et un reboisement plus orienté éventuellement et que, dans les terrains un peu plus accidentés, on tienne compte d'une coupe moins à blanc, moins mécanisée et plus à la mitaine, comme je le disais, je ne le sais pas, c'est peut-être une question pertinente et je pense qu'elle mérite d'être posée et d'être évaluée.

M. Duhaime: En fait, vous posez vraiment une question pertinente et les modèles économétriques là-dessus ont amené toutes les entreprises privées et le gouvernement à constater qu'un scénario qui consisterait à utiliser davantage de main-d'oeuvre et moins de machinerie entraînerait immanquablement une augmentation des coûts de production. Cela est certain. Est-ce qu'il vaudrait le coût de refaire toute l'étude et de faire des projections en tenant compte de ce qui est gagné, de ce qui est perdu? Cela pourrait être très intéressant, mais je suis à peu près certain qu'on arriverait aux mêmes données. Je pense qu'on a devant nous une avenue qui m'apparaît assez claire. On parle beaucoup de technologies nouvelles; on parle de virage technologique. Si nous mécanisions davantage au Québec, en forêt, il est certain qu'au fil des années, on arriverait à développer davantage d'entreprises qui mettraient au point la machinerie industrielle qu'on produit ici pour une partie, mais qu'on

achète aussi ailleurs.

Je ne veux pas vous effrayer mais, dans le domaine de la plantation, dans certains coins du monde, on a commencé à utiliser de la machinerie pour des fins de plantation et on calcule le nombre de milliers de plants à l'heure qu'une machine arrive à planter en terrain plat, bien sûr et en terrain adéquat qui a été drainé. C'est évident que, sur une problématique d'avenir, c'est dans cette direction qu'on ira. Je verrais plus la problématique d'accueillir des technologies nouvelles, les assimiler, les domestiquer, les bonifier et réexporter de la technologie qu'on ajouterait.

Il est évident que l'impact sur l'emploi mérite sérieusement d'être considéré et ce n'est pas inconciliable d'avoir une industrie dynamique et concurrentielle tant en forêt qu'en industrie en aval et d'en arriver à mettre au point des programmes d'emploi pour remettre à l'ouvrage le maximum de la population active du Québec. Dans ce sens-là, le plan de relance que nous avons annoncé l'automne dernier, la réinsertion des personnes aptes au travail dans toute espèce de travaux communautaires ou stages en entreprise ou de retour aux études, c'est devenu, même en forêt, des métiers qui sont techniquement beaucoup plus sophistiqués qu'ils ne l'étaient il y a plusieurs années. Je pense qu'on ferait une erreur importante, selon moi, en refusant ces technologies nouvelles pour axer notre développement sur une plus grande utilisation de la main-d'oeuvre sans tenir compte de ce que pourraient envisager nos concurrents. Qu'un moulin à papier s'installe n'importe où au Québec, il est automatiquement sur le marché international.

Qu'un moulin de sciage s'installe n'importe où, il doit faire face à une concurrence, nous n'établissons pas les prix; nous ne fixons pas les règles de la concurrence sur le marché international. On n'en a que le résultat et il faut y faire face. Je pense que si on retenait une stratégie qui pourrait répondre, à court terme, à un problème de main-d'oeuvre en disponibilité mais qui, presque automatiquement, créerait des problèmes à peu près insurmontables pour l'ensemble de l'industrie, j'aime mieux maintenir le choix que nous avons fait jusqu'à maintenant.

M. Lavigne: M. le ministre, je pose une dernière question. On dit que, d'ici 1988, on sera prêt à mettre 300 000 000 de plants en terre; le député d'Outremont vous posait la question tout à l'heure à savoir si le terrains qui recevront ces 300 000 000 de plants ont déjà été identifiés par région. Vous avez dit que c'était identifié. Je parle surtout du type de terrains. Pour enchaîner avec la question précédente, comme vous avez choisi des terrains plutôt plats, est-ce qu'on préparera ces terrains comme on le fait pour un champ de blé d'Inde, par exemple? Est-ce qu'ils seront dégagés des vieilles souches, des vieilles branches? Est-ce qu'on fera la plantation à la machine, à la main? J'aimerais vous entendre parler là-dessus? Évidemment, se greffe à cela le fait que si on avait à nettoyer la forêt comme il faut avant de planter ces plants, cela amènerait énormément de résidu de bois qui n'est pas bon ni pour les pâtes et le papier ni pour le bois de sciage. Cela nous amène donc à débloquer sur une autre question qui est le développement de la biomasse. Tous ces résidus du bois pourraient-ils être récupérés dans des usines de biomasse? On sait qu'il y en a déjà une ou deux qui fonctionnent au Québec et qui font face à une grande concurrence, mais elles sont quand même là et on pourrait peut-être aider à les développer davantage et à devenir davantage concurrentielles sur le plan énergétique? J'aimerais que vous m'informiez sur quel type de terrains, sur la procédure et sur la biomasse dont il s'agit.

M. Duhaime: J'ai deux points. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de survoler, par exemple, l'ancienne seigneurie de Lotbinière, où il y a une forêt domaniale où vous pouvez voir un modèle de coupe qui a été fait depuis plusieurs années. On essaie d'en mesurer les effets maintenant, mais ce n'est pas... Des coupes par bande ont été faites dans cette immense forêt domaniale. Il n'y a pas eu de reboisement comme tel. On essaie de voir sur certaines parties de cette forêt comment la régénérescence va se faire et de quelle manière. Il était entendu qu'avant de faire le reboisement, on va faire un travail de préparation, mais il serait hors de question de labourer la forêt, de la herser et de tasser tout ce qui pourrait s'y trouver, autrement dit en faire un champ qu'on préparerait avant l'ensemencement.

Généralement, après que la coupe de bois est faite, la plantation se fait sans beaucoup de préparation. En Colombie britannique, par exemple, j'ai eu l'occasion de voir un peu de documents là-dessus, à première vue, quand vous jetez un coup d'oeil sur le terrain qu'on s'apprête à reboiser, votre réaction est plutôt de dire: Qu'est-ce qu'ils sont en train de faire là? Pourtant, le reboisement se fait là, les souches sont là, etc., mais il faut bien considérer qu'une souche qui est là maintenant ou un bois mort, quand l'arbre que vous plantez aujourd'hui arrivera à maturité à 60 ans, les chances sont que le bois sera disparu; il aura réintégré le sol. Il se fait surtout un travail d'entretien, mais ce serait s'embarquer dans des coûts astronomiques que de penser qu'on pourrait nettoyer complètement pour ensuite reboiser. On le fait sur certaines parties de la forêt

publique. En forêt privée, c'est une autre question. Cela dépend vraiment du goût du propriétaire. Je dois dire qu'en forêt privée, généralement, le reboisement se fait sur des territoires qui ont été soit autrefois en culture ou qui ont été coupés à blanc et, ensuite, sont reboisés. Cela va varier énormément d'un secteur à l'autre. Règle générale, on va tenter de travailler sur des acrages qui auront été préparés et il restera à voir quel est le niveau de préparation qu'on va y mettre. Enlever du bois mort, par exemple, ce serait gaspiller essentiellement de l'argent parce qu'on sait très bien qu'au fil des années, il va disparaître. Ce qui est important, une fois que l'arbre planté a atteint une certaine maturité, c'est qu'on va utiliser de la main-d'oeuvre pour faire l'entretien des plantations ou encore utiliser de la machinerie. J'ai comme le sentiment qu'on va faire un peu des deux. (12 heures)

Le Président (M. Lafrenière): M. le député d'Outremont.

M. Duhaime: Vous avez posé une dernière question sur la biomasse. Là encore, nous sommes à des étapes vraiment premières. On ne fait que commencer au Québec. Je sais que Shell avait beaucoup d'ambition avec ses partenaires. Ils ont dû réduire leur problématique d'investissements. Je crois qu'il y a une usine, cependant, qui est ou bien en voie de parachèvement ou terminée dans le coin de Mégantic, mais je me souviens d'avoir vu la problématique des investissements. Ils les ont ralentis pour une raison assez simple; c'est que le produit fini doit être un produit commercial, donc, entrer sur le marché et maintenant que les Arabes ont décidé d'être un peu plus raisonnables sur l'augmentation du prix du pétrole, il est évident que cela va retarder tous ces produits. C'est la même chose pour le méthanol. À Saint-Juste-de-Bretenières, nous avons un projet qui est en marche. Nous en sommes à la phase I pour la mise au point du gazogène. Je crois qu'on envisageait à peu près vers 1985 d'aller dans la phase II sur une production de méthanol. Je suis loin d'être convaincu qu'on va y arriver si le prix international du brut reste à peu près ce qu'il est aujourd'hui. Tout est fonction de marché. Cela n'exclut pas, cependant que, dans ces secteurs, nous consacrions davantage d'argent à la recherche et au développement, à des applications industrielles aussi, ne serait-ce que pour préparer les années 1995, 2000, 2010, 2015, etc. C'est un immense point d'interrogation: Quel va être le prix du pétrole dans cinq, dix ou vingt ans? On l'a demandé ici lors des travaux de la commission parlementaire à peu près à tout ce qu'on a d'experts et le consensus semble se faire sur un statu quo, mais pour combien de temps? Il n'y a personne qui va risquer une réponse. Ce genre de dossier est directement relié à l'évolution du prix des autres formes d'énergie qui concurrencent, finalement soit le méthanol ou tout autre produit qui viendrait de la forêt.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, je pense que la discussion sur la forêt est très intéressante, mais je me rends compte qu'on n'en est rendu qu'au programme 2. Avant de continuer, j'aurais une question à poser au ministre. Le secrétaire me disait qu'il serait peut-être possible d'avoir une heure ou deux de plus. Le ministre serait-il consentant pour en discuter un peu plus tard?

M. Duhaime: Cela dépend à quel moment.

M. Fortier: Ce soir, seriez-vous libre? M. Duhaime: Pardon? M. Fortier: Ce soir?

M. Duhaime: Ce soir, j'ai des empêchements dirimants.

M. Fortier: En tout cas, si on pouvait s'entendre. Peut-être qu'à l'heure du lunch, on pourrait se parler. Si c'était possible, on pourrait en discuter.

Le Secrétaire: II faudrait s'entendre avec le leader.

M. Fortier: Oui. Nous allons continuer nos travaux en essayant d'accélérer, mais c'est sûr que tout le domaine de la forêt demande présentement une attention particulière pour plusieurs régions du Québec et c'est la raison pour laquelle je suis tout à fait d'accord pour qu'on y passe un peu de temps, mais, par ailleurs, il nous reste l'énergie et les mines. Ce sont deux autres secteurs très importants également. Hier, on n'a eu finalement qu'une heure et dix minutes et, ce matin, deux heures et demie. Cela veut dire qu'on a eu quatre heures en tout ce matin et cet après-midi, peut-être deux heures et quelques minutes.

M. Duhaime: M. le député d'Outremont, si vous me permettez une remarque, ce n'est pas particulièrement ma faute...

M. Fortier: Non, non!

M. Duhaime: ...s'il y a de la turbulence à la période des questions.

M. Fortier: Non, c'est à cause des déclarations ministérielles, en particulier,

mais...

M. Duhaime: C'est cela qui nous retarde.

M. Fortier: ...je n'en fais pas ombrage à qui que ce soit. J'aurais voulu simplement avoir votre collaboration, si possible, pour avoir un peu plus de temps. Sinon, on va essayer de se contracter, mais ce serait déplorable, vu l'importance du ministère, comme j'en faisais état hier. En ce qui me concerne, le programme 2 est adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Le programme 2 est adopté.

M. Lavigne: M. le Président, je voudrais seulement souligner que mon collègue de Deux-Montagnes voudrait poser une question sur les défoliants tout à l'heure.

M. Fortier: On y reviendra. Il n'y aucune difficulté.

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce qu'on suspend le programme 2?

M. Fortier: On peut l'adopter.

M. Lavigne: Non, non, c'est au programme 3, si vous intervenez.

Protection de la forêt

M. Fortier: Le programme 3, on en a parlé tout à l'heure. Je n'ai qu'une question, pour ma part, étant donné qu'un peu plus loin il y a de nombreux sujets surtout lorsqu'on arrive au programme 7, le développement de l'industrie forestière. Il y a plusieurs questions, mais, au programme 3, ma question est la suivante: Chaque année -cela fait trois ans que je fais les crédits du ministère - on déprime les budgets de prévention et de lutte contre les incendies. Chaque année, on dit: C'est compte tenu de la performance des années dernières et, chaque année, il y a des budgets supplémentaires. Est-ce que le ministère ou le Conseil du trésor joue à cache-cache? Pour quelle raison réduire les budgets pour les augmenter en cours de route? Il me semblerait que, si on prenait la moyenne des dernières années, on s'apercevrait qu'il manque de l'argent à chaque année, comme de raison. Je sais que le ministre ne peut pas prévoir le nombre de feux de forêt et l'importance des feux de forêt mais il me semblerait qu'une façon plus rationnelle serait de baser le budget sur la moyenne des dernières années qui, de mémoire, semble indiquer que le budget de 1984-1985 est trop bas.

M. Duhaime: Trop faible ou trop fort?

M. Fortier: Trop faible par rapport aux expériences passées.

M. Duhaime: Ah! Je suis parfaitement d'accord avec vous là-dessus. Sur le point que ce qui est annoncé dans le cahier des crédits, à moins que nous connaissions un été diluvien, et cela m'étonnerait beaucoup, on va très certainement devoir retourner au Conseil du trésor et au fonds de suppléance.

J'avoue que, du côté du Conseil du trésor, le gros de nos dépenses, comme vous le savez, se fait l'été. Les crédits sont déposés vers les mois de février ou de mars, selon les années, et le Conseil du trésor préfère, au lieu de geler tout de suite un crédit à ce poste de dépenses, se garder une marge de manoeuvre. Il y a des crédits qui deviennent périmés dans d'autres ministères. Le Conseil du trésor est en quelque sorte le poste de contrôle de toutes les dépenses et les virements se font presque automatiquement. On n'a pas besoin de faire de longues parades au Conseil du trésor car il le sait d'avance. Aussitôt qu'on arrive presque au fond de notre baril, on retourne au Conseil du trésor pour percevoir un montant d'argent additionnel pour faire face aux impératifs de la lutte contre les incendies.

J'avoue qu'on pourrait retenir une autre technique, mais je n'en ai pas fait un drame parce que, depuis trois ans, je n'ai jamais manqué d'argent pour lutter contre les incendies. On se paie même le luxe de prêter nos avions à nos amis de l'Ontario. On l'a fait avec beaucoup de plaisir sauf que, maintenant, ils sont mieux équipés. Ils ont finalement fait l'achat de CL-215. Grâce à l'initiative du Québec, une entente a été conclue avec le gouvernement fédéral, et les provinces et le fédéral ont préparé un programme de telle sorte que, pour le prix d'un appareil, on en obtenait un deuxième. Eux, étant maintenant équipés, je pense que...

Écoutez, si votre suggestion est dans le sens de faire augmenter le budget, cela me paraît plus...

M. Fortier: Non, non. Ce n'est pas plus important que cela. Je ne veux pas passer trop de temps là-dessus. Est-ce que le ministre pourrait me dire, comme on indique 19 000 000 $ dans le cahier des crédits pour l'année 1983-1984, que vous nous avez remis, si c'est le budget ou si c'est le total qui a été dépensé l'an dernier?

M. Duhaime: En fait, vous avez toujours deux chiffres. Si vous vous référez au cahier des crédits de 1983-1984, vous trouverez un autre chiffre. Les 19 000 000 $ que vous venez de mentionner, c'est un budget ajusté au dernier jour de décembre. C'est une méthode que le Conseil

du trésor utilise depuis des années et des années. Avez-vous mentionné 19 000 000 $?

M. Fortier: C'est un montant de 18 995 000 $, oui.

M. Duhaime: Ah bon! Vous avez les deux. Vous avez...

M. Fortier: Non, je n'ai pas...

M. Duhaime: Dans le montant de 18 995 500 $, vous avez deux volets: la prévention et la lutte contre les incendies. Il y a donc une ventilation qui devrait être faite. Mais quand vous vous référez aux crédits de l'année dernière, si vous vous référez au cahier des crédits au moment du dépôt...

M. Fortier: Il est sur 13 000 000 $.

M. Duhaime: ...c'est au début de l'année. Ensuite, quand on fait, par exemple, un nouveau dépôt des crédits, comme pour l'exercice financier de 1984-1985, quand on fait les comparaisons avec l'année 1983-1984, on n'est plus au moment du dépôt des crédits faits au 31 décembre. C'est pour cela qu'il y a des variations parfois vers le haut et parfois vers le bas. C'est une méthode qui a été utilisée depuis que le ministère existe, j'imagine. L'essentiel, je pense, est d'avoir les fonds nécessaires pour lutter efficacement. L'année dernière, cela a été terrible. On a défoncé tout ce qu'il y avait comme prévisions. Il y a eu beaucoup d'incendies.

Le montant qui est mis là-dessus tient aussi compte d'une certaine réalité. J'ai ici quelques chiffres drôlement impressionnants de 1974 à 1983. Je vais vous épargner tout le dédale de cela, mais c'est simplement pour dire que, par exemple, en 1974, 910 feux ont coûté 500 000 $. On va prendre l'année 1983 durant laquelle il y a eu 1653 feux de forêt; 238 000 hectares ont été touchés et cela a coûté 12 000 000 $.

M. Fortier: Une mini-question: c'est la forêt publique qui est touchée surtout, mais est-ce qu'il y a des feux dans les forêts privées?

M. Duhaime: Je vais faire une vérification. Je crois que le total comprend la forêt privée. Nous n'avons pas la comptabilité de la forêt privée. Les chiffres que je vous ai fournis, en chiffres arrondis, 239 000 hectares détruits en 1983, pour un montant de 11 800 000 $, concernent la forêt publique.

Maintenant, je pense qu'on pourrait vous fournir le nombre d'incendies en forêt privée qui ont été éteints par le ministère de l'Énergie et des Ressources.

M. Fortier: Le ministère intervient quand même?

M. Duhaime: Le ministère intervient avec la même rapidité et la même vitesse en utilisant les CL-215 ou un Canso.

M. Fortier: Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir brièvement à des questions qui ont déjà été abordées par mon collègue de Beauharnois à propos des épandages. Le ministre a voulu en quelque sorte se faire rassurant; il a parlé de l'aspect sécuritaire qui est relié à l'utilisation des produits chimiques dans ces épandages. Il est excellent que le ministre et le ministère se préoccupent de l'aspect sécuritaire puisqu'il y a, dans ces épandages chimiques, des dangers qui sont peut-être mal connus et peut-être assez considérables, assez graves.

Dans une situation comme celle-là, il y a des intérêts économiques extrêmement importants qui réclament la poursuite de certaines mesures malgré les dangers que ces mesures peuvent présenter pour la santé. Le ministre a fait allusion à ce qu'il a appelé un courant qui n'est pas majoritaire dans les opinions, mais il faudrait savoir de quelles opinions il s'agit. S'il s'agit des opinions de ceux qui ont des intérêts économiques dans l'exploitation des forêts, il est bien sûr que le courant en question sera minoritaire dans ces milieux.

Quand il s'agit de la santé, il n'est pas toujours facile de reconnaître les vrais prophètes, il n'est pas toujours facile de savoir qui a raison, minoritaire ou pas. Quand Galilée prétendait que la terre était ronde - on l'a pendu pour cela - il était remarquablement minoritaire.

M. Duhaime: On ne l'a pas brûlé, plutôt?

M. de Bellefeuille: On l'a peut-être brûlé; de toute façon, on l'a mis à mort.

M. Fortier: De toute façon, c'était l'Église qui l'avait décidé.

M. de Bellefeuille: On l'a mis à mort, parce qu'il prétendait que la terre était une boule. Pasteur n'a pas été mis à mort, mais il n'y a pas beaucoup de gens qui prenaient au sérieux ses histoires d'êtres vivants invisibles reliés à des maladies. Il a été nettement ostracisé. Les gens qui, aujourd'hui, nous parlent des dangers associés à l'usage des produits chimiques dans les épandages sur la forêt, est-ce que ce sont

les Galilée et les Pasteur, ou est-ce que ce sont les prophètes de malheur dont les prophéties sont mal fondées? Ce n'est pas nécessairement facile à savoir, mais il y a pourtant des travaux de recherche très sérieux qui ont montré que, dans certaines régions, on peut croire qu'il y a un lien entre l'usage des produits chimiques dans ces épandages et le taux de malformation à la naissance chez les êtres humains. Cela donne à croire que les dangers pour la santé sont très sérieux et qu'il faut vraiment en tenir compte.

Je me demande d'ailleurs, à partir des explications que le ministre nous a données, s'il n'y a pas de problèmes par rapport à la santé, pourquoi le ministère réduit les arrosages alors que les milieux reliés à l'exploitation de la forêt réclament plutôt une augmentation des arrosages. D'autre part - le ministre a bien fait la distinction entre les plantations et les forêts en exploitation -dans les plantations, pourquoi décréter, comme le gouvernement l'a fait le 13 novembre dernier, un moratoire des épandages de produits chimiques sur les plantations, s'il n'y a pas de problèmes reliés à la santé?

Je voudrais que le ministre nous explique un peu plus clairement comment il perçoit les problèmes relatifs à la santé et, puisqu'il nous parle de sécurité, quelle assurance il peut nous donner de ce point de vue-là. (12 h 15)

M. Duhaime: Vous avez parfaitement raison de souligner qu'il ne s'agit pas de compter les opinions d'un côté et de l'autre pour prendre une décision. Je pense que ce doit être une décision prise de façon très objective, sur les bases de la meilleure connaissance scientifique de ce dossier.

Je disais tantôt qu'il y a différentes écoles de pensée. C'est plus que de se référer aux querelles byzantines d'autrefois. Le professeur Vladimir Smirnoff qui est une des grandes autorités reconnues et un des promoteurs du BT, est, bien sûr, un homme hautement respecté. Par contre, je vais peut-être vous faire sursauter en vous disant que beaucoup des ingrédients que nous utilisons dans les composantes des produits chimiques utilisés sont également utilisés à des fins de fertilisation agricole. Ces produits sont autorisés à l'heure actuelle. Ils engraissent les sols pour activer la croissance des céréales, par exemple, les jardins, soit pour nourrir directement les gens ou encore nourrir des animaux qui, ultimement, seront consommés par des humains.

C'est un problème énorme. C'est pour cela que nous voulons y aller avec prudence. Je voudrais vous donner l'assurance que, concernant les intérêts économiques qui sont présents dans ce dossier - il y a toute l'industrie manufacturière de ces produits chimiques, d'une part, et il y a toute l'industrie manufacturière du BT, d'autre part, qui est une industrie actuellement en croissance - du point de vue du ministère de l'Énergie et des Ressources aussi bien que celui du gouvernement, les intérêts économiques qui pourraient se batailler sur le marché pour la promotion de leurs produits n'ont aucune espèce d'incidence sur les décisions que nous prenons. Le ministère de l'Environnement, depuis trois ou quatre ans, a poussé ses recherches et ses études. Il y a eu une grande sensibilisation de l'opinion publique. Au ministère de l'Énergie et des Ressources, on a changé considérablement nos méthodes d'arrosage. Vous avez indiqué le moratoire sur les plantations. L'année dernière, par exemple, nous avons arrosé sur 1 200 000 hectares; cette année, on réduit à 800 000. La tendance va vers le BT.

À partir du moment où on a les mêmes garanties - du moins c'est ce qu'on me donne comme information - je voudrais vous donner l'assurance que j'en ai longuement discuté avec mon collègue de l'Environnement de même qu'avec mon collègue des Affaires sociales, à l'époque où M. Johnson était titulaire de ce ministère. On a eu des réunions de travail. Nos équipes de fonctionnaires au plus haut niveau des administrations se parlent régulièrement à ce sujet. Au moindre signal ou, je devrais dire, au moindre signe prémonitoire, nous ne ferons pas une évaluation des courants d'opinion publique. S'il y a un danger quelconque, nous allons tout arrêter. Quand je dis "tout arrêter", c'est aussi bien le BT que les produits chimiques, parce qu'il y a des discussions entre scientistes sur les vertus d'une méthode et ses risques et sur les vertus d'une autre méthode par rapport à ses risques. Nous n'avons pas fait un choix non plus en fonction d'impératifs budgétaires. Si nous l'avions fait, nous n'aurions même pas retenu les arrosages au BT, puisque ces derniers nous coûtent beaucoup plus cher que les arrosages aux produits chimiques. Pourtant, nous avons fait la répartition: cinq huitièmes des superficies arrosées cette année le seront avec des produits chimiques et trois huitièmes le seront avec le BT. J'expliquais tout à l'heure qu'il faut aussi vérifier sur le terrain ce que cela donne. Il y a beaucoup de scientistes et de biologistes principalement qui sont assignés à ce dossier et qui font des prélèvements sur des bases d'échantillonnage, je dirais, très poussées. J'ai moi-même eu l'occasion d'avoir au moins deux séances de travail avec les équipes mêmes sur les inventaires qui sont faits des larves après arrosage, etc. C'est un des volets du dossier. D'aucuns nous disent que les produits au BT sont moins efficaces; d'autres prétendent le contraire. J'ai l'impression que, quant à l'efficacité, ce sera dans quelques années qu'on sera en mesure

de l'évaluer, mais je peux vous répondre très clairement tout de suite qu'au plan de la sécurité, nous n'avons jamais pris aucune chance et nous n'avons l'intention d'en prendre aucune.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Pour le programme 3, j'ai terminé.

Le Président (M. Lafrenière): Adopté?

Utilisation de la forêt

M. Fortier: Adopté. J'aimerais arriver au programme 7 le plus tôt possible, mais, au programme 4, j'ai seulement une question. C'est sur l'utilisation de la forêt. Ici, je lis, à la page 20, qu'aucun crédit n'est prévu en 1984-1985 pour le programme des révocations. Or, un de vos collègues, dans le Soleil du 9 avril, c'est le ministre de l'Environnement, a dit: "Reprise de la rétrocession des concessions forestières. Est-ce qu'il y a des budgets ou s'il n'y a pas de budget?

M. Duhaime: Qu'est-ce que vous dites de l'environnement?

M. Fortier: Ici j'ai, le lundi 9 avril: "Le gouvernement Lévesque reprendra la rétrocession des. concessions forestières qu'il avait temporairement arrêtée." C'est le ministre de l'Environnement qui dit cela. Dans votre budget, vous dites qu'il n'y a pas de budget. Est-ce qu'il y en a un ou s'il n'y en a pas? C'est le ministre de l'Environnement qui a raison ou si c'est le ministre de l'Énergie et des Ressources? Comme d'habitude.

M. Duhaime: C'est parce que, parfois, vous voyez des contradictions là où il faudrait voir une conciliation. Ce n'est pas le ministère de l'Environnement qui conduit les programmes de révocation. Si nous n'avons pas de crédits là-dessus, cette année, c'est que nous ne prévoyons pas, dans l'immédiat, avoir besoin de crédits. J'ai indiqué tout à l'heure que le programme de rétrocession des concessions forestières se déroule au fur et à mesure que nous rencontrons des problèmes d'approvisionnement. De mémoire, je pourrais vous dire de la dernière évaluation qu'on en avait faite l'an dernier que, si on disait qu'on termine tout d'un coup le programme de révocation, je crois que c'était d'environ 60 000 000 $ à 65 000 000 $ en termes de budget global pour finir le travail, au moment de la révocation, où il nous faut indemniser les détenteurs de ce droit pour les améliorations qui ont été faites.

Si en cours d'année, nous avons un problème d'approvisionnement et que nous décidons de révoquer, à ce moment, nous envoyons un CT au Conseil du trésor, où c'est discuté et généralement réglé et c'est payé à même le fonds de suppléance.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Très brièvement, M. le ministre, je m'étonne un peu de voir à quel point, dans ces volets, on met presque la moitié du volet, soit 22 000 000 $ cette année par rapport à 21 000 000 $ l'an passé, pour la voirie forestière. Est-ce que cela nous est remboursé d'une certaine façon par les concessions? C'est ça qu'on fait aux entreprises, ou si on paie vraiment le montant? On fait les routes et on laisse promener... C'est 50-50?

M. Fortier: C'est 50-50.

M. Duhaime: C'est un des bons programmes, je dois dire, qu'il fonctionne admirablement bien. C'est une grande incitation pour l'industrie. On paie 50% des dépenses; il y a des ajustements qui se font... Tous les projets sont présentés au ministère; on essaie, bien sûr, d'y aller au moindre coût possible, mais nous payons 50% de la facture.

M. Lavigne: Cela veut dire qu'au total, avec la mise de fonds des compagnies, on irait chercher environ 40 000 000 $ en investissements dans les réseaux routiers et forestiers.

M. Duhaime: C'est exact.

Le Président (M. Lafrenière): Programme 4, adopté? Adopté.

Gestion interne et soutien

M. Fortier: Progamme 5, très rapidement, j'ai deux questions. La première: Est-ce que le ministère se préoccupe de faire l'analyse de toute la réglementation existant au ministère de l'Énergie et des Ressources? Est-ce qu'une évaluation a été faite de la réglementation? Est-ce qu'un programme d'action est en oeuvre pour simplifier la réglementation, pour diminuer l'impact économique des règlements? Est-ce que le ministre a un plan d'action précis à cet égard qui répondrait à la demande des intervenants du secteur économique de diminuer la réglementation et de la simplifier le plus possible?

M. Duhaime: II y a une mise à jour continuelle de la réglementation qui est faite. C'est entendu qu'on est possiblement

surreglementé. Le problème se pose toujours au moment de la déréglementation. Qu'arrive-t-il alors? Il est vrai que les gens nous disent qu'il y a beaucoup de règlements qui s'appliquent, mais il faut quand même travailler sur le terrain. On essaie de ne pas alourdir la machine au-delà de ses besoins et de tenter de travailler sur des scénarios simplifiés. Je ne sais pas ce que vous avez en tête exactement comme règlements inutiles.

M. Fortier: Je suis d'accord avec le ministre quand il dit qu'on a besoin de réglementation. D'ailleurs, il y a certains hommes d'affaires ou certaines industries qui vivent simplement parce qu'il y a une réglementation et, lorsqu'on vient pour l'enlever, ces gens-là sont certainement les premiers à s'en plaindre. Je croyais que, dans un sens de simplification - il y a peut-être des règlements qui existent depuis "dix-neuf cent tranquille" - et que si le ministre ou ses fonctionnaires pouvaient faire une révision, ils s'apercevraient que certains règlements sont complètement désuets et qu'il y aurait lieu de les éliminer. Est-ce qu'il y a une équipe de travail qui fait cela ou si le ministre est satisfait de la réglementation telle qu'elle existe et croit qu'elle doit continuer comme cela?

M. Duhaime: Je vais peut-être vous étonner mais, dans un premier temps, je vous dirai qu'on n'a pas beaucoup de plaintes à ce sujet-là au ministère. C'est plutôt le phénomène inverse qui se produit. Des gens de l'industrie me demandent d'adopter des lois et des règlements en plus de ceux que nous avons, bien sûr, parce que cela pourrait servir leurs intérêts comme entreprise. Il faut un peu se méfier de ce genre d'invitation. Je vous donne un exemple très simple. Dans le dossier de la tordeuse des bourgeons de l'épinette, lorsque l'épidémie manifeste de l'intensité, on voudrait qu'on reprenne la fameuse loi "Bona", qu'on lui mette des crocs, sinon des dents, et qu'ensuite on réglemente. Mais, si on touche à un morceau comme celui-là, cela veut dire aussi qu'il faudra toucher à toute la réglementation du prix du bois, qu'il faudra toucher à la réglementation des approvisionnements. C'est drôle comme je n'ai donc pas le goût d'aller jouer là-dedans. Cela peut paraître très curieux, mais, dans un temps, l'industrie, dans son ensemble, constate une réglementation qui, d'après son jugement, peut être abusive et, du même souffle, nous en réclame davantage.

La seule plainte que j'ai pour l'instant et qui se manifeste davantage comme étant une crainte, c'est la réglementation qu'adopteront éventuellement les MRC dans le cadre des schémas d'aménagement. Ce n'est pas inconciliable. Je pense qu'il faudra faire preuve de souplesse. Je pense que le ministre des Affaires municipales et le ministre délégué à l'Aménagement et au développement régional sont parfaitement conscients de ce problème. S'il y a de la réglementation qui vient s'ajouter, cela pourrait être tel que tel pour autant que cela ne vient pas en contradiction ou de manière inconciliable avec ce qui existe déjà. Je dois dire que, si j'avais à faire une réponse très courte, c'est que nous n'avons pas beaucoup de plaintes, c'est pour cela que je vous ai demandé exactement sur quoi vous avez entendu une récrimination. (12 h 30)

M. Fortier: C'était général. Sur ce volet, j'ai une dernière question. Je sais qu'à l'intérieur du gouvernement, il y a eu des efforts pour donner plus de dents ou plus d'action au vérificateur interne. J'ai eu certaines plaintes à savoir que le ministère manquerait de contrôle en région. On me dit que, lorsqu'il s'agit de payer des entrepreneurs qui plantent des plants, si on parle de reboisement en particulier, il manquerait de contrôle. Dans quelle mesure le vérificateur interne attitré au ministère de l'Énergie et des Ressources a-t-il un programme d'action bien précis? Le ministre juge-t-il que les contrôles sont satisfaisants présentement? Compte tenu du fait qu'il va déléguer certains travaux à l'entreprise privée, dans la même mesure le ministre sait fort bien qu'il y a une grande règle en gestion: plus on délègue, plus il faut contrôler. Dans quelle mesure, dans la mesure où le ministère va déléguer ou qu'il a délégué présentement, va-t-il s'assurer d'avoir les contrôles efficaces pour s'assurer que l'argent des contribuables soit bien utilisé?

Le Président (M. Lafrenière): M. le ministre.

M. Duhaime: Vous parlez de contrôles de la qualité?

M. Fortier: Je parle du contrôle de la qualité, du contrôle financier, surtout.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député d'Outremont, il est 12 h 30. Il faudrait un consentement ou bien on ajourne sine die. Y a-t-il consentement pour entendre la réponse du ministre?

M. Duhaime: Je pourrais peut-être répondre à cette question et on pourrait ajourner ensuite.

Le Président (M. Lafrenière): Y a-t-il consentement?

M. Fortier: Oui, consentement.

Le Président (M. Lafrenière): D'accord, allez-y, M. le ministre.

M. Duhaime: Parlons d'abord du contrôle de la qualité du produit. Là-dessus, nous serons très exigeants. J'ai indiqué tantôt qu'on exigerait un contrôle professionnel. Nous allons le faire. Je dois dire que c'est de ce côté qu'on a eu des problèmes. Je ne veux pas identifier d'entreprises, mais, règle générale, quand le paiement tarde, c'est parce que la qualité du produit n'a pas été acceptée. On parle essentiellement de la qualité des plants fournis au ministère et qui doivent être payés par le ministère.

Je dois dire que nous avons dû utiliser une certaine largesse dans l'évaluation de la qualité pour éviter que des entreprises se culbutent en faillite. Sur le plan de la qualité, avec le programme que nous commençons cette année de très hauts niveaux de production, je dirais que nous serons intraitables.

Deuxième élément de la question sur le contrôle comme tel, la rapidité du paiement, j'ai le sentiment qu'on doit payer presque à la même vitesse que le ministère du Revenu sur le remboursement des impôts.

M. Fortier: Je ne parlais pas de vitesse, je parlais du respect des données contractuelles. Si vous octroyez un contrat à quelqu'un pour planter en région X milliers de plants, vous le payez au plant, j'imagine. Quelle assurance avez-vous que ces plants sont réellement en terre? Avez-vous des contrôles qui vous permettent de vérifier cela?

M. Dumaine: Oui, des contrôles se font sur le terrain. Il y a des entreprises avec lesquelles le ministère travaille depuis plusieurs années et où cela ne cause pas de problème. Il y en a d'autres qui font un peu de piraterie. Autant au niveau des entrepreneurs comme tels qu'au niveau des employés - je ne sais pas qui a mentionné hier, peut-être un peu à la blague, que, parce que la rémunération était faite à la pièce, on retrouvait en forêt des paquets de plants qui étaient tout simplement mis sous une roche ou sous des framboisiers sur le terrain - nous allons, bien sûr, faire exercer un contrôle le plus efficace possible. Mais on doit admettre au départ qu'on ne peut pas engager quelqu'un pour suivre le planteur à longueur de journée. Donc, on fera ce qu'on appelle des vérifications - les Anglais diraient des "spot checks" - et c'est de cette façon qu'on fonctionnera.

M. Fortier: Rapidement, sur le contrôle de la qualité. Le ministre, je pense, pourra emprunter ce qui se fait dans l'industrie aéronautique ou dans l'industrie nucléaire. Il pourrait même consulter son sous-ministre des Mines, qui était à l'époque dans l'industrie nucléaire, où il y a deux façons de procéder pour le contrôle de la qualité. Ce qui arrive, c'est que, dans l'industrie aéronautique ou nucléaire, lorsqu'il s'agissait de s'assurer de la qualité d'un produit donné, disons une pièce de machinerie, la méthode traditionnelle était d'embaucher des inspecteurs qui se rendaient sur place vérifier que le travail était fait tel qu'il devait l'être et cela coûtait très cher, parce que cela amène une multitude d'inspecteurs. Si le ministère allait dans cette direction, cela pourrait vouloir dire qu'une multitude d'inspecteurs seraient embauchés pour vérifier la qualité, même si cela passait par le secteur privé.

La formule retenue dans le domaine aéronautique ou nucléaire, c'est d'insister pour que chaque entreprise ait un programme de contrôle de la qualité. Ceci se fait en exigeant de l'entreprise en particulier qu'elle produise un document qui détermine tous les paramètres et les contrôles qui seront effectués et qu'elle indique qu'il y a un service responsable de cela dans cette entreprise même et que la personne responsable de ce service se rapporte à un point très élevé dans l'organisation. Autrement dit, ce qui revient au client, que ce soit Hydro-Québec ou à ceux qui achètent ces produits, leur seule responsabilité, c'est de s'assurer qu'un programme de contrôle de la qualité existe dans chaque industrie, et laisse l'inspection quotidienne se faire par l'entreprise elle-même. Si on parle du contrôle de la qualité, je crois que le ministre serait sage de regarder ce qui se fait dans certaines industries où justement, pour minimiser les coûts et pour maximiser le contrôle de la qualité, on établit des programmes d'assurance de la qualité, où l'entreprise a une responsabilité spécifique, où on exige que ceux qui sont responsables du contrôle de la qualité dans l'entreprise se rapportent au président ou à quelqu'un de très en vue dans l'organisation même. Si on croit, comme le ministre l'a dit, que le contrôle de la qualité a un impact déterminant sur la qualité du reboisement éventuellement, je crois qu'il pourrait s'inspirer de ce genre d'expérience qui s'est fait dans d'autres entreprises.

Mais j'aimerais revenir au programme du vérificateur interne, parce que, lorsqu'on lit le rapport du vérificateur du gouvernement, on nous dit que des efforts sont faits de ce côté. Le Vérificateur général nous dit que les efforts ne sont pas assez suivis. Y a-t-il un programme spécifique pour le ministère de l'Énergie et des Ressources? Est-ce que le vérificateur interne attitré à votre ministère a un programme bien arrêté? Est-ce que ce programme est en voie de réalisation?

M. Duhaime: La réponse à votre dernière question est oui, et nous en faisons le suivi le mieux possible. Je voudrais peut-être revenir sur la question du contrôle de la qualité. Quand nous signons des contrats avec l'entreprise privée, nous avons, bien sûr, des exigences sur le contrôle de la qualité des plantations faites, la qualité de la mise en terre et certains critères de densité et d'espacement. Il y en a pour une vingtaine de pages, mais je retiens votre suggestion. On pourrait peut-être demander aux entreprises d'exercer elles-mêmes leur propre contrôle de la qualité, ce serait peut-être plus facile et cela les responsabiliserait davantage. Le problème est davantage dans le champ, comme on le dit, ou dans le bois. Au moment où les planteurs sont à l'ouvrage, s'il y en a une trentaine ou une quarantaine dans un groupe, quand arrive un secteur de plantation un peu plus ombragé et moins surveillé, la tentation est là. On va tenter de faire un effort maximal là-dessus.

Le Président (M. Lafrenière): Merci, M. le ministre. La commission de l'économie et du travail ajourne ses travaux... Il faudrait adopter le programme 5.

M. Duhaime: Est-ce qu'il est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Lafrenière): Adopté? Adopté.

M. Duhaime: Est-ce qu'on a fini la forêt?

M. Fortier: Pour la forêt, il reste les programmes 6 et 7.

M. Duhaime: D'accord, on continuera cet après-midi.

M. Fortier: J'aurai quelques questions sur le développement de l'industrie forestière, ce qui prendra 20 ou 25 minutes.

M. Duhaime: D'accord, oui.

M. Fortier: Ensuite, on passera...

M. Duhaime: M. le Président, si vous me le permettez, hier, j'ai indiqué que je voulais déposer devant la commission parlementaire la lettre que j'avais adressée au président de REXFOR, de même qu'au président de l'entreprise Bellerive-Ka'n'enda pour ce qui est du projet de Mont-Laurier. C'est une lettre du 5 avril. Je voudrais ajouter que c'est une réserve d'approvisionnement que nous avons faite pour six mois. Il y a des conditions à remplir pour l'entreprise. Je voudrais les déposer à la commission.

Le Président (M. Lafrenière): Bon! M. le ministre, elles ne seront pas déposées, mais des photocopies seront faites et acheminées à tous les députés.

M. Duhaime: Bon, d'accord.

Le Président (M. Lafrenière): D'accord. La commission de l'économie et du travail ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 40)

(Reprise de la séance à 15 h 28)

Le Président (M. Lafrenière): À l'ordre!

La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. La parole est à...

M. Fortier: Je propose l'adoption du programme 6, immédiatement.

Le Président (M. Lafrenière): Adopté. M. Fortier: Programme 7.

Le Président (M. Lafrenière): Programme 7. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Merci. M. le ministre, est-ce qu'on s'entend d'un commun accord pour poursuivre jusqu'à 18 h 30, 18 h 45?

M. Duhaime: On terminerait à cette heure?

M. Fortier: Oui.

M. Duhaime: 18 h 45.

M. Fortier: Oui.

M. Duhaime: J'ai un rendez-vous très important à 19 h 30.

M. Fortier: D'accord, 18 h 45.

Une voix: C'est le même rendez-vous.

M. Lavigne: M. le Président, en tant que responsable de cette commission, je peux vous dire qu'il y a plusieurs membres de cette commission qui doivent partir absolument à 18 heures. Il était convenu qu'on finissait à 18 heures et des engagements ont été pris. Je ne sais pas si je pourrai récupérer suffisamment de membres pour que la commission siège. Je pourrais le vérifier avant que vous preniez une décision finale. Donnez-moi dix ou quinze minutes pour vérifier, car pour le moment je ne peux pas prendre cet engagement.

Développement de l'industrie forestière

M. Fortier: S'il y avait moyen d'avoir une ou deux personnes.

Le programme 7 concerne le développement de l'industrie forestière. J'imagine que c'est à l'intérieur de ce programme-là que vous allez financer, éventuellement, le programme annoncé pour les scieries de Grande-Vallée, dans une très grande mesure. C'est le moment pour en parler. Vous avez annoncé pour la Gaspésie un programme...

M. Duhaime: Le programme de relance de l'industrie du sciage dans le nord de la Gaspésie sera fait par l'intervention de REXFOR.

M. Fortier: II y a quand même des subventions. J'aurais quelques questions...

M. Duhaime: II y aura des subventions à l'intérieur de ce volet.

M. Fortier: J'ai en main, M. le ministre - cela nous permettra de gagner du temps puisqu'on est un peu à court et que tout le monde est intéressé par le sujet - le mémoire présenté au Conseil des ministres, du moins la partie accessible au public, et j'aurais quelques questions à ce sujet.

REXFOR possède déjà Matabois, Grande-Vallée, Saint-Léon-le-Grand, Lac-au-Saumon, qui sont incorporés sous le nom de Proforêt. Il y a d'autres intérêts privés, Marsoui et Mont Logan. Vous avez un programme d'acquisition des actifs qui se chiffre à 26 000 000 $ et il y a les approvisionnements en bois.

Ma première question: Est-ce qu'il existe une étude de rentablité de tout cela? Autrement dit, est-ce que cette étude a été faite sur la même base que pour une société privée qui irait voir son banquier? J'imagine que le banquier exigerait d'avoir une analyse quelque peu poussée avec plusieurs scénarios probables quant au prix du bois dans l'avenir. Autrement dit, est-ce qu'il existe une documentation qui pourrait être déposée - je ne voudrais pas prendre le temps de la commission - pour qu'on puisse mesurer l'ampleur de la rentabilité de ce nouveau programme de relance des scieries de la Gaspésie?

M. Duhaime: Oui, en fait, on fonctionne exactement comme l'entreprise privée. Pour un programme de relance comme celui qui va viser l'industrie du sciage dans la partie nord de la Gaspésie, REXFOR a préparé un projet d'intervention. Ils sont venus au gouvernement voir leur actionnaire. Bien sûr, il y a une étude de rentabilité.

M. Fortier: Est-ce qu'on pourrait en avoir une copie?

M. Duhaime: Bien, avec plaisir. M. Fortier: Merci.

M. Duhaime: On pourrait vous la remettre dans le courant de la journée ou demain.

M. Fortier: Ah! II n'y a pas d'urgence.

M. Duhaime: Cela pourra sûrement vous être utile lors de l'étude du projet de loi 66 lorsqu'on l'amènera en commission parlementaire parce qu'à même les 66 000 000 $ de capital-actions qu'on va ajouter dans REXFOR, la partie équité que celle-ci investira sera puisée à même ces 66 000 000 $.

M. Fortier: J'ai quelques questions à poser, si vous le permettez.

Le Président (M. Lafrenière): D'accord.

M. Fortier: À la page 3 de ce même document - je vais essayer d'avoir des questions les plus brèves possible si on veut accélérer la cadence - on dit ceci, en parlant des approvisionnements: "II est à noter que, pour atteindre de tels volumes d'approvisionnement - on parle d'un volume total de 914 000 mètres cubes provenant des forêts publiques - en provenance des forêts publiques, il a été nécessaire d'y inclure les volumes jusque-là considérés pour l'approvisionnement de la papeterie projetée de Matane." Cela signifie-t-il qu'il n'existe plus maintenant d'approvisionnement pour la papeterie de Matane? Pourriez-vous éclaircir cet énoncé? Je ne le comprends pas moi-même.

M. Duhaime: Absolument pas. La papeterie de Matane est un dossier qui, bien que silencieux, est très actif. L'explication est d'une grande clarté. À partir des quatre scieries qui seront remises en marche dans ce que j'appellerais la première phase d'un plan de relance dans la Gaspésie-Nord -parce qu'il y a encore deux scieries qui nous intéressent - nous comptons approvisionner la papeterie de Matane en copeaux, ce qui veut dire qu'il n'y a aucun problème quant à l'approvisionnement en bois de Matane. Originairement, nous envisagions une production de 160 000 tonnes. Le dossier est maintenant à un niveau de 180 000 tonnes. Nous avons les approvisionnements nécessaires dans cette région en comptant, bien sûr, que, pour l'un et l'autre projet, les copeaux du sciage iront à Matane. Qu'est-ce qui arrive dans l'intervalle? Ces copeaux seront mis en marché au Québec ou sur le marché d'exportation par le truchement d'une

filiale de REXFOR qui s'appelle Lignarex et qui a le mandat de faire la mise en marché.

M. Fortier: II y a une certaine quantité d'approvisionnement qui vient des forêts privées. Sur 990 000 mètres cubes, il y a 914 000 mètres cubes de la forêt publique et 76 000 mètres cubes de la forêt privée. Vous dites qu'entre-temps les copeaux pourraient être vendus ailleurs. Comment allez-vous assurer l'équilibre du marché? Comment allez-vous vous assurer qu'il n'y aura pas une surenchère, qu'il n'y aura pas un problème de prix, qu'il n'y aura pas du dumping qui nuirait aux producteurs de bois ou à ceux travaillent dans le bois?

M. Duhaime: Ce serait relativement facile de dire: On va permettre à une société d'État d'offrir des copeaux à un prix de dumping sur notre propre marché, mais je pense qu'on travaillerait, à court et moyen termes, contre nos propres intérêts. On va travailler dans le sens de maintenir le marché. Je disais tantôt que nous envisagions le marché international. Nous avons actuellement en main plusieurs propositions de contrats de longue durée pour l'exportation, mais ce n'est pas le but visé. Ce que nous voulons, c'est utiliser les copeaux pour leur donner une valeur ajoutée au Québec, créer des emplois ici et non pas simplement les exporter. Si nous devons le faire, ce sera une situation temporaire.

M. Fortier: Le ministre peut-il nous dire, en ce qui concerne la papeterie de Matane qui viendrait s'intégrer, où nous en sommes présentement? Je vois ici dans une dépêche du Soleil du 19 novembre: "Le projet d'une usine de fabrication de papier journal à Matane est sur le point de franchir une étape décisive à la faveur d'un climat politique et financier meilleur." Où en sommes-nous présentement, en résumé, sans aller dans tous les détails? Le ministre peut-il nous donner l'échéancier, s'il y en a un, du lancement de ce projet?

M. Duhaime: Vous avez raison de souligner que la reprise économique que l'on sent est un des facteurs importants. Cela crée, bien sûr, de l'effervescence au niveau de la décision d'aller de l'avant avec des investissements. Ce que je puis dire ici pour l'instant, c'est que REXFOR a un mandat très clair. REXFOR a déjà un partenaire et est en discussion actuellement avec un troisième et possiblement un quatrième. Je n'ai pas d'idée quant à l'échéancier, pour une raison assez simple. Il s'agit d'un investissement envisagé de l'ordre de 330 000 000 $ et notre société d'État, avec ses partenaires du secteur privé, est en train de revoir et de refaire les exercices sur les problématiques de la faisabilité et de la rentabilité du projet. C'est parfaitement normal que cela se fasse ainsi. Aussitôt qu'il y aura une entente de faite entre les actionnaires, il restera ensuite une étape à franchir, qui sera de voir au financement à long terme. Il est assez difficile d'annoncer un échéancier et de dire: On le fera dans deux mois ou dans six mois. Nous avions un très solide espoir de concrétiser le projet cette année avec la participation d'un groupe américain, Bato, qui a déjà des intérêts à Rivière-du-Loup avec REXFOR, mais, pour des raisons qui sont internes à l'entreprise Bato, ils nous ont signifié leur retrait du dossier.

M. Fortier: Sur la question de la relance des scieries de la Gaspésie, cela signifie qu'il va y avoir un transport de bois sur de très grandes distances, quand on connaît les distances, et j'imagine que dans l'étude de rentabilité qui a été prise en considération, à première vue, les distances à parcourir sont tellement grandes que cela compromet dès le départ la rentabilité d'un tel projet. On me signale qu'à la demande de REXFOR ou d'autres personnes le gouvernement fédéral a construit un quai. Est-ce à Grande-Vallée? Oui? Cet investissement qui a été fait à ce moment-là devient-il périmé et dans quelle mesure l'utilisation du transport routier est-elle supérieure au transport par bateau ou autrement? De quelle façon avez-vous fait l'analyse qui vous permet de dire que la rentabilité est assurée quand même par transport routier?

M. Duhaime: C'est un concept qui n'est pas nouveau. Est-ce qu'on va le faire dans le nord de la Gaspésie plutôt qu'à partir des scieries de Grande-Vallée ou de Matabois ou encore de Lac-au-Saumon ou de Saint-Léon-le-Grand, pour sortir de ces scieries un produit fini, prêt à être mis en marché? Nous avons plutôt l'intention de faire produire, dans ces installations, du bois équarri qui recevra un traitement final à Matane. Pour ce qui est du transport, les effets s'annulent en quelque sorte. Qu'on transporte du bois équarri ou qu'on transporte des produits finis à partir d'un point donné, l'un dans l'autre, nous évaluons qu'il n'y a pas d'économie réelle. Là où l'économie se fait sentir, c'est à partir du point de distribution final, à partir de Matane, d'où on expédiera soit des planches, soit des 2 sur 3, des 2 sur 4, des 2 sur 6 ou des 2 sur 8, dépendant s'il s'agit d'épinette ou de sapin; ce bois sera traité, séché, raboté et expédié.

Le quai fédéral de Grande-Vallée est le genre de folie qu'un gouvernement commet une fois de temps en temps. Je ne dis pas qu'à très long terme il ne puisse pas trouver sa rentabilité. Mais le jour où on réexpédiera

des produits finis à partir de Grande-Vallée même, pour des marchés d'outre-mer, si on regarde la capacité de Grande-Vallée, même avec l'intervention qu'on y fait, si voulez mon sentiment, ceux qui ont pris la décision d'y construire un quai ont dû prendre une telle décision juste avant une campagne électorale ou quelque chose comme cela.

M. Fortier: Le ministre a dit qu'il n'y avait pas tellement de différence dans les coûts, que ce soit pour le transport du bois équarri ou pour le transport du bois d'oeuvre. Mais, enfin, il sait bien que, dans ce cas-ci, selon des données que vous avez dans vos documents, on parle de 340 000 mètres cubes de bois équarri qui va devenir la matière première alors que la quantité de bois d'oeuvre sera uniquement de 272 000 mètres cubes. Donc, la quantité est de près de 33% en moins ou de 25%; ce facteur doit être quand même très: important. C'est un pourcentage de 25% des quantités de bois à transporter en plus.

M. Duhaime: Mais ce n'est pas à ce niveau que, sur le plan de la rentabilité de l'ensemble du projet, les économies d'échelle sont significatives. On concentre un très haut niveau de production à partir du bois équarri vers les produits finis en un seul lieu plutôt que d'avoir des opérations de finition et de traitement final du bois en quatre ou cinq endroits différents. Cela sera concentré en un seul endroit et, de là, expédié. C'est à cette étape de la production que les économies d'échelle se réalisent.

Avoir des installations de séchage, de rabotage, de planage et de traitement du bois en quatre ou cinq endroits différents pour de petites quantités ou de petits volumes, cela vous coûte drôlement plus cher que si vous concentrez ces étapes au même endroit en un processus de fabrication qui fonctionne de façon continue. C'est pourquoi nous avons retenu cette formule d'avoir un centre de traitement régional à Matane. Ce concept n'est pas nouveau. Il existe ailleurs également. C'est là que l'économie d'échelle se fait sentir. Ce n'est pas tellement au niveau du transport. Transporter des 2 sur 4, planés ou non, ou transporter des billes équarries, en termes de coût de transport, cela a des chances de se ressembler.

M. Fortier: Les journaux font état du fait que les Gaspésiens doutent que les réserves forestières du coin soient suffisantes pour approvisionner six scieries en même temps. Quelle assurance le ministre peut-il nous donner à ce sujet, compte tenu de l'état de la forêt gaspésienne et des quantités accrues qu'il s'apprête à autoriser?

M. Duhaime: II y a des craintes qui apparaissent de temps à autre dans les journaux, dans cette région comme dans d'autres. Le problème de la forêt gaspésienne est assez simple à expliquer. C'est une forêt qui a été maltraitée, qui a été ravagée. Le bois est de très petite dimension. C'est un fait. Personne ne va nier une pareille évidence. Mais REXFOR et le ministère de l'Énergie et des Ressources ont fait une étude très attentive sur la capacité de la forêt gaspésienne aux fins d'alimenter non pas six mais quatre scieries pour l'instant. On verra si on peut régler les problèmes à Marsoui et Mont Logan, on verra s'il y aura une cinquième et une sixième scieries. Une chose est sûre, il y en aura une cinquième, mais je ne donne pas de garantie quant à la sixième. Sur le plan des approvisionnements en bois, par rapport au volume de production qu'on envisage, ce sera serré, mais on pense qu'on peut satisfaire la demande. (15 h 45)

M. Fortier: Je change de dossier avant de passer la parole à mes collègues. Vous êtes allé en Suède dernièrement, en partie pour étudier son programme de reboisement, et vous en avez fait état ce matin. Par ailleurs, les journaux ont mentionné que vous êtes allé là-bas avec certaines personnes de Port-Cartier. Pourriez-vous nous dire quelles sont les démarches que vous avez faites en Suède et est-ce que celles-ci peuvent nous permettre d'espérer que le dossier de ITT-Rayonier va aboutir prochainement?

M. Duhaime: D'abord, je voudrais apporter une précision. Nous avons fait une tournée en Norvège, en Suède et en Finlande pour vérifier sur place ce que nous savions, bien sûr, mais aussi pour rencontrer les ministres, hauts fonctionnaires et dirigeants de grandes entreprises de même que les dirigeants et représentants des associations de producteurs et de propriétaires de boisés privés.

Nous avons eu une rencontre - cela a été rendu public il y a plusieurs semaines par mon collègue de Duplessis - avec les dirigeants de la compagnie suédoise Swenska Cellulosa, qui connaissent notre région, qui connaissent le Québec, qui sont déjà à Montréal. Nous avons, bien sûr, parlé avec eux du dossier ITT-Rayonier. Il y a un intérêt manifeste de leur côté. Il serait peut-être trop tôt pour qualifier l'intérêt qu'ils ont manifesté, mais ils sont très intéressés à aller voir plus loin ce que cela pourrait donner, non pas pour redémarrer une production de rayonne, mais peut-être pour éventuellement utiliser les bâtisses ou une partie des bâtisses pour d'autres productions.

J'ai eu l'occasion de qualifier cet échange comme étant prometteur et je pense que c'est l'expression qu'on peut utiliser dans ces circonstances. J'ai eu l'occasion de leur adresser de la correspondance et il n'est pas impossible non plus que je rencontre de

nouveau, en mai ou en juin prochain, un des dirigeants de Swenska Cellulosa pour parler de ce dossier.

M. Fortier: Quelle compagnie?

M. Duhaime: Swenska Cellulosa. Il me manque un mot parce que le sigle est SCA, mais c'est connu comme Swenska Cellulosa. Nous parlerons de ce dossier et d'autres aussi que nous avons eu l'occasion d'aborder.

M. Fortier: Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Si vous me le permettez, je voudrais revenir sur le décret du gouvernement du Québec qui n'a pas encore été étudié par le Conseil des ministres mais qui le sera très prochainement concernant l'approvisionnement de six scieries de la côte sud en forêt publique; 914 000 mètres cubes, je crois. Est-ce que le territoire de l'île d'Anticosti est inclus?

M. Duhaime: Anticosti sera... Si mon collègue des Finances était ici, il dirait "comment dire?"... Les gens du Nord ont les yeux sur Anticosti et les gens du Sud également. Pour l'instant, les approvisionnements d'Anticosti ne sont engagés sur aucun projet.

M. Perron: Si je vous pose la question, M. le ministre, ce n'est pas que je sois contre le fait que le bois d'Anticosti soit transporté sur la côte sud pour approvisionner certaines scieries ou encore la papeterie de Matane. Le ministre pourrait-il nous garantir que si jamais, dans les prochains mois - si on peut parler ainsi - il y a une réouverture de Rayonier Québec à Port-Cartier, par le biais d'un consortium ou autrement, le bois de l'île pourrait approvisionner cette usine à la suite de sa réouverture?

M. Duhaime: Je sais qu'Anticosti fait partie de votre patrimoine, comme député. Ce que je peux, c'est utiliser la même expression que vous, "pourrait". C'est une pure éventualité pour l'instant parce qu'il n'y a aucun projet précis et encadré qui pourrait commander un volume d'approvisionnement quelconque qui est relié au redémarrage des installations d'ITT-Rayonier. On pense qu'avec la forêt de la Côte-Nord, avec ce que nous envisageons pour l'instant, ce serait amplement suffisant.

On ne peut jamais préjuger de l'avenir mais, si des tonnages importants étaient requis en approvisionnement à partir d'Anticosti, j'avoue que je n'ai pas le goût de faire une ligne de démarcation sur

Anticosti à savoir ce qui appartiendra au nord et ce qui appartiendra au sud. Une chose est sûre, cependant, le seul besoin qui est identifié sur Anticosti pour approvisionner Matane, c'est au cas où il y aurait une deuxième machine à papier à Matane. Ce que j'ai l'habitude de dire, dans ce dossier-là, c'est: Commençons par en construire une, à la mettre en route et après on verra bien.

M. Perron: Sur ce point-là, je suis d'accord avec le ministre, mais n'est-il pas d'usage pour le ministre de l'Énergie et des Ressources de toujours se réserver le droit, malgré que des permis de coupe soient émis, de changer la direction de l'approvisionnement? C'est-à-dire qu'au lieu d'aller sur la côte sud cela pourrait aller sur la Côte-Nord ou à un autre endroit. Je pense que vous vous gardez une réserve là-dedans...

M. Duhaime: Oui.

M. Perron: ...pour envoyer l'approvisionnement où le besoin se fait sentir.

M. Duhaime: Vous avez parfaitement raison, c'est d'ailleurs ce qui nous permet de réconcilier les deux rives.

M. Perron: D'accord. L'île est juste entre les deux rives, pour l'information de tout le monde. Je veux bien croire aussi qu'il y a un certain comté de la côte sud qui s'appelle le comté de Gaspé qui essaie de se l'approprier depuis de nombreuses années.

Si on revient à l'usine de Matane par rapport à celle de Rayonier Québec, selon la production qui serait possible actuellement par les techniques qu'elle a à l'intérieur de l'usine - je parle de Rayonier Québec -c'est-à-dire le bisulfite, techniques qui pourraient être modifiées éventuellement par d'autres procédés, comme vous le mentionniez tout à l'heure en rapport avec les intérêts de Swenska.

Est-ce que le ministre pourrait nous dire si la production de l'usine de Matane pourrait entrer en conflit avec la production qui serait possible actuellement ou celle qui serait possible à la suite de modifications qui pourraient être faites à l'usine de Rayonier?

Si je vous pose la question, M. le ministre, c'est parce qu'on laisse entendre, dans certains milieux politiques, en particulier certains membres de l'Assemblée nationale qui sont de l'autre côté, en face de nous - cela vient aussi du milieu - que, s'il y avait une usine à Matane, cela pourrait compromettre l'ouverture de Rayonier Québec à Port-Cartier à cause de cette production dont il est fait mention.

M. Duhaime: Non, les deux projets ne sont en conflit d'aucune manière. Ce qui est

envisagé à Matane, c'est une usine de fabrication de papier journal. Il n'a jamais été porté à ma connaissance qu'à Port-Cartier il y avait un projet pour fabriquer du papier journal. Cela pourrait être de la pâte, cela pourrait être du bisulfite, peu importe le procédé qui serait retenu. Les approvisionnements sont garantis pour chacun des projets: le projet Rayonier, à partir des approvisionnements sur la Côte-Nord, et le projet Matane, à partir d'approvisionnements sur la côte sud. Les deux ne sont pas en concurrence de quelque manière que ce soit.

Je serais très étonné qu'on m'apprenne qu'il y a un consortium ou un groupe de compagnies qui seraient intéressés à installer, à Port-Cartier, sur le site d'ITT-Rayonier, une usine de fabrication de papier journal. Ce serait vraiment nouveau.

M. Perron: Une dernière question, M. le Président. Puisqu'on parle du dossier de Rayonier Québec, on sait que le 5 novembre 1983, à la suite d'une représentation faite le 18 octobre par SOREF, de Port-Cartier, qui est un organisme à but non lucratif, mais qui s'occupe de la question forestière, le gouvernement du Québec avait pris la décision d'aller de l'avant avec la proposition SOREF et de la présenter au gouvernement fédéral. Le 8 novembre, vous avez fait une représentation auprès de M. Lumley, du gouvernement fédéral, pour obtenir une participation financière de 75%-25% des deux gouvernements, c'est-à-dire 75% du fédéral et 25% du gouvernement du Québec, ce qui était la proposition de SOREF. Le 14 novembre, vous avez reçu un accusé de réception de M. Ed Lumley disant qu'il vous ferait parvenir des réponses ultérieurement. Le 22 décembre, vous avez fait une nouvelle représentation à M. Lumley, à savoir que vous n'aviez toujours pas reçu de réponse à son accusé de réception et à l'ensemble du dossier concernant l'offre de SOREF, et vous lui demandiez une réponse. À plusieurs reprises, en janvier et février, vous êtes revenu à la charge par des télex, même des appels téléphoniques au bureau de M. Lumley. Est-ce qu'il y a eu des développements durant les dernières semaines, à savoir une réponse du gouvernement fédéral, pour l'entretien et le chauffage de l'usine, puisqu'il était question que ITT procède à la démolition, au démantèlement complet de l'usine, donc rase l'usine en question, et même transporte certains équipements jusqu'aux États-Unis, à la suite d'une étude qui a été faite en 1983 par Dominion Bridge, je crois? Est-ce que vous avez eu des nouvelles dernièrement du gouvernement fédéral à ce sujet?

M. Duhaime: Mon collègue, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, tantôt, évoquait les difficultés de communication. Comme vous le savez, Ottawa est à 6000 milles de distance et ce n'est pas facile d'avoir des réponses rapides pour régler des dossiers qui peuvent se régler en quinze minutes lorsqu'on se décide à les régler. Nous sommes à la mi-avril. Il y a eu beaucoup de discussions avec mes fonctionnaires, avec la compagnie ITT et aussi avec des fonctionnaires fédéraux. Il semblerait qu'une entente s'en vient du côté fédéral, mais ce n'est pas encore confirmé. Ce serait un partage des coûts entre les deux gouvernements pour assurer la maintenance, si on peut dire, l'entretien et le chauffage des installations à Port-Cartier.

Nous avions proposé trois années dans notre scénario, où nous étions prêts à payer 25%. L'information qu'on a pour l'instant, des fonctionnaires, c'est que la recommandation serait pour une année, financé à l'intérieur de l'entente auxiliaire qui existe sur le projet de la relance et de la modernisation. En quelque sorte, c'est un accroc au but premier poursuivi dans l'entente, mais nous sommes prêts à le faire. J'aurais souhaité qu'on ait davantage de durée, mais un an, c'est mieux que rien. Ce scénario est déjà accepté par ITT qui, soit dit en passant, a assuré à sa charge exclusive tous les frais d'entretien et de chauffage des derniers mois. Je sais pertinemment, pour avoir rencontré le président de ITT et son vice-président aux finances, que, quant à eux, la décision est prise. Ils vont procéder au démantèlement si une entente n'intervient pas.

Si le député fédéral de votre comté décidait de faire autre chose que des déclarations et des discours et de sensibiliser son collègue, M. Lumley, qui m'apparaît davantage versé dans les dossiers qui intéressent l'Ontario et Terre-Neuve, entre autres, je pense que cela irait pas mal mieux. (16 heures)

M. Perron: Merci, M. le ministre. Maintenant, est-ce qu'on me permettrait de revenir - puisque je n'étais pas présent ce matin - avec une courte question se rapportant au programme de reforestation? Est-ce que le ministre a déjà informé cette commission ou pourrait le faire quant à ses intentions pour le dévoilement du programme qui doit être lancé prochainement en rapport avec la reforestation?

M. Duhaime: Ce que j'entends faire dans les semaines qui viennent, après Pâques, en tout cas, ce sera de me rendre dans chacune des grandes régions forestières du Québec et de donner tous les détails pour chacune des régions de même que les étapes, les budgets au niveau de chaque région et le calendrier d'intervention que nous entendons suivre pour l'application de ce programme de reboisement. Je ne sais pas si on va

commencer par la Côte-Nord, mais j'aurais le goût de commencer par la Mauricie pour une fois.

M. Fortier: Maintenant que le député de Duplessis a ouvert la porte, mon leader parlementaire m'a demandé de vous poser une question concernant la pépinière qui a existé pendant 30 ou 40 ans dans le comté de Bonaventure et qui a été fermée. Est-ce que ce plan va permettre la réouverture de la pépinière du comté de Bonaventure?

M. Duhaime: Ma réponse est non.

M. Fortier: C'est clair. J'ai terminé. Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Le programme 7 est-il adopté?

M. Duhaime: Je vous réponds non. Remarquez qu'il ne faut pas faire un lien avec mon collègue de l'Opposition libérale dans Bonaventure. S'il y avait un besoin réel de redémarrer ces installations, on le ferait, mais on n'en a vraiment pas besoin.

M. Fortier: Si j'ai bien compris, c'est que dans l'ensemble vous allez avoir des pépinières dans certains coins. Vous allez créer de nouvelles pépinières.

M. Duhaime: Non. M. Fortier: Non?

M. Duhaime: Le ministère de l'Énergie et des Ressources comme tel, avec les infrastructures qu'il a dans ses serres et pépinières, produit autour de 75 000 000 à 80 000 000 de plants par année. Il va prendre de l'expansion. Je donnais l'exemple de Berthier, ce matin. On va doubler la capacité de production des serres d'East-Angus, par exemple, et d'autres pour porter la capacité de production dans les installations du ministère à autour de 100 000 000 de plants par année. Le reste va être donné à contrat pour relever un certain défi en quelque sorte parce que, étant un social-démocrate, j'aime cela que l'entreprise privée soit envoyée au bâton de temps à autre, et on nous a dit que l'entreprise privée était prête à relever ce genre de défi. Je l'ai rencontrée. On a énormément de propositions qui viennent de chacune des régions. Je suis absolument convaincu que nos entrepreneurs au Québec, dans le domaine de la sylviculture, sont amplement capables, sur le plan financier et sur le plan technique, de relever ce défi. C'est pour cela qu'on a décidé de leur allouer 200 000 000 de plants, c'est-à-dire les deux tiers du programme.

Je voudrais vous donner une assurance également. Au cas où il y aurait des inquiétudes, parce que le député de Beauce-Sud semble traumatisé par les 300 000 000 de plants...

M. Fortier: Vous parlez des députés qui ne sont pas ici.

M. Duhaime: II devrait être là. Il n'est jamais au bon endroit quand on a besoin de lui. Nous produisons à East-Angus, actuellement, 14 000 000 de plants. 7 000 000 par production; on en fait deux par année. On va doubler. On peut monter facilement à 28 000 000. On pourrait tripler, on pourrait quadrupler. Les investissements sont quand même légers. On a toute la technique nécessaire. Ce que je veux faire c'est ne pas concentrer dans certains coins parce qu'on pourrait décider, à Berthier, par exemple, ou encore Saint-Jacques-des-Piles dans le comté de Laviolette, de produire en un seul endroit 50 000 000, 60 000 000 ou 70 000 000 de plants. Il n'y a aucun problème là-dessus sauf que je préférerais ventiler ces investissements pour que chacune des régions du Québec puisse en profiter parce qu'il y a un impact sur l'emploi qui est très important et aussi une économie d'échelle significative sur le plan du transport une fois que les plants sont prêts à aller en forêt.

M. Fortier: Juste un commentaire concernant le député de Beauce-Sud. Le ministre devrait savoir qu'il est président d'une commission parlementaire, qu'il n'est pas membre de cette commission-ci, malheureusement. Oui, il était présent hier. Quant à la confiance que le ministre semble avoir envers le secteur privé, cela fait plaisir que finalement il ait donné suite aux nombreuses représentations qu'on a faites dans le passé. Cela fait plaisir qu'on partage maintenant ce credo quant au secteur privé et qu'on le mette au défi de s'attaquer à de nouveaux défis. Je crois que le ministre va dans la bonne direction. On sera sur la même longueur d'onde.

M. Duhaime: Si vous venez de vous en rendre compte vous êtes en retard parce que j'ai toujours été dans cette direction, de même que notre gouvernement, depuis 1976.

M. Fortier: Cela ne paraît pas beaucoup dans le programme du Parti québécois, mais cela est une autre affaire.

Le Président (M. Lafrenière): J'appelle le programme 8.

M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Le programme 7 est adopté?

M. Fortier: Oui.

Le Président (M. Lafrenière): J'appelle le programme 8.

M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Programme 8, adopté.

Programme 9?

M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Programme 9, adopté. Programme 10?

M. Duhaime: Si vous me le permettez, M. le Président...

Le Président (M. Lafrenière): Oui.

M. Duhaime: Je m'étais engagé ce matin à déposer une grille...

Le Président (M. Lafrenière): À distribuer.

M. Duhaime: Je veux dire ici, en commission parlementaire, que je la dépose et on la remettra à mon collègue d'Outremont et aux collègues qui sont membres de cette commission.

Le Président (M. Lafrenière): On la fera distribuer à tous les membres de la commission.

M. Fortier: C'est juste un principe, M. le ministre. On ne peut pas déposer en commission; on ne peut que distribuer. Ce n'est que l'appellation.

M. Duhaime: Je voudrais que le monde entier sache que j'ai remis le document...

Le Président (M. Lafrenière): II le saura.

M. Duhaime: ...règlement sur les bois et les forêts, révisé le 8 avril 1983, qui comprend la grille tarifaire quant aux droits de coupe.

Le Président (M. Lafrenière): Question de règlement. M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Sur la question de règlement, je pense qu'avec notre nouveau règlement on peut déposer un document en commission parlementaire avec la permission du président.

M. Fortier: On n'en fera pas un débat.

M. Gagnon: C'est simplement pour être certain.

Le Président (M. Lafrenière): II peut faire le dépôt. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Fortier: Consentement.

Le Président (M. Lafrenière): J'appelle le programme 10.

Exploration géologique et minérale

M. Kehoe: Est-ce que le ministre a une déclaration ou des commentaires à faire?

M. Duhaime: Je n'ai pas de déclaration, je ne veux pas prendre de votre temps. Si vous voulez faire un discours inaugural à votre tour, c'est le temps.

M. Kehoe: Je n'y tiens pas. M. le Président, hier soir, en préparant les crédits du domaine des mines, j'ai regardé les commentaires du ministre l'an dernier. Les commentaires qu'on peut faire sont: plus ça change, plus c'est pareil. La situation qui prévaut cette année est à peu près la même que celle de l'an dernier. C'est la troisième année consécutive que la valeur des actions minières du Québec diminue par rapport à celle de l'année précédente. Si on prend les principaux minéraux de la province de Québec, soit le cuivre, l'amiante et le fer, dans chacun de ces cas, il y a eu une chute dans la quantité de production et la valeur. La chute est plus dramatique pour ce qui est du fer sur la Côte-Nord.

Je n'ai pas l'intention de faire une longue déclaration. J'ai plusieurs questions à poser au ministre relativement à ces trois secteurs, amiante, cuivre et fer. Dans le secteur de l'amiante, la situation est assez alarmante. Le nombre de chômeurs dans la région de Thetford-Mines, la région de la production d'amiante, continue d'augmenter. Il y a aussi la situation en ce qui concerne le cuivre dans la province de Québec, les mines de cuivre Gaspé. Dernièrement, on a injecté de l'argent par la compagnie Noranda et la province de Québec et cela a redressé la situation. Mais la situation dans ce domaine est encore très sombre.

Sommet sur le fer

J'aimerais poser des questions au ministre dans chacun de ces secteurs, mais surtout dans le secteur du fer. Comme vous le savez, M. le ministre, le 29 novembre 1983, nous avons eu une rencontre à Baie-Comeau à laquelle assistaient quatre ministres, des députés, les principaux intervenants de la Côte-Nord, soit les maires nordiques, les présidents des compagnies, des syndicats, enfin toutes les personnes intéressées au problème. Nous avons fait le tour des problèmes. Plusieurs comités avaient

été formés auparavant pour discuter des problèmes qui surgissent dans l'industrie du fer de la Côte-Nord. La réaction principale à cette conférence était une déception assez prononcée des intervenants vis-à-vis de l'inaction du ministre. À la fin de cette conférence, le ministre nous a assurés qu'au commencement du mois d'avril, cette année, un sommet sur cette affaire serait tenu ici à Québec. Depuis ce temps, on n'a pas entendu d'autres nouvelles du ministre.

La première question que je lui pose, c'est quand et s'il y aura un sommet sur l'affaire. Quel travail a été fait par son ministère depuis la conférence sur cette affaire, le 29 novembre, pour préparer non pas un plan de relance - la question d'un plan de relance sur la Côte-Nord est déjà oubliée - mais un plan de survie ou un plan de sauvetage? Est-ce qu'on aura un sommet sur cette affaire? Deuxièmement, le ministre a-t-il en main ou le ministère a-t-il commencé à préparer un plan de sauvetage dans le domaine du fer?

Le Président (M. Lafrenière): M. le ministre.

M. Duhaime: D'abord, M. le Président, je voudrais rectifier ce qui peut paraître scandaleux pour le député qui représente cette circonscription, mais la deuxième rencontre a eu lieu non pas à Baie-Comeau, mais à Port-Cartier.

M. Kehoe: Ah! Excusez-moi!

M. Duhaime: Nous envisagions de tenir une troisième table en avril. Je pense que nous ne sommes pas prêts à tenir cette troisième table en avril, non pas que le ministère de l'Énergie et des Ressources ne soit pas prêt, mais nous avons des partenaires qui sont les grandes entreprises, bien sûr, dans le dossier de la restructuration ou de la consolidation des activités d'extraction du minerai de fer. À l'heure où on se parle, IOC ne fait plus, au Québec, aucune extraction. Iron Ore prend son minerai au Labrador, utilise le chemin de fer et fait ses opérations de boulettage. Je voudrais corriger, M. le Président; IOC prend son minerai au Labrador et achemine par le chemin de fer son minerai au port de Sept-Îles qui est ensuite expédié pour être bouletté ailleurs. Québec Cartier a diminué considérablement sa production. C'est un secret de polichinelle que de dire que Québec Cartier, qui est également partie prenante jusqu'à un certain point dans le dossier de SIDBEC-Normines, n'est pas en mesure pour l'instant de prendre ou d'annoncer quelque décision que ce soit quant à son avenir immédiat. Le dossier est piloté par mon collègue, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, le dossier de

SIDBEC-Normines, et des discussions se font actuellement entre les trois partenaires-actionnaires de cette entreprise, c'est-à-dire SIDBEC, British Steel et US Steel. Il y a un peu d'activité qui vient des travaux de la mine de Wabush et de Québec Fer et Titane. (16 h 15)

Nous réunirons à nouveau, à la table de concertation sur le fer, les intervenants; cela comprend les compagnies, les syndicats, les élus municipaux. Le sentiment que j'ai eu à Port-Cartier et que j'ai depuis à travers les rencontres que j'ai eues moi-même avec les dirigeants des entreprises, avec le Syndicat des métallos sur ce dossier, dans les réunions et les discussions qu'ont régulièrement mes hauts fonctionnaires avec les intervenants, c'est qu'on est loin de faire quelque reproche que ce soit au ministère de l'Énergie et des Ressources. Au contraire. Nous n'avons aucun moyen d'intervention quant au prix du minerai de fer sur le marché international. Nous n'avons aucun moyen d'intervention sur le prix international des boulettes. Nous n'avons aucun moyen, si ce n'est de prier le bon Dieu, quant aux teneurs que les Brésiliens trouvent dans des mines à ciel ouvert dans leur région et qu'ils exportent de plus en plus ici. C'est évident que nous travaillons sur un plan de sauvetage et non pas sur un plan de relance. Je crois avoir utilisé l'expression moi-même. Je ne suis pas, non plus, convaincu que la prochaine réunion va se tenir publiquement. Nous avons eu un huis qui n'était que peu clos à Port-Cartier la dernière fois et je sais que les discussions qui se faisaient dans la salle de conférence étaient rapportées dans les médias d'information dans les secondes qui suivaient. Je ne pense pas que ce soit une bonne formule. Malheureusement, je dois dire qu'il y a quelques intervenants qui, en fin de journée, se sont servis de cette table pour tenter de faire du kilométrage ou du millage politique. J'ai eu l'occasion de le dire et je le répète ici: J'ai trouvé inappropriés à la fois le moment et le propos. Je ne pense pas qu'on ait beaucoup avancé et il n'y a pas de solution miracle dans ce dossier. On a travaillé avec les entreprises sur le volet énergie, entre autres. Il y a encore des discussions à avoir et je pense qu'on peut envisager très sérieusement ou bien d'avoir des rencontres qu'on fait pour l'instant privément, ou encore une réunion élargie qui pourrait avoir lieu, mais, cette fois, dans un vrai huis clos, mais j'ai mes doutes qu'on puisse réunir à nouveau cette table d'ici juin. Je pense que cela ira plutôt vers l'automne.

M. Kehoe: Vers le mois de...? M. Duhaime: Vers l'automne.

M. Kehoe: L'automne. Est-ce à la demande spécifique des autres intervenants

ou est-ce le gouvernement qui n'est pas prêt?

M. Duhaime: Je pense que ce serait assez facile pour moi de vous dire: Nous sommes prêts. Ce serait effectivement exact, mais, si nos partenaires ne le sont pas et s'il y a des discussions qui doivent se faire, je ne vois pas l'utilité de convoquer à nouveau le sommet sur le fer pour se faire dire: Nous attendons telle réponse de nos actionnaires ou on attend telle autre réponse d'un partenaire, ou encore on attend des études de faisabilité sur des projets d'investissement. Je n'ai pas demandé aux gens s'ils étaient prêts ou non. Je ne crois pas avoir besoin de le faire, mais je suis suffisamment au courant de ce dossier pour réaliser moi-même que nous ne sommes pas prêts comme groupe à nous réunir à nouveau.

M. Kehoe: M. le ministre, je n'ai pas la date exacte du mémoire que vous avez fait parvenir au Conseil des ministres. J'imagine que c'est au mois de... Vous faites allusion à la concertation du 29 novembre 1983. C'était, j'imagine, durant l'été 1983 que vous avez fait parvenir un mémoire au Conseil des ministres dans lequel vous dites, entre autres: "Le gouvernement du Québec a, par le passé, adopté une politique de non-implication directe vis-à-vis de ce secteur et laissé les entreprises porter le fardeau des infrastructures tout en rapportant d'importants revenus. Il ne peut maintenant rester indifférent à la menace qui plane sur ce secteur. Cependant, il ne peut agir seul. Il faut donc susciter un apport collectif des entreprises, des travailleurs et des différents paliers de gouvernement pour la relance de l'industrie. La table de concertation sur les mines de fer ayant été créée dans cette perspective, le comité ministériel considère que le gouvernement se doit d'agir rapidement dans ce dossier avant qu'il soit trop tard." Cela a été écrit au cours de l'été 1983. On est maintenant au mois d'avril 1984. À la fin de cette table de concertation, le 29 novembre dernier, sans doute que vous aviez en main les renseignements nécessaires pour avoir une idée sur où vous allez dans ce dossier. Vous mentionnez dans votre mémoire au Conseil des ministres que vous devrez procéder rapidement au cours de l'été 1983. Vous annoncez en conférence, à la suite de la table de concertation au mois de novembre, que vous allez avoir un sommet au mois d'avril. Là, vous nous dites que ce sera peut-être à l'automne.

Dans les circonstances et compte tenu de la gravité de la situation qui persiste sur toute la Côte-Nord, la menace de fermer la ville de Gagnon, la fermeture de Schefferville alors que d'autres villes attendent une action concrète et définitive de votre gouvernement, pensez-vous que c'est une réponse que les gens de la Côte-Nord peuvent accepter de votre gouvernement? Vous pourriez dire tout simplement que vous n'êtes pas prêts. Peut-être aussi qu'à l'automne prochain vous direz la même chose et retarderez davantage votre plan de relance ou de survie.

Ce à quoi je veux en venir, c'est: qu'est-ce que votre ministère va faire? Quel est le plan? Est-ce que vous allez annoncer seulement au sommet le fait que vous allez proposer de reporter ce plan encore une fois à l'automne prochain?

M. Duhaime: Je pense qu'on va vous inviter à la prochaine réunion qu'on tiendra, M. le député. Ce n'est pas le ministère de l'Énergie et des Ressources qui va établir quelle va être la stratégie de Iron Ore Corporation. Ce n'est pas le ministère de l'Énergie et des Ressources qui va imposer une ligne de conduite à Quebec Cartier Mining, ni aux partenaires de SIDBEC, dans le consortium SIDBEC-Normines. Je verrais mal le ministère de l'Énergie écrire au président de US Steel pour lui passer des commandes ou encore au président de British Steel. Même chose pour la mine Wabush et même chose pour Québec Fer et Titane. Il y a l'entreprise privée que vous devriez respecter, j'imagine, dans ses décisions.

Ce que nous faisons, c'est de soutenir l'effort que déploient actuellement ces entreprises pour traverser une période extrêmement difficile. Nous avons évoqué la possibilité d'une intervention sur le plan des infrastructures de transport. Il y a une étude en marche au ministère des Transports qui est passablement avancée. Mais, si le résultat net est une facture de 200 000 000 $ ou de 300 000 000 $, je ne crois pas qu'on l'enverra au Parti libéral du Québec. On va voir comment on va être capable de financer cela avec les entreprises.

Il y a aussi tout l'aspect de la fiscalité municipale dans cette région nordique, qui est un bloc très important. Il y a toute la problématique de la tarification hydroélectrique. Il y a aussi des avenues nouvelles. Par exemple, je crois qu'on devrait aller de l'avant dans cette direction de l'utilisation de l'arc au plasma comme procédé à être utilisé dans les mines plutôt que de continuer d'importer du mazout. On pourrait, plutôt que de brûler du mazout, utiliser davantage l'hydroélectricité.

Vous étiez vous-même à Port-Cartier lorsque, je crois, les dirigeants d'IOC ont indiqué leur grand intérêt pour cette filière technologique de même que les dirigeants de Normines, depuis, qui nous ont donné des indications. Ce n'est pas quelque chose qui va se régler dans une fin de semaine. Je pense que vous le comprenez parfaitement bien.

À moins que vous ne me suggériez qu'on achète toutes ces entreprises et qu'on forme une autre société d'État pour en prendre charge.

M. Kehoe: Pas une autre, non, non.

M. Duhaime: Mais je ne pense pas que ce soit là votre propos. La limite de l'intervention du gouvernement du Québec dans ce dossier est restreinte. C'est une intervention d'appoint, c'est une intervention pour aider. Dans notre approche comme gouvernement, nous ne voulons pas nous substituer à l'entreprise privée mais plutôt l'aider, quand cela va bien aussi bien que lorsque cela va mal. J'espérerais que dans les mois qui viennent, on puisse établir une stratégie d'intervention; on va faire notre part du chemin, mais cela va se faire donnant-donnant. Je ne vois pas pourquoi ou encore comment ce ne serait pas une intervention - cela se traduit toujours en dollars en bout de piste - qui commanderait aussi une mise à contribution des actionnaires et des entreprises qui sont concernées.

M. Kehoe: M. le ministre, il est bien évident que vous n'avez pas de contrôle sur les compagnies privées, comme vous l'avez mentionné. Il y a bien d'autres facteurs que vous avez mentionnés, et cela se fera à long terme, c'est bien évident. Une des recommandations que vous avez faites dans votre rapport au Conseil des ministres se lit comme suit. Je vais en lire une partie: "Que le Conseil des ministres accepte de considérer des mesures temporaires de relance compatibles avec la stratégie développée dans le présent mémoire et dont le coût n'excéderait pas 200 000 000 $ sur une période de cinq ans."

C'est une recommandation que vous avez faite au Conseil des ministres il y a un an ou un an et demi. Est-ce qu'il y a eu une réaction? Y a-t-il eu des démarches concrètes à la suite de votre recommandation? Quelle a été la réaction du Conseil des ministres? Est-ce qu'il a refusé votre recommandation? Y a-t-il eu des développements en ce qui concerne les autres recommandations que vous avez faites?

M. Duhaime: Je ne sais pas si vous avez en main l'annexe à ce mémoire qui donnait une ventilation de ce montant; si vous l'avez en main, puisque vous m'avez l'air d'être assez bien équipé...

M. Kehoe: On est toujours prêt, nous, du Parti libéral.

M. Duhaime: Pardon?

M. Kehoe: On est prêt à toute éventualité, nous, du Parti libéral. J'ai tout cela en main, oui.

M. Duhaime: Bon. Je trouve que vous faites un excellent travail dans l'Opposition; on va vous souhaiter longue vie à votre siège.

M. Kehoe: Cela ne sera pas long, le temps passe vite.

M. Duhaime: Nous avons chiffré à l'époque à peu près 40 000 000 $ par année, cinq fois. Cela comprend l'ensemble de l'intervention. Le scénario que vous avez en main était basé sur la problématique suivante: on a évalué que pour maintenir notre industrie du fer il fallait réduire le coût à la tonne d'au moins 7 $. Il fallait, bien sûr, que chaque partie prenante dans ce dossier en assume une part, ce qui veut dire les entreprises, le gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral et les travailleurs. Ces 200 000 000 $ qu'on évoquait dans le mémoire de l'an dernier est une évaluation sommaire, bien sûr, mais qui donne quand même un ordre de grandeur sur l'importance de l'intervention à être faite, et cela comprend tous les coûts. Cela assume qu'il va y avoir des révisions de la fiscalité minière ou, devrais-je dire, municipale, l'amélioration des coûts sur le réseau du transport, du coût de transport du site d'expédition sur la voie maritime jusqu'aux Grands Lacs; cela assume également le voleténergétique, pour autant qu'Hydro-Québec est concernée.

Enfin, vous avez l'ensemble et c'est toujours sur ce scénario que nous nous travaillons à l'heure actuelle. Il y a eu deux ou trois interventions qui ont été faites dans de la renégociation de contrats d'approvisionnement en énergie hydroélectrique avec, entre autres, Québec Fer et Titane et avec Québec Cartier. J'ai indiqué tantôt ce que nous étions en train de faire sur le plan du transport et je sais qu'au ministère des Affaires municipales, de même qu'au ministère des Finances il y a des évaluations qui se font sur le plan de la fiscalité. (16 h 30)

M. Kehoe: Vous avez fait une troisième recommandation à savoir que le président du comité ministériel sur les mines de fer, avec le soutien technique du ministre des Affaires intergouvernementales, sollicite la participation du gouvernement fédéral à cet effort de relance.

Comme vous le savez, M. le ministre, lors d'une conférence sur le fer le 29 novembre dernier, il n'y avait aucun représentant du gouvernement fédéral présent. Je pense que cela a été remarqué par plusieurs intervenants; les maires, les présidents de compagnie et d'autres

intervenants l'ont remarqué. Dans votre recommandation, vous dites que cela prend une participation soutenue du gouvernement fédéral avec le gouvernement provincial pour régler le problème. Depuis le mois de novembre, depuis que vous avez écrit ce rapport, est-ce qu'il y a eu effectivement des négociations, des approches ou des travaux avec le gouvernement fédéral pour en venir à un plan de sauvetage, un plan de survie ou un plan quelconque pour la Côte-Nord?

M. Duhaime: Nous avons mis en route huit comités techniques qui travaillent sur chacune des facettes ou sur chacun des volets du dossier du minerai de fer. Le gouvernement fédéral était représenté à chacun de ces comités techniques. Chaque fois qu'il y a besoin d'une rencontre avec les fonctionnaires du ministère de l'Énergie et des Mines à Ottawa, les rencontres sont faites. Je ne sais pas s'il y a des rencontres entre les autorités fédérales et les entreprises comme telles, mais je me risquerais à répondre oui parce que des dirigeants de ces entreprises m'ont dit qu'ils avaient vu les autorités politiques du gouvernement fédéral. Nous travaillons avec les dirigeants des entreprises, les représentants des travailleurs, les maires et les représentants de la région. Lorsque nous serons prêts sur un scénario d'intervention à la suite des travaux des comités techniques, le dossier sera porté à l'attention des ministres fédéraux - parce qu'il y en aura plusieurs - en tenant pour acquis que dans l'intervalle les fonctionnaires fédéraux qui siègent à ces comités techniques acheminent l'information à l'intérieur de leur propre machine.

M. Kehoe: Jusqu'à maintenant, est-ce qu'il y a eu une coopération financière autre que technique par les représentants du gouvernement fédéral? Est-ce que des montants ont été mis sur la table par le gouvernement fédéral pour aider dans cette situation?

M. Duhaime: Je répondrais par l'affirmative. Sur le plan technique, oui, on n'a aucun problème. La collaboration et la coopération existent. Le volet financier n'a pas encore été ouvert dans les discussions. Je me souviens qu'il y avait eu, il y a un an ou deux, un colloque sur les mines de fer à Sept-Îles, où le ministre d'État aux Mines à Ottawa, Mme Judy Erola, avait eu l'occasion d'assister à l'intervention du vice-président d'IOC, qui était M. Dick Gerren, qui connaît très bien la Côte-Nord pour y avoir passé à peu près toute sa vie. Si vous voulez le texte de son intervention, je pourrais vous le faire parvenir, mais cela voulait dire, de la part de Dick Gerren, au ministre fédéral des

Mines: Non seulement vous n'avez jamais rien fait pour aider les entreprises minières du Québec oeuvrant dans le fer, mais je me demande même si vous êtes au courant qu'il existe des mines de fer au Québec.

Je dois dire que nous attendons du gouvernement fédéral une participation, principalement sur la question d'un ajustement des coûts de transport sur la voie maritime et sur les Grands Lacs, de même qu'une contribution financière si jamais nous décidons, de concert avec les entreprises, d'intervenir au niveau des infrastructures du chemin de fer. Il y a, bien sûr, des projets qui existent, qui sont en carnet, qui ne sont pas suffisamment avancés pour qu'on puisse en faire état. Ces projets pourraient faire l'objet d'ententes spécifiques de soutien ou de subvention de la part des deux gouvernements. Nous le faisons déjà dans le cadre d'un programme d'accélération des investissements pour lequel, dans le secteur minier, jusqu'à présent, nous avons engagé entre 85 000 000 $ et 90 000 000 $ en subventions, pour permettre l'annonce et la réalisation d'investissements qui, aujourd'hui, sont de l'ordre d'environ 370 000 000 $ depuis le début du programme. Ces investissements n'ont pas été faits dans le secteur du fer. Il y en a eu, cependant, dans le secteur du cuivre - vous l'avez vous-même indiqué tantôt - dans Mines de cuivre Gaspé. Il y a eu le secteur du zinc, celui de l'or et on a eu le démarrage d'une première mine d'argent au Québec. Nous sommes très intéressés à maintenir le programme d'accélération des investissements dans le secteur minier et, s'il y avait une participation fédérale dans ce domaine, elle serait très bienvenue.

M. Kehoe: Actuellement, M. le ministre, c'est bien évident qu'il y a une relation spéciale entre la province de Québec et la France, surtout depuis la signature des contrats pour l'usine de Pechiney et les micro-ordinateurs, ainsi que d'autres échanges, différentes ventes d'articles. C'est surtout le Québec qui, à cause de ses relations, j'imagine, achète beaucoup plus que ce qu'il vend à la France. La question que je pose est la suivante: Est-ce qu'il y a des négociations actuellement avec la France pour la vente du fer ou de l'acier provenant de la Côte-Nord?

M. Duhaime: II n'y en a aucune et je n'oserais pas leur proposer l'ouverture d'un pareil dossier. Si vous êtes au courant du plan acier que propose le gouvernement français à la région de la Lorraine, entre autres, ils ont les mêmes problèmes que nous connaissons ici, c'est-à-dire qu'ils encaissent une réduction de la consommation d'acier dans le monde occidental. Le plan acier, en France, implique la perte de 20 000 emplois

dans l'industrie de l'acier, ce qui veut dire que l'effet devrait se faire sentir aussi dans les mines. Je pense que ce ne serait pas vraiment le moment. On va plutôt attendre s'ils ont vraiment besoin de minerai de fer. Je pense qu'il sont au courant qu'on en a beaucoup.

M. Kehoe: En ce qui concerne les relations avec le Japon, je pense qu'il existe un contrat entre Iron Ore et le Japon pour la vente d'une certaine quantité de fer jusqu'en 1986-1987. Encore là, est-ce qu'il y a des négociations? Est-ce que le Québec et/ou le fédéral est impliqué dans les négociations avec le Japon pour l'achat de fer ou d'acier provenant de la Côte-Nord?

M. Duhaime: Non. Nous ne sommes pas impliqués directement dans ces relations d'affaires. La seule chose que je peux confirmer, c'est qu'il y a eu, traditionnellement, de petites expéditions de minerai de fer vers le Japon. Mon souvenir, quand j'avais à m'occuper de SIDBEC, c'est qu'il y a peut-être eu des ventes d'acier au Japon, déjà, mais j'avoue que c'est un très vague souvenir. Je ne pourrais même pas vous le confirmer. Les Japonais sont en excédent sur leur propre marché et ils sont devenus exportateurs.

M. Kehoe: Concernant l'amiante, pourriez-vous nous dire quelles sont les actions prises concrètement par le gouvernement de la province de Québec au cours de l'année 1983-1984 pour venir en aide à l'industrie de l'amiante?

M. Duhaime: Je vais vous donner les chiffres pour 1982 et 1983 et les prévisions pour 1984. Le total des expéditions pour tout le secteur de l'amiante incluant la SNA et les compagnies privées, en 1982, c'était 748 000 tonnes pour une valeur de 300 000 000 $. Pour 1983, les chiffres que j'ai ici sont des chiffres estimés tirés des documents qui ont été présentés en janvier 1984 à la conférence annuelle sur l'état de l'économie. En 1983, 717 000 tonnes pour une valeur de 325 000 000 $. Les prévisions fin 1983 pour 1984 étaient des volumes de production constants pour 1984 et depuis cela a été révisé à la baisse dans les deux mines de la SNA, c'est-à-dire Bell et la Société Asbestos. La part de la SNA pour ce qui est de sa production minière, 1982-1983 - une seconde - les chiffres que j'ai ici ne portent pas sur les volumes de production, mais sur la valeur des expéditions. Prévisions pour 1982-1983, Bell et Asbestos ensemble: 130 000 000 $. Pour 1983-1984: 131 000 000 $. Prévisions pour 1984-1985: 140 000 000 $. Cela vous donne une idée en même temps de la part de la SNA dans le total des expéditions.

Maintenant, pour ce qui est des investissements projetés par la Société nationale de l'amiante, aussi bien dans les mines que dans l'industrie en aval dans ses filiales, je vais vous donner le budget 1982-1983. Cela comprend des investissements dans les mines, les usines de production de papier d'amiante, fil et matériaux de construction, amiante-ciment, oxyde de magnésium, nouveaux produits et l'usine de production de laine de roche; 1982-1983: 18 400 000 $; 1983-1984: 17 800 000 $; 1984-1985: 15 700 000 $. Nous avons également aidé une entreprise par une subvention dans le cadre du programme d'accélération, la mine Carey Canada, un investissement de 2 250 000 $ l'année dernière. À la mine Bell, pour sa part, à l'intérieur du programme d'accélération des investissements, nous allons verser environ 20% en subventions sur un investissement de 13 900 000 $ pour les années 1983-1984 et 1984-1985. (16 h 45)

M. Kehoe: La perte d'Asbestos Ltée au cours de l'année 1983, si je ne me trompe, était d'environ 20 000 000 $. Prévoyez-vous une meilleure année en 1984?

M. Duhaime: Voulez-vous répéter votre chiffre? Est-ce que vous avez parlé de la SNA ou de l'Asbestos Ltée?

M. Kehoe: Asbestos Corporation. 20 400 000 $.

M. Duhaime: Pour la Société Asbestos Ltée, pour 1982-1983, au compte de fonctionnement, la perte est de 31 000 000 $. On prévoit, en 1983-1984, de ramener le déficit à 26 000 000 $. Il devrait aussi diminuer en 1984-1985, selon l'exercice comptable qui sera fait quant aux amortissements.

M. Kehoe: Une dernière question en ce qui concerne l'industrie du cuivre. Le ministère de l'Énergie et des Ressources investira au cours des prochaines années une somme d'environ 13 000 000 $ dans les Mines de cuivre Gaspé. Cela était conditionnel à ce que la compagnie Noranda elle-même investisse un montant de 32 000 000 $. Il y avait trois conditions; une des conditions concernait l'environnement, soit la pollution dans la rivière York. Pourriez-vous expliquer comment votre ministère en est venu à une entente avec la compagnie Noranda sur la question de la pollution dans la rivière York?

M. Duhaime: L'investissement global que Les mines Gaspé veut faire dans leur programme sous la ville Murdochville est de 72 000 000 $ de 1984 jusqu'à l'exercice financier 1987-1988. Ce n'est pas une

subvention que nous versons aux Mines Gaspé; c'est un prêt dont le remboursement est assujetti à certaines conditions qui, si elles sont remplies, permettent d'effacer la dette de Mines Gaspé envers le gouvernement.

Pour ce qui est de la rivière York qui reçoit les eaux de l'étang de polissage de Mines Gaspé, une entente a été signée entre le ministère de l'Environnement du Québec, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le ministère de l'Énergie et des Ressources et Mines Gaspé. Cette entente dit que, du 1er janvier 1984 au 31 décembre 1988, la norme retenue est de 150 microgrammes par litre de cuivre à la sortie de l'étang. L'engagement de la compagnie est de poursuivre ses programmes d'assainissement, tout en donnant considération aux suggestions qui pourraient être faites par le ministère de l'Environnement et par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche au cours de la poursuite de ces programmes d'assainissement, de mesurer les effets de ces programmes et d'en faire rapport chaque année au ministère de l'Environnement. C'est la deuxième condition. La troisième condition est qu'au 1er janvier 1989 la norme soit ramenée de 150 microgrammes à 100 microgrammes par livre de cuivre à moins que les résultats reliés au programme d'assainissement aient démontré que cette norme est irréalisable ou qu'elle n'a pas d'impact significatif sur le milieu biologique. C'est cette entente qui nous gouverne. En revenant à 100 microgrammes par livre de cuivre, on revient à la norme qui avait toujours existé auparavant, ce qui a fait l'objet de longs et fructueux échanges entre trois ministères du gouvernement et Mines Gaspé pour en arriver à signer cette entente le 13 janvier 1984.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Seulement une question se rapportant à la fosse du Labrador. Le ministre pourrait-il nous dire combien du budget qui avait été adopté pour l'année financière 1983-1984 a été dépensé dans la fosse du Labrador? Y a-t-il eu des crédits additionnels qui ont été permis par le Conseil du trésor? Depuis, quelles sont les prévisions pour l'année financière 1984-1985 se rapportant à la fosse elle-même? La dernière - pour en faire une quatrième - quels sont les endroits où on va se diriger principalement, dans la fosse du Labrador, quant aux recherches minérales?

M. Duhaime: L'année dernière, nous avons augmenté considérablement les crédits affectés à l'exploration de la fosse du Labrador. Les crédits étaient de 2 636 000 $, en chiffres arrondis. Nous n'avons eu, à ce poste, aucun crédit périmé. Tout a été dépensé. Cette année, nous augmentons de 35% les crédits affectés à l'exploration dans la fosse du Labrador pour porter le total à 3 572 000 $. Vous voulez avoir l'information quant aux lieux géographiques?

M. Perron: Si possible.

M. Duhaime: Si vous nous promettez de ne déposer aucun claim, on va vous donner cette information avec grand plaisir.

M. Perron: Non, on va laisser faire les jalonnements, M. le Président.

M. Duhaime: En géophysique, Schefferville et les alentours: 241 000 $; au nord-est de Schefferville: 185 000 $; sur la Basse-Côte-Nord, Johan-Beetz: 263 000 $ et Kenoniska: 243 000 $. En géologie, on va vous donner le détail aussi. On consacre 55 000 $ à la supervision de ces travaux en géologie; 481 000 $ à Cap Smith à l'extrême nord; rivière Georges: 558 000 $; lac Barrin: 54 000 $; Escoumins-Forestville: 39 800 $; lac Gérido: 20 000 $. Le gisement de manganèse à Schefferville: 46 000 $. Dans le nord de Schefferville encore, autour du lac Bertin: 170 000 $; lac Musset: 20 000 $; Grandes-Bergeronnes: 46 000 $; lac Romanet: 38 000 $ arrondis; lac Aulneau: 31 800 $ et lac La Lande: 69 600 $.

M. Perron: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le ministre, sans aller dans les détails, sans nous dévoiler tous les secrets des négociations avec Terre-Neuve et sans toucher au côté de l'énergie pour le moment, avez-vous discuté, dans vos négociations, d'une possibilité de collaboration dans le développement du secteur minier avec Terre-Neuve?

M. Duhaime: Jamais.

M. Fortier: À la page 35...

M. Duhaime: Pas jamais dans un sens futur...

M. Fortier: Non, cela me satisfait.

M. Duhaime: ...mais jamais jusqu'à présent.

Développement du Grand-Nord québécois

M. Fortier: Oui, merci. À la page 35 de votre document que nous avons, je lis ici:

"De plus, la cessation des activités minières à Schefferville, limite septentrionale de l'accès ferroviaire, risque de compromettre le prolongement de cet axe de développement pour les ressources nordiques." Lorsque nous étions à Schefferville, plusieurs intervenants avaient évoqué ce danger, à savoir que la poursuite des activités en ce qui touche le Nord québécois soit mise de côté. En particulier, il y avait des représentants de la SDBJ qui avaient évoqué qu'ils pourraient certainement contribuer au développement du Grand-Nord québécois. L'an dernier, lors de l'étude des crédits, le ministre, après une étude très approfondie -et je pourrais le citer au mot - nous avait dit: Non, la SDBJ, c'est terminé. C'est clos. C'est définitif. J'imagine que par la suite il y a d'autres gens que le ministre qui ont étudié le dossier, parce que maintenant on voit que le SAGMAI s'intéresse à la SDBJ et qu'il y a une possibilité de sauver la SDBJ. Dernièrement, d'ailleurs, à Sept-Îles, je crois, il y avait - je ne peux pas dire un sommet - une rencontre de l'OPDQ sur la meilleure façon pour le gouvernement d'assurer la survie ou le développement du Grand-Nord québécois. Cela me fait plaisir que, finalement, le gouvernement trouve qu'on doit se préoccuper du développement du Grand-Nord québécois. Le ministre peut-il nous dire en ce qui concerne la SDBJ, en particulier, s'il y a une possibilité d'utiliser cet organisme pour assurer le développement du Grand-Nord québécois? En ce qui a trait au domaine minier ou d'autres secteurs, en ce qui concerne ce secteur-là, la SDBJ, malgré ce que le ministre nous avait dit l'an dernier, aura-t-elle encore un rôle à jouer ou est-ce que le rôle que l'on réserve à la SDBJ est tout à fait différent?

M. Duhaime: Pour faire une longue histoire courte, je dirais que le gouvernement n'a pas changé son point de vue là-dessus. Nous avons procédé à un certain nombre d'interventions dans la SDBJ et nous avons à peu près terminé le transfert des activités minières de la SDBJ sur SOQUEM pour ce qui peut en rester, maintenant que Joe Mann a été réglé avec le groupe Meston et qu'il y a reprise des travaux à Joe Mann tout près de Chibougamau. On va procéder très bientôt, si ce n'est en voie de se faire, au pompage de l'eau dans la mine et le nouveau groupe minier va investir 5 000 000 $ dans le redémarrage de cette mine. La SDBJ, comme corporation, y détient toujours des intérêts en échange de sa participation; je crois que c'est 1 000 000 d'actions dans Meston, plus une redevance, et ces actifs vont être transférés en cours d'année à SOQUEM.

M. Fortier: De quelle façon le litige dans ce projet a-t-il été réglé? A-t-il été réglé hors cour?

M. Duhaime: II a été réglé hors cour, mais je n'ai pas les détails de ce règlement. Je ne suis pas intervenu non plus. J'ai laissé... (17 heures)

M. Fortier: Vous l'avez appris depuis votre commission parlementaire.

M. Duhaime: J'ai laissé la SDBJ... Quand je dis que je ne suis pas intervenu, il faut faire attention. J'ai suivi le dossier de très près. J'ajouterais que les activités forestières de la SDBJ sont en voie d'être transférées à la société d'État REXFOR, de sorte qu'il ne restera à la SDBJ qu'une armature juridique qui va nous servir de coquille en quelque sorte pour l'exécution de nos engagements en vertu de la Convention de la Baie James.

Toute la problématique de présence et de développement du Nord fait l'objet d'une analyse que mène mon collègue, le ministre de l'Aménagement et du Développement régional, en étroite collaboration avec le SAGMAI. Là-dessus, nous n'avons pas pris de décision mais, si vous voulez mon sentiment, c'est très peu probable que la SDBJ reprenne un mandat de développement.

La deuxième chose que je voudrais dire est que je sais qu'à Schefferville des cadres de la SDBJ, payés aux frais de la SDBJ, avec l'autorisation tacite, semble-t-il, de leur président à l'époque, sont venus offrir publiquement leurs services pour s'occuper de Schefferville. Nous avons décliné cette offre. Quant à moi, la SDBJ, dans les activités minières ou forestières dans cette partie du territoire, a rempli sa mission.

M. Fortier: Je comprends, M. le ministre, que la SDBJ, étant dégagée du genre de responsabilités qui sont celles du ministre, actuellement, relève toujours du ministre mais que dans un avenir prochain elle va relever de quelqu'un d'autre.

M. Duhaime: C'est fort possible, oui. Parce que ce genre de structures, comme la Société de développement de la Baie James, si vous demandez à M. Bourassa les vraies raisons de sa création ou de sa mise au monde, il pourra vous donner plus de détails. Mais nous n'avons aucune intention de donner un nouveau mandat de développement à cette société. Je pense que dans les mois qui viennent, au Conseil des ministres, nous aurons à trancher cette question. Il est fort possible que la structure juridique de la SDBJ soit maintenue et confiée à un autre ministère.

M. Fortier: Oui, parce que dans l'article du Devoir, le samedi 24 mars, on fait état du fait que c'est pour collaborer au

développement qui se fera conjointement avec les autochtones. J'imagine que le changement d'orientation se fera dans ce sens.

M. Duhaime: Cela n'exclura pas, cependant, de continuer les excellentes relations d'Hydro-Québec et de la SEBJ avec une instance comme la SDBJ ou tout autre organisme municipal ou autres qui prendrait la relève. Du point de vue de notre ministère, nous disons qu'il est beaucoup plus efficace, non pas de doubler les appareils administratifs, mais de travailler dans le secteur minier et dans le secteur forestier à partir des infrastructures que nous avons déjà, c'est-à-dire SOQUEM et REXFOR.

La SNA

M. Fortier: J'aimerais revenir brièvement sur le sujet que mon collègue avait abordé quand il parlait de la Société Asbestos Ltée. On voit que, en 1981, il y avait une perte avant impôts de 6 500 000 $; en 1982, de 26 700 000 $; en 1983, de 31 800 000 $. J'imagine que tout cela doit avoir un effet sur le fonds de roulement. Effectivement, dans le rapport financier de 1982, on voit que le fonds de roulement est passé de 63 000 000 $ à 35 000 000 $ et j'imagine que cette année, après la perte de l'an dernier, le fonds de roulement doit être pas mal bas. J'imagine que la Société Asbestos doit avoir besoin d'un fonds de roulement pour maintenir ses activités. De quelle façon la Société Asbestos va-t-elle respecter ses obligations pour avoir un fonds de roulement raisonnable? Est-ce que ceci va demander que la Société nationale de l'amiante et, indirectement, le gouvernement du Québec soient dans l'obligation de garantir ou d'avancer des fonds pour s'assurer que la Société Asbestos ait le fonds de roulement qui lui est nécessaire?

M. Duhaime: Pour 1983, la SNA a refait un financement à long terme sur une dette à court terme et nous n'avons pas eu à avancer d'autres capitaux dans la SNA pour la Société Asbestos. Le plan des activités de la Société Asbestos est actuellement en révision à la Société nationale de l'amiante à cause d'une chute des estimations de vente prévues pour 1984, mais il est à peu près certain que nous aurons besoin d'intervenir quand même auprès de la Société nationale de l'amiante pour aider l'une des entreprises du groupe, c'est-à-dire Atlas Turner.

M. Fortier: L'automne dernier, le ministre était intervenu en promettant que les mines de Thetford Mines seraient ouvertes. Dernièrement, nous avons appris que la mine BC-II ne sera ouverte que dix semaines; à la mine BC-I, il n'y a que la moitié des employés qui travaillent. Je crois que c'est tout récemment, le mois dernier, que la Société nationale de l'amiante a fait part de ses plans en ce qui concerne l'ouverture de la mine BC-II comme telle. J'imagine que, s'il y a une telle différence entre les plans de l'automne et ceux du mois de février, c'est que les prévisions de vente ont dû chuter énormément.

Autrement dit, en quelques mois, il y a eu un changement radical des activités et ce, malgré le fait que le ministre soit intervenu pour fermer Asbestos Hill afin de donner du travail en bas, comme on le dit. Donc, en quelques mois, la situation s'est dégradée; est-ce que cela signifie que la situation est beaucoup plus pénible maintenant qu'elle ne l'était, disons, au mois d'octobre dernier?

M. Duhaime: Plus pénible, oui. Nous avons pris la décision de cesser les activités d'extraction de la fibre à Asbestos Hill l'année dernière. La production d'Asbestos Hill a été ramenée à Thetford-Mines, ce qui, normalement, devait nous permettre de redonner de l'emploi à l'ensemble des travailleurs, autant ceux de Bell que ceux d'Asbestos.

Pendant que nous avons procédé à la fermeture des activités d'Asbestos Hill, dans l'extrême nord du Québec, une nouvelle mine d'amiante est apparue à la surface canadienne, à Terre-Neuve, à Baie Verte. Elle est subventionnée à tours de bras par le gouvernement fédéral et elle vend de la fibre à un prix de dumping sur les marchés internationaux. Je le dis en commission parlementaire; je ne crains pas de le dire ici parce qu'on est capable de le prouver. Cela a fait perdre à la compagnie Asbestos, de Thetford, un très important contrat aux Indes, entre autres. J'ai communiqué avec M. Lumley à ce sujet et il m'a dit qu'il y verrait; alors, j'imagine qu'il est en train d'y voir. Cela fait déjà plusieurs mois.

M. Fortier: Est-ce qu'on peut conclure de cette expérience que dorénavant il serait préférable qu'aucun niveau de gouvernement ne s'implique dans des situations comme celle-là car cela fausse sûrement beaucoup l'économie internationale et qu'on ne peut rien y faire? Cela fausse l'économie et cela fausse les données autant auprès du gouvernement fédéral que du gouvernement provincial. On a créé cette situation et on ne s'en rend compte que maintenant, seulement deux ou trois ans après que le gouvernement provincial eut décidé d'acheter Asbestos Corporation.

Je dois admettre que c'est maintenant facile de le dire, mais ma formation politique avait suggéré au gouvernement

d'utiliser l'argent disponible pour la recherche et le développement. Dans la mesure où la Société nationale de l'amiante, dans le cadre de nouveaux projets, fait de la recherche pour trouver de nouvelles utilisations de l'amiante, utilise l'argent des contribuables pour faire du marketing ou pour inciter les pays étrangers à ne pas créer de moratoire contre l'amiante, dans cette mesure, nous sommes complètement d'accord. Mais il est bien évident maintenant, et c'est malheureux que cela arrive ainsi, parce que ce sont les gens de Thetford-Mines qui en souffrent, que cet achat n'a absolument rien réglé. À ce sujet, j'aimerais demander au ministre s'il y avait, dans son option d'achat d'Asbestos Corporation, une clause qui prévoyait que, si la compagnie faisait des pertes, le prix d'achat pourrait être ajusté en conséquence?

M. Duhaime: Non, je n'ai pas souvenir qu'il y ait pareille clause. La transaction est ferme, le financement a été fait. Je n'ai pas en tête les détails sur les taux d'intérêt que nous nous sommes engagés à payer mais il n'y a aucune clause qui pourrait aller vers le haut ou vers le bas, dépendant de la performance de l'entreprise. J'ajouterais cependant que je ne suis pas du tout d'accord avec votre façon de voir les choses. Je pense que, dans ce dossier-là comme dans d'autres, une intervention d'une société d'État, si elle est faite suivant les règles normales de concurrence, pourrait être et a été très bienvenue. Il y aurait gros à parier que, sans l'intervention de la Société nationale de l'amiante, il y aurait eu des fermetures complètes de mines dans l'amiante dans la région de Thetford. Nous aurions à vivre aujourd'hui une situation beaucoup plus dramatique.

J'ajoute que nous avons fait, depuis l'acquisition de ces deux mines, un effort considérable dans la recherche et le développement. Le total cumulatif est de l'ordre de 10 000 000 $ ou 12 000 000 $ maintenant, depuis que nous sommes élus. J'ajouterais aussi que des filiales en aval ont été mises au monde par la Société nationale de l'amiante. Nous conduisons actuellement des recherches plus que prometteuses sur le plan de la sécurité et de la santé. Il y a également des projets de technologie nouvelle, entre autres le projet de magnésium métal, qui pourraient faire en sorte que ce que nous perdons en amont, c'est-à-dire dans l'extraction de la fibre, nous pourrions le gagner avec profit en aval.

Nous pourrions très bien décider de faire tourner à pleine capacité les mines qui appartiennent à la Société nationale de l'amiante et vendre à des prix de dumping. Je vous donne l'assurance que tous ceux du secteur privé pourraient disparaître rapidement.

Nous n'avons pas l'intention d'aller dans cette direction. Nous avons toujours maintenu l'attitude de respecter très correctement le jeu des forces du marché et de la libre concurrence. Ce serait vraiment déloyal de demander à Bell ou à la Société Asbestos d'aller sur les marchés internationaux et déplacer des concurrents à des prix de dumping. Je pense qu'à long terme tout le monde y perdrait.

M. Fortier: Dans cette optique d'avoir des sociétés d'État qui travaillent de la même façon que dans le secteur privé, est-ce que le ministre peut me dire quelle raison on donne à certaines sociétés d'État... Si ma mémoire est fidèle, on a donné à la Société nationale de l'amiante, dans son incorporation, la caractéristique d'être un mandataire de la couronne. On connaît tous les avantages pour ceux qui sont "mandataires de la couronne", entre guillemets: non-respect des brevets, non-saisie des actifs en cas de poursuite, un tas de choses comme celles-là. Pour quelle raison lui a-t-on donné - je le répète, je ne suis pas certain que cela s'applique à la Société nationale de l'amiante - si c'est un fait, un tel mandat?

Pour ma part, je dois avouer que dans le passé, lorsque cela venait dans un projet de loi, je ne savais à peu près pas ce que cela signifiait mais, maintenant que je me suis penché sur le sujet, je me suis demandé pour quelle raison on donnait de tels pouvoirs à certaines sociétés lorsqu'elles voulaient travailler sur le même pied que ceux du secteur privé?

M. Duhaime: Ce que je vais vous dire va peut-être vous amuser, mais les sociétés d'État qui ont le statut de mandataires sont peut-être considérées comme les joyaux de la couronne. Il y en a deux: Hydro-Québec et la SNA.

M. Fortier: II y a la Raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, il y en a cinq ou six.

M. Duhaime: Quelles sont les autres?

M. Fortier: II y en a cinq ou six, je pourrai vous les donner. Un ouvrage de M. Barbe sortira prochainement, ce sera certainement intéressant à étudier.

M. Duhaime: Ce n'est pas impossible, mais je ne crois pas que l'on se serve de ce statut pour ne pas respecter le brevet des autres. Je serais étonné de l'apprendre. (17 h 15)

M. Fortier: Finalement, j'ai reçu différentes lettres - je suis sûr que le ministre en a reçu - concernant le mode de sélection des étudiants en géologie pour servir durant l'été. J'ai ici une lettre d'un

étudiant en géologie et géophysique, au niveau de la maîtrise, à l'École polytechnique de Montréal, qui me signale des irrégularités dans le processus de sélection des chefs d'équipe adjoints engagés par le ministère de l'Énergie et des Ressources pour la période estivale 1984. Le mode de sélection a été changé. J'ai reçu copie d'une autre lettre qui a été envoyée à Mme Marois dans laquelle on écrit: "Plusieurs géologues se sont vu rayés des listes des candidats sélectionnés pour la période "entrevue" parce qu'ils n'ont pu être rejoints par téléphone." La plupart des plaintes qui nous sont parvenues vont dans le sens que, jusqu'à l'an dernier, la sélection était faite directement par le ministère et, cette année, la responsabilité a été donnée au ministère de Mme Marois, celui de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'ai reçu plusieurs plaintes par téléphone et plusieurs lettres, à savoir que le processus a été tout à fait irrégulier, qu'on a changé les règles du jeu en chemin. Les annonces qui ont été faites l'avaient été de la façon dont cela se faisait dans le passé et, en définitive, le gouvernement a changé les règles du jeu en chemin, ce qui me semble tout à fait irrégulier.

Je me demande si, à la lumière de cette expérience, le ministre ne devrait pas revenir, pour l'an prochain, à la façon adoptée dans le passé et qui semblait donner satisfaction à tous ceux qui postulaient un emploi. Autrement dit, les étudiants ou ceux qui obtenaient ces emplois d'été avaient nettement l'impression que le processus était "fair" dans le passé et, cette année, ils ont eu nettement l'impression que cela a été mis entre les mains de certains bureaucrates qui ne comprennent absolument rien à la géologie ou à la sélection de géologues pour la période estivale. J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi le ministère s'en remet maintenant à un autre ministère pour une telle sélection.

M. Duhaime: Bien sûr, on a attiré mon attention sur ce problème. Cela a même fait l'objet de lettres de lecteurs dans un ou deux quotidiens. C'est un fait que ce changement a créé des frustrations, puisque l'embauche est maintenant faite par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et par les centres de main-d'oeuvre. Les procédures d'embauche ont été uniformisées pour chacun des ministères. C'est entendu que c'est un changement de cap qui peut nécessairement entraîner des frustrations par rapport aux méthodes qui existaient auparavant, mais tout ce que je peux vous répondre aujourd'hui, c'est de reparler avec ma collègue, Mme Marois, et voir avec elle s'il n'y a pas des correctifs qui peuvent être apportés. Il faudra également voir avec le

Conseil du trésor, puisqu'il s'agit d'une réglementation qui a été mise au point au Conseil du trésor.

M. Fortier: Je vais vous donner un exemple. Un étudiant avait été choisi et un jour, le lundi 23, on l'a appelé. Comme il n'était pas à la maison, parce qu'il était à l'université, on a conclu qu'il n'était pas intéressé et, par la suite, on lui a dit: Vous n'étiez pas à la maison quand on vous a appelé; alors, votre nom a été rayé automatiquement. Cela me semble un procédé tout à fait cavalier, tout à fait irrégulier. Si c'est le genre de directives qui ont été données par le Conseil du trésor, c'est complètement outrancier.

M. Duhaime: Si vous voulez mon avis, s'il y a des fonctionnaires des centres de main-d'oeuvre qui répondent de cette façon aux gens, ils mériteraient un prix citron. Je le dis, parce que j'ai aussi des problèmes dans mon comté, dans certains dossiers. Mais cet étudiant...

M. Fortier: Pour ces étudiants qui ont nettement l'impression d'avoir été brimés dans leurs droits, n'y a-t-il pas moyen au ministère de faire quelque chose? Je ne sais pas combien... J'ai ici deux lettres. S'il y a des gens qui ont été brimés dans leurs droits, est-ce qu'il y a des postes? Est-ce que tous les postes sont comblés? N'y aurait-il pas moyen de faire des correctifs à l'égard de ces gens-là qui se plaignent d'avoir été brimés et qui n'ont pas su à temps que les règles étaient changées?

M. Duhaime: Je ne pense pas qu'on puisse redresser les torts au coin de la table. Il y a eu au moins un cas qui a été corrigé. Je ne sais pas si cela correspond à celui que vous avez devant vous.

M. Fortier: J'espère que c'est celui qui demeure dans mon comté.

M. Duhaime: Cela va vous prouver qu'on ne fait aucune discrimination, malgré qu'on ait perdu tout espoir de gagner, un jour, le comté d'Outremont. S'il y a d'autres cas, on va les examiner et je verrai avec Mme Marois s'il n'y a pas des ajustements à faire. Je sais que, lorsque les centres de main-d'oeuvre communiquent aux résidences par téléphone, s'il y a des absents, on ne fait pas toujours le suivi de rappeler le lendemain ou le surlendemain. On marque absent ou non intéressé, ce qui crée des injustices, et avec raison d'ailleurs. On va voir ce qui peut être fait.

M. Fortier: Je vous remercie.

Le Président (M. Lafrenière): Le

programme 10 est-il adopté?

M. Fortier: Juste une dernière question. Si je comprends bien, l'IRDA a été fusionné dans un institut de l'amiante. C'est un fait accompli?

M. Duhaime: Oui. Nous avons, après de laborieuses discussions avec les autorités fédérales et avec l'Association des mines d'amiante, mis au point un scénario par lequel nous voulons intégrer nos efforts dans une seule structure qui s'appelle maintenant l'Institut de l'amiante qui chapeaute ce qui autrefois était connu comme étant l'IRDA, l'Institut de recherche et de développement sur l'amiante, qui est à Sherbrooke et qui restera à Sherbrooke. Il chapeaute, également, le Centre canadien d'information sur l'amiante de sorte que le volet information, promotion, défense du dossier de l'amiante par tout le monde entier se fera désormais sous le couvert de l'Institut de l'amiante. Il y a également des crédits qui sont prévus pour appuyer l'effort de recherche et de développement des mines d'amiante faisant partie de l'institut. Pour notre part, sur le plan budgétaire, nous allons y consacrer 1 250 000 $ par année sur une entente de cinq ans. J'ai également obtenu pour le ministère de l'Énergie et des Ressources une enveloppe qu'on appelle un fonds spécial de recherche qui est d'environ 250 000 $ pour nous permettre d'appuyer des projets ad hoc dans la recherche et le développement que pourraient nous présenter l'une ou l'autre des mines membres de l'Association des mines d'amiante du Québec.

M. Fortier: Quelle distinction peut-on faire entre l'Institut de l'amiante, qui va être financé par les compagnies, par le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et, disons, la recherche qui est faite par la Société nationale de l'amiante? J'imagine que chaque compagnie poursuit les recherches des projets qu'elles veulent mettre de l'avant. Dans quelle mesure le même genre de recherche va se faire aux deux endroits ou est-ce qu'il y a une dichotomie qui est très nette?

M. Duhaime: II n'y a pas beaucoup de risques qu'il y ait dédoublement de l'effort de recherche. D'abord, il n'y a pas beaucoup de mines d'amiante. Elles ne sont pas nombreuses. Elles sont actives dans la même association. Moi j'avoue ne pas avoir d'inquiétude sur ce genre de risque. Cependant, chaque entreprise a le loisir de conduire son propre programme de recherche et de développement, comme la SNA a ses programmes de recherche, Carey et d'autres. Mais l'Institut de recherche et de développement sur l'amiante est maintenant à l'intérieur, si on peut dire, de l'Institut de l'amiante. Comme vous savez, l'IRDA a été financé conjointement par les entreprises et le gouvernement; ce seront des projets de recherche et de développement en commun. Chaque entreprise reste parfaitement libre de conduire tout programme de recherche et de développement qu'elle jugera utile de poursuivre.

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce que le programme 10 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Le programme 10 est adopté. J'appelle le programme 11. M. le député d'Abitibi-Est, une question?

Industrie minérale et administration minière

M. Bordeleau: Simplement une petite question, merci. Concernant l'information qui est donnée au service des mines, aux bureaux des géologues résidents dans les régions sur les claims échus, j'avais eu quelques plaintes au cours de l'hiver à savoir que la liste mensuelle sur les claims échus qui était disponible dans les bureaux des géologues résidents ne l'était plus depuis quelques mois. On m'a dit qu'on voulait refaire le système et je ne sais pas où cela en est.

M. Duhaime: Cela sera corrigé rapidement. Les inconvénients survenus sont directement reliés au fait que nous sommes à installer des terminaux dans chacune des régions du Québec. Ces données seront sur ordinateur et reliées au central à Québec, de sorte que, désormais, l'information sera accessible beaucoup plus rapidement.

M. Bordeleau: Est-ce que cela signifie que l'information pourrait être continuellement disponible?

M. Duhaime: Oui, c'est d'ailleurs dans ce...

M. Bordeleau: Au lieu d'être une fois par mois, cela pourrait être continu, à la demande des prospecteurs.

M. Duhaime: Vous vous présentez à un des bureaux régionaux du ministère de l'Énergie et des Ressources et vous faites une demande d'information. Le message sera codé et l'information sera demandée par l'ordinateur central et retransmise au terminal. Cela sera accessible pendant les heures normales d'ouverture du bureau.

M. Bordeleau: C'est donc une amélioration des services.

M. Duhaime: Pour autant que les ordinateurs ne tombent pas en panne, c'est une très nette amélioration puisque ces données seront maintenant disponibles en tout temps plutôt qu'une fois par mois, ce qui, parfois, impliquait des retards, selon le moment où entrait l'information à la centrale, de deux ou trois semaines. L'information sera maintenant disponible en région aussitôt que la donnée aura été inscrite à l'ordinateur central, peu importe le jour du calendrier.

M. Bordeleau: Merci.

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce qu'il y a d'autres questions relatives au programme 11?

M. Lavigne: M. le Président, je regrette, j'ai dû m'absenter pour deux secondes et cela a mis fin au programme 10. J'avais une courte question relative à ce programme. Est-ce que vous me le permettez?

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce qu'on peut adopter le programme 11? S'il y a consentement, on reviendra au programme 10.

Le programme 11 est adopté.

M. Lavigne: M. le ministre, ma question était relative au programme 10. Je voulais connaître les effets - d'abord, savoir s'il y en a eu - de la loi 59 qui avait pour but de débloquer la prospection, particulièrement dans la région des Cantons de l'Est. Comme législateurs, on adopte des lois; certaines sont bénéfiques et d'autres le sont moins. J'aurais aimé savoir si cette loi a permis d'explorer davantage le sous-sol de la région désignée lors de la promulgation de cette loi et si elle a eu des effets bénéfiques.

M. Duhaime: Je suis très content que vous souleviez cette question; cela avait fait l'objet d'un grand débat lors de son adoption, autant à l'Assemblée nationale qu'en commission parlementaire, lorsque nous avons révoqué ces droits miniers qui étaient une enfarge au développement du potentiel minier de cette région du Québec. Depuis l'adoption de cette loi, le ministère de l'Énergie et des Ressources a émis 942 permis. Le gouvernement a augmenté ses investissements dans la recherche géologique. En 1982, nous avons engagé 300 000 $; en 1983, 1 000 000 $ et cette année, 1 200 000 $. Les investissements privés ont augmenté de façon considérable. Nous n'avons pas en main ces données; j'imagine qu'elles seront disponibles un jour, mais les gens du ministère qui sont en contact avec ceux du secteur privé qui font les investissements nous confirment que c'est une effervescence qui ne s'est pas vue dans ce coin du Québec depuis le début du siècle.

M. Lavigne: Je suis content...

M. Duhaime: C'est donc une excellente loi que nous avons adoptée à l'Assemblée nationale.

M. Lavigne: Merci, M. le ministre.

M. Fortier: Je crois que dans cette loi-là on avait changé le système des claims pour un autre. Quel était le système proposé? Quelle est l'expérience à ce jour?

M. Duhaime: Nous utilisons la technique des permis spéciaux d'exploration. Cela ne crée pas de problème, malgré les craintes soulevées à l'époque.

M. Fortier: Merci.

Le Président (M. Lafrenière): J'appelle le programme 12.

M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Adopté. Programme 13?

M. Fortier: Programme 13.

M. Duhaime: Est-ce qu'on pourrait suspendre pour quatre ou cinq minutes? Je suis prêt à régler pour trois.

M. Fortier: Trois minutes.

Le Président (M. Lafrenière): Nous suspendons pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 32)

(Reprise de la séance à 17 h 35)

Le Président (M. Lafrenière): La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Nous étions rendus au programme 13. La parole était au député d'Outremont.

Régie de l'électricité et du gaz

M. Fortier: M. le Président, dans son rapport annuel, le ministère de l'Énergie et des Ressources donne l'ensemble des revenus du ministère qui viennent de droits et permis. On voit que les ressources forestières donnent 22 000 000 $, les ressources minières, 28 000 000 $, les ressources hydrauliques, 27 000 000 $, et il y a d'autres permis de toutes sortes. Quand on regarde cela, c'est assez intéressant de noter que certains secteurs ou certaines activités du

ministère s'autofinancent, autrement dit. En ce qui concerne les mines, en particulier, on dirait qu'il y a un autofinancement à peu près à 100%.

M. Duhaime: Je m'excuse.

M. Fortier: Oui. Je disais que, quand on regarde les droits que le ministère du Revenu ou que le ministère des Finances encaisse, cela semble autofinancer une partie des dépenses du ministère de l'Énergie et des Ressources. Quand on regarde les mines, en particulier, cela semble assez évident. Dans les mines, vous avez quoi? 18 000 000 $, plus... Ce serait 25 000 000 $. Seulement en droits miniers, vous avez 28 000 000 $. Autrement dit, si on prend les droits miniers et tout cela - je vais continuer avec l'énergie après - le gouvernement reçoit plus d'argent qu'il n'en dépense, effectivement. Le ministère, que ce soit pour l'énergie, les mines ou les terres et forêts, a-t-il fait une analyse de ces revenus ou cherché à les maximiser? De quelle façon le gouvernement ou le ministre du Revenu fait-il l'analyse des revenus en contrepartie des dépenses que le gouvernement encourt pour les différentes activités du ministère de l'Énergie et des Ressources?

M. Duhaime: II n'y a sûrement pas d'objectif d'en arriver à autofinancer de quelque manière que ce soit ce que le gouvernement dépense dans le développement et la mise en valeur de ces ressources. Si vous prenez les blocs principaux du budget, il y a un manque à gagner énorme dans le secteur de la forêt, par exemple, qui ne pourrait jamais s'autofinancer avec les droits de coupe, à moins de les augmenter à des montants vraiment faramineux. Ce que vous dites est vrai, sauf pour les deux dernières années, pour ce qui est des mines. Nous percevons des droits miniers, bien sûr. Nous redépensons cet argent en salaires, en services aux entreprises, pour les bureaux régionaux, les programmes de recherche, d'exploration, etc., mais, si on ajoute à ces montants qui apparaissent au budget des mines les montants qui sont puisés au programme d'accélération des investissements, je n'ai pas fait le calcul précis pour 1983, mais je pense qu'on doit être autour de 60 000 000 $, qui sont engagés, qui ne seront pas nécessairement dépensés en 1983 et environ 30 000 000 $ pour 1984 pour soutenir l'effort d'investissement des entreprises minières. Ce qui s'est produit au cours de l'année 1983 et qui continue en 1984 avec le programme d'accélération, je dirais que, depuis que le ministère des Mines a été créé à Québec, c'est durant l'année 1983 et durant l'année 1984 que l'intervention du ministère a été à son plus haut niveau avec son programme et son budget régulier, mais aussi avec le programme d'accélération.

M. Fortier: C'est peut-être un détail et, même si on additionnait la rubrique que je vais mentionner, cela n'autofinancerait pas le ministère, mais je ne vois pas dans la liste que le rapport donne les revenus de la Régie de l'électricité et du gaz qui tombent dans les revenus consolidés du gouvernement. Chaque fois que les compagnies se présentent devant cette régie, elles paient des droits et ils ne semblent pas comptabilisés ici. On m'avait dit, en ce qui concerne la Régie de l'électricité et du gaz, en particulier - cette année, vous avez un budget de 2 000 000 $ - que c'était quasiment un autofinancement et que, lorsque vous avez étudié la possibilité d'anéantir la régie, vous aviez même constaté que c'était une régie avec laquelle vous faisiez de l'argent, que vous aviez plus de revenus que de dépenses. Est-il possible d'avoir le montant qui tombe dans les revenus consolidés? Quel a été le montant des revenus en 1983?

M. Duhaime: Ce que vous dites est exact dans un sens. Les revenus de la Régie de l'électricité et du gaz ne viennent pas au fonds consolidé, par la loi même qui a constitué la régie. La loi sur la régie indique aussi que le niveau des redevances versées par la clientèle est établi en fonction des budgets de fonctionnement de la régie. Alors, s'il y a un surplus quelconque, il est passager et il devrait profiter à cette clientèle au fil des années. Mais il n'y a pas de retour net au fonds consolidé.

M. Fortier: Est-ce que, éventuellement, je pourrai avoir le montant pour l'an dernier? Comment se fait-il que cela ne paraisse pas dans votre rapport? C'est un oubli ou...

M. Duhaime: Non, pas dans le rapport annuel de 1982-1983. L'année complète de 1983 devrait paraître dans le rapport de 1983-1984, j'imagine.

M. Fortier: Dans le rapport de 1982-1983, est-ce que je me trompe quand je dis que les revenus de la régie n'y sont pas comptabilisés?

M. Duhaime: Ce n'est pas impossible, mais vous allez peut-être retrouver ces données au rapport annuel de la Régie de l'électricité et du gaz plutôt que dans le rapport annuel du ministère.

M. Fortier: Mais j'imagine que les revenus de la régie sont du même ordre que ceux dont vous faites état ici.

M. Duhaime: Oui.

M. Fortier: Exactement. Si je ne me trompe, l'an dernier, on avait parlé de la régie et vous aviez dit que certains services d'inspection seraient transférés au ministère et que la régie serait soulagée de cet aspect qui, finalement, ne relève pas d'elle. Autrement dit, la régie est là pour statuer sur des augmentations de tarifs. Est-ce que ce transfert de responsabilités de la régie vers le ministère de l'Énergie et des Ressources a été complété? Si c'est le cas, pour quelle raison retrouvons-nous - je ne voudrais pas faire erreur - dans le budget de la régie, l'élément 2, Sécurité publique? Est-ce que l'élément sur la sécurité publique concerne le rôle d'inspection dont nous parlions l'an dernier? Je n'ai pas relu le journal des Débats, mais je crois que l'an dernier vous nous aviez dit qu'il y avait une décision arrêtée de transférer ce genre de responsabilités au ministère comme tel. Encore cette année, on retrouve un montant de 641 500 $ dans le budget de la régie.

M. Duhaime: En fait, c'est un dossier qui est actuellement en discussion. Il est au stade de l'analyse au secrétariat du Conseil du trésor de même que dans d'autres secrétariats ministériels. Nous maintenons la même problématique. Il va y avoir des économies d'échelle. Jusqu'à quel point nos projections vont-elles s'avérer justes? Il est fort plausible que tout ce qui relève de l'inspection qui est actuellement à la Régie de l'électricité et du gaz revienne ou bien au ministère de l'Énergie et des Ressources ou encore au ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur. Les deux avenues sont évaluées à l'heure actuelle. Je pense qu'on devrait pouvoir prendre une décision au cours de l'année.

M. Fortier: Mais je croyais que vous m'aviez dit l'an dernier qu'il y avait eu un début de transfert. Alors, il n'y a pas eu de début de transfert de responsabilités, n'est-ce pas?

M. Duhaime: Non, il n'y a pas eu de début comme tel. On a été tenté de le faire parce qu'on a eu une offre d'un autre ministère qui s'intéresse au dossier sous l'angle de la protection du consommateur. On a jugé utile de surseoir et de compléter l'évaluation de ce côté. Mon intention est de dégager la Régie de l'électricité et du gaz de cette responsabilité et de la confier à mon propre ministère ou encore au ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur si son offre tient jusqu'au bout.

M. Fortier: Au bas de la page 45, vous dites: Finalement, afin de donner suite aux travaux de la commission parlementaire, le gouvernement étudie actuellement les orientations futures de la régie. Il a été question en commission parlementaire - que ce soit par l'Ordre des ingénieurs, l'Association des ingénieurs-conseils et j'en oublie - de débats sur les questions énergétiques dans le cadre d'une espèce de conseil de l'énergie. Le ministre avait dit qu'il était réceptif au concept si on pouvait se débrouiller pour ne pas trop augmenter les coûts du gouvernement.

Est-ce que cette réflexion que vous faites va dans cette direction? Autrement dit, avez-vous l'intention d'ajouter aux responsabilités de la régie en lui transférant le mandat de l'évaluation des politiques énergétiques du Québec dans son ensemble? (17 h 45)

M. Duhaime: Les deux choses sont liées, finalement. Ce que je pourrais dire pour l'instant là-dessus, c'est qu'à la suite des travaux de la commission parlementaire l'équipe énergie du ministère de l'Énergie et des Ressources a fait, bien sûr, une compilation et un examen très attentif de l'ensemble des propositions; il y en a eu une foule à travers la soixantaine de mémoires qui ont été présentés et nous sommes à réfléchir sur l'ensemble de la problématique. J'avoue que j'ai beaucoup d'hésitation à confier des mandats aussi vastes et aussi larges et même à mettre sur pied un conseil consultatif de l'énergie; cela pourrait être indiqué sur des points ad hoc. Ce que je craindrais, ce sont les coûts administratifs d'une structure permanente.

Deuxièmement, dans l'examen des mandats qui sont actuellement confiés à la Régie de l'électricité et du gaz, il y a un volet qui rejoint un des voeux manifestés par plusieurs associations lors de la commission parlementaire et j'ai le sentiment très net que, lorsque le gouvernement prendra position sur la Régie de l'électricité et du gaz et les mandats qu'on veut lui voir confier, on pourra disposer en même temps de l'autre volet de la question.

M. Fortier: Vous aviez promis un document. J'imagine que dans un premier temps la section énergie du ministère a compilé ou a analysé les recommandations. Est-ce que - cela pourrait nous être utile -le ministère ne pourrait pas distribuer cette compilation des points de vue qui résumerait, j'imagine, les différents points de vue par type de recommandations, et aussi donner le nom de chaque association? Autrement dit, ce serait une compilation des différents points de vue qui avaient été exprimés; un peu plus tard, j'imagine qu'il y aura une deuxième partie qui sera l'analyse des recommandations. Est-ce qu'il serait possible que le ministère publie au moins la première partie afin que l'on puisse en disposer nous-mêmes?

M. Duhaime: À la suite des travaux de la commission parlementaire qui a siégé pendant plusieurs semaines, nous avons dû, bien sûr, attendre la transcription normale des débats de la commission parlementaire. Lorsque cela a été révisé, on s'est posé beaucoup de questions sur la méthodologie qu'on devrait utiliser. Notre première approche était de tenter de résumer les points de vue en mettant en lumière telle ou telle proposition par un groupe ou par un autre. Nous avons finalement écarté cette approche parce qu'elle était, bien sûr, très critiquable. On n'était pas absolument certain de pouvoir rendre fidèlement ce que les gens étaient venus nous dire. On a donc opté pour une deuxième voie, qui est celle de publier intégralement dans un document toutes les interventions in extenso qui ont été faites et ce document est prêt.

M. Fortier: Vous voulez dire que ce sera une réplique du journal des Débats?

M. Duhaime: Oui, un peu comme il y avait eu la transcription intégrale des débats de la commission parlementaire sur les investissements d'Hydro-Québec au printemps 1978, je crois.

À la fin de ce document, vous allez retrouver la partie des recommandations comme telles sans que l'une ou l'autre ait été mise dans quelque ordre de priorité. On veut refléter essentiellement le travail de ceux qui se sont donné la peine de venir devant la commission. Donc, à la fin du document, dans des annexes, vous allez retrouver la liste des recommandations qui nous ont été faites. Ce n'est pas regroupé par sujet; c'est regroupé par intervenant.

À partir de ce premier travail, le ministère de l'Énergie a continué et nous aurons un document prêt pour juin qui mettra davantage en lumière les différentes recommandations qui ont été faites devant la commission.

M. Fortier: Est-ce que le premier document va être prêt bientôt?

M. Duhaime: Je ne l'ai pas rendu public plus tôt parce que je n'ai pas eu le temps. Je voulais le faire demain, mais je serai à Montréal. On va le faire le plus rapidement possible, il est prêt.

M. Fortier: II y a une difficulté à publier in extenso; c'est qu'on s'est aperçu par après que certaines données étaient fausses en entier ou en partie. Si on prend la présentation de SOQUIP sur la consommation ou le raffinement du pétrole au Québec, des correctifs ont été apportés après. J'aurais cru qu'il aurait été utile d'avoir le tableau corrigé intégralement et que le ministère aurait fait ce genre d'ajustement. Si vous publiez cela in extenso, si les gens s'y réfèrent, on va faire la même erreur qui a été faite dans un premier temps.

M. Duhaime: Nous n'allons pas, dans ce document, reprendre in extenso les mémoires écrits. Les mémoires ont été déposés devant la commission, ils ont été mis à la disposition des membres. Je pense qu'il en reste encore des copies au secrétariat. Ce que nous allons publier, ce sont les propos tenus ici à cette table durant les travaux de la commission parlementaire.

J'imagine que sur un dossier comme SOQUIP, qui avait échappé 50 000 barils en chemin à un moment donné, à la lecture on verra que la correction a été faite.

M. Fortier: Lors de la commission parlementaire de l'énergie et des ressources où on avait discuté des tarifs d'Hydro-Québec, le ministre et Hydro-Québec avaient évoqué la possibilité que l'augmentation de tarif ou la révision en commission parlementaire se fasse durant l'été au lieu de la faire au mois de novembre ou décembre, comme c'était la tradition. Je pense que les membres de la commission aimeraient savoir quel va être le fardeau de notre travail en juillet et en août prochains. Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer si Hydro-Québec demandera de comparaître en commission parlementaire cet été ou si ce sera reporté à l'automne, comme les années passées?

M. Duhaime: À moins de grandes surprises, la commission parlementaire de l'énergie et des ressources ne siégera pas en 1984 pour étudier une proposition tarifaire d'Hydro-Québec.

M. Fortier: La commission de l'énergie et des ressources ne siégera pas, parce qu'elle n'existe plus, mais celle de l'économie et du travail pourrait siéger.

M. Duhaime: Je m'excuse, M. le Président. La commission parlementaire de l'économie, du travail et de l'emploi... Comment appelez-vous la commission?

M. Fortier: Économie et travail, tout simplement.

M. Duhaime: Cette commission-ci ne sera pas saisie, en 1984, d'une proposition tarifaire d'Hydro-Québec.

Études, recherches et interventions concernant l'énergie

M. Fortier: Au programme 14, vous faites allusion à ce que vous aviez discuté en commission parlementaire, M. le ministre,

à savoir que le ministère compte mettre au point - je cite à la page 47 - "un programme pour promouvoir de nouvelles utilisations dans le secteur industriel". Cela avait été évoqué en commission parlementaire lorsqu'on a parlé de la politique énergétique. Cela avait été évoqué partiellement lors de la révision des tarifs d'Hydro-Québec. Ma première question, c'est: Est-ce le ministère qui prépare cela ou si c'est Hydro-Québec? Deuxièmement, compte tenu qu'on nous avait dit, je crois, à la commission parlementaire, que ce serait prêt au printemps, à quel moment ces nouveaux programmes seront-ils présentés publiquement?

M. Duhaime: On travaille actuellement sur deux dossiers. Quand je dis "on", je m'exclus, parce que l'initiative de ces travaux est prise par Hydro-Québec et cela se fait en consultation étroite et continue avec mes fonctionnaires, au ministère de l'Énergie et des Ressources. On travaille sur deux problématiques. La première, c'est un programme de stabilisation tarifaire pour l'industrie, d'une façon générale. Le deuxième volet porte plus précisément sur les secteurs de l'électrochimie, de l'électro-métallurgie et de la chimie minérale. On se propose d'étendre à ces trois secteurs un scénario comme celui retenu dans le secteur de l'aluminium. C'est très avancé comme travaux. Cela ne nous empêche pas, cependant, de mettre déjà en application les grands principes de cette problématique tarifaire sur des dossiers ad hoc pour ne pas retarder des investissements.

M. Fortier: Ce qui irait dans le sens de favoriser de nouveaux tarifs dans la mesure où il y aurait de nouveaux investissements, si je comprends bien.

M. Duhaime: Cela est pour un des volets. C'est le deuxième, l'électrométal-lurgie, l'électrochimie et la chimie minérale. Le premier volet est un programme de stabilisation qui consisterait en gros à donner, à long terme, des garanties aux entreprises pour les prémunir contre des dépassements qui seraient inattendus.

M. Fortier: Est-ce que ce serait garanti par le gouvernement ou si Hydro-Québec serait forcée de créer un fonds à même les tarifs pour cette éventualité?

M. Duhaime: D'abord, le gouvernement ne force jamais Hydro-Québec, comme vous le savez. C'est une décision de l'entreprise et il n'est pas exclu qu'un fonds spécial soit créé pour pouvoir encaisser les hauts et les bas de ces fourchettes lorsque mises en application dans le temps.

M. Fortier: En ce qui concerne les négociations avec Terre-Neuve, qu'est-ce que le ministre peut nous dire de plus qu'il a dit publiquement? Est-ce que ces négociations impliquaient l'aménagement de certaines rivières de la Côte-Nord? Les négociations étaient-elles limitées à l'aménagement de Lower Churchill, des chutes Churchill qui appartiennent à Terre-Neuve exclusivement et où le gouvernement avait offert une coopération pour développer ces ressources dans un avenir, j'imagine, immédiat?

M. Duhaime: À la demande de Terre-Neuve, en août dernier, je crois que c'était le 18, nous avons eu des échanges au niveau des ministres de l'Énergie à trois reprises, mais qui n'ont pas porté sur le fond du dossier. C'était plus des discussions qui portaient sur l'encadrement des négociations, les mandats à donner et qui seraient les porte-parole. De notre côté, toutes les négociations ont été conduites par Hydro-Québec avec, bien sûr, la collaboration étroite de son actionnaire. Lorsque nous avons accepté, à la demande de Terre-Neuve, de reprendre les négociations, c'est essentiellement parce que Terre-Neuve, pour la première fois, acceptait d'examiner l'ensemble du dossier, c'est-à-dire le Haut-Churchill, le Bas-Churchill, les ententes quant à la régularisation des bassins hydrographiques des rivières de la côte, les redevances, bien sûr, et certains éléments du contrat signé. Il n'a jamais été question du tracé de 1927, ce que vous appelez une frontière.

M. Fortier: Est-ce que du côté de Terre-Neuve les négociations se faisaient par l'entremise de leur compagnie d'utilité publique ou par le gouvernement?

M. Duhaime: En partie par Newfoundland and Labrador Hydro, mais je dirais, en majeure partie, au niveau du gouvernement de Terre-Neuve, par les représentants qu'ils avaient délégués à la table de négociation.

M. Fortier: Au moment où on se parle, j'imagine que tout est arrêté à lasuite de la déclaration d'Hydro-Québec. Y a-t-il des possiblités de nouvelles négociations? On a lu dans les journaux que Terre-Neuve avait décidé d'en appeler de la décision de l'Office national de l'énergie. Dans quelle mesure l'appel de Terre-Neuve peut-il retarder l'exportation d'énergie vers les États-Unis pour pénaliser financièrement Hydro-Québec?

Le Président (M. Lafrenière): Un instant, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Duhaime: Nous ne pensons pas...

Le Président (M. Lafrenière): Tel que convenu nous continuons nos travaux jusqu'à 18 h 30. (18 heures)

M. Duhaime: Nous ne pensons pas que le gouvernement de Terre-Neuve a déposé une opposition devant l'Office national de l'énergie sur le contrat d'exportation vers New York. L'Office national de l'énergie n'a pas retenu l'opposition de Terre-Neuve pour des motifs assez évidents. Un opposant doit faire la preuve qu'il a besoin de cette énergie et qu'il est prêt à payer le prix que nous obtiendrions sur le marché international, qui est essentiellement américain pour nous. Je pense que cette preuve est à peu près impossible à faire dans l'état actuel du dossier.

Terre-Neuve a un droit d'appel devant la Cour fédérale. Elle a indiqué qu'elle porterait ce dossier en appel devant la Cour fédérale. Nous attendrons d'obtenir le jugement de la Cour fédérale, il y aura audience, j'imagine bien, mais cela ne crée pas un retard pour l'instant. De notre côté, nous nous préparons à construire l'interconnexion, de même que du côté américain.

M. Fortier: Est-ce que l'appel permet à Hydro-Québec de construire effectivement ou si cela annule les autorisations que l'Office national de l'énergie a données ou avait effectivement l'intention de donner?

M. Duhaime: J'aurais préféré que nos conseillers juridiques soient ici pour répondre à cette question. L'appel devant la Cour fédérale porte sur des questions de forme. L'approbation de la décision de l'Office national de l'énergie doit être faite par le cabinet fédéral, comme toute décision en semblable matière de l'office. Ces décisions entrent en vigueur et ont plein effet lorsqu'elles sont approuvées sur le fond par le cabinet fédéral à cause des amendements qui ont été apportés en 1983, je crois. C'est le projet de loi fédéral C-108 qui nous donnait l'héritage du corridor électrique -vous vous en souviendrez. Je ne pense pas non plus que - je ne suis pas très familier avec la tuyauterie fédérale dans ces matières - le cabinet fédéral donne son approbation tant que les recours, quant à la forme, n'auront pas été épuisés devant la Cour fédérale. Sur le plan des dates de livraison, pour l'instant en tout cas, cela n'a eu aucun impact.

M. Fortier: L'autorisation qu'Hydro-Québec cherchait à avoir était pour exporter des quantités additionnelles à partir de 1986 ou 1987, je crois.

M. Duhaime: On parle du contrat avec le New York Power Authority qui est un contrat de 111 000 000 000 de kilowattheures à partir de 1984 jusqu'en 1997. C'est un contrat de treize ans. Mais il y a des livraisons qui se font parce qu'il y avait déjà une entente qui existait. Le contrat de 1982, signé avec New York, devrait être respecté. Du côté américain, ils ont encore des autorisations. Du côté américain, l'interconnexion est celle que l'on appelle Marcy South, qui n'est pas encore approuvée sur le plan de la commission... Je crois qu'il y a une commission de l'environnement, la "Public Service Commission", et, de notre côté, nous pensons toujours pouvoir respecter - nos collègues américains aussi - l'échéance du contrat et commencer les livraisons suivant le calendrier qui a été arrêté en 1982.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Merci, M. le Président. M. le ministre, je voudrais vous poser une couple de questions. Je ne suis pas sûr de bien interpréter - en tout cas, vous me le direz - en ce qui a trait à l'investissement ou les mises de fonds qu'on retrouve dans Gaz Métropolitain qui, évidemment, étend d'année en année ses tentacules, d'autant plus que cela va dans le sens et dans l'esprit développé par le ministre. Je pense qu'on doit pousser sur ce type d'énergie qui doit concurrencer de plus en plus les produits pétroliers ainsi, évidemment, que l'électricité. Donc, il y a des villes ou des municipalités au Québec qui greffent leur réseau municipal de gaz naturel aux grands réseaux et on fait une pénétration plus intense dans les villes. Les fonds que le gouvernement met dans Gaz Inter-Cité, on les retrouve où dans l'étude du budget présentement? Si c'était le cas, ce serait à quel élément?

M. Duhaime: Cela n'apparaît pas au budget.

M. Lavigne: Cela n'apparaît pas au budget?

M. Duhaime: Je crois que vous allez retrouver ces informations au rapport annuel de SOQUIP; elles pourraient être complétées par les rapports annuels de Gaz Métropolitain et de Gaz Inter-Cité.

M. Lavigne: M. le ministre, est-ce que pour cette année on prévoit des augmentations dans ces champs d'activité de la part du gouvernement? Les budgets sont-ils augmentés?

M. Duhaime: II va y avoir une augmentation des activités, bien sûr, en termes d'investissements. Du côté de Gaz

Inter-Cité, cette année, on va construire la latérale Grand-Mère, La Tuque, Chambord et La Baie. C'est un investissement de 240 000 000 $. Au fur et à mesure que la demande va se faire dans les villes traversées, Gaz Inter-Cité va donner une expansion à son réseau gazier municipal. Cela donne pour Gaz Inter-Cité pour la seule année 1984 des investissements de 220 000 000 $ dans le secteur de la transmission; dans le secteur de la distribution, 113 500 000 $. Pour Gaz Métro, les investissements en 1984 sont de 179 000 000 $. Ce qui vous donne un total pour les deux compagnies de distribution gazière de 512 500 000 $ pour la seule année 1984, comparativement à 193 000 000 $ ou 194 000 000 $ pour 1983 et 128 000 000 $ pour 1982.

M. Lavigne: Donc, il y a une nette progression.

M. Duhaime: J'ajoute également qu'il y a quelques jours à peine, avec Gaz Métro, nous avons annoncé que Saint-Jérôme serait reliée à Lachute. C'est un investissement de 7 000 000 $. Les travaux vont commencer incessamment. Ceci va permettre également d'alimenter en gaz naturel la compagnie Great Lakes Carbon, située près de Lachute, de même que trois municipalités. Très prochainement, je l'espère, nous pourrons annoncer un programme d'accélération des investissements de Gaz Métro dans la région de Montréal.

M. Lavigne: Dans un autre ordre d'idées, M. le ministre, on voit dans les documents au programme 14 les faits saillants quant au programme Bi-énergie. On sait que le ministère défraie ce programme dans la proportion de 50%; Hydro-Québec défraie l'autre moitié. C'est un programme qui a coûté 7 000 000 $ l'an passé. Vous dites que vous le réduisez à 5 800 000 $. Il me semble que c'est un programme qui était populaire, qui allait dans le sens de combattre le pétrole d'une certaine façon et de permettre à l'hydroélectricité de pénétrer davantage sur les marchés au niveau de la consommation. Je m'explique mal la diminution de 7 000 000 $ à 5 800 000 $.

M. Duhaime: Pour mieux répondre à votre question, on pourrait peut-être vous donner quelques chiffres sur l'impact du programme Energain depuis le début. En 1981-1982, il y a eu 11 214 analyses qui ont été faites et le coût total du programme a été de 6 200 000 $ en chiffres arrondis. Quand je parle du coût total, c'est la part et du gouvernement et d'Hydro-Québec. Pour 1982-1983, il y a eu 45 250 analyses; le coût total du programme a été de 13 250 000 $. En 1983-1984, on compte 116 500 analyses pour un coût total de 19 400 000 $.

Ce que nous avons remarqué au fil des années, c'est d'abord la très grande réussite du programme Énergain et un déplacement soutenu du mazout ou encore de l'huile à chauffage no 2, principalement, et un très haut taux de conversion à l'hydroélectricité. Dans les constructions nouvelles, Hydro-Québec va chercher au-delà de 95% du marché résidentiel; à la faveur du programme Énergain, le taux de conversion à l'électricité était de l'ordre d'à peu près 90%, ce qui veut dire que le gaz naturel n'a pas beaucoup concurrencé Hydro-Québec dans ce secteur.

J'ajouterai un élément important: le coût par unité de logement, au moment de l'application du programme Énergain, va en diminuant et de beaucoup. Si vous faites la division des chiffres que je viens de vous donner, vous allez constater qu'en 1981-1982 cela coûtait 550 $ par unité de logement et cela a été ramené à 292 $ en 1982-1983 et à 158,76 $ en 1983-1984 comme coût total.

M. Lavigne: Au niveau du coût d'installation.

M. Duhaime: Comme coût total du programme. Cela signifie quoi? Cela signifie qu'après trois ans nous avons écrémé en quelque sorte une clientèle qui a bénéficié des analyses énergétiques, qui a fait des investissements et qui s'est convertie dans une proportion de 90% et plus à l'électricité.

Nous touchons maintenant une tranche de clientèle où les économies d'énergie sont plus faibles. Pour les clients éventuels d'Hydro-Québec ou du gaz naturel, quant à eux, lorsque l'investissement est maintenant réalisé ou sera réalisé au cours de 1984-1985, les économies d'énergie seront plus faibles, donc, il y aura moins d'investissements, un coût moindre pour le fonctionnement du programme, d'où la révision à la baisse pour répondre aux besoins de cette clientèle.

Le Président (M. Lafrenière): Merci, M. le ministre.

M. Duhaime: J'ajoute un élément. On va maintenant travailler davantage dans le secteur multifamilial plutôt qu'unifamilial et résidentiel, ce qui nous amène à des économies importantes au niveau de la subvention à l'investissement.

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce que le programme 13 est adopté?

M. Fortier: Je pense qu'il nous reste juste une dizaine de minutes. Si on pouvait poser quelques questions qui ne se réfèrent pas nécessairement au programme, on adopterait les programmes à la fin.

Le Président (M. Lafrenière): D'accord.

Société de cartographie

M. Fortier: Cela ne se réfère pas nécessairement au programme qui est ici, mais le ministre me pardonnera de ne pas avoir posé la question plus tôt. L'an dernier, j'avais posé la question au ministre en ce qui concerne les déficits cumulatifs de la Société de cartographie. Différentes représentations ont été faites par les syndiqués qui craignent de perdre leur emploi si le ministre donne suite à ce qu'il me disait l'an dernier: "Je vous avoue que mon idée est à peu près faite, nous avons l'intention de nous retirer de ce champ d'activité", mais il nous indiquait qu'à ce moment-là c'était un projet du ministère et qu'il irait au cabinet, le cas échéant. Ceci, il nous le disait le 17 juin 1983 et je crois qu'il n'est pas encore allé au cabinet. Cela ne devrait pas tarder. (18 h 15)

Est-ce que le ministre peut nous dire si sa décision est prise ou si le cabinet a pris une décision au sujet de ce dossier? Quand va-t-il informer les employés de la Société de cartographie qui, eux, s'inquiètent de leur emploi? A-t-il reçu des offres du secteur privé qui permettraient au gouvernement de transférer le personnel, ou la société privée achètera-t-elle les actifs? Autrement dit, quelle formule sera retenue et qu'est-ce qui sera fait pour préserver l'emploi des 35 personnes, je crois, qui sont encore à l'emploi de la Société de cartographie?

M. Duhaime: Je serais prêt à répéter mot à mot ce que j'ai dit l'an passé à l'étude des crédits. Le dossier a fait l'objet d'une analyse au Conseil du trésor. Il est au Secrétariat exécutif. Nous prendrons, comme gouvernement, une décision d'ici deux à trois semaines. Nous ne nous sommes pas encore arrêtés, de façon définitive, sur la manière dont nous pourrions disposer des actifs de la Société de cartographie dans l'hypothèse où le gouvernement donnerait suite à cette avenue, mais pour ce qui est des employés, peu importe qui pourrait éventuellement devenir propriétaire de la Société de cartographie, c'est un personnel hautement spécialisé. Nous allons tenir compte, dans les propositions que nous devrions recevoir à la suite d'un appel d'offres qui sera fait, de la présence des travailleurs dans cette entreprise.

M. Fortier: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il existe présentement plusieurs sociétés privées qui peuvent offrir à peu près le même genre de services? Est-il vrai également que, même s'il existe plusieurs firmes privées, c'est le ministère présentement qui détermine le tarif, qu'il n'y a pas d'appels d'offres comme tels? Je crois que vous avez des tarifs réglementés pour le travail. Si le ministère se départissait de la Société de cartographie, est-ce qu'il y aurait danger? C'est un danger, j'imagine, qu'on a appréhendé en 1975 lorsque le gouvernement a décidé de lancer cette société, de faire concurrence au secteur privé. J'imagine qu'à ce moment, on avait peut-être peur qu'une société privée prenne le monopole de ce service et on a voulu lui faire concurrence. Est-ce que les conditions ont changé? Est-ce que le ministre est satisfait que, s'il y a plusieurs firmes dans le secteur privé, celles-ci pourront se faire concurrence pour que le ministère puisse donner des contrats sans être à la merci d'une firme en particulier?

M. Duhaime: II n'y a aucun danger qu'on soit à la merci de qui que ce soit parce que j'ai le sentiment que le ministère de l'Énergie et des Ressources est aussi bien équipé que n'importe laquelle des entreprises dont on parle, incluant la Société de cartographie. Nous sommes presque autonomes, sinon autosuffisants, quoique nous octroyons des contrats et nous avons l'intention de continuer à en octroyer.

La tarification est effectivement approuvée par le gouvernement au niveau du Conseil du trésor. Nous avons évalué ce danger de voir s'établir un monopole et, moi, j'en arrive à la conclusion qu'il n'y a pas grand risque que cela se produise, car il y a plusieurs compagnies qui oeuvrent dans ce secteur qui sont déjà en concurrence. Je pense que nous laisserons les entreprises privées dans ce secteur oeuvrer suivant les règles normales de concurrence.

M. Fortier: Est-ce que le ministre vient de me dire que les services fournis par la Société de cartographie existent également au ministère de l'Énergie et des Ressources?

M. Duhaime: Pour une partie des travaux que la Société de cartographie fait ou pourrait faire, nous avons également au ministère de l'Énergie et des Ressources de l'équipement similaire, mais pas aussi sophistiqué.

M. Fortier: Si l'information que j'ai est exacte, c'est au cours des dernières années que la société a acquis et développé les équipements modernes qui lui permettent de faire cela. Quel était le but poursuivi par le gouvernement, car ce que vous venez de me dire c'est que le ministère est équipé à peu près de la même façon mais, à la Société de cartographie, pourquoi avoir permis une double utilisation des fonds publics qui a amené des déficits retentissants à la Société de cartographie? J'ai de la misère à comprendre la bonne gestion du ministère dans un dossier comme celui-là.

M. Duhaime: II n'y a pas de chevauchement sur l'ensemble des activités. Quand le ministère a décidé de s'équiper c'était beaucoup plus en fonction d'exigences de rapidité à obtenir ce que nous voulions avoir. Je me souviens bien, pour l'avoir visitée, avoir fait le tour de la Société de cartographie, qu'ils ont des équipements que le ministère de l'Énergie et des Ressources n'a pas et n'a pas l'intention d'acquérir non plus. Entre autres, tout le procédé de fabrication des cartes à partir de photos aériennes. Je crois que c'est une technologie norvégienne qui a été acquise, du moins les appareils, et, que je sache, ces appareils n'existent pas au ministère de l'Énergie et des Ressources, à moins que l'on me fasse des surprises, mais je ne crois pas.

Office de l'électrification rurale

M. Fortier: En ce qui concerne l'Office de l'électrification rurale, dont le ministère m'a transmis certaines informations, je crois qu'il n'y a plus aucune raison pour avoir un Office de l'électrification rurale. Malgré le fait que cet office n'ait plus de justification depuis un certain nombre d'années...

M. Duhaime: Justement...

M. Fortier: ...est-ce qu'il s'y fait des dépenses? L'an dernier, vous avez payé du personnel pour s'occuper de cet office. Des dépenses ont-elles été encourues?

M. Duhaime: L'Office de l'élec-trification rurale - peut-être que M. Duplessis va se retourner dans sa tombe - il n'en reste que la coquille. Deux personnes sont officiellement sur la liste de paie de l'office, mais, effectivement, elles travaillent au ministère de l'Énergie et des Ressources. Nous projetons une modification législative pour mettre fin à ses beaux jours.

M. Fortier: Le ministre peut-il me dire pourquoi il y a deux personnes sur la liste de paie de l'office s'il n'y a absolument aucun travail à y faire?

M. Duhaime: Un directeur général au ministère de l'Énergie et des Ressources est en même temps plénipotentiaire de l'Office de l'électrification rurale; c'est exactement la même dépense comme telle. Je m'excuse, ils sont rémunérés par le ministère de l'Énergie et des Ressources et remplissent les fonctions dévolues par la loi dans le cadre actuel de la législation concernant l'Office de l'électrification rurale.

M. Fortier: L'office, présentement, n'a personne sur sa liste de paie et des dépenses ont-elles été encourues à l'intérieur de l'office?

M. Duhaime: C'est M. Denis L'Homme, président de l'Office de l'électrification rurale, qui est en même temps directeur général au ministère de l'Énergie et des Ressources. Cela fait partie des héritages. On va liquider cela tranquillement.

M. Fortier: Je me demandais si, malgré le fait que c'était dormant, vous y dépensiez beaucoup d'argent. Il ne semble pas que ce soit le cas. Cela me fait de la peine. Ce sera tout, M. le Président.

M. Duhaime: C'est plutôt tranquille.

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce que le programme est adopté?

M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Lafrenière): Adopté. Est-ce que l'ensemble des crédits de l'énergie et des ressources...

M. Fortier: J'aurais seulement une question au ministre étant donné que...

Le Président (M. Lafrenière): Est-ce qu'on les adopte avant la question?

M. Fortier: Oui, on va les adopter. Puis j'ai une question à poser au ministre ensuite.

Le Président (M. Lafrenière): D'accord. Adopté.

M. Fortier: J'ai reçu une lettre d'une personne qui habite le sixième rang à Saint-Cyrille-de-Wendover, près de Drummondville, qui dit qu'elle ne peut être branchée au réseau d'Hydro-Québec. Elle m'a même envoyé la photo de sa demeure. C'est un petit bungalow. Elle a fait une demande auprès d'Hydro-Québec et il semblerait qu'Hydro veuille faire payer la ligne de transmission qui serait requise pour l'alimenter.

Je voulais seulement savoir du ministre si effectivement, dans des cas comme cela... Cela me semble assez cocasse; c'est un rang près de Drummondville. Est-ce que la Loi sur l'Hydro-Québec permet à celle-ci de demander à un client de payer? Je comprends bien le problème. C'est peut-être que pour brancher cette personne cela prendrait une petite ligne en alimentation qui pourrait coûter - je n'ai pas le coût ici - de 2000 $ à 6000 $ et on exige qu'elle paie ce montant. Est-ce que la Loi sur l'Hydro-Québec oblige celle-ci à alimenter toute personne à l'intérieur d'un certain territoire ou si elle peut exiger d'un client en particulier qu'il paie une mini-ligne de transport pour se rendre à sa demeure?

M. Duhaime: À quelle adresse habite ce

monsieur?

M. Fortier: Sixième rang à Saint-Cyrille-de-Wendover, près de Drummondville.

M. Duhaime: Je ne sais pas s'il n'aurait pas pu trouver un endroit plus loin pour aller s'installer. Plus sérieusement, Hydro-Québec est obligée de fournir le service mais la loi n'oblige pas Hydro-Québec à faire assumer par l'ensemble de la clientèle des coûts d'installation semblables.

Nous sommes au courant de ce dossier parce que, en plus de vous avoir écrit, il nous a écrit aussi. Hydro-Québec est en train de régler ce problème. Je ne sais pas de quelle façon l'entente sera faite mais il est clair et net qu'il va y avoir une charge au client.

M. Fortier: Oui, parce que ce...

M. Duhaime: Si on procédait à l'inverse, Hydro-Québec serait obligée d'aller relier toute personne qui déciderait d'aller s'installer à 30 milles, 40 milles ou 100 milles de distance des réseaux normaux de distribution d'électricité. Je n'aimerais pas trop recevoir cette facture sur ma note. C'est parfaitement normal qu'Hydro-Québec exige qu'il y ait un paiement d'exécuté. Il faut bien comprendre qu'il y a plus de 2 000 000 d'abonnés à Hydro-Québec. S'il fallait que l'entreprise commence, même avec des photos en couleur à l'appui, de pareilles requêtes, on risquerait de se retrouver avec des dizaines de millions de dollars engagés chaque année pour répondre à ce genre de demandes venant de la clientèle.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bordeleau: Tout simplement dans la même veine, si le ministre dit au député d'Outremont qu'il peut régler des problèmes de ce type, je vais lui envoyer les miens. J'ai également un certain nombre de gens qui voudraient faire payer les poteaux ou les lignes.

M. Duhaime: Le député d'Outremont ne m'a jamais parlé de ce dossier en dehors du cadre de nos travaux en commission parlementaire mais, si vous communiquez avec Hydro-Québec pour régler ce genre de problèmes, peut-être qu'ils vont se régler. Sinon, vous pourrez m'en parler et on verra, surtout quand on est adjoint parlementaire.

Le Président (M. Lafrenière): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Juste une explication, puisque j'ai moi-même travaillé dans un certain secteur à Hydro-Québec. C'est que, effectivement, Hydro-Québec, lorsqu'elle reçoit une demande d'un groupe de citoyens, fait une étude sur les retombées internes en revenus sur les cinq années en projection. Elle ne facture pas à la clientèle si c'est un regroupement de chalets ou un regroupement de maisons isolées. Elle ne charge pas si c'est rentable dans les cinq années subséquentes. Cependant, c'est qu'après cinq ans, si ça ne se rentabilise pas, il y a des coûts qui sont facturés à chacun des citoyens et citoyennes qui sont rattachés.

Dans un deuxième temps, lorsqu'il y a un individu isolé - j'en ai un à Saint-Augustin dans le comté de Duplessis qui s'est ramassé avec une facture de 12 000 $ d'Hydro-Québec - Hydro-Québec, à ce moment-là, ne facture que les coûts fixes, c'est-à-dire le coût des matériaux: poteaux, fils, ancrages, mais elle n'exige rien pour la main-d'oeuvre qui se déplace pour aller faire l'installation. C'est à l'intérieur des programmes réguliers.

Le Président (M. Lafrenière): Mesdames et messieurs, merci beaucoup. Nous terminons les travaux de la commission de l'économie et du travail.

(Fin de la séance à 18 h 30)

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