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(Dix heures treize minutes)
La Présidente (Mme Harel): Messieurs, la commission
permanente de l'économie et du travail commence ses travaux.
Je vais demander au secrétaire de la commission de nous indiquer
immédiatement les remplacements parmi les membres de la commission qui
vont siéger pour l'étude des crédits.
M. le secrétaire.
Le Secrétaire: M. Maltais (Saguenay) remplace M. Bourbeau
(Laporte); M. Polak (Sainte-Anne) remplace M. Kehoe (Chapleau).
La Présidente (Mme Harel): Cette séance de la
commission permanente de l'économie et du travail a pour objet
d'étudier les crédits budgétaires du ministère du
Travail conformément au mandat qu'elle a reçu de
l'Assemblée nationale. Je voudrais d'ailleurs profiter de cette
première séance de notre commission, en présence de ses
membres et du ministre du Travail, pour nous souhaiter, dans le cadre de
l'étude de ces crédits, mais aussi dans le cadre des travaux que
nous entreprendrons durant l'année qui vient, un travail très
substantiel et très fructueux.
Avant d'entreprendre l'étude du premier programme, parce que je
crois comprendre qu'il y a consentement pour siéger
immédiatement, M. le secrétaire, en dépit de l'absence de
quorum et qu'il y a également consentement pour les remarques
préliminaires, je rappelle que, théoriquement, chaque membre de
la commission peut utiliser vingt minutes de temps de parole. Je crois
comprendre que M. le ministre et le critique officiel de l'Opposition en
matière du travail utiliseront leur temps de parole de vingt minutes
pour procéder aux remarques préliminaires. Nous allons
immédiatement, de consentement, étudier le programme 2, je crois,
qui porte sur la santé et la sécurité du travail. C'est
bien le cas?
M. Fréchette: C'est de cette façon que nous nous
sommes entendus. La procédure que vous venez de suggérer me va
parfaitement bien.
La Présidente (Mme Harel): La parole est au ministre du
Travail et nous en sommes à l'étape des remarques
préliminaires.
Remarques préliminaires M. Raynald
Fréchette
M. Fréchette: Merci, Mme la Présidente. Au cours du
mois de mars dernier, lorsque la commission du travail a terminé ses
travaux sur la loi 42, je me souviens que le président de la commission,
le député de Rivière-du-Loup, avait signalé
à la toute fin de nos travaux que cette commission tournait la page, en
quelque sorte, sur l'ancien règlement et que cela constituait un fait
historique.
Nous nous retrouvons effectivement, ce matin, Mme la Présidente,
à l'étude des crédits du ministère du Travail,
conformément à la nouvelle procédure qui est la
nôtre et qui procède de la volonté des deux partis qui sont
représentés à l'Assemblée nationale. Il me semble
que cette volonté commune va contribuer à inculquer à
chacun une plus grande responsabilisation du travail des parlementaires et,
cela, bien sûr, quelle que soit leur allégeance politique.
Je vous remercie, Mme la Présidente, de l'accueil que vous me
faites à la commission. Puis-je profiter de ces remarques
préliminaires pour vous indiquer que toute ma collaboration vous est
acquise, à vous et à tous les membres de cette commission? Je
prendrais aussi une minute pour vous offrir mes meilleurs voeux de
succès dans votre nouvelle fonction, à vous et au
vice-président de la commission, le député d'Outremont,
et, en même temps, bien sûr, à toute l'équipe des
fonctionnaires qui vous secondent régulièrement dans
l'exécution des fonctions qui sont les vôtres.
Je prendrai une minute également, Mme la Présidente, pour
vous présenter, autant du ministère du Travail que des
différents organismes et/ou sociétés qui relèvent
du ministre du Travail, les sous-ministres, les fonctionnaires et les
présidents. Je commence à ma droite, sans aucune espèce de
préférence: M. Robert Sauvé, qui est le
président-directeur général de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail; à ma droite
immédiate, M. Raymond Désilets, qui est sous-ministre adjoint aux
relations de travail au ministère du Travail; à mon extrême
gauche, M. Raymond Parent, qui est le président du Conseil consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre; M. Bernard Bastien, qui est le
président du Conseil des services
essentiels; M. Alcide Fournier, qui est le président de l'Office
de la construction du Québec; et, à ma gauche immédiate,
M. Maurice Bernier, qui est mon directeur de cabinet.
Je pense utile de souligner dès maintenant, Mme la
Présidente, que le ministère du Travail vient de terminer sa
première année complète d'autonomie, autant au plan
budgétaire qu'au plan du fonctionnement. On se rappellera en effet que
c'est le 9 septembre 1982 que la décision avait été prise
de scinder, en quelque sorte, l'entité administrative qui s'appelait
Travail, Main-d'Oeuvre et Sécurité du revenu pour en faire deux
entités administratives: Travail, d'une part, référant
plus spécifiquement aux relations du travail, et Main-d'Oeuvre et
Sécurité du revenu.
Dans les quelques remarques préliminaires que je m'apprête
à vous livrer, je pense que l'on va percevoir que la décision,
qui a alors été prise, était tout à fait
justifiée et que, une année seulement après que cette
réforme a été effectuée, déjà les
effets bénéfiques s'en font sentir. Je repasserai
brièvement, Mme la Présidente, quelques dossiers
d'actualité qui ont marqué cette année dont je viens de
parler autant au niveau du ministère du Travail qu'au niveau de l'un ou
l'autre des organismes dont j'ai présenté, tout à l'heure,
les représentants. Je veux simplement et brièvement rappeler, Mme
la Présidente, l'adoption, au cours du mois de juin 1983, de la loi 17.
Vous vous souvenez que l'adoption de cette loi s'inscrivait dans le cadre du
discours inaugural du 23 mars 1983 à l'intérieur duquel le
gouvernement, par le premier ministre, indiquait très clairement son
intention de procéder par étapes à la
réévaluation du Code du travail. La première étape
étant l'adoption d'une loi dont les objectifs allaient parer au plus
pressant et au plus urgent, c'est effectivement cette loi 17, encore une fois,
qui a été adoptée, comme je viens de le signaler, et
sanctionnée au mois de juin 1983.
Dans ce même discours inaugural, Mme la Présidente, du 23
mars 1983, le premier ministre indiquait également l'intention du
gouvernement de procéder à la réévaluation,
à la réforme, à la révision globale du Code du
travail. Cependant, il indiquait à la même occasion qu'il fallait
procéder à ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la
deuxième phase avec prudence, avec circonspection, dans le respect des
opinions des principaux intervenants et en essayant de dégager les plus
grands consensus possible. C'est à partir de ces principes, qu'on
retrouve dans le discours inaugural du mois de mars 1983, qu'a
été mise sur pied cette commission itinérante dont nous
aurons très certainement l'occasion de reparler au cours des heures que
nous allons consacrer à l'étude des crédits du
ministère du Travail.
Permettez, Mme la Présidente, que je vous dise également
un mot sur les intentions du ministère du Travail quant à Loi sur
les décrets de convention collective. On le sait tous, il s'agit
là d'une loi qui a plus de cinquante années d'existence
maintenant et qui a très certainement atteint, à travers les
âges, à travers cette longue période de temps, les
objectifs que le législateur de l'époque s'était
fixés. Maintenant, après autant d'années
d'expérience, après autant d'années d'exercice, il nous
semble que le temps est venu de procéder à une évaluation
des mécanismes de la loi, des objectifs qu'elle visait à
atteindre au moment où elle a été adoptée par
rapport à ceux que maintenant nous voulons atteindre et, à partir
de là, Mme la Présidente, je voudrais signaler aux membres de la
commission que depuis plusieurs mois, près d'une année, en fait,
j'ai demandé à un groupe d'étude du ministère de
procéder effectivement à faire le bilan, en quelque sorte, de la
Loi sur les décrets de convention collective. Au moment où l'on
se parle, je suis en mesure de vous indiquer que ce comité a, à
toutes fins utiles, terminé son travail et qu'il soumettra très
bientôt trois solutions par rapport à la Loi sur les
décrets de convention collective. Faut-il purement et simplement abroger
cette loi, la faire disparaître complètement de nos statuts?
Faut-il la remanier ou l'amender en profondeur? Ou alors, faut-il purement et
simplement l'ajuster sur le plan strictement technique, l'ajuster pour qu'elle
puisse répondre aux exigences des années quatre-vingt? Ce sont,
je vous le signale, les trois avenues qui sont ouvertes par ce comité
d'étude dont je viens de parler et, à ce stade-ci, je ne pourrais
pas indiquer aux membres de la commission laquelle des trois solutions sera
retenue par le gouvernement, sauf qu'il nous apparaît évident
qu'il nous faudra effectivement procéder à des amendements
à cette loi.
Mon collègue de Portneuf m'a déjà, à cet
égard, posé une question à l'Assemblée nationale et
je lui avais indiqué à ce moment, Mme la Présidente, que
ce printemps-ci, je procéderais à ce que j'avais qualifié
à l'époque d'un dépôt d'un avant-projet de loi
à l'Assemblée nationale de façon que le document soit le
plus largement possible diffusé à travers les intervenants, les
groupes, les instances intéressées pour que, ensuite, nous
puissions recueillir les observations, les recommandations de ces groupes ou
organismes. Informations prises, il semble que, quant à la forme, ce ne
serait pas par le dépôt d'un avant-projet de loi qu'il faudrait
procéder mais par un autre moyen, soit le dépôt pur et
simple d'un document qui pourrait avoir l'allure d'un livre vert ou n'importe
quelle autre allure,
mais qui contiendrait, de toute façon, tous les renseignements
pertinents et utiles à la discussion pour la réévaluation
de la Loi sur les décrets de convention collective.
Je vous signalerai également, Mme la Présidente, dans ce
bilan rapide que je suis en train de vous faire, que la commission
d'enquête qui avait été mise sur pied à la suite des
incidents que l'on connaît à la compagnie Expro de
Saint-Timothée dans le comté de Beauharnois a effectivement
complété son mandat, qu'elle a remis son rapport écrit au
mois de novembre dernier en présence de toutes les parties
intéressées à Valleyfield. Cette commission
d'enquête a tiré des conclusions dans lesquelles on retrouve
au-delà d'une trentaine de recommandations tant en termes de
santé et de sécurité du travail qu'en termes de
modernisation de l'entreprise. Et je vous signale, Mme la Présidente,
qu'au moment où l'on se parle, un comité interministériel
a été formé, présidé par le ministre du
Travail, et auquel se sont joints le ministère de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme, le ministère de la Science et de la
Technologie, le ministère du Commerce extérieur et un autre dont
l'identification m'échappe, le ministère de la Main-d'Oeuvre, et
les représentants de tous ces ministères ont déjà
tenu trois ou quatre séances de travail aux fins de concrétiser
les recommandations de la commission Beaudry.
Je voudrais également, Mme la Présidente,
brièvement rappeler à l'attention des membres de la commission
une action du ministère du Travail qui a été prise
à la fin du printemps dernier, au début de l'été
dernier, et qui était en relation avec les travaux du gazoduc qui se
sont amorcés à ce moment. On va se souvenir que le
ministère avait pris l'initiative, à peu près à ce
temps-ci l'année dernière, de procéder par étapes
pour que ces travaux puissent se faire le plus "sereinement possible", si vous
me passez l'expression. Nous avions donc procédé à
rencontrer autant les parties patronales que syndicales pour d'abord
connaître leurs perpectives quant au début et à la
poursuite des travaux du gazoduc et en même temps leur faire savoir les
intentions du ministère du Travail quant à la politique de
placement sur les chantiers du gazoduc. Je suis très heureux de signaler
à la commission que, effectivement, par la collaboration de toutes les
parties intéressées, par le travail presque quotidien et
inlassable de l'Office de la construction du Québec, les travaux du
gazoduc se sont amorcés, se sont poursuivis tout au cours de
l'été sans que nous n'ayons aucune espèce
d'embêtement. (10 h 30)
Mme la Présidente, à un autre chapitre, je rappelle aux
membres de la commission la tenue de la commission parlementaire au mois de
décembre dernier sur l'administration et le fonctionnement de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Les
travaux se sont poursuivis pendant cinq jours. Ils ont permis, je pense,
à ceux et à celles qui en avaient manifesté le
désir, autant les parlementaires que les parties externes, de pouvoir
venir dans ce forum qu'est une commission parlementaire s'exprimer au chapitre
de l'administration et du fonctionnement de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail. Cette commission du mois de
décembre a été suivie par une autre à la fin du
mois de février et au début du mois de mars sur la loi 42, la Loi
sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Cette
deuxième commission, vous le savez, Mme la Présidente, a
duré une bonne dizaine de jours. Nous avons entendu quelque 43
organismes qui sont venus faire des représentations, après avoir
reçu au Secrétariat des commissions quelque 46 mémoires.
Cette commission parlementaire, du moins je le prétends, a permis de
réévaluer en profondeur le projet de loi 42 et elle s'est
terminée par cette motion de réécriture qui a
été adoptée par la commission parlementaire et qui fait en
sorte que, lorsque le projet de loi 42 sera redéposé à
l'Assemblée nationale, il sera, comme les termes l'indiquent, Mme la
Présidente, réécrit et contiendra des amendements majeurs
à plusieurs égards et à plusieurs chapitres.
C'étaient essentiellement les remarques préliminaires que
je voulais vous soumettre, Mme la Présidente, en insistant
peut-être, en terminant, sur un dernier aspect qui concerne
l'administration du ministère du Travail plus spécifiquement.
Mme la Présidente, on le sait, la Direction
générale des relations du travail se compose du service de la
conciliation, du service d'arbitrage et il y a aussi un service qui s'appelle
celui de la médiation préventive, qui est peut-être un peu
moins connu du grand public et qui a pourtant jusqu'à maintenant, depuis
qu'il est institutionnalisé, obtenu des résultats, des
succès remarquables. Le service de la médiation
préventive, Mme la Présidente, en est un en vertu duquel les
parties intéressées, lorsqu'elles s'entendent, peuvent avoir
recours pendant la vie d'une convention collective, non pas à l'approche
d'une négociation, non pas non plus, bien sûr, en plein coeur
d'une négociation mais pendant la vie d'une convention collective, par
exemple, une convention de trois ans qui est signée depuis six mois ou
un an... Lorsque les parties en manifestent le désir, lorsqu'elles
s'entendent, des spécialistes de la médiation préventive
peuvent aller dans l'entreprise pour procéder à
l'évaluation, non pas précisément des conditions de
travail à proprement parler, mais des relations humaines qui se vivent
à
l'intérieur de l'entreprise. Vous savez, si, pendant la vie d'une
convention collective les relations humaines commencent à se
détériorer et qu'effectivement tout au cours de la vie de la
convention collective elles se détériorent complètement,
il y a de fortes chances qu'à l'expiration de la convention collective,
le moment arrivé pour amorcer une négociation, non pas
nécessairement, encore une fois, à cause des conditions de
travail à proprement parler mais à cause de l'atmosphère
qui s'est développée à l'intérieur de l'entreprise,
les parties soient déjà à des distances absolument
infranchissables pour amorcer une négociation. Alors, la
médiation préventive est donc au service des parties qui le
veulent, pendant le cours d'une convention collective, et elle a comme objectif
"d'assainir" les conditions de vie à l'intérieur de
l'entreprise.
Mme la Présidente, en terminant, je vous signalerai simplement
que ce service a déjà une soixantaine d'expériences
à son crédit et que, parmi ces expériences, il y en a qui
ont été menées à l'intérieur d'entreprises
où presque historiquement les conditions de travail étaient
invivables pour tout le monde. Aucune convention ne se terminait sans qu'un
conflit n'éclate, ne se prolonge longuement dans bien des cas et soit
marqué au coin, parfois, de la violence physique.
Alors, dans ces soixante entreprises où l'expérience de la
médiation préventive a été menée et
vécue par les deux parties, je pense pouvoir dire que les
résultats ont partout été au-delà de ce que les
parties elles-mêmes et les membres du service eux-mêmes en
attendaient. Je pourrais vous donner l'exemple d'entreprises où les
relations étaient ce dont je viens de vous parler et qui, à la
grande surprise de tout le monde, ont signé des conventions collectives
à l'expiration d'une antérieure, sans conflit et dans un laps de
temps record. Or, il m'apparaissait utile, Mme la Présidente, d'attirer
l'attention des membres de la commission sur ce service de la médiation
préventive qui est institutionnalisé maintenant depuis un peu
plus d'une année et qui donne, encore une fois, des résultats qui
dépassent ce que tout le monde avait espéré. Nous pourrons
sans doute y revenir. Merci.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre. Nous
aurons certainement l'occasion durant toute la journée d'aborder chacun
des aspects dont vous avez parlé. La parole est maintenant au
député de Portneuf, qui est aussi le porte-parole de l'Opposition
en matière du travail.
M. Michel Pagé M. Pagé: Merci, Mme la
Présidente. M. le secrétaire de la commission, chers
collègues, membres de la commission de l'économie et du travail,
M. le ministre, je voudrais évidemment ajouter ma voix à celle de
M. le ministre pour vous faire part de toute la confiance que les
parlementaires ont témoignée lorsqu'ils ont accepté
unanimement votre élection comme présidente de cette
commission.
Mes premières paroles seront pour saluer bien cordialement et
amicalement, et leur témoigner mon appréciation personnelle et
celle de mon groupe parlementaire, messieurs et mesdames les fonctionnaires qui
accompagnent le ministre du Travail ce matin, que ce soit au niveau du
sous-ministre, des sous-ministres adjoints, des services connexes du
ministère du Travail. Souventefois, nous avons l'occasion, soit par des
questions, soit par des commentaires, de mettre en relief le travail que vous
abattez dans vos secteurs respectifs; je voudrais ce matin, parce que le moment
est privilégié lors de l'étude des crédits, saluer
bien cordialement la contribution significative que vous apportez à
l'évolution de notre société par votre engagement et votre
travail au sein du ministère.
Nous sommes là pour adopter 40 000 000 $ de crédits.
L'observateur de l'étude des crédits pourrait se dire que c'est
bien peu sur un budget de plusieurs milliards de dollars, mais il suffit
d'être un peu familier avec le monde des relations du travail, avec les
objectifs poursuivis par le ministère du Travail et avec le mandat
confié au ministre du Travail et à son équipe, pour
constater comment ces sommes peuvent être importantes dans
l'économie du Québec au chapitre du climat des relations entre
les employés, les employeurs et de ceux qui, finalement, travaillent et
besognent quotidiennement au Québec. Nous aurons l'occasion dans dix ou
onze heures qui nous sont allouées de scruter plus attentivement
l'affectation de ces sommes, leur ventilation, ce à quoi elles servent
et ce à quoi, plutôt, elles devraient servir.
Mme la Présidente, pour avoir assisté à
l'étude des crédits depuis déjà plusieurs
années, vous aurez certainement constaté que l'étude des
crédits est un moment privilégié pour voir quelles sont
les intentions du ministre du Travail, voir jusqu'où le mandat qui lui
est confié par la loi est respecté intégralement. Ces
crédits nous permettent généralement, du côté
des parlementaires, d'échanger avec le ministre et de dégager les
orientations que le titulaire du ministère est à donner,
prévoit donner aux actions de son ministère.
M. le ministre du Travail, le 16 décembre 1982, vous avez
été désigné par le premier ministre comme ministre
délégué au Travail. Vous preniez l'héritage de deux
de vos prédécesseurs, MM. Johnson et Marois.
Je pourrais insister assez longuement sur l'héritage qui vous a
été cédé, mais là n'est pas l'objectif de
notre démarche ce matin. Mais, je retiens que vous n'avez certainement
pas eu, comme peu d'ailleurs l'ont, l'occasion de faire un
bénéfice d'inventaire avant d'accepter la nomination parce que
rares sont les hommes politiques qui disent au premier ministre: On va attendre
une semaine et je vais vérifier cela et je te rappellerai. Ils se
dépêchent à revêtir leur habit bleu marin, à
téléphoner à leur femme et à venir se faire
assermenter.
Vous avez été nommé le 16 décembre. Vous
avez été confronté dès le début à des
problèmes fort délicats, fort particuliers. Vous avez très
probablement, comme d'autres, pris quelques mois pour faire le tour de votre
ministère, apporter les réaménagements nécessaires,
former votre cabinet, etc. Votre ministère a fait l'objet de
déclarations importantes dans le discours inaugural de la part du
premier ministre et vous êtes venu aux crédits de 1983. À
ce moment, l'équipe parlementaire dont je suis, l'Opposition, vous avait
posé - c'était au début du mois de mai ou juin -...
Une voix: Mai.
M. Pagé: ...au début du mois de mai -plusieurs
questions sur les volets particuliers de l'administration de votre
ministère. De plus, on se rappellera... M. le juge Sauvé, que je
salue, se rappellera très certainement qu'une partie importante du temps
qui nous était alloué avait servi à vous interroger sur
les orientations de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
Cependant, nous n'avions pas eu l'occasion de voir ensemble quelle
était votre position comme ministre du Travail, les grandes orientations
que vous entendiez donner. Vous veniez d'arriver. On voulait vous
ménager, on voulait vous laisser une chance. Vous étiez, comme
vous l'êtes encore aujourd'hui, un bon gars et on se disait: On va lui
laisser le temps de s'installer puis on l'interrogera l'année
prochaine.
Mme la Présidente, en ce printemps 1984, on ne peut que
s'interroger sur les conditions qui entourent les relations du travail au
Québec, sur les conditions qui entourent les droits des travailleurs et
des employeurs, sur la situation de cette dynamique sociale entre deux groupes,
deux entités. On ne peut que s'interroger sur l'opportunité de
certaines orientations politiques qui ont été données par
les gouvernements qui ont précédé au chapitre des
relations du travail.
Force nous est de constater que la situation qui prévaut
actuellement témoigne d'un certain flottement, d'une certaine
imprécision. Des lois importantes ont été adoptées
à l'Assemblée nationale depuis quelques années. Qu'il me
suffise de faire référence au projet de loi 45, à son
expérience, le vécu des travailleurs et des employeurs avec cette
loi, à la loi 17 à laquelle le ministre a fait
référence, pour laquelle des appréhensions nombreuses
avaient été signalées, desquelles on ne peut que commencer
à tirer certaines conclusions qui, encore là, sont bien
incertaines.
Il y a tout cet aspect de l'effet de la crise économique sur les
relations du travail, plus particulièrement dans le secteur
privé; il y a le comportement de l'employeur, le comportement de
l'employé qui doivent nécessairement être jaugés,
mesurés et analysés en fonction des actions qu'un
ministère comme le vôtre doit enclencher; il y a l'orientation de
certains groupes. Qu'il me suffise de vous donner, à titre d'exemple -
cela, vous en êtes bien conscient - cette orientation qui semble
être caractérisée par une approche de fermeté de la
part de l'Association des entrepreneurs en construction, dans le cadre du
présent décret. Il y a cette orientation qu'on semble percevoir
dans les milieux syndicaux d'une plus grande solidarité à
l'égard des problèmes économiques que notre
société vit. Qu'il suffise de référer au fonds de
solidarité de la FTQ. Mais, encore là, force nous est aussi de
constater que cet objectif tout à fait louable qui a été
concrétisé par une loi, ici à l'Assemblée, a
impliqué un débat assez serré à l'intérieur
des rangs mêmes de la FTQ. (10 h 45)
II y a des phénomènes particuliers auxquels le ministre du
Travail ne peut demeurer insensible. Il y a le phénomène de la
désaffiliation. On sait que nos lois sous-tendent ou ont eu comme
objectif, depuis quelques années, de favoriser l'exercice par les
travailleurs du droit de se réunir, de se syndiquer et de
défendre leurs droits. Comment expliquer que notre
société, que le Québec connaisse sensiblement un
phénomène analogue à celui qui se passe un peu partout en
Amérique du Nord? Exemple: en Californie, le taux de
désaffiliation syndicale et de désyndicalisation est palpable
à chaque année.
C'est le tableau; il est imprécis, il est peut-être flou,
mais c'est un tableau auquel le ministre du Travail se doit de consacrer
beaucoup de temps et beaucoup d'efforts pour que les solutions qui se
dégageront ici devant le Parlement ou l'action du ministère
soient les meilleures possible.
Depuis un an, vous avez posé des gestes, vous avez défendu
vos lois, mais on s'attendait à un peu plus que cela de votre part.
Depuis quelques années, M. Marois et M. Johnson y ont
référé, votre gouvernement a dit souhaiter, ce qui est
nécessaire selon nous, "une réforme globale du Code du
travail", de tout le phénomène de l'aspect contentieux,
l'aspect judiciaire, la déjudicia-risation des relations du travail, des
problèmes fort épineux que notre société vit, que
des travailleurs et travailleuses vivent, en raison de cet état de
droits qui débouche sur une situation de faits déplorable.
C'est à se demander où votre gouvernement a
relégué son programme politique parce qu'un gouvernement,
normalement, agit en fonction d'un programme politique qu'il a adopté et
c'est ce qu'il présente à la population. Ce furent
hésitations sur hésitations depuis quelques années
à cet égard. Qu'on se rappelle le vocabulaire utilisé par
vous au début de votre désignation comme ministre du Travail, par
vos prédécesseurs, à l'égard de
l'accréditation multipatronale et de la négociation sectorielle.
Un bout de temps, l'observateur des relations du travail au Québec
croyait que c'était une volonté politique de votre gouvernement
de s'y diriger. Cela a débouché sur des hésitations, des
contradictions dans certains cas, entre le groupe économique de votre
gouvernement et le groupe "socio", entre guillemets.
Force nous est de constater M. le ministre, on vous le dit bien
amicalement, que vous témoignez actuellement d'un manque de leadership
évident à cet égard. Vous avez annoncé, il y a
quelques semaines, la formation d'un groupe de travail qui enclencherait une
journée de consultation, laquelle pourrait déboucher
éventuellement sur une conférence socio-économique:
absence de leadership encore là. Il nous apparaît que ce fut
improvisé et pourquoi? Parce qu'on a senti de l'inquiétude dans
le milieu, des doutes sur le mandat, sur l'opportunité de tenir une
commission, une démarche, comme vous l'avez annoncé. Vous avez,
à notre grand regret, mis de côté les recommandations qui
nous apparaissent justifiées d'un organisme qui est là pour vous
guider, pour vous aider et pour vous assister, le Conseil consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre, qui voulait un mandat plus large touchant
l'ensemble des lois du travail dans le secteur privé et dans le secteur
public, qui voulait éviter ou qui craignait l'opération
strictement politique, qui voulait une commission mandatée et
encadrée par le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre et
c'était tout à fait légitime. Le conseil exigeait que le
président, sans apporter quelque grief que ce soit à
l'égard de M. Châtillon, soit une personne d'expérience
dans les relations du travail. Vous avez manqué de leadership à
cet égard. On ose espérer que les imprécisions et
l'improvisation qui a animé l'annonce de tout cela ne
déboucheront pas sur un échec de la démarche.
Vous avez témoigné et vous témoignez encore d'un
manque de leadership évident dans la situation qui est faite à
des milliers et des milliers de travailleurs qui ne sont pas syndiqués
mais qui sont régis par des décrets de convention collective. En
1983, ce sont 112 000 travailleurs qui oeuvrent au sein de 20 000 entreprises
qui sont régis par de tels décrets.
Sans revenir à l'historique qui a expliqué le pourquoi de
l'adoption d'une telle loi, on se rappelle - tout le monde doit le constater
aujourd'hui - que la Loi sur les décrets de convention collective doit
être mise à jour. Plusieurs groupes s'interrogent sur
l'opportunité du maintien de tel ou tel décret. Tout le monde se
demande pourquoi, quel est l'objectif d'un décret. On sait qu'au
début l'objectif des décrets était de sécuriser les
patrons dans ces années-là, pour freiner la syndicalisation. On
constate aujourd'hui que, dans plusieurs cas où un décret
s'applique, ni la partie patronale n'a l'impression, et encore moins la
conviction, de participer au processus de renouvellement de ces décrets.
On se retourne de bord et on consulte les employés et ni les
employés soumis à de tels décrets n'ont l'impression, et
encore moins la conviction, de participer à l'échange, à
la négociation, pour établir leurs conditions de travail. Il y a
des situations de désuétude. Il y a des problèmes
épineux au niveau des régions; qu'il me suffise de
référer à la coiffure, à ce qui se passe dans la
région de Québec et dans la région de Montréal par
rapport aux autres régions.
Nous devions avoir pour ce printemps-ci un avant-projet de loi, une
position gouvernementale bien encadrée nous disant: C'est ce qu'on veut
et c'est la volonté politique du gouvernement. Nous apprenons ce matin,
à notre grande déception, qu'on aura droit à un livre
vert, un livre rose ou peu importe la couleur, qui débouchera sur un
mécanisme de consultations. Finalement, ce qu'on doit retenir ce matin,
c'est que le gouvernement a décidé de laisser porter une
situation déplorable pendant encore trop longtemps.
Je vais terminer rapidement, Mme la Présidente. Je dois
déplorer un manque de leadership de la part du ministre du Travail
concernant toute la question des négociations dans le secteur public et
parapublic. Un ministre du Travail dans un gouvernement -quel qu'il soit - doit
être au coeur même de l'équipe ministérielle qui a
à déterminer par le Conseil des ministres, et parfois avec
l'assentiment de l'Assemblée nationale, toutes les questions relatives
au régime de négociations dans le secteur public et parapublic et
toute la structure qui se rattache à la négociation, au maintien
des services essentiels, etc. Vous savez, le gouvernement a formé des
comités paritaires. Nous aurons l'occasion d'y revenir. Vous vous
êtes opposé ou vous n'avez pas cru opportun,
comme ministre du Travail, que le mandat de la commission
Châtillon touche entre autres les négociations dans le secteur
public et parapublic; cela aurait été important, selon nous, que
ce pan ou ce secteur soit touché par la commission.
Le secteur de la construction est le dernier secteur que je veux toucher
avant d'aborder les programmes. Vos prédécesseurs, et tout
particulièrement M. Johnson, vous ont laissé un héritage
certainement pas des plus motivants à l'égard du placement dans
l'industrie de la construction, un règlement dont l'objectif est
louable, à savoir... Parce que l'objectif du règlement de
placement, il ne faut pas se faire d'histoire, c'est de s'assurer que ce sont
les vrais travailleurs de la construction qui puissent travailler dans ce
secteur et c'est aussi s'assurer que le gâteau, le nombre d'heures
travaillées dans une année, puisse être distribué
équitablement de façon à garantir un revenu décent
aux travailleurs de la construction.
Depuis 1978, la volonté politique du gouvernement du Parti
québécois, dont vous êtes, s'est exprimée par des
modifications à la pièce, par des amendements périodiques,
témoignant par là des problèmes profonds
d'opération et de vécu avec ce fameux règlement. Encore
tout récemment, vous avez fait ratifier par le Conseil des ministres un
règlement permettant de reconduire pour deux ans le certificat de
classification de ces travailleurs, alors que la même chose vous
était demandée l'année passée et que vous n'avez
pas osé le faire. Il y a un problème au niveau du placement, vos
députés vous l'indiquent régulièrement dans vos
caucus - et ils ont raison - comme on peut le faire par des questions avec
débat, des interpellations, etc. Il y a maintenant cinq ans, il y a
maintenant un an et demi que les parlementaires à l'Assemblée
nationale du Québec, des deux côtés de la Chambre, tentent
de vous convaincre non seulement de réfléchir, mais de faire
quelque chose avec ce règlement. Pour ce faire, il faut une
volonté politique et un leadership.
Toute la question de la juridiction, de l'application du décret
de la construction, que de problèmes! Encore là, absence de
leadership, Mme la Présidente. Ce sont des milliers et des milliers
d'heures qui se travaillent actuellement au Québec et qui ne sont pas
soumises au décret de la construction. Ce n'est pas
considéré comme étant de la construction alors que les
travailleurs syndiqués, entre autres, ont les yeux tournés vers
ce type de travaux beaucoup plus que la réparation de la galerie dans le
comté de M. Blais ou dans le mien. Absence de leadership au niveau de la
juridiction. Il faudra que cela se règle une fois pour toutes. Et encore
là, là ou cela a été fait - on pourrait y revenir
tantôt... Qu'on regarde l'industrie du verre plat, la situation de droit
que vous avez modifiée est davantage susceptible de créer des
problèmes de fait qui auront des répercussions pour les
contribuables et les citoyens.
Toute la question du travail au noir. Il ne faut pas se faire de
cachette, ce secteur est tellement réglementé que des
travailleurs doivent - ils doivent parce qu'ils le font -s'adonner à du
travail au noir pour être capables de vivre. Et, par surcroît, des
citoyens et des citoyennes doivent contracter et transiger avec des
travailleurs au noir pour être capables de faire des travaux, incapables
qu'ils sont de payer 400 $ pour une journée pour deux travailleurs qui
viennent réparer leur galerie. Sur ce, les députés de
l'autre côté vont être d'accord avec moi, on pourra
revenir.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf, je vais vous demander de conclure, votre temps est déjà
expiré.
M. Pagé: Oui, je termine. Il y a toute la question du
renouvellement du décret. On doit déplorer que, malheureusement,
encore une fois, compte tenu d'un manque de leadership, parce que c'est une
situation contre laquelle on vous avait prévenus... Il y a quelques
années on vous avait prévenus qu'en modifiant certaines lois vous
n'auriez pas de majorité syndicale dans le monde de la construction et
que vous auriez des problèmes. Aujourd'hui, on doit constater,
malheureusement, que cette situation prévaut. On se retrouve dans une
situation où les deux parties sont en position de force. L'AECQ est en
position de force actuellement. Les 20%, ce n'est pas compliqué, ils
viennent de l'exemple du gouvernement. La construction semble prendre son envol
et est dans une position de force pour négocier. Les syndicats sont dans
une position de force aussi.
La Présidente (Mme Harel): En conclusion.
M. Pagé: Je reviendrai, au cours des questions que je vous
poserai, en vous disant, M. le ministre, bien amicalement, que cette
année on ne peut pas laisser passer tout cela. Pour nous, vous devez
assumer un meilleur leadership des responsabilités que vous avez sur
plusieurs secteurs, dans les plus brefs délais, et la commission de
l'économie et du travail sera là pour vous appuyer dans ces cas.
Mais bon Dieu de bon Dieu, manifestez-vous! Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Toujours sur les remarques
préliminaires. M. le député de Châteauguay.
M. Roland Dussault
M. Dussault: Mme la Présidente, je ne voudrais pas laisser
passer sous silence les propos qu'a tenus le député de Portneuf
relativement à l'attitude des membres du caucus des
députés du Parti québécois sur le règlement
de placement. On dit souvent: Qui ne dit mot consent. Je crains qu'à ne
rien dire, notre collègue de Portneuf aille dire par la suite que,
à ses propos n'ayant rien dit, on a vraiment consenti au contenu. Mme la
Présidente, je voudrais dire que jamais les députés
ministériels n'ont remis en question fondamentalement le
règlement de placement. Ils nous apparaît toujours important que
ce règlement de placement existe parce qu'on en a besoin
fondamentalement. On sait qu'il existe énormément trop de
travailleurs dans la construction, qu'il n'y a pas de travail pour tout ce
monde et qu'il est important d'assurer du travail d'abord aux vrais
travailleurs de la construction. Cependant, il nous est apparu, Mme la
Présidente, qu'il fallait améliorer le sort de certains
travailleurs potentiels de la construction - je pense aux jeunes
particulièrement - qu'il y avait quelque chose à faire du
côté des apprentis. Nous avons fait des représentations et
nous avons été entendus par le ministre. C'est ce que je voulais
dire, Merci. (11 heures)
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le
député de Châteauguay.
D'autres membres de cette commission veulent intervenir en remarques
préliminaires?
M. le député de Beauharnois.
M. Laurent Lavigne
M. Lavigne: Mme la Présidente, très rapidement
aussi. C'est un peu pour enchaîner parce qu'effectivement le
député de Portneuf a été un peu
sévère quant à la discussion qu'il y a eu sur le
règlement de placement dans la construction. On ne reprendra pas ici
tout le débat qui s'est tenu autour de la commission parlementaire sur
le saccage de la Baie James, de l'enquête Cliche. On ne reprendra pas ce
débat, Mme la Présidente, mais je suis sûr que le
député de Portneuf est quand même un député
qui a essayé, en tout cas, de se tenir au courant des choses du monde du
travail. Il n'est sûrement pas ignorant de ce qui se passait dans la
construction avant la venue du règlement de placement dans la
construction.
Un peu comme mon collègue de Châteauguay, à ne rien
dire sur cela, je ne voudrais pas qu'on prétende que les
députés ministériels mettent en doute le bien-fondé
du règlement de placement dans la construction. Je considère que
ce règlement est là pour demeurer fondamentalement, au niveau de
ses principes de fond, ses principes de base. On ne voudrait pas revivre au
Québec ce que nous avons vécu dans le passé dans le monde
de la construction, avec des tentatives d'un monopole syndical, etc. Le
principe est là pour demeurer.
Bien sûr qu'instaurer le règlement de placement dans la
construction, cela a amené dans certains cas des irritants auprès
de certaines personnes, mais il y a un principe fondamental qui est de donner
aux gens de la construction, aux vrais travailleurs de la construction, le
premier droit de gagner leur vie dans la construction et, par le
règlement de placement dans la construction, d'éloigner ou de
faire passer au second rang ou en deuxième lieu les gens qui ne sont pas
des vrais travailleurs de la construction. Quant à ce principe de fond,
nous serons là pour le maintenir, mais cela ne veut pas dire que nous
aurons les yeux fermés sur les modifications ou les aménagements
qu'on pourra y apporter éventuellement.
Dernièrement, les députés ministériels et
les responsables de l'OCQ ont eu justement des réunions afin de regarder
et examiner quels pourraient être les modifications et les
aménagements qu'on pourra apporter au règlement de placement dans
la construction. Je suis sûr que, d'ici peu de temps, le ministre aura
à se prononcer sur certaines modifications à apporter à ce
règlement. Je m'en voudrais de mettre de côté ce
règlement de placement, parce que je suis certain qu'à ce moment
on risquerait de connaître dans l'avenir ce que nous avons connu dans le
passé, et Dieu merci! j'espère qu'on ne connaîtra jamais le
temps où on engageait les gens sans règlement dans la
construction. Je ne voudrais pas partager ici, et je le dis bien clairement,
les propos du député de Portneuf, qui semblait trouver que le
règlement de placement dans la construction était un
règlement de trop.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): D'autres membres de cette
commission veulent formuler des remarques d'ordre général?
M. le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je m'en
voudrais en tant que député ministériel de ne pas
intervenir sur les remarques amicales, dit-on, de l'Opposition sur ce sujet.
Mais, en tant que personne qui ai travaillé pendant seize ans dans la
construction, ayant été directement impliqué dans le
domaine de 1951 à 1966, il faut absolument que je fasse des remarques.
Ayant connu la période où l'OCQ n'était pas en force,
ayant connu sur la construction même, sur les chantiers de construction,
de
1951 à 1959, de façon très directe, ayant connu,
avant l'arrivée du gouvernement Lesage, le droit de syndicalisation
n'étant pas là, ayant connu cette période, ayant connu de
1960 à 1966-1967 beaucoup de remous sur les chantiers de construction,
je me dois de venir à la défense de l'OCQ ici de façon
directe. C'est un témoignage comme gars qui a travaillé dans la
construction, qui a travaillé aussi pour aider la syndicalisation dans
la construction; je me dois d'intervenir. L'OCQ d'après moi est
là, il doit rester, les députés ministériels ne
mettent jamais en cause le bien-fondé de l'OCQ. Bien sûr, il n'y a
aucun organisme de cette ampleur où on ne peut pas trouver des lacunes
à l'intérieur du fonctionnement. Des fois, nous sommes quatre ou
cinq dans une famille et il y a des problèmes. Quand on est 100 000 et
150 000, aujourd'hui, cette noble crise nous vaut de prendre conscience des
problèmes que nous avons. Je l'appelle la noble crise parce que cette
noble crise nous fait voir les inconvénients de certaines de nos lois,
mais cette noble crise qui nous fait voir les inconvénients de certaines
de nos lois nous fait aussi prendre conscience que, autant les travailleurs que
le patronat, devant l'association qui s'appelle l'OCQ, on a des obligations que
cette crise rend plus tangibles encore. Je comprends beaucoup les travailleurs
de la construction qui sont à peu près 100 000 aujourd'hui. Il y
a encore beaucoup de chômage. Si on était en période de
prospérité comme cela a été le cas au Québec
de 1945 à 1975, les 30 années de prospérité,
hé bien! à ce moment-là s'il y avait eu un OCQ, cela
aurait été fameux. C'est en force.
Aujourd'hui, dans cette période de crise, à cause du
chômage c'est facile de dire: Cela ne fonctionne pas, il y a des gens
dans la construction qui ne travaillent pas. Mais ce n'est pas à cause
de l'OCQ, ce n'est pas le problème majeur. C'est loin d'être le
problème majeur; au contraire, c'est la protection de ceux qui sont dans
le domaine de la construction. Il ne faut jamais oublier non plus que, dans le
domaine de l'industrie, il y a au-delà de 200 000 postes qui
représentent les gens de métiers et c'est une ouverture aussi
pour ceux qui ne sont pas dans la construction. La construction n'est pas le
réceptacle de tout ce qui existe en fait de métiers: le plombier,
l'électricien, etc. Il y a d'autres endroits dans la
société où ces gens peuvent se placer. Si les gens de la
construction se sont unis au Québec pour former une association et des
syndicats pour protéger leur métier, leur gagne-pain, c'est aussi
valable pour eux que cela l'est pour d'autres métiers qui se sont
protégés, ne fût-ce que le secteur public ou parapublic
où, là, c'est extrêmement protégé.
Je me dois de dire que, jamais, du côté ministériel
on n'a mis en doute le bien-fondé de l'OCQ et je veux ici, pour un
ancien travailleur de la construction, le dire avec force. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Alors, je crois comprendre
qu'avec le consentement il y a d'autres membres de cette commission qui veulent
formuler des remarques?
M. Cusano: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Je vais procéder puisqu'on a passé des
messages publicitaires depuis les trois dernières interventions.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau, j'avais appelé l'étude du programme 2 parce que je crois
comprendre...
M. Cusano: Ah bon!
La Présidente (Mme Harel): ...du consentement unanime des
membres de cette commission que nous allons procéder à
l'étude du programme 2 et que nous allons revenir au programme 1 par la
suite pour étudier dans l'ordre les cinq programmes. Je vous rappelle
simplement ceci: En vertu de cette nouvelle réforme, la
présidence ou la vice-présidence de la commission peut
dorénavant intervenir. J'entends pouvoir me prévaloir de ces
nouvelles dispositions durant la journée. Je vais faire
immédiatement l'appel du programme 2.
M. le ministre ou des membres de cette commission, voulez-vous prendre
la parole?
M. Cusano: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député
de Viau.
Administration de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail
M. Cusano: J'écoutais le discours du ministre tout
à l'heure et il semblait se vanter du travail qui a été
fait par les parlementaires, spécifiquement en ce qui concerne la
Commission de la santé et de la sécurité du travail.
J'aimerais rectifier certaines choses. S'il y a eu une interpellation du
ministre, cela a été à la demande de l'Opposition. S'il y
a eu une commission parlementaire pour examiner le fonctionnement et
l'administration de la CSST, c'est à la demande aussi d'une motion que
j'avais formulée en Chambre à laquelle le ministre a consenti.
J'aimerais spécifier que la plupart du travail dans ce domaine a
été entrepris par l'Opposition. C'est mon
petit message publicitaire, Mme la Présidente, ce matin.
Si vous permettez, et ne vous gênez pas pour m'interrompre si je
ne suis pas les règlements, je vais procéder à des
questions adressées au ministre sur la Commission de la santé et
de la sécurité du travail. Je dois avouer que je suis un peu
déçu de procéder ce matin à l'étude de la
commission pour examiner encore une fois son administration. Malheureusement,
nous n'avons pas entre les mains le rapport annuel de la commission.
M. le ministre, l'article 163 de la Loi sur la santé et la
sécurité du travail exige que la commission fasse rapport de ses
activités au ministre pour l'exercice financier précédent.
Ce rapport doit être soumis au ministre avant le 1er avril. Est-ce que
vous avez reçu ce rapport?
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, pour répondre
expressément à la question du député de Viau, je
vous signale... Je m'excuse. C'est Mme la Présidente. Il va falloir que
je revienne à de meilleurs sentiments, madame.
La Présidente (Mme Harel): Non, je ne doute pas de vos
sentiments. C'est une question d'usage, M. le ministre.
M. Fréchette: Je disais donc au député de
Viau qu'au moment où l'on se parle je n'ai pas encore
expressément reçu le rapport de la commission de santé et
sécurité. Ce que je peux lui dire cependant, c'est qu'un projet
de rapport est maintenant finalisé, qu'il va devoir être soumis au
conseil d'administration à sa prochaine réunion
régulière qui va se tenir le 19 avril et, dès lors que le
conseil d'administration aura donné son placet à la publication
du rapport, il est évident qu'il me sera soumis et, par la suite,
déposé à l'Assemblée nationale.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Vous avez pris connaissance de ce rapport
préliminaire, M. le ministre?
M. Fréchette: Non, Mme la Présidente. Je n'en ai
pas pris connaissance.
M. Cusano: Vous ne pouvez donc pas répondre à
certaines questions.
M. Fréchette: Enfin, je suggère que le
député de Viau pose ces questions, Mme la Présidente. Si
je ne peux y répondre, je le lui dirai aussi sereinement que je suis en
train de le faire et je répondrai avec plaisir aux autres questions
auxquelles je pourrai répondre.
M. Cusano: Ma première question, M. le ministre, serait
pour savoir quels ont été les revenus de la commission pour
l'année.
M. Fréchette: Vous allez comprendre, Mme la
Présidente, qu'il va nous falloir parler strictement en termes de
projection et qu'au moment où on se parle tout cela n'a pas encore
été finalisé.
Encore une fois, si l'on accepte la réserve que je viens de
faire, en termes de prévisions, la situation se présenterait de
la façon suivante: les cotisations des employeurs
généreraient des revenus de 715 692 000 $ et les revenus de
placements seraient de 186 448 000 $. Je n'ai pas besoin d'insister ici, Mme la
Présidente, pour vous dire quel est le bon état de santé
du fonds actuariel de la commission de santé et de
sécurité. C'est pour cela qu'on peut compter sur des revenus de
placements de près de 200 000 000 $, plus précisément 186
448 000 $. Finalement, une troisième source de revenus anticipés,
ce sont les intérêts sur les cotisations et d'autres revenus pour
un montant de 25 138 000 $, de sorte que le total de ces revenus atteindrait le
chiffre de 927 278 000 $ par rapport à 887 896 000 $ pour l'année
1982.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: II y a peut-être une différence, M. le
ministre. Comme vous le dites, puisque c'est seulement un rapport
préliminaire, je sais qu'il va être ajusté.
M. Fréchette: Je pense que j'ai suffisamment pris de
réserve pour...
M. Cusano: Ah! Vous le faites toujours, M. le ministre. (11 h
15)
M. Fréchette: ...signaler aux membres de la commission.
Oui, je comprends bien, mais c'est particulièrement important dans un
cas comme celui-là.
M. Cusano: Oui, sachant les revenus, est-ce que vous avez une
indication des dépenses?
M. Fréchette: Oui, Mme la Présidente, et toujours
avec la même réserve. Je vous signale que cela peut prendre un peu
de temps que de faire la ventilation des dépenses prévues, mais
je pense qu'il est important qu'on le fasse.
Quant aux différents programmes de réparation, les
coûts prévus pour 1983: d'abord, l'assistance médicale
serait de l'ordre de 96 445 000 $; les paiements pour les incapacités
temporaires seraient de
l'ordre de 276 820 000 $; pour les incapacités permanentes, 199
966 000 $ et pour les décès, 23 017 000 $. Donc, au chapitre des
programmes de réparation, l'évaluation globale nous
amènerait au montant de 596 248 000 $.
M. Cusano: Vous dites 596...?
M. Fréchette: 596 248 000 $. Il faut parler des programmes
de prévention qui sont évalués à 38 158 000 $. Les
frais d'administration, et je sais que c'est un sujet qui,
généralement, intéresse beaucoup le député
de Viau, seraient de l'ordre de 88 402 000 $, alors qu'en 1982 - je le signale
avec beaucoup de satisfaction, Mme la Présidente - les frais
d'administration étaient de l'ordre de 94 888 000 $. Il y a aussi,
là comme ailleurs, des créances que l'on doit imputer au chapitre
des créances irrécouvrables. Il y en aurait pour 23 404 000 $ en
1983. Il y a, bien sûr, les contributions au régime de retraite
des fonctionnaires qui sont relatives à des services antérieurs
pour 4 923 000 $, de sorte que, tout compte fait, en procédant à
l'addition de ces différents chiffres au chapitre des dépenses,
nous arrivons à un total global de 968 154 000 $, ce qui nous
amène donc, toujours en termes de prévisions, à la fin de
l'exercice, à un excédent des dépenses sur les revenus de
l'ordre de 40 876 000 $. Je ne veux pas revenir sur la petite histoire du
déficit de 1983, mais des gens très pessimistes ont
soulevé, à un moment donné, la possibilité que pour
1983 l'on se retrouve avec un déficit qui allait, et je me souviens des
chiffres qui étaient mentionnés, rejoindre les 80 000 000 $, les
85 000 000 $, les 90 000 000 $, quand ce n'était pas les 100 000 000 $,
et le député de Viau les connaît ces gens qui ont fait ces
références. Il les connaît très bien. Ce qui est
maintenant anticipé par rapport à cette atmosphère de
pessimisme qu'on a connue à un moment donné, c'est la
moitié moins de ce qui était prévu comme excédent
des dépenses, soit 40 876 000 $.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Oui, Mme la Présidente. M. le ministre, pour
une personne qui n'a pas vu les états financiers précis, vous
semblez être bien certain de vos chiffres. On verra, une fois que le
rapport annuel sera déposé, exactement comment on peut jouer avec
ces chiffres, spécialement lorsque vous dites que les frais
d'administration ont baissé de 95 000 000 $ à 88 000 000 $...
M. Fréchette: À 88 402 000 $.
M. Cusano: Oui, il s'agira de voir exactement si ce sont des
transferts ou si ce sont des économies réelles. En ce qui regarde
un déficit de 40 000 000 $, oui, ce n'est pas 80 et non plus
zéro. Comme on dit en anglais: "What is in a million"; aujourd'hui, il
n'y a rien là. Je m'en tiens à cela et on verra plus
précisément où cette économie a été
faite ou si l'économie a été transférée
ailleurs. Je vois l'honorable juge qui fait signe que non de la tête. Il
a peut-être raison, je n'ai pas les chiffres devant moi. Vous avez un
déficit de 40 000 000 $. Je présume que vous êtes
très heureux.
M. Fréchette: Mme la Présidente, puisqu'on me lance
la perche, allez-vous imaginer que je ne vais pas sauter dessus? Par rapport
à tout ce pessimisme dont je parlais tout à l'heure, pessimisme
qu'on a allègrement - on le sait - associé à toute
espèce de situations qui étaient supposées
prévaloir à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, il est bien évident que, lorsque j'ai
devant moi des chiffres de la nature de ceux dont je viens de communiquer la
teneur aux membres de la commission, je suis très heureux, Mme la
Présidente. Cela dénote, me semble-t-il, d'une façon
ferme, d'une façon claire ce que j'ai toujours pensé, quant
à moi, au niveau de l'administration et du fonctionnement de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail: on ne
pouvait presque pas espérer mieux que ce qu'on est en train
d'évaluer et d'analyser actuellement. Cela devrait permettre à
certaines gens de bonne foi ou en toute bonne volonté, à
l'intérieur des différentes assises parlementaires ou à
l'extérieur, de réévaluer un certain nombre de choses ou
un certain nombre de conclusions auxquelles on était rapidement
arrivé et qui avaient très souvent l'allure d'un jugement sans
que toute la preuve ait été analysée. Il me semble qu'on
est en train - j'espère que le député de Viau va continuer
dans le même style ou dans le même sens quant à ses
questions - de mettre sur la place publique une situation qui, encore une fois,
m'apparaît tout à fait heureuse dans les circonstances que l'on
connaît.
Malgré l'année que cet organisme vient de passer, il a eu
plus que son lot - me semble-t-il - de critiques sur la place publique.
À travers tout cela, contre vents et marées, les responsables de
la Commission de la santé et de la sécurité du travail ont
continué d'accomplir un très bon boulot. Il me semble que la
preuve la plus éloquente de ce que je suis en train de dire, c'est ce
que je suis en train de vous livrer en termes de chiffres. C'est pour cela que
j'invite le député de Viau à continuer dans le même
sens. On va continuer de lui donner des renseignements tout aussi
intéressants et aussi longtemps qu'il le souhaitera.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Votre optimisme, Mme la Présidente, est
vraiment frappant. Tout le monde a tort et vous avez raison. Le juge a raison.
Vous oubliez ce qu'on a entendu à la commission de décembre. Vous
semblez oublier ce qu'on a entendu - même si ce n'était pas le
mandat - à la commission parlementaire qui a étudié le
projet de loi 42. La plupart des intervenants revenaient toujours sur le
problème de l'administration de la CSST. Cela ne s'est pas
enregistré quelque part dans votre tête. Tout le monde qui est
venu témoigner ici a tort. L'Opposition a tort, mais de votre
côté tout va bien: Un déficit de 40 000 000 $? Bravo! C'est
tout un accomplissement, ce déficit de 40 000 000$. Comme je l'ai dit
plus tôt, c'est mieux qu'un déficit de 80 000 000 $, mais ce n'est
pas zéro non plus et ce n'est pas un surplus.
M. Fréchette: Est-ce une question, Mme la
Présidente?
M. Cusano: Non, ce n'est qu'un commentaire.
M. Fréchette: Bon! je reviendrai sur ce commentaire.
M. Cusano: Je me permets un commentaire.
Sur les effectifs de la CSST, vous en avez combien? Quel est le
personnel à la CSST?
M. Fréchette: Je m'excuse, j'ai mal saisi.
M. Cusano: Je parle du personnel. Les postes autorisés
à la CSST sont de combien?
M. Fréchette: Si on veut simplement me donner le temps,
Mme la Présidente. Le député de Viau me demande, si j'ai
bien compris sa question, quel est le nombre des postes autorisés.
M. Cusano: Je suis enrhumé ce matin et je m'excuse si ma
voix ne porte pas aussi bien.
M. Fréchette: Je vous entends très bien. Depuis le
temps qu'on travaille ensemble, je commence à vous connaître
très bien.
M. Cusano: On s'habitue.
M. Fréchette: Le nombre de postes autorisés est de
2694. Je présume que la question suivante sera de me demander combien de
ces postes sont occupés. Si c'est cela, 2540, Mme la Présidente;
163 postes sont vacants.
M. Cusano: Est-ce que vous incluez le personnel de l'institut de
recherche de la CSST?
M. Fréchette: M. le député de Viau sait
certainement que l'institut de recherche est un organisme tout à fait
autonome, qu'il a été créé par une loi
spécifique et qu'en vertu de cette autonomie il a son propre
fonctionnement. Quand je donne les chiffres dont je viens de parler, je
n'inclus pas le nombre de postes autorisés et/ou occupés à
l'institut de recherche sur la santé et la sécurité.
M. Cusano: Est-ce qu'il y a d'autres individus qui sont
payés directement ou indirectement par la CSST, à part les
2540?
M. Fréchette: La précision là-dessus est de
la nature suivante: le député de Viau sait très bien que
dans plusieurs secteurs qui sont couverts par la Loi sur la santé et la
sécurité du travail et la Loi sur les accidents du travail, il
existe des associations sectorielles. Les membres qui sont à
l'intérieur de ces associations sectorielles ne font évidemment
pas partie de la fonction publique. Donc, ils ne détiennent pas de
poste, d'aucune espèce de façon. Cependant, la Commission de la
santé et de la sécurité du travail finance, entre
guillemets, certaines de ces associations sectorielles par voie de subventions.
C'est également vrai pour les départements de santé
communautaire que la CSST, aux fins de l'application de sa loi et l'atteinte de
ses objectifs, va aussi subventionner.
Maintenant, si le député de Viau veut avoir des
précisions quant aux montants qui sont alloués à ces deux
groupes d'organismes, on pourra les lui donner.
M. Cusano: Non, les montants, on les verra plus tard. Ma
préoccupation, à ce moment-ci, est plutôt de tenter de
chiffrer, de façon directe ou indirecte, combien de personnes sont
à l'emploi directement ou indirectement de la CSST.
M. Fréchette: Directement, je reviendrai au chiffre de
2540. Maintenant, indirectement, je ne voudrais pas que l'on fasse
référence à un emploi ou à un lien
employeur-travailleur. Eu égard aux associations sectorielles ou alors
aux DSC, il n'y a aucune relation de droit d'employeur à à
travailleur. Il y a une seule relation de désir d'atteindre les
objectifs dont on parle et un des moyens d'y arriver, c'est par la voie des
subventions ou de l'aide - s'il faut appeler cela comme cela - que la CSST, la
commission, va accorder à ces différents
organismes ou groupes, mais il n'y a pas de lien direct ou indirect
d'employeur à travailleur chez les personnes qui oeuvrent à
l'intérieur des associations sectorielles ni non plus à
l'intérieur des DSC. (11 h 30)
M. Cusano: M. le ministre, si les services de santé
communautaire n'existaient pas tels quels, la CSST aurait du personnel pour
s'occuper de cela. Ce à quoi je veux en venir, et je pense que vous
comprenez très bien ma question, c'est que, dans l'ensemble de la
santé et de la sécurité du travail, est-il possible de
chiffrer - je ne parle pas des gens dans les universités, je parle des
gens qui sont directement impliqués dans la santé et la
sécurité du travail - combien de personnes travaillent à
ces fins?
M. Fréchette: Mme la Présidente, c'est le genre de
renseignement que l'on peut obtenir. Si le député de Viau est
suffisamment patient pour nous donner quelques minutes, on va tenter de se
procurer le détail très précis qu'il nous demande et,
dès qu'il sera disponible, on vous...
M. Cusano: Je pourrais passer à une autre question.
M. Fréchette: Absolument, si vous le voulez.
M. Cusano: Y a-t-il des contractuels qui sont engagés
à la CSST?
M. Fréchette: Je pourrais, dès maintenant, donner
des renseignements quant au personnel "subventionné" des DSC: il y a 795
postes et demi dans les DSC. En termes de budget, si mes renseignements sont
exacts, ce serait de l'ordre de 17 000 000 $, M. Bertrand? 17 000 000 $ pour
les DSC. Quant aux associations sectorielles, il va nous falloir aller un peu
plus à fond, plus avant dans le détail que veut avoir le
député de Viau.
M. Cusano: Je comprends que la tâche n'est pas facile et je
ne l'exigerai pas présentement, mais, d'ici à la fin de nos
travaux, j'apprécierais recevoir des chiffres sur cela. L'autre question
que je posais, M. le ministre, c'était sur les contractuels.
M. Fréchette: Vous voulez avoir le nombre?
M. Cusano: Oui, le nombre de contractuels.
M. Fréchette: II faut faire la distinction, me
semble-t-il, entre les contractuels qui y sont pour un contrat global de 25 000
$ et plus, et ceux qui y sont pour un contrat global de 25 000 $ et moins. Je
vous dirai que dans les deux volets il y a actuellement huit personnes qui
travaillent à titre de contractuels à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail.
M. Cusano: Actuellement, mais durant l'année combien y en
a-t-il eu?
M. Fréchette: L'indication qu'on me donne, c'est que cela
aurait été le même nombre pendant toute l'année.
M. Cusano: Le même nombre, mais pas nécessairement
les mêmes personnes, je présume.
M. Fréchette: Mme la Présidente, est-ce qu'à
ce stade-ci vous me permettriez de demander au président-directeur
général de donner ces réponses qui sont d'ordre
technique?
La Présidente (Mme Harel): Parfaitement, M. le ministre.
D'ailleurs, c'est à votre discrétion et l'ensemble des personnes
qui vous accompagnent pourront, dans le cours de nos travaux, prendre la
parole. La parole est au président-directeur général de la
CSST.
M. Sauvé (Robert): Pourquoi ce sont les mêmes, Mme
la Présidente? Parce qu'il y en a quatre qui sont des boursiers, comme
on les appelle. Nous avons fait une promotion pour permettre à des gens
d'aller recevoir une formation supplémentaire, soit un doctorat, soit
une maîtrise, à l'extérieur du pays ou au pays. Vous savez
que l'institut, maintenant, a pris ce programme, mais pendant trois ans nous
avons eu un tel programme et nous avons demandé aux gens qui avaient
cette bourse de nous donner deux ans de travail par année
d'étude. C'est pour cela que ces quatre sont toujours les mêmes.
Ils finissent au cours de 1984 leurs deux ans d'engagement. Est-ce qu'ils
resteront chez nous ou s'ils iront... On ne peut pas ouvrir de concours. Ils
peuvent aller travailler dans les DSC, ou à l'institut, ou dans des
programmes de recherche à l'université. Pour nous, c'était
un excellent placement.
M. Cusano: Dois-je comprendre, M. Sauvé, que des personnes
vont suivre des cours et que vous subventionnez ces cours pour que celles-ci se
retrouvent ailleurs par la suite?
M. Sauvé: Non. Partout dans l'institut, nous avons cette
façon de procéder qui est bien connue dans le monde de la
santé et de la sécurité. Il s'agit de promouvoir, par
exemple, des médecins de la santé, des ergonomistes, des
hygiénistes, des spécialistes
en toxicologie et de toutes les spécialités possibles et
impossibles qu'on n'avait pas au Québec.
Je vous dirai à titre d'exemple que l'institut a un programme de
80 boursiers qui fonctionne présentement et que nous maintenons.
L'institut dépense au-delà de 1 500 000 $ en bourses pour
permettre aux gens de la santé et de la sécurité
d'être les plus compétents possible et qu'on en forme à
tous les niveaux. La seule condition qu'on demande, c'est qu'ils reviennent
travailler au Québec et qu'ils nous donnent deux ans de travail par
année d'étude. Vous savez que les concours sont plutôt
rares et il serait assez difficile de faire des concours pour des toxicologues
à ce temps-ci, pour donner un exemple.
On fait la promotion et, si jamais on a des concours, on leur
suggère alors de se présenter aux concours.
La Présidente (Mme Harel): Le député de
Viau.
M. Cusano: Est-ce que ces bourses sont données aux
employés de la CSST? Je veux faire une distinction entre les bourses qui
sont données "at large" - excusez l'expression - et les bourses ou
permissions d'études avec frais payés pour les employés de
la CSST.
Je voudrais toucher à l'aspect des employés de la CSST.
Vous avez justement un programme de perfectionnement, de recyclage et tout
cela. Quel est le budget consacré à cela?
M. Sauvé: Je vérifie, mais je pense que c'est 200
000 $ par année.
M. Cusano: Est-ce que vous pouvez me donner la ventilation,
à savoir si ces 200 000 $ par année, c'est pour des cours de
groupe ou des cours individuels? Pouvez-vous nous indiquer la durée de
ces cours individuels: est-ce pour une semaine, un mois, un an et à
quelles universités?
M. Sauvé: Exact. Je pourrais vous faire parvenir, Mme la
Présidente, tout le programme de bourses internes à la commission
et tout le système de formation. En 1983, nous avons
dépensé exactement 250 000 $ en formation et perfectionnement.
Cela comprend des cours individuels. Par exemple, il y a des gens qui finissent
leur baccalauréat, ou des choses du genre, sur la base d'un ou deux
cours par semaine. Cela est permis en vertu des conventions collectives. Des
cours d'anglais, pour du personnel qui a à travailler fréquemment
en anglais, se donnent. Également, cette année, nous avons un
boursier qui est allé se spéciliser en Californie en informatique
et qui revient au mois de juin, et un autre qui finit une maîtrise en
administration à l'Université de Sherbrooke.
M. Cusano: Ces gens, si j'ai bien compris...
M. Sauvé: Ce sont nos employés.
M. Cusano: Ce sont vos employés et vous exigez qu'ils
restent avec vous deux ans pour chaque année d'études.
M. Sauvé: Exact, c'est la politique interne.
M. Cusano: Ma question sur cela: Plusieurs fois, on a vu - je
parle d'expérience - dans le domaine scolaire, justement, à cause
des ententes collectives, que des gens allaient suivre certains cours et que
c'étaient des cours, dans un sens, qui n'étaient pas tout
à fait reliés au domaine pédagogique. Dans votre cas,
pouvez-vous nous dire combien de ces personnes depuis les deux ou trois
dernières années sont allées se chercher un diplôme
et ont quitté par la suite la CSST?
M. Sauvé: Quand vous me demandez combien de ces personnes
sont allées se chercher un diplôme...
M. Cusano: Ce à quoi je veux en venir, M. le
président-directeur général, c'est de comprendre un peu la
philosophie de telles subventions. Est-ce pour perfectionner l'individu dans
quelque chose qui lui plaît ou bien s'assurer que la CSST finance
justement des cours qui seront rentables dans un sens pour la CSST, dans les
années à venir?
M. Sauvé: Mme la Présidente, on a mis l'accent, si
on me permet cette expression, sur la santé et la
sécurité. Ce n'étaient pas des cours qui étaient
ouverts pour aller étudier l'écologie ou des choses du genre,
c'étaient des cours qui s'appliquaient directement à nous, et les
gens qui ne sont pas restés sont allés dans les DSC. Nous en
sommes très heureux, c'est-à-dire qu'ils sont restés dans
le domaine. Par exemple, si des personnes avaient fait une année
d'études à l'extérieur ou au pays, elles travaillaient
à nouveau deux ans chez nous, mais il n'y avait pas de poste d'ouvert
chez nous. Par voie de conséquence, elles ont eu à l'occasion des
offres dans les DSC et je les comprends de les avoir acceptées
plutôt que de rester contractuelles. Alors, on considère que c'est
un bon placement.
M. Cusano: Lorsque les gens sortent du pays - vous avez
mentionné l'exemple de la Californie - vous payez les frais de
scolarité.
M. Sauvé: Exact.
M. Cusano: Vous payez le transport. Qu'est-ce qui est inclus dans
la bourse que vous accordez à l'individu?
M. Sauvé: La personne garde son salaire pour
l'année et a ses frais de scolarité payés et ses frais de
transport. C'est la même chose à l'institut.
M. Cusano: C'est très généreux.
M. Sauvé: Les bourses varient suivant les
spécialités et suivant les candidats entre 20 000 $, je dirais,
et 40 000 $.
M. Cusano: 20 000 $ au-delà de leur salaire?
M. Sauvé: Non, cela comprend le salaire et tout. Quand un
professionnel part aux études, la moyenne d'un professionnel chez nous
est de 40 000 $ à peu près. Ce qu'on paie, ce sont les frais de
scolarité selon l'endroit.
M. Cusano: Excusez-moi, peut-être que je vous ai mal
compris. Vous avez dit qu'ils gardent leur salaire pour l'année.
M. Sauvé: Oui.
M. Cusano: Bon, alors, la personne a son salaire plus...
M. Sauvé: Mais, quand j'ai parlé de 20 000 $
à 40 000 $, c'est l'ensemble. C'est le salaire, les frais de
scolarité et les frais de transport.
M. Cusano: Pendant qu'ils sont à l'extérieur,
à part le transport, ils ont leur plein salaire, le transport, la
scolarité. Est-ce qu'il y a d'autres dépenses qui sont incluses
dans cela?
M. Sauvé: Je ne crois pas. Je peux vérifier, mais
je vais vous envoyer le programme, vous allez voir. Il n'y a pas de cachette,
c'est public chez nous.
M. Cusano: C'est public... M. Sauvé: C'est un
livre.
M. Cusano: ...mais des fois très bien camouflé, M.
le président-directeur général.
M. Sauvé: Pas du tout. Je pense qu'il y a assez de
vérificateurs chez nous pour qu'il n'y ait pas de camouflage.
M. Cusano: Le perfectionnement ou recyclage interne, cela est
fait par qui? Avec toutes les nouvelles méthodologies et les nouveaux
appareils que vous avez chez vous, qui fait ce perfectionnement? Est-ce des
gens de la CSST ou bien si vous êtes obligés d'aller à
l'extérieur?
M. Sauvé: Cela dépend, Mme la Présidente. La
grosse partie se fait à l'intérieur et il y en a qui se fait
à l'extérieur. Ce sont des cours donnés ordinairement dans
les universités ou dans les endroits spécialisés. (11 h
45)
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Mon autre question s'adresse au ministre.
Une voix: Excusez-moi.
M. Fréchette: Vous n'avez pas à vous excuser, je
vous en prie.
La Présidente (Mme Harel): M. le
président-directeur général, peut-être qu'il serait
utile pour le bénéfice des membres de la commission que vous
fassiez parvenir au secrétaire de la commission copie des brochures dont
vous nous parliez. On en fera la distribution, cela peut être
intéressant.
M. Sauvé: Avec plaisir, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Merci.
M. Cusano: Cette question au ministre sera très courte. Au
cours de la commission parlementaire de décembre, on a appris - et
même, je crois, le ministre - qu'il semblait y avoir un problème
au conseil d'administration en ce qui touchait l'article 154 de la loi sur la
CSST. Le ministre songe-t-il à changer cet article?
M. Fréchette: M. le Président... Mme la
Présidente, je m'excuse. Au bout de onze heures, je vais finir par y
parvenir, Mme la Présidente. Vous savez, il en est de ce
secteur-là, si vous me prêtez l'expression, comme de bien
d'autres. Le travail de l'Opposition, c'est d'essayer de pointer autant dans
les lois, dans les règlements et dans les politiques administratives des
choses qui, dans son évaluation, semble faire problème. Tout
à l'heure, le député de Portneuf parlait du
règlement de placement; le député de Viau est en train de
parler de l'article 154 de la loi. Je veux bien, Mme la Présidente, que
l'on identifie ces phénomènes, mais je n'ai encore entendu
d'aucune espèce de façon des suggestions quant à une
possible avenue pour modifier ce qui leur paraît ne pas être
conforme.
M. Cusano: Mais, M. le ministre...
M. Fréchette: Je n'ai pas terminé, Mme
la Présidente. J'achève cependant.
M. Cusano: Je m'excuse, il est chatouilleux ce matin.
M. Fréchette: Ce que je voudrais simplement ajouter, Mme
la Présidente, c'est que cet article 154, s'il n'était pas
là et s'il n'accordait pas au président-directeur
général de l'organisme les pouvoirs que l'on sait et qui lui sont
accordés, je ne sais pas comment l'administration quotidienne d'un
organisme comme celui-là pourrait être faite sans que cela
crée régulièrement des embêtements de toute
espèce.
Je comprends très bien que le député de Viau - il
l'a dit tellement souvent depuis qu'on parle de la commission - ne parle pas
précisément du titulaire de la fonction actuel, mais de la
politique ou de la philosophie elle-même qu'on retrouve à
l'article 154. Encore une fois, quand le gouvernement a fait adopter cette loi
17, il savait ce que contenait l'article 154. Il en était tout à
fait conscient et c'est comme cela qu'il l'a voulu, Mme la Présidente.
Je ne sache pas qu'après maintenant bientôt cinq ans d'exercice il
faille revoir cette disposition de l'article 154, à moins que
l'Opposition soit à ce point prête à cet égard
qu'elle nous dise, ici ou ailleurs, par quoi il faudrait remplacer le
mécanisme que l'on retrouve à l'article 154. C'est le genre de
suggestion que je n'ai jamais encore entendue depuis une année
maintenant que presque régulièrement, pour ne pas dire
quotidiennement, on parle de la commission. Mais, dans l'état actuel des
choses, je ne vois pas pourquoi on procéderait aux changements dont
parle le député de Viau.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Je ne voudrais pas faire lecture du journal des
Débats sur la commission, lorsque les membres du conseil
d'administration nous ont dit très clairement combien l'article 154 les
embêtait. Ce conseil d'administration, selon vous, a des pouvoirs
similaires à ceux d'autres conseils d'administration; ce n'est pas ce
que l'on a constaté à la commission parlementaire, M. le
ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je suis heureux
que le député de Viau soulève cet aspect de la question.
Cela me permet de rappeler un certain nombre de choses. C'est évident
que les membres du conseil d'administration, à l'occasion de la
commission parlementaire de décembre dernier, ont fait état d'un
certain nombre de difficultés que cela pouvait présenter par
rapport aux pouvoirs qui sont accordés au président- directeur
général en vertu de l'article 154.
Cependant, il faudrait bien relire tous les témoignages jusqu'au
bout. Tous ont également dit devant la commission, autant au mois de
décembre qu'aux mois de février et mars derniers, deux choses
bien importantes: par rapport à la situation qui prévalait
auparavant, lorsqu'on avait la Commission des accidents du travail, c'est,
ont-ils tous dit, une amélioration considérable par rapport
à la situation qui existait auparavant où deux ou trois et
peut-être quatre commissaires décidaient entre eux des
orientations à donner à la commission à tous
égards: sur le plan administratif, sur le plan de la
réglementation, sur le plan des décisions à prendre au
niveau de la réparation, des politiques de réadaptation, de la
prévention et ainsi de suite. Faisant ce parallèle entre les deux
organismes, tous ont très clairement indiqué, à l'occasion
de ce débat, que c'était une amélioration à tous
égards.
Deuxièmement, autant les représentants des parties
syndicales que des parties patronales, tout en identifiant un certain nombre de
difficultés presque inévitables, se sont déclarés
satisfaits de pouvoir participer aux décisions qui se prenaient à
l'intérieur de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail à telle enseigne qu'aucun de ceux que
nous avons entendus, qu'ils aient été des représentants
des parties syndicales ou patronales, à mon souvenir, en tout cas - on
pourra refaire la lecture des témoignages qu'on a entendus - n'a
suggéré de changements à cet égard, tout en
soulevant les difficultés que cela pouvait présenter.
Rappelez-vous, Mme la Présidente, la commission parlementaire du
mois de mars, quand nous avons entendu l'Association des mines d'amiante, il me
semble. Un des invités que nous avions dans cette
délégation était un membre du conseil d'administration de
la Commission de la santé et de la sécurité du travail.
J'engage ceux qui auraient le goût de le faire à lire la
conclusion de son témoignage. Il nous a dit être très
heureux de ce qui s'était passé depuis que la commission de
santé et sécurité était là et il nous a dit
également qu'au fur et à mesure que le temps passerait les
difficultés qu'actuellement les parties doivent vivre allaient s'aplanir
et qu'on allait apprendre à vivre heureux ensemble.
J'essaie de vous résumer le témoignage d'un membre du
conseil d'administration qui est venu le dire ici à cette table. Mme la
Présidente, dans ces circonstances, je pense qu'on est devant un
régime, entre guillemets, qui est en train de faire ses preuves. Tous
ceux qui ont un tant soit peu d'expérience en matière de
santé et sécurité vont savoir, vont se rappeler qu'il
n'existe pas de situations parfaites, d'une part, qu'il n'existe pas de
systèmes parfaits, et tous ceux qui
ont cette expertise de la santé et de la sécurité
et l'expertise d'un organisme analogue ou qui ressemble à celui qu'on a
vont tous vous dire qu'avant cinq ans d'exercice, qu'avant cinq ans de pratique
-cinq ans et un peu plus dans certains cas -personne n'est en mesure de passer
un jugement qui soit définitif, qui soit clair. Nous avons à
peine cinq ans. Il me semble que dans les circonstances l'exercice doit
être complété jusqu'à sa limite et, au train
où vont les choses, je suis l'un de ceux qui est convaincu que les
objectifs qui étaient visés par le législateur vont
être atteints par les dispositions actuelles de la loi 17 et les
dispositions de la loi 42, lorsqu'elle sera amendée et adoptée
par l'Assemblée nationale.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Si tout va si bien que cela, M. le ministre, comment
expliquez-vous... Si des changements ont été faits, vous pouvez
les annoncer. Le conseil d'administration nous a dit qu'à plusieurs
reprises il a demandé au président-directeur
général et au conseil de direction d'implanter des
systèmes de vérification interne et qu'il aurait aimé, en
tant que bon administrateur, d'abord, des mandats très clairs et
précis et, ensuite, d'en connaître les résultats. En ce qui
me concerne, à ma souvenance, M. le ministre, il me semble que
c'était impossible de le faire. C'est là qu'est arrivée la
question de l'article 154. Est-ce que cela a changé depuis, M. le
ministre?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je vais fouiller
un peu dans mes souvenirs, mais, pour autant que ces souvenirs sont exacts, ce
à quoi ont référé un certain nombre de nos
invités à la commission parlementaire tenue en décembre,
autant membres que non-membres du conseil d'administration, c'était
d'évaluer la possibilité que la Commission de la santé et
de la sécurité du travail soit sujette à une
vérification externe. Je ne me souviens pas qu'on ait parlé de la
possibilité de faire procéder à une vérification
interne, il y en a déjà une. Il y en a déjà une,
Mme la Présidente, et je vous signalerai à ce chapitre qu'elle
est peut-être plus intense, plus poussée que dans n'importe lequel
des autres organismes gouvernementaux ou n'importe lequel des ministères
du gouvernement. Il y a cette vérification interne qui se fait
périodiquement, à quelques reprises dans une année, et il
y a aussi le Vérificateur général qui est là
régulièrement. Je ne pense pas qu'il y ait d'autres organismes
gouvernementaux ou paragouvernementaux qui soient l'objet de plus de
vérification que la Commission de la santé et de la
sécurité du travail elle-même. Dans ces conditions, je ne
sais pas ce que l'on pourrait ajouter de plus à ce qui se fait
déjà pour avoir l'heure juste, si encore le député
de Viau prétend que ce n'est pas l'heure juste.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau, peut-être une dernière question sur ce sujet, votre temps de
parole est temporairement expiré. Je passe la parole au
député de Beauharnois et on reviendra avec vous par la suite.
M. Cusano: Oui, c'est que nous sommes très loin de la
boîte de la CSST, M. le ministre, du conseil d'administration et du
conseil de direction. Il me semble que, lorsque les membres du conseil
d'administration, eux qui regardent périodiquement, plus souvent que
nous, le fonctionnement de cette boîte, ont suggéré
à plusieurs reprises qu'il y ait une vérification externe,
d'après moi, leur dernière demande était justifiée.
Je suis certain qu'ils ne l'ont pas fait par simple caprice, M. le
ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, c'est
effectivement vrai que vous et moi, M. le député, sommes loin de
la boîte. C'est effectivement vrai qu'on ne peut pas se mettre le nez
dans l'administration quotidienne, journalière ou de toute autre nature,
mais c'est également vrai que le législateur l'a voulu cette
boîte. Il est également vrai de dire que l'intention très
précise du législateur est là, et pour des motifs sur
lesquels on n'a pas besoin de plaider longtemps, me semble-t-il, pour faire la
démarcation très nette qui doit exister entre l'organisme
lui-même et l'appareil gouvernemental. (12 heures)
Mme la Présidente, l'occasion est peut-être
appropriée, choisie, pour une autre remarque qui m'apparaît
s'imposer. Il est évident que, lorsqu'on a procédé
à la commission parlementaire de décembre dont le mandat
était spécifiquement de procéder à évaluer
l'administration et le fonctionnement de la commission - ce fut aussi vrai,
à certains égards, à l'occasion de la commission
parlementaire sur la loi 42 - il est évident qu'il ne fallait pas nous
attendre, de la part de nos invités, à des témoignages de
satisfaction totale, à des témoignages qui nous auraient
amenés à la conclusion qu'il n'existe pas de problèmes.
C'est évident parce que les gens qui y sont venus, et c'était de
bonne guerre de le faire, ont précisément mis le doigt sur des
situations qui leur causent ou qui leur ont causé des problèmes.
Personne, par ailleurs - c'était aussi normal - n'est venu devant ni
l'une ni l'autre des deux commissions parlementaires pour dire qu'il y avait un
taux de
satisfaction de la clientèle de la Commission de la santé
et de la sécurité du travail qui se situe entre 70% et 75%. Il me
semble que c'est un élément fort important dans le dossier. Je
veux bien que l'on s'applique à mettre le doigt sur ce qu'on pourrait
convenir d'appeler des bobos, pour les besoins de notre discussion, ou des
problèmes même majeurs. Il ne faudrait pas non plus que l'on perde
de vue qu'à peu près 73% de la clientèle de l'organisme
est satisfaite des services qui sont rendus, de la façon dont les
demandes sont traitées et des délais qui sont mis pour traiter
les demandes. Il me semble que l'objectif majeur de cette commission est
précisément d'arriver à donner satisfaction à la
clientèle qu'elle doit desservir.
Maintenant, je vois le député de Viau clignoter de l'oeil
et opiner du bonnet, Mme la Présidente. Je sais que j'ai pris un long
détour pour arriver de façon plus précise à sa
question. Une vérification externe... S'il arrivait, par exemple, que
les vérificateurs internes, que le Vérificateur
général ou des intervenants à un autre palier signalent
qu'il serait peut-être indiqué, à cause de telle et telle
circonstance et pour tel et tel motif, qu'une vérification externe soit
faite, personne ne va s'opposer à une décision de cette nature.
Il me semble que, lorsque le Vérificateur général
procède à son travail et qu'il arrive à des conclusions
qui sont généralement acceptables en cette matière, il n'y
a pas l'utilité expresse d'aller vers l'externe et de demander que
l'opération recommence, à toutes fins utiles, à
zéro ou à peu près. Que les vérificateurs qui sont
déjà là indiquent qu'il serait souhaitable qu'une
vérification externe se fasse, il n'y a personne qui va faire une guerre
de tranchée là-dessus et qui va dire: Non, il n'en est pas
question. C'est évident.
La Présidente (Mme Harel): La parole est maintenant au
député de Châteauguay. Nous reviendrons avec vous, M. le
député de Viau.
M. Cusano: J'avais une autre petite question.
La Présidente (Mme Harel): J'imagine que vous en avez de
nombreuses. Nous allons terminé nos travaux à 12 h 30 et nous
aurons l'occasion de revenir avec vous. Votre premier temps de parole est
très largement expiré.
M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: Merci, Mme la Présidente.
M. Cusano: Vous le dites avec un beau sourire, Mme la
Présidente. Je vais me soumettre.
La Présidente (Mme Harel): J'espère que c'est
plutôt mon argumentation qui vous convainc.
M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: Merci, Mme la Présidente. Il y a
sûrement d'autres choses intéressantes à faire à
cette commission que de s'apitoyer sur les craintes du député de
Viau, quoiqu'il aura l'occasion de revenir sur ses messages publicitaires,
comme il le disait lui-même tout à l'heure, ainsi que son
collègue de Portneuf.
La Présidente (Mme Harel): II n'y a pas de
préambule en commission, M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: II n'y a pas de préambule. Merci, Mme la
Présidente. C'est que la question était quand même
d'actualité, Mme la Présidente. On voit le député
de Portneuf qui est parti tout de suite après ses remarques
préliminaires. C'est un spectacle qu'il vient
régulièrement faire en commission. Il s'en retourne après
comme s'il n'était pas intéressé à entendre les
réponses aux questions qu'il pose. Ceci dit...
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Mme la Présidente, question de
règlement.
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député
de Viau. Vous savez, encore un rappel au règlement...
M. Cusano: Cela n'existe pas maintenant?
La Présidente (Mme Harel): Oui, encore faut-il citer
l'article du règlement qu'on veut invoquer.
M. Cusano: Vous savez, la réforme qu'on a eue
dernièrement...
La Présidente (Mme Harel): On dit: demande de
directive.
M. Cusano: Demande de directive. Peut-être que le
député de Châteauguay n'était pas ici au
début de nos travaux. Il a été entendu qu'à cause
de certains travaux du whip en chef de l'Opposition...
M. Blais: II n'y a pas de directives là-dedans.
M. Cusano: Non, je veux seulement qu'il comprenne que le
député a dû s'absenter à cause d'autres engagements.
Je suis sûr et certain qu'il lira attentivement la transcription pour
vous répondre, M. le
député.
La Présidente (Mme Harel): Je pense qu'on va demander au
député de Châteauguay et au député de Viau de
faciliter nos travaux. La parole est au député de
Châteauguay et je l'invite à immédiatement interpeller le
ministre.
M. Dussault: Merci, Mme la Présidente. Je vous promets que
je vais poser des questions et que je vais rester ici pour entendre les
réponses. M. le ministre, comme adjoint parlementaire du ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, il m'est arrivé dans le
passé d'entendre des gens d'affaires exprimer des points de vue sur les
cotisations qu'ils avaient à payer à la commission. Je dois dire
que, dans un passé assez lointain maintenant, les remarques ont souvent
été acerbes, mais il me semble que dans les derniers temps j'ai
beaucoup moins entendu de remarques là-dessus. C'est peut-être
parce qu'on a créé des espérances qui satisfont les gens
d'affaires pour le moment.
D'abord, je voudrais vous poser une question sur le financement de la
CSST. On sait que la CSST a annoncé un nouveau mode de financement en
1983. J'aimerais savoir si cette annonce de politique de financement nouveau va
avoir un effet sur le taux de cotisation en 1984 et, si oui, de quel ordre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, le
député de Châteauguay fait référence à
une situation dont on entend parler très souvent.
Généralement, on en entend parler par une référence
qui est faite aux situations qui existent dans d'autres provinces, l'exemple
classique étant la comparaison avec l'Ontario. Je vous signalerai, Mme
la Présidente, que le taux de cotisation moyen par 100 $ assurables
était au Québec, pour 1983, de 2,05 $. On va se souvenir
également que le conseil d'administration et celui qui vous parle
également ont annoncé que le taux de cotisation pour 1984
était de 1,89 $ les 100 $ assurables, une diminution substantielle quand
même d'une année à l'autre, soit 1983 et 1984. Il n'y a
pas, au moment où on se parle, aucune espèce d'indication qui
pourrait nous amener à la conclusion que des augmentations sont
envisagées pour 1985, bien au contraire. S'il y avait des
réévaluations ou des réajustements qui devaient être
faits en termes de cotisation pour 1985, ce serait de toute évidence
vers la baisse.
Une autre chose, Mme la Présidente, qu'il est important de
signaler. Je me référais très rapidement tout à
l'heure à des questions que me posait le député de Viau au
fonds actuariel, au fonds capitalisé de la Commission de la santé
et de la sécurité du travail du Québec. Là aussi,
on fait très souvent des comparaisons avec ce qui existe en Ontario. Je
vous dirai qu'au Québec, au moment où l'on se parle, le fonds
actuariel capitalisé de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail dépasse 800 000 000 $. Quand je
parlais de revenus d'intérêt tout à l'heure qui rejoignent
190 000 000 $, ce sont des intérêts qui sont
générés par le placement de ce fonds actuariel à la
Caisse de dépôt et placement du Québec.
Nous sommes capitalisés dans une proportion qui dépasse
70% de nos besoins. S'il fallait, demain matin, payer tous ceux à qui
des indemnités sont dues, les capitaliser et les payer, nous pourrions
payer 70% de toutes les réclamations qui nous seraient
présentées. Et cela, c'est en tenant compte de la valorisation
des indemnisations qui arrivent au premier jour de chaque année. On est
capitalisé dans cette proportion en tenant compte, encore une fois, de
la valorisation des indemnisations qui doivent être payées aux
accidentés ou aux victimes de maladies professionnelles. En Ontario, ce
taux de capitalisation est d'environ 50%, sans tenir compte de l'obligation qui
incombe à la commission de l'Ontario de valoriser également ses
paiements le permier jour de chaque année. Si on tenait compte de cette
obligation de valoriser les indemnisations, on tomberait, en Ontario, à
un taux de capitalisation - et je le donne sous réserve d'arrondir ou de
préciser les chiffres -d'environ 30% des besoins - est-ce que c'est
autour de 30%? - d'environ 30% des besoins auxquels il faudrait subitement
faire face. Maintenant, je vous signale comme dernière information
à cet égard que le taux de cotisation moyen en Ontario - par 100
$ assurables toujours - était, en 1983, de 1,98 $ les 100 $ assurables
et, le 1er janvier 1984, il est passé à 2,17 $ les 100 $
assurables. La commission a récemment publié une petite brochure,
une petite plaquette qui fait le tour précisément de tous ces
chiffres dont on vient de parler à travers toutes les commissions au
Canada, quels sont les taux de cotisation, quel est le capital actualisé
dans chacune des provinces. Nous pourrions facilement, Mme la
Présidente, mettre à la disposition de tous les membres de la
commission cette petite plaquette dont je viens de parler et qui illustre
beaucoup mieux que je ne peux le faire quel est très
précisément au plan économique, au plan financier, la
situation de notre commission par rapport à toutes celles qui existent
au Canada.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Mme la Présidente, mon intuition était
juste, les gens d'affaires ont sans doute eux aussi fait cette comparaison.
C'est toujours en se comparant qu'on se
console. Un homme célèbre a dit les choses autrement, mais
il les a dites dans ce sens. C'est donc que la comparaison nous permet de
constater que maintenant notre situation est tout à fait
satisfaisante.
Sur le plan de la dette non provisionnée, est-ce que la situation
est aussi comparable et aussi intéressante avec l'Ontario et
peut-être avec d'autres provinces du Canada?
M. Fréchette: Mme la Présidente, pour
répondre à cette question, je vais demander au
président-directeur général de donner les renseignements
au député de Châteauguay, si vous le permettez.
La Présidente (Mme Harel): La parole est à M.
Sauvé.
M. Sauvé: Mme la Présidente, nous tenons toujours
compte de toutes les commissions au Canada. Il y en a douze, mais disons qu'il
y en a quatre principales. Il s'agit de la Colombie britannique, de l'Alberta,
de l'Ontario et du Québec qui ont vraiment, d'abord, une main-d'oeuvre
importante et un nombre d'accidents qui dépasse partout les 100 000.
Alors, cela varie entre 100 000 et 450 000 dans les commissions que je viens
d'énumérer. Donc, c'est ce qu'on peut dire qui est comparable.
Nous sommes capitalisés à 72%. L'Ontario, comme l'a dit le
ministre tantôt, est capitalisé officiellement, et ce ne sont pas
des inventions, cela a été déposé devant le
Standing Committee on Resources
Development, un comité de la Chambre en Ontario qui étudie
le projet de loi à venir... Le professeur Weiler a fait deux rapports.
Il doit soumettre son dernier rapport au cours du mois d'avril de façon
que le gouvernement adopte une loi en 1984. Ses chiffres actuariels
déposés étaient de 50,2%, soit une dette de 1 939 000 000
$. S'il capitalisait, comme l'a expliqué le ministre tantôt, avec
l'indexation, comme nous on le fait, il serait capitalisé à
30,6%, avec une dette de 4 375 000 000 $.
Quant à la Colombie britannique, les gens de cette province sont
en mission ici au Québec présentement pour regarder la situation
parce qu'eux sont capitalisés à 69%, avec un déficit de
504 000 000 $. Ils veulent savoir s'ils peuvent améliorer leur situation
et comment ils pourraient le faire; ils sont en discussions ici. L'Alberta est
capitalisée à 70%. C'est donc que de l'ensemble des provinces
comparables nous sommes capitalisés à 72%. Nous avons donc un
fonds qui est supérieur à toutes les autres commissions, avec 1
800 000 000 $ à la caisse de dépôt. Nous n'avons aucune
crainte et toutes les études actuarielles... Quand nous avons
adopté le mode de financement -les données nous sont fournies
jusqu'en l'an 2032 - mais, pour s'en tenir jusqu'en l'an 2008, nos
prévisions actuarielles sont de l'ordre que nous serons toujours
capitalisés à 70%, ce qui est amplement suffisant selon les
experts. Pour faire plaisir à tout le monde, les actuaires externes sont
venus au conseil d'administration poser les questions à nos actuaires et
aux actuaires-conseils avant qu'on n'adopte le mode de financement. Tout le
monde a donné son accord, cela a été adopté
à l'unanimité, ce mode de financement. (12 h 15)
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Beauharnois.
M. Dussault: Mme la Présidente, je veux remercier le
ministre et M. le juge des réponses qu'ils nous ont données et
inviter le parti de l'Opposition à mettre cela dans ses analyses.
Peut-être qu'il sera plus optimiste l'avenir, Mme la Présidente.
Merci encore.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: Merci, Mme la Présidente. Tout d'abord, je
voudrais faire une espèce de parallèle entre ce que l'on disait
dans les remarques préliminaires à propos de l'OCQ. On disait que
c'était un organisme qui était là et qui devait rester
là au niveau de ses principes de fond. Je voudrais faire un
parallèle avec la CSST. C'est un organisme qui est là pour rester
au niveau de ses principes de fond aussi, quoi qu'en dise le
député de Viau et les inquiétudes qu'il manifeste.
C'est sûr qu'un organisme qui a à administrer tout
près de 1 000 000 000 $ par année et qui a à administrer
une nouvelle loi, qui est la loi 17 et la loi 42 qui sera effective
bientôt. Il ne peut pas dans un si court laps de temps être
rodé et huilé comme tout le monde l'espérerait. Il n'en
reste pas moins, comme le ministre le disait tout à l'heure, qu'à
l'intérieur des commissions parlementaires que nous avons tenues en
décembre à propos des analyses de l'administration de la CSST,
aussi bien que des commentaires que nous avons entendus en commission
parlementaire sur la loi 42, ni la partie patronale ni la partie syndicale
n'ont mis en doute le bien-fondé de l'organisme. C'est sûr qu'il y
a des améliorations à apporter et nous sommes là pour
cela. Certaines commissions parlementaires que nous avons tenues cette
année témoignaient de l'intérêt de tout le monde de
voir à améliorer, parce qu'il y a de la place pour de
l'amélioration, c'est sûr, mais le ministre mentionnait tout
à l'heure qu'au-delà de 70% des gens qui utilisent les services
de la CSST en sont satisfaits. C'est important d'insister là-dessus.
Je voudrais au niveau de mes questions
revenir sur les montants globaux perçus par la CSST annuellement,
tout près de 1 000 000 000 $, je crois que c'est 968 000 000 $. Les 20
000 000 $ que le gouvernement donne à la CSST tous les ans sont-ils
inclus dans les 927 000 000 $ en question ou sont-ils à part?
M. Fréchette: C'est effectivement à part, Mme la
Présidente. Ce n'est pas inclus dans la liste des revenus que j'ai
donnée tout à l'heure et non plus, évidemment, dans le
total.
M. Lavigne: Donc, cela nous porterait à un total d'environ
947 000 000 $. Comme deuxième question, les 20 000 000 $ qui passent du
gouvernement à la CSST cette année, le gouvernement ou le
ministre du Travail a-t-il des directives précises quant à
l'utilisation de ces 20 000 000 $ ou si ce montant entre dans les fonds
généraux et qu'il est administré à la
discrétion de l'organisme?
M. Fréchette: Mme la Présidente, à cet
égard, le montant très précis est de 20 360 000 $. Il doit
être affecté exclusivement au service d'inspection de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Quant
aux modalités à être suivies pour son utilisation, c'est le
Conseil du trésor qui, dans un décret, une directive, une
décision, indique à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail comment les sommes d'argent qui lui sont
données à ce chapitre de l'inspection doivent être
dépensées.
M. Lavigne: II y a une autre constatation qu'on peut faire, c'est
quand le ministre se disait relativement satisfait tout à l'heure quand
on a pu constater que, finalement, malgré tout, la CSST arrive à
un déficit pour 1983 d'environ 40 000 000 $. C'est sûr qu'il y a
toujours de la place pour amélioration, je le disais tout à
l'heure, mais, quand on compare avec l'année 1982, le montant global de
la CSST se situait en deçà de 900 000 000 $ - c'étaient
environ 880 000 000 $, si je me souviens bien - et elle a accusé, avec
un montant global moindre, un déficit supérieur, qui était
autour de 60 000 000 $; je pense que c'était 57 000 000 $.
M. Fréchette: 57 809 000 $.
M. Lavigne: Quand on regarde le portrait global: avec des revenus
globaux d'environ 880 000 000 $, on accuse un déficit de 57 000 000 $
pour l'année 1982, c'est normal qu'on se réjouisse de voir que
l'année financière 1983, avec un montant global accru de 947 000
000 $, si on ajoute les 20 000 000 $ du gouvernement, qu'on ferme
l'année financière avec un déficit de 40 000 000 $.
Je pense donc que c'est bon ou moins bon, toujours en comparant avec
l'année antérieure. Si on avait accusé un déficit
plus grand que l'an passé, évidemment, on aurait pu se poser des
questions et essayer de corriger notre tir davantage. Je pense que le tir a
été corrigé dans une certaine mesure, dans le sens qu'on
est parti avec un montant plus gros à administrer et qu'on ferme
l'année avec un déficit inférieur à l'année
d'avant. Je pense donc qu'il est important de faire cette remarque. Je dis
qu'il y a encore des améliorations. Je suis sûr que le
président de la commission aussi bien que le ministre et tous les gens
concernés par l'administration de la CSST souhaitent un déficit
qui va descendre d'année en année. C'est bien évident.
Inspection et prévention
Je voudrais aussi poser quelques questions. Lorsqu'on regarde le
programme de la prévention, on s'aperçoit qu'entre l'année
1982 et l'année 1983 il y a eu une augmentation d'environ 8 000 000 $
à ce chapitre. Je pense que sur le fond, c'est une question de principe,
c'est une question de philosophie, on l'a toujours dit dans nos débats
concernant l'administration et la volonté gouvernementale et la CSST,
c'est de mettre l'accent d'année en année et de plus en plus sur
la prévention plutôt que la réparation. Je suis donc fier
de voir qu'il y a une augmentation de 8 000 000 $ à ce chapitre.
Je voudrais savoir si l'expérience de la CSST est suffisamment
grande pour qu'on puisse déceler, au fur et à mesure qu'on
augmente le chapitre de la prévention, des signes sensibles quant au
chapitre de la réparation. Est-ce qu'il y a une relation de cause
à effet directe?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je suis
évidemment tout à fait d'accord avec les deux évaluations
que vient de faire le député de Beauharnois, d'une part, quant
à l'explication, les motifs qu'il y a de se réjouir de la
diminution du déficit par rapport à 1982. Il est peut-être
indiqué d'ajouter ici un élément important quant au
déficit. Les revenus anticipés de la commission sont
basés, évalués à partir d'une estimation qui est
faite de la masse salariale prévisible pour une année. La
commission doit procéder à cette évaluation de la masse
salariale qui est prévisible et c'est à partir de cette
évaluation qu'elle fait qu'elle bâtit son budget. Le
déficit, autant de 1982 que de 1983, s'explique en bonne partie, sinon
totalement, par le fait que l'évaluation de la masse salariale qui a
été faite par la commission ne s'est pas
concrétisée à cause des problèmes d'ordre
économique qu'on a
connus: la diminution de l'emploi, le chômage et ainsi de suite.
Cela explique donc pourquoi il y a ce déficit dont on parle.
Quant au deuxième aspect de la question, et il est, quant
à moi, Mme la Présidente, d'une importance capitale, la
nécessité de mettre l'accent sur la prévention, je me
souviens avoir lu et relu à profusion le livre blanc sur la santé
et la sécurité qui a été publié en 1978. Le
livre blanc consacrait une bonne partie des objectifs que visait le
gouvernement très précisément sur l'aspect de la
prévention. C'est aussi simple que de dire: plus il y aura de
prévention, moins il y aura de réparation.
M. Jean-Louis Bertrand, le vice-président à la
prévention, peut effectivement donner au député de
Beauharnois plus de précisions quant à l'utilisation des 8 000
000 $ de plus au chapitre de la prévention.
M. Bertrand (Jean-Louis): Effectivement, ces montants d'argent
ont été utilisés pour l'implantation des services de
santé au niveau du réseau des affaires sociales, de même
qu'une augmentation au niveau des subventions aux associations sectorielles,
pour parler des deux points principaux d'augmentation dans les budgets de
transfert.
Au niveau de l'effet sur le plan des lésions professionnelles, il
est peut-être trop tôt pour voir pleinement l'effet de ces
programmes de prévention. On pense qu'il faut une période
d'environ cinq ans avant qu'on n'en voie vraiment l'effet. Cependant, il est
intéressant de noter que, dans les statistiques qu'on est en train de
finaliser, on s'aperçoit qu'il y a une diminution de la gravité
des accidents, ce qui est évidemment très favorable aux
travailleurs. Cependant, au niveau du nombre de travailleurs touchés,
c'est sensiblement le même nombre que l'année
précédente même si l'on s'aperçoit, d'après
nos statistiques, qu'il y a une certaine augmentation du nombre de travailleurs
à l'emploi au cours de la dernière année.
Nous avons tenu hier une réunion avec les associations
sectorielles qui sont en formation, de même que celles qui fonctionnent;
il y en a sept actuellement. Cela réunissait autour de la table les sept
associations qui fonctionnaient, plus une dizaine qui sont en voie de formation
à divers niveaux. C'est une des questions qui ont été
mises sur la table concernant les échanges, à savoir: Est-ce que,
parmi les associations qui fonctionnent, vous pouvez commencer à voir
des effets de vos programmes de prévention? Je peux vous citer deux
témoignages: celui de M. Pierre Boucher, directeur de l'association
sectorielle des affaires sociales, de même que M. Chatelois, qui est le
directeur général de l'association du textile, et les deux ont
dit constater qu'il y a diminution de la fréquence et de la
gravité.
Dans le secteur des affaires sociales, on assistait depuis plusieurs
années à une augmentation rapide de la fréquence et de la
gravité qu'ils ont réussi à contenir, pensent-ils,
grâce, entre autres, à leurs programmes - dans le cas de l'ASSTAS,
ils fonctionnent depuis un certain nombre d'années. Du côté
du textile, on constate la même chose. Je pense que c'est bon signe. Ces
gens étaient accompagnés de leurs coprésidents patronal et
syndical. C'est aussi un témoignagne tant patronal que syndical qui fait
que cela vaut la peine d'investir dans la prévention. Cela semble
commencer à être rentable, mais cela prendra une période de
cinq ans avant qu'on puisse vraiment évaluer tout cela.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que, dans le
même ordre d'idées, en ce qui a trait à la
prévention, on peut commencer à percevoir suffisamment d'efforts
ou pas assez de la part des employeurs? Est-ce que les employeurs remplissent
bien leur rôle dans le sens de la prévention? Je voudrais
immédiatement greffer d'autres questions à la
prévention.
Est-ce que l'exercice du droit de refus, par exemple, qu'on accorde
maintenant dans la loi est un élément important qui
épargne des blessures, qui épargne des accidents? Est-ce qu'on
peut quantifier? Est-ce qu'on a des chiffres sur cela, parce que je pense que
l'élément du droit de refus est important dans le monde du
travail? J'aimerais savoir si le fait d'avoir mis cet élément
dans la loi a été profitable non pas uniquement à la
prévention des accidents, mais est-ce que cela a aussi des effets sur
les coûts? Est-ce possible d'évaluer aussi, d'une façon
mercantile, cet aspect?
Il y aurait comme troisième question touchant l'inspection:
Comment sont réparties les ressources de l'inspection? Est-ce qu'il y a
plus d'inspecteurs dans certains chantiers donnés, dans certaines
activités données que dans d'autres? Est-ce que, par exemple, au
niveau de la construction et des mines, on met suffisamment d'inspecteurs? On
sait que ce sont là des champs d'activités où l'on
retrouve un taux d'accidents assez élevé.
Pour terminer, quel est l'impact des programmes de prévention sur
les interventions de l'inspection? J'aimerais, si possible, que vous me fassiez
un compte rendu de ces quelques points.
La Présidente (Mme Harel): Si vous le permettez, M. le
juge Sauvé, je constate qu'il est près de 12 h 30 et que nous
devons terminer nos travaux à 12 h 30. Je vais ajourner la commission
sine die et vous inviter à être de retour après la
période des questions.
M. Lavigne: Très bien, Mme la Présidente,
j'attendrai les réponses au retour. Merci.
La Président (Mme Harel): À moins qu'il y ait
consentement unanime à poursuivre. Oui, M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je voudrais
m'enquérir d'une situation. Remarquez que ce n'est pas un désir
ou un voeu que j'émets, mais s'il n'y avait pas d'autres questions,
à part celles du député de Beauharnois, est-ce qu'on ne
pourrait pas même au-delà de l'heure prévue régler
le cas du programme 2? Je ne sais pas si le député de Viau a fait
le tour de ses questions. Enfin, je mets cela sur la table comme cela.
La Président (Mme Harel): M. le ministre, le
député de Viau m'avait déjà indiqué qu'il
entendait compléter par d'autres questions l'étude du programme
2.
M. Fréchette: Très bien, cela va. (Suspension de la
séance à 12 h 30)
(Reprise de la séance à 15 h 20)
La Présidente (Mme Harel): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux.
Cette séance de la commission de l'économie et du travail a pour
objet d'étudier les crédits budgétaires du
ministère du Travail conformément au mandat que nous avons
reçu de l'Assemblée nationale. Je vais immédiatement vous
rappeler que nous allons siéger ce soir. Nous terminerons l'étude
des crédits du ministère du Travail demain matin. Comme nous
avons quatre autres programmes à examiner au cours de cette
séance, j'inviterais les membres de cette commission à conclure
rapidement l'étude du programme 2. Je passe la parole au
député de Viau. M. le député de Viau.
M. Lavigne: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député
de Beauharnois.
M. Lavigne: Je ne voudrais pas intervenir indûment dans le
débat, mais j'ai posé, immédiatement avant l'heure du
dîner, quelques questions. Juste avant de passer la parole au
député de Viau, si vous me le permettiez, j'aimerais entendre les
réponses, s'il vous plaît!
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Beauharnois, vous avez entièrement raison. Je cède donc la parole
à M. Sauvé ou au vice-président...
M. Fréchette: M. Bertrand.
La Présidente (Mme Harel): ...à la
réparation, je crois.
M. Bertrand (Jean-Louis): Prévention et inspection.
La Présidente (Mme Harel): À la
prévention.
M. Bertrand (Jean-Louis): Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Avec votre permission, j'espère que j'ai bien
noté les questions de M. le député de Beauharnois. Si
jamais j'en avais oublié une, veuillez me rafraîchir la
mémoire. Votre première question portait un peu sur l'attitude
générale des employeurs par rapport à l'application de la
Loi sur la santé et la sécurité du travail et
peut-être que nous pouvons mieux faire ressortir cette attitude à
l'égard des programmes de prévention. Je pense qu'actuellement on
peut dire, globalement, que les employeurs se sont soumis à la
réglementation concernant les programmes de prévention et ont
produit des programmes de prévention.
Par exemple, dans le secteur du bâtiment et des travaux publics,
nous avons reçu plus de 65% des programmes de prévention
demandés. Dans le secteur de la chimie, on dépasse maintenant
82%; dans le secteur de la forêt et de la scierie, 95%; dans le secteur
des mines et carrières, 91%, et dans le secteur des produits de
métal -qui est peut-être l'endroit où on a actuellement le
plus de difficulté - c'est 62%, pour un total de programmes
reçus, pour le secteur prioritaire I, de 76%. Cette attitude des
employeurs se reflète aussi au niveau des dérogations
émises de la part de l'inspection où on assiste à une
baisse notable de même qu'à des arrêts de travaux ou des
scellés apposés.
Cette attitude qu'on peut percevoir par l'accumulation des avis de
dérogation ou des scellés apposés traduit un changement
d'attitude du côté des employeurs où il y a un désir
de plus en plus grand de prendre en charge la prévention et de
s'organiser à l'intérieur même de l'établissement
pour surveiller la prévention. C'est un changement d'attitude
très positif. Tantôt, M. le ministre a fait
référence à des témoignages en commission
parlementaire. Je pense que dans plusieurs secteurs maintenant on assiste
à un changement d'attitude du patronat vis-à-vis de la mise en
place de programmes de prévention et on peut le ressentir dans les
chiffres que nous compilons.
La deuxième question portait sur les cas de droits de refus. Au
niveau du droit de refus, en 1981, on a eu 229 cas; en 1982,
233, et, en 1983, 212. Donc, nous avons une diminution. Si on regarde le
nombre de travailleurs affectés: en 1981, il y en avait 1584; en 1982,
il y en avait 969 et, en 1983, 576. Quand on regarde au niveau du
détail, il y a un certain nombre de compagnies un peu plus
problématiques où il y a beaucoup de droits de refus et qui
couvrent, dans le cas d'une compagnie, plus de 10% des droits de refus.
Évidemment, c'est relié au problème de cette
compagnie.
Si on examine ce qui se passe au niveau des droits de refus, selon nos
statistiques, environ 30% des cas sont justifiés. Dans notre jargon,
cela veut dire que l'inspecteur indique que, oui, le droit de refus au sens de
la loi est utilisé et donne droit au travailleur de cesser de travailler
jusqu'à ce qu'une réparation soit faite. On assiste en même
temps à un nombre de plus en plus grand de cas où, finalement,
l'inspecteur n'a pas à se prononcer, où l'intervention de
l'inspecteur se règle par accord entre les parties. On a 39 cas
maintenant dans cette situation par rapport à l'année 1981
où il n'y en avait que sept.
Les cas que je vous donne sont seulement ceux
référés à la commission. On s'aperçoit de
plus en plus qu'il y a des droits de refus de travail qui s'exercent dans les
établissements, mais qui se règlent au sein même de
l'établissement, sans intervention de l'inspecteur. Évidemment,
on n'a pas de statistiques dans ces cas, mais, lorsqu'on rencontre les
comités de santé et de sécurité j'ai
été dernièrement à la compagnie Kruger, à
Trois-Rivières - on s'aperçoit que là où il y a des
comités de santé et de sécurité qui fonctionnent -
dans ce cas, il est prévu par convention collective - on a mis en place
des mécanismes pour régler les cas de droits de refus.
On peut dire globalement que ce droit est bien utilisé, mais
certains diront que 30% des cas, c'est-à-dire 61 justifiés par
rapport aux cas non justifiés, cela peut sembler peu. Quand on sait que,
dans les méthodes traditionnelles au niveau de l'inspection, on peut
découvrir à peu près 30% des problèmes
réels, on voit qu'on atteint à peu près le même
niveau de la part des travailleurs qui examinent leur milieu de travail et qui
décèlent des cas justifiés d'arrêt.
Dans plusieurs autres cas, même si le droit de refus de travail
n'est pas justifié au sens de la loi, où il y a certaines
techniques qui y sont inscrites. Souvent, cela amène des corrections et
on traite le droit de refus comme un cas de plainte. Globalement, on peut dire
que cela a amené un phénomène d'autosurveillance au niveau
des établissements et les cas qui nous sont référés
nous ont permis de les régler avant que cela ne devienne dramatique et
cause des accidents. Sur ce plan, le programme est positif. Si on compare avec
l'expérience en
Ontario, on s'aperçoit qu'en Ontario, en 1982-1983, il y a eu 304
cas de refus. Donc, je pense qu'au Québec le droit est bien
utilisé, comme la tendance dans les autres provinces canadiennes.
Au niveau des ressources de l'inspection, nous tentons d'affecter nos
ressources selon les divers programmes que nous avons et, dans ces programmes,
il y en a sur lesquels nous devons porter une attention plus grande. Le total
des inspecteurs durant la présente année est de 233, pour
1984-1985. Il y a plus de ressources, il y a 362 postes qui nous sont
accordés pour la prochaine année, mais 233 inspecteurs parmi cet
ensemble de postes. L'an dernier, c'était le même nombre
d'inspecteurs.
Si nous regardons maintenant au niveau du secteur mines et
carrières - c'est un des points que vous avez demandé - lors du
transfert des ressources d'inspection du ministère de l'Énergie
et des Ressources, il y eu 18 inspecteurs qui ont été
transférés. Au cours de l'année 1981, nous avons
monté ce nombre à 22; en 1982, il était de 27 et, en 1983,
il est de 26. Nous avons quand même augmenté le nombre de
ressources affectées à l'inspection du côté des
mines et carrières. C'est un peu le même phénomène
du côté de l'inspection du secteur bâtiment et travaux
publics. Lorsqu'il y a eu transfert de l'OCQ à la commission, à
l'époque, en 1981, il y a eu 45 inspecteurs qui ont été
transférés. Nous avons augmenté ce nombre à 68 et,
en 1982, nous avions 73 inspecteurs; maintenant, nous en avons 69. Il faut dire
que le territoire du Nouveau-Québec a beaucoup moins d'activités
maintenant. Nous avons réduit de beaucoup le nombre d'inspecteurs sur ce
territoire, lequel est maintenant desservi à partir du Nord-Ouest
québécois, de l'Abitibi-Témiscamingue. Il y a 69
inspecteurs affectés à ce secteur. C'est un secteur où il
faut continuer l'inspection traditionnelle, entre autres, à cause du
phénomène des petits chantiers où il est difficile d'avoir
le phénomène d'autosurveillance dont je parlais plutôt. Il
faut donc avoir constamment des gens qui font la surveillance. Vous savez que
les programmes de prévention ne s'appliquent que dans les chantiers de
construction où il y a plus de 25 travailleurs. Dans les autres cas, il
faut assurer une surveillance adéquate. (15 h 30)
Au niveau des relations entre les activités d'inspection et
l'ensemble des programmes de prévention-inspection, il y a une
diminution du nombre de dossiers. Par exemple, un niveau des inspections de
conformité, il y a une baisse. L'an dernier, il y avait 11 806 dossiers
ouverts d'inspection de conformité. Cette année, pour 1983, il y
en a 9643. Cette baisse est due à un changement d'attitude par rapport
à nos
programmes. Nous visons de plus en plus la mise en place de programmes
de prévention. Pour nous, l'inspection de conformité devient un
instrument pour permettre de déceler un certain nombre de
problèmes à l'intérieur d'un établissement et
permettre à l'employeur et au syndicat de mettre en place des programmes
de prévention et les corriger eux-mêmes, ce qui fait qu'il y a un
changement au niveau des interventions habituelles de l'inspection qui se
retrouve surtout au niveau des inspections de conformité, mais aussi,
comme je l'ai dit tantôt, au niveau des droits de refus. Plus la prise en
charge va avoir lieu, moins on va intervenir d'une façon traditionnelle,
entre guillemets, c'est-à-dire un intervenant de l'extérieur qui
va dans un établissement et dit: Corrigez ceci ou cela. De plus en plus,
cela va être le milieu lui-même qui va corriger les choses et
l'appel à l'inspecteur va se faire dans les cas plus graves.
Déjà, on peut ressentir que cela se règle au niveau du
milieu de travail. C'est un peu ce qu'on retrouve dans nos chiffres pour un
total de 14 114 interventions par rapport à 16 980 en 1982. Donc, il y a
une baisse de l'intervention traditionnelle.
Maintenant, les inspecteurs sont affectés de plus en plus, d'une
part, à l'analyse des programmes de prévention pour s'assurer
qu'ils couvrent les principaux problèmes et, d'autre part, au suivi des
programmes de prévention. Tantôt, je vous citais des chiffres pour
les entrées des programmes. Les inspecteurs doivent examiner les
programmes, s'assurer qu'ils sont conformes, qu'ils respectent les
règlements. Par la suite, ils doivent retourner au niveau de
l'établissement faire un suivi du programme de prévention,
s'assurer que les échéances qui y sont prévues sont
respectées. Évidemment, si elles ne sont pas respectées,
on revient à l'inspection plus traditionnelle et on prend les mesures de
contrôle, etc.
Vous avez, M. le député, dans votre comté un cas
qui illustre bien cela. Je pense que la compagnie Expro est un cas qui a fait
l'objet d'une enquête où il y avait beaucoup de
difficultés. On assiste à un mécanisme de prise en charge
intéressant où les deux parties, employeur et travailleur, se
mettant d'accord sur des échéanciers et c'est la tendance qu'on
tente d'implanter de plus en plus dans toutes les usines, parce qu'on pense que
ceux qui sont encore les mieux placés pour régler les
problèmes de santé et de sécurité, ce sont les
premiers intéressés, soit travailleur et employeur sur la place
même. Expro est peut-être un exemple intéressant, même
si parfois cela revient. Récemment, il y a eu un arrêt de travail
à Expro, mais, globalement, on peut dire que depuis six mois les parties
ont décidé de se prendre en charge, de se donner de la formation,
de faire des suivis et je crois que l'employeur démontre du
sérieux dans le suivi de ses engagements.
M. Lavigne: Tout ce qu'on pourrait souhaiter avant de terminer,
Mme la Présidente, c'est qu'on donne - on a commencé d'ailleurs,
comme vous le disiez vous-même, à rencontrer des gens aussi bien
de la partie patronale que de la partie syndicale de la compagnie Expro -
suite, dans les plus brefs délais, aux recommandations qu'on retrouvait
dans le rapport Beaudry; je pense qu'elles étaient judicieuses.
Dès qu'on aura tout mis en oeuvre pour apporter les correctifs
nécessaires, tel que le recommande la commission Beaudry, je pense que
tout le monde ne s'en portera que mieux. J'espère que tout cela sera
fait dans les meilleurs délais. Merci.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Bertrand. La parole
est au député de Viau.
M. Cusano: Merci, Mme la Présidente. Une question au
ministre: l'Association des entrepreneurs en construction du Québec vous
a demandé, ici, en commission parlementaire, si vous aviez l'intention
de nommer un de ses représentants au conseil d'administration de la
CSST. Si je me rappelle bien, vous aviez dit à ce moment que vous
étiez prêt à étudier la situation. Est-ce que vos
études sont avancées, M. le ministre? Est-ce que l'AECQ sera
représentée?
M. Fréchette: Si je me rappelle bien, le Président,
je n'ai pas dit aux représentants de l'association...
M. Cusano: C'est Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Cela va venir.
M. Fréchette: Je m'excuse.
La Présidente (Mme Harel): Je ne me décourage
pas.
M. Pagé: Cela prend du temps pour changer les
mentalités.
M. Cusano: II est aussi pire que le premier ministre.
M. Fréchette: On va finir par passer au travers, vous
savez. Je me reprends, Mme la Présidente. Si mon souvenir est exact, au
moment où l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec s'est présentée ici, en commission parlementaire,
au moment de l'étude du projet de loi 42, je ne lui ai pas dit que sa
demande était à l'étude. Je lui ai dit qu'une
décision avait été prise en relation avec sa demande. Je
voudrais
simplement rappeler au député de Viau, ne serait-ce que
pour mémoire, que ce n'était pas la première fois que
l'Association des entrepreneurs en construction me soumettait cette
requête. En fait, depuis septembre 1982, cette même association est
constamment revenue à la charge pour insister et obtenir une
représentation au conseil d'administration de la CSST. J'ai toujours
indiqué aux représentants de l'AECQ que leur requête
m'apparaissait effectivement bien fondée. Cependant, il m'était
difficile, pour ne pas dire impossible, de procéder à une
nomination au moment même où on me le demandait, compte tenu que
tous les postes au conseil d'administration étaient remplis, avaient des
titulaires et qu'il fallait de toute évidence attendre le renouvellement
de l'ensemble du conseil d'administration. Ce renouvellement doit se faire au
mois d'août et l'engagement que j'ai pris vis-à-vis de l'AECQ est
toujours le même. Comme elle est d'une prudence extrême, elle m'a
écrit récemment pour me redemander mes intentions à cet
égard. Je l'ai encore informée que, le temps venu, sa
requête serait effectivement agréée.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci. Puisqu'on est un peu limité par le
temps... Le ministre n'est peut-être pas au courant de nos
règlements, c'est que, dans mes vingt minutes, ce sont seulement mes
paroles qui comptent et non les vôtres.
M. Fréchette: Monsieur, vous êtes d'une
amabilité consommée.
M. Cusano: Sur les voyages, on parlait justement ce matin...
M. Pagé: J'aurais une question additionnelle.
La Présidente (Mme Harel): Vous pourrez le faire avec le
consentement des membres de la commission et surtout avec le consentement de
votre collègue de Viau.
M. Pagé: Vous dites, M. le ministre, qu'au moment venu on
procédera à la nomination. Selon vous, quand viendra ce
moment?
M. Fréchette: Je viens de vous signaler que la loi est
ainsi faite et que c'est au mois d'août de l'année qui vient que
les postes seront comblés au conseil d'administration. Ou bien tous les
gens qui y sont actuellement peuvent être reconduits, quelques-uns
d'entre eux seulement peuvent être reconduits et les autres
remplacés par de nouveaux venus. Tout cela doit se faire au mois
d'août. Au moment où on se parle, il y a cette consultation qui
est prévue par la loi et qui est en train de se faire pour que les
différentes associations, autant syndicales que patronales, acheminent
des recommandations. Dès lors que tout cela sera complété,
le temps venu, encore une fois, les nominations se feront.
M. Pagé: Donc, un représentant de l'AECQ.
M. Fréchette: Voilà, vous devinez très bien.
Je vous signale que Mme Grimard, qui est au conseil d'administration, est une
membre active, me dit-on, de l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec.
M. Pagé: Mais elle ne représente pas l'AECQ.
M. Fréchette: Non, elle ne représente pas l'AECQ,
je suis d'accord avec vous, mais elle est membre de l'organisme.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci. Je regardais les voyages à
l'étranger depuis le 1er janvier 1983. Je remarque qu'il y a eu un total
de 45 000 $ de dépensés en voyages. Avant que j'entre dans les
détails, une question. Lorsque des employés de la CSST vont en
dehors du Québec ou dans le Québec même, lorsqu'ils
assistent à une conférence, à un congrès ou
lorsqu'ils suivent des cours, est-ce qu'ils remettent un rapport à leurs
supérieurs? Est-ce que les rapports sont disponibles pour les voyages
qui sont mentionnés ici, dans l'information que vous nous avez fournie,
M. le ministre?
M. Fréchette: Mme la Présidente, à la
première question du député de Viau, je lui signalerai que
la règle, c'est qu'effectivement des fonctionnaires de la commission,
qui sont en mission ou qui font des voyages à l'extérieur du
Québec, doivent à leur retour faire rapport des travaux auxquels
ils ont assisté, quelle a été leur participation et
qu'est-ce qu'ils en retiennent. Maintenant, je ne connais ni de
règlement ni de directives administratives qui feraient que ces rapports
ne puissent pas être publiés ou soumis à qui voudrait les
voir. À cet égard, je pense bien qu'il n'y aurait aucune
espèce d'hésitation, si le député de Viau demandait
de façon précise...
M. Cusano: Oui, je vais le faire, M. le ministre.
M. Fréchette: Alors, il n'y a pas de problème. Je
ne vous dis cependant pas qu'on peut les avoir sous la main cet
après-midi.
M. Cusano: Non, non. Je suis très patient, et vous le
savez.
Pour revenir à ces voyages, je crois que quelques explications
sont toutefois nécessaires, mais, s'il y a des erreurs de frappe, on les
accepte. Vous avez M. Jacques Simard qui a passé au-delà de 24
jours en Californie pour un montant de 1507,84 $. À la même page,
vous avez un M. Robert Rouleau qui a passé une journée en
Californie et cela a coûté 1989,52 $. Est-ce qu'on pourrait nous
expliquer...
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre.
M. Cusano: II y a plusieurs voyages en Californie et on sait fort
bien que le billet d'avion est de 950 $. Alors, avec les allocations qu'on
connaît, les 24 jours, c'était bon marché, mais celui de M.
Rouleau: une journée pour une visite des installations d'IBM à
1989,52 $, je crois qu'on doit se poser des questions.
M. Fréchette: Oui, je pense, Mme la Présidente, que
le député de Viau est tout à fait justifié de se
poser des questions. Je lui réitère ce que je viens de lui dire.
Nous allons lui fournir les explications qu'il demande, mais on n'est pas
capable de le faire sur-le-champ. Nous pourrions faire parvenir au
secrétariat de la commission les renseignements demandés par le
député de Viau.
M. Cusano: Quel poste occupe M. Robert Rouleau?
M. Sauvé: Les deux sont à la direction des
systèmes à Québec, au siège social.
M. Cusano: La visite a duré une journée?
M. Sauvé: Écoutez, il y a quelque chose qui ne va
pas, cela me paraît étonnant.
M. Cusano: D'accord, je continue.
M. Sauvé: J'en profiterais pour faire une correction, M.
le député.
La Présidente (Mme Harel): M. le juge Sauvé, c'est
pour les fins de l'enregistrement de nos travaux.
M. Sauvé: Excusez-moi, mais j'en profiterais pour faire
une correction. À la fin des voyages, l'avant-dernier nom, André
Laurin, qui est allé au BIT, nous avons été
remboursés depuis. Il faut donc soustraire 4323 $.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Sauvé: C'est remboursé par le gouvernement
fédéral, quand on participe aux...
La Présidente (Mme Harel): M. le juge Sauvé.
M. Sauvé: ...conférences internationales à
la demande du gouvernement fédéral.
M. Cusano: II y a une bonne collaboration de ce
côté. C'est très bien.
M. Sauvé: Excellente.
M. Cusano: Ce n'est pas cela que le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation nous disait aujourd'hui. Je continue
encore...
La Présidente (Mme Harel): Cela n'est pas pertinent
à nos travaux.
M. Cusano: C'est vrai, vous avez raison, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Pagé: Je pense que M. le juge voulait ajouter quelque
chose.
M. Cusano: Vous avez aussi M. Roger Tremblay, un voyage en
Allemagne. Le but du voyage, selon la fiche que vous nous avez donnée,
c'est un voyage d'études.
M. Sauvé: II est allé dans une mission
interministérielle, je crois - c'est le directeur des ressources
humaines - pour développer une politique pour les cadres à la
commission et au gouvernement. M. Tremblay est bien connu, je pense. Il
était autrefois au ministère de la Fonction publique. Il est chez
nous directeur des ressources humaines depuis quatre ans.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Puisque vous allez...
M. Sauvé: On peut fournir le rapport, c'est très
intéressant.
M. Cusano: Pardon?
M. Sauvé: On pourra fournir le rapport, c'est très
intéressant.
M. Cusano: Je l'ai demandé officiellement, j'aimerais bien
voir les rapports de tous ces voyages parce qu'il y en a qui semblent
très intéressants. Encore sur la question des voyages, il y a
ici: Boston, Massachusetts, une dénommée Jacqueline
Cadoret. Pour trois jours, cela coûte 846,99 $ et je
présume, au bas de la page, M. Régis Tremblay, Boston,
Massachusetts, encore: suivre un cours sur la qualité de l'air ambiant.
Celui-ci y est pour cinq jours et cela coûte 659 $. Est-ce que ce sont
des erreurs d'informatique? Je commence à m'inquiéter. Ce matin,
le ministre nous a cité toutes sortes de chiffres en disant que les
états financiers démontrent sûrement un déficit de
40 000 000 $, mais, si les états financiers sont de la même
précision que ceci, je crois qu'on va s'attendre à des
surprises.
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre.
M. Fréchette: Je m'excuse, Mme la Présidente,
j'étais distrait. Est-ce que c'est une question et, si oui, de...
La Présidente (Mme Harel): C'est un commentaire.
M. Cusano: Non, non, c'est un commentaire, M. le ministre. (15 h
45)
M. Fréchette: Ah bon!
M. Cusano: Je me demande quelle est la précision de ce
document, s'il reflète les chiffres que vous avez donnés ce
matin.
M. Fréchette: Je pense que pour être fixé
là-dessus, Mme la Présidente, il va falloir attendre...
M. Cusano: C'est cela.
M. Fréchette: ...les renseignements précis que le
député de Viau nous a demandés. Le député de
Viau va comprendre que, lorsqu'on discute... Je ne suis pas en train de vous
dire que ce n'est pas important de faire l'examen qu'on fait là, mais,
sur un budget global de la nature que vous savez, demander des
précisions aussi claires par rapport au dossier qu'on a sous les yeux
actuellement, il va falloir de toute évidence faire les recherches et
vous fournir la documentation ou les réponses par écrit.
M. Cusano: M. le ministre, d'habitude, en administration - c'est
une question d'opinion à ce moment-ci - lorsqu'on regarde l'exactitude
des petits dossiers, on est capable d'extrapoler sur l'exactitude des gros
dossiers.
M. Fréchette: Enfin, on verra quand la documentation sera
acheminée à qui de droit.
M. Cusano: Puisque vous allez nous fournir cela avec toutes les
précisions, je ne veux pas savoir ce que M. Rouleau a mangé quand
il était là. À une autre annexe, on donne la liste des
contrats de moins de 25 000 $; une opinion a été demandée
à Andrée Lajoie. On nous indique ici: pouvoir CSST. Qu'est-ce que
c'est?
La Présidente (Mme Harel): M. Sauvé.
M. Sauvé: Mme Lajoie est bien connue comme ayant
été la directrice du centre de recherche de droit public à
l'Université de Montréal. Elle a écrit de gros volumes
fort importants et intéressants sur le droit à la santé et
elle a été consultée pour nous donner une opinion sur le
pouvoir à déterminer le lieu de prestation des services de
santé aux accidentés en vertu du droit à l'assistance
médicale.
M. Cusano: Vous allez nous faire parvenir cela, M.
Sauvé?
M. Sauvé: Certainement.
M. Cusano: Je continue. Au bas de la page: Me Claude Marcoux,
frais: collection, dossier CUM, Gilles Beaulieu, un montant de 3604 $.
Qu'est-ce que c'est?
M. Sauvé: Je vais le vérifier, M. le
député de Viau. Si vous vous souvenez, depuis un certain temps,
ce sont les avocats plaideurs qui plaident les causes du gouvernement et des
organismes. Le système auparavant était donné aux avocats
de pratique privée. Alors, avant 1976 ou 1977 -je ne saurais vous dire
la date exacte du changement de politique gouvernementale - il y a un certain
nombre d'avocats qui ont fait de la "collection" ou des causes pour
défendre la commission. Ce sont des dossiers qu'ils avaient dans leur
système.
M. Cusano: Ah! c'étaient des montants qui étaient
dus à des avocats?
M. Sauvé: C'est cela.
M. Cusano: Ah bon, très bien.
M. Sauvé: Ce sont des honoraires pour des frais de cour.
Alors, il n'y a pas d'opinion.
M. Cusano: D'accord. Je continue à l'autre page: Dr
Laurent Pilat, projet de recherche. Je sais qu'il y a de l'économie qui
est faite, mais je trouve que la description est un peu maigre. Qu'est-ce que
c'est? C'est un projet de recherche pour 10 557 $.
M. Sauvé: Vous avez peut-être remarqué que
nous avons dix monographies pour les dix secteurs prioritaires. Le Dr Pilat,
qui est à l'Université McGill, a
travaillé sur une des monographies qui touchent les
minéraux non métalliques. On pourra vous faire parvenir la
publication.
M. Cusano: On va avoir beaucoup de lecture. Encore plus loin:
"Recherche d'espaces pour location à Montréal payée
à M. Maurice Farragi, 1850 $." Est-ce un courtier?
M. Sauvé: Non, Mme la Présidente. Le conseil
d'administration a demandé un appel d'offres public, dans les journaux,
pour des locaux à Montréal, soit pour la direction
régionale de Montréal, soit pour le centre administratif de
Montréal. À la suite de l'appel d'offres, le conseil
d'administration, pour avoir la plus grande garantie possible
d'impartialité, a demandé que nous demandions à deux
experts externes d'évaluer et de conseiller le conseil, en plus de nos
experts internes.
M. Farragi en est un et l'autre - le compte n'était pas
arrivé au moment où on l'a fait - n'est pas là.
M. Cusano: Cela va. D'accord. Ce sont des recherches d'espaces
strictement pour Montréal?
M. Sauvé: Oui.
M. Cusano: Par qui se fait la recherche d'espaces à
Saint-Jérôme?
M. Sauvé: II n'y a pas encore de décision du
conseil d'ouvrir un bureau à
Saint-Jérôme, c'est à l'ordre du jour de la
réunion du 19 avril.
M. Cusano: Oui. Est-ce que M. Dean vous a suggéré
un espace?
M. Sauvé: Ni M. Dean ni personne ne nous a
suggéré quoi que ce soit parce que la décision n'est pas
prise.
M. Cusano: Alors, sa déclaration dans le journal de
Saint-Jérôme n'était pas...
M. Sauvé: À ma connaissance, Mme la
Présidente, la déclaration n'est pas de M. Dean, mais d'un des
attachés politiques qui a dit qu'il y aurait possiblement un bureau qui
ouvrirait à Saint-Jérôme.
M. Pagé: C'est de l'enthousiasme.
M. Cusano: Oui.
M. Sauvé: Cela n'est pas...
Une voix: II faudrait le lui demander.
M. Sauvé: Ne me demandez pas cela.
M. Cusano: Alors, il n'y a pas de décision de
déménager dans les édifices qui ont été
suggérés par l'attaché politique de M. Dean.
M. Sauvé: Tout ce que je peux dire, c'est que la
décision est à l'ordre du jour du conseil du 19 avril. Si jamais
on ouvrait un bureau à Saint-Jérôme, ce serait un bureau
local par rapport au bureau régional qui est à Laval et ce serait
au cours de l'année 1984. On ne peut donc pas avoir loué un local
sans avoir eu l'autorisation budgétaire.
M. Cusano: Vous avez certainement fait des études. Vous
n'arrivez pas au conseil d'administration en demandant aux gens autour de la
table de choisir un local à Saint-Jérôme.
M. Sauvé: Nous avons prévu un budget et on a fait
des études pour savoir le coût des loyers à
Saint-Jérôme. Nous avons le coût des loyers à
Saint-Jérôme et nous ne savons aucunement où nous nous
situerons quand nous ouvrirons et si nous ouvrons un bureau à
Saint-Jérôme.
M. Cusano: C'est bien...
M. Pagé: Donc, ce n'est pas certain que vous ouvrirez un
bureau à Saint-Jérôme.
M. Sauvé: Je ne peux vous répondre, c'est le 19
avril que la décision doit être prise.
M. Cusano: M. Sauvé, vous me démontrez, ainsi qu'au
député de Portneuf, que c'est bien le conseil d'administration
qui prend les décisions.
Je termine, Mme la Présidente. Encore le document que vous nous
avez fourni. Vous avez une page sur les sondages faits par la direction des
communications. Je présume que le sondage entrevue-groupe et le sondage
général, la première étape est
précisément pour valider les questions qui seraient
posées.
M. Sauvé: M. le député de Viau, la
première, l'étape 1, c'est pour valider le questionnaire.
M. Cusano: C'est cela. Et le deuxième, les 20 000 $, c'est
pour le sondage. C'est ce sondage qui vous a amené à dire que
tout va bien, qu'il y a beaucoup de gens qui sont satisfaits du fonctionnement
de la CSST. C'est bien cela?
M. Sauvé: C'est un sondage qui nous a indiqué des
besoins de satisfaction et des questions que nous essayons de corriger.
M. Cusano: Ce sondage a été fait en 1983. C'est
bien cela?
M. Sauvé: En 1983.
M. Cusano: Et il n'y a pas eu d'autres sondages de faits,
à part ceux qui sont mentionnés ici?
M. Sauvé: Aucun autre.
M. Cusano: Aucun autre. Le sondage sur l'écoute
électronique, qu'est-ce que c'est?
M. Sauvé: Vous devez savoir que nous sommes devant les
tribunaux et que nous bâtissons notre cause.
M. Cusano: Je parle du sondage, M. le juge.
M. Sauvé: C'est cela. Nous bâtissons notre cause et
je ne vous en dirai pas plus que cela. Ce sera un élément de
preuve pour montrer ce qui a été fait.
M. Cusano: Le sondage a été fait en 1983?
M. Sauvé: En 1984. C'est une erreur.
M. Cusano: Ah bon! Une autre erreur! Quand le sondage a-t-il
été fait?
M. Sauvé: En 1984, au cours du mois de mars, je pense.
M. Cusano: À la suite...
M. Sauvé: C'est à la suite de la déclaration
qui a été faite devant la commission parlementaire.
M. Cusano: ...de M. Harguindeguy. Alors, c'est à la suite
de la déclaration de M. Harguindeguy. Si je comprends bien, vous avez
fait un sondage auprès de la population pour savoir...
M. Sauvé: Je ne vous en dirai pas plus que cela, Mme la
Présidente, parce que cette question est devant les tribunaux. Je ne
déclarerai pas les éléments de preuve que nous avons
à déposer devant la cause... Nous avons déposé une
action devant les tribunaux et c'est un des éléments de preuve.
Je ne pourrai pas vous en dire beaucoup parce que je ne pense pas qu'on ait
à déclarer la preuve.
M. Cusano: Et tout cela, M. le juge, ce sont les employeurs qui
paient pour.
M. Sauvé: Mme la Présidente, je vous dirais que les
employeurs du conseil d'administration ont été très
choqués de cette déclaration malheureuse. Je n'en dirai pas
plus...
M. Cusano: Oui, mais vous avez pris la décision de
poursuivre M. Harguindeguy avant d'arriver au conseil d'administration,
n'est-ce pas?
M. Sauvé: ...parce que, Mme la Présidente, si vous
connaissiez l'influence que ce genre de déclaration a eue sur les 2556
membres du syndicat, il faudrait peut-être regarder cet aspect.
M. Cusano: Sur l'équipement
téléphonique...
M. Pagé: Avant, Mme la Présidente, vous me
permettrez de demander ceci à M. le juge: Vous confirmez que des sommes
provenant des budgets réguliers de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail, laquelle se finance principalement des
contributions des employeurs du Québec, servent à bâtir une
preuve au soutien de l'argumentation invoquée par la Commission de la
santé et de la sécurité du travail dans une
démarche judiciaire qu'elle a avec le Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec et que cette poursuite a été
annoncée avant que le conseil d'administration ne l'accepte. C'est cela
que vous nous confirmez aujourd'hui.
M. Sauvé: Mme la Présidente, c'est très
simple: le règlement de régie interne de la commission a
été adopté par le conseil d'administration et il
prévoit que toutes les poursuites judiciaires sont du ressort du
président-directeur général.
M. Cusano: M. le juge, sur cette décision, le ministre
nous avait bien expliqué en commission parlementaire les
règlements qui vous permettaient d'agir de la façon que vous avez
agi, mais vous n'avez pas - c'est sûr, le règlement est là
et je ne le discute pas présentement. On sait comment vous vous servez
de l'article 154 de la loi, alors je ne suis pas étonné -
avez-vous consulté quelqu'un avant d'entamer tout le processus?
La Présidente (Mme Harel): M. le juge Sauvé, avant
que vous répondiez, je voudrais simplement rappeler aux membres de cette
commission, et peut-être au député de Viau qui en est
déjà informé, qu'il y a un article dans nos
règlements qui nous interdit de parler d'une affaire qui est devant les
tribunaux. Dans ce contexte, la parole est à vous, M. le juge
Sauvé.
M. Cusano: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député
de Viau.
M. Cusano: Je lui demande quand et qui il a consulté avant
de prendre cette
décision. Je ne vois pas comment on pourrait influencer les
résultats.
M. Sauvé: Mme la Présidente, je voudrais expliquer
l'une des raisons qui sous-tend que les règlements prévoient que
le P.-D.G doit prendre les procédures lui-même. Vous allez
comprendre que, dans bien des cas, il y a des conflits d'intérêts.
Par exemple, s'il fallait que nous demandions aux employeurs du conseil
d'administration si l'on doit poursuivre un employeur, je pense qu'on aurait
quelques problèmes. La même chose quand nous poursuivons un
travailleur: s'il fallait demander à la partie syndicale de voter en
faveur, ce serait probablement lui demander beaucoup. En plus de cela, comme
tout le monde sait, il y a des délais d'appel, les choses doivent
être prises rapidement et les avocats nous demandent de prendre des
décisions. Le comité de direction conseille le P.-D.G. sur ces
cas. Dans ce cas-là, nous avons consulté beaucoup de personnes, y
compris des syndiqués chez nous.
M. Cusano: M. Sauvé, je reviens aux voyages. M. Pierre
Perron a fait un séjour à San Antonio, au Texas, pour suivre un
cours sur le fonctionnement du nouveau système
téléphonique à être implanté au service de
l'indemnisation. Quel système est-ce? (16 heures)
M. Sauvé: Mme la Présidente, nous avons un
système téléphonique à Montréal, à la
DRIM. C'est un investissement qui a été décidé par
le conseil d'administration, si mon souvenir est bon, d'environ 500 000 $ pour
donner de meilleurs services et permettre un certain nombre de choses
techniques. Ce que je veux dire par là, c'est qu'on puisse parler
à plusieurs personnes. Nous avons à Montréal comme tout le
monde le sait - 24 téléphonistes; alors, cela prend un
système développé. M. Perron est allé voir,
à la demande des services auxiliaires chez nous, des systèmes
comparables pour pouvoir décider, avant la décision finale sur
l'appel d'offres, ce que nous devions faire.
M. Cusano: Les gens qui se servaient de ce système
à San Antonio faisaient-ils de l'écoute électronique ou
téléphonique?
M. Sauvé: Je pense, Mme la Présidente, qu'on a
suffisamment répondu à ce genre de questions.
M. Cusano: Je vous demande plus d'informations sur ce
système que M. Perron est allé voir.
M. Sauvé: Ce que j'ai dit clairement, Mme la
Présidente, dans une émission d'affaires publiques à la
télévision, c'est qu'il ne s'est jamais fait, il ne se fera
jamais et il ne se fait pas d'écoute électronique à la
CSST. Tant que je serai P.-D.G., il ne s'en fera pas.
M. Cusano: Alors, pourquoi le sondage...
M. Sauvé: Je pense que là-dessus c'est...
M. Cusano: Pourquoi le sondage sur l'écoute
électronique? Je ne comprends pas.
M. Sauvé: Je comprends fort bien...
M. Cusano: Vous dites qu'il ne s'en fait pas. Alors, pourquoi
faire un sondage?
M. Sauvé: J'ai expliqué tantôt ce que j'ai
fait dans ce cas-là, c'est que nous avons des éléments de
preuve. C'est un des éléments de preuve que nous avons
jugé opportun d'avoir en main sur les déclarations malheureuses
qui ont été faites, qui attaquaient la crédibilité
des employés de la commission.
M. Perron: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Je voudrais vous demander une directive. Est-ce qu'il
ne serait pas de rigueur, lorsqu'une cause est devant les tribunaux, donc sub
judice, que les gens d'un côté comme de l'autre de la table et
même les intervenants n'en parlent pas du tout? Cela devient
risqué de la part de toutes les personnes qui sont membres de cette
commission, pour faire achopper la cause devant les tribunaux, autant que pour
les personnes qui sont intervenantes devant nous.
La Présidente (Mme Harel): Pour le bénéfice
des membres de la commission...
M. Pagé: Mme la Présidente, sur cette
question...
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf, je vais vous entendre et je vais faire lecture par la suite de la
disposition...
M. Pagé: ...et comme suite...
La Présidente (Mme Harel): ...de notre règlement
sur cette question. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: À la suite de l'intervention de notre
savant collègue de Duplessis, on doit retenir que les dispositions de
notre règlement prévoient qu'on ne peut référer
à une cause qui est devant les tribunaux, mais vous aurez certainement
compris que mon collège de Viau ne réfère pas à la
cause, ne
réfère pas au fond de la question mais au pourquoi de
l'affectation d'une somme qui a enclenché cette procédure devant
les tribunaux. C'est tout à fait différent, il y a le fond et la
forme. Mon collègue réfère à la forme et il est en
droit et légitimé de poser de telles questions.
La Présidente (Mme Harel): Je vous fais lecture, M. le
député de Duplessis, pour le bénéfice des membres
de la commission et pour le bénéfice de nos invités, de
cet article qui s'intitule "Paroles interdites" et qui se lit comme suit: Le
député qui a la parole ne peut - troisième paragraphe
-parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou qui fait l'objet d'une
enquête si les paroles prononcées peuvent porter préjudice
à qui que ce soit.
On ne fait pas de distinction dans cette disposition sur les
modalités concernant le fond ou la forme. J'apprécierais beaucoup
qu'on puisse, peut-être, relativement terminer cette affaire.
Peut-être, M. le député de Viau, que vous pourrez
procéder à d'autres interventions.
M. le député de Viau.
M. Cusano: Mme la Présidente, je ne veux pas vous rendre
la tâche difficile. Je veux tout simplement faire encore une fois la
demande, au cas où on ne l'aurait pas comprise, de recevoir tous les
rapports des gens qui ont fait des voyages à l'étranger, ceux qui
sont ici et peut-être d'autres qui ont été oubliés,
à savoir exactement quels sont les coûts engendrés et quel
a été le but de leurs visites et le rapport qu'ils étaient
censés donner. J'apprécierais que ces rapports ne soient pas
faits rétroactivement.
Ma dernière question va être très brève mais
va peut-être engendrer une longue réponse. La question s'adresse
au ministre et en même temps au juge Sauvé. À la suite des
deux commissions parlementaires que nous avons eues, celle du mois de
décembre qui a tenté de regarder de plus près le
fonctionnement de l'administration de la CSST et, comme je l'ai dit ce matin,
même la commission du mois de février, les gens qui sont venus
témoigner ont, même si ce n'était pas le mandat de la
commission, très souvent référé à
l'administration de la CSST.
Puis-je vous demander quels changements, quelles améliorations
vous avez faits? Quelles opérations avez-vous mises en marche? Lorsque
vous parliez des rapports internes, je vous avais souligné celui de
Longueuil où on démontrait qu'il y avait au-delà de 20%
des dossiers qui étaient erronés. Pouvez-vous nous dire, aussi
brièvement que possible, M. le ministre ou M. Sauvé, quels sont
les changements fondamentaux que vous avez apportés au fonctionnement de
la CSST?
M. Fréchette: Mme la Présidente, dans son
préambule, le député de Viau a évalué que,
bien que la question pouvait être courte, la réponse pouvait
être longue et je pense qu'il a été prudent lorsqu'il m'a
signalé cet aspect de sa question. Je vous dirais essentiellement que
les deux commissions parlementaires, autant celle de décembre 1983 que
celle de février et mars 1984, ont effectivement permis de mettre le
doigt ou d'identifier des processus, autant administratifs,
réglementaires que législatifs qu'il faut corriger.
Est-ce que je peux tout de suite vous signaler, Mme la
Présidente, que ce ne sont pas les gens de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail qui vont se plaindre,
par exemple, du fait que plusieurs pouvoirs réglementaires, qui sont
actuellement de leur juridiction, soient incorporés dans une loi? Par
exemple, vous savez tout aussi bien que moi que, dans l'état actuel des
choses, la Commission de la santé et de la sécurité du
travail a un pouvoir réglementaire qui réfère à 26
juridictions différentes. Elle peut faire des règlements dans 26
champs d'action différents.
Le projet de loi 42, tel que déposé, limitait ses champs
de juridiction à six volets particuliers. Il y en avait un parmi ces
six, le dernier, qui était de la nature d'une espèce de clause
omnibus qui permettait de la réglementation presque à tous
égards. Le député de Viau le sait très bien, cet
article a été amendé de façon à retrancher
le sixième paragraphe qui permettait une réglementation ouverte
à tous égards, encore une fois.
Les règlements qui existent actuellement - et je le dis, Mme la
Présidente, sans aucune réserve - le pouvoir réglementaire
a été l'objet d'un sentiment d'agressivité et de
méfiance de la part de bien des gens qui font quotidiennement affaires
avec la Commission de la santé et de la sécurité du
travail. La commission de décembre a révélé cette
situation. Celle de février et de mars a confirmé cette
situation. Et, à partir de ces observations, la décision a
été prise - elle a été annoncée à
plusieurs occasions pendant la commission parlementaire - de procéder
à une série, que je considère impressionnante,
d'amendements au projet de loi 42 qui vont avoir très
précisément pour objectif de réduire
considérablement le pouvoir réglementaire, d'inclure dans la loi
la réglementation qui existe actuellement et c'est
particulièrement vrai au chapitre de la réadaptation sociale. Le
député de Viau qui a suivi avec beaucoup d'assiduité tous
les travaux de la commission sait très bien quelle préoccupation
avaient les invités à cet égard.
Ce qu'on nous a demandé, ce qui faisait, ce qui fait aussi
l'objet d'agressivité
et de méfiance - dont je parlais tout à l'heure -
c'étaient précisément les politiques de
réadaptation. Qu'est-ce qui a été convenu, Mme la
Présidente? Il a été convenu que, dans le projet de loi 42
amendé, nous allions incorporer dans la loi le principe
général du droit à la réadaptation, de même
que nous allions procéder à décrire quelles sont les
politiques de réadaptation et quels sont les droits auxquels peut
prétendre un accidenté du travail. J'ai cependant indiqué
- et le député de Viau va s'en souvenir - en commission
parlementaire que nous n'étions pas à la fin de nos
embêtements à cet égard. Les embêtements qu'on a
actuellement proviennent de l'interprétation qu'on fait de la
réglementation. Et l'interprétation qu'on fait dans bien des
égards nous amène à bien des conclusions qu'il y a de la
discrétion, enfin, qu'on interprète mal et ainsi de suite. Mais
ce ne sera pas la fin de nos problèmes si tout cela est maintenant
incorporé dans la loi; il va falloir, à moins que le
député de Viau n'ait d'autres suggestions à nous faire,
que les tribunaux épuisent l'interprétation qu'il faudra donner
à la politique de réadaptation, par exemple, qu'on retrouvera
dorénavant dans la loi. Il sait tout aussi bien que moi qu'avant que la
Cour suprême ne se soit prononcée sur l'interprétation
qu'il faut donner à la définition de telles politiques de
réadaptation, bien, on va devoir vivre dans une espèce
d'incertitude. Mais, les parties nous ont toutes signalé qu'elles
préféraient, et de beaucoup, qu'on retrouve dans la loi à
la fois la consécration du principe du droit à la
réadaptation de même que les politiques
générales.
Mme la Présidente, je pourrais épiloguer longuement sur le
chapitre de l'assistance médicale. Je pourrais épiloguer
longuement sur le chapitre des mécanismes d'appel. Je pourrais repasser
avec le député de Viau tous les chapitres de la loi 42 qui vont
faire l'objet d'amendements importants. Et nous sommes d'avis, à tort ou
à raison -je pense bien que l'exercice confirmera ou infirmera l'opinion
que l'on a - nous sommes d'avis que la loi 42 et les amendements qui vont y
être inclus vont précisément contribuer à faire
disparaître ces sentiments dont je viens de parler et qui, dans bien des
égards, étaient fondés.
Vérification interne
M. Cusano: J'apprécie votre exposé sur la loi 42 et
certaines lacunes vont certainement être corrigées. C'est
peut-être un peu ma faute, je vous ai posé la question trop large
pour que vous restiez sur le sujet.
Ma question - et là, je vais la préciser davantage - est
la suivante: Si l'on prend tous les exemples - et je pense que je n'ai pas
besoin d'en faire l'énumération, je vous ai mentionné la
question des surpayés administratifs, des erreurs, justement, dans le
rapport de vérification interne du bureau de Longueuil; j'avais
mentionné aussi dans le temps d'autres rapports - quelles mesures ont
été prises pour diminuer cette marge d'erreurs? Quelles mesures
ont été prises pour s'assurer que les médecins de la CSST,
avant d'écrire un rapport médical, examinent au moins le patient?
C'est cela, la "day to day operation"; qu'est-ce qui a été fait
depuis pour améliorer la situation?
M. Fréchette: Mme la Présidente, au chapitre de
l'assistance médicale, je me suis volontairement abstenu d'entrer dans
des détails que le député de Viau connaît
parfaitement bien et qui sont de la nature des amendements qui ont
été annoncés. Il sait, par exemple, que la loi sera ainsi
faite qu'elle devra privilégier...
M. Cusano: Mme la Présidente, la loi n'a pas encore
été réécrite et n'a pas été
déposée. Moi, je veux savoir ce qui a été fait
depuis décembre, du côté de l'administration, pour
s'assurer que la boîte fonctionne bien.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je vais
référer mon collègue...
M. Cusano: La loi, on ne sait pas. Peut-être pouvez-vous
nous dire quand elle va être déposée et, là, nous
pourrons faire une projection, à savoir quand ces mesures entreront en
place.
La Présidente (Mme Harel): Si je comprends bien, M. le
député de Viau, c'était votre dernière
question.
M. Cusano: Bien, c'est que la réponse du ministre a
suscité d'autres questions de ma part.
La Présidente (Mme Harel): D'accord. M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, je parlais
d'assistance médicale parce que c'est un des exemples très
concrets et très précis auxquels a référé le
député de Viau. J'entreprenais de lui expliquer quelles
étaient nos intentions, mais je n'irai pas plus loin.
Quant aux mesures très concrètes que la commission a
prises depuis décembre, avant décembre, je vais simplement
référer mon collègue au rapport que vient de
déposer à l'Assemblée nationale...
M. Cusano: Oui, je l'ai lu.
M. Fréchette: ...le ministre délégué
aux Relations avec les citoyens et les citoyennes du Québec. Il y
constatera qu'une page complète de ce rapport est consacrée
à la
Commission de la santé et de la sécurité du
travail, que ce rapport identifie très précisément les
actions qui ont été prises et qu'il y a à ce stade une
évaluation qui est faite par le ministre délégué
aux Relations avec les citoyens et les citoyennes qui va dans le sens... (16 h
15)
M. Cusano: Mais il dit aussi que c'est trop tôt pour se
prononcer.
La Présidente (Mme Harel): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le ministre. La parole est au ministre.
M. Fréchette: Mme la Présidente, donc
l'évaluation qui est faite par le ministre délégué
aux Relations avec les citoyens et les citoyennes à ce stade, c'est que
la commission a effectivement fait des efforts qu'il faut souligner pour
améliorer son système de service à la clientèle,
qu'il reste un certain nombre d'autres choses à faire et que, si le
passé doit être garant de l'avenir quant à la nature des
décisions et aux intentions d'améliorer ce service, il y a tout
lieu d'espérer que dans de courts laps de temps nous allons atteindre
cet objectif.
Maintenant, si vous me le permettiez, Mme la Présidente, quant
aux autres aspects d'ordre plus technique comme, par exemple, la
référence au cas de Longueuil. Incidemment, le cas de Longueuil
n'était pas le meilleur qui pouvait être cité en exemple.
On nous reprochait, on reprochait à la commission d'avoir payé
une femme longtemps après le décès de son mari, de l'avoir
payée en trop. Je vous signalerai que, toutes les démarches ayant
été faites, on a constaté qu'après le
décès du mari elle n'était pas suffisamment payée
et c'est la commission qui lui en devait après que la découverte
a été faite. Alors, je vais demander au
président-directeur général de donner plus de
précisions sur cet aspect précis de la question.
M. Cusano: M. le ministre...
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Viau, vous avez posé une question. Est-ce que nous laissons la parole
à M. le juge Sauvé?
M. Cusano: Je voudrais préciser avant que le ministre...
Lorsque j'ai soulevé ces cas, M. le ministre, ce n'était pas le
fait de dire qu'une personne avait reçu trop ou moins. La question, vous
venez de le dire vous-même, c'est que c'était une erreur en
partant, et cela démontre un peu l'inefficacité de la
boîte; vous venez de le dire.
M. Sauvé: Merci.
La Présidente (Mme Harel): M. le juge Sauvé.
M. Sauvé: Mme la Présidente, je voudrais donner
quatre exemples. Je vais commencer par ce dernier cas qui sera dans ma
première série d'exemples sur la vérification interne. Ce
qui est arrivé dans le cas de cette veuve, c'est que son mari recevait
un déficit anatomophysiologique de tant pourcent. Vous savez qu'avec la
nouvelle loi de 1979 la veuve ou les survivants ont droit à 55% de la
rente. Alors, par voie de conséquence, on devait donner 55% des 90%
à cette madame. On avait fait une erreur technique. Je me souviens fort
bien des cas suggérés par le député de Viau lors de
la commission parlementaire de décembre. Je pensais qu'on avait
donné des réponses claires à ce moment. Dans le cas des
décès, Mme la Présidente, il est évident que nous
ne perdons jamais un sou; comme je l'ai expliqué à ce moment:
Quelqu'un qui signe un chèque, c'est un acte frauduleux s'il n'est pas
adressé à la personne. Par voie de conséquence, nous nous
retournons vers la banque et c'est la banque qui poursuit et nous rembourse
avant même le résultat de sa poursuite. Nous n'avons jamais perdu
un sou dans les cas de décès. Jamais un sou à la
commission.
Nous recevons des rapports de vérification interne parce que tous
nos services sont vérifiés par seize vérificateurs chez
nous, en plus du Vérificateur général. Ces services sont
tous vus sur une période de trois ans. Alors, on a toutes les
régions, tous les services et, maintenant, pour accélérer
le processus on a demandé aux gens de la vérification interne,
sans influencer leur façon de procéder, s'il n'était pas
possible, par exemple, quand ils vont dans un bureau régional de faire
la vérification interne complète du bureau plutôt qu'un
service à l'intérieur du bureau, comme ils procédaient
auparavant. J'ai expliqué à ce moment ce que nous faisons avec
les rapports de la vérification interne. Le rapport est envoyé
aux services concernés. Ils doivent faire des commentaires. Ils ont 30
jours pour le faire et pour l'appliquer. Nous en recevons une copie, nous
recevons les commentaires de la direction impliquée. Une fois ces
commentaires analysés, si nous ne sommes pas d'accord sur la suite
donnée au rapport, nous écrivons à la direction
impliquée et nous donnons un délai de suivi de trois mois. Ceci
fait que les rapports de la vérification interne... Vous n'avez
qu'à lire les rapports annuels, vous verrez que nous donnons suite
à tous les rapports de la vérification interne. C'est de la saine
administration.
Au moment de la commission parlementaire, on nous avait parlé de
l'accueil auprès des médecins. C'est mon deuxième
point,
Mme la Présidente. Maintenant nous avons une personne à
Québec et une personne à Montréal où se font les
expertises. Ce sont les deux seuls endroits dans la province où se font
les expertises chez nous par des médecins experts externes. Ce ne sont
pas des employés de la commission. Il y a une personne infirmière
et travailleuse sociale de formation qui explique au patient avant de voir le
médecin, parce qu'il y a toujours un certain traumatisme à voir
le médecin, ce qui devrait se passer et si en sortant il n'a pas eu
toutes les réponses voulues, il revient voir cette personne qui va
chercher la réponse si le médecin ne l'a pas donnée. Le
taux de succès est fantastique. C'est très
intéressant.
Quant à la téléphonie, nous avons fait
d'énormes efforts et nous sommes maintenant dans toute la province de
Québec avec des délais variant de sept secondes à une
minute. Nous avons beaucoup d'appels téléphoniques et nous
essayons encore d'améliorer ce système.
Un des derniers points qui avaient été mentionnés,
c'est le retrait préventif de la travailleuse enceinte. J'ai
envoyé à chacun des membres de la commission parlementaire copie
des lettres que j'avais envoyées aux responsables des 32 DSC pour leur
dire de retirer leur interprétation. Depuis le 24 janvier 1984, nous
avons une politique interne qui fait que, lorsqu'il y a contestation de la part
de la personne enceinte, cela doit être entendu dans les 21 jours de la
contestation et la décision doit être rendue dans les sept
jours.
Mme la Présidente, je pense que ce sont des efforts pour corriger
les situations qui nous paraissaient déplorables. Quand nous en trouvons
d'autres, nous passons notre temps... Je profite de l'occasion pour remercier
tous les employés chez nous qui travaillent très fort et dans les
conditions difficiles, pas physiquement, mais dans des conditions où il
y a des conflits d'intérêts de part et d'autre. Alors, ce n'est
pas toujours facile d'être pris entre l'employeur et le travailleur dans
tous les cas que nous avons. Ces gens sont polis et gentils, donnent toutes les
informations possibles et impossibles. Je dois les remercier.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le juge
Sauvé.
M. Cusano: Une dernière question.
La Présidente (Mme Harel): C'est vraiment la
dernière, M. le député de Viau?
M. Cusano: C'est vraiment la dernière. C'est sur les
rapports de la vérification interne. Depuis notre rencontre ici au mois
de décembre, combien de rapports avez-vous présentés au
conseil d'administration?
M. Sauvé: Mme la Présidente, à ma
connaissance et de mémoire, je n'ai soumis au conseil d'administration
aucun rapport de vérification interne parce qu'on ne m'en a pas
demandé non plus.
M. Cusano: II faudrait vérifier les galées du
journal des Débats parce qu'il me semble qu'il y avait eu un engagement
de votre part. C'est sous vérification.
M. Sauvé: Mme la Présidente, on pourra
vérifier, mais si vous me le permettez, je dirai que toute la confusion
vient du fait que la partie patronale au conseil d'administration ne demande
pas de rapport de vérification interne. Ce qu'elle demande, c'est que ce
soient des comptables externes qui fassent la vérification à la
place du Vérificateur général. C'est ce que la partie
patronale demande, comme cela se fait à l'Institut de recherche en
santé et sécurité du travail. Mais, elle ne demande pas
plus que cela. Je pense qu'il faudra regarder avec le Vérificateur
général s'il est prêt à céder sa place. Vous
savez qu'en vertu de sa loi il fait la vérification par ses propres
services dans une cinquantaine de ministères et d'organismes. Je pense
que c'est 57, pour être précis. Dans d'autres cas, il
délègue à des comptables privés des mandats pour
faire la vérification. Tout ce que la partie patronale demande -
j'espère que ce sera très clair - c'est que la
vérification annuelle soit faite par des comptables externes
plutôt que par le Vérificateur général du
Québec.
M. Cusano: Ces gens n'ont jamais demandé des rapports de
vérification interne.
M. Sauvé: Jamais. M. Cusano: Merci.
La Présidente (Mme Harel): Est-ce que l'étude du
programme 2 est terminée? Oui, nous allons devoir l'adopter. M. le
député de Beauharnois.
M. Lavigne: Je veux seulement souligner, parce que j'avais
attaché beaucoup d'importance à cette partie, ce que le
président-directeur général vient de nous annoncer, des
règles du jeu améliorées en ce qui a trait au retrait
préventif. On sait que, lorsque nous avons eu à discuter en
décembre, autour de la loi 42, c'est un sujet qui est revenu à
maintes reprises, qui semblait intéresser plusieurs des intervenants et
membres de la commission. Avec ce que M. le président vient de nous
annoncer, je pense que tout le monde pourrait s'en réjouir parce que,
comme je le disais lors de ces commissions, cela nous a amené quelques
embêtements dans nos bureaux de comté. Si cela pouvait faire en
sorte qu'à l'avenir ce
problème soit en grande partie réglé, je pense que
les gens n'en seraient que plus heureux. Je vous remercie donc, M. le
président, d'être intervenu aussi rapidement.
M. Pagé: Mme la Présidente, une très
brève...
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf, toujours sur le programme 2.
M. Pagé: Oui. Une très brève question
à M. le juge Sauvé. Pourriez-vous nous indiquer dans quel cadre
s'est exprimé le retrait de la partie patronale au sein de l'association
de la sécurité de l'automobile?
La Présidente (Mme Harel): M.
Bertrand.
M. Bertrand (Jean-Louis): Avec votre permission, Mme la
Présidente, M. le ministre, effectivement il y a eu retrait. Je me
souviens qu'on avait discuté de ce sujet et il y a eu retrait d'une des
parties au sein de la partie patronale à l'association au service
à l'automobile. Ce sont les concessionnaires d'automobiles qui se sont
retirés.
Il y a eu discussion au sein de la partie patronale et les autres
membres patronaux ont décidé de continuer l'association
sectorielle. Il y a donc eu à ce moment redivision des postes. Il y a eu
échange de lettres entre, d'une part, ceux qui se sont retirés,
la partie patronale qui s'est retirée, qui étaient
envoyées au président, qui étaient déposées
auprès du conseil d'administration, si ma mémoire est bonne, et
aussi entre la partie patronale.
Si j'ai bien compris leur position, il semble que c'est là une
question d'attitude à l'égard, d'une part, des budgets
peut-être insuffisants pour faire tout ce qu'ils voudraient faire au
niveau du secteur, ce que ne semble pas partager le reste de la partie
patronale et, en même temps, certains débats qui se situent aussi
un peu à l'extérieur. Je me souviens, M. le député,
que vous aviez soulevé le fait qu'au niveau des comités
paritaires il y avait aussi certains problèmes et cela m'apparaît
aussi interrelié. On pourra vous envoyer copie des lettres qui ont
été échangées et vous pourrez vous-mêmes
faire un jugement sur cette situation.
On a eu une réunion des associations sectorielles hier où
étaient présentes la partie patronale et la partie syndicale dans
le secteur service automobile. Le sujet n'a pas été
abordé. Cela semble fonctionner à nouveau correctement.
Évidemment, ils déplorent l'absence de cette partie et ils
souhaitent qu'elle va revenir sur sa décision.
Une voix: Merci.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. Bertrand. Pour ma
part, je voudrais aussi transmettre ma satisfaction et celle de plusieurs
collègues quant aux suites que vous avez données à nos
représentations sur l'application du retrait préventif. Je peux
vous dire que cela a été très apprécié. Le
programme 2 est-il adopté?
Des voix: Adopté.
La Présidente (Mme Harel): Adopté. M. le ministre,
vous allez nous permettre de remercier les membres et les représentants
de la Commission de la santé et de la sécurité du
travail.
M. Fréchette: Bien.
La Présidente (Mme Harel): Ils ont maintenant une longue
expérience de nos travaux.
Une voix: Merci. Merci bien.
La Présidente (Mme Harel): J'appelle l'étude du
programme 1. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Nous reprenons
immédiatement l'étude, dans l'ordre, de nos programmes. J'appelle
le programme 1. La parole est au député de Portneuf. (16 h
30)
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Je dois vous
remercier, ainsi que le ministre, d'avoir accepté que notre commission
aborde le programme 2, ayant dû m'absenter ce matin pour présider
le caucus de ma formation politique, quoi qu'en pense, quoi qu'en dise le
député de Châteauguay.
M. Dussault: La bonne gestion du temps de travail, cela
existe.
M. Pagé: Vous devriez peut-être tenir plus de
caucus; vous auriez peut-être moins de problèmes à
l'intérieur de vos troupes. Vous devriez vous affirmer davantage...
M. Dussault: Nous avons planifié notre temps et nous
sommes là, Mme la Présidente.
M. Pagé: ...cela vous donnerait peut-être plus
d'assurance en Chambre.
M. Dussault: Et quand on pose des questions, on est là
pour entendre les réponses.
M. Pagé: Mme la Présidente, ma première
question au ministre...
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf - ma question s'adresse à tous les membres de cette commission
- est-ce que nous allons procéder élément par
élément ou si nous allons examiner le programme 1 dans son
ensemble?
M. Pagé: Dans son ensemble.
La Présidente (Mme Harel): De consentement?
M. Fréchette: Quant à moi aussi, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): La parole est au
député de Portneuf.
M. Pagé: Mme la Présidente, j'aurais une
très brève question à l'honorable ministre du Travail.
Vous nous avez fourni différents documents dont les noms des membres de
votre cabinet au 29 février 1984. On y remarque la présence de M.
Bernier qui est directeur de cabinet; M. Jean-Marc Biron qui est attaché
politique; M. Richard Bonin qui est attaché politique; Mme Julie
Cardinal qui est attachée politique; M. Jean-Guy Dagenais qui
attaché politique et aussi Mme France Racine qui est attachée
politique. Comment pouvez-vous expliquer, M. le ministre, que, dans votre
cabinet, à titre, à fonction et à responsabilités
égales une femme gagne moins cher qu'un homme?
M. Fréchette: J'ai mal compris la question, Mme la
Présidente.
M. Pagé: Comment pouvez-vous expliquer que, dans votre
cabinet, à titre, à fonction et à responsabilités
égales, une femme gagne moins cher qu'un homme?
M. Fréchette: Mme la Présidente, avant d'arriver
à déterminer la rémunération de tous et chacun des
attachés politiques du cabinet du ministre du Travail, je demande
à la direction du personnel du ministère du Travail de
procéder à l'évaluation du dossier de tous et de toutes.
C'est à partir des évaluations qui sont faites, c'est à
partir des expertises qu'on retrouve dans les dossiers de ces attachés
politiques, de leur expérience de travail, que les différents
services habilités à le faire nous indiquent quel serait
normalement le salaire que telle ou telle personne serait en droit d'exiger si
elle se trouvait dans un autre champ d'action. C'est donc à partir de
cette évaluation que les salaires des attachés politiques sont
fixés. C'est le processus qui a été suivi dans le cas des
personnes auxquelles le député de Portneuf vient de
référer.
M. Pagé: Nous devons comprendre que, dans votre cabinet,
ce n'est pas vous qui établissez le niveau de rémunération
des employés qui entrent.
M. Fréchette: C'est moi qui l'établis, mais
après consultation avec des personnes qui, encore une fois, ont
l'expertise de ce genre d'évaluation et qui sont habilitées
à cause, sans doute, de la gérance de ressources de personnel
à faire des évaluations - cela veut dire ce que cela veut dire et
on va me comprendre - du salaire auquel peut avoir droit un attaché
politique, qu'il soit un homme ou une femme. C'est donc le seul critère
qui entre en ligne de compte et c'est à partir, encore une fois, de ces
évaluations-là que, par la suite, conformément à la
loi, conformément à la réglementation, conformément
aux règles administratives, je prends la décision de
déterminer quel sera le salaire de l'un par rapport à l'autre et
ainsi de suite. Ce n'est rien de moins ni rien de plus que cela.
M. Pagé: Vous allez comprendre, M. le ministre, que si
vous occupiez le fauteuil que j'occupe actuellement et que vous preniez
connaissance de tels documents, confirmant des écarts au niveau de la
rémunération qui vont jusqu'à 10 000 $ ou 12 000 $ par
année, vous vous inquiéteriez d'un tel état de fait. Je
comprends qu'il y a une volonté -il n'y a peut-être pas une
volonté - tout au moins un verbe politique, un langage politique
utilisé par les membres de votre gouvernement, entre autres par le
premier ministre, qui évoque l'égalité dans l'emploi,
l'égalité des chances, l'égalité de la
rémunération. Force nous est de constater cela et surtout
conscients qu'il y a loin de la coupe aux lèvres - c'est le cas de le
dire - quand on voit des tableaux comme ceux-là, il y a certainement
matière à s'inquiéter de notre côté et
à se poser des questions. C'est ce pourquoi je voulais qu'on aborde
cette question au tout début.
M. Fréchette: Je suis assez satisfait, Mme la
Présidente, d'entendre l'argumentation du député de
Portneuf parce c'est à une argumentation tout à fait contraire
que je m'attendais. Je m'attendais de me faire dire que tout le monde est trop
bien payé, que les salaires n'ont pas d'allure...
M. Pagé: ...là-dessus...
M. Fréchette: ...et qu'il fallait réviser tout cela
à la baisse.
M. Pagé: ...Mme la Présidente...
M. Fréchette: C'est exactement le contraire que le
député de Portneuf est en train de me dire. Vous allez comprendre
que je suis très heureux de cette évaluation que
fait le député de Portneuf. J'ajouterais un seul
élément, Mme la Présidente, si vous me le permettiez, pour
arriver à faire les distinctions ou les différences que l'on
retrouve dans la liste des salaires: il faut de toute évidence tenir
compte, par exemple, de l'expérience pertinente d'une personne. Est-ce
qu'on est en train de plaider, par exemple, qu'un attaché politique qui
aurait une expérience de dix, douze ou quinze ans dans la fonction
publique, fût-il un homme, devrait avoir le même salaire qu'une
femme qui vient à peine de faire son entrée dans le secteur ou
dans la fonction? Je ne pas si c'est cette argumentation-là que le
député de Portneuf est en train de développer, mais il va
avoir un bon bout de chemin à faire avant de me convaincre de la
pertinence de cette argumentation. Je vous dirai cependant que, lorsqu'un homme
aura plafonné et qu'une femme l'aura rejoint en termes d'années
d'expérience, en termes d'expertise, il n'y a aucune espèce
d'hésitation à faire en sorte que les salaires soient
effectivement les mêmes.
M. Pagé: Bon, tant mieux, nous sommes bien heureux de vous
l'entendre dire. C'est évidemment avec le sourire, Mme la
Présidente, que je prends note des commentaires du ministre qui
s'attendait -comme il le disait - à ce que je lui pose des questions sur
la justification de payer tel niveau de rémunération à tel
employé. Au contraire, Mme la Présidente, je retiens que le
ministre du Travail a plusieurs employés dans son cabinet. C'est normal
et explicable. Je retiens qu'ils ont non seulement droit mais, qu'ils auront
toujours droit à un niveau de rémunération acceptable
parce que cela ne doit pas être facile de "coacher" le ministre du
Travail tout le temps. Je comprends que ces gens ont beaucoup de travail
à abattre, beaucoup d'efforts à déployer, beaucoup de
recherches, des préparations de dossiers, etc. Ils gagnent leur salaire
à travailler avec vous et il n'y a pas de problème.
M. Fréchette: Voilà qui est bien dit. Commission
consultative sur le travail
M. Pagé: Maintenant, Mme la Présidente, je voudrais
aborder avec le ministre - ce matin on n'a malheureusement pas eu l'occasion
d'échanger, mais le moment est arrivé - une des questions
principales de mon propos qui était la commission consultative sur le
Code du travail. C'était la refonte du Code du travail. C'était
l'inquiétude manifestée chez les intervenants ou chez tous ceux
et celles qui sont intéressés au monde des relations de travail
au Québec de voir l'évolution du propos gouvernemental depuis
quelques années et, plus particulièrement, de celui du ministre
du Travail. J'ai fait référence aux possibilités que vous
aviez déjà évoquées ou à
l'intérêt que vous aviez manifesté pour la
négociation sectorielle, l'accréditation multipatronale. À
une certaine époque on croyait que c'était l'avenue que voulait
privilégier le gouvernement dans son action législative. On a
entendu à de nombreuses reprises des volontés clairement
exprimées de modifier nos lois afin de déjudiciariser les
relations de travail au Québec. Tout cela a abouti, il y a quelques
semaines, par l'annonce faite par vous, M. le ministre, de la constitution, de
la formation d'une commission consultative.
Le principe de la démarche a trois volets: la consultation, la
concertation et, éventuellement, la législation dans 18 ou 24
mois. J'ai eu l'occasion de vous poser des questions à
l'Assemblée nationale et j'y reviens aujourd'hui. Ce sur quoi je veux me
référer, évidemment, ce sont les oppositions et les
appuis, des deux côtés, qui ont été
manifestés par les parties concernées. On sait que le Conseil du
patronat a clairement indiqué qu'il était déçu de
certains paramètres qui entourent ou qui ont entouré la mise sur
pied de la commission. Si mes informations sont exactes, vous devriez avoir des
rencontres - sinon d'ici quelques jours, tout au moins peut-être d'ici
quelques heures - avec le Conseil du patronat.
M. Fréchette: M. le député, vous êtes
très bien informé.
M. Pagé: Le Conseil du patronat argumentait que
l'opération pouvait devenir une opération à
caractère politique; il s'est référé à la
composition de la commission, à son mandat. La
Confédération des syndicats nationaux s'est opposée, elle
avait des inquiétudes à l'égard de l'exercice:
démarche qui fait preuve d'irréalisme, doute sur le choix de la
personne qui sera appelée à présider cette commission, non
pas à titre personnel, mais à titre professionnel. La
Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) a
déclaré que la centrale, évidemment, participait
pleinement aux travaux de la commission. Cela, on devait s'y attendre. La
Centrale de l'enseignement du Québec (CEQ) se pose des questions sur
l'utilité et souhaite que tout le volet des négociations dans le
secteur public et parapublic soit inclus dans le mandat de la commission.
Mme la Présidente, je voudrais demander au ministre comment il
peut expliquer aujourd'hui... Je comprends que, lorsque des
représentations lui sont faites par des parties patronales ou
syndicales, il soit légitimé d'en prendre et d'en laisser, qu'il
doive jauger, qu'il doive mesurer les représentations de chacun des
groupes, mais des représentations et un document lui ont
été envoyés, si ma mémoire est fidèle,
par
le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre qui, lui,
voulait un mandat plus large touchant l'ensemble des lois du travail dans le
secteur privé et dans le secteur public, voulait éviter que cette
commission devienne une opération politique, une opération
d'image. Sans que vous soyez obligé de me le confesser, vous savez que
votre gouvernement a une relative habilité à cet égard. Le
Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre voulait une commission
mandatée et encadrée par le conseil consultatif plutôt. Et
cela n'était pas hors d'entendement, c'était à sa face
même très intéressant. Il exigeait que le président
de la commission soit quelqu'un ayant une grande connaissance des relations de
travail, que les commissaires et tout ce monde puissent
bénéficier d'une crédibilité auprès de
toutes les parties.
Première question qui touche le mandat de la commission:
Êtes-vous toujours en faveur que le mandat se limite aux relations de
travail dans le secteur privé? Si oui, pourriez-vous nous faire part des
échanges que vous avez eus avec vos autres collègues du Conseil
des ministres qui sont certainement concernés par l'extension ou non
d'un tel mandat? Toujours sous l'aspect des négociations dans les
secteurs public et parapublic, comme je le disais ce matin, il serait hors de
question pour nous que le ministre du Travail du Québec ne soit pas
associé à une démarche touchant les négociations
dans les secteurs public et parapublic, que ce soit le régime de
négociation, que ce soit la façon de négocier, les
documents d'appui, enfin, tout ce qui touche les négociations. Vous
êtes ministre du Travail. Vous êtes légitimé
d'être placé au coeur même de ces débats et
j'aimerais savoir une chose: Est-ce que vous maintenez la limitation du mandat?
Je reviens avec les échanges - si vous pouviez nous déposer des
documents, ce serait certainement très intéressant - avec vos
autres collègues et, ensuite, on abordera votre rôle comme
ministre du Travail dans les négociations des secteurs public et
parapublic.
M. Fréchette: Mme la Présidente, le
député de Portneuf a terminé une longue intervention par
deux questions fort précises, très précises. Je
présume que je ne contreviendrais pas aux règlements si je
prenais le temps de toucher l'un et l'autre des aspects qu'il a lui-même
soulevés dans sa question.
D'abord, au risque de me répéter, je dois
référer les membres de la commission au discours inaugural du 23
mars 1983. On va se souvenir que, dans ce discours inaugural, le gouvernement
manifestait l'intention d'intervenir à trois chapitres qui touchent les
relations de travail à proprement parler, la santé et la
sécurité à un autre égard.
Quant aux relations de travail, on va s'en souvenir, il fallait
procéder au plus urgent, au plus pressant à la suite d'un
jugement de la Cour d'appel dans une affaire de Shell Canada, lequel jugement
ouvrait une brèche très grande dans des dispositions de la loi
45, à propos de la politique "antiscabs". Cette première
démarche a été faite, Mme la Présidente; la loi 17
a été déposée le printemps dernier, adoptée
et sanctionnée au mois de juin 1983 avec, comme le disait le
député de Portneuf ce matin, des commentaires parfois très
acides à cette époque, mais il semble que, depuis un certain
moment, on en entende moins parler ou, enfin, qu'il y ait moins
d'inquiétude qu'il n'y en avait à ce moment-là. (16 h
45)
Le deuxième aspect du discours inaugural référait
à la nécessité de procéder à amender la Loi
sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Le projet de loi
42 a donc été déposé et est en processus
législatif d'adoption.
Finalement, Mme la Présidente, le discours inaugural du 23 mars
démontrait aussi l'intention gouvernementale de procéder à
ce qu'on est maintenant convenu d'appeler la deuxième phase de la
révision du Code du travail, qui allait être plus globale, plus
générale et qui allait revoir, dans l'intention du gouvernement
en tout cas, tous les mécanismes que l'on retrouve actuellement dans le
Code du travail.
Cependant, il y a eu dans la présentation qui a été
faite à ce moment-là des balises qui ont été
posées par le premier ministre, quand il a dit: Nous allons
effectivement procéder à cette deuxième phase, mais en
prenant tout le temps qu'il faut, avec autant de prudence que requiert la
situation, dans le respect des opinions et, bien sûr, en essayant de
dégager les plus larges consensus possible.
Mme la Présidente, quand on se réfère à la
nécessité de procéder à amender une loi à
partir de consensus le plus large ou les plus larges possible, il faut, me
semble-t-il, en tout cas, que l'on utilise les mécanismes qui ont
démontré au cours des dernières années que les
consensus se dégagent à la suite de la consultation et à
la suite de la concertation.
Au cours des sept dernières années, cette
expérience a été faite à l'intérieur
d'au-delà d'une cinquantaine de sommets de toute espèce qui ont
tous débloqué ou débouché sur des consensus, mais
qui ont été précédés d'une longue
période de consultation et de concertation. Alors, après analyse
et évaluation de la situation, il fallait donc prendre une
décision quant au véhicule qu'il fallait utiliser pour arriver
à la réforme du
Code du travail. Allions-nous procéder par la classique
commission parlementaire au cours de laquelle des élus entendent des
invités qui se succèdent les uns les autres et qui viennent faire
des suggestions? Allions-nous retenir cette avenue-là? Allions-nous
plutôt choisir de procéder par ce qu'on est pompeusement convenus
d'appeler la commission royale d'enquête, avec ce que cela donne comme
résultat dans bien des situations? Cela aussi a été dans
les plateaux de la balance quant à l'évaluation du moyen à
retenir. Après analyse, Mme la Présidente, toujours à
partir de la nécessité d'y aller avec prudence, c'est le
mécanisme qui a été annoncé qui a été
retenu, celui, donc, de la consultation, de la concertation et de la
législation.
Le député de Portneuf, et c'est tout à fait normal
dans les circonstances dans lesquelles nous sommes, fait état de l'avis
qui a été émis par le conseil Consultatif du travail et de
la main-d'oeuvre. Je vous signalerai que j'ai d'abord rencontré les
membres du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre le 9
février pour, dans un premier temps, les renseigner sur la nature de la
démarche, les objectifs qu'elle poursuivait et le mandat qui allait
être confié à l'organisme qui serait habilité
à mener l'opération. C'était le 9 février et il a
été convenu entre les membres du conseil consultatif et celui qui
vous parle que le 21 ou le 22 février - je cite de mémoire - le
conseil consultatif allait émettre un avis écrit.
J'attire cependant l'attention des membres de la commission sur le fait
qu'avant de recevoir cet avis écrit dont je parle, la plupart des
intervenants qu'on retrouve au conseil consultatif - c'était le 10 ou le
11 février - ont tous déclaré que tout le monde
était d'accord sur l'objectif qui était poursuivi, à telle
enseigne, Mme la Présidente, que, dans la Presse du samedi 11
février, il y a une manchette dont je me souviens presque du mot
à mot: Le CPQ, la CSN, la FTQ, d'accord avec Fréchette. Et cela
m'apparaissait tout à fait extraordinaire de pouvoir lire, à un
moment donné, dans un journal qu'autant les associations patronales que
les associations syndicales étaient d'accord avec le ministre du
Travail.
Il reste qu'au plan du principe même ou au plan de l'objectif
à atteindre personne n'a mis en doute ou n'a plaidé dans le sens
qu'il ne fallait pas aller vers l'objectif d'amender notre Code du travail en
profondeur. D'ailleurs, c'étaient aussi les conclusions de
différents sommets. Pensons à Montebello, Mme la
Présidente, pensons à Pointe-au-Pic, pensons au dernier sommet de
Québec en 1982 où tous les intervenants se sont dits d'accord
pour que l'opération s'enclenche.
Le conseil consultatif a émis quatre réserves bien claires
et sur lesquelles je reviens rapidement. D'abord, le conseil consultatif m'a
indiqué, autant dans les propos que j'ai échangés avec ses
membres que dans l'avis écrit, que pour eux le président de cette
commission eût dû être un spécialiste des relations du
travail. C'est une opinion pour laquelle j'ai beaucoup de respect et qui se
défend sans doute et qui peut être appuyée aussi
d'arguments solides.
Je vous dirai essentiellement le motif principal - il y en a plusieurs
autres - pour lequel ce choix a été fait: S'il avait fallu
retenir la candidature d'une personne qu'on appelle experte en relations de
travail, c'eut été un avocat, un juge, un professeur de relations
industrielles d'un département de l'une ou l'autre de nos
universités mais je ne pense pas qu'on ait pu trouver un tel
spécialiste qui ne se soit jamais prononcé sur l'un ou l'autre
des nombreux problèmes qui vont être soumis à la commission
et qui n'a déjà émis des opinions sur, par exemple, les
modalités d'accès à la syndicalisation,
l'accréditation multipatronale, comme le souligne le
député de Portneuf.
Eût-il été raisonnablement pensable qu'un expert en
relations de travail eût pu présider cette commission sans jamais
s'être prononcé soit dans des écrits - qu'ils aient
été des sentences arbitrales, qu'ils aient été des
volumes, qu'ils aient été des ouvrages -soit verbalement?
C'était un des objectifs qui étaient poursuivis, de faire en
sorte que le président de cette commission n'ait jamais
été impliqué d'une façon ou d'une autre dans des
discussions, dans des opinions, dans des évaluations en matière
de relations de travail.
Deuxièmement, il nous fallait aussi tenir compte de l'objectif
quant aux amendements éventuels, c'est-à-dire l'atteinte des
consensus. Il nous fallait alors un coordonnateur habilité à
faire dégager des consensus.
La position du ministre aurait été tout à fait
différente si cette commission avait été composée
de trois membres au lieu de cinq. Si elle avait été
composée de trois membres au lieu de cinq, je suis tout à fait
disposé à retenir l'argumentation du député de
Portneuf et, de surcroît, des membres du conseil consultatif qui
plaidaient dans ce sens. Comme elle est composée de cinq membres et que
les quatre autres membres, dans un champ d'activités ou dans l'autre,
syndical ou patronal, sont des experts des relations de travail, il
m'apparaissait qu'en fonction des deux principes dont je viens de parler il
était plus important de procéder comme on l'a fait.
L'autre réserve importante de plusieurs représentants
d'associations, autant patronales que syndicales au conseil consultatif, est en
relation avec le mandat de la commission, les uns disant avec beaucoup
d'insistance: Cela ne devrait pas être limité au seul Code
du travail dans le secteur privé, mais cela devrait
également rejoindre toutes nos lois du travail, notamment, disait-on -
je pense que c'est l'expression qu'on a utilisée dans l'avis
écrit - le Code du travail. À partir de ce texte, j'ai
interprété que le Code du travail devenait un petit peu
secondaire dans le sens très littéral du terme par rapport
à l'ensemble de la démarche. Quand on sait, Mme la
Présidente, que dans le seul Code du travail il y a quatre grands
chapitres qui peuvent retenir l'attention de plusieurs spécialistes
pendant de longs mois, il fallait à cet égard considérer
la question de l'échéancier. Déjà, on nous a
signalé que, même étant limité au seul secteur du
privé et au seul secteur du Code du travail, l'échéancier
est fort étroit. Il est déjà fort limité et il
faudra qu'il y ait de la part de tous ceux qui travailleront dans le dossier
une diligence particulière pour arriver à l'expiration des quinze
mois et à une législation, comme on le souhaite. C'est donc un
premier aspect qui nous a fait prendre la décision que le processus de
négociation dans le secteur public et parapublic ne devait pas
être inclus dans le mandat de la commission. Par exemple, vous savez,
quand on va entreprendre de discuter de ce chapitre du code qui concerne
l'accès à la syndicalisation, quand on va entreprendre de
discuter le mode de négociation, quand on va entreprendre de discuter le
chapitre qui concerne le règlement des griefs, des différends,
l'arbitrage des premières conventions collectives, l'arbitrage des
conventions des policiers-pompiers et, finalement, quand on va entreprendre
d'étudier les mécanismes qui entourent l'exercice des droits de
grève et de lock-out, on a déjà là, me semble-t-il,
Mme la Présidente, un menu suffisamment élaboré pour
retenir l'attention de la commission pendant la période de temps qui est
prévue, soit une quinzaine de mois.
Deuxièmement, quant à la question de retenir que la
commission devrait également évaluer le processus de
négociation dans la fonction publique et parapublique, je signalerai ou
rappellerai plutôt au député de Portneuf une chose qu'il
sait déjà, puisque c'est la réponse que je lui ai faite
à l'Assemblée nationale à une question qu'il m'a
posée récemment, qu'il y a déjà au gouvernement un
processus qui est engagé aux fins d'arriver très
précisément à la réévaluation de tout notre
secteur des relations de travail dans la fonction publique et parapublique. Je
le dis, Mme la Présidente, pour y avoir participé, le
comité interministériel qui a été habilité
à travailler ce dossier, qui en a reçu le mandat, s'est
réuni maintenant à plusieurs reprises. Il n'a pas
arrêté des décisions, mais il a arrêté des
suggestions, il a arrêté des propositions qui devront maintenant
suivre les deux étapes suivantes: d'abord, être
évaluées, bien sûr, par le Conseil des ministres et,
deuxièmement, soumises aux intervenants qui généralement
sont ceux qui négocient avec le gouvernement, les différentes
centrales syndicales, les syndicats indépendants, enfin, ceux qui sont
les partenaires habituels du gouvernement lorsqu'arrive le temps des
négociations. C'est un des motifs pour lequel nous n'avons pas
jugé utile... Maintenant, Mme la Présidente, là comme
ailleurs, est-ce que notre évaluation a été la bonne?
Est-ce que le temps démontrera que c'étaient les décisions
qu'il fallait prendre? J'espère. Je ne vous dis pas non plus qu'on est
infaillible. On a pensé que c'était comme cela qu'il fallait
cheminer le dossier. Alors, comme, donc, le travail de ce côté est
déjà largement engagé et l'était avant même
que la composition de la commission, son mandat soit annoncé, il
n'était plus pertinent que l'on inclue dans le mandat de la commission
le dossier du public et du parapublic.
Troisièmement, Mme la Présidente, je vous signalerai -
cela, je le dis aussi objectivement que la situation elle-même l'est -
que l'on va convenir que c'est dans le secteur privé que les
organisations, autant patronales que syndicales, sont les moins fortes. On va
également convenir qu'au niveau, par exemple, de la syndicalisation,
c'est là qu'il y en a le moins. Quand on sait que, dans le secteur
strictement privé, le taux de syndicalisation, par exemple, se situe
autour de 24% ou 25%, il est apparu que c'est un des aspects du dossier dont il
fallait également tenir compte. (17 heures)
Ce sont les trois motifs pour lesquels le mandat de la commission ne
comporte pas ce volet de procéder à l'étude du public et
du parapublic. Cela n'exclut pas - je veux être bien clair
là-dessus - que, tout au cours de ses travaux, la commission ait
à se pencher sur le dossier des secteurs public et parapublic. Elle ne
va pas aller interdire à des invités qui le souhaiteraient de
venir émettre des opinions à cet égard. Rien n'est exclu
non plus quant à l'opportunité pour la commission, dans ses
recommandations, de dire au gouvernement: Vous devriez avoir un seul et unique
Code du travail qui regroupe toutes les lois ouvrières ou vous devriez
avoir un Code du travail pour le secteur privé et un Code du travail
pour le secteur public. Rien n'exclut, dans le mandat de la commission, qu'elle
puisse faire de semblables recommandations.
L'autre réserve que m'a soumise le conseil consultatif du travail
est en fonction ou en relation des audiences publiques que tiendra la
commission. J'ai cru comprendre -c'est une interprétation strictement
personnelle que j'en fais, peut-être bien que ce n'est pas ce qui
sous-tend l'évaluation qu'en fait le conseil consultatif - des
intervenants du conseil qu'il y avait une espèce
d'inquiétude quant au fait, par exemple, que les audiences
régionales allaient devenir à ce point publiques qu'il n'y aurait
pas de limitation dans le nombre d'invités qui pourraient s'y
présenter, dans l'origine des invités. C'est la crainte que j'ai
cru comprendre.
Si je devais retenir cette réserve et baliser le mandat de la
commission de telle sorte qu'en audiences, autant régionales que
nationales, elle doive se limiter à entendre des invités
qu'elle-même choisirait ou que le conseil consultatif identifierait, je
vous signale très honnêtement que je manquerais
complètement l'objectif qui est visé. L'objectif est de permettre
aux travailleurs et aux travailleuses qui, autrement, ne pourraient pas le
faire, qui, autrement, ne pourraient pas s'exprimer, d'aller devant un forum
habilité à recevoir des recommandations, faire état de
leur situation à eux et à elles, de dire s'ils veulent être
syndiqués ou non, de dire comment ils vivent nos lois sur les relations
de travail. Ce sont ces "sans-voix" qu'on ne pourrait pas ne pas entendre au
cours des auditions. Là-dessus, je vous signale qu'il y a une
espèce de divergence de fond entre celui qui vous parle et le conseil
consultatif.
Quatrièmement, Mme la Présidente, la réserve du
conseil consultatif est en relation autant avec la composition des tables
sectorielles ou du sommet de concertation qu'avec la méthode de travail
qu'arrêtera ou qu'adoptera la table de concertation, le conseil
consultatif argumentant avec des motifs très certainement valables que
ce devrait être lui, le conseil consultatif, qui prenne l'initiative de
tenir les audiences de concertation et qu'il en soit le maître d'oeuvre.
J'espère qu'on va comprendre que je ne suis pas en train de mettre en
doute l'habileté, l'expertise, la capacité - si on me passe
l'expression - du conseil consultatif à mener ce genre
d'activité.
Toujours en fonction des principes généraux dont je viens
de parler et des objectifs qui sont poursuivis, la décision à
laquelle nous en sommes arrivés quant à la composition des tables
de concertation a été de dire: Oui, il faudra que les
intervenants que l'on retrouve au Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, s'ils veulent, soient des intervenants à la table de
concertation. Il est impensable que l'on puisse aller plus avant dans les
travaux si, par exemple, il fallait tenir pour acquis, dès maintenant,
qu'aucune des parties qui siègent au conseil consultatif du travail ne
sera présente au moment de la table de concertation. En d'autres mots,
la table de concertation devrait être un conseil consultatif du travail
élargi, composé de toutes les personnes qui y siègent
actuellement, mais auquel on ajoutera d'autres intervenants qui peuvent
être des représentants de syndicats indépendants, par
exemple, qui peuvent être des représentants de travailleurs et de
travailleuses non syndiqués, qui peuvent être des
représentants de l'Union des municipalités du Québec qui a
très certainement un mot à dire au chapitre de l'arbitrage des
conventions collectives des policiers-pompiers. Enfin, c'est dans ce sens que
je parle de conseil consultatif du travail élargi.
Alors, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Harel): Je vous demande de conclure,
votre temps de parole est maintenant expiré.
M. Fréchette: Je termine en vous disant que, malgré
ces réserves, malgré les argumentations dont je viens de parler,
je ne sache pas, en tout cas, au moment où on se parle, qu'aucun des
organismes n'ait pris la décision de ne pas participer aux travaux de la
commission. Plusieurs ont émis des réserves, encore une fois,
mais personne n'a dit publiquement en ma connaissance qu'il n'allait pas
participer aux travaux. Bien au contraire, le député de Portneuf
parlait tout à l'heure de la Centrale de l'enseignement du Québec
qui, au conseil consultatif, a eu ce même genre de réserve, mais
qui vient de décider au cours du dernier week-end, dans une de ses
instances syndicales, de participer pleinement à la commission
Châtillon.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Le ministre a essentiellement repris
l'argumentation au soutien de la position qu'il a adoptée. Je dois
d'abord convenir avec lui que, sur le principe, l'objectif qui est
recherché pour en arriver à une législation
adéquate et répondant davantage aux besoins des parties, tout le
monde ne peut qu'être d'accord avec cela. C'est plutôt le style de
démarche ou la façon avec laquelle la démarche a
été enclenchée et ses modalités qui étaient
mises en doute. Je dois confesser que, moi aussi, j'ai été
agréablement surpris de lire le titre du journal auquel vous
référiez tantôt. Ce n'est pas souvent que, dans l'histoire
des relations de travail au Québec, on lit que la CSN, la FTQ, la CEQ,
le CPQ, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre sont d'accord
avec Fréchette. Ce matin-là, j'étais tellement surpris que
je me suis imaginé certaines choses. J'ai presque envie de vous le dire.
Je me suis dit que très probablement le premier ministre avait dû
appeler son ministre du Travail pour lui dire: Écoute, Raynald, "good
job"; tu as moins de panache que Pierre-Marc, mais tu es plus efficace. Tout
cela venait de mon imagination, évidemment.
II y a quand même une question qui arrive et qui est très
importante dans tout cela. C'est un pari que prend le gouvernement parce que
vous auriez pu -c'est là une première possibilité - donner
un mandat à cette commission de consulter, d'écouter et de
recommander à partir d'une proposition gouvernementale, alors que
l'exercice que vous vous apprêtez à mener actuellement est que
toutes les parties intéressées aient l'occasion de venir
définir, selon leur concept, la façon de modifier ce Code du
travail. Le pari implique que, autant il aurait pu être difficile si vous
aviez retenu la première possibilité d'avoir un consensus sur une
politique donnée, autant on peut s'interroger sur les chances qu'un
consensus se dégage de par la base et de par les intervenants, sans que
ce consensus porte initialement sur une proposition formelle du
gouvernement.
Ce sont là deux questions bien particulières et bien
spécifiques. Devons-nous comprendre de votre propos que vous n'avez pas
l'intention d'apporter de modification du côté du fonctionnement
et du mandat de la commission?
M. Fréchette: Je m'excuse, Mme la Présidente, le
sous-ministre vient d'arriver avec une information que je lui demandais et j'ai
perdu la question du député de Portneuf.
M. Pagé: Alors, on va souhaiter la bienvenue à M.
Blain. Nous sommes bien heureux qu'il se joigne à nous. Devons-nous
comprendre de votre propos que le ministre du Travail du Québec n'a pas
l'intention de modifier quoi que ce soit dans ce qui a été
annoncé à l'égard du mandat, du mode de fonctionnement et
de la composition de la commission? Est-ce que votre opinion est faite et que
c'est comme cela, point final, à la ligne?
M. Fréchette: Mme la Présidente, quand le
député de Portneuf évalue que l'opération qui a
été enclenchée est un pari, un défi en quelque
sorte, je vous signale que, sans aucune hésitation, je suis d'accord
avec lui. C'est le genre d'appréciation que je n'ai pas craint de dire,
même publiquement. C'est à ce point un défi et un pari que,
aujourd'hui, au moment où on se parle, je pense qu'il n'y a personne
d'entre nous - ni aucun des membres de la commission - qui peut garantir le
succès de l'opération.
La situation dans laquelle on est depuis une bonne dizaine
d'années maintenant, c'est de se poser la question suivante: Est-ce que,
parce que c'est un pari, parce que c'est un défi et parce que les
conclusions ne sont pas garanties ou assurées, il faille continuer de
remettre de six mois en six mois, d'année en année et continuer
de vivre avec des modus que plusieurs évaluent comme étant
maintenant dépassés? Alors, je suis conscient qu'il s'agit d'un
défi, mais je préférerais, Mme la Présidente, le
relever, risquer l'échec plutôt que de me faire reprocher par le
député de Portneuf de manquer de leadership et de n'avoir rien
fait.
M. Pagé: Vous ne l'avez pas digérée,
celle-là!
M. Fréchette: Non, non. Maintenant, le
député de Portneuf me demande très
précisément: Est-ce que, au niveau de la composition de la
commission, votre opinion est arrêtée, est définitive et
est finale? Je vous dirai que, au moment où on se parle, il n'y aurait
pas de motif qui ferait en sorte que l'on puisse ou bien modifier la
composition de la commission ou, alors, l'amender en ajoutant ou en retranchant
des membres qui y sont déjà. Je vous réitère que,
à ce stade-ci, encore une fois, je ne vois pas pourquoi ce devrait
être fait. Quant au choix du président, j'ai expliqué
pourquoi, tout à l'heure, il était là. Je rappellerai
essentiellement que les cinq commissaires totalisent ensemble au-delà de
82 années d'expérience en relations de travail. Le commissaire
issu du monde patronal est un directeur de ressources humaines dans une
entreprise privée; il y a travaillé pendant 40 ans et il a
gagné ses galons partout, autant dans son entreprise qu'auprès
des associations syndicales avec lesquelles il a transigé. Le
commissaire qui est issu du monde syndical a, lui aussi, me semble-t-il,
gagné tous ses galons. Il a une expérience de 30 années
dans le syndicalisme actif, dans le syndicalisme privé actif. C'est un
commissaire, à ce que j'en sache, en tout cas, qui a le respect des
travailleurs avec lesquels il a passé une bonne partie de sa vie - cela
ne fait aucun doute - et d'un bon nombre d'autres. Quant au commissaire qui est
issu du service des relations industrielles de l'Université de
Montréal, ceux qui ont l'expérience des relations de travail, qui
ont l'habitude de lire des sentences arbitrales, par exemple, vont tout de
suite réaliser que le commissaire Larouche est un expert en relations de
travail, qui a une réputation à double volet: la
réputation de régler des problèmes et de les bien
régler. Finalement, l'autre commissaire, Mme McNeil, qui est de
l'École des hautes études commerciales, est une
spécialiste en économie du travail, qui a même
été invitée à des colloques du Parti
libéral; dans son curriculum vitae, on voit cela. Elle a
été conférencière invitée à des
colloques du Parti libéral, pour aller expliquer comment on devait
prendre le virage technologique et comment il fallait envisager l'avenir par
rapport aux relations de travail. Je suppose... (17 h 15)
M. Pagé: Je comprends qu'avec 26%,
vous ayez de l'intérêt pour le Parti libéral du
Québec.
M. Fréchette: Pardon?
M. Pagé: Je comprends qu'avec 26% de sondage...
M. Fréchette: Non, mais c'est une information que je
voulais ajouter au dossier pour que vous la reteniez. À partir de cette
composition et de l'expérience qui est celle de ses cinq commissaires,
je réitère au député de Portneuf que je ne vois pas
actuellement comment et pourquoi il faudrait retrancher, ajouter ou retirer des
gens qui y sont.
Quant à l'autre aspect de sa question, le mandat de la
commission. Si on me parle du fond du mandat, c'est-à-dire quelles sont
les législations qu'il faut évaluer, quelles sont les
recommandations qu'il faut faire, si c'est de cela qu'on me parle, je signale
au député de Portneuf qu'à cet égard
également, à ce stade-ci en tout cas, je ne vois pas comment on
pourrait changer le mandat.
Si, par ailleurs, on me parle de la façon de tenir les audiences
en région, de la façon de tenir les audiences nationales, de la
façon de tenir - et, là-dessus, le conseil consultatif avait une
réserve importante - les séances de travail des tables de
concertation, si elles doivent être publiques ou non publiques, la
première, la dernière, celle du milieu, ce sont des choses sur
lesquelles je n'ai aucune espèce d'objection à
reconsidérer des situations autant avec les parties qui seraient
intéressées à le faire qu'avec la commission
elle-même.
M. Pagé: Sur cette question spécifique,
êtes-vous en consultation avec les parties actuellement?
M. Fréchette: Je disais tout à l'heure au
député de Portneuf qu'il est fort bien renseigné, du moins
dans certains milieux, et effectivement je rencontre demain des
représentants du Conseil du patronat qui ont manifesté le
désir de venir discuter du dossier, ce que j'ai accepté sans
aucune hésitation dès lors que la demande m'en a
été faite. Je vous signale également que j'ai
été en communication assez constante depuis une couple de
semaines avec des représentants de la CSN et que le dialogue se poursuit
à cet égard.
Je ne vous dis pas, au moment où on se parle, que tous les
obstacles sont levés et qu'on peut y aller comme s'il n'y avait aucune
réserve, ce n'est pas cela que je suis en train de vous dire. Je suis en
train de vous dire que la discussion se continue et que j'espère, quant
à moi en tout cas, qu'on pourra arriver à un consensus qui fera
en sorte que tout le monde s'impliquera dans l'opération.
M. Pagé: Sous cet aspect spécifique du
fonctionnement, prévoyez-vous avoir des échanges avec le conseil
consultatif à nouveau?
M. Fréchette: Écoutez, quand j'aurai terminé
ces consultations tout à fait informelles dont je vous parle quant
à moi, je serai en aucun temps disposé à retourner au
conseil consultatif du travail et, à sa demande ou à ma propre
initiative, on évaluera en temps et lieu l'état du dossier et on
lui fera part de ce qui a pu se produire depuis le temps que ces
échanges dont je vous parle ont été tenus. Il ne me
répugne pas du tout de faire la démarche dans ce sens.
M. Pagé: Alors, ce n'est pas "en aucun temps", c'est "en
tout temps".
M. Fréchette: Ah! Je m'excuse. En tout temps,
effectivement.
M. Pagé: Pour le bénéfice de ceux qui
peuvent vous citer.
M. Fréchette: Je vais dire comme le député
de Saguenay, au moment de la commission parlementaire sur le projet de loi 42:
Je suis disposé à regarder cela d'une oreille attentive.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Pagé: Si j'y avais été, j'aurais fait
comme vous, j'aurais souri, M. le ministre.
M. Fréchette: Juste une information additionnelle, Mme la
Présidente, si vous me le permettez. Cela rejoint un peu beaucoup la
préoccupation du député de Portneuf. Je suis en mesure de
lui dire que les membres de la commission sont également
disposés, en tout temps, à rencontrer aussi le conseil
consultatif.
M. Pagé: Concernant le volet du monde de la construction,
quel a été votre cheminement, depuis l'annonce que vous avez
faite de la constitution de la commission, à l'égard de la
possibilité que le mandat de la commission touche aussi le secteur de la
construction?
M. Fréchette: Je dois vous signaler, Mme la
Présidente, que - en tout cas, je fais état des renseignements
qui m'ont été acheminés depuis le temps que la commission
a été formée et que l'annonce a été faite du
commencement de sa mise en place - je n'ai pas eu du monde de la construction,
autant du côté syndical que patronal, de
représentation particulière quant à
l'opportunité de porter une attention spéciale à la Loi
sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Ce qu'on a
dit, et c'est également vrai pour la Loi sur les décrets de
convention collective, c'est également vrai pour la loi sur les normes
minimales du travail, ce qu'on a dit, c'est essentiellement ceci: Si la
commission permet, par exemple, de dégager qu'il existe des
incohérences entre les différentes lois, de dégager qu'il
y a des problèmes de concordance, mais des problèmes de
concordance qui peuvent, dans certains cas, déboucher sur des
interprétations quant au fond même de l'une ou l'autre de ces
lois, il n'y a pas d'objection. Bien au contraire, il n'y a pas d'objection
à ce que la commission nous fasse des recommandations à cet
égard. Maintenant, la même remarque s'applique, Mme la
Présidente, pour les lois sur les relations de travail dans la
construction et pour les lois sur les relations de travail dans le public et le
parapublic. S'il faut ajouter ce volet au mandat, il est évident que
l'échéancier qui est fixé ne permettrait jamais de pouvoir
arriver aux conclusions qu'on souhaite avoir dans une quinzaine de mois.
M. Pagé: Sur cet aspect particulier du mandat, en regard
des relations de travail dans le monde de la construction, vous allez quand
même convenir avec moi, M. le ministre, que tant les parties patronales
que syndicales qui oeuvrent dans le secteur de la construction ont leur
pensée ailleurs, actuellement, avec les négociations, si on peut
utiliser le terme de négociations. D'autre part, on doit retenir
qu'à l'intérieur de la partie syndicale les associations qui
représentent les employés de la construction, actuellement, ont
déjà un peu de difficulté à échanger entre
elles sur l'opportunité de s'asseoir à telle table ou non.
J'hésite à croire qu'elles se rencontrent tous les matins pour
discuter du mandat de la commission. Quand je référais au
leadership que vous devez assumer, c'est ce à quoi, entre autres, je
référais ce matin. On a toujours convenu que le monde de la
construction était un monde particulier. Ce secteur a d'ailleurs
toujours fait l'objet de mesures, de lois particulières, de lois
spéciales, de décrets, etc. Ce matin, quand je
référais au leadership que vous devez assumer, ce sont des
exemples comme ceux-là que je voulais donner parce que le monde de la
construction est un monde où on a besoin, je crois, notre
société, les parties ont besoin d'une refonte et d'une grande
question à poser: Qu'est-ce qu'on fait, est-ce que nous sommes
légitimés, comme société, à continuer
à oeuvrer à l'intérieur de mécanismes comme
ceux-là ou si on ne devrait pas tenter de trouver au moins des solutions
sous d'autres formes? C'est ce qui me faisait regretter votre position à
cet égard. Devons-nous comprendre que durant le mandat qui est de quinze
à dix-huit mois, au cours de cette période le ministre du Travail
s'abstiendra, évidemment, d'apporter des modifications au Code du
travail à l'Assemblée nationale?
M. Fréchette: Le principe général devrait
être effectivement ce que le député de Portneuf vient
d'émettre. Compte tenu de la nature de l'opération qui est
enclenchée, des objectifs qu'elle vise, il ne devrait pas y avoir de
modifications qui soient suggérées au Code du travail avant que
les recommandations nous arrivent. Il y a une seule réserve,
cependant...
M. Pagé: Ah!
M. Fréchette: ...et je pense que le député
de Portneuf va très facilement comprendre pourquoi je fais cette
réserve. S'il arrivait qu'un jugement de cour, - je parle
évidemment d'une Cour de droit commun et je pense, pour sûr, au
plus haut tribunal du pays, la Cour suprême - s'il arrivait que la Cour
suprême rende une décision judiciaire en vertu de laquelle le
Tribunal du travail, par exemple, serait déclaré
inconstitutionnel, ou si une décision judiciaire nous amenait à
la conclusion que l'une ou l'autre des juridictions exercées, autant par
les commissaires du travail que par les juges du Tribunal du travail, n'est pas
celle sur laquelle ils ont juridiction pour se prononcer, je retourne la
question au député de Portneuf: Qu'est-ce qu'on ferait si demain
matin on se retrouvait dans un immense vacuum juridique? Qu'est-ce que l'on
ferait autant par rapport à toutes les décisions
déjà rendues par ces instances, à celles qu'elles se
préparent à rendre et, enfin, au fonctionnement
général de tout le système d'accréditation et de
toutes les procédures qui sont de la juridiction du tribunal et des
commissaires? C'est à peu près - évidemment, Mme la
Présidente, je n'ai pas la prétention de tout couvrir - la seule
situation qui ferait en sorte que le gouvernement devrait rapidement intervenir
par législation afin qu'il n'y ait pas ce vide juridique, si encore les
tribunaux de droit commun, les tribunaux supérieurs arrivaient à
la conclusion que le tribunal est inconstitutionnel.
M. Pagé: Merci de la réponse à cette
question, Mme la Présidente. Ma dernière question concerne un
article de la Presse du jeudi 5 avril: "Fréchette accepte de s'expliquer
sur la commission consultative, accédant aux demandes du CPQ et de la
CSN", sous la signature de Mme Lisa Binsse. "Le ministre aurait alors
déclaré que ces
réactions négatives étaient non seulement normales
mais presque voulues par le gouvernement qui ferait maintenant porter son
préjugé favorable sur les 80 p. cent des travailleurs du secteur
privé qui ne sont pas syndiqués, en leur permettant de s'exprimer
sur le genre de relations de travail auxquelles ils aspirent. "Une telle
déclaration, dit le vice-président exécutif, Ghislain
Dufour, si elle est exacte, confirmerait que les dés sont pipés
à l'avance et enlèverait toute crédibilité à
la commission."
C'était jeudi. Je m'attendais, Mme la Présidente, à
une déclaration du ministre du Travail soit jeudi, soit ce matin
à l'Assemblée nationale pour vraiment rétablir les faits
et reprendre ce propos ou cette interprétation qui est, pour le moins
qu'on puisse dire, inquiétante.
M. Fréchette: Je suis très heureux, Mme la
Présidente, que le député de Portneuf soulève cette
question. D'abord, cela va me donner l'occasion d'apporter un certain nombre de
précisions et de lui dire également que je n'ai pas,
jusqu'à maintenant, jugé utile de relever cette
déclaration très précisément parce que je voulais,
de façon privilégiée, indiquer aux parties
elles-mêmes de quoi retournait ce genre d'article qu'on retrouve dans le
journal du 5 avril. D'ailleurs, ce n'était pas la première fois
que c'était publié comme cela. On l'a retrouvé le lundi 2
avril sous la plume de Pierre Vennat. Je vous invite, Mme la Présidente,
enfin j'invite par vous le député de Portneuf à jeter un
coup d'oeil sur l'article du lundi 2 avril 1984, et je ferai les observations
suivantes: D'abord, à aucun endroit, le texte auquel vient de faire
référence le député de Portneuf - est-il entre
guillements? - ne rapporte une citation au mot à mot que celui qui vous
parle aurait faite à l'occasion d'une manifestation politique de sa
formation politique. Ce genre de chose était à ce point
inquiétant que j'ai fait une démarche additionnelle et je me suis
informé auprès du journaliste lui-même qui couvrait
l'événement aux fins de savoir de lui si j'avais effectivement
échappé une phrase de cette allure ou si, alors, c'était
une interprétation qu'il faisait à partir de mes propos. La
réponse qu'il m'a donnée a été essentiellement la
suivante: Vous avez indiqué à ce conseil national de votre parti
politique que les réactions, autant du patronat que de certaines
associations syndicales, étaient à toutes fins utiles normales
dans les circonstances. Un de vos collègues, ministre du Revenu, a aussi
fait des commentaires sur la syndicalisation dans le secteur privé, sur,
effectivement, les réactions de l'une ou l'autre des parties. C'est
à partir de ces déclarations que le journaliste a tiré la
conclusion qu'on retrouve autant dans la Presse du lundi 2 avril que dans celle
du jeudi 5 avril. Mme la Présidente, je réitère qu'en
aucun moment je n'ai dit de semblables choses. Enfin, je ne demanderai pas au
député de Portneuf de faire un acte de foi par rapport à
ce que je suis en train de lui dire, mais qu'on me donne au moins le
bénéfice du doute. Je suis capable de faire l'évaluation
quant à la nature d'une déclaration qui serait aussi grosse que
celle-là. (17 h 30)
M. Pagé: Vous allez convenir avec moi, M. le ministre -
c'est d'ailleurs pourquoi je voulais vous donner la chance de vous expliquer
cet après-midi, avec toute la générosité qui me
caractérise, vous allez en convenir - que, lorsque deux ministres d'un
gouvernement, du même gouvernement parlent, c'est le gouvernement qui
parle.
M. Fréchette: Si c'est une opinion que vous me demandez
là-dessus, je suis, comme vous, d'avis que, lorsque deux ministres
s'expriment sur un sujet donné et que les opinions vont dans le
même sens, il y a de fortes chances que cela engage le gouvernement
lui-même. Encore faut-il cependant que ce soit aussi
précisément que possible le texte de ce que vraiment ils ont dit.
Encore une fois, je vous réitère qu'en aucune circonstance je
n'ai dit de semblables choses.
M. Pagé: Pour clore sur cet aspect du programme...
M. Fréchette: J'ai un renseignement additionnel. M. Vennat
à qui on a demandé des renseignements - je voulais vraiment
savoir - nous a indiqué que c'était effectivement sa propre
interprétation. Je signale en dernière instance qu'il semble que
je ne sois pas le seul qui ait pris des informations auprès de M. Vennat
quant à cette déclaration. Il aurait dit la même chose
à tout le monde.
M. Pagé: Mme la Présidente, on ne peut que
souhaiter que le travail de cette commission porte fruit dans les délais
prévus et que les résultats seront ceux escomptés.
Nous avons abordé de façon incidente les
négociations dans les secteurs public et parapublic. Le gouvernement a
mis sur pied des comités paritaires au lendemain des négociations
ardues, lourdes et difficiles que vous avez vécues, que le gouvernement
a vécues, dont l'Assemblée nationale a été
témoin et pour lesquelles la population du Québec a payé
le prix en 1983. À la fin de l'année 1983 - si ma mémoire
est fidèle - le président du Conseil du trésor de
l'époque annonçait la volonté gouvernementale de former
des comités paritaires composés de représentants syndicaux
et patronaux pour
tenter de revoir l'ensemble de la question des négociations dans
le secteur public et pour que les écueils et les aléas que la
société québécoise a eu à vivre et dont elle
a dû souffrir ne se répètent pas.
Pourriez-vous nous indiquer, comme ministre du Travail qui, nous le
présumons ou l'espérons, devez être intimement
associé à ce comité ministériel, le degré
d'avancement du dossier? Quelle a été l'implication du
ministère du Travail et du ministre du Travail au sein de ce
comité ministériel et de ces comités paritaires?
Pourriez-vous nous indiquer si cet aspect de la négociation qu'on
appelle la négociation permanente a été abordée,
où en sont rendues les réflexions du gouvernement sur cet aspect,
si le droit de grève, si l'utilisation du recours à la
grève a été abordé et, encore là, où
en est rendue la réflexion du gouvernement?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je pense que, face
à une question comme celle-là, il y a peut-être une petite
précision qui s'impose. Il faut faire la distinction entre ce qu'on
pourrait convenir d'appeler un comité interministériel et un
comité paritaire. On ne retrouve pas à l'intérieur des
comités paritaires auxquels on réfère les mêmes gens
qu'on peut retrouver à l'intérieur d'un comité
interministériel qui a le mandat d'étudier ce dossier.
Quelle a été l'implication du ministère du Travail?
Je pense que c'est la première question du député de
Portneuf. Je vous dirai que, lorsque les travaux ont commencé, le
sous-ministre du Travail a été très intimement
associé aux travaux de ce comité, de cette commission, de ce
groupe de travail, de ce groupe d'experts qui a procédé à
une première évaluation, qui a procédé à un
premier déblayage et qui a tiré certaines conclusions. Ces
travaux préliminaires ayant été faits, le comité
interministériel dont parle le député de Portneuf a
effectivement été réuni, à ma connaissance - et je
vous donne cela sous réserve encore une fois, une erreur de
mémoire étant toujours possible - jusqu'à maintenant,
quatre ou cinq fois. C'est le comité auquel participaient le
président du Conseil du trésor, le ministre des Affaires
sociales, le ministre de l'Éducation, le ministre de la Fonction
publique et le ministre du Travail.
Ce comité interministériel, à partir des travaux
préliminaires auxquels se sont livrés les experts dont je vous
parlais tout à l'heure, a effectivement, quant à lui,
évalué des situations, des recommandations qui ont
été tirées des études qui avaient été
menées.
Mme la Présidente, à ce stade-ci le député
de Portneuf me demande de lui dire quelles sont les conclusions du
comité interministériel. Je serai malheureusement obligé
de vous dire que je ne peux répondre à ce genre de question parce
qu'il s'agit, à ce stade-ci, en tout cas, des travaux, purement et
simplement, de recommandations, de conclusions ou de suggestions que ce
comité interministériel va soumettre - comme je le disais tout
à l'heure - autant au Conseil des ministres qu'à ses partenaires
du monde de la négociation. À ce stade-ci, encore une fois, on ne
peut pas parler en termes de décisions fermes, formelles. On ne peut
parler qu'en termes de recommandations. Cela n'aiderait la cause de personne si
j'entreprenais de disserter sur la place publique sur les points qui ont
été retenus par le comité interministériel avant
que la consultation n'ait été faite avec les intervenants
particulièrement touchés et intéressés par le
sujet.
M. Pagé: À quel moment les recommandations du
comité interministériel seront-elles déposées au
Conseil des ministres?
M. Fréchette: Cela tombe bien, Mme la Présidente,
parce que je recevais l'ordre du jour du conseil pour demain et cette rubrique
y est.
M. Pagé: Pour prise de connaissance ou pour
décision?
M. Fréchette: Enfin, je serais plutôt porté
à croire que c'est plutôt pour prise de connaissance et pour
première évaluation que pour décision.
M. Pagé: D'accord.
M. Fréchette: Mais je sais que c'est à l'ordre du
jour du conseil pour demain.
M. Pagé: Nous sommes en avril 1984. Il faut retenir du
processus que celui-ci prévoit une décision du Conseil des
ministres, une consultation - si je peux utiliser le terme parce que consulter
une fois la décision prise, c'est assez délicat - un
échange, tout au moins avec vos partenaires patronaux et tout cela
devrait déboucher, par la suite, sur un échange au sein des
comités paritaires.
Croyez-vous vraiment, M. le ministre du Travail, que cette oeuvre saura
résulter sur des modifications importantes et significatives pour la
ronde de négociations qui s'annonce en 1985?
M. Fréchette: II y a une chose sur laquelle je voudrais
être un peu plus clair, Mme la Présidente. C'est évident
que le Conseil des ministres, et non plus le gouvernement, ne va pas adopter
des politiques ou des lois sans procéder à la consultation. S'il
y a imbroglio là-dessus, je voudrais être bien clair: C'est
sûr que c'est
le processus de consultation qui doit prévaloir.
Le député de Portneuf me demande s'il y a des espoirs que
des modifications soient apportées au système avant une prochaine
ronde de négociations. Je pense que les intentions du gouvernement ont
été - et je dois le dire - à plusieurs reprises
très clairement énoncées à cet égard. Je
dois également dire qu'il est finalement fort simple de procéder
à identifier la nature très précise des problèmes
qui reviennent chaque fois qu'il y a une négociation dans le secteur
public et parapublic. Si, alors, l'identification des dispositions
législatives qui sont problématiques est déjà
faite, il y a déjà un bon bout qui est réalisé au
niveau du quantum de temps que cela peut requérir pour débloquer
sur des lois qui seraient le fruit du consensus des parties. Encore une fois,
il ne sera pas nécessaire de procéder à l'identification
de tout ce qui fait obstacle ou problème: c'est déjà, pour
toutes les parties, à toutes fins utiles, connu. Il va rester, comme je
le signalais il y a un instant, à identifier maintenant les moyens par
lesquels il faudra tenter de contourner ces difficultés et je suis l'un
de ceux qui croient que le gouvernement n'a pas de choix et qu'il doit, de
toute évidence, avant une prochaine négociation dans le secteur
public et parapublic, avoir revu l'ensemble de tout le processus et voir
quelles sont les décisions qu'il faut arrêter et vers quelle
avenue il faut aller.
M. Pagé: Sans, M. le ministre, divulguer les
recommandations du comité interministériel qui seront
déposées devant le Conseil des ministres pour
appréciation, dans une première étape, pouvez-vous au
moins nous indiquer si des recommandations portent sur le régime des
négociations?
M. Fréchette: Sur ce, Mme la Présidente, je ne
transgresserais pas de secret d'Etat si je disais au député de
Portneuf qu'effectivement les travaux sont strictement centrés sur le
mode de négociation dans les secteurs public et parapublic et sur le
bilan que tout un chacun peut faire depuis que le Code du travail existe dans
l'état actuel, c'est-à-dire depuis 1964.
Le député de Portneuf va très certainement se
rappeler, par exemple, que le droit de grève dans le secteur public a
été accordé à l'unanimité des partis qui
siégeaient à l'Assemblée nationale en 1964. C'est le
gouvernement libéral du temps qui a introduit cette disposition dans
notre code et c'est le ministre du Travail, député de Sherbrooke,
qui avait parrainé le projet de loi à cette époque et tout
le monde n'avait aucune espèce d'hésitation quant aux objectifs
à atteindre.
Est-ce qu'à partir du bilan qu'on peut maintenant faire,
placé en parallèle avec les objectifs que tout le monde avait, en
1984 -20 ans après, comme dirait un animateur de
télévision - nos objectifs ont été atteints?
M. Pagé: Selon vous?
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf, si vous permettez, M. le ministre...
M. Pagé: II y avait une question intéressante:
Selon vous?
La Présidente (Mme Harel): ...si vous me permettez
simplement de vous signaler que, par équité pour les autres
membres de la commission, votre temps de parole est largement expiré
temporairement puisque vous pouvez revenir. J'aimerais savoir si d'autres
membres de cette commission entendent intervenir sur ce programme 1 et non pas
nécessairement les inviter à le faire. Je vous cède la
parole, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Vous reprenez votre
question?
M. Pagé: Oui. Selon vous?
M. Fréchette: Mme la Présidente, si l'on retient
l'objectif - je ne sais si c'est l'article 2 ou 3 du Code du travail qui dit
que l'objectif du Code du travail est de faire en sorte que l'on vive des
relations de travail harmonieuses, le sous-ministre me signale que c'est
l'article 3 - et que l'on fait ce bilan dont je viens de parler, je suis l'un
de ceux qui croient que les objectifs qu'avaient, autant le législateur
en 1964 que les parties qui étaient directement
intéressées au processus et qui ont toutes déclaré
qu'elles étaient disposées à vivre ce mécanisme
comme tout le monde souhaitait qu'il soit vécu... Je dois dire que non.
Par rapport au bilan que l'on peut faire, en fonction de relations de travail
harmonieuses, mon opinion à moi, c'est que les objectifs n'ont pas
été atteints.
M. Pagé: Votre opinion comme ministre du Travail, les
objectifs n'ayant pas été atteints, ça commande l'action
qui a été enclenchée, laquelle devra déboucher sur
des modifications fondamentales au régime de négociations et des
lois éventuelles.
M. Fréchette: II me semble que tout cela va de soi, cela
s'enchaîne. C'est l'objectif vers lequel il faut tendre.
M. Pagé: Question qui est peut-être un peu
expectative: Croyez-vous que les lois ou les projets de loi - le ou les - qui
devront être déposés le seront par le député
de Sherbrooke, là aussi, s'il est ministre du Travail?
M. Fréchette: C'est effectivement très
hypothétique, Mme la Présidente.
Conseil des services essentiels
M. Pagé: D'accord. Le Conseil des services essentiels?
M. Fréchette: Ah oui!
La Présidente (Mme Harel): Je dois comprendre que M. le
député de Portneuf nous suggère d'entreprendre
l'étude du programme 3. (17 h 45)
M. Pagé: Je reviendrai.
La Présidente (Mme Harel): Toujours sur le programme 1,
d'autres membres de cette commission veulent-ils intervenir?
M. Pagé: Non, c'est que...
La Présidente (Mme Harel): Nous pouvons simplement
suspendre et revenir...
M. Pagé: Sans sauter au programme 3, nous étions
aux services essentiels et on pourrait vider cette question-là tout de
suite.
La Présidente (Mme Harel): S'il y a consentement des
membres de cette commission.
M. Fréchette: Est-ce que les services essentiels sont un
autre programme?
La Présidente (Mme Harel): Oui, c'est le programme 3. Nous
pouvons suspendre temporairement le programme 1 et...
M. Fréchette: Je n'ai pas du tout d'objection, je ne sais
pas ce que mes collègues du côté ministériel en
pensent, mais je n'ai pas d'objection.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: On sait que les principales activités du
conseil se sont déroulées dans huit secteurs différents,
considérés comme des services publics. On retient que les
municipalités constituent le niveau principal sur lequel le conseil a
exercé sa juridiction. On retient qu'au cours de l'année 1983 274
municipalités ont été assujetties par le décret du
gouvernement, par la loi 72. Si on inclut les autres secteurs comme le
transport, l'enlèvement des ordures ménagères,
l'électricité, le téléphone, 306 employeurs et 402
syndicats ont maintenant l'obligation de maintenir les services essentiels s'il
doit y avoir une grève dans leur établissement.
Or, lors du conflit de travail à la Commission de transport de
Laval, la CTL et ses employés n'étaient pas assujettis à
la loi sur les services essentiels puisque les syndicats avaient acquis leur
droit de grève avant l'entrée en vigueur des dispositions
pertinentes de la loi. Je crois que l'ensemble des députés
à l'Assemblée nationale du Québec et l'ensemble des
intervenants ont déploré cette situation de droit qui a
débouché sur une situation de fait qui était
particulièrement inquiétante et que les usagers et les citoyens
de Laval ont dû vivre.
Est-ce qu'il y a d'autres situations similaires qui pourraient
être vécues avec les effets que cela a eus à la CTL?
M. Fréchette: Je comprends que le député de
Portneuf se réfère à des organismes qui, normalement,
auraient dû être assujettis...
M. Pagé: Devraient...
M. Fréchette: ...qui devraient être assujettis et
qui ne l'ont pas été. Il me semble qu'il y a un cas ou deux qu'on
a échappés, si vous me passez l'expression. Heureusement, par
ailleurs, il n'y a pas eu, dans ces cas-là, de conflit. Nous avons
maintenant pris des dispositions pour faire en sorte que chaque fois qu'une
convention vient à expiration, quinze jours avant l'acquisition du droit
de grève, il n'y ait plus de ces espèces d'échappatoires
qui font en sorte que quelqu'un qui devrait être assujetti ne l'est pas.
Les deux qu'on a échappés, il n'y a pas eu conflit.
M. Pagé: C'était dans quel domaine?
M. Fréchette: Dans le domaine municipal.
M. Pagé: Domaine municipal.
M. Fréchette: Oui, dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, je pense.
M. Pagé: Dans votre rapport annuel, il est indiqué
que le conseil s'apprête à lancer une campagne de sensibilisation
au niveau du transport scolaire. On sait que le Québec, depuis quatre
ans, cinq ans, a vécu des conflits de travail assez durs; entre autres,
ici dans la région de Québec on a vécu de tels conflits.
Ce sont des régions entières qui ont été
privées de transport scolaire pendant des périodes plus ou moins
longues et
coûteuses pour la société. On doit retenir de
l'exercice que le transport scolaire qui était fait par des entreprises
artisanales il y a 15 ou 20 ans est devenu une véritable entreprise avec
un taux de syndicalisation qui est plus élevé. Cela
débouche sur les négociations de conventions collectives; cela
débouche sur des représentations, des demandes syndicales qui
sont légitimées jusqu'à une certaine mesure, en ce
qu'elles s'appuient sur des conventions collectives signées dans
d'autres régions.
Pourriez-vous nous indiquer, M. le ministre, le degré
d'avancement de ce dossier, surtout en termes d'échéancier
probable? On sait qu'il y a des conventions collectives qui viendront à
échéance sous peu; on connaît tous les effets dommageables
que cela peut créer dans une région lorsque le transport scolaire
est en grève. J'aimerais bien profiter de votre présence ici
à la table pour avoir le plus de détails là-dessus.
M. Fréchette: Mme la Présidente, il me fait plaisir
de passer la parole au président du Conseil des services essentiels, Me
Bastien.
La Présidente (Mme Harel); La parole est à vous, Me
Bastien.
M. Bastien (Bernard): Mme la Présidente, il me fait
plaisir de signaler aux membres de la commission que, au cours de
l'année 1983, le conseil a procédé à une analyse de
toute la situation du transport scolaire dans la province de Québec. Il
s'est agi, pour l'enquêteur du conseil, d'identifier où
étaient les zones qui étaient particulièrement
syndiquées, où se trouvaient, si vous voulez, les syndicats qui
faisaient du transport scolaire, si le transport était fait par la
commission scolaire ou par des entrepreneurs.
Alors, nous avons eu un rapport, qui a été finalisé
à la fin de décembre 1983 ou en novembre 1983, qui nous a
été soumis. Il nous permet d'avoir tout le portrait de la
situation du transport scolaire, à l'heure actuelle. Il ne faut pas
oublier une chose, c'est que c'est le gouvernement qui assujettit, un par un,
chacun des organismes, syndicats ou employeurs qui, selon lui, devrait
être assujetti en fonction de deux critères, ceux de la
santé ou de la sécurité de la population.
Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas retenu, en tout cas, dans
les assujettissements... Il y a un comité qui a été
formé pour évaluer, au préalable, avant que la
grève soit déclarée, quels sont les problèmes de
santé ou de sécurité qui peuvent se poser dans une
grève appréhendée. Alors, au niveau du transport scolaire,
nous avons certaines difficultés à nous astreindre à la
question de santé ou de sécurité, c'est-à-dire:
L'éducation comme telle, dans la loi, n'est pas identifiée comme
un service essentiel, ni comme un service essentiel à la santé ou
à la sécurité. Le transport scolaire en soi est un
transport qui, je veux bien le croire, peut transporter des handicapés,
à l'occasion; mais il est plus facile de voir le lien quand on parle
d'une grande commission de transport, qui transporte des handicapés,
puisqu'elle transporte des handicapés pour la réhabilitation,
pour les nourrir, pour les envoyer travailler et pour un tas de choses, alors
que le transport scolaire se résume tout simplement à la question
de savoir si on les transporte à l'école ou pas, alors que
d'autres pourraient être en grève et ils n'iraient pas à
l'école?
Alors, jusqu'à maintenant, la situation du dossier est la
suivante: On a une enquête, on a identifié les zones. Il va s'agir
de prendre une décision préalable, de dire: Est-ce qu'on
assujettit le transport scolaire? et de le faire. Pour cela, il va falloir
évaluer des critères. Il ne faut pas oublier une chose, c'est
que, dès qu'un organisme est assujetti, le droit au lock-out pour
l'employeur est perdu aussi. Il devient interdit dès le moment où
l'assujettissement se fait. Alors, il faut penser en fonction des
possibilités de règlement du conflit, qui est la convention
collective; il faut évaluer un tas de choses, ce que nous n'avons pas
fait jusqu'à présent, mais que nous nous apprêtons à
faire en collaboration avec les fonctionnaires du ministère et avec le
ministre pour voir si on adopte comme politique que tout le transport scolaire
est assujetti et que, définitivement, chacune des grèves dans le
transport scolaire donnerait lieu à une obligation de maintenir les
services essentiels. Alors, c'est une situation qu'il faut évaluer. Il
faut tenir compte aussi du fait que, du côté syndical, cela
modifie, jusqu'à un certain point, un certain rapport de forces qu'on a
normalement puisque le droit de grève est maintenu. Alors, il faut
évaluer cela dès le départ, avant de nous engager plus
loin, ce que nous n'avons pas fait jusqu'à présent.
M. Pagé: Est-ce que le conseil a une recommandation
à formuler dans le contenu du décret?
M. Bastien: Pas exactement. Ce qui a été fait,
c'est une collaboration administrative entre le conseil, le ministère du
Travail et les fonctionnaires du ministère où, tout simplement,
sont identifiés les secteurs où le conseil peut intervenir en
fonction de l'échéance de la grève. À ce
moment-là, il y a une personne du ministère, une personne du
cabinet et une personne du bureau du sous-ministre du Travail qui, à
toutes fins utiles, soumettent un dossier que le ministre approuve pour
recommander au Conseil des ministres.
M. Pagé: Quel est l'échéancier? Est-ce que
vous vous êtes fixé un échéancier en ce qui concerne
le transport scolaire?
M. Bastien: Je croyais, comme président d'organisme, qu'on
devrait régler cela d'ici septembre, pour voir si on a une...
M. Pagé: C'est donc dire que, si le transport scolaire
devient assujetti par un décret, ce sera fait avant l'année
scolaire de 1984-1985.
M. Bastien: C'est-à-dire qu'on commencerait à
assujettir au fur et à mesure des échéances de conventions
collectives tous les transporteurs scolaires pour l'avenir.
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Est-ce que d'autres membres de
la commission veulent intervenir? M. le ministre.
M. Fréchette: Oui, très brièvement, Mme la
Présidente. Je suis heureux que le président du Conseil des
services essentiels ait l'occasion de s'exprimer sur une question très
précise, mais, quant à moi, je voudrais profiter de l'occasion
pour dire publiquement ce qu'on n'a pas encore dit publiquement et qui
mérite d'être dit. Souvenez-vous, Mme la Présidente, que,
lorsque cette loi 72 a été adoptée il y a plusieurs mois
maintenant, plusieurs personnes étaient sceptiques quant à la
vocation du Conseil des services essentiels, quant à la
possibilité pour lui de réaliser le mandat qui était le
sien. Lorsque je dis plusieurs personnnes, j'inclus celui qui vous parle.
J'étais d'autant plus à l'aise pour être inquiet que je
n'étais pas au ministère du Travail à ce moment-là.
Je suis bien obligé aujourd'hui de dire, mais je le dis avec beaucoup
d'empressement, que non seulement le Conseil des services essentiels a atteint
les objectifs pour lesquels il a été mis sur pied et pour
lesquels il a été fondé, mais qu'il est en train de se
tailler une réputation enviable dans le monde des relations du travail
au Québec. À cet égard, je ne ferai que rappeler aux
membres de la commission qui le veulent de prendre le temps de lire un
récent éditorial du Devoir. Je pense qu'il était sous la
signature de M. Roy. Il émettait des opinions, il faisait une
évaluation et il portait même un jugement très
précis sur le travail du Conseil des services essentiels à la
suite du règlement du conflit à la Commission de transport de la
rive sud de Montréal. Je pense qu'il fallait profiter du très peu
de temps qu'on avait à notre disposition pour signaler cet aspect du
travail que fait le Conseil des services essentiels.
La Présidente (Mme Harel): Oui. M. le ministre, j'aimerais
poser une question à M. Bastien. Je partage les propos du ministre sur
le travail réalisé par le conseil. En vertu de la loi 72, votre
mandat était très large. On en a suspendu l'application au moment
des négociations dans le secteur public, mais, présentement,
avez-vous à intervenir? Je fais référence, par exemple, au
cas de l'arrêt de travail à l'hôpital de Chicoutimi. Son
application est-elle toujours écartée pour les
établissements de santé et les services sociaux?
M. Bastien: Toute la partie de la loi qui concerne le secteur
public dans le code n'est pas proclamée actuellement, de sorte que je ne
peux pas dépenser des montants et des budgets pour une partie de la loi
qui n'est évidemment pas appliquée.
M. Fréchette: Si vous me le permettiez, Mme la
Présidente...
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre.
M. Fréchette: Dans l'évaluation ou dans le dossier
des relations du travail dans les secteurs public et parapublic, c'est
évidemment, selon moi en tout cas, un aspect dont il faut absolument
tenir compte. Il faut absolument tenir compte des résultats qu'ont
donnés les interventions du Conseil des services essentiels là
où il a exercé son mandat. Je ne suis pas en train de vous dire
qu'il faudra promulguer in extenso les actuels articles qui ne l'ont pas
été, mais il me semble que c'est un aspect du dossier qu'on ne
peut pas ignorer dans l'évaluation globale de tout notre système
des secteurs public et parapublic.
M. Bastien: Je voudrais ajouter ceci, c'est...
La Présidente (Mme Harel): Me Bastien.
M. Bastien: ...qu'il faut faire attention lorsqu'on parle de ce
type de grève auquel vous faites allusion. Dans le cas de
l'hôpital de Chicoutimi, il s'agissait d'une grève illégale
et les mandats du conseil sont exercés en fonction des grèves
légales. Il faut éviter de créer une ambiguïté
autour de cela. Dès que le droit de grève est acquis, que le
syndicat a le droit de la faire, le conseil intervient. Lorsqu'il s'agit d'une
grève spontanée, illégale, pour toutes sortes de motifs
à l'intérieur d'un hôpital ou d'un secteur donné, la
loi ne permet pas actuellement au conseil d'intervenir.
La Présidente (Mme Harel): On aura peut-être
l'occasion d'y revenir, puisque, en termes de médiation
préventive...
M. Pagé: Oui, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Harel): ...ou en termes
d'interventions, je sais qu'il y a des services au ministère du Travail
qui interviennent dans le secteur privé, nonobstant le caractère
légal ou illégal de la grève. On y reviendra en
poursuivant nos travaux ce soir. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: J'ai une très brève question
à poser à M. Bastien. Je lui laisse le soin d'y répondre
ou non. Le ministre du Travail vous a-t-il indiqué à quel moment
cette section de la loi pourrait être proclamée?
M. Bastien: Non. M. Pagé: Non.
M. Bastien: Je ne lui ai pas demandé non plus.
M. Pagé: Ah! vous devriez le faire.
La Présidente (Mme Harel): Je constate qu'il est 18
heures. Nous allons suspendre nos travaux et les reprendre à 20
heures.
M. Fréchette: Mme la Présidente, me permettez-vous
une simple question d'information?
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le ministre.
M. Fréchette: J'ai constaté que le
député de Portneuf avait déclaré ne plus avoir de
questions au président du conseil. Est-ce que d'autres membres de la
commission ont des questions? Sinon, on pourrait tenir pour acquis que le
programme 3 pourrait être adopté ce stade-ci.
La Présidente (Mme Harel): Le programme 3 est le programme
qui traite...
M. Fréchette: Conseil des services essentiels.
La Présidente (Mme Harel): Oui, du Conseil des services
essentiels. Le programme 3 est adopté?
M. Fréchette: Adopté.
La Présidente (Mme Harel): Adopté. Nous suspendons
nos travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
(Reprise de la séance à 20 h 14)
La Présidente (Mme Harel): La commission de
l'économie et du travail entreprend ses travaux; elle a pour objet
d'étudier les crédits budgétaires du ministère du
Travail. Nous sommes à l'examen du programme 1 que nous avons à
compléter. Nous devons également examiner les programmes 4 et 5
pour ainsi terminer l'étude des crédits du ministère du
Travail.
Sur le programme 1, est-ce que l'étude est terminée,
messieurs les membres de la commission?
M. Pagé: Nous avons d'autres questions.
La Présidente (Mme Harel): Alors, la parole est au
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Une très
brève question au ministre: Comment expliquer qu'on ne reçoive
plus le relevé des grèves et des lock-out?
M. Fréchette: Mme la Présidente, je vous signale
que c'est la première nouvelle que j'en ai. La situation ne m'a jamais
été évoquée jusqu'à maintenant. Quant
à moi, je continue de recevoir cette liste. Le sous-ministre nous
signale qu'il y aurait sans doute un point d'information qu'il faudrait ajouter
à ce renseignement.
La Présidente (Mme Harel): M. Blain.
M. Blain (Yvan): Mme la Présidente, c'est tout simplement
le fait que les listes de grèves ont toujours été
acheminées par les mêmes canaux depuis plusieurs années. Je
ne sais pas s'il y a quelqu'un qui a arrêté de les envoyer aux
députés, mais, nous, on en envoie à tout le monde qui doit
se charger... Je ne sais pas si la machine a arrêté de
fonctionner, mais on ne s'y s'opposait pas. La seule chose qu'on extrayait de
la liste de grèves ou de lock-out, c'étaient les commentaires que
le ministère envoyait au ministre du Travail pour son information, parce
que cela pouvait être délicat des fois. La liste comme telle, avec
les noms des parties, a toujours été envoyée en je ne sais
combien d'exemplaires aux députés de l'Asssemblée
nationale. Je ne sais pas qui a arrêté...
M. Pagé: Mme la Présidente, je dois exprimer ma
surprise. Je ne sais si la machine est allergique au député de
Portneuf, mais on ne la reçoit plus. Cela nous inquiète de ne
pouvoir assurer le suivi régulier de l'évolution des
conflits.
M. Fréchette: II s'agira simplement, Mme la
Présidente, de faire les vérifications qui s'imposent dans les
circonstances et
d'essayer de voir pourquoi cela n'existe plus. J'étais, quant
à moi, et le sous-ministre me le signale également, tout à
fait convaincu que la procédure continuait à être
suivie.
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre, si vous
permettez. Cette distribution a été interrompue il y a plusieurs
mois. Je ne sais s'il serait utile de la reprendre pour l'ensemble de nos
collègues de l'Assemblée, mais il faut convenir que,
certainement, les membres de la commission parlementaire de l'économie
et du travail devraient continuer à recevoir, très
régulièrement, cette liste-là.
M. Fréchette: J'en prends bonne note, Mme la
Présidente, et nous allons aussi prendre les dispositions
nécessaires pour qu'au moins les membres de la commission
reçoivent leur liste, évacuée cependant des commentaires
dont parlait le sous-ministre tout à l'heure.
M. Pagé: Ce qui est normal et explicable. Il y a un
conflit de travail qui a touché, de façon particulière, la
région de Plessisville. Vous comprenez que je me réfère au
problème du lock-out chez Forano.
M. Blain: Alors, si vous permettez, c'est que dans le cas de
Forano, qui est très présent au moment où l'on se parle,
il est possible qu'il y ait une assemblée générale qui ait
lieu aujourd'hui - qui a peut-être déjà eu lieu - et il y a
à la table une entente de principe. L'on croit que les dirigeants
syndicaux et patronaux en sont venus à une entente et nous attendons le
résultat de l'assemblée générale quant à
Forano.
M. Pagé: Vous croyez?
M. Blain: On croit. On croit toujours! Quand il y a une entente
de principe à la table avec les officiers syndicaux et patronaux, on
pense qu'il y a de grosses chances que ce soit accepté.
M. Pagé: Quand est-ce que l'entente de principe a
été convenue?
M. Blain: Elle est prévue pour?
M. Pagé: Quand a-t-elle été convenue entre
les parties à la table?
M. Blain: Samedi. M. Pagé: Samedi?
M. Blain: Samedi. Alors, c'est en fin de semaine. Il s'agissait
pour les gens de regrouper les membres pour tenir l'assemblée
générale.
M. Pagé: D'accord.
M. Blain: Je demandais justement à M. Sainte-Marie, le
directeur du service de la conciliation, en arrivant ici si l'assemblée
avait eu lieu et il n'était pas au courant encore si l'assemblée
avait été tenue.
M. Pagé: Je n'ai pas besoin de vous dire comme ce
problème, vécu par près de 500 travailleurs là-bas,
a pu jeter de l'inquiétude dans les familles. Elles ont eu non seulement
à subir un lock-out, qui a perduré depuis le 27 janvier, mais les
renseignements qui étaient donnés aux employés
sous-tendaient une diminution substantielle des effectifs, la fermeture de
certains secteurs d'activité de l'entreprise. À cet
égard-là, je n'ai pas besoin de vous dire non plus que c'est avec
beaucoup d'intérêt qu'on entend vos commentaires sur cette
question. Demain matin, on pourra peut-être y revenir selon la
décison.
M. Blain: J'espère que demain matin on sera en mesure de
vous donner plus de détails quant à l'issue de ce conflit.
M. Pagé: D'accord. Le renouvellement du décret.
M. Fréchette: Vous permettez, Mme la Présidente?
Question d'actualité surtout.
La Présidente (Mme Harel): Est-ce que je comprends, M. le
député de Portneuf, que vous aimeriez qu'on aborde le programme
4, si je ne fais erreur...
M. Pagé: Non, non, le programme 4, c'est pour...
La Présidente (Mme Harel): ...concernant l'Office de la
construction?
M. Pagé: Non, c'est différent.
La Présidente (Mme Harel): Oui, je sais que c'est
différent.
M. Pagé: L'office comme tel, on va l'aborder probablement
demain matin.
La Présidente (Mme Harel): Alors, on poursuit, toujours
à l'intérieur du programme 1.
M. Fréchette: Oui, d'accord.
M. Pagé: Cela va. Dans le programme 1, soutien aux
relations du travail dans la construction, 565 000 $ pour 1984-1985. Comment
expliquer une diminution de 170 000 $ au budget?
M. Fréchette: Voulez-vous réitérer, s'il
vous plaît, la question?
M. Pagé: En 1983-1984...
M. Fréchette: Oui.
M. Pagé: ...la prévision budgétaire
était de 753 000 $; en 1984-1985, elle est de 565 000 $. Qu'est-ce qui
va coûter moins cher?
M. Fréchette: À quel chapitre, Mme la
Présidente?
M. Pagé: Programme 1, élément 3. La
Présidente (Mme Harel): Élément 3.
M. Fréchette: L'écart auquel se
réfère le député de Portneuf, Mme la
Présidente, est principalement dû à un
réaménagement d'effectifs. Quatre postes qui étaient
affectés à cet élément ont été
affectés à d'autres éléments du programme, de sorte
que cela explique l'écart entre les montants de 1982-1983 et 1983-1984.
Cette procédure s'est inscrite dans le cadre de la réorganisation
totale de la structure du ministère à compter du moment
où, en décembre 1982, le ministère du Travail est devenu
une entité autonome et que le Conseil du trésor a donné
son autorisation à un programme d'organisation, d'administration
supérieure.
M. Pagé: Les gens qui étaient là et qui n'y
sont plus faisaient quoi et font quoi maintenant? C'est bien beau les
réaménagements d'effectifs, un ministère autonome...
M. Fréchette: II y avait, Mme la Présidente, des
gens qui se voyaient octroyer des mandats ad hoc, qui n'étaient pas
nécessairement des fonctionnaires affectés à des postes
permanents du ministère. Alors, on n'a plus recours à ces gens de
l'extérieur. Il y a également à tenir en compte le fait
que cette catégorie dont on parle comprenait aussi des montants d'argent
qui étaient affectés aux différentes tutelles que l'on
connaît et qui existent encore, d'ailleurs. Un
réaménagement budgétaire permet d'équilibrer
maintenant les dépenses entre les autres éléments du
programme.
Décret de la construction
M. Pagé: Mme la Présidente, je voudrais aborder
avec le ministre la négociation qui devrait avoir cours actuellement
entre l'Association des entrepreneurs en construction du Québec et les
représentants syndicaux de la FTQ-Construction, du Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction
(international), de la CSN-Construction, de la CSD et du Syndicat des
travailleurs de la Côte-Nord.
Comme je l'évoquais ce matin, force nous est de constater, encore
une fois, qu'on se trouve placé devant une situation où les
négociations n'ont pratiquement pas eu lieu, où les parties se
retrouvent dans une position véritablement de force pour s'affronter
à compter du 1er mai prochain; finalement, l'économie du
Québec est susceptible de vivre le résultat de lois
adoptées, ici, à l'Assemblée nationale du Québec.
On se rappelle que, lors de l'adoption de la loi qui a créé la
cinquième centrale dans le monde de la construction, j'avais
évoqué à l'époque le fait qu'il était
difficile de croire qu'une majorité syndicale pourrait se dégager
du vote exprimé par les travailleurs de la construction. C'est la
situation qui prévaut actuellement.
D'autre part, l'absence de consensus -si je peux utiliser le terme - du
côté syndical place la partie patronale dans une position
privilégiée et... Pourquoi souriez-vous, M. le
député de Duplessis? Cela n'est pas vrai?
M. Perron: Je n'ai rien dit, Mme la Présidente.
M. Pagé: Vous souriez.
M. Perron: Ce n'est pas enregistré, le sourire, Mme la
Présidente.
M. Pagé: Celui-là devrait être
enregistré. Je disais donc, avant ce sourire particulier du
député de Duplessis, que l'absence de consensus du
côté de la partie syndicale place la partie patronale dans une
position de force, une position privilégiée. Par surcroît,
la partie patronale, avec ses offres - si on peut qualifier ce qui a
été évoqué comme étant des offres,
c'est-à-dire une diminution de salaire de 20% - est placée aussi
dans une position de force, parce que la diminution de 20% semble
coïncider curieusement avec l'approche déjà donnée
dans ses propres négociations par le gouvernement du Québec. Le
gouvernement du Québec est certainement mal placé pour condamner
une approche comme celle-là, à sa face même. De plus, on
sait que la construction a repris un peu d'élan, il y a un peu plus
d'air dans les poumons du monde de la construction; les pronostics, les
probabilités sont encourageantes. C'est évident qu'un conflit
à compter du 1er mai viendrait placer l'économie du Québec
dans une situation délicate pour les mois à venir. Qu'on ajoute
les impératifs nombreux, que ce soient les fêtes qui s'en viennent
dans la région de Québec, notamment, tout cela pourrait
finalement contribuer à placer le ministre du Travail dans une
position
particulière.
Ma première question: Comment expliquez-vous votre retard
à nommer un conciliateur? On sait que la demande avait été
formulée par le Conseil provincial de la CSN, si ma mémoire est
fidèle. Quelques jours après, la FTQ a fait la demande à
laquelle vous vous êtes empressé, évidemment, de donner
suite. Comment pouvez-vous expliquer un retard comme celui-là?
M. Fréchette: Mme la Présidente, à ce
chapitre de la négociation de la convention collective ou du
décret, vous allez comprendre que je n'entreprendrai pas de commenter
les positions de négociation de l'une ou l'autre des parties qui sont
impliquées dans le dossier pour des motifs qui vont de soi, me
semble-t-il, et pour lesquels il n'est certainement pas nécessaire de
donner des explications.
La question que le député de Portneuf me soumet est tout
à fait pertinente: Pourquoi, dès lors que l'une des parties
syndicales demandait la nomination d'un conciliateur, ne pas avoir
immédiatement donné suite à cette demande? Mme la
Présidente, c'est très précisément pour le motif
que le député de Portneuf a lui-même soulevé au tout
début de ses remarques. Il y a cinq associations syndicales
représentatives qui sont expressément et nommément
incluses dans la loi. La conciliation nous était demandée par une
seule de ces associations qui était, en l'occurrence, le Conseil
provincial des métiers de la construction. Il s'agit d'une association
qui représente 30% de l'ensemble de la main-d'oeuvre de la construction.
Or, si nous avions immédiatement accédé à la
demande du Conseil provincial des métiers de la construction et
confié un mandat à un conciliateur, la question que nous nous
posions - et c'est une question d'ordre strictement juridique - était:
Qui allaient être les interlocuteurs du conciliateur du côté
des parties syndicales? Le Conseil provincial des métiers de la
construction, ne représentant pas la majorité de l'ensemble de la
main-d'oeuvre, il n'était donc pas - dans notre évaluation
juridique, en tout cas -habilité à parler pour et au nom de
l'ensemble de toute la main-d'oeuvre de la construction. Aucune autre
association syndicale à ce moment-là n'avait fait la demande. (20
h 30)
C'est la raison pour laquelle il n'a pas été possible de
donner suite à la première demande qui nous a été
soumise par le Conseil provincial des métiers de la construction qui
représente plus précisément 31% de l'ensemble de la
main-d'oeuvre. C'est 48 ou 72 heures plus tard que la FTQ s'est jointe au
Conseil provincial des métiers de la construction pour demander, elle
aussi, la conciliation. Or, la FTQ, on le sait, Mme la Présidente,
représente 41% de l'ensemble de la main-d'oeuvre dans la construction.
Nous avions donc, à la suite de la demande de la FTQ, la
représentativité qui nous paraissait suffisante pour nommer un
conciliateur et permettre à celui-ci d'avoir des intervenants syndicaux
qui allaient parler au nom de la majorité, puisqu'il recueillait
maintenant 72% de représentativité. C'est la seule et unique
raison pour laquelle le conciliateur n'a pas été nommé
dès lors que le Conseil provincial des métiers de la construction
l'a demandé. Il y a des gens à l'imagination fertile qui ont fait
toute espèce d'interprétation parce que le conciliateur a
été nommé immédiatement après la demande de
la FTQ. Il n'y a pas d'autre motif, Mme la Présidente, que celui dont je
viens de parler.
M. Pagé: Vous confirmez donc que l'absence de
majorité du côté de la partie syndicale, en plus de causer,
entre guillemets, un certain "préjudice" aux intérêts et
aux droits des travailleurs, parce qu'à chaque négociation doit
être réglée la fameuse question de qui parle au nom de qui
et qui s'exprime au nom de la majorité, avec les coalitions, etc., en
plus de cela, vous nous confirmez que le fait qu'il n'y a pas de
majorité a constitué un motif suffisant pour que le ministre du
Travail retarde à nommer un conciliateur.
M. Fréchette: Non seulement je le confirme, Mme la
Présidente, mais, si la même question était posée
à chacune des cinq associations syndicales qui sont là, je suis
moralement et, à toutes fins utiles, tout à fait convaincu que
chacune des associations répondrait dans le même sens et
plaiderait qu'effectivement le fait qu'aucune des cinq centrales n'a recueilli
- en tout cas, depuis les deux derniers maraudages - la majorité
absolue, cela crée effectivement ce genre de problème qu'on est
en train d'évoquer. Cela retarde d'autant le début des
négociations et cela crée des embêtements dont tout le
monde est conscient.
Je ne vais pas entreprendre de faire tout l'historique de cette Loi sur
les relations du travail dans l'industrie de la construction, ni non plus
tenter de justifier pourquoi elle est comme cela. Il y a cependant une chose
qu'il apparaît important de mettre sur la table à ce stade-ci, ne
serait-ce que pour les fins de la discussion et pour tenter de trouver une
avenue de solution à ce genre de problème, c'est que, lorsque les
négociations seront terminées, peu importe de quelle façon
elles se termineront, est-ce qu'il ne serait pas indiqué - je vous
signale que c'est la question que je suis en train de me poser; je n'y ai pas,
quant à moi, encore donné de réponse, mais cela fait
l'objet de réflexions passablement intenses, surtout à
voir ce qui se passe et ce à quoi se réfère le
député de Portneuf - dès lors que la période de
négociation sera terminée, ne serait-il pas indiqué de
demander aux cinq parties syndicales de prendre sur elles-mêmes le mandat
d'essayer de cheminer une décision sans que personne d'autre
n'intervienne, ni du ministère, ni du côté patronal? Aucun
tiers dans le dossier, mais les cinq parties syndicales ensemble, la
négociation étant terminée, pourraient-elles s'asseoir
ensemble et procéder à l'exercice d'identifier un moyen sur
lequel elles pourraient s'entendre pour faire en sorte qu'à l'avenir on
ne se retrouve plus dans ce genre de situation? Qu'on leur donne six mois, huit
mois, un an pour faire le tour du dossier et essayer d'identifier une solution
à ce genre de problème, il me semble que c'est un exercice qu'on
peut leur demander et qu'elles accepteraient sans doute de jouer à la
limite pour essayer de contourner la difficulté, conscientes qu'elles
sont, les parties syndicales, tout autant que nous tous ce soir, qu'il y a
là effectivement un problème important.
M. Pagé: Devons-nous comprendre, M. le ministre, que vous
retenez que la situation actuelle cause préjudice aux travailleurs,
à l'ensemble de l'exercice, finalement, et que, selon vous, le
gouvernement aurait dû, lorsqu'il a modifié la loi - je pense que
c'était 109 ou 110 - prévoir de telles situations et
prévoir dans la loi qui serait l'interlocuteur de la
majorité?
M. Fréchette: Mme la Présidente, ce que le
député de Portneuf est en train de me demander, c'est
d'agréer la thèse qu'il dit avoir plaidée au moment
où cette loi à laquelle il fait référence a
été adoptée. Je n'étais pas là. Je n'ai pas
non plus participé ni suivi les débats qui ont marqué
l'adoption de cette loi. La seule constatation que je puisse faire, Mme la
Présidente, c'est qu'étant plus expressément dans le
dossier depuis maintenant 18 mois je suis en mesure de faire une constatation
fort simple et c'est la situation dont on vient de parler et qu'on vient de
décrire: Est-ce qu'à l'époque où la loi a
été adoptée les circonstances étaient les
mêmes? Est-ce que les conditions étaient les mêmes? Est-ce
que les dispositions des parties étaient les mêmes? Je ne le sais
pas, Mme la Présidente. Je n'y étais pas. Je constate une
situation aujourd'hui avec laquelle, pas particulièrement le
gouvernement, mais avec laquelle les parties doivent vivre et qui
créent, il me semble, en tout cas, des préjudices autant aux
parties syndicales qu'à la partie patronale et qu'à l'ensemble du
monde de la construction.
Si le député de Portneuf, en abordant le sujet, veut me
faire une suggestion de procéder à réévaluer cette
situation dans les meilleurs délais, je vais être très
réceptif à une suggestion de ce genre. Je lui expliquais que
c'est effectivement le genre de question que je suis en train de me poser.
M. Pagé: À partir du constat auquel vous en venez,
auquel tout le monde se doit de souscrire parce que c'est une situation qui
paraît claire et nette, vous dites qu'au lendemain de la présente
ronde de négociations vous inviterez les cinq associations à
réfléchir ensemble à la façon dont ce
problème de représentation de la majorité pourrait
être réglé.
Au cas où, peu importe pour quel motif, la réflexion
à laquelle seront conviées les cinq associations achopperait,
est-ce que vous seriez disposé à revoir ou à nous
présenter un projet de loi qui pourrait être débattu en
commission, avec tous les mécanismes que cela implique, qui permettrait
au législateur de modifier cette loi de façon à s'assurer
que la majorité pourra être obtenue en termes
d'interlocuteurs?
M. Fréchette: Mme la Présidente, ce que je peux
ajouter en réponse à cette question, c'est que, si effectivement
la décision était prise après la négociation de
demander aux parties elles-mêmes de faire ce genre d'exercice dont on est
en train de parler, que les parties acceptent de faire cet exercice, tout le
monde, y inclus les parties elles-mêmes, aura convenu qu'il y a une
situation qu'il faut corriger et, autant que faire se peut, à la
satisfaction de tout le monde, ce qui n'est pas simple, on va en convenir par
ailleurs.
Si donc on constate le malaise, si donc il fallait aussi constater que
les parties elles-mêmes - j'entends les parties intéressées
- ne pouvaient pas trouver la solution qui ferait que la difficulté
disparaisse, il va falloir que quelqu'un quelque part tente de trouver une
solution, parce qu'il est fort évident qu'en termes de
négociations - et les expériences sont là pour le
démontrer - on va prendre un mois, deux mois, trois mois pour essayer de
s'entendre entre les parties syndicales pour déterminer qui sera ou qui
seront le ou les porte-parole de la partie syndicale. C'est évidemment
le genre de situation qu'il faut corriger maintenant. Maintenant, les moyens et
quand? C'est autre chose, mais il est clair qu'il faut y arriver.
M. Pagé: Cela arrivera nécessairement après
la présente négociation.
M. Fréchette: Oui, de toute évidence.
M. Pagé: Ce qui veut dire qu'on peut s'attendre qu'au mois
de septembre ou
octobre le ministre du Travail pourra nous donner sa position sur cette
question.
M. Fréchette: Je ne sais pas si le député de
Portneuf se réfère, quand il parle de la fin des
négociations, à septembre ou à octobre...
M. Pagé: Non, mais je présume, M. le ministre,
qu'on ne siégera ni en juillet ni en août.
M. Fréchette: Moi aussi, j'espère pouvoir le
présumer.
M. Pagé: C'est donc dire que la prochaine occasion,
après la fin de la session, d'échanger ensemble sur des questions
aussi intéressantes, ce sera en septembre ou en octobre.
M. Fréchette: II y aura certainement un bout de fait
à ce moment-là. Je serai aussi en mesure de préciser
davantage l'attitude que j'entends prendre dans le dossier.
M. Pagé: D'accord. Maintenant, Mme la Présidente,
je voudrais aborder un aspect, et je veux être bien clair. Je ne voudrais
pas, par les questions que je vais poser, qu'on s'immisce, comme dirait le
premier ministre, ni de près ni de loin dans les présentes
négociations ou dans les représentations patronales, les
réactions syndicales, etc. J'aurais des questions à poser
à M. le sous-ministre adjoint et à son équipe qui sont
responsables de la recherche et des enquêtes, de la documentation du
ministère. Est-ce que vos services ont effectué des études
sur la rémunération dans le monde de la construction, sur
l'évolution des taux de rémunération dans le monde de la
construction par rapport à d'autres secteurs depuis quelques
années? Si oui, on pourrait certainement prendre quelques minutes du
présent échange pour être informé de ces
études, à quel moment elles ont été
effectuées, auprès de combien de travailleurs, quels sont les
points de comparaison, les secteurs, la segmentisation, les métiers,
etc.
Je comprends qu'on n'a que quelques heures, mais, si vous pouviez nous
donner des indications les plus précises possible et déposer des
documents pour le bénéfice des membres de la commission, cela
serait intéressant pour la réflexion de tous les membres de la
commission parlementaire.
M. Fréchette: Je comprends, pour les besoins du journal
des Débats, que le député de Portneuf s'adresse au
sous-ministre adjoint à la recherche, M. Parent.
M. Pagé: C'est cela.
La Présidente (Mme Harel): Si vous me le permettez, M.
Parent, le député de Portneuf s'adresse au ministre. Il a
été ainsi décidé que, dans le cadre de
l'étude des crédits en commission parlementaire, c'est à
la discrétion du ministre de laisser ses collaborateurs répondre.
Dans ce cadre, la parole est à vous, M. Parent.
M. Parent (Réjean): Merci. Pour répondre de
façon très précise à la question du
député de Portneuf, il n'y a pas d'étude de
rémunération qui est faite dans le secteur de la construction
pour la raison suivante: c'est un marché unique, c'est-à-dire que
ce sont des taux qui sont dans le décret. Lorsqu'on fait des
enquêtes de rémunération salariale, c'est effectivement
pour évaluer ce que paie le marché pour les différentes
occupations. Il n'est donc pas nécessaire de faire ce genre
d'étude comparative au Québec puisque ce sont des taux uniques
pour chaque occupation et ces taux sont dans le décret de la
construction.
M. Pagé: Je comprends, M. Parent, que les taux de
rémunération sont dans le décret. Cependant, l'objectif de
ma question était de savoir si, par exemple, vos services pouvaient
comparer le salaire annuel moyen gagné par un menuisier qui oeuvre dans
le secteur de la construction par rapport au revenu annuel moyen gagné
par un autre menuisier qui, lui, peut oeuvrer en industrie, qui peut oeuvrer
dans une polyvalente, avec d'autres gammes de métiers comparables. Vous
avez le plombier qui oeuvre dans le secteur de la construction, vous en avez un
autre qui peut oeuvrer dans un autre secteur. Il serait peut-être
intéressant pour le législateur d'avoir des points d'appui en
termes de comparaison. Je ne parle pas de niveau horaire, de
rémunération annuelle pour ces deux travailleurs. (20 h 45)
L'autre question que je voulais vous poser: Est-ce que vous avez des
études sur la situation au Québec par rapport à la
situation au niveau des rémunérations payées dans d'autres
provinces ou encore dans les États du Nord-Est des
États-Unis?
M. Parent: À la première question, en fait, ce que
vous demandez, c'est plus précisément une enquête de
revenus salariaux pour différentes occupations, que ce soit dans le
secteur de la construction par rapport à des métiers similaires
au niveau des entreprises. C'est non, on n'a pas d'études comparatives
de revenus à ces niveaux.
En ce qui concerne votre deuxième question, nous n'avons pas, au
moment où on se parle, d'étude comparative des salaires -je dis
bien: la structure salariale - dans le domaine de la construction par rapport
aux
autres provinces. Il est possible que cela puisse être
réalisé. Par ailleurs, il faut bien comprendre que le
marché de la main-d'oeuvre dans le domaine de la construction dans les
autres provinces n'est pas un marché unique car il y a des taux
payés selon les différentes régions. Par exemple, la
région métropolitaine de Toronto est beaucoup plus dispendieuse
que la région d'Ottawa. C'est beaucoup plus difficile d'obtenir ces
données, mais il serait possible de les obtenir du ministère du
Travail de l'Ontario, si le besoin se faisait sentir.
M. Pagé: Qui a la responsabilité de
déterminer si vos équipes se pencheront sur telle ou telle
analyse? Par exemple, la première question à laquelle je faisais
référence: qui a le pouvoir chez vous de vous demander de
requérir une telle étude?
M. Parent: En fait, les pouvoirs - je ne sais pas comment les
traduire, ce n'est pas nécessairement en termes de réglementation
- mais ce qu'on fait généralement, c'est qu'une fois par
année, et même deux fois par année, nous soumettons nos
projets de programmation d'enquête et d'autres études à la
consultation d'un comité spécial du CCTM, le comité 26.
Généralement, les avis sortent du comité 26, comme vous le
savez, qui sont les représentants des parties dans un comité qui
touche le domaine de la recherche et des statistiques. Évidemment - en
tout cas, à ma connaissance, depuis que je suis là - on a
toujours tenu compte des avis du CCTM. Les efforts d'enquête durant
l'année 1983 et l'année 1984 sont mises sur l'enquête en
trois repères généraux: 90 emplois, 300
établissements et on va ajouter le volet avantage social ou le
coût des avantages sociaux pour l'année 1984-1985. Les
résultats viennent d'être rendus publics dans la publication du
ministère, du centre de recherche et du ministère, la revue Le
marché du travail d'avril. Vous avez tous les résultats. Vous
avez quatorze tableaux de statistiques très bien présentés
là-dedans. Nos efforts, l'an passé, en 1983-1984, l'année
qu'on vient de terminer, et en 1984-1985 sont principalement pour alimenter les
comités paritaires dont vous avez parlé tantôt, M.
Pagé.
M. Pagé: Vous n'avez donc jamais effectué
d'études pour voir ce qui se passait dans d'autres provinces ou dans le
Nord-Est des États-Unis dans le domaine de la construction?
M. Parent: Dans le domaine de la construction,
spécifiquement non. Je me souviens qu'on a monté un dossier il y
a un certain nombre de mois, mais ce n'est pas un dossier que j'appellerais
récurrent. On a fait cela à des fins strictement comparatives, il
y a une dizaine de mois, je pense. Cela n'avait pas le but de faciliter, si
vous voulez, ou de comparer le champ de la construction.
Travail au noir
M. Pagé: Est-ce que vos services ont déjà
effectué de la recherche sur le travail au noir?
M. Parent: Nos services ont effectué un travail qui
consistait à déterminer les conditions de travail des
travailleuses à domicile dans le secteur du vêtement. Le document
a été rendu public il y a déjà plusieurs mois; on
pourrait vous en transmettre des copies. En ce qui concerne le travail au noir,
en soi, c'est très difficile de se documenter, comme vous le savez. On
cherche à se documenter. On y a songé, à un certain
moment, mais les méthodologies sont à peu près
inexistantes; comment découvrir le travail au noir?
M. Pagé: Le quantifier surtout. Au ministre, maintenant,
Mme la Présidente. Ne voyez-vous pas une relation directe entre un
niveau de rémunération qu'on peut qualifier d'élevé
dans le monde de la construction -et je ne parle pas nécessairement de
ce que reçoit le travailleur, mais je fais référence
à la facture remplie lorsqu'un citoyen fait affaires avec un
entrepreneur pour réparer, ne serait-ce que sa galerie - ne voyez-vous
pas une relation directe entre le taux élevé pour se doter des
services d'un professionnel de la construction et le travail au noir?
M. Fréchette: Mme la Présidente, il y a sans doute
une relation entre les deux phénomènes auxquels le
député de Portneuf fait référence. Je suis en train
de me demander si on est passé au programme de l'Office de la
construction, parce que je...
M. Pagé: De consentement.
M. Fréchette: De consentement, bon.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf, est-ce qu'il ne serait pas souhaitable que nous terminions
l'étude du programme 1 pour procéder ensuite, en bonne et due
forme, à l'étude du programme 4, l'Office de la construction, ce
qui vous permettrait, de même qu'à nous, d'aller plus à
fond dans ces questions?
M. Pagé: Je n'ai aucune objection à ce qu'on aille
plus à fond. Le seul problème, c'est que je voudrais revenir au
décret, non pas au décret de la construction, mais à la
Loi sur les décrets de convention collective.
M. Fréchette: Oui, oui.
M. Pagé: Alors, je ne voudrais pas qu'on... On peut, de
consentement, aborder tout le secteur de la construction...
M. Fréchette: Oui, je n'ai pas d'objection.
M. Pagé: ...que ce soit le décret, l'office
et...
M. Fréchette: Je n'ai pas précisément
d'objection là-dessus, à la condition, Mme la Présidente,
que, si je le croyais utile, je puisse demander, par exemple, au
président de l'office...
M. Pagé: Oui, oui. Il n'y aucun problème.
M. Fréchette: ...d'expliciter des réponses que je
pourrais donner à la commission.
La Présidente (Mme Harel): Oui, sous réserve, M. le
ministre et M. le député de Portneuf, que le temps passe et que
votre temps de parole sera bientôt épuisé.
M. Pagé: Oui, mais, Mme la Présidente, moi, je pose
des questions brèves et le ministre parle longtemps. Le problème,
c'est que je pose une question et qu'ils sont deux à répondre,
parce que monsieur... Moi, je ne peux pas lui poser de questions, mais il peut
me répondre.
La Présidente (Mme Harel): Mais vous savez qu'on ne
comptabilise strictement, avec un chronomètre, que vos interventions, M.
le député de Portneuf, et non pas les réponses qui vous
sont données. Simplement, je sais très bien que...
M. Pagé: On se permettra du supplémentaire.
La Présidente (Mme Harel): ...l'étude de chacun des
programmes donne lieu à des interventions. Alors, je suis très
favorable, comme, je pense, l'ensemble des membres de cette commission,
à ce que nous soyons très souples, mais il faudrait
peut-être accepter, si tant est qu'on étudie à la fois les
programmes 1 et 4, que d'autres membres de la commission puissent intervenir
avant la fin de la soirée.
M. Pagé: II n'y a aucun problème.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf... M. le ministre plutôt.
M. Pagé: M. le ministre.
M. Fréchette: Oui. J'étais en train de dire, Mme la
Présidente, qu'il y a sans doute une relation entre les deux
phénomènes dont parle le député de Portneuf. J'ai
cru comprendre qu'il faisait référence plus
précisément au taux horaire qu'on retrouve dans la construction,
le taux horaire négocié et, par la suite, élargi
juridiquement par décret, et la nature des travaux qui sont à
effectuer. Il y a une relation, cela m'apparaît évident. Si on me
demandait ce soir de quantifier en termes proportionnels cette relation, je ne
serais sûrement pas en mesure de le faire.
Je voudrais simplement signaler à l'attention de la commission
que le 19 décembre dernier j'ai rencontré tous les membres du
comité mixte de l'Office de la construction et nous avons ensemble
convenu de procéder à identifier les problèmes
spécifiques de l'industrie de la construction, les problèmes sur
lesquels les deux parties s'entendaient au niveau de l'identification des
difficultés. C'était le 19 décembre. À cette
même date, il a été convenu que nous allions nous revoir le
24 janvier suivant et qu'à l'occasion de cette deuxième rencontre
les membres du comité mixte qui regroupe les parties patronale et
syndicale allaient avoir fait l'exercice de procéder à
l'identification des problèmes dont je viens de parler. Effectivement,
le 24 janvier, les deux parties, à l'occasion d'une rencontre qui a
duré toute la journée, ont procédé à
identifier les problèmes que les unes et les autres parties vivaient
dans l'industrie et qui faisaient consensus des deux côtés. Tout
le monde s'entendait pour dire, par exemple, que le travail au noir,
c'était un des problèmes dans l'industrie de la construction, que
le champ d'application de la loi était également un dossier
à revoir. Il y a eu six dossiers très précis qui ont
été identifiés par les parties elles-mêmes. On
réclame avec beaucoup d'insistance, depuis longtemps, un tribunal de la
construction. On a parlé à ce moment-là du
règlement sur les conditions de vie, particulièrement dans les
chantiers éloignés.
Donc, le 24 janvier, après que ce deuxième exercice eut
été fait, la chose sur laquelle tout le monde s'est
également entendu a été de procéder à la
préparation d'un document conjoint des parties, écrit par les
deux parties, non plus, bien sûr, en termes d'identification des
problèmes - cette opération était faite - mais en termes
de solutions à suggérer pour remédier à ces
situations que les parties avaient soulevées.
Le délai sur lequel nous nous étions entendus, tout le
monde ensemble, était d'une quinzaine de jours. Le 24 janvier, les
parties m'avaient donné l'assurance que dans une quinzaine de jours
elles allaient être en mesure de me soumettre les solutions qu'elles
suggéraient par rapport aux
problèmes qui avaient été identifiés. Nous
sommes aujourd'hui le 10 avril et je n'ai pas encore eu ce document des deux
parties, pour des motifs que je comprends très bien, Mme la
Présidente: on s'est engagé par la suite dans la période
des négociations. Sans doute que des difficultés de
rédaction de textes ont été rencontrées par les
deux parties, mais toujours est-il que je n'ai pas le document en question. Le
dossier du travail au noir était un des dossiers importants.
Allons un petit peu plus avant sur des causes possibles du travail au
noir. Je présume que le député de Portneuf, comme
plusieurs autres collègues de l'Assemblée nationale, ont
reçu hier la visite de représentants d'une centrale syndicale qui
sont venus effectivement soumettre ce dossier et suggérer des moyens
d'arriver à régler le problème. Une autre cause possible,
Mme la Présidente, ce sont les limites dans lesquelles se retrouve
l'office de pouvoir procéder à autant d'inspections qu'il le
souhaiterait, autant en nombre qu'en qualité, qu'en termes de choix des
périodes de temps pendant lesquelles ces inspections devraient se faire.
Pour arriver à évaluer l'ensemble de la situation, il faudrait
augmenter considérablement le nombre d'inspecteurs qu'on retrouve
à l'Office de la construction. Or, les parties, parce que cela
nécessiterait des déboursés additionnels importants, ont
beaucoup de réserves sur la possibilité d'augmenter le nombre
d'inspecteurs. Malgré ces réserves, je dois vous signaler qu'au
cours de 1983 le nombre des visites d'inspection par rapport à 1982 est
passé à 36 000, alors qu'en 1982 il avait été de 29
000. Avec le même personnel, le même nombre d'inspecteurs, les
activités ont augmenté dans la proportion que je viens de vous
signaler. Cela nous a amenés au bilan net suivant: en 1982, 12 817
infractions au décret, à la qualification, à la
classification avaient été constatées, alors qu'en 1983 ce
nombre d'infractions a doublé et est passé à 24 065. Il
faut dire, cependant, qu'il faut ajouter à 1983 les inspections faites
pour et au nom de la Régie des entreprises de construction, ce qui
n'était pas le cas en 1982. Il y a donc eu 3655 inspections qui ont
été faites pour le compte de la régie alors qu'en 1982 il
n'y en avait pas. Enlevons ces 3000 et nous sommes quand même à
9000 constatations d'infractions de plus en 1983 qu'en 1982.
M. Pagé: Dois-je comprendre de la réponse du
ministre - et là, je dois vous exprimer ma surprise en toute
honnêteté -que, pour vous, un des éléments de
solution du travail au noir passe par davantage d'inspecteurs, plus d'efforts
déployés au niveau de l'inspection? Si c'est cela, on n'est pas
du tout sur la même longueur d'onde.
(21 heures)
M. Fréchette: Ce n'est pas ce que le député
de Portneuf doit comprendre.
M. Pagé: C'est quoi?
M. Fréchette: Ce que je suis en train de tenter
d'expliquer, c'est que l'inspection est l'un des moyens permettant de faire la
vérification plus spécifique du phénomène. Quelle
est précisément la solution au problème? Je serais fort
heureux d'entendre le député de Portneuf me suggérer des
solutions au problème. Le sous-ministre adjoint à la recherche
signalait tout à l'heure que le ministère du Travail a entrepris
une étude importante sur le travail au noir dans l'industrie du
vêtement, par exemple, qu'il a réussi à identifier le
phénomène, qu'il a réussi également à
identifier l'ampleur du phénomène, mais là où se
trouve la difficulté, c'est d'arriver à déterminer ou
à cheminer une solution quant au règlement du
problème.
Je vous signalerai qu'à l'occasion de deux tables sectorielles
sur le vêtement, les parties, autant patronales que syndicales, ont
abondamment discuté du sujet. Les parties ont également convenu
de part et d'autre que le phénomène existait sauf que, lorsqu'on
arrive à l'étape de demander aux uns et aux autres de
suggérer des solutions pour contourner cette difficulté,
malgré la bonne volonté de tout le monde, personne n'a encore
réussi à en faire l'identification.
Ce qui nous est actuellement suggéré comme solution, c'est
la tenue d'une commission parlementaire. En tout cas, les
représentations qui nous ont été faites hier, celles qui
m'ont été faites dans ma région, chez moi, dans mon
comté, à mon bureau de comté, c'était
précisément la tenue d'une commission parlementaire en
particulier, mais non limitativement, sur le travail au noir. J'ai
répondu à ceux qui sont venus me voir qu'après les
négociations qui sont actuellement en cours que, si c'est encore le
désir des parties de tenir une commission parlementaire de cette nature
pour permettre à ceux qui le veulent de venir s'exprimer, d'abord, sur
la nature du phénomène, son ampleur, et surtout sur des solutions
pour arriver à contourner le phénomène, j'étais
tout à fait disposé à tenir cette commission
parlementaire, mais, évidemment, après l'actuelle période
de négociations. Ces dispositions demeurent toujours les
mêmes.
Qu'est-ce que suggère la CSN, par exemple? La CSN suggère
que la vérification sur les chantiers se fasse par les
délégués syndicaux. Elle suggère également
qu'une infraction ou des infractions étant constatées, ceux qui
font cette constatation aient le pouvoir par la loi d'arrêter
immédiatement les travaux afin de libérer les chantiers de ce
qu'on est convenu
d'appeler le travail au noir. Est-ce le genre d'avenue qu'il faut
privilégier et retenir? À ce stade-ci, je ne suis pas en mesure
de vous dire que ce devrait être cela, mais c'est un chemin sur lequel on
pourrait s'engager en termes d'exploration et d'évaluation de la
situation. S'il y avait cette commission parlementaire dont on parle, je suis
tout à fait convaincu que l'ensemble des intervenants aurait très
certainement des suggestions à faire qui permettraient, sinon de faire
complètement disparaître le phénomène, tout au moins
de l'atténuer considérablement.
M. Pagé: Si on se réfère aux statistiques de
l'industrie de la construction pour l'année 1982, nous avions, au
Québec, 77 864 salariés dans le monde de la construction. C'est
73 600 000 heures qui ont été travaillées.
M. Fréchette: Vous parlez de 1982?
M. Pagé: Qui ont été déclarées
à l'Office de la construction du Québec en 1982, pour une moyenne
annuelle d'heures travaillées de 945 heures et un salaire annuel moyen
de 14 960 $, ce qui veut dire un taux de rémunération moyen de 15
$ l'heure.
M. le ministre, vous êtes ministre du Travail, vous êtes en
contact régulier, soutenu, avec les représentants des
travailleurs et avec les travailleurs eux-mêmes. À la
lumière de l'expérience que vous avez, croyez-vous que le
travailleur de la construction préfère travailler 945 heures par
année à un niveau de rémunération de 15 $
plutôt que d'en travailler 2000 à un niveau de
rémunération qui soit inférieur en termes de quantum
horaire, mais qui lui permette d'occuper dans le monde de la construction
peut-être 2000 heures par année?
M. Fréchette: Mme la Présidente, la question m'est
adressée et je ne suis pas en mesure de répondre pour et au nom
des travailleurs de la construction.
M. Pagé: Votre perception.
M. Fréchette: Si, par exemple, comme le
député de Terrebonne, j'avais été un travailleur de
la construction, je serais pas mal plus en mesure de vous donner mon
appréciation à cet égard, mais je ne l'ai jamais
été. Je présume qu'un travailleur de la construction
souhaiterait davantage faire un plus grand nombre d'heures, avec une
reconsidération sans doute du taux horaire du salaire qu'il
reçoit, plutôt que d'être obligé de se limiter au
nombre d'heures que l'on connaît et retirer le salaire moyen que l'on
connaît. Je vous signale que c'est une présomption qui ne
procède d'aucun autre motif que de ma propre évaluation de la
situation.
M. Pagé: M. le ministre, je vais vous donner mon
impression. Je peux me tromper, mais c'est mon impression. Vous pourrez ajouter
et j'apprécierais si vous pouviez la commenter.
Mon impression, c'est que nous sommes, le législateur par les
lois qu'il a adoptées ici, le gouvernement par les structures qu'il a
mises sur pied, dont un pouvoir réglementaire important consenti
à l'Office de la construction du Québec qui s'appuie sur un
comité mixte, les parties, nous sommes dans un cercle vicieux qui est
susceptible d'aggraver la situation délicate qu'on vit dans le monde de
la construction et faire mal à peu près à tout le
monde.
Le règlement de placement dans l'industrie de la construction et
les mesures qui ont été adoptées par l'OCQ, par le
gouvernement, visent, visaient et continuent à viser essentiellement une
meilleure protection du revenu pour les travailleurs de l'industrie de la
construction. Essentiellement, ce que le règlement de placement dit,
c'est que le gâteau est grand comme cela et qu'il doit être
distribué équitablement à un certain nombre de
travailleurs qu'on qualifie, entre guillemets, de vrais travailleurs. Le
partage de ce gâteau doit garantir à ces travailleurs un revenu
moyen acceptable à la fin de l'année.
Depuis quelques années, pour plusieurs motifs, le gâteau a
diminué substantiellement. Plus le gâteau diminue, plus il est
légitime pour les travailleurs de rechercher au moins à garder la
part qu'ils avaient dans ce gâteau.
Aujourd'hui, nous avons au Québec 77 000 ou 78 000 travailleurs
qui ont leur certificat de classification de l'OCQ, alors qu'on a
déjà eu, si ma mémoire est fidèle -M. le directeur
général de l'OCQ pourra le confirmer - près de 105 000 ou
110 000 travailleurs. Le nombre de travailleurs a diminué et le
gâteau a diminué. Autant le gâteau diminue d'un
côté, on peut présumer que le travail au noir, le
gâteau du travail au noir augmente aussi. Je mets personnellement en
doute, de même que mon groupe, l'opportunité de maintenir de
telles normes sur l'ensemble du territoire pour tous les métiers de la
construction et pour tous les types de construction. Le travail au noir peut
être effectué autant sur un chantier de construction avec un
entrepreneur bien accrédité qui a un contrat et qui est membre de
la Régie des entreprises de construction, etc. Il peut et il est
souven-tefois dans une relation directe qu'a un consommateur avec un
travailleur.
Je comprends que ce n'est pas quantifiable - c'est bien difficile
à quantifier et à juger - mais c'est là. À titre
d'exemple, dans combien de municipalités du Québec un
citoyen, un consommateur, se lève-t-il un matin et veut se
trouver un peintre? Cherchez-en un, un peintre qualifié ayant sa carte
de l'OCQ dans une municipalité. Il ne l'a pas. Qu'est-ce que le
consommateur fait? Il téléphone à l'individu qui est
peintre, mais qui n'a pas de carte et il le paie. Il a un service. Vous allez
convenir avec moi que cela fait mal à tout le monde. Cela fait mal au
consommateur qui bénéficie d'une protection qui est moins bonne,
qui est moins garantie, qui est moins sécuritaire. Cela fait mal
à ce travailleur qui ne peut se payer aucun régime d'avantages
sociaux, de sécurité de revenu, d'assurance ou de quoi que ce
soit sur le salaire qu'il gagne, ce à quoi il serait en droit de
s'attendre. Pas de commission de santé et de sécurité du
travail, pas de couverture des accidents du travail. Cela fait mal au
gouvernement du Québec et cela fait particulièrement mal: pas
d'impôt, pas de contribution à nos régimes de retraite, pas
de contribution à la Régie de l'assurance-maladie. Pour le gars,
c'est du "cash" dans ses poches. Tant mieux pour lui et tant pis pour nous.
Je suis persuadé que, si le gouvernement acceptait - et on va
s'associer à cette démarche, je vous en donne l'assurance au nom
de notre groupe politique - de s'asseoir autour d'une table pour étudier
la possibilité de modifier de fond en comble ce règlement... Je
comprends que l'aspect placement est un aspect qui est, lui aussi, très
important, qu'on ne peut pas se permettre demain matin de dire: On fait table
rase et c'est le "free for all", mais la volonté du gouvernement de
régler le problème du placement syndical, du placement des
employés dans le monde de la construction, a engendré toute une
série de normes, de mécanismes qui embêtent à peu
près tout le monde au Québec, qui font en sorte que le
consommateur, pour construire sa maison, fait venir un artisan, un entrepreneur
et, ensuite, ce sont les frères, les beaux-frères, les "chums",
le gars sur la "sly", comme on dit dans le langage, qui finissent cela. Combien
y en a-t-il de centaines, de milliers, de millions de dollars de travaux par
année qui sont ainsi effectués, sans aucune protection, sans
aucun contrôle? Le règlement de placement dans l'industrie de la
construction, qu'on le veuille ou non, prête flanc et donne ouverture
à des situations comme celle-là.
Autre chose maintenant. Quand je parlais tantôt des niveaux de
rémunération, je comprends qu'on doit avoir comme objectif qu'un
groupe de travailleurs comme ceux de la construction doit améliorer ses
conditions de revenus sur une base annuelle. Ce n'est pas vrai que tous les
travailleurs de la construction veulent travailler seulement 900 heures par
année. Si ces gens-là pouvaient travailler 2000 heures, ils
seraient bien heureux. La majorité - je peux me tromper et vous me
corrigerez - de ceux que je rencontre me disent: Monsieur, on aimerait beaucoup
mieux travailler à un niveau de rémunération moins
élevé, mais travailler régulièrement, pouvoir
travailler dans certains chantiers qui ne sont pas considérés
comme relevant de la construction et qui devraient l'être. C'est un autre
élément. Quand les syndicats et quand les représentants
des employés plaident pour un plus grand nombre d'heures... Je fais
référence, évidemment, à la Loi sur les relations
du travail dans la construction. Qu'on prenne l'article 19 sur le fameux champ
d'application du décret, on retient que cela ne s'applique pas aux
exploitations agricoles. Le législateur l'a voulu ainsi. Cela ne
s'applique pas aux travaux d'entretien et de réparation
exécutés par des salariés permanents embauchés
directement par un employeur autre qu'un employeur professionnel. Ce sont des
milliers et des milliers d'heures qui sont travaillées chaque
année par des travailleurs du Québec, lesquelles heures ne sont
pas régies par l'Office de la construction du Québec, lesquelles
ne sont pas créditées dans le gâteau de la construction.
Vous savez probablement comme moi que, dans plusieurs de ces cas, la
démarcation à faire pour savoir si c'est de la construction ou
non est assez délicate et assez particulière et qu'il n'y a pas
de jurisprudence très ferme qui est établie. (21 h 15)
Mme la Présidente, je soutiens que l'élimination la plus
substantielle possible du travail au noir avec tous les bénéfices
que cela pourrait comporter pour l'ensemble des intervenants passe par une
modification aux règlements de placement dans l'industrie de la
construction, passe par des modifications au champ d'application du
décret, passe par une volonté ferme du gouvernement de
régler des problèmes selon les problèmes auxquels on a
à faire face. Construire un hôtel de 20 étages, construire
un immeuble ou une usine, construire un projet comme une aluminerie, ce n'est
pas le même type de construction, d'après moi, et je peux me
tromper, que de construire un bungalow, finir un sous-sol.
Vous savez, quand vous avez un travailleur - je termine
là-dessus, je ne veux pas abuser. Peut-être que d'autres voudront
ajouter - qui gagne, je ne sais pas, 16 000 $ par année, 15 000 $ par
année, je vois mal ce travailleur être capable de payer pour faire
faire une construction à sa maison, finir un sous-sol, le lambrissage
extérieur, etc., parce que le lambrissage, c'est maintenant dans le
décret. Payer des gens 30 $ l'heure pour faire cela, le gars n'est pas
capable. Il ne faut pas se faire de cachette. Qu'est-ce qu'il fait? Sur la
"sly",
le samedi après-midi, le dimanche matin. Là, tout le monde
est perdant.
Si une volonté du ministre du Travail s'exprime dans ce sens de
s'asseoir autour d'une table, que ce soit en commission parlementaire, que ce
soit une sous-commission de la commission de l'économie et du travail,
et qu'on regarde objectivement, que notre groupe s'associe, les
spécialistes, qu'on ait les données, les informations, je suis
persuadé qu'on est capable de régler ce problème.
Règlement de placement
M. Fréchette: Mme la Présidente, je pense qu'on est
en train de s'engager dans un débat qu'on a souvent fait et qui est
revenu à plusieurs occasions à l'Assemblée nationale dans
les commissions parlementaires. Je vous ferai remarquer que le fait qu'on y
revienne si souvent est assez éloquent de l'importance que toute la
question peut avoir. En fait, ce qu'on remet en question, c'est l'existence
même du règlement de placement lui-même et de certaines
autres réglementations ou normes qui existent dans le secteur de la
construction. Je ne ferai que quelques commentaires à cet égard
pour ajouter un élément à celui qu'a soulevé le
député de Portneuf quand il donnait son appréciation du
règlement de placement et qu'il indiquait l'un des objectifs qu'il
avait. Il faudrait aussi ajouter que le règlement de placement n'est
rien de moins ni rien de plus que la clause d'ancienneté que l'on
retrouve dans n'importe laquelle des conventions collectives qui sont
négociées entre deux parties habilitées à le
faire.
Dans des conventions collectives négociées entre des
parties, le sens commun des choses nous indique que, lorsqu'un employeur doit
procéder à des mises à pied, il le fait en demandant
à ceux de ses travailleurs et à celles de ses travailleuses qui
ont le moins d'ancienneté de se retirer pour le temps que doit durer la
baisse de la productivité. Quand il y a rappel au travail, il va
procéder de façon inverse en rappelant ceux de ses travailleurs
et de ses travailleuses qui ont accumulé la plus grande
ancienneté. Il faut aussi retenir que le règlement de placement
est très précisément la reproduction, dans le secteur de
la construction, de cette clause d'ancienneté qui est classique dans
toutes les conventions collectives.
Il y a un autre aspect qu'il est important de retenir, et c'est le
suivant: je suis d'opinion, quant à moi, que ce n'est pas parce qu'il
existe un règlement de placement, avec les conditions qu'il renferme,
les clauses qu'il renferme, qu'il y a plus ou qu'il y a moins de travail dans
la construction. Qu'on fasse disparaître ce soir et de façon
absolue le règlement de placement, il va continuer d'y avoir 105 000
travailleurs classifiés pour la construction et il va continuer d'y en
avoir seulement 70 000 qui seront actifs.
Qu'il y ait un règlement de placement ou qu'il n'y en ait pas,
c'est la vérité brutale devant laquelle on est. Cela n'est pas
parce que demain matin, encore une fois, ce règlement de placement
n'existera plus que les 35 000 qui, actuellement, n'ont pas de travail seront
automatiquement rappelés au travail. Quand on plaide avec tellement
d'insistance que le règlement de placement est une entrave à la
possibilité d'obtenir un emploi, je suis obligé de m'inscrire en
faux contre une assertion de cette nature, toujours, cependant, en tenant pour
compte les principes d'ancienneté dont je parlais tout à
l'heure.
Qu'il y ait cependant nécessité de revoir un certain
nombre de choses, de procéder à une certaine
réévaluation depuis le temps que le règlement de placement
est là, je n'en disconviens pas du tout, bien au contraire. Un de mes
collègues l'a signalé ce matin, j'ai un peu de peine à me
souvenir qui a soulevé la question, mais je crois utile de rappeler
qu'au mois de novembre dernier, à l'occasion d'un Conseil des ministres
qui avait été tenu à Compton, la décision a
été prise de procéder à certaines suggestions quant
à des changements possibles au règlement de placement. Cette
décision du Conseil des ministres, c'est important de le souligner,
procédait, quant à elle, d'un travail qui avait été
mené à l'intérieur d'un comité auquel ont
siégé des députés ministériels qui ont
procédé à identifier un certain nombre de
problèmes.
Qu'est-ce qui a été fait par la suite? Nous avons
demandé à l'Office de la construction d'établir
immédiatement le contact avec toutes les parties concernées, de
faire part aux parties du désir que le gouvernement avait
manifesté de procéder à certains changements au
règlement de placement et de demander à ces parties de donner
leur opinion sur les changements qui étaient envisagés. Nous
venons à peine de recevoir les opinions de toutes les parties à
qui nous les avions demandées. Il faut également retenir qu'il y
a, à l'intérieur de l'Office de la construction et à
l'intérieur du monde en général de la construction, un
organisme qui s'appelle le comité mixte. Il y a aussi l'office en tant
que tel et nous n'allons pas procéder à imposer d'autorité
des changements à un règlement de placement sans que tout au
moins les principales parties qui sont intéressées au
mécanisme de ce règlement de placement n'aient eu l'occasion de
se prononcer. C'est à ce stade-là qu'on en est, Mme la
Présidente. Quand, par exemple, on nous demande s'il n'y aurait pas un
moyen qui
pourrait permettre qu'un jeune diplômé, par exemple, puisse
obtenir de l'emploi lorsqu'un employeur lui garantit un travail, il y a
effectivement un moyen d'y arriver. Le moyen auquel on a pensé, on l'a
soumis à l'appréciation des parties. Le comité mixte sera
appelé à l'évaluer, l'office également et
après cette évaluation le gouvernement devra procéder
à arrêter une décision.
Que cela fasse - et c'est mon dernier point - l'objet d'une discussion
à l'occasion d'une commission parlementaire qui pourrait être de
la nature de celle dont on a parlé tout à l'heure, cela non plus
ne répugne pas, cela ne fait aucune espèce d'objection. Je serais
fort heureux que le député de Portneuf garde ses bons sentiments
de collaboration et qu'ensemble nous puissions arriver à trouver des
solutions à d'éventuels changements. Si vous me demandez, par
ailleurs, de faire disparaître totalement le règlement de
placement, je vous signale que là-dessus je suis loin d'être
convaincu qu'il faille revenir à ce genre de situation qu'on a connue et
qui existait au début des années soixante-dix.
La Présidente (Mme Harel): Merci, M. le ministre. La
parole est maintenant au député de Terrebonne. Par la suite, je
donnerai la parole au député de Duplessis.
M. Pagé: Je pourrai revenir ce soir ou demain sur le
même sujet, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Harel): Oui, certainement. Le temps est
très comptabilisé et, si vous le voulez, je vous en donnerai une
indication. Je me sens, d'une certaine façon, magnanime à
distribuer les droits de parole comme cela en m'évitant moi-même,
parce que j'aurais beaucoup souhaité intervenir dans ce débat.
J'espère que les membres de la commission accepteront que demain, si
tant est que je ne puisse pas en avoir le temps ce soir, je le fasse.
M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci, Mme la Présidente. J'aurais quelques
questions sur le domaine des relations de travail, mais, avant, j'aimerais vous
poser une question, M. le ministre. Je vois que l'intervention du
député de Portneuf a ouvert pour une fois une porte à
l'OCQ et j'espère que je la comprends bien. Je vous demande si c'est
comme cela que vous l'avez compris. Je crois que c'est la première fois
que j'entends le Parti libéral nous dire qu'on ne doit pas enlever
l'office, l'OCQ, parce que cela ferait un "free for all" et qu'on ne peut pas
se permettre de faire cela. Normalement, on entend plutôt dire que c'est
l'office du crime du Québec. Cela fait un peu changement et il me fait
plaisir de l'entendre.
M. Pagé: Si vous me permettez, M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Avec plaisir.
M. Pagé: L'Office de la construction du Québec est
issu de la Commission de l'industrie de la construction et son mandat
était différent à l'époque. Il était tout
aussi louable sous ce volet des régimes sociaux, des avantages, et on
pourra revenir, si on a quelques minutes à la fin, sur la distinction
à faire entre l'abolition et des modifications substantielles. Cela peut
parfois vouloir dire la même chose.
M. Blais: D'accord, mais je voudrais savoir si M. le ministre a
compris cette intervention de la même façon que moi. Le
député de Portneuf est maintenant favorable à l'Office de
la construction et dit que, si on l'abolissait, ce serait un "free for all"
indésirable. Deuxièmement, au contraire des positions qui
étaient défendues par son parti avant, il dit qu'il n'y a
même pas assez de gens couverts par l'Office de la construction parce
qu'il se perd beaucoup d'heures par ceux qui sont exclus. Je crois que c'est
une philosophie complètement nouvelle. Je ne sais pas si c'est comme
cela que vous l'avez compris et je vous demande si c'est ainsi que vous l'avez
compris, M. le ministre.
M. Pagé: Vous êtes en train de faire de la
démagogie, monsieur.
M. Fréchette: Effectivement, depuis un certain nombre de
mois, j'ai constaté une évolution dans la position du Parti
libéral. Je me rappelle, par exemple, que les premières questions
avec débat, puisque c'est ainsi qu'on les appelait à
l'époque, qui touchaient le règlement de placement étaient
toujours dans le sens de procéder à l'abolition pure et simple du
règlement. La dernière qu'on a tenue - j'aurais un peu de peine
à en déterminer l'époque précise a vu sa
formulation modifiée; là, on suggérait de modifier le
règlement de placement plutôt que de l'abolir. L'intervention du
député de Portneuf ce soir, pour répondre à la
question du député de Terrebonne, me paraît être dans
la suite logique de la dernière question avec débat qu'on a tenue
à cet égard. Il y a effectivement eu une évolution.
M. Blais: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député
de Terrebonne.
M. Pagé: Vous êtes bien parti, allez.
M. Blais: M. le ministre, vous avez dit tantôt que, pour
trouver un interlocuteur valable dans le domaine de la construction,
lorsque toutes les parties multireprésentatives des syndicats ne
donnent à aucune des parties la majorité absolue, soit qu'on le
trouve de façon normale ou qu'on soit obligé de l'imposer si on
ne s'entend pas.
Dans le cas d'une imposition - c'est la question que je vous pose -
est-ce que vous envisageriez une représentation unique dans le domaine
de la construction au Québec comme solution?
M. Fréchette: On remettrait en question tout le
problème du pluralisme syndical. Je suis convaincu - évidemment,
il restera à vérifier la pertinence de cette conviction et
surtout la justesse de cette conviction - que les parties syndicales
elles-mêmes, étant tellement sensibilisées par cette
situation, ayant à la vivre chaque fois qu'une négociation
s'annonce et doit se faire, elles vont très certainement, ensemble,
essayer de trouver le moyen ou la solution qu'il faut pour éviter qu'on
ne se retrouve dans des situations semblables à l'avenir.
Maintenant, à supposer que cet exercice échoue et que les
parties elles-mêmes n'arrivent pas à une suggestion qui retienne
l'opinion de tout le monde, quelle serait alors la position gouvernementale? Je
pense qu'il est peut-être un peu tôt actuellement pour le
déterminer, mais il est clair qu'il va falloir nous acheminer vers cette
solution qui ferait en sorte que nous arriverions à l'étape d'une
négociation avec un ou des interlocuteurs qui sont déjà
identifiés et qui sont déjà habilités à
entreprendre la négociation.
M. Blais: S'il vous plaît...
La Présidente (Mme Harel): Oui, M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Je ne voudrais pas qu'on en arrive à un
représentant unisyndical, je préfère le pluralisme. Dans
certains domaines, un seul syndicat représente un groupe; pour donner un
exemple, parlons de la Guilde des musiciens du Québec. C'est une charte
fédérale avec une exclusivité de
représentativité sur le territoire. On a essayé d'avoir un
pluralisme syndical, on a essayé de fonder l'Association des musiciens
du Québec et des professionnels de la musique -dans le temps,
j'étais dans le domaine et cela m'a coûté les yeux de la
tête et je ne sais trop quoi en plus - et cela a été
extrêmement difficile parce qu'il y avait déjà une charte
d'exclusivité. C'est très malsain, cela entraîne des
conséquences dans le domaine très néfastes à
l'expansion des salles de spectacle, par exemple. (21 h 30)
Pour vous donner un inconvénient de cette représentation
monolithique syndicale, supposons qu'un visiteur de France nous arrive,
Aznavour, pour ne pas le nommer. Il arrive avec ses musiciens, il n'a pas le
droit d'avoir ses musiciens dans nos salles au Québec. Mais, supposons
qu'il arrive avec douze musiciens, il est obligé de payer douze autres
musiciens à l'union américaine. Dans le domaine du spectacle, de
la scène et de la variété, il y avait deux syndicats et
c'étaient deux syndicats américains. On est venu à bout de
gagner la représentation de l'Union des artistes au Québec, mais
avec de la violence. En 1964, à la Place des Arts, il a fallu manifester
pour que l'Union des artistes entre à la Place des Arts. Maintenant, nos
chanteurs dits de variété ont l'Union des artistes qui les
représente dans nos salles.
Il reste encore, dans l'Union des musiciens, une seule union qui est
accréditée et comme on dit dans le métier, on appelle cela
le bordel. L'Union des musiciens, c'est un bordel parce qu'on ne peut pas du
tout donner de franchises à des syndicats québécois pour
unir les musiciens, pour leur plus grand bien d'ailleurs. Je ne voudrais pas
que dans la construction on en vienne à un seul syndicat et la
pluralité, je crois, est beaucoup plus décente dans ce domaine
comme dans d'autres. Je vous repose la question: Est-ce que c'est sûr
qu'on ne s'en ira pas vers une seule représentation syndicale dans la
construction?
M. Fréchette: II est une chose sur laquelle mes
convictions sont assez fermes, c'est qu'il va très certainement falloir
conserver cette partie du processus en vertu de laquelle les travailleurs de la
construction ont l'occasion de s'exprimer quant à leur allégeance
syndicale. En d'autres mots, je ne pense pas, quand on parle de ce dossier,
à la possibilité d'éliminer ce qu'on est convenu d'appeler
actuellement la période de maraudage et le vote d'allégeance. Il
faudra, de toute évidence, que les travailleurs puissent continuer
d'exprimer à quelle centrale syndicale ils souhaitent adhérer,
mais c'est après que cette expression aura été faite et
dans les cas où aucune des centrales syndicales n'obtient la
majorité absolue de 50 plus 1. C'est un mécanisme
consécutif au vote qu'il va falloir trouver pour faire en sorte que
lorsqu'arrive le temps de la négociation il y ait un porte-parole
négociateur pour l'ensemble des parties syndicales.
Quel genre de mécanisme faudra-t-il trouver? Cela est autre
chose. C'est probablement à cet égard que les parties seront
invitées à réfléchir à cet aspect de la
question. Je voudrais être clair aussi, par ailleurs, et cela rejoint, je
pense, la question du député de Terrebonne: il n'est pas
question, dans ma tête, dans mon esprit, de faire disparaître le
système qui existe actuellement et en vertu duquel les
travailleurs peuvent s'exprimer tous les deux ans quant à leur
appartenance syndicale.
M. Blais: Une autre question et ce sera ma dernière, M. le
ministre. Dans le domaine de la construction domiciliaire, j'ai
rencontré l'association patronale et les associations syndicales au mois
de novembre passé une à une. Je leur ai toutes demandé si
elles seraient d'accord pour avoir, dans le domiciliaire, un décret
d'été et un décret d'hiver à des taux
différents pour justement permettre que le gagne-pain de ces gens
s'étende sur une plus longue période. Est-ce que c'est
envisageable dans des négociations futures?
M. Fréchette: Mme la Présidente, ce sont les
parties elles-mêmes qui vont devoir décider d'un aspect comme
celui-là parce que, comme le député de Terrebonne le
signale, cela fait partie des conditions de travail et, alors, les conditions
de travail sont négociées par les parties elles-mêmes.
Quand par bonheur elles arrivent à s'entendre sur l'ensemble d'une
convention collective, ce qui reste au gouvernement, c'est de prolonger le tout
par voie de décret et le problème, à cet égard, est
réglé. Il appartiendra aux parties, d'ici le 30 avril -je
conviens que le délai est fort court -d'envisager cet aspect de la
question si elles le souhaitent.
M. Pagé: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: La proposition ou l'interrogation du
député de Terrebonne est intéressante à prime
abord. Dans votre esprit à vous, est-ce que cela coûterait plus
cher l'été que l'hiver?
M. Blais: C'est le contraire, monsieur.
M. Pagé: Cela coûterait plus cher l'hiver que
l'été.
M. Blais: Non, pour construire. M. Pagé: Pour
construire.
M. Blais: Cela dépend... Votre question s'adresse-t-elle
au syndicat ou au patron?
M. Pagé: Non, à vous.
M. Blais: À moi? Je peux me...
M. Pagé: Vous, si vous aviez à écrire le
décret...
M. Blais: Est-ce que vous me permettez de répondre, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Terrebonne, si vous y consentez.
M. Blais: Oui, avec plaisir, mais de façon très
brève.
M. Pagé: Expliquez-nous cela.
M. Blais: C'est bien sûr que la construction coûte
beaucoup plus cher l'hiver.
M. Pagé: Qui.
M. Blais: Donc, si on avait deux décrets dans le domaine
domiciliaire seulement, un l'été et un l'hiver, cela permettrait
d'établir un décret plus bas l'hiver, bien sûr, pour
compenser les dépenses du patronat pour entretenir le chauffage,
etc.
M. Pagé: Donc, c'est cela.
M. Blais: Cela permettrait de prolonger les semaines de travail.
Les gens de la construction ne travaillent environ que sept mois et demi ou
huit mois par année. Cela permettrait de prolonger au moins à
onze mois et cela permettrait de mieux répartir et, peut-être, de
faire plus de construction au Québec.
M. Pagé: Est-ce que cela se greffe à la proposition
que vous aviez déjà formulée de modifier l'heure
avancée?
M. Blais: Je n'ai jamais fait cette proposition.
M. Pagé: Oui, oui, ici, une fois en commission
parlementaire.
M. Blais: Non, pas moi. M. Pagé: Oui, oui,
vous.
La Présidente (Mme Harel): Ce serait un excellent
sujet...
M. Pagé: On y reviendra.
La Présidente (Mme Harel): ...à examiner en
séance de travail. Notre commission de l'économie et du travail
pourrait examiner ce genre de chose. On y reviendra d'ailleurs. M. le
député de Beauharnois.
M. Pagé: J'ai une autre question, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): Une autre question au
député de Terrebonne?
M. Pagé: Non, non, non. Surtout pas. Que Dieu m'en
garde!
La Présidente (Mme Harel): À M. le ministre? Si
vous permettez, M. le député de
Portneuf, je vais passer la parole au député de
Beauharnois...
M. Pagé: D'accord.
M. Lavigne: Brièvement.
La Présidente (Mme Harel): Non, pas nécessairement
brièvement, M. le député de Beauharnois.
M. Lavigne: Non, c'est parce que c'est brièvement...
La Présidente (Mme Harel): Je pense que vous pouvez
utiliser le temps de parole...
M. Lavigne: Je ne me sens pas...
La Présidente (Mme Harel): ...qu'il vous convient
d'utiliser.
M. Lavigne: C'est brièvement que j'ai l'intention
d'intervenir, Mme la Présidente.
M. Pagé: C'est bien. Vous aurez plus de temps demain, Mme
la Présidente.
M. Lavigne: Ce que je voulais dire, Mme la Présidente,
c'est que je constate que le député de Portneuf, contrairement
à ce qu'il a déjà dit... J'ai l'impression de me
répéter ou de répéter ce que les autres ont dit,
mais, pour moi, c'est important de le redire. Depuis un certain nombre
d'années, on sait qu'en Chambre et aux commissions parlementaires le
député de Portneuf a toujours été, ou à peu
près, le critique du monde du travail. Son attitude
générale face au règlement de placement dans la
construction a toujours été extrêmement...
M. Pagé: Si vous voulez... Non, question de
règlement, j'ai le droit, vous me citez...
M. Lavigne: Je trouve cela important.
La Présidente (Mme Harel): Question de règlement?
Oui, il va vous falloir évidemment me citer l'article du
règlement que vous invoquez.
M. Pagé: Je me demande si l'intervention du
député de Beauharnois vise à étudier les
crédits, à questionner le ministre ou à faire de la
démagogie, comme l'autre l'a fait tantôt, auquel cas je vais
répliquer tout de suite ou dès le moment où vous me
céderez la parole, parce que je suis mal cité. Vous n'avez pas
compris. On va vous expliquer cela tantôt et cela va être
très clair. Vous allez comprendre, j'espère.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Beauharnois... Oui, en fait, c'est l'article 205, M. le député de
Portneuf. Peut-être pourriez-vous...
M. Pagé: Vous me donnez la parole tout de suite?
La Présidente (Mme Harel): C'est tout simplement quand un
député estime que ses propos ont été mal
compris...
M. Pagé: Je comprends que...
La Présidente (Mme Harel): ...ou qu'ils sont
déformés...
M. Pagé: Je comprends que... M. Lavigne: Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Harel): M. le député de
Beauharnois.
M. Lavigne: Je ne veux pas être arrogant avec le
député de Portneuf. La seule chose que je veux dire - et j'en
suis fort heureux et je pense que tous les membres de la commission, y compris
le ministre... Contrairement à l'attitude que le député de
Portneuf a déjà eue...
M. Pagé: Vous avez mal compris.
Question de règlement, Mme la Présidente.
Vous avez mal compris ou vous ne comprenez pas les deux facettes du
règlement de placement.
M. Lavigne: On lira les galées, M. le député
de Portneuf. Je ne vous dis pas de bêtises.
M. Pagé: Je vais y revenir tantôt.
M. Lavigne: Je suis fier...
M. Pagé: Vous êtes démagogue!
M. Lavigne: ...que vous trouviez que le règlement de
placement est un règlement important.
M. Pagé: Vous êtes d'une démagogie
honteuse.
Une voix: À l'ordre! À l'ordre!
La Présidente (Mme Harel): Écoutez, messieurs les
membres de la commission, M. le député de Portneuf...
M. Pagé: Vous êtes démagogue, cela n'a pas de
bon sens!
La Présidente (Mme Harel): ...et M. le
député de...
M. Lavigne: Je veux être gentil, Mme la
Présidente.
M. Pagé: Soyez ce que vous voulez, mais soyez
honnête.
M. Lavigne: S'il m'y force, le député de Portneuf
va m'obliger à l'être moins. Je veux être gentil avec
lui.
M. Pagé: Comme si cela m'énervait.
M. Lavigne: Bien non, il n'est pas question d'énerver
personne. Je veux seulement dire que je me réjouis...
M. Pagé: Jouissez.
M. Lavigne: ...que les libéraux, par la voix du
député de Portneuf, trouvent que...
La Présidente (Mme Harel): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lavigne: ...le règlement de placement dans la
construction est une chose importante. Je l'ai dit ce matin, je
considère qu'au niveau du principe fondamental c'est un peu comme
l'existence de la CSST: même si c'est un organisme qui peut être
critiqué à l'occasion et qui mérite d'être
amélioré, je dis que le règlement de placement, au niveau
des principes, est là et doit rester là. Cela ne veut pas dire,
par ailleurs, que, parce que l'OCQ existe, il n'y a pas lieu de se pencher sur
des modifications à apporter au règlement de placement. C'est ce
que je veux dire aux membres de la commission et particulièrement au
député de Portneuf. Je dis que, sans cela, on reviendrait aux
années noires de la construction. Je le disais ce matin et je le
répète: personne ne veut revivre au Québec - pas plus les
députés libéraux, j'espère, que les
députés du Parti québécois et les gens du monde de
la construction - les années du saccage de la Baie James. Personne ne
veut revivre cela. C'est l'une des raisons pour laquelle... Le règlement
de placement dans la construction nous sert de balise pour éviter ce
genre de situation. Donc, je dis et j'insiste sur le principe qu'il faut
maintenir le règlement de placement.
Par ailleurs, le ministre a fait une ouverture tout à l'heure. Il
a dit qu'il y aurait peut-être possibilité, soit par le truchement
de la commission que nous représentons, soit par une commission
parlementaire, soit par des rencontres avec les gens intéressés,
qu'on examine à nouveau tout le règlement de placement et qu'on y
apporte des adoucissements ou qu'on y enlève certains irritants.
Je vais être un de ceux-là et si le député de
Portneuf veut être un de ceux-là -il semblait avoir des
suggestions à faire tout à l'heure - je l'invite. Je ne le dis
pas avec arrogance. Je le dis sincèrement. Si le député de
Portneuf peut avoir quelque chose de positif dans la commission du travail pour
améliorer le règlement de placement, je l'invite à le
faire. J'insiste là-dessus, je ne le dis pas avec agressivité ou
rancoeur. Je le dis honnêtement et sincèrement parce que je crois
à une commission comme la nôtre et je crois qu'en dépit de
nos allégeances politiques on peut apporter de part et d'autre des
points positifs à un problème qui peut exister.
Si on constate ensemble qu'il y a des lacunes dans le placement dans la
construction et qu'ensemble on veut y travailler pour l'améliorer,
j'invite tout le monde à le faire et objectivement.
Je voudrais aussi, et cela m'embarrasse un peu... Dans les propos
qu'énumérait le député de Portneuf tout à
l'heure, en tout cas, je pense l'avoir bien interprété, il disait
que le fait que les taux soient fort élevés dans la construction
- il parlait même de 30 $ l'heure - cela incitait les gens qui avaient
des sous-sols à finir ou des galeries à peinturer ou des petits
travaux de menuiserie à faire autour de leur propriété,
à engager des gens au noir parce que la personne qui gagne 12 000 $, 15
000 $ ou 17 000 $ ne peut se permettre d'engager des gens à 30 $
l'heure. Cela incite les gens à travailler au noir.
Est-ce qu'on pourrait descendre le salaire qui est d'environ 30 $
l'heure à 25 $, à 28 $, à 20 $ ou à 15 $ et
à quel prix? Je ne le sais pas. Où serait la bonne ligne ou le
bon salaire par lesquels on pourrait inciter les gens de la construction
à accepter, pour faire en sorte que le travail au noir n'existe pas ou,
pour le moins, existe moins?
À mon avis, ce n'est pas facile de décider, même si
on le décidait ensemble, du salaire juste qui ferait en sorte qu'il y
aurait moins de travail au noir. En tout cas, la question est posée. Si
on vient à avoir une table ronde pour étudier ou réviser
la question du règlement de placement, j'espère que cette
question fera partie de nos débats et qu'on trouvera le bon salaire. Je
vous assure que cela ne sera peut-être pas facile de demander aux gens
qui gagnent 30 $ l'heure de descendre à 20 $ ou à 25 $
l'heure.
Mme la Présidente, c'étaient les quelques propos, M. le
député de Portneuf et M. le ministre... J'ai hâte qu'on ait
à se pencher sur les améliorations qu'on pourra apporter au
niveau du placement dans la construction. Vous avez fait quelques ouvertures,
M. le ministre, tout à l'heure, en parlant de l'intrusion des jeunes
finissants, par exemple, dans nos polyvalentes ou dans les cégeps, pour
leur permettre peut-être plus facilement qu'actuellement d'entrer dans le
monde de la construction. Je pense que
cela serait très important et il y a aussi d'autres choses dont
on pourrait discuter autour du règlement de placement. Il y a
sûrement des améliorations à apporter de ce
côté. Je termine en disant que le règlement de placement
est là pour y rester.
La Présidente (Mme Harel): Je vous remercie, M. le
député de Beauharnois. M. le député de Portneuf, si
on convenait que vous gardez les dix dernières minutes et que nous
accordions le droit de parole au député de Champlain pour cinq
minutes. M. le député de Champlain.
M. Gagnon: Vous me limitez.
La Présidente (Mme Harel): De façon que le total
des interventions du côté ministériel ait fait un peu plus
de 20 minutes. Si on comptabilise, c'est un peu plus d'une heure et quarante
qui a été utilisée.
M. Pagé: Mais cela a été instructif pour la
majorité.
La Présidente (Mme Harel): Oui. En fait, je pense bien que
cela l'est de part et d'autre. La parole est au député de
Champlain. Les dix dernières minutes seront allouées...
M. Gagnon: Au député de Champlain.
La Présidente (Mme Harel): ...au député de
Portneuf. M. le député de Champlain.
M. Gagnon: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais revenir.
Je ne suis pas certain d'avoir compris tantôt les bons chiffres que le
ministre a avancés lorsqu'on parlait de travail au noir et de visites
effectuées sur les chantiers. (21 h 45)
J'ai noté qu'au cours de la dernière année il y
avait eu 36 000 visites et qu'on avait dénombré, trouvé 24
000 infractions au règlement de placement. Cela m'apparaît
beaucoup par rapport au nombre de visites. Je voudrais savoir si ces visites
qu'on fait sont uniquement des visites qu'on fait sur les gros chantiers. En
fait, de quelle façon les inspecteurs font-ils leur travail? Est-ce que,
par exemple, cela prend une plainte? Est-ce à la suite de plaintes qu'on
va vérifier sur les chantiers de construction? Ceci voudrait dire
qu'à ce moment-là aussi, je voudrais savoir, concernant les
petits travaux dont parlait le député de Portneuf, des travaux
mineurs - on sait que les propriétaires de maison font pour environ 700
$ à 1000 $ par année de travaux d'entretien dans leur maison
familiale - si, dans le cas de ces travaux, certaines visites sont aussi
effectuées par les inspecteurs. Je vous laisse la parole
là-dessus pour savoir si j'ai bien compris ces chiffres.
M. Fréchette: Mme la Présidente, brièvement,
d'abord quant aux chiffres, le député de Champlain a
effectivement bien compris. Il y a eu, en 1983, 36 032 visites de chantiers qui
ont débloqué sur un nombre total d'infractions de 24 065. Quand
on parle d'infractions, cela peut être des infractions autant au
décret de la construction qu'au chapitre de la qualification ou de la
classification des salariés. Cela n'a pas d'égard à la
nature des chantiers, Mme la Présidente. Cela peut être tout aussi
bien de gros chantiers de construction que des chantiers de travaux
domiciliaires.
Finalement, quant au troisième volet de la question du
député de Champlain, qu'est-ce qui fait qu'une décision
est prise de procéder, à un moment donné, à une
inspection? C'est tout simplement à partir de plaintes qui peuvent
être cheminées aux bureaux régionaux de l'Office de la
construction. Cela peut également procéder d'une initiative d'un
bureau régional sans qu'aucune plainte n'ait été
formulée. Je vous signalerai, Mme la Présidente, que le nombre
d'augmentation des visites de chantiers a été conditionné
- ce n'est pas le terme exact -mais procède du fait que, depuis que le
programme Corvée-habitation est là, les travailleurs de la
construction qui y contribuent dans une proportion de 0,125 $ l'heure ont
insisté, évidemment, pour que ces inspections se fassent à
un rythme plus accéléré. C'est un des motifs pour lesquels
les inspections ont effectivement été augmentées le soir,
la nuit et au cours des fins de semaine, très souvent.
C'est très succinct, mais j'espère que cela répond
aux deux ou trois questions que le député de Champlain m'a
posées.
M. Gagnon: Est-ce qu'on peut dire que la plupart des chantiers
sont visités, disons, je ne le sais pas, une fois au cours du chantier
ou si, en fait, seulement un certain pourcentage des chantiers sont
visités?
M. Pagé: Si vous me le permettez, Mme la
Présidente, il y a eu 9992 chantiers actifs en 1982. Alors, faites les
chiffres. Calculez.
M. Fréchette: II peut y avoir plus d'une infraction par
chantier, c'est évident. Maintenant, Mme la Présidente, je ne
sais pas si le temps nous le permet...
M. Pagé: Non.
M. Fréchette: ...mais, le président del'Office de la construction pourrait...
M. Pagé: Demain.
M. Fréchette: ...ou il pourra le faire demain, bien
sûr.
M. Gagnon: Juste une dernière...
La Présidente (Mme Harel): Tout d'abord, M. le ministre,
je dois vous dire qu'on avait convenu que les dix dernières minutes
seraient réservées au député de Portneuf.
M. Fréchette: Ah, madame!
M. Gagnon: II me reste encore une minute.
La Présidente (Mme Harel): Alors, je vais inviter...
Une voix: Champlain.
La Présidente (Mme Harel): ...le député de
Champlain, oui.
M. Gagnon: Juste une dernière remarque. On parlait des
taux horaires des travailleurs de la construction et on disait que,
peut-être, un moyen d'éviter le travail au noir serait, entre
autres, de diminuer le taux horaire de façon que les gens engagent
plutôt des spécialistes qualifiés en construction. Si on
dit qu'on remarque sur les gros chantiers un certain nombre d'infractions
aussi, cela veut dire que ce ne sont pas nécessairement seulement des
gens qui travaillent à plus bas salaire, à ce
moment-là.
La solution ne serait peut-être pas de diminuer le salaire. Il y
aurait peut-être d'autres solutions à envisager.
M. Fréchette: Un seul commentaire à cet
égard, Mme la Présidente. C'est, de toute façon, une
décision qui appartient aux parties elles-mêmes, parce que c'est
un objet de négociation, bien sûr.
La Présidente (Mme Harel): Je crois comprendre que le
président de l'OCQ sera avec nous, de toute façon, demain. Oui,
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Vous savez, je
voyais une nette distinction ce soir entre le verbe utilisé par certains
députés, lorsque la réforme parlementaire a
été adoptée, qui vantaient les mérites et les
espoirs nouveaux qui naissaient avec la réforme des commissions
parlementaires en termes d'échanges utiles, fructueux, d'échanges
sur le fond des questions... Quand j'ai entendu le propos teinté de
démagogie du député de Terrebonne, auquel s'est complu
d'ajouter sa voix le député de Beauharnois, évidemment sur
l'interprétation à donner aux propos que j'avais tenus
antérieurement, je remarque qu'il y a loin de la coupe aux lèvres
en matière de réforme parlementaire. Je vais vous expliquer cela
pour une couple de minutes, vous allez comprendre, j'espère.
La Présidente (Mme Harel): Je...
M. Pagé: J'ai dit et j'ai bien dit tout à l'heure
que, si - vous pourrez vérifier avec le texte - le volet placement
était aboli, purement et simplement, ce serait un "free for all" et
c'est vrai. Mais cela ne veut pas dire que je suis favorable au
règlement de placement. Cela ne veut pas dire qu'on pourrait maintenir
le règlement de placement. Cela ne veut pas dire qu'il soit opportun de
maintenir le règlement de placement et l'Office de la construction du
Québec.
Dans le mandat qui est confié à l'OCQ en vertu de la loi,
le pouvoir réglementaire, il y a deux volets bien importants: le
placement et l'autre volet qu'il sous-tend, le contingentement de la
main-d'oeuvre. Le gouvernement a adopté un règlement de placement
en 1978 et vous constaterez avec moi que l'opportunité du maintien de ce
règlement a été revue assez régulièrement:
1977, adoption du règlement - et là, je pourrais vous faire toute
la nomenclature des décisions administratives et politiques qui ont
été posées - 1er mars 1978, modifications; 1er juillet
1978, intervention du gouvernement; 23 août 1978, modifications du
règlement en élargissant les conditions d'un certificat de
classification A; 14 février 1978, 28 février 1978, 20 juin 1979,
février 1980, 27 août 1982; là, 1983; et mars 1984,
modifications au règlement de placement.
C'est un règlement qui a été critiqué, qui a
fait l'objet de consensus des parties; d'ailleurs, certaines des parties,
actuellement, demandent l'abolition du règlement, pure et simple. Nous
avons, à plusieurs reprises, parlé de l'abolition du
règlement et c'est vrai que tout le volet, tout l'aspect contingentement
doit être éliminé, Mme la Présidente,
complètement. D'ailleurs, c'est avec un certain intérêt que
je voyais les députés péquistes, tout à l'heure,
acquiescer du signe de la tête, comme ils sont probablement
habitués de le faire en Chambre, aux propos que je tenais. Ils
entendaient probablement là ce qu'ils entendent dans leur caucus mais ce
qu'ils n'osent pas dire ici, autour de la table!
Mme la Présidente, j'ai encore huit minutes et je vous
demanderais, s'il vous plaît, de me protéger!
La Présidente (Mme Harel): Peut-être en vous
rappelant...
M. Pagé: De protéger mon droit de parole.
La Présidente (Mme Harel): ...l'article 35 de nos
règlements qui dit qu'un député qui a la parole ne peut
imputer des motifs à un autre membre de la commission.
M. Pagé: Je vous demande de protéger mon droit de
parole.
Alors, j'en étais dans les commentaires que j'ai faits au
ministre et j'aimerais bien qu'on revienne demain là-dessus. Le
problème du gouvernement et de l'Office de la construction du
Québec, c'est que le nombre d'heures déclarées à
l'OCQ diminue substantiellement d'année en année.
N'êtes-vous pas surpris de constater une telle diminution? D'accord, il y
a eu la situation économique qui a prévalu. Ne comprenez-vous
pas, M. le ministre, que, plus il y a de travail au noir, plus il y a d'heures
non déclarées, moins il y a d'heures déclarées? Ne
comprenez-vous pas - non, non, ce n'est pas la question d'être fort, mais
c'est cela, c'est un cercle vicieux - que la solution du travail au noir passe
par une révision complète de tout le volet contingentement de la
main-d'oeuvre? Est-ce que l'on peut légitimement croire que le
travailleur, qui a un certificat de qualification dans ses poches depuis 20
ans, qui oeuvrait dans un métier donné, qui se fait dire par
l'OCQ: C'est regrettable, ton certificat de classification n'est pas
renouvelé, il va s'asseoir chez lui, se limiter à une couple de
visites dans les bureaux de députés péquistes pour se
faire dire: Bien, écoute, c'est regrettable, le gâteau, la
main-d'oeuvre, tatata? Non, non, il part bien souvent et il va travailler; il
va travailler au noir. Et tout le problème, qui a été mis
en relief par la CSN dans les conférences de presse qu'elle a tenues et
les contacts qu'elle a établis, touche ce volet de la question et il est
bien important.
D'ailleurs, encore cette année, vous avez, comme ministre du
Travail, confirmé l'échec de votre règlement de placement
en reconduisant, pour 24 mois, tous les détenteurs de certificats de
classification. Vous êtes pris avec la patate chaude dans les mains, vous
ne savez pas quoi faire, vous n'osez pas reculer, vous explorez des avenues
comme celles qui ont été dégagées au colloque
régional de votre formation politique ici, dans la région de
Québec, où une résolution a été
adoptée disant que le règlement de placement ne s'applique pas
dans les municipalités de moins de 5000 habitants. C'est exactement la
proposition que je formulais au nom de mon groupe politique, il y a quelques
années, au ministre du Travail. Vous dites, ce soir, comme ministre du
Travail: Cela peut revêtir un certain intérêt pour autant
que les parties sont intéressées et qu'elles l'acceptent.
Pierre-Marc Johnson disait que c'était irresponsable, il y a trois ans,
que cela n'avait pas d'allure et que cela n'avait pas de bon sens, il y a
quatre ans.
On évoque la possibilité, ce soir, par les
députés: Pourquoi le secteur résidentiel serait-il soumis
aux mêmes normes? Lorsqu'on a eu la commission parlementaire avant
l'adoption de ce règlement, deux députés à
l'Assemblée nationale du Québec, Fabien Roy, député
de Beauce, et moi-même avons évoqué cette
possibilité. Le ministre du Travail nous a dit: Cela va être
invivable, incontrôlable, impraticable. Vous vous dirigez maintenant vers
ces solutions. Je persiste à croire, Mme la Présidente, que le
gouvernement a une responsabilité. Quand je parlais de leadership, ce
matin, c'est le genre des responsabilités auxquelles je
réfère, sans vouloir vous insulter, mais dans
l'intérêt de l'économie du travail au Québec et dans
l'intérêt d'un monde plus paisible et plus productif dans le monde
de la construction et avec moins d'irritants. Je crois que votre premier
ministre est sensibilisé à cela. Le gouvernement se doit de
revoir... On ne vous demande pas un acte de contrition, on ne vous demande pas
de confession, on ne sera pas démagogues au point de vous dire: Ah! On
avait raison. Non, non, on vous demande de convenir franchement, loyalement et
ouvertement dans le cadre d'une commission comme celle-ci... Faites-vous donner
le blanc-seing par une sous-commission de la commission de l'économie et
du travail, si vous voulez.
Vous devez revoir complètement, premièrement, le volet
placement. Est-il opportun de le laisser à l'OCQ? Pourquoi les centres
de main-d'oeuvre du Québec ne seraient-ils pas capables de s'occuper
d'une telle responsabilité? Le mandat initial de l'OCQ, comme je le
disais au député de Terrebonne tout à l'heure, lorsqu'il
était à la Commission de l'industrie de la construction,
était de voir à l'administration des régimes d'avantages
sociaux des travailleurs de la construction. Ce volet a été
délaissé de plus en plus, il faut en convenir, pour s'occuper du
placement, des cartes, des récriminations et d'essayer de vous suivre
dans vos modifications et les adapter aux ordinateurs et le diable à
quatre. Premièrement, placement. Quand j'ai indiqué, tout
à l'heure, qu'on ne pouvait pas, demain matin, abolir le placement et
dire: C'est fini, n'importe qui va se placer n'importe où, on
reviendrait à un statu quo ante qui est non souhaitable. Mais, entre
placement et contingentement, M. le député, il y a une
différence très nette. N'allez dire nulle part que notre
formation politique est pour l'OCQ et pour le règlement de placement et
pour le maintien des contingentements. Vous ne seriez pas honnête parce
que ce qui est important, cela je l'ai dit et je le répète, c'est
le volet placement qu'il faut conserver. C'est bien différent du volet
embêtement, tracas, ennuis, préoccupations et tout ce qui
est créé par ce mardi règlement avec lequel vous
êtes pris, vous aussi.
Mme la Présidente, je termine en indiquant au ministre qu'il
devra se pencher là-dessus. Je comprends qu'il a un carcan qui lui est
fixé par les déclarations de ses prédécesseurs. Je
vous ai dit ce matin: Quand vous avez pris l'héritage, vous ne l'avez
pas pris avec bénéfice d'inventaire, vous l'avez accepté
tout de suite. Que le gouvernement, s'il veut être sérieux avec le
verbe qu'il utilise, soit donc responsable pour accepter de revoir l'ensemble
de cette question. Il y a des hypothèses nombreuses. Je conviens que le
placement, il faut continuer à s'en occuper, les critères, on
pourra les voir ensemble, mais pas des critères de contingentement comme
ceux-là. Vous allez régler le problème du travail au noir.
Vous allez augmenter le nombre d'heures travaillées dans la
construction. Permettez! Donnez donc le droit à un travailleur qui est
qualifié, qui a un certificat de qualification obtenu dans votre propre
ministère, donnez donc le droit aux finissants d'une école,
où le ministre de l'Éducation a investi temps, argent, effort,
argent des contribuables pour le former, donnez donc le droit à ce jeune
de travailler dans la construction, donnez donc le droit au jeune travailleur
qui va se chercher un bon d'emploi au centre de main-d'oeuvre et qui veut
travailler. L'OCQ dit: Non, tu n'as pas le droit de travailler. Donnez donc un
peu plus de liberté et assoyez-vous donc à la table. À cet
égard, j'aimerais bien vous entendre demain matin parce qu'on va
ajourner dans quelques minutes. Vous aurez toute la nuit pour dormir
là-dessus. J'aimerais bien avoir votre opinion, comme ministre du
Travail, sur la possibilité que le règlement de placement ne
s'applique pas dans les municipalités de moins de 5000 habitants, la
possibilité que ce règlement, que vous ne voulez pas abolir -
vous y tenez comme à la prunelle de vos yeux parce que Pierre-Marc a dit
que c'était important -que ce règlement ne s'applique pas aux
secteurs résidentiels.
Le Présidente (Mme Harel): Alors, en conclusion, M. le
député de Portneuf?
M. Pagé: Le ministre pourra nous répondre demain.
Après les réponses du ministre, c'est avec, évidemment,
beaucoup d'enthousiasme qu'on entendra M. le président-directeur
général de l'OCQ. Merci, Mme la Présidente.
M. Gagnon: Sur une question de règlement.
La Présidente (Mme Harel): Sur une question de
règlement, M. le député de Champlain.
M. Pagé: Mme la Présidente, il est 22 heures.
M. Gagnon: Juste avant de terminer, c'est pour savoir si
tantôt j'ai bien compris. Demain notre formation a encore du temps de
parole. Tantôt, quand vous m'avez donné les cinq minutes, est-ce
que c'était la fin...
La Présidente (Mme Harel): C'est une question de
directive, M. le député de Champlain?
M. Gagnon: Une question de directive. Oui.
La Présidente (Mme Harel): Alors, pour chacune des
formations politiques, je pourrai demain, dès l'ouverture de nos
travaux, vous indiquer le temps qui a été utilisé
jusqu'à maintenant. Nous le répartirons donc en
conséquence.
M. Pagé: On retient que le temps du PQ est
compté.
La Présidente (Mme Harel): Pas celui de la
présidente.
M. Fréchette: Étant entendu, Mme la
Présidente, c'est d'ailleurs l'invitation que me fait le
député de Portneuf, que mes droits sont réservés
pour commenter la dernière intervention du député de
Portneuf.
La Présidente (Mme Harel): M. le ministre, lors de
l'étude des crédits en commission, le ministre peut intervenir
aussi souvent qu'il le désire. C'est l'article 279 de nos
règlements.
M. Fréchette: Merci, madame.
La Présidente (Mme Harel): Je constate qu'il est 22 heures
et donc...
M. Pagé: On se souhaite mutuellement bonne nuit.
La Présidente (Mme Harel): ...la commission suspend ses
travaux jusqu'à demain matin, 10 heures, ici même dans cette
salle.
M. Fréchette: De 10 heures à 11 h 30?
La Présidente (Mme Harel): De 10 heures à 11 h
30.
(Fin de la séance à 22 h 1)