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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Jolivet): La commission élue
permanente de l'énergie et des ressources est à nouveau
réunie aux fins d'examiner les circonstances entourant la
décision du conseil d'administration de la Société
d'énergie de la Baie James de régler hors cour la poursuite
civile intentée à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu
en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle du premier ministre et de
son bureau à cet égard.
Les membres de cette commission sont: MM. Dussault (Châteauguay);
Ciaccia (Mont-Royal); Duhaime (Saint-Maurice); Bourbeau (Laporte); Laplante
(Bourassa); Gratton (Gatineau); Lavigne (Beauharnois); LeBlanc
(Montmagny-L'Islet); Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); Vaillancourt
(Jonquière); Rodrigue (Vimont).
Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie); Perron (Duplessis);
Desbiens (Dubuc); Mme Harel (Maisonneuve); MM. Paradis (Brome-Missisquoi);
Pagé (Portneuf); Doyon (Louis-Hébert); Tremblay (Chambly);
Saintonge (Laprairie).
Le rapporteur est toujours M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).
L'horaire des travaux d'aujourd'hui est de maintenant jusqu'à 12
h 30. Nous reprendrons normalement après la période des
questions, c'est-à-dire vers 15 heures ou 15 h 30, jusqu'à 18
heures, et de 20 heures à 22 heures, après un arrêt de 18
heures à 20 heures.
Les personnes invitées devant la commission aujourd'hui sont
d'abord, à la suite de l'entente, Me André Gadbois. Si nous avons
terminé avec Me Gadbois avant 18 heures ou à 18 heures, Me
Rosaire Beaulé reviendra pour la soirée de 20 heures à 22
heures.
Je demande donc à Me André Gadbois de s'approcher et
à M. Jean Bédard, greffier, de lui faire prêter le serment
demandé.
Le greffier (M. Jean Bédard): M.
Gadbois, pourriez-vous mettre la main sur l'Évangile et
répéter après moi: Je, vos nom et prénom, jure ou
déclare solennellement que je dirai toute la vérité, rien
que la vérité?
M. Gadbois (André): Je, André Gadbois, jure et
déclare solennellement que je dirai toute la vérité, rien
que la vérité.
Le greffier (M. Jean Bédard): Merci, monsieur.
Le Président (M. Jolivet): Pendant que Me Gadbois
s'installe, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
Discussion sur la procédure
M. Lalonde: M. le Président, l'ajournement d'hier soir,
à 18 heures, m'a empêché de poursuivre les questions que je
soulevais quant au règlement qui régit nos travaux et à la
façon, naturellement, de l'appliquer pour nous permettre de faire
avancer les choses en rappelant, comme vous l'avez dit tout à l'heure,
que notre mandat est un mandat d'examiner les circonstances avec les moyens
qu'on peut avoir à notre disposition.
Pour faire un bref historique, avant-hier, le ministre a soulevé
une question de règlement justement sur cette question, à la
suite de laquelle vous avez ajourné les travaux et vous avez rendu une
décision que j'ai examinée attentivement. Je vais relire
l'essentiel de la conclusion: II est une règle d'interprétation
dont le président entend s'inspirer dans la poursuite des travaux, comme
il l'a fait depuis le début du mandat de cette commission; il s'agit de
l'article 168 de notre règlement, je ne le répéterai pas,
vous le connaissez mieux que moi. Pour le bénéfice de ceux qui
nous écoutent, ce serait peut-être bon de le lire: "Une question
ne doit contenir que les mots nécessaires pour obtenir les
renseignements demandés. Est irrecevable - c'est-à-dire
refusée, irrégulière - une question qui est
précédée d'un préambule inutile; qui contient une
hypothèse, une expression d'opinion, une déduction, une
suggestion ou une imputation de motifs; dont la réponse serait une
opinion professionnelle ou une appréciation personnelle."
En toute justice, il faut le rappeler, vous vous inspiriez aussi des
concepts que la Cour suprême a établis pour que les travaux de la
commission se déroulent dans l'équité et
l'impartialité. Enfin, vous avez souligné, à fort bon
droit si vous me le permettez, que la règle de la gentilhommerie, etc.,
serait aussi votre bible.
En m'inspirant de la journée d'hier, à
la suite de votre décision, il y a des points où ça
peut créer un problème. Je vais vous en soulever quelques-uns.
Quand le témoin soulève une question d'opinion - l'exemple le
plus récent, le plus frais à la mémoire, c'est le
mémoire présenté par Me Beaulé il y a quelques
jours, lequel est une opinion qui ne se réfère à presque
aucun fait - à ce moment, comment pouvons-nous poser des questions sur
cette opinion si l'article 168 est appliqué, à savoir que: Est
irrecevable une question dont la réponse serait une opinion
professionnelle ou une appréciation personnelle?
Les autres dispositions de notre règlement, pour illustrer que
cela peut difficilement s'appliquer ici... On sait qu'un ministre peut refuser
de répondre, on sait qu'il peut prendre avis de la question. Je veux
simplement démontrer jusqu'à quel point l'ambiguïté
entre l'application de l'article 168 et aussi le rappel qu'il y a des
règles devant nos tribunaux dont vous pouvez vous inspirer - vous ne
l'avez pas exclus d'ailleurs dans votre décision - que cette
ambiguïté permet de faire des objections à un grand nombre
de questions. Il y a une autre règle qui est admise et qui est
pratiquée quotidiennement devant les tribunaux, c'est de tester la
crédibilité. On ne peut tester la crédibilité d'un
ministre. On peut simplement lui poser des questions auxquelles il peut refuser
de répondre ou auxquelles il peut répondre. Mais un témoin
dont la mémoire n'est pas parfaite, dont la version des faits ne nous
semble pas, à l'un ou à l'autre, exacte, peut voir tester sa
crédibilité.
Par exemple, le ministre l'a fait à l'égard de M. Giroux,
mais en rappelant un événement de 1976 qui était bien loin
avant le règlement de 1979. Autrement dit, ce que je vous demande en
fait, c'est: Peut-on étendre l'application de l'article 168.1, par
exemple, par lequel on interdirait à un député de faire
des observations sans poser de questions et de faire des motions
conformément à notre règlement?
Ce qui m'inspire cette demande, M. le Président, c'est la
décision que vous avez rendue hier, à la toute fin de nos
travaux, voulant que le député de Gatineau ne pouvait même
pas faire d'observation sans poser de questions. Cela soulève un droit
extrêmement fondamental du parlementarisme, à savoir que notre
règlement doit protéger notre droit de parole alors que le
témoin, à plusieurs reprises, interrompait même le
député de Gatineau et pouvait faire toutes sortes d'observations.
Vous me le permettrez, M. le Président, ce droit est fondamental; il est
permis et créé par le règlement. Un député
qui ne veut pas poser de questions, mais qui veut faire des observations, ou
proposer une motion devrait avoir ce droit. Je vous dis respectueusement que ce
droit permettrait justement à un député de faire des
observations sans poser de questions, parce que notre râle n'est pas
seulement de poser des questions, mais d'examiner les circonstances. On peut le
faire en posant les questions directement à un témoin ou en
éclairant ou en tentant d'éclairer la commission de sa propre
analyse des choses.
Il y a aussi un cas qui m'a inquiété. C'est lorsque vous
avez - je ne fais pas appel de votre décision, mais c'est seulement pour
montrer dans quelle perspective le problème se pose - interdit la
question à Me Beaulé du contenu de la conversation qu'il avait
eue avec M. Boivin vendredi dernier. Cela peut même être injuste
pour le témoin si on permet la question, à savoir s'il y a eu
conversation, et si on ne lui permet pas de dire ce qu'elle contenait. À
ce moment, l'ignorance du contenu peut être aussi nuisible au
témoin qu'à la cause qu'on essaie de chercher,
c'est-à-dire la vérité.
M. le Président, tout ceci sans faire appel de votre
décision pour rappeler que, lorsque le ministre avait
suggéré que l'article 730 de l'ancien règlement
s'applique, je l'avais appuyé d'emblée. Tout en conservant
peut-être l'esprit de l'article 168, je veux vous demander une directive,
à savoir si ces points que j'ai soulevés ne devraient pas faire
l'objet d'une plus large interprétation et application de l'ancien
règlement, par exemple, qui permet à peu près toute
question pertinente et de tester la mémoire et la
crédibilité.
M. le Président, un exemple, et je termine là-dessus. Si,
par hypothèse, une promesse de pot-de-vin avait été
livrée six mois après le règlement hors cour, est-ce que
votre décision, à savoir qu'on ne peut poser de questions sur des
faits qui ont suivi le règlement, nous empêcherait d'aller faire
cet examen? C'est une hypothèse parce que je n'ai aucune information
dans ce sens. Que ce soit bien clair, je ne veux pas laisser planer quoi que ce
soit, mais c'est un...
M. Duhaime: ...comme exemple.
M. Lalonde: D'accord, disons que je retire cet exemple, mais
j'essaie de trouver un exemple ou un événement postérieur
s'y rattachant et qui devrait être examiné par notre commission.
Je vous présente ceci pour permettre aussi au député de
Gatineau - je ne sais pas si c'est lui qui a droit de parole ce matin - et
à tous les autres députés de parler et de faire leurs
observations sans que ce soit interprété comme étant un
préambule à une question.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jonquière, sur cette question.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
même si le député de Marguerite-Bourgeoys a indiqué
qu'il ne s'agissait pas
d'un appel de vos décisions, il n'en demeure pas moins que, de
façon très habile, par les questions qu'il vous a posées,
il vous amène de façon évidente à vous interroger
sur les décisions que vous avez rendues. De ce côté-ci de
la table, nous croyons, et le suggérons humblement, que vous devez
respecter et continuer à respecter, comme vous l'avez fait depuis le
début, cette décision importante à laquelle nous nous
rallions de façon générale, à savoir que l'article
168, que je ne relirai pas parce qu'il a été lu à
plusieurs reprises, devrait guider les parlementaires sur la façon de
poser leurs questions.
Comme le député de Marguerite-Bourgeoys l'a dit, vous avez
également mentionné que l'article 730, paragraphe 4, de l'ancien
règlement n'était pas exclu, en ce sens que, même si ce
n'était pas la première règle qui devait nous guider, on
pouvait quand même se servir de cet article pour faire certaines
objections. Vous avez également fait appel à
l'équité, à l'impartialité et à la
gentilhommerie. De ce côté-ci de la table, M. le Président,
nous avons l'intention de continuer, sans exagérer, bien sûr,
à nous opposer à toute question qui contiendrait un
préambule inutile, qui serait une expression d'opinion, qui comprendrait
une déduction ou une suggestion, qui imputerait des motifs ou qui
demanderait au témoin une opinion ou une appréciation
personnelle, comme, d'ailleurs, on le mentionne à l'article 168,
paragraphe 4.
Nous avons en plus, M. le Président, l'intention de nous servir
de l'article 173 du règlement, qui dit qu'il est permis de poser de
nouvelles questions pour obtenir des renseignements supplémentaires
pourvu que ces questions ne prennent pas la forme d'un contre-interrogatoire.
C'est à l'article 173 de notre règlement.
Il ne faut jamais oublier, M. le Président, que les
témoins qui viennent devant la commission sont nos invités. Ils
sont les invités de la commission parlementaire et, en ce sens,
l'interrogatoire doit être direct, comme pour le témoin d'une
partie qui le produit devant les tribunaux de droit commun. Dans ce sens, nous
allons continuer, parce que c'est une règle d'équité et
d'impartialité qu'une partie interroge son témoin par un
interrogatoire direct. Nous allons continuer, quant à nous, de la
façon la moins exagérée possible; tant mieux, si nous
n'avons pas d'objection. Nous allons essayer de continuer à faire
respecter ces principes que vous avez toujours fait respecter depuis le
début de la commission. Mais vous me permettrez de dire que vous les
faites respecter avec beaucoup plus de rigueur depuis deux jours.
M. le Président, j'ajouterais un petit point en terminant...
M. Lalonde: La semaine dernière, ce n'était pas
bon?
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, le
député de Marguerite-Bourgeoys a fait allusion au fait que, sur
des événements qui seraient postérieurs, le fait de ne pas
répondre peut nuire passablement au témoin. Je vous rappellerai
que, dans le cas qu'il a soulevé, le témoin a eu l'occasion de
répondre et de dire que cette conversation n'avait aucun rapport avec le
mandat de la commission. Je pense que le témoin, il faut le dire, a eu
l'occasion de dire que cette conversation n'avait pas de rapport avec le mandat
de la commission tel que nous l'avons eu de l'Assemblée nationale. Le
président a pris cette chose en délibéré et a rendu
une décision, je pense, dans les heures suivantes. C'est ce que j'avais
à dire, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Comme le règlement me
permet de prendre une décision sans entendre d'autres personnes et que
je suis prêt à la prendre dans le sens de continuer à faire
en sorte qu'on avance le plus rapidement possible dans les débats et que
votre but de ce matin est d'entendre Me Gadbois, je dois d'abord dire que je
n'ai jamais dit que personne n'avait le droit de faire des observations sans
poser de question. Ce que j'ai dit, c'est que nous étions ici pour poser
d'abord des questions et je n'enlèverai jamais le droit de parole
à personne. J'en ai d'ailleurs fait mention depuis le début de
cette commission. Qu'une personne fasse des observations, mais qu'elle dise
qu'elle n'a aucune question à poser et qu'elle a des observations
à faire.
Cependant, ce que j'ai demandé, c'est que les observations
tiennent compte aussi qu'on ne doit pas mettre dans la bouche de qui que ce
soit ni des intentions, ni des suppositions, ni des choses semblables; je pense
qu'à partir de cela, on va s'entendre facilement.
À savoir maintenant pourquoi il y a eu un changement dans mon
attitude comme président de la commission, c'est que je ne suis ni
sourd, ni aveugle et, en conséquence, j'ai tenu compte aussi de ce qui
se dit aussi bien à l'intérieur de l'enceinte de cette
Assemblée, aussi bien à la commission parlementaire
qu'ailleurs.
J'en avais fait mention après les vacances de Pâques.
Cependant, j'ai eu une demande et j'ai reçu une directive
différente. Je ne veux en aucune façon faire en sorte d'expliquer
mon comportement, mais j'ai essayé, à partir du mandat qui avait
été donné à cette commission, d'amener le plus
d'éclairage possible par les questions qui étaient posées,
jusqu'à ce qu'il y ait des objections auxquelles j'ai eu à
répondre ou que moi-même j'ai eu à interrompre des
questions, puisque j'avais une attitude qui était basée
sur une sorte de bon sens.
Il est arrivé, en cours de route, qu'on m'a demandé
d'être plus rigide par une demande de directive. J'ai donc pris cette
demande en délibéré. J'ai entendu chacune des parties et,
après avoir, avec les gens qui sont au bureau de la présidence,
regardé l'ensemble de la question, les arguments que vous aviez
apportés, j'ai décidé d'appliquer de façon plus
rigoureuse l'article 168 que j'avais à plusieurs occasions
invoqué comme moyen de faire avancer nos travaux.
Simplement, ce changement d'attitude est dû au fait qu'il fallait
éviter tout abus et j'ai peut-être dû le faire, à la
fin de la journée, comme j'ai eu souvent l'occasion de m'en excuser, si
j'avais moi aussi, à cause de la fatigue que j'ai à
présider cette commission, comme tous les membres de cette commission...
Ce que je voulais dire, c'est qu'il risquait d'y avoir des abus et qu'en
conséquence, aussi bien pour l'invité qui, depuis de longues
heures, était devant nous, qui est une personne qui doit nous aider
à faire la lumière sur le mandat qui nous est donné, il
fallait donc éviter, par des questions répétées,
d'en arriver à faire en sorte qu'il puisse se tromper, parce que, la
fatigue aidant, quelquefois, il n'est pas sûr que cela aide l'individu
à avoir plus de mémoire. Or, je pense que la personne qui
était devant nous - on aura l'occasion de la revoir ce soir, normalement
- a fait, à mon avis, tout son possible pour nous aider jusqu'à
maintenant et qu'il faudra continuer dans ce sens.
Pour ce qui est de l'autre demande qu'on m'a faite, sans vouloir
remettre en question ma directive concernant mon refus d'aller au delà
du mois de mars 1979, c'est bien simple: s'il y a d'autres choses qui sont
portées à la connaissance de l'Assemblée nationale,
d'autres décisions seront prises. Et ce n'est pas à moi, comme
président d'assemblée, d'aller plus loin que le mandat qui m'est
accordé. Or, je pense que cela a été clair dans bien
d'autres commissions parlementaires. S'il y avait un autre fait qui
était porté à la connaissance de l'Assemblée
nationale et s'il avait trait à une période ultérieure
à cette prise de décision de mars 1979, vous avez, comme
parlementaires, tout le loisir de poser des questions à
l'Assemblée nationale, mais ce n'est pas ici qu'on va le régler.
Et je ne changerai pas d'opinion sur cette question. Donc, au moment où
on se parle, c'est Me André Gadbois qui est notre invité. J'ai
demandé s'il...
M. Paradis: M. le Président, sur la question...
Le Président (M. Jolivet): Non, je n'accepte plus
rien.
M. Bourbeau: Une question de directive, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Une question de directive? M.
le député de Laporte.
M. Bourbeau: J'ai l'intention de poser des questions un peu plus
tard, M. le Président, et je voudrais savoir ce que vous allez faire si
un témoin refuse de répondre sans donner de raisons.
Le Président (M. Jolivet): Je n'ai actuellement devant moi
personne qui a refusé de répondre. La seule chose qu'on a eue, ce
sont des gens qui ont dit: J'ai déjà donné cette
réponse. Or...
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'un témoin a
le droit de refuser de répondre sans donner de raisons? (10 h 30)
Le Président (M. Jolivet): La personne qui est devant nous
n'a pas le droit de refuser. Mais elle n'a pas non plus le devoir de
répondre cinq ou dix fois à la même question. Si tel
était le cas, je vais commencer par rendre la question irrecevable et,
à ce moment-là, elle n'aura pas besoin de refuser.
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais simplement
préciser ma question. Je veux que vous m'expliquiez comment on peut
appliquer l'article 171, paragraphe 2, à la lumière de ce que
vous venez de dire tout à l'heure. Il faut prendre, je pense, les
articles 168, 169, 170, 171, dans un tout. Les articles 168 et 169
établissent les règles qui s'appliquent à celui qui
questionne. Les articles 170 et 171 établissent les règles pour
les réponses. Et je pense qu'il faut les traiter ensemble. Or, comme le
règlement qui s'applique à l'Assemblée nationale
s'applique également ici, à l'égard des réponses,
je pense qu'il faut tenir compte -et c'est votre décision d'hier - du
fait que l'article 171.2 dit: "Un ministre ou un député - et par
analogie, évidemment, un témoin -peut toujours refuser de
répondre à une question sans donner de raisons et son refus ne
peut être discuté d'aucune façon."
M. le Président, en vertu de ce que vous venez de dire, je veux
savoir ce qui se passera si un témoin refuse de répondre sans
donner de raison.
M. Duhaime: On verra dans ce temps-là.
M. Bourbeau: Oui, mais il faut le savoir tout de suite.
Le Président (M. Jolivet): J'ai dit au départ, et
je le répète, que, par analogie, j'appliquais à la
commission parlementaire les
règles prévues à l'Assemblée nationale. J'ai
dit que je tenais compte aussi d'autres facteurs. Ma décision a
été rendue en ce sens. Je pense que c'est important puisqu'on m'a
demandé d'être plus strict dans les manières d'agir et j'ai
accepté, à la suite d'une directive qui m'a été
demandée, d'agir en ce sens, après consultation.
Normalement, quant à la personne qui est devant nous, quand on
regarde l'ensemble des commissions parlementaires et qu'on en préside,
je pense que c'est important pour les gens qui nous écoutent aussi,
quand un mémoire est présenté, quand des questions sont
posées sur un mémoire présenté, il y a une grande
différence par rapport à la commission où nous
siégeons actuellement.
J'ai donc essayé, par le mandat qui m'a été
accordé, d'être souple. Les gens me connaissent comme cela.
Cependant, je pense qu'il y a crainte d'abus et, en conséquence, on m'a
demandé d'appliquer plus strictement, par analogie, l'article 168; ce
que j'ai fait. Donc, une personne, qui est devant nous, n'a pas le droit de
refuser, non pas en vertu de l'article 171, mais en vertu d'autres articles qui
disent que la personne, qui est devant nous, en vertu de la Loi sur
l'Assemblée nationale, doit répondre aux questions.
L'autre chose qu'il faut aussi considérer, et ce sur quoi j'ai
dit que la personne, qui était devant nous, n'aura pas l'obligation de
répondre, est si la question a déjà été
posée. Quel est le moyen de ne pas la reposer? C'est de la prendre en
note et de ne pas la reposer. Mais si, à partir de la question qui a
déjà été posée, un élément
additionnel doit' être cherché, c'est autre chose.
M. Lalonde: D'accord.
Le Président (M. Jolivet): Mais allons-y sur la question
additionnelle et non pas sur la même question. Je pense que le
député de Gatineau, pour lui rendre hommage sur ce point, a
accepté, à plusieurs occasions hier, de reformuler sa question
qui est devenue recevable. C'est, je pense, la seule façon d'agir.
M. Paradis: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas qu'on passe
la matinée sur cela, s'il vous plaît!
M. Lalonde: Non, non. Il n'est pas question de cela. Absolument
pas.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, une précision quant
aux événements postérieurs au règlement. J'ai ici
la transcription de la commission parlementaire, le ruban 915 du 28 avril 1983.
À l'occasion d'une réponse qu'il a donnée à cette
commission, le témoin ou l'invité, Me Beaulé, a fait
référence à une conversation téléphonique
qu'il a eue le 29 mars dernier avec Me Fanning, son client. On sait qu'il est
délié du secret professionnel.
C'était une question que lui adressait M. Ciaccia. Ce qu'il nous
a dit dans sa réponse, en faisant référence à un
événement postérieur, c'est qu'il s'interrogeait sur sa
nomination, à savoir si elle était due à Me Gauthier, qui
est au bureau du premier ministre, comme procureur du syndicat international.
Il a vérifié sa nomination par téléphone
après cette date. La réponse qu'il a donnée ici en
commission parlementaire est que cela venait du milieu de Montréal et du
milieu syndical. Si le député de Brome-Missisquoi ou tout autre
membre de cette commission veut avoir des détails, parce que
Montréal est une grande ville et le milieu syndical, Me Gauthier y
était, si on veut avoir des précisions, est-ce que ce genre de
questions, qui découlent des réponses fournies par un
témoin sur des événements après le
règlement, va être autorisé ou est recevable selon la
présidence?
Le Président (M. Jolivet): Ce que je veux vous dire, M. le
député, c'est que la question avait trait au mandat qu'il avait
reçu à l'époque des décisions à être
rendues en 1978 et en 1979. Elle était donc pertinente. Mais ce que je
veux dire, c'est que tout ce qui dépasse et qui n'est pas pertinent au
mandat n'a pas lieu d'être et, après vérification, je ne
changerai pas ma décision là-dessus.
M. Paradis: Est-ce que, selon sa réponse, il nous a dit
qu'il avait téléphoné, lui, aux États-Unis...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, ce
que je vous dis, c'est que, effectivement, dans la réponse qu'il a
donnée, compte tenu des besoins de la commission, pour le mandat dans
lequel il avait eu une décision en 1978...
M. Lalonde: Cela va.
Le Président (M. Jolivet): ...c'était normal.
M. Lalonde: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou de
l'autre, cela n'avait pas trait à un événement
postérieur aux décisions qui étaient rendues.
M. Gratton: Très brièvement, j'aimerais que cela
soit clair. Je suis sûr que cela
évitera des retards par la suite. Hier, j'ai été
empêché de formuler des commentaires, à la toute fin des
travaux, parce que cela ne constituait pas une question, si j'ai bien compris.
Par contre, vous venez de dire ce matin que les règlements de
l'Assemblée nationale permettent à un député qui a
le droit de parole, ici à la commission parlementaire, de faire des
commentaires à la condition qu'il n'attaque pas
l'intégrité, l'honnêteté ou la réputation du
témoin qui est devant la commission. Dois-je comprendre de cela que, si
je désire à l'avenir faire un commentaire qui ne comporte pas une
question à l'endroit de l'invité qui est devant nous, je pourrai
le faire simplement en annonçant que c'est ce que je désire
faire?
Je vous pose la question parce que j'ai tenté - je pense que
c'était le 21 avril - de le faire de cette façon-là, en
annonçant d'avance que je faisais un commentaire et cela a
soulevé une question de procédure de la part du ministre
indiquant que nous n'étions pas ici pour entendre les commentaires. Je
veux qu'on se situe pour qu'à l'avenir, je ne déroge pas aux
règlements et à nos directives.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison et c'est
d'ailleurs ce que j'ai répété ce matin, en
référence justement à cette fameuse journée de
vendredi. Ce que j'ai voulu dire, c'est que vous pouvez tirer les conclusions
que vous voulez, sans mettre en péril, comme vous le dites,
l'honnêteté et l'intégrité de la personne qui est
devant nous. Je n'ai jamais empêché cela. Ce que je veux dire,
c'est que la personne qui est devant nous - vous étiez en train de lui
poser des questions - voulait que vous lui posiez d'abord votre question, et
quand vous aviez eu réponse à la question, vous disiez:
Maintenant, j'ai des commentaires à faire, ce sont mes commentaires
personnels. Je vous aurais permis de le faire.
M. Gratton: Je vous remercie, M. le Président. Vous ne
savez pas combien cela me soulage.
Le Président (M. Jolivet): Me Gadbois a-t-il des
renseignements à donner?
M. Duhaime: Oui, je m'excuse. M. le Président, est-ce sur
autre chose?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Oui. Si mon collègue de Marguerite-Bourgeoys
était d'accord, on pourrait peut-être régler tout de suite
l'horaire de la semaine qui nous reste et celui de la semaine prochaine.
À votre demande, M. le Président, nous sommes d'accord des deux
côtés pour faire droit à votre requête de ne pas
siéger demain, ce qui vous permettra de vaquer à vos occupations
dans votre comté de Laviolette.
Les gens de la presse ont également fait état que, puisque
mardi est le jour du discours sur le budget, ils seront retenus incomunicado
à partir de 11 heures, mardi matin. Je serais parfaitement d'accord pour
que nous ne siégions pas mardi. Cela veut dire qu'à l'ajournement
de ce soir, les travaux reprendraient mercredi, sous réserve des motions
ou avis que pourrait donner le leader du gouvernement à
l'Assemblée. Nous allons - je ne dirais pas perdre - devoir sacrifier de
précieuses journées. J'ai vérifié de mon
côté - je ne sais pas si tous mes collègues seraient
disponibles, mais on pourrait très certainement voir à ce qu'il y
ait des députés ministériels en nombre suffisant - et on
pourrait reprendre les quelques heures perdues le vendredi 13 mai.
N'étant pas superstitieux, je n'ai aucun problème à
travailler un vendredi 13. On pourrait siéger en matinée et dans
l'après-midi. On pourrait arrêter à 18 heures. N'ayant pas
la période des questions, cela nous donnerait tout près de sept
heures d'affilée. Si vous voulez y penser pour vendredi
après-midi prochain, je serais prêt à le faire. On pourrait
régler cela tout de suite. Demain, vendredi, nous ne siégerions
pas de même que mardi prochain.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Pour ce qui est de vendredi après-midi de la
semaine prochaine, j'en avais déjà discuté avec le
ministre. Nous sommes d'accord pour vous libérer demain en vertu du
règlement que nous appliquons avec libéralité. En ce qui
concerne l'idée d'enfermer les journalistes pendant une
demi-journée, cela ne nous déplaît pas non plus. Il faut
dire qu'on les laisse sortir vers 16 heures ou 18 heures. Jusqu'à
maintenant, nous n'avons pas pu accepter lorsque le ministre nous invitait
à siéger le vendredi après-midi à cause des
occupations de mes collègues et souvent des miennes dans les
comtés. Comme nous serons tous retenus à Québec pour la
fin de la semaine, à cause d'un conseil général que nous
tenons, ce serait possible, sous réserve de le confirmer toutefois,
disons, mercredi; cela devrait pouvoir se faire.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. Ce qu'on peut
toujours dire, c'est que tous les éléments pour les superstitieux
sont réunis, c'est un vendredi 13 et au mois de mai en plus.
Me Gadbois a-t-il des commentaires préliminaires à
faire?
Témoignages M. André Gadbois
M. Gadbois: M. le Président, je n'ai ni mémoire ni
commentaire préliminaire, sauf pour vous dire que j'ai demandé
à Me John Lussier, l'avocat en chef de la Société
d'énergie de la Baie James, de s'asseoir à côté de
moi pour m'assister. Deuxièmement, j'ai été relevé
de mon secret professionnel par la Société d'énergie de la
Baie James concernant les événements et les matières qui
font l'objet du mandat de la présente commission.
Je suis à la disposition des membres de la commission pour
répondre à leurs questions.
Le Président (M. Jolivet): Nous vous remercions. Il n'y a
pas de problème quant à votre compagnon.
M. le ministre.
M. Duhaime: Merci, M. le Président. Me Gadbois, pour les
fins de l'information des membres de la commission, je voudrais que vous nous
précisiez exactement quelles sont vos fonctions actuelles?
M. Gadbois: M. le Président, mes fonctions actuelles sont
d'être l'avocat en chef d'Hydro-Québec, et ce depuis le 31 janvier
1979, le jour où j'ai été nommé à cette
fonction. Cependant, étant donné que j'avais la charge de la
coordination du dossier de la poursuite des événements du saccage
de la Baie-James, j'ai continué à occuper ce dossier jusque vers
la fin du mois de février 1979.
M. Duhaime: Au moment où l'action a été
intentée, quelle était votre occupation?
M. Gadbois: À ce moment, j'étais chef du
contentieux de la Société d'énergie de la Baie James et,
en même temps, j'étais secrétaire intérimaire de la
société.
M. Duhaime: L'on parle de février 1976, si ma
mémoire est bonne.
M. Gadbois: C'est cela.
M. Duhaime: En plus clair, est-ce que vous avez été
au dossier en quelque sorte de cette action en cour du début
jusqu'à la fin?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Duhaime: Je vais vous poser une question qui vous
paraîtra une question de détail, mais qui est importante. Sur du
papier à lettres qui fait partie du dossier de la SEBJ on retrouve votre
nom avec des noms d'associés professionnels dans la pratique du droit.
Est-ce que je peux conclure de cela que vous avez d'autres activités
professionnelles ou si vous êtes au service exclusif tantôt de la
SEBJ ou tantôt d'Hydro-Québec?
M. Gadbois: La société dont je fais partie, en
fait, forme le contentieux d'Hydro-Québec et de la Société
d'énergie de la Baie James, c'est-à-dire que nous nous occupons
des affaires et des problèmes juridiques de l'entreprise dans son sens
large. Nous n'avons pas d'autres clients.
M. Duhaime: Vous n'avez pas d'autres clients, donc vous vous
occupez des affaires juridiques en général. Est-ce que vous
n'avez pas été aussi, à un certain moment,
secrétaire de la SEBJ?
M. Gadbois: Oui, j'ai été secrétaire
intérimaire...
M. Duhaime: Oui.
M. Gadbois: ...de la Société d'énergie de la
Baie James depuis le début de 1973 jusqu'à 1979 inclusivement. Je
devrais dire que c'est un intérim qui a duré longtemps, mais
c'est une question historique. Le secrétariat de la
Société d'énergie de la Baie James, au début,
était conduit par le secrétaire de la Société de
développement de la Baie James et, vers l'année 1973, il y a eu
un changement et le conseil d'administration de la société m'a
demandé d'agir temporairement comme secrétaire jusqu'à ce
qu'un secrétaire permanent soit nommé. Le choix de ce
secrétaire a pris quelque temps à être
déterminé. (10 h 45)
M. Duhaime: Maintenant, Me Gadbois, pendant tout ce litige qui
est intervenu devant les tribunaux à partir de février 1976,
l'action intentée à partir du saccage de 1974 jusqu'au
règlement hors cour de mars 1979, est-ce que, durant toute cette
période, un jour ou l'autre, M. René Lévesque, premier
ministre du Québec, aurait communiqué avec vous au sujet de ce
dossier?
M. Gadbois: Aucunement, M. le Président.
M. Duhaime: Est-ce que Me Jean-Roch Boivin l'aurait fait?
M. Gadbois: Non plus, M. le Président.
M. Duhaime: Est-ce que Me Yves Gauthier a communiqué avec
vous pour parler de cette affaire?
M. Gadbois: Je crois, une fois. C'était à
l'automne. Je ne peux pas vous donner la
date, mais c'était à l'automne 1978. J'ai eu la visite
à mon bureau d'un monsieur Yves Gauthier qui s'est
présenté comme ex-tuteur du syndicat 791 et qui est venu me voir
pour exposer les difficultés dans lesquelles se trouvait le syndicat
face à l'action qu'on avait instituée contre lui.
Il m'a fait valoir certains motifs pour lesquels il disait qu'il ne
convenait pas qu'Hydro-Québec continue sa poursuite contre le syndicat
et je lui ai dit que le conseil d'administration de la Société
d'énergie de la Baie James avait mandaté le bureau Geoffrion et
Prud'homme pour agir, prendre la poursuite, instituer l'action. Je lui ai
suggéré qu'il communique avec les avocats de Geoffrion et
Prud'homme. La visite a duré à peu près dix minutes et
elle n'avait pas été annoncée. Je me souviens vaguement de
ce monsieur Gauthier qui était accompagné d'une autre personne
que je ne connaissais pas et que je ne pourrais nommer.
M. Duhaime: Alors, vous situez cela à l'automne de
1978?
M. Gadbois: Oui. C'est peut-être au mois d'octobre,
novembre ou décembre, je ne sais pas. La raison pour laquelle je dis
ceci, c'est que c'était sur la fin de l'après-midi, il faisait
noir dehors et la lumière de mon bureau était allumée.
Alors, je ne peux vous dire autrement.
M. Duhaime: Est-ce que vous auriez eu des conversations
téléphoniques à un moment ou à l'autre, soit avant
ou après cette rencontre, avec Me Yves Gauthier?
M. Gadbois: Pas que je me souvienne.
M. Duhaime: Maintenant, pour les fins de la responsabilité
de ce dossier - je comprends qu'au contentieux d'Hydro-Québec comme
à celui de la SEBJ il doit y avoir plusieurs dizaines de dossiers -
lorsque la corporation décide d'aller à l'extérieur pour
confier un mandat à des procureurs, soit pour prendre action ou faire
valoir des moyens de défense, je voudrais que vous nous disiez, pour
qu'on le connaisse exactement, ce que devient à ce moment le rôle
du contentieux d'Hydro-Québec lorsqu'un mandat est confié
à l'extérieur, à une firme d'avocats dans la pratique
privée, comme un mandat a été confié à la
firme Geoffrion et Prud'homme pour s'occuper des intérêts de la
SEBJ dans la poursuite qui a été intentée. Que devient
votre rôle à ce moment?
M. Gadbois: Lorsqu'un dossier est confié à une
étude de l'extérieur dans les cas exceptionnels - parce que
normalement le contentieux donne ou essaie de donner un service complet
à la société ou à Hydro-
Québec - l'avocat qui a la charge du dossier - comme j'en avais
la charge - agit comme coordonnateur entre la société et le
bureau d'avocats qui s'occupe du dossier. Je faisais donc la coordination entre
le président-directeur général de la Société
d'énergie de la Baie James ou le conseil de la Société
d'énergie de la Baie James et les avocats qui s'occupaient du dossier
dans l'étude extérieure.
M. Duhaime: Cela veut dire que la responsabilité
première du dossier, quant à faire valoir des opinions, par
exemple, la démarche à suivre, la stratégie, les
discussions, les négociations, etc., ne relèvent pas à ce
moment de votre bureau du contentieux comme tel mais du bureau des procureurs
à qui le mandat a été confié?
M. Gadbois: C'est cela, M. le Président. Cela ne
relève nullement du contentieux à ce moment-là.
M. Duhaime: Je n'ai pas d'autres questions pour l'instant, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. Gadbois, je ne vous demanderai pas si vous avez
été surpris d'être convoqué; on s'est aperçu,
à mesure qu'avançait le scénario de ce règlement,
que vous étiez, en quelque sorte, une plaque tournante. Les avocats de
Geoffrion et Prud'homme nous ont dit qu'ils communiquaient avec vous; en fait,
vous faisiez la liaison, comme on dit dans le métier. Alors, c'est pour
cela qu'on a cru bon de vous poser quelques questions.
Donc, votre fonction dans le règlement hors cour était
d'être le lien, si je comprends bien, avec les avocats que la
société avait engagés.
M. Gadbois: C'est exact, M. le Président.
M. Lalonde: Je ne sais pas si vous avez entendu Me Aquin ou
d'autres avocats du bureau Geoffrion et Prud'homme, mais je me souviens
sûrement de Me Aquin qui disait que ce n'est qu'exceptionnellement qu'il
communiquait avec d'autres que vous à la SEBJ.
M. Gadbois: C'est vrai.
M. Lalonde: Vous-même, de qui receviez-vous vos
instructions? On peut partir de 1976, mais ce qui nous intéresse
surtout, c'est l'automne 1978 et le printemps 1979, au moment du
règlement.
M. Gadbois: Mes instructions
provenaient, comme je l'ai dit tantôt, du président ou du
président-directeur général lorsque le nouveau conseil
d'administration est entré en fonction ou du conseil d'administration
lui-même ou, sur la fin de l'époque en question, du
président du conseil lui-même.
M. Lalonde: Alors, pour ma bonne compréhension, à
compter du 1er octobre 1978, au moins, il s'agissait de M. Claude
Laliberté, président-directeur général de la SEBJ -
je vous ferai grâce des noms de tous les membres du conseil
d'administration - et de M. Saulnier, président du conseil?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Lalonde: M. Lucien Saulnier. J'aimerais qu'on parle de
l'opinion des avocats américains du 9 novembre 1978, qui vous a
été remise, je pense, par les avocats de Geoffrion et Prud'homme.
Est-ce qu'on s'entend sur le document dont on parle?
M. Gadbois: Je l'ai devant moi, M. le Président.
M. Lalonde: Vous l'avez devant vous. Je vois une copie d'un
document qui a sans doute été déposé par Geoffrion
et Prud'homme ou peut-être par la SEBJ; il s'agit d'une lettre qui vous a
été adressée le 9 novembre 1978, par Me Michel
Jetté, et qui se lit comme suit: "Cher confrère, veuillez trouver
sous pli le mémoire que nous avons reçu de Me Wade V. Mallard,
à la suite de la demande que nous avions formulée à son
étude légale". Est-ce que vous avez remis ou communiqué
cette opinion au président-directeur général, M.
Laliberté?
M. Gadbois: Non, M. le Président, la raison étant
que cette opinion était une opinion de fond sur laquelle Geoffrion et
Prud'homme avaient basé l'opinion qu'ils avaient rendue au conseil
d'administration le 5 janvier, et les opinions suivantes. En d'autres mots,
j'avais jugé que les matériaux - si je peux les appeler comme
cela -légaux, soit la jurisprudence ou les opinions
d'arrière-fond, ne devraient faire partie du dossier
présenté aux administrateurs de la SEBJ pour ne pas appesantir le
dossier ou ne pas confondre.
M. Lalonde: Alors, vous considériez cette opinion comme un
document sur lequel s'était appuyée l'opinion de Geoffrion et
Prud'homme. D'après vous, si je vous comprends bien, ce qui était
important de communiquer, c'était le résultat, en fait, le
produit fini qui était l'opinion de Geoffrion et Prud'homme?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Lalonde: Je vous traduis bien. Donc, je vous pose la question:
Est-ce que vous l'avez communiquée à d'autres qu'à M.
Laliberté, c'est-à-dire à M. Saulnier, par exemple?
M. Gadbois: Cette opinion n'est ressortie qu'au début de
février, lorsque la demande du conseil allait plus loin que simplement
les liens de responsabilité des syndicats du Québec. En d'autres
mots, lorsque le conseil s'est posé la question: Si on obtient le
jugement, que fera-t-on avec ce jugement, à ce moment, ces opinions sont
devenues importantes. À la demande de M. Saulnier, le président
du conseil, vers le milieu de février, j'ai repassé les opinions
qui nous avaient été données par Geoffrion et Prud'homme,
ainsi que les opinions américaines pour faire valoir ou ressortir les
points difficiles de faire exemplifier ou de faire valoir un jugement rendu au
Québec aux États-Unis.
M. Lalonde: Est-ce qu'on - je le fais exprès pour employer
le mot "on", je vous demanderai de qui il s'agit si la réponse est
affirmative - vous avait demandé spécifiquement de faire
ressortir les points difficiles?
M. Gadbois: Le président du conseil, M. Saulnier, me
l'avait demandé.
M. Lalonde: Vers quelle époque? M. Gadbois: Vers le
15 février.
M. Lalonde: Donc, cette opinion ne faisait pas partie des
documents qui ont été remis aux membres du conseil
d'administration. Je pense que la première fois que les nouveaux membres
du conseil d'administration avaient un dossier, c'est à la
réunion du 11 décembre 1978. Cette opinion n'était pas
dans ces...
M. Gadbois: Non, elle n'y était pas, M. le
Président.
M. Lalonde: ...dossiers. Je vais continuer un peu au sujet de
cette opinion et on reviendra dans le temps. Votre propre opinion du 19
février. C'est bien cette date?
M. Gadbois: C'est bien celle-là.
M. Lalonde: Elle ne faisait pas état, non plus, de cette
opinion juridique américaine?
M. Gadbois: Elle faisait surtout état de la seconde
opinion américaine.
M. Lalonde: Mais pas de celle-là?
M. Gadbois: Mais pas de celle-là, non.
M. Lalonde: Bon! Si je pose la question, c'est qu'on a cru,
à un moment donné, que Geoffrion et Prud'homme - cela a
été nié ici par Me Jetté et je pense qu'on a
démontré que c'était faux, j'en suis satisfait - dans leur
opinion du 19 février, la même date que la vôtre, dans une
lettre, en mentionnant tout à coup, d'après nous, dans le
déroulement des choses, le Norris-La Guardia Act, avaient changé
leur opinion. D'après vous, il n'y a pas eu de changement d'opinion
à ce moment?
M. Gadbois: Aucunement. Lorsque M. Saulnier m'a demandé de
regarder les opinions et de faire ressortir les points difficiles de faire
exemplifier un jugement aux États-Unis, j'avais préparé
l'opinion du 19 février. J'ai jugé bon - en fait, je l'aurais
fait de toute façon - de la faire examiner par Geoffrion et Prud'homme.
En fait, c'est Me Jetté qui l'a examinée et il lui est venu
à l'idée que je n'avais pas été assez loin. En
d'autres mots, j'avais dit que faire exemplifier un jugement aux
États-Unis causerait des difficultés. Mais, il y avait plus que
simplement les difficultés d'exem-plification; il y avait
également des difficultés de droit de base. Il a relevé ce
qui était contenu dans la première opinion américaine. Il
a bien fait, évidemment. Les deux opinions se complètent.
M. Lalonde: Maintenant, je vais passer quelques réunions
avec vous à compter du 27 novembre 1978. Vous étiez
secrétaire, je pense, jusqu'à la réunion du 6
février 1979 inclusivement?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Lalonde: À ce moment-là, vous avez changé
de fonction.
M. Gadbois: C'est cela.
M. Lalonde: Vous avez été remplacé par
Me...
M. Gadbois: Me Bernier. (11 heures)
M. Lalonde: ...Bernier. À la réunion du 27 novembre
1978, il apparaît que M. Laferrière, un des membres du conseil
d'administration, a soulevé un certain nombre de questions sur la
poursuite - qui était alors la poursuite, parce qu'il n'était pas
question de régler hors cour - d'un peu plus de 31 000 000 $ de la SEBJ
contre des syndicats et des individus à la suite du saccage de la
Baie-James, comme on l'appelle.
Naturellement, c'est vous qui avez composé, je suppose, le
procès-verbal. Alors, je ne vous demande pas s'il est complet. On sait
qu'un procès-verbal n'est qu'un procès-verbal. Est-ce qu'en vous
inspirant du procès-verbal et de votre mémoire vous pourriez nous
dire si d'autres questions ont été soulevées par M.
Laferrière à ce moment? Je pense que le procès-verbal fait
état de la capacité de payer et du lien de droit. Est-ce que, par
exemple, la paix industrielle sur le chantier a été
soulevée?
M. Gadbois: Je ne me le rappelle pas, M. le Président. En
fait, la demande de M. Laferrière est venue parce que M.
Laferrière était absent de la réunion qui
précédait cette réunion où le conseil
d'administration avait voté un crédit de 500 000 $ pour pourvoir
aux frais judiriques qui seraient entraînés par la poursuite
l'année suivante, c'est-à-dire en 1979. M. Laferrière
étant absent, il est venu à la réunion suivante et, dans
ce qu'on appelle les affaires découlant de la dernière
assemblée, il a constaté l'approbation de ce crédit.
Alors, il a soulevé cette question pour approfondir un peu plus les
motifs sur lesquels était fondée l'action qui avait
été instituée par la Société
d'énergie de la Baie James.
M. Lalonde: Je vais vous demander si vous avez participé
à la préparation de ce cahier que la SEBJ nous a remis.
M. Gadbois: Je n'y ai pas participé directement,
n'étant plus détenteur des registres de la société
d'énergie; d'autres l'ont fait.
M. Lalonde: Nous avons présumé ici que les seuls
extraits de procès-verbaux qui sont contenus dans les livres de la SEBJ
pour cette période et qui concernent le règlement hors cour nous
ont été remis.
M. Gadbois: Votre présomption est bonne. J'ai eu
l'occasion, évidemment, de repasser à fond ce cahier et je peux
vous confirmer que c'est exact.
M. Lalonde: C'était le but de ma première question,
à savoir si vous aviez participé à la préparation
de ce cahier. Je comprends que vous l'avez vérifié même si
vous ne l'avez pas préparé.
Je m'excuse de revenir sur un sujet que je pensais avoir
complété, c'est-à-dire l'opinion du 9 novembre, mais vous
avez participé au rapport interne - ce qu'on appelle le rapport interne
confidentiel - qui a été soumis à la réunion du 9
janvier. Vous avez participé à sa préparation, votre nom
apparaît. Est-ce exact?
M. Gadbois: En fait, je crois que j'ai
fait la majeur partie de la rédaction de ce rapport, avec l'aide,
évidemment, des autres personnes qui sont mentionnées à la
fin du rapport.
M. Lalonde: Ce rapport interne, je ne le lirai pas ici, car il y
a certains passages qui ont été lus par plusieurs de mes
collègues, qui confirment, par exemple, qu'il serait bon que la
poursuite soit continuée, justement, pour démontrer le
sérieux de la SEBJ dans cette poursuite en cour et, par voie de
conséquence, assurer la paix sur le chantier. Il y a aussi toutes sortes
d'autres considérations. Est-ce que ce rapport interne tient compte de
l'opinion du 9 novembre, dont on ne connaissait pas l'existence et qui revient
le 19 février 1979?
M. Gadbois: Ce rapport était basé essentiellement
sur les opinions qui avaient été remises par Geoffrion et
Prud'homme. Je ne crois pas que nous soyons allés autant dans le
détail que de tenir compte de l'opinion américaine. Le rapport
avait été préparé à la demande du
président-directeur général, M. Laliberté, à
la suite de la réunion du conseil d'administration du mois de novembre,
pour expliquer la situation aux membres du conseil, leur donner l'aspect
général du fondement de l'action, les circonstances qui ont
motivé l'action et des détails. Normalement, un conseil ne
connaît pas réellement tous les détails de l'action, mais
il est au courant par la voie des journaux ou autrement. C'était pour
leur information de façon que, à cette réunion du mois de
janvier, durant laquelle on a considéré une seconde opinion de
Geoffrion et Prud'homme, tous les administrateurs puissent être au
même diapason.
M. Lalonde: Oui. Quand je disais "tient compte", je voulais dire
que... Je vais vous poser la question autrement: Ce rapport interne est-il
conforme à l'opinion du 9 novembre? Est-ce conforme? Est-ce que
ça reflète...
M. Gadbois: Cela ne fait pas mention... M. Lalonde:
Non.
M. Gadbois: ...de cette opinion-là. Mais, en fait, cela en
tient compte, parce que l'opinion de Geoffrion et Prud'homme en tenait
compte.
M. Lalonde: Je vous remercie. Est-ce que, à votre
connaissance - si vous n'en avez pas eu connaissance, vous me le direz - la
paix industrielle du chantier était acquise à la fin de 1978,
comme M. Boyd, je pense, nous l'avait dit ici?
M. Gadbois: Je crois bien que oui. Le chantier était
redevenu paisible et les travaux s'accéléraient.
M. Lalonde: Et encore là - c'est selon votre connaissance
seulement que je vous pose la question - est-ce que la paix industrielle du
chantier, d'après vous, était compromise par la poursuite de
l'action en cour?
M. Gadbois: Si je me fie aux conclusions du rapport que nous
avons fait, nous croyions qu'il était essentiel de faire
déterminer par un tribunal extérieur les responsabilités
des parties pour le saccage. Les gestionnaires de l'entreprise qui ont
signé le rapport avec moi étaient de cette opinion et ils y ont
participé.
M. Lalonde: Je m'excuse, je me suis probablement mal
exprimé, quoique votre dernière réponse soit utile aussi,
mais je vais poser la question autrement. En fait, votre opinion était
que c'était mieux de poursuivre et de laisser un tribunal
décider. Mais est-ce que, d'après vous, cette poursuite de la
cause en cour compromettait cette paix industrielle dont vous venez de dire
qu'elle était déjà acquise à la fin de 1978?
M. Gadbois: Nous n'avions pas d'indication que cela compromettait
cette paix.
M. Lalonde: Je vous remercie. J'aimerais vous poser une autre
question, un peu dans la foulée - comme dirait l'ancien ministre de
l'Éducation - des questions du ministre, en ce qui concerne les
communications que vous auriez pu avoir. Vous avez fait état d'une
rencontre avec deux personnes et vous en avez identifié une, Me
Gauthier. Je ne vous demanderai pas si celui qui l'accompagnait était
petit, chauve et fumait beaucoup.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Gadbois: Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il avait un
habit foncé, c'est tout.
M. Lalonde: J'aimerais savoir si vous avez eu des conversations
avec l'ancien ministre, M. Joron, ou son chef de cabinet d'alors, M. Dumas?
M. Gadbois: Jamais, M. le Président. M. Claude Dumas?
M. Lalonde: Oui, c'est Claude Dumas, je pense, le nom de son chef
de cabinet d'alors?
M. Gadbois: Voici. Claude Dumas, pas au sujet du saccage de la
Baie-James, non.
M. Lalonde: Non. Est-ce que vous avez été
témoin - j'insiste, je veux répéter parce que je ne vous
demande pas, maintenant, si ce sont des communications que vous avez eues - de
communications entre, d'une part, M. Laliberté et - là, j'ai
toute une série de noms - Me Beaulé?
M. Gadbois: Non.
M. Lalonde: Me Jasmin?
M. Gadbois: Oui.
M. Lalonde: Je reviendrai à Me Jasmin, pour le contenu, si
vous voulez. M. Boivin?
M. Gadbois: Non.
M. Lalonde: M. Gauthier?
M. Gadbois: Non plus.
M. Lalonde: Je parle de M. Boivin, du cabinet du premier
ministre, ainsi que de Me Gauthier.
M. Gadbois: Je comprends. Non plus.
M. Lalonde: Ou d'autres personnages politiques du gouvernement,
en particulier M. Joron qui était, à cette époque,
ministre de l'Énergie?
M. Gadbois: Non plus, M. le Président.
M. Lalonde: Revenons à Me Jasmin. Vous avez
été témoin d'une communication ou de plusieurs?
Combien?
M. Gadbois: J'ai été témoin, selon mon
souvenir, d'une réunion qui a eu lieu...
M. Lalonde: Ah oui!
M. Gadbois: ...au bureau du président-directeur
général au début du mois de janvier, c'est-à-dire
le 18.
M. Lalonde: C'est le 17 janvier, je pense.
M. Gadbois: Le 17 janvier.
M. Lalonde: À votre connaissance, M. Laliberté n'a
pas, devant vous, eu d'autres communications? Je ne parle pas seulement de
réunions, mais d'appels téléphoniques avec l'un ou l'autre
de ces messieurs.
M. Gadbois: Pas à ma connaissance, M. le
Président.
M. Lalonde: Je reviendrai à la rencontre du 17 janvier
plus tard. Il y avait d'autres personnes. Je pense qu'il y avait aussi des
représentants de l'étude Geoffrion et Prud'homme. On a fait
état de cette rencontre ici, auparavant.
M. Gadbois: C'est cela. Il y avait Me Cardinal et Me Aquin...
M. Lalonde: C'est cela.
M. Gadbois: ...qui participaient à cette rencontre.
M. Lalonde: On reviendra, si vous voulez, à la
réunion du 17 janvier. Je voudrais connaître les circonstances qui
ont entouré la demande d'ajournement du procès. Si vous
permettez, M. le Président, un petit préambule non inutile, le
procès commençait le 15 janvier 1979. On nous a dit ici, je
pense, que Me Cardinal - le 15 janvier, si je comprends bien, était un
lundi - en fin de semaine, donc, le samedi ou le dimanche
précédent, aurait reçu un appel téléphonique
- je vous demande si c'est vous - qui disait essentiellement que les avocats de
la défense allaient demander un ajournement du procès,
c'est-à-dire que le procès ne commence pas. Deuxièmement,
on demandait à l'étude Geoffrion et Prud'homme d'acquiescer
à cette demande d'ajournement. Je pense - on pourra me corriger si je
fais erreur - qu'on a demandé à la firme Geoffrion et Prud'homme
si cette demande d'ajournement lui avait été communiquée
directement par les avocats des défendeurs. Je crois que la
réponse était négative. Avec qui, à votre
connaissance, les avocats des défendeurs - je présume que c'est
Me Jasmin et/ou Me Beaulé - ont-ils communiqué à la SEBJ
pour faire cette demande d'ajournement?
M. Gadbois: Si vous me le permettez, M. le Président, je
devrai revenir une couple de jours avant, au 10 janvier, en fait, où il
y a eu une rencontre entre Me Rosaire Beaulé et Me Jetté. Me
Beaulé aurait fait part à Me Jetté d'une proposition de
règlement. Ce n'était pas réellement une proposition,
c'était une ouverture plutôt, où on avait mentionné
une somme de 250 000 $.
M. Lalonde: Si vous me permettez de vous interrompre, est-ce la
rencontre fortuite dans un restaurant, dont on a parlé?
M. Gadbois: C'est celle-là. Le lendemain matin, le 11
janvier, je suis avisé par Me Cardinal de cette rencontre. Je passe
à son bureau pour rencontrer Me Jetté et obtenir des
détails sur la rencontre. Me Jetté appelle Me Beaulé
devant moi et lui demande de confirmer la conversation qu'il a eue avec lui, la
veille. Me Beaulé a apparemment confirmé cette conversation;
cependant, ce n'étaient pas des offres
réelles, si vous voulez. C'était simplement une ouverture.
J'en ai fait part au président-directeur général, M.
Laliberté. M. Laliberté nous a demandé, voyant qu'il y
avait une certaine activité qui commençait du côté
d'un des défendeurs, puisque la fin de semaine arrivait, de rester
disponibles au cas où il y aurait une proposition réelle. J'ai
alors demandé les numéros de téléphone des deux
procureurs, c'est-à-dire Me Cardinal et Me Aquin, afin de pouvoir les
rejoindre. (11 h 15)
Sur la fin de l'après-midi du vendredi 12 janvier, j'ai
reçu un appel téléphonique de Me Jasmin qui - les
événements sont très loin - me dit qu'il aurait
communiqué avec Me Cardinal, qui quittait le bureau à peu
près au moment où il a communiqué avec lui, pour lui faire
part du fait que le conseil de son syndicat devait se réunir cette fin
de semaine-là et qu'il y aurait peut-être une proposition de
règlement. Il a demandé à Me Cardinal s'il y avait
possibilité qu'il obtienne une remise de la cause qui devait commencer
le 15, c'est-à-dire le lundi suivant. Me Cardinal lui aurait dit: Je
n'ai pas l'autorité de vous donner cela. Appelez donc Me Gadbois. Je
vous relate ce que Me Jasmin m'aurait dit au début de son appel
téléphonique. Me Jasmin m'a ensuite demandé s'il aurait
possibilité qu'on ne s'oppose pas à une remise. Je lui ai dit que
je verrais ce que je pourrais faire. J'en ai discuté avec le
président-directeur général de la société
et, comme Me Cardinal n'était pas disponible cet
après-midi-là, je l'ai rappelé le lendemain matin pour lui
dire que la société d'énergie ne s'opposerait pas - pas
qu'elle appuierait - à une demande de remise, si elle avait lieu, pour
autant que cette demande était raisonnable, c'est-à-dire à
la condition que ce ne soit pas une remise sine die.
M. Lalonde: Je vous remercie de ces précisions. Cela ouvre
une parenthèse que j'aimerais qu'on explore ensemble. Est-ce que Me
Jasmin, procureur des défendeurs, et Me Beaulé communiquaient
avec vous à propos de la cause?
M. Gadbois: Je n'ai jamais parlé à Me
Beaulé, sauf lorsque je le voyais à la cour, parce que j'ai
assisté à plusieurs des sessions. Je ne lui ai jamais
parlé privément et il ne m'a jamais parlé de cette cause.
Me Jasmin a communiqué cette fois-là et non subséquemment,
sauf durant la rencontre au bureau du président. Il avait
communiqué avec moi précédemment, en 1975, lorsqu'est
venue la question du paiement qu'on devait recevoir des assureurs. Autrement,
je n'ai pas eu de communications directes. D'ailleurs, j'aurais trouvé
drôle que Me Jasmin communique directement avec moi sans passer par les
procureurs qui étaient en titre à la cause.
M. Lalonde: Je vous remercie. Le 15 janvier 1979, le
procès commence. Les avocats de Geoffrion et Prud'homme nous ont dit
qu'ils avaient reçu un mandat d'écouter, à ce
moment-là, les propositions de règlement qui pourraient venir des
défendeurs. Est-ce que vous pouvez nous dire comment ce mandat vous
avait été demandé?
M. Gadbois: Le midi de la première journée de la
cause, c'est-à-dire le 15 janvier, les avocats sont allés
dîner. J'étais présent à ce lunch-là parce
que j'étais à la cour à ce moment-là avec nos
procureurs. Me Beaulé a commencé à faire des ouvertures et
a posé la question: Est-ce que Geoffrion et Prud'homme pouvait
négocier un règlement de la cause? Après avoir fait
certaines vérifications nous en sommes venus à la conclusion que
le seul mandat que nous avions était d'écouter pour savoir s'il y
avait des propositions, et j'en ai fait part à Me Cardinal et à
Me Aquin.
M. Lalonde: Excusez-moi. Quand vous dites: La seule conclusion
à laquelle nous sommes venus...
M. Gadbois: N'ayant pas de mandat de négocier.
M. Lalonde: ..."nous", c'est M. Laliberté. L'avez-vous
consulté à ce moment?
M. Gadbois: Je ne me le rappelle pas, mais j'ai dû le
consulter.
M. Lalonde: Si je comprends bien votre réponse, cela n'a
pas fait l'objet d'un mandat formel écrit.
M. Gadbois: Aucunement. D'ailleurs, ce mandat a été
confirmé le 17, lors de notre réunion et des conversations que
nous avons eues à la fin de la réunion. Il se peut que, lorsque
cette conversation a commencé, j'aie communiqué par
téléphone avec le P.-D.G., mais je ne me le rappelle pas.
M. Lalonde: Venons-en à la réunion du 17, vous
étiez déjà rendu là. Vous êtes présent
avec Me Jasmin, M. Laliberté, Me Cardinal et Me Aquin.
M. Gadbois: C'est cela.
M. Lalonde: Et vous-même?
M. Gadbois: Et moi-même.
M. Lalonde: II n'y avait pas d'autres personnes à cette
réunion?
M. Gadbois: Pas d'autres.
M. Lalonde: On nous a dit que Me Jasmin avait demandé
d'avoir l'occasion de faire valoir - et je cite - "certains arguments qui ne
sont pas nécessairement de nature juridique". Est-ce que vous vous
souvenez quels étaient ces arguments qui ne sont pas de nature
juridique?
M. Gadbois: Heureusement, j'ai conservé certaines notes et
c'est là-dessus que ma mémoire repose. Comme je vous le disais
tantôt, se rappeler d'événements qui peuvent parfois
sembler des événements ordinaires, c'est très difficile,
surtout quand on ne peut pas se souvenir de ce qu'on a mangé la veille.
Cependant mes notes indiquent qu'il avait parlé de paix syndicale sur le
chantier, évidemment. Il disait qu'il avait des difficultés,
qu'il n'était engagé par le syndicat que de semaine en semaine et
qu'il y avait possibilité que le syndicat, finalement, ne soit pas
représenté à l'action, qu'il pouvait retirer ses
représentants du chantier si, évidemment, on continuait à
poursuivre l'action et qu'on le mettait dans l'impossibilité de
continuer en affectant les cotisations syndicales. Il a parlé de
faillite, etc. Il a fait valoir probablement tous les arguments qui
permettaient de dire: Pourquoi poursuivez-vous le syndicat, et un syndicat si
pauvre?
M. Lalonde: Quand vous avez parlé de paix syndicale, au
meilleur de votre souvenir, est-ce que Me Jasmin a indiqué de quelle
façon cette paix syndicale pouvait être compromise,
brisée?
M. Gadbois: II n'en a pas parlé. Il a dit que la paix
syndicale existait alors. Mais, sur le simple fait d'en avoir parlé, je
ne veux pas donner d'opinion.
M. Lalonde: Sur les 23 et 30 janvier, nous avons des petits
problèmes ici à cette commission. On sait qu'on a parlé du
règlement, mais le procès-verbal de ces deux réunions ne
reflète aucune décision, enfin, aucune discussion de ce
règlement. Prenons le 23 janvier. Est-ce que vous avez souvenir de ce
qui a été discuté, d'après vos notes, par exemple,
du contenu des discussions à propos du règlement?
M. Gadbois: Le 23 janvier, en fait, c'est la première fois
que le conseil d'administration voyait les offres de règlement qui
avaient été reçues, et de la part de Me Jasmin et de Me
Beaulé. Il y a eu, évidemment, des discussions au conseil parce
que, le 24, j'écrivais à Geoffrion et Prud'homme pour leur faire
part de certaines demandes du conseil.
Je dirais que les motifs pour lesquels le procès-verbal ne fait
pas mention de ces discussions au moins - sans les préciser, il aurait
pu les mentionner - c'est que le 24 janvier, dès le lendemain, CKAC
annonçait publiquement que l'action était réglée
pour 125 000 $. Vu que le conseil d'administration n'avait donné aucun
mandat de règlement a ce moment ou de négociation pour
régler, le juge ayant fait des commentaires le matin du 24, le conseil
d'administration a jugé bon de ne rien inclure dans le
procès-verbal. C'est pour cela, je crois; c'est le motif pour lequel les
réunions des 23 et 30 janvier ne contiennent pas de mention du fait
qu'il y ait eu des délibérations vis-à-vis de
l'action.
M. Lalonde: Oui, je comprends. Cela nous a été
expliqué. Mais, pour le contenu des discussions, est-ce que le conseil
d'administration, d'après votre souvenir - je comprends que vous pouvez
ne pas vous en souvenir du tout - était plutôt favorable au
règlement hors cour à ce prix?
M. Gadbois: Je ne pourrais pas dire que le conseil
d'administration était favorable ou non. Ce que le conseil
d'administration a demandé, c'est plus de précisions sur le plan
légal, sur les moyens de payer du syndicat; il a également
demandé ou suggéré que des modifications soient
apportées dans les déclarations de transactions que Me
Beaulé avait déposées. C'est constaté par la lettre
du 24 janvier que j'ai adressée à Geoffrion et Prud'homme et qui
fait partie du dossier.
M. Lalonde: Est-ce qu'on peut dire que la lettre du 26 janvier de
Geoffrion et Prud'homme donnait suite à cette demande de
précisions du conseil d'administration?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Lalonde: Si on vient au 30 janvier maintenant, le 30 janvier,
le procès-verbal ne fait pas état, non plus, de discussions sur
le règlement. Mais ici - plusieurs l'ont mentionné, y compris le
président du conseil d'administration, M. Saulnier, le président
d'alors - est-ce que vous pouvez nous donner un compte rendu rapide, succinct,
de ce qui a été discuté à la lumière des
nouvelles informations obtenues entre-temps, entre le 23 et le 30 janvier?
M. Gadbois: Autant que je me souvienne, la discussion sur la
question du saccage, à la réunion du 30 janvier, a
été assez brève. M. Giroux a aidé à mon
souvenir lorsqu'il a déclaré qu'il avait proposé ou
suggéré au conseil d'administration que le président du
conseil et les deux présidents-directeurs généraux
d'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la
Baie James consultent le premier ministre pour avoir son opinion sur la
possibilité d'un
règlement.
M. Lalonde: Je vais vous poser la même question - je l'ai
seulement en mémoire, c'est possible que je n'emploie pas les
mêmes termes - à propos de la réunion du 30 janvier que
celle que je vous ai posée pour le 23. Est-ce que le conseil
d'administration, à ce moment, le 30, favorisait, était
prêt à accepter un règlement? (11 h 30)
M. Gadbois: Je ne peux me souvenir, n'ayant pas de document sur
lequel me reposer, mais je crois qu'à ce moment c'était encore de
l'exploration, c'est-à-dire que c'était pour avoir de
l'information pour en arriver à une décision, finalement.
M. Lalonde: Je vous remercie. Avant d'arriver à la
prochaine réunion, qui est le 6 février, si je comprends
bien...
M. Gadbois: C'est exact.
M. Lalonde: ...le 2 février, on a appris ici que M.
Boivin, chef de cabinet du premier ministre, a convoqué Me Aquin et Me
Cardinal à "luncher" et il les a mis au courant d'une réunion qui
a précédé, la veille, entre le premier ministre, M. Boyd,
M. Laliberté et M. Saulnier, à laquelle M. Boivin participait.
À cette réunion, nous a-ton dit, M. Boivin a annoncé que
deux rapports allaient leur être remis: un de Me Beaulé, avocat du
syndicat américain, et un de Me Jasmin, avocat des défendeurs
canadiens. Si je fais erreur dans ma description, parce qu'il est possible que
ce soit vous qui avez mis au courant Mes Geoffrion et Prud'homme de ces
rapports, vous pouvez donner la précision. Qui vous a vous-même
mis au courant de l'existence de ces rapports et du fait que ces
rapports-là seraient remis à Mes Geoffrion et Prud'homme?
M. Gadbois: Je ne connaissais pas l'existence de ces rapports.
Toutefois, je dois dire qu'à cette date ou environ, le président
du conseil avait formulé le voeu, pour étoffer le dossier,
d'avoir peut-être plus de détails sur les difficultés
financières des syndicats québécois et des syndicats en
général. Je crois que j'ai probablement parlé au
téléphone à Me Cardinal le matin du même jour. Mais
c'est tout ce que je sais, à ma connaissance. La suite est que j'ai vu
quelques jours après les rapports qui nous ont été
soumis.
M. Lalonde: Quelques jours après. Pouvez-vous
préciser? Était-ce à la réunion du 6 février
ou auparavant?
M. Gadbois: C'était le 5 février.
M. Lalonde: Le 5 février. Le 8 février, Me Aquin
vous a appelé, nous a-t-il dit. Il nous a décrit que cet appel
téléphonique - je ne suggère pas que c'est à votre
connaissance - faisait suite à un appel téléphonique de M.
Boivin, chef de cabinet du premier ministre, qui s'informait s'il était
exact que le syndicat américain refusait de reconnaître sa
responsabilité. Me Aquin, d'après ce qu'on nous a dit, vous
aurait appelé à ce moment-là et aurait parlé avec
vous de cette question de la difficulté d'obtenir du syndicat
américain la reconnaissance de la responsabilité. Est-ce
exact?
M. Gadbois: C'est exact. En revenant à la réunion
du conseil d'administration tenue le 6 février, le mandat qui avait
été donné aux procureurs comportait, notamment, que chaque
défendeur, que ce soit un organisme ou une personne, reconnaisse sa
responsabilité pour les dommages. Le 7 février, j'ai transmis ce
mandat à Geoffrion et Prud'homme. J'ai reçu, un peu plus tard
dans la même journée, un appel de Me Aquin concernant l'aveu de
responsabilité du local 134. Il m'avise qu'il aurait des
difficultés à l'avoir. Je lui ai confirmé que
c'était nécessaire de l'avoir. Le lendemain, le 8 février,
il me rappelle, toujours concernant la même question des aveux de
responsabilité, et il me dit que le syndicat américain,
c'est-à-dire Me Beaulé, refuse absolument de reconnaître
une responsabilité.
Je lui ai répondu à ce moment-là que,
évidemment, devant un refus total, il y aurait peut-être lieu de
sonder le conseil d'administration de la société et je lui ai
dit: Pour l'instant, acceptons ou essayons de voir de cette façon
quelles seront les choses et on le soumettra au conseil. À la
réunion du 20 février, le conseil a pris connaissance de ces
diverses matières et a encore confirmé qu'il voulait avoir l'aveu
de responsabilité de tous les syndicats. Ce n'était pas une
question de... Mon appel téléphonique avec Me Aquin était
simplement pour dire: On verra ce qui arrivera.
M. Lalonde: Je vous remercie de ces précisions. J'avais
compris que, selon les témoignages que j'ai entendus jusqu'à
maintenant, au cours de cet appel téléphonique du 8
février, vous n'aviez pas tellement insisté sur la reconnaissance
ou l'aveu de responsabilité, mais ce n'est pas ce que vous venez de nous
dire.
M. Gadbois: Si je peux préciser un peu, je n'ai pas
tellement insisté devant le refus absolu de Me Beaulé.
M. Lalonde: Est-ce que vous en avez parlé à M.
Laliberté, à ce moment-là?
M. Gadbois: J'ai pu le faire, mais je ne m'en souviens pas.
M. Lalonde: Donc, si vous ne vous souvenez pas de lui en avoir
parlé, vous ne vous souvenez sûrement pas de ce qu'il avait dit,
fatalement. Étiez-vous au courant des visites que les procureurs, Mes
Jasmin et Beaulé, les avocats des défendeurs, faisaient au bureau
du premier ministre et de ce qu'on a appris ici par une liste
déposée par le premier ministre lui-même à la
commission parlementaire?
M. Gadbois: Je l'ai également appris ici.
M. Lalonde: Étiez-vous au courant que vos propres avocats,
Geoffrion et Prud'homme, avaient aussi eu des communications comme -
précisons - le lunch du 2 février, l'appel
téléphonique de Me Boivin, chef de cabinet du premier ministre,
à Me François Aquin, du bureau de Geoffrion et Prud'homme?
Étiez-vous au courant de cela?
M. Gadbois: Je n'étais pas au courant de ces
communications et de ces rencontres. Toutefois, je dois préciser que je
savais que Me Cardinal était un ami de Me Boivin et qu'il aurait pu me
mentionner, à un moment donné, qu'il arrivait de ou qu'il allait
chez Me Boivin, mais cela ne m'aurait pas indiqué qu'il y avait quelque
chose d'insolite qui se passait ou autre chose. En d'autres mots, cela fait
assez longtemps que je connais Me Cardinal, on a travaillé ensemble dans
le dossier de Terre-Neuve, le contrat de Churchill, et je savais qu'il voyait
Me Boivin occasionnellement, mais pas plus.
M. Lalonde: J'aimerais que vous apportiez une précision
lorsque vous dites que cela ne vous aurait pas paru insolite; je pense que
c'est le mot que vous avez employé. Est-ce que, autrement dit, Me
Cardinal vous a dit qu'il avait discuté d'un règlement possible
avec M. Boivin?
M. Gadbois: Jamais.
M. Lalonde: J'ai mentionné deux communications. Je
n'oublie pas les autres, naturellement. Vous avez vous-même parlé
de M. Cardinal qui a eu, je crois, deux visites au bureau de M. Boivin. Est-ce
que Me Aquin vous a aussi parlé de la visite qu'il a faite et de la
communication qu'il a eue avec Me Gauthier, du bureau du premier ministre?
M. Gadbois: II ne m'en a pas parlé.
M. Lalonde: Est-ce que je vous traduis bien en concluant, si vous
me le permettez,
M. le Président, que les avocats de Geoffrion et Prud'homme ne
vous ont jamais fait rapport des communications qu'ils avaient avec le bureau
du premier ministre quant à cette cause?
M. Gadbois: C'est exact, M. le Président.
M. Lalonde: Je vais vous poser une question, Me Gadbois - vous
allez peut-être avoir de la difficulté à y répondre,
vous le me direz - sur l'évolution, le cheminenent que M. Claude
Laliberté, le président-directeur général de la
SEBJ, nous a décrit ici à cette commission, qui l'a amené
à éventuellement favoriser un règlement hors cour. Je vous
demande seulement si à votre connaissance, vous avez été
témoin de faits, de conversations qui vous ont fait suivre ce
cheminement de M. Laliberté.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Dans un premier temps, je voudrais féliciter
le député de Marguerite-Bourgeoys pour la façon dont il
pose ses questions ce matin.
M. Gratton: II n'y a rien de changé.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
M. Gratton: M. le ministre...
M. Duhaime: Mais je dois, à ce moment-ci, m'opposer...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Lalonde: Je suis l'exemple de mes collègues, tout
simplement
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît: S'il vous plaît!
M. Gratton: La différence se retrouve peut-être chez
le témoin, M. le Président.
M. Duhaime: Je ne voudrais pas...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! Je pense, M. le député de Gatineau, que ce
n'était pas nécessaire d'affirmer cela.
M. Gratton: Je le pense, néanmoins, M. le
Président.
M. Duhaime: Je vais me convaincre moi-même, M. le
Président, de ne pas aller plus loin dans cette voie. C'est bien
ressenti, ce que je viens de dire à l'endroit du
député
de Marguerite-Bourgeoys.
Maintenant, sur la question qui vient d'être posée, je vais
m'opposer, parce que c'est une question qui, à mon sens, est tout
à fait irrecevable pour les raisons suivantes. M. Claude
Laliberté a témoigné ici. Il a été devant la
commission pendant de longues heures, à mon sens, de trop longues
heures. Il a donné sa version des faits et son témoignage a
été fait ici sous serment en entier.
Ce que vous demandez à Me Gadbois, c'est une opinion personnelle
quant à l'évolution ou quant au témoignage rendu par M.
Laliberté devant cette commission. Vous demandez à un
employé permanent, qui est chef du contentieux à
Hydro-Québec et qui, à l'époque, était
également un officier de la SEBJ, qui en était secrétaire,
de porter un jugement de valeur, parce que c'est vraiment une
appréciation que vous avez demandée.
Je n'aurai pas d'objection si vous voulez vous y prendre autrement.
M. Lalonde: Je vais reprendre cela.
M. Duhaime: Mais, si vous tenez à la formuler de cette
façon, je vais m'opposer à nouveau.
M. Lalonde: Je prévoyais que j'aurais de la
difficulté, M. le Président. J'en avais même avisé
Me Gadbois.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: C'était plutôt une question pour situer
une autre question plus précise au cas où vous auriez eu un
souvenir de faits, de conversations qui vous auraient indiqué cette
évolution. Je vous ai posé une question générale,
mais je vais y aller plus précisément. Est-ce que M.
Laliberté vous a mis au courant personnellement de la rencontre qu'il a
eue avec M. Boivin, chef de cabinet du premier ministre, le 3 janvier 1979,
réunion à laquelle M. Boivin aurait -et là j'espère
que je traduis bien tout ce qu'on a entendu là-dessus - exprimé
à M. Laliberté le souhait que le premier ministre voulait un
règlement hors cour ou, enfin, que la poursuite soit abandonnée
et qu'un règlement ait lieu?
M. Gadbois: Non, M. le Président.
M. Lalonde: Est-ce qu'il en a fait part au conseil
d'administration postérieurement, c'est-à-dire après le 3
janvier?
M. Gadbois: Pas en ma présence, M. le Président.
(11 h 45)
M. Lalonde: Est-ce que M. Laliberté, au cours de
conversations, vous a indiqué qu'il était, à un moment
donné - on verra quand, si jamais votre réponse est affirmative -
en faveur du fait que la SEBJ cesse de poursuivre les syndicats, enfin, les
défendeurs, dans cette cause?
M. Gadbois: Je ne crois pas que M. Laliberté m'ait fait
mention, en aucun temps, qu'il était en faveur que la compagnie
règle la cause. Il était, évidemment, réceptif
à une offre de règlement, puisqu'il nous avait demandé
d'être à l'écoute quant à la possibilité de
recevoir des offres, mais il n'est pas allé plus loin.
M. Lalonde: Est-ce que vous parlez du 15 janvier?
M. Gadbois: Oui.
M. Lalonde: J'aurais une dernière question - à
moins que votre réponse ne m'en inspire d'autres - assez précise.
Au ruban 660, M. Saulnier, l'ancien président du conseil
d'administration de la Société d'énergie de la Baie James,
a dit ceci: "C'est le chef du contentieux de la SEBJ qui faisait les demandes
pour obtenir plus d'argent." Je pense que cette question lui avait
été posée dans le contexte suivant: Qui négociait
les montants? Qui? Qui avait le mandat? Quel était ce mandat, à
vous donné, pour aller chercher plus d'argent? Est-ce que c'est
exact?
M. Gadbois: En fait, la façon dont je percevais mon
rôle comme chef du contentieux, c'était de transmettre les voeux
du conseil d'administration aux avocats qui oeuvraient dans le dossier. Ces
voeux ont été transmis à au moins deux reprises, suivant
la réunion du 6 février et celle du 20 février. La demande
du conseil était, le 6 février, d'essayer d'obtenir un montant
acceptable pour la société et, le 20 février, d'essayer
d'obtenir un montant qui soit substantiellement égal au montant des
frais judiciaires que la compagnie avait engagés dans la cause.
M. Lalonde: Avant le 6 février 1979, est-ce que, vous,
comme chef du contentieux, aviez un mandat pour parler d'argent, de
négociation d'argent, dans un règlement hors cour de cette
cause?
M. Gadbois: Aucunement.
M. Lalonde: Je vous remercie, Me Gadbois, de votre
collaboration.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont.
M. Rodrigue: M. Gadbois, lors de
l'audition de la cause devant la Cour supérieure, il y a un M.
Marcel Audet qui a été appelé à témoigner.
Je veux vous demander, si possible, de préciser pour qui travaillait M.
Marcel Audet à cette époque et quelle était sa fonction,
à l'époque du saccage du chantier de LG 2, bien sûr.
Êtes-vous en mesure de le faire?
M. Gadbois: Je ne m'en souviens pas. Il faudrait qu'on
vérifie dans le dossier pour voir exactement qui il
représentait.
M. Rodrigue: Écoutez, je vais garder la question en
suspens et, si c'est possible de le faire au cours de votre témoignage,
vous pourrez répondre à la question plus tard.
Lors de la visite de Me Yves Gauthier à vos bureaux, que vous
avez mentionnée plus tôt dans votre témoignage, est-ce que
M. Gauthier vous a dit ou vous a indiqué qu'il était adjoint au
bureau du premier ministre?
M. Gadbois: Je ne le savais pas à ce moment-là, je
l'ai appris depuis.
M. Rodrigue: Alors, lorsque M. Gauthier vous a
rencontré... Vous rappelez-vous à quelle date?
M. Gadbois: Je ne me souviens pas de la date. C'était
à l'automne 1978, autant que je me souvienne.
M. Rodrigue: À l'automne 1978.
M. Gadbois: II ne s'est présenté que comme
ex-tuteur du syndicat 791.
M. Rodrigue: Donc, vous l'avez reçu comme ex-tuteur et M.
Gauthier - il ne l'était peut-être pas à ce
moment-là non plus - n'a pas invoqué de qualité d'adjoint
au premier ministre lors de cette rencontre, et vous, vous ne le saviez pas non
plus?
M. Gadbois: Aucunement, M. le Président. Même que je
me demande... Je n'ai ni vu, ni connu M. Gauthier qui est au cabinet du premier
ministre. Réellement, il faudrait que je le voie pour dire si c'est la
même personne.
M. Rodrigue: Très bien. Me Gadbois, l'action devant la
Cour supérieure a été intentée en février
1976, si je me souviens bien. À votre connaissance, est-ce que le
premier ministre du temps, M. Robert Bourassa, avait été
consulté par les autorités de la Société
d'énergie de la Baie James, avant le dépôt de cette action
en Cour supérieure?
M. Gadbois: Je crois que oui. Je me fie sur une
déclaration que M. Giroux aurait faite - M. Giroux était alors le
président du conseil d'administration de la Société
d'énergie de la Baie James - précédemment ou après
l'institution de l'action qui a été prise.
M. Rodrigue: Avez-vous appris cela de la bouche même de M.
Giroux?
M. Gadbois: Oui.
M. Rodrigue: Vous l'avez appris de la bouche de M. Giroux. Vous
rappelez-vous à quel moment?
M. Gadbois: Je ne pourrais pas vous le dire. Je vous ai dit:
Probablement juste avant ou après. Je ne le sais pas.
M. Rodrigue: Avant ou après sa rencontre avec M. Robert
Bourassa?
M. Gadbois: Non, non. M. Rodrigue: Non?
M. Gadbois: Non, non. Avant ou après l'institution de
l'action, en 1976.
M. Rodrigue: L'institution de l'action, donc, autour de
février 1976. Est-ce que vous avez discuté avec M. Giroux du
contenu de ses conversations avec M. Bourassa, à ce
moment-là?
M. Gadbois: Aucunement. C'est une... M. Bourbeau: Question
de règlement.
M. Rodrigue: C'est une question de fait, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui. Je m'excuse.
M. Rodrigue: Ce n'est pas une question d'opinion.
Le Président (M. Jolivet): Non, non, je sais. C'est
simplement pour bien clarifier la situation.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, je veux seulement vérifier ce qui ne va pas, pour m'assurer que
je suis correct.
M. Bourbeau: Je n'ai pas d'objection à la question, M. le
Président, mais je veux souligner qu'on parle de faits qui se sont
passés en 1976, donc, qui sont un petit peu en dehors du mandat qui est
d'examiner les circonstances entourant la décision du conseil
d'administration de régler. Ce sont des
événements de 1979. Je n'ai pas d'objection à ce
qu'on parle de 1976, mais on parlera de 1981 aussi, après.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: S'il y a eu un règlement, M. le
Président, c'est parce qu'il y a eu des procédures qui ont
été prises. Dans quelles circonstances ces procédures
ont-elles été prises pour qu'il y ait eu règlement? Cela
fait partie, je crois, des questions du député de Vimont.
M. Lalonde: S'il y a eu procédure, c'est parce qu'il y a
eu un saccage. S'il y a eu un saccage, c'est parce qu'il y avait une baie
James. S'il y avait une baie James, c'est parce que...
M. Laplante: S'il y a eu un règlement, c'est parce qu'il y
a eu...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Vimont. Est-ce que vous aviez bien compris la
question?
M. Gadbois: J'ai compris la question. La seule réponse que
je puisse vous donner, c'est qu'à un conseil d'administration le
président du conseil...
M. Rodrigue: Qui était monsieur? M. Gadbois: ...qui
était M. Giroux... M. Rodrigue: Très bien.
M. Gadbois: ...a déclaré qu'il avait
consulté le premier ministre relativement à la prise d'action
contre les auteurs du saccage.
M. Rodrigue: Si je comprends bien, vous étiez
présent à ce conseil d'administration?
M. Gadbois: J'étais secrétaire pendant toute cette
période.
M. Rodrigue: Très bien. Est-ce que M. Giroux avait fait
part du contenu de sa conversation au conseil d'administration?
M. Gadbois: Non. Il a simplement mentionné qu'il l'avait
consulté. C'est tout.
M. Rodrigue: Tout simplement, il a relaté qu'il l'avait
consulté.
M. Gadbois: Et le fait que le conseil d'administration ait
autorisé l'institution de l'action m'indiquait que c'était
favorable.
M. Rodrigue: Que la consultation avec M. Robert Bourassa avait
été favorable?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Rodrigue: Bon. Mais le contenu comme tel, vous n'êtes
pas en mesure d'en parler parce que M. Giroux n'en a pas parlé au
conseil d'administration.
M. Gadbois: Aucunement.
M. Rodrigue: Très bien, merci. Lors de l'institution de
l'action en février 1976, la réclamation qui est contenue, je
pense, dans les documents qui ont été déposés en
Cour supérieure est de l'ordre de 31 000 000 $. C'est la
réclamation globale qui a été faite par la SEBJ pour des
dommages causés sur le chantier. L'action déposée, en
février 1976, si je me souviens bien, était d'environ 31 000 000
$. Est-ce exact?
M. Gadbois: C'est exact. Un peu plus que 31 000 000 $.
M. Rodrigue: Avez-vous participé à la
préparation de cette action et, en particulier, à la compilation
des montants des divers chapitres de la réclamation pour en arriver au
total de 31 000 000 $?
M. Gadbois: Je n'ai pas participé directement à
l'établissement des montants des dommages...
M. Rodrigue: Des quanta?
M. Gadbois: ...des quanta, si vous voulez. Cela a
été fait par nos procureurs, consultant les diverses directions
qui étaient responsables soit de la construction ou des assurances, des
réclamations et le reste. Je n'ai pas participé à ce
côté-là de l'affaire.
M. Rodrigue: Quand vous parlez des procureurs consultant, vous
vous référez à?
M. Gadbois: Me Jetté, particulièrement, qui
était assisté d'autres avocats de son étude.
M. Rodrigue: Alors, c'est l'étude Geoffrion et Prud'homme
qui est au dossier depuis le début?
M. Gadbois: C'est cela.
M. Rodrigue: Pas depuis le début, mais, enfin, qui
était là à ce moment-là. Dans l'avis qu'ils vous
ont transmis le 26 février 1979 - c'est quand même trois ans plus
tard...
M. Gadbois: Je pourrais préciser. C'est peut-être le
26 janvier.
M. Rodrigue: Vous avez raison, c'est le 26 janvier 1979. Je vous
remercie de la
correction. Les procureurs Geoffrion et Prud'homme sont donc les
mêmes procureurs qui initialement avaient compilé une
réclamation de 31 000 000 $. Là, je vous réfère
à la page 7 de cet avis, qui est la page 61 du document
déposé par les procureurs Geoffrion et Prud'homme,
intitulé Correspondance et lettres du cabinet Geoffrion, Prud'homme,
contenant leurs opinions. On trouve l'opinion à la page 55 et, à
la page 61 du document, les procureurs vous disent ceci - et cela, c'est en
1979, donc trois ans après l'institution de la poursuite - "En
résumé, la réclamation totale peut se détailler
comme suit: "A. Les postes suivants sont juridiquement fondés et, selon
notre opinion, devraient être maintenus." Là, il y en a pour 17
196 419,12 $. "B. Les postes de réclamation suivants, bien que
prouvables, risquent d'être rejetés pour raison de force majeure
et de non-subrogation; "C. Les postes de réclamation qui suivent sont
juridiquement discutables puisqu'ils peuvent être
considérés comme des dommages indirects; "D. Le poste suivant est
inadmissible; "E. Le poste de réclamation suivant devrait être
abandonné; "F. Quant au chapitre des assurances, étant
donné les récentes révisions de vos assureurs, il nous est
impossible à l'heure actuelle de déterminer le montant
prouvable."
Est-ce que je dois comprendre que les mêmes procureurs qui, au
départ, avaient déposé une poursuite de 31 000 000 $, dans
cet avis du 26 janvier, étaient en train de vous dire à la SEBJ
que, finalement, ils n'étaient en mesure de prouver que 17 196 419,12
$?
M. Gadbois: C'est exact, mais je crois que je devrais apporter
une précision à ce moment-ci. C'est que les procureurs Geoffrion
et Prud'homme n'ont été introduits dans le dossier qu'à la
fin de septembre 1975. Le conseil d'administration de la société
d'énergie avait, le 1er octobre 1974, mandaté l'étude
Pouliot, Dion et Guilbault pour donner une opinion à la
société d'énergie et prendre action, s'il y avait lieu.
Toutefois, cette étude n'avait pas pu mettre sur pied... Je crois que
cette situation-là est relatée dans le rapport qui a
été présenté à la réunion du 7
janvier 1979 au conseil d'administration. Ce n'est qu'au cours du mois de
septembre 1975 que nous sommes venus à la conclusion que le temps
passait et qu'il fallait absolument faire quelque chose pour rectifier la
situation. Nous avons donc suggéré à Me Pouliot que le
bureau de Geoffrion et Prud'homme, qui semblait avoir les ressources
nécessaires et que nous connaissions, pouvait apporter de l'aide et agir
conjointement. Le bureau n'avait que du mois de septembre jusqu'à la
prescription, c'est-à-dire au mois de mars de l'année suivante,
pour préparer l'action, aller dans tous les fondements et faire
ressortir les dommages. Devant ce court laps de temps, ils ont tout mis dans
l'action, c'est-à-dire qu'ils ont mis ce qu'on appelle
communément le paquet, quitte à prouver la validité ou la
non-validité, plus tard, de certains chefs de réclamation. (12
heures)
M. Rodrigue: Si je vous comprends bien, ils n'ont pas couru de
risque, ils ont tout mis, quitte à préciser plus tard et à
réduire, si nécessaire. Une fois l'action déposée
devant la Cour supérieure, il est évident qu'ils n'auraient pas
pu ajouter, je pense. C'est cela?
M. Gadbois: Cela devenait prescrit.
M. Rodrigue: Cela devenait prescrit à ce moment. Il n'y
avait pas possibilité d'ajouter; donc, ils ont mis tout le paquet.
M. Gadbois: C'est cela.
M. Rodrigue: Et, par la suite, ils ont précisé et
ils arrivent, finalement, au chiffre de 17 196 419,12 $, qui était le
montant qu'eux estiment être capables de prouver.
M. Gadbois: On me fait remarquer qu'ils auraient pu l'amender
pour l'augmenter également, mais c'est toujours plus facile de
réduire que d'augmenter.
M. Rodrigue: Dans votre témoignage,
précédemment, vous avez fait état d'une rencontre - si je
me souviens bien, c'est avec M. Laferrière, mais je n'en suis pas
absolument sûr, vous pourrez me le préciser - où on vous
aurait dit: Si on obtient jugement, qu'est-ce qu'on fera ensuite? Qui a
posé cette question? Vous le rappelez-vous? Vous en avez parlé
plus tôt dans votre témoignage; malheureusement, j'ai saisi ce
bout, mais je n'ai pas saisi le nom de la personne à laquelle vous
référiez.
M. Gadbois: Ce n'est pas une question précise d'un membre
du conseil.
M. Rodrigue: C'est lors d'une réunion du conseil?
M. Gadbois: C'est plutôt la façon dont le conseil a
évolué. En d'autres mots, au début de janvier, le conseil
était plutôt concerné par les liens de droit qui pouvaient
être établis, les liens de responsabilité; c'est cette
question qui a été examinée au cours du mois de janvier.
Vers le début du mois de février, c'est là qu'on a
commencé - quand je dis "on", ce n'est pas un souvenir précis
que j'ai; c'est la totalité des délibérations du
conseil - à s'interroger sur ce qui arriverait une fois le jugement
obtenu ici au Québec. En d'autres mots, lorsque les rapports ont
été faits sur les capacités financières de payer,
le conseil d'administration, ayant reçu des rapports de Geoffrion et
Prud'homme sur cette capacité de payer, en est venu à la
conclusion que le seul organisme qui pouvait réellement défrayer
le coût complet des dommages, c'était le syndicat
américain.
M. Rodrigue: Est-ce pour cela et est-ce à la suite de cela
qu'on a commencé à explorer les chances d'étendre un
jugement canadien aux États-Unis, ce que vous avez appelé
l'exemplification? Est-ce à partir du moment où on a
constaté que les syndicats canadiens n'étaient pas solvables et
que seul le syndicat américain était solvable qu'on a
examiné les possibilités d'obtenir un jugement aux
États-Unis?
M. Gadbois: C'est à peu près à ce moment,
malgré le fait que nous avions demandé à nos procureurs
d'obtenir des rapports des avocats américains sur le droit
américain, premièrement sur la responsabilité en droit
américain d'organismes ou de personnes pour des dommages et,
deuxièmement, sur ce que ça prenait pour faire exemplifier un
jugement. Toute cette situation est venue progressivement; cela n'est pas venu
tout d'un coup ou cela n'est pas venu à la demande d'une personne en
particulier.
M. Rodrigue: Dans une conversation dont vous avez eu
connaissance, Me Jasmin vous aurait demandé que certains
éléments qui n'étaient pas de nature juridique soient
considérés pour examiner la possibilité de
règlement hors cour et, en particulier, il vous aurait parlé de
paix syndicale, qu'il n'était engagé par le syndicat qu'il
représentait que de semaine en semaine et que le syndicat pouvait
retirer ses représentants du chantier. Il vous a également
parlé de faillite du syndicat. Dans quel sens vous a-t-il parlé
de faillite du syndicat? Quelles auraient été les
conséquences d'une telle faillite sur la cause s'il y avait eu un
jugement accordant des dommages à la SEBJ?
M. Gadbois: Évidemment, lorsqu'il nous a parlé de
paix syndicale, c'est ce qui existait au moment où il nous a
parlé. Il a fait mention de faillite du syndicat dans le sens que, si
nous poursuivions le syndicat pour les sommes impliquées dans l'action,
le syndicat deviendrait incapable de payer un tel montant et que le seul
recours qu'il y aurait serait de déclarer faillite. Il n'est pas
allé plus loin. Cependant, nous avons pris la déclaration qu'il
avait faite comme telle.
M. Rodrigue: Maintenant, si un syndicat déclare faillite
dans ces circonstances...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
dois vous arrêter; si Me Gadbois avait commencé à parler,
je l'aurais arrêté. Cette partie est une question d'opinion et je
la juge irrecevable.
M. Rodrigue: Laquelle?
Le Président (M. Jolivet): La dernière partie de
votre question: Quelles seraient les conséquences d'une faillite du
syndicat sur la cause?
M. Lalonde: C'est hypothétique. C'est très
hypothétique.
Le Président (M. Jolivet): Je ne peux pas l'accepter.
M. Gratton: Vous avez le même problème que moi, M.
le député?
M. Lalonde: Entre ingénieurs, vous vous comprenez.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Rodrigue: Me Gadbois, d'après vos connaissances comme
avocat, est-ce que vous pensez qu'un syndicat qui fait faillite peut être
en mesure de payer un jugement?
M. Gadbois: Évidemment, toute personne, que ce soit un
syndicat ou un autre, qui fait faillite a de la difficulté à
payer un jugement. C'est de cette seule façon que je peux
répondre.
M. Rodrigue: J'ai interrogé des membres du conseil
d'administration à cet effet et un certain nombre d'entre eux m'ont
mentionné que cela avait été un élément
important dans la décision qu'ils avaient eu à prendre de
régler hors cour, le fait qu'une fois un jugement prononcé par le
tribunal il aurait été extrêmement difficile de
l'exécuter. M. Saulnier, dans ses notes écrites
déposées ici, a même souligné cela d'une
façon très explicite. En somme, on a beau condamner un syndicat
à 17 000 000 $...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député.
M. Rodrigue: Oui.
Le Président (M. Jolivet): Je voudrais vous arrêter
parce que j'ai demandé ce matin au député de Gatineau,
s'il n'avait plus de questions, de passer aux commentaires. Je pourrais vous le
permettre, mais je voudrais d'abord savoir si vous avez
des questions.
M. Rodrigue: M. le Président, je faisais
précéder ma question d'un préambule...
Le Président (M. Jolivet): J'ai refusé...
M. Rodrigue: ...qui était nécessaire pour faire
comprendre ma question.
Le Président (M. Jolivet): Non.
Justement, je voudrais que vous posiez votre question et que vous
fassiez vos commentaires ensuite.
M. Rodrigue: Oui. Sur un autre sujet, M. Gadbois, le rapport de
la commission Cliche a établi très clairement que des tractations
avaient eu lieu entre des dirigeants de la SEBJ, M. Paul Desrochers, adjoint
spécial au premier ministre, M. Robert Bourassa, de même que les
représentants de la FTQ-Construction, pour accorder un monopole syndical
au syndicat de la FTQ-Construction. Effectivement, je vous réfère
à la page 28 du rapport de la commission Cliche où on dit: "On
regrette que MM. Desrochers et Giroux aient abordé avec la FTQ la
possibilité d'accorder à celle-ci un monopole syndical sans en
informer la CSN ou la CSD..." Également, à la page 292 du
rapport, on dit: "II convient maintenant d'étudier le comportement de M.
Paul Desrochers, ex-conseiller spécial au bureau du premier
ministre."
Je poursuis la citation: "On se souviendra que c'est à son
initiative que certaines rencontres eurent lieu avec les dirigeants de la FTQ
et ceux de la Baie-James. Ces rencontres avaient pour but de reproduire au
Québec ce qui s'était passé à Churchill Falls:
monopole syndical en échange de dix années sans grève. Les
démarches de M. Desrochers étaient importantes puisqu'elles
impliquaient de graves conséquences. Alors que le pluralisme syndical
est la règle, la proposition de M. Desrochers allait à l'encontre
de ce principe."
Je poursuis toujours la citation: "Des séances dites
"exploratoires" furent tenues pendant plusieurs mois entre la FTQ et les
autorités de la Baie-James. Ni la CSN, ni la CSD ne furent
invitées à "explorer". La loi est pourtant bien claire: toutes
les parties intéressées doivent s'asseoir à une même
table pour amender le décret. Il est évident que la
manière d'agir de M. Desrochers, celle de MM. Robert Boyd et Roland
Giroux, respectivement de la SEBJ et de l'Hydro-Québec, était
susceptible d'attiser le feu entre les centrales syndicales. "En outre, il
était imprudent pour M. Desrochers d'explorer la possibilité
d'accorder un monopole syndical à M. André Desjardins, le midi,
au Club la Garnison, à Québec, puis de retrouver ce même M.
Desjardins, le même soir, à Sept-Îles, pour lui demander de
l'aide afin que l'élection partielle de Duplessis "se passe dans un
climat serein".
Une voix: Eh bien!
M. Rodrigue: La question que j'ai à vous poser, M.
Gadbois, est la suivante: Est-ce que vous avez participé aux discussions
en vue d'accorder un monopole syndical à la FTQ-Construction?
M. Gadbois: Je n'ai pas participé aux discussions, M. le
Président, qui sont mentionnées par le député.
M. Rodrigue: M. Gadbois, est-ce que vous avez été
informé, soit par M. Giroux, soit par M. Boyd ou par d'autres personnes,
des discussions qui étaient en cours entre l'adjoint spécial du
premier ministre, M. Bourassa, d'une part, M. Robert Boyd, et M. Giroux,
d'autre part, avec la FTQ-Construction pour lui accorder un monopole de
représentation syndicale sur les chantiers de la Baie-James?
M. Gadbois: J'étais au courant qu'il y avait des
discussions qui se poursuivaient au niveau ministériel. Je ne savais pas
qu'il y avait des discussions avec M. Desrochers. Cependant, en reportant mon
souvenir à cette période du début des travaux de la
Baie-James et surtout au fait que la société d'énergie
s'était associée à Bechtel pour qu'elle lui fournisse des
services - la compagnie Bechtel et la compagnie Akers étaient en cours
de construction de la centrale de Churchill Falls - à ce
moment-là, il était ordinaire, je crois, d'obtenir des
conventions collectives de projets. Je crois que c'est dans ce but que des
discussions se poursuivaient. Je suis au courant qu'elles ont abouti, mais je
ne crois pas que c'étaient des discussions dans le but d'accorder un
monopole syndical à un syndicat en particulier. J'ai lu le rapport
Cliche. J'ai même entendu les dépositions des cadres de la
société devant cette commission. Par ailleurs, j'ai lu, dans la
Presse de ce matin, l'article de M. Marcel Adam, qui écrit, au
deuxième paragraphe: "II faut dire que les conclusions du rapport Cliche
sur les responsabilités du saccage de la Baie-James sont ambiguës
et portent à interprétation, comme on l'a vu hier dans
l'échange auquel se sont livrés à la commission
parlementaire le député libéral Michel Gratton et Me
Rosaire Beaulé, ex-procureur du syndicat américain dans la
poursuite intentée par la SEBJ."
Je voudrais vous reporter au rapport conjoint de Jean Bernier, Laurent
Harnel, Marc Darby et moi-même, plus particulièrement au dernier
paragraphe de ce
rapport où, parlant dans le paragraphe précédent de
paix de chantier, nous disons: "II est important, pour le maintien de ce climat
de confiance qui est devenu apparent depuis la reprise des travaux à la
Baie-James et l'institution de l'action, que les responsabilités des
parties soient déterminées par le tribunal et que la
société d'énergie soit reconnue comme un organisme qui ne
fléchit pas dans la poursuite d'un but qu'elle reconnaît amplement
justifié."
M. Rodrigue: Si je comprends bien, avec ce que vous venez de nous
lire, la SEBJ recherchait beaucoup plus à ce moment-là à
établir la responsabilité du syndicat.
M. Gadbois: C'était un point principal.
M. Rodrigue: C'était le point principal. En réponse
à ma question, à savoir si vous aviez été
informé des tractations que j'ai relatées en lisant le rapport de
la commission Cliche, vous nous avez dit: Oui, j'ai été
informé qu'il y avait des discussions au niveau ministériel.
M. Gadbois: Ce que je veux dire, c'est que la
société d'énergie était en relation,
évidemment, avec le gouvernement.
M. Rodrigue: Qui en particulier au gouvernement? Le
savez-vous?
M. Gadbois: Je ne pourrais pas vous le dire. Le président
d'alors avait des communications, je présume.
M. Rodrigue: C'était le gouvernement Bourassa?
M. Gadbois: Oui.
M. Rodrigue: À ce moment-là, vous nous avez dit
qu'il y avait des discussions au niveau ministériel du gouvernement
Bourassa pour accorder un monopole de représentation syndicale à
la FTQ-Construction?
M. Gadbois: Je n'ai pas dit cela.
M. Rodrigue: Non. Bon! Je veux être bien prudent pour ne
pas mettre de paroles dans votre bouche, contrairement à ce qu'a
tenté de faire le député de Mont-Royal pendant tout son
interrogatoire avec d'autres témoins et, en particulier...
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le
Président.
M. Rodrigue: Je me réfère toujours à votre
témoignage. Vous nous avez dit...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
seulement avant, de la même façon que j'ai demandé à
un autre député d'être courtois et de la même
façon que j'ai demandé à une personne invitée
d'être courtoise envers un autre député, j'aimerais que
vous n'exprimiez pas l'opinion que vous avez. Compte tenu que vous l'avez fait,
je demanderais, pour la bonne poursuite des travaux, que vous retiriez... (12 h
15)
M. Rodrigue: Je ne comprends pas.
Le Président (M. Jolivet): ...ce que vous avez dit
à propos du député de Mont-Royal.
M. Rodrigue: Pourriez-vous préciser les paroles, M. le
Président? Je m'excuse, j'étais en train d'examiner un
document.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous avez dit: Contrairement à la façon dont le
député de Mont-Royal a mis dans la bouche des personnes
invitées des paroles. Je vous demande simplement de retirer cette
remarque.
M. Rodrigue: M. le Président, je pense que toutes les
personnes qui ont suivi les travaux de notre commission ont constaté
que, plusieurs fois, dans ses questions, le député de Mont-Royal
a tenté de suggérer des réponses aux personnes qui
étaient devant nous. Il me semble que c'est une question de fait, ce
n'est pas une opinion que j'émets, à ce moment-là.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
simplement pour les besoins de la poursuite des travaux, je vous le demande une
deuxième fois.
M. Rodrigue: M. le Président, je n'ai pas envie de
retarder les travaux de la commission sur une question comme celle-là.
C'est une question absolument accessoire. Alors, je vais me rendre à
votre demande, tout en conservant mon opinion sur la façon qu'a eue le
député de Mont-Royal d'interroger les témoins, mais je
vais la garder pour moi.
M. Gratton: C'est un gentilhomme!
Une voix: M. le Président, est-ce que le...
M. Rodrigue: M. le Président, toujours concernant Me
Gadbois...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. J'ai cru
comprendre qu'il retirait ses paroles, mais qu'il gardait quand même son
opinion. C'est son droit le plus strict, cependant.
M. Rodrigue: J'ai le droit d'avoir mes opinions.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez exactement ce droit,
M. le député.
M. Rodrigue: Mais ce que vous me demandez, c'est de ne pas les
rendre publiques à cette commission.
M. Ciaccia: Je garde mon opinion sur le député.
M. Rodrigue: M. le Président, l'opinion du
député de Mont-Royal n'a aucune espèce d'importance pour
moi, pour autant que je suis concerné.
Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le
député, continuez avec les questions. M. le député
de Gatineau, s'il vous plaît!
M. Gratton: Quelle arrogance!
M. Rodrigue: Vous savez que l'opinion que les autres peuvent
avoir de nous...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
simplement sur les questions, s'il vous plaît!
M. Gratton: Quelle arrogance!
M. Paradis: II y en beaucoup qui se sont fait une opinion sur
vous.
M. Rodrigue: J'aimerais bien comprendre ce que vous vouliez nous
dire, Me Gadbois, quand vous avez dit que les discussions se poursuivaient au
niveau ministériel. Vous aviez été informé qu'il y
avait des discussions qui se poursuivaient. C'était avant la commission
Cliche. Ce sont des faits dont vous avez eu connaissance. Vous aviez
été informé qu'il y avait des discussions pour voir s'il
était possible de donner un monopole syndical à la
FTQ-Construction; là, vous nous avez dit que vous étiez
informé que c'était au niveau ministériel. Est-ce que je
vous ai bien compris là-dessus?
M. Gadbois: Je n'ai pas parlé, en donnant ma
réponse, de donner un monopole syndical à qui que ce soit. Ce qui
était recherché, à ce moment-là, M. le
Président, c'était la possibilité d'obtenir une convention
de chantier qui était semblable ou qui pourrait être semblable
à celle qui avait été approuvée sur d'autres
chantiers avant les travaux de la Baie-James. Il y a eu une convention de
chantier pour les travaux de Churchill Falls. Il y a eu une convention qui a
été obtenue pour Expo 67, je crois. Dans d'autres chantiers dans
le monde, il y en a plusieurs qui l'ont obtenue. C'était une recherche,
à ce moment, pour essayer de retrouver une formule semblable.
M. Rodrigue: Une convention de chantier avec un seul syndicat ou
avec une seule centrale.
M. Gadbois: C'était une exploration.
M. Rodrigue: Je vous relis un paragraphe à la page 28 du
rapport de la commission Cliche qui dit ceci: "Devant la preuve, la commission
ne peut que conclure -et là, c'est la commission Cliche - que le
gouvernement, Hydro-Québec et la FTQ-Construction ont
véritablement négocié en vue d'instituer le monopole
syndical à la Baie-James". C'est dans le rapport de la commission
Cliche.
La question que je vous avais posée, c'est si vous étiez
au courant de ces discussions. Vous nous avez dit avoir lu le rapport de la
commission Cliche. Est-ce en lisant le rapport de la commission Cliche que vous
avez constaté qu'effectivement c'était en vue d'accorder le
monopole syndical à la FTQ-Construction que ces discussions avaient eu
lieu?
M. Gadbois: J'ai vu dans le rapport Cliche que c'était
mentionné de cette façon, mais ce n'était pas mon
impression générale.
M. Rodrigue: À quel moment? M. Gadbois: Au
moment...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je suis les questions du député de
Vimont à Me Gadbois, et je pense que Me Gadbois a bien établi,
à sa première question sur cette série, qu'il n'avait
participé à aucune des réunions qui sont
mentionnées dans le rapport Cliche, mais qu'il avait entendu dire que
cela se passait. On lisait cela même dans les journaux. Il me semble que
les questions sont un petit peu injustes à l'égard du
témoin, lorsqu'il est obligé de répondre que
c'était son impression. C'est passablement loin du bon témoin,
c'est-à-dire que ce n'est peut-être pas à ce témoin
que ces questions devraient être posées.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, sur la question de
règlement, je voudrais simplement - je ne veux pas en faire un
débat - rappeler au député de Marguerite-Bourgeoys qu'une
impression en anglais, cela devient un "feeling". Je pense que je vais demander
à quelqu'un de me faire le relevé du nombre de minutes que le
député de
Mont-Royal a passé sur le "feeling" de Me Beaulé.
M. Lalonde: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: La comparaison est tellement boiteuse, parce qu'il
s'agissait, dans le cas de Me Beaulé, d'une rencontre à laquelle
il participait avec Me Boivin dans le bureau du premier ministre et qu'on lui
demandait si Me Boivin lui avait dit quelque chose qui avait l'air d'une
décision du premier ministre de mettre fin. Me Gadbois dit qu'il n'a pas
participé à ces réunions.
M. Rodrigue: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont.
M. Rodrigue: ...j'ai posé une question à savoir si
M. Gadbois avait participé à des discussions et il m'a dit non.
Je lui ai demandé s'il avait été informé et il m'a
dit oui. À partir de là, j'essayais de savoir de quoi il avait
été informé. Il est fort possible que, lors de ces
discussions, M. Gadbois ait été informé d'une partie des
éléments que plus tard la commission Cliche a
considérés...
M. Lalonde: En quoi est-ce dans notre mandat?
M. Rodrigue: ...mais que d'autres éléments aient
été considérés par la commission Cliche plus
complets peut-être pour en arriver à une conclusion. Il est
possible que Me Gadbois, au moment où ces discussions ont eu lieu, ait
eu un autre aperçu de ces discussions. Je veux tout simplement savoir de
quoi il avait été informé. Même si cela ne concorde
pas parfaitement avec les conclusions de la commission Cliche, cela ne met pas
en cause du tout la crédibilité du témoin. En somme, il a
pu avoir connaissance de certains éléments et d'une certaine
ligne d'action pour discuter de la façon d'organiser la
représentation syndicale sur les chantiers, et la commission Cliche a pu
avoir des témoignages possiblement beaucoup plus complets de diverses
sources qui l'ont amenée à conclure autre chose. Mais je ne veux
absolument pas que mes questions soient interprétées comme
mettant en cause la crédibilité du témoin, d'autant plus
que je suis à Hydro-Québec depuis 1960 et que Me Gadbois est
là depuis très longtemps aussi. Je vous dis tout de suite que je
n'ai aucun doute sur la bonne foi et la crédibilité de Me
Gadbois. Au contraire, sa réputation à Hydro-Québec n'est
plus à faire. Je regrette que le député de
Marguerite-Bourgeoys ait laissé planer des doutes sur cet aspect.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Juste avant, M. le
député. Le problème que je vais avoir, c'est que c'est un
débat qui est soulevé par une question de règlement. Je
pense - je dois être juste envers tous les gens de cette commission, en
particulier envers ceux qui ont posé des questions ce matin - qu'il
n'est pas vrai qu'on ait, de quelque façon que ce soit, mis en doute la
crédibilité de Me Gadbois. Au contraire même, le
député de Marguerite-Bourgeoys a, à la fin de ses
questions, félicité Me Gadbois pour ses réponses. Je pense
qu'on devrait clore ce débat, s'il vous plaît, sans en faire un
autre.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je ne veux pas faire un débat, mais vous
remarquerez... Enfin, j'espère que vous allez me laisser quand
même rétablir les faits. Ma question, mon objection ou, en fait,
mon observation aux questions du député ne touchait pas du tout
la crédibilité de Me Gadbois. C'est un des meilleurs
témoins que j'aie vus ici par sa franchise, enfin, son état
d'esprit, la rigueur de ses réponses. Ce que je veux dire, c'est qu'on
me fait remarquer - d'ailleurs, on vous écoute, M. le Président,
avec beaucoup d'empressement - qu'on est rendu en 1971 ou en 1972 et que nous
avons le mandat d'examiner les circonstances entourant la décision de
régler hors cour. Cela reste là.
Le Président (M. Jolivet): Si j'ai bien compris,
cependant, le sens de votre question, quand j'ai fait mention de la
décision que j'ai rendue, eu égard à la période
après le mois de mars 1979, c'est parce que tout ce qui peut
précéder et qui a un effet sur les décisions prises par le
conseil d'administration de la Société d'énergie de la
Baie James, depuis le début, on en a fait mention: les questions doivent
porter là-dessus. Ce que je demanderai, cependant, au
député de Vimont, c'est d'arriver le plus rapidement possible aux
questions qu'il veut poser et d'éviter les préambules qui
amènent les questions de règlement qu'on a eues jusqu'à
maintenant. S'il vous plaît, M. le député de Vimont,
allez.
M. Lalonde: J'aurais une chose à ajouter, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Dans votre désir - vous l'avez annoncé
dans votre décision avant-hier d'appliquer aussi le principe de la
gentilhommerie, j'aimerais que le député de Vimont retire les
motifs qu'il m'a prêtés, à savoir que ma question
était inspirée par le sentiment que j'avais que la
crédibilité de Me Gadbois était à mettre en
doute.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont.
M. Rodrigue: M. le Président, je sens qu'on devient
nerveux de l'autre côté quand on commence à parler des
tractations qui ont entouré la question du monopole syndical sur le
chantier de la Baie-James.
M. Gratton: On va y revenir cet après-midi.
M. Rodrigue: Alors, je vais donner la chance au
député de Gatineau, qui a permis par...
M. Lalonde: Posez une question!
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont, je m'excuse, mais, si vous avez l'intention de continuer dans cette
veine, je ne l'accepterai pas.
M. Rodrigue: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Non, je ne pense pas qu'on
doive mettre en doute, de part et d'autre, la façon dont on a à
poser des questions. Je vous demande expressément, M. le
député de Vimont, de ne pas entrer dans cette forme de
discussion.
M. Rodrigue: C'est un compliment que je vais...
Le Président (M. Jolivet): Non. M. le député
de Marguerite-Bourgeoys vous a posé une question. J'aimerais, d'abord,
savoir quelle réponse vous y donnez. Vous auriez dit que le
député de Marguerite-Bourgeoys, par la question qu'il a
posée, avait laissé planer un doute sur la
crédibilité de Me Gadbois. J'aimerais, d'abord, savoir si vous
retirez cette partie de vos paroles, à la demande du
député.
M. Rodrigue: Je ne pense pas avoir dit cela, M. le
Président, je n'ai pas voulu prêter de motifs au
député de Marguerite-Bourgeoys, en aucune façon.
Maintenant...
Le Président (M. Jolivet): Cela va. M. Bourbeau:
Question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Non, cela va. Il a parfaitement
répondu en disant qu'il n'avait pas voulu imputer de motifs au
député de Marguerite-Bourgeoys, et c'est ce que le
député de Marguerite-Bourgeoys demandait. Cette question
étant réglée...
M. Bourbeau: M. le Président... Le Président (M.
Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: ...je voudrais quand même souligner que
vous-même, tout à l'heure, dans vos remarques, vous avez dit que
le député de Vimont n'avait pas dit la vérité. Ce
sont les mots que vous avez employés à l'égard de ce qu'il
avait dit du député de Marguerite-Bourgeoys. À mon avis,
s'il n'a pas dit la vérité, il doit donc retirer ses paroles.
M. Duhaime: II n'a jamais dit cela. M. Lalonde: M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...je prends la dernière remarque du
député de Vimont comme étant une rectification du fait
qu'il ne voulait pas me prêter ce motif. Je ne peux lui en demander
davantage, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont, maintenant, sur les questions, s'il vous plaît!
M. Rodrigue: Oui, je m'abstiendrai toujours, M. le
Président, de prêter des motifs au député de
Marguerite-Bourgeoys. Maintenant, j'avais terminé mes questions avec M.
Gadbois. Je remercie M. Gadbois d'avoir bien voulu y répondre.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu du peu de temps
qu'il nous reste, je voudrais simplement vérifier une dernière
chose. Il reste l'intervention du député de Brome-Missisquoi,
celle du député de Châteauguay, celle du ministre et celle
du député de Gatineau. Ils ont l'intention de poser des
questions. Cela veut donc dire que nous reviendrons après la
période des questions. Je voudrais vous poser une autre question. Est-ce
que, dès maintenant, puisque, cet après-midi, Me Beaulé
doit communiquer avec le greffier du Secrétariat des commissions
parlementaires, on peut lui dire qu'il doit être ici, ce soir, à
20 heures?
M. Lalonde: Oui.
Une voix: Je n'en ai pas pour longtemps.
Le Président (M. Jolivet): Donc, nous pouvons dire que Me
Beaulé sera ici - à 20
heures?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, compte tenu que cet
après-midi je ne pourrai pas venir à la commission, ni ce soir,
à ce moment-là, je ne pourrai pas poser de questions à Me
Gadbois. Je pense que, lorsqu'on reprendra, s'il advenait que Me Gadbois soit
obligé de revenir, je ne pourrai pas être là, non plus,
à cause de ma fonction d'adjoint parlementaire et de la commission sur
les crédits. Est-ce qu'on me permettrait de poser brièvement deux
petites questions à Me Gadbois?
Le Président (M. Jolivet): Non. Il y a une façon
plus simple de régler cela, c'est de demander à un de vos
collègues de le faire à votre place cet après-midi. Je
suspends jusqu'après la période des questions.
M. Lalonde: Est-ce que je peux poser une question concernant nos
travaux?
Le Président (M. Jolivet): Non, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
(Reprise de la séance à 15 h 43)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources est à nouveau réunie aux fins d'examiner les
circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la
Société d'énergie de la Baie James de régler hors
cour la poursuite civile intentée à la suite du saccage du
chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le rôle
du premier ministre et de son bureau à cet égard.
Les membres de cette commission sont: MM. Dussault (Châteauguay),
Ciaccia (Mont-Royal), Duhaime (Saint-Maurice), Bourbeau (Laporte), Laplante
(Bourassa), Gratton (Gatineau), Lavigne (Beauharnois), LeBlanc
(Montmagny-L'Islet), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Vaillancourt
(Jonquière), Rodrigue (Vimont).
Je m'excuse. J'ai nommé M. Dussault (Châteauguay), j'aurais
plutôt dû dire M. Tremblay (Chambly).
Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Perron (Duplessis),
Desbiens (Dubuc), Dussault (Châteauguay), Mme Harel (Maisonneuve), MM.
Paradis (Brome-Missisquoi), Pagé (Portneuf), Doyon
(Louis-Hébert), Saintonge (Laprairie).
Le rapporteur est toujours M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).
Nous avions devant nous Me Gadbois qui avait à répondre
à des questions. Avant de donner la parole au député de
Brome-Missisquoi, qui est le prochain sur la liste, j'aimerais vous lire un
télégramme que j'ai reçu et qui a une importance, compte
tenu de la décision que j'ai rendue dans les jours passés. "M. le
Président, nous représentons l'Union des opérateurs de
machinerie lourde, local 791, et confirmons que notre cliente a, par
résolution dûment adoptée, décidé de ne pas
relever expressément ou implicitement Me Michel Jasmin de son secret
professionnel. "Nous avons pris connaissance de votre décision
datée le ou vers le 3 mai 1983 suivant laquelle Me Michel Jasmin, avocat
et procureur de notre cliente à l'époque pertinente, n'a pas
été libéré de l'invitation qui lui a
été adressée à l'effet de témoigner devant
la commission. "Le témoignage précité met en cause
l'interprétation d'une disposition législative,
précisément l'article 9 de la Charte des droits et
libertés de la personne, et justifie dès lors notre cliente
à demander une interprétation judiciaire. "Nous sommes à
rédiger une requête pour jugement déclaratoire et visant
à faire déterminer la portée de l'article 9 de la charte
précitée et plus précisément eu égard
à l'obligation pour Me Jasmin de témoigner. "Subsidiairement,
demande sera faite afin de déterminer, le cas échant, la
portée du secret professionnel auquel le procureur est tenu. Nous
demandons avec déférence et respect que l'invitation à
témoigner soit ajournée jusqu'à ce que décision
judiciaire soit rendue. "Veuillez agréer, M. le Président,
l'expression de nos sentiments distingués. "Laurin, Laplante et
Laplante, avocats, par Robert Laurin."
Je fais simplement faire les photocopies qui s'imposent pour chacun des
membres de cette commission, en vous disant, comme M. le ministre et M. le
député de Marguerite-Bourgeoys en ont fait mention au moment de
la suspension, que des discussions sont amorcées actuellement sur cette
question. Mais, comme je n'ai pas, comme président, à prendre de
décision autre que celle d'abord de prendre connaissance du document qui
nous est transmis et au niveau des deux personnes représentant
l'Opposition et le gouvernement, il y a peut-être des discussions qui
peuvent s'amorcer et j'aurai peut-être d'autres décisions à
rendre, selon ce qui se fera dans les jours qui suivent. Je demanderai au
secrétariat des commissions de faire les photocopies qui s'imposent.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: À ce stade-ci, j'aurais seulement une demande
préliminaire à vous faire. Si j'ai bien compris la lecture que
vous avez faite du télégramme, le client ou l'ancien client de M.
le juge Jasmin maintenant a demandé que le témoignage de M.
Jasmin soit suspendu. Je voudrais seulement savoir s'il s'agit d'une
décision de la présidence ou d'une décision du
gouvernement.
Le Président (M. Jolivet): J'ai reçu ce
télégramme à mon bureau. Comme je l'ai reçu, je me
permets de le lire, mais j'aurai certainement d'autres décisions
à prendre. Je voulais vous mettre au courant de la demande. Il y aura
d'autres décisions qui seront prises dans les jours qui viennent, de
façon à pouvoir nous déterminer quelle position la
présidence prendra vis-à-vis de cette demande.
M. Lalonde: Si vous permettez une dernière observation. Je
ne sais pas dans quelles circonstances la décision sera prise et je ne
peux pas la prévoir complètement; je voulais seulement m'assurer
par qui la décision devra être prise et tout simplement faire
valoir qu'il est important que la présidence, ou même le
gouvernement, s'il s'agissait d'une décision du leader du gouvernement,
soit bien conscient de la portée de cette décision sur
l'autonomie de l'Assemblée nationale, sur la souveraineté de
l'Assemblée nationale et sur sa souveraineté aussi sur les
travaux qu'elle entreprend. C'est seulement cela que je veux dire
maintenant.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhairne: Oui, en fait, M. le Président, vous venez de
donner lecture de ce télégramme. Si j'ai bien compris à la
lecture, une demande était adressée à la
présidence. Je le dis sous toutes réserves et en tout respect
pour la présidence. J'ai toujours compris que tant la convocation que
l'ordre de convocation des personnes appelées devant cette commission
relevaient du leader du gouvernement, qui transmet tant les convocations que
les ordres de convocation au secrétariat de la commission. Est-ce que la
présidence, qui est saisie de ce télégramme qui contient
une requête, peut ordonner de surseoir à la comparution de
quelqu'un parce qu'une action serait pendante devant une instance judiciaire
pour définir ce qu'est le secret professionnel, son extension? Enfin, on
verra bien ce qui va se produire. Je ne suis pas certain, M. le
Président, que ce soit du ressort de la présidence. Si vous avez
besoin davantage d'arguments là-dessus, sans préjuger pour autant
de ce que pourrait être la décision du gouvernement
là-dessus, je pourrais en ajouter en temps utile, mais je pense qu'il y
a un préalable que vous aurez à décider: Est-ce que c'est
de votre ressort ou non?
Le Président (M. Jolivet): C'est dans ce sens que je vous
mettais d'abord au courant du télégramme. Nous allons le faire
parvenir à chacun d'entre vous pour que vous l'analysiez de votre
côté. Si jamais la présidence a besoin de conseils pour la
décision qu'elle aura à prendre auprès des gens qui
l'appuient dans les décisions qu'elle a à rendre, elle vous
demandera, comme on le fait d'habitude, de part et d'autre, une intervention,
mais, pour le moment, il n'y a pas de décision de prise autre que celle
de vous faire lecture du télégramme.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Jolivet): D'accord? M. le
député de Brome-Missisquoi, vous avez la parole.
M. Paradis: Merci, M. le Président. Me Gadbois ayant
été libéré par sa cliente du secret professionnel
et ayant répondu aux questions du député de
Marguerite-Bourgeoys qui, cet avant-midi, a fait le tour du jardin, je serai
très bref. Vous avez parlé, en réponse à une
question du député de Marguerite-Bourgeoys, d'une visite qu'a
effectuée à vos bureaux, à l'automne 1978, Me Yves
"Ti-Lou" Gauthier, ex-tuteur du local 791, un des syndicats
québécois qui étaient poursuivis pour 32 000 000 $...
M. Duhaime: M. le Président, je m'excuse auprès du
député de Brome-Missisquoi. Je me demande si, pour la bonne
marche de nos travaux et pour continuer dans l'esprit que tous semblent avoir
retenu depuis le début, le député de Brome-Missisquoi
pourrait s'abstenir d'ajouter aux nom et prénom des personnes ce que
j'appellerais un... Comment appelez-vous cela?
M. Lalonde: Comment appelle-t-on cela?
M. Duhaime: Non, je n'allais pas dire un quolibet, mais un
surnom.
Le Président (M. Jolivet): Un surnom.
M. Duhaime: Je pense que cela nous aiderait. Chaque fois que je
l'entends, je vous avoue... Je l'ai tellement entendu qu'il y a un bout de
temps, j'avais même changé le prénom de Me Gauthier. Je
vous prierais, en tout respect pour Me Yves Gauthier, qui est notaire de sa
profession et attaché politique au cabinet du premier ministre, de vous
abstenir d'utiliser du patois pour le
qualifier.
M. Paradis: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: J'ignorais que Me Yves Gauthier portait cette
appellation de "Ti-Lou". Je l'ai lu dans la Presse comme la population en
général. J'ai également entendu au moins un administrateur
de la Société d'énergie de la Baie James qui, sans manquer
de respect pour Me Gauthier, l'avait appelé "Ti-Lou". Je pensais que,
pour faciliter la compréhension, c'était plus simple d'inscrire
ses titres au complet. Mais, si cela choque l'oreille du ministre, je me
contenterai de l'appeler du prénom du ministre, Yves.
M. Duhaime: Et son nom de famille. M. Paradis: Oui,
oui.
Le Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, vous
avez la parole, M. le député.
M. Paradis: M. le Président, constatant que le ministre ne
veut pas être assimilé à Me Gauthier du bureau du premier
ministre, je dirai donc Me Yves Gauthier.
Me Gadbois, je reprends ma question. En réponse à une
question du député de Marguerite-Bourgeoys ou au ministre, Me
Yves Duhaime, ce matin, vous avez affirmé que Me Yves Gauthier, tuteur
du local 791, d'après les témoignages qu'on a recueillis ici,
jusqu'au mois de septembre ou octobre 1978 et, à ce moment-là,
conseiller politique dans le bureau du premier ministre, vous avait rendu
visite à vos bureaux à l'automne 1978, en compagnie d'une
personne que vous n'avez pas pu identifier, pour vous parler du dossier du
saccage de la Baie-James et des motifs pour lesquels cette poursuite de 32 000
000 $ qui a finalement été réglée pour 200 000 $
devait être abandonnée.
Ma question est bien simple! Est-ce que vous avez fait rapport à
quelqu'un de cette rencontre que vous avez eue avec le notaire Yves
Gauthier?
M. Gadbois: Je ne me rappelle pas, M. le Président, avoir
fait rapport à quelqu'un, parce que je n'avais pas associé le
notaire Gauthier à quelqu'un qui appartenait au gouvernement. J'ai
sûrement parlé de ceci à Me Cardinal. La visite directe de
l'ex-tuteur, si vous le voulez, m'avait surpris parce que, étant
donné qu'il y avait des avocats interposés dans le dossier, je
trouvais singulière une visite de cette nature, directement du syndicat
ou de l'ex-tuteur du syndicat.
M. Paradis: Simplement pour mon information et peut-être
celle de la commission également: Quand avez-vous appris pour la
première fois que ce fameux Me Gauthier, qui était l'ex-tuteur,
faisait partie des conseillers politiques du premier ministre, M. René
Lévesque?
M. Gadbois: Je l'ai appris subséquemment, des mois
après.
M. Paradis: Des mois après. M. Gadbois:
Probablement.
M. Paradis: Ça clôt ce sujet-là.
Dans un autre ordre d'idées, dans le cahier que nous a remis le
président-directeur général de la Société
d'énergie de la Baie James, M. Laliberté, aux pages 117 et
suivantes, on retrouve un extrait du procès-verbal de la 369e
réunion du conseil d'administration de la SEBJ, tenue le 20
février 1979, à 9 h 30. On a le nom des personnes
présentes, etc. Est-ce qu'il s'agit, selon votre connaissance
personnelle, de 9 h 30 de la matinée?
M. Gadbois: Autrement, on aurait dit 21 h 30, je crois.
M. Paradis: D'accord. À votre connaissance, il s'agit de 9
h 30 de la matinée?
M. Gadbois: De la matinée.
M. Paradis: Est-ce que vous avez une connaissance personnelle de
l'heure à laquelle, approximativement, s'est terminée cette
réunion?
M. Gadbois: La réunion elle-même s'est probablement
terminée dans l'après-midi, parce que la réunion ne
comprenait pas seulement la question du saccage de la Baie-James, ou de
l'action. Il y avait également un grand nombre de points à
l'ordre du jour. Alors, je ne pourrais vous dire, à partir des documents
qu'il y a ici, à quelle heure la réunion s'est terminée.
D'autant plus que je n'étais pas secrétaire de cette
réunion.
M. Paradis: Non, non. D'ailleurs, je l'ai constaté. Il est
indiqué au procès-verbal que c'est Me Jean Bernier. C'est pour
cela que j'ai insisté sur les mots "à votre connaissance
personnelle". Maintenant, et cela clôt ce sujet également, ce sont
simplement des questions de précision que je demande. Si on prend le
cahier qui nous été remis par les avocats Geoffrion et Prud'homme
qui s'intitule: Correspondance, cabinet Geoffrion et Prud'homme, et projets de
déclaration de transaction dans l'instance, à la page 133, on y
retrouve une lettre que
vous avez adressée en date du 7 mars 1979 à Me
François Aquin, de chez Geoffrion et Prud'homme, et qui se lit,
très brièvement, comme suit: "Pour donner suite à la
conversation téléphonique que nous avons eue ce matin, vous
trouverez ci-joint le texte d'un projet de communiqué de presse que la
Société d'énergie de la Baie James entend faire au moment
opportun, lequel lui sera indiqué par ses procureurs. Auriez-vous
l'obligeance de me transmettre vos commentaires au sujet de ce projet de
communiqué. Veuillez me croire, votre tout dévoué."
Votre signature apparaît au bas de la lettre. En annexe, on
retrouve le communiqué qui dit, finalement, que la société
a décidé de régler hors cour pour 200 000 $ la poursuite
de 32 000 000 $. Plus spécifiquement, à la page 135, au bas, au
dernier paragraphe, c'est le deuxième alinéa du paragraphe 3, on
y lit ce qui suit: "La cause de la Gaspé Copper Mines qui pourrait
être invoquée pour appuyer une poursuite devant les tribunaux d'un
syndicat américain comporte, de l'avis de ses conseillers juridiques,
des éléments qui n'apparaissent pas dans le dossier de la
SEBJ."
Le dernier paragraphe, à la page 136: "C'est pour toutes ces
raisons - celle-là et d'autres qui sont invoquées - que le
conseil d'administration de la SEBJ a accepté l'offre de
règlement hors cour de cette cause pour une considération presque
nominale."
Plus loin, à la page 139, on retrouve, datée le 8 mars
1979, une lettre qui vous est adressée par Me François Aquin. On
va en faire la lecture complète pour une meilleure compréhension
de la question que je vais vous poser. Cette lettre se lit comme suit: "Cher
confrère, "Je reçois le projet de communiqué que la
Société d'énergie de la Baie James entend publier. "Ce
communiqué ne pourrait être expédié aux
médias d'information qu'après la production de la transaction
devant le tribunal. - on était le 8 mars, cela se comprend - Si les
documents de règlement sont signés lundi, comme on peut
présentement le prévoir, la transaction pourrait être
produite devant le tribunal à la séance de mardi matin. "Nos
commentaires sur le projet de communiqué se limitent, comme il se doit,
aux aspects juridiques du communiqué. "Nous nous permettons de souligner
le caractère inopportun de l'alinéa suivant." On retrouve
l'alinéa que je viens de lire dans le communiqué. Je passe cet
alinéa, parce que j'en ai déjà fait la lecture. "Il est
exact, comme nous l'avons écrit le 19 février dernier, que
l'instance de la Gaspé Copper Mines se situait dans une perspective
juridique différente. Par contre, et pour cette raison, nous n'avons
jamais invoqué à l'appui de notre cause le
précédent de la Gaspé Copper Mines. Le rapprochement fait
par le communiqué entre la présente instance et celle de la
Gaspé Copper Mines peut laisser croire que nos chances de
réussite contre le syndicat américain étaient bien minces.
Ce qui n'est pas exact. Le même rapprochement amène à
douter sérieusement de la compétence de conseillers juridiques
qui auraient mis plus de trois ans à réaliser que l'arrêt
de la Gaspé Copper Mines ne pouvait pas être invoqué comme
tel au soutien de leur cause. Ce qui n'est pas non plus exact, comme nous
l'avons mentionné plus haut. La comparaison entre des instances non
comparables nous paraît donc totalement inopportune et entraînerait
vraisemblablement d'autres comparaisons avec l'affaire Reynolds qui vient
d'être décidée par la Cour supérieure, il y a
à peine quelques semaines. "Veuillez agréer..." C'est
signé: "François Aquin". (16 heures)
Qui avait rédigé le communiqué que vous aviez fait
parvenir et dans lequel on retrouvait cette référence à la
cause de Gaspé Copper Mines?
M. Gadbois: Autant que je me rappelle, ce communiqué avait
été rédigé par le service des relations publiques
d'Hydro-Québec. Il faut se replacer un peu dans le contexte. C'est le
président du conseil d'Hydro-Québec, dont les bureaux
étaient à Hydro-Québec, qui avait été
mandaté pour effectuer la transaction. Il avait à coeur de faire
une déclaration adéquate. Le service des relations publiques
d'Hydro-Québec avait préparé, conjointement avec lui - il
a eu quelque chose à faire avec cela - et moi-même, le texte de ce
projet de communiqué.
M. Paradis: Est-ce qu'à la suite de la réception de
la lettre du 8 mars 1979, à votre connaissance, la Société
d'énergie de la Baie James a modifié, à la demande des
procureurs de Geoffrion et Prud'homme, le texte du communiqué?
M. Gadbois: À ma connaissance, cela n'a pas
été modifié.
M. Paradis: Cela n'a pas été modifié. C'est
une opinion - je préviens immédiatement la présidence -
professionnelle que je vous demande à titre d'avocat - gratuite,
d'ailleurs, j'en profite. Est-ce que vous étiez d'accord, vous, en tant
qu'avocat, avec le texte de la lettre de Geoffrion et Prud'homme du 8 mars
1979? Vous êtes libre de me répondre, étant donné
que c'est un conseil juridique gratuit que je vous demande.
Le Président (M. Jolivet): Je voudrais déclarer
dès le départ qu'il n'a pas à répondre.
M. Paradis: Non, non, je le sais, M. le Président, mais
j'invite le témoin à le faire, s'il veut bien le faire.
Le Président (M. Jolivet): Je suis dans l'obligation
d'appliquer ce que j'ai demandé hier, c'est-à-dire de ne
même pas y répondre.
M. Paradis: M. Gadbois, je vous remets...
M. Duhaime: Elle est irrecevable.
Le Président (M. Jolivet): II n'en est pas question, il ne
répondra pas.
M. Duhaime: Non, non, je ne suis pas nerveux, je faisais autre
chose.
M. Paradis: M. Gadbois, je vous remercie de votre
témoignage. Je sais que vous auriez aimé répondre à
ma question.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Une courte question. Les demandeurs dans la cause de
la Baie-James étaient les assurances et la Société
d'énergie de la Baie James. C'est cela?
M. Gadbois: Non, il y avait des causes séparées.
Trois compagnies d'assurances avaient institué action contre les
mêmes personnes qui étaient les défendeurs dans l'action de
la Société d'énergie de la Baie James. Pour les fins de la
preuve dans la cause, les deux causes ont été jointes.
D'ailleurs, on me dit que ces causes sont indiquées dans la lettre de
l'International Union of Operating Engineers datée du 25 avril 1978, que
Me Beaulé a déposée devant cette commission.
M. Laplante: Mais, lorsque le règlement est venu, est-ce
que ce fut un règlement conjoint?
M. Gadbois: Le règlement n'a pas été un
règlement conjoint, il a été un règlement
séparé, mais fait en même temps, pour autant que je me
rappelle.
M. Laplante: II y a 200 000 $ qui étaient pour la
Société d'énergie de la Baie James; il y avait 100 000 $,
après entente avec les gens de la Société d'énergie
de la Baie James, qui leur reviendraient à elles aussi parce qu'elles
vous ont versé, je crois, 1 300 000 $. Il y avait une condition:
qu'elles laissent tomber leur cause, elles aussi, pour autant que soit inclus
dans le règlement qu'il y ait 100 000 $ qui seraient pour les
assurances. Est-ce que je me trompe?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Laplante: Est-ce que je me tromperais en disant comme cela que
ce n'est plus un règlement de 200 000 $, mais bien un règlement
de 300 000 $ qui s'est fait?
M. Gadbois: Si vous examinez la globalité de l'affaire,
oui, c'est un règlement de 300 000 $.
M. Laplante: D'accord. On peut maintenant parler de 300 000 $
comme règlement, au lieu de 200 000 $. Il ne faut pas minimiser les
choses et montrer cela plus dur que ce ne l'est.
M. Gadbois: Pour autant que vous considérez que les
compagnies d'assurances étaient dans le règlement.
M. Laplante: Cela en faisait partie. Je vous remercie, M.
Gadbois.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, très
brièvement; le député de Vimont ce matin a
interrogé Me Gadbois sur l'interprétation qu'on doit donner de
certains passages et même des conclusions du rapport Cliche. J'aimerais
ici non pas poser une question à Me Gadbois - je vous en avertis
d'avance, M. le Président - même pas formuler des commentaires ou
porter des conclusions moi-même, mais tout simplement citer un passage
d'un éditorial du journal La Presse de ce matin, signé par Marcel
Adam, auquel Me Gadbois s'est d'ailleurs référé ce matin,
pour tenter de situer ce que fait le rapport Cliche par rapport aux travaux de
la commission. Ce sera très bref.
L'éditorial s'intitule: "Les commodes ambiguïtés du
rapport Cliche". Me Gadbois a fait lecture d'une partie du deuxième
paragraphe qui disait: "II faut dire que les conclusions du rapport Cliche sur
les responsabilités du saccage de la Baie-James sont ambiguës et
portent à interprétation", etc. Le passage qui retient mon
attention et que j'aimerais communiquer à la commission se retrouve
à la fin de l'éditorial. On y lit ce qui suit: "Comme ce passage
du rapport prête à des exégèses différentes,
pour les fins du débat, je veux bien étudier la portée de
l'interprétation que lui donne le gouvernement: la
non-responsabilité des simples travailleurs des actes commis par
quelques bandits, pour la mettre en rapport
avec d'autres conclusions de la Commission Cliche. "Ailleurs dans son
rapport, la commission Cliche établit une relation indirecte de cause
à effet entre le saccage de la Baie-James et les agissements
répréhensibles de divers agents publics, notamment les dirigeants
d'alors d'Hydro-Québec et de la SEBJ, l'ex-conseiller spécial du
premier ministre Bourassa, agissements qui ont conduit à accorder
illégalement un monopole de fait, au chantier de LG 2, à la
FTQ-Construction, et de mettre éventuellement le feu aux poudres. "On
sait que le premier ministre Lévesque et les syndicats ont tiré
argument de cette conclusion du rapport pour inciter la SEBJ à
régler hors cour. "Si cette thèse profite aux simples
travailleurs de la construction en les déchargeant de toute
responsabilité, elle n'arrange pas l'ensemble des
Québécois. Innocents des crimes commis à LG 2, ces
derniers n'échappent pas aux conséquences des actes condamnables
commis en leur nom par des agents publics qui portent une bonne part de
responsabilité, cependant que les syndiqués innocents du crime
commis par quelques-uns des leurs et agissant au nom du syndicat qui les
regroupe tous ne sont pas tenus responsables. "Si la responsabilité est
indivisible dans la société politique, comment peut-elle
l'être dans les organisations syndicales? "En quoi, se demanderont
certains, ce débat est-il pertinent au mandat de la commission qui
siège à Québec? À mon avis, ce débat n'a
qu'une commodité politique pour ceux qui ont intérêt
à distraire l'opinion de l'objectif fondamental de cette enquête:
le premier ministre a-t-il dit la vérité en Chambre? "Ce n'est
pas le rapport Cliche qui peut apporter la réponse à cette
question."
M. le Président, je terminerai là parce que la fin de
l'éditorial porte sur des propos tenus par Me Rosaire Beaulé
devant cette commission hier. Je ne voudrais pas y revenir ici en l'absence de
Me Beaulé. On pourra peut-être le faire lorsqu'il sera parmi nous,
mais je retiens de cet extrait de l'éditorial que je viens de lire de M.
Marcel Adam dans le journal La Presse de ce matin, et je dis très
clairement que je partage son point de vue, que ce n'est pas le rapport... Bien
oui, je sais que cela n'impressionne personne, mais j'ai quand même le
droit de dire, M. le Président, que ce n'est pas le rapport Cliche qui
peut apporter...
M. Duhaime: Quelle est votre question? Une voix: II n'y a
pas de question.
M. Duhaime: Comment, il n'y a pas de question?
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse...
M. Gratton: Si le ministre écoutait, M. le
Président...
M. Duhaime: J'écoute, mais j'attends votre question.
M. Gratton: ...il saurait que j'ai indiqué que je n'aurais
pas de question.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, non, non.
M. Duhaime: Ah! Vous faites un commentaire.
Le Président (M. Jolivet): II a dit dès le
départ qu'il faisait un commentaire.
M. Duhaime: Ah bon! Je m'excuse.
M. Gratton: Je n'ai même pas fait de commentaire. J'ai dit
que je n'en ferais pas.
Le Président (M. Jolivet): D'accord, d'accord.
M. Duhaime: Pour tout de suite, vous lisez la Presse.
M. Gratton: Par contre... Oui.
M. Lalonde: J'ai apporté aussi la Presse pour la lire.
M. Gratton: On va aussi vous lire un bout tantôt de
l'article de Mme Lysiane Gagnon.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Gratton: J'invite Me Gadbois, s'il le veut, s'il le
désire, s'il le sent approprié, à commenter. Je n'ai pas
de question et je termine là-dessus, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai seulement une question
à poser au député de Gatineau. Est-il exact que...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le
député.
M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais avec son
consentement.
M. Gratton: Encore là, le règlement...
M. Lalonde: II n'y a pas de consentement.
Le Président (M. Jolivet): Je pose la question. Est-ce
qu'il y consentement?
M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai une question à
poser au député...
M. Paradis: Non, il faut qu'il soit assermenté.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
Une voix: Non, il n'y a pas de consentement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Gratton: Je ne me rendrai pas à ma question.
Une voix: Ils ne sont pas préparés.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais dire tout de
suite que je n'aurai pas de question à poser à Me Gadbois. Je
considère que les réponses qu'il m'a fournies ce matin
étaient très claires. Je vais faire un commentaire. Dans les
différents éditoriaux que signe régulièrement M.
Marcel Adam depuis le début de nos travaux il y en a un qui m'impliquait
directement, la Presse, le 28 avril 1983: "Des motifs et avantages du
règlement hors cour." "Que le ministre Duhaime choisisse de ne lire du
rapport que ce qui arrange le premier ministre, soit. Mais le politicien Guy
Chevrette devrait avoir la décence de ne pas contredire ce
qu'écrivait avec plus d'objectivité, en 1975, le commissaire du
même nom."
Une voix: Soit.
M. Duhaime: Non, il n'a pas écrit "soit", c'est le point,
c'est terminé.
M. le Président, M. Marcel Adam, comme vous le savez, est un
éditorialiste qui travaille pour le quotidien La Presse. Il fait donc
partie, comme le disait récemment le président du journal La
Presse, de l'équipe éditoriale et donc de l'orientation politique
du journal, peu importe le sujet traité. Puisque M. Adam me fait une
suggestion, je pourrais peut-être lui en faire une aussi. Je pense qu'il
est partie dans ce dossier, parce que, si nous sommes réunis autour de
cette table, c'est non pas à partir des déclarations du premier
ministre du Québec faites en Chambre en mars 1979, mais bien parce que
la Presse a publié en première page, le 17 mars 1983, un article
que je qualifierais de fracassant et que la Presse a récidivé le
19 mars 1983. À la demande expresse de l'Opposition, qui paralysait les
travaux de la Chambre, au moment même où il n'y avait même
pas un président au fauteuil, le chef de l'Opposition a
réclamé que toute la lumière soit faite et que la
commission parlementaire ait lieu avant Pâques. Or, puisque M. Adam nous
fait des invitations, je voudrais peut-être lui faire une suggestion -je
suis convaincu qu'il nous écoute actuellement - celle d'avoir, quant
à moi, la décence de s'abstenir de faire des commentaires sur un
dossier dans lequel il est partie prenante comme membre de l'équipe
éditoriale d'un journal qui a porté une des plus graves
accusations qu'un journal n'ait jamais portées à l'endroit du
premier ministre du Québec.
Quant à ses interprétations sur le contenu du rapport de
la commission Cliche et les conclusions, quant à moi, autant sur le
contenu que sur les conclusions, j'aime mieux me référer à
ce que disent les commissaires de la commission Cliche. C'est rapporté
à la page 28. Tout le monde sait que ceux qui ont été
impliqués dans ce que j'appellerais l'entente pour, d'une part, obtenir
une convention collective de travail pour la durée du chantier, mais
aussi un monopole syndical... Spécialement pour M. Adam, je voudrais
peut-être lui relire la page 28 du rapport de la commission Cliche: "Ce
que la violence ne pouvait lui donner, la FTQ-Construction..."
M. Gratton: M. le Président, de façon qu'il n'y ait
pas de malentendu, je ne voudrais pas que le ministre fasse une
déclaration en ayant été induit en erreur par le fait que
je n'ai cité qu'une partie de l'éditorial de M. Adam ce matin,
parce qu'effectivement, il se réfère à ce passage de la
page 28 dans son éditorial de ce matin. (16 h 15)
M. Duhaime: Vous pouvez dire ce que voulez ici, à partir
de votre siège; M. Adam peut écrire ce qu'il veut, et moi aussi,
j'ai l'intention de dire ce que je veux.
M. Gratton: Ah! Si vous voulez dire n'importe quoi, allez-y!
M. Duhaime: Non, je ne dirai pas n'importe quoi.
M. le Président, à la page 28, il est très bien
dit: "Ce que la violence ne pouvait lui donner, la FTQ-Construction a
tenté de l'obtenir au moyen de négociations secrètes,
nouées avec M. Paul Desrochers et avec la haute direction
d'Hydro-Québec, la SEBJ et la SDBJ. Devant la preuve, la commission ne
peut que conclure que le gouvernement, Hydro-Québec et la
FTQ-Construction ont véritablement négocié en vue
d'instituer le monopole syndical à la Baie-James. On regrette que MM.
Desrochers et Giroux aient abordé avec la FTQ la possibilité
d'accorder à celle-ci un monopole syndical sans en informer la CSN ou la
CSD et sans tenter
de conclure avec les trois centrales des modalités d'entente
susceptibles d'assurer aux travaux de la Baie-James un climat de travail serein
et harmonieux. Il ne faut pas oublier que la loi 290 avait déjà
sanctionné le principe du plurialisme syndical dans la
construction."
Il va de soi, M. le Président, qu'à cette époque,
quand on se réfère au gouvernement du Québec, puisque le
rapport des commissaires Cliche, Chevrette et Mulroney a été
remis à l'honorable Robert Bourassa, premier ministre du Québec,
le 2 mai 1975, il s'agit du gouvernement libéral.
M. le Président, aux pages 68 et 69 du rapport - je vais le
relire pour qu'on ne l'oublie jamais au Québec, non seulement pour les
prochaines années, mais pour le prochain siècle - on dit: "Les
commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs ordinaires
n'encourent pas la responsabilité de ce qui est arrivé. Il ne
s'agit aucunement d'une réaction de masse, mais bien d'une
opération montée par un noyau de mécréants,
dirigés par Duhamel, pour montrer, une fois pour toutes, qui
était le maître à la Baie-James. "L'impression nette que
nous tirons de l'interrogatoire des témoins du saccage est que les
travailleurs ont été de simples spectateurs et même des
victimes des actes insensés posés par un Duhamel en
délire. "C'est à ce genre de castastrophe que devait fatalement
aboutir l'irresponsabilité des aventuriers sans scrupule qui avaient
fait main basse sur le contrôle des principaux locaux de la
FTQ-Contruction."
M. Adam, l'autre jour, me reprochait de ne lire que les paragraphes qui
faisaient mon affaire. Je vais continuer la lecture.
M. Gratton: C'est une première provinciale.
M. Duhaime: Je continue, à la page 69 du rapport de la
commission Cliche: "II suffit, à partir de Yvon Duhamel, de remonter le
lien de filiation pour voir à qui incombe ultimement la
responsabilité morale de son crime. "Car, enfin, l'agent d'affaires
travaillait à la réalisation d'un objectif maintes fois
déclaré par les dirigeants de sa centrale: l'acquisition du
monopole syndical sur les chantiers. Et il le faisait avec des méthodes
qui ne détonnent pas du tout avec celles généralement
admises dans la FTQ-Construction. Il n'est que de lire le procès-verbal
de l'assemblée mensuelle des membres du local 791, tenue le 25 mars
1974. Une résolution, adoptée unanimement, accepte le rapport par
lequel M. René Mantha, après avoir souligné le "beau
travail" accompli par Yvon Duhamel "pour le local et pour tous les membres",
ajoute qu'il "a été grandement apprécié à
son dernier meeting à la Baie-
James". À noter que les membres sont alors bien au courant du
saccage du 21 mars puisqu'il en a été question à la
même assemblée."
Je pourrais continuer, M. le Président, et parler de René
Mantha ou de l'esprit de famille, du roi de la construction, faire état
également que plusieurs des dirigeants de la FTQ-Construction
étaient ce qu'il est convenu d'appeler des travailleurs
d'élections à la solde du Parti libéral du Québec,
ce qu'il est convenu d'appeler des bras, mais je vais m'arrêter là
pour l'instant, pour faire une distinction qui m'apparaît fondamentale:
La responsabilité morale, sauf erreur, n'a pas d'effet juridique. Il y
a, à mon sens, une distinction très nette qu'ont faite les
commissaires, à la page 68, en disant qu'ils ont acquis la conviction
que les travailleurs ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce
qui est arrivé. C'est simple, c'est un travailleur à la base,
celui qui n'a rien à voir avec les mécréants et les
criminels, qui avait pris le contrôle de la FTQ-Construction et qui avait
obtenu le monopole syndical après l'avoir négocié avec le
gouvernement Bourassa, la direction d'Hydro-Québec, la SEBJ et la SDBJ.
C'est ce que dit en toutes lettres le rapport de la commission Cliche. On aura
beau écrire les éditoriaux qu'on voudra, M. le Président,
au soutien d'une mauvaise thèse ou d'un mauvais dossier, quant à
moi, je ne changerai pas d'idée. Je vous remercie, M. le
Président, de votre patience.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président. Je voudrais poser une
question à Me Gadbois. Est-ce qu'une requête en
irrecevabilité a été prise par l'International Union of
Operating Engineers, soit à cause d'une absence de lien de droit ou pour
tout autre motif?
M. Gadbois: À ma connaissance, non. La requête en
irrecevabilité avait été prise par le local 134.
M. Ciaccia: Vous aviez, je crois, mentionné que cette
requête avait été entreprise par le local 134.
M. Gadbois: C'est exact.
M. Ciaccia: Est-ce que d'autres défendeurs
s'étaient joints à cette requête?
M. Gadbois: Je ne crois pas.
M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, la requête en
irrecevabilité a été présentée devant les
tribunaux à cause d'une absence de lien de droit et l'International
Union of Operating Engineers n'a jamais pris une telle
requête.
M. Gadbois: La requête en irrecevabilité avait
été présentée par Me Cutler. Elle a
été entendue le 15 janvier, pour autant que je me rappelle,
c'est-à-dire dès le début de la cause, et elle a
été rejetée.
M. Ciaccia: Elle a été rejetée.
M. Gadbois: Elle avait également été
entendue avant, je crois, mais la décision a été rendue le
15 janvier.
M. Ciaccia: Et elle a été rejetée. M.
Gadbois: Rejetée, oui. M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Chambly.
M. Tremblay: M. le Président, j'aimerais demander à
Me Gadbois de l'information relativement au communiqué de presse qui, je
crois - et je le demande à Me Gadbois - a finalement été
envoyé après le règlement. Je parle d'un communiqué
de presse qui avait été préparé le 13 mars 1979, en
présence du président du conseil d'administration.
M. Gadbois: À quelle page, M. le Président?
M. Tremblay: J'ai cela à la page 183. À la page
134, il y a le projet de communiqué de presse. Je ne retrouve pas dans
les documents le communiqué de presse final. La page 134 du document des
avocats Geoffrion et Prud'homme et les documents de la SEBJ qu'on nous a remis
au début, à la page 183. À la page 134, vous trouvez le
projet de communiqué et les avocats de la SEBJ demandaient qu'un des
paragraphes ne soit pas inclus dans le communiqué.
M. Gadbois: Je regrette, M. le Président, mais je
comprends mal. À la page 183 du livre de la société
d'énergie, c'est un mémoire de Me Jean Bernier des circonstances
entourant la signature de la déclaration de règlement, alors
qu'à la page 134 du livre de Geoffrion et Prud'homme, c'est un projet de
communiqué qui avait été envoyé à MM.
Geoffrion et Prud'homme pour avoir leurs commentaires.
M. Tremblay: D'accord. Dans le troisième paragraphe du
mémo à Me Gadbois de Me Jean Bernier, à la fin du
troisième paragraphe, c'est écrit: "Ensuite, j'ai
réglé avec le PCA les termes finals du communiqué de
presse." Ma question est:
Est-ce que le communiqué de presse a été
expédié aux médias d'information?
M. Gadbois: En fait, il l'a été. C'est Me Bernier,
qui était à ce moment secrétaire de la
société d'énergie, qui s'est occupé de
l'expédier.
M. Tremblay: Est-ce que vous pouvez me dire s'il a
été expédié dans les termes du projet de
communiqué?
M. Gadbois: On m'avise que le communiqué qui a
été remis aux médias de la presse contenait de
légères modifications à ce que vous avez comme projet
à la page 134. J'en ai une copie ici.
M. Tremblay: Bon. Vous en avez une copie. Je voudrais simplement
vous demander si, dans le communiqué final, la SEBJ conservait
l'essentiel de l'article 2 qui disait que les syndicats québécois
n'étaient pas en mesure de payer des sommes de l'ordre du montant
réclamé dans la poursuite. D'autre part, conservait-il aussi
l'allégation que le syndicat américain impliqué dans la
poursuite, l'International Union of Operating Engineers, auquel était
affilié un des syndicats québécois, ne reconnaissait pas
sa responsabilité, mais participait au règlement et y
contribuait? On ajoutait: De l'opinion des conseillers juridiques de la SEBJ,
des procédures requises aux États-Unis pour faire
reconnaître un jugement québécois pourraient se
révéler longues et coûteuses, en plus de représenter
des risques sérieux. Est-ce que cela a été conservé
dans le...
M. Gadbois: Oui. Je lis dans ce communiqué, aux
paragraphes 2 et 3, celui qui a été émis aux
médias, les mots que vous venez de prononcer.
M. Tremblay: Cela avait été préparé
par Me Bernier, avec la collaboration du président du conseil
d'administration, M. Saulnier.
M. Gadbois: C'est exact. Je pense que j'ai dit tantôt que
le projet de communiqué avait été préparé
par le personnel des relations de presse d'Hydro-Québec, à la
demande de M. Saulnier. Il a, par la suite, été
référé à nos avocats et, par la suite, transmis
à la société d'énergie, qui a émis son
propre communiqué.
M. Tremblay: D'accord. Maintenant, dans ce même
mémo, sont relatées les démarches de la journée -
j'ai l'impression -de Me Jean Bernier relativement à ce dossier. Et il y
a une citation, à la page 2 du document, à la page 84 du cahier,
du juge Bisson, du 13 mars 1979 à midi.
M. Gadbois: C'est exact.
M. Tremblay: Est-ce que vous pouvez nous dire quelle a
été la réaction du juge Bisson au moment où lui a
été présentée la requête pour la
déclaration d'entente ou de règlement hors cour?
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. La
façon dont la question est posée concerne une réaction. Je
ne peux pas accepter la question.
M. Tremblay: Quelle a été sa déclaration,
alors?
M. Gadbois: Voici, M. le Président. Tout ce que je puis
faire, c'est de lire ce que M. Bernier rapporte. Je n'étais pas
présent au moment où le juge a constaté le
règlement, étant absent, soit en voyage ou par maladie. Le
rapport que m'en fit M. Bernier est entre guillemets. Donc, j'assume que ce
sont les paroles du juge. On dit: "Je constate que des hommes sages se sont
penchés sur ce dossier pour mettre fin au litige de la façon
présentée." Fin de la citation.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je vais faire ce qu'on fait peu souvent, M. le
Président, je vais m'abstenir.
Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, le
député de Laporte. Le député de Bourassa? Oui.
M. Laplante: J'ai une question additionnelle qui m'a
échappé tout à l'heure. On a parlé de la compagnie
d'assurances et du montant de 1 300 000 $; la compagnie d'assurances,
étant donné que ce n'était pas 32 000 000 $, comment se
fait-il qu'elle ait abandonné aussi facilement une poursuite de 1 300
000 $?
M. Gadbois: II faut...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Vous n'avez pas
besoin de répondre parce que cela ne vous regarde pas. J'ai eu une
réaction spontanée du député de
Jonquièrel
M. Laplante: Je vais changer ma question. Je vais changer ma
question.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président (M. Jolivet): D'accord, parce que j'ai eu une
réaction véhémente... Non, je ne devrais pas dire
cela.
Une voix: Spontanée.
Le Président (M. Jolivet): Spontanée.
M. Laplante: Oui, mais je n'aime pas d'où elle vient, par
exemple.
M. Tremblay: La justice, pour nous, c'est plus important.
M. Laplante: Avez-vous eu une concertation avec les compagnies
d'assurances pour abandonner les poursuites?
M. Gadbois: Pas moi-même. Nos procureurs étaient en
relation avec les procureurs des compagnies d'assurances. (16 h 30)
M. Laplante: Dans votre mandat, était-ce une condition
liée au règlement que la compagnie d'assurances cesse ses
poursuites en même temps que la Société d'énergie de
la Baie James?
M. Gadbois: En fait, c'était une exigence de la
Société d'énergie de la Baie James que, s'il y avait un
règlement, il fallait nécessairement que les réclamations
des assureurs soient également réglées, à cause de
l'obligation qu'avait la Société d'énergie de la Baie
James, en vertu des contrats qui la liaient aux compagnies d'assurances, qui
prévoyaient que la Société d'énergie de la Baie
James, comme assurée, devait fournir, à la compagnie d'assurances
qui réclamerait, tous les services nécessaires, soit comme
témoin, soit comme preuve, pour aider à la cause.
Si le règlement était effectué seulement par la
Société d'énergie de la Baie James, celle-ci se voyait
entraîner dans une action qui se poursuivait contre les défendeurs
et elle considérait qu'elle n'était pas plus avancée
à ce moment-là. Alors, il fallait qu'elle règle.
M. Laplante: Vous m'avez dit tout à l'heure que ce
n'était pas une action conjointe, mais, en somme, la compagnie
d'assurances était quand même liée aussi intimement que
cela avec vous. Ce que je voudrais déterminer - parce que je n'aime pas
jouer au sous-marin avec cela - c'est la responsabilité de la compagnie
d'assurances d'avoir jeté du lest, elle aussi, sur un règlement
en même temps que la Société d'énergie de la Baie
James, quand elle n'avait qu'un petit montant de 1 300 000 $ à
récupérer et qu'à cause de l'insolvabilité des
syndicats, qui a été mentionnée aussi à ce
moment-là, je le vois comme une action prise conjointement avec
Hydro-Québec.
M. Gadbois: C'étaient les mêmes causes;
c'étaient les mêmes défendeurs. Dans les quatre actions
dont il s'agit, l'action de la Société d'énergie de la
Baie James, l'action de la Sécurité, compagnie
d'assurances générales du Canada... Il y avait deux
actions, excusez-moi. En fait, il y en a trois de la compagnie d'assurances et
ces actions devaient être réglées en même temps que
la nôtre. Autrement, l'action se poursuivait en cour comme si nous
n'avions pas réglé.
M. Laplante: C'est compliqué!
M. Gadbois: C'est une question de preuve.
M. Laplante: Oui, c'est cela. Pour nous, c'est compliqué.
Pour les gens qui nous écoutent aussi, s'ils ne sont pas familiers avec
de telles requêtes en justice, au tribunal.
M. Gadbois: M. le Président, j'ai mentionné
tantôt que les trois - j'ai dit trois, mais, en fait, il y en a quatre
-actions étaient liées ensemble pour la preuve. Si une des causes
est réglée et que les trois autres se continuent, c'est la
même preuve qui se continue. L'obligation de la Société
d'énergie de la Baie James était, vis-à-vis de ses
assureurs, de leur fournir la preuve nécessaire pour la poursuite de
leurs actions. Alors, il fallait nécessairement que tout ce "paquet"
soit réglé ensemble.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. Gadbois,
pouvez-nous dire à quel moment M. Laliberté s'est installé
dans ses locaux à Hydro-Québec, en 1978? Vers quelle
époque?
M. Gadbois: En fait, M. Laliberté est devenu
président-directeur général de la Société
d'énergie de la Baie James et, à ce titre, administrateur membre
du conseil d'administration d'Hydro-Québec, le 1er octobre 1978.
À quel moment s'est-il installé? Je dirais dès cette date
ou dès après.
M. Bourbeau: Ah bon! Vous n'avez pas le souvenir qu'il ait pris
place dans les locaux à une période antérieure au 1er
octobre 1978?
M. Gadbois: De souvenir, non.
M. Bourbeau: À l'égard de M. Saulnier qui
était président du conseil, est-ce qu'il a pris possession de ses
locaux avant le 1er octobre 1978 ou après?
M. Gadbois: Non plus, je dirais.
M. Bourbeau: À titre de chef du contentieux, ou avocat en
chef de la compagnie, vous aviez l'occasion de rencontrer M. Laliberté,
je présume, sur une base journalière?
M. Gadbois: Pas nécessairement journalière. J'avais
l'occasion de le rencontrer lorsque j'avais affaire à lui ou qu'il avait
affaire à moi et également, comme j'étais
secrétaire intérimaire du conseil d'administration de la
Société d'énergie de la Baie James, au moins une fois par
semaine.
M. Bourbeau: Est-ce que vous rencontriez M. Saulnier souvent?
M. Gadbois: II faudrait peut-être vous préciser que
le bureau de M. Laliberté était situé à Place
Dupuis, au bureau de la Société d'énergie de la Baie
James, alors que M. Saulnier avait son bureau à Hydro-Québec, au
vingt-deuxième étage. Il y avait une séparation physique
entre les deux.
M. Bourbeau: D'accord. À compter de sa nomination - je
parle de M. Laliberté -est-ce qu'en aucun moment, lors de vos rencontres
journalières - ou enfin hebdomadaires et non pas nécessairement
lors des rencontres du conseil d'administration -il vous a fait part de son
souhait ou de son désir de voir la cause réglée hors
cour?
M. Gadbois: Pas comme tel, M. le Président.
M. Bourbeau: Et à l'égard de M. Saulnier, si je
vous posais la même question?
M. Gadbois: Je donnerais la même réponse.
M. Bourbeau: La même réponse. Au sujet du
règlement avec les compagnies d'assurances dont on faisait état
tout à l'heure, le montant de 100 000 $ qui a été
payé aux compagnies d'assurances a été payé, je
crois, à une seule compagnie.
M. Gadbois: Je n'ai pas participé au règlement des
compagnies d'assurances.
M. Bourbeau: J'avais cru comprendre que, parmi les compagnies
d'assurances, il y en avait quelques-unes qui s'étaient
désistées à un certain moment et qu'à la fin, il
n'y en avait plus qu'une seule encore au dossier. Est-ce que vous pourriez
vérifier?
M. Gadbois: Si je comprends bien, M. le Président, il n'y
avait qu'un certain nombre de compagnies d'assurances qui avaient
décidé de poursuivre, représentant à peu
près un tiers du montant total qui avait été versé
par les compagnies d'assurances. Je parle de la somme de 1 132 000 $. La
Sécurité, compagnie d'assurances générales du
Canada,
représentait les trois compagnies d'assurances qui ont
décidé de poursuivre. Si le règlement s'est
effectué en un seul paiement à cette compagnie, c'est
peut-être un fait, mais je ne connais pas les droits ou les obligations
de cette compagnie vis-à-vis des compagnies qu'elle
représentait.
M. Bourbeau: D'accord. Si vous dites que les compagnies qui
avaient poursuivi ne représentaient qu'un tiers du montant de
l'indemnité payée à Hydro-Québec, on parle alors
d'une réclamation de compagnies qui auraient déboursé
environ 375 000 $. J'essaie d'obtenir le tiers de 1 132 000 $. Cela
représente 377 000 $. Est-ce que c'est exact? Est-ce approximatif?
M. Gadbois: Excusez, M. le Président. Je lis ceci,
à la page 22 du rapport de la Société d'énergie de
la Baie James, c'est-à-dire du livre: "La Sécurité,
compagnie d'assurances générales du Canada, St. Paul Fire and
Marine Insurance Company et la Société d'assurance des caisses
populaires, représentées par Mes Desjardins, Ducharme et Cie,
poursuivent également les mêmes défendeurs pour leurs
parties, 340 000 $, des indemnités payées pour les dommages
directs à la SEBJ et la SDBJ et SOTOUR.
M. Bourbeau: D'accord. Ces compagnies poursuivaient pour 340 000
$ et elles ont encaissé?
M. Gadbois: 100 000 $.
M. Bourbeau: 100 000 $ sur 340 000 $, ce qui fait tout
près de 30% de leur réclamation.
M. Gadbois: II faudrait mettre cela en face des autres compagnies
qui ont renoncé à leur poursuite.
M. Bourbeau: Maintenant, à la suite du paiement des
indemnités par les compagnies d'assurances, il y a eu une augmentation
des primes à la SEBJ. Êtes-vous au courant de l'importance de
cette augmentation?
M. Gadbois: Je crois qu'un des paragraphes de la
déclaration, dans l'action, fait mention de cette augmentation.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez me donner le renseignement?
On peut vous laisser quelques minutes pour vérifier.
Une voix: Le député de Bourassa a dit que
c'était 20%.
M. Bourbeau: Je me fierais plutôt aux chiffres du
témoin qu'à ceux du député de Bourassa.
M. Gadbois: Si l'on regarde à la page 54 du livre de la
Société d'énergie de la Baie James, qui contient la
déclaration de la société, au paragraphe 85 on lit ce qui
suit: "À cause des événements de mars 1974 les
représentants du groupe d'assureurs qui avaient déjà
produit auprès de la demanderesse leur cotation pour assurer les biens
de cette dernière ont exigé une majoration de 20% du taux des
primes d'assurance, majoration qui, sur une période de 10 ans,
représentera pour la demanderesse un coût additionnel de 5 869 132
$, somme que la demanderesse est bien fondée à réclamer
des défendeurs."
M. Bourbeau: Êtes-vous au courant si, effectivement, les
primes d'assurance ont été augmentées subséquemment
de ce montant?
M. Gadbois: Je ne suis pas au courant, il faudrait le
vérifier.
M. Bourbeau: Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: M. le Président...
M. Tremblay: En verty du principe de l'alternance...
Le Président (M. Jolivet): Vous aviez demandé la
parole, je m'excuse, M. le député de Chambly. Allez, laissez
tomber le reste.
M. Tremblay: Me Gadbois, j'aimerais vous demander quel
était le montant d'assurance que vous déteniez,
c'est-à-dire quelle était la somme maximale que les compagnies
d'assurances auraient pu vous payer dans une réclamation.
M. Gadbois: Là, je n'ai aucun document qui pourrait me
permettre de vous donner une réponse exacte. Cependant, la
société d'énergie détenait des polices
d'assurance-construction qui étaient peut-être de l'ordre de 30
000 000 $ ou 50 000 000 $, quelque chose comme cela. Cependant, ces polices
prévoyaient le paiement simplement de dommages directs,
c'est-à-dire de dommages aux installations. C'est la raison pour
laquelle le montant du paiement qui a été fait par les assureurs
à la société d'énergie s'est limité à
1 132 000 $; il s'agissait là de dommages aux installations, aux
campements, aux maisons, etc.
M. Tremblay: Les 1 132 000 $, est-ce que c'était la somme
totale de votre réclamation aux assureurs?
M. Gadbois: Cela a été la somme totale qui a
été acceptée par les compagnies
d'assurances.
M. Tremblay: Votre réclamation à la SEBJ?
M. Gadbois: Je ne pourrais vous répondre.
M. Tremblay: Dans un autre ordre d'idées, mais toujours en
rapport avec la somme de 1 132 000 $ payée par les assurances, si j'ai
bien compris - je ne suis pas avocat; je ne m'en excuse pas, mais je le dis -
les compagnies d'assurances auraient-elles récupéré les 1
132 000 $, si la SEBJ avait eu gain de cause en cour et qu'elle avait
récupéré - c'est fort hypothétique, je l'admets
très bien cet argent?
Le Président (M. Jolivet): Me Gadbois, simplement en vous
disant que je vous refuse la réponse. C'est une hypothèse. Je ne
peux en aucune façon vous permettre de répondre; on ne sait pas
ce qui serait arrivé. (16 h 45)
M. Lalonde: Si le député avait des roues...
M. Tremblay: Je voudrais, au moins, que vous m'informiez de
l'erreur que je fais.
Le Président (M. Jolivet): Oui, simplement, vous allez la
reformuler, mais, si vous partez sur une hypothèse, dès le
départ la question est irrecevable.
M. Gratton: Faites attention parce qu'il y en avait trois avant
votre question.
M. Lalonde: On pourrait demander au député de
Bourassa de vous conseiller.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le député.
M. Gratton: En tout cas, je ne vous offre pas mes services.
M. Tremblay: De notre côté, c'est un travail
d'équipe.
M. Gratton: On voit cela.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît; M. le
député de Chambly, vous pouvez reprendre votre question si vous
pensez pouvoir la reprendre.
M. Tremblay: Écoutez, je vais y aller très
directement et, M. le Président, vous m'arrêterez si c'est
hypothétique. Ce que je cherche à savoir, c'est: Aurait-il pu
être possible pour les assurances de recouvrer le montant qu'elles
avaient payé à la SEBJ si le jugement...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
suis obligé de vous dire que, malheureusement, je ne peux la
recevoir.
M. Tremblay: Si j'arrête au si, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): Indépendamment de cela.
C'est impossible de le savoir. Il y a eu un règlement hors cour et, en
conséquence, on ne peut poser aucune autre hypothèse en disant:
S'il y avait eu un procès.
M. Tremblay: M. le Président, je m'excuse, mais il reste
qu'en droit il doit y avoir une entente normale entre les compagnies
d'assurances dans un cas comme celui-ci et leurs clients pour savoir comment
seraient réparties les sommes qui seraient versées. Et, dans la
pratique courante, j'imagine que je pourrais avoir la réponse, non?
M. Lalonde: Demandez à la pratique courante. Appelez la
pratique courante.
M. Tremblay: Alors, dans la pratique courante. Merci. Le
député de Marguerite-Bourgeoys...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Tremblay: ...en tant qu'avocat, me conseille maintenant. J'ai
non seulement la collaboration de mes collègues de ce
côté-ci de la Chambre, mais aussi de ceux de l'autre
côté. Je les remercie infiniment.
M. Lalonde: M. le Président, je veux déclarer que
je n'ai pas accepté de mandat.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Chambly.
M. Tremblay: Ce serait un procureur que je n'aurais pas
choisi.
M. Lalonde: Tant pis pour vous.
M. Tremblay: Dans la pratique courante, comme me le
suggérait je ne sais qui de l'autre côté, dans le cas
où un jugement aurait été porté...
M. Lalonde: On vous observe.
M. Tremblay: Je sais... est-ce que les compagnies d'assurances
auraient pu espérer...
Une voix: Tous les espoirs sont permis.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous allez me rendre la vie difficile. Le problème est que votre
question, quel que soit l'angle sous lequel vous la posez, ne semble pas
être autre chose qu'une hypothèse sur quelque chose qui n'a jamais
existé. Alors, je ne peux permettre à Me Gadbois de
répondre.
M. Tremblay: M. le Président, c'est fort simple.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y donc et on verra.
M. Tremblay: Ce que je cherche à savoir, c'est: Les
compagnies d'assurances avaient-elles intérêt à poursuivre
au maximum pour obtenir plus que 100 000 $?
Le Président (M. Jolivet): Et mon problème, c'est
qu'encore une fois Me Gadbois ne peut répondre à cela; il n'est
pas la compagnie d'assurances. Il ne peut répondre à cela. C'est
impossible.
M. Tremblay: Ah non! Mais, il sait très bien...
Le Président (M. Jolivet): Ah non! C'est une opinion, et
une opinion n'est pas recevable en vertu du règlement que vous m'avez
demandé d'appliquer et que j'applique.
M. Lalonde: Vous pouvez demander à Me Gadbois l'adresse
des compagnies d'assurances pour leur écrire.
M. Tremblay: Bien, je vous remercie, M. le Président. Je
vais clore là-dessus et vous remercier de vos directives, ainsi que de
celles du député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, je donne la parole
au député de Laprairie.
Une voix: Vous savez maintenant comment je me sentais hier.
M. Bourbeau: On appelle cela un "strike-out".
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, je ne voudrais aucun commentaire. Je l'ai fait ce matin et je
demanderais la même collaboration de votre bord. M. le
député de Laprairie.
M. Saintonge: Me Gadbois, le 15 janvier, les procureurs de la
SEBJ, Geoffrion et Prud'homme, recevaient uniquement comme mandat
d'écouter les propositions de règlement, sans aucun mandat de
négocier. C'est bien exact?
M. Gadbois: C'est exact.
M. Saintonge: À la réunion du 17, Me Jasmin avait
présenté la veille une proposition de règlement de l'ordre
de 50 000 $.
M. Gadbois: Oui.
M. Saintonge: Cela a été présenté
à M. Laliberté le 17. C'est bien cela?
M. Gadbois: C'est cela.
M. Saintonge: Cela a été reçu de quelle
façon par M. Laliberté?
M. Gadbois: Me Jasmin avait demandé, en présentant
sa proposition de règlement, de rencontrer le P.-D.G. de la
société d'énergie. Cette rencontre a effectivement eu lieu
le mercredi 17 dans le bureau du président-directeur
général de la société d'énergie où
étaient présents M. Laliberté, Me Cardinal, Me Aquin, Me
Jasmin et moi-même. C'est là que Me Jasmin a proposé les
commentaires dont j'ai fait part ce matin. Après qu'il eut
quitté, le président-directeur général de la
société nous a avisés que l'offre syndicale,
c'est-à-dire l'offre faite par Me Jasmin pour son syndicat, était
inacceptable.
M. Saintonge: A-t-il donné des motifs du fait que l'offre
était inacceptable?
M. Gadbois: II avait un motif, le montant de l'offre: 50 000 $ et
il y avait dans l'offre certains textes qu'il trouvait non acceptables.
M. Saintonge: Je pense que c'est à cette même
réunion que le mandat a été confié à
Geoffrion et Prud'homme de préparer une formule de transaction ou une
formule de déclaration de règlement hors cour.
M. Gadbois: C'est exact, M. le Président.
M. Saintonge: Dans quelles circonstances, le mandat précis
de préparer cette formule a été donné à
Geoffrion et Prud'homme?
M. Gadbois: Dans les circonstances que je viens de vous relater.
En d'autres mots, d'une part, le président-directeur
général fait le commentaire que l'offre de Me Jasmin est
inacceptable, qu'elle contient certains allégués qui
n'étaient pas, non plus acceptables et qu'il désirait avoir de
Geoffrion et Prud'homme un projet de transaction qui, s'il décidait de
transmettre ce document ou un projet de transaction au conseil
d'administration, soit acceptable à la
société d'énergie.
M. Saintonge: À ce moment-là, M. Laliberté
a-t-il mentionné si des négociations étaient en cours
entre les syndicats et une personne quelconque, ou une partie quelconque, pour
la SEBJ?
M. Gadbois: II a répété que le mandat de
Geoffrion et Prud'homme était toujours d'écouter.
M. Saintonge: Mais a-t-il fait allusion au fait de
préparer une formule de transaction, une formule de règlement de
cour, alors qu'on refuse une offre potentielle du syndicat et que M.
Laliberté demande, d'autre part, précisément à ses
procureurs, tout en leur laissant simplement le mandat d'écouter, de
préparer une formule de transaction? Est-ce qu'une quelconque offre de
règlement autre que cela ou une quelconque négociation
était dans l'air?
M. Gadbois: Pas au moment où on a rencontré Me
Jasmin. Il y avait l'ouverture qui avait été faite par Me
Beaulé la semaine précédente, lorsque Me Beaulé
avait exposé à Me Jetté qu'il y avait peut-être une
possibilité d'un montant de 250 000 $, mais c'était tout.
M. Saintonge: Étiez-vous présent le 15 janvier
à la cour lorsque Me Beaulé aurait mentionné quelque chose
relativement aux négociations par rapport au mandat confié
à Geoffrion et Prud'homme à ce moment-là, dans le sens
que, si Geoffrion et Prud'homme n'avaient pas le mandat de négocier,
seulement d'écouter, lui, il se retirait de toute
négociation?
M. Gadbois: C'était sur l'heure du dîner et
j'étais avec Me Cardinal et, je crois, Me Aquin. Nous avons
rencontré Me Beaulé et Me Jasmin. Je crois que l'un ou l'autre a
commencé à parler, probablement Me Beaulé. Il a
demandé à Me Cardinal s'il avait un mandat de négocier. Me
Cardinal lui a répondu: Non, nous n'avons pas le mandat de
négocier. Me Beaulé leur a soi-disant répondu - je l'ai
entendu, cela fait revenir ma mémoire - qu'il ne pouvait pas parler
à des gens qui n'étaient pas mandatés pour
négocier.
M. Saintonge: Donc, en d'autres mots, Me Beaulé
n'était pas dans les négociations avec la SEBJ à ce
moment-là. Le 17, il n'y avait aucune négociation, à votre
connaissance. Vous n'aviez pas le mandat de négocier, Geoffrion et
Prud'homme non plus?
M. Gadbois: Aucunement.
M. Saintonge: Me Jasmin avait présenté son offre et
cela avait été refusé. M. Gadbois: C'est exact.
M. Saintonge: Donc, à ce moment-là, M.
Laliberté n'avait donné aucun motif du nouveau mandat
confié à Geoffrion et Prud'homme de préparer une formule
de transaction?
M. Gadbois: Non. C'est à sa demande que cela a
été fait.
M. Saintonge: Sans aucune explication? M. Gadbois: Au cas
où.
M. Saintonge: Au cas où, bon! Et sans aucune information
que des négociations quelconques pouvaient se dérouler entre les
parties?
M. Gadbois: Non, juste au cas où des offres seraient
faites...
M. Saintonge: D'accord.
M. Gadbois: ...par les défendeurs.
M. Saintonge: Je pense que Me Aquin mentionnait qu'on avait
demandé que la formule de négociation soit préparée
dans un délai assez court, pour le 23 janvier, si je me souviens bien.
Êtes-vous au courant de cela?
M. Gadbois: On avait demandé - quand je dis "on", je veux
dire M. Laliberté - s'il était possible d'avoir un document
aussitôt que possible. D'ailleurs, M. Aquin m'a transmis un document le
lendemain, le 18 janvier.
M. Saintonge: D'accord. On voulait arriver avec un document assez
complet pour le 22 ou le 23 janvier, je pense. Est-ce qu'il y avait une raison
à l'urgence de préparer un tel document? Ma question est bien
précise: À votre connaissance, est-ce qu'il y avait une raison
d'urgence pour la préparation d'un tel document de transaction ou de
règlement dans un délai très rapide?
M. Gadbois: D'après moi - je ne fais qu'une
hypothèse - il y avait l'offre de M. Jasmin...
M. Duhaime: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: Je dois m'opposer, non pas que je n'aimerais pas
entendre la réponse, mais parce que cette question est
irrecevable, M. le Président.
M. Saintonge: Non. Ce n'est pas une opinion que je demande, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Répétez votre
question. Me Gadbois a commencé en disant: Je fais une
hypothèse.
M. Saintonge: Je demandais simplement à Me Gadbois s'il y
avait un motif d'urgence, à sa connaissance, qui existait pour la
préparation d'une telle formule de règlement dans un bref
délai.
Le Président (M. Jolivet): Me Gadbois.
M. Gadbois: À ma connaissance, le
président-directeur général de la Société
d'énergie de la Baie James ne m'a pas fait part des motifs ou des
raisons pour lesquels il demandait ce document. Vu l'offre qui avait
été faite par Me Jasmin - encore une fois, il faut que je suppose
- je suppose qu'il voulait être préparé.
M. Saintonge: Au cas où. M. Gadbois: Au cas
où.
M. Saintonge: J'ai une autre question à poser à Me
Gadbois. Cela concerne les rapports spéciaux de Me Jasmin, en fait,
comme procureur des syndicats canadiens et également le rapport
spécial qui a été remis au conseil d'administration le 6
février. Est-ce que vous avez été informé d'une
façon quelconque avant le 6 février de la préparation de
ces rapports par les syndicats et que ce rapport s'en venait
éventuellement au niveau de la Société d'énergie de
la Baie James?
M. Gadbois: Je ne savais pas que ces rapports s'en venaient. Ce
que mes notes m'indiquent, c'est que le président du conseil, M.
Saulnier, m'a exprimé, à peu près à ce
moment-là, le voeu de pouvoir étoffer le dossier. Ils avaient
reçu, à ce moment-là, certaines offres qui avaient
été déposées à l'assemblée du 23
janvier. C'était celle de Me Jasmin, qui était semblable à
celle qui avait été refusée originalement, et celle de Me
Beaulé. M. Saulnier m'a exprimé le voeu d'une possibilité
d'avoir plus de renseignements du côté des difficultés
financières des syndicats. De mémoire, je crois que j'en ai
probablement fait part à Me Cardinal.
M. Saintonge: Vous ne savez pas qui a fait part de la demande aux
syndicats de préparer de tels rapports?
M. Gadbois: Je ne le sais pas.
M. Saintonge: Vous avez pris connaissance de ce rapport ou vous
en avez été informé simplement à la réunion
du 6 février. C'est bien cela?
M. Gadbois: C'est cela.
M. Saintonge: Vous n'aviez pas discuté de cela auparavant,
dans les jours précédents, avec les procureurs de la SEBJ ou les
procureurs des syndicats? (17 heures)
M. Gadbois: J'avais simplement transmis le voeu ou le message. Je
n'ai eu que le retour des documents. Quant à ce qui . s'est passé
dans l'intervalle, je n'en sais rien.
M. Saintonge: Vous n'avez pas discuté avec Me Jasmin ou Me
Beaulé?
M. Gadbois: Aucunement. Je n'étais pas en communication
avec Me Jasmin.
M. Saintonge: Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Cela va être bref. Je voudrais revenir sur un
des points soulevés par M. le député de Laporte sur la
question des assurances. Je voudrais vous renvoyer au document
déposé par la SEBJ, à la page 54 qui réfère
au paragraphe 85 de la déclaration de la société, au
dossier de la cour qui porte la date du 29 juillet 1977, où il est
question d'une réclamation quant aux assurances pour un montant de 5 869
132 $. C'est le paragraphe que vous avez lu tantôt.
Pour vous poser ma question, je voudrais que vous vous
référiez au dossier déposé par les procureurs
Geoffrion et Prud'homme, la rubrique Correspondance et lettres à la page
55 qui réfère à une lettre de Geoffrion et Prud'homme qui
vous a été transmise. Je vais vous lire le premier paragraphe.
"Le 24 janvier 1978 - il y a un renvoi au bas de page: lire 29 janvier 1979
-vous nous demandiez notre opinion sur le montant des dommages que nous
croyions être en mesure de vous prouver compte tenu de nos plus
récentes informations et du déroulement de la preuve dans ce
dossier." La lettre se poursuit et je voudrais vous renvoyer à la page 4
de la lettre, donc à la page 57 du document, au dernier paragraphe.
Est-ce que vous l'avez?
M. Gadbois: M. le ministre c'est, en fait, la page 3,
numérotée en haut.
M. Duhaime: Pardon, page 3. Oui, c'est cela, vous avez raison.
Est-ce que vous pourriez nous lire le dernier paragraphe de la page 3 qui
commence par: "Sous la rubrique majoration des primes d'assurance?
M. Gadbois: Certainement.
M. Duhaime: C'est une lettre qui vous est adressée.
M. Gadbois: "Sous la rubrique majoration des primes d'assurance
imposées par les assureurs de la société à cause
des événements de mars 1974, nous avons réclamé une
somme de 5 869 132 $ (c'est la somme qui avait été
mentionnée précédemment). D'une part, la somme
réclamée couvre la majoration des primes d'assurance non
seulement pour le chantier de LG 2 lui-même, mais pour tous les chantiers
du complexe La Grande. Il se pourrait fort bien que, même si de fait, les
événements de mars 1974 ont provoqué une augmentation des
primes d'assurance de 20% pour tous les chantiers du complexe La Grande, le
tribunal pourrait décider de ne faire supporter par les
défendeurs que les coûts additionnels applicables au chantier de
LG 2. M. Marc Darby nous a précisé récemment - M. Darby
était le contrôleur des assurances de la société
d'énergie - que les coûts additionnels encourus à ce jour
se chiffrent pour le chantier de LG 2, à 400 000 $ approximativement. En
outre, les assureurs de la société viennent de décider
tout récemment de réduire de 20% les primes d'assurance
actuellement payées par la société d'énergie. Un
représentant des assureurs nous a informés que 10%
approximativement de cette diminution récente est attribuable à
la paix syndicale qui règne depuis quelques années sur les divers
chantiers du complexe La Grande. Une nouvelle analyse de notre
réclamation sous ce chef s'impose donc."
M. Duhaime: On peut s'arrêter là, M. le
Président. Je voudrais vous renvoyer à la page 8 de la lettre qui
vous a été adressée et qui correspond à la page 62
du document Correspondance et lettres, sous la rubrique F. Pour gagner du
temps, je peux bien le lire. "Quant au chapitre des assurances, étant
donné les récentes révisions de vos assureurs, il nous est
impossible, à l'heure actuelle, de déterminer le montant
prouvable."
Si je me réfère à la page 3 de la lettre, dans la
majoration des assurances pour ce qui est du chantier de LG 2, il était
question d'un montant de 400 000 $ approximativement.
M. Gadbois: C'est exact.
M. Duhaime: Est-ce qu'on peut dire que c'était un maximum
réclamable?
M. Gadbois: J'aurais de la difficulté à
répondre à cette question.
M. Duhaime: Très bien. Maintenant, lors des
réunions du conseil d'administration de la SEBJ des 23 et 30 janvier, je
crois que la Société d'énergie de la Baie James a
déposé après ce document-ci, à la demande, je
crois, du député de Marguerite-Bourgeoys, la liste des
présences. Voulez-vous me confirmer si M. Roland Giroux était
présent à ces deux réunions du conseil?
M. Gadbois: À la réunion du 23 janvier 1979, il est
indiqué que M. Giroux est présent.
M. Duhaime: À la réunion du 30? M. Gadbois:
Également.
M. Duhaime: Maintenant, lors de l'une ou l'autre de ces deux
réunions du conseil d'administration, au meilleur de votre souvenir,
est-ce que M. Giroux a mentionné que, quant à lui, la
réclamation valait 20 000 000 $?
M. Gadbois: Les délibérations du conseil portaient
sur bien des aspects de la réclamation. Qui a dit quoi? Sauf,
peut-être, la demande de M. Giroux de suggérer que le
président du conseil et les deux P.-D.G. aillent consulter le premier
ministre, je ne pourrais me rappeler si M. Giroux a fait cette remarque ou
non.
M. Duhaime: Je vous remercie, Me Gadbois.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Me Gadbois, comme je
n'ai plus d'intervenant, je tiens, au nom des membres de la commission,
à vous remercier.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys a un petit
commentaire à faire?
M. Lalonde: Je voudrais, moi aussi, remercier Me Gadbois de
l'éclairage qu'il a fourni à la commission, de sa collaboration,
de sa façon directe et claire de répondre à nos questions,
de nous donner des réponses qui touchaient directement les questions
posées, sans détour, ce qui témoigne, sans l'ombre d'un
doute, que vous n'avez voulu rien retenir, ce qui, au fond, est la meilleure
façon de ne pas se sentir harcelé.
Le Président (M. Jolivet): J'aimerais simplement faire une
vérification. Avant la fin de la séance de ce matin, le
député de Vimont a fait une demande de documents concernant
Marcel Audet, si je ne me trompe pas. M. le député de Vimont.
M. Rodrigue: Je voulais savoir quelle était la fonction de
M. Audet au moment du saccage de LG 2 et pour qui il travaillait. C'est la
question que j'avais posée.
M. Gadbois: II nous fera plaisir, M. le Président, de
faire la vérification et d'en aviser le secrétaire de la
commission.
Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie et, compte
tenu de la fin de cette interrogation de Me Gadbois, je vais suspendre les
travaux jusqu'à 20 heures alors que l'on reprendra avec Me
Beaulé.
(Suspension de la séance à 17 h 08)
(Reprise de la séance à 20 h 06)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources reprend donc ses travaux jusqu'à 22 heures ce soir. Je vous
rappelle que la commission ajournera à 22 heures jusqu'à mercredi
prochain, dans l'avant-midi, à la suite d'une motion qui sera
déposée à l'Assemblée nationale au cours de la
journée de mardi de la semaine prochaine.
Décision sur la requête des procureurs du
local 791
Avant de commencer nos travaux, j'aimerais répondre par une
décision concernant le télégramme que nous avons
reçu. Je ne pense pas que j'aurai besoin d'éclairage de personne
puisque la décision va être facile à rendre. De la
même façon que j'ai jugé irrecevable une requête
présentée par l'avocate de Me Beaulé de la même
façon la présidence de cette commission rejette comme irrecevable
la requête présentée par Laurin Laplante et Laplante,
avocats par M. Robert Laurin pour le local 791. Donc, M. le juge Jasmin devra
se tenir disponible pour la commission parlementaire au moment où il
sera invité à cette commission parlementaire.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Si vous me le permettez peut-être que c'est
à ce moment-ci que je devrais poser la question au ministre. Dans
l'hypothèse où le témoignage de Me Beaulé se
terminerait ce soir, est-ce que le ministre est en mesure de nous dire quel
serait le prochain invité, mercredi prochain?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Alors, M. le Président, je suis content que le
député de Marguerite-Bourgeoys aborde cette question. Si j'avais
la garantie que ce soir nous en aurons terminé avec le témoignage
de Me Beaulé...
M. Lalonde: J'ai fait un hypothèse je pense assez
réaliste dépendant de la longueur des réponses et de la
longueur des interventions et des interférences.
M. Duhaime: Et de la pertinence des questions vous voulez dire.
Je préférerais prendre un peu de temps pour consulter. Je
comprends que la présidence, par le jugement qui vient d'être
rendu tout à l'heure, a disposé de la requête ou du
télégramme du local 791. Mais normalement nous ne reprenons nos
travaux que mercredi prochain à 10 heures. Je dis normalement.
J'appellerais Me Yves Gauthier et ensuite, dépendant des consultations
qui pourraient être faites et selon aussi ce dont nous pourrions
être informés des procédures judiciaires qui sont
annoncées dans ce télégramme, le temps d'en prendre
connaissance, le temps également de demander avis, je pourrais
suggérer au leader du gouvernement ou bien d'appeler Me Jean-Roch
Boivin, ou encore l'honorable juge Jasmin. Mais, en tout état de cause,
n'ayant en main aucune des procédures annoncées dans le
télégramme transmis à la présidence cet
après-midi, je ne pourrais vraiment pas aller plus loin pour
l'instant.
M. Lalonde: Est-ce qu'on peut s'attendre à être
avisés...
M. Duhaime: Lundi. M. Lalonde: Lundi?
M. Duhaime: Lundi, dans la journée, oui.
M. Lalonde: Merci. Maintenant, en ce qui concerne M. Maurice
Pouliot - je m'excuse de revenir à la charge...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Lalonde: J'ai posé une question au premier ministre, il
y a quelques jours, lui demandant s'il était prêt à
reconsidérer la décision de ne pas l'appeler. Et il avait
semblé accueillir cette invitation avec une certaine faveur. Est-ce que
cette décision de ne pas l'appeler a été
reconsidérée par le gouvernement?
M. Duhaime: Je répondrais, M. le Président, que le
premier ministre a pris avis de la question qui a été
posée à l'Assemblée nationale. Je n'ai pas eu le temps de
participer à quelque discussion que ce soit avec le premier ministre
à propos de cette question. Je ne veux pas m'engager au nom du premier
ministre. Probablement que,
mardi ou mercredi de la semaine prochaine, il pourrait donner une
réponse à l'Assemblée nationale à la suite de
l'avis qu'il a pris de la question qui lui était posée. Mais cela
pourrait aider beaucoup la prise en considération ou le
délibéré si le député de
Marguerite-Bourgeoys nous indiquait davantage le lien ou le rapport, autre que
le fait d'avoir signé le règlement hors cour au nom du Conseil
provincial des métiers de la construction...
Le Président (M. Jolivet): Je n'accepterai, cependant,
aucun débat ce soir, comme je l'ai dit hier...
M. Duhaime: Puisqu'il n'y a pas de motion sur la table, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): C'est ce que j'allais
dire...
M. Duhaime: ...attendons la semaine prochaine.
M. Lalonde: Alors, je comprends donc que mercredi, ce sera Me
Louis alias Yves
Gauthier qui sera invité par le ministre, de toute
évidence.
M. Duhaime: M. le Président, normalement, oui. Mais je ne
peux pas être formel...
M. Lalonde: À confirmer lundi.
M. Duhaime: Ce sera confirmé par le leader du gouvernement
par l'entremise du secrétariat de la commission.
M. Laionde: Très bien.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Nous en étions
toujours au même serment de Me Rosaire Beaulé.
Comme les débats se sont déroulés aujourd'hui, avec
rapidité, je demanderai donc aux membres de cette commission d'agir de
la même façon. La parole est au député de Gatineau.
Et je devrais aussi dire, par la même occasion, que je demanderais la
même collaboration de la part de notre invité. La parole est au
député de Gatineau.
Commentaire sur le témoignage de Me Rosaire
Beaulé
M. Gratton: M. le Président, vous aurez probablement
deviné, hier, à l'ajournement de nos travaux, que j'avais fini de
poser les questions à notre invité, Me Rosaire Beaulé.
Avant de céder mon droit de parole, j'aimerais maintenant faire un bref
commentaire.
En me référant à la conclusion du mémoire de
Me Beaulé, on y lit ce qui suit: "À la lumière des faits
qui précèdent, on comprendra que j'ai fait appel à la
droiture, à la sagesse et au fair-play des personnes en autorité
et des membres du conseil d'administration de la SEBJ, afin que cesse au plus
tôt ce procès long et coûteux, non seulement pour la SEBJ,
mais également pour l'International Union of Operating Engineers. "On
comprendra aussi le refus de ma cliente de reconnaître quelque
responsabilité que ce soit dans le saccage de LG 2, survenu le 21 mars
1974."
M. le Président, supposons, pour les fins de la discussion, qu'on
donne raison à Me Beaulé étant donné que sa
cliente, l'International Union of Operating Engineers, n'avait aucune
responsabilité dans cette cause, la question qui se pose est de savoir
si on doit reprocher à Me Beaulé d'avoir jugé utile de
s'adresser aux personnes en autorité pour les sensibiliser au point de
vue de sa cliente? Après tout, comme il l'a lui-même
répété à plusieurs reprises, c'était
peut-être son droit de prendre tous les moyens juridiques susceptibles de
protéger les intérêts de ceux qui payaient ses
honoraires.
Je tiens à préciser que le fait d'avoir été
ou d'être un ami de longue date et un ancien associé du chef de
cabinet du premier ministre et d'avoir milité activement dans le
même parti politique n'a rien de répréhensible en soi.
Je répète que je ne suis pas avocat, mais prenons par
analogie le cas heureusement de plus en plus rare, mais qui s'est quand
même produit assez fréquemment dans le passé - d'un
individu qui écope d'une contravention de circulation ou de
stationnement, dans une de nos villes du Québec. Supposons que cet
individu est un ami de longue date du maire de la ville, peut-être
même un de ses organisateurs politiques. L'individu en question est
convaincu que le policier qui lui a collé la contravention l'a fait
injustement ou abusivement. Plutôt que de se présenter en cour
pour plaider non coupable et se défendre, il décide de tenter de
sensibiliser le maire, par l'entremise de son principal conseiller, à
l'injustice dont il se croit victime. Je ne porterai pas de jugement sur le
bien-fondé d'une telle démarche. Je sais cependant que le maire
qui y donnerait suite en faisant annuler la contravention serait jugé
très sévèrement par la population. (20 h 15)
Dans le cas qui nous occupe, je dois avouer que j'aurais pu être
convaincu du bien-fondé des démarches de Me Beaulé
auprès de Me Jean-Roch Boivin si, dans son mémoire et dans ses
réponses à nos questions, il s'était limité
à nous exposer les
considérations purement juridiques de sa défense qui
pouvait, je suppose, ne pas être sans mérite. Mais, M. le
Président, quand dans son mémoire, il se permet de citer un
extrait incomplet du rapport de la commission Cliche et qu'il en fait une de
ses principales recommandations et qu'il nous parle de la philosophie sociale
de la commission qui aurait inspiré le règlement hors cour, quand
il nous parle de désaccord idéologique quant à
l'interprétation des événements entourant le saccage,
quand il s'est permis de tenir publiquement un discours à saveur
nettement politique, pour ne pas dire partisane, avant même de
témoigner et durant son témoignage devant la commission, quand
finalement je constate l'attitude que Me Beaulé a eue jusqu'à
maintenant à l'égard des membres de la commission qui ont
osé poser les questions qu'ils jugeaient susceptibles d'aider à
faire la lumière sur toute cette affaire, je regrette de vous dire que
Me Beaulé ne m'a pas convaincu.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Nous venons d'entendre, à mi-course, la
conclusion du Parti libéral du Québec sur l'état de nos
travaux. Je dois dire que je le regrette, non seulement sur le fond mais sur le
moment. J'aurais pensé que nous aurions pu mener les travaux de cette
commission à terme et qu'ensuite cette commission aurait, bien
sûr, débattu et produit un rapport. C'est avec beaucoup
d'insistance que l'Opposition libérale a demandé cette semaine
à Me Beaulé qui, je tiens à le répéter, est
ici comme invité de cette commission... Ce n'est un témoin ni
d'un côté ni de l'autre mais un témoin de la commission
permanente élue de l'énergie et des ressources. En excluant la
journée d'aujourd'hui, cette commission à ce jour a
siégé pendant treize jours en incluant aujourd'hui, jeudi 5 mai,
quatorze jours. De tout ce temps, je le rappelle, Me Beaulé est ici et
nous sommes jeudi 5 mai. Me Beaulé a répondu à
l'invitation de la commission parce qu'il n'a pas été
assigné par huissier ou par voie de subpoena, il est ici depuis jeudi
matin dernier. J'avais pensé que l'insistance de l'Opposition
libérale en ce sens que Me Beaulé revienne devant nous ce soir
était dans le but de lui poser des questions sur des points qui
n'avaient pas été éclaircis par notre commission depuis
une semaine, c'est-à-dire depuis le temps où Me Beaulé est
avec nous. Plutôt que d'adresser des questions à Me Beaulé,
le député de Gatineau qui n'est pas le garçon d'ascenseur
au Parti libéral du Québec mais qui est leader parlementaire
adjoint de l'Opposition s'est contenté de faire ce que j'appellerais un
plaidoyer pro domo.
Motion pour libérer M. Beaulé
En conséquence, je voudrais formuler la motion suivante puisque
j'en ai le droit. Je vais formuler la motion et je ferai l'argumentation
ensuite. Je fais motion pour que cette commission mette fin
immédiatement et de façon définitive au témoignage
de Me Rosaire Beaulé devant la commission élue permanente de
l'énergie et des ressources.
M. le Président, je voudrais statuer d'abord sur la
recevabilité de cette motion et ensuite j'argumenterai sur le fond.
Le Président (M. Jolivet): Sur cette motion, M. le
ministre, toute motion de fond - et c'en est une - est débattable. Donc,
je la déclare recevable.
M. Lalonde: Sur la recevabilité, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): ...non j'ai le droit de la
déclarer puisqu'elle est recevable, c'est une motion.
Une voix: ...
Le Président (M. Jolivet): Un instant seulement, vous
aurez à la discuter. On m'a demandé de parler sur la
recevabilité et j'ai le droit comme président de déclarer
si elle est recevable ou pas. Cette motion est recevable.
La deuxième chose que je tiendrais à faire remarquer,
puisqu'un débat suivra, bien entendu, est en ce sens que cette motion
étant recevable le droit de parole de chaque personne sur une motion est
de vingt minutes. Je vais donc déclarer recevable la motion. Toute
personne qui voudra intervenir aura vingt minutes pour le faire.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le...
Une voix: Le ministre a demandé la parole.
Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais. Sur une question
de règlement ou sur la motion?
M. Lalonde: Sur la motion.
Le Président (M. Jolivet): Sur la motion. On va d'abord
entendre le ministre.
M. Lalonde: Oui. Je voulais simplement donner un renseignement
qu'on vient d'ailleurs de me demander. Mon adjoint, mon chef de cabinet me
posait la question à savoir que le chef de cabinet du leader du
gouvernement lui avait demandé combien de
temps encore l'interrogatoire de Me Beaulé durerait. Je lui ai
indiqué que nous tenterions de terminer ce soir. On ne sait pas
exactement combien de temps cela peut prendre; cela dépend de la
longueur des questions, des interventions, etc. Le député de
Brome-Missisquoi, le député de Laporte et votre humble serviteur
devaient... Nous avions même, en séance de préparation,
tenté de nous discipliner d'une façon absolument rigoureuse pour
pouvoir libérer Me Beaulé à 22 heures ou avant mais,
enfin, c'est malheureux... Je donne cette information au ministre; il peut
retirer sa motion, et à 22 heures, je pense qu'on va pouvoir terminer,
suivant la longueur des questions.
M. Duhaime: Alors, M. le Président,
là-dessus....
M. Lalonde: S'il veut qu'on débatte la question.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: J'ai l'habitude de jouer franc-jeu en pareille
matière. Je voudrais le consentement de l'Opposition officielle à
l'effet que le témoignage de Me Beaulé se terminera à 22
heures précises, c'est-à-dire à l'ajournement normal. Si
j'ai cet accord, je vais retirer la motion que je viens de formuler. Si je n'ai
pas ce consentement nous allons la débattre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, au nom de l'Opposition.
M. Lalonde: Oui. Il faudrait faire vite pour cela, M. le
Président. Il nous reste à peine une heure et demie. J'ai
à peu près cinq ou six questions à poser et
peut-être un petit commentaire de deux minutes, après ou avant ou
au milieu. Le député de Brome-Missisquoi me dit à peu
près la même chose. Cela va dépendre de la longueur des
réponses et des interventions concernant les questions. Si la
deuxième question du député de Brome-Missisquoi
dégénère en débat qui nous mène à 21
h 45, je ne peux m'engager dans ce sens. Je ne vois pas pourquoi on forcerait
Me Beaulé à revenir mercredi prochain. Je ne vois pas pourquoi.
Je pense que Me Beaulé non plus ne voit pas pourquoi il reviendrait.
Je pense qu'on a quelques questions. Chacun de nous a été
témoin participant, mais surtout témoin du déroulement de
cet interrogatoire. Si le témoin prend dix minutes pour répondre
à chacune de nos questions, on ne finira pas à 22 heures.
M. Duhaime: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: Je comprends la situation dans laquelle se retrouve
le leader parlementaire de l'Opposition. Je lui prête toute la bonne foi
possible, mais je lui dis très clairement ceci: Je pense qu'on pourrait
demander à notre invité d'être très bref dans ses
réponses, mais je ne prendrai pas le risque de perdre mon droit de
parole...
M. Lalonde: J'allais vous l'offrir. M. Duhaime: Un
instant.
M. Lalonde: À 9 h 50, vous reviendrez...
M. Duhaime: Non, non.
M. Lalonde: ...avec votre motion si ce n'est pas
terminé.
M. Duhaime: Non, non, non, j'en ai déjà vu passer
depuis quelques années.
M. Lalonde: Suspendez-la.
M. Duhaime: Ce que je dis au leader parlementaire de l'Opposition
- je ne sais pas quel genre de conciliabule il peut avoir avec ses propres
troupes, c'est son problème -c'est ceci: À moins d'avoir, non
seulement l'assurance ou l'intention, mais le consentement que cette commission
va libérer Me Beaulé, à 22 heures, nous allons argumenter
sur la motion.
M. le Président, je ne courrai pas le risque de revivre ce que
cette commission a vécu vendredi dernier où, lorsqu'un droit de
parole est consenti... Je rappelle essentiellement qu'au début des
travaux de cette commission, nous avons consenti que le droit de parole des
députés membres de cette commission puisse dépasser la
période normale de 20 minutes suivant nos règlements. Quand on
dit dépasser 20 minutes, cela peut aller à 25, 30 et même
45 minutes, mais quand cela fait quatre heures, vous me permettrez de qualifier
cela comme un abus de la période de 20 minutes. Je ne courrai pas le
risque que, lorsqu'un autre député de l'Opposition aura la
parole, on assiège Me Beaulé pendant quatre ou cinq heures. Mon
offre est très simple. Nous avons devant nous une heure trente-quatre
minutes. À peu près tout a été dit depuis -j'avais
le minutage exact; je crois que cela fait maintenant neuf heures trente-cinq
minutes que Me Beaulé est ici - depuis jeudi dernier. Si j'ai
l'assurance, par consentement de l'Opposition, que nous pourrons libérer
Me Beaulé, à 22 heures, je vais retirer la motion que j'ai
formulée tout à l'heure. Autrement, je suis prêt à
l'argumenter.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Le ministre, comme à peu près tout ce
qu'il a fait jusqu'à maintenant et son parti, depuis le début de
cette commission parlementaire, s'est enferré dans ses propres
problèmes. Jamais je ne consentirai à renier ou à enlever
un droit de parole à mes collègues pour poser des questions.
J'ai, dans le meilleur esprit possible de coopération, donné tout
ce qu'on a l'intention de faire. Je vous ai donné tout.
Le député de Jonquière a-t-il l'intention de
parler? Qu'il parle au lieu de murmurer et de m'interrompre.
M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement,
M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Lalonde: II y a quand même des limites...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Lalonde: II m'accusait de mauvaise foi. Retirez vos
paroles.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense que j'ai...
Le Président (M. Jolivet): Non, à l'ordre! Je pense
que cela allait très bien. Je ne voudrais pas que... S'il vous
plaît, M. le député! Si vous voulez m'aider, aidez-moi en
ne parlant pas.
M. Lalonde: M. le Président, j'étais donc en train
de dire que, compte tenu de la longueur des réponses et des
interventions, nous avions nous-mêmes l'intention de mettre fin à
cet interrogatoire après l'intervention... D'ailleurs, vous avez vu que
l'intervention du député de Gatineau était très
courte. J'ai dit que j'aurais quelques questions, ainsi que le
député de Brome-Missisquoi et celui de Laporte. Cela
dépend aussi, nécessairement, s'il y a un député de
l'autre côté qui prend la parole pendant une heure et demie, on
n'y peut rien. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que je ne peux
pas consentir à enlever un droit de parole à un collègue.
Il y a une autre chose qui est très sûre, c'est que si on discute
de votre motion, Me Beaulé va revenir mercredi prochain.
M. Duhaime: M. le Président...
M. Lalonde: C'est totalement stupide.
M. Duhaime: M. le Président.
M. Lalonde: Vous voulez le libérer...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: On est prêt à le libérer ce soir
à 22 heures, compte tenu, naturellement, de la longueur des
réponses, et vous me dites: On va le faire venir mercredi pour discuter
d'une motion pour le libérer.
M. Duhaime: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
Retrait de la motion
M. Duhaime: J'ai l'habitude d'être vite sur mes patins, je
vais saisir la balle au bond, je retire la motion. Allez-y.
Le Président (M. Jolivet): Donc, je m'excuse... La motion
étant... S'il vous plaît! Seulement un instant, je veux bien
m'entendre au départ. Nous avons devant nous un ministre qui a
retiré sa motion. Nous avons donc, maintenant, à entendre Me
Beaulé, en essayant de faire en sorte, aussi bien pour lui que pour tous
les membres de cette commission, de le libérer pour 22 heures. En
conséquence, la parole sera donnée au député de
Brome-Missisquoi. Mais, avant, le député de Jonquière a
invoqué une question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président. Tout
à l'heure, le député de Marguerite-Bourgeoys a dit que je
l'avais traité de député qui agissait de mauvaise foi. Je
voudrais dire au député de Marguerite-Bourgeoys que ces paroles
n'ont pas été enregistrées et qu'elles n'ont jamais
été dites. Je parlais au ministre et je disais tout simplement
que le Parti libéral agissait de mauvaise foi, puisque, après la
conclusion tirée par le député de Gatineau, les questions,
nécessairement, provenaient d'un parti qui était de mauvaise foi,
puisque la conclusion était déjà tirée. C'est ce
que j'ai dit au ministre. J'ai le droit de parler à mon ministre et
personne ne va m'empêcher de le faire.
Une voix: Question de règlement, M. le
Président.
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Justement, c'est...
M. Lalonde: Je prends la parole du député, M. le
Président, en ce sens qu'il ne m'accusait pas de mauvaise foi. Mais si
le ministre avait pu comprendre qu'un député, après son
interrogatoire, peut apporter une conclusion, sa perception de
l'interrogatoire...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Lalonde: C'est ce que le député de Gatineau a
fait.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une
autre, je l'avais permis.
M. Lalonde: Oui.
Témoignages M. Rosaire Beaulé
(suite)
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi, en essayant de faire en sorte que chacun puisse, d'ici
à 22 heures, agir comme on l'a fait durant toute la journée. J'ai
demandé la même collaboration de la part de notre invité.
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Le plus rapidement possible, je ferais une
brève remarque préliminaire, M. le Président... (20 h
30)
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, j'ai
entendu Me Beaulé?
M. Beaulé: M. le Président? Le Président
(M. Jolivet): Oui. M. Paradis: II m'interrompt?
M. Beaulé: Je voudrais souligner que mes réponses,
depuis le début de la séance, ont été très
brèves.
Le Président (M. Jolivet): De cette séance-ci, oui.
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Je souhaite qu'elles soient un peu plus longues
à cette séance-ci. M. le Président, lorsque le
député de Gatineau a dit que, à la suite de ses questions
au témoin, le témoin ne l'avait pas convaincu, je suggère
bien respectueusement - pour mes remarques préliminaires, cela
s'arrêtera là -qu'un juge qui entend - on aura un jugement
à rendre comme parlementaires - qu'un juge qui entend un témoin
témoigner ou un invité témoigner lui accorde un
degré de crédibilité. Ce sont tous les juges qui sont
actuellement en fonction au Québec qui font cela. J'espère que
les juges qui seront en fonction dans quelques années au Québec
continueront de faire la même chose.
M. Lalonde: Les futurs juges.
M. Paradis: Revenant plus spécifiquement aux questions, M.
le Président.
Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le
député. S'il vous plaît:
M. Paradis: Je vais donner à Me Beaulé tout le
temps de retrouver la page, s'il a les notes sténographiques avec lui,
de façon qu'on puisse suivre et bien se comprendre et éviter des
questions et des réponses trop longues. Je vous
référerais, Me Beaulé, à la page R/915 du 28 avril
1983. Il est 20 h 25 et le sujet porte, pour vous permettre d'avoir le temps de
vous situer dans le débat, sur des questions que vous adressait le
député de Mont-Royal quant à une recommandation qui aurait
pu vous être favorable pour obtenir un mandat de l'union internationale
américaine de la représenter dans cette contestation de la
Société d'énergie de la Baie James qui poursuivait vos
clients pour 32 000 000 $.
Est-ce que votre avocate vous a remis le texte?
M. Beaulé: M. le Président, j'ai le texte du ruban
915 à 20 h 25.
M. Paradis: Très bien. Ruban 915, 916 et vous
complétez un petit peu plus loin aux pages 916 et substantiellement - je
l'ai résumé à partir de cette transcription - vous dites
ce qui suit: À la fin mars 1978 vous étiez en vacances. Quelqu'un
des États-Unis, de l'union internationale a placé un appel
à votre étude d'avocat. Le 12 avril 1978 vous êtes revenu
de vacances et vous avez retourné à Me Woll à Washington,
qui est le general council of AFL-CIO, l'appel qu'il vous avait fait, durant
vos vacances.
Il vous propose à ce moment une rencontre à Washington.
Vous vous y rendez le 20 avril, soit huit jours après. Vous avez
à ce moment rencontré Me Woll, Me Fanning, M. Turner qui est le
general president et vous avez accepté, suivant votre témoignage,
le mandat que ce client a jugé à propos de vous confier.
Un peu plus loin, vous avez déclaré que pour vous cela a
été une surprise totale de recevoir un tel mandat.
M. Beaulé: À quel endroit, M. le
Président?
M. Paradis: Si je comptais le nombre de lignes cela va
peut-être être un petit peu trop long mais pour qu'on se replace
plus facilement entre moi et vous...
M. Beaulé: ...je l'ai trouvé.
M. Paradis: Vous l'avez trouvé, c'est bien dans cette
page-là?
M. Beaulé: Oui, cela va.
M. Paradis: Vous avez dit ce qui suit à la suite de la
surprise totale. Je reprends à partir de l'alinéa qui suit. M.
Ciaccia vous demande y a-t-il eu quelques recommandations qui auraient pu
être faites à votre égard? Vous répondez au texte:
"M. Beaulé: Comme je pense saisir le sens de votre question, cela
répondra à votre question. J'ai reçu un appel
téléphonique le 29 mars dernier - j'attire l'attention du
président sur le fait qu'il s'agit du 29 mars 1983 - d'un journaliste,
M. Girard - le journaliste de la Presse qui a publié des articles qui
ont donné lieu à cette commission - me demandant s'il
était exact que j'avais été nommé avocat de l'union
internationale, à la suggestion de Me Yves Gauthier, l'ancien tuteur du
local 791 qui était poursuivi et qui est devenu, au mois d'octobre,
conseiller spécial au bureau du premier ministre du Québec." Je
continue au texte: "Je lui ai dit que je n'avais jamais entendu parler d'une
telle recommandation. Ce soir-là, j'ai appelé Me Fanning à
sa résidence - j'ai son numéro ici - pour m'enquérir de
cette question, et il m'a répondu ce qui suit: qu'après le
décès de Me Golt qui les représentait avant, parce qu'on
se rappelle que l'action datait de 1976, ils ont pris des renseignements
à Montréal. Ils ont obtenu une liste d'avocats et ils ont fait un
choix. Je sais maintenant que sur cette liste il y avait le nom de M. Aquin,
etc." Plus loin, vous répondez que les renseignements sont venus du
milieu syndical montréalais. En résumé, vous
répondiez à la question du député de Mont-Royal
à l'effet de savoir s'il y avait eu une recommandation: "Oui, il y en
avait eu une; ça venait de Montréal et ça venait du milieu
syndical." C'est grand, Montréal. C'est populeux, le milieu syndical.
Mais pour autant que l'on sache, Me Yves Gauthier était, à ce
moment-là, à Montréal et était dans le milieu
syndical. Est-ce que c'est de Me Gauthier, à la suite de la conversation
que vous avez eue, ou à votre connaissance qui a pu vous venir
autrement, qu'est venue la recommandation?
M. Beaulé: La réponse est la suivante:
Je n'ai jamais cherché à savoir, avant le 29 mars dernier,
qui avait pu placer mon nom sur une liste à partir de laquelle
l'International Union of Operating Engineers a choisi un avocat. Je vais
simplement répéter, en essayant d'être bref, comme on me
l'a dit, que j'ai communiqué avec Me Fanning, le 29 mars. Il m'a donc
dit qu'ils avaient eu une liste à l'époque, qu'ils avaient
confectionné une liste à partir de recommandations en provenance
du milieu syndical montréalais. Bon. Je n'en sais pas davantage; pas
plus aujourd'hui que le 29 mars.
M. Paradis: D'accord. On va essayer de se comprendre, Me
Beaulé. Le 29 mars, vous recevez un appel d'un journaliste de la Presse,
qui s'appelle Michel Girard, suivant votre témoignage. Il vous demande
si vous avez obtenu votre mandat à la suite de la recommandation de Me
Yves Gauthier. Vous trouvez la question suffisamment intéressante pour
faire un interurbain à Washington, pour parler à vos clients et
pour leur demander si c'est exact. Vous nous répondez ce soir que vous
n'avez pas eu la réponse lors de cette conversation
téléphonique, que tout ce qu'on vous dit, cela vient de
Montréal, du milieu syndical.
M. Beaulé: La réponse de M. Fanning a
été que mon nom apparaissait sur une liste qu'ils avaient
confectionnée à partir de recommandations du milieu syndical
montréalais. Et j'ai indiqué que, sur cette liste, il y avait
également le nom de M. Aquin.
M. Paradis: Est-ce que vous avez déjà vu cette
liste?
M. Beaulé: Absolument pas.
M. Paradis: Comment pouvez-vous dire que le nom de M. Aquin s'y
trouvait?
M. Beaulé: Écoutez, ma réponse est simple,
M. le Président. M. Fanning m'a dit qu'il y avait plusieurs avocats sur
la liste, incluant le nom de M. Aquin.
M. Paradis: Vous effectuiez votre appel
téléphonique dans un but très précis, suivant vos
propos qui sont enregistrés au journal des Débats. C'était
dans le but de savoir si cette recommandation - à la suite de l'appel
qu'avait effectué l'après-midi un journaliste du journal La
Presse - provenait de Me Yves Gauthier, du bureau du premier ministre.
C'était le but de votre appel. Est-ce exact?
M. Beaulé: M. le Président, je ne veux pas entrer
dans aucun carcan parce que, souvent, cela ne permet pas de dire exactement les
faits. Je ne me suis pas
préoccupé avant le 29 mars 1983 de savoir qui avait pu me
recommander auprès de l'International Union en 1978. Mais, comme je lis
les journaux comme tout le monde et comme il y avait des allégations de
relations, je dirais, politiques qui pouvaient être à la source de
mon mandat. C'était le sens de l'appel téléphonique de M.
Girard, près de cinq ans après avoir eu ce mandat, j'ai voulu
vérifier de qui provenait ce mandat. M. Fanning m'a dit qu'on avait
retenu mes services à partir d'une liste où il y avait les noms
de plusieurs avocats montréalais dont le nom de M. Aquin. Je n'en sais
pas davantage.
M. Paradis: Je ne vous parle pas, Me Beaulé, de lecture de
journaux, parce que les membres de la commission, le public et moi-même
lisons les journaux. Ni les membres de la commission ni ces gens ni moi n'avons
reçu, sauf erreur, d'appel téléphonique de Michel Girard,
journaliste à la Presse, en date du 29 mars 1983, pour demander s'ils
avaient été nommés procureur de l'union internationale
à la suite de la recommandation de Me Yves Gauthier, du bureau du
premier ministre. Vous, vous avez reçu cet appel
téléphonique et, selon le témoignage que vous avez rendu
ici, vous avez affirmé sous serment, devant cette commission,
qu'à la suite de cet appel téléphonique, vous avez fait un
appel interurbain à Washington pour savoir ce qu'il en était.
C'était le but de votre appel téléphonique. Est-ce
exact?
M. Beaulé: C'est exact. C'est sûr que c'était
le but de mon appel téléphonique.
M. Paradis: Bon! Merci beaucoup.
M. Vaillancourt (Jonquière): Cela fait quatre fois qu'il
vous le dit.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Brome...
M. Paradis: M. le député de Jonquière...
M. Vaillancourt (Jonquière): Cela fait quatre fois qu'il
vous le dit.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, le député de
Jonquière vient d'affirmer...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Paradis: ...que cela fait quatre fois que je reçois
cette réponse.
Des voix: C'est vrai.
M. Duhaime: Oui.
M. Paradis: Je vous prends à témoin que c'est la
première fois que j'obtiens la réponse "oui", à cette
question.
M. Vaillancourt (Jonquière): Cela fait quatre fois qu'il
vous le dit.
M. Paradis: Je vous demanderais, si vous n'êtes pas
convaincu ou si vous n'êtes pas en mesure de rendre une décision,
de vérifier à la transcription du journal des Débats.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, on va
vérifier.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
adressez vos questions à Me Beaulé, s'il vous plaît.
M. Paradis: Très bien, M. le Président.
M. Duhaime: On était bien, restez de bonne humeur.
M. Paradis: Je demanderais au député de
Jonquière...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député.
Une voix: Demandez-lui!
Le Président (M. Jolivet): ...à Me Beaulé,
s'il vous plaît!
M. Paradis: Très bien.
Le Président (M. Jolivet): Laissez-moi la chance de mener
à bien cette réunion.
M. Paradis: Vous avez fait votre appel, donc, comme vous venez de
le dire, afin de savoir si c'était Me Yves Gauthier, du bureau du
premier ministre, qui avait recommandé à vos clients
américains de vous engager, de vous confier un mandat. D'ailleurs, soit
dit en passant - c'est une remarque que je fais, M. le Président - c'est
un mandat que vous avez exécuté, à mon avis d'ex-avocat -
je suis encore membre du barreau - d'une façon impeccable. Vous avez
obtenu la meilleure solution ou le meilleur règlement possible pour vos
clients et, là-dessus, malgré mes propos...
M. Duhaime: Est-ce qu'il y a un secondeur?
M. Paradis: ...je tiens à vous en féliciter comme
procureur.
M. Duhaime: Est-ce qu'il y a un secondeur?
Le Président (M. Jolivet): Merci. Cependant, M. le
député, ce n'est pas l'objet de nos...
M. Paradis: J'ouvrais une parenthèse.
Le Président (M. Jolivet): N'en ouvrez pas trop puisqu'on
aurait des difficultés.
M. Lalonde: Notre président est nerveux, s'il vous
plaît, un petit peu de calme!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Brome-Missisquoi, continuez.
M. Ciaccia: La question est de savoir comment il l'a eu?
M. Paradis: J'ouvrais une petite parenthèse, mais ce
n'était pas de la façon dont vous l'avez conduite sur laquelle je
m'enquérais, c'est plutôt comment et de quelle façon vous
avez eu ce mandat? Vous avez fait cet appel téléphonique afin,
donc, de savoir si c'était Me Gauthier. La réponse que vous nous
avez donnée est la suivante: Vous avez été
recommandé par quelqu'un Os Montréal qui était dans le
milieu syndical. C'est assez large...
M. Beaulé: La réponse...
M. Paradis: Laissez-moi continuer!
M. Beaulé: Ah bon! Je pensais qu'il y avait une
question.
M. Paradis: Sauf erreur, à ce moment-là, Me Yves
Gauthier, du bureau du premier ministre - il n'y était pas à ce
moment-là, il était tuteur du local 791 à Montréal
- était de Montréal et du milieu syndical. Est-ce que vous
concluez, de la réponse que vous avez eue, que la recommandation
effectuée au syndicat américain, pour vous confier un mandat, est
venue de Me Yves Gauthier.
M. Duhaime: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. M. le
ministre.
M. Paradis: Voyons donc! Il a appelé pour cela.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Cette question, selon les dispositions de l'article
168, paragraphe 2 de notre règlement, contient une hypothèse.
M. Lalonde: Non, non.
M. Duhaime: J'ajouterais que Me Beaulé, non seulement ce
soir, mais la semaine dernière, a été interrogé sur
l'origine de son mandat. À moins d'avoir complètement perdu
l'esprit, je dirais qu'à chaque fois que la question lui a
été posée, il a répondu que, à sa
connaissance, une liste de procureurs avait été fournie par le
milieu syndical...
M. Paradis: II faudrait que je retire ma question.
M. Duhaime: ...et que son nom apparaissait sur la liste, de
même que le nom de Me Aquin. Alors...
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre. La
question est retirée. Je viens de l'entendre.
M. Duhaime: La question est retirée. M. Paradis:
Pour accélérer le débat...
Le Président (M. Jolivet): Donc, allez, M. le
député.
M. Duhaime: Bon. Alors... (20 h 45)
M. Paradis: ...est-ce que vous avez demandé au cours de
votre conversation téléphonique à votre interlocuteur, Me
Fanning, si c'était Me Yves Gauthier qui vous avait
recommandé?
M. Beaulé: J'ai relaté à M. Fanning la
teneur de la conversation que j'avais eue avec M. Girard, évidemment,
faisant état de cette rumeur que m'avait colportée M. Girard
concernant le rôle qu'aurait pu jouer M. Gauthier dans mon choix comme
avocat de l'union internationale. Sa réponse a été la
suivante, c'est très clair: Nous avons procédé à
partir d'une liste. J'ai compris de sa réponse qu'aucune influence
politique n'avait joué dans son choix comme avocat de l'union
internationale. C'est cela ma réponse, je n'en n'ai pas d'autre à
offrir.
M. Paradis: Je m'excuse. Je vais être obligé de
revenir parce que vous venez de me répondre qu'aucune influence
politique n'avait joué dans le choix qu'avaient effectué vos
clients. Me Yves Gauthier, à l'époque, n'était pas dans la
politique. Il était dans le monde syndical. Il était tuteur du
791. Est-ce qu'il vous a répondu si c'était Me Yves Gauthier, oui
ou non?
M. Beaulé: Ce sera ma dernière
réponse...
Le Président (M. Jolivet): Je pense justement que je ne
vous laisserai même pas répondre pour une raison bien simple:
c'est
qu'en réponse aux questions qui ont été
posées, la réponse a toujours été la même et
je ne pense pas qu'elle changera quoi que ce soit. Je pense que c'est vouloir
trop insister sur la même question qui revient systématiquement
depuis le début.
M. Paradis: Cela va, M. le Président. Je me plie à
votre décision comme je me plie habituellement à vos
décisions. Je rappellerai simplement au témoin le ruban 916
où le témoin a dit: "J'espérais que les Américains
n'étaient pas déçus de m'avoir choisi peut-être
aussi à cause de mes connaissances juridiques." On passe au fait
suivant.
M. Duhaime: Qu'est-ce que cela veut dire?
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.
M. Beaulé: C'est une remarque qui est peut-être
humoristique mais qui est blessante.
M. Paradis: C'est ce que vous avez dit.
M. Beaulé: Je...
M. Paradis: Si vous vous êtes fait...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Paradis: ...une remarque blessante, excusez-vous en.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
s'il vous plaît!
M. Duhaime: Franchement!
Le Président (M. Jolivet): Laissez quand même la
chance... Est-ce que ça va, Me Beaulé?
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Vous nous avez remis, Me Beaulé, le texte, le
libellé du mandat qui vous a été confié. Ce
texte-là porte la date du 25 avril 1978. Il provient de l'International
Union of Operating Engineers et il est signé par Michael R. Fanning,
house counsel. Le deuxième paragraphe de ce mandat se lit textuellement
en anglais comme suit: "We are pleased that you will be representing the
International Union of Operating Engineers in these cases. It is requested that
you keep this office posted of all progress and that you send copies to me of
any documents filed on behalf of the International Union of Operating
Engineers. Sincerely, Michael R. Fanning."
On vous demandait donc de faire parvenir tous les documents que vous
produisiez pour le compte de votre cliente. Est-ce que vous avez envoyé
une copie du document que vous avez produit à Jean-Roch Boivin, chef de
cabinet du premier ministre, et que vous avez mis à la poubelle la
veille de votre comparution devant cette commission?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, dans le Code de
procédure civile, il est très bien mentionné que "filed"
veut dire produit à la cour. Quand on dit: "You send copies to me of any
documents filed on behalf of the International Union" cela signifie les
procédures produites et enregistrées au plumitif de la Cour
supérieure.
Une voix: Qu'est-ce que cela veut dire? Qu'est-ce que c'est que
cela?
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement. Ce
n'est pas une question de règlement. Il a donné la réponse
pour le témoin.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, un instant.
M. Duhaime: Si la question va sur ce point-là, sinon je
demanderai au député de Brome-Missisquoi de préciser sa
question.
M. Paradis: Je vais la préciser. Est-ce que vous avez
envoyé une copie à vos clients américains du document que
vous avez remis à Me Jean-Roch Boivin et que vous avez jeté
à la poubelle la veille de votre comparution devant cette
commission?
Le Président (M. Jolivet): Juste avant que vous ne
répondiez Me Beaulé, je pense que, pour les besoins des gens qui
nous écoutent et qui ont suivi ces débats, il serait mauvais de
continuer même si la réalité est là. Me
Beaulé a répété à plusieurs occasions que
l'essentiel du document se retrouvait dans une lettre envoyée...
Des voix: Non, non.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse je prends la
réponse parce que vous prenez des réponses, je fais simplement
une mise au point que Me Beaulé peut faire s'il le désire. La
question est posée vous devez y répondre. Me Beaulé, vous
devez répondre à la question qui est posée. Est-ce que
vous avez envoyé...
M. Beaulé: Je n'en ai aucun souvenir. Cependant, en
révisant mon dossier, j'ai envoyé à Me Fanning une
transcription de toutes les procédures judiciaires faites dans
ce dossier, tant par mon bureau que par mes adversaires; et la
réponse ne m'est suggérée que par qui que ce soit. Je lui
ai envoyé également une copie de tous les exhibits importants.
Quand je parle de copie, je parle de transcription. Je lui ai envoyé la
transcription également de parties de témoignages importants.
J'ai également vu dans mon dossier que je lui ai adressé une
transcription de la lettre que j'avais adressée à François
Aquin, le 5 février 1979.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, je voudrais
vous arrêter parce que la question était - sans vouloir vous
demander de préciser, on dit souvent que vous en donnez plus que le
client en demande - Est-ce que le document a été envoyé?
C'est simplement cela.
M. Beaulé: Je ne peux pas répondre. Le
Président (M. Jolivet): Merci. M. Paradis: Pardon?
M. Beaulé: Je ne peux pas répondre. Je ne sais
pas.
M. Paradis: Ah! vous ne le savez pas, vous l'ignorez.
Les avocats Geoffrion et Prud'homme lorsqu'ils sont venus informer cette
commission des circonstances qui entouraient le règlement hors cour, ont
préparé pour les besoins des membres de la commission de
façon à faire avancer les travaux, à faire avancer les
débats, deux cahiers: un cahier dans lequel se trouvaient les opinions
qu'ils avaient émises tout au long des procédures ainsi qu'un
cahier de projets de déclaration etc. Est-ce que vous pourriez remettre
ou communiquer à la commission toutes les lettres et les opinions que
vous avez émises de même que l'échange de correspondance
que vous avez émis dans ledit dossier, vu que vous avez
été libéré par vos clients de façon
complète et entière de votre secret professionnel?
M. Beaulé: M. le Président, si c'était
là une résolution de la commission je le ferais.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a aucune obligation.
M. Paradis: Vous ne voulez pas...
Le Président (M. Jolivet): S'il y avait un consentement.
La question qui est posée c'est..
M. Paradis: Je vais la poser autrement. Est-ce que vous voulez
les remettre à ma demande?
M. Beaulé: M. le Président, s'il y avait une
résolution de la commission me demandant de produire mes dossiers je les
produirais.
Le Président (M. Jolivet): Pour savoir s'il y a une...
M. Paradis: M. le Président, je comprends que le Parti
libéral est en minorité sur cette commission.
Le Président (M. Jolivet): Allez continuez vos questions
M. le député.
M. Paradis: M. le Président, lorsque vous avez
été interrogé par le député de Mont-Royal
sur le mandat qui vous a été confié et sur les honoraires
que vous avez touchés, vous avez été très clair.
Vous avez dit que votre compte d'honoraires et frais, pour être le plus
exact possible, se calculait à 280 000 $ approximativement, que vous
aviez eu des déboursés à effectuer, que vous aviez eu
d'autres avocats à payer pour vous assister etc. Lorsque le
député de Mont-Royal vous a demandé de déposer les
détails de votre compte d'honoraires vous avez invoqué votre vie
privée ou la charte des droits etc. La Société
d'énergie de la Baie James nous a déposé dans ce cahier-ci
le détail des comptes d'honoraires de ses avocats, nous a
déposé dans une annexe le reste qui n'avait pas été
déposé dans le premier cahier etc. Je vous demande bien
simplement, pour contribuer à l'avancement des travaux de cette
commission, de bien vouloir communiquer à cette commission le
détail de votre compte d'honoraires. Je m'explique sur ceci, ce n'est
pas le montant on l'a c'est 280 000 $ - qui nous intéresse, c'est le
déroulement quotidien dans des comptes d'avocats qui est
récité. On a vu à quel point cela pouvait se
révéler utile dans le cas des comptes de Geoffrion et Prud'homme
qui nous ont été dévoilés. Est-ce que vous auriez
l'obligeance de nous déposer le détail de vos comptes de
façon qu'on puisse avancer dans nos travaux et qu'on puisse prendre
connaissance des démarches quotidiennes que vous avez effectuées
pour le compte de vos clients, considérant que vous avez
été libéré de façon totale et
complète de votre secret professionnel?
Le Président (M. Jolivet): Un instant, Me Beaulé.
M. le ministre veut intervenir. M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je pense qu'il y a une
distinction très nette à faire. C'est pourquoi d'ailleurs la
Société d'énergie de la Baie James a déposé
devant cette commission tous les documents, procès-verbaux, etc. C'est
même la première fois
que je vois devant une commission parlementaire jusqu'aux honoraires en
détail des procureurs d'une société. La grande distinction
est qu'il s'agit d'une société d'État. La
société d'énergie appartient à 100% aux citoyens du
Québec.
Pour ce qui est de la question posée...
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement, M. le
Président. Il répond pour le témoin. Qu'est-ce que c'est
que cela? Il répond pour le témoin.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Duhaime: Non. J'en fais une question de règlement, M.
le Président.
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.
M. Duhaime: Me Beaulé, à mon sens, n'était
même pas tenu de mentionner le montant des honoraires qu'il a
reçus et des frais.
Une voix: C'est vrai. Il aurait pu refuser.
M. Lalonde: II l'a fait. M. Duhaime: II l'a fait. M.
Paradis: Oui.
M. Duhaime: J'ajouterai que si j'avais été un
avocat en pratique et un de ses associés dans son bureau ou
lui-même, j'aurais fait le calcul très rapide que si le
procès avait duré six mois ou, encore, trois ans ou jusqu'en
1990, il aurait gagné des millions de dollars.
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. le
ministre.
M. Paradis: Bien voyons donc! Arrêtez-moi donc cela,
vous.
M. Lalonde: Si vous voulez revenir mercredi, on va revenir.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaîtl M. le
ministre. M. le ministre.
M. Paradis: ...question ou la perte de temps? On ne finira pas
à 22 heures si...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je pense qu'on
va régler notre problème rapidement. Vous avez fait ce que vous
aviez à faire au niveau de...
Une voix: C'est M. Ciaccia qui va faire la conclusion.
Le Président (M. Jolivet): C'est justement ce que je
pensais que vous étiez pour me demander au départ, pour me
permettre de bien situer le débat, mais je pense que Me Beaulé a
déjà répondu. S'il veut donner la même
réponse, je pense que ce serait bon qu'on sache si, oui ou non...
M. Beaulé: M. le Président, je ne
représentais pas une société d'État. Les honoraires
ne m'ont pas été payés par les payeurs de taxes
québécois mais par les
Américains. Je n'ai pas l'intention de produire le détail
de mes comptes. J'ai donné le montant.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Je veux simplement faire remarquer, comme l'a dit le
témoin devant cette commission, et j'emprunte ses paroles, que ce sont
les payeurs de taxes du Québec qui ont payé pour ce
règlement hors cour. De toute façon, je continue. Prochaine
question, M. le Président.
De façon à faciliter votre compréhension de la
question et de façon à ce que vous puissiez vérifier si ce
que je cite au texte est exact, je demanderais à quelqu'un du
Secrétariat de la commission de vous acheminer...
Une voix: Le texte et non pas la réponse.
M. Laplante: ...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa, laissez, s'il vous plaît. Il ira à la Chambre le voir
lui-même. S'il vous plaît, M. le député.
M. Gratton: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Non, je ne lui ai pas
donné la parole. La parole est au député de Brome
Missisquoi.
M. Gratton: Non, mais il l'a prise quand même, et il a
mentionné que le journaliste Normand Girard...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! S'il vous plaît!
M. Gratton: ...était le recherchiste du Parti
libéral du Québec.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! Vous aussi, prenez la parole que je... S'il vous plaît!
M. le député de Brome-Missisquoi. M. le député
de
Bourassa, s'il vous plaît! M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, suivant votre
décision, je vais ignorer les attaques...
Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie beaucoup.
M. Paradis: ...du député ministériel contre
la presse et à l'égard d'un tiers qui n'est pas présent
ici ce soir.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, M.
le député, s'il vous plaît!
M. Paradis: Et je vais référer notre invité,
Me Beaulé, au dernier paragraphe d'un article intitulé:
"L'interruption des poursuites LG 2: une décision politique." Journal de
Québec, le samedi 30 avril 1983. Je vais le référer au
dernier paragraphe...
M. Duhaime: Qui est-ce qui a écrit cela?
M. Paradis: Le ministre demande qui a écrit l'article?
C'est un journaliste. Le dernier paragraphe entre guillemets...
M. Duhaime: Qui a écrit cela? Une voix: ...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Paradis: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Vous ne
m'aidez aucunement, de la façon dont vous fonctionnez.
Une voix: On sera ici mercredi.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome Missisquoi, s'il vous plaît.
M. Paradis: M. le Président, un journaliste - ce n'est pas
le député de Brome-Missisquoi, qui est journaliste - a
cité, au dernier paragraphe de cet article intitulé:
"L'interruption des poursuites LG 2: une décision politique", Me
Beaulé entre guillemets. Il dit ce qui suit et, suivant ces guillemets,
c'est Me Beaulé qui parle: "Quant au principe à savoir si, oui ou
non, cela devait être réglé, cesser les procédures,
c'était une question politique. Le premier ministre avait non seulement
le droit mais le devoir de prendre position. Il l'a fait." Est-ce que vous avez
prononcé ces paroles, Me Beaulé? (21 heures)
M. Beaulé: M. le Président, j'ai conversé
longuement avec M. Girard, le vendredi 29 avril, M. Normand Girard du Journal
de Québec et du Journal de Montréal. L'article que vous me citez
demanderait de ma part plusieurs commentaires, plusieurs nuances et plusieurs
mises au point. J'ai parlé à M. Girard...
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, je ne
voudrais pas qu'on s'enferre dans un débat. Il y a une question qui est
posée, j'aimerais que vous y répondiez.
M. Beaulé: M. le Président, en vertu de l'article 3
de la Charte des droits et libertés de la personne, qui se lit comme
suit: "Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la
liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté
d'opinion, la liberté d'expression, etc.", j'ai exercé certains
de ces droits, le 29 avril, et je ne pense pas en être redevable devant
cette commission. Je ne pense pas que cela entre dans le mandat. J'ai
exercé, M. le Président, certains des droits que me
reconnaît, comme être humain et comme citoyen, l'article 3 de la
Charte des droits et libertés de la personne.
M. Paradis: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Un instant, s'il vous
plaît! Vous n'aurez pas besoin de question de règlement, je vais
le régler. S'il vous plaît! Me Beaulé... S'il vous
plaît! Me Beaulé, une question vous est posée et je pense
que vous devez y répondre.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant.
M. Vaillancourt (Jonquière): Question
d'équité, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant. Vous
connaissez le règlement aussi bien que moi, il y a une question de
posée, Me Beaulé doit y répondre.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, mais, M. le
Président, question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Sur quoi?
M. Vaillancourt (Jonquière): D'abord, je suis d'accord
avec votre décision.
Le Président (M. Jolivet): Merci.
M. Vaillancourt (Jonquière): II doit répondre
à la question; mais lorsqu'un député de cette commission
met un article dans les mains de l'un de nos invités, même si
sa
question ne porte que sur une des parties de l'article, le
témoin, en présence de l'article, a le droit, comme il l'a dit
tout à l'heure, de faire toutes les nuances qui s'imposent, non
seulement sur la partie de l'article qui a été citée par
le député, mais sur l'ensemble de l'article.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le
député, la seule chose que je voudrais savoir, c'est d'abord une
réponse, et il fera les commentaires qu'il voudra de la même
façon que d'autres en font.
Me Beaulé.
M. Beaulé: C'est ma position, ce soir, et c'était
ma position le vendredi, 29 avril, savoir que la cessation de ces
procédures pouvait commander une décision politique et
également une décision administrative. Si on veut bien
m'écouter, M. le Président. Lorsque je parle...
Le Président (M. Jolivet): Allez, allez.
M. Beaulé: ...d'une décision administrative, c'est
du ressort de la SEBJ. Quant à la décision politique, à
savoir s'il y avait lieu d'appliquer une des constatations principales du
rapport Cliche, c'était, à mon sens, une décision
politique.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Question de règlement,
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je pense que vous avez
demandé à l'invité, Me Beaulé, de répondre
à la question du député de Brome-Missisquoi. A-t-il, oui
ou non, prononcé les mots qui sont reproduits, entre guillemets, dans
l'article et que le député de Brome-Missisquoi a cités?
Ces mots sont les suivants: "Quant au principe à savoir si, oui ou non,
ça devait être réglé, cesser les procédures,
c'était une question politique. Le premier ministre avait non seulement
le droit mais le devoir de prendre position. Il l'a fait."
La question du député de Brome-Missisquoi à Me
Beaulé: Avez-vous prononcé ces paroles?
M. Duhaime: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Cela fait partie des questions inutiles.
M. Lalonde: Laissez faire pour l'utilité des questions, on
verra. Elle est recevable et le président a demandé au
témoin de répondre. C'est oui ou non.
M. Duhaime: Vous avez eu le droit de parler sur la question de
règlement, alors...
Le Président (M. Jolivet): Oui, et le ministre a le droit
de parler sur la question de règlement.
M. Duhaime: Je ne vous ai pas interrompu non plus, alors...
M. Lalonde: On va être ici mercredi.
Une voix: II faut que cela finisse à 22 heures.
M. Duhaime: Détachez vos montures un peu, il n'y a pas de
problème.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Duhaime: M. le Président, je pense que le
député de Brome-Missisquoi devrait comparer sa question à
la transcription du journal des Débats, aux fins de vérifier si
ce qui est rapporté dans cet article du Journal de Québec traduit
exactement ce que Me Beaulé aurait dit devant cette commission avant de
poursuivre les débats.
M. Lalonde: Ce n'est pas devant cette commission...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! Àl'ordre!
M. Lalonde: ...que ces paroles ont été
prononcées, c'est pour cela qu'on demande au témoin de savoir
s'il les a prononcées.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Lalonde: Autrement, on pourrait vérifier à la
transcription.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: C'est en conférence de presse.
M. Duhaime: Cela fait partie du placotage, si je comprends
bien.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: Je ne sais pas si le témoin placote, mais le
ministre vient de l'accuser de placoter.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous
plaît: s'il vous plaît!
M. Duhaime: II y a beaucoup de journalistes qui placotent
aussi.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.
M. Duhaime: J'en connais plusieurs dans l'Opposition qui le font
également.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé.
M. Beaulé: M. le Président, lorsque je dis que cela
demande des nuances, je vais m'expliquer à partir de l'article en
question. Il s'agit toujours de l'article de Normand Girard du samedi, 30 avril
1983. Le titre: "L'interruption des poursuites: une décision politique";
en sous-titre: "Me Rosaire Beaulé a déclaré hier que la
décision d'interrompre les poursuites découlant du saccage de LG
2 était une décision politique et que le premier ministre
René Lévesque l'avait prise". Voilà le sous-titre. Si on
va à la quatrième colonne, au bas de la troisième et au
haut de la quatrième: "À une remarque d'un journaliste, Me
Beaulé a soutenu: Cela n'a pas été réglé
dans le bureau de M. Lévesque et s'il y a eu une décision
ministérielle ou d'un comité ministériel, je l'ignore
même aujourd'hui. Il faudrait poser la question à M.
Lévesque."
Ce qui m'amenait à dire tout à l'heure que la
réponse qui est citée à la fin de cet article, à la
cinquième colonne, demanderait des nuances, parce que je ne l'ai
sûrement pas prononcée isolée comme elle est là, M.
le Président. Je n'ai pas autre chose à dire.
Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Je vais vous demander de demander au témoin
s'il veut confirmer qu'il a également prononcé ces paroles. C'est
son droit le plus strict. S'il pense que ses propos expliquent, nuancent, etc.,
je crois que c'est son droit le plus strict. Je n'ai aucune objection. C'est
son droit de parole et je vais le respecter, M. le Président. Mais quand
je lui demande de façon très précise et que je lui cite,
entre guillemets, des paroles qu'un journaliste lui attribue, que je lui
demande s'il reconnaît avoir prononcé ces paroles, la
réponse, même s'il peut l'expliquer, même s'il peut mettre
tout le chocolat et l'arrondir, est-ce qu'il les a prononcées, oui ou
non? C'est aussi simple que cela. Je les répète: "Quant au...
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le
député, je l'ai entendu assez souvent et assez longtemps.
M. Paradis: Je n'ai pas eu de réponse.
Le Président (M. Jolivet): Non, mais je pense que le bon
sens... Ce que j'ai amené au point de vue juridique, comme le
député de Gatineau, je ne suis pas un avocat, donc, je vais
prendre le bon sens pour m'aider. J'ai cru comprendre, de la part de Me
Beaulé... S'il vous plaît, M. le député!
M. Lalonde: C'est parce que vous dites que vous n'êtes pas
avocat, donc, vous allez prendre le bon sens.
Une voix: Je n'ai rien contre cela.
Le Président (M. Jolivet): Je pense que ce que je voulais
dire, c'est que le bon sens général... L'invité - je ferai
en sorte de ne plus permettre d'autres questions - a dit: J'ai prononcé
les paroles, mais dans un contexte. Il a vraiment répondu à la
question, c'est ce que je lui ai demandé. Mais il ne peut... Je pense
qu'il est impossible de dire que ces paroles n'ont pas été
prononcées dans un contexte. C'est bien ce que j'ai compris.
M. Paradis: M. le Président, c'est simplement pour que
cela soit clair pour les fins du journal des Débats lorsqu'on aura une
argumentation à effectuer. Ce que vous me dites, c'est que vous avez
compris. Je suis prêt à prendre votre décision
là-dessus, comme je prends toutes vos décisions, non pas avec un
grain de sel, mais avec tout leur sens. Est-ce que vous avez dit que le
témoin a répondu qu'il avait prononcé ces paroles, mais
dans un contexte et a ajouté d'autres paroles?
Le Président (M. Jolivet): Monsieur, ce que
l'invité a dit, ce n'est pas qu'il refuse de dire qu'il a
prononcé certainement des paroles, mais que ce n'est pas le contexte
dans lequel elles sont citées. Est-ce que j'ai bien compris, Me
Beaulé?
M. Beaulé: M. le Président... M. Paradis: M.
le Président...
M. Beaulé: ...parce que je vois que le journaliste, M.
Girard, a cité ce qui faisait son affaire de ma déclaration, pour
être net et clair.
M. Ciaccia: M. le Président... Le Président (M.
Jolivet): Non.
M. Ciaccia: C'est une question de directive, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Non. M. Paradis: M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît'. Pour
être bien clair, on ne fera pas le procès d'un texte qui est
produit par un autre à partir des déclarations d'une personne.
C'est sûr et certain que je ne le permettrai pas. Me Beaulé, je
pense, a répondu adéquatement à la question et je ne
permettrai pas d'autres questions.
M. Paradis: Très bien, M. le Président. M. Ciaccia:
Question de directive.
Le Président (M. Jolivet): Question de directive, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que vous constatez,
comme je le constate moi-même, que les questions qui sont posées
par le député de Brome-Missisquoi, sur certains points
très spécifiques, sont interrompues par le ministre ou par le
côté ministériel, pour suggérer le genre de
réponse que M. Beaulé doit donner.
M. Duhaime: Question de règlement, M. le
Président.
M. Ciaccia: Est-ce que vous constatez cela, M. le
Président?
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne peux pas accepter, vous m'avez demandé...
M. Duhaime: Vous allez retirer vos paroles.
Le Président (M. Jolivet): ...une directive. Je dois vous
dire, M. le député, vous êtes en politique comme moi, et,
comme une personne en politique... S'il vous plaît! M. le ministre,
laissez-moi... S'il vous plaît! Je pense que chacun m'a promis, ce soir,
de permettre qu'on finisse, mais je connais tous les aléas de cette
chose. Ce que je voulais dire - je pense qu'il faut être honnête
envers Me Beaulé, comme chacun d'entre nous le voudrait - c'est que,
souvent, il arrive que nous fassions des déclarations et que des gens
les utilisent. Ce que Me Beaulé a dit, c'est cela. Je ne permettrai pas
d'autres questions. On le vit assez comme député. On sait qu'on
est très bien cité, mais quelquefois on juge qu'on est mal
cité et je pense que cela pourrait arriver. En conséquence, je ne
permettrai plus d'autres questions. M. le député, sur un autre
sujet.
M. Duhaime: M. le Président, sur la question de
règlement du député de Mont-Royal...
Le Président (M. Jolivet): ...je ne l'ai pas
reçue.
M. Duhaime: Ah! bon. Très bien.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: M. le Président, ma question s'adresse, encore
une fois, à notre aimable invité. Est-ce que vous avez
déclaré, le 22 avril 1983, dans la langue de Shakespeare, et
là j'espère qu'il n'y a pas de barrière
linguistique...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
m'excuse mais je vous ai demandé, de la même façon
qu'à tous les autres... J'espère que vous allez me permettre de
retirer cette partie-là.
M. Paradis: Je vous permets de la retirer, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Vous, vous la retirez.
M. Paradis: Si je vous permets de retirer ce que j'ai dit,
donc...
Le Président (M. Jolivet): ...il n'existera pas.
M. Paradis: ...cela n'existe pas. Le Président (M.
Jolivet): D'accord.
M. Paradis: C'est ce que j'avais compris, M. le
Président.
M. Tremblay: M. le Président, sur une question de
directive.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
laissez la chance au député de Brome-Missisquoi.
M. Tremblay: Non, c'est parce que cela implique sa question.
Le Président (M. Jolivet): Allez donc, je vais voir.
M. Tremblay: Je voulais vous demander si je devrais faire une
question de règlement puisque hier, sur un appel
téléphonique qui avait été fait ou des contacts
téléphoniques qui avaient été faits avec Me
Boivin...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, je veux
d'abord entendre la question. Je verrai. J'ai compris votre question. Vous
allez voir que j'ai compris. Allez, posez votre question.
Une voix: II est brillant, notre président.
M. Paradis: II comprend vite, le
président.
Le Président (M. Jolivet): Allez, allez.
M. Gratton: Est-ce que c'est assez fort?
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas la première
journée que je suis ici moi non plus.
M. Paradis: M. Beaulé, le vendredi 22 avril 1983, lorsque
vous avez parlé du mandat de cette commission, des circonstances qui
entouraient le règlement hors cour du saccage de LG 2, est-ce que vous
avez déclaré, en langue de Shakespeare, en langue anglaise,
à des journalistes, qui l'ont reproduit sur des réseaux de
télévision ainsi qu'à la radio, la phrase suivante: The
principle of the settlement was discussed with Mr. Boivin but the amount of the
settlement at no time has been discussed with Mr. Boivin.
M. Beaulé: Je ne me rappelle pas, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, je m'excuse mais
je n'ai pas compris Me Beaulé.
M. Beaulé: Je ne me rappelle pas, M. le
Président.
M. Paradis: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Je vous ai compris, mais la
question était recevable.
M. Paradis: Bien oui, ce n'était pas une question
hypothétique.
Le Président (M. Jolivet): C'est vrai, elle se rapportait
au détail de la décision.
M. Paradis: Merci, M. le Président. C'était ma
dernière question. Vous me permettrez un bref commentaire. À la
suite des réponses que vous nous avez données, Me Beaulé,
c'est avec regret que je le dis à un collègue du barreau, tout
comme le député de Gatineau, vous ne m'avez pas convaincu de
votre version des faits.
M. Beaulé: Me permettez-vous de me retirer
temporairement?
Le Président (M. Jolivet): Oui, Me Beaulé.
M. Beaulé: Je considère que la commission ou ses
membres ne sont pas là comme mes juges. Ils sont là pour me poser
des questions et mon devoir est d'y répondre, mais non pas de recevoir
le sermon de la fin après chaque intervention. Puis-je me retirer pour
quelques minutes, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui, je vous le permets, Me
Beaulé. Je voudrais savoir pour combien de temps vous voulez que je
suspende?
M. Beaulé: Non, je ne veux pas une suspension, je trouve,
M. le Président, que c'est absolument indigne de me servir une
leçon après chaque intervention.
M. Lalonde: Un instant, M. le Président.
M. Beaulé: Si la commission juge à propos de...
M. Lalonde: ...question de règlement, question de
règlement...
Le Président (M. Jolivet): ...écoutez...
M. Lalonde: ...j'ai une question de règlement à
soulever, M. le Président, ici maintenant.
Le Président (M. Jolivet): Juste avant, Me Beaulé,
le problème - je dois le dire pour les gens qui nous écoutent -
c'est que nous sommes en commission parlementaire. Comme nous sommes en
commission parlementaire, je ne peux cependant malheureusement empêcher
qui que ce soit d'user de son droit de parole et de faire les commentaires
qu'il veut ni d'avoir l'opinion qu'il a. Je ne peux donc faire autre chose
qu'écouter. Comme c'était la dernière intervention que
faisait le député et que nous passions au député de
Bourassa, vous permettez que le député de Bourassa continue?
M. Beaulé: Je suis à votre disposition, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa. M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, sans vouloir ajouter à
ce que vient de dire Me Beaulé, je dirais que je fais miens ses propos.
Je trouve disgracieux, pour ne pas dire davantage...
M. Lalonde: ...ce n'est pas une question de
règlement...
Le Président (M. Jolivet): ...non, non...
M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas sur une question
de règlement, il a le droit de parole.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse,
je ne pense pas que ce soit une question de règlement. Je veux
juste savoir si...
M. Laplante: ...j'ai échangé mon droit de parole
avec le ministre, je le reprendrai à l'autre tour, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre, à
vous la parole. (21 h 15)
M. Duhaime: M. le Président, malgré l'excuse qui a
précédé ce qu'a dit le député de
Brome-Missisquoi, je dis que je trouve parfaitement disgracieux ce que je viens
d'entendre quant à l'évaluation que l'on peut faire, à ma
gauche, en plus de celle du procureur de la Gatineau et de celle qui viendra
sans aucun doute, à un moment ou l'autre, d'un des autres à ma
gauche, et à la conviction qu'on pourrait avoir quant à la
version des faits qu'a donnée devant cette commission Me Rosaire
Beaulé.
Je dis, M. le Président, aux membres du Parti libéral du
Québec qui, par des députés munis de l'immunité
parlementaire, défendent le dossier du quotidien La Presse: s'ils
défendent un mauvais dossier et s'ils s'en rendent compte maintenant, je
les prierais de bien vouloir constater qu'ils plaident un mauvais dossier.
Mais, de grâce, au nom de ce qui pourrait vous rester d'éthique
parlementaire, pour ne pas dire d'éthique professionnelle, je vous
demande de ne pas calomnier, calomnier, la carrière, l'honneur et la
réputation fort honorable des membres du Barreau. Qui a eu, au cours de
sa vie, l'occasion de plaider un dossier contre l'une de nos
sociétés d'État? J'aurais cru, M. le Président,
qu'en 1983, autant dans la lettre que dans l'esprit, nous aurions pu quitter,
lors de ces travaux, ce que j'appellerais l'ambiance pernicieuse et vicieuse de
la banlieue de Téhéran. Depuis les cinq dernières semaines
que nous sommes ici devant cette commission, nous avons pu entendre des
soi-disant procureurs, en mal de pratique ou de nostalgie de leur ordre, venir
littéralement écoeurer des honnêtes gens devant cette
commission. Et je parlerai de M. Claude Laliberté,
président-directeur général de la Société
d'énergie de la Baie James, de M. Lucien Saulnier et, également,
M. le Président...
M. Paradis: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le ministre, il
y a une question de règlement. J'aimerais...
M. Paradis: Je n'ai pas les citations exactes, mais si le
ministre me demande de les retracer, autant M. Laliberté que M. Saulnier
qu'il vient de mentionner, ne se sont pas plaints du traitement. Au contraire,
ils ont dit qu'ils appréciaient...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Paradis: ...le fait d'apporter un éclairage à
cette commission.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi, ce n'est pas une question de règlement et
j'aimerais...
M. Paradis: C'est une rectification de faits inexacts...
Le Président (M. Jolivet): Non, non. M. le
député. M. le ministre. M. le ministre.
M. Duhaime: Le seul regret que j'ai, M. le Président,
à ce stade-ci de nos travaux, c'est d'avoir cru, il y a à peine
une heure, que l'Opposition libérale avait des questions
sérieuses, pertinentes et intelligentes à poser...
M. Lalonde: M. le Président...
M. Duhaime: ...sans quoi, j'aurais, sans aucun doute,
engagé le débat sur la motion que j'avais présentée
et que j'ai retirée sur l'affirmation du leader parlementaire de
l'Opposition officielle à savoir que ce soir, dès 22 heures, nous
en aurions terminé avec Me Beaulé.
M. Lalonde: On pourra terminer si vous cessez de parler.
M. Duhaime: M. le Président, je dirai que, comme
député de mon comté de Saint-Maurice, comme membre de
cette commission parlementaire et comme parlementaire, je me sens en quelque
sorte humilié de voir mon nom, de même que celui des
collègues qui sont à ma droite, associé aux propos qui
viennent d'être tenus par le député de Brome-Missisquoi
à l'endroit de Me Beaulé. La perche que je vais lui tendre, c'est
la suivante: Je vous demanderais de retirer votre évaluation pour le
moins désobligeante de la version des faits que Me Beaulé a
rendue devant cette commission, puisqu'il est ici depuis maintenant une
semaine.
M. Paradis: Je vais profiter de la perche...
M. Duhaime: C'est la demande que je vous formule comme
parlementaire...
M. Paradis: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre.
M. Duhaime: ...pour la bonne santé de nos
institutions.
Le Président (M. Jolivet): En évitant, cependant,
d'ouvrir un autre débat.
M. Paradis: II n'y aura pas de débat, M. le
Président. Je vais saisir la perche du ministre, à une condition:
que le ministre me permette de reprendre les questions que j'ai posées
pour permettre au témoin de se reprendre.
M. Duhaime: Oui, allez-y.
M. Paradis: Très bien. M. Beaulé...
M. Duhaime: Vous allez retirer vos paroles, donc?
M. Paradis: Non, non, non. M. Duhaime: Ah!
M. Paradis: On va se reprendre... Si on a des réponses aux
questions, on va retirer...
M. Duhaime: Non, non, il n'y a pas de fligne-flagne,
là.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. C'est moi qui vais
refuser.
M. Duhaime: Ce n'est pas ce que j'ai compris.
M. Paradis: Bien, voyons donc! C'est clair et net!
Le Président (M. Jolivet): Eh bien! moi, dans ce
cas-là, compte tenu des circonstances, si le ministre a terminé
l'utilisation de son droit de parole, je vais demander au député
de Laporte... C'est le ministre qui va me dire s'il a terminé. M. le
ministre, avez-vous terminé?
M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je voudrais que
l'Opposition profite des minutes...
Une voix: Quarante minutes.
M. Duhaime: ...selon l'indication que j'ai eue tout à
l'heure, pour poser des questions pertinentes, sérieuses à
l'intérieur du mandat de cette commission.
Le Président (M. Jolivet): Avant de permettre au
député de Laporte d'utiliser son droit de parole, j'aimerais vous
faire remarquer qu'à la demande du député de Vimont, nous
avons reçu de M. John Lussier, un dossier qui répond aux
questions de M. Marcel Audet, et je vous l'ai fait distribuer.
M. Lalonde: Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, s'il vous plaît, vos questions.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Je vais tenter
d'être aussi bref que possible étant donné que mon
collègue, le leader parlementaire, doit prendre la parole après
moi et qu'il reste à peu près 40 minutes avant la fin de la
séance.
Me Beaulé, est-ce que vous considérez Me Boivin comme un
ami?
M. Beaulé: M. le Président, est-ce que ce n'est pas
une question d'opinion qu'on me pose?
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. On m'a
dérangé. Voulez-vous reprendre votre question, M. le
député?
M. Bourbeau: J'ai demandé à Me Beaulé si M.
Jean-Roch Boivin est un ami à lui. Question de fait.
M. Beaulé: Non, la question était, M. le
Président: Est-ce que vous considérez M. Boivin comme un ami?
Le Président (M. Jolivet): Donc, la question est: Est-ce
que c'est un ami?
M. Bourbeau: Est-ce que M. Jean-Roch Boivin est votre ami?
M. Beaulé: M. le Président, je me suis
déjà exprimé devant la commission, sur ce sujet, à
plusieurs reprises.
M. Lalonde: Non.
M. Bourbeau: Je ne pense pas, M. le Président, que la
question ait jamais été posée. Je la repose, M. le
Président. Est-ce que M. Boivin est votre ami?
M. Duhaime: On est loin du mandat...
M. Beaulé: J'ai l'honneur d'avoir comme ami, M. Boivin. La
réponse est oui. J'ajoute que j'ai déclaré à la
commission que, en ce qui concerne ce dossier qui fait l'objet du mandat de
cette commission, mes relations avec M. Boivin étaient traitées
sur une base professionnelle et d'affaires. Je pense qu'on se souviendra de mes
réponses.
M. Bourbeau: M. le Président, question de
règlement. J'ai posé une très courte question et je ne
vois pas pourquoi le témoin commence à faire un discours.
Le Président (M. Jolivet): M. le député! Il
avait raison. Votre question maintenant, M. le député.
M. Beaulé: Opération "salissage!"
M. Bourbeau: Pardon?
M. Beaulé: J'ai dit que c'est une opération
"salissage" et j'en ai assez! Je pense que l'opinion publique aussi en a
assez.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je ne
voudrais pas avoir de question de règlement.
M. Lalonde: Non, mais j'en ai une. À moins que vous
régliez le problème vous-même.
Le Président (M. Jolivet): Oui, je sais. C'est ce que je
voudrais faire.
Une voix: Ils n'ont jamais fait autre chose!..
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Me
Beaulé, je comprends votre fatigue, comme la mienne aussi, je pense.
S'il vous plaît, simplement pour les besoins des travaux, j'aimerais que
vous retiriez vos paroles de façon qu'on puisse continuer. De la
même façon que je l'ai demandé à d'autres, c'est
votre opinion, j'en conviens. Vous avez le droit d'avoir votre opinion. Mais je
ne voudrais pas que vous l'exprimiez, de façon que les travaux puissent
se poursuivre. S'il vous plaît!
M. Beaulé: Bien, M. le Président.
M. Tremblay: Question de règlement, M. le
Président.
M. Lalonde: Pardon?
Le Président (M. Jolivet): Non. J'ai compris, de la part
de Me Beaulé, qu'il retirait ce qu'il venait de dire, tout en
conservant, si j'ai bien compris, son opinion. Je l'ai compris. C'est ce que
vous avez dit?
Des voix: On n'a pas compris.
M. Beaulé: M. le Président, à votre demande,
je vais retirer tout ce qu'un homme sans moyen et sans immunité
parlementaire peut dire et faire.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, vos questions s'il vous plaît!
M. Bourbeau: M. le Président, je dois avouer que je suis
très mal à l'aise. J'ai posé une question très
simple...
Le Président (M. Jolivet): Imaginez-vous que, moi aussi,
je suis très mal à l'aise dans la fonction que j'occupe.
M. Bourbeau: Je me fais engueuler par le témoin parce que
je lui demande si M. Boivin est son ami.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. M. le
député! Il a retiré ses paroles, prenez-le pour fait. Vos
questions maintenant.
M. Bourbeau: Bon. M. Boivin, est-ce que vous parlez la langue
anglaise?
Le Président (M. Jolivet): C'est M. Beaulé.
M. Bourbeau: M. Beaulé, plutôt.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Je regrette...
M. Beaulé: Ce n'est pas dans le mandat de la commission,
M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Je voudrais éviter de
revenir sur ce qu'on a dit. Je m'excuse, mais je pense que vous entrez dans une
discussion qui n'a trait en aucune façon au mandat que nous avons.
M. Bourbeau: M. le Président, je pense que j'ai le choix
de mes questions. Je veux poser mes questions...
Le Président (M. Jolivet): Je sais que vous avez le choix
de vos questions, mais j'ai aussi le choix de savoir si elles sont recevables
ou pas.
M. Bourbeau: Bon. Alors, M. le Président, je vais demander
au témoin s'il s'exprime très bien en anglais.
Le Président (M. Jolivet): Je n'accepte pas la
question.
M. Bourbeau: Non.
M. Lalonde: C'est contre la loi 101.
M. Bourbeau: Elle est irrecevable, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui, monsieur.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. Beaulé, le
28 août dernier, vous étiez présent à une rencontre
au bureau du ministre Pierre-Marc Johnson, le ministre du Travail de
l'époque.
Une voix: Le 28 août 1978. M. Bourbeau: Le 28
août 1978.
M. Duhaime: Parlez un peu plus fort, s'il vous plaît! Si
vous manquez de voix, on
peut libérer...
M. Bourbeau: Alors, je reprends. Le 28 août 1978, vous
étiez présent, M. Beaulé, à une rencontre avec Me
Yves Gauthier, Me Jasmin et vos clients, Mes Woll et Fanning, au bureau du
ministre Pierre-Marc Johnson. En quelle langue l'entrevue s'est-elle
déroulée?
M. Beaulé: Forcément en anglais, M. le
Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vos clients, Mes Woll et Fanning,
parlaient le français? Comprenaient-ils le français?
M. Beaulé: Non, M. le Président. Une voix:
Italien ou grec?
M. Bourbeau: Depuis combien d'années connaissez-vous Me
Jasmin?
M. Beaulé: Je ne sais pas si cela fait partie du mandat de
la commission, mais je vais y répondre quand même. Depuis quinze
ans au moins, quinze ans environ.
M. Bourbeau: À votre connaissance, est-ce que Me Boivin
connaît Me Jasmin depuis plusieurs années?
M. Beaulé: Je pense que la question s'adresse à M.
Boivin.
M. Bourbeau: À votre connaissance à vous?
Le Président (M. Jolivet): II a répondu. J'ai
compris qu'à sa connaissance, vous devriez poser la question à Me
Boivin.
M. Bourbeau: À sa connaissance, c'est oui ou c'est
non.
Le Président (M. Jolivet): Je le sais, mais ce que je veux
dire, c'est qu'il a répondu sous une forme différente.
M. Bourbeau: Est-ce que vous connaissez Me Jasmin sur une base
assez familière ou si c'est plutôt d'une façon
distante?
M. Beaulé: Je n'ai pas de rapports sociaux avec M. Jasmin,
je n'en n'ai jamais eu. J'ai eu des rapports professionnels avec lui,
uniquement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le député de Bourassa.
M. Bourbeau: Est-ce que vous avez rencontré Me Jasmin lors
d'activités politiques?
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, Me
Beaulé...
M. Beaulé: Je n'ai pas compris la question.
Le Président (M. Jolivet): Moi non plus, je suis
dérangé. Si vous voulez qu'on termine comme il faut, je vais
demander à M. le député de Laporte de reprendre sa
question, parce que je ne l'ai vraiment pas comprise. Je demanderais de ne pas
être dérangé, s'il vous plaît! M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: J'ai demandé si vous aviez déjà
rencontré Me Jasmin lors d'activités politiques?
M. Duhaime: Question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Etes-vous capable de me dire ce que cela peut nous
"foutre". Le mandat de la commission est de voir dans quel sens...
M. Bourbeau: M. le Président, je retire ma question.
M. Duhaime: ...et vous l'avez lu à plusieurs
reprises...
Le Président (M. Jolivet): La question est retirée,
M. le ministre.
M. Duhaime: ...oui j'espère. On va surveiller les
prochaines.
M. Bourbeau: M. le Président, je la retire pour permettre
d'épargner du temps.
Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie.
M. Bourbeau: Lors de vos visites, Me Beaulé, au bureau du
premier ministre, les visites qui ont été notées sur le
registre, le but recherché était de sensibiliser - comme vous
l'avez dit - les responsables au bureau du premier ministre à la cause
de votre cliente. Pourquoi n'êtes-vous pas plutôt allé voir
le ministre responsable de l'énergie, responsable de la SEBJ, M.
Joron?
Une voix: C'est une hypothèse.
M. Bourbeau: Puisque vous vouliez sensibiliser les
autorités, pourquoi n'êtes-vous pas allé voir M. Joron,
responsable de la SEBJ?
M. Beaulé: J'ai déjà répondu à
toutes
ces questions. Mes clients ont d'abord voulu rencontrer le ministre du
Travail selon la tradition américaine. Ils croyaient vraiment que
c'était à cette personne qu'ils devaient s'adresser pour exposer
le problème. Je répète qu'ils considéraient cette
poursuite comme abusive et que cela avait des répercussions dans les
milieux syndicaux américains. Par la suite, j'ai remis certains
documents à M. Boivin pour le sensibiliser au problème, à
tout ce problème qui avait aussi des incidences internationales et qui
dépassait les simples débats partisans, encore hier comme
aujourd'hui, d'ailleurs.
M. Bourbeau: Vous avez dit dans une de vos déclarations
antérieures que vous ne tutoyiez pas Me Boivin en réunion. Je
pourrais le citer, mais je voudrais gagner du temps. Vous avez dit: En
réunion...
M. Beaulé: Je n'ai pas dit cela.
M. Bourbeau: Alors, je vous cite. Nous parlions de Me Boivin en
réunion: "II n'y a jamais eu de tutoiement, ni de familiarité
dans nos rencontres." C'est ce que vous avez dit...
M. Beaulé: Ce que j'ai voulu dire, c'est qu'il n'y avait
pas de familiarité comme cela m'était suggéré par
M. le député de Mont-Royal, un peu comme si j'avais
discuté avec M. Boivin en disant: Jean Roch, qu'est-ce que t'en penses?
J'ai dit que ce n'était pas le ton, ni le mode, ni la façon avec
laquelle j'avais traité avec lui de cette affaire qui était
extrêmement importante. (21 h 30)
M. Bourbeau: Je vous pose la question carrément. Est-ce
que vous tutoyez M. Boivin?
M. Duhaime: M. le Président, question de règlement.
Je connais des Français...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Je connais des couples de Français qui sont
mariés depuis 45 ans et qui se vouvoient.
M. Bourbeau: Est-ce qu'ils sont... M. Lalonde: Question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Duhaime: Qu'il le tutoie ou le vouvoie, franchement! On se
croirait non seulement dans un cour de récréation, mais dans une
brasserie.
Le Président (M. Jolivet): Je suis en train de me demander
si je n'utiliserai pas la martingale du ministre pour mettre les gens...
M. le ministre.
M. Duhaime: C'est épouvantable!
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, sur la question de
règlement que M. le ministre a soulignée, je vais expliquer
pourquoi je la pose. C'est que M. Beaulé a dit lui-même: II n'y a
jamais eu de tutoiement et de familiarité dans nos rencontres. Je veux
lui donner l'occasion d'expliciter ce qu'il voulait dire et je pense qu'il est
heureux d'ailleurs de ma question. Si le ministre veut le laisser
répondre, je crois qu'il veut exactement ce qui se passe. Ma question,
je la repose. Est-ce que vous tutoyez ou non M. Boivin?
M. Beaulé: Je ne sais pas.
M. Duhaime: Voulez-vous lire le mandat de la commission?
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant!
M. Beaulé: M. le Président, je ne sais pas si je
laisserais le député de Laporte lire dans ma conscience, cela,
c'est une autre question. Il est évident que, lorsque je rencontre M.
Boivin ailleurs, si vous voulez, que dans l'exercice de ses fonctions, je le
tutoie mais, dans le cas de ces quelques rencontres que j'ai eues avec lui, je
ne l'ai pas tutoyé.
J'ajoute ceci. Me le permettez-vous, je vais invoquer l'article 4, pour
ceux qui peuvent comprendre ce que cela veut dire: "Toute personne a droit
à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa
réputation". Les questions qu'on me pose, et j'en forme un protêt
auprès de vous, qui êtes mon seul protecteur ici, ont pour but de
me rendre coupable par association comme McCarthy le faisait aux
États-Unis, en 1953, de présumés actes illicites.
M. Lalonde: Une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Lalonde: Une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Juste un
instant! Je ne voudrais pas qu'on empêche la personne qui est devant nous
d'avoir tout de même des opinions, de la même façon que
chacun des membres de cette commission en a aussi.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement.
Une voix: Richard Nixon, lui?
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.
M. Lalonde: M. le Président, tout le monde sait que se
faire traiter de Mccarthysme est une accusation péjorative et c'est, je
pense, les propos que le témoin vient d'avoir à l'égard de
cette commission ou de quelques membres, j'imagine que ce sont surtout les
membres libéraux, puisque le témoin s'était
déjà permis des accusations politiques, à savoir que ce
qu'on faisait, c'était un ballon politique. Je crois qu'on ne peut pas
accepter que des accusations de cette nature soient faites. Ce n'est pas
parlementaire, ce n'est pas du tout conforme aux règles de
gentilhommerie que vous avez vous-même promis d'appliquer. Je vous
demanderais de prier le témoin de retirer ses paroles.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, sur la question de
règlement, si Me Beaulé est obligé de retirer des propos
qu'il vient de tenir, parce qu'il n'a pas l'immunité parlementaire, je
voudrais les répéter. Je l'ai, l'immunité
parlementaire...
M. Lalonde: M. le Président, vous n'avez pas le droit de
parole.
M. Duhaime: ...je voudrais l'utiliser.
M. Paradis: ...ce n'est pas une de question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Sauf que, M. le ministre, ce
n'est vraiment pas une question de règlement, et vous n'avez pas le
droit de parole.
M. Tremblay: M. le Président, une question de
règlement ou de directive.
Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le
député de Chambly.
M. Tremblay: Je voudrais simplement savoir ce qui arrive, si
l'invité refuse de retirer ses paroles.
M. Duhaime: C'est intéressant.
Une voix: Complètement hypothétique.
Le Président (M. Jolivet): Vous m'aidez difficilement dans
cette décision. J'ai eu l'occasion, avant les débuts des travaux,
de demander à Me Beaulé de m'aider dans mon travail. J'ai
demandé a chacun des membres de cette commission en dehors des travaux
de m'aider à faire en sorte qu'on puisse en terminer ce soir avec Me
Beaulé. Je ne sais pas de quelle façon exprimer cette demande qui
pourrait être faite - sans vouloir blesser personne - en disant que je
peux penser comme toute personne ici présente qu'on peut avoir des
opinions mais que, quelquefois, il est peut-être mieux de ne pas les
donner et de les conserver pour soi-même. Puisqu'il n'est pas
député, je l'ai fait par gentilhommerie tout à l'heure, je
ne peux pas demander à Me Beaulé de retirer certaines paroles,
mais ce n'est pas la même chose qu'un député qui est autour
de la table et à qui je demande de retirer ses paroles. Je fais
simplement le souhait que, si Me Beaulé veut dire autre chose, il le
fasse, sinon je laisserai la parole au député de Laporte.
M. Duhaime: M. le Président, une question de
règlement.
M. Bourbeau: Une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Non. Sur la question de
règlement, je l'ai réglé.
M. Duhaime: Alors, vous ne demandez pas à Me Beaulé
de retirer ses paroles?
Le Président (M. Jolivet): Non, non.
M. Duhaime: Ah bon! J'aurais trouvé cela regrettable.
Le Président (M. Jolivet): Tout ce que je dis, c'est qu'il
est libre de le faire.
M. Bourbeau: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, une dernière
question, et je ne poursuivrai pas sur la question du tutoiement, mais je
l'avais posée uniquement parce que c'était le témoin qui
avait souligné ces mots.
Ma dernière question est celle-ci: L'objet du présent
exercice est d'examiner les circonstances entourant la décision du
conseil d'administration de la SEBJ et le rôle du premier ministre. Or,
le premier ministre, à l'Assemblée nationale, le 20
février 1979, a dit, et je le cite: "Ce n'est pas du tout, ni de
près ni de loin, dans le bureau du premier ministre que le
règlement ou partie du règlement a eu lieu." Évidemment,
il s'agissait du règlement hors cour de l'action en justice de 32 000
000 $ intentée et dont
le règlement a été fait pour 200 000 $ en ce qui
concerne la SEBJ.
Le 29 avril dernier, mon collègue, le député de
Mont-Royal, vous posait une question. C'est au ruban 953, page 1, si vous
voulez regarder. Il vous disait ceci.
M. Beaulé: Juste un instant, s'il vous plaît!
M. Bourbeau: Oui. C'était au sujet de la
réunion...
Une voix: ...
M. Bourbeau: Oui, oui. Mais, M. le Président, je ne lis
pas, je parle.
Le Président (M. Jolivet): Je sais, mais c'est simplement
pour qu'il puisse l'avoir entre les mains avant de commencer.
M. Beaulé: Quelle page dites-vous? Le Président
(M. Jolivet): Ruban 953.
M. Bourbeau: 953, page 1. Au bas de la page.
Le Président (M. Jolivet): Page 1.
M. Bourbeau: Alors il s'agissait de la réunion du 15
janvier 1979 que vous aviez tenue au bureau de Me Boivin. M. le
député de Mont-Royal vous a demandé: "II ne vous a fait
aucun commentaire sur les propos que vous lui avez faits?" Évidemment,
vous parlez à Me Boivin. Et vous avez répondu: "J'ai
informé M. Boivin du déroulement des procédures de la
journée." On parlait du procès qui venait de débuter. M.
le député de Mont-Royal vous a demandé: "Est-ce que vous
avez parlé du règlement?" Il s'agissait du règlement hors
cour prévu, enfin, en négociation. Et vous avez répondu:
"Pas ce jour-là. Pas ce jour-là." La question était:
"Est-ce que vous avez parlé du règlement à M. Boivin?" Et
vous avez répondu: "Pas ce jour-là." Est-ce qu'on doit comprendre
que vous avez parlé du règlement à M. Boivin une autre
journée?
M. Beaulé: Non. Je vous ai déjà
répondu là-dessus, M. le Président.
M. Bourbeau: Pas sur cette question.
M. Beaulé: Maintenant, quant à la citation qui a
été faite de la déclaration du premier ministre et qui a
été le préambule à la question, je jure qu'elle est
vraie. La déclaration du premier ministre est vraie.
M. Bourbeau: Alors, pourquoi avez-vous utilisé le mot "pas
ce jour-là"? Est-ce que cela n'implique pas que vous en avez
parlé une autre journée?
M. Beaulé: Je n'ai pas parlé de règlement.
J'ai été clair, M. le Président. Il ne faut pas sortir des
réponses hors contexte.
Le Président (M. Jolivet): D'accord, Me Beaulé.
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais poser une autre
question sur le même sujet. Je cite vos propres paroles, M.
Beaulé, pas celles d'autres personnes, vos propres paroles à
vous. Vous avez dit: "Pas ce jour-là."
M. Beaulé: Je réponds, M. le Président, que
c'est hors contexte. J'ai déclaré et bien expliqué
à la commission qu'il n'a jamais été question de
règlement ou de modalités de règlement. Il y a plusieurs
questions qui m'ont été posées dans ce sens, en
particulier par le député de Mont-Royal.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais terminer en disant
ceci: M. le Président, j'ai posé deux sortes de questions
à Me Beaulé. Je lui ai...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, avant d'aller trop loin...
M. Dussault: Donnez-vous votre sermon aussi?
M. Bourbeau: Pardon?
M. Dussault: Donnez-vous votre sermon aussi?
M. Bourbeau: Non, non.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le député.
M. Tremblay: Votre petit commentaire désobligeant.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Bourbeau: Je veux simplement dire...
Le Président (M. Jolivet): Oui, d'accord, d'accord.
M. Tremblay: Vous ne pourrez pas dormir, sans cela.
Le Président (M. Jolivet): Je vais vous laisser parler, M.
le député, mais je ne voudrais pas que vos propos engendrent un
autre débat. M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, je vais simplement dire que
les mots "pas ce jour-
là", en ce qui me concerne, impliquent qu'il en a
été question un autre jour, sans cela, on n'aurait pas dit: "Pas
ce jour-là."
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
dois malheureusement vous rappeler une chose.
M. Bourbeau: Oui.
Le Président (M. Jolivet): C'est que l'invité est
sous serment.
M. Bourbeau: M. le Président, je donne mon opinion.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Vous n'avez pas le
droit, je pense. Non, je l'ai déjà dit. La personne est sous
serment et nous devons prendre sa parole. Nous devons peut-être avoir des
opinions, c'est autre chose.
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, disons que le
témoin ne m'a pas convaincu.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.
M. Laplante: Vous avez passé mon tour.
Le Président (M. Jolivet): Oh! Excusez-moi. M. le
député de Bourassa. Je m'excuse.
M. Laplante: Oui, mais en bon prince, M. le Président,
voulant que les travaux puissent se terminer à 22 heures...
Le Président (M. Jolivet): ...sur votre temps.
M. Laplante: Marquez zéro minute sur mon temps. Au cas
où des questions auraient été oubliées, j'avais des
remarques à faire sans poser de questions mais je vais m'abstenir...
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le
député.
M. Laplante: ...de les poser pour que M. le député
de Marguerite-Bourgeoys puisse poser toutes ses questions d'ici à 22
heures.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole, mais vous
n'êtes pas obligé de la prendre jusqu'à 22 heures.
M. Lalonde: M. le Président, lorsque j'ai dit au ministre
que nous espérions de ce côté-ci terminer l'interrogatoire
de ce témoin à 22 heures, je n'avais pas prévu toutes les
interruptions que nous avons eues...
M. Duhaime: Ils ne l'ont pas provoqué, cela je peux le
dire...
M. Lalonde: Non, en fait, je vais essayer d'être rapide.
Mais j'aimerais commencer et terminer par quelques observations. J'aurai
quelques questions entre-temps.
M. Duhaime: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Duhaime: Je voudrais seulement savoir de la part du
député de Marguerite-Bourgeoys s'il a des questions à
poser à Me Beaulé.
Le Président (M. Jolivet): Oui. M. Lalonde: J'en
ai. M. Duhaime: Vous en avez? M. Lalonde: Oui, j'en ai. M.
Duhaime: Ah, d'accord.
M. Lalonde: Parce qu'on a fait grief, et même vous, j'en
suis convaincu, Me Beaulé, à certains députés qui
ont exprimé leur évaluation de l'éclairage que vous avez
pu apporter à cette commission. Il ne faut pas se cacher que la question
qui se pose dans tout le débat, une fois qu'on a passé la
commission Cliche, le saccage, le procès, le règlement, c'est la
suivante: Est-ce que le premier ministre a trompé l'Assemblée
nationale le 20 février 1979? C'est pour cela que votre
témoignage est extrêmement important, parce que la
déclaration du premier ministre touchait à la participation de
son bureau dans le règlement.
Enfin, je vais parler pour moi, je ne veux pas parler pour les autres,
j'espérais avoir beaucoup plus de détails, beaucoup plus
d'information quant à la participation de Me Boivin aux rencontres que
vous avez eues avec lui. Lorsque vous avez répondu à une question
du ministre, à savoir si vous aviez négocié le
règlement avec Me Boivin, vous avez répondu non. Je ne pense pas
vous mettre des mots dans la bouche qui n'étaient pas les vôtres.
Je respecte votre conclusion de ce qui s'est passé; mais nous ici devons
faire notre propre perception et apporter nos propres conclusions, à
même quoi? À même des faits. Pour apporter ces conclusions,
il faudrait avoir un peu plus d'information en ce qui concerne la participation
de Me Boivin à ces réunions. Cela ne sert à rien de
tourner autour du pot pendant deux ou cinq semaines si on n'a pas ce qui s'est
passé.
Je vais vous poser quelques questions. C'est possible que quelques-unes
de mes
questions vous apparaissent comme une répétition, vous me
pardonnerez, je l'espère, je ne les lis pas dans la transcription. En
fait, vous répondrez comme vous voudrez, mais si vous me dites que c'est
la quatorzième fois que je réponds à cette question... en
tout cas, vous ferez ce que vous voudrez, mais je ne le fais pas pour vous
harceler.
Votre objectif était-il la cessation de la poursuite de la SEBJ
contre votre cliente?
M. Beaulé: C'est évident, M. le Président,
que l'objectif ultime c'était que la SEBJ mette fin à une
poursuite abusive contre l'union internationale, abusive quant à eux et
très dommageable à nos rapports avec les États-Unis. Je
parle des rapports du Québec avec les États-Unis. Mais, avec M.
Boivin, je n'ai discuté...
M. Lalonde: Non, je...
M. Beaulé: ...que de la non-responsabilité des
Américains.
M. Lalonde: Si je comprends bien, votre objectif ultime -
j'emprunte votre qualificatif - était donc la cessation de la poursuite
de la SEBJ contre votre cliente. Vos rencontres avec Me Boivin
étaient-elles des démarches en vue d'atteindre cet objectif?
M. Beaulé: M. le Président, je pense que, ayant
répondu oui à la première question, la réponse
à la deuxième est également oui.
M. Lalonde: Merci, M. Beaulé. Dans vos rencontres avec Me
Boivin, avez-vous eu des entretiens avec Me Boivin?
M. Beaulé: M. le Président, j'aurais
peut-être dû apporter mon Littré.
M. Lalonde: Cela semble tomber sous le sens. Mais, si vous
permettez, je vais m'expliquer. Je ne veux pas vous citer de travers, mais, au
moins une fois et quelquefois trois ou quatre fois parce que vous
répétiez vos réponses, j'avais l'impression que -
sûrement une fausse impression - c'était plutôt un monologue
ou un discours et que Me Boivin écoutait. Enfin! Je vous pose la
question: Est-ce que vous avez eu des entretiens avec Me Boivin lors de vos
rencontres?
M. Beaulé: II y a sûrement eu des discussions. J'ai
déjà répondu - je crois que c'est hier - à la
commission en disant que M. Boivin m'a posé beaucoup de questions. Je
lui ai même fourni les documents toujours relatifs à la
non-responsabilité des Américains.
M. Lalonde: Ces entretiens portaient-ils sur la cessation de la
poursuite de la SEBJ contre votre cliente?
M. Beaulé: J'ai déjà répondu oui
à la première question en expliquant ma réponse.
M. Lalonde: Est-ce que Me Boivin a pris la défense de la
SEBJ lors de l'un ou l'autre de ces entretiens?
M. Beaulé: Oui, M. le Président. Je fais
référence à ma contestation du 28 novembre 1978.
J'essayais de dire cela, hier, au moment où, vers 18 heures, M. le
député de Gatineau allait lire une déclaration. M. Boivin,
alors que je lui ai remis le texte de la contestation... Vous vous rappelez
qu'il y avait deux chapitres importants à part le chapitre sur la
non-responsabilité des Américains. L'un, c'est que la SEBJ avait
tissé la toile de fond qui était à la source des causes
lointaines de ce saccage en accordant un monopole syndical à la
FTQ-Construction; l'autre, c'est que la SEBJ n'avait pas pris les moyens
sachant les dangers imminents pour le chantier de LG 2 pour empêcher que
le saccage ne se produise. Là-dessus, M. Boivin m'a toujours dit: Je ne
veux pas en discuter, cela ne relève pas de moi.
M. Lalonde: Je vous remercie, Me Beaulé. Me Boivin ayant
pris la défense de la SEBJ, si j'ai bien compris votre réponse
à ma question précédente, a-t-il mentionné un
montant minimum que la SEBJ devrait recevoir pour cesser la poursuite?
M. Beaulé: D'aucune façon et jamais. Une voix:
Cela va bien.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez réussi à
convaincre Me Boivin du bien-fondé de votre cause?
M. Beaulé: M. le Président, je pense que la
question devrait être posée à M. Boivin.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.
M. Lalonde: J'aurais pensé que vous auriez eu une opinion,
là-dessus. C'est une question d'opinion peut-être.
M. Beaulé: Ce serait la meilleure preuve, M. le
Président.
M. Lalonde: Oui, sûrement. Enfin, vous avez
déjà eu un "feeling" que vous aviez réussi, mais je ne
reviendrai pas là-dessus.
M. Duhaime: ..."feeling" un bout de
temps.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez appris, d'un avocat de la
pratique privée, à la suite d'une indiscrétion, ce qu'un
membre du conseil d'administration de la SEBJ aurait dit à la
réunion du 9 janvier 1979, à peu près en ces termes: "II
faut poursuivre l'action car la poursuite pourrait avoir pour effet de tenir
les syndicats tranquilles. De plus, un règlement pourrait être
interprété comme un blâme à l'égard des
personnes en autorité à l'époque, comme MM. Boyd, Hamel et
Gauvin."
M. Duhaime: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Pour ma part, je n'aurais pas d'objection à ce
que la question soit formulée, à la condition que l'avocat de la
pratique privée soit identifié. Je ne voudrais pas reprendre le
même débat à une des questions posées par le
député de Mont-Royal qui faisait référence à
une déclaration qu'aurait pu faire M. Lucien Saulnier à un
journaliste. Je vois que le Parti libéral est bien documenté,
peut-être que vous devriez réviser les bandes enregistrées
que vous avez à la suite de conversations téléphoniques.
Je ne m'opposerai pas à la question pour autant que l'on identifiera
l'avocat de la pratique privée dont il s'agit, de façon que Me
Beaulé puisse répondre en toute connaissance de cause.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Justement, l'identité de l'avocat était
ma deuxième question. Est-ce que vous n'avez pas une note à votre
dossier à l'effet qu'un membre important du conseil d'administration
aurait dit, lors de la réunion du 9 janvier 1979, ce que je viens de
dire?
M. Duhaime: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Vous n'avez même pas
besoin de question de règlement, M. le ministre.
M. Duhaime: Je voudrais que l'on identifie le membre...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, M. le
ministre...
M. Duhaime: ...du conseil d'administration de la SEBJ de
façon qu'on puisse...
Le Président (M. Jolivet): ...vous n'avez pas besoin de
faire une question de règlement car je n'accepte pas la question.
M. Duhaime: Ah bon! Je vous remercie, M. le Président, je
vais ménager ma salive.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez appris de quiconque ce qui s'est
passé en partie lors de cette réunion du 9 janvier 1979 du
conseil d'administration?
M. Beaulé: Non, M. le Président.
M. Lalonde: Ni d'un avocat de la pratique privée, ni de
personne d'autre.
M. Beaulé: J'ai su, par la suite, M. le Président,
par M. Aquin en particulier, lors de rencontres tout à fait officielles,
que la SEBJ avait, le 9 janvier 1979, décidé de continuer la
poursuite engagée. Quant à moi, j'en ai tiré certaines
conclusions à savoir que, dans toute cette affaire, M. Boyd était
plus intéressé à ménager ses arrières et ses
décisions administratives et à refiler aux syndicats
l'entière responsabilité qu'à toute autre chose.
M. Lalonde: Me Beaulé, je voudrais revenir - vous
m'excuserez de ne pas l'avoir fait tout à l'heure - à ce que vous
avez répondu à ma question, à savoir si M. Boivin avait
pris la défense de la SEBJ. Je pense que vous avez dit oui?
M. Beaulé: D'une façon claire.
M. Lalonde: Est-ce que vous pouvez expliciter votre pensée
en nous disant en quels termes et lors de quelle réunion? Vous en avez
eu cinq, en incluant celle du 1er décembre?
M. Beaulé: C'est à la première, celle... Je
n'ai pas mon calendrier, mais, de mémoire, c'est à celle du 11
décembre où je lui ai remis la contestation. Il m'a dit: Tout ce
qui touche... Pour ce qui est des allégations faites contre la SEBJ, je
ne veux pas qu'on en discute. C'était assez clair et j'ai toujours
respecté cette consigne-là.
M. Lalonde: Et, à aucune autre réunion, Me Boivin
n'a pris la défense... Ce que je comprends, c'est la seule
réunion...
M. Beaulé: Je n'en ai jamais reparlé avec lui, M.
le Président.
M. Lalonde: Pardon?
M. Beaulé: J'ai dit tout à l'heure, et je pensais
que j'avais été clair que, dans la contestation, il y a un
chapitre qui traite de la non-responsabilité des Américains, un
autre chapitre où il est dit - vous pouvez
prendre connaissance de cette contestation -que la SEBJ a
contribué à créer, si vous voulez, ce contexte ou cette
toile de fond qui a abouti au saccage. Et, dans un troisième chapitre,
que M. Boyd, savait dès le 19 mars 1974 que tout allait sauter, que M.
Boyd savait, par l'entremise de Me Durocher, d'Hydro-Québec, que tout
allait sauter et j'ai toujours prétendu qu'il n'avait pas pris les
mesures pour protéger son chantier. Là-dessus, M. Boivin m'a dit:
Je ne veux absolument pas discuter de ces questions-là avec toi.
M. Lalonde: Avec toi? M. le Président...
M. Beaulé: C'était une rencontre privée.
M. Lalonde: Ah! Ah!
M. Beaulé: II n'y avait pas d'interlocuteur, M. le
Président, le 11 décembre.
M. Lalonde: Le 11 décembre, c'était privé,
c'est-à-dire que vous considérez que c'est privé, quand
vous êtes tous les deux seuls, si je comprends bien?
M. Beaulé: Ce serait hypocrite de dire que, quand je
rencontre M. Boivin seul à seul, je vais le vouvoyer, M. le
Président.
M. Lalonde: Ah bon! Non, non, je voulais savoir...
M. Beaulé: Pour ce qui est des rencontres que j'ai avec
des tierces personnes, je l'ai toujours vouvoyé. D'ailleurs, en anglais,
on peut s'en rendre compte très difficilement.
M. Lalonde: Oui, oui, je comprends.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Lalonde: Même avec Me Jasmin?
Une voix: Do you understand that, young man?
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Lalonde: Je présume que, lorsque vous rencontriez Me
Boivin avec Me Jasmin, vous ne parliez pas anglais et que vous vouvoyiez Me
Boivin? Enfin, je peux tirer mes conclusions, parce que vous avez dit que c'est
seulement seul à seul que vous le tutoyez.
M. Duhaime: Le pape, lui, dit "Nous". Le pape, à Rome, dit
"Nous". Cela m'impressionne chaque fois de l'entendre.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, c'est vous qui avez la
parole.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Me Beaulé, je
n'ai plus de question mais j'aurais quelques observations à faire
sur...
M. Beaulé: Me permettez-vous, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Beaulé: Si le député de
Marguerite-Bourgeoys me le permet.
M. Lalonde: Un instant! J'aurais des...
M. Beaulé: C'est pour compléter une réponse
que je lui ai donnée.
M. Lalonde: Oui, s'il vous plaît!
M. Beaulé: Je regrette de ne pas avoir le temps de le
faire, ce soir.
M. Lalonde: Vous pouvez revenir mercredi, si vous voulez. Je
voulais vous libérer. On voulait vous libérer.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Beaulé: Je soumets - je pense que cela intéresse
le public - que M. Boyd avait refilé au syndicat les factures pour bien
des réclamations ou bien des postes qui n'étaient ni de
près ni de loin le résultat du saccage. J'en donne comme exemple
le poste de 21 000 000 $ qui a été payé à Impreglio
et Spino.
M. Lalonde: Si vous permettez, M. le Président. Le
témoin s'est exprimé, je pense, pleinement là-dessus. Vous
avez fait un plaidoyer...
Le Président (M. Jolivet): Vous avez la parole.
M. Lalonde: ...assez long d'ailleurs, lors de votre
première journée de comparution. Non. Voici ce que je voulais
simplement, et j'aimerais que Me Beaulé comprenne le problème des
députés ici autour de la table. On nous a confié un
mandat, un mandat extrêmement difficile, parce que cela s'accorde mal
avec nos habitudes de fonctionnement à l'Assemblée nationale ou
à une commission parlementaire, c'est-à-dire de poser des
questions - non pas des opinions -comme on pose par exemple à la chambre
de commerce ou à la société nationale des
Québécois de l'Estrie, sur des projets de loi qui sont soumis
à l'Assemblée nationale. À ce moment-là, ce sont
des questions
d'opinion. Ce qu'on a ici sont des faits. Vous êtes un
témoin clé, c'est évident. Parce que l'accusation est
à savoir si c'est dans le bureau du premier ministre qu'une partie du
règlement a eu lieu, "Ni de près ni de loin", comme disait le
premier ministre.
J'ai écouté attentivement votre témoignage et je
fais appel à votre expérience d'avocat, depuis 25 ans, pour
comprendre quelle peut être la réaction de quelqu'un qui participe
à un interrogatoire vis-à-vis de quelqu'un qui répond
à des questions. Vous niez avoir négocié...
M. Beaulé: Le règlement...
M. Lalonde: ...et les renseignements que, à mon humble
avis, vous nous avez donnés de vos réunions avec Me Boivin sont
très minces quant à la participation de Me Boivin. Dans cette
mesure, je suis déçu. Donc, je ne suis pas convaincu. Je sais une
chose. D'après la démonstration qui a été faite,
encore avec Me Gadbois aujourd'hui -vous ne l'avez pas entendu, mais c'est
à vous que je parle, M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, j'ai entendu.
M. Beaulé: J'étais en cour toute la
journée.
M. Lalonde: ...il est évident que la SEBJ ne peut pas
avoir négocié avant le 7 février. Donc, s'il y a eu des
négociations avant le 7 février, ce n'est pas ailleurs que cela
s'est fait. Le problème c'est que les informations que nous avons...
M. Duhaime: Question de règlement.
M. Lalonde: ...sont très minces à savoir...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Lalonde: ...si cela s'est fait là.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Lalonde: Mais ce n'est pas ailleurs...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, question de
règlement.
M. Lalonde: On est pas mal sûr que jusqu'au 7
février ce n'est pas ailleurs.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, sur une question de
règlement. Je veux demander au député de
Marguerite-Bourgeoys, avec la conclusion qu'il vient de formuler, s'il serait
d'accord pour que cette commission ajourne ses travaux.
M. Lalonde: Non, pas du tout, M. le Président. On a encore
des témoins qui auraient sûrement, j'espère, davantage
à nous dire sur la participation du bureau du premier ministre. Nous
allons avoir Me Gauthier, Me Boivin, M. Lévesque...
Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas-là, vous
allez me permettre - je crois comprendre que tout le monde a terminé son
intervention - de remercier, au nom de tous les membres de la commission, Me
Beaulé de sa patience, de la mienne et de la vôtre. Je n'ai pas
à faire ces choses cependant. Je dois vous libérer et je suis
heureux pour vous et pour l'ensemble de toutes les personnes qui sont ici
autour de cette table.
M. Beaulé: Merci M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): J'ajourne les travaux
jusqu'à la prochaine motion qui sera présentée en Chambre,
possiblement pour mercredi prochain à 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 58)