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Etude du projet de loi no 101
Charte de la langue française
(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Nous commençons une nouvelle séance de la commission de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications pour
étudier, après la deuxième lecture, article par article,
le projet de loi 101, Charte de la langue française.
Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau).
M. Alfred: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Bertrand (Vanier).
M. Bertrand: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Charbonneau
(Verchères). M. Charron (Saint-Jacques).
M. Charron: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Chevrette
(Joliette-Montcalm).
M. Chevrette: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Ciaccia (Mont-Royal). M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes) remplacé par M. Morin (Sauvé). M.
Dussault (Châteauguay).
M. Dussault: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Grenier
(Mégantic-Compton). M. Guay (Taschereau), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Laplante (Bourassa), M. Laurin (Bourget), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé) remplacé par M.
Biron (Lotbinière); M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Fallu
(Terrebonne); M. Roy (Beauce-Sud).
M. Roy: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Saint-Germain
(Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).
Chapitre premier: La langue officielle du
Québec
Motion d'amendement M. Fernand Lalonde
Le Président (M. Cardinal): Au moment de l'ajournement,
hier soir, nous en étions à débattre la motion
jugée recevable, cette fois-là, du député de
Marguerite-Bourgeoys, à savoir que l'on ajouterait à l'article 1
un alinéa qui se lirait comme suit: L'usage de l'anglais continue
à être permis dans les débats de l'Assemblée
nationale et dans les témoignages et les plaidoiries orales devant les
tribunaux. La parole était à M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, à qui il reste quatre minutes.
M. Charron: M. le Président, si le député le
permet...
Le Président (M. Cardinal): S'il vous le permet.
M. Charron: Je ne veux pas en faire un point de règlement,
je voudrais simplement informer les membres de la commission du retard du
ministre d'Etat au développement culturel ce matin, à cause d'une
seule raison qui intéresse les membres de la commission, je crois. Il
rencontre en ce moment les représentants des hôpitaux anglophones
de Montréal et comme, éventuellement, certains des articles que
vous appellerez, M. le Président, toucheront cette matière, il
est donc à l'oeuvre sur le projet de loi, mais à un autre
endroit. Il nous rejoindra le plus rapidement possible.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je remercie le
député de Saint-Jacques, ministre au haut-commissariat. Ses
propos me rassurent. Vous me voyiez désespéré de voir le
ministre d'Etat au développement culturel absent. Alors, nous sommes
rassurés. Son absence, toutefois, va changer un peu les propos que je
voulais faire en conclusion. Ils concernaient le recours que le ministre d'Etat
fait trop souvent à des arguments de niveau intellectuel qui me semblent
indignes de sa fonction, au moins.
Comme il n'est pas là, je vais attendre qu'il revienne et,
à une autre occasion, je le ferai.
M. le Président, notre amendement est bien pâle à
côté de celui qu'on aurait dû apporter ici, si le
règlement nous l'avait permis. J'ai invoqué, je pense, l'argument
le plus valable, le plus considérable; il est exprimé par la
Commission des droits et libertés de la personne; c'est de façon
très sérieuse que le Parti libéral croit que, dans une loi
qui détermine les droits linguistiques de toute une population, une
population pluraliste, une population hétérogène
linguistiquement, le gouvernement de tous les Québécois doit
déterminer la place des différents groupes au départ,
c'est-à-dire à l'article 1 ou peut-être 2 ou 3, mais nous
sommes à l'article 1 et nous croyons que c'est là que cela doit
se présenter.
M. le Président, je conclus ainsi en invitant tous les membres de
cette commission à faire preuve d'ouverture à la
réalité québécoise d'une grande communauté
francophone fortement majoritaire, mais aussi d'une communauté
anglo-
phone qui, historiquement, a contribué au développement de
notre province et qui forme non pas l'une ou l'autre des communautés
qu'on appelle souvent ethniques, mais qui forme une communauté quasi
cofondatrice de notre province et, à cet égard, je pense que
l'amendement du Parti libéral est bien fondé.
Le Président (M. Cardinal): Y a-t-il d'autres intervenants
sur la motion?
M. le député de Mont-Royal, quand c'est votre cas, on vous
donne toujours beaucoup de temps, il vous reste dix minutes.
M. Ciaccia: C'est parce que je suis bref, concis et à
point. Le journal des Débats ne peut pas prendre ce que vous venez de
dire alors je ne peux pas, M. le député de Sauvé,
répondre, ce ne serait pas parlementaire, M. le
député.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez la parole sur la
motion.
M. Ciaccia: C'est seulement pour faire la remarque, M. le
Président, que quand l'article 1 déclare que la langue officielle
du Québec est le français, si on avait un projet de loi seulement
sur la langue officielle et si on n'avait pas le préambule que nous
avons maintenant, cela aurait d'autres implications, mais le fait que nous
ayons ce préambule et que ce soit un projet de loi sur la charte
impliquent que la langue anglaise n'aura pas de statut légal du tout.
C'était le but de l'intervention, de l'amendement du
député de L'Acadie et du député de
Marguerite-Bourgeoys.
La communauté anglophone, qui fait partie de la
réalité du Québec, n'est pas traitée d'une
façon plus différente que toutes les autres minorités.
C'est seulement pour faire le point sur cette négation, sur cette
approche. On nie vraiment l'histoire du Québec et la place dans cette
histoire de cette communauté.
Notre approche... Ce que nous recommandons, c'est un statut légal
pour la langue anglaise, même si l'amendement que vous avez
accepté et restreint, c'était le but de notre amendement. Le but
du gouvernement, c'est de promouvoir la qualité et la promotion de la
langue française et de le faire en niant totalement l'existence de la
langue anglaise, de la communauté anglaise. Quand le
député de Deux-Montagnes parlait de dignité, je pense que
ce n'est pas une approche digne.
Je vais appuyer l'amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys.
Vote sur la motion
Le Président (M. Cardinal): Je pense que la motion
d'amendement de M. le député de Marguerite-Bourgeoys est mise aux
voix. J'appelle le vote. Chacun indiquera son choix, pour ou contre. M. le
député de Papineau?
M. Alfred: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Vanier?
M. Bertrand: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Verchères?
M. Charbonneau: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Jacques?
M. Charron: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm?
M. Chevrette: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal?
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé?
M. Morin: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Châteauguay?
M. Dussault: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton?
M. Grenier: Abstention.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourget.
M. Laurin: Contre.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Abstention.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Beauce-Sud. Il est absent.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. le député de Rouyn-Noranda.
La motion d'amendement est donc rejetée. J'indique que,
dès maintenant, pour établir justement cette rotation qui permet
le jeu de la démocratie, je donne la parole à un
représentant de ce parti reconnu qu'est l'Union Nationale.
M. Biron: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Le député de
Lotbinière.
Motion d'amendement M. Rodrigue Biron
M. Biron: Je vais présenter une motion qui visera à
remplacer les mots de l'article 1 par les mots suivants: "La langue
française et la langue anglaise sont les langues officielles du
Québec. Des dispositions particulières de la présente loi
peuvent permettre l'utilisation exclusive de la langue française ou
affirmer sa prééminence sur la langue anglaise ou toute autre
langue au Québec."
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que je peux avoir le
texte, s'il vous plaît?
Je vais relire la motion. Je donne le même renseignement qu'hier.
Je prendrai avis brièvement de la commission avant de déclarer
recevable ou non recevable cette motion d'amendement.
La motion du député de Lotbinière dit ceci:
"Remplacer les mots de l'article 1 par les mots suivants: La langue
française et la langue anglaise sont les langues officielles du
Québec. "Des dispositions particulières de la présente loi
peuvent permettre l'utilisation exclusive de la langue française ou
affirmer sa prééminence sur la langue anglaise ou toute autre
langue au Québec."
Sur la recevabilité uniquement, parce qu'une fois que le
débat sera engagé, nous serons pris dans une situation où
certaines ententes ne pourront pas se réaliser.
M. le député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, je veux simplement attirer
votre attention et celle des membres de la commission sur le fait que la
recevabilité de cette motion est discutable. En effet, je crois que le
vote clair de deuxième lecture qu'a pris l'Assemblée nationale,
il y a quelques heures, se faisait sur le principe de la Charte de la langue
française au Québec.
Vous savez pertinemment que notre règlement nous interdit, au
moment de l'étude article par ar- ticle, d'apporter des amendements qui,
directement, toucheraient le principe d'une loi qui vient d'être
votée par c'est le sens d'ailleurs de la deuxième lecture
l'Assemblée Nationale.
J'attire votre attention sur le fait, à mon avis, et là
est tout le débat, que le principe de la loi 101 est de faire du
français la langue officielle du Québec. A moult reprises, dans
toutes les dispositions qui suivent l'article premier, sur lequel nous
discutons, nous faisons référence à la langue officielle,
tout le monde sachant, suite à l'article 1, que, lorsqu'on dit "langue
officielle" dans tous les autres articles, il s'agit bien de la langue
française.
Si le principe de la loi avait été de créer deux
langues officielles, comme le suggère l'amendement qu'amène le
chef de l'Union Nationale, tous les autres articles, toute la discussion et je
dis même tout le débat de la deuxième lecture auraient
été différents puisque les députés auraient
été appelés à se prononcer sur le principe de deux
langues officielles au Québec.
Or, en aucun temps nous n'avons été appelés
à nous prononcer sur le principe de deux langues officielles. Il
s'agissait de savoir si nous faisions du français la langue officielle
du Québec. Toute la structure de la loi est basée sur cette
affirmation et je soutiens que l'amendement avancé ce matin par le chef
de l'Union Nationale est dérogatoire à l'esprit de notre
règlement qui veut qu'une fois l'étude article par article
appelée, nul amendement devant modifier le principe d'une loi ne peut
être présenté.
J'attire votre attention, M. le Président, sur l'excellente
possibilité, comme l'indique notre règlement, qui vous est
offerte de déclarer l'amendement du chef de l'Union Nationale
irrecevable.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Sur cette question de recevabilité, je vous
réfère tout simplement à l'article 70 de notre
règlement qui dit "qu'un amendement doit se rapporter directement au
sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants:
retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres." J'ai l'impression
que la motion, telle que présentée ce matin, ajoute des mots. Et
on continue: "II est irrecevable si son effet est d'écarter la question
principale sur laquelle il a été proposé." Alors, ma
motion de ce matin n'écarte pas du tout la question principale, parce
que nous voulons reconnaître la langue française comme langue
officielle. Nous disons même qu'il y aura des dispositions
particulières pour permettre l'utilisation exclusive de la langue
française et affirmer sa prééminence sur toutes les autres
lois.
En fonction de l'article 70 de notre règlement, je crois que
notre motion est recevable et d'autant plus qu'au chapitre premier, nous
discutons de la langue officielle du Québec et que la motion
présentée ce matin fait en sorte que nous discutions de la langue
officielle. Et même avec le titre de la loi, quand on parle de la Charte
de la langue française, j'ai l'impression qu'à travers notre
motion, nous voulons justement reconnaître la place de la
langue française à travers toute cette loi que nous sommes
appelés à voter ce matin.
Nous ne voulons pas considérer la langue française et la
langue anglaise sur le même pied. En fait, c'est expressément que
nous avons ajouté, à la suite des deux langues officielles, que
nous proposons des dispositions particulières pour assurer la
prééminence de la langue française.
En fonction de notre amendement et de l'article 70 de notre
règlement, je crois que la motion est recevable.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière, je vous ai écouté. Vous voyez comment il est
difficile de séparer le fond de la forme sur une question de
recevabilité. Quand même, personne n'est intervenu.
M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Je la juge non recevable, m'appuyant sur l'article
70.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourassa, ne la jugez pas non recevable. Soulignez-moi ce qui devrait
être irrecevable.
M. Laplante: On vous le souligne, M. le Président. En
vertu du deuxième paragraphe, l'article 70 dit: "II est irrecevable si
son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a
été proposé et il en est de même d'un
sous-amendement par rapport à un amendement."
Si on se réfère à l'article 154 aussi, le
deuxième paragraphe dit: "La commission peut amender un projet de loi,
pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet
et qu'il ne s'oppose pas au principe affirmé en deuxième
lecture."
Seulement en faisant lecture de ces deux articles, je crois que c'est
clair, cet amendement, pour nous, ne serait pas recevable.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Papineau, sur la recevabilité.
M. Alfred: Je vous assure que je ne comprends pas du tout la
motion d'amendement du député de Lotbinière. D'une part,
elle est à l'encontre même de la motivation fondamentale de
l'article premier, qui guide toute notre charte, qui se lit ainsi: "Le
français est la langue officielle du Québec." Or, quand je lis la
motion du député de Lotbinière, la première des
phrases se lit comme suit: "La langue française et la langue anglaise
sont les langues officielles du Québec." Il y a une concurrence
remarquable entre "Le français est la langue officielle du
Québec" et la notion des deux langues officielles
préconisée publiquement, cette fois-ci, par la motion
apportée par le député de Lotbinière et le "et"
ici, je vous rappelle, M. le député de Lotbinière, a une
importance particulière.
Il est additif, ce qui signifie que vous mettez, pour une fois et
c'est la première fois qu'un parti politique est allé aussi loin
au Québec. Vous l'emportez même sur le Parti libéral
vous mettez sur le même pied, la langue française et la langue
anglaise. Vous avez bien sûr apporté quelques assaisonnements: Des
dispositions particulières de la présente loi peuvent permettre
l'utilisation exclusive de la langue française ou affirmer sa
prééminence sur la langue française ou sur toute autre
langue du Québec.
Je ne comprends plus rien... Je parle ici sur cette motion.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Papineau, je m'excuse, à l'ordre, un instant, s'il vous plaît. A
l'ordre, M. le député de Papineau! Mme le député de
L'Acadie vient de m'indiquer que vous parliez sur le fond. C'est exact. M. le
député...
M. Alfred: Je parle de la recevabilité...
Le Président (M. Cardinal): ...Non, non, en parlant de la
recevabilité, vous parlez de la substance même de la motion. Elle
est recevable ou irrecevable pour des questions de règlement ou des
questions d'économie générale du code qui nous
régit, et non pas sur le fond. Sur le fond, vous pouvez en
débattre si elle est déclarée recevable.
M. Alfred: II m'a été difficile, M. le
Président, de dissocier forme et fond. Alors, pour toutes les raisons
que j'ai mentionnées tout à l'heure, étant donné
l'incompatibilité que je vois entre, bien sûr, l'article premier
que nous avons dans notre charte et la motion apportée par le
député de Lotbinière, je vous mentionne que,
personnellement, je trouve cette motion nettement irrecevable.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm, sur la recevabilité.
M. Chevrette: Je ne voudrais pas argumenter sur le
règlement. Je considère cette motion irrecevable, suite à
ce qu'a dit M. Laplante, à partir des articles du règlement.
Cependant, je ne serais pas fâché que vous la considériez
recevable, pour qu'on sache une fois, comment on peut, officiellement,
déclarer deux langues officielles, puis donner une priorité
à une des deux langues. Ce serait bon d'écouter la thèse
de fond de l'Union Nationale et de découvrir la motivation profonde qui
a guidé cette politique. Je vous dis, quand même, que, par rapport
au règlement, elle devrait être déclarée
irrecevable, mais, personnellement, je serais heureux de les entendre sur le
fond.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm, vous demandez à la présidence une chose
impossible, soit de se prononcer politiquement. Ma décision ne sera pas
politique lorsqu'elle sera rendue. M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je dois protester contre
l'approche et l'opposition systématique...
M. Grenier: M. le Président, une question de
règlement. Est-ce que je pourrais demander au
député de Mont-Royal de parler plus fort, on ne l'entend
pas.
M. Ciaccia: Excusez-moi. M. le Président, je dois
protester contre l'approche et l'opposition systématique du
côté ministériel, à la présentation de tout
amendement. Il ne veut pas de discussion. Il s'oppose même à la
présentation de l'amendement. L'amendement est recevable. Je ne me
prononce pas sur le fond, je discute de la recevabilité. En discutant de
la recevabilité, je dois dire qu'il ne faut pas abuser des articles des
règlements, comme le fait le côté ministériel. C'est
clair que, relativement à l'article 70, l'amendement est recevable. Un
des effets de ne pas accepter les amendements et donner une
interprétation trop restrictive aux règlements, c'est donner une
fausse impression de l'amendement, c'est donner une fausse impression de ce
à quoi le parrain veut en arriver. La seule chose qu'on sait maintenant,
c'est qu'il y a une proposition pour qu'il y ait deux langues officielles et,
si on s'arrête là, on ne pourra pas vraiment discuter de ce que
veulent dire deux langues officielles.
Si le côté ministériel dit que je m'attaque au fond,
je dis que le principe de la loi, en deuxième lecture, était le
principe de la Charte de la langue française. Je crois que c'est tout
à fait recevable comme amendement de spécifier quelle est la
position de la langue française. Si l'Union Nationale veut modifier le
statut légal, le statut officiel, tout cela entre dans l'ensemble de la
langue française. Le principe de la loi n'est pas écarté.
S'il y a un doute, M. le Président, je suis d'avis que le doute doit
être interprété en faveur du parrain de l'amendement.
Le Président (M. Cardinal): Une dernière
intervention avant que je ne rende ma décision. M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, vous sentez que vous
êtes suffisamment informé ou presque. C'est probablement ce que
les membres de la commission prétendent également.
Le Président (M. Cardinal): J'attendais votre
dernière intervention pour l'être entièrement.
M. Grenier: Seulement pour vous rappeler les articles 70 et 154.
On ne s'oppose pas au principe, bien sûr. Il est bien évident que
là-dedans on ne rend pas nul le principe comme on l'a prétendu
dans ce coin-ci, quand on dit que la langue française et la langue
anglaise sont les langues officielles du Québec et qu'on ajoute ensuite
la prééminence du français. A l'article 70, quand il est
dit: II est irrecevable si son effet est d'écarter la question
principale. Donc, on n'écarte pas la question principale. Quant à
l'article 154, deuxièmement, contrairement à ce que
prétend le député de Bourassa ici, on dit: "La commission
peut amender un projet de loi, pourvu que l'amendement ne soit pas
étranger à l'objet du projet et qu'il ne s'oppose pas au principe
affirmé en deuxième lecture". Donc, il est bien évident
qu'on ne s'oppose pas au principe, on ajoute, dans l'esprit et selon
l'économie de notre règlement.
Motion jugée irrecevable
Le Président (M. Cardinal): Je vais être
obligé, encore une fois, de rendre une décision sur la
recevabilité de cette motion. Je voudrais ne pas toucher du tout au
fond, à la suite de l'intervention du député de
Joliette-Montcalm et du député de Mont-Royal qui, tous les deux
m'invitaient sur un terrain glissant, celui de rendre une décision
politique.
Il est sûr qu'il serait fort intéressant, lorsqu'il y a un
doute sérieux, que l'on donne le bénéfice de ce doute au
parrain d'une motion, surtout si celui-ci est membre d'un parti d'Opposition.
Je l'ai dit et je le répète, c'est une partie de la philosophie
de la présidence.
Uniquement sur la question technique de règlement, vous avez,
fort justement, certains d'entre vous, invoqué l'article 70. L'article
70, je ne veux pas le relire, je l'ai déjà lu deux ou trois fois
hier. Je vous rappellerai cependant que, le 23 juillet 1974, page B-6219 au
journal des Débats, à la suite d'une motion semblable, au sujet
du projet de loi 22, le président avait déclaré ceci: A
cause de l'article 70 du règlement et de l'article 566, note 8, de
l'ancien règlement, le président déclare irrecevable une
motion d'amendement qui a pour effet de remplacer tout un article par un nouvel
article.
Le député de Lotbinière a été fort
habile en ne disant pas: Je remplace l'article 1 par un nouvel article 1. Il a
tout simplement dit, suivant le texte de l'article 70, qu'il remplaçait
des mots par d'autres mots. Le texte de la motion, c'est de remplacer les mots
de l'article 1 par les mots suivants. Or, il y a eu une autre décision
et là, je m'appuie sur la jurisprudence qui a été
rendue, aussi en 1974, au mois de juillet, et qui est aux pages B-6230 et
B-6231 et qui dit ceci: "II déclare c'est le président
irrecevable une motion qui conduit pratiquement à la même
fin c'est-à-dire de remplacer un article par un nouveau en
retranchant ou en ajoutant des mots parce qu'elle change entièrement la
nature de la proposition principale."
En d'autres mots, malgré l'art du député de
Lotbinière, je dois rappeler qu'en droit, il est interdit de faire
indirectement ce qu'il est interdit de faire directement. Je n'ai même
pas besoin d'invoquer l'article 158 ou l'article 154.-2, parce qu'alors,
j'approcherais de très près le fond de la question.
Donc, pour ces seules raisons de technique, je dois déclarer
cette motion irrecevable.
M. Charron: Article 1, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Nous sommes déjà
à l'article 1. M. le député de Jacques-Cartier, nous
sommes sur des amendements...
Oui, M. le député de Lotbinière, je vous donne
encore le droit de parole. Je veux rappeler un autre principe. Comme votre
motion vient d'être déclarée irrecevable, je
considère qu'elle n'existe plus et que vous avez encore le droit de
parole.
M. Biron: Merci, M. le Président, je ne veux pas critiquer
ni commenter votre décision. J'aurais aimé, bien sûr,
expliciter notre proposition de ce matin, mais nous allons continuer de
travailler à cette commission parlementaire pour apporter les
améliorations nécessaires à ce projet de loi.
C'est sûr qu'au fur et à mesure que nous évoluerons
dans les autres chapitres du projet de loi, nous serons forcés de faire
les suggestions ou les amendements que nous voulons pour que ce projet
réponde davantage, à notre point de vue, aux besoins de la
population du Québec, au niveau de la législation, de la justice,
de l'administration locale ou régionale des commissions scolaires ou des
municipalités ou des autres articles.
Nous essaierons quand même de prouver, tout le long de ce projet
de loi, ce que nous voulions, le fond de notre pensée, de notre
âme, lorsque nous avons présenté cet amendement à
l'article 1 de notre projet de loi, M. le Président. Tout le long, nous
ferons les corrections nécessaires.
Le Président (M. Cardinal): Vous serez le bienvenu. Nous
en sommes toujours à l'article 1. Cet article sera-t-il
adopté?
Une Voix: Adopté.
M. Lalonde: M. Président, seulement quelques mots.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys. Faites-vous une motion ou si...
M. Lalonde: Non.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Lalonde: Je présume que toutes les motions d'amendement
ont été présentées et battues ou non
reçues.
Le Président (M. Cardinal): C'est justement, je voulais le
savoir.
M. Lalonde: Je n'ai pas l'intention de faire d'autres motions
d'amendement.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez le droit de parler
sur l'article 1, bien sûr, vous avez même vingt minutes.
M. Lalonde: M. le Président, cela va prendre deux minutes,
simplement pour dire jusqu'à quel point le Parti libéral, enfin,
moi, comme député de Marguerite-Bourgeoys, je suis d'accord avec
l'article 1.
M. Chevrette: Parlez plus fort, s'il vous plaît, on ne
comprend rien.
M. Lalonde: II m'apparaît toutefois, M. le
Président, que l'hypocrisie de ce gouvernement, dans toute sa politique
linguistique, prend, à cet article 1 une évidence qui
crève les yeux. Je ne serai pas long, cela prendrait trop de temps pour
réellement décrire le machiavélisme de ce gouvernement
lorsque, d'un trait de plume, il efface ou veut tenter d'effacer l'histoire du
Québec, l'histoire linguistique moderne, pour s'approprier ce qui a
été fait par un autre gouvernement.
Pour nous, le français langue officielle du Québec, c'est
réglé depuis trois ans et nous sommes en faveur de cet article
premier.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie sur l'article premier, ensuite, M. le ministre d'Etat au
développement culturel. Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux simplement
réitérer ce que j'avais dit au début de la commission
parlementaire qui a entendu les mémoires touchant le projet de loi no 1,
que nous souscrivions à l'objectif fondamental pour le Québec
d'assurer la prééminence de la langue française et de
réaffirmer son statut de langue officielle. Dans ce sens, je rejoins les
remarques du député de Marguerite-Bourgeoys, que ceci avait
déjà été fait et qu'on veut le refaire, quelles que
soient les motivations que le gouvernement puisse avoir.
Je pense que nous n'avons pas à discuter de la motion de l'Union
Nationale. Tout ce que je peux dire, c'est que ce statut de langue officielle
du Québec est nécessaire, compte tenu de la position du
Québec en Amérique du Nord et de la position fragile dans
laquelle la langue française se trouve compte tenu ce contexte que je
viens de mentionner.
J'aurais souhaité néanmoins je répète
peut-être ce que j'ai dit hier soir que compte tenu du fait que le
reste du projet de loi est tout à fait silencieux sur la reconnaissance,
je pense, sauf pour des accommodements qu'on accorde aux anglophones qu'on
essaie de limiter le plus possible, j'aurais souhaité même que
nous n'ayons pas eu à faire cet amendement, hier soir, si le projet de
loi avait été vraiment généreux envers les
minorités, tel qu'on nous l'avait promis. Néanmoins, je
répète que, pour nous, une fois de plus, que le français
soit proclamé la langue officielle du Québec, nous ne pouvons
qu'y souscrire.
Le Président (M. Cardinal): Alors, dans l'ordre, pour
éviter justement ces discussions sur le droit de parole, M. le ministre
d'Etat au développement culturel, M. le député de
Lotbinière, M. le député de Verchères et M. le
député de Mont-Royal.
M. le ministre d'Etat au développement culturel.
M. Laurin: M. le Président, il est vrai que l'article
premier du projet de loi no 101 se retrouvait dans la loi 22, mais il est bien
évident, pour ceux qui ont parcourru le journal des Débats qui
relate les péripéties de l'adoption de la loi 22, que le Parti
libéral avait inscrit cet article à son corps défendant,
à la suite de toutes les pressions qui avaient été faites
auprès du gouvernement, à la
suite de l'adoption de la loi 63, à la suite des insatisfactions
croissantes qui se manifestaient chez un peuple qui voyait son identité
mal reconnue par ceux qui présidaient à ses destinées.
Il a fallu beaucoup de pression, il a même fallu plus que de la
pression pour amener le gouvernement libéral du temps à adopter
une loi linguistique. Et même lorsqu'il l'a fait, il l'a fait de telle
façon que ce premier article était contredit par tous les
articles qui le suivaient. C'est la raison pour laquelle...
M. Lalonde: Excusez-moi, M. le Président, je
déteste interrompre le ministre.
Le Président (M. Cardinal): Sur une question de
règlement?
M. Lalonde: Sur une question de règlement. J'aimerais lui
rappeler que ce n'est pas la loi 22 qui est en discussion actuellement, c'est
le projet de loi no 101. Le débat sur la loi 22 est terminé.
Le Président (M. Cardinal): Si vous me permettez, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, j'ai entendu souvent parler des
projets de loi, qui sont devenus lois, 63 et 22. Comme je l'ai dit hier...
M. Laurin: Cela fait partie de l'histoire.
Le Président (M. Cardinal): ...je n'ai jamais
bronché. Justement comme le dit le ministre d'Etat au
développement culturel, cela fait partie de l'histoire de ce long
débat qui dure depuis le 10 novembre 1968 est-ce que vous avez
oublié le projet de loi no 85?
M. Morin (Sauvé): II dure depuis 1793
Le Président (M. Cardinal): N'allons pas jusque là.
Je vais quand même accorder une certaine latitude dans ce débat
sur l'article 1.
M. le ministre d'Etat au développement culturel.
M. Laurin: C'est précisément parce que ce principe
avait été immédiatement dilué,
édulcoré par les articles qui ont suivi que l'Opposition
officielle du temps, le Parti québécois, avait proposé un
amendement afin de faire du français la seule langue officielle. Donc,
il est faux de dire que c'est le Parti libéral qui peut avoir la
paternité de cet article, parce que déjà, à
l'époque, l'Opposition officielle allait beaucoup plus loin,
était beaucoup plus logique dans ses positions que le Parti
libéral du temps, dans son désir de faire du français la
seule langue officielle.
Dans le projet de loi no 101, ceci n'est plus nécessaire, puisque
tous les autres articles du projet de loi sont en concordance, sont le
prolongement, l'explicitation, de ce principe premier et fondamental qui fait
du français la langue officielle de la société
québécoise. Il n'y a donc rien d'hypocrite ou de
machiavélique à proclamer fièrement et hautement,
aujourd'hui, dans un projet de loi dont le gouvernement assume la
paternité et la responsabilité, que le français est enfin
la langue officielle du Québec, ou qu'il n'est plus nécessaire de
dire que le français est la seule langue officielle du
Québec.
A ce titre, M. le Président, on veut aussi souligner qu'il est
bien possible que le gouvernement libéral du temps n'aurait pas inscrit
cet article à son programme ou à son projet de loi, si,
antérieurement, le Parti québécois ne l'avait inscrit au
tout début de son histoire dans ses statuts, dans son programme. On peut
penser que c'est précisément parce que ce principe
obéissait aux constantes de la société
québécoise, au désir de ce peuple exprimé depuis le
début de son histoire qu'il a finalement trouvé sa place dans un
texte de loi et qu'on y trouve enfin la consécration officielle, non
seulement dans ses principes, mais dans toutes ses explicitations.
Je suis donc extrêmement heureux et fier que ce principe soit
inscrit à l'article premier, en attendant qu'on en voie les explications
dans les articles qui lui succèdent.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, sur cet article premier, c'est
sûr que l'Union Nationale est en faveur du français comme langue
officielle du Québec. Nous l'avons prôné partout.
Vous avez trop déjeuné ce matin?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Lotbinière, ne soyez pas
étonné, vous allez apprendre à connaître les
commissions parlementaires à une table semblable.
M. Ciaccia: Question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): Nous sommes très
près les uns des autres, même si nous sommes parfois très
loin.
M. Biron: Merci, M. le Président. M. Ciaccia:
Question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le journal des Débats n'indiquera pas que le
député de Lotbinière a été interrompu par le
député de Papineau. Pour le journal des Débats, je
voudrais qu'on comprenne pourquoi le député de Lotbinière
a été obligé d'arrêter de parler.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Alfred: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Papineau.
M. Alfred: Je voulais uniquement exhiber la feuille de la motion
présentée par le député de Lotbinière.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Papineau, cette motion n'existe pas. M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Nous l'avons prôné partout et nous voulons
véritablement protéger le fait français au Québec.
Nous voulons favoriser son épanouissement. C'est sûr que
même si l'article premier, à notre point de vue, n'est pas
complet, devrait expliciter clairement la situation qui existe au Québec
depuis au-delà de deux siècles, cette situation devrait
s'expliciter clairement à notre point de vue, mais, quand même, si
on en prend une seule partie, c'est faux de dire que nous sommes contre une
partie, même si nous voulons expliciter beaucoup plus clairement, si nous
croyons que l'article premier n'est pas complet.
C'est sûr qu'au Québec, dans ce coin de terre
d'Amérique, on a besoin de protéger le fait français,
parce que nous sommes entourés de tout près de 250 millions
d'anglophones. Si le français n'est pas protégé par le
gouvernement du Québec, je me demande qui va protéger la langue
française ou la culture française au Québec.
Si on prend tout simplement un extrait de notre programme, de notre
volonté, à l'Union Nationale, nous voulons sortir à
travers notre volonté vis-à-vis des langues officielles du
Québec, le français, langue officielle du Québec, nous
allons le reconnaître, bien sûr.
Cela n'empêche pas quand même, à notre point de vue,
si nous voulons reconnaître le français comme langue officielle,
de reconnaître aussi l'existence d'une communauté et d'une
collectivité anglophones.
Je crois que le premier ministre lui-même l'a reconnu à
quelques reprises et j'en ai été très heureux. Même
si on veut reconnaître le français comme langue officielle, cela
n'empêche pas de reconnaître la communauté anglophone
à travers ses institutions, ses outils de travail. Cette vie anglophone
qu'il y a au Québec, on ne peut pas la nier, elle est ici depuis deux
siècles, comme je l'ai dit tout à l'heure.
L'Union Nationale va collaborer avec le gouvernement pour
établir, tout le long de ce projet de loi, clairement sa volonté
première, de voir à l'affirmation et à
l'épanouissement de la culture et de la langue françaises au
Québec.
On reconnaît la nécessité d'avoir le français
comme langue officielle. D'un autre côté, j'ai dit qu'à
notre point de vue, cet article n'est pas complet, parce que nous aurions
voulu, en reconnaissant le français comme langue officielle, dans un
esprit de justice et d'équité, qu'on puisse aussi
reconnaître cette situation que l'histoire nous a laissée et qu'on
ne peut pas changer.
Nous pouvons changer l'avenir et peut-être un peu le
présent, mais, le passé, on ne peut pas le changer. Il faut le
reconnaître tel quel et dire ce que l'histoire nous a
légué; il faut travailler et légiférer avec
cela.
Nous reconnaissons le français comme langue officielle du
Québec. Nous en sommes très heureux. Malheureusement, cet article
premier n'est pas complet à notre point de vue, parce que c'est la
reconnaissance totale de la réalité québécoise
qu'on veut à travers cet article premier.
Parce que cet article n'est pas complet, nous verrons plus loin, au
cours de ce projet de loi, comment le ministre et le gouvernement entendent
expliciter ce qu'ils voient de la communauté anglophone, à savoir
s'ils entendent agir soit avec générosité ou justice
envers la communauté anglophone, dans tout le projet de loi dans son
ensemble.
Comme je l'ai dit en deuxième lecture, nous allons quand
même réserver notre jugement pour la fin afin de voir d'un bout
à l'autre ce que nous allons faire. Pour le moment, sur l'article
premier, étant donné qu'il n'est pas complet, nous allons devoir
nous abstenir de voter.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Verchères.
M. Charbonneau: Je pourrais peut-être céder mon
droit de parole à M. le député de Mont-Royal, s'il veut
parler avant moi. Sinon, je pourrais immédiatement...
M. Ciaccia: Non. Continuez.
Le Président (M. Cardinal): Je ne sais pas si vous avez
une entente avec M. le député de Mont-Royal.
M. Charbonneau: Je n'ai pas d'entente particulière. Je lui
offre de prendre la parole.
Le Président (M. Cardinal): Alors, M. le
député de Verchères, vous pouvez commencer.
M. Charbonneau: L'attitude de gentilhomme, c'était hier...
Après avoir écouté le chef de l'Union Nationale, j'aurais
quelques brefs commentaires à formuler en rapport avec l'article
premier.
Il m'a été assez agréable d'entendre le chef de
l'Union Nationale affirmer qu'il n'y avait que le gouvernement du Québec
finalement qui ne pouvait vraiment protéger la langue française
en Amérique. D'une certaine façon je ne sais pas s'il s'en
rend compte il affirmait, par cette phrase, que le gouvernement du
Québec, de l'Etat du Québec, est un gouvernement national. C'est
là toute la question.
J'en ai parlé lors de mon discours en deuxième lecture et
je trouve que c'est le fondement de tout ce débat. Il ne s'agit pas
uniquement d'une majorité française au Québec. Il s'agit
d'une majorité qui est également une nation, contrairement aux
majorités dans d'autres provinces qui ne sont que des morceaux d'une
nation qui se regroupe dans tous les autres territoires de la
fédération canadienne.
La situation du Québec est particulière et unique dans la
fédération canadienne. C'est ce qu'il faudra que les gens
comprennent une fois pour
toutes. C'est ce qui fait la justification de l'action du gouvernement
du Québec, de l'Etat québécois qui agit à titre de
gouvernement national et d'Etat national. Dans ce sens, il est important de
comprendre qu'au Québec il n'y a qu'une nation et c'est la nation
francophone. On pourrait l'appeler la nation canadienne-française si
certains préfèrent ce terme.
De toute façon, c'est la nation des francophones au
Québec. Contrairement à la situation au Québec
ça, c'est l'Etat du Québec la situation est
différente pour l'Etat canadien, pour le pays du Canada alors qu'il y a
deux nations.
Il était normal dans un Etat fédéral, dans une
fédération où il y avait deux nations de faire en sorte
que les institutions publiques, fédérales, soient officiellement
bilingues parce qu'on reconnaissait et on l'a toujours reconnu, du moins
depuis un certain nombre d'années l'existence de ces deux nations
et de leur égalité. Mais ce n'est pas la situation au
Québec.
L'Etat québécois, même provincial, est un Etat.
C'est un Etat fédéré où on retrouve non pas deux
nations, mais une nation. Je ne vois pas pourquoi dans un Etat, où il
n'y a qu'une nation et des minorités d'autres nations qui sont ailleurs,
dont les territoires et les institutions politiques sont situés
ailleurs, je ne vois pas pourquoi dans cet Etat, dis-je, on reconnaîtrait
la langue d'autres nations comme étant la langue officielle de l'Etat et
de ses institutions.
Et si l'Union Nationale je l'ai dit en deuxième lecture,
quand on parle du terme "Nationale" dans son nom avait vraiment voulu
préciser sa pensée, elle nous aurait d'abord
précisé ses concepts. Je l'ai demandé à ses membres
en deuxième lecture, mais ils n'ont pas daigné le faire. Ils
n'ont pas jugé bon de le faire, c'est pourquoi je reviens à la
charge aujourd'hui. Dans un débat aussi fondamental, lorsqu'on n'a
même pas le courage de préciser des concepts qui sont à la
base de ses opinions, je pense qu'on pourrait laisser l'histoire, les gens et
nos concitoyens juger de la valeur de ses arguments.
Par ailleurs, lorsqu'on parle de reconnaître l'existence d'une
communauté anglophone, je pense que c'est effectivement ce qui se fait
tout le long du projet de loi no 101, par la suite, après l'article
1.
Mais il y a une différence entre reconnaître l'existence
d'une communauté anglophone, qui est finalement une minorité
d'une nation qui est à l'extérieur du Québec
majoritairement, et faire en sorte que ce morceau d'une autre nation soit chez
nous officielle. Il me semble qu'à un certain moment, il faudra
établir les choses clairement. Et quand le chef de l'Union Nationale
parle d'accepter l'histoire, je pense qu'il y a une différence entre
accepter l'histoire et reconnaître une réalité.
Je pense qu'il n'y a personne au Québec qui ne reconnaît
pas la réalité actuelle. Il n'y a pas un Canadien
français, il n'y a pas un francophone du Québec qui accepte une
défaite. L'histoire du Québec, même si,
éventuellement, on m'accusera d'être un nationaliste
extrémiste, en suivant à la commission parlementaire
l'étude d'une autre loi qui n'est pas très loin, devant la
même commission d'ailleurs, j'ai eu l'impression qu'il était
important, finalement, de revenir à l'histoire.
Il ne s'agit pas, quand on revient à l'histoire, d'attitude
revancharde, il s'agit d'accepter l'histoire. On est le produit d'un
passé et je n'accepterai jamais, étant dans le produit d'un
passé, et assumant mon présent, qu'on me reproche d'être
revanchard, parce que j'assume ce passé et parce que j'essaie,
éventuellement, de corriger des choses, des situations qui ont
été engendrées par des situations qui se sont produites
dans le passé. Et, dans ce sens, M. le Président, il est
important que, clairement et d'une façon officielle, la langue de la
majorité, la langue d'une nation, de la seule nation qui existe au
Québec, soit la langue de l'Etat et de ses institutions.
Et j'espère que l'Union Nationale, prochainement, pour ces
débats et également pour les autres débats de fond qui
s'engagent dans la société québécoise, verra
l'importance de préciser ses concepts de base. On a eu l'occasion
à l'Assemblée nationale, dernièrement, de discuter d'une
autre motion qui avait trait à un référendum
précipité et j'ai dit, a ce moment-là, que les concepts de
base pour cette autre motion et cet autre débat sont les mêmes que
ceux pour le débat actuel et qu'un jour ou l'autre, vous ne pourrez pas
vous défiler; il va falloir que vous précisiez clairement vos
positions de base, vos concepts de base.En attendant, M. le Président,
comme le ministre d'Etat et comme probablement la majorité de mes
collègues de ce côté-ci de la table, je voterai pour
l'article 1.
C'est une déformation, à l'Assemblée nationale, je
suis placé du mauvais côté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, il y a plusieurs raisons qui
me motivent à intervenir sur l'article premier. Premièrement,
à cause de la motion qui a été défaite hier, par
laquelle nous voulions que tous les membres de l'Assemblée nationale
puissent intervenir, on se trouve dans la situation où il y a
peut-être d'autres membres de l'Assemblée nationale qui auraient
voulu faire certaines interventions sur l'article permier. Alors, je ne parle
pas seulement en leur nom, mais en mon nom personnel. Je veux m'expliquer. Je
crois que c'est nécessaire de rétablir un certain
équilibre dans le débat à cause aussi de l'esprit dans
lequel le projet de loi a été rédigé. Quand je
parle du projet de loi 101 et de son esprit, je me réfère aussi
à l'esprit du livre blanc et du bill 1 et, à cause de
l'atmosphère qui semble être créée par le Parti
québécois en utilisant, en se rendant les défenseurs de la
langue française au Québec et spécifiquement aussi
à cause des propos du député de Verchères,
j'aimerais essayer d'apporter un autre point de vue et essayer de faire un
certain équilibre, parce qu'on tente de monter la population, pour des
raisons émotives et pour des raisons qui n'ont rien du tout à
faire avec la protection de la langue ou le fait de la rendre officielle. Comme
le député de Sauvé
l'avait dit, il y a trois ans, la langue française a toujours
été officielle, sauf pour la période d'union, en 1841,
où on a essayé d'imposer...
M. Morin (Sauvé): En 1841.
M. Ciaccia: ... 1841, la fusion, l'union entre le Haut et le
Bas-Canada.
M. Morin (Sauvé): Oui, jusqu'en 1848.
M. Ciaccia: Oui, jusqu'en 1848 où on a essayé, on a
tenté d'imposer la langue anqlaise comme langue officielle. Seulement,
cela ne se conformait pas à la réalité et, parce que cela
ne se conformait pas à la réalité, cela a
été un échec. Tout ce qui ne se conforme pas à la
justice, à l'équité et à la réalité
sera un échec, que ce soit en 1841, en 1848, en 1974 ou en 1977.
On invoque toujours comme motif et, parfois, cela nous fait sourire,
cela me fait sourire, que c'est normal dans un pays d'avoir une langue et de
donner les services dans cette langue commune. On invoque toujours la question
de la normalité, que, si on ne fait pas cela, ce n'est pas normal.
C'est vrai, M. le Président, que cela a été la
situation dans plusieurs pays dont la population est homogène du point
de vue linguistique, que ce soit des pays unitaires, qui ont de longues
traditions culturelles tels que la France, l'Espagne ou l'Italie, ou que ce
soit des fédérations, des confédérations comme les
Etats-Unis avec leur approche de "melting pot". Même ces pays ont eu
leurs problèmes linguistiques. Nous connaissons les problèmes de
l'Espage, avec les Catalans et les Basques, de la France, avec les Bretons et
les Provençaux, et même de l'Italie, avec les Tyroliens. Tous ces
groupes ont demandé différents degrés de reconnaissance
culturelle ou d'autonomie culturelle. Mais de suggérer que c'est normal
que c'est la situation et que c'est la norme, je crois que cela induit la
population en erreur.
On leur fait croire certaines situations. On utilise, on crée des
mythes. Par exemple, en Europe, au Proche-Orient, il y a plusieurs pays, de
très nombreux pays, où il existe une assez large minorité.
Je peux en nommer quelques-uns, l'Autriche, la Bulgarie, la
Tchécoslovaquie, la Grèce, la Hongrie, l'Iraq, une série
de pays où des minorités se sont trouvées dans cette
situation. Il y avait un concept, au XIXe siècle, qui voulait que chaque
nation forme son propre Etat. Je dois vous dire, M. le Président, que
c'est une notion démodée, qui a été
discréditée. Si on étudie l'histoire mondiale, l'histoire
de tous les pays, nous voyons comme cette notion a été
discréditée, a été mal utilisée. Nous allons
voir...
M. Guay: M. le Président, une question de
règlement. Je voudrais avoir une directive de votre part, si c'est
possible.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Taschereau, sur une question de règlement.
M. Guay: J'aimerais savoir si, à l'occasion de
l'étude de l'article 1 qui vise à faire du français la
langue officielle du Québec, il est de mise, il est dans la logique des
choses, de faire un tour d'horizon de la scène linguistique
internationale pour parler des droits des minorités, alors que cela n'a
aucune pertinence avec l'article même qui vise à faire du
français la langue officielle du Québec. Je demande une directive
à cet égard, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Guay: M. le Président, j'ai demandé une
directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît.
M. Lalonde: Ce n'est pas une directive, c'est une question de
règlement.
M. Guay: J'ai demandé une directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, la première
intervention du député de Taschereau nous émerveille, la
première depuis la reprise de nos séances. On sait quel fin
procédurier il était lors de nos séances concernant le
projet de loi no 1. S'il se souvient bien, toutefois, pour compléter ses
propos, il pourrait mentionner que le ministre d'Etat au développement
culturel, à l'occasion, a fait un petit tour à Chypre lorsque la
société grecque est venue...
M. Guay: ...une directive. La question de règlement n'en
est visiblement, manifestement, pas une. Il s'agit d'une intervention...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, M. le député de Taschereau. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je veux simplement éclairer le president sur
l'à-propos de la directive qu'il a à donner. Je pense, M. le
Président, pour revenir strictement à l'objet de l'article 1,
qu'il s'agit de savoir s'il est indiqué de le faire...
M. Guay: M. le Président, je m'excuse, mais le
député de Marguerite-Bourgeoys a soulevé une question de
règlement. Il n'a pas encore fait état de l'article qu'il
invoque, ni de sa question de règlement. J'ai demandé une
directive. Est-ce que vous pourriez me donner la réponse à la
directive que j'ai demandée?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
avez commencé votre intervention en soulevant une question de
règlement. M. le député de Marguerite-Bourgeoys a...
M. Guay: J'ai corrigé ensuite pour dire que c'était
une demande de directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, M. le député de Taschereau, je suis prêt
à rendre cette directive immédiatement, si vous le voulez, mais
je voulais laisser finir l'intervention du député de
Marguerite-Bourgeoys. Je pense que le tour d'horizon du député de
Mont-Royal n'était que passager, n'était
qu'éphémère et je lui recède la parole.
M. Charbonneau: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Est-ce que le député de Mont-Royal
nous permettrait une question?
M. Ciaccia: A la fin de mon intervention...
M. Charbonneau: Non, pas à la fin, tout de suite...
M. Ciaccia: Non, pas tout de suite, à la fin de mon
intervention.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Verchères, M. le député de
Mont-Royal a le droit d'exiger que...
M. Charbonneau: Oui, je comprends, mais il ne peut me le donner
à la fin, c'est tout de suite ou pas du tout.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Verchères, respectez la réponse du
député de Mont-Royal, je vous en prie. M. le député
de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je puis assurer le
député de Verchères que je ne prendrai pas mes 20 minutes.
Il va me rester du temps dans mon droit de parole et, durant ce temps qui me
restera, je lui accorderai le droit de me poser une question. J'espère
que c'est acceptable pour lui.
Alors, M. le Président, c'est vrai que je parlais des droits des
minorités relativement à la langue officielle. Je crois que je me
conforme au règlement au sujet de l'article. Je disais qu'il y a
plusieurs pays où il y a des minorités assez importantes et je
faisais état du concept démodé, discrédité,
d'une nation, un pays. Les droits de ces minorités ont varié de
l'autonomie locale, dans certains cas, jusqu'au cas des Ukrainiens, qui ont
été supprimés d'une façon dictatoriale.
On peut prendre, quand on parle de la langue officielle et de la
reconnaissance d'une minorité, d'une collectivité... Le
côté ministériel, le gouvernement, M. le Président,
donne l'impression qu'à aucun autre endroit au monde, on accorde de tels
droits dont la collectivité anglophone, ici, jouit, jusqu'à ce
que le projet de loi 101 soit adopté. Mais, je crois que c'est important
on vous parle, M. le Président, mais on parle à la
population qu'on sache la situation réelle pour qu'on ne se
crée pas de fausses impressions et qu'on ne base pas toutes nos actions
et notre avenir sur des mythes.
Je pourrais citer l'exemple de la Finlande où on a accordé
à la langue finlandaise et à la langue suédoise le statut
de langue officielle, quoique dans ce pays, la Finlande, la population
suédoise n'est que de 7.4% de la population globale. La population
totale se chiffre par environ 4,5 millions. C'est un exemple d'un autre endroit
où une minorité a certains droits. Cela n'enlève pas
l'identité, ou la maturité, ou la respectabilité, ou
l'avenir de la Finlande.
M. Morin (Sauvé): Ce sont des droits très
limités. Il faudrait que vous entriez dans les détails.
M. Ciaccia: Un instant, M. le Président, j'exige... J'ai
le droit de parole, ils parleront cependant après. On n'ira pas dans
tous les droits qu'ils ont, c'est une reconnaissance. Si on veut faire un
débat sur tous les droits des autres... On parle au niveau des
principes.
M. Morin (Sauvé): Mais il faut être
précis!
M. Ciaccia: Je suis précis. On parle de l'article 1 qui
dit que la langue officielle du Québec est le français. On essaie
de créer un mythe pour expliquer pourquoi il n'y a qu'une langue
officielle. Je veux seulement souligner au député de Sauvé
que les raisons que le gouvernement a invoquées ne sont pas tout
à fait honnêtes en conséquence des cas qui existent dans
d'autres endroits. Souvent, vous dites: Cela n'existe à aucun autre
endroit au monde. Je veux seulement souligner cela.
M. Morin (Sauvé): Soyez précis, entrez dans les
détails.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement. Il y a quand même une limite aux intermissions. Je
prierais...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
demanderais à tous les députés, s'il vous plaît, de
bien vouloir respecter le droit de parole de leur collègue. Allez-y, M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je ne peux être plus précis, M. le
Président, que de dire que c'est 7,4% de la population minoritaire
à qui sont accordés le droit et la reconnaissance de leur langue
comme langue officielle. Je ne peux pas être plus précis que
cela.
M. Charbonneau: C'est la langue officielle des institutions.
M. Ciaccia: Vous voulez parler d'autres pays. Pour ceux qui sont
à la gauche dans votre parti, j'ai donné l'exemple d'un pays
démocratique; je peux vous donner un autre exemple, la
Tchécoslovaquie, si cela fait mieux votre affaire, et je peux vous citer
la constitution de la Fédération tchécoslovaque, l'article
6. "La déclaration des lois et autres actes juridi-
ques de portée générale se fait
indifféremment et de façon égalitaire en droit dans la
langue tchèque et dans la langue slovaque". Il y a deux langues. C'est
un pays qui n'est pas démocratique. Il y a deux nations, il y a des
minorités, on les traite d'une façon égalitaire. Je vous
donne des exemples des deux côtés du rideau de fer.
M. Charbonneau: Deux nations dans un Etat; ici, c'est une nation
dans un Etat.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Verchères, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: C'est difficile, non seulement les
ministériels ne veulent pas accepter la recevabilité de nos
amendements, ils ne veulent même pas nous donner le droit de parole, M.
le Président, parce que les faits leur font mal. Ils ne veulent pas que
la population sache ce qui se passe en dehors du Québec; ils veulent
faire une clôture autour de notre province, faire un ghetto; ils veulent
faire la plus grande réserve au monde au Québec.
J'ai eu l'expérience de ce qu'on a essayé de faire avec
des réserves, de mettre des gens dans des ghettos, et j'espère
qu'on pourra l'éviter ici.
M. Alfred: Question de règlement.
M. Ciaccia: Si on avait le droit de parole, au moins, on pourrait
informer le public d'une façon démocratique. C'est effrayant, ce
qui se passe, M. le Président, on ne peut même pas parler, parce
que cela fait mal, les faits font mal.
Voulez-vous un autre exemple?
Une Voix: Continuez, on veut en avoir d'autres.
M. Ciaccia: Très bien, je vais continuer, je vais vous en
donner d'autres exemples. Vous parlez de...
M. Morin (Sauvé): Soyez bien précis.
M. Ciaccia: Je vais être très précis, M. le
député de Sauvé, cela, c'est une autre tactique.
M. Morin (Sauvé): Vous ne dites pas toute la
vérité.
M. Ciaccia: Je dis toute la vérité, seulement la
vérité.
On dit qu'on est menacé ici par les Anglais, que la langue est
menacée, que les francophones sont menacés. Je voudrais vous
donner un autre exemple très précis, M. le député
de Sauvé. Je voudrais vous citer la situation en Israël.
La population arabe d'Israël consiste en 13% du peuple de l'Etat
d'Israël. Je n'ai pas à faire l'histoire de la situation politique,
économique, géographique de cet Etat d'Israël, de ce petit
Etat dans une mer arabe. Pour votre information, M. le Président, et
l'information du côté ministériel, il y a deux langues
officielles en Israël, l'hébreu et l'arabe. Pourtant, s'il y a un
pays qui pourrait dire:
Nous sommes menacés; nous sommes dans une mer d'autres langues,
d'autres peuples, c'est bien l'Etat d'Israël. Les deux langues officielles
de ce pays sont utilisées dans les communications avec le gouvernement,
sont interchangeables complètement. Il y a des systèmes scolaires
parallèles dans lesquels un individu a le droit à
l'éducation dans le système arabe où il va apprendre
l'hébreu et vice versa dans l'autre système.
Le système arabe est payé par les fonds du gouvernement,
du ministère de l'Education, et c'est le ministère de l'Education
qui administre ce système.
M. le Président, le but de mon intervention, ce n'est pas de
voter contre, d'aucune façon, l'article premier; non, c'est seulement de
faire le point, parce qu'on exagère. Si nous sommes encore au
développement adolescent de notre société, si, parce que
nous ne sommes pas arrivés à la maturité, on est
obligé de faire des distinctions et de ne pas reconnaître une
collectivité composée de 13% à 20%, selon des pourcentages
qu'on veut utiliser...
On ne veut pas donner cette reconnaissance, on veut l'effacer de la
réalité de notre société. Ce n'est pas une
façon digne, je trouve. On peut donner un statut officiel à la
langue française sans l'esprit, sans l'atmosphère, sans les
raisons que le gouvernement donne et en établissant les faits. C'est
seulement dans ce but que je voulais rétablir un peu la situation des
langues officielles.
Je vais voter en faveur de l'article 1, mais je crois que c'est
nécessaire qu'on le fasse en toute connaissance de cause et pourquoi
nous devons le faire.
Maintenant, je n'ai pas utilisé tout mon temps de parole.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez
dépassé votre temps. Je vous ai laissé dépasser ce
temps, parce que vous avez été interrompu.
M. Ciaccia: Je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le ministre
d'Etat au développement culturel.
M. Laurin: M. le Président.
M. Saint-Germain: Ce n'est pas la fin du débat
là-dessus.
Le Président (M. Cardinal): Non, non.
M. Saint-Germain: J'aimerais bien que vous me placiez dans votre
liste.
Le Président (M. Cardinal): Vous n'êtes pas le
premier. Je vais vous donner l'ordre tout de suite: M. le député
de Bourget, M. le député de Saint-Jacques, M. le
député de Sauvé, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, M. le député de Jacques-Cartier et M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Laurin: Quelques brèves remarques, M. le
Président, pour vous donner ma réaction à
l'abstention de l'Union Nationale au sujet de cet article fondamental. Cette
abstention me scandalise, comme elle scandalisera sûrement la
majorité francophone de ce pays.
J'imagine que ce matin le fondateur de l'Union Nationale a dû se
retourner dans sa tombe en écoutant l'exposé du chef de l'Union
Nationale et en assistant à son abstention. Car ce vote d'abstention est
une insulte à ses membres, de même qu'une insulte à toutes
les attitudes qu'a prises toujours le fondateur de l'Union Nationale, une
insulte à sa "québécitude" toujours affirmée, une
insulte à son nationalisme, une insulte à toutes les positions
qu'il a prises sur l'autonomie du Québec, sur tous les plans, une
insulte au chef du gouvernement qui a fait adopter le drapeau que nous arborons
fièrement sur tous les édifices, une insulte à toute la
tradition de l'Union Nationale.
C'est quelque chose d'inouï, auquel nous avons assisté ce
matin. J'ai l'impression que ce vote marque à quel point l'Union
Nationale actuelle s'est éloignée de ses origines et à
quel point elle ne représente plus les aspirations fondamentales du
peuple qu'elle prétend servir.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, le ministre d'Etat au
développement culturel, en parlant au nom du gouvernement, a sans doute
exprimé l'opinion de tous. Je vous assure qu'avec toute
l'expérience dont je peux bénéficier, j'ai du mal à
m'expliquer les contorsions électoralistes d'un parti duquel notre
propre parti, notre gouvernement tient son origine. Je m'aperçois
vraiment maintenant que nous ne sommes, non seulement les successeurs, mais que
nous les avons définitivement remplacés.
Quand un parti qui a marqué l'histoire d'un pays en vient
à s'abstenir pour reconnaître à la nation qui est dans son
seul coin de terre ici, le fait que le français soit la langue
officielle, c'est un parti qui ne pense qu'au pouvoir. C'est un parti qui, dans
ses contorsions, s'imagine avoir pris un grand train, mais c'est un petit train
qui n'ira pas loin. Je sais que le chef de l'Union Nationale est
spécialiste des trains de banlieue et j'ai l'impression qu'il n'ira pas
très loin non plus dans cette attitude. On ne prend pas le pouvoir
systématiquement en refusant de l'exercer. C'est beaucoup plus difficile
à exercer lorsqu'on est de ce côté-ci de la table, mais
quand on est de l'autre côté, il ne faut pas craindre, à
l'occasion, surtout sur des questions fondamentales, quels que soient les
calculs stratégiques que l'on fasse, de rendre aux
Québécois honnêtement le mandat qu'ils s'attendent que nous
prenions là-dessus.
C'est un bien petit geste, ce matin, que de recourir à
l'abstention sur une question aussi fondamentale.
J'estime que, si l'Union Nationale avait à déposer
à nouveau un document linguistique, à la suite de sa motion qui a
été jugée irrecevable ce matin, elle pourrait lui donner
comme titre, et, en ce sens, nous verrions toutes ses couleurs: "Une langue
officielle, Two official languages".
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, tôt ou
tard, il fallait que l'Assemblée nationale vide ce débat qui
dure, dans les faits, depuis qu'elle existe. On se souviendra que, dès
les premières séances de l'Assemblée celle qu'on
appelait à l'époque l'Assemblée législative du
Bas-Canada à la fin de 1792 et au début de 1793, les
députés anglophones avaient tenté d'imposer l'anglais
comme langue des lois, comme langue parlementaire.
Depuis cette époque, à travers mille
péripéties, auxquelles le député de Mont-Royal a
fait allusion, se contentant, cependant, de rappeler l'Acte d'Union de 1840, le
débat ne s'est jamais vraiment apaisé car les dispositions
législatives ne reconnaissaient pas pleinement les droits de la
majorité.
Il y a un instant, on a fait allusion au cas de la Finlande et à
quelques autres pays. J'ai demandé au député de Mont-Royal
de nous donner des détails car, en matière de droits des
minorités, les détails sont fort importants. Il ne faut point se
contenter de généralités. Il est exact que la
minorité suédoise de Finlande est protégée en vertu
de la constitution de 1919, mais il est important de préciser, par
exemple, que seuls les citoyens d'origine suédoise ont accès
à l'école de langue suédoise. Voilà un
détail sur lequel vous vous êtes bien gardé d'insister.
M. Ciaccia: On va en discuter à l'article 69.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Je parlais de langue officielle, M. le
député. .
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Mont-Royal...
A l'ordre, s'il vous plaît! Je veux rappeler... A l'ordre! ...
deux choses. J'ai permis tantôt que M. le député de
Mont-Royal dépasse son temps parce qu'il avait été
interrompu. Je ne voudrais pas recommencer sans cesse cette pratique. D'autre
part, je demanderais au député de Sauvé de s'adresser
à la présidence et non pas au député de
Mont-Royal.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je ferai comme
vous me le recommandez. D'ailleurs, je n'ai aucune objection à
être interrompu puisque cela peut m'amener, au contraire, à
préciser ma pensée.
M. Lalonde: Est-ce que c'est une invitation, M. le
Président?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Morin (Sauvé): Ce n'est toutefois pas une invitation,
M. le Président.
M. Ciaccia: Est-ce que c'est une nécessité?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé...
M. Morin (Sauvé): Cela peut être utile à
l'occasion, M. le Président. C'est pour cela que je m'étais
permis, moi-même, d'interrompre le député de Mont-Royal,
tout à l'heure.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais, M. le
député de Sauvé, si vous permettez qu'on vous interrompe,
il faut qu'on vous pose une question et que vous acceptiez d'y répondre.
La présidence ne permettra pas qu'on vous interrompe.
M. Morin (Sauvé): Je vous en remercie, M. le
Président. J'allais ajouter que, de fait, si le député de
Mont-Royal veut être parfaitement sincère, il devra admettre
il le fera, j'imagine, éventuellement, au cours du débat
qu'aucune minorité, où que ce soit dans le monde, n'a
été traitée et ne sera traitée, en vertu des
dispositions du projet de loi 101, comme la minorité anglophone du
Québec l'a été et le sera.
Avec ses écoles, ses collèges, ses universités,
nommez-moi une... J'allais utiliser, M. le Président, le langage
qu'utilisait un premier ministre antérieur, dont j'oublie le nom, qui me
disait: "Citez-moi un seul cas". Eh bien! je propose la même charade au
député de Mont-Royal. Citez-moi un seul cas de pays où
l'on a mieux traité, où l'on traite mieux sa minorité que
ce n'est le cas au Québec.
M. Ciaccia: Pour vous, vous vous limitez à la langue
officielle, mais l'intervention était sur la langue officielle.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Mont-Royal a épuisé
son temps. M. le député de Sauvé, même s'il le
provoque, je ne permettrai pas...
M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais provoquer personne ou
alors ce serait au nom de la vérité.
De fait, le projet de loi qui est devant nous rendra certes obligatoire
l'usage du français, mais sans toutefois interdire l'usage d'une autre
langue. Dans plusieurs cas: par exemple, la rédaction des textes et
documents de l'administration, les communications écrites à
l'intérieur des organismes de l'administration, les contrats conclus par
l'administration au Québec. Le projet rendra facultatif l'usage du
français ou d'une autre langue dans de nombreux autres cas, comme la
correspondance de l'administration avec les personnes physiques qui s'adressent
à elle dans une autre langue que le français, les contrats
conclus par l'administration avec l'étranger, les communications
internes des organismes scolaires dont la majorité des
administrés sont d'une autre langue que le français, ainsi que
dans les services scolai- res qui dispensent l'enseignement dans une autre
langue que le français.
Que voilà des dispositions "libérales", dans le sens
philosophique du mot, bien sûr!
Je me réjouis, en conclusion, que les députés
libéraux s'apprêtent à voter pour cet article, lequel va
ils devront cependant l'admettre beaucoup plus loin que n'allait
l'article premier du projet de loi no 22...
Mme Lavoie-Roux: C'est hypothétique, M. le
député de Sauvé.
M. Morin (Sauvé): ...qui disait, en somme: "La langue
française...
M. Ciaccia: Vous badinez.
M. Morin (Sauvé): ...est la langue officielle du
Québec, sauf que l'anglais l'est également".
Mme Lavoie-Roux: C'est votre interprétation. M.
Lalonde: Vous récrivez l'histoire.
M. Morin (Sauvé): C'étaient les termes presque tels
quels des paragraphes 1 et 2 de l'article premier du projet de loi no 22.
En conclusion, je me réjouis de leur attitude. Je ne suis pas
sans constater que les députés libéraux font preuve d'un
certain courage en se ralliant à article premier tel que proposé
par le gouvernement et je les en félicite.
M. Lalonde: Pas besoin de vous pour cela.
M. Morin (Sauvé): Je ne m'explique pas, à la
lumière de cette attitude libérale, celle de l'Union Nationale,
mais là-dessus, ceux qui m'ont précédé...
Mme Lavoie-Roux: Vous voulez qu'on vote contre, M. le
député de Sauvé? Voulez-vous qu'on vote contre?
M. Morin (Sauvé): ...ont dit tout ce qu'il y avait
à dire.
M. Ciaccia: Vous êtes des plagiaires.
M. Morin (Sauvé): Je viens de féliciter les
députés libéraux de leur courage. Je serais
étonné qu'ils reviennent là-dessus et qu'ils votent
maintenant contre l'article premier.
Mme Lavoie-Roux: Cela ne nous a pas pris de courage, M. le
député de Sauvé.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, Mme le
député de L'Acadie!
M. Lalonde: On n'a surtout pas besoin de vos compliments.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député
de
L'Acadie, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous
plaît.
Mme Lavoie-Roux: II nous a dit qu'il aimait être
interrompu. Cela l'aide à préciser sa pensée.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Madame et messieurs les députés, si vous permettez. M. le
député de Sauvé vous a dit qu'il aimerait être
interrompu. Je vous ai mentionné...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Cardinal): ...que je ne le permettrais
pas.
M. le député de Sauvé.
M. Morin (Sauvé): Pendant trois ans, j'ai bien dû
admettre qu'il fallait être interrompu de temps à autre!
Maintenant que j'ai réussi à être interrompu par le
député de L'Acadie, j'estime avoir rempli ma mission. Je vous
remercie.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, c'est à votre tour cette fois-ci et
j'espère qu'on vous permettra de le faire sans interruption.
M. Lalonde: Je n'aimerais pas être interrompu
j'espère que vous ferez appel au règlement sauf de
façon intelligente. Donc, je présume que je vais avoir le
silence.
Le ministre d'Etat au développement culturel craint qu'on ne lui
reconnaisse pas la paternité de l'article 1 et la plus grande partie de
ses propos, au début, dans sa première intervention, était
à cet égard.
Il accuse même le Parti libéral de n'être pas le
véritable auteur de l'article 1. L'acrobatie intellectuelle du ministre
pour s'approprier, rétroactivement, les droits d'auteur, ne trompera
personne. Le battage publicitaire dont on a entouré la
présentation de la politique linguistique, livre blanc, projet de loi no
1, projet de loi no 101, tournée du ministre, ont tenté d'effacer
cette histoire, mais la parade n'aura pas réussi à masquer,
à farder, à teindre la vérité et la
réalité.
Même l'Union Nationale qui ajoute une page noire à son
épais recueil bleu de pages blanches, ce matin, s'est associée
à cette évolution fondamentale en instituant la commission
d'enquête Gendron. Ce n'est donc pas par hasard que le rapport Gendron a
vu le jour à la fin de 1972.
Ce n'est pas par hasard non plus qu'en 1974, le gouvernement
libéral, agissant en gouvernement responsable, a décidé
que le français devait être reconnu, officiellement, par la loi.
Que l'on soit d'accord sur les articles qui ont suivi l'article 1 ou non, avec
les modalités, avec la sévérité ou avec la
souplesse, il reste que l'article 1 est là, aussi limpide, aussi pure,
aussi clair, aussi définitif en 1974, c'est-à-dire "Le
français est la langue officielle du Québec".
Le député de Sauvé a tenté... Il crée
chez moi une certaine appréhension. J'espère qu'il dit à
la blague que l'article 1 se lisait autrement. J'espère qu'il ne prend
pas les vessies pour des lanternes. Il a même référé
à l'article 2 qui, lui, établissait le même statut pour une
autre langue. Je lis l'article 2 de la loi actuelle...
M. Morin (Sauvé): Second alinéa de l'article
premier de la loi 22?
M. Lalonde: L'article premier n'a qu'un alinéa. Il se lit
comme suit: "Le français est la langue officielle du Québec". Le
deuxième article se lit comme suit: "En cas de divergence que les
règles ordinaires d'interprétation ne permettent pas de
résoudre convenablement, le texte français des lois du
Québec prévaut sur le texte anglais". Alors je ne vois pas
où le député de Sauvé trouve... Ce qu'il pense
être une autre loi, il faudrait qu'il nous la dépose, qu'il agisse
un peu comme un juriste à la réputation diminuante, mais, quand
même, qu'il soit un peu plus responsable dans ses propos, M. le
Président.
M. Morin (Sauvé): C'est vrai qu'on ne peut pas rester
professeur d'université toute sa vie.
M. Lalonde: Le romantisme si bien exprimé par le
député de Verchères et que sous-tend l'inspiration de ce
projet de loi, a été nié toutefois par le projet 101,
lorsque, dans le préambule, on a reconnu au peuple
québécois, à tous les Québécois, quelle que
soit leur origine, leur langue, leur appartenance culturelle, le droit à
la reconnaissance d'être partie du peuple québécois. Alors,
j'espère que le gouvernement n'écoutera pas trop les propos un
peu échevelés du député de Verchères et
tendra, lors de l'examen des articles qui suivront... Une loi comme cela...
L'article 1, c'est le principe. Nous sommes en faveur. Cela ne prend pas du
courage, il s'agit simplement d'être logique...
M. Charbonneau: D'être cohérent.
M. Lalonde: Oui, c'est vrai, d'être cohérent, et de
reconnaître ce qu'est la réalité. On n'a même pas
besoin de retourner en 1793 pour savoir que, de 1950 à 1970, la langue
française, à cause de l'évolution de la
société, de l'augmentation des moyens de communication, de
l'industrialisation, de la baisse de la natalité et de l'urbanisation du
Québec, devenait non nécessaire dans un secteur important de la
société, c'est-à-dire dans le secteur du travail. C'est
pour cela que cela a pris simplement un sens de la responsabilité
on va employer le mot que vous aimez, normale, je ne l'aime pas d'habitude, je
ne l'emploie pas, parce que c'est très subjectif fondamentale
à un gouvernement pour dire: C'est le français qui est la langue
officielle. Cela a été fait en 1974.
Qu'on fasse actuellement toutes sortes de détours pour en arriver
aux mêmes conclusions, je trouve cela hypocrite, je l'ai dit
tantôt. Quand même, nos institutions politiques font qu'un
gouvernement qui a été élu, qui a la majorité, a le
droit d'offrir, de proposer un autre projet de loi. Ce même article se
retrouve là et ce n'est pas parce
que je n'ai aucune confiance en ce gouvernement que je vais voter contre
ce projet de loi, contre cet article. Cet article-là est vrai et doit
demeurer dans nos lois.
Je ne comprends pas l'Union Nationale, M. le Président, et
j'espérais que les pirouettes qu'elle a faites jusqu'à maintenant
étaient terminées, parce qu'il faut quand même avoir un peu
de sérieux à cette Assemblée nationale, quand on parle de
quelque chose d'aussi fondamental que la langue. Je ne comprends pas l'Union
Nationale. Je termine là-dessus, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: On a souvent parlé, M. le
Président, à cette table, de bout d'histoire. On a essayé
de tirer de l'histoire toutes sortes de conclusions, comme si l'histoire
était exclusivement une chose du passé et qu'on devait toujours
en parler au passé. L'histoire du Québec, on la vit
présentement, M. le Président, comme les gens, dans le
passé, l'ont vécue. Il reste que, si on commence au tout
début du groupe français, le long du Saint-Laurent, on sait
pertinemment qu'une poignée de colons français sont restés
ici, y sont demeurés, coupés de toute relation avec leur pays
d'origine et coupés aussi de tous les leaders du temps, excepté
les religieux.
J'avoue, M. le Président, bien humblement, que je n'ai pas cette
connaissance profonde de l'histoire.
Mais il me semble que si on constate la présence, la force, la
vitalité des francophones du Québec, on doit
nécessairement conclure, pour qu'une telle minorité ait pu
atteindre un stade de développement à tout point de vue, au point
de vue social, au point de vue culturel, au point de vue institutionnel, au
point de vue des libertés personnelles, des libertés
individuelles, au point de vue économique, pour avoir atteint ce stade,
il fallait nécessairement que nos institutions, que les autorités
du temps, malgré les abus, malgré les injustices, bien souvent,
qui ont marqué notre évolution, aient été des
hommes au moins qui avaient le respect de l'humain. Si on avait
été dirigés, si on avait été dominés
par une dictature brutale, il est clair qu'on ne parlerait plus de l'histoire
des francophones en Amérique du Nord. Nous aurions, M. le
Président, simplement disparu.
Alors, qu'on essaie de faire voir la minorité anglophone du
Québec comme un peuple dominateur, comme un peuple qui,
systématiquement, voudrait empêcher l'évolution normale de
la culture française, comme un groupe voulant, par tout les moyens,
d'une façon ordonnée et systématique, empêcher son
évolution, c'est mentir à la population, c'est oublier la
réalité et c'est avoir une méconnaissance profonde de nos
minorités.
Ceci dit, M. le Président, je l'ai répété
souvent, le problème de la langue est ce qui soustend fondamentalement
dans cette province le manque de présence des francophones dans les
institutions financières, dans l'industrie, dans le commerce et dans la
finance. Si on veut faire l'histoire objective de l'évolution des
francophones au Québec, on trouvera les raisons fondamentales de notre
absence dans ces différents champs d'activité. On trouvera que
l'échelle de valeurs du groupe francophone dans le Québec, il y a
simplement quelques décennies, a fait qu'on s'est, comme groupe,
désintéressé de l'évolution de ces divers
milieux.
Ceci dit, M. le Président, il me parait évident que la
peur, que la crainte, n'a jamais été la caractéristique
fondamentale du groupe francophone. Je crois que les francophones du
Québec ont toujours été et traditionnellement
été des gens hardis, qui ont confiance en eux, confiance dans
leurs moyens, et on a donné naissance, comme groupe, M. le
Président, à nombre d'aventuriers qui ont parcouru tout ce
continent de l'est à l'ouest et du nord au sud.
Aujourd'hui, je ne sais par quelle distorsion des faits on veut
créer la peur chez le groupe français, on veut institutionnaliser
la peur. On a peur de ne pas vivre comme groupe. On a peur de perdre notre
langue. On a peur de tout et il semble évident qu'il est dans
l'intérêt du gouvernement de prouver à la population que
cette peur, que cette crainte se fonde sur des faits, car, autrement, une loi
comme celle-ci devient tout à fait inadmissible.
Qu'on légifère sur la langue au Québec et au
Canada, je n'y ai pas d'objection de principe. Je crois que cela devrait
être fait. Mais le faire d'une façon aussi brutale d'une
façon aussi arrogante, d'une façon aussi extrême, sera pour
l'avenir de cette province un inconvénient très sérieux.
D'ailleurs, on remarque que le nombre de nos unilin-gues français
augmente.
C'est dommage pour la jeunesse car, avec le temps, elle se trouvera et
elle aura la preuve qu'elle sera sévèrement handicapée et
fondamentalement handicapée, à moins que cette jeunesse n'ait
aucune ambition, qu'elle veuille vivre tranquille dans nos villages
québécois, se limiter au groupe francophone du Québec et
s'exclure, comme nous l'avons fait dans le passé, de la vie
extérieure, de la vie internationale, de la grande industrie, de la
science, de la finance, et qu'on veuille rejeter à prime abord notre
participation dans ces divers champs d'activité sur le plan
international, de peur de perdre notre culture.
La peur est très négative, jamais rien de cons-tructif ne
s'est créé avec la peur, et elle a souvent été la
cause, individuellement et collectivement, d'erreurs très
importantes.
Ce qui me surprend, M. le Président, dans l'article premier, ce
n'est pas ce qu'il dit, c'est ce qu'il ne dit pas. J'ai assisté aux
débats dans le passé sur la langue. J'ai entendu pendant des
heures et des heures, des jours et des jours et même des semaines, et
même des mois, comme dit notre ministre de l'Education, parler sur un
article semblable pour dire que le mot "seul" devait être là.
Aujourd'hui, cela montre bien le sérieux du gouvernement, si on
lui remémore ces débats épiques, cela le porte à
sourire. On peut accuser l'Union Nationale de prendre des moyens
détournés pour accaparer le pouvoir. Je me demande si le
gouvernement peut réellement en rire et en prendre avantage, car s'il
m'était permis de sortir
du sujet, M. le Président, je pourrais vous donner mille et un
exemples de fausses représentations, bien souvent, que ce parti a
utilisées pour atteindre le pouvoir.
De toute façon, dans un champ d'activité donné, il
a été honnête, car nous savions tous que ce parti politique
a fait un appel passionnel aux extrémistes de cette province. Il a
réussi, M. le Président, à canaliser en sa faveur tous les
extrémistes francophones et les extrémistes négatifs. Il
les a tous, ils sont protégés à ce point de vue.
M. Charbonneau: Question de règlement, M. le
Président. A titre de représentant des citoyens de
Verchères, je ne prendrai jamais cela. Il y a 41% de la population qui
vient d'être traitée d'extrémiste ici, il y a des limites
à la démagogie et au colonialisme...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Verchères...
M. Alfred: Question de règlement, M. le
Président.
M. Saint-Germain: Cela ne sera pas pris sur mon temps?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur quoi
est fondée votre question de règlement, M. le
député de Papineau?
M. Charbonneau: Non, c'est fini, M. le Président.
M. Saint-Germain: S'ils veulent parler, je n'ai pas
d'objection.
M. Alfred: Depuis hier soir, le député de
Jacques-Cartier et cela me blesse terriblement traite les 42%
d'électeurs qui ont voté pour le Parti québécois
d'extrémistes, et je me sens très humilié de voir que le
député de Jacques-Cartier traite ainsi les votants du Parti
québécois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Papineau, vous avez été très
subtil. Votre message est passé, mais ce n'était pas une question
de règlement. Je recède la parole au député de
Jacques-Cartier.
M. Saint-Germain: Le gouvernement, dis-je, M. le
Président, a été au moins constant dans une chose
donnée. On s'attendait tous à une loi semblable. Les citoyens du
Québec, le lendemain de l'élection, s'attendaient à une
loi aussi restrictive; aujourd'hui, c'est une question de fait.
On s'imagine naïvement, M. le Président, que cette loi
mettra un terme aux difficultés linguistiques que nous avons. C'est
absolument faux. Avec une telle loi, on continuera longtemps à parler de
langue dans cette province et dans ce pays et je crois que ceci se fera au
désavantage de l'évolution des francophones dans cette
province.
Etant francophone moi-même, M. le Président, je me sens un
peu humilié de me voir comme individu et de voir que le gouvernement
traite le groupe auquel j'appartiens de gens faibles, de gens qui ne peuvent
pas, par leurs qualités et leur initiative personnelle, promouvoir le
français d'aucune façon, comme des gens qui sont prêts,
pour des avantages immédiats, à laisser tomber leur culture et
leurs traditions françaises. Je me refuse, M. le Président,
à une telle façon d'estimer mes valeurs personnelles.
Je suis né et j'ai toujours vécu dans une ville
hétérogène; j'ai toujours vécu dans un endroit
où à peu près toutes les minorités canadiennes
étaient représentées et je ne sache pas que, pour ces
raisons, je sois un francophone moins valable que ceux qui ont vécu
traditionnellement dans des milieux homogènes de langue
française. Je n'ai pas...
M. Charron: J'invoque le règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Jacques, sur une question de
règlement.
M. Charron: Je déteste interrompre un opinant, mais, ou
c'est le discours de troisième lecture que nous réserve le
député, ou c'est celui qu'il a raté en deuxième,
mais ce n'est certainement pas le moment de faire cette intervention. Je serais
curieux de voir comment il peut nous expliquer maintenant comment il se
rattachera à son parti et votera pour l'article premier, comme l'a
déjà annoncé son parti. Ce serait le temps pour lui de
nous l'indiquer, plutôt que de répéter ad nauseam pourquoi
il s'oppose au principe même de la loi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Jacques, je cède à nouveau la
parole au député de Jacques-Cartier en vous soulignant que ce
n'était pas une question de règlement.
M. Charron: Oui, c'est une question de règlement, M. le
Président, parce que le règlement nous oblige, lorsque vous
appelez un article, à nous en tenir à l'article. Ce n'est plus le
moment de reprendre et, au moment où le député
s'apprête à nous raconter sa vie...
M. Saint-Germain: Sur cette question de règlement, M. le
Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! Je comprends maintenant le sens de votre question de
règlement et, si c'était pour ramener le député de
Jacques-Cartier à l'article 1 du bill, je vous donne entièrement
raison.
M. Saint-Germain: Pourtant, M. le Président, je suis en
plein dans le sujet. Si je lis l'article 1, je vois: "Le français est la
langue officielle du Québec" et je parle de ceux qui parlent
français dans
cette province. Ce n'est pas écrit: "Le polonais est la langue
officielle du Québec", c'est écrit "Le français" et je
parle des Français, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
comprendrez que l'article 1, qui est une affirmation de principe, est un
article très large et qu'il devient extrêmement difficile pour la
présidence de délimiter si les intervenants sont dans le cadre de
l'article 1, mais, quoi qu'il en soit, je recommande et j'incite tous les
membres de la commission à déployer tous les efforts afin de
demeurer dans ce qu'ils pensent être l'intérieur de l'article
1.
M. Charron: M. le Président, ce que nous voulons voir,
c'est la grâce de la pirouette finale.
M. Saint-Germain: L'article premier, M. le Président, dans
sa forme, est très acceptable. D'ailleurs, c'est la loi de la province
actuellement, mais, lorsqu'on lit le projet de loi en entier...
Des Voix: L'article 1.
M. Saint-Germain: ...on voit, à l'article premier, le sens
réel de cette loi et, au moins, elle au-raît dû se porter le
titre, en toute justice, et pour bien définir ce qu'il y a dans la loi,
on aurait dû écrire: "Le français est la seule langue
parlée du Québec". Au moins, on aurait été
honnête avec le restant du projet de loi.
Je dis, M. le Président, que, par son titre et par son contenu,
c'est une loi qui donne aux francophones une protection dont ils n'ont
absolument pas besoin, qui va frustrer bien des gens et qui va être un
inconvénient sérieux je vous le dis dans le
développement futur de la culture française au Québec.
M. Laplante: II va voter quand même. C'est tentant, la
pirouette s'en vient?
M. Bertrand: Etes-vous d'accord avec l'article 1?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
cède maintenant la parole au député...
Mme Lavoie-Roux: II n'a pas fini.
M. Bertrand: II n'a pas fini, non, il va dire s'il est d'accord
avec l'article 1.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Avez-vous terminé, M. le député de Jacques-Cartier? Il
vous reste encore quatre minutes et vous pouvez...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je voudrais, M. le Président, que vous
demandiez au député de Vanier de respecter le règlement,
l'article 100, qui lui interdit de faire une interruption et de provoquer le
député.
M. Bertrand: D'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Jacques-Cartier, avec quatre minutes.
M. Saint-Germain: Comme je le disais, cet article, M. le
Président, est déjà dans nos lois, dans nos statuts et il
a été voté par le groupe, par les libéraux que j'ai
l'honneur de représenter à cette table. Il est officiel que je
voterai pour l'article.
M. Chevrette: La pirouette n'est pas...
M. Saint-Germain: Mais comme j'ai dit, elle prend...
M. Charron: Des fois j'ai des 5,5.
M. Saint-Germain:... une signification tout autre que celle qu'on
aurait voulue.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Saint-Germain: M. le Président. M. Chevrette: Je
m'excuse.
M. Saint-Germain: Cela ne me dérange pas de voir les
députés s'amuser, rire, parler, mais on voit la qualité
des "back-benchers" du gouvernement. Si cela ne les intéresse pas, ils
peuvent réellement partir, je ne suis pas intéressé a leur
présence, en aucune façon.
M. Chevrette: Au contraire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, à l'ordre! Laissez terminer l'intervention du
député de Jacques-Cartier.
M. Chevrette: La qualité ne réside pas dans le fou
rire.
M. Saint-Germain: Alors, je disais, M. le Président
que...
M. Chevrette: Excusez, M. le Président, la qualité
s'analyse beaucoup plus... suite aux propos.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Joliette, à l'ordre, s'il vous plaît!
M. Chevrette: C'est dans le journal des Débats qu'on
pourra apprécier la qualité, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Joliette, vous n'avez pas le droit de parole.
Mme Lavoie-Roux: II n'est pas gentil.
M. Saint-Germain: Ce ne sont pas de telles déclarations
qui vont amener le député à devenir ministre du
Travail.
M. Chevrette: Ce ne sont pas de tels exposés qui vont lui
faire reconnaître une qualité.
M. Lalonde: La frustration inspire toutes sortes de propos.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Saint-Germain: M. le Président, je dis au moins, que
pour ce qui regarde ce projet de loi, le gouvernement a eu une suite dans les
idées.
Je ne suis pas surpris personnellement du comportement de l'Union
Nationale; de sa part, j'en ai vu bien d'autres. J'ai vu ses membres, comme je
le disais, j'ai eu l'honneur de le dire à l'Assemblée nationale,
parcourir mon comté et dire à qui mieux mieux à nos
minorités: "We are for the liberty of choice". Cela a été
fait dans tout l'Ouest de Montréal. Quelques semaines après, ils
avaient changé leur politique. Aujourd'hui, sur une loi aussi
fondamentale, sur une loi "basique", une des plus importantes sur laquelle le
gouvernement va légiférer...
M. Bertrand: "Basique"?
M. Morin (Sauvé): "Basique"?
M. Saint-Germain: ... l'Union Nationale ne votera pas.
Fondamentale, si vous voulez, M. le député. L'Union
Nationale s'abstient, croyant par ce moyen, satisfaire tout le monde et son
père. C'est un manque du sens des responsabilités pour un
député. Depuis que je siège à l'Assemblée
nationale, j'ai toujours trouvé honteux qu'un député ne
puisse pas sur une loi donnée, sur une loi aussi importante dire
franchement un non ou dire franchement un oui. C'est un manque de sens des
responsabilités et de l'importance du rôle de nos institutions
dans le développement et la sécurité de cette
province.
Si ces gens s'imaginent satisfaire et sécuriser nos
minorités, je dois leur dire je parle en connaissance de cause,
parce que j'ai toujours représenté dans ce Parlement un groupe
minoritaire important qu'ils ne connaissent pas nos minorités; et
surtout, la minorité anglaise connaît bien ses institutions. Elle
les veut protégées, elle les veut respectées. Ce n'est
certainement pas avec des neutralités semblables qu'on va attirer sa
confiance et son respect. Elle est réellement trop démocrate et
trop intelligente pour ce faire.
Je crois que l'Union Nationale, aujourd'hui, s'est montrée sous
son vrai jour à essayer par tous les détours, les retours,
les...
Une Voix: Les contours.
M. Saint-Germain: ... retours en arrière et les
projections en avant. Elle a réellement fait preuve d'un vide politique
et d'un manque de responsabilité qui n'est pas à l'honneur des
députés élus à cette Assemblée.
Là-dessus, je sais pertinemment que ce n'est pas moi qui vais
être capable de faire disparaître de nos statuts ce projet de loi
que le gouvernement va rendre définitif. Je sais pertinemment que ce
projet de loi sera un inconvénient sérieux au
développement de la province, mais j'aurai la satisfaction personnelle
de dire que j'ai fait à la limite de mon possible et de mon talent pour
la bonifier et la rendre acceptable à toute la population du
Québec.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Je dois vous avouer
que je vous ai accordé quelques minutes supplémentaires pour les
interruptions dont vous avez été victime.
M. Saint-Germain: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
cède maintenant la parole au député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, très très
brièvement, puisque le chef de l'Union Nationale interviendra
également pour donner quelques commentaires sur l'article 1. Je devrais
d'abord vous dire combien je trouve déplorable, depuis hier, ce
pique-nique qui se fait autour de la table et qui manque de sérieux. On
se rend compte qu'il n'y a rien de pire pour corrompre une table de travail
intéressante que les discours comme on vient d'en entendre, comme le
dernier, celui du député de Jacques-Cartier. On l'entend depuis
hier. Il a pris 20 minutes pour nous dire qu'il était contre et
finalement pour voter pour. Il nous a parlé des projections en avant. Je
pensais qu'il parlerait des projections en arrière. Il a parlé de
l'histoire du passé comme s'il avait voulu parler de l'histoire de
l'avenir. Il nous a dit, hier, qu'il avait des oreilles pour voir. C'est assez
rare.
M. Saint-Germain: Question de règlement.
M. Grenier: II a maintenant une langue pour entendre.
M. Saint-Germain: Question de règlement, M. le
Président. On ne déforme pas simplement mes paroles, on
déforme mes oreilles.
M. Grenier: On lira le journal des Débats d'hier soir pour
s'en convaincre.
M. le Président, ce qu'il y a de plus cocasse, le
député de Marguerite-Bourgeoys a parlé de la page noire du
livre, épais, bleu de l'Union Nationale. Ce qu'il y a d'étrange,
c'est qu'hier midi je vais reprendre cela, puisqu'il n'a pas eu l'air de
le comprendre hier il a paru une feuille de chou de
cinq pages qui était le communiqué de presse du Parti
libéral devant une assemblée de journalistes à laquelle
ont participé le quintette libéral. Ils étaient cinq pour
faire chacun un exposé d'un quart d'heure. Il restait à peu
près cinq minutes pour que les journalistes posent des questions. Ce
qu'il y a de plus épouvantable, c'est que je peux vous citer, dans les
cinq retenues de la fin, des recommandations qui sont toutes dans le livre bleu
de l'Union Nationale. Alors, cessez de le traiter d'épais, car on va
vous trouver ridicule. On ne le dira pas, mais on va vous trouver ridicule.
C'est ici, et je peux vous citer les pages du livre bleu. Ce sont les pages 74,
87, 130, 126, 54, et 135. Vous avez des recherchistes, vraiment... Le
frère, quand j'allais à l'école, me mettait à
genoux quand je copiais de même.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Puis-je
vous recommander de vous en tenir à l'article 1 du projet de loi
101?
M. Lalonde: Question de directive. Je dois intervenir pour
rétablir les faits. Est-ce que j'attends la fin des propos, si on
appelle cela des propos, du député de Mégantic-Compton,
qui ne sont pas très à propos, ou est-ce maintenant?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En vertu
de l'article 96, vous devez laisser finir l'intervention du
député de Mégantic-Compton.
M. Lalonde: Je serai patient.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
faits seront rétablis si les paroles en question ont été
prononcées par vous-même, sinon ce sera par l'autre
député qui aura prononcé ces paroles. En vertu de
l'article 96, lorsqu'un député fait un discours et que, par la
suite, un autre député déforme partiellement ou non, avec
raison ou non, les faits, ce député peut, à la fin de
l'intervention, invoquer l'article 96 pour rectifier les faits. M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, je ne voudrais pas que vous
appeliez ce que je fais là un discours. Je ne fais que rétablir
certains faits au sujet de l'article 1. Des faits qui méritent vraiment
d'être remis dans leur contexte et que j'ai vraiment trouvé
déplacés. J'ai entendu, tout à l'heure, les trois
ministres dont un, entre autres, qui trouvait qu'à cause de notre
position Duplessis aurait pu se lever dans sa tombe. Je n'en suis pas
assuré, M. le Président. On va le sortir le 9 septembre, mais je
ne suis pas sûr qu'il se serait levé pour cela. Je voudrais bien
faire remarquer aux ministres qui ont lancé cette expression et à
l'autre ministre qui a dit qu'on avait certainement remplacé l'Union
Nationale...
M. Laurin: Etes-vous allé voir?
M. Grenier: Vous surveillerez les événements le 9
septembre. J'aimerais, sur un ton beaucoup plus sérieux, quand
même attirer votre attention sur le résultat de la dernière
élection.
Il faut se rappeler que l'Union Nationale a quand même
récolté presque la moitié des votes du parti actuel et
cela nous a donné onze députés. Mais, en toute
honnêteté, cela aurait pu nous en donner 35. Vous le savez. Vous
avez déjà été témoin de cela.
A partir de là, commencer à dire que vous avez
remplacé l'Union Nationale, il faudrait faire attention. Autre fait,
n'oubliez pas que, sur les onze députés de l'Union Nationale, il
y en a dix qui viennent de comtés presque exclusivement
francophones.
Je pense qu'on représente une proportion de gens...
M. Charron: Pas qui pèsent lourd, par exemple.
M. Grenier: C'est à voir dans l'histoire de l'Union
Nationale. L'interprétation qu'on donne aux chefs
décédés, qu'ils s'appellent Duplessis, Johnson ou
Bertrand, j'ai toujours trouvé drôle, dans notre parti, comme vous
le savez de l'extérieur, comme vous en avez entendu parler de
l'extérieur, on leur a prêté beaucoup de propos, mais ils
n'ont pas souvent tenu les propos qu'on leur prêtait. Je pense que la
position de l'Union Nationale ce matin est une position qui se défend.
On est mal venu de tenter de nous ridiculiser. Je ne parle pas de cette partie
de la table, mais qu'on l'ait fait, il y a des interventions qui ont
été faites ici, on a dit spécialement qu'on n'avait pas de
concept. On est le seul parti qui ait vraiment soumis des amendements
importants et, en plus de cela, on a donné des explications, des
définitions à nos termes.
Je pense qu'on est allé assez loin dans ce projet de loi; on a
fait un travail vraiment valable, cette réaction est mal à propos
et ne mérite presque pas qu'on réponde à des gens qui
viennent nous dire qu'on ne s'est pas penché sur le problème.
Notre formation politique représente presque 20% du vote de la
population. Je ne voudrais pas qu'on interprète les actes qu'ont
posés les anciens premiers ministres du Québec. La position que
prend l'Union Nationale actuellement se défend et vous voyez que,
lorsqu'on parle de langue française officielle et de langue anglaise
avec prééminence du français, c'est une position qui se
défend et c'est une position qui fera probablement son chemin.
Inutile de vous dire ce qu'a été la sensation des
électeurs du Québec. On a circulé dans le Québec et
on se rendra probablement compte qu'il faut faire attention. Le gouvernement
actuel prétend avoir tout droit de tout décider. Avec 40%, dans
le contexte de la dernière élection, il faut se rappeler, pour
les libéraux, ce n'est pas pour leur tourner le couteau dans la plaie,
que les gens ont changé pour une plus saine administration, bon nombre
de gens ont voulu changer pour avoir une plus saine administration, profitant
du fait que l'Union Nationale venait à peine de choisir son chef.
Je le dis parce que je pense que c'est un fait
connu, et il faut bien comprendre que, dans les 40% des votes du Parti
québécois actuellement, ce n'est pas si sûr que ça
qu'il y en ait même 40% qui désirent l'article 1, tel qu'on devra
le voter tout à l'heure. Ce n'est pas sûr pour le Parti
libéral non plus. Quand on dit je le dirai en terminant ici
pourquoi l'Opposition est valable, c'est qu'il y a peut-être des
gens du Parti libéral aussi qui aimeraient amener une distinction...
On a tenté toute la veillée hier d'apporter une
distinction à l'article 1. Il y a un pourcentage important du vote qui
est libéral, il se situe à 31%...
M. Lalonde:...
M. Grenier: Vous pourriez peut-être garder vos observations
pour la fin, pour ce qu'elles apportent au discours. Si vous regardez cela, il
y a près de 60% de la population qui demande des explications sur
l'article 1. Quand vous qualifiez notre position de s'abstenir cela a
fait gémir des ministres tout à l'heure c'est sur le
premier article qu'on vote ce matin. On ne connaît pas encore
jusqu'où ira le gouvernement dans ses amendements de la charte. Je pense
qu'on ne peut pas se permettre, étant une formation qui a proposé
une motion valable, de donner à ce moment un chèque en blanc. On
a une volonté également ce n'est pas celle de dire non, non plus,
à un gouvernement qui veut favoriser la langue française, mais je
pense que notre position se défend très bien. Sur les autres
articles, je peux vous dire une chose, on va voter la loi aussi.
On a voté en première lecture. On n'a pas craint de
prendre position. On a voté en première lecture pour le
remplacement de la loi 22, on a également voté en deuxième
lecture, on votera également en troisième lecture et on votera
également sur les articles, mais, ici, je pense que notre position se
défend et qu'on serait mal venu de la trouver ridicule.
Qu'on trouve des arguments valables, comme certains ministres l'ont
fait, tout à l'heure, très bien, et j'aime ça, mais que
des gens du gouvernement je l'ai dit antérieurement et je le dis
encore de cet actuel gouvernement... il y a des changements, on veut
collaborer, il y a plus de sérieux en Chambre et je voudrais qu'il y en
ait davantage, mais je ne voudrais pas, par exemple, que, à des bouts de
table comme ici, on vienne faire des choses moins sérieuses, qu'on
vienne faire déteindre sur le gouvernement des changements qu'on est en
train d'apporter et l'opposition constructive qu'on amène, nous de
l'Union Nationale avec ces suggestions qui sont multiples, pensées,
sérieuses et faites dans le but de faire changer le gouvernement
d'idée sur certains points.
A l'occasion l'Opposition libérale aussi. Si on devait se
rejoindre sur certains articles, je dis bravo. Bien sûr qu'on s'attend
bien que cet article premier n'aura pas de changement et je pense que la
position qu'on défend là-dessus, en s'abstenant de voter,
s'explique d'elle-même. Je vous remercie, M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président, en vertu de l'article
96...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys j'ai une question à vous
poser. Est-ce que la rectification des faits que vous voulez faire est suite
à des propos que vous avez vous-même tenus dans un discours? Sinon
l'article 96 ne s'appliquerait pas.
M. Lalonde: Bon, bien c'est assez difficile, parce que
l'imbroglio...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense
que vous faites allusion aux faits sur un document qui aurait été
rendu public à la presse et auquel a fait allusion le
député de Mégantic-Compton. Si c'était exact, si ma
présomption est exacte, l'article 96 ne s'appliquerait pas et il n'y a
pas de question de privilège en commission parlementaire.
M. Lalonde: Bon. Alors, j'aurai, à d'autre moment, M. le
Président, l'occasion de rectifier ces faits. S'il me reste quelques
secondes seulement, je voudrais en profiter simplement pour...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais je
dois céder la parole à ce moment-ci, au député de
Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, j'ai essayé d'être
bref tout à l'heure, parce que tout le long de ces débats, nous,
de l'Union Nationale, voulons être assez brefs afin d'avoir le temps de
passer à travers tout le projet de loi, avant que la guillotine ne
s'abatte sur nos têtes. Mais je crois que je dois revenir quand
même pour quelques instants, pour réexpliciter. Je
m'aperçois que quelques membres autour de cette table n'ont pas compris
la philosophie de l'Union Nationale derrière cet article premier. En
fait, si l'article premier est rédigé tel quel par le
gouvernement, c'est que nous, nous voyons beaucoup plus loin que seulement
langue officielle. Parce qu'on a lu le bill, la présentation d'un
couvert à l'autre, on n'a pas encore malheureusement en notre possession
tous les amendements qui vont être apportés à cette loi. Je
sais, parce que le ministre d'Etat aux affaires culturelles l'a dit dans sa
réponse en deuxième lecture qu'il y eut de nombreux amendements
dont beaucoup ont été suggérés par l'Union
Nationale, puis on en est heureux. A ce jour, nous ne connaissons pas
malheureusement ces amendements. Par la conception même de ce projet de
loi, nous devons y voir une philosophie, une philosophie qui fait que le
gouvernement est peut-être rendu, selon sa propre idée au stade de
l'indépendance complète du Québec, et il ne tient pas
compte de la réalité canadienne. Tant et aussi longtemps qu'on ne
verra pas plus loin dans le projet de loi, M. le Président, c'est
difficile de nous prononcer sur une philosophie lorsqu'on ne voit pas la
philosophie
complète ou si elle n'est pas explicitée
complètement par le gouvernement.
Alors, nous attendons de voir les amendements à venir, avant de
prendre une position définitive. Mais la position de l'Union Nationale
se défend. Je me réfère surtout ici au rapport Gendron. Je
veux tout simplement vous lire rapidement un bout de texte qui dit que le terme
"langue officielle" désigne tout simplement la langue que l'Etat a
jugé à propos d'appuyer de sa puissance pour l'usage public, soit
par une loi constitutionnelle, soit le plus souvent par une loi ordinaire. Il
peut y avoir plus d'une langue officielle. Le domaine de l'application de la ou
des langues officielles est parfois stipulé ou simplement limité
par inférence."
Or, tant et aussi longtemps qu'on ne verra pas plus loin, dans la
volonté du gouvernement, dans l'article premier tel que
présenté à l'heure actuelle, pour nous, c'est beaucoup
plus un article qui veut passer à l'indépendance avant la
volonté des Québécois, alors que si l'article premier
avait été, à notre point de vue, en voyant tous les
amendements que le ministre va apporter à ce projet de loi, simplement
une langue officielle purement et simplement, cela pourrait changer notre
façon de voir.
Et M. Gendron continue même un peu plus loin en disant, en parlant
de prédominance, la langue prédominante, la langue prioritaire,
la langue prééminente: Ils peuvent tout au plus évoquer la
situation ou par une législation constitutionnelle ou ordinaire"...
l'Etat aurait opté pour une politique de dualité et de
pluralité au chapitre des langues officielles ou nationales, puis
déciderait de rompre avec la présomption normale
d'égalité qui en découle pour les langues en
présence et instaurerait pour l'utilisation de ces langues, un
régime de distinction horizontal, à base géographique, ou
vertical, à base scolaire, commerciale ou industrielle. Pareille
distinction dans l'emploi des langues, continue M. Gendron, surtout si elle
répondait à des critères rationnels ne serait pas
nécessairement discriminatoire sur le plan de la loi et susceptible par
conséquent d'être attaquée comme inconstitutionnelle".
C'était la volonté ou la philosophie de l'Union Nationale.
D'ailleurs, même si, sur cet article en particulier, nous devons nous
abstenir à cause de la philosophie générale qui sous-tend,
comme je l'ai expliqué, M. le Président, toute la loi, je crois
que l'Union Nationale a fait un effort intellectuel important en
présentant ses amendements au projet de loi et en ne gardant pas ces
amendements secrets. Nous avons transmis une copie au gouvernement, une copie
à l'Opposition officielle et je crois que la population est
informée de cela. Nous n'avons pas gardé ces amendements pour
nous, mais nous voulions véritablement collaborer avec le gouvernement
pour trouver la possibilité de répondre, justement, aux besoins
de la population. Lorsqu'on a dit tout à l'heure, à propos de
l'Union Nationale, que nous rompions avec une tradition nationaliste, je
pourrais vous dire, M. le Président, que le français, pour les
chefs de l'Union Nationale, a toujours été très important.
Que ce soit Duplessis, Sauvé, Barrette, Johnson et Bertrand, tous ces
premiers ministres de l'Union Nationale étaient des nationalistes, mais,
pour eux, c'était un nationalisme sain, un nationalisme réaliste
vis-à-vis des langues officielles et surtout un nationalisme juste
à l'égard de tout le monde.
Alors, si nous voulons nous abstenir, si nous ne voulons pas voter sur
ce projet de loi, c'est parce que nous voulons dire non à un parti qui
ne veut pas reconnaître la réalité canadienne telle qu'elle
est déjà et qui veut passer à l'indépendance avant
que ce ne soit fait. C'est surtout aussi un avertissement au gouvernement de ne
pas se prendre pour le propriétaire exclusif du Québec, mais bien
de collaborer avec tous ceux qui sont propriétaires du Québec,
c'est-à-dire tous les citoyens du Québec sans exception. Alors,
on dit oui au français comme langue officielle, on dit oui au
français comme langue prééminente au Québec, on dit
oui au français partout protégé au Québec, mais on
dit non à des gens qui veulent se servir du français, de la
langue ou de la culture, comme d'un tremplin politique. On veut
véritablement que cette langue appartienne à toute la population
du Québec.
En terminant, M. le Président, je veux encore faire allusion
à tous ceux qui ont été chefs de l'Union Nationale, et
spécialement aux quatre premiers ministres qui sont morts à la
tâche: Duplessis, Sauvé, Johnson, Bertrand. C'étaient des
premiers ministres qui croyaient au Québec, ils croyaient à la
langue française au Québec. C'étaient des premiers
ministres qui étaient justes, qui étaient honnêtes, qui ont
voulu servir les intérêts de la population, servir les
intérêts de toute la population du Québec, sans exception,
plutôt que de servir leurs intérêts politiques.
Alors, c'est en fonction, M. le Président, des explications que
je viens de vous donner et que j'ai données un peu plus tôt que
l'Union Nationale devra s'abstenir de voter sur cet article premier. Mais,
encore une fois, tout au long du projet de loi, nous réservons notre
opposition pour la fin complètement, tant et aussi longtemps qu'on ne
verra pas plus clairement les intentions du ministre et du gouvernement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, bien brièvement, les
propos des deux derniers opinants confirment l'impression que j'avais, parce
que j'ai terminé tantôt mes propos en disant que je ne comprenais
pas l'Union Natonale, et j'avoue que je ne comprends pas davantage, sauf,
peut-être, si on s'en rapporte aux intentions. Je n'aime pas discuter des
intentions des qens, mais il me semble que, sur une loi aussi fondamentale, on
a droit d'être contre l'article 1, on a le droit d'être pour, mais,
si on est un parti politique, on n'a pas le droit de s'abstenir. C'est renoncer
au caractère même, à la responsabilité d'un parti
politique que de s'abstenir sur un article aussi important. Que l'Union
Nationale prenne ses responsabilités. L'explication suivant laquelle on
verra les autres articles, on verra quelle est l'opinion, la philoso-
phie du gouvernement lorsqu'on étudiera les autres articles, ne
tient pas du tout. Chaque article doit être étudié un par
un, un après l'autre, et la responsabilité politique de chacun
des membres de cette commission doit être exprimée sur chacun des
articles. Alors, ce sont les seuls propos que je voulais faire, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Vanier.
M. Bertrand: M. le Président, très
brièvement, c'est simplement pour dire qu'autant je peux concevoir que
l'Union Nationale attache une importance à l'amendement qu'elle propose,
à la motion d'amendement qu'elle formule, autant, par contre, je ne suis
pas en mesure de comprendre que, même si ces gens ont l'intention de se
prononcer sur chacun des autres articles du projet de loi no 101 en
troisième lecture, je comprends assez mal leur réaction à
l'article 1 dans leur volonté de s'abstenir, et pour la raison
suivante:
Ou bien le fait pour le gouvernement de consacrer le français
langue officielle ne leur paraît pas, eu égard, justement à
la motion d'amendement qu'elle fait, parce que, dans sa motion d'amendement,
à toutes fins pratiques, je pense que si j'interprète bien les
propos du député de Lotbinière, l'Union Nationale veut que
le gouvernement fasse la démonstration qu'il reconnaît l'existence
d'une communauté anglophone qui existe vraiment au Québec et qui
a ses institutions, qui a sa cohérence sociale et qui a, à
travers l'histoire, développé une présence qui doit
être défendue à un titre différent de celle des
autres minorités.
Si l'article 1, qui fait du français la langue officielle du
Québec, quant au député de Lotbinière,
empêche d'exprimer, dans ce projet de loi, que la communauté
anglophone existe et qu'elle doit être reconnue, je pense qu'en toute
logique il devrait voter contre cet article, parce que l'article premier est
quand même celui qui imprime toute sa philosophie au projet de loi. La
reconnaissance d'un statut juridique des langues, ce n'est pas simplement un
article qu'on met là pour le plaisir d'affirmer une position politique.
C'est parce que, par la suite, on veut manifester que tout le projet de loi va
s'inspirer du fait que le français est la langue officielle du
Québec. C'est d'ailleurs un peu la raison pour laquelle, en 1974,
l'Opposition officielle d'alors avait demandé qu'il y ait un amendement
qui soit formulé pour inscrire: "Le français est la seule langue
officielle du Québec". C'est parce qu'à la lecture de l'ensemble
de la loi 22, l'Opposition officielle n'avait pas, à ce moment,
l'assurance que tous les articles qui suivaient l'article premier
étaient en conformité avec le principe émis à
l'article premier qui disait: "Le français est la langue officielle du
Québec". Au contraire, on retrouvait un projet de loi qui faisait
véritablement du Québec, à tous les plans, une province
bilingue, bilingue dans toute la force du mot. Ce qui faisait que l'Opposition
officielle se sentait fort justifiée, dans un tel contexte, de demander
qu'on dise: "Le français est la seule lan- gue officielle du
Québec", pour ensuite forcer le gouvernement à être logique
avec lui-même et à faire en sorte que, dans tous les autres
chapitres du projet de loi, on marque bien que le français est la seule
langue officielle du Québec.
Si, d'après vous, ce principe énoncé à
l'article premier va contre la reconnaissance d'un principe que vous jugez
essentiel, à savoir la reconnaissance de l'existence de la
communauté anglophone, je dis qu'il faudrait, en toute logique, voter
contre l'article premier.
Mais si, au contraire, comme vous le dites et c'est là
qu'on ne sait pas, un moment donné ce sur quoi vous voulez mettre une
insistance primordiale, si, à votre avis, il est normal que le
français soit reconnu comme la langue officielle du Québec, mais
que, par contre, il faille avoir dans cette loi certaines dispositions qui
permettent l'utilisation de l'anglais, qui permettent de préserver les
droits de la minorité anglophone dans certains secteurs, comme c'est le
cas par exemple dans l'éducation avec un réseau public
d'institutions soolaires, si vous pensez que, devant les tribunaux, il faut
leur reconnaître certains droits, que, sur le plan de la
législation, il faut leur reconnaître certains droits et que, sur
le plan d'affichage, il faut leur reconnaître certains droits, moi, je
trouve cela tout à fait sain, à ce moment-là.
Je pense que c'est à l'étude de chacun des autres articles
qu'on peut manifester le principe que vous avez voulu reconnaître dans
l'article 1, mais que vous vous sentez incapables de soutenir en votant pour ou
en votant contre, parce que vous dites: A toutes fins pratiques, nous, le
français langue officielle, on est favorable à cela, mais on
pense que le gouvernement ne fait pas assez pour reconnaître la
communauté anglophone. Mais le gouvernement fait assez dans les 218
articles qui vont suivre. Il y a des articles là-dedans qui parlent de
la reconnaissance des anglophones, des droits de la communauté
anglophone...
Mme Lavoie-Roux: II n'y en a pas beaucoup.
M. Bertrand: S'il n'y en a pas assez, l'Opposition pourra
présenter des amendements à chacun de ces articles.
M. Ciaccia: Ils ne sont pas recevables. Ils ne sont jamais
recevables, ces amendements.
M. Bertrand: Cela est une autre paire de manches. Il ne faut pas
préjuger de la décision de la présidence et de la
commission.
Mais, dans tous les autres articles de la loi, il y a des points sur
lesquels on peut, quant à moi, en tout cas, faire valoir qu'on
reconnaît des droits à la minorité anglophone. Dans ce
contexte, j'aurais vraiment pensé quoique je comprenne cette
position dans le sens où l'Union Nationale veut soutenir une position de
principe, qui est la reconnaissance de la communauté anglophone, je suis
bien d'accord que vous fassiez tous les efforts pour le faire et, dans le cas
de tous les articles, on va pouvoir faire des amendements, vous nous direz si,
oui ou non, on va assez loin ou pas pour
reconnaître ces droits. Mais, dans l'article 1, qui est une
question de philosophie, de principe, de fondement même de la loi,
j'aurais pensé que l'Union Nationale nous aurait dit: Cet article, dans
son principe même, va à l'encontre de notre philosophie politique
ou on pense que cet article 1, qui reconnaît le français langue
officielle, joint à une reconnaissance de la communauté
anglophone dans les 218 autres articles sur des points très
précis, cela nous va, c'est à notre satisfaction.
C'est pourquoi, moi aussi, peut-être pour des raisons
différentes de celles de l'Opposition officielle, j'aurais nettement
préféré que, là-dessus, l'Union Nationale, prenne
un vote en faveur ou contre l'article premier.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Merci, M. le Président. J'ai hésité
un bout de temps avant de prendre la parole sur cet article premier, parce que
je trouvais que la façon dont se déroulaient nos débats
depuis ce matin, bien que je les ai suivis dans mon bureau pendant un certain
temps, n'était pas de nature à rehausser et à maintenir un
certain caractère de dignité dans un projet de loi d'une aussi
grande importance.
Etant donné que, depuis que mon collègue,
député de Mégantic-Compton, a pris la parole tout à
l'heure, le tout s'est rétabli, chacun exprime son point de vue, ce qui
est le droit de chacun, je veux apporter quelques observations sur cet article
premier.
M. le Président, je voterai en faveur de cet article sans aucune
équivoque, sans aucun doute dans mon esprit et je veux que ce soit
très clair. Le français est la langue officielle du
Québec, d'ailleurs j'avais dit, lorsque la loi 22 a été
présentée et adoptée en Chambre, tant en commission
parlementaire que devant l'Assemblée nationale, que le Québec
devait demeurer une terre de culture et de tradition françaises.
Je me serais opposé et j'aurais voté contre la motion de
mes collègues de l'Union Nationale, si jamais elle avait
été reçue. D'ailleurs, puisqu'elle n'a pas
été reçue, je ne pourrai pas en faire de longs
commentaires. J'aimerais tout simplement dire que nous avons un choix à
faire, au Québec, ce choix est extrêmement important. Gouverner,
c'est prévoir. C'est sûr que c'est un choix difficile, que c'est
un choix qui peut paraître peut-être très difficile pour
certains, pour certains groupes au Québec. Mais il ne faut pas oublier
un fait, c'est que la politique du bilinguisme qui est promue par le
gouvernement central actuellement a pour objet premier de rendre le
Québec davantage bilingue. M ne faut pas le perdre de vue. Regardons les
milliers de dollars, pour ne pas dire les millions qui sont
dépensés. A quel endroit ces millions sont-ils
dépensés, actuellement?
Il est évident que, si on faisait en sorte de permettre que le
Québec devienne de plus en plus bilingue, à cause du contexte
canadien, qu'on soit séparé ou pas, à cause du contexte
nord-américain, il n'y a aucun doute que, dans une
génération, le Québec deviendrait unilingue anglais.
Parce que le jour où le Québec deviendra
entièrement bilingue au niveau de tous ses citoyens, au niveau de toutes
ses institutions, à partir du moment où le bilinguisme serait
consacré, dans les faits, à ces deux niveaux, à cause du
contexte par lequel nous sommes entourés, le Québec deviendrait
unilingue anglais.
Je l'ai dit, lorsque la loi 22 a été déposée
devant l'Assemblée nationale; je le répète aujourd'hui et
je n'ai pas changé d'opinion sur ce plan. Si nous avions à
défendre une politique canadienne et si nous étions à un
autre palier de gouvernement, au gouvernement central, il est certain que le
gouvernement central doit avoir une politique pour reconnaître le
caractère bilingue du Canada, mais il ne faut pas oublier ceci, c'est
que si le fédéral reconnaît aujourd'hui le caractère
bilingue du Canada; il faut retourner un peu dans l'histoire, dans les
années passées pour se rendre compte qu'il y a eu une
considération politique particulière qui a joué. C'est le
fait que le Parti libéral fédéral a toujours eu besoin du
Québec pour gouverner et c'est lorsqu'il a été en
minorité, dans les années 1962, 1963, 1964, 1965 qu'on a fait la
promotion du bilinguisme, mais on n'a pas fait la promotion du bilinguisme
à cause de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, de
l'Ontario ou de la Nouvelle-Ecosse, on l'a fait à cause de la
présence française et à cause du Québec
français.
C'est la raison pour laquelle on l'a fait, parce que le Québec
est majoritairement français. Si nous avions été une
minorité au Québec, les francophones, comme cela existe dans les
autres provinces, je dis, M. le Président, que jamais le
fédéral n'aurait consenti à aller vers le bilinguisme. Il
faut être prudent ici au Québec; il faut être
extrêmement prudent. Cette offensive du gouvernement central, à
cause justement de tout notre environnement, qui ferait en sorte à un
moment donné que nous perdions notre langue et que le Québec ne
soit plus la terre de culture et de tradition françaises dans 20 ans, 25
ans, 30 ans et même 40 ans, bien que je comprenne que, dans bien des
régions du Québec, le problème ne se pose pas, il ne faut
pas oublier que l'économie, le développement économique du
Québec se fait dans la région métropolitaine. Il y a aussi
la vallée de l'Outaouais.
C'est dans ces régions que nous rencontrons le plus de
problèmes.
C'est la raison pour laquelle le gouvernement doit prendre les mesures
qui s'imposent pour faire en sorte que le français soit la langue
officielle du Québec.
M. le Président, j'appuierai cet article no 1. Cependant, je
voudrais ajouter quelques points. Il ne faudrait pas non plus, puisqu'on a
parlé des autres articles du projet de loi, faire en sorte
d'empiéter et de brimer les droits d'autres personnes. C'est assez
difficile d'avoir une ligne de démarcation précise dans ce
domaine. Je pense qu'il y a quand même un fait que nous n'avons pas le
droit de perdre de vue. Il commence à être important que tous les
francophones au Québec, où qu'ils soient, dans quelque
région que ce soit, dans quelque municipalité du Québec
que ce soit, puis-
sent avoir une administration dans leur langue pour être en mesure
de travailler dans leur langue. Il y a eu tellement d'injustices causées
dans le passé qu'il est important que la loi en vienne à
protéger les nôtres, chez nous, dans notre territoire du
Québec. C'est une raison de plus pour laquelle j'appuie cet article qui
fait du français la langue officielle du Québec, qui d'ailleurs,
avait déjà été consacrée par la loi 22.
Mise aux voix de l'article premier
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Beauce-Sud.
Puisqu'il n'y a plus d'autres intervenants sur ma liste, je demande donc
si l'article 1 du projet de loi no 101 est adopté.
M. Charron: Je demande l'appel nominal, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Alfred (Papineau).
M. Alfred: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bertrand (Vanier).
M. Bertrand: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Charbonneau (Verchères).
M. Charbonneau: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Charron (Saint-Jacques).
M. Charron: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Chevrette (Joliette-Montcalm).
M. Chevrette: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Ciaccia (Mont-Royal).
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Morin
(Sauvé).
M. Morin (Sauvé): En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Dussault (Châteauguay).
M. Dussault: Entièrement pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Grenier (Mégantic-Compton).
M. Grenier: Abstention.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Guay
(Taschereau).
M. Guay: Favorable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).
M. Lalonde: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Laplante (Bourassa).
M. Laplante: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Laurin (Bourget).
M. Laurin: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie).
Mme Lavoie-Roux: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Biron
(Lotbinière).
M. Biron: Abstention.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Fallu
(Terrebonne).
M. Fallu: Favorable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Roy
(Beauce-Sud).
M. Roy: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier).
M. Saint-Germain: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Samson (Rouyn-Noranda) étant absent, je déclare adopté
l'article 1 du projet de loi no 101.
M. Lalonde: M. le Président, avant que vous n'appeliez
l'article 2, et je vais vous expliquer pourquoi, j'aurais une directive
à vous demander.
Je dois dire d'abord que, quant à l'article 2 et au chapitre 2,
dans la forme où les articles sont actuellement proposés, je n'ai
pas d'amendement à apporter. Mais j'ai un problème, et voici
lequel: C'est que d'ailleurs cela a été expliqué
comme cela par le ministre et le gouvernement ces articles et ces
chapitres contiennent des expressions de droits fondamentaux qui sont
explicités par d'autres chapitres, plus loin, de sorte qu'on peut se
trouver devant une situation où il y aurait un hiatus, où des
droits fondamentaux exprimés, par exemple, à l'article 2
je vous donne l'exemple toute personne a le droit que communiquent
en français avec elle et je saute à la fin
les diverses entreprises exerçant au Québec...
Cela affecte naturellement toute la question de la francisation des
entreprises pour laquelle francisation on retrouve une série d'articles
plus loin, en particulier qui disent que les entreprises de 50 employés
et plus doivent obtenir un certificat de francisation, etc., de sorte que
l'entreprise de 30 employés, qui n'est pas affectée par la
francisation un peu plus loin, sauf au choix éventuel de l'office, peut
quand même être affectée par cet article.
La directive que je vous demande, c'est: Est-ce que je peux proposer un
amendement qui viendrait avant l'article 2, qui s'appliquerait au chapitre 2 et
qui serait un peu ceci: "Que les dispositions du présent chapitre n'ont
d'effet que dans la mesure prévue par les autres titres et chapitres de
la présente loi", de sorte qu'il y ait une cohérence et qu'il n'y
ait pas de situation d'incertitude, à savoir quel est l'article qui
s'applique, l'article 2, l'article 130 ou l'article 135 à telle et telle
personne? C'est simplement dans le but de clarifier la technique
législative employée par le gouvernement.
M. Charron: Sur la question soulevée par le
député de Marguerite-Bourgeoys, je ne veux pas écarter
l'intention, au besoin, j'imagine que le gouvernement se devait de
répondre à une interrogation de cette sorte... Le ministre d'Etat
au développement culturel a déjà fourni des explications,
mais je vous signale que pareil amendement est irrecevable, parce que les
articles de notre règlement le mentionnent clairement. Dans le chapitre
concernant nos travaux en commission, tout amendement doit être
rattaché à un article en particulier. Nous procédons
à l'étude de la loi, article par article, et c'est à un
article qu'on doit rattacher un amendement. Celui que vient de nous signaler,
dans son intention, le député de Marguerite-Bourgeoys, n'aurait
de place que j'aie entendu ni à l'article 2 que vous venez
d'appeler, ni... Il ne nous a pas indiqué non plus à quel autre
article il désirait le rattacher.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question. C'est
justement pour cette raison que je vous demande une directive pour clarifier
l'application du règlement. L'ancien règlement était un
peu plus explicite et m'aurait peut-être obligé de proposer des
articles nouveaux seulement à la fin de l'étude, en vertu de
l'article 119. Pour la cohérence du débat, il me semble que je
devais faire cette proposition actuellement. Si vous retrouviez dans le
règlement place à une telle proposition, je l'aurais fait
maintenant pour ne pas me faire reprocher un peu plus tard de ne pas l'avoir
fait maintenant. Je peux m'y prendre autrement. Je peux, après l'article
2 enfin, cela n'affecte que quelques articles de ce chapitre
ajouter un amendement. Je vous demande une directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
si on se reporte au chapitre où on parle de motion d'amendement,
à la page 33 de notre règlement, à la section 4, plus
précisément à l'article 70, on se rend compte qu'un
amendement doit se rapporter directement au sujet de la motion proposée.
Je dois faire état, tout d'abord, qu'actuellement il n'y a aucune motion
de proposée, puisque l'article 2 n'a pas été
appelé...
M. Lalonde: C'est pour cela que je vous demande la directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... "et
ne peut avoir que les objets suivants: Retrancher, ajouter des mots ou les
remplacer par d'autres. Il est irrecevable si son effet est d'écarter la
question principale sur laquelle il a été proposé et il en
est de même d'un sous-amendement par rapport à un amendement."
Considérant qu'actuellement il n'y a aucune motion de
proposée, considérant aussi, et surtout, que le but de la motion
n'est pas de retrancher, ni d'ajouter des mots, ni de les remplacer par
d'autres, mais d'ajouter un nouvel article, je considère que cette
motion va à l'encontre de la lettre de l'article 70. Je la
déclare irrecevable, quoique je vous dise, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, que l'autre hypothèse que vous avez
proposée, c'est-à-dire que si l'article 2 est appelé, vous
pourriez, à cette occasion, proposer un amendement, de même
qu'à tous les autres articles auxquels pourrait s'appliquer votre
motion...
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Chapitre II: Droits
linguistiques fondamentaux
M. Charron: M. le Président, je propose que l'article 2
soit adopté.
M. Lalonde: M. le Président, à moins qu'il y ait
d'autres opinants, ce n'est pas mon intention de retarder... Au contraire, j'ai
déjà dit que l'expression de ces droits fondamentaux, quant
à moi, m'apparaissait tout à fait correcte et souhaitable... J'ai
simplement un problème, c'est qu'on se trouve à créer des
droits, sinon on n'aurait pas d'article. Alors ma première question est
celle-ci: Est-ce que le gouvernement si je peux demander une opinion au
gouvernement croit que des droits sont créés par cet
article?
M. Laurin: M. le Président, des droits sont
créés par ces articles puisque, comme vient de le dire le
député de Marguerite-Bourgeoys, s'il n'y en avait pas, il n'y
aurait pas d'article, évidemment.
Quand nous créons des droits, nous pouvons prendre deux voies
possibles. Il y a celle qui consiste à créer une obligation
correspondante qui obligerait, par exemple, telle entreprise ou tel
établissement à respecter ce droit.
Il y a l'autre voie qui consiste, un peu comme les déclarations
des droits de l'homme ou les déclarations internationales l'ont fait,
à énoncer des droits par voies déclaratoires qui
constituent des principes sacrés que doivent ensuite appliquer,
avec toutes les mesures qu'ils croient possibles et pertinentes, les
divers éléments sociaux visés par ces droits.
Les deux techniques, comme on le voit, ont été
utilisées, selon le cas. Dans certains Etats, on fait suivre ces
déclarations de droits linguistiques fondamentaux d'articles qui
créent des obligations pour ceux qui ont la mission de les faire
respecter.
Dans certains autres Etats et dans certains organismes internationaux,
pour bien marquer le caractère sacré, justement, de certains
droits fondamentaux, on se contente de l'énoncé de droits
fondamentaux et il appartient ensuite à la société en
général et aux tribunaux aussi, évidemment, et
également à ceux qui sont visés, aux citoyens qui sont
visés par les droits qu'on leur reconnaît, de voir à les
faire respecter.
J'avoue que nous nous sommes posé la question, que nous avons
longuement discuté des diverses façons possibles d'aborder ce
chapitre. Nous aurions pu, évidemment, à la suite de l'article 6,
par exemple, introduire un autre article créant l'obligation
spécifique, à la cantonade, en général, à
toutes les organisations sociales qui existent dans l'Etat du Québec, de
respecter ces droits.
Nous n'avons pas voulu le faire parce que ceci aurait peut-être
enlevé, d'une certaine façon, le caractère sacré et
fondamental et déclaratoire à ce chapitre des droits
linguistiques fondamentaux, pensant quand même que les articles
étaient assez clairs pour constituer une indication, aussi bien à
l'endroit des citoyens qu'à l'endroit de toutes les institutions et aux
tribunaux également, pour bien marquer que ces droits, en tant que
droits fondamentaux, devaient être respectés.
Il est bien sûr que tous les autres articles qui suivent ont pour
effet d'expliciter ou de donner des effets juridiques précis à
l'exercice de tel ou tel de ces droits. Nous avons considéré
qu'il n'était pas nécessaire de l'expliciter davantage à
ce chapitre pour garder justement à ce chapitre son caractère
fondamental et sacré.
M. Lalonde: M. le Président, si vous permettez. Je ne veux
pas faire de débat là-dessus. Comme vous le voyez, c'est
simplement une inquiétude que j'ai quant à la capacité
d'appliquer ces articles pour que la loi soit bien faite et qu'il n'y ait pas
de doute quant à la validité des articles, surtout ceux qui
créent des droits linguistiques fondamentaux.
Je suis d'accord sur le caractère sacré des dispositions
de ce chapitre, mais il reste que, puisque c'est dans la loi, cela crée
des droits ou bien cela n'en crée pas, c'est une déclaration de
voeux pieux. A ce moment, il faudrait le dire. Si cela crée des droits,
comme le ministre vient de me le dire, à ce moment, nous sommes devant
une situation...
M. Laurin: Les droits sacrés, M. le député
de Marguerite-Bourgeoys, ne sont jamais des voeux pieux. La déclaration
des droits de l'homme n'est pas une déclaration pieuse.
M. Lalonde: Non. C'est sûr. Dans le domaine strictement
juridique...
M. Laurin: Oui, je sais.
M. Lalonde: Si cet article crée des droits, à ce
moment, nous sommes devant une situation, par exemple, où les
entreprises de 50 employés ou de moins de 50 employés, ne pouvant
pas invoquer l'article 130 pour procéder à une francisation
évolutive telle qu'imbriquée dans le projet de loi, sont dans une
situation différente, en ce que cet article 2 sera le seul auquel
pourront faire appel les citoyens pour que communiquent en français avec
eux diverses entreprises exerçant au Québec. C'est le
danger...
M. Laurin: Oui.
M. Lalonde: ...que, si on ne le restreint pas ou si on ne
l'explicite pas...
M. Laurin: Je ne pense pas que l'exemple que M. le
député de Marguerite-Bourgeoys a choisi est applicable. Parce que
dans le cas des entreprises de 30 employés, il y a plusieurs autres
articles, dans le projet de loi, qui leur font obligation de poser des gestes
précis qui leur donnent des obligations, qui leur prescrivent des
obligations très précises, même si les entreprises de 30
employés ne sont pas soumises à des programmes de francisation,
il y a quand même plusieurs articles qui se réfèrent
à leur pratique, aux gestes qu'ils doivent poser.
M. Lalonde: Oui, je comprends, aux communications avec le
personnel, par exemple. Mais j'aimerais quand même savoir si le
gouvernement est prêt à tenter de clarifier cette situation pour
que les citoyens soient très certains de l'étendue de leurs
droits.
M. Laurin: M. le Président, nous avons tenté de
clarifier justement, conformément au voeu qu'exprime le
député de Marguerite-Bourgeoys, ces intentions dans toute la
mesure du possible, dans les articles qui suivent, mais nous n'avons pas voulu
aller jusqu'à l'inscription d'un article qui inscrirait les obligations
correspondantes à chacun de ces droits. Parce que justement, nous
pensions que le reste de la loi pouvait avoir cet effet.
M. Lalonde: Nous sommes dans un domaine d'opinion juridique
à ce stade-ci et je...
M. Laurin: Nous avons longuement consulté à cet
égard.
M. Lalonde: Mais quand même, M. le Président, je
vais faire l'amendement suivant. Je comprends le scrupule que le ministre
exprime de ne pas recourir à un langage d'avocat, disons, dans une
déclaration aussi sacrée de droits fondamentaux; mais, quand
même, pour que la loi ait la valeur qu'on veut lui donner. J'en fais une
mo-
tion, M. le Président: Que l'article 2 soit modifié, en
ajoutant, à la fin, l'alinéa suivant: "cet article n'a d'effet
que dans la mesure prévue aux autres titres et chapitres de la
présente loi". Je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): Votre amendement s'il vous
plaît.
Un instant s'il vous plaît. Est-ce qu'on pourrait distribuer
copies aux membres de la commission? Alors l'amendement proposé par le
député de Marguerite-Bourgeoys techniquement suit les
règles de l'article 70, évidemment. C'est une motion d'amendement
à l'article 2 qui prévoit que l'article 2 soit modifié en
ajoutant, à la fin, l'alinéa suivant: "Cet article n'a d'effet
que dans la mesure prévue aux autres titres et chapitres de la
présente loi."
M. le député de Saint-Jacques, je voudrais qu'on soit
quand même bref, sur la recevabilité.
M. le député de Saint-Jacques.
M. Charron: Ce n'est pas sur la recevabilité, M. le
Président, que je veux intervenir.
Le Président (M. Cardinal): C'est sur quoi? Sur la
motion?
M. Charron: Sur la motion elle-même.
Le Président (M. Cardinal): Bien il faudrait que la
présidence la déclare recevable auparavant.
M. Charron: Je vous demande de statuer avant de me
reconnaître.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je vais statuer
immédiatement. Ce sera peut-être plus rapide cette fois-ci. Je
déclare techniquement recevable cette motion. M. le député
de Marguerite-Bourgeoys a le droit de parole le premier sur sa motion.
M. Lalonde: M. le Président, très
brièvement, parce que j'ai exprimé en préambule, avant de
présenter la motion, l'inquiétude que j'ai ici, ce n'est pas
négatif, ce n'est que pour tenter d'éviter le doute.
Ce chapitre est fondamental. D'ailleurs, les droits linguistiques
fondamentaux, le titre l'exprime très clairement, je comprends ce que le
ministre nous a exprimé tantôt qu'on veut conserver un
caractère sacré déclaratoire à ces articles, de 2
à 6... Il s'est assis entre deux chaises. On s'est abstenu de
s'asseoir.
M. le Président, je voudrais que le gouvernement considère
favorablement et positivement cet amendement parce qu'au fond il n'a comme
intention justement que de nous assurer que ces articles vont créer
réellement des droits dans les faits pour les citoyens. Autrement, on va
tenter, dans le doute, de faire reconnaître des droits en invoquant cet
article 2 et se retrouver peut-être devant un juge qui partagera
l'opinion du ministre et dira: Cela ne crée pas d'obligation. Mais que
de frustrations pour les citoyens, à ce moment-là, ne pouvant pas
recourir à d'autres articles, se rejetant sur l'article 2, de trouver
que cette loi-là, au fond, ne leur donne pas les droits que l'article 2
semblait leur donner! C'est extrêmement important d'éviter aux
citoyens ce genre de frustration quand il arrive justement devant un juge et
qu'on lui dit: C'est simplement un article déclaratoire, cela ne
crée pas d'obligation. Il faudrait que'ce soit plus clairement
indiqué, même si cela affecte un peu le caractère
sacré dans sa forme. Je pense qu'une loi, c'est une loi, ce n'est pas un
roman, et on doit bien se servir d'une technique législative qui n'est
pas incertaine, qui est claire, d'une méthode qui est acceptée et
qui va permettre à tous les citoyens de savoir exactement où ils
en sont.
Je ne veux pas aller plus loin, j'espère que le gouvernement va
recevoir mon amendement favorablement dans ce sens.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre de...
M. Charron: Je vous demanderais de reconnaître le ministre
de l'Education.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre de
l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il/s'agit d'une
proposition d'amendement essentiellement restrictive et négative,
quoique le député puisse dire. Ce chapitre qui énonce des
principes fondamental x, les droits reconnus aux Québécois, non
seulement est mis en oeuvre dans les chapitres qui le suivent, dans les
détails, mais il a également une valeur qu'il ne faudrait pas
négliger, bien que le député se montre prêt à
passer par-dessus bord. C'est la valeur déclaratoire et éducative
qu'il possède. S'il n'y avait pas eu, M. le Président, dans
l'histoire des droits de l'homme et des citoyens, la Déclaration
universelle des droits de l'homme, s'il n'y avait pas eu, dans la plupart des
constitutions modernes de plusieurs nouveaux Etats, des déclarations
ressemblant étrangement à celle que le ministre d'Etat a fait
inscrire au frontispice de son projet de loi, ces droits ne seraient pas
protégés comme ils le sont.
Si le député veut bien se référer aux
constitutions et à la législation d'un très grand nombre
d'Etat, il découvrira que souvent on y trouve un chapitre premier qui
énonce, de façon générale, les droits des personnes
et des citoyens. Ce sont ces précédents qui ont inspiré le
gouvernement dans l'énoncé des droits linguistiques fondamentaux
des Québécois.
A l'article 7, par exemple, on nous dit que le français est la
langue de la législation et de la justice au Québec. Le
député trouvera maints articles, dans le projet de loi, qui
viendront confirmer ce principe. De même pour les articles 2 à 6
qui, de fait, ne forment que l'ossature morale, j'allais dire
constitutionnelle, en quelque sorte, du projet de loi.
M. le Président, vouloir ajouter à ces dispositions
l'alinéa que nous propose le député qui se lit
comme ceci: "Cet article n'a d'effet que dans la mesure prévue aux
autres titres et chapitres de la présente loi" c'est
littéralement rabattre, abais-
ser le caractère fondamental que le gouvernement a voulu donner
à ce chapitre 2 du projet de loi no 101. C'est un peu comme si, dans les
lois ou les constitutions de nombreux Etats, après un
énoncé de principe qui a autant valeur juridique
qu'éducative, on allait ajouter à la fin du chapitre: "Cet
article n'a d'effet que dans la mesure prévue aux autres titres et
chapitres de la présente loi". C'est une disposition que nous ne
trouvons nulle part. Il n'y a aucun exemple d'une telle disposition dans la
législation des autres Etats, M. le Président. Elle est
essentiellement restrictive et négative. C'est la raison pour laquelle
nous voterons contre l'amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière, sur la motion d'amendement.
M. Biron: M. le Président, cette motion d'amendement,
à notre point de vue, n'apporte pas grand-chose de nouveau à ces
différents articles. Il faudrait certainement, si on l'adopte à
l'article 2, l'adopter à l'article 5, je crois, ou 4, finalement, tout
le long du présent projet de loi. Or, moi aussi, comme le ministre de
l'Education, j'y vois une motion d'amendement plutôt négative. On
dit tout de suite, après avoir été très positif
vis-à-vis du droit de recevoir en français des services, soit de
l'administration, des entreprises, des ordres professionnels ou autres, on dit:
"On a le droit de recevoir cela, mais ce n'est pas vrai". Il y a un non tout de
suite après.
Doit-on restreindre l'application véritable du principe, du droit
pour toute personne de recevoir en français des services? Doit-on le
restreindre après cela, selon les autres choses qui pourraient arriver
par la suite? A notre point de vue, M. le Président, on ne doit pas
restreindre le droit qu'a un citoyen du Québec de recevoir en
français des services.
Considérant ce chapitre de droits linguistiques fondamentaux
on en viendra un peu plus tard sur le fond du sujet si on
acceptait la motion d'amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys, cela aurait l'air un peu négatif, après
avoir été positifs tout le long vis-à-vis de ce chapitre
II en particulier. Nous voterons contre la motion du député de
Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: M. le Président, la première
réaction que j'ai devant cette motion d'amendement, c'est de constater
que le député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas encore sorti d'un
certain style de loi, celui de la loi 22, à savoir qu'après le
premier énoncé de principe, tout se tourne en "néanmoins,
cependant, toutefois, or, mais", c'est-à-dire que tout
énoncé de principe est aussitôt restreint par l'application
d'une seconde loi qui est incluse indirectement dans une première. C'est
ainsi qu'on retrouve, dans le même style: "Cet article n'a d'effet que
dans la mesure prévue". Je me serais attendu dans le style ancien
à: "Néanmoins, cet article n'a d'effet... Cependant cet article
n'a d'effet... Toutefois cet article n'a d'effet..." C'était le style de
la loi 22.
Ceci dit, deuxième petite remarque, je pense que le projet de loi
101 est essentiellement deux choses, la première, c'est une charte et,
la seconde, c'est une loi. C'est une charte pour autant qu'il y a un chapitre
premier et un chapitre deuxième qui énoncent et une loi qui
encadre la vie quotidienne.
De ce point de vue c'est ma troisième remarque, qui est
greffée sur la deuxième tout style déclaratoire,
que ce soit charte ou constitution, qu'on prenne des principes
généraux, le peuple X est souverain, bien sûr, qu'il est
souverain, sauf que l'ensemble des lois ou des règlements vont lui
imposer, par exemple, d'attacher sa ceinture de sécurité dans la
voiture, sa souveraineté sera limitée par toute une série
d'ententes internationales.
On trouvera aussitôt après: "II détermine
librement..." librement, par exemple, les ententes avec ses voisins". Toutefois
on sait que, par une série d'ententes, cette liberté sera
assujettie à la Charte de I"ONU, aux règlements de l'UNESCO, aux
ententes du GATT, etc., et tous les traités en somme.
Je crois que le député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas
saisi la démarche fondamentale du projet de loi qui, d'une part,
constitue une charte, et d'autre part et on y arrivera tantôt
constitue une loi. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Sur la motion, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, la réaction du
gouvernement confirme une inquiétude que plusieurs avaient,
jusqu'à maintenant, voulant que cette loi était un geste de
séparation. On veut écrire une constitution, on veut
écrire un traité. Je pensais qu'en vertu des obligations, des
prérogatives de membres de cette Assemblée nationale et de cette
commission parlementaire, j'étais appelé à étudier
un projet de loi que des juges, des tribunaux seront appelés, eux,
à appliquer. J'aurais désiré bonifier la loi, mais il
semble qu'on veuille faire de la littérature. Si c'est cela, M. le
Président, il va falloir que le gouvernement prenne ses
responsabilités un jour.
Si on veut faire un chapitre de la constitution d'un Québec
éventuellement souverain dans l'esprit des ministres, c'est une chose,
qu'on le dise. Si on veut faire une loi, alors, je suis prêt à
étudier une loi. Malheureusement, je ne suis pas en mesure de participer
ici... ce n'est pas le mandat qu'on a eu. Je pourrais vous le demander. M. le
Président, est-ce qu'on a eu le mandat de l'Assemblée nationale
d'étudier un projet de loi, article par article ou de composer une
constitution? Je vous le demande.
Il me semble que la réaction du gouvernement n'est pas
rassurante. Tout ce que je pense... d'ailleurs, le style, justement, le nouveau
style que le député de Terrebonne me reproche de ne pas avoir
compris, on le retrouve partout dans ce pro-
jet de loi. Je serais surpris que c'est malheureux, mais il y en
a une technique législative, il y a un méthodologie pour faire
des lois les experts du gouvernement se soient déclarés
satisfaits de la technique législative utilisée dans ce projet de
loi.
C'est un projet de loi mal rédigé. Ce serait un roman bien
fait, mais c'est un projet de loi mal rédigé. C'est notre devoir
ici, comme législateur, de faire en sorte que cette loi reçoive
une application juste et efficace pour le bénéfice des
citoyens.
Si on veut faire un traité, de grandes déclarations, on
fait cela dans le préambule. C'est entendu, c'est réglé et
la présidence s'est même exprimée là-dessus hier. Il
y a des préambules.
Une Voix: La Charte des droits et libertés de la
personne.
M. Lalonde: Dans la Charte des droits et libertés de la
personne, on dit quelles sont les limites d'application. On le dit exactement.
Vous allez peut-être trouver des "néanmoins" et des "toutefois"
dans la Charte des droits et libertés de la personne parce que...
M. Morin (Sauvé): Oui, mais pas ce que vous
suggérez!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: On peut suggérer une autre formule ou un
libellé différent à l'amendement, mais l'esprit et
l'intention de l'amendement, c'est justement de rendre cet article 2
réel, de lui donner force de loi, de lui enlever, peut-être,
malheureusement, le caractère, le style déclaratoire,
sacré, mais de lui donner quand même une valeur légale.
Elle n'en a pas actuellement. Elle n'en aura pas.
M. Morin (Sauvé): Quelle énormité!
M. Lalonde: Elle n'en aura pas parce qu'elle contredit d'autres
articles.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: Elle couvre d'autres... Il y a des contradictions
manifestes. Si le gouvernement veut conserver...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, avant que le dialogue ne s'établisse, ce qui n'est
pas conforme au règlement, je déclare que les travaux de cette
commission sont ajournés sine die jusqu'au nouvel avis ou à la
nouvelle motion du leader parlementaire du gouvernement.
(Fin de la séance à 13 heures)
Reprise de la séance à 16 h 30
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Techniquement, nous commençons une nouvelle séance. Comme
dirait Claudel: Ainsi donc encore une fois... La commission parlementaire de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications. Je vais
donc faire l'appel des membres et vérifier les remplacements.
M. Alfred (Papineau): M. Bertrand (Vanier). M. Bertrand:
Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Charbonneau
(Verchères), M. Charron (Saint-Jacques).
M. Charron: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes), M. Dussault (Châteauguay).
M. Dussault: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Grenier
(Mégantic-Compton), M. Guay (Taschereau), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys).
M. Lalonde: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Laplante (Bourassa).
M. Laplante: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Laurin (Bourget), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé) remplacé par M.
Biron (Lotbinière).
M. Charron: M. Morin (Sauvé) remplace M. Paquette
(Rosemont).
Le Président (M. Cardinal): Justement j'y arrive. M.
Paquette (Rosemont) remplacé par M. Morin (Sauvé), M. Roy
(Beauce-Sud), M. Saint-Germain...
Mme Lavoie-Roux: M. Goldbloom (D'Arcy McGee) remplace M.
Saint-Germain.
Le Président (M. Cardinal): M. Saint-Germain
(Jacques-Cartier) est remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee); M.
Samson (Rouyn-Noranda).
C'est une nouvelle séance qui sera suspendue à 18 heures
et qui reprendra, normalement, à 20 heures. Au moment de l'ajournement,
nous en étions à une motion d'amendement à l'article 2
proposé, si je n'erre pas, par le député de
Marguerite-Bourgeoys et qui se lisait comme suit: "Que l'article 2 soit
modifié en ajoutant à la fin l'alinéa suivant: Cet article
n'a d'effet que dans la mesure prévue aux autres titres et chapitres de
la présente loi". Au moment de l'ajournement, per-
sonne n'avait demandé la parole, mais j'avais déjà
reconnu... Oui, M. le député de Saint-Jacques.
M. Charron: Je m'excuse. Je déteste vous interrompre,
vous, plus que quiconque de la commission.
Le Président (M. Cardinal): Vous êtes trop
gentil.
M. Charron: Mais puisqu'on fait la liste, je voudrais vous
mentionner que M. Fallu (Terrebonne) remplace M. Dussault
(Châteauguay).
Le Président (M. Cardinal): D'accord. C'est le temps de le
faire. Vous avez parfaitement le droit de le faire. M. Dussault
(Châteauguay) remplacé par M. Fallu (Terrebonne). Ces choses qui
semblent sans importance en ont beaucoup au bout du compte. J'avais reconnu,
à ce moment, sur cette motion, M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: M. le Président, pour les raisons qui ont
été savamment évoquées par mon collègue de
Terrebonne, nous n'appuierons pas cet amendement parce qu'il a une formulation
restrictive qui atténue, qui diminue la portée des articles
déclaratoires.
Je ne comprends pas que le député de Marguerite-Bourgeoys
se scandalise ou s'indigne si facilement puisque le Québec
possède déjà sa contribution, même si elle est
enveloppée, enterrée dans une autre constitution qui est l'Acte
de l'Amérique du Nord britannique. C'est tellement vrai que le
Québec possède sa propre constitution que les gouvernements
précédents l'ont déjà modifiée lorsque, par
exemple, l'article 80 qui parlait de comtés protégés a
été aboli, lorsque l'article 118, je crois, qui parlait du
Conseil législatif a été aboli également par un
gouvernement antérieur. Tous les constitutionnalistes s'entendent pour
dire que l'article 92 équivaut, en fait, à ce qu'on pourrait
appeler, d'une façon substantielle, la constitution du Québec. Il
n'est donc pas erroné de parler d'une constitution du Québec que
le gouvernement du Québec peut d'ailleurs amender, selon la plupart des
juristes, des spécialistes en la matière. Donc, on ne peut pas
s'étonner que certains articles de nos projets de loi aient une
portée plus constitutionnelle que d'autres, même si le
Québec n'a pas encore sa propre constitution formelle comme d'autres
pays la possèdent déjà.
Ceci dit, M. le Président, nous nous opposons également
à cet article, encore une fois parce qu'il courrait le risque de laisser
penser que cette déclaration qui a une portée éducative,
comme l'a souligné le député de Sauvé, et qui a
aussi une portée éducatrice en ce sens qu'elle aide les tribunaux
à interpréter la loi, doit rester telle qu'elle est.
Evidemment, comme je l'ai dit dans ma première intervention, il
aurait été possible de faire davantage, de créer des
obligations correspondantes aux droits. Nous l'avons envisagé, mais nous
pensons que, pour le moment en tout cas, jusqu'à plus ample
informé, il n'est pas nécessaire d'aller aussi loin, que cela
pourrait compliquer la situation ou pourrait même faire taxer la loi de
plus répressive qu'elle ne l'est et Dieu sait que les membres de
l'Opposition ne se sont pas gênés pour la critiquer à cet
égard.
Nous pensons que le libellé actuel de la loi répond aux
buts, aux motivations, aux intentions du gouvernement. S'il fallait l'amender
dans le sens du problème qu'a soulevé le député de
Marguerite-Bourgeoys je ne nie pas qu'il n'y a pas problème
je pense qu'il faudrait adopter une formule beaucoup moins restrictive
que celle qu'il a employée et qui est évidente dans le
libellé même de son article, lorsqu'il emploie, par exemple,
l'expression "ne que"; il aurait fallu employer une formule positive, comme,
par exemple, dire que les obligations qui sont créées pour
permettre l'exercice des droits prévus au chapitre des droits
linguistiques fondamentaux sont définies dans les autres chapitres qui
le suivent, mais encore une fois ceci ne nous paraît pas
nécessaire pour le moment. Pour ces raisons, nous votons contre
l'amendement.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie, sur la motion d'amendement.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je pense qu'au point de
départ il semble y avoir une certaine ambiguïté. Je voudrais
d'abord établir comme principe que je suis d'accord avec l'article 2
dans son esprit qui veut l'établir comme un droit fondamental de toute
personne au Québec ayant droit de communiquer en français. Mais
il reste néanmoins qu'il y a une ambiguïté dans le sens que
j'entendais le ministre de l'Education dire au ministre d'Etat au
développement culturel: "Ceci fera partie de la constitution du
Québec".
J'ai bien l'impression qu'on ne discute pas sur la même base.
Notre préoccupation c'est que, dans la mesure du possible, ce droit
fondamental qu'on établit puisse rester, mais que, de l'autre
côté, on ait une loi qui crée le moins d'abus possible,
tant pour les uns que pour les autres.
En dépit des réassurances que le ministre nous a
données ce matin voulant que, même pour les entreprises de
cinquante employés et moins, il y a d'autres dispositions dans la loi
qui viennent aussi apporter certaines contraintes ou certaines obligations,
certaines précisions à ces plus petites entreprises. Il reste
vrai, néanmoins, qu'il sera toujours possible pour un individu,
dès demain matin, en admettant qu'on adopterait le projet de loi 101 ce
soir, alors qu'il n'y a aucun délai de prévu pour ces gens pour
arriver à une francisation progressive, comme c'est le cas pour les plus
grandes entreprises, qui se présente, je ne sais pas, à
l'épicerie du coin de faire immédiatement valoir ce droit
fondamental établi par la loi 101.
Comme vous le signaliez je pense que c'est vous, M. le ministre
d'Etat au développement culturel il pourra toujours aller devant
les tribunaux pour faire valoir ses droits et le juge lui répondra:
C'est déclaratoire, toute personne a le droit de communiquer, mais cela
ne va pas au-
delà de ce qui est prévu dans la loi. Il me semble que
c'est là une démarche un peu inutile et un peu frustrante aussi.
C'est vraiment dans cet esprit que je pense que le député de
Marguerite-Bourgeoys a présenté cet amendement qui n'est pas de
vouloir diminuer l'esprit de cet article 2, mais vraiment de faire de la loi un
outil qui puisse être le plus facilement compris et applicable.
Je vous entendais dire: Vous croyez que nous rendions cela plus
restrictif, alors que vous dites que vous nous avez souvent blâmés
que la loi avait un caractère trop restrictif; c'est votre
interprétation, et je me permets de différer d'opinion avec vous.
Je pense que ce n'est pas dans le but de rendre la loi plus restrictive, au
contraire, c'est de rendre la loi plus facilement applicable et plus facilement
respectée de façon qu'elle cause le moins de tracas et de
tracasseries inutiles.
Dans ce sens, je suis d'accord avec vous. Peut-être que la
formulation aurait pu être différente, pour qu'elle soit plus
positive, au lieu d'avoir une tournure négative, si on veut, mais,
fondamentalement pour moi, l'esprit de ce que vous venez de formuler et
l'esprit de l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, font
de même à cet égard. Une formulation peut être
meilleure que l'autre, je l'admettrai. Pour ces considérations qui me
semblent importantes au moment où, et je vais le répéter
car je l'ai déjà dit, une loi doit répondre le plus
possible au consensus général, elle doit être la plus
claire possible pour pouvoir être suivie le plus fidèlement
possible et amener le plus grand nombre de citoyens à la respecter.
C'est dans ce sens que j'appuierai la motion de mon collègue de
Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je crois que l'amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys est tout à fait dans
l'ordre pratique et équitable. Il ne va pas contre le principe de
l'article 2, mais il prend en considération les réalités
et les problèmes pratiques que certaines petites entreprises auront
à vivre dès que la loi sera en vigueur. On pourrait commencera
demander des explications sur ce que veut dire le gouvernement. C'est vague,
"diverses entreprises". Pourquoi le gouvernement, dans un autre article,
donne-t-il un délai aux entreprises de 50 employés et plus, dans
le processus de la francisation, tandis qu'il semble pénaliser
immédiatement une petite entreprise qui, d'une façon ou d'une
autre, ou qu'elle fasse affaire seulement dans un domaine dans un secteur
très restreint, et ne peut pas se permettre d'engager des
employés additionnels pour donner ce service? Un point aussi que le
gouvernement n'a pas prévu, c'est d'accorder une période de
transition, avant de donner effet au principe contenu dans l'article 2. Je
crois que personne, de ce côté-ci de la table, ne pose des
questions sur le principe de l'article 2. C'est un principe qui, je crois, ne
va peut-être pas assez loin sous certains aspects, et je vais
l'expliquer, mais c'est un principe acceptable que toute personne a le droit de
communiquer en français avec les différents organismes
spécifiés dans cet article.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le
député de Mont-Royal, parlez surtout de l'amendement plutôt
que de l'article. Nous reviendrons à l'article par après.
M. Ciaccia: C'est difficile, M. le Président, de parler de
l'amendement sans parler de l'article.
Le Président (M. Cardinal): J'admets que c'est
difficile.
M. Ciaccia: C'est un amendement à un article, ce n'est pas
un amendement dans un vacuum.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais quand
même.
M. Morin (Sauvé): S'il fait l'éloge de l'article,
M. le Président, nous pouvons bien l'endurer.
Le Président (M. Cardinal): D'accord! S'il y a
consentement.
M. Ciaccia: Je vais y venir, je vais y venir.
M. Lalonde: Mais la présidence n'est pas censée
avoir de règles pour cela.
Une Voix: Attendez! Attendez!
Le Président (M. Cardinal): II y a l'article 39 qui oblige
à faire observer le règlement. M. le député de
Mont-Royal, c'est seulement une petite remarque, ce n'est pas une critique.
M. Ciaccia: Je ne la prends pas comme une critique, je vous en
remercie, M. le Président. Il y a certains principes, tout de
même, que souligne l'amendement. Le député de Sauvé,
si je me souviens bien a dit ce matin, qu'on ne pouvait pas faire de changement
à cet article parce que c'était comme une charte des droits
fondamentaux. Il s'est référé aux chartes d'autres pays,
au préambule, etc., qui accordaient certains droits fondamentaux aux
citoyens. Il a partiellement raison. Des chartes du genre de celles auxquelles
se référait le député de Sauvé donnent et
accordent des droits, c'est vrai, mais je voudrais rappeler au
député de Sauvé, M. le Président, et ce rappel est
indiqué par l'amendement proposé par le député de
Marguerite-Bourgeoys, qu'une charte du genre dont le député de
Sauvé a parlé accorde des droits, n'enlève pas des
droits.
Il y a une grande différence entre ces deux concepts. Vous
essayez de créer un mythe, vous donnez l'illusion que vous accordez des
droits, avec cette charte, sans en enlever. Si vous examinez les grandes
chartes que vous n'avez pas nommées, mais dont vous avez parlé,
aucune de ces chartes n'a enlevé de droits à qui que ce soit,
elles en ont accordé. Elles n'ont pas enlevé de droits à
des collectivités.
Naturellement, M. le Président, si on part des
prémisses qu'il y a une collectivité qui doit
disparaître, le projet de loi n'aurait pas tellement besoin
d'amendements, bien qu'il restreigne certaines libertés individuelles,
même pour les membres de la majorité, mais cela part de ces
prémisses.
Nous, nous ne partons pas de ces prémisses. C'est pour cela que
nous présentons un amendement d'ordre pratique. Nous partons des
prémisses qu'il y a au moins une autre collectivité au
Québec, qu'il y a des gens qui travaillent, qui ont des entreprises
aujourd'hui, et qui n'ont pas eu l'occasion de donner des services dans l'autre
langue, mais qui ont certains droits, au moins des droits moraux, si vous ne
voulez pas parler des droits légaux, qui, d'après les coutumes
mêmes et l'usage de notre constitution, pourraient leur être
accordés.
Je crois que le ministre d'Etat au développement culturel parle
d'une charte, d'une constitution d'un pays. Même si cela est le cas, M.
le ministre, est-ce que ce serait nécessaire dans votre pays, par votre
nouvelle charte, d'enlever des droits a qui que ce soit? Même si nous
avions un régime politique différent je n'admets pas que
nous allons l'avoir je crois que ce serait secondaire.
Quelle sorte de société allons-nous avoir dans ce
régime? Allez-vous promulguer des articles, des projets de loi où
vous nierez la réalité qui existe? C'est dans ce but que nous
essayons d'apporter certains amendements.
Nous ne voulons pas enlever, M. le Président, les droits à
la majorité. Nous voulons reconnaître les principes qui sont
contenus dans certains de ces articles, mais les modalités et l'esprit
dans lesquels ils sont rédigés, leur effet... Vous avez dit que
l'article 2 je ne me souviens pas si c'est vous ou si c'est le
député de Sauvé, le ministre de l'Education avait
une portée éducative, de la façon dont il est
rédigé. C'est pour cela que nous faisons l'amendement, non
seulement a-t-il une portée éducative, mais il a une
portée punitive.
La question de punir des gens, cela ne devrait pas être l'objet
d'une loi. Dans son amendement, le député de
Marguerite-Bourgeoys, en plus de vouloir éviter les contradictions
manifestes qui existent entre l'article 2 et, je crois, les articles 130 et les
suivants, dans le chapitre de la francisation, évite aussi l'effet
punitif, parce qu'il y aurait un délai accordé avant de pouvoir
faire ceci. On ne peut pas, du jour au lendemain, changer la
réalité. Même à la longue, c'est parfois difficile,
mais il y a une réalité ici qu'on ne semble pas prendre en
considération. Je suppose qu'à des fins politiques, à des
fins émotives, c'est beau de dire: Regardez, nous faisons un tel article
d'un certain principe, mais il y a aussi la réalité des
choses.
Pour ces raisons, M. le Président, je dirais que l'amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys est tout à fait logique,
tout à fait juste, et tout à fait équitable. Il n'ira pas
à l'encontre du principe de l'article 2, mais permettra l'application de
cet article d'une façon modérée, en tenant compte des
problèmes que les individus, qui vont être affectés par cet
article, vont avoir durant la période de transition.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que la motion...
M. Laurin: M. le Président, un dernier mot.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre d'Etat au
développement culturel. Il vous reste en fait seize minutes, si vous les
employez.
M. Laurin: J'ai peine à me retrouver dans le salmigondis
ou la macédoine d'arguments qui viennent de nous être soumis, mais
je vais essayer de m'y retrouver laborieusement et d'y répondre
brièvement.
Je veux d'abord dire que cette loi, même si elle porte le nom de
Charte de la langue française, n'est quand même pas la
constitution du Québec. C'est plus tard qu'on s'occupera de cela.
Mme Lavoie-Roux: C'est une partie, je pense.
M. Ciaccia: C'est une partie de votre constitution.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: On ne peut véritablement pas établir
une équivalence entre une constitution éventuelle et cette
loi.
M. Ciaccia: Vous pourriez en faire une plus libre.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Laurin: Deuxièmement, M. le député de
Mont-Royal nous dit que nous n'avons pas prévu de phase de transition,
en mentionnant les petites entreprises. Il devrait savoir que, dans les
dispositions transitoires et diverses, à partir de l'article 199, il y a
plusieurs mesures de transition qui sont prévues, par exemple, à
l'article 11, aux articles 34 et 35, pour les propriétaires de
panneaux-réclame ou d'enseignes lumineuses, etc. Il y a donc des mesures
de transition prévues.
Troisièmement, M. le député de Mont-Royal nous
parle des droits que nous accordons. Si nous accordons des droits aux
Québécois, ce sont des droits véritables en particulier
aux Québécois francophones. S'il a paru nécessaire au
gouvernement d'inclure ces droits dans la loi actuelle, c'est que
précisément ces droits, qui ont toujours été
implicitement reconnus à la majorité du Québec, en
réalité, dans leur exercice, n'ont pas été
reconnus, ont même été souvent violés,
bafoués, et beaucoup de francophones se trouvaient dans une
impossibilité totale de les exercer ou de les voir reconnus. C'est la
raison pour laquelle il est absolument nécessaire, pour ne pas dire
urgent, d'en parler et d'une façon solennelle, dans ce chapitre.
Lorsque le député de Mont-Royal dit qu'une charte ou une
constitution ne fait qu'accorder des droits et n'en enlève pas, je ne
crois pas que ce
soit vrai. Dans toutes les déclarations internationales que nous
avons ou dans toutes les constitutions que nous avons pu regarder, il y a bien
sûr des droits qui sont octroyés, mais il y a toujours des droits
qui sont limités à tout le moins, puisque, quand on accorde des
droits à une personne, souvent, on se trouve à limiter l'exercice
du droit d'un autre.
M. Ciaccia: Priver totalement une collectivité, c'est la
première charte qui fait cela.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Je m'excuse...
M. Ciaccia: Par exemple... Excusez-moi.
Le Président (M. Cardinal): ...je l'ai mentionné,
pas de dialogue, même si la table est étroite.
M. Laurin: Par exemple, quand on a aboli l'esclavage aux
Etats-Unis, on a limité sérieusement le droit des esclavagistes.
Quand on accorde aux femmes de plus en plus de droits qui ne s'incarnaient pas
dans la réalité, on se trouve à dire aux hommes:
Tassez-vous, les femmes arrivent. Elles ont droit de faire respecter les droits
qu'elles ont. Lorsqu'on interdit à un mari de battre sa femme, on limite
sérieusement le droit qu'il s'était octroyé.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre!
Mme Lavoie-Roux: C'est écrit dans la loi? Le
Président (M. Cardinal): A l'ordre!
M. Laurin: Non, ce sont des exemples, des analogies que je livre
à la considération du député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Vous badinez, M. le ministre. Je ne répondrai
pas, c'est trop sérieux.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Une Voix: Vous parlez de macédoine...
M. Laurin: Sur ce, M. le Président, j'ai l'impression que
les arguments du député de Mont-Royal, tout en nous
entraînant loin du sujet, parce que, dans ce chapitre, il s'agit
simplement d'affirmer les droits linguistiques fondamentaux... Tout en
reconnaissant que vous nous entraînez loin du sujet, je conclus en disant
qu'il était parfaitement pertinent, opportun, d'inclure ce chapitre. Il
m'apparaît urgent de l'appuyer.
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mont-Royal, sur une question de règlement.
M. Ciaccia: Article 96. La raison pour laquelle j'invoque
l'article 96, c'est...
Le Président (M. Cardinal): Vous avez raison, vous avez le
droit.
M. Ciaccia: Merci. Dans mon intervention, j'ai dit qu'il n'y
avait pas de mesure transitoire. Je me référais à
l'article 2. Je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas de mesure transitoire dans
tout le projet de loi, même je me suis référé
à certaines mesures transitoires. Alors, je ne voudrais pas que mes
propos soient faussement rapportés par le ministre. Quand le ministre se
réfère aux articles sur les enseignes lumineuses, je ne crois pas
que ce soit vraiment...
Une Voix: Lumineux.
M. Ciaccia: Non, je ne dirais pas cela, mais ce n'est pas
relié à l'article 2. Ce n'était pas pertinent à
l'article 2. Mes propos selon lesquels il n'y avait pas de mesure transitoire
s'appliquaient à l'article 2 et ils s'appliquent encore.
M. Lalonde: A moins qu'il y ait d'autres intervenants...
Le Président (M. Cardinal): Qui a demandé la
parole? M. le député de Mégantic-Compton, sur la motion
d'amendement.
M. Grenier: Deux minutes, M. le Président, pour vous dire
que cet article 2 et les autres, 3, 4, 5 et 6, sont des articles d'ordre
déclaratoire, à mon sens. Ils font partie d'un chapitre
d'application universelle. Si nous voulons rendre la loi plus restrictive ou
encore plus facilement viable, ou applicable, je pense que nous le ferons
à un autre moment, à un moment plus opportun, dans d'autres
titres de chapitre. Nous aurons l'occasion d'intervenir et, bien sûr,
nous voterons contre cette motion du député de
Marguerite-Bourgeoys. Nous traitons ici de droits fondamentaux. Quand nous
parlerons, aux autres titres de chapitre, de l'articulation, de la politique
linguistique, de son application, des organismes qui auront à
l'appliquer, alors, on pourra s'assurer du domaine de son application. Je ne
sais pas, mais j'imagine que l'Opposition libérale n'a pas l'intention
de faire des amendements sur chacun des articles à aller jusqu'à
6 puisque cela va aller contre les déclarations que ces gens ont faites,
à savoir qu'ils ne voulaient pas faire perdre le temps de la Chambre. On
a l'impression, à écouter ces discours qui se font à votre
gauche, tout près de vous, qu'on perd énormément de temps
sur des articles, alors qu'on se dit, au départ, complètement
d'accord. Cela me fait un peu penser à chez nous; on avait une
espèce de Baptiste dans le village qui était affublé de
tous les défauts physiques y compris celui de bégayer et qui nous
disait: As-tu un quart d'heure que je te parle deux minutes? Si vous voulez, M.
le Président, nous voterons contre, et on serait prêt, quant
à nous, à passer au vote.
M. Charron:... l'amendement aux voix.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, il y a d'autres
opinants qui se sont manifestés à la présidence. Je
voudrais simplement savoir, entre les députés de Mont-Royal et de
Marguerite-Bourgeoys, entre lesquels mon coeur balance, lequel des deux prendra
la parole le premier. M. le député de Mont-Royal, il vous reste
cinq minutes.
M. Claccia: Ce n'est pas la question. Merci, M. le
Président, ce n'est pas que je veuille prendre toutes mes cinq minutes,
mais nous sommes au début du projet de loi et peut-être qu'il
serait bon... Je parle sur l'amendement. Je pourrais en faire une question de
règlement, mais, si vous me le permettez, cela pourrait peut-être
nous aider dans nos travaux...
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que vous en faites une
question de règlement?
M. Ciaccia: Je voudrais faire certains commentaires sur
l'amendement, mais cela se rapporte aux propos du député de
Mégantic-Compton. Je crois qu'on devrait se souvenir...
Le Président (M. Cardinal): Vous n'en faites pas une
question de règlement. Vous avez encore cinq minutes, par
conséquent; exprimez-vous directement.
M. Ciaccia: Très bien, je ne les prendrai pas toutes. Si
nous avons jugé bon d'apporter cet amendement, c'est que nous l'avons
jugé nécessaire; ce n'est pas pour faire un filibuster ou prendre
du temps. M. le Président, je crois que la population a le droit
d'exiger que l'Union Nationale réalise que ce n'est pas le Parti
libéral qui est le gouvernement, que c'est le Parti
québécois qui est le gouvernement et je pense que ce serait plus
productif... Je ne fais pas une critique dans le but de faire une critique,
mais peut-être que cela pourrait nous aider tous, tous les membres, dans
nos délibérations; on devrait...
M. Grenier: Brièvement, je ne veux pas être...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Mégantic-Compton, sur une question de
règlement. Une question de règlement, n'est-ce pas?
M. Grenier: Oui, bien sûr, sur ce que vient de dire le
député de Mont-Royal.
Le Président (M. Cardinal): C'est l'article 96 que vous
invoquez, parce que vous venez de parler. D'accord.
M. Ciaccia: Ce n'est pas un règlement, cela.
M. Grenier: Je ne voudrais pas qu'on comprenne qu'on ne voudrait
pas qu'il y ait d'amendement, sauf qu'il me semble qu'on est soudoyé
ici. On a l'air de penser que cela nous prend trop de temps à
comprendre. Je ne voudrais pas autant d'explications de la part du Parti
libéral. On comprend plus vite que cela.
M. Ciaccia: M. le Président, ce n'est pas une explication,
mais...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: ...nous avons fait cet amendement parce que nous le
jugions nécessaire. Si le député de Mégantic se
trouve plus à l'aise de l'autre côté de la table, qu'il
traverse de l'autre côté de la table.
M. Charron: M. le Président, je pense que cela a plus
l'air de la Ligue du vieux poêle que n'importe quoi d'autre.
M. Ciaccia: Je pense que la population est tannée de voir
des chicanes seulement de ce côté-ci de la table. Qu'on
étudie le projet de loi, qu'on fasse ses commentaires sur les articles
sans se sentir obligé de dire: un parti est bon et l'autre parti n'est
pas bon. C'est seulement cela, depuis le début, que fait l'Union
Nationale. Parlons du projet de loi.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Mont-Royal, les commissions parlementaires en cette
salle 81-A ont une longue tradition de ces usages. C'est pourquoi je les
permets. Il est sûr que les formations politiques ont le droit de
s'attaquer alors que les hommes ne sont pas censés le faire. Cela
comprend les dames, Mme le député de L'Acadie. D'ailleurs, c'est
à vous que je donne la parole.
Mme Lavoie-Roux: Je passe, M. le Président, mais pas
à cause des interventions du député de
Mégantic-Compton.
M. Lalonde: Je pense que j'avais demandé la parole
après le député...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, est-ce que je pourrais donner la parole à Mme le
député de L'Acadie?
Mme Lavoie-Roux: J'ai fini.
M. Lalonde: Elle a dit qu'elle passait.
Le Président (M. Cardinal): D'accord! M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, si on peut juger, de la
façon que l'Union Nationale a compris lors du débat sur l'article
1, ce n'est pas de vingt minutes qu'on aurait besoin, mais c'est de vingt
heures...
M. Grenier: ...
M. Lalonde: ...pour les droits fondamentaux.
Je pense que l'Union Nationale est tellement heureuse d'avoir la chance
de voter contre quelque chose ou pour quelque chose, depuis deux jours que ces
députés s'abstiennent, qu'ils ont tellement hâte de dire
contre tantôt...
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que vous parlez sur la
motion?
M. Lalonde: Oui, et ils veulent voter contre, M. le
Président, alors...
Une Voix: ...parler contre la motion.
M. Lalonde: Plus sérieusement, je comprends les
interventions, plus particulièrement, celles du ministre d'Etat, et je
me réfère plutôt à celle qu'il a faite avant la
suspension à 13 heures. Il a dit que, selon les avis juridiques qu'il a
reçus, les articles 2 à 6 inclusivement ne créeraient pas
d'obligations correspondantes. Donc, on désire que cela demeure de la
littérature, que cela demeure déclara-toire...
Une Voix: D'éducation.
M. Lalonde: D'éducation; bien, j'ai mal compris, mais,
à ce moment-là, je pense...
M. Morin (Sauvé): Vous avez mal compris.
M. Lalonde: ...si cela crée des droits, donc, s'il y a des
obligations correspondantes, mon amendement est d'autant plus pertinent et
justifiable parce qu'à ce moment-là, il contredit les articles 2
et 6, surtout l'article 2 restons à l'article 2, M. le
Président, c'est là que se trouve l'amendement il
contredit les articles 30 et suivants. Si c'est cela qu'on veut, jeter la
population dans la confusion, faire des déclarations, faire de la
littérature et ne pas s'imposer une méthode, une technique
juridique, une technique législative qui nous permettrait de
légiférer clairement comme on doit le faire, de créer des
droits clairs, à ce moment-là, ceux qui veulent rester dans
l'ambiguïté, qu'ils votent contre. C'est ce que j'ai compris.
M. Charron: Je propose que vous mettiez l'amendement aux voix, M.
le Président.
Le Président (M. Cardinal): S'il n'y a pas d'autres
intervenants. Alors, l'amendement est mis aux voix. Demandez-vous que je fasse
l'appel nominal?
M. Charron: Non, ce n'est pas nécessaire.
M. Lalonde: Mais je pense que l'Union Nationale aimerait voter
contre.
Le Président (M. Cardinal): Je vais faire l'appel nominal.
Alors, nous votons sur la motion d'amendement de M. le député de
Marguerite-Bourgeoys. Je pense qu'il n'est pas nécessaire que je relise
l'amendement qui modifierait l'article 2. Je vais simplement faire l'appel
nominal et aussi rapidement que possible. Alors, pour ou contre, M. le
député de Papineau?
M. Alfred: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Vanier. M. le député de Verchères. M. le
député de Saint-Jacques.
M. Charron: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Tout contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Contre.
M. Lalonde: Abstention.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourget.
M. Laurin: Contre.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé.
M. Morin (Sauvé): Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Beauce-Sud. M. le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: En faveur, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Rouyn-Noranda? La motion est rejetée.
M. Charron: M. le Président, je propose l'adoption de
l'article 2.
Le Président (M. Cardinal): Cette motion d'adoption de
l'article 2 sera-t-elle adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, j'aurais quelques commentaires
sur l'article 2 et ce seront les commentaires pour nous pour les articles 3, 4,
5 et 6; nous ne reviendrons pas sur ces sujets, pour l'Union Nationale.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, vous avez le droit
de le faire et je vous remercie de votre avis. Vous avez vingt minutes pour le
faire, si vous désirez. M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Le but de cet article, de tout le chapitre d'ailleurs,
c'est un chapitre d'application universelle qui veut assurer dans les faits et
gestes quotidiens la prééminence de la langue française.
L'Union Nationale est tout à fait d'accord avec cela, de même que
pour prouver le caractère essentiellement francophone du
Québec.
Ce que nous reconnaissons dans ces articles, c'est que, même si
l'article rédigé tel quel: Toute personne a le droit que
communique en français avec elle l'administration, a le droit de
recevoir les services, cela n'empêche pas l'usage de la langue anglaise
pour un anglophone du Québec. Nous reconnaissons que tout francophone a
le droit, mais que l'anglophone n'a pas les mêmes droits.
Reconnaître les mêmes droits linguistiques fondamentaux, à
ce chapitre, aux anglophones, ce serait véritablement reconnaître
un bilinguisme institutionnel universel pour notre province, et ce n'est pas le
but de l'Union Nationale, même si nous avions proposé un
amendement à l'article 1.
Ce que nous voulons en fait, nous voulons garantir des droits aux
anglophones, mais pas les mêmes droits fondamentaux essentiels.
Or, compte tenu de notre volonté première de nous assurer
que, dans les chapitres qui viennent et qui s'appliquent à des secteurs
bien déterminés pour l'usage de la langue anglaise, qu'on le
reconnaisse aussi dans d'autres secteurs, en particulier dans le secteur de la
justice ou autrement, ces articles 2, 3, 4, 5 et 6 nous apparaissent tout
à fait logiques et ce sont les seuls commentaires que nous voulons faire
finalement, pour notre parti avant d'accepter tous ces articles.
Simplement en terminant, je veux noter que nous avons vu avec
satisfaction le mot "Québécois" remplacé par "Toute
personne". C'est véritablement plus logique dans l'optique que nous
voulons voir se réaliser, ce projet collectif au Québec. M. le
Président, nous allons voter en faveur de cette série
d'articles.
M. Charron: L'article 2 est adopté, M. le
Président.
Une Voix: Adopté.
M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 3, M. le
Président.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 2, adopté.
Article 3? M. le ministre.
M. Lalonde: Adopté.
M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 4.
M. Ciaccia: Seulement une question sur l'article 3.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce nécessaire, pour que ce soit moins
vague ou pour que ce soit un peu plus spécifique, de définir ce
qu'on veut dire par assemblée délibérante?
M. Laurin: Dans le code Morin. M. Ciaccia: Pardon? M.
Laurin: C'est dans le code Morin. M. Ciaccia: C'est quoi le code
Morin?
Une Voix: Ce n'est certainement pas le code Morin.
M. Ciaccia: Le Code de procédure.
M. Charron: Claude Morin, Jacques-Yvan Morin.
M. Ciaccia: Oui, mais est-ce que vous avez une
référence spécifique au projet de loi que la
définition d'assemblée délibérante...
M. Laurin: Je pense que c'est l'usage uniformément reconnu
par tout le monde.
M. Ciaccia: Même quand on vous pose tout bonnement une
question, il n'est pas nécessaire de répondre...
M. Laurin: J'ai répondu tout naturellement.
M. Ciaccia: Oui, c'est cela le problème, c'est de votre
naturel que je me plains.
Le Président (M. Laplante): Article 3, adopté.
Article 4, adopté?
M. Lalonde: Adopté.
M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 5, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Article 4, adopté.
Article 5?
M. Lalonde: Adopté.
M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 6, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Article 6, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: A l'article 6, M. le Président, pour justement
tendre la perche encore une fois au gouvernement, une dernière fois
je ne ferai pas de débat là-dessus simplement un
peu à l'invitation, même pas à la suggestion, à
l'hypothèse du ministre d'Etat au développement culturel
suggérant que l'amélioration que je voulais apporter à ce
chapitre était exprimée d'une façon négative
à mon premier amendement qui a été défait, à
l'article 2, je proposerais que l'article 6 soit modifié en ajoutant
à la fin l'alinéa suivant: "L'application du présent
chapitre est faite conformément aux dispositions des autres titres et
chapitres de la présente loi". Seulement quelques mots pour dire que
c'est exactement dans le même sens que ce que j'avais proposé de
faire pour l'article 2 et qu'il aurait fallu répéter à
l'article 5, je crois, mais, de cette façon-là, c'est fait de
façon positive, cela donne une indication très claire à
tous les citoyens et toutes les personnes, les individus et les entreprises
qu'affecte positivement ou négativement cette loi, de sorte qu'il n'y
ait plus d'ambiguïté. Les droits fondamentaux sont exprimés
dans le langage le plus solennel qu'on ait vu, qui a été
adopté unanimement ici, jusqu'à l'article 6, que nous sommes
prêts à adopter aussi tel quel, mais c'est le seul endroit
où je tente encore une dernière fois d'apporter cette
amélioration de façon positive. J'avoue que c'est vrai que le
langage était peut-être un peu négatif, ce n'était
pas l'intention d'être restrictif, mais le langage l'était. Alors,
je ne sais pas s'il a été distribué. Je termine là
mon intervention.
M. Charron: Oui. M. le Président, je reconnais la
modification dans le libellé et même dans le résultat de
l'amendement présenté par l'Opposition officielle, mais si nous
nous étions opposés au premier amendement parce que nous le
jugions négatif et restrictif, la modification apportée nous
amène cette fois à le rejeter parce qu'il est inutile et
superfétatoire, puisque je pense que le député n'aura
aucune objection à reconnaître que l'article 6 s'impose. Il vient
de le dire lui-même, que, d'autre part, sa référence au
présent chapitre: Que l'application du présent chapitre soit
faite conformément aux dispositions des autres titres et chapitres de la
présente loi. Il veut, sans aucun doute, parler du chapitre VIII, lequel
chapitre VIII débute par une affirmation similaire à celle qui
est à l'article 6. Donc, cela demande que l'application de l'article 6
soit fait en fonction de ce qui est dit au chapitre VIII ce qui devient
inutile, puisque le législateur lui-même a prévu pareille
affirmation.
De plus, M. le Président, pour faire le lien entre les
différents chapitres du projet de loi, nous nous étions
inspirés, pour la rédaction de cet article 6, du
témoignage de la Commission des écoles catholiques de
Montréal lors de l'étude de la loi 22, où la
présidente d'alors de la Commission des écoles catholiques de
Montréal disait, et cette position nous est apparue claire au point que
nous en fassions un article de notre projet de loi, Mme l'ex-présidente
de la Commission des écoles catholiques de Montréal disait donc
en commission parlementaire le mercredi 26 juin 1974: "Essentiellement, nous
demandons que la langue d'enseignement soit le français pour tous, tant
dans les écoles publiques que dans les institutions privées
subventionnées par l'Etat, sauf pour les membres de la minorité
anglophone existante au moment de l'adoption de la loi. Nous faisons
également exception pour les Indiens et les Inuit et pour les familles
dont des enfants ont déjà commencé leurs études
primaires."
Je dois dire que le gouvernement s'est largement inspiré de cette
position de la plus importante des commissions scolaires du Québec,
à ce moment-là et que ce défaut d'affirmation dans la loi
22, comme cela était apparu aux yeux de la Commission des écoles
catholiques de l'époque, nous est apparu à combler. C'est
pourquoi nous avons ajouté dans les droits fondamentaux ce fait et je
cite l'article 6 qui, en soi, est complet et n'a pas besoin de l'amendement du
député de Marguerite-Bourgeoys, puisque le chapitre VIII
débute en faisant lui-même le lien avec les droits fondamentaux,
ce qui écarte toute ambiguïté: "Toute personne admissible
à l'enseignement au Québec a droit de recevoir cet enseignement
en français".
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si c'est l'article 96 que je dois
invoquer pour cela.
Le Président (M. Laplante): Est-ce sur la
recevabilité que vous voulez parler, madame?
M. Lalonde: Elle n'est pas déclarée recevable?
Le Président (M. Laplante): Elle n'est pas
déclarée recevable encore.
M. Lalonde: Excusez-moi. Le député de Saint-Jacques
s'adressait à la recevabilité.
M. Charron: Je m'en excuse, M. le Président...
M. Lalonde: Non, il s'adressait au fond. Même au chapitre
VIII, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Sans aller dans... Mme
Lavoie-Roux: C'est là-dessus que je...
Le Président (M. Laplante): Je vais la déclarer
recevable, tout de suite, je suis prêt à le déclarer. Mme
le député de L'Acadie, on commence.
Mme Lavoie-Roux: Je voulais simplement intervenir pour qu'il n'y
ait pas de confusion dans les discussions ultérieures sur les propos que
le député de Saint-Jacques vient de rapporter, qu'il m'a
attribués et qui sont exacts. Il y a quand même une nuance que je
voudrais apporter et qui est importante, à ce moment-ci, compte tenu des
débats ultérieurs qui vont survenir. Quand on parlait de la
minorité anglophone existant au Québec, c'était une
position sur laquelle j'avais moi-même été dissidente, mais
je venais à la commission évidemment présenter le point de
vue majoritaire de la commission qui, à ce moment, avait
été un vote de huit à neuf.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, si vous me le permettez,
avant d'appeler le vote sur cet article, vous ne m'avez pas entendu mentionner
Mme le député de L'Acadie, c'est la position de la Commission des
écoles catholiques de Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez nommé la présidente
souvent.
M. Charron: Oui, c'est Mme la présidente qui lisait ce
message.
Mme Lavoie-Roux: Oui, je le sais, mais, pour le public, c'est
important.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal, vous avez demandé la parole.
M. Ciaccia: Je voulais poser une question, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Allez.
M. Ciaccia: Dans l'article 6, quand vous dites: "Toute personne
admissible à l'enseignement au Québec a droit de recevoir cet
enseignement en français", le ministre entend-il par cela que même
une personne qui serait admissible, par exemple, à une école
privée aurait le droit de recevoir cet enseignement en français?
Par exemple, si une personne était admissible à une école
privée, telle que le Lower Canada College, est-ce que cela veut dire
qu'après avoir été admise au Lower Canada College elle
peut se prévaloir de l'article 6 et exi- ger que le Lower Canada College
lui donne l'enseignement en français?
M. Laurin: II faudrait qu'elle aille dans une école
où c'est dispensé et subventionné conformément aux
autres articles qui précisent.
M. Ciaccia: Mais l'article 6 ne dit pas cela.
M. Laurin: C'est un droit qui est précisé au
chapitre VIII.
M. Charron: Cela veut dire qu'on ne veut pas interdire, par
exemple, par l'article 6, à un anglophone l'accès à une
école française, mais s'il préfère aller à
l'école anglaise, il y a d'autres dispositions de la loi qui le lui
permettent. Le principe veut qu'aucun Québécois, de quelque
langue maternelle que ce soit, puisse, pour quelque raison que ce soit, se voir
interdire l'entrée dans une école française. On ne
l'oblige pas à aller à l'école française. On
empêche l'interdiction de le voir y entrer.
M. Ciaccia: Je comprends, et nous ne sommes pas contre ce
principe. Nous sommes en faveur de ce principe, mais la question
spécifique que je posais, tout en approuvant ce principe, est celle-ci:
Une personne peut-elle se prévaloir de l'article 6 et exiger,
après avoir été admise à une école
privée anglaise, qui est autorisée à donner l'instruction
par la loi, et je donne l'exemple du Lower Canada College, parce que c'est un
droit fondamental vous dites que c'est un droit fondamental et vous ne
voulez pas le qualifier, ni le définir ou le restreindre ou le rendre
conforme aux autres articles et dire: Maintenant que je suis admise, je
veux mon enseignement en français?
M. Laurin: Cette personne peut se prévaloir de l'article 6
et de tous les autres qui ont référence au même sujet.
M. Ciaccia: Cela veut dire que cette personne pourrait exiger
d'une école privée, présentement autorisée à
donner l'enseignement en anglais, de recevoir son enseignement en
français.
M. Laurin: II n'y a pas que l'article 6 dans la loi.
M. Ciaccia: Cela veut dire que, demain, vous pourriez envoyer 50,
60, 100 élèves qui seraient admis à l'école Lower
Canada College et qui pourraient exiger de cette institution privée de
leur donner l'enseignement totalement en français? Est-ce cela
l'intention de l'article 6?
M. Laurin: Non. Encore une fois, vous ne pouvez pas...
M. Ciaccia: Je comprends le principe qu'un anglophone doit avoir
le droit de vivre.
M. Laurin: M. le Président, le député de
Mont-Royal ne peut pas sortir l'article 6 du contexte de toute la loi.
Si quelqu'un veut se prévaloir du droit à l'enseignement en
français, il le fera selon l'article 6, du chapitre II, et selon les
divers articles qui apparaissent au chapitre VIII.
Le Président (M. Laplante): Je vous avais permis une
question, vous en avez posé plusieurs, M. le député de
Mont-Royal. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous voulez
parler sur l'amendement?
M. Lalonde: On parle sur l'article... Le Président (M.
Laplante): D'accord.
M. Lalonde: J'aimerais qu'on parle sur l'amendement. Je voudrais
quand même préciser que si l'amendement est fait comme
deuxième alinéa de l'article 6, ce n'est pas pour réduire
la portée même de l'article 6. C'est parce que c'est le seul
endroit où j'ai trouvé à le mettre étant
donné que le règlement ne me permet pas d'offrir un nouvel
article, à ce stade-ci de nos délibérations.
C'est un amendement qui concerne tous les articles du chapitre
simplement et qui ne réduit pas la portée de ces articles d'une
manière plus restrictive que le reste de la loi le fait, autrement dit
ne fait que référer au reste de la loi.
Encore là, je ne comprends pas le gouvernement de ne pas voir
dans cet amendement une amélioration qui précisera la
portée. Cela ne la réduit pas, cela précise la
portée simplement.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal, sur...
M. Ciaccia: ... l'amendement.
Le Président (M. Laplante):... l'amendement.
M. Ciaccia: Je suggère au ministre et au gouvernement que
si ce n'est pas votre intention d'obliger ou d'enlever certains droits à
des écoles privées, ou de donner le droit à un
élève d'exiger l'exemple que je vous ai donné de Lower
Canada College de se faire instruire en français à cette
institution privée, qui est autorisée à donner
l'enseignement en anglais, la seule façon dont vous pouvez éviter
cette situation, c'est en adoptant l'amendement du député de
Marguerite-Bourgeoys. Autrement, je soutiens que l'article 6 qui est un droit
fondamental, qui n'est pas qualifié, qui n'est pas restreint, qui n'a
aucune limitation, on pourrait s'en prévaloir. C'est une suggestion
positive que je fais pour éviter le genre de situation que vous ne
voulez pas créer.
Pour éviter cette situation, il faut absolument une certaine
référence à l'article 6 du genre de l'amendement tel que
fait par le député de Marguerite-Bourgeoys. Autrement, vous allez
créer une situation bizarre.
M. Laurin: II ne faut pas sous-estimer l'intelligence de ceux qui
auront à se servir de la loi, qui qu'ils soient. Je pense que la loi
forme un tout et si quelqu'un prétend se prévaloir d'un droit, ce
droit sera qualifié par tous et chacun des articles contenus dans la
loi. C'est la raison pour laquelle je répète, après le
député de Saint-Jacques, que l'amendement du député
de Marguerite-Bourgeoys me paraît être une redondance inutile.
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je suis contente que le député de
Marguerite-Bourgeoys ait fait la précision quant à l'endroit
où il devait situer son amendement, parce que s'il avait
été attaché uniquement à l'article 6, j'aurais
trouvé difficile de l'appuyer. Mais, dans les circonstances et pour les
raisons données auparavant, je l'appuierai.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Lotbinière.
M. Biron: Pour les mêmes raisons que j'ai données
à l'article 2 et d'autant plus que cet article comme les autres articles
d'ailleurs... Le fait d'avoir le droit de recevoir... cela n'empêche pas,
selon les autres articles de la loi, de recevoir une autre sorte d'enseignement
ou d'autres services.
Cela m'apparaît évident que toute partie du projet de loi
no 101 ne doit pas contrevenir aux autres dispositions, des autres titres ou
chapitres.
Je rejoins là-dessus le ministre d'Etat au développement
culturel et cet amendement m'apparaît inutile maintenant, parce que la
loi est un ensemble et certainement que tous les Québécois
profiteront de cette loi à l'article qui les intéresse
spécifiquement.
Même si ce nouvel amendement est rédigé d'une
façon positive, nous ne pouvons l'appuyer et j'aurais bien aimé
pouvoir appuyer un amendement positif du Parti libéral. C'est
peut-être sa première contribution positive au grand débat
sur la langue.
Je ne voudrais pas entretenir plus longtemps cette commission, me faire
accuser d'avoir un amendement qui serait peut-être dilatoire pour
certains.
De toute façon, nous ne pouvons appuyer cet amendement.
Le Président (M. Laplante): Le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais dire tout
simplement que, quand le législateur donne force de loi à une
mesure, il constitue ainsi un droit que les citoyens peuvent exercer, dont ils
peuvent se prévaloir, et il faut examiner les conditions dans lesquelles
ce droit serait exercé et il faut examiner la façon dont ce droit
serait exercé et quand un article déclaratoire est
extrêmement général, il faut, à mon sens, avoir plus
de certitude que nous n'avons dans cette série d'articles, que les
tribunaux, un jour, devant la demande d'un citoyen de pouvoir exercer
pleinement le droit consacré par l'article 6 répondraient: Oui,
vous avec ce droit; il est général; il ne comporte aucune
condition, quant à l'article 6, mais les autres articles viennent
apporter des conditions d'exercice et c'est là où je rejoins mon
collègue de Mont-Royal.
Il est évident que l'esprit de la loi est de créer une
situation où tout citoyen pourrait s'adresser au système scolaire
pour recevoir de l'enseignement en français et, par mesure d'exceptions
analogues au système de dissidence qui existe dans la Loi de
l'instruction publique, ce régime de dissidence est maintenu; il y a un
réseau de langue anglaise.
Si l'interprétation de l'article 6, tel que rédigé,
est la suivante, il n'y a pas de problème, c'est-à-dire que la
personne s'adressant à une institution d'enseignement reconnue par le
ministère de l'Education comme dispendant l'enseignement en anglais et
demandant à cette institution de lui fournir, néanmoins,
l'enseignement en français, il est évident, dis-je, que cette
personne se ferait répondre: Mais, monsieur ou madame, selon le cas, ou,
mon cher enfant, il faudra que vous alliez à une autre école, une
école reconnue par le ministère de l'Education comme dispensant
l'enseignement en français.
Si telle est l'interprétation et si nous avons l'assurance
incontroversible que telle est l'interprétation, l'amendement
proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys devient
moins nécessaire. Mais, s'il n'est pas possible de donner l'assurance
que la personne qui s'adresserait à une telle école, une
école reconnue comme dispensant l'enseignement en anglais, et demandant
l'enseignement en français et se voyant refuser l'enseignement en
français et se présentant devant les tribunaux pour obtenir le
plein exercice de ce droit que cette personne ne serait pas en mesure, par
l'intermédiaire des tribunaux, de chambarder le régime
d'enseignement établi pour et dans cette école, à ce
moment-là, il me semble je rejoins de nouveau mon collègue
de Mont-Royal à ce sujet qu'il faudrait que ce soit suffisamment
clair.
Le Président (M. Laplante): Vote sur l'amendement.
M. Goldbloom: Non, M. le Président, je m'excuse,
j'aimerais que le ministre au moins me donne la courtoisie d'une
réponse.
M. Laurin: Encore une fois, M. le Président, l'article me
paraît suffisamment clair; il me semble que la loi dans son entier est un
tissu sans couture qu'il faut prendre dans son ensemble, et je pense que les
tribunaux sont parfaitement habitués et habilités à juger
de pareils cas; je ne pense pas qu'ils auront de grands problèmes
à reconnaître ce droit, non seulement à la lumière
de l'article 6, mais à la lumière de tous les autres articles qui
viennent qualifier ce droit.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Non, pas tout de suite, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Sauvé.
M. Ciaccia: Pourriez-vous me référer à
d'autres articles dans le projet de loi qui qualifient ce droit, qui
qualifieraient l'article 6?
M. Morin (Sauvé): Je puis tenter d'apporter une
réponse aux préoccupations du député D'Arcy McGee
et du député de Mont-Royal. Non seulement faut-il
interpréter ces articles en eux-mêmes et les uns par rapport aux
autres, mais il faut les interpréter par rapport à l'ensemble du
système scolaire existant, c'est-à-dire par rapport à la
Loi de l'instruction publique, par rapport aussi aux traditions
québécoises dans le domaine de l'enseignement.
Or, de toute évidence il existe un système d'enseignement
linguistique à l'intérieur des systèmes d'enseignement
confessionnel. Il est bien clair qu'une personne qui veut obtenir
l'enseignement dans une longue donnée se présentera devant une
commission scolaire pour faire reconnaître son droit et ira à
l'école française ou à l'école anglaise, selon ce
qu'elle aura revendiqué.
C'est dans ce contexte qu'il faut interpréter ces dispositions
et, si cela peut rassurer le député de D'Arcy McGee, il n'est
absolument pas question de forcer une école anglaise, une école
qui dispense l'enseignement en anglais, pour utiliser le jargon précis
des lois, à donner un enseignement en français, sauf, bien
sûr, s'il s'agit du français langue seconde.
Le Président (M. Laplante): Le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Je remercie le ministre de l'Education de cette
réponse. Ce n'est pas désobligeant à l'endroit du ministre
d'Etat au développement culturel de dire que, comme moi, il n'est pas
juriste et, puisque le député de Sauvé a cette formation,
je suis un peu plus rassuré que, de sa bouche, j'aie une réponse
précise à cet égard parce que je voulais justement
demander au ministre d'Etat au développement culturel si l'opinion qu'il
exprimait tout à l'heure était fondée sur un avis
juridique précis qu'il avait reçu à cet effet.
M. Morin (Sauvé): Si je puis rassurer le
député, nous en avons discuté et il est clair que cet
article n'a pas l'effet que pourraient craindre les députés de
l'Opposition officielle.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Seulement un mot. Est-ce qu'il est correct de dire
que ces articles, y compris l'article 6, créent des droits fondamentaux,
mais non pas les obligations correspondantes? Et je rejoins peut-être un
peu les propos du ministre d'Etat au développement culturel au
début. Il est apparu au gouvernement qu'il n'y avait pas lieu, à
ce stade, de créer, de préciser des obligations correspondant
à ces droits.
M. Laurin: Cela ne veut pas dire qu'elles n'existent pas.
M. Ciaccia: Mais il faudrait l'avoir des deux côtés,
si ça crée des obligations.
M. Lalonde: II faudrait que vous vous entendiez entre vous.
Une Voix: Oui, mais...
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, avez-vous terminé votre intervention?
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: J'avais posé une question au ministre d'Etat
au développement culturel. Il avait affirmé que l'article 6
était qualifié par d'autres articles. Je lui ai demandé
lesquels. Il m'a référé à l'article 76.
M. Laurin: ... vous en mentionnez d'autres.
M. Ciaccia: L'article 76 je m'excuse ne
répond pas à la question parce que l'article 76 dit: "Aucun
organisme scolaire qui ne donne pas déjà l'enseignement en
anglais n'est tenu de le donner..." Alors, on parle de l'enseignement en
anglais. Ce n'est pas cela ma question et je voudrais revenir aussi à la
question des assurances qui ont été données par le
ministre de l'Education, le député de Sauvé.
C'est un juriste assez compétent pour savoir que les assurances
que n'importe qui peut donner, que cela soit à cette commission ou
à l'Assemblée nationale, ne valent absolument rien quand il
s'agit de l'application de la loi. La loi sera interprétée telle
qu'écrite et le juge va lire l'article 6 et, s'il n'y a pas d'autres
articles dans le projet de loi qui qualifient cet article 6, une personne aura
ce droit. Ou cela crée un droit avec une obligation correspondante,
auquel cas cela peut causer des conflits futurs, ou, si votre
interprétation est correcte et que cela ne crée pas d'obligation
correspondante, pourquoi le placer ici? C'est un voeu pieux?
Alors, il faudrait que vous décidiez quelle est votre intention,
quelle est votre interprétation.
Est-ce un voeu pieux qu'une personne ne peut pas exercer, qu'elle ne
peut pas mettre en application, ou bien est-ce quelque chose qui crée
une obligation correspondante? Quand vous référez aux traditions
de notre système scolaire, écoutez, il faudrait être un peu
sérieux. Ces traditions, vous les limitez pas mal dans votre projet de
loi. Une personne ne pourrait pas aller, d'après ce projet de loi-ci, et
se fier aux traditions quand on va limiter le réseau du système
scolaire anglophone. Ce sont tes effets du projet. Je ne crois pas qu'on puisse
se fier aux assurances du ministre ni à la question de traditions. Je
voudrais vous signaler, M. le Président, que le but de cet amendement et
le but de nos suggestions, de nos recommandations, c'est que nous acceptons le
principe que le député de Saint-Jacques a mentionné, soit
qu'un anglophone ou n'importe qui aurait le droit de recevoir un enseignement
en français. C'est un principe que nous appuyons, mais nous voulons
éviter les conflits que je viens de vous signaler. Si ce n'est pas votre
intention de créer de tels conflits, pourquoi ne pas le dire dans le
projet de loi? Il me semble que vous voulez avoir le meilleur des deux mondes.
Vous voulez donner l'impression de donner des droits fondamentaux aux citoyens
en leur disant, à l'article 6: Vous avez tel et tel droit; et, quand on
souligne un conflit possible, vous dites: Ah non! Cela n'a pas cet effet. Il va
falloir, M. le Président, que vous vous décidiez. C'est soit une
position ou l'autre.
M. Charron: On est prêt à décider,
monsieur.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que les membres de la
commission sont prêts à voter sur l'amendement?
M. Laurin: Un dernier mot, M. le Président. Les tribunaux
ne pourront sûrement pas faire en sorte qu'ils puissent juger d'une
situation comme si ce chapitre n'existait pas. En ce sens, il y a
sûrement une obligation générale au respect de tous les
droits qui sont inclus dans ce chapitre. Mais ce que je dis, et ce que je
répète, c'est que la loi est un tout et qu'elle doit être
considérée dans l'ensemble de ses parties et de ses articles. En
ce sens, je pense que l'on peut dire qu'un article en particulier est
qualifié par un autre.
En réponse à la question du député de D'Arcy
McGee, je donnais 76 qui pouvait référer un cas particulier. Par
exemple, le cas de certaines classes comportant un nombre plus ou moins grand
d'élèves. J'aurais pu donner aussi le cas de l'article 68 qui dit
très clairement que l'enseignement se donne en français dans les
classes maternelles, dans les écoles primaires et secondaires, sous
réserve des exceptions prévues au présent chapitre. Mais
encore une fois, ceci n'est pas tellement pertinent. Ce qui est pertinent,
c'est que la loi est complète et qu'elle doit être
interprétée à la lumière de chacun de ses
articles.
Le Président (M. Laplante): Le vote est appelé, sur
l'amendement de l'article 6: Que l'article 6 soit modifié en ajoutant,
à la fin, l'alinéa suivant: "L'application du présent
chapitre est faite conformément aux dispositions des autres titres et
chapitres de la présente loi.
Est-ce que vous voulez un vote enregistré? Accepté sur
division?
M. Charron: Rejeté sur division.
Le Président (M. Laplante): Rejeté sur
division?
M. Ciaccia: On vous a convaincu, vous voyez, avec nos arguments.
Vous voyez le conflit possible.
Le Président (M. Laplante): Un président neutre
commence toujours...
M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 6.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce qu'on peut
parler?
Le Président (M. Laplante): Oui, Mme le
député de L'Acadie, sur l'article 6.
Mme Lavoie-Roux: Avant d'adopter l'article 6, je voudrais
simplement dire brièvement que je souscris totalement à tous ces
articles fondamentaux. Je voudrais insister particulièrement sur celui
qui touche la langue de travail et la langue d'enseignement. Je pense que c'est
également le cas de mes collègues, sauf si, évidemment, de
bonne foi, nous croyons que les deux amendements qui avaient été
mis de l'avant, auparavant, étaient dans un esprit de réduire
l'ambiguïté, la confusion et d'assurer la clarté. Il reste
que sur les principes mêmes et l'esprit de ces principes fondamentaux, de
ces droits fondamentaux, je veux profiter de l'occasion pour souligner
particulièrement comment, en ce qui touche les droits au travail et
à l'enseignement, ceci me semble tout à fait pertinent et
répondant aux besoins d'une société dans laquelle on veut
accorder la priorité au français.
M. Laurin: M. le Président, je voudrais dire, en terminant
l'étude de ce chapitre, que je me félicite de l'appui qu'y
apporte l'Opposition officielle et je tiens à répéter en
terminant que, pour tous les articles de ce chapitre, tout droit qui est
prévu à ces articles de 2 à 6 comporte, dans notre esprit,
l'obligation de le respecter, même s'il n'y a pas d'articles
spécifiques à cet égard.
Le Président (M. Cardinal): Seulement un instant, s'il
vous plaît, pour me replacer dans l'atmosphère. Je veux souligner,
pour les fins du journal des Débats et d'écriture, que la motion
d'amendement a été rejetée, que nous sommes revenus
à la motion principale sur l'article 6. Sur ce, je donne la parole
à M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je voudrais simplement
ajouter quelques mots à l'appui de ce que le député de
L'Acadie a exprimé tantôt. C'est un appui inconditionnel et le
ministre d'Etat se félicitait de trouver cet appui chez l'Opposition
officielle. Il n'a pas dit qu'il s'en surprenait, cela aurait
été, d'ailleurs, je pense, tout à fait inattendu.
L'Opposition officielle est quand même le Parti libéral qui a mis
de l'avant, de façon vigoureuse, des dispositions dans plusieurs
secteurs d'activités visant à faire du français la langue
de tous les jours de tous les Québécois et à rendre
nécessaire la langue française dans les secteurs
d'activités où elle était menacée,
c'est-à-dire plus particulièrement au travail.
Je pense que c'est l'occasion, peut-être la dernière, alors
que nous allons nous engager dans des dispositions de modalités beaucoup
plus précises, de réitérer cet appui que nous avons fait
de façon tout à fait claire, précise et même sans
aucune ambiguïté à l'article 1. C'est une occasion que je
prends, à ce stade de nos délibérations, pour appuyer sans
aucune réserve ces droits fondamentaux qui sont reconnus par ces
articles, y compris l'article 6.
Le Président (M. Cardinal): D'accord! Est-ce que je
considère que l'article 6 serait adopté?
M. Charron: Adopté. M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Saint-Jacques.
M. Charron: ... je voudrais, à ce moment-ci, faire une
proposition sur l'ordre des travaux, des délibérations de la
commission parlementaire de l'éducation. Vous nous avez entendu hier,
même s'il s'agissait d'une motion que vous avez, quelques instants plus
tard, déclarée irrecevable, à bon droit, je pense, le
parrain même...
Le Président (M. Cardinal): Prématurée.
M. Charron: Prématurée, voilà. Le parrain
d'hier l'a reconnu de fort bonne grâce. Vous nous avez entendus faire une
entente, au moins entre deux partis membres de cette commission, soit le parti
gouvernemental et le parti de l'Union Nationale, et c'est cette entente que je
voudrais maintenant respecter, entente selon laquelle nous pourrions
procéder, maintenant que le chapitre de la langue officielle et le
chapitre des droits fondamentaux sont adoptés, puisque le débat,
en quelque sorte, qui vient d'avoir lieu sur l'article 6 nous y a
déjà amenés, puisque aussi, les trois partis politiques
membres de cette commission ont déjà des positions connues et
affirmées publiquement quant à leur politique linguistique dans
le domaine de l'enseignement, puisqu'il s'agit d'un point que nous avons
qualifié ensemble, hier, de névralgique dans le projet de loi et
que c'est peut-être dans l'intérêt de la qualité de
nos délibérations, aux yeux mêmes des
Québécois qui nous observent, que la commission se penche
immédiatement sur ce chapitre au moment où elle est encore, je
crois, dans toutes ses dispositions de bonne volonté, de collaboration,
étant donné l'importance du sujet...
J'apprécie la proposition faite hier par l'Union Nationale et, au
nom du gouvernement, je voudrais faire la motion suivante, M. le
Président: Que la commission aborde immédiatement l'étude
du chapitre VIII de la loi 101.
Le Président (M. Cardinal): Tout le monde est d'accord.
Cela va très bien, sauf qu'il y aura une mesure préliminaire
qu'il faudra prendre. Il faudrait suspendre l'étude des articles 7
à 67, si je ne me trompe...
M. Charron: C'est exact.
Le Président (M. Cardinal): Qu'on me corrige.
M. Charron: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Y aurait-il consentement
unanime, sans qu'il y ait besoin que l'on fasse de procédure.
Mme La voie-Roux: II n'y a pas consentement unanime, M. le
Président.
M. Lalonde: II n'y a pas de consentement là-dessus, M. le
Président.
M. Charron: Je devrai donc, M. le Président, si je suis
votre directive...
Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas, M. le
député de Saint-Jacques, vous faites une motion, et il faudra en
débattre.
M. Charron: Oui, très bien. A votre directive, M. le
Président, vous avez raison, je me souviens d'un épisode lors
d'une autre législature...
M. Ciaccia: Une directive, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce qu'on commence par discuter de la
recevabilité de la motion avant de...
M. Charron: Si vous voulez, mais je... Là-dessus, il n'y a
pas de...
Le Président (M. Cardinal): Non, on va commencer par
prendre connaissance de la motion, si vous permettez, parce qu'actuellement je
n'en ai point.
Motion pour suspendre l'étude
des articles 7 à 67 et procéder
à l'étude des articles 68 à
83
M. Claude Charron
M. Charron: C'est cela. Je propose, M. le Président, que
la commission suspende l'étude des articles 7 à 67 inclusivement
et procède immédiatement à l'étude des articles 68
à 83.
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, je ne
souhaite pas de débat sur la recevabilité, pour une raison
très simple, c'est qu'à moins que le journal des Débats ne
me prouve le contraire, j'avais cru hier qu'il y avait une entente que j'ai
qualifiée de gentilshommes à travers toute cette table pour que
nous fassions ainsi, après l'étude de l'article 6. Je constate
que je n'ai plus cette entente.
Mme Lavoie-Roux: Me permettez-vous, M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, certainement que je vous
permets. Mme le député de L'Acadie et, ensuite, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais savoir sur
quoi vous vous basez pour décider qu'il y avait eu une entente de
gentilshommes et sans doute, il manquait la gentille femme, parce qu'il n'y a
pas consentement. Que vous ayez interprété cela ainsi, je peux le
comprendre. Par contre, compte tenu du fait que, nous-mêmes, nous avions
souhaité ou avons fait une motion à cet effet que la loi soit
scindée, c'est qu'à ce moment-là, nous y voyions des
intérêts ou des avantages certains, c'est qu'une loi touchant la
langue d'enseignement était adoptée et pouvait être
appliquée dès son adoption. Dans le cas présent, je pense
qu'il ne s'agit plus de la même chose, parce que même si nous
adoptions les articles 68 à 83, ceci ne change pas le moment où
la loi sera adoptée dans son entier.
Je pense qu'il y a peut-être eu méprise et je ne voudrais
pas qu'on pense que nous avons changé d'idée.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, Mme le
député de L'Acadie. Justement, je vais vous répondre
immédiatement. Il est vrai que j'avais cru qu'il y aurait entente, parce
que je présume toujours le consentement, lorsque l'on ne s'oppose pas.
Il ne faudrait pas, vis-à-vis de l'Opposition officielle, que vos
positions, comme vos oppositions, deviennent caduques à la suite de
l'interprétation du président. Par conséquent, je
considère qu'il n'y a pas de consentement, qu'il y a une motion devant
nous et que nous allons en discuter. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Oui, M. le Président, je ne voudrais pas que
l'impression ait été donnée que nous avions changé
d'idée. Nous n'avions pas fait d'intervention, je crois, ou si peu
à la proposition du député de Mégantic-Compton,
hier soir, étant d'accord que c'était prématuré
tout simplement et étant d'accord que ce soit reporté et que la
discussion revienne à un moment ultérieur. J'ai même
indiqué, en dehors de cette Chambre, au ministre d'Etat cet
après-midi, à sa demande, que nous n'étions pas d'accord
avec cette façon de procéder.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, vous n'avez pas à en
vouloir à la présidence, j'ai simplement présumé
d'un fait, à cause d'un silence. Je viens de vous dire que vos positions
enfin, je ne veux pas répéter la même chose
doivent être reconnues et j'accepte qu'il n'y ait pas consentement et que
nous ayons devant nous la motion de M. le député de
Saint-Jacques, dont j'aimerais avoir cependant le texte.
M. Charron: Je vous l'écris à l'instant même,
M. le Président, mais je peux vous la répéter: "Que cette
commission suspende l'étude des articles 7 à 67 inclusivement et
procède immédiatement à l'étude des articles 68
à 83".
Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais mettez-la par
écrit quand même, s'il vous plaît! Justement, M. le
député de Mégantic-Compton,
j'aurais pu la reconnaître, mais remarquez que M. le
député de Saint-Jacques a été très rapide,
il est au haut-commissariat aux sports.
Une Voix: C'est votre droit.
M. Charron: Et à la jeunesse, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Ne vous comparez pas au
député de Mégantic-Compton. Alors, à ce moment,
qu'est-ce que vous voulez? Je sais fort bien que vous aviez retiré une
motion qui avait été déclarée
prématurée par la présidence et que, normalement, vous
auriez pu avoir la possibilité de la représenter à ce
moment. C'est pourquoi je vais hésiter, parce que, lorsqu'il y a une
motion, nous avons discuté hier pour savoir qui devait avoir le droit de
parole, lorsqu'il y a une motion, normalement, c'est le proposeur qui commence
et ensuite, on suit l'ordre des partis.
M. Grenier: Puis-je vous venir en aide?
Le Président (M. Cardinal): Certainement. Je vous en prie.
Je vous y invite.
M. Grenier: Notre motion n'était pas dans les mêmes
termes que celle du ministre délégué au Haut-Commissariat
à la Jeunesse, aux Loisirs et aux Sports. Depuis hier, elle disait: "Que
les membres de cette commission ont repris immédiatement l'étude
du chapitre VIII de la langue d'enseignement, articles 68 à 83
inclusivement."
Je voudrais tout simplement vous dire...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, cette question de rédaction ou de
libellé est importante. Je l'ai mentionné tantôt. J'ai
rendu une directive. Il faut vraiment suspendre l'étude des articles qui
précèdent...
M. Grenier: Là, ça vous donne l'argument. Le
Président (M. Cardinal): ... L'article 68... M. Grenier: Je
n'aurais pas dû la lire.
Le Président (M. Cardinal): Non. Vous avez bien fait. Vous
m'avez aidé, mais vous me permettrez de vous répondre dans ce
sens et, partant de là, vous ayant permis de vous exprimer, je vois que
vous pensez la même chose que M. le député de
Saint-Jacques, à quelques virgules près.
Pourrions-nous maintenant discuter de cette motion? Je la déclare
immédiatement recevable. C'est constant en commission parlementaire, que
cela soit pour l'étude des crédits, l'étude de projets de
loi, article par article.
Cette motion sera-t-elle adoptée?
Mme Lavoie-Roux: Non.
Le Président (M. Cardinal): C'est correct. Vous dites non.
D'accord.
M. Lalonde: On a beaucoup de jeunes à la table. C'est
difficile d'arriver avant eux.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie, sur la motion de M. le député de Saint-Jacques qui dit:
"Que cette commission suspende l'étude des articles 7 à 67 et
procède immédiatement..." après le débat
"... à l'étude des articles 68 à 83."
Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Si cela peut vous rassurer, je n'entends pas
utiliser tout le temps que le règlement m'accorde pour parler sur cette
motion.
M. Chevrette: Ordinairement, ce sont ceux qui partent par ces
phrases qui...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Si le parti
ministériel veut parler immédiatement des articles 68 et
suivants, qu'il laisse la parole à Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord mettre au défi le
député de Joliette-Montcalm de retrouver une seule occasion, sauf
pour l'invitation aux conseils de comté même là,
c'est dix minutes, je pense où j'ai utilisé mon droit de
parole.
Le Président (M. Cardinal): C'est une question de
règlement?
M. Lalonde: C'est l'article 96. Mme Lavoie-Roux: C'est
l'article 96.
Le Président (M. Cardinal): Non. L'article 96 ne peut pas
s'appliquer. Vous n'avez pas fait de discours sur la motion.
Mme le député de L'Acadie, sur la motion de M. le
député de Saint-Jacques, s'il vous plaît.
Mme Lavoie-Roux: Ma première parole est une question.
J'aurais voulu que le député de Saint-Jacques qui a
présenté la motion nous explique quels étaient les
objectifs qu'il s'était fixés en la proposant, quels sont les
objectifs poursuivis par le gouvernement en voulant escamoter les articles qui
sont tout aussi importants.
Je voudrais immédiatement dire pourquoi nous nous y opposons pour
qu'il n'y ait pas de confusion dans l'esprit de qui que ce soit, je
l'espère.
Il est vrai et exact que nous avions déjà exprimé,
depuis au-delà de deux mois, le désir que la loi soit
scindée, étant fort conscients des échéances que la
rentrée scolaire imposait au gouvernement quant à l'adoption de
cette loi.
M. Guay: Le député de L'Acadie pourrait-elle
approcher son micro pour que nous puissions nous abreuver à ses
paroles?
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Madame, on aime
votre voix de proche.
Mme La voie-Roux: Permettez-moi d'en douter!
M. de Bellefeuille: La confiance règne. Une Voix:
...
Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce qu'il a dit? M. Laurin: II veut que je
m'occupe de vous.
Le Président (M. Cardinal): On peut vous permettre cela
rendu à presque 18 heures. Très sérieusement, Mme le
député de L'Acadie, justement très sérieusement, je
viens de le dire, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
Mme Lavoie-Roux: Alors, je disais que lorsque nous avions
exprimé ce désir que la loi soit scindée pour que la
partie de la loi qui touche la langue d'enseignement soit adoptée le
plus rapidement possible, et qu'on puisse même en dépit de
délais qui m'apparaissaient déjà très courts,
trouver une solution convenable pour la rentrée scolaire, à ce
moment-ci, l'étude des articles 68 à 83, à mon point de
vue, ne devrait pas accélérer nécessairement le projet de
loi, on peut se demander, avec raison: Qu'adviendra-t-il des autres articles
s'ils doivent être laissés en plan? Parce qu'à un moment
donné ou l'autre, le gouvernement je suis certaine qu'il n'a pas
de telles intentions, mais on peut peut-être en douter
décide qu'il... On appelle cela imposer la guillotine.
Une Voix: On n'en parle jamais.
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est cela. Des fois, je pense que je vous
ai déjà dit, M. le ministre d'Etat au développement
culturel que...
M. Charron: Ce n'est plus la guillotine, c'est la chaise
électrique.
Mme Lavoie-Roux: ... ce n'est pas nécessairement ce qu'on
dit ou ce qu'on ne dit pas, mais c'est ce qui mène au fait qu'on doit
vivre ultérieurement. Sérieusement, pour nous et pour moi en
particulier, je pense que là-dessus, si des députés ou des
ministres veulent s'amuser à relire le journal des Débats, quand
je suis venue en commission parlementaire ou dans d'autres positions que j'ai
eu à prendre, la langue de travail et toutes les autres dispositions de
la loi me semblent tout aussi importantes sinon plus, même si ce point
demeure névralgique pour les raisons que l'on sait, dans ce projet de
loi. Je pense que c'est l'opinion de mes collègues et c'est
également la position de l'Opposition officielle, que nous ne devons pas
compromettre une étude sérieuse des autres articles de cette loi,
sur lesquels nous avons des amendements cela demeure toujours un
jugement subjectif que nous trouvons importants et valables et nous
souhaiterions pouvoir en discuter, et risquer de les escamoter parce que ce
problème, qui je sais vous tracasse, et si j'étais à votre
place, je me sentirais de la même façon, et même de l'autre
côté de la table je peux partager votre inquiétude à
ce sujet-là. Mais je ne voudrais quand même pas qu'en discutant
d'abord les articles 68 à 83 on soit ensuite mis dans une position dans
laquelle on n'aura plus le loisir de discuter tout ce qui précède
et qui concerne la langue de travail, enfin tous les autres chapitres,
législation, etc., qui sont inclus dans le projet de loi. Alors, c'est
simplement tout ce que je voulais dire pour le moment.
Il est 18 heures, de toute façon, M. le Président, mais je
voudrais que ceci soit très clair. Je ne veux pas qu'en discutant les
articles 68 à 83, on s'expose à se mettre dans une position
où on n'aura jamais le loisir de présenter des amendements que
nous jugeons importants et qui peut-être pourraient bonifier la loi et,
je pense aussi dans le meilleur intérêt de tous.
Le Président (M. Cardinal): Vous me permettez une seconde?
En vertu de l'article 31, il est toujours bon de retourner aux auteurs, il est
dit que sauf le mercredi nous sommes un jeudi lorsque toutes les
affaires n'ont pas été expédiées, le
président doit quitter le fauteuil et la séance est suspendue
jusqu'à 20 heures.
M. Grenier: Ceci est un peu en dehors des débats. Vous
n'avez pas eu de directive de la Chambre pour savoir si on siégeait
vendredi ou samedi, cela devait se faire après-midi.
Le Président (M. Cardinal): Non. C'est en dehors de la
séance; mais non, je n'ai aucune directive, très
sincèrement.
M. Lalonde: On siège dimanche. (Suspension de la
séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 10
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
SI chaque député regagne son fauteuil, il y a quorum et
nous allons reprendre sur la motion de M. le député de
Saint-Jacques, pour que cette commission suspende les articles 7 à 67 et
procède immédiatement à l'étude des articles 68
à 83.
M. Alfred: Le vote, s'il vous plaît! M. Bertrand: Le
vote, s'il vous plaît!
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! Je n'ai
même pas demandé si cette motion serait adoptée.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Non. A la
suspension, à 18 heures, Mme le député de L'Acadie, qui
avait commencé à 17 h 54, avait la parole sur la motion. Mme le
député de L'Acadie, sur la motion.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je disais que j'aimerais
que le gouvernement nous explique quels sont ses objectifs en présentant
cette motion. Je l'ai expliqué avant le souper, nous ne voulons pas que
ceci serve éventuellement de prétexte à la fin des
débats de cette commission, parce que nous jugeons extrêmement
importants les articles qui précèdent l'article 69, en fait, qui
couvrent toutes les autres sphères d'activités prévues
dans le projet de loi.
Je voudrais dire que si nous avions prévu que ceci pourrait
apporter une solution véritable au problème de l'entrée
aux écoles, nous y accéderions de bon gré et même
avec plaisir, mais, pour nous, c'est un prétexte et une façon
déguisée qu'éventuellement nous soyons
empêchés de discuter des autres articles de la loi, et pour cette
raison, à ce moment-ci, je dois dire que nous ne pouvons voter en faveur
de cette motion.
Le Président (M. Cardinal): Cette motion sera-t-elle
adoptée? M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je suis contre la motion de
suspension proposée par le député de Saint-Jacques. Les
commentaires du député de Sauvé n'apparaissent pas au
journal des Débats, alors, je ne ferai pas de réplique. Il y a
beaucoup de raisons et de bonnes raisons pour lesquelles nous sommes
opposés à cette motion.
Premièrement, je pourrais dire que si c'est l'intention ou si
cela avait été l'intention du gouvernement de donner
priorité à l'éducation et de traiter de l'éducation
d'une façon séparée du reste du projet loi, il aurait pu
introduire deux projets de loi. Nous avions indiqué même que nous
voulions introduire une motion, à un moment donné, pour scinder
le projet de loi et le gouvernement vient nous donner des raisons, maintenant,
disant pourquoi il aurait dû procéder de cette façon.
S'il y a une certaine logique dans les articles du projet de loi, et je
dois présumer que si le gouvernement a rédigé le projet de
loi de telle façon, en commençant avec le chapitre premier sur la
langue officielle, en continuant, cela doit vouloir dire qu'il y a une certaine
logique dans la discussion de ces articles l'un après l'autre. On ne
voit pas pourquoi, soudainement, tout à coup, on veuille arrêter
ou suspendre la discussion sur des articles qui sont d'une extrême
importance, qui, vraiment, je dirais, qualifient les articles dont nous avons
discuté.
Nous avons discuté des articles au chapitre II, sur les droits
linguistiques fondamentaux, supposément. Je dis supposément parce
que chaque article aura certaines qualifications plus tard. Alors, nous avons
apporté certains amendements à ces articles, mais toujours dans
le but et dans l'espoir, avec l'objectif que nous y reviendrions aux chapitres
subséquents pour discuter de l'impact et de la modalité de ces
articles. Nous avions, par exemple, soulevé un certain conflit possible
à l'article 6 quant à la question de l'admissibilité
à l'enseignement et on nous a dit qu'il y avait d'autres articles qui
qualifiaient cela. Alors, il y a beaucoup d'arguments, beaucoup de suggestions,
de recommandations que nous ne pouvons pas faire maintenant parce qu'on veut
suspendre la suite logique, d'après le projet de loi, de ces
différents articles et, finalement, on veut nous imposer la discussion
sur les questions de l'enseignement. Le gouvernement, je le suppose et je le
présume, par ses actions, s'est posé certains problèmes en
voulant retirer le projet de loi 1 et en introduisant le projet de loi 101. Il
y a eu alors une certaine perte de temps à cause de cette
procédure. Maintenant, le gouvernement semble vouloir rattraper le temps
qu'il a lui-même perdu. Ce n'est pas une raison, M. le Président,
pour vouloir nous imposer une discussion d'une façon illogique,
d'étudier maintenant certains articles parce que ces gens ont fait des
règlements, parce qu'ils ont publié certains règlements et
des règlements que nous avons qualifiés d'illégaux parce
que le projet de loi n'est pas encore adopté. Maintenant, le
gouvernement se voit dans cet embarras, celui d'avoir pris de mauvaises
procédures pour retirer le projet de loi no 1. Techniquement, je crois
qu'il y a encore une commission parlementaire où on n'a pas encore fait
de rapport, celle sur les mémoires présentés lors de
l'étude du projet de loi. Parce qu'ils ont mal utilisé la
procédure ou mal agi, que leur stratégie n'a pas eu l'effet
attendu, on veut nous imposer ici une discussion qui est en dehors du contexte,
de la suite des articles du projet de loi.
Je dis, M. le Président, que ce n'est pas à nous à
subir ces conséquences. Le gouvernement aurait dû y voir avant et
ce n'est pas une raison, maintenant, pour discuter, hors du contexte, les
articles sur l'enseignement. Avant de discuter des articles concernant
l'enseignement... C'est pour cette raison que nous voulions scinder le projet
de loi parce que ce sont des problèmes tout à fait particuliers.
Mais, avant d'en arriver à l'enseignement, qui pourrait même
affecter les décisions, les discussions, les recommandations que nous
pour-
rions faire, il faudrait discuter d'autres chapitres qui peuvent
affecter toute discussion sur le droit et l'administration et les
réseaux, et l'admissibilité à l'enseignement soit anglais,
ou français. Le gouvernement a admis cela, M. le Président, parce
que, si vous regardez au chapitre II et si vous suivez la logique ou la suite
des articles, vous voyez que la référence à l'enseignement
arrive en dernier, à l'article 6. Alors, avant de discuter de
l'admissibilité et du droit à l'enseignement, on a parlé
de tous les autres aspects qui devraient être acceptés ou
discutés ou réglés avant de discuter et de
légiférer sur la langue d'enseignement, sur les réseaux,
sur l'admissibilité à l'éducation.
Je n'ai pas fait de commentaires, par exemple, sur l'article 4: "Les
travailleurs ont le droit d'exercer leurs activités en français".
Parce que dans les modalités d'application de l'article 4, nous allons
voir et nous aurions pu poser certaines questions qui pourraient affecter
sérieusement les discussions sur l'éducation. L'article 4, c'est
un peu un voeu pieux, dans un certain sens. Le principe qu'un travailleur de
langue française ait le droit d'exercer...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal, je m'excuse. L'article 4 est déjà adopté.
M. Ciaccia: Oui, mais M. le Président, je voudrais donner
certaines raisons pour lesquelles il faut discuter des droits de travail et les
droits de commerce avant de discuter de droit d'enseignement. Parce que quand
nous regardons à l'article 84, il permet aussi, d'après une
interprétation, l'utilisation de l'anglais comme droit de travail.
Alors, j'ai jugé bon, en présumant de la bonne foi du
gouvernement, de ne pas faire ces commentaires sur l'article 4, sur la question
des travailleurs, la définition des travailleurs, etc., jusqu'à
ce que nous arrivions au chapitre sur le droit de travail, sur la langue de
travail, la langue des affaires.
Les mêmes commentaires, M. le Président, je pourrais les
faire pour le droit de s'exprimer en assemblée délibérante
et le droit de recevoir les services en français. Ce sont des sujets
d'une extrême importance. Ce sont des sujets qui devraient être
discutés avant la question de la langue d'enseignement, et nous voulons
être aussi positifs que les ministériels vont nous permettre de
l'être. Si vous le constatez, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas
fait d'obstruction. Nous avons présenté certaines motions au
début, dès la première journée, nous n'avons pas
utilisé tout notre droit de parole, d'après les
règlements, justement dans le but d'être positifs, d'apporter des
recommandations que nous jugions importantes, mais d'une façon
systématique, pas de façon à causer des délais
indus aux travaux de cette commission.
Maintenant, nous voyons qu'on peut suspendre la discussion d'articles
qui sont d'une extrême importance. Comment le gouvernement peut-il nous
dire que les articles 7 à 67 ne sont pas importants? Comment peut-il
nous dire qu'on ne devrait pas discuter maintenant de ces articles? La crainte
que nous avons, c'est que nous n'ayons jamais l'occasion d'en discuter, parce
que pour se sortir de l'embarras des règlements, les
députés ministériels vont essayer de faire adopter ou de
discuter la question de la langue d'enseignement et tout nous laisse croire que
nous n'aurons pas l'occasion on n'a pas eu d'assurance du gouvernement
à cet égard de discuter tous les autres articles. Quand
nous avons apporté certaines craintes au sujet de certains articles, on
nous a dit: II faut regarder la loi dans l'ensemble, on ne peut pas regarder
seulement l'article 6. Maintenant, on veut suspendre cette façon de
procéder et dire: Oui, on peut regarder seulement certains articles.
C'est une façon un peu illogique, M. le Président, de
procéder. C'est contradictoire quant à la position du
gouvernement. Cela nous impose des contraintes que nous ne devons pas
être obligés de subir. Alors, pour ces motifs, M. le
Président, je voterai contre la motion du député de
Saint-Jacques.
Je suis un peu surpris aussi, M. le Président je sais que
c'était la position de l'Union Nationale de vouloir discuter de la
langue d'enseignement maintenant qu'on ait pris cette position de ce
côté-ci de la table, du parti de l'Union Nationale.
On semble vouloir jouer un peu le jeu du gouvernement du Parti
québécois; si l'Union Nationale accepte cette motion, elle semble
vouloir protéger un gouvernement qui est en voie de perdre sa
crédibilité, M. le Président. En toute
sincérité...
M. Charron: D'heure en heure.
M. Ciaccia: Oui, je vous l'avais dit. Pourquoi y a-t-il cette
crainte du gouvernement de vouloir discuter les articles dans cet ordre, tels
qu'ils se suivent dans le projet de loi? Ce n'est pas l'Opposition qui a
rédigé le projet de loi, qui a mis l'article 3 sur
l'assemblée délibérante, l'article 4 sur les travailleurs,
l'article 5 sur les consommateurs et finalement l'article 6 sur la langue
d'enseignement. Ce n'est pas nous qui avons suggéré cet
ordre.
Une Voix: Arrêtez de bégayer et allez-y.
M. Ciaccia: II nous a été donné de cette
façon. Maintenant, on nous dit "non", on va changer. Qu'il retire donc
ce projet de loi, M. le Président et qu'il en présente deux, un
sur l'éducation... Il y a des précédents pour retirer des
projets de loi. Qu'il en présente un sur l'éducation et nous
allons être en mesure de le discuter. Ce qu'il fait, il veut un "omnibus
bill", un projet omnibus...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Bourassa.
M. Ciaccia: On ne peut pas, on n'acceptera pas, M. le
Président, de...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: II y a quand même des limites, M. le
Président, à accepter la bonne humeur des membres. Il y en a
actuellement qui n'accordent aucune attention aux travaux de cette commission
et je pense que le minimum de respect exigerait que les membres de cette
commission gardent le silence, pendant que le député de
Mont-Royal...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, je suis surpris que vous évoquiez oette question
de règlement après que la présidence a rappelé
à l'ordre les membres de cette commission.
M. Lalonde: C'était pour vous aider, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Je vous en remercie et je
redonne la parole à l'ordre, s'il vous plaît!
à M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Pour le moment, M. le Président, je vais
terminer mon intervention et je suggérerais, je recommanderais fortement
au gouvernement d'essayer d'être un peu plus logique et un peu plus
respectueux aussi dans son approche de la discussion du projet de loi.
Le Président (M. Cardinal): Je vais donner l'ordre tout de
suite, justement pour qu'on évite ces petites scènes. J'ai
reconnu dans l'ordre, M. le député de Joliette-Montcalm, M. le
député de Mégantic-Compton, M. le député de
Vanier.
M. Grenier: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: A-t-on changé encore la façon? Le
Président (M. Cardinal): Non, pas du tout. M. Grenier:
Pouvez-vous m'expliquer cela?
Le Président (M. Cardinal): Hier, vous le savez, j'ai
rendu une directive. Nous sommes purement sur une motion qui a
été présentée par le parti ministériel.
J'aurais préféré, M. le député de
Mégantic-Compton, vous reconnaître avant un membre d'un autre
parti, d'autant plus que, je l'ai souligné cet après-midi, la
motion que vous suggériez était du même genre, même
si elle n'était pas libellée de la même façon.
Cependant, si M. le député de Joliette-Montcalm veut non
pas vous céder son droit de parole, mais vous accorder la
priorité...
M. Grenier: Non, M. le Président, ce n'est pas à
cela que je fais allusion, c'est qu'hier, on avait dit que, quand sortait une
motion, qu'elle vienne du Parti libéral, de l'Union Nationale ou du
gouvernement, si c'était le Parti libéral, immédiatement
après, on entendait le parti ministériel et ensuite
c'était l'Union Nationale et que, si c'était une motion, comme
c'est le cas du Parti ministériel, comme on a entendu le Parti
libéral, je pensais qu'on passerait à l'Union Nationale et
ensuite dans l'ordre des demandes.
Le Président (M. Cardinal): C'est exact, M. le
député de Mégantic-Compton, que j'ai mentionné
ceci, sauf que je n'ai qu'une personne qui ait demandé la parole.
Cependant, je vais peut-être poser un geste qui va plaire à
certains et déplaire à d'autres, dans les circonstances,
après ce qui s'est passé cet après-midi, je vais demander
à M. le député de Joliette-Montcalm d'attendre et je vais
vous donner la parole.
Une Voix: C'est un bon gars.
M. Charron: D'accord, M. le Président.
M. Grenier: Je ne veux pas le priver de son droit de parole,
parce qu'il aura l'occasion de revenir.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, vous avez la parole.
M. Grenier: Merci, M. le Président. Très
rapidement, pour vous dire que cette motion, on l'a signalé tout
à l'heure, a été présentée par l'Union
Nationale hier, à peu près dans sa teneur actuelle. On l'a
retirée et certains journalistes ont qualifié ce geste de
gentilhommerie. C'est avec la même gentilhommerie qu'on se
préparait à représenter notre motion aujourd'hui, mais
elle a été présentée par le gouvernement. On n'en
veut pas au gouvernement pour cela. Chacun a le droit de présenter ses
motions, mais on a un témoignage, encore une fois, que lorsqu'on publie
un livre à l'avance, comme on l'a fait, on peut s'attendre qu'on se
fasse enlever parfois des primeurs et on le comprend; mais je pense que cela
fait partie du rôle de l'Opposition que de suggérer et de proposer
des choses.
Alors, que le Parti québécois ait trouvé que notre
proposition était pas mal correcte, quand on l'a faite hier, pour s'en
servir aujourd'hui, ou bien que le Parti libéral ait
décidé de copier notre programme sur cinq articles, cela ne nous
empêche pas de dormir, mais il reste une chose, c'est qu'on se rend
compte...
M. Lalonde: C'est permis.
M. Ciaccia: Quand vous venez à la commission
parlementaire, vous dormez.
M. Grenier: II y en a peut-être qui feraient mieux de
dormir plus longtemps et qui sont à la commission ici, quand on
entend... Cela me rappelle la mise en garde que me faisait l'ancien
député Lucien Tremblay, de Montréal, qui me disait lorsque
j'ai été élu en 1966: "Mon jeune, tu vas apprendre bien
des affaires, et tu vas apprendre que de la part de députés qui
commencent à avoir de l'expérience en Chambre on voit que
c'est le cas depuis tout à l'heure les idées peuvent
manquer, mais jamais les mots".
Je dois vous dire que cette motion qu'on vous présente, qu'on est
en train de débattre ce soir, était la nôtre. On n'a rien
contre cela. Le noeud de ce projet de loi, pour la période actuelle
on ne dit pas que les autres parties ne sont pas importantes et on ne
vous dira pas non plus que de sauter de l'article 7 jusqu'à l'article
68, ce ne sont pas des articles importants c'est la rentrée
scolaire à Montréal. Nous, de l'Union Nationale, comprenons que
tant et aussi longtemps que tout le projet de loi ne sera pas adopté, on
ne pourra pas procéder à la rentrée à
Montréal. Comme j'ai posé la question à plusieurs reprises
au ministre de l'Education pendant la session, je sais qu'on pourra
préparer les dossiers. Ce qu'on veut, comme Opposition, c'est collaborer
avec le gouvernement pour qu'il y ait le moins de chaos possible à la
rentrée.
Si actuellement on procède à ce chapitre de la langue
d'enseignement, on a des chances de régler cela dans peu de temps et
c'est ce que nous avons pu percevoir, dans votre parti.
Je pense que ces choses se comprennent. Cela se voit à
première vue dans un projet de loi comme celui-là. A moins de
vouloir faire de la vocalise autour de la table, il me semble que c'est un
geste tout à fait naturel. On aurait pu trouver un assentiment de tous
les membres de la commission autour de cette table pour qu'on procède
immédiatement à ce chapitre de la langue d'enseignement.
On n'a pas à faire des discours et à utiliser tout son
temps pour le comprendre. Il s'agit d'expliquer son point de vue dans des
termes aussi brefs qu'on le peut et de poursuivre.
Je peux vous dire que pour cette motion j'ai à peu
près terminé quand on procédera à
l'étude du projet de loi, vous pouvez être sûr qu'on va
faire nos propositions qui sont dans ce livre. A moins de contretemps qu'on ne
peut pas prévoir parce qu'un contretemps, c'est par
définition, quelque chose qu'on peut difficilement prévoir
on s'en tiendra à notre livre. On n'aura pas de résolution de
préparée au bout de la main, sur le bout de la table, de nature
à retarder les débats. Ce n'est pas notre intention. Et si une
bonne journée d'étude nous suffit pour passer à travers le
chapitre de la langue d'enseignement, c'est assez pour nous.
Quand nous aurons fait comprendre notre position, nous ne sommes pas
sûrs, ou, nous sommes quasiment sûrs que nos propositions ne seront
pas acceptées, mais nous ferons connaître au public notre
façon de voir le problème. C'est tout ce qu'on peut attendre de
l'Opposition, à savoir tenter de convaincre le gouvernement et, une fois
que c'est fait, c'est fait.
Je pense que ce ne sont pas de longs discours qu'on peut faire de ce
côté-ci qui vont changer quelque chose. Qu'on nous appelle
à cause de cela, le "club ferme" du gouvernement, c'est peut-être
cela le nouveau style. C'est de faire des propositions. Cela peut
peut-être faire rire certains membres de cette commission, mais c'est
peut-être cela le nouveau style, soit d'être capable de faire des
propositions brèves, précises, pensées à l'avance
et quand elles sont rejetées, on passe à autre chose. J'appelle
cela de la saine administration. Si l'Opposition libérale a
décidé que c'étaient de longs discours qu'il fallait faire
pour garder les anciennes traditions qui existaient avant Taschereau, on peut
se permettre de penser le contraire et peut-être d'avoir raison
aussi.
Alors, je dis que le Parti libéral, bien sûr, quand on voit
tout ce qui se passe dans le Québec aujourd'hui, n'a pas tellement de
chose à perdre, c'est comme à peu près une non-vierge, il
ne lui reste plus beaucoup à perdre. A ce moment-là, on peut se
permettre bien des choses. Ce n'est pas notre cas. Nous sommes un parti qui va
en montant et c'est notre intention de répondre aux aspirations de la
population et de procéder avec diligence, avec fermeté, de faire
connaître nos positions et de procéder ensuite. M. le
Président, c'est tout.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Non, je ne parlerai pas de virginité, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, à l'ordre!
M. Lalonde: Je veux simplement dire et reconnaître
et, à ce moment-là, je rejoins le député de
Mégantic-Compton qu'il a bien appris et retenu la leçon de
l'ancien député Tremblay.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
voudrais faire remarquer au député de Marguerite-Bourgeoys que ce
n'était pas une question de règlement. Je cède la parole
au député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, je serai très bref
pour permettre qu'on passe immédiatement au fond de l'article 68. Je
voudrais tout d'abord dire, sans me porter à la défense du
député de Saint-Jacques, ministre délégué au
haut-commissariat, qu'il a fait la proposition purement et simplement dans
l'optique d'être conséquent avec l'engagement qu'il avait pris
hier de passer à l'article 68 après l'adoption de l'article 6. Ce
n'est pas dans un but de voler ou "scooper" comme on dit communément en
anglais l'Union Nationale, mais bien dans l'optique d'un appui et de tenir sa
parole. Deuxièmement, M. le Président, quand j'entends le
député de Mont-Royal parler d'un deuxième projet de loi
sur l'éducation, je ne sais pas si c'est là une façon de
gagner du temps et d'aggraver la situation ou de faire en sorte que la
situation inopérante actuelle persiste, perdure, mais le mois de
septembre arrive sans qu'on ait réglé d'une façon
systématique, d'une façon précise, d'une façon
claire, la question de l'inscription des étudiants conformément,
à une réglementation axée sur un projet de loi
précis et déterminé
par une volonté politique claire. Donc, à partir de
là, on n'est pas surpris d'entendre à la radio ou de lire dans
les journaux que le Parti libéral espère le retour au libre
choix. Tant et aussi longtemps qu'on refusera de parler de la langue
d'enseignement, c'est du temps qu'on gagne pour cette Opposition encore dite
officielle. Donc, à partir de ce fait de suggérer qu'il y ait un
deuxième projet de loi et qu'on cherche le moyen de ne pas en discuter,
après avoir, en commission parlementaire, sur un projet de loi de
même nature, passé la majeure partie du temps à argumenter
en fonction de la langue d'enseignement, je suis surpris que, dans un premier
temps on ait, sur le bill 1, argumenté autant en ce qui regarde la
langue d'enseignement et qu'on se refuse tout d'un coup, alors que le parti
ministériel offre aux libéraux l'occasion de parler du sujet sur
lequel ils ont le plus parlé en commission parlementaire, et dans leurs
discours au niveau de la deuxième lecture du projet de loi, qu'on se
refuse tout à coup, dis-je, à passer à cette
priorité. Serait-ce parce que l'Opposition concurrente, qui est l'Union
Nationale, voulait discuter de ce sujet elle aussi et qu'on veut absolument se
dérober? Ce sont des questions qu'on peut se poser.
Il y a des centaines de parents qui, actuellement, sont soucieux du
respect de la légalité et attendent de voir ce qu'on va faire ici
au niveau de la langue d'enseignement, pour se brancher définitivement,
dans une discussion sérieuse sur le fond des articles. Lorsque les gens
verront qu'en commission parlementaire, les parlementaires, d'une façon
sérieuse, ont pris des positions, ont tranché le débat,
indépendamment du fait que la loi soit ou non adoptée vers la fin
d'août, ils s'enli-gneront, parce que ces gens auront compris qu'en
commission parlementaire, les idées sont faites et que les
décisions sont prises. Donc, à partir de ce fait, M. le
Président, je pense que si on veut vraiment se montrer positif comme on
l'a fait au niveau des discours, au début de cette commission
parlementaire, se montrer positif, c'est attaquer le fond des articles un par
un et on vous offre l'occasion immédiate de vous retremper dans les
articles qui vous ont valu de si beaux discours au niveau du projet de loi no 1
en commission parlementaire et de faire valoir le fond même de vos
opinions. A ce moment-là, on pourra juger, en tant que
ministériels, du bien-fondé de vos arguments.
Ce serait beaucoup plus édifiant d'entendre de longs discours de
vingt minutes sur le fond des articles que d'entendre parler de
l'opportunité de discuter de l'article 68 à ce stade-ci.
J'invite l'Opposition officielle à faire vite dans ses discours
après mon bref exposé afin qu'on passe, avec l'ensemble des
autres députés qui siègent à cette commission, au
fond de l'article 68.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que cette motion sera adoptée? M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, cette motion du
député de Saint-Jacques n'a reçu aucun appui
véritable du gouvernement. Si on recherche un appui ordonné, un
appui articulé du gouvernement, la seule chose que le
député de Saint-Jacques a dite en préambule de sa motion,
c'était que l'article 6 parle de l'enseignement, donc, il faudrait
peut-être aller à l'article 68 qui parle de l'enseignement. Je
m'étonne que le député de Saint-Jacques n'ait pas fait la
même motion pour l'article 5 qui parle des consommateurs ou l'article 4
qui parle des travailleurs et cet argument, à mon sens, est tout
à fait fallacieux.
Un autre argument qu'il a employé, qu'il a mis de l'avant, c'est
que tous les partis ont une politique définie sur la langue
d'enseignement, donc, il est temps d'en parler. Je dirai au
député de Saint-Jacques qu'en ce qui nous concerne, je ne sais
pas à propos du recueil bleu de l'Union Nationale, mais en ce qui nous
concerne...
Une Voix: ...
M. Lalonde: J'ai été gentil, je n'ai pas dit
"épais", non. Quant à nous, notre politique linguistique couvre
tous les aspects de ce projet de loi et nous sommes prêts à
attaquer l'article 7 et les articles suivants aussi bien que les articles de ce
projet de loi qui concernent la langue d'enseignement. C'est la
pauvreté, justement, de la présentation du député
de Saint-Jacques qui m'incite à penser que nous devons nous
méfier, comme Opposition officielle. Généralement, le
député de Saint-Jacques est beaucoup plus loquace. Je l'ai
souvent entendu faire preuve d'une éloquence remarquable, au moins dans
la forme, sinon dans le fond. Je m'attendais, M. le Président, et
j'attendais qu'il tente de me convaincre grâce à cette
éloquence, justement, et qu'il démontre la
nécessité pour cette commission parlementaire, qui est quand
même la créature de l'Assemblée nationale, d'attaquer
maintenant l'étude de ce chapitre concernant la langue de
l'enseignement.
Naturellement, je ne peux pas me rabattre sur la pauvreté des
arguments et, là-dessus, je ne peux quand même pas trop
blâmer l'Union Nationale parce que le député de
Mégantic-Compton n'a pas eu le temps, n'a pas eu le loisir hier de
parler à l'appui de cette motion qui avait été
déclarée prématurée. Les quelques arguments qu'il
avait quand même eu le temps d'effleurer, c'était que c'est un
problème important. Oui, c'est un problème important. C'est un
problème urgent. Oui, c'est un problème urgent, M. le
Président. Mais il n'avait pas pu, à ce moment-là, quand
même, me convaincre du fait que, même si on décide ce soir
ou demain des articles concernant la langue de l'enseignement, ces articles ne
pourraient pas entrer en vigueur avant l'adoption de la loi,
c'est-à-dire des 219 articles de cette loi. Devant cette
pauvreté, cette absence d'arguments de la part du gouvernement, j'ai des
raisons de penser qu'il s'agit d'une stratégie.
Des Voix: ...
M. Lalonde: Bon, alors, c'est terminé?
M. le Président, pourquoi commencerions-nous ce soir à
étudier les articles 68 et suivants? Je pose la question au
gouvernement. Le gouver-
nement n'a pas démontré cette nécessité,
cette urgence. Même s1 je le répète, parce que c'est
important nous disposions ce soir, avant 23 heures, de tous les articles
du chapitre concernant la langue de l'enseignement, les articles de ce projet
de loi ne pourraient pas entrer en vigueur avant que nous ayons terminé
l'étude article par article de tous les autres articles de ce projet de
loi. Pourquoi commencer par la langue d'enseignement? Nous n'avons aucune
raison d'adopter ces articles.
On peut dire qu'il y a la rentrée scolaire ici dans quelques
semaines, nais ce n'est quand même pas la faute de l'Opposition si ce
gouvernement a décidé de proposer à l'Assemblée
nationale un projet de loi aussi important et volumineux, de plus de 200
articles, à la mi-juillet, quelque six semaines avant la rentrée
scolaire, un projet de loi qui aurait mérité qu'on s'accorde le
temps, le loisir de l'étudier article par article au niveau des
principes, des détails, des modalités pendant de longs mois, un
projet de loi qui va quand même affecter la vie de tous les
Québécois et Québécoises, adultes, enfants,
entreprises, consommateurs, travailleurs, patrons, et d'autres.
C'est le gouvernement qui est responsable du calendrier
législatif et il ne peut quand même pas blâmer l'Opposition
de ne pas être d'accord, ce soir, parce que c'était à lui
de décider. Si c'est la rentrée scolaire qui est quand même
l'échéance qui l'effraie, c'était à lui de
décider de proposer un projet de loi concernant la rentrée
scolaire dans un calendrier raisonnable pour permettre à l'Opposition et
à tous les parlementaires, y compris l'Union Nationale si jamais elle
voulait cesser de s'abstenir, de discuter positivement de toutes les
dispositions qu'un tel projet de loi pourrait contenir.
Nous avons, M. le Président, dans les articles 7 à 68
qu'allègrement le député de Saint-Jacques suggère
de laisser tomber jusqu'à nouvel ordre, des dispositions
extrêmement importantes. Nous avons, par exemple, des dispositions
concernant la langue de la législation et de la justice au
Québec. Vous savez que la législation est l'objet principal du
pouvoir législatif dont nous sommes les serviteurs, le pouvoir
législatif et un des trois pouvoirs de notre démocratie; le
pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif étant les autres.
Naturellement, le pouvoir exécutif peut s'organiser
lui-même, en ce qui concerne la francisation ou le français; je
lui fais confiance là-dessus. Quant au pouvoir judiciaire et au pouvoir
législatif, c'est aux articles 7 et suivants que nous avons des
dispositions extrêmement importantes qui affectent le comportement et les
droits de tous les citoyens qui sont proposés par ce gouvernement et
nous avons des amendements à proposer aux articles 7, 8, 9, 10, 11, 12,
13
Une Voix: 14.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. LaIonde: Non, cela s'arrête à l'article 13, M. le
Président, pour ce chapitre.
Mme Lavoie-Roux: Ils n'ont pas lu le projet de loi 101.
M. Lalonde: M. le Président, nous avons la langue de
l'administration aux articles 14 et suivants. L'administration, il ne faut
quand même pas se leurrer, ce n'est pas simplement ce gouvernement avec
ses ministères et ses organismes. Il faut admettre que le statut de la
langue française, à ce niveau, n'est pas pire, cela ne va pas si
mal, mais l'administration inclut des centaines de municipalités, des
dizaines de commissions scolaires et, à cet effet, nous avons des
amendements à proposer aux articles 14, 15...
Une Voix: 16.
M. Lalonde: Non, 17, 18...
Une Voix: 19.
M. Lalonde: Non, pas à l'article 19.
Une Voix: 20.
M. Lalonde: 20, oui; 21, 22, 23, 24, 25, 26 et 27.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: Nous avons préparé des amendements
extrêmement importants, positifs, qui n'ont de raison d'être que
notre désir de bonifier la loi et de la rendre juste.
Nous avons, en plus, la langue des organismes parapublics. On pourra
dire que c'est moins important. Non, ce n'est pas moins important.
Peut-être que la portée de ces articles est moins large. Nous
avons, à ce moment, des dispositions concernant les services de
santé, les services sociaux, les entreprises d'utilité publique
et les ordres professionnels. Il y a quand même plusieurs milliers de
personnes, d'individus, de citoyens du Québec qui sont affectés,
et aussi tous les citoyens qui ont affaire à ces gens.
Nous avons des amendements aux articles 28, 29 et 30...
M. Grenier: L'article 22 va être amendé.
M. Lalonde: ... 32 au moins, peut-être 33 on verra
sûrement 34 et 35. Nous avons aussi un amendement à
l'article 37 aussi.
Maintenant, j'arrive à un chapitre extrêmement
important.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
m'excuse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je demanderais
aux députés, membres de la commission, d'être silencieux,
de laisser parler le
député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît.
Cela prend un minimum de décorum dans cette salle, s'il vous
plaît.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Nous arrivons au
chapitre VI que le député de Saint-Jacques veut mettre de
côté du revers de la main. Cela s'appelle "La langue du
travail".
La langue du travail est la raison d'être de toute cette loi. Ce
sont les travailleurs qui profiteront des dispositions de ce chapitre. Il y a
des dispositions qui profitent aux travailleurs, dont les travailleurs seront
les premiers bénéficiaires, à tous les articles, à
partir de l'article 38 jusqu'à la fin de ce chapitre.
En ce qui nous concerne, pour l'Opposition officielle, nous insistons
sur l'importance de ces articles, quelle que soit aussi l'importance de la
langue d'enseignement, et c'est pour cela que nous voulons procéder
à l'examen, article par article, dans l'ordre que le gouvernement a
choisi.
Si le gouvernement avait été un peu plus prévoyant,
lorsque, à la mi-juillet, quelques semaines à peine avant
l'entrée scolaire, s'il avait choisi d'inclure le chapitre de la langue
d'enseignement au tout début, naturellement, nous aurions
procédé comme le gouvernement nous l'aurait
suggéré.
Il nous a demandé, par la facture même de ce projet de loi,
d'examiner, avant la langue d'enseignement, tous les chapitres que je vous ai
mentionnés et surtout et c'est celui sur lequel j'insiste plus
particulièrement le chapitre de la langue du travail.
Il y a aussi, naturellement, la langue du commerce et des affaires qui
implique et qui affecte beaucoup d'individus, d'entreprises, d'organismes, et
j'en passe.
Ceci pour dire que je pense que le gouvernement agit avec beaucoup
d'arrogance quand, sans même tenir compte de ses propres choix, de ses
propres priorités lorsqu'il a rédigé le projet de loi, il
demande tout à coup à cette commission, sans aucune raison, sans
appuyer sa décision, son choix sur aucun argument valable,
d'étudier la langue d'enseignement.
La seule raison que je vois est la clôture qui se profile à
l'horizon, derrière ce choix du gouvernement. C'est la guillotine qu'on
construit à grands coups de marteau actuellement et qui va s'abattre sur
cette commission aussitôt que l'étude sur le chapitre de la langue
d'enseignement aura été terminée.
Si, immédiatement, le ministre d'Etat au développement
culturel, et non pas seulement celui-ci parce que j'ai peur qu'il me
réponde: dès que possible, et le ministre, député
de Saint-Jacques, s'engageaient à ne pas imposer la guillotine, à
ne pas imposer la clôture à cette commission parlementaire, M. le
Président, je voterais en faveur de cet amendement.
J'ai attendu quelques secondes, M. le Président, et je n'ai pas
eu...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Jacques sera le prochain intervenant.
M. Lalonde: Alors, M. le Président, j'arrête ici mon
intervention et je reviendrai après le député de
Saint-Jacques.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Après M. le député de Lotbinière, puisque le
député de Lotbinière suivra le député de
Saint-Jacques.
M. Lalonde: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Jacques, M. le ministre.
M. Charron: M. le Président, je n'avais pas l'intention de
revenir, parce qu'il me semblait qu'en me rendant aux voeux exprimés par
l'Opposition hier, je susciterais rapidement l'unanimité de ceux qui ont
envie de se prononcer sur les aspects les plus importants du projet de loi,
comme ils l'ont maintes fois exprimé. Mais puisque je m'aperçois
qu'encore une fois, sans explications valables, ladite Opposition officielle
nous fait faux bond, il faut peut-être mettre les points sur les "i" et
expliquer ce geste. Nous n'en avons pas pris l'initiative, mais l'initiative
nous a souri. Nous l'avons même, entre nous, considérée
comme normale pour précisément faire taire les critiques
desquelles s'abreuvent nos collègues du Parti libéral. Quand
j'entendais cet aimable moulin à parole qu'est le député
de Mont-Royal, dire tout à l'heure qu'il s'agissait là d'un geste
de crainte du gouvernement, je dis: Mais qu'est-ce qu'il ne faut pas
faire...
M. Ciaccia: Répondez donc au fond des arguments, au lieu
d'insulter...
M. Charron: ...je suis en train de vous répondre, mon cher
et excellent ami.
M. Ciaccia: ...par vos paroles et par vos projets de loi, vous
insultez la population. Tellement...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, M. le député de Mont-Royal!
M. Charron: Avez-vous remarqué que ce sont les plus grands
défenseurs de la liberté d'expression qui interdisent toujours
aux autres de parler, M. le Président?
M. Lalonde: Le gouvernement est bâillonné.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, M. le député de
Mont-Royal, MM. les députés.
M. Charron: Quand j'entendais cet aimable collègue
à nous qui s'était, sur le bill 22, opposé au fait que le
français devienne la langue officielle du Québec, intervenir
aujourd'hui...
M. Ciaccia: C'est faux, M. le Président, et je ne
laisserai pas des paroles...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal, pour la troisième fois, à
l'ordre!
M. Ciaccia: Je ne me suis pas opposé à la langue
officielle, ni que le français soit la langue officielle, même sur
le bill 22.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal, s'i vous plaît, respectez le droit de
parole du député de Saint-Jacques!
M. Ciaccia: Je reviendrai. Je demanderai le droit de parole.
M. Charron: Je n'ai pas l'âge où je commence
à perdre la mémoire. Je me souviens très bien qu'en 1974
le député de Mont-Royal a, par trois fois, voté, à
chaque appel, en trois lectures, contre le projet de loi 22.
M. Ciaccia: Pas contre l'article 1. Contre le projet de loi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Charron: Quelle subtilité anglaise, que vous êtes
en train de nous manifester.
M. Ciaccia: II y avait beaucoup d'autres articles.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mi le
député de Mont-Royal, s'il vous plaît, pour la
dernière fois.
M. Ciaccia: L'article 96...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal, vous n'avez pas le droit de parole. Je
comprends que les paroles du député de Saint-Jacques peuvent
provoquer chez-vous des réactions, mais vous êtes le
troisième intervenant à suivre et il vous restera cinq minutes
pour rectifier les paroles que vous voudrez rectifier.
M. Charron: Quand j'entendais cet excellent ami à nous,
dire qu'il s'agissait là d'un geste de crainte du gouvernement, je me
dis: Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour que l'Opposition se cherche
quelques bouées de sauvetage dans l'explication de son manque de
politique? Parce que, M. le Président, au contraire, je soutiens que
lorsque nous offrons par cette motion, d'amener immédiatement, au moment
où l'Opposition est encore en pleine possession de toutes ses forces,
où les travaux ne nous ont pas encore épuisés puisque nous
en sommes à la deuxième journée de la commission
parlementaire, de mettre sur la table le sujet le plus litigieux à
l'intérieur de la loi 101, nos avancés politiques sont sur la
table, on vous offre le défi de combattre le point sur lequel vous avez
le plus fait valoir votre opposition au projet de loi 101, est-ce qu'il s'agit
d'une attitude de crainte de la part du gouvernement? Nous vous offrons
aujourd'hui, après que vous ayez fait des sparages non seulement dans le
Québec, mais dans tout le pays, contre la clause Québec qui est
incluse dans le projet de loi, que je suis disposé à mettre en
débat tout de suite, est-ce qu'il s'agit d'un débat de crainte?
Non, au contraire. Nous avons hâte de mesurer nos arguments aux
vôtres sur le sujet le plus capital, sur l'échec le plus cinglant
de la loi 22 que vous aviez raison de combattre et contre laquelle vous vous
êtes prononcé trois fois. Est-ce qu'il s'agit d'un geste de
crainte quand, après que tout le monde se soit prononcé comme
étant le litige fondamental où même à
l'intérieur du parti ministériel plusieurs d'entre nous ont
avoué avoir, à l'occasion, des discussions profondes?
Nous offrons aujourd'hui, plutôt d'attendre que cela vienne dans
dix jours, après qu'à partir de motions dilatoires et
d'amendements ridicules, vous aurez retardé l'étude du projet de
loi, pour ensuite nous reprocher qu'on arrive avec l'article 68 au moment
où ces dignes membres de la commission sont épuisés dans
les propres amendements qu'ils nous auront eux-mêmes
présentés, nous l'offrons tout de suite, au moment où
madame et messieurs sont tous en pleine capacité de nous faire valoir
leurs opinions. Avez-vous peur de dire ce que vous avez dit hier, que vous
soutenez le libre choix? Avez-vous peur de confronter vos opinions tout de
suite, comme le gouvernement vous l'offre?
L'Union Nationale a fait connaître ses opinions. Elle est
prête à relever ce défi. Je pense que c'est le débat
le plus important, et quand j'entends le député de
Marguerite-Bourgeoys nous dire que j'ai rejeté, par ma motion, du revers
de la main, la question de la langue de travail ou toutes ces dispositions
contenues dans les articles que je vous demande de suspendre par ma motion, je
lui dis que s'il est disposé à terminer dès ce soir ou le
plus rapidement possible, qu'il collabore à terminer le plus rapidement
possible, mais, après l'examen que la question mérite, le
chapitre de la langue d'enseignement, je suis tout à fait disposé
à amener la langue de travail par la suite.
Nous allons les prendre dans un ordre d'importance, l'importance
même que les interventions de l'Opposition nous ont signalée.
Je n'ai pas vu d'interventions mirobolantes sur la question de l'Office
de la langue française.
M. Lalonde: Cela viendra après.
M. Charron: Nous en parlerons bien. Cela viendra après,
mais nous offrons ce soir d'avoir le vrai débat fondamental que les
Québécois nous demandent d'avoir sur cette question, qui a
été l'échec de votre politique linguistique, qui a
été l'échec de votre gouvernement, et qui vous
mérite aujourd'hui d'être dans l'Opposition.
Avez-vous peur de ressusciter un débat qui
vous a coûté le gouvernement, un débat qui vous a
ramenés de 102 députés à 28 d'un seul coup?
Des Voix: 26.
M. Charron: 26... J'en mettais même trop, qui vous a
ramenés d'un seul coup, nous vous l'offrons.
Si nous attendions, il faudrait les voir se plaindre et gémir, et
dire que nous avons fait travailler la commission à des heures
irrégulières, que ces messieurs et dame étaient
épuisés et qu'ils n'ont pu fournir le plein rendement. Mais quand
on a encore le front, quand on a encore l'audace et je dis, quand on a encore
la faiblesse de présenter à la face des Québécois
comme politique linguistique dans la langue d'enseignement le libre choix, il
faut le déposer sur la table tout de suite, parce que cette position
intenable que vous-même, madame avez condamnée lorsque vous
étiez présidente de la Commission des écoles catholiques
de Montréal, j'ai bien envie de vous l'entendre défendre comme
député de L'Acadie maintenant, trois ans plus tard, après
qu'elle a échoué.
Mme Lavoie-Roux: Je suis prête, M. le député
de Saint-Jacques, mais parlez franchement.
M. Charron: C'est ce que je vous offre madame, mais votez pour ma
motion.
Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de libre choix, M. le
député de Saint-Jacques.
M. Charron: Votez pour ma motion et nous allons entamer ce
débat dans quelques instants. Cessez ces motions dilatoires où
vous dites que vous ne comprenez pas pourquoi je rejette du revers de la main
les chapitres entre les articles 7 et 67. Les chapitres entre ces articles 7 et
67, nous les reprendrons dès ce soir, dès que vous nous aurez
expliqué ce que vous avez envie de faire sur la langue
d'enseignement.
M. Lalonde: Vous engagez-vous à les faire?
M. Charron: Je m'engage à les faire. Bien sûr, je
m'engage à les faire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Charron: Je m'engage à revenir à toutes les
dispositions de la loi si l'Opposition y collabore...
M. Lalonde: Jusqu'à 219?
M. Charron: ...si l'Opposition a l'intention d'y venir.
M. Lalonde: Jusqu'à 219?
M. Charron: Mais je suis convaincu que nous ne permettrons pas
à l'Opposition ce petit jeu ridi- cule qui, lorsqu'elle se trouvait au
pouvoir, lui a permis d'amener la motion de clôture sans même que
nous n'abordions la question de la langue d'enseignement sur la loi 22.
M. Lalonde: C'est ridicule.
M. Charron: Pouvez-vous dire aujourd'hui, maintenant...
M. Lalonde: Vous n'avez jamais voulu...
M. Charron: ...qu'il n'y aurait pas eu utilité que ce
débat ait lieu puisque maintenant vous vous trouvez de l'autre
côté?
Mme Lavoie-Roux: Ah! C'est de la démagogie.
M. Charron: Nous vous l'offrons maintenant, madame.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Charron: Nous vous offrons de mesurer nos mesures aux
vôtres. Nous vous offrons de mesurer dans un instant...
M. Lalonde: C'est de la démagogie.
M. Charron: ...les politiques des trois partis en cause, devant
les Québécois, devant ceux qui sont ici pour les
représenter et les informer et nous sommes prêts à tenir ce
débat ce soir, vendredi, samedi, lundi matin, si vous le voulez, mais
nous allons aller au fond de la question une fois pour toutes.
De quelle couleur est le Parti libéral? Qui sert-il? Quels
intérêts sert-il? Pour qui travaille-t-il à
l'Assemblée nationale? Et ces messieurs qui essaient de sauver la
chèvre et le chou à la fois, vont-ils avoir la chèvre ou
le chou ou vont-ils courir après le bouc à la fin du
débat?
Et, de ce côté-ci, nous allons, à nouveau,
identifier toutes les raisons, argument par argument le ministre de
l'Education est à mes côtés, le ministre parrain de la loi
est à ma gauche nous allons vous dire pourquoi nous avons mis la
clause Québec dans la loi. Nous sommes prêts à l'expliquer
tout de suite, si vous nous le permettez, et si la commission le
désire.
Nous allons tout de suite vous expliquer pourquoi nous avons offert aux
autres provinces canadiennes un traité de réciprocité,
dans l'esprit normal dans lequel cela doit être fait.
Nous allons vous dire tout de suite pourquoi nous avons pris les
critères d'accès à l'école anglaise qui sont
là.
Ce qui nous conduit à présenter cette motion, ce n'est pas
l'arrogance, c'est simplement la confiance que les positions que nous
avançons sur cette question sont celles que les Québécois
réclament et nous les avons entendus, les Québécois,
pendant cinq semaines, venir nous dire, sur cette question, qu'ils appuyaient
enfin les critères
précis, qui ne laisseront plus de flou et de vague comme la
prétendue connaissance de la langue maternelle, que ce soit par
entrevues ou par tests. Tout le monde nous demande enfin, une fois pour toutes,
de clarifier cette question, les Québécois savent que nous avons
enfin pris, maintenant, les moyens de vivre en français au
Québec, de stériliser une fois pour toutes l'érosion des
francophones vers l'école anglaise, de réserver strictement
l'école anglaise à nos concitoyens québécois qui
sont de langue anglaise, selon les critères qui sont dans la loi, et
nous sommes prêts à les défendre l'un après
l'autre.
Ce que je sollicite, M. le Président, ce n'est pas un geste de
fuyard que je fais, c'est la bonne et vraie rencontre qui devrait avoir lieu et
elle doit avoir lieu tout de suite, maintenant que nous venons tout juste de
nous prononcer sur les droits linguistiques fondamentaux des
Québécois, articles qui ont suscité l'unanimité de
la commission.
Je pense que le temps est propice. Nous allons voir maintenant si ce qui
a fait l'unanimité de la commission sur les droits linguistiques
fondamentaux va conserver la même attitude, la même énergie,
la même clarté, parce qu'il s'agira de les appliquer dans le sujet
le plus névralgique c'est le mot de Mme le député
que je maintiens, M. le Président, parce qu'il est bien choisi de
toute la loi.
Je ne vous dis pas le plus important, M. le Président. Pour ma
part, j'estime que ce qui me plaît le plus dans le projet de loi
je le dis en toute honnêteté et je ne me dissocie en rien de mon
parti en disant cela ce sont les mesures de francisation de
l'économie. C'est par là, je crois, que nous allons vraiment
établir au Québec la langue française, mais puisque, d'un
autre côté... A tous ceux, y compris les opposants anglophones au
projet de loi dont vous vous êtes faits les fidèles
représentants à l'intérieur de cette Assemblée, on
a d'abord et avant tout fait porter le feu de l'Opposition systématique
au projet de loi 101, où les attaques les plus virulentes, les plus
basses commises, par exemple, par le député de Saint-Laurent et
par le député de Saint-Louis à l'égard du ministre
d'Etat au développement culturel, à l'Assemblée, ont
porté sur ce sujet, nous vous disons: Retroussez-vous les manches et
c'est cela qu'on commence tout de suite. C'est ce que nous offrons, la bonne,
vraie rencontre entre Québécois sur le sujet de notre avenir
collectif. Il est là, dit-on, nous allons le faire tout de suite.
Que l'on ne me dise pas, M. le Président, que cette motion est
une motion de fuite, elle est une motion qui, précisément,
invite, à ce moment-ci de la commission, les membres à se
prononcer sur le sujet le plus litigieux. Je suis même disposé,
lorsque la commission aura entendu...
M. Lalonde: Un engagement.
M. Charron:... c'est le seul engagement que je vais prendre
devant vous. Vous allez me demander l'engagement de ne pas prendre la
guillotine. M. le Président, la guillotine est une méthode
d'exécution de l'ancien gouvernement; nous avons pré-
féré électrifier les chaises de l'Opposition et nous les
mettrons au courant.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, malgré les propos électrisants du
député de Saint-Jacques, je demanderais à la salle et aux
députés de ne manifester d'aucune façon.
M. Charron: M. le Président, je crois que nous devrons
laisser à l'Opposition tout le temps que le règlement lui permet
pour continuer à nous dire pourquoi elle craint maintenant d'aborder
immédiatement le débat où, prétend-elle, elle a la
solution finale et globale qu'elle n'avait pas dans la loi 22 qui l'a
coulée, auquel elle s'oppose, mais, lorsque vous appellerez le vote sur
ma motion, étant donné l'offre déjà faite par
l'Union Nationale qui, elle, risque sa politique dans ce débat, je suis
convaincu que la commission disposera volontiers du fait qu'en aucun temps, la
commission refuse d'attaquer tout de suite le sujet fondamental de notre
débat.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Biron: M. le Président, j'avais demandé la
parole avant.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, je m'excuse, M. le
député de Lotbinière. Vous savez que, même si la
présidence est indivisible, elle n'a pas des yeux tout le tour de la
tête et des oreilles partout.
M. Biron: Vous étiez distrait lorsque j'ai demandé
la parole.
Le Président (M. Cardinal): C'est ça. M. le
député de Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, cette vraie rencontre à
laquelle vient de nous convier le ministre délégué au
Haut-Commissariat.
Nous, de l'Union Nationale nous la souhaitons en tout cas, cette vraie
rencontre, puisque hier même nous avions lancé le même
défi. Nous sommes prêts à mettre notre politique
linguistique sur la table et spécialement à discuter de cette
question fondamentale de la langue de l'enseignement. Cela ne veut pas dire que
la loi n'est pas importante ailleurs. Pour nous, c'est une loi très
importante. Mais le chapitre qui a trait à la langue de l'enseignement,
c'est le chapitre qui a été le plus discuté, c'est le
chapitre qui a peut-être apporté le plus
d'insécurité à travers le Québec et
spécialement dans la grande région de Montréal.
Mais si c'est un chapitre qui a été discuté et qui
a apporté de l'insécurité, c'est parce que les gens ne
savent pas ce qui arrivera à leurs enfants au mois de septembre. Et
lorsqu'on attaque les citoyens dans leur progéniture, dans leurs
descendants mêmes, on coupe dans la chair vive, et c'est important pour
les parents de même que pour les commissions scolaires, les commissaires
d'école et pour les enfants, de savoir ce qui va arriver au
mois de septembre. C'est dans ce but que l'Union Nationale a
suggéré hier qu'on s'attaque immédiatement à cette
question de la langue de l'enseignement. Ce n'est pas parce que, pour nous,
c'est plus important que l'autre, mais parce que c'est pour nous un sujet
crucial au Québec, c'est un sujet qui a un impact immédiat sur
l'avenir du Québec, parce qu'au mois de septembre, dans trois ou quatre
semaines, on est rendu à faire face à cela.
On a voulu, en en discutant immédiatement, désamorcer
cette espèce d'insécurité qui existe à l'heure
actuelle. On ne peut pas se le cacher, cela existe. Mais, quand même, il
est grand temps de désamorcer cette insécurité et
possiblement que cela peut se faire dans un jour ou deux, M. le
Président. Si on s'attaque sérieusement à ce chapitre, on
va passer à travers et, finalement, les gens vont savoir, au
Québec, où on veut aller.
Il est fort possible que les amendements que nous, de l'Union Nationale,
avons suggérés ou que d'autres amendements que le parti
Libéral pourra peut-être suggérer correspondent exactement
aux amendements que déjà le ministre d'Etat aux Affaires
culturelles nous a dit qu'il apporterait.
C'est cela qu'il est important de savoir exactement, où se situe
chacun de nos partis politiques et en discuter véritablement le fond.
Bien sûr, on va avoir des divergences d'opinion. Bien sûr, on va
voir les choses d'un oeil différent, mais on est ici, je crois, pour
représenter véritablement toute la population, la population de
nos comtés respectifs, bien sûr, mais toute la population du
Québec. Et il faudrait passer un peu au-dessus des lignes de parti et
mettre sur la table nos options à nous.
Quand on va sortir du débat, on ne sera peut-être pas
d'accord à 100% mais, au moins, on aura contribué à faire
avancer un peu la discussion et on prendra finalement une décision qui
va répondre aux besoins de la situation du Québec
d'aujourd'hui.
Si on veut étudier ce chapitre de la langue de l'enseignement, en
particulier, c'est que les arguments sont très nombreux. On pourra
trouver de nombreux arguments. C'est une question de jours avant
d'établir les règles du jeu pour le mois de septembre. C'est ce
qui est important pour nous. Il y a une urgence à connaître la
position finale du gouvernement. On sait que des amendements seront
apportés. On sait que les partis d'opposition vont suggérer des
amendements, mais c'est important de connaître le plus rapidement
possible les règles du jeu.
Si on attend au début de septembre pour s'attaquer à ce
chapitre en particulier, il va être trop tard. C'est pour cela que c'est
important de les connaître. Les commissions scolaires, les parents et les
enfants, comme je le disais tout à l'heure, veulent véritablement
connaître l'esprit qui anime le gouvernement, les différentes
suggestions et les différents amendements qu'il va apporter à son
projet de loi, et il faut à tout prix favoriser la paix dans la
rentrée scolaire du mois de septembre et, le plus tôt possible on
connaîtra les règles du jeu, le mieux ce sera.
C'est sûr qu'on pourrait dire: Bien, si on s'était
attaqué à cela au mois de juin ou au mois d'avril, on
connaîtrait tout aujourd'hui, cela est vrai. Mais, finalement, nous
sommes rendus au mois d'août et on ne peut pas reculer le calendrier, on
est rendu là et il faut faire face à nos obligations et dire ce
qu'on a à offrir. Il faudra peut-être arrêter de perdre du
temps et discuter réellement du fond du problème. Les motifs qui
nous animent, nous de l'Union Nationale, pour en discuter tout de suite, ce ne
sont pas des motifs d'ordre juridique. Ce sont des motifs d'ordre pratique.
C'est sûr que le projet de loi ne sera peut-être pas
adopté avant la fin d'août, mais, au moins, les gens vont savoir
où aller. On sait que, lorsque ce chapitre de la langue de
l'enseignement va être adopté, ici en commission parlementaire, il
n'y aura pas grand-chance que cela change en troisième lecture. Au
moins, ce sont là des motifs d'ordre pratique. Tant que la loi ne sera
pas sanctionnée par le lieutenant-gouverneur, elle ne sera pas
adoptée, tout le monde sait cela au Québec. Mais, au moins, si on
pouvait savoir où l'on va, si nos parents, nos commissaires
d'écoles pouvaient connaître la position définitive des
législateurs du Québec, je pense que cela pourrait faire avancer
la discussion là-dessus et les idées, cela pourrait avancer la
paix sociale au Québec.
Le chapitre qui traite de la justice, du travail et de l'administration
est important, c'est sûr, mais même si c'est réglé un
peu plus tard, cela ne changera pas grand-chose au Québec. Les
organismes parapublics, la langue du commerce et des affaires, si c'est
réglé une semaine, deux, trois ou quatre semaines plus tard, cela
ne changera pas grand-chose au Québec. Il y a quand même un
calendrier qui prévoit pour le début de septembre la
rentrée scolaire, c'est cela qu'il faut prévoir. On a voulu le
prévoir en arrivant en commission parlementaire... C'était
difficile de demander la semaine dernière de s'attaquer à la
langue de l'enseignement, parce qu'on n'était pas rendu en commission
parlementaire.
Mais quant à la rentrée scolaire, on veut savoir ce qui va
arriver. Il n'est pas question, pour nous, d'être de retour à
l'ancienne méthode ou aux tests linguistiques. On veut savoir
véritablement ce que ce sera au mois de septembre.
Et là-dessus, vous me permettrez de dire que je suis
déçu de l'attitude du Parti libéral, ce soir, parce que
j'étais sûr, hier, que le Parti libéral était
d'accord avec nous pour discuter de la langue de l'enseignement, parce que
c'est ce parti qui voulait scinder le projet en deux parties. C'est lui qui
nous disait qu'il y avait un problème particulier à la langue de
l'enseignement. Mettons une loi spéciale pour elle et, après, on
discutera d'autre chose. On va régler ce problème en particulier.
Ce sont les libéraux qui voulaient, au début, régler ce
point rapidement. Voilà que ce soir, ils nous disent: On n'est pas
prêt à régler cela. Je voudrais connaître
véritablement la position des libéraux.
Pourquoi, il y a plusieurs mois, voulaient-ils régler le
problème de la langue de l'enseignement tout seul en disant: On va
scinder le projet de loi, et maintenant, ce soir, alors qu'on veut discuter
de
la langue de l'enseignement, on est prêt maintenant à en
discuter, il n'y a pas moyen de savoir la position réelle du Parti
libéral là-dessus?
Comme le ministre délégué au Haut-Commissariat
à la Jeunesse, aux Loisirs et aux Sports l'a dit tout à l'heure,
c'est le temps de mettre nos positions sur la table et d'en discuter avec toute
l'honnêteté possible et de connaître les règles du
jeu.
Il faudrait peut-être, pour ce chapitre en particulier, de
même que pour tout le projet de loi no 101, se moderniser un peu comme
législateur au Québec, oublier ce qu'on est dans notre parti
politique, se rendre compte qu'on est ici pour représenter la population
du Québec. On n'adopte pas des lois pour nous autres, en particulier, ou
pour nos enfants. On va se tirer d'affaires chacun de nous. On adopte des lois
pour toute la population du Québec. C'est à cela qu'il faut
songer sérieusement et il faut se mettre dans la tête aussi que le
përe, la mère de famille s'inquiète, quelque part, pour la
rentrée de sa fille ou de son fils à l'école. Cela est
important. On est au service de ces gens. Il faut peut-être oublier notre
personnalité propre et il faut peut-être passer par-dessus nos
lignes de pensée de parti politique. Ici, autour de la table de la
commission parlementaire, il faut véritablement être au service de
chacun des citoyens de notre province.
Je crois que si on veut véritablement rendre service à nos
concitoyens vis-à-vis de la langue de l'enseignement qui, à mon
point de vue, ce n'est pas parce que c'est plus important que les autres
chapitres, mais parce que c'est plus urgent, on devrait en discuter
immédiatement.
En terminant, je voulais dire, ce soir, sur cette motion en particulier,
au Parti libéral: C'est assez de temps perdu. Cessons de parler pour
rien. Il est grand temps qu'on discute véritablement du fond de chacun
de ces problèmes, de chacun de ces articles, de chacun des amendements
qu'on veut apporter au gouvernement et véritablement, qu'on prenne des
décisions dans les meilleurs intérêts de toute la
population du Québec.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, l'unicité de ce
projet de loi saute aux yeux. C'est alors un jugement de valeur que l'on peut
poser, chacun de nous, sur l'opportunité de commencer par tel ou tel
chapitre. Mais quand un gouvernement prépare un projet de loi et le
dépose, il a une idée en tête, au moins on doit le
présumer, il y a une suite dans cette idée, cela aussi, on doit
le présumer, et il y a une règle que nous connaissons et qui
s'applique à l'étude des projets de loi et à la
rédaction des projets de loi, c'est que l'on doit, normalement,
procéder dans l'ordre. Vous savez, encore mieux que moi, parce que vous
êtes plus versé dans les technicités de notre
règlement, que si l'on veut présenter un projet de loi qui,
contrairement à celui-ci, modifie une loi déjà existante,
il faut que ces modifications soient faites dans l'ordre et il n'y a pas moyen
de modifier, par un nouveau projet de loi, l'article 86, par exemple, de la Loi
des cités et villes avant d'avoir amendé l'article 58, si telle
est l'intention du gouvernement.
Or, le gouvernement a présenté ce projet de loi avec une
économie quelconque et les articles sont numérotés et les
chapitres également.
Il me semble que si l'on doit, à un moment donné, mettre
de côté des articles, des chapitres pour en prendre d'autres par
priorité, que l'on doit avoir une explication valable pour ce faire. Si
j'ai bien compris je m'excuse d'avoir dû manquer une partie de la
discussion tous les opinants ont dit que chaque chapitre a son
importance. Le ministre délégué au Haut-Commissariat
à la Jeunesse, aux Loisirs et aux Sports a dit que, pour lui, le
chapitre qui porte sur l'économie est véritablement le plus
important et, pourtant, il présente la motion pour passer
immédiatement à la question de la langue de
l'éducation.
Je ne minimise pas du tout, M. le Président, l'importance de ce
chapitre et je suis d'accord qu'il a des aspects plus névralgiques que
d'autres chapitres. Il me semble que, dans le passé, avec le projet de
loi de 1974 qui portait le no 22, nous avions des chapitres dont l'application
s'est avérée relativement facile. L'expérience des trois
dernières années a laissé ce chapitre comme,
effectivement, le plus névralgique.
Je concède cela, M. le Président, mais j'ai
écouté, comme d'habitude, avec une attention respectueuse, M. le
chef de l'Union Nationale qui nous incitait à accepter la motion du
ministre délégué au Haut-Commissariat en disant qu'il faut
régler immédiatement, avant la rentrée scolaire, la
question de l'inscription des enfants à l'école. Il a posé
la question: Qu'est-ce qui va arriver à nos enfants?
M. le Président, je soutiens respectueusement que mon ami, le
député de Sauvé, ministre de l'Education, a
déjà présenté devant l'Assemblée nationale
des arguments qu'il a défendus avec acharnement pour indiquer qu'il
avait, en vertu de la Loi de l'instruction publique, tous les pouvoirs
nécessaires pour réglementer la rentrée scolaire.
M. Lalonde: C'est cela.
M. Goldbloom: Alors, M. le Président, de deux choses
l'une; ou bien le ministre a déjà les pouvoirs nécessaires
en vertu de la Loi de l'instruction publique, ou bien il ne les a pas. S'il ne
les a pas, qu'il nous le dise et, s'il nous le dit, contrairement à ce
qu'il a dit en Chambre, à ce moment, l'argument du député
de Lotbinière, chef de l'Union Nationale, aura du sens. Il faudrait,
dans une telle éventualité, arriver rapidement à une
solution au problème, mais plusieurs fois, M. le Président, le
ministre de l'Education nous a rassurés en Chambre. Il n'y a pas de
problème. Les règlements qu'il a mis de l'avant, qu'il a
publiés, qu'il a envoyés aux commissions scolaires, ces
règlements sont valides. Il n'y a pas de manque de validité
là-dedans parce que la Loi de l'instruction publique lui donne les
pouvoirs nécessaires.
Or, M. le Président, je regrette de différer
d'opinion avec mon ami, le député de Lotbinière,
mon voisin ce soir, comme en Chambre, avec qui je m'entends passablement bien
sur le plan humain, mais, en ce qui concerne...
Des Voix: ...
M. Goldbloom: Est-ce que j'ai dit une chose maladroite?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Goldbloom: M. le Président, nous cherchons tous une
logique dans notre action. Ceux qui présentent un projet de loi doivent
le faire dans un contexte logique. Ceux qui proposent des amendements doivent
le faire dans un contexte logique et j'ai de la peine à comprendre la
logique de ceux qui voudraient mettre de côté l'ordre
déjà établi, déjà décidé par
le gouvernement.
Je me pose une question bien simple, M. le Président: Pourquoi ce
gouvernement qui, aujourd'hui, à la place de son club-ferme,
présente la motion pour changer l'ordre de l'étude des articles
de ce projet de loi, pourquoi ce gouvernement a-t-il auparavant
décidé d'un ordre différent? A-t-il fait erreur en
rédigeant le projet de loi, et quelles sont les circonstances
très particulières qui nous amènent à dire,
aujourd'hui: Le ministre de l'Education n'est pas en mesure de régler le
problème; il n'est pas en mesure d'assurer une rentrée scolaire
harmonieuse. Il lui faut ces articles-là. Mais, M. le Président,
ces articles n'auront leur validité qu'au moment où la loi, dans
son ensemble, aura été adoptée, à moins que le
gouvernement n'accepte de scinder le projet de loi, d'en faire deux, et
d'adopter en priorité et rapidement, la partie qui concerne la langue de
l'enseignement. Or, tel n'est clairement l'intention du gouvernement; il l'a
déclaré à maintes et maintes reprises.
M. le Président, il me semble que nous n'avons pas devant nous
des raisons suffisantes pour dire aux parents, comme le ministre de l'Education
l'a déjà dit: Ce n'est pas la loi qui va déterminer les
modalités de la rentrée scolaire. Le ministre de l'Education a
déjà ces modalités. Il les a déjà
communiquées aux commissions scolaires et, M. le Président, si le
gouvernement, soudainement, à la surprise générale, veut
nous dire ce soir qu'il y a des modifications importantes qu'il veut apporter
à cette série d'articles, d'accord, peut-être que nous
pourrons en être convaincus. Si tel est le cas, j'inviterais le
gouvernement à déposer immédiatement les modifications,
les amendements en question et, de toute façon... Tout cela, c'est
très impressionnant...
M. Morin (Sauvé): J'attends que le moulin à
café s'arrête.
M. Goldbloom: Puisque je ne suis pas un buveur de café, M.
le Président...
Des Voix: ...du scotch.
M. Goldbloom: Mon ancien collègue, qui était
ministre de l'Industrie et du Commerce et député du comté
de Chambly, disait: "La démocratie, c'est le jeu de convaincre ou de se
laisser convaincre". Je ne suis pas encore convaincu, M. le Président.
Je laisse la parole à ceux qui voudraient me convaincre.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de D'Arcy Mc Gee.
M. le député de Mont-Royal, en vous rappelant qu'il ne
vous reste à vous, que cinq minutes.
M. Ciaccia: M. le Président, je pourrais en faire une
question de règlement, mais je ne le ferai pas, parce que je ne voudrais
pas me faire accuser que si j'en fais une question de règlement, il me
restera encore mes cinq minutes et que je n'utiliserai mon droit de parole que
pour épuiser le temps. Je vais faire mes remarques, même si c'est
pour rectifier certains propos que j'ai faits et qui ont été, je
dirais, déformés un peu par le député de
Saint-Jacques. Je vais le faire dans les cinq minutes qu'il me reste.
M. le Président, je ne le ferai pas de façon
démagogique, comme l'a fait le député de Saint-Jacques;
même si je le voulais, j'avoue d'avance que je ne le peux pas. Je fais
cette admission.
Quand j'ai dit que le gouvernement craignait de discuter de certains
aspects du projet de loi, je n'ai pas dit que le gouvernement craignait de
discuter au sujet de la langue de l'enseignement.
Ce n'est pas cela. C'est certain que vous ne craignez pas de discuter de
la langue d'enseignement, mais ce que j'ai dit et je voudrais rectifier, ce que
vous craignez c'est de discuter ce projet de loi article par article dans son
ordre logique et de discuter de la langue d'enseignement quand elle va arriver.
Parce que vous nous avertissez d'avance et vous n'avez pas donné
l'engagement au député de Marguerite-Bourgeoys que vous n'allez
pas appliquer le baîllon. Deuxièmement, M. le Président,
quand le député de Saint-Jacques se réfère à
la loi 22, je pourrais dire que c'était un temps différent, un
contexte différent. Si vous lisez les interventions que j'ai faites je
crois qu'il va admettre que je n'ai pas voté contre la langue
officielle, mais j'avais d'autres raisons et ce n'est ni le temps, ni l'endroit
de les répéter... Non, mais...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît. Est-ce qu'on pourrait, au sein d'un même parti, ne pas
s'interrompre?
M. Ciaccia: Je lui avais accordé le droit de parole. Ce
n'était pas une interruption, M. le Président.
M. Lalonde: C'est la liberté chez nous, M. le
Président.
M. Ciaccia: II n'y a pas de division.
Quand, M. le Président, on se réfère aux cinq
semaines de la commission parlementaire et aux mémoires qui ont
été soumis, j'étais présent pen-
dant la plupart de ces cinq semaines. Je ne reproche pas au
député de Saint-Jacques de ne pas avoir été
présent, mais moi aussi j'ai entendu ces mémoires et ils
n'étaient pas tous en faveur du projet de loi. Ce n'étaient pas
seulement les mémoires des anglophones qui étaient contre le
projet de loi. Je voulais seulement rétablir les choses. Il y avait
beaucoup de mémoires de groupes francophones qui s'opposaient à
certains aspects du projet de loi et c'est pour cette raison que nous voulons
le discuter article par article. Ce n'est pas que nous craignions de discuter
de la langue d'enseignement, mais d'après nous, nous voulons suivre et
nous voulons avoir l'assurance que nous pouvons discuter de la langue du
travail, de la langue du commerce et de la langue des affaires. A moins que
vous ne puissiez nous donner cette assurance, nous allons voter contre
l'amendement.
On veut discuter de la langue d'enseignement. Nous avons des arguments
valables et des suggestions positives à apporter. Nous n'avons pas
seulement à faire appel à l'émotion de la galerie, M. le
Président. Nous allons apporter des arguments bien précis
pourquoi nous voulons certains amendements au chapitre de la langue
d'enseignement.
Pour ces raisons, je vais me prononcer contre la motion du
député de Saint-Jacques. Je le répète, à
moins qu'il ne puisse nous donner l'assurance qu'on va pouvoir discuter de tous
les autres articles du projet de loi. Nous ne craignons pas de discuter du
chapitre de la langue d'enseignement, mais nous ne voulons pas qu'on nous
applique le baîllon puis qu'on n'ait pas l'occasion de montrer les autres
difficultés que vous avez créées dans les autres articles
très importants qui affectent tous les Québécois et qui
affectent les minorités spécifiquement. On semble vouloir nous
intimider. Il semble qu'on n'ait pas le droit de discuter de certains sujets et
on veut créer une atmosthère pour que certaines choses, certains
sujets ne soient pas discutés. Je m'oppose à cela. Je ne me
laisserai pas intimider. Quand ce sera le temps de faire des interventions, que
je considère importantes, je vais les faire.
En terminant, si le député de Saint-Jacques est prêt
à nous assurer que nous allons pouvoir discuter de tout le projet de
loi, parce que les motions dilatoires, ce n'est pas nous qui les avons
faites... Très rarement, avons-nous pris tout notre temps. Maintenant,
oui, parce que je réponds.
Le Président (M. Cardinal): M. le député,
oui, s'il vous plaît.
M. Ciaccia: Alors, je termine en disant que si le
député de Saint-Jacques et le gouvernement peuvent nous assurer
que l'on peut discuter tout le projet de loi, nous allons voter en faveur de la
motion.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie. Il vous reste treize minutes. A l'ordre, s'il vous plaît! Mme
le député de L'Acadie a treize minutes à sa
disposition.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je réalise fort
bien que le gouvernement fait face à une échéance
difficile, compte tenu de la rentrée scolaire, ceci a été
dit et redit. Cependant je le répète je crois qu'il
veut empêcher une discussion approfondie du projet de loi article par
article pour respecter cette échéance.
Je voudrais, à ce moment-ci, faire une digression pour rappeler
au député de Mégantic-Compton que c'est de deux choses
l'une. Je regrette de lui dire il a été tout au long de la
première commission parlementaire un excellent collègue
que je crains qu'il n'apprenne pas vite ou qu'il oublie très rapidement.
Il a déjà oublié le bâillon déguisé
qui nous a été imposé lors de la commission parlementaire
qui a entendu les mémoires sur le projet de loi no 1 et, pourtant, il
avait montré la même confiance que moi au moment où
je ne répéterai pas ce que j'ai cité ailleurs les
propos du ministre d'Etat au développement culturel nous avaient
donné des garanties suffisantes suivant lesquelles nous pourrions
trouver un moyen adulte de terminer cette commission parlementaire.
Je le lui rappelle, mais, sans nul doute qu'avec l'esprit très
vertueux de l'Union Nationale, si un nouveau bâillon
déguisé nous arrive, elle saura l'accepter avec une
résignation toute chrétienne et aussi vertueuse.
Evidemment, le gouvernement ne nous a pas donné de garanties que,
même si nous passions au chapitre VIII et le faisions d'une façon
raisonnable, nous pourrions examiner tous les autres articles du projet de loi.
Je pense que le député de Saint-Jacques est allé aussi
loin que de dire: Je suis prêt, après que nous aurons
examiné le chapitre de la langue d'enseignement, à respecter ce
que vous jugerez vos priorités, mais, pour nous, tout est important dans
le projet de loi. Je pense qu'à ce moment-ci plus qu'à tout autre
moment, surtout quand on voit les dispositions de l'Union Nationale qui, sur
tous les points, sauf évidemment sur un point fondamental, semble
vouloir être à la remorque du gouvernement, je pense qu'il est
doublement important que l'Opposition officielle soit vigilante.
Il ne faut pas oublier que, dans ce deuxième projet de loi, il y
a des articles importants qui ont été ajoutés. Je ne
citerai, par exemple, que les articles 88, 129. Il n'y a plus personne qui
peut, à ce moment-ci, dans le public, venir se faire entendre à
une commission parlementaire et je n'en demande pas une non plus, mais il reste
qu'à ce moment-là, les seuls qui peuvent représenter cette
opinion publique, c'est l'Opposition. L'Opposition officielle, je l'ai dit
à plusieurs reprises, à ce moment-ci, sent que c'est encore plus
important, compte tenu de la démission de certains, qu'elle joue
à fond de train son rôle qui est celui de représenter cette
opinion publique et de tenter d'ajouter ou de retrancher de la loi ce qui ne
semble pas être dans les meilleurs intérêts de la
population. Toute l'importance du chapitre VIII, je serais la dernière
à la nier, je le reconnais mais je pense que nous ne recevons pas
d'assurance suf-
fisante que nous pourrons examiner tous les autres articles de la
loi.
Je trouve encore naïf le député de
Mégantic-Compton qui dit: J'ai posé elles étaient
très justifiées beaucoup de questions au ministre de
l'Education sur cette fameuse question d'inscription scolaire
prématurée. Je pense qu'il a même tenu un mini-débat
pour lui dire: Vous appliquez, par anticipation, une loi. Je vous dis qu'une
fois que le chapitre de l'enseignement aura été
étudié, on donnera une arme de plus au ministre de l'Education
pour dire: Je peux, en toute facilité, exercer des pressions, puisque,
déjà, ces articles ont été discutés et ont
été adoptés et je ne suis pas sûre qu'en lui donnant
cette arme, nous n'aggravions pas le climat des commissions scolaires qui,
à ce moment-ci, ne veulent pas apporter de collaboration ou semblent
montrer de la résistance, et soit dit en passant, avec lesquelles je ne
suis pas d'accord.
Je pense qu'il faut essayer d'être le plus prévoyant
possible dans cette question d'inscription scolaire. Mais quand on a vu de
quelle façon le ministre de l'Education a étiré le
règlement de l'Instruction publique, je ne suis pas intervenue dans le
débat, et je pense que le ministre de l'Education comprend, quand cela
s'est passé en Chambre, à cause de ce que je viens d'expliquer
auparavant. A ce moment-ci, avec des articles de loi adoptés, la
pression sera formidable. Comme je le dis, s'il fallait que le Parti
québécois puisse utiliser ces articles comme une arme
supplémentaire auprès des commissions scolaires, je suis loin
d'être convaincue que ce que l'on veut éviter, une rentrée
scolaire chaotique, soit évitée. Elle ne pourrait être
évitée que dans l'autre hypothèse. On nous bousculera et,
éventuellement, on mettra le fameux bâillon, d'une façon
déformée. Je ne sais pas quel projet on apportera à ce
moment. En tout cas, les péquistes ne manquent pas d'imagination. Ils
trouveront un autre moyen, s'ils ne veulent pas l'appeler le bâillon.
M. Lalonde: Le "401".
Mme Lavoie-Roux: Et c'est ce qui se produira.
En terminant, c'est facile pour le gouvernement. D'ailleurs, je pense
qu'il n'a pas d'autre choix que d'essayer de dévaloriser les
interventions que nous faisons, en disant: Ce sont des motions dilatoires.
L'Union Nationale embauche, non pas embauche...
M. Lalonde: Les débauchés!..
Mme Lavoie-Roux: ...au moins suit la procession...
M. Lalonde: A genoux!
M. de Bellefeuille: Emboîte...
Mme Lavoie-Roux: ...emboîte le pas... Merci, M. le
député.
M. Lalonde: Un littéraire, c'est toujours important.
Mme Lavoie-Roux: ...pour répéter la même
chose.
Ce que nous avons fait ce soir, nous avons voulu sensibiliser l'opinion
publique je pense que c'est là le rôle de l'Opposition
au fait que le gouvernement adoptait une stratégie qui,
éventuellement, pourrait conduire à une adoption que
j'appellerais prématurée, de ce projet de loi, puisque tous les
articles n'en auraient pas été examinés avec soin.
Si nous nous trompons, j'en serai la première heureuse et
contente, parce que la population pourra être satisfaite. Mais si ceci se
produit, selon l'hypothèse, à tort ou à raison, mais que
nous le faisons en toute honnêteté, nous voulons éviter ce
bâillon, qu'il soit direct ou détourné, peu importe, je
pense qu'à ce moment, au moins l'opinion publique saura que nous l'avons
avertie et que nous avons essayé de prendre les moyens d'éviter
qu'un semblable dénouement ne se produise. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
D'Arcy McGee. Il vous reste dix minutes.
M. Goldbloom: Merci, je ne les prendrai pas, M. le
Président, mais j'ai été piqué, tout à
l'heure, par l'allusion du député de Sauvé, ministre de
l'Education, à un moulin à café, a-t-il dit.
M. Morin: Je voulais dire: à vent. Excusez-moi.
M. Goldbloom: Oui, mais j'ai vécu six années et
demie...
Une Voix: La rectification s'imposait.
M. Goldbloom: M. le Président, j'ai vécu six
années et demie avec, devant moi, un moulin à farine, avec
laquelle le Parti québécois a fardé les projets de loi
à gauche et à droite, et, ce soir et cet après-midi, quand
je vois les grimaces du député de Saint-Jacques, les grimaces
scandalisées devant l'action de l'Opposition officielle, je suis
abasourdi. S'il y a un député qui, pendant ces six années
et demie, a eu la carapace si dure qu'elle était absolument
impénétrable quand un tel débat se poursuivait, et il
continuait, avec l'éloquence qu'on lui reconnaît, à
attaquer le gouvernement du temps, et à trouver tous les arguments et
à utiliser tout le temps, mais jusqu'à la dernière
seconde, et davantage, avec des trucs de procédure, pour ne pas
permettre qu'on procède à des actions législatives.
Je trouve que la vierge offensée de ce soir...
M. Morin (Sauvé): En plus de cela, il le disait avec
éloquence.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre de l'Education,
s'il vous plaît! M. le député de D'Arcy McGee, vous avez la
parole.
M. Goldbloom: Oui, M. le Président. Pour être un peu
plus sérieux et en venir plus directement au sujet, il me paraît
un peu curieux que le gouvernement, en répondant à toutes les
questions que nous avons posées à l'Assemblée nationale et
en réagissant aux mémoires qui ont été
présentés les 25%, ou à peu près, qui ont
été effectivement entendus par cette commission parlementaire
fasse preuve d'une intransigeance assez nette en ce qui concerne la
langue de l'enseignement. Si le premier ministre, avant son départ pour
des vacances bien méritées, mais pas plus méritées
que celles des autres membres de cette Assemblée et, entre
parenthèses, mon épouse me pose la question à laquelle je
n'ai pas de réponse: Comment se fait-il que le premier ministre ait pris
deux semaines de vacances quand, toi, tu as pendant six années et demie
refusé d'en prendre pendant que tu avais des responsabilités
publiques? mais je ferme cette parenthèse...
Mme Lavoie-Roux: ... le ministre de l'Education à prendre
des vacances.
M. Charron: Vous auriez dû en prendre, vous seriez
peut-être encore au pouvoir.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! A
l'ordre! Un instant, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous
plaît!
Si tous peuvent... M. le député de Bourassa, s'il vous
plaît! A l'ordre!
M. Goldbloom: Oui, M. le Président, je voulais...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Goldbloom: Je m'excuse.
Le Président (M. Cardinal): Attendons que...
M. Laurin:... les eaux se soient calmées.
Le Président (M. Cardinal): ... tous se soient tus. La
patience de la présidence, comme je l'ai mentionné hier soir, est
incommensurable.
Mme Lavoie-Roux: On va vous canoniser, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Cependant, j'aimerais que l'on
parle de la motion qui est devant nous et que celui qui parle soit entendu par
les autres qui écoutent.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Laplante: ...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourassa, vous n'avez pas la parole.
M. le député de D'Arcy McGee, sur la motion qui est devant
nous, s'il vous plaît.
M. Goldbloom: Je vous remercie, M. le Président, de votre
patience légendaire.
Le Président (M. Cardinal): Cela ne me rajeunit pas!
M. Morin (Sauvé): Vous auriez dû prendre des
vacances quand c'était le temps.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Goldbloom: Si c'est la recette pour conserver le pouvoir,
c'est un travesti de l'expression de la responsabilité publique.
Voici un chapitre au sujet duquel le gouvernement s'est montré
d'une intransigeance totale. Si le premier ministre, paraît-il, selon des
reportages dont nous avons pu prendre connaissance, a favorisé une
souplesse plus grande quant à la réglementation de l'accès
à l'école, selon le caractère linguistique de cette
école...
Si le premier ministre n'a pas réussi à convaincre ses
collègues, je ne me fais pas d'illusion, l'Opposition ne réussira
pas à amener le gouvernement à changer quoi que ce soit et, plus
précisément, à remplacer ce que nous appelons, depuis un
certain nombre de semaines, la clause Québec par ce que nous appelons,
depuis la même période, la clause Canada.
Il y avait quand même d'autres domaines, à peu près
tous les autres, dans lesquels la loi adoptée en 1974 s'appliquait d'une
façon harmonieuse et bien réussie.
Pourtant, le gouvernement actuel a pris des décisions, de
nombreuses décisions, qui ont pour effet de modifier ce qui existe
jusqu'à maintenant, parce que ce projet de loi n'est pas encore
adopté et ce qui s'applique s'applique avec une harmonie raisonnable et
avec un succès reconnu, reconnu dans de nombreux reportages, dans de
nombreux commentaires, dans de nombreuses expressions d'opinions dont nous
avons pu prendre connaissance.
Or, voici, M. le Président, que le gouvernement, intransigeant
quant à la question de la langue de l'enseignement, nous dit: C'est
quand même de ce sujet qu'il faut parler en priorité. Pour ma
part, M. le Président, j'aimerais avoir, de la part du gouvernement, des
justifications pour les chambardements qu'il se propose d'apporter aux autres
domaines où ça va bien. C'est cela qui m'embête, M. le
Président.
Il me semble que c'est beaucoup plus important, s'il y a des raisons
valables à ce chambardement, que nous les connaissions, tandis que si le
gouvernement, intransigeant jusqu'à maintenant, est soudainement pour
céder, qu'il nous le dise, et nous pourrions, dans une telle
éventualité, un peu invraisemblable, parce qu'un gouvernement
j'en sais quelque chose, M. le Président, tous ceux qui ont fait
partie d'un gouvernement en savent quelque chose a une terrible tendance
à ne pas vouloir changer les choses importantes auxquelles il s'est
engagé, il ne veut pas perdre la face, M. le Président.
Si le gouvernement avait voulu modifier de façon importante le
chapitre sur la langue de l'enseignement, il l'aurait sûrement fait, M.
le Président, par un geste bien orchestré, entouré d'un
mécanisme de publicité, comme c'est son habitude, bien
rodée, pour que la population le sache avant ce soir. S'il n'a pas
choisi de le faire, M. le Président, je suis moralement convaincu
c'est au gouvernement de me convaincre que j'ai tort que nous allons
nous embarquer dans un exercice stérile où il y aura des
modifications techniques pour la forme, mais, quant au fond, rien ne sera
changé au chapitre de la langue de l'enseignement.
Entre-temps, d'autres domaines, comme celui des affaires, par exemple,
où les programmes de francisation s'appliquaient dans un contexte
d'harmonie et de progrès notable, ces autres domaines sont dans
l'attente de la tombée de l'autre soulier, parce qu'il y a eu
déjà le livre blanc et, ensuite, le projet de loi no 1 et,
maintenant, on est rendu au projet de loi no 101.
Entre-temps, dis-je, il y a des réactions assez vives et assez
négatives de la part de ces milieux qui, se pensant sur la bonne voie,
se pensant en bonne voie de réaliser des programmes de francisation dans
l'intérêt de la majorité francophone du Québec, se
trouvent soudainement devant des exigences additionnelles, devant un changement
de programme qui ne se justifiaient pas par ce qui existait depuis 1974 dans
ces domaines. C'est pour cette raison...
Le Président (M. Cardinal): M. le député...
Oui, M. le député de Taschereau.
M. Guay: Question de règlement, M. le Président. Le
député nous a fait valoir qu'il avait besoin de vacances; il a
épuisé son temps. Je suggère que vous lui donniez
effectivement ses vacances.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Taschereau, au moment où vous avez posé votre question de
règlement, j'étais pour inviter M. le député de
D'Arcy McGee, qui a déjà dépassé son temps d'une
minute, à conclure.
M. Goldbloom: M. le Président, je conclus. J'avais
effectivement conclu, mais puisque le député de Taschereau
m'interpelle et me prête des...
Le Président (M. Cardinal): Non, M. le
député de D'Arcy McGee, non...
M. Goldbloom: ...propos que je n'ai pas tenus, j'ai le droit de
rétablir les faits, M. le Président. Je n'ai pas dit que j'avais
besoin de vacances.
Le Président (M. Cardinal): D'accord...
M. Goldbloom: Je suis ici pour la durée, M. le
Président...
Le Président (M. Cardinal): ...vous avez...
M. Goldbloom: Cela prendra le temps que ça prendra.
Le Président (M. Cardinal): Entendu, M. le
député de D'Arcy McGee. Vous avez utilisé l'article 96,
c'était votre droit. Je vous demanderais maintenant de conclure
votre...
M. Goldbloom: J'ai conclu, M. le Président,
respectueusement.
Le Président (M. Cardinal): Merci. Alors, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys à qui il reste... Oui, M.
le député.
M. Biron: M. le Président, je voudrais savoir combien il
nous reste de temps. Parce qu'on est ici depuis 20 heures, j'ai l'impression
que tout le monde a à peu près épuisé son
temps.
Le Président (M. Cardinal): II n'en reste plus, en fait.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys, a demandé la parole,
il vous reste cinq minutes.
M. Blron: Combien reste-t-il de temps à l'Union
Nationale?
Le Président (M. Cardinal): Un instant, il reste... Non,
je pense...
M. Biron: Ne calculez pas, M. le Président. Je vous donne
le temps qu'il nous reste.
M. Lalonde: Même pas jusqu'au prochaines
élections.
Le Président (M. Cardinal): Je peux le calculer, si vous
le désirez, mais il reste... Je puis vous assurer qu'il reste...
M. Grenier: J'aime entendre le discours du député
de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Grenier: M. le Président, pour une...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Je vous conseillerais de le faire pendant que le
député de Marguerite-Bourgeoys va parler, vous ne manquerez
rien.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, il vous resterait treize minutes, par exemple. Vous
êtes un de ceux qui parlent. Il vous resterait...
M. Lalonde: Vous n'êtes pas superstitieux?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, cinq minutes, s'il vous plaît.
M. Lalonde: Je vais les prendre, M. le Président.
La tirade excitée du député de Saint-Jacques n'a
rien réglé, M. le Président. Elle n'a pas
démontré la nécessité d'attaquer
immédiatement le chapitre VIII. Au contraire, après avoir
provoqué littéralement l'Opposition qui, il importe de le dire
maintenant, aura dans dix jours, dans vingt jours, dans deux mois s'il le faut,
toute l'énergie nécessaire pour examiner article par article, ce
projet de loi, il insiste sur la priorité des dispositions relatives
à l'économie. Cette incohérence, M. le Président,
est inexplicable, même truffée de sanglots italiens, les amateurs
d'opéra sauront de quoi je parle. Une telle intervention n'a pas fait
avancer le débat. Le gouvernement a fait son lit avec le projet de loi
no 101 et je pense qu'il doit s'y coucher. J'ai demandé au
député de Saint-Jacques de s'engager à ne pas imposer la
guillotine. Il n'a pas cru bon prendre l'occasion de répondre à
mon invitation.
Or, M. le Président, l'Opposition officielle a le désir
d'étudier tout le projet de loi, article par article, jusqu'à
l'article 219. Nous n'avons pas fait d'opposition systématique, nous
n'avons pas l'intention d'en faire. Depuis deux jours que nous avons
commencé cette commission parlementaire, nous avons disposé des
motions préliminaires, nous avons adopté six articles
extrêmement importants. Je dirais même les six articles
fondamentaux.
Les rires que j'entends, m'invitent à vous demander s'il vous
plaît, de maintenir un minimum de décorum dans cette commission,
M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, je suis le premier d'accord avec vous qu'il faut
maintenir le décorum dans cette salle, cependant, il est arrivé
au mois de décembre dernier que j'ai dit que l'on pouvait sourire et
même rire en Assemblée, pourvu que les démonstrations ne
dépassent pas les limites de la bienséance.
M. Grenier: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: L'ordre ne se commande pas par le président,
il s'impose par le conférencier généralement.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît. Non, après ce que je viens de dire, je pense que vous
devriez au moins avoir une certaine retenue. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, je vous laisse poursuivre.
M. Lalonde: Alors, M. le Président, si on compare le
débat que nous avons engagé il y a deux jours à celui que
l'on a connu lors de l'étude de la loi 22, où le Parti
québécois avait systématiquement empêché le
débat de l'article 1 pendant plusieurs jours, je pense que nous pouvons
dire que l'Opposition officielle, et ceci malgré les rires idiots que
j'ai entendus jusqu'à maintenant, a fait son devoir. Nous avons
présenté quelques motions. Nous n'avons pas employé tout
notre temps. Même actuellement, M. le Président, pendant les
quelques minutes qu'il me reste, je pourrais présenter un amendement qui
engagerait cet'te horloge de 80 minutes de plus et qui pourrait inviter un
sous-amendement qui, lui, pourrait être discuté pendant encore 80
minutes, en ne comptant que le temps de l'Opposition officielle.
M. le Président, nous n'avons pas l'intention d'en faire. Nous
nous opposons à cette motion et nous voulons que notre position soit
positive, mais nous n'accepterons pas la bousculade ni la guillotine. Nous
avons ici on appelle cela maintenant la chaise électrique...
Mme Lavoie-Roux: Cela ne fait pas très
français.
M. Lalonde: Je ne sais pas si c'est le fait que le ministre
d'Etat au Haut-Commissariat voisine le ministre d'Etat au développement
culturel qui lui inspire les chocs électriques, M. le Président,
mais il reste que nous n'accepterons pas le rouleau à vapeur. Nous avons
un devoir à faire ici. Devant l'Union Nationale qui se met à plat
ventre, nous avons un double devoir parce que maintenant nous
représentons 60% de la population devant ce projet et ce gouvernement.
Après toutes les ac-crobaties, les pirouettes, les culbutes, il n'est
pas surprenant que l'Union Nationale se tienne debout sur ses deux genoux les
deux bras croisés.
M. Grenier: M. le Président, sur une question de
privilège, je dois...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Un instant!
M. Grenier: Une question de privilège, une question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que vous soulevez une
question...? Pas de question de privilège.
M. Grenier: Une question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): Un instant! Il n'y a pas de
question de privilège en commission parlementaire. Une question de
règlement, d'accord, M. le député de
Mégantic-Compton. Avant cependant de vous donner la parole et pour
éviter de vous interrompre, je voudrais rappeler au député
de Marguerite-Bourgeoys qu'il a, en fait, épuisé son temps.
M. Lalonde: M. le Président, j'ai été
interrompu. Laissez-moi au moins conclure.
M. Grenier: Sur une question de règlement.
M. Cardinal: Un instant, s'il vous plaît! Je vous laisserai
conclure. Soyez donc patient comme la démocratie l'exige.
Mme Lavoie-Roux: Comme l'Opposition.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Grenier: Si le député de Marguerite-Bourgeoys
prétend qu'on marche à plat ventre, j'aime mieux marcher à
plat ventre que marcher à reculons.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, si vous voulez bien conclure, s'il vous plaît.
M. Lalonde: M. le Président, j'ai une question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): D'accord!
M. Lalonde: Je pense qu'avant de conclure... J'espère que
vous accepterez ma question de règlement avec tout le sérieux
qu'elle commande.
Le Président (M. Cardinal): Remarquez que je ne trouve
rien de drôle.
M. Lalonde: M. le Président, je dis que si... Je ne
m'attaque pas à votre compétence. Jusqu'à maintenant, vous
avez été sûrement l'un des présidents à qui
on pourrait adresser les plus sincères compliments depuis les deux
commissions parlementaires que vous avez eu à présider. Mais je
vous dis que si l'ordre à cette commission parlementaire ne peut
être assuré, si on doit assister à cette bouffonnerie qu'on
entend à ma gauche depuis tout le temps, ce soir, je ne suis pas
sûr que l'Opposition officielle voudra continuer à participer au
débat de cette commission.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Charbonneau: Gardez vos menaces pour vous.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, ne
dépassez pas la question de règlement. Je viens tout juste de
dire que je ne trouvais rien de drôle. J'ai mentionné, d'ailleurs,
aujourd'hui...
Une Voix: Ils partiront, on va pouvoir travailler.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! ...que cette table était peu facile à conduire. Vous
êtes tous près les uns des autres. Il y a des dialogues qui se
créent alors qu'on doit toujours s'adresser à la
présidence. Nous sommes, comme tout le monde le sait, rendus au mois
d'août. Je n'ai pas fait de discours d'ouverture de cette commission
cette fois-ci pour en appeler à la collaboration des membres de la
commission. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous venez de
le faire à ma place. J'espère que les gens de la commission,
devant le sérieux de la loi qui est devant nous, se comporteront selon
le sérieux de ce projet de loi. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, si vous voulez bien conclure, s'il vous plaît.
M. Lalonde: Oui, M. le Président. La seule raison, en
définitive, malgré la volonté et le désir de
l'Opposition officielle de faire avancer ce projet de loi... Je vous l'ai dit
tantôt, en deux jours nous avons quand même montré notre
désir de faire avancer ce projet de loi, malgré toute
l'opposition que nous avons en principe et que nous avons exprimée
jusqu'à maintenant à ce projet de loi...
Mais c'est la guillotine qui se dessine, M. le Président. Devant
l'absence d'assurances du gouvernement, nous allons voter contre la motion du
député de Saint-Jacques parce que, malheureusement, je commence
à voir le commencement de la clôture dans cette motion.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Mme le député de L'Acadie il vous reste six minutes.
Mme Lavoie-Roux: Je ne les utiliserai pas, M. le
Président.
M. Charron: Je vous demande de mettre la motion aux voix, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): De quoi voulez-vous parler, M.
le député de Mont-Royal?
M. Ciaccia: Puis-je vous poser une question, vous demander une
directive?
Le Président (M. Cardinal): Oui, vous en avez le
droit.
M. Ciaccia: Etes-vous en mesure de nous dire si vous savez que le
côté ministériel veut que nous étudiions le chapitre
de l'enseignement et la clause Québec durant le temps où le
premier ministre est en vacances et parce qu'il est en vacances?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal, je suis surpris que vous posiez à la présidence cette
question. Vous savez que, pour la première fois depuis qu'existent les
formations politiques au Québec, le vice-président ne participe
ni au caucus, ni au Conseil national, ni au Congrès national, ni
à aucune instance du parti. Il ne communique pas par ligne
privilégiée avec le leader parlementaire pour connaître la
stratégie du parti ministériel. Par conséquent, M. le
député de Mont-Royal, je ne puis absolument pas répondre
à cette question, ne portant plus l'insigne d'aucun parti, et ne
participant même pas aux activités du
parti sous la bannière duquel j'ai été élu,
je serais très malvenu de répondre à cette question.
M. Charron: M. le Président, sur un point de
règlement également, je vous rappellerai que votre réponse
aurait pu j'accepte celle que vous venez de fournir être
tout autre, et simplement rappeler au député de Mont-Royal qu'il
ne s'agissait pas d'une demande de directive. S'il voulait avoir une
réponse à sa question, il n'avait qu'à me l'adresser et je
lui aurais, aimablement, fourni la réponse.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, oui si vous
permettez, juste pour terminer sur cet incident quand même, enfin,
j'aurais aimé qu'il ne se produise pas.
Une Voix: Nous aussi.
Le Président (M. Cardinal): Silence. A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Mont-Royal, vous auriez dû adresser
votre question à M. le ministre d'Etat délégué au
Haut-Commissariat, puisqu'il est en même temps leader parlementaire
adjoint. Peut-être qu'il aurait su la réponse et qu'il aurait pu y
répondre.
Sur ce, est-ce que je puis mettre cette motion aux voix?
M. Charron: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Un appel nominal?
M. Charron: Oui, M. le Président. Vote sur la
motion
Le Président (M. Cardinal): Vous savez que nous votons sur
une motion de M. le député de Saint-Jacques, qui se lit comme
suit: Que cette commission suspende l'étude des articles 7 à 67
du projet de loi 101 et procède immédiatement à
l'étude des articles 68 à 83.
Vous indiquerez si vous êtes en faveur ou contre cette motion.
M. le député de Papineau.
M. Alfred: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Vanier.
M. Bertrand: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourget.
M. Laurin: Pour.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Rosemont.
Une Voix: Absent.
Le Président (M. Cardinal): M. le député
de... Il n'est pas indiqué sur ma liste comme étant
remplacé.
M. Charron: II a été remplacé cet
après-midi par le ministre de l'Education.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez raison, alors, au
lieu du député de Rosemont, je demanderai à M. le
député de Sauvé.
M. Morin (Sauvé): Je suis en faveur, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez raison, monsieur...
En faveur...
M. Morin (Sauvé): Je le savais, monsieur.
M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.
Question d'ordre, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, sur un point d'ordre, est-ce
que je pourrais vous donner l'occasion de rectifier...
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Lalonde: ...pour rétablir la confiance, qui n'est pas
égratignée de toute façon de toute la deputation à
l'égard de la présidence.
Le Président (M. Cardinal): Rectifiez. Je n'ai pas dit que
M. le député de Sauvé avait raison de voter pour la
motion.
M. Lalonde: C'est ce que j'ai compris.
Le Président (M. Cardinal): Pour les fins du journal des
Débats, j'avais indiqué que M. le député de
Saint-Jacques avait raison de m'indiquer qu'il y avait un remplacement au sein
de la commission.
M. Lalonde: C'est ce que j'avais compris.
Le Président (M. Cardinal): Je vous remercie de votre
collaboration, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, et je
continue l'appel nominal pour cette mise aux voix.
M. le député de Beauce-Sud? M. le député de
D'Arcy McGee?
M. Goldbloom: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Rouyn-Noranda?
La motion est adoptée. Madame, messieurs, j'appelle l'article
68.
Chapitre VIII: La langue d'enseignement
M. Charron: M. le Président, je propose que l'article 68
soit adopté.
Le Président (M. Cardinal): Cette motion sera-t-elle
adoptée?
M. Bertrand: Adopté.
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant! Oui, M. le
ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): ...la commission me paraît fort
sage...
M. Lalonde: On était prêt à l'adopter.
Le Président (M. Cardinal): Un instant encore, si vous
permettez! Je voudrais bien que tout soit clair vis-à-vis de la
présidence. Je rappelle l'article 92. J'ai reconnu M. le ministre de
l'Education, qui m'a appelé d'ailleurs par le titre qui me
désigne, et je m'excuse envers Mme le député de L'Acadie
de ne pas être aussi rapide, mais je suis obligé de suivre le
règlement.
Mme Lavoie-Roux: ...M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): De toute façon, il y a
un usage qui veut que, lorsqu'un «article est appelé, le
gouvernement puisse d'abord s'exprimer.
Mme Lavoie-Roux: Le parti ministériel... D'accord.
M. Lalonde: Je préfère, M. le Président, que
le gouvernement s'exprime, pour une fois, sur un article.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre de
l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, la commission me
paraît fort sage de se pencher immédiatement sur le chapitre
consacré à la langue de l'enseignement. C'est sans doute,
reconnaissons-le, l'un des plus importants, l'un des plus névralgiques,
a-t-on dit, du projet de charte et il touche de très près, en
effet, la conception que se font de leur avenir aussi bien la majorité
que la minorité.
Dépôt d'un nouveau projet de
règlement M. Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): La semaine dernière, au moment du
débat de deuxième lecture, j'ai fait savoir que le gouvernement
était prêt à faire preuve de souplesse dans l'application
du chapitre VIII du projet de loi. Je voudrais le démontrer ce soir en
déposant devant cette commission et en remettant à chacun de ses
membres, de même qu'à la presse, le nouveau projet de
règlement concernant la demande de recevoir l'enseignement en
anglais.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Ce n'est pas que je m'oppose à ce que ce
règlement soit distribué actuellement. Il me semble quand
même que le débat actuel est sur l'article 68 et je ne vois
pas...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Sauvé et M. le député de
Marguerite-Bourgeoys un instant! ne le distribuez pas tout de suite
en commission parlementaire, il n'y a pas de depôt formel. Est-il
nécessaire de demander la permission pour distribuer des renseignements
aux membres de la commission? Je n'ai quand même pas l'intention le
prendre une question semblable en délibéré.
M. Lalonde: Je vais donner mon consentement...
Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas-là, tout
est parfait.
M. Lalonde: ...conformément aux règlements, tout en
soulignant que ce n'est quand même pas à l'égard de
l'article 68 que ce règlement est déposé, parce que
l'article 68 ne donne ouverture à aucun règlement.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. Ce règlement n'est pas
déposé, il est, en commission parlementaire je le
répète remis pour fins de renseignements aux membres de la
commission. Il n'y a pas d'archives qui nous permettent de faire un
dépôt formel.
M. Lalonde: M. le Président, me permettez-vous une autre
question?
Le Président (M. Cardinal): Certainement, monsieur.
M. Lalonde: Le ministre de l'Education accepterait-il aussi de le
déposer à l'Assemblée nationale demain matin?
M. Morin (Sauvé): Assurément, M. le
Président. Je comptais le faire de toute façon.
Le Président (M. Cardinal): Nous avons la promesse du
ministre et je redonne la parole à M. le ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): Merci, M. le Président. Ce
nouveau projet de règlement prévoit tout d'abord des dispositions
permanentes qui s'appliqueront à la rentrée de septembre 1978 et,
dans un second temps, il énonce de nouvelles dispositions transitoires,
propres à faciliter la rentrée qui vient.
Parmi ces nouvelles mesures transitoires, je me permets de souligner
celles qui permettent l'inscription immédiate des élèves
qui recevaient légalement l'enseignement en anglais dans une commission
scolaire ou une institution au Québec en 1976-1977 sous réserve,
bien sûr, d'une décision ultérieure de la personne
désignée par moi, pour établir éventuellement les
droits des enfants dont les parents désirent les inscrire à
l'école anglaise.
Cela signifie qu'en septembre 1977, cette année même,
l'inscription à l'école anglaise de tous les enfants qui
recevaient déjà, l'an dernier, l'enseignement en anglais n'aura
pas à souffrir de retard.
Ces mesures auront pour effet de régler, de façon
accélérée, les cas de la très grande
majorité des enfants qui seront inscrits à l'école
anglaise en septembre. Une autre mesure transitoire permet l'inscription
immédiate à l'enseignement en anglais aux enfants dont une soeur
ou un frère aîné recevait également l'enseignement
en anglais dans une école du Québec en 1976/77, mais toujours
sous réserve d'une décision ultérieure plutôt que
d'une décision antérieure de la personne que j'ai
désignée.
Ces mesures modifient donc le processus d'admission et d'inscription
prévu dans le projet de règlements déposé au mois
de juin. J'ose espérer qu'elles favoriseront une rentrée scolaire
ordonnée. Les commissions scolaires, comme elles l'avaient
demandé d'ailleurs, seront de la sorte habilitées à
inscrire elles-mêmes, conformément aux dispositions de la loi,
bien sûr, la très grande majorité des enfants admissibles
à l'enseignement à l'anglais.
Il va de soi, cependant, que les commissions scolaires sont
invitées à procéder, non seulement avec diligence, mais
également avec prudence, afin que ceux qui n'ont pas droit à
l'enseignement en langue anglaise ne soient point forcés de quitter, en
cours d'année, une école qu'ils auraient fréquentée
depuis quelques mois.
Je reviens maintenant au sujet qui nous intéresse ce soir, et
sans doute, demain encore, la langue de l'enseignement. Il s'agit, dans ce
chapitre crucial, d'assurer aussi bien les droits de la majorité que
ceux de la minorité. Dans le livre blanc que le ministre d'Etat au
développement culturel a rendu public au mois de mars, il était
déjà dit ce qui suit: "II ne saurait être question d'abolir
cet enseignement..." il s'agit de l'enseignement en anglais,
"...ni de faire fi de la tradition culturelle qui l'a inspiré
jusqu'à aujourd'hui". C'est cette idée fondamentale qui a
inspiré toute la démarche du gouvernement jusqu'ici. Nous
voulons, bien sûr, assurer, une fois pour toutes, les droits de la
majorité dans le domaine scolaire, mais nous voulons également
faire en sorte que la minorité puisse asseoir ses droits sur des
dispositions fermes, claires, stables.
Cependant, il ne saurait être question de revenir au libre choix,
en particulier pour les nouveaux venus s'établissant au Québec
pour nous aider à le développer.
Je me permets de revenir je le ferai à quelques reprises
au cours des minutes qui viennent au livre blanc, puisque nous n'avons
pas changé d'idée depuis sa publication. Si l'on veut bien
méditer la pensée qui se trouve exprimée dans le livre
blanc, au chapitre de la langue d'enseignement, on verra que le gouvernement
avait
déjà réfléchi longuement à tous les
aspects de cette question et avait déjà fait des choix qui se
sont avérés, en fin de compte, être les meilleurs.
Bien sûr, dans ce domaine, comme dans beaucoup d'autres, l'art de
gouverner, c'est souvent celui de choisir entre de grands inconvénients.
Je ne cacherai à personne que nous avons dû à l'occasion
choisir entre de bien grands inconvénients, mais gouverner, c'est cela,
à l'occasion.
Par ailleurs, nous dit le livre blanc, s'il y a lieu de garantir
à la minorité anglaise du Québec l'accès à
l'école anglaise, il est légitime de s'assurer que les personnes
qui viendront s'installer au Québec, dans l'avenir, enverront leurs
enfants à l'école française. En d'autres mots,
l'école anglaise, qui constitue un système d'exception en faveur
de la minorité actuelle du Québec, doit cesser d'être
assimilatrice et doit être réservée à ceux pour qui
elle a été créée.
Cette idée fondamentale demeure toujours le pilier sur lequel
nous avons bâti les articles 68 et suivants du projet de Charte sur la
langue française.
Un autre passage du livre blanc auquel je n'ai rien à ajouter,
décrit fort bien les intentions du gouvernement. "Les dispositions de la
charte seront donc rédigées de façon à atteindre ce
double objectif: permettre l'accès à l'école anglaise
à tous ceux qui se trouvent actuellement au Québec et dont les
parents, par l'éducation reçue, font partie de la
communauté anglophone, ainsi qu'à leurs descendants; diriger vers
l'école française tous les autres enfants, qu'ils fassent
déjà partie de la communauté francophone ou qu'ils
viennent s'établir chez nous dans l'avenir". La difficulté
majeure que présentait l'application de ces idées fondamentales
était la suivante: Comment détermine-t-on les droits des
personnes désirant inscrire leurs enfants à l'école
anglaise? Selon quels critères?
M. le Président, là-dessus, nous n'avons pas changé
d'idée non plus, bien que nous ayons écouté avidement le
débat public qui a suivi non seulement le dépôt du livre
blanc devant la Chambre, mais, à plus forte raison, le
dépôt des deux projets de loi que nous connaissons.
Nous avons retenu un critère qui nous a paru, dans les
circonstances, être le plus objectif et, pour ainsi dire, presque
automatique; non pas nécessairement le meilleur, mais le moins mauvais.
Nous avions, pour nous éclairer, l'expérience de l'ancien
gouvernement et le fiasco complet qui a résulté de l'application
de la loi 22, laquelle, on s'en souviendra, fondait l'accès à
l'école anglaise sur la connaissance suffisante de la langue anglaise.
Les tests auxquels ces critères menaient obligatoirement étaient
devenus si odieux que même l'ancien gouvernement en était venu
à la conclusion qu'il fallait modifier les critères
d'accès à l'école anglaise.
M. le Président, je ne voudrais pas m'étendre sur la
description de certaines scènes qui ont entouré les tests ou les
entrevues certains tests donnaient lieu à des entrevues au
cours des- quelles on a vu des parents, dont l'origine importe peu, gifler
leurs enfants, les bousculer pour leur faire émettre les quelques sons
anglophones qu'ils avaient réussi à apprendre, de peine et de
misère. Les scènes dont certains fonctionnaires ont
été témoins les ont persuadés, une fois pour
toutes, que les tests ou entrevues sont des méthodes qui doivent
être mises de côté, une fois pour toutes, surtout dans le
cas des enfants, des petits enfants qui n'ont même pas encore
commencé leur scolarité.
M. le Président, certains membres de l'Opposition, et de
l'Opposition libérale en particulier, nous ont, depuis quelque temps,
fait des suggestions et nous les avons écoutées; nous les avons
soupesées. Je dois dire, cependant, que nous y avions déjà
longuement réfléchi, avant même qu'on nous les propose.
Avant même de rédiger le projet de loi no 1, longuement, pendant
des séances interminables, qui ont duré bien plus longtemps que
la commission parlementaire, nous avions analysé, les uns après
les autres, méticu leusement, tous les critères possibles
et imaginables. Je pense que nous en avions dénombré 17, quelque
chose de cet ordre, 19 plus exactement, et, nous avons retenu la
scolarité des parents parce que c'était vraiment le seul qui nous
permît d'éviter de revenir aux tests.
Personne, je le pense, ne s'est laissé abuser par les
déclarations ambiguës du député de L'Acadie ou de son
parti à propos des critères qu'il conviendrait d'appliquer: la
langue maternelle ou encore "la langue de ceux qui utilisent la langue anglaise
à la manière de ceux dont c'est la langue maternelle". Les
journaux ont parfaitement compris ce dont il s'agissait. La Presse a
posé la question et la Gazette y a répondu. Dans la Presse, on
posait la question: S'agit-il d'un retour aux tests? Mme le
député voulait faire croire qu'une entrevue n'était pas un
test et que c'était moins traumatisant pour les enfants. J'aurais le
goût de dire: Allons donc! Les exemples d'entrevues...
Mme Lavoie-Roux:... vous avez assisté...
M. Morin (Sauvé): ... dont m'ont parlé certains
fonctionnaires m'ont convaincu depuis longtemps que, quelle que soit la forme
du test proposé, s'il s'agit de petits enfants, ils seront toujours
odieux et perçus comme tels, perçus comme source de
discriminations. Certains enfants furent paralysés par l'idée
d'avoir à parler une langue qui leur était
étrangère, d'autres par le seul fait de se trouver devant
quelqu'un qui leur posait des questions, peut-être pour la
première fois de leur vie.
La Gazette, elle, n'y est pas allée par quatre chemins. Je
pourrai en fournir un exemplaire à Mme le député, si elle
ne l'a pas lue. Elle écrit en gros titres: "Test pupils on language,
liberals say". L'article, à bon droit, je crois, démontre
comment, sous couvert "d'entrevue", on est revenu, de fait, aux tests du bill
22. Si, encore, ce n'était que cela!
Nous sommes également revenus, par d'autres chemins, au libre
choix. L'amendement à l'ar-
tide 69 aurait pour effet de rétablir, a-t-on dit, ie libre choix
de la langue de l'enseignement pour tous les enfants résidant au
Québec, à la fin de la première année. J'ai
tenté d'obtenir une citation au texte elle se trouvait dans les
journaux: "Ces enfants peuvent s'inscrire à l'école anglaise,
s'ils le désirent." C'est du moins ce que rapportent textuellement les
journaux. Cela inclut, je le souligne, les cas conscription illégale de
l'an dernier; ou alors, Mme le député voudra bien me
détromper, je ne demande pas mieux.
On a fait remarquer, avec raison, que c'est là se montrer encore
généreux sous ce rapport que la loi 22, que Mme le
député avait pourtant dénoncée à
l'époque où elle comparaissait devant la commission
parlementaire, mais en vertu de fonctions différentes de celles qu'elle
occupe aujourd'hui. On va jusqu'à admettre que cela pourrait provoquer
une augmentation considérable du nombre d'enfants au secteur
anglais.
J'estime que si le Parti libéral veut nous ramener aux tests de
la loi 22 ou, par des chemins détournés, à la loi 63, eh
bien, la population saura le juger. La chose est bien amorcée,
d'ailleurs.
S'il y a des dispositions qui pourraient nous ramener à la
discrimination dont les Néo-Québécois se plaignaient
à la suite de l'application de la loi 22, ce sont bien les dispositions
qu'on nous propose maintenant de la part du Parti libéral. Il y a dans
ces dispositions une iniquité fondamentale à l'égard de
ceux qui, en particulier, se sont conformés à la loi 22. Dieu
sait que nous n'avons pas appuyé cette loi en 1974. Dieu sait le combat
que mes collègues et moi-même avons dû mener contre ce
projet de loi, mais, une fois devenue loi, c'était la loi; nous n'avons
jamais soutenu le contraire. Il fallait l'appliquer et, l'appliquant, en
démontrer l'inanité.
Si, aujourd'hui, nous allions traiter les enfants des
Néo-Québécois de la façon que nous suggère
le Parti libéral, il ne se passerait pas trois jours avant que les
parents de ceux qui se sont conformés à la loi et qui ont inscrit
leurs enfants à l'école française ne frappent à
notre porte pour nous dire: Et nous, qui nous sommes conformés à
la loi, qui avons respecté les lois de notre pays d'accueil, nous sommes
pénalisés.
M. Lalonde: M. le Président...
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
M. Lalonde:... question de règlement...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de
règlement.
M. Lalonde: M. le Président, j'ai écouté
avec beaucoup d'intérêt le ministre depuis une dizaine de minutes
au moins, et je tente de rapprocher ses propos au texte de l'article 68.
Je sais que nous, lorsque nous serons appelés à
intervenir, nous devrons nous en tenir à la pertinence de l'article 68
et, si vous me dites mainte- nant que nous aurons la liberté que vous
avez accordée généreusement au ministre de nous attaquer
aux dispositions de l'article 69 avant même de l'avoir appelé,
à ce moment-là, je vais laisser porter.
M. Charron: M. le Président, sur le point de
règlement soulevé par...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Jacques.
M. Charron: Je le déplore, dans un certain sens, puisque
la commission a décidé d'attaquer cette question fondamentale
qu'est la langue d'enseignement. Il est difficile je pense que le
député lui-même l'a fait remarquer de traiter
séparément la question de l'école anglaise et de son
accès en deux temps. Je me rallierais, si le député en
fait une proposition, à l'idée que, à cause du sujet, et
surtout pour ne pas ennuyer un débat aussi fondamental pour le
Québec par des questions de procédure, nous discutions des deux
articles en même temps.
Mme Lavoie-Roux: Non, je regrette, parce que...
M. Lalonde: Les articles...
Mme Lavoie-Roux: ... à 69, on veut avoir des amendements,
il ne faut pas qu'on prenne les deux en même temps.
M. Charron: Ah bon!
M. Lalonde: 68, quant à nous, est adopté.
M. Charron: Est-ce que l'Union Nationale accepterait d'adopter
l'article 68?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! Pas tous en même temps.
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, je lui ai demandé...
M. Charron: Je ne veux pas interrompre le ministre de l'Education
longtemps, mais si c'est pour faire avancer, M. le Président...
M. Morin (Sauvé): ... M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'ailleurs, M. le ministre, il vous restait une minute à votre
temps.
M. Morin (Sauvé): Bien!
M. Lalonde: Ce n'est pas sur la question de temps; c'est
simplement...
M. Charron: Puis-je demander, M. le Président, si
l'article 68 est adopté?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que l'article 68 est adopté?
Mme Lavoie-Roux: Non, je veux dire un mot. Une Voix:
Non.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors,
M. le ministre, il vous reste...
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'on peut avoir le droit de parole
avant l'adoption?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre, il vous reste une minute pour conclure, s'il vous plaît.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je conclurai
simplement en disant que personne n'a réussi à nous persuader
et je vous prie de croire que nous ne demandions pas mieux que
d'être persuadés qu'il existe un critère meilleur
que celui que nous avons choisi, ou encore moins mauvais que celui que nous
avons retenu après mûre réflexion et de longues
délibérations. Personne ne nous a persuadés qu'un tel
critère existait. C'est la raison, pour laquelle le gouvernement entend
s'en tenir aux articles que vous avez devant vous. Toutefois, comme je l'ai
annoncé tout à l'heure, à la requête, notamment, des
gens de l'Union Nationale, nous en assouplirons l'application. Et j'ose
espérer qu'après avoir pris connaissance du nouveau
règlement, certains députés, qui avaient des craintes,
comprendront que le gouvernement est fort bien disposé quant à
l'application de la loi.
M. le Président, nous n'avons rien entendu qui nous
conduisît à changer d'idée. C'est la raison pour laquelle
je propose l'adoption des articles 68 et suivants du projet de loi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'avais
reconnu le député de D'Arcy McGee.
Mme Lavoie-Roux: Le président antérieur m'avait
reconnue après le député de...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'ignore...
Mme Lavoie-Roux: II l'avait mentionné.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Or, si
vous m'assurez que le président antérieur...
Mme Lavoie-Roux: II l'avait dit.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... vous
avait reconnue...
Mme Lavoie-Roux: Ecoutez! Demandez aux collègues...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... je
cède la parole à Mme le député de L'Acadie.
M. Laurin: Le député de D'Arcy McGee vous la
cède volontiers.
M. Goldbloom: Je vous suivrai, chère collègue.
M. Charron: II vous contredira en temps et lieu.
M. Goldbloom: Ne comptez pas là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux parler
uniquement sur l'article 68, et je tenterai de m'en tenir à la
pertinence de l'article.
Je dirai, en passant, que je trouve très amusant ou
intéressant de voir que le ministre de l'Education, au moment où
il devrait expliquer le principe de l'article 68, les objectifs que le
gouvernement tente d'atteindre, ne trouve autre chose que d'attaquer le
député de L'Acadie. Enfin, c'est son choix. Il donne vraiment
l'impression de quelqu'un qui est sur la défensive avant de partir.
Pour ma part, je pourrais me mettre à répondre à
tous ses arguments, mais je pense que j'en aurai l'occasion au moment de
l'étude de l'article 69.
Je me contenterai de dire à ce moment-ci, pour qu'il n'y ait pas
d'ambiguïté, qu'en ce qui touche le premier alinéa de
l'article 68 qui, si je ne m'abuse, est exactement celui de la loi 22, je ne
puis être qu'en accord, bien que je pense, qu'il soit toujours assez
maladroit de s'attribuer certains mérites que d'autres pourront mettre
en doute. Je pense qu'en grande partie, lorsqu'il fut inclus dans la loi 22, ce
ne fut certainement pas à cause d'une opposition pour le moins
négative de ceux qui formaient à ce moment-là l'Opposition
officielle, mais vraiment suite à des représentations suivies que
nous avions faites organismes que j'ai représentés durant
plusieurs années parce que nous jugions qu'il était
important, compte tenu de toutes les données que nous avions à ce
moment-là et dans les années qui ont suivi, que, pour renverser
une tendance qui pouvait, pour la survie du français à
Montréal, présenter des risques, nous avons demandé, d'une
façon suivie, au gouvernement d'assurer la primauté du
français dans l'enseignement.
Inutile de vous dire que retrouvant ici ce premier alinéa, je ne
puis qu'être d'accord, parce qu'il correspond vraiment à ce que je
professais personnellement, et également le Parti libéral qui
avait accepté de préparer, en 1974, un projet de loi qui faisait
de l'école française l'école de tous; c'est vraiment un
objectif auquel j'ai toujours souscrit, auquel je continue de souscrire et
auquel mon parti continue de souscrire.
Quand au deuxième alinéa, qui n'existait pas, du moins en
partie, dans la loi 22, et qui touche les institutions déclarées
d'intérêt public ou reconnues pour fins de subventions en vertu de
la Loi de l'enseignement privé, je pense que tous se rappelleront que
d'ailleurs, je pense que, peut-être, le député de
Saint-Jacques l'a cité ce matin c'était également
une représentation que l'organisme que je présidais avait faite
en commission parlementaire, au moment de l'étude de la loi 22, que j'ai
eu l'occasion de refaire durant ma campagne électorale, parce que je
pense qu'on ne doit pas ouvrir la porte pour faire contourner une loi qui vaut
pour le secteur public. Je pense qu'elle doit s'appliquer à tout, tant
et
aussi longtemps que des écoles privées sont
subventionnées par le ministère de l'Education.
A mon point de vue, ceci est une amélioration, et je suis tout
à fait disposée à le reconnaître. Je pense que les
choses évoluent, dans ce sens, et qu'elles évoluent pour le
mieux; c'est une mesure qui m'apparaît plus équitable. Je pense
qu'il ne faut pas tenir le gouvernement antérieur responsable de ne pas
l'avoir inclus, que c'est à la pratique et à l'observation des
faits qu'on a pu évoluer vers la situation que l'on retrouve
présentement dans le deuxième alinéa de l'article 68,
mais, je le répète c'est la position du parti que je
représente, de l'Opposition officielle ce qui demeure le principe
fondamental de cet article 68le deuxième alinéa, en fait,
est une modalité c'est que l'école française est
normalement l'école pour tous et qu'éventuellement, comme il
était prévu dans la loi 22 et qu'on verra à l'article 69,
d'autres dispositions prévoiront que l'école anglaise reste
disponible pour les parents qui le désirent, mais je pense que c'est le
souhait de tous que, le plus possible, tous les enfants puissent s'inscrire
à l'école française.
A ce moment-ci, même si j'y reviendrai à l'article 69, il
faut regretter, que les anglophones ne soient pas encouragés à y
aller. Mon parti et moi souhaitons que même les anglophones se sentent
tout à fait accueillis, qu'un projet de loi mette en place les
dispositions qui ne les rendent pas ambivalents vis-à-vis de
l'école anglaise. Le gouvernement a choisi un critère qui va
décourager les anglophones qui, jusqu'à maintenant,
s'étaient ouverts à l'école française, y envoyaient
un assez grand nombre de leurs enfants.
Mais enfin, je reviendrai sur ce point-là. Je veux simplement, en
terminant, dire que nous voterons certainement en faveur de l'adoption de
l'article 68.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
Mme le député de L'Acadie. Je pense que conformément
à ce qui s'est passé cet après-midi, on parle de l'article
68, M. le ministre de l'Education a parlé au nom du gouvernement, Mme le
député de L'Acadie, je présume, a parlé au nom du
Parti libéral, et pour respecter une incitation qu'a faite mon
collègue cet après-midi, je demanderais au député
de D'Arcy McGee, que je reconnaîtrai immédiatement après le
député de Lotbinière, s'il n'aurait pas objection à
ce que le député de Lotbinière prenne la parole. M. le
député de Lotbinière.
M. Biron: Merci, M. le Président. Merci, M. le
député de D'Arcy McGee.
M. le Président, c'est sûr que l'Union Nationale est en
faveur de l'article 68 qui fait en sorte que l'enseignement se donne en
français au Québec. C'est-à-dire que tout
Québécois puisse recevoir en langue française son
enseignement partout. Or, l'Union Nationale est véritablement en faveur
d'un tel article. D'autant plus qu'on a fait un cheminement depuis un an,
cheminement dont je suis fier aujourd'hui et qui, quand même, a valu
à l'Union Nationale beaucoup de recherche et d'heures et de jours
passés à analyser la situation de l'enseignement au
Québec. Et véritablement, à l'heure actuelle, nous
appuyons le gouvernement lorsqu'il dit que les francophones vont pouvoir
recevoir en français l'enseignement nécessaire dans les
écoles, les allophones et tous ceux qui viendront de l'extérieur
vont pouvoir et vont devoir recevoir en français l'enseignement dans les
écoles. Or, c'est aussi la volonté de l'Union Nationale.
Le ministre de l'Education, tout à l'heure, a
déposé le projet, ici malheureusement on n'a pas eu le
temps de lire le projet, demain je ferai certainement des commentaires
là-dessus je vois quand même rapidement qu'il y a une
nouvelle flexibilité. C'est ce que j'avais demandé d'ailleurs au
ministre de l'Education, de faire montre de flexibilité pour
résoudre les problèmes que nous avons présentement,
aujourd'hui, cette année, quitte, l'an prochain, à durcir un peu
notre ligne de pensée, notre plan d'action; mais, pour cette
année, à cause de l'urgence de la situation, il faut
véritablement faire montre d'une grande flexibilité. J'aurais
aimé entendre davantage le ministre de l'Education discuter de la
qualité de l'enseignement du français dans nos écoles
françaises et aussi dans nos écoles anglaises. Je voudrais
entendre, dans le cours de l'étude de ce chapitre VIII sur la langue
d'enseignement, le ministre de l'Education nous dire et s'engager même
par un article de loi, à assurer une bonne quantité et
qualité de l'enseignement du français dans les écoles
anglaises, de même que pour résoudre le problème de tous
ceux, dans une ville en particulier, comme Montréal ou ailleurs en
province aussi, qui veulent une bonne quantité et qualité
d'anglais comme langue seconde dans les écoles françaises. C'est
important. A l'heure actuelle, le ministre en a parlé, mais il n'y a pas
d'engagement formel émanant du projet de loi. J'aimerais voir quelque
chose dans le projet de loi pour donner une garantie morale à la
population du Québec. Je connais, dans le discours inaugural... Mais on
ne l'a pas vu, véritablement dans le projet de loi. Je connais beaucoup
d'allophones au Québec et beaucoup d'anglophones qui sont prêts
à envoyer leurs enfants à l'école française,
à condition d'être assurés que dans cette même
école française on puisse leur enseigner une bonne
quantité et qualité d'anglais dans cette école
française; ils sont prêts, tout de suite, à venir à
l'école française pour véritablement participer activement
à la vie collective québécoise.
J'ai personnellement visité plusieurs écoles. Une
école, en particulier, à Montréal, m'a frappé, une
école anglaise, où je suis allé il y a quelques mois. J'ai
commencé à parler, surtout en anglais, parce que c'est une
école anglaise.
Il y avait, ensuite, une période de questions. J'ai
été même ému de constater que 75% ou 80% des
questions de ces jeunes ont été posées en un excellent
français, dans une école anglaise.
M. Morin (Sauvé): Vous auriez dû parler
français!
M. Biron: Bien sûr, si j'avais su que ces gens pouvaient
apprendre autant de français dans cette
école. Cela m'a éclairé quand même. Cela
prouve que si on fait l'effort nécessaire dans toutes nos écoles
du Québec, on va pouvoir donner la formation que nos
Québécois veulent.
Nos Québécois veulent vivre en français, veulent
pouvoir travailler en français, veulent pouvoir acheter ce qu'ils
désirent en français, veulent recevoir les services
nécessaires en français, mais ils veulent aussi s'épanouir
pleinement en Amérique du Nord et pouvoir parler cette langue anglaise
qu'il faut parler aussitôt qu'on sort du Québec.
Cette question est importante et j'aimerais que le ministre de
l'Education...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Pourrais-je poser une question au
député?
M. Biron: Je vais terminer si vous voulez, et vous poserez votre
question, après, sur votre temps, s'il nous manque du temps.
Mme Lavoie-Roux: Serait-ce indiscret de vous demander le nom de
l'école où vous vous trouviez?
M. Biron: Selwyn House School.
Mme Lavoie-Roux: Ah! D'accord. C'est intéressant. Je
pensais que vous étiez... Merci.
M. Lalonde: On ne vous dérange pas, toujours!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît. La parole est au député de
Lotbinière.
M. Biron: Cela est important, parce que nos gens veulent
véritablement participer à la vie collective du Québec.
Là-dessus, je voudrais que le ministre de l'Education... on va y
arriver, d'ailleurs, demain. Nous aurons une suggestion, un amendement, pour le
ministre de l'Education, soit un engagement de la part du gouvernement
d'enseigner une bonne qualité et une bonne quantité de
français dans toutes les écoles soit françaises ou
anglaises.
Je voudrais que le ministre y songe sérieusement demain matin.
Mais, je vous assure que vis-à-vis de l'article 68, en ce qui traite en
particulier à l'enseignement qui se donne en français partout,
dans toutes les classes du Québec, nous sommes totalement d'accord et
nous allons voter pour cet article.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais faire quelques
commentaires et je voudrais terminer par une question que je voudrais adresser
au ministre de l'Education.
D'abord, je voudrais lui dire que c'est toujours de bonne guerre
d'attaquer l'adversaire et de le faire de la façon qui peut lui nuire le
plus. Il ne faut quand même pas caricaturer la position de l'adversaire
en ce faisant.
Depuis de nombreuses années, même avant son entrée
dans la vie publique, je connais le député de Sauvé,
aujourd'hui ministre de l'Education. Je suis convaincu que c'est
essentiellement d'une façon involontaire qu'il l'a fait, mais
c'était quand même une caricature qu'il nous a offert de la
position de l'Opposition officielle à l'égard de cette question
chatouilleuse des tests linguistiques. Il a invoqué des exemples qui lui
ont été cités par des fonctionnaires, paraît-il et
peut-être par d'autres personnes, peu importe. Il a mentionné des
cas où le petit enfant de cinq ans étant invité à
prononcer les quelques mots nécessaires en anglais pour obtenir son
accès à l'école de langue anglaise, et devenant nerveux,
étant incapable de s'exprimer, a été giflé par ses
parents. Il a dit, en quelque sorte: Vous voyez, c'est abominable de passer par
un régime de tests pour déterminer le droit
d'admissibilité à l'école de langue anglaise.
M. le Président, je n'ai pas de difficulté à
être d'accord avec le ministre que ce genre de scène est
disgracieux et inacceptable. Ce n'est pas ainsi qu'il faut déterminer
l'admissibilité d'un enfant à quelque école que ce soit.
Mais, ce n'est pas ce que l'Opposition officielle a indiqué comme sa
pensée quant à la façon de déterminer cette
admissibilité.
Justement, un des problèmes que tout le système scolaire a
vécus avec les tests repose justement sur le fait que l'enfant de cinq
ans était appelé à être le témoin pour toute
la famille.
M. le Président, si l'on parle aujourd'hui "d'interview", c'est
pour ne plus viser l'enfant de cinq ans justement. C'est pour amener les
parents qui, étant adultes, sont capables de s'exprimer dans la
très forte majorité des cas, même si ce ne sont pas des
hommes publics, des femmes publiques, habitués à prendre la
parole, ils sont quand même capables de s'exprimer et de démontrer
leur capacité de parler en anglais et de vivre en* anglais, si c'est
leur désir de faire cette preuve, et d'obtenir, pour leurs enfants,
l'accès à l'école. En même temps, les autres
enfants, les enfants aînés de la famille, seraient en mesure de
contribuer à cette preuve.
M. le Président, je ne sais pas de quel reportage journalistique
le ministre a voulu se servir pour citer le point de vue...
M. Morin (Sauvé): Je puis vous donner les
références.
M. Goldbloom: ...de l'Opposition officielle, mais je veux tirer
les choses au clair. Il ne s'agit pas de viser et surtout pas d'isoler un
enfant de
cinq ans pour en faire le témoin pour toute la famille. Il me
semble tout à fait humain et raisonnable, si le besoin en existe. M. le
Président, si nous avons parlé d'appartenance reconnue au milieu
anglophone, cette appartenance se détermine, dans la majorité des
cas, facilement. Dans la minorité des cas, il faudrait une
évaluation quelconque. Dans ce sens...
M. Morin (Sauvé): Comme dans le cas de la loi 22?
M. Goldbloom: M. le Président, j'ai essayé
d'être assez explicite, je crois l'avoir été, et je crois
avoir corrigé une fausse impression laissée involontairement par
le ministre...
M. Morin (Sauvé): Vous n'avez rien corrigé du tout.
Vous alliez me poser une question. Posez-la moi, sinon, j'en ai une à
vous poser.
M. Goldbloom: M. le Président, je ne suis pas encore rendu
à ma question, parce qu'elle ne porte pas sur cet aspect du sujet. Donc,
si le ministre veut m'en poser une, je l'invite à le faire.
M. Morin (Sauvé): C'est une question toute simple. Le
critère retenu par Mme le député de L'Acadie et votre
parti, est-ce la langue maternelle des parents ou la langue maternelle de
l'enfant?
M. Goldbloom: M. le Président, ce n'est pas comme telle,
la langue maternelle, parce que l'appartenance à une communauté
évolue avec le temps et...
M. Morin (Sauvé): Alors, j'ai une autre question. Est-ce
l'appartenance des parents ou l'appartenance des enfants?
M. Goldbloom: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai pas
d'objection à ce que le ministre me pose d'autres questions, à
condition qu'il me permette de répondre d'abord à la
première. Si j'ai bien compris son interpellation de tout à
l'heure, il me reposait une deuxième fois la même question.
J'étais en train de lui dire... Et lui qui avait affirmé que
personne n'avait soutenu la thèse de l'Opposition officielle à
cet égard, M. le Président, il y a eu de nombreux articles et
éditoriaux dans les journaux qui ont analysé les divers points de
vue et qui ont indiqué notamment que le Conseil supérieur de
l'éducation un organisme cher au coeur du ministre qui est de
l'autre côté de la table a pris une position semblable,
mais a utilisé un critère défini comme étant la
langue maternelle, la langue maternelle étant difficile à
déterminer, selon la définition que l'on donne de ce mot, de
cette expression, langue maternelle.
Il y a donc le problème pratique, et c'est pour cette raison, M.
le Président, que je voudrais terminer rapidement. Nous avons
sûrement quelques secondes avant d'être obligés de nous
rendre en Chambre pour...
M. Morin (Sauvé): Le ministre est sauvé par la
cloche, M. le Président; il n'a pas répondu à ma
question.
M. Goldbloom: L'ancien ministre...
M. Morin (Sauvé): L'ancien, effectivement.
M. Goldbloom: Merci.
M. Charron: Des parents ou de l'enfant, là est toute la
question.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, sil vous plaît! Pas tous en même temps.
M. Goldbloom: Mais, M. le Président, il y a des familles
qui appartiennent à la communauté anglophone qui n'ont pas la
langue maternelle, selon la définition que l'on donne, qui est
l'anglais. il y a des enfants qui sont nés en Grèce, qui sont
arrivés ici à l'âge de deux mois, leur langue maternelle,
selon la définition que l'on pourrait en donner, ne serait pas
l'anglais. Quand même, ce serait une famille assimilée
déjà et depuis plusieurs années, au moment où
l'enfant arriverait à la porte de l'école, au milieu
anglophone.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît...
M. Morin (Sauvé): Une autre question,
peut-être...
Mme Lavoie-Roux: ... demain, vous, M. le ministre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!
Compte tenu du fait que les cloches viennent de sonner, je pense qu'il
est de mon devoir d'ajourner les travaux de cette commission sine die.
(Fin de la séance à 22 h 56)