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Audition des mémoires sur
le projet de loi no 1 :
Charte de la langue française
au Québec
(Dix heures seize minutes)
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Bonjour, M. le ministre.
M. Laurin: Salut.
Le Président (M. Cardinal): Nous commençons une
nouvelle séance séance qui ne durera que jusqu'à
midi; nous sommes mercredi de la commission de l'éducation, des
affaires culturelles et des communications.
Je fais l'appel des membres de la commission: M. Alfred (Papineau); M.
Bertrand (Vanier), M. Bi-saillon (Sainte-Marie) remplacé par M.
Charbon-neau (Verchères); M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M. Ciaccia
(Mont-Royal); M. de Belle-feuille (Deux-Montagnes); M. Dussault
(Châteauguay); M. Godin (Mercier) remplacé par M. Fallu
(Terrebonne); M. Grenier (Mégantic-Compton); M. Guay (Taschereau); M.
Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Laplante (Bourassa); M. Laurin (Bourget);
Mme Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Le Moignan (Gaspé); M. Paquette
(Rosemont); M. Roy (Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Je fais aussi l'appel des invités qui doivent comparaître
devant cette commission: la Chambre de commerce du district de Montréal,
qui était déjà présente hier. Bonjour. Vous pouvez
déjà vous installer. Vous étiez déjà avec
nous. Mémoire 15. Comité des kilomètres d'appui. Merci.
Mémoire 206. Confédération des syndicats nationaux. Merci.
Mémoire 37. Ordre des ingénieurs. Merci. Mémoire 230.
Congrès juif canadien.
M. Ciaccia: Ils sont ici, M. le Président. Le
Président (M. Cardinal): Ils sont ici où?
M. Ciaccia: Ils n'avaient pas été convoqués,
selon eux, pour dix heures. Ils sont dehors...
Le Président (M. Cardinal): Pardon. Je m'excuse. Tout le
monde est convoqué pour dix heures.
M. Ciaccia: Excusez-moi, M. le Président. Me
donneriez-vous un instant pour aller les chercher? Ils sont dans
l'antichambre.
Le Président (M. Cardinal): Je puis suspendre les travaux
de la commission pour deux minutes parce que je ne voudrais pas faire perdre un
droit à un organisme.
M. Ciaccia: Merci.
Le Président (M. Cardinal): La séance est suspendue
pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 18)
Reprise de la séance à 10 h 19
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Les travaux de la commission reprennent. J'appelais les
représentants du Congrès juif. Merci d'être
présents. Je m'excuse de cette technicité, -mais je ne voulais
pas appliquer le règlement, pour que personne ne perde son tour.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): De rien, M. le
député de Mont-Royal. D'ailleurs, j'ai justement quelques
renseignements à donner avant que ne commence cette séance. C'est
une séance qui ne dure que la matinée. Le mercredi, en vertu
d'une entente entre les leaders parlementaires des partis, nous devons ajourner
à midi et non pas à 13 heures. Le mercredi après-midi,
c'est à l'Assemblée nationale la journée des
députés. Il y a déjà une motion du
député de Beauce-Sud devant l'Assemblée, ce qui fait que
nous commençons toujours plus tard que les autres jours, certainement
après 16 heures, pour continuer jusqu'à 18 heures. Nous
reprendrons probablement c'est une supposition, je n'ai pas encore la
motion du leader parlementaire à 20 heures. Nous devrons
attendre, comme l'a mentionné d'ailleurs le député de
Marguerite-Bourgeoys, nous ne fonctionnons qu'avec des ordres de la Chambre,
qui sont quotidiens. Nous avons devant nous la Chambre de commerce, qui n'a pas
encore commencé à présenter son mémoire. Par
conséquent, aucun temps n'est calculé pour vous. Quant aux
autres, ayant tous répondu à l'appel, il est bien sûr
qu'ils ne passeront pas tous ce matin. Je ne puis pas officiellement vous
donner congé; soyez non pas présents, mais prêts à
vous faire entendre dès que la commission pourra le faire.
Je rappelle aussi que, devant la commission, il y a présentement
une motion du député de Marguerite-Bourgeoys qui se lit comme
suit: Que cette commission invite la mission ou ses représentants
qui s'est récemment rendue en Europe, afin d'étudier le
fonctionnement linguistique des sièges sociaux d'entreprises
multinationales, à se faire entendre le 13 juillet 1977. Au moment de
l'ajournement à 22 h 57, hier, la parole était au
député de Marguerite-Bourgeoys que j'ai interrompu dans son
élan, suivant ses propres paroles. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Motion pour entendre la mission
qui a étudié le fonctionnement
linguistique des sièges sociaux des
multinationales, en Europe (suite)
M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie. Mon
élan ayant été interrompu, mais voulant aussi laisser aux
invités le loisir de présenter leur mémoire, je
suggérerais de suspendre le débat sur cette motion, tout en
indiquant à la commission que, comptant sur la
générosité du leader parlementaire du gouvernement de nous
faire siéger ce soir, et espérant qu'il aura cette
générosité à notre égard, on pourra
reprendre la discussion de cette motion ce soir, à la reprise des
travaux.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, je vous sais gré de cette proposition, d'une part,
et je demande immédiatement si j'ai le consentement de la commission
pour que nous suspendions ce débat. M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Je ne serais pas en faveur de suspendre s'il est
repris ce soir. Quant à perdre du temps, on va le perdre tout de suite
et on va aller jusqu'au bout de cette motion.
Le Président (M. Cardinal): Ecoutez, j'ai une suggestion
et je n'ai pas le consentement.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que je pourrais essayer de convaincre le
député de Bourassa en vue...
M. Laplante: Tu peux essayer de me convaincre, mais la seule
façon de le faire, c'est d'arrêter de piétiner et de dire:
On retire la motion.
M. Ciaccia: S'il veut me laisser finir, M. le Président.
C'est parce que nous avons des invités ici ce matin. Par courtoisie,
nous voulons les entendre, ils ont préparé leur mémoire.
Je crois que ce n'est pas le député de Marguerite-Bourgeoys que
vous allez affecter par cette attitude, ce sont surtout les invités qui
sont ici ce matin, alors je vous demanderais de reconsidérer la
question. Je sais que c'est tôt le matin et que ça fait longtemps
qu'on siège, c'est peut-être juste par...
M. Laplante: Pour répondre au député de
Mont-Royal, ce soir, on a encore des invités, ils ont été
convoqués pour la journée. Je trouve ça indécent,
à ce moment-ci, de reporter le débat à ce soir, avec un
autre groupe d'invités qui sont encore ici aujourd'hui.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît. Il y a déjà plusieurs membres de la commission qui
ont demandé la parole, je les note dans l'ordre que j'ai pu voir. Mme le
député de L'Aca- die, M. le député de Rosemont, M.
le député de Joliette-Montcalm. Mme le député de
L'Acadie.
M. Chevrette: Question de privilège.
Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas de question de
privilège ici.
M. Chevrette: J'aurais aimé avoir une directive.
Mme Lavoie-Roux: II m'a donné la parole. Le
Président (M. Cardinal): Ecoutez...
M. Chevrette: Une directive, je ne veux pas vous couper la
parole, madame, j'essaie de trouver une solution moi aussi.
Mme Lavoie-Roux: Vous ne voulez pas me couper.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, sur une demande de
directive, M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Avec les nuances qui s'imposent, madame.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, allez, sur une
demande de directive.
M. Chevrette: M. le Président, je ferais la suggestion
suivante, permettre au groupe qui est là de se faire entendre, se
réserver un temps bien précis pour faire le débat sur la
motion. Est-ce que ça rallierait les gens?
Le Président (M. Cardinal): II faut, encore une fois, que
j'aie un consentement unanime de la commission.
M. Chevrette: Peut-être que le député de
Bourassa se rallierait avec nous...
M. Laplante: Celui qui est maître de sa motion, c'est le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Est-ce que je pourrais, M. le Président, si la
commission, contrairement à ce que j'avais prévu, ne
désire pas avoir une idée d'avance de l'intention du
député qui présente la motion, à savoir quand il a
l'intention de demander à nouveau la reprise du débat, s'il ne
désire pas le savoir, simplement suggérer de suspendre le
débat de la motion, sans dire quand je vais redemander de le faire. Je
le faisais simplement par simple courtoisie pour les membres de cette
commission et surtout pour les invités. Si le député de
Bourassa ne veut pas savoir quand on reprendra le débat
là-dessus, je vais amender ma suggestion et dire: M. le
Président, je suggère qu'on suspende le débat sur ma
motion.
Le Président (M. Cardinal): Un moment. Je
vais demander la collaboration de tous. Oublions ce qui s'est
passé, même si c'est au journal des Débats. Il y a une
nouvelle suggestion du député de Marguerite-Bourgeoys, de
suspendre, pour le moment, la motion présentée hier soir.
Sur une question de directive, M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Sur une telle demande, M. le Président,
est-ce qu'il faut voter ou s'il faut encore l'unanimité, vu qu'on
arrête les travaux...
Le Président (M. Cardinal): Non, il n'y a pas de vote,
parce qu'il n'y a pas de motion. Je demande simplement le consentement de la
commission, parce que ce n'est pas le...
M. Laplante: C'est le consentement unanime que vous demandez
encore?
M. Chevette: Demande de directive. Le Président (M.
Cardinal): C'est cela.
M. Laplante: S'il faut le consentement unanime, je suis encore
contre, M. le Président.
M. Chevrette: Une directive, s'il vous plaît.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je m'excuse. Cela n'a pas l'air de faire votre
affaire, M. le Président, mais je suis obligé de le faire. Quand
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce...
M. Lalonde: Marguerite-Bourgeoys.
M. Chevrette: Marguerite-Bourgeoys, excusez.
M. Lalonde: Ce sont deux dames quand même.
M. Chevrette: Souvent, j'ai dit "de grâce"... Il demande,
immédiatement après le groupe des invités qui est ici, de
reprendre le débat...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Ce qui est
demandé présentement, c'est tout simplement de suspendre...
M. Chevrette: Oui, suspendre.
Le Président (M. Cardinal): ...sine die, si on veut
employer des termes juridiques, le débat.
M. Chevrette: Oui, mais il pourrait revenir immédiatement
avec le...
Le Président (M. Cardinal): Oui, il pourrait revenir
avec...
M. Chevrette: Je vais terminer et vous allez peut-être
pouvoir me donner une réponse plus précise.
Je suppose qu'il y a un groupe, ici dans la salle, qui est
convoqué depuis trois fois et qui ne passe pas. Au moment où il
arrive à la table, cela plaît moins au député de
Marguerite-Bourgeoys et là il fait sa motion, formellement. Il va
falloir le faire, le débat, un jour ou l'autre.
A partir de là, j'aime autant vider la question une fois pour
toutes.
M. Lalonde: 96, je pense, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, d'accord, pour autant
qu'il puisse s'appliquer. Nous sommes dans un faux débat de
procédure. Je vous donne quand même la parole.
M. Lalonde: Oui. Je pense que, peut-être inconsciemment, le
député de Joliette-Montcalm a imputé des désirs
indignes, à savoir que je choisirais le moment de nuire...
M. Chevrette: Ce n'est pas malhonnête. M. Lalonde:
...à certains invités.
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas 96, c'est 99.
M. Lalonde: 99.
M. Chevrette: Je vais m'en servir moi aussi, M. le
Président, parce que c'est vraiment inconscient.
M. Lalonde: Je n'ai pas terminé. C'est impossible pour moi
de savoir qui va être là ce soir. C'est impossible pour moi de
savoir. Quand j'ai dit: "à un moment donné, on reprendra le
débat," je donnais l'avis simplement pour être gentil à
l'endroit des membres de cette commission.
Lundi prochain, par exemple, je n'ai aucune idée qui le ministre
invite, sauf la veille au soir. C'est, je pense, tout à fait injuste de
m'imputer des intentions de nuire aux invités. Ce n'est pas cela que
vous vouliez dire, je présume?
M. Guay: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, Mme le
député de L'Acadie, avant de vous donner la parole, je voulais
ajouter quand même un commentaire, seulement un instant.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît!
Mme Lavoie-Roux: Ah! excusez-moi.
Le Président (M. Cardinal): C'est que le
député de Joliette-Montcalm n'a certainement pas tenu de propos
indignes, mais il a fait une hypothèse et on ne peut pas vivre avec des
hypothèses
en matière de procédure et de commissions parlementaires.
Non, vous avez supposé que si tel groupe se présentait qui avait
été invité depuis trois jours et que le
député de Marguerite-Bourgeoys ne l'aimait pas...
c'étaient trois hypothèses, c'étaient trois "si". Je ne
veux pas du tout vous rappeler à l'ordre, je veux simplement indiquer
que c'est une question purement hypothétique. Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président.
M. Fallu: J'aurais une directive à vous demander, s'il
vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Terrebonne.
M. Fallu: J'aimerais savoir, du point de vue de la
procédure, si la motion qui a été déposée
hier soir est effectivement devant nous ce matin.
Le Président (M. Cardinal): Oui, elle l'est; elle a
été jugée recevable par celui qui me remplaçait
à ce moment-là et, de plus, le député de
Marguerite-Bourgeoys a même commencé à parler sur cette
motion. Il a dû employer environ deux minutes et demie de son temps.
M. Fallu: J'aimerais savoir de plus, M. le Président, si,
normalement, ce matin, cette motion serait débattable.
Le Président (M. Cardinal): Certainement, parce
qu'à l'ajournement de la commission, le député de
Marguerite-Bourgeoys avait la parole sur cette motion.
M. Fallu: Autre directive, M. le Président, pour qu'elle
ne soit pas débattable, si je comprends bien, il faudrait un
consentement unanime?
Le Président (M. Cardinal): II faudrait de deux choses
l'une, ou un consentement unanime ou que la motion soit retirée, quitte
là, je n'en fais pas une hypothèse à ce
qu'elle soit représentée à une autre séance.
M. Fallu: Pour être retirée, M. le Président,
quelles sont les exigences?
Le Président (M. Cardinal): Une seule exigence, c'est que
le député lui-même qui a présenté la motion
la retire.
M. Chevrette: Cela n'appartient pas à
l'Assemblée?
Le Président (M. Cardinal): Non, nous ne sommes pas
à l'Assemblée nationale et, même à
l'Assemblée nationale, vous savez que celui qui fait une motion peut
toujours la retirer. Il y a de nombreux précédents; cela s'est
fait très souvent. On l'a vu encore la semaine dernière.
Par conséquent, ce sont les deux seuls moyens d'en sortir.
J'espère que cela répond aux questions.
M. Guay: M. le Président...
M. Fallu: En conséquence, M. le Président, je vous
demanderais de nous donner collectivement une directive, à savoir si oui
ou non nous débattons ce matin la motion immédiatement.
Le Président (M. Cardinal): Je n'en sais rien, cela
dépend de ce qui va se passer à la suite des interventions. S'il
n'y a pas moyen d'en sortir, nous allons la débattre ce matin. Mme le
député de L'Acadie.
M. Guay: M. le Président, une directive s'il vous
plaît.
Mme Lavoie-Roux: Je vais demander une directive, je vais finir
par avoir la parole.
M. Guay: Non, mais je veux avoir une précision.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Taschereau.
M. Guay: Je m'excuse, Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Cela devient ridicule.
M. Lalonde: En fait, c'est compréhensible, ils ont besoin
de beaucoup de directives.
M. Guay: Je veux simplement être très bien
fixé quant à la nature de la proposition...
M. Chevrette: ... ridicule.
M. Guay: Laisse-moi donc parler, toi... Quant à la nature
de la motion ou du souhait du député de Marguerite-Bourgeoys,
est-ce que c'est votre interprétation, M. le Président
peut-être pouvez-vous, si besoin est, vous en référer au
député de Marguerite-Bourgeoys que le fait que le
député de Marguerite-Bourgeoys ait modifié sa motion
originale, si toutefois c'est une motion, mais qu'on ne la débatte pas
ce matin d'abord, ce n'est pas ce matin, mais ce soir, mais là,
ce n'est pas du tout ce matin est-ce que, dans votre esprit, cela veut
dire qu'on n'en débattra pas du tout aujourd'hui et, en particulier, ce
soir?
Le Président (M. Cardinal): Je n'en sais rien. Tout ce que
je peux dire, c'est ceci, pour clarifier la situation: M. le
député de Taschereau a fait un cours de droit, alors, on va
essayer d'être très clair.
M. Guay: Avec vous, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys avait le choix simplement
de faire une suggestion, ce qui s'est fait souvent en commission
parlementaire, qui aurait pu être acceptée par tous les membres de
la commission. Alors, nous aurions entendu les porte-parole de la Chambre de
commerce de Montréal. Ou il aurait pu faire une motion de suspension du
débat sur sa motion, et nous aurions eu alors un débat sur la
motion de suspension du débat. Sur ce, est-ce que cela
répond...
M. Guay: Cela ne veut donc pas dire que le fait qu'il ait
modifié son désir implique pour autant, dans son esprit,
d'après la façon dont vous l'avez compris, que nous n'entendrons
pas cette motion aujourd'hui? Il se peut qu'il revienne avec cette motion cet
après-midi ou ce soir?
Le Président (M. Cardinal): Dans mon esprit, c'est
possible.
M. Guay: Même si ce n'est pas mentionné.
Le Président (M. Cardinal): C'est à lui de
décider, c'est cela.
M. Guay: Bon!
Le Président (M. Cardinal): J'ai mentionné que
c'était une suggestion d'ajournement sine die du débat. J'ai
mentionné au début de la séance que la séance se
terminait à midi et que c'était une nouvelle séance qui
recommencerait, je ne sais pas à quelle heure, à la suite d'une
motion ou d'un avis qui sera donné en Chambre cet après-midi. Mme
le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voulais simplement
faire remarquer que l'Opposition officielle a toujours tenu compte, au moment
de la présentation de ces motions, des invités qui étaient
ici. Nous avons même donné des avis de 24 heures pour lesquels
vous avez reconnu, je pense, que nous avions, dans les circonstances, fait
preuve de courtoisie envers les invités. Je dois rappeler qu'hier soir,
quant la motion a été présentée, il était 10
h 50 exactement et que, de toute façon, la Chambre de commerce qui,
à ce moment, avait été invitée à faire ses
représentations, n'aurait même pas eu le temps de finir la
présentation de son mémoire, puisqu'on accorde 20 minutes aux
organismes, s'ils veulent bien les utiliser. Je pense qu'à ce moment,
imputer des motifs à savoir qu'on ne tient pas compte des
invités, cela me paraît tout à fait injuste. C'est ce point
que je voulais signaler au président.
Une Voix: ...école secondaire...
M. Paquette: Je m'excuse, c'est à moi...
Le Président (M. Cardinal): D'accord. A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, c'est sur le même
sujet que vient de toucher le député de L'Acadie, quand elle dit
qu'on accuse l'Opposition de nuire aux invités, je pense qu'on a
parfaitement raison.
Vous savez très bien que cette motion, même si elle a pour
but d'inviter des gens, va faire en sorte qu'on va en entendre moins qu'on en
aurait entendu si on n'avait pas eu cette motion. Vous savez très bien
qu'après un certain temps où tout le monde va avoir le temps de
parler la motion va être défaite parce qu'on n'est pas d'accord.
Bon! Vous le savez, ça. Vous la présentez quand même. C'est
le jeu normal d'une Opposition...
Mme Lavoie-Roux: C'est la démocratie! M. Lalonde:
On présume...
M. Paquette: ...qui veut faire un mini-filibuster, mais je tiens
à dire que vous nuisez aux invités effectivement. Peut-être
qu'on va entendre...
Mme Lavoie-Roux: Mais présentement, c'est vous autres.
M. Paquette: ...la Chambre de commerce ce matin, mais il y a
d'autres groupes dans la salle qui sont ici depuis trois jours et qu'on
n'entendra pas.
M. Laplante: Cinq.
M. Paquette: M. le Président, je demande la collaboration
de l'Opposition. Je demande au député de Marguerite-Bourgeoys de
retirer sa motion et de ne pas la représenter, parce qu'elle va
être battue tôt ou tard, vous le savez très bien.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...ce qu'on vient d'entendre est absolument
inouï. J'avais cru, M. le Président, que l'Opposition avait
été invitée ici par le règlement, par la Loi de la
Législature dont relève le règlement, pour participer aux
travaux et avoir, naturellement, la chance de convaincre les membres du
gouvernement du bien-fondé de nos représentations. Comment
puis-je présumer que ma motion va être battue, alors que j'en ai
fait une pour inviter le président de la régie, que j'ai dû
parler 20 minutes la première fois que cela a été
présenté, un mercredi soir, si je me souviens bien
coïncidence et que c'est seulement à la reprise du
débat que, tout à coup, le parti ministériel s'est
déclaré en faveur. Cela m'a pris 20 minutes, cette fois, pour les
convaincre. Cela va peut-être me prendre 40 minutes, cette fois-ci, je ne
le sais pas. Je ne peux pas présumer de la mauvaise foi...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, mais en vertu de
l'article 160, vous n'aurez pas plus de 20 minutes.
M. Lalonde: Non, mais je veux dire l'Opposition entre nous.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Lalonde: Je ne peux pas présumer de la mauvaise foi du
gouvernement, M. le Président. C'est ce que le député de
Rosemont me demande de faire.
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez...
M. Lalonde: Non, un instant, M. le Président! Le
Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Lalonde: Je trouve que c'est absolument injuste de dire que
c'est l'Opposition, que c'est ma motion qui nuit aux travaux actuellement.
C'est le gouvernement qui ne veut pas collaborer pour remettre à plus
tard, sine die même, parce qu'il semblait que les scrupules du
député de Bourassa étaient chatouillés d'une
façon...
Mme Lavoie-Roux: Indue.
M. Lalonde: ...indue. Alors, j'ai enlevé l'avis. Tous le
monde a eu le message. M. le député de Bourassa ne l'a pas eu.
C'est tout simplement une motion de suspension, enfin, une suggestion de
suspension que j'ai faite. On devrait compter sur la collaboration de tous les
membres de l'assemblée pour ne pas faire poireauter les gens qui sont
là. C'est sûrement le parti ministériel qui nuit aux
travaux. Je vous demande une directive en terminant, M. le
Président.
J'ai cru comprendre de vos propos tantôt, en réponse
à des questions de députés ministériels, qu'une
motion pouvait être retirée unilatéralement et que cela
n'empêchait pas qu'elle soit représentée en tout temps.
Le Président (M. Cardinal): C'est exact et, comme
président de la commission, je l'accepterai en tout temps.
Motion retirée
M. Lalonde: Pour mettre fin à cela et pour prouver au
gouvernement qu'il ne pourra pas faire un filibuster inutile ce matin, je
retire ma motion.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys et je vous assure que vous pourrez
la présenter à nouveau pourvu que cela soit à une autre
séance.
D'accord?
M. Laplante: On jugera.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre messieurs!
M. Laplante: On va voir ce soir leur sérieux.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Bourassa.
M. Lalonde: Vous n'avez rien vu encore.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Laplante: J'ai hâte d'en voir plus.
M. Lalonde: Vous allez voir que c'est l'Opposition qui
mène.
Le Président (M. Cardinal): Voulez-vous que la
séance soit suspendue par respect pour nos invités de
façon qu'ils ne voient pas ce spectacle?
Messieurs les porte-parole de la Chambre de commerce du district de
Montréal, je vous souhaite la bienvenue. Je vous prierais de vous
identifier; ensuite, vous aurez 20 minutes pour présenter votre
mémoire et les députés auront 70 minutes pour vous poser
des questions.
M. Charbonneau.
Chambre de commerce du district de
Montréal
M. Charbonneau (Edgar): Edgar Charbonneau, président de la
Chambre de commerce du district de Montréal. M. Marcel Paré,
membre de la chambre de commerce et M. Claude Beauregard, directeur
général de la chambre.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Nous
commençons à 10 h 35.
M. Charbonneau (Edgar): J'aimerais peut-être
préciser devant cette commission que, préalablement au
mémoire que nous présentons ce matin, la chambre de commerce a
fait appel à l'opinion de ses membres par voie de son organe
interne.
Suite aux opinions reçues, nous avons formé un
comité composé de six membres qui, croyons-nous,
représentent parfaitement le tissu que forment les membres de la chambre
de commerce.
Ce mémoire a été accepté et corrigé
par le conseil d'administration de la chambre avant de vous être
présenté ici ce matin.
Nous apprécions vivement être entendus en commission
parlementaire dans une démarche démocratique, à
caractère public. Nous sommes appelés à nous exprimer
à un moment où un grand nombre d'organismes ont
déjà fait connaître leurs vues au sujet du projet de loi no
1.
Plusieurs de nos préoccupations, voire de nos
considérations et propositions auront été
évoquées par d'autres avant nous, mais il demeure que la
convergence et même les fondements des divergences entre intervenants qui
ont établi leur position indépendamment les uns des autres sont
de nature à éclairer l'opinion publique et les membres de
l'Assemblée nationale, qui décideront en dernière analyse
et à qui nous nous adressons en comparaissant devant la commission
parlementaire.
Nous tenons pour hautement significatif et révélateur de
la qualité du processus démocratique
que les représentations des divers intervenants aient
amené les porte-parole gouvernementaux et notamment le ministre
responsable du projet de loi no 1 à annoncer d'éventuelles
modifications à certaines dispositions parmi celles que nous trouvons
les plus discutables.
C'est dans l'espoir que notre apport puisse confirmer ces intentions et
contribuer à identifier des solutions de rechange que nous nous mettons
à votre disposition pour éclairer, par la discussion, les
considérations et propositions consignées dans notre
mémoire dont nous présumons que vous aurez déjà
pris un peu connaissance.
La Chambre de commerce du district de Montréal choisit de voir
dans le projet de loi no 1 une volonté gouvernementale d'assurer la
sécurité linguistique et culturelle de la communauté
francophone du Québec.
Il est peu probable qu'entre optimistes et pessimistes, on en vienne
à s'entendre sur l'état exact de la situation dont plusieurs
croient cependant qu'elle appelle des redressements. La Chambre^ pour sa part,
souscrit à l'intention, énoncée dans le livre blanc et que
le projet de loi no 1 vise à actualiser "de protéger, de
développer dans sa plénitude une culture originale, un mode
d'être, de penser, d'écrire, de créer, de se réunir,
d'établir des relations entre les groupes et les personnes et même
de conduire les affaires."
Déjà, en 1969 et en 1973, la Chambre avait fait des
observations dont le législateur, dans la Loi sur la langue officielle
de 1974, a, dans une certaine mesure, tenu compte, notamment au chapitre de la
langue de travail. La Chambre avait dit croire que la cause fondamentale des
problèmes auxquels devait faire face la majorité francophone du
Québec, qu'il s'agisse de problèmes sociaux, économiques
ou linguistiques, était le contrôle par la minorité
anglophone des plus importantes entreprises économiques, de telle sorte
que pour normaliser la situation sociale et économique des francophones
du Québec et par là changer quelque chose au statut de la langue
française, il fallait d'abord assurer un meilleur équilibre des
forces au sein de ces entreprises. "L'important, disions-nous, est d'assurer,
dans la mesure du possible, qu'à partir de maintenant, au Québec,
la langue française et la langue anglaise aient toutes deux la place qui
leur revient dans le secteur économique tout comme dans les autres
secteurs d'activité, et surtout qu'aucun Québécois ne soit
handicapé par son appartenance à un groupe linguistique
plutôt qu'à l'autre et que tous aient des chances égales de
réussir."
Nous continuons de croire cette approche valable. Elle sous-tendra
d'ailleurs bon nombre des considérations que nous ferons à
l'endroit du projet de loi no 1. Constatant toutefois le caractère
démesuré de certains moyens proposés pour redresser une
situation que nous avons nous-mêmes dénoncée, nous avons
utilisé trois critères spécifiques dans notre analyse et
évaluation du projet de loi.
Premièrement, en quoi telle mesure du projet de loi concourt-elle
de façon nécessaire ou oppor- tune à la protection et
à la promotion de la langue française au Québec?
Deuxièmement, en quoi telle mesure concourt-elle de façon
nécessaire ou opportune à la promotion économique des
Québécois francophones?
Troisièmement, dans quelle mesure, dans le cadre d'une loi
statuant sur certains droits collectifs de la majorité, les dispositions
retenues tiennent-elles compte des libertés individuelles et du "droit
de cité" des minorités?
La Chambre de commerce du district de Montréal accepte qu'une loi
que l'on veut efficace puisse comporter des obligations et des contraintes,
pourvu que soient respectés les critères fondamentaux de justice
et d'équité déjà évoqués et que ces
mesures paraissent nécessaires et les mieux ordonnées à la
réalisation des objectifs poursuivis une fois ces derniers
convenablement définis et reconnus légitimes et opportuns.
Redresser des torts est une entreprise délicate et semée
d'embûches. C'est encore en respectant les exigeantes perspectives que
nous avons évoquées que l'Assemblée nationale pourra
adopter un projet de loi modifié plus apte à rallier le plus
grand nombre de citoyens sans distinction quant à leurs diverses
appartenances et allégeances.
Dans les limites de notre compétence, et nous en tenant en
règle générale à des dispositions que nous
aimerions voir modifier, nous nous référerons par la suite aux
articles du projet de loi, signalant à l'occasion certains qui nous
paraissent particulièrement bien inspirés.
Préambule du projet de loi.
Dans sa formulation actuelle, le préambule fait une distinction
implicite entre citoyens: ceux qui sont du peuple québécois et
ceux qui n'en seraient pas, selon que la langue française est ou non
leur langue.
La chambre estime cette approche contre-indiquée et propose que
l'on se réfère à la langue de la majorité au
Québec, qui a vocation de langue commune à tous les
Québécois, plutôt qu'à l'expression langue du peuple
québécois. Nous avons pris acte avec satisfaction de l'intention
du ministre de reconsidérer la formulation du préambule.
Langue de la législation et de la justice. La chambre y voit un
doute sérieux au plan constitutionnel ainsi qu'une certaine question
d'équité. Elle propose de reformuler le contenu du chapitre et de
n'y conserver que deux dispositions, l'une prévoyant que le texte
français des lois du Québec prévaut sur le texte anglais
ou la version anglaise, l'autre rééditant l'actuel article 12 du
projet.
Langue de travail. Les articles 36 et 37 seront parmi les plus
difficiles d'application. Les concepts d'emploi et de poste qui s'y retrouvent,
empruntés au régime de la fonction publique et de la grande
entreprise, collent mal à la réalité de la PME
manufacturière et commerciale et des services. Sans porter atteinte
à un objectif toujours recherché par la chambre de chances
vraiment égales pour tous, les propositions de la chambre offrent des
solutions de rechange plus fonctionnelles.
Là encore, nous avons éprouvé quelque satisfaction
à entendre le ministre responsable du projet de loi évoquer la
possibilité d'apporter certains assouplissements, au moins au niveau de
la réglementation. Nous aimerions que soit considérée
sérieusement notre proposition de modifier le texte même de la
loi. Ainsi, il suffirait d'ajouter au premier alinéa de l'article 36 le
dispositif d'exception qui suit pour maintenir la nécessaire protection
contre l'arbitraire de l'employeur pour motif d'ordre linguistique, tout en
permettant de tenir compte de l'évolution d'une entreprise: "En cas de
congédiement ou de rétrogradation suite à des changements
technologiques, à des changements de marché, ou à une
réduction des effectifs, il incombe à l'employeur de prouver que
la connaissance d'une autre langue devient nécessaire pour
l'accomplissement de la fonction redéfinie et de l'emploi disponible,
auquel cas, pour les fins du présent article, l'interdiction est
levée".
A l'article 37, il s'agirait de reconnaître que, pour un nombre
appréciable d'entreprises, notamment à Montréal et dans le
secteur des services, ce dont l'employeur a absolument besoin, c'est d'une
capacité de transiger dans une autre langue, habituellement l'anglais,
chez une proportion plus ou moins importante de ses employés,
d'où la proposition de la chambre d'ajouter au premier alinéa".
"Dans l'entreprise où la tâche nécessitant la connaissance
d'une langue autre que le français n'est pas impartie en permanence et
en exclusivité à une personne mais doit être assumée
selon les disponibilités par l'un ou l'autre membre du personnel, il est
loisible à l'employeur d'exiger d'un certain nombre de ses
employés la connaissance d'une autre langue pourvu que le nombre de ces
employés ne dépasse les besoins de fonctionnement de
l'entreprise".
Langue du commerce et des affaires. La chambre propose de s'en tenir
à des mesures qui ne s'écartent pas sensiblement de celles
retenues dans la Loi sur la langue officielle de 1974 et dont on retrouve
d'ailleurs l'orientation essentielle au troisième alinéa de
l'article 41 de l'actuel projet de loi. L'Office de la langue française
peut réglementer l'utilisation d'autres langues, sous réserve que
le français domine ou, à tout le moins, figure d'une façon
aussi évidente que toute autre langue. Plus ouvertes à l'endroit
de l'usage d'autres langues que ne le sont les propositions de l'actuel projet
de loi, les modifications proposées par la chambre n'équivalent
pas pour autant à proposer un modèle de bilinguisme
institutionnel. La langue française y jouit toujours, dans l'ensemble,
d'une préposition de prédominance. C'est ce que l'on peut
constater à la lecture de notre proposition visant l'article 46 en page
16 de notre mémoire. Nous avons noté, là encore, que l'on
a évoqué en commission parlementaire, le 29 juin, de nouveaux cas
particuliers concernant l'affichage exclusivement en langue
française.
Langue de l'enseignement. La chambre demande avec insistance que la loi
reflète fidèlement l'avis émis en février 1977 par
le Conseil supérieur de l'éducation touchant l'accès
à l'enseignement en langue anglaise essentiellement à partir d'un
critère de langue maternelle ainsi que l'enseignement de l'anglais et du
français au titre de langues secondes.
Dans cette perspective appréciablement plus ouverte que celle qui
se dégage du projet de loi, il va de soi que tous les ressortissants
canadiens peuvent avoir accès à l'enseignement de la langue
anglaise, aux mêmes conditions que leurs concitoyens de la province de
Québec. La plus récente explication du Conseil supérieur,
en date du 13 juin, nous paraît conforme à l'essentiel de son avis
de février et nous y souscrivons.
L'Office de la langue française.
La chambre a été en mesure d'apprécier le travail
accompli en peu de temps par la Régie de la langue française.
Reconnaissant la compétence et l'attitude ouverte de la haute direction
de l'actuelle régie, la chambre constate que la confiance et la
coopération des milieux d'affaires, gage du succès de la
régie ou de l'office dans l'exercice de son mandat, est aussi affaire de
structures et d'organisation. La chambre récuse le caractère
bureaucratique et non représentatif de l'Office de la langue
française selon le modèle prévu dans le projet de loi;
elle propose donc, pour l'essentiel, de s'en tenir au modèle de
l'actuelle régie. Nous avons compris, avec satisfaction, que le ministre
responsable entend apporter des modifications dans le sens de nos
préoccupations déjà partagées par plusieurs.
A l'article 75, la chambre propose de conférer à l'office
le pouvoir spécifique, non prévu dans le projet de loi, de
prendre, de concert avec l'administration, ou de faire prendre par les services
appropriés de cette dernière, toutes mesures nécessaires
pour en arriver à une concertation efficace dans la mise au point de
certains produits et instruments de travail en langue française.
A l'article 106, la chambre propose de modifier le paragraphe b), de
telle sorte que tout en maintenant une contrainte, on élimine toute
disposition qui entraînerait nécessairement la fermeture d'une
entreprise, ce qui serait le cas si celle-ci se voyait refuser, entre autres
choses, certains services d'utilité publique, électricité
et gaz notamment.
A l'article 112, la Chambre insiste pour que soit apportée la
précision fournie par le ministre au développement culturel hors
de l'Assemblée nationale, savoir qu'au paragraphe b), lorsqu'on
réfère à l'augmentation du nombre de
Québécois, on veut dire et l'on dira plutôt effectivement,
dans la loi, "du nombre de résidants au Québec ayant une
connaissance d'usage de la langue officielle".
A l'article 113, la chambre indique qu'en plus des sièges
sociaux, il faut considérer comme cas particuliers certaines
unités de production à haute technologie, les centres de
recherche industrielle et certains bureaux divisionnaires dont
l'activité s'étend hors du Québec.
A l'article 114, la chambre dit considérer inutile et nettement
contre-indiqué le comité de francisation lorsqu'il s'agit d'une
entreprise qui est, à l'évidence, francophone; il y a là
une question de
coûts appréciables à l'échelle du
Québec. Enfin, en ce qui regarde le comité de francisation, la
chambre estime qu'il n'y a pas lieu de privilégier un seul modèle
de participation. Celui qu'imposerait la loi présente
l'inconvénient de confondre responsabilité de gestion, qui
relève de l'employeur, et relations de travail, champ tout
indiqué d'action syndicale; l'implantation d'un programme de
francisation devrait être intégrée aux objectifs de gestion
de l'entreprise et il appartiendrait à l'employeur, à qui la loi
pourrait en imposer l'obligation, d'établir à cet effet un
comité représentant les divers niveaux de l'entreprise.
Dispositions transitoires et finales (article 172).
La chambre estime inconcevable que l'on accorde préséance
à la Charte de la langue française au Québec sur la Charte
des droits et libertés de la personne. Si besoin est et nous n'en
sommes pas à ce point convaincus que l'on modifie plutôt la
Charte des droits et libertés de la personne, car les dispositions de ce
document fondamental ne sauraient être contredites ou amenuisées
par aucune disposition externe, sous peine de laisser entendre que les
personnes ne sont plus, au Québec, inviolables dans leurs droits les
plus fondamentaux, dont la Charte des droits et libertés de la personne
doit constituer la codification exemplaire.
Nous tenons, depuis le 27 juin, une assurance importante du ministre
à cet égard, considérant qu'il a dit en être venu
à la conclusion qu'il y a très peu de conflits à craindre
entre les deux chartes, perspective qui s'avérera d'autant plus
plausible que les modifications anticipées seront effectivement
apportées à l'actuel projet de loi.
Là encore, il faudrait voir les nouvelles dispositions. Mais nous
avons confiance que la loi, telle que finalement votée par
l'Assemblée nationale, aura réussi à faire
l'unanimité sur ce point fondamental.
J'aimerais faire remarquer à la commission parlementaire que ce
mémoire n'a pas été rendu public avant ce matin.
Le Président (M. Dussault): Je vous remercie de votre
exposé et je cède la parole au ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: Merci. Je voudrais également remercier la
Chambre de commerce de Montréal pour le mémoire documenté
qu'elle nous apporte ce matin et pour l'approche positive et constructive dont
il témoigne. Je les remercie aussi d'avoir attendu au moment de la
présentation à la commission parlementaire pour rendre leur
mémoire public, ce qui témoigne bien qu'ils ne sont pas en
quête de publicité mais qu'ils cherchent sincèrement
à aider le législateur à faire la meilleure loi possible
et non pas à rompre des lances avec le gouvernement.
Il est bien évident, à les entendre, que non seulement ils
ont étudié avec attention le livre blanc et chacun des articles
du projet de loi, mais qu'ils ont également suivi scrupuleusement les
séances de la commission et qu'ils tiennent compte de toutes les
modifications qui y ont été annoncées implicitement. De
cela aussi je les remercie et je pense que c'est à leur honneur et que
cela témoigne du sens démocratique dont tout leur mémoire
est par ailleurs inspiré.
J'ai été très intéressé par le
passage sur le préambule du projet de loi. La position que défend
la Chambre de commerce de Montréal n'est en effet pas nouvelle,
puisqu'on la retrouve dans le mémoire qu'elle avait
présenté lors de la discussion de la loi 22. Je suis bien
d'accord avec elle pour dire que le but fondamental d'une telle loi, c'est
d'assurer, bien sûr, la sécurité linguistique et culturelle
du peuple québécois et particulièrement de sa
majorité francophone, qui en avait bien besoin. Mais j'ajouterais
peut-être que le but de cette loi est de marquer le caractère
distinctif de la langue commune du peuple québécois et de marquer
également le caractère distinctif de cette communauté
québécoise qui, depuis trois siècles, a exploré, a
bâti ce territoire.
Le but de cette loi, en somme, est de marquer que cette
société est d'abord française et qu'elle entend
fonctionner en ce sens avec tout le respect que cela comporte pour les
individus, les groupes, les minorités qui se sont joints à la
majorité francophone au fil des siècles.
Nous sommes aussi d'accord avec la chambre de commerce pour dire que la
cause fondamentale des problèmes que nous avons vécus,
particulièrement au cours du dernier siècle, se retrouve dans le
contrôle, par la minorité anglophone, des plus importantes
entreprises économiques et qu'il y a lieu de tenir compte de cette cause
fondamentale et de tenter de la corriger par tous les moyens possibles, non
seulement d'ailleurs par ce projet de loi que nous présentons
actuellement, mais par toute une série de mesures, dispositifs,
directives, politiques que les gouvernements du Québec seront
appelés à mettre en oeuvre au cours des prochaines années.
Car le but que nous visons est exactement celui que vous mentionnez dans votre
préambule, c'est de faire en sorte qu'aucun Québécois ne
soit handicapé par son appartenance à un groupe linguistique
plutôt qu'à l'autre et que tous ici au Québec, anglophones
comme francophones, aient des chances égales de réussir. Mais,
pour que cet idéal soit atteint, c'est d'abord aux francophones qu'il
nous fallait penser.
Même si nous prévoyons des mesures à cet effet, je
pense qu'il est évident, et il deviendra de plus en plus évident
que nous entendons le faire dans un esprit de justice et d'équité
à l'endroit de tous les citoyens qui habitent aujourd'hui le
Québec.
Venant après tant d'autres mémoires qui nous ont fait
plusieurs recommandations et qui ont suscité les commentaires que vous
savez de notre part, il est évident que nous n'avons pas à
répéter aujourd'hui, à l'occasion des recommandations que
vous nous faites, les commentaires ou modifications dont nous nous sommes
déjà ouverts à la commission. Par exemple, en ce qui
concerne les structures de l'Office de la langue française, en ce qui
concerne les pouvoirs qui lui sont impartis, les structures qui seront celles
de l'office pour s'acquitter de ses obligations, je pense que vous
êtes
déjà au courant de ce que nous avons l'intention de
présenter comme amendements. Il n'importe donc pas d'y revenir. C'est la
raison pour laquelle je voudrais plutôt m'arrêter à celle de
vos recommandations qui ont été moins touchées par les
autres groupes qui nous ont présenté les leurs.
Je trouve, par exemple, intéressantes vos suggestions, en ce qui
concerne la modification éventuelle des articles 26 et 45, dans votre
mémoire. Vous avez vu, en effet, que peut-être le
législateur n'arriverait pas au but qu'il se propose en formulant ces
articles sous la forme passive, et comme vous le dites si bien dans votre
mémoire, en faisant du francophone qui voudrait faire respecter ses
droits une sorte de quémandeur. Je pense que votre suggestion est
très opportune à cet égard et qu'il convient d'y donner
suite.
Vous voudriez également que l'office, lorsqu'il croit opportun de
demander un certificat de francisation à une entreprise de moins de
cinquante employés, ne soit pas laissé à sa seule
initiative et risque de succomber à l'arbitraire. Je pense que là
aussi, c'est une suggestion opportune, valable. Nous ferons l'impossible pour
aller dans le sens de votre recommandation. En effet, il peut s'avérer
opportun pour des cas exceptionnels, selon la nature de telle ou telle
entreprise, que l'office soumette une entreprise comptant moins de cinquante
employés au processus de francisation. Il importerait quand même
d'éviter, dans ces cas exceptionnels, tout risque d'arbitraire. Je pense
qu'il importe de prévoir a cet effet les dispositifs
appropriés.
J'ai été intéressé aussi par la
recommandation que vous nous faites à l'article 58. Vous voudriez que la
loi spécifie davantage ce que le législateur entend par
"séjour limité". Même après avoir lu votre
mémoire in extenso, j'avoue que je me pose encore quelques questions
à cet égard. Je ne suis pas réfractaire à
l'idée d'inscrire dans le projet de loi un nombre exact d'années,
mais je me demande encore pourquoi vous avez opté pour cinq ans,
plutôt que quatre ou plutôt que six, et quelles sont les raisons
qui vous poussent à faire une addition, également, en ce qui
concerne les annonces prédéterminées de séjour
faites par une entreprise ou par l'autre. Sur ce point, j'aimerais vous
demander des éclaircissements ou des additions à votre
mémoire.
M. Charbonneau (Edgar): Est-ce que je réponds maintenant?
D'abord, nous avons voulu déterminer une période pour qu'on ne
pense pas que ce soit une façon d'ajouter du temps qui, finalement, ne
soit indéterminé et semble vouloir s'éterniser. On a donc
voulu, en indiquant une certaine période, considérer une
période qui nous paraissait être valable et excellente. Pourquoi
cinq ans et trois ans? On s'est dit que dans certaines entreprises,
particulièrement dans des entreprises de recherche technologique, il
arrive que des gens viennent pour travailler à un projet qui devrait
avoir une durée de cinq années et qu'après coup, on
s'aperçoive qu'il faudrait y consacrer quelques années
additionnelles.
C'est cette idée d'ajouter, s'il y a un départ
prédéterminé, donc suite à un projet de cinq ans,
qu'on décide qu'il y a une autre année ou deux autres
années qui s'ajoutent, suite à un départ
prédéterminé; il appartient, à ce moment-là,
de donner la possibilité aux gens de rester.
M. Laurin: Est-ce à dire que vous avez l'impression que
cinq ans devraient être la limite maximale d'un séjour
limité pour la plupart des cas? Est-ce que ce chiffre de cinq ans vous
apparaît la limite du raisonnable, par exemple?
M. Charbonneau (Edgar): M. Beauregard va commenter cet
aspect.
M. Beauregard (Claude): Effectivement, on peut penser que bon
nombre de contrats, si on peut ainsi parler, sont offerts à des
spécialistes, entre autres, de l'étranger ou des choses comme
ça. J'ai moi-même bourlingué un peu dans ce sens-là,
et, souvent, on a des affectations de trois, quatre, cinq ans. Cela
dépasse assez rarement cinq ans. Cependant, il y a des projets et je
serais curieux de savoir s'il n'en existe pas comme ça même dans
le projet de la baie James et des choses comme ça; il y a probablement
des gens qu'on a fait venir et on sait très bien que la période
de leur engagement, leur affectation, ce pourquoi ils sont requis peut
très bien prendre six, sept ans, mais on a l'impression que ça ne
dépasserait pas habituellement huit ans. C'est aussi une façon de
considérer le prédéterminé. Cela peut vouloir dire
que, d'entrée de jeu, quelqu'un vient au Québec et vous savez
déjà, au moment de son arrivée, qu'il va y passer sept
ans. Vous le savez déjà, et ceci nous semblerait
évidemment devoir être accepté également, puisque,
dans tous les cas, il s'agit de gens qui viennent pour une période
prédéterminée, donc en fonction d'un boulot, d'une
tâche à accomplir, dans la majorité des cas.
M. Charbonneau (Edgar): Est-ce que ça répond
à votre...
M. Laurin: Oui. Je voudrais vous dire aussi, en terminant, que
nous apporterons toute l'attention désirable aux suggestions que vous
nous faites en ce qui concerne les modifications éventuelles à
l'article 106, à l'article 112, à celles que vous nous faites
concernant le droit d'appel, droit d'appel portant surtout, si je comprends
bien, sur le refus, la suspension ou l'annulation de certificats de
francisation, et aussi en ce qui concerne l'article 172, dont nous essaierons
de limiter au maximum la portée, pour qu'il devienne bien évident
qu'il n'y a pas contradiction au niveau des principes entre le respect des
droits collectifs et le respect des droits individuels.
Je veux remercier encore pour cette contribution éminemment
positive que vous faites aux efforts du législateur.
Le Président (M. Dussault): M. le ministre, merci.
Mme le député de L'Acadie, vous avez la parole.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
les représentants de la Chambre de commerce de la région de
Montréal pour leur mémoire très ouvert, très
pondéré et qui, je pense, explicite bien les difficultés
du projet de loi 1 et recoupe, à maints égards, des
représentations qui ont été faites ici mais qui sont loin
d'être superflues.
Je trouve extrêmement intéressants les trois
critères que vous énumérez à la page 3 et sur
lesquels vous avez basé votre analyse-évaluation du projet de
loi. Je pense que ceci révèle justement un esprit
démocratique et vraiment un désir que le Québec ne soit
pas seulement le Québec des francophones, mais le Québec de tous
ceux qui y vivent, qui résident ici et qui partagent la vie des citoyens
de cette province.
Je voudrais attirer l'attention, en particulier, à la page 2, sur
le paragraphe où vous dites: "Redresser des torts est une entreprise
délicate et semée d'embûches"... Je pense que vous avez
vraiment mis là l'accent sur le dilemme que présente tout ce
projet de loi, à savoir dans quelle mesure s'établit
l'équilibre pour que, tout en respectant ce que les uns appellent la
majorité, par contre, on ne le fasse pas dans un esprit revanchard, dans
un esprit de reconquête, comme certains mémoires sont venus le
dire ici, et je pense qu'il est important de le souligner de nouveau.
Par exemple, je me suis étonnée à plusieurs
reprises que, devant certains mémoires, le ministre d'Etat au
développement culturel non seulement ne s'est pas dissocié de
certaines formulations qui étaient nettement revanchardes, pour ne pas
utiliser d'autres expressions, mais a dit comment il se sentait
profondément touché par les exposés qui lui étaient
faits et les félicitait d'apporter des mémoires aussi complets,
aussi étoffés et aussi lumineux dans tous les sujets qu'il
aborde. Pour être plus précise, j'aimerais référer
mes collègues de la commission, par exemple, à certaines parties
du mémoire du Mouvement Québec français touchant la
toponymie où et je ne cite pas au texte on devra remplacer
ou changer les noms qui expriment ou symbolisent la conquête violente de
ceux qui nous ont colonisés.
Ceci dit, je voudrais vous poser deux questions. La première est
la suivante: à plusieurs reprises, vous faites allusion,
particulièrement en ce qui touche la langue du commerce, la langue du
travail, à la loi 22 et vous souhaitez même qu'à certains
égards, on retourne à certaines dispositions de la loi 22
touchant ces domaines et je me demande si vous pourriez expliquer un peu.
Avez-vous pu, dans une certaine mesure, évaluer, dans le monde du
commerce, dans le monde du travail, certains effets de la loi 22, et quels sont
les éléments dans ces deux domaines particuliers que vous
souhaiteriez voir retenir d'une façon plus précise?
M. Beauregard (Claude): Peut-être que d'au- tres membres de
la délégation voudront compléter mes commentaires
là-dessus...
Etant près de ce milieu et ayant passé du volet
d'application gouvernementale à titre de fonctionnaire à
fonctionnaire d'une association maintenant, j'ai pu constater que, dans le
domaine des entreprises, après un départ nécessairement
difficile et des préventions certaines dans la communauté des
affaires à l'endroit de tout ce qui vient nécessairement changer,
modifier et bousculer les habitudes, après une période de
réticence, dans le milieu des affaires, en relation avec les
fonctionnaires de la régie, notamment, et les hommes politiques de
l'époque, il y a eu une prise de conscience que les choses devaient
être faites. J'ai participé moi-même à une foule de
rencontres jusqu'au niveau technique où on était venu à
arrêter des dispositions satisfaisantes, progressivement,
l'expérience se faisant. Je pense que ce que les milieux d'affaires
déploraient, comme d'autres, c'est qu'on sait la difficulté de
mettre en branle une telle machine, et une fois qu'elle a acquis un certain
élan, de l'interrompre, de l'arrêter. Cela rend les gens
nécessairement perplexes ou un peu frustrés. On peut dire,
à l'égard des mesures visant le milieu de travail, de la
même façon que les mesures visant le monde de l'éducation,
qu'il est peut-être dommage que la conjoncture ou d'autres
éléments nous amènent, au fond, à quitter
précipitamment une formule de redressement d'une situation sans en avoir
vraiment vérifié les conséquences.
Autrement dit, on n'aura jamais été en mesure,
historiquement parlant, de savoir si, oui ou non, le train de mesures
prévues par la loi 22 allait être valables ou non, alors que dans
un contexte autre que politique au sens large du terme dans un
autre contexte expérimental, on aurait, normalement, laissé
donner cours à un train de mesures pour en évaluer le rendement
avant de convenir d'une correction de trajectoire ou d'une approche
radicalement différente. A ce titre, on peut dire que c'est un peu comme
si les gens s'étaient dit, et je l'ai entendu à de nombreuses
reprises: Voici que dans mon entreprise A, B, C, D, E, etc, on était
lancé, on allait fonctionner et on ne sait pas quel aurait
été le rendement. Je dois dire que dans bien des cas, il y avait
une attente assez optimiste, c'est normal, à l'effet que les mesures
entreprises allaient, effectivement, atteindre les objectifs
souhaités.
Alors, on n'a pas de démonstration probante. D'ailleurs, il est
manifeste que, dans le domaine des affaires comme dans le domaine de
l'éducation, la période d'application des nouvelles mesures a
été beaucoup trop courte pour qu'on soit en mesure de
l'évaluer.
Donc, plutôt que de procéder par correction de trajectoire,
on est obligé de se lancer dans une autre approche, mais nous avons vu
dans le texte, quand même, du nouveau projet de loi des
possibilités de réconciliation, en quelque sorte. Au fond si tant
est que les objectifs sont sensiblement les mêmes, à un moment
donné je pense que d'un commun accord, autant à
l'Assemblée nationale
que dans les milieux directement intéressés, on sera en
mesure de se rendre compte que, si on veut atteindre tel objectif, c'est
vraiment tel type de moyens qui y sont davantage ordonnés et c'est
ceux-là qu'il faut choisir.
Mme Lavoie-Roux: Ma deuxième question touche la langue
d'enseignement. Je vois que vous ne retenez pas le critère mis de
l'avant par le gouvernement, à savoir la fréquentation scolaire
des parents à l'élémentaire. Voici deux questions.
Pourriez-vous me dire ce qui justifie de votre part ce rejet du critère
retenu par le gouvernement? Deuxièmement, est-ce que, quand vous faites
allusion au critère de la langue maternelle, vous l'appliquez uniquement
aux enfants qui viendraient des autres provinces ou à tout autre enfant
de culture et de langue maternelle anglaise, quelle que soit sa provenance?
M. Beauregard: Là-dessus, je pense qu'il vaut la peine
d'établir, un peu comme on l'a fait dans notre document, je crois, une
justification plus radicale de l'attitude de la Chambre de commerce de
Montréal.
La Chambre de commerce de Montréal a déjà tenu, au
moment de la commission Gendron, l'opinion qu'il fallait préserver le
libre choix. Quand nous avons revu la situation, bien que nous ayons encore ce
même attachement au libre choix, nous avons reconnu qu'il peut exister,
pour des raisons de sécurité culturelle, objectives ou
subjectives, des motifs justifiant une intervention de l'Etat pour redresser
une certaine situation où d'aucuns décèlent un certain
danger au plan culturel pour une collectivité. Reconnaissant ceci, on a
quand même admis que la réalité socio-politique historique
québécoise est celle où nous avons dans ce pays, et je
l'entends d'une côte à l'autre d'ailleurs, des écoles
anglaises et françaises. Il semble inscrit dans la logique, dans la
normale des choses que les écoles anglaises sont destinées aux
personnes de culture anglaise et les écoles françaises aux
personnes de culture française, quelle que soit leur origine lointaine,
quel que soit leur moment d'établissement au pays; des écoles
françaises pour les Français, des écoles anglaises pour
les Anglais. Il est tout à fait légitime de penser qu'on va
à l'école anglaise ou française selon qu'on est Anglais ou
Français. En ce qui concerne ce qu'on appelle les allophones, il n'y
aurait rien d'aberrant du tout à concevoir qu'un allophone qui arrive au
pays puisse choisir indifféremment l'une ou l'autre de ces écoles
qui ont droit de cité en ce pays. On peut cependant alléguer que,
pour les raisons de sécurité culturelle dont on parle, et nous
l'avons accepté dans la conjoncture présente, le Québec se
voit dans l'obligation de s'assurer que les allophones qui viennent
s'établir au Québec s'intègrent au groupe majoritaire
francophone, et c'est pour cela que nous acceptons l'idée que les
allophones puissent être dirigés vers l'école
française.
Nous tenons cependant à ce que tous les gens qui sont
déjà anglophones, d'où qu'ils viennent, puissent avoir
accès à l'école anglaise et nous ne croyons pas que ce
faisant ce soit de nature à perturber les éléments
démographiques et que cela porte vraiment atteinte à la
sécurité culturelle. Pour rejoindre ce que je disais plus
tôt au sujet de la langue de travail, on peut au moins penser que
l'approche que propose la Chambre pourrait, si elle était
adoptée, faire l'objet d'un suivi sérieux, sur une période
d'années. Si on s'apercevait qu'effectivement la situation est
insuffisamment redressée et qu'il y a encore une menace dont on pourrait
faire la démonstration, à ce moment-là il serait toujours
temps de réviser et on serait capable d'apporter à la population
une démonstration adéquate qu'il faut le faire. Mais, dans le
moment, il nous semble qu'il faut donner libre accès à tous les
anglophones "authentiques".
Vous posez la question du critère de langue maternelle?
Mme Lavoie-Roux: C'est-à-dire la fréquentation
scolaire du parent comme étant le critère qui détermine
l'accès à l'école anglaise.
M. Beauregard: Remarquez que ce n'est pas nécessairement
spécifiquement à cela qu'on s'est attardé. On avait
l'impression que le projet actuel, au fond, comme tous les autres projets
antérieurs, est toujours aux prises avec le problème à
déterminer quel est l'indice le plus plausible de la légitime
appartenance à une communauté anglophone.
Celui choisi par le gouvernement, dans son projet de loi, ne
m'apparaît pas impertinent ou mauvais en soi, mais il nous paraît,
à la réflexion, que si on logeait au niveau des instances
responsables de l'admission des élèves, la responsabilité
de déterminer si on appartient à la culture anglophone
déjà, si on est de langue maternelle anglaise, si c'est encore
avec ce critère qu'on peut le mieux évaluer, je pense que de sens
commun, ceux qui sont mêlés au processus d'admission savent,
surtout au niveau d'un jeune enfant qui arrive à l'école, ce
n'est pas tellement compliqué, s'apercevoir si on a affaire à un
enfant qui, à toutes fins utiles, est anglophone ou ne l'est pas.
Bien que notre mémoire se réfère à la langue
maternelle, sans préciser de quelle façon on vérifiera
qu'effectivement, il s'agit bien de la langue maternelle, je suis porté
à penser nous pensons à la Chambre comme le Conseil
supérieur de l'éducation, qu'il faudrait peut-être recourir
à un, deux ou trois moyens qui, par convergence ou recoupement,
permettraient à l'autorité responsable de l'admission
d'être satisfaite qu'il s'agit bien là d'une personne
anglophone.
Mme Lavoie-Roux: Si je vous comprends bien, M. Beauregard, c'est
que ce critère utilisé seul peut errer, c'est-à-dire que
la réponse ne peut permettre de dire qu'un enfant appartient à la
communauté anglophone. Ce n'est pas le seul critère qui doive
être utilisé, il y en a d'autres, si on veut établir la
langue maternelle, qui est utilisée?
M. Beauregard: Je crois que oui.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie de vos réponses.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Je voudrais partager les mêmes sentiments
qui viennent d'être exprimés par le ministre et par l'Opposition
officielle pour vous remercier de votre mémoire qui est très
sérieux, très positif et surtout pour les nombreuses suggestions
que vous apportez. Comme vous l'avez mentionné lors de la loi 22, si on
a écouté vos suggestions, vos revendications, je crois que, cette
fois-ci encore, le ton de votre mémoire peut inciter le gouvernement
à scruter davantage les suggestions que vous faites.
A ce point de vue, je crois que nous avons lieu de vous féliciter
pour avoir travaillé dans un objectif aussi positif et, surtout, pour un
groupe aussi sérieux que le vôtre, d'apporter cette contribution
que j'estime très valable.
Maintenant, suite à votre analyse et comme vous avez
déjà contribué, avec vos remarques sur la loi 22, si vous
considérez les deux projets de loi, quels changements importants
croyez-vous que le projet de loi no 1 va apporter dans son ensemble à
notre collectivité québécoise? De quelle façon
voyez-vous ça. Est-ce qu'on avance ou si on demeure un peu au statu quo?
Qu'est-ce que cela va nous donner en définitive?
M. Beauregard: C'est une question plus difficile. En tout cas, je
vais commencer, pour compléter... C'est difficile à dire, je
pense qu'il semble y avoir dans le projet de loi no 1, on l'a vu par le fait
qu'il a été précédé d'un livre blanc, etc.,
une intention, qui comporte sans doute des aspects positifs, de prendre une
approche peut-être plus formelle, plus déclaratoire ou plus
affirmative. Il se peut que cela ait des effets d'entraînement au sens
où plusieurs en ont parlé, d'une fierté plus
marquée des Québécois, etc. C'est un choix, alors que la
loi 22 nous paraissait peut-être une loi où on avait voulu
s'inscrire davantage dans un processus plus évolutif. Quant à moi
je ne parle pas au nom de la chambre tout compte fait, les
objectifs me paraissant, au bout du compte, fondamentalement les mêmes.
Que, d'un côté, un projet de loi ait voulu passer par une approche
moins "spectaculaire" ou qu'on veuille procéder d'une façon plus
affirmative, cela me semble deux approches.
Quant à nous, c'est la raison de nos commentaires, de l'approche
retenue de notre mémoire. On se dit qu'au bout du compte, on peut bien
avoir deux styles différents, ce qui nous intéresse, ce sont les
trois critères d'analyse que nous avons posés. A cet
égard, dans la mesure où le projet de loi no 1 en viendrait
à s'aligner sur ces objectifs avec des moyens qui nous paraîtront
à nous, maintenant, mesurés, ceci nous satisfait.
M. Charbonneau (Edgar): En somme, cela veut dire que le projet de
loi no 1 est peut-être plus articulé que la loi 22 ne
l'était et, dans la mesure où il respecte les critères qui
sont la base même de notre mémoire, nous en sommes satisfaits.
M. Le Moignan: Je vois qu'en plusieurs endroits, vous placez
l'insistance, soit du côté de la langue vous avez
étudié le sujet en détail soit de l'affichage du
travail. Je pourrais peut-être vous poser une petite question. Votre
Chambre de commerce, est-ce qu'elle est bilingue? Est-ce qu'elle comprend des
membres anglophones?
M. Charbonneau (Edgar): Elle comprend des membres anglophones,
mais la Chambre de commerce est unilingue française. La Chambre de
commerce de Montréal est unilingue française. Nous n'employons
que le français.
M. Le Moignan: Alors, votre langue de travail, au sein de la
chambre de commerce, est la langue française?
M. Charbonneau (Edgar): C'est la langue française.
M. Le Moignan: Je vous remercie. Mon voisin aura des questions
plus tard.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau (Verchères): M. le Président, je ne
parlerai pas trop longtemps, voulant laisser la parole à un autre de mes
collègues qui a préparé son intervention. La seule chose
que je voudrais indiquer, c'est ma très grande satisfaction devant le
ton et l'approche de la Chambre de commerce du district de Montréal.
Personnellement, cela va me faire changer d'idée quant à la
nature et à la cote de crédibilité que j'avais
décernées à la Chambre de commerce, à la suite
d'une mauvaise expérience, il y a quelques semaines.
M. Charbonneau (Edgar): Pour laquelle nous n'étions pas
responsables.
M. Charbonneau (Verchères): D'accord. Mais
j'apprécie énormément l'attitude que vous avez ce matin.
Je pense que c'est dans cette optique que le gouvernement actuel, quelles que
soient il ne faut pas se le cacher les divergences de vues qu'on
pourrait avoir sur des façons de concevoir l'avenir du Québec,
pour le moment, et c'est ce qui est important, pourra entretenir un dialogue
honnête et sincère avec la communauté des affaires, en
particulier la communauté des affaires de Montréal.
Je suis particulièrement fier de voir que des hommes d'affaires
de chez nous, Québécois francophones, sont capables de cette
dignité. En terminant, je vous rappelle que, pour moi, vous remontez
dans mon estime. J'espère qu'éventuellement, j'aurai l'occasion
de reprendre un dialogue qui, malheureusement, n'a pas eu lieu la
dernière fois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, ayant relevé l'estime
du député de Verchères, je pense qu'on a compris quelque
chose ce matin. Je voudrais remercier les membres de la Chambre de commerce de
Montréal pour ce mémoire, cette présentation
extrêmement positive et mesurée.
La participation de la Chambre de commerce de Montréal, en
particulier dans la mise en marche, dans le processus de consultation qui a
suivi la mise en application de la loi sur la langue officielle, en ce qui
concerne la francisation des entreprises, demeurera toujours un des
éléments majeurs; je comprends également dans mon esprit
la Chambre de commerce du Québec, qui est l'organisme plus large, mais
elle demeurera toujours un des éléments fondamentaux du
succès que toute entreprise de francisation pourra escompter, que ce
soit en vertu de la loi actuelle ou du projet de loi dont nous faisons
l'étude actuellement. Je voulais le souligner, parce que, sans la
coopération d'organismes comme le vôtre et d'autres associations,
il est inutile de penser qu'on peut avoir du succès, qu'on puisse
atteindre les objectifs recherchés. Vous le dites d'ailleurs dans votre
mémoire, vous craignez, en parlant de la structure de la régie,
que l'acquis à cet égard, depuis deux ans, la coopération,
la confiance qui ont été créés entre la
Régie de la langue française, d'une part, et le milieu que vous
représentez, d'autre part, soient mis en danger par la création
d'un organisme plus tatillon et dont la structure s'apparenterait plus à
la fonction publique ou à un organisme de fonctionnaires, à
comparer à l'organisme à direction collégiale que nous
avons actuellement.
J'espère que la modération et l'articulation qui
sous-tendent votre mémoire pourront convaincre le ministre, à cet
égard, et à l'égard plus particulièrement de la
structure de la régie, de la direction collégiale de la
régie et c'est extrêmement important. Tout projet de loi comporte
des défauts. Généralement, notre problème, c'est
qu'on s'en aperçoit une fois qu'il est adopté. La loi 22 en a, et
il aurait fallu, de toute façon, si le résultat des
dernières élections avait été différent,
apporter probablement des modifications à la loi 22.
Je ne parle pas de la langue d'enseignement, même en ce qui
concerne la francisation des entreprises, la langue des affaires, etc., mais il
importe de conserver avec beaucoup de soins le rapport qui doit exister entre
l'organisme responsable de la mise en application d'une telle loi et le milieu.
Pourquoi? Parce que ce n'est pas une loi comme une autre, la loi linguistique.
C'est une loi de changement social. Ce n'est pas une loi pour le port de la
ceinture de sécurité où, à un moment donné,
on décide que tout le monde la porte et où on donne quelques
infractions à un moment donné. Les habitudes changent. On ne
francise pas Montréal, le milieu des affaires de Montréal surtout
je parle de Montréal, parce qu'on a vu hier, ici, qu'à
Québec, ce n'est pas tellement un problème du jour au
lendemain, sans dommages économiques, à moins d'y apporter
beaucoup d'attention.
Je pense que le gouvernement actuel devra tout d'abord apporter des
amendements à ce pro- jet de loi. Ceux que vous suggérez, je
pense, sont valables. J'y reviendrai plus tard. Lorsque le gouvernement aura
apporté des amendements, il verra qu'une loi linguistique ne s'applique
pas comme une loi de feu vert ou de feu rouge. De toute façon, quelle
que soit la loi, la loi 22 ou la loi no 1, il va devoir concilier les deux
impératifs, c'est-à-dire faire du français la langue de
tous les jours, de toutes les activités au Québec, qui est
l'impératif de ce gouvernement comme de l'ancien gouvernement, et
l'impératif économique, c'est-à-dire de le faire aux
moindres coûts possible.
C'est cela que les deux ans de consultations sur la loi 22 pour faire le
programme de francisation, toute la structure de la francisation, du
règlement de francisation des entreprises, c'est cela qui a
présidé à cet effort de consultation. J'espère que
le ministre s'en aperçoit. Je ne vous demande même pas de le
reconnaître. En politique, vous savez, on ne peut pas reconnaître
nos erreurs, quoique souvent, cela aide, cela rafraîchit la politique que
de le faire. C'est pour cela qu'on peut déplorer le rejet, la suspension
d'application du règlement de francisation que le ministre a fait de
façon précipitée, je pense, en décembre dernier,
mal conseillé sûrement, pour venir ensuite, dans la loi 1, au
même mécanisme, à l'analyse linguistique, au programme de
francisation et en y ajoutant naturellement des aménagements
différents comme la coercition.
Je voulais simplement vous demander, peut-être à M.
Beauregard que j'ai entendu avec beaucoup d'intérêt tantôt,
quand il a décrit les deux styles, le style spectaculaire contre le
style peut-être un peu plus pragmatique de la loi 22, est-ce que le style
spectaculaire de la loi 1 doit recourir à la coercition, en ce qui
concerne la francisation des entreprises seulement? Je m'adresse à vous
seulement là-dessus. En ce qui concerne le processus de francisation du
monde des affaires, du monde du travail, est-ce que la coercition est
indispensable?
M. Beauregard: Je ne crois pas que la coercition soit
indispensable. A la lumière de cette question, j'aimerais quand
même préciser, toujours pour garder la même dignité
dont on a parlé jusqu'à maintenant, que je n'impliquais pas, en
employant, entre guillemets d'ailleurs, le mot "spectaculaire", marquer une
préférence morale ou dérogatoire ou autrement. Je
signalais plutôt qu'il nous paraissait que le projet de loi no 1, dans
son style et dans sa présentation, recherchait, en soi, un objectif au
niveau de la conscience ou d'une fierté.
On mettait davantage l'accent là-dessus, qui est un choix, qui
est une option. Je distingue ceci nettement de la dimension incitation ou
coercition, côté des mesures à l'entreprise. Pour
répondre directement à votre question, en ce qui concerne un
processus réussi de francisation des entreprises, je crois qu'il faut au
maximum utiliser l'approche incitative. Quant aux éléments de
coercition qui demeureraient, comme nous l'indiquions dans notre mémoire
nous reconnaissions cependant que, face aux récalcitrants, si on
peut
ainsi parler, aux gens qui se traînent les pieds, les gens
carrément de mauvaise volonté, il faut qu'il y ait dans la loi
des dispositions coercitives, des obligations de créées, voire
des sanctions, mais encore faut-il que les sanctions soiejit proportionnelles
au délit, si on peut ainsi parler. Il faut vraiment qu'on attaque le mal
à sa racine, c'est-à-dire chez ceux qui ne font pas preuve de
bonne foi. Mais il me semble mauvais, dans toute loi d'ailleurs, de faire comme
si l'ensemble du secteur visé ou l'ensemble de la collectivité
était fondamentalement méchant et vicieux. Il faut plutôt
tabler que, dans l'ensemble, on va se conformer à une loi et ce sont des
cas d'exception qu'on ira viser par des dispositions prévues et connues
de tous.
M. Lalonde: Merci beaucoup, M. Beauregard. Je voudrais laisser
quelques minutes à mes collègues. Je vais simplement terminer en
rappelant que même si plusieurs de vos remarques sont
considérées par certains députés comme de la simple
répétition, et que certains députés, par les
vôtres, mais enfin le contenu de leurs remarques...
M. Paquette: Je m'excuse, c'est le contraire... M. Lalonde:
Ecoutez, j'ai le droit de parole.
M. Paquette: On trouve énormément
d'éléments nouveaux.
M. Lalonde: Le député de Rosemont n'est
peut-être pas d'accord, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
M. Paquette: On n'a rien dit. Comment pouvez-vous dire cela?
M. Lalonde: Alors, je me reformule. Même si des
députés...
Mme Lavoie-Roux: Cela fait trois jours qu'ils l'ont dit...
M. Lalonde: ... et là, je vais le dire, des
députés ministériels se sont déclarés
suffisamment informés en ce qui concerne le domaine que vous
représentez, c'est-à-dire le milieu des affaires. D'ailleurs, je
vois que le député de Taschereau a été suffisamment
informé, il n'est pas ici.
Mme Lavoie-Roux: II vient de moins en moins.
M. Lalonde: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Le député de
Châteauguay...
M. Lalonde: La répétition, à ce moment,
n'est pas nuisible, au contraire. Je pense que ce que vous dites à
propos de la convergence des interventions, c'est important pour que la
commission parlementaire et surtout le gouvernement, qui, en définitive,
décide, soient bien informés. Souvent, c'est en
répétant plusieurs fois qu'un gouvernement s'aperçoit que
c'est une opinion générale et qu'il faisait fausse route. Ce
n'est pas seulement à vous que je fais le message, mais à tous
ceux qui viendront après vous, parce qu'il nous reste quand même
200 mémoires à examiner; il ne faut pas être
gênés de le dire et de le répéter. Si vous avez
raison, pourquoi ne pas le dire? Je vous remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
député de Pointe-Claire.
M. Shaw: Merci, M. le Président. Premièrement,
messieurs, quelques remarques. La fin de semaine passée, M. le premier
ministre du Québec, M. Lévesque, disait que l'exode d'entreprises
du Québec était dû à une mauvaise
représentation des media anglophones du Québec. Comme
représentant d'un comté anglophone, Pointe-Claire, j'ai
vécu dans la situation dans laquelle on voit, dans ma rue, quatre
maisons sur dix à vendre. Ces quatres personnes sont des personnes qui
sont transférées du Québec. Alors, j'ai hâte d'avoir
la chance de visiter mon comté avec M. Lévesque pour lui donner
l'occasion de faire des entrevues avec les citoyens de Pointe-Claire pour
savoir les dommages qui sont déjà faits. L'avenir du
Québec, c'est de renverser ce mouvement d'entreprises du Québec,
votre groupe s'occupe de l'économie du Québec, de
Montréal, premièrement. Comme exemple, il y a 67% de l'industrie
pharmaceutique du Canada à Montréal; prévoyez-vous, avec
le Bill 1, que dans cinq ans, ces industries seront encore à
Montréal?
M. Charbonneau (Edgar): Ecoutez, encore une fois, nous nous
repportons aux critères fondamentaux de notre mémoire. Dans la
mesure où les critères fondamentaux sont respectés, dans
ces critères fondamentaux, le troisième dit bien qu'on
s'intéresse particulièrement aux libertés
individuelles.
Avec les recommandations que nous avons faites, si ces libertés
individuelles sont respectées, nous ne voyons aucun inconvénient
à ce que dans cinq ans les compagnies dont vous avez fait mention
fassent encore partie du Québec.
Il est entendu que le problème linguistique est un
problème très important, mais ce n'est pas le seul
problème qui puisse faire que le Québec se trouve peut-être
dans un état économique un peu difficile. Cela existe non
seulement au Québec, mais dans d'autres provinces aussi, actuellement,
et je pense qu'on n'est pas prêts, nous, en tout cas, à rattacher
tout le problème économique présent à la seule
question linguistique.
M. Shaw: Vous ne prévoyez pas, disons... J'ai parlé
il y a quelques jours avec un responsable de Ayerst McKenna, qui disait: Avec
800 personnes dans la recherche, dans notre industrie, le langage commun de ces
individus, c'est l'anglais. Maintenant, vu le coût pour chercher des gens
qui viendront à Montréal, à cause du climat social qui est
représenté par cette loi, il sera impossible de continuer avec le
même climat. Prévoyez-vous que
nous pouvons faire, avec le sens de cette loi, un climat qui va
être accepté par les industries de recherche, d'expertise du
Québec? Est-ce qu'elles vont rester?
M. Charbonneau (Edgar): Dans votre mémoire, si vous
remarquez, nous touchons cet aspect spécifique. Nous demandons qu'en
plus des sièges sociaux, les centres de recherche soient
privilégiés. Nous avons constaté dans notre étude
que dans les services technologiques, l'anglais est une langue internationale,
et on rencontre énormément de déplacements de gens qui
sont appelés à travailler sur des projets, à court ou
à long terme. Nous aimerions que les centres de recherche soient
considérés au même niveau que les sièges sociaux
dans le respect des libertés. Encore une fois, là, je pense qu'on
touche un domaine qui est très spécifique. Mais dans l'ensemble
de l'économie du Québec, encore une fois, si les critères
que nous avons établis dans notre mémoire sont respectés,
nous ne croyons pas que l'économie du Québec sera
affectée.
M. Beauregard: Est-ce que je peux ajouter quelque chose en
réponse? Je reviendrais à la question dont on a parlé en
termes d'approche. Comme vient de le signaler notre président, nous
avons voulu que certaines entreprises à haute technologie et les centres
de recherche industrielle, de même que certains bureaux divisionnaires
qui traitent à l'extérieur du Québec soient traités
un peu de la même façon que les sièges sociaux. Toujours,
il s'agit, bien sûr, de la façon de leur appliquer un programme de
francisation. C'est donc dire que l'objectif d'une certaine francisation dans
le fonctionnement interne doit être un objectif qui demeure, et nous
invitons, bien sûr, l'Assemblée nationale, le gouvernement
à faire bien attention à la façon d'appliquer des
programmes de francisation, notamment dans ces cas que nous jugeons
particuliers. Tout est une question d'approche. Si on a une approche
évolutive, pour répondre à votre premier souci, je crois
qu'il n'y a pas lieu de cacher que le style plus affirmatif, plus
déclaratoire est sans doute de nature à se faire poser davantage
de questions chez les gens. Dans la mesure où on a un style qui, d'une
part, est plus affirmatif et, probablement, à certains égards,
plus satisfaisant pour certains qui veulent mettre l'accent sur l'affirmation
collective.
C'est d'autant inquiétant à certains égards pour
ceux qui se demandent exactement à quel type de rajustement cela va
donner lieu, mais si on retient dans les programmes de francisation pour ces
milieux particuliers une approche évolutive où on tient vraiment
compte des contraintes techniques réelles qui pèsent sur ces
unités particulières, je crois qu'il y a moyen de minimiser ce
que l'affirmation, par ailleurs, d'autres droits, peut avoir de quelque peu
inquiétant ou traumatisant. A cet égard, je pense que le
rôle des media d'information, le rôle des gens qui interviennent
sur la place publique, fussent-ils des hommes de gouvernement ou des hommes
d'association ou de simples citoyens, est particulièrement important
dans le sens d'agir d'une façon responsable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Pointe-Claire, votre temps est expiré. M. le
député de Mont-Royal, vous avez environ trois minutes.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais dire que
j'apprécie particulièrement l'approche positive de votre
mémoire. Vous démontrez une confiance dans vos entreprises et
cela se reflète dans les suggestions que vous faites. Malheureusement,
certains des articles du projet de loi ne semblent pas refléter cette
confiance et, pour cette raison, parfois, cela suscite certaines
réactions chez certains groupes.
Je suis particulièrement heureux de voir votre approche sur les
libertés individuelles et les droits des minorités, parce que
vous avez cette confiance. Cela découle de votre approche. Parfois, la
panique ou la réaction parfois alarmiste est suscitée par
certains articles du projet de loi et je note particulièrement vos
recommandations sur l'article 112. Il y a beaucoup de jeunes gens qui n'ont pas
un nom francophone et qui sont très préoccupés par cet
article, et j'accepte entièrement vos suggestions. En terminant, puisque
je n'ai pas beaucoup de temps, M. le Président, le ministre me
permettrait-il de lui poser une question?
Il y a beaucoup de jeunes gens qui interprètent l'article 112 tel
que rédigé d'une façon peut-être très
ambiguë. Je voudrais demander au ministre s'il accepte
l'interprétation et les recommandations de nos invités au sujet
de l'article 112 et, si tel est le cas, pourrait-il nous dire s'il serait
prêt à recommander certains amendements afin que l'article 112
puisse vraiment refléter les recommandations de nos témoins et
les préoccupations qu'ont plusieurs personnes au sujet de l'application
et de l'interprétation qui pourraient être données à
l'article 112, tel que présentement rédigé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
toujours le même règlement. Le ministre peut répondre ou ne
pas répondre à cette question.
M. Laurin: J'ai déjà dit à plusieurs
reprises que l'article 112 avait été mal compris par certaines
personnes, mais, si tel est le cas, je n'ai aucune objection à le
reformuler pour qu'il conserve le même esprit mais ne crée aucune
ambiguïté.
M. Ciaccia: Est-ce que le ministre accepte
l'interprétation que les témoins ont donnée? Je crois que
c'est une interprétation qui protège et encourage la langue
française mais qui, vraiment, serait juste et équitable envers
tous les gens, tous les citoyens du Québec, de quelque culture ou
quelque milieu que ce soit.
M. Laurin: J'ai tout lieu de croire que même le
député de Mont-Royal sera satisfait de la nouvelle
formulation.
M. Ciaccia: Mais vous ne vous engagez pas maintenant. C'est
toujours dans l'avenir, vos pro-
messes. Les recommandations de nos invités sont concrètes
et j'aurais aimé que vous acceptiez de dire: Oui, nos invités ont
raison, j'accepte cet article.
M. Charbonneau (Jean-Pierre): Quelle est votre position sur le
libre choix?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie beaucoup, M. le député de Mont-Royal d'avoir
respecté votre période de temps. Une dernière
intervention, et c'est celle du député de Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, j'aimerais remercier les
représentants de la Chambre de commerce de Montréal de leur
mémoire extrêmement positif, que je considère comme un
appui aux objectifs et aux intentions du projet de loi. Je pense que vous avez
très bien compris les intentions du projet de loi. Je souhaiterais que,
particulièrement dans l'Ouest de Montréal, on cesse de paniquer
sur ce projet de loi. On se rend compte qu'à peu près tous les
organismes patronaux ou d'affaires qui sont venus devant nous n'ont aucunement
une attitude de panique, qu'ils sont très bien capables de vivre en
français. Ils disent: Certaines opérations sont plus difficiles,
donnez-nous un peu de souplesse de ce côté-ci, de ce
côté-là, mais essentiellement, ils acceptent la
francisation du Québec et sont prêts à s'y engager. Je
pense que cela va nous inciter à réduire certains articles
où il y a énormément de contrôles possibles.
Là il aurait fallu voir comment cela se serait appliqué, mais il
y avait une possibilité de contrôle bureaucratique assez grand, et
peut-être un excès dans certaines sanctions prévues.
Je pense que vous avez très bien compris le projet de loi. Le
député de Marguerite-Bourgeoys disait tantôt:
"J'espère que le ministre a compris. Je pense que le ministre a
compris". Nous avons compris. Vous avez très bien compris l'intention du
projet de loi mais, malheureusement, on n'a pas d'indice que l'Opposition,
elle, a très bien compris la différence essentielle entre la loi
22 et ce projet de loi. Cette différence essentielle, vous l'avez
mentionné tantôt, c'est que ce projet de loi est clair, vigoureux
et de nature à susciter la fierté des
Québécois.
Mme Lavoie-Roux: ... tel qu'il est?
M. Paquette: Cela, il faudrait le prouver, Mme le
député de L'Acadie.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît. Non, ne commencez pas...
M. Paquette: C'est un des points que je veux toucher, de toute
façon.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Rosemont, adressez-vous soit au président, soit aux invités, mais
pas aux députés de l'Opposition.
M. Paquette: M. le Président...
M. Laplante: II y en a seulement un, il n'y en a pas deux.
Le Président (M. Cardinal): Non.
M. Paquette: ... sur l'intervention du député de
L'Acadie, je vais revenir tantôt, parce que j'ai une question
là-dessus. Je pense que la différence essentielle, vous l'avez
dit tantôt, entre la loi 22 et la loi no 1, c'est qu'elle est de nature
à susciter la fierté des Québécois. C'est
également une réponse aux attentes des gens qui ont
travaillé à la francisation, que ce soit dans les
différentes entreprises ou au niveau de la Régie de la langue
française, qui nous disaient, quand on a commencé le travail avec
eux, la loi 22, c'est un pas dans la bonne direction, bien sûr, on est
très content, et cela nous facilite la tâche aujourd'hui, mais il
manquait et c'est ce que nous disaient ces gens-là une
certaine volonté politique qu'on espère que le nouveau
gouvernement va afficher clairement.
Je pense que c'est là la différence essentielle entre la
loi 22 et la loi no 1. Je tiens à dire que la loi ne sera pas
coercitive, dans la mesure où elle va susciter cette fierté et
cet effet d'entraînement. Il n'y a aucune loi qui peut réaliser
des changements politiques de cette importance s'il n'y a pas d'effets
d'entraînement de la loi qui ne sont pas prévus dans les articles,
mais qui tiennent au changement de climat. La manifestation devant le parlement
quant au bill 63, a commencé à opérer un changement de
climat, la loi 22 a poursuivi et je pense que la loi no 1 va nous permettre
d'éviter toute espèce de coercition.
Je ne pense pas qu'il va y avoir d'entreprises récalcitrantes et,
dans ce sens, on va pouvoir l'assouplir considérablement. Il y a
beaucoup d'organismes qui nous l'ont demandé et je pense qu'il faut en
tenir compte. Je pense d'ailleurs que 80% des recommandations que vous faites
dans votre mémoire sont déjà acceptées par le
ministre ou vont l'être et je pense que ça va aplanir l'essentiel
des difficultés.
Maintenant, j'aimerais relever la suggestion extrêmement
intéressante que vous nous faites à la page 6 de votre
mémoire, au troisième paragraphe, à l'article 75. Vous
proposez de conférer à l'office le pouvoir de prendre, de concert
avec l'administration, ou de faire prendre par les services appropriés
toute mesure nécessaire pour en arriver à une concertation
efficace dans la mise au point de certains produits et instruments de travail
en langue française. Je ne sais pas si c'est la même chose que
cela évoque dans mon esprit; par exemple, est-ce que vous pensez
à de la concertation sur le plan sectoriel quant à la
terminologie? Il y a certains types d'entreprises qui se ressemblent beaucoup
et qui auraient avantage à échanger leur processus de
francisation, leur méthode. Est-ce que vous pensez à des choses
comme ça, lorsque vous nous faites cette suggestion?
M. Beauregard: C'était surtout en termes de la production
d'instruments de travail. Cela se ré-
férait moins à des éléments de terminologie,
mais bien à des processus de fabrication. Un exemple très clair,
c'est qu'il existe du matériel informatique en français, mais il
est offert sous plusieurs formes et variétés non
standardisées, alors que le produit anglais équivalent est
internationalement standardisé, de telle sorte que cela amène des
problèmes de communication d'ordinateur à ordinateur, des trucs
comme ça. C'est un exemple.
Il y a beaucoup de produits comme ça et l'incitation est à
une concertation plus ou moins stricte qui pourrait être effectuée
pour profiter d'un certain pouvoir d'achat québécois, pas
nécessairement de source gouvernementale d'ailleurs.
Il se pourrait que les gens qui font appel à des types de
fournisseurs... L'exemple très simple qu'on peut donner, c'est: Pourquoi
n'y avait-il pas, jusqu'à de récentes années, des
indications en français pour les ascenseurs, les odomètres sur
les voitures? Il n'y en a pas encore, dans bien des cas, et on peut penser que
ce que de petites entreprises tenteraient d'obtenir de fournisseurs en ordre
dispersé, elles ne l'obtiendront pas, sinon à des coûts
très prohibitifs. Il y a du matériel qui pourrait être mis
à la disposition des entreprises où une certaine concertation par
incitation gouvernementale pourrait aider à se procurer du
matériel adéquat standardisé, à des coûts
raisonnablement comparatifs.
M. Paquette: II y a ce que je pense être une
suggestion extrêmement intéressante, j'espère que le
ministre va en tenir compte une différence entre la loi 22 et la
loi no 1. C'est la clarté des objectifs de francisation. On
énumère un certain nombre d'objectifs à atteindre par les
entreprises, et, peut-être, un resserrement des délais et une
volonté plus ferme d'appliquer les programmes de francisation. Est-ce
que vous considérez, dans ces aspects, qu'il y a une certaine
amélioration par rapport à la loi 22? Quelle est votre attitude
face à ces aspects?
M. Charbonneau (Edgar): La question n'est pas facile. Je pense
qu'on ne s'est pas vraiment attachés à cette question, à
savoir s'il y avait eu une amélioration. On n'a fait aucune
évaluation réelle dans ce sens-là. Répondre, ce
serait...
M. Paquette: D'accord. Pour une entreprise, c'est quand
même plus utile de savoir les intentions plus précises du
gouvernement en termes d'objectif; qu'on sache que l'objectif, c'est d'arriver
à telle proportion de cadres francophones, que tel genre
d'activité se fasse en français. Est-ce que ce n'est pas plus
facile pour une entreprise de savoir où elle s'en va, de planifier son
évolution et ses modes de gestion pour atteindre des objectifs, ces
objectifs étant précis?
M. Charbonneau (Edgar): Je serais porté à croire
que non. Ce n'est pas un élément essentiel de gestion.
M. Paquette: Je vous mentionne cela parce qu'il y avait des
responsables en francisation qui nous disaient que c'était très
important.
M. Charbonneau (Edgar): Je pense qu'au niveau de la gestion,
c'est une loi parmi d'autres qui devient... Une loi est une contrainte et il
faut qu'ils s'y conforment. Le fait d'avoir certains délais plus ou
moins longs ou appliqués de façon plus ou moins forte
représente tout simplement une contrainte plus ou moins grande. Mais de
là à déterminer les objectifs mêmes, non, je ne
pense pas.
M. Beauregard: Si on peut se permettre, de ce
côté-ci de la table, quelques facéties également, on
dirait que les milieux d'affaires sont relativement peu sensibles à ce
que j'ai appelé tout à l'heure le style plus déclaratoire
ou plus affirmatif.
C'est la raison pour laquelle, constamment, vous avez dû entendre
certains de nos prédécesseurs des milieux d'affaires vous dire:
Ce qui nous intéresse, c'est la réglementation. C'est très
important pour nous, la réglementation, parce que l'objectif
présumément clair ou non clair inscrit dans la loi, on va en
connaître l'impact réel quand on connaîtra la nature de la
réglementation. Dans la mesure où la réglementation est
claire, c'est là que le problème se pose.
M. Paquette: Je termine, M. le Président, par une
dernère question qui va être reliée à l'interruption
du député de L'Acadie tantôt. Elle considère que la
charte est discriminatoire dans sa forme actuelle. Personnellement, je n'ai
jamais été d'accord avec l'introduction de l'article 172, je suis
donc heureux que vous en recommandiez, comme de nombreux autres organismes,
l'abolition, et je suis d'autant plus d'accord que, chaque fois qu'un organisme
s'est présenté devant nous, je lui ai demandé s'il pouvait
nous montrer un exemple d'article où les deux chartes étaient
contradictoires. A un moment donné, le député de L'Acadie,
dans une interruption semblable à celle qu'elle a faite aujourd'hui, m'a
lancé que l'article 52 est discriminatoire.
Le lendemain, la Commission des droits et libertés de la personne
rendait public son mémoire et elle nous disait: L'article 52 n'est pas
discriminatoire. J'aimerais vous demander, au-delà de votre proposition
pour l'abolition de l'article 172, si vous avez noté, dans votre
étude du projet de loi, certains articles qui seraient, selon vous,
discriminatoires ou à l'encontre de la Charte des droits et
libertés de la personne.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, mais, très
rapidement, parce que la commission devra ajourner ses travaux.
M. Beauregard: Je pense qu'il y avait en tout cas des questions
de doute au niveau des articles 36 et 37 où on parle des questions de
congédiement ou autrement. Il y avait des possibilités de
discrimination dans les deux sens.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Si vous
permettez... A l'ordre, tout le monde! Je désire remercier M.
Edgar Charbonneau, M. Claude Béau-regard et M. Marcel Paré, les
porte-parole de la Chambre de commerce de Montréal, comme je l'ai fait
souvent, de leur patience. Ils ont attendu, ils ont vu comment fonctionnait une
commission parlementaire. J'ai déjà indiqué que
c'était une longue patience que cet exercice de la démocratie,
pour tous d'ailleurs, mais il faut l'apprendre. Ils sont maintenant
libérés.
Je voudrais cependant faire quelques remarques, avant l'ajournement des
travaux. Tout d'abord, le prochain organisme convoqué est le
Comité des kilomètres d'appui, mémoire 206. Nous
poursuivrons par la suite, mais je ne sais pas du tout à quelle heure.
Je le rappelle, c'est mercredi. Ce sera certainement après 16 heures. Il
faudrait se préparer en conséquence.
Dernière chose, suite à une question du
député de Mégantic-Compton, hier, au sujet d'un
télégramme provenant de l'Association des citoyens des Cantons de
l'Est, j'avais mentionné que j'indi-querais, s'il y avait mémoire
reçu, quel en serait le numéro. Il y a un mémoire de
déposé, le no 106.
Je veux, de plus, indiquer que j'ai fait distribuer ce matin à
chacun des membres de la commission une copie de ce télégramme,
et que non seulement le cabinet du ministre, le secrétariat de la
commission, mais que chacun des membres de la commission est informé de
ce télégramme et que les dispositions nécessaires seront
prises en temps et lieu. Sur ce, merci à tous. Les travaux de la
commission sont ajournés sine die.
M. Charbonneau (Edgar): M. le Président, j'aurais
aimé...
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je vous en prie.
M. Charbonneau (Edgar): ...remercier la commission parlementaire
de l'accueil qu'elle nous a fait, et nous espérons que nos travaux
auront contribué à vous aider dans vos difficultés.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez été
les bienvenus.
(Fin de la séance à 12 h 2)
Reprise de la séance à 16 h 44
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs! A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît.
Je constate que nous avons quorum, et comme c'est une nouvelle
séance de la commission de l'éducation, des affaires culturelles
et des communications, je fais l'appel des membres et indique les changements.
Ces changements vaudront pour la séance de cet après-midi et
celle de ce soir qui a été donnée en avis à
l'Assemblée nationale.
M. Alfred (Papineau)...
M. Alfred: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Bertrand (Vanier), M.
Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Ciaccia
(Mont-Royal), remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee), ...
M. Charbonneau: M. Bisaillon (Sainte-Marie), toujours
remplacé par...
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas ce qu'on m'a...
Attendez un peu.
M. Charbonneau: ... de Verchères.
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas ce qu'on m'a
indiqué. On m'a indiqué que vous remplaciez le
député de Taschereau.
M. Charbonneau: Un ou l'autre, dans ce cas-là. On n'avait
pas prévu...
Le Président (M. Cardinal): D'ailleurs, M. Bisaillon
arrive à l'instant. Nous l'attendions. M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Mont-Royal), remplacé par M.
Goldbloom (D'Arcy McGee); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), remplacé
par M. Gagnon (Champlain) vous aurez le droit de poser des questions
M. Dussault (Châteauguay), M. Godin (Mercier), remplacé par
M. Fallu (Terrebonne); M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Guay
(Taschereau, remplacé par M. Charbonneau (Verchères); M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Laplante (Bourassa), M. Laurin (Bourget), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Pa-quette (Rosemont),
remplacé par M. Lacoste (Sainte-Anne). Je salue particulièrement
M. Lacoste. C'est la deuxième fois qu'il vient. M. Roy (Beauce-Sud), M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).
Je n'ai pas besoin quand même de faire l'appel des invités.
Cela a déjà été fait ce matin. Il ne faudrait pas
être trop méticuleux sur ces questions, quand même.
Quant au programme, j'indique que nous suspendrons à 18 heures,
et c'est une suspension sans consentement de la commission, quels que soient
les incidents qui puissent arriver à ce moment-là, celui qui
présidera se lèvera du fauteuil à 18 heures et la
séance reprendra à 20 heures, à la suite d'un avis du
leader parlementaire du
gouvernement, pour se poursuivre normalement jusqu'à 23
heures.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Juste un instant! Nous n'avons
personne devant la commission. J'ai toujours appelé les gens.
M. Lalonde: C'est sur une chose que vous venez de dire.
Le Président (M. Cardinal): Oui, d'accord, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: C'est parce que j'ai cru comprendre que, de
façon inusitée, le leader du gouvernement a mentionné
tantôton peut vérifier ça à la transcription
du journal des Débats que la reprise des travaux ce soir serait
à 20 h 15, comme la Chambre.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Je n'étais
pas là.
M. Lalonde: Comme la Chambre...
Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas, je prends votre
parole, M. le député...
M. Lalonde: Je pense que le ministre...
Le Président (M. Cardinal): ... et je vous en remercie.
Nous reprendrons à 20 h 15. Merci beaucoup, M. le député
de Marguerite-Bourgeoys et sans autre procédure, j'invite l'organisme
suivant: Comité pour des kilomètres d'appui, mémoire
206.
Si vous voulez bien vous identifier pour les membres de la commission.
Vous savez que vous avez 20 minutes, au maximum, pour présenter votre
mémoire. Evidemment, cela dépend de sa longueur. Si je regarde ce
qu'il y a devant moi... Par la suite, les députés pourront vous
poser des questions pendant 70 minutes.
Comité pour des kilomètres
d'appui
M. Roy (Rodrigue): Le Comité pour des kilomètres
d'appui est formé de quatre membres: M. Pierre Lalande, ici
présent; Jean Lavoie, qui, malheureusement, est retenu chez lui pour des
raisons personnelles; M. Claude Bouthillier, qui a attendu avec nous
jusqu'à midi. C'est à regret qu'il a dû quitter, mais il me
demande de préciser auprès de cette commission qu'il comprend
très bien la situation et qu'il n'en tient rigueur à personne; et
enfin moi-même, Rodrigue Roy.
Peut-être me permettrez-vous de donner quelques explications, de
dire ce qu'est le Comité pour des kilomètres d'appui avant de
commencer la lecture de notre mémoire.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, c'est dans
l'ordre.
M. Roy (Rodrigue): Le Comité est formé, comme je
viens de vous le dire, de quatre membres. Ce comité est né
très spontanément autour d'une table où se retrouvaiegt
quatre personnes qui se connaissaient. Toutes les quatre étaient
d'accord avec le projet de loi no 1 et ont décidé, à un
certain moment, d'écrire une lettre au ministre responsable. Ensuite,
cette idée a pris des proportions un peu plus grandes et nous avons
décidé de demander au plus grand nombre de gens possible, qui
étaient d'accord, de l'écrire sur une lettre.
Ainsi, avec des moyens un peu artisanaux, nous avons réussi
à ramasser ce que vous avez devant vous aujourd'hui. Le comité
est né il y a environ un mois et demi. Il disparaîtra avec
l'adoption du projet de loi no 1.
C'est donc un comité ad hoc.
Le Président (M. Cardinal): Nous souhaitons que votre mort
ne soit pas une lente agonie pour les membres de la commission et de
l'Assemblée nationale.
M. Roy (Rodrigue): Nous le souhaitons également.
Le Président (M. Cardinal): Alors, vous débutez.
Nous commençons à 16 h 50.
M. Roy (Rodrigue): M. le Président, madame et messieurs
les membres de cette commission parlementaire, comme le dit une chanson: "Les
gens c'est nous et il n'y a que nous qui pouvons faire quelque chose pour
nous". Voilà, madame, messieurs, exprimé en peu de mots, l'esprit
qui a animé toute l'action de notre comité d'appui au projet de
loi no 1.
Né d'un élan spontané et généreux, ce
comité s'est donné comme tâche d'inviter les citoyens du
Québec à exprimer leur soutien au projet de loi sur la langue.
Des organismes influents, bien connus et solidement structurés auraient
sans doute pu accomplir ce travail plus rapidement et d'une façon plus
spectaculaire. Mais, alors, le résultat se serait avéré
moins probant parce que plus discutable. Tandis qu'une idée soutenue
simplement par quelques citoyens sans notoriété publique garde
toute sa signification première en évitant ainsi que le
véhicule prime sur le véhiculé. En fait, ce comité
que vous avez devant vous s'est donné comme objectif de recueillir des
milliers de lettres d'appui au projet de loi no 1 sur la langue
française.
A écouter parler les Québécois, nous en sommes
venus à constater qu'une grande majorité reconnaissait le
bien-fondé de cette loi à ce moment-ci. Nous leur avons tout
simplement demandé de faire entendre leurs voix afin que vous n'ayez pas
seulement le son de cloche d'une minorité qui jouit d'un système
de communication et de diffusion tellement disproportionné que cet
aspect spectaculaire risque de nous faire oublier qu'ils sont peu nombreux.
Vous avez ici, madame et messieurs, le témoignage de milliers et
de milliers de Québécois de la
Gaspésie jusqu'à Hull, de Sept-lles jusqu'à Rouyn
vous noterez une erreur de typographie vous affirmant leur ferme
volonté de parler français. Ils viennent aujourd'hui avec
fierté exiger que vous respectiez le processus démocratique qui
leur fut jadis imposé par les ancêtres de ce groupe qui crie
maintenant à l'injustice. Ces Québécois de tous
âges, de toutes allégeances et de tous milieux ont suspendu leurs
préoccupations quotidiennes le temps, M. le ministre d'Etat au
développement culturel, de vous écrire une lettre personnelle, et
c'est ce qui fait la valeur historique de ce document que nous vous
soumettons.
Pas la peine d'en tirer davantage, madame, messieurs, vous avez devant
vous cinq kilomètres de cette route qu'il vous faut parcourir.
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, M. Roy,
concernant justement ces cinq kilomètres, quand vous vous retirerez, je
vous prierais de vous organiser avec les services de sécurité
pour qu'ils soient transmis à M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. le ministre d'Etat.
M. Laurin: Je voudrais d'abord remercier évidemment les
membres du Comité pour les kilomètres d'appui, mais surtout, par
leur intermédiaire, remercier personnellement les quelque 20 000
Québécois qui m'ont manifesté leur appui dans la lutte que
je poursuis pour la promotion du français au Québec.
C'est un témoignage extrêmement touchant et significatif
et, si le temps m'en était permis, j'aimerais remercier personnellement,
par cinq kilomètres de lettres, ceux qui ont pris la peine de
m'écrire et de me manifester cet appui.
C'est un témoignage significatif également, en ce sens
qu'il provient de citoyens ordinaires qui, comme vous le dites, n'ont pas
toujours la chance de franchir la rampe de l'opinion publique, parce que les
journalistes ne sont pas toujours là pour recueillir leur
témoignage, étant donné qu'ils n'occupent pas des postes
qui les mettent en vedette dans quelque organisme que ce soit.
Je pense qu'il convenait de fournir à ces citoyens ordinaires le
moyen de s'exprimer sur un projet de loi qui les touche de près et qui
va sûrement modifier leur existence, dans le sens de leurs besoins, dans
le sens de leurs aspirations, dans le sens de leur goût de la
fierté et de la dignité.
On pourrait espérer que, dans des temps ou dans une
société autres, ces 20 000 témoignages auraient pu trouver
accès à la tribune des lecteurs de quelque journaux que ce soient
où ils auraient pu compenser, neutraliser d'autres témoignages
venus, encore une fois, de personnages plus habitués à s'exprimer
ou plus habitués à voir leurs lettres reçues par les
journaux qui s'occupent de la tribune des lecteurs.
Malgré que ceci ne soit pas possible, je veux encore leur
répéter, par votre entremise, à quel point ce
témoignage me semble aussi important, sinon plus important, que le
témoignage de centaines de personnalités ou de trois centaines de
personnalités qui peuvent s'exprimer sur l'un ou l'autre des aspects des
projets de loi. En ce sens, leur avis, et surtout leur appui m'apparaît
être d'un grand poids dans le débat que nous poursuivons
actuellement à l'Assemblée nationale.
Vous voudrez bien leur transmettre, si la chance vous en est
donnée également, l'expression de notre reconnaissance et
l'expression de la sécurité que nous éprouvons à
nous voir appuyés par un nombre aussi élevé de citoyens
qui suivent l'actualité, qui suivent l'action de leur gouvernement et
qui sont encouragés par la direction que prend cette action.
Encore une fois, je pense bien que votre mémoire est davantage un
témoignage qu'une expression d'opinion, mais ce témoignage, nous
en avions besoin, à cette heure particulièrement importante de
notre histoire et c'est vous-mêmes qui avez qualifié ce
témoignage d'historique. Je le prends comme tel et à ce moment
particulièrement important de notre histoire, ce témoignage est
véritablement le bienvenu. Encore une fois, merci.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
les représentants du Comité pour des kilomètres d'appui,
qui ont été extrêmement patients, parce que cela fait deux
jours que je les observe au milieu de la salle. Ils ont eu d'autant plus de
mérite à se rendre que j'imagine que cela a dû prendre un
moyen de transport particulier pour apporter ici vos cinq kilomètres
d'appui.
Ceci dit, je lis dans votre texte: "Les gens, c'est nous, il n'y a que
nous qui pouvons faire quelque chose pour nous". Qui désignez-vous par
"nous"? J'imagine que vous en excluez. Quel est le sens exact de ce verset?
M. Roy (Rodrigue): Au début, notre action s'adresse aux
Québécois. On pense que par cette loi no 1 c'est le peuple
québécois qui est concerné. On lui a alors demandé
de s'exprimer. Il y en a qui crient, il y en a d'autres qui pourraient
peut-être écrire. On a demandé aux gens qui étaient
concernés. Je pense que c'est nous, les gens du Québec.
Mme Lavoie-Roux: Pour vous, les Québécois, c'est
qui?
M. Roy (Rodrigue): Je pense que c'est un peu détourner la
question que de répondre à cela actuellement, parce que tout le
monde se sent concerné par le projet de loi. Pour moi, les
Québécois, ce sont tous les habitants de la province de
Québec. C'est à tous ces gens que j'ai voulu donner l'occasion de
s'exprimer.
Mme Lavoie-Roux: Comment avez-vous procédé? Est-ce
que vous avez écrit aux gens ou si c'est par les journaux que vous avez
demandé l'opinion ou ce témoignage de la part des citoyens du
Québec?
M. Roy (Rodrigue): La majorité de ces lettres a
été recueillie lors d'assemblées, de réunions, de
manifestations, je dis bien la majorité; lors de ces assemblées,
lors de ces réunions, se trouvaient très souvent des personnes
qui venaient d'un peu partout à travers le Québec. Ils
retournaient dans leurs régions avec une certaine note explicative de
notre action et ils expliquaient cela à leurs gens, ce qui fait que nous
avons reçu quelques milliers de lettres par la poste, mais la
majorité, nous l'avons recueillie lors d'assemblées,
c'est-à-dire par contact personnel avec les gens.
Mme Lavoie-Roux: De quels types de manifestations ou de
réunions s'agissait-il?
M. Roy (Rodrigue): Je peux vous les énumérer en
détail, de façon assez complète même. Nous avons
"couvert", si je peux emprunter l'expression aux journalistes, le
congrès de la CSN, par exemple; nous avons été
invités à une manifestation par le monde à bicyclette;
nous avons été invités à des vernissages. Cinquante
ou soixante personnes, cela ne nous dérangeait pas, on y allait quand
même. Nous avons été invités à une
soirée "bénéfice" organisée par les meuniers. Nous
avons parcouru les centres d'attraction lors des fêtes...
M. Lavoie-Roux: Nationales.
M. Roy (Rodrigue): ... de la Saint-Jean-Baptiste. Nous n'avons
pas été invités, mais nous nous sommes invités au
congrès du Parti québécois à Montréal. On
s'est invité aussi au congrès du Mouvement national
québécois à Chicoutimi.
Mme Lavoie-Roux: Doit-on conclure que c'est un appui
inconditionnel au projet de loi no 1?
M. Roy (Rodrigue): Pour vous répondre bien
sincèrement, beaucoup de gens nous ont donné un appui
inconditionnel. Beaucoup de gens nous ont dit: Le projet de loi ne va pas
même assez loin. Beaucoup de gens nous ont donné aussi je
dis beaucoup je ne devrais peut-être pas dire beaucoup des gens
nous ont donné un accord de principe.
Mme Lavoie-Roux: Alors, il y a des marges ou des
différences d'opinions chez ces personnes qui se sont prononcées
sur le principe même. Tout le monde, évidemment, était
d'accord, puisqu'ils l'ont signé. Quant aux différents articles
qui sont prévues aux différentes modalités d'application,
ce pourrait peut-être être un consensus plus nuancé entre
les individus, j'imagine.
M. Roy (Rodrigue): Ce serait vous mentir, Mme le
député, que de vous dire que nous avons lu en entier toutes les
lettres qui sont devant vous. Nous pouvons vous garantir que nous sommes
persuadés que tout le monde donne un accord, mais il y a des lettres qui
ont jusqu'à quatre pages. C'est déjà beaucoup de
dépouiller le courrier, de coller toutes les lettres, on n'a pas eu le
temps de lire les lettres en entier. Je ne peux pas vous dire les petites
nuances qui seraient situées dans chaque lettre. Nous n'avons pas fait
cette étude. C'est la raison pour laquelle nous avons pensé et
nous voulons suggérer au ministre d'Etat au développement
culturel de déposer ces lettres aux archives nationales où tout
le monde pourra les consulter. Je pense que des recherches intéressantes
pourraient être faites.
Le Président (M. Cardinal): Me permettez-vous une
remarque, à ce sujet, c'est une question de procédure, Mme le
député, cela ne doit pas être déposé à
cette commission parlementaire. Tout ce que vous pouvez suggérer au
ministre, et là, je n'en fais pas la suggestion, je suis en dehors de
ces questions à cause de mon rôle, c'est que, pour qu'elles soient
déposées aux archives, il faudrait qu'il y ait dépôt
à l'Assemblée nationale. C'est pourquoi, tantôt, je vous ai
suggéré de remettre ces documents au cabinet du ministre d'Etat
au développement culturel. Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: II y a une phrase que je voudrais que vous
m'interprétiez, qui est au bas de la page 2. "Ils viennent aujourd'hui,
avec fierté, exiger que vous respectiez le processus démocratique
qui leur fut jadis imposé par les ancêtres de ce groupe qui crie
maintenant à l'injustice". Est-ce que vous pourriez développer un
peu cette idée?
M. Roy (Rodrigue): Nous faisons ici un jugement de fait. C'est
une constatation. Nous ne faisons pas un jugement de valeur. Nous constatons
qu'ils viennent aujourd'hui avec fierté exiger de respecter ce processus
démocratique. On constate. C'est vrai qu'il nous a été
imposé. On ne dit pas qu'il est bon ou qu'il est mauvais.
Peut-être qu'on le trouve bon. On fait une constatation. C'est vrai que
nous n'avons pas inventé ce processus.
Mme Lavoie-Roux: Vous parlez des ancêtres de qui?
M. Roy (Rodrigue): Je parle des ancêtres de ceux qui crient
à l'injustice.
Mme Lavoie-Roux: Mais qui sont-ils?
M. Lalande (Pierre): Ce sont ceux qui se sont
élevés contre le bill 1, qui étaient
généralement de la communauté anglophone.
Mme Lavoie-Roux: Vous respectez le processus démocratique
qui leur fut jadis imposé par les ancêtres de ce groupe qui crie
maintenant à l'injustice.
M. Lalande: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Le processus démocratique, qu'est-ce que
vous voulez dire là-dedans? Il y a un élément de votre
énoncé que je ne saisis pas.
M. Lalande: Le voeu de la majorité.
Mme Lavoie-Roux: Pardon?
M. Lalande: Le voeu de la majorité.
Mme Lavoie-Roux: Ah! Le voeu de la majorité.
M. Roy (Rodrigue): C'est une chose que je devrais peut-être
ajouter. Au début du mémoire, nous avons dit que c'était
suite à ce que nous entendions autour de nous que nous avions eu
l'idée de commencer cette petite action. Notre action nous a
confirmé ce que nous pensions et, sans chiffres très exacts, nous
pouvons affirmer que ce que nous avons conclu de cette action, c'est que le
sondage qui a été publié il y a peut-être un mois
disant que 65% de la population francophone était en faveur du projet de
loi no 1... Nous, sans plus de preuves à l'appui on pourra
peut-être parler plus scientifiquement nous, nous sommes
persuadés qu'il y a plus que 65% de la population francophone qui est
d'accord. Quand nous parlons de processus démocratique, c'est ce
à quoi on fait appel, comme dit M. Lalande.
Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce qui vous porte à conclure qu'il
y a plus que 65% de la population qui était d'accord? Est-ce que vous
mettez en doute ce sondage?
M. Roy (Rodrigue): Je ne mets pas en doute ce sondage, mais je
dis que nous avons un échantillonnage qui est largement
supérieur. Si un sondage, dit scientifique, se limite à un
échantillonnage de 1000 à 1200 personnes, eh bien, nous, nous
croyons avoir rencontré un échantillonnage qui dépasse
largement ça et, dans les milliers de personnes que nous avons
rencontrées, c'est très rare que nous ayons essuyé des
refus catégoriques. Je vais vous dire une chose, cependant, qui nous a
un petit peu surpris, c'est que beaucoup de gens sont d'accord, mais n'ont pas
écrit. Les gens sont tellement persuadés que tout le monde est
d'accord qu'ils nous ont dit, à maintes reprises: Ce n'est pas la peine
d'écrire, il va être adopté, le bill. Tout le monde est
d'accord avec ça. Ils ne se rendaient pas compte que c'était
peut-être important qu'on le dise.
Mme Lavoie-Roux: Mais vous savez sans doute que dans une
recherche scientifique les règles qui sont choisies pour faire
l'échantillonnage, que ce soit 1200 ou que ce soit 6000... Les
résultats n'en sont pas changés. Vous, vous dites que parce que
vous en avez rencontré plus, vous pensez que ça dépasse
65%. Alors, à ce moment-là, c'est que vous mettez en doute la
façon dont l'échantillonnage a pu être fait par ce
sondage.
M. Roy (Rodrigue): Remarquez que pour ma part, c'est une
impression. Je ne suis pas un spécialiste des sondages, certainement
pas. J'ai pensé ça. Nous avons pensé ça aussi.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que c'était bien humain de
penser comme ça, parce que vous avez rencontré beaucoup de monde
qui était sympathique...
M. Roy (Rodrigue): Oui.
Mme Lavoie-Roux: ...mais je pense qu'on ne peut peut-être
pas déduire qu'il y en ait nécessairement plus que 65%. Que votre
réaction soit celle-là, je peux fort bien la comprendre.
Je veux simplement vous féliciter, en tout cas, pour votre
initiative et votre sens de l'organisation et certainement pour les efforts que
vous avez déployés pour atteindre l'objectif que vous
poursuiviez.
Merci, messieurs.
M. Roy (Rodrigue): Merci.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Evidemment, je dois
me rendre à l'évidence quand je regarde ces kilomètres
d'appui. Il y a certainement eu un geste très positif de posé de
la part de toutes les personnes que vous avez réussi à
rejoindre.
Je n'ai pas à présumer des intentions du
député de Deux-Montagnes. Je pense bien que, s'il a lu ce
mémoire, s'il était assis à la droite du président,
il hésiterait peut-être à qualifier ce mémoire
encore moins d'essai.
Je sais que c'est son privilège et c'est sa liberté. Il
n'y a pas de débat sur ce point. Un témoignage...
M. Charbonneau: Des témoignages.
Une Voix: Merci, M. le député de
Verchères.
M. Le Moignan: Merci d'avoir éclairé mon
ignorance.
M. Charbonneau: On est à votre service.
M. Le Moignan: Quand je regarde le geste, évidemment, j'en
suis à 100%, mais, quand je regarde certains mots, certains
détails de votre témoignage, je suis porté à faire
une certaine comparaison. Quand on pense à tous les mémoires qui
nous ont été présentés depuis le début et
comme il y a là une lampe qui éclaire très bien...
Supposons une comparaison. Je me dis qu'une lampe de 2000 watts, c'est
très puissant. Supposons que les bons mémoires qui nous ont
été présentés, c'est 2000 watts. Je dis les bons
mémoires. Je parle des mémoires positifs, constructifs,
même s'ils ne sont pas entièrement d'accord avec le projet de loi
no 1, parce qu'il y en a qui ont voulu aller peut-être un peu plus loin;
d'autres, peut-être trop pessimistes ou qui voyaient là-dedans un
élément de destruction...
A ce moment, je baisserais l'éclairage. Peut-être que cela
serait 1000 watts, peut-être 500 watts ou peut-être 200 watts, mais
ce que vous nous apportez comme éclairage alors que vous compa-
raissez devant la commission je ne veux pas vous insulter; comme
je vous le dis, c'est une comparaison cela serait pour moi une petite
lampe très faible qui ne vient pas du tout nous éclairer, une
petite lampe qu'on voit parfois dans les greniers. Il ne faut pas confondre
avec mon voisin... Une petite lampe assez faible. Vous avez parlé de
minorités...
Le Président (M. Cardinal): Ne nommez pas un
député, surtout avec cette expression.
M. Le Moignan: Dans un grenier. J'ai voulu dire un galetas.
M. Chevrette: On dit une veilleuse.
M. Le Moignan: Ce n'est peut-être pas français. Je
pensais au mot grenier.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Roy (Rodrigue): Puis-je vous arrêter tout de suite?
M. Le Moignan: Oui.
M. Roy (Rodrigue): Pour voir clair, il faut d'abord actionner un
commutateur. Pour voir clair, peut-être auriez-vous besoin, M. le
député, de lire quelques-unes des lettres qui sont là.
Peut-être que cela vous éclairerait.
M. Le Moignan: Je ne suis pas aveugle à ce point. Nous
avons déjà écouté une centaine de groupes et des
plus sérieux et nous avons été assez
éclairés jusqu'à maintenant, même si
l'éclairage n'est pas terminé.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Terrebonne.
M. Fallu: J'aimerais remercier le député de
Gaspé pour ses derniers mots.
M. Le Moignan: Je n'ai pas terminé.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse.
M. Fallu: Non, à savoir qu'il se sent assez bien
éclairé.
M. Le Moignan: J'ai dit: pas complètement
éclairé.
M. Chevrette: II vous en manque un bout!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Le Moignan: II m'en manque...
Le Président (m. Cardinal): M. le député de
Gaspé a la parole.
M. Chevrette: Dites-nous quel bout vous voulez...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Gaspé...
M. Le Moignan: J'aimerais qu'on me laisse continuer
calmement.
Le Président (M. Cardinal): ... veuillez poursuivre, s'il
vous plaît, sans tenir compte des interruptions.
M. Chevrette: Vous faites bien cela.
M. Le Moignan: Je ne veux pas entrer en conflit avec vous. Vous
comprenez mon point de vue.
Quand vous parlez de cette minorité, vous parlez de la
minorité... A ce moment, vous avez les anglophones à
l'idée, mais nous avons eu ici des groupes, je pourrais même dire
des opposants qui n'étaient pas du tout des anglophones,
c'est-à-dire des groupes même francophones qui n'étaient
pas entièrement d'accord avec les objectifs que poursuit le projet de
loi.
Alors, le danger, c'est de polariser, justement, la question sur un seul
groupe ethnique. En somme, ce conflit entre les Anglais et les Français.
Il ne faudrait pas voir la question sous cet angle. Est-ce que vous pensez aux
autres minorités non anglophones?
M. Roy (Rodrigue): Je pense que les francophones, dans ce
cas-là, sont une minorité dans la minorité.
M. Le Moignan: Les francophones, qui ont fait beaucoup de
réserve, ne sont pas contre la société
québécoise. Ils se posent des points d'interrogation très
sérieux.
M. Roy (Rodrigue): Ces gens qui sont venus présenter un
mémoire ici étaient représentatifs de quoi? C'est ce qu'il
faudrait savoir.
M. Le Moignan: II y en a qui étaient
représentatifs, il suffirait de regarder la liste de groupes
nombreux...
M. Roy (Rodrigue): Au point de vue nombre.
M. Le Moignan: ... ils représentaient tout de même
un vaste...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît. Non, je vous en prie. Si vous voulez prendre les invités au
sérieux, je vous prierais d'écouter chacun des
députés, d'écouter les invités et de ne pas
interrompre ceux qui ont la parole.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je les prends au
sérieux, même si je leur pose des questions.
M. Laplante: ... un sermon.
M. Le Moignan: Je comprends très bien je l'ai dit
leur geste et tout cela, mais je veux simplement me faire
éclairer sur l'idée parce que la petite minorité
même francophone... parfois, on a des organismes qui représentent
40 000, 50 000 ou 60 000 personnes; je crois qu'ils sont très
représentatifs. Je ne parle pas de ceux qui sont pour ou contre, je
parle d'opinions pour éclairer cette commission.
Le Président (M. Cardinal): Une question de
règlement?
M. Le Moignan: Est-ce que j'ai trahi le règlement?
M. Alfred: ... parler de la CEQ.
M. Le Moignan: Est-ce que j'ai dit quelque chose...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Papineau, je m'excuse. Ce n'est pas une question de règlement. Si vous
voulez poser une question au député, vous devez lui demander la
permission, mais ce n'est pas une question... C'est l'article 100.
M. Alfred: J'aimerais lui poser la question. Est-ce que vous me
donnez la permission?
Le Président (M. Cardinal): C'est-à-dire que si le
député vous donne la permission, vous pourrez l'interrompre. M.
le député de Gaspé, est-ce que vous accordez votre
permission pour une question?
M. Le Moignan: Est-ce que je perds mon temps avec cela?
Le Président (M. Cardinal): C'est à vous de
décider si vous répondez ou non.
M. Le Moignan: Si la question est brève, une très
très brève question, oui.
M. Alfred: Quand vous parlez de représentants de 50 000,
60 000 personnes, est-ce que vous parlez d'organismes comme la CEQ?
M. Le Moignan: Aucun organisme, parce qu'un des témoins,
cette semaine, ou la semaine dernière, a dit: Nous représentons
un million. Il n'avait peut-être pas consulté le million de
personnes. Je parle de façon générale.
M. Alfred: Le Mouvement Québec français...
M. Le Moignan: J'aurais pu dire un million, j'aurais pu dire 300
000. Certains représentaient 3000 industries. J'ai pris un chiffre, le
premier du bord. Cela répond à votre question?
Le Président (M. Cardinal): D'accord, veuillez poursuivre,
M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: C'est parce que mon voisin aura des questions tout
à l'heure.
Le Président (M. Cardinal): C'est cela.
Présentement il reste à peine cinq minutes à tout le
parti.
M. Le Moignan: On m'a dérangé à quelques
reprises.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, j'en tiens
compte.
M. Le Moignan: Merci. Maintenant, vous parlez de la valeur
historique de ce document, je n'ai aucun doute là-dessus. Je suis
d'accord avec votre raisonnement, mais, je crois que les 264 mémoires
qui ont été soumis à cette commission je n'ai pas
eu le temps de tous les lire, je n'aurai peut-être jamais le temps
constituent aussi un document d'une très grande valeur historique, qu'on
soit pour, qu'on soit contre, qu'on apporte des modifications dans un sens ou
dans l'autre, la valeur historique réside dans ce que les témoins
apportent à cette commission pour lui permettre de progresser dans ses
travaux. C'est une simple remarque que je voulais faire, sans du tout vouloir
mésestimer ou anéantir les efforts que vous avez faits. J'admire
tout de même ceux qui appuient le projet de loi de façon aussi
inconditionnelle et qui, dans la plupart des cas, n'ont probablement pas lu
grand-chose du projet de loi. J'admire tout de même ces gens-là de
faire confiance à ceux qui leur proposent un projet de loi. Merci.
M. Roy (Rodrigue): Nous n'avons pas la prétention
d'être les seuls à présenter un mémoire avec une
valeur historique, nous n'avons pas dit ça, je pense.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je voudrais souligner
l'aspect sympathique du geste de nos invités. Il n'y a aucun doute que
c'est tout à fait dans l'ordre de notre système
démocratique que des citoyens, de leur propre initiative, posent un
geste comme ça à l'endroit du gouvernement. Je trouve ça
très rafraîchissant, il y a un petit côté
spectaculaire qui n'est pas non plus pour déplaire, j'en suis sûr,
au gouvernement, quoique je regrette que votre mémoire n'ait pas fait
état des suggestions que vous avez mentionnées, qui seraient
précieuses, et qui sont contenues dans ces lettres; j'ai entendu le
chiffre de 20 000, est-ce que c'est ça, 20 000 lettres?
M. Roy (Rodrigue): Approximativement.
M. Lalonde: Je ne sais pas si le président de la
commission peut s'engager envers les membres à leur fournir une copie de
chacune de ces lettres?
Le Président (M. Cardinal): Non, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. J'ai indiqué, dès
le début, qu'il n'y a pas de dépôt en commission
parlementaire et j'ai demandé que l'on transmettre tout ceci au cabinet
du ministre d'Etat au développement culturel. J'ai même
prévenu l'un des collaborateurs du ministre de bien vouloir s'entendre
avec ceux qui sont devant nous pour récupérer ces 20 000
lettres.
M. Lalonde: Remarquez, M. le Président, que ma question
est quand même pertinente, parce que si ces gens, au lieu de sonner
à la porte du ministre, avec leur rouleau de kilomètres, se sont
adressés à la commission parlementaire, encore eût-il fallu
qu'ils nous mettent dans la situation de pouvoir prendre connaissance de ces
kilomètres. C'est pour ça que j'ai...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, est-ce que je
peux ajouter que j'ai aussi dit que le ministre pouvait, s'il le
désirait, en faire dépôt à l'Assemblée
nationale, si c'était son désir?
M. Lalonde: Alors, je compte bien là-dessus, M. le
Président, pour que, d'ici la fin de nos auditions, nous ayons
l'occasion d'examiner une à une ces 20 000 lettres, surtout celles de
trois ou quatre pages que vous avez mentionnées qui contiennent,
d'après vous, des suggestions intéressantes.
Mais je dois quand même déplorer que votre mémoire
lui-même ne soit qu'un témoignage d'appui sans discernement, je
veux dire sans détail. C'est comme, par exemple... j'aurais aimé
que vous me parliez de l'article 172. Est-ce que vous êtes d'accord avec
cet article 172 de la loi? Etes-vous d'accord pour que le projet de loi no 1
mette de côté la Charte des droits et libertés de la
personne?
M. Roy (Rodrigue): J'insiste, M. le député, sur
l'aspect artisanal de notre structure. Nous ne formions un groupe que de quatre
personnes, nous avons eu, bien sûr, quelques bénévoles qui
nous ont aidés une journée ici et là. Nous avons
reçu des lettres jusqu'à la dernière minute, c'est la
raison pour laquelle il y a une pile en-dessous qui n'a pas été
ajoutée au rouleau. Evidemment, nous n'avons pas pu ressortir
l'essentiel. On y a pensé, remarquez, mais nous n'avons pas eu le temps.
Je suis persuadé que si ce n'est pas le mémoire qui, aux yeux du
député de Gaspé, est le plus illuminant, je suis
sûr, sans me tromper, que c'est celui qui a dû demander le plus de
travail, cependant.
Si nous avions eu une équipe très structurée, ce
n'est pas cinq kilomètres que vous auriez eu devant vous, mais
probablement 20, 30 ou 40 kilomètres.
M. Lalonde: M. le Président, M. Girouard...
Le Président (M. Cardinal): M. Roy, Rodrigue Roy.
M. Lalonde: M. Roy, je ne mets pas en doute, au contraire, j'ai
sûrement.un sentiment d'admiration pour votre initiative et vos efforts
et je me joins aux félicitations du député de L'Acadie
à votre endroit. Que ce soit 20 kilomètres ou cinq
kilomètres, cinq kilomètres, cela m'impressionne beaucoup
déjà. J'aurais peut-être mis un mètre sur l'article
172. Peut-être qu'on peut trouver des réponses à l'article
172, dans vos cinq kilomètres, mais vous, qui avez quand même pris
connaissance, de façon détaillée, du projet de loi pour
pouvoir en faire une démonstration à ceux à qui vous avez
demandé un appui, vous avez sûrement dit: Le projet de loi dit
telle et telle chose. Qu'est-ce que vous pensez de l'article 172?
M. Lalande: Notre but n'était pas du tout de convaincre
les gens du bien-fondé de la loi 1. C'était de recueillir des
appuis. Il n'y a pas...
M. Lalonde: Alors, vous avez demandé aux gens: Est-ce que
vous appuyez la loi 1, tout simplement?
M. Lalande: Est-ce que vous êtes d'accord avec le projet de
loi no 1? Il n'était pas question ici de...
M. Lalonde: Cela me rassure beaucoup que vous ayez eu des appuis
au congrès du Parti québécois le contraire m'aurait
beaucoup surpris, mais cela ne fait rien, cela me rassure et aussi
à la Société Saint-Jean-Baptiste, qui est
déjà venue ici.
M. Lalande: Aux fêtes de la Saint-Jean-Baptiste, pas
à la société.
M. Lalonde: Mais est-ce qu'on n'a pas dit la
Société Saint-Jean-Baptiste de Chicoutimi aussi?
M. Lalande: C'est une erreur, c'est aux fêtes de la
Saint-Jean.
M. Lalonde: II y avait Chicoutimi.
Mme Lavoie-Roux: Les fêtes de la Saint-Jean-Baptiste.
M. Roy (Rodrigue): Non le MNQ à Chicoutimi, le Mouvement
du Québec français.
M. Lalonde: Et au Mouvement national des Québécois,
cela fait plaisir qu'il ait donné son appui, étant donné
qu'il a fait la même chose ici, en commission parlementaire.
M. Roy (Rodrigue): Ils sont du Québec, ces
gens-là.
M. Lalonde: Alors, vous ne pourriez pas me
dire si vous êtes d'accord que l'administration publique publie
une version anglaise des lois de l'Assemblée nationale?
M. Roy (Rodrigue): Je trouve que c'est tout à fait
détourner la question. Je pense, M. le député, que nous,
on aurait pu être contre le projet de loi et, pour notre plaisir, aller
voir ceux qui étaient pour. Je n'ai peut-être pas compris
votre...
M. Lalonde: Ecoutez, monsieur, je ne veux pas vous mettre mal
à l'aise, seulement, vous vous présentez à cette
commission parlementaire pour nous éclairer.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Jonquière, sur une question
de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense que, manifestement, nos invités s'en viennent ici comme
étant des mandataires de 20 000 personnes qui ont écrit des
lettres. Je pense que, manifestement également, leur prétention
n'est pas de venir convaincre les membres de la commission, ni de les informer,
mais simplement de venir rendre témoignage. Je pense que mon
collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys, qui est
lui-même avocat, comprendra, je pense, d'après les réponses
données par les invités, que, manifestement, ils se comportent
comme des mandataires qui ont reçu le mandat de 20 000 personnes de
venir rendre ce témoignage.
M. Lalonde: M. le Président, sur cette question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de
règlement.
M. Lalonde: Je pense que je serais d'accord avec le
député de Jonquière. Mes questions l'ont
démontré, c'était le but, étant donné que
c'est un organisme quand même assez important, la commission
parlementaire, j'aurais cru que ceux qui ont organisé cette initiative
auraient quand même des opinions sur des points particuliers qui ont
été soulevés par tous les organismes jusqu'à
maintenant. Je voulais simplement savoir si je pourrais avoir un
éclairage un peu plus convaincant que simplement l'aspect spectaculaire
de ce geste. Je dois malheureusement appuyer la remarque du
député de Gaspé relativement à la lueur de
l'éclairage qui nous est donné.
Le Président (M. Cardinal): Me permettez-vous, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, M. le député de
Jonquière, vous me direz que c'est un jugement de Salomon, vous le
prendrez comme vous voudrez, de dire que les deux députés ont
raison.
Mme Lavoie-Roux: Cela m'apparaît un bon jugement.
M. Lalonde: C'est une des premières fois qu'une question
de règlement nous réunit, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le
Président. C'est peut-être parce que ce sont deux disciples de
Thémis.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Lalonde: Vous raisonnez comme un président souvent
aussi.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, il reste quatre minutes à votre parti.
M. Grenier: Merci. Ce mémoire est un peu différent
des autres et le protocole qui entoure votre mémoire attire davantage
notre attention que d'autres. Il ressemble peut-être, dans son contexte,
à d'autres, puisqu'il représente un groupe d'une vingtaine de
mille personnes, comme vous nous le dites. Vous avez certainement des choses
qui nous emballent. Quand je vois la fleur de lis que M. Duplessis a fait
mettre sur son drapeau, j'applaudis à cela, et quand je vois surtout la
couleur, le beau bleu que vous avez là me fait plaisir
énormément aussi. Je vais vous dire que vous avez du
goût.
Il y a à retenir aussi que, contrairement à d'autres
associations qui ont représenté 20 000 membres, c'est que vous
êtes assurés, vous autres, de l'appui de ces gens-là, je
pense bien dans l'ensemble, c'est peut-être à 95%, ce qui est un
chiffre que d'autres associations n'ont pas atteint. J'ai vu les gens de la
Société Saint-Jean-Baptiste venir ici et M. Biron leur disait
qu'ils représentaient l'exécutif surtout, et qu'on voit à
pleine page que l'exécutif de la Société
Saint-Jean-Baptiste de Sherbrooke qui dit: "Manifeste sur le libre choix des
parents dans l'éducation", vous autres au moins vous avez le
mérite, avec ces 20 000 lettres, que ces personnes sont favorables au
projet de loi. C'est quelque chose et c'est quelque chose que d'autres
associations n'ont peut-être pas pu nous donner.
Ce que disait le député de Gaspé, qu'il
était appuyé, c'est que, pour le gouvernement, on ne peut pas
sentir pour nous que c'est un éclairage bien important, en ce sens que
cela n'apporte rien de neuf. Je me demandais si vous aviez participé
à la composition de la loi. Est-ce que vous avez participé
vous-mêmes à la composition de la loi? Est-ce que vous avez
été invités par le gouvernement à donner votre
point de vue? Parce qu'une loi, cela se prépare, surtout avec l'actuel
gouvernement. On va dans le peuple pour préparer les lois. On se rend
compte qu'on est retourné à plusieurs reprises devant le Parti
québécois. Est-ce que vous avez participé à
l'élaboration de la loi?
M. Roy (Rodrigue): Pas personnellement, non. Pourquoi?
M. Grenier: C'est étrange quand même, ce qu'on
disait tout à l'heure, c'est étrange que vous n'ayez pas une
seule recommandation. Tout correspond exactement à la loi. Vos demandes
correspondent exactement à la loi. J'aurais aimé trouver quelque
chose qui pouvait vous différencier sur certains aspects de la loi,
certains points de la loi. Il me semble que cela aurait montré plus
d'objectivité de la part de votre groupe, parce que vous savez qu'on
peut venir...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, un instant, s'il vous plaît! M. le
député de Verchères sur une question de
règlement.
M. Charbonneau: Je pense que les deux dernières
interventions sur les questions de règlement avaient très bien
situé le type de gens qui sont devant nous. J'ai l'impression que,
manifestement, le député de Mégantic-Compton n'a pas
compris.
M. Grenier: Non, j'ai très bien compris...
M. Charbonneau: Ce n'est pas une association, ce sont 20 000
citoyens qui sont ici.
M. Grenier: ...ce sont des individus ordinaires.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre! M. le
député de Verchères, s'il vous plaît, à
l'ordre!
M. Lalonde: Sur la question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, sur la question de règlement.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement, je pense qu'on ne doit pas reprocher aux
députés ici à cette table de poser des questions
pertinentes. Si des reproches doivent êtres faits, ce n'est même
pas à ces messieurs qui ont pris cette initiative pour laquelle, je
pense, on a eu quand même des mots très encourageants et des
félicitations. S'il y a des reproches à faire, c'est au ministre
d'avoir invité les gens qui ne sont pas en mesure de nous
éclairer. Je pense qu'on ne peut pas reprocher aux députés
de poser des questions pour savoir ce que les gens pensent des articles de la
loi. La loi, ce n'est pas seulement le titre, la Charte de la langue
française au Québec, c'est 175 ou 180 articles.
Je pense, M. le Président, que les questions du
député vous me permettrez, M. le député de
Mégantic-Compton de vous appuyer sont tout à fait
pertinentes.
Le Président (M. Cardinal): D'ailleurs, je cède la
parole au député de Mégantic-Compton, considérant
l'incident clos.
M. Grenier: Des lettres d'appui, on peut faire mourir quelqu'un
avec une corde, comme on peut le faire mourir en l'étouffant de fleurs,
vous savez, on meurt quand même. C'est plus intéressant de se
faire étouffer de fleurs pour le ministre que de recevoir ici ces
kilomètres qui viennent lui dire bravo, mais ces lettres peuvent
être envoyées directement au cabinet, c'est à cela qu'on
fait allusion. On peut passer avec vous, comme on a passé avec d'autres
genres... J'aime mieux le vôtre, je ne vous le cache pas. J'aime mieux le
vôtre que d'autres qu'on a reçus ici qui étaient des
mémoires individuels, qui ne nous ont rien donné de neuf, si ce
n'est qu'ils nous ont fait passer une heure et demie à perdre notre
temps ici, comme on en a perdu quelques-uns.
M. Charbonneau: Vous les avez félicités...
M. Grenier: Pardon?
M. Charbonneau: Vous les avez félicités.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Grenier: Non, je ne les ai pas félicités
ceux-là.
Le Président (M. Cardinal): Monsieur, à
l'ordre!
M. Grenier: Pourquoi ce député-là
intervient-il toujours dans mes débats?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, veuillez ignorer cette intervention et poursuivre,
s'il vous plaît!
M. Grenier: Etes-vous capable d'empêcher ce
député de toujours couper mes débats?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
M. Grenier: Je perds mes idées et on n'a plus rien
à dire avec des interventions qui arrivent...
M. Charbonneau: Soyez honnête avec vous-même,
monsieur.
M. Grenier: Oui, je suis honnête, je le suis autant que le
député en face de moi, M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Verchères...
M. Charbonneau: Les gens qui sont venus seuls ici, vous les avez
appuyés.
M. Grenier: ...qui n'a rien à dire et qui coupe mes propos
quand même et vous le laissez faire.
M. Charbonneau: II y a toujours bien des limites pour
charrier.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, je regrette. Vous savez que je n'ai jamais
laissé personne interrompre qui que ce soit...
M. Grenier: Surveillez-le.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, je vous surveille tous.
M. Charbonneau: Je ne vous mangerai pas.
Le Président (M. Cardinal): Avec quand même beaucoup
de sympathie, je vous prierais de poursuivre et de ne pas répondre
à des interventions qui ne sont pas permises.
M. Charbonneau: Je vais vous en citer des témoins qui sont
venus seuls.
M. Grenier: J'allais dire que ces lettres, M. le
Président, devaient être envoyées directement au ministre.
C'est cela que je voulais dire, parce qu'on n'apporte rien de neuf avec des
lettres comme cela. C'est cela que je voulais dire. On n'apporte rien de neuf
avec certains individus qui nous ont fait perdre une heure et demie à
les écouter et on sera privé de bons mémoires tout
à l'heure.
Je vais vous reposer la question avant la fin de l'après-midi.
D'excellents mémoires qui nous viennent comme cela, des gens qui se sont
penchés sur le problème sérieusement, on ne pourra pas les
entendre. Là, on perd une heure et demie à recevoir des lettres
qui auraient dû être envoyées au ministre. C'est cela. Je
n'ai rien à ajouter.
Le Président (M. Cardinal): Permettez-vous, M. le
député de...
M. Grenier: Ce n'est pas cela, une commission parlementaire.
Le Président (M. Cardinal): Permettez-vous, M. le
député de Mégantic-Compton? Si vous parlez de cette
association des Cantons de l'Est, j'ai, à la fin de la séance de
ce matin, distribué le télégramme et donné certains
renseignements à ce sujet. J'ai informé et le cabinet du ministre
et le secrétariat de la commission de la réception de ce
télégramme. Sur ce, je cède la parole, en dernier lieu,
pour terminer cette audition, à M. le député de
Châteauguay.
M. Lalonde: Question de règlement. Est-ce qu'il nous reste
du temps?
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Il vous reste du
temps. Je m'excuse, l'élan du député de
Mégantic-Compton m'a distrait pendant quelques secondes.
M. Grenier: La vérité du député de
Mégantic-Compton.
M. Charbonneau: ... vous avez demandé du temps additionnel
pour l'entente qui était...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Verchères.
M. Grenier: Ce n'est pas du temps additionnel, je parle sur mon
temps, M. le député.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Charbonneau: Une heure et demie, oui! Une Voix: ...
c'était pertinent, lui.
M. Grenier: A même le temps de l'Union Nationale.
M. Charbonneau: Une heure et demie.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Verchères, s'il vous plaît! M. le député de
Mégantic-Compton, personne n'a parlé sur votre temps. Vous savez
fort bien que cela fait quatre semaines que le temps des interventions non
permises et des questions de règlement est enlevé du temps de
chacun des partis.
M. Grenier: Je n'ai pas fait d'accusation, M. le
Président, jamais. C'est le député qui soulève
cela.
Le Président (M. Cardinal): Non, mais vous avez fait une
affirmation. De toute façon, à l'ordre, s'il vous plaît,
n'en parlons plus! M. le député D'Arcy McGee, vous avez la
parole, il vous reste sept minutes.
M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Très
se-reinement, je voudrais faire un préambule à mes questions. Je
pense que du côté de l'Opposition officielle et je ne
critique pas d'autres députés en disant ceci, mais je n'ai pas le
droit de parler pour d'autres que ceux qui constituent le groupe dont je suis
membre nous avons accueilli très courtoisement et avec
intérêt la présentation de ce mémoire. Je soutiens
respectueusement que, quand un témoignage est offert, il y a toujours
une question de crédibilité. Ce n'est pas dans un sens
péjoratif que je dis cela. Je voudrais que je sois bien compris à
cet égard. Les membres d'une commission parlementaire, comme un juge qui
siège pour présider un tribunal, ont le droit de savoir sur quoi
se fondent les témoignages et quelle est la solidité, si vous
voulez, de ce qui est présenté.
Voici que vous venez avec une série de lettres et ces lettres
sont, si je comprends bien, et je n'en ai pas pris connaissance,
essentiellement élogieu-ses à l'endroit du projet de loi et du
gouvernement.
M. le Président, j'ouvre une parenthèse à cet
égard, parce que c'est le ministre qui a laissé entendre, par ses
commentaires, que voici le peuple
qui parle. Le peuple est favorable au projet de loi, tandis que ceux qui
sont venus à tour de rôle s'exprimer en désaccord avec le
gouvernement sont une petite minorité de privilégiés qui
ont des intérêts à défendre.
M. Chevrette: ... j'en appelle au règlement.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Sur une question de règlement, M. le député
de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je serai calme. M. le Président, je voudrais
souligner que le député de D'Arcy McGee déforme les
paroles du ministre. Le ministre s'est adressé aux représentants
ici. Il n'a jamais traité de non-représentatifs les autres
représentants qui sont venus avec des points de vue différents.
C'est absolument faux. Vous relirez le journal des Débats. C'est dans
l'optique de la correction des faits que j'en appelle au règlement.
Le Président (m. Cardinal): D'accord.
M. Chevrette: C'est un procès d'intention qui est fait
là, mais c'est absolument faux.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys sur la question de règlement.
M. Lalonde: Sur cette question de règlement, vous savez,
on n'a pas la transcription immédiate des débats. Je pense que le
député de D'Arcy McGee est parfaitement autorisé à
exprimer l'interprétation qu'il a faite lui-même des paroles du
ministre. Je sais que le ministre a mentionné le mot "notable". Il a
fait part de quelque 300. Il faudrait quand même être sourd ou
aveugle pour ne pas comprendre là une référence à
d'autres interventions qui n'étaient pas favorables complètement
au projet de loi, qui n'étaient pas complètement adorables... et
je pense que le député de D'Arcy McGee est parfaitement dans son
droit d'interpréter les paroles et de dire son désaccord avec
l'attitude du ministre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys et M. le député de Joliette-Montcalm, je
vais prendre cette question de règlement en
délibéré pour la raison suivante: Si ça
intéresse les membres de la commission, il y avait, ce matin, au
début de la séance, à 10 h et quelques minutes, 100 heures
et 30 minutes de séance, 58 organismes ou individus qui avaient comparu.
Quand j'aurai relu les 400 ou 600 pages du journal des Débats, je
pourrai rendre ma décision.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je vous ai
déjà fait des compliments sur votre façon de diriger nos
travaux. Aujourd'hui, vous jouez le rôle de Salomon c'est la
deuxième fois est-ce que c'est dans la perspective de
l'arrivée du Congrès juif canadien?
Le Président (M. Cardinal): Je puis vous répondre.
J'espère que la façon dont les membres de la commission
fonctionneront nous permettra non seulement d'attendre, mais de constater cette
arrivée.
M. le député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Merci, M. le Président.
Voici la question que j'aimerais poser à ces messieurs qui nous
présentent les 20 000 lettres. Quand vous êtes allés
à des assemblées vous en avez mentionné plusieurs
est-ce que vous avez apporté avec vous le texte du projet de loi
et est-ce que vous en avez fait lecture aux intéressés? Est-ce
que vous vous êtes assurés que les auteurs de ces lettres avaient
effectivement lu le projet de loi et, donc, écrivaient en parfaite
connaissance de cause?
M. Roy (Rodrigue): M. le député est-ce que vous me
voyez dans le parc Jeanne-Mance, le soir de la Saint-Jean-Baptiste, expliquer
le projet de loi no 1? Notre but n'était pas d'expliquer. Il y a des
gens qui se sont promenés à travers la province pour expliquer
des spécialistes le projet de loi no 1. Nous, après
ces explications, après ce que les gens en ont connu par la radio, par
les journaux, on veut savoir: Etes-vous d'accord avec le projet de loi no 1?
Nous avions peu de temps pour agir, M. le député, et puis nous
voulions recueillir le plus grand nombre de lettres possible, malgré nos
moyens. Nous n'avions pas à expliquer. Il y a une chose que nous avons
oublié de mentionner. Nous avons passé une semaine à la
Place Desjardins. On nous a donné un petit emplacement, un kiosque.
Plusieurs personnes nous ont demandé si on avait le projet de loi avec
nous. On a dit: On ne l'a pas, mais si vous voulez, il y a un petit magasin...
Comment cela s'appelle-t-il?
La librairie de l'éditeur, je ne sais quoi.
M. Goldbloom: L'éditeur officiel?
M. Roy (Rodrigue): Voilà! C'est juste à
côté. Si vous voulez, allez là et vous viendrez
écrire votre lettre après. Renseignez-vous, si vous n'êtes
pas renseignés. Mon but, ce n'était pas de renseigner. J'ai dit:
Vous l'avez lu. Vous le connaissez. Etes-vous d'accord? Point.
M. Goldbloom: Je tiens à vous expliquer je me
permets de croire que vous n'êtes pas souvent venus comme opinants devant
une commission parlementaire que nous avons, dans le passé,
reçu de nombreux témoignages de cette même nature
c'est ce fait qui nous inspire ce genre de questions où il
était assez évident que les personnes s'exprimaient d'une
façon générale, suivant des impressions
récoltées de la lecture des journaux et de l'écoute de la
radio et de la télévision. Je n'ai pas l'habitude de condamner
les journalistes, mais je voudrais tout simplement réfléchir sur
le fait que ce sont des êtres humains et qu'ils ont les imperfections que
nous avons tous et que, des fois, quand on lit quelque chose dans un
journal ou quand on écoute quelque chose à la
télévision pendant généralement 45 secondes
si c'est 90 secondes, c'est beaucoup on n'est pas en pleine possession
d'un document important et, pourtant, on s'exprime là-dessus.
C'est normal dans un pays démocratique qu'il en soit ainsi, mais
tout contribue à nous donner une appréciation de la valeur des 20
000 lettres, et c'est cette appréciation que nous essayons de formuler.
C'est le sens des questions.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
D'Arcy McGee, vous avez terminé?
M. Goldbloom: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Merci. Oui, M.
Roy.
M. Roy (Rodrigue): J'ajouterais un commentaire. Pour donner plus
de crédibilité au geste de la personne qui a écrit sa
lettre, nous lui avons demandé de signer et d'inscrire son adresse.
Alors, il y a même moyen de contacter cette personne pour connaître
le degré de conviction de son geste.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Roy, et pour
terminer le débat, M. le député de Châteauguay.
M. Dussault: Merci, M. le Président. Messieurs de ce
mouvement, si on peut dire, des kilomètres d'appui, je tiens à
vous dire que, malgré tout ce qu'on dira au Québec dans les
prochains jours, les prochains mois, les prochaines années, rien
n'arrivera à éteindre la fierté des
Québécois.
Je vous avoue que cela fait énormément plaisir à
des députés ministériels de voir devant eux ces rouleaux
de kilomètres d'appui. Je pense que vous n'auriez pas écrit de
mémoire, vous n'auriez rien dit ici aujourd'hui, que vous seriez
demeurés les plus représentatifs des groupes qui sont venus nous
parler ici car ces écrits-là, c'est ce que les gens pensent,
c'est cela que vous venez nous porter: ce que les gens en pensent.
Ce geste prend beaucoup de sens pour nous pour les raisons suivantes:
D'abord, ces témoignages ont du poids. Les lettres que les gens ont
écrites sont plus engageantes que quelque pétition que nous
pourrions recevoir. Vous savez ce qu'est une pétition? Habituellement,
c'est un cadre réduit, un petit texte sur lequel on se prononce.
Les gens qui vous ont remis ces lettres ont réfléchi un
peu, un certain temps, sur quelque chose et vous l'ont remis. Ils savaient en
plus que leur pensée, le petit papier qu'ils vous remettaient, allait
s'ajouter à d'autres papiers que d'autres allaient vous remettre. Ces
gens savaient que leur papier allait s'ajouter à quelque chose qui
serait une sorte de chaîne. Je pense qu'on peut dire que ce que vous nous
apportez ici est un symbole, un symbole de solidarité. C'est dans ce
sens, d'abord, qu'il faut prendre ce que vous venez nous livrer ici
aujourd'hui.
C'est en somme le symbole d'une solidarité. C'est, en fin de
compte, cinq kilomètres de fierté que vous avez enroulés,
que vous êtes venus nous porter. C'est exactement comme cela que tous ici
devrions prendre ce que vous nous apportez.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant. A l'ordre, s'il
vous plaît! M. le député de D'Arcy McGee, sur une question
de règlement.
M. Goldbloom: M. le Président, je n'ai pas voulu
interrompre le député de Châteauguay, mais il a
continué dans la même ligne d'arguments. Je ne voudrais pas que
ses paroles soient comprises comme suggérant que ceux qui ne sont pas
d'accord n'ont pas cette même fierté qu'il invoque. Je crois que
c'est exactement de la même façon que nous avons
interprété le geste posé. Ce n'est pas de façon
désobligeante que nous l'avons fait. La fierté existe des deux
côtés de la table et à un degré égal. Elle
s'exprime un peu différemment selon le cas.
Le Président (M. Cardinal): Votre question de
règlement est acceptée, M. le député de D'Arcy
McGee, en vertu de l'article 96. M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, je laisse le
député de D'Arcy McGee à ses interprétations;
d'ailleurs, nous n'en serons pas à la première ici. Le chiffre de
20 000 que vous avez rapporté nous rappelle aussi et je pense
qu'il n'est pas mauvais de le rappeler qu'il y a eu ici, devant
l'Assemblée nationale, lors de l'adoption de la loi 22, 20 000 personnes
qui sont venues manifester contre cette loi, qui ont aussi posé un geste
concret, un geste aussi concret que celui que nous constatons ici. Les 20 000
reviennent, mais, cette fois-ci, avec une tout autre portée.
Je tiens, au nom de tous les députés du parti
ministériel, à vous remercier de ce témoignage et soyez
sûrs que nous allons nous souvenir de ce geste. Merci.
Le Président (M. Cardinal): Merci. Est-ce que M. Roy ou
son collègue a quelque chose à ajouter?
M. Roy (Rodrigue): Personnellement, je n'ai rien à
ajouter.
M. Lalande: Nous vous remercions de nous avoir reçus
à la commission parlementaire.
Le Président (M. Cardinal): Alors, M. Rodrigue Roy, M.
Pierre Lalande, au nom de la commission, je vous remercie de votre
témoignage. Je le prends dans ce sens et je vous remercie de votre
patience. Je vais, pour aider la commission et aussi pour vous aider, suspendre
les travaux de cette commission pendant deux minutes pour que vous puissiez
transmettre, par la voie que vous jugez à propos, ces documents au
ministre d'Etat au développement culturel.
Les travaux de cette commission sont suspendus pendant deux minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 46)
Reprise de la séance à 17 h 49
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Puis-je demander à chacun de regagner son fauteuil?
Messieurs les députés, à l'ordre, s'il vous
plaît! Messieurs les députés, à l'ordre, s'il vous
plaît. Monsieur le député de Pointe-Claire. Même s'il
n'est pas membre de la commission, il n'y a pas de conversation pendant que la
séance se poursuit.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Un instant, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys; pour que la commission fonctionne
dans son mandat, j'invite tout d'abord les membres de la CSN à se
présenter devant nous, c'est-à-dire la
Confédération des syndicats nationaux, mémoire no 37.
Pendant qu'ils se présentent, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, concernant le mémoire
no 106, vous nous avez distribué une copie du télégramme
ce matin, je crois; vous nous avez dit que c'était entre les mains du
ministre, je crois?
Le Président (M. Cardinal): C'est ça.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez eu des nouvelles à savoir
si ce groupe va être invité et quand?
Le Président (M. Cardinal): Non. Je n'ai aucune nouvelle
à cet effet et je ne voudrais pas ici passer à côté
de ce qui pourrait paraître une responsabilité. J'ai
indiqué hier que volontairement, je n'avais les listes des gens
invités que la veille ou au moment même du début d'une
séance, parce que je ne voulais pas me mêler de la
stratégie des partis. Par conséquent, je puis me renseigner, mais
je ne suis pas en mesure, à ce moment-ci, sauf ce que j'en ai dit ce
matin, de vous informer s'il y a eu suite à ma lettre et à mon
message.
M. Grenier: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Permettez que je donne suite à la question que
j'avais posée hier, relativement à ce mémoire de Eastern
Township Citizen Association. On a 58 mémoires entendus, ce matin en
tout cas, la question est qu'on entend de plus en plus parler... Chaque fois
qu'on fait mention que l'éclai- rage est plus important pour nous, tout
de suite, on tente de nous dire: Est-ce que vous êtes suffisamment
éclairés? C'est rendu au point que ça nous fait sentir que
la commission pourrait tirer à sa fin.
Si c'était ça, j'aimerais bien que vous nous le fassiez
savoir, que vous soyez le porte-parole du ministre, à ce
moment-là, ou qu'il vienne lui-même nous dire si c'est son
intention de faire discontinuer les séances de cette commission, afin
qu'on puisse juger, parmi les quelque 200 autres mémoires, lesquels il
nous faudra entendre. J'ai bien l'impression qu'on ne pourra pas s'en tenir
à ce qu'on a entendu jusqu'à présent. Il y a certainement
d'autres mémoires importants. C'en est un parmi tant d'autres, le
mémoire 106, qu'il faudra absolument entendre, de même que
plusieurs dizaines d'autres.
Est-ce qu'il y aurait lieu d'avoir, ce soir, à la reprise de la
commission, une indication qui nous laissera savoir combien de temps le
gouvernement a l'intention de faire siéger la commission, parce que
c'est quand même lui qui va décider, et quelles sortes de
mémoires il a l'intention de nous faire entendre?
Le Président (M. Cardinal): Si vous le permettez, M. le
député de Mégantic-Compton, vous savez que comme
président, je ne puis répondre à votre question. Je ne
représente pas le ministre, je ne représente pas le gouvernement.
Je ne suis, comme je l'ai indiqué souvent, que celui qui sert
l'Assemblée nationale en commission, présentement.
Je pense que votre question, si vous le permettez, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, devrait s'adresser au ministre ce
soir, au début de la séance à 20 h 15. Je ne puis
certainement pas répondre en son nom. Je veux compléter ma
réponse.
D'autre part, j'ai déjà indiqué dans le
passé, et je reviens sur cette question et cette réponse: ce
n'est pas nécessairement le gouvernement qui décide de la fin des
travaux de la commission. C'est, soit la commission elle-même, en vertu
de l'article 118-A, soit le leader parlementaire qui le demande, en vertu de
l'article 156, soit une motion d'ajournement ou simplement le fait qu'on ne
nous appelle pas, par avis ou par motion en Chambre. Je ne puis préjuger
de ces décisions qui appartiennent, soit à la commission, soit au
leader parlementaire, soit au ministre. Par conséquent, je vous
inviterais, si vous êtes ici avec nous ce soir je pense que vous y
serez, parce que c'est une même séance à poser la
question au ministre.
J'ai reconnu d'abord le député de Marguerite-Bourgeoys,
ensuite, Mme le député de L'Acadie.
M. Lalonde: M. le Président, c'est un peu dans la
même foulée que les propos du député de
Mégantic-Compton. On voit qu'il y a des députés qui sont
tellement informés qu'ils ne se présentent plus à cette
commission, comme le député de Taschereau. Naturellement, les
occupations du ministre le retiennent à l'extérieur de la
commis-
sion, d'après ce que je comprends. Il est venu recevoir ses
hommages et ses compliments, et il est parti.
J'aimerais savoir, M. le Président c'est seulement
à vous que je puis m'adresser actuellement si vous avez
reçu d'autres demandes particulières, par
télégramme ou autrement, d'organismes qui désirent se
faire entendre.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, et encore aujourd'hui. Chaque
fois, j'emploie le même procédé: J'accuse
immédiatement réception et j'envoie immédiatement copie au
ministre d'Etat au développement culturel et au secrétariat de la
commission. Je le fais "instanter".
M. Lalonde: Est-ce que aussi "instanter" en fait, on ne
peut pas vous le demander, mais au moins dans un délai relativement
court comme vous avez eu la gentillesse de le faire ce matin en nous
distribuant une copie du télégramme relatif au mémoire no
106, vous pourriez nous informer du nombre de télégrammes que
vous avez reçus et lesquels?
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Il se produit un
problème et je vais être obligé de couper tout. Quand
même, messieurs les porte-parole de la CSN, vers 18 heures il se produit
toujours ce genre de chose. Vous reviendrez avec nous à 20 h 15.
Sur cela je dois suspendre les travaux de la commission jusqu'à
20 h 15.
(Suspension de la séance à 17 h 56)
Reprise de la séance à 20 h 21
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Oui, M. le député de Gaspé? Sur quel
problème?
Motion pour entendre l'Association des
éducateurs de langue française
M. Le Moignan: C'est un problème qui est très
facile à expliquer. Je voudrais profiter de la circonstance pour
présenter une motion à l'avantage de cette commission et, en
même temps, pour obtenir un meilleur éclairage, étant
donné que nous tenons à être parfaitement renseignés
sur les différents aspects du projet de loi sur la Charte de la langue.
Nous constatons, en cours de route, que beaucoup de groupes importants qui ont
une très grande influence, ici dans le Québec, pourraient
certainement nous apporter de judicieux conseils et pourraient peut-être
aider le gouvernement dans cette mission très noble, très
louable, celle d'implanter une fois pour toutes un véritable projet de
langue qui corresponde aux objectifs de cette société
québécoise que, tous ensemble, nous aimerions fonder, ici au
Québec. Parmi ces groupes, il en est un qui, je pense, a joué, au
point de vue de la francophonie, un rôle très important. Ce serait
dommage que nous n'invitions pas ce groupe à venir nous rencontrer. Si
j'insiste sur ce point, ce n'est pas pour tuer le temps de la commission. C'est
simplement pour vous dire l'importance de ce groupe que, déjà,
plusieurs connaissent parmi les membres de cette commission. J'ai eu le bonheur
d'en faire partie moi-même dans le passé, à
différentes reprises. Je suis convaincu qu'avec le support que nous
aurons, surtout cet autre son de cloche d'un groupe qui est très bien
intentionné... On ne peut pas du tout juger de ses intentions.
Alors, je suis convaincu que ce groupe-là pourra nous apporter
quelque chose de très positif. Le groupe je peux le mentionner
tout de suite c'est l'ACELF, l'Association canadienne des
éducateurs de langue française. C'est un groupe qui oeuvre non
seulement ici au Québec, mais qui a des contacts très
étroits avec tous les groupes francophones de tout le Canada. L'ACELF
tient ses congrès annuels dans l'une ou l'autre des provinces du pays.
Je crois qu'un groupement de ce genre pourrait très bien nous expliquer
la situation des Canadiens français hors Québec et, surtout, nous
parler de l'impact que ce projet de loi aura non seulement ici sur notre
collectivité, mais surtout les réactions qui nous viennent de
l'extérieur...
On a déjà dit que les Québécois ou les
Canadiens français du Québec n'avaient pas à se
préoccuper du sort de leurs frères. C'est un peu
répéter les paroles de Caïn: Suis-je le gardien de mon
frère? Mais s'il est vrai que nos minorités ne peuvent pas, dans
certains milieux, compter sur l'appui de leurs gouvernements provinciaux,
peut-être regardent-ils le Québec comme leur planche de salut.
Quand nous aurons notre loi,
que nous voulons la plus parfaite possible, à ce
moment-là, je suis convaincu que les provinces anglaises... Il ne
faudrait pas oublier que certaines ont déjà commencé,
comme le Nouveau-Brunswick. Admettons qu'il y ait 35% ou 38% de francophones
qui aient leurs commissions scolaires françaises, le bilinguisme
à l'Assemblée législative, comme à Fredericton, la
traduction simultanée... Je crois que l'exemple de ces groupes serait de
nature à nous aider, à nous stimuler, peut-être à
nous faire mieux comprendre non seulement le problème des
minorités, mais surtout notre problème, nous, de majorité,
et le rôle que nous pourrions jouer au Québec, tenant compte un
peu de toutes les minorités françaises.
Je vais vous lire cette motion, qui sera peut-être acceptée
sans discussion. A ce moment-là, je n'aurai pas pris le temps des
témoins qui ont hâte de se faire entendre. Est-ce que vous avez
reçu la copie...
Le Président (M. Cardinal): Si vous voulez lire votre
motion, M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Je vais lire cette motion que je transmets
à l'instant même au président: "Que l'ACELF soit
invitée à se présenter devant cette commission pour
expliquer l'impact de la loi 1 sur l'ensemble des minorités
françaises vivant au Canada, hors Québec... "et s'il faut
ajouter une date"...le 15 juillet 1977".
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Gaspé, je ne veux pas me prononcer immédiatement sur la
recevabilité de la motion. J'étais en train de me demander si ce
n'étaient pas les évê-ques que vous convoquiez devant la
commission.
M. Le Moignan: Les évêques, c'est dans une autre
motion. M. le Président, si vous le permettez... L'ACELF a
déjà un mémoire, no 36...
Le Président (M. Cardinal): Exactement. C'est ce que je
voulais vous souligner. L'Association canadienne d'éducation de langue
française, a/s de M. Raymond Beauchemin, Secrétaire
général, 980, chemin Saint-Louis, Sillery, Québec, a
déjà présenté un mémoire, no 36.
M. Le Moignan: C'est parce que je n'avais pas la liste des
mémoires et j'avais un sérieux doute. Alors, si elle est
déjà inscrite... Je vous ai dit que cela prendrait une
minute.
Le Président (M. Cardinal): Je pense que le
député de Gaspé comprendra que la motion n'est pas
recevable, parce que ces gens ont déjà déposé un
mémoire et que, normalement, ils seraient convoqués dans l'ordre
ordinaire.
Je vais être très candide, si on peut ainsi dire. Je ne
pense pas que l'on puisse convoquer des gens qui déjà,
volontairement, ont demandé à comparaître devant la
commission.
Tout ce qu'on pourrait demander, si vous permettez que je termine, est
qu'on accélère leur présentation, mais qu'on ne puisse pas
les convoquer.
Oui, M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Si vous permettez, M. le Président. On
entend toutes sortes de rumeurs. On dit que cette commission, pourrait
peut-être peut-être, je ne mentionne pas le président
qui parle, ce sont des rumeurs se terminer cette semaine,
peut-être la semaine prochaine. Personnellement, comme je l'ai dit au
début, nous sommes intéressés à écouter tous
les groupes qui ont sérieusement préparé un
mémoire.
En supposant que vous ne puissiez pas disposer du temps
nécessaire pour les 264 ou 270 mémoires, peut-être
serait-il bon de retenir les groupes qui nous semblent les plus
représentatifs, ceux qui ont à présider au choix de ces
mémoires, et je crois que l'ACELF, sans lui envoyer une invitation
spéciale, pourrait être convoquée, d'autant plus qu'elle a
son mémoire.
Le Président (M. Cardinal): Avant que je ne rende une
décision, je donne la parole au député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Vous avez déjà entamé
légèrement la question de la recevabilité en indiquant
qu'il s'agissait d'un organisme qui avait déjà envoyé un
mémoire au secrétariat des commissions parlementaires.
Vos paroles, j'espère que j'interprète correctement, m'ont
indiqué que vous faisiez une différence ertre des groupes qui
avaient déjà indiqué leur intention d'être entendus
en envoyant un mémoire et ceux qui n'auraient pas indiqué une
telle intention. Je me demande, M. le Président, dans quelle mesure
cette approche, cette attitude est compréhensible, dans quelle mesure
une motion d'un député serait recevable s'il s'agissait de
personnes qui n'ont pas l'intention de venir devant cette commission et ne
serait pas recevable à l'égard d'organismes qui ont
déjà indiqué leur intention. Je fais appel, M. le
Président, à votre grande sagesse pour vous inviter à
considérer recevable une motion de cette commission, une motion d'un
député de cette commission, donc qui deviendrait, si elle
était acceptée, une motion de la commission, une
résolution de la commission; une telle résolution serait, je
pense, recevable même à l'égard de quelqu'un qui a
indiqué son intention d'être entendu. Il s'agit de
déterminer qui va être entendu. Est-il possible de penser que les
264 mémoires feront l'objet de présentation ici? Je pense que
oui, il n'y a rien dans nos règlements qui l'empêche. Mais qu'un
député demande de façon formelle qu'une personne, qu'un
organisme soit entendu, soit invité, je pense que c'est tout à
fait recevable. La commission parlementaire est maîtresse de ses travaux
en ce qui concerne qui va être entendu ou non. Je sais naturellement que
jusqu'à maintenant et suivant la tradition, c'est le ministre qui fait
un certain tri des invités et jusqu'à maintenant on en a entendu
de toute sorte; mais je ne vois pas dans quelle mesure ou pour quelle raison,
enfin je trouverais tout à fait incompréhensible qu'une motion
d'un député, indiquant un mémoire en particulier,
indiquant un intérêt, de-
mandant à la commission parlementaire de bien déterminer
quels sont les mémoires que cette commission parlementaire veut
entendre... Je ne vois pas comment, en vertu de quel règlement, cette
motion ne serait pas recevable.
Le Président (M. Cardinal): M. te député de
Marguerite-Bourgeoys, vous avez raison, je me suis déjà
engagé sur la voie, mais je n'ai pas dit qu'elle était non
recevable. D'ailleurs, tous les voeux pieux venant du député de
Gaspé pourraient être recevables. J'ai dit: voeux pieux.
M. Le Moignan: C'est beau ça, on va en formuler
d'autres.
Le Président (M. Cardinal): Je n'ai pas terminé, M.
le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Je n'ai pas dit ce soir.
Le Président (M. Cardinal): Vous savez quel est le mandat
de la commission, je l'ai mentionné à plusieurs reprises. C'est
d'entendre des témoins. Pour l'organisation même des travaux de
cette commission, cette étape de convocation est en voie et, chaque
jour, elle est exécutée. On a eu d'ailleurs des motions
préliminaires et des motions additionnelles à ce sujet. Si on
fait motion pour que tel témoin ou pour que tous les témoins
soient entendus, je me permets de mentionner que la motion serait, je ne dis
pas non recevable, je dis inutile, puisque c'est là l'ordre de la
Chambre, le mandat de la commission.
Cette motion, ce soir, me paraît, pour le moins,
prématurée puisque la commission ne s'est pas encore
déclarée suffisamment informée en vertu de l'article
118-A, alinéa 6. La commission n'a pas encore signifié qu'elle ne
voulait pas entendre tous les témoins et, dans ce cas, c'est un des
témoins qui, volontairement, s'est offert à
comparaître.
Si on fait motion pour entendre tel ou tel témoin, ce qui a
déjà été fait à deux ou trois reprises,
parfois sous forme de motion, parfois comme le député de
Mégantic-Compton l'a fait sous forme de voeu dans son cas,
je ne sais pas si c'est pieux avant tel autre ou de
préférence à tel autre ou à tel autre, il est
difficile de trancher cette question. Cela me paraît si vous me
permettez, je vais conclure rapidement inadmissible, parce que l'ordre
de convocation et l'ordre du jour, je le répète à chaque
séance, sont assujettis non pas à la discrétion de la
présidence, ni même à la discrétion du ministre
d'Etat au développement culturel, mais à l'article 118-A.
D'autre part, j'admettrai que la commission... Je m'excuse, je
m'interromps moi-même; j'ai vu que le député de
Marguerite-Bourgeoys voulait lever la main. Je puis le laisser parler avant que
je ne rende ma décision, parce qu'après, elle sera rendue.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Nous en sommes rendus
là quand même.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys, Mme le
député de L'Acadie et M. le député de D'Arcy
McGee.
M. Lalonde: M. le Président, je vous demande une directive
qui m'est inspirée par vos dernières paroles. Vous avez dit, je
dois le reconnaître, avec certaine raison, qu'il serait
prématuré de désigner un des 200 autres mémoires
qui n'ont pas été entendus, étant donné que c'est
justement le mandat de la commission de les entendre. Vous avez
mentionné surtout qu'il n'y avait pas eu de motion en vertu de l'article
118-A présentée à cette commission.
Ma demande de directive est la suivante: Si, dans l'hypothèse que
je ne souhaite pas, les jours prochains, un membre de cette commission fasse
motion en vertu de l'article 118-A je crois que c'est le sixième
paragraphe est-ce qu'après que cette motion aurait
été faite, une motion comme celle du député de
Gaspé serait recevable?
Le Président (M. Cardinal): Je vais répondre. La
question est facile, mais la réponse est plus difficile, parce qu'elle
engage l'avenir. La commission est sans cesse à chacune des
séances, mais dans le cadre de chacune des séances et suivant
l'avis ou la motion ou l'ordre de l'assemblée, si nous dépassons
la session. Il faut penser que la session pourrait se terminer, que la
commission pourrait continuer et que nous pourrions vivre en vertu d'un ordre
permanent de la Chambre.
Dans ce cadre, la commission, étant maîtresse de ses
travaux, elle peut, à chaque nouvelle séance, sauf dans certains
cas prévus par le règlement, établir, non pas de nouvelles
règles concernant le règlement, mais de nouvelles convocations.
Elle pourra même cesser ses travaux, je l'ai mentionné à
plusieurs reprises.
Serait-il admissible qu'en vertu du principe que la commission est
maîtresse de ses travaux, dans le cadre de son mandat reçu, l'on
décide, dans une soirée, à telle heure et tel jour, de
définir à tout jamais le cadre des débats de cette
commission?
Vous voyez, je ne rends pas une décision à la suite de
votre question, j'en pose une qui est plus grave.
M. Lalonde: Si vous me permettez, M. le Président,
à ce moment-là, comment se fait-il qu'une motion pour entendre le
président de la Régie de la langue française, le 20
juillet, ait été acceptée?
Le Président (M. Cardinal): Pardon. Elle a
été déclarée recevable...
M. Lalonde: Elle a été acceptée après
coup.
Le Président (M. Cardinal): ... et la commission l'a
ensuite adoptée.
M. Lalonde: Oui.
Le Président (M. Cardinal): Justement, je pense que c'est
cohérent avec ce que je viens de mentionner. Nous ne savons pas quand
les travaux de cette commission se termineront et ce que vous venez de dire, M.
le député de Marguerite-Bourgeoys, indique justement que la
commission est maîtresse de ses travaux, tant que l'Assemblée
nationale... ou que la commission elle-même il y a une
espèce de pétition de principe dans ce que je vais dire
n'ait pas décidé d'en faire autrement.
Nous pourrions décider ce soir, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, d'inviter le 30 août tel groupe, mais nous
pourrions décider demain soir, article 118-A paragraphe 6, comme vous
l'avez si bien mentionné, que nous sommes suffisamment
informés...
M. Lalonde: M. le Président, je ne veux pas vous
interrompre, mais il me semble qu'il s'agit...
Le Président (M. Cardinal): Non, vous ne m'interrompez
pas.
M. Lalonde: ... d'une espèce d'échange ici.
D'accord. Autrement dit, le fait que la commission ait adopté une motion
pour entendre un organisme ou une personne le 20 juillet pour les fins de la
discussion n'empêche pas, quoique, à ce moment-là, je me
réserve tous les arguments pour combattre un tel ajournement,
mais...
Le Président (M. Cardinal): Je n'en doute point.
M. Lalonde: ... il reste que, quand même, au niveau de la
recevabilité, la motion du député de Gaspé
participe des mêmes caractères que la motion que j'avais faite et
qui a été acceptée. Elle a d'abord été
déclarée recevable, puis acceptée.
Le Président (M. Cardinal): Non. Je m'excuse, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, nous avons un dialogue
présentement, j'en suis fort aise et je vous en remercie. C'est que
votre motion invitait quelqu'un qui n'était pas prévu dans la
liste des mémoires déposés, tandis que la motion du
député de Gaspé invite quelqu'un d'une façon
préférentielle, parmi la liste des mémoires
déposés.
M. Lalonde: M. le Président, je reviens à ma
première question. Je trouverais incompréhensible qu'on ne puisse
pas inviter particulièrement quelqu'un qui a déjà
exprimé son intention d'être entendu, alors qu'on pourrait le
faire à propos de quelqu'un qui ne sait même pas qu'il devait
être invité.
Motion prise en délibéré
Le Président (M. Cardinal): C'est là toute la
différence et, si vous me poussez au bout, je vais vous dire que cette
motion étant très importante vous y attachez beaucoup
d'importance, M. le député de Marguerite-Bourgeoys je la
prendrai en délibéré.
M. Lalonde: M. le Président, vous indiquez que la
recevabilité est prise en délibéré?
Le Président (M. Cardinal): C'est cela, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, vous allez prendre cela en
délibéré maintenant ou vous allez rendre votre jugement
plus tard?
Le Président (M. Cardinal): Quand je dis que c'est pris en
délibéré, cela veut dire que je ne suspends pas, que nous
continuons les travaux de la commission et qu'une fois que j'aurai suffisamment
réfléchi, je rendrai la décision.
M. le député, sur une question de?
M. Grenier: Pour demander une directive...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: ...suite à la question que je vous ai
posée à 17 h 55. Etant donné que le ministre est ici
je sais qu'il était retenu cet après-midi par les travaux
réguliers qui concernent le cabinet le mercredi après-midi
est-ce que je pourrais savoir du ministre si c'est son intention de convoquer
et nous donner une date, si c'est possible... On reprend la question au complet
sur ce qu'on entend dire de plus en plus; il serait peut-être bon qu'on
arrête aussi ce qu'on entend dire en coulisse: Est-ce son intention de
recevoir tous les mémoires? Il en reste au-delà de 200, à
ce qu'on nous dit, est-ce son intention de recevoir The Eastern Townships
Citizens Association, de façon à nous rendre la question bien
claire sur ce dossier, et dans quel délai, si cela doit se faire?
M. Laurin: Ce groupe sera convoqué dès que
possible.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que je comprends qu'il
sera convoqué?
M. Laurin: Dès que possible.
M. Lalonde: C'est seulement la question de temps qu'on ne sait
pas.
Une Voix: D'accord.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Mme le
député de L'Acadie avait demandé la parole.
Mme Lavoie-Roux: Etant donné que vous avez pris la
question en délibéré, je ne sais pas si je puis encore...
en fait, c'est relié d'une façon à la motion de...
Le Président (M. Cardinal): Non, je m'excuse, on ne peut
plus parler de cette motion. Elle est prise en
délibéré.
Mme Lavoie-Roux: Alors, je vais poser une question. Est-ce que,
par exemple, on pourrait
avoir une certaine assurance personne ne se fait d'illusion ici,
à moins que nous ayons un mandat de siéger d'une façon
permanente comme vous avez dit tout à l'heure que nous allons
entendre les 224 autres mémoires? Il reste que, au tout départ,
vous vous en souviendrez, nous avions eu cette longue discussion au sujet de la
procédure que nous utiliserions quant à la répartition du
temps. Pour ma part, j'avais fait un souhait, sachant qu'un jour ou l'autre, il
y aurait une limite imposée au nombre de mémoires que nous
entendrions, pour que le ministre d'Etat au développement culturel, dans
la mesure où c'est possible et selon les coutumes, puisse
peut-être nous consulter, à savoir si on attachait plus
d'importance, quand il s'agit de faire un choix plus restreint des
mémoires qui peuvent être entendus. Si on avait une certaine
assurance de la façon dont les événements vont se
dérouler, peut-être que des motions comme celles du
député de Gaspé ne surviendraient pas, de même que
d'autres motions de même nature qui pourraient survenir et qui par.-tent
non pas comme certains pourront tenter de l'interpréter, en
parlant ce matin de "mini-filibuster" vraiment d'un intérêt
précis pour certains mémoires. Je pourrais vous en nommer
d'autres qui sont aussi d'un grand intérêt. S'il y en a qui ont
pris connaissance du mémoire de la Chambre d'immeubles de
Montréal, par exemple, il y a là plusieurs amendements
recommandés, et je pourrais en nommer d'autres. Je pense que cela
pourrait peut-être permettre de clore cette discussion beaucoup plus
rapidement.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie, je vous remercie beaucoup de votre intervention. Cela me permettra
peut-être de clarifier une situation. Il y a deux catégories de
témoins ou d'invités possibles.
Il y a ceux qui ont déjà volontairement et cela a
été dit à cette commission présenté
un mémoire et qui désireraient être entendus par cette
commission et ceux que la commission, de son propre chef, avec ou sans
débat, invite ou convoque. Parmi ceux qui, volontairement, ont
présenté un mémoire, il peut y avoir, à mon humble
opinion, le voeu de la commission que certains soient entendus de façon
prioritaire. Cependant, il ne faut pas oublier que la commission est une
commission assez, si on peut ainsi employer ce pléonasme,
extraordinaire, en ce sens qu'elle est composée de 20 membres, que
chacun des membres pourrait, vis-à-vis non pas de ses
intérêts personnels, mais de ce qui l'intéresse d'une
façon intellectuelle ou sentimentale ou autre, invoquer une
préférence pour un groupe donné, ceci de nature non pas
d'une motion et là, je ne veux pas préjuger de ce que je
rendrai comme décision vis-à-vis de la motion du
député de Gaspé mais invoquer une
préférence qui ferait que j'aurais devant moi au moins 19 voeux
de préférence. Or, j'ai mentionné à plusieurs
reprises que, sauf pendant la deuxième semaine de la commission
où la commission m'avait donné un mandat particulier, restreint
et spécial, que sauf cette période-là, c'est au cabinet du
ministre et ce n'est pas parce que je veux lancer la balle au ministre,
il le sait fort bien, il a accepté sa responsabilité
d'établir cette théorie le mot est français
de convocation.
J'ai déjà mentionné à cette commission que
nous avions tous ensemble tenté de convoquer des gens
représentatifs de diverses sphères, diverses opinions, des
groupes tantôt francophones, tantôt anglophones, tantôt de
langues diverses. Nous savons quelle langue nous avons entendue hier soir, pour
ceux qui l'ont comprise et, par conséquent, la question que vous
m'adressez je ne veux pas passer, comme on dit dans un langage plus ou
moins vulgaire, le paquet à quelqu'un d'autre est beaucoup plus
adressée à celui qui, présentement, par ses
fonctionnaires, par ses collaborateurs, établit les convocations. Vous
savez qu'il y a déjà des convocations de prévues. Ce soir,
je donnerai la liste des gens qui n'ont pas encore comparu et qui sont
invités pour demain. A la suite de motions, vous savez qu'il y a
déjà des gens d'invités pour des dates précises.
Par conséquent, je ne peux pas, comme président, décider
de la préséance d'un mémoire sur un autre, à moins
que, ou bien le ministre n'émette son opinion ou que, parce que la
commission est maîtresse de ses travaux, unanimement ou à la suite
d'un vote, elle n'émette son désir d'une façon
formelle.
Mme La voie-Roux: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: M. le Président, tous les groupes ou la
théorie des groupes, comme vous le dites, seront invités,
à tour de rôle, à présenter leurs mémoires
devant la commission, mais je pense que, pour le moment, il serait poli et
bienséant d'entendre les invités que nous avons devant nous, au
lieu de tuer le temps par des motions qui pourraient parfaitement venir
après que nous aurons entendu nos invités.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
D'Arcy McGee et, ensuite, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Goldbloom: M. le Président, je reconnais le droit
parfait du ministre d'exprimer son avis, mais je crois qu'il faut quand
même accorder une importance considérable aux questions qui vous
sont posées et que vous avez accepté de prendre en
délibéré.
J'aimerais vous demander, en quelque sorte, une directive.
Peut-être cela serait-il une question que vous voudrez ajouter à
ce que vous avez déjà pris en délibéré.
Ma question s'inspire d'un commentaire que vous avez fait
vous-même, il y a quelques instants. J'aimerais vous demander si, dans
votre esprit, une motion, pour être recevable, doit répondre
à un critère d'utilité. Je prends l'exemple des motions
que nous avons de temps en temps en Chambre pour que soit substitué au
nom d'un dé-
puté déjà inscrit à la liste des membres
d'une commission le nom d'un autre député. Pourtant, la
commission pourrait tout simplement faire cette substitution et la motion,
à cet égard, ne serait pas nécessairement utile.
Le Président (M. Cardinal): Pourrais-je interrompre? Le
permettez-vous? Il y a peut-être abus de cette procédure en
Chambre. Normalement, cette motion en Chambre devrait être faite pour
remplacer de façon permanente un membre d'une commission
désigné par la commission de l'Assemblée nationale.
M. Goldbloom: Je comprends cela, M. le Président, mais le
fait demeure qu'à ma mémoire personne n'a contesté la
recevabilité d'une telle motion, parce qu'elle constitue en quelque
sorte un pléonasme législatif. Je voudrais que vous vous penchiez
sur cet aspect de la question. J'ai cru comprendre que vous évoquiez la
possibilité qu'une motion ne soit pas recevable parce qu'aux yeux du
président, aux yeux de la présidence, elle ne serait pas
utile.
Le Président (M. Cardinal): Je vous remercie de votre
question, cela va me permettre de définir davantage ma position. Je
viens déjà de donner une partie de la réponse en vous
disant que l'Assemblée et là, je n'attaque en rien la
présidence, ou les députés, ou les partis que les
usages font et l'article 4 vient le confirmer avec le temps que
nous utilisons régulièrement des procédés qui ne
sont pas nécessaires.
On sait fort bien et vous avez parfaitement raison, M. le
député de D'Arcy McGee qu'au début d'une
séance de cette commission, j'accepte des remplacements pour la
séance. C'est pourquoi j'ai mentionné tantôt qu'à
l'Assemblée, on devrait se restreindre, comme on l'a fait, je pense, le
ou vers le 6 juin, à remplacer, par exemple, le député de
Laurier par le député de Jacques-Cartier. C'est une motion pour
un remplacement permanent, ce qui n'empêche pas le député
de Jacques-Cartier, à une séance de la commission, au
début de cette séance, d'être remplacé ici.
D'autre part, vous parlez de l'utilité d'une motion. Je ne
voudrais pas prendre la soirée, je pourrais faire un discours sur ce
sujet de l'utilité des motions.
M. Laurin: Cela va faire plaisir aux libéraux, si vous en
faites un.
Le Président (M. Cardinal): Non, je me retiendrai. Je suis
quand même obligé d'expliquer certaines choses. Si un
président a des doutes sur la recevabilité d'une motion, il a peu
de moyens à sa disposition.
J'ai indiqué le 7 juin que j'invitais les membres de la
commission à m'aider dans ces cas. Je l'ai fait à plusieurs
reprises, particulièrement ce jour-là où cinq motions ont
été déposées devant cette commission.
Je n'ai pris jusqu'à maintenant qu'une motion en
délibéré. C'est la deuxième motion que je prends en
délibéré. Je l'ai prise en délibéré
sans suspendre les travaux, parce qu'elle engage l'avenir. Cela dépasse
la question de l'utilité. Il est possible que d'ici la fin des travaux
ae cette commission, il y en ait d'autres de ce genre. Je me rends fort bien
compte, bien que nos invités puissent penser que certains s'amusent
à la procédure, qu'une décision rendue est, dans notre
droit britannique, un précédent. On peut bien être rapide,
mais il faut être sage en même temps.
D'ailleurs, les délibérés que j'ai pris ont
toujours fait l'objet de décisions à la séance suivante,
bien que ce soir je n'aie pas indiqué que je le ferais, vu l'heure
à laquelle nous sommes. Mais je pourrais dire que ce genre de motion,
comme celle présentée par le député de
Gaspé, sont de ces motions qui pourraient être
présentées à une période ultérieure,
c'est-à-dire que, si vous prenez toute l'hypothèse de travail,
derrière ces motions et derrière les interventions des
députés l'on présuppose et je n'interprète
rien, je prends les textes tels qu'ils sont que les rumeurs de couloirs,
que les rumeurs que l'on indique dans les moyens d'information font que, si je
les avais crues, la commission, ce soir, aurait déjà
terminé ses travaux, qu'elle les aurait terminés c'est un
"futurible" demain soir, qu'elle les terminerait peut-être
après-demain. Personnellement, je n'en sais rien. C'est pourquoi je dis
que c'est le genre de motions qui, dans un certain sens, sont
prématurées parce que l'on présume ou l'on préjuge
de la fin des travaux de cette commission, ce qui n'est pas encore fait. L'on
ne sait même pas, de tous les moyens que l'on puisse employer, comment la
commission, le ministre, le leader du gouvernement ou l'assemblée, non
pas décideront, mais provoqueront la fin des travaux de cette commission
et c'est pourquoi, M. le député de D'Arcy McGee, j'ai pris cette
motion en délibéré.
M. Grenier: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Considérant que vous avez gardé cette
motion du député de Gaspé en
délibéré...
Le Président (M. Cardinal): ... pas moi, c'est
écrit dessus: en délibéré.
M. Grenier: Merci. Je voudrais vous laisser savoir que, sur cette
motion, bien sûr, votre décision étant rendue, il n'est pas
question de reparler de cette motion. C'est simplement pour vous dire que nous
l'avons prévue et, si nous avons fait appel à cette motion pour
amener ici l'ACELF, conscients que ce groupe avait préparé un
mémoire... Mais, quand on entend certains propos, le ministre qui vient
de me confirmer que l'Eastern Township Citizen Association sera
convoquée dès que possible et qu'en Chambre, on entend le
ministre de l'Education dire...
Le Président (M. Cardinal): M. le député
de
Mégantic-Compton. Je n'aime pas vous interrompre. Vous êtes
tellement gentil, mais...
M. Grenier: Merci.
Le Président (M. Cardinal): ... j'ai rendu une
décision...
M. Grenier: On a été élevé à
la même école, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal):... dans le sens du
délibéré et je ne pense pas que l'on puisse en parler
à ce moment-là. Vous avez deux choses devant vous, cette
invitation à l'association qui vous tient à coeur et cette motion
à l'ACELF. Dans un cas, vous avez une réponse du ministre qui
peut vous satisfaire, oui ou non, mais il n'y a pas de mini-débat en
commission parlementaire après 23 heures, et vous avez, d'autre part,
cette minidécision, si vous voulez. C'est la présidence qui vous
dit: C'est pris en délibéré.
M. Grenier: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie. Oui, M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Je voulais quand même continuer...
Le Président (M. Cardinal): Cela dépend.
M. Grenier: Oui, bien sûr, pas sur ce sujet, puisque vous
me l'interdisez. Vous m'excuserez si je n'ai pas la même formation de
droit que celle que vous avez. On n'est pas passé par la même
université.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, veuillez ne pas vous excuser. Veuillez plutôt
m'excuser que la commission m'oblige a faire de telles choses.
M. Grenier: Comme dirait le député de Johnson,
c'est une université de trottoir que j'ai faite; alors, je n'ai
peut-être pas le sens de la procédure que vous pouvez avoir. Je
dirai tout simplement que les propos qu'a tenus le ministre de l'Education me
laissent un peu sceptique et c'est pour cela que je voudrais faire cette mise
au point, à savoir si...
Le Président (M. Cardinal): Cela est en vertu de l'article
96.
M. Grenier: Ça doit. Je vous crois sur parole. Alors, en
vertu de l'article 96, je dois vous dire que les propos du ministre de
l'Education en Chambre, qui nous dit qu'il se servira de cette loi pour
l'entrée des écoliers de langue anglaise dès l'automne...
Il s'attend que cette loi sera votée au cours de l'été.
Quand on voit le nombre de mémoires, au rythme où nous allons, 58
d'entendus, c'est donc dire qu'on en a à peine le quart. Il nous reste
si peu de temps pour étudier les autres! C'est peut-être pour cela
qu'on s'est interrogé et qu'on a voulu, dans la première motion,
la motion du député de Gaspé, parler de ce mémoire
de l'ACELF, mais je n'en parle pas, je n'ai pas le droit.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le
député de Mégantic-Compton. Nous en avions 58 à dix
heures ce matin. Nous en avons entendu deux dans la journée.
Nous sommes déjà rendus à 60, s'il n'y avait pas eu
ce débat, on serait peut-être rendus à 61.
M. Grenier: On reste quand même assez près du quart
des mémoires qui sont présentés.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais il faut quand
même se rappeler l'expérience du projet de loi 22. Et, ceci dit,
le président ne participe pas aux débats et ne préjuge en
rien de ce qui se produira. Si jamais, il y a une motion
présentée à cette commission pour la fin de ces travaux,
je devrai, comme toute autre motion, la déclarer recevable ou non, dans
son libellé, tel qu'il sera.
M. Grenier: Suite à ceci, je voudrais vous dire, M. le
Président, que j'aurais aimé et j'aimerais, dans des
mémoires qui ne sont pas sur la liste de ceux qui doivent venir
témoigner devant nous, ils sont nos invités...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le
député de Mégantic-Compton, et vous êtes un membre
de la commission, j'ai distribué toute la liste des mémoires et
je ne pense pas qu'on puisse dire que certains mémoires ne seront pas
entendus.
M. Grenier: Non, ce n'est pas ce que je dis. Le
Président (M. Cardinal): Ah bon! D'accord.
M. Grenier: On sera informé un peu plus tard. Ce que je
vous dis, c'est qu'il y a un groupe qui n'est pas dans la liste et que notre
parti serait désireux d'entendre ici, avec sans doute l'approbation de
l'ensemble des membres de la commission. On entend ici, depuis le début,
des personnes, des groupes venant... oui.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, est-ce que vous
vous préparez à présenter une motion?
M. Grenier: Cela peut tourner ainsi, vous savez.
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas ça, c'est
parce que je veux être juste pour tous les membres de la commission.
J'aurais aimé que le débat soit terminé sur ce qui vient
de se produire et je sais qu'il y a d'autres intervenants.
M. Grenier: Sur le débat...
Le Président (M. Cardinal): Très honnêtement,
je voudrais, si vous vous préparez à présen-
ter une motion, que l'on vide d'abord ce qui vient d'être dit et,
ensuite, je vous donnerai le droit de parole.
M. Grenier: Parfait.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Ce sera très bref, M. le
Président. C'est suite aux explications très sérieuses que
vous nous avez données, que j'apprécie et que je tente de
comprendre.
Le Président (M. Cardinal): Pardon? Je vais recommencer,
si ce n'est pas assez clair.
Mme Lavoie-Roux: Cela ne dépend pas de vous, ça
dépend de moi. C'est vous qui avez dit, et j'admets votre raisonnement,
qu'étant donné que la commission n'est pas encore
terminée, il serait prématuré de faire des motions de la
nature de celle qu'a présentée le député de
Gaspé...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse de vous
interrompre...
Mme Lavoie-Roux: J'ai mal compris.
Le Président (M. Cardinal): Je ne suis pas allé
jusque là. Non, non.
Mme Lavoie-Roux: Non.
Le Président (M. Cardinal): Je n'ai pas dit ça,
madame. J'ai dit que je la prenais en délibéré, parce que,
normalement...
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.
Le Président (M. Cardinal): ...j'aurais pensé
qu'elle serait venue à une période ultérieure. Mais la
décision n'est pas rendue.
Mme Lavoie-Roux: II y a une question que je veux poser. Je suis
d'accord que vous n'avez pas rendu la décision, mais on peut
peut-être... Je pense que vous avez quand même exprimé que
ça pouvait être un peu prématuré. Je me dis, tenant
compte de l'article 118-A, que celui-ci peut être utilisé pour
terminer les travaux de cette commission, et je sais que cette motion peut
venir, pas nécessairement du ministre, mais d'un député.
Si un député présente cette motion de clôture, et
j'imagine que ce ne sera pas de son propre chef, il y aura eu une certaine
entente entre les membres du côté ministériel, et si cette
motion de clôture est acceptée, la question que je me pose, la
motion aurait voulu faire, non seulement elle ne sera pas
prématurée, mais elle sera devenue tardive.
Cela me pose un problème.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie, deux remarques très brèves. D'une part, l'article 118-A
n'est pas une motion de clôture, c'est une décision de la
commission. C'est en vertu d'autres articles, en particulier l'article 156, et
d'autres que je ne veux pas citer en série, je pourrais le faire, mais
c'est fini les leçons de procédure, on pourrait faire une motion
de clôture. D'ailleurs, quand vous avez comparu devant la commission,
lors du projet de loi 22, vous savez que l'article 118-A a été
utilisé après la première lecture et l'article 156
après la deuxième lecture.
Pour autant que les règlements du temps s'appliquaient, et M. le
député de Laval, qui est ici, le sait fort bien et me corrigera
si j'erre, le code Lavoie n'était pas encore adopté. C'est le 23
mars 1976 que les règles de pratique ont été
rescindées et que l'article 118-A a été
rédigé dans son texte actuel, ainsi que l'article 156,
paragraphes 1 et 2.
Par conséquent, nous vivons dans du droit nouveau et si vous
invoquez 118-A, je vous dis que c'est la commission qui décidera. Si
vous lisez 118-A, paragraphe 6, c'est très clair: "Lorsqu'elle la
commission croit être suffisamment renseignée, la
commission peut décider de cesser les auditions." Et je dis des ce soir,
même si je m'encarcane d'avance, que si une motion était
présentée uniquement je souligne uniquement, exclusivement
en vertu de l'article 118-A, paragraphe 6, l'article 160 s'appliquerait
et au moins 107 députés, en vertu d'une motion adoptée le
7 juin 1977, pourraient, pendant 20 minutes, s'exprimer sur cette motion.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: D'accord que les membres de l'Assemblée
nationale pourraient s'exprimer sur une telle motion.
Le Président (M. Cardinal): Non, pas à
l'Assemblée nationale, je m'excuse; à la commission, en vertu de
la motion qui veut que les députés aient droit de parler
sur...
M. Goldbloom: Les députés, d'accord, M. le
Président. Mais ce que j'aimerais vous demander: Est-ce qu'une telle
motion est susceptible d'être amendée? Est-ce que vous pouvez-nous
dire, dans le sens de la question posée tout à l'heure par le
député de L'Acadie, pourriez-vous nous dire... A ce
moment-là, est-ce qu'on pourrait arriver avec le genre de motion dont
vous avez invoqué la prématurité possible, le genre de
motion présentée par le député de Gaspé?
Est-ce qu'on pourrait introduire une telle motion comme amendement? Sinon, je
soumets respectueusement à votre considération que ce ne serait
pas juste à l'endroit des députés qui voudraient
présenter de telles motions, de leur dire que c'est
prématuré aujourd'hui, même si nous constatons que celui
qui a commencé à parler du degré d'information de la
commission a été mis à la discipline, paraît-il,
parce qu'il n'est plus parmi nous.
M. Lalonde: II est en Europe.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît.
M. Lalonde: On l'a envoyé en Europe. Une Voix:
Voilà.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Non, c'était prévu auparavant.
M. le député de D'Arcy McGee, c'est une bonne question que
vous posez. Mais sans aller trop rapidement, je pourrais vous dire qu'elle ne
pourrait certainement pas être amendée par une motion du genre de
celle que vous mentionnez.
Elle pourrait être amendée suivant les règles
générales, en retranchant, en ajoutant ou en modifiant des mots
à la motion. Mais, c'est une hypothèse. Je n'ai pas devant moi
une telle motion. L'on peut se demander et je vous le demande
personnellement quel genre de motion, dans son texte, peut être
présentée en vertu de l'article 118-A, alinéa 6. C'est
à ce moment-là que la présidence, avec l'aide de la
commission, doit décider de sa recevabilité et de la
possibilité de son amendement et de son sous-amendement et rien
au-delà de cela.
M. Goldbloom: M. le Président, une dernière
question. Ne serait-il pas juste de dire que la recevabilité d'une
motion équivaut à sa compatibilité avec le
règlement et avec le mandat de la commission?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de D'Arcy McGee. Je ne sais pas si vous étiez
présent le 7 juin. Je me suis permis un petit laïus à ce
sujet, pour indiquer qu'une motion devait être conforme au mandat de la
commission, aux ordres, avis ou motions de la Chambre, à la pertinence
du débat. Ceci n'est pas décidé, ce sont purement des
indications que j'ai données, des espèces de balises, au
début du débat. Mais nous en sommes rendus tellement loin dans
des hypothèses, que nous sommes en train de faire de la théorie
de la procédure parlementaire, alors que ceci, en droit britannique, est
très pragmatique.
M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, je pense que des deux
côtés de cette table, personne n'est intéressé
à faire de la procédure uniquement pour faire de la
procédure et faire perdre le temps de tout le monde.
J'aimerais bien que le ministre puisse nous informer dès
maintenant, nous dire son intention. Il est bien sûr que si ces
débats arrivent autour de la table, c'est qu'il y a des gens qui se
posent des questions. Si le ministre pouvait nous informer du jour où il
a l'intention d'arrêter les mémoires ou de décider qu'il
sera suffisamment informé, s'il pouvait nous donner un préavis de
quinze jours, à partir de maintenant, je pense qu'on pourrait être
satisfaits et que cela couperait peut-être court aux motions de ce soir,
si c'était cela.
Le Président (M. Cardinal): Je vais d'abord, avant de
laisser répondre le ministre, vous dire deux mots. D'une part, ce n'est
pas sûr que ce sera le ministre qui décidera que la commission
sera suffisamment informée. D'autre part, si le ministre veut vous
donner son assurance, c'est purement, oserais-je dire, une faveur qu'il
pourrait vous accorder. Je ne pense pas que l'on puisse vivre en commission
parlementaire sur une base semblable. M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: Pour le moment, M. le Président, je conclus de
ce débat dilatoire que mène l'Opposition depuis une heure qu'elle
veut humilier nos témoins ou qu'elle est tellement opposée ou
qu'elle a tellement peur de leurs témoignages qu'elle ne veut même
pas les entendre; mais pour répondre plus précisément
à la question du député de Mégantic-Compton, je lui
réponds, comme vous l'avez laissé subodorer, qu'il ne
m'appartient pas de répondre à cette question, que cette
réponse appartient à la commission.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre.
Puis-je, à ce moment-là, demander au...
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...je pense que les propos du ministre sont...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse; est-ce une
question de règlement, une demande de directives ou...
M. Lalonde: Oui, une question de règlement. Le
Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Lalonde: II impute aux membres de l'Opposition des intentions
indignes...
Le Président (M. Cardinal): Ouf!
M. Lalonde: ...y compris celle d'humilier les témoins.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Lalonde: Comment, M. le Président c'est une
directive que je vous demande des députés, qu'ils soient
de l'Opposition ou du parti ministériel je n'en vois pas beaucoup
qui parlent ce soir, mais des fois, ils sont un peu plus bavards
peuvent-ils soulever des questions de règlement concernant les travaux
de cette commission, sans, d'une certaine façon, bousculer un peu le
programme qui a été établi par le ministre lui-même?
S'il nous amène, sans nous consulter le règlement n'impose
pas une telle consultation cinq, six ou sept témoins on a
vu, des jours, sept témoins par jour comment voulez-vous que nous
ayons la liberté de soulever des
questions concernant les travaux, comme nous le faisons ce soir
je vous ferai remarquer que c'est toute l'Opposition qui a participé,
à ce moment-ci, au débat ce soir sans, d'une certaine
façon déranger quelqu'un? J'ai jusqu'à maintenant
j'insiste là-dessus, M. le Président donné
même jusqu'à 24 heures d'avis, qu'on aurait des motions à
présenter à cette commission. Ce ne sont pas toujours des motions
tellement dilatoires, puisque au moins deux ont été
adoptées par les députés ministériels, celle
concernant le Conseil supérieur de l'éducation et celle
concernant le président de la Régie de la langue
française. Il n'y a aucun caractère dilatoire, à ce
moment-là.
Je m'élève vigoureusement contre les propos du ministre,
je trouve que c'est de la petite démagogie qu'il fait en imputant des
motifs de cette nature à l'Opposition. Nous ferons toutes les motions
que nous croyons utiles aux travaux de cette commission, sans nous laisser
impressionner par ce genre de petite politique de la part du ministre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous avez raison en tous les points, sauf un. Ce que
l'article 99, alinéa 9 défend, ce n'est pas d'imputer des motifs
à un parti, parce qu'on le fait continuellement. L'usage est vieux et
immémorial à ce sujet. C'est d'imputer des motifs à un
député en particulier ou de refuser d'accepter sa parole.
Par conséquent, je considère cet incident comme clos.
Est-ce que je puis maintenant, MM. les membres... Non, M. le
député de Mégantic-Compton? D'accord.
M. Grenier: M. le Président, vous savez que ces propos
m'émeuvent assez peu, moi aussi, puisque j'ai été
témoin, non pas comme député, mais comme invité
assez assidu dans les galeries pendant que je voyais le gouvernement qui
était l'Opposition... J'ai moins vu cela pendant que le ministre
était député, mais le bout qui s'est fait en 1973 et 1976,
je l'ai assez intensément vécu dans les galeries. J'ai vu ces
gens de l'Opposition faire venir en Chambre toute la députation, le
lendemain de Noël; vous savez, ce ne sont pas les débats de ce
soir, les motions très fondées qu'on veut donner ce soir qui vont
m'émouvoir et qui vont me faire sauter en l'air et j'aime mieux vous le
dire tout de suite.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Grenier: Cela ne doit pas émouvoir les
députés d'en face non plus, ils n'ont pas eu l'avantage de
siéger pendant ce temps-là et il n'y en a peut-être pas
beaucoup qui s'intéressaient aux débats, dans le sens qu'ils
étaient mêlés moins activement à la politique.
S'ils avaient vu leurs députés en Chambre, la sorte de
débats qu'on y faisait, ils ne seraient peut-être pas surpris de
voir ce soir qu'on demande, par des motions, un peu plus d'éclairage sur
les débats à venir.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): ... vous pouvez voir que je ne
suis en rien surpris et que j'ai tout accepté jusqu'à
présent. Cependant, je pense que votre question n'est pas une question
de règlement ni une question de privilège.
M. Grenier: Non, c'est une précision. Je voyais que dans
l'ensemble, de l'autre côté de la table, on avait l'air de
trouver, de se dire, qu'on perdait du temps, comme l'a laissé entendre
tout à l'heure le ministre, qui était peut-être le
porte-parole de ce groupe. Il faudrait penser que, quand on n'a pas plus de
certitude concernant les gens qu'on veut rencontrer, qu'on n'a pas plus de
certitude qu'on ne nous en a donnée... J'ai demandé au ministre
de nous envoyer un préavis d'une quinzaine de jours; on n'a pas eu de
réponse à cela. On nous a dit vaguement que les motions seront
appelées, sans plus d'engagement. On peut alors se poser des questions.
Si c'est ainsi, je dois vous dire que c'est mon intention de vous demander de
convoquer un autre groupe qui n'a pas présenté de mémoire,
mais qu'à mon sens on devrait l'entendre. C'est un groupe d'un milieu
qui n'est pas sur la liste, mais qui correspond à des
réalités québécoises, assez différentes de
celles qu'on a entendues jusqu'à maintenant. Je vous fais ma motion.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, justement, puis-je vous demander d'en venir
immédiatement à la motion, si tel est le cas?
Motion pour entendre l'Union des conseils de
comté
M. Grenier: Ma motion se lit comme suit: Que cette commission
invite l'Association des conseils de comté de la province de
Québec à venir expliquer les implications de la loi 1 sur
l'administration des municipalités rurales. Ce qui semble assez
étrange...
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que je pourrais avoir
le texte de votre motion avant qu'on n'en débatte, s'il vous
plaît?
M. Grenier: Oui. On ne l'a pas déjà
envoyé?
Le Président (M. Cardinal): II y a quand même des
étapes. Il faut d'abord que je le lise; deuxièmement, que la
motion soit déclarée recevable. Ensuite on décide de la
débattre ou non.
Alors, la motion du député de Mégantic-Compton se
lit comme suit: "Que cette commission invite l'Association des conseils de
comté de la province de Québec à venir expliquer les
implications de la loi 1 sur l'administration des municipalités
rurales". Pour éviter un débat sur la recevabilité,
après toutes les motions qui ont été
déclarées recevables ou irrecevables, je la déclare
immédiatement recevable. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, sur cette motion, j'aimerais
faire comprendre à ceux qui sont autour de cette table à quel
point le sujet de cette loi qu'on a amenée devant nous est important,
cette loi no 1. Ce sujet a fait l'objet de bien des discussions au
Québec depuis près d'une dizaine d'années, que ce soit la
loi 63, qui a été présentée vers les années
1969, la loi 22, qui est venue un peu plus tard, et maintenant celle-ci. Nous
avons entendu des mémoires venant de divers milieux de la province de
Québec. Inutile de vous dire que la plupart venaient de compagnies de
différents secteurs. Les compagnies importantes sont venues nous dire
l'implication que cela avait pour eux, de même que les sièges
sociaux. Les milieux urbains nous ont longuement entretenus des implications de
cette loi. Pour ce secteur de la province de Québec, ces conseils de
comté, l'Association des conseils de comté, le gouvernement, le
parti ministériel, est peut-être plus en mesure que n'importe quel
parti politique autour de cette table de comprendre à quel point c'est
important qu'on rencontre ces gens et qu'on connaisse le fond de leur
pensée sur la loi no 1.
Le Parti québécois en congrès a largement dit qu'il
voulait revaloriser le rôle des conseils de comté. Je comprends
assez difficilement qu'à une commission comme celle-ci... Si on n'a pas
présenté de mémoire, il me semble qu'on aurait dû
faire une invitation, ou une certaine incitation, à cette association
provinciale pour qu'elle vienne nous rencontrer. Plusieurs pourront
prétendre, parce qu'elle n'a pas présenté de
mémoire, que c'est tout simplement qu'elle s'est
désintéressée de cette loi. Inutile de vous dire, et vous
le savez, M. le Président, mieux que tout autre, que cette loi n'est
peut-être pas la première demande des Québécois. On
a souvent dit, on l'a dit en Chambre et tous les partis l'ont dit, le
Ralliement créditiste, le PNP, l'Union Nationale et le Parti
libéral... C'est le cas de vous dire que ce n'était
peut-être pas la loi la plus urgente, mais que le plus urgent
était bien d'avoir une loi dans le secteur économique, afin de
relever ce milieu.
S'il est un groupe sensible aux problèmes de l'économie,
je pense que ce sont nos conseils municipaux, qui sont personnellement
affectés par l'économie de leurs municipalités; s'il est
des gens dans la société québécoise capables de
nous dire exactement l'implication de cette loi au niveau municipal, il serait,
bien sûr, souhaitable d'avoir plus que l'exécutif des conseils de
comté. On a reçu ici des exécutifs d'associations
provinciales et on sait qu'ils étaient les porte-parole dans quelques
cas je ne dirai pas tous les groupes de l'exécutif, et
peut-être moins des membres de ces associations. On en témoignait
cet après-midi, quand on parlait principalement de la
Saint-Jean-Baptiste, alors qu'on voyait des régions qui avaient des
volontés assez différentes de celles de l'exécutif
provincial.
J'aurais aimé que l'Association des conseils de comté soit
représentée par différentes régions du
Québec, qu'on ait ici des gens... Parce que, même à
l'intérieur des conseils de comté, s'il y a des
représentants qui viennent du Bas-du-Fleuve, de la Côte-Nord, du
Lac-Saint-Jean, des Cantons de l'Est ou de la rive nord du fleuve, de
l'Outaouais ou bien de l'Abitibi, ce sont des gens qui ont des problèmes
très différents les uns des autres.
J'aurais aimé que cette association qui a des regroupements au
niveau des régions soit présente. On fera peut-être la
preuve, avec une association de ce genre, que la loi 1, comme on l'a
mentionné à plusieurs reprises, est une loi pour régler un
problème tout à fait régional, qui ne se pose pas dans
toutes les régions du Québec. On a été
témoin, au cours de la semaine dernière, en
célébrant la fête du Canada, on s'est rendu compte que ces
régions, peut-être en dehors de la ville de Montréal, et je
dirais même en dehors de l'ouest de la ville de Montréal, sont
différentes de la métropole et que la coordination et la vie sont
faciles avec les deux groupes ethniques en dehors de Montréal. Vous
savez, M. le Président, que, dans la ville de Montréal, c'est
toujours plus facile de dresser les deux groupes ethniques l'un contre l'autre,
ce sont des gens qui se connaissent moins. Je peux vous dire qu'en section
rurale les gens se connaissent, s'apprécient davantage, et on pourrait
difficilement réussir à les monter les uns contre les autres,
comme on sait le faire dans la métropole. Un groupement comme
l'Association des conseils de comté groupe des gens vraiment
enracinés, des gens qui se font élire au niveau du peuple,
contrairement à certains exécutifs qui viennent devant nous, des
exécutifs d'associations élus par un petit nombre d'élites
de leurs associations. Au contraire, les maires de l'Association des conseils
de comté sont directement élus par les contribuables et quand on
a un mandat à rendre directement à la population, je pense qu'il
faut être plus attentif aux besoins de notre population. C'est le cas des
députés qui sont à cette table et c'est le cas des maires
dans la province de Québec. Ce sont ces gens qui composent l'Association
des conseils de comté.
Le monde rural, c'est dans les conseils de comté qu'on le
reconnaît. Si on faisait le total des mémoires, sur les 60 que
vous avez mentionnés tout à l'heure, on se rendrait sans doute
compte qu'on a réuni ici, à cette table, comme invités,
des gens qui venaient principalement des centres urbains. Encore une fois, on
ferait peut-être la preuve que la loi 1 aurait peut-être pu
être tout simplement des règlements qu'on aurait appliqués
dans les régions où il y avait des problèmes, et on
n'aurait peut-être pas eu besoin de chambarder tout le climat au
Québec, un climat qui indirectement, comme vous le savez, influence
énormément la situation économique.
Ce qui est assez étrange, ce qui me semble encore plus
étrange, c'est que ce gouvernement, a dit, pendant sa campagne
électorale, qu'on ne modifierait rien sans retourner à la
population, sans retourner devant les organismes valables. S'il est des
organismes valables, je pense que ce sont les conseils municipaux et, bien
sûr, l'exécutif des conseils de comté. Ces gens sont des
représentants, je comprends mal qu'on s'opposerait à les
entendre. J'ai hâte d'entendre, de l'autre côté de la
table, les députés ministériels; j'ai hâte
qu'on exprime des deux côtés de la table un désir
d'entendre ces gens exposer ici les problèmes que pourrait causer par
exemple aux municipalités, le problème de la signalisation.
Ces gens, ces préfets de comté, ces maires de
municipalités réunies en conseils de comté sauraient
vraiment nous parler des problèmes que cela peut engendrer, uniquement
dans le secteur de la signalisation.
Le secteur des conseils municipaux... J'ai posé la question au
ministre en Chambre. Je l'ai fait ici à la commission. Je l'ai fait lors
de l'étude des crédits. L'application de la loi 1 rendra la vie
difficile... Encore la semaine dernière, j'en parlais avec des
représentants des municipalités de ma circonscription où
il y a une forte majorité de contribuables qui sont anglophones. Il faut
admettre que les minorités, peu importe où elles se situent, que
cela soit une minorité dans les provinces anglophones, des
minorités françaises comme cela se voit en Ontario ou la
minorité anglophone au Québec, ont tendance à se
regrouper, à se tenir ensemble. A partir de cela, elles ont
peut-être moins de fenêtres ouvertes sur l'ensemble de la
population. C'est ce qui fait que cette minorité... Des gens
étaient peut-être scandalisés l'autre jour d'entendre un
président de banque qui ne pouvait pas s'exprimer dans notre langue
à cause de son travail de bureau, à cause du milieu et à
cause du fait surtout que les minorités ont tendance à se
tenir.
Quand on se sent... Certains prétendent ne pas être
menacés ici au Québec, où la minorité anglophone...
Mais d'autres prétendent le contraire. On est venu ici tenter de faire
la preuve d'un côté comme de l'autre et c'est le cas des
minorités à l'extérieur.
Il faut être capable de comprendre que certaines de nos
minorités n'ont pas le personnel capable, au niveau des
municipalités, de communiquer avec le gouvernement et, à ce
moment, on les obligera, par une loi, à s'engager des traducteurs parce
que la traduction donnée par un secrétaire ordinaire sera
peut-être assez loin de la réalité, des motions
votées au conseil municipal, et on en arrivera à des
dépenses difficiles à absorber par les municipalités.
Cette motion que je vous fais, M. le Président, je pense qu'elle
ne peut faire autrement que d'être jugée très
sérieuse et vous en avez donné le ton en acceptant qu'elle soit
discutée. Encore une fois, je pense que, si on pouvait avoir ici, dans
un délai assez court... Ce ne sont peut-être pas des gens qui
auront le temps de préparer un mémoire parce que le temps avance,
mais...
M. L'Heureux (André): On en a un...
M. Grenier: Oui, je vous remercie. On aura certainement
l'occasion de l'entendre.
M. L'Heureux: Grossier personnage!
M. Grenier: Cela peut être des deux côtés de
la table, même des trois, si vous le voulez.
M. L'Heureux: Oui.
M. Grenier: On en a entendu d'autres depuis qu'on est ici.
Je voulais dire que ces gens auraient des choses à nous donner et
qui seraient de nature à donner l'éclairage qu'on n'a pas eu avec
les autres mémoires, depuis qu'on entend ces groupes autour de cette
table.
Alors, si c'était là l'intention des membres de cette
commission, j'aimerais bien que cette motion soit acceptée par
l'ensemble des gens qui sont ici et qu'on demande à l'association des
conseils de comté de bien vouloir se présenter devant nous et
qu'on fixe une date pour que...
J'irais même jusqu'à dire que, s'il y a des mémoires
de préparés actuellement qui viennent donner une version qui
ressemble à celle qu'on a déjà reçue, parce qu'il y
en a quand même... Je sais qu'on a reçu, par exemple, je pense
si je ne fais pas erreur que c'est le Mouvement Québec
français qui disait représenter une quinzaine d'associations,
dont la CSN; donc, des gens qui sont peut-être ici ce soir. En tout cas,
une image... Pardon?
M. L'Heureux: Depuis trois jours.
Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse auprès de
nos invités, mais il y a une motion qui a été jugée
recevable et sur laquelle tous les députés membres de la
commission peuvent s'exprimer.
M. L'Heureux: D'accord.
M. Grenier: Merci, M. le Président. Alors, on a vu des
groupes qui sont venus ici et qui nous ont donné des sons de cloche qui
étaient intéressants pour tous les membres de cette commission
autour de la table. Inutile de vous dire que cela nous a donné des
éclairages dont on avait besoin. Je pense que l'association des conseils
de comté fournira aussi à cette table d'autres informations qu'on
ne pourra pas prendre dans d'autres milieux. C'est pour cela que je vous dis,
en terminant, que c'est un voeu c'est une motion que j'ai faite
je souhaiterais que l'ensemble des députés soit favorable
à ce que vous convoquiez, dans les délais requis, l'association
des conseils de comté de la province de Québec.
Merci, M. le Président.
M. Laurin: M. le Président, un mot très bref. C'est
un débat purement académique puisque l'Union des conseils de
comté n'a pas jugé bon de présenter un mémoire
à la commission. Je suis donc obligé de conclure que toute
l'homélie du député de Mégantic-Compton se
réduit à ce que disait un orateur célèbre: "Words,
words", et rien d'autre. "La parole a été donnée à
l'homme pour masquer sa pensée véritable" et je pense que le
député de Mégantic-Compton, par son homélie, vient
de prendre sur lui la responsabilité de ne pas entendre l'organisme
très représentatif d'une centaine de milliers de travailleurs qui
est devant nous.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, brièvement, comme
vous le savez, même si j'ai eu l'avantage de siéger plusieurs fois
au cours de ces délibérations, je n'ai pas été au
départ des travaux de cette commission un membre permanent. Je n'ai donc
pas eu l'avantage de recevoir toute la liste des mémoires qui ont
été soumis. Le ministre invoque le fait que l'Union des conseils
de comté n'a pas jugé bon de faire inscrire son nom et d'envoyer
un mémoire, mais je trouve que ce que souligne le député
de Mégantic-Compton est quand même d'une importance
considérable en ce qui concerne notamment les municipalités
rurales. Je ne plaiderai pas pour une grande ville qui, à mon sens,
devrait être en mesure de communiquer avec les autres autorités
publiques dans la langue commune du Québec et qui devrait pouvoir
fournir des services à ses citoyens dans les deux langues, mais je pense
justement à des municipalités qui sont relativement
éloignées du centre des activités relativement
éloignées des ressources qui permettraient une communication
efficace. Je vais vous donner un exemple, M. le Président. Je pense
à la municipalité de Shigawake, dans le comté de
Bonaventure qui est, à toutes fins pratiques, une municipalité de
quelques centaines d'âmes entièrement anglophone. Le maire est
anglophone, je l'ai reçu à mon bureau à deux ou trois
reprises, et j'ai même fait des traductions pour lui justement parce
qu'il n'avait ni le personnel requis, ni lui-même l'expérience
suffisante pour lui permettre de faire convenablement son travail. Il me semble
que même si, pour des raisons qui lui sont propres, l'Union des conseils
de comté du Québec, et M. le Président, j'espère
que vous accepterez cette correction dans le texte de la motion, parce qu'il
s'agit bien de l'Union des conseils de comté, pas de l'Association des
conseils de comté...
Le Président (M. Cardinal): Je ne sais pas si j'accepte la
correction, s'il n'y a pas de motion d'amendement qui permet de changer des
mots ou d'ajouter des mots. S'il y a un consentement, je n'ai aucune
objection.
M. Lavoie: Consentement.
Le Président (M. Cardinal): Consentement accordé.
Alors, je vous prierais de répéter votre texte.
M. Goldbloom: II s'agit de l'Union des conseils de comté
du Québec.
Le Président (M. Cardinal): Alors, nous changeons les mots
"l'Association" par les mots "l'Union des conseils de comté" et "de la
province de Québec" par les mots "du Québec".
M. Goldbloom: C'est cela.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, motion d'amendement
adoptée, ce qui ne préjuge en rien de la motion principale.
M. Goldbloom: D'accord. Alors, M. le Président, je termine
par l'exemple que j'ai offert d'une municipalité qui pourrait se trouver
dans une situation difficile pour un certain temps. Il faudra une transition,
je suis d'accord, mais il me semble que même si l'Union des conseils de
comté ne s'est pas réunie en temps opportun pour envoyer un
mémoire, connaissant cet organisme avec lequel j'ai travaillé
pendant trois années et demie, je suis convaincu qu'il serait important,
pour que la lanterne des membres de cette commission soit convenablement
éclairée, que l'Union des conseils de comté vienne
s'exprimer sur les effets de cette éventuelle loi notamment sur les
petites municipalités rurales du Québec. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de D'Arcy McGee. Mme le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: C'est M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Cardinal): Pardon. Mme le
député de L'Acadie avait demandé la parole auparavant. Qui
cède la parole à l'autre? Merci de la politesse, Mme le
député de L'Acadie. Je m'excuse de ce lapsus.
M. Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je désire
appuyer la motion du député de Mégantic-Compton. Pour ma
part, j'ai visité un comté de la province en l'occurrence
cela va intéresser le député du comté de Papineau
c'était le comté de l'Outaouais où nous avons eu
une rencontre avec les membres des conseils de comté.
Ceux-ci nous ont exprimé, non pas dans un mémoire
très élaboré, mais simplement à partir
d'échanges, des considérations extrêmement
intéressantes quant au problème que la loi 1 pouvait créer
dans un grand nombre de leurs municipalités qui recrutent une partie de
leur population de la province de l'Ontario et même des Etats-Unis, parce
qu'elles ont une forte population estivale. Je pense que c'est exactement le
cas d'autres petites municipalités du Québec, ce n'est là
qu'un aspect des problèmes qu'elles auront à affronter. Je pense
que ça pourrait être utile à la commission d'entendre, de
vive voix, ces gens qui vivent les problèmes concrètement et qui,
tous, s'ils se sont exprimés dans le sens de la nécessité
ou de l'affirmation du français, voyaient quand même dans la loi
1, des implications pour le vécu quotidien de leur municipalité
respective.
Je parlais de la région de l'Outaouais. Dans d'autres
régions du Québec, il y a des municipalités où se
trouvent des proportions plus ou moins grandes de population anglophone et
où différentes mesures sont prévues, tant pour l'affichage
en particulier que pour le fonctionnement de leur municipalité
respective. J'identifierais par exemple le village de Hatley où vous
retrouvez une popula-
tion de peut-être 300 ou 400 personnes qui sont très
majoritairement de langue anglaise. Je pense que si certaines adaptations ne
sont pas faites au projet de loi no 1 pour de telles municipalités
où la moyenne d'âge est également très
élevée. Ce sont de vieux villages qui ne se sont pas
renouvelés, la population, d'une façon générale,
émigrant vers les grands centres ou à l'extérieur du
Québec. Ces gens voient venir l'application possible de la loi 1 telle
qu'elle est rédigée avec beaucoup d'anxiété et une
anxiété que l'on peut comprendre.
Il ne s'agit pas de municipalités qui, demandant peut-être
certaines exemptions ou des mesures transitoires plus libérales que ne
le prévoit la loi, compromettront tout le processus de francisation de
la province qui est souhaitable, on le sait, dans des régions, telle la
région métropolitaine. Mais pour ces municipalités, ces
mesures présentent des difficultés sérieuses et elles
semblent les mettre dans un état d'insécurité, compte tenu
de la population restreinte qu'elles représentent, je le redis, elles ne
constituent pas une menace dans tout ce processus général de la
francisation au Québec.
Je pense aussi qu'un autre aspect de la loi, dans les quelques
échanges que j'ai eus justement dans des régions rurales
avec des individus et à l'occasion, avec des représentants de
certaines petites municipalités le sous-chapitre touchant la
toponymie est un autre objet d'inquiétude qui me semble également
justifié. Je pense que ces gens auraient probablement des
représentations intéressantes à nous faire quant à
certaines modalités qui devraient être prévues dans la loi
ou encore certaines modifications qui pourraient être apportées et
une fois de plus, sans compromettre tous les objectifs de ce projet de loi.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, il me semble important
que nous profitions de l'expérience de ces personnes. Le ministre nous
disait: Si elles avaient été intéressées, elles
seraient venues comme organisme, l'Association des conseils de comté du
Québec, présenter un mémoire.
Mais quand vous rencontrez ces gens individuellement, vous voyez que
pour eux, c'est déjà un projet assez considérable, compte
tenu qu'ils sont répartis un peu partout, qu'ils ont souvent des
problèmes de nature différente et des réactions
différentes. Il est peut-être difficile pour eux de se regrouper
et d'écrire un mémoire, compte tenu des ressources qu'ils ont
à leur disposition.
Je pense que dans un échange et un dialogue très simple
avec ces personnes, ou quelques-unes de ces personnes, non seulement la
commission, mais éventuellement l'Assemblée nationale aurait tout
à gagner d'avoir tenté ce rapprochement et ce dialogue avec ces
personnes. Comme le député de Mégantic-Compton
l'indiquait, les gens que nous avons reçus ici étaient
très largement, sinon en quasi-totalité, des représentants
des grands centres. De mémoire, je ne me souviens pas que nous ayons
reçu des représentants de municipalités rurales non
seulement de municipalités, mais d'agglomérations plus
restreintes que celles des grands centres comme Montréal, Québec,
et peut-être quelques autres.
Nous avons reçu hier, à mon point de vue, une leçon
profitable du mémoire des anglophones de la ville de Québec. La
plupart des membres de cette commission l'admettront, le problème de la
loi 1 se présente pour eux dans une perspective tout à fait
différente qu'il ne se présente pour ceux de la région
métropolitaine, ou même de la région de l'Outaouais
où le problème possible de l'angli-cisation peut avoir des
dimensions beaucoup plus grandes.
Le mémoire de ce groupe de la ville de Québec a
démontré qu'en nous rencontrant, les membres de ces
municipalités pourraient voir diminuer leur anxiété
vis-à-vis du contenu du projet de loi no 1.
A cet égard, le groupe de la ville de Québec hier
et cela a été rapporté par les journalistes qui ont
même déploré que l'entretien n'ait pu durer plus longtemps
semblait avoir, au départ, une attitude assez réticente.
Elle s'est peu à peu modifiée pour se changer en un
véritable dialogue qui, s'il avait été poursuivi, je
pense, aurait eu pour effet de diminuer non seulement l'anxiété
de ces personnes, mais également leur agressivité. Le
député de Mégantic-Compton faisait allusion tout à
l'heure à ce qui semble se développer inutilement dans ces
petites communautés qui vivent depuis des générations
côte à côte, très souvent, et d'une façon
très fraternelle où l'hospitalité des uns à
l'égard des autres est très connue. Je pense qu'on aurait tout
intérêt à pouvoir cerner d'un peu plus près les
problèmes d'application que le projet de loi no 1 pose pour cette partie
de la population.
Encore une fois, je désire, et très sincèrement,
appuyer la motion du député de Mégantic-Compton.
Mme Lalonde (Francine): M. le Président... Le
Président (M. Cardinal): Oui, madame.
Mme Lalonde: Je voudrais prier l'Opposition de nous dire si elle
veut nous entendre ce soir. Cela fait la troisième journée que
nous sommes ici. On pourrait faire le compte des heures. Nous sommes un
organisme valable, fort représentatif. Nous représentons 200 000
travailleurs. Il nous semble que notre patience a assez duré et que
continuer à endurer cela serait faire injure aux travailleurs que nous
représentons.
Alors, nous voulons d'abord demander à l'Opposition si elle va
continuer à refuser de nous entendre, auquel cas, nous prendrons les
moyens de se faire entendre.
Le Président (M. Cardinal): Madame, vous savez que je ne
puis point participer au débat. C'est un appel que vous faites, vous
attendez comme moi la réponse.
M. Le Moignan: Puis-je vous demander une directive, M. le
Président?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: Je comprends très bien l'angoisse du
groupe, mais s'il attend ici depuis trois jours, il y a certainement eu un
manque, une faiblesse quelque part, parce que, normalement, s'il a
été convoqué pour une telle date, il aurait dû
passer le même jour ou le lendemain.
Le Président (M. Cardinal): Un instant! M. le
député de Gaspé, il y a des choses que je vais accepter et
il y a des choses que je n'accepterai pas.
M. Le Moignan: Je vous demande simplement d'éclaircir la
situation. On se pose une question.
Le Président (M. Cardinal): Justement, je vais vous dire
pourquoi. Les convocations sont faites à sept jours d'avis, on le sait,
c'est en vertu du règlement. Chaque soir, je donne la liste des
invités du lendemain. Chaque matin, à l'ouverture de la
séance, j'appelle chacun de ces organismes. Il est sûr que, comme
président, je n'ai pu brimer aucun des partis. L'on pourrait même
soutenir que je serais là pour permettre que l'Opposition joue son
rôle vis-à-vis de l'exécutif.
Cependant, ce jeu parlementaire que j'ai exprimé souvent comme
étant un patient exercice peut s'exercer tant qu'on le veut. C'est le
mandat de la commission, permettez-moi, Mme le député de
L'Acadie, je l'ai mentionné le 7 juin, et je puis répéter
mon texte, si on le désire, j'ai répété à
plusieurs reprises que je l'ai souligné à l'occasion où un
témoin a souligné devant nous qu'au lieu d'écouter les
témoins, nous causions entre nous. Je me permets de dire ce soir devant
des témoins, que, tout en respectant les droits de chacun des
députés, tout en respectant les droits de chacune des
Oppositions, il faudrait quand même respecter aussi les droits des
invités. J'ai terminé. M. le député de
Gaspé, vous pouvez continuer.
M. Le Moignan: Non, c'est tout ce que je voulais vous
demander.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme La voie-Roux: M. le Président...
Mme Lalonde: Je voulais souligner, s'il vous plaît!
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie, je m'excuse.
Mme Lavoie-Roux: M. le...
Le Président (M. Cardinal): D'accord, je m'excuse,
question de règlement par le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Je voulais profiter de cette question de
règlement pour souligner, de toute façon, qu'il est 9 h 45, M. le
Président...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, il faut que ce
soit une véritable question de règlement.
M. Charbonneau: Je pense que déjà, M. le
Président, on est certain de ne pas avoir suffisamment de temps pour
entendre...
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas une question de
règlement, M. le député de Verchères, je m'excuse,
c'est une intervention, je ne pourrai pas la permettre. J'ai déjà
permis beaucoup de choses. Mme le député de L'Acadie.
Suspension du débat
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je ne sais pas quelle
sera la décision de l'Union Nationale, j'aimerais lui faire une
suggestion que peut-être la discussion de la motion puisse être
suspendue temporairement pour que nous entendions le groupe.
Le Président (M. Cardinal): Madame, il faudrait un
consentement unanime.
Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela que je le demande.
M. Grenier: M. le Président, je suis bien d'accord, ce ne
sont pas les hauts cris qui me tannent, j'en ai entendu bien d'autres,
même des gens qui sont ici devant nous ce soir. Je me sens malheureux
quand j'entends des gens venir nous traiter de grossiers personnages ici, quand
on fait notre devoir de député je ne suis pas agressif, je
suis modéré et je pense que la position que nous
détenons ici, ces messieurs qui sont placés à la
tête de la CSN en savent passablement long sur le rôle qu'on doit
jouer ici dans l'Opposition, et le bout qu'ils ne savent pas, placés
comme ils le sont, ils peuvent soupçonner le reste. Je pense que les
gens qui sont là que je respecte, qui représentent un nombre de
personnes important dans la province de Québec, contre qui je n'ai
absolument rien, sont assez avertis. J'aime bien aussi qu'on comprenne que,
quand on se fait donner des réponses aussi évasives
j'aimerais qu'on nous entende là-bas aussi, c'est important, c'est vous
qu'on entretient et c'est pour cela l'explication que je donne... je comprends
l'importance de votre mémoire et je veux qu'on entende votre
mémoire. S'il y a lieu, on va tenter de l'entendre en grande partie, ce
soir. Je suis prêt à collaborer, mais quand on se fait servir des
réponses aussi évasives et des accusations comme on vient d'en
avoir du ministre, à savoir qu'on fait du boycottage, il n'y a rien de
plus faux, je vais vous dire cela, moi.
Ah oui! riez. Vous avez bien plus envie de brailler ce soir que de rire,
parce que vous ne faites pas partie de la nouvelle équipe de ministres.
J'aimerais vous dire ici que si c'est cela, je suis bien prêt à
collaborer, pour une fois... C'est la première fois que cela m'arrive
ici, mais je ne le ferai pas deux fois. La motion que j'ai faite ici ce
soir est sérieuse. Ce sont des gens qu'on doit entendre, quand on
a affaire au milieu rural. Au milieu rural, ce sont des gens qui n'ont pas
été prévenus de cela et cette loi est importante pour le
milieu rural. Je suis sûr que ces gens-là auraient eu des choses
importantes à nous dire.
Si ces personnes qui sont invitées ici ce soir semblent
être victimes des discussions qu'on mène à cette table, je
vais vous dire une chose, je suis bien prêt à céder pour ce
soir et donner l'unanimité pour qu'on les entende, mais je ne le ferai
pas une deuxième fois. Je n'ai pas assisté au premier
débat de mercredi passé, et je ne le ferai pas une
deuxième fois, j'aime mieux vous prévenir tout de suite, pas par
des réponses comme j'ai eues du ministre tout à l'heure, à
deux reprises, certainement pas deux fois. Ce gouvernement a dit trop longtemps
dans la province qu'il changerait des choses au Québec. J'ai bien trop
l'impression que cela ressemble au passé. Je veux qu'il se change des
choses. Ce qui se dit là, ce ne sont pas des choses changées. Des
réponses aussi évasi-ves... Dans deux semaines, les
réponses que j'ai eues du ministre tout à l'heure, je vous dirai
peut-être de quoi cela a l'air. C'est dommage que les mêmes
témoins ne soient pas ici dans deux semaines. On verra peut-être
les réponses que le ministre nous a données, la
réalité et les réponses qu'on a ce soir. Je donne mon
consentement pour entendre ces témoins, mais je vais vous dire tout de
suite que c'est la dernière fois, sur des propos comme ce soir.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, je vous remercie. Je comprends que vous demandez la
suspension du débat et qu'il y a consentement unanime pour le faire.
M. Lalonde: M. le Président, j'avais quand même une
intervention à faire. Cela me fait plaisir d'accéder à la
suggestion du député de L'Acadie. Nous avions aussi des motions
à présenter. Nous discutons actuellement une motion de l'Union
Nationale. Si les témoins veulent bien intervenir actuellement, cela me
fait plaisir de participer à l'unanimité pour la suspension du
débat.
Le Président (M. Cardinal): J'ai l'unanimité.
Est-ce que les témoins sont encore là? Merci, madame, messieurs
les membres de la commission. Le débat sur cette motion est suspendu. Je
suspens la séance pour trois minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 52)
(Reprise de la séance à 22 h 2)
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Puis-je demander aux députés et à tous les
invités de bien vouloir prendre leurs fauteuils?
Cela va prendre 30 secondes. Je reconnais donc que la commission,
unanimement, suspend le débat sur la motion du député de
Mégantic-
Compton. Il pourra y revenir en tout temps, sauf pendant cette
séance.
Sur ce, la Confédération des syndicats nationaux
étant devant nous, mémoire 37, je demanderai à ses
représentants de bien vouloir s'identifier. Ils auront ensuite, à
compter du moment où ils commenceront la lecture de leur mémoire
ou le résumé du mémoire, 20 minutes pour l'exposer et,
ensuite, les députés auront, pour autant que faire se peut ce
soir, 70 minutes pour poser des questions.
Confédération des syndicats
nationaux
Mme Lalonde (Francine): Je suis Francine Lalonde, première
vice-présidente de la CSN. A ma gauche, André L'Heureux,
vice-président, Michel Rioux, permanent; à ma droite,
Léopold Beaulieu, trésorier.
M. le Président, je voudrais quand même dire, compte tenu
de l'incident dont nous avons été l'objet, quant à nous,
qu'il y a deux semaines, n'eût été d'un mercredi soir
utilisé à la procédure, nous aurions pu nous faire
entendre, au moins, dans la journée du lendemain. Nous étions
pris le 23 au soir. Loin de nous de refuser à la démocratie ces
aléas, y compris les débats de procédure, mais c'est un
peu raide à avaler d'entendre discuter longuement de groupes qu'on
devrait inviter quand, déjà, des représentants des
travailleurs, dont nous sommes, je parle de notre groupe, sont là depuis
un certain temps.
Le Président (M. Cardinal): Madame, si vous permettez, je
me suis déjà, à plusieurs reprises, exprimé sur ce
sujet. Je suis le premier malheureux, dans un sens, que ça se produise,
mais, le mercredi soir, ce n'est pas le bon soir.
Mme Lalonde: Alors, c'est "jamais le mercredi".
Le Président (M. Cardinal): Mme le député
de... Oui, c'est ça: "Never on Wednesday". Mme le député
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais être
extrêmement brève. Je n'avais pas l'intention de faire cette
intervention à ce moment-ci, mais, puisque vous avez ouvert la porte, si
j'ai demandé de retirer la motion, c'est que je réalisais fort
bien que vous attendiez.
Mais moi, je dois rappeler qu'en 1970, je suis venue à cette
commission parlementaire où on nous a fait revenir deux fois.
On devait revenir une troisième fois et nous n'assistions
même pas à des discussions de motions. On assistait strictement
à de la "procédu-rite" entre les députés.
Je dois vous dire que je me suis sentie comme vous vous êtes
sentis aujourd'hui, mais il me semble que cela ne soit pas une chose qui soit
nouvelle à l'Assemblée nationale et je pense que le
président qui est à ma droite se rappellera de ces incidents et
la troisième fois, comme je l'ai déjà dit au début
de cette séance, les élections ont été
dé-
clenchées. Alors, nous n'avons pas eu à revenir la
troisième fois. Nous n'avons même pas eu la chance d'être
entendus.
Le Président (M. Cardinal): Pour terminer, il est
sûr que le président s'en rappelle. Il l'a vécu et il ne
souhaite pas tellement le revivre.
M. Beaulieu: Je voudrais seulement, si vous permettez, indiquer
que plus tôt ce matin, on parlait de revanche à éviter.
Le Président (M. Cardinal): Ne commencez pas un
débat de procédure.
A l'ordre, s'il vous plaît! Maintenant qu'il est 10 h 6, je
voudrais bien que nous commencions.
Mme Lalonde.
Mme Lalonde: C'est cela; de notre point de vue, la distinction
entre la "procédurite" et la discussion de motions est difficile
à faire.
Alors, je vous demanderais d'abord le privilège que l'ensemble de
notre mémoire soit annexé au journal des Débats, comme
cela m'a semblé la coutume.
Le Président (M. Cardinal): Ceci vous est accordé
immédiatement.
Mme Lalonde: Merci.
Le Président (M. Cardinal): II sera déposé
en annexe au journal des Débats.
Mme Lalonde: Comme le temps nous est compté... Le
Président (M. Cardinal): Pourriez-vous présenter ceux qui
vous accompagnent, s'il vous plaît?
Mme Lalonde: C'est fait.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je m'excuse.
Mme Lalonde: A mon souvenir, en tout cas.
Le Président (M. Cardinal): Oui, vous avez raison. Alors,
allez-y.
Mme Lalonde: Je vais d'abord, globalement, faire part de
l'attitude de la CSN par rapport à l'ensemble du projet de loi pour
tenter dans les minutes qui me sont comptées de faire part de la
position relativement à la langue de travail qui est fondamentale pour
nous et également, la langue de l'enseignement, entendu que les autres
points dont nous avons fait mention ont été largement
touchés par d'autres groupes.
En conclusion à la position de la CSN sur la loi 22, on pouvait
lire: "Nous répétons... que la pente imprimée à
l'histoire par le gouvernement en matière de langue nous conduit non
seulement à notre disparition comme peuple, mais à notre
subordination massive aux étrangers et aux dé- chéances
morales, économiques et sociales qui attendent les peuples
réduits à une condition de minoritaires, les travailleurs ne
devant pas échapper aux conséquences de cette décadence,
bien au contraire. La bourgoisie seule garderait des chances individuelles
d'échapper au sort commun."
La question de la langue nous a toujours touchés de très
près parce qu'elle compte tellement dans la vie quotidienne de centaines
de milliers de travailleurs. Aujourd'hui, la CSN est heureuse devant ce projet
de loi, symboliquement numéroté un, de constater la
volonté du gouvernement de mettre un frein à la domination
spécifique des travailleurs francophones en tant que travailleurs
francophones.
Le gouvernement semble, à tout le moins, vouloir assurer de droit
que la langue française soit un outil efficace et collectif de
formation, d'expression, de communication au lieu d'être la seule langue
de la culture et de la résistance.
Et si nous sommes d'autant plus à l'aise pour souligner le
courage du gouvernement, c'est que nous nous sentons toujours tout aussi
à l'aise de souligner à maintes reprises la timidité des
gestes qu'il pose dans d'autres domaines qui ont aussi une grande importance
pour les travailleurs.
La CSN et la langue. Il nous apparaît opportun d'expliquer
rapidement pourquoi et dans quelle perspective la CSN, depuis longtemps, a
attaché une importance spéciale à cette question de la
langue et a participé à tous les débats qui ont
agité le Québec depuis une dizaine d'années, sur cette
question.
Nous sommes une centrale syndicale essentiellement
québécoise. Nos membres affiliés aux quatre coins du
territoire évoluent dans un contexte où la domination de
l'appareil économique se manifeste de façon quotidienne. Ils la
subissent comme travailleurs et comme consommateurs.
Il est donc normal que cette situation ait fini par être
dénoncée dans les débats qui se déroulent à
l'intérieur de nos instances démocratiques. Dès 1969, la
CSN adoptait une position prônant l'unilinguisme français. Il ne
s'agit donc pas pour nous d'un quelconque combat d'arrière-garde pour la
défense d'une soi-disant culture à caractère
élitiste. Au contraire. Les luttes en faveur de la langue
française et le soutien que nous leur avons accordé s'inscrivent
dans un combat plus large encore contre tous les types de domination et
d'aliénation dont ont eu à souffrir et souffrent encore des
générations de travailleurs québécois.
Pour la CSN, le français au travail est une lutte ouvrière
en même temps que nationale car la langue est aussi un des
éléments qui font qu'un travailleur est respecté dans son
travail et dans sa vie. Pour un travailleur québécois
francophone, travailler dans sa langue est un droit pour lequel il faut lutter
au même titre que le droit à la santé et à des
conditions de travail humaines.
Le mouvement syndical a soutenu plusieurs luttes pour le respect de ce
droit de travailler dans sa langue, dans son propre pays, mais le fond du
problème n'a jamais été réglé d'une
façon colléc-
five. N'insistons pas sur les conséquences, elles sont trop bien
connues. Des milliers se sont vu refuser un emploi ou ont été
congédiés parce qu'ils ne connaissaient pas l'anglais ou ne le
connaissaient pas suffisamment, ou n'ont pas pu avoir d'emploi. Des milliers
ont dû demeurer au même poste, parce qu'ils n'alliaient pas
à leur compétence technique la connaissance de la langue
anglaise. Comment donner tout leur sens aux terribles statistiques du rapport
Laurendeau-Dunton? Des statistiques plus récentes montrent même
que la situation relative du revenu des travailleurs francophones s'est
dégradée, ils sont maintenant les moins bien payés au
Québec.
C'est pourquoi, sur cette question de la langue, le gouvernement pourra
compter sur le soutien de notre organisation syndicale. Travailler dans sa
langue, vivre dans sa langue ne règle pas tous les problèmes,
mais la CSN ne pourra qu'être d'accord chaque fois qu'une injustice sera
corrigée. Dans le cas particulier du français, l'injustice dure
et durait trop longtemps pour que nous ne reconnaissions pas que la ferme
volonté manifestée par le gouvernement tend à
rétablir la situation en faveur de la majorité francophone. Cette
volonté ferme doit cependant être accompagnée
particulièrement en matière de langue de travail de la souplesse
nécessaire quand il s'agit de lois ou de règlements
appelés à régir les rapports entre les hommes. Dans cette
perspective, il faut donner aux personnes qui occupent actuellement un emploi
et qui ne maîtrisent pas la langue française le temps et les
moyens de se recycler, de s'adapter à une situation nouvelle et, dans ce
sens, il est évident que nous attendons impatiemment les
règlements et autres manifestations de cette volonté
gouvernementale.
Les articles 33 à 40 du projet de loi traitent de la langue du
travail. Disons dès le départ que ce chapitre répond d'une
façon adéquate aux problèmes que nous avons
soulevés en introduction. Les remarques qui vont suivre n'ont pour but
que d'amener des clarifications supplémentaires et ont pour objet de
rendre plus facile l'application de la loi, en tout cas le sens que nous y
trouvons. Il nous semble que, dès l'article 33, la précision
apportée par le législateur en spécifiant que tout membre
du personnel d'un employeur a le droit d'exiger que soient
rédigées en français les communications écrites
ouvre la porte à la possibilité qu'un contremaître, par
exemple, s'adresse continuellement à des travailleurs dans une langue
autre que le français oralement sans contrevenir aux dispositions du
présent projet de loi. Cette restriction en ce qui a trait aux
recommandations écrites nous semble de plus amoindrir la portée
de l'article 4, qui établit que les travailleurs ont le droit
fondamental d'exercer leurs activités en français.
Nous estimons donc que le gouvernement, si son intention est de faire en
sorte qu'un travailleur puisse exercer ses occupations et recevoir des
directives,- qu'elles soient orales ou écrites, en français,
aurait intérêt à biffer de l'article 33 la restriction
touchant les seules communications écrites. Par ailleurs, ce même
article 33, qui stipule que tout membre du personnel a le droit d'exiger que
soient rédigées en français les communications
écrites qui lui sont adressées par ce dernier, garantit
clairement ce droit au salarié compris au sens du code du travail
cela n'est pas aussi clair cependant pour les cadres d'une entreprise,
particulièrement en raison de l'article 109 du présent projet de
loi qui parle de salariés. Si le gouvernement veut que les cadres soient
couverts par les articles 36, 39 et 40, il devrait élargir davantage et
de façon plus précise la notion de salarié.
L'article 36 prévoit qu'aucun employeur ne pourra
congédier ou rétrograder un salarié pour la seule raison
qu'il ne parle que le français ou qu'il ne connaît pas
suffisamment une langue donnée autre que le français. L'article
prévoit de plus qu'un salarié lésé pourra faire
valoir ses droits auprès d'un commissaire enquêteur au même
titre que s'il s'agissait d'un congédiement pour activité
syndicale. Ces dispositions nous semblent heureuses. Toutefois,
l'expérience nous apprend qu'il serait sans doute
préférable d'enlever l'article seul pour éviter les
"avocasseries" inutiles. Nous connaissons aussi de nombreux cas où des
déplacements dans l'entreprise tiennent lieu de rétrogradation.
La loi devrait être plus explicite sur ce point, le motif pouvant
être la méconnaissance de la langue seconde, alors que le motif
invoqué pourrait être autre chose. Alors, le mot seul, quant
à la connaissance de la jurisprudence du travail que nous connaissons,
serait de nature à ne pas protéger suffisamment le travailleur
dans ce cas. Or, il nous semble fondamental que les droits des travailleurs
soient véritablement protégés, autrement les droits qu'on
veut assurer dans la loi pourraient ne pas être utilisés.
Dans notre condition quotidienne de travailleurs, nous savons fort bien
faire la différence entre un droit reconnu dans un texte
législatif et l'exercice de ce droit, je peux penser à la
grève comme à la santé.
Il nous semble de plus qu'il serait préférable d'adapter
expressément l'article 14 du Code du travail au lieu de ne s'en tenir
qu'à un "mutatis mutandis". Ce n'est pas qu'on ait quelaue chose contre
le latin, mais c'est vague, en l'occurrence, comme le prévoit l'article
36, car le renvoi aux articles 14 à 19 pourrait s'avérer plus
difficile d'application. Ainsi, la présomption dont jouit le
salarié pourrait ne pas être démontrée à la
satisfaction du commissaire-enquêteur, ne pas être
démontrée ou l'être difficilement.
Quant à l'article 40 qui prévoit que le présent
chapitre est réputé faire partie intégrante de toute
convention collective, nous y souscrivons, parce qu'il aura pour effet
d'éviter à des milliers de travailleurs de devoir recommencer
toujours des luttes pour que ces droits soient inscrits dans leurs conventions
collectives. Il aura, en outre, l'avantage d'intéresser
concrètement le travailleur et son syndicat en permettant l'utilisation
de la procédure de grief pour que les droits inscrits au chapitre sur la
langue de travail soit respectés.
Nous constatons cependant, et nous tenons à le souligner, que le
gouvernement québécois continue à ne pas avoir de pouvoir
sur les condi-
tions de travail de plusieurs milliers de travailleurs
québécois francophones assujettis au code fédéral
du travail, ce qui, sur cette question de la langue, risque de faire d'eux,
dans ce cas précis, des travailleurs de seconde zone.
Nous avons également quelques remarques, importantes quant
à nous, à formuler au sujet de l'article 114 qui traite des
comités de francisation dans les entreprises. D'abord, en raison
même de la structure industrielle du Québec, nous croyons qu'il
serait absolument nécessaire que ces comités soient formés
dans toute entreprise qui compte 50 employés. Nous ajoutons, dans notre
position, et à la demande des employés, dans les entreprises qui
comptent dix employés et plus.
La loi 49 prévoit qu'il y a des comités dans les
entreprises où il y a dix employés et plus, le règlement
3787 sur la sécurité et la santé au travail prévoit
qu'il y a des comités paritaires dans les entreprises où il y a
50 employés et plus. Evidemment, l'article 1050 est arbitraire, mais on
pourra davantage étoffer tantôt ce pourquoi il nous semble
important que de semblables comités existent, si on veut vraiment
imposer un tournant à la situation de la langue au travail.
Ensuite, nous voyons mal pourquoi les travailleurs, premiers
visés par une telle mesure, ne représenteraient que le tiers des
membres de ces comités de francisation. La loi devra prévoir que
les salariés de l'entreprise devront compter pour la moitié des
membres de ces comités, d'autant plus qu'on prévoit ailleurs
qu'il y aura des rencontres entre la direction et le comité de
francisation. Alors, on voit mal comment un comité de francisation, qui
soit très majoritairement composé de représentants de la
direction, se rende compte lui-même quel rôle il reste alors aux
travailleurs.
Enfin, la loi devra prévoir que les dépenses
inhérentes à ces comités de francisation sont la
responsabilité de l'entreprise; les moyens financiers forcément
limités, de nombreux syndicats locaux en amèneraient plusieurs,
notamment au chapitre des délibérations, à ne pouvoir
participer à ces comités où, nous le
répétons, les travailleurs sont intéressés au
premier chef.
Avant de passer à la langue d'enseignement, rapidement, une
remarque générale. Il nous semble qu'il faut que l'effort maximum
soit mis pour que la langue de travail devienne véritablement, dans un
certain laps de temps, la langue française. Autrement, les dispositions
relatives à la langue d'enseignement, et je pense que de nombreux
groupes en ont fait état, sont inacceptables, même pour les
travailleurs francophones, parce qu'il est évident que ce sont les
conditions économiques qui ont dicté les choix, finalement,
politiques, en ce qui concerne l'ensemble de ceux qui ont choisi d'envoyer
leurs enfants, qu'ils soient allophones ou francophones, à
l'école anglaise.
Si bien que la position de la CSN sur la lanque de l'enseignement, c'est
l'unilinguisme. Je pense que c'est une position qui est bien connue, qui
s'assortit, au niveau primaire, d'une recherche de l'enseignement, pour ce qui
est des allophones, dans leur langue maternelle. Nous persistons à
croire que cette solution serait la plus logique.
Cependant, nous sommes conscients que la solution avancée par le
gouvernement doit tenir compte de facteurs politiques. Dans la circonstance
historique dans laquelle nous sommes placés, on comprend qu'on ait cru
que c'était là le plus loin qu'on pouvait se permettre
d'aller.
Il nous faut cependant souligner que, compte tenu que la loi
prévoit qu'il n'y a pas de liberté de choix, ce avec quoi nous
sommes d'accord, jusqu'à la fin du secondaire, il nous semble, encore
une fois, que si l'effort maximum n'est pas fait pour que la langue
française devienne la langue du travail, le libre choix qui est
laissé, au niveau du CEGEP et de l'université pourrait
créer une condition qu'on ne veut pas.
D'autre part, même si nous ne partageons pas les vues alarmistes
de certains anglophones et francophones quant à la possibilité
d'extinction à long terme de la communauté anglaise au
Québec suite à l'adoption du projet de loi 1, compte tenu des
conditions géographiques, économiques, etc., nous
réitérons notre position toutefois, pour que les emplois soient
préservés, aussi bien pour les enseignants que pour les autres
personnels. S'il advenait que la clientèle scolaire anglophone soit
réduite en raison des mesures reliées à l'application de
la loi 1, nous voulons que les droits syndicaux des enseignants et autres
travailleurs touchés soient préservés. Les mesures
nécessaires devront être prévues, comme le recyclage, par
exemple. Nous insistons de plus pour que ces dispositions soient inscrites dans
la loi, dans le but de rassurer ces travailleurs.
Sur l'office de la langue, la position que nous soutenons est que le
gouvernement devrait revenir sur sa décision de faire de l'office un
organisme relevant du ministre et de son ministère.
Quant à la composition du conseil consultatif, nous pensons que
les personnes appelées à y siéger et c'est une
position à laquelle nous tenons devraient être
nommées par les organismes eux-mêmes qui pourraient les rappeler
s'ils estimaient qu'ils ne les représentaient plus.
Les droits de la personne. Il y a eu plusieurs interventions
relativement à cette question, pas que nous pensions qu'il y ait
opposition entre l'article 172 et la Charte des droits et libertés de la
personne, mais nous partageons l'avis du ministre Laurin qu'il n'y a pas
d'incompatibilité entre les deux chartes, c'est-à-dire que nous
trouvons néanmoins le procédé déplaisant, parce
qu'il enlève à la Charte des droits et libertés de la
personne le caractère de quasi-inviolabilité qui lui
confère en bonne partie sa valeur. C'est donc sur la forme et non sur le
fond que nous soulignons notre désaccord. Le gouvernement a
emprunté une mauvaise technique législative qu'il devra corriger,
pensons-nous.
En conclusion, lorsque les débats d'une importance et d'une
intensité comme celui qui se fait autour du projet de loi sur la langue
occupe une collectivité, on peut vérifier par les diverses
réactions où se situe l'intérêt
général d'un peuple. On peut voir aussi comment se
répartissent les blocs, de qui ils sont composés. Il est
intéressant de constater aujourd'hui qui sont ceux qui appuient
globalement le projet de loi et ceux qui le combattent avec
véhémence. Le peuple, les travailleurs et leurs organisations
sont derrière le gouvernement. Le monde des affaires, les
possédants anglophones ou francophones, ces derniers que le ministre
Laurin qualifiait lui-même, le 8 avril, de rois-nègres à la
solde de leurs patrons anglophones, le combattent.
Le comble de l'humiliation, quant à nous, c'est bien de voir un
peuple, écrasé tout au long de son histoire, se voir
accusé aujourd'hui de racisme et de xénophobie, parce qu'il veut
simplement relever la tête. A cet égard, l'histoire se
répète. On se permet de citer un extrait d'un livre
intéressant. Le manifeste dont il est question, qui est le manifeste
d'une association francophone de Québec en 1847, dix ans après
les événements de 1837, retrace donc la véritable source
de cette tendance à voir dans l'affirmation des droits d'un peuple un
désir de domination.
On constate de plus que le penchant des Anglo-Saxons à
écarter les revendications légitimes d'un peuple opprimé
en les qualifiant dédaigneusement de nationalisme étroit ou de
jalousie, portent la marque d'un autre nationalisme, celui du groupe
dominant.
Notre collectivité a attendu trop longtemps avant oe se donner de
véritables moyens de pouvoir vivre en français. Ce projet de loi
est perçu par la population, estimons-nous, comme une affirmation
indispensable de notre identité et nous fournit les moyens de nous
présenter devant le tribunal de l'histoire autrement que comme un peuple
diminué, finalement vaincu.
Nous exhortons donc le gouvernement à maintenir sa
fermeté, sa volonté, dans cette entreprise, les travailleurs en
ont saisi l'importance.
Le Président (M. Dussault): Mme Lalonde, je vous remercie
de votre exposé. Je cède la parole à M. le ministre d'Etat
au développement culturel.
M. Laurin: Je veux d'abord remercier la CSN, autant pour sa
patience que pour le mémoire senti et équilibré qu'elle
vient de nous présenter. Nous avons bien failli ne pas vous entendre et,
n'eût été ce rétablissement de dernière
heure, je pense bien que votre mémoire aurait été perdu
pour la postérité. Je me félicite qu'il n'en ait pas
été ainsi, car la commission y aurait sûrement beaucoup
perdu.
Pour notre part, évidemment, nous sommes très satisfaits
de l'appui global que votre association apporte au gouvernement. Nous sommes
reconnaissants des substantifs que vous employez, lucidité,
fermeté, courage, qui correspondent véritablement aux intentions
du gouvernement, à la volonté qu'il avait de redresser
efficacement, véritablement la situation à l'avantage d'une
majorité qui, de fait, avait toujours eu le statut de minorité et
s'était comportée aussi comme une minorité face aux
obstacles auxquels elle faisait face.
Nous acceptons avec d'autant plus de plaisir votre appui que nous
croyons que, autant il est malsain pour un gouvernement de
légiférer contre l'ensemble des travailleurs, autant il est sain
pour un gouvernement, lorsqu'il légifère, de sentir l'appui de la
vaste majorité de l'ensemble des travail- leurs et je me
réfère ici non seulement à votre mémoire, mais
à celui de toutes les autres centrales syndicales, c'est-à-dire
la FTQ, la Centrale de l'enseignement du Québec et même l'Union
des producteurs agricoles que nous n'avons pas encore eu le plaisir
d'entendre.
Nous croyons avec vous qu'il devenait urgent d'intervenir, qu'il
devenait urgent pour l'Etat d'intervenir et d'intervenir d'une façon
énergique sur le problème de la langue. En effet, trop longtemps
les gouvernements ont laissé les organisations syndicales se
débattre seules avec ce problème et, comme vous le soulignez
vous-mêmes dans votre mémoire, les victoires remportées par
les organismes syndicaux ont souvent été pénibles,
partielles, incomplètes et parfois elles ne se sont pas produites du
tout, dans un très grand nombre de cas.
Nous sommes d'accord avec vous lorsque vous dites que seul l'Etat, avec
tous les instruments qu'il possède, peut vraiment intervenir, de tout
son poids, pour rétablir, à l'avantage de la majorité, une
situation qui, même si elle s'est améliorée à
certains égards, sur d'autres points, ne cessait de se dégrader,
de se détériorer.
Je suis aussi d'accord avec vous lorsque vous dites que la lutte
ouvrière est en même temps une lutte nationale. On a voulu,
souvent, dissocier les deux luttes et non seulement les dissocier, mais les
opposer. On traitait de nationalistes ou de "na-tionaleux" ceux qui tentaient
de promouvoir la cause du français et surtout de promouvoir la cause des
francophones. Mais c'était une fausse opposition, car il arrivait
justement que ceux qui souffraient, qui étaient victimes de
l'aliénation sociale étaient en même temps les victimes de
l'aliénation linguistique et que, bien souvent, ils étaient
victimes de l'aliénation sociale parce qu'ils appartenaient à une
certaine communauté linguistique. On ne saurait donc dissocier les deux
combats. Nous sommes d'avis qu'il faut les mener de front, tous les deux, en
même temps, et que, par ailleurs, il ne faut pas se contenter, bien
sûr, de mener un combat linguistique, mais qu'il faut également
que les gouvernements mettent tout en oeuvre pour, en même temps, d'une
façon concomitante, éliminer tous les facteurs qui sont
responsables de l'aliénation sociale des travailleurs ou, du moins,
éliminer tous les facteurs qui sont responsables de leur
infériorisation, qui sont responsables du fait que les travailleurs
n'ont pas le même accès que les autres à la richesse
collective et ne peuvent pas utiliser cette richesse collective pour
l'épanouissement de leur personne, pour le développement de tous
les talents qu'ils possèdent.
C'est là notre idéal social-démocrate et je pense
qu'il est parfaitement compatible avec le travail de promotion linguistique que
nous menons à l'heure actuelle. Je n'en veux d'autre preuve que celle
que vous apportez dans votre mémoire et que celle que nous ont
apportée d'ailleurs toutes les études que nous connaissons, les
études scientifiques qui ont été faites sur le revenu des
travailleurs québécois, car il est vrai que même si leur
situation s'est améliorée en chiffres absolus, même si
l'écart a diminué entre les reve-
nus des travailleurs francophones et des travailleurs appartenant
à d'autres communautés linguistiques, il reste que, d'une
façon relative, ils ont glissé au cours des dernières
années au dernier rang et que ce seul fait appellerait une intervention
énergique de l'Etat pour corriger tous les facteurs, tous les
éléments, toutes les causes qui sont responsables de cet
état de choses. Une des causes est incontestablement l'absence relative
de francisation dans le milieu du travail.
Vous dites, à bon droit, dans votre mémoire, que si le
gouvernement ne voulait améliorer que la situation linguistique au
niveau du secteur de l'enseignement, cette réforme ne serait que
superficielle et ne changerait pas fondamentalement la situation. Nous sommes
d'accord avec vous qu'il faut d'abord changer le milieu du travail, le milieu
de l'administration, qu'il faut franciser le plus complètement possible
ces deux milieux afin qu'il devienne évident pour tous les citoyens du
Québec que la langue française est non seulement la langue de la
majorité, qu'elle est la langue de cette société dans
laquelle nous vivons, mais également qu'elle est la langue utile,
rentable, indispensable, la langue commune, la langue qu'il faut
connaître pour non seulement communiquer les uns avec les autres, mais
également qu'il faut connaître pour développer au maximum
tout le potentiel que recèle chaque individu. C'est à cette
réforme globale que nous entendons nous attaquer actuellement par une
législation linguistique, bientôt par une législation sur
le plan social et sur le plan économique, mais, dans notre esprit, les
deux éléments sont indissociables.
Je vous remercie également pour les suggestions très
précises que vous nous faites pour l'amélioration de tel ou tel
article du projet de loi. Par exemple, vous nous demandez de clarifier
l'article 33. Vous ne voudriez pas, en effet, que la francisation des rapports
entre employeur et employé se limite aux seules communications verbales,
mais qu'elle englobe également les communications écrites. Je
peux vous dire d'ores et déjà que cette recommandation sera
entérinée dans la nouvelle version que nous préparons,
tout en vous soulignant, cependant, que déjà un article du projet
de loi veillait à ce que cette recommandation s'incarne, se
concrétise dans les faits. Je veux parler ici de l'article 112, qui
énonçait les objectifs que doivent poursuivre les programmes de
francisation. Dans ces programmes de francisation, il était bien
indiqué que tout le personnel dirigeant et en particulier, les
contremaîtres doivent posséder dans un délai fixé
une connaissance de la langue française suffisante pour les habiliter
à s'entretenir dans la langue française avec tous leurs
employés francophones.
Il reste que votre recommandation nous amène à scruter
avec un peu plus d'attention cet article et nous verrons à ce que votre
voeu se réalise. De la même façon, vous nous mettez en
garde contre l'équivoque qui pourrait résulter d'un emploi
inconsidéré du mot "salarié", par exemple, par opposition
au mot "cadre".
D'autres organismes avant vous nous ont fait part de cette
ambiguïté possible et nous verrons à la corriger.
En ce qui concerne l'article 36, vous nous recommandez d'éliminer
le mot "seule". Je vous avoue que nous avons longuement réfléchi
sur le sujet. Nous avons hésité entre "pour la raison qu'il ne
parle que le français", ou "pour la seule raison qu'il ne parle que le
français", et nous avons tenté d'utiliser un jeu de
scénario pour essayer de voir l'effet hypothétique de l'emploi de
l'une ou de l'autre formule.
A nous, pour le moment, il nous semble qu'il est plus facile de
protéger le travailleur en laissant le mot "seule", parce qu'alors, il
deviendrait évident que l'employeur devrait prouver que c'est uniquement
parce que l'employé parle le français qu'il est victime d'une
discrimination, alors que si nous n'employons pas le mot "seule", il deviendra
très difficile de prouver que c'est pour cette seule raison que
l'employé ne connaît pas le français qu'il peut subir un
préjudice. Mais comme nous ne prétendons pas à
l'infaillibilité en ce domaine, j'aimerais vous demander d'expliciter
davantage le raisonnement qui vous amène à nous suggérer
l'élimination de cet adjectif?
Mme Lalonde: La jurisprudence qui s'est développée
dans les cas de congédiement pour activités syndicales, par
exemple, fait en sorte qu'on évalue qu'il y a congédiement pour
activités syndicales quand tout autre motif pouvant justifier le
congédiement a été éliminé, si bien que,
effectivement, l'employé peut avoir été
congédié pour activités syndicales cela a
été le motif réel du congédiement sauf que
je dis hypothétique-ment deux retards qui, jusque
là, n'avaient pas été utilisés le sont, etc., si
bien qu'il nous semble que ce qui fait que c'est extrêmement long et
difficile de prouver un congédiement pour activités syndicales
dans des cas patents où c'est le cas, si bien qu'il nous semble qu'il
est absolument important que, dans cette matière, les travailleurs se
sentent définitivement protégés. Autrement, nous
semble-t-il, le droit qui est prévu dans la loi pourrait ne pas
être exercé par le travailleur, parce qu'une fois que la loi est
votée, ça commence. Là où le travailleur, dans son
syndicat, ou là où il n'y a pas de syndicat, aura à poser
des gestes en accord avec la loi, mais en désaccord avec son milieu,
s'il est, et il sera passible, parce que l'employeur conserve toujours ses
droits de gérance, s'il est passible de peine et que la défense
est extrêmement longue et difficile, notamment ça le sera
de toute façon mais notamment à cause de cet article, de
cet adjectif, il nous semble qu'il faut enlever les motifs
supplémentaires, qui feraient que la défense serait difficile
à faire. C'est dans cette perspective qu'on demande d'enlever
"seule".
M. Laurin: Bon! Je vous remercie de votre réponse.
Vous nous recommandez aussi de former des comités de francisation
dans toute entreprise qui compte 50 employés et plus. Nous n'avons
pas
jugé nécessaire, jusqu'ici, de prévoir des
comités de francisation dans toutes les entreprises de 50
employés et plus, bien que nous soumettions cependant toutes ces
entreprises à l'obligation de posséder un certificat de
francisation. Donc, il devient évident que même si cet outil
technique que constitue un comité de francisation n'est pas prévu
à la loi, il reste que nous ne renonçons pas à l'objectif
que poursuivent les programmes de francisation tels qu'entérinés
par les certificats de francisation. Je pense qu'il faut signaler ça au
départ.
La loi prévoit aussi, comme l'ancienne loi 22 d'ailleurs, que
l'office peut soumettre certaines entreprises de 50 employés et plus au
processus de francisation et exiger d'elles un certificat.
Nous pensions, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire,
à certaines entreprises un peu spéciales où, en effet, une
telle obligation pouvait être perçue avec plus d'acuité, en
particulier par les employés.
Il y a aussi le nombre des entreprises de 50 employés et plus
qu'il faut considérer et les ressources, leur assiette financière
qui, dans certains cas, peut laisser à ce point à désirer
que les dépenses que postule l'établissement d'un tel
comité peut comporter...
Il reste cependant et je pense que c'est une suggestion que je
voudrais vous faire cette fois comme centrale syndicale que rien
n'interdit à un organisme syndical ou à une association de
salariés de s'adresser à l'Office de la langue française
pour demander que telle ou telle entreprise de moins de 50 employés
puisse être soumise à la francisation et rien n'interdit non plus
à une organisation syndicale ou à une association de
salariés de s'adresser à l'office pour le renseigner sur les
conditions qui prévalent dans cette entreprise, même si elle ne
possède pas un comité de francisation et je pense qu'étant
donné les objectifs fixés dans la loi, les programmes
également, l'esprit de la loi, l'office accueillera avec toute
l'attention qu'il se doit une pareille demande.
Je me demande, cependant, s'il importe de prévoir davantage et,
là aussi, j'aimerais peut-être que vous nous donniez des raisons
additionnelles à l'appui de votre demande.
Mme Lalonde: Encore là, une fois ce projet de loi
adopté, dans les modalités qui sont prévues là, la
francisation effective, dans la réalité vivante, suppose, quant
à nous, l'implication active des travailleurs des entreprises. Comme on
l'a cru nécessaire dans la santé, par exemple, il nous semble
que, pour cette matière, il serait aussi important que les travailleurs
soient impliqués activement. Les travailleurs d'une entreprise sont
conscients, savent, généralement parlant, les limites des
possibilités d'une entreprise et, si le ministre Marois pouvait parler
de six millions d'inspecteurs sur la santé au travail, il nous semble
important d'impliquer les travailleurs dans cette question autrement que par
une éventuelle demande à l'office, dont on sait qu'il aura une
tâche importante relativement à cette question. C'est aussi pour
cette même raison que nous demandons que ces comités soient
paritaires, ce qui suppose, du côté syndical en tout cas,
là où il y aura des syndicats que nous allons inciter les
travailleurs à s'organiser sur ce plan comme sur le plan de la
santé, comme sur le plan de l'ensemble des conditions de travail. Parce
que encore une fois, si le français ne devient pas la langue du travail,
le reste des dispositions est inacceptable pour les travailleurs.
Le Président (M. Dussault): Un instant, s'il vous
plaît. M. le député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Juste pour vous préciser une chose. Je vois
que l'heure avance et quand on arrive à 11 heures et qu'on est
obligé d'avoir l'unanimité de la commission pour continuer...
J'aimerais savoir si le ministre en a encore pour longtemps, sinon on pourrait
peut-être commencer tout de suite à parler de partager le temps
entre l'Opposition libérale et nous.
M. Laurin: Oui, je le conçois très bien, M. le
Président. Je n'ai qu'une autre question. Une seule, une
dernière.
Vous dites que même si vous êtes d'accord qu'il n'y a pas
d'incompatibilité entre la Charte des droits et libertés de la
personne et la Charte du français, vous n'êtes pas d'accord sur la
forme, sur la technique que prend le gouvernement pour concilier les deux
chartes. Je voudrais vous demander, très brièvement, si vous
auriez... J'ai déjà annoncé l'intention du gouvernement
d'en arriver à une meilleure formulation que celle qui est actuellement
inscrite dans le projet de loi. Je voudrais vous demander si vous avez une
suggestion précise à nous formuler.
Mme Lalonde: Non. Nous ne sommes pas des spécialistes de
cette question, mais ce qui nous semblait difficilement acceptable
c'était de sembler limiter la portée de la Charte des droits et
libertés de la personne par cette addition, ce qui semble d'ailleurs
affirmer cette addition que le présent projet de loi
devenu loi ne serait pas compatible avec les dispositions de la charte. Or, il
nous semble qu'au Québec on a tellement à consolider au
Québec et ailleurs, mais on parle d'ici on a tellement à
consolider cette question du respect des droits de la personne et en même
temps on a tellement à faire en sorte de ne pas laisser penser que de
s'affirmer en tant que peuple français ce soit brimant pour d'autres,
que pour toutes ces raisons, il n'est pas opportun que ce soit comme cela.
Maintenant, quant à vous proposer une formulation précise, nous
n'en sommes pas là. Nous pensons que vous êtes fort bien
équipés en juristes de toute espèce.
M. Laurin: Merci.
Le Président (M. Dussault): Merci. Je cède la
parole à Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. A mon tour, au
nom de l'Opposition officielle, je
veux remercier les représentants de la CSN d'être venus
à la commission. J'ai quelques questions. Est-ce que vous avez des
statistiques à la CSN quant à l'usage du français comme
langue de travail? Vous décrivez, en page 5, que pendant trop longtemps
les travailleurs n'ont pas pu travailler dans leur langue, que cela a aussi
été une cause de leur non-promotion et ceci probablement peut
encore jouer, mais quant à la possibilité de travailler en
français pour les travailleurs, dans le moment, est-ce que vous avez
certaines statistiques? Est-ce que la plupart, maintenant, peuvent travailler
dans leur langue ou...
Mme Lalonde: C'est évident qu'on n'a pas ces statistiques
parce qu'on aurait fait participer la société
québécoise, sauf que notre expérience quotidienne de
négociation, par exemple, dans les conditions de travail ne marque pas
partout. Il est évident que dans une épicerie à Rimouski,
il y a de fortes présomptions que à Gaspé, cela
dépend la langue de travail soit le français.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, je ne pensais pas à
l'exemple particulier que vous venez d'apporter, parce que celui-là je
pense que tout le monde est à même de l'observer quand on sort de
la grande région métropolitaine d'une façon
générale, mais je pensais plus à la grande industrie.
Remarquez que ces gens sont peut-être membres de la FTQ.
Je pensais à General Motors vous ne m'en voudrez pas, je
ne sais pas exactement de qui chaque groupe relève à la
grande industrie de la région métropolitaine. Est-ce qu'il y a eu
progression et dans quelle mesure, selon votre évaluation, même si
elle n'est pas précise, les travailleurs peuvent travailler en langue
française?
Mme Lalonde: C'est sûr qu'à la suite, notamment de
batailles syndicales, il y a eu des progrès à des endroits. Dans
l'industrie du papier, dans le temps, les négociations se
déroulaient en anglais. Maintenant, il y a des usines qui sont
complètement francisées. Mais tout à fait
récemment, à QIT, fer et titane les travailleurs ne disent
pas fer et titane couramment à QIT, les travailleurs
considèrent comme une grande victoire d'avoir négocié une
clause de non-discrimination par rapport à la langue. C'est encore un
objet de revendication important, différemment ressenti, c'est
évident, mais de façon suffisante pour que nous inscrivions ce
qu'il y a dans ce rapport.
C'est évident que ce n'est pas la même chose en dehors de
la région de Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Selon vous, il y aurait encore des industries
que vous pourriez peut-être pas ce soir identifier comme
étant des industries où le travailleur ne peut pas travailler en
français?
M. Rioux (Michel): Un exemple de cela s'est passé encore
récemment c'était en 1973 au chantier maritime de
Lauzon. A la suite d'une grève, il y a quatre travailleurs qui ont
été congé- diés et l'arbitrage s'est
déroulé uniquement en anglais, parce que les contremaîtres
de la compagnie, appelés à témoigner, étaient
unilingues anglais. Peut-être que la situation s'est rétablie
depuis, mais ce n'est quand même pas tellement loin, 1973. C'est un
exemple qu'on me souligne. C'est un fait qu'on n'a pas les moyens de compiler
ce genre de statistiques, mais pour des faits comme ça, il s'agit de se
promener dans des syndicats avec cette pensée en tête et il serait
possible d'en colliger un certain nombre, assez rapidement.
Mme Lavoie-Roux: Au bas de la page 5, justement dans ce processus
de francisation, vous dites: II faut donner aux personnes qui occupent
actuellement un emploi et qui ne maîtrisent pas la langue
française, le temps de se recycler et de s'adapter à une
situation nouvelle.
Compte tenu de votre expérience dans le monde du travail,
existe-t-il, non seulement dans votre esprit, mais peut-être dans les
faits, des circonstances où, pour des travailleurs, ce recyclage
linguistique serait difficile ou si vous croyez que, sauf des cas d'exception,
ce serait possible de recycler tous les travailleurs sur le plan
linguistique?
Mme Lalonde: Je pense qu'on peut tenir pour acquis qu'un
enseignant de 58 ans, complètement unilingue anglophone pourrait mettre
un certain temps avant de pouvoir enseigner en français, si tant est que
les statistiques scolaires le menaient là.
Cependant, il nous semble que, dans la très grande
majorité des cas, sinon tout le temps, cela sera possible, avec des
conditions et des moyens, cependant. On n'a qu'à penser à tous
les immigrants qui viennent de partout, de tous les âges, et pour
lesquels, y compris à la CECM dans le temps, on avait des classes qui
leur permettaient de s'initier au français et à l'anglais, dans
le temps, dans les COFI, on a développé des méthodes qui
font que nous sommes capables de faire acquérir une connaissance d'usage
du français dans des délais qui seraient utiles.
Mais on pense évidemment à assurer cela et c'est au niveau
de la réglementation ou des moyens mis en oeuvre par l'office qu'on
verra comment le gouvernement entend donner suite à cela, mais il nous
semble que c'est possible, dans la très grande majorité des
cas.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que l'exemple que vous citez, celui des
enseignants, ce sont peut-être d'une certaine façon, les plus
privilégiés. Ils sont d'abord dans un milieu où c'est plus
facile de mettre des ressources à leur disposition; j'avais davantage en
tête les travailleurs de l'industrie.
Mme Lalonde: Je ne pense pas qu'ils soient les plus
privilégiés parce que leur instrument de travail étant la
langue, posséder une autre langue suffisamment pour communiquer un
enseignement, quel qu'il soit, cela peut être compliqué. C'est
pour cela que je donnais l'exemple de l'enseignant de 58 ans. Les autres
travailleurs, dans l'ensemble, ne sont pas dans cette situation.
Mme Lavoie-Roux: Et quelle mesure...
Le Président (M. Dussault): Un instant, monsieur voudrait
aussi répondre à la question.
M. Rioux: Exactement dans cette perspective, l'objectif que nous
poursuivons en demandant que les travailleurs, on respecte la situation qu'ils
occupent, l'emploi qu'ils occupent, et on demande aussi qu'ils ne soient pas
pénalisés, c'est tout à fait le contraire d'une attitude
revancharde. C'est tout simplement tenir pour acquise une situation qui
était d'une certaine façon, historique, c'est-à-dire que
si des Italiens ont appris l'anglais, c'est tout simplement parce que l'anglais
leur était apparu comme utile, comme l'a souligné le ministre
tout à l'heure.
Prenons un exemple concret, dans les hôpitaux, où la CSN
représente plusieurs membres et où, dans l'ouest de
Montréal, plusieurs de nos membres sont anglophones, la question n'est
pas d'en faire des francophones parfaits du jour au lendemain. Mais on peut,
à partir d'un exemple concret comme cela, essayer de se servir d'un peu
d'imagination.
Pourquoi ne serait-il pas possible, par exemple, sur les lieux de
travail, si on croit vraiment à cette question de la langue, durant les
heures de travail, pendant un certain nombre d'heures par semaine, et
même avec des travailleurs du lieu, de l'endroit, formés non pas
nécessairement pour faire des spécialistes d'avions ou de
pelotons, mais pour donner aux travailleurs anglophones ou allophones une
connaissance suffisante, courante du français, pourquoi est-ce que ce ne
seraient pas les travailleurs sur les lieux de travail, pendant un certain
nombre d'heures, qui seraient appelés à former leurs compagnons
de travail dans la langue française, pour leur enseigner les rudiments
de la langue française? Il est sûr que l'Etat n'a certainement pas
les moyens d'affecter 25 000 professeurs, du jour au lendemain, pour enseigner
à tous les travailleurs les rudiments de la langue française.
C'est peut-être une formule à explorer, il y en aura
peut-être d'autres aussi, mais c'est dans une perspective comme
celle-là qu'on fait ce genre de représentation.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question.
Le Président (M. Dussault): Un instant! Je m'excuse,
à 23 heures le parti de l'Opposition officielle aura utilisé 13
minutes, le parti ministériel 22 minutes et l'Union Nationale n'en aura
pas eu encore. Si on continue jusqu'à 23 heures, je devrai conclure
à 23 heures que vous êtes prêts à équilibrer
les choses, avant que nous ne nous quittions, sinon je devrai arrêter
immédiatement la séance.
M. Lalonde: Qu'est-ce que cela veut dire, M. le Président
"équilibrer"? Vous voulez dire qu'il faudrait continuer
après?
Le Président (M. Dussault): Un peu, pour permettre
à chacun de s'être exprimé.
M. Lalonde: Peut-on demander aux invités s'ils sont
prêts à être là, demain matin?
Le Président (M. Dussault): Effectivement, il faut,
à ce stade-ci, que je vous pose la question. Si on ne terminait pas,
est-ce que vous seriez prêts à âtre là demain matin
à 10 heures?
Mme Lalonde: Oui.
M. Grenier: Si vous permettez...
Le Président (M. Dussault): Si vous nous dites que vous
pouvez être là demain matin à 10 heures, je continuerai
jusqu'à 23 heures et, à 23 heures, je lèverai la
séance jusqu'à demain matin.
M. Grenier: M. le Président...
Le Président (M. Dussault): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: ...afin de clarifier, vous avez toujours besoin que
tous les partis se fassent entendre pous savoir vers quoi on se dirige, je
pense que si le Parti libéral termine une de ses dernières
questions, il y aura certainement moyen d'avoir le consensus pour qu'on puisse
terminer après 23 heures pour les quelques minutes, afin de
libérer, même s'ils sont prêts...
Le Président (M. Dussault): Avons-nous le consentement
unanime? On nous signifie qu'on n'aura pas le consentement unanime. A 23
heures, nous lèverons la séance jusqu'à demain, 10
heures.
M. Lalonde: Nous autres, M. le Président, aurions
été prêts à concourir à un consentement
unanime.
M. Laplante: C'était à vous autres de concourir
à 20 heures.
M. Lalonde: On voit où est l'intolérance. Le
Président (M. Cardinal): S'il vous plaît!
M. Grenier: Un instant, M. le Président! Est-ce que je
dois comprendre que le député de Bourassa vient de dire qu'il ne
donne pas son consentement pour terminer ce soir?
Le Président (M. Cardinal): M. le député...
M. Laplante: Au nom du côté ministériel.
Le Président (M. Cardinal): Ne faites pas un débat,
s'il vous plaît. J'aurais pu simplement indiquer qu'en vertu de l'avis de
la Chambre, nous devions ajourner à 23 heures.
Je veux simplement demander par politesse à ces gens qui sont ici
depuis un temps que j'ignore s'ils sont encore désireux de vivre dans
cette capitale du Québec.
Mme Lalonde: La question étant ainsi posée, nous
pouvons répondre oui.
Le Président (M. Cardinal): Alors, nous vous reverrons
demain à 10 heures. Restez là, s'il vous plaît, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Ecoutez, c'est simplement pour déplorer le
fait que j'aurais voulu, et je pense que nos invités, nos témoins
étaient prêts à continuer peut-être pour une dizaine
de minutes. J'ai l'impression que le gouvernement avait à peu
près terminé. Le Parti libéral a à peu près
terminé. Nous avions des questions pour cinq ou six minutes.
M. Laurin: Si tous les partis sont terminé dans dix
minutes, c'est bien sûr qu'on serait prêt à
libérer.
M. Grenier: Oui, c'est cela que...
Mme La voie-Roux: II me reste une toute petite question.
M. Lalonde: Ils ont refusé.
M. Laplante: On a refusé de continuer jusqu'au bout, nous
autres, parce qu'il vous restait encore une demi-heure, ensemble.
Mme Lavoie-Roux: Non, on venait de dire que...
M. Grenier: On vient de faire entendre qu'on a cinq ou six
minutes.
M. Laplante: Si vous vous donnez une limite de huit à dix
minutes, je pense qu'on est d'accord là-dessus.
M. Grenier: Cela va.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas cela qu'on avait dit.
M. Lalonde: Je comprends que le député de Bourassa
revient sur sa parole.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. S'il vous
plaît, à l'ordre!
M. Laplante: On n'a pas demandé d'argument
là-dessus, c'est un consensus qu'on est capable de faire.
Le Président (M. Cardinal): D'après les notes que
j'ai devant moi, il pourrait rester 25 minutes d'audition.
M. Grenier: Quatre ou cinq minutes, M. le Président, de
notre côté.
Mme Lavoie-Roux: Monsieur...
Le Président (M. Cardinal): Ecoutez, nous avons
déjà tenté ceci. Je ne me suis opposé à au-
cune proposition. Nous avons déjà tenté ceci et j'ai
constaté que, lorsqu'on demande à certains députés
de résumer leurs interventions pour que chacun des partis s'exprime,
parce que je veux que chacun des partis puisse s'exprimer, je n'aurais aucune
objection à demander un consentement jusqu'à 23 h 15, mais il
faudra, à ce moment, qu'aucun parti, d'une part, ne se sente
brimé, Mme le député de L'Acadie, et, d'autre part,
n'abuse de la situation. J'ai déjà vécu ceci, je dois le
dire, malheureusement. Or, à nouveau, je dis que, si les partis veulent
s'en tenir à 15 minutes d'audition en se restreignant chacun, je suis
prêt à demander ce consentement. Oui, M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
Des Voix: Consentement.
M. Lalonde: M. le Président, si vous m'accordez 15
secondes, au cas où on arrive à 11 h 15 et que vous n'auriez pas
eu le temps de me donner le droit de parole, est-ce que vous allez, de toute
façon, indiquer quels seront les invités demain?
Le Président (M. Cardinal): Oui, je le fais toujours en
fin de soirée. Alors, est-ce que j'ai un consentement pour 15 minutes
avec une collaboration très spéciale de chacun des partis,
puisqu'il leur reste 25 minutes, ce qui est impossible en 15 minutes?
M. Lalonde: De l'Opposition officielle, oui, vous l'avez.
Mme Lavoie-Roux: On vous assure de notre collaboration.
Le Président (M. Cardinal): Bon!
M. Lalonde: 15 minutes.
Mme Lavoie-Roux: II me reste une toute petite question.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire si, parmi vos membres,
vous avez un certain pourcentage d'anglophones ou de non-francophones ou de
non-anglophones, d'allophones, comme on les appelle, justement?
Quand vous présentez un mémoire comme celui-ci, est-ce que
vous avez un moyen de consultation auprès de ces membres?
Mme Lalonde: La position de la CSN sur la langue date de 1969.
Elle a été discutée dans des conseils, dans des
congrès, si bien que pour ce présent mémoire, on n'a pas
eu besoin de faire une tournée générale. De toute
façon, on n'en aurait pas eu le temps, mais les positions ont
été amplement discutées sur cette question.
Mme Lavoie-Roux: Au niveau des assemblées
générales.
Mme Lalonde: Pardon?
Mme La voie-Roux: Au niveau des assemblées
générales.
Mme Lalonde: Nous supposons que les délégués
font les débats, mais les positions étant connues, quand elles
sont de nature litigieuses, la structure de la CSN est ainsi faite qu'il y a
toutes sortes de moyens pour que nous en soyons informés.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, vous avez sept minutes, mais réduites par
l'entente.
M. Grenier: Pas de problème! On va essayer de terminer en
moins de sept minutes. Je voudrais faire savoir à nos invités
qu'ils ont un mémoire qu'il aurait été pénible de
ne pas avoir devant nous. Je dois vous dire que vous êtes placés
un peu comme l'Union Nationale. Vous êtes le 60e mémoire et nous,
on est toujours en troisième position pour vous poser des questions qui
sont sou-ventefois posées par, ou bien le gouvernement, ou bien le Parti
libéral.
Vous avez un mémoire qui répète peut-être des
choses qu'on a entendues. Cela ne vous enlève pas de mérite,
remarquez bien. Cela prouve une chose, c'est que vous n'êtes pas moins
intelligents que les autres qui sont venus, peut-être davantage,
puisqu'il a peut-être été préparé avant
d'autres, mais il a eu le défaut de passer après. C'est la raison
pour laquelle nous, de notre côté, nous avons des questions qui,
parfois, sont coupées par d'autres personnes qui les posent. On se rend
compte que vous donnez un éclairage ici, ce soir, sur plusieurs points
qui n'ont pas été apportés, puisque vous vous situez au
niveau de la pratique courante, de la pratique du travailleur, principalement
du Québec, que plusieurs autres mémoires ne nous ont pas
amené. J'aurais aimé avoir plus de temps pour l'étudier
plus à fond et pour faire appel à l'étude que fait la CSN
sur laquelle vous vous basez pour dire que les solutions de la CSN sont celles
qui nous arriveront tout à l'heure à la page 9. Elles sont fort
intéressantes et fort différentes de bien d'autres qui nous ont
été proposées. J'aurai une question à vous poser
là-dessus.
J'aimerais savoir si les chiffres que vous amenez, jusqu'en 1971, bien
globalement bien sûr, on n'ira pas dans les détails et on
ne demandera pas à des démographes de nous fournir des chiffres
mais est-ce que vous sentez que de 1971 à 1977, le travailleur
francophone est aussi... n'a certainement pas autant de difficultés,
mais voyez-vous, à l'exemple d'autres mémoires, une
amélioration vraiment sensible ou est-ce à peine sensible?
Il semble y avoir un courant... Depuis 1971, il y a une
amélioration. Tout le monde semble s'entendre là-dessus. Il y a
moins de difficultés. Le langage parlé est plus facile. Il semble
y avoir, en plus du merveilleux travail qu'ont fait les syndi- cats
c'était peut-être le temps qu'ils fassent quelque chose il
y a aussi un sentiment, un courant général qui fait que la langue
parlée... C'est plus facile d'avoir la langue parlée pour les
francophones.
Mme Lalonde: Par rapport aux statistiques, il est difficile de
répondre par des sentiments ou des impressions. Alors, je ne le ferai
certainement pas.
M. Grenier: Mais vous avez des points de repère quand
même.
Mme Lalonde: Je ne le ferai certainement pas. Il est
évident que les batailles qu'on a faites sur la langue depuis 1969, qui
ont soulevé des échos et même en 1966 un peu
partout, quant à nous, ont donné certains résultats, mais
nous exprimons clairement qu'il est important d'aller plus loin pour faire
vraiment en sorte que le français devienne la langue du travail. Il nous
semble que la meilleure réponse est que, relativement à la
question de l'enseignement, par exemple, si le français était
vraiment la langue de travail, vraiment la langue dans laquelle on ne s'exprime
pas seulement, par exemple, dans les corridors du Hilton à
Montréal, mais dans l'hôtel aussi... J'en passe et des
meilleures... Il nous semble qu'on n'aurait pas les problèmes qu'on a
relativement à la langue de l'enseignement et c'est cela qui peut
être inquiétant. D'ailleurs, dans les représentations
faites par plusieurs, il y a cette insistance sur la langue de l'enseignement
qui manifeste qu'ils ont l'impression que rien ne changera relativement
à la langue de travail.
Si la langue de travail était véritablement le
français, tous auraient intérêt à en avoir la plus
grande connaissance possible.
M. Grenier: Merci. Vous avez, à la page 5 je passe
un peu rapidement; vous voyez que notre temps est assez limité
des données de 1961 jusqu'en 1971, alors que vous avez une espèce
de comparaison entre le travailleur italien et le travailleur francophone.
J'imagine que vous allez me dire qu'il y a eu encore un changement entre
1971 et 1977, mais ce changement est-il palpable pour les francophones?
M. L'Heureux: On n'a pas de statistiques récentes
là-dessus pour le Québec, sauf qu'en gros, je pense que
l'écart, sauf dans le secteur public et avec les améliorations
qu'il y a eu depuis dans ce secteur, a dû se maintenir assez
sensiblement. On aurait pu ajouter aussi une statistique qu'on avait ici. Il y
a quelques mois encore, globalement, dans la plupart des secteurs,
comparativement à l'Ontario par exemple, les salaires au Québec
sont généralement je dis généralement, il y
a des exceptions inférieurs pour le même emploi à
ceux payés en Ontario. C'est une histoire.
On a chiffré cela, cette année, à un coût
inférieur pour les travailleurs québécois de $500 millions
en salaires. Si vous prenez, par exemple, un secteur comme le textile, qui est
une industrie très
importante pour le Québec, installée en
prédominance au Québec, je vais donner un cas très
précis. A la Celanese à Drummondville, comparativement à
l'usine de Kingston, Ontario, c'est le même type d'usines, mais il y
avait un écart de salaires et il reste actuellement un écart du
salaire qui va de $1.50 à $2 l'heure pour les mêmes usines de
Celanese. On constate aussi le déplacement des emplois vers le textile
synthétique en Ontario, qui paie plus aussi en Ontario qu'ici.
Globalement, je pense bien que les travailleurs québécois ont
subi des injustices à ce point de vue.
M. Grenier: Merci, M. L'Heureux. Je ne vous poserai pas de
question, mais je signale quand même en passant qu'on en arrive à
la toute dernière. A la page 7, vous signalez c'est la
première fois qu'on se fait dire cela ici qu'il y a une
différence assez importante entre le droit d'exiger des communications
écrites et des communications orales. C'est un point qui me taquinait
tout le temps. Je me disais: Dans des industries, est-ce possible de nos jours
qu'un "foreman" s'adresse encore à un francophone en anglais? Vous le
signalez à la page 7. C'est peut-être que cela existe encore. Si
on avait plus de temps, ce serait intéressant d'en entendre parler.
J'aime que vous l'ayez rapporté, c'est la première fois que cela
nous arrive. A la page 9, vous avez une proposition. Il m'intéresserait
de vous entendre parler plus longuement. On n'aura pas le temps, je pense que
le président me regarde déjà, et vous avez deux choses.
Sur les articles 1 et 2, j'aurais aimé vous rencontrer; si je le peux,
je le ferai immédiatement après, s'il me reste un peu de temps
pour vous demander votre assentiment. Vous laissez entendre, au paragraphe 1,
que l'enseignement au primaire pourrait être fait dans la langue
maternelle. Je ne sais pas si vous vous rangez avec cette école de
pensée qui prétend que la langue d'apprentissage s'apprend mieux
au primaire qu'au secondaire. J'aurais aimé avoir votre avis, mais je
pense que cela va être une longue question, et j'aurais aimé
connaître pourquoi. Est-ce à cause du danger de la majorité
qui est menacée que vous avez dit, au paragraphe 2, qu'il ne devrait pas
y avoir de subvention aux universités non francophones? Est-ce que vous
pouvez y répondre brièvement? Je peux les rencontrer.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Enfin, il nous reste
six minutes et il y a quand même deux députés qui ont
demandé la parole. Vous savez que nous allons ajourner...
M. Grenier: M. le Président, si vous le permettez, je
n'exigerai pas de réponse, j'irai rencontrer madame ou monsieur
immédiatement après et j'aurai un entretien de quelques minutes,
cela me suffira, pour mon parti, pour nous aider à éclairer notre
position.
Le Président (M. Cardinal): Vous êtes rempli
d'aménité, M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Merci.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que M. le
député de Gaspé veut compléter en laissant la place
à un autre député?
M. Le Moignan: Je vais prendre 30 secondes. Le
Président (M. Cardinal): Tout de suite.
M. Le Moignan: A la page 10, je vois une suggestion.
A moins d'erreur, je crois que c'est la première fois qu'il est
proposé que l'Office de la langue relève de l'Assemblée
nationale. Cette suggestion est très intéressante. En même
temps, il y aurait peut-être lieu, après avoir regardé
cette page, de faire une suggestion pour que cette recommandation soit retenue
et prolongée par une autre-, et ceci concerne l'article 68: "L'office
est dirigé par un président nommé par le gouvernement pour
au plus dix ans". Nous avions pensé à ceci: L'office est
dirigé par un président et deux vice-présidents, l'un
venant du monde des travailleurs et l'autre venant du monde patronal et
nommés par l'Assemblée nationale après consultation, un
peu comme cela se fait pour le Protecteur du citoyen.
Dans ce sens, je trouve que votre remarque a une très grande
valeur et je crois que vous êtes les premiers à le signaler. J'y
suis allé d'un petit commentaire, mais j'ai terminé, M. le
Président, mon intervention.
Le Président (M. Cardinal): Merci, je peux vous accorder
deux ou trois minutes.
Mme Lalonde: Ce qui nous semblait important à ce chapitre,
c'est la recommandation qu'on fait celle que vous amenez, on pourrait y
penser quant à nous de faire en sorte que les
représentants qui siègent au conseil consultatif soient
nommés par les organismes et donc puissent être retirés par
ces organismes; il nous semble que cela serait un principe important à
affirmer. On y tiendrait décidément.
M. Le Moignan: Merci.
Le Président (M. Cardinal): Pour terminer, et
brièvement, s'il vous plaît, parce que je dis tout de suite que
j'aurai certains renseignements à fournir aux membres de la commission
et à nos invités, M. le député de Terrebonne.
M. Fallu: Merci, M. le Président. Je voudrais, puisque
l'occasion m'est donnée, saluer dans la vice-présidence de la CSN
celle qui fut la présidente de ma propre fédération
syndicale. La charte de la langue ne sera, à toutes fins pratiques, pour
les travailleurs du Québec, qu'un outil qui leur sera donné pour
pouvoir continuer la lutte qu'ils ont entreprise déjà depuis fort
longtemps.
A tout prendre, il faut être bien réaliste, le
véritable débat sur la langue va commencer au lendemain de sa
sanction. C'est donc un outil qui est mieux adapté, mieux rodé
aux circonstances et je voudrais qu'en partant, vous sachiez bien que ce
n'est pas la victoire des travailleurs québécois qui est
assurée automatiquement par la Charte de la langue.
Je sais que, malgré toutes les prévisions du
législateur, vous aurez encore grand-peine à assurer le combat
localement, à la pièce, individu par individu, témoin
après témoin, enquête après enquête,
peut-être bien. Ce que je souhaite, à la limite, c'est que le tout
se fasse dans un climat d'harmonie, d'une certaine santé, de telle sorte
que les travailleurs y trouvent finalement un peu plus de dignité. Je
vous remercie, au nom du parti ministériel, de votre patience et d'avoir
présenté ce mémoire.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Terrebonne. Est-ce que vous avez un mot à
ajouter?
Mme Lalonde: S'il vous plaît! L'ensemble de nos
considérations, notamment sur la langue du travail, est justement
inspiré par ce fait que la loi, même adoptée, n'est
toujours qu'un papier qui reconnaît des droits, des droits qui ne se
transforment en réalité vivante que quand, notamment, la grande
majorité de la population que sont les travailleurs décidera de
les faire respecter.
C'est pourquoi nous insistons pour que l'ensemble des dispositions sur
le travail les implique au premier chef. C'est décidément
seulement un instrument. Quant à nous, si nous saluons le geste que pose
le gouvernement, nous continuerons à surveiller les moyens qu'il mettra
vraiment en oeuvre pour que la langue de travail devienne le français.
Autrement, je le répète, même les dispositions relativement
à la langue d'enseignement pourraient se révéler injustes.
C'est un mouvement historique effectivement qui, quant à nous, est lourd
de responsabilités. De notre côté, on s'engage à
faire tout ce qu'on peut au niveau de l'activité des travailleurs
organisés sur cette question et nous vous assurons de notre surveillance
pleine et entière du gouvernement sur cette question.
J'ai souligné, dans l'exposé de départ, une
interrogation relativement à la liberté complète et
entière de choix au niveau des CEGEP et de l'université. Dans la
mesure aussi où la langue de travail deviendra la langue
française, cette liberté pourra être moins
problématique.
Mais dans la mesure où elle ne le deviendrait pas, nous pourrions
nous trouver dans la situation où, à partir du moment où
quelqu'un accède à l'étape sociale du technicien et plus,
au statut, plutôt, de technicien et plus, il pourrait accéder
à un monde qui est différent alors que, pour le monde ordinaire,
il n'en serait pas ainsi. Nous ne pourrions pas être d'accord avec une
telle vision des choses. C'est dans la mesure, encore une fois, où la
langue de travail est le français et c'est donc dans la mesure où
on fait tout pour qu'il en soit ainsi que ce projet est cohérent et
conforme à l'intérêt des travailleurs.
La position de notre congrès là-dessus est claire, c'est
le français au Québec.
Le Président (M. Cardinal): Merci, madame.
Comme je l'ai déjà mentionné, j'ai
présumé du consentement de la commission pour continuer ce
débat au-delà de 23 h 15. Je vous remercie, Mme Francine Lalonde,
ainsi que ceux qui vous accompagnent, comme représentants de la CSN, et
cela au nom de toute la commission. Je vous remercie pour tout, cela veut tout
dire, dans les circonstances, et j'indique immédiatement que, suite
à l'avis du leader parlementaire du gouvernement, nous entendrions,
demain l'Ordre des ingénieurs, mémoire 230, le Congrès
juif canadien, mémoire 112, le Grand conseil des Cris, mémoire
101 et, sur ce, marci... Oui, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je vois qu'il n'y a que trois
organismes demain. Nous avons quand même sept ou huit heures de
prévues. Est-ce qu'il y a d'autres organismes qui ont été
invités pour vendredi?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, j'ai déjà répondu souvent à
cette question. Vraiment, je n'en sais rien.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre pourrait nous éclairer
là-dessus?
Le Président (M. Cardinal): S'il désire
répondre.
M. Laurin: Je m'informerai.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ...demain, les heures prévues sont de 10
heures à 13 heures, normalement de 16 heures à 18 heures, et de
20 heures à 23 heures. Vous pouvez peut-être enlever une
demi-heure à 16 heures, si vous le désirez.
Le Président (M. Cardinal): Vous pouvez peut-être
enlever plus qu'une demi-heure pour les deux motions.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, vous ne saviez pas ce
soir qu'il y aurait ces deux motions?
Le Président (M. Cardinal): Non, madame.
Mme Lavoie-Roux: Comment se fait-il alors que, certains jours, on
a convoqué jusqu'à sept groupes au moins et que, demain, avec le
même nombre d'heures, on n'en convoque que trois?
Le Président (M. Cardinal): Madame, je regrette, vous
savez que j'ai répondu souvent à cette question, on me la pose
tous les jours, je vous dis que je n'ai vraiment rien à faire dans le
problème, si c'en est un, des convocations...
M. Grenier: II y aurait anguille sous roche? M. Lalonde: M. le
Président...
M. Grenier: J'avais demandé...
M. Lalonde: La réponse du ministre a peut-être
été un peu drôle, mais on ne rit pas du monde comme cela.
On est ici pour travailler. S'il le sait, c'est lui qui le sait et personne
d'autre. Alors, je ne la trouve pas du tout sérieuse.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Vous savez comment
j'ai tenté de ne jamais participer au débat. J'aimerais savoir
combien d'organismes nous avons entendus aujourd'hui?
Mme Lavoie-Roux: Aujourd'hui, ce fut une journée plus
courte que les autres, vous l'avez fait remarquer vous-même, M. le
Président. Le mercredi, nous arrêtons à midi. Vous avez
même averti les invités de ce matin que, le mercredi
après-midi, il fallait toujours compter que ce soit plus court que les
autres jours.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez raison, Mme le
député de L'Acadie. Sur ce, on peut conti- nuer à
interroger le président, qui ne saura que répondre, encore une
fois.
M. Lalonde: Je comprends que le ministre ne sait pas s'il va y
avoir des invités vendredi.
M. Laurin: Non, pas encore.
Le Président (M. Cardinal): Sur ce, est-ce que je puis
remercier tout le monde et dire que...
M. Grenier: Ce n'est pas cela qu'on appelle exactement la
transparence, je pense?
Des Voix: Non! Non!
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! Ne
commencez pas à cette heure un débat, parce que je vais tout
simplement me lever, mais je suis trop poli pour le faire immédiatement.
Je déclare tout simplement que les travaux de la commission
parlementaire sont ajournés à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 20)
ANNEXE 1
LA CHAMBRE DE COMMERCE DU DISTRICT DE
MONTRÉAL
Projet de loi no 1 Charte de la langue
française au Québec
Observations et propositions
présentées à la Commission
parlementaire de
l'éducation, des affaires culturelles
et des communications
Montréal, mai 1977
Le texte de ces commentaires a été approuvé par le
Conseil d'administration, lors de sa réunion régulière du
19 mai 1977, et constitue l'opinion officielle de la Chambre.
la Chambre de commerce du district de
Montréal
La Chambre de commerce du district de Montréal, fondée en
1886 et inco.rporée en vertu du chapitre de la loi 58-59 Victoria, est,
depuis le 8 novembre 1967, constituée par lettres patentes en
corporation sous le régime de la Partie II de la Loi sur les
corporations canadiennes.
Elle compte, en 1977, environ 1 200 membres individuels et plus de 4 000
délégués des sociétés adhérentes qui
sont, elles-mêmes, au nombre de 800.
La Chambre de commerce du district de Montréal a pour but de
contribuer à l'essor économique et à la
prospérité du milieu dans le respect des valeurs humaines et
sociales de la communauté. La Chambre centre son activité sur le
développement et l'éducation économiques des citoyens du
milieu métropolitain, ceux de langue française en particulier. De
plus, à cause de sa position au sein de la communauté, elle
s'intéresse aussi à des questions économiques et sociales
de plus grande envergure. Elle touche donc au développement des
intérêts de toute la collectivité québécoise
dont Montréal constitue à bien des égards le principal
élément moteur. Par son action communautaire, la Chambre
contribue au progrès de tous les citoyens, qu'ils soient membres ou non
de la Chambre.
Introduction
La Chambre de commerce du district de Montréal choisit de voir
dans le projet de loi No I une volonté gouvernementale d'assurer la
sécurité linguistique et culturelle de la communauté
francophone du Québec. Il est peu probable qu'entre optimistes et
pessimistes on en vienne à s'ntendre sur l'état exact de la
situation, dont plusieurs croient cependant qu'elle appelle des redressements.
La Chambre, pour sa part, souscrit à l'intention énoncée
dans le Livre Blanc et que le projet de loi No I vise à actualiser "de
protéger et de développer dans sa plénitude une culture
originale: un mode d'être, de penser, d'écrire, de créer,
de se réunir, d'établir des relations entre les groupes et les
personnes, et même de conduire les affaires".
Déjà, en 1969 et en 1973, la Chambre avait fait des
observations dont le législateur, dans la loi sur la langue officielle
de 1974, a dans une certaine mesure tenu compte, notamment au chapitre de la
langue de travail. La Chambre avait dit croire que la cause fondamentale des
problèmes auxquels devait faire face la majorité francophone du
Québec, qu'il s'agisse de problèmes sociaux, économiques
ou linguistiques, était le contrôle par la minorité
anglophone des plus importantes entreprises économiques. De telle sorte
que, pour normaliser la situation sociale et économique des francophones
du Québec et, par là, changer quelque chose au statut de la
langue française, il fallait d'abord assurer un meilleur
équilibre des forces au sein de ces entreprises. "L'important,
disions-nous, est d'assurer, dans la mesure du possible, qu'à partir de
maintenant, au Québec, la langue française et la langue anglaise
aient toutes deux la place qui leur revient dans le secteur économique,
tout comme dans les autres secteurs d'activité, et surtout qu'aucun
Québécois ne soit handicapé par son appartenance à
un groupe linguistique plutôt qu'à l'autre et que tous aient des
chances égales de réussir..."
Nous continuons de croire cette approche valable; elle soustendra
d'ailleurs bon nombre des considérations que nous ferons à
l'endroit du projet de loi No I. Constatant toutefois le caractère
démesuré de certains moyens proposés pour redresser une
situation que nous avons nous-mêmes dénoncée, nous avons
utilisé trois critères spécifiques dans notre analyse et
évaluation du projet de loi: en quoi telle mesure du projet de loi
concourt-elle de façon nécessaire ou opportune à la
protection et à la promotion de la langue française au
Québec? en quoi telle mesure concourt-elle de façon
nécessaire ou opportune à la promotion économique des
Québécois francophones? dans quelle mesure, dans le cadre d'une
loi statuant sur certains droits collectifs de la majorité, les
dispositions retenues tiennent-elles compte des libertés individuelles
et du "droit de cité" des minorités?
La Chambre de commerce du district de Montréal accepte qu'une loi
que l'on veut efficace puisse comporter des obligations et des contraintes,
pourvu que soient respectés les critères fondamentaux de justice
et d'équité déjà évoqués et que ces
mesures paraissent nécessaires et les mieux ordonnées à la
réalisation des objectifs poursuivis, une fois ces derniers
convenablement définis et reconnus légitimes et opportuns.
Redresser des torts est une entreprise délicate et semée
d'embûches; c'est encore en respectant les exigentes perspectives que
nous avons évoquées que l'Assemblée nationale pourra
adopter un projet de loi modifié plus apte à rallier le plus
grand nombre de citoyens, sans distinction quant à leurs diverses
appartenances et allégeances.
Dans les limites de notre compétence, et nous en tenant
règle générale à des dispositions que nous
aimerions voir modifier, nous nous référerons par la suite aux
articles du projet de loi, signalant à l'occasion certains qui nous
paraissent particulièrement bien inspirés.
Charte de la langue française au Québec
Préambule
L'Assemblée nationale constate que la langue française
est, depuis toujours, la langue du peuple québécois et que c'est
elle qui lui permet d'exprimer son identité.
Proposition "L'Assemblée nationale constate que la langue
française est, depuis toujours, la langue de la majorité au
Québec, que c'est elle qui lui permet d'exprimer son identité et
qu'elle a vocation de langue commune à tous les
Québécois".
Explication
Dans sa formulation actuelle, le préambule fait une distinction
implicite entre citoyens: ceux qui
sont du peuple québécois et ceux qui n'en sont pas, selon
que la langue française est ou non leur langue.
Recourir à une telle distinction nous paraît
carrément contre-indiqué, trop de dispositions du projet de loi
prenant dès lors un caractère indûment menaçant et
vexatoire.
En partant d'une telle prémisse dès le préambule du
projet de loi, on fonde abusivement l'érosion appréciable des
assises institutionnelles de la culture des anglophones à laquelle
donnerait lieu son adoption dans sa formulation actuelle.
Titre premier Chapitre III
La langue de la législation et de la justice
Art. 7.
Le français est la langue de la législation et de la
justice au Québec.
Art. 8.
Les projets de loi sont rédigés en français; ils
sont, en français, déposés à l'Assemblée
nationale, adoptés et sanctionnés.
Art. 9. Est seul officiel le texte français des lois du
Québec.
Art. 10. Une version anglaise des textes de loi est imprimée et
publiée par les soins de l'Administration.
Art. 11.
Les personnes morales s'adressent dans la langue officielle aux
tribunaux et aux organismes exerçant des fonctions judiciaires ou
quasi-judiciaires; elles plaident devant eux dans la langue officielle,
à moins que toutes les parties à l'instance ne consentent
à plaider en langue anglaise.
Art. 12.
Tout intéressé a droit que soient rédigées
en français les citations, sommations, mises en demeure et assignations
décernées par les tribunaux et les organismes exerçant des
fonctions judiciaires ou quasi-judiciaires ou expédiées par les
avocats exerçant devant eux.
Art. 13.
Les jugements rendus au Québec par les tribunaux et les
organismes exerçant des fonctions judiciaires ou quasi-judiciaires
doivent être rédigés en français ou être
accompagnés d'une version française dûment
authentifiée. Seule la version française du jugement est
officielle.
Proposition
Reformuler le contenu du chapitre et n'y conserver que deux
dispositions, l'une prévoyant que le texte français des lois du
Québec prévaut sur le texte anglais (ou la version anglaise),
l'autre ré-éditant l'actuel article 12.
Explication
Seul l'article 12 nous paraît d'une portée pratique
appréciable, et dans le sens du respect des droits de la personne.
Toutes les autres dispositions du chapître ne protègent rien en
pratique et sont inutiles pour atteindre des objectifs autres que symboliques.
Considérant qu'au demeurant certaines dispositions de ce chapître
prêtent flanc à un doute très sérieux au plan
constitutionnel, il vaudrait mieux revenir à la simple disposition
prévue à l'article 2 de la loi sur la langue officielle de 1974
tout en retenant l'évidente mesure d'équité que constitue
l'article 12 de l'actuel projet de loi.
L'article 2 de la loi sur la langue officielle de 1974 se lit comme
suit: "En cas de divergence que les règles ordinaires
d'interprétation ne permettent pas de résoudre convenablement, le
texte français des lois du Québec prévaut sur le texte
anglais".
Art. 19.
Nul ne peut être nommé, muté ou promu à une
fonction dans l'Administration s'il n'a de la langue officielle une
connaissance appropriée à la fonction qu'il postule.
Cette connaissance doit être prouvée suivant les
prescriptions des règlements du gouvernement, lesquels peuvent pourvoir
à la tenue d'examens et à la délivrance
d'attestations.
Commentaire
Cet article repose à nos yeux sur un principe et une pratique
inattaquables: pour être nommé, muté ou promu à une
fonction, il faut répondre à toutes les exigences de la fonction,
y compris les compétences linguistiques légitimement requises. Ce
principe inscrit à l'article 30 se retrouve, dans une formulation
différente, à l'article 37. Ce que nous tenons à signaler
ici, c'est que lorsqu'évoqué dans le contexte protectionniste de
l'article 37, il faudra tenir compte de l'intention d'une disposition de ce
genre qui est essentiellement fonction du service au public, au client, au
consommateur...
Art. 20.
Les services et organismes de l'Administration communiquent entre eux
dans la langue officielle.
Proposition
Ajouter un deuxième alinéa: "Les organismes municipaux ou
scolaires dont les administrés sont en majorité de langue
anglaise peuvent cependant communiquer entre eux en anglais". ainsi qu'en
troisième et quatrième alinéas, les dispositions des
deuxième et troisième alinéas (modifiés comme suit)
de l'actuel article 23: "Tout administré de ces organismes a toutefois
le droit d'exiger d'eux, dès l'entrée en vigueur de la
présente loi, que soient rédigés en français les
textes et documents qui lui sont destinés ou auxquels il a
légalement accès". "Dans les organismes scolaires, le
français et l'anglais peuvent être utilisés comme langue de
communication interne des services chargés d'organiser ou de donner
l'enseignement en anglais".
Explication
II y aurait lieu de prévoir ici une exception pour les organismes
municipaux et scolaires à majorité anglophone. Certes un
délai raisonnable est prévu à l'article 23, et on pourrait
alléguer qu'il n'est pas nécessaire de prévoir des
exceptions là où le bon sens devrait prévaloir et que
personne n'entend ré-éditer en sens inverse les situations
ridicules où deux francophones ont été trop souvent
amenés dans le passé à communiquer entre eux en anglais.
Mais est-ce bien le cas? La Chambre estime tout compte fait qu'il vaut mieux
prévoir l'exception pour ces organismes à majorité
anglophone, la provision du 2e alinéa de l'article 23 pouvant fort bien
constituer la règle permanente sans que les ressortissants francophones
de ces organismes ne s'en trouvent le moindrement lésés; agir
autrement, ce que fait le projet de loi, c'est, sous prétexte de se
mieux retrouver dans un Etat et une société au "visage
français", affaiblir inutilement le caractère anglais d'une
"institution".
Titre premier Chapitre V
La langue de certains organismes parapublics Art. 25
Les services de santé, les services sociaux, les entreprises
d'utilité publique et les ordres professionnels doivent offrir leurs
services au public dans la langue officielle; ils doivent également
utiliser la langue officielle pour s'adresser à l'Administration.
Art. 26
Tout intéressé peut exiger des services de santé,
des services sociaux et des entreprises d'utilité publique qu'ils
émettent dans la langue officielle les avis, communications, formulaires
et imprimés destinés au public; le présent article
s'applique également aux titres de transport.
Art. 27
Les ordres professionnels doivent communiquer en français avec
leurs membres ainsi qu'avec le public.
Proposition
Modifier comme suite à l'article 26. "Sur demande de tout
intéressé, les services de santé, les services sociaux et
les entreprises d'utilité publique émettent dans la langue
officielle les avis, communications, formulaires et imprimés
destinés au public; le présent article s'applique
également aux titres de transport".
Explication
Sans altérer le sens de l'article, notre proposition vise
à créer une obligation pour les services en cause et à
indiquer que c'est par la voie d'une demande, comme cela se pratique le plus
souvent, que les intéressés font connaître leur attente de
recevoir ces diverses communications périodiques ou occasionnelles en
langue française. L'exigence et son efficacité n'en sont pas
atténuées pour autant, et l'intéressé paraît
moins placé en position de quémandeur.
Commentaire
La Chambre note avec satisfaction que l'on fait droit, aux articles 25
à 27, aux réclamations trop souvent non satisfaites du public
francophone, et ce sans exclusive inutile qui interdirait de communiquer aussi
en anglais ou dans toute autre langue, refoulant de plus en plus l'usage de ces
langues au seul domaine privé, ce à quoi nous nous
objecterions.
Titre premier Chapitre VI
La langue du travail Art. 33
Tout membre du personnel d'un employeur a le droit d'exiger que soient
rédigées en français les communications écrites qui
lui sont adressées par ce dernier.
Proposition "Tout employeur rédige en français les
communications écrites destinées aux membres francophones de son
entreprise et aux autres membres qui auront logé une demande à
cet effet".
Explication
En créant l'obligation pour l'employeur, on évite de
placer les employés dans la position de perpétuels
quémandeurs, dont le droit conféré à l'article 33
ne s'exercerait pas nécessairement sans encombre. Les membres non
francophones de l'entrepise qui voudraient recevoir ces communications
écrites en français peuvent facilement signifier leur demande
à cet effet, comme cela se pratique couramment dans les communications
des entreprises avec leur clientèle et le public auquel elles
s'adressent. Tel est le sens de notre proposition, qui pourrait recevoir le cas
échéant une forme juridique jugée plus
appropriée.
Art. 36
II est interdit à tout employeur de congédier ou
rétrograder un salarié pour la seule raison qu'il ne parle que le
français ou qu'il ne connaît pas suffisamment une langue
donnée, autre que le français.
Toute contravention au présent article, en plus de constituer une
infraction à la présente loi, autorise le salarié à
faire valoir ses droits auprès d'un commissaire-enquêteur
nommé en vertu du Code du travail, au même titre que s'il
s'agissait d'un congédiement pour activités syndicales; les
articles 14 à 19 du Code du travail s'appliquent alors, mutatis
mutandis.
Proposition
Ajouter au premier alinéa: "En cas de congédiement ou de
rétrogration suite à des changements technologiques, à des
changements de marché, ou à une réduction des effectifs,
il incombe à l'employeur de prouver que la connaissance d'une autre
langue devient nécessaire pour l'accomplissement de la fonction
redéfinie et de l'emploi disponible auquel cas, pour les fins du
présent article, l'interdiction est levée".
Explication
L'intention ici est de protéger l'employé francophone
contre une décision arbitraire de son employeur qui invoquerait un motif
de compétence linguistique. Si tel employeur avait l'intention de cacher
derrière ce motif d'autres raisons, la disposition de l'article 36
l'obligera tout simplement à les formuler, permettant ainsi à
tous les intéressés d'en évaluer le bien-fondé.
Mais quel sens faudra-t-il donner à l'expression "pour la seule raison",
dans le contexte de l'évolution d'une entreprise? Si, par exemple, des
changements technologiques ou encore des contractions de certains de ses
marchés nécessitaient une réduction des effectifs d'une
entreprise, doit-on comprendre que les francophones unilingues, ou encore les
moins compétents en "langue autre", seraient les plus
protégés de façon absolue? Dans une conjoncture
donnée, tel poste, telle fonction peuvent ne pas requérir la
connaissance d'une langue autre que le français; un changement,
présumément non temporaire, de la conjoncture pourrait faire que
l'accomplissement de la même tâche nécessite
désormais la connaissance suffisante d'une autre langue. Il y a donc
lieu de prévoir au premier alinéa de l'article 36 qu'il incombe
à l'employeur de prouver, en dérogation à la règle,
que la connaissance d'une autre langue devient nécessaire pour
l'accomplissement de la même tâche.
Art. 37
II est interdit à tout employeur d'exiger pour l'accès
à un emploi ou à un poste la connaissance d'une langue autre que
le français, à moins que l'accomplissement de la tâche ne
nécessite la connaissance de cette autre langue, conformément aux
règlements adoptés à cet effet par l'Office de la langue
française.
Il incombe à l'employeur de prouver que la connaissance de
l'autre langue est nécessaire.
Proposition
Ajouter au premier alinéa: "Dans l'entreprise où la
tâche nécessitant la connaissance d'une langue autre que le
français n'est pas impartie en permanence et en exclusivité
à une personne mais doit être assumée selon les
disponibilités par l'un ou l'autre membre du personnel, il est loisible
à l'employeur d'exiger d'un certain nombre de ses employés la
connaissance d'une autre langue, pourvu que le nombre de ces employés ne
dépasse pas les besoins de fonctionnement de l'entreprise".
Explication
L'entreprise, surtout petite ou moyenne, a rarement recours au concept
des postes tel que l'utilise la Fonction publique et elle s'en accommodera que
difficilement, et encore, si on le lui impose sous une forme ou sous une autre.
Pour un grand nombre de ces entreprises, notamment à Montréal et
dans le secteur des services, ce dont l'employeur a absolument besoin c'est
d'une capacité de transiger dans une autre langue, habituellement
l'anglais, chez une proportion plus ou moins importante de ses employés.
C'est donc ce qu'il faut prévoir dans la loi, quitte à
préciser les modalités par règlements.
Commentaire
Le sens de cet article, modifié ou non selon notre proposition,
se comprend et se défend bien. Il reste que son application sera source
de grande lourdeur administrative et d'incompréhension bureaucratique.
La pratique des affaires rend hautement souhaitable sinon indispensable de
pouvoir répondre au client dans sa langue, de telle sorte que la
connaissance d'une autre langue peut légitimement devenir critère
d'embauche; et ceci ne s'applique pas nécessairement qu'à la
langue anglaise.
Si les règlements de l'Office allaient viser à interdire
que ne soient vérifiées les aptitudes linguistiques des candidats
là où la fonction n'est pas reconnue comme exigeant la
connaissance d'une "autre langue", l'effet pourrait être d'inciter les
employeurs à embaucher systématiquement des anglophones dont ils
auraient vérifié par ailleurs une connaissance suffisante de la
langue française. Comment parler alors de chances égales de
réussite pour tous les Québécois, quelque soit leur
appartenance à un groupe linguistique plutôt qu'à un
autre...
L'appel est donc au plus grand soin à apporter aux
règlements et politiques de l'Office en cette matière.
Titre premier Chapitre VII
La langue du commerce et des affaires
Art. 41 Est reconnu aux consommateurs le droit d'être
informés en français dans tous les cas suivants:
désignation des biens et services, offre, présentation,
publicité écrite ou parlée, mode d'emploi, étendue
et conditions de garantie.
Les mêmes dispositions s'appliquent aux catalogues,
dépliants et brochures, aux étiquettes et inscriptions de
caractère permanent, ainsi qu'à tout texte accompagnant les biens
offerts au public.
L'Office de la langue française peut réglementer
l'utilisation d'autres langues, sous réserve que le français
domine ou à tout le moins figure d'une façon aussi
évidente que toute autre langue.
Commentaire
Nous tenons à signaler que l'approche retenue, notamment au 3e
alinéa, nous paraît excellente.
Art. 45
Est reconnu à toute personne le droit d'exiger que soient
rédigés en français les bons de commande, factures,
reçus et quittances qui lui sont présentés ainsi que les
menus et cartes de vin.
Proposition
Reformuler comme suit l'alinéa: "Doivent être
rédigés en français les bons de commande, factures,
reçus et quittances ainsi que les menus et cartes de vin".
Ajouter à la fin du même alinéa: "L'utilisation
simultanée d'autres langues n'est pas interdite, sous réserve que
le français domine ou à tout le moins figure d'une façon
aussi évidente que toute autre langue".
Explication
Cet article ne nous paraît pas comporter d'exclusive, tout en
prescrivant l'usage du français; à ce double égard, une
excellente mesure. Il y a cependant lieu de prévoir, comme au 3e
alinéa de l'article 41, que le français domine ou à tout
le moins figure d'une façon aussi évidente que toute autre
langue.
Quant au premier alinéa tel qu'actuellement libellé
à l'article 45, il vaut mieux créer l'obligation explicitement
que de conférer un droit qui place le client dans une position de
quémandeur.
Art. 46
L'affichage commercial doit se faire uniquement en français.
Par "affichage", on entend l'action d'exposer un texte à la vue
du public aussi bien que le texte ainsi exposé, quelles qu'en soient la
forme, la dimension ou la nature, le support matériel qui soutient le
texte, ainsi que tout panneau-réclame et toute enseigne lumineuse, sous
réserve toutefois des exceptions prévues aux règlements de
l'Office de la langue française et portant notamment sur: a) les
messages de caractère international; b) les messages destinés aux
étrangers, à des particuliers en tant que tels ou à des
groupes restreints; et c) les messages destinés à des organes
d'information diffusant dans une langue autre que le français.
Proposition
Reformuler comme suit le premier alinéa: "L'affichage commercial
doit se faire en français, ou à la fois en français et
dans une autre langue propre à la communauté locale, sous
réserve que le français prédomine ou figure d'une
façon aussi avantageuse".
Explication
Cet article pose la question de l'affichage à l'intention des
divers groupes ethniques. L'objectif de faire, de Montréal notamment,
une ville au visage largement français est louable, et même
économiquement rentable si l'on pense à l'attrait touristique;
mais n'est pas moins intéressant un certain visage cosmopolite de la
métropole, si ce n'était de l'abus de l'unilinguisme anglais et
d'un bilinguisme anglais-français parfois lourd et de mauvais
goût. La juste mesure est difficile à atteindre et ne
règlemente pas qui veut le bon goût!
Notre proposition vise néanmoins à
généraliser l'utilisation du français dans l'affichage
public et à lui accorder du même coup la prédominance,
toute autre langue ne pouvant atteindre, même à la limite, qu'une
parité de traitement circonscrite géographiquement dans certaines
localités à concentration anglophone ou allophone.
Art. 48.
Les raisons sociales doivent être en langue française.
Quiconque utilise une raison sociale en infraction au présent
article doit la modifier ou la faire modifier avant le (insérer ici la
date qui suit de trois ans celle de l'entrée en vigueur de la
présente loi).
Le présent article s'applique également à
l'enregistrement des raisons sociales effectué en vertu de la Loi des
déclarations des compagnies et sociétés (Statuts refondus,
1964, chapitre 272).
Proposition
Modifier comme suit le premier alinéa: "Les raisons sociales des
compagnies incorporées au Québec doivent être en langue
française. Les raisons sociales peuvent néanmoins être
accompagnées d'une version anglaise".
Explication
La Chambre continue de préférer l'approche de l'article 30
de la loi de 1974; en effet, tel qu'actuellement libellé, l'article 48
peut poser des problèmes d'application en ce qui concerne les
entreprises constituées sous le régime de lois autres que les
lois du Québec et la loi sur les corporations commerciales canadiennes.
Il n'est pas assuré que les précisions apportées au
premier alinéa de l'article 50 permettraient de résoudre certains
cas particuliers d'image de marque d'entreprises connues mondialement sous leur
nom d'origine. On peut enfin imaginer une certaine incongruité dans le
cas, par exemple, de petites entreprises aux propriétaires de langue
maternelle autre que française.
Titre premier Chapitre VIII
La langue de l'enseignement Art. 51.
L'enseignement se donne en français dans les écoles
maternelles, primaires et secondaires, sous réserve des exceptions
prévues au présent chapitre.
Cette disposition vaut pour les écoles régies par la Loi
de l'instruction publique (Statuts refondus, 1964, chapitre 235) et pour les
organismes scolaires régis par la Loi de l'enseignement privé
(1968, chapitre 67) et déclarés d'intérêt public ou
reconnus admissibles à des subventions en vertu de cette dernière
loi.
Commentaire
L'éducation relève de la compétence exclusive des
provinces. La constitution du pays confère toutefois des droits en
éducation aux confessions religieuses catholique et protestante; en
matière d'éducation, elle ne comporte pas de garanties
linguistiques. Il reste que le Québec est une province du Canada
où sont maintenues depuis des générations, pour des
raisons historiques et sociologiques, des écoles anglaises et des
écoles françaises; le critère d'accès le plus
normal a ces écoles est d'être de langue maternelle anglaise ou
française respectivement, et d'appartenir de ce fait à l'une ou
l'autre culture, que l'on soit installé au pays depuis des
générations ou que l'on vienne d'y immigrer. Il n'est pas
déraisonnable de concevoir que les immigrants allophones puissent avoir
la liberté d'opter pour l'école française ou anglaise,
deux écoles qui ont pleinement droit de cité et que l'on choisit
librement en fonction de ses aspirations et de sa situation personnelle. Il
n'est enfin pas répréhensible en soi que francophones et
anglophones, se prévalant d'une situation de fait et d'une
liberté appréciable et appréciée, puissent choisir
pour un temps plus ou moins prolongé de fréquenter l'école
de l'autre groupe. C'est cet ordre de chose qui a longtemps prévalu et
c'est la situation qu'en principe la Chambre continue de
préférer.
Mais les principes qui président à l'organisation de la
chose publique ne sont pas des absolus, immuables dans l'espace et dans le
temps; sans porter atteinte arbitrairement à ces principes, sans
égard au processus démocratique et aux règles
constitutionnelles, il est de la responsabilité du pouvoir politique
dans sa compétence législative de les ordonner au bien commun, en
tenant compte tant des droits de la personne que des droits collectifs, tant de
la majorité que des minorités. Or on alléguait que la
majorité francophone du Québec risquait de se trouver en
minorité dans son Etat provincial, à moyen ou à long
terme, si devait se maintenir la tendance de l'immigration à
s'intégrer à la communauté anglophone, notamment en
empruntant le chemin de l'école anglaise.
On sait que dans une première intervention gouvernementale en
1973, un redressernent appréciable a été amorcé par
la mise en application d'un volet spécifique du plan de
développement de l'enseignement des langues. Alors que la plus grande
part des crédits de ce programme quinquennal de $100 millions allait
à des mesures ordonnées à l'amélioration de
l'enseignement du français langue maternelle, ainsi qu'à
l'amélioration des langues secondes (français et anglais), des
crédits suffisants
étaient alloués pour offrir à tous les enfants
d'immigrants l'accès à la maternelle et pré-maternelle
française dans des conditions qui ont effectivement constitué une
incitation efficace. Dans la courte période qui a
précédé l'adoption de la loi de 1974, donnant lieu
à deux rentrées scolaires, la tendance vers l'intégration
des enfants d'immigrants aux écoles anglaises était
renversée, et l'on pouvait constater un taux de passage très
élevé (80% et plus) de ces enfants de la maternelle
française aux classes élémentaires françaises des
commissions scolaires. On peut regretter que cette expérience ait fait
place aux prescriptions de la loi de 1974 avant qu'elle ne puisse donner des
résultats probants quant à ses effets à terme.
La loi de 1974 visait, par un critère relativement objectif mais
combien difficile d'application, à limiter l'accès aux classes
anglaises aux seuls enfants dont la connaissance suffisante de la langue
anglaise indiquerait qu'à toutes fins utiles ils étaient
déjà intégrés au groupe anglophone. A fortiori, les
anglophones de la langue maternelle, d'où qu'ils viennent,
étaient assurés de pouvoir fréquenter l'école
anglaise, sans pour autant interdire l'école française à
ceux qui la choisiraient ou l'avaient effectivement déjà choisie.
Enfin, la loi de 1974 faisait obligation au ministre de l'Education d'assurer
l'enseignement de l'anglais et du français au titre de langue seconde,
voire, dans le cas du français, la connaissance
(présumément suffisante) de cette langue, langue officielle du
Québec.
Aujourd'hui, alors que la situation a évolué d'une
façon difficilement réversible, la Chambre se rallie à la
position du Conseil supérieur de l'Education dont l'avis ne saurait
être écarté que pour des motifs extrêmement
sérieux, dont le bien-fondé appellerait une démonstration
probante.
Nous nous référons explicitement aux alinéas 4 et 8
du texte (Février 1977) de la recommandation du Conseil supérieur
de l'Education au ministre de l'Education, qui se lisent comme suit:
Aux niveaux élémentaire et secondaire, le Conseil
recommande l'adoption du principe suivant: la langue d'enseignement au
Québec est le français pour tous ses résidents et pour
tous ceux qui viendront s'y établir, sauf pour les enfants de langues
maternelles amérindiennes ou inuit et pour les enfants de langue
maternelle anglaise.
Les enfants qui se trouveront déjà inscrits dans des
écoles de langue anglaise au moment de la promulgation de la loi
pourront continuer de les fréquenter si leurs parents le demandent;
leurs frères et soeurs pourront les y suivre.
A tout événement, la Chambre loge avec la plus grande
fermeté deux réclamations que lui dictent les critères
qu'elle s'est donnés pour analyser le projet de loi et sa conception de
la sagesse politique dans le traitement de nos concitoyens canadiens des autres
provinces. Ces réclamations sont les suivantes: que le projet de loi
soit modifié pour inclure des dispositions analogues à celles que
l'on retrouvait à l'article 44 de la loi de 1974; qu'il n'y ait pas de
distinction faite entre résidents canadiens des autres provinces et
résidents canadiens du Québec. Ce dernier résultat sera
acquis si l'on adopte, comme nous le demandons également, la solution
proposée par le Conseil supérieur de l'Education. Quant à
l'enseignement du français et de l'anglais au titre de langue seconde,
s'il s'impose comme allant de soi, il demeure opportun d'en spécifier
l'obligation dans le texte de la loi, car il s'agit bien d'une reconnaissance
officielle de portée aussi pratique que symbolique. La population,
notamment à Montréal, réclame depuis longtemps une
consécration adéquate d'un engagement efficace en matière
d'enseignement de l'anglais et du français au titre de langue
seconde.
Les dispositions de l'article 44 de la loi de 1974, voire l'exigence
encore plus nette de la proposition du Conseil supérieur de l'Education
en ce qui regarde l'anglais langue seconde, donneraient suite à cette
réclamation de la population en ce qui a trait à l'enseignement
des langues secondes.
Loi sur la langue officielle (1974)
Article 44 Les programmes d'études doivent assurer la
connaissance de la langue française, parlée et écrite, aux
élèves qui reçoivent l'enseignement en langue anglaise, et
le ministre de l'Education doit prendre les mesures nécessaires à
cet effet.
Le ministre de l'Education doit également prendre les mesures
nécessaires pour assurer l'enseignement de la langue anglaise, langue
seconde, aux élèves qui reçoivent l'enseignement en langue
française.
Avis du C.S.E. (Février 1977)
Article 11 L'enseignement du français et de l'anglais,
langues secondes doit être promu. 11.1 Danses écoles de
langue anglaise, les programmes d'étude assureront aux finissants du
cours secondaire, comme une condition d'obtention du certificat, une
connaissance d'usage du français. 11.2 Dans les écoles de
langue française, les programmes d'étude assureront aux
finissants du cours secondaire, comme une condition d'obtention du certificat,
une connaissance d'usage de l'anglais.
Art. 52.
Par dérogation à l'article 51, peuvent recevoir
l'enseignement en anglais, à la demande de leur père et de leur
mère: a)les enfants dont le père ou la mère a reçu,
au Québec, l'enseignement primaire en anglais: b)les enfants qui,
à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, sont
domiciliés au Québec, et
Proposition
Modifier comme suit le sous-alinéa b): "les enfants qui, à
la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, sont
domiciliés au Québec ou ailleurs au Canada, et"
Explication
En proposant, ici comme aux articles 55, 57 et 58, une modification au
chapitre VIII sur la langue de l'enseignement, la Chambre n'abandonne ni ne
limite en rien ses réclamations principales antérieurement
formulées; elle indique qu'advenant une fin de non recevoir à ses
propositions principales, certains articles du chapitre, notamment l'article
52, devraient être modifiés.
Les motifs de notre proposition, succinctement: la mobilité
interprovinciale n'est pas telle qu'elle puisse menacer dans un avenir
prévisible notre sécurité culturelle de communauté
francophone; les Québécois francophones, lorsqu'ils
s'établissent dans d'autres provinces canadiennes, s'attendent à
la réciprocité, savoir, pouvoir inscrire leurs enfants dans les
écoles françaises là où elles existent.
Art. 55
Le gouvernement peut, par règlement: a)statuer sur la
procédure à suivre lorsque des parents invoquent l'article 52 et
sur les éléments de preuve que ces derniers doivent apporter
à l'appui de leur demande: b) prévoir un appel des
décisions des organismes scolaires et des personnes
désignées par le ministre portant sur l'application de l'article
52.
L'appel prévu ci-dessus est interjeté auprès d'une
commission d'appel instituée à cette fin par le ministre. La
décision de la commission d'appel est sans appel.
Proposition
Modifier le premier alinéa pour qu'il se lise comme suit: "Le
gouvernement doit, par règlement:"
Explication
Dans une matière de cette importance, un droit d'appel s'impose,
devant un organisme dont la compétence et l'intégrité
devront être évidentes.
Art. 57.
Aucun certificat de fin d'études secondaires ne peut être
délivré à l'élève qui n'a du
français, parlé et écrit, la connaissance exigée
par les programmes du ministère de l'éducation.
Proposition
Insérer, entre les mots "connaissance" et "exigée",
l'expression suivante: "au titre de langue première ou de langue seconde
selon le cas"
Ajouter un deuxième alinéa: "Le ministre de l'Education
doit prendre les mesures nécessaires pour assurer l'enseignement de la
langue anglaise, langue seconde, aux élèves qui reçoivent
l'enseignement en langue française et l'enseignement du français,
langue seconde, aux élèves qui reçoivent l'enseignement en
langue anglaise".
Explication
Même s'il est légitime et opportun de stipuler, comme le
faisait l'article 44 de la loi de 1974, que les élèves qui
reçoivent l'enseignement en langue anglaise doivent parvenir
effectivement à un degré donné de connaissance de la
langue française, parlée et écrite, le contexte (comme
c'était le cas à l'article 44 de la loi de 1974) ou le texte
(dans le cas de l'article 57, qui se présente différemment) doit
indiquer qu'il s'agit d'un degré de connaissance associé à
l'apprentissage d'une langue première ou d'une langue seconde selon
qu'il s'agit respectivement d'élèves recevant l'enseignement en
langue française ou en langue anglaise.
Art. 58.
Le présent chapitre ne s'applique pas aux personnes qui, aux
conditions fixées par règlement du gouvernement, sont de passage
au Québec ou y séjournent pour un temps limité.
Proposition
Ajouter à la fin de l'alinéa, après le mot
"limité" à faire suivre d'une virgule: "ne dépassant pas
cinq ans sauf lorsque la date de fin de séjour est
préditerminée et n'implique pas une prolongation de plus de 3
ans".
Explication
Nous convenons qu'il est difficile de statuer sur ce qui, compte tenu
des intentions de la présente loi, constitue la durée raisonnable
"d'un temps limité; il ne sera pas plus facile d'y parvenir dans un
règlement, bien qu'il soit plus simple dans ce dernier cas d'apporter
des modifications à la lumière de l'expérience. Dans la
perspective d'une certaine garantie de stabilité bien nécessaire
tant pour les institutions que les personnes, il nous paraît
néanmoins préférable d'inscrire la durée de ce
temps limité dans le texte même de la loi.
Les règlements édictés en vertu de cet article
devront sans doute préciser par ailleurs à quels critères
et conditions on reconnaîtra qu'une personne n'est que de passage au
Québec ou encore qu'elle n'y séjournera pas au-delà de la
période prévue.
Titre premier Chapitre IX
Dispositions diverses Art. 61.
Les avis de l'Administration dont une loi prescrit la publication en
français et en anglais peuvent néanmoins être
publiés uniquement en français.
De même, les avis de l'Administration dont une loi prescrit la
publication dans un journal de langue française et dans un journal de
langue anglaise peuvent être publiés uniquement dans un journal de
langue française.
Commentaire
On doit certes prêter à l'Administration sens commun et
bonne foi; mais le pouvoir discrétionnaire qui lui est ici laissé
à l'égard de dispositions précises d'autres lois laisse le
citoyen dans le doute quant à l'accès à des informations
dont diverses lois lui disent qu'elles lui seront communiquées en
anglais et dans un journal de langue anglaise. Ne vaudrait-il pas mieux tout
simplement retirer cette exigence des textes de loi où l'obligation ne
paraîtrait plus indiquée? Là où cette exigence d'une
publication en langue anglaise ne paraîtra plus fondée, le droit
des citoyens à l'information pourrait bien dicter la publication dans
deux journaux de langue française.
Titre deuxième Chapitre II
L'Office de la langue française section première
Constitution et composition
Art. 67. Il est institué un Office de la langue
française
Commentaire (article 67 et suivants)
La Chambre déplore vivement le caractère bureaucratique et
non représentatif de l'Office de la langue française. Etablir par
voie de l'Assemblée nationale un cadre législatif est une chose,
en confier
l'application de certaines dispositions cruciales à un
fonctionnaire dont l'activité n'est sujette qu'au recours très
aléatoire prévu au quatrième alinéa de l'article
147 en est une autre! Il nous paraîtrait tellement plus sage de
protéger davantage administrés et Administration en
conférant à l'Office une légitimité plus
évidente en lui donnant une structure de type collégial, comme on
l'avait fait pour la Régie de la langue française.
L'Office exercera des pouvoirs considérables, dont certains
demeureraient démesurés même s'ils étaient
réservés à un organisme largement représentatif;
voir, à titre d'exemple, le pouvoir de fermer littéralement une
entreprise en interdisant son approvisionnement en électricité
(article 106b). Cette contrainte abusive qu'il pourrait paraître opportun
de faire peser sur une entreprise présumée "de mauvaise foi",
a-t-on pensé à ce qu'elle compte d'odieux et de démotivant
pour toutes les autres? Et que dire du climat coercitif et punisseur qu'elle
instaure?
La Régie de la langue française, dont les cadres
supérieurs ont su travailler en étroite relation avec les milieux
d'affaires, a réussi à créer un climat de confiance qui
déjà accélérait le rythme des réalisations
intéressantes. C'est un témoignage qu'il convient de leur rendre,
observant tout à la fois que la loi de 1974 leur établissait un
cadre d'opération favorable. La haute direction de la Régie a
mérité la confiance des milieux d'affaires; comme personnes,
elles la conserveraient, mais jusqu'à quel point le nouveau cadre
d'opération ne viendrait-il pas contrecarrer leurs efforts?
C'est dire, à plus forte raison, comment s'avère
irrecevable pour la communauté des affaires la remise de tels pouvoirs
aux mains d'un seul homme, fut-il un fonctionnaire de la plus haute
compétence et de la plus grande intégrité. Au moins
l'apparence de l'arbitraire ne saurait manquer d'être
évoquée, quand ce ne seront des accusations de comportement plus
ou moins dictatorial.
La légitimité de l'Office ne saurait reposer que sur un
homme seul, quelles qu'en soient les qualités; c'est davantage une
question de structures, qui doivent être convenablement
collégiales et représentatives.
SECTION II POUVOIRS
Art. 75.
L'Office: h) reconnaît, pour l'application de l'article 23, les
organismes municipaux et scolaires y visés, ainsi que les services qui,
dans les organismes scolaires, sont chargés d'organiser ou de donner
l'enseignement en anglais.
Commentaire
On y fonde le pouvoir considérable et virtuellement arbitraire de
"reconnaître" les organismes municipaux et scolaires où il y aura
"majorité de langue anglaise". N'y aurait-il pas là un objet de
compétence de type judiciaire, relevant à ce titre d'un
tribunal?
Proposition
Ajouter une disposition conférant à l'Office le pouvoir
spécifique de prendre de concert avec l'Administration, ou de faire
prendre par les services appropriés de cette dernière, toutes
mesures nécessaires pour en arriver à une concertation efficace
dans la mise au point de certains produits et instruments de travail en langue
française.
Explication
II s'agit ici d'une entreprise de "normalisation" que la P.M.E.,
agissant en ordre dispersé, ne serait aucunement en mesure d'exiger des
grands fournisseurs; on pense ici, à titre d'exemple, a du
matériel informatique, certes disponible en français mais non
standardisé, alors que le produit équivalent en langue anglaise
est normalisé internationalement.
SECTION IV LA COMMISSION DE TOPONYMIE
Art. 90.
La Commission procède à l'inventaire et à la
conservation des noms de lieux, vérifie la documentation officielle et,
dès qu'elle le juge utile, dénomme les lieux géographiques
ou en approuve la dénomination.
Dans les territoires organisés, la Commission ne change les noms
de lieux qu'avec l'assentiment des autorités municipales
concernées.
Commentaire
Nous tenons à signaler à l'égard du 2e
alinéa qu'il s'agit là d'une disposition prudente et
rassurante.
SECTION III PROGRAMMES ET CERTIFICATS DE FRANCISATION
Art. 106.
Toute entreprise de cinquante salariés ou plus, même
d'utilité publique, doit, à compter de la date
déterminée conformément à l'article 109, justifier
de la possession d'un certificat de francisation délivré par
l'Office. Sous réserve de tout recours pénal, l'entreprise doit
justifier de la possession d'un pareil certificat: a) pour avoir le droit de
recevoir de l'Administration les permis, primes, subventions, concessions ou
avantages déterminés par règlement du gouvernement, ou b)
pour conclure avec l'Administration ainsi qu'avec les services de santé,
les services sociaux, les entreprises d'utilité publique, les
universités et les collèges d'enseignement général
et professionnel les contrats d'achat, de vente, de service, de location ou de
transport public déterminés par règlement du
gouvernement.
Proposition
Modifier le sous-alinéa b) pour le faire porter exclusivement sur
les transactions et les diverses parties mentionnées au premier
alinéa de l'article 28 de la loi de 1974.
Explication
Nous n'offrons pas un projet précis de rédaction, compte
tenu de la difficulté pour des non-spécialistes de tenir compte
des incidences particulières tant de l'actuel article 106 que de
l'article 28 de la loi de 1974.
Tout en maintenant une contrainte, nous proposons d'éliminer
toute disposition qui entraînerait nécessairement la fermeture
d'une entreprise, ce qui serait le cas si celle-ci se voit refuser, entre
autres choses, certains services d'utilité publique,
électricité et gaz notamment.
SECTION III PROGRAMMES ET CERTIFICATS DE FRANCISATION
Art. 109.
Le gouvernement peut, par règlement, établir des
catégories d'entreprises suivant le genre d'activités et
l'importance du personnel et, pour chacune des catégories ainsi
établies, fixer la date à laquelle les certificats de
francisation deviennent exigibles, déterminer les modalités
d'émission de ces certificats et statuer sur les conditions que doivent
remplir les entreprises les possédant.
Le gouvernement peut, de la même façon, adopter des
critères permettant de reconnaître les entreprises comme
appartenant à la catégorie des entreprises de cinquante
salariés ou plus ou à celles des entreprises de cent
salariés ou plus et, à cette fin, définir les expressions
"entreprise" et "salarié".
Commentaire
II vaudrait mieux que ces règlements et critères soient
déposés avant l'adoption de la loi, voire que les expressions
"entreprise" et "salarié" soient définies dans le texte
même de la loi.
Art. 111.
L'Office peut exiger de toute entreprise de moins de cinquante
salariés qu'elle procède à l'élaboration et
à l'implantation d'un programme de francisation.
L'Office doit faire chaque année au ministre un rapport des
démarches qu'il a ainsi faites et des mesures prises par les
entreprises.
Proposition
Modifier le premier alinéa comme suit: "L'Office, qui a
préalablement motivé son intervention par écrit
auprès du ministre et de l'entre-
prise, peut exiger de toute entreprise de moins de cinquante
salariés qu'elle procède à l'élaboration et
à l'implantation d'un programme de francisation".
Ajouter, à la fin du deuxième alinéa: "L'Office
fait aussi état de son intervention dans son rapport annuel".
Explication
Ici il nous paraît grave et contre-indiqué que l'on puisse
viser des entreprises de petite taille, de 50 employés ou moins, alors
que le Livre blanc, pour des motifs satisfaisants, prétendait qu'on n'y
réglementer; it pas la langue interne de travail (Livre blanc, PP 42 et
53). Le Livre blanc disait bien "cas exceptionnel '; or rien n'indique ce
caractère exceptionnel à l'article 111.
Art. 112.
Les programmes de francisation adoptés et appliqués par
les entreprises conformément aux articles ci-dessus doivent permettre
d'atteindre les objectifs suivants: a) une connaissance satisfaisante de la
langue officielle chez les dirigeants et le personnel; b) l'augmentation du
nombre de Québécois à tous les niveaux de l'entreprise, y
compris au sein du conseil d'administration et au niveau des cadres
supérieurs, de manière à assurer la
généralisation de l'utilisation du français: c)
l'utilisation du français dans les documents de travail de l'entreprise,
notamment dans les manuels et les catalogues; d)l'utilisation du
français dans les communications internes et dans les communications
avec la clientèle, les fournisseurs et le public;
Proposition
Que l'article 112b) soit libellé comme suit: "l'augmentation,
à tous les niveaux de l'entreprise, y compris au sein du Conseil
d'administration et au niveau des cadres supérieurs, du nombre de
résidents du Québec ayant une connaissance d'usage de la langue
officielle, de manière à assurer la généralisation
de l'utilisation du français".
Explication
La Chambre insiste pour que l'on substitue à
"Québécois" la précision apportée par le ministre
Laurin devant le C.D.E., savoir, "résidents du Québec en autant
qu'ils aient une connaissance d'usage du français".
Art. 113.
Les programmes de francisation doivent tenir compte des relations de
l'entreprise avec l'étranger et du cas particulier des sièges
sociaux établis au Québec par des sociétés ou
entreprises dont l'activité s'étend hors du Québec.
Proposition
Insérer entre les mots "particulier" et "des sièges
sociaux" les mots: "de certaines unités de production à haute
technologie, des centres de recherche industrielle et".
Explication
Avant même la publication du Livre blanc, la Chambre a mené
une réflexion sur la situation de la recherche industrielle au
Québec et notamment dans la région de Montréal; elle a
commandité auprès de ressources particulièrement
compétentes en la matière l'élaboration d'un dossier en
vue des délibérations de son congrès du 9 au 12 juin 1977.
Il ressort de cette démarche que les centres de recherche industrielle
constituent des instruments de développement importants, qui ajoutent
aux avantages comparatifs de Montréal comme foyer d'activité
industrielle; or, à l'instar des sièges sociaux, ces
unités spécialisées requièrent des dispositions
spéciales en matière de pratique linguistique si l'on entend
préserver leur fonctionnement optimal et leur offrir des avantages
comparatifs moins disponibles ailleurs, notamment en termes de diversité
linguistique et culturelle. Il en va de même pour certaines unités
de production à haute technologie.
Commentaire
II y aurait également lieu de considérer comme
siège social pour les fins du présent article
certains "bureaux dvisionnaires" dont l'activité s'étend
hors du Québec. Certains bureaux d'achat de grandes entreprises qui
desservent plus d'une province tombent dans cette catégorie; il faudrait
à tout le moins que l'on tienne compte de cette particularité au
moment d'établir leur programme de francisation.
Art. 114.
Toute entreprise de cent salariés ou plus doit, avant le (date
qui suit de trois mois l'entrée en vigueur de la présente loi),
instituer conformément aux règlements un comité de
francisation dont au moins le tiers des membres sont nommés par les
associations de salariés accréditées pour
représenter les salariés de l'entreprise; en l'absence de
pareilles associations ou d'entente entre les associations, ces membres sont
élus par l'ensemble des salariés de l'entreprise.
Commentaire
La Chambre considère inutile et nettement contre-indiqué
le comité de francisation prévu à l'article 114 lorsqu'il
s'agit d'une entreprise qui est à l'évidence francophone, souvent
d'ailleurs de notoriété publique. A défaut d'en
prévoir l'exemption, on encourra, tant dans l'entreprise qu'à
l'Office, des pertes de temps et d'argent appréciables et encore plus
injustifiables si l'on pense à ce que cela pourra représenter
à l'échelle de la province.
Là où le comité de francisation pourra jouer un
rôle utile, ce qui en motive la mise en oeuvre, il conviendrait que les
membres en soient désignées par l'employeur, qui aura
l'obligation de voir à ce que sa composition reflète les divers
échelons de l'entreprise. Il n'y a pas lieu de privilégier un
seul modèle de participation et sans exclure celui qu'imposerait
l'article 114, que certaines entreprises pourraient vouloir adopter de leur
propre chef, il faut signaler que l'implantation d'un programme de francisation
est essentiellement une opération de gestion, qui relève de la
responsabilité de l'entreprise et qu'il n'y a pas lieu de faire
émarger au domaine des relations de travail.
Titre troisième
La commission de surveillance et les enquêtes Art. 121.
Une Commission de surveillance de la langue française est
instituée.
La Commission de surveillance est dirigée par un président
et est formée de commissaires-enquêteurs, d'inspecteurs et de tous
autres fonctionnaires et employés jugés nécessaires.
Commentaire (article 121 et suivants)
Force nous est de constater à l'article 121 et suivants que la
Commission de surveillance présente les mêmes caractères
bureaucratiques et non représentatifs que l'Office lui-même; ils
n'y sont guère plus acceptables. Il pourrait peut-être en aller
autrement si la Commission dépendait directement d'un Office qui aurait
le caractère collégial et représentatif de la Régie
établie par la loi de 1974.
Titre quatrième
Le conseil consultatif de la langue française Art. 147.
Le Conseil doit donner son avis au ministre sur les questions que
celui-ci lui soumet touchant la situation de la langue française au
Québec.
Il peut aussi, moyennant l'approbation préalable du ministre,
entreprendre l'étude des questions se rattachant à la langue et
effectuer ou faire effectuer les recherches qu'il juge utiles ou
nécessaires.
Le Conseil peut recevoir et entendre les requêtes et suggestions
des individus et des groupes sur les questions visées au présent
article.
Il peut aussi recevoir les observations de toute entreprise sur la
façon dont l'Office de la langue française applique les
programmes de francisation prévus par la présente loi, et faire
rapport au ministre.
Le Conseil peut informer le public sur les questions individuelles ou
collectives concernant la langue au Québec.
Commentaire
II semble bien y avoir, au 4e alinéa, une intention d'octroyer un
certain recours aux entreprises. Cependant, compte tenu des pouvoirs
considérables conférés par la loi à l'Office
que l'on pense par
exemple à l'octroi des permis c'est un véritable
droit d'appel qu'il faudrait plutôt instaurer. La Chambre le
réclame formellement.
Titre sixième
Dispositions transitoires et finales Art. 172.
L'article 52 de la Charte des droits et libertés de la personne
(1975, chapitre 6) est modifié par l'addition à la fin,
après le mot "Charte", des mots "ou à moins qu'il ne s'agisse de
la Charte de la langue française au Québec (1977, chapitre
insérer ici le numéro de chapitre du projet de loi no 1)".
Commentaire
La Chambre estime inconcevable que l'on accorde préséance
à la Charte de la langue française au Québec sur la Charte
des droits de la personne. Si besoin est et nous n'en sommes pas à
ce point convaincus que l'on modifie plutôt la Charte des droits
de la personne, car les dispositions de ce document fondamental ne sauraient
être contredites ou amenuisées par aucune disposition externe,
sous peine de laisser entendre que les personnes ne sont plus, au
Québec, inviolables dans leurs droits les plus fondamentaux, dont la
Charte des droits de la personne doit constituer la codification
exemplaire.
ANNEXE 2
MÉMOIRE
de la Confédération des syndicats
nationaux
sur le
Projet de loi no 1 Charte de la langue
française au Québec
juin 1977
C'est une histoire fascinante que celle de ce peuple français
d'Amérique du Nord, de cette colonie française conquise et
devenue colonie anglaise au moment où d'autres arrachaient leur
indépendance, provincialisée après avoir tenté
l'indépendance et maintenant agitée, mal à son aise dans
le carcan d'une fédération anglaise.
Ce n'est pourtant pas un miracle, il n'y en a pas en histoire.
Privés de tout pouvoir économique et politique par la
conquête, les Français d'Amérique se sont multipliés
en français sur leurs terres, profitant de la proximité des
colonies récalcitrantes du sud pour récupérer leurs droits
linguistiques en 1774.
En dépit des marchands anglais de Montréal, de quelques
gouverneurs clairvoyants, les gestes politiques que Londres a posés,
liés à l'attachement à la terre des Canadiens, qui sont
devenus Canadiens-français vers 1840, ont fait en sorte que dans cette
colonie anglaise se forme un peuple français pourtant sans aucune prise
sur l'économie et auquel on abandonnera en 1867 un pouvoir politique
réduit, un pouvoir régional.
Le développement de l'économie capitaliste moderne et la
crise de l'agriculture ont amené les francophones en ville où ils
ont dû apprendre l'anglais pour travailler pour les mêmes patrons
que les loyalistes et les immigrants irlandais et bien d'autres qui viendront
plus tard. Le départ vert l'ouest et les Etats-Unis de nombreux
Québécois francophones, la diminution du rythme de
natalité, l'urbanisation, les immigrants attirés par la recherche
de la réussite, le contrôle de la presque totalité des
leviers économiques par les employeurs anglais et américains ont
fait en sorte que le peuple français de 1760 est entraîné
dans un processus d'assimilation irréversible si des gestes concrets ne
sont pas posés maintenant.
Plus près de nous
Cet envahissement, cette domination de fait de la langue anglaise,
certains gouvernements ont réagi en voulant la confirmer par la loi, en
la reconnaissant de droit. Nous avons connu, il y a huit ans, la loi 63,
adoptée malgré les protestations véhémentes de tout
un peuple qui avait trop bien vu le danger. Ce fut ensuite, il y a trois ans,
la loi 22, elle aussi entreprise de bilinguisation et d'anglicisation
rejetée
massivement par tout ce que le Québec peut compter de forces
vives, mais quand même maintenue par un gouvernement prisonnier des
intérêts étrangers.
Dans la position adoptée par la CSN à l'époque des
discussions autour de la loi 22, on pouvait lire, en conclusion:
Nous aurions été trop heureux de saluer sur cette question
fondamentale de la langue un gouvernement, quel qu'il fût, qui eût
montré par un projet de loi son intention de s'engager, sans trop
brusquer les choses mais décisivement tout de même, dans la voie
de la reconnaissance nationale. Ce n'est pas le cas. Nous sommes en
présence d'un gouvernement de la démission et de la vente en bloc
du patrimoine québécois, âmes et biens, au
bénéfice de l'étranger.
On y trouvait aussi la constatation suivante:
Nous répétons... que la pente imprimée à
l'histoire par le gouvernement en matière de langue nous conduit non
seulement à notre disparition comme peuple, mais à notre
subordination massive aux étrangers et aux déchéances
morales, économiques et sociales qui attendent les peuples
réduits à une condition de minoritaires, les travailleurs ne
devant pas échapper aux conséquences de cette décadence,
bien au contraire. La bourgeoisie seule garderait des chances individuelles
d'échapper au sort commun.
La question de la langue, on peut le constater, nous a toujours
touchés de très près parce qu'elle compte tellement dans
la vie quotidienne de centaines de milliers de travailleurs.
Aujourd'hui, la CSN est heureuse devant ce projet de loi symboliquement
numéroté 1, de constater la volonté du gouvernement de
mettre un frein à la domination spécifique des travailleurs
francophones en tant que travailleurs francophones. Le gouvernement semble
vouloir assurer de droit que la langue française soit un outil efficace
et collectif de formation, d'expression et de communication au lieu
d'être la seule langue de la culture et de la résistance.
Nous reconnaissons que le gouvernement et le ministre responsable ont su
faire preuve de lucidité, de fermeté et de courage sur cette
question. Un courage qui a été et qui sera encore
nécessaire pour que soit menée à bien cette entreprise de
redonner à un peuple la fierté d'être soi-même.
Nous avons été heureux de constater que le gouvernement et
le ministre responsable ont compris, contrairement aux régimes
précédents, l'urgence d'une intervention énergique de
l'Etat sur la question de la langue.
(Nous nous sentons d'autant plus à l'aise de souligner le courage
du gouvernement en cette matière que nous n'avons pas manqué, en
tant qu'organisation syndicale, de souligner à maintes reprises la
timidité des gestes posés par le présent gouvernement dans
d'autres domaines qui ont, eux aussi, une grande importance pour les
travailleurs).
La CSN et la langue
Avant de livrer nos commentaires sur certains aspects plus particuliers
de la loi 1, il nous apparaît opportun d'expliquer rapidement pourquoi,
et dans quelle perspective, la CSN, depuis longtemps, a attaché une
importance spéciale à cette question de la langue et
participé à tous les débats qui ont agité le
Québec depuis une dizaine d'années.
Centrale syndicale essentiellement québécoise, rien de ce
qui est québécois ne nous est étranger. Nos membres
affiliés, aux quatre coins du territoire, évoluent dans un
contexte où la domination de l'appareil économique se manifeste
de façon quotidienne. Ils la subissent en tant que travailleurs, en tant
que consommateurs.
Cette domination s'exerçant la plupart du temps dans la langue
anglaise, il est normal qu'elle ait fini par se refléter dans les
débats qui se déroulent à l'intérieur de nos
instances démocratiques. Dès 1969, en effet, la CSN adoptait une
position prônant l'unilinguisme français.
Il ne s'agit donc pas pour nous, on s'en apercevra, d'un quelconque
combat d'arrière-garde pour la défense d'une soi-disant culture
à caractère élitiste. Au contraire!
Les luttes en faveur de la langue française et le soutien que
nous leur avons accordé s'inscrivent dans un combat plus large encore
contre tous les types de domination et d'aliénation dont ont eu à
souffrir des générations de travailleurs
québécois.
C'est ainsi que dans son rapport adopté par le congrès de
1974, Marcel Pepin, alors président de la centrale, précisait le
sens des luttes menées en faveur du français:
Le combat engagé par le mouvement syndical emprunte de multiples
formes. Mais pour moi, la lutte pour la langue française, langue de
travail n'est pas seulement une lutte nécessaire à
l'agrandissement des perspectives pratiques des travailleurs et à
l'obtention de conditions de travail plus favorables. C'est aussi une lutte, un
levier parmi d'autres de la lutte québécoise contre les forces de
domination économique, politique et sociale. Elle est un levier du
combat contre la domination capitaliste.
Pour la CSN, on le voit, le français au travail est une lutte
ouvrière en même temps que natio-
nale. Car la langue est aussi un des éléments qui font
qu'un travailleur est respecté dans son travail et dans sa vie. Pour un
travailleur québécois francophone, travailler dans sa langue est
un droit pour lequel il faut lutter au même titre que le droit à
la santé et à des conditions de travail humaines.
Le mouvement syndical a soutenu plusieurs luttes pour le respect de ce
droit à travailler dans sa langue dans son propre pays, mais le fond du
problème n'a jamais été réglé d'une
façon collective, avec les instruments que seul un Etat possède;
il nous a toujours fallu nous contenter, jusqu'ici, d'ententes partielles, de
demi-victoires, en attendant que l'Etat intervienne avec le poids
nécessaire.
N'insistons pas sur les conséquences. Elles sont trop bien
connues. Des milliers se sont vu refuser un emploi, ou ont été
congédiés, parce qu'ils ne connaissaient pas l'anglais ou ne le
connaissaient pas suffisamment. Des milliers ont dû demeurer au
même endroit parce qu'ils n'alliaient pas à leur compétence
technique la connaissance de la langue anglaise.
Et comment donner tout leur sens aux terribles statistiques du rapport
Laurendeau-Dunton? Des statistiques plus récentes montrent même
que la situation relative du revenu des travailleurs francophones s'est
dégradée. Ils sont maintenant les moins bien payés au
Québec.
En 1961, le travailleur francophone au Québec occupait le 8e rang
sur 9 en ce qui a trait au revenu; il gagnait $3,185 alors que le travailleur
d'origine italienne gagnait $2,938. En 1971, le francophone était
passé au dernier rang, gagnant $6,009 alors que le travailleur d'origine
italienne gagnait $6,214. (F. Vaillancourt, La Presse, 30 avril 1977).
Que la langue de travail ne soit pas encore devenue, de droit, le
français au Québec entraîne donc pour un grand nombre des
torts considérables, en plus de l'humiliation quotidienne. Tout cela est
intolérable.
Cependant, parce qu'il diffère, par ses appuis populaires et par
ses racines, des régimes précédents, le présent
gouvernement a pu aborder de front la question de la langue et
légiférer en faveur d'une majorité que l'histoire n'avait
pas particulièrement choyée jusqu'à présent.
C'est pourquoi, sur cette question de la langue, le gouvernement pourra
compter sur le soutien de notre organisation syndicale. Travailler dans sa
langue, vivre dans sa langue ne règle pas tous les problèmes,
cela est certain. Mais la CSN ne pourra qu'être d'accord chaque fois
qu'une injustice sera corrigée. Dans le cas particulier du
français, l'injustice durait depuis trop longtemps pour que nous ne
reconnaissions pas que la ferme volonté manifestée par le
gouvernement tend à rétablir la situation en faveur de la
collectivité francophone.
Cette volonté ferme doit cependant être accompagnée,
particulièrement en matière de langue de travail, de la souplesse
nécessaire quand il s'agit de lois ou de règlements
appelés à régir les rapports entre les hommes.
Dans cette perspective, il faut donner aux personnes qui occupent
actuellement un emploi et qui ne maîtrisent pas la langue
française le temps de se recycler, de s'adapter à une situation
nouvelle.
La loi 1
Nous livrerons maintenant nos commentaires sur quelques aspects qui nous
touchent plus particulièrement dans le projet de loi 1.
Loi statutaire
Le gouvernement n'a pas retenu la suggestion faite par plusieurs
organismes, dont la CSN, à l'effet de décréter, par un
texte de portée constitutionnelle, le français comme étant
la seule langue officielle au Québec.
Il s'agit ici d'une loi statutaire, susceptible donc d'être
modifiée plus facilement par des gouvernements qui pourraient intervenir
dans l'avenir.
L'article 133 de l'AANB
Le rapport de la Commission Gendron a établi une forte
présomption sur le droit pour le Québec de modifier seul
l'article 133 de l'AANB, en ce qui concerne les droits conférés
à l'anglais au Québec. Cet article se lit comme suit:
Dans les chambres du Parlement du Canada et les chambres de la
Législature de Québec, l'usage de la langue française ou
de la langue anglaise, dans les débats, sera facultatif; mais, dans la
rédaction des registres, procès-verbaux et journaux respectifs de
ces chambres, l'usage de ces deux langues sera obligatoire. En outre, dans
toute plaidoirie ou pièce de procédure devant les tribunaux du
Canada établis sous l'autorité de présent acte ou
émanant des tribunaux, et devant les tribunaux de Québec, ou
émanant de ces derniers, il pourra être fait usage de l'une ou
l'autre de ces langues.
Les lois du Parlement du Canada et de la Législature du
Québec devront être imprimées et publiées dans ces
deux langues.
Ce sont les articles 7 à 13 du présent projet de loi qui
sont touchés sous cet aspect.
Dans ses interventions sur cette question, la CSN a défendu la
position à l'effet que la langue anglaise doit être
considérée comme une langue de fait, et non de droit. C'est
pourquoi, pour éviter que le débat ne soit faussé, nous
aurions préféré que le gouvernement abroge l'article 133.
Le débat pourra être faussé et ne pas porter sur les vraies
questions puisqu'il pourra porter sur la concordance ou non de la loi 1 avec
cet article 133. Si, comme on peut le supposer, ce débat devait
être porté devant la Cour suprême du Canada, celle-ci pourra
éviter le noeud du problème, à savoir le droit pour le
Québec d'amender, s'en tenant à statuer sur la priorité de
l'article 133 sur une loi statutaire du Québec.
Pour éviter ce faux débat, nous suggérons au
gouvernement d'introduire dans son projet de loi un article spécifiant
que cette loi rend inopérantes pour le Québec les prescriptions
de l'article 133 afin qu'il soit clairement établi que les articles 7
à 13 de la loi en tiennent lieu.
La langue du travail
Les articles 33 à 40 du projet de loi 1 traitent de la langue du
travail.
Il nous semble, dès l'article 33, que la précision
apportée par le législateur en spécifiant que tout membre
du personnel d'un employeur a le droit d'exiger que soient
rédigées en français... les communications
écrites... ouvre la porte à la possibilité qu'un
contremaître, par exemple, s'adresse continuellement à des
travailleurs dans une langue autre que le français, oralement, sans
contrevenir aux dispositions du présent projet de loi.
Cette restriction en ce qui a trait aux recommandations écrites
nous semble de plus amoindrir la portée de l'article 4 qui
établit que les travailleurs ont le droit fondamental d'exercer leurs
activités en français...
Nous estimons donc que le gouvernement, si son intention est de faire en
sorte qu'un travailleur puisse exercer ses occupations et recevoir des
directives, qu'elles soient orales ou écrites, en français,
aurait intérêt à biffer de l'article 33 la restriction
touchant les seules communications écrites.
Disons, dès le départ, que ce chapitre répond d'une
façon adéquate aux problèmes que nous avons
soulevés en introduction. Les remarques qui vont suivre n'ont pour but
que d'amener des clarifications supplémentaires et ont pour objet de
rendre plus facile l'application de la loi.
L'article 33, qui stipule que tout membre du personnel a le droit
d'exiger que soient rédigées en français les
communications écrites qui lui sont adressées par ce dernier,
garantit clairement ce droit aux salaries compris au sens du Code du travail.
Cela n'est pas aussi clair cependant pour les cadres d'une entreprise,
particulièrement en raison de l'article 109 du présent projet de
loi. Si le gouvernement veut que les cadres soient couverts par les articles
36, 39 et 40, il devra élargir davantage la notion de
salarié.
L'article 36 prévoit qu'aucun employeur ne pourra
congédier ou rétrograder un salarié pour la seule raison
qu'il ne parle que le français ou qu'il ne connaît pas
suffisamment une langue donnée, autre que le français. L'article
prévoit de plus qu'un salarié lésé pourra faire
valoir ses droits auprès d'un commissaire-enquêteur au même
titre que s'il s'agissait d'un congédiement pour activités
syndicales.
Ces dispositions nous semblent heureuses. Toutefois, l'expérience
nous apprend qu'il serait sans doute préférable d'enlever de
l'article seul, pour éviter les avocasseries inutiles. Nous connaissons
aussi de nombreux cas où des déplacements dans l'entreprise
tiennent lieu de rétrogradation. La loi devra être plus explicite
sur ce point.
Il nous semble de plus qu'il serait préférable d'adapter
expressément l'article 14 du Code du travail au lieu de ne s'en tenir
qu'à un mutatis mutandis, comme le prévoit l'article 36, car le
renvoi aux articles 14 à 19 du Code du travail pourrait s'avérer
difficile d'application. Ainsi, la présomption dont jouit le
salarié pourrait ne pas être démontrée à la
satisfaction du commissaire-enquêteur.
Quant à l'article 40, qui prévoit que le présent
chapitre est réputé faire partie intégrale de toute
convention collective, nous y souscrivons parce qu'il aura pour effet
d'éviter à des milliers de travailleurs de devoir recommencer
toujours des luttes pour que ces droits soient inscrits dans leur convention
collective.
Il aura en outre l'avantage d'intéresser concrètement le
travailleur et son syndicat, en permettant l'utilisation de la procédure
de grief pour que les droits inscrits au chapitre sur la langue du travail
soient respectés.
Nous constatons cependant, et nous tenons à le souligner, que le
gouvernement québécois continue à ne pas avoir de pouvoirs
sur les conditions de travail de plusieurs milliers de travailleurs
québécois francophones assujettis au Code fédéral
du travail, ce qui, sur cette question de la langue, risque de faire d'eux des
travailleurs de seconde zone.
Des cas patents se posent en effet aujourd'hui même.
Qu'adviendra-t-il, même lorsque la Charte sera adoptée, des
mécaniciens à l'emploi d'Air Canada à Montréal, par
exemple, qui luttent actuellement pour le simple droit de pouvoir communiquer
en français?
Nous avons aussi quelques remarques à formuler au sujet de
l'article 114, qui traite des comités de francisation dans les
entreprises.
D'abord, en raison même de la structure industrielle du
Québec, nous croyons qu'il serait absolument nécessaire que ces
comités soient formés dans toute entreprise qui compte cinquante
employés, et non pas seulement dans celles qui en comptent cent, tel
qu'il est prévu dans la Charte.
Ensuite, nous voyons mal pourquoi les travailleurs, premiers
visés par une telle mesure, ne
représenteraient que le tiers des membres de ces comités
de francisation. La loi devra prévoir que les salariés de
l'entreprise devront compter pour la moitié des membres de ces
comités.
Enfin, la loi devra prévoir que les dépenses
inhérentes à ces comités de francisation sont la
responsabilité de l'entreprise. Les moyens financiers forcément
limités de nombreux syndicats locaux en amèneraient plusieurs
à ne pas pouvoir participer à ces comités où, nous
le répétons, les travailleurs sont intéressés au
premier chef.
La langue de l'enseignement
Les articles 51 à 59 portent sur la langue de l'enseignement. La
solution proposée par le projet de loi 1 en matière de langue
d'enseignement est assez éloignée de celle mise de l'avant par la
CSN, et qui s'appuie sur les deux principes suivants: 1)Au niveau primaire,
l'enseignement serait donné dans la langue maternelle de
l'élève, partout où il y aurait une concentration de
population suffisante dans une langue donnée pour constituer des
classes, et l'on préparerait les élèves, par un
enseignement suffisant du français, à leur passage aux autres
niveaux d'enseignement. 2) A tous les autres niveaux supérieurs au
primaire, université comprise, les seules institutions scolaires
subventionnées par l'Etat seraient celles ou l'enseignement serait
donné en français, mais on y enseignerait une langue seconde.
Nous persistons à croire que cette solution, tout en respectant
les différentes cultures et en facilitant les transitions
nécessaires, s'avérerait la plus logique et la plus juste, tout
en étant beaucoup plus facile d'application que toutes les solutions
proposées jusqu'ici.
Nous sommes conscients, toutefois, que la solution avancée par le
gouvernement dans son projet de loi 1 doit tenir compte de facteurs politiques
et que, dans la circonstance historique dans laquelle nous sommes
placés, on ait cru que c'était là le plus loin où
on pouvait se permettre d'aller. Il faut aussi souligner que les mesures
proposées mettent fin au rôle assimilateur joué à ce
jour par l'école anglaise.
Il s'agit cependant à nos yeux d'un strict minimum et nous
exhortons le gouvernement à ne pas aller en deçà de ce qui
est contenu dans le projet de loi. Sur cet aspect précis, nous
partageons entièrement les remarques et les inquiétudes contenues
dans le mémoire soumis par le Mouvement Québec Français,
dont nous sommes membres.
D'autre part, même si nous ne partageons pas les vues alarmistes
de certains anglophones et francophones quant à la possibilité
d'extinction, à long terme, de la communauté anglaise au
Québec suite à l'adoption du projet de loi 1, nous
réitérons toutefois notre position à l'effet que les
emplois soient préservés. S'il advenait que la clientèle
scolaire anglophone soit réduite en raison des mesures reliées
à l'application de la loi 1, nous voulons que les droits syndicaux des
enseignants touchés, particulièrement leur droit à un
emploi soit intégralement préservé. Les mesures
nécessaires, comme le recyclage, devront être prévues et
mises à la disposition de ceux qui voudront s'en prévaloir. Nous
insistons de plus pour que ces dispositions soient inscrites dans la loi.
Office de la langue
Nous invitons le gouvernement à revenir sur sa décision de
faire de l'Office de la langue française un organisme relevant du
ministre et de son ministère.
Nous estimons en effet que la crédibilité de cet organisme
serait d'autant plus grande qu'il ne serait pas identifié à
quelque gouvernement ou parti politique que ce soit. Dans toutes les
tâches qui seront siennes, d'ailleurs, il ne sera pas de trop que le
pouvoir moral de l'Office soit au-dessus de tout soupçon de partisanerie
politique. Que l'on pense, par exemple, aux certificats de francisation qu'il
aura la charge de décerner. C'est pourquoi nous
préférerions que l'office de la langue relève de
l'Assemblée nationale.
Quant à la composition du Conseil consultatif de la langue
française, dont le projet de loi prévoit la création, nous
pensons que les personnes appelées à y siéger devraient
être nommées par les organismes eux-mêmes, et que ces
organismes aient un droit de rappel sur ces personnes dans le cas où,
pour une raison ou pour une autre, l'organisme n'était plus satisfait
soit du Conseil lui-même, soit de la personne qu'il y a
déléguée.
Les droits de la personne
Tous les peuples, à des degrés divers qui tiennent tant
à l'histoire qu'à la géographie, sont aux prises avec le
problème de trouver le meilleur équilibre possible entre les
droits individuels et les droits collectifs. Le projet de loi 1, on a pu le
constater par le débat qu'il a suscité, a soulevé cette
question.
Plusieurs ont soulevé, avec raison, croyons-nous, l'introduction
de l'article 172 qui prévoit que
l'article 52 de la Charte des droits et libertés de la personne
est modifié par l'addition, à la fin, après le mot
"Charte", des mots "ou à moins qu'il ne s'agisse de la Charte de la
langue française au Québec.
Si bien intentionnée soit-elle, nous voyons dans cette mesure une
maladresse, à tout le moins. Nous partageons l'avis du ministre Laurin,
exprimé publiquement, à l'effet qu'il n'y a pas
d'incompatibilités entre les deux Chartes. Nous trouvons
néanmoins le procédé déplaisant parce qu'il
enlève à la Charte des droits et libertés de la personne
le caractère de quasi inviolabilité qui lui confère en
bonne partie sa valeur.
C'est donc sur la forme, et non sur le fond, que nous soulignons notre
désaccord; le gouvernement a emprunté une mauvaise technique
législative qu'il devra corriger.
Nous demeurons persuadés que la Charte du français ne
contient pas de dispositions qui pourraient avoir des effets discriminatoires
prohibés par la Charte des libertés et droits de la personne.
Comme le souligne le vice-président de la commission des droits de la
personne, monsieur Maurice Champagne-Gilbert,"la notion de droit collectif est
fondée, comme celle des droits individuels, sur la satisfaction de
besoins reconnus comme légitimes à tel ou tel moment, ou
fondamentalement, pour une société donnée. La notion de
droit collectif est directement liée à la notion de bien commun,
de bien collectif, de bien-être général?" Il ajoute:"Le
préambule de la Charte des droits et libertés de la personne du
Québec est explicite à cet égard; il soumet à la
"volonté collective" la garantie et la protection des droits et
libertés reconnus par la Charte.''ll affirme également que les
droits et libertés de la personne sont inséparables du
bien-être général. C'est à partir de tels fondements
que la liberté de choix de la langue d'enseignement doit être
restreinte, c'est-à-dire au nom du bien-être général
et du droit de la majorité.
Or, nous savons qu'ici au Québec, ce ne sqnt pas, sur cette
question de la langue, les droits de la minorité qui sont menacés
mais bien plutôt l'avenir même de la majorité. Nous
suggérons donc au gouvernement de procéder autrement qu'il ne l'a
fait dans son article 172.
Conclusion
Lorsque des débats d'une importance et d'une intensité
comme celui qui se fait autour du projet de loi sur la langue occupent une
collectivité, on peut vérifier, par les diverses
réactions, où se situe l'intérêt
général d'un peuple.
On peut voir aussi comment se répartissent les blocs, et de qui
ils sont composés. Il est intéressant de constater aujourd'hui
qui sont ceux qui appuient globalement le projet de loi et ceux qui le
combattent avec véhémence. Le peuple, les travailleurs et leurs
organisations sont derrière le gouvernement. Le monde des affaires, les
possédants, anglophones ou francophones, ces derniers que le ministre
Laurin qualifiait lui-même le 8 avril de rois nègres à la
solde de leurs patrons anglophones, le combattent.
Et le comble de l'humiliation, c'est bien de voir un peuple
écrasé tout au long de son histoire se voir accusé
aujourd'hui de racisme et de xénophobie parce qu'il veut simplement
relever la tête. A cet égard, l'histoire se
répète.
Le manifeste (d'une association francophone de Québec, en 1847),
retrace donc la véritable source de cette tendance, à voir dans
l'affirmation des droits d'un peuple un désir de domination. On constate
de plus que le penchant des Anglo-saxonsà écarter les
revendications légitimes d'un peuple opprimé, en les qualifiant
dédaigneusement de nationalisme étroit ou de jalousie, porte la
marque d'un autre nationalisme, celui du groupe dominant.
(Stanley-Brébaut Ryer-son, Le capitalisme et la
Confédération, Parti-Pris, 1972, page 218).
Notre collectivité a attendu trop longtemps avant de se donner de
véritables moyens de pouvoir vivre en français. Ce projet de loi
est perçu par la population comme une affirmation indispensable de notre
identité et nous fournit les moyens de nous présenter devant le
tribunal de l'histoire autrement que comme un peuple diminué, et
finalement vaincu.
Nous exhortons donc le gouvernement de maintenir sa fermeté et sa
volonté dans cette entreprise. Les travailleurs en ont saisi
l'importance.
Montréal, juin 1977